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RECHERCHES
SUR L'ORIGINE DE LA
PROPRIÉTÉ FONCIÈRE
ET DBS
NOMS DE LIEUX HABITÉS
EN FRANCK
(PÉRIODE CELTIQUE ET PÉRIODE ROUAINE)
H. D'ARBOIS DE JUBAINVILLE
A.'s^ec la collaboi-ation de G. DOTTIN
PARIS
tllMiST THOBIN, ÉULTEUII
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PROPRIÉTÉ FONCIÈRE
NOMS DE LIEUX HABITES
EN FRANCE
OUVRAGES DE M. H. D'ARBOIS DE JUBAiNVILLE
EN VENTE
Chez THORIN, libraire-éditeur, 7, rue de Médicis, Paris.
Histoire des ducs et des comtes de Champagne^ six tomes en sept volumes,
in-8o (1859-1867). 52 50
Ouvrage presque épuisé.
Essai d'un catalogue sur la littérature épique de l'Irlande , précédé d'une
étude sur les manuscrits de la langue irlandaise conservés dans les
Iles-Bi'itanoiques et sur le Continent, in-8o, 1884. 12 »
Inventaire sommaire des archives de la ville de Bar-sur-Seine , 1864 ,
in-4o. 5 »
Résumé d*un cours de droit irlandais, professé au Collège de France pen-
dant le premier semestre de Tannée 1887-1888 (Sources du droit celtique ;
Date du Senchtjs Môa; Divisions du 6bnchus Môa, etc.), brochure
in-8o. • ' 1 50
Résumé d'un cours de droit irlandais, professé au Collège de France pen-
dant le second semestre de Tannée 1887-1888 et pendant le premier
semestre de' Tannée 1888-1889 (La saisie mobilière dans le Senchus M6r),
brochure in-8''. 1 50
«
Les premierfjkabitants de l'Europe, d'aprôs les auteurs de Tantiquité et les
recherches des linguistiques. Seconde édition, corrigée et considéra-
blement augmentée par Tauteur, avec la collaboration de G. Dottin ,
secrélairc de la rédaction de la Revue celtique, 2 beaux volumes grand
in -80 raisin.
En vente : Tome l*', contenant : 1» Peuples étrangers à la race indo-
européenne (habitants des cavernes, Ibères, Pélasges, Etrusques, Phé-
niciens); 2» Indo-Européens, l'« partie (Scythes, Thraces, lUyriens,
Ligures). — Prix de ce volume : 10 »
N. B. — Le tome 12 paraîtra fin 1890.
Catalogue d^ actes des comtes de Brienne, in*8<*, 1872. 3 50
Cours de littérature celtique, t. I à IV. Prix de chaque vol. in-8*». 8 »
Tome I»*" : Introduction à Vhistoire rfe la littérature celtique,
ToMis II : Le cycle mythologique irlandais et la mythologie celtique.
ToMiss III el IV : Les Mabinogion^ suivis en appendice d'une traduc-
tion et d'un commentaire des triades historiques et légendaires
des Gallois et de divers autres documents, par J. Loth, profes-
seur à la Faculté des lettres de Rennes, 2 vol. in-8*.
Ouvrage couronné par T Académie française en 1890 (prix Langlois).
TOULOUSE. — IHP. A. CHAUVIN R FILS, RUB DBS BALBlfQUBS , tS.
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RECHERCHES
SUR L'ORIGINE DE LA
PROPRIÉTÉ FONCIÈRE
KT DES
NOMS DE LIEUX HABITÉS
EN FRANCK
(PÉRIODE CELTIQUE ET PÉRIODE ROHAINB)
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Hf'D;iPOIS DE JUBAINVILLE , 185-7 - 19 10,
Avec la coUabor-ation de G; DOTTIN \S(c?) —
PARIS
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I.IHRAiHI! DUS ÉCOLES rHANÇAlBIiB d'aTUÈKEK ET
OU coulai DE TEikECB ET DE l'ECOLE EOHEELi EOTl
M U HOaiTt DES ETCDES B[STOELODES
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ASTOH, LENOX AND
TLLDEN FOUNDATION S
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 LA MÉMOIRE DE
Jules QUICHERAT
A Monsieur Eugène de ROZIÈRE
a
PRÉFACE
Le travail qui suit se divise en deux parties. L'une
traite spécialement de Torigine de la propriété foncière
en France, c'est le premier livre; l'autre a pour' ob-
jet de montrer qu'en France un grand nombre de
noms de lieux habités sont dérivés d'un nom de pro-
priétaire , c'est le second livre.
I
Il y a deux manières de chercher d'où vient la pro-
priété foncière : l'une est d'examiner comment ce
grand fait contemporain se peut justifier par la mo-
rale ou par le droit naturel , voire même par l'intérêt
économique et politique des sociétés ; l'autre est
d'étudier quels sont les faits antérieurs et successifs
par lesquels ce fait moderne a été engendré. Cette
seconde manière a été la nôtre.
Nous n'entendons, en aucune façon, contester le
mérite de la première. Nous ne chercherons pas à
vérifier si les philosophes, les orateurs, les élégants
écrivains, qui' exposent quelle est suivant eux
la base rationnelle du droit de propriété foncière ,
n'attribuent pas quelquefois un caractère absolu et
immuable à des doctrines qui sont le résultat de faits
politiques et sociaux transitoires ; nous ne discuterons
I
II PRÉFACE.
pas la question de savoir si leurs doctrines ne sont
pas la formule ou la négation d'un certain degré de
civilisation, qu'un autre a précédé et qu'un autre
suivra; nous ne demanderons pas si eux-mêmes,
en donnant ou refusant un fondement moral au fait
de la propriété foncière moderne , n'ont pas été sou-
vent guidés par des idées préconçues et si ces idées
ne sont pas le résultat de l'éducation , s'ils ne les
doivent pas à l'influence du milieu déterminé où ils
ont vécu.
Leur méthode, qu'on peut appeler philosophique
et oratoire , est celle que préfèrent le plus grand nom-
bre des esprits; elle a été suivie, dans un cours
de philosophie du droit, par un des maîtres les
plus éminents et les plus goûtés qui se soit assis
dans une chaire française en notre siècle. Dans une
de ses leçons, donnée le 29 mai 1849, mais restée
inédite jusqu'en 1888, le spirituel et disert profes-
seur met en présence deux formules qui sont la néga-
tion l'une de Tautre : la première est de Bentham,
la seconde de Ballanche. Voici celle de Bentham :
« La propriété et la loi sont nées ensemble et mour-
» ront ensemble. Avant les lois , point de propriété.
» Otez les lois, toute propriété cesse. » Ballanche ré-
pond : « La propriété est une institution divine. Les
» déclamations du dernier siècle contre le tien et le
» mien ne peuvent soutenir le regard de la raison ,
» malgré le secours que l'éloquence de Rousseau a
» daigné leur prêter. L'homme fait le sol, la terre
» c'est lui (1). » La thèse de Ballanche est celle qu'a
défendue Edouard Laboulaye.
(1) Trente ans d'enseignement au Collège de France^ 1849-1882. — Cours
inédits de M. Edouard Laboulaye, publiés par tes fils, avec le concours de
PRÉFACE. III
Le but qu'on se "propose ici n'est pas de résoudre la
question de savoir qui de Bentham ou de Ballanche
a raison : il est de chercher à discerner comment , à
l'origine de l'histoire, la notion de la propriété immo-
bilière était conçue dans la région qui est aujourd'hui
la France.
Dès la période de l'unité indo-européenne, les Indo-
européens ont eu l'idée de la propriété mobilière et
du vol qui en est la négation. La propriété mobilière
— de la famille , plutôt que de l'individu comme au-
jourd'hui — était alors une des bases de l'organisa-
tion sociale ; les travaux des linguistes et les recher-
ches des historiens du droit l'établissent; mais il
n'est pas prouvé que les premiers Indo-européens
connussent la propriété foncière, telle du moins
qu'on la conçoit ordinairement de nos jours en
France.
On peut distinguer deux sortes de propriété fon-
cière : 1** la propriété individuelle ou la propriété fa-
miliale dont dérive la propriété individuelle qui , au-
jourd'hui , en France , détient presque tout le sol ;
2' la propriété qui appartient à un groupe différent
de la famille et plus vaste ; cette seconde espèce de
propriété foncière existe encore de nos jours par
exception en France sous forme 1** de propriété d'État,
2' de propriété appartenant à une personne morale
inférieure, de propriété communale par exemple.
La propriété communale peut être l'objet de modes
de jouissance très variés : un chemin qui appartient
à une commune est afifecté à la jouissance publique,
sans distinction entre les habitants de la commune
M. Marcel Pournier, et avec une préface par M. R. Dareste, membre de
rinstitut, p. 133, 159.
IV PRÉFACE.
et les étrangers; les uns et les autres ont également
le droit de passer dans le chemin communal. Une
pâture communale est affectée à la jouissance com-
mune des habitants , avec exclusion des étrangers ;
tous les habitants de la commune y font paître leurs
bestiaux, les étrangers n'ont pas le droit d'y envoyer
les leurs. Enfin une terre communale peut être
partagée entre tous les habitants de la commune qui
ont chacun la jouissance temporaire , viagère quel-
quefois, d'un lot à l'exclusion des autres habitants
de la même commune ainsi que des étrangers ; ils
exploitent chacun séparément leur part sans préju-
dice du droit collectif de propriété appartenant à la
commune , et ce droit de la commune est représenté
par une légère redevance annuelle.
Il n'est pas ici question d'examiner si ce dernier
mode d'exploitation de la terre est ou n'est pas en
contradiction avec ce que Ballanche appelait « l'insti-
tution divine, » mais ce mode d'exploitation , aujour-
d'hui rare en France , présente une grande analogie
avec le procédé généralement usité dans la Gaule
barbare au moment où César en fit la conquête. Rem-
plaçons la commune, propriétaire, par le peuple;
au lieu des habitants de la commune qui jouissent
chacun précairement d'un lot de la terre communale
mettons les membres de l'aristocratie gauloise, et
nous aurons une idée approximative de la condition
de la terre dans la Gaule barbare quand elle perdit
son indépendance au milieu du premier siècle avant
notre ère. Vager publicus romain , sans être ex-
ploité exactement aux mêmes conditions que la terre
communale française offre avec elle beaucoup de
ressemblance, il peut aussi être comparé à Vager
PRÉFACE. V
gaulois, et la comparaison serait également justifiée.
Nous avons déjà soutenu cette doctrine dans plu-
sieurs mémoires ; elle est en contradiction avec l'opi-
nion d'un des hommes qui aujourd'hui, par leur talent
et par leur caractère, honorent le plus la science
et le professorat français. On trouvera , à la fin de
cette préface, une réponse à plusieurs de ses critiques :
cette réponse, destinée d'abord à une revue, sera
plus à sa place ici ; quant aux autres points sur les-
quels notre savant confrère a contesté nos conclu-
sions, on les verra discutés plus loin.
II
La seconde partie du présent ouvrage est une étude
étymologique sur une partie des noms les plus an-
ciens de lieux habités qu'on trouve en France. Par
les plus anciens , nous entendons ceux de ces noms
qui remontent à une date antérieure à la conquête
franque. Nous disons lieux habités , parce que les
noms de coufâ d'eau et de montagnes restent en de-
hors de notre travail. Les noms de cours d'eau et de
montagnes, qui remontent à l'antiquité, appartiennent
pour la plupart à une ou plusieurs langues antérieu-
res à la conquête celtique et sont inexplicables pour
nous ; tandis que les noms des lieux habités sont
souvent faciles à comprendre , quand les lois de la
phonétique et les siècles n'en ont pas trop modifié les
formes primitives et les organes.
L'étude des noms de lieux habités se rattache aux
recherches sur l'origine de la propriété foncière par
une doctrine qui est fondamentale en fait de topo-
nymie française : les noms anciens de lieux habités
VI PRÉFACE.
sont pour la plupart tirés du nom porté par un pro-
priétaire antique : il s'agit du premier propriétaire de
bâtiments qui à la fois servaient à son habitation et
étaient le centre d'une exploitation agricole dirigée
par lui ou faite en tout cas par ses gens.
Pour la période franque , cette doctrine est d'une
complète évidence : des diplômes nombreux nous
donnent les formes géographiques de cette période ;
les noms d'hommes francs sont bien connus , grâce
aux diplômes, aux chroniques et à divers autres docu-
ments ; en mettant à profit ces textes on peut, sans de
trop longues recherches, parvenir à reconnaître dans
nos cartes de géographie les noms d'une quantité
considérable de villa£y de viHaria, de contes j fondées
par les Francs, vainqueurs et conquérants, les noms
d'une foule de valles , de montes où ces dominateurs
barbares ont construit leurs demeures. Us s'établis-
saient tantôt à côté des villae gallo-romaines détruites
par les invasions précédentes , tantôt même sur les
ruines déjà vieilles et innommées de ces mllae anti-
ques, tantôt peut-être près d'autres mllae gallo-ro-
maines encore debout et habitées par les descendants
des anciens propriétaires, mais que réduisit à un
territoire moins vaste le voisinage d'une nouvelle
exploitation imposée par la conquête. La terre , dans
la Gaule dépeuplée, avait probablement si peu de va-
leur, était si souvent sans emploi , que le vaincu n'a
guère souffert de cette spoliation.
Voici quelques exemples de ces fondations fran-
ques.
Dans le département de Meurthe-et-Moselle : Gon-
dreville est une ancienne Gandulfi-mlla. Voilà son
nom au huitième et au neuvième siècle; or, Gundul-
PREFACE. vil
fus est un nom d'homme franc déjà assez répandu au
sixième siècle pour avoir été alors adopté , à l'exemple
des vainqueurs, dans une famille sénatoriale gallo-ro-
maine : on le voit par un duc Gundulfus, grand oncle
maternel de Tévèque historien Grégoire de Tours (1).
Une charte en faveur de l'abbaye de Saint-Denis ,
en 766, est datée d'une localité appelée Ansoaldo-viln
lare (2). On trouve un exemple du nom d'homme
Ansoaldus dans V Histoire des Francs de Grégoire de
Tours. Il s'agit d'un grand seigneur de la cour ; c'est,
pour employer la langue du temps , un des proceres
du roi Chilpéric I", en 576 et les années suivantes (3),
Plusieurs autres personnages du nom d' Ansoaldus se
rencontrent dans divers documents mérovingiens.
Tel est, au milieu du septième siècle, à la fîn du règne
de Dagobert P', un fonctionnaire royal qui protégeait
l'église de Poitiers (4). Tels sont, un peu plus tard,
sous Glovis III , un comte du palais en 691 (5) , un
évêque en 693 ou en 694 (6). La bonne orthographe
de ce nom serait Ansi-taldtts , il signifie « celui qui
a la puissance des dieux dits Anses. » Ansoaldo-ml"
lare paraît être aujourd'hui Ansauvilliers (Oise). Il y
a longtemps que dans ce village personne ne pense
plus ni aux Anses ni à d'autres divinités de l'antique
panthéon germanique.
En 693 ou en 694, Clovis III ordonne, par un juge-
ment, la restitution d'une propriété foncière appelée
(1) Historié Francorum ^ 1. VI, c. ii, édition Arndt, p. 255, 1. 35; p. 250,
1. 1-3.
(2) Tardif, Monuments historiques, p. i9.
(3) Grégoire de Tours, Historia Franco rum^ V, 3, édition Arndt, p. 105, 1. 2»
(A) Gesta Dagoberii, c. 44 ; édit. Krusch, p. 421.
(5) Tardif, Monuments historiques, p. 691, col. 1.
(6) /6id., p. 26, col, 2.
VIII PREFACE.
Baddane^urtis (1). Baddane est le génitif féminin de
Baddo. Baddo est le nom d'un envoyé de Frédégonde
qui , en 587, fut accusé d'avoir tenté de faire assas-
siner le roi Gontran (2). Un diplôme royal de Tannée
625 mentionne un autre Baddo , père de Dodo , abbé
de Saint-Denis (3). Baddane-'Curtis paratt être au-
jourd'hui Bethencourt (Oise).
Bougival (Seine-et-Oise) est appelé BaudechisHo--
vallis dans une charte de Tannée 697. Baude-chisilo-
est le thème du nom d'un grand personnage franc de
la fin du sixième siècle ; pour ce nom, il y a plusieurs
orthographes : Bate-chisilus (4) , Baude-gysilus (5) ,
Bade-gysilus (6) , Badi-gysilus (7) : le personnage ,
d'abord maire du palais , 581 , devint , vers 584 ,
quoique marié, évêque du Mans. Un certain Baude-
gisilus, simple diacre, avait été envoyé par le roi
Chilpéric, en 577, porter sur le tombeau de saint
Martin , à Tours , une lettre avec demande d'une ré-
ponse que naturellement saint Martin ne donna pas ;
il est peut-être le même que celui qui fut élevé à la
dignité de maire du palais, puis à Tépiscopat. Le fon-
dateur de Bougival avait, comme le diacre, le même
nom que le maire-évêque. Ce nom ne doit pas avoir
été rare à l'époque méroVingienhe : Grégoire de Tours
cite deux autres Baudegisilus , tous deux gens
(1) Lcpagc, Dictionnaire topographique du département de la Meurthe ^
p. 149.
(2) Historia Francorum, VIII, 44 ; IX, 13, édit. Arndt. p. 356, 1. 11; p. 369,
1. 13.
(3) Tardif, Monuments historiques^ p. 4, col. 2.
(4) Historia Francorum, VI, 9; édit. Arndt, p. 255, 1. 3.
(5) Ibid,, VII, 15; édit. Arndt, p. 300, 1. 9.
(6) Ibid., VIII, 39; édit. Arndt, p. 352, 1. 1.
(7) Ibid., X, 5, édit. Arndt, p. 413, 1. 20.
(8) Ibid,, X, 5 ; édit. Arndt, p. 205, 1. 1-7.
PRÉFACE. IX
obscurs, l'un d'Anjou (1), l'autre de Nantes (2).
Le nom de Vaudéraont (Meurthe-et-Moselle) , ap-
parrftt pour la première fois au douzième siècle , où
on le trouve écrit Vadoni-mons; mais ce nom de
lieu est beaucoup plus ancien. Son premier terme est
un nom hypocoristique franc. Un certain Waddo a
été, au sixième siècle, maire du palais de Rigunthe,
fille de Chilpéric P', roi des Francs, et femme de Ré-
carôde, roi des Wisigoths; il avait été comte de
Saintes (3). On doit croire que le nom de Vaudémont
remonte aux premiers siècles de la période franque ;
s'il datait du neuvième siècle, par exemple, l'ordre
des termes serait différent et on aurait dit Morts Wor
doniSy comme on a dit Monasterium Adremari pour
désigner l'abbaye dite plus tard de Montiéramey, qui
a été fondée en 837 par le prêtre Adrémare.
Ce ne sont pas les Francs , ce sont les Gallo-Ro-
mains qui ont donné ces noms aux villae fondées par
les conquérants. Les Francs auraient employé comme
second terme des mots germaniques : ils auraient dit
au lieu de mlla et de mllare^ heim; au lieu de cortiSj
hof; au lieu de mons^ berg ; au lieu de vallis, thaï;
je donne ces mots sous la forme allemande moderne,
sans chercher à restituer la forme franque de l'épo-
que mérovingienne. Les seconds termes latins : mUa,
mllare, cortis, valliSy monsy attestent que nous som-
mes en présence d'une idée gallo-romaine identique
à l'idée germanique ; cette idée est que la manière la
plus commode de désigner une maison nouvellement
(1) De virtutibus sancti Martini, IV, 14 ; édit. Krusch, p. 653, 1. 6.
(2) Ibid,, IV, 27 ; édit. Krusch, p. 656, 1. 14.
(3) Grégoire de Tours, Historia Francorurrit 1. VI, c. 45, édit. Arndt,
p. 285, I. 18, 19.
X PRÉFACE.
bâtie est de lui donner le nom de son propriétaire.
Pour atteindre ce but , il y avait deux principaux
procédés; outre le procédé de la composition, celui
de la dérivation. C*est le procédé de la dérivation qui,
sous la domination romaine, a été ordinairement pré-
féré, exemple JaliaciiSj de Julius. Ce procédé était
plus conforme au génie de la langue latine; mais
sous la domination romaine on a aussi fait usage de
la composition. Ce serait une erreur de croire que la
conquête germanique, en introduisant en Gaule des
noms de lieu composés dont le premier terme est un
nom de propriétaire germain, ait importé dans notre
patrie un procédé nouveau : ce procédé était usité
antérieurement comme le prouvent les noms com-
posés suivants qui désignent des localités de la Gaule
dans des documents du temps de l'empire romain :
Claudio-magus , « champ de Claudius , » aujour-*
d'hui Clion, Indre (1).
Nerich-magus , « champ de Nérius , » Neris (Al-
lier) (2).
Arganto-magus y « champ d'Argantos, » Argen-
ton-sur-Creuse (Indre) (3).
Caranto-maguSj « champ de Carantos, » Cran ton,
commune de Campolibat (Aveyron) (4).
(1) Sulpice Sévère, DiaL, 2, 8. Cet auteur écrivait au commencement du
cinquième siècle. J. Quichcrat, De la formation, p. 50, traduit Claxidiomagus
par Cloue (Vienne), ce qui est phonétiquement inadmissible. M. Longnon,
Atlas historique, p. 27, préfère Clion.
(2) Vicani Neriomagienses, inscription romaine; E. Desjardins, Géogra-
phie de la Gaule d'après la Table de Peutînger, p. 299. Sur le gentilice
Norius, voir ci-dessous, p. 155.
(3) Table de Peutingery chez E. Desjardins, ibid,, p. 272. Arganto est le thème
gaulois du nom d'homme écrit Argant dans te Cartulaire de Redon , p. 83.
(4) Table de Peutinger, chez E. Desjardins, ibid,, p. 312; cf. Longnon,
Atlas historique^ p. 26. Sur le nom pérégrin Carantos, voir ci-dessous,
p. 109.
PREFACE. XI
Germanico-maguSy « champ de Germanicus, »
Sainte- Sévère (Charente) (1).
Ic[c]io-magus^ «champ d'Iccius,» Usson (Loire) (2).
Marco-magus , « champ de Marcus , » Marmagen
(Prusse Rhénane) (3).
Eburo-duntimj « Forteresse d'Eburos, » Yverdun
(Suisse) (4).
Velatw-durum j « forteresse de * Velatus ou Ve-
ladus, » Velleret-les-Belvoir (Doubs) (5).
Vitu-durum , « forteresse de Vitus, » Winterthûr
(Suisse) (6).
Eburo-briga , « château d'Eburos » (7) , A vrolies
(Yonne) (8).
De ces noms composés, dont le premier terme est
un nom d^homme propriétaire, on ne peut séparer
celui de Caturigo-magus (9) , « champ des Caturi-
ges , » où le nom de propriétaire qui a fourni le pre-
mier terme est un nom de peuple; c'est aujourd'hui
Chorges (Hautes- Alpes) (10).
A ces exemples antiques on peut ajouter ceux que
(1) Table de Peutinger^ choz E. Desjardins, ibid,, p. 274; cf. Longnon,
Atlas historique t p. 28.
(2) Table de Peutinger, chez E. Desjardins , ibid.^ p. 302; cf. Longnon,
Atlas historique, p. 29. Sur le gontilice Iccius^ voir ci-dessous, p. 148.
(3) Table de Peutinger^ chez E. Desjardins, ibid.y p. 110; cf. Longnon ,
Allas historique^ p. 29. Sur le cognomen romain Marcus, voy. Do-Vit, Ono-
masticon, t. IV. p. .340.
(4) Table de Pcuiinger, chez E. Desjardins, ibid.^ p. 234. Sur le nom pé-
régrin Eburus^ voir ci-dessous, p. 108.
(5) Velatudoro dans Vilinéraire d'Anloinn^ p. 349, 1. 1 ; cf. Longnon, Allas
historique, p. 32. Le nom pérégrin Veladus est conservé par une inscription
de Nimes (C. /. L., XII, 3984).
(6) Itinéraire d'Antonin, p. 251, 1. 5. Le nom pérégrin Vitus est attesté
par une marque de potier trouvée à Vienne (Isère) (C. /. L., XII, 5686, 942).
(7) Itinéraire d'Antonin, p. 361, 1. 2.
(8) Longnon, Atlas historique, p. 28.
(9) Table de Peulinger, chez E. Desjardins, i6id., p. 22.
(10) Longnon, Atlas historique, p. 27.
xn PREFACE.
donnent les documents du moyen Age; tels sont :
Turno-magus y « champ de Turnus (1), » aujour-
d'hui Tournon-Saint-Pierre (Indre-et-Loire) (2).
Ic[c]ÙMiurum (3), « champ d'Iccius , » Izeures
(Indre-et-Loire) (4) , et Issoire (Puy-de-Dôme) (5).
Albio-duram (6), « forteresse d'AIbius, » Augers,
(Seine-et-Marne) (7).
Turno-durum (8), « forteresse de Turnus, » Ton-
nerre (Yonne).
Arto-dunum (9) , « forteresse d'Artos ou Ar-
tus (10), » Arthun (Loire).
Curtio-dunum (11), «forteresse de Curtius,»
Ck)urson (Yonne) (12).
(I) VicuB Tornomagensis, chez Grégoire de Tours, HisLFrancorum,!. X,
c. zxxi, éd. Amdt, p. 444, 1. 4. Sur le cognomen Turnus, voir ci-dessous,
p. 170.
(?) Longnon, La Gaule au sixième siècle, p. 294.
(3) !• îciodoro, Grégoire de Tours, Hisloria Francorurrii 1. X, c. xxxi,
édition Arndt, p. 431, 1. 20; pagus Isiodorensis, ibid.^ 1. VI, c. xn, p. 257,
1. 10 ; vicus Iciodorensis , dans le Gloria Martyrum . c. LViii, éd. Krusch ,
p. 528, 1. 10. — 2* Iciodorensis Vicus dans le Gloria confessorum, c. xxix,
éd. Krusch, p. 766, 1. 4-5.
(4) Longnon, La Gaule au sixième siècle^ p. 273-274.
(5) Ibid,, p. 499-500.
(6) Albioderum^ chez Frédégaire, 1. IV c. Lxxxni, éd. Krusch, p. 163, 1. 18;
comparez la vallis Albi-drum au comté de Rioz (Basses- Alpes), dans une
charte do la fin du dixième siècle ; Bruel , Recueil des chaires de Cluny,
t. III, p. 81.
(7) Longnon, Atlas historique^ p. 163.
(8) In Tornoderensi pago^ Grégoire de Tours, Gloria confessorum, c. 85;
éd. Krusch , p. 803 , 1. 5 ; avec un e (mauvaise notation) à la première syl-
labe : Ternoderensem castrum dans Historia Francorum, 1. V, c. 5, édit.
Amdt, p. 196, 1. 25; et Ternoderensis caslri dans Gloria confessorum^ c. 11,
éd. Krusch, p. 754, 1. 26 : cf. Quantin, Dict, top, de l'Yonne, p. 129.
(9) In villa que Artidunus dicitur, 943; Bruel, Recueil des chartes de
Cluny^ t. I, p. 598; in villa Arteuno, 981; ibid,^ t. II, p. 623; Artadunum^
994; ibid.f t. III, p. 386; Artedunus villa, vers 1080, Aug. Bernard, Cari, de
Savigny, 1. 1, p. 414.
(10) Sur ce nom d'homme, voir livre II, chap. m, g 3, au mot Ariia.
(II) Curcedonus, Règlement de Saint- Aulaire , sixième siècle, cité par
Quantin, Dict, top, de l'Yonne, p. 41.
(12) Longnon, Atlas historique, p. 176.
PRÉFACE. XIII
Liber[o]-dunum (1), « forteresse de Liber (2), »
liverdun (Meurthe-et-Moselle) .
Donno-briga (3), « château de Donnos (4); » Deneu-
vre (Meurthe-et-Moselle), et Chatel-Deneuvre (Allier).
Vindo-briga y « château de Vindos (5) , » aujour-
d'hui Vendeuvre (Vienne) (6), Vandoeuvre (Meurthe-
et-Moselle) (7), Vendeuvre-sur-Barse, (Aube), Ven-
deuvre (Calvados) (8).
Entre ces formations antiques et celles de la pé-
riode firanque , il n'y a qu'une différence : elle con-
siste dans la langue à laquelle les termes appartien-
nent. Dans les formations de la période franque le
premier terme des noms de lieu est germanique,
tandis que dans les formations antérieures le premier
terme est gaulois, comme Argantos, Artos, Carantos,
Donnos, Eburos, Vindos, qui sont des noms gaulois
d'hommes, ou il est romain comme Glaudius, Albius,
(!) Liber-dunum, en 894; Lepage, Dict. top. de la, Meurthe, p. 79.
P) C. /. L., XII/2916; 5686, 480.
(3J Ecclesia Donobrii, 1120; castrum quod dicitur Donobrium, 1127; Le-
page, Dict. top. de la Meurthe, p. 40. — In fundis Donobrens^ 950; vicaria
Donobrena, 954; vicaria Donobrensia, 966; chez Bruel, Recueil des chartes
de Cluny, t. I, p. 736, 825; t. II, p. 286; cf. Longnon, Atlas, p. 143, 147.
(4) Sur ce nom pérégrin, voyez De- Vit, Onomasticon, t. II, p. 663.
(5) Sur le nom d'homme Vindos, voir Rhys, Lectures, 1" éd., p. 171.
(6) Terra Sancti Petn VindobHae, 973-974; Curtis VindobHa, 988-1020;
Vindovria, vers l'an 1000 ; Redet. Dict. top, de la Vienne, p. 431. Il a existé
une villa de même nom dans la Côte d'Or ; de là vient la Finis Vendo-
brensis de la Chronique de Bèze ; Gamier, Nomenclature, p. 55, n* 239 ; cf.
p. 41, n- 175.
(7) Pour cette localité, nous n'avons que l'orthographe prétendue savante
Vindopcra (971) ; Vendopera, même siècle ; Lepage, Dict. top, de la Meur-
the, p. 148. On trouve aussi villa Vindopere en 938, pour Vendeuvre (Vienne).
Redet, Dict. top. de la Vienne, p. 431.
(8) Les Bretons, venus de Grande Bretagne sur le continent, au cinquième
siècle, apportèrent le même procédé de formation, mais l'âge relativement
moderne de leur langue leur imposa l'ordre inverse des composés : Plu-
maugat et Ploufragan (Côtes-du-Nord) ; Ploermel et Pleucadec (Morbihan)
sont d'anciens Plebs Maelcat, Plebs Fracan, Plebs Arthmael, Plebs Catoc ;
Maeicat, Fracan, Arthmael, Catoc sout des noms d'hommes.
XIV PRÉFACE.
Curtius qui sont des gentilices romains, comme Ger-
manicus , Liber et Marcus qui sont des cognomina
romains.
La même différence entre le procédé antique et
le procédé de la période franque se remarque pour
le second terme des noms de lieux : dans les for-
mations de la période franque, le second terme,
mlUiy villarey cortiSj mons^ vallis est latin, tandis que
dans les formations antérieures il est gaulois. Les
noms communs gaulois magus « champ, » dunum
et durum « forteresse , » briga « château » étaient
encore usités comme mots indépendants et en dehors
de la composition, quand ont été formés, tant à l'épo-
que de l'indépendance celtique que sous l'Empire ro-
main, les noms propres de lieux dont ces noms com-
muns sont le second terme.
Alors les habitants de la plus grande partie de la
Gaule parlaient gaulois. Ils parlaient gaulois , quand
ils étaient libres et que César les subjugua; ils ont
continué à parler gaulois pendant les premiers temps
de l'Empire romain , et alors ils ont créé des compo-
sés hybrides comme Claudio-maguSj Marco-magaSj
Germanico-magus j Albio-dururriy Curtio-dunum ,
Libero-dunanij dont le premier terme est latin quoi-
que le second soit gaulois. Mais quand, au cinquième
siècle, la domination franque se superposa aux ruines
de l'Empire romain, les habitants de la Gaule ne
parlaient plus gaulois , leur lajigue était le latin ; ce
fut au latin qu'ils empruntèrent le second terme des
noms de lieu composés qui sont encore , dans notre
nomenclature géographique , les monuments de la
grande révolution politique accomplie à cette date.
Dans le second terme des formations nouvelles,
PRÉFACE. XV
pendant la période franque, les mots latins villa y
cortiSj morts f vallis supplantèrent les mots gaulois
mcxgus , dunum , durum , briga , en même temps
qu'au premier terme les noms francs, comme Gun-
dulfus , Ansevaldus , Baddo , Baudechisilus , etc. ,
remplaçaient les gentilices romains Claudius, Albius,
Curtîus, etc., les cognomina romains, Germanicus,
liber, Marcus et autres.
III
Il n'y a donc pas à douter du rôle important que
les noms d'hommes ont joué dans la formation des
noms de lieux habités , et voilà comment il y a une
liaison entre les deux livres dont cet ouvrage se
compose , comment l'étymologie des noms de lieux
offre un rapport intime avec les recherches sur l'ori-
gine de la propriété foncière.
Cependant le second livre , qui traite de l'étymo-
logie des noms de lieu , n'a pas été engendré par le
premier où est étudiée l'origine de la propriété fon-
cière ; la paternité de ce second livre remonte à un
petit ouvrage dont l'auteur, aujourd'hui défunt,
n'avait guère attaché d'importance , à la relation
entre l'étymologie des noms de lieu et l'origine de la
propriété foncière : ce petit ouvrage est le traité De la
formation française des anciens noms de lieu, par
Jules Quicherat, courte brochure, qui a paru en 1867.
Jules Quicherat, maître dont les élèves ne peuvent
parler sans une noble fierté, était surtout remarqua-
ble comme professeur d'archéologie ; autant il possé-
dait à fond la matière de cet enseignement , autant il
sentait vivement ce que cet enseignement pouvait
XVI PREFACE.
avoir d'incomplet et de défectueux. Aussi est-il mort
sans avoir pu se décider à publier ce cours qui aurait
été son chef-d'œuvre. Quand les circonstances l'ame-
naient à étudier un sujet qu'il connaissait moins , il
était plus facilement satisfait et il se décidait plus ra-
pidement à publier ses travaux ; telle est la loi psycho-
logique qui a fait mettre au jour le court traité De la
formation française des anciens noms de lieu. Ce
petit, volume, malgré d'inévitables lacunes et bien des
défauts, porte à toutes les pages la vigoureuse em-
preinte du puissant esprit auquel nous le devons.
Beaucoup de gens penseront sans doute qu'en le
recommençant je fais acte de grande témérité. Deux
raisons m'ont déterminé cependant à publier le pré-
sent ouvrage : il est sur un grand nombre de points
beaucoup plus complet que celui de Jules Quicherat;
d'autre part, il y a chez mon savant maître un cer-
tain nombre de doctrines linguistiques qui à mes
yeux sont arriérées. Ainsi il n'avait pas une notion
très nette de la différence qui existe entre les com-
posés et les dérivés ; il réunit, dans le chapitre II inti-
tulé : accidents particuliers de la désinende (p. 27) ,
le suffixe --acus (p. 41) et les mots danum, magus
(p. 48-51) , employés souvent comme second terme de
composés. A ce chapitre II , dans lequel il comprend
les noms de lieux formés à l'aide de ces deux mots ,
il oppose un chapitre III intitulé : des noms composés
(p. 53) ; et les noms composés dont dunum et magus
sont le second terme n'apparaissent pas dans ce cha-
pitre.
Je n'admets pas, comme Jules Quicherat, que pen-
dant la période romaine on ait formé des noms de
lieu avec un suffixe -iacus : le suffixe -iacus date de
PRÉFACE. XYii
la période mérovingienne. On peut être étonné de
voir Jules Quicherat citer comme autorité , à Tappui
de sa thèse (p. 34) , la légende de saint Domitien où
il est dit que le nom de lieu Latiniacus vient de
Latinus (1). Cette légende n'est pas antérieure au
neuvième siècle, et elle s'appuie sur un document
évidemment faux, puisqu'il est daté de l'an l"* de
l'empereur Valentinien , contrairement à l'usage ro-
main et suivant celui des chancelleries carlovin-
giennes (2).
Dès le sixième siècle on a dû former des noms de
lieu en ajoutant -iacus à un nom d'homme. Autre-
ment Grégoire de Tours n'aurait pas rattaché le nom
de Martiniacas à celui de saint Martin (3) . L'usage
du suffixe "iactis est attesté au milieu du septième
siècle par le nom de Daccognaca ou Daccugnaca
(pour Dacœniaca) villa y dans un diplôme de Clo-
taire III (4) ; ce nom de lieu est dérivé du nom
d'homme hypocoristique franc Dacco; un personnage
de ce nom, fils de Dagaricus, fut mis à mort en
578 (5). Un autre témoignage de l'époque mérovin-
gienne est le nom de lieu écrit Childriciaecas , Chil-
driciagas et Childriciaegas dans un diplôme de Chil-
debert III en 709 (6) ; ce nom de lieu dérive du nom
d'homme si connu Childericus , porté par trois rois
(1) BoUand, juillet, t. I, p. 51, col. 2; p. 52, col. 1.
[*2] c Data octavo calendarum julianim anno primo Valentiniani impera-
toris. 9 (Bolland, juillet, t. I, p. 57, col. 1.)
(3) c Oratorium situm in villa Martiniacensim, in quo célèbre ferebatur
saepius orasse Martinum. v Gloria confeasorum, ch. viii, éd. Krusch, p. 753,
1. 11 et 12.
(4]t Tardif, Monuments hisU, p. 13, col. 2.
(5) Grégoire de Tours, Historia Francoruniy 1. V, ch. xxv, éd. Amdt,
p. 220, 1. 11.
(6) Tardif, Monum, hist,^ p. 36.
II
^viii PREFACE.
francs dont le premier était père de Clovis et vivait
au cinquième siècle. Le nom de Childericus n'était
pas en usage seulement dans la famille royale : Gré-
goire de Tours parle d'un certain duc Childéric qui
vivait à la fin du sixième siècle (1),
Le nom de lieu Teodeberciaco j dans la légende
d'une monnaie mérovingienne (2), aurait été écrit
Theudebercthiacus par un scribe plus exact que les
monnoyers, et ce nom dérive du nom d'homme
Theudebercthus porté par deux rois francs, 534*548
et 596-612.
Ainsi , créer des noms de lieu en développant des
noms d'homme à l'aide du suffixe -iacus est un pro-
cédé de formation usité à l'époque mérovingienne.
Les auteurs de l'époque carlovingienne le connais-
saient, et ils l'ont formulé en en faisant une ap-
plication inexacte et en prétendant en faire remonter
l'usage au temps de l'empire romain : c'est ainsi que,
suivant le biographe du roi Dagobert, le mot Catal--
liacus, nom primitif de Saint-Denis, près Paris, s'ex-
plique par CatuUa, nom d'une matrone qui, au temps
de Domitien, 81-96 de notre ère, aurait fait enterrer
saint Denys et ses compagnons? (3). Catulliacus vient
de Catullius et non de Catulla.
Il y a donc certains points sur lequels je ne par-
tage pas la manière de voir de Jules Quicherat,
c'est ce qui m'a décidé à étudier de nouveau le sujet
qu'il avait traité lui-même il y a un peu plus de vingt
ans avec une si légitime autorité. Je ne crois point
(1) Historia Fr&ncorum, Vn, 3; VHI, 18; X, 22, éd. Arndt, p. 29J, 1, 2;
p. 337, 1. 10; p. 434,1.24.
(2) A. de Barthélémy, Bibl, de VEc. des Chartes^ 6* série, 1. 1, p. 462, n* 634.
(3) Krusch, Scriptorum rerum merovingicArum, t. H, p. 401, 1. 24-32.
PREFACE. XIX
en cela faire outrage à sa mémoire ; la vraie manière
d'honorer un maître est de marcher sur ses traces
et de chercher à faire faire des progrès nouveaux à
la science que sa langue, glacée par la mort, ne peut
plus professer. Le livre lui-même que je publie n'est
ni complet ni parfait : je suis loin d'avoir épuisé le
sujet; mon unique prétention est d'avoir tracé, à
côté des sillons ouverts par Jules Quicherat, quel-
ques sillons nouveaux dans un champ à peu près
friche que d'autres achèveront de défricher après
nous.
Il y a plus de quarante ans que, sous la direction
de Benjamin Guérard et assis à côté de mon excel-
lent et malheureux camarade, Alfred Jacobs, j'ai
commencé à étudier les textes géographiques du
moyen âge mérovingien et carlovingien ; je con-
sidère mon livre comme un testament par lequel
je lègue à ceux qui auront la patience de me lire le
dernier résultat de mes travaux. Ils y trouveront
beaucoup à reprendre et à rectifier, notamment en ce
qui concerne le rapport des noms de lieu du haut
moyen âge avec les noms de lieu modernes au
double point de vue de la linguistique et de la géogra-
phie; il me semble déjà entendre résonner à mes
oreilles une sorte de murmure précurseur et des
critiques que m'adresseront mes savants amis
MM. G. Paris, P. Meyer, *A. Longnon, l'abbé Rous-
selot, et de l'écho unanime qui leur répondra dans
le monde si nombreux des érudits dont les loisirs
sont consacrés à l'histoire locale. J'espère qu'un jour
les nombreux travaux entre lesquels M. Longnon se
partage lui laisseront le loisir de reprendre le même
sujet pour remplacer mon œuvre par un travail dé-
PREFACE.
flnitif , et qu'en se servant peut-être un peu d'elle il
la fera oublier : c'est le sort ordinaire des leçons et
des livres. Un écrivain qui, au moyen âge, avait fré-
quenté l'université de Paris le constatait déjà :
« Dis-moi où sont maintenant tous ces maîtres
» que tu as bien connus quand ils vivaient et qu'ils
» brillaient par les études. Déjà d'autres touchent
» leurs appointements, et je ne sais si ces docteurs
» nouveaux pensent à leurs prédécesseurs. Ceux-ci,
» pendant leur vie, avaient l'air d'être quelque chose
» et maintenant on ne parle plus d'eux (1). »
Un grand nombre de ces vieux maîtres n'écrivaient
point ; mais à quoi sert un livre qui , remplacé par
un meilleur, ne se lit plus? Il a pu être quelque
temps utile, comme l'œuvre obscure du laboureur
qui trace des sillons et qui ainsi, travaillant pour sa
part à l'alimentation annuelle de ses concitoyens,
collabore à la vie d'une grande nation , puis meurt
oublié. Tel est le sort de la plupart des livres d'éru-
dition : dans l'avenir, leur seule notoriété est celle
qu'assurent les recueils bibliographiques ; l'immor-
talité qu'ils confèrent à leurs auteurs peut être com-
parée à celle que donnent aux potiers de l'empire
romain les index du Corpus inscriptionam latinarum.
Jubainville (Vosges), le 2 septembre 1889.
(1) • Die mihi ubi sunt modo omnes illi domini et magistri, quos bene no-
visti, dum adhuc vivercnt et studiis florerent? Jam eorum praebendas alii
possident et nescio utrum de eis recogitant. In vita sua aliquid esse vide-
bantur, et modo de illis tacetur. » [De Imitatione Christi^ liv. I, c. ,iil { 5.)
PREFACE. XXI
POST-SCRIPTUM
En corrigeant les épreuves de cette préface, j'ap-
prends que M. Fustel de Coulanges a été enlevé par
la mort aux lettres, à l'attachement et à Tadmiration
de ses élèves. Il est dans la vie un âge où c'est sur
des tombeaux qu'ordinairement le regard s'arrête,
quand la pensée se reporte aux maîtres, souvent
même aux compagnons de travail et aux émules qu'on
a entendus, qu'on a aimés, dont on a plaint les mal-
heurs ou quelquefois peut-être envié les succès. Cet
âge sérieux, c'est le mien.
La bibliothèque d'un érudit est toujours une sorte
de nécropole ; les livres des morts y sont bien plus
nombreux que ceux des vivants, et la plupart des
titres ressemblent à des épitaphes ; mais ce qui, dans
ma bibliothèque, est surtout émouvant pour moi,
c'est que presque sur chaque rayon il y a un livre
écrit par un défunt que j'ai personnellement connu,
qui a été pour moi soit un maître, soit un ami, quel-
quefois tous les deux : je ne puis jeter les yeux sur
ses œuvres sans voir se dresser à côté de moi sa
figure bienveillante et douce qui semble me sourire
comme autrefois et m'encourager dans mes travaux,
en attendant que j'aille le rejoindre dans une autre
vie. Pardessus, B. Guérard, F. Guessard, Natalis de
Wailly, Ad. Renier, Ch. Jourdain, E.Benoist, E. Des-
jardins, P. Paris, Henri Martin, Pitra et combien
d'autres dont, en ce moment, le nom m'échappe,
mais qui font battre mon cœur chaque fois que des
travaux analogues aux leurs me ramènent à leurs
livres. Ils n'avaient ni les mêmes croyances, ni le
XXII PREFACE.
même genre de vie, mais tous étaient dominés par le
même amour pour la science et pour la vérité histo-
rique ; et aujourd'hui leur carrière littéraire est ter-
minée, comme va Têtre bientôt la mienne.
Mais Térudition ne meurt pas avec les érudits :
elle continue à vivre avec les élèves ; à côté de mon
nom on lira, dans le titre de ce livre, le nom de mon
jeune et zélé collaborateur, M. G. Dottin, dont le
concours a aidé mes recherches , et qui a rédigé les
index de ce volume. Tous les professeurs auxquels
j'ai dû le bienfait de l'instruction n'ont pas encore
disparu de ce monde, et dans la dédicace de cet
ouvrage, j'ai pu réunir au nom de M. J. Quicherat ,
mon maître défunt, celui du maître encore vivant qui
m'a initié à l'étude historique du droit, il y a qua-
rante ans, M. Eugène de Rozière, alors professeur
à l'Ecole des Chartes, aujourd'hui toujours vigoureux
et ferme en dépit des années , et un des membres
les plus écoutés de l'Académie des inscriptions et
belles-lettres.
JubainvillS) le 30 septembre 1889.
RÉPONSE A M. FUSTEL DE GOULANGBS
M. Fustel de Goulanges a fait paraître dans la Revue des ques-
lions historiques y en avril dernier, la critique d'un petit mémoire
que j*avais publié en 1887 dans les Comptes rendus de V Académie
des inscriptions, sous ce titre : la Propriété foncière en Gaule. Le
savant académicien a eu l'attention de m'adresser un exemplaire
de son travail (1) en raccompagnant d'une lettre dont la grâce ai-
mable et cordiale m'a profondément touché. Dans son texte im-
primé, il parle de moi dans les termes les plus flatteurs : « L'un
» des premiers érudits de notre temps, > dit-il, c M. d'Ârbois de
> Jubainville, dont les travaux sur le moyen âge et sur la litté-
> rature irlandaise sont si hautement appréciés. >
Toutefois, je ne songe pas à tirer la moindre vanité de la gra-
cieuse appréciation faite de mes écrits par un juge aussi compé-
tent. Car je n'ai pas Tillusion do croire qu'il les ait lus. Mes écrits
n'ont en général aucun rapport avec les sujets que M. Fustel de
(boulanges a traités dans les beaux livres qui lui ont acquis en
France une si légitime renommée. Les seuls lecteurs qu'aient trou-
vé:> mes livres ont été ceux qu'attirait l'intérêt du sujet, et même
la plupart de ces lecteurs se bornent à de courtes recherches faites
à Taide des index dont chaque ouvrage est muni.
Tout autre a été la fortune des travaux do M. Fustel de Cou-
langes. Ils ont ou d'innombrables lecteurs et chacun d'eux, après
avoir commencé un volume, n'a pu s'en détacher avant d'avoir
atteint la dernière lip:nc. De ces lecteurs, j'ai été un des plus pas-
sionnés. Plusieurs, af»rès avoir lu une première fois les livres do
(1) La critique de mon mémoire occupe les pages 83-93 d'une brochure
intitulée : Le problème des origines de la propriété foncière y Bruxelles,
Vromant, 1889, in-8', 95 pages, qui est un tirage à part de la Revue des
questions historiques.
XXIV REPONSE A M. FUSTEL DE C0ULANGE8.
M. Fustel de Goulanges, ont recommencé. Je suis de ces der-
niers. Je crains de n'avoir pas obtenu auprès de lui le même
succès avec les vingt pages dont se compose ma notice sur la pro-
priété foncière en Gaule dans les Comptes rendus de l'Académie des
inscriptions pour 1887. Certainement M. Fustel de Goulanges l'a
lue^ car il la cite deux fois ; mais il a fait cette lecture d'une
façon quelque peu distraite, l'esprit préoccupé de questions étran-
gères à mon sujets et certainement il ne m'a pas relu.
II
Voici ce que je dis au début de mon petit mémoire, p. 66 des
Comptes rendus de f Académie des inscriptions pour 1887 : « Ce que
» j'entends, c'est qu'en général chaque peuple gaulois avait sur
» tout son territoire un droit analogue à celui du peuple romain
• sur Vager publicus; c'est qu'ordinairement en Gaule, vers le
» milieu du premier siècle avant notre ère, le particulier qui
» jouissait d'une portion plus ou moins considérable du sol de sa
1 cité détenait cette portion à titre précaire. 11 se trouvait légale-
» ment dans une situation analogue à celle des patriciens et des
» nobles romains, qui, après avoir occupé des parcelles plus ou
» moins étendues de Yager publicus^ en furent expulsés en partie
» par les lois agraires, quand ces lois déterminèrent le maximum
» de la fraction de Vager publicus qu'un particulier pouvait pos-
» séder. »
Rien n'est plus banal que le fait de l'histoire romaine auquel
je me réfère ici , et l'histoire de Vager publicus romain peut être
considérée dans ses traits généraux comme universellement con-
nue. Cependant je vais, pour plus de clarté, insérer ici la traduc-
tion de quelques lignes du Manuel des antiquités romaines de
MM. Mommsen et Marquardt :
« La partie la plus importante et la plus lucrative de la pro-
» priété de l'Etat romain consistait en Vager publicus italique. Cet
» ager publicus remontait aux temps les plus anciens, il s'agrandit
» de plus en plus à mesure que se développait l'étendue des terri-
» toires soumis à la domination romaine, puis il alla se réduisant
» dans les derniers siècles de la république... Parmi les terres
» réunies par la conquête à Vager publicus, celles qui n'étaient
» point cultivées étaient abandonnées à l'occupation dont le but
» était le défrichement à charge d'une redevance annuelle égale
» au dixième du produit en blé et au cinquième du produit des
» arbres à fruit. En outre, une condition de l'occupation était
REPONSE A M. FU8TEL DE C0ULANQE8. xxv
> que TEtat aurait toujours le droit de reprendre ces fonds de terre.
» On les appelait agri occupatoHi ; leur transmission se faisait par
» héritage, donation et vente. Jamais on no pouvait par usuca-
» pion les transformer en propriété privée. Ils restaient propriété
» de TEtat à charge de redevance annuelle et le terme technique
« pour désigner la relation précaire établie entre eux et le déten-
> teur s'appelait possessio (1). »
Ainsi, les portions de Vager publicus occupées par les patriciens
et les nobles romains se transmettaient héréditairement. Voilà en
Italie un des caractères distinctifs de Fespëce de biens immobi-
liers que je crois retrouver dans la Gaule barbare au moment où
César en a fait la conquête. Or, M. Fustel dé Coulanges m'attri-
bue la doctrine que voici : en Gaule , suivant moi , « la règle
• d'hérédité ne devait pas exister ; » voyez son tirage à part ,
p. 86 , ligne 8. Je n'ai rien dit de pareil. J'ai simplement affirmé
que M. Fustel de Coulanges tirait, suivant moi, une conséquence
exagérée du passage de César, De bello gallico , où il est dit que
les diniides jugent les procès de heredilate. Suivant lui, un procès
de hereditaie suppose nécessairement la propriété foncière dans le
sens où , en France , nous entendons ce mot. Mais Iweditas n'est
pas synonyme d'heredium qui est le terme technique du vieux
droit romain pour désigner la propriété immobilière dans le sens
qu'a cette expression en français aujourd'hui. Hereditas^ c'est
Tensemble des biens quelconques du défunt; c'est ce qu'ont dit
sous l'Empire romain deux jurisconsultes qui répètent la même
formule : Nihil est aliud heredilas quam successio in universum jus
quod defuncius habuU (2). Hereditas nihil aliud est quam successio
in universum 'lus quod defuncius habueril (3). Cicéron auparavant
l'avait dit en d'autres termes : Heredilas est pecunia quae morte
alicujus ad quempiam pervenit jure (4). Dans ce dernier texte ,
contemporain de César, pecunia est employé comme synonyme
en quelque sorte d'heredilas. Pecunia, dans la langue de la loi des
Douze Tables, est à pou près Téquivalent du mot français « for-
tune » : un U'fjassit super pecunia tulelave suae rel, itajus eslo (5).
Tel est le texte que savaient par cœur à l'Ecole de droit de Paris,
il y a quarante-trois ans, tous les étudiants quelque peu studieux.
(1) Handbucfi der rœmischen Aller thûmer, 2* édit., t. V, p. 151, 152, 155.
(2) Gaius, Ad ediclum provinciale^ livre VI (Digeste, livre L, lit. xvi, § 24).
(3) Junianus, Digesta, livre VI (Digeste, livre L, titre xvir, { 62).
(4) Cicéron, Topica, { 29.
(5) Ulpicn, Liber regularum, titre xi, | 14.
XXYi REPONSE K M. FUSTEL DE COULANGES.
M. Fustel de Coulanges, craignant que depuis cette époque j'aie
oublié le sens de ce mot pecunia , prend soin de me le rappeler.
Je lui sais beaucoup de gré de cette attention, mais je ne croyais
pas avoir, autant qu'il le pense, perdu la mémoire des leçons de
mes maîtres Ducaurroy et Pellat. Par pecunia, on entend non
seulement l'argent comptant, mais tout bien, soit meuble, soi^
immeuble. On doit cotte observation à Ulpien (1) et à Hermogé-
nien (2). L'hérédité peut donc comprendre des biens-fonds; dans
l'hérédité, il peut se trouver des heredia dont le défunt avait
la pleine propriété, comme des possessiones sur lesquels , pendant
une longue période de l'histoire romaine , il n'a pu avoir qu'un
droit précaire. Mais il peut aussi dans l'hérédité ne se trouver
aucun droit immobilier. L'hérédité peut consister exclusivement
en meubles; ainsi, de ce que, suivant César, les druides jugeaient
les contestations de hereditale, on ne peut conclure qu^il y eut
dans la Gaule indépendante des heredia, c'est-à-dire des biens-
fonds dont le défunt aurait eu la pleine et entière propriété.
J'ai dit en 1887, dans le passage des Comptes rendus de l'Acadé-
mie des inscriptions reproduit plus haut : « Ordinairement en
» Gaule, vers le milieu du premier siècle avant notre ère, le par-
» ticulier qui jouissait d'une portion plus ou moins considérable
» du sol de sa cité détenait cette portion à titre précaire. »
Voilà ma doctrine; or, suivant M. Fustel de Coulanges (p. 83
de son tirage à part), j'ai voulu — parlant des Gaulois — « intro-
» duire dans leur histoire l'indivision du sol. » J'ai eu tort évi-
demment , car, dit-il plus bas (p. 84) , César « ne mentionne pas
> cette indivision du sol. » Cependant , répète M. Fustel de Cou-
langes (p. 85), « M. d'Arbois de Jubain ville a cru voir chez eux
• (les Gaulois) l'indivision du sol. » J'ai même, suivant M. Fus-
tel de Coulanges (p. 92), commis l'erreur de « supposer que l'Etat
> gaulois fût le maître de tout le sol et le distribuât annuellement
9 entre les citoyens. > Les membres de phrase entre guillemets
sont littéralement copiés dans la brochure de M. Fustel de Cou-
langes : les passages de mon mémoire auxquels ces membres de
phrase font allusion existaient dans la pensée de M. Fustel de
Coulanges quand il écrivait, mais ils ne se trouvent ni dans l'édi-
tion de mon mémoire qu'on peut lire dans les Comptes rendus de
l'Académie des inscriptions , ni dans le tirage à part. Je n'ai parlé
ni de l'indivision du sol gaulois, ni d'un partage annuel entre les
(1) Ad S&binumt livre XLIX (Digeste, livre L, titre xvi, { 178).
(2) Juris Epitomê, livre II (Digeste, livre L, titre xvi, { 222).
RÉPONSE A M. FUSTEL DE COULANGES. xx^ii
citoyens de la Gaule indépendante ; j'ai dit qu*en Gaule, au milieu
du premier siècle , ordinairement les particuliers possesseurs du
sol le détenaient , me semble-t-il , à titre précaire , à peu près
comme les patriciens et les nobles romains possesseurs d'une
grande grande partie de Vager publicus avant les lois Licinia et
Sempronia. Or, entre ces patriciens et ces nobles, il n'y avait ni
partage annuel, ni jouissance indivise; leur domaine s*appelle
ager occupatorius , arcifinalis ou arcifinius (1); il n'a pas été offi-
ciellement divisé ot délimité (2)^ mais il a des limites, fines ^ de
fait.
III
Par quel phénomène psychologique M. Fustel de Coulanges
a-t-il été amené à m'attribuer ainsi une doctrine qui n'est point
la mienne? On le comprend facilement quand on connaît Ten-
semble de son œuvre littéraire et qu'on s'est rendu compte des lois
qui dominent sa puissante intelligence, qui en font la force et qui
lui ont assuré le succès; ce succès, il le doit à la simplicité dos
idées qu'il conçoit et qu'il expose : les faits dont il parle sont mul-
tiples , présentent une infinie variété ; mais son vigoureux esprit
les a disposés de manière à constituer le développement d'un tout
petit groupe de doctrines très simples, et qui par conséquent sont
exposées sans effort avec une merveilleuse clarté. Ouvrez la Cité
antiquej le premier en date des livres de M. Fustel de Coulanges,
le type de ceux qu'il a écrits depuis, un des chefs-d'œuvre de la
littérature fi*ançaise au dix-neuvième siècle. Ce livre est tout en-
tier le déYoloppement d'une thèse qui peut se résumer en quel-
ques lignes.
La société antique a commencé par la famille et la famille an-
tii^e a pour base le culte des ancêtres. Ce culte se célèbre sur le
foyer et sur le tombeau. La permanence de la famille suppose la
permanence du foyer et du tombeau , par conséquent la propriété
du sol où tous deux sont établis. La cité est une association de
(1) « Occupatorii autom dicuntur agri quos quidam arcifinales vocant,
qnibas agris victor populus occupando nomen dédit ; bellis enim gcstis
victores populi terras omncs ex quibus victos ejecerant publicavcro...,
deinde ut quisque virtuto colendi quid occupavit, arcendo vicinum arcifi-
nalem dixit. b (Siculus Flaccus , De conditione agrorum , chez Lachmann ,
Grom&tici veteres, p. 138.)
(2) « Ager ergo divisus adsignatus est coloniarum. » (Frontin, De agrorum
qualitate^ édit. Lachmann, p. 2.)
XXVIII RÉPONSE A M. FUSTEL DE COULANQES.
familles, et c'est sur la famille qu'elle se modèle. A cet antique
système , qui a pour principe une infinie multiplicité , l'empire
romain substitua le despotisme unitaire d'un seul homme; et
le christianisme, auquel la philosophie grecque a préparé les
voies, a complété ce système nouveau en mettant le culte d'un
seul Dieu, d'un Dieu universel à la place des dieux innombrables
et spéciaux des familles et des cités.
Il y a dans cette doctrine une grande part de vérité, mais elle
est inexacte en ce qu'elle est incomplètiî. L'idée d*un Dieu uni-
versel ne date pas seulement du christianisme; dans les plus an-
ciens monuments de la littérature grecque, Zeus n'est le mo-
nopole ni d'une famille, ni d'une cité. La cité antique n*est pas
exclusivement une institution religieuse : c'est la conquête à main
armée et ce n'est pas la religion qui est Torigine de la propriété
foncière indo-européenne. Si le père , le mari , le frère ont une
situation si eiclusivement dominante dans la famille antique, ils
ne le doivent pas seulement à une conception religieuse ; leur rôle
sacerdotal n'est que l'accessoire de leur supériorité guerrière sur
l'enfant, la femme et la sœur. M. Fustel de Coulanges n'a vu dans
les textes antiques qu'un côté secondaire de l'histoire de la famille
et de la cité ; l'ensemble lui a échappé ; une loi de son esprit l'em-
pêchait de saisir cet ensemble; si cette loi de son esprit a été une
cause de faiblesse au point de vue où se placent les érudits, elle
a été sa force dans Tordre littéraire, car elle a fait la merveilleuse
simplicité d'un livre qui, s'il eût été complet , aurait été, comme
on dit aujourd'hui , louffa , ce qui est bien près de confus , c'est-
à-dire obscur pour le plus grand nombre des lecteurs, fatigant
pour tous.
M. Fustel de Coulanges, en écrivant la Cité antique^ a cru faire
toujours œuvre d'historien ; il a fait œuvre de philosophe quand
il s*est lancé dans des hypothèses préhistoriques qu'aucun texte
ne justifie. Aucun document historique par exemple n'établit qu'il
ait existé dans le monde indo-européen un temps où la famille ne
vivait pas dans la société politique ; il n'y a pas de preuve que le
mot indo-européen « pjère » soit plus ancien que le mot indo-
européen « roi. »
IV
Quand M. Fustel de Coulanges est dominé par une idée, cette
idée, dont un article ou un livre va être le développement, est
plus puissante que ses lectures si variées et si attentives; elle
RÉPONSE A M. FUSTEL DE C0ULANGE8. xxix
remporte sur sa mémoire cependant si vigoureuse, elle est plus
forte que son érudition , qui pourtant provoque chez tous ses lec-
teurs une si légitime admiration ; de là certaines citations singu-
lières qu on peut recueillir dans ses écrits. Ainsi M. Fustel de
Coulanges cite entre guillemets comme étant de moi des phrases
que je n'ai jamais écrites : « A Rome , modas agri était Texpres-
3 sion consacrée quand on parlait de Vager pubUcus, > M. Fustel
de Coulanges m'attribue cette phrase, page 92, note 1, de son
tirage à part; or, voici ce que j*ai écrit, page 18 de mon mémoire :
« Modus agrorum , modus agri est à Rome le terme consacré dont
» se servent les lois agraires quand elles fixent la quantité de
» Vager publicus que peut détenir un citoyen. » Après avoir sub-
stitué à mes expressions la phrase qui précède, M. Fustel de
Coulanges continue : « Mais où a-t-il vu cela , » dit-il en parlant
de moi. Or, voici comment je continuais ma rédaction : « On le
> voit par Tite-Live quand il parle de la loi Licinia de Tan 367
» avant J.-C, par le passage où Siculus Flaccus analyse la loi
> Semprania de Taunée 133 : dans ces textes latins, nous lisons
D que la loi Licinia était de modo agrorum ne guis plus quingenta
» jugera agri possideret (1) et que suivant Ti. Gracchus, auteur de
> la loi Sempronia , il ne fallait pas : majorem modum possidere
> quam qui ah ipso possidenu coli possil (2). » J'ai donc répété ce
que disaient Tite-Live etSiculus Flaccus ; j*ai cité ces auteurs, et
j'ai même indiqué pour Tun le livre et le chapitre, pour l'autre
l'édition y le tome, la page; M. Fustel de Coulanges demande :
« Où a-t-il vu cela? »
Rendre inexactement mes doctrines et m'attribuer, en les pla-
çant entre guillemets, des phrases qui ne sont pas de moi; ajouter
ensuite que l'opinion exprimée dans ces phrases manque de fon-
dement c'est un acte dont les conséquences n'ont aucune gra-
vité ; ce qui est beaucoup plus sérieux , c'est quand la préoccupa-
tion exclusive d'une seule et unique idée oblitère la mémoire de
M. Fustel de Coulanges au point de lui faire traduire les textes
des auteurs anciens de la même façon qu'il a rendu ma pensée.
Dans les Topiques de Cicéron , c. 10 , § 43 , il y a un passage ainsi
conçu : Si in Drbe de finibus controversia est, quia fines magis agro-
rum esse videntur quam Urbis, finibtAS regundis adigere arbitrum
non passis, c'est-à-dire : « Si à Rome il y a contestation sur des
1 limites, le demandeur ne peut contraindre son adversaire à
(!) Tite-Live, 1. VI, c. xxxv.
{2) Lachmann, Gromatici veteres^ t. I, p. 136.
XXX RÉPONSE A M. FU8TEL DE C0ULANGE8.
» paraître devant le jage en vertu de l'action finium regundorum^
» parce que le mot fines paraît convenir plutôt aux champs qu'à
» Rome (1). » Voici comment s'exprime M. Fustel de Goulanges
(p. 88 de son tirage à part) : « Cicéron... écrit : Quand vous dites
» si de finibus conlroversia est , c'est de limite de propriété qu'il
B s'agit visiblement. » Les guillemets sont de M. Fustel de Cou-
langes. Evidemment, quand M. Fustel de Goulanges a fait cette
traduction , il n'avait plus présent à l'esprit le passage précité du
grand orateur romain; à ce moment d'oubli rien d'étonnant,
mais ce qui pourra sembler bizarre, c'est que, traduisant ainsi, il
croie devoir me donner des leçons de traduction : « M. de Jubain-
» ville ne traduit pas très exactement les textes latins » (p. 92, n).
Les renvois au texte de César n'ont pas toujours plus d'exacti-
tude que cette traduction de Cicéron. A la page 88 de son tirage
à part, parlant de l'auteur des Commentaires De bello gallico^
M. Fustel de Coulanges écrit : a Au milieu de ses récits de guerre,
)> il se trouve seulement sept paragraphes sur les mœurs des 6au-
» lois et leurs institutions en temps de paix(YI, 11, 13, 15, 18,
» 19, 21, 22). Or, dans ces sept chapitres, vous rencontrez trois
» fois le mot fines avec le sens parfaitement certain de limites de
» champs. » Dans ce passage, M. Fustel de Coulanges emploie
paragraphe comme synonyme de chapitre , oubliant que chez
César les paragraphes sont une subdivision des chapitres; cette
observation a peu d'importance; ceci est plus sérieux : les chapi-
tresde César concernant les mœurs des Gaulois sont les chapitres xi
à XX du livre Yl. Les chapitres suivants xxi et xxii concernent,
quoi qu'en dise M. Fustel de Coulanges , non les Gaulois, mais
les Germains. Des trois exemples du mot fines^ « avec le sens par-
» faitement certain de limites des champs, » comme dit M. Fustel
de Coulanges, deux se trouvent dans le chapitre xxii ; par consé-
quent dans un passage où il est question des Germains et non
des Gaulois , en sorte que les trois exemples qui me sont opposés
et qui se trouveraient dans les^chapitres relatifs aux mœurs des
Gaulois sont réduits à un (livre VI , chapitre xni). Or c'est préci-
sément celui dont le sens est à déterminer. On y reviendra plus
loin (2).
(1) G^est resté la doctrine des jurisconsultes postérieurs. Ulpien, Ad Edic-
tum^ liv. XIX, dit que l'action finium regundorum : « Pertinet ad praedia
rustica. » — Paul, Ad Edicium^ liv. XXIII, a écrit, en parlant de la même
procédure : c Hoc judicium locum habet in confinio praediorum rusticorum :
urbanorum displicuit. » (Digeste, liv. X, tit. i, 1. 2 pr.; 1. 4, | 10.
(2) P. 117.
RÉPONSE A M. FU8TEL DE COULANQES. xxzi
Nous croyons devoir arrêter ici cette discussion : il nous sem-
ble avoir montré quel est le défaut de la méthode d'un historien
dont on ne peut cependant trop admirer Térudition comme le
talent littéraire. Il raisonne sur des lambeaux de phrases ou sur
des mots isolés qu'après de longues et persévérantes lectures sa
mémoire a conservés; il écrit sans avoir sous les yeux un texte
complet, des fragments seuls lui sont présents à l'esprit; ces
fragments mêmes, par un travail inconscient de sa vigoureuse
intelligence , ont été transformés quelquefois au point d'être de-
venus méconnaissables. On peut admirer en lui un héritier de
Montesquieu , mais il est difficile d'être à la fois le continuateur
de ce grand penseur , de cet admirable écrivain, et d'observer
partout , dans un travail d'érudition , les règles minutieuses aux-
quelles se sont assujettis autrefois les Bénédictins et , dans ce
siècle-ci , le laborieux , sympathique mais glacial maître auquel
on doit les prolégomènes du Polyptyque dlrminon.
Paris, le l** mai 1889.
LIVRE PREMIER
RECHERCHES SUR L'ORIGINE DE LA PROPRIÉTÉ FONCIÈRE
EN FRANCE.
CHAPITRE PREMIER.
NOTIONS GÉNÉRALES SUR l'hISTOIRE DE LA PROPRIÉTÉ
li'ONGIÈRE EN FRANCE.
Sommaire :
l \» Conquête de la Gaule par les peuples gaulois. — { 2. Le sol conquis
est réparti entre les peuples conquérants ; il devient propriété d'Etat ,
laristocratie se le partage ensuite et en jouit à titre précaire. ^ { 3. La
conquête romaine, le cadastre d'Auguste , ses effets sur la propriété fon-
cière. — {4. Origine de la commune rurale en France. — { 5. La pro-
priété foncière en France d'Auguste à nos jours.
S l"". — Conquête de la Gaule par les peuples gaulois.
La propriété foncière en France tire son origine de
la conquête. Pour atteindre cette origine, il faut remonter
à l'époque inconnue où les Gaulois passant le Rhin vin-
rent s'établir à Touest de ce fleuve. Ce n'était peut-être
guère plus tôt que Tan 500 avant notre ère. Alors, armés
d'épées de fer et du gaison, redoutable javelot qu'ils lan-
çaient du haut de leurs chars de guerre, les Gaulois entrè-
rent vainqueurs et conquérants dans la vaste contrée
qui depuis deux mille ans, après tant de révolutions et de
désastres, porte encore leur nom dans les livres des his-
toriens.
Cette contrée, que nous appelons Gaule, était habitée
déjà par une population qui avait atteint un degré élevé de
civilisation, qui possédait des chevaux et des bœufs, qui
4 LIVRE !•'. CHAPITRE !•'. { 2.
connaissait le bronze et Tor. Cette population était probable-
ment bien plus nombreuse que les conquérants. Nous igno-
rons son nom. Les Grecs ont connu les prédécesseurs des
Gaulois , et distinguent chez eux deux groupes , les Ibères
et les Ligures. Les principaux monuments de cette popu-
lation antique semblent être aujourd'hui les cimetières où
elle repose depuis plus de vingt siècles : c*est par les débris
qu'elle y a enfouis que nous cherchons à nous faire d'elle
une idée. Mais il est vraisemblable qu'outre ces monuments
lugubres, cette population antique en a laissé d'autres,
qui sont moins loin de nous et dont l'étude est moins fu-
nèbre : c'est nous-mêmes ; car nous sommes , pour la plu-
part j les descendants des peuples oubliés dont les Gaulois ,
nos aïeux supposés, ont triomphé et qu'ils ont asservis avant
d'être eux-mêmes conquis par les Romains. Nous sommes
les petits-fils de cette plèbe vaincue, mais toujours vivante,
que l'orgueil gaulois, au temps de César, traitait à peu
près comme les Romains traitaient leurs esclaves : pêne
servorum habetur loco.
§ 2. — Le sol conquis est réparti entre les peuples conquérants ;
il devient propriété d'Etat^ Varistocratie se le partage
ensuite et en jouit à titre précaire.
La conquête gauloise eut l'effet que produisait toute
conquête dans les idées du monde antique : la spoliation
des vaincus. Chez les anciens, la victoire conférait à la
fois au vainqueur et le droit de souveraineté et le droit de
propriété sur le territoire, sur les personnes et sur les
biens mobiliers du peuple contre lequel avait tourné la
fortune des armes. Les Gaulois devinrent donc proprié-
taires du sol conquis. Ils étaient divisés en un certain
nombre de peuples. Nous connaissons, par César et par
les auteurs postérieurs , romains et grecs , les noms d'un
certain nombre de ces peuples. Chacun de ces peuples eut
pour lot une portion du territoire conquis. Ainsi , à une épo-
NOTIONS GÉNÉRALES. 5
que plus ancienne , lorsque , arrivant du nord des Alpes , la
race latine était venue s'établir au sud du Tibre, chacune des
genks^ dont l'association devait plus tard donner naissance
à la ville de Rome , avait reçu une portion de territoire
dont elle eut d'abord la propriété collective (1). Ainsi, plus
tard, Rome conquérante réunit à son domaine public le
domaine des cités vaincues. Dans chacun des groupes de
guerriers dont Tassociation constituait un peuple gaulois :
Arvemit BiturigéSj Remi^ Aedui^ etc., c'était la coopération
des courages qui avait produit le succès des armes. Le sol,
dont la conquête avait été le résultat de ce concours, resta
propriété collective de chaque peuple. Il ne fut partagé
(pi'entre les peuples : le butin mobilier fut seul d'abord
partagé entre les guerriers. Ce procédé est celui que pa-
raissent avoir suivi , dans toute l'Europe, les conquérants
indo-européens. La propriété collective du sol était le prin-
cipe; la propriété immobilière individuelle n'apparaissait
qu'à l'état d'exception. A Rome , lorsque le roi légendaire
Romulus fit le premier partage des terres, chaque chef
de famille ne reçut que deux jugera ou cinquante ares ,
c'est-à-dire de quoi se créer un enclos autour de la maison
des champs. Tel fut primitivement Vherêdium romain. Le
reste du territoire de Rome était affecté à une jouissance
soit commune, soit précaire : en d'autres termes, consti-
tuait le domaine public.
Vherediwn romain parait identique à l'enclos, faithce,
que la loi irlandaise nous montre attenant à la maison des
membres de la noblesse irlandaise. Telle est aussi la terra
salica du titre LXII de la loi des Francs Saliens. Dans la
période historique primitive dont les Gaulois n'étaient pas
çncore sortis , quand César les assujettit au joug romain ,
ie territoire de chaque peuple était affecté à la propriété
collective de ce peuple, sauf peut-être le sol des maisons de
ville, des maisons des champs, et l'enclos attenant à cha-
(t) Mommsen, Rœmiêche Geêchiehtêj 6* édition, t. I, p. 35, 150.
G LIVRE !•'. CHAPITRE 1*\ l 3.
cune de ces propriétés bâties. Cette situation peut sembler
démocratique au plus haut point, quand elle est Tobjet
d'une observation superficielle. En réalité, rien ne se con-
cilie mieux avec la constitution aristocratique des Etats et
des fortunes. La propriété collective n*a pas pour consé-
quence nécessaire la jouissance collective ; la propriété
collective qui appartient à TEtat se combine facilement avec
la jouissance individuelle au profit d'un petit nombre.
L'exploitation du sol public par Tagriculture ou par le
pâturage exige un capital que possèdent seuls les gens
riches , c'est-à-dire les membres de l'aristocratie , car c'est
par abus de langage que chez nous, dans l'usage vulgaire,
on distingue naïvement de la richesse l'aristocratie. Les
gens riches seuls avaient les bœufs ou les chevaux , les
charrues nécessaires au labourage ; seuls , ils pouvaient
faire l'avance de la semence et des salaires, loger et nourrir
bétes et gens jusqu'à la récolte ; seuls, ils avaient les trou-
peaux nécessaires pour exploiter le sol en le pâturant ; en
sorte qu'en fait ils divisèrent entre eux le domaine public
et en jouirent, comme s'il leur eût appartenu, à charge de
redevances insignifiantes, tandis que, dans notre organisa-
tion moderne, ceux qui possèdent les mêmes capitaux sont
obligés d'acheter ou de tenir à bail des particuliers la
terre qu'ils labourent , les pâtures et les prés qui nourris-
sent leurs bestiaux, et ces particuliers ne leur font pas
les conditions qu'une aristocratie obtient de l'Etat.
S 3. — La conquête romaine , le cadastre d* Auguste, ses effets
sur la propriété foncière.
Le système d'impôts qu'Auguste établit en Gaule eut
pour effet la substitution de la propriété privée à la pro-
priété collective ou publique de la terre. Il consolida la
jouissance jusque-là précaire du sol par les membres de
l'aristocratie , et transforma cette jouissance en une sorte
de droit de propriété définitive.
NOTIONS GÉNÉRALES. 7
César vainqueur avait frappé la Gaule d'un impôt de
répartition, iributum ou stipendium^ qui s'élevait à qua-
rante millions de sesterces, c'est-à-dire un peu plus de huit
millions de francs (1) ; chaque peuple ou Etat supportait ,
dans cet impôt, une part déterminée et se procurait les
fonds comme il l'entendait. À ce système primitif, Auguste
substitua le cens, c'est à-dire un impôt de quotité qui frap-
pait à la fois les personnes et les terres ; le montant total
n'en était pas fixé d'avance ; chaque particulier contribuable
payait d'après un tarif uniforme, et les exonérations indivi-
duelles, quand elles avaient lieu, n'étaient pas compensées
par une surtaxe des imposés ; la perte qui en résultait était
supportée par le fisc impérial (2). L'établissement du cens
changea les rapports de chaque contribuable gaulois avec
sa cité , et de chaque portion du sol avec celui qui la dé-
tenait : les particuliers délenteurs du sol cessèrent de ver-
ser dans la caisse de la cité la redevance annuelle qui était
la condition de leur jouissance précaire ; cette redevance
fut remplacée par l'impôt dû au fisc romain ; et, par l'efTet
de la loi fiscale romaine, ces particuliers furent substitués
à la cité comme possesseurs légaux des parcelles territo-
riales qui , en fait, étaient entre leurs mains : payant l'im-
pôt foncier au fisc, ils furent considérés comme investis
d'une sorte de propriété foncière au lieu et place du peuple
ou de la cité.
Le recensement qui servit de base à l'établissement de
ce nouveau système d'impôts fut commencé par Auguste
l'an 27 avant notre ère (3). Il paraît avoir été précédé d'un
arpentage général de l'empire prescrit par Jules César et
il) Entropc, Ht. VI, ch. xvn. Cf. Suétone, Ca^ar, cb. XXV, et le com-
mentaire donné sur ces deux textes par Marquardt, Handbuch dor rômis-
chen Alterthûmer, 2* édit., t. V, p. 191, note 10.
(2) Suétone, Auguste, ch. XL : < Liviae pro quodam tributario Gallo ro-
ganti civitatem negavit, immunitatem optulit : affirmans, se faciiius passu-
rtim fisco detrabi aliquid, quam civitatis Roroanae vulgari honorem. »
(3) E. Desjardins , Géographie historique el administrative de la Oaulc
romaine, t. III, p- 154.
8 LIVRE I". CHAPITRE !•'. { 3.
dirigé par quatre géomètres, à chacun desquels fut attribué
un quart de cette vaste circonscription. La portion occi-
dentale de Tempire, qui comprenait la Gaule, avait été
confiée, dit-on, à un certain Didyme, dont le travail avait
duré seize ans et trois mois; commencé Tannée 44, il
s'était terminé l'an 27 avant notre ère (1). Un des résultats
géographiques de cette vaste entreprise fut la rédaction
d'un livre publié sous le nom d' Agrippa, et qui était une
sorte de géographie géométrique de Tempire romain ; pour
donner à cette œuvre une publicité plus grande. Agrippa
et Auguste voulurent qu'une carte représentant l'empire
romain fût peinte et exposée aux yeux du public, à Rome
même , dans un portique (2). Cette grande opération géo-
graphique était inspirée par des préoccupations beaucoup
plus administratives que scientifiques ; elle jetait les bases
du cadastre qui devait servir à l'assiette de l'impôt foncier.
La Gallia comata (3) , ou la Gaule conquise par César, pa-
rait avoir compris trois cent cinq peuples (4). Auguste trouva
ce nombre trop considérable, il maintint, à quelques mo-
difications près, une grande partie de ces peuples dans
l'état de subordination où ils se trouvaient à l'égard d'au-
tres peuples plus importants, et il divisa la Gallia comata
en soixante circonscriptions financières , si nous nous en
rapportons à Strabon ; en soixante-quatre , si nous en
croyons d'autres documents (5). On se sert souvent du mot
(1) Voyez les textes réunis chez Marquardt et Mommsen, Handbuch der
rœmischen Alterthûmer ^ 2« édit., t. V, p. 209-210. Les divisions de la cos-
mographie de Julius Honorius et de la cosmographie d'Ethicus ont pour
base le partage de l'empire romain entre les quatre géomètres. Pour la
section occidentale, voy. Riese, Geographi latini minores , p. 33-40, ^8-86.
(2) Riese, Geographi latini minores, p. i-xvi, 1-8.
(3) On trouve déjà cette expression chez Catulle , 29 , 3, c'est-à-dire dans
une pièce contemporaine de la guerre des Gaules.
(4) C'est le chiffre donné par Josèphe , icévre 8è xal xp laxoaioïc icXv)Ouovt£;
ëOveat. De bello judaico, liv. II, ch. xvi , édit. Didot, p. 119, 1. 11 et 12. Ce
chiffre exact est remplacé par des chiffres ronds chez Plutarque qui dit trois
cents, èOvY) 5à éx8ipiQ(raT0 Tpiaxôaïa. César, ch. XV, édit. Didot, p. 852, 1. 43,
44, et chez Appien qui dit quatre cents, iOvY) de TCTpaxôoia. De rébus galliciti,
ch. II, édit. Didot, p. 24.
(5) Marquardt et Mommsen, Handbuch der rœmischen AUerihûmer ,
NOTIONS GÉNÉRALES. 9
civikts pour désigner ces circonscriptions ; mais cette ex-
pression désigne plutôt Tétre moral qui, créé par un fait
politique , vivait sur chacune de ces circonscription , et, à
proprement parler, cette circonscription elle même s'appe-
lait en latin terriiorium (1) ou regio (2). Le sol de la cité se
divisait en pagi, et le pagixs lui-même, dans le système
romain, se subdivisait en fundi. Cette triple division du sol
est la base du cadastre et de Timpôt foncier romains (3).
On peut comparer la cité à notre département; le pagus (4),
à notre arrondissement; le fundus, à notre commune. Pour
constituer un fundus, il faut une certaine étendue de ter-
rain, officiellement délimitée, qu'on appelle a^er, et sur
ce terrain, des bâtiments qu'on appelle villa (5).
2* édiL, t. IV, p. 268. Cf. Desjardins, Géographie de la Gûule romaine, t. HI,
p. 156 et suIt.
(1) a Territormm est nniversitas agrorum intra fines cujusque civitatis. »
Pomponius, Liber êingularis EncMridii; Digeste, lib. L, tit. xyi, 1. 239, { 8.
(2) a Regiones autem dicimus , intra quarum fines singulamm coloniarum
ant mnnicipiorum magistratibus jus dicendi coercondique est libéra potes-
tas. » Sicttlus Flaccus , chez Blume , Lachmann et Rudorff , Die Schriften
der rœmischen Feldmessery Gromatici veteres, t. I, p. 135, 1. 4-7.
(3) c Forma censuali cavetur, ut agri sic in censum reforantur : Nomen
fondi cujusque; et in qua civitate et in quo pago sit; et quos duos vicinos
proximos habeat. » Ulpien , De censibus, livre III , dans Digeste , livre L ,
tit. XV, 1. 4.
(4) Il est déjà question des pagi de la Gaule chez César qui les oppose
d'une façon générale aux cités ; In omnibus civitaiibus atque pagis, livre VI,
ch. 10, et qui mentionne les pagi des Helvètes, livre I, ch. 12, 13, 27 ; ceux
des Morini , livre IV, ch. 22 ; ceux des Arvemes , livre VII , ch. 64. Tacit<^
parle de ceux des Sequani, Annales y I, 45, et de ceux des Aedui, His-
toires, II, 61.
(5) « Locus... sine aedificio... rure... ager appellatur. Idemque ager cum
aedificio fundus dicitur. Florentinus, libro VIII Institutionum , » dans Di-
geste, livre L, titre xvi, 1. 211. — « Locus est non fundus sed portio aliqua
fondi ; fundus autem integrum aliquid est , et plerumque sine villa locum
accipimus... Sed fundus quidem suos habet fines. » Ulpien, livre LXIX, Ad
edictum, dans Digeste , livre L , titre xvi, 1. 60. — t Ager est locus qui sine
villa est. > Ulpien, livre XVII, Ad ediclum, dans Digeste, livre L, titre xvi,
1. 27. — Les passages suivants de Caton, De re rustica, achèveront de faire
comprendre le rapport qui existe entre fundvs et villa : a Paterfamilias,
ubi ad villam venit, ubi larem familiarem salutavit, fundum eodem die, si
potest, circumeat; si non eo die, at postridie... Ita aedifices ne villa fundum
quaerat neve fundus villam » (c. II , III). Le sens de cette maxime est que
les bâtiments d'exploitation doivent avoir une importance proportionnée à
celle du domaine. On la trouve reproduite chez Pline le Naturaliste ,
10 LIVRE I". CHAPITRE I". { 4.
S 4. — Origine de la commune rurale en France.
On doit reconnaître dans le fundus romain Torigine de
nos communes rurales. Les plus anciennes de ces com-
munes, portant en général un nom formé avec un gentilice
romain et avec le suffixe acus^ comme Juli-acu$y remontent
à un fundus qui date de TEmpire romain (1) , et dont les
limites ont été primitivement fixées par les arpenteurs, agri-
mensores^ employés à la confection du cens, sous le règne
d'Auguste. Le premier propriétaire est un grand seigneur
gaulois qui , ordinairement , en devenant citoyen romain ,
avait pris le gentilice de son protecteur romain. De ce
gentilice vint le nom de son fundus. La villa construite
dans ce fundus eut avec lui, pour premiers habitants, ses
obaerati, ses clients qui, jadis, consacraient leur temps au
soin des troupeaux, à l'agriculture et aux armes. Sous la
domination romaine, cessant de combattre, ils ne furent
plus que laboureurs et pâtres. Leur ancien chef, devenu
leur propriétaire, leur partagea une partie de son domaine,
à charge de redevances ; pour la pâture , le bois de chauf-
fage et de construction, il leur donna Tusage collectif d'une
autre portion : on appela villa leurs habitations groupées
autour de la sienne ; à la villa, le village a succédé (2).
Cette nouvelle organisation de la propriété eut financiè-
rement l'avantage de répartir la charge de l'impôt foncier
entre les Gaulois les plus riches et, par conséquent, les
livre XVIII, ch. vi (7), { 32. Cf. Columelle, livre I, ch. iv. — Sur les modi
Qcations dont les fonds étaient susceptibles, voyez Pomponius, livre V, Ad
Sadintim , dans Digeste, livre XXX, titre unique, 1. 24, } 3. Cf. Ulpien,
livre LXIX» Ad edictum, dans Digeste, livre L, titre xvi, 1. GO.
(1) Je ne parle pas ici de colles de nos communes, évidemment peu nom-
breuses, qui remontent à un vicus ou à un oppidum.
(2) Un passage d'Apulée, Métamorphones , 1. VIII , nous donne un exem-
ple d'une villA qui est déjà un village moderne : « Villae vero quam forte
tu)^^ praeteril>amus coloni, roultitudinem nostram latrones rati, satis agcntes
rerum suarum, ezimieque trepidi, canes rabidos et immanes et quibusvo
iupis et ursis saeviores. quos ad tutelae praesidia curiose fuerant alumnaii
Jubilationibus solitis ci cujuscemodi vocibus nobis inhortantur.
NOTIONS GÉNÉRALES. 11
plus solvables. L'impôt foncier était payé par les proprié-
taires des fundi. Le plaisir que leur fit éprouver l'acquisi-
tion du droit de propriété leur fit accepter, sans trop de
peine , la charge d*un impôt probablement plus considérable
que la redevance autrefois due à la cité. Quant à la plèbe,
condamnée à cultiver le bien d'autrui, elle ne perdait rien
à la révolution qui faisait partager entre les membres de
l'aristocratie le droit au sol : ce droit jusque-là était resté
en théorie dans les mains de chaque peuple ou de chaque
Etat, et il cessait de lui appartenir ; mais, au point de vue
de la plèbe , il n'y avait pas de changement pratique : en
efTet, presque toujours, par la force des choses, Taristo-
cratie seule avait jusque-là joui de la terre.
La contenance moyenne de ^os communes est aujour-
d'hui de treize à quatorze cents hectares. Il serait certai-
nement téméraire d'affirmer qu'au temps d'Auguste telle
fut l'étendue moyenne des fundi. Le fundus était une créa-
tion arbitraire que l'homme pouvait modifier suivant les
exigences de sa fortune et de sa fantaisie. Des fundi,
reconnaissables à leur nom, sont aujourd'hui de simples
sections de communes; les villae, qui leur servaient de
centre, sont réduites à l'état de hameaux, ou même elles
ont disparu sans laisser d*autres traces qu'un nom dans de
vieux titres ou que des ruines innommées qu'étudient quel-
ques archéologues. Des villae nouvelles ou, pour se servir
d'une autre expression , des cartes de création plus récente
ont surgi : monuments des grandes invasions qui amenè-
rent la chute de l'empire romain ou qui en furent la con-
séquence ; leurs noms sont des composés dont le premier
terme est un nom propre d'homme d'origine germanique ,
dont le second,-ville, -court, -mont, -val, appartient à la
langue que parlaient les vaincus du cinquième siècle après
notre ère. A côté de Clichy, Clippiacus^ d'Antony, Anto^
niacusj noms d'anciens fundi formés à Taide d'un gentilice
romain et du suffixe gaulois -acus , témoins qui attestent ,
lout près de Paris même , la conquête de la Gaule par les
n
12 LIVRE !•'. CHAPITRB I". { 5.
Romains , nous trouvons des noms de lieu : Billan-court ,
Clîgnan-court et Bougi-val, Baudechisilo-valliSj mots de for-
mation hybride, mi-partie germains, mi-partie gallo-ro-
mains, qui rappellent la conquête franque et la création
de villcte nouvelles, faite sur les ruines de villae gallo-
romaines, ou à côté d'elles en démembrant leur territoire.
Ce serait donc une opération fort délicate que de cher-
cher à retrouver sur notre sol les limites exactes des fundi
gallo-romains dont un grand nombre de nos communes ont
conservé le nom. Mais je crois qu'il ne faut pas désespérer
d'arriver un jour à ce résultat par une étude attentive, là
surtout où les textes nous permettent d'atteindre les pre-
miers siècles du moyen Age. Il est fort possible qu'un cer-
tain nombre de nos communes représentent exactement la
circonscription de fundi gallo-romains. L'étendue n'est pas
un obstacle. Nos communes, ai-je dit, contiennent de treize
à quatorze cents hectares. Les fundi gallo-romains pou-
vaient avoir une étendue moyenne approchant de celle-là,
puisqu'Ausone appelle parvum herediolum sa propriété de
famille , dont la contenance dépassait mille jugera, c'est-à-
dire deux cent cinquante hectares (1).
S 5. — La propriété foncière en France d'Auguste à nos jours.
Les clients de chaque eques gaulois, installés par lui
sur son fundus^ c'est-à-dire sur la portion du territoire
commun que le cens impérial lui avait attribuée, détinrent,
partagée entre eux, une section, ordinairement la plus
considérable, de ce fundus; une autre resta affectée à la
jouissance directe du propriétaire nouveau que la puis-
sance romaine avait créé. Une troisième section fut attri-
buée à la jouissance commune des habitants du fundus,
logés autour du maître dans IdL villa. Ce qui subsiste de
pette dernière section constitue aujourd'hui nos biens corn-
(1) Ausone^ idylle III, v. 9.
NOTIONS QÉNÉRAUBS. 13
munaux; la seconde est la terra indominieata du moyen
âge; quant à la première, c*est en elle que nous devons
reconnaître l'origine de la plus grande partie de la pro-
priété immobilière telle que nous la connaissons dans la
France moderne.
Chacun des obcterati, des clientes^ des ambacti eut un lot
à cultiver. Fermier au point de vue du droit romain , il
considérait peut-être son petit lot comme la part qui légale-
ment lui revenait dans Tantique propriété collective de la
cité. De là ce caractère mixte du colonat, où le tenancier,
irrévocablement lié au ftmdus , et comme tel , en une cer-
taine mesure y esclave , a cependant un droit sur le terrain
qu'il cultive. Ce droit, qui remonte au droit collectif de la
cité fut pendant des siècles en lutte avec celui que le pro-
priétaire du fandus reçut de la loi romaine. On appelle ce
dernier droit domaine émineni; le premier, celui du tenan-
cier, est le domaine utile. Ces deux droits avaient pour
objet le même immeuble. En France , aujourd'hui , le do-
maine utile subsiste seul. Le moyen âge avait, en général,
fixé en argent les redevances qui grevaient le domaine
utile au profit du domaine éminent. Du treizième siècle à
1789, la quantité de matières précieuses contenues dans les
espèces monétaires diminua dans la proportion de vingt à
un , et le pouvoir commercial de l'or et de l'argent s'abaissa
dans la proportion de trois à un ; en sorte que , dans cette
période, le poids des redevances pécuniaires annuelles qui
grevaient le domaine utile au profit du domaine éminent
s'était réduit, suivant un rapport que l'on peut comparer,
à celui de soixante à un. Ainsi , le domaine éminent en
France n'était plus guère qu'une institution honorifique,
lorsqu'il disparut dans la tourmente révolutionnaire comme
les feuilles des arbres que le vent des derniers mois d'au-
tomne emporte au loin quand les premières gelées ont
achevé l'œuvre du soleil de juillet et d'août.
Tout Butte a été l'histoire économique en Ecosse et en
Irlande. Une législation aristocratique à outrance, de date
1
14 LIVtlE I". CHAPITRE !•'. | f,.
toute récente, a fait considérer comme bail temporaire et
non écrit le titre du tenancier. Elle a permis d'accroître
indéfiniment sa redevance, que la loi française diminuait
progressivement et finissait par supprimer ; elle a livré le
tenancier à la merci du landlordy maître de l'expulser
suivant son intérêt ou son caprice. Le domaine utile a
disparu, et Ton ne connaît plus, en général , qu'une seule
forme de la propriété , qui est le domaine éminent.
Le droit que récbment les tenanciers d'Irlande et
d'Ecosse est le droit ancien : ils en ont été dépouillés par
une révolution économique et législative, qui est l'op-
posé de celle dont la secousse politique de la fin du siècle
dernier a été chez nous la conséquence logique et le cou-
ronnement.
CHAPITRE II.
RAPPORT DE LA PROPRIÉTÉ FONCIÈRE AVEC LA SOUVERAINETÉ
DANS LE DROIT PUBLIC DE ROME ET DES GERMAINS. Vager
pUblicUS ET LES LOIS AGRAIRES A ROME AVANT CÉSAR ET DE
SON TEMPS.
SOMMAIBB :
I 1. La notion de la propriété foncière dans la France moderne. Autres
manières de concevoir la propriété foncière soit dans l'ancienne France,
soit hors de France. Le domaine éminent , le domaine utile. — { 2. Le
droit de souveraineté comprend-il le droit de propriété ? Réponse à cette
question dans le droit public de Rome et des Germains. La deditio,
Arioviste et les Burgundes en Gaule. — i 3. Uager publicus romain et
les lois agraires.
S I*^ — La- notion de la propriété foncière dans la France
moderne. Autre manière de concevoir la propriété foncière
mt dans V ancienne France^ soit hors de France : le domaine
éminentf le domaine utile.
Nous avons de la propriété foncière, nous Français de
la fin du dix-neuvième siècle , une notion qui est le résultat
d'habitudes d'esprit toutes récentes, car la législation qui
les a produites remonte à environ cent ans : cette notion
n'est pas conforme aux doctrines reçues chez nos ancêtres
à une date très rapprochée de nous. En France , la pro-
priété foncière était conçue, au siècle dernier, tout au-
trement qu'aujourd'hui , et alors elle comportait certains
démembrements qu'un droit nouveau a fait disparaître en
prohibant le bail perpétuel , en déclarant la rente foncière
16 LIVRE I-. CHAPITRE II. | 1.
rachetable ou même en la supprimant sans indemnité
quand on la considérait comme féodale. Ainsi , des deux
éléments de la propriété foncière en France sous Tancienne
monarchie, domaine éminent du seigneur ou, théorique-
ment, du propriétaire primitif, et domaine utile du tenan-
cier, le second seul subsiste; il est théoriquement une
émanation du premier; il est certainement plus ancien
dans bien des cas; mais peu importe la solution qu'on
donne à cette question historique ; ce qui est certain, c'est
qu'en France le domaine utile a , de nos jours , absorbé le
domaine éminent.
Beaucoup de nos compatriotes, même instruits, parais-
sent ignorer combien est nouvelle la notion française mo-
derne de la propriété foncière. L'ardeur de la discussion
de ce qu'on appelle chez nous les questions sociales a créé
dans leur esprit l'habitude de considérer comme une base
nécessaire de la société la propriété foncière individuelle ,
telle que nos lois actuelles la définissent ; quand ils vont
dans certains pays étrangers où la propriété foncière n'a
pas eu la même histoire que chez nous et où elle est com-
prise autrement, ils n'en peuvent croire leurs yeux. Rien
n'est ridicule, par exemple, comme les observations des
publicistes français qui vont se promener en Irlande. Là ,
il y a deux siècles, par une révolution opposée à la nôtre,
le domaine éminent , quoique de date récente , a absorbé
le domaine utile, dont l'origine se perdait dans la nuit des
temps , et la généreuse équité du gouvernement anglais
d'aujourd'hui cherche à rétablir le domaine utile au profit
du tenancier spolié. Le voyageur français n'y comprend
rien et croit assister à la réalisation des théories à priori
émises par les socialistes du continent. — Il s'agit de donner
à toute une nation , une réparation analogue à celle qu'en
France obtinrent, il y a un demi-siècle, quelques milliers
de vaincus, et qu'on appelle 1' « indemnité des émigrés. »
Un peuple contemporain a beau être rapproché de nous
géographiquement , on ne peut avoir l'intelligence de ses
SOUVERAINETÉ ET PROPRIÉTÉ FONCIÈRE. It
institutions présentes et des passions qui raniment, si Ton
ne se donne pas la peine d*ëtudier son histoire et si Ton
n'arrive pas ainsi à se rendre compte de l'influence qui .
dans ce peuple , est exercée sur chaque homme par la tra-
dition. Combien^ sont puissants les souvenirs d*une nation,
ces souvenirs , les uns brillants et doux , les autres péni-
bles et irritants qui , traduits par la langue passionnée des
mères , passent de leur bouche dans Toreille des enfants
et deviennent le premier aliment de leur jeune intelli-
gence. Il n'y a pas en Irlande une pierre ou un brin
d'herbe qui ne rappelle à un Irlandais la spoliation si
récente dont sa race a été victime.
Ainsi, pour se rendre compte des passions qui agitent
aujourd'hui un peuple étranger, pour concevoir comment il
comprend ses institutions présentes, il faut connaître son
passé ; sans connaître son passé à lui, on ne peut apprécier
en quelle mesure ses idées sont différentes des idées d'un
peuple qui, comme nous, a derrière lui un passé différent.
Si quelqu'un ne saisit pas bien ce en quoi la façon de pen-
ser des voisins qu'il veut observer s*éloigne de la sienne ,
l'étude qu'il prétend faire de leurs actes sera frappée de
stérilité.
Quand, au lieu d'un peuple contemporain, c'est le monde
antique que l'on veut étudier, il faut commencer par une pré-
paration analogue et chercher à se rendre compte de ce en
quoi se distinguent de nos doctrines modernes les doctrines
analogues admises à ces âges reculés. Si à l'idée que nous
exprimons actuellement en France par le mot de propriété
foncière , on compare les idées similaires dans le droit ro-
main, vers la fin de la République , à Tépoque où la Oaule
a perdu son indépendance, on est obligé de reconnaître
entre ces idées romaines et la nôtre des différences impor-
tantes.
S 2. — Le droU de souveraineté comprend-il le droit de
propriété? La réponse à cette question en droit public
2
18 LIVRE I". CHAPITRE II. | 2.
romain et germanique. La deditio ; Arioviste et les Bur-
gundes.
Aujourd'hui la notion de la distinction entre la propriété
et la souveraineté a fait des progrès considérables. Quand
une province conquise est réunie au territoire d'un Etat
vainqueur , cette province change de souverain ; mais la
propriété privée reste dans les mains qui la détenaient
avant la conquête. C'est une maxime du droit public euro-
péen. Si ce principe subit quelques exceptions , lorsqu'il
s'agit de la propriété mobilière , c'est-à-dire si , dans une
certaine mesure, la propriété mobilière du vaincu passe
entre les mains du vainqueur par le pillage ou par l'indem-
nité de guerre qui est le rachat du droit au pillage, il est
de principe que la propriété foncière privée tout entière et
sans exception continue d'appartenir au vaincu. La pro-
priété foncière publique du vaincu est la seule que la con-
quête fasse passer entre les mains du vainqueur.
Tel n'était pas le droit des Romains. On connaît la for-
mule terrible de ce qu'ils appelaient deditio. Voici comment
Tite-Live raconte la capitulation de CoUatie , ville sabine ,
qui, dit-on, se rendit aux Romains au temps de Tarquin
l'Ancien. Quand les délégués des habitants se présentèrent
à lui, Tarquin leur demanda : « Etes-vous les ambassa-
» deurs envoyés par le peuple coUatin pour consentir à la
» deditio du peuple coUatin ?» — « Nous le sommes , »
répondirent-ils. — « Le peuple coUatin a-t-il le droit de
» disposer de lui-même? » reprit Tarquin. — « Il Ta, »
répondirent les délégués. — « Donnez-vous , pour être en
» mon pouvoir et en celui du peuple romain, vos personnes
» et le peuple coUatin , la ville , les champs , les eaux , les
» limites, les temples, les meubles, toutes les choses di-
)) vines et humaines? » — « Nous les donnons, » répon-
dirent les députés. — « Et moi je les accepte , » répondit
le roi. Cette formule se trouve répétée à peu près dans
les mêmes termes par Tite-Live dans le récit des événe-
SOUVERAINETÉ ET PROPRIÉTÉ FONCIÈRE. 19
ments de Tan 343 av. J. C. (1). II était de principe que le
sol du territoire appartenant aux dedititii , c'est-à-dire aux
vaincus qui s'étaient rendus sans conditions comme les
CoUatins, devenait « propriété » de l'Etat romain. La formule
de la deditio ne doit pas être entendue en ce sens que
Rome acquit simplement la souveraineté. A la souve-
raineté acquise par la conquête se joignait un droit de
a propriété » absolue. Les champs conquis cessaient d'ap-
partenir aux vaincus et entraient dans le domaine public
romain. C'est encore la doctrine formulée par un des juris-
consultes les plus célèbres du temps d'Hadrien et de Marc-
Aurèle au second siècle de notre ère : « Fait partie du
domaine public le champ qui est pris à l'ennemi (2), » et
cette règle persiste dans le droit de Justinien ; du livre de
Pomponius, elle est passée dans un des grands recueils de
droit compilés par ordre du prince byzantin (3).
Quand la capitulation était conditionnelle, il ne se sui-
vait pas de là que le vaincu dût conserver la totalité de
son territoire. Ainsi en Tan 486 avant notre ère la guerre
avec les Herniques se termina par un traité qui leur enleva
les deux tiers de leur territoire. C'est alors que fut présen-
tée la première loi agraire. Elle proposait que le territoire
conquis fût partagé moitié entre des Latins moitié entre des
plébéiens romains (4).
(1) a Deditosque Collatinos ita accipio eamque dedîtionis formulam esse :
rex interrogavit « Estisno vos legaU oratorcsque missi a populo collatiao ut
vos populumque coUatinum dederetis? » — a Sumus. » — « Estne populus
coUatinus in sua potestate? » — « Est. » — « Deditisnc vos, populumque
collatinum, urbem, agros, aquam, tcrminos, dolubra, ustcnsilia, divina hu-
manaque omnia in mcam populiquc romani dicioncm? » — a Dedimus. »
— « At ego recipio. » Tite-Live, livre I, c. xxxviii (éd. Teubncr-Wcissen-
born, t. I , p. 41). Cf. Mommscn et Marquardt, Handbuch der rômischen
Alterihûmer, t, III, p. 55-56, 138-139, 723. Comparez ce que rapporte Tite-
Livc, livre VII, c. xxxr.
(2) c Publicatur euim illo agcr qui ex hostibus captus sit. » Pomponius ,
Ad Sàbinum, livre XXXVI.
(3) Digeste, livre XLIX, titre xv, loi 20, g 1.
(4) t Cum Hemicis foodus ictum, agri partes duae ademptae. Inde dimi-
dioxn Lalinis, diinidium plebi divisurus consul Cassius crat. » Tite-Live,
livre II, c. XLi ; éd. Teubner-Weissemborn, t. I, p. 102.
20 LIVRE !•'. CHAPITRE II. { 2.
Telle était donc la doctrine des Romains sur le droit du
vainqueur lorsque Jules César, de 58 à 51, fit la conquête
de la portion de la Gaule restée jusque-là indépendante. Il
régla en Gaule sa conduite sur cette doctrine. Nous voyons
par exemple que deux Allobroges , Raucillus et Egus , fils
d'Adbucillus, prince de la cité des Allobroges, reçurent de
lui en présent des champs pris sur l'ennemi en Gaule.
Grâce à ce cadeau et à des dons importants en argent , ils
devinrent riches de pauvres qu'ils étaient d'abord (1).
Les Germains, qui avaient comme César la prétention de
conquérir la Gaule et auxquels César venait disputer cette
proie, avaient la même notion que lui du droit du vainqueur
sur le sol du territoire habité et cultivé par le vaincu.
Quand le général romain arriva en Gaule, Arioviste avait
dé^k occupé un tiers du territoire des Sequani, et il voulait
en occuper un second tiers (2) ; or il ne faut pas se mépren-
dre sur le sens du latin occupare dont César se sert et que
nous avons tant bien que mal rendu par le français occu-
p&i^ ; occupare agi^m en droit romain , c'est s'eu mettre en
possession par un acte d'exploitation agricole. A la même
date, les Aedui^ vaincus par les Germains, avaient perdu de
la même façon que les Sequani la plus grande partie de
leur territoire (3).
Etait-ce le tiers ou les deux tiers comme les Sequani ,
nous n'en savons rien. En tout cas, il est curieux de voir,
cinq siècles plus tard, les Burgundes réaliser définitivement
dans la même région l'entreprise où Arioviste échoua, et
procéder d'une façon analogue à l'égard des anciens habi-
tants du pays. En 443 , les Burgundes prirent aux posses-
(1) a His... agros in Gallia ex hostibus captos pracmiaquo rei pecuniariae
magna tribuerat locuplctesque ox egcntibus fccorat. » De bello civili ,
III, 59.
(2) « Ariovistus rox Germanorum... tcrtiam partcm agri Sequani qui es-
set optimus totius Galliao occupavisset et nunc de altéra parte tertia Se-
quanos decedere juboret. n De bello gallico, I, 31, | 10.
(3) « Multatos agris. » De bello gallico, VII, 54, g 4.
SOUVERAINETÉ ET PROPRIÉTÉ FONCIÈRE. 21
seurs romains une partie de leurs biens immobiliers (1 ,
d'abord la moitié des terres tant arables que friches, bois et
jardins (2). Us avaient droit à un tiers desb&timents comme
hôtes en exécution d*une loi des empereurs Ârcadius et
Honorius en 398 (3) ; mais ils semblent bien en avoir pris
moitié comme du reste (4). Vers l'année 500, la part des
Burgundes dans les terres arables fut augmentée ; on Téleva
de la moitié aux deux tiers pour tous les Burgundes qui
n'avaient pas reçu de leur roi des dons immobiliers équi-
valents (5).
Ce chiffre des deux tiers enlevés aux anciens possesseurs
semble copié sur l'exemple donné par Arioviste au premier
siècle avant notre ère, quand, ayant pris ^uxSeqtuini un tiers
de leurs terres, il voulut les contraindre à lui en livrer un
second tiers, et sur l'exemple donné par les Romains quatre
cents ans plus tôt qu'Arioviste, huit siècles avant les Bur-
gundes, quand ils enlevèrent aux Herniques les deux tiers
de leur territoire. 11 y a toutefois une grande différence.
Lors de la conquête burgunde , ce n'est pas en un bloc
les deux tiers d'une province que les Barbares occupent. 11
y a autant de partages qu'il y avait d'exploitations agricoles
ou de villœ: chacune est partagée entre l'ancien propriétaire
romain et un Barbare nouveau venu qui prend moitié des
(1) c Sabaudia Burgnndionum reliquiis datur cum indigenig dividunda. »
Chronique de Prosper^ sur Tannée 443. ir Eo anno Burgundiones partem
GaUiae occupavenint terrasque cum Gallicis senatoribus diviserunt. »
Chrofiique de Marius, à l'année 456.
(2) C'est ce que l'on doit conclure, semble-t-il, des titres XIII et XXXI de
la loi des Burgundes. Ces titres appartiennent à la partie la plus ancienne
de la loi, 488-490, et traitent, Tun des défrichements, Tautre des plantations
de vignes , et supposent tous deux le principe de Tégalité du partage. Le
même principe parût rappelé par les paragraphes 2 et 3 du titre LIV qui
est postérieur.
(3) Cade Tlièodosien, livre VII, titre viii, loi 5.
(4) a Si militer de curte et pomariis circa faramannos condicione servata,
id est ut medietatem Romani estiment praesumendam. » Loi des Burgundes,
^H.LIV. |3.
(5) c Tempore quo populus noster mancipiorum tertiam et duas terrarura
partes accepit. » Lot des Burgundes, titre LIV, 2 1. Cf. Binding, Geschichte
des Burgundisch-romsinischen^KQnigreichSf p. U^tsuiv.
22 LIVRE I". CHAPITRE IL | 3.
bâtiments et de l'enclos , moitié des friches et des bois ,
moitié d'abord, et deux tiers ensuite, des terres arables
comprises dans l'exploitation. D'Arioviste aux Burgundes,
il s'est écoulé cinq siècles. Dans cet intervalle , il s'est
produit une grande modification dans les doctrines sur la
valeur du lien que la jouissance plus ou moins prolongée
du sol produit entre Thomme et la terre qu'il cultive et
dont il récolte les produits. Les possesseurs romains étaient
considérés comme ayant sur la terre un droit dont au mo-
ment de l'établissement des Burgundes , au cinquième siè-
cle de notre ère , on ne crut pas possible de les dépouil-
ler entièrement. Quand, au contraire, Arioviste prit aux
Sequani un tiers de leur territoire, quand les Sequani^ avec
l'alliance d' Arioviste, s'emparèrent d'une grande partie des
champs des Aedui, ne leur laissant guère que leurs vil-
les (1) , l'opération doit s'entendre en ce sens qu'une vaste
région, sans exception ni réserve (2), fut détachée du terri-
toire des Sequani et du territoire des Aeduiy que les déten-
teurs gaulois furent chassés de cette région et qu'elle fut
occupée par de nouveaux habitants et par de nouveaux
cultivateurs en même temps qu'elle changea de souverain.
§ 3. — i'ager publions romains et les lois agraires.
A Rome, le terrain conquis sur l'ennemi était propriété
publique. Telle est l'origine de Vager publicus, qui, après
la conquête de l'Italie par les Romains, comprit une grande
partie du sol de la péninsule et qui s'étendit ensuite hors
d'Italie dans de vastes territoires. On ne pouvait sans une
loi, sous la république romaine, détacher de Y ager publions,
à titre définitif, une portion quelconque du sol pour en at-
tribuer à un Romain la propriété , ce que la loi romaine
(1) c Compulsos in oppida, multatos agris. » César, De bello gMico,
VII, 54. i 4.
(2) « Tertiam partem agri sequani... occupavisset, et nunc de altéra parte
tertia Sequanos decedere juberet. Ibidem, I> 31, | 10. »
SOUVERAINETÉ ET PROPRIÉTÉ FONCIÈRE. 23
appelait le dominium ex jure Quiritium (1). En règle gé-
nérale, Vager pviblicus n'était l'objet que d'une jouissance
précaire, toujours révocable et grevée d'une redevance
annuelle ; cette jouissance s'appelait possessio par opposition
au dominium qui était la pleine propriété. La possessio de
Vager publicus était, dans les premiers siècles de la répu-
blique romaine, une sorte de monopole que se réservaient
les patriciens et les familles nobles élevés par les fonc-
tions publiques au niveau du patriciat. Ce monopole était
un fait inévitable économiquement aussi bien que poli-
tiquement : seuls, les patriciens et les nobles avaient à
leur disposition , soit en esclaves , soit en bestiaux , soit
en argent, les capitaux nécessaires pour mettre en valeur
les vastes domaines de l'Etat romain.
Avec le temps la possessio de Vager publicus romain, per-
sistant héréditairement dans les mêmes mains , se rappro-
cha peu à peu du dominium ^ ou, si l'on veut parler
français, de la propriété. Mais les lois agraires dont la
première fut présentée par le consul Cassius, l'an 486
avant notre ère , et dont la plus célèbre est la loi Sempro-
nia présentée par Ti. Gracchus , l'an 133 avant notre ère,
furent une protestation de l'ancien droit et du sentiment
populaire contre le droit nouveau que l'aristocratie avait
la prétention d'introduire à son profit. Les dernières lois
agraires furent votées en 59 pendant le consulat de César,
grâce à la puissante influence acquise par le futur dictateur
qui, pendant les années suivantes, se créa par la conquête
de la Gaule les titres définitifs à la domination du monde
romain. César était le chef du parti démocratique et conti-
nuait à chercher la faveur populaire par les moyens qu'a-
vaient employés les agitateurs les plus anciens. Les por-
tions de Vager publicus italique, détenues depuis longtemps
par la noblesse romaine , étaient devenues entre les mains
(OHommsen et Marquardt, Uàndbuch der rômiechen Alterthûmer, 2* éd.,
t. ÏV, p. 94 et suiv.; t. V, p. I5i et suiv. Cf. t. III, p. 731 et Buiy.
24 LIVRE !•'. CHAPITRE II. g 3.
de cette noblesse une sorte de propriété, à laquelle pendant
le premier siècle avant notre ère on n'osait plus opposer
le droit primitif de l'Etat, mais TEtat empêchait cette
quasi-propriété de s'étendre à des territoires nouveaux et
voilà comment César ât partager Vager publions de Cam-
panie (1), qui remontait à la seconde guerre punique et qui
n'avait ainsi qu'un siècle et demi de date.
Les lois agraires (3) dont César obtint le vote en 59 étaient
en quelque sorte une seconde édition d'une loi déjà présen-
tée par son parti sous le consulat de Cicéron, en 63, quatre
ans plus tôt et qu'avait fait échouer l'éloquence du grand
orateur romain Quand la loi agraire de 63 fut présentée ,
Vager publicus de Campanie était partagé entre des locatai-
res qui seraient arrivés peu à peu à acquérir les mêmes
droits que les noblessur l'ancien ager publicus italique, sans la
mesure qui les remplaça parles protégés de Jules César (3).
Cicéron, dans un de ses discours contre le projet de loi de
l'année 63, cherche à exciter la pitié en faveur de ces bra-
ves gens qui cultivent et possèdent tout Y ager campanus^
qui y sont nés, qui y ont été élevés et que la colonisation
expulsera sans leur laisser d'asile (4).
Ces considérations n'arrêtèrent point le parti démocrati-
que ni son chef tout-puissant , et quand César arriva dans
la Gaule barbare pour en faire la conquête, l'exécution de
(1) Sur rhistoire de Vager publicus romain et des lois agraires jusqu'au
premier consulat de César , voy. Mommsen et Marquardt , Handbuch der
rômischen Alterthûmer, t. IV, 2* éd., p. 96-114.
{2, Ces lois paraissent avoir été au nombre do deux ; Tune ayant pour ob-
jet spécial rétablissement d'une colonie romaine à Capoue, Tautre con-
tenant un règlement général sur la fondation des colonies. Celle-ci est ap-
pelée, du nom de ses rédacteurs : Lex Mamilia, Roscia, Peducea, AJliena,
Fabia.
(3) Voyez les textes réunis par Mommsen, Corpus inêcriptionum lattna-
rum, t. X, p. 366, 368.
(4) « Sic enim dico : Si Campanus ager dividatur, exturbari et expelli pie-
bem ex agris, non constitui et collocari. Totus enim ager Campanus coli-
tur et possidetur a plebe et a plebe optima et modestissima... Atqne illi
miser! nati in illis agris et aducati... quo se subito confetant.iioii habent. ■
De lege agraria çratio secunda, c. XXXI> {84.
SOUVERAINETi ET PROPRIÉTÉ FONCIËRB. tt
ses lois agraires commençait , au grand désespoir de la no-
blesse romaine (1). Pendant ses campagnes en Graule, Ce*
sar n'oubliait pas Rome ; ses Commentaires en offrent plu-
sieurs traces et il y a un passage où ses préoccupations
agraires se sont fait jour clairement. Ce passage fait partie
de la description des mœurs des Germains. « Personne
parmi eux , » dit César , « n'a une quantité de champ dé-
terminé ou des limites qui lui appartiennent en propre ,
mais chaque année, les magistrats et les princes attribuent
aux familles et aux parents par les femmes, qui se sont as-
sociés entre eux, la quantité de champs qu'ils jugent à pro-
pos, dans l'endroit qui leur parait convenable, et Tannée sui-
vante ils les obligent à se rendre ailleurs (2). » Âpres avoir
ainsi décrit des mœurs si différentes de celles de Rome,
César se demande la cause qui les a fait établir, et mettant
dans la bouche des Germains ses propres doctrines, il leur
fait dire que le but de ces institutions est d'empêcher qu'il
ne se crée en Germanie de vastes domaines et que les gens
puissants ne chassent les petits de leurs possessions. Ne
latos fines parare studeant potentioresque humiliores passes^
Hùnibus eœpellanL Latos fines ^ ce sont déjà ces latifundia Aoni
parlent les moralistes du temps de l'empire romain : lati^
fundia perdidere Italiam (3). Quant à la spoliation des pau-
vres par les riches , c'est un des motifs par lesquels on
justifiait la loi agraire de Ti. Gracchus. La loi Licinia, en
367 av. J.-C. , avait fixé à cinq cents jugera , c'est-à-dire
*
à cent vingt-six hectares, la portion de Vager publieus
que pouvait détenir , à titre de possessio , un citoyen ro-
main. Cette loi fut quelque temps exécutée , et l'on voyait
souvent, à côté du riche possesseur de cinq cents jugera y
des voisins pauvres jouissant chacun d'une portion beau-
coup moins étendue. Mais peu à peu ces petites fermes
passèrent malgré la loi entre les mains de riches voisins qui
(1) Cicéron, Ad Atticuniy livre II, ép. xvîii, { 2,
(2) De beUo gallico, VI, Î2.
(3) Pline, Uvrs XVIII» 1 35,
1
36 LIVRE I- CHAPITRB H. { 3.
les achetèrent d*abord par personnes interposées, ensuite
ostensiblement. Telle fut la cause de la loi agraire de Ti.
Gracchus en 133 avant J.-C. Nous l'apprenons par Plutar-
que (1) et surtout par Salluste, contemporain, comme on
le sait , de Jules César. Salluste raconte qu'après la chute
de Carthage en 146 avant J.-C. , la noblesse romaine
triomphante abusa de son pouvoir. Le peuple était accablé
par le service militaire et par la pauvreté. Les généraux
s'emparaient du butin fait à la guerre et le partageaient
avec quelques amis ; pendant ce temps , les pères et les
jeunes enfants des soldats étaient chassés de leurs maisons
par des voisins plus puissants qu'eux : uii quisque poten-
tiori eonfinû erat sedibus pellebatur (2) , ce sont presque les
expressions dont César se sert dans le passage des Com-
mentaires cité plus haut. Plus tard , Horace , un des fami-
liers d'Auguste, c'est-à-dire du continuateur de César,
exprime en vers la même idée ; il peint le pauvre expulsé
par un riche voisin ; « on voit partir la femme et le mari ;
» ils portent dans leur sein les dieux paternels et des en-
» fiants en haillons (3). »
César, dans sa description des mœurs des Gaulois, s'at-
tache à mettre en relief les différences entre cette nation
barbare et les usages romains. Il est naturel que trouvant
chez tous les peuples de la Gaule cet ager^ publicus qui , à
Rome , occupait si vivement le parti démocratique , il ait
cru inutile d'en parler. En quoi renonciation d'un fait aussi
banal pouvait-il piquer la curiosité de ses lecteurs ?
Pour bien comprendre ce qu'était en Gaule la propriété
(1) Vie de Tib. Grecchue, ch. VIII.
m Jngiirtlia, 41.
(S) Qnid qnod osqiie proximos
RevelUs agri tenninos et ultra
Limites clientium.
Salis aTams ? Pellitnr patemos.
In sinu ferons deos.
Et nxor et yir sordidosqne natos.
Horace, Odee, U, 18, vers 23-28.
SOUVERAINETÉ ET PROPRIÉTÉ FONCIÈRE. H
foncière au temps de la conquête , il faut commencer par
se rendre compte de Torganisation de la société politique
dans le même pays , à la même date. Les lois qui règlent
la condition de la terre sont toujours une conséquence des
lois qui fixent la condition des hommes.
CHAPITRE III.
LA GAULE BARBARE AU MOMENT DE LA CONQUÊTE PAR CÉSAR.
INÉGALITÉ DES PEUPLES ET DES HOMMES.
Sommaire :
Sbgtiom I. Les PEUPLES , distingués en principes et en clientes. — Sec-
non II. Les HOMMES : A. Rois ; — B. Magistrats et principes ; — C. Sé-
nats ; — D. Equités ; — E. Ch>nles ; ^ F. Comparaison avec la Féodalité
française; — Q. Caractères distinctifs de la Féodalité celtique.
Section première.
Les PEUPLES, distingués en principes et en clientes.
Dans la Gaule indépendante , à rarrivée de César , Tan
58 avant notre ère , nous ne comprendrons pas TAquitaine ,
qui appartient ethnographiquement à TEspagne et qui n'a
fait partie de la Gaule que lorsque celle-ci est devenue une
circonscription administrative de TEtat romain. Sans doute
Fauteur des Commentaires nous dit que TAquitaine est en
Gaule ; mais , en s*exprimant ainsi , il n*énonce pas plus
un fait politique qu*un fait ethnographique. Il parle en
conquérant. Dans sa bouche, le mot Gaule exprime déjà une
conception administrative : de cette conception, due proba-
blement à son génie , il donne connaissance à ses compa-
triotes pour leur apprendre comment ils devront gou-
verner le pays vaincu.
Quand César commence au nord des Alpes sa première
INÉGALITÉ DE8 PEUPLES EN GAULE. 29
campagne , la Gaule indépendante est divisée en deux par-
ties qui, chacune, forment un groupe politique séparé : la
Celtique et la Belgique. Dans la Celtique sont concentrés
ceux des Gaulois encore libres qui ont les premiers passé
le Rhin, peut-être vers Tan 500 avant notre ère. La Bel-
gique est habitée par d'autres Gaulois qui plus récemment,
peut-être vers Tannée 250, ont été, par les Germains,
chassés de la région située à Test du Rhin, leur séjour
primitif. Par une exception due à un phénomène géogra-
phique, les Helvetii, quoique tout nouveaux venus, parais-
sent compris dans la Celtique dont ils sont voisins , sans
communication immédiate avec les Belges. Des nécessités
topographiques l'emportent ici sur Fethnographie.
Dans chacun des deux groupes politiques entre lesquels
la Gaule se divise , il y a un peuple qui a exercé la supré-
matie sur les autres peuples du même groupe pendant
Tâge précédent , et qui prétend la conserver. Ce peuple ,
en Celtique, ce sont les Arverni; en Belgique, ce sont les
Suessiones, Mais les Arverni et les Suessiones ont des enne-
mis qui se placent sous la direction d*un ou de plusieurs
peuples rivaux. Ceux-ci demandent l'appui des Romains,
qui en profitent pour imposer leur domination à tout le
pays en ne laissant à leurs protégés qu'une indépendance
nominale avec le titre honorifique d'alliés , foederati (1).
(1) Les Aedui et les Rémi reçurent le titre de foederati. Us avaient été ,
les uns en Celtique, les autres en Belgique , chefs du parti romain pendant
les campagnes de César. Le même honneur fut conféré aux Lingone$ et
anx Camutes. Les Lingonea dominaient sur un territoire très vaste , puis-
que les Tricasses (Troyos), et les Caluellauni (Chàlons-sur-Marno) , parais-
sent avoir été leurs sujets et que, par conséquent, le pays qui s'étend de
Dijon à Chàlons-sur-M^c était soumis à leur autorité. Sans avoir un rôle
aussi éclatant que les Aedui ou les Rémi, ils furent du nombre dos plus
fidèles alliés de César. Dés l'année de* sa première campagne, en 58, ils lui
fournissent du froment {De bello gallicOy I, 40) ; en 52, ils sont un des trois
peuples (ftemi, Lingones, Treveri) qui refusent de prendre part à l'insur-
rection générale de la Gaule iVII, 63); en 51, leurs cavaliers sont mentionnés
parmi les cavaliers gaulois qui donnent leur concours aux opérations mili-
taires des Romains (VIII, 11).
Quant aux Carnutes^ la concession du titre de foederati qu'ils obtinrent
30 LIVRE I". CHAPITRE III. SECtION 1-.
L'histoire de la Gaule , à l'époque de la conquête , pré-
sente une analogie curieuse avec celle de TAUemagne pen-
dant les derniers siècles. En Allemagne dominait la maison
d'Autriche , comme en Celtique les Àrverni et en Belgique
les Suessiones, La politique française consista à soutenir les
ennemis de cette maison, comme la politique romaine à
soutenir ceux des Arverni et des Suessiones; mais, entre les
mains inexpérimentées des hommes d*Etat français, Tarme
qui, aux mains des Romains, était devenue Tinstrument
de la conquête, a créé dans le vieil empire germanique
une puissance beaucoup plus redoutable à la France que
n'avait jamais été celle des princes autrichiens. Les rois
de Prusse, chefs en Allemagne du parti protestant que la
France soutenait jadis contre TAutriche, n'ont pas marché
jusqu'au bout sur la trace des magistrats qui, par haine
pour les Arverni et les Suessiones ^ ont jeté les Aeduiy les
Rémi et leurs clients dans les bras des Romains.
La Celtique et la Belgique, au moment où César en fait
la conquête, sont divisées en un certain nombre d'Etats
que César appelle civitates. Ces Etats ne sont point égaux
entre eux. Certains , plus importants , ont les autres dans
leur clientèle. Toutefois , les Etats clients conservent leur
autonomie; ils ont leur armée distincte de celle de l'Etat
dominant. Ils sont en quelque sorte les membres d'une
ligue dont l'Etat dominant est chef. Il ne faut pas confon-
dre les Etats clients avec les peuples clients qui ont cessé
de former un Etat séparé et dont l'armée est fondue dans
celle de l'Etat sous l'autorité ou imperium duquel ils se sont
placés. Ces clients de second ordre ou sujets ne reçoivent
pas dans les Commentaires de César le titre d'Etat, civitas^
donné par l'auteur aux clients de premier ordre ou alliés.
En Celtique , l'Etat qui , au temps de César , a la clien-
tèle la plus considérable est celui des Aedui qui , en con-
peut avoir été la conséquence de ce que pour être agréables aux Romains,
ils s'étaient placés dans la clientèle des Rémi (De hello gallico VI, 4). On
étendit à eux la dignité de foederati accordée aux Rémi,
INÉGALITÉ DES PEUPLES EN GAULE. 31
séquence, possède sur la Celtique ce que César appelle le
principal (1). L'Etat des Aedui est rival des Arvemi que les
Romains ont vaincus et contre lesquels les Romains le
protègent. Des Etats de la Celtique qui s'étaient placés
dans la clientèle des Aedui, nous connaissons les Bitvr'
rige$ (2) , les Senones (3) , les Parisii (4) , les Boii (5) , qui ,
dans la guerre entreprise par Vercingétorix , fournirent
chacun un contingent séparé , et reçurent directement les
ordres du conseil des principes de la Gaule. On demanda
aux Bituriges 12,000 hommes, autant aux Senones^ 10,000
aux Parisii , 2,000 aux Boii ; aussi ces quatre peuples ob-
tiennent-ils chez César la qualification de civiias.
Mais, en outre des Etats clients dont nous connaissons
quatre, les Aedui avaient d autres clients qui étaient en quel-
que sorte des sujets dont le contingent militaire se confon-
(1) César, s* adressant au roi germain Arioviste, prétend que les Aedui
ont obtenu « oroni tempore totius Galiiae principatum » (De bello gallicOj
l, 43, 1 7). C'est une exagération contredite par les faits puisque les Arvemi
avaient eu ce principal. Dans les idées reçues en Gaule à cette époque , il
est nécessaire qu*un peuple ait le principat. Chez les Aedui^ un parti sou-
tient qoe si les Aedut ne peuvent obtenir le principat de la Qaule , prin-
cipatum Galiiae , il faut accepter le principat des Arvernes, car la domina-
tion des Gaulois vaut mieux que celle des Romains (De bello gallico ,
1, 17, 1 3. Remarquons bien que, dans ces passages, Gaule et gaulois veulent
dire Celtique et Celte, à l'exclusion de la Belgique).
(2) « Bituriges ad Acduos quorum erant in fide legatos mittunt. » De bello
gallico, VII, 5, { 2. Il s'agit vraisemblablement ici des Bituriges Cubi, dont
la ville principale est Avaricum. César ne parle pas, seroble-t-il, des Bitu~
rigesVivisci qui, sous Tempire romain, ont Bordeaux pour capitale. Peut-
être cependant le mot Bituriges désigne- t-il à la fois chez César les Bitu-
riges Vivisci et les Bituriges Cubi,
(3) « Senones... Caesarem... adeunt per Aeduos quorum antiquitus erat
in fide civitas. » {De bello gallico, VI, 4, | 1-3.)
(4) c Concilium Lutetiam Parisiorum transfert. Confines erant hi Senoni-
Ims civitatcmque patrum memoria conjunxerat. » (De bello gallico, VI, 3, 2 5.)
(5) « Boios petentibus Aeduis quod egrcgia virtute erant cogniti ut in
finibus suis coUocaront concessit : quibus illi agros dederunt quosque pos-
tca in parem juris libertatisque condicioncm atque ipsi erant receperunt. »
De bello gallico, I, 28. Les Boii payaient tribut, slipendium, aux Aedui,
Qaand Vercingétorix attaqua Gorgobina, oppidum des Doti.(quos ibi helve* .
tico proelio victos Caesar coUocaverat, Aeduisque attribuorat), César vint
à leur secours, « ne stipendiariis Aeduorum expugnatis cuncta Gallia
deficeret » (De bello gallico, VII, 10, { 1.)
32 LIVRE I". CHAPITRE 111. SECTION 1".
dait avec le leur. Ces derniers ne reçurent pas d*ordres directs
quand le conseil des principes de la Gaule , conformément
aux instructions de Vercingétorix, prescrivit la levée d'une
armée pour secourir Alesia. C'étaient les Segusiavi^ les Am-
bivareti, les Aulerci Brannovices et les Brannovii. L'effectif
imposé à ces quatre peuples se confondait avec celui des
Aedui fixé en bloc à 35,000 hommes. Au début de la guerre,
le plus important de ces clients de second ordre des Aeèuiy
le peuple des Segusiavi^ avait été compris par Vercingé-
torix, dans Tordre donné aux Aedui, de fournir 10,000 fan-
tassins pour attaquer les Allobroges (1). Ces fantassins, tant
Segusiavi qu' Aedui ^ avaient été placés sous le comman-
dement d'un chef appartenant à la tribu dominante des
Aedui j malgré l'antipathie naturelle de Vercingétorix pour
ce peuple rival du sien (2).
On sait que les Aedui étaient , dès le second siècle avant
notre ère, les alliés du peuple romain (3). Hs restèrent les
alliés de César pendant toute la guerre des Gaules, sauf
durant la grande insurrection de l'année 52. Sous l'empire
romain, ils portent encore le titre d'alliés, foederati^
donné alors en Gaule à trois autres peuples seulement :
les Remit les Linganes, les Carnutes,
Les Arverni , rivaux des Aedui , apparaissent dans l'his-
toire comme ennemis du peuple romain. C'est en l'année
121 avant notre ère. Leur clientèle atteignait à cette date :
au sud , Narbonne , les Pyrénées et le territoire de Mar-
seille; à l'ouest, l'Océan; à l'est, le Rhin (4); les Allô-
(1) « Âediiis Segusiavisque... decem millia peditum imperat. > (De bello
gallico, VII, 64, { 4.)
(2) « His praofecit fratrem Eporedorigis. » {De bello gallicOf VII , 64, { 5.)
(3) « Quodque Âeduorum agros socionim populi romani vastassent. •
Titc-Live, Epitome du livre LXl, Les événements dont il s'agit dans ce
texte se rapportent à Tannée 122 avant notre ère. Mommsen, Rœmische
Geschichte, 6* édit., t. II, p. 162. Cf. Desjardins , Géographie historique et
administrative de la Gaule romaine, t. II, p. 274.
(4) « AUTttvav 8è Ti^v àpx^v ol 'Apovepvoi xal ii^xP^ Nap6wvoc xal tûv 6pc0v tl)c
MaaffoXiutiSoc, ixpàTouv 8è xal to^v (iéxpt OupiQvT); iOvûv xal fiixp^ 'OxcavoO xai
*P^ov. » Strabon, liv. IV, ch. ii, { 3, édit. Didot, p. 159, 1. 9-12. Mommsen,
INÉGALITÉ DES PEUPLES EN GAULE. 33
broges, alors, devaient être leurs clients (1). Au temps de
César, la clientèle des Arverni est bien réduite ; leurs
clients méridionaux sont tombés sous la domination romaine
et forment la Province ; les peuples du nord , qui avaient
été placés originairement dans la clientèle des Awerni en
conservant leur indépendance , et plutôt comme alliés que
comme sujets, paraissent avoir brisé en grande partie ce
lien.
On vit même les Sequani^ un des principaux clients
septentrionaux des Ai^emi, supplanter les Arverni comme
chefs du parti opposé aux Aedui pendant les premières an-
nées du séjour de César en Gaule (2). Plusieurs des peuples
ennemis des Aedui, après avoir été successivement clients
des Arverni et des Sequani , voulant s'assurer Tamitié des
Romains, demandèrent Tappui d'un peuple allié de Rome,
et se placèrent dans la clientèle des Rémi (3), peuple belge,
mais immédiatement voisin de la Celtique ; de ce nombre
furent les Carnutes (4).
Dès les premiers succès de César, il ne resta guère aux
Arverni d'autres clients que leurs sujets , c'est-à-dire les
peuples dont le contingent militaire se confondait avec le
Rœmische Geschichte^ 6* édit., t. II, p. 162. Desjardins, Géographie histori-
que et administrative de la Gaule romaine, t. II, p. 217, 274. Los Sequani,
clients des Arverni, atteignaient le Rhin.
(t) « AUobroges deinde et Arverni cum adversus eos similes Aeduorum
querelae, opem et auxilium nostrum flagitarent. » Florus, livre I, ch. xxxvi,
ou liv. III, ch. II. Edition d'Otto lahn, p. 159, 1. 21-23. Nous pouvons en-
core citer les Ruleni (Oello supcratos esse Arvernos et Kutcnos) comme
clients des Arverni, au deuxième siècle avant J.-C. (De bello gallico, î, 45,
i 2), et les Carnutes {De bello gallico, VI, 4, § 2 ; 12, | 7).
(2} « Galliac totius factioncs esse duas, Tiarum alterius principatum tenere
Aeduos, alterius Arvernos. Hi, cum tantopcre de potost.itu intor se multos
annos contcndercnt, factum esse uti ab ArvernisÔcquauisqucGenuani mor-
cedc arcesscrontur. » (De bello g illico, 1 , 31 , § 3-4.) « Sequani principatum
diiiiiscrant , in corum locum Rcmi successcrant. » (De bello gallico, VI,
12, l 6, 7.)
(3) « li, qui proptcr veteres inimicitias nullo modo cum Acduis conjungi
potorant, se Remis In clientelam dicabaut. » (De bello gallico, VI, 12, § 7.)
(4) • £odem Carnutes legatos obsidesquo mittunt, usi deprecatoribus Re-
mis, quorum erant in clientela. » (De bello gallico, VI, 4, g 2.)
3
34 LIVRE !•'. CHAPITRE III. SECTION 1-.
leur et sur lesquels ils exerçaient une autorité appelée par
César imperium. Quand le conseil des principes de la Gaule
convoqua Tannée qui devait inutilement tenter de secourir
Alésia, il prescrivit une levée de 35,000 hommes chez les
Àrvemi , y compris les Eleuteti , les Cadurci , les Gabali et
les Vellavi (1). Cependant les Cadurci semblent avoir été ,
dans une certaine mesure , indépendants , puisque César
leur donne dans un endroit le titre de civitas (2), que dans
un autre endroit nous voyons marcher, distinct des troupes
arvernes, un corps de Buteni et de Cadurci (3).
Les Arvemi, après la conquête romaine , conservèrent
une situation privilégiée, l'exemption d'impôts, une admi-
nistration et une juridiction locale indépendante avec le
titre de libres liberi, mais ils perdirent leur suprématie
sur les Cadurci y les Gabali et les Vellavi qui devinrent
autant de cités immédiatement subordonnées aux magis-
trats romains. Les Eleuteti seuls semblent être restés soumis
aux Arverni sous la domination des Romains.
Dans la Gaule Belgique , les Suessiones ont eu , avant
l'arrivée de César, une situation dominante analogue à celle
des Arvemi dans la Celtique. Leur roi Divitiacus , quelque
temps avant l'arrivée de César , a étendu son autorité sur
une grande partie des régions voisines du pays des Sues^
siones et même sur la Grande-Bretagne. En 57, Galba, suc-
cesseur de Divitiacus , est général en chef de l'armée des
Belges coalisés contre les Romains (4). Jusqu'à cette date,
les Rémi ont vécu sous la domination des Suessiones ; ils ont
été soumis au même droit, aux mêmes lois, ont obéi au même
commandement, et au même magistrat qui est le roi des Sues-
(1) a Parem numerum Arvemis , adjunctis Eleutetis , Gadurcis , Qaballs «
Vellavis qui sub imporio Arvemorum esse consuerunt. » {De bello gallico,
VII, 75, § 2.)
(2) 0 Celeriter sibi Benones , Parisios , Pictones, Cadurcos... adjungit...
bis civitatibus obsides imperat. » (De bello gallicOf VII, 4, § 6.)
(3) a Rutonos Gadurcosque ad fines Volcarum Ârecomicorum depopulan-
dos mittit. » [De bello gallico, VII, 64, i 6.)
(4) De bello gallico, II, 4, i 7.
INÉGALITÉ DES PEUPLES EN GAULE. 35
siones (1). Alors les Rémi se révoltent contre les Suessiones,
demandent le secours des Romains qui sont vainqueurs,
qui contraignent les Suessiones à se rendre à discrétion et
qui leur font grâce sur la demande des Rémi (2). Mais les
rôles sont renversés ; de maîtres , les Suessiones deviennent
sujets; ils passent sous la domination des Rémi qui, autre-
fois, leur obéissaient (3) et sous la protection desquels
viennent se placer même des peuples de la Celtique autre-
fois clients des Arverni. Telle est l'origine de la haute for-
tune qu'a eu depuis la ville de Reims ; de là son rang de
métropole dans Tordre administratif sous les Romains, dans
Tordre religieux jusqu'à nos jours , et même dans Tordre
industriel et commercial où elle a encore maintenant, sur
Sûissons 5 la suprématie acquise avec Taide du conquérant
des Gaules, il y a près de deux mille ans.
Les deux grandes clientèles des Arverni et des AedAii
paraissent s'être partagé la Gaule celtique avant Tarrivée
de César. Nous ne voyons pas que les Arterni aient eu
aucun Belge parmi leurs clients , et quant aux Aedui , s'ils
entrsdnent les Bellovaci dans leur clientèle, c'est une nou-
veauté , résultat de l'ambition des Bellovaci , qui veulent ,
comme les Rémi , se soustraire à la suprématie des Sues-
siones (4).
(1) a Suessiones... fratres consanguineosque suos, qui eodem jure et iis-
dem legibas utantur, unum imperium, unumque magistratum cum ipsis ha-
béant. » {De beUo gallico^ II, 3, § 5.)
(3) a Petentibus Remis, ut conservarentur, impétrant, o (De bello gallico,
II, 12, 1 5.)
(3) « In fines Suessionum qui Remis erant attributi. » (De bello gallicOy
vm, 6. i 2.)
(4) Quand Divitiacus , celui des chefs des Aedui qui est le plus dévoué
anx Romains , vient demander à César la grâce des Bellov&ci vaincus , il
prétend que les Bellovaci ont été de tout temps les alliés des Aedui ; a Bello-
vacos omni tomporc infide atque amicitiacivitatis Âeduae fuisse » (De bello
yailtco, II. 14, I 2). Il exagère évidemment la durée de la période pendant
laquelle les Bellovaci ont accepté ce que César appelle ailleurs le principat
des Aedui, 11 est inadmissible qu'à l'époque où le roi des Suessiones était
le plus puissant de la Gaule et avait mis sous son autorité la plus grande
partie de la Belgique et de la Grande-Bretagne : Divitiacum totius Galliae
potentiorem qui cum magnae partis harum regionum etiam Britanniae
36 LIVRE I". CHAPITRE III. SECTION 1".
Les Suessiones étaient évidemment le peuple de la Bel-
gique qui, avant César, avait dans cette région la clientèle
la plus considérable. Après eux venaient les Nervii et les
Treveri. Cinq petits peuples formaient la clientèle des Nei--
vii^ dont ils étaient en quelque sorte les sujets; ils étaient,
nous dit César, soumis à leur commandement. César nous
apprend leurs noms : Ceutrones, Grudii, Levaci, Pleumoxii,
Geidumni (1).
Les Treveri avaient sur leurs clients beaucoup moins
d'autorité. C'étaient les Eburones et les Condrusi (2) , et
probablement aussi deux peuples moins connus , les Cae-
roesi et les Paemani. On réunissait ces quatre peuples sous
la domination générique de Germani (3), ce qui ne veut
pas dire qu'ils fussent Germains dans le sens ethnogra-
phique exclusivement admis de nos jours (4). Ces peuples,
clients des Treveri, n'étaient pas soumis à leur commande-
ment. Lors de la coalition des Belges contre les Romains,
en 57, ils entrèrent dans cette ligue qui accepta pour chef
le roi des Suessiones, et ils firent défection aux Treveri dont
la cavalerie se joignit à l'armée romaine (5). Ils étaient fort
nombreux, puisque leur effectif fut fixé en bloc à 40,000
hommes. C'était le plus considérable, après ceux des Bello-
imperium obtinuerit (De bello gallico^ II, 4, § 7), les Bellovacif ses voisins lei«
plus proches, n'aient pas été soumis à sa domination.
(1) (c Facile hac oratione Ncrviis persuadet. Itaque confestim dimissis
nuntiis ad Ceutrones, Grudios, Levacos, Pleumoxios, Geidumnos, qui om>
nés sub eorum imperio sunt. » (De bello gallico, V, 39, {1.)
(2) a In fines Eburonum et Condrusorum qui sunt Treverorum clientes
pcrvenerant. » (De bello g&llico, IV, 6, g 4.)
(3) « Condrusos, Eburones , Caeroesos , Paemanos , qui uno nomine Ger-
mani appellantur. » (De bello gallico^ II , 4, 2 10.) u Segni Gondnisiquo ex
gente et numéro Germanorum qui sunt inter Eburones Treverosque. »
(/bid., VI, 32, i 1.)
(4) Ces peuples n'étaient pas plus Germains dans le sens ethnographique
que les Oretani, a qui et Germani cognominantur » en Espagne (Pline,
liv. III, § 25) ou que les Treveri et les Nervii qui se vantaient d'avoir une
origine germanique, comme Tacite nous l'apprend (Germanta, 28).
(5) « Equités Treveri quorum inter Galles virtutis opinio est singularis
qui auxilii causa ab civitate ad Caesarem missi vénérant. » (De bello gallicOj
II, 24, i 4.)
INÉGALITÉ DES PEUPLES EN GAULE. 37
uoci, 60,000 hommes; des Suessiones et des Neivii^ chacun
50,000. Cette comparaison nous montre quelle aurait du
être en Belgique la puissance des Treveri , si leurs clients
leur avaient été fidèles. De ces clients , dont quatre nous
sont connus, les plus importants étaient les Eburones.
Il fallait que les Eburones fussent non seulement belli-
queux mais en état de mettre sous les armes un nombre
de guerriers considérable , puisqu'ils détruisirent un corps
de troupes romaines composé de quinze cohortes ou d'une
légion et demie. Cependant leur état de subordination à
l'égard des Treveri nuisait à leur considération. Voilà pour-
quoi César les appelle une cité peu connue et de mince
dignité (1). La cause qui provoqua leur seconde prise d'ar-
mes contre les Romains atteste Tinfluence que les Treveri
avaient conservée chez eux. Ils vinrent attaquer les Ro-
mains sur le conseil d'Indutiomarus , chef du parti qui,
chez les Treveri^ était hostile à César (2). C'était en 54, trois
ans après la guerre de Tannée 57, où les Treveri avaient
envoyé leur cavalerie dans le camp romain, tandis que
leurs clients étaient dans le parti opposé.
La maxime de Tégalité des peuples était aussi étrangère
à la politique de César qu'à celle des Gaulois. Nous avons
vu César placer sous la domination des Rémi les Suessiones
vaincus. Il y a un autre exemple du même procédé. César,
content des services de Commius, roi des Atrebates, fit sortir
ce peuple de la catégorie des dedititii ou sujets de Rome
pour le faire entrer dans celle des peuples libres , et mit
dans sa dépendance les Morini (3). En général, le principal
(1) « Civitatem ignobilem atque humilem Eburonum. » (De bello gallico,
V,28,il.)
(2) a Indutiomari Treveri nuntiis impulsi. » {De bello gallico , V, 26 , g 2.)
f3) (! Quibus illo pro mcritis civitatem ejus immunem esse jusserat , jura-
que legcsque rcddiderat atque ipsi Morinos attribuerat. » (De bello gallico,
VII, 76, i 1). Les Atrebates avaient fait partie de la ligue des Belges en 57 (De
bello gallico, II, 4, 16, 23). Ils furent évidemment deditilii à la fin de cette
campagne. César leur imposa Commius comme roi et renvoya en ambas-
sade en BreUgne en 55 (De bello gallico, IV, 21), gj 6-7. Les Morini furent
conquis par Labiénus la même année (De bello gallico, IV, 38).
38 LIVRE I". CHAPITRE III. SECTION l~.
des Aedui en Gaule fut le résultat de la politique romaine.
Cette politique n'était qu'une façon particulière d'appliquer
le système gaulois du principat, que le parti opposé aux
Romains, entendait appliquer différemment : Vercingétorix
proposa aux Allobroges le « principat » de la province ro-
maine (1), et quand l'assemblée générale de la Gaule in-
surgée élut, à Bibracte, Vercingétorix général en chef, les
Aedui virent avec douleur que le « principat » leur était
enlevé et retournait aux Arverni (2).
Un détail de la politique de César après la prise d'Alésia
et la capture de Vercingétorix montre combien le général
romain entendait peu changer, au moins dans la forme,
le système général de l'organisation gauloise : les Aedui
l'avaient trahi , les Arvernes avaient été à la tête de l'in-
surrection qui avait semblé sur le point de terminer par
un désastre six années de victoires. Or César, qui livra,
en règle générale, les Gaulois captifs à ses soldats, avec
droit d'en disposer comme esclaves, fit exception pour les
prisonniers Arverni et Aedui qui furent, la plupart, ren-
voyés chez eux. Les Arverni^ comme peuple, restèrent
liberi avec une sorte d'indépendance municipale et l'exemp-
tion d'impôts, les Aedui non seulement gardèrent leurs
magistrats, jouirent de l'exemption des impôts, mais de-
meurèrent foederati^ conservèrent le titre d'alliés des Ro-
mains dont ils avaient abandonné la cause au moment du
danger. Au contraire, la plupart des peuples de la Gaule,
dont le tort unique avait été de se laisser entraîner par les
Arverni et par les Aedui^ furent comprisjdans la catégorie in-
fime des dedititii et frappés d'impôt au profit de l'Etat ro-
main : tant le respect des privilèges consacrés par l'usage
l'emportait sur l'équité ! Ainsi le voulait la politique.
Nous ne pouvons pas donner d'une façon absolument cer-
(1) (( Imperium totius provinciae. » (De hello gallicOf VII, 64, ( 8.)
(2) a MagQo dolore Aedui ferunt se dejectos principatu. » (De belîo gallico,
VII, 63, g 8.)
INÉGALITÉ DES PEUPLES EN GAULE. 39
laine la liste des Etats dont la Gaule se composait au temps de
César. Au commencement de Tempire romain , leur nombre
s'élevait à soixante ou soixante-cinq. Les Commentaires en
nomment un nombre moindre, quarante-quatre seulement (1).
Il est possible que cette différence soit , dans une certaine
mesure , le résultat d'omissions commises par César ; mais
nous n'avons aucune raison pour supposer qu'Auguste ait
diminué dans la Gaule conquise le nombre des cités ou
états. Il est même certain qu'il en a créé de nouveaux.
Tels sont les Vellavi et les Gabali, qu'il a fait sortir de la
dépendance des Arvemi ; les Tricasses et les Catuellauni ,
affranchis de la domination des Lingones ;2) ; les Silvanectes
et les Meldi , enlevés aux Suessiones (3) ; les Segusiavi , dé-
tachés du territoire des Aed^ii et attribués à celui de la co-
lonie de Lyon ; les Aulerci Brannovices , sujets des Aedui ,
qui forment une cité dont la capitale est Autessiodurum (4).
Auguste, s'attachant surtout à diminuer l'influence exa-
gérée que certains peuples avaient acquise , ne maintint
pas les agrandissements de territoires accordés par César
à des protégés. Il ôta aux Rémi le territoire des Suessiones
(1) Aedui, Ambiani (VII, 75; VIII, 7), Ambibarii (VII, 75), Ambiliati (III,
9, 10), Andes (VII, 4), Arvemi, Atrebates, Aulerci Genomanni et Aulerci
Eburovices (VII, 75), confondus ailleurs sous le nom d'Aulerci(II, 34; III, 29;
VII, 4; VIII, 7), Bellovaci (11,4,15; V, 24; VII, 59, 75; VIII,7, 21),Bituriges
(Vn, 15, 75; VIII, 11). Boii (VII, 17, 75), Cadurci (VII, 4; VIII, 32), Caleti
(VII, 75; VIII, 7). Camutes (V, 25, 56; VII, 43 , 75; VIII, 31, 38), Curioso-
lites (II, 34; III, 7; VII, 75), Diablintes (III, 9, 10), Eburones (V, 24, 27, 28;
VI, 34; VIII, 38). Elvetii (I, 2, 4, 9, 12; VII, 75), Esubii (II, 34; III, 7; V,
24), Lcmovici (VII, 4, 75), Lexovii (III, 9, 10, 29; VII, 75), Lingones (VIII,
U), Mediomatrici (VII, 75). Menapii (III, 9, 10), Morini (III, 9, 10; V, 24;
VII, 75, 76), Namnetes (III, 9, 10), Nenrii (II, 28; V , 24 ; VII, 75), Nitiobro-
ges (VII, 75), Osismi (II, 34; III, 9, 10; VII, 75), Parisii (VI, 3 ; VII. 4, 75) ,
Petrucorii (VII, 75), Pictones (VII, 4, 75; VIII, 26), Rauraci (VII, 75), Re-
doncs (II, 34 ; VII, 75), Rémi, Ruteni (VII, 7, 75), Santoni (VII, 75), Senones
(V, 54, 56; VI, 5; VII, 4, 75), Sequani (I, 3, 31 ; VII, 75), Suessiones (II, 13;
VIU, 6), Treveri (II, 24; V, 3, 4; VI, 8 ; VIII, 25), Turoni (VII , 4, 75), Ve-
liocasses (VII, 75; VIII, 7), Venelli (II, 34; VII, 75).
(2) Longnon, Atlas historique de la France, texte explicatif des planches,
page 6.
(3) Longnon, tbtd., p. 7.
(4) Longnon, ibid., p. 4.
40 LIVRE !•'. CHAPITRE III. SECTION 2.
et aux Atrebatcs celui des Morini. Il n'y a donc pas contra-
diction entre le chiffre de quarante-quatre cités ou Etats
fourni par les Commentaires de César et celui de soixante
ou soixante-cinq au début de l'empire romain.
Nous savons par Josèphe le chifiFre officiel , semble-t-il ,
du nombre des peuples de la Gaule indépendante, Aqui-
taine comprise. Il est de trois cent cinq (1). En retranchant
pour l'Aquitaine les trente peuples dont Pline fait Ténu-
mération (2), il reste deux cent soixante-quinze peuples
comme total pour la Belgique et la Celtique. Déduisons les
quarante-quatre peuples qui constituent des Etats, nous
trouvons deux cent trente et un peuples sujets, c'est-à-dire
un peu plus de cinq par peuple autonome et dominant à
l'époque de César.
Section II.
Les hommes.
A. — Rois.
Chez les Gaulois, l'égalité des hommes n'est pas plus
un dogme politique que l'égalité des peuples. Cependant la
plupart des Etats gaulois sont des républiques. Mais les
républiques établies sur les ruines des monarchies sont en
général aristocratiques. Cette loi est confirmée par l'exem-
ple de la Gaule.
En Celtique, à l'arrivée de César, il n'y a plus que deux
rois : l'un Teutomatus ou son père et prédécesseur Ollovico,
sur la frontière de l'Aquitaine, chez les Nitiobroges {3)]
(1) « flevTe 8è xal TptaxoaCot; 7r).r|6uovTec {Bve^i. » (De bello jud&ico^ livre II,
cb. XYi, édit. Didot, p. 119, 1. 11 , 12.) Ce chiffre précis a été remplacé par
un nombre rond chez Plutarquo qui dit trois cents, a iOvv) Si iyjtiçv^tra'zo Tpia-
xoffia u [Césary 15, édit. Didot, p. 852. 1. 43, 44), et cbcz Appien qui dit qua-
tre cents, « iOvT] tï tExpaxosta » (De rébus gallicis^ ch. II, édit. Didot, p. 24).
(2) Histoire naturelle ^ liv. IV, g 108. à partir du mot Sediboviates. Les
peuples dont les noms précèdent appartiennent à la Celtique de César dont
Auguste les a démembrés.
(3) De bello gallico, VII, 31, | 5, 46 ,{ 5.
INÉGALITÉ DES HOMMES EN GAULE. 41
l'autre Moritasgus , dans le nord , chez les Senones (1) ; or
dans ce dernier peuple, Cavarinus , pour succéder à Mori-
tasgus, son frère, qui lui-même succédait à ses ancêtres, a
besoin de la protection de César; malgré cet appui si puis-
sant, une assemblée publique le condamne à mort et il
n'échappe au supplice que par la fuite (2). Partout ailleurs
la royauté parait avoir péri antérieurement au début de la
guerre des Gaules. Comme exemple, nous pouvons citer
cinq peuples : les Arverni , les Sequani , les Helvetii , les
Camutes^ les Aedui,
César est notre autorité. Chez les Arverni le fameux roi
Bituitus , qui a été au siècle précédent vaincu par les Ro-
mains , n'a pas de successeur ; le père de Vercingétorix ,
Celtillus , accusé de prétendre à la royauté , a payé cette
ambition de sa vie (3). Chez les Sequani , Casticus , fils du
dernier roi , n'a pas obtenu la couronne et cherche en vain
à se la faire donner (4). Chez les Helvetii^ Orgetorix, accusé
de prétendre à la royauté , est traduit devant le tribunal
suprême de l'Etat et aurait été condamné au supplice du
feu si une mort subite et probablement volontaire ne l'eût
soustrait au jugement (5). Chez les Carnutes, le conquérant
romain fait rendre à Tasgetius la royauté de ses aïeux,
en 56 avant notre ère. Tasgetius règne un peu plus de
deux ans, puis ses ennemis le tuent publiquement avec
Tapprobation de la plus grande partie de leurs concito-
yens (6).
(1) De bello gallico, V, 54. Cf. note 7.
(2) « Cavarinuro, qucm Caesar apud eos rcgem constituerai, cujus frater
Horitasgiis advcntu in Galliam Caesaris cujusque majores rcgnum obtinue-
rant, interficore publico consilio conati. » (De bello gallicOy V, 54, 2 2.)
(3) De bello g&llico, VII, 4, § 1.
(4) « Orgetorix persuadet Castico, Catamantalocdis filio , sequano, cujus
patcr rcgnum in Scquanis multos annos obtinuorat et a senatu populi ro-
mani auiicus appcUatus erat, ut rognum in ci vitale sua occuparet, quod pa-
1er anle habuorat. » (De bello gallico, I, 3, § 4.)
(5) De bello gallico, I, 4.
(6) De bello gallico , V, 25, 29; VI, 2, 4. Acco avait pris l'initiative de ce
meurtre; César le fit périr sous les verges puis décapiter (VI, 44, 9. 2;
cf. VIII, 38, l 5).
42 LIVRE I". CHAPITRE III. SECTION 2.
Chez les Aedui, Tambitieux Dumnorix prétend aussi à la
royauté ; mais comme il sait que cette institution est anti-
pathique à ses concitoyens, c'est par Tappui de Tétranger
qu'il compte s'assurer le succès. Il arrivera, pense-t-il
d'abord, avec l'aide des Helt)eHi (1) ; et après la défaite de ce
peuple , quand il a vu César créer des rois chez les Carnutes
et les Senones , il espère obtenir du général romain la même
faveur et il a l'imprudence de s'en vanter dans l'assemblée
des Aedui, propos qui provoque un mécontentement général
parmi ses concitoyens (2). César le fait tuer, et dans cette
circonstance, sa politique est d'accord avec l'opinion domi-
nante contre laquelle il s'était inutilement mis en lutte
lorsqu'il avait donné des rois aux Senones et aux Carnu-
tes,
Pour rendre un peu de popularité à la royauté en Celtique,
il fallut le grand soulèvement de l'année 52 et la nécessité
universellement sentie d'un chef militaire unique et tout-
puissant; on proclama roi Vercingétorix (4). Mais ce chan-
gement d'opinion fut éphémère. Au bout de quelques mois,
le nouveau roi est déjà accusé de trahison. On prétend
qu'il voudrait tenir de César plutôt que des Gaulois le
titre que ceux-ci lui ont conféré (5). Nous savons le reste
de sa tragique histoire. L'impopularité du titre qu'on lui
avait donné a pu être une des causes du désastre final.
Généralement, en Celtique, à cette époque, on n'aime pas
les rois.
En Belgique, la royauté paraît moins antipathique à la
masse de la population. Lors de la coalition formée contre
César, en 57, un roi est choisi pour général en chef; c'est
(1) De bello gallico, I, 3, 9, 18.
(2) <x In concilio Aeduorum Dumnorix dixerat sibi a Caesare regnum ci-
vitatis deforri, quod dictum Aedui graviter ferebant. » (De bello gallico,
V, 6, î 2.)
(3) De bello gallico, V, 7, § 7-9. C'était en 54.
(4) « Rex ab suis appellatur. » (De bello gallico^ VII, 4, § 4.)
(5) a Regnum illum Galliae malle Caosaris concessu quam ipsorum haberc
beneficio. » (De bello gallico, VII, 20, i 2.)
INÉGALITÉ DES HOMMES EN GAULE. 43
Galba , qui règne sur les Suessiones (1). Les Eburones , ce
peuple obscur qui tue aux Romains une légion et demie ,
c'est-à-dire un corps d'au moins cinq mille hommes , sont
gouvernés par deux rois qui ont soulevé leur peuple contre
les Romains (2). Il y eut en Belgique un roi créé par César,
comme en Celtique Cavarinus et Tasgetius ; ce fut Com-
mius, chez les Airebates (3). Mais Commius fut plus heureux
que ses collègues nommés par César chez les Senones et
chez les Camutes; son autorité fut respectée de ses conci-
toyens ; il devint un prince national , prit part aux insur-
rections de 52 et de 51 (4) ; ce furent les Romains, et non
ses concitoyens, qui lui ôtèrent le pouvoir (5).
Quoi qu'il en soit , même en Belgique , la royauté est
une exception. La plupart des Etats de la Gaule indépen-
dante sont des républiques à la tête desquelles nous voyons
des magistrats (6) , un sénat , et au-dessous d'eux des ci-
toyens divisés en deux catégories : les équités^ cavaliers
ou chevaliers, qui combattent à cheval, et la plèbe ou
multitude, plebs, multitudo^ qui fournit aux armées l'in-
fanterie.
B. — Magistrats et principes.
Les magistrats des Helvetii prennent la défense de la loi
à laquelle Orgétorix veut se soustraire et réunissent contre
lui les citoyens en armes (7). Il y a aussi des magistrats
(1) De bello gallico, II, 4, i 7.
(2) c Initinm repentini tumultus ac defectionis ortum est ab Âmbiorige et
GatUTolco, qui, cum ad fines regni sui... » {De bello gallico , V, 26, {{ 1-2.)
« Catnvolcus, rez dimidiae partis Eburonum. » (De bello gallico, VI, 31, { 5.)
(3) a Gommium, quem ipse Atrebatibus superatis regem ibi constituerat, »
{De bello gallico, IV, 21, { 7.)
(4) De bello gallico, VII, 75, 76, 79; VIII, 6, 7, 10.
(5) Ibid., VIII, 21, 23, 47, 48.
(6) César, VI, 20, §2 2-3, parlant en général de Tadministration des cités
de la Gaule, désigne l'autorité suprême par le mot magistraiui employé une
fois an singulier, une fois au pluriel.
(7) « Cum civitas ob eam rem incitata armis jus suum exsequi conaretur.
44 LIVRE !•'. CHAPITRE III. SECTION 2.
chez les Aedui. On prétend que chez eux , Dumnorix s'est
acquis sur le peuple une influence qui surpasse Tautorité
des magistrats (1).
Parmi ces magistrats des cités , il y en a un qui est in-
vesti d'une autorité supérieure à celle des autres et que
César appelle magistrat suprême , summus magistratus (2) ,
ou plus brièvement magisiratus (3). Chez les Aedui et chez
les Lexovii^ le magistrat suprême se nommait, en gaulois,
vergobretos ; il était annuel et unique (4). Nous connaissons
DQUltitudinomque hominum ex agris magistratus cogèrent. » {De bello gai-
lico, I, 4, g 3.)
(1) « Esse nonnullos quorum auctoritas apud plebem plurimum valeat ,
qui privatim plus posscnt quam ipsi magistratus. » (De bello gallico , I ,
17, { 1. Cf. Intcrmissis magistratibus, ibid.y VII» 33,4.)
(2) De bello gallico, I, 16. § 5; VII, 33, § 2.
(3) De bello gallico, 1, 19, § 1 ; VII, 32, § 1 ; 37, § 6; 55, g 4. Dans I, 19, | 3-4;
le magisiratus qui accuse Dumnorix est Liscus, vergobret, comme on le
voit aux chap. IG et 17.
(4) ff Convocatis eorura principibus... in his Divitiaco, et Lisco qui summo
magistratui pracerat quem vergobretum appellant Acdui, qui creatur anuus
et vitae necisquo in suos habot potestatom. o (De bello gallico, I, 16, g 5.)
M. Mowat a soutenu qu'il fallait lire praeerant et qu'il y avait deux vergo-
brets comme à Rome doux consuls ; mais cette doctrine est contredite par
le passage de César. VII, 32, g 3. où les principes des Aedui racontent que :
« Cum singuli magistratus antiquitus creari atque rcgiam potestatom annum
obtincre consucsscnt, duo magislratum gérant et se uterque eorum legibus
crcatum esse dicat. » César annule une des deux, élections. De ces textes
il ne faut pas séparer le passage suivant de Strabou, liv. IV, ch. iv, g 3,
édit. Didot, 164, I. 6-9 : « ^Ëva 6*iflYE|ji6va f,(/oOvTO xat* évtauxàv x6 icaXaiov, (b;
fi'aOxfii); el; icoXepiov si; uicà toO icXiq^ou; dire6eCxvvT0 orpatriYÔç. » Ainsi , outre le
magistrat annuel, chaque état avait, en cas de guerre, nous dit Strabon,
un général élu par la multitude. C'est elle qui élit Vercingétorix {De bello
gallico^ VII, 21, g 1.) Les Commentaires nomment, outre Vercingétorix,
sept de ces généraux : Divico qui commandait les Helvelii quand , en 107 ,
ils battirent et tuèrent le consul L. Cassius Longinus (De bello gallico , I ,
13, g 2. Cf. Mommsen, Rœmisrhe Geschichte, 6" édit., t. II, p. 174, 175); Epo-
redorix , sous les ordres duquel les Aedui , s'étaient fait battre par les Se-
quani avant l'arrivée de César en Gaule {De bello gallico, VII, 67, g 7); Bo-
duognatus, général des Nervii en 57 (Duce Boduognato qui summain imperii
tonebat. Ibidem, II, 23, H); Camulogenus, général des Aulerci et do leurs
alliés en 53 (8umma imperii traditur Camulogeno Aulerco. Ibid. ,\ll, 57, g 3.
Dux hostium Camulogenus, VII, 62, g 5); Sedulius, général des Lemootces
la môme année (Sedulius, dux et princcps Lemovicum occiditur. Ibid., \ll,
88); Correus, général des Bcllovaci en 52 (Bellovacos... duce Correo Bello-
vaco. Ibid.y VIII, 6; cf. 17), et Dumnacus, qui, la même année, comman-
dait les Andecavi (A Dumnaco , duce Andium, /6td., VIII, 26). Chez les
INÉGALITÉ DES HOMMES EN GAULE. 45
les noms de trois vergobrets des Aediii, L'un est Liscus ,
investi de cette fonction en Tannée 58 (1). Valetiacus la
remplit en 53 ; son frère Cotus prétendit lui succéder en
52; mais le parti opposé lui préféra Convictolitavis , qui
l'emporta grâce à Tintervention de César, et qui cependant
se laissa entraîner du côté de Vercingétorix (2).
Nous apprenons par une monnaie le nom de Cattos, ver-
gobretos chez les Lexovii (3).
Tel est le mot gaulois que César rend par summus ma-
gistratus. On n'a pas encore déterminé d'une manière pré-
cise en quoi consiste la situation qu'il désigne par le mot
de principatus . Chez les Aedui^ Dumnorix, en l'an 61, ob-
tenait le principatus (4). César parait lui avoir ôté cette
dignité (5). En 53, Eporedorix, jeune homme de haute
naissance , et Viridomarus , d'origine moins distinguée ,
mais protégé de César, prétendent tous deux au principatus
chez le même peuple, et lors de l'élection du vergobretos^
l'un avait donné son appui à Convictolitavis, l'autre à
Cotus, concurrent de ce dernier (6).
Aedui, le vergobret ne pouvait commander l'armée parce qu'il lui était in-
terdit de sortir du territoire de la cité (Ibid, , VII , 33, § 2). Il est possible
que la même loi existât chez d'autres peuples et ainsi s'expliquerait l'é-
lection d'un général en cas de guerre par la multitude , comme nous
l'apprend Strabon. Cette distinction entre l'autorité civile et l'autorité
militaire n'existait pas à Rome.
(1) De bello gallico, I, 16, | 5.
(2) De bello gallico, VII, 32, 37, 42, 55, 67.
(J} Cette monnaie a fourni le sujet d'intéressantes dissertations à
MM. Mowat, Charles Robert et Emile Ernault. Nous adoptons l'opinion des
deux derniers.
(4) « Qui eo tcmpore principatum in civitate obtinebat. » (De bello gai-
lico, I, 3, I 5.)
(5) « Dumnorigem... odisse etiam suo nominc Cacsarem et Romanes quod
eomm advenlu potentia cjus deminuta et Divitiacus fratcr in antiquum
locum gratiae atque honoris sit rcstitutus. x> {De bello gallicOj I, 18, | 8.)
(6) a Uis erat inter se de principatu contcntio , et in illa magistratuum
controversia, alter pro Convictoiitavi . altcr pro Goto summis opibus pug-
naverant. » {De bello gallicOy VII, 39, g 2.) César les appelle collectivement
princes do la cité : « Principes civitatis Eporedorix et Viridomarus. » (De
bello gallico, VII, 38, g 2.) La magislratuum conlrovcrsia dont il est ques-
tien au chap. 39 est celle dont il a été traité aux chap. 32 et 33 du même
livre.
46 LÎVRE I". CHAPITRE lîl. SECTION 2.
En 54, Indutiomarus et Cingétorix se disputent le prin^
cipatus chez les Treveri , et César , après des démarches en
faveur du second, semble les laisser tous deux au pouvoir
concurremment jusqu*à Tannée suivante où, Indutiomarus
étant tué , Cingétorix est investi du principatus et du com-
mandement, — probablement militaire (1). — Plus tard, dans
le De bello civili , il est question d'un certain Adbucillus
qui avait obtenu le principatus chez les AUobroges pendant
un grand nombre d'années (2).
Si Ton se bornait à étudier les textes que nous venons
de citer, le mot principatus pourrait sembler indiquer une
magistrature qui aurait dû régulièrement être occupée par
un seul individu dans chacun des trois peuples dont il vient
d'être question, c'est-à-dire chez les Aedut^ chez les Tre-
veri et chez les AUobroges. Mais cette explication présente
une difficulté. C'est que , précisément pour chacun de ces
trois peuples. César, dans d'autres textes, nous fait connaî-
tre l'existence simultanée de plusieurs principes.
Prenons d'abord les Aedui.
Avant l'arrivée de César en Gaule, au moment même
où Dumnorix avait le principatus chez les Aedui , ceux-ci
vaincus sont contraints à livrer comme otages les fils de
leurs principes aux Sequani qui, avec l'aide d'Arioviste,
les ont, en 61 , battus dans plusieurs combats (3). César,
en 58 , a dans son camp un grand nombre de principes des
Aedui; il les convoque à une assemblée (4). En 53 , il reçoit
une ambassade composée de principes des Aedui (5).
(1) « Duo de principatu inter se contendebant , Indutiomarus et Cingé-
torix. » (De bello gallicOy V, 3, g 2.) a Cingetorigi... principatus atque impe-
rium est traditum. » (De bello g&llicOj VI, 8, § 9.)
(2) a Qui principatum in civitato multis annis obtinuerat. » (De bello ci-
vili, III, 59.)
(3) a Obsides ab iis principum filios acciperent. » (De bello gàllico , VI, 12,
8 4.)
(4) <x Gonvocatis eorum principibus quorum magnam copiam in castris
habebat. » (De bello gallico, I, 16, g 5.)
(5) « Legati ad eum principes Aeduorum veniunt. » (/)e bello gallico,
VII, 32, 8 2.)
INÉGALITÉ DES HOMMES EN GAULE. 47
On peut faire la même observation chez les Treveri,
A rinslant même où Indutiomarus et Cingétorix se dis-
putent le principatus chez les Treveri , César , qui préfère
Cingétorix, convoque les principes des Treveri et obtient
d'eux qu'ils se mettent du côté de Cingétorix (1).
La même pluralité dans le principat se rencontre chez les
Allobroges : en 52, Vercingétorix , cherchant à les gagner,
promet de l'argent à leurs principes (2), et cependant nous
lisons ailleurs que chez les Allobroges^ Adbucillus avait eu
le principatus pendant un grand nombre d'années (3).
Les /îemi donnent lieu à une remarque analogue. En 57,
César leur ordonne de lui amener comme otages les fils de
leurs principes (4) ; six ans plus tard, les Rémi perdent dans
une bataille Vertiscus , princeps de leur cité , qui comman-
dait leur cavalerie (5). Conclurons-nous de là que la con-
stitution des Rémi était changée et qu'en 51 le nombre des
principes était réduit à un ? Il nous semble que non. Ver-
tiscus est un des principes qui momentanément a plus d'in-
fluence que tous les autres, puisqu'il est parvenu à se
faire donner le commandement de la cavalerie.
Il y a dans chaque peuple gaulois un certain nombre de
personnages influents ; ils sont riches , commandent à une
gensj à un clan puissant, à une clientèle nombreuse. César
les appelle principes. Tels sont les principes des Aedui, des
Treveri, des Allobroges et des Rémi dont nous venons de
parler. Tels sont ceux des Arverni qui résistent inutilement
à Vercingétorix (6); ceux des Bellovaci qui entraînent ce
(1) e Principibus Treverorum ad se convocatis , hos singiUatim Gingeto-
hgi conciUavit. » {De bello gallicOf V, 4, § 3.)
(2) e Horum principibus pecunias. » {De bello gallico, VII, 64, g 8.)
(3) « ÂdbuciUi filii, qui principatum in civitate multis annis obtinuerat. »
(De bello civili, III, 59.)
(4) « Principum liberos ad se adduci jussit. » {De bello gallico^ II, 5, § 1.)
(5) « Amisso Vertisco , principe civitatis , praefecto equitum. » {De bello
gàllico, Vni, 12, § 4.)
(6) « Probibetur ab Gobannitione patruo suo reliquisquc principibus, »
{De bello gallico, VII, 4, { 1-)
48 LIVRE I". CHAPITRE III. SECTION 2.
peuple à combattre les Romains en 57 (1). et qui donnent
leur consentement au soulèvement de Tannée 51 (2); ceux
des Nervii qui, avec les généraux du même peuple, ont, en
54 , une entrevue avec Cicéron , lieutenant de César , et
cherchent à le tromper (3 . Tels sont les principes de toutes
les cités de la Gaule (4) que César, près de s'embarquer
pour la Grande-Bretagne, réunit au portus Itius en 54; les
principes des cités qui viennent demander à César son
appui contre Arioviste en 58 (5) et ceux qui se trouvent
auprès de Vercingétorix en 53 (6). Tels sont : les principes
Galliae dont il est question dans d'autres passages des
Commentaires (7). La seule circonstance où ils paraissent
remplir une fonction publique oflBcielle se présente lors-
qu'ils se rendent à une assemblée générale de la Gaule.
Alors César leur donne , dans un passage , la qualification
de legati (8), que nous pouvons traduire par « députés. »
Mais ordinairement princeps veut dire, ce semble, homme
influent, non fonctionnaire, — qui, quelquefois, parvient
à se faire nommer général ; — princeps s'oppose à magis-
Praius (9).
(1) <c Impulses a suis principibus. » (De bello yallico^ II, 14, { 3.)
(2) a Omnium principum conscnsu. » (De bello gallico, VIII, 7, 1 6.) a Nemi-
nem vero tantum pollere ut invitis principibus... » (lbid.<, VIII, 22, 2 2.)
(3) a Tune duces principosquc Nerviorum. » (De bello g&llico^ V, 41.) Je ne
cito pas ici les passages oii il est question des principes de plusieurs peu-
ples à la fois. On no peut démontrer que les principes dont ces passages
font mention soient plusieurs pour chaque peuple ; exemple : les pHncipes
des Esubii , des Curiosolites et des Veneti qui se liguent contre César en
56 (ibid,, 111,8, § 3); les principes des Ambiani, des Aulerci^ des Caleti, des
Veliocasses , des Alrebales f qui ont pris parti contre les Romains en 51 :
a Gomplures principes esse belli auctores. » (Ibid.^ VIII, 7, 2 ^•)
(4) « Principes ex omnibus civitatibus. » {De bello gallicOy V, 5, 2 3.)
(5) De bello yallico, h 31, 2 ^
(6) /6id., VII, 28, 2 6.
(7) a Principibus Galliae cvocatis. » (De bello gallico, IV, 6, 2 5.) « Prin-
cipes Galliae sollicitare. » (Ibid.^ V, 6, 2 4.) a Indictis inter se principes
Galliae conciliis. » (Ibid., VII, 1, 2 ^0
(8) « Totius fore Galliae legati principes civitatum. » (De bello gallico,
I. 30, 2 !■)
(d) Une manière de voir différente de la nôtre a été soutenue par M. De-
loche dans son savant mémoire intitulé : Eludes sur la géographie histori-
INÉGALITÉ DES HOMMES EN GAULE. 49
Le titre de princeps ne désigne pas une magistrature,
quand même il est employé au singulier comme pour
Sedulius, général des Lemovices en 53 (1). C. Valerius
Procillus, que César appelle princeps de la province de
Gaule (2), est simplement un des hommes qui exercent le
plus d'influence dans cette province ; à Valerius Procillus
on peut comparer, chez les Helvii^ c'est-à-dire chez un
peuple de la province de Gaule, Valerius Donnotaurus
qui, suivant César, est princeps de la cité (3).
Principatus au singulier, cette situation qu'à occupée
Dumnorix chez les Aedui, que se disputent chez le même
peuple Eporedorix et Viridomarus, chez les Trévères Indu-
tiomarus et Cingétorix, dont a joui Adbucillus chez les
Allobroges, c'est la primauté parmi les principes^ probable-
ment une sorte de prépondérance au Sénat. Cette primauté
peut durer plusieurs années, tandis que la magistrature est
annuelle. Résultat d'une influence personnelle, elle peut
être fixée sur la même tête que le commandement des
troupes , qui est décerné annuellement par le suffrage po-
pulaire (4).
que de la Gaule , p. 43 et suiv. Suivant lui , le princeps est un magistrat.
Mais le passage en apparence décisif des Commentaires, VI, 23, sur lequel
M. Deioehe appuie sa thèse, concerne la Germanie et non la Gaule. Lo
principalus Galliae qu'avait eu Cellillus avant César {Ibid. , VII , 4) était
l'influence exercée en Gaule par Coltillus quand il était le plus puissant
des Arvemes et que les Arvemcs avaient la suprématie en Gaule {De bello
gallico, VII , 4). Les passages relatifs aux Aedui {De bello gallico, VII, 38,
39) cités plus haut (p. 45, n. 6) établissent nettement la distinction entre la
magistrature et le principatus. Au même moment, chez les Aedui, Epore-
dorix et Viridomarus étaient principes, Convictolitavis et Cotus se préscn-
daicnt chacun investis du magislratus unique et annuel auquel était attaché
la puissance royale. Il no parait pas qu'il y ait grande ressemblance entre
les pnnctpes des cités de la Gaule au temps de César, et le principalis
qui, an commencement du cinquième siècle, est dans certaines cités de la
Gaule le chef de l'administration {Code Théodosien, liv. xii, t. I, 1. 170).
(1) c Sedulius, dux et princeps Lemovicum. » {De bello galliro, VII, 88, (4.)
(2) a C. Valerium Procillum, principem Galliae provinciae. » {De bello gai-
iico, I, 19, i 3.)
(3) c Gaio Valerio Donnotauro, Caburi filio, principe civitatis. » {De bello
gêllico, VII, 65, I 2.)
(4) Sur rélection annuelle du chef do l'armée par le peuple, voy. Strabon,
4
50 LIVRE l". CHAPITRE III. SECTION 1.
C. - SénaU.
A côté du magistrat , nous trouvons le sénat. C'est une
institution commune à la Celtique et à la Belgique. Parmi
les sénats de la Celtique , le sénat des Aedui est celui sur
lequel César nous donne les indications les plus précises.
En l'année 52, au moment où Convictolitavis et Cotus se
disputent chez les Aedui la dignité suprême de vergobretos^
une partie du sénat se met du côté de Cotus, l'autre soutient
Convictolitavis; César, voulant juger la question, fait venir
le sénat à Decetia (1). Quand, la môme année, les Aedui
se laissent entraîner dans le soulèvement dirigé par Ver-
cingétorix, la résolution d'abandonner la cause romaine est
prise dans une assemblée du sénat à Bibracte; la plus
grande partie des sénateurs s'y trouvent; quelques-uns
seulement, restés fidèles à César, font défaut (2).
Quatre autres sénats de la Celtique sont mentionnés par
les Commentaires,
Lors de la grande insurrection des cités du nord-ouest .
en 56, le sénat des Veneti se met à la tête du mouvement ;
et, pour jeter la terreur parmi les ennemis du peuple ro-
main , César vainqueur fait mettre à mort tous les séna-
teurs prisonniers (3). Les sénateurs des Aulerci Eburovices
et des Lexovii ne veulent pas prendre parti contre les
Romains ; ils sont massacrés par leurs concitoyens (4).
L'année suivante, quand chez les Carnutes le parti hostile
aux Romains , uni à celui qui ne voulait plus de roi . eut
chassé le roi Cavarinus que César avait nommé , le général
romain envoya au sénat des Carnutes Tordre de se présen-
liv. IV, ch. IV, § 3, édition Didot, p. 164, li^ne 6-9), et ci-dessus, p. 44,
note 4.
(î) De bello gallico, VU, 32, 33.
(2) /bic/., VII, 55, I 4.
(3) a Omni scnatu nccato. » {De bello gallico, III, IG, J 4.)
(4) « Aulorci Eburovices Lcxoviiquc, scnatu suo interfecto, quod auctorcs
belli ossc nolobant. » {Dp. bello gallico, III, 17, g 3.)
INÉGALITÉ DES HOMMES EN GAULE. 51
ter tout entier devant lui , mais le sénat se garda bien de
venir (1). Voilà donc cinq peuples dont les sénats appa-
raissent chez César : Aedui^ Veneti, Aulerci Eburovices,
léxoviiy Camutes, et qui appartiennent à la Celtique.
En Belgique, trois sénats sont mentionnés : ceux des
Remij des Nervii^ des Bellovaci. Quand, seuls avec les Tre-
veri et les Letici » les Rémi prennent parti pour les Romains
en 57 , César ne se contente pas des promesses que deux
ambassadeurs des Rémi lui apportent ; il exige que tout le
sénat des Rémi vienne le trouver (2). Dans la guerre qu'il
fait aux coalisés , l'armée des Nervii est presque entière-
ment détruite; de six cents sénateurs, trois seulement
survivent (3). Plus tard, lors du dernier effort de la Gaule
contre le vainqueur de Vercingétorix, le Bellbvaque Cor-
reus perd la vie en se mettant à la tête d*un inutile soulë-
vement ; les sénateurs des Bellovaci soutiennent que la
guerre s'est faite malgré eux (4).
Le nombre total des sénats gaulois, tant Celtiques que
Belges, dont il est question dans les Commentaires est de
huit.
Un des faits que nous venons de citer nous montre que
les sénats des Etats gaulois étaient fort nombreux : chez
les Nervii il y avait six cents sénateurs. Nous voyons ail-
leurs, chez les Aeduiy les lois défendre que deux per-
sonnes de la même famille fissent en même temps partie
du sénat (5). Il semble que ces deux faits nous mettent en
présence d'une organisation analogue à celle de Rome pri-
mitive. En Gaule, la race dominante dans chaque civitas
(i) « CtUD is omnem ad se sonatum vonire jussissot, dicto audientes non
ftierunt. » {De bello gallico, V, 54, § 3.)
(2) • Omncm senatum ad se convcnirc. a {De bello gallico, II, 5, | 1.)
(3) « Ex soxccutis nd trcs scnatorcs. » (De bello gullico, II, 28, § 1.)
(4} f Numquam cnim senatum tantum in civltatc illo vivo quara impcritam
plebem potuissc. — Nemincm vcro tantum pollcro ut... rcsistcnte sonatu. »
pc bello gallico, VIII, 21, g 4; 22. i 2.)
(5) f Cum loges duo ex una familia... in sonatu osso prohibèrent. • {De
bello galHco, VII, 33, { 3.)
52 LIVRE !•'. CHAPITRE III. SECTION 2.
se compose d*an certain nombre de génies représentées
chacune au sénat par son chef qui , dans cette assemblée ,
ne peut jamais disposer de plus d'une voix; le nombre des
gentes est probablement de six cents chez les Nervii; voilà
pourquoi le sénat des Nervii compte six cents membres. Le
sénat romain en avait originairement trois cents , corres-
pondant à autant de gentes groupées elles-mêmes en trois
tribus de cent gentes chacune (1).
D. — Equités.
L'organisation militaire était constituée primitivement, à
Rome, sur les mêmes bases que le sénat ; chaque gens devait
un cavalier, 9ques, et dix fantassins ; dans chaque gensy il
y avait deux groupes : le premier, peu nombreux, qui
exerçait la suprématie, fournissait le sénateur et le cava-
lier ; le second groupe, qui acceptait la suprématie du pre-
mier, fournissait les fantassins, dix fois plus nombreux
que les cavaliers. Chaque peuple gaulois avait, ce semble,
une organisation analogue : il était formé de gentes ou clans,
au-dessus de chacun desquels s'élevait une famille plus
noble et plus riche que les autres, c'est-à-dire un petit
groupe aristocratique qu'entouraient des clients de race
moins distinguée et de moindre fortune.
L'ensemble de ces petits groupes aristocratiques domi-
nant le reste de chacune des gentes est ce qui constitue, dans
la doctrine de César, la classe des équités, chevaliers ou ca-
valiers, rivaux des druides et qui se partagent avec eux, en
Gaule , la considération et le pouvoir (2). Cette classe four-
nit les sénateurs en même temps que les équités ; mais chez
César, le côté stratégique domine : César a eu moins affaire
(1) Mommsen, Roemische Geschichte, livre I, c. iv, v ; 6* édit., t. I, p. 41
et suiv., 64 et suiv., 74 et suiv.
(2) (I In omni Gallia eorum hominum qui aliquo sunt numéro atque honore,
gênera sunt duo .. de his duobus generibus alterum est druidum, alterum
equitum. » (De bello gallico, VI, 13, § 1, 3.)
INÉGALITÉ DES HOMMES EN GAULE. 53
aux sénats qu'à la cavalerie gauloise qui lui a fourni d'uti-
les auxiliaires et dans laquelle il a aussi trouvé , sur les
champs de bataille, de redoutables ennemis.
En arrivant dans la Gaule transalpine, il navait que de
l'infanterie. Il prit sa cavalerie dans le pays. Dès la pre-
mière année, elle fut de quatre mille hommes, fournis une
partie par la province romaine , mais le reste par les Aedui
et leurs alliés ou clients (1) ; c'était en 58. En 55, le chifiFre
était le même (2) ; César en emmena moitié en Bretagne et
laissa le reste à Labiénus, sur le continent (3).
Lors de la grande insurrection de l'année 52 , le patrio-
tisme fit faire aux Qaulois contre les Romains un effort
beaucoup plus grand que celui que le conquérant avait exigé
d'eux pour assurer le succès de ses armes. Quand les Aedui
eurent abandonné les Romains et que tous les Etats gau-
lois, sauf les Rémi, les Lingones et les Treveri^ se furent
laissés entraîner dans le parti national , Vercingétorix put
compter sur quinze mille cavaliers (4).
Une fois sur le point d'être enfermé dans Alésia, il ren-
voya sa cavalerie et garda son infanterie au nombre de
quatre-vingt mille hommes , chiffre très inférieur au total
des forces de pied dont la Gaule pouvait disposer. Mais
Vercingétorix n'en avait pas voulu davantage (5). La com-
position de l'armée de secours que les Gaulois lui en-
voyèrent peut montrer dans quelles proportions la popu-
lation militaire de la Gaule se répartissait entre l'aristo-
cratie et la classe inférieure. L'assemblée générale craignit
(1) « Gaesar equitatum omnem ad numerum quattuor milium quem ex
onmi provincia et Aodnis atque eomm sociis coactum habcbat praemittit. »
(De bello gtLllico, I, 15, | 1.)
(2) « Equitatus totius Qalliae convenit numéro milium quattuor. » (De bello
palHco, V, 5, i 3.)
(3) De bello gallico, V, S, § 1.
(4) a Omnes équités quindecim milia numéro celeritcr convenire jubet. »
{De bello g&llico, VII, 64, { 1.)
(5) c Peditatu quem ante habuerat se fore contcntum dicit. » (De bello
gaUiro, VII. 64, { 1.) a Omnem ab se equitatum noctu dimittere, VII, 71, § i.
Milia hominum délecta LXXX una secum interitura demonàtrat. » (Ibid.jl 3.)
54 LIVRE I-. CHAPITRE III. SECTION 2.
qu'une année trop considérable ne pût être ni conduite ni
approvisionnée ; elle réduisit le nombre des cavaliers à en-
viron moitié : de quinze mille à huit mille , et elle réunit
deux cent cinquante mille fantassins (1). C'est trente et un
fantassins pour un cavalier, trois fois plus que dans la
Rome primitive où Ton comptait dix fantassins seulement
pour un cavalier.
E. — Clientes.
Le grand vice qu'offrait la constitution politique de cha-
cun des Etats gaulois consistait dans le système de la gens
ou du clan et de la clientèle, et dans la compétence res-
treinte des tribunaux.
La Loi des Douze Tables, qui remonte au milieu du
cinquième siècle avant notre ère , débute par une procé-
dure qui appartient déjà, ou peut le dire, malgré sa haute
antiquité , à la civilisation moderne ; il s'agit de la citation
à comparaître devant le magistrat : la comparution sera
forcée; le juge, sans le consentement du défendeur, ren-
dra, quoique l'intérêt privé soit seul en jeu, une sentence
dont l'exécution sera assurée par la force publique.
Dans le droit primitif des Indo-Européens, cette procédure
est inconnue, il n'y a de juridiction obligatoire que lorsqu'il
s'agit de crimes contre la sûreté de l'Etat ; c'est alors que
le magistrat intervient. Alors l'accusé, contraint à compa-
raître devant le tribunal qu'a institué la coutume , c'est-
à-dire ordinairement devant le peuple ou devant le roi ,
est, en cas de condamnation, frappé d'une peine que la
puissance publique fait exécuter.
Mais la puissance publique se désintéresse des questions
qui ne touchent pas aux droits et à la sûreté de l'Etat ; et,
à cette période reculée, les crimes et les délits contre les
(1) « Coactis equitum VIII milibus et peditum circitcr CCL. » {De 6#'//o
gàUico, VII, 76, { 3.)
INÉGALITÉ DES HOMMES EN GAULE. 5ô
particuliers , même le meurtre et Tassassinat , sont consi-
dérés comme aussi indifférents à TEtat que les contesta-
tions civiles : la mort violente d'un homme est affaire qui
concerne sa famille et non la société. Â plus forte raison ,
le vol d'un objet appartenant à un particulier n'est pas du
nombre des crimes que les magistrats ont reçu mission de
châtier. Par conséquent , celui qui est accusé de vol n'est
pas obligé de se soumettre à la juridiction du tribunal pu-
blic; à ce point de vue , pas de différence entre lui et la
personne à laquelle on réclame le paiement d'une créance
quelconque ou la restitution d'un objet emprunté.
Celte manière de distinguer entre l'intérêt public et l'in-
térêt privé , cette indifférence de l'Etat à l'égard du second,
nous explique la constitution de la société en Gaule , à
l'époque de la conquête romaine , sous un double aspect ;
elle nous fait comprendre l'origine de la juridiction des
Druides et le grand développement du système de la clien-
tèle. Il V avait deux façons de résoudre les contestations
privées : Tune était de s'adresser à un tribunal arbitral, à
des hommes investis de la confiance des parties et dont
les deux adversaires promettaient d'accepter la sentence ;
l'autre consistait à employer la force : la famille de celui
qui avait été tué prenait les armes, obtenait Taide du chef
dans la clientèle duquel elle était placée (1), se faisait sou-
tenir par ses clients si elle en avait au-dessous d'elle,
puis elle tuait le meurtrier quand il ne lui payait pas la
composition pour meurtre; le volé, accompagné de ses
parents, de ses clients, ou de son patron s'il était lui-
même dans la clientèle d'un autre , cherchait à reprendre
l'objet volé et à enlever en outre d'autres objets équivalant
comme prix à l'indemnité pour vol , fixée par l'usage ; en
cas d'insolvabilité du voleur, ce qui était le plus fréquent,
le volé , s'il le pouvait , s'emparait de la personne du vo-
lt) • âuos enim qnisque opprimi et circumveni non patitur. ») (De bello
gMieo, livre VI, c. il, | 4).
56 LIVRE !•'. CHAPITRE III. SECTION 2.
leur , et la coutume lui reconnaissait sur ce malheureux le
droit de vie et de mort (1).
Quand on n'avait pas recours à la force , le tribunal ar-
bitral auquel on s'adressait ordinairement en Gaule, au
temps de César , était celui des Druides (2) : cela résultait
de leur réputation de science et de leur prestige religieux.
Parmi les Gaulois , un certain nombre avaient été leurs
élèves, ou leur confiaient eux-mêmes l'éducation et l'in-
struction de leurs enfants ; tous les Gaulois les considé-
raient comme investis d'une puissance surnaturelle et en
quelque sorte divine , qui leur faisait prévoir l'avenir et
connaître dans le présent les choses les plus secrètes : il
était logique de les prendre pour arbitres quand, dans une
contestation , on voulait éviter TefFusion du sang (3). Mais
s'adresser à cet arbitrage n'était pas obligatoire.
Lorsqu'on recourait à la force, il est clair que les chances
les plus nombreuses étaient du côté de celui qui pouvait
mettre en ligne le plus grand nombre de combattants : de
là l'utilité de la clientèle , qui donnait aux parents de la
partie lésée des auxiliaires quelquefois très nombreux et
qui pouvait d'autre part assurer l'impunité du coupable en
lui donnant un appui. On connaît par César l'histoire d'Or-
gétorix qui, accusé de haute trahison, se présenta devant
le tribunal national en amenant avec lui ses parents , ses
esclaves, ses clients et ses débiteurs; il inspira ainsi à ses
(1) Naturellement le meurtrier et le voleur cherchaient à se défendre et
appelaient à leur aide leur famille et leur patron. De là ces guerres conti>
nuelles dont parle César, VI, 15, 1 1 : Hi [équités] cum est usus atque aliqnod
bellum incidit (quod fere ante Caesaris adventum quotannis accidere solebat
uti aut ipsi injurias inferrent aut illatas propulsarent) omnes in bello versantur.
(2) Caesar, De bello gallico^ VI, 13, § 5 : a Nam fere de omnibus contro-
yersiis publicis privatisquc constituunt; et, si quod est admissum faci-
nus, si caedes facta, si de hercditatc, do finibus controvorsia est, iidem
decernunt ; praemia pocnasque constituunt. » — Les druides ne jugeaient,
comme on dit, qu'au civil, même en cas de crime , oh ils fixaient le chiffre
de la composition due par le condamné et ne prononçaient pas de peine
dans le sens français du mot en droit criminel.
(3)Z)ebe2{oyaaico, VI, 13, 14; Cicéron, De divinalione, livre 1, |90. Diodore
de Bielle, 1. V, c. 31, f 5; éd. Didot, p. 273, 1. 4-15.
INÉGALITÉ DES HOMMES EN GAULE. 57
juges une terreur si grande qu'ils n'osèrent d'abord enta-
mer son procès (l).
La majorité du sénat des cités gauloises était impuissante
contre le sénateur ou le chevalier qui réunissait autour de
lui , grâce à Tappui de sa gen^ et de ses clients , une force
armée supérieure à celle dont la majorité du sénat pouvait
disposer. Chez les Helvetii, le chiffre total de la population
s'élevait à 263,000 âmes , dont un quart , soit environ
65,000 ou 66,000, en état de porter les armes (2) ; les « gens »
d'Orgétorix , sa gens ou son clan , c'est-à-dire ses parents
et ses esclaves , débiteurs et clients non compris , étaient
au nombre de 10,000 hommes, près du sixième de la popu-
lation guerrière totale ; Orgétorix entreprit de tenir tête à
l'autorité légale, et, après un succès momentané, il ne put
échapper à une défaite certaine qu'en perdant la vie.
D'autres, par leur clientèle, furent maîtres de leur cité.
Quand en 51, Correus, après avoir soulevé en vain les
Bellovaques contre les Romains, eut succombé dans la
lutte , les sénateurs bellovaques soutinrent que cette ré-
volte avait eu lieu malgré eux, et ils obtinrent grâce de
César (3). L'année précédente , Vercingétorix avait pris les
armes contrairement à la volonté des principes de sa cité (4)
et l'avait emporté sur eux à l'aide des clients qu'il avait
réunis (5).
C'était l'anarchie ; elle a fait le succès des Romains. La
brillante entreprise de Vercingétorix a été, par son succQ^
momentané, un des symptômes les plus caractéristiques
(1) « Orgetoriz ad judicium omnem suam familiam, ad hominum milia
decem, nndique coegit, et omnes clientes obaeratosque suos, quorum mag-
num nuroemm babebat , eodom conduzit ; per eos , ne causam diceret , se
eripnit. > {De bello gaUico^ livre I, 4, § 2.)
(2) D€ bello gallico, I, 29, i 2.
(3) Ibid., VIII, 21, 22.
(4) « Probibetur a Gobannitione patnio suo reliquisque prineipibut. » (De
beUo gallico, VII, 4, { 2.)
(5) < In agris babet dilectum egentium ac perditonim. » (De bello paUtco,
VII. 4. I 3.)
58 LIVRE I". CHAPITRE III. SECTION 2.
de la défectueuse organisation sociale qui a rendu défini-
tive la défaite des Gaulois.
Il est question de la clientèle des chefs gaulois dans un
certain nombre d'autres passages du De belle gallico. Nous
les citons en note. On y voit, par exemple, qu'une ville
entière pouvait être comprise dans la clientèle d'un chef.
Telle était Uxellodunum chez les Cadurci^ cet oppidum
dont le siège par César fut un des événements principaux
de la campagne de 51 (1).
Quand le chef considérait ou prétendait considérer la
cause du client comme légitime, il lui donnait sa protection :
rien n'était dangereux comme de faire tort au client d'un
chef puissant; de là, la multiplication de la clientèle, qui
était, pour les hommes de condition inférieure, une garan-
(1) Dumnorigom... magnum numonim equitatus suo sumptu semper alere
et circum se habere » (I, 18, § 5).
« Equitum... ut quisque est genero copiisque amplissimus , ita plurimos
circum se ambactos clicntesque habet, Hanc unam gratiam potentiamque
novorunt » (De bello gstUico VI, 15, g 2). — La même organisation existait
chez les Gaulois d*Italio : « Ilepl 5è xàç étaipeCoc (icyiorviv oicoufi^v éiroioOvro,
ttà TÔv foCtpbiTaxov xal SuvaTcoxatov slvai irap* aOxoTc toOtov 8c &v icXeCorou;
i^tiv dox) Toùc OftpaiccuovToc, xal av|Aicepi9epo(iévovc aÙTû » (Polybe, 1. II, c. XVII ,
I 12). Cf. circum se habere et ou|iitepi9epo|iivovc. Le mot grec, comme les
trois mots latins, traduit le gaulois ambactos =s ambi-acto-s.
« Paulo supra hanc memoriam servi et clientes , quos ab lis dilectos esse
constabat, justis funeribus confectis, una cremabantur d {De bello gallico ^
VI, 19.84).
ff Vercingotoriz , Celtilli filius , arvernus , summae potentiae adulescens
(cujus pater principatum Galliae totius obtinuerat, et ob oam causam, qood
regnum appetebat, ab civitate erat interfcctus) convocatis suis dientibus,
facile inccndit » (VII, 4, g 1).
«( [Aoduorum] civitatem esse omnem in armis, divisum scnatum, divisum
populum ; suas cujusque eorum clientelas » (VII, 32, g 5).
« Litaviccus cum suis clientibus « quibus more Gallorum nefas est etiam
in extrema fortuna desercre patronos, Gergoviam profugit » ^VII , 40, { 7).
« Lucterius... oppidum Uxellodunum quod in clientela fuerat ejus... oc-
cupât » (VIII, 32, i 2).
Aux fragments VI, 19, g 4, et VII. 4, § 1, comparez le fragment suivant, III,
22, 1-3 : « Adiatunnus... cum sexcentis devotis, quos illi soldurios appellant
(quorum baec est condlcio, uti omnibus in vita commodis una cum his
fruantur quorum se amicitiae dediderint; si quid ils per vim accidat, aut
eundem casum una ferant , aut sibi mortom consciscant ; neque adhuc ho-
minum memoria ropertus est quisquam, qui , eo interfecto , cujus se amici-
tiae dei^ovisset, mori recusaret). »
INÉGALITÉ DES HOMMES EN GAULE. 59
tie de sécurité beaucoup plus qu'un état de servitude (1).
Entre le système de la clientèle gauloise et la féodalité
française du moyen &ge, il y a une grande analogie , mais
aussi de grandes différences.
F. <— La féodalité française repose sur le ffrincipe de la propriété
individueUe du sol , et ce principe n'existe pas chez les Celtes,
La féodalité si puissante au moyen &ge en France, dans
les Etats voisins, même en Orient, et qui jouait encore chez
nous un rôle si brillant au siècle dernier, était fondée
sur la propriété immobilière. La France féodale nous appa-
raît comme un vaste ensemble de domaines fonciers sys-
tématiquement étages les uns au-dessus des autres. Les
relations de suprématie et de subordination qui relient
entre eux le suzerain et le vassal sont la conséquence de
relations identiques entre le domaine du premier et le do-
maine du second. Ces relations se répétant de degré en
degré, on peut se figurer la France féodale comme une
sorte de pyramide , au sommet de laquelle la royauté repose
sur les grands fiefs : duchés de Normandie, de Bourgogne
et de Guyenne , comtés de Flandre , de Champagne et de
Toulouse ; les grands fiefs s appuient sur des fiefs secon-
daires mouvant d*eux en pins grand nombre ; ces derniers
sur d*autres moins importants et dont le nombre est en-
core bien plus considérable.
Un fief consiste en une habitation grande ou petite, avec
des dépendances plas ou moins étendues ; c*est d*abord
un chftteau magnifique avec une vaste province, c'est en-
(1) « No quis ex plèbe contra potentiorem auxilii egeret. Suos onim quis-
que opprimi et circumveni non patitur; neque, aliter si faciat, ullam inter
suos babet auctoritatom. » (De belle gallico, VI, il, f 4.) La société germa-
nique était organisée d'après les mêmes principes ; celui qui tuait le client
d*un hommo puissant était exposé à une vengeance d'autant plus redouta-
ble que la clientèle du patron était plus nombreuse, plus habile au manie-
ment des armes et bien commandée ; c'est une dos raisons pour lesquelles
dans la loi sallque le v^ehrgeld des leudes royaux est si élevé.
60 LIVRE I". CHAPITRE III. SECTION 2.
suite un château moins beau dont dépend un petit comté
ou une baronnie ; plus bas c'est une maison forte qui do-
mine un village , enfin c'est une chaumière avec un petit
champ ; à chacune de ces propriétés s'attachent des droits
ou des charges, de là le rang occupé dans la société féo-
dale par rhomme auquel le flef appartient.
Soit le comté de Champagne : c'est un des grands fiefs
du royaume de France ; si Thibaut le Chansonnier est vas-
sal du roi saint Louis, c'est que Thibaut le Chansonnier a
hérité du comté de Champagne. Du comté de Champagne
dépend le comté de Brienne ; Gautier IV, prenant posses-
sion du comté de Brienne au temps où Thibaut le Chan-
sonnier était comte de Champagne , devient par là vassal
de Thibaut le Chansonnier. A son tour, le comté de Brienne
a, comme on dit, une mouvance : de lui meut, par exemple,
la seigneurie d'Epagne , qui est un simple village où une
petite maison forte sert d'abri à un modeste feudataire , à
un petit gentilhomme; celui-ci, à cause de sa maison forte
et de sa seigneurie , dépendance du comté de Brienne , est
vassal de Gautier IV, comte de Brienne. Au pied de la pe-
tite maison forte du seigneur d'Epagne, on voit rangées
de pauvres cabanes en bois couvertes de chaume ; des vi-
lains les habitent et , à cause de ces masures , ils sont les
vassaux du seigneur d'Epagne.
Que les vilains d'Epagne abandonnent leur misérable
chaumière, que, mécontents, ils partent, laissant au seigneur
d'Epagne l'immeuble qui a créé le lien féodal entre eux et
lui, ils sont dégagés et cessent d'être ses vassaux. De
même, le seigneur d'Epagne peut remettre sa terre aux
mains de Gautier IV, comte de Brienne , et briser ainsi le
lien qui l'unit à son suzerain. A leur tour , le comte de
Brienne, le comte de Champagne ont chacun, à l'égard de
leur suzerain , le même droit. La propriété territoriale est
la base de la féodalité française au moyen âge ; et , dans
les temps modernes, ce principe a persisté jusqu'à la Ré-
volution,
INÉGALITÉ DES HOMMES EN GAULE. 61
La féodalité celtique se fonde sur un principe tout diffé-
rent. En général , chez les Celtes , la propriété immobilière
est collective ; le sol appartient au peuple , c'est principa-
lement un vaste pâturage semé çà et là d'ilôts cultivés ; en
droit, il est commun à tous les citoyens, et par consé-
quent les chefs du peuple , les membres influents de Taris-
tocratie, qui, de fait, en ont principalement la jouissance,
mais qui n'en ont pas la propriété, n'ont sur lui aucun
droit réel, ils ne peuvent donc transformer le sol en sa-
laire, ils ne peuvent en disposer pour payer le dévouement
de leur clientèle ; c'est par le don ou le prêt d'objets mo-
biliers qu'ils se créent des vassaux.
Cette doctrine n'est pas imaginaire , ce ne sont pas des
raisonnements arbitraires qui nous ont conduit à la soutenir,
elle résulte des textes. Un des plus anciens auteurs qui nous
ait laissé des indications un peu précises sur les mœurs des
Gaulois est Polybe ; il écrivait au second siècle avant notre
ère ; nous lui devons d'intéressants détails sur les guerres
soutenues par les Romains contre les Gaulois en Italie à
partir des premières années du quatrième siècle avant J.-C.
Or, suivant lui, ces Gaulois qui prirent Rome, et qui depuis
la firent longtemps trembler, se nourrissaient principalement
de viande , et chez eux la fortune de chacun consistait
exclusivement en or et en troupeaux (1). Ce qu'ils man-
geaient, c'était surtout la chair de leur bétail (2) ; ils vivaient
de l'élevage du bétail , et , sans ignorer l'agriculture , ils
demandaient aux céréales une très petite partie de leur
alimentation. Ce fut seulement après la conquête romaine
que la culture du sol prit en Gaule une place importante.
« Autrefois, » nous dit Strabon en l'an 19 de notre ère,
environ un siècle et demi après Polybe, « autrefois les
Gaulois étaient guerriers plutôt que laboureurs, aujour-
(!) « "YwoipCfc ye i*^ ixàtnoiQ fy (^éy.\iaxa xaX xpw^« » (Polybe.^ livre ÎI ,
c. XVII, i 11; cf. i 10). Seconde édition de Didot, p. 80.
(2) 0 KpttdçoYeîv » (Polybe? ibid,, l 10).
6Î LIVRE I-. CHAPITRE III. SECTION 2.
d'hui ils sont forcés de cultiver la terre (1). » La conquête
romaine donna la paix : on vit se développer ragriculture,
tandis que se transformait en propriété individuelle le do-
maine collectif de chaque peuple, ager publicus.
G. — jLa féodalité eeUique dans Vantiquité.
Dès Tépoque reculée à laquelle nous fait remonter la
description des mœurs des gaulois chez Polybe, — que cette
époque soit, comme cet auteur le semble dire , celle de la
prise de Rome par les Gaulois, 390 avant J.-C, que ce
soit la fin du troisième siècle avant J.-C, date à laquelle
a été écrite l'histoire romaine de Fabius Pictor, source
probable de ce passage de Polybe, peu importe, — à l'épo-
que dont il s'agit, une sorte de féodalité celtique existait,
fondée, comme nous le disons, sur le don ou le prêt d'ob-
jets mobiliers, c'est-à-dire évidemment de bestiaux dans
la plupart des cas. De là, chez les Gaulois, des groupes
d'hommes réunis chacun sous l'autorité d'un chef, comme
nous le raconte Polybe. « Parmi les Gaulois, » dit-il,
« celui qui se fait le plus craindre, celui qui exerce la plus
grande puissance , est celui qui se montre entouré du
nombre le plus considérable de serviteurs. » Je traduis par
« serviteurs » le mot grec ôepaiwuovraç ; mais il y a dans la
phrase grecque une autre expression qui relève singuliè-
rement la dignité de ces serviteurs gaulois : Ces hommes,
nous dit Polybe , forment avec leur chef une association
de camarades, âtaipeia (?).
 une autre extrémité du monde celtique , en Irlande ,
le mot consacré par l'usage pour désigner un vassal signifie
(i) « 01 8'dvdpsç \uf,yi\xa\ (iâX).ov fj yecopYot, vvv S'&vaYxdCovxat YMSpT'îv , xaTa-
esiJLcvoi Ta IhrXa » (Strâbon, livre IV, c. I, § 2, édit. Didot, p. 147, 1. 51-52).
(2) « IIcpl 8è tac éxaiptta; piEy'oTTiv oicov6if|v èicotoûvto , 8tà ri xal 9o6cpwTaTov
xal (uvaTcoTaTov cTvai icap* avToT; toOtov , d; &v ir>t(aTov; Ix^t^^ ^ox^ toOc Scpa*
ittuovToc xal av|»cepi9Kpo|iévou; aOTCf» » (Polybe, livre II, c. XVli, { 12, 2* édit.
Didot, p. 80-. Le grec av|jiitepifepo(i(vo; est la traduction du gaulois ambactus.
César exprime la mémo idée par circum se habere (VI, 16, 2).
INÉGALITÉ DES HOMMES EN GAULE. 6S
en même temps « associé , » ce mot est cèle. Il appartient
au vocabulaire de Tecclésiastique irlandais qui , au neu-
yième siècle, a glosé les épitres de saint Paul. Chez ce
glossateur le mari est le cèle de sa femme, la femme est
le cèle de son mari (1) ; les membres d*une paroisse chré-
tienne qui se réunissent pour manger les agapes sont cèle
l'un de l'autre (2). Or, dans la langue du droit irlandais,
le vassal est le cèle de son suzerain ; cèle veut dire « vassal »
dans le Senchus Môr. Les jurisconsultes irlandais distin-
guent le soer-chéle (3) ou « vassal franc » du doer-chéle (4)
ou « vassal dépourvu de liberté ; » la première de ces
expressions glose au neuvième siècle le liberlus Domini
« affranchi du Seigneur » de saint Paul (5).
La c( vassalité » s'appelle céilsine , au moyen âge dans le
Senckus Môr et dans les autres écrits des vieux juriscon-
sultes irlandais, et au neuvième siècle le glossateur irlan-
dais de saint Paul emploie le composé co-cèilsine pour
expliquer à ses compatriotes le latin societas dans le pas-
sage où saint Paul parle de Tassociation formée entre lui
et les apôtres pour la prédication de TEvangile (6). Il y
eut dès lors , entre saint Paul et les apôtres , une sorte de
camaraderie, tel est le sens du mot irlandais céilsine :
saint Paul et les apôtres furent des camarades , cèli. Or,
céiUine est l'expression consacrée pour désigner les rela-
(1) Manuscrit de Wurzbourg , f 9 d , glose sur la première aux Corin-
ihicns, c. VII, verset 5 ; chez Zimmer, Glossae hibemicae, p. 64. Cèle veut
dire mari dans le Senchus Môr {Ancient Iaw« of Ireland, I, 52, 250; II, 386,
396,400).
(2) Manuscrit do Wurzbourg, {• 11 d, glose sur la première aux Corin-
thiens, c. II, verset 33, chez Zimmer, p. 72.
(3) Glose du Senchus Môr {Ancient iaw» of Ireland, II, 204, ligne 24).
(4) Daercheile, 0*Donovan, supplément à O'Reilly.
(5) Sàirchele do Dia (Ad Corinthios, I, c. vu, verset 22, ms. de Wurz-
bourg) texte, bien lu par Zcuss-Ebel, Gr. Ci, 31, mal lu par Zimmer, Clos-
Me hibemicae, 60, corrigé par Whitley Stokos, Literarisches Ceniralblatt ,
1883, p. 1673, col. 1, ligne 18, correction admise par M. Zimmer, Supple-
mentum^ p. 8.
(6) Ms. de Wurzbourg, ^ 19 a, glose sur l'épîtrc aux Galatos, ch. II, v. 9,
chez Zimmer, p. 119. Le mot céilsine se trouve dans le Senchus Môr y aux
pessages publiés dans Ancient Inws, II, 206, 268, 282.
64 LIVRE I-. CHAPITRE IIl. SECTION 2.
lions que là vassalité créait entre le chef irlandais et les
subordonnés attirés par ses largesses. Les formes égalitai-
res qui déguisaient la rudesse de la hiérarchie sociale
irlandaise au moyen âge étaient si puissantes que les
relations du vassal au suzerain étaient considérées comme
établissant entre eux une sorte de camaraderie. Déjà la
vassalité était une camaraderie, suivant Polybe, chez les
Gaulois du sud des Alpes à Tépoque reculée où ils se sont
emparés de Rome, 390 ans avant J.-C.
Nous retrouvons le vasselage à Tépoque de César dans
la Gaule transalpine , avec cette différence toutefois que ,
si nous en croyons le grand capitaine, la condition des
vassaux aurait été fort dure. La plèbe, dit-il, vit dans une
situation qui est presque celle des esclaves , elle ne prend
l'initiative de rien, elle n'est appelée à aucun conseil. La
plupart de ses membres , accablés soit par les dettes , soit
par de lourds impôts , soit par l'injustice des grands , se
soumettent eux-mêmes à la servitude en prenant pour maî-
tres les nobles qui ont sur eux les mômes droits que sur
des esclaves (1).
Il y a certainement là beaucoup d'exagération , puisque
nous savons par Strabon que dans chaque peuple Gau-
lois , le chef de l'armée était élu par la plèbe (2) , et que
conformément à cette théorie, nous voyons, chez César,
la plèbe Arverne élever Vercingétorix à l'autorité suprême
pour faire la guerre aux Romains. Parmi les vassaux des
nobles , on doit distinguer deux classes , les hommes libres
et ceux qui ne le sont pas. Tous les débiteurs des nobles
n'étaient pas réduits à une condition analogue à celle
de l'esclave romain. Orgétorix, accusé de haute trahi-
son et menacé du dernier supplice , se rend devant ses
(1) « Plerique cum aut aère alieno , aut magnitudine tributorum , aut in*
juria potcntiorum premuntur, sese in servitutom dicant nobilibus , quitus
in h08 eadem omnia sunt jura quac dominis in servos. » (De bello gallico,
VI, 13, 2.)
(2) Voir plus haut, p. 44, n. 4.
INÉGALITÉ DES HOMMES EN GAULE. 65
juges , accompagné non seulement de dix mille parents et
esclaves , mais aussi d'un grand nombre de clients et de
débiteurs qui n'étaient par conséquent ni ses parents ni
ses esclaves : le procès est suspendu (1). César se plaint de
ce qu un des obstacles à la conquête de la Gaule par les
Romains était la puissance des gens assez riches pour
prendre, moyennant salaire, des hommes à leur service (2).
Ces hommes étaient des guerriers libres qui vendaient leur
concours. Les clients et les débiteurs qui firent suspendre
le procès d'Orgétorix étaient des hommes libres qui avaient
accepté un suzerain et qui lui devaient leur appui. Tels sont
aussi cf ces pauvres et ces hommes perdus , » — delecium
egentium et perditonimi , dit César , — que Vercingétorix,
banni par l'aristocratie arverne, joint à sa clientèle et avec
Taide desquels, devenu maître de TEtat, il exile à son tour
ceux qui l'avaient chassé (3).
Il est évident que les chefs gaulois avaient deux catégo-
ries de vassaux : les uns , compagnons de leurs combats ,
tenaient , quoique pauvres , un rang presque égal au leur ;
les sôer-chéli de l'Irlande , vassaux francs , dont le nom
glose le libertus Domini de saint Paul , leur ressemblent
beaucoup ; les autres étaient des bergers , des ouvriers ru-
raux , dont la condition était analogue à celle des esclaves
romains : on peut leur comparer les vassaux non libres,
doer-chéli , de l'Irlande. Ce sont les vassaux francs , sôer-
chéli^ que César a en vue quand, parlant des habitudes
belliqueuses de la noblesse gauloise, il dit que chez elle :
« Plus un homme se distingue par la naissance et les ri-
chesses, plus est grand le nombre des ambacti et des
clients qui l'entourent à la guerre (4). » Ambactus est un
(1) f Omnem snam familiam... omnes cUentes et obaeratos suos, quorum
magnum numerum habebat, eodem conduxit... » (De bello gallico, I, 4, § 2.)
(2} « Quod in GaUia a potentioribus atque iis, qui ad conducondos homi-
nés facultatcs babcbant , volgo régna occupabantur. » {De bello gallico, II,
1, 1 4.)
(3) De bello gallico, VII, 4, 2§ 2-4.
(4) n Atquc cornm ut quisque est ganere copiisque amplissimus, ita plu*
5
66 LIVRE I**. CHAPITRE III. SECTION H.
mot gaulois dont « client » est la glose (1). Diodore de Sicile,
écrivant après César , mais copiant un auteur plus ancien
que César de plus d'un demi-siècle, parle aussi de ces
compagnons de guerre des chefs gaulois : « Ceux-ci, » dit-il,
« emmènent avec eux des domestiques, qui sont des hom*
» mes libres , mais pauvres , et qui leur servent de cochers
» et de satellites dans les combats (2). » Diodore ici repro-
duit probablement la relation de Poseidonios d*Apamée qui
avait visité la Gaule vers l'an 100 avant notre ère ; il s'ac-
corde avec le passage plus ancien de Polybe que nous
avons cité , au commencement de ce paragraphe (3) et qui
parle de « camaraderie » entre les vassaux et les chefs
gaulois.
Ainsi en Gaule, au premier siècle avant notre ère, anté-
rieurement à la conquête romaine , il existait une sorte
d'organisation féodale ; elle était distincte de l'Etat : à côté
des magistrats de la cité, quelquefois en opposition avec
eux, vivaient des grands seigneurs entourés d'une foule
de vassaux. Avec l'aide de ces vassaux, de hauts person-
nages comme Orgétorix et Correus, tenaient tète aux ma-
gistrats ; en outre, ils avaient le concours de leurs vassaux
dans les guerres privées, fréquentes, que causait l'absence
de toute juridiction établie par la loi pour réprimer les cri-
mes et délits contre les particuliers (4).
rimoB circum se ambactos clientesque habet. » {De bello oialHco, VI, 15, { 2.)
(1) Le mot ambactus a été employé par Ennius, 239-169 avant Jcsus-
Cbrist. Il parût donc avoir été porté de la Gaule Cisalpine à Rome, an
pins tard vers le commencement du second siècle avant notre ère. Fcstus,
qui nous a conservé cette citation d'Ennius, en nous disant que le mot est
gaulois, traduit ambactus par servu». Il ne faut pas entendre cette traduc«
tion dans le sens littéral; elle est seulement approximative. Le gaulois
ambactus n'avait pas, en latin, d'équivalent exact ; sa valeur était intermé-
diaire entre servus et clienê; le Uen qui attache l'ambactus au chef est
moins étroit que celui qui attache le servus au maître, moins lAche que
celui qui attache le client romain au patron.
(2) a * Effdrfovxai Sk xal OipairovTa; éXeuOlpev; Ix Tâv «sv^^taiv xcRoXiYOVTtc , oTc
^6xoK xal icoLpoomaraTc XP^^'^ *^^^ ^^c f^^* ^ (Diodore de Sicile, V, 29,
1 2, éd. Didot, I, 271.)
(3) Voyez ci-dessus, p. 58, n. i.
(4) t. Alterum genus est equitum. Hi , cum est usus atque aliquod bollum
INÉGALITÉ DES HOMMES EN QAULE. «7
Mais les dons par lesquels les suzerains gaulois, au
milieu du premier siècle avant Jésus-Christ, tenaient ces
Yassaux dans leur dépendance n'étaient pas immobiliers.
Ces gnmds seigneurs n'avaient pas d'immeubles dont ils
pussent disposer. La propriété rurale en Gaule était encore
indivise dans chaque peuple; la propriété b&tie était la
seule que jusque-là les individus se fussent attribuée , et
la nature de leurs droits sur elle n'est pas déterminée.
Toutefois la terre cultivée en Gaule, bien qu'appartenant
à chaque peuple, à la date où écrit César, est l'objet d'une
jouissance analogue , en une certaine mesure , à la jouis-
sance que justifie la propriété individuelle ; les sénateurs
et les chevaliers jouissent précairement de la terre culti-
vée ; ils paient pour elle une redevance à l'Etat, et c'est
pour eux que cette terre est labourée et moissonnée par la
plèbe réduite presque en esclavage. Quant aux prés, pâtu-
res et bois , ils sont livrés à la jouissance commune (1) ;
mais c'est principalement aux sénateurs et aux chevaliers
qu'appartiennent les bestiaux qui y trouvent leur nourri-
ture.
incidit (quod fere ante Caesaris advcntum qnotannis accidere solebat , uU
sut ipsi injurias inforrent, aut illatas propulsaront), omnes in bello veraan-
tur. > {De hello gallico, VI. 15, { 1.)
(1) Cest en partie Thistoire de Taper publicus romain. Quand, à Romo, la
propriété immobilière individuelle n*czi8tait pas et que la fortune de cha»
caa consistait en esclaves et en troupeaux, lo^mot pecunia t troupeaux »
fat Texpression créée pour désigner la fortune de chaque particulier, es-
claves {familia) déduits ; ce sens subsista quand les immeubles furent en-
trés dans le domaine privé, et alors on entendit que les immeubles comme
les meubles étaient compris dans la pecunia de chacun. (Hcrmogénion au
Digeste, livre L, t. xvi, loi 222. Comparez Tarticle de la loi des Douze
Tables : « Utl Icgassit super pecunia [familiaque] tutelave suae rei, ita jus
este. 9 On cite ordinairement ce texte d*aprës Ulpien. Le mot familia^ ou-
blié par Ulpien ou par ses copistes, nous a été conservé par Cicéron.)
CHAPITRE IV.
l'agriculture bt les lieux habités dans la gaule barbare
au moment de sa conquête par césar.
Sommaire :
I !•'. L'agriculture. — f 2. Les lieux habités : A. Vici , — B. OppidM. —
C. Aedi/lcia.
S !•'. — L'agriculture.
Cicéron, dans sa République^ prétend qu'aux yeux des
Gaulois il est honteux de produire le blé par le travail des
mains, et en conséquence, dit-il, les Gaulois vont ar-
més moissonner les champs d'autrui (1). Le grand orateur
commet là une grande exagération. Entendue en un sens
absolu , sa doctrine ne peut se concilier avec les faits que
nous apprennent Polybe et César.
Si nous nous en rapportons à Polybe , les Gaulois qui
ont pris Rome au quatrième siècle , ou plus exactement
ceux qui habitaient l'Italie du Nord au troisième siè-
cle , se nourrissaient principalement de viande , mais il ne
se suit pas de là qu'ils dédaignassent l'agriculture : le
(1) 0 Qalli turpe ducunt frumentum manu quaerere, itaque armati alienos
agros demetunt. » (De re pubiica, livre III , c. iz, 2 15.) -^ La source de ce
passage parait être la même que celle de Strabon, quand il a écrit dans sa
description de la Gaule : a 01 8*àv8pec fiax^iTal (iSXXov ij yttù^'^oi » (Poseido-
nios? vers 100 av. J.-G.)' — La suite du texte de Strabon est de source
plus récente : « Nûv 8e àvapidCovrai yuàçyiîw xata6i(tevoi Ta 6iû<a » (Strabon,
livre IV, c. I, I 2, édit. Didot, p. 147. 1. 51-52, écrit vers l'an 20 de J.-C).
AGRICULTURE EN GAULE. 69
contraire est même établi, puisque, Fauteur grec le dit
formellement : ils cultivaient la terre. La guerre et l'agri-
culture étaient, suivant lui, les seuls arts qu'ils connussent,
et la simplicité de leur vie était si grande qu'ils couchaient
sur de la litière (I). Polybe, dans ce passage, copie le récit
de Fabius Pictor ; ce dernier , qui écrivait à la fin du troi-
sième siècle, décrit probablement les mœurs des Gaulois
italiens de son temps.
Au troisième siècle avant J.-C, les Gaulois d'Italie
mangeaient de la viande , donc ils élevaient du bétail ;
des deux éléments dont chez eux alors se constituait la
fortune et qui étaient le bétail et l'or, le bétail est celui
que l'historien grec nomme le premier (2). César nous parle
aussi du bétail élevé par les Gaulois auxquels il fit la
guerre (3), mais nous ne pouvons savoir si la nourriture
(1) « Ità YÀp ta (rrt^aSoxoiTcTv xal xpeiiifaYsTv, Iri H \Lrfiht dlXXo irXi^v xà icoXt-
|taà «aI xà «axà yu&çrxia^ &axttv dncXovç e^X^ '^^C pCouc * oOt* éniOT^|iY)C àXXiic ,
oÛTS téxviK '>^>p' oOtoTç to icapdicGtv yvmaino^isi^ » (Polybe , livro II , c. XVII ,
i 10, 2* édit. de Didot, p. 80).
(2) « Ticoplic yt i&^v tnéaxoii ^v Opt|&|&aTa xai x^m^oç » (Polybe , livro II ,
c. rvn, i il).
(3) Nous citerons les exemples suivants : Dans la campagne de Tannée 56,
César s'empare des troupeaux des Morini et des Menapii : a Cum jam pe-
eus atque extrema impedimenta ab nostris tenerentur. » (De bello g&HicOf III,
29, 2.) En Tannée 53, il prend aux Nervii et donne à ses soldats une grande
quantité de bestiaux et d'hommes : « Magno pecoris atque hominum nu-
méro capto atque ea praeda militibus concessa » {Ibid,, VI, 3, 2). Il entre
dans le pays des Menapii ; un grand nombre de bestiaux et d'hommes tom-
bent en son pouvoir : t Magno pecoris atque hominum numéro potitur »
(Ibid., VI, 6, 1). Les Germains appelés par César s'emparent des nombreux
troupeaux que possédaient les £5iirone8 : a Magno pecoris numéro... po-
tiantur » {Ibid., VI, 35, 6). Au siège d'Avaricum, en 52, les Romains trouvent
des bestiaux dans la campagne » {Ibid,^ VII, 17, 3 ; cf. 20, 10). La même an-
née, César s'empare d'une certaine quantité de bestiaux : « Pecoris copiam
nactus 9 surles bords de la Loire {Ibid., VII, 56, 5); les défenseurs d'Alésia
ont du bétail (VII, 71, 7). En 51, César prend aux Eburones leurs troupeaux
{ibid,, VIII, 24, 4), et il trouve des bestiaux à UxeHodunum, chez les Cadurct
(ibid., VIII, 41, 6). Après la conquête, les Gaulois fournissaient de manteaux
de laine et de salaisons Rome et une grande partie de l'Italie au commen-
cement de Tére chrétienne : « 0\ktù; S'Iorl SaipiXfj, xal xà iTo(|ivia xal Ta {lofop-
6ta 6tfT« Tûv ffdcyuv xal Ti)c ToipixeCoiç àçOovCav \i^ t^ *Pb)|jL^ yopjiytXafiai |i6vov &).Xà
xai Toî; «XsCoTOtc fiipcat T^jc IvaXCaç » (Strabon, livre IV, c. iv, ) 3, éd. Didot,
p. 164, I. 2-5.
10 LIVRE I*. CHAPITRE IV. | t.
animale avait chez les Gaulois da temps de César Fimpor-
tance que d*après Polybe on devrait lui attribuer chez
ceux du troisième siècle. U est cependant vraisemblable
que , dans la Gaule vaincue par César , ragriculture et le
froment tenaient plus de {dace que dans le monde celtique
plus ancien de l'Italie du Nord auquel se rapporte le texte
de Poljhe.
Le degré de civilisation auquel étaient parvenus les
Gaulois transalpins du I" siècle av. J.-C. comportait un
développement de l'agriculture qui fusait contraste avec le
genre de vie des Germains. « Ceux-ci , » nous dit César y « ne
mangent pas beaucoup de froment et vivent principalement
du lait et de la chair de leurs bestiaux (1':; > les Germains,
ijoute César , s*appliquent peu à ragriculture (2) : tandis
qu*il nous représente la plupart des Gaulois comme occu-
pés de travaux agricoles {Z. De crainte de manquer de
blé, le général romain n*ose pénétrer en Germanie (4) ; au
contraire, en Gaule, fl fût habituellement sans diflSculté
les approvisionnements de Ué nécessaires à la nourriture
de son armée.
César naturellement parie beaucoup plus de ses appro-
visionnements que de ceux des Gaulois. Cependant son
récit nous montre les HelTètes faisant les semailles les plus
considérables qu*ils peuvent pour se procurer le blé dont
ils auront besoin dans la grande expédition qu'ils projet-
• 'JOe ktOm faOâc», VI, S, { 1.) — « Mi-
. ibêé^ VI, a, 1 1).
'!uni«l« «lint ex GaBia pcrditonim homi-
q^os spcs yrmfiliaiii ■!» <i«—mc beHandi ab
agrîcQltarm et coci%îiiao Uiborv mocatel. > Dt d«L^ faHâca» III» 17, 1.) De
BB ae doit pas tootefMs ai y mu œhu oà Straboa . im peu plus
et dix aa» ptes Uni . pnesseabe les pcyrs de ragncoltnre en
le ressttu de U ciaayiète rofluùel « *ài4fc; pez^tsl pAliv
t -ï— r;*^ ' wir»T«C»«~ T«iig?«S^ iiÉlàpâ»^ q i^m» C^î^re IV, c i, 1 2,
Pl u:, L ^1-4^ , CL o-dessss. p. Cts. ■. L
» U»« W£;o gaOica, VI, ^ I U)
AORICULTURB EN GAULE. 71
tent (1) ; au moment de partir, ils brûlent le froment qu'ils
ne peuvent emporter (2); quand, vaincus, ils retournent
chez eux, c'est du froment qu*il leur faut pour vivre, et les
Âllobroges le leur fournissent par ordre du vainqueur (3).
Lia suite de son récit nous apprend que les approvi-
sionnements des défenseurs d'Âlésia et d'Uxellodunum
consistaient en froment comme en bétail (4). Mais c'est au
siège d'Alésia surtout que la réserve de froment réunie
par les Gaulois parait avoir été considérable : il y avait
de quoi nourrir quatre-vingt mille hommes pendant un
mois, un peu plus longtemps même, avec de l'économie (5) ;
et quand cette réserve fut épuisée (6) , on eut beau se dé-
faire des bouches inutiles , condamner à mourir de faim les
vieillards, les enfants et les femmes, et joindre à cette
cruauté des prodiges de valeur, il fallut se rendre.
Antérieurement à ce siège célèbre, quand les Belges
rassemblèrent contre César une armée de plus de trois cent
mille hommes , c'est-à-dire un effectif environ décuple du
sien qui était de huit légions, une circonstance imprévue
les mit dans l'impossibilité de tirer parti de cette énorme
supériorité numérique : le froment leur manqua, et après
(1) « Sementes quam maximas facere ut in itinera copia frumenti suppe-
teret. b (Oe bello gallico, I, 3, | 1.)
(2) c Fnunentnm omne, praeterquam quod secum portaturi erant combu-
mnt. » {De bello gallico, l, 5, { 3.)
(3) « AUobro^bus imperavit ut iis frumenti copiam facerent. • (i>e bello
yallico, I, 28, { 3.)
(4) An siège d^Alésia, Vercingétorix déclare : « 8e exiguë dierum triginta
habere fmmentum... Pecus cujus magna erat copia ab Mandubiis compulsa,
Tiritim distribuit, fmmentum parce et paulattm metiri instituit. » (De bello
gellico, VII, 71, { 4.) — Avant le siège d*Uxellodunum , Drapes et Lucte-
rins : « Magnum numerum frumenti comparant d (ibtcf. , VIII, 34, { 3). — -
Quand la source où les assiégés se fournissaient d'eau est coupée : « Non
tantnm pecora atque jumenta, sed etiam magna hostium multitudo siti
eonsumebatur i» {ibid,, VIII, 41, { 6). — Quand César, Tannée précédente,
avait pris Avaricum, il avait trouvé du froment et d'autres approvision-
nements : f Summamque ibi copiam frumenti et reliqui commeatus nanctus »
{ibid,y VII, 32, { 1). Le bétail est probablement l'élément fondamental du
reliqiMê eommealus.
(5) De bello yalltco, VH, 71, { 4.
(Q m Gonsainpto onmî frumanito. » {De bello geUicOf VU, 77, | 1.)
n LIVRE !•'. CHAPITRE IV. ) l.
avoir tenu conseil , ils conclurent que le plus sage était de
retourner chacun chez soi (1). Voilà comment les Gaulois
apprirent Futilité des approvisionnements. Aussi, lorsque
Tannée suivante les Esubii^ les Curiosolites et les Veneti se
préparèrent à la guerre , ils transportèrent des champs le
froment dans les oppida (2). Cet exemple fut suivi plus
tard à Alésia et à Uxellodunum.
Pour nourrir son armée , César trouvait du froment dans
toutes les parties de la Gaule celtique et de la Belgique.
Dans la Gaule celtique , il s'en procure chez les Aedui ,
chez les Sequani et chez les Lingones (3) , c'est-à-dire dans
la région orientale de cette contrée. L'armée romaine en
trouve aussi à l'ouest : P. Crassus, prenant avec la septième
légion ses quartiers d'hiver chez les Andeccwi que César ap-
pelle Andesy et ne pouvant réunir chez eux les approvision-
nements nécessaires, envoie chercher le reste, notam-
ment du froment, chez les Esubii, les Curiosolites et les
Veneti {i). La région centrale de la Celtique fournit aussi
du froment aux Romains : César fait observer quAvaricum
est situé au milieu d'une campagne très fertile (5), et quand
il a commencé le siège de cette place, Vercingétorix entame
les hostilités en faisant attaquer les détachements romains
qui vont chercher aux environs du fourrage et du fro-
(1) « Ipsos res frumentaria deficere coepit, eoncilio convocato constitue-
runt optimum esse , domum suam quemque reverti. » {De bello gallico, II,
10, 1 4.)
(2) c Frumenta ex agris in oppida comportant. » (De bello g&llico^ III,
9, l 8.)
(3) Arioviste veut couper les vivres à César : « Uti frumento commeatuque
qui ex Sequanis et Aeduis supportaretur , Gaesarem intercluderet, > [De
bello gallico^ I, 48, { 2.) Dans la même campagne, César s'approvisionne
chez les Sequani et les Lingones : n Frumentum Sequanos... Lingones
subministrare » (tbtd., I» 40» § 11). Plus tard : « Q. Tullium Ciceronem et P.
Sulpicium Cabilloni et Matiscone in Aeduis ad Ararim rei frumentariae
causa collocat » (ibid., VII, 90, § 7).
(4) « Praefectos tribunosque militum complures in finitimas civitates fni-
menti causa dimisit , quo in numéro est T. Terrasidius missus in Esubios ,
M. Trebius Qallus in Curiosolitas, Q. Velanius cum T. Silio in Venotos. »
{De bello g&llico, III, 7, U 3-4.)
(5) c Agri fertilissima regione. » (De bello gàllico, VII, 13, { 3).
AGRICULTURE EN GAULE. 73
ment (1). Pendant quelques jours, les soldats romains furent
réduits à ne se nourrir que de viande. Pour leurs estomacs
italiens, c'était la famine poussée à ses extrêmes limites;
mais, suivant leur général, ils ne montrèrent jamais plus
de grandeur d'âme ; dans cette rude épreuve , ils ne firent
pas entendre une plainte, il ne sortit pas de leur bouche
une parole indigne de la majesté du peuple romain et de
leurs précédentes victoires (2). Cette disette momentanée
fat le résultat des opérations militaires faites par Vercin-
gétorix; car la région était abondamment pourvue de fro-
ment.
La Gaule Belgique produisait aussi du froment. Les Leixi
en fournissent aux Romains , pendant la guerre contre
Arioviste, 58 (3). Dès le début de la première campagne de
Belgique, 57, les Rémi promettent du froment à César (4).
À la fin de la campagne de Tannée 54 , César, sachant que
le froment n'avait été généralement récolté qu'en petite
quantité dans la Gaule , disperse ses légions afin qu'elles
trouvent partout sur place les vivres nécessaires; il met
dans la Belgique sept légions et demie, dont une chez les
Moriniy une chez les Nervii^ une chez les Remif une et
demie chez les Eburones, trois chez les Bellovaci (5) ; il avait
alors à Samarobriva, chez les Ambiani, une réserve de
froment recueilli sans doute dans les environs (6). D'autres
faits de guerre établissent l'importance de la culture du
froment chez les Belges. Ainsi, dans la campagne de l'an-
(1) 9 Omnis nostras pabulationes frumentationesque observabat , disper-
sosque... adoriebatur. » (De bello gallico, VII, 16, { 3.)
(2) a Usque eo ni eomplures dies frumento milites canierint, et pecore ex
longinqnioribns vicis adacto extremam famem sustentarent. NuUa tamen
Toz est ab eis audita, populi romani majestate et superioribus victoriis in-
digna. 1 (De bello gallico^ VII, 17, 2 3.)
(3) « Pramentum... Leucos... subministrare. » (De béllo gallico^ l, 40, 2 ^^O
(4) « Paratos esse... frumento ceterisque rébus juvare. » (De bello gal-
lico, n, 3, 2 3.)
(5) De bello gallico, V, 24, 2 2.
(6) c Samarobrivae... frumentum omne quod eo tolerandae hiemis causa
devexeral relinquebat. 9 (De bello gaUico^ V, 47» 2 2)
74 LIVRE I". CHAPITRE IV. { 1.
née 55, les Romains dévastent les champs des Mennpii et
coupent leur froment (1). Pendant Tannée 54, des cavaliers
germains vont chercher du froment chez les Ambivaritiy
sur la rive gauche de la Meuse (2). Quand, en Tannée 53,
César fit saccager le pays des Eburones , les froments de
ce malheureux peuple furent partie mangés, partie dé-
truits (3).
Il 7 avait cependant en Belgique, à côté des champs de
blé, de nombreuses forêts. L'une d'entre elle existe encore
sous le nom que lui donne César ; c'est la forêt d'Ardenne,
autrefois Arduinna ; elle commençait au Rhin à Test, cou-
vrait une partie du territoire des Treveri^ atteignait à l'ouest
celui des Remi^ au nord celui des Nervii et TEscaut; c'était
la plus grande de toute la Gaule (4) ; on Thonorait comme
une divinité et après la conquête romaine elle fut assimi-
lée à Diane (5). La Gaule renfermait bien d'autres forêts ,
principalement en Belgique. Ainsi César, lors de sa dernière
campagne, en 51, trouve les Bellovaci et leurs alliés cam-
pés sur une colline, au milieu d*une forêt qu'un marais en-
veloppait (6). Les forêts des Eburones (7), celles des Mench-
pii (8), des Morini (9) et des Nervii (10), tiennent une grande
place dans le récit des opérations militaires qui eurent lieu
chez ces quatre peuples.
Les forêts de la Celtique paraissent avoir été moins
(1) c Omnibus eorum agris vastatis, framentis succisis. » (De bêllo g^llico,
IV, 38, { 3.)
(2) « Magnam partom equitatus... praedandi frumentandique causa ad
Ambivaritos trans Mosam missam. » (De bello gallico, IV, 9, { 3.) c Qui fni-
montandi causa ierant trans Mosam » (tbtd., IV, 12, { 1 ; cf. IV, 16, { 2).
(3) « Frumenta non solum a tanta multitudine jumentorum atque hominum
consumebantur sed, etiamanni temporo atque imbribus procubuerant. » {De
bello gallico, VI, 43, { 3.)
(4) De bello g&llico, V, 3, | 4; VI, 29, | 4; 51, § 2; 33, { 3.
(5) Corpus inscriplionum laiinarum, t. VI, n* 46; cf. Brambach, Inscrip-
Hones rhenanae, n* 589.
(6) De bello gallico, VIII, 7, { 4; cf. c. 12, g 1 ; 18, { 1 ; 19, 1 1.
(7) Ibid., V, 32, î 1 ; 37, { 7; VI, 30, l 3; 34, J 2; 37, { 2.
(8) ma., III, 28, 29 ; IV, 38 ; VI, 5.
(9) I6id., III, 28, 29.
(10) /5W., II, 18, 19 ; V, 39, 52,
AGRICULTURE EN GAULE. 75
considérables. Cependant le récit de César nous en montre
chez les Arvemi près de Gergovia (1); chez les BHuriges^
près d'Avaricum (2) ; chez les Cadurci , dans le voisinage
d'Uxellodunum (3); chez les CamuteSy qui, fuyant devant
César, se réfugient dans }es bois et en sont chassés par les
rigueurs de Thiver (4) ; chez les Senones dont les bois ser-
vent d*asile aux soldats vaincus de Camulogenus (5); chez
les Sequani dont les bois abritent les Tigurini qui échap-
pent aux légions de César (6) : ces bois des Sequani de-
viennent ensuite par leur étendue une cause d*effroi pour
les Romains au début de la guerre contre Ârioviste (7).
Mais les forêts de la Gaule semblent avoir été considé-
rées comme dépourvues de valeur. La portion du territoire
à laquelle on attribue du prix au temps de César est celle
qui est cultivée, ce sont les champs, agri. Ainsi, quand au
conseil de guerre tenu par les défenseurs d'Alise, peu de
temps avant la capitulation, TArverne Critognatus rappelle
la guerre des Cimbres et les maux affreux qu*elle avait
amenés, il ajoute que ce peuple est parti laissant aux Gau-
lois leurs lois, leurs champs, agros, et leur liberté, et que
dans ces champs les Romains veulent s'établir pour impo-
ser au peuple qui les habite une servitude sans fin (8) ; des
forêts de la Gaule, Critognatus ne dit pas un mot.
Les Germains contemporains de César ont pris ou veu-
lent prendre aux Gaulois non pas des forêts, mais des
champs; ils aiment les champs des Gaulois (9); une des
raisons pour lesquelles César force les Helvètes vaincus à
retourner dans leur pays est, dit-il, la crainte que séduits
(1) De bello g^llico, VII, 44, { 3; 45, { 5.
(2) /6id., VII, !6. I 1 ; 18. { 3.
(3) Ibid., VIII, 35, 1 3.
l4) Ibid., VIII. 5, I 4.
(5) Ibid., VII. 62. i 9.
(6) Ibid., I, 12, 1 3.
(7) Ibid., I, 39, i 6.
(8) Ibid., VII, 77, I 5,
(9) c Agroft... GaUorum... adaniMseat. » {De bello gMllico, I, 91, | ^\
76 LIVRE !••. CHAPITRE IV. | 1.
par la bonne qualité de leurs champs , les Germains ne
viennent s'y établir (1). Arioviste , lisons-nous ensuite , a
forcé les Sequani à lui abandonner le tiers de leur ager
qui est le meilleur de toute la Gaule ; et au moment où les
Gaulois terrifiés sollicitent Tintervention de César, le roi
barbare vient d'enjoindre aux malheureux Sequani de lui
céder un second tiers de cet ager (2). Quand Arioviste,
vaincu par les Romains, a été contraint de s'enfuir, on voit
apparaître d'autres Germains qui demandent des champs ,
agros, et César leur répond qu'il n'y en a pas de vacants (3).
Ce sont aussi les champs et non les bois qu'entre peu-
ples gaulois on se dispute. Ainsi, avant l'arrivée de César,
les Sequani , grâce à l'appui d' Arioviste , s'étaient emparés
d'une partie des champs des Aedui (4). Les Bellovaci parlent
à César avec envie des champs fertiles que possèdent les
SuessiùneSj leurs voisins (5).
Les Aedui y ayant besoin d'auxiliaires dans leur lutte
contre les Sequani , espèrent en trouver parmi les Boii que
l'audace entreprenante des Helvetii avait entraînés en Gaule.
Us établissent ces Boii dans leur territoire et leur donnent,
moyennant une redevance annuelle, des champs, agros (6),
où ceux-ci fondent un Etat gaulois nouveau.
Le récit des opérations militaires , qui sont le principal
objet des Commentaires de César, nous offre de fréquentes
mentions des champs des Gaulois. Ainsi, dans la Celtique,
(1) c Ne propter bonitatem agrorum, Germani... in Helvetiorum fines
transirent. » (De bello gallico^ I, 28, g 4.)
(2) Tertiam partem agri Sequani qui esset optimus totius Galliae occupa-
visset et nunc de altéra parte tertia Sequanos decedero juberet. » (De bello
g&llico, I, 31, i 10.)
(3) De bello gallico, IV, 7, § 4 ; 8, 2 2.
(4) « Partem finitimi agri per vim occupatam possiderent. » (De bello gai-
lico , VI , 12, 2 4). Le même fait est rappelé plus loin par l'expression mul-
tàtoi agris, VII, 54, 2 4.
(5) a Suessiones... feracissimos agros possidere. » (De bello gallico, II,
4, S 6.)
(6) c Quibus illi agros dederunt. » (De bello gallico, 1 , 28, 2 ^0 César ap-
pelle les Boii, « stipendiarii Àeduorum » (De bello gallico, VII, 10, 2 !•)
AGRICULTURE EN GAULE. 77
nous voyons les Helvetii ravager les champs des Aedui (1) ,
les Ymeti transporter des champs le froment dans les op-
pida (2). César invite les Aedui à venir en Belgique ravager
les champs des Bellovaci (3) ; dans la même partie de la
Oaule, son armée dévaste les champs des Morini et des
Menapii (4) ; les Menapii qui avaient des champs sur les
deux rives du Rhin abandonnent aux Germains ceux qui
étaient sur la rive droite (5) ; Indutiomarus , chef des 7V«-
um, annonce qu'il viendra ravager les champs des Rémi (6);
César dévaste ceux des Nervii et par là les contraint à la
soumission (7).
Alors donc Tagriculture était un facteur important de la
civilisation Gauloise, et la Gaule avait sur la Germanie
une grande supériorité agricole ; ajoutons que , si Ton en
croit César , le développement de l'agriculture en Grande-
Bretagne, à cette date , était dû à la colonisation de cette
lie par les Gaulois du continent (8).
§ 2. — Les lieux habités.
A. — Fict.
Si nous nous en rapportons à Polybe , les Gaulois qui
envahirent l'Italie au quatrième siècle groupaient leurs ha-
bitations en villages sans murailles (9). Nous devons inter-
(1) c In Aeduomm fines pervenerant , eorumque agros populabantur. »
[ùt bello gallico, 1, 11, { 1.)
(^) De bello gallico, III, 9, { 8.
(3) Ibid., II, 5, i 3.
(4) t Vastatis omnibns eoram agris. » {De bello gàllico, III, 29, { 3, { 3.)
(5) De bello çaIHco, IV, 4, { 3.
(6) Ibid,, V, 56, i 5.
0) « Vastatisqne agris, in deditionem venire atque obsides sibi dare coe-
git. • (De bello gàllico, VI, 3, { 2.)
(8) c Britanniae... incolitur... maritima pars ab iis qui praedae ac belli in-
ferendi causa ex Belgio transienint... et beUo iUato ibi permansenint atque
agn>8 colère coeperunt. » (De bello gallico , V, 12, 1 1-2.) « Interiores pie-
riqtie framenta non serunt » {Ibid,, V, 14, | 2).
(9) • *Qxouv Sa xaxà xib|iac àxuxiarwç » (Polybe, livre II, c. XVii, | 9 ; 2* éd.
Didot, p. 80.
78 LIVRE !•'. CHAPITRE IV. | 1
prêter ce texte en ce sens que tel était encore l'usage des
Gaulois dltalie au temps de Fabius Pictor, à la fin du
troisième siècle. Dans ces villages sans murailles de la
Gaule Cisalpine, dont parle Polybe, nous devons recon-
naître des groupes d'habitations analogues aux vici transal-
pins dont il est souvent question chez César.
Ainsi, au début de la guerre, en 58, les Helvetii ont quatre
cents vici qu'ils brûlent avant de quitter leur pays (1) et
que César vainqueur leur ordonne de rebâtir (2) ; les Allô-
broges ont des vici sur la rive droite du Rhône et les Hel-
vetii les détruisent (3). Les Belges coalisés en Tannée 57
brûlent tous les vici des Rémi qu'ils peuvent atteindre (4).
L'année suivante, Servius Galba avec huit cohortes de la
douzième légion s'établit pour hiverner dans un vicus des
Veragri qui est appelé Octodurus; il prend pour lui et pour
ses soldats une partie du vicus et il en chasse les habitants
qu'il oblige à se réfugier dans l'autre partie de ce vicus (5).
La même année. César brûle les vici des Morini et des
Menapii (6). Les Menapii avaient des vici sur les deux rives
du Rhin (7) ; en l'année 53 , César brûle ceux qui étaient
sur la rive gauche (8) ; il traite de même ceux des Eburo^
nés (9). Vercingétorix , au début de la grande lutte de
l'année 52 , prescrit de brûler les vici où les Romains pour-
(1) De bello gallico, I, 5, | 1. Quatre cents vici pour 263,000 habitants
supposent par viens 656 habitants , s'il n'y avait pas d'habitants dans les
édifices agricoles isolés. Les Raurici, les Tulingi et les Latovici avaient
aussi des vici qu'ils brûlent (tbtd., | 4).
(2) Ibid., I, 28. 2 3.
(3) Ibid,, I, il, i 5.
(4) Ibid., II, 7, i 3.
(5) Ibid,, III, 1, l 4-6. Le nom d*Octoduru8 désigne, à proprement parler,
un point fortifié ; mais il n'y avait probablement de fortifié que l'habitation
d'un chef et cette habitation avait donné son nom à un groupe d'habita-
tions moins importantes qu'aucune enceinte ne protégeait. Tcla étaient,
au moyen âge, les villages bâtis autour des châteaux.
(6) Ibid., III, 29, { 3.
CT) Ibid., IV, 4, i 3.
(8) Ibid., VI, 6, i 1.
(9) Ibid., VI, 43, I 2.
LIBUX HABITÉS EN GAULE. 79
ront trouver du fourrage (1) ; pendant le siège d'Avaricum ,
c'est dans les vici épargnés par les Gaulois que César
troavele bétail nécessaire à la nourriture de son armée (2).
Durant la dernière campagne, en 51, les Camutes aban-
donnent leurs vici (3}.
Ainsi , les Oaulois , au temps de César , possédaient un
certain nombre de vici, c'est-à-dire de villages ou de bourgs
non clos de murs et semblables à ceux qui faisaient Thabi-
tation exclusive de leurs compatriotes italiens du troisième
siècle dont Polybe nous parle. Mais ce n'était pas tout. Ils
avaient des villes fortes que César appelle oppida ordinai-
rement, et quelquefois urbes. Ils avaient aussi des maisons
isolées I aedificia,
B.^ Oppida.
L'usage des lieux fortifiés appelés oppida par les Romains
existait déjà en Gaule au temps de la guerre des Cimbres,
c'est-à-dire à la fin du second siècle avant notre ère (4) ;
au siège d'Alésia, Critognatus rappelle à ses compatriotes
qu'à l'époque où les Cimbres et les Teutons avaient envahi
la Gaule, les guerriers gaulois, réfugiés dans les oppida et
souffrant les plus extrêmes rigueurs de la faim, avaient été
réduits à se nourrir de chair humaine (5).
César distingue deux sortes à! oppida. Les oppida des
Bretons consistent en une portion de forêt dont une levée
de terre garnie de palissades et précédée d un fossé interdit
l'accès ; c*est un lieu de refuge momentané où l'on cherche
un abri contre les incursions de l'ennemi (6). Mais les
(1) De bello g&llico, VII, 14, { 5.
P) Jbid., VIL 17, I 3.
(8) 16W.. VIII. 5, i 1.
(4) La défaite du consul M. Julius Silanus , envoyé pour protéger le ter-
ritoire des AUobrogos, eut lieu Tannée 109 avant notre ère.
(5) De bello gtUlico, VII, 77, { l^-
(6) • Oppidum autem Britanni vocant cum silvas impeditaa vallo atque
fossa munierunt, quo incursionis hostium vitandae causa convenire consue-
mat. • (De beUo gallico, V, 21, i 3.)
M
80 LIVRE I-. CHAPITRE IV. { 2.
oppida de la Gaule sont de vraies villes : des murailles
percées de portes les entourent; elles contiennent des
maisons où vit une population stable, ce qui ne les empêche
pas d'offrir, en cas de guerre, un refuge aux habitants des
campagnes voisines, non seulement pour eux-mêmes, mais
aussi pour leurs troupeaux, leurs approvisionnements et le
reste de leur avoir mobilier.
Deux passages intéressants des Commentaires de César nous
expliquent comment les Gaulois construisaient les murailles
qui interdisaient rentrée de leurs oppida (1). Les portes
dont ces murailles étaient percées se fermaient en cas de
guerre, comme celles des oppida possédées par les Aulerci
Eburovices et les Leœovii en Tannée 56 (2) ; dans le récit du
siège d'Avaricum, il est souvent question des portes percées
dans les murailles de cet oppidum (3). Derrière les murailles
des oppida^ il y a des maisons : en 51, César faisant camper
son armée dans Voppidum de Cenabum, chez les Carnutes^
y loge une partie de ses soldats dans les maisons des
Gaulois (4) ; l'incendie des oppida exécuté chez les Helvètes
en 58 (5) , prescrit d'une façon générale par Vercingétorix ,
en Tannée 52 (6), suppose des maisons dans les oppida ; et
ce qui l'établit d'une façon formelle, ce sont les expressions
dont se sert Tauteur latin pour nous faire connaître comment
(1) Dans le premier , il est question de Voppidum , où se réfugièrent les
Aduatuci : « Quod cum ex omnibus in circuitu partibus altissimas nipes
despectusque haberet, una ex parte Icniter acclivis aditus in latitudinem
non amplius ducentonim pedum relinquebatur; quem locum duplici altis-
simo muro munierant ; tum magni ponderis saxa et praeacutas trabes in
muro collocabant. » (De bello gallico, II, 29.) L'autre passage, plus détaillé,
se trouve au livre VII, c. 23; il est trop long pour être rapporté ici.
(2) « Aulerci Eburovices Lexoviique... portas clauserunt. » (De bello gàl-
lico, III, 17, i 3.)
(3) De bello g&llico, VII, 24, 25, 28, 47, 50.
(4) « Gaesar... in oppido Carnutum Cenabo castra ponit atque in tecta
partim Galloruro partim quae collectis celeriter stramentis (tentoriorum in-
tegendorum gratia) erant inaedificata milites compegit. » (De bello g&llico ,
VIII, 5, l 1.)
(5) De bello gallicOy 1 , 5, { 2; cf. 28, { 3 : a Oppida sua omnia numéro
ad duodecim incendunt. »
(6) f Oppida incendi oportere. » (De bello gallico^ VII, 14, | 9.)
UEVX HABITÉS EN QAULE. 81
chez les Bituriges cet ordre fut exécuté. En un jour, chez
ce peuple, on brûla plus de vingt villes, urbes (1). UrbSj en
Gaule, est synonyme d'oppidum : voilà pourquoi les trois
oppida d'Avaricum, de Gergovia et d'Alésia sont désignés
chez César, non seulement par le nom à! oppidum^ mais
aussi par celui d'urbs (2).
Le mot latin wrbs suppose non seulement des maisons,
mais une population permanente qui les habite en temps
de paix. Cette population permanente des oppida apparaît
dans le passage où César, racontant un usage de la Gaule,
dit que les marchands dans les oppida sont entourés de la
foule qui les questionne sur les pays d'où ils viennent , et
qui leur fait «raconter les nouvelles qu'ils y ont apprises (3).
C'est la population permanente des oppida qui attire dans
ces oppida les négociants romains pendant les campagnes
de César, par exemple à Cenabum, chez les Commutes (4),
à Cabillonum (5) et à Noviodunum (6) chez les Aedui ; ces
négociants furent massacrés dans l'insurrection de l'an-
née 52.
Les oppida sont beaucoup moins nombreux que les vici :
chez les Helvetii, on compte quatre cents vici contre douze
oppida : un oppidum pour trente-trois vici. Comme chez
les Helvetii , il y a , chez les Suessiones , douze oppida ; on
en trouve plus de vingt chez les Bituriges.
Les peuples de la Gaule, tant Celtique que Belgique où
(1) « Uno die y amplius viginti nrbes Biturigum incenduntur. » (De bello
gillico, VII, 15, ! 1.)
(2) Pour Avaricum, y oyez De bello g&llicOy VII, 15, g 3, 4. Pour Gergovia,
iWd., vu, 36, î 1 ; 47, } 4. Pour Alesia, VII, 68, g 3.
(3) c Hoc gadlicae consuetudinis uti... mercatores in oppidis volgus cir-
cnmsistat quibusque ex regionibos veniant quasque ibi res cognoverint
pronuntiare cogant. » (De bello gallico, IV, 5, g 2.)
(4) « Cenabam... cives romanos qui negotiandi causa ibi constiterant... ,
interficiunt, bonaqne eorum diripiunt. » {De bello gallico, VII, 3, g 1.)
(5) a Ex oppido Cabillono educunt... qui negotiandi causa ibi constite-
rant. > (De bello gallico, VII, 42, g 5.)
(6) « Interfectis Novioduni custodibus quique eo negotiandi causa conve-
aenat {De belh gallico, VII, 55, g 5.)
6
«2 LIVRE !•'. CHAPITRE IV. { 2.
nous pouvons signaler des oppida sont au nombre de vingt-
cinq, savoir dix-neuf dans la Celtique : Aedui, Ambarri,
Arverni, Aulerciy Bituriges^ Biri, Cadurci^ Camutes^ Curioso-
lites, Elvetii, EsuAii, Lexovii, Mandubil^ Parisii^ Ptctones^
Raurici, Senones, Sequani^ Veneti; six dans la Belgique :
Aduatuci, Bellovaci, Eburones^ Nervii , Remif Suessiones,
plus un peuple d'Aquitaine, les Sontiates.
Nous suivrons Tordre alphabétique :
Aduatii4)i. Ils avaient des oppida dont César ne nous fait
point connaître le nombre. L'auteur latin leur attribue
aussi des castella qui seraient des points fortifiés d'une im-
portance moindre. Ils abandonnèrent à Tennemi tous leurs
castella et même leurs oppida, à l'exception d'un qui était
assez considérable pour que Ton ait pu, après plusieurs
combats meurtriers dans Tun desquels quatre mille guer-
riers Aduatuques périrent , y faire encore cinquante-trois
mille prisonniers. César donne des détails intéressants sur
la double muraille de cette forteresse et parle deux fois
des portes dont cette muraille était percée (1).
Aed^i. Ce peuple possédait un nombre d' oppida qui n'est
pas indiqué et Sont quelques-uns furent pris par les Hel-
vetii en 58 (2). Cependant il ne parait pas que les Germains
ou les Sequani en eussent enlevé aucun aux Aedui dans la
guerre des années précédentes (3). Trois oppida des Aedui
sont nommés par César ; ce sont Bibracte , Cdbillonum et
Noviodunum. — Bibracte était le plus important des trois :
c'était même le plus grand , le plus riche , le mieux appro-
visionné de tous les oppida de ce peuple. Nous voyons le
général romain à la poursuite des Helvetii se détourner de
sa route dans l'espérance de trouver à Bibracte le froment
nécessaire à la nourriture de ses soldats (4). Bibracte chez
(1) De bello gallicOj II, 29-33; cf. p. 80, note 1.
(2) « Oppida expugnari non debucrint. » (De bello gallico^ l, 11, | 3.)
(3) « Compulsos in oppida. » (De bello gallico, VII, 54» g 4.)
(4) « Gum exercitui frumentum metiri oporteret, et quod a Bibracte, op-
pido Aeduonim longe maximo et copiosissimo, non amplius passuum octo-
dccim aberat..., Bibracte iri contendit. » (De bello g&llico, I, 23, {1.)
LIEUX HABITÉS EN QAULE. 83
les Aedui semble avoir été une sorte de capitale (1) : quand
en l'année 52 , les Aedui abandonnent la cause romaine et
se laissent entraîner dans le parti opposé dont Vercingéto-
rix est le chef, un des faits principaux par lesquels le chan-
gement des esprits se manifeste est la réception à Bibracte
de Litaviccus, partisan de Vercingétorix, et quelque temps
auparavant obligé à se réfugier à Gergovie chez les Arver-
nes (2) ; Convictolitavis , magistrat suprême de la cité ,
c'est-à-dire vergobret , et une grande partie du sénat des
Aedui viennent trouver Litaviccus à Bibracte ; c'est de là
qu'ils envoient des ambassadeurs à Vercingétorix ; c'est là
qu'on amène à Convictolitavis les otages que César s'était
fait livrer par les peuples de la Gaule , comme garantie de
leur fidélité (3) ; une assemblée générale de toute la Gaule
y est convoquée et s'y réunit, et Vercingétorix y est élu
général en chef (4) ; quelques mois après , César, vain-
queur de Vercingétorix, prend, à Bibracte, ses quartiers
d'hiver (5). — Cabillanum parait avoir été moins important :
quand les Aedui commencèrent à se tourner du côté de
Vercingétorix , en 52 , un de leurs* premiers actes fut de
chasser les négociants romains de VoppidAAm de Cabillonum
où ils s'étaient établis et de les massacrer en route (6) ;
c'est aujourd'hui Chalon-sur-Saône. — Noviodunum, autre
oppidum des Aedui^ probablement Nevers, était en quelque
sorte en 52 la capitale romaine de toute la Gaule ; César y
avait placé ses approvisionnements de froment, la caisse
centrale de l'armée, les chevaux achetés pour sa cavalerie,
les otages qui lui garantissaient la fidélité des peuples vain-
cus ; des marchands romains s'y étaient installés ; une gar-
nison protégeait le tout ; cette garnison fut massacrée par
(1) « Bibracii quod est oppidum apud eos maximae auctoritatis. p (De bello
gàllico, VII, 55, i 4.)
P) De bello gallico, VII, 40, ( 7.
(3) Ihid,, VII, 55, i 4, 6.
(4) Ibid,, VII, 63, i 5.
(5)i6W„ VII, 90, Î8; VIII, 2, J l.
(6) /6id., VII, 42, J5, 6.
84 LIVRE I-. CHAPITRE IV. | 1
les Gaulois qui s'emparèrent de Voppidum et de ce qu'il
contenait, et livrèrent Yoppidwm aux flammes (1).
Les Ambarri, clients des Aedui , avaient des oppida que
les Helvetii attaquèrent pendant la campagne de Tan-
née 58 (2).
Arverni. Chez eux était le fameux oppidum de Oergovia
près Clermont-Ferrand, assiégé, pris par César en 52 ; Cé-
sar qualifie ordinairement cette localité d*oppidum ; mais il
Fappelle aussi urbs (3).
Aulerci Eburovices. Ce peuple avait des oppida dont il fit
fermer les portes en 56 , quand il se prépara à la guerre
contre les Romains (4).
Bellovaci. Dans la campagne de Tannée 57 , les Bellova^i
paraissent avoir abandonné, sans aucun essai de résistance,
leur territoire aux Romains, sauf Voppidum de Bratus-
pantium où ils s'étaient réfugiés tous. Or ils pouvaient met-
tre cent mille hommes sous les armes (5) , ce qui suppose
une population de quatre cent mille âmes réunie dans
Tenceinte de Bratuspantium. Mais probablement ils man-
quaient de vivres, aussi demandèrent-ils la paix, en sorte
qu'en approchant, les Romains virent sur les remparts , au
lieu de guerriers, des femmes et des enfants qui leur ten-
daient des mains suppliantes (6).
Bituriges. Ce peuple avait beaucoup d'oppida (7). César
en nomme deux : Avcmcum et Noviodunum. Il donne au
premier non seulement la qualification d'oppidum j mais
(1) De bello g^lico, VU, 55. César, ibid.y VII, 33, { 2 ; 90, { 7, menUozme deux
autres localités dépendant des Aedui. C'est d'abord Decetia; il y réunit, en
52 , le sénat des Aedui et y tint une sorte d*assemblée générale de la cité,
n ne nous dit pas si Decetia était un oppidum ou un vicus, — La même
observation peut être faite au sujet de M&tisco , Mâcon , où une partie des
troupes romaines prirent leurs quartiers d'hiver à la fin de Tannée.
(2) De bello gallico, I, 11, { 4; 14, { 3.
(3) Ibid., VII, 36, l 1 ; 47, | 4.
(4) Ibid., III, 17, i 3.
(5) Zbid., II, 4, { 5.
(6) Ibid., II, 13, g 3.
(7) ff Gum latos fines et complura oppida haberent. c (De bello gëUico ,
VIII, 2, i 2.)
LIEUX HABITÉS EN GAULE. 85
aussi celle de ville, urbs; c'était à peu près la plus belle
de toute la Gaule. Ou évaluait à quarante mille personnes
la population abritée derrière ses murs ; toutes , sauf huit
cents, furent massacrées par les Romains irrités de leur
révolte (1), Parmi les oppida des Bituriges, Avaricum ne
méritait pas seul le titre d'urbs ; plus de vingt autres, nous
dit César, étaient des villes, urbes^ et on fit le sacrifice de
les brûler pendant la grande insurrection de Tannée 52 (2).
Malheureusement César ne nous dit pas le nom de ces
vingt villes ou oppida des Bituriges , un seul excepté , qui
s'appelait Noviodunum et dont les Romains s'étaient em-
parés au début de la campagne (3).
Boii. Ce petit peuple, dont rétablissement en Gaule date
de Tannée 58, avait un oppidum qui s'appelait Gorgobina.
Vercingétorix voulut le prendre (4). César lui fit lever le
siège (5).
Cadwci. Chez eux se trouvait Toppidum (ï Uxellodunum^
qui était dans la clientèle de Lucterius c'est-à-dire dont les
habitants étaient clients de ce chef gaulois lorsqu'il prit
les armes contre les Romains, en Tannée 51. Le continua-
teur de César raconte longuement comment cette place fut
approvisionnée, assiégée, défendue et prise, et comment
César, dont il vante la clémence politique, laissa la vie
aux vaincus, mais ordonna de couper les mains à tous ceux
d'entre eux qui avaient porté les armes, et fit ainsi de
chacun d'eux un témoin de sa vengeance (6).
Camutes. En Tannée 51 , terrifiés par Tannonce de la
prochaine arrivée de César, ils abandonnent les oppida où
ils s'étaient réunis , se dispersent dans les bois et finissent
(1) c Pulcherrimam prope totius Galliae urbem quae praesidio et orna-
mento sit civiUU. » (De bello gallico, VII, 15, } 4; c. 28, § 4.)
(2) a Uno die ampUus viginti urbes Biturigum incenduntur. » (De bello
gàlUco, VII, 15, î 1.) •
(3) De belU) gallico, VII, 12, 13.
(4) ma., VII, 9, t 6.
(5) Ibid,, VII, 12, § 1.
(6) Ibid,, VIII, 32-44.
86 LIVRE I". CHAPITRE IV. | 2.
par se réfugier chez les peuples voisins. César explique à
ce propos que les Camutes avaient un certain nombre d'op-
piday qu'à la suite des revers subis par eux Tannée précé-
dente (1) ils en avaient abandonné une partie, s'étaient
concentrés dans les autres et dans plusieurs vici, et habi-
taient fort à l'étroit de petites maisons construites à la hâte
pour résister aux rigueurs de Fhiver (2). Il n'y a qu'un de
leurs oppida dont le nom nous soit connu : Cenabum , où
s'étaient établis des négociants romains dont le massacre
donna le signal de la grande insurrection de l'année 52 (3).
César, irrité, parut presque immédiatement sous les murs
de Cenabum. Après en avoir fait brûler les portes , il pé-
nétra avec son armée dans l'intérieur des fortifications.
Pour venger les citoyens romains qui avaient été mis à
mort dans cet oppidum, ses soldats massacrèrent non seu-
lement les hommes, mais encore les femmes et les enfants.
Après avoir enlevé le butin, les Romains livrèrent les
maisons aux flammes (4). L'année suivante, César revint
dans cet oppidum avec deux légions qu'il y fit camper.
Les Gaulois avaient rebâti les maisons brûlées l'année
précédente. Une partie des soldats s'y logea; les autres
s'établirent dans des cabanes construites à la hâte (5).
Curiosolites. C'est un des trois peuples qu'en l'année 56
César nous montre fortifiant leurs oppida et y réunissant
des approvisionnements de froment (6).
Eburones. Quand César , en l'année 53 , eut entrepris de
(1) De bello gallico, VII, 11.
(2) a Desertis vicis oppidisquc, quae tolerandao hiemis causa constitutis
repente exiguis ad noccssitatem aedifîciis incolobant (nuper enim devicti
complura oppida dimiserant), dispersi profugiunt. v (De bello gallico^ VIII,
5, i 1.)
(3) De bello g&llico, VII, 3, § 1 ; 17, g 7. *
(4) « Oppidum diripit atque incendit. » (De bello gallico, VII, 11, } 9;
cf. 28, 8 4).
(5) « In oppido Carnutum Cen&bo castra ponit atque in tecta partim Gai-
lorum, partim quae collectis celcriter stramentis... erant inaedificata, milites
compegit. » (De bello gallico, VIII, 5, § 2.)
(6) a Oppida muniunt... frumenta ex agris in oppida comportant. » (De
bello gallico, III, 9, { 8 ; cf. 6, g 4; 8, g 3.)
LIEUX HABITES EN GAULE. 87
détruire ce peuple obscur (1), qui lui avait infligé l'humilia- I
lion d'extenniner un corps de troupes de quinze cohortes i
ou d'une légion et demie , il ne trouva pas d'oppidum qui
lui résistât (2). Il ne nomme qu'un de ces oppida^ auquel il ,
donne le titre de castellum; c'est AduaPuca, point central
de la contrée. César y plaça ses bagages sous la garde
d'une légion (3).
Elvetii^ynlgBiTemeni Helvetii. Ce peuple possédait, comme
les Suessiones^ douze oppida qu'il brûla, croyant les aban-
donner pour toujours. César obligea les Helvetii d'y re-
tourner et de les reb&tir ; mais il ne nous donne les noms
d'aucune de ces places fortes (4).
Esubii. C'est un des trois peuples que César nous mon-
tre fortifiant et approvisionnant leurs oppida , au commen-
cement de la campagne de l'année 56 (5).
Leœovii, Ce peuple prit les armes contre les Romains en
l'année 56; après avoir massacré tous les sénateurs qui
s'opposaient à la guerre, les Leœovii fermèrent les portes
de leurs oppida (6).
Mandubii. Chez eux était Alesia , place assez vaste pour
renfermer les quatre-vingt mille soldats de Vercingétorix.
C'est un des oppida que César appelle urbs. Tout le monde
connaît l'histoire du siège célèbre de cette place , dont la
prise rendit définitive la conquête de la Gaule (7).
Nervii. César vainqueur et leur ayant, prétend-il, tué
cinquante-neuf mille cinq cents guerriers sur soixante
mille qu'ils avaient, leur laissa leur territoire et leurs
(1) • Civitatem ignobilem atque humilem. » (De bello gallicOf V, 28, | 1.)
8ar le sens de ces mots, voyez ci-dessus, p. 37.
(2) ff Non oppidum, non praesidium, quod se armis defendoret. » (De bello
gàllico, VI, 34.)
(3) c Impedimenta omnium legionum Aduatucam contulit. Id casteUi no-
men est. Hoc fere est in mediis Eburonum finibus. » {De bello g&llicoy
VI, 32, I 3, 4.)
(4) De bello gallico, I, 5, { 2 ; 28, | 3.
(5) Jbtd., III, 9, l 8.
(6) /Md., m, 17, i 3.
(7) /Md., VII, 68-89.
88 LIVRE I-. CHAPITRE IV. | 2.
oppida dout il ne s'est pas soucié de nous faire connaître
les noms (1).
Poâ^isii, Ils avaient un oppidum que les manuscrits des
Commentaires de César appellent LuteHa. Les Gaulois y
mirent eux-mômes le feu (2). L'année précédente , César y
avait réuni l'assemblée générale des Gaulois (3).
Pictones. Chez eux se trouvait Voppidum Lemon/umt où
Duratius, partisan des Romains, fut inutilement assiégé
en 51 , par Dumnacus , chef des Andecavi (4).
Raurici. Entraînés par l'exemple des Helvetii^ ils brûlent
comme eux leurs oppida en 58 (5).
Rémi. Lors de la coalition des Belges contre les Ro-
mains, en 57, les Rémi ofifrent à César de recevoir ses
troupes dans leurs oppida (6). César nous apprend le nom
d'une de ces places fortes : c'est Bibrax. Les Belges coa-
lisés assiégèrent cet oppidAAm\ mais l'arrivée du général
romain les contraignit à battre en retraite (7). Plus bas ,
César nous parle d'une autre localité située chez les Remi^
Durocortorum ^ où il tint une assemblée générale de la
Gaule en 53. Mais il ne nous dit pas si c'était un oppidum
ou un simple vicus (8).
Senones, En 53 , Acco qui s'est mis à la tète de la résis-
tance contre les Romains chez les Senones , ordonne à la
multitude de se réunir dans les oppida (9) ; mais l'arrivée
rapide de César empêcha la réalisation de cette mesure.
Les Commentaires nous font connaître les noms de trpis
(i) De bello gallico, II, 28.
(2) « Lutetiam... , oppidum Parisiorum quod positum est in insula fla-
minis Sequanae... Lutetiam incendi pontesque ejus oppidi rescindi jubent. »
(De bello gallico y VII, 57, J 1 ; 58 , | 8.) Les manuscrits de Vmnértiire
d'Antonin offrent Luticiaj Luiecta, Lutitia^ Lotica,
(3) De bello gallico, VI, 3, § 4.
(4) Ibid., VIII, 26, 27.
(5) Ibid., I, 5, i 4.
(6) « Oppidis recipere. » (De bello gallicOf II, 3, { 3.)
(7) De bello gallico, II, 6, 7.
(8) Ibid., VI, 44, 8 l.
(9) « Jubet in oppida multitudinem convenire. » (De bello palitco, VI, 4, 1 1.)
LIEUX HABITÉS EN GAULE. 89
de ces appida : 1^ Melodunum^ ou en adoptant une autre
leçon , Meiiosedum^ dans une lie de la Seine ; Labienus s'en
empara dans la campagne de Tannée 52 (1); 2'' Vellav/noA^
ntim , pris par César dans la même campagne , après un
siège de trois jours (2) ; 3^ Agedincum auquel les Commsn^
taires ne donnent ni la qualification d'oppidum , ni celle
de vious , mais qui doit avoir été un oppidum important ,
puisqu*en 53 six légions y prirent leurs quartiers d^hiver (3)
et puisqu'on 52 nous voyons César y laisser deux légions
et tout le bagage de l'armée romaine (4).
Seqifani. En 58 , au moment où César entreprit sa cam-
pagne contre Ârioviste , tous leurs oppida étaient au pou-
voir du roi germain (5). Voilà du moins ce que César rap-
porte , et par une contradiction singulière il nous montre ,
quelques lignes plus loin, Arioviste s'avançant avec ses
troupes pour aller occuper Vesoniio^ le principal oppidum
des Sequani où se trouvait un grand approvisionnement
de munitions de guerres. César prévient Arioviste, s'em-
pare de Vesontio , y met garnison et y reste plusieurs
jours (6).
Sontiatesj peuple de l'Aquitaine; son oppidum fut pris
par Crassus , en 56 (7).
Suessiones. Ils avaient, comme les Helvetii, douze op-
pida (8). Un s'appelait Noviodunum ; César l'assiégea en 57 ;
il fait remarquer que le fossé était large et le mur élevé ,
cependant les défenseurs effrayés se rendirent (9).
Yenetù Ce peuple est, en 56, à la tôte de l'insurrection
des cités armoricaines. Il fortifie ses oppida et y transporte
(1) De beUo g^llico, VII, 58. Cf. 60, 61.
(2) Ibid., VII, 11, § 1.
(3) /ôid., VI, 44, l 3.
(4) Ibid., VII, 10, l 4; 67, 1 1 ; 62, I 10. Cf. 59. | 4.
(5) « Qui intra fines sucs ArioTiBtum recepittent , quorum oppida omma
in potattate ejua essent. b {De beUo gtillico, I, 32, ) 5.)
(6) De bello yaUico, I, 38.
(7) Ibia,, m, 21. 22.
9) ma., u, 4, i 8.
(9) Jbtd,, II, 12.
90 LIVRE !••. CHAPITRE IV. ( 2.
des approvisionnements de froment (1). La plupart de ces
oppida étaient situés sur le bord de la mer, dans des pres-
qu'îles qui devenaient inaccessibles lorsque la marée mon-
tait (2). Quand la guerre commença, les habitants se réfu-
gièrent chacun dans les oppida les plus rapprochés (3);
César en prit plusieurs (4). Puis les Veneti furent vain-
cus dans une bataille navale , alors ils reconnurent qu'ils
ne pouvaient plus défendre leurs oppida et la résistance
cessa (5).
G. — Aedificia,
Outre les vici et les oppida, les Gaulois possédaient des
aedificia épars dans la campagne. La distinction est nette-
ment apparente dans un grand nombre de passages des
Commentaires ; par exemple à propos des Helvetii (6) , des
Menapii (7). Le plan de campagne de Vercingétorix en 52
applique cette distinction à la Gaule entière ; il a pour ob-
jet de réduire les Romains par la famine : « Il faut brûler
les vici et les aedificia où l'ennemi pourrait trouver du
fourrage , il faut brûler les oppida quand on n'est pas sûr
de les empocher de tomber entre les mains de l'ennemi
avec les approvisionnements qu'ils contiennent (8). »
Parmi les aedificia on peut distinguer deux catégories :
la première comprend les maisons de maître, les habita-
(1) De bello gallico, III, 9, { 8.
(2) Ibid., III, 12, Il 1.
(3) « 8eque in proxima oppida recipiebant. » (De bello g&llico, III, 12, 1 4.)
(4) « Compluribus exptignatis oppidis. » (De bello g&llico, III, 14, {1.)
(5) « Neque quemadmodum oppida defenderent, babebant. » (De bello gal-
lico, III, 16, i 3.)
(6) Oppida sua omnia numéro ad duodecim , vicos ad quadringentos , re-
liqua privata aedificia incendunt. » (De bello gallicOy I, 5, { 2.)
(7) a Ad Rhenum pervenerunt, quas regiones Menapii incoiebant, et ad
utramque ripam fluminis agros, aedificia vicosque babebant. o (De bello
gallico, IV, 4, { 3.)
(8) « Vicos atque aedificia incendi oportere..., quo pabulandi causa adiré
posse videantur... praetera oppida incendi oportere, quae non munitione et
loci natura ab omni sint poriculo tuta. » (De bello gallico, VII, 14, { 5, 9.)
LIEUX HABITÉS EN GAULE. 91
tions qui ont précédé les châteaux modernes. Le château
ne se conçoit pas aujourd'hui sans ce qu'on appelle un
parc , un bosquet. Il en était de même au premier siècle
avant notre ère , quand César fit la conquête de la Gaule ;
il nous le raconte à propos de la tentative inutile qu'il fit
en 53 pour s'emparer de la personne d'Ambiorix , chef des
Eburones : Ambiorix fut surpris par un parti de cavalerie
que César envoyait à sa recherche dans un aedificiii/m en-
touré d'un bois, « comme sont, » ajoutent les Commentai-
res^ « presque toutes les demeures des Gaulois (1), » lisons :
des membres de l'aristocratie gauloise.
D'autres acdi/Çcia* étaient des bâtiments d'exploitation
habités par des cultivateurs. Quand César , en 51 , fit sa
dernière expédition contre les Bellovaci^ il envoya en
avant des éclaireurs et ceux-ci lui rapportèrent que dans les
aedificia ils avaient trouvé peu de monde ; les Bellovaci
qu'ils avaient rencontrés dans les aedificia n'étaient pas
des ouvriers agricoles restés pour cultiver les champs,
ceux-là étaient partis, et dans les aedificia il n'y avait que
des émissaires envoyés pour espionner les Romains (2).
Dans ces aedificia étaient logés non seulement les ou-
vriers employés à la culture, mais aussi, avec eux, les
bestiaux et les récoltes. Quand, en 51, César vient à
l'improviste attaquer les Bituriges^ sa cavalerie surprend
les habitants des campagnes avant qu'ils n'aient pu se
réfugier dans les oppida (3). Et comment ce résultat a-t-il
été obtenu? César avait défendu à ses soldats de met-
tre le feu aux aedificia. De là double avantage ; les in-
cendies ne prévenaient pas la population de l'approche des
Romains, et les approvisionnements contenus dans les
(1) a Aedificio circamdato silva, ut sunt fere domicilia GaUomm. > (D«
tello gallico, VI, 30, { 3.)
(2) « Pancos in aedificiis esse inventes, atque hos non qui agrorum colen-
donim causa remansissent (namque esse undique diligenter demigratum),
sed qui speculandi causa essent remissi. » {De beîlo gallico, VIII, 7, 1 3.)
(3) « Accidit... ut sine timoré uUo rura colentes prius ab equitatu opprime-
rentur quam confngere in oppida possent. » {De bello g&llico, VIII, 3, 1 1.)
92 LIVRE !•'. CHAPITRE IV. } 2.
aedificia donnaient à César Tassurance que les chevaux
trouveraient le fourrage nécessaire , ses soldats le froment
dont ils avaient besoin (1). Ordinairement César faisait la
guerre d'une tout autre façon ; il avait pour ses soldats des
approvisionnements préparés d'avance ou fournis par les
alliés; il trouvait dans les champs elles prés la nourriture
de ses chevaux : il n'avait par conséquent aucune raison
pour ménager les aedificia de Tennemi.
En 56 , César dévaste tous les champs des Morini et des
Menapii ; il brûle leurs vici et leurs aedificia (2). L'année
suivante les Menapii reprennent les armes ; deux lieutenants
de César saccagent leurs champs, coupent leur froment,
brûlent leurs aedificia (3). Cette opération est renouvelée
contre le même peuple en 53 : César brûle les aedificia et
les vici des Menapii et leur prend une grande quantité de
bestiaux et d'hommes (4). Les Eburones subissent aussi ce
dur traitement : tous les vici et tous les aedificia que l'ar-
mée romaine trouve sur sa route sont brûlés (5).
Quand les Gaulois faisaient la guerre aux Gaulois ils pro-
cédaient avec la môme rigueur : en l'année 57, les Rémi
refusèrent de prendre part à la coalition des Belges contre
les Romains; l'armée confédérée se mit à dévaster les
champs des Rémi , à brûler leurs vici et leurs aedificia (6).
Ces aedificia de la Gaule jouent dans l'histoire militaire
un rôle identique à celui des villae de l'Italie et des autres
(1) « Namque etiam illud vulgare incursionis hostium signum , quod in-
cendiis aedificiorum intellegi consuevit, Caesaris erat interdicto sublatum,
ne aut copia pabuli fnimentiqtie, si longius progredi vellet, deficeretur, aut
hostes incendiis terrerentur. » (Dtt bello gallico, VIII, 3, { 2.)
(2) a Vastatis omnibus eorum agris, vicis aedificiisque incensis. s (De
bello gallico, III, 29, i 3.)
(3) « Omnibus eorum agris vastatis, frumentis succisis, aedificiis incen-
sis. 0 (De bello gallico, IV, 38, g 3.)
(4) ff Aedificia vicosque incendit, magno pecoris atque hominum numéro
potitur. » (De bello gallico, VI, 6, § 1.)
(5) « Omnes vici atque omnia aedificia, quae quisque conspexerat, incen-
debantur. » (De bello gallico, VI, 43, g 2.)
(6) a Agros Remorum depopulati, omnibus vicis aedificiisque, quos adiré
potuerant, incensis. » (De bello gallico, II, 7, g 3.)
LIBUX HABITÉS EN GAULE. 9S
parties de Tempire romain. Ainsi, à la fin du troisième
siècle avant notre ère , quand Annibal porta la guerre en
Italie , une partie de la péninsule était déjà couverte de
villae : Tite-Live nous montre le général carthaginois
campé sur les bords du Vulturne;; la partie la plus sédui-
sante de la campagne italienne est en flammes ; de distance
en distance on voit la fumée des villae incendiées (1) ;
c'était en l'année 217 avant notre ère. Deux ans après
un consul voulant affamer l'ennemi enjoint de rentrer les
froments dans les places fortes, avant le !•' juin; en
cas d'inexécution de cet ordre , il dévastera les champs ,
saisira et fera vendre les esclaves , brûlera les villae (2).
Un siècle et demi plus tard, une autre guerre moins flat-
teuse pour la vanité des vainqueurs du monde vient porter
la terreur dans Rome : presque à ses portes , le gladiateur
Spartacus tient tête aux légions ; il ne se contente pas de
dévaster les villae et les vici (3) ; il s'attaque aux urbes ;
ceci se passait en Tannée 73 avant J.-C. De môme dans
l'Afrique romanisée , lorsque la guerre civile y porta la dé-
vastation dans les années 47 et 46, on brûlait les villae;
cet acte de guerre était inséparable de la dévastation des
champs, de la destruction des oppida (4).
Au premier siècle de notre ère, quand de barbare la
Gaule est devenue romaine , les villae ont en Gaule rem-
placé les aedificia. Tacite, racontant la guerre de l'année 70,
fait briller à nos yeux le feu des villae incendiées qui an-
nonce l'arrivée d'une armée victorieuse (5) ; c'était près de
la rive gauche du Rhin, à peu de distance de Cologne. Il
(1) « Exurebatur amoenissimus Italiae ager, viUaeque passim incendiift
fumabant. » (Ti^e-Live, XXII, 14.)
(2) « ViUas incensurum. » (Tite-Live, XXIII, 32.)
(3) a Nec viUarum atqne vicorum vastatione content!, u (Flonu , livre II ,
c. g, on III, c. 20. Edition d*Otto lahn, p. 86, 1. 22.)
(4) a ViHas exnri, agros vastari... oppida casteUaque dirui. » (De bello
ifric^no^ c. 26.)
(5) c Vastatione incendiisque flagrantium viUarum venire victorem exer-
citnm intellegebatnr. » {Historiaej IV, 34.)
94 LIVRE I-. CHAPITRE IV. i 2.
y avait alors des villae jusque dans l'île des Bataves ; Ci-
vilis en possédait, et quand, en 71, Cerialis alla saccager
ce pays , il épargna les villae de Civilis , pour rendre le
chef ennemi odieux à ses concitoyens (1). A cette époque,
en Gaule, les fortunes privées n'étaient plus exclusivement
mobilières : ainsi qu'à Rome la villa, et le fundus ou la
terre que la villa suppose, en étaient la base principale,
comme le dit Horace environ dix ans avant notre ère :
Vos sapere et solos aio bene vivere, quorum
Conspicitur nitidis fundata pecunia villis (2).
Dès le début du premier siècle de notre ère, les aedificia,
habitation des chefs gaulois chez César, ont été transfor-
més en villae. Sacrovir a poussé les Aedui à la révolte ; il
s'est emparé d'Augustodunum, c'est-à-dire de la « forte-
resse d'Auguste, » d'Autun, ville alors nouvelle dont le nom
môme est un témoignage de la grande révolution qui s'est
produite, ville qui déjà possède des écoles où les fils des
nobles gaulois se transforment en Romains ; il est vaincu ;
il gagne dans sa fuite une villa près d'Autun et c'est là
qu'il se donne la mort, l'an 21 de notre ère (3). Un demi-
siècle plus tard, Julius Sabinus aussi malheureux que Sa-
crovir veut échapper à la mort ; il se rend dans une villa
du pays des Lingones, y met le feu et s'enfuit : on croira,
pense-t-il, qu'il a péri dans les flammes (4).
La villa où Sacrovir va se tuer, en 21 , comme celle où
se réfugiera, en 71, Julius Sabinus, remplace, grâce à la
civilisation gallo-romaine, Vaedificium, demeure ordinaire
des membres de l'aristocratie gauloise soixante-treize ans
avant le suicide de Sacrovir. En Tan 53 avant notre ère,
(i) « Agros villasque Civilis intactas nota arte ducum sinebat. v (Tacite,
HistoHae, V, 23.)
(2) Horace, Epist., livre I, 15, v. 45, 46.
(3) « Sacrovir primo Augustodunum, dein metu deditionis in villam pro-
pinquam cum fidissimis pengit. Dlic sua manu, reliqui mutuis ictibus occi-
dere. » (Tacite, Annales, III, 46.)
(4) a Sabinus... villam, in quam perfugerat, cremavit. » (Tacite, HistoriAe^
IV, 67.)
LIEUX HABITÉS EN GAULE. 95
les soldats romains qui venaient tuer Ambiorix le surpri-
rent daos une maison ronde , construite en charpente et
en osier (l), couverte de paille; un bois entourait cette
maison (2^ bâtie sur un sol qui , théoriquement au moins,
était la propriété du peuple des Eburons. Au siècle suivant
la villa du chef gaulois s'élève au milieu d'une vaste pièce
de terre , d'un fundus qui lui appartient et que ses clients
et vassaux cultivent ; des constructions rectangulaires en
maçonnerie, couvertes en tuiles, commencent à remplacer
les maisons circulaires de bois à toit de chaume conique
qu'habitaient les Gaulois au temps de l'indépendance.
Fundus et villa sont deux termes corrélatifs. Fundus est
la portion du sol qui forme une exploitation agricole ap-
partenant à un propriétaire déterminé. Villa est le groupe
des bâtiments où le propriétaire du fundus se loge et qui
servent à l'exploitation. Il n'y a pas de villa sans fundus^
ni de fundus sans villa. Supprimez la villa , le fundus est
réduit à l'état d'ager ou de locus. Supprimez le fundus^
la villa n'est plus qu'un aedificium (3).
La division du sol de l'empire en cités , subdivisées en
pagi , formant eux-mêmes un certain nombre de fundi , tel
est le principe fondamental du cadastre qui , sous l'empire
romain , servait de base à l'impôt foncier : « Forma cenn
(1) Toù; $*o!xouc, i% ffoivCScov xal yippoiv ixouai lu^àXoMc OoXoeidsZci Apofov icoXiiv
istSdXXovte; (Strabon, livre IV, ch. iv, { 3, édit. Didot» p. 163-164). Casas
qaae more gaUico strainantis erant tectae. (De bello gallico, W, 43, ) 1.)
(2) Caesar, De bello gaUico, 'VI, 30, g 3 : « aedificio circumdato silva. o
(3) Voir les citations d'UIpien et de Florentinus réanies au Digeste
(livre L, titre XVI, lois 27, 60, 211) : « Ager est locus qui sine villa est. Lo-
cus non est fundus , sed portio aliqua fundi. Fundus autem integrum aii-
qnid est, et plerumque sine villa locum accipimus. Locus... sine aedificio
rare... ager appellatur ; idemque ager cnm aedificio fundus dicitur. » — Il y
a, dans le diplôme n* 25 de Tardif, p. 20, col. 2 (689-690), un passage con-
forme à la définition légale : « Locus non est fundus sed portio aliqua
ftmdi. • Voici le texte mérovingien : « In loco qui dicitur SiUacos qui fuit
Arulfo qnondam et ibidem usque nunc ad ipso Latiniaco aspezit. b Les bA-
timents construits sur le fundus Siliacue ont été détruits, et ce fundus a
été réuni au fundus Latiniacus de manière à ne former avec lui qu'une
seule exploitation rurale ; en conséquence , le fundus Siliacus n'a plus été
qu'on locus.
96 LIVRE !•'. CHAPITRB IV. { 1
suali cavetur, ut agri sic in censwrrv referanpaf : ft&men
fundi cujusque , et in qua civitate , et in quo pagtf Ht , et
quos duos proximos habeat (1). » Ulpien , à qui nous em-
pruntons ce texte, est mort en 228. Mais le principe
énoncé par ce juriconsulte est beaucoup plus ancien que
lui. La Table alimentaire de Veleia^ qui remonte à l'année
104 de notre ère , est rédigée conformément à la règle
qu'énonce Ulpien : « C. Volumnius Memor et Volumnia
Alce.,. professi sunt fundum Quintiaoum'Aurelian/um.., qui
est in Veleiate pago Ambitrebio , adfinibus M. Mummeio Per-
sicoj Satrio Severo et populo, »
La division du sol de la Gaule en fundi date évidem-
ment de rintroduction du cens commencée par Auguste
en Tan 27 avant notre ère. Dès que les pagi gaulois, cha-
cun propriété collective d'un peuple , furent subdivisés en
fundi, les aedificia que César avait trouvés en Gaule épars
dans Vager des divers peuples se transformèrent en villae.
De ces villae, celle qui est le plus anciennement signalée
par un texte est celle de Sacrovir sons Tibère, l'an 21 de
notre ère. Mais on doit croire que la plupart des nomsr de
lieu en -ociw remontent à l'époque où la politique d'Au-
guste imposa aux Gaulois les institutions financières de
Rome , par conséquent la théorie du fundum qui n'en peut
être séparée (2) ; ordinairement les noms de lieu en -otcus
proviennent de gentilices quand un i précède le suflSbte ;
ils dérivent de cognomina dans le cas contraire. Ces genti-
lices et ces cognmnina sont ceux du premier propriétaire ,
qui avait pris un gentilice quand il avait obtenu droit de
cité romaine, qui se contentait d*un cognomen quand il
était resté barbare.
(1) Ulpien, De cenMug^ III; au Digeste, L, xv, 4; cf. Mommsen et Har-
qtiaTdt, Handbuch der rômischen Alterthûmer^ 2* édit., t. V, p. 221.
(2) Auguste fit un premier recensement de la Gallia Comata (Aquitaine ,
Celtique, Belgique) en Tan 27 avant J.-C. Voir plus haut, p. 7, 8. Un second
recensement eut lieu en Gaule sous son régne par les soins de Drusus,
12-8 ayant Jésus-Christ. Voir Jes textes réunis par M. E. Desjardins , Géo^
graphie politique et administrative de la Gaule romainef t. III, p. 185.
LIEUX HABITÉS EN GAULE. 97
Les noms composés dont le second terme est villa, cor-'
tiSjValliSj monsj appartiennent à un autre âge. Ils datent de
la conquête germanique ; leur premier terme est le nom du
propriétaire barbare qui a fondé la cortis ou la villa , qui
s'est construit une habitation sur le mons ou dans la vallis.
Au septième siècle , où ces noms commencent à paraître
dans les chartes , il n'est plus question du c&nsus romain
ni des fundi; à Tordre politique nouveau correspondent
des noms géographiques formés d'après des lois linguisti-
ques nouvelles. Us sont les monuments de la civilisation
qui a succédé à la civilisation romaine , mais de celle-ci
les noms de lieux en -aciLS ne sont pas les moindres dé-
bris (1).
A la môme époque, dans les chartes mérovingiennes du
septième et du huitième siècle, et, plus tard, dans les
chartes carlovingiennes, en Gaule, Tancien nom du fundus
persiste souvent, avec sa désinence masculine, associé au
mot villa, avec lequel il ne s'accorde point ; exemple : villa
Latiniaco, dans un diplôme de Thierry III, 688-689 (2);
villa cui vQcabulum est Prisciniacus, dans un acte de 682
ou 683 (3) ; villa quae dicitur Masciacu^^ dans un diplôme
de Louis le Débonnaire en 820 (4). Mais , en Italie , les
chartes de Ravenne , à la même époque , attestent par de
nombreux exemples le maintien de l'usage romain : Fundus
(\) Les imitations barbares du procédé romain, comme Teodeberciacus ou
Linderidacae (sons-entendu villae) , doivent être soigneusement démêlées
des fonnations antiques. II 7 a un point sur lequel le procédé linguistique
employé par les Germains est identique à celui dont les Romains avaient
fait usage avant eux : les uns et les autres ont emprunté au peuple vaincu
le dernier élément du nom de lieu. Dans le composé Bougi-val , par exem-
ple, à l'époque mérovingienne, B&udechisilo-vallis , chez Tardif, Monuments
historiques^ p. 32, col. 2 (acte de Tannée 697) , le dernier terme vallis est
latin, tandis que le premier terme est francique. Ainsi, dans le dérivé Quin^
tiàcuSj qui remonte à Fempire romain et dont un exemple a été conservé,
par on texte du deuxième siècle de notre ère , le dernier élément est le
suffixe gaulois -aco-s, tandis que le premier élément est le mot la^n Quinctius.
(2) Tardif, Monuments historiques^ p. 20.
(3) Tardif, ibid,, p. 19.
(4) Tardif, iWd., p. 80.
7
M
'-A^
l.
i
!»
96 LIVRE I". CHAPITRE IV. { 2.
Antonianus (1), fundus Flavinianus (2), fundorum corum vo-
cabula sunt Valliano.,. (3). En France, on aurait dit : villa
Antoniacus^' villa Flaviniacus^ villarum qtwrum vocabula
sunt Valliaco,., Le mot fundus appartient à la langue flnan-
p. cière de Tadministration romaine, et, à Ravenne, cette
» administration a duré plus longtemps qu'en France : la
5 prise de Ravenne par les Lombards ne date que du milieu
r. du huitième siècle; or c'est dès le cinquième siècle qu'en
y Gaule les Burgundes, les Goths et les Francs se sont établis
sur les ruines de l'Empire Romain ; voilà pourquoi on a
^ continué à se servir du terme administratif romain fundus
I dans les actes, à Ravenne, longtemps après qu'en France,
"t' ce mot était tombé en désuétude.
i' (1) Fantuzzi, Monumenti RavennAti^ p. 57, acte du temps de l'archevêque
iv Honestus, 971-983.
"- (2) Ibid,, p. 63, acte du temps de l'archevêque Sergius, 752-770.
(3) Ibid., p. 102, acte de Tannée 903. On peut aussi comparer au fundo qui
voc&tur SRvinianum , d'une charte de Ravenne en 955 (Fantuzzi, p. 136), la
formule in villa S&vinisLCO du cartulaire d'Ainay, à Lyon, en 989 (Aug. Ber-
nard, Carf. de Savigny, t. II, p. 632).
CHAPITRE V.
PREUVES DU GABAGTÉRS PRÉCAIRE DE Ul POSSESSION DU SOL
PAR LES PARTICULIERS DANS LA GAULE BARBARE, AU MO-
MENT OU CÉSAR EN FIT LA CONQUÊTE* (58-51 aV. J.-C.)-
SOMMAIRB :
1 1. Position de la question. — { 2. La propriété foncière individuelle n'exis-
tait pas encore chez les Gaulois d'Italie à la fin du troisième siècle avant
Jéstts-Christ. — { 3. La propriété foncière individuelle est inconciliable
avec rémigration des Helvetii Tan 58 avant Jésus-Christ. — { 4. La pro-
priété foncière individuelle est inconciliable avec rétablissement des Boii
dans le territoire des Aedut. — { 5. L'absence de propriété foncière in-
dividuelle en Qaule explique le système particulier de communauté entre
époux que César constate chez les Gaulois. — | 6. Objection tirée d'un
passage de César oU il est question de la juridiction des druides. —
i 7. Conclusion. U&ger publicus romain et l'ayer publicus gaulois. La
propriété bâtie en Gaule pendant la guerre de la conquête.
5 !•'. — Position de la question.
Il a été dit plus haut qu'à Tépoque où la Gaule a été
conquise par César, la propriété rurale dans ce pays était
restée collective. Cette doctrine a besoin d'être précisée.
Le terme de propriété collective a le défaut d'être moderne,
et, pour rendre avec netteté les croyances et les institu-
tions des anciens , il faut ou se servir de périphrases , ou
conserver les expressions reçues dans l'antiquité. Ce qu'on
doit entendre, c'est qu'en général chaque peuple gaulois
avait sur tout son territoire un droit analogue à celui du
peuple romain sur Vager pijiilicus ; c'est qu'ordinairement
•iv
c>^^^^^'^
rv
100 LIVRE I»'. CHAPITRE V. ( 2.
en Gaule, vers le milieu du premier. siècle avant notre ère,
le particulier qui jouissait d'une portion plus ou moins
considérable du sol de sa cité détenait cette portion à titre
précaire. Il se trouvait légalement dans une situation ana-
logue à celle des patriciens et des nobles romains qui,
après avoir occupé des parcelles plus ou moins étendues
de Vager publicus, en furent expulsés en partie par les lois
agraires, quand ces loi« déterminèrent le maximum de la
fraction de Vager publicus qu'un particulier pouvait posséder.
§ 2. — La propriété foncière individuelle n* existait pas encore
chez les Gaulois d'Italie à la fin du troisième siècle avant
Jésus-Christ.
Le plus ancien texte que nous ayons sur la constitution
de la propriété chez les Gaulois appartient à Polybe (livre II,
chap. XVII. § 11). C'est un des traits de la description, que
le grand historien nous fait , des mœurs apportées par les
Gaulois dans les régions voisines du Pô quand, dit-il, ils
vinrent s'y établir après la chute de la domination étrusque
en Campanie. On sait que la domination étrusque en Cam-
panie cessa vers la fin du cinquième siècle avant Jésus-
Christ. Il est clair, donc, que Polybe, dans le passage en
question , veut parler des Gaulois d'Italie au commence-
ment du quatrième ?iècle avant notre ère. Mais cette pein-
ture est empruntée par le célèbre auteur grec à un histo-
rien de la fin du troisième siècle. Les écrivains grecs du
quatrième siècle ne sont pas ici la source de Polybe. Au
quatrième siècle, les Grecs connaissaient fort mal l'Italie
du Nord : Héraclide de Pont, disciple d'Aristote, croyait
que Rome était une ville grecque, et il confond avec les
Hyperboréens de la mythologie les Celtes qui prirent cette
ville en 390 (1).
La source probable de Polybe dans le passage dont il
(1) Plutarque, Camille, XXH, 2.
POSSESSION PRÉCAIRE DU SOL EN GAULE. 101
s'agit est le grand ouvrage que Fabius Pictor avait com-
posé et qui est connu sous le titre latin de Graecae his-
toriae ou Graeci annales. Cet ouvrage connu de Polybe,
qui le cite plusieurs fois (1), était postérieur de près de
deux siècles à la conquête de l'Italie du Nord par les Gau-
lois; il datait de la fin du troisième siècle, et les mœurs
gauloises qui s'y trouvaient dépeintes étaient par consé-
quent celles de la fin du troisième siècle. Fabius Pictor,
qui vécut de 254 à 200 environ avant Jésus-Christ, avait
pris part à une campagne des troupes romaines dans la
Gaule cisalpine, en 225 (2) : il pouvait donc parler en
connaissance de cause des habitants de cette région.
Or, voici en quels termes le texte dont nous parlons, et
qui doit être emprunté à Fabius Pictor, nous fait connaître
la constitution de la propriété individuelle chez les Gaulois
d'Italie. Polybe vient de dire que les villages habités par
ces Gaulois n'étaient pas clos de murs , que leur genre de
vie était d'une simplicité extrême. Il continue : « La for-
tune de chacun d'eux consistait en troupeaux et en or,
parce que ces objets seuls peuvent facilement, quand les
circonstances l'exigent, être emmenés partout et changés
de place à volonté (3). » Ainsi, chez les Gaulois d'Italie au
troisième siècle, la fortune immobilière était inconnue aux
particuliers. Si les Gaulois d'Italie n'avaient pas organisé
à leur profit , dans ce pays nouvellement conquis , la pro-
priété individuelle du sol , c'est qu'ils n'avaient point
apporté de leur pays d'origine la notion de cette propriété.
(1) Polybe , livre I , ch. xiy, 2 U dit que ses sources , pour la première
guerre punique , sont Philinos [auteur sicilien] et Fabius [Pictor]. l\ s'est
encore servi de Fabius Pictor pour la deuxième guerre punique, comme on
le voit au livre III, cb. viii et ix (éd. Didot. p. 10, 125). Le texte concer-
nant les mœurs des Gaulois se trouve entre le récit de la première guerre
panique et celui de la deuxième (éd. Didot, p. 80).
(2) Hermann Peter, Veterum historicorum rom&norum reHtqutae, p. lxix
etsniv.
(3) TncLçilç ye (ii^v énàatoi^ y}v 5pé(i,(AaTa xal xp^ero; 8ià t6 {i/6va ravTa Y.axà Tàc
ocpiffréffeic ^^Bitaç duvoiaOat oavTox^ tarepiayaYetv xai |Ae6iotdévai xarà toç aOT<ôv
ofooipitfiK (Polybe, livre II, ch. xvii, § 11).
102 LIVRE !•'. CHAPITRE V. | 3.
En règle générale, un peuple qui vient s'établir par
la conquête et la colonisation dans un pays, y importe sa
législation. Les Anglais et les Français des derniers siè-
cles et du siècle courant ont introduit en Amérique et
en Afrique la théorie juridique de la propriété individuelle
du sol, telle qu'ils la concevaient dans leur patrie. Us ont,
les uns et les autres, constitué dans leurs colonies, la pro-
priété immobilière suivant les règles usitées dans leur
pays d'origine.
Mais les Gaulois n'ont pas apporté en Italie la théorie de
la propriété individuelle du sol ; près de deux siècles après
leur arrivée en Italie, cette théorie leur faisait encore défaut.
Donc, à la date où ils sont venus s'établir en Italie, c'est-
à-dire au commencement du quatrième siècle avant notre
ère , ils n'avaient pas cette théorie. Ainsi , au commence-
ment du quatrième siècle , les Gaulois qui de Germanie et
de Gaule vinrent conquérir l'Italie septentrionale ne prati-
quaient pas la propriété individuelle du sol. La prati-
quaient-ils en Gaule à l'époque de César, trois siècles et
demi plus tard ? On doit, ce semble, répondre à peu près
négativement à cette question, et il y a pour cela plusieurs
raisons.
S 3. — La propriété foncière individuelle est inconciliable avec
Vémigration des Helvetii l'om 58 avant J.'C.
D'abord l'émigration des Helvetii en Tan 58 avant notre
ère ne peut s'accorder avec la propriété individuelle du sol.
L'assemblée générale des Helvetii décide que toute la po-
pulation helvétique, au nombre de deux cent soixante-trois
mille âmes, abandonnera sa patrie et ira s'établir à l'autre
extrémité de la Gaule, sur les bords de l'Océan (1). Si ras-
semblée générale des Helvetii prend cette résolution, ce
(1) De bello gallico, l, 2, 3, 5, 28, 29.
b
POSSESSION PRÉCAIRE DU SOL EN GAULE. 103
n'est point par contrainte ; ce n'est pas qu'un ennemi plus
puissant chasse les Helvetii de leur patrie ; en effet, quand ^/'
ils en furent partis, personne ne vint les y remplacer. Non ;
ils espèrent trouver ailleurs un territoire plus fertile et sa- /
tisfaire leur goût pour les aventures glorieuses (1).
Ce n'est pas un entraînement passager. La décision est
prise en Tannée 61 ; trois ans sont consacrés aux prépara- '^
tifs (2), Puis, en 58, les Helvetii partent (3), et, si l'armée
romaine ne se fût portée à leur rencontre , ils ne seraient
pas rentrés dans leur pays. Les Helvetii perdirent, dans la
lutte contre César, plus des deux tiers de leur effectif, et
ce fut alors seulement que les survivants se décidèrent à
rentrer dans le pays qu'ils avaient abandonné (4).
8e figure-t-on le conseil général d'un département fran-
çais, fût-ce un des moins fertiles (la Lozère ou les Hautes-
Alpes), votant rémigration en masse de ses habitants, par
exemple en Afrique, la population exécutant cette décision '^
et le département abandonné restant vide d'habitants ? Le
droit de propriété tel que nous l'entendons et l'attachement
de chaque propriétaire pour le lambeau de terre qu'il pos-
sède serait un obstacle insurmontable à cette résolution .
étrange et à son exécution. Le Français qui aujourd'hui
quitte son pays pour aller s'établir en Algérie ou à l'étranger,
n'est à peu près jamais propriétaire foncier. D'ordinaire, le
paysan français n'émigre point , et c'est parce qu'il est
propriétaire de champs ; le paysan français qui, par excep-
tion, transporte son domicile en Algérie, ne se décide à
prendre ce grand parti qu'après s'être ruiné. Si le paysan
anglais, part facilement pour les Etats-Unis ou pour l'Aus-
tralie c'est parce qu'il ne possède aucun immeuble et
qu'aucun lien ne l'attache au sol qu'il cultive, pauvre et mé-
content, dans l'intérêt d'autrui.
(1) De bello g&llico, I, 2, 10.
(2) Ce chiflEre de trois ans parait attester Tusage de l'assoUement triennal.
(3) De bello g&llico, l, 2, 3, 6, 8.
(4) Ihid,, l, 29.
104 LIVRE I". CHAPITRE V. g 4.
S 4. — La propriété foncière individuelle est inconciliable
avec l'établissement des Boii dans le territoire des Aedui.
Le second fait que nous avons à expliquer est l'instal-
lation des Boii dans une portion du territoire des Àedui.
Ces Boii appartenaient à la grande nation de ce nom,
établie à l'est du Rhin, principalement entre le Danube
et les Alpes. Au nombre de trente-deux mille (hommes,
femmes et enfants) , ils avaient pris part à l'expédition des
Helvetii en Gaule, et, défaits comme eux par César, ils
avaient perdu , comme leurs compagnons de guerre , un
peu plus des deux tiers de leur effectif : leur nombre de-
vait être réduit à environ dix mille âmes. César avait dé-
cidé que les vaincus devaient retourner chacun chez eux :
les Boii étaient donc condamnés à regagner les régions
transrhénanes.
Mais les Aedui ne consentirent pas à les laisser partir :
ils voulurent profiter de l'occasion pour augmenter le
nombre de leurs clients et pour donner à leur puissance
en Gaule une base plus solide. Avec l'autorisation du
général romain, ils établirent dans une portion de leur
territoire ces Boii vaincus, leur permirent de s'y orga-
niser en une cité, en un petit Etat dépendant de la cité
ou de l'Etat des Aedui, mais sur le pied d'une sorte d'éga-
lité (1). Le signe de la dépendance des Boii fut une rede-
vance annuelle, stipendium (2), qu'ils payèrent aux Aedui :
César, dans le récit de sa campagne contre Vercingétorix,
en 52, donne aux Boii l'épithète de stipen4iarii Aeduo^
rum (3) ; ce stipendium exigé des Boii par les Aedui repré-
(l)<i [Caesar] Boios» potentibus Aeduis, qupd egregia virtute erant cogniti,
ut in finibus suis coUocarent, concessit; quibus illi agros dederunt, quosque
postea in parem juris libertatisquo condicionem atque ipsi erant, recepe-
runt. » (De bello gallico, I, 28, | 5.)
(2) Marquardt, dans Handbuch der rômischen Alterthûmer, t. V, 2* édit.,
p. 183, n. 5; cf. 184. Voir aussi p. 162. Goniulter enfin t. IV, p. 80.
(3) De bello gallico, VII, 10, | 1.
POSSESSION PRÉCAIRE DU SOL EN GAULE. 105
sentait la rente due à la cité des Aedui pour la portion
à'ager pubhcus dont les Aedui avaient abandonné la jouis-
sance aux Boii.
L'état de dépendance où sont placés les Boii ne les em-
pêche pas d'avoir en Gaule une personnalité politique dis-
tincte de celle des Aedui^ leurs suzerains. Us ont, en 52, un
oppidum^ et Vercingétorix en entreprend le siège (1), que
César en personne fait lever (2). Bien que peu nombreux
et faibles, ils constituent, nous dit César, une cité, qui
lui fournit des vivres (3) au début de la guerre contre Ver-
cingétorix. Peu après, les Boii se laissent entraîner dans
le grand mouvement patriotique qui soulève la Gaule
presque entière' contre les Romains; il leur est enjoint de
fournir à Tarmée nationale un contingent de deux mille
soldats (4) ; ce contingent est distinct de celui qui est
imposé aux Aedui et à leurs sujets, parce que, bien que
subordonnés {stipendiarii) des Aedui , ils sont à leur égard
sur le pied d'une sorte d'égalité {parem juris libertatisque
condicionem) (5). Vaincus, les Boiij sauf le stipendium
quils payent aux Aedui , sont en Gaule dans une situation
identique à celle des Germains conquérants avant la dé-
faite d'Arioviste par César.
Arioviste vainqueur s'est emparé du tiers du territoire des
Sequani , et d'une partie de celui des Aedui , où il a établi
120,000 Germains (6); 24,000 autres Germains viennent
d'arriver, et, pour leur donner un établissement, il va
(1) De bello gallico, VII, 9, { 6.
(2)/Wd., VII. 10, Î3,4; 12, Jl.
(3) c De re frumentaria Boios atque Aeduos adhortari non destitit : quorum
alteri, qnod nullo studio agebant, non multum adjuvabant ; alteri non mag-
nis facultatibiis, quod civitas erat exigua et infirma, celeriter quod habue-
mut consumpsenint Bumma difficultate rei frumentariie affecto ezercitu,
tenuiute Boiorum... s {De bello g&llicOy VII, 17, | 2, 3.)
(4) « Boiis [bina] mUia. » (De bello gallico, VII, 75, | 3.)
(5) De bello gallico, I, 28, | 5. Cf. VII, 10, { 1.
(Q ■ Nunc esse in Gallia ad centum et yiginti milium numerum. » (De bello
giUico, I, 31 , { 5.) « Ariovistus... tertiam partem agri Sequani... occupa-
Tisset... • (/btd., 1 10.) « Aeduos... multatos agris. o (De bello gallico, VII, 54,
H)
106 LIVRE I". CHAPITRE V. { 4.
prendrjB aux Sequani un second tiers de leur territoire (1).
Ce n'est pas seulement de la souveraineté, c'est de la
jouissance du sol que les Sequani et les Aedai sont dé-
pouillés. Les Germains sont les plus forts; ils ont vaincu
les Aed/ai , dont les sénateurs et les chevaliers ont presque
tous péri dans les combats, et les Sequani^ bien qu'alliés
des Germains , sont réduits par Ârioviste presque à l'état
de sujets.
Comment les Aedui , après avoir associé leur cause à celle
de César vainqueur des Boii , sont-ils amenés à concéder à
ce peuple vaincu des avantages qui sont presque les mê-
mes que ceux qu'Ârioviste vainqueur a violemment exi-
gés? Ce n'est pas le procédé ordinaire des peuples victo-
rieux. Au sort des Boiiy vaincus en Gaule l'an 58 av. J.-C,
comparons celui d'autres vaincus, dans le même pays,
trois siècles et demi plus tard. .
Constance Chlore , vainqueur , amène de Germanie en
Gaule des Germains prisonniers; il en fait des colons
qui labourent et moissonnent les terres des propriétaires
gallo-romains : « Le Chamave et le Frison labourent pour
moi, » dit en 296 un panégyriste de Constance Chlore, « et,
grâce à tes victoires, César invincible, les parties inhabitées
des territoires d'Amiens, de Beauvais, de Troyes, de Langres
reverdissent par le travail du cultivateur barbare (2). » Le
môme auteur nous peint un peu plu s haut les portiques des cités
encombrés par la foule des barbares captifs : « Les hom-
mes s'agitent partagés entre la surprise de la défaite et
leur naturelle fierté ; les vieilles mères témoignent aux fils,
(1) c Nunc de altéra parte tertia Sequanos decedere juberet, propterea
quod paucis mensibus ante . Harudum milia hominum viginti quatuor ad
eum venissenty quibus locus ac sedes pararentur. » (De btllo gallico^ I» 31,
I 10.)
(2) « Arat ergo nunc mibi Cbamavus et Frisius. » {Incerti pànegyricuê
Constantio Cœsari^ ix, édit. Teubner-Bœhrens, p. 138, 1. 17-18.) « Fer victo-
rias tuas, Constanti Gaesar invicte , quicquid infrequens Ambiano et BeUo*
vaco et Tricassino solo Lingonicoque rostabat, barbaro cultore revirescit. •
(/6id., XXI, p. 147, 1. 26-29.) Cf. Fustel de Coulanges, Recherches eur quel-
que$ problèmes d'histoire, p. 49.
POSSESSION PRÉCAIRE DU SOL EN GAULE. 107
les jeunes femmes aux maris le mépris que méritent les
lâches; mais les jeunes garçons et les jeunes filles réunis
dans les mêmes chaînes parlent familièrement à demi-voix
sur un ton tout différent. Prince, vous les avez partagés
entre les habitants de vos provinces ; ils vont servir ces
maîtres, et ils attendent qu'on les conduise aux solitudes
qu'ils doivent cultiver (1). » Ces barbares vaincus sont
réduits en esclavage ; c'est en qualité d'« esclaves » (5^*-
viendo) qu'ils vont remettre en culture des champs aban-
donnés, les mêmes champs peut-être que leurs dévasta-
tions avaient rendus incultes (2).
Les Boii sont traités tout autrement. Ils ne deviennent
ni les esclaves , ni les domestiques , ni les fermiers d'au-
cun particulier. Les Aeduiy dans la guerre contre Ârioviste»
avaient perdu beaucoup de monde (3) ; ils n'étaient plus
en état de cultiver tout leur territoire , ils en détachent un
vaste canton qu'ils livrent aux Boii, Ce n'est point de par-
ticuliers, c'est de la cité des Aedui que les Boii tiennent le
territoire qui leur est attribué , et c'est à elle qu'ils payent
la redevance annuelle appelée par César stipendium. C'esl
donc la cité des Aedui qui est propriétaire de ce territoire ;
les détenteurs 'dépossédés au profit des Boii n'avaient sur
ce territoire qu'un droit analogue à celui des nobles ro-
mains sur les portions de Vager pvblicus dont ils avaient la
jouissance au temps des lois agraires.
Ces détenteurs en avaient joui à charge de payer à la
cité la redevance annuelle qui est imposée aux Boii, La
redevance annuelle due par ces détenteurs avait été com-
(1) • Totis portieibus civitatum sedere captiva agmina barbarorum, viros
tttonita feritate trépidantes, despicientes anus ignaviam flliorum, nuptas
maritorum , Yincnlis copulatos pueros ac pueUas familiari murmure blan-
dientes, atque bos omnes provincialibus vestris ad obsequium distributos,
donec ad destinâtes sibi cultus solitudinum ducerentur. » (Incerti panegy'
ncuê ConsUntio Caesan, ix, édit. Teubner-Bœhrens, p. 138, 1. 8-15.)
(2) t Ut, qnae fortasse ipsi quondam depraedando vastaverant, cul ta red-
derent »er?iendo. > [Ibid., viii, p. 138, 1. 3-5.)
(3) c Magnam calamitatem pulsos accepisse : omnem nobilitatem, omnem
M&atam, omnem equitatem amisisse. m (De bello gallico, I, 31, | 6.)
108 LIVRE I". CHAPITRE V. { 5.
prise dans les vectigalia que Dumnorix avait pris à bail de
la cité des Aedui avant la campagne de César contre les
Helvetii (1).
Quand, par la conquête, le Germain vainqueur s'empare
d'une portion du territoire gaulois, il expulse les Gaulois
qui la cultivent, parce qu'il ne fait pas de distinction entre
la souveraineté et la propriété du vaincu ; c'est aussi la
doctrine du Romain victorieux. Mais la législation romaine
conçoit pour le citoyen de Rome un droit de propriété
foncière qu'elle distingue de la souveraineté de l'Etat : à
côté de Vager publiais, le domaine privé ; or, cette concep-
tion n'existe ni chez les Germains, ni chez les Gaulois : le
Germain, au temps de César, ne met pas de différence
entre le droit individuel du vaincu et le droit individuel
du citoyen sur la terre; à la même époque, le Gaulois
comprend à peu prés comme le Germain la relation juridi-
que entre le champ et le possesseur, que ce possesseur
soit un étranger vaincu ou le citoyen d'un état victorieux.
Nous avons de la propriété foncière des citoyens une
rdée analogue à la notion du dominium romain. Supposons
qu'en France un gouvernement dépouille et expulse d'un
arrondissement toute la population française qui l'habite
et y établisse une population étrangère, de même langue
que nous si l'on veut , venue de la Belgique wallonne ou
de la Suisse romande : — tels étaient les Boii parlant gau-
lois comme les Aedui : — cette hypothèse est absurde,
parce que, chez nous, c'est aux particuliers et non à l'Etat
qu'en général appartient la propriété du sol.
5 5. — L'absence de propriété foncière individuelle en Gaule
explique le système particulier de communauté entre époux
que César constate chez les Gaulois.
Nous arrivons à un troisième texte qui semble confirmer
(1) « Omnia Aeduorum vectigalia parvo pretio redempta habere. » (De
btllo gallico, I, 18, { 3.)
POSSESSION PRÉCAIRE DU SOL EN GAULE. 109
cette doctrine, qu'en général le territoire de la Gaule
était ager publicus à la date de la conquête. Nous commen-
cerons par rappeler le passage de Polybe : « La propriété
de chacun des Gaulois consistait en troupeaux et en or (1). »
Or César, exposant en termes très brefs les principaux
traits de la législation des Gaulois, nous fait connaître
ainsi qu'il suit le régime des biens entre époux : « Les
hommes reçoivent de leur femme une dot et, après esti-
mation, mettent en commun avec cette dot, des biens
d'une valeur égale pris sur leur avoir. Ces biens mis en
commun sont l'objet d'un compte; ou conserve les fruits;
le survivant des deux époux reçoit les deux parts avec les
fruits produits par elles pendant le mariage (2). »
Ce contrat qui , à première vue , peut sembler bizarre ,
devient quelque chose de rationnel et de très simple si,
s'inspirant du texte de Polybe, on suppose que la dot
des femmes et la portion de l'apport des maris mise en
commun avec cette dot consistent en troupeaux et que les
fruits qui viennent s'y ajouter sont le croit des troupeaux.
La convention dont il s'agit offre une grande analogie avec
notre cheptel du Code civil. On garde les fruits, c'est-à-
dire le croit ; cela ne veut pas dire qu'on garde les bes-
tiaux jusqu'à les laisser mourir de vieillesse. Cela signifie
qu'on élève les veaux et les génisses, et que, pour les
abattre, on attend l'âge où, devenus adultes, ils peuvent
atteindre, après engraissement, la valeur la plus élevée,
soit comme bœufs après avoir servi à la culture, soit
comme vaches après avoir donné plusieurs veaux. Admet-
tons qu'un troupeau ainsi administré vienne à doubler
tous les trois ans, ce qui peut fort bien arriver, sauf le cas
(1) Txap^iç Yc \^H ixduTToïc ^v dpé|i{jLaTa xal xP^ffoç (Polybe, livre II, eh. xvxi,
Jll).
(2) c Viri, quantas pecunias ab uxohbus dotis nomine accepenint, tantas
ex suis bonis aestimatione facta cum dotibus communicant. Hujus omnis
pecnûiae conjunctim ratio habetur fructusque servantur : uter eorum vitA
Sttporavit, ad en m pars utriusque cum fructibus superiorum temporum per-
venit. » (César, De bello gallico. VI, 19, { 1, 2.)
110 LIVRE I-. CHAPITRE V. { 5.
d'épidémie , de disette ou de guerre ; avec deux vaches au
début, ou aura, au bout de trente ans, un troupeau de
plus de 2,000 têtes, à condition qu'on puisse le nourrir (1).
On comprend ce procédé ; un troupeau ainsi traité donne
tous les ans un produit en laitage, en fumier, en bêtes
qu'il faut abattre, parce que Tàge qu'indique une bonne
administration est atteint, ou parce qu'un accident, une
difficulté quelconque rend l'élevage impossible. De ce pro-
duit , le ménage vivra. Mais que la dot consiste en terre
et que l'apport associé à la dot par le mari soit encore de
la terre; tant que le mariage durera, on ne touchera pas
au revenu de ces terres.; les blés et les pailles seront em-
magasinés dans des greniers, et on les y conservera jusqu'à
la mort de l'un des conjoints , ou , si on les vend , on en
gardera soigneusement le produit dans un coffre-fort sans
jamais y toucher : on mourra de faim à côté. De telles
hypothèses peuvent être émises dans le silence du cabinet
par des savants qui vivent entre leur imagination et leurs
livres , mais elles sont impraticables et ne peuvent avoir
été la loi à laquelle , dans un grand peuple , tous les mé-
nages aisés aient dû soumettre leur existence journalière.
Gouverner un troupeau comme nous l'entendons suppose
une économie qui n'est compatible qu'avec la fortune ; mais
quels étaient ces maris auxquels les femmes apportaient
des dots et qui mettaient en commun avec cette dot un ca-
pital égal? Us n'appartenaient point à la plèbe réduite
presque à l'esclavage, accablée par le poids des dettes et
des impôts (2). Ces maris, ce sont des membres de l'aristo-
cratie , ce sont des sénateurs et des chevaliers ; c'est un
groupe de population très riche et peu nombreux, puisque
Vercingétorix , voulant réimir contre César tous les cheva-
(1) Voici la progression : le premier chiffre indiquera les années, le second
le nombre des têtes : 1, 2; 3, 4; 6, 8; 9, 16; n, 32; 15, 64; 18, 128; 21, 256;
,24, 512; 27, 1024; 30,2048.
(2) « Plèbes paene servorum habetur loco... plerique cum aut aère alieno
aut magnitudine tributorum... premuntur... » {De bello gallicOf VI, 13, { 1, 2.)
POSSESSION PRÉCAIRE DU SOL EN GAULE. 111
liers de la Gaule insurgée contre Rome, n'en a pas trouvé
plus de quinze mille à convoquer (1). Comment ont-ils créé
la fortune qui leur a permis de transformer en débiteurs
une grande partie des membres de la plèbe? C'est par la
sage administration de leurs troupeaux, c'est en conservant
les fruits, c'est-à-dire le croit, le croit des troupeaux appor-
tés en dot par les femmes et celui de troupeaux d'une
valeur égale pris sur l'avoir des maris.
§ 6. — Objection tirée d'un passage de César où il est question
de la juridiction des Druides.-
A notre doctrine il a été fait plusieurs objections par un
savant professeur de la Faculté des lettres de Paris. Le ta-
lent littéraire de cet habile critique est égal à son érudi-
tion. Aussi semble-t-il nécessaire de répondre ici à la prin-
cipale de ses objections. Cette objection est fondée sur
une interprétation erronée d'un passage de César, dont il
est impossible de tirer aucun argument ni pour ni contre la
thèse soutenue ici.
César vient de parler de l'enseignement des druides ; de
ce sujet il passe à leur juridiction. Voici comment il s'ex-
prime : Fere de omnibus controversiis publicis PRiVATisgutf
constituunt ; et, si quod est admissum facinuSy si caedes facta^
si de hereditate, si de finibus controversia est^ idem decer^
nunt, praemia poenasque constituunt , si gui aut privatus aut
POPULus eorum decreto non stetit, sacrificiis interdicunt (2).
Voici la traduction que nous proposons : « Les druides
» jugent presque toutes les contestations , qu'elles con-
» cernent soit un peuple^ soit un particulier] si quelque
» crime a été commis , s!il a été fait un meurtre , s'il y a
» contestation sur héritage ou sur limites ce sont encore eux
(1) f Omnes équités, quindecim milia numéro, celeriter convenire jubet. »
[Ikhello g&llico, VII, 64, J 1.)
(2) De bello gallico, VI, 13, { 5.
llï LIVRE I". CHAPITRE V. { 6.
» qui décident et qui fixent le montant de la composition
» pécuniaire à recevoir par le demandeur et à payer par le
» défendeur ; si soit un particulier soit un peuple ne se
» conforme pas à leur décision , ils l'excluent des sacrifi-
» ces. » M. Fustel de Coulanges rend ainsi ce passage :
« Il (César) dit que les druides jugent presque tous les pro-
» ces aussi bien au criminel qu'au civil. Puis il fait Ténu-
» mération de ces débats portés devant les druides : au
» criminel il cite le meurtre ; au civil il mentionne le pro-
» ces sur héritage ou sur des limites : Si de hereditate^ si
9 de finibus controversia est. Dès qu'il y a en Gaule des
» procès sur héritage et sur des limites, c'est que les Gau-
» lois ont la règle de l'hérédité et l'usage des limites, c'est-
» à-dire la propriété héréditaire du sol (1). »
M. Fustel de Coulanges parait n'avoir pas compris
ce que César a voulu dire. D'abord, suivant le docte
professeur, quand César a écrit en parlant des druides :
Fere de omnibus controversiis publicis PRiVATisg^ti^ consti-
tuunt, cela signifie « que les druides jugent presque tous
» les procès aussi bien au criminel qu'au civil. » Dans
cette traduction de M. Fustel de Coulanges, il y a un
contre sens. Pour bien comprendre le membre de phrase
ainsi traduit par M. Fustel de Coulanges, et qui est la
première des cinq lignes de César reproduites plus haut,
il faut en rapprocher le dernier membre de phrase qui est
pour ainsi dire le pendant du premier : Si qui dut privatus
aut POPULUS eorum decreto non stetit, sacri/lciis interdicunt ;
« si , soit un particulier, soit un peuple , ne se conforme
pas à leur décision ils l'excluent du sacrifice. »
A pvèlicis, dans le premier membre de phrase, corres-
pond populus dans le second membre de phrase , comme à
privatis, dans le premier, privatus dans le second. Evidem-
ment, controversia publica veut dire « contestation concer-
(1) Le problème des origines de la propriété foncière^ Bruxelles, Alfred
VromAnt, 1889, in-8*, p. 84-85.
POSSESSION PRÉCAIRE DU SOL EN GAULE. 113
nant un peuple. » M. Pustel de Coulanges croit que con-
troversiae publicas est synonyme de judicia publica. Il en
conclut qu'en français controversia publica doit être tra-
duit par « procès au criminel. » « On sait, » dit le savant
auteur « que , dans la langue du droit , les judicia publica
» sont les jugements criminels , littéralement ceux qui
» portent sur Tun des crimes que l'autorité publique pour-
» suit » (p. 84, note).
Nous allons examiner deux questions ; la première est de
savoir si César, en se servant des mots controversiae publicae
a eu l'intention d'exprimer l'idée qui est rendue ordinaire-
ment en droit romain par les mots judicia publica ; la se-
conde est de savoir si, même en ce cas, la traduction « pro-
cès au criminel » rendrait clairement la doctrine de
l'historien romain.
Controversia, en latin, est le terme technique pour dési-
gner les procès civils par opposition aux procès criminels.
On a souvent cité pour la détermination de ce sens, un pas-
sage de Cicéron, pro Caecina^ c. 2, § 6 : Omnia judicia aut
distrahendarum controversiarum ^ aut puniendorum malefi-
ciorum caussa reperta sunt , et on en rapproche un passage
in De oratore, limre II, c. 24, § 104 : Sive ex crimine caussa
constat ut facinoriSy sive ex controversia ut hereditatis. Contre-
versia est donc l'opposé de judicium publicum.
Théoriquement, à l'origine du droit, il n'y a de judicium
publicum que pour les crimes commis contre l'Etat, tels que
la haute trahison, laesa majestas\ plus tard, à Rome, cer-
tains crimes contre les particuliers, tels que le meurtre,
ont été compris dans la nomenclature des actes qui don-
nent lieu à des judicia publica^ tandis que les autres , tels
que le vol, restaient ce que le Digeste appelle privata
delicta (1),
César, en employant le terme de controversia dans le
(l) Livre XLVII, titre I, De privatis delictis. Cf. livre XLVIII, titre I,
De publicis judiciis.
8
114 LIVRE 1^, CHAPITRE V. { 6.
passage précité, exclut l'idée romaine de judicium jmblicum.
et on ne peut dire qu'il ait employé cette expression au ha-
sard, car il insiste quelques lignes plus loin. Après avoir dit
que tous les ans, à une date déterminée, les druides se réu-
nissent dans le territoire de Chartres, il ajoute : « là, de
toutes parts s'assemblent tous ceux qui ont des contesta-
tions : qui controversias habeat. »
Les Gaulois vivaient encore sous le régime de la com-
position pécuniaire, et les druides, même en ce que nous
appelons aujourd'hui matière criminelle , ne prononçaient
que des condamnations civiles. Les druides ne pouvaient
donc rendre des jugements lorsqu'il s'agissait de judicium
publicum dans le sens primitif et restreint du mot , c'est-
à-dire quand quelqu'un était accusé de haute trahison si
nous pouvons rendre ainsi le latin lassae majestatis. Voilà
pourquoi César appelle controversiae , c'est-à-dire procès
civils, les contestations jugées par les Druides.
C'est un ^ procès de haute trahison — lesae majestatis
comme on aurait dit à Rome — qui, au début des Com-
mentaires^ est intenté à Orgetorix, accusé de prétendre à
la royauté ; une condamnation à mort doit s'ensuivre ; il
doit être brûlé ; dans le récit de cette afi^ire il n'est pas
dit un inot des druides ni du voyage à Chartres. Le procès
doit se plaider sur le territoire helvétique; c'est évidem-
ment l'assemblée du peuple qui doit le juger (1).
On doit interpréter de même le passage où il est dit que
les Senones veulent mettre à mort Cavarinus que, sans leur
consentement, César leur a imposé comme roi : interficere
publico consilio conati (2). Le publicum consilium dont parle
César est l'assemblée du peuple des Sénons qui voulant
conserver ses institutions républicaines a condamné à mort
l'usurpateur Cavarinus. Le pays des Sénons est tout près
de celui de Chartres où se tient annuellement l'assemblée
(1) De hello gallico, I, 4.
(2) /bid., I, 54.
POSSESSION PRÉCAIRE DU SOL EN GAULE. 115
des druides et cependant le peuple des Sénons n'a point
fait appel à la juridiction druidique. Et pourquoi cela? C'est
que les druides ne jugeaient que des controversiasy c'est-à-
dire des procès civils. Les procès criminels échappaient à
leur compétence. Mais les procès, pour ce que nous appel-
lerions des crimes contre les personnes, contre les pro-
priétés, par exemple pour meurtre et pour vol, ne pou-
vaient alors en Gaule donner lieu qu'à des réparations
civiles et appartenaient à la catégorie des controversiae ,
les Druides pouvaient les juger.
M. Pustel de Coulanges se trompe donc certainement
quand il suppose que César, en employant la formule con-
troversiae publicae, a voulu parler de judicia publica. Mais
même en admettant un instant que cette supposition soit
exacte , la traduction de controversiae puOlicae par « procès
au criminel » opposés aux procès civils, controversiae privatae^
est très dangereuse et donne au lecteur une idée fausse du
droit criminel antique. En efifet , la poursuite pour vol, en
droit romain , n'a jamais donné lieu à un judicium publi-
cum\ cependant elle pouvait avoir pour effet, dans l'ancien
droit romain, de faire livrer par le juge la personne du cou-
pable au volé dont le voleur devenait l'esclave et qui avait
sur lui droit de vie ou de mort : tel était le résultat de la
condamnation pour furtum manifestum. Il en était de même
dans la Gaule barbare : en Gaule, le voleur, c'est-à-dire
l'insolvable qui s'était emparé d'un objet mobilier apparte-
nant à autrui , et qui , naturellement , ne pouvait payer
la composition pécuniaire, devenait l'esclave du volé,
et souvent ce dernier se débarrassait de lui en le faisant
briller vif (1). Ainsi M. Fustel de Coulanges, expliquant
controversia jmblica par judicium publicum, qu'il rend par
les mots français « procès au criminel » , n'a pas le droit
de comprendre parmi ces procès la procédure motivée par
un acte (le furtum manifestum) qui a pour conséquence une
(l)De bellQ gallico, VI, 16, l 5.
i 116 LIVRE !•'. CHAPITRE V. | 6.
condamnation à une peine équivalente soit à nos travaux
forcés à perpétuité soit à notre condamnation à mort.
Mais qu'est-ce qu'un procès au criminel ? qu'est-ce qu'un
crime dans la langue du droit français ? « L'infraction que
» les lois punissent d'une peine afflictive ou infamante est
» un crime. » {Code pénal^ article 1, § 3.) « Les peines
» afflictives et infamantes sont : 1** la mort ; 2** les travaux
» forcés à perpétuité ; 3^ la déportation ; 4* les travaux
» forcés à temps ; 5® la détention ; 6*" la réclusion » {Code
pénal, article 7). Donc, suivant ces définitions, le furtum
manifesPum est un crime. Par conséquent il est certain
qu'en traduisant en français ytedicia publica par « procès au
criminel , » on amène le lecteur à comprendre dans les
judicia publica^ les poursuites pour furtum manifestum
que le droit romain, conforme au droit indo-européen le
plus ancien, n'y comprenait point. C'est ici le cas de rap-
peler une observation du jurisconsulte Macer, insérée au
Digeste , livre XLVIII , titre I , loi 1 : non omnia judicia
in quibus crimen vertitur publioa su/nt , sed ea tantum quae
ex legihus publicorv/m judicioru/m veniunt.
Erreur donc sur le sens dejudicium publicum^ comme de
controversia. M. F. de Coulanges continue : « il (César) fait
» une énumération de ces débats portés devant les druides;
» au criminel il cite le meurtre, au civil il mentionne les
» procès sur un héritage ou sur des limites : Si de heredi-
» tate, si de finibus, controversia est. Dès qu'il y a en
♦ » Gaule des procès sur l'héritage ou sur les limites, c'est
» que les Gaulois ont la règle d'hérédité et l'usage des
» limites, c'est-à-dire la propriété héréditaire du sol. César
n dit ailleurs que les Germains n'ont pas de finesy il dit ici
» que les Gaulois en ont » (p. 84-85).
Il y a sur ce passage plusieurs observations à présenter.
L'opposition que fait ici M. Fustel de Coulanges entre le
criminel et le civil dans la juridiction druidique n'existe
que dans son imagination. Après un meurtre, les drui-
des ne jugeaient que ce que notre Code d'instruction cri-
POSSESSION PRÉCAIRE DU SOL EN GAULE. 117
mnelldj article 2, appelle raction civile par opposition à
raction publique, et ce que le môme code, article 1, définit *
« Taction en réparation du dommage causé par un crime. »
D'autre part , César, dans le passage dont il s'agit , n'a
pas distingué en deux catégories , Tune criminelle , l'autre
civile, les causes de procès qu'il énumère : crime quel-
conque, meurtre, héritage, limite. Il annonce qu'il veut
parler de procès concernant soit un peuple, soit un par-
ticulier ; il termine en disant que si le peuple ou le parti-
culier condamné n'exécute pas le jugement, ce particulier
ou ce peuple sera exclus des sacrifices ; mais il ne dit nulle
part qui est demandeur ni qui est défendeur, qu'il s'agisse
de crime, de meurtre, d'héritage ou de limites. Affirmer
que lorsqu'il s'agit de crime , notamment de meurtre , le
peuple sera partie dans l'affaire , que lorsqu'il s'agira d'hé-
ritage ou de limites ce sera un particulier, c'est une hypo-
thèse arbitraire que rien ne justifie.
« Les Gaulois ont, » continue M. Pustel de Coulanges,
« la règle d'hérédité et l'usage des limites , c'est-à-dire la
» propriété héréditaire du sol. » Mais, dans le texte de Cé-
sar, rien ne dit que l'hérédité dont il s'agit eût pour objet
la propriété du sol. L'hérédité réclamée par un particulier
contre un autre particulier pouvait avoir pour objet
soit un meuble soit un droit temporaire ou précaire sur le
sol. L'hérédité réclamée par un particulier contre un peu-
ple pouvait avoir pour objet une fonction héréditaire, par
exemple la royauté (1). Pourquoi prétendre déterminer
l'objet de cette hereditas^ dire que cet objet est nécessaire-
ment la propriété du sol quand César ne le dit point?
Les limites , fines , si elles étaient réclamées par un peu-
ple contre un autre peuple pouvaient être des limites
d'Etats ; réclamées par un particulier contre un particulier ,
elles pouvaient être une limite de champ , de cour ou de
yerger ; mais sur ce champ , sur cette cour , sur ce verger ,
(1) Cf. Regni kerediUs^ herM regni dans la Guerre d'Alexandrie, c. 66.
tl8 LIVRE !••. CHAPITRE V. ( 7.
quel étail le droit réel prétendu par les plaideurs? On voit
tous les jours dans la France de notre temps des procès
pour limites entre fermiers ; à Rome Vager occupatorius ou
arcifinius, c'est-à-dire celui dont, à Torigine et pendant des
siècles, la détention par le possesseur a été précaire, c'est-
à-dire celui qui faisait partie de Yager publicus et dont les
lois agraires ont plusieurs fois expulsé les détenteurs, ce
champ, auquel nous comparons le c^hamp gaulois, avait des
limites, fines : De fine similis est controversia... sed de fim
disconvenu per ftexus quitus arcifinii agri coniinentur (1).
Il n'y a donc rien à tirer du texte de César contre la
doctrine que nous exposons. Ce texte ne prouve pas que
la propriété foncière individuelle, telle que nous la conce-
vons aujourd'hui en France , existât dans la Gaule barbare
quand cette contrée a été conquise par les Romains.
S 7. — Conclusion, L'ager publicus romain et /'ager publi-
cus gaulois, La propriété bâtie en Gaule pendant la guerre
de la conquête.
En Gaule , à l'époque de la conquête romaine, le déten-
teur de la terre n'a pas de titre à opposer à l'Etat. La con-
séquence est qu'il ne s'attache pas à la terre. Voilà pour-
quoi les Helvetii abandonnent leur territoire ; voilà pourquoi
les Aedui cèdent aux Boii une partie du leur. Cela nous
montre que le droit de l'Etat avait en Gaule un caractère
beaucoup plus pratique et beaucoup moins platonique à
l'époque de la conquête romaine, que dans l'Italie du même
temps. Un signe du droit de l'Etat en Italie avait été une
redevance annuelle, vectigaU imposée au propriétaire. Une
loi, de la fin du deuxième siècle avant J.-C, avait aboli
cette redevance en Italie. Mais, au temps de César, les
Aedui la percevaient chez eux. Dumnorix l'avait prise à
(1) Frontin, chez Lachman, GromtLtici veteres, p. 13.
POSSESSION PRÉCAIRE DU SOL EN GAULE. 119
fenne en même temps que les impôts indirects (1). Quand
les Boii reçurent la concession d'une partie du territoire des
Aedai, ce fut à charge de payer la même redevance, et ce
fut ainsi qu'ils devinrent , comme le dit César, stipendiarii
des Aedui : stipendium est un synonyme de vectigaL
On se demandera pourquoi les Gaulois détenteurs de
Yager publicus appartenant à leur cité auraient eu une situa-
tion plus précaire que celle des citoyens romains déten-
teurs de Yiiger publicus de Rome en Italie. Cette différence
s'explique par la date récente de rétablissement de chaque
peuple gaulois sur le territoire qu'il occupait à l'arrivée de
César et par l'incertitude qui y régnait sur l'avenir, tandis
que rorigine de Vager publicus de Rome remontait à sept
siècles, et que les citoyens de Rome n'en prévoyaient
pas la fin.
La migration des Volcae Àrecomici n'était pas terminée à
la fin du troisième siècle, puisque , au moment du passage
d'Annibal , une partie d'entre eux habitait encore à l'est du
Rhône (2), et qu'ils avaient disparu de cette région quand
les Romains conquérants mirent un terme aux déplace-
ments de peuples en Gaule. La venue des Helvetii dans
le pays qui est aujourd'hui la Suisse était un fait encore
tout récent en l'an 58 avant notre ère , car l'histoire nous
a conservé le souvenir de leur établissement antérieur de
l'autre côté du Rhin (3). L'arrivée des Belges à l'ouest du
Rhin ne pouvait pas être bien ancienne à l'époque de Cé-
sar, puisqu'on en gardait le souvenir en Gaule, et on sait
combien le souvenir des migrations s'efface vite chez les
peuples qui n'écrivent pas. Le plus ancien événement
connu de l'histoire des Belges en Gaule est leur résistance
aux Cimbres et aux Teutons à la fin du deuxième siècle
avant notre ère. Il n'est pas probable que leur arrivée sur
(1) « Complnris annos portoria reliqaaque omnia Aeduonim vectigalia
pwe preiio redempta habere. » (De hello gsillico, I, 18, J 3.)
(2) Tite-Live, XXI, 26.
(3) Tacite, Germania, 28.
120 LIVRE I". CHAPITRE V. { 7.
la rive gauche du Rhin soit antérieure au troisième siècle
avant J.-C. Le grand territoire qui devint belge à cette
date était précédemment occupé par des Celtes ou Gaulois,
dans le sens restreint du mot, qui furent rejetés vers le midi ;
et ainsi s'explique par exemple l'établissement des Sequani
dans le bassin du Rhône : les Sequani semblent avoir été
originairement les habitants des bords de la Seine {Sequana).
En tout cas, il dut y avoir en Gaule, au troisième siècle,
un grand nombre de peuples contraints à se déplacer, puis-
qu*à cette époque le domaine du groupe appelé celtique ou
gaulois , dans le sens restreint de ces mots , fut réduit aux
deux tiers environ de l'espace qu'il avait précédemment
occupé (1).
Ainsi , à l'arrivée de César , le territoire habité par cha-
que peuple ne devait pas être en sa possession depuis beau-
coup plus d'environ deux siècles. Il était donc naturel que
la détention de chacune des parcelles de ce territoire par
les membres de l'aristocratie, seuls en état d'en tirer parti,
eût conservé un caractère précaire qui alors, en Italie,
s'était peu à peu eflfacé , non en théorie , mais en fait ; ce
caractère précaire de la détention du sol par les particuliers
en Gaule , explique la facilité avec laquelle les Helvetii
prirent le parti d'émigrer en masse et la libéralité avec
laquelle les Aedui abandonnèrent une portion de leur ter-
ritoire aux Boii.
On ne trouve guère , dans le De bello gallico , qu*un seul
exemple où des Gaulois montrent de l'attachement pour
des propriétés immobilières privées. Cet exemple est donné
par les Bituriges , qui refusent de laisser brûler Avaricum ,
leur ville principale, et qui, par là, contraignent Vercin-
gétorix a changer son plan de campagne contre les Ro-
(l}.a Cum ab his quaereret, quae civitates quantaeque in armis essent et
quid in beUo possent, sic reperiebat : plerosque Belgas esse ortos ab Ger-
manis Rhonumque antiquitus traductos propter loci fertilitatem ibi conse-
disse, Gallosque, qui ea loca incolerent, oxpulisse solosque esse qui patmm
nostrorum memoria omni GalUa vexata Teutonos Cimbrosque intra fines
suos ingredi prohibuerint. » (De bello g&llicoy II, 4, § 1, 2.)
POSSESSION PRÉCAIRE DU SOL EN GAULE. 121
mains. César nous les montre prosternés aux pieds des re-
présentants de la nation gauloise : ils prétendent que leur
ville est presque la plus belle de toute la Gaule, qu'elle est
la défense et Tornenient de leur cité ; finalement , ils ob-
tiennent gain de cause. Ves Bituriges, qui se jettent aux
pieds de leurs collègues dans l'assemblée générale de la
Gaule , étaient de grands seigneurs , propriétaires des prin-
cipales maisons d'Avaricum , tandis que , prés d'eux , une
plèbe sans influence habitait des maisons plus modestes, ou
même pauvres. Vercingétorix eut pitié de ces misérables
que rincendie devait ruiner, et accorda ce que demandait
Taristocratie biturige (1). Ainsi, la propriété immobilière
privée existait dans Tenceinte fortifiée d'Avaricum^ et Ver-
cingétorix la respecta. Cette propriété urbaine est inconnue
aux Gaulois Italiens de Polybe , qui n'habitent que des vil-
lages dépourvus de murailles (2) ; tel est l'unique progrès
qu'eût fait la notion de la propriété immobilière entre la
période décrite par l'historien grec, fin du troisième siècle,
et celle où nous transportent les Commentaires de César, au
milieu du premier siècle avant J.-C.
Un progrès nouveau s'accomplit quand , après la conquête
romaine, vers la fin du premier siècle avant J.-C, les
portions de territoire occupées par les grands seigneurs
gaulois furent assimilées aux fundi italiens, et quand ces
grands seigneurs , devenus citoyens romains , donnèrent à
ces fundi des noms dérivés des gentilices qu'ils avaient
adoptés.
(1) • Datur petentibns Tonia, dissuadente primo Vercingetorige , post
concedente et precibas ipsomin et misericordia volgi. v (De bello gallico,
VU, 15, i 6.)
(2) • 'Oxow tt xaTà xc&(iac &Tti](((rrovc. • (Polybe, II, zvil, { 9.)
LIVRE II
RECHERCHES SUR L'ORIGINE DES NOMS DE LIEUX
HABITÉS EN FRANCE.
CHAPITRE PREMIER.
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS EN FRANCE. — PRINCIPES
6ÉNÉRAUX APPUYÉS PRINCIPALEMENT SUR DES TEXTES CON-
TEMPORAINS DE LA RÉPUBLIQUE ET DE l'BMPIRE ROMAIN.
Sommaire :
i 1. La propriété du sol devient individuelle. Les fundi dans la Gaule ro-
maine ; le fundus Sabiniacus, — | 2. Les noms de fundi formés à Taide
du suffixe latin -anus dans la Table alimentaire de Veleia. — | 3. Les
noms d'hommes en Gaule après la conquête. — | 4. Les noms de fundi
en 'inus dans la Table alimentaire auxquels correspondent des noms de
fundi gallo-romains dérivés des mêmes gentilices , mais avec le suffixe
gaulois 'âcu8. — {5. Les noms de fundi dérivés de gentilices chez les
populations celtiques sont postérieurs à la conquête romaine. — § 6. Qua-
tre espèces de noms de lieux habités en Gaule , chez César. — {7. Cinq
espèces de noms de lieux habités dans les pays celtiques, suivant les do-
cuments du temps de TEmpire. — { 8. Le suffixe -âcus placé à la suite du
gentilice pour former des noms de lieux, dans les documents du temps
de TEmpire. — ) 9. Comparaison entre les noms de lieux formés en
France à l'aide du suffixe -âcus et quelques noms de lieux en -anus dans
diverses parties de TEmpire romain. — { 10. Noms de fundi formés à
Faide de surnoms dans les pays celtiques et qui se rencontrent dans des
documents écrits au temps de TEmpire romain. — {11. Examen de la
question de savoir s'il y a en France des noms de lieux en -âcus dérivés
de noms communs. — } 12. Etude sur divers noms de lieu d'origine cel-
tique ou gallo-romaine qui n'offrent pas le suffixe -âcus et qui apparais-
sent pour la première fois dans les documents de la période mérovin-
gienne et de la période carlovingienne.
S !•'. — La propriété du sol devient individuelle. Les fundi
dcms la Gaule romaine. Le fundus Sabiniacus.
La division de la Gaule en fundi ou propriétés immobi-
lières individuelles date de Tépoque romaine; cela résulte
126 LIVRE II. CHAPITRE I-. { l.
des noms qu'un grand nombre de ces ftmdi^ devenus s( u-
vent aujourd'hui territoires de communes , ou réduits à la
condition de hameaux , ont conservés. Ces noms sont dé-
rivés de gentilices romains. Pour le moment, un exemple
sufBra au lecteur.
Il y a en France plus de cinquante communes et de
trente écarts dont le nom moderne Savigna, Savignac^
Savignat, Savigné, Savigneux, Savigny, Sevignac, Sevi-
gny , s'explique par un primitif Sabiniaous dérivé d'un gen-
tilice Sabinius , usité en Gaule et dans d'autres parties de
l'empire romain (1). L'origine latine de Sabinius et de
Sabiniacus est évidente.
Nous trouvons d'abord le mot Sabinus, nom d'un des
peuples italiotes qui ont fourni à la population de Rome
le plus fort contingent ; l'addition du suffixe -io- au thème
SabinO' de ce nom ethnique a transformé Sabinus en un
nom de famille ou gentilice. Sabinius, transporté en Gaule
par la conquête romaine, et pris comme nom par des
Gaulois romanisés, a donné, grâce au suffixe gaulois -aco-s,
un dérivé Sabiniacus^ qui a servi à désigner la part de cha-
que Sabinius dans la propriété collective de son peuple ou
de sa cité; et, après vingt siècles, après des révolutions
multipliées qui ont toutes eu leur contre-coup dans la géo-
graphie, on peut recueillir, dans le dictionnaire des postes
de France, plus de quatre-vingts exemples du nom que
(1) M. Sabinius Gandidus, à Nimégue. Brambach , n* 72.
T. Sabinius, à Gléves. Brambach, 143.
FI. Sabinius AttiHus, à Huttich. Brambach, 1342.
Sabin[ia] Marcella, à Mûnchweiler. Mommsen, Inscviptiones helvelicae, 16().
L. Sabinius Severus, à Colias (Gard). (C. /. L., XII, 2579.)
Sabinius Quintilianus, à Nimes. (C. /. L., XII, 3866.)
Sabinius Voratianus, à Vaison (Vaucluse). (C. /. L., XII, 5843.)
Voilà donc pour la Gaule sept exemples du gentilice Sabinius.
Le nombre des hommes dont le gentilice est Sabinius est de dix->neur
dans le tome III du Corpus inscriptionum lalinarum; do un dans le
tome V et dans le tome VII; de trois dans le tome IX; de deux dans le
tomo X. Les femmes dont le gentilice est Sabinia sont six dans le tome III,
deux dans le tome V, deux dans lo tome IX , une dans le tome X , etc. Sur
le cognomen Sabinus, voyez Paulj, Real-EncyclopaediCy t. VI, p. 626.
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 127
donnèrent à leurs fundi les Gallo-Romains du nom de
Sabinius, quand ils devinrent propriétaires des petits ter-
ritoires encore désignés par les diverses formes modernes
du nom de lieu Sabiniacus, dérivé du gentilice Sabinius.
Ces petits territoires, appelés aujourd'hui Savigna, Savi-
gnac, Savigny, Savigné, etc., appartiennent à toutes les
parties de la France, depuis TAriège jusqu'aux Ardennes,
depuis les Basses-Pyrénées jusques aux Côtes-du-Nord ,
depuis la Gironde jusqu'à la Haute-Savoie (1).
S 2. — Les noms de fundi formés à Vaide du suffixe latin
-anus dans la table alimentaire de Veleia,
La Tabula Alimentaria de Veleia, dont M. Ernest Des-
jardins a publié une savante édition (2) , nous montre clai-
rement comment .se créaient ordinairement dans l'empire
romain les noms de fundi. En l'an 104 de notre ère,
l'empereur Trajan voulut établir à Veleia (3) un fonds de
secours au profit des enfants pauvres ; il prêta aux pro-
priétaires fonciers de la ville, moyennant hypothèque, un
capital, à charge par eux de payer chaque année l'intérêt,
et cet intérêt devait être employé en allocations annuelles
aux enfants sans fortune. Les noms des propriétaires em-
prunteurs et des fonds de terre hypothéqués furent inscrits
sur une table de bronze qu'un hasard heureux nous a
conservée. La plupart de ces fundi portent des noms ter-
minés en 'anus et dérivés de gentilices romains bien connus.
En voici quelques exemples :
Acilianus, d'Aciliits,
Aemilianus^ à'Aemilius.
Afranianus, à!Afranius.
(1) L'équivalent italien est Savignano, forme moderne du latin SsibiniAnus.
(2) Depuis l'époque où ce mémoire a été écrit , une nouveUo édition a
paru dans le C. L L., t. XI, p. 205-231.
(3) Veleia était situé prés de Plaisance , au sud du Pô , dans la Gaule
cisalpine. On verra cités plus bas quelques noms de fundi en -acus qui at-
testent la présence d'éléments gaulois dans le territoire de cette viUe.
m LIVRE II. CHAPITRE !•'. | 2.
Anionianus, à'Antoniiis,
AppianuSf A'Appius.
Àtilianus, d'AHliiLS.
AurelianuSj d'Aurelius.
Caecilianus^ de Caecilius.
Calidianus, de Calidius.
CctssianiLSy de Cassius.
Comelianus^ de Cornélius,
Domitianus, de Domitius.
EnnianuSj à*EnniiLS.
Fabianus^ de Fabius.
Furianus, de Furius.
Gellianus, de Gellius.
Granianus, de Granius.
Julianus^ de Julius,
Junianus^ de Junius,
Latinianus, de Laiinius,
Licinianus, de Licinius.
LucilianuSy de Lucilius,
Manlianus^ de Manlius,
Marcilianus^ de Marcellius ou de MarciUus.
Marianus, de Marius.
Mucianus^ de Mucius.
Munatianus, de Munatius,
Numerianus, de Numerius.
Octavianus^ d'Octavius.
PapirianuSj de Papirius.
Petronianus^ de Peironius.
Propertianus, de Propertius.
Statianus, de Siatius.
Valerianus^ de Valerius,
VelleianuSy de Velleius.
Vibianus^ de Kifcius.
Kmant(5, de Finiw (1).
(1) Les premiers de ces gentilices sont chacun Tobjet d*un article dans la
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 129
Les fundi désignés par ces noms ne doivent pas ces
noms aux propriétaires qui les hypothèquent à l'empereur
en l'an 104 de notre ère , ils les ont reçu de propriétaires
plus anciens. Ainsi le fandus Acilianus appartenait au
temps de Trajan à M. Virius Nepos ; le fundus Aemilianiis
à Yaleria Ingenua, le fundus Afranianus à C. Dellius Pro-
culus, le fundus Appianus à Cornelia Severa, un fundus
Atilianus. à M. Antonius Priscus , un autre à C. Coelius
Verus, un autre encore à L. Granius Priscus, etc. C'est
par hasard et par exception que M. Antonius Priscus et ses
parents se trouvent propriétaires de quelques fundi Anto-
nianij et C. Vibius d'un fundus Vibianus, Depuis le lotis-
sement primitif les fundi ont changé de mains, et, malgré
les mutations, leur nom d'origine leur a été conservé. En
Gaule, les noms d'un nombre considérable de fundi offrent
à l'observation la même stabilité persistant depuis l'empire
romain jusqu'à nos jours. Pour le bien comprendre, il faut
résumer en quelques mots l'histoire de l'onomastique en
Gaule pendant les premiers temps qui ont suivi la conquête
romaine.
S 3. — Les noms d*hommes en Gaule après la conquête.
Les Gaulois indépendants ne faisaient usage ni de pré-
uoms , ni de gentilices : en d'autres termes , les noms de
famille leur étaient inconnus. Chacun d'eux avait un nom
auquel, en cas de besoin , pour éviter la confusion , il joi-
gnait soit un surnom, ex. Licnos Contextos (1), soit plutôt le
nom de son père au génitif en le faisant suivre du mot
cnos a fils » : Aiegnatos Druti-cnos, t Ategnatos, fils de
Drutos (2) ; » KatroiTaXoç OWpautvoç , « Cassitalos , fils de Ver-
partie déjà publiée du Totiuê laliniiAtis onomaslicorif t. MV, que nous
devons à la patience érudite de M. Vincent De-vit. On peut consulter sur
les derniers Pauly, Real Encyclopaedie, t. V et VI.
(1) Inscription d'Autun.
(2) Inscription de Todi.
9
180 LIVRE IL CHAPITRE I-. { 9.
SOS (1); » Iccavos Oppiani^cnos ^ « Iccavos, fils d'Oppia-
nus (2), » Andecamulos Toutissi-cnos ^ « Andecamulos, fils
de Toutîssos (3) ; » Bratronos Nantoni-cnos, « Bratonos, fils
de Nantonos (4). » Quelquefois même on supprimait le mot
cnos en laissant le nom du père au génitif : Doiros Sego-
mari, « Doiros, fils de Segomaros (5); » Ma/rtialis Danno-
taliy (( Martialis, fils de Dannotalos (6). »
Quand, après la conquête, les membres de l'aristocratie
gauloise voulurent s'agréger à la race conquérante , ils ne
se bornèrent pas à revêtir la toge et à parler latin ; ils
adoptèrent aussi le système onomastique des Romains, ils
prirent par conséquent un prénom, un gentilice et un sur-
nom. Pour arriver à ce résultat , ils ne suivirent pas tous
le même procédé ; quatre systèmes différents se firent con-
currence : — 1® Le plus répandu fut celui des copistes ; ils
prirent à Rome les trois éléments onomastiques par les-
quels ils prétendaient distinguer leur personnalité : leur
prénom, leur nom et leur surnom furent tous trois romains;
on ne peut ordinairement , dans les textes , distinguer ces
Gaulois des Romains établis en Gaule. — 2'' Quelques-
uns montrèrent plus d'originalité : demandant à Rome un
prénom et un surnom , ils se firent un gentilice avec un
nom Gaulois, probablement celui de leur père, en y ajou-
tant la désinence ius. — 3® D'autres , empruntant à Rome
un prénom et un nom ou gentilice, firent de leur nom
gaulois un surnom. — 4® D'autres enfin ne prirent à Rome
(1) Inscription de Nimes.
(2) Inscription de Volnay.
(3) Inscription de Nevers.
(4) Inscription de Paris, que M. Mowat a le premier interprétée.
(5) Inscription de Dijon.
(6) Inscription d'Alise ; deux inscriptions gauloises nous offrent un sjs-
tème intermédiaire entre celui-ci et l'adoption du système onomastique ro-
main. Le Gaulois fait suivre son nom d'une espèce de gentilice formé avec
le nom de son père et la désinence -eo«. Ex. : 1* Bi|jl|jloc A(Tov|i6ptoç. Aitov-
{AipEoc est un dérivé de Litumaros ; Héron de Villefosse , Inscriptions de
saint Remy, 2* £syô|Mipoc OiSiXX6vsoc. Inscription de Vaison, aujourd'hui au
musée Galvet d'Avignon. OàiXX6vfio< pai'sdt dérivé d'un nom propre Vtllo.
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 131
que le prénom, et le firent suivre de deux noms gaulois ,
employés l'un comme nom, l'autre comme surnom.
Du premier système , — emprunt à Rome des trois élé-
ments : prénom , nom , surnom , — un exemple ancien et
connu est celui de C. Valerius Procillus, un des agents de
César pendant la conquête des Gaules : C. Valerius Procillus
était gaulois d*origine et le second citoyen romain de sa
famiUe (1) ; son surnom Procillus est dérivé du latin procus^
comme le gentilice romain Procilius , nom d*un tribun du
peuple qui fut historien et qui était contemporain de Ci-
céron (2) ; le prénom et le nom de C. Valerius Procillus
sont ceux de C. Valerius Flaccus, propréteur de la Gaule
Narbonnaise en 83 (3), à qui son père avait dû le titre de
citoyen romain. On peut lui comparer C. Julius Magnus^
dont Torigine gauloise est attestée par le surnom de son
père Eporedirix , et dont une inscription votive , à Bour-
bonne-les-Bains , a conservé le souvenir (4).
Le procédé suivi par des hommes obscurs comme C. Va-
lerius Procillus^ et C. Julius Magnus^ fut celui de membres
plus illustres de l'aristocratie gallo-romaine qui de même
empruntèrent aux Romains les trois éléments de leur
onomastique. Julius Florus, de Trêves, un des chefs de
l'insurrection gauloise en Tan 21 de notre ère , en est un
témoin, bien que Tacite ne nous ait pas conservé son
prénom (5) , probablement Gains. Tel est encore Gains
Julius Vindex , gaulois d*origine , de race royale , dont le
père avait été élevé à la dignité de sénateur, et qui fut
lui-même légat impérial en Gaule; il est célèbre par sa
révolte contre Néron , Tan 68 de notre ère (6).
(1) De bello gàllico, l, 47.
(2) TenBel, Geschichte der rômischen LUer&tur, 3* édition, p. 299, 300.
Cf. Pauly, Real Encyclopaedie, VI, 61.
(3) Desjardins, Géographie historique et administrative de la Gaule
romaine, i, II, p. 329.
(4) Revue archéologique, nouvelle série, t. XXXIX (1880), p. 80, article de
M. ChabouUlet.
(5) Annale*, III, 43.
(Q Dion Gassius, LXIII, 2. Suétone, Néron, 40.
132 LIVRE II. CHAPITRE 1-. ) 3.
Voici des exemples du second système qui consiste à
intercaler entre deux éléments romains, Tun prénom, l'autre
surnom, un gentilice en -ius dérivé d*un nom gaulois,
probablement du nom du père ou d*un ancêtre :
L. Carantius Atticus (1), M. Carantius Macrinus (2) et
L. Carantius Gratus (3). Carantius dérive du nom gaulois
Carantos , « ami, parent, » écrit Carantus dans la période
romaine et conservé par quatre inscriptions , Tune de la
Grande-Bretagne, les autres des contrées rhénanes (4). Le
même nom gaulois forme le premier terme du composé
Caranto-magus ; celui-ci, vers la fin du troisième siècle,
date de la table de Peutinger, était le nom porté par une
station romaine qu'on croit reconnaître dans Cranton,
commune de Compolibat (Aveyron) (5).
C. Carantinius Maternus (6). Carantinius est dérivé de
Carantinus et nous avons un exemple de Carantinus em-
ployé comme nom d'homme, c'est le nom d'un potier (7).
C. Mogillonius Priscianus (8). Mogillonius est dérivé de
Mogillo (9) qui est une variante de Magilo ; celui-ci se
trouve quelquefois dans les inscriptions d'Espagne (10).
C. Meddignatius Severus (11). Meddignatius est dérivé de
Meddi-gnatos dont le second terme est un adjectif gaulois
> signifiant <( habitué à » et fréquent dans les composés.
Passons au troisième système : emprunter prénom et
gentilice à Rome en faisant du nom gaulois un surnom.
On peut citer d'abord le grand-père de l'historien Trogue
Pompée. C'était un gaulois du peuple des Voconces , il
(1) Brambach, Corpus inscriptionem rhenanarum, n* 713.
(2) Allmer, Inscriptions antiques de Viennef I, 404.
(3) C. I. L., III, 3916.
(4) C./. L., t. VII, n» 1033; Brambach, n" 921, 1321, 1769.
(5) Longnon, Atlas historique de la Gaule, 1** livraison, p. 26.
(6) Brambach, 1329.
(7) Allmer, Inscriptions antiques de Vienne, t. IV, p. 74.
(8) Brambach, 1425.
(9) C. /. L., XII, 3407.
(10) Ibid., II, 809, 865, 2633, 3051.
(11) Brambach, 1336.
i
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 133
s'appelait Trogus. Cn. Pompius le fit citoyen romain ; ce
Cn. Pompeius est le célèbre Pompée , Pompeius Magnus ,
propréteur en Espagne, de 76 à 74, ou de 75 à 73. Il eut
à traverser la Gaule pour se rendre en Espagne et pour en
revenir; il en tira peut-être des approvisionnements et des
troupes. C'est alors qu'il donna droit de cité romaine au
gaulois Trogus. Dès lors, Trogus s'appela Cn. Pompeius
Trogus. L'historien parait avoir eu la même onomastique (1).
Un autre exemple de ce procédé nous est connu par César :
l'auteur des Commentaires nous parle de C. Valerius Cabu-
rus, élevé à la dignité de citoyen romain par le propréteur
C. Valerius Flaccus et qui avait adopté le prénom et le nom
de son bienfaiteur en y ajoutant comme surnom son propre
aom gaulois Caburus, en 83 (2). Tite-Live nous apprend
que le premier prêtre de l'autel construit en l'honneur de
Jules César fut TEduen C. Julius Vercondaridubnus (3).
Nous citerons ensuite :
C. Antestius Lutu-marus (4).
M. Antestius Vogi-toutus (5).
P. Decius Esu-nertus (6).
G. Julius Comatu-marus (7).
6. Julius Vogi-toutus (8).
Q. Valerius Esu-nertus (9).
L. Valerius Tarvius (10).
Nous arrivons enfin au quatrième système : prénom ro-
main, nom et surnom gaulois. Exemples :
(1) Justin, XLIII, 5, 11, et Teuffel, Geschichte der rœmischen Ltteratur,
3* édition, p. 558.
(2) De bello çaIHco, I, 47.
(3) Bpitome^ 139. Edition d*Otto Jahn, p. 108.
(A) C. i. L., III, 4724.
(5) Ibid., ni , 4724.
(6) Mommsea, Inscriptioneê Hëlveticae^ n* 80.
(7) C. /. L., III, 337.
(8) Ibid,, m, 4908.
(9) /Wd., VII, 1334, 61.
(10)/Md.,III,D. 41.
13^ LIVRE II. CHAPITRE I-. 1 4.
C. Commius Bitutio (1). Commius est chez César le nom
d'un roi des Atrébates (2).
Q. Solimarius Bitus (3). Solimarius est dérivé du nom
gaulois Solimarus (4).
L. Carantius Cinto (5). On a déjà vu (p. 132) que Caran-
tius vient du nom gaulois Carantos.
Sextus Nertomarius Nertonius (6). Nertomarius est tiré
du nom gaulois Nertomâros , « grand par la force. » Les
surnoms Bitutio, Bitus, Cinto, Nertonius sont gaulois.
S 4. — Les noms de fundi en -anus dans la Table alimertr
taire auxquels correspondent des noms de fundi gallo-ro-
mains dérivés des mêmes gentilices , mais avec le suffixe
gaulois -àcus.
Les membres de l'aristocratie gallo-romaine s'étant pro-
curé' des gentilices par les divers procédés que nous ve-
nons d'exposer, tirèrent habituellement de ces gentilices
les noms de leurs fundi en ajoutant à ces gentilices , non
pas le suffixe dnus, suivant l'usage romain , mais le sufiBxe
àcus par à long. On sait que les suffixes àcus par à bref et
àcus par d long sout d'un emploi rare en latin, tandis que
le suffixe àcus , mieux àco-s , par a long , est d'un usage
très fréquent dans les langues celtiques (7). .
Le plus ancien exemple connu d'un mot où le suffixe
celtique àcus apparaisse avec indication de sa quantité, nous
est donné à deux reprises par Virgile :
Fluctibus et fremitu assurgens Benace marino (8).
Quos pâtre Benaco , velatus arundine longa (9).
(1) Herzog, n* 206.
(2) De bello g&llico, 1. IV, c. 21, 27, etc.
(3) Brambach, 855.
(4) Ibid., 1380, 1439, 1778.
(5) AUmer, III, 414.
(6) Brambach, 29.
(7) Gr&mm&tica, celtica, 2* éd., p. 806, 809, 849. Cf. p. 15.
(8) Géorgiquei, 1. II, vers 159.
(9) Enéides, 1. X, vers 205.
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 135
Béndcus^ variante de *bennacuSj en vieil irlandais bennach,
« cornu , » <c aux promontoires multiples , » est le lac de
Garde, dans la Gaule cisalpine ; comparez le nom de Berm
Etaifj a corne » ou « promontoire d'Etar, » porté autrefois
par le promontoire qui borde au nord la baie de Dublin.
La quantité attribuée deux fois par Virgile au suffixe -dois
dans Bêndcus doit une grande autorité à la date où écri-
vait le célèbre poète et à sa patrie. A l'époque où vivait
Virgile, la langue latine distinguait nettement Va long de
la bref. Virgile, originaire de Padoue, devait savoir, autre-
ment que par l'écriture, la quantité des voyelles du nom
porté de son temps par le lac de Garde, et n'a pu commettre
d'erreur sur ce point de prosodie. Enfin, aucun obsta-
cle ne l'eût empêché de respecter cete quantité : Bendcus
par d bref eût pu entrer dans un vers comme Bendcus par
à long (1).
La même quantité se trouve pour le même mot chez
Glaudien :
Quas Benacus alit, quas excipit amne quieto
Mincius... (2).
Benacumque pntat littora rubra lacum (3).
Et chez Sidoine Apollinaire le vers :
Si quis Ayitacum dignaris visere nostram (4).
nous offre encore de môme un <J long dans le suffixe -âcus.
Toutefois, on ne peut voir là que le respect de la tradition.
Pendant les derniers temps de l'empire romain, la distinc-
(1) On ne pent tirer aucune conclusion des vers de Juvénal : Bebriaci campo
spolinm affectare palati (Satires , II , 106) , et de Martial : Accipe Mattiacas
qao tibi calva pilas {Epigrammes^ XIV, 27). Bebrtacus et Math'actcs ont pris
la quantité que le vers exigeait. Originaires Tun de l'Italie méridionale et
l'antre d*Espagne , Juvénal et Martial ont pu , sans se sentir ToreiUe bles-
sée, donner une quantité inexacte à Ta du suffixe celtique -aciis , et le faire
bref comme dans AcIUlcus , Aegyptiaicus»
(2) EpithaXaLTnium dictum PalUdio et Celertnae, y. 107. Edition Jeep, p. 75.
(3) Carmina minora, XIII, v. 18. Edition Jeep, p. 144.
(4) Carmen, XVIII, ▼. 1. Migne, Patrologia latinm, t. LVIII, col. 723, B.
136 LIVRE IL CHAPITRE I-. | 4. ^
tion entre ïa bref et Ya long avait disparu de la pronon-
ciation. Bien qu'écrivant en Gaule, Ausone, qui vivait au
quatrième siècle, fait bref, contrairement aux lois ancien-
nement respectées de la quantité celtique, Va du sufiSxe
'ocus dans les deux vers pentamètres :
Pauliacus tanti non mihi villa foret.
Villa Lucani mox potieris aco (1).
On peut donc se demander s'il y a lieu d'attacher grande
importance aux vers précités de Claudien et de Sidoine
Apollinaire, qui sont postérieurs à Ausone, et surtout à
Texemple de Fortunat, poète du sixième siècle, qui a comme
eux fait long l'a du suffixe gaulois -octw, témoin son vers :
Antonnacensis castelli promptus ad arces (2).
Mais la quantité de Va de ce suffixe est établie d'une ma-
nière incontestable par Taccord de Virgile avec une ins-
cription de Nimes et avec une loi phonétique des dialectes
bretons. Virgile, avons-nous dit, qui écrivait à une époque
où les Romains prononçaient Va long autrement que Va
bref, fait long Va du suffixe gaulois -acus dans Benacus, Or,
l'inscription de Nimes sur laquelle nous nous appuyons
distingue les longues par un apex (3). L'o d^tixôrù y est
surmonté d'un apex , de même l'a de Mânibus « aux Mâ-
nes, » celui du cognomen Vitâlis^ et enfin, c'est là que nous
voulons arriver, le premier a de Togiàciae. Ce dernier mot
est le génitif du gentilice Togidcia^ dérivé de Togidcus (4) ,
lequel vient lui-même d'un thème Togio- masculin du
nom propre féminin Togia (5). Togidcus avait l'a long. Nous
(1) EpxBtoU V, VY. 16 et 36. Edit. Schenkl, p. 163.
(2) De ntivigio auo - Carminum, lib. X, c 9, ▼. 63. Edition de Frid. Léo,
p. 243.
(3) Herzog, Galltae ridirbonensis... historia, t. II, p. 34, n* 136. Gommani-
cation de M. Mowat à la Société de Linguistique dans la séance du 27 jan-
vier 1882. Bulletin^ n* 23, p. lx.
(4) Qruter, 845. 5.
(5) C. /. L. , t. III, n* 5470. Togia, dérive de Togus : Togorum libertus,
C. /. L., III, 4169.
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 137
retrouvons cet d long du suffixe â4)us dans des documents
postérieurs d'une haute autorité.
Les langues néo-celtiques du rameau breton ont con-
servé la distinction de Va bref et de 1'^ long dont le bas-
latin avait perdu le sentiment. Chez elles, la plus ancienne
notation de Y à long est o, qui devient plus tard en breton
de France eu, e, en gallois oti, aw^ tandis que Va bref reste
a; or les notations eu^ e en breton, au, aw en gallois sont
celles que ces deux langues emploient pour représenter Va
du suflBxe celtique âcus. Un exemple curieux en est donné
vers le neuvième siècle par Nennius dans sa nomenclature
des cités de la Grande-Bretagne ; il y rend par Ebrauc le
latin Eburâcus, ancien nom de la ville d'York (1), dérivé du
nom d'homme Eburus. Un autre exemple , fourni par des
documents postérieurs d'environ trois siècles , est le nom
de la région alors appelée Brecheniauc (2). Brecheniauc est
dérivé de Brachan^ nom d'homme, au moyen du gentilice
fictif *Bracanius et du suffixe -âcyus ajouté à ce gentilice
fictif suivant un procédé emprunté aux usages de la pé-
riode romaine et employé après la chute de l'empire ro-
main en Grande-Bretagne comme en Gaule.
Quand, au cinquième siècle, des habitants de la Grande-
Bretagne, chassés par l'invasion anglo-saxonne, vinrent se
réfugier sur le continent, ils apportèrent avec eux le suffixe
-dcus par d long, aujourd'hui dans leur langue, dans le
breton de France , -ek ou -euk ; mais ils trouvèrent sur le
territoire conquis par eux une population gallo-romaine qui
désignait certaines localités par des noms de lieux créés
sous la domination romaine à l'aide de gentilices romains
(1) La leçon Ebroauc que préfèrent Pétrie, Monumenta historica Bri-
Unnica, I, p. 77 A, et Giles History of the ancient BritonSy t. II, p. 335,
doit ce semble être corrigée en Ehorauc. Dans la même nomenclature se
trouve le nom de Cair Caratauc, chez Geoffroy de Monmouth Kaer-Caradauc,
composé dont le second terme représente le génitif britanno-latin Caralâci.
Bar Eturacus yoir plus bas, g 10.
(2) Liber Landavensis et manuscrit du Musée britannique , Gottonien ,
Vesp. A, 14, cités dans la Grammatica Celtica, deuxième édition, p. 807.
138 LIVRE II. CHAPITRE I-. { 4.
et du su£Sxe gaulois --âcus : Avitidcus^ PaulidcuSj Campa*
nidcus^ et autres nopis de lieux, dérivés d^Avitius, de Pau-
liusy de Campanius, etc. Les Gallo-Romains d'Annorique
avaient dans ces mots remplacé par Va commun du bas-
latin ïd long primitif du suffixe âcm; de cet a commun du
bas-latin , les Bretons conquérants firent un a bref, et de
là est venue dans ces mots la prononciation bretonne -ac :
Avizac (1), Poliac (2), Kempeniae (3) au neuvième siècle, au-
jourd'hui Avessac (Loire-Inférieure), Peillac (Morbihan),
Campénéac (Morbihan). Brittiacus^ dérivé de Brittius (4), est
écrit, au onzième siècle, Brithiac dans le Cartulaire de
Landévennec; aujourd'hui il est devenu Briec par analo-
gie avec la désinence -ec = dcos par d long des noms de
lieux créés par les Bretons comme Beuzec = * Bodidcos^
Gouezec = * Vêdàcos^ — tous deux noms d'hommes à Tori-
gine ; — mais c'est un phénomène tout récent qui , dans
Briec , a fait triompher sur la prononciation gallo-romaine
des bas temps , la prononciation néo-celtique de Va long
dans le suffixe dcm^ tandis que la prononciation gallo-
romaine de la fin de l'empire persiste encore aujourd'hui
dans Avessac, Campénéac, Peillac, mots merveilleusement
conservés : la langue bretonne a été pour eux une sorte
d'écrin qui les a protégés contre les révolutions phonétiques
du français , depuis le cinquième jusqu'au onzième siècle ;
sans cette sauvegarde, l'a et le c seraient perdus : on
dirait Avecé, Champigné, Fouillé.
La langue latine possède, comme le celtique , un suffixe
'àcm par à long, et parallèlement on y trouve un sufiBxe
âciis par à bref. Et d'abord, par d bref : tout le monde a
(1) Le Cartulaire de Redon nous ofifre cette orthographe, pp. 65, 73, 89,
95, 151, 159. On trouve aussi : Avesiacus, p. 49; Aviciacuê, p. 192; Auezac,
p. 291.
(2) Poliacenses homineSy Cartulaire de Redon^ p. 81.
(3) Cartulaire de Redon^ p. 81.
(4) Le tome X du C. /. L. en offre douze exemples ; c'est une variante de
Bruttius ; on trouve aussi Britius avec un seul t ; mais il faut un double t
pour expliquer le th de Brithiac,
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 139
entendu parler de la Victoria Actiàca, du triumphus Actiâcus,
du bellum Actiàcum (1). Ovide fait bref Va du suflBxe, par
exemple : f
Frondibtts Actiacis eomtos redimlî|^ capiUos (2).
Nous citerons aussi Tadjectif Aegyptiàcus,
Le suffixe àcus. par à long existait de même en latin : la
cloàca maxima (3) est un des plus anciens monuments de
Rome; la bonne orthographe de son nom, clouaca^ nous a
été conservée par une inscription (4), et la quantité par
un vers d'Horace :
niud idem in rapidum flumen jacerotve cloacam (5).
Toutefois l'usage n'existait pas chez les Romains de se
servir des suffixes -dcus et -àciis pour former des dérivés
de gentilices qu'on aurait employés à désigner des fundi.
Mais ajouter le suffixe celtique -àcits au gentilice, et créer
ainsi les mots qui servent à la dénomination des fundi est
la coutume générale des Celtes soumis à Rome en Oaule
et hors de Gaule. Comme les gentilices de ces Celtes sont
la plupart du temps empruntés au latin , il résulte de là
qu'ordinairement le nom donné par le Celte romanisé à la
terre dont il est propriétaire est un mot hybride composé
de deux éléments , le premier latin , le second celtique.
Ainsi le Gaulois qui a pris le gentilice romain Antonius^ au
lieu d'appeler son fonds de terre Antonianus^ nom plusieurs
fois inscrit sur la table alimentaire de Veleia (6), a fait
usage de l'adjectif Antoniactu. Un fv/ndus Antoniacus était,
(!) Ces expressions se trouvent chez Suétone et chez VeUeius Paterculus.
(2)Fa«tef, I, 711.
(3) Tite-Uve, livre I, ch. 56, % 2.
(4)C. /. L., I, n* 1178.
(5) Satirea, livre II, v. 242. Cf. Corsseni Ueber Ausspr&che, etc., deuxième
édition, t. Il, p. 195.
(6) On trouve aussi fundus Antonianus dans les chartes de Ravenne ,
Pantozzi, Monumenti Ravennati, p. 57. L'acte est du temps de l'archevêque
Honestus ou Aunestus, 971-983.
140 LIVRE IL CHAPITRE !•'. { 4.
au onzième siècle, AntoniaciLs villa que mentionne en 1030
une charte émanée du roi Robert (1) ; c'est aujourd'hui
Antony (Seine). On doit expliquer de même les noms d'An-
togny (Indre-et-Loire), Antoigné (Maine-et-Loire), Antoigny
(Orne). Antoigné (Maine-et-Loire) parait être la villa Anto-
niacus, d'un diplôme de l'année 775 (2) ; et Antogny (Indre-
et-Loire) , est appelé villa Antoniacus dans un diplôme de
Tannée 925 (3). Le gentilice Antonius n'était pas rare en
Gaule dans la période romaine. Peut-être les premiers
Gaulois qui l'ont porté étaient-ils des protégés du célèbre
Marc Antoine qui a fait un séjour en Gaule, près de César,
de l'an 55 à Tan 51 avant notre ère ; et qui, plus tard, de-
venu triumvir, eut la Gaule dans son lot. M. AUmer a
recueilli neuf exemples du gentilice Antonius dans ses
Inscriptions antiques de Vienne (4). M. Mommsen en a
signalé deux dans les inscriptions romaines de la Suisse (5).
M. Brambach en indique trois dans celles de la rive gauche
du Rhin (6). M. de Boissieu en a réuni douze dans ses
Inscriptions antiques de Lyon (7). Antonius Primus, qui
battit Vitellius à Bedriacum Tan 70 de notre ère , était né
à Toulouse, et de son surnom gaulois Beccus, identique au
mot gaulois qui est devenu « bec » en français , on peut
conclure qu'Antonius Primus était d'origine gauloise (8). Il
est donc naturel que nous trouvions en France des fundi
Antoniaci.
Naturellement le gentilice Julius , celui du conquérant
(1) Tardif, Monuments historiques^ p. 264, col. 2. J'ignore si c'est da même
Antoniacus qu'il est question en 829 dans le diplôme de Louis le Débon-
naire, auquel M. Sickel a donné le n* 260, Acta Karolinorum , t. II, p. 163.
(2) Dom Bouquet, t. V, p. 737 c. ; cf. Mabille, La Pancarte noire de Saint-
Martin de Tours, p. 69, 106, 107, 151 , 218; et Sickel, Acta Karolinorum,
t. II, p. 27, n- 42.
(3) D. Bouquet, t. IV, v. 325. Cf. MabiUe, La Pancarte noire de Saint-
Martin de Tours, pp. 99, 185, 186, 218.
(4) Voyez l'index au t. IV, p. 503. Cf. Bulletin èpigr,, t. II, p. 371, n» 415.
(5) Inscriptiones Helveticae, n" 24.
(6) Inscriptiones Rhenanae, n" 199, 583, 602.
(7) Voyez l'index, p. 501.
(8) Suétone, Vitellius, 18.
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 141
de la Gaule, et d'Auguste son fils adoptif, est plus fréquent
en Gaule que celui d'Antonius.
Tout le inonde a entendu parler du trévire Julius Plorus
et de Téduen Julius Sacrovir , chefs des Gaulois insurgés
contre Tempire romain sous le règne de Tibère, Tan 21
de notre ère (1).
M. Allmer, dans ses Inscriptions de Vienne, a réuni quatre-
vingt-quatre exemples du gentilice Julius (2). On en trouve
quarante-neuf dans les Inscriptions antiques de Lyon de
M. de Boissieu. M. Mommsen nous en donne trente-deux,
recueillis en Suisse (3). Dans ces relevés on a laissé de côté
les femmes. De ce gentilice dérive le nom de fundus gallo-
romain Juliacus, correspondant au Julianus de la table
alimentaire de Veleia. De Juliacus nous viennent dix noms
de communes : quatre Juillac (Charente, Corrèze, Gers,
Gironde); trois Juillé (Charente, Sarthe, Deux-Sèvres); un
Juilley (Manche); deux Juilly (Côte-d*Or, Seine-et-Marne);
un JuUié (Rhône); trois Jully (Aube, Saône-et-Loire ,
Yonne). A ces dix noms de communes il faut ajouter treize
noms identiques de hameaux.
Enfin, en Prusse rhénane, se trouve la plus connue des
localités qui appartiennent à ce groupe : Juliers , en alle-
mand Jiilich, connu au quatrième siècle sous le nom de
Juliacus, comme Tattestent Ammien Marcellin , V Itinéraire
SAntonin et la Table de Peutinger (4). On a cru que Jules
César était le fondateur de Juliers. Mais l'obscur Julius ,
qui a donné son nom à un fundus de la Colonia Agrippina,
et qui a eu Theureuse fortune qu'une ville bâtie sur ce
fundus ait conservé ce nom jusqu'à nos jours, ne doit en
aucun cas être confondu avec le célèbre conquérant de la
Gaule. Peut-être est-ce un de ces Ubiens qu'en l'an 39
(1) Tacite, Annales, III, 40.
(2) Voyez l'index au t. IV, p. 506.
(3) Insrriptiones Helvetic&ey pp. 119, 120.
(4) Voyez les textes réunis par E. Desjardins, Géographie de U Gaule
d'après U Uble de Peutinger, p. 107.
142 LIVRE II. CHAPITRE I-. { 4.
avant J.-C. M. Vipsanius Agrippa, depuis gendre d'Auguste,
fit passer de la rive droite du Rhin sur la gauche dans les
environs de la ville actuelle de Cologne (1), ou c'est un de
ces vétérans que quatre-vingt-dix ans plus tard, en Tan
50 de J.-C, rimpératrice Agrippine, femme de Claude,
envoya fonder une colonie dans ce nouveau territoire des
Dbii (2). Colonia Agrippina est aujourd'hui Cologne (3). Les
inscriptions de Cologne réunies par Brambach nous mon-
trent le gentilice Julius douze fois répété dans les noms
d'hommes :
C. Julius Baccus, n*" 310 ;
T. Julius Tuttius, n* 311 ;
C. Julpus] Materuus, n** 319 ;
Jul[ius] Primus, n^ 329 ;
Q. Julius Flavos, n*^ 332 ;
C. Julius Verecundus, n** 363;
Julius Antoninus, n** 368 ;
Julius Verinus, n® 371 ;
C. Jul[ius] Speratus, n** 374;
T. Julius Fortunatus, n* 386 ;
C. Julius Mansuetus, n** 405;
C. Julius Firminus, n® 433.
Il est possible que parmi ces douze individus se trouve
ou le premier propriétaire , ou un descendant du premier
propriétaire du fundus Juliacus sur lequel s'élève aujour-
d'hui la ville de Juliers.
La variante romaine Julianus de Juliacus parait avoir
donné Juillan, nom d'une commune des Hautes-Pyrénées,
et trois noms de hameaux : Juillan (Vaucluse), Julhans
(Bouches-du-Rhône), JuUians (Vaucluse).
(1) Tacite, Germanta, 28. Cf. E. Dosjardins, Géogrtiphie historique et âd'
ministrative de la Gaule Romaine, t. III, p. 36-37.
(2) Tacite, Annales, XII, 27.
(3) E. DesjardinSy Géographie de la Gaule d'après la Table de Peutinger,
pp. 49-52.
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 143
Du gentilice Cassius est dérivé à Veleia le nom du fundus
Cassianus (1). Mais sur le territoire d'une ville gallo-romaine
dltalie, Mediolanum, aujourd'hui Milan, le même gentilice
a donné le dérivé Cassiacus^ d*où le nom du riLs Cassiacum
dont le propriétaire Verecundus offrit asile à saint Augustin
Tan 386 ou 387 de notre ère. Cette localité s'appelle aujour-
d'hui en italien Cassago (2). CassiacuSj que nous trouvons
ensuite en France au septième siècle dans une charte de
Vigile, évoque d'Auxerre (3), au huitième dans le testa-
ment de Widerad, abbé de Flavigny (4), et dans un diplôme
de Charlemagne (5), est la forme primitive du nom de
quinze communes de France, savoir : un Chassé (Sarthe) ;
cinq Chassey (Côte-d'Or, Jura, Meuse, Saône-et-Loire ,
Haute-Saône) ; un Chassiecq (Charente) ; un Chassieu (Isère) ;
quatre Chassy (Cher, Nièvre, Saône-et-Loire , Yonne);
trois Chessy (Aube , Rhône , Seine-et-Marne) (6) ; comme
Cassago^ chacune d'elles tire son nom d'un ancien fwndus
gallo-romain, dont le premier propriétaire portait le gentilice
Cassius. T>^Xi^\%s Inscriptions cmHqu^s de Fienn^deM. AUmer
figurent dix-sept Cassius (7); M. Mommsen en a relevé
quatre dans les inscriptions latines de la Suisse ; on en
trouve six dans les Inscriptions de Lyon de M. de Boissieu.
C'était donc un nom d'homme fort répandu en Gaule pen-
dant la période romaine.
Le gentilice Latinius n'est pas très commun dans les
inscriptions romaines. Cependant un homme de ce nom
(1) Voir aussi dans une charte de Ravenne , sous l'archevêque Gratins ,
784-794, un fundus Cassi&nua, Pantiizzi, p. 64.
(2) De-vit, Totius latinit&tis onomasticon , t. I, p. t56. Le Casstctaco des
Confeêtions, Uvre IX, { 5, doit être corrigé en Cassiaco,
(3) Pardessus, Diplomata, t. Il, p. 153; Quantin, Cartulatre général de
îTonne, 1. 1^ p. 19.
(4) Pardessus, Jbtd., t. II, p. 400.
(h) 0. Bouquet , t. V, p. 737 c. C'est le n* 42 des Actes de Charlemagne
chez Sickel, Acta Karolinorum.
(6) Nous ne parlons pas des hameaux, au nombre de onze.
CO V07. l'index au t. IV, p. 504.
144 LIVRE IL CHAPITRE !•'. l 4. »
paraît avoir fait un vœu au dieu Pœuinus (1). Le nom
d'une femme appelée Latinia se lit dans une inscription
d'Altenberg (Prusse rhénane) (2). M. Latinius figure dans
une inscription d'Espagne (3). Le monument funèbre élevé
par P. Latinius Primus à P. Latinius Lepidus son père
existe encore aujourd'hui à Tévéché de Tortone , dans la
partie occidentale de la vallée du Pô (4). Le même genti-
lice est offert par un nom de femme, Latinia Dextra, peu
loin de là, dans une inscription d'Acqui (5). Quatre parents
dont le gentilice était Latinius apparaissent dans deux
inscriptions de Bénévent (6). P. Latinius Lucanus d'Atena,
en Lucanie , dédia un autel à Esculape (7). On se bornera
à ces exemples ; ils suffisent pour établir Texistence du
gentilice Latinius duquel sont dérivés à la fois le nom du
fundus Latinianus à Veleia, et en Gaule celui de plusieurs
fundi Latiniaci. L'un est aujourd'hui Lagny (Seine-et-
Marne) mentionné, dès le septième siècle, dans un diplôme
du roi Thierry III (8). Nous citerons ensuite Lagny-le-Sec
(Oise), appelé d'abord, comme le précédent, LaHniacus ; son
nom apparaît en 862 dans un diplôme de Charles le
Chauve (9). Nous terminerons par Lagnieu (Ain). Sur l'au-
torité de la vie de saint Domitien qui parait dater du neu-
vième siècle, M. Jules Quicherat admet que ce village tire
son nom primitif, Latiniacus , d'un ancien propriétaire ap-
pelé Latinus : lisons Latinius (10). Le biographe a écrit Lati-
nus parce que de son temps l'usage des gentilices n'existait
(1) Mommsen, ln9cr, Helv.^ 46.
(2) Brambach, n- 303.
(3)'c. /. L., II, 1501.
(4) Ibid.y V, 7388.
(5) /6id., V, 7512.
(6) Ibid., IX, 1856 et 1857.
(7) Ibid., X, 330.
(8) Tardif, Monuments historiques, p. 20, col. 1 : Villa noncopanti La-
(tniaco, que ponitur in pago Meldequo, Ce diplôme a été rédigé en 688 ou
689; cf. ibid., p. 32, col. 2; p. 38, col. 1; p. 85, col. 1.
(9) Tardif, Monuments historiques, p. 117.
(10) Quicherat, De la formation française des anciens noms de lieu, p. 34.
1
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 145
plus, et parce que, dans la période mérovingienne, l'usage
s'était introduit de former des noms de lieux en ajoutant à
des noms d'hommes barbares la désinence iacus : Teode-
b^ciacus, de Theodebercthus ; Landericiacus, de Landericus.
3ous Tempire romain, on aurait dit Theodebercihacus ^ Lan-
dericacus, comme Eburacus « York » (Angleterre), d'Eburus;
comme Avitacus « Aydat » (Puy-de-Dôme), d'Avitus; et par
conséquent Latinus aurait donné le dérivé Latinacus, dans
le patois de TAin Laneu, en français Lanay, Laiiey , Lany,
et non Lagneu, ni Lagny.
Dans les tables des Inscriptions antiques de Vienne.de
M. AUmer, on voit apparaître six hommes dont le gentilice
est Aurelius, et quarante et un qui portent le gentilice Va-
Imus. Rien donc d'étonnant si on trouve en Gaule des
fmdi Aureliaci et Valeriaci parallèles aux fundi Aurelianus et
Yalerianus de Veleia (1). Aureillac (Gard), Aurillac (Cantal),
Orihac (Lot), Orly (Seine), sont d'anciens fundi Aureliaci (2).
Vallery (Yonne) et Valléry (Haute-Savoie) sont d'anciens
fundi Valeriaci (3). Du premier, la variante romaine en
ànas nous est conservée par deux Aureilhan (Landes et
Hautes-Pyrénées).
Du gentilice romain Marcellius^ connu par plusieurs ins-
criptions (4), sont venus à la fois le nom du fundus Marci-
lianus, à Veleia, et celui de nombreux fundi gaulois appelés
Marciliacus ou Marcilliacw. La première orthographe est
celle de la vie de saint Didier, évéque de Cahors, écrite au
septième siècle , et qui raconte la fondation du coenobium
(1) Locus Valeri&nus en 926, dans une charte de la cathédrale d'Âsti
[Historiae patriae monumenia, t. I, col. 127 c.
(2) Voyez Quicherat, De la formation française des anciens noms de lieu,
p. 35. Orly (8oine), est désigné par le nom d'Auriliacus dans des diplômes
de Charlemagne et de Charles le Chauve, Cartulaire de Noire-Dame de
PàriSy t. I, pp. 24iJ, 251. Ce nom de lieu se trouve aussi en Italie : Curiem
que foca/ur Aureliacus, 896, 973; Fantuzzi, pp. 97, 180, cf. p. XLViii.
(3) Quantin, Dictionnaire topographique du département de l'Yonne ^
p. 133.
f\]C. I. L., V, 5642 {Additamenia, p. 1085), 6038, 6542; Allmcr, Inscriptions
de Vienne, III, 449.
10
146 LIVRE IL CHAPITRE I-. 1 5.
Marciliacense (1). La seconde est celle d*un diplôme de
Louis le Débonnaire remontant à l'année 834 (2). Aujour-
d'hui les noms de trente-trois communes nous conservent
ce dérivé gallo-romain sous des formes plus modernes :
Marcillac, Marcillat, Marcillé, Marcilly. En y ajoutant
vingt-sept hameaux , on trouve en France soixante noms
de lieux qui dérivent du gentilice Marcellius.
ç 5 i^ noms de fundi dérivés de gentilices chez les popu-
lation celtiques sont postérieurs à la conquête romaine.
Les noms de fundi dérivés de gentilices d'origine ro-
maine ne peuvent être antérieurs à la conquête. On en
dira autant des noms de lieux tirés des gentilices d'origine
celtique. Un gentilice d'origine celtique est Carantius] on
en a donné quatre exemples : L. Carantius Atticus, M. Ca-
rantius Macrinus, L. Carantius Gratus et L. Carantius
Cinto (3) ; de Carantius vient Carantiacus , nom porté par
au moins dix-neuf fundi de la Gaule, savoir les neuf com-
munes suivantes : Carancy (Pas-de-Calais); Charancieu
(Isère) ; deux Charancey (Côte-d'Or et Moselle) ; Charency
(Jura) ; deux Cherancé (Mayenne et Sarthe) ; Cherencé-le-
Héron et Cherencé-le-Roussel (Manche) , et dix hameaux.
On a parlé ensuite du gentilice Carantinius (4) , dont le
dérivé est Carantiniacus , d'où Charantigny (Aisne) (5) ;
enfin du gentilice Solimarius (6) , d'où le Solimariaca de
Yltinéraire entre Neufchâteau (Vosges) et Toul (Meurthe-
et-Moselle).
(1) D. Bouquet, III, 531 c.
m D Bouquet. VI, 595 E; cf. Sickel, Acta Karolinorum , t II, p. 183,
n» 322. bans ce document il s'agit d'une villa, Marcilliacua située dans le
diocèse de Langres.
(3) Voyez plus haut, p. 132.
(4) Voyez plus haut, p. 132.
(5) Hameau de la commune do Viilemontoire; Matton, Dictionnaire topo-
graphique du département de l'Aisne, p. 58.
(6) Voyez plus haut, p. 134.
ORIGINE DB8 NOMS DE LIEUX HABITÉS. 147
Comme les noms de fundi , précédemment cités , et qui
dérivent de gentilices d'origine latine , les noms de fundi
dérivés de gentilices d*origine celtique sont postérieurs à
la conquête romaine , puisque , avant cette conquête , les
Gaulois n'ont pas eu de gentilices.
Il est vrai que parmi les noms d'hommes gaulois du
temps de l'indépendance , quelques-uns se terminaient en
'ius ou en -w et auraient pu donner des dérivés en -iacus.
Sur soixante-deux noms celtiques d'hommes, tant de Gaule
que de la Grande-Bretagne, que Ton peut relever dans les
Commentaires de César, un se termine en -w, c'est Convie-
tolitaviSf et dix se terminent en -ttw ; Andecuniborius^ Car-
vilius, Commius, IceiuSj Lucterius, Mandubratius, Nammeius^
SeduliiÂS^ TasgetiuSj Vet^iÂeloetius. Trois au moins de ces
noms persistent sous la domination romaine. — On peut
laisser de côté Carvilius, nom d'un des quatre rois de Kent
en l'an 54 de notre ère, car il y avait à Rome, dès le troi-
sième siècle avant Jésus-Christ , une famille noble de ce
nom ; les Carvilius que Ton rencontre plus tard peuvent
se rattacher à elle. — Mais les Commius, Sedulius et
Iccius des commentaires de César n'ont pas à Rome
d'homonymes plus anciens. C'est donc à ces trois noms
gaulois qu'on doit rattacher les gentilices romains identi-
ques qui apparaissent postérieurement ; c'est d'eux que
viennent les gentilices romains Commius, Sedulius, Iccius.
Commius, roi des Atrebates, fut envoyé par César en
Grande-Bretagne l'an 55 avant Jésus-Christ. Son nom a
été employé comme gentilice sous l'Empire romain (1).
Telle a été aussi la fortune du nom de Sedulius, que porta
un chef obscur des Lemovices , mort les armes à la main ,
sous les murs d'Alésia , 52 ans avant notre ère ; un poète
chrétien du cinquième siècle a donné à ce nom une cer-
taine célébrité ; nous avons encore les œuvres de ce poète ;
un païen du même nom a élevé à ses dieux un monument
(1) Voyez plus haut, p. 134.
148 LIVRE II. CHAPITRE I-. { 5.
trouvé à Cannstatt , en Wurtemberg , et dont l'inscription
a été plusieurs fois publiée (1) ; elle date de Tempire
romain.
IcciiLs n'est pas seulement le nom d'un Rème envoyé en
ambassade à César, par ses concitoyens, l'an 57 avant
J.-C. Vingt et quelques années plus tard, Horace connut
un autre Iccius auquel le célèbre poète latin adressa une
ode et une épitre (2). Le gentilice Iccius se trouve aussi
sous l'empire dans une inscription de Nimes (3), et il avait
une variante IciiLs qui a pris place dans la géographie
galle-romaine comme premier terme des composés Icio-ma-
gus, aujourd'hui Usson (Loire) (4), et Icio-durum, nom porté
par deux localités différentes , l'une en Touraine , aujour-
d'hui Izeures (Indre-et-Loire) (5); l'autre en Auvergne; au-
jourd'hui Issoire (Puy-de-Dôme) (6).
Quelques-uns de ces noms gaulois mentionnés chez Cé-
sar peuvent avoir donné à la France des noms de lieux
dérivés en -acus qui offrent la désinence -i-acus. Ainsi les
noms de Congé-sur-Orne (Sarthe), Congis (Marne), peuvent
représenter un primitif* Commiacus. La domus Iciacmsis ,
en Auvergne, aujourd'hui Yssac (Puy-de-Dôme), dont parle
Grégoire de Tours (7), a été construite sur un fundus Icia-
(yus dont le nom est dérivé d'Iciics, variante A' Iccius,
comme il a été dit plus haut ; les noms d'Issy (Seine) (8; ,
d'Issy-l'Evêque (Saône-et-Loire), et d'Issé (Loire-Inférieure),
(1) Brambach, 1575.
(2) Odes, livre I, 29, 1. Epttres, I, 12, 1. Cf. De bello g&llicOy 1. II , c. 3, 1 2.
(3) Herzog, t. II, p. 42, n* 200.
(4) Dans la Table de Peutinger on a écrit Icidmago pour Iciomago. Des-
jardins, Géographie de la Gaule d'après la Table de Peutinger^ p. !)02-3O4.
Cf. Longnon, Allas historique de la France^ p. 29.
(5) Grégoire do Tours, Historia Francoy^m, livre X, c. 31, édition Arndt,
p. 444, I. 20; Longnon , Géographie de la Gaule au sixième siècle, p. 273.
(6) Grégoire de Tours, Gloria confessorum^ c. 29, édition Àrndt et Krusch,
p. 766,1. 4. Longnon, Géographie de la Gaule au sixième siècle, p. 499, 500.
(7) Gloria mnrlyrum, c. 65, édit. Arndt, p. 432, 1, 22,
(8) Fiscus.., Isciacus dans un diplôme faux du roi Childebert I*', dont le
manuscrit le plus ancien est du neuvième siècle. Tardif, Monuments his-
toriques, p. 2 ; Pertz, Diplomatum imperii tomus primus, p. 7, ligne 33.
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. t49
peuvent avoir la môme origine. Le nom gaulois d'Iccius
est donc encore vivant dans la géographie de la France.
Mais il ne doit cette bonne fortune qu'à la chance heureuse
qu'il a eue d'être conservé comme gentilice à l'époque
romaine.
La nomenclature des noms de lieux de la Gaule qui se
terminent en -acus et en -iaciis est le reflet de la nomen-
clature des noms d'hommes usités en Gaule pendant l'em-
pire romain et nullement de celle des noms d'hommes
aatérieurs à la conquête. Si elle était le produit des noms
d'hommes antérieurs à la conquête, elle conserverait un
des caractères qui distingue la liste de ces noms.
Une observation préalable est nécessaire pour faire com-
prendre ce dont il s'agit. Sont terminés en -iacw les noms
de lieux qui dérivent de noms d'hommes en -ius et peut-
être en -M ; différente est l'origine des noms de lieux qui
n'ont pas d'i devant -acus. Or les noms celtiques d'hommes
en -îttf ou en -w sont, avant la conquête romaine, les moins
nombreux ; il y en a chez César onze sur soixante-deux ,
entre le cinquième et le sixième de la totalité ; cette propor-
tion est vraisemblablement celle qui existait dans les noms
d'homme gaulois avant la conquête romaine : un cinquième
ou un sixième se terminait en i-s ou en io-s = iu-s et au-
raient pu donner des dérivés en -tact^, quatre cinquièmes
ou cinq sixièmes se terminaient autrement et auraient for-
cément donné des dérivés en -aous sans i avant l'a d'-acus.
Si les noms de lieux de la Gaule en -(was dérivaient des
noms d'hommes gaulois antérieurs à la conquête, nous de-
vrions en Gaule, parmi les noms de lieu en -aous, en
trouver un cinquième ou un sixième seulement avec i
devant l'a d'acus ; dans les quatre cinquièmes ou les cinq
sixièmes, le suflBxe -aciLs serait précédé d'une lettre autre
que i. Mais c'est la proportion inverse qu'on rencontre dans
la nomenclature géographique de la Gaule romaine.
Si à l'aide du récent travail de M. Longnon sur la géo-
graphie de la Gaule romaine, on dresse la liste des localités
150 LIVRE II. CHAPITRE I-. | 5.
qui , sous Tempire romain , ont porté des noms terminés
en -acm^ on en trouve quarante-quatre, sur lesquels huit
seulement n'ofifrent pas à'i avant ce suffixe : Antunnacus^
Aunedonnacus , Avitacus , Bagacus , Camaracus , Cunnacus ,
SolonacuSy Turnacus, Ces huit mots supposent des noms
d'hommes dont le thème était consonn antique ou se termi-
nait en 0 précédé d'une consonne. Les trente-six autres
noms de lieux en -acus de la Gaule romaine offrent la dési-
nence 'iacus , et s'expliquent par des noms d'hommes qui
avaient une terminaison différente de celle des premiers,
c'est-à-dire le suffixe -iiis des gentilices romains. Ainsi
les quatre cinquièmes des noms de lieux en -acus que
M. Longnon a recueillis dans les monuments de la domi-
nation romaine en Gaule dérivent de noms d'hommes en
-iiw. La proportion est inverse de celle que nous devrions
rencontrer si les noms de lieux en -acvs de la période ro-
maine avaient pour base des noms d'hommes antérieurs à
la conquête.
La liste des noms de lieu de la Gaule au sixième siècle,
dressée par M. " Longnon , donne lieu à une observation
analogue; quarante-cinq se terminent en -î-aciw, il y en
a huit qui , devant le suffixe -acus , nous offrent une lettre
autre que i. Sur un total de cinquante-trois, c'est un
sixième environ qui n'ont pas d'^ devant le suffixe -octw ,
tandis que les noms celtiques d'hommes recueillis par Cé-
sar devraient donner un sixième ou un cinquième de dé-
rivés en 'iacus et cinq sixièmes ou quatre cinquièmes de
dérivés où le suffixe -acus serait précédé d'une lettre autre
que i.
La table géographique du tome VII du Recueil des histo-
riens de la France^ qui contient des documents relatifs aux
fils de Louis le Débonnaire , entre autres une nombreuse
collection de diplômes, nous offre une quantité considérable
de noms de lieux de la Gaule au. neuvième siècle. J'en ai
compté quatre cent quatre-vingt-dix-sept qui se terminent
en -acus ; sept huitièmes, soit quatre cent trente-neuf, ont
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 151
un t devant ce suffixe, un huitième, soit cinquante-huit
seulement, n'ont pas à*i avant -acus.
Ces relevés suffisent pour établir que les noms géogra-
phiques en -acus de la Gaule ne tirent pas leur origine
des noms d'hommes antérieurs à la conquête romaine. Si
les noms de lieux en -aotis de la Gaule remontaient à la
période de Tindépendance, ce serait le plus petit nombre
de ces noms, un cinquième au plus, qui nous^offrirait un i
avant Va d'aous; au contraire, les plus nombreux de beau-
coup nous offrent cet i qu'explique la désinence ordinaire
du gentilice romain.
S 6. — Quatre espèces de noms de lieux habités en Gaule chez
César.
Les noms de lieux habités dans la Gaule indépendante
qui sont mentionnés par César ne semblent presque aucuns
<^tre tirés de noms d'hommes. Parmi ces noms de lieux
habités on peut distinguer quatre sections :
La première comprend les noms à sens topographique.
11 y en a un qui exprime une relation avec un cours d'eau.
Le nom i'Avaricum^ « Bourges, » situé sur TEvre (1), vient
i'Avara , ancien nom de TE vre ; ainsi , plus tard , le nom
à'Auiricuin, « Chartres, » est dérivé d'Àutura^ ancien nom
de l'Eure. On peut comparer Gena^a , « Genève , » qui si-
gnifie , à proprement parler , « bouche , » parce que cette
ville se trouve à l'endroit où le lac Léman vomit le Rhône.
La seconde section des noms de villes de la Gaule indé-
pendante mentionnés par César se rapporte aux produits
du sol ou , plus spécialement , à la faune locale : tels Bi-
bracte et Bibrax^ dont les noms dérivent du gaulois *bebros,
en latin fiber^ mais en français bièvre, qui vient du gaulois ;
le bièvre ou castor a précédé l'homme dans ces deux loca-
lités. Cabillonum^ paraissant dérivé de caballus, « cheval, »
(1) GràmmàticM ceUtca. f édit., p. 779-806.
15a LIVRE II. CHAPITRE I". { 7.
désigne , ce semble , une ville dont la principale industrie
était rélève du cheval.
La troisième section doit son origine à des idées reli-
gieuses : comme plus tard Lugudunum est la forteresse
du dieu Lugus, Nemetocenna est chez César, soit un dérivé
de nemeton, « temple, » soit un composé dont nemeton est
le premier terme.
Les noms des lieux habités compris dans la quatrième
section sont formés de deux termes , un adjectif placé le
premier et un nom qui est le second terme d*un composé.
Ce composé exprime l'opinion que les fondateurs avaient
de leur nouvel établissement; ainsi Uœellodunum veut dire
« haute forteresse ; » Vellaunodunum^ « bonne forteresse ; »
Noviodunum , « forteresse neuve ; » c'est l'opposé du vieil
irlandais Sen-dûn ^ aujourd'hui Shandon ou Shannon^ dont
le sens est « vieille forteresse (1). »
§ 7. — Cinq espèces de noms de Lieux habités dans les pays
celtiques suivant les documents du temps de l'empire.
Si des noms de lieu de la Gaule qu'on lit chez César
nous passons aux noms de lieux qui, appartenant à des
pays celtiques, sont contenus dans les textes contemporains
de l'empire romain, notamment dans les plus importants
de ces textes : Itinéraire d'Antonin^ fin du troisième siècle;
Table de Peutinger^ Notice des provinces et des cités de la
Gaule, quatrième siècle ; nous y retrouvons les quatre sec-
tions qui viennent d'être signalées, plus certainement une
cinquième composée des noms de lieu qui expriment un
rapport avec une personne (2).
En première ligne , voici des noms de lieu gaulois du
(1) The origin and hislory of irish names of places ^ hy P.-W. Joyce,
5- édit. Dublin, 1883, t. I, p. 282.
(2) Il a pu exister , dès le temps de César , en Gaule , des noms de lieu
composés dont un nom d'homme formait le premier terme : Samaro-briva,
pont d'un homme appelé Samaros, et Admageto-briga, forteresse d'un gau-
lois nommé Admagctos; mais pas de noms de terre, magua, ainsi formés.
1
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 153
quatrième siècle qui expriment un rapport avec un cours
d*eau : Brivalsarae , « pont de l'Oise , » aujourd'hui Pon-
toise ; Brivo^durum , « forteresse du pont , » aujourd'hui
Briare (Loiret) ; Brivate, « endroit où il y a un pont, » au-
jourd'hui Brioude (Haute-Loire) ; Moso-magus , « champ de
la Meuse , » aujourd'hui Mouzon (Ardennes) ; Bitu-magus ,
a champ du gué, » aujourd'hui Radepont (Eure) ; Condato-
magiis, « champ du confluent, » aujourd'hui Millau (Avey-
ron), et enfin plusieurs localités du nom de Condate. A
Moso-magus ^ « champ de la Meuse, » on peut comparer
Bodinco-magus , a champ du Bodincus ou Pô » dans une
inscription (1). On verra même cette section se développer
grâce à des indications topographiques d'un autre ordre :
Àcaunum, « Saint-Maurice en Valais ; » Acunum , « Notre-
Dame d'Aygu » (Aveyron), veulent dire « Le Rocher (2) ; »
ces noms du moyen âge remontent à l'époque celtique.
 la seconde section appartiennent les noms de lieu de
période romaine qui se rapportent à la faune locale : Go-
bro-sentuiriy « chemin des chèvres, » en Grande-Bretagne ;
Gcèro-magus, « champ des chèvres, » et Matucaium, « che-
min des ours, » en Norique. Cette catégorie se développe
par des noms relatifs à la végétation et à l'industrie loca-
les : 1* en Gaule, Aballo^ aujourd'hui Avallpn, signifie
probablement « la pommeraie ; » en Grande-Bretagne, Der-
ventione , « la chênaie ; » 2® en Grande-Bretagne , Goban-
nium^ « la forge; » en Gaule, Carpentorate, « la fabrique
de chars : » son nom dérive d'un thème Carpento- , écrit
CarhantO' dans Carbantorigum (Grande-Bretagne). De Car-
banto- dérive Carbantia , « la ville des chars , » en Italie ,
au nord du Pô , non loin d!Epo-redia , « la ville des bons
dompteurs de chevaux , » comme dit Pline. Citons encore
Figlinae pour Figulinae ^ « les poteries, » près de Saint-
Rambert d'Albon (Drôme).
(1) C. /. L., t, V, p. 845.
C-) Longnon, At2a« historique de la France, p. 25 et suivantosi.
154 LIVRE II. CHAPITRE I". } 7.
Dans la troisième section , noms de lieu d'origine reli-
gieuse, prend place Divona, « la divine, » aujourd'hui Ca-
hors ; Divo-Durum , « forteresse des dieux , » aujourd'hui
Metz , tous deux en Gaule ; rapprochons Deo-brigula , « la
petite forteresse des dieux, » en Espagne; Camulo-dunum,
forteresse du dieu Camulus^ en Grande-Bretagne. De plus,
puisqu 'Auguste et César sont élevés au rang des dieux, il
faut ranger dans cette catégorie Augusto-nemetum , « temple
d'Auguste, » aujourd'hui Clermond-Ferrand ; Augusto-dxh
num, « forteresse d'Auguste, » Autun; Augusto- dw^m ,
môme sens, aujourd'hui Bayeux; Augusto-^tum ^ « gué
d'Auguste, » aujourd'hui Limoges; Augusto-magus^ « champ
d'Auguste, » aujourd'hui Senlis (comparez Augusto-briga ^
« forteresse d'Auguste , » en Espagne) ; Cciesaro-dunum ,
ce forteresse de César, » aujourd'hui Tours ; Caesaro-magus^
« champ de César , » aujourd'hui Beauvais (comparez un
autre Caesaro-magus en Grande-Bretagne).
A la quatrième section se rattachent Novio-magus, « le
champ neuf ou le champ nouvellement défriché, » dont la
Table de Peutinger nous offre en Gaule quatre exemples ;
Vhinéraire d'Antonin nous en montre trois hors de Gaule,
■
dont un en Grande-Bretagne, deux en Germanie. On peut
leur opposer Seno-magus , « le vieux champ , » près de
Saint- Paul -Trois -Châteaux (Drôme); de SenomagtASj on
rapprocherait le Sen-mag de la mythologie irlandaise (i) : le
Sen-mag aurait été la plaine la plus anciennement défrichée
de rirlande ; elle était déjà défrichée quand arrivèrent les
premiers habitants de l'île. On citera encore Litanobrigay
« la forteresse large , » près de Creil (Oise) ; comparez les
deux Cambodunum ou « forteresse courbe, » l'un de
Grande-Bretagne, l'autre de Rhétie.
Nous arrivons à la cinquième section, qui atteste des re-
lations entre l'homme propriétaire et sa portion de terre .
son champ. Elle est postérieure aux Commentaires de
(t) Livre de Leinster^ p. 5, col. 1, ligne 38.
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 1S5
César. Elle comprend deux groupes. Dans l'un de ces grou-
pes , le terme qui désigne Thomme est un gentilice ; dans
l'autre, ce terme est un cognomen ou c'est le nom unique
et pérégrin employé pour désigner une personne qui n'a
pas de gentilice.
Dans le premier groupe, noms de lieu tirés du gentilice
du propriétaire , on trouve réunis des composés et des dé-
rivés ; les composés sont les moins nombreux. On a parlé
àlci<Mnagu$j « champ d'Iccius, » p. 148, on peut ajouter :
Claudichmagus , aujourd'hui Clion (Indre) "(1); Nerio-magus,
aujourd'hui Néris, dont le premier terme, Nerius^ est un
gentilice connu par plusieurs inscriptions et par le nom de
lieu dérivé Niriacus (2). Il y a peu de dérivés en -ont**;
cependant on rencontre Liviana^ sous-entendu donius ou
villa, aujourd'hui Capendu (Aude) (3), dérivé de Livius, et
Âlbaniani ou Àlbiniani^ situé sur la rive gauche du Rhin (4),
aujourd'hui Halphen (Pays-Bas). Albaniani ou Albiniani est
dérivé à'Albanius ou d'Albiniu^, deux gentilices attestés par
les inscriptions (5). Albaniani ou Albiniani est un adjectif
au pluriel qui se rapporte au substantif sous-entendu fundi.
Comparez pour le suffixe le français moderne Lusignan,
d'abord Lesignan, c'est-à-dire fundus Licinianus.
Le procédé de dérivation le plus commun est celui dont
il sera question dans le paragraphe suivant.
(1) Claudio-magus chez Sulpice Sévère, Dialogues^ II» 8 (Migne, Pttirologia,
latina, t XX, col. 207). Julio-bona dans la Table de Peutinger, et 17/tnë-
mred'Anioninj Julio-maguSf aujourd'hui Angers, dans la Table de Peu^
linger et chez Ptolémée ne sont probablement pas des noms de fundi , et
le premier terme de leur nom rappelle le souvenir du divin Jules , d'abord
conquérant de la Gaule et depuis Dieu. Comparez Caesaro-magus, Beauvais,
et Auguslo-bona, Troyes.
1^) Vicani Neriomagienses ^ inscription. Desjardins, Géographie..., etc.,
p. 299; Nerius, C. /. L., t. III, 3215, 10; 6008, 42; V, 8114, 98; X, cinq ex.
fUriicus, diplômes de 832 et 862 ; Tardif, Monuments historiques, p. 85, 1 17.
(3) Table de Peutinger; Desjardins, Géographie, p. 362.
(4) La première orthographe est celle de la Table de Peutinger; la se-
conde, celle de 17(mëratre d'Antonin,
(3}3f. Albanius Paternus; Brambach, 385. T. Albanius Primanus; Bram-
bach. 1301. T. Albinius Januarius; Brambach, 73. P. Albinius Antonius ,
^' / L., UI, 5143, etc.
156 LIVRE II. CHAPITRE 1-. { 8.
S 8. — Le suffixe -ftcus placé à la suite du gentilice pour
former des noms de lieux dans les documents du temps de
l'Empire,
En Gaule, le suffixe -dcus est plus fréquent que le suffixe
'Anu^s (1). On le trouve aussi hors de Gaule dans les régions
celtiques. Ainsi, à Veleia, on peut citer le fundus Quintia-
cus^ dont le nom est dérivé du gentilice Quintius ou Quinc-
tius^ très fréquent dans le monde romain (2). La Table
alimentaire qui nous fournit ce nom date, comme on l'a
dit plus haut, de l'an 104 de notre ère. Le plus ancien
exemple de ce nom de fu/ndus que nous ayons trouvé dans
la Gaule transalpine date de Tannée 697, où une propriété
appelée Quiniiacus^ et située près de la Loire, fut donnée
à Tabbaye de Limours (3). Quintiacus doit, à l'époque
romaine, avoir été un nom de lieu fort répandu en Gaule;
il existe en France dix-neuf communes dont le nom mo-
derne en vient : Cuinchy (Pas-de-Calais) ; Cuincy (Nord) ;
Quinçay (Vienne) ; Quincé (Maine-et-Loire) ; trois Quincey
(Aube, Côte-d'Or, Haute-Saône); un Quincié (Rhône);
Quincieu (Isère); Quincieux (Rhône); sept Quincy (Aisne,
Cher, Côte-d'Or, Meuse, Seine-et-Marne, Seine-et-Oise) ;
deux Quinsac (Dordogne, Gironde). En y ajoutant dix-sept
hameaux on trouve un total de trente-six Quintiacus en
France. De ces localités diverses, celle pour laquelle on a,
(1) Dos l'empire romain, il y a des noms de lieux créés à Taide d'autre$
suffixes, comme le suffixe -o ; il y a aussi un système qui consiste à employer
les gentilices ou les cognomen comme noms de lieu. Nous parlerons de ces
procédés quand nous passerons à Texamen des textes du moyen âge où les
noms de lieu sont beaucoup plus nombreux que dans les textes contempo-
rains de l'empire romain.
(2) Le C. /. L. nous en offre six exemples dans le t. III , trente-huit dans
le t. V, vingt dans le t. X. En Qaule, Quintius Primulus dans une inscrip-
tion de Saint- Victor-des-Oules, près Uzès (Allmer, Aeuue épigraphique,
t. I, p. 394, n* 435); Quintius Valentinius dans une inscription de Greno-
ble (Allmer, Inscriptions de Vienne, t. III , p. 163).
(3) Pardessus, Diplom&ta, t.^II, p. 244.
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 157
je crois, le témoignage le plus ancien, est Quincieu (Isère),
dont il est question dans une charte de Tannée 739, où
Quincieu est appelé à Tablatif Quintiaco (1). Viennent
ensuite : Quincy (Meuse), mentionné sous le nom de
Quinciacum dans deux chartes de Tannée 770 (2) ; le Quin-
cey du département de T Aube , appelé Quincictcus dans un
diplôme royal de 886 (3). Quinciacus est une orthographe
de la basse latinité pour Quintiactis. La forme latine de ce
terme gallo-romain est Quintianus , deux fois inscrit dans
yhinéraire d'Antonin , une fois pour désigner une station
romaine de Rhétie; une autre fois pour désigner une
station romaine d'Italie (4). Cette forme a pénétré en
France, témoin la commune de TAUier qui s'appelle Quin-
saines, c*est-à-dire Quintianae, sous-eniendu villae.
Il y avait à Veleia un fundus Arsuniacus. Arsuniacus
dérive d'un gentilice * Arsunius qui ne diffère que par une
voyelle d^Arsiiiius (5) et à'Arseniiis (6) conservées chacun
dans une inscription.
Le fundus Pisunictcus à Veleia tire son nom du gen-
tilice * Pisunius , variante de Pisonius , qu'une inscription
nous a gardé (7). Piney (Aube), s'appelait, en 869, Pm-
niacum (8) , mot dérivé de Pisinius , et qui ne semble être
qu'une variante de Pisuniacus.
Le fundus Cabwrdiacus de Veleia est dérivé du gen-
tilice *Cabardius, écrit Cabarsits dans une inscription (9).
(1) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 372.
(2) Liénard, Diclionnaire topographique du département de la Meuse ^
p. 1B5. •
(3)Dom Bouquet, t. IX, p. 353 B. Cf. Boutiot et 8ocard, Dictionnaire io-
pogrsLphique du département de l'Aube, p. 131.
(4) Quintianis^ Rhétie, Itinéraire d'Antonin, édit. Parthey et Pinder,
p. 249 de l'édition Wesseling ; Quintiano , Italie , ibid, , p. 499 de Tédition
Wesseling.
(5) C. I. L., III, 3435.
(6) C. /, L., X, 1791.
(î) C. /. L., X, 3515. Cf. Pisenius, III, 1789, et Pisinius^ Brambach, 810.
(8) Boutiot et Socard, Dictionnaire topographique du département de
l'Aube, p. 121.
(9) Af . Cabarsus Patiens, C. /. L., V, 5134. Cabaraus est pour Cabarzus;
158 UVRE II. CHAPITRE I-*. { 8.
Cahardiacus est devenu en italien Caverzago. Caverzago est
situé sur la rive gauche de la Trébie, près de Trevi. En
français, Cabardiacus s'est changé en Chevresis^ nom d'une
commune et d'un hameau du département de l'Aisne ; ces
deux localités sont voisines , et 1'^ final de Chevresis parait
avoir été originairement le signe du pluriel employé quand
on voulait désigner ces deux localités par un seul mot ; du
reste, cet s final manque dans deux documents du dou-
zième siècle (1). Le hameau de Chaversey (Oise), peut avoir
la même origine.
Le fundus Caudiacus de Veleia dérive du gentilice Cau-
dius conservé par une inscription (2). Cavdiacus est de-
venu , en français du nord , Gaugé , nom d'une commune
du département de l'Eure, Caugy, nom d'un hameau du
Calvados, et, en français du midi, Caujac, nom d'une
commune de la Haute-Garonne.
Le fundus Orbiniacus de Veleia dérive son nom du gen-
tilice *OrbiniuSf dont je n'ai pas rencontré d'exemple. Ou
trouve dans les inscriptions Orbius (3). A côté d'*Orbinius
a pu exister le gentilice * Orbanius ; il expliquerait la forme
Orbaniacus donnée par la plupart des manuscrits de Gré-
goire de Tours au nom d'Orbigny (Indre-et-Loire) (4). 11 y
a aussi, dans le département de la Haute-Marne, deux
villages du nom d'Orbigny.
Nous ne parlerons pas plus longuement des fundi de
Veleia dont le nom , conservé par la Table alimentaire de
l'an 104 de notre ère, consiste en dérivés tirés de gentilices
au moyen du suffixe -aciis. Passons maintenant aux fundi
de la Gaule transalpine dont le nom est formé de la même
comparez za,bolu8 pour di&bolus et zaconua pour diaconus, Diez , Gràm-
m&ire des langues romanes, traduite par Brachet et Paris, t. I, p. 216.
(1) Matton, Dictionnaire topographique du département de l'Aisne, p. 67.
(2) C. /. L., X, 2246.
(3) Voyez, dans Corpus inscriptionum latinarum^ Tindex des tomes V et
X, et tome VI , n« 23558.
(4) Historia Francorum, 10, 31 ; GIoHa Martyrum, 89, édit. Arndt, p. 448,
1. 6, et p. 548, 1. 10.
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 159
manière, et que Ton trouve transcrits dans les textes
géographiques compilés au temps de Tempire romain. Il a
été déjà question, p. 141, du fundus Juliacus où a été bâtie
la ville de Juliers. Un autre fundus, aussi intéressant, est
Geminiacus (1) , sur la route de Tongres à Boulogne. Son
nom est dérivé du gentilice Geminius , qu'on trouve dans
plusieurs inscriptions (2). A côté de Geminiacus^ il y a une
forme plus latine Geminianus qui est le nom d'un fundus
de Veleia. La forme gallo-romaine Geminiacus survit dans
le nom des communes de Gemigny (Loiret), et de Jumigny
(Aisne).
Tiberiacus (3), nom d'une station romaine près de Cologne,
est dérivé de Tiherius, prénom romain employé quelquefois
comme gentilice (4).
Artiaca, nom d'une station romaine entre Troyes et
Chàlons-sur-Marne (5), vient A'Artius, gentilice romain
dont on a recueilli deux exemples , et qu'on trouve aussi
employé comme surnom (6).
Mimtiacus, nom d'une station située près de Reims (7),
dérive de Minatius, gentilice romain dont il y a quelques
exemples (8).
Solimariaca , nom d'une station voisine de Toul (9),
(1) Itinéraire d'Antonin et Table de Peutinger. Ernest Desjardins , Géo-
graphie de la. Gaule d'après la Table de Peutinger ^ p. 77.
3 C. /. L., III, 96, 513, 2916, 4116, 4436. Sur la gens Geminia, voyez
I)e-vit, Onomasticony t. II, p. 223; XII, 11 ex. masc, 3 féminins.
[3!) Itinér&ire d'Antonin j édit. Parthey et Pinder, p. 375 de l'édition de
Wesseling.
(4)C. Tiberius Verus^ Brambach, 150. T. Tiberius Marcus (C. /. L., X, 3640).
(ô) liinéraire d'Antonin^ édition Partbey et Pinder, p. 361 de l'édition de
Wesseling,
(6) De-vit, Totius latinitatis Onomasticon, t. I, p. 494 , aux mots Artia^
Arlius.
Çf) Uinérstire d'Antonin, édition Parthey et Pinder, p. 381 de l'édition de
Wesseling.
(8) CI. L., V, 1301. 7850; VI. 22495-22501; IX, 867, 1031, 2403, 4825, etc.
(9) Itinéraire d'Antonin ^ édit. Parthey et Pinder, p. 385 de l'édition de
Wesseling. — Du nom de cette station, rapprocher celui de Somméré
(Saône-et-Loire) , en 878 , Solmeriacus pour Solimeriacus , Solimariacus.
Th. Chavot, Le AlàconnaiSt p. 264.
160 LIVRE II. CHAPITRE I". { 8.
dérive du gentilice gallo-romain Solimarius mentionné plus
haut (1) , et qui dérive lui-même du nom d'homme gaulois
Solimaros.
Hermoniactts y écrit à tort Hermomacum dans la Table de
Peutinger, est une station romaine située non loin de
Cambrai (2). Son nom dérive A'HermoniuSn gentilice con-
servé par des inscriptions (3).
Ricciacus^ station voisine de Trêves (4), tire son nom de
RicciuSj gentilice dont plusieurs inscriptions établissent
Texistence (5).
Aux exemples qu'offrent les monuments géographiques
de l'empire romain, on peut en ajouter deux fournis par
un poète.
Pauliacus , villa mentionnée par Âusone (6) . porte un
nom qu'explique le gentilice Paulius, variante de PaulliusÇi).
Lucaniacus, villa à laquelle le même auteur a donné une
célébrité relative par le vers bizarre :
Villa Lucani mox potieris aco (8) ,
doit son nom à un propriétaire primitif , dont le gentilice
était LucaniuSy comme celui de L. Lucanius Censorinus.
auteur d'une dédicace à la déesse Sirona ; ce monument
est conservé au musée de Trêves (9). On a trouvé à Va-
(1) Voir plus haut, p. 133.
(2) Desjardins, Géographie de ta Gaule d'après 2a Table de Peutinger,
p. 89. La correction est due à M. Longnon.
(3) C. /. L., IX, 5352 ; X, 1690, 1691.
(4) Ta5Ze de Peutinger chez Desjardins, Géographie, etc., p. 117.
(5) C. /. L., III, 1818; AUmer, Inscriptions antiques de Vienne, II, 245,246).
(6) a Pauliacos tanti non mihi villa foret ; o Epitres, V, v. 16. Edit. Scbenkl
p. 163.
(7) Paullius, C. /. L., II, 4546; Paulia, Boissieu, Inscriptions antiques de
Lyon, p. 187.
(8) Ausone, Epîtres, V, v. 36. Ibid. Cf. Lucaniaco , nom d'un locellus
donné on 696 pour la dotation d*un hôpital fondé à Poitiers; Pardessus,
Diplomata, t. II, p. 240.
(9) Branibach , n' 814. Deux femmes nommées Lucania figurent dans les
n** 920 et 922. Trois autres exemples du même gentilice se trouvent dans le
C. /. L., VI, 21518-21520.
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 161
lence (Drôme) Tépitaphe de D. Lucanius Threption (1) ;
à Esparron celle que Q. Lucanius Insequens fit graver
pour sa femme (2); à Nimes, Tépitaphe de L. Lucanius
Cornélius (3).
Ausone écrivait au quatrième siècle; il fut élevé au
consulat en 379, et mourut en 390. Ses écrits fournissent
donc un complément à Vltinéraire d'Antonin et à la Table
de Peuting&r , pour Tétude des noms de lieux de la Gaule
pendant la période romaine.
Les documents de la période romaine offrent aussi des
noms de lieux en -âciùSf dérivés de gentilices, à Test de
la Gaule. Dans la Rhétie, une des régions de Tempire
romain où l'élément gaulois paraît avoir eu le plus d'im-
portance, Abiidiacus , nom d'une station romaine près
d'Augsbourg (4), dérive du gentilice Abudius; on trouve ce
gentilice dans les inscriptions (5) ., et sous Tibère , il fut
porté à Rome par Tédile Abudius Ruso (6).
Plus au nord , en Germanie , mais près de la rive droite
du Rhin, dans une région où domina quelque temps la
civilisation gallo-romaine, se trouvait une ville que Pto-
lémée appelle Mattiacum (7). Son nom est un dérivé du
gentilice Mauius dont nous avons relevé douze exemples
dans les inscriptions (8).
De même , en Espagne , on rencontre une station d'i4r-
Tiaca (9) dont le nom dérive du gentilice Arrius. Les
inscriptions d'Espagne offrent neuf exemples de ce genti-
(i) c. /. L., xn, ms.
P) c. /. L., xn, 350.
(3) c. /. L., xn, 3707.
(4) Ecrit AbuztLCo dans 17ttnératr6 d'Antonin^ éd. Parthey et Pinder,
p. 275 de redit, de Wesseling ; dans la Table de Peutinger on lit AhodUcum.
(5) C. /. L., III, 2938; V, 328, 329 5i«, 8322, 8110, 34.
(6) Tacite, Annales, VI, 30 ; cf. De-vit, Ùnomaaixcon^ 1. 1, p. 19.
(7) M(mie»ôv, Ptolémée, II, 11, 29. Edit. Nobbe, t. I, p. 122; II, 11, U;
édit. MùUer, t. I, p. 272. Cf. Brambach, n" 987, 1313.
(8) Cl. L., III, 378, 5286; V, 6957; VI, 22303-22311.
(9) Kinératre d'Antonin, édit. Parthey-Pinder, p. 436, 438 de Wesseling.
11
lea LIVRE n. chapitre i». j 9.
lice (1) dont il y a encore d'autres exemples ailleurs (3).
En Grande Bretagne, Epiacum{Sj parait dérivé i'Eppius,
gentilice dont l'existence est aussi prouvée par les inscrip-
tions (4).
S 9. — Comparaison entre les noms de lieux formés en France
à l'aide du suffixe -âcus, et quelques noms de lieux en -4nus
dans diverses parties de l'empire romain.
Les dérivés en -anus que nous offrent , dans une lettre
de Pline le Jeune, dans la Table de Peutinger, dans Vlliné-
raire d'Antonin^ et dans quelques inscriptions, les noms de
lieux étrangers aux pays celtiques, sont quelquefois au
moins aussi intéressants que les noms de lieux en àcut
mentionnés jusqu'ici. En effet, certains de ces noms de
lieux en anus ont eu des équivalents gallo-romains en
âcus qui existent encore en France sous une forme plus
moderne. Telle est la Camilliana villa en Campanie (0).
Elle appartenait au beau-père de Pline le Jeune, elle tirait
son nom du gentilice Camillius dont on a recueilli quel-
ques exemples (6). La forme gallo-romaine de l'adjectif
Camillianus est Camilliaaus, dont neuf noms de communes :
Chamilly {Saône-et-Loire) ; un Chemilla (Jura) ; trois Che-
millé {Indre-et-Loire, Maine-et-Loire}; ChemiUi (Orne), et
quatre Chemilly (Allier, Haute-Saône, Yonne) (7); enfin
dix noms de hameaux, total dix-neuf noms de lieux mo-
dernes en France. Nous citerons ensuite :
(1) C. J. L., t. II.
(2) Va/ aotamment Brambach, 934, 1835.
(3) 'EnilcaDv, Ptolémàe, II, 3, 16; édit. Nobbe, t. I, p. 71; II, 3, 10; «dit
Uûller, t. I, p. 9G.
(4) C.I.L., 111,3925, 4799, 4819; V, 2623, 4857, 8379; VI, 17246-17248. Cf.
De-vit, Onomatticon, t. II, p. 744.
(5) Pline le Jeune, Epistularum. 1. VI. ! 30.
(6) C. /. L., VI, 14302.14304-, cf. De-vit, Onomasifcon, t. Il, p. 97,
(7) Camiliscum, Chumbly (Oise), d'où le pagus CamUiaceniU des ctaartet
du septième siècle (Tardif, Monuments historiques, p. 24, 31, 63, 84) pftralt
n'avoir eu qu'une 1 et être un mot différent.
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 163
Florianay sous-entendu villa^ en Pannonie (1), dérivé du
gentilice Florius (2). Sa forme gallo-romaine est Floriacus (3),
aujourd'hui Fleury, Fleurieu ou Fleurieux et Floirac. Il y
a en France dix-neuf communes du nom de Fleury dans
les départements de l'Aisne, de l'Aude, de TEure, du
Loiret, de la Marne, de la Meuse, de la Nièvre, de TOise,
du Pas-de-Calais, de 8aône-et-Loire, de Seine-et-Marne, de
8eine-et-0ise et de T Yonne. Fleurieu et Fleurieux sont dans
le département du Rhône. Il y a trois Floirac (Charente-
Inférieure, Gironde, Lot). En ajoutant vingt-trois noms de
hameaux à ces vingt-quatre noms de communes, on trouve
un total de quarante-sept noms de lieu qui représentent ,
dans la France d'aujourd'hui , autant d'antiques Floriacus,
Blandiana , sous-entendu villa , en Dacie (4) , dérive du
gentilice Blandius conservé par des inscriptions, par exem-
ple dans ritalie septentrionale (5), et en Gaule (6). De Blan-
dius sont dérivés des noms de fundi en -dcit^, dont la forme
primitive Blandiacus se reconnaît sous les formes modernes
de seize noms de communes de France : deux Blandy
(Seine-et-Marne, Seine-et-Oise) ; cinq Blangy (Calvados,
Pas-de-Calais , Seine-Inférieure , Somme) ; quatre Blanzac
(Charente, Charente-Inférieure, Haute-Loire, Haute-Vienne);
un Blanzat (Puy-de-Dôme); un Blanzay (Charente-Infé-
rieure); quatre Blanzy (Aisne, Ardennes, Saône-et-Loire).
11 faut ajouter treize noms de hameaux, total vingt-neuf
noms de lieux. Une de ces localités apparaît sous le nom
de BUmziacus dans un diplôme de l'année 832 (7).
(1) Itinéraire d'Antonin, édition Parthey-Pinder , p. 263, 265 de ceUe de
Wesseling.
(2) C. /. L., VI, 18482-18488; X, 4370, 5414, 5732; Brambach, 1067, etc.
(3) Grégoire de Toars, Historia Fr&ncorum, III, 35, édition Arndt, t. I,
p. 138,1. 9 : Diplôme de 835, chez D. Bouquet, VI, 601; Diplôme de 866,
chez Tardif, Monuments historiques, p. 127.
(4) Table de Peutinger, édit. de M. E. Desjardins, segment VII, B. Cf.
C. J. L., t. III, p. 225.
(5) C. /. L., t. V, index, p. 1106, col. 3.
(6) Allmer, Inscriptions antiques de Vienne^ I, 349.
(7) Tardif, Monuments historiques, p. 85, col. 1.
IM LIVRE n. CHAPITRE I". J 9.
Pacciani ou Paccianae, nom d'une station romaioe
d'Afrique (!) est dérivé de Paccius, gentiiice latin bien
connu (2). Paccius a une variante Pacius (3); de Pacius
dérive le nom de lieu gallo-romain Paciacus conservé
par des documents de l'époque carlovingienne (4) ; et de
Paciactis viennent onze noms de communes de France :
deux Pacé {lUe-et- Vilaine , Orne) ; deux Pacy (Eure ,
Yonne); sept Passy (Aisne, Marne, 9aôae-et-Loire, Haute-
Savoie, aeine-et-Mame, Yonne) ; les noms de six hameaux;
enfin le nom de Passy, seizième arrondissement de Paris.
De Paccius a dû venir ' Pacciacus, écrit Paxiacwn en 1136,
aujourd'hui Paissy (Aisne) (5). Comparez le nom du furdui
Paccianus dans la table alimentaire des Ligures Baebiani (6).
Mariniani ou Marinianae, nom d'une station romaine de
la Pannonie inférieure (7), est un dérivé en -anus du gen-
tiiice Marinius qui se trouve dans les inscriptions (8). On
reconnaît le même dérivé dans le nom de Marignano porté
par une petite ville d'Italie, dans celui de Marignane qui
désigne un bourg des Bouches-du-Rhône , et dont la va-
riante Marignana distingue un village de Corse. Sa forme
gallo-romaine était Mariniacus , dont il sera question plus
loin, et d'où viennent, les uns certainement, et les autres
probablement, les noms des communes appelées : Mari-
gnac, Marigné, Marigneu, Marigny.
L'Itinéraire d'Antonin mentionne en Espagne deux Bar-
(I) Jlin^rafre d'Antonin ; Paccfanii, p. 18 de l'édition de Wesseliug.
(î) Brambach, n^673; C. I. L., 111, sii exemples; V, quatre ex.; IX, seÎM
es.; X, trois ex.
(3) Les.tonies V et IX du C, I. L. offrent cbacim quatre exemples de Pa-
cius ; ou trouve la variaute Paquius dans deux inscriptions d'Arles, Henog,
n- 3*2, 343.
(4) Diplômes des années 832 et S36, chez D. Bouquet, t. VI, p. 586 A «I
611 B.
(5) Hatton, DicCionnaire (opographique du dipartement de VAitne, p. 208.
(6) Edition de H. E. Desjardins, p. lxv.
(7) ItiiUraire d'Antonin , édit. Parthey et Pinder, p, 130 de l'édition de
Wosseling.
(S) Brambacb, n* 1529. Allmer, Intcriplions de VUnne, II, &3T.
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 165
bariana (î). Le gentilice Barbarius nous a été conservé (2) :
de là le nom de Barberey (Aube), au moyen âge Barba^
rioùusy et celui de Berbirey (Côte-d'Or) (3).
Une inscription nous donne le nom d'un vicus Valenti-
nianus en Dacie (4). C'est un dérivé en -4nu5 d'un gentilice
Yalentinius conservé par les inscriptions (5). La forme
gallo-romaine correspondante était Yalentiniaeus ^ d'où le
nom de deux communes de France , Valentigney (Doubs) ,
et Valentigny (Aube). Le dernier est appelé Valentiniacum
dans un document du douzième siècle (6). Un hameau de
Valentigny se trouve dans le Cher.
Une inscription de Buccino, autrefois Volcei, dans l'Italie
méridionale, fournit une nomenclature de fundi contenus
dans cette cité (7). Parmi ces fundi ^ le fundus Casinianus ^
mieux Cassinianus^ a dû avoir pour parallèle en Gaule un
fundm Cassiniacus ou plutôt plusieurs fundi Cassiniaci.
Témoin les deux communes de Chassigny, Tune de la
Haute-Marne, l'autre de Saône-et-Loire, celle de Chassigneu
(Isère), et trois hameaux du nom de Chassigny.
Le fundus Micerianus de la môme inscription nous permet
de supposer en Gaule des fundi Miceriaci; d'où cinq noms
de communes en France , savoir : deux Miserey (Doubs et
Eure) ; un Misery (Somme) ; Missery (Côte-d'Or) ; Missiriac
(Morbihan). Ce dernier s'appelait Miceriac en 1130 (8). Il
faut y ajouter cinq noms de hameaux.
(1) Itinér&ire d'Antonin^ édit. Parthoy ot Pinder, p. 406 et 450 de l'édition
Wesseling.
(2) C. /. L., X, 1199.
(3) Boutiot et Socard , Diclionnaire topogr&phique du département de
l'AubBj p. 17. Joseph Gamier, Nomenclature historique^ p. 246.
{4)C.7. L., III, 371.
(5)Brambach, 1245; C. 7. L., III, 4981.
(6) Boutiot et Socard , Dictionnaire topographique du département de
l'Aube, p. 172.
(7) C. J. L., X, 407.
(8) Rosenzwcig , Dictionnaire topographique du département du Mor-
bih^n, p. 281. Missery (Côte-d'Or) est appelé Meseriacum dans un diplôme
âe l'année 721. Pardessus, Diplomata, II, 324.
166 LIVRE II. CHAPITRE I". i 10.
§ 10. — Noms de fundi formés à l'aide de surnoms^ dans les
pays celtiques au temps de Vempire romain.
Sous la domination romaine, les habitants des provinces
n'ont pas tous adopté le système onomastique de la race
conquérante. Un certain nombre, probablement même au
début le plus grand nombre , c'est-à-dire ceux qui n'ont
pas obtenu la dignité de citoyens romains, ont conservé
l'usage ancien de leur nation, en ne portant qu'un nom, et,
dans le cas où ils craignaient la confusion avec d'autres,
en plaçant ensuite le nom de leur père, au génitif, suivi du
mot filius. Tels sont les cavaliers : Adbogius Coinagi f[ilius],
na[tione] Petrucorius ^ c'est-à-dire originaire du Périgord;
Ru fus y Coutusuati f[ilius]y natiolne] Elvetius , c'est-à-dire
originaire de Suisse ; Argiotalus, Smertulitani f[ilius], Nam-
nis, c'est-à-dire de Nantes, leurs monuments funèbres
sont conservés aux musées deMannheim (i) et de Worms(2).
On peut aussi citer lantumarus , Andedunis f [ilius] , Var-
cianv^^ originaire probablement de Varcia entre Langres et
Besançon (3), et Cattaus, Bardi f[ilius], Helvetius; tous deux,
après avoir servi comme les précédents en qualité de cava-
liers dans l'armée romaine , reçurent de l'empereur Néron
le droit de cité, l'un en l'an 60, l'autre en l'an 64 de notre
ère; et les diplômes par lesquels cette faveur leur est
concédée, sont conservés aux musées de Vienne et de
Munich (4).
Parmi les hommes de condition inférieure qui étaient
ainsi dépourvus de gentilices , quelques-uns furent cepen-
dant propriétaires, et de là un certain nombre de noms de
fundi, les uns composés, les autres dérivés. Les composés
sont formés en employant comme second terme le mot
(1) Brambach, 1230, 1227.
(2) Brambach, 891.
(3) Itinérsiire d^Antonin, éd. Parthoy et Pinder, p. 386 de l'éd. Wesseling.
(4),C. /. L., t. III, p. 845-846.
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 167
-magus^ champ ; et on peut en rapprocher les noms de lieu
composés dont le second terme est -dunum ou -briga^ deux
mots signifiant forteresse. Quant aux dérivés, ils sont,
comme les dérivés de gentilices, formés avec le suffixe
-acus; ils se distinguent des dérivés de gentilices en ce
que le suffixe --acus n'est pas précédé d'un i. Exemple
Ami'Ocus^ Ebur-acus, Turn-acus.
Comme exemple de composés dont -magus est le second
terme, nous citerons Caranto-magus^ station située entre
Cahors et Rodez, aujourd'hui Cranton (1); Draso-magus^
localité de Rhétie, dans le voisinage du Rhin, mentionnée
par Ptolémée (2) ; Bardo-magas , victÂS voisin de Milan (3) ;
Eburo-jnagtis , station romaine de Gaule, près de Carcas-
sonne (4). Les deux premiers termes, Carantus et DrusuSy
sont des noms gaulois ; on l'a dit pour le premier (p. 132),
à propos du gentilice Carantius; quant au second, qui a
deux orthographes, Drausus la plus ancienne, Drusus la plus
récente , il fut » sous la seconde forme , adopté par la gens
Livia, La gens Livia prenait, disait-elle , le surnom de Dru-
sus, à cause d'un barbare nommé Drausus^ qu'un ancêtre
avait tué à la guerre (5). Drausus, Drusus parait identique à
la seconde partie du nom des Con-drusiy peuple de la Gaule
Belgique dont il est deux fois question chez César (6).
Le premier terme de Bardo-magm est Bardo-s, usité comme
nom propre d'homme et comme surnom dans la population
gallo-romaine au temps de l'empire. En l'an 64 de notre
(1) TMe de Peutinger. Cf. Ernest Desjardins , Géographie de la Gaule
d'après la Table de Peutinger, p. 312.
(2) Ptolémée, livre II, ch. xii, | 5; édition Nobbe, t. I, p. 125; livre II,
ch. XIII, I 3 ; éd. Ch. MûUcr, t. I, p. 282.
(3) C. /. L., V, 5872, 5878.
(4) Table de Peutinger; Eraest Desjardins, Géographie de la Gaule d'après
là Table de Peutinger, p. 364.
(5) Suétone, Tibère, 3.
(6) De bello gallico, livre IV, ch. vi; livre VI, ch. xxxii. Dans ce passage.
César dit que les Condrusi sont d'origine germanique : ex g ente et numéro
Germanorum; ceci doit être entendu dans un sens géographique, et non
ethnographique; de même au livre II, ch. iv : plerosque Belgas esse ortoe
a6 Germanis.
168 LIVRE II. CHAPITRE I*». ( 10.
ère , Néron , comme on Ta déjà vu , donna droit de cité à
Cattaus^ Bardi filius, d'origine helvète (1). On a trouvé
prés de Knittelfeld , en Styrie , le monument funèbre de
Banona Bardi, c'est-à-dire fille de Bardus (2); les deux
Bardus, pères, l'un de Cattaus^ l'autre de Banona^ n'avaient
point de gentilice. Mais, dans une troisième inscription
trouvée en Carinthie , on lit le nom de Julia Bard[i filia]
Eliomara (3) dont, par conséquent, le père portait le genti-
lice Julius avec le surnom Bardais,
Eburo-magus a pour premier terme le nom d'homme
Eburos, latinisé en Eburus, qu'on a lu plusieurs fois dans
les inscriptions romaines de la période impériale. Dans
l'une, qui a été trouvée en. Hongrie et qui est au musée de
Pesth , un certain Eburus fait une dédicace à Vénus (4).
Dans une autre, recueillie en Carinthie, Bufius Mosgaitus et
sa femme élèvent un monument tant à eux-mêmes qu'à
leur fils Eburus (5). Enfin, sur un vase de terre trouvé en
Styrie, on a lu la marque de potier EBVRVS FEC. (6). La
marque EBVRV trouvée à Douai (7) est peut-être du même
potier. D*Ebunts on tira même le dérivé Eburius, employé
comme gentilice avec un surnom dans trois inscriptions,
Tune des environs de Novare (8), une autre de Novare
même (9), la dernière de Rome (10); d'Eburius vient Ebu-
riacuSj au moyen âge Eboriacus, nom de la localité où fut
fondée, au septième siècle, l'abbaye de Faremoutiers (Seine-
et-Marne), dite d'abord Eboriacense monasterium (il). Ebur
(1) c. /. L., t. III, p. 846.
(2) Ibid., III, 5473.
(3) Ibid., III, 4838.
(4) Ibtd., III, 4167.
(5) Ibid., III, 5033.
(6) f 5id., III, 6010, 82.
(7) Schuermans, Sigles figulins^ n* 2048.
(8) C. /. L.» t. V, addit&menta, p. 1087, n* 6578.
(9) C. /. L., V, 6573.
(10) Ibid., VI, 17086. On trouve aussi Eburius employé comme surnom.
Jbid., v, 3541 et 6537; JuUian , Inscriptions romaines de Bordeaux, 1. 1,
p. 199.
(11) Pardessus, Diplom,, II, 15-17.
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 169
riacus est probablement la forme primitive des noms des
communes d'Evry (Seine-et-Marne, Seine-et-Oise, Yonne),
et d'Ivry (Eure, Oise et Seine).
Comme exemples de composés dont le premier terme est
un nom d'homme, et dont le second tenue est -dunum ou
'briga^ nous avons trois Eburo-dunum, deux en Gaule, un
en Germanie , et Eburo-briga en Gaule. Les deux Eburotki-
num de Gaule sont aujourd'hui la petite ville d'Yverdun ,
en Suisse, dans le canton de Vaud (1), et Embrun, sous-
préfecture du département des Hautes-Alpes (2). Eburodu-
num, de Germanie, nous est connu par Ptolémée (3); on
suppose que c'est aujourd'hui Briinn, en Moravie. Quant
à Eburobriga, on croit que c'est aujourd'hui AvroUes
(Yonne) (4).
Des noms de lieux gallo-romains en -acus qui , sans
être dérivés de gentilices, sont cependant tirés de noms
d'hommes, le plus fameux est Eburacus, Yorck (cf. p. 137).
La variante orthographique Eboracus, qui sent déjà la basse
latinité , est la plus connue ; mais une inscription appelle
les habitants Ebur[ac€nses] (5) , et on lit Eburacum dans les
meilleurs manuscrits de V Itinéraire dCAntonin (6). Eburacus^
en Angleterre, Ebu/riacus, ancien nom de Faremoutiers en
France, sont intéressants à rapprocher; puisque l'un dé-
(1) Voyez les textes réunis par M. E. Desjardins, Géographie de /a Gaule
d'après la Table de Peutinger, p. 234.
Ç) V07. les textes réunis par M. E. Desjardins, Géographie de la Gaule, etc.,
p. 423. Deux autres Eburo-dunum apparaissent dans les textes du moyen
âge. L'un a donné son nom à la vicaria Everdunensis , mentionnée en 865
dans une charte de l'abbaye Saint-Martin de Tours (Mabille, Pancarte notre,
p. 224; cf. 159); c*est aujourd'hui Averdon (Loir-et-Cher). De l'autre vient
le nom de la utcan'a Ebredenensis , on 919 , dans le cartulaire de Brioude ,
p. 323; cette vicairie était située en Auvergne au comté de Tallende (Puy-
de-Dôme).
(3) Livre II, ch. xi, i 30; édition Nobbe, 1. 1, p. 123; édit. Wilberg, p. 156.
Livre II, ch. xi, i 15, chez Charles Mùller, t. I, 275: cf. p. 273, note.
(4) Desjardins , Géographie de la Gaule d'après la Table de Peutinger ,
p. 168-169.
(5) C. /. L., VII, 236.
(6) md., VII, 61.
170 LIVRE IL CHAPITRE I-. { 10.
rive du surnom Eburus , l'autre du gentilice Eburius , lui-
môme dérivé d'Eburus.
Turnacus , nom de la ville de Tournai dans la Table de
Pèutinger et dans V Itinéraire d'Antonin (1), est dérivé de
Tv/rniLs , nom porté par un personnage mythique que Vir-
gile a chanté et qu'on rencontre dans une inscription écrite
sur les murs de Pompéi peu avant la catastrophe qui dé-
truisit cette ville, l'an 79 de notre ère (2). Vers la même
époque vivait à Rome le satirique Tumus^ fils d'affranchi,
qui acquit de l'influence dans les cours de Vespasien, de
Titus et de Domitien ; Martial parle de lui (3). Un autre
Twrnus a été un des correspondants de Sidoine Apolli-
naire au cinquième siècle de notre ère (4). Un monument
qui nous conserve ce surnom est le nom du village de
Tournon (Indre-et-Loire), anciennement Turno-magus^ écrit
Tomo-magus par Grégoire de Tours au sixième siècle de
notre ère (5).
Le nom d^Avitacum praedium , chez Sidoine Apolli-
naire (6) , vient d'Avitus , surnom qui n'est point rare dans
les inscriptions latines (7). Nous le trouvons quelquefois
employé seul. Un des amis du poète Martial s'appelait Avi-
tus ; son nom se lit plusieurs fois dans les épigrammes de
Martial ; cinq lui sont adressées (8) ; il est simplement ques-
tion de lui dans une sixième (9) ; c'était vers la fin du pre-
mier siècle de notre ère. Deux autres Avitus apparaissent
dans le Code ; un rescrit impérial fut adressé à chacun ; le
premier est d'Alexandre Sévère et de l'année 224 de notre
(1) Géographie de la Gaule d'après la Table de Pèutinger, pp. 80, 81.
(2) Enéidey livres VII-XI (cf. Tite-Live, livre I, ch. ii); C. /. L., IV, 1237.
(3) Martial, XI, 10; VII, 97. Voyez du reste les textes réunis par Tcuffel,
Gechichte der rœmischen Literatur, troisième édition, p. 733.
(4) Sidoine Apollinaire, Episiolae . livre IV, lettre 24.
(5) Historia Francorum, livre X, ch. xxxi, éd. Arndt, p. 444, ligne 4.
(6) Epistolarurrif liber II, epistola ii; comparez Carmen, XVIII.
(7) Voir notamment Allmer, Inscriptions antiques de Vienne, II, 453; III,
424 ; IV, 64, 207.
(8) Epigrammaton, I, 16; VI, 84; IX, 1; X, 96, 102.
(9) /Md.,iXII. 24.
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 171
ère (I), l'autre est des empereurs Dioclétien et Maximin et
date de Tannée 286 (2). Il n'est pas rigoureusement établi
que YAvitacum praedium de Sidoine Apollinaire, bien
qu'appartenant à sa femme , iLœoriv/in , comme le dit Técri-
vaiû latin, dût son nom au père de sa femme, Marcus Mae-
cilius Avitus, mort empereur en 456. Le nom de cette lo-
calité peut être beaucoup plus ancien et remonter à un
autre Avitus. A côté d'Avitacus, se place AvitiacuSy dérivé
d'Avitius (3), gentilice qui vient lui-même d'Avitus. On a
écrit au moyen âge Aviciacus pour Avitiacus. Il a été parlé
plus haut, p. 138, à! Aviciacus^ aujourd'hui Avessac (Mor-
bihan). Un autre Aviciacus ^ situé en Bourgogne, est men-
tionné dans une charte de 721 (4).
Camaracus , « Cambrai , » dont on a écrit au moyen âge
le nom Cameracum (5), est un dérivé de Camarus, surnom
qu'on a lu deux fois sur les murs de Poinpéi (6), C'est
peut-être une variante de Ca/mmarusy « crabe, » c'est-à-dire
un sobriquet. Cammarus a donné le nom d'homme dérivé
Cammariitë d'une inscription de Capoue (7); et de Camma-
rius vient Camariacus , nom d'une localité où l'abbaye de
Flavigny (Côte-d'Or) avait des vignes au neuvième siècle ,
témoin un diplôme de l'empereur Lothaire (8) , nom aussi
d'une villa Camariacus qui appartenait , dans le même siè-
cle , à l'église du Mans , comme l'établit un diplôme de
Charlemagne (9).
(I) Code, livre III, titre 37, 1. 2.
(2)/bi(f., livre IV, titre 38, 1. 2; cf. De-vit, Totius Utinitatis onomM-
ticon, t. I, p. 591.
(3) Le gentilice Avitius apparaît dans une inscription de Lyon (Boissieu,
p. 303), et dans des inscriptions d'Afrique, C. /. L., VIII, 2560, 3450, 4485.
Il a existé aussi ailleurs, comme le prouve le dérivé Avitianus. C. I, L. , II,
513, 1000, 3399, 3401 ; III, 8371 ; V, 5128, etc.
(4) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 324.
(5) Desjardins , Géographie de la. Gaule d'après la Table de Peutinger ,
pp. 88, 89.
(6) C. /. L., IV, 656, 2110.
(7) Ihid.. X, 2812.
(8) D. Bouquet, VIII, 377 B.
(9) Jbid., V, 769 A. Cf. Sickel, AcU Karolinorum, t. II, p. 67, n- 181.
LIVRE II. CHAPITRE I". | 10.
[unedonnacus , « Aulnay » (Charente-Infërieure) , station
laine dont il est question à la fois dans l'Itinéraire d'An-
in et dans la Table de Peutinger (1) est un dérivé d'-^u-
o, nom de potier relevé par M. l'abbé Thédenat sur un
jment de vase trouvé à Reims (2).
'olonacus, aujourd'hui Sonnay (Indre-et-Loire), s'explique
le cognomen Solo , -onis qu'on rencontre dans une
cription de Milan (3) ; Solo peut dériver de SoUos, nom
ilois gravé sur une monnaie (4).
Toilà donc six noms de lieux de la Gaule romaine qui
ivent certainement de surnoms. Le lecteur en verra
jtres exemples , bien plus nombreux , dans la suite de
ouvrage , quand on parlera des noms de lieu formés
cette façon qui se rencontrent dans les documents du
yen âge.
)n a supposé, avec une certaine vraisemblance, qa'An-
nacus , aujourd'hui Andernach (5) , dérivait également
n surnom qui serait 'Antunmts. Ce qui parait jus-
îr cette hypothèse , c'est d'abord l'existence du surnom
'ullus en Espagne (6), en Suisse (7), en Italie (8). Martial,
is deux épigrammes, pleure la mort d'une jeune fille
lelée Antulla (9). Le thème antu- aurait donné deux dé-
Ss : Antullo- et 'Antunno-, dont le dernier serait cou-
vé seulement dans Antunnacvs (10). Une autre preuve, —
I Deajardins, Géographie de la Gaule d'aprét la carte de Peulingtr,
63; Longnon, Atlas historique de ta France, texte, 1** livraison, p. 15.
I Bullelin de la Société des antiquaires de France, 1884, p. 135,
I C. I. t., V, 5946.
I A, de Barthélémy, Reoue celtique, t. X, p. 34.
. LongnoD a admis Solonacus dans sa liste, quoique cette localité ne
pas mentionnée avant Grégoire de Tours, Hisl. Francorurn, X, 31.
) Desjardins, Géographie de la Gauie d'après la Table de Peutinger,
4.
I C. /. L„ II, 1426, 1727, 2240. Cf. Antulla, ibid., 1305, 1401, 1713, 3986.
I Hommson, Inscriptiones Heloeticae , 35.
) C. I. L., V. 6874.
1 Episrammalôn, lib. I, 114, tt6,
&) Voyez Grammalica cellica, î* édit.. p. 77i, et un mémoire de Quiria
)r dans le Programme du Progv"""'*'' d'Aridernach, pour l'année 1873-
, Andernach, i8T4,i,in~4*. p. 9.
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITES. 173
et celle-ci décisive , — se tire du nom de lieu Antonnava
(965) ou Ant(yn[n]avi (1152), aujourd'hui Antonnaves (Hau-
tes-Alpes) (1) , qui suppose un antique Antunnava , Antu/nr-
navij dérivé d'Antunnus, à Taide du sufiBxe -avus (2). Voilà
comment quelquefois un texte du moyen âge peut expliquer
un fait antique.
511- — Examen de la question de savoir s'il y a eu en France
des noms de lieux en -§cus dérivés de noms communs.
Il est incontestable qu'à l'époque de l'empire romain les
régions celtiques soumises à la domination romaine ont eu
des noms de lieux en -dcus dérivés de noms d'hommes ; les
noms de lieux finissant en -idcus^ c'est-à-dire où le suffixe
'âcus est précédé d'un i, viennent ordinairement de genti-
lices ; les noms de lieux qui se terminent en -dcu^ précédé
d'une consonne viennent , en règle générale , de surnoms ,
cognomina. Les courtes listes données ci-dessus , de noms
géographiques ayant cette double origine peuvent se déve-
lopper considérablement à l'aide des documents postérieurs
à la chute de l'empire romain. On en verra des exemples un
peu plus loin, quand il sera question des noms de lieux que
fournissent les textes du moyen âge , surtout de la période
(1) Romans, Dict. top, des Hautes-Alpes^ p. 4.
(2) Parmi les huit nom de lieux en -acus do Gaule conservés par des
documents du temps de l'empire romain et mentionnés plus haut, p. 150,
deux sont laissés sans explication : Bagacus, Cunnacus. Cunnacus peut
être corrigé en Connacus qui dériverait de Gonno[s], nom d'honune gaulois
dans une légende monétaire (A. de Barthélémy , Revue celtique , X , 30 ; cf.
De-vit, OnomasticoTif II, 397); de Connos est venu le gentilice Gonnius
(Mommscn, Inscript, helv., 94; AUmer, Inscriptions de Vienne, t. II, 263,
306, 490, 491). Bagacus suppose un cognomen Bagus ; Bagus aurait été d'ori-
gine gauloise et aurait signifié « bataille ; » comparez le vieil irlandais bàg,
thème bâga, qui a ce sens; Bagus aurait été synonyme de Catus « ba-
taille, » et nom d'homme. Salomacus {Itinéraire d'Antonin , 457) , THospi-
talet, conunune de Belis (Landes), peut être corrigé en Salo-magus; cf.
Sàlo-<iurum, Soleure (Suisse) , dont le nom est écrit Salod. dans une in-
scription (Mommsen, Inscript, helvet,^ 219); Salo-magus signifierait et champ
de Salos '> comme Salo^durum « forteresse de Salos, »
174 LIVRB II. CHAPITRE I-. | U.
mérovingienne et de la période carlovingienne. Mais, préa-
lablement , on peut se demander si , parmi les noms de
lieux en -iacta, ou en -acus précédé d'une consonne, dans
les pays celtiques soumis à i'empire romain , il n'y a pas
des dérivés de substantifs autres que des noms d'hommes.
L'étude des langues néo-celtiques pourrait porter à
l'admettre. L'irlandais nous offre le substantif dristenach ,
glosant le latin dumetum dans un manuscrit du neuvième
siècle (1). Dristenach, signifiant a endroit où il y a des buis-
sons épineux, » est un dérivé du thème dristen, dérivé lui-
même de dris , « buisson épineux, " qui glose vêpres dans
le même manuscrit (2). J'ignore s'il y a des exemples de
ee mot dans la nomenclature géographique de l'Irlande. On
y a signalé six exemples du nom de lieu Drishaghaun (3) ,
qui aurait été, en vieil irlandais, Drisachân, c'est-à-dire un
diminutif de drisach, lui-même dérivé, par -ack = deo-s, du
Dom commun dris, n buisson épineux, n Mais l'antiquité
de Drisachân n'est pas démontrée. U n'est même pas prouvé
que dans drisach la finale -ach soit identique au suffixe -ach
du moyen irlandais et ne tienne pas lieu d'un plus ancien
■eaoh -ech, ^ ico. Cf. Are-moricus.
Mais on ne peut contester qu'on ne doive reconnaître le
suffixe -ach dans le nom de lieu Tamnach du livre d'Ar-
magb, neuvième siècle (4). Tamnach fait au datif Tamnuch (5)
et suppose un thème Tamonâeo- , différent de celui qui a
fourni au même ms, l'accusatif Tamnich (6) = * Tamonicin,
au nominatif singulier ' Tamonica. Les deux mots sont
dérivés de tamon , « tronc d'arbre , » et veulent dire « en-
Ci) PritcUn de Saini-Gall, n* 904, p. 53 a, édition Ascoli, p. 50.
{1) Prigcien de Saint-GRll, p. 47 a, édiUon Atcoli, p. 46.
(3) Joyce, The origin and history o( frtgh nameg of places, 1883, l. II,
p. 356.
(4) F* 15. Voir l'édition donnée par le R. P. Edmond Hogan, Artalecla
Bollandiana, t. II, p. 63, I. 17,
(5) Livre d'Armagh, f 11, Analecta Botlsndiana, t. II, p. 48, I. 18.
(6} Liure d'Armagh, f> 17, Analecls Bollandtana, t. II, p. 232, 1. 1. Wliit-
[«7 Stokes, Gofdslica, 2* édit., p. 85, 1. 15.
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 175
droit où il y a des troncs d'arbres (1). » La voyelle de la
seconde syllabe de tamon est tombée dans le dérivé ; com-
parez debthachj « dissident, » de débuith^ a dissentiment ; »
caHhach , « celui qui aime (2) , » de carad , infinitif de
carim^ « j'aime. »
Le Chronicum ScotoiMm, monument du douzième siè-
cle, mais composé avec des documents plus anciens, nous
offre le nom de Flesccach , endroit où une bataille se serait
livrée en 652 (3). Ce mot veut dire aujourd'hui « champ de
blé ; » il est dérivé de flesc , « baguette , bâton , » et aussi
« gerbe de blé , » et veut dire littéralement un endroit où
il y a soit des baguettes, soit des gerbes de blé.
Suivant les Annales des quatre maîtres, compilation du
dix-septième siècle , mais qui est souvent la reproduction
de vieilles chroniques monastiques , il faut dater de l'an-
née 695 une bataille de Crannach ; ce nom , au génitif
Crandcha = *qrennacâs (au nominatif qrennaca), est dérivé
de crann = *qrennos , « arbre , » et veut dire « endroit
boisé. » C'est l'irlandais moderne Crannagh encore usité en
Irlande comme nom de lieu (4).
Dans le même ouvrage , mais à propos d'événements du
seizième siècle , on trouve mentionnés deux lieux dits du
nom de Leacach; ce mot, dérivé de lia, génitif liacc,
« pierre , » veut dire « pierreux , endroit où il y a des
pierres. »
Il y donc en Irlande quelques noms de lieux en -ach =
âco-s, dérivés de noms communs. Mais ils sont fort rares ,
et rien ne prouve qu'ils remontent plus haut que le moyen
(1) M. Jojce, The origin and hiatory of irish natnes of pUces, 1. 1, 5* éd.,
P- 44, 231, prétend que ce mot yeut dire prairie. C'est la doctrine d*0*Do-
novan dans son supplément an dictionnaire d'O'Reilly, p. 708. Ce n'est pas
le sens étymologique.
(2) Gràmmatica celHca, 2» édit., p. 810.
(3) Chronicum Scotorum, édit. Hennessy, p. 94. Cf. O'Donoyan, Annals
ofthê four masters, 1851, t. I, p. 264, 265.
(4)io3rce, The origin and history of irish names ofplaceSf 1. 1, 5- édit.,
p. 499.
^:»
«
V.
7i
176 LIVRE II. CHAPITRE I-. { 11.
âge. Les noms de lieu de la Bretagne continentale donnent
lieu à une observation analogue.
Dans la Bretagne continentale on trouve, à partir du on-
zième siècle, des noms de lieu dérivés de noms communs
à Taide du suffixe dcus. Ce sont d*anciens adjectifs. Le plus
ancien que nous puissions citer est Les Rattenuc (1) ou Les
Radenuc (2), « château ou cour de la fougeraie ; » Rattenuc^
Radenuc est dérivé de raten^ raden^ « fougère. » Au dou-
zième siècle , Terra an Prunuc signifie « terre de la pru-
naie, » terre de Tendroit qui produit des prunes : on dirait
aujourd'hui prunek. Au treizième siècle , Banazlec , dérivé
de banazl^ « genêt, » veut dire terrain qui produit du genêt,
et c'est un nom de lieu dans une charte de l'année 1230
aux archives des Côtes-du-Nord (3). Quelermecy « la Hous-
saie, » dérivé de quelen, « houx, » apparaît au quatorzième
siècle (4).
Le Dictionnaire topographique du Morbihan , par M. Ro-
senzweig, mentionne onze lieux habités du nom de Quele-
nec ou QuelleneCj et plusieurs autres formations du même
genre, comme : Avallecy nom de hameau, « pommeraie, »
dérivé A'avall , « pomme ; » — une ferme dite Le Blevec ,
« l'endroit où il y a des fleurs ; » au quinzième siècle ,
blezvec (5), qui vient de *blezvy a fleur, » usité au quinzième
siècle sous la forme dérivée blezvenn^ aujourd'hui bleun ; —
un écart dit Bruguec, « endroit où il y a des bruyères, » de
bruc, bruQy au singulier brugen, « bruyère; » — un village
appelé SperneCy « endroit où il y a des épines, » de spem,
« épine. »
Drenek , nom d'une commune du Finistère , est peut-être
identique à l'adjectif moderne draenek, dreinek, drenek f
(1) Gartulaire de Landévennec, publié par Le Men et Ernault, n* 10. Do^
cuments inédits. Mélanges, t. V, p. 555.
(2) /btd., n* 19. Documents inédits, Mélanges, t. V, p. 558.
(3) Revue celtique, t. III, p. 400.
(4) Morice, Preuves, t. I, col. 1214.
(5) C&tholicon de Lagadeuc, édition de Le Men, p. 28.
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 177
« épineux, » de draerij drean^ dren, « épine, » et, en ce cas,
ce nom de commune signifie « lieu où il y a des épines. »
Mais, en général , il ne faut pas attribuer une étymolo-
gie topographique aux dérivés en ec = dçus que nous
ofiFrent en Bretagne les noms do lieu un peu anciens. Ces
dérivés sont, la plupart du temps, de vieux noms d'hom-
mes. Ainsi Beuzec, nom de trois communes du départe-
ment du Finistère, n'est pas un dérivé de beuz « buis. »
De beuz^ « buis, » le dérivé usité en breton est d'origine
latine : c'est au treizième siècle beuzid; au onzième dans
le Cartulaire de Landévennec, busit, mot identique au bas
latin buœituin^ plus anciennement buxetum, Beuzec, au
onzième siècle vicarium Buduc, Les Buduc (c'est-à-dire
« vicairie, cour de Buduc ») dans le Cartulaire de Landé^
vennecj est un nom d'homme signifiant « victorieux, »
variante Budoc = * Bôdi-âcus. Goxiezec, nom d'une commune
du Finistère, au onzième siècle vicarium Woeduc, « vicairie
de Woeduc, » est encore un nom d'homme (1).
Au neuvième siècle, tous les noms formés à l'aide du
sulBxe 'âeusj qu'on trouve dans la Bretagne française, sont
des noms d'homme, par exemple : Dubroc, « aqueux, »
= * DubrdcuSf larnoc, « ferreux, = * Isarnâcus, » etc. Compa-
rez chez César les noms d'hommes qui se terminent par le
même suffixe : Divitiacus, Dumnacus, Valetiacus, et en Ir-
lande, au neuvième siècle, dans le Livre d'Armagh, les
noms d'hommes analogues, tels que Camulacus, Lochar-
uach , Senachus (2).
Y avait-il dans la Gaule transalpine, au temps de l'em-
pire romain , des noms de lieux formés comme Dubroc et
Isarnoc, en plaçant le suffice -dctw à la suite d'un nom com-
mun désignant les objets qui se trouvaient dans la localité
dénommée à l'aide du dérivé ainsi créé ? Le fait est pos-
(1) Sur les noms de lieux bretons en -ec, voyez Grammsitica ceiftca, 2* éd.,
p. 850. Documents inédits, Mélanges, t. V, p. 581, 582, 599. (Table du Car-
tulaire de Lajidévennec, par M. Ernault.)
C2) V^iUey Stokes, The tripartite life, p. 304, 320.
12
178 LIVRE II. CHAPITRE I-. { 12.
sible, mais non prouvé. Dans la Gaule cisalpine, Bêndcus
pour BennâcuSy dérive de benUy m corne, promontoire »
(cf. p. 135). Je ne puis indiquer un nom de lieu formé
de la même façon dans la Gaule transalpine. Les noms de
lieux qui offrent la désinence -iâcus^ et qu'on peut expli-
quer, sont dérivés de gentilices ou exceptionnellement de
surnoms en ius, comme Mercurius ; les noms de lieu où la
désinence -âcus se trouve immédiatement précédée d'une
consonne , dérivent ou de surnoms qui ont été employés
comme noms pérégrins par des individus dépourvus de
gentilices , ou exceptionnellement de gentilices qui ne se
terminaient pas en -ius,
§ 12. — Etude sur divers noms de lieu d'origine celtique qui
n'offrent pas le suffixe -âcus et qui apparaissent pour la
première fois dans les documents du moyen âge (1).
Les résultats acquis par Tétude des documents contem-
porains de Tempire romain sont justifiés par Texamen des
monuments postérieurs si Ton a soin d'y faire la distinction
entre les noms de lieux dont la création remonte à la do-
mination romaine, quelquefois plus haut, et ceux qui sont
le résultat soit do la conquête franque, soit de tout autre
fait nouveau. Je dis les noms de lieux qui remontent à la
conquête romaine et quelquefois plus haut ; dans les textes
mérovingiens, carlovingiens et même à des dates bien pos-
térieures, on voit quelquefois apparaître pour la première
fois des noms de lieux gaulois non mentionnés jusque-là.
Certains ont un sens topographique (cf. p. 151 , 152).
Tels sont : Acaunum , avec affaiblissement de la sourde en
moyenne Agaunum, qui veut dire « rocher, » aujourd'hui
Saint-Maurice-en-Valais (2); Duèrum, « eau, » aujourd'hui
Douvres (Seine-et-Marne), arrondissement de Meaux, can-
(1) Comparez les § 6 et 7, p. 151-155.
(2) Voyez les textes réunis par M. Longnon, La Gaule au sixième siècle,
p. 232. L'orthographe Ac&uno avec un c se trouve dans une monnaie mé-
rovingienne (A. de Barthélémy, Bibl. de l'Ecole des Chartes, t. XXVI, p. 450,
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 179
ton de Lagny, commune de Torcy (1). Canto-benniexAs^ nom
d'une montagne d'Auvergne, le mont Chanturgue, près de
Clermont-Ferrand , a été aussi le nom d'une forteresse, et
plus tard d'un monastère dont parle Grégoire de Tours (2).
CanUhbennicus est dérivé d'un composé Canto-benno-^ dont
le second terme veut dire sommet, littéralement corne,
et dont le premier nous offre le mot d*où dérive probable-
ment Cantiumy nom du pays de Kent chez César. On sup-
pose que ce mot canto- veut dire « blanc, » mais cela n'est
pas encore prouvé.
Quelques-uns de ces noms de lieux s'expliquent par la
religion (cf. p. 152, 153, 154). Du nom divin Belenos dérive
le terme géographique Mons Belenatensis, Grégoire de Tours
rapporte qu'un jour saint Martin passa dans cet endroit ;
c'est, nous apprend-il, une montagne du haut de laquelle
on voyait le vicus Ricomagensis ^ aujourd'hui Riom (Puy-
de-Dôme). La villa Belenatensis^ dont parle un diplôme de
Pépin le Bref, devait son nom à cette montagne, c'est
aujourd'hui Saint-Bonnet (Puy-de-Dôme) (3). Le BelenO"
Castro d'une monnaie mérovingienne (4) , la Belna-villa de
deux diplômes carlovingiens des années 832 et 862 (5),
aujourd'hui Beaune-la-Rolande (Loiret), nous rappellent
le souvenir de la même divinité, à moins qu'il ne s'agisse
d'un homme qui aurait porté le nom gaulois de Belenos ou
Belinos (6).
et dans la chronique de Marius, chez D. Bouquet, t. II, p. 14 d. L'ortho-
graphe plus récente, Agaunum par un g, est ceUe de Grégoire de Tours.
Quant au sens, comparez le grec àxôw;, « pierre à aiguiser, » et le sanscrit
açan a pierre, rocher. »
(1) Diplôme de 854; chez Tardif, Monuments historiques^ p. 106, col. 1.
(2) Grégoire de Tours, Historia Francorum, II, 21, édit. Arndt, p. 84,
I. 23. Cf. Longnon, La Gaule au sixième siècle, p. 497.
(3) Longnon, La Gaule au sixième siècle, p. 491, 492.
(4) A. do Barthélémy, dans la Bibliothèque de l'Ecole des Chartes, t. XXVI,
p. 452. Quichcrat, De la formation française des anciens noms de lieux, p. 97;
cf. ci-dessous, p. 181, note 1.
(5) Tardif, Monuments historiques, n* 123, p. 85, et n* 186, p. 119.
{€) Bellinus dans les inscriptions : Mommsen, Inscriptiones helveticae,
n- 289; C. /. L., t. V, n- 8122, 3 ; t. VII, n- 430.
180 LIVRE II. CHAPITRE I". { 12.
Le dieu était connu dans plusieurs pays celtiques. Ter-
tuUien, dans son Apologétique, écrite en 199, ditqueBelenus
était la divinité principale des habitants du Norique (1). On
sait qu'il était aussi adoré dans la ville d'Aquilée. En 238,
les habitants, assiégés par l'empereur Maximin, puisèrent
le courage de résister dans la croyance à la protection du
dieu Belenus ou Belinus, qu'ils assimilaient à Apollon, et
qui leur avait, disait-on, promis la victoire. Le succès cou-
ronna leur confiance. Les soldats de Maximin découragés
coupèrent la tête à leur prince et levèrent le siège (2). On
a recueilli dans Aquilée vingt-deux inscriptions antiques
en l'honneur du dieu Belenus ou Belinus (3), et dans six
d'entre elles, son nom apparaît comme épithète d'Apol-
lon (4) ; une est une dédicace par les empereurs Dioclétien
et Maximin (286-305) (5). Deux de ces inscriptions rappel-
lent qu'une fontaine lui était consacrée (6). Il avait non
loin de là un temple à Zuglio, l'ancien Julium Carnicum (7).
Son culte avait pénétré en Gaule. Ausone raconte la
chance heureuse d'un certain Phœbicius, Armoricain de
naissance, comptant des druides parmi ses ancêtres, qui fut
d'abord sacristain de Belenus; mais c'était au quatrième
siècle : le nombre des adorateurs des dieux et leur libéra-
lité avait diminué ; la place était peu lucrative ; Phœbicius
obtint, ce qui valait mieux, une chaire à l'école de Bor-
deaux (8). Le nom du Dieu Belenus a été lu dernièrement
dans une inscription de Nimes (9).
Une des montagnes qui dominent Riom était dédiée à
ce dieu comme la fontaine sacrée d'Aquilée, et cette mon-
(1) Tertullien, Apolog,^ c. 24; Ad naftones, liv.II, c.8. Ed. Migne, 1, 419,595.
(2) Capitolin, Les deux Af aximtns, c. 22. Cf. Hérodien, VIII , 3.
(3) C. /. L., V, n" 732-735, 737-741, 743-755.
(4) Ibid., V, n" 732, 737, 741, 748, 749. 753.
(5) Ibid., v, n- 732.
(6) /5id., v, n- 754, 755.
(7) Ibid., V, n* 1829.
(8) Ausone, Prof essores t II, vers 16-25. Edit. Schenkl, p. 63-64.
(9) BtiXtivoç, c. /. L., XII, 5693, 12.
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 181
tagne, au temps de Grégoire de Tours, c'est-à-dire au
sixième siècle, s'appelait encore Mons Belenatensis , Belena-
tensis est dérivé de Belenatis ou Belenatus, dérivé lui-même
(le Belentis. D'autres localités portaient simplement le nom
de ce dieu sans suffixe de dérivation (1).
Souvent les noms de lieux ont été divinisés : récipro-
quement certaines localités ont pris des noms de divinités.
En Grande-Bretagne une baie portait, suivant Ptolémée, le
nom de Belisa/ma (2). Or, Belisama est une déesse assimilée
à Minerve à Tépoque romaine, et qui fut l'objet d'un culte
à Conserans (Ariège) (3), et à Vaison (Vaucluse) (4). Le nom
de Belisama doit être reconnu dans ceux de Belisma et
de Belesmay portés l'un par Blismes (Nièvre) , en 1287 (5) ;
l'autre par Blesmes (Marne), dans le siècle précédent (6).
Quelques noms de lieux habités qu'on ne trouve pas dans
les textes avant le moyen âge, sont des composés gaulois :
le premier terme est l'épithéte considérée comme caractéris-
tique (152, 154) ; exemple : 1® Cambidonno pour Cambo-dunum,
« courbe forteresse, » dans la légende d'une monnaie méro-
vingienne (7), nom de lieu qui, à l'époque romaine, se trouve
en Grande-Bretagne et en Rhétie et qui , dans la légende
monétaire, désignerait Cambon (Loire-Inférieure); 2® * Cam-
bidubro'j <c la courbe eau, » d'où vient le nom du Cambi-
dobrense monasterium de Grégoire de Tours construit pro-
bablement sur les ruines d'un établissement plus ancien (8).
(1) Chez Ausone, dans le passage auquel renvoie» p. 180, la note 8, le second
e de Belenns est long. J. Quîchcrat en conclut que cet e était accentué , et
que, par conséquent, le nom de Heu Belna « Beauno » ne peut être un fé-
minin du nom divin Belenus. U a eu tort d'attribuer à l'accent gaulois les
lois de l'accent latin.
(2) Ptolémée, II, c. 3, g 2, BikiaayM etoxvaic, Edit. de Charles Mûner, t. I,
p. 84.
(3) Orclli, n- 1431, 1969.
(4) Inscription gauloise de Vaison au musée d'Avignon.
(5) Soultrait, Dictionnaire topographique de la Nièvre^ p. 16.
(6) E. de Barthélémy, Diocèse ancien de Chàlons-sur-Marne , t. II, p. 91.
(7) A. de Barthélémy, dansla Bibliothèque de l'Ecole des Chartes^ t. XXVI,
p. 453.
(8) Longnon, La Gaule au sixième siècle^ p. 496, 497.
182 LIVRE II. CHAPITRE I". { 12.
Ces noms semblent rappeler Tépoque où la langue gau-
loise régnait en maîtresse dans notre patrie. D'autres peu-
vent dater plutôt du temps où le gaulois y était en lutte
avec le latin. Tels sont les composés suivants dont le
premier terme est un nom propre d'homme.
On a déjà parlé, page 148, de deux Iciodwum, Tun en
Touraine, aujourd'hui Izeures (Indre-et-Loire) (1), l'autre
en Auvergne , aujourd'hui Issoire (Puy-de-Dôme) (2). Icio-
durv/m veut dire forteresse dUccius, Iccius est un nom
d'homme gaulois et romain.
Cisomagus où , suivant Grégoire de Tours , saint Martin
bâtit une église (3). C'est probablement aujourd'hui Ciran-
la-Latte (Indre-et-Loire) (4). Ciso-magus veut dire champ
de Cisus ou CissiLs. Cùssils est un surnom gallo-romain, pré-
cédemment nom d'esclave dans l'inscription d'Aquilée ainsi
conçue : Silvano Aug[usto] in hoiiore[m] M. Trosi Daphni se-
viri et M. Trosi Cissi lib[erti] (5). L'affranchi Jf. Trosius Os-
5ti5, d'abord esclave sous le nom de Cissus^ avait emprunté
le prénom et le nom de son maître. Dans une inscription
de Milan, c'est le contraire : Q. Lucilius Ossias est un pa-
tron auquel Pasicrates, son esclave, doit à la fois la liberté,
un prénom et un nom (6). Enfin, dans le musée du mont
Saint-Bernard se trouve une tablette de cuivre, sur laquelle
un Gallo-Romain a fait écrire ses noms pour les laisser en
souvenir à Jupiter Poeninus, et ses noms sont T. Annius
Cissus (7). La variante Cissa nous est fournie par le génitif
(1) Historia Fr&ncorum, livre VI, c. 12 ; livre X, c. 31. in Gloria Màrty-
rum, c. 58. édit. Arndt et Krusch, p. 257, 1. 11 ; p. 444, 1. 20; p. 528, 1. 15.
Cf. Longnon, Géographie de la Gaule au sixième stècie, p. 273.
(2) In gloria confessorum , c. 30. Edition Arndt et Krusch, p. 766, 1. 4-5.
Cf. Longnon, Géographie de la Gaule au sixième siècle^ p. 499, 500.
(3) Grégoire de Tours, Historia Francorum,\h X, c. 31 ; éd. Arndt, p. 444,
1. 4.
(4) Longnon, Géographie de la Gaule au sixième siècle, p. 269, 270.
(5) C. /. L., V, 830.
(6) Ibid,, V, 6034.
(7) Ibid.^ v, 6863. On peut citer encore P. Cornélius Cissus y C. I. L.,
IX, 3626, et la signature L. Publii Cissi, C. I. L., X, 8509, 334. Il j a enfin
quatre exemples de Cissus dans les inscriptions pariétaires de Pompéi.
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 183
Cissoe^ du nom du père dUbliomarius^ dans une inscription
d'Alsace (1). L'existence d'une orthographe Cisus avec une
seule s est prouvée par plusieurs dérivés. Tel est Cisius,
connu par la signature C. Cisi sur un vase (2) et d'où vien-
nent : 1® Cisionig,^ nom de femme dans une inscription de
Noie (3) ; 2^ Cisiacus^ un des surnoms d'un procurateur im-
périal, prolégat de la province de Rhétie, de Vindélicie et
de la Vallis Poenina , dont les noms ont été conservés par
une inscription de Vérone : Q, Caicilius Cisiacus Septicius
Pica Caicilianus (4).
C'est l'orthographe par une seule s, qui se retrouve chez
Grégoire de Tours dans le nom de lieu Cisomagus^ « champ
de Cisus. »
La vie de sainte Geneviève nous apprend que cette vierge
célèbre naquit à Nemetodorum, près de Paris; c'était au
cinquième siècle. Grégoire de Tours parle aussi de ce vil-
lage et l'appelle Nemptodurus : Gontran y fit baptiser, en
591, Clotaire II, son neveu, fils de Chilpéric (5). C'est au-
jourd'hui Nanterre (Seine) (6). La forme la plus ancienne
du nom de cette localité a dû être * Nemeto-durum, dont le
sens est « forteresse de Nemetus ou Nemetos. » L'adjectif
gaulois * nemetos, « sacré, » employé au neutre, signifiait
a temple » ; au masculin , il était employé comme nom
d'homme ; il a persisté avec cette valeur en gallois, au
moyen âge, sous les formes Nimet (7) et Nevet (8). Nemeta^
cum, nom de la ville d'Arras à l'époque romaine, semble
être aussi un dérivé du nom d'homme Nemetos,
(1) Brambach, 1876.
m C. J. L., X, 8056, 92.
(3) Ibid., X, 1266.
(4) Ibid., V, 3936.
(5) Grégoire de Tours, Historia Francorurrif X, 28, édition Arndt, p. 439,
1.23.
(6] Longaon, Géographie de la Gaule au sixième siècle^ p. 359.
(7) Chronique galloise du dixième siècle conservée dans le manuscrit du
Musée britannique , Harleian , 3859. Fragment publié par Aneurin Owen ,
Ancient laws and institutes of WaleSy p. 5.
(8) Mabinogion, édition de Charlotte Guest, t. II, p. 243. Cf. Grammatica
celtica, 2* édit, p. 85.
184 LIVRE II. CHAPITRE I-'. g 12.
* Isarnodurum^ aujourd'hui Isernore (Ain) (1), apparaît
dans la légende d'une monnaie mérovingienne avec Tor-
thographe Isernodero (2). Dans une vie de saint Oyand,
écrite au sixième siècle , l'orthographe suivie est au géni-
tif Isarnodori (3). Saint Oyand naquit près de ce vicus, au
milieu du cinquième siècle. Le nom de ce vicus veut dire
c( forteresse dlsamm. »
Nous ne rencontrons pas le nom d'homme Isamus dans
les documents de l'époque romaine. Mais il apparaît au
neuvième siècle 5 sous la forme bretonne Hoiarn, dans six
chartes du Cartulaire de Redon , il désigne un témoin dont
la qualité n'est pas désignée dans cinq de ces chartes (4^ ;
dans une autre , Hoiarn est, dit le texte latin, un t tyran-
nus, » c'est-à-dire un machtiern^ sorte de magistrat (5).
Dans le breton du neuvième siècle, hoiarn veut dire « fer. »
En Irlande, l'équivalent dialectal de hoiarn est iarn^ qui
signifie aussi « fer; » le diminutif larndn est un nom
d'homme irlandais au dixième siècle : un personnage qui le
porte est tué par trahison en 1003 (6). Ainsi, dans les deux
branches entre lesquelles se divisent les dialectes néocelti-
ques, Tusage a existé d'employer comme nom d'homme le
nom commun qui veut dire « fer. » On trouve des exem-
ples analogues, au moyen âge, dans la région sud-est de la
Gaule, à laquelle appartient Isernore : au dixième siècle,
il y eut à Grenoble un évéque nommé Isamus (7) ; Isamus
fut aussi, au siècle suivant, le nom d'un abbé de Saint-Vic-
tor de Marseille (8) ; vers le môme temps , on rencontre le
(1) Quicherat, De la, formation française des anciens noms de Heu, p. 49.
(2) A. de Barthélémy, dans la Bibliothèque de l'Ecole des chartes^ t. XXVI,
p. 457.
(3) Dom Bouquet, t. III, p. 396 d.
(4) Cartulaire de Redon, p. 51, 104, 106, 108, 114.
(5) Ibid., p. 207.
(6) Annales des quatre maîtres, édit. d*0*Donovan, 1851, t. II, p. 748-750.
(7) Des chartes de lui , datées de 950 et de 976, ont été publiées dans le
Cartulaire de Saint-Hugues de Grenoble, p. 19 et 26.
(8) Des chartes de lui, datées des années 1031 à 1044, ont été publiées dans
le Cartulaire de Saint-Victor de Marseille, tome I, n^ 430, 564; tome II,
n" 659, 685.
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS. 185
nom d'homme Isarn dans d'autres parties de la France (1).
L'antiquité de ce nom résulte de son dérivé Isaminu$
inscrit, a l'époque romaine, sur six vases d'étain trouvés
en Angleterre (2) ; Isseminus, avec une légère variante d'or-
thographe, est au cinquième siècle le nom d'un compagnon
de saint Patrice (3), son collaborateur pour la rédaction
d'un texte canonique.
Le biographe de saint Oyand, écrivant au sixième siècle,
afcme qu'en langue gauloise le sens àUsarnodorum est
« porte de fer (4). » Il commet en cela deux erreurs : Isar-
nos, employé comme nom commun, a dû, en effet, vouloir
dire « fer » en gaulois ; mais ce mot est ici employé comme
nom propre d'homme. Quant à dorum, c'est une orthogra-
phe de basse époque pour le classique durumiy « forte-
resse, » avec lequel le breton dor^ « porte , » et l'irlandais
dorus, même sens, n'ont aucun rapport. Il est, du reste, à
craindre que l'auteur de la vie de saint Oyand ne connût
la langue gauloise beaucoup moins qu'il le prétend. C'était
aux langues des Burgundes et des Francs qu'il empruntait
probablement sa science. On sait combien ces langues
étaient prochainement apparentées au gothique ; or , les
deux mots dont il s'agit étaient du nombre des quelques
expressions qui appartenaient en commun aux Celtes et aux
Goths. « Porte, » en gothique, s'appelait daur : prononcez
dor] a fer » s'appelait eisam : prononcez isarn (5). La lan-
(1) Inseription de Minerve (Hérault) , chartes du dixième siècle dans les
preuves de VHistoire de Languedoc ; Le Blant , Inscriptions chrétiennes ,
t. n, p. 444. Voyez aussi les exemples du nom d'homme Jsarnus réunis par
Gustave Desjardins, C&rtulaire àe l'abbaye de Conques, p. 474, col. 1.
(2) C. /. L., VII, 1270.
(3) Arthur West Haddan and William Stubbs, CouncHs and ecclesiastical
doccuments relating to Great Britain and Ireland, t. II, p. 328.
(4) c Haud longe a yico cui vestusta paganitas , ob celebritatem clausu-
ramqae fortissimam supcrstitiosissimi templi, gallica lingua /sarnodort , id
est [errei ostii, indidit nomen » (Dom Bouquet, t. III, p. 396 c, d.).
(5) L'orthographe dor et isarn est celle du vieux saxon. Voyez Oskar
Schade, Alt deutsches Wœrterbuch , t. II , p. 946 au mot tor, et t. I, p. 458
ftu mot isarn.
186 LIVRE II. CHAPITRE I-'. { 12.
gue gauloise, gallica lingua^ du biographe parait donc avoir
été tout simplement le burgunde ou le francique.
Quoi qu'il en soit, Icio-durum^ Nemeto-durum , Isamo-dumm
et Ciso-magus sont plus anciens que les textes du moyen
âge par lesquels ils sont parvenus jusqu'à nous. Ils ont été
contemporains de l'empire romain , les trois premiers
comme Augn^sto-dururriy aujourd'hui Bayeux, le dernier
comme Augusto-magus et Caesaro-magm, aujourd'hui Senlis
et Beauvais. Les trois premiers remontent peut-être même
plus haut. Les Gaulois ont dû donner leur nom à des ha-
bitations avant de le donner à des champs. Admageto-briga,
où, comme César nous l'apprend, Arioviste battit les Gau-
lois soixante et un ans avant notre ère, peut tirer son nom
d'un ancien propriétaire et signifier « château d'Admage-
tos (1). » Rien ne s'oppose à ce que Icio-durum^ Nemeto-dU"
rum, IsarnO'durum aient été contemporains d'Arioviste.
Mais il n'y a pas de preuve que ces trois noms soient an-
térieurs à l'empire romain. On a, sous l'empire romain,
continué à créer des noms de lieux composés dont -durum-
était le second terme. Tel est Albio-durum , écrit Albiode-
rum dans la Chronique dite de Frédégaire (2) ; le premier
terme de ce nom de lieu est le gentilice romain Albm
qui sera étudié p. 190. Tel est encore Alio-durumj d'où le
nom du pagus Aliodremis , probablement au diocèse de
Meaux en 632 (3) ; le premier terme A'AliO'dumm est un
gentilice romain dont il sera question p. 192.
Ainsi, les textes du moyen âge peuvent servir à com-
pléter diverses catégories de noms de lieux gaulois distin-
gués d'après les textes antérieurs au moyen âge , dans les
§ 6 et 7 de ce chapitre (ci-dessus, p. 151-155).
(1) Mommsen» Rœmische Geschichte, 6» édit., t. III, p. 247, note; cf. De
bello gallicOf l, 31.
(2) Frédégaire, 1. IV, c. 83, éd. Krusch, p. 163, 1. 18.
(3) Pardessus, Diplom., t. II, p. 16.
CHAPITRE II.
EXEMPLES EN FRANCE, AU MOYEN AGE, DE NOMS DE « FUNDI »
FORMÉS PLUS ANCIENNEMENT A l'aIDE DE GENTILICES RO-
MAINS EN 'ius ET DU SUFFIXE -aCUS (1).
AcHiNiAGAS , pour Aquiuiacas (sous-entendu villas ou do-
mu$) , est un nom de lieu mentionné dans un diplôme de
Charlemagne remontant à Tannée 779 (2).
Ce nom dérive d'Aquinius. Aquinius est un gentilice
romain, le nom, par exemple, d'un poète contemporain
de Cicéron et mentionné par Catulle (3). Il a été porté
aussi par plusieurs personnages qui figurent dans les ins-
criptions, une notamment de Lyon (4). Acigné, nom d'une
commune de l'IUe-et-Vilaine , suppose la forme gallo-ro-
maine Aquiniacus ou sa variante Aciniacus.
AciACus, dans un diplôme faux de Childebert I", attribué
à l'année 541 (5), désigne une localité du nom d'Assé
au diocèse du Mans, soit Assé-le-Bérenger (Mayenne), soit
(1) La première partie de ce chapitre, lettres A et B, a paru en 1887 dans
la Bibliothèque de l'Ecole des chartes, t. XLVIII, p. 357-370. La suite a été
publiée dans les t. VIII et IX de la Revue celtique, 1887, 1888.
P) Ce diplôme porte le numéro 71 , chez Sickel : Acta regum et impera-
iorum Karolinorum.
(3) Vojrez les textes réunis par De- Vit , Totius latinitatis Onomasticon ,
p. 403.
(4) A. de Boissieu, p. 355, 356.
(5) Pardessus, Dtp{oma/a, t. I, p. 103; K. Pertz, Diplomatum imperii tq-
mus /, p. 122, ligne 36, p. 123, ligne 6.
/
188 LIVRE II. CHAPITRE II.
Assé-le-Boisne , soit enfin Assé-le-Biboul , tous deux dans
la Sarthe. Aciacus^ dans le pagus Pauliacensis. fut donné à
la basilique de Saint-Fargeau , par Tabbé Widerad, en
721 (1). Aciacus est une orthographe de basse époque pour
Acciacus , avec un double c. La variante Acciagus , par un
double c et par un g, substitut bas-latin du c antique, nous
est offerte par un diplôme d'Angilramme, évoque de Metz,
qui, en 780, donne à Tabbaye de Gorze des biens dans la
villa Acciagus (2); il s'agit d'Essey, qui est, en quelque
sorte, un faubourg de Nancy (3). Un autre Essey, situé en
Meurthe-et-Moselle, comme le précédent, est appelé Aciacus
dans une charte de Tannée 846 ; mais une pièce de Tannée
895, où la même localité est appelée Acci , nous autorise à
restituer l'orthographe AcciaciLs par un double c (4). Ce
nom de lieu dérive d'Accius.
Accius est un gentilice romain porté par divers person-
nages, dont le plus connu est le poète tragique L. Accius,
né Tan 170 avant J.-C. et qui parait avoir vécu fort long-
temps, car Cicéron raconte qu'il a souvent causé avec lui ;
il serait mort vers Tannée 94 avant notre ère (5). Ce gen-
tilice se rencontre de temps en temps dans les inscriptions;
ainsi T. Accius Marcus figure avec Accius Maximus dans
une inscription de Carinthie (6). T. Accius est un fabricant
de tuiles dont la marque est conservée au musée de Kla-
genfurt (7). On a trouvé près d'Esté le tombeau de C. Ac-
cius Boethus (8), à Moggio celui de L. Accius Libellus(9);
(1) Pardessus, Diplomata^ t. II, p. 324.
(2) Dom Calmet, Histoire de Lorraine; PreuveSf I, col. 289.
(3) Lepage , Dictionnaire topographique du département de la Meurlh« ,
p. 47.
(4) Lepage, t'bid., p. 47.
(5) Voir les textes réunis par Teuffel , Geschichte der rœmischen Liten-
tur, 3* édit., p. 214-217; Ribbock, Tragicorum latinorum reliquiae^ l'appelle
Attius, Il a réuni ses fragments aux pages 114-194 du volume dont le titre
vient d'être donné.
(6) C. 7. L., III, 4830.
(7) Ibid,, III, 5758.
(8) Ibid., V, 2551.
(9) Ibid., V, 1827.
LA DÉSINENCE -I-ACU8 AU MOYEN AGE. 189
Este et Moggio sont deux localités de l'Italie septentrionale.
D'autres inscriptions établissent la fréquence de ce nom
dans l'Italie méridionale (1). On le rencontre aussi en Es-
pagne (2). L'existence de ce gentilice en Gaule est attestée
par un monument funèbre de Lyon; ce monument fut
élevé par les héritiers du défunt , et l'un de ces héritiers
était le soldat M. Accius Modestus (3).
AcoNucA finis est un territoire situé dans le pagus Scar-
pone)isis , aux termes du diplôme par lequel Chrodegang ,
évêque de Metz, fonda, en 745, l'abbaye de Gorze (4). Aco-
niaca dérive d'Aconius.
Aconius est un gentilice d'abord obscur, mais qui dut
une certaine notoriété à deux Aconius Catulinus, l'un pro-
consul d'Afrique de l'an 316 à 319 après J.-G. , et l'autre
consul trente ans plus tard (5). D'autres Aconius sont con-
nus par les inscriptions. L'un est auteur d'une inscription
votive au dieu Mercure , à Spire (6). Un autre a dédié un
autel à Jupiter sur les bords du lac Majeur (7). Leur nom
est écrit par un double c , Acconius. Mais le nom de Q.
Aconius et celui d'Aconia, son affranchie, tous deux par un
simple c, sont conservés par une inscription de Treia (8).
La même orthographe Aconia a été relevée dans la nécro-
pole de Lambessa (9).
AcuTiACus apparaît, écrit Aguciacus^ dans un diplôme du
roi Clotaire III donné vers l'année 657 (10). M. Longnon a
reconnu qu'il s'agit d'Aguisy , hameau de la commune de
(1) Voyez les index du C. /. L., t. IX, p. 703 ; t. X, p. 1023.
(2) C. /. L., t. n, index, à la page 715.
(3) A. de Boissieu, Inscriptions antiques de Lyon, p. 355, 356.
j[4) Pardessus, Diploma,ta, t. II, p. 398.
(5) De- Vit, Onomasticonf t. I, p. 43.
(6) Brambach, n- 1797.
(7) C. i. L., V, 5496.
(S) Ibid,y IX, 5660.
(9) ma., VIII, 3319.
(10) Tardif, Monument» historiques, n* 13, p. 11.
y
à
190 LIVRE II. CHAPITRE II.
Chelles (Oise). Aiguisy, nom d'un hameau du département
de TAisne, s'explique aussi par un primitif Acutia>cus.
Ce nom de lieu dérive du gentilice Acutius. Acutius est
le nom d'un tribun du peuple élu par Tinfluence des patri-
ciens en Tan 399 avant J.-C. Le même nom est porté plus
tard par un grand nombre de personnages dont la mémoire
nous a été gardée par des inscriptions (1). L'une de ces
inscriptions est conservée au musée d'Aix-en-Provence (2).
Albiacus , dans la légende d'une monnaie mérovin-
gienne (3), et dans un diplôme de Charles le Chauve (4),
vient d'Albius.
Albius est le nom d'une gens à laquelle appartenait la
mère de l'empereur Othon, Albia Terentia (5). Ce gentilice
se rencontre de temps en temps dans les inscriptions et
dans quelques autres documents (6) , dont le plus connu
est le discours de Cicéron pro Cluentio , où il est souvent
question de l'empoisonneur Statius Albius Oppianicus La-
rinas. Des inscriptions nous apprennent que ce gentilice
avait pénétré en Gaule (7). Il y a en France : 1® Deux commu-
nes du nom d'Albiac, l'une dans la Haute-Garonne, l'autre
dans le Lot; celle-ci appelée, au cas indirect, Àlbiaco, en
967 (8) ; 2'' trois communes du nom d'Aubiac : deux dans
la Gironde, une dans le Lot-et-Garonne. Ce sont d'anciens
Albiacus, comme Aubiat (Puy-de-Dôme) (9). Le Cari, de
(1) C, I. L.fWy douze exemples; VIII, quatre; IX, deux; X, huit. Sans
compter les femmes.
(2) Herzog, Galliae Narbonensis historiaf t. II, p. 77, n* 366.
(3) A. de Barthélémy, dans la Bibl, de l'Ecole des chartes, t. XXVI, p. 450.
(4) Tardif, Monuments historiques^ n* 212, p. 136.
(5) Suétone, Othon, ch. I.
(C) De-Vit, Onomasticon, t. I, p. 194, 197. 198.
(7) A. de Boissicu, Inscriptions antiques de Lyon, p. 28, 30; Allmer, Ins-
criptions de Vienne, I, 78; III, 419. C. /. L., XII. 748, 1390, 1782, 3258. 3561,
4379, 4506, 4563, 5111. Albius, en latin, est un dérivé d'albus. Les Gaulois
possédaient un thème albio-, dont nous ignorons le sens, et qui nous est
connu par la dédicace Marti Albio^rigi (OreUi-Henzen, 5867).
(8) Deloche, Cartulaire de Deaulieu, p. 125.
(9) Houzé, chez Doniol, Cartulaire de Sauxilange, p. 687.
LA DÉSINENCE -I-ACUB AU MOYEN AGE. 191
Saint-Victor de Marseille (1), nous montre, dans un docu-
ment de Tannée 814, le nom de lieu Albianus.
Albiniacus est le nom d'une propriété de Tabbaye de
Saint-Martin de Tours, suivant un diplôme donné par
Charlemagne en 775 (2). C'est aujourd'hui Aubigny-sur-
Xére (Cher). Deux autres Albiniacus^ situés en Rouergue ,
apparaissent au onzième siècle dans le cartulaire de l'ab-
baye de Conques (3).
Albinius, d'où vient Albiniacus^ est le nom d'une gens
plébéienne de Rome , dont les plus anciens membres con-
nus sont : 1® L. Albinius Paterculus, un des deux premiers
Romains créés tribuns du peuple en l'an 493 avant notre
ère (4); 2** un certain L. Albinius, contemporain de la
prise de Rome par les Gaulois en 390 ; celui-ci est connu
par le zèle pieux qu'il aurait , dit-on , montré après la ba-
taille de l'Allia , quand , prenant en pitié les vestales qui
s'en allaient de Rome à pied, il les aurait fait monter dans
son char , après en avoir fait descendre sa femme et ses
enfants (5).
Ce nom persista sous l'empire romain : des inscriptions
d'Italie l'attestent (6). Il pénétra en Gaule; un certain T.
Albinius Januarius figure dans une inscription de Niraé-
gue (7). Ce nom a fourni à la Gaule septentrionale un nom
de lieu formé au moyen du suffixe -anus; c'est Albiniani,
aujourd'hui Halphen , mentionné à la fois dans V Itinéraire
d'Antonin et dans la Table de Peutinger. (8) Le nom d'Au-
(1) T. n, p. 643.
(2) Ce diplôme, publié sans date par dom Bouquet, t. V , p. 737, est lo
n* 42, p. 27, de Sickel, Acta Karolinorum , et le n* XVIII de Mabille, La
pancarte notre de Saint-Martin de TourSf p. 69.
(3) Desjardius, Cartulaire de l'abbaye de Conques^ p. 39, 40, 311.
(4) Tite-Live, II, 33. Cf. De-Vit, Onomasticon, I, 196.
(5) Tite-Live , V , 40. C'est probablement une légende généalogique
empruntée à une laudatio funebris.
(6) Voyez, par exemple, C. /. L., V, 5506, 5522, 5478, 6375.
(7) Brambach, n* 73.
(8) Desjardins, Géographie de la Gaule d'après la table de Peutinger , p. 39.
192 LIVRE II. CHAPITRE II.
bignan (Vaucluse) a été formé d'après le même procédé.
Mais c'est à remploi du sufiBxe -acus qu'on doit les noms
d'Albignac (Corrèze) , de quatre Aubigné (lUe-el-Vilaine ,
Sarthe, Deux-Sèvres, Maine-et-Loire), d'Aubigiley (Haute-
Saône), et de dix-huit autres communes qui s'appellent Au-
bigny (Aisne, Allier, Ardennes, Aube, Calvados, Cher,
Côte-d'Or, Nièvre, Nord, Pas-de-Calais, Deux-Sèvres,
Somme, Vendée) ; total : vingt-quatre communes, dont le
nom actuel s'explique par un primitif Albiniacus.
Aliacus est le nom d'une localité où Berchaire , fonda-
teur de l'abbaye de Montier-en-Der, avait une propriété
dont il fit donation à cette abbaye en 673 (1).
AUius est un gentilice romain ; les personnages les plus
importants de ce nom paraissent avoir été : C. Allius
Alba, triumvir monetalis, de l'an 106 à l'an 102 avant notre
ère (2) ; M. Allius Nepos , contemporain de l'empereur Ti-
bère et célèbre par ses dettes (3) ; Q. Allius Maximus, con-
sul, l'an 49 de notre ère (4). On rencontre plusieurs autres
Allius dans les inscriptions : L. Allius Victor , dans une
inscription funéraire de Mayence (5) ; le légionnaire C. Al-
lius, fils de Caius, dans une autre inscription funéraire du
musée de la même ville (6); un second, C. Allius, égale-
ment C. fllius, dans une inscription funéraire de Guel-
dre (7).
Nous ne savons pas où était située la villa Al[l]iacu5
mentionnée dans la donation de Berchaire. Alliacus a dû
donner en français Ailly , en provençal Aillac. Il y a en
France cinq communes du nom d' Ailly , une dans l'Eure ,
(1) Pardessus, Diplomala, t. II, p. 159.
(2) De-Vit, Onomaslicon, t. I, p. 230.
(3) Sénéque, De Beneficiis, liv. II. c. vu, g 2.
(4) De- Vit, Onomasticon^ t. I , p. 230.
(5) Brambach , 1280.
(6)/5id., 1172.
(7) Ibid., 84.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 193
une dans la Meuse, trois dans la Somme, et une commune
d'Aillac (Dordogne).
Alsiacus était une villa qui appartenait à l'abbaye de
8aint-Germain-des-Prés , suivant un diplôme de Charle-
magne daté de 786 (1).
Alsius est un gentilice assez rare ; cependant, nous pou-
vons en signaler deux exemples dans des inscriptions ; dans
un cas, il s'agit d'un homme, L. Alsius Verecundus (2);
dans l'autre, il s'agit d'une femme, Alsia Postuma (3).
Andiacus est le nom d'un des quatre palais que Louis le
Débonnaire , alors roi d'Aquitaine , choisit en 795 pour y
passer l'hiver (4). Il en est aussi question dans un diplôme
de son fils Pépin donné en 825 (5). C'est probablement au-
jourd'hui un des deux Angeac du département de la Cha-
rente.
Le gentilice Andius , dont ce mot dérive , se rencontre
quelquefois dans les inscriptions (6). On le trouve notam-
ment en Gaule (7).
Anisiacus est le nom. d'une villa qui, suivant Hincmar,
aurait appartenu à l'évôché de Laon au temps du roi Pépin
le Bref (8). C'est aujourd'hui Anizy-le-Château (Aisne) (9).
Une monnaie mérovingienne porte la légende Anisiaco
vico (10) ; il est vraisemblable qu'elle a été frappée dans
cette localité ; cependant, il y a en France un autre Anizy,
dans le département du Calvados.
(1) Dom Bouquet, t. V, p. 750 6. '.
(2) C. /. L., X, 1403.
(3) Ibid., V, 1813. ^
(4} ViU'Ludovici Fit, chez Dom Bouquet, t. VI, p. 90 c.
(5) Dom Bouquet, t. VI, p. 664 d.
(6) De- Vit, Onomasticon, t. I, p. 292, col. 2.
(7) Allmer, Inscriptions de Vienne, III, 135, 158.
(8) Hincmar, Vie et Miracles de saint Remy, D. Bouquet, t. V, p. 452 c.
(9j Matton, Dictionnaire topographique du département de l'Aisne , p. 6.
;iO) A. de Barthélémy, dans la Bibl. de l'Ecole des Chartes, t. XXVI, p. 451.
13
94 LIVRE II. CHAPITRE II.
Anisiacus dérive d*Anicius , nom d*une gens romaine qui
s'est fort illustrée sous la république et sous l'empire ; plu-
sieurs Anicius furent consuls avant et après notre ère (1).
Ce nom pénétra dans les provinces. Un certain Anicius
Victor est mentionné dans une inscription de Bade (2). Un
autre Anicius, distingué par le prénom de Marcus, apparaît
dans une inscription de Nimègue (3).
Appiacus colonia fut donnée à l'église du Mans, par Tévê-
que Hadoind , en 642 (4) ; c'est aujourd'hui Saint-Ulphas
(Sarthe) (5). Appiacus est dérivé d'Appius.
Appius, célèbre comme prénom dans la gens Claudia, se
rencontre aussi quelquefois avec valeur de gentilice.
L'exemple le plus connu est fourni par L. Appius Maximus
Norbanus, deux fois consul : une première fois comme
remplaçant, suffecius, sous Domitien ; l'autre comme consul
ordinaire sous Trajan, en l'année 103. Avant lui, on
trouve Sex. Appius Severus , questeur de l'empereur Ti-
tus (6) , et le sénateur Appius Appianus , expulsé du sénat
par Tibère, l'an 17 avant Jésus-Christ (7). Ce gentilice
pénétra en Gaule. L'inscription funéraire d'une femme
nommée Appia a été signalée à Lyon (8), et Appia, mère
d'un légionnaire, éleva à son fils mort un monument dont
un débris a été trouvé dans la même ville (9). On signale
au musée de Narbonne la marque du potier Appius (10). Ou
a trouvé à Cologne le monument funèbre élevé par Appius
Severus à sa fille Appia Verina (11). Dans une inscription
(1) De- Vit, OnomsLSticony t. I, p. 300-305.
(2) Brambach, n- 1659.
(3) Ibid. , n* 85.
(4) Pardessus, DiplomulSL, II, 70.
(5) Quichorat, De la formation française des anciens noms de lieu, p. 76.
(6) De-Vit, Onomasticonf p. 386.
(7) Tacite, Annales, II, 48.
(8) A. de Boissieu, Inscriptions antiques de Lyon, p. 481.
(9) Ibid,, p. 300.
(10) Schuermans, Siglcs figulins, n* 397.
(11) Brambach, n* 415.
LA DÉSINENCE -I-ACU8 AU MOYEN AGE. 195
de Payerne, en Suisse, on lit le nom de D. Appius Augus-
tus .,1).
Àppiacum a pu donner : 1® Achy ; il y a une commune
de ce nom dans l'Oise ; 2** Achey ; il y a une commune
d'Achey dans la Haute-Saône.
Appiliacus, sur l'Oise, dans le pagus Noviomensis, aux ter-
mes d'une charte de l'année 708 en faveur de l'abbaye de
Saint-Bertin, est aujourd'hui Apilly (Oise) (2).
11 n'y a pas d'exemples certains d'un gentilice * Appilius (3).
Mais on a trouvé un exemple du gentilice Apillius dans le
monument funèbre de L. Apillius Successus, près d'Aqui-
lée (4). Une autre variante est fournie par le nom d'Apilia
Severina dans une inscription découverte non loin de là à
Cividale (5). Citons encore la variante Appalius dans une
inscription de Fermo (6) ; on y trouve le double p , mais
non Yi à! Appiliacus, Or, Appiliacus peut dériver d' Appalius
comme d'* Appilius.
Apponiacus est le nom d'une villa située près d'Orléans,
et qui appartenait à l'abbaye de Saint-Aignan aux termes
d'un diplôme de Charlemagne donné entre les années 774
et 800 (7).
Apponius, par deux p dans le gentilice de M. Apponius
Firmus , conservé par une inscription de Pouzzoles (8),
offre une orthographe confirmée par le double p d'Appo-
niolen[us] dans une autre inscription d'Italie (9) ; on trouve
encore les deux p dans le nom de femme Apponia Sisso[i],
(1) Mommsen, Inscriptiones helveticaef n* 151.
(2) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 277, 499.
(3} De- Vit, Onosm&ticon ^ t. I, p. 385, au mot Appilia. Cf. Mommsen,
C. /. L., V, 2896.
(4) C. J. L., V, 8452.
(5) Ibid., V. 1771.
(6) Ihid., IX, 5357.
(7) Sickel, Acia regum et imperatorum Karolinorum, t. II, p. 64, n* 168.
(8) C. I. L., X, 3475.
(9) /Md., IX, 3451.
196 LIVRE II. CHAPITRE II.
d'une inscription d'Afrique (1). C'est une variante d'Apo-
nius, gentilice fréquent dans les inscriptions. Le person-
nage le plus célèbre de ce nom a été M. Aponius Satur-
ninus, consul sous Néron, président de la Mésie sous
Othon, et qui, dans la guerre civile entre Vitellius et Ves-
pasien, prit parti pour ce dernier (2).
Le nom d'Apoigny (Yonne), bien qu'offrant avec Appo-
niacus une grande ressemblance, parait s'expliquer par
un primitif, Epponiacus (3), dérivé d'*Epponius, variante
d' *Eponius , qui n'est lui-même qu'une variante dialectale
d'Equonius, gentilice relaté dans une inscription d'Alsace (4).
Archiniacus, villa mentionnée dans un diplôme faux de
Dagobert I", en faveur de l'abbaye de Saint-Denis (5), est
aujourd'hui Archignat (Allier) (6).
Le gentilice Arquinius explique le nom d'une affranchie,
Arquinia Artemisia, dont la tombe a été trouvée en Cam-
panie (7). On trouve aussi M. Arquinius Secundus (8).
*
Artiliacus, dans un diplôme de Pépin le Bref, remontant
à l'année 751 ou environ (9), est le nom d'une propriété
• de l'abbaye de Saint-Denis.
Artilius est un gentilice dont il y a quelques exemples
dans les inscriptions. On l'a trouvé dans une inscription
lapidaire de Brescia (10). Il est gravé sur un vase d'airain
recueilli dans la ville d'Aquilée (11). Il a pénétré en Gaule :
(1) C. /. L., VIII, 10918.
(2) Les textes qui le concernent ont été réunis par De-Vit, Onom^siicon,
t. I. p. 383, col.' 1.
(3) Quantin, Diciionnsiire topographique du dép&rlement de l'Yonne,]^. 3.
(4) Brarabach, n* 1848.
(5) Pardessus, t. II, p. 42 ; K. Pertz, Diplomalum imperii tomus /, p. 159.
l. 27.
(6) Longnon, Examen géographique ^ p. 12.
(7) CI. L., X, 4335.
(8) De- Vit, Onomasticortf t. I, p. 471.
(9) Tardif, Monumenls historiqueSy p. 45, col, 2.
(10) C. /. L., V, 4535.
(11) Ibid., V, 812,3,6.
LA DÉSINENCE -I-ACU8AU MOYEN AGE. 19^
ie tombeau d'Artilia Martia, femme de T. Munatius Félix,
curateur des seviri aitgustales de Lyon, a été découvert
dans cette ville au dix-septième siècle (1).
Attiniacus est le nom d'un village où les rois mérovin-
giens et carlovingiens eurent un palais. Thierry IV y mou-
rut en 737 (2). Pépin le Bref, maire du palais, y rendit un
jugement en 749 (3). Pépin le Bref, devenu roi, Carloman,
Louis le Débonnaire , Charles le Chauve ont daté des di-
plômes du palais public ou du palais royal d*Attiniacus (4).
Âttinius par deux t est une variante d'Atinius par un
seul tj gentilice romain qui n'est pas rare. Nous citerons
C. Atinius Labeo, préteur l'an 190 avant Jésus-Christ (5),
et un autre C. Atinius Labeo, tribun du peuple en l'an-
née 130, et célèbre pour avoir voulu faire mettre à mort le
censeur Q. Caecilius Metellus (6). La bonne orthographe
de ce nom est celle qui n'offre qu'un t; on la trouve, par
exemple, dans une inscription de Trêves (7) et dans une
inscription du musée de Mayence (8). Mais les manuscrits
nous offrent quelquefois le double t (9) , et cette variante
doit être ancienne , témoin le génitif féminin Atteniae lu
sur une anse d'amphore (10) ; le génitif masculin Attenii ,
dans une inscription d'Espagne (il), et le nominatif féminin
(1) A. de Boissieu, Inscriptions ds Lyon^ p. 200.
(2) Annales Pet&viani, chez dom Bouquet, II, 641 c.
(3) Pardessus, Diplomata^ t. II, p. 414. K. Pertz, Diplomatum imperii to-
mus /, p. 106.
(4) Pépin le Bref, en 753, 757 et 760 (Sickel, Acta Karolinorum, t. Il, p. 3,
4, 6). Carloman, en'769 (Sickel, ibid.^ p. 13). Louis le Débonnaire, en 822,
834, MO (Sickel, ibid., p. 138, 139, 184,203). Charles le Chauve, en 860 (Tar-
dif, Monumen /s historiques, p. 110, 111).
(5) Tite-Uve, livre XXXVl, c. 45.
(6) Tite-Live, Periochae, livre LIX.
(7) Brambach, n* 825.
(8) Brambacfa, n* 932.
(9) De- Vit, Onomasticon, t. I, p. 556, col. 2.
(10) C. /. L., III, 6007, 4.
(11) /Md., II, 537.
198 LIVRE II. CHAPITRE II.
Attenia dans une autre (1) ; le double t s'explique par celui
d'Attius et de son dérivé Attilius (2).
Attigny est un chef-lieu de canton du département des
Ardennes ; un autre Attigny se trouve dans le département
des Vosges.
AuLiACus est une localité mentionnée en 642 dans le
testament de Hadoind, évoque du Mans (3).
Aulius est un gentilice qu'on trouve quelquefois dans
les inscriptions, par exemple à Augst, en Suisse, sur la
stèle funéraire de P. Aulius Memusus (4), à Salzbourg,
Aulia Venusta, nom de femme (5). On a recueilli, tant en
France qu'en Angleterre, des produits de la fabrication du
potier Aulius (6). Ce gentilice n'était pas rare en Italie (7).
AuRiACus. Un Castrum nomine Auriacum est mentionné,
en 1032, dans le Cartulaire de Saint-Victor de Marseille (8).
C'est aujourd'hui Auriac (Var).
Il y avait, au premier siècle avant notre ère, une gens
Auria à Larinum, en Italie. Statius Albius Oppianicus fil
périr une partie de cette famille : on le voit par le plai-
doyer de Cicéron pour Cluentius, qui a été prononcé
l'an 66 avant notre ère.
Auriactis est peut-être la bonne orthographe du nom
d'Orry-la-ville (Oise) (9).
Balbiacus. Grégoire de Tours raconte qu'un jour, tra-
(1) C. /. L., II, 1092.
(2) AUmer, III, 423.
(3) Pardessus, Diplomafa, t. II, p. 70.
(4) Mommsen, Inscriptiones helveticae, n* 288.
(5) C. /. L., III, n- 552.
(6) Schuermans, Sigles figulins, n" 693, 694.
(7) Voyez, par exemple, C. /. L., t. V, index, p. 1105, col. 1; t, IX, index,
p. 706, col. 4; t. X, index, p. 1028, col. 1.
(8) T. II , p. 327. Il est aussi question de la même localité dans le même
cartulaire, au racmc siècle, t. Il, p. 32, et t. I, p. 251.
(9) R. de Lasteyrie, CsnHulaire de Parie, p. 274; cf. cependant Oriacuf,
ibid., p. 128.
LA DÉSINENCE -I-ACU8 AU MOYEN AOE. 199
versant le pagus Balbiacensis ^ il atteignit la Loire (1). Sui-
vant M. Longnon, le nom de la petite localité dont Balbia-
censis est dérivé serait aujourd'hui Baugy (Saône-et-Loire),
identique peut-être au Balbiago de Tacte de fondation de
Tabbaye de Limours, en 697 (2).
Balbius n'est pas jun gentilice fréquent ; cependant une
inscription de Venafri , en Italie , . nous fait connaître le
nom d'un certain C. Balbius Speratus (3). Dans d'autres
inscriptions , on trouve mentionnés Balbia Secundilla (4) ,
L. Balbius Rufi Ipbertus] (5), M. Balbius P. f[ilius] (6).
Basiliaga est le nom d'une villa où l'abbaye de Saint-
Sulpice de Bourges avait un manse au neuvième siècle,
suivant un diplôme émané de Charles le Chauve en 855 (7).
Ce nom est dérivé de Basilius, nom d'origine grecque
qui a été porté par d'importants personnages romains, au
troisième et au quatrième siècle. Ainsi, il y a au Code de
Justinien un rescrit de l'empereur Alexandre Sévère adressé
à un certain Basilius (8). On sait qu'Alexandre Sévère régna
de 222 à 235. Un autre Basilius, vivant un demi-siècle plus
lard, est le destinataire d'un rescrit des empereurs Dioclé-
tien et Maximien (9), qui régnèreqt de 286 à 305. Un troi-
sième Basilius fut comte des largesses sacrées en Occident
environ un siècle après. On l'apprend par plusieurs lois
insérées dans le Code Théodosien et qui datent des an-
nées 379 et 383 (10).
Le gentilice Basilius se rencontre quelquefois dans les
inscriptions en Italie méridionale et en Afrique. La signa-
il) Mir^culdL beaii HtivHni, livre II, ch. xvi.
(2) Pardessus, Diplomate, t. II, p. 244.
(3) C. /. L., X, 4852.
(4) De- Vit, OnomMticon, t. II, p. 666, col. 1.
(5) C. J. L.. V, 5201.
(6) Ihid,, V, 344.
(7) Dom Bouquet, t. VIII, p. 543 6.
(8) Code de Justinien^ livre V, titre 62, loi 5.
(9) /Md., VIII, titre 36, loi 5.
(10) Code Théodosien, livre IV, titre 20, loi i ; livre XII, titre l, loi 101. etc.
200 LIVRE II. CHAPITRE II.
ture Q. Basili Min... a été lue à Fermo sur une tuile (1).
Le musée de Naples possède la stèle funéraire élevée à C.
Valerius Bassus, soldat de la flotte de Ravenne, par Basi-
lius Germanus (2). Q. Basilius Placcianus, flamen perpeiuus,
augure et curateur à Calama, aujourd'hui Guelma, en Al-
gérie, au temps des empereurs Valentinien et Valens
(364-375), est connu par deux inscriptions du musée de
cette ville (3). On a trouvé, dans le même pays, les stèles
funéraires de Q. Basilius Fortunatus (4), de P. Basilius
Maximus (5), de L. Basilius Meleager (6).
Basiniacus ou mieux Bassiniacus est le nom d'un pagus
compris, au neuvième siècle, dans le royaume de Lorraine
et attribué à Louis le Germanique par un partage en 870 (7).
Rançonnières (Haute-Marne) faisait partie de ce pagus en
892 (8). L'orthographe moderne est Bassigny.
Une inscription d'Augsbourg conserve la mémoire d'un
vœu fait à Mercure par M. Bassinius Vitalis (9). Bassinius
est un dérivé de Bassinus, dérivé lui-même de Bassus,
deux surnoms qui se trouvent dans les inscriptions, le
dernier très souvent (10).
Blaciacus , locellus donné à l'église cathédrale du Mans
par Bertrand, évêque de cette ville , en 615 (11) ; Blaciacus,
dans les environs de Vienne (Isère), donné à Tabbaye de
(1) c. /. L., IX, 6078, 47.
(2) /bid., X, 3645.
(3)/6id., VIII, 5335, 5337.
(4) Ihid,, VIII, 6396.
(5) Ihid., VIII, 7230.
(6) /6id., VIII, 7231.
(7) Annales de Saint-Bertin, dom Bouquet, t. VII, p. 110 a : Basiniacus
avec une seule s.
(8) Diplôme de Louis ^ roi de Provence, dom Bouquet, t. IX, p. 675 a ■
Bassiniacensis avec deux s.
(9) C. /. L.. III, 5794.
(10) Voyez les exemples réunis par De- Vit, Onomasticony t. I, p. 686.
(11) Pardessus, Diplomata, t. I, p. 211.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 201
Novalèse par Albon, en 739 (1); Blaciacus, dans le Ton-
nerrois, donné à Tabbaye de Flavigny par Tabbé Widerad
en 746 (2), et -qui eM aujourd'hui Blacy (Yonne), ont, tous
trois, dû s'appeler originairement Blatiacus.
Blatius par un t est un gentilice qu'on trouve deux fois
dans les inscriptions d'Espagne : elles nous fournissent les
noms de L. Blatius Calpurnianus (3) et de L. Blatius Ven-
tinus ou Serventinus (4). On trouve aussi Blattius avec
deux t :h. et M. Blattius dans une inscription trouvée aux
environs d'Esté (5), dans l'Italie du nord ; les noms de P.
Blattius Criticus sont gravés sur une inscription votive
trouvée au sommet du mont Saint-Bernard (6) ; Blattius
Dexier éleva à sa femme un jnonument funèbre, trouvé à
Altilia, dans l'Italie méridionale (7).
BRiTn<iNiACus , dans l'acte de fondation de l'abbaye de
Limeurs, en 697 (8), offre à la piemière syllabe un i aii
lieu d'un e dans le Bret[t]iniacus d'un diplôme des empereurs
Louis et Lothaire pour l'église de Reims, 826-830 (9).
Britan[n]ius est un des évêques sectateurs de l'hérésie
macédonienne auxquels le pape Libère, vers le milieu du
quatrième siècle , adressa une lettre conservée par Cassio-
dore (10); Socrate a écrit son nom BpcTrtîvtoç (11). Ce nom
d'homme dérive du nom de peuple Britannus ou Bretta-
nus, et Britinniacus ou Brettiniacus en vient.
II y a en France six communes dont le nom s'explique
(1) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 372.
(2) Jbid. p. 400.
(3) C. /. L., n, 998.
(4)/Md., II, 1176.
(5) Ibid., V, 2704. •
(6) /Md., V, 6866.
(7) Ihid., IX, 2492.
(^ Pardessus, Diplomàta, t. II, p. 244.
(9) Sickel, Acta regum et imperatorum Karolinorum^ t. II, p. 168, n* 276.
(10) Historia tripartita, livre VII, ch. xxv ; chez Migne, Patrologie latine,
t. LXIX, col. 1088 b.
(W) Histoire ecclésiastique, IV, 12; cf. De- Vit, Onômastihon, t. II, p. 759.
202 LIVRE IL CHAPITRE IL
par un primitif BriHnniacus ou Brettiniacus : ce sont deux
Bretigney (Doubs) et quatre Brétigny (Côte-d'Or, Eure,
Oise, Seine-et-Oise).
BuGiAGus est un nom de lieu inscrit dans un diplôme
original de Tannée 689 (1).
Bucius , d'où le nom de femme Bucia Âpta , fourni par
une inscription de Pompéi (2), est une variante orthogra-
phique de Buccins^ qu'on trouve probablement pour la
môme femme appelé Apta Buccia dans une autre inscrip-
tion trouvée à côté de la première (3). Le nom d'homme
A. Buccins Victor se lit dans une inscription du musée de
Naples, qui a la même origine (4). Si d'Italie nous passons
en Afrique, nous y trouvons la môme alternance entre Bu-
cius et Buccins : dans une inscription de Lambessa, le
nom de femme Bucia Saturnina (5) ; dans une autre, le
nom d'homme Buccins Antoninus (6). Bucia est encore un
nom de femme dans une inscription de Cilly en Styrie :
Vetulla Bucia Urbani f[ilia] (7).
La forme française de ce nom est Bucey, Bucy, Bussy.
Il y a en France trois communes du nom de Bucey : une
dans l'Aube , deux dans la Haute-Saône ; cinq du nom de
Bucy , dont trois dans l'Aisne et deux dans le Loiret ; et
dix-sept communes du nom de Bussy réparties entre dix
départements : Cher, Côte-d'Or, Loire, Marne, Meuse,
Nièvre, Oise, Seine-et-Marne, Somme, Yonne. Il ne faut
pas confondre ce nom avec celui de Boussy, qui repré-
sente le latin Buxetum.
(1) Tardif, MonumentB historiques, p. 638, col. L
(2) C. /. L., X, lOOL
(S) Jbid., X, 1002.
(4) Ibid., X, 1000.
(5) /bid., VIII, 4027.
(6) Ibid., VIII, 2811.
(7) Ibid., III. 5265.
LA DfiSINENGE -I-ACU8 AU MOYEN AGE. 203
BuRiAGA, villa mentionnée dans un diplôme faux attribué
au roi Dagobert !•' et à Tannée 637 (1).
Le gentilice Burius se lit deux fois dans Tinscription
funéraire du légionnaire Burius Nocina, qui existe encore
à Novare (2).
Un primitif Buriacus explique les noms de trois com-
munes qui s'appellent Burey : Tune dans l'Eure, deux
dans la Meuse ; et celui de la commune de Bury (Oise).
Cadoniacus, nom d'une curtis donnée par Tabbé Wide-
rad à TaMaye de Flavigny (3), est bas-latin pour Cato-
niacûs.
Catonius Justus, centurion, fut, en l'an 14 de notre ère,
un des délégués que les légions de Pannonie révoltées
envoyèrent à Tibère pour lui demander leur grâce (4) ;
il devint préfet du prétoire sous Claude ; il périt victime
de la cruauté de Messaline ; Sénèque dans son Ludn^ de
morte Claudii le met au nombre des défunts de la connais-
sance de Claude, qui seraient venus au-devant de leur
prince à son arrivée dans les enfers (5). Sous Hadrien, 117-
138, vivait Catonius Verus auquel cet empereur adressa
un rescrit relatif à une des causes de nullité des testa-
ments (6). On a trouvé, non loin de Crémone, une inscrip-
tion votive à Hercule par Catonius Maximianus (7). Une
inscription des environs de Chierio nous a conservé le
nom de femme Catonia (8).
(1) Pardessus, DipZomAto, t. Il, p. 58; K. Pertz, Diplom&tum imperii io-
m\u I, p. 168, h 18.
(2) C. /. L., y, 6512.
(Zj Pardessus, Diplomata, t. II, p. 400.
(4) Tacite, Annales, livre I, c. 29.
(5) Sénèque, Ludua de morte Claudii, ch. XIII» § 5; cf. Dion Cassius,
livre LX, ch. xviii, { 3.
(6) Code Juatinien, livre VI, titre XXIII, loi 1 ; cf. Institutes de Justinien,
livre II, titre X, i 7.
(7) C. /. L., V, 4147.
(8) I6td., V, 7502,
204 LIVRE II. CHAPITRE II.
Çalciacus , aussi appelé villa Chrausobaci à la fin du
septième siècle (1), paraît être Chaussy (Seine-et-Oise).
Ce nom de lieu peut dériver, soit du gentilice Calcius
qu'on trouve en Italie (2), soit du gentilice Calicius dont
on a constaté l'existence à Narbonne (3).
Caliace, est le nom d'une villa située près d'Orléans, au
sud de la Loire ^ aux termes d'une charte de Tannée 667
en faveur des abbayes de Saint-Aignan d'Orléans et de
Saint-Benoit-sur-Loire (4).
Le gentilice Callius est conservé par l'inscription funé-
raire de L. Callius Julianus recueillie en Afrique (5), par
celle de Callius Crispinus trouvée à Pola en Istrie (6), par
celle du vétéran L. Callius Restitutus (7) qui appartient à
ritalie centrale. On trouve aussi ce gentilice écrit avec une
seule ly exemple : G. Calius dans une inscription votive
de Dalmartie (8) et au génitif M. Cali dans un diplôme qui
dgCte de l'an 92 de notre ère (9).
Caliacus a dû donner dans le midi Chaillac, dans l'ouest
Chaillé, dans le centre et Test Chailley et Chailly. On
trouve en i^'rance deux communes de Chaillac (Indre et
Haute-Vienne) : deux communes de Chaillé (Vendée), une
commune de Chailley (Yonne), et trois communes de
Chailly dont une dans la Côte-d'Or, une dans le Loiret,
et une dans Seine-et-Marne. Chailly-en-Brie (Seine-et-
Marne) est identique au Calagum de la Table de Peutin-
ger, et Calagum doit, suivant M. Longnon, être corrigé
en Caliacum.
(1) Tardif, Monuments hisioriqueSt p. 1, col. 2.
(2) De- Vit, OnomsLSticon, 1. 1, p. 61.
(3) C. /. L., XII, 4675.
(4) Pardessus, Dtplomata, t. II, p. 144.
(5) C. /. L., VIII, 5892.
(6) Ibid., V, 142.
(7) Ibid., IX, 4120.
(8) Ibid., III, 2820.
(9) Ibid.y tome III, p. 858.
LA DÉSINENCE -Ï-ACU8 AU MOYEN AGE. Î05
La variante latine Calianus est notée Chalianjus en 943 ,
dans le cartulaire de Saint-Chaffre du Monestier, en Velay ;
c'est aujourd'hui Chalias (Ardèche) (1).
Caliniacus est le nom d'une localité où l'église du Mans
avait une propriété en 833, témoin un diplôme de Louis
le Débonnaire donné à cette date (2).
Calinius est un gentilice originairement étrusque et
osque. Les inscriptions étrusques de Pérouse nous en
offrent plusieurs exemples. Sa forme osque était Kalinis (3).
Il pénétra dans le monde romain. Les inscriptions nous
font connaître plusieurs individus qui le portèrent : Cali-
nius Félix (4) ; T. Calinius Marcellus ; et, avec une double / :
L. Callinius Aviola (5). On trouve aussi la variante Ca-
lenius (6).
Calviacus est un locus donné à l'église du Mans par
Bertrand, évêque de cette ville en 615 (7). Vers l'an-
née 835 , Nithard nous montre Louis le Débonnaire et son
fils Lothaire campant près d'Orléans , sur le fleuve , à côté
de la villa appelée Calviacus (8).
Le gentilice Calvius n'est pas rare dans les documents
romains qui datent du haut Empire. Une femme de ce
nom, Calvia Crispinilla, joua un certain rôle à Rome vers
la fin du règne de Néron : Tacite l'appelle « magistra libi-
dinum Neronis ; » elle faillit périr victime du soulèvement
qui eut pour effet la mort de ce prince ; ses richesses et
son habileté la sauvèrent (9).
(1) Edition de Tabbé U. Chevalier, p. 111, 122.
(2) Dom Bouquet, t. VI, p. 5^7 C ; cf. Sickel, ActSi regum et impertitorum
Karolinorum, t. II, p. 179, n» 309.
(3) Fabretti, Glossarium it&licum, col. 740, 741.
(4) C. /. L., X, 2204.
(5) De- Vit, Onom&sticony t. II, p. 66.
(6) C. /. L., III, 1762.
(7) Pardessus, Diplomata, t. I, p. 214.
(8) Dom Bouquet, t. VI, p. 69 E.
(9) Dion Gassius, abrégé par Xiphilin, livre LXIII, c. 12, § 3. Tacite, His-
toires, livre I, c. 73.
206 LIVRE IL CHAPITRE IL
On a trouvé près de Rome le monument funèbre d'une
autre Calvia Crispinilla morte à Tâge de dix-huit mois (1).
Une inscription nous a conservé la mémoire d'un certain
M. Calvius , introduit dans le sénat par l'empereur
Claude (2). On a découvert à Bonn le monument funèbre
du légionnaire Calvius Fronto (3) ; à Leybach on conserve
celui de C. Calvius Priscus, etc. (4).
Cambariagus est un nom de lieu mentionné vers 658
dans un jugement rendu par le roi Clotaire III (5) ; il
s'agit d'une villa située dans le Maine. Un autre Cambor
riacus apparaît au dixième siècle dans le Cartulaire de Sa-
Vigny {6!) ; il s'agit d'un Ioculs situé en Lyonnais. Deux autres
localités de même nom figurent dans les titres de la cathé-
drale de Grenoble , Tune est Chambéry , chef-lieu du
département de la Savoie (7), l'autre est Chambéry-le-
Vieux, même département (8).
Cambariacus est dérivé d'un gentilice Cambarius attesté
par trois inscriptions de Nimes (9).
Cambiacus est une localité tenue en fief de l'abbaye de
Saint-Père-de-Chartres vers l'année 1100 (10).
Cambiacus dérive de Cambius, gentilice deux fois gravé
dans une inscription de Nimes (il); le gentilice romain
parait avoir été précédemment un nom d'homme gaulois
qui a donné le dérivé ou composé Cambio-vix d'où, à l'épo-
que romaine, le nom de peuple dérivé Cambiovicenses
dans la TaAle de Peutinger,
(1) OreUi, II, 4990. C. /. L., VI, 142, 90.
(2) Ibid., 3112.
(3) Brambach, n* 476.
(4) C. /. L., III, 3856; cf. VI, 14282-14290. De- Vit, Onomasticon, t. II. p. 89.
(5) Tardif, Monuments historiques, p. 13, col. 1.
(6) Page 148, 221, 244.
(7) Cartulaire de Saint-Hugues de Grenoble, p. 186, 194.
(8) Ibid., p. 99, 186, 193.
(9) C. I. L., XII, 3505, 3756, 3706.
(10) Guérard, Cartulaire de Saint-Père-de-Chartres, p. 316.
(11) C./. L., XII, 3503.
LA DÉSINENCE -1-ACUS AU MOYEN AGE. 207
Camiliacus ou Camliacus, aujourd'hui Chambly (Oise),
dont est daté un diplômé de Tannée 689 (1) , donna son nom
au pagus Camiliacensis ou Camliacensis dont il est question
dans beaucoup de documents mérovingiens et carlovin-
giens à partir de Tannée 640 (2). Une monnaie mérovin-
gienne porte la légende Camiliaeo (3).
Ce nom de lieu peut s'expliquer par les deux gentilices
Camulius et Camilius.
Camulius est le nom d'un légionnaire qui , comme nous
rapprend une inscription du second siècle de notre ère,
reçut à la fois son congé , des colliers et des bracelets
d'honneur; il fut enterré à Grenoble; sa sœur Camulia lui
survécut et s'associa à une affranchie pour lui élever un
monument funèbre (4). Le gentilice Camulius est dérivé
du nom divin gaulois Camulus. Il ne faut pas le confondre
avec le gentilice d'origine latine Camillius , dérivé du sur-
nom si fameux de Camilius ; nous en parlerons plus loin.
Ce gentilice Camillius , par deux l , a une variante Cami-
lius par une seule l qui peut, comme Camulius, expliquer le
nom de lieu Camiliacus, Camliacus.
Camilius se lit dans des inscriptions. On a découvert en
Espagne les monuments funèbres : de Camilia Aemi-
liana (5), de C. Camilius Paternus (6), de Camilia Natula : le
monument de ce dernier fut élevé par l'affranchi Camilius
Saturnalis (7). L'Z unique par laquelle ce gentilice est dis-
tingué se retrouve dans le nom d'une des trente-cinq
tribus de Rome, la tribu Camilia (8).
Camiuacus, mieux Camilliacus ^ aujourd'hui Chemillé
(1) Tardif, Monument historique^, n9 25 6i», p. 638, col. 1.
P) Ibid., p. 8, 25, 30, 31, 45, 81, etc.
(3) On rattribue à Chomillé (Maine-et-Loire). A. de Barthélémy , Biblio-
ihèque^de l'Ecole des chartes, t. XXVI, p. 453.
(4) OreUi, II, 3571.
(5) C. /. L., II, 2738.
(6) Ibid., II, 4345.
Çf) Ibid,, III, 4346; cf. VI. 14301.
(8) Cf. De- Vit, Onom&sticon, t. II, p. 97.
208 LIVRE II. CHAPITRE II.
(Maine-et-Loire), était, en 775, une propriété de Tabbaye de
Saint-Martin de Tours, comme notte l'apprend un diplôme
de Charlemagne (1).
On a trouvé près d'Ayenche le monument que se fit éle-
ver le sévir augustal L. Camillius Faustus, mort depuis,
à Tâge de quatre-vingt-douze ans (2). Dans Tltalie du nord,
à Pavie, on a découvert la stèle funéraire d'un certain
G. Camillius (3). Le même gentilice a été lu dans une
inscription de Venosa (4).
Campaniacus était un viciis publiais appartenant à l'église
du Mans , au commencement du neuvième siècle , ainsi
que l'établit un diplôme donné par Charlemagne en 802 (5).
C'est Champagne (Sarthe) , comme nous le fait remarquer
M. Longnon. La variante Campiniacus est donnée par la
chronique de Saint-Bénigne de Dijon , écrite au onzième
siècle , mais qui , dans ce passage , se réfère à une dona-
tion de biens en ce lieu faite à l'abbaye de * Saint-Bénigne
par le roi Gontran , au sixième siècle (6) ; elle nous trans-
porte par conséquent du Maine en Bourgogne. On trouve
encore la variante Campiniacus dans un diplôme donné par
Charles le Chauve à l'abbaye de Saint-Denis en 862 7);
il s'agit ici de Champigny-sur-Marne (Seine).
La vieille orthographe Campaniacus nous est offerte par
deux documents fort anciens bien que dépourvus d'au-
thenticité. Ce sont deux diplômes faux attribués l'un à
Clovis I*', l'autre à Dagobert P'. Dans l'un on veut parler
(1) Dom Bouquet, t. V, p. 737 C. Ôf. Sickel, Acta Karolinorum, t. II, p. 27,
n* 42. MabiUe, La, pancsLrte noire de Saint-Martin de Tours, p. 69, 106, 151,
221.
(2) Mommsen, Inscriptiones Helveticae, n" 187.
(3) C. /. L., V, 6439.
(4) Ibid., IX, 445; cf. VI, 14302-14304.
(5) Dom Bouquet, t. V, p 768 G ; cf. Sickel, Acta Karolinorum , t. II,
p. 67, n* 181.
(6) Dom Bouquet, t. III, p. 469 B.
(7) Tardif, Monuments historiques, p. 117, col. 2.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 209
de Champagné-Saint-Hilaire (Vienne) (1) ; dans Tautre , de
Champagnat (Creuse) (2).
Campanius est un gentilice qui n'est pas rare dans les
inscriptions latines. On 1q trouve en Gaule et hors de
Gaule. Nous citerons : Oampania Geminia, femme associée
à son mari dans l'inscription d'un monument funèbre dé-
couvert à Lyon (3); T. Campanius Priscus Maximianus,
consulaire dont la tombe tirée du sol de la cathédrale de
Sien est conservée dans cette église (4); C. Campanius
Victor, auteur d'une dédicace aux Matronae Gabiae qui
a été découverte dans les environs de Cologne (5) ; Cam-
panius Materninus qui éleva un monument à Mercure prés
de Blieskastel dans le Palatinat (6) ; C. Campanius Vitalis,
centurion de la cohorte « prima Batavorum miliaria » mort
en Dacie, comme l'atteste l'inscription de sa stèle funé-
raire (7); Campanius Âcutus, dont le nom se lit dans
une inscription du musée de Klagenfurt (8); L. Campa-
nius Celer, qui fit graver en l'honneur de Jupiter une
stèle aujourd'hui placée au sommet du clocher du monas-
tère de Reun près Graz (9); L. Campanius Verecundus,
légionnaire vétéran, dont la tombe a été trouvé près de
Rovigno en Istrie (10). Nous nous contenterons de ces huit
exemples dont le nombre pourrait être facilement augmenté.
Inutile de dire que Campanius est un dérivé de Campanus
^ui veut dire habitant ou originaire de la Campanie.
(l) « Curtem, quae Campaniacum vocatur. » Pardessus, DiplomaUj t. I,
p. 61. Pertz, Diplomatum iomus I, p. 121, ligne 47; cf. Longnon, Examen
géographique du tome /"' des diplomata, p. 16.
(^) « Campaniacum cum ecclesia. » Pardessus , Diplomala > t. II , p. 42.
Pertz, Diplomatum. tomus I, p. 159, ligne 23; cf. Longnon, Examen géogra-
phique^ p. 16.
(3) Boissieu, Inscriptions antiques de Lyon, p. 520.
(4) Mommsen, Inscriptiones confoederationis helveticae, n* 9.
(5) Brambacb, n* 560.
(6) Brambach, n* 1782.
P) C. I. L., III, 839.
(8) /Wd., m, 4779.
(9) Ibid,, III, 5443.
(10) Ibid., V, 8185.
14
210 LIVRE II. CHAPITRE II.
Il y a en France trente-huit communes dont le nom
s'explique par le primitif Campaniacus ou par le plus
récent Campiniacus, Sur ce nombre , vingt-quatre , — plus
de moitié, — supposent la forme la plus ancienne, Campa-
niacus; ce sont : trois Campagnac (Aveyron, Dordogne,
Tarn) ; huit Champagnac (Cantal, Charente-Inférieure, Cor-
rèze, Creuse, Dordogne, Haute-Loire, Haute-Vienne) ; deux
Champagnat (Creuse, Puy-de-Dôme, Saône-et-Loire) ; quatre
Champagne (Sarthe, Vendée, Vienne); un Champagneux
(Savoie) ; trois' Champagney (Doubs , Jura , Haute-Saône) ;
trois Champagny (Côte-d*Or, Jura, Savoie). Quatorze exi-
gent une forme latine Campiniacus, avec assimilation de la
seconde syllabe à la troisième. Ce sont : Campénéac (Mor-
bihan) , au neuvième siècle Kempeniac ou Kenpeniac (1) ;
deux Campigny (Calvados , Eure) ; un Champigné (Maine-
et-Loire) ; dix Champigny (Aube , Eure , Indre-et-Loire ,
Loir-et-Cher , Marne , Haute-Marne , Seine , Yonne).
Campagnan (Hérault) vient de Campanianus avec le suf-
fixe -anus au lieu du suffixe gallo-romain -octw. Un fundus
Campam,ianu$ est mentionné, au huitième siècle, dans une
charte de Ravenne (2).
Caniagus, propriété de Tabbaye de Saint-Martin de
Tours , suivant un diplôme donné par Charlemagne en
795 (3), est aujourd'hui Chennay (Indre-et-Loire), et ne
doit pas être confondu avec CaniacuSy aujourd'hui Cheny
(Yonne) , propriété de l'abbaye de Saint-Remy de Sens aux
termes d'un diplôme émané de Charles le Chauve en 853 (4).
L'n n'est pas mouillé dans ces deux mots : Chigné (Maine-
et-Loire) paraît plus régulier.
Canins a été le nom de deux poètes latins; l'un est cHé
(1) Cartulair.e de Redon, p. 81, 150; cf. Rosenzweig, Dictionnaire topo-
graphique du département du Morbihan, p. 34.
(2) Fantuzzi, Monumenti Ravennati, t. I, p. 62.
(3) Dom Bouquot, t. V, p. 737 ; cf. Sickel, Acta Karolinorum, U II, p. 27,
n» 42. MabiUe, La pancarte noire de Saint-Martin de Tours, p. 221.
(4) D. Bouquet, t. VIII, p. 523 E.
LA DÉSINENCE -I-AGUS AU MOYEN AGE. 211
par Varron , qui écrivait au premier siècle avant notre
ère (1) ; l'autre parait avoir écrit vers la fin du premier siè-
cle de notre ère, c'est Canins Rufus, originaire de Cadix
et dont Martial parle en admirateur et en ami (2). Cicéron,
dans ses traités De (h^atore et De ofjiciis nous fait connaître
un chevalier romain appelé C. Canins à la fois lettré et
homme d'esprit , mais peu habile en affaires et qui, dans
un voyage d'agrément à Syracuse , fut la dupe d'un ban-
quier (3). On rencontre aussi ce nom dans les inscriptions :
Canius Crescens, T. Canins Cinnamus, T. Canins Aeter-
nalis et L. Canius Cinna dans deux inscriptions de Hon-
grie (4). On a trouvé à Grado, près de Trieste, la stèle fu-
néraire de T. Canius Restitutus (5).
*Canio$ùus, Kagnoscus^ aujourd'hui Saint- Jacques-de-Ca-
gnosc, commune de Gonfaron (Var) (6), est le dérivé li-
gure correspondant au gaulois Caniacus. Le dérivé latin
est Canianus • on trouve dans une charte de Ravenne, au
neuvième siècle, un fwidus Canianus CI),
Cahanciagus =s * CarantiaciAs est dans un diplôme de
Tannée 901 , en faveur de l'abbaye de Conques , le nom
d'une villa située dans le Rouergue (8) ; c'est aujourd'hui
Cransac (Aveyron).
* Carantiaaus dérive du gentilice gallo-romain Carantius
étudié p. 132 , 134 , et qui dérive lui-même du nom gau-
lois Garantes. Dans le nord de la France , Carantiacus est
le primitif qui explique les six noms de communes : Ca-
rency (Pas-de-Calais) ; Charancieu (Isère) ; Charencey (Côte-
(1) De lingua. Ia(tna, livre VI, c. 81; édit. Mûller, p. 105.
(2) Epigrammes, livre III, 20, 64; livre VII, 69; cf. Teuffel, Geschichie der
mmischen Literatur, 3" édit., p. 736. De- Vit, Onomasiicorij t. II, p. 105.
(3) De oratore, livre II, c. 69, § 278. De officiis, Hvre III, c. 14, g 58.
(4) C. J. L., m, 4150, 4250.
(5) Ihid,, III, 8353.
(6) Cartulaire de Saint-Victor de Maraeillet 1. 1, p. 388; cf. Ghainosc, tbtd.,
p. 348.
(7) Fantuzzi, Monumenti Ravennati, 1. 1, p. 6.
(8) Desjardins, Cartulaire de l'abbaye de Conques, p. 274.
212 LIVRE II. CHAPITRE II.
d'Or); Charency (Jura), (Meurthe-et-Moselle); Charensat
Puy-de-Dôme. En comptant la forme méridionale Cransac,
(Aveyron) , nous trouvons sept noms de communes qui
s'expliquent par * Carantiacus (1). Il faut en distinguer
Charentay (Rhône) = * Carantacus.
Carisiacus , aujourd'hui Quierzy (Oise) , était souvent la
résidence des princes carlovingiens ; on a quatorze diplô-
mes de Gharlemagne, sept diplômes de Louis le Débon-
naire, datés de Quierzy (2). Un autre Carisiacus était situé
au comté de Brioude dans la viguerie d'Usson (Puy-de-
Dôme) (3).
Le gentilice qui explique ce nom de lieu se présente
avec deux orthographes différentes : on trouve Charisius et
Carisius. La première orthographe a été constatée dans le
nom de plusieurs personnages historiques. Tels sont :
T. Charisius, triumvir monetalis au temps de César; ses
monnaies ont été frappées vers les années 45 et 44 avant
J.-C; P. Charisius, legatus pro praetore d'Auguste en Lu-
sitanie, de l'an 25 à l'an 22 avant J.-C. ; pendant son gou-
vernement , il réprima les révoltes des Astures et des Can-
tabres. Nous aurions tort d'oublier le grammairien FI.
Charisius Sosipater dont il existe encore des écrits et qui
vivait vers la fin du quatrième siècle ou le commencement
du cinquième (4).
L'orthographe Carisius est celle que nous oflfrent les
inscriptions. On a trouvé à Coblentz la stèle funéraire
du vétéran T. Carisius Alba (5). Le musée d'Avignon pos-
sède une dédicace à Vulcain par le préteur T. Carisius (6).
Il existe à Die une dédicace à une divinité locale par
(1) Desjardins, C&rt. de l'abbaye de Conques, p. 57.
(2) Sickel, Acta Karolinorum, t. II, p. 462, col. 2.
(3) Cartulaire de SauxUlange, édit. Doniol, p. 136.
(4) De- Vit, Onomasticon, t. II, p. 248, 249.
(5) Brambach, 493.
(6) Uerzog, Galliae Narbonensis provinciae romanae historia, t. II, p. 85,
n* 403.
LA DÉSINENCE -I-ACU8 AU MOYEN AGE. 213
L. Carisius Serenus, sévir augustal (i). Les noms de L. Ca-
risius Faber se lisent dans une inscription d'Âdria, en
Italie (2).
Carraciacus est une localité dont , en 702 , le roi Chil-
debert III a daté un jugement (3) ; il ne faut pas la confon-
dre avec Carisiacus (4) et nous n'en connaissons pas la si-
tuation, peut-être Charcé (Maine-et-Loire).
Carraciacus^ orthographe de basse époque pour Caratia--
eus dont il y a un exemple chez Frédégaire (5), dérive du
gentilice Caratius. On a trouvé à Saverne le monument
funèbre d'un certain Caratius (6). Une autre inscription
a fourni les noms de Sex. Caratius Onesimus (7).
Catiacus, nom d'une villa située en Anjou et dont Tab-
baje de Priim est reconnue propriétaire par un diplôme de
Charlemagne donné en 797 (8), est probablement aujour-
d'hui Chacé (Maine-et-Loire).
Catius est un gentilice fréquent à Rome. Q. Catius,
édile deux cent dix ans avant notre ère, se fit remarquer,
dit Tite-Live, par les jeux magnifiques qu'il donna (9).
T. Catius Insuber , philosophe épicurien , écrivit quatre li-
vres «c de la nature des choses et du souverain bien »;
Cicéron, dans une lettre écrite Tannée 45 avant notre ère,
le cite et nous apprend qu'à cette date la mort de cet au-
teur était toute récente (10). Il y «eut plusieurs consuls du
(1) Hêrzog, idtd., t. II, p. 99, n* 465.
(2>C./. L., V, 2328; cf. VI, 14404, 14405, et De-Vit, Onomaeticon, t. II,
p. 248.
(3) Tardif, Monuments higtoriques, p. 36, col. 1; cf. PerU, Diplom&tum
imperii tomus primus^ p. 65.
(4) Longnon, Examen géographique du tome /*' des Diplomata, p. 16, 17.
(5) Frédégaire, 1. IV, c. 27; édit. Krusch, p. 31, 1. 27.
(6) Brambacb, 1862.
(7) De-Vit, Onomasticon, t. II, p. 127.
(8) Sickel, Acta Karolinorumy t. II, p. 59, n* 150.
(9) Tite-Utre, XXVII, c. 6.
(10) Voyez les textes réunis par Teuffel , Geschichte der rœmischen lite-
ratur, 3" édit., p. 301, et par De-Vit, Onomasticon, t. II, p. 181.
214 LIVRE II. CHAPITRE II.
nom de Catius : Ti. Catius Caesius Fronto, Tàn 96 de no-
tre ère; Â. Catius Sabinus, en 210 et en 216; Sex. Catius
Clementinus en 230 (1). Ce gentilice pénétra en Gaule, té-
moin le monument funèbre élevé à C. Catius Driburo,
utriculaire, c'est-à-dire fabricant d'outrés, à Lyon, par
Catius Pupus son fils et par Catia Silvina, sa femipe; oa
a trouvé ce monument près de Lyon (2). On a tiré du
sol même de cette ville la stèle funéraire élevée à la mé-
moire de Catia Severa (3). Le Musée de Nimes possède
Tépitaphe de Catia, fille de Catius (4). On a trouvé à Saint-
Paul-Trois-Châteaux celle de Catius TertuUinus (5).
Catulliâgus est le nom primitif d'une villa qui a pré-
cédé la ville de Saint-Denis, près Paris; cette villa a
changé de nom à cause de l'importance acquise par l'ab-
baye fondée au sixième siècle sous le vocable du premier
évéque de Paris (6). Une autre localité de même nom, dans
une autre partie de la France, appartenait à l'église de
Lyon; elle est appelée Caduliacus dans plusieurs diplômes
de la seconde moitié du neuvième siècle (7) ; dans ces do-
cuments , il s'agit de Chelieu (Isère).
CatuUius, d'où vient Catulliacus, est un gentilice rare, mais
dont il y a cependant quelques exemples. Ainsi , près de
^ Corno en Italie, en Tan 104 de notre ère, M. CatuUius Mercator
et M. CatuUitis Secundus élevèrent un monument aux dées-
ses dites Matronae (8). On conserve à Trêves le monument
(l)De-Vit, Onomasticon, t. Il, p. 185; cf. C. /. L., VI, 14589-14596.
(2) Boissieu, Inscriptions de Lyon, p. 403.
(3) Boissieu, tbid., p. 483.
(4) Allmer, Revue épigr&phique, t. I, p. 406, n' 451.
(5) Rev. épigr.^A. II, p. 25, n» 474.
(6) Nous trouvons l'orthographe C&tulliacus dans les Gesta Dagoberti
Francorum régis, c. 2; chez Dom Bouquet, t. II, p. 580 d, édition Krnsch,
p. 401, ligne 24, et dans une charte de Tannée 1154 (Tardif, Monuments his-
toriques, p. 278). Aimoin, De gestis Francorum^ livre IV, c. 17, écrit Catu-
liacus par une seule l (Dom Bouquet, III, 125 ej.
(7) 863-869, Cartulaire de l'église cathédrale de Grenoble, p. 71 ; 885, ibid.,
p. 11; 892, ibid,, p. 73.
(8) C. /. L., V, 5252.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 215
funèbre de M. Catullius Martialis (i). Le musée de Lyon
possède Tépitaphe d'une femme appelée CatuUia Ca-
milla(2).
Cauciactjs est l'endroit où fut enterré Childebert III,
mort en 711,(3). C'est aujourd'hui Choisy-sur-Aisne (Oise).
Bertrade, ou Berte, mère de Charlemagne, y mourut en
783 (4). Il y eut dans cette localité une abbaye de Saint-
Etienne (5) qui fut plus tard réunie à l'abbaye de Saint-
Médard de Soissons ; l'auteur de cette réunion serait ,
dit-on, Louis le Débonnaire ; mais le diplôme est faux (6).
Nous trouvons ce nom écrit Cautiacus dans un diplôme
sans date de Charles le Chauve (7).
Cauciacus , écrit avec un c à une date où c et ^ suivis à*i
se confondent , peut venir soit du gentîlice Caucius , soit
du gentilice Cautius, tous deux peu célèbres, mais connus
par les inscriptions. Le nom de M. Caucius se lit dans
une inscription de Bénévent (8) ; le village appelé Licalci ,
prés de Vitolano , non loin de Bénévent , paraît avoir été
fondé et possédé uù certain' temps par une gens Caucia
dont le plus ancien membre connu aurait été P. Caucius ,
citoyen romain (9) ; le monument funèbre d'A. Caucius Epa-
phroditus est conservé au musée de Naples (10). Quant à
l'orthographe Cautius, elle est celle de l'épitaphe du lé-
gionnaire vétéran L. Cautius, qui appartient au musée de
(1) Brambacb, n* 749.
(2) Boissieu, Inscriptions de Lyon, p. 505.
(3) Continuation de Frédégaire^ 2* partie, c. 104, chez Dom Bouquet, II,
4S3 b; dans rédition Krusch, p. 172. 1. 16, Cauciaecus avec ae ss a.
(4) Chronique abrégée chez Dom Bouquet, V, 29 c. Annales de Metz, ibid.,
3Ud.
(5) Liber translationis reliquiarum S, Sebastiani, chez Dom Bouquet,
VI, 323 a.
(6) Dom Bouquet, VI, 539; cf. Sickel, Acta Karolinorum, t. II, p. 422.
(7) Tardif, Monuments historiques, n* 212, p. 136.
(8) C. /. Z,., IX, 1784.
(9) /Wd., IX, 2131.
(10) Ibid.y X, 2245.
216 LIVRE II. CHAPITRE n.
Vienne en Autriche (i). Caucius et Gautius sont deux mots
différents dérivés Tun de caucus « vase à boire », Tautre
de cauttcs « prudent, adroit. »
Il y ,en France cinq villages du nom de Choisy = Cau-
ciacus ou Cautiaous , savoir : deux dans l'Oise , les trois au-
tres, dans la Haute-Savoie, Seine-et-Marne et la Seine.
Chaussy (Loiret), Chaussy (Seine-et-Oise), Choisey (Jura),
Chouzé-sur-Loire (Indre-et-Loire), Chouzy et Choussy
(Loir-et-Cher) , paraissent avoir la même origine. Choisies
(Nord) suppose un primitif Cauciacae ou CauHctcas, sous-
entendu domus ou villae.
L'ortographe Camiacus substituée à Cauciacus dans quel-
ques documents où il est question de Choisy-sur-Aisne est
relativement moderne (2). Il ne parait pas avoir existé de
gentilice Cousins. Causia^ fille d'Occus, qui fit élever dans
les environs de Klagenfurt , un monument funèbre à Ter-
tius, son mari, affranchi de César, est désignée par un nom
barbare, qu'il ne faut pas confondre avec un gentilice ro-
main (3).
Cauliaca , villa donnée à l'abbaye de Notre-Dame d'Au-
xerre, par l'évéque Vigile en 670, est aujourd'hui Chouilly,
portion du territoire de la ville d'Auxerre (Yonne) (4). Son
nom dérive du gentilice Caulius.
Caulius est le nom du sénateur romain L. Caulius Mer-
gus, un des meilleurs juges dont, nous dit Cicéron, on eut
conservé la mémoire (5). D'autres Caulius paraissent avoir
été moins célèbres. Tels sont : P. Caulius Coeranus, mar-
chand dont la tombe est venue de Pouzzoles au musée de
(1) C. /. L., III, 4463.
(2) Chronique de SBini Médard de Sotssonc, chez Dom Bouquet, III,
367 a. Cette chronique est du treizième siècle. Vie de saint Drausius, chez
Dom Bouquet, III, 610 c.
(3) C. /. L., III, 4987.
(4) Pardessus, II, 152; cf. Quantin, Dictionnaire topographique du dé-
partement de l'Yonne, p. 36.
(5) Pro Cluentio, c. 38, § 107.
LA DÉSINENCE -I-ACUB AU MOYEN AGE. 217
Naples(l); P. Caulius Restitutus, dont le nom est inscrit sur
un diplôme donné par Trajan en l'an 105 de notre ère (2);
P. Caulius Vitalis dont les noms se lisent sur le même di-
plôme et sur un autre donné par le même empereur deux
ans auparavant, etc. (3).
Chaulhac (Lozère) , Choilley (Haute-Marne) , et Chouilly
(Marne) , nous offrent probablement des formes modernes
d*un plus ancien Cauliaous.
Gblsiagus , nom d'une villa mentionnée dans une do-
nation à Saint-Germain-des-Prés en 849 (4), dérive de
CeUius.
Celsius est un gentilice obscur qu'on trouve dans diver-
ses parties de Tempire romain. Un grand nombre de lam-
pes recueillies à Naples ou aux environs et en Sicile, por-
tent la signature du fabricant qui s^appelait Celsius (5). Un
certain Celsius Aprilis servit dans la cavalerie au camp de
Lambèze avec grade à'optio, c'est-à-dire de lieutenant (6).
A Tarragone en Espagne , Celsia Flavina est une mère qui
élève une tombe à sa fille (7). A Strasbourg, T. Celsius Vic-
torinus apparaît dans une inscription religieuse de Tan 202
de notre ère (8).
CiPiLiACus , villa située dans les environs d'Amiens fut
donnée à l'abbaye de Corbie par le roi Clotaire III, en
659 (9).
Son nom dérive de Cipellius. Cipellius, gentilice connu
(1) c. /. L., X, ld31.
(2) tbid., t. m, p. 865.
(3)/6id., t. III, p. 864, 865; cf. VI, 14612-14622.
(4) Longnon, Polyptyque de l'abbaye de Saint-Germain des Prés, p. 153.
(5) C. /. L., X, 8053, 46.
(6) /5id., VIII, 2568, 18.
(7) /Wd., II, 4119.
(8) Orelli-Henzen, 6778; Brambach, 1883.
(9) Pertz, Diplomatum imperii tomus primus, p. 37, ligne 22 ; Pardessus,
D4>I<mula, II, 115,
218 LIVRE II. CHAPITRE II.
par une inscription (1), est lui-même un dérivé de Cipius,
nom beaucoup plus fréquent et porté notamment par un
personnage qui avait fourni aux Romains le type légendaire
du sommeil simulé; d*où le proverbe « non omnibus
dormio (2). »
Clamenciacus , pour Clementiacus , est le nom d'une vi/to
donnée à Tabbaye de Gigny, par Raoul, roi de Bourgogne,
en 903 (3).
Il dérive du gentilice Clementius. Clementius Silvius
dédia au génie de l'empereur Gallien une stèle aujourd'hui
conservée au musée de Pesth (4).
* Clariacus qui explique le terminus Clariacensis d'un di-
plôme de l'année 667 (5) aujourd'hui Cléry (Loiret) comme
nous l'apprend M. Longnon, dérive de Clarius, gentilice
rare, dont on n'a trouvé jusqu'à présent qu'un exemple
certain dans les inscriptions et qui a donné le surnom dé-
rivé Clarianus (6).
Clérieux (Drôme), Clarei^ au douzième siècle, est un
ancien Clariacus (7).
Clippiacus ou Clipiacus est l'ancien nom de Clichy, près
Paris. Le plus ancien document où ce nom de lieu figure
est un diplôme du roi Dagobert P% qui remonte à l'année
631 ou 632. Nous ne pouvons savoir laquelle des deux or-
thographes , par un seul p ou par un double p , le scribe
avait adoptée. Le commencement du mot n'est plus lisible.
Les éditeurs les plus récents ont restitué [Cli]piaco^ avec
(1) De- Vit, Onomasticon, t. Il, p. 288.
(2) Voy. De-Vit, Onom&sticon, t. II, p. 288; cf. C. /. L., VI, 14832, 14833,
(3) D. Bouquet, IX, 692 D.
(4) C. /. L., III, 4424.
(5) Pardessus, Diplomata, II, 143.
(6) De-Vit, Onom&sticon^ t. II, p. 297, col. 2.
(7) GhevaUer, Cartulaire de l'abb&ye de Saint-Chaffre, p. 149.
LA DÉSINENCE -I-AGUS AU MOYEN AGE. 219
un seul p. Peut-être faudrait-il restituer [Clip]piaco (1) avec
deux p.
Nous trouvons le double p dans un diplôme de Chilpé-
rié II, de Tannée 717, où le nom qui nous occupe est écrit
trois fois Clippiaco (2). C'est l'orthographe de la chronique
dite de Frédégaire , qui nous apprend qu'en l'année 625 ,
Dagobert P', sur l'ordre de son père auquel il était associé et
allait bientôt succéder, vint à Clichy près de Paris et s'y
maria (3). Deux ans plus tard, suivant la môme chronique,
Clotaire tint à Clichy une assemblée des grands et des évo-
ques de Bourgogne et de Neustrie (4). Dans ces deux cir-
constances, on lit chez le chroniqueur comme dans le di-
plôme, Clippiaco 9 par deux p.
Ces deuxp sont réduits à un 1® dans deux diplômes, l'un
de Tannée 832, l'autre de l'année 862, émanés, l'un d'Hil-
duin, abbé de Saint-Denis (5), l'autre de Charles le
Chauve (6) ; 2" dans deux passages de la chronique de Fré-
dégaire et dans un passage du Gesta regum Prancœ^m (7).
La môme alternance entre le p simple et le double p
nous est offerte par plusieurs documents relatifs à un au-
tre Clippiaous ou Clipiaous siiué dans le diocèse de Lyon (8).
M. Longnon nous fait observer que le double p s'est main-
(1) Tardif, Monuments historiques ^ p. 6. Pertz, Diplomatum imperii to-
musprimus, p. 16.
(2) Tardif, Monuments historiques, p. 42, col. 1 ; Pertz, Diplomatum im-
perii tomus primus, p. 77, lignes 33, 34, 41.
(3) Frédégaire, c. 53; chez Dom Bouquet, t. H, 434 a; Krusch, Scripto-
res rerum merovingicarum , t. II, p. 147, 1. 1; cf. c. 78, ibid,, p. 160, 1. 19,
22. Le territoire de Clichy était alors plus étendu qu*aujourd*hui et com-
prenait le territoire de Saint-Ouen, où se trouvait le palais des rois.
(4) Frédégaire, c. 55; chez Dom Bouquet, t. II, p. 435 a; Krusch, Scrip-
tores rerum merovingicarum, t. II, p. 118, 1. 12.
(5) Tardif, Monuments historiques^ p 85.
(6) Tardif, i nd., p. 117.
(7) Frédégaire, livre IV , c. 78 : Krusch, Scriptores rerum merovingica^
rum, t. II, p. 161, 1. 2; c. 83, ibid., p. 163, 1. 16; Clepiaco ou CHpiago,
dans le Liber historiae Francorum, c. 47, ibid., p. 322, 1. 1-2, etc.
(8) Voyez le Gartulaire d*Ainay , publié par Aug. Bernard , Car tu/aire de
Vsbbaye de Savigny, t. II ; Clippiacus, p. 261 ; Clippiacensis, ibid, ; Clipiacus^
p. 614, 616, 617, 621, 671, 674, 675, 676; cf. 1075,
220 LIVRE II. CHAPITRE II.
tenu dans l'orthographe moderne du nom de cette localité,
aujourd'hui Cleppé (Loire) ; cette forme justifie la vieille or-
thographe Clippiacus par deux p, car Clipiacus par un seul
p aurait donné Clevé. On n*a jusqu'ici trouvé qu'un seul p
dans la plus ancienne forme du nom de Clapiers (Hérault),
Clipiagum au dixième siècle (1).
On trouve les deux variantes dans l'orthographe du gen-
tilice romain dont ce nom de lieu est dérivé. On conserve
à Rome les épitaphes de L. Cleppius et de Cleppia (2). Le
nom de Q. Cleppius se lit dans une inscription de Venosa
en Campanie (3). On a trouvé dans la même région le mo-
nument funèbre de M. Cleppius Maximinus (4). Les deux p
persistent et nous trouvons déjà Vi de la première syllabe
de Clippiacus dans le nom de femme dérivé Clippiana, ins-
crit deux fois sur un monument funèbre de Bénévent (5).
C'est l'orthographe la plus fréquente des textes mérovin-
giens relatifs à Clichy. Mais des inscriptions romaines,
d'accord avec l'autre notation du nom de la même localité,
nous offrent aussi l'orthographe Clepius avec un seul p.
On peut citer une stèle funéraire de Cittanova en Istrie,
où ce gentilice apparaît quatre fois (6). Deux inscriptions
gardent le souvenir de C. Clepius Sodalis à San Séverine
en Ombrie (7).
CocciACus est un nom de lieu mentionné dans un acte
faux, mais qui existait dès le neuvième siècle et qui était
attribué à Louis le Débonnaire (8). On trouve la variante
(1) Eug. Thomas , Dictionnaire topographique du département de VHé-
rault^ p. 46.
(2) C. /. L., VI, 15679, 15680.
(3) Ibid,, IX, 465.
(4) Ihid., IX, 1434.
(5) Ibid,, IX, 1792.
(6) Ibid., V, 381.
(7) Ibid., IX, 5597, 5598.
(8) Dom Bouquet, t. VI, p. 631 a; cf. Sickel, Acta Karolinorum, t. U,
p. 398, n» 5.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 2i\
CocHacus dans un diplôme de Charlemagne en 802 (1). Ces
' diplômes étant donnés en faveur de la cathédrale du Mans,
il s'agit de la même localité dans tous les deux, et cette lo-
calité peut être Cossé-en-Champagne ou Cossé-le-Vivien ,
deux communes du département de la Mayenne. Une mon-
naie mérovingienne nous offre les orthographes Cociaco^
avec un seul c , et Coccaco sans i. Mais on ignore à quelle
localité ces légendes monétaires peuvent se rapporter (2).
Cocciactis et Coctiacus dérivent du gentilice Coccius.
Cocceius est plus fréquent que Coccius ; c'est un genti-
lice romain fort connu, et qui, entre autres personnages no-
tables, a été porté par l'empereur Nerva. Coccius semble
être une variante de Cocceius. On conserve à Bene en Pié-
mont, le monument funèbre d'un affranchi appelé L. Coccius
Stacius et de sa femme, Coccia Erotis (3). L'orthographe
Cocius avec un seul c a été préférée dans une inscription
de Canosa où se lisent les noms de l'affranchi C. Cocius
Chresimus (4) , et dans les marques d'un tuilier d'Italie et
d'un potier de Gaule ; au génitif Coci (5).
CoMUGus était en 802 une villa de l'église du Mans (6).
Il vaudrait mieux écrire * Commiacus , mot dérivé de Com-
mius. Commius fut le nom d'un roi des Atrebates, d'abord
ami des Romains , qui ensuite rentra dans le parti natio-
nal (7). Le même nom , avec l'orthographe Commios , pas
encore latinisé, se lit sur des monnaies, tant de Gaule que
de Grande-Bretagne (8). Sous l'empire romain, ce nom de-
(i) Dom Bouquet, V, 768 e, cf. Sickel, Acla, K&rolinorum , t. II, p. 67,
n« 181.
(2) A. do Barthélémy , dans la Bibliothèque de l'Ecole des chartes ,
t. XXVI, p. 454, n- 227, 228.
(3) C. /. L., V, 7692.
(4) Ibid.y IX, 370.
(5)/btcf., V, 8110, 428. Boissiou, Inscriptions antiques de Lyon, p. 434,
n" 38, 39. Schuermans, Sigles figulins, n» 1501.
(6) Dom Bouquet, V, 769 a. Sickel, Acla Karolinorum, t. II, p. 67, n* 181.
(7) Voir plus haut, p. 134, 147, 148.
(8) À. de Barthélémy, dans la Revue celtique, t. I, p. 294.
222 LIVRE II. CHAPITRE II.
vint un gentilîce. Le nom de C. Commius L. filius se lit
dans une inscription d'Istrie (1) et celui de T. Commius
sévir augustalis, dans une inscription de Manduel prés de
Nimes (2).
Le Comiacus qui appartenait à l'église du Mans paraît
être Congé-sur-Orne (Sarthe). C'est par Commiacus que
s'explique Comiac , nom d'une section de la commune de
Logrian et Comiac-de-Florian (Gard).
Crisciacus est le nom d'un palais des rois mérovin-
giens (3) et d'une localité donnée par le roi Childéric II,
vers l'année 670 à Lambert , abbé de Fontenelle (4). Il dé-
rive de Crixsius. Crixsius était, en 236, le gentilice de
Crixsius Adnamatus , l'un des hastiferi de la cité des Mat-
tiaci sur la rive droite du Rhin , comme nous l'apprend
une inscription du Musée de Mayence (5). Deux inscrip-
tions de Lyon nous ont 'conservé les noms de M. Crixsius
Antonius et de sa fille, Crixsia Secundina (6). Ce gentilice
est dérivé de Crixsus, surnom, ou nom servile qu'on a
trouvé inscrit sur les murs de Pompéi (7). Il a été rendu
célèbre par un gladiateur de Capoue, d'origine gauloise, qui
fut un des chefs des esclaves révoltés contre Rome et qui
périt en combattant, l'an 71 avant notre ère (8).
C'est à Criœsiacus, venu de Crixsius, que paraissent re-
monter dix noms de communes, savoir : cinq Crécy, deux
dans TAisne et un dans chacun des trois départements
(1) c. I. L., v, 425.
(2) Herzog, GaHiae Narbonensis histori&f t. II, p. 52, n* 253.
(3) Diplômes : de Glotaire III, 662 (Pardessus, Diplomata, t. II, p. 123;
Pertz, p. 36) ; — de Thierry, III, 687 (Pardessus, p. 203 ; Pertz, p. 51); - de
Childebert III, 709 (Pertz, p. 67; Tardif, p. 36), qui nous offre, comme
Frédégaire (Krusch, Scriptores rerum merovingicarum, t. II, p. 169, 1. 15),
la variante orthographique Crisciaecus, etc.
(4) Vte de saint Lamberty chez Dom Bouquet, III, 585 a.
(5) Brambach, n* 1336.
(6) Boissieu, Inscriptions antiques de Lyon^ p. 507, n" 34 et 35.
(7) C. J. L., IV, 1916.
(8) Tite-Live, Periochae, 96. Eutrope, livre VI, c. 7. Orose, livre V, c. 25
Cf. De-Vit, Onomasticon, t. II, p. 501.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 223
d'Eure-et-Loir, de la Somme, de Seine-et-Marne; Cressac
(Charente); Cressey, (Côte-d'Or); et trois Cressy (Saône-et-
Loire, Seine-Inférieure, Somme. M. Longnon me rappelle
que le Crisdacus où se trouvait un palais des rois méro-
vingiens est Crécy-en-Ponthieu (Somme).
Crispiacus est le nom d'un d'un locus situé aux envi-
rons de Grenoble et donné à Tabbaye de Saint-Jean-de-
Maurienne en 739 (1). Il y avait près de Laon un autre
* Crispiacus d'où vient le nom de la Crispiacensis finis où
Amand, évêque d'Utrecht, avait une vigne en 664 (2).
Crispiacus vient de Crispius ; Crispius est le gentilice : de
C. Crispius Hesperio, sévir de Brescia (3); de M. Crispius
Firmus dont la stèle funéraire est conservée au séminaire
de Suze (4); de Crispius Saturninus, dont une dédicace à
Jupiter a été trouvée en Hongrie (5); de L. Crispius, dont
les noms au génitif L. Crispi ont été écrits sur un
vase recueilli à Windisch, en Suisse, Tantique Vindo-
nissa (6); de T. Crispius Antiquus, dont le monument funè-
bre a été découvert à Domessin, Savoie (7); de T. Crispius
Reburrus, dont le nom est gravé sur Tampbithéâtre de Ni-
mes (8), etc.
Il y a en France trois communes du nom de Crépy
(Aisne, Oise , Pas-de-Calais), et une commune de Crespy
(Aube) ; Crépy (Aisne) paraît être la finis Crispiacensis du di-
plôme de 664 cité plus haut. Comparez Crespian (Gard) ,
dont la désinence -an vient de -anus,
Crispiniacus est le nom d'une villa qui fut donnée
(1) Pardessus, Diplom&ta, t. II, p. 376.
(î) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 13.3.
(3) C. /. L., V, 4418.
(4) Ibid^ V, 7283.
(5) Ibid., III, 1030.
(6) Mommsen, Inscriptiones helveticae, n* 352, 118.
(7) Allmer, Inscriptions antiques de Vienne, III, p. 215.
(8) Allmer, Revue épigr&ghique, t. I, p. 374, n* 417.
224 LIVRE II. CHAPITRE II.
comme réparation de Tinsulte commise envers saint Judoc
en violant sa sépulture ; c'était probablement vers la fin du
septième siècle (1) ; l'auteur de la donation était un duc
de Ponthieu. Ce nom de lieu dérive du gentilice Crispi-
nius.
Crispinius Félix éleva à sa femme un monument funè-
bre qu'on a trouvé à Salone (2). On a découvert près de
Klagenfurt et transporté dans cette ville la stèle funéraire
de C. Crispinius Rufus (3). Sex. Crispinius Nigrinus est
Fauteur d'une dédicace à Mars Caturix , trouvée près de
Genève (4).
Il n'y a pas en France de communes qui portent le nom
de Crépigny ou Crespigny. Crépigny est un. écart de la
commune de Caillouel-Crépigny dans le département de
l'Aisne; Crespigny fait partie de la commune de Saint-
Jean-le-Blanc (Calvados).
Croniagus apparaît dans un diplôme faux du pape Jean III,
pour l'abbaye de Saint-Médard de Soissons (5).
Cronius, d'où Croniacus dérive, est un gentilice rare,
porté par M. Cronius Sp. f[ilius] dans une inscription de
Lucera en Italie (6), et par Cronius Eusebius dans une ins-
cription de Rome qui date de l'an 399 de notre ère (7).
C'est un nom grec chez Pline quand cet auteur nomme
Cronius parmi les plus célèbres graveurs de pierres pré-
cieuses (8). On connaît plusieurs exemples du nom d'homme
Kprfvtoç dans les textes grecs ; c'était originairement un nom
divin, un de ceux de Zeus, fils de Crcaos.
De Croniacus peut venir le nom de Crogny, commune
(1) Vita Sancti Judoci, c. 15; chez Dom Bouquet, III, 521.
(2) C. J. L., III, 2238.
(3) Ibid., III, 5074.
(4) Mommsen, Inscripliones helvetic&e^ n* 70.
(5) Pardessus, Diplomataf t. I, p. 122.
(6) C. /. L., IX, 848.
(7) Ibid., VI, 1715.
(8) Histoire naturelle, Uvre XXXVII, c. 4, { 8.
T-wT
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 225
des Loges-Margueron (Aube), et celui de Crognac com-
mune de Saint- Allier (Dordogne).
CuRCiACus ou Cursiacus. La première orthographe est
celle d'un diplôme faux de Clovis II, qui daterait de
644 (1) ; la seconde est celle d*un diplôme également faux
de Dagobert I*"' , qui daterait de 636 (2). Il s'agit de Cour-
eais (Allier) (3) ; la bonne orthographe serait Curtiacus par
un t\ mais les textes de Tépoque carlovingienne rempla-
cent ce t par un c. Tel est le diplôme donné par Charle-
magne en 775 pour confirmer l'établissement de la mansô
canoniale à Saint-Martin de Tours (4) ; le Curciacus dont il
s'agit dans ce document parait être Curçay (Vienne) (5). Tel
est aussi l'acte de la donation faite par Amalric à Saint-Mar-
tin de Tours en 841 (6) ; le Curciacus mentionné dans ce
document est aujourd'hui Courçay (Indre-et-Loire) (7).
Curciacus , ou mieux Curtiacus , vient de Curtius , gen-
tilice romain célèbre qui remonte à la période légendaire :
on connaît les récits fabuleux qui parlent d'abord du sa-
biu Curtius Mettius , ou Mettius Curtius , mort dans une
bataille contre le roi Romulus, huitième siècle avant notre
ère, à l'endroit qui fut plus tard le forum romain (8), puis
du jeune romain M. Curtius qui , en l'an 362 avant J.-C,
se serait patriotiquement précipité dans un gouffre mena-
çant ouvert au milieu du forum parla colère des dieux (9).
(1) Pertz, Diplomaium imperii tomus primus, p. 180, ligne 47. Pardessus,
Diplomata, t. II, p. 81.
(2) Pertz, Diplomaium imperii lomus primus^ p. 159, ligne 36. Pardessus,
Diplomata, t. Il, p. 81.
(3) Longnon, Examen géographique du lome premier des Diplomala im-
perii, p. 1.
(4) Dom Bouquet, V, 737 6; cf. Sickel, Acla Karolinorum , t. II,' p. 27,
n- 42.
(5) Mabille, La pancarte noire de Saint'Marlin de Tours, p. 223; cf. 69, 151.
(6) Martene, Thésaurus novus anecdolorum, t. I, col. 33 6.
(7) Habillo, La pancarte noire de Sainl-Marlin de Tours ^ p. 223; cf. 81,
155, 156.
(8) Tite-Live, livre I, c. 12.
(9) Tite-Live, livre I, c. 12; livre VII, c. 6.
15
226 LIVRE II. CHAPITRE IL
G. Curtius Filo fut consul Tan 446 avant J.-C (1). On
trouve plusieurs exemples de ce gentilice vers la fin de la
république et sous Tempire. C'est ainsi que dans les œu-
vres de Cicéron on voit apparaître : le préteur C. Curtius
Peducaeanus, le sénateur C. Curtius; le tribun militaire
M. Curtius Postumus, ami de César et qui fut assez ambi-
tieux pour prétendre au consulat ; Cicéron s'en indigne
dans une lettre à Atticus (2). Nous citerons aussi le séna-
teur Curtius Montanus , contemporain de Néron et de Ves-
pasien et connu par le témoignage de Tacite (3) ; enfin le
'plus célèbre de tous, Q. Curtius Rufus, qui vivait dans la
seconde moitié du premier siècle de notre ère et qui écri-
vit une histoire d'Alexandre.
Outre Courçais et Courçay, il y a en France quatre
communes dont le nom semble représenter un ancien Cur-
tiacus ; ce sont autant de Courcy (Calvados, Loiret, Man-
che, Marne).
De la forme latine correspondante Curtianus, un exem-
ple est donné, vers Tan 700, par une charte de Ravenne
où est mentionné un fundus Curcianus^ lisez Curtianus (4).
CusiACus, nom d'une forêt dans un diplôme faux de
Dagobert P"' qui daterait de Tannée 633 (5), est dans un
diplôme du roi Eude en 893, un fisc royal donné par
ce prince à l'abbaye de Saint-Médard de Soissons (6;.
En 936 , dans un diplôme de Louis d'Outremer , c'est une
propriété de l'église cathédrale d'Autun (7). Cusiacus vient
de Cusius.
Cusius est un gentilice romain dépourvu de célébrité,
(1) Tite-Live, livre IV, c. 1. Dc-Vit, Onom&siicon^ t. II, p. 519.
(2) Cicéron, Ad Aiiicum, XII, 49.
(3) Tacite, Annales, XVI, 28, 29, 33; Histoires, IV, 40, 42.
(4) Fantuzzi, Monumenti Ravennati, t. I, p. 21.
(5) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 27. Pertz , Dip. im. t, primus, p. 152,
ligne 20.
(6) Dom Bouquet, t. IX, p. 460 d.
(7) Dom Bouquet, IX, 584 d.
LA UL'mntlItGE -1-AUU8 AU MOYEN AGE. 227
mais connu par les inscriptions. Ainsi , on a trouvé : en
Hongrie le monument funèbre de Cusius Callistio (1) ; à
Turin , les tombes de T. Cusius Rufus (2) , de C. Cusius
Cavisius et de Q. Cusius, frère de ce dernier (3). Le nom
d'une femme qui avait le même gentilice, CusiaHil[ara] se
lit dans une inscription du musée de Naples qui provient
(le Capoue (4).
Le Cusiacus du diplôme du roi Eude est Cuizy-en-Almont,
(.\isne) (5). D'autres noms de communes peuvent s'expli-
quer par un primitif Cusiacus. Ce sont : Cuisy (Meuse) (6);
Cuisy (Seine-et-Marne) ; Cusey (Haute-Marne); Cuzac(Lot).
DiTiAGUS , nom d'une villa donnée à l'abbaye de Wissem-
bourg, en Alsace, en 713 (7), est écrit Disciacu dans un au-
tre document de la même date et concernant la même
donation (8). Le nom primitif est vraisemblablement' De-
ciacus , que l'on doit reconnaître aussi dans le Disiacus
d'une charte émanée eu 672 de Nivard , archevêque de
Reims, pour l'abbaye d'Hautvillers (9) ; ce Disiacus est au-
jourd'hui Dizy (Marne) (10).
Decius est un gentilice romain bien connu; les plus cé-
lèbres de ceux qui le portèrent sous la république sont deux
P. Decius Mus, l'un consul en l'an 340 avant notre ère,
l'autre fils du précédent et quatre fois consul , la première
fois en 312, la dernière en 295, fameux pour avoir — tous
deux, dit-on, — en des circonstances désespérées, assuré la
victoire à leur armée par leur mort, en exécutant solcnnel-
(1) c. 1. L., m, 4330.
(2) Jbid., V, 7027.
(3) Ibid., V, 7028.
(1| ma., X, «îl.
(5) Matton, Dfcfionnaire lopographique du département de l'Aisne, p. 90.
(5) Voyez Licnarc] , Dictionnaire topographique du département de la
McuM, p. 64.
0) Pardessus, Diplomafa, t. II, p. 439.
(8)/bt((., (. II, p. 437.
(9) Ibid., t. II, p. 129.
(10) LoDgDon, Elude sur les pafff de la Gaule, 2* parCic, p. lî.
228 LIVRE IL CHAPITRE IL
lement les prescriptions du cérémonial romain sur la « de-
votio (1). » Ce gentilice pénétra en Gaule. C'est ainsi que
dans une inscription de Suisse, remontant à Tan 8 de notre
ère, on a trouvé les noms de P. Decius Esunertus (2). Une
inscription de Savoie rappelle la mémoire de Sex. Decius,
tribun militaire, contemporain de Tempereur Tibère qui
mourut Tan 37 après J.-C. (3). Une brique, trouvée à Vienne
(Isère), porte la marque d'A. Decius Alpinus (4). La variante
Deccius par deux c nous est offerte à Cologne par la tombe
du légionnaire C. Deccius, fils de Lucius (5), et à Lyon par
celle de Q. Deccius Verecundus (6).
DociACus , une des villae de Tabbaye de Saint-Martin de
Tours en 775 (7), est aujourd'hui Doussay (Vienne) (8).
Docius Elaesi, dans une inscription d'Espagne transférée
au musée de Berlin, est le nom d'un personnage qui
n'avait pas de gentilice (9). Mais une inscription du musée
de Manheim nous donne la variante Doccius par un double
c, employée comme gentilice par le sévir Doccius Aprissus
dans une dédicace à Mercure et à Rosmerta (10).
Une inscription d'Italie fait connaître le gentilice Dotius
de L. Dotius Antiochus et de Dotia Jucunda, tous deux
affranchis (il). La variante Dottius par deux t apparaît dans
le gentilice de Cn. Dottius Plancianus , un des principaux
magistrats d'Antioche de Pisidie , personnage dont deux
(1) Gela ne paraît certain que pour le second des deux.
(2) Mommsen , Inscriptiones helvetic&e , n* 80. Allmer , Inscriptions de
Vienne, t. III, p. 246.
(3) AUmer, Inscriptions de Vienne, t. II, p. 210.
(4) Ibid., t. IV, p. 226.
(5) Brambach, n" 377.
(6) Boissieu, Inscriptions antiques de Lyon, p. 508.
(7) Dom Bouquet, V, 737 c. Cf. Sickel, Acta K&rolinorum , t. II, p. 27,
n-42.
(8) Mabille, La pancarte noire de Saint-Martin de Tours, p. 224; cf. 69, loi-
(9) C. J. L., II, 2633.
(10) Brambach, n» 1711.
(11) C. /. L., X, 5673.
'i'T
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 229
inscriptions nous ont conservé la mémoire (1). Le Dociacus
carlovingien peut avoir été primitivement appelé Docciacus^
Dotiacus ou DoUiacus.
Telle est Forigine probable des noms des communes de
Doucey (Marne), Doucy (Savoie), Doussay (Vienne). Douzy
(Ardennes).
DoMiTiACus est le nom de fundus d'où dérive Tadjectif ca-
ractéristique de Vager Domitiacinsis mentionné en 670, dans
une charte de Vigile, évéque d'Auxerre (2). Domitiacus
vient de Domitius.
Domltius est un célèbre gentilice romain. La gens Do-
mitia, quoique plébéienne, est une des plus anciennes de
Rome et une de celles qui ont obtenu le plus d'honneurs.
Une de ses branches , celle qui portait le surnom d*Aeno-
barbus, a donné à Rome l^neuf consuls, de Tan 192 avant
J.-C. à l'an 31 ap. J.-C; 2® vingt-trois ans plus tard, l'em-
pereur Néron, d'abord appelé L. Domitius Aenobarbus, et
qui, adopté par son beau-père Claude, prit les noms de son
père adoptif . Dans une autre branche , celle des Calvinus ,
on compte quatre consuls, de l'an 332 à l'an 124 avant
J.-C. (3). Ce nom pénétra en Gaule; c'est ainsi qu'à Nimes
vers Tan 14 avant notre ère, naquit Cn. Domitius Afer qui
obtint, à Rome, une certaine célébrité comme orateur, qui
fut élevé à la préture l'an 26 de J.-C, au consulat l'an 39,
et qui vieux, sans enfants , mourut d'un excès de table ,
au milieu d'un festin, en l'an 59 (4). Les inscriptions de la
Gaule mentionnent un certain nombre d'autres Domitius
moins connus, tels que : Domitius lias dont la tombe est
conservée au musée de Lyon (5), P. Domitius Didymus,
(1) C. /. L, III, 296, 297.
(2) Pardessus, Diplom&ta, II, p. 154.
(3) De-Vit, Onomasticon, t. II, p. 651-655.
(4) Voir sur lui les textes réunis par De-Vit, Onomasticon , t. II, p. 650;
cf. Jos. Klein , Fasti consulares inde a Caesaris nece usque ad imperium
Diocletiani, p. 31.
(5) Boissieu, Inscriptions de Lyon, p. 508.
230 LIVRE II. CHAPITRE II.
auteur d'une dédicace à la déesse Aventia trouvée à Mun-
chweiler en Suisse (1), et M. Domitius Magnus qui élevaeii
l'honneur de Mercure un monument conservé à Yverdun .
aussi en Suisse (2). On a trouvé à Turin la tombe de L. Do-
mitius Virilis, originaire de Vienne (Isère) (2).
L'introduction de ce gentilice en Gaule remonte peul-
être à Cn. Domitius Aenobarbus, consul l'an 122 avant
notre ère, qui vint en Gaule et y resta comme proconsul
l'année suivante ; il remporta la victoire de Vindalium sur
les Gaulois et il triompha en l'an 120 (4).
Le nom de Donzy , porté par une commune du départe-
ment de la Nièvre et par deux communes du département
de Saône-et-Loire ; celui de Donzac (Gironde, Tani-el-
Garonne) ; celui de Donzacq (Landes), paraissent s'expliquer
par un primitif Domiciacus.
De la forme latine correspondante, Domitianus, un exem-
ple nous est fourni vers l'année 700, par une charte df
Ravenne où est mentionné un fundus Domicianus, lisez
Domitianus (5).
Drusciacus pour Drussiaeus est le nom d'une possession
de l'abbaye de Saint-Riquier au diocèse d'Amiens, suivani
deux diplômes, l'un de Louis le Débonnaire , qui remonlo
à l'année 830 (6) ; l'autre , de Charles le Chauve , en 844 !7i.
Nous ignorons son nom moderne, mais on peut recon-
naître un ancien Drussiaeus dans Droussac, commune <k-
Lissac (Haute- Loire), l>ntssiacus dérive de Drussius.
(1) Mommsen, Iriêcriptionei helueticue, n° iii.
(2) Ibid., a' 138.
(3) AUmor, Inscriptiom de Vienne, t. II. p. 140.
(4) Les teites relatifs à cotte partie do notre histoire sont indiqués et dis-
cutés dans lu savante Géographie historique et adminislratiae de U Gaiilf
romaine, que nous devons à M. Ernest Desjardins, t. II, p. 273-280: et, Lc-
bcguG, Fastes de la Narbonnaine, p. 6-9.
(5) Fantuzzi, Monumenli Racennati, t. I, p. 2!.
(G) Dom Bouquet , VI , 563 a ; cf. Sickel , Acla Karolinoriim , t. II, p. I«,
(7) Dom)Bouquet, VIII, 466 E.
LA DESINENCE -I-ACU8 A,U MOYEN AGE.
Drussius au masculin, Drussia au féminin, appara
comme gentilices dans une inscription de Venosa, e
lie (1). On reconnaît Dru3sius, bien que mutilé, dan
autre inscription de la même localité (2). Ailleurs, ci
liliee est écrit avec une seule s, Drusius : par exe
daDs une inscription de Cilly en Styrie (3); sur le i
ment funèbre de M. Drusius Philodamus à Larino (4):
i'icscription de la tombe élevée par Drusius Valens
fille et qui est conservée au musée de Naples (5).
Drussius ou Drusius dérive de Drusus , cognomen
geas Livia. Drusus est d'origine barbare, et sa for
plus ancienne est Drausus (6). De là vient la variante
sius, nom d'un évéque de Soissons qui vivait au sep
siècle et dont une vie nous a été conservée (7). Drausiu:
s'écrire plus anciennement par deux s, et sous cette
ce mol constitue le second terme du composé Con-(
sius que l'on dit avoir lu dans une inscription de la Gi
Bretagne (8). Condraussius dérive d'un thème, Con-dr
qui est probablement identique à celui du nom des
dntsi, peuple de Gaule, chez César (9).
PmiACus, villa dont Charles Martel data une cbai
717 (10), porte un nom dérivé de Pidius.
Fidius est le gentilice de deux personnages romaini
l'un, C. Fidius, n'a échappé à un complet oubli qu'
portant accusateur de M. Saufeius, cinquante-deu
(1) c. I. L., IX. 505.
i^lbid., IX, 506.
|3) Jbid., III, 5170.
(*) Ibid., IX, 75!.
(5)Il.(d., X,Î701.
IB] 1 Drusus, hostiuQi duce Drauso cominus trucidato, sîbi posi
suis tognomon invenit • (Suétone, Tibère, 3).
(7] Polthaat, Bibiiolheca historien medii aevi, p. 671.
(W C. I. L., VII, 922.
{•S) De btUo galtico, ]. Il, c. 4; 1. IV, c. 6;I. VI, c. 3!.
ilO) Pardessus, Diplomafa, t. II, p. 311. Pertz, Oiplomalum imperi
primut, p. S7, ligno 30.
231 LIVRE II. CHAPITRE II.
avant notre ère (1). L'autre, Fidius Optatus, était gram-
mairien , vivait au second siècle de notre ère; il avait, dit
Aulu-Gelle, une grande réputation à Rome. Aulu-Gelle ra-
conte avoir vu entre ses mains un vieil exemplaire du se-
cond livre de l'Enéide : on croyait que ce volume avait
tenu à Virgile même. Le nom de ce grammairien
autrefois Fidus conformément aux manuscrits, est
rd'hui avec raison corrigé en Pidius (2). U y a quel-
exemples de ce gentilice dans les inscriptions. Dans
i'entre elles, en Italie, Fidius Dexter est un père
îureux qui élève une tombe à ses enfants (3). Dans
lutre , Fidius Faustus est un oncle qui , probablement
moins de chagrin, a pourvu son neveu d'une dernière
ure (4). Ailleurs Gaius Fidius Dexter est un maître
reux qui, après avoir affranchi son esclave Typhera,
lousée, et elle l'enterre (5).
iiACus, nom d'une abbaye célèbre, aujourd'hui Fîgeac
commence à paraître au huitième siècle; c'est ou un
n fundus F'tdiactis ou un ancien fundus Fibiacvs. Pour
yas, dérivé du célébra gentilice Fabius, comparez le
M FibiantLs de deux chartes de Ravenne (6).
fcCiACTJS est le nom d'une propriété de l'église cathé-
du Mans, aux termes d'un diplôme faux de Charle-
Le conservé par un manuscrit du douzième siècle (7).
jous vient de Flaccius.
iccius est un gentilice dont un exemple au féminin,
^sconiue, dans son commentaire du Pro UUone. De-Vît, Onomadicon,
p. es.
ulu-Gelle, livre II, c. 3, J 5; édition de Martin Hertz, t. I, p. 76.
. /. L., IX, 2528.
iid., IX, 3659.
bid., X, 6606.
antuzzi, Monumenti RstiennaU, t. I, p. 57, 62.
om Bouquet, V, 756 e. Cf. Sickel, Acta Karolfnorum, t. II, p. 397, d* I,
.r^
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 233
Flaccia, est conservé par une inscription de Trieste (1).
On cite le nom masculin au génitif Flacci Montani (2).
FlaciaciLSy dont il est question dans le diplôme faux de
Charlemagne, parait être Placé (Sarthe), hameau de la
commune de Souligné-sous- Vallon. Il y a en France cinq
noms de communes qui paraissent avoir la môme origine :
Placé (Saône-et-Loire) ; trois Flacey (Côte-d'Or, Eure-et-
Loir, Saône-et-Loire) , le second désigné par le nom de
Flaciacum dans un document du douzième siècle (3) ; enfin
Flacy (Yonne). Pour celui-ci, la gutturale de la dernière
syllabe était déjà tombée en 1023, année où cette localité
est désignée par le nom de Flaceius. Au seizième siècle, la
tradition savante fit rétablir la gutturale perdue, et on
écrivit Flaciacmn (4).
De la variante latine fundus Flacianus, il y a un exemple
dans les chartes de Ravenne, au neuvième siècle (5).
Flaviagus = Flaviacus, est le nom d'une localité où des
biens furent donnés à Tabbaye de Limours en 697 (6).
Flaviacus est aussi le nom porté vers la môme époque par
l'abbaye de Saint-Germer-de-Fly (Oise) , fondée en 655 par
Geremarus dont on a conservé une vie presque contempo-
raine (7). Flaviacus, au neuvième siècle, est le nom d'une
villa de Tabbaye de Saint-Denis , comme l'attestent une
charte de l'abbé Hilduin et un diplôme de Louis le Débon-
naire en 832 (8), un diplôme de Charles le Chauve
en 862 (9); elle était située dans les environs d'Etam-
(1) c. J. L., V, 595.
(2) D€-Vit, Onomasticoriy t. III, p. 72.
(3) Merlet , Dictionnaire topographique du département d' Eure-et-Loir ,
p. 69.
(4) Quantin , Dictionnaire topographique du département de l'Yonne ,
p. 52.
(5) Fantuzzi, Monumenti Ravennati, t. I, p. 19.
(6) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 244.
(7) Dom Bouquet, III, 552 a. Cf. Chronicon Fontanellense, ibid,y V, 316 a-b.
(8) Tardif, Monuments historiques, p. 85, col. 2. Dom Bouquet, VI, 580 b,
(9) Tardif, ibid., p. 119, col. 2.
234 LIVRE II. CHAPITRE IL
pes (1). Un quatrième Flaviacus ^ en Rouergue, apparaît,
vers Fan 1000, sous le règne du roi Robert dans une charte
que nous a conservée le cartulaire de Conques (Aveyron) (2,.
Flavius est un gentilice très répandu dans les derniers
temps de l'empire romain. On sait qu'un grand nombre
d'empereurs le portèrent au quatrième et au cinquième
siècle. Auparavant Flavius avait été à la fin du premier
siècle le gentilice d'empereurs , plus connus Vespasien et
Domitien par leur surnom , et Titus par son prénom (3). II
y avait déjà des Flavius au temps de la république
romaine. Dès Tannée 327 avant notre ère, un certain
M. Flavius , ayant perdu sa mère, fit à l'occasion des funé-
railles une distribution de viande au peuple , et le peuple
reconnaissant le nomma tribun sans qu'il eût la peine de
le demander (4) ; en cette qualité , il proposa une loi con-
tre la ville de Tusculum (5). Un personnage de même nom,
plus célèbre, est Cn. Flavius, fils d'affranchi, et qui, mal-
gré sa naissance , s'éleva par son éloquence et son adresse
à l'édilité curule ; c'était en l'an 305 avant notre ère ; il s'est
acquis une grande place dans l'histoire romaine en divul-
guant les règles de droit dont la connaissance, jusque-là
réservée aux pontifes , constituait pour l'aristocratie une
sorte de monopole (6). Dans les œuvres de Cicéron, il est
question de huit Flavius , outre celui dont nous venons de
parler; l'un est C. Flavius Fimbria, consul Tan 104 avant
notre ère. Le nom de Flavius pénétra en Gaule : on en
trouve douze exemples dans les Inscriptio^is de Lyoïx de
Boissieu; sept dans les Inscriptions de Vienne de M. AUmer.
Flavius dérive du cognomen Flavus : en Tan 70 de J.-C.
Flavus est en Gaule un des chefs du parti à la tête duquel
(1) In pago Stampinse sitam. Diplôme de Charles le Chauve précité.
(2) G. Desjardins, Cartulaire de l'abbaye de Conques^ p. 220.
(3) Voir C. /. L., VI, 17961-18469, les inscriptions funéraires de Rome oîi
se rencontre le gentilice Flavius.
(4) Tite-Live, livre VIII, c. 22.
(5) Tite-Live, livre VIII, c. 37.
(6) Tite-Live, livre IX, c. 46.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 235
s'est placé C. Julius Vindex, et Vitellius le condamne à
mort (1).
Flaviacus dérivé de Flavius, devint dans le midi Fla-
viac , nom d'une commune de TArdèche , Flaugeac , nom
d'une commune de la Dordogne , Flaujac , nom de deux
communes du Lot; dans le nord Flavy, nom d'une com-
mune deTOise.
Sont dérivés du même gentilice avec le suffixe latin -anus
le nom du fundus Flavianus dans les chartes de Ravenne
vers la fin du septième siècle et au commencement du
neuvième (2), et le nom de la vallis Flaviana, près du
Rhône , dans les environs de Saint-Gilles (Gard) , au neu-
vième siècle (3).
Flàviniacus, nom d'un locus situé dans Vager Burnaccn-
sis et dans le pagus Alsinsis et où Widerad, dans un acte
de Tannée 721 , raconte qu'il avait fondé une abbaye (4),
est aujourd'hui Flavigny (Côte-d'Or) ; il y avait dans cet
endroit un castrum à la même date (5) ; ce Flaviniacus est
sans doute le même que celui où, suivant la chronique de
Saint-Bénigne de Dijon , auraient été situés des biens don-
nés à l'abbaye de Saint-Bénigne par le roi Gontran (561-
593), c'est-à-dire environ un siècle et demi plus tôt (6).
Un autre Flaviniacus , situé dans l'ouest de la France , est
mentionné dans un jugement rendu par Clotaire III en fa-
veur de l'abbaye de Saint-Denis, vers l'année 058 (7). Fla-
viniacus vient de Flavinius.
Flavinius est un gentilice rare; il y en a cependant quel-
ques exemples ; ainsi on a trouvé en Espagne la tombe d'un
certain Marnon , esclave de Flavinius Carpetus , de la ville
(1) Tacite. Histoires, livre II, c. 94, 4- édit. de Halm, t. II, p. 98.
[1] Fantuzzi, Monumeriti Ravennati, t. I, p. 2, 9, 21.
(3) Molinier, Géographie historique de la province de Languedoc^ p. 166,
(4) Pardessus, Dip/omafa, II, 123.
(5) ibid., p. 324; cf. p. 399.
(6) Dom Bouquet, III, 469 b.
P) Tardif, Monuments historiques, p. 13, col 1,
236 LIVRE II. CHAPITRE II.
d'Uxama Barca (1), et celle du fils de Flavinius Flavus (2).
Il y a en France , outre Flavigny (Côte-d'Or), cinq com-
munes du nom de Flavigny : deux dans TAisne, les au-
tres dans le Cher, la Marne et dans Meurthe-et-Moselle.
Citons enfin Flavignac (Haute-Vienne). De la formule latine
fundus Flavinianusj il y a, au huitième siècle, un exemple
dans les chartes de Ravenne (3).
Floriacus , le nom de Fleurey-sur-Ouche (Côte-d'Or)
au sixième siècle, était le domaine d'un certain Siri-
vald , ennemi d'Agéric , évêque de Verdun ; Agéric avait
un fils qui vint à Floriacus et y tua Sirivald (4); c'était
en 547. Une villa Floriacus , située entre deux mers dans
le voisinage de Bordeaux , est mentionnée dans un testa-
ment fait par Bertramne, évoque du Mans en 615 (5), Dans
une charte émanée de Leodebodus, abbé de Saint- Aignan
d'Orléans en 667, Yager Floriacus est le territoire sur
lequel on va bâtir un monastère que le même document
appelle S. Petrus Floriacensis (6). Dans un diplôme de Tan-
née 706 donné par Arnoulf, duc de Bourgogne, en faveur
de Tabbaye des Saints-Apôtres , près de Metz , il est fait
don à cette abbaye d'un praedium Floriacum^ situé dans le
pays de Voivre , au comté de Scarpone , dont le chef-lieu
est situé dans le département de Meurthe-et-Moselle (7).
En 866, Charles le Chauve donna à l'abbaye de Saint-
Maur-les-Fossés des biens dans une villa nommée Floria-
cus et située dans le comté de Reims (8) ; c'est aujourd'hui
(1) C.LL,, II, 2854.
(2) /bid., II, 2868.
(3) Fantuzzi, Monumenti Aauennafi, t. I, p. 63.
(4) Historia Francorum^ livre III, c. 35. Chez Dom Bouquet, t. II, p. 202 c
Cf. Longnon, Géographie de la Gattle au sixième siècle f p. 213.
(5) Pardessus, Diplomafa, t. I, p. 206.
(6) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 142-144. C'est aujourd'hui Saint-Be-
noît-sur-Loire (Loiret).
(7) Pardessus, Diplomata^ t. II, p. 276.
(8) Tardif, Monuments historiques, n* 194, p. 127.
r^^--.r
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 237
Fleury-la-Rivière (Marne) (1). Au même siècle, dans la vie
du roi Dagobert, Floriacus est Fleury-sur-Andelle (Eure) (2).
Florins, d'où vient Floriacus, est un gentilice que nous
font connaître quelques inscriptions. Telle est celle du
tombeau du vétéran T. Florins Saturninus , au musée de
Mayence (3). Telle est Tinscription d'Espagne qui nous ap-
prend le nom et le surnom de Florins Vegetus, flamine de
la province d'Espagne citérieure (4). Nous citerons encore
la tombe élevée à P. Florins Crispinus par P. Florins Se-
verus, son père, en Dalmatie (5).
Le nombre des communes dont le nom moderne s'expli-
que par un primitif Floriacus est d'au moins vingt-neuf, sa-
voir : deux Fleuré (Orne et Vienne); cinq Fleurey (Doubs,
Haute-Saône et Côte-d'Or); Fleurieu-sur-Saône et Fleu-
rieux-sur-l'Arbresle (Rhône); dix-sept Fleury (Aisne, Aude,
Eure, Loiret, Manche, Marne, Meuse, Nièvre, Oise, Pas-
de-Calais, Saône-et-Loire , Seine-et-Marne, Seine-et-Oise,
Somme , Yonne) ; trois Floirac (Charente-Inférieure , Gi-
ronde, Lot). Fleurian, écart de Capens (Haute-Garonne), et
Florian , hameau de la commune de Logrian et Comiac de
Florian (Gard), s'expliquent par un primitif f/ormniw équi-
valent romain du gallo-romain Floriacus.
FusciACus, villa située en Limousin, fut donnée à la ca-
thédrale de Châlons-sur-Marne par Elafius, évéque de cette
ville en 565 (6). Le même nom apparaît dans un diplôme
faux de Clovis P' (7) qui désigne par là une localité du pa-
gus SenoniciLs, aujourd'hui Foissy , canton de Villeneuve-
l'Archevéque (Yonne) (8). Un ager Fusciacensis en Maçonnais
(1) Longnon, Etude sur les pagi de la Gaule, 2* partie, p. 15.
(2) Krusch, Scriptores rerum merovingicarurriy t. II, p. 516, 1. 16.
(3) Brambach, n« 1667.
(4) C. /. L., II, 4210.
{5)/Md., ni, 1923; cf. VI, 18482-18488.
(6) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 423.
(7) Pertz, Diplomatum imperii tomus primus, p. 115, ligne 47. Ce nom a
été écrit Furtiacum chez Pardessus, Diplomata^ 1. 1, p. 35.
(8) Quantin, Dictionnaire topographique du département de l'Yonne^ p. 53.
'^r^ri
238 LIVRE II. CHAPITRE II.
est mentionné , au neuvième siècle , dans les chartes de
Tabbaye de Saint-Vincent de Mâcon. C'est aujourd'hui
Fuisse (Saône-et-Loire) (1).
Fuscius, d'où Fusciacus^ est un gentilice conservé par
une inscription de Nimes où on lit les noms de M. Fuscius
Nedymus (2). On trouve aussi les noms de femmes : Fus-
cia Cypare, dans une inscription d'Espagne (3), Fuscia Ci-
tata , dans une inscription de Carinthie (4), Fuscia Aemilia
dans une inscription d'Afrique (5). L'orthographe Fouscius
est offerte par une inscription de Gemona dans l'Italie du
nord-est ; il s'agit d'une tombe élevée à M. Fouscius Licnus
et à C. Fouscius Balbus (6).
Fusciacus explique sept noms de communes : deux Fois-
sac (Aveyron et Gard) ; un Foissiat (Ain) ; trois Foissy, dont
un dans la Côte-d'Or et deux dans l'Yonne ; enfin Fuisse
(Saône-et-Loire).
Galiacus, locellus situé dans le Blaisois ou le Dunois,
dépendait de l'abbaye de Marmoutiers, aux termes d'un di-
plôme émané de Louis le Débonnaire en 832 (7). La bonne
orthographe de ce nom doit être Galliacus,
Gallius, dont Galliacus dérive, est un gentilice romain
porté notamment par Q. Gallius, édile, l'an 67 avant J.-C,
préteur deux ans plus tard , et qui , probablement Tannée
suivante, fut accusé d'avoir employé des moyens fraudu-
leux pour obtenir cette charge ; Cicéron fut son avocat ; la
plaidoirie du célèbre orateur est perdue ; on n'en a con-
servé que de très courts fragments. Q. Gallius eut deuxfils :
l'un , qui portait le prénom de Marcus , prit le parti d'An-
Ci) Ragut, Cart. de Saint-Vincent- de-Mâcon, p. ccviir, 62, 112.
(2) C. /. L., XII, 3499.
(3) Ibid., II, 1370.
(4) Ihid., III, 4917.
(5) Ibid., VIII, 9862.
(6) Ibid., V, 1818.
(7) Dom Bouquet, VI, 583 c. Cf. Sickel, Acta Karolinorum, t. II, p. 178,
n* 306.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 239
toine contre Auguste et mourut en laissant un testament
par lequel il adoptait Tibère (1); Tautre, appelé Quintus
comme sou père, devint préteur, et Auguste, pendant son
triumvirat, le lit tuer après Tavoir fait mettre à la torture
et lui avoir de sa main arraché les yeux (2).
On trouve plusieurs Gallius dans les inscriptions. Ainsi
à Feyzin (Isère), une tombe a été élevée par D. Gallius Sa-
cer pour lui-même et pour D. Gallius Lascivius son père (3).
En Istrie , près de Rozzi , on a lu sur une stèle funéraire
les noms du soldat L. Gallius Silvester (4). On a recueilli
en Pannonie une dédicace à Jupiter par M. Gallius Cel-
sinus (5).
Par Galliacus dérivé de Gallius s'explique le nom de
Gaillac, porté par trois communes : Aveyron, Haute-Ga-
ronne, Tarn; celui de Jailly qui désigne deux commu-
nes, Gôte-d'Or, Nièvre; enfin celui de Jallieu (Isère).
Gacdiacus, enTouraine, était un vicus où du temps de
Grégoire de Tours, sixième siècle , on conservait des reli-
ques de saint Julien de Brioude, et on prétait serment
sur elles (7); c'est aujourd'hui Joué-les-Tours (Indre-et-
Loire) (8), localité plusieurs fois mentionnée sous le même
nom de Gaudiacus, dans les titres de l'abbaye de Saint-
Martin de Tours, au dixième siècle (9). Un autre Gaudia-
eus est le lieu d'origine d'une jeune fille qui, lors de la
translation des reliques de saint Léger, vers la fin du sep-
tième siècle, dut sa guérison à l'intercession du saint; on
(1) De- Vit, OnomsLSiicon, t. III, p. 203.
(2) Suétone, Auguste^ c. 27.
(3) ÂUmer, Inscriptions de Vienne^ t. III, p. 96.
(4) C, /. L., V, 430.
(5) /5id., III, 4405. Cf. VI, 18866-18873.
(C) Fantuzzi, Monumenii Ravennatij t. I, p. 16, 35, 166.
(7) Grégoire de Tours, De miraculis sancti JuUani^ c. 40, édition Arndt
et Krusch, t. II, p. 580, ligne 18. Bordier, Les livres des miracles^ I, 376.
(i>) Longnon, Géographie de la Gaule au sixième siècle, p. 273.
(9) Mabille, La pancarte noire de Saint-Martin de Tours^ p. 125, 143, 144,
187, 188, 225.
240 LIVRE II. CHAPITRE IL
suppose que ce Gaudiacus était situé dans le territoire de
Chartres (1). Un troisième Gaudiacus^ situé près de la ri-
vière appelée Aïbeta^ en Berry, aujourd'hui Jouet-sur-FAu-
bois (Cher) , eut , au septième siècle , un monastère habité
par des religieux de Tordre de Saint-Colomban (2). Gaudia-
cus^ in pago Wabrinse, fut donné, en 770, à Tabbaye de
Gorze, par Angelramme, évoque de Metz (3) ; on pense re-
connaître cette villa dans Jouy-sous-les-Côtes (Meuse) (4\
ou, suivant d'autres, Jouy-aux- Arches (Moselle) {^). Gaudia-
cus^ propriété de l'abbaye de Jumièges en 849, suivant un
diplôme de Charles le Chauve (6), est aujourd'hui, croit-on,
Jouy-sur-Eure , près d'Evreux (7). En 978 , une localité
appelée Gaudiacus appartenait à Letgarde, comtesse de
Champagne et de Blois, bien que sa mère Richilde l'eut
donnée à Saint-Martin de Tours; c'est maintenant Jouy-
le-Châtel (Seine-et-Marne) (8).
Gaudiacus = * Gavidiacus est dérivé de Gavidius. Gavi-
dius est un gentilice romain peu commun, mais dont les
inscriptions nous ofiFrent quelques exemples. Tel est le
nom de femme Gavidia Torquata, dans deux inscriptions
de Karlsburg en Hongrie, autrefois en Dacie, que pos-
sède aujourd'hui la bibliothèque de Vienne en Autriche (9\
Une inscription d'Aquilée nous apprend les noms de L. Ga-
vidius Secundinus (10); des inscriptions de l'Italie méridio-
(1) ViiB, s&ncti Leodegarii, c. 18, chez Dom Bouquet, II, 625 b.
(2) Vita sancH Eustasii, chez Dom Bouquet, III, 501 c.
(3) Dom Calmet, Histoire de Lorraine^ 1** édition. Preuves, col. 285.
(4) Liénard , Dictionnaire topographique du département de la Meuse ,
p. 117. On remarquera que dans plusieurs pièces du huitième et du dixième
siècle, cette localité est appelée Gaugiacum,
(5) Bouteiller, Dictionnaire topographique du déparlement de la Moselle^
p. 132,
(6) Dom Bouquet, VII, 499 6.
(7) Blossevillc, Dtcttonnatre topographique du département de VEure,
p. 220.
(8) Mabilie, La pancarte notre de Saint-Martin de Tours, p. 143, 225.
(9) C. I. L., III, 1071, 1072.
(10) Ibid., V, 909.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 241
nale, ceux de Gavidius Ëutychius, de Gavidia Ma[D]3ueta (1)
et d'A. Gavidius Félix (2).
La variante Gavedius nous est donnée par une stèle fu-
néraire de l'Italie centrale où se lisent les noms de Q. Ga-
vedius Verus (3).
II est certain que ce nom. pénétra en Gaule ; on a trouvé
à Narbonne les épitaphes de L. Gavidius PoUio et de
L. Gavidius Scaeva (4). L'Aquitain Sulpice Sévère , dans
son récit du concile de Rimini , en 359 , rapporte qu'il
tient certains détails de Gavidius, et il l'appelle episcopum
nostrwn (5).
De Gauidiaous paraissent venir le nom de Joué, porté par
sept communes : Indre-et-Loire , Loire-Inférieure , Maine-
et-Loire , Orne , Sarthe ; celui de Jouey (Côte-d'Or) , et ce-
lui de Jouy, porté par seize communes : Aisne, Eure,
Eure-et-Loir, Loiret, Marne, Meuse, Oise, Seine-et-
Marne, Seine-et-Oise , Yonne. En comptant Jouet (Cher),
nous arrivons à un total de vingt-cinq communes dont le
nom primitif est Gaudiacus,
Geniciagus , villa donnée à la cathédrale de Vienne
(Isère) par Ephibius, en 696 (6), est appelée à l'ablatif Genecio
pour Gmiciaco^ dans un diplôme faux de Childebert III (7);
c'est aujourd'hui Genissieux (Drôme).
Genicius, d'où Geniciacus^ est une variante de Genucius ;
exemple, M. Genicius Menecrates dans une inscription de
Nocera en Italie (8). Genucius est le nom d'une gens plé-
béienne de Rome qui a fourni sept consuls de Tan 451 à
(1) C. /. L., X, 2474.
(2) /Wd., X, 6713. Cf. VI, 1888, 1889.
(3) /btd., IX, 5683.
(4) IWd., Xn, 4834.
(5) HûtoHa sacra, Uvre II, c. 41 ; Hign«, Psitrologia, lah'na, t. XX, col. 152 c.
(6) Pardessus, Dtplomata, t. II, p. 240, 241.
(7) /Wd., p. 247. Cf. Pertz, Diplom^tum imperii tomus primus, p. 194,
ligne 33.
(8) C. J. L., X, 1084.
16
242 LIVRE, II. CHAPITRftMI.
l'an 271 avant J.-C, et dont les inscriptions du temps de
Tempire ofifrent quelques exemples (1).
Outre Genissieux (Drôme), Geniciacus explique Genissac
(Gironde).
Gentiliacus , où Pépin le Bref célébra les fêtes de Noël
et de Pâques en 762, celles de Pâques en 766 (2), est
aujourd'hui Gentilly (Seine), alors dépendance du domaine
royal; Louis II le Bègue détacha Gentilly du domaine
royal en 878 et le donna à la cathédrale de Paris, à la con-
dition que les revenus seraient employés au luminaire (3).
Gentiliacus dérive de Gentilius. Ce gentilice était porté
par le légionnaire vétéran G. Gentilius Victor qui fit élever
à Mayence un autel de marbre en Thonneur de l'empereur
Commode alors régnant, 193-211 après J.-C. (4).
Germaniacus est une villa que le roi d'Austrasie Thierry I*',
fils de Clovis , donna à saint Thierry, abbé de Saint-Remy
de Reims ; c'était dans la première moitié du sixième siècle,
entre les années 511, date de Tavènement du roi, et 533
environ , date de la mort du saint , auquel survécut le roi
mort en 534 (5) ; cette localité est aujourd'hui Germigny
(Marne). Dans la plupart des textes, l'a de la seconde syl-
labe de Germaniacus s'assimile à Vi de la syllabe suivante :
Germiniacus. C'est ainsi que se trouve écrit le nom d'un
village du pagus Remensis , qui s'est appelé au moyen âge
Germigny-Pend-la-Pie, et dont on a retrouvé l'emplace-
ment dans le département des Ardennes (6) ; ce Germi'
(1) De- Vit, Onomasticon, t. III, p. 230-231; cf. C. I. L., VI, 19022-19026.
(2) Annales Francorum Tiliani , chez Dom Bouquet , V , 17 d , 18 b ; An-
nales Francorum LotaeZtani, tbid., 36 b. Eginhardt Annales, ibid,, 199, c, d,
200 a; Annales Metenses, iMd., 338 e.
(3) C&rtulaire de Notre-Dame de Paris, t. I, p. 262.
(4) Brambach, n* 1076. Cf. C. /. L., XII, 857.
(5) Vita s. T/ieoden'ct, chez Dom Bouquet, III, 406 c.
(6) Longnon, Etude sur les pagi de la Gaule, 2* partie, p. 11, 12; £jcanien
géographique du tome premier des Diplomata tmpeni, p. 24.
LA DÉSINENCE -I-ACU8AU MOYEN AGE. 243
niaous fut donné au duc Grimoald, maire du palais d'Aus-
trasie, fils de Pépin le Vieux, par le roi mérovingien
Sigebert IIL qui régna de 630 à 654 ; Orimoald en transféra
la propriété à l'abbaye de Malmedy (1), qui fit confirmer
cette donation par le roi Childcric II en 664 (2) et par Da-
gobert II en 677 (3). Germiniacus est aussi l'orthographe
adoptée pour Germigny (Yonne), dans deux diplômes faux
qu'auraient donnés à Tabbaye de Saint-Pierre-le-Vif de
Sens le roi Clovis I" (4) et Theudechilde , sa fille (5). Ger-
migny (Loiret) est appelé Germiniacus au dixième siècle par
l'auteur du Livre des Miracles de saint Maximin de Micy : cet
auteur raconte que Théodulphe, évoque d'Orléans, 787-821,
fit construire à Germiniacus une basilique imitée de celle
d'Aix-la-ChapeUe (6).
Germanius, dont viennent Germaniacus et Germiniacus,
est un gentilice qu'on a rencontré quelquefois dans des
inscriptions : Q. Germanius Valens, sur une stèle du musée
de Pettau en Styrie (7) ; Germanius Dentilianus, Germanius
Petronianus, Germanius Valens, dans une inscription
d'Afrique (8) ; Magius Germanius Statorius Marsianus, dans
une inscription de Milan (9) ; G. Germanius Corobus, dans
une inscription du musée de Metz (10).
L'orthographe la plus ancienne Germaniacus , avec un a
(1) Pardessus, DiplomtiU, t II, p. 92. Pertz, Diplomtitum imperii tomus
primua, p. 91.
(2) Pardessus, Diploma-ia, , t. II, p. 137 , 138. Pertz , Diplom^turri imperii
lomuB primuSy p. 26, ligne 37.
(3) Pardessus, Dtplomafa, t. II, p. 176. Pertz, DiplomAtum imperii tomus
primus, p. 42.
(4) Pertz, Diploma,tum imperii tomus primus^ p. 116, ligne 3; chez Par-
dessus, Diplomata, t. I, p. .36, au lieu de GerminiacOy on a imprimé Tra-
minaco. Cf. Quantin, Dictionnaire topographique du département de
l'Yonne, p. 60.
(&) Pertz, Diplomatum imperii tomus primus, p. 133, ligne 7.
(6) Dom Bouquet, V, 469 c.
(7) C. I. L., III, 4067.
(8) JWd., VIII, 440.
(9) /bid., V, 5869.
(10) Robert, Epigraphte j/allo-romaine de la Moselle, fascicule premier,
p. 31-33.
244 LIVRE II. CHAPITRE II.
après Tm, persiste dans deux noms de communes : Ger-
magnat (Ain), Germagny (Saône-et-Loire). Ailleurs Tortho-
graphe la plus moderne avec Yi après ïm a été préférée,
Germignac (Charente-Inférieure); Germigney (Jura et
Haute- Saône) ; Germigny (Cher, Loiret, Marne, Nièvre,
Seine-et-Marne, Yonne). Chacun de ces départements con-
tient une commune du nom de Germigny, sauf Seine-et-
Marne qui en renferme deux. Le nombre des communes
dont le nom est un dérivé du gentilice Germanius est de
douze.
Il ne faut pas confondre ces noms avec celui de Ger-
menay (Nièvre), Germanayum dans un document du trei-
zième siècle (1). Germanayum s'est dit évidemment * Ger-
managus à l'époque mérovingienne et * Germ^nacas sous
l'empire romain. C'est un dérivé du surnom Germanus.
Exemples : L. Sennius Germanus, dans une inscription du
musée de Vienne (Isère) (2) ; Nonnius Germanus, dans une
inscription de Trêves (3); M. Aurelius Germanus, dans une
inscription de Mombach en Hesse (4), Fabius Germanus,
dans une inscription de Gundelsheim en Wurtemberg (5).
C'est du surnom Germanus (6) que dérive le gentilice
Germanius.
Gessiagus est un locellus ou une colonica donné à l'ab-
baye de Flavigny par l'abbé Widerad en 721 (7). On croit
le reconnaître dans Gissey-sous-Flavigny (Côte-d'Or).
Le gentilice Gessius a reçu une certaine notoriété grâce
à Gessius Florus nommé procurateur de Judée, en l'an 66
de notre ère, par l'empereur Néron; Gessius Florus dut
(1) Soultrait , Dictionnaire topographique du département de la Nièvre,
p. 82.
(2) AUmer, Inscriptions antiques de Vienne, t. II, p. 559.
(3) Brambach, n* 825.
(4) Brambach, n* 972. Cf. n* 1017.
(5) Brambach, n* 1606.
(6) Le C. /. L., VI,. 19030-19032, offre des exemples d'individus qui s'kppe-
làient Germanus- sans gentilice ni prénom.
(7) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 324.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 245
cette dignité à Tinfluence de la fameuse Poppée , amie de
sa femme et maîtresse de Néron ; ses injustices criantes
causèrent, dit-on, la révolte des Juifs dont la répression
par Titus se termina par la ruine de Jérusalem (1). D'autres
Gessius nous sont connus par les inscriptions ; tels sont :
L. Gessius Optatus, auteur d'une dédicace à Neptune qui
appartient au musée de Turin (2); C. Gessius Rogatus (3),
dans une inscription d'Afrique ; P. Gessius Ampliatus, nom
inscrit sur un vase de verre trouvé en Italie (4) ; D. Gessius
Félix, nom inscrit sur une lampe antique (5). C. Gessius
Miccio et M. Gessius Augur, connus par des inscriptions
de Vienne (Isère) et de Nimes (6).
Il y a, dans la Côte-d'Or, trois communes de Gissey;
Gissac (Aveyron) parait être aussi un Gessiacus. Geyssans
(Drôme) est identique à la variante latine * Gessiarms.
Graciacus, donné à la basilique de Saint-Germain par
Bertramne , évêque du Mans en 615 (7) , est aujourd'hui
Grazay (Mayenne); on doit probablement supposer une
orthographe primitive Gratiacus ou Grattiacus, C'est Gra-
tiacus qu'on trouve, au dixième siècle, dans le Cartulaire
de Savigny ; il s'agit de Grézieux-le-Marché (Rhône) (8) ;
mais le territoire de ce village est appelé, au même siècle,
Grassiacensis ager (9). Graissago^ au cas indirect, est, en 894,
le nom d'une villa située dans le territoire de Brioude
(Haute-Loire) (10).
Gratins est le nom porté au premier siècle avant notre
(1) Josèphe, Antiquités judaïques y livre X, c. 11, édit. Didot, p. 791. Cf.
Tacite, livre V, c. 10.
P) C. /. L.. V. 7457.
(3) IMd., VIII. 278.
(4) Ibid., X, 8062, 5.
(5) Ibid., X, 8053, 91. Voir aussi C. I. L , VI, 19040-19044.
(6) /6id., XII, 1914, 3224
(7) Pardessus, Diplom&ta, t. I, p. 209.
(8) Aug. Bernard, C&rtuUire de Savigny, t. II, p. 827. On y trouve aussi
Graciacus en 1087, t. I, p. 437.
(9) Ibid., t. I, p. 103; t. II, p. 1078.
(10) Doniol, Cartulaire de Brioude, p. 41.
246 LIVRE II. CHAPITRE IL
ère par le poète Gratius Faliscus, auteur d'une Cynégéti-
que en vers latins que nous avons encore, et qui est citée
par Ovide. Il y a quelques exemples de ce gentilice dans
les inscriptions. Ainsi, on a trouvé à Ancône le monument
élevé à la mémoire de M. Gratius Coronarius, mort sur
mer , victime d'une tempête (1). Le nom de fabricant
G. Grati, au génitif, a été lu sur un vase de terre trouvé
en Espagne (2). Le nom de femme, Gratia Hibern[a],a
été fourni par une inscription funéraire de la Hesse (3);
celui de Gratia Gratiana par une inscription de Grenoble (4).
On a signalé aussi l'orthographe Gracius avec un c, dans
l'épitaphe de Gracius Auspecio (5), et Grattius avec deux (.
Cette dernière orthographe est même la plus fréquente
dans les inscriptions ; plusieurs exemples appartiennent à
la Gaule ; telles sont les épitaphes de Q. Grattius Proclio
et de Grattia sa fille, provenant de Vienne (Isère) et con-
servées au musée de Lyon (6). Dans une inscription de
Vienne (Isère), les deux orthographes par un seul i ou par
un double ^, Gratius et Grattia, paraissent avoir été em-
ployées concurremment (7).
Outre Grazay (Mayenne) et Grézieux-le-Marché (Rhône),
GratiacuSj Grattiacus ou peut-être Graciacus explique le
nom de trois communes de Grazac (Haute-Garonne, Haute-
Loire, Tarn); de celles de Gressey (Seine-et-Oise), Gressy
(Seine-et-Marne), Grésy (Savoie, Isère), Grézac (Charente-
Inférieure) ; des deux communes de Grézieu-la-Varenne
(Rhône) et de Grézieux (Loire).
Gratiasca (8) , Graciasca (9) , aujourd'hui Gréasque (Bou-
(1) c. I. L., IX, 59Î0.
(2) ma., II, 4970, 219.
(3) Brambach, 1238.
(4) Allmer, Inscriptions de Vienne^ t. II, p. 312.
(5) Brambach, p. 29, n* 2045.
(6) Allmer, InscHpiions de Vienne, t. II, p. 502; cf. C. /. L., VI, 19tl7-
19125.
(7) Allmer, Inscriptions de Vienne, t. II, p. 508.
(8) Quérard, Csirlulaire de Saint-Victor de Marseille, 1. 1, p. 155, vers 1035.
(9) Ibid.f p. 276, 1059-1085. Grezasca, plus moderne, est plus fréquent
LA DÉSINENCE -I-ACUB AU MOYEN AGE. 247
ches-du-Rhône), est la forme ligure ; Grézian (Hautes-
Pyrénées), la forme latine du gaulois Gratiacus.
Graniagengis finis est située dans le pagus Waldensis,
suivant deux chartes données à Téglise de Lausanne, Tune
en 881 (1), l'autre en 929 (2). Griniacus^ villa qui apparte-
nait à l'église du Mans, aux termes d'un diplôme émané
de Louis le Débonnaire en 832 (3), nous offre le môme
nom avec assimilation de Va de la première syllabe à Vi
de la seconde.
Granius est un gentilice romain fréquent chez les auteurs
comme dans les inscriptions. Un des Granius les plus con*
nus est le grammairien Granius Flaccus qui vivait au pre-
mier siècle avant notr^ ère ; il laissa un recueil d'indi-
gitamenia, c'est-à-dire de formules de prières (4), et un
livre De jure Papiriano , c'est-à-dire sur la législation attri-
buée aux rois de Rome (5). Au même siècle appartiennent :
P. Granius, témoin dans le procès de Verres (6) ; On. Gra-
nius, beau-fils de Marins, et son compagnon dans sa
fuite (7); enfin, un chevalier romain, nommé A. Granius,
qui fit partie de l'armée de César dans la guerre contre
Pompée et qui fut tué à Dyrrachium (8). D'autres Granius
apparaissent dans les inscriptions de Rome (9).
(t) Cartulaire du chapitre de Notre-Dame de Lausanne, publié par la So-
ciété de rhistoire de la Suisse romande, p. 343. Cf. Regestre soit répertoire
chronologique de documents relatifs à l'histoire de la Suisse romande, par
Frinçois Forel, p. 26, n» 79.
(2) Cartulaire du chapitre de Notre-Dame de Lausanne , p. 232. Cf. Re-
gestre, etc., p. 42, !!• 133.
(3) Dom Bouquet, VI, 586 a. Cf. Sickel, Acta Karolinorum, t. II, p. 179.
n*308.
(4) Censorin, De die natali, c. 3, g 2.
(5) Paul, livre X, « ad legom Juliam et Papiam , i> au Digeste, livre L ,
titre lYf, loi 144. Cf. Touffel, Geschichte der rœmischen Literatur^ 3* édit.,
p. 380.
(6) Cicéron, In Verrem, action II, livre V, c. 59, § 154.
(7) Appien, De bello civili, livre I, c. 60, 62, édit. Didot, p. 311, 312. Plu-
tarque, Marius, c. 35, 37, 40, édit. Didot, p.. 508, 509, 511.
(8) De bello civili, livre III, c. 71.
(9) 0. 1. L., VI, 19072-19106,
248 LIVRE II. CHAPITRE II.
Ce nom pénétra en Gaule. On a trouvé à Lyon un frag-
ment de la stèle funéraire d'un certain Granius, qui était
originaire de Trêves, marchand de vins et citoyen romain(i).
Un potier, son homonyme, faisait usage d'une marque où
son nom était inscrit au nominatif (2). On a recueilli près
de Xanten une dédicace à Mercure par T. Granius Victo-
rinus (3).
Graniaca^ s'accordant avec villa ^ comme Graniacus avec
fundus^ a donné Gragnague, nom d'une commune du dépar-
tement de la Haute-Garonne. Griniacus = Graniacus se
prononce aujourd'hui Grigny et c'est le nom de trois com-
munes, Pas-deCalais, Rhône, Seine-et-Oise. Le gallo-romain
Graniacus avait pour pendant le latin Granianus^ nom d'un
fundus de Veleia sous l'empire romain (4) , et d'un autre
fundus Granianus au moyen âge , dans les chartes de
Ravenne (5). Grinianus^ variante de Granianus^ est devenu,
dans la France moderne, Grignan (Drôme).
[HIermoniace , cédé par un certain Ebroin à l'abbaye de
Saint-Denis, aux termes d'un acte d'échange que Charles
le Chauve coniBrma en 867 (6), porte un nom qui a dû
primitivement se prononcer Harmoniacus, et qui dérive
à^Harmoniîis.
Harmonius est un mot d'origine grecque ; on le trouve
employé comme surnom : Q. Gavius [H]armonius, dans une
inscription de Rome (7); et comme nom : Harmonius Janua-
rius , dans une inscription tirée du fond de la mer, près de
(1) Boissieu, Inscriptions de Lyon^ p. 400, 430.
(2) Boissieu, Inscriptions de Lyon» p. 433 ; Schuermans , Sigles figulins ,
p. 131, n- 2466.
(3) Brambach, n* 154.
(4) Table alimentaire de Veleia, col. 6, ligne 13.
(5) Fantuzzi, Monumenti R&vennatit t. I, p. 38, 49.
(6) Tardif, Monuments historiques, p. 129, n* 199. Suivant M. Matton,
Dictionnaire topographique du dôpartement de l'Aisne ^ p. 186, ce serait
aujourd'hui Morgny-en-Tiérache.
(7) OreUi, n* 2618; C. I. L., VI, 10093.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 249
Naples, et aujourd'hui conservée au musée de Leyde (1).
Ce nom pénétra en Gaule ; au quatrième siècle , Ausone
l'atteste dans son épitre à Ursule , grammairien de Trêves ;
il félicite Ursule d'être collègue d'Harmonius , célèbre
en ce temps par un travail sur Homère, et qui, à cette
époque de décadence , par une sorte de merveilleux mono-
pole, associait à la connaissance du latin celle du grec alors
à peu près inconnu en Gaule (2).
[H]elariacus est une villa donnée par le testament
du roi Contran à l'abbaye de Saint-Bénigne de Dijon,
comme nous l'apprend un diplôme du roi Clotaire III, en
663 (3); on sait que Gontran mourut en 593. Plus tard,
Hileriacus est le nom d'une villa appartenant à l'église
Notre-Dame de Paris, aux termes d'un diplôme faux de
Charlemagne (4) et de deux diplômes authentiques, l'un
de l'évéque Inchad, en 829 (5), l'autre de Charles le Chauve,
en 850 (6). [H]elariacus , propriété de l'abbaye de Saint-
Bénigne de Dijon, parait être aujourd'hui Larrey (Côte-
d'Or). Quant à la variante Hileriacus y nom de. la propriété
du chapitre de Notre-Dame de Paris , on n'en connaît pas
la forme en français.
Ces noms de lieux sont dérivés du gentilice Hilarius
porté par Hilarius Lucus dans une inscription de Trêves (7),
par Hilarius Sequens dans une inscription du musée de
(1) C. I. L., X, 2496.
(2) Quique sacri lacenim collegit corpus Homeri ,
Quique notas spuriis versibus apposait ,
Gccropiae commune decus, Latiacque Camenae ,
Solus qui Ghium miscet, et Ammineum.
Ausone, épitre XVIII, v. 28-31.
(3) Pertz, Diplomatum imperii tomus primuSf p. 39, lignes 4, 5. Pardes-
sus, Diplomata, t. I, p. 132.
(4) Cartulaire de Notre-Dame de Paris y t. I, p. 240. Sickel, Ac(a Karoli-
norum, t. II, p. 431.
(5) Cartulaire de Notre-Dame de Paris t. I, p. 322.
(6) Ibid., t. I, p. 251.
(7) Brambach, n* 825.
250 LIVRE II. CHAPITRE II.
Wiesbaden (1), par Hilaria Quintilla dans une inscription de
Grenoble (2). Ce nom fut illustré au quatrième siècle par
saint Hilaire, évéque de Poitiers, mort en 368 (3), plus
tard par Hilaire, évoque d'Arles, qui vivait dans la première
moitié du cinquième siècle (4).
JocuNDiACus est le nom d'une maison située près de
Tours ; là s'aventurèrent , en 577 , Mérovée , fils du roi
Chilpéric, et Gontran Boson, qui s'étaient réfugiés dans
la basilique de Saint-Martin de Tours, pour y jouir du
droit d'asile et par là conserver leur vie (5). Mons Jocunr
diacus était, au neuvième siècle, le nom d'une montagne;
au-dessus s'élevait une cella sancti Martini qui apparte-
nait à l'abbaye de Saint-Denis : on l'apprend par un
diplôme de Charle le Chauve qui remonte à l'année 862 (6).
Au même siècle et dès le précédent, les rois d'Aquitaine
avaient en Limousin un palais appelé, au neuvième siècle,
Jocundiacum , dans la vie de Louis le Débonnaire , dite de
« de l'Astronome (7), » et Jogundiacum dans un diplôme
de l'année 794 (8). L'orthographe Joguntiacum nous est
ofiferte par un document du onzième siècle (9). Nous devons
partout restituer * Jucundictcus.
Jucundius est un gentilice qu'on peut relever dans quel-
ques inscriptions. Dans une dédicace à Jupiter trouvée à
Dottendorf , on voit apparaître le légionnaire C. Jucundius
Similis (iO). Jucundius est un des noms propres qui se lisent
(1) Brambach, n* 1027.
(2) AUmer, Inscriptions de Vienne^ t. II, p. 316.
(3) Teuffol, Geschichte der rœmischen Liter&tur, 3* édit., p. 976, 977.
(4) Teulfel, ibid., p. 1078.
(5) Grégoire de Tours, Historia Francorum^ livre V, chapitre 14, édi-
tion Arndt, p. 204; cf. Longnon, Géographie de U Gaule au sixième siècle,
p. 274.
(6) Tardif, Monuments histqriqueSf p. 119.
(7) C. 47, chez Dom Bouquet, VI, 112 d.
(8) Dom Bouqaet, VI, 453 b ; Sickel, Acta Karoltnorum, t. II, p. 84.
(9) Translalio sancti Genulfi episcopi, D. Bouquet, VI, 331 a.
(10) Brambach, n* 512.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 251
dans les fragments d*inscriptions recueillis à la porte noire
de Trêves (1). On a trouvé en Hongrie une dédicace à
Jupiter par Jucundius Juvenalis (2). Une inscription d'Afri-
que sur une borne de champ nous apprend que cette borne
a été placée au temps de l'empire romain par ordre du
praeses Jucundius Peregrinus (3).
Par Jucundiacus ^ on peut expliquer les noms de Janzé
( lUe-et- Vilaine ) ; Janzat (Allier); Jonzac (Charente-Infé-
rieure) ; Jonzieux (Loire).
JuvENCiACUM est le nom d'un palais dont la situation
nous est inconnue et d'où Louis le Débonnaire a daté un
diplôme en 832 (4). L'orthographe primitive a dû être
^Juventiacus,
Juventius est un gentilice romain connu à la fois par les
auteurs et par les inscriptions. Ainsi Tite-Live nous apprend
qu'en l'an 197 avant J.-C, le tribun militaire T. Juventius
pérît dans une bataille contre les Gaulois (5). T. Juventius
Thalna devint préteur en l'an 195 (6). Vers la même épo-
que paraît avoir vécu le poète comique Juventius (7). L. Ju-
ventius Thalna fut lieutenant du préteur Calpurnius en
Espagne, l'an 185 avant notre ère (8). M. Juventius Thalna,
d'abord tribun du peuple, devint préteur l'an 167 avant
notre ère (9), consul en 163, et mourut subitement en célé-
brant un sacrifice (10). Vers le commencement du premier
siècle avant J.-C, dn comptait parmi les disciples du juris-
consulte Q. Mucius Scaevola un certain C. Juventius, et il
(1) Brambach, n* 826.
(2) C. /. L., III, 887.
(3)/bid., VIII, 8811.
(4)Dom Bonquet, VI, 581 c. Sickel, Acta Karolinorum, t. II, p. 178, n» 304.
(5) Tite-Live, livre XXXIII, c. 22.
(6) Tite-Live, livre XXXIV, c. 42, 43.
(7) Voyez les textes réunis par Teuffel , Geschichte der rœmischen Lite-
rafur, 3' cdit., p. 187.
(8) Tite-Live, livre XXXIX, c. 31, 38.
(9) Ibid., livre XLV, c. 16, 21.
(10) C. /. L., t. I, p. 437. Pline, Histoire naturelle, livre VII, } 182.
252 LIVRE IL CHAPITRE IL
acquit lui-môme une autorité dont le souvenir subsistait
encore deux cents ans plus tard comme Tatteste un frag-
ment du jurisconsulte Pomponius (1). Il y eut sous le haut
empire deux autres jurisconsultes du même nom, les deui
Juventius Celsus , père et fils , qui vécurent , l'un vers le
milieu du premier siècle de notre ère (2) , Tautre vers la
fin de ce siècle ou le commencement du suivant ; ce der-
nier laissa d*importants ouvrages dont le Digeste nous a
conservé des débris nombreux ; il fut élevé une fois à la
préture et deux fois au consulat (3).
Ce gentilice pénétra en Gaule, témoin une inscription de
Grenoble où se lisaient les noms de Q. Juventius Victor (4)
et une inscription de Lornay où on lit ceux de G. Juventius
Secundinus (5).
Jouancy, commune du département de l'Yonne, est ap-
pelé Jovenciacum dans un document de Tannée 1157; il
faut corriger * Juventiacus et reconnaître dans ce nom de
lieu un dérivé du gentilice Juventius. La forme gallo-
romaine " Juventiacus avait pour variante proprement ro-
maine JuventianuSy nom d'une villa dépendant de Fabbaye
de Saint- Vaast d'Arras en 867 : nous l'apprenons par un
diplôme de Charles-le-Chauve (6).
JuviNiACus est, suivant la Vie de saint Arnoul, le nom
d'une localité située dans le Soissonnais et où Clovis se
serait rendu après la célèbre victoire contre les Allemands
qui le décida à se convertir au christianisme l'an 496 de
notre ère; on pense que c'est aujourd'hui Juvigny (Aisne) (7).
(1) Pomponius, Liber singul&ris enchiridii^ au Digeste, livre I, titre 2,
loi 2, i 42.
(2) Teuffel, Geschichte derrœmischen Liter&tur, 3* édit., p. 712, 713.
(3) Teuflfel, ibid,, p. 795. Le C, /. L., VI, 20940-20958, nous donne des
exemples de ce gentilice dans les inscriptions de Rome.
(4) Allmer, Inscriptions de Vienne, t. III, p. 147.
(5) Allmer, ibid.. t. III, p. 277.
(6) Dom Bouquet, VIII, 605 a.
(7) Dom Bouquet, III, 383 d. Matton, Dictionnaire topographique du dé-
partement de l'Aisne, p. 146.
LA DÉSINENCE -I-ACU8 AU MOYEN AGE. 253
En 799, Juviniacus est le nom d*un fisctis dont une partie
est cédée par Châriemagne à l'abbaye de Saint-Sauveur
d'Aniane (Hérault) (1) , et cette libéralité est confirmée par
Louis le Débonnaire en 837 (2). Un diplôme de Charles le
Chauve nous apprend qu'il y avait dans le comté de Troyes,
en 877, une villa appelée Juviniacus, aujourd'hui Jeugny
(Aube) (3). Un autre Juviniacus qui aurait été situé dans la
Champagne septentrionale est mentionné dans le polypty-
que de Saint-Remy de Reims; suivant M. Longnon, ce
serait Jouaignes (Aisne) (4). Est-ce le Juveniacum oppidum
d'une lettre de Gerbert qui aurait été écrite en 986 (5)?
Une autre villa Juviniacus était située en M&connais, et
l'église cathédrale de Nevers en devint propriétaire à la fin
du neuvième siècle, ainsi qu'il résulte d'un diplôme émané
du roi Eude en 894 (6).
Juvinitums par deux i ou mieux Juveniacum par un seul z,
vient du gentilice Juvinius, ou mieux Juvenius qui dérive
àejuvenis, jeune, et qui se rencontre quelquefois au temps
de l'empire romain. Une inscription de Gloett, en Bavière,
conserve le souvenir d'un vœu fait à Jupiter, Junon et
Minerve , dans l'espérance de conserver la vie à Juvenius
Speratus (7); le musée de Ratisbonne possède l'inscription
placée sur le tombeau d'une famille dont le chef était
M. Juvenius, ancien porte-étendard de la légion III Ao-
lica (8). La variante Juvinius par deux i correspondant à
Juviniacus nous est mise sous les yeux par une épitaphe
romaine d'Espagne placée sur le tombeau de Juvinia Sabina,
gr&ce aux soins de L. Juvinius (9).
(l)Dom Bouquet, V, 762 a. Sickel, Acta, JSCaroItnorum, t. II, p. 61, n* 159.
(2) Dom Bouquet, VI, 616 b. Sickel, Acta Karolinorum , t. II, p. 194,
r355.
(3) Dom Bouquet, VIII, 659 b,
(4) Longnon, Etude sur les pagi de la Gaule, 2* partie, p. 92.
(5) Dom Bouquet, IX, 291 a. OUeris, Œuvres de Gerbert^ p. 55.
(6) Dom Bouquet, IX, 464 b.
(7) C. /. L., III, 5867,
(8) Ibid., III, 5966.
(9| Ibiff ., n, 495.
254 LIVRE II. CHAPITRE II.
Le nom gallo-romain Juviniacus a perdu, en français,
la syllabe médiale vi dans le nom de Jeugny (Aube) dont
nous avons parlé à la page précédente. Mais ordinairement
la syllabe médiale vi est conservée. Nous citerons comme
exemple du maintien de cette syllabe les deux Juvigny du
département de la Meuse dont l'un possédait une abbaye
de femmes fondée, dit-on, par Richilde, femme de' Char-
les le Chauve (1). Il y a en France sept autres communes
du nom de Juvigny. Nous avons, p. 252, cité Juvigny
(Aisne) ; les autres sont situées dans les départements du
Calvados (2) , de la Manche , de la Marne , de l'Orne et de
la Haute-Savoie, et chacun de ces départements contient
un Juvigny, sauf l'Orne où Ton en compte deux. Juvi-
gnies (Oise) suppose un primitif Juviniacae , sous-entendu
villae ; quant à Juvigné (Maine) , il nous offre la pronon-
ciation occidentale de la désinence -iacus dont Juvignac
(Hérault) nous donne la prononciation méridionale. De ce
relevé il résulte que douze noms de communes en France
représentent Tadjectif dérivé gallo-romain yuvemoctw en en
conservant la seconde syllabe. Un autre au moins a perdu
cette syllabe en traversant les siècles. Quant à Jouai-
gnes (Aisne) , il représente une variante Juveniae, sous-
entendu villae : ici le gentilice , transformé en adjectif,
ne prend pas de sufi&xe.
LiziNiACus est le nom d'une villa mentionnée en 963
dans une charte d'Etienne, évéque de Clermont, en faveur
de l'abbaye de Saint-Julien de Brioude (3). Suivant Ja-
cobs (4) et M. Longnon (5) , cette localité a changé de
nom, et c'est aujourd'hui Saint-Germain-Lembron (Puy-
(1) Liénard, Dictionnaire topogr&phique du département de la Meuse,
p. 118, 119.
(2) Hippeau , Dictionnaire topographique du département du Calvados^
p. 154.
(3) Doniol, Cartulaire de Brioude, p. 341.
(4) Géographie de Grégoire de Tours, 2* édit., p. 130.
(5) Géographie de la Gaule au sixième siècle^ p. 501.
LA DÉSINENCE -1-ACUS AU MOYEN AGE. 1S5
de-Dôme); au dixième siècle, elle n'avait pas d'autre nom
que Lisiniaeua; mais il s'y trouvait une église dédiée à
saint Germain (1). On a dû écrire plus anciennement Liei-
niacus par un c au lieu du s; Grégoire de Tours nous
apprend qu'en l'année 479 , le duc de Septimaniej Victo-
rius , fit construire une basilique dans le Licaniacensis vi-
cus (3) ; Jacobs et M. Longnon proposent de corriger Lici-
macentis (3) et croient qu'il s'agit du vious ou de la villa
qui , dans les chartes précitées , porte le nom de Lisinia-
cai. Un diplôme, émané de Charles le Chauve en 869 (4), nous
parle d'un locus qui portait le même nom : & l'accusatif plu-
riel Lûiniacas dans le comté de Laon ; c'est aujourd'hui
Résigny (Aisne) (5). Une villa Lisiniaca est mentionnée au
onzième siècle dans un cartulaire de l'abbaye de Mo-
léme (Côte-d'Or) (6) ; c'est Léslgny, commune de Mailly-la-
ViUe (Yonne).
Licinius est un des gentilices romains les plus connus.
Un des hommes les plus célèbres qui l'aient porté est le
plébéien C. Licinius Calvus Stolo, gendre du patricien
M. Fabius Ambustus; il a surtout marqué sa place dans
l'histoire romaine par l'influence que, poussé par l'ambi-
tioQ de sa femme , il exerça à la tête des plébéiens , dans
la lutte contre les patriciens , pendant la première moitié
du quatrième siècle avant notre ère (7); il parvint au
consulat l'an 361 avant J.-C. (8). Déjà, avant lui, deux
membres de la même gens, tous deux appelés C. Licinius
Calvus, avaient été élus tribuns militaires avec puis-
(1) Doniol, Carlulalre de Brioude, p. 341.
(31 Grégoire d« Tour», Bistoria Frsncorum, livre II, c. 30, èdit. Arndt,
p. M.
(3) C'Mt la Tariuits A'na muiiiBerït, Voj, Dom Bonqnet, tom. II , p, 171,
not«0.
H) Tardif, Uonumanli hi$torique$, W 199, p. 129.
&) HatloD, Dictioniiaire topographique du liéparUment de l'AUne, p. 239.
(et Qnuitiii, Cart. dt l'Yonne, t. II, p. 20.
m Tito-LiTe, livre VI, c. 34.
^ r. I. L., t. I, p. 510, 511. Tite-Uve, Uvm VU, c. 0.
256 LIVRE II. CHAPITRE II.
sance consulaire, l'un pour Tannée 400 avant notre ère (1),
l'autre pour l'année 396 (2). A une époque moins éloignée
de nous , le gentilice Licinius fut porté par les deux Cras-
sus ; l'un , qui compte parmi les grands orateurs de Rome,
fit fonder, l'an 118 avant notre ère, la colonie de Nar-
bonne, et mourut l'an 91 ; il s'appelait L. Licinius Crassus;
l'autre est le triumvir M. Licinius Crassus qui périt dans la
guerre contre les Parthes, l'an 53 avant J.-C. Son contem-
porain, L. Licinius Murena, consul Tan 62 avant notre ère,
est connu parmi les humanistes, grâce à une éloquente plai-
doirie de Cicéron ; comme L. Licinius Crassus, il porta
son gentilice en Gaule où il fut propréteur en 64 (3).
Les inscriptions de la Gaule nous font connaître plusieurs
exemples de Licinius employé comme nom : à Saint-Pierre-
d'Albigny (Savoie), C. Licinius Calvinus dédie une basilique
à Jupiter (4). A Saint- Alban-du-Rhône, P. Licinius Floridus
élève un monument funèbre à sa femme (5). A Aix-les-
Bains, M. Licinius Ruso fait un vœu au dieu thermal
Bormo (6). Une inscription provenant d'un mur de con-
struction romaine , près d'Annecy , atteste que ce mur était
la propriété de L. Licinius Titurianus (7). On a trouvé à
Nimes l'épitaphe de Licinia Flavilla (8). M. Aimer a derniè-
rement publié une dédicace à Mars par Licinius Myrtillus ;
ce monument a été trouvé à Aire (9).
Outre Résigny (Aisne), plusieurs noms de communes
s'expliquent par le primitif Liciniacus. Nous citerons Lési-
gnat (Charente) , Lésigné (Maine-et-Loire) , deux Lésigny
(Seine-et-Marne, Vienne); Lézignieux (Loire). La variante
(1) Tite-Live, Uvre V, c. 12; C. /. L., t. I, p. 502, 503.
(2) Tite-Live, Uvre V, c. 18 ; C. /. L., t. I, p. 502.
(3) Voyez les textes réunis par M. Desjardins, Géographie de la Gaule ro-
maine, t. II, p. 290, 347-349.
(4) AUmer, Inscriptions de Vienne, t. III, p. 228.
(5) Allmer, ibtd., t. III, p. 103.
(6) AUmer, iMd., t. III, p. 304.
(7) Allmer, ibid.y t. III, p. 343.
(8) AUmer, Revue épigr,^ t. I, p. 392, n* 434.
(9) AUmer, ibid., t. II, p. 161, n* 575.
LA DÉSINENCE -I-ACU8 AU MOYEN AGE. 257
Lieinianw se trouve au Moyen Age, en Italie, dans les char-
tes de Rayonne (1) ; elle est constatée en France par Lézi-
gnan (Aude, Hautes-Pyrénées, Hérault), et par Lusignan
(Vienne) qui s'est écrit au treizième siècle, en français,
Lizegnen (2). Lézinnes (Yonne), s'est appelé, en français,
Lizignes (1234), et en latin Lisigniae (1116), Lisiniae (1080);
on peut corriger Uciniae par un c en sous-entendant domus
an pluriel ; domiâs Liciniae est un équivalent latin de domus
lÀciniaeae ou Licinicmae.
LiLiACus, villa située'dans le pays de Chalon-sur-Saône,
aurait été donnée à l'église Saint-Marcel de Ch&lon en 584 ;
mais le diplôme qui contient cette disposition , bien que
remontant au Moyen Age, est faux (3). Liliacus s'expli-
que par un primitif Laeliacus dérivé de Laelius.
Laelius est le nom d'une gens plébéienne qui arriva au
consulat en 190, dans la personne de C. Laelius, en cette
année collègue de L. Cornélius Scipio, plus tard surnommé
l'Asiatique. C. Laelius est surtout connu par sa liaison avec
le frère de son collègue, c'est-à-dire avec P. Cornélius Scipio
Africanus, vainqueur d'Annibal à Zama, 202 ; il l'accompa-
gna sur tous les champs de bataille et partagea sa gloire.
C. Laelius Sapiens son fils, consul en 140, ami du second
Scipion l'Africain, se trouva avec lui à la prise de Car-
thage, 146, et mourut vers 115 : il est un des personnages
que Cicéron met en scène dans ses dialogues philosophiques.
Les inscriptions nous montrent que ce gentilice pénétra
dans les provinces où il persiste pendant la période impé-
riale. On a recueilli en Espagne les épitaphes de Q. Laelius
Scipio (4) et de M. Laelius Sabinianus (5); à Seckau, en
(1) Fundus Licinianus, Fantnzzi, Monumenti R&venn&ii, t. I, p. 70.
(2) Charte de Tannée 1202, vieux style ; chez L. Delisle, CaLtalogue deê ac-
tes de Philippe-Auguste, p. 173, n* 752. Cf. p. 612 au mot Lusignan,
(3) Pardessus, Dtpjomata, t. I, p. 150; Pertz, Diplomsitum imperii tomus
primus, p. 129, ligne 19.
(4) C. /. L., Il, 347.
(5) Ibtd., II, 4180.
17
258 LIVRE IL CHAPITRE IL !
Styrie, celles de P. Laelius Heracla et de Laelius Vitalis(l\
Liliacus pour * Laeliacus a donné à la France deux noms
de communes : Lilhac (Haute-Garonne) , et Lilly (Eure);
cette dernière localité est appelée Liliacum dans un docu-
ment de Tannée 1157 (2).
LiPiDiACus est le nom d'un pagus d'Auvergne où habita,
enfermé dans une cellule, et où mourut, vers l'année 500,
saint Lupicin, dont Grégoire de Tours raconte l'his-
toire (3). Le vicus chef-lieu de ce pagiLs s'appelait, du nom
de la rivière qui y coule , Berberensis , parce que le nom de
cette rivière, aujourd'hui la Bèbre, affluent de la Loire;
était autrefois Berbera ; M. Longnon a démontré que ce
vicus est probablement Dampierre-sur-Bèbre (Allier).
Tout le monde connaît le cognomen latin Lepidus illustré
par une branche de la gens Aemilia et notamment par le
triumvir M. Aemilius Lepidus, collègue d'Antoine et d'Au-
guste. De Lepidus dérive un gentilice Lepidius moins célè-
bre que le surnom. On le rencontre deux fois dans uoe
inscription d'Espagne (4) ; une fois dans une inscription de
Bulgarie (5). Les exemples n'en sont pas rares en Italie (6).
Il pénétra en Afrique (7) et en Gaule : de nouveaux exem-
ples ont confirmé la lecture proposée par M. AUmer pour
une inscription de Grenoble qui est l'épitaphe du tombeau
élevé par L. Lepidius Basilaeus à sa femme (8).
LuciACus, actuellement Lussac (Charente), est, en 573
(1) C. /. L., III, 5365, 5366.
(2) Blosseville, Dictionnaire topographique du département de l'Eure,
p. 125.
(3) Grégoire de Tours, Vita patrum, c. 13, § 3; édit. Amdt et Krusch ,
p. 716, 1. 33 ; Bordier, Les livres des miracles, t. III, p. 306.
(4) C. /. L., II, 1647.
(5) Ibid., III, 6293.
(6) Voyez C. /. L., VI, 21188-21198, et les index du C. I. L., t. V,p. 1117;
t. IX, p. 716; t. X, p. 1043.
(7) C. /. L., VIII, index, p. 1006.
(8) InscHptions de Vienne, III, 150; C. L L., XII, 2270; cf. 1910,2723.
LA DÉSINENCE -I-AGU8 AU MOYEN AGE. 259
OU 591 , le nom d'une propriété donnée par le prêtre Are-
dius, en français saint Yrieix, à l'abbaye d'Attanum^ au-
jourd'hui 8aint-Yrieix-la-Perche (Haute- Vienne) (1). Un au-
tre locellus appelé Luciacus est légué, en 615, par Bertramne,
évoque du Mans , à la basilique de Saint-Pierre et Saint-
Paul , fondée par lui près de cette ville (2) ; ce doit être
Lucé-sous-Ballon (Sarthe). Une localité appelée Luciacus ,
dans le Parisis, est mentionnée en 846 dans un diplôme de
Charles le Chauve (3). En 855, ce roi donne à l'abbaye de
Saint-Oermain d'Âuxerre une propriété à Liu>iacus , aujour-
d'hui Lucy-le-Bois (Yonne) (4). L'abbaye de Saint-Lucien
de Beauvais reçoit du même prince, en 869, le don de la
villa de Lucic^i^ en Beauvaisis , aujourd'hui Luchy
(Oise) (5). En 885 , un diplôme de l'empereur Charles le
Gros nous montre le chapitre de Toul propriétaire de la
dîme du vin à Litciacus , aujourd'hui Lucey (Meurthe-et-
Moselle) (6).
Lucius, d'où Luciaous dérive, est plus connu comme pré-
nom que comme gentilice. Cependant il était déjà employé
comme gentilice avant la fin de la république, témoin une
inscription de Terracine qui nous fournit les noms de
C. Lucius M. f[ilius] (7) et deux autres inscriptions où la
quantité de la syllabe initiale est indiquée par le double-
ment de Vu : M. Luucius M. f[ilius], à Spolète (8); Sex.
Luucius, Sex. l[ibertus], Caen[us], à Carthagëne en Espa-
gne (9). Dès cette période primitive, nous rencontrons la
(1) Pardessus, DiplomaiitL^ t. I, p. 138. Cf. Mabme, La panctiTte noire de
Sèint'MArtin de Tours^ p. 148.
(2) Pardessus, DiplomaU^ t. I, p. 210.
(3) Tardif, Monuments historiques, n* 150, p. 98.
(4) Dom Bouquet, VIII, 553 b. Cf. Quantin, Dictionnsire topographique
du département de l'Yonne, p. 74.
(5) Dom Bouquet, VIII, 617 b.
(6) Dom Bouquet, IX, 343 b. Cf. Lepage, Dictionnaire topographique du
département de la Meurthe, p. 80.
P) C. I. L., I, n» 1187.
(8) iMcC., I, 1407.
(9) Ibid., I, 1477.
260 LIVRE II. CHAPITRB II.
variante Laccius , avec deux c et probablement avec Tabrè-
gement de Vu dans une inscription du mont Athos (1). Les
deux variantes, Tune par u long et un seul c, Tautre par «
bref et deux c, persistent dans les monuments du temps de
Tempire. Voici quelques exemples de la première : L. Lu-
cius L. l[ibertus] Cimber (2) et M. Lucius M. Ipbertus
Dromo (avec un apex sur Vu pour montrer qu'il est long),
Aquilée (3); M. Lucius Maximas, Parenzo en Istrie (4);
C. Lucius, Saint-Jean-de-Garguier (5), Lucius Sevenis,
Aries (6) , P. Lucius Festus et P. Lncius Auctus , Nar-
bonne (7). La variante Luccius par deux ù est as^z fré-
quente : Q. Luccius Maximus, Carinthie (8); C. Luccius
Alexander, oculiste, dont on a trouvé plusieurs cachets près
d'Utrecht (9); Q. Luccius Faustus, légionnaire dont Tépita-
phe , découverte à Zahlbach , est conservée au musée de
Mayence (10) ; Luccius Marcianus, Apt (11) ; M. Luccius à
Narbonne (12).
L'orthographe par u bref et double c explique probable-
ment Vou de Loucé (Orne), qui suppose un primitif Luccia-
eus. La variante Luciacus par u long et un seul c a dû con-
server son u en français. Elle a donné les noms de
dix-neuf communes , savoir : les deux Luçay du départe-
ment de rindre, Lucé (Eure et-Loir) (13), Lucé-sous-Ballon
(Sarthe) , dont on a parlé plus haut; trois Lucey (Côte-
d'Or, Meurthe-et-Moselle, Savoie), du second desquels
(1) c. l L., I, 579 ; m, 714.
(2) Ibid., V, 8252.
(3) Ibid., V, 994.
(4) Ibid., V, 333.
(5) Ibid., XII, 597.
(6) Ibid., G84.
(7) Ibid., 4581, 4950, 4957, etc.
(8) Ibid., III, 4786.
(9) Brambach, 136.
(10) Brambach, 1180.
(11) C. /. L., XII, 2656. .
(12) /6id.. 4954, etc.
(13) Cf. Mcriet, Dictionnaire topographique du département d'Eure-et-
Loir ^ p. 106, oU l'on voit, en 1116, cette localité appelée Luciacum,
LA DÉSINENCE -I-ÂGUS AU MOYEN AGE. 261
il a été question déjà; six Lucy, un dans l'Aisne, un
dans la Marne, un dans la Seine-Inférieure, trois dans
ITonne dont un mentionné plus haut; Luchy (Oise), déjà
cité ; cinq Lussac , de Tun desquels on a déjà parlé (Cha-
rente, Charente-Inférieure, Gironde, Vienne et Haute-
Vienne) ; deux Lussat (Creuse et Puy-de-Dôme).
A côté de Luciacu^ on trouve la variante Luçianus. Elle
apparaît déjà sous l'empire romain ; il y avait à Veleia un
fundus Lucianus (1). Deux localités du nom de Lacianus
figurent dans les diplômes mérovingiens qu'a publiés
Pardessus, l'une en 615 dans le testament de Bertramne,
évoque du Mans (2), l'autre en 739 dans le testament d'Ab-
bon, en faveur de l'abbaye de la Novaleze en Piémont (3).
Comparez à ces formes anciennes le nom de Lussan, porté
aujourd'hui par trois communes : Gard, Haute-Garonne,
Gers. Celle de ces communes qui est dans le département
de la Haute-Garonne a donné son nom au terminium Lur-
cianense d'une charte de l'abbaye de Lezat (4). Il y a aussi
un fundus Lucianus dans une charte de Ravenne au hui-
tième siècle (5).
LuciLiACus vicus fut fondé, suivant Grégoire de Tours,
sous l'épiscopat de l'évéque Injuriosus (529-546) (6), cela
veut dire certainement que la paroisse fut érigée par ce
prélat; ce vicus est identique à Luzillé (Indre-et-Loire).
Lucilius, d'où Luciliacus dérive, est le nom d'une gens
romaine qui remonte à la république comme l'attestent à
la fois les inscriptions (7) et les auteurs. Il a été illustré
(i) Table alimentaire, p. 4, I. 43.
(2) Tome I, p. 210.
l3) Tome II, p. 374.
(4)Molinier, Géographie historique de la province de Languedoc, col. 141.
(5) Fantuzzi, Monumenti Ravennatiy t. I, p. 13.
(6) Hisioria Francorum, livre X, c. 31, g 15; chez Dom Bouquet, t. II,
p. 388 b; Amdt, p. 447, ligne 13. Cf. Longnon, Géographie de la Gaule au
tixième siècle, p. 276.
(7) C. /. L., I, 408,:896, 1430.
262 LIVRE II. CHAPITRE II.
par le chevalier C. Lucilius mort cent trois ans avant notre
ère , le premier en date des satiriques romains (1). Il était
assez répandu au siècle suivant, car Cicéron, dans ceux de
ses écrits qui nous ont été conservés, parle de six Lucilius
qui semblent avoir été ses contemporains (2) , et l'auteur
du De bello civili mentionne un septième Lucilius parmi les
partisans de Pompée (3).
Lucilius est aussi sous l'empire un nom assez répandu.
On connaît Lucilius Longus, mort Tan 23 de notre ère, in-
time ami de Tempereur Tibère (4) ; Lucilius Capito, procu-
rateur d'Asie à la môme époque (5) ; Lucilius, le correspon-
dant de Sénèque ; Lucilius Bassus, chargé par Vitellius, en
70, du commandement des flottes de Ravenne et de Mi-
sène (6) et qui presque immédiatement, trahissant son
protecteur, embrassa le parti de Vespasien (7). Les inscrip-
tions de la période impériale mentionnent un grand nombre
de Lucilius. Plusieurs de ces inscriptions appartiennent à la
Gaule ; deux sont conservées au musée de Vienne (Isère) ; ce
sont les épitaphes de Lucilius Metrobius (8) et de A. Luci-
lius Cantaber (9).
Le primitif Luciliacus explique , outre le nom de Luzillé
(Indre-et-Loire) , celui de Luzillat (Puy-de-Dôme).
Luliâgus est le nom d'une curtis qui aurait été donnée
à l'abbaye de Saint-Maurice en Valais, par Sigismond, roi
des Burgondes, en 523. Ce diplôme est faux; mais il a été
(1) Teuffel, Geschichte der rœmischen Lt'ferafur, 3* édit. , p. 232 etsuiv.
(2) Les deux plus connus sont les deux Lucilius Balbus appelés Tun Lu-
cius, l'autre Quintus, le premier jurisconsulte , le second philosophe, sur
lesquels on peut voir Teufifel, Geschichte der rœmischen Literalur, 3* édit.,
p. 250, 251, 264.
(3) Oe bello civili, livre I, c. 15; liv. III, c. 82.
(4) Tacite, Annales, livre IV, c. 15.
(5) Ibid.
(6) Ibid.y Histoires^ livre II, c. 100.
(7) Ibid., HistoireSy livre III, c. 12, 36, 40.
(8) AUmer, Inscriplionê de Vienne, t. I, p. 337.
1(9) Ibid., t. II, p. 269. Cf. C. /. L., XII, 447, 456, 1203, etc.
\
LA DÉSINENCE -I-ACUB AU MOYEN AGE. 263
fabriqué fort anciennement (1). Un autre Luliacus , dépen-
dance de Tarchevôché de Reims et où Louis , roi de Ger-
manie, aurait séjourné en 841 , est mentionné par Hincmar
dans sa vie de saint Rémi (2). Luliacus parait tenir lieu d'un
plus ancien * Lolliacus.
LoUius , dont * Lolliacus est dérivé , est un gentilice ro-
main dont les exemples sont nombreux. On a relevé l'indi-
cation d*au moins sept LoUius dans les œuvres de Cicéron.
Au commencement de l'empire , en Tannée 21 avant notre
ère, M. LoUius jouit des honneurs du consulat; c'est une
des causes qui, vers cette époque, le firent chanter par Ho-
race (3); cinq ans plus tard, en Tan 16, il devint légat de
l'empereur Auguste en Germanie, et il s'y fit battre par
les Sicambres, les Usipètes et les Tenctères (4), défaite
honteuse , dit Suétone (5). C'est peut-être à l'influence de
M. LolUus qu'est due la présence du nom de C. LoUius
dans une inscription de la Gaule , à Crombach (Prusse
rhénane) (6). Le potier LoUius, dont on a trouvé la marque
dans diverses parties de l'empire romain, était peut-être
Gaulois (7).
Leuilly (Aisne); Loeuilly (Somme); et Loeuilly (Haute-
Saône), sont chacun un ancien fundus Lolliacus, Pour le
premier on trouve, au douzième siècle, l'orthographe it^/ia-
cum^ Luilliacumy Lulliacu/m avec ti = o comme dans le
Luliacus des textes les plus anciens.
LupiACus , dans un diplôme faux de Clovis I" pour l'ab-
(1) Pardessus, Dtplomata, t. I, 71.
(2) Dom Bouquet, V, 432 c; VII, 345 c.
(3) Horace, Carmina, livre IV, 9, vers 30 et suiv.
(4) Dion Cassius, livre LIV, c, 20; Cougny , Extraits des auteurs grecs,
t. IV, p. 470.
(5) Suétone, Auguste, c. 23.
(6) Brambach, 389. Cf. C. /. L., XII, 4174: 5686, 489.
(7) Les inscriptions funéraires de Rome fournissent de nombreux Lollius
(C. 1, L., VI, 21443-21497).
264 LIVRE II. CHAPITRE II.
baye de Saiat-Pierre-le-Vif de Sens (1), est aujourd'hui
Loupiac (Cantal). Un autre Lupiaoas est mentionné parmi
les propriétés de Saint-Martin de Tours dans un diplôme
donné par Charlemagne en 775 (2). Un troisième Lupiactis
est une villa située en Limousin et dans laquelle était si-
tuée une propriété qu'un certain Avitus donna, en 891, à
l'abbaye de Beaulieu (Corrèze) (3).
iMpiacus est peut-être une variante d*un plus ancien
* Loppiacus. Les noms de L. Loppius Proculus nous ont été
fournis par une inscripticm de Pompéi (4).
Il y a en France cinq communes du nom de Loupiac,
outre celle dont nous venons de parler; elles sont situées
daijs les départements de TAveyron, de la Gironde, du Lot
et du Tarn. Il y a deux Loupiac dans la Gironde , un seul
dans chacun des trois autres départements; Louchy (Al-
lier) a probablement la même origine. Loupian (Hérault),
appelé Lupianus en 990 dans le testament de Guillaume,
vicomte d'Agde (5) , nous offre la forme romaine du gallo-
romain Luppiacus pour ^ Loppiacus. Les trois Louppy du
département de la Meuse ont la môme origine : inutile
de supposer un plus ancien * Loppeiacus dérivé d'un
gentilice perdu * Loppeius (6).
Magniacus est donné à l'abbaye de Saint-Pierve-le-Vif
de Sens dans un diplôme faux qui serait émané , en 569
de Theudechilde, fille de Clovis (7) ; il s'agit probablement
(1) Pardessus, Dfplomata, t. I, p. 39; Pertz, Diplomsitum. imperii tomus
primusj p. 117, ligne 15.
(2) Dom Bouquet, V, 737 b. Cf. Mabille, La pancarte noire de Saint-Mar-
tin de Tours, p. 69, n» xviii; p. 106, n* lxxix; p. 151, n* 18; p. 227. Sickel,
Acta Karolinorum, t. II, p. 27, n« 42.
(3) M. Deloche, Cartulaire de Beaulieu, p. 210.
(4) C. /. L., X, p. 1064, col. 3. De- Vit, Onomasticonf IV, 217, propose un
gentilice Lupius.
(5) Martene, Thésaurus novus anecdotorum , t. I, col. 180. Cf. Eugène
Thomas, Dictionnaire topographique du département de l'Hérault, p. 96.
(6) La plus ancienne orthographe connue est Lopei, Lopeium, Liénard,
Dictionnaire topographique du département de la Meuse, p. 134.
(7) Pertz, Diplomatum imperii tomus primus, p. 133, ligne 26.
LA DÉSINENCE -I-ACUB AU MOYEN AGE. 265
de Magny (Yonne), mentionné sous le même nom dans une
charte de 864 (1). Un autre acte faux attribué à Louis le
Débonnaire prétend que Charlemagne aurait fait à Tabbaye
de Micy présent de l'église dite Magniacus, en Limou-
sin (2). En 835 , un diplôme authentique de Pépin P% roi
d'Aquitaine, en faveur de Tabbaye de Mont-Olieu (Aude),
met dans le pctgiLs Tolosanus une villa Magniacus (3). En
845, un diplôme de Charles le Chauve compte, parmi les
propriétés de l'abbaye de Marmoutiers, une villa Magnia-
cus (4). Un diplôme du môme roi , donné le 20 décem-
bre 858 , est daté de Magniacus , viens situé dans le comté
de Nevers (5). Trois Magniacus apparaissent au dixième et
au onzième siècle dans les chartes relatives au départe-
ment de Maine-et-Loire (6). Une Magniacus villa figure
trois fois dans le cartulaire de Savigny (Rhône) (7).
Magnius, d'où vient Magniacus, est un gentilice qui exis-
tait déjà au temps de la république romaine, comme l'at-
teste une inscription de Spolète , où Ton a lu les noms de
l'afTranchi L. Magnius Alaucus qui exerçait dans cette ville
le métier de foulon (8). On a trouvé en Espagne l'épitaphe
de C. Magnius Martialis (9) et une inscription en l'honneur
du procurateur P. Magnius Rufus Magonianus (10). Une ins-
cription de Trévise provient de la tombe élevée par Ma-
gnius Semnus à sa mère (11). Le même gentilice se rencon-
tre dans les inscriptions funéraires de Rome (12).
Magniacus^ dérivé de Magnius, est devenu dans le midi
(t) Quantin, Dictionnaire topographique du département de l Yonne, p. 75.
\2) Dom Bouquet, VI, 556 b.
(3) Ibid., VI, 673 b,
(4) Ibid., VIII, 474 c.
(5) Ibid., VIII, 552.
(6) Port, Dictionnaire de Maine-et-Loire, t. II, p. 637-639.
(7) Aug. Bernard, Cartulaire de Savigny, p. 147, 262, 269.
(8) C. /. L., I, 1406.
(9) /Md., II, 1706.
(10) Ibid., II, 2029.
(11) IMd., V, 2137.
(12) Ibid,, VI, 21848-21853.
266 LIVRE II. CHAPITRE II.
de la France Magnac ou Manhac. Les communes appelées
Magnac sont au nombre de quatre , deux dans la Charente,
deux dans la Haute- Vienne. Il y a une commune de Ma-
nhac (Aveyron). Dans le nord-ouest, nous trouvons deux
Magné (Deux-Sèvres , Vienne) ; dans le centre , le nord et
le nord-est , vingt-sept communes de Magny réparties en-
tre les départements suivants : Aisne, Doubs, Eure-et-
Loir , Indre , Orne , Seine-et-Marne , Vosges , Yonne , cha-
cun une ; Nièvre , Seine-et-Oise , chacun deux ; Calvados ,
trois ; Haute-Saône , cinq ; Côte-d*Or, sept. A Test de Lyon.
Magniacus devient Magnieu (Ain). Il y a donc en France
trente-cinq noms de communes qui s'expliquent par un
primitif Magniacus. On peut ajouter Montmagny (Seine-et-
Oise), mons Magniacus dans une charte de la fin du onzième
siècle (1). La variante romaine Magnianus est représentée
par Magnan (Gers), et par Magnien (Côte-d'Or).
Malliagus, plus tard Maillé, puis du nom de ses ducs,
depuis le dix-septième siècle, Luynes, avait, au temps de
Grégoire de Tours, c'est-à-dire au sixième siècle, un monas-
tère entouré de vieux édifices en ruines (2). Un autre Mal-
liacus, situé dans le Berry, à deux milles du Cher, appa-
raît dans un diplôme faux que le roi Dagobert I" aurait
donné à Tabbaye de Saint-Denis , en 635 (3). Un troisième
Malliacus^ au pays d'Arcis (Aube), fut donné à la cathédrale
de Châlons-sur-Marne par un bienfaiteur dont Charles le
Chauve confirma la libéralité en 859 (4).
Mallius est un gentilice souvent confondu avec Manlius.
Cn. Mallius fut consul Tan 105 avant notre ère. L'ortho-
(1) Robert de Lasteyrie, Cartulatre de Paris^ p. 151.
(2) Grégoire de Tours , De gloriSL confessorum , c. 21, chez Bordier, Les
livres des miracles, t. II, p. 384; édit. Arndt et Krusch , p. 760, 1. 18. Cf.
Longnon, Géographie de la Gaule au sixième siècle, p. 277.
(3) Pardessus, Dtplomata, t. II, p. 36. Pertz, Diplomatum imperii tomus
primuSy p. 155, ligne 43.
(4) H. d'Ârbois de JubainviUe, Pout'Hé du diocèse de Troyes, p. 312. Cf. Boa-
tiot et Socard, Dictionnaire topographique du département de l'Aube, p. 90.
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LA DÉSINENCE -I-ACUB AU MOYEN AGE. 267
graphe exacte de son nom , — écrit Manlius et Manilîus
chez certains auteurs, tandis que d'autres écrivent Mai-
llas (1) , — est donnée par une inscription de Pouzzoles ,
aujourd'hui conservée au musée de Naples, en tête de la-
quelle on lit : P Rutilio, Cn Mallio cos (2). Cicéron, dans
son discours pro Cn, Plancio, parle de Cn. Mallius avec le
plus profond mépris : C'était , dit-il , un homme sans mé-
rite ni talent et d'une vie honteuse (3). Un autre Mallius
était centurion et partisan de Catilina (4). Ce gentilice se
rencontre dans les inscriptions de l'époque impériale : on
a trouvé à Worms une dédicace à Jupiter par Mallius Fo-
fio (5); deux inscriptions d'Espagne nous fournissent les
noms de l'affranchie Mallia Galla (6) et de P. Malins For-
tunatus (7). Dans ce dernier monument , Malins est écrit
avec une seule / ; on trouve la même orthographe dans
Vépitaphe de Malia Severa, récemment trouvée à Allègre
(Gard) (8).
Outre le nom de Mailly (Aube), dont nous avons parlé
déjà, Malliaciis a donné à la France moderne les noms de
communes suivants : trois Maillé (Indre-et-Loire, Vendée,
Vienne); un Mailley (Haute-Saône); huit Mailly : les dépar-
tements de la Côte-d'Or, de la Marne, de Meurthe-et-Mo-
selle , de Saône-et-Loire en possèdent un chacun ; il y eri
a deux dans la Somme et autant dans l'Yonne; en ajoutant
Mailhac (Aude), et Mailhac (Haute-Vienne), on trouve en
France seize communes dont le nom remonte à un primi-
tif Malliaous. Maillanne (Bouches-du-Rhône) est une an-
cienne villa Malliana, Une charte de Ravenne, écrite vers
Tannée 700, nous offre un fundus Mallianus (9).
(1) C. /. L., t. I, p. 536-537.
P) /Md., t. I, n* 5T7 ; t. X, n* 1781.
(3) Pro Cn, Pl&ncio^ c. 5, { 12.
(4) Première Catilinaire, c. 3, { 7. Cf. Balluste, C&tilina, c. 30.
(5) Brambach, 881.
(6) C. /. L., II, 558.
(7) /Wd., II, 4970, 292.
(8) Allmer, Revue épigr&phique, t. II, p. 78, n* 515. Cf. C. /. L., XII, 4466.
(9) FantQzzi, Monumenti R&vennati^ t. I, p. 62.
268 LIVRE II. CHAPITRE II.
Mangiâgus, nom d'une villa donnée à la basilique de
Saint-Germain du Mans, en 615, par le testament de
Tévéque Bertramne (1) , a dû s'écrire primitivement * Man-
tiacus.
Ce nom de lieu dérive du gentilice Mantius. Sur une
pierre découverte près de Vintimille, on lit les noms de
Q. Mantius Placidus, édile, duumvir, et prêtre de Lanu-
vium (2). A Saint-Pons (Alpes-Maritimes) se trouve Tépi-
taphe de G. Mantius Paternus, duumvir et flamine (3). Le
musée de Tebessa, en Algérie, possède une inscription qui
contient une dédicace à Jupiter, et dans laquelle on lit le
nom de Q. Mantius (4). Il existe à Lambessa l'épitapbe de
la femme du légionnaire Mantius Hispanus faite aux frais
de L. Mantius Caecilianus , son fils (5) et l'épitaphe de
L. Mantius Victorinus (6).
Mantiacus est probablement la forme primitive du nom
des communes de Maincy (Seine-et-Marne), Mancey (Saôoe-
et-Loire), Mancy (Marne).
* Marcelldlcus , dont le dérivé Marcelliacenses se lit dans
un diplôme attribué à Domnolus, évoque du Mans au
sixième siècle, — diplôme certainement interpolé (7) , — se
rapporte probablement dans ce texte à Marcillé (Mayenne).
On trouve plus souvent Marcilliacus ou Marciliacus.
Ainsi une vie de saint Didier, évéque de Cahors, écrite au
septième siècle, raconte la fondation de Tabbaye de Mar-
cillac qu'elle appelle Marcilliacense coenobium (8). En 834, un
diplôme de Louis le Débonnaire nous montre, aux environs
(1) Pardessus, Diplom&ta, t. I, p. 209.
(2) C. /. L., V, 7814.
(3) /6id., V, 7913.
(4) Ibid.y VIII, 1839.
(5) Ibid., VIII, 2939.
(6) Ibid., VIII, 3886. Cf. XII, 708, 2717.
(7) Pardessus, Diplom&ta^ t. I, p. 134.
(8) Dom Bouquet, III, 531 c.
LA DËSINBKOE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 26»
de Langres une villa appelée Maroilliacus (1), aujourd'hui
Marcilly (Haute-Marne).
Maroiliacus est le nom d'une dépendance de Tabbaye de
Moissac, dans un diplôme de Pépin II, roi d'Aquitaine, en
844 (2). En 867 , un diplôme de Charles le Chauve men-
tioBoe une villa Maroiliacus parmi les localités où l'abbaye
de Saint-Amand de Tournay était propriétaire (3).
De ces trois orthographes , Uarcelliacus , Marcilliacus et
Marciliacus , la plus ancienne est Uarcelliacus. Ce nom dé-
rive du gentilice assez rare Marcellius qui , lui-même , est
dérivé du cognom&n Marcellus illustré par plusieurs mem-
bres de la gens Claudia. Le musée de Milan possède une
dédicace à Hercule par Q. Marcellius Rufinus (4). Une
inscription de Novare nous fournit les noms de Marcellius
Marcellinus (5). Ce gentilice apparaît au génitif Marcellii
dans une inscription de Milan (6). On a trouvé à Echa-
gnieu l'épitaphe de Marcellia Catta posée par ordre de son
père et de sa mère Marcellius Ingenuus et Marcellia Pe-
troniana (7).
Marcelliacfês est devenu en France Marcillac , Marcillat ,
Marcillé, Marcilly et Marsilly. Il y a sept communes de
Marcillac, savoir : deux dans la Corrèze , et une dans cha-
cun des cinq départements de l'Aveyron , de la Charente ,
de la Dordogne, de la Gironde et du Lot; deux commu-
nes de Marcillat , l'une dans l'Allier , l'autre dans le Puy-
de-Dôme; trois communes de Marcillé dont une dans la
Mayenne et deux dans l'IUe-et- Vilaine ; dix-sept commu-
nes de Marcilly dans les départements suivants, savoir :
Côte-d'Or, Eure, Loir-et-Cher et Saône-et-Loire qui en
(1) Doin Bouqaet, VI, 595 e. Cf. Sickel, AcU K&rolinorum , t. II, p. 183,
n»322.
(2) Dom Bouquet, VIII, 357 a.
(3) Dom Bouquet, VIII, 604 a.
(4) C. /. L., t. V, p. 1085, n* 5642.
(5) i6id., V, 6543 a.
(6) /Wd., V, 6038.
Ç) AUmer, Inscriptiong de Vienne, t. III, p. 449.
270 LIVRE II. CHAPITRB 11.
contiennent chacun deux; Aube, Cher, Indre-et-Loire,
Isère , Loire, Loiret , Manche, Haute- Marne, Rhône, Seine-
et-Marne qui en contiennent une chacun. Marsilly (Cha-
rente-Inférieure) a la même origine; cela fait trente com-
munes dont le nom primitif est Marcelliacus , Les trois
communes de Marseillan (Gers , Hérault, Hautes-Pyrénées)
doivent être d'anciens fundi Marcelliani , avec la désinence
romaine -anus au lieu de la désinence gallo-romaine -acus.
On trouve la variante fundus Marcilianus dans une charte
de Ravenne, au neuvième siècle (1). .
De *Maiigiacus dérive Fadjectif marctac^rww, épithète de
domus , et qui , chez Grégoire de Tours , désigne une loca-
lité de l'Auvergne ; il s'y trouvait une chapelle de la Vierge
où l'historien Grégoire de Tours raconte qu'il alla prier (2);
c'est aujourd'hui Marsat (Puy-de-Dôme) (3), qu'on recon-
naît aussi dans la villa Marciagus,.. in pago Arvemico, d'un
diplôme de Pépin P% roi d'Aquitaine , en 828 (4) et dans le
MarciactAS d'un diplôme de Charles le Chauve en 869 (5).
Une villa Marciacensis ^ comme nous l'apprend Grégoire
de Tours , était de son temps située dans le territoire de
Bordeaux, et avait une église dédiée à saint Martin , elle a
été reconnue identique à Marsas (Gironde) (6). Un ager
Marciacensis^ en M&connais, figure d'abord en 898, et plu-
sieurs fois ensuite au dixième siècle , dans les chartes de
l'abbaye de Cluny (7), c'est Saint-Jean de Merzé, commune
de Cortambert. Une charte du dixième siècle provenant de
(1) Fantuzzi, Monumenti Ravenn&ti, t. I, p. 55. Cf. ci-dessus, p. 145.
(2) De gloria, martyrum, c. 9; Bordier, Les livres des miracles, 1. 1, p. 28,
29; chez Amdt et Krusch, c. 8. p. 493, 1. 20.
(S) Longnon, Géographie de la Gaule au sixième siècle, p. 504.
(4) Dom Bouquet, VI, 666 e.
(5) Ibid., VIII, 613 b.
(6) De virtutibus sancti Martini^ livre III, c. 33 ; chez Bordier, Les livres
des miracles, t. II, p. 234; Amdt et Krusch« p. 640, 1. 16. Cf. Longnon, Géo-
graphie de la Gaule au stjctème siècle, p. 547.
(7) Bruel, Recueil des chartes de l'abbaye de Cluny -^ 1. 1, p. 72-73 , 186
209,226,227.
LA DÉSINENCE -I-ACU8 AU MOYEN AGE. 271
la même abbaye mentionne une Marciacus villa au comté
de Ch&lon-sur-Sadne (1). Dans les textes de la basse lati-
nité, il n'y a pas de distinction à faire entre Torthographe
Ma/rciaçus par un c qu'on trouve dans les documents pré-
cités et l'orthographe Martiacus par un t qu'on rencontre
dans la vie de saint Melaine , évéque de Rennes , contem-
porain du roi Clovis l" : dans cette vie, Martiacus est le
nom d'un castrum situé dans le Vannetais (2) ; on prononce
aujourd'hui Marsac; c'est un villaga qui fait partie de la
commune de Carentoir (Morbihan) (3). Martiacus est aussi,
en 993, dans les titres de la cathédrale d'Âutun, le nom
d'un village du département de la Côte-d'Or , Mercey ,
commune de Saint-Prix-lès-Arnay (4).
Le Marciacus ou Martiacus du moyen âge dérive du gen-
tilice Marcius ou du gentilice Martius,
On trouve dans les textes latins ces deux gentilices.
Marcius est le plus ancien des deux; il dérive du prénom
Marcus et il est le seul qu'on rencontre dans les inscrip-
tions antérieures à la période impériale (5). Parmi les nom-
breux Marcius dont l'histoire de la république romaine nous
a conservé le souvenir, nous citerons C. Marcius Rutilus,
([uatre fois consul, de l'an 357 à l'an 342 avant J.-C. Il
était d'origine plébéienne , ce qui ne l'empôcha pas d'être
élevé à la dictature et d'être élu censeur, dignités auxquel-
les aucun plébéien n'était parvenu avant lui (6). Il obtint
deux fois les honneurs triomphaux (7). Un autre C. Mar-
cius Rutilus , consul en 310 (8) , fut nommé pontife
en 300 (9); censeur quelques années plus tard, il fit avec
(1) Brael, Recueil, t. I, p. 965.
(2) Dom Bouquet, t. III, p. 395.
(3) Longnon, Atlas historique de la France, texte explicatif, 1"* livraison,
p. 29.
(4) Gamier, Nomenclature historique, p. 75, n* 314.
(5) Voyez les exemples réunis dans le C. 7. L., t. I, index, p. 585, col. 3.
(6) Tite-Li?e, livre VII, c. 16, 17, 21, 22, 28, 38. Cf. C. /. L., 1. 1, p. 510-513.
(7) C. /. L,, 1. 1, p. 455.
(8) Titc-Live, livre IX, c. 33.
(9) ma., Uvre X, c. 9.
1
272 LIVRE IL CHAPITRE IL
son collègue le dix-neuvième recensement de la popula-
tion de Rome. C'était en 293 (I). Un autre membre de la
gens Marcia ., Q. Marcius Tremulus , consul en 306 , battit
les Herniques , et obtint les honneurs du triomphe (2). A
une date moins éloignée , Q. Marcius Philippus fut deux
fois élevé au consulat : la première en 186, la seconde
en 169 (3) ; battu honteusement par les Ligures , il laissa
son nom au théâtre de sa défaite , saltw Marcius (4) ; il y
a une monnaie romaine frappée à son nom (5). D'autres
monnaies portent le nom de C. Marcius Censorinus, consul
Tan 8 avant J.-C. (6).
Le gentilice Marcius est des plus répandus dans les
inscriptions du temps de Tempire. On en a trouvé, sans
compter les femmes, vingt-sept exemples en Espagne,
trente-neuf en Afrique , quatre en Grande-Bretagne. On le
rencontre aussi en Gaule; le musée de Lyon possède une
inscription que Q. Marcius Donatianus fit graver en Thon-
neur d'un procurateur des provinces de Lyonnaise et
d'Aquitaine; il était attaché k ce personnage en qualité
à!eques cornicularius (7). Une inscription de Grésy-sur-
Isère (Savoie) , est Tépitaphe que s'est fait graver de son
vivant T. Marcius Taurinus, tribun militaire de la sixième
légion victriw (8). On a trouvé à Marseille l'épitaphe de D.
Marcius Ingenuus et de Marcius Lenaeus (9) ; aux Vans ,
celle de D. Marcius Félix (10); à Nimes, celle de C. Marcius
Philologus (il) et de C. Marcius Cosmio (12); à Narbonne,
(î) Tite-Uve, livre X, c. 47.
(2) Ibid., livre IX, c. 42, 43. C. I. L., t. I, p. 456, 515.
(3) Ibid,, livre XXXIX, c. 6; 1. XLIII, c. 13. C. /. L., t. I, p. 526-529.
(4) Ibid., livre XXXIX, c. 20.
(5) C. /. L., t. I, p 133, n* 354.
(6) Ibid., p. 137, n* 432 ; cf. p. 546, 547. Cf, XII, 2623.
(7) Boissieu, Inscriptions de Lyon, p. 236.
(8) AUmer, InscHptions de Vienne, t. II, p. 229 ; C. I. L., XII, 2456.
(9) C. /. L., XII, 450-451.
(10) Ibid,, 2717.
(11) Ibid., 3251.
(12) Ibid., 3991.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 273
celles de M. Marcius Rufus (1), de P. Marcius Alexander (2) ,
de S. Marcius Anteros (3). Les noms de Marcius Modestus
sont conservés par une inscription de Gebensdorf, en
Suisse (4). On a trouvé près d'Aix-la-Chapelle une inscription
qui rappelait la construction d'un temple par L. Marcius
Similis (5). Le musée de Bonn a une inscription qui pro-
vient des environs de Cologne et constate Tacqùittement
d'un vœu par L. Marcius Verecundus, légionnaire (6).
Quelques inscriptions nous offrent l'orthographe Martius.
Telle est, en Alsace, celle qui nous apprend que Q. Mar-
tius Optatus avait, par son testament, fait élever une
colonne et une statue pour rendre honneur à la maison
impériale , au génie du vicus Ccmabbarum et aux vicani
Canabbenses (7). Des inscriptions du musée de Mayence
conservent les noms de Martius Marcellus (8) et de Martius
Severus (9). Il existe au musée de Bonn une inscription
datée de l'an 230 et qui est une dédicace à Jupiter par
Martius Victor, porte-étendard de la légion trente Severiana
Alexandria (10). Une épitaphe de Virieu-le-Grand (Ain) a
été gravée par Tordre de Martius Saturhus (11). Une in-
scription d'Arles fournit les noms de Martius Victor (12),
une de Narbonne, celle de Martius Diogenes (13).
L'orthographe Martius ne peut s'expliquer dans les textes
les plus anciens que par un dérivé du nom du dieu Mars ;
car dans les monuments de la bonne latinité la confusion
entre les groupes ciu et tiu est impossible. Il semble
(I) C. L L., XU, 4365.
P) Ibid., 4685.
(3) ma., 4978.
(4) Hoi&mëen, Inscriptiones hêlveticAe, n* 254.
(5) Brambach, n* 637.
(6) /6id., n« 541.
(7) Ibid., n* 1891. Cf. C. I. L., t. III, p. 183, n* 1008*.
(8) ibid,, H» 1330:
(9) Ibid., n* 1331 a.
(10) Ibid.y n* 202.
(II) Allmer, Inscriptions de Vienne^ t. III, p. 399.
(12) C. /.L., XII, 850.
(13) /Wd., 4983.
18
274 LIVRE IL CHAPITRE IL
difficile d'admettre que cette confusion ait été faite dans
l'inscription d'Iglitza, aujourd'hui à la Bibliothèque Natio-
nale de Paris ; cette inscription a été gravée entre les
années 161 et 169 : nous y lisons les noms dun lieutenant
impérial, au génitif Marti Veri ; il s'agit de P. Martius Ve-
rus qui fut consul en 179 (1).
De Marciacus ou Martiacus viennent les noms de com-
munes suivants : Marçay (Indre-et-Loire), Marçay (Vienne);
Marcé (Indre-et-Loire), Marcé (Maine-et-Loire), Marcé (Man-
che) ; Marcey (Orne) ; Marciac (Gers) ; Marcieu (Isère) ; Mar-
cieux (Savoie) ; deux Marcy dans l'Aisne , autant dans le
Rhône , un dans la Nièvre ; sept Marsac (Charente , Creuse,
Dordogne, Loire-Inférieure, Puy-de-Dôme, Hautes-Pyré-
nées, Tarn-et-Garonne) ; trois Marsas (Drôme, Gironde,
Hautes-Pyrénées) ; Marsac (Tarn) ; Maxey-sur-Vaize (Meuse),
appelé Marcey au quatorzième siècle (2) ; Maxey-sur-Meuse
(Vosges) ; deux Mercy (Meurthe-et-Moselle) et un Mercy
(Lorraine allemande), pour lesquels on a Torthographe
plus ancienne Marciacus et Marceium (3). On peut ratta-
cher à la même -origine Mercy (Allier), Mercy (Yonne^
et les trois Mercey de TEure , du Doubs et de la Haute-
Saône. Nous avons ainsi en France trente quatre noms
dé communes qui supposent un primitif Marciacus ou
Martiacus.
La forme romaine de cet adjectif, marcianys ou martia-
riAjis se rencontre au féminin singulier, Marciana villa^ dans
deux documents conservés par les archives de Saint- Victor
de Marseille, Tun de 814 (4), l'autre du dixième siècle (5j.
Elle nous est donnée , à l'accusatif féminin pluriel , par le
nom de Marchiennes (Nord), villas ou domos Marcianas;
(1) C. /. L., m, 6169.
(2) Liénard, Dictionnaire topogr&phique du département de U Meuse ^
p. 145.
(3) Bouteiller, Dictionnaire topographique du département de la Mo-
selle, p. 165, 16G.
(4) Gucrard, Cart, de Saint-Victor, t. II, p. 636.
(5) Ibid., t. I, p. 309.
LA DÉSINENCE -I-ACU8 AU MOYEN AGE. 275
à raccusatif masculia singulier, par Marsan (Gers), /tm-
dum Marcianv/m ou Martianum : les deux se lisent dans
les chartes de Ravenne (1).
Les Romains disaient aussi, comme nous l'apprend Tite-
Uye , saltus Mordus , en transformant le gentilice en ad-
jectif, et en le faisant accorder avec un nom commun.
Maixe (Meurthe-et-Moselle), dont la prononciation vulgaire
est Mâche , en donnant à ch le son de gutturale spirante ,
s'est écrit Marches du douzième siècle au quinzième (2) et
peut s'expliquer par un primitif ifarciaa, sous-entendu domus
ou villae. L'a? a , dans ce mot , la même valeur étymolo-
gique que dans Maxey-sur-Meuse et Maxey-sur-Vaize.
Le ligure * Marcioscus , au dixième siècle Marzoscus (3) ,
ne diffère que par le sufiBbce du gallo-romain Marciacus et
du latin Marcianus.
Mariagus est le nom d'une villa où Raoul, archevêque
de Bourges , avait des propriétés qu'il donna à l'abbaye de
Dèvre , près Vierzon (Cher) , comme nous l'apprend un di-
plôme de Charles le Chauve (4). Un lieu appelé Mariacus,
dans le pays de Nimes , est mentionné dans un diplôme
de Charles le Chauve en 845 (5). Un autre Mariacus^ situé,
soit en Franche-Comté, soit en Suisse, soit dans les envi-
rons de Lyon , apparaît en 866 dans un diplôme de Lo-
thaire , roi de Lorraine (6).
Mariacus est dérivé de Marins, gentilice romain, illus-
tré par le vainqueur des Cimbres. Il fut usité en Gaule
comme l'atteste le savant recueil des inscriptions antiques
de Vienne par M. AUmer; on y voit réunis neuf exemples
du nom Marins ; trois sont fournis par une inscription du
(1) Fantuzzi, Monumenti Ravennatiy t. I, p. 36.
(2) Lepage, Dictionnaire topographique du département de la Meurthe,
p. 84.
(3) Gaérard, Cartulaire de Saint-Victor de Marseille, t. I, p. 591.
(4) Dom Bouquet, t. VIII, p. 447 6. .
(5) Ibid., t VIII, p. 467 b.
(6) /Wd., t. VIII, p. 412 d.
27G LIVRE II. CHAPITRE II.
musée de Vienne où sont mentionnés Tédile Sex. Marius
Navus (1) et deux personnages dont la qualité n'est pas in-
diquée et qui s'appelaient tous deux D. Marins Martinus (t;
à Aix-les-Bains on a conservé Tépitaphe de M. Marius Ta-
racio (3); sur une épitaphe de Lyon on lit les noms de
T. Marius Tiro (4), etc.
C'est de Mariaous que vient une partie des noms des
communes appelées Maire, Mairy, Maray, Marey, Ma-
riac, Mérey, Méry. Ces communes sont au nombre de
vingt-quatre, savoir : deux Maire (Deux-Sèvres, Vienne»;
trois Mairy (Ardennes, Marne, Meurthe-et-Moselle); Maray
(Loir-et-Cher) ; trois Marey , dont deux dans la Côte-d'Or
et un dans les Vosges; Mariac (Ardèche); deux Méré
(Seine-et-Oise , Yonne) ; trois Mérey , dont deux dans le
Doubs, un dans l'Eure; neuf Méry, deux dans le Cher,
un dans chacun des département de TAube, du Calvados,
de la Marne , de l'Oise , de la Savoie , de Seine-et-Marne
et de Seine-et-Oise. Plusieurs de ces noms de lieux ont pu
perdre une dentale avant IV et doivent en ce cas s'expli-
quer par un primitif *Matriacus^ écrit Madriacus dès l'époque
mérovingienne , comme l'attestent les diplômes relatifs au
pagus Madriacensis.
La forme latine correspondant à Mariacus est celle du
fundus Mariarms^ qu'on trouve au Moyen Age dans les
chartes de Ravenne (5).
Mariniacus est une curtis située dans le royaume des
Burgundes suivant un diplôme qui aurait été donné par le
roi Sigismond en 523 et dont l'authenticité est contestée (6).
En 667, Leodebodus, abbé de Saint-Aignan d'Orléans,
donne à son abbaye une portion de terre appelée Mari-
(1) Allmer» Inscriptions de Vienne^ t. II, p. 261.
(2) Allmor, ihid., t. II, p. 261.
(3) AHmer, ibid., t. III, p. 311.
(4) Allmer, ibid,, t. III, p. 29.
(5) Fantuzzi, Monumenti Ravennali, t. I, p. 19, 20.
{('}) Pardessus, Diploynaia, t. I, p. 70.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 277
niacus et située dans le territoire de Bourges (1). Une villa
Mariniacus est donnée à la cathédrale d'Âutun , par saint
Léger, évoque de cette ville, aux termes d'un testament
qui daterait de 676, mais qui a dû être fabriqué au neu-
vième siècle (2) ; ce Mariniacus enlevé à cette église lui est
rendu en 883 par le roi Karloman (3) ; et le pape Jean X ,
dans une bulle de l'année 919, comprend Mariniacus parmi
les propriétés de la cathédrale d'Autun (4) ; il s'agit proba-
blement de Marigny (Saône-et-Loire). Un autre Mariniacus
est mentionné dans l'acte de fondation de l'hôpital de Pont-
sur-Seine par Alcuin , vers l'année 804 (5) ; c'est aujour-
d'hui Marigny-le-Châtel (Aube).
Mariniacus dérive de Marinius , gentilice romain , dérivé
lui-même du surnom Marinus. Marinius, qu'on ne trouve
pas à Rome dans les documents du temps de la républi-
que , se rencontre parfois en Gaule sous l'empire. On a
recueilli à Vienne l'épitaphe du grammairien L. Marinius
Italicensis dont le fils s'appelait Marinius Claudianus (6).
A Lyon , a été découverte l'inscription du monument élevé
par Marinius Demetrius à sa sœur Marinia (7). Un légion-
naire d'origine probablement gauloise, L. Marinius Mari-
niacus, éleva sur la rive droite du Rhin, non loin de
Mayence, une stèle en l'honneur de la maison impériale
et du dieu gaulois ApoUo Toutiorix (8).
C'est par un primitif Mariniacus, dérivé de Marinius,
que s'expliquent probablement la plupart des trente-trois
noms de communes suivants : cinqjMarignac, dont deux
dans la Haute-Garonne, et les trois autres dans la Cha-
(1) Pardessus, ibid,, t. II, p. 143.
(2) Pardessus, ibid., t. II, p. 174.
(3) Dom Bonqnet, IX, 430 c.
(4) Ibid, IX, 215 a.
(5) Mabillon, Acta. sanctorum ordinis s&ncti Benedicti , sect. IV, part. I ,
p. 177. Migne, Pairologia latina, t. C, col. 71 b; t. CI, col. 1432 c. Cf. Ma-
bille, La pancarte noire de Saint-Martin de Tours, p. 153, 228.
(6) Allmer, InscripiionB de Vienne, t. II, p. 537.
(7) Boissieu, Inscriptions antiques de Lyon, p. 516.
(8) Brambach, n* 1529.
278 LIVRE II. CHAPITRE II.
rente-Inférieure , la Drôme et Tarn-et-Garonne ; deux Ma-
rigna (Haute-Garonne, Jura) ; deux Marigné (Maine-et-Loire,
Sarthe) ; Marignier (Haute- Savoie); dix-sept Marigny; il
y en a deux dans la Côte-d'Or, deux dans la Nièvre et
deux dans la Vienne; un dans chacun des départements
suivants : Aisne, Allier, Aube, Deux-Sèvres, Indre-et-
Loire, Jura, Loiret, Manche, Marne, Saône-et-Loire ,
Haute-Savoie; trois Mérignac (Charente, Charente-Infé-
rieure, Gironde); Mérignas (Gironde); deux Mérignat (Ain,
Creuse); Mérigny (Indre).
Toutefois, parmi ces noms modernes, un certain nombre
peut s'expliquer par un primitif Matriniacus (1) , tout aussi
bien que par Mariniacus,
En regard du gallo-romain Mariniacus, se place l'adjectif
latin marinianus qui a été étudié plus haut (2).
De Martiniacus dérive Tadjectif marUniacensis , qui
sert d'épithète à villa ^ dans un passage de Grégoire de
Tours ; là ces deux mots désignent une localité située prés
de Tours (3) , aujourd'hui Martigny , commune de Fondet-
tes (Indre-et-Loire) (4). Une autre villa Martiniacus est don-
née par Hadoind , évoque du Mans , à la basilique Saint-
Pierre et Saint-Paul de cette ville, en 642 (5). Une
troisième localité appelée Martiniacus, située dans le Co-
tentin , est mentionnée dans un acte du commencement
du huitième siècle qui nous a été conservé par le cartu-
laire de Saint-Florent-le- Vieil , au diocèse d'Angers (6).
(1) Mamay (Aube), appelé MadrinîAcus au neuvième siècle , est un anti-
que Matriniacus. Boutiot et Socard, Dictionnaire topographique du dépir-
tentent de l'Aube, p. 93. U y a un Madriniacus dans le Cartulaire de Beau-
lieu, publié par M. Deloche; c'est Mayrinhac (Lot). Des exemples da
gentilice Matrinius ont été recueillis par De-vit, Onomasticon, t. IV^ p. 400.
(2) Voir ci-dessus, p. 164.
(3) Gloria confessorum, % 8; chez Bordier, Les livres des miracles, t. II,
p. 3^8; chez Arndt et Krusch, p. 753, 1. 16-17.
(4) Longnon, Géographie de la Gaule au sixième siècle^ p. 279.
(5) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 70.
(6) Pardessus, ibid,, t. II, p. 450.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 279
Une monnaie mérovingienne porte en légende le nom de
lieu Martiniaco (1). Plus tard Martiniacus est une des villae
dans lesquelles Féglise cathédrale du Mans a droit de dîme,
suivant un diplôme donné par Charlemagne en 802 (2).
Dans le pays de Nimes il y avait , en 845 , une colonica ap-
pelée à la fois Amantianicus et Martiniacus qui appartenait
alors à l'abbaye de Psalmodi , suivant un diplôme de Char-
les le Chauve (3).
Le gentilice Martinius, d'où vient Martiniacus y est rare.
On en a cependant recueilli quelques exemples. L'un nous
est fourni par le cachet de Toculiste Sp. Martinius Ablaptus,
trouvé à Vieux (Calvados), et conservé au musée de
Caen (4). Une femme , appelée Martinia Martiname , figure
dans une inscription votive de Tan 276 de notre ère ; ce
monument a été découvert à Mayence, et il est conservé
au musée de cette ville (5). Les noms de Mar[ti]nius Seno-
condus se lisent sur une table de marbre qui appartient au
même musée (6). Une épitaphe trouvée à Lyon a été
gravée par Tordre d'une femme appelée Martinia Lea (7).
Ce gentilice dérive du cognomen beaucoup plus fréquent ,
Marlinus ; un exemple du procédé nous est offert par une
inscription de Worms : c'est Tépitaphe de C. Candidius
Martinus ; sa fille y est nommée ; elle s'appelle Candidia
sive Martinia Dignilla (8).
C'est par Martiniacus que s'expliquent en France qua-
torze noms de communes : Martigna (Jura) ; Martignas
(Gironde) ; Martignat (Ain) ; trois Martigné (lUe-et- Vilaine ,
(1) A. de BarUiélemy, dans la Bibliothèque de l'Ecole des chartes y
t. XXVI, p. 458.
(2) Dom Bouquet , V , 769 a ; cf. Sickel , Àcta Karolinorum , t. II , p. 67 ,
!!• 181.
(3) Dom Bouquet. VIII, 467 6.
(4) Héron de Villefosse et Thédenat / Cachets d'oculistes romains, t. I,
p. 116. 117.
(5) Brambach, n» 1130.
(6) Ibid., n« 1330.
(!) Boissieu, Inscriptions de Lyon^ p. 424.
(8) Brambach, n- 904.
280 LIVRE II. CHAPITRE II.
Maine-et-Loire, Mayenne) ; et huit Martigny, savoir : deux
dans TAisne, deux dans les Vosges, et les quatre autres
dans les quatre départements du Calvados, de la Manche,
de Saône-et-Loire et de la Seine-Inférieure. Nous citerons
hors de France Martigny (Valais). Quant à Martignac, va-
riante méridionale de Martigny, rendue célèbre par un
homme politique français qui donna son nom au ministère
du 4 janvier 1828, ce n*est pas un nom de commune : le
dictionnaire des postes indique deux Martignac ; ce sont
deux hameaux, Tun du département de TAriège, l'autre de
celui du Lot.
*Matriacus est le nom primitif d'une localité qui donna
son nom au pagus Madriacensis , mentionné dans quel-
ques documents du huitième siècle ; tels sont : un juge-
ment rendu par Pépin le Bref vers 751 (1), un diplôme de
Karloman en 771 (2), deux diplômes donnés par Charlema-
gne, Tun en 774 (3), Tautre en 775 (4). Il est question de
ce pagiis dans divers documents postérieurs. Matriacus,
plus tard Madriacus d'où Madriacensis dérive, est aujour-
d'hui Mérey (Eure) (5).
* Matriacus est dérivé de Matrius, gentilice rare qui nous
est conservé par une inscription datée de l'an 714 de Rome,
50 av. J.-C, et trouvée à San-Gennano, prés du mont
Cassin ; elle nous apprend qu'à cette date L. Matrius était
duumvir ju/ri dicundoldn municipe de Casinum (6). Man,
commune de Berzé (Saône-et-Loire) (7) , Méré (Yonne) (8) ,
et Mérey (Seine-et-Oise) (9) , sont d'anciens Matriacus qui,
(1) Tardif, Monuments historiques, p. 45, col. 2.
(2) Dom Bouquet, V, 721 6. Sickel, Acta Karolinorunif t. II, p. 15, n* 12.
(3) Dom Bouquet, V, 726 e. Sickel, ibid,, t. II, p. 25, n" 33.
(4) Dom Bouquet, V, 734 a. Sickel, ibid,, t. II, p. 28, n* 45.
(5) Longnon, Allas historique de la France, p. 99.
(6) C. /. L., X, 5159.
(7) Ragut, Cart. de Saint-Vincent de Afâcon, p. 229.
(8) Quantin, Dictionnaire, topographique du département de iYonnej p. 81,
(9) Longnon, Atlas historique de la France, p. 188.
LA DÉSINENCE -I-ACU8 AU MOYEN AGE. 281
au Moyen Age , se sont appelés Madriacus, C'est aussi à
MatiHacus que nous font remonter certainement Merry-la-
Vallée et Merry-le-Sec (Yonne) (1); et probablement Merry-
sur- Yonne , môme département ; Merrey (Aube) ; Merrey
; Haute-Marne); Merry (Orne).
Matriolaôy MaroUes, est un autre dérivé du même genti-
lice.
Mauriagus est le nom de la localité où Attila fut battu
par Aétius , en 451 ; la première mention se trouve dans
une loi burgunde écrite probablement entre 488 et 490 (2) ;
une seconde mention apparaît au siècle suivant chez Gré-
goire de Tours (3) ; nous en lisons une troisième au sep-
tième siècle dans la compilation connue sous le nom de
Frédégaire (4) ; on a émis Thypothèse que ce Mauriacus de-
vait être reconnu dans Moirey, qui a été au Moyen Age le
chef-lieu d'une paroisse au diocèse de Troyes ; son empla-
cement est aujourd'hui compris dans le territoire de la
commune de Dierrey-saint-Julien (Aube) (5). Un autre Mau-
riacus^ que Ton croit être Mory (Seine-et-Marne), commune
de Mitry, est compris, en 982, dans une liste des domaines
de la cathédrale de Paris (6). Mauriacense ministerium ^
mentionné en 920, est Mauriac, commune de Saint-Léons
(Aveyron) (7). Mauriac (Cantal), avait une abbaye appelée
en 948 S. Petrus JUau/riaceiisis dans le Cart. de Beaulieu (8).
Mauriacus dérive de Maurius^ gentilice conservé par une
(1) Qaantin, Diciionnsiire topogr&phique du département de l'Yonne,
p. 81, 82.
C2} Lex Burgundionumy t. XVH, § 1» chez Dom Bouquet, IV, 261 c. Pertz,
Leges, t. III, p. 540, 1. 10; cf. Binding, Das burgundisch-romanische Koeni-
greich, t. I, p. 26, 45, 46.
(3) Hisioria Francorum, livre II, c. 7, chez Dom Bouquet, t. II, p, 162 a;
Aradt, p. 69, 1. 15.
(4) Dom Bouquet, II, 462 d; Krusch, p. 73, 1. 25.
(5) LongnoQ, Géographie de la Gaule au sixième siècle, p. 334-340.
(6) Cartulaire de Notre-Dame de Paris, t. I, p. 275; t. IV, p. 396, 401.
(O Molinier, Géographie historique de la province de Languedoc, col. 178,
\^) Deloche, Cart. de Beaulieu, p. 193.
282 LIVRE IL CHAPITRE IL
inscription d'Ain-Temuschent, en Algérie, qui est Tépila-
phe d'un personnage appelé Maurius Cocidius (1). Maurius
vient lui-même de Maurtis^ surnom plus fréquent (2), qui a
donné plusieurs autres dérivés employés comme surnoms,
tels que Maurinus et Maurentius,
Mauriacus est la forme primitive de treize noms de com-
munes : deux Mauriac (Cantal et Gironde); un Mauriat
(Puy-de-Dôme) ; Moreac (Morbihan), appelé Moriacum dans
un acte de Tannée 1008 (3); quatre Morey (Côte-d'Or,
Meurthe-et-Moselle, Haute-Saône, Saône-et-Loire) ; deux
Mory (Oise, Pas-de-Calais); Moiré (Rhône); Moirey (Meuse);
Moiry (Ardennes).
Melliacus est une potestas que Leodebodus, abbé de
Saint-Aignan d'Orléans, raconte avoir achetée, et dont il
fait donation par acte de Tannée 667 (4) ; ce nom, qui doit
ici désigner une localité située près d'Orléans, paraît iden-
tique à celui de Miliacus, Miliaous est un fisc royal du pays
de Béziers ; ce fisc devint propriété de Tabbaye d'Aniane,
suivant un diplôme émané en 807 de Louis le Pieux, alors
roi d'Aquitaine (5) ; sont à consulter, sur le même Miliacus^
trois diplômes donnés par Louis le Pieux après son éléva-
tion à l'empire (6).
Melliacus , où VI a été probablement doublée pour com-
penser l'abrègement de Te, dérive, comme MiliacuSy de
Maelius , gentilice romain , connu à la fois par les auteurs
et par les inscriptions.
En Tannée 439 avant notre ère, le chevalier Sp. Maelius,
(1) C. L L., t. VIII, n» 9814.
(2) Voyez, par exemple, C. /. L., VI, 22316. 22317.
(3) Rosenzweig, Dictionnaire topogr&phique du dép9Lrtêment du Mor-
bihan, p. 183.
(4) Pardessus, Diplomala, t. II, p. 144.
(5) Dom Bouquet, VI, 454 b ; Sickel, Acta Karolinorum^ t. II, p. 86, d* 2.
(6) 1' 814, Dom Bouquet, VI, 457 a; 2* 822, Dom Bouquet, VI, 527 d;
3* 837, Dom Bouquet, V, 616 a. Sickel, Acta Karolinorum, t. II, p. 86, 137,
194, !!•• 8, 177, 356.
LA DÉSINENCE -I-ACU8 AU MOYEN AGE. 283
un des plus riches habitants de Rome, fit distribuer du blé
au peuple, et, accusé pour cette raison d'aspirer à la
royauté, il fut tué par le maître de la cavalerie (1). P. Maelius,
son fils , devint deux fois tribun militaire avec puissance
consulaire : d'abord Tan 400, ensuite Tan 396 avant J.-C. (2).
Q. Maelius était tribun du peuple en 320 (3).
Ce gentilice se répandit dans les provinces où nous le
montrent les inscriptions du temps de l'empire. Telles sont
en Espagne l'épitaphe de Maelia TertuUa (4) et celle qui
était gravée sur le monument que Maelia Martialis avait
élevé à sa mère (5). Sur une tuile trouvée près de Verceil,
en Italie, on a lu les noms de M. Maelius Attiacus (6). En
France , les noms de Maelia Secundina nous sont fournis
par une inscription de Chazey (7) ; ceux de Cn. Maelius
Pudens et de Cn. Maelius Flavus par une inscription de
Camoins-les-Bains (Bouches-du-Rhône) (8).
Quelques monuments nous offrent l'orthographe Melius,
par e au lieu à*ae : Melius Zosimus , à Lyon (9) ; Melius
Martinianus, qui, étant augure de la colonie de Vienne
(Isère), dédia à Mercure un autel conservé encore aujour-
d'hui près d'Amblagnieu (Isère) (10) ; Melia Anniana, dans
une inscription de Zara (Dalmatie) (il) ; Q. Melius Auctus,
dans une épitaphe recueillie prés de Vérone (12).
Melliacus ou Miliacus pour Maeliacus est devenu en
France Meilhac (Haute- Vienne) ; Meillac (llle-et-Vilaine) ;
Meilly (Côte-d*Or) ; Milhac, noms de deux communes de la
(l) Tite-Uve, Uv. IV, c. 13, 14.
(î) C. /. L.. t. I, p. 502.
(3) Tite-Live, Uv. IX, c. 8.
(4) C. /. L., II, 121.
(5) Ibid., II, 385.
(6)/6id., V, 8110, 393.
(7) Allmer, Inscriptions de Vienne^ t. III, p. 416.
(8) Allmer, Revue épigraphique. t. II, p. 78, n* 515.
(9) Boissieu, Inscriptions de Lyon, p. 513.
(10) Allmer, Inscriptions de Vienne, t. II, p. 285.
(tl) C. /. L., III, 2922.
(12) /Wd., V, 3680.
284 LIVRE II. CHAPITRE II.
Dordogne et d'une commune du Lot ; Millac (Vienne);
Milly, nom de six communes (Manche, Meuse, Oise, Saône-
et-Loire, Seine-et-Oise, Yonne).
MoNTiNiACus, nom d'une villa donnée à Téglise du Mans
par Tévéque Bertramne en 615 (1), doit probablement être
reconnu dans Montigné (Mayenne). Au même siècle, Ber-
chaire, abbé de Montier-en-Der, avait une propriété dans
une localité appelée Montiniacus, et située au sud-ouest de
la Loire (2). Une monnaie mérovingienne a été frappée
dans un lieu appelé Montiniacus que Ton suppose être Mon-
tignac (Creuse) (3). Une église Saint-Christophe de Monti-
niacus appartenait, en 819, à Tabbaye de Conques (Aveyron),
comme nous le voyons par un diplôme de Louis le Dé-
bonnaire (4); c'est aujourd'hui Montignac, commune de
Conques (Aveyron). En 830, une villa Montiniacus, située
dans le pays de Meaux, appartenait à l'abbaye de Charroux
(Vienne) ; on l'apprend par une confirmation émanée de
Louis le Pieux et de Lothaire, son fils (5).
Avant de prononcer Montiniacus^ on a dû dire Montor
niacus en plaçant après le * un a qui s'est plus tard assi-
milé à Vi de la syllabe suivante. C'est l'orthographe de la
chronique de Béze écrite au douzième siècle, mais proba-
blement à l'aide de documents plus anciens ; cette chroni-
que désigne par le nom de villa Montaniacus (6) Montagny-
lès-Seurre (Côte-d'Or) (7).
Montaniacus , dont Montiniacus est une variante , est un
dérivé de Montanius, gentilice rare, mais dont l'existence
(1) Pardessus, Diplomata,f t. I, p. 211.
(2) Ibid., t. II, p. 159.
(3) A. de Barthélémy, dans la Bibliothèque de l'Ecole des chartes, vingt-
sixième année, p. 459, n* 444.
(4) Gustave Desjardins, Cariulaire de l'abbaye de Conques, p. 410. Dom
Bouquet, VI, 517 d. Sickel, Acta Karolinorum^ t. II, p. 123, n* 135.
(5) Dom Bouquet, VI, 566 d. Sickel, Acta Karolinorum, t. II, p. 1C7, n'TA.
(6) Migne, Patrologia latina, t. CLXII, col. 866 a.
(7) Garnier, Nomenclature historique des communes , etc, , du déparle-
ment de la Côte-d'Or, p. 200, n* 438; cf. p. 109, même numéro.
LA DÉSINENCE -I-ACU8 AU MOYEN AGE. 285
est constatée. On le trouve dans une inscription de la
Dacie (1). Une épitaphe découverte à Milan nous fait con-
naître les noms de M. Montanius Primus (2) ; une inscrip-
tion de Cagliari, 'en Sardaigne, ceux de Q. Montanius
Pollio (3). Le gentilice Montanius est dérivé du cognomen
Montanus, très fréquent dans les inscriptions. Ce surnom
était déjà usité au siècle d'Auguste. Julius Montanus, poète
élégiaque et en même temps épique, est mentionné par
Ovide et par les deux Sénèque (4). De Montanus est dérivé
• MonUmacuSy aujourd'hui Montenay (Mayenne) ; Montanius
a donné Montaniacus^ Montiniacus^ Montanianus ,
De Montaniacus sont venus les vingt-quatre noms de
communes suivants : six Montagnac, savoir : deux dans la
Dordogne, deux dans le Lot-et-Garonne, un dans les Basses-
Alpes, un dans THérault ; deux Montagna (Jura) ; un Mon-
tagnat (Ain) ; deux Montagney, un dans le Doubs , Tautre
dans la Haute-Saône ; deux Montagnieu (Ain , Isère) ; onze
Montagny, savoir : trois dans Saône-et-Loire, deux dans la
Côte-d'Or , autant dans l'Oise , un dans chacun des dépar-
tements de la Loire, du Rhône, de la Savoie et de la
Haute-Savoie.
C'est par Moniiniacus que s'expliquent les noms de qua-
rante-neuf communes : sept Montignac, savoir : deux dans
la Charente, autant dans Lot-et-Garonne; un dans la Dor-
dogne, autant dans la Charente et les Hautes-Pyrénées;
cinq Montigné, savoir : deux dans Maine-et-Loire, un dans
chacun des trois départements de la Charente, de la
Mayenne et des Deux-Sèvres; quarante-neuf Montigny,
savoir : six dans l'Aisne, cinq dans la Côte-d'Or, trois dans
chacun des départements d'Eure-et-Loir, de la Nièvre et
de Seine-et-Marne ; deux dans les Ardennes , autant dans
le Jura , dans Meurthe-et-Moselle , dans la Meuse , dans le
(1) C. 7. L., t. m, n* 792,
(2) Ibid,, V, 6043.
(3) IWd., X, 7580.
(4) Teuffel» Geschichte der rœmischen Literatur, S* édit., p. 539.
286 LIVRE II. CHAPITRE II.
Nord, dans la Haute-Saône , dans Seine-et-Oise et dans la
Somme ; un dans chacun des départements de l'Aube , du
Calvados, du Cher, du Loiret, de la Manche, de la Haute-
Marne, de la Marne, de TOise, du Pas-de-Calais, de la
Sarthe, de la Seine-Inférieure, des Deux-Sèvres et de
r Yonne. Ainsi, au total, les noms de soixante-treize com-
munes dérivent du gentilice Montanius.
La forme latine fundus Monianianus se rencontre daos
une charte de Ravenne (1).
MusGiAGiE est le nom d'un vicus qui avait une église ; et.
dans cette église , un personnage arverne , nommé Nunni-
nus, qui vivait dans la seconde moitié du sixième siècle,
déposa une relique de saint Germain d'Auxerre ; c'était un
fragment du tombeau de ce saint (2). Musciacae^ sous-entendu
domus, au masculin singulier Musciacus^ sous-entendu
vicus^ et plus anciennement fundus, doit-étre aujourd'hui
Moissat (Puy-de-Dôme). Parmi les localités situées au sud-
ouest de la Loire, et qu'en 673 Berchaire donna à l'abbaye
de Montier-en-Der , se trouve un certain Musciacus [S). Un
monasterium Musciacum fut l'objet des libéralités de Louis
le Débonnaire (4) ; il était situé à Moissac (Tarn-et-Garonne).
Musciacus s'explique par le gentilice Mustius. Le chevalier
romain C. Mustius fut défendu par Cicéron- qui parle de
lui dans les Verrines (5). C. Mustius Tettianus fit deui
dédicaces, Tune à Jupiter, l'autre à Epona, qui ont été
trouvées à Cilly en Styrie (6). Les inscriptions d'Afrique
nous font connaître plusieurs Mustius : à Lambessa.
(1) Fantuzzi, Monumenti Ravennati, t. I, p. 29.
(2) Grégoire de Tours, De gloria confeasorum, c. 41. Chez Bordier, Us
livres des miracles, t. II, p. 422-425. Amdt et Krusch, p. 773, 1. 20; cf. Lon-
gnon, Géographie de la Gaule au sixième siècle^ p. 506-507.
(3) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 159.
(4) Vie de ce prince par l'Astronome, chez Dom Bouquet, t. VI, p. 95c.
Constitutio de monasteriis, en 817, tbid., 409 a.
(5) Pauly, Rêal'Encyclopaedie, t. V, p. 283.
(6) C. /. L., III, 5175, 5176.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 287
C. Mustius Portunatus (1); à Sadjar, Q. Mustius (2); à
Arsacal, G. Mustius Rusticus (3); à Beni-Ziad, A. Mus-
tius (4). Mustius a donné le dériy é * Mv^tiaciLS dont Musciacus
n'est qu'une variante orthographique.
De Musciacus viennent les noms de communes suivants :
trois Moissac (Lozère , Tarn-et-Garonne , Tarn) ; Moissat
(Puy-de-Dôme) ; Moissey (Jura) ; Moissieu (Isère) ; Moissy
(Seine-et-Marne , Nièvre) ; peut-être Moussac (Gard et
Vienne); Moussey (Aube et Vosges); enfin probablement
six Moussy, dont deux dans Seine-et-Marne et un dans
chacun des quatre départements de TAisne , de la Marne ,
de la Nièvre et de Seine-et-Oise. Moussy (Aisne) est ap-
pelé Musceium dans la vie anonyme de saint Rigobert, ar-
chevêque de Reims , mort en 749 (5) ; le groupe se que
nous ofifre cette orthographe est d'accord avec Tétymologie
que nous proposons. Cette étymologie est contredite par
Torthographe Mulciacum , Molceiv/m^ du nom de Moussey
(Aube) , dans des textes du douzième siècle (6) ; mais cette
orthographe est peut-être le résultat d'une hypothèse étymo-
logique, plutôt que le reflet de la tradition; cependant
Mulciacum peut s'expliquer par un primitif * Molliciacus
qui dériverait de MoUicius , geutilice connu par quelques
inscriptions (7).
Une colonica du nom de Noniacus appartenait à l'abbé
Aridius , qui vivait au sixième siècle ; elle était probable-
ment située en Limousin ; voilà ce que nous apprend une
vie de ce personnage attribuée à Grégoire de Tours (8) ;
(1) c. 1. L., VIII , 2949, 3204.
(2) Ibid,, VIII, 6022.
(3) JbW., VIII, 6152.
(4) Ibid., VIII, 6532.
(5) Matton, Dictionnaire topographique du département de l'AisnCy p. 194.
(6) Bontiot et Socard, Dictionnaire topographique du département de
VAube, p. 109.
(7) MoUicius, C. /. L., III, 341, 342; V, 1305; Mollicia, X, 6501.
(8) Vita sancti Aridii abbatis, c. VIII; chez Bordier, Les livres des mi-
ncies, t IV, p. 173.
288 LIVRE II. CHAPITRE II.
cette localité est aussi mentionnée dans |le texte qu'on
nous a conservé du testament du même Aridius (1).
Nonius est un gentilice romain qu'on rencontre quelque-
fois (2). En Tan 50 avant notre ère, M. Nonius Sufifenas était
propréteur de Crète et de Cyrène (3). Un sénateur du nom
de Nonius fut proscrit par Antoine (4). Auguste gratifia
d'un collier d'or Nonius Asprenas (5). Deux ou trois Nonius
Asprenas figurent dans la liste deè consuls , aux années 6,
29 et 38 après notre ère (6). De tous les Nonius, celui qui est
le plus connu de nos jours est le grammairien Nonius
Marcellus; il écrivait au troisième siècle de notre ère et
a laissé un ouvrage souvent édité (7). Ce gentilice fut porté
chez nous par M. Nonius Gallus qui fut gouverneur de la
Gaule transalpine en l'an 29 avant notre ère, et qui soumit
les Treveri ; il reçut pour cette raison le titre dHmperaior (8\
Deux inscriptions de Lyon contiennent le nom de Nonius
précédé du prénom Caius et suivi dans lune d'elles du
surnom Euposius (9). Une inscription de Trêves nous of-
fre l'orthographe Nonnius avec deux n et le surnom Ger-
manus (10).
Nogna (Jura), suppose un plus ancien Noniacus.
NoviACUM castrum fut en 752 donné à l'abbaye de Prlim
par le roi Pépin le Bref (11).
(1) Pardessus, Diplomata, t. I, p. 138. On y lit Nonniacus avec deux n;
cf. Longnon, Géographie de la Gaule au sixième siècle, p. 527.
(2) Pauly, Real'Bncyclopaedie, t. V, p. 687-692.
(3) Cicéron, à Atticus, livre VI, lettre i.
(4) Pline, Histoire naturelle, livre XXXVII, c. 81.
(5) Suétone, Auguste, c. 43.
(6) Joseph Klein. Fasti consulares, p. 17, 27, 30.
(7) Teuflfel, Gcschichte der roemischen Literatur, 3» édition, p. 909-912
(8) Voy. Desjardins, Géographie historique et administrative de la Giule
romaine, t. IH, p. 40, 45.
(9) Boissieu, Inscriptions antiques de Lyon, p. 18, 53.
(10) Brambach, n* 835. Nonius dérive du nombre ordinal nonus, c neu-
vième »; Nonnius, du cognomen Nonnus, sur lequel on peut voir Paul/,
Real'Encyclopaedie, t. V, p. 692-694.
(11) Sickel, Acta Karolinorum, t. II, p. 2, n* 4.
'
LA DÉSINENCE - 1 - A C U S AU MOYEN AGE. 289
Les auteurs et les inscriptions nous font connaître de
nombreux exemples du gentilice Novius. Tels sont le poète
comique Q. Novius qui vivait au commencement du P' siè-
cle avant notre ère (1). En 58 avant notre ère, L. Novius
était tribun du peuple ; on l'apprend par Asconius (2).
Novius Niger était questeur au temps de la conjuration de
Catilina, en l'an 56 avant J.-C (3). Ce nom se répandit
dans les provinces. Deux inscriptions de Spalatro , Tan-
cienne Salona, nous font connaître les noms de Novius
Persicus et de P. Novius Laurus (4). Dans une inscription
des environs de Bude , on lit les noms du légionnaire No-
vius Provincialis (5). Une inscription de Worms rappelle
un vœu de Novia Prisca (6). A Schwanden , dans le Pala-
tinat, on a trouvé l'épitaphe d'une femme appelée Novia (7).
Nous nous bornons à ces exemples , dont il serait facile
d'augmenter le nombre (8).
De Novius est dérivé Noviacus qui est devenu Neuvy ,
dans dix-neuf noms de communes , savoir : trois dans le
Cher, deux dans l'Eure-et-Loir et dans Tlndre; un dans
chacun des départements de l'Allier, des Deux-Sèvres, de
rindre-et-Loire , de Loir-et-Cher , du Loiret , de Maine-et-
Loire , de la Nièvre , de l'Orne , de Saône-et-Loire , de la
Sarthe et de l'Yonne. A la même origine se peuvent
rattacher Neufvy (Oise) ; Nevy (Ardennes) ; et probablement
les deux Nevy , du Jura.
Au neuvième siècle, la véritable étymologie de Noviacus
était oubliée, et on considérait ce mot comme un dérivé
de l'adjectif latin noviis. C'est pour cela que Jérémie, ar-
chevêque de Sens, imagina d'appeler Noviacus l'abbaye
(1) Teoffel, Geschichte der rœmiachen Literatur, 3* édit., p. 243.
(?) Asconias, 6ur le c. 14 du Pro Milone de Gicéron.
(3) Suétone, César, c. 17.
(4) C. /. L., III, 2511, 2552.
(5) /Wd., III, 3556.
(6) Brmmbach, n» 907.
fT) Brambach, n- 1765.
(8) Voyez Pauly, Re&l-Encyclopaedie, t. V, p. 717-719.
19
I
«
290 LIVRE IL CHAPITRE IL
qu'il fonda en 818, à Mauriacus, en Auvergne (1). Mais
cette dénomination nouvelle , qu'une erreur avait inspirée,
ne fut pas [adoptée par la population , et l'ancien nom de
Mauriacus persiste encore , à peine modifié , dans celui de
Mauriac (Cantal).
La villa Novilliàgus fut donnée à Téglise cathédrale de
Reims par le roi Karloman en 771 , et Charlemagne con-
firma cette libéralité ; les diplômes, aujourd'hui perdus, sont
analysés dans l'appendice à Flodoard , écrit vers la fin du
dixième siècle (2). Ce nom de lieu est assez fréquent, mais
le plus souvent altéré. On le trouve écrit avec une seule i,
Noviliacus. Ainsi Grégoire de Tours écrit Noviliacus le nom
de deux vici qui auraient été , suivant lui , fondés , c'est-
à-dire évidemment, dont les paroisses auraient été créées
par les évoques Injuriosus et Baudinus, tous deux ses pré-
décesseurs, l'un de 529 à 546, l'autre de 546 à 552 (3). On
remarque la môme orthographe dans le diplôme de Clo-
taire III pour l'abbaye de Bèze , en 664 , tel que nous l'a
conservé la chronique de cette abbaye (4) ; dans la charte
originale contenant les donations faites par Wandmir et
Ercamberte à diverses églises en 689 (5); dans les diplô-
mes donnés : en 705 par Childebert III à l'abbaye de Saint-
Serge et de Saint-Médard d'Angers (6) ; en 802 par Char-
lemagne (7) , en 832 par Louis le Débonnaire , à la
cathédrale du Mans (8). Au lieu de Noviliacus, on a écrit
quelquefois Nobiliacus avec un b au lieu d'un v, phéno-
(1) Chronique de Siint-Pierre-Ie-Vtf de Sens; chez Dom Bouquet, VI, 237 a.
(2) Dom Bouquet, t. V, p. 362 b, c; cf. t. VI, p. 216 c, d. Bickèl, Actolt-
rolinorumt t. II, p. 380.
(3) Hietoria, Francorum^ livre X, c. 31, i 15, édit Amdt, p. 447, lignes 13-20.
Cf. Longnon, Géographie de la Gaule au sixième siècle^ p. 282.
(4) Pertz, Diplomatum imperii tomus primvLS, p. 40, 1. 23.
(5) Tardif, Monuments historiques, p. 637, col. 1.
(6) Pertz, Diplomatum imperii tomus primus, p. 65, 1. 44.
(7) Dom Bouquet, V, 768 e; cf. Sickel , Acta Karolinorum, t. Il, p. 67,
n- 181.
(8) Dom Bouquet , VI , 585 e; cf. Bickel, Acta Karolinorum^ U II, p. 179,
n* 308.
LA DÉSINENCE -I-ACUB AU MOYEN AGE. 291
mène fréquent dans la basse latinité. Cette orthographe
se rencontre dans certains manuscrits de Grégoire de
Tours (1) , dans un diplôme de [Fannée 680 en faveur de
l'abbaye de Saint-.Wast d'Arras (2), et dans la vie de Louis
le Débonnaire dite de l'Astronome , où Tabbaye de Saint-
Vaast est appelée monasterium Nobiliacum (3).
Le gentilice d'où est dérivé le nom de lieu qui se pré-
sente dans les textes sous ces trois formes a été porté sous
le règne de l'empereur Tibère par Novellius Torquatus, de
Milan, qui devint préteur et proconsul et qui dut une
grande notoriété, non à l'habileté avec laquelle il s'acquit-
tait de ses hautes fonctions , mais au talent qu'il avait de
boire d'un trait , en se conformant à toutes les règles de
l'art, trois congés, c'est-à-dire environ neuf litres de vin;
Pline, dans son Histoire natv/relle^ s'étend avec détails sur
les faits qui attestent combien Novellius s'acquittait cons-
ciencieusement de cette tâche glorieuse, vraie merveille
dont l'empereur lui-même fut témoin (4). D'autres Novel-
lius, moins célèbres, nous sont connus par les inscriptions.
Tels sont Novellius Optatus , dont l'épitaphe a été trouvée
près de Salzbourg (5) ; Novellius Aequalis (6) , Novellius
Agilis, Novellius Euodius dont les épitaphes ont été re-
cueillies à Milan (7). Il serait trop long d'énumérer tous les
autres exemples de ce gentilice que l'Italie nous offre.
U pénétra en Gaule. Nous citerons C. Novellius Amphio
dans une inscription de Genève (8), L. Novellius Hispelo (9)
(1) Voyez les notes placées par Amdt au bas de la page 447 citée plus
haut; cf. Gloria confessorurrif c. 7; chez Bordier, Les livres des miracles,
t II, p. 358; Krasch, p. 753, 1. 9.
(2) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 181.
(3) Dom Bouquet, VI, 95 c.
(4) Pline, Histoire natureUe, livre XIV, g 144-146; cf. Pauly, Real-Ency-
clopsedie, t. V, p. 714.
(5) C. /. L., t. ni, n* 5626.
(6) /Wd., V, 6051.
(7) Ibid., V, 6054.
(8) Mommsen , Inscriptiones confoederationis helveticae , n* 92. AUmer ,
îmeriptions antiques de ViennSy t. II, p. 319.
(9) Brambach, n* 1201.
292 LIVRE II. CHAPITRE II.
et M. Novellius (1) au musée de -Mayence , Tépitaphe de
P. Novellius Novanus et de ses enfants qui a été trouvée
à Apt (2).
* Novelliacus , Noviliacus , dérivé de Novellius , peut se
reconnaître dans trente-six noms de communes : Neuillac
(Charente-Inférieure), Neuillay (Indre), deux Neuillé (Indre-
et-Loire) , Neuillé (Maine-et-Loire) , Neuilli (Orne) ; vingt-
trois Neuilly, savoir : deux dans chacun des départements
de l'Allier, du Calvados, du Cher, de la Haute-Marne, de
l'Oise , de Seine-et-Oise et de la Somme ; un seulement
dans chacun des départements suivants : Aisne, Côte-d'Or,
Eure , Indre-et-Loire , Mayenne , Nièvre , Orne , Yonne ;
NeuUiac (Morbihan) ; Neuvilley (Jura) ; Neuvilly (Meuse),
et Neuvilly (Nord) ; trois Nuillé , dont un dans la Sarthe
et deux dans la Mayenne; enfin NuUy (Haute-Marne).
De ces noms de lieux il faut distinguer Nouaillé (Vienne),
au huitième siècle Novaliacus , comme nous l'apprend un
diplôme émané en 794 de Louis le Débonnaire , alors roi
d'Aquitaine (3). Novaliacus suppose un geniïlice * Novalius
dérivé de Tadjectif novalis.
PiçiACus est le nom d'une localité située dans le Perche,
et où saint Avit, mort vers Tannée 527, mena la vie éré-
mitique ; on le sait par une vie anonyme , à peu près con-
temporaine (4). On ignore où était l'emplacement précis
de Piciacus,
Ce mot est dérivé de Pitius. On a trouvé à Veglia, île
voisine de la côte de Dalmatie, Tépitaphe du décurion
P. Pitius Marullus (5) ; à Petronell , en Autriche , celle de
(1) Brambach, n* 1216.
(2) C. J. L., XII, 1133.
(3) Dom Bouquet, t. VI, p. 452 c ; cf. Sickel, Acta, KArolinorum.^ t. VL, p. 84,
n- 1.
(4) Dom Bouquet, t. III, p. 439 d; cf. Longnon, Géographie de <a GdMk
au sixièifne siècle, p. 328, 329.
(5) C. L L., III, 3128.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 293
l'affranchi C. Pitius Hilarus (1). On conserve à Ebersdorf
(Autriche), celle de l'affranchi C. Pitius Jucundus (2).
De Pitius on a tiré * Pitiacus , puis par effet de Tassibi-
lation et avec substitution du c au t^ Piciacus. Peut-être ce
nom explique-t-il celui de Pécy (Seine-et-Marne). On doit
aussi probablement le reconnaître dans les deux Pessac du
département de la Gironde ; dans Pessat (Puy-de-Dôme) ;
dans Pissy (Somme et Seine-Inférieure). Pissy (Somme)
est vraisemblablement le Pisciacus qu'un diplôme émané
de Pépin le Bref, en 751, met dans \e^ pagus^^Ambianen-'
m (3) ; mais cette orthographe peut être le résultat d'une
étymologie populaire qui rapprochait le nom de lieu Pissy
du latin jnscis , poisson , bien connu à une époque où de-
puis longtemps le gentilice Pitius était oublié. Nous termi-
nerons par Pizy (Yonne), qui, suivant M. Quantin, s'est
appelé Piciacum au septième siècle (4).
PociACus est le nom d'une des villae qui , au huitième
siècle, appartenaient à Tabbaye de Saint-Martin de Tours.
Nous l'apprenons par un diplôme de Charlemagne qui re-
monte à l'année 775 (5). La situation de Pociacus est
inconnue.
Ce mot peut être dérivé du gentilice Paucius, dérivé lui-
même de l'adjectif paucus. Une inscription de Bénévent
contient le nom du décurion Q. Paucius (6).
PoDENTiACus (7), lisez PuDENTiACus, dérivc de Pudentius
qui est un gentilice romain, probablement d'assez basse
(1) c. /. L., III, 4518.
(2) 7Wd., III. 4602.
(3) Perte, Diplomatiim imperii lomus primuSy p. 109, 1. 16.
ik) Dictionnaire topogr&phique du département de l'Yonne^ p. 99.
(5}Pom Bouquet» V, 737 c; cf. Sickel, Acta Karolinorum , t. II, p. 27,
nMî; cf. Habille, La pancarte noire de Saint-Martin de Tours, p. 69, 106,
107.
(6) C. /. L., IX, 1653.
(7) Cartulaire de Saint-Seine cité par Garnier, Nomnnrlattirp historiqvp,
etc„ du département de la Côte-d'Or, p. 51.
294 LIVRE II. CHAPITRE IL
époque : Pudentius Maximinus, vétéran, fît à Hercule
une dédicace trouvée près de Salzbourg (1). C'est aussi le
nom d'un saint qui fut martyrisé à Alexandrie, et dont od
célèbre la fête le 29 avril (2).
Poncey-lez-Pellerey (Côte-d'Or) , Pouançay (Vienne),
Pouancé (Maine-et-Loire) , peuvent être d'anciens Puden-
tiacus.
PoMPEiAGUM est le nom d'un castrum où , suivant les
actes du martyre de saint Vincent d' Agen , le corps de ce
saint, mis à mort sous Dioclétien, aurait été transféré et se-
rait devenu l'objet d'un culte vers le milieu du cinquième
siècle (3) ; ce castrum était situé, suivant M. Longnon, au
Mas-d'Agenais (Lot-et-Garonne) (4). En 829, Pépin I", roi
d'Aquitaine , confirma l'abbaye de Saint-Maur-les-Fossés
dans la possession du quart d'une propriété que son diplôme
appelle Pompeiaci villa (5). La vie de saint Theuderius.
abbé de Vienne (Isère) au sixième siècle , écrite trois siè-
cles plus tard, met dans le voisinage de Vienne (Isère),
alors bien fortifiée, cinq forts destinés en cas de guerre à
tenir l'assiégeant à distance; un de ces forts s'appelait
Pompeiacus (6).
Pompeiacus dérive du genlilice d'abord obscur Pompeius,
qui est d'origine ombrienne et vient du nom de nombre
* pompe = quinque, cinq. Ce gentîlice fut à peu près ia-
connu avant le consul Q. Pompeius, 141, un des généraux
romains qui échouèrent dans la guerre contre les Celtibè-
res (7). Après lui Cn. Pompeius Strabo et Q. Pompeius
Rufus, parvinrent aussi au consulat, l'un, Tan 89, Tau-
(1) C. /. L., III, 5531.
(2) BoUandistes, avril, t. III, p. 617.
(3) Voir les actes du martyre de saint Vincent, dans les Bollandistes, t. II
de juin, p. 166-168.
(4) Géographie de la Gaule au sixième siècle, p. 549-552.
(5) Tardif, Monuments historiques^ n» 121, p. 84, col. 1.
(6) Dom Bouquet, t. III, p. 470 b.
(7) Sur la gens Pompeia, voyez Pauly, Real-Encyclopaedie^ t. V, p. 1844-
1858.
LA DÉSINENCE -I<ACU8 AU MOYEN AGE. 295
tre, Tan 88 avant J.-C. ; ce nom d'homme dut surtout
sa célébrité au fils du premier des deux , Cn. Pompeius ,
surnommé le Grand. Entre autres affaires importantes
dont il fut chargé, une des plus graves fut la guerre con-
tre Sertorius, en Espagne. Elle l'occupa de 77 à 72, et
pendant ce temps il parait avoir exercé Tautorité suprême
dans la Gaule, administrée sous ses ordres par le propréteur
Fonteius (1). C'est à cette date que doit remonter l'introduc-
tion en Gaule du gentilice Pompeius. Un des monuments
antiques les plus curieux de la France est la porte d'entrée
de la sépulture d'une famille Pompeia , à Âix , en Savoie ;
L. Pompeius Campanus la fit construire de son vivant , et
les épitaphes d'un certain nombre de ses parents s'y lisent
encore aujourd'hui (2). Nous citerons ensuite Sex. Pom-
peius Macrinus, connu par une inscription de Novairy (3) ;
Ponpeius Octavianus, dont l'épitaphe a été trouvée près
de Ghozeau (Isère) (4) ; Q. Pompeius Adjutor, dont les noms
se lisent dans une inscription d'Annecy (5) ; Pompeia Da-
tiva, dont l'épitaphe vient d'être découverte à Arles (6);
une autre Pompeia dont le musée de Bordeaux possède
l'épitaphe (7). Je me bornerai à ces exemples : on en
trouvera beaucoup d'autres dans le t. XII du C. /. L
De Pompeiacus viennent les noms de Pompejac (Gironde),
et Pompiac (Gers).
PoNGiAGus est une villa dépendant de l'église du Mans,
aux termes d'un diplôme de Louis le Débonnaire en 832 (8) ;
c'est probablement aujourd'hui Poncé (Sarthe).
Ce nom de lieu dérive du gentilice Pontius qui est latin ,
(1) E. Desjardins, Géogr&phie de U Gaule romaine^ t. II, p. 330-334, 347.
(?) E. Desjardins, ihid., t. III, p. 118; cf. Allmer, Inscriptions antiques
de Vienne, t. III, p. 312-317.
(3) AUmer, Inscriptions antiques de Vienne, t. III, p. 245.
(4) AUmer, ibid., t. III, p. 182.
(5) Allmer, ibid., t. III, p. 340.
(Q AUmer, Revue épigraphique, t. I, p. 268, n* 296.
m AUmer, ibid,, t. II, p. 22, n* 469.
(8)Dom Bouquet, VI, 586 a; Sickel, Acta Karolinorum, t. II, p. 179.
296 LIVRE II. CHAPITRE II.
mais d'origine samnite (1), e} vient du thème ombrien
*ponto- =: *pomptO', identique au thème latin *quintO' =
* quinqtO' du nom de nombre ordinal signifiant cinquième.
Pontius est la forme ombrienne du gentilice latin Quintius,
mieux Quinctiiis. Le plus célèbre personnage de ce nom
que Ton rencontre dans l'histoire de la république romaine
est C. Pontius, fils d'Herennius, qui commandait les Sam-
nites quand ils firent Tarmée romaine prisonnière aux
Fourches Caudines, l'an 321 avant J.-C. (2). Ce gentilice
avait pénétré à Rome de fort bonne heure, si Ton en croit
la légende ; en effet, dès le siège de Rome par les Gaulois.
en Tan 390 avant notre ère , un jeune et ardent patriote
romain, Pontius Cominius , aurait rendu son nom illustre
par l'heureuse audace avec laquelle, trompant la sur\'eii-
lance des assiégeants, il pénétra, dit-on, dans le Capitole 3 .
Plus tard, L. Pontius Aquila fut du nombre des meurtriers
sous les coups desquels César perdit la vie. Tan 44 avant
notre ère (4) : ici nous sommes en présence d'un fait his-
torique. Enfin tout le monde connaît le nom du procuni-
teur de Judée, Pontius Pilatus (5).
On rencontre ce gentilice dans les inscriptions de Rome
et des provinces, Q. Pontius Severus, à Tarragone 6';
P. Pontius Blandus, P. Pontius Pontianus, P. Pontius Se-
cundinus, dans une inscription de Hongrie (7). On a trouve
nombre de fois en Gaule et en Grande-Bretagne la marque
du potier Pontius.
De Pontius on a tiré ; 1** un dérivé en -anus : Pontianus
qui explique Ponsan (Gers), et qui est à comparer au fundus
(1) Corssen, Ueher Aussprache, Vohalismus und Betonung der lateini'
schen Sprache, 2*édit., 1. 1, p. 116. Ponto- est pour *pomp''lO'' comme quin-
tus pour * quinqU'tus.
(2) Tite-Live, liv. IX, ch. i et suivants. Sur le gentilice Pontius, voyez
Pauly, Real'Encyclopaedie, t. V, p. 1891-1893.
(3) Tite-Live, livre V, c. 46.
(4) Suétone, César, c. 78 ; édit. Teubner-Roth, p. 32, 1. 3-4.
(5) Tacite, Annales, livre XV, c. 44.
(6) C. /. L., II, 4937.
(7) Ibid,, III, 6271.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 2fl7
Poncianus d'une charte de^ Ravenne (1) , 2® un dérivé en
acus ; * PontiaciÀS, écrit Ponciacus au moyen âge. De là pro-
bablement, outre le nom de Poncé (Sarthe), déjà cité, ceux
de : Pontiacq (Basses-Pyrénées), Poinchy (Yonne), Poincy
(Seine-et-Marne), et Poncey-lez-Athée (Côte-d'Or). Poncey-
lez-Pellerey, aut?e commune du même département, parait
devoir s'expliquer par un bas-latin Podentiacus (p. 293).
PoNTiLiACDS est le nom d'un palais d'où Charles le
Chauve data, en 873, un diplôme en faveur des églises
Saint-Mammès de Langres , et Saint-Etienne de Dijon (2) ;
c'est aujourd'hui Pontailler-sur-Saône (Côte-d'Or). La
forme latine correspondant à ce nom de lieu gallo-romain
est Poniilianus^ nom d'une villa située dans le Roussillon ;
on l'apprend par un diplôme du roi Lothaire, 982 (3).
Pontiliacus et PontUianus sont dérivés de Pontilius, gen-
tihce romain dérivé lui-même de Pontius, Le plus ancien
exemple de Pontilius nous est offert par une inscription
recueillie en Espagne, près de Carthagène (4). On le trouve
deux fois répété dans une inscription d'Afrique (5). Il appa-
raît dans plusieurs inscriptions d'Italie (6).
PosTHiMiAGus est le nom d'un locus de situation inconnue
donné à l'abbaye de Limours (Seine-et-Oise) , aux termes
de l'acte de sa fondation par Gammon , en 697 (7). Un
diplôme de Charles le Gros, en faveur de l'abbaye de Saint-
Etienne de Dijon, en 885, nous donne le même nom de
lieu avec l'orthographe un peu plus archaïque Postu-
miacus (8) ; il s'agirait ici de Potangey, commune d'Aiserey
(1) Fantuzzi, Monumenti AavennaCt, t. I, p. 64.
(2) Dom Bouquet, VIII. 643 d.
(3) Dom Bouquet, IX, 649 b.
(4) C. /. L., I, 1478 ; II, 3433.
(5) /Wd., VIII, 8799.
(6) Ibid., IX, 5799; X, 47, 363, 364.
(7) Pardessus, DiplomsiU, t. II, p. 244,
(8) Dom Bouquet, IX, 336 c.
298 LIVRE II. CHAPITRE II.
(Côte-d'Or) , suivant M. Garnier, le savant archiviste de ce
département (1).
Posthumiacus vient de Postumius. h^gens Postumia était
patricienne (2) ; elle atteignit de très bonne heure aux plus
hautes magistratures de Rome. Le premier consul qu'elle
donna à la république romaine fut P. Postumius Tubertus,
élevé à cette dignité d'abord Tan 249 de Rome (av. J.-C.
505) , puis Tan 252 (503) , et qui obtint deux fois les hon-
neurs du triomphe (3). Quelques années plus tard (496
avant J.-C), le dictateur A. Postumius Albus, fils du pré-
cédent, battait les Latins près du lac Régille et triom-
phait (4). Nous nous bornons à ces deux exemples. La
gens Postumia donna son nom à un des plus anciens mo-
numents de la législation de Rome , une des lois somp-
tuaires attribuées à Numa (5). Le même nom fut aussi
porté par une des grandes routes de la Gaule Cisalpine, la
via Postumia^ construite, à ce que Ton croit, par le consul
Sp. Postumius Albinus, Tan 148 avant notre ère (6). Le
gentilice Postumius persista sous l'empire ; ainsi , au
second siècle de notre ère , Postumius Festus fut célèbre
par son éloquence (7). On trouve ce nom fréquemment dans
les inscriptions d'Espagne (8) , d'Afrique (9), d'Italie (10),
(1) Garnier , NomencleLture historique des communes du département de
te Côte-d'Or, p. 19.
(2) Sur la gens Postumia, voyez Pauly, Real-Encyclopaedie, t. V, p. 1932-
1944.
(3) Tite-Live, livre II, c. 16. Pline, livre XV, } 125; cf. Acta triumphorum
capitolina dans le C. /. L., t. I, p. 454. Fastes consulaires, ibid., p. 486487.
(4) Tite-Live, livre II, c. 19, 20, et Acta triumphorum capitolina dans le
C. /. L., 1. 1, p. 454.
(5) Pline, livre XIV, { 88.
(6) Voyez ce que dit de cette route M. Mommsen dans le C, /. L. , t. V ,
p. 827.
C7) Aulu-Gelle, livre XIX, c. 13. Gomp. le passage de Fronton cité par
Teuffel, Geschichte der rœmischen Literatur, 3* édit., p. 848.
(8) C. /. L.. t. II, index, p. 728, col. 4.
(9) Ibid., t. VIII, index, p. 1012, col. 2.
(10) ibid., t. V, index, p. 1123, col. 4, 1124, col. 1 ; t IX, index, p. 723,
col. 1 ; t. X, p. 1052, col. 2, 1065, col. 4.
LA DÉSINENCE -1-AOUSAU MOYEN AGE. 299
de Grande-Bretagne (1), etc. (2). Nous jfignalerons en Gaule
trois exemples : Tun est une dédicace à Diane par Q. Pos-
tumius Potens ; elle a été trouvée près de Trêves (3) ; le
second monument, qui existe encore dans la ville d'Aven-
che, en Suisse^ est aussi une dédicace à des dieux ; ses au-
teurs sont Q. Postumius Hyginus et Postumius Hermès (4) ;
enfin le musée de Toulouse possède le signaculum de Pos-
tumius Faustinus (5).
Pbimiagus est une villa mentionnée dans un diplôme
de Louis le Débonnaire en faveur d'Albéric, évéque de
Langres, 834 (6) ; c'est aujourd'hui Prangey (Haute-Marne).
Une autre villa , du nom de Primiacus , fut donnée en 866
par Lothaire, roi de Lorraine, à sa femme Theodeberge (7).
Ce nom de lieu dérive de Primius , gentilice tiré du sur-
nom Primus, et qu'une inscription découverte en Autri-
che nous montre dans le nom de femme Primia Hono-
rata (8). Nous le retrouvons dans une inscription du musée
de Mannheim qui débute par le nom de femme Primia
Accepta (9) ; dans une inscription d'Oppenheim, en Hesse,
qui nous fait connaître le nom de femme Primia Am-
miUa (10). On a découvert à Meylan (Isère), Tépitaphe de
L. Primius Valerius gravée par ordre de son fils Primius
Vassillus et de sa fille Primia Valeria (il). On a recueilli à
Lyon Tépitaphe de M. Primius Secundianus, sévir augus-
tal, gravée par les soins de M. Primius Augustus, son
(1) C. /. L., t. VII, index, p. 320, col. 1.
(2) Ibid., t. III, index, p. 1082, col. 2.
(3) Brambach, n* 844.
(4) Mommsen, Inscriptiones helveticae, n* 164.
(5) C. /. L., XII, 5690. 106.
(6) Dom Bouquet, VI, 596 a; cf. Sickel, Acta Karolinorum , t. II, p. 183,
n*322.
(7) Dom Bouquet, VIII, 412 d.
(8) C. /. L., III, 5606.
(9) Brambach, n* 868.
(10) Brambach, n* 917.
(11) AUmer, InBcriptions de Vienne, t. III, p. 176.
300 LIVRE II. CHAPITRE II.
fils (1), et celle de, P. Primius Eglectianus , aflFranchi de
P. Primius Cupitus (2).
Le nom Premiacus , d'une localité située dans le pagiu
Aurelianensis suivant un diplôme de Tannée 689 (3), parait
être une variante orthographique de Primiacus. C*est par un
primitif Primiacus que semble devoir s'expliquer le nom des
trois communes de Pringy situées dans les départements
de la Marne , de la Haute-Savoie et de Seine-et-Marne.
Prisciacus est une villa d'Auvergne donnée à Téglise
Saint-Etienne de Châlons-sur-Marne , en 565 , par Elafius,
évoque de la môme ville (4). Un autre Prisciacus^ dans
le pays de Chambly (Oise) , apparaît dans un diplôme de
l'année 689 (5). Une villa Prisciacus qui forme aujourd'hui
deux communes, Précy-Notre-Dame et Précy-Saint-Martin
(Aube) , appartenait au neuvième siècle à l'abbaye de Mon-
tier-en-Der, comme on le voit par deux diplômes de
Charles-le-Chauve donnés l'un en 845 , l'autre en 854 (6;.
Une villa Prisciacus^ située dans le Poitou, fut donnée
pour partie à l'abbaye de Noirmoutier par Charles le Chauve
en 854 (7). Une villa Prisciacus y dans l'Autunois, apparaît
dans une charte de Cluny au commencement du dixième
siècle (8). Plusieurs chartes de la même abbaye mention-
nent au même siècle une villa Prisciacus et un ager Priscia-
censis situés dans le [Maçonnais , c'est Prisse (Saône-et-
Loire) (9).
(1) Boissieu, p. 203, 204.
(2) Boissieu, p. 494. Voir d'autres exemples dans le t. XII xlu C. I, L.
(3) Tardif, Monuments historiques, p. 637; cf. Pardessus, DtploTiuta, t. II,
p.. 209.
(4) Pardessus, Dtpfomata, t. II, p. 423.
(5) Tardif, Monuments historiques, p. 637, col. 2. Pardessus, Dipforrute,
t. II, p. 210.
■(6) Dom Bouquet, VIII, 477 a, 529 e.
(7) Dom Bouquet, VII, 344 a ; VIII. 529 a.
(8) Bruel, Recueil des chartes de l'abbaye de Cluny, t. I, p. 164.
(9) Bruel, Recueil, t. I, p. 133, 243, 296, 298, 402, 408, 513, 664; cf. Ang.
Bernard, Cartulaire de Savigny, t. II, p. 1092, col. 1 ; 1095, col. 2.
LA DÉSINENCE -I-ACU8 AU MOYEN AGE. 301
Priscioums est dérivé du gentilice Priscius, venant lui-
même de Priscus , usité d'abord comme surnom : P. Ser-
vilius Priscus fut consul Tan 495 avant J.-C. (1). T. Numi-
cius Priscus remplit la même fonction en 469 (2). Priscius
est beaucoup plus récent , et nous n'en avons pas constaté
Texistence avant l'établissement de l'empire. On conserve
près de Klagenfurt, en Styrie, l'épitaphe de C. Priscius
Surio (3). On a recueilli près de Leibnitz, dans la même
province, l'épitaphe de Priscia Albina (4). Priscia Restituta
est le nom d'une propriétaire mentionnée dans la table
alimentaire des Ligures Baebiani (5).
Prisciacus paraît être la forme ancienne du nom : 1** de
huit communes appelées aujourd'hui Précy , savoir : deux
dans l'Aube , deux dans l'Yonne , et une dans chacun des
quatre départements du Cher, de la Côte-d'Or, de l'Oise et
de Seine-et-Marne ; 2* des deux communes de Pressy (Pas-
de-Calais , Saône-et-Loire) ; enfin des communes de Pré-
cey (Manche) ; Pressac (Vienne) ; Prétieux et Preyssac (Dor-
dogne) ; total , quatorze communes , dont le nom actuel
tient lieu d'un primitif Prisciacus,
De * Prisciniacus dérive V Biàjectif prisciniaeensis, employé
avec le substantif vicus , par Grégoire de Tours , pour dé-
signer un bourg de son diocèse dans l'église duquel il mit
des reliques de saint Nizier, évêque de Lyon, mort
en 573 (6) ; il s'agit, soit du Grand-Pressigny, soit du Petit -
Pressigny (Indre-et-Loire) (7). Un second Prisciniacus, au-
jourd'hui Pressagny l'Orgueilleux (Eure), était situé dans
(1) Denys d'Halicamasse, Uvre VI, c. 23. C. /. L., t. I, p. 487.
^) Tite-Liive, livre II, c. 63. Denys d'Halicamasse , livre IX, c. 56; cf.
C. /. t., t, I, p. 491.
(3) C. /. L., III, 4951.
(4) Ibid., III, 5362.
(5) C. /. L., IX, 1455.
(6) Viiae patrum^ c. VIII, | 11. Bordier, Les livres des mtraoleâ, t. III,
p. ^. Bdit. Arndt et Kruscb, t. II, p. 700, 1. 15.
(7) Longnon, Géographie de la GaxO.e au sixième siècle^ p. 285, 286.
302 LIVRE II. CHAPITRE II.
le Vexin, et, dès le septième siècle, appartenait pour moitié
à Tabbaye de Saint-Denis, comme Tatteste une charte
donnée en 682 ou 683 (1). Un troisième Prisciniacus dépen-
dait de l'abbaye de Saint-Martin de Tours ; c'est aujour-
d'hui Précigné (Sarthe) (2) ; il en est question pour la pre-
mière fois dans un diplôme donné par Charlemagne,
en 775 (3) ; nous le retrouvons mentionné dans des diplô-
'mes de Charles le Simple, en 903 (4), en 904 (5), et
en 919 (6), et dans un diplôme du roi Raoul, en 931 (7.
Un quatrième Prisciniacus dépendait de Tabbaye de Saint-
Ouen de Rouen, comme nous le voyons dans un diplôme
donné par Charles le Chauve en 876 (8). Un cinquième
Prisciniacus appartenait à l'église d'Orléans , ainsi qu'il ré-
sulte d'un diplôme du roi Louis V, daté de 979 (9). Un
sixième Prisciniacus était situé en Lyonnais (10).
Ce nom de lieu dérive du gentilice Priscinius qui nous
est connu par une inscription de Neuss où l'on trouve
mentionné le vétéran Priscinius Florus (1 1). Priscinius vient
lui-même du surnom Priscinus qui est plus fréquent (12).
Les communes dont le nom moderne parait tenir lieu
d'un primitif Prisciniacus sont au nombre de neuf, savoir :
Précigné (Sarthe), et Pressagny (Eure), déjà cités; deux
Pressignac (Charente et Dordogne), et cinq Pressigny, sur
lesquels deux dans l'Indre-et-Loire, dont il a été déjà ques-
(1) Tardif, Monuments historiques ^ p. 19, col. 2. Marquis de Blosseville ,
Dictionnaire topographique du département de l'Eure, p. 175.
(2) MabiUe, La pancarte noire de Saint-Martin de Tours, p. 231.
(3) Dom Bouquet, V , 737 c; cf. Sickel, Acta Karolinorum, t. II , p. 27,
n* 42; cf. MabiUe, La pancarte noire de Saint-Martin de Tours^ p. 67, 106-
107.
(4) Dom Bouquet, IX, 497 b,
(5) Dom Bouquet, IX, 511 c. Mabille, La pancarte notre, p. 88, n* XLV.
(6) Dom Bouquet, IX, 543 b ; cf. MabiUe, ibtd., p. 58, n* VII.
(7) Dom Bouquet, IX, 574 e; cf. MabiUe, ibid.y p. 57, n* VI.
(8) Dom Bouquet, VIII, 650 e.
(9) Dom Bouquet, IX, 660 d.
(10) Aug. Bernard, Cart. de Savigny, t. II, p. 1083.
(11) Brambach, n* 265.
(12) C. /. L., VIII, 9476; IX, 338, 3, 36; 2152, 2153, 3180.
LA DâSINENGE -I-ACUB AU MOYEN AGE. 303
lion, et les trois autres dans les départements du Loiret »
de la Haute-Marne et des Deux-Sèvres.
RoMANiAGus, chez Orégoire de Tours, est un adjectif qui
sert d'épithète au substantif campus et qui désigne un en-
droit où, en Tannée 560, deux armées de sauterelles se
livrèrent bataille, dit-on, non sans éprouver de part et
d'autre de grandes avaries (1) ; c*est aujourd'hui Romagnat
(Puy-de-Dôme) (2).
La variante Rominiacus, avec i pour a dans la seconde
syllabe, nous est fournie par un diplôme de Charles le
Chauve pour l'abbaye de Saint-Médard de Soissons (3) ;
il s'agit de Romeny (Aisne) , au seizième siècle Romigni ,
Roumigny (4). La forme romaine de ce nom est écrite
Romagnanus pour * Romanianu^j en 899, dans un diplôme
de Charles le Simple, où elle désigne une villa située dans
le comté de Besalu, en Catalogne (5).
* Romanianus et Romaniacus dérivent de Romanius, gen-
tilice dérivé lui-même du cognomen Romanus, et qui exis-
tait déjà au commencement de l'empire , comme l'atteste
le nom de Romanius Hispo , délateur et rhéteur souvent
cité par Sénèque le rhéteur, et dont la première mention
datée remonte à l'an 14 de notre ère (6). D'autres Romanius
nous sont connus par les inscriptions, par exemple L. Ro-
manius Justus, dans une inscription de Patras en Grèce (7) ;
M. Romanius Encolpus, dans une inscription d'Hermanns-
tadt, en Hongrie (8) ; Q. Romanius Verecundus, dans une
inscription de Oebensdorf en Suisse (9); Q. Romanius
(1) BistoriM Pnncorum, 1. IV, c. 20; édition Amdt, p. 157, 1. 12.
(2) Longnon, Géographie de ta Gaula au êixième tiède, p. 510.
(3) Tardif, Monuments hUtoriqueêf p. 136.
, (4) Matton, Dictionnaire topographique du département de l'Aisne, p. 235.
(5) Dom Bouquet, t. IX, p. 484 b.
(6) Tacite, Annales, livre I, c. 74. Voir l'édition de Bénéque le Rhéteur
donnée chez Teubner par KiessUng, p. 551 (Jlndex),
(7) C. /. L., m, 505.
(8) C. J. L., III, 1613.
(9) Uommsen, Inscriptiones helveticae, jy 254.
304 LIVRE II. CHAPITRE II.
Probus, dans une inscription du musée de Mannheim {[):
C. Romanius Capito, dans une inscription du musée de
Mayence (2) ; T. Romanius Epictetus (3) et Romanius Sol-
lemnis (4), dans des inscriptions de Lyon. On a trouvé à
Saint-Aubin-suT-Gaillon (Eure), le cachet de l'oculiste Sex.
Romanius Symforus (5) ; à Arles l'épitaphe de Romanius
Adrastus (6), etc.
A Romaniacus remontent les huit noms de communes
suivants : Romagnat (Puy-de-Dôme) ; Romagné (lUe-et-Vi-
laine) ; Romagnieu (Isère) ; Romagny (Manche et territoire de
Béfort) ; Rômigny (Marne) ; Rumigy (Ardennes et Sommet.
RoMiLiACus est une villa où , en 629 , le roi Dagobert I"
répudia Gomatrude, sa femme, et la remplaça par Nan-
thilde (7) ; Jacobs a pensé que c'est Reuilly , aujourd'hui
compris dans Paris. On doit probablement reconnaître le
môme nom , malgré la différence d'orthographe , dans un
locus Rumliacus sis au pays de Thérouanne et acheté par
Tabbaye de Saint-Bertin, eti 704 (8). On lit Rumeliacus dans
un diplôme de Charles le Chauve en 842 (9) , Rumiliacus
dans un diplôme de Louis de Germanie en 875 (10), tous
deux en faveur de l'abbaye de Saint-Arnould , de Metz , et
dans ces deux documents il s'agît de Remilly (Moselle",
aujourd'hui Alsace-Lorraine (il).
(1) Brambach, n* 600.
(2) Brambach, n* 1229.
(3) Boissieu, Inscriptions antiques de Lyon^ p. 189.
(4) Boissieu, ibid,, p. 477.
(5) Héron de Xillefosse et Thédenat, Cachets d'oculistes romsinSy 1. 1,
pp. 193-198.
(6) C. /. L.f XII, 871. Voir neuf autres exemples dans le même tome.
(7) Frédégaire, c. 58, chez Dom Bouquet, t. II, p. 436 b ; édition Kruscb,
Scriptorum rerum merovingicarum , t. Il; p. 150 1. 8; Gesta D&gobeHit
I, c. 22, t6td., p. 585 c ; édition Knisch, ibid., p. 408, 1. 10.
(8) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 265.
(9) Dom Bouquet, VIII, 430 b.
(10) Dom Bouquet, VIII, 424 c.
(11) De Bouteiller, Dictionnaire topographique de l'ancien département
de la Moselle, p. 213.
LA DÉSINENCE -I-ACU8 AU MOYEN AGE. 305
RomiliaeuSj Rumiliaciis, Rumeliacus^ Rumliacus, dérivent
de Romilius ou Romulius , un des plus anciens ^entilices
romains qui donna son nom à une tribu , du nombre des
rustiques ; le territoire de cette tribu était au nord du Tibre.
A cette gens appartenait T. Romilius ou Romulius, consul
Van 455 avant notre ère, décemvir en 451 (1). Ce nom se
rencontre rarement depuis. Cependant Tacite parle d'un
centurion appelé Romilius Marcellus qui , en 70 , lors de
rinsurrection par laquelle Galba fut renversé , défendit en
vain les images de ce prince contre les soldats révoltés (2).
On a trouvé en Hongrie une dédicace à Jupiter par L. Ro-
mulius Quintus (3). Une inscription recueillie aux environs
de Milan nous fait connaître les noms de C. Romilius
Calla (4).
Romilitu^us ou * Romuliacus est la forme primitive des
dix-sept noms de communes qui suivent : Romillé (lUe-et-
Vilaine) ; cinq Romilly , sur lesquels deux dans l'Eure et
un dans chacun des trois départements de TAube, d'Eure-
et-Loir et de Loir-et-Cher ; quatre Rumilly (Aube , Nord ,
Pas-de-Calais, Haute-Savoie); sept Remilly, sur lesquels
deux dans les Ardennes, autant dans la Côte-d'Or, et un
dans chacun des trois départements de la Manche, de la
Nièvre et du Pas-de-Calais.
RuFiAGus ou Ruffiacus est une villa où étaient situés des
biens qui furent donnés en 715 à Tabbaye de Saint-Béni-
gne, de Dijon (5); c*est aujourd'hui Rufifey-lès-Echi-
rey (Côte-d'Or) (6). Une monnaie mérovingienne a été frap-
(1) Voyez les textes cités par Mommseii, C. I. L., t. I, p. 492, 493. Of. Pauly,
Re^l'Encyclopaedie, t. VI, p. 545.
(2) Tacite, Histoires, 1. I, c. 56.
(3) C. 7. L., m, 1352.
(4) /6id., V, 6026.
(5) Pardessus , Diplomata , t. II, p. 300. Voir aussi sur la même localité la
Chronique de saint Bénigne^ chez Dom Bouquet, VII, 380 d ; elle nous offre
l'analyse d'un diplôme de Charles le Chauve dont on trouve le texte chez
Dom Bouquet, VIII, 618.
(6) Gamier, Nomenclature historique des communes du département de
là Côte-d'Or, p. 8.
20
306 LIVRE II. CHAPITRE II.
pée à Rufiacu, que Ton croit être Roufiac (Cantal) (1). Une
église de Ruflac apparaît en 860 ou 866 dans le Cartulaire
de Redon (2) ; la paroisse de Ruflac, plebs Rufiac^ est men-
tionnée dans une autre charte du même Cartulaire en 867;
cette paroisse est aujourd'hui la commune de RuflBac (Mor-
bihan) (3). La même année , Charles le Chauve donne un
diplôme dans une villa Rufiacus dont on ignore la situa-
tion (4). Rufiacus a une variante Rofiacus] un fundus Rofia'
eus apparaît en 575 dans le testament du fondateur de Tab-
baye de Saint-Yrieix (Haute-Vienne) (5). Il est question
d'une villa Rofiacus en 891, dans une charte de l'abbaye de
Cluny; cette villa était située dans le Maçonnais (6).
Le gentilice Rufius est rare sous la république. Cepen-
dant une inscription qui le mentionne et qui a été trouvée
prés de Pérouse paraît antérieure à la période impériale (7).
Sous Claude , le chevalier Rufius Crispinus fut préfet du
prétoire (8) ; élevé à la préture par cet empereur (9) , il de-
vint sous Néron le mari de la trop célèbre Poppée (10). Ce
gentilice est très fréquent dans les inscriptions. On le
trouve notamment en Gaule : à Genève, une inscription
nous a conservé les noms de Rufla Aquilina (11) ; à Chazey
(Ain), on voit encore Tépitaphe de M. Rufius Cassiolus (12;;
à Murs (Ain), celle de Rufius CatuUus (13); à Uriage, celle
(1) Deloche, cité par A. de BarUiélemy dans la Bibliothèque de VEcole
des chartes, t. XXVI, p. 460.
(2) A. de Gourson, CArtuUire de l'abbaye de Redon^ p. 106.
(3) A. de Courson, ibid., p. 106, 747.
(4) Tardif, Monuments historiques, p. 129, col. 2 ; cf. Dom Bouquet, VHI,
602 c , 603 a. M. Matton , Dictionnaire topographique du département de
l'Aisne, p. 238, émet l'hypothèse que ce serait Rouy , commune d'Amignj
(Aisne).
(5) Pardessus, Dtptomata, 1. 1, p. 138.
(6) Bruel, Recueil des chartes de l'abbaye de Cluny ^ t. I, p. 51, 52«
(7) C. /. L., t. I, n* 1394.
(8) Tacite, Annales, liv. XI, c. 1.
(9) Tacite, ibid., liv. XI, c. 4,
(10) Tacite, ibid,, liv. XIII, c. 45.
(11) Mommsen, Inscriptiones helveticae, n* 76.
(12) AUmer, Inscriptions de Vienne, t. III, p. 417.
(13) AUmer, ibid., t. III, p. 435.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 307
(le M. Rufius Marcianus (1). L7 est quelquefois doublé ;
deux exemples de cette orthographe nous sont fournis par
Tépitaphe du gladiateur RufiBus RufiBanus (2). Le double f
se rencontre aussi dans une marque du potier Ruffi
m[anu] (3).
De Rafiacus ou Ruffiacus viennent les dix-neuf noms de
communes suivants : Rofifey (Yonne) ; Roffiac (Cantal) ; sept
RoufiBac , sur lesquels deux dans l'Aude et cinq dans cha-
cun des cinq départements du Cantal , de la Charente , de
Charente-Inférieure , de Haute-Garonne et du Lot ; Rouffy
(Marne) ; deux Ruflfec (Charente, Indre) ; trois Ruffey , sur
lesquels deux dans la Côte-d'Or, un dans le Jura; deux
Ruffiac (Lot-et-Garonne , Morbihan) ; Ruffleu (Ain) ; Ruf-
fieux (Savoie). L'ou de RoufiBac et de Rouflfy s'explique par
le redoublement de Vf qui compensait l'abrègement de Vu
primitivement long du latin Rufus, Rufius. Nous avons cité
plus haut , d'après des textes qui remontent à l'époque ro-
maine , trois exemples de ce redoublement de Vf, dans le
nom RuflBus et dans son dérivé RufiBanus. Quant à l'ortho-
graphe française, RufiFec, Rufifey, RufiBac, RufiBeu et Ruf-
fieux par double /", elle est défectueuse , Vu de ces mots
suppose en latin un u long suivi d'un f simple , Rufiacus
dérivé de Rufius, ce qui est la bonne orthographe latine.
RuLLiACus est un agellus situé dans le territoire de
Troyes et mentionné en 635 dans une charte de Palladius,
évêque d'Auxerre (4) ; on suppose que c'est Rouilly-Saint-
Loup (Aube) (5). Un autre Rulliacus apparaît en 877 dans
un diplôme de Charles le Chauve pour l'abbaye de Mar-
chiennes (6). L'orthographe Ruilliacum nous est ofiferte par
(1) C. /. L,, XII, 2251 a. Voir d'autres Rufius dans le même tome.
{2)AUmer, ibid,, t. III, p. 397.
(3) Boissieu, Inscriptions de Lyon^ p. 435, n* 119.
(4) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 37.
(5) Boutiot et Boc&vd^ Dictionnaire topographique du département de
i'Auhe, p. 138.
(6) Dom Bouquet, VIII, 667 c.
I
308 LIVRE II. CHAPITRE II.
un diplôme faux , attribué au roi Dagobert !•' (1). On lit
Ruiliacus dans un diplôme de Louis le Débonnaire pour
Téglise du Mans, en 832 (2). La variante Roliacus nous
est donnée deux fois dans la vie de Charlemagne par le
moine d'Angoulême , qui appartenait à l'abbaye de Saint-
Cybard-lès-Angouléme : dans un passage où est résumé un
diplôme de Charlemagne en faveur de cette abbaye , il est
question de deux localités, appelées Tune Roliacus (3), l'au-
tre Roliacus minor (4) ; elles reparaissent dans un diplôme
de Charles le Chauve en 852 et y sont appelées lune Ro-
liacus super Noiram , et l'autre Ruliacus Minor (5).
On voit que ce nom de lieu a été écrit tantôt avec dou-
ble l et probablement u bref, tantôt avec / simple et pro-
bablement u long. L'orthographe étymologique est avec
double / : le gentilice Rullius, d'où le nom de lieu dérive,
est lui-même un dérivé de l'adjectif rullus^ rural, rustique,
employé quelquefois comme surnom (6). Le plus ancien exem-
ple du gentilice Rullius nous est offert par une inscription
du temps de la république , qui a été découverte à Aquino,
en Italie ; on y lit le nom de M. Rullius M. fllius (7). Nous
trouvons ensuite : C. Rullius Communis, à Capoue (8); Rul-
lius Celer, à Formies (9); RuUia Galla, à Aquilée (10):
Cn. Rullius Calais, à Isernia (11); P. Rullius Faustus, en
Afrique (12).
Rullius, avec double / a donné le dérivé Ruiliacus
d'où, en France, Roilly (Côte-d*Or), Rouillac (Charente et
(1) Pertz, Diplom&tum imperii tomus primus^ p. 163, 1. 20.
(2) Dom Bouquet, VI, 586 a ; cf. Sickel , Acta. Karolinorum , t II, p. 179,
n- 308.
(3) Dom Bouquet, V, 184 é.
(4) Ihid., V, 185 a.
(5) Ibid., VIII, 521 a.
(6) Pauly, Real-Encyclopaedie^ t. VI, p. 564.
(7) C. /. L., I, 1181.
(8) Ibid., X, 4319.
(9) Ibid., X, 6097.
(10) Ibid., V, 1170.
(U) Ibid., IX. 2682.
(12) Ibid., Vin, 1635.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 309
Côtes-du-Nord), Rouillé (Vienne), deux Rouilly (Aube), uu
troisième, Seine-et-Marne. De la variante Rulius par u
long et simple / est venu Ruliacus également par u long et
simple /, en français de l'ouest, Ruillé, nom de quatre
communes, deux dans la Sarthe et autant dans la Mayenne ;
ailleurs RuUy , nom de trois communes : Calvados, Oise ,
3aône-et-Loire. Ainsi le nombre des communes qui tirent
leur origine du gentilice Rullitis , RuUils , est de quatorze.
Sabiacus est une villa qui , dès Tannée 769 , appartenait
à l'abbaye de Saint-Aubin d'Angers, comme l'atteste, à
cette date, un diplôme de Charlemagne (1). Ce nom de
lieu a probablement la même origine que celui de Savia-
eus porté par une localité des environs de Lyon; là étaient
situées deux manses qu'en 878 Louis le Bègue donna à
l'église de Mâcon (2).
Ces noms de lieux supposent un gentilice Sapins , en
basse latinité Sabius ou Savius. Sapins, adjectif signifiant
sage, se rencontre dans le composé nesapius « dépourvu
de sagesse ou de science » et a été employé comme
gentilice, exemple : M. Sapins Maximus dans une inscrip-
tion de Turin (3). La variante par 6 := p est constatée par
le nom de femme Sabia Optata porté par une affranchie
de Sabius Plaetor dans une inscription d'Aquilée (4).
De Sapius , Sabius ou Savius est venu Sapiacus , Sabia-
eus ou Saviacus. De Sabiacus ou Saviacus sont venus pro-
bablement en français : Savy, nom de deux communes,
l'une dans l'Aisne, l'autre dans le Pas-de-Calais, et Sagy,
aussi nom de deux communes, Saône-et-Loire et Seine-et
Oise. Quant à Sapiacus, c'est de cette forme que paraissent
venir Sache (Indre-et-Loire) et Sachy (Ardennes).
Sacugus est le nom d'une villa dont Vigile, évoque
(1) Sickel, Acia Karolinorum, p. 17, n» 4. Dom Bouquet, V, 717 b.
P) Dom Bouquet, IX, 411 e.
(3) C. /. L., V, 7192.
(4) Ibid., V, 1359.
310 LIVRE II. CHAPITRE II.
d'Auxerre , dispose par une charte de rannée 670 (1). C'est
aujourd'hui Sacy (Yonne). Saciacus, variante archaïque de
ce nom désigne un locus du Beauvaisis dans une charte de
Pépin le Bref, en faveur de Tabbaye de Saint-Denis, en
751 (2). Dans un diplôme de Charles le Chauve pour l'ab-
baye de Compiègne, en 877, apparaît une villa Sacciacm,
également située en Beauvaisis , qui est probablement dif-
férente (3). En 892, un diplôme de Louis, roi de ProveDce.
nous montre Téglise de Lyon en possession d'une Sacia-
clis villa, près de Valence (4). En 912, une charte de l'ab-
baye de Cluny mentionne une villa Saciagus dans le Ma-
çonnais (5). En 926, une Saciacus villa appartenait à l'église
Saint-Bénigne, de Dijon, comme nous l'apprend une charte
du roi Raoul (6).
De ce nom de lieu , l'orthographe la plus ancienne, bien
que nous n'en ayons rencontré qu'un exemple, parait être
Sacciacus, dérivé du gentilice Saccius conservé par Tinscrip-
tion d'Igel , près Trêves , où se lisent les noms de L. îSac-
cius Modestus (7). Saccius a donné le dérivé Sacciarius
employé comme cognomen dans une inscription de Ley-
bach (8). Il est dérivé de Saccus, autre cognomen porté par
un chrétien d'Afrique qui fut martyrisé et dont le culte est
célébré le 27 mai. Le cognomen Saccus est probablement
identique au nom commun signifiant « sac ». De Saccus
vient le dérivé Sacco, employé à titre de cognomen dans une
inscription de Terracine (9), d'où le gentilice Sacconius dans
deux inscriptions, l'une de Naples (10), l'autre de Lyon (11).
(1) Pardessus, t. II, p. 454.
(2) Pertz, Diplomaitum imperii tomus primuSy p. 109, I. 9.
(3) Dom Bouquet, VIII, 660 c.
(4) Ibid., IX, 674 c.
(5) £ruel, Recueil des chartes de l'abbaye de Cluny, p. 175.
(6) Dom Bouquet, IX, 570 c.
(7) Brambach, n» 830.
(8) C. /. L., III, 3874.
(9) Ibid., X, 6394.
(10) Ibid., X, 2198.
(11) Boissieu, Inscriptions antiques de Lyon, p. 241.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 311
De Sacdacus viennent les noms de Sacé (Mayenne) , de
Sacey (Manche), et de quatre communes de Sacy, deux
dans roise, les deux autres dans la Marne et TYonne.
Salviacus, où Tabbaye de Saint-Denis posséda une église
dédiée à saint Martial et que mentionnent deux diplômes
faux, Tun de Dagobert I" (1), Tautre de Clovis II (2), est
aujourd'hui Saujat, commune de Montluçon (Allier) (3).
Le gentilice Salvius, d'où Salviacus, remonte à la pé-
riode de la république, comme le prouve Tépitaphe de C.
Salvius Cassiae gn[atus] (4) et Tinscription de Pescina qui
nous a conservé les noms de A. Salvius Cledus (5). Ce
gentilice, d abord obscur, fut rendu célèbre par l'empereur
Othon , dont le régne éphémère appartient , comme on le
sait, à l'an 70 de notre ère : ce prince s'appelait M. Salvius
Otho; son père, L. Salvius Otho Titianus, avait été con-
sul en 52 , et son grand-père avait été préteur (6). Un cer-
tain Salvius fut chargé du gouvernement de l'Aquitaine
avec titre de légat sous l'empereur Hadrien (117-138); nous
avons encore l'analyse d'un rescrit que lui adressa cet
empereur (7) ; on pense que ce Salvius est identique au cé-
lèbre jurisconsulte Salvius Julianus (8). Le gentilice Sal-
m\të n'est pas rare dans les inscriptions du temps de l'em-
pire (9). Ce gentilice pénétra en Gaule, comme l'atteste
(1) Pertz, Diplojn&tum imperii tomus primus^ p. 159, 1. 36.
P) Pertz, ibid., p. 180, 1. 45.
(3) Longnon, Examen géographique du tome premier des diplomata im-
perii^ p. 33.
(4) C. /. L., I, 1383.
(5) /Md., I, 1541 a. Pour plus do détails, voir Tarticle Salvii chez Pauly,
Real'Encyclopaedie, t. VI, p. 720-722.
(6) Tacite, Histoires, 1. II, c. 50; cf. Josephus Klein, Fasti consulares, p. 35.
(7) Callistrate, livre V, De ^ognitionibus, passage reproduit au Digeste,
Uvrc XLVÏII, titre m, loi 12.
(8) Desjardins , Géographie historique et administrative de la Gaule ro-
maine, t. III, p. 253. Voy. Teufifcl, Geschichte der rœmischen Literatur ,
3-édit., p. 817.
(9j Voyez les index du C. /. L., t. II, p. 729, col. 3; t. III, p. 1083, col. 2 ;
t. V, p. 1125, col. 4; t. VII, p. 370, col. 1; t. VIII, p. 1013, col 3; t. IX,
p. 724, col. 2; t. X, p. 1054, col. 1.
312 LIVRE II. CHAPITRE II.
Tépitaphe de C. Salvius Mercurius, trouvée à Pourvieres
et conservée au palais des Arts, à Lyon (1).
De SalviacuSf la forme moderne dans les régions méri-
dionales de la France est : Salviac (Lot) ; Sauviac (Gers,
Gironde); Sauviat (Puy-de-Dôme, Hau te- Vienne) ; Saujac
(Aveyron) : six noms de communes , sans compter les
écarts ; parmi ceux-ci , nous citerons Saugey (Savoie et
Haute-Savoie) qui nous offrent une forme septentrionale
de ce nom; la variante romaine est Salvia/nus^ qui a donne
Sauvian (Hérault).
Salviniacus est une villa du Tonnerrois qui appartenait
au neuvième siècle à l'abbaye de Montier-la-Celle, comme
nous l'apprend un diplôme de Charles le Chauve (2).
Sâlvinius . d'où Salviniactis dérive, n'est pas un gentilice
commun ; on l'a trouvé dans une inscription de Constan-
tine qui nous apprend^les noms de P. Sâlvinius Arat[orj '3..
Sâlvinius est dérivé de Salvinus, qui a été employé comme
surnom, exemple : Ulpius Salvinus dans une inscription de
Carlsbourg (4). Salvinus, nom de deux saints évêques, l'un
de Vérone mort vers 562, l'autre de Verdun qui vivait au
siècle précédent (5), n'est autre chose que ce cognomen dont
le gentilice Sâlvinius est dérivé.
De Salviniacus viennent les noms de communes suivante :
Sauvignac (Charente) ; deux Sauvigney (Haute-Saône) ; et
quatre Sauvigny, sur lesquels deux dans l'Yonne (6), un
dans la Meuse (7), un dans la Nièvre (8).
(1) Boissieu, Inscriptions antiques de Lyon^ p. 184. On trouvera deux
autres Salvius et quatre Salvia dans le t. XII du C. I. L. ^
(2) Dom Bouquet, t. VIII, p. 642 e,
(3) C. I. L., VIII, 7706.
(4) Ibid., III, 1145.
(5) Leurs fêtes ont été mises Tune au 12 octobre, l'autre au 4 septembre.
(6) S&lvigniacum^ 1217. Quantin, Dictionnaire topographique de l'Yonne,
p. 121.
(7) Salviniaco , 846. Liénard . Dictionnaire iopographique de la Meuse,
p. 219.
(8) Salviniacum, 817. Soultrait, Dictionnaire topographique de la Nièvre^
p. 172.
LA DÉSINENCE -I-A<3U8 AU MOYEN AGE. 313
Sansiacus est le nom d'une des propriétés de Tabbaye
de Saint-Ouen de Rouen, aux termes d'un diplôme donné
par Charles le Chauve en 876 (1). Sansiacus vient, peut-
être , d*un plus ancien * Sanctiacus , dont la forme romaine
était Sanctianus ; ce dernier mot aurait conservé son t dans
Torthographe Sanlianae, d'un nom de lieu que mentionne,
vers Tannée 846, un diplôme de l'empereur Lothaire en
faveur d'un archevêque de Lyon (2).
Sanctictcits et Sanctianus dériveraient du gentilice Sanc-
tius dont un exemple nous est conservé par une inscrip-
tion de la Bavière rhénane où figure un personnage appelé
Sanctius Honoratus (3). On en trouve un autre exemple
dans une dédicace conservée au musée de Genève, et qui
a pour auteur L. Sanctius Marcus (4). Ce gentilice est lui-
même dérivé du cognomen Sanctus, plus fréquent.
On peut aussi supposer un primitif Sentiacus^ Sentianus
dérivé du gentilice Sentius, connu sous la république, fré-
quent dans les inscriptions sous l'empire romain, où quatre
personnages de ce nom revêtirent la pourpre consulaire (5).
*SancHacus — ou SenHacus (?) — a donné à la géographie
moderne de la France les huit noms de communes suivants :
deux Sansac (Cantal); Sansais (Deux-Sèvres); Sanssac (Haute-
Loire) ; Sanssat (Allier) ; Sanxay (Vienne) ; Sanzay (Deux-
Sèvres), et Sanzey (Meurthe-et-Moselle). * Sanctianus
peut expliquer Sansan (Gers) (Cf. p. 315-316).
Secundiaca est le nom d'une cors, c'est-à-dire d'une villa
mentionnée dans le diplôme de fondation de l'abbaye de
la Sainte-Trinité de Poitiers, vers l'année 962 (6). Cette
localité était située près de Melle (Deux-Sèvres).
(!) Dom Bouquet, t. VIII, p. 650 e.
[% Ibid., VIII, 384.a.
(3) Brambach, 1764.
(4) Mommsen, Inscriptiones helveticae^ n" 75.
(5) Sur los Sentii, voyez Pauly, Real-Enclopaedie, t. VI, p. 1047-1049, et
ci-dessous, p. 315-316.
(6^ Dom Bouquet, t. IX, p. 626 d.
314 LIVRE II. CHAPITRE IL
Secundiacus est dérivé de Secundius , gentilice qui ne?*
pas rare dans les inscriptions, et qui est dérivé du surnom
plus fréquent encore Secundus (1). Nous citerons : Secuii-
dius Crispus, dans une inscription de Trêves (2); Secun-
dius Ursio , au musée de Bonn (3) ; Secundius Agricola, à
Wiesbaden (4); M. Secundius Saturninus, M. Secundius
Acceptus, dans une inscription de Lyon (5).
De Secundius est venu Secundiacus qui, dans le midi de
la France, a donné Ségonzac (Charente, Corrèze et Dordo
gne). Quant à Secondigné et Secondigny (Deux-Sèvres), ils
supposent un primitif * Secundiniacus , dérivé de Secundi-
nius qu'on trouve dans la dédicace lyonnaise à Mithra, par
Aur. Secundinius Donatus (6), et dans plusieurs autres
inscriptions (7). Il peut se faire que, dans le diplôme cite
plus haut, on ait imprimé Secundiacus pour Secundiniacus^
et que la localité mentionnée soit Secondigné (Deux-
Sèvres), arrondissement de Melle.
Securiacus est un locus situé en Brabant , comme nous
l'apprennent deux diplômes, l'un de Louis le Débonnaire.
qui parait dater de Tannée 822 (8), l'autre de Charles le
Chauve, en 847 (9). Dans un diplôme de Charles le Simple,
en 899, Securiacus est qualifié de villa (10).
Ce nom de lieu dérive du gentilice Securius, qui parait
très rare. Le seul exemple rigoureusement certain que
nous en puissions signaler se rencontre dans une dédicace
(1) Pauly, Real-EncyclopaLedie^ t. V, p. 914.
(2) Br&mbach, n* 825.
(3) /bid., n* 846.
(4) Ibid,, n- 1526.
(5) Boissieu, Inscript, de Lyon, p. 521. Cf. C. /. L., t. XII, p. 881, col. 2
(6) Boissieu, ibid,, p. 40. Ces lignes ont été écrites avant la publicaUon
du t. XII du C. /. L. où ont été recueillis dix exemples de ce gentilice.
(7) Voyez les index du C. /. L. , t. III, p. 1083, col. 2; t. V, p. 1126, col. 1.
(8) Dom Bouquet, VI, 530 c ; cf. Sickel, Acta Karolinorum, t. II, p. I3vV
n* 180.
(9) Dom Bouquet, VIII, 488 e.
(10) Ibid., IX, 474 6.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 315
à Jupiter trouvée près de Mayence ; Tauteur de cette dé-
dicace est le légionnaire Securius Carantus (1). On suppose
que le même gentilice était inscrit dans une épitaphe
recueillie à Neumayer (Prusse rhénane) ; cette épitaphe
aurait été gravée par les soins de Securius Novellus ; mais
quand a été trouvée cette inscription aujourd'hui perdue ,
le commencement de la ligne où ce nom avait été gravé
manquait, et dans cette lacune était comprise la lettre
initiale s de Securius (2).
Sentiacus, aujourd'hui Sinzig, près de Coblenz (3), est
une localité où se trouvait un palais d'où Pépin le Bref a
daté un diplôme, en 762 (4). Sentiacus est aussi mentionné
dans un autre diplôme du même prince et de la même
année (5). L'empereur Lothaire y fit un feéjour en 842 , et
en nous rapportant ce fait, les Annales de Saint-Bertin se
servent de l'expression Sentiacum palatium (6), les Annales
de Fulde emploient celle de villa Sentiaca (7). Mais la forme
mascuUne était la plus usitée : en 876, nous la retrouvons
encore; Louis, fils de Louis le Germanique, allant d'An-
dernach à Aix-la-Chapelle, passe à Senciacus (8).
La forme romaine de ce nom est Sentianus , nom d'une
station de l'Italie méridionale, non loin de Bénévent (9).
Sentiacus dérive du gentilice romain Sentius (10). Le pré-
(1) Brambacb, n* 921.
(2) Ibid., n* 858.
(3) Sickel, Acta Karolinorum , t. II, p. 483; cf. Mabillon, De re diploma-
ttca,liv. IV, J 131.
(4) Sickel, Acia Karolinorum, t. II, p. 6, n* 19.
(5) Sickel, ibid., t. II, p. 6, n* 20. Migne, Patrologia latina, t. XGVI,
col. 1539 d.
(6) Dom Bouquet, VII, 60 d.
(7) Ibid., VII, 160 a.
(8) Migne, Palrologia latina, t. CXXVI, col. 1280 b; Annales de Saint-Ber-
iin, chez Dom Bouquet, VII, 122 e.
(9) Itinéraire d'Antonin, édit. Parthey et Pinder, p. 112 ; cf. C. /. L., t. IX,
p. 657.
(10) Sur la gens Sentia, voyez Pauly, Real-Encyclopaedie, t. V, p. 1047-
1049.
316 LIVRE IL CHAPITRE II.
teur C.Sentius, connu surtout parce que, comme le raconle
Varron , il ne buvait de vin de Chio que par ordonnance
de médecin (1) , fut battu par les Thraces Tan 89 avant
notre ère (2). On lit sur des monnaies romaines les noms
de L. Sentius C. fllius (3). G. Sentius Saturninus obtint
les honneurs consulaires l'an 19 avant J.-C. (4). Un autre
C. Sentius fut préteur de Syrie trente-huit ans plus
tard. (5). Cegentilice, fréquent dans les inscriptions delà
période impériale (6), pénétra en Gaule : un certain C. Sen
tins apparaît dans une inscription du musée de Mayence ;7i ;
Sentius Ursio , dans une inscription de Gologne (8) ; Sen-
tius Successianus dans une épitaphe trouvée à FuUy, près
Martigny, en Suisse (9); G. Sentius Diadumenus, médecin,
fit à Mars une dédicace dont on signale l'existence à Yver-
dun dans le même pays (10).
Seniiacus^ dérivé de Sentius, n'a pas laissé en France de
traces certaines. Il est cependant possible que Sincey
(Gôte-d'Or) soit un ancien Sentiacus (il). En général, on
peut croire qu'en français Sentiacus s'est confondu avec
" SanciiacuSy traité plus haut, p. 313.
Severiacus est le nom d'une villa située près de Tours,
et qui appartenait à l'église de Paris au sixième siècle.
(1) Pline, Histoire naturelle, livre XIV, J 96.
(2) Tite-Live, Epitome du livre LXX; cf. Cicéron, In Verrem, II, 93; /n
Pisonevrif 34, et Mommsen, Histoire romaine, 6* édit., t. II, p. 285.
(3) C. /. L., I, 409.
(4) Ibid,, t. I, n»» 742, 743, p. 546, 547; c'est sous son consulat que mou-
rut Virgile. Voyez les fragments de Suétone dans l'édition de cet auteur
donnée par L. Roth, chez Teubner, p. 796.
(5) Tacite, Annales, II, 74.
(6) C. /. L., t. V, p. 1126, col. 1 et 2; t. VIII, p. lOll, col. i ; t. X, p. 1054.
col. 3 et 4; p. 1065, col. 4.
(7) Brambach, n» 78.
(8) Ibid., n* 361.
(9) Mommsen, Inscriptiones helveticae, n* 13.
(10) Mommsen, ibid,, n* 136. On trouvera sept autres exemples dans le
t. XII du C. /. L.
(11) Cotte hypothèse n'est pas admise par Gamier, Nomenclature hiitori-
que des communes, etc., du département de la Côte-d'Or, p. 171, n" 67?.
LA DESINENCE -I-ACU8 AU MOYEN AGE. 317
ronime nous le voyons par la vie de saint Germain, évoque
de Paris , qu'écrivit Fortunat (1). Des documents de Tépo-
que carlovingienne et du commencement de la période
capétienne conservés par le Cartulaire de Tabbaye de Con-
ques (Aveyron) , nous font connaître trois Severiacus situés
dans le voisinage de ce monastère (2).
SeveriaciAs est dérivé de Severius, gentilice romain dérivé
lui-même du cognomen plus ancien Severus (3). Le genti-
lice Severius se trouve en Italie ; on a recueilli, par exem-
ple, à Milan, Tépitaphe de Q. Severius Saturianus (4). Ce
nom pénétra en Gaule. Le musée de Nimes a Tépitaphé
de L. Severius Severinus, édile de la colonie de Nimes (5);
celui d'Avignon, l'épitaphe de Severius Viator (6). Le musée
de Genève possède une dédicace au dieu Liber par P. Se-
verius Lucanus ; elle a été trouvée à Saint-Prex , dans
l'ancien territoire de la colonie de Noviodunum, aujour-
d'hui Nyon (7). L. Severius Martius fit faire à sa femme
une épitaphe découverte, il y a plus de deux siècles, près
d'Avenche, en Suisse (8). Non loin de là, à Wifelsburg, on
a lu jadis une épitaphe que Severius Marcianus fit graver
pour sa sœur (9). Le musée de Chalon-sur-Saône possède
l'épitaphe de Severia Severa(lO). Une seconde Severia Se-
vera figure dans une autre épitaphe trouvée à Lyon (11).
L'épitaphe de Severia Fuscina existe au palais des Arts , à
(1) Vt^a gancti Germant parisiensis episcopij c. 64. Migne, Patrologiê, la-
iina, t. LXXXVIII, col. 474 c, édit. de Fortunat donnée par B. Krusch dans
les Monumenta Germaniae, in-4*, t. II, p. 24; cf. Longnon, Géographie de
la Gaule au sixième siècle, p. 292.
(2) Desjardins, Cartulaire de l'abbaye de Conques, p. 35, 135, 136, 185,
192, 505.
(3) Voyez, par exemple, C. J. L., t. I, n» 1422 ; cf. Pauly . Real-Encyclo-
paedte, t. V, p. 1132.
(4) C. 7. L., V, 5962.
(5) Herzog, Galliae Narbonensis.., historia, t. II, p. 35, n* 140.
(6) Herzog, ibid., p. 74, n- 357.
(7) Mommsen, Inscriptiones helveticae, n* 113.
(8) Mommsen, ibid., n* 191.
(9) Mommsen, tbtd., n* 202.
(10} Bcissien, Inscriptions antiques de Lyon, p. 217.
(U) Boissieu, ibid., p. 421.
(1) Boissieu, ibid.^ p. 523.
(2) Bulletin épigraphique , t. I, p. 74. Le tome XII du C /. L. mentionne
six autres Severius et trois autres Severia.
(3) Siveriacum^ vers 1250. Lucien Merlet, Dictionnaire topographique du
département d'Eure-et-Loir , p. 49.
(4) Sivriacum, en 1170. Quantin, Dictionnaire topographique du dépar-
tement de l'Yonne^ p. 36.
(5) Ce sont deux des Severiacua du Cartulaire de Conques, Severac
(Loire-Inférieure), suppose un ancien *SeveracuSf dérivé du cognomen
Beverus. Voy. Cartulaire de Redon^ p. 314.
318 LIVRE II. CHAPITRE II.
Lyon (1). M. Germer Durand a lu, il y a quelques années,
les noms de L. Severius Severus dans une inscription de
Bruges, commune de Palhers (Lozère) (2).
Suivant M. Longûon , le Severiacus dont parle Fortunat,
au sixième siècle , est Civray-sur-Cher (Indre-et-Loire). Le
même département contient une autre commune dont le
nom s'explique par la môme étymologie , c'est Civray-sur-
Esves, Il y a encore en France deux autres communes de
Civray , l'une dans le Cher , l'autre dans la Vienne , et le
nom de chacune a probablement la même origine. Dans le
midi, Severiacus a donné Civrac; on compte dans la Gironde
trois communes de Civrac ; ailleurs , la désinence -act« est
devenu -ieux ou -y : nous citerons deux Civrieux (Ain,
Rhône); quatre Civry (Côte-d'Or, Eure-et-Loir (3), Seine-
et-Oise, Yonne) (4). Dans tous ces noms, 1'^ initial a été
supplanté par un c. L'* persiste dans les suivants : Sevrai,
(Orne) ; Sevrey (Saône-et-Loire) ;, Sévry (Cher) ; deux Seve-
rac dans l'Aveyron (5).
On pourrait expliquer aussi par Severiacus le nom de sLx
communes de Sivry, parmi lesquelles deux dans la Meuse
et quatre dans les départements des Ardennes, de la Marne,
de Meurthe-et-Moselle et de Seine-et-Marne.
Toutefois, le nom d'une de ces communes remontée
une autre origine. Sivry-sur-Meuse , dans le département
de la Meuse, s'est appelé superiacus au dixième, au
onzième et au douzième siècle ; Vu de la première syllabe
n'a commencé à se prononcer i qu'au treizième siècle.
LA DÉSINENCE -I-ACU8 AU MOYEN AGE. 319
comme Ta établi M. Liénard (1). &aperiacus est dérivé de
Siiperius, gentilice que nous fait connaître une épitaphe
africaine , celle de Superius Flavianus (2). On ne peut
donc comprendre Sivry-sur-Meuse dans la liste des noms
de communes qui offrent la forme moderne d*un pri-
mitif Severiacus. Il en reste vingt-trois. Il est possible que
dans le nombre quelques-uns soient, comme Sivry-sur-
Meuse, d'anciens Superiacus, cependant, le gentilice Supe-
rius étant beaucoup plus rare que le gentilice Severius, le
dérivé Severiacus a dû être plus fréquent que le dérivé
* Sexciacus est un nom de fundus , d'où vient le nom
du vicus Seœciacensis situé dans le Bigorre, c'est-à-dire pro-
bablement dans le département des Hautes-Pyrénées; vers,
la fin du sixième siècle, Grégoire de Tours nous rapporte
que là fut enterré le prêtre saint Justin et que , dans une
dépendance de ce victis, le prêtre saint Sévère fit bâ-
tir une église (3). * Seœciacus est une orthographe de basse
époque pour * Sextiacus. L'orthographe plus altérée encore,
Smiacus, nous est offerte en 854 par un diplôme de l'em-
pereur Lothaire pour l'abbaye de Saint-Claude (4).
Ces noms de lieux sont dérivés du gentilice romain
Sextius, porté par une famille plébéienne. Dès l'an 339
avant notre ère, L. Sextius était tribun du peuple à
Rome (5). Un autre L. Sextius, tribun du peuple en 377,
se rendit célèbre par l'ardeur et le succès de sa lutte con-
tre les patriciens (6) ; il fut le premier plébéien élevé au
consulat, l'an 366 avant notre ère (7). C. Sextius Calvinus,
(i) Dictionnaire topogr&phique du département de la Meuse, p. 224.
(2) C. /. L., t. VIII, n- 9639. Cf. Superinius, à Arles, XII, 687.
(Z) Gloria confessorum, c. 49, 50. Bordier , Les livres des miracles,
t. II, p. 436, 438, édit. Arndt et Krusch, c. 48, 49, p. 777, 1. 3, 11.
(4) Dom Bouquet, VIII, 394 a.
(5) Tite-Uve, livre IV, c. 49, } 6.
(6) Jbid,, livre VI, c. 35.
(7) /5id., livre VII, c. 1.
3Î0 LIVRE II. CHAPITRE II.
consul Tan 124 avant notre ère (1), porta ce nom en Gaule:
il y fut proconsul les deux années qui suivirent son con-
sulat , et y fonda la ville d'Aquae Sextiae , aujourd'hui Aii
en Provence, le premier établissement des Romains dans
la région qui est devenue la France (2). On a recueilli quel-
ques inscriptions qui attestent Texistence en Gaule du gen-
tilice de ce consul : telles sont Tépitaphe de M. Sextius
Atticus , trouvée à Verenay (Rhône) (3) , les marques de fa-
brique de C. Sex[tius] Eutyches (4), et de G. Sext[iu5;
Post[umus] au musée de Vienne (Isère) (5). Une inscrip-
tion de Lyon nous a conservé les noms de P. Sextitis Flo-
rus (6); une inscription d'Ingweiler (Alsace), ceux de L.
Sextius Marcianus (7); une inscription d'Huttich, en Hesse,
ceux de L. Sextius Perwincus (8).
C'est d'un primitif * Sextiacus que viennent probable-
ment les noms de deux communes de Sexey (Meurthe-et-
Moselle) , appelées chacune Sessiacum en 1050 (9). Sissy
(Aisne), est aussi appelé Sessiacum en 1168 (10). Peut-être
Cessey (Doubs), et Cession (Isère), ont-ils la même origine.
On doit, ce semble, expliquer autrement le nom de Cessey-
sur-Tille (Côte-d'Or) (11), et de Cessy-les-Bois (Nièvre) (lÎ!;
ce sont des dérivés du gentilice Saccius, étudié page 310.
(1) c. I. L., t. I, p. 534, 535; cf. n» 632.
(2) Voyez Tétude faite sur lui par M. E. Desjardins, Géographie historique
et administrative de la Gaule romaine, t. II, p. 271-273 ; et sur la gens
Seztia, consultez Pauly, Real-Encyclopaedie , t. VII, p. 1142-1146.
(3) AUmer, Inscriptions de Vienne, t. III, p. 5.
(4) Allmer, ibid., t. IV, p. 9.
(5) AUmer, ibid,, t. IV, p. 194.
(6) Bolssieu, Insûriptions de Lyon, p. 194.
(7) Brambach, Inscriptiones rhenanae, n* 1878.
(8) Ibid.f n* 1088. Plusieurs autres Sextius sont mentionnés dans le tome XII
du C. /. L. On y trouve aussi Seccius, 3709, et Seccia, 415.
(9) Lepage , Dictionnaire topographique du département de la Meurthe ,
p. 129.
(10) Matton, Dictionnaire topographique du département de V Aisne, p. 261.
(11) Sactacus. Garnier, Nomenclature historique des communes, etc., du
département de la Côte-d'Or, p. 20, n* 80.
(12) Sassiacense monasterium, cenobium Saxiacense. Soultrait, Diction-
naire topographique du département de la Nièvre, p. 32.
LA DÉSINENCE -I-ACU8 AU MOYEN AGE. 321
SiuACus est un loous dépendant de Lagny-le-Sec (Oise),
suivant un diplôme de Thierry III qui remonte à 688 (1).
Un diplôme de Charlemagne pour Tabbaye de Saint-Calais,
en 774 , nous transporte dans le Maine « in condita Silia^
censé » ; dans cette condita se trouve une villa appelée
mrte Bosane (2). Un diplôme de Charles le Gros, en faveur
de l'abbaye de Saint-Etienne de Dijon, en 885, nous mon-
tre en Bourgogne un autre Siliacus situé « in comitatu
Uscarensi », c'est-à-dire un peu au sud de Dijon (3).
Siliacus vient de Silius, gentilice qui apparaît dans les
derniers temps de la république romaine, et qui n'était
pas rare sous l'empire (4). Ainsi, sous la république, P. Si-
lius Nerva , élevé à la préture Tan 59 avant notre ère, fut,
quelques années après, avec le titre de propréteur, chargé
de Tadministration de la Bithynie et du Pont ; c'était un
des amis de Gicéron (5). Le grand orateur eut des relations
d'affaires avec un autre Silius dont le prénom était Âu-
lus (6). Sous Tempire, on trouve dans les fastes consulai-
res, en Tan 20 avant J.-C, P. Silius Nerva (7). P. Silius
fut consul suffecPus en l'an 3 après J.-C (8). C. Silius par-
vint au consulat en l'an 13 de notre ère (9). P. Silius
Nerva obtint la même dignité en l'an 28 (10). Sous Claude,
C. Silius, consul désigné, dut une célébrité scandaleuse à
son mariage avec Messaline (11). Le poète Silius Italiens
(1) Pardessus , Diplomata, t. II, p. 205. Tardif, Monuments hUtoriques^
p. 20, col. 2. Pertz , Diplomatum imperii tomus primus , p. 51, ligne 32 ;
et Longnon, Ex&nien géographique^ p. 26.
(2) Dom Bouquet, V, 724 b; cf. Sickel, Acta Karolinorum, t. II, p. 22, n* 22.
(3) ma., IX, 336 c.
(4) On peut trouver une étude sur la gens Silia chez Pauly, Real-Ency-
clopaedie, t. V, p. 1190-1195.
(5) Gicéron, Ad familiares, livre VII, ép. 21 ; livre IX, ép. 16 ; livre XIII,
ép. 61, 62, 63, 64, 65.
(6) Ad Atticum, Uvre XII, ép. 24-31, 33, 35.
(7) C. i. L., t. I, p. 540, 547. Josephus Klein, Fasti consulares^ p. 9.
(8) Ihid.j t. I, p. 548. Josephus Klein, p. 13.
(9)lbid., t. I, p. 550, 551, n** 762, 763. Josephus Klein, p. 20.
(10) Josephus Klein, p. 26.
(11) Tacite, Annales, livre XI, c. 26, 27.
21
322 LIVRE IT. CHAPITRE II.
acquit par ses vers d'autres titres à la notoriété ; mais il
n'était pas seulement homme de lettres, il obtint les
honneurs consulaires en Tan 68 de notre ère (1).
Les noms de lieux que nous avons cités attestent que
ce gentilice pénétra en Gaule. Nous ignorons si ce fut par
l'influence de l'un des personnages que nous venons de
mentionner; ce que nous savons, c'est que le C. Silius.
consul en l'an 13, commanda l'armée de la Germanie su-
périeure, avec titre de légat, pendant sept ans, de l'an 14
à l'an 21 de notre ère (2).
SiliaciÀSy dérivé de Silius, est devenu dans le Midi Si-
Ihac ; c'est le nom d'une commune du département de l'Ar-
dèche ; dans le Nord , d'autres formes modernes de Silia-
eus nous» sont offertes par : Sillé, nom de deux communes
de la Sarthe; Silley, nom de deux communes du Doubs;
Silli, nom d'une commune de l'Orne ; Silly, nom porté par
trois communes , deux dans l'Oise , une dans l'Aisne. Le
nombre total de ces communes s'élève à neuf.
La forme latine de Siliacus était Silianus ; une charte de
Ravenne mentionne un fundum qui vocatur Siliamim (3!.
*8iLVANiACus est probablement l'orthographe primitiTe
du nom de lieu écrit Selvaniacus dans un diplôme accordé
par Louis le Débonnaire à l'abbaye de Conques, en 819 (4;.
En effet, nous trouvons le même nom de lieu écrit à
l'ablatif Silvaniago^ avec un i à la première syllabe, dans
une charte du onzième siècle conservée par le Cartulaire
de Conques (5). Le nom actuel de cette localité est Savi-
gnac, c'est une dépendance de la commune d'Asprières
(Aveyron).
(1) Josephus Klein, Fasti consul&res, p. 41.
(2) E. Desjardins, Géographie historique et administrative de U GauU
romaine, t. III, p. 248.
(3) Fantuzzi, Monumenti Ravennati^ t. I, p. 35.
(4) Dom Bouquet , VI, 717 e, Gustave Desjardins , Cartulaire de l'abbaye
de Conques, p. 410.
(5) Gust. Desjardins, ibid.y p. 81.
LA DÉSINENCE -I-ACU8 AU MOYEN AGE. 3Î3
Silvaniacus est dérivé du gentilice Silvanius, dérivé lui-
même du surnom Silvanus. L'épitaphe de Silvanius For-
tunatus existe encore à Vienne (Isère) (1). Les noms de
L. Silvanius Probus nous ont été conservés par une inscrip-
tion de Rheinzabern , en Bavière rhénane (2), et ceux de
C. Silvanius Matemus par une inscription de Saint-Hippo-
iyte-de-Caton (Gard) (3).
Les noms de lieux dérivés du gentilice Silvanius offrent
une grande analogie avec ceux qui sont tirés de Silvinius
[p. 325), et il doit être souvent difficile de les en distinguer.
SiLviAGus , orthographe de basse époque pour Silviacus^
est le nom d'un vious où étaient situées des vignes qu'en
615 Bertramne, évoque du Mans, donna à la basilique de
Saiot-Germain, fondée par lui près de la ville du Mans (4).
La légende Silviaco se lit sur une monnaie mérovin-
gienne (5) , et nous ignorons où était située la localité que
désigne cette légende monétaire. Mais il est vraisemblable
que le Silviacus , inscrit en 832 dans la liste des villas et
des vici dépendant de Téglise du Mans que nous a con-
servée un diplôme de Louis le Débonnaire (6), est identi-
que au Silviagus du testament de Bertramne. Un autre
SilviaciLs est aujourd'hui Servais (Aisne) (7) ; les empereurs
carlovingiens y avaient un palais dont il est question pour
la première fois sous le règne de Louis le Débonnaire ; ce
prince data du palais royal de Silviacus deux diplômes, le
premier en 820 (8) , le second en 830 (9) ; plusieurs diplô-
(1) Allmer, Inscriptions antiques de Vienne, t. III, p. 6.
P) Brambach, n- 1814.
(3) C. I. L., XII, 2887.
(4) Pardessus, DiplomaLta, t. I, p. 209.
(5) A« de BarUiélemy, dans la Bibliothèque de l'Ecole des chartes
t. XXVI, p. 462, n- 599.
(6) Dom Bouquet, VI, 585 e; cf. Sickel, Acta Karolinorum, t. II, p. 179,
n* 308.
(7) Matton, Dictionnaire topographique du département de l'Aisne, p. 260.
(8) Sickel, Acta Karolinorum, t. II, p. 132, n- 162.
(9) Sickel, ibid., t. II, p. 166, n- 270.
324 LIVRE IL CHAPITRE IL
mes de Charles le Chauve ont été donnés au palais de
viacus en 846 (1), en 847 (2), en 879 (3); on peut considé-
rer comme défectueuse l'orthographe Silvaico palatio, dans
un diplôme du môme roi en 850 (4), et l'orthographe Sil-
vacus employée pour désigner le nom du lieu où aurait été
promulgué aussi par Charles le Chauve un célèbre capitu-
laire de l'année 853 (5). Un troisième Silviacus, situé dans
une tout autre partie de la France, dépendait en 967 du
monastère de Saint-Pierre de Vienne (Isère) ; nous l'appre-
nons par un diplôme de Conrad le Pacifique , roi de Bour-
gogne transjurane et de Provence (6).
Silvius, d'où Silviacus, est un nom qui appartiient d'abord
à l'histoire mythologique de Rome : le fils d'Ascagne , fils
lui-même d'Enée , s'appelle Silvius , règne sur les Latins.
et après lui , Silvius devient un surnom commun à ses suc-
cesseurs (7). C'est dans les inscriptions du temps de Tem-
pire que le gentilice Silvius apparaît. La Gaule nous en
offre quelques exemples : le musée du mont Saint-Bernard
contient une dédicace à Jupiter Poeninus par Q. Silvius
Perennius, tabellariu^ de la colonie des Séquanes (8) ; une
inscription d'Yverdun nous a conservé les noms de T. Sil-
vius Similis (9). Ceux de Q. Silvius Spe[ratus], centurion
de la première cohorte des Belges , nous sont connus par
une inscription de l'île de Brazza sur la côte de Dalma-
tie (10). On a trouvé plusieurs fois, tant en Gaule qu'en
Angleterre, la marque du potier Silvius (11).
(1) Dom Bouquet, VIII, 484 0.
(2) ma,, VIII, 492 b.
(3) Ibid., VIII, 636 d.
(4) Ibid.y VIII, 508 0.
(5) Ibid., VII, 613 c. Cf. MabiUon, De re diplomatica, livre IV, c. 132.
(6) Dom Bouquet, IX, 702 b.
(7) Tite-Live, liv. I, c. 3, {{ 6, 7. 8; cf. Virgile, Enéide, VI, 768, 769.
(8) C. /. L., V, 6887. Mommsen, Inseriptiones helvetictte, n* 42.
(9) Mommsen, Inttcriptiones helveticae, n* 138.
(10) C. /. L., III, 3093.
(11) Scbuormans, Sigles figulins, p. 248, n" 5240-5246: Trois autres SUtIos
sont mentionnés dans le t. XII du C. /. L.
LA DÉSINENCE -I-ACU8 AU MOYEN AGE. 325
SiLviNiAGus est le nom d'une villa dépendant de l'abbaye
de Saint-Aubin d'Angers, comme on le voit par un diplôme
émané de Charles le Chauve , en 851 (1). Une autre villa
Silviniacu^ était située dans le Tonnerrois, et dépendait de
1 abbaye de Montier-la-Celle (Aube), à laquelle elle fut
donnée en 856 par le môme roi (2). Un troisième Silvi-
niacus appartenait à l'église d'Autun , et , à la fin du neu-
vième siècle , était possédé , à titre de précaire , par une
femme noble ; le roi Eudes la maintint en possession de ce
bien en 890 (3). En 979, le roi Louis V comprend un qua-
trième Silviniacus dans la nomenclature qu'il donne des
propriétés de l'église d'Orléans (4).
La forme romaine de ce nom de lieu est Silvinianus , et
nous la trouvons, en 814, dans un diplôme de Louis le
Débonnaire concernant une abbaye située à Brescia, et une
autre abbaye à Nonantola, près de Modène (5).
Silviniacus est dérivé de Silvinius. Une femme, dont
Tépitaphe a été trouvée à Lyon, avait pour mari un certain
Silvinius Balbinus (6). Une dédicace par L. Silvinius Res-
pectus est conservée au musée de Cologne (7). On a re-
cueilli , dans la Bavière rhénane , une autre dédicace par
deux Silvinius surnommés , l'un Justus , et Tautre Dubi-
tatus (8).
De Silviniacus vient Selvigny, nom d'une commune du
département du Nord.
SiMPLicGiAGus est le nom d'une villa placée dans le Maine
en 658, par un diplôme de Clotaire III (9). Elle reparait en
(t) Dom Bouquet, VIII, 518 b.
(2) /Md.. VIII, 547 c.
(3} Ibid., IX, 454 b.
(4) /btd., IX, 660 e, 661 a.
(5) Migne, Patrologia iafina, t. CIV, col. 1007. Sickel, Acta, Kar&linorum,
t. Il, p. 87, 88, n- 12.
(6) Boissieu, Inscriptions de Lyon, p. 613.
(7) Brambach, n* 406.
(8) Ibid., n- 1790.
(9) Tardif, Monuments historiques, p. 13, col 1. Pertz, Oiplom&tum im-
p«ni tomus primus, p. 33, lignes 40, 41.
326 LIVRE II. CHAPITRE IL
862, dans un diplôme de Charles le Chauve où son nom
est écrit sans doublement du c de la troisième syllabe,
Simpliciaco (1).
Simplicius, d'où Simpliciacus est dérivé, est un genli-
lice peu fréquent, mais usité en Gaule; ainsi on a trouvé
en Gueldre deux dédicaces émanées de personnages qui
avaient ce gentilice. L'une a pour auteur Simplicius Supe-
rus, decurio alae Vocontiorum dans l'année de Bretagne ,;2 ;
on sait que les Vocontii habitaient Vaison (Vaucluse) et les
environs. L'autre dédicace a été faite par Simplicius Inge-
nuus (3). L'épitaphe de Simplicia Acutilla, conservée a
Milan (4) , nous ofifre aussi un exemple du gentilice Sim-
plicius. Dans d'autres monuments, c'est un cognomen^.
SociACus est une villa qu'un testament , écrit vers Tan-
née 690, met en Vexin (6). Un autre Sociacus, qualifié de
colonia, appartenait à l'église Saint-Martin de Tours,
en 862 , comme on le voit par un diplôme de Charles le
Chauve (7) ; on croit que c'est Sausay, commune de Monl-
richard (Loir-et-Cher).
Sociacus est dérivé de Socius, gentilice peu commun;
sa forme féminine nous est conservée par une inscrip-
tion de Pola, en Istrie , où on lit les noms de Soda
Maxima (8). La variante Soccius résulte d'une inscription
de Cherasco où l'on trouve les noms de Soccia Modesta 9 .
Un gentilice qui présente avec celui-là une grande res-
semblance de son, et qui a été beaucoup plus fréquent, est
(1) Tardif, Monuments historiques, p. 117, col. 2.
(2) Brambach, n* 67.
(3) Ibid., n* 97.
(4) C. /. L., V, 6093.
(5) Ibid., Xll, 964, 2063.
(6) Tardif, Monuments historiques^ p. 21, col. 1.
(7) Dom Bouquet, VIII, 573 a. Cf. Mabille, La pancarte noire de Saint-
Martin de Tours, p. 65, n' 14, p. 159, n* 61, p. 235.
(8) C. /. L., V, 141.
(9) Ibid., V, 7678.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 327
Sosius, nom par exemple d'un des deux partisans d'Antoine
qui, à la bataille d*Âctium, commandaient sa flotte (1).
De Sosius on a pu tirer le nom de lieu dérivé Sosiacus
qui , à une basse époque , devait se confondre avec Socia-
eus. C'est par l'un ou l'autre que doivent probablement
s'expliquer les noms des trois Soisy du département de
Seine-et-Oise , de Soisy (Seine-et-Marne), de Soizé (Eure-
et-Loir), de Soisy (Marne).
De SoLLEMNiACus , par abus Solemniacus ^ dérive l'ad-
jectif soUmniacensis, épithète d'un ager situé en Limousin,
suivant l'acte de fondation de l'abbaye de Solignac (Haute-
Vienne) par saint Eloi, en 631 (2) ; Solignac est une forme
moderne de Sollemniacus (3). Un autre ager SolemniacensiSf
situé dans le Tonnerrois , est mentionné dans un acte de
Vigile, évêque d'Auxerre, en faveur de l'abbaye de Notre-
Dame , fondée par lui près de cette ville , vers 680 (4) ; on
l'a reconnu dans Soulangy , commune de Sarry (Yonne).
Une villa Sollemniacus , située en Anjou , aujourd'hui Sou-
langé (Maine-et-Loire) , fut donnée à l'abbaye de Saint-
Maur-sur-Loire, par Charles-le-Chauve en 850 (5). Un titre
de la cathédrale de Lyon appelle Solemniacus Soleymieux
^Loire), et quoique ce document soit sans date et ne soit
conservé qu'en copie du seizième siècle , il parait conser-
ver une ancienne tradition (6). Nous ne savons où était si-
tuée la villa Sollempniacus donnée à Tabbaye de Cluny au
commencement du dixième siècle (7).
(1) Velleius Paterculus, liy. II, c. 85, § 2; cf. c. 86, { 3. 8ur le gentilice
Sosius, voyez Pauly, Real-Encyclopaedie. t. VI, p. 1329, 1330.
(21 Pardessus, Diplomata, t. II. p. 11.
(3) Voir, sur la même abbaje, un diplôme de Louis le Débonnaire en 817
Dom Bouquet, VI, 504); son nom est écrit avec deux 2 : Sollemniacus; cf.
Sickel, Acta Karolinorurriy t. II, p. 117, n« 111.
(4) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 153. Quantin, Cart. de VYonne, t. I,
p. 19, 596.
(5) Tardif, Monuments histoHques, p. 103, col. 2. Port, Dict. de Maine-
et-Loire, t. III, p. 541.
(6) A. Bernard , Cart. de Savigny^ t. II, p. 1055.
(7) Bruel, Rec. des chartes de,., Cluny, t. I, p. 165.
328 LIVRE II. CHAPITRE II.
Solemniaous^ ou mieux Sollemniacus , dérive de Sollem*
nius, gentilice assez rare. Une inscription d'Arabie nous a
conservé les noms de Cl. SoUemnius Pac[atianus] , legatm
AugusH pro praetore (1). On a trouvé dans une inscription
de la Bavière rhénane, la mention d*une femme appelée
Sollemnia Justa (2). L*épitaphe de Solemnius Fidus parait
e^ster encore à Lyon (3).
^SoLiACus est le nom de lieu que suppose Fadjectif ^ofad-
censis dans le livre second des miracles de saint Benoit.
écrit au temps d'Archambauld de Sully, archevêque de
Tours , 980-1007 (4). Ce castrum est aujourd'hui Sully-sur-
Loire (Loiret). Un autre Soliacus^ moins connu, aujour-
d'hui Souillac (Lot) , est mentionné en 962 dans le testa-
ment de Raimond !•', comte de Rodez (5). Soliacus^
aujourd'hui Souillé (Sarthe) , apparaît dans un titre de
l'église du Mans qui daterait de 572 (6).
Soliacus paraît dériver de Solius, gentilice conservé par
une inscription du musée de Mannheim qui nous apprend
les noms de P. Solius Suavis (7). Cependant, l'orthogra-
phe la plus fréquente est SoUius par deux L L. SoUius Se-
cundo, dans une inscription de Vérone (8); M. SoUius At
tiens, dans une inscription de Nerelo, Italie centrale (9.;
SoUia Salvia, à Milan (10); G. SoUius Marculus et G. Sol-
lius Marcus, à Grenoble (11); Sex SoUius Demosthenianus,
(1) C. /. L., t. m, n* 94; AddiUmenta, p. 969.
(2) Brambach, n* 1764.
(3) Boissieu, Inscriptions antiques de Lyon, p. 299.
(4) E. de Certain, Les miracles de saint Benoit, p. 107 ; ci. Dom Bouquet,
IX, 140 c.
(5) Dom Bouquet, IX, 727 c.
(6) Pardessus, Diplomata^ t. I, p. 136.
(7) Brambach, 1382.
(8) C. /. L.. V, 3469.
(9) Ibid., IX, 5155.
(10) Ibid.y V, 6094.
(11) Allmer, Inscriptions antiques de Vienne, t. I, p. 329.
LA DÉSINENCE -I-ACUB AU MOYEN AGE. 329
à Cheyssieu (Isère) (1) ; M. SoUius Marcellus et G. SoUius
Verus, à La Chapelle-Blanche (Savoie) (2).
Solicums ou * Solliacus, dérivé de Solius ou de SoUius,
a donné les noms de communes : Souillac (Lot), dont le
diminutif est Souillaguet, même département ; Souillé (Sar-
the); Souilly (Meuse) (3) ; enfin six Sully, savoir : deux dans
le Ldiret , les autres dans les départements du Calvados ,
de la Nièvre, de l'Oise, de Saône-et-Loire. Un des Sully
du Loiret a donné son nom au célèbre ministre de Henri IV.
Nous ne savons duquel des villages appelés Sully M. Sully
Prudhomme tire la première partie de son nom; cet aima-
ble poète ignore probablement sa parenté grammaticale avec
un écrivain antique : dans les derniers temps de l'empire
romain, SoUius d'où Solliacus = Sully était le gentilice du
poète Sidoine Apollinaire (430-488), qui s'appelait C. SoUius
ApoUinaris Sidonius, qui appartenait à une famille noble
de Lyon et qui fut évoque de Clermont (4).
Tauwacus, noté Tauryaous. est une villa de l'Orléanais
donnée à l'abbaye de Saint-Denis par Dagobert P', en
635 (5). Un second Tauriacus , situé dans le Maine , est
mentionné dans un diplôme donné par Glotaire III,
en 658 ; c'était . dit ce diplôme , une villa , propriété de
l'abbaye de Saint-Denis et détenue indûment par un
tiers (6); ce Tauriacus est peut-être le même que celui
dont il est question en 615 , dans le testament de Ber-
tramne , évoque du Mans (7). Un troisième Tauriacus ap-
■
(1) Allmer, InBcHptions antiques de Vienne, t. III, p. 100.
(2) Allmer, ibid., t. III, p. 470. Quelques autres SoUius sont mentionnés
dans le t. XII du C. 1. L,
(3) M. Liénard, Dictionnaire topographique du département de la Meuse,
p. i27, propose de rapporter à Souilly la monnaie mérovingienne ob Ton
trouve la légende SauHaco vico. Mais, dans tous les autres textes qu'il cite,
le nom de Souilly est écrit avec o et non au.
(4) Teuffel, Geschichte der roemischen Literatur, 3* édition, p. 1100,
(5) Pertz, Diplomatum imperii tomus primus^ p. 18, 1, 22.
(6) Pertz, ÎMd., p. 33,1. 41, 44.
(7) Pardessus, Diplomala, t. I, p. 210.
330 LIVRE II. CHAPITRE II.
partenait à l'abbaye de Saint-Martin de Tours; nous en
trouvons la première mention dans un diplôme de Charle-
magne en 775 (1) ; son nom reparait dans deux diplômes
de Charles le Chauve en 862 ; l'un de ces diplômes nous
apprend que cette villa était située en Touraine (2). Une
quatrième villa de ce nom appartenait à l'abbaye de Sainte-
Colombe de Sens, comme le constate un diplôme de Louis
le Débonnaire en 836 (3). Un cinquième Tauria^cus était si-
tué dans le diocèse de Rodez ; l'abbaye de Joncelle y avait
une église dans la possession de laquelle elle fut confirmée
par un diplôme du roi Raoul en 891 (4).
Tauriacus dérive de Taurins. Ce gentilice , bien qu'as-
sez rare , apparaît déjà avant la fin de la république ro-
maine , dans une inscription de Carthagène , où se lisent
les noms de L. Taurins Aefolan[us] , c'est-à-dire originaire
d'Aefula, dans le Latium (5). P. Taurins Secundus figure
dans une inscription trouvée près d'Aquilée (6) ; C. Tau-
rins Ursinus , dans une inscription des environs d'Esté (7).
Une épitaphe trouvée à Viel-Arzew , en Afrique , nous fait
connaître les noms de Taurins Senecio (8).
Tauriacus est devenu dans le midi de la France Tauriac,
nom de quatre communes , savoir : deux dans l'Aveyron ,
un dans chacun des départements de la Gironde et du Lot.
On doit probablement attribuer la même origine aux deux
Thoiré du département de la Sarthe ; aux trois Thoiry de
l'Ain , de la Savoie et de Seine-et-Oise ; à Thoré (Loir-et-
Cher) ; à cinq Thorey , dont trois dans la Côte-d'Or , un
(1) Dom Bouquet, V, 737 c , où Ton a imprimé T&uciacus, Cf. Habille , U
pancaWe notre de Saint-Martin de Tours^ p. 69, n* 18; p. 151, n« 18; p. 236,
col. 1.
(2) Dom Bouquet, VIII, 576 e; cf. 573 a.
(3) Dom Bouquet, VI, 611 a ; cf. Sickel, Acta Karolinorum , t. II, p. VA,
n* 347.
(4) Dom Bouquet, IX, 456 a.
(5) C. /. L., t. I, p. 564, n* 1555; t. II, n* 3408.
(6) /6id., V, 8253.
(7) Ibid., V, 2702.
(8) Ibid., VIII, 9765.
LA DÉSINENCE -I-ACU8 AU MOYEN AGE. 331
dans chacun des deux départements de Meurthe-et-Moselle
et dTonne ; à deux Thoury (Loir-et-Cher, Seine-et-Marne) ;
à Thuré (Vienne) ; Thurey (Doubs, Saône-et-Loire) ; à cinq
Thury , sur lesquels deux dans l'Oise , un dans chacun
des départements du Calvados, de la Côte-d'Or et de
TYonne (1) ; enfin trois Toury dont un dans TEure-et-
Loir (2), les deux autres dans la Nièvre (3). Cela forme un
total de vingt-huit noms de communes dérivés du gentilice
Taurins qui paraît avoir été fort répandu en Gaule à
Tépoque romaine.
Tauricciacus est une villa mentionnée dans un juge-
ment du roi Clotaire III, en 638 (4).
Tauricciacus dont le c a été doublé pour représenter le
double son qu'avait pris le c en s'assibilant, dérive de Tau-
ricius, gentilice conservé : 1** par une inscription dédicatoire
c[ui a été jadis trouvée dans un endroit inconnu, sur les
bords du Rhin inférieur, et qui contient les noms de
C. Tauricius Verus (5), 2** par une inscription de Lyon où
se trouvent les noms de L. Tauricius Florentins (6).
De Tauricius on forma le dérivé Tauriciacu^, par lequel
s'expliquent les noms : de trois communes appelées Torcé
(lUe-et- Vilaine , Mayenne , Sarthe) ; de Torcieu (Ain) ; de
de neuf communes du nom de Torcy : deux dans l'Aube ,
deux dans la Seine-Inférieure, les cinq autres dans TAisne,
la Côte-d'Or, le Pas-de-Calais, Saône-et-Loire, Seine-et-
Marne; de Torsac (Charente); de Torciac (Haute-Loire);
(1) Thury (Yonne), s'est d'abord appelé Tauriacus. Quantin, Dictionnaire
topographique du département de l'Yonne, p. 128.
(2) Thauriacus, vers 1020. Merlet, Dictionnaire topographique du dépar-
tement d'Eure-et-Loir, p. 180.
(3) Toury-sur-Abron (Nièvre) est appelé Tauriacus par une charte de
l'année 1103. Soultrait, Dictionnaire topographique du département de la
Nièvre, p. 181.
(4) Tardif, Monuments HistoriqueSy p. 12, col. 2. Pertz, Diplomatum tm-
perii tomus primus, p. 32, 1. 44.
(5) Brambach, n* 1993.
(6) Boissieu, Inscriptions de Lyon^ p. 259.
332 LIVRE II. CHAPITRE II.
de Torxé (Charente-Inférieure). Le total de ces noms
s'élève à seize (I).
faurmociw, nom d'un viens du diocèse de Tours où une
église aurait été construite par ordre de Tarchevêque Eu-
phronius (556-573) (2) est une variante de Tauriciacus ou
dérive d'un gentilice *Taurisius.
Tauriniacus est un nom de lieu mentionné vers l'année
700 dans le testament d'Erminthrude qui est daté de Pa-
ris (3) et qui parait concerner des biens situés à peu de
distance de cette ville. Vers la même époque , c'est-à-dire
en 692 , Aiglibert , évéque du Mans , dispose des dîmes de
plusieurs églises, entre autres Tauriniacus^ qui paraît ici
être le nom d'une paroisse de son diocèse (4).
Tauriniacus dérive du gentilice Taurinius dont nous ne
pouvons citer que deux exemples, ce sont les épilaphes
de Taurinius Montanus, à Augsbourg (5), et de L. Taurinius
Aurelius, à Nimes (6). Taurinius est dérivé de Taurinus,
surnom que l'on rencontre quelquefois ; par exemple,
dans une inscription de Fontaine, près Grésy-sur-Isère (7),
et qui est identique à un nom de peuple Ligure, de l'Italie
du nord-ouest : tout le monde a entendu parler des Tau-
fini dont Turin conserve le souvenir dans la nomenclature
géographique de l'Europe moderne.
Tau/riniacuLs est le nom primitif de dix communes de
France; cinq Thorigné (Ille-et-Vilaine , Maine-et-Loire,
Mayenne (8), Sarthe, Deux-Sèvres); quatre Thorigny (Seine-
(1) Cf. Longnon, Examen géographique du tome premier des diplomàta,
imperii, p. 36.
(2) Grégoire de Tours, livre X, c. 31 ; édit. Amdt, p. 448, 1. 5. Les précé-
dents éditeurs avaient préféré la variante Tauriacus.
(3) Pardessus, Diplomata, t. II , p. 256 , 257. Tardif, Monuments histori-
ques, p. 33.
(4) Pardessus, Diplom&ta, t. II, p. 226.
(5) C. /. L.. III, 5820.
(6) Ibid., XII, 3361.
* (7) Allmer, Inscriptions de Vienne^ t. II, p. 227.
(8) M- L, Maître, Dictionnaire topographique du département de Is
LA DÉSINENCE -I-ACUB AU MOYEN AGE. 333
et-Marne, Deux-Sévres, Vendée, Yonne); Torigny (Manche)»
La forme romaine correspondant au gallo-romain Tauri--
niacus est Tauriniomus, nom de lieu mentionné en 871
dans un diplôme de Charles le Chauve qui approuve la
fondation du monastère de Saint-André au diocèse d'Elne,
Pyrénées Orientales (1) ; c'est peut-être Taurinya (Pyrénées-
Orientales). Le nom des deux communes de Taurignan
(Ariège) , est mieux conservé.
TuRiLiACus est le nom d'un villare situé en Vexin et
donné à l'abbaye de Saint-Denis vers Tannée 690 par le
testament du fils d'Idda (2).
Turiliacus est dérivé de Turelius , gentilice rare , mais
dont on rencontre les variantes Turellius et Turillius. Un
certain Turelius Flavinus était, en Tan 188 de notre ère,
curiale à Savaria, aujourd'hui Stein-am-Anger en Hon-
grie (3). L'épitaphe de M. Turellius Maximus a été trouvée
à Guelma, en Algérie (4) ; celle de Turillius Caeso est con-
servée au musée de Vérone (5) ; celle de Turillius Amian-
tus a été trouvée à Montelione, dans l'Italie méridio-
nale (6).
C'est par Turiliacus^ dérivé de Turelius, que s'expli-
quent les noms de Tourliac (Lot-et-Garonne) et de Tourly
(Oise).
Vassiacus , nom de Vassy (Haute-Marne) , dans la vie de
saint Berchaire, écrite par Adson, à^la fin du dixième siè-
cle (7) , est dérivé de Vassius , gentilice dont les inscrip-
tfayeriTM, p. 312, donne deux exemples de la diphtongue tLU à la première
syllabe du nom de ce viUage; 7aurtntacu«, douzième siècle; Taurigné ,
1217; TuriniSLcuSf 802, est probablement une mauvaise leçon.
(1) Dom Bouquet, VIII, 637 a.
(2) Tardif, Monuments historiques, p. 21 , col. 2. Pardessus, DiplomàU^
t. II, p. 211.
(3) C. I. L., III, 4150.
(4) Ibid., VIII, 5466.
(5) ma., V, 8825.
(6) Ibid., X, 85.
(7) Migne, P&trologia laiina, t. XXII, p. 137, col. 683 A.
334 LIVRE II. CHAPITRE II.
tions romaines d'Italie nous offrent quelques exemples (i).
Ce gentilice est dérivé du thème gaulois vasso-,
ViCTOR^ACus est le nom d'une forteresse, castrum, qui
servit de retraite à Munderic, prétendant à la royauté, vers
532 (2) ; M. Longnon pense que ce castrwm est Vitry-le-
Brûlé (Marne) (3). Un second Victoriacus était situé prés
d'Arras ; c'était au sixième siècle une villa publica servant
quelquefois de résidence aux rois des Francs : Clotaire II y
épousa sainte Radegonde en 538 (4) ; Sigebert I y fut assas-
siné en 575 par deux émissaires de Frédégonde (5) ; en 584,
Chilpéric donna Tordre d'y élever son fils nouveau-né (6).
Un troisième Victoriacus était situé près de Brioude ; il est
qualifié de castrwm en 825, dans un diplôme de Louis le
Débonnaire (7).
Victoriacus dérive de Victorius , gentilice qui existe déjà
sous la république. En Tannée 194 avant notre ère, Q.
Victorius, centurion de la seconde légion, se distingua
dan» une bataille contre les Gaulois (8). Sous Tempire, vers
la fin du premier siècle de Tére chrétienne, Quintilien dé-
dia à Victorius Marcellus ses douze livres Institution^ ora-
toriae. Ce gentilice se rencontre dans les inscriptions. On
a trouvé à Altenbourg, en Hongrie, Tépitaphe du vétéran
(1) C. /. L., IX, 2015, 2016, 4366, 4447, 4937; XIV, 2964. On trouve en Gaule
les dérivés Vassetius, C. /. L., XII, 4163, et VassiUius, ibtd., 2746, 2857.
(2) Historia. Francorurrit livre III, c. 14. M. Amdt, p. 120, 1. 24, a imprimé
Victuriaci castn, au génitif, pour Victori&ci castri, avec Vu tenant lieu d*o,
qu'on rencontre si souvent à l'époque mérovingienne.
(3) Géographie de la, Gaule au sixième siècle^ p. 409, 410.
(4) Fortunat, Vie de sainte Radegonde^ livre I, c. 2. Dom Bouquet, t. III,
p. 456 c ; édition Krusch, t. II, p. 39, 1. 8.
(5) « Villam cui nomen est Vtc(urtacon. Grégoire de Tours, Historia
Francorum, 1. IV, c. 51 ; édition Arndt , p. 186, 1. 15; cf. 1. V, c. 1, ibid,,
p. 191 , I. 14« Jonas, Vita §ancti Columbani^ c. 31 ; Dom Bouquet, t. III,
p. 478 b, c.
(6) Grégoire de Tours, Historia Francorunit livre VI, <î. 41 ; édit Aradt,
p. 281. 1. 19, 20.
(7) Dom Bouquet, VI, 547 b; et. Sickel, Acta Karolinorum , t. II, p. U9
n*216.
(8) Tite-Ldve, Uvre XXXIV, c. 46.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 335
G. Victorius Urso (1). Le musée de Wiesbaden possède
une dédicace à Jupiter par G. Victorius Januarius (2) ; le
musée de Trêves, une dédicace à la déesse Calva, par
M. Victorius PoUentinus, monument gravé Tan 124 de no-
tre ère (3). On a trouvé, à Huttich, en Hesse rhénane , Tépita-
phe du vétéran Victorius Cassianus (4). Une inscription de
Lyon a conservé les noms de deux femmes qui, toutes
les deux, avaient le gentilice Victoria; elles y joignaient,
l'une, un surnom commençant par les trois lettres Lam.;
la seconde, fille de la première, le surnom de Novella (5).
Le musée de Narbonne possède le signaculum de G. Vic-
torius Verinus (6).
Le nom de lieu Victoriaous , dérivé de Victorius , paraît
avoir, dès le neuvième siècle, perdu dans la prononciation
To de la seconde syllabe, témoin les distiques d'Ermoldus
Nigellus dans son poème sur Louis le Débonnaire :
Aurelianenses sensim dehinc visitât agros ,
Victriacum villam jam pius ingreditur (7)
En règle générale , dans la langue moderne de la France,
Yictoriacus perd Vo de la seconde syllabe. Il devient Vi-
trac dans le Midi ; c'est le nom de cinq communes, Avey-
ron, Cantal, Gharente, Corrèze, Dordogne, Puy-de-Dôme.
Dans le Nord, la désinence varie : Vitray est le nom d'une
commune du département de l'Orne ; on compte deux com-
munes de Vitray dans l'Eure-et-Loir, une dans l'Allier; i
y a une commune de Vitré dans Tllle-et- Vilaine, une autre
dans les Deux-Sèvres; le Jura nous offre la variante Vi-
treux; Meurthe-et-Moselle et la Haute-Saône ont chacun
(1) C. /. L., m, 4489.
(2) Brambach, n» 1452.
(3) ma., n* 853.
(4) iWd., n* 1064.
(5) Boissieu, p. 507, n* 24.
(6) C. /. L., XII, 5690, 129.
fî) De rébus gestie Ludovid Pii, livre III, vers 275, 276. Dom Bouquet, VI,
43 b, n s'agit de Vitry-aux-Loges (Loiret).
336 LIVRE II. CHAPITRE II.
une commune de Vitrey. La forme la plus fréquente est
Vitry ; ce nom est porté par douze communes : trois dans
chacun des départements de la Marne et de Saône-ei-
Loire, deux dans la Haute-Marne, les quatre autres dans
TAube , le Loiret , le Pas-de-Calais et la Seine. Le nombre
total des communes dont le nom offre une forme moderne
du primitif Victoricums est de vingt-six.
ViLLiACus , Villy (Yonne) , au douzième siècle (1) , noté
Viliacus par une seule l dans deux chartes de Saint-Hugue
de Grenoble , au neuvième siècle (2) , où il représente Vi-
lieux (Isère), est dérivé de Villius , gentilice romain qui se
rencontre six fois chez Tite-Live et qui fut principalement
illustré par P. Villius Tappulus, consul Tan 200 avant J.-C.(3).
A Villiaous correspondent le dérivé ligure Vil[l]ioscus,
aujourd'hui Vilhosc (Basses-Alpes) (4), et le dérivé latin
FÏZ[f|fanu5, nom d'une localité située en Italie, aux en-
virons de Modène, suivant une charte de 1041 (5).
ViNGiAGus est un lacus situé aux environs de Cambrai et
où Charles Martel battit Chilpéric II et Rainfroi , maire de
Neustrie en 717 (6). La même localité reparait dans un di-
plôme faux de Dagobert I" (7). C'est aujourd'hui Vincy,
commune de Crèvecœur (Nord) (8).
Le bas latin Vinciaous est dérivé de Vintius ou de Ven-
dus. Une inscription de l'Italie méridionale nous fait con-
naître les noms de l'affranchi M. Vintius Acceptus et de sa
(t) Quantin, Car<. de VYonn^ t. Il, p. 190.
(2) CartuUire de Saint-Hugues de Grenoble, p. 10, 73.
(3) Sur le gentilice Villius, voyez Pauly, Real-Bncyclopaediey VI, p. 2611-
2613.
(4) Qnérard, Cart. de Saint-Victor de Marseille, t. II, p. 65, 70.
(5) Tiraboschi, Memorie storiche Modenesi, t. II, preuves, p. 37.
(6) Continuation de Frédégaire, c. 106. Chez Dom Bouquet, II, 454 a, cf.
Paul Diacre, De Gestis Langobardorum, livre VI, c. 42; ibid., p. 639 a.
(7) Pertz, Diplomatum imperii tomus primus, p. 168, 1. 21 ; cf. Pardanns,
Diplomaê^ t. II, p. 5&
(8) Longnon, Examen géographique, p. 39.
LA DÉ8INBNGE -I-ACU8 AU MOYEN AQE. 337
patronne Vintia Satumia (1) ; et une inscription de Die ,
«
ceux de Sex. Vendus Juventianus (2).
Il y a en France trois communes dont le nom dérive du
bas latin Vinciacus. Ce sont Vincey (Vosges), Viucy (Aisne),
et Vincy (Seine-et-Marne).
ViNBiciACus est le nom d'une localité d'Auvergne où Ton
battit monnaie à l'époque mérovingienne ainsi que l'atteste
la légende monétaire Vindiciaco (3). Ce nom de lieu a
donné le dérivé vindiciacensis , épithëte de domus dans un
manuscrit des Vitas pairum de Grégoire de Tours (4). Dans
le passage de Grégoire de Tours dont il s'agit ici, c'est en-
core d'une localité d'Auvergne qu'il est question.
Vindiciacus est dérivé de Vindicius. Vindicius est le nom
deTeselave qui, à Rome, l'an 509 avant J.-C, découvrit
une conspiration pour le rétablissement de la royauté (5).
Vindicius, sous l'empire, est un gentilice que l'on rencon-
tre dans quelques inscriptions ; exemple : en Afrique , les
noms de femme Vindicia Theodora (6), Vindicia Victo-
rina (7); à Lyon , le nom de femme Vindicia Luperca (8).
On trouve aussi le nom d'homme P. Vindicius (9).
Vindecy (Saône-et-Loire) est probablement un ancien
Vindiciacus.
Certains manuscrits de Grégoire de Tours écrivent vin-
DucENSis l'adjectif dérivé dont nous avons cité la leçon
vindiciacensis, Vindiacensis suppose un nom de lieu Vindia-
il) c. /. L., X, 431 .
(2) Herzog, G^lliae Narbonensis,,. historia, t. Il, p. 97, n* 453.
(3) A. de Barthélémy, dans la Bibliothèque de l'Ecole des chartes, t. XXVI,
p. 464, n« 707.
(4) G. 12, { 3. Bordier, Les livres des miracles, t. III, p. 296. Comparez
Amdt et Knuch , p. 713 , 1. 33 , et Longnon , Géographie de la Gaule au
sixième siècle, p. 517.
(5) Tite-Live, livre II, c. 5, i 10.
(6) C. /. L., VIII, 112.
(7) JWd., VIII, 323.
(8) Boissieu, Inscriptions antiques de Lyon, p. 527.
(9) Allmer, Revue épigraphique, t. I, n* 209.
22
338 LIVRE II. CHAPITRE II.
eus, dérivé lui-même de Vindius. Tandis que Vindicixis, dé
rivé de Vindex , est rorigine latine , Vindius paraît d'ori-
gine gauloise et dérivé de Tadjectif vindos qui , dans cette
langue, a dû signifier « blanc, » et par extension « beau,
heureux. » On a trouvé à Vérone une inscription votive à
Hercule par Taffranchi G. Vindius Priscus (1). Une inscrip-
tion de Pavie conserve les noms de Vindia Secunda i?.
On a signalé près d*Uzès (Gard) Tépitaphe de Vindia
Quartina (3).
Vindey (Marne) paraît être un ancien Vindiacus,
Wakiacus est le nom d'un loctts situé dans le pagus Tel-
lau , aujourd'hui compris dans le département de la Seine-
Inférieure. Ce lociLS (appartenait à Tabbaye de Saint-Denis
en 775, comme on le voit par un diplôme de Charlema-
gne (4). Ce même nom est écrit (îManacti^ dans un jugement
rendu^ par Pépin le Bref en faveur de Tabbaye de Saint-
Denis vers Tannée 751 , et où il s'agit évidemment de la
même localité (5).
Wariacus ou Guariacus tiennent lieu d'un primitif * Varia-
eus , dérivé du gentilice Varius , qui est déjà fréquent à
Rome au premier siècle avant notre ère (6). Six Varius sont
■
mentionnés dans les œuvres de Cicéron. Le plus connu
est Q. Varius Hybrida, tribun du peuple Tan 91 avant notre
ère, grand orateur, très influent, et qui, après avoir com-
mis deux assassinats , finit par le dernier supplice (7). Le
poète tragique L. Varius Rufus fut contemporain de César
et d'Auguste et se rendit célèbre par sa pièce intitulée
(1) C. /. L., V, 3228.
(2) Ibid.^ V, 6457.
(3) /6id., XII, 2853.
(4) Dom Bouquet, V, 734. a. Sickel, AcU Karoltnorum, t. II, p. 28, n' 45.
(5) Pertz, Diploma.tum imperii tomus primus , p. 109 , 1. 14. Tardif, Mo-
numents historiqueSf p. 45, col. 2.
(6) Sur le gentilice Varias, voyez Pauly, Real-Encyclopaedie, t. VI,
p. 2380-2382.
(7) Cicéron, De Or&tore, liv. I, c. 15, 8 117 ; Bruius, c. 62, { 221 ; De natura
deorum, liy. II, c. 33, | 81.
LA DÉSINENCE -I-ACUBAU MOYEN AGE. 339
Thyestes , plus encore peut-être par sa liaison avec Virgile
et Horace (1). Un des premiers Romains qui portèrent ce
nom en Gaule fut le propréteur Varius Cotylo , c'est-à-dire
« le buveur, » légat d'Antoine en Gaule, Tan 43 avant no-
tre ère (2). Une inscription gravée sur un rocher à Gros-
lée (Ain), nous apprend qu'un certain L. Varius Lucanus a
fait, dès la période romaine, les travaux de canalisation qui
fournissent encore aujourd'hui de Teau de source aux ha-
bitants de ce village (3). M. Varius Capito , étant préteur
et duumvir à Narbonne , dirigea avec son collègue des tra-
vaux publics dont une inscription, conservée au musée de
cette ville, perpétue la mémoire (4). Inutile de citer les nom-
breux exemples qui attestent combien ce gentilice fut ré-
pandu dans les provinces au temps de l'empire (5).
De Varius on a fait le dérivé * Variaous d'où les noms de
communes Vayrac (Lot) ; Vairé (Vendée) ; et Verry (Meuse),
ou mieux Véry , qui est en outre le nom de trois hameaux
(Loire, Haute-Savoie, Vaucluse). La variante Guéry, cor-
respondant à l'orthographe Guariacus du diplôme de Char-
lemagne cité plus haut , est conservée par le nom de deux
hameaux (Cher, Lot-et-Garonne).
APPENDICE A.
.NOMS DB LiBUX EN 'Ocus DÉRIVÉS DB cognomina LATINS EN ius,
Dalmatiagus, au onzième siècle , villa quae dicitur Dalmaciaco,
daas une charte conservée par le Cartulaire de Saint-Julien de
«
Brioude (6) , est un dérivé du cognomen Dalmatius. Un exemple
(1) Teaffel, Geschichte der rœmischen Liter&tur, 3* édit., p. 453, 454.
(2) Voyez les textes réunis par M. E. Desjardins , Géogr. hislor. et ad-
ministrative de la Gaule romaine, t. III, p. 34.
(3) Allmer, Inscript, de Vienne, t. III, Y>. 441.
(4) Herzog, Galliae Narbonensis.,. hisloria, t. II, p. 8, n» 16.
(5) Voyez les Index du C. /. L., t. III. V, VII, VIII, IX, X, XII.
(6) Doniol, Cart, de Brioude , p. 190.
340 LIVRE II. CHAPITRE II. APPENDICE A.
notable de ce cognomen a été donné par le père de Tempereur Pro-
bus ; on sait que Probus régna de 276 à 281. D'autres exemples
en ont été réunis (1). On le rencontre à Vienne (Isère) dans deui
inscriptions chrétiennes (2). A côté du dérivé gaulois Dalmatiam^
on trouve le dérivé romain Dalmatianus, aujourd'hui Daumaïao
(Ariège), qui a été le chef-lieu de la Vicaria Dalmatianensis (3).
FiDENTiAGus , écrit Pedentiacus dans la vie de Louis le Déiwn-
naire, dite de l'Astronome, était alors le nom d'un comté, dont
le souvenir est conservé par la seconde partie du nom de Vic-de-
Fézensac (Gers) (4). Les comtes de Fézensac ont eu , au Moyen
Age , une certaine notoriété.
Fidentiactis est dérivé du cognomen Fidentius signalé dans ooe
inscription romaine et qui fut porté par plusieurs évâques aa
quatrième et au cinquième siècles (5).
* Maurbntiagus est l'orthographe régulière d'un adjectif dérivé
du surnom Maurentius et qui a reçu des scribes du moyen âge
une orthographe variée. Ainsi Maurinciagi curtis est le nom
d'une villa donnée à l'abbaye de Saint-Denis par un certain I^ea-
ton, comme nous l'apprend un diplôme émané de Charles le
Chauve en 844 (6) ; la môme villa est appelée Morinciaea curiis
dans un autre diplôme de ce prince en 862 (7) ; cette localité était
située sur l'Oise, dans le comitaius Camliacensis ; c'est aujourd'hui
Morancy, commune de Boran (Oise). Montmorency , près de Pa-
ris, beaucoup plus connu dans la seccmdd partie du moyen âge et
à l'époque moderne, fait son apparition dans Thistoire au dixième
siècle ; il fut assiégé par l'empereur Othon II en 978 (8).
* Maurentiacus dérive du cognomen Maurentius employé seul
dans des documents de basse époque où généralement les genti-
lices étaient tombés en désuétude. C'est ainsi que sous Diodétien,
(1) De- Vit, Onom&sticon, t. Il, p. 554,
(2) C. I. L., XII, 2069, 2141.
(3) Molinier, Géogr. histor, de la, province de Languedoc, col. 189.
(4) Longnon, Atl&s historique de la France, p. 152-153, résume stram-
ment la plus ancienne histoire de ce comté.
(5) De- Vit, .Onowiashcon , t. III,#p. 65.
(6) Tardif, Monuments historiques, n» 147, p. 97, col. i.
(7) Tardif, Ibid., n* 186, p. 119, col. 1.
(8) GestA consulum andegavensium, Dom Bouquet, X, 249 a.
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 341
284-305, le chrétien Maurentius fut martyrisé à Fossombrone, en
Ombrie (1). A Trieste existe encore Tépitaphe d'un certain Mau-
rentius» mort en 571 (2); celle de Maurentius Fabricensis, con-
servée à Spalatro, en Dalmatie (3), ne remonte pas non plus aux
premiers sièdes de l'Empire romain.
Morancé (Rhône) est probablement un ancien *MaurentiactiS.
Morenchies (Nord) suppose un primitif * Maurenliacas villas. Mo-
raacez (Eure-et-Loir) , écrit Morentiae^ en 1110 , suppose un pri-
mitif * Maxirtniiacaij sous-entendu domus ou villas, et cette forme
persiste dans Torthographe actuelle, tandis que la variante Moren-
ciaeum , pour * Maurentiacus funditSy est tombée en désuétude (4).
Patrigiaqus, nom de villa duquel dérive celui de Vager patrida-
ctnsis^ situé dans TAutunois au neuvième siècle » comme nous
rapprennent deux diplômes, l'un de Pépin , roi d'Aquitaine, eu
838 (5), l'autre de Louis le Débonnaire, en 839 (6), désigne, dans
ces documents, Perrecy (Saône-et-Loire) ; le même nom reparaît,
en 885 , dans un diplôme de Charles le Gros pour les chanoines
de Saint-Marcel de Chalon-sur-Saône (7) ; il s'agit, probablement,
de la même localité. Un autre PalridacxtSy aujourd'hui Parce
(Sarthe), appartenait à l'abbaye de Saint-Martin de Tours, comme
on le voit par plusieurs diplômes dont le plus ancien est de l'an-
née 775 et émane de Charlemagne (8).
Patriciaeus est dérivé de Patricius, qui est, à proprement parler,
UD eognomefiy mais qui n'apparaît qu'à une époque basse et pour
des gens qui n'avaient pas de gentilice ou dont legentilice est in-
connu. Tel est le potier Patricius dont on a recueilli la marque
(1) On célèbre sa fête le 31 août. V07. les Bollandistes, août, t. VI, p. 665.
p) C. /. L., V, 694.
(3) C. /. L., III, 2043.
(4) V07. Lucien Merlot, Dictionnaire topographique du département
d'Eure-et-Loir, p. 124.
(5) Dom Bouquet, VI, 677 6.
(6) /Wd., VI, 628 c.
Ci) Ibid IX, 337 c.
(8) C'est le numéro 42 de Sickel, Acta Karolinorum , t. II, p. 27; chez
Dom Bouquet, t. V, p. 737 c, on a imprimé, par erreur, Parriciacus avec
deux r au lieu do Patriciaeus avec tr. Pour Tétude des documents qui
concernent cette localité, voir Mabille, La pancarte notre de Saint-Martin
de Tours, p. 230.
M2 LIVRE n. CHAPITRE II. APPENDICE B.
sur un grand nombre de vases (1). Telle est Pesclave Patricia dont
on a trouvé l'épitaphe en Espagne (2). On a copié, en Italie et eu
France, cinq épitapbes d'hommes appelés Patricius, mais elles
sont des derniers temps de TEmpire romain (3).
De Patriciacui , dérivé de Patricius, paraissent venir quinze
noms de communes : deux Parçay (Indre-et-Loire) ; trois Parce
(Ille-et-Tiiaine , Maine-et-Loire, Sarthe); Parcey (Jura); Par-
cieux (Ain) ; Parcy (Aisne) ; quatre Percey, savoir : deux dans la
Haute-Marne, un dans la Haute-Saône, un dans T Yonne; trois
Percy (Calvados, Isère, Manche).
APPENDICE B.
NOMS DE LIBUX EN -OCUS DÉRIVÉS OB &BNTILIGBS PBRDU8.
L'étude des noms géographiques français du moyen âge peut
faire connaître un grand nombre de gentilices romains dont les
textes antérieurs à la chute de l'empire romain n*ont pas conservé
d'exemple. Nous nous bornerons à établir l'existence de deux de
ces gentilices.
Bbggiacus est le nom d'un vicus mentionné par Grégoire de
Tours ; M. Longnon a reconnu, dans ce vieus^ Bessay (Vendée) (4).
De Becciacus on peut conclure un gentilice * Beccius , dérivé du
cognomen Beccus, qui était originairement un nom commun gau-
lois signifiant c bec, » et qui est identique à ce mot français. Bec-
cus fut employé en Gaule comme surnom. Antonius Primus,qui,
par la victoire de BedriacuSy Tan 70 de J.-C. , assura le triomphe
de Vespasien sur Vitellius, avait été surnommé Beccus dans sou
enfance ; il était né à Toulouse (5). Beccus fut aussi , en Gaule,
un nom pérégrin ; on a trouvé à Ruffleux (Ain) une dédicace à
(1) c. /. L., II, 4970, 376; t. VII, n- 1336, 806-811 , 1079, 1080. AUmcr, Ins-
criptions de Vienne, t. IV, p. 137.
(2) C. /. L., t. II, 2796.
(3) Ibid., IX, 6408; X, 1379, 8174; XII, 2133, 3791.
(4) Longnon, Géogr. de la Gaule au sixième siècle^ p. 565.
(5) Suétone, Vitellius^ 18.
^4
LA DÉSINENCE -I-ACUS AU MOYEN AGE. 343
Apollon par un certain Beccus (1). Le cognomen ou nom pérégrin
Beccus a, comme d'autres, cités plus haut, p. 132, donné un
dérivé en ius qui a été employé comme gentilice.
BiuifiAcus, au neuvième et au dixième siècle, dans les titres
de la cathédrale d'Autun, est le nom de Bligny-sur-Ouche (Côte-
d'0r)(2). Dans les titres de la cathédrale de Grenoble, au neuvième
siècle, le même nom de Beliniacus désigne Beligneux (Ain) (3).
Les trois Belligné du département de Maine-et-Loire paraissent
être aussi d'antiques Beliniacus (4). On doit en dire autant de
Bligny-sous-Beaune (Gôte-d*Or) pour lequel on a trouvé, au
douzième siècle , la forme Beliniacum (5).
De Tezistence du nom de lieu Beliniacus^ on est en droit de
conclure Tezistence d'un gentilice Belinius. 11 y a un gentilice
Camulius, probablement dérivé du nom divin Camulos(6), et
Camiilius a donné le nom de lieu Gamuliacus (7). De même, le
nom divin gaulois bien connu Belenos avait donné un dérivé,
'Belenius, ou * Belinius avec assimilation de la seconde syllabe
à la troisième, et ^Belenius explique le nom de lieu Beliniacus.
(1) C. 7. L., XII. 2514.
(2) A. de Charmasse, Ctirtulaire de l'église d'Autun, p. 22, 26, 27, 42, 78,
86; cf. Gamier, Nomenclature... de la Côte-d'OVy p. 76, n* 317.
(3) Carlulaire de Saint-Hugues de Grenoble , p. 11 ; à la p. 73, Beliacum
paraît être une faute de copie pour Beliniacum.
(4) Port, Dictionnaire historique du département de Maine-et-Loire, t. I,
p. 300.
(5) Gamier, Nomenclature, p. 61.
(6) De- Vit, Onomasticon, t. II, p. 103.
(7) Voyez ci-dessous, chap. III, { 2, p. 356 : cf. ci-dessus, p. 207.
CHAPITRE III.
EXEMPLES AU MOYEN AGE DE NOMS DE fUtuH IDENTIQUBS A
DES GENTILIGES ROMAINS EN iiiS (1).
Sommaire :
§ 1. Généralités : gentilices romains en -ius employés substantivement avec
un sens géographique au génitif dans les textes de Tompire romain et du
moyen âge ; gentilices romains en -lus employéis adjectivement avec no
sens géographique au masculin singulier dans les textes de l'empire
romain. — § 2. Gentilices romains en -ius employés adjectivement avec
un sens géographique aii masculin singulier dans les textes du moyen âge.
— I 3. Gentilices romains en -tus employés adjectivemeot avec un sens
géographique au féminin singulier. — 2 4. Gentilices romains en -ius
employés adjectivement avec un sens géographique au datif-ablatif pluriel.
— § 5. Gentilices romains en -tus employés adjectivement avec an se&5
géographique à l'accusatif féminin pluriel. — Appendice. Les cognomins
en -tus employés adjectivement avec un sens géographique.
S l®^ — Généralités. Gentilices romains en -ius employés
substantivement au génitif, avec un sens géographique^ sous
V Empire romain et au moyen âge ; gentilices en -ius em-
ployés adjectivement j avec un sens géographique, dans les
textes contemporains de l'Empire romain.
Nous allons nous occuper des noms de lieux habités qui,
dans les documents du moyen âge, offrent des exemples
d'une désinencejautre que -iacus. Nous parlerons d'abord
(1) Texte de leçons faites au Collège do Franco en décembre 1888. La
première a été déjà publiée dans la Revue des patois yaZfo-romanx, de
MM. Gilliéron et Rousselot, t. II, p. 241-256.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES QENTILICE8 EN -lUS. 345
des cas où le gentilice qui sert à désigner un lieu habité
se termine en -iti^, et n'est pas développé à l'aide d*un
suffixe. Ce gentilice peut rester substantif et être mis au
génitif ; bien plus souvent il prend la valeur d*adjectif et
s'accorde avec un substantif quelquefois exprimé, la plu-
part du temps sous-entendu.
D'abord les gentilices peuvent être au génitif pluriel.
En voici un exemple qui remonte à l'empire romain :
Casas villa Anieiorum^ en Afrique (1). Villa Aniciorwn veut
dire exploitation agricole et maison de campagne des Ani«-
cius. La gens Anicia est une famille noble qui a donné à
Rome plusieurs consuls avant et après l'ère chrétienne. Au
lieu de villa ^ fundus Anidorunij on pouvait dire aussi :
1*" fundus Anicianus , villa Aniciana , ou , dans les régions
celtiques, fundus Aniciacus^ villa Aniciaca^ cf. Anisiacus
villa in agro Forensi dans une charte de 980 (?) (2) ; 2® Fun-
dus Anicius : Anicius est le plus ancien nom connu de la
ville du Puy (Haute-Loire), comme on le verra p. 349.
Voici deux exemples du génitif pluriel d'un gentilice
romain dans des documents géographiques du moyen âge :
Curtis Acutior, dans une charte de 877 (3) ; ecclesia de Monte
Aguzor^ in monte Aguzor^ dans deux chartes de la fin du
onzième siècle (4). Acutior^ Aguzor = Acutiorum, génitif
pluriel d'Acutius. On aurait pu dire AcutianuSj Acutiana,
Acutiaous^ Acutiaca : Acutianus est le nom d'un monastère
d'Italie dont il est question au neuvième siècle dans les do-
cuments recueillis par D. Bouquet; Acutiacus est un nom
de lieu étudié ci-dessus (5). Acutianus et Acutiaous déri-
vent du gentilice Acutius.
(1) n\néT8iire d'Antonin, p. 61, 1. 2,
(2) A. Bernard, Cartulaire de SsLvigny, p. 174. Voir aussi ci-dessus, p. 193.
(3) Matton, Dictionnaire topographique du département de l'Aisne, p. 2,
col. 2. — Une autre localité de mômonom, Curtis Agutior, aujourd'hui
Courtisols (Marne), est citée par M. Longnon dans le texte explicatif de son
savant Atlas historique de la France, p. 176.
(4) G. Desjardins, Cartulaire de Conques^ p. 281, 286»
(5) Page 189-190.
34^ LIVRE II. CHAPITRE III. { 1.
Le gentilice peut être au génitif singulier : Aquis Neri,
dans la table de Peutinger, désigne Néris (Allier). Une
inscription appelle les habitants Nerio-magienses ^ d'où ré-
sulte que Nerio-magas , « champ de Nérios , » est le nom
le plus ancien de remplacement sur lequel Néris est bâti :
Nerios ou Nerius est le nom du propriétaire primitif des
eaux et du champ. On trouve le gentilice Nerius dans plu-
sieurs inscriptions du temps de l'empire romain; de ce
gentilice vient le nom de lieu dérivé écrit Niriaeus au neu-
vième siècle (1).
Dans la langue géographique, un certain nombre de gen-
tilices transformés en adjectifs s'accordent avec un substantif
sous-entendu soit masculin, comme fundus^ soit féminin,
comme villa ou cortis. La plupart des exemples de genti-
lices employés adjectivement dans la langue géographi-
que ne se rencontrent pas dans les monuments antérieurs
au Moyen Age. Il y a cependant quelques exceptions :
ainsi , une inscription du temps de Fempire romain men-
tionne, dans la cité d'Arles, un pagus Lucretius (2). On sait
que la gens Lucretia est une des plus anciennes et des
plus célèbres de Rome, qu'elle était patricienne, et qu'elle
a eu des consuls au commencement de la république. Les
inscriptions de l'époque impériale attestent que ce genti-
lice pénétra en Gaule (3).
V Itinéraire d'Antonin (4) nous montre , en Espagne , un
CsBcilius vic%LS, La gens Cœcilia est une des plus illustres
familles plébéiennes de Rome ; Cœciliiis est le gentilice des
Metellus. Grammaticalement, il n'y a pas de différence
entre Cœcilius vicus et Pons JEmilius, Il y avait, à Rome,
un pons jEmilius^ c'était Tancien pons Sublicius^ d'abord
bâti en bois ; il devait son nom nouveau à M' iEmilius,
qui l'avait fait rebâtir en pierre. Dans ces exemples, le
(1) Voy. ci-dessus, p. 155, note 2.
(2) C. /. L., t. XII, p. 594.
(3) Ibid,, t. XII, p. 876, col. 4.
(4) Pa^e 4M,
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILIGE8 EN -lUS. 347
gentilice est employé adjectivement au masculin ; il Test
au féminin dans les noms des grandes routes de Tempire
romain, comme «fa Aurélia^ via Clodia, via Flaminia^ via
Yaleria. Aurélia, Clodia, Flaminia , Valeria sont autant de
gentilices bien connus. La première de ces routes , via
Atirelia, arrivait en Gaule; elle allait de Rome à Arles.
Elle était encore désignée par son nom antique, aux envi-
rons de Marseille, dans le courant du onzième siècle ; on
le voit par une charte de Tannée 1056 (1).
§2. — Genlilices romains en -ius employés adjectivement au
Tnasculin singulier^ avec sens géographique^ dans les textes
du moyen âge.
iEMiLius. Colonia in Amelio , dixième siècle (2). Amelius
pour iEmilius nous offre deux déformations caractéristiques
du latin vulgaire : a pour œ, e pour i, M. Schuchardt (3) a
réuni un certain nombre d'exemples d'à pour », parmi les-
quels nous citerons Amilia = Mmilia. Quant aux exemples
de pour i, ils sont très nombreux , comme on peut le voir
chez le même auteur (4), et nous signalerons Emelius^
Mmelia^ Mmelius^ Mmelii^ Emelio (5).
Le plus ancien exemple d'Amelius nous est donné par
le gentilice d un élève de Plotin, Amelius Gentilianus, qui
eut, comme philosophe, une certaine célébrité ; il était ori-
ginaire d'Etrurie ; il vivait au troisième siècle de notre ère ;
il suivit, à Rome, les leçons de Plotin, qui enseigna, dans
cette ville, de 241 à 270; sous la plume grecque de Por-
phyre, son nom 'Af^Atoç se rapproche d'âfAiXiiç, « sans
souci, » et la forme primitive de ce nom, -^milius, n'est
plus reconnaissable. Amelius devient fréquent en Gaule
(1) Guérard, CaHulaire de SeLint-Victor de Marseille, t. I , p. 264, a pu-
blié co document.
(2) Guépard, Cartulaire de Saint-Victor de Marseille, t. I, p. 309.
(3) Vohalismus des Vulgaerlateins, t. I, p. 220-223.
(4) Ibid,, tome II, p. 1-91.
(5) Ibid., tome II, p. 15.
848 LIVRE II. CHAPITRE III. t 2.
à partir du sixième siècle de notre ère. C'est le nom d'un
archevêque de Bordeaux, chanté par le poète Fortunat (1),
et d'un évoque de Tarbes dont il est deux fois ques-
tion dans l'histoire des Francs , de Grégoire de Tours (2).
M. Le Blant a relevé le nom d'Ameliûs parmi les graffiti
mérovingiens de l'autel de Minerve (Hérault) (3). On trouve
ce nom parmi ceux des témoins d*ua diplôme de l'an-
née 706 , donné dans le pays de Liège (4). Âgde eut, au
neuvième et au dixième siècle , deux évéques du nom
d'Âmelius. Le nom d'Ameliûs est fréquent d^ns le Cam-
laire de Conques (Aveyron) , se rencontre dans ceux de
Savigny (Rhône) , de Saint- Victor de Marseille , de Bea/alm
(Corrèze), etc.
Le gentilice -flEmilius, dont Amelius est la variante vul-
gaire, appartient à une maison patricienne, et fut porté en
Gaule par M. ^milius Lepidus, triumvir, qui eut laNar-
bonnaise sous son autorité, de 44 à 42 avant Jésus-Christ.
Il est très commun dans les inscriptions de la Gaule au
temps de l'empire romain. Il y avait notamment des iEmi-
lius à Aix, en Provence ; voir l'inscription qui porte le
n* 537 au t. XII du C. I. L. Ces iEmilius n'étaient pas
éloignés du lieu dit Amelius , où Tabbaye de Saint- Victor
de Marseille avait des colons. Ce sont peut-être ces ^mi-
lius qui ont donné leur nom au lieu dit Amelius.
Le gentilice iEmilius a fourni à la géographie de la
Gaule les deux dérivés : JSmiliacu^ et JSmiliavus. Comme
exemple du premier, nous citerons : Amilly (Eure-et-Loir),
appelé à l'accusatif Amiliacum villam dans une charte
de 986 (5) ; Millac (Vienne) , appelé Amellac , Ameilhac ,
Ameillac au quatorzième et au quinzième siècle (6) ; enfin
(1) Fortunat, I, 2, 5 ; éd. de Frédéric Léo, t. I, p. 13.
(2) VIII, 28; IX, 6; édit. Amdt, t. I, p. 341, 1. 23; p. 363, 1 13.
(3) Inscriptions chrétiennes de la GauZe, t. II, p. 437.
(4) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 276.
(5) Guérard, Cartulaire de Satnt-Pére de Chartres, p. 76.
(6) Redet, Dictionnaire topogr. du départ, de la Vienne^ p. 263.
NOMS DB LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICES EN -lUS. 349
Amilly (Loiret), Amillis (Seine-et-Marne). Pour le second ,
£miliavus, on peut donner comme exemples : Millau (Âvey-
ron), appelé, au onzième siècle, villa AmeliavênHs (1), et
de Amiliavo (2) ; Milhaud (Gard) , au douzième siècle Ami-
liau (3).
Afranius : Nostram mcclesicmi quœ vocatur AfragniOy 1061-
1065 (4) ; aecclesiam quB vocatur Afragnio sive Vauro^ 1060-*
1065 (5). Il s'agit de Lavaur (Tarn).
La gens Afrania a donné à Rome plusieurs personnages
historiques, entre autres L. Afranius, consul Tan 60
av. J.-G. Ce gentilice pénétra en Gaule, comme nous l'ap-
prennent des inscriptions : de Trêves (6), de Narbonne (7),
et de Vaison (8). La dernière concerne Sextus Afranius
Burrus , préfet du prétoire sous Claude et sous Néron ;
Sextus Afranius Burrus parait avoir été originaire de Vai-
son; on sait qu'avec Sénëque il exerça une grande in-
fluence pendant les premières années du règne de Néron,
sous lequel il mourut Tan 62 de Jésus-Christ.
D'Afranius est dérivé le nom du fwndus Afranian/us dans
la table alimentaire de Veleia (9). Les deux Fragny du dé-
partement de la Nièvre peuvent avoir la même origine ; ils
seraient d'anciens fundi Afraniaoi.
Anicius. Grégoire de Tours (10), parlant des événements
de Tannée 591, nomme un lieu appelé Anicius, hcum quem
Anicium vocitant^ dans la cité des Vellavi (11). C'est le plus
(1) G. Desjardins, CartuUire de Conques, p. 21.
(2) Qnérard, CartuUire de Saint-Victor de Marseille, t. II, p. 201.
(3) Germer-Durand, Dictionnaire topogr, du départ, du Oard, p. 1S6.
(4) G. Desjardins, Cartulaire de Conquës^ p. 61.
(5) Ibid., p. 880.
(6)Brambach, 787.
(7) C. /. L., XII, n* 4377.
(8) /Wd., n- 1309, 5842.
(9) Page 3, h 3-4; C. /. L., t. XI, p. 211.
(10) UiêtmrU Francorum, X, 25.
(11) Edit. Amdt, 1. 1, p. 437, 1. 26. Les manuscrits offrent deux leçons Ani-
Hum par t et Anicium par c.
350 LIVRE II. CHAPITRE HL i 2.
ancien nom connu du Puy en Velay. Ce nom est encore
porté par le mont Ânis , sur les flancs duquel est bâtie la
ville du Puy (1).
La gens Anicia, originaire de Préneste, est une des plus
illustres de Rome, à qui elle a donné plusieurs consuls
avant et après notre ère. On trouve le gentilice Anicius
en Gaule, dans les inscriptions, par exemple à Nimes [f.
à Narbonne (3), à Orange (4).
Une charte de la fin du dixième siècle nous fait connaître
un nom de lieu dérivé d'Anicius ; c'est Anisiacus villa in
agro Forensi^ c'est-à-dire en Forez (5). Il a été parlé, p. 193,
d'Anisy-le-Château (Aisne), appelé, au neuvième siècle,
Anisiacus par Hincmar (6). Cf. Anicianwm^ aujourd'hui
Nissan (Hérault), dans une charte de 1199 (7).
• Antonius. In pago Arvernico, in comitatu Talamitensi, in
vicaria Ambronense^ in villa quœ nominatur Antonio^ 13 juil-
let 898 (8); in villa quss dicitur Anionio, 937-938 (9); in
villa quB diciPur Antonio, 906? (10) ; ad ecclesiam de AnUmio,
27 décembre 906 (11). C'est Antoingt (Puy-de-Dôme) (12).
Antoingt tire son nom du gentilice Antonius. Le plus
célèbre des hommes que ce gentilice a désignés est Marc-
Ajitoine, le fameux triumvir ; il a exercé pendant plusieurs
années une grande influence en Gaule , d'abord quand , à
partir de Tan 55 avant Jésus-Christ , il fut le compagnon
(1) Longnon, Géographie de la Gauie au sixième siècle, p. 533.
(2) C. /. L., XII, 3402, 3403, 3424.
(3) Ibid,, 4500.
(4) Ihid., 1247.
(5) Aug. Bernard, Cartutaire de Savigny^ t. I, p. 174.
(6) Vie et miracles de saint Remy, Dom Bouquet, V, 452 G.
(7) E. Thomas, Dictionnaire topogr, de l'Hérault, p. 133.
(8) Doniol, Cartulaire de Brioude, p. 48.
»(9) Ibid,, p. 94.
(10) Ibid., p. 255.
(ll)7bid., p. 334.
(12) M. Houzé l'a établi à la p. 678 de sa dissertation géographique pnbliée
en appendice à l'édition du Carfuiatre de Sauxillanges donnée par M. Do-
niol.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILIGES EN -IU8. 351
de Jules César pendant la guerre contre les Gaulois ; en-
suite, quand, de 43 à 40, en qualité de triumvir, il eut
dans la Gaule conquise un pouvoir absolu. Un grand nom-
bre de Gaulois prirent son nom ; de là résulte la fréquence
du gentilice Antonius dans les inscriptions de la Gaule.
Du gentilice Antonius vient le nom de lieu Antoniacv^.
Parmi les villes de Saint-Germain-des-Prés nous trouvons
mentionnée celle qui est appelée , en 828 , au cas indirect
Antaniacum (1), plus tard Antoniaco (2), c'est Antony (Seine-
et-Oise). Les diplômes de Saint-Martin de Tours mention-
nent deux Antoniaous : le premier parait, dès 775, dans un
diplôme de Cbarlemagne (3), c'est Antogné (Maine-et-Loire);
du second, il es,t question pour la première fois, au dixième
siècle (4), c'est Antogny (Indre-et-Loire). Antogné (Vienne),
nommé Antoignec vers la fin du onzième siècle (5), a la
même origine. Antoigné (Sarthe) est probablement la loca-
lité appelée au cas indirect : villa Antoniaco dans les diplô-
mes de Téglise du Mans , en 802 (6) et en 832 (7) ; c'est
encore un dérivé en -acus du gentilice Antonius (8). Dans
la table alimentaire de Veleia, on trouve onze fundi Anto-
niani.
Ascins. Les mots Actum Ascio villa dominica se lisent
dans une charte de Tannée 648 (9) : In Ascio super fluviwm,
Widolaci dans une charte de l'an 800 (10). Il s'agit d'Aix-en-
Erquigny (Pas-de-Calais).
(1) Diplôme des empereurs Louis le Pieux et Lothaire , chez Lasteyrie ,
CàrtuUire de Paris, p. 48.
(2) Longnon, Polyptyque de S&int-Germ&in^des-PréSf p. 48.
(3) Dom Bouquet, V, 737 c.
(4) Habille, La pancarte noire de Saint-Martin de Tours, p. 186, n* 131.
(5) Redet, Dte^onnatre topogr. du départ, de la Vienne, p. 9.
(6) Dom Bouquet, V, 768 c.
. (7) Ibid., VI, 586 a.
(8) n a déjà été question du nom de lieu Anioniacus ci-dessus, p. 140;
des textes différents y sont cités.
(9) Guérard, Cartulaire de Saint-Bertin, p. 19.
(10] Ihid., p. 65.
36t LIVRE II. CHAPITRE III. { 2.
Àsoius ne diffère du gentilice Àstius que par remploi du
c pour tf substitution qui est sans importance phonétique
au moyen &ge. Le gentilice Astius se trouve dans trois
inscriptions d'Afrique (1). Ascius n'a été trouvé, au temps
de Tempire, qu'avec valeur de cognomen : Asinia Ascia
Veausta dans une inscription de Salerne, en Campanie (2).
Braccius. La formule locella nostra in pago Regense mm-
cupantes Braccio , et plus bas les mots ad ipsv/m Bractio^
désignant une localité située au pays de Riez, se rencon-
trent dans un passage d'une charte de Tannée 739 (3 .
La localité dont il s'agit est Bras d'Asse (Basses- Alpes).
Braccius et sa variante Bractius sont identiques au genti-
lice Braccius qui se trouve dans les inscriptions romaines
en Campanie (4), et qui dérive probablement àebrdcca^
variante de bràca, nom de la culotte gauloise. De Braccius
vient le nom de lieu Bracciacus : celui-ci , dans une charte
du neuvième siècle, désigne Bracy, commune d'Egrisel-
les-le-Bocage (Yonne) , comme nous l'apprend M. Quantin
dans son Dictionnaire topographique de VYonns. Le CarUi-
laire d'Ainay (Rhône), nous offre l'orthographe Braxiacus :
in villa qux dicitur BraxiacOj dans une charte de l'an-
née 990 (5) ; cette localité était dans le pagus Lugdunensis.
Une variante Braciacus curtis par un seul c nous a été con-
servée par une charte de 926 reproduite dans le Carfulaire
de Saint' Julien de Brioude (Haute-Loire) (6) ; il s'agît probable-
ment ici de Brassac (Puy-de-Dôme). Citons encore Bras-
sac (Tarn-et-Garonne) , qui a été appelé Bradaeias au
moyen &ge (7).
(1) c. I. L., Vm, 460, 4605, 10526.
(2) Ibid., X, 559.
(S) Carful«ir« de Satnt-Huyues de Grenoble, p. 44.
(4) C. /. L., X, 6233, 6234, 6235.
(5) A« Bernard, Cartulatre de Sàmgnyy p. 596.
(6) Page 319.
(7) Delocbo, Carfulaire de fiaaulieu, p. 201.
NOHB DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILIGES EN -1U8. U3
Centolius. Les mots Unus campus voeatw Ceni/uXio 36
lisent dans une charte de l'an 1055 ou environ, dans
laquelle ils désignent une localité de l'Aveyron, commune
de Leuc (Aude) (1). Comparez le gentiiice de C. Centullius
Fortunatus dans une inscription trouvée en Gaule cisalpine,
à Toscolano , près du lac de Garde (2).
C\HnLius.£cclMidHnsandféeJfariâ3(IeCamuIio, vers 1100(3).
Camulius est un gentiiice romain dont on trouve quel-
ques exemples en Gaule. Deux inscriptions romaines nous
doDQent la forme masculine , ce sont l'ëpitapbe de Juliiis
Camulius Verus à Carsan (Gard) (4), et celle du légion-
naire C. Camulius Lavenius à Grenoble ^). Nous rencon-
trons aussi la forme féminine : Camulia Marcella dans une
inscription de Vienne (Isère) (6) ; Camulia Procla dans une
inscription de Narbonne (1). Camulius a une variante par
lieux l : CamuUius ; exemples : T. Camullius ^milianua,
dans une inscription d*Apt (8); T. Camullius Telesphorus,
dans une inscription de Vaison (9); Camullia Tertulla, dans
une inscription d'Apt (10).
Ce gentiiice romain parait être un ancien nom gaulois.
Il a cette valeur dans l'inscription de Bordeaux : D. M. Ca-
mulia patribus Blasto et Ivorigi (p)osuit (11), et dans l'in-
scription du Norique où une femme s'appelle Camulia
Quarti (12).
Camulius est un dérivé du nom divin Caraulos. Un pro-
(1) 0. Desjardina, Carlulaire de Conquet, p. cit, 72.
P) C. /. L., V, *870.
0) C. thraait, CtrtuMre de Sttint-Semin de Toutouae, p. 131.
(4)C. 1,L., XII, 372*.
(5) /bld., XII, 2230.
(6} IMd., XII, 1960.
(T) ma., XII, 4677.
(8j ibid., XII, 1116.
0)tMd., XII, 1401.
(10) Ibid., XII. 1125.
(U) Jullian, tntcriptions romaines de boràeiux, t. 1, p. 8« 8t !
(12) C./. L., 111,4687.
354 LIVRE II. CHAPITRE III. | 2.
cédé identique a donné à la langue grecque les noms
d'homme Atovuaioç de Atovoaoç et 'AttoXXwvcoç d'AicoXXttiv; ces
noms grecs d'homme, comme le gaulois Camulius ou
mieux Camulios , ont été dérivés de noms divins au
moyen du suffixe io-.
Le plus célèbre peut-être des monuments du culte du
dieu Camulos est au musée du Vatican. Il a été dédié à
cinq divinités : 1® aux deux divinités gauloises Arduinna
(la forêt d'Ardenne) et Camulos ; 2** aux trois dieux romains
Jupiter, Mercure, Hercule, par M. Quartinius Sabinius,
citoyen de Reims , cives remus , soldat prétorien de la sep-
tième cohorte ; Camulos est représenté avec les attribuai
distinctifs du Mars romain (1). On voit par ce monument
que le culte de Camulos était en honneur chez les Rmi.
Une autre preuve en est donnée par une inscription trou-
vée près de Clèves et conservée en cette ville , c'est une
dédicace à Mars Camulos par les habitants de Reims,
cives Rémi , qui , dit cette inscription, ont construit un tem-
ple pour le salut de l'empereur Néron (2). Cette inscription
est un témoignage de l'attachement des populations de la
Belgique pour Néron , auquel elles restèrent fidèles pen-
dant la révolte de Vindex; Galba, vainqueur, s'en ven-
gea (3).
Le culte de Camulus était aussi connu en Grande-Bre-
tagne. On a trouvé dans le nord de cette île une dédicace
Deo Marti Camulo ; elle est conservée au musée de Glas-
gow , en Ecosse (4). La piété celtique envers le dieu Ca-
mulus ne se manifeste pas seulement par des inscriptions
dédicatoires. On donna son nom à une ville de Grande-
Bretagne, CamulO'dunum y aujourd'hui Colchester. Cette
ville , antérieure à la conquête romaine , était la capitale du
roi Cunobelinos et l'empereur romain Claude la prit en
(1) c. /. L., VI, 46.
(2) Brambach, n* 164.
(3) Tacite, Histoires, 1. I, c. 8, 51.
(4) C. /. L., VII, 1103.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES OENTILICES EN -lUS. 355
l'an 43 (1). Devenue colonie romaine, elle tomba entre
les mains des Bretons insurgés qui massacrèrent les colons,
l'an 62 de notre ère (2).
Le nom divin Camulus fournit à des noms d'hommes
leur premier ou leur second élément : on connaît le nom
de Camulo-gffnus , eburovicr, c'est-à-dire d'Evreux , qui fut
chef des Parisii et des peuples voisins révoltés contre Cé-
sar, et qui , dans une bataille contre Labienus, perdit à la
fuis la victoire et la vie (3), en l'an 52 avant Jésus-Christ ;
Camulogenus veut dire Qls de Camulos. Camulognata, « ha-
bituée à Camulos, » « adoratrice de Camulos » est le nom
d une femme gauloise qui offrit à Mercure un des vases
(l'argent trouvés à Bernay (Eure); ce vase appartient au
cabinet des antiques de la Bibliothèque nationale à Paris.
Camulos est le second élément du nom d'homme, Ande-
cj'mulos , probablement « très [semblable à] Camulos, u
cûDservé par l'inscription gauloise de Nevers ; Ande-camulos
est devenu un nom de lieu en Limousin , comme l'atteste
uae inscription trouvée à Rançon (Haute-Vienne) : on y
voit les Andecamulenses dédier aux divinités impériales
une chapelle de Pluton (4).
Quelques personnes portèrent par piété le nom de Ca-
mulos comme on porte aujourd'hui un nom de saint. On
en trouve des exemples : au musée d'Arles, où une inscrip-
tion nous offre le nom de femme Camula (5) ; à Bordeaux,
011 le musée possède l'épitaphe d'un certain Camulus (6).
Daus l'antique Noricum, prés de Klagenfurt, dans l'empire
d'Autriche, sur le bord d'un chemin, on lit, encastrée
dans une croix de pierre , l'épitaphe de Camulianus, ûls de
(I) Les textes des autenrs anciens <
nis p«r HûbQor, C. l. L., VII, 33-34.
(î) Tacite, .Annales, XII, 32; XIV, 31-3Î.
(3) De btHo gmico. Vil, 57, 59, 62.
(4] OreUi, n- 1804.
(5) C. î. L., XII, 744.
(6) JoUian, ImcripUont Tomaine» de Bordeaux, t. I, p. 331.
356 LIVRE II. CHAPITRE III. | 2.
Camulus (1). A Indenburg, dans la même région, on â logé
dans la tour de Tégliâe Tépitaphe de Qtlartâ, affranchie de
Camula (2).
Camulus donna des dérivés. L'un est Caiïltiliuô ou Ca-
mullius, dont il a déjà été question. On trouve aussi
Camulatus, qui est un cognomen; ainsi : C. Valeriùs Se-
norigis fllius Camulatus se fit construire un monument
funèbre dont un débris existe encore à Aix-les-Bains , en
Savoie (3). De Camulatus on tira le gentilice Camulatius :
à Nimes existe encore Tépitaphe de Camulatia Severa (4).
On peut en rapprocher Camulates , nom de fabricant ins-
crit sur une tuile qui a été trouvée en Espagne (5). Un
autre dérivé de Camulus est Camulinius , c'est un gentilice
attesté par une inscription de Trêves , où se lisent les noms
de Camulinius Oledo (6).
Des dérivés de Camulus , il en est un qui a laîésé des
traces évidentes dans la géographie tnoderïle de la France,
c'est le gentilice Camulîus ou CamuUius. L'ecclesia de Ca-
mulio citée ci-dessus doit avoir été située pi*ês Toiilouse;
elle a pour pendant Chamouille (Aisne). Chamôuille (Aisnel
est une ancienne villa Camulia ou Canïullia] Son nom
est écrit Camolia dans une charte de l'année 1151 (7). Nous
citerons ensuite deux dérivés en -acus de Câttiulius ou
CamuUius : Chamouillac (Charente-Inférieure) , Chamouil-
let (Haute-Marne); ce sont des communes dont le nom
rappelle le culte de Camulus. Peut-être en est-il de même
de Chamolay, commune des Avenières (Isère), qui serait
un p^ncien Camulacus^ c'est-à-dire la propriété d'un honune
appelé Camulus à cause de la piété de seô parents envers
le dieu de ce nom.
(1) c. /. L., m, 4892.
(l) Ibid., III, 5479.
(3) Ibid.y XII, 2480.
(4) Ibid,, XII, 3645.
(5) Ibid., II, 4967, 34.
(6) Brambach, 825.
(7) Matton, Dtctionnatre topogr, du département de rAitne, p. 55.
NOHB DE LIEU IDENTIQUES A DBS 0BNTIUCB8 EN -lUB. 357
Caucius en Limousin. In villa Caticius , charte d'octo-
bre 887 (1); in alio loco qui vocatur Caucius, autre charte
d'octobre 887 (2) ; villam meam qus vocatur Caucius média-
nus, 1165-1170 (3).
On a parlé, pages 215-216, du gentilice Caucius et de son
dérivé Cauciacw, aujourd'hui Choisy-sur- Aisne (Oise), où
le roi Childebert III fut enterré en 711. Caucius parait
dérivé de cottcw, gobelet; mais, au moyen âge, il pou-
vait se confondre avec Gautius, dérivé de cautus, avisé,
prudent.
COMARTDS. Les mots in Comario dans le testament d'Ab-
bon en 739 (4), désignent Gommiers (Isère).
Ce nom de lieu est identique à un gentilice que nous
fait coQDaitre l'épitaphe de Quintus Comarius , conservée à
Milan (5).
Comarius a donné le dérivé Comariacus, écrit Comariago
au cas indirect en 615 dans le testament de Bertramne ,
eïêque du Mans (6). Un diplôme de Gbarlemagne, en 775,
nous offre la variante Comoriaco (7) , et dans un diplôme de
Louis le Débonnaire en 832, on trouve la variante Commo-
Tiaco (8); dans ces deux exemples, la seconde syllabe est
assimilée à la première. Il s'agit, semble-t-il, de Comeré,
commune de Ballée (Mayenne).
Cornélius. Mansum de Comilio... Mansus vero de Corni-
lio, vers 971 (9). Il s'agit de Gornil, près de Queyssac (Gor-
rèïe); on peut en rapprocher Cornille (Dordogne), proba-
blement Comelia (villa).
(1) D«loehe, CsrluUlrs de Beaulieu, p. 22&.
(1) Daloehe, ibtd., p. 226.
(3] Ibii., p. 62.
H) CtriitUire de Suint-Huguet de Grtnoblê, p. 48.
(i) C- I. L., V, 5997.
[^ PudeMos, DiplomalA, I, 200.
(7) Dom Boaqnet, V, 769 a.
(8) Ibid., VI, 586 a.
<3) Deloch«, C«rluUIr« de Beaulieu, p. 228.
35$ LIVRE IL CHAPITRE III. { 2.
Cornélius est un des gentilices les plus célèbres de
Rome, celui des Scipion et du dictateur Sylla. On le ren-
contre très fréquemment en Gaule, sous l'empire romain
dans les inscriptions ; il y a été porté par Cornélius Gaelu
licus, légat de Germanie supérieure, 28-39 de Jésus-
Christ (1).
Il a donné à la France des dérivés en -acus, en -anus ei
en -0 , -onis, Cornillé (Maine-et-Loire) : villa 7iomim Cof
niliacus apparaît, au onzième siècle, dans une charte citée
par M. Port (2); Cornillé (lUe-et-Vilaine), Cornillac (Drôme,
Cornillac, commune de Saint-Clair (Tarn-et-Garonne) , pa-
raissent être aussi d'anciens Corneliacus. Corneilhan (Hh-
rault), Corneillan (Gers), les trois Corneilla des Pyrénées-
Orientales sont chacun un ancien fiindus Corneliatius ; k
premier apparaît à l'ablatif, de Comeliano^ dans une cliarte
de 1135 (3).
Il y avait à Veleia quatre fundi Comeliani\ il y en
avait deux à Plaisance (4). On parlera plus bas du dérive
ComeliOy -onis.
Grussius est le nom d'une villa située dans le pagus
Turonicus, et où deux chanoines de Saint-Martin de Tours,
Haganon et Adjuteur, frères, avaient un manse seigneurial
qu'ils donnèrent à l'abbaye de Saint-Martin (5). Celait
eu 818, et la localité dont il s'agit est aujourd'hui Greus
(Indre-et-Loire) v^^- La même localité est mentioniii'e
dès 785 dans une autre donation à la même abbaye, mais
dans les copies que nous avons de cet acte, on a écrit, en
omettant un i : Grussas au lieu de Grussius (7).
vl> K. DcsJAr\iins. G^v'^P^^î' hiMorique de Im. Gaule romaine, II, *^4^
^S' Gw^Tani^ Oarh.lJiï-v V S'.:-.f-Vi -:or de Marseille^ t. I, p. 2^.
(4> 0. L L., XI, p, mn ^y. :si. ^î.v :i.x *:i7.
v,^^ M^rtone, Th^sn.é^-.^s \:t'>s i••.'.^:^:c•-î<•n, t. I, col, ÎO.
(7' Matk^ïic, r*ïr,<;:).-î.* ,:r't.f Jt~.r. .:::. T4»n, U I, p. 68. Mabille, U pa»
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES QENTILICES EN -IU8.
Ce nom de lieu est identique au geatilice écrit Grusi
avec une seule s, dans une inscriptioD romaine d'Italie i
Iccius. In pago Athoariorum Hicio. 721 (2) ; suivi
J. Garnier (3) , il faut lire Hiccio ; c'est Is-sur-Tille (Cô
d'Or), Comparez Icius pour Iccius dans les deux tex
suivants : In patria Arvernica in aice Brivatense in vi
cui nomen est Icio , i" mai- 843 (4); in Alvemia, in cor
iatu ipsius Brivatis... in îoco dicto Icio, novembre 926 (5
[ Iccius est le nom d'un Gaulois de la cité de Rein
' envoyé en ambassade à César l'an 57 avant Jésus-Chri
Mais ce nom était déjà, à cette époque, ua gentilice roma
En l'an 44, c'est-à-dire dix-sept ans plus tard, Cicén
dans sa troisième philippique , parle du préteur M. Icc
qui eut pour lot la Sicile. Dix-sept ans encore après, en !
nous trouvons à Rome un autre Iccius, c'est un famil
d'Horace ; il a d'abord cultivé la philosophie ; mais , trt
vant cette science peu lucrative, il veut chercher la riche;
dans le métier des armes, et va se joindre à une expéi
lieu militaire contre les Arabes : Horace lui adresse u
ode, la vingt-huitième du premier livre. En l'an 20, i
Iccius, ayant encore une fois changé de carrière, admin
trait les biens d'Agrippa en Sicile; Horace lui adres
l'épître 12 du livre I ; elle commence par le vers :
Pmctibus Agrippao siculia, qnos colligis, Icci.
3ous l'empire, le nom propre Iccius persista en Gai
comme gentilice. Les inscriptions l'attestent. Nous le In
vous à Vaison (Vaucluse) (6), où il produit Vagnomen déri
(I) C.I.L, X. 37M; cf. De-Vil. Onomamcon, III, 378.
(!) Pftrdessas, Dfplomala, II. 3Î5.
(3) iVomfncUlure hiiloriqxie de» communes du itépurUment de la Ci
<iOr, p. M, n- 146.
(4) Doniol, Carlufaire d« Brioude, p. 210.
(5)fbid., p. 169.
(6) C. I. Z,,, XII, 1335.
360 LIVHB II. CHAPITRE III. { 2.
Iccianus (1); nous le trouvons au Pégue; près de Valréas
(Vauduse) (2), à Saint-Paul-Trois-Chàteaux (Drôme) (3), à
Nimes (Gard) (4).
On doit le reconnaître dans le premier terme àlcio-
magus^ aujourd'hui Usson (Loire), nom de station romaine
inscrit dans la table de Peutinger, et qui veut dire « champ
d'Iccius; » dans le premier terme d7cf o-dwrtfm , « forte-
resse dlccius , » gui apparaît au sixième siècle chez Gré-
goire de Tours, qui, chez cet historien, désigne à la fois
Izeures (Indre-et-Loire) et Issoire (Puy-de-Dôme) (5), et qu'on
retrouve au huitième siècle dans une charte où il est la
forme antique du nom dlzeure (Côte-d*Or) , comme nous
rapprend M. J. Garnier (6).
Le gentilice Iccius donna aussi naissance à un dérivé
en -aous : Icciacus. Ce dérivé est écrit par deux $, en
928, dans une charte de Tabbaye de Cluny (8aône-et-
Loire) ; il y est question de biens situés in pago Matisco-
nense, in fine Hissiaoense^ in Hissiaco (7); Torthographe
moins bonne in Hisiaco par une seule «, se trouve, en 935,
dans une autre charte de la même abbaye ; il s'agit proba-
blement Issy-r Evoque (Saône-et-Loire) (8). On trouve la
même faute dans l'orthographe in potestate Isiaca d'un
diplôme de 980 provenant de Tabbaye de Saint-Magloire(9);
mais cette orthographe est rectifiée en 1085 dans une charte
de Marmoutier, où il est question de l'église de Issiaco (10);
enfin, dans le diplôme faux de Childebert I" pour la fon-
dation de Saint-Germain-des-Prés : on y lit Isciacus {li) ]
(1) C. /. L.. 1319.
(2) Ibid., 1705.
(3) Ibid., 1733.
(4) Ibid., 3226, 3494.
(5) Voir plus haut, p. 148, 154, 182.
(6) Nomenclaturey p. 21, n* 86.
(7) Bruel, Recueil des chartes de l'abbaye de Cluny , t. I, p. 337, 338.
(8) Bruel, ibid., p. 429.
(9) Robert de Lasteyrie, Cartulaire général de Paris, p. 88.
(10) Ibid., p. 133.
(11) Ibid,, p. 3.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A PES QBNTILICES EN -IU8. 36
c'est Issy-sur-Seine, près Paris. Issac {Dordogne), appeli
Issacum dans un pouillé du treizième siàcle (1). doit ôtr<
aussi un ancien fondus Icciacus. Les Issac de l'AUier , di
l'Ardècbe, de la Gironde, de Lot-et-Oaronne ont probable
meut la même origine. On peut faire la même bypothèa<
au sujet d'issay (Eure-et-Loir), qui s'appelait, au quatorziènif
et au quinzième siècle Isaâ, et au sujet d'Issè (Loire-
Inférieure).
Enfin Is-en-Bassigny (Haute-Marne) ne serait-il pas m
ancien fundus Iccius, Isse (Marne), une ancienne villa Iccia i
Ingenius. Ecclesiam S. Johannis de Ingénia, 1080, aujour-
d'hui Engins (Isère) (3), s'explique par le gentilice Ingenius
conservé par une inscription d'Afrique (3).
Lancius. Ce nom de lieu apparaît au cas indirect : ville
qva vocatw Lanceum, dans une charte de l'année 1080 (4):
de Lancio, en 1090(5); Lantium et Lanz, en 1109 (6). C'est
aujourd'hui Laos (Isère).
Lancius, nom de lieu est identique, soit au gentilice Len-
tius, soit au gentilice Lancius. Le gentilice Lentius est coU'
serve par une inscription de l'ancien territoire d'Aix en Pro-
vence (7) ; comparez le cognomen Lentiaus en Afrique (8|
et le gentilice Lentidius à Rome (9). Le gentilice Lancius
se trouve dans une inscription d'Espagne (10), la variante
féminine Lcmtia a été relevée dans une inscription ài
Campanie (11).
(1) Da Qoargnea, IHctfonnalre topogr. de la Dordogne, p. 160.
(2) CartuUire de Sainl-Haguee dt Grenoble, p. 147.
f3) C. /. L., VIII, 6775.
(4) Carlulalre de SaiTU-Bugu»» d< Grenoble, p. 117.
(5) ma., p. U9.
(6) /6fd., p. 152.
(7) C. I. L.. XII, M5.
(8) Ibid., VIII, 996Ï.
(9) ibid., VI, 21181.
(10) Ibid., II, 573.
(ll]It>ld., X, 4955.
362 LIVRE II. CHAPITRE III. { 2.
Lancius ou Lentius a donné des noms de lieu dérivés
en -0 et en -ctcus.
Des dérivés de Lancius , voici des exemples : 1® le po-
lyptyque de Saint- Victor de Marseille, qui date du neu-
vième siècle, mentionne : Colonica in Lancions (1) ; il s'agit
probablement de Lançon (Bouches-du-Rhône) ; 2* Une
charte de Cluny, de Tannée 930, parle d'un ager Lancianis
dans le M&connais (2) , et une villa LanciaciAs est nommée
dans une charte de la même abbaye, que l'éditeur met
entre les années 997 et 1031 (3).
On reconnaît un dérivé de Lentius dans une charte de
Tannée 696 : Lentiacus en Angoumois (4). Comparez la
curtis Lenziacus donnée à Tabbaye de Beaulieu au dixième
siècle (5), c'est Lanzac (Lot). L'existence du gentilice Len-
tius en Gaule paraît établie par les dérivés : 1® * Lentinius;
2^ *Lentilius nécessaires pour expliquer : a)Lentigny (Loire ,
Lantignie (Rhône) ; ce dernier, écrit Lantigneu vers 1300 ;6;;
b) Lentilly (Rhône), appelé Lentiliacus en 975 (7) ; les trois
Lentilliac du département du Lot; Lantilly (Côte-dOr) ,
appelé villam Lentiliacum dans un diplôme du roi Karlo-
man, en 883 (8) ; comparez Lantillac (Morbihan).
Lucius. C'est ainsi qu'on doit lire un nom de lieu écrit
Lucus dans plusieurs documents du moyen âge, dont les
auteurs ont écrit sous l'influence de leurs études gramma-
ticales et du mot latin lucus. Le plus ancien de ces docu-
ments est le testament de Tabbé Widerad ; il date de 721 ,
mais on n'en a que des copies et la plus ancienne ne re-
monte pas au delà du onzième siècle. Le testateur réserve
(1) Quérard, Cartul&ire de Saint-Victor de Marseille, t. II, p. 640.
(2) Bniel, Recueil des chartes de Cluny, t. I, p. 816.
(3) Bruel, ibid., t. III, p. 525.
(4) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 240.
(5) Deloche, Cartulaire de Beaulieu, p. 58.
(6) A. Bernard, Cartulaire de Savigny, t. II, p. 914.
(7) Ibid., t. I, p. 130.
(8) Dom Bouquet, IX, 430 c.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICEB EN -lUB. 31
à ses héritiers divers bieas, dans la propriété appelée Luc
et située dans le pagus Âtkoariorum (I); c'est aujourd'hi
Lux (Côte-d'Or). Il est possible que Lux {Saône-et-Loire} (
Lux (Haute-Garonne) s'expliquent de la même façon.
11 ne faut pas confondre ce nom avec celui de Luccas o
litcas, comme l'écrivent les manuscrits de Y Historia Frari
nrum de Grégoire de Tours (2), ou de Loceis, Locas dans le
manuscrits du livre des Vitœ Patrum du même auteur (3)
il s'agit de Loches (Indre-et-Loire), dont le nom primit
Luccœ et en latin vulgaire Luccas, sous-entendu casas, es
le féminin pluriel du cognomen Luccus. Une inscriptio
de Trêves mentionne un certain Hilarius Luccus (4). Ces
à ce cognomen que correspond le gentilice Luccîus coe
serve par quelques inscriptions à Rome (5) et en Gauk
par exemple à Aps (Ardéche) (6) et à Narbonne (7). Voi
p. 258-261 ce qui a été dit du gentilice Luccius, du gent
lice Lucius, sa variante, et des noms de lieu en -acus qx.
en sont dérivés.
Quelqu'un pourrait essayer d'expliquer par le gentilic
Lucius te nom de Castellucius dans les deux cartulaires d
Beaulieu et de Brioude. Le cartulaire de Beaulieu oËFre c
nom dans deux chartes de l'année 885 : Cum ipso castell
qui vocatur Castel- Lucius (8) , Cum ipso castello quod voco
iur Castellucio (9) ; dans ces deux documents , il s'agit d
Chalus (Haute-Vienne). Le même nom se lit dans deu
chartes d'Auvergne qui datent du siècle suivant : In pag
irvemico, in comitatu Telamitensi... in monte qui vocatti
Castellucius, juin 932 (10); In patria Arvemica in comitat
(]} Pardessus, Diplomata, t. II, p. 325.
(?) L. 10, c. 31 ; édit. Aradt, t. I, p. 444, 1. 20,
(3) Arndt et Knisch, t. II, p. 734, 1. I
(4) Brarabach, n- 825.
(i) C. /. t., VI, 21557, 21560.
(6) Ibid., XII, 265G.
(T) ma., Xli, 4954.
(8) Doloche, Carlulaire (ie Beaulieu, p. 100.
(9) Deloche, Una., p. 530.
■.10) Doniol , CaWuIaire de Brioude, p. 96,
364 ;.IVRE IL CHAPITRE IILI 1
Telamitensi... in villa qwB diciPur Castelluoio, mai 945 (1);
il s'agit ici de Chalus (Puy-de-Dôme), comme Ta établi
}i. Hou9é (2). Il y a au moins une troisième localité de
môme nom, c'est Chastelux (Yonne) ^ en 1147 Casteluz (3).
Il parait invraisemblable qu'un composé syntstctique
CasteJfluS'lAicius ait été fabriqué en France daus trois ré-
gions éloignées Tune de l'autre, comme la Haute- Vienne ,
le Puy-de-Dôme et l'Yonne ; on doit, ce semble, préférer
à cette hypothèse celle de la dérivation. Castellucius serait
dérivé 4^ castellum comme Castellio , Châtillon. La langue
latine a un suffixe ûceus qu'on trouve dans pannûc&ÂS^ « dé-
guenillé ; ce suffixe s'est prononcé ûcius dans les bas temps
et s'est confondu avec celui qui a servi à former fidûoia^
« confiance , » cadûoia, « épilepsie ; » on trouve ce suffixe
en France dans les noms de lieu Tumucius et Petronudus.
Turnucius est noté Turnuciv/m, villa/m dans un diplôme de
Charles-le-Chauve en 875 (4) ; l'orthographe Tomotium, en
853, dans un autre diplôme du môme prince (5) repré-
sente le môme son ; il s'agit de Tournus (Saône-et-Loire) ;
Turnucius est un dérivé du cognomen Turnus étudié p. 170,
Le cognomen Turnus a donné, outre Turnucius, les dérivés
primaires : Turnacus ; — Tournay (Belgique, Calvados, Orne),
Tournac (Ariège), — et *Turnius, gentilice dont l'existence
est attestée par les noms dérivés Tourny (Eure), Tournhac
(Aveyron), Tourniac (Ariège, Cantal , Lot), autant de nota-
tions modernes du gallo-romain Tumiacu^.
PePronuciuSj écrit au cas indirect Petronutio^ dans un
diplôme de Charles le Chauve pour l'abbaye de Saint-
Riquier (Somme) en 844 (6) , est un nom de lieu dérivé de
Petro, Petronis; Petro est un cognomen; on a trouvé dans
(1) Doniol, ibid., p. 182.
(2) Chez Doniol, Cartulatre de SauxilUnges, p. 677, 679.
(3) Quantin, Dictionnaire topogr&phique du département de l'Yonne, p. 31.
(4) Dom Bouquet, VIII, 647 c.
(5) /Md., VIII, 524 c.
(6) Ibid.y VIII, 468 e.
NOMS DE LIEU IDÈNTIQUtîÔ A DBS GEirt'iLICES EN -IU8.
les murailles de la ville de Narbonne l'épitaphe que L. Ss
nius Petro, affranchi de L. Salonius, fit graver pour di
personnes et pour lui-ûiôme (1).
LucAKtDs. Par unô chartâ qui se place entre les ann
1031 et 1065, Aimoù de Gombrouse donna & l'abbaye
Sainte-Pby-de-Conques le manse de Causeria , situé in
caria iMgafiiensi (3). Luganiensis est un adjectif dérivé
Substantif Lut/am'tu, dans lequel on reconnaît Lugan,c(
mune de Villeneuve (Aveyron) ; Luganim représente \
prononciation basse du latin classique huccmim.
On a parlé, p. 160-161, de ce gentilice et de ses déri
en -octu.
Mabcids. Dans une charte de l'année 940 ou de l'an:
941, qui fait partie des archives de l'abbaye de Cluny,
bienfaiteur donne à ce monastère les biens qu'il poss<
in villa Marcio (3). Il s'agit d'une localité située dans le
gus communacensis , dont le chef-lieu était Communac
aujourd'hui Coinmunay (Isère). \l y avait dans le dépai
ment do Gard un autre ifartius ou Marcius : de Jiartio
de iBarcio dans plusieurs chartes du douzième , du qua
zième et dii quinzième siècle, citées par M. Qermer-1
rand (4}; ce Martius ou Marcius s'appelle aujourd'hui Mi
Il a été déjà question , p. 270-275 , de ce gentilice el
ses dérivés en -acus et en -aniis.
Matroïhbs. Une charte de l'année 921 f?), a pour
jet la donation de biens situés en Auvergne, dans la vii
rie de Nonette {Puy-de-t)ôme) , in villa quà dicihiir
Aronio (5).
(I] c. I. L., XII, 4650.
(I) Dealardina, Carlul«ir« da ConquM, p. 313-314.
(3) Bniel, R«cu«tt de» charlu de l'abbaK* de dluViv, 1. 1, jt.^.
(4) tticHonnaire fopopraphfgue du département du Gard, p. 123.
(5) Doniol, Carlulaire de Srloude, p. 157.
366 LIVRE II. CHAPITRE III. { 2.
Matronius est un gentilice mentionné dans une inscrip-
tion de Vérone (Italie) ; c'est l'épitaphe de Matronia Mater-
nina (1). On trouve plus souvent Matrinius, exemple : les
épitaphes de L. Matrinius Secundus, de L. Matrinius
Stichianus et de Matrinia à Rome (2) ; une dédicace aux
mères Veteranehœ par C. Matrinius Primus aux envii-ons
d'Aix-la-Chapelle (3) ; Tinscription de Mayence, qui nous a
conservé les noms de Matrinius Zmaragdus (4). Le philoso-
phe épicurien C. Matrinius Valentius nous est connu par
son épitaphe qu'on trouve chez Orelli sous le n® 1192.
De Matrinius vient le nom de Matriniacus^ au neuvième
siècle Madriniacus, aujourd'hui Marnay (Aube), donnée
Tabbaye de Saint-Denis en 859 par le roi Charles-le-
Chauve (5). Un autre Madriniacus qui serait Marigny-Mar-
mande (Indre-et-Loire) , apparaît au neuvième siècle dans
une charte de Tabbaye de Saint-Martin-de-Tours (6).
PoMPONius. En 861 , Charles-le-chauve donna à Tabbaye
de Saint-Denis, pour subvenir aux dépenses du luminaire,
une partie des biens qui composaient le domaine royal dit
Pomponius en Beauvaisis : ex rébus fisoi nost/ri Pomponii in
pago Belvacensi (7). M. Longnon a reconnu que la localité
dont il s'agit est Pontpoint (Oise). L'orthographe moderne
de ce nom offre un exemple caractéristique de la façon intel-
ligente dont les scribes officiels entendent Tétymologie.
Le gentilice Pomponius est celui d'une gens plébéienne
de Rome qui arriva aux dignités curules. M. Pomponius
Matho fut consul deux fois, l'an 233 et Tan 231 avant
Jésus-Christ ; la première fois il obtint les honneurs triom-
phaux pour avoir vaincu les Sardes. Bien antérieurement,
(1) c. /. L., t. y, n- 3668.
(2) Ibid., VI, 22298-22300.
(3) Brambach, 575.
(4)/bid., 1124.
(5) Dom Bouquet, VIII, 558 d.
(6) MabiUe, La pancarte noire, p. 227.
(7) Dom Bouquet, VIII, 569 a.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICE8 EN -lUS. 9
des PomponJus avaient occupé des magistratures inférieu
res. été par exemple tribuns du peuple. Dés 449, un de
dix tribuns élus par la plèbe romaine fut M. Pomponius (1
Pomponius n'est pas originairement un nom romain
c'est un dérivé du nom de nombre pompe « cinq » qui ei
osque et ombrien ; c'est un des témoins qui attestent ]
présence d'éléments étrangers dans la population romair
dès les premiers siècles de son histoire.
La conquête romaine introduisit ce gentilice en Oauli
A Aime (Savoie), on a trouvé encastré dans un mur d'églif
une dédicace à la déesse Silvana par T. Pomponius Victo
procurator augustorum (2) dans les Alpes Graiae et Poenina
Le cimetière des Aliscamps d'Arles, a fourni l'épitaphe c
C. Pomponius Polycarpus (3). On a autrefois lu à Uzi
l'épitaphe de Pomponius Orbus (4), etc. De Pomponius déi
vent deux noms de lieu conservés par la géographie au
derae de la France : Pompignac (Gironde) = Pomfi
niacm ; Pompignan (1° Gard , 2° Tarn-et-Garonne) ■
Pomponiarwtë. Des fundi Pomponiani sont inscrits sur
table alimentaire de Veleia, p. 5, 1. 60 et 91 (5).
La parenté grammaticale du poète Le Franc de Pomp
gnan avec le tribun du peuple Pomponius, qui vivait dei
mille deux cents ans ans plus t6t, est le résultat d'un basa:
dont l'étymologie géographique offre de nombreux exei
pies.
Pompogne (Lot-et-Garonne) parait être une ancieni
villa Pomponia.
Priscius. Une charte de l'an 801 , par laquelle débute
cartulaire de l'abbaye de Conques (Aveyron) , contie
(1) Tit«-Livo, III, H. Sor U gtn» Pomponia, voyaz Paul;, Real-Bncye
p«ed!B. (. V, p, 1874-I88Ï.
{!)C. I.L., XU, 103.
(3) /btd., XII, 836.
(4) IbU., Xll, 29*6.
[i) IbU., t. XI, p. 315-216,
m LIVRE II. CHAPITRE III. ( 2.
donation à ce monastère de biens situés en Rouergue , in
locis vel villù nuncopantilms ubi vocabulum est Prisdo (1).
Le donateur, énumérant ses largesses, parle plus bas de
ipsa rocca Prisdo (2). Dans le même cartulaire, vers 1100,
cette localité est appelée Pris (3). Dans un autre document
de la môme époque, conservé par le même cartulaire, le ré-
dacteur voulant faire de la science a écrit Pri9cm (4) ;
c'est une faute pour Prisdu^.
On a parlé plus haut, p. 300-301, du gentilioe Priseius
et de son dérivé Prisôiatms.
QtjmTiLttJs. Par une charte dont la date se place entre
les années 1061 et 1065, un bienfaiteur de Tabbaye de
Conques (Aveyron) donne à ce monastère ecclesiam nostram
de Quintilio (5). M. G. Desjardins, éditeur de ce document,
a établi que l'église de Quintilio devait être située près de
Touk)iise (6). En 1107, on disait Quintil : Bernardus de
Quintil (7).
La bonne orthographe de ce gentilice est Quinctilins ,
bien qu'on trouve déjà Quintilius sans c daûs les inscrip-
tions romaines. La gens Quinctilia était patricienne et remon-
tait, dit"0n, au temps de Romuius où un de ses ïnembres
aurait présidé les prêtres dits Qmnctiliani Luperei (8). Les
Luperrcales, fête fixée au 15 février, étaient célébrées par
deux groupes de prêtres : les Quinctiliani Luperei et les
Fabiani Lupèixi^ tirant chacun leur surnom d'Urne ^nde
famille de Rome.
La branche la plus importante de la gen>s QuinctiUa était
(1) Q. Desjardins, CtirtuUire de Conques^ p. 1.
(î) îbid., p. 2.
(3) Ibid., p. 347.
(4) ïbtd., p. 3^.
(5) /bid., p. 62.
(6) Ibid.y p. cvi, cvii.
(7) Ibid., p. 386.
(8) Pestas, livre XVI. Sur la gens Quin[c]tilia , voyez t^aùly, ReaX-Èncy-
clopaêdiê, t. VI, p. 372-373.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICEB EN -lUB. 36»
celle des Quiaclilius Varus. Un d'entre eux devint dicta-
teur l'an 331 av. J.-C. ; un autre, tribun militaire en l'année
403; deux, consuls, l'un l'an 453, l'autre l'an 13 av. J.-C.
Le dictateur fut élu pour apaiser une émeute populaire ; le
moyen qu'il employa et qui eut plein succès, fut d'enfon-
cer un clou dans la paroi d'un temple ; c'était le moyen le
plus sûr d'apaiser la colère des dieux et de faire cesser les
calamités publiques (1). Les deux consuls furent moins
heureux. Le premier, étant en fonctions, mourut d'une
maladie épidëmique qui, cette année-là, fit beaucoup de
victimes; le second est ce fameux Varus qui, l'an 9 av.
J.-C, commandant en Germanie trois légions, périt avec
son armée ; il s'appelait P. Quinctilius Varus,
Son gentilice pénétra en Gaule. Trois inscriptions l'attes-
teul ; au musée de Narbonne est wnservée l'ëpitapbe que
de son vivant se ût préparer C. Quintilius Celsus (2) ;
à Nimes, C. Quintilius Eutychus fît graver celle de sa
femme (3) ; on a trouvé , à Vaison , l'épitapbe de Quintilia
Paterna (4).
Quintilius a donné à la géographie de la Gaule le dérivé
Quiniiliacus, aujourd'hui conservé par les noms de Quan-
tiliy (Cher) et de Cantillac (Dordogne). Celui-ci, écrit au-
jourd'hui par un C initial, a commencé autrefois par un Q.
On le voit écrit Qentilhacum au treizième siècle, Qumtillac
en 1382 (5).
SoLLEMNius. Vers l'année 751, Pépin le Bref, encore
maire du palais, ordonna, par un jugement conservé en
original, la restitution de divers biens à l'abbaye de Saint-
Denis. Dans la nomenclature se trouve le monastère dit
(l|Tit«-Liv0, VIII, 18; et. VII, 3.
lî) C. I. L., XII, 4990.
(i| ibid., XII, uns.
H) Ibid.. XII, tSTt.
[i] De Qowgaes, Dictionnaire topogr. du départ, de la Dordogne
24
370 LIVRE IL CHAPITRE IIL { 2.
C)^ce, aujourd'hui Croix-Nord, arrondissement d' A vesnes 1 ,
alors situé dans le pagm de Famars (Nord) (2) et près du
fiscus ou domaine royal appelé au cas indirect Solemnio /, .
précédemment donné à Saint-Denis par le roi Childeben.
Les mêmes indications géographiques se retrouvent en 773
dans un diplôme de Charlemagne (4). La donation par le
roi Childebert à Tabbaye de Saint-Denis avait eu lieu ei:
706; on n*en a plus qu'une copie, et le nom du domaine
royal y est écrit deux fois Solemio (5), sans n entre Vm et
Vi ; il faut corriger Solemnio. Il s'agit, parait-il, de Soles-
mes (Belgique) (6).
On a parlé déjà, p. 327, du gentilice Sollemnius et de son
dérivé Sollemniacus .
SoLius. In alio loco nfuod vulgo dicitur Solius, telle est la
formule employée en 1055 par le rédacteur d'une charte
pour désigner une localité située dans le Val de Salerne
au comté de Fréjus (7).
On a étudié déjà, p. 328-329, le gentilice Solius et son
dérivé Soliacus.
Tertius. En 896, il fut fait à l'abbaye de Cluny dona-
tion d'un bien situé dans le comté de Vienne, in villa
Tercio superiori (8).
Tertius fut d'abord un surnom. C'était celui de Junia Ter-
tia, sœur de M. Junius Brutus et femme de C. Cassius
Longinus. Elle passait pour être devenue la maîtresse de
(i) Longnon, Examen géographique du tome premier des Dtplomala im-
periif p. 19.
(2) Sur ce pagus^ voy. Longnon, texte de VAtlas historique de U France,
p. 124.
(3) Tardif, Monuments historiques, p. 45, col. 1. Pertz, Diplomalum im-
perii tomus primus, p. 109, 1. 5.
(4) Dom Bouquet, V, 733 e.
(5) Pertz, Diplomatum imperii tomus primus^ p. 66, 1. 41, et p. 67,1. 10.
(6) Longnon, Atlas historique de la France, p. 202.
(7) Guérard, CartuL de Saint-Victor de Marseille^ t. I, p. 506.
(8) Bruel, Rec, des chartes de Cluny, t. I, p. 68.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICES EN -lUS. 371
Jules César, et la mère de Tertia était accusée de favoriser
les relations des deux amants. César rendit à cette mère in-
dulgente le service de lui adjuger en vente publique, pour
une somme fort modique , de vastes domaines confisqués ;
Cicéron dit en plaisantant que le prix avait été fixé Tertia
deducta. On pouvait comprendre au choix , ou que le tiers
avait été déduit, ou que la valeur de Tertia avait été retran-
chée du prix, ou que Tertia avait été conduite par sa mère
à César (1). Dans le langage familier, Tertia s'appelait Ter-
luUa : Cicéron la nomme ainsi dans ses lettres à Atticus (2).
Antérieurement à cela, en Tan 168 avant Jésus-Christ,
le consul L. Aemilius Paulus avait une fille qui se distin-
guait des autres Aemilia par le cognomen de Tertia ; elle
se fit un nom dans l'histoire romaine par une parole enfan-
tine où Ton vit une prédiction de la défaite du roi de Macé-
doine, Persée (3).
Une Tertia moins illustre, était la ûlle du mime Isidore.
Cicéron parle d'elle dans ses Verrines.
Sous l'empire romain nous trouvons dans Tacite le cog-
nomen Tertius, passé à la dignité de gentilice. En l'an 70
de notre ère , Tertius Julianus commandait , avec titre de
légat, la septième légion ; il faillit être une des victimes des
discordes civiles (4) ; l'année suivante , il fut préteur (5).
D'autres Tertius moins connus apparaissent dans les in-
scriptions : T. Tertius Italiens et T. Tertius Paullus , au
musée de Nimes (6); T. Tertius Félix, au musée de
Mayence (7), etc.
Le gentilice Tercius a donné un dérivé en -acus qui
désigne plusieurs localités différentes. Au commencement
du neuvième siècle, le Polyptyque de Saint-Victor de
(1) Suétone, César, c. 50.
(2) Livre XIV, 20; livre XV, 11.
(3) Cicéron, De divin&tione, livre I, c. 46, i 103 ; livre II, c. 40, g 83.
(4) Tacite, Histoires, livre II, c. 85.
(5) Ibid., livre IV, c. 3940.
(6) C. /. L., XII, 3593, 3945.
(7) Brambacb, 1049.
372 LIVRE II. CHAPITRE III. { 2.
Marseille nous apprend que cette abbaye avait une colo-
nica in Terciago^ c'est-à-dire une propriété immobilieiv
habitée par des colons dans un ancien fundu$ Tertio-
cv^ (1). En 860, Raoul, archevêque de Bordeaux, donne
pour la fondation de l'abbaye de Beaulieu un manse
in villa Terciaco ; il ajoute que cette villa est situe^
in orbe Lemovicino et t&iTitorio Tornense , c'est-à-dire f-w
Limousin dans la pays de Turenne ; c'est aujourd'hui Ter
sac (Haute-Vienne) (2). Dans le siècle suivant, les cha^le^
de Cluny mentionnent deux Teriiacus ; le premier apparaît
en 956 : il s'agit de la donation d'une curtis^ située dans le
pays d'Autun dans Vager Marcilliacensis ^ in villa Ter-
ciaco (3), c'est aujourd'hui Terzé, commune de Mar-
cilly (Saône-et-Loire) ; le second est nommé dans une
charte de 960, où il est dit qu'une villa Buciagusesi^iw^-^
en Maçonnais in fine Terciacensi (4).
Terssac (Tarn) parait être aussi un ancien Teriiacus.
Ainsi peut s'expliquer également le nom de Tressé (Maine-
et-Loire), qu'on a autrefois écrit Tercé (5).
TiLius ou plutôt TiLLius. Une villa Tilius, ou mieux
Tillius^ mentionnée en 845 et en 854 dans des diplômes de
Charles le Chauve pour l'abbaye de Montiérender ^6,
est aujourd'hui Thil (Aube). Un autre Tilius : [in alio loc-
qui vocatur Tilius) apparaît en 878 dans une charte de
l'abbaye de Beaulieu (Corrèze) (7); ce parait être Tillet,
commune de Molières, ou Tillet, commune de Lenlil-
lac, tous deux dans le département du Lot. Une troisième
(1) Guérard, Cart. de Saint-Victor de MarsetHe, t. II, p. 638.
(2) Deloche, CaW. de Beaulieu, p. 4, 384, 385.
(3) Bruel, Recueil des chartes de Cluny^ t. II, p. 90.
(4) Bruel, ibtd., t. II, p. 183.
(5) Port, Dictionnaire de Maine-et-Loire^ t. III, p. 626.
(6) Dom Bouquet, VIII, 477 a, 429 e. Lalore, Collection des principm
cartulaires du diocèse de Troyes, t. IV, p. 126, 128.
(7) Deloche, Car(. de Beaulieu, p. 84.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICES EN -lUS. 373
villa Tilifis, située dans TAutunois figure dans une charte
de l'abbaye de Saint-Germain-d'Auxerre en 924 (1).
Tillius est un gentilice qui n'était pas rare sous Tempire
romain. On peut s'en assurer en consultant les index du C.
I. L. , t. V , VIII , IX, X , XIV. Ce gentilice a pénétré en
Gaule ; on a lu le nom de femme Tillia dans une inscription
de Narbonne (2).
Tillius a des dérivés en -a(yus : on a reconnu que la
Tilliacus villa d'une charte de 989 est aujourd'hui Tillé,
commune de Champgéneteux (Mayenne) (3). En 952, une
charte d'Otton I", roi de Germanie, pour l'abbaye de
Saint- Vannes , parle d'un Tilliacus (4) qui est aujourd'hui
Thilly ou Tilly-sur-Meuse (Meuse) (5).
Les formes modernes de Tilliacus^ dérivé en -aous de
Tillius, nom d'homme, doivent être soigneusement distin-
guées des formes modernes de Tilietum , dérivé en -etum
de iilia , nom d'une espèce d'arbre , c'est-à-dire du tilleul ;
ainsi Tillay (Eure-et-Loir) , est un ancien Tilietum comme
l'a montré M. Merlet (6); Tilietum est un endroit où il y
a des tilleuls, Tilliacus est la propriété de Tillius.
Nous sommes arrivés, par ordre alphabétique, au dernier
des exemples que nous voulions donner de gentilices romains
employés au masculin comme noms de lieux dans les textes
du moyen âge.
Nous terminerons par un exemple d'un phénomène ana-
logue en Gaule au temps de l'empire romain. C'est :
Nasium. Ptolémée au deuxième siècle de notre ère
(1) Dom Bouquet, IX, 563 e, 564 a.
P) C. /. L., XII, p. 854, col. 1, n- 5135.
(3) Léon Maître, Diciionnaire topogr&phique du département de la
Mayenne, p. 313.
(4) Dom Bouquet, IX» 384 a.
(5) Liénard, Dict. iopogr, du départ, de la Meuse^ p, 235.
(6) L. Merlet, Dictionn, topogr, du départ. d'Eure-et-Loir^ p, 178.
874 LIVRE IL CHAPITRE IIL { 2,
nomme deux villes des Leuci : ce sont, au nominatif singu-
lier, TooXXov « Toul » (Meurthe-et-Moselle) etNaatov a Naix»
(Meuse) (1).
Pour comprendre ces deux noms de lieux qui sont des
substantifs masculins employés adjectivement au neutre, il
faut les écrire en caractères latins Tullum et Nasium, comme
dans Vltinéf^aire d'Antonin et suppléer praedium, Tullum et
Nasium sont le premier un cognomen latin (2), l'autre un
gentilice , employés tous deux adjectivement au neutre.
L'orthographe du gentilice Nasius par une seule s est
conforme à Tétymologie, car ce nom d'homme dérive de
nasuSj « nez. » comme les cognomina bien connus du poète
Ovide, P. Ovidius Naso, et du consul P. Cornélius Scipio
Nasica. De nasus viennent aussi les gentilices Nasellius,
Nasennius, Nasidius, Nasonius, qu'on trouve dans les
inscriptions. Dans tous ces dérivés Vs est simple et Va long
comme dans nasv^. Cette orthographe est respectée dans
Nasium et dans le gentilice de Maxima Nasia que nous a
conservé une inscription dédicatoire à Apollon trouvée à
Maurovalle dans l'Italie méridionale (3).
Mais par un phénomène dont l'onomastique latine offre
d'autres exemples, le gentilice Nâsius double ordinaire-
ment son s en abrégeant son a et s'écrit Nassius (4).
Comme exemple de cette notation nous citerons une ins-
cription de Narbonne; c'est l'épitaphe gravée sur une stèle
funéraire par les soins de Nassius Eutycus (5).
(1) Ptolémée, 1. II, c. 9, § 7; édition Didot-MûUer. t. I, p. 225. Un certain
nombre de mss. donnent la forme TouXXtov d*accord avec la table de Pentia-
gor, où on lit Tullio : ToOXXov est l'orthographe des autres mss. de Ptolémée
d'accord avec l'Itinéraire d'Antonin, où on lit Tullum, p. 365, 1. 4; p. 385,
1. 10; et TullOf p. 385, 1. 6. ToOXXov, Tullum est la bonne leçon confirmée
par la prononciation moderne Toul. Tullium aurait donné Touille. Voyez,
du reste, les textes réunis par £. Dosjardins, Géographie de la Gaule d'après
le lable de Peutinger, p. 123-124,
(2) C. /. L., V, 2845, 3930, 7576; VII, 794, 1336 (1136); VIII, 2556; IX, 5560;
X, 2625, 8048; XII, 3726, 5804.
(3) C. J. L., IX, 5803.
(4) Ibid., VI, 22283; IX, 3191 ; X, 1403, 2765; XIV, 2966.
(5) Ibid,, XII, 4910.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICES EN -lUS. 375
§3. — Gentilices romains en -ius employés adjectivement
avec un sens géographique au féminin singulier, (1).
U Itinéraire cTAntonin nous donne un exemple d'un nom
de fundus employé au féminin et s'accordant avec villa ex-
primé : ad villam Servilianam (p. 42), c'est en Afrique. Le
plus souvent, dans V Itinéraire d'Antonin, le mot villa est
sous-entendu : voici des exemples de noms de fundi au
féminin tirés de gentilices à l'aide du suffixe --anus :
Antistiana {Itinéraire^ p. 398)
Barbariana (p. 406)
Bassiana (p. 262)
Clodiana (p. 318)
Crispiana (p. 267)
Domitiana (p. 499, 500)
Malliana (p. 38)
Manliana (p. 292)
Marcelliana (p. 110)
Mariana (p. 445)
Valeriana, Variana (p. 220)
Ont été formés avec le suffixe -aci« :
Arriaca [Itinéraire d'Antonin, p. 436, 438)
Artiaca (iWd., p. 361)
Darentiaca {Itinéraire de Jérusalem^ p. 554).
Il ne faut donc pas s'étonner si les gentilices employés
comme noms de lieux se rencontrent quelquefois au fémi-
nin dans les documents du moyen âge. On en peut citer
pour la France un exemple qui remonte au temps de l'Em-
pire romain :
Cantilia, dans la Table de Peutinger, aujourd'hui Chan-
(1) Go paragraphe contient le texte de leçons faites au Collège de France
en janvier 1889. l\ a paru en partie dans la Revue celtique, t. X, p. 153-177.
376 LIVRE II. CHAPITRE III. { 3.
telle (Allier) (1), est la forme féminine du gentilice Cantilius.
La forme féminine Cantilia de ce gentilice est ua nom
de femme dans une inscription du musée de Naples (2).
Au masculin, L. Cantilius est le nom d'un scriba pontificis
mentionné par Tite-Live (3) ; il fut condamné à mort pour
avoir rendu grosse une vestale et périt sous les verges.
Au lieu de villa Cantilia y on aurait pu dire villa Canti^
liana ou fundus Cantilianus. C'est d*un fimdus Cantilianus
que tire probablement son nom la vicaria Cantilianenns
mentionnée dans une charte de 926 et qui était située dans
le comté de Brioude (Haute-Loire) (4). De Cantilianus est
venu le dérivé Cantilianicus écrit Cantillanicus dans une
charte de 894 relative à la même région (5).
Les dérivés en -acus de Cantilius ne sont pas rares en
France. Nous citerons Chantilly (Oise), Chantilly, commune
de Courcelles (Indre-et-Loire), Chantillac (Charente), Chan-
tillac, commune de Ceyssac (Haute-Loirq), Cantillac (Dor-
dogne), Cantilly, hameau de Cerisy-la-Forêt (Manche).
De cet exemple fourni par un- document contemporain de
l'empire romain , nous passons à ceux qu'offrent les textes
du moyen âge.
AcuLiA. Une localité de ce nom dans le pays de Vosge,
in pago Vosago, est mentionnée en 713 par une charte de
l'abbaye de Wissembourg (6). En 1056, une charte deTab-
baye de Saint-Victor de Marseille parle d'un château ap-
pelé Agulia : castrum quem vocatur Agulia (7). Agulia est
une orthographe moderne pour Àculia.
Àculia est le féminin d'Aculius , gentilice écrit Aqulius
(1) E. Desjardins, Géographie de la Gaule d'après la Table de Peutinger,
p. 298.
(2) C. /. L., X, 4116.
(3) Tite-Live, Uvre XXII, c. 57.
(4) Douiol, Cartul&ire de Brioude^ p. 63.
(5) Doniol, i6id., p. 115.
(6) Pardessus, DtpZomata, t. II, p. 437.
(7) Guérard, Cari, de SAint-Victor de MarsetHe, t. I, p. 264.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICES EN -IU6. 377
dans la marque d'un potier qu'on a relevée sur un vase
trouvé à Aix en Provence : C. Aqulius Félix (1). Aculius
est le pendant du gentilice Âculenus (2). En dérivent le
coff^nomen Aculinus (3) et quelques noms de lieu.
Tel est Aguliacus pour Aculiacus dans une charte de Tan-
née 850; c'est aujourd'hui Saint- Apollinaire (Côte-d'Or)
comme Ta reconnu M. J. Gamier (4). Un primitif i4ctiKa-
ctis explique : Eguilly (Aube), au douzième siècle Aguilley (5) ;
Eguilly, commune de Saint-Avit (Eure-et-Loir), au quator-
zième siècle Aguilly (6).
Aiguillan , commune de Mérindol (Drôme) , Aiguillanes ,
commune de Vilhac-Aiguillanes (Ardèche), sont dérivés du
gentilice Aculius au moyen du suflBxe ^anus. Aiguillon
•Lot-et-Garonne) et les deux Aiguillon de la Vendée nous
offrent le môme gentilice développé à Taide du suffixe -o,
■onis.
Albâniâ. Les mots in territorio quod dicitur Albania (7),
in territorio villae Albaniae (8) , in Castro Albaniae (9) , dans
des chartes du onzième siècle , paraissent désigner Auba-
gne (Bouches-du-Rhône).
C'est un gentilice dont les inscriptions romaines nous
offrent quelques exemples en Afrique et en Italie (10). On
le trouve aussi dans une inscription romaine de Valence
(Drôme) (11).
Le nom d'Aubagnan (Landes) est un dérivé en -anus de
ce gentilice. Les dérivés en -actÀS sont plus nombreux en
(1) c. I. L., XII, 5686, 69.
(2) Ibid., IX, 3351.
(3) JMd,, VIII, 7973.
(4) Nomenclature historiqtu^ p. 190, n* 28; cf. p. 8, même numéro*
(5) Boutiot et Socard, Dicî. topogr. du départ de l'Aube, p. 61.
(6) Merlet, Dict, topogr. du départ. d'Eure-et-Loir, p. 63.
(7) Guérard, Cari, de Saint-Victor de Marseille, t. I, p. 67.
(8) Ibid., p. 83.
(9) Ibid., p. 162.
(10) C. /. L., VIII. 6718, 7185, 8003, 8005; IX, 1639, 5351 ; X, 6132.
(11) Ibid., XII, 1759.
378 LIVRE II. CHAPITRE III. § 3.
France ; tels sont : trois hameaux du département de
TAveyron, tous appelés Albagnac, communes de Monla-
gnol, Sauveterre et Saint-Igest; Albagnac, commune de
Saint-Etienne-de-Chomeil (Cantal) ; Aubagnat, commune de
Frugières-le-Pin (Haute-Loire) (1).
Albia. C'est Albi , chef-lieu du département du Tarn.
La plupart des textes les plus anciens supposent une or-
thographe Albiga avec un g parasite entre Vi et Va. C'est
ainsi que la Notitia dignitatum parle des équités cataphrao
tarii albigenses placés sous les ordres du magister militum
de Thrace (2); et que la civitas Albigensium figure dans la
« Notice des provinces et des cités de la Gaule (3). » Gré-
goire de Tours appelle Albi au génitif Àlbige (4) et en tire
V ^d^eciit Albigensis f Albiginsis (5).
D'Anville (6) a reconnu qu' Albiga est une notation à'Al-
bia. M. Schuchardt (7) a relevé des exemples analogues
d'épenthèse de g entre deux voyelles : aligenare pour alie-
nare, aliginigenus pour alienigenus ; origeniis pour oi'imtis.
On a étudié, p. 190, le gentilice Albius et son dérivé
Albidcu^.
Antia. Ancia , forme vulgaire pour Antia, est un nom de
lieu mentionné dans un diplôme faux du roi Dagobert II
en faveur d'une abbaye du diocèse de Trêves (8.
Ance (Basses-Pyrénées) , Anse (Rhône) , se sont peut-être
appelés primitivement Antia.
Antius est un gentilice romain peu connu. Le moins obs-
(1) Voy. Ghassaing, Spicilegium Brivatense, p. 579, 585.
(2) Notitia orientis, ch. VII, g l, b. 1. Ed. Boecking, t. I, p. Si, 216.
(3) Longnon, Atlas historique de la France, p. 15.
(4) Historia Francorum, 1. IX, c. 20; édit. Arndt, p. 375, 1. 16.
(5) Historia Francorum, 1. II, c. 3, 37; 1. VI, c. 33; 1. VII, c. 1; 1. VIII,
c. 22, 45; édition Arndt, p. 65, 1. 18; p. 102, I. l; p. 274, 1. 5; p. 292,1.2;
p. 340, 1. 9; p. 356, 1. 14.
(6) Notice des Gaules, p. 45.
(7) Vohalismus des VulgaerlateinSt I, 170 ; III, 25.
(8) Pardessus, Dtplomata, II, 168.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICE8 EN -lUS. 379
cur de ceux qui l'ont porté sous la république est Antius
Restio ; étant tribun du peuple , édile ou préteur , on ne
sait lequel , il fit voter une loi pour empêcher les candi-
dats aux magistratures et les magistrats d*aller dîner en
ville. Sa loi ne fut exécutée par personne , lui excepté ;
avant soin de bien dîner chez lui tous les soirs , il n'eut
jamais la tentation de dîner une seconde fois chez les au-
tres (1).
On trouve ce gentilice sous l'empire à Rome et hors de
Rome, par exemple en Gaule (2).
Le gentilice Antius a donné à la France des noms de
lieu dérivés en -actw et en -anus : Ancy-le-Franc (Yonne)
est appelé à l'accusatif Ànciacum dans deux testaments ,
Tun de Tannée 721 , Tautre de 746 (3) , et dans une dona-
tion de la fin du onzième siècle (4). L'église d'^ncy-le-
Serveux (Yonne) est en latin ecclesia Anciaci dans une
charte de 1108 (5). Ancey (Côte-d'Or) a la môme origine,
bien que les textes les plus anciens , douzième siècle , ne
conservent la tradition ni de l'a ni du c du suffixe et écri-
vent son nom Ancium (6). Ancy (Rhône) dans une charte
de la fin du onzième siècle est à l'ablatif Anciaco (7). An-
sac (Charente) paraît être la notation méridionale d'un an-
tique Anti(iciis. Ansan (Gers) doit être la forme moderne
d'un primitif Antianits.
Aria, mieux arriâ. Une charte de l'année 856 contient
la date de lieu Actum Aria monasterio (8). Il s'agit d'Aire-
sur-la-Lys (Pas-de-Calais).
(1) Aulu-Gelle, II, 24, 13; Macrobe, Saturnales, III, 17, 13; cf. De- Vit,
Onomisticon, I, 345.
(2) C. /. L., VI, 11940-11945; XII, 753, 1392.
(3) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 324, 400; cf. Quantin, Cartulaire de
l'Yonne, U II, p. 2.
(4) Quantin, Cartul. de l'Yonne, t. II, p. 18.
(5) Ibid., t. I, p. 216.
(6) Garnier, Nomenclature historique, p. 56, n* 243.
(7) A. Bernard, Cartul. de Savigny, p. 429.
(8) Guérard, Cartul. de Saint-Berlin, p. 162.
380 LIVRE II. CHAPITRE III. { 3.
On a trouvé à Rome les épitaphes de L. Arius Abascan-
tus, d'Arius Amandus et ë'Aria Gemella (I). Cependant les
inscriptions et les textes classiques écrivent ordinairement
ce gentilice avec deux r; la bonne orthographe du nom de
lieu serait donc Arria. C'est la forme féminine du gentilice
Arrius. Arrius est le nom d'un centurion qui s'empara du
bien de Virgile près de Mantoue. Servius nous l'apprend
dans son commentaire sur le vers 47 de la première éclo-
gue , sur le vers 94 de la troisième et sur le premier vers
de la neuvième (2). On y voit que le domaine occupé par
Arrius touchait au Mincio, un affluent du Pô ; que, Virgile
s'étant remis en possession, Arrius voulut le tuer, et que le
poète ne put sauver sa vie qu'en se jetant dans la rivière
et en la traversant à la nage.
Catulle (poème 84) se moque de la prononciation d'un au-
tre Arrius qui ornait la langue latine d'aspirations inutiles :
Ghommoda dicebat, si quando commoda vellet
Dicere, et hinsidias Arrius insidias.
Arrius est fréquent chez les auteurs, et on rencontre par
exemple chez Cicéron plusieurs Arrius. On trouve souvent
aussi ce gentilice dans les inscriptions romaines. Ainsi,
parmi celles de la ville de Rome, on a publié les épitaphes
de dix-sept Arrius et de vingt Arria (3). On peut citer dans
la Gaule méridionale le nom du potier Arrius au musée de
Nimes (4). L'épitaphe d'un certain Capito , trouvée prés de
Mayence , nous apprend que ce Capito était affranchi d'Ar-
rius et qu'Arrius , son patron , avait un esclave nommé
Diomède (5). Une inscription de la Bavière rhénane rap-
pelle que G. Arrius Patruitus avait élevé un temple à la
déesse Maia (6).
(1) C. /. L., VI, 12328-12330.
(2) Ed. Thilo, t. III, p. 11, 41, 108.
(3) C. /. L„ VI, 12366-12415.
(4) Ihid., XII, 5686, 76.
(5) Brambach, 934.
(6) /btd., 1835.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICEB EN -IU8. 381
Les noms de lieu dérivés d'Arrius ne nous offrent
qu'une seule r dans les monuments du moyen âge. En
721, l'abbé Wideradus donne à l'abbaye de Flavigny (Côte-
d'Or), une cotonica in Ariaco, c'est-à-dire à Herry (Niè-
vre) (1). Dans la charte de Saint-Bertin , d'après laquelle
on a cité, p. 379, le nom ancien, Aria, d'Aire-sur-la-Lys ,
on trouve aussi l'indication géographique in Ariaco. Une
charte du neuvième siècle, comme la précédente (3), donne
une énumération de localités comprises dans le comté de
Vienne, et nous y lisons au cas indirect Ariaco, c'est Hey-
rieux (Isère). Nous parlerons encore de la viearia Ariacensis
mentionnée au dixième siècle (3) ; elle était située en
Rouergue, c'est aujourd'hui Arjac, commune de Saint-
Cyprien (Aveyron). La bonne orthographe par double r
nous est conservée par l'ItiTiéraire d'Antonin, où une sta-
tion d'Espagne est deux fois appelée Arriaea (4).
A côté du dérivé en -actts, il y en a un autre en -anus
dont la forme féminine nous est offerte par le nom de lieu
Ariana. Ce nom de lieu sert à distinguer des autres Giraud,
Giraldus de Ariana dans une charte de ta Qn du onzième
siècle (5). Ariana a dû s'écrire originairement par deux r :
dans une inscription de Pompeii, il est question de Vln-
suia Arricma (6).
Art[a. Nous diviserons cet article en cinq paragraphes.
Le premier traitera de l'étymologie du nom de lieu Artia
dérivé d'Artos « ours. » Dans le deuxième, àh dira qu'unf
idée religieuse était associée au mot Artos. La preuve «c
sera donnée dans le troisième paragraphe par l'examen de:
noms d'hommes composés gaulois dont le second terme es
genos. Le quatrième paragraphe concernera 1° trois noms
0) QuanUo, Carlul. de VYonne, t. II, p. S40.
(!) Cartulaice de Saint-Hugues de Grenoble, p. 15,
(ij G. DeajardiDS, Carlulaire de Conques, p. 230.
(4) IlinérairB d'Anfonin, p. 436, 1. 3 ; p. 438, 1. 10.
(5) Carlulaire de Saint-Hugues de Grenoble, p. 12?.
(6)C. ;.'!,., IV, 138,
382 LIVRE II. CHAPITRE III. { 3.
propres d'hommes gaulois identiques comme Artos à des
noms communs d'animaux divinisés, 2** les dérivés de ces
noms propres. Dans le cinquième paragraphe, on répondra
à une objection possible qui serait tirée de la phonétique.
4« EtymologU du nom de lieu Ârtia ; c'est un genUlice dérivé d'Artos
c Oun. >
Le testament d'Abbon, en 739, met in pago GraHanopoli-
tano, c'est-à-dire en Graisivaudan , une colonica (c'est-à-
dire une terre habitée par des colons)... prope Arcia (1).
La même localité est appelée Arces vers 1100 (2); c'est au-
jourd'hui Arces , commune de Saint-Ismier (Isère). Arcia,
Arces (lisez Arce) , figurent la prononciation moderne d'un
antique Artia, féminin d'Artius.
Artius est un gentilice romain peu répandu. De-Vit (3',
au mot Artia ^ en offre deux exemples. On trouve Artius
servant de cognomen dans une inscription de Pozzuoli en
Campanie; c'est l'épitaphe d'un monument funèbre élevé
par deux affranchis à leur mère, affranchie comme eux
d'un certain Junius : l'un s'appelle M. Junius Artius (4}.
Artius est dérivé d'Artus ou Artos , que l'on suppose être
le nominatif d'Arti 1® dans le composé syntactique gaulois
Arti-cnos « fils d'Artos , » conservé par une inscription
grecque d'Ancyre (5) en Galatie, 2"* dans une inscription de
la Pannonie supérieure où est mentionnée la tvrma Àrti,
le « peloton d'Artos » qui faisait partie de Vala Pannonio-
rumy c'est-à-dire de l'escadron des Pannoniens (6). Arti peut
être le génitif d'Artius aussi bien que d'Artos. Cependant
l'existence d'un nom d'homme Artos ou Artus parait dé-
montrée par le nom de lieu Arto-briga, forteresse d'Artos ,
(1) Cartul. de Saint'Hugues de Grenoble^ p. 44.
(2) Ibid,, p. 105.
(3) Onom&sticonj t. I, p. 494.
(4) C. /. L., X, 2626.
(5) Mouaavoc 'Aprtxvw. Bœck, C. /. Gr., t. III, n» 4039, 1. 37.
(6) C. /. L., III, 4376.
NOMS DE LIEU IDENTIQTJEB A DES GENTILICE8 EN -IU8. 383
en Norique suivant la table de Peutinger, en Vindélicie
suivant Ptolémée (1) ; c'est par un premier terme primitif
ArtO" que s^explique le nom à! Arte-dunus , Arti-dunus ou
Arta-dunum porté au huitième et au dixième siècle par Ar-
thun (Loire) dans les Cartulaires de Savigny et de Saint-
Victor de Marseille.
A ArtO'briga comparez Eburo-briga « forteresse d'Ebur
ros, » nom d'une station romaine des Gaules; Augusto-
briga , Caesaro-briga , noms de villes d'Espagne dont le
premier terme est un cognomen romain comme Eburus ;
Coelio-briga^ Flavio-briga^ Julio-briga^ noms de villes d'Es-
pagne dont le premier terme est un gentilice romain. A
* ArtO'dunum , comparez Augusto-dunv/m ^ Caesaro-dunumi.
Arto-s a donné plusieurs dérivés; l'un est Artinus, cogno-
men d'Acceptius, dans une épitaphe trouvée à Trêves (2);
un autre est Artilius , gentilice employé au féminin dans
une inscription de Lyon (3), au masculin dans une inscrip-
tion de Brescia (4). On trouve les gentilices Artanius et
Ârtidius dans des inscriptions de Rome (5).
D'Artius est venu le nom de lieu dérivé Artiacus, em-
ployé au féminin dans Y Itinéraire d'Antonin où Artiaca est
Arcis-sur-Aube (Aube) (6). L'accusatif pluriel féminin Arda-
cas^ dans un diplôme de Charlemagne en 802, désigne Assé-
le-Bérenger (Mayenne) (7). Ailleurs le masculin l'emporte .%
Âriiacas est Arçay (Vienne) dans un acte de l'année 791 (8) ;
Arcy-sur-Cure (Yonne), s'appelle à l'ablatif Arsiaco dans
une charte du douzième siècle (9) ; Arciacus est en 11251e
(1) Ptolémée. 1. II, c. 12, § 4; édition Didot-Mûller, t. I, p. 283, 1. 7; cf.
p. 284, la note de la ligne 8.
(2) Brambach, 817.
(3) Boissieu, p. 200.
(4) C. /. L., V, 4535.
(5) ma., VI, 12452, 12471.
(6) Voyez ci-dessns, p. 159.
(7) L. Maître, Diciionnsiire topogr, du départ, de 2a Mayenne, p. 7.
(8) Redet, Dictionnaire topogr. du départ, de la Vienne, p. 11.
(9) Qaantin, CarfuZaire de l'Yonne^ t. I, p. 71.
384 LIVRE II. CHAPITRE III. | 3.
nom d'Arcy-Sainte-Restitute (Aisne) (1) ; le même nom de-
signe au onzième et au douzième siècle (2), Arciat ou Ar-
cieux, commune de Saint- Jean-de-Thurigneux (Ain).
Dans le midi de la France , les communes d'Arsac (Gi-
ronde) et d'Arzacq (Basses-Pyrénées), les hameaux d*Arzac,
commune de Cahuzac (Tarn) ; d'Arsac, commune d'Auzer?
(Cantal) ; d'Arsac , commune de Garât (Charente) ; d'Arsac.
commune de Saint-Fréjoux (Corrèze) • d'Arsac , commune
de Coubon ; d'Arsac , commune de Saint^Pierre-du-Champ,
tous deux dans la Haute-Loire , se sont probablement ap-
pelés primitivement chacun Ariiacus. Arsague (Landes) pa-
rait être une ancienne Artiaca villa. Ces formations ne
sont pas spéciales à la France : M. Flechia, dans le
t. XXVII des mémoires de l'Académie des sciences de Tu-
rin, signale les noms de lieu Arzago etArzaga^ près de Mi-
lan et près de Bergame, Une charte de 976 qui fait partie
des archives de la cathédrale de Novare mentionne près de
cette ville un fundus Arciacus (3).
Le nom d'homme gaulois Arto-s , dont le gentilice Ar-
tins dérive, parait identique au gallois arth « ours. » Le
nom latin de cet animal, ursiÀS^ a été employé en Gaule
comme cognomen sous l'empire romain. A Grézy, près
Aix en Savoie, existe encore l'épitaphe de Rutilia Ursa(4l
On a autrefois copié à Narbonne les épitaphes de Cornelia
Ursa (5) et d'Usulena Ursa (6). On a trouvé : à Vienne
(Isère), une lampe romaine qui porte la marque du fabri-
cant de poterie L. Aemilius (?) Ursus (7) ; près de Mayence,
une dédicace au génie du collège de la jeunesse d'un n-
cu$ par Acutius Ursus et par Acutia Ursa (8).
(1) Matton, Dictionnaire topogr. du départ, de VAisne, p. 8.
(2) Ragut, Cartulaire dé Saint-Vincent de MAcon, p. 340 et 374.
(3) Historiae patriae monumenta ; Chartae^ tome I, col. 249.
(4) C. /. L., XII, 2476.
(5) Ibid., XII, 4747. t
(6) Ibid., XII, 5265,
(7) Ibid., XII, 5682, 53.
(8) Brambach, 1138.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICES EN - 1 U 8 . 385
Ursus fut un nom fréquent chez les chrétiens vers la fin
de l'Empire romain, et dans les siècles qui ont suivi sa
chute ; on peut citer : saint Ursus, évêque de Troyes, au
commencement du cinquième siècle; saint Ursus, évêque
d'Auxerre, vers la fin du même siècle; saint Ursus, né à
Cahors, qui devint abbé de Loches et dont Grégoire de
Tours a raconté l'histoire (1); il était contemporain du roi
Alaric et vivait sbu^^Ja domination de ce prince qui pérît,
comme on sait, à la bataille de Veuille en 507. Grégoire de
Tours raconte (2) comment, au temps du roi Sigebert (561-
575), un certain Ursus, riche habitant de Ctermont-Ferrand,
faillit être dépouillé de sa fortune par les intrigues d'un
aventurier appelé Andarchius. Andarchius avait trouvé
pour compère un pauvre diable nommé aussi Ursus qui
s'était engagé à lui donner sa fille en mariage , et il pré-
tendait contraindre le riche Ursus à exécuter cette pro-
messe.
D'Ursus est venu le gentilice Ursius dans les inscrip-
tions romaines , par exemple aux environs de Mayence (3)
et dans l'Italie méridionale (4). On peut y rattacher le nom
d'Orsay (Seine-et-Oise) et d'Orçay (Loir-et-Cher) qui seraient
d'anciens Ursiacus; ces noms de lieu ont le même sens
qu'Arcis, Arcy, Arçay, etc., ceux-ci dérivés d'un gentilice
tiré du gaulois artos « ours, » tandis qu'Orsay parait venir
d'un gentilice dérivé du latin ursus.
On ne doit pas hésiter à reconnaître l'identité du mot
gallois arth « ours, » en gaulois arto-s^ avec le premier
terme des noms d'hommes composés : 1® Arth-mael,
2* Arth-uuiu , fréquents au neuvième siècle dans les char-
tes de la Bretagne continentale que nous a conservées le
Curtulaire de Redon , S"" Arthbiu , qui s'y rencontre aussi ,
mais une fois seulement. Arth-mael = * Arto-maglo-s
(1) V«ae p&trum, ch. XVHI, K U 2; édition Arndt et Krusch, p. 733-735.
P) Hisloria Francorum, 1, IV, c. 46; édition Arndt, p. 180-182.
(3) Brambach, 1238.
(4) C. /. L., X, 6238.
25
386 LIVRE II. CHAPITRE III. { 3.
parait signifier « prince, roi des ours (1); » Arth-uuiu
« digne d'être un ours; » Arth-biu « vif comme un ours. »
On a proposé d'expliquer le premier terme de ces nom?
composés par Tirlandais art « pierre ; » il est bien plus na
turel de Texpliquer par le gallois. Le premier et le dernier
de ces deux noms composés ont été usités chez les Gallois
comme chez les Bretons. On trouve dans le Cartulairc de
Llandaf, au douzième siècle, le nom d'homme Arthtnail =
Arth-mael « roi des ours (2) » ; Artbeu = Arthbiu « vif
comme un ours » est un nom d'homme inscrit au hui-
tième ou au neuvième siècle sur une stèle funéraire du
pays de Galles (3). M. Rhys traduit comme nous les
substantifs arth et mail dans les noms d'homme composés
gallois (4).
Il y a un nom d'homme germanique dont la compa-
raison avec Arth-mael devra, ce semble, convaincre les
plus sceptiques , c'est Bern-rich « roi des ours », dont
M. Fœrstemann a réuni des exemples (5). Un exemple
français est fourni par les actes des évoques du Mans
fabriqués au neuvième siècle ; on y voit paraître les té-
moins Berna-ricus (6), Berne-richus (7) et Berne-ricus (8).
Ces personnages, créés par le même faussaire, constituent,
à côté des exemples allemands colligés par M. Fœrstemann,
un témoignage français unique, mais ce témoignage atteste
que le nom dont il s'agit était connu dans le diocèse du
Mans au neuvième siècle. Un autre nom bien plus répandu
est le nom germanique Bern-hard, littéralement « dur
comme un ours ; » il peut se comparer aux noms bretons
(1) M. Rhys, Lectures on Welsh Philology, 2* édit.,p. 369, rend par noble^
prince t hing ^ ma,el = maglos, ot on peut voir dans le même ouvrage,
p. 358 , que arth (bear) a été employé comme nom d'homme en Galles.
(2) Grammatica celtica, 2* édition, p. 114.
(3) Hûbnor, Inscripliones Britanniae Christianae, n* 57.
(4) Lectures on Welsh Philology, 2- édit., p. 358, 369.
(5) Altdeutsches Namenbuch, t. II, col. 233.
(6) Pardessus, Dtplomafa, t. I, p. 95.
(7) Ibid,, t. I, p. 98.
{8)/6td., t. I, p. 99, 127; 11,45.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTIUCE8 EN -IU8. 387
Arlh-biu « vif comme un ours, » Arth-uuiu « digne d'être
un ours. »
Le nom d'homme Arth-mael a fourni le second élément
du nom de lieu breton Ploermel (Morbihan). Ploermel
s'appelait Plebs Arihmael au neuvième siècle, comme nous
l'apprend une charte du temps (1).
Plebs Arihmael signifie « paroisse d'Arthmael , » c'est-à-
dire du « roî des ours, » comme Artiaca, sous-entendu
y//ia, signifie « ferme d'Artius, » c'est-à-dire « ferme du
fils d'Arlos, du fils de Tours, » Qi Ario-Briga, *Arto-dunum^
« château d'Artos, » c'est-à-dire d'un homme dont le nom
était le nom gaulois de l'ours.
Nous serions incomplet si nous ne disions qu'Artilius,
signalé plus haut comme dérivé d'Artos, a donné un nom
de lieu en -actis , c'est Artiliacus dans le Talou , pagus
Tellavus (2), c'est-à-dire aux environs d'Eu (Seine-Inférieure),
suivant un diplôme de Pépin le Bref pour l'abbaye de
Saint-Denis en 751 (3).
Artiliacus a pour pendant Ursiliacus en Lyonnais donné
à l'abbaye d'Ainay vers le milieu du onzième siècle (4).
^ De l'idée religieuse associée au mot Arlos. — Les animaux divins.
Une des causes qui ont dû contribuer à faire adopter à
certaines personnes dans le monde gaulois le nom d'Artos
et les noms dérivés d'Artos, est le sentiment religieux.
L'ours était considéré comme un animal divin. Chez les
Celtes , on avait divinisé l'ours et l'auroch , qui étaient les
plus redoutables animaux des forêts , et le corbeau qui ,
après la bataille, rongeait le cadavre du guerrier vaincu.
Les Germains avaient des croyances analogues. En Scan-
(1) A. de Courson, Cartulaire de Redon^ p. 20.
(^) Voyez, sur ce pagu8 , dont le nom est ordinairement écrit Tellauai
Longaon, Atlas historique de la France, p. 98.
(3) Tardif, Monuments historiques, p. 45, col. 2.
(4) Aug. Bernard, Cart, de Savigny, t. II, p. 568.
388 LIVRE II. CHAPITRE III. { 3.
dinavie , ours, biorn^ était un surnom de Thorr, dieu de la
foudre (1) , et un corbeau perchait sur chaque épaule du
grand dieu Odin (2). Dans les premiers siècles du royaume
de France des parents donnant à leurs fils les noms de
Bero « ours, » de Chramnus ou Hrabanus « corbeau, » ont
dû avoir présentes à l'esprit ces croyances religieuses.
En Irlande, le mot art = artos, au gén. airt = arti
« ours, » tombé en désuétude comme nom d'animal, sur-
vécut dans la littérature la plus ancienne comme nom de
dieu en général; on le trouve même appliqué à Jésus-
Christ (3).
En Gaule , au temps de l'empire romain , nous le recon-
naissons au féminin dans le nom And-arta = Ande-arta
d'une déesse honorée à Die (Drôme) , comme l'établissent
plusieurs inscriptions dédicatoires (4). And[e]-arta, dontle
premier terme est la particule augmentative ande, dont le
second terme est un nom d'animal divinisé, peut être com-
paré à deux noms d'homme qui devinrent noms de lieux :
Ande-matunnum et Ande^camultis . Tous deux ont pour pre-
mier terme le préfixe ande et pour second terme un nom
de divinité. Ande-^matunnum , nom de la ville de Langres
sous l'empire romtiin , est probablement une expression
abrégée pour Ande-matunno-dunum , forteresse d^Ande-
maPumnus, et le second terme de ce nom d'homme n'est
autre chose que le nom du dieu Matunus , probablement
par u long , mentionné dans une inscription romaine de la
Grande-Bretagne (5) , et employé au féminin comme cogno-
men dans une inscription romaine de Séville (6). Quant à
Andecamulus [fandus] ou Ande-oa/mulum (pour And&camulO'
(1) Qrimm, Deutsche Mythologie, 3* édit., p. 633. Simrock, H&ndbuch der
deutschen Mythologie, 5* édit., p. 239.
(2) Simrock, Handbitnh der deutschen Mythologie, 5* édit., p. 174.
(3) Glossaire de Cormac^ V Art, chez WhiUey Stokes, Three Irish glos-
saries, p. 2.
(4) C. /. L., XII, 1554-1560.
(5) Ibid., VII, 995.
(6) Ibid., II, 1209.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES QBNTILICE8 EN -IU8. 389
dunum ou pour Andecamulum praedium) (i), tout le monde
connait le nom de Camulus , un des dieux gaulois de la
guerre, qui a fourni le second terme de ce composé.
\y*artos^ nom de l'ours m&le, ou d'arkz, nom de sa
femelle , paraissent tirés deux autres noms de divinités :
i"" celui de la déesse Ârtio : un fragment de statue dé cette
divinité a été découvert dans le canton de Berne (2) ;
2"^ celui du dieu Ârtaios assimilé à Mercure : une dédicace
Mercurio Augusto Ârtaio a été trouvée à Beaucroissant
(Isère) (3).
On comprend Timportance du culte de Tours dans le
voisinage des Alpes, mais ce culte parait avoir été connu
dans le monde celtique en des régions bien éloignées de
ces montagnes.
3* Nom$ d^homme composés dont le second terme est genos : Matu^
genos, Arti-^enoSf etc.
De Tétude du mot art-o-s, qui est un des noms de Tours,
nous ne pouvons guère séparer Tétude du thème maPur- qui
est un autre nom du même animal. Maiu-s est en moyen-
irlandais Tnath^ gén. matho (4). Les dictionnaires de Tirlan-
dais moderne fournissent le composé math-ghamhain ou
math'-ghamhuiny dont le second terme veut dire « veau. »
Math-ghamhain est, à proprement parler, « le veau de Tours »,
c'est-à-dire « Tourson ». Cependant ce mot signifie « ours »
aujourd'hui. C'est l'expression qui, dans la traduction ir-
landaise de la Bible, correspond à Vursus de la Vulgate.
De Math^ghamhna, gén. sing. de mathghamhain, la notation
anglaise est aujourd'hui Mahon, c'est la seconde partie du
(1) Uinscription 1804 d*Orelli nous fait connaître les Andec&mulenaes ,
c'est-à-dire les habitants d^Ande-camulus ou Ande-camulum. Cette in-
cription a été trouvée à Rançon (Haute- Vienne).
(2) Mommsen, Inscriptiones helveticae^ 215.
(3) C. /. L.. XII, 2199. ♦
(4) Windisch, Irische Texte, t. I, p. 681, col. 2.
390 LIVRE II. CHAPITRE III. { 3.
nom de famille Mac-Mahon ; ce nom de famille , écrit en
irlandais Mac-Mathghamhna ^ veut dire « fils de Tours. »
Le principal témoignage qui atteste le culte de Tours
sous le nom de maPa-s dans le monde celtique est le nom
d'homme Matu-genos « fils de Tours. » On le lit écrit sur
une monnaie gauloise comme on peut le voir dans le der-
nier travail de M. A. de Barthélémy sur les légendes nu-
mismatiques de la Gaule (1). On a trouvé en France, tant
dans le département du Qard qu'à Narbonne, les épitaphes
de trois Matugenus (2) ; à Bordeaux, un autel dédié à Jupi-
ter par les soins d'un quatrième Matugenus (3). On con-
serve au Musée Britannique quelques vases qui portent la
marque du potier Matugenus (4). De ce nom gaulois dérive
le gentilice Matugenius dont le féminin Matiigenia nous a été
conservé par une inscription de Soleure en Suisse (5) et
dont la forme masculine apparaît avec un c au lieu d'un ^ :
Matuceni au génitif, dans une inscription trouvée à Saint-
Benézet-de-Cheyran (Gard) (6).
Les composés asyntactiques dont le second terme est
-genos expriment une filiation mythologique ; ils s'opposent
aux composés syntactiques dont le premier terme est un
nom d'homme au génitif et dont le second terme est eno-s :
exemple, Druti-cnos « fils de Drutus, » Dannotali-cnos « fils
de Dannotalos , » Toutissi-cnos « fils de Toutissos , » Arti-
cnos cité p. 382, etc. Ces derniers noms expriment la
relation juridique de fils à père; tandis que les noms dont
le second terme est -genos ont un sens religieux : tel est
dans une inscription de Rome (7) Totati-gen[u]s, «fils deTo-
tatis, » ailleurs Toutatis, dieu assimilé à Mars, le Tentâtes
de Lucain. Totati-genus est le nom d'un soldat gaulois au
(1) Revue celtique, t. IX, p. 33, col. 1.
(2) C. /. t., XII, 2865, 2880, 4986.
(3) JuUian, Inscriptions romaines de Bordeaux^ p. 25.
(4) C. /. L., VII, 1334, 34 ; 1336, 683.
(5) Mommsen, Inscr, helveticàe, 231.
(6) C. /. L., XII, 3935.
(7) Ibid., VI, 2407.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICE8 EN - lUS. 391
service de Tempire romain. Camulo-genus , chef aulerque
d'Evreux, qui prend les armes contre César en Tan 52
avant J.-C, est étymologiquement un fils du dieu Camu-
los. Divo-genus , Divo-gena dans des inscriptions de Bor-
deaux (1), variantes dialectales d'un plus régulier *Dévo-
genos, * Dévo-gena, signifient « fils » et « fille de Dieu ».
Le grec a des composés analogues, Aio-y<vt)ç, *Ep[jto-Y^vT)ç ,
« fils de Zeus », « fils d'Hermès ».
Des noms gaulois dont le second terme est genos et dont
le premier terme est un nom de divinité , on peut rappro-
cher les noms gaulois en genos dont le premier terme est
le nom d'un être abstrait : Rectu-genus (2) « fils du droit »
dans deux inscriptions romaines d'Espagne (3), Boduogenus
« fils de la volonté, du bon plaisir », peut-être « du des-
tin, » dans une inscription romaine de Grande-Bretagne (4) ;
Litu-genus « fils de la fête » dans un graffito romain de
Grande-Bretagne (5). et dans des marques de potier du
même pays (6); au féminin Litu-gena « fille de la fête »
oogiiomen de femmes dans plusieurs inscriptions romaines
du Xorique (7). Litugena faisait au génitif Litugenes ou,
avec une orthographe moins exacte , Litogenes : c'était le
nom d'une fabricante de lampes en terre dont on a trouvé
des spécimens dans plusieurs localités de l'Italie septen-
trionale (8). Ce nom antique a persisté en Grande-Bretagne
après la chute de l'empire romain; on signale encore, dans
le comté de Pembroke , l'épitaphe du fils de Lito-genus ,
gravée entre les années 500 et 700 de notre ère (9).
Les chartes du moyen âge gallois et breton nous offrent
des exemples de noms d'hommes formés de cette façon :
(1) Jullian, p. 129, 27.
(2) Rextu-genos, dans rinscription de la figurine de Caudebec.
(3) C. /. L., II. 2402. 2907.
(4) Ibid., VII. 1202.
(5) Ibid., VII, 1256.
(6)fMd., VII, 1331, 66; 1336, 563.
(7) Ibid., III. 5066, 5099. 5269. 5430.
(8)/6id.. V, 8114, 81.
(9) Hûbner. Inscriptiones BHtanniae ChHsUanae. n* 98.
392 LIVRE II. CHAPITRE III. § S.
Anaugen = * Anavo-genos « fils de la musique et de la
poésie » dans le Liber Landavensis , manuscrit du pays de
Galles, et dans le Cartulaire de Redon ^ qui est breton;
Cat-gen = * Catu-genos dans le Liber Landavensis^ veut dire
« fils de la bataille; » Bud-ien = *Bodi-genos, dans le Car-
tulaire de Redon , signifie « fils de la victoire. » * Bodi-
genos exprime une idée analogue au sens de Bodiacos qui
veut dire « celui qui appartient à la victoire, » « celui qui
est en quelque sorte membre de la famille dont la victoire
personnifiée est le chef : » le suffixe celtique -acus a une valeur
analogue à celle du suffixe latin -anus^ et celui-ci, dans les
noms d*hommes , exprime la filiation naturelle de Tenfant
adoptif par opposition à sa filiation légale : Octavianus est
celui qui, de par la nature, a appartenu à Octavius et auquel
une fiction légale adonné un père nouveau. Bodiacus forme
le second terme du nom d'un peuple de Galatie, les Teuto-
bodi-aci (1) ; ce nom peut être rendu par : « fils ou protégés
de la divinité qui préside aux victoires sur les peuples. »
La paternité mythologique chez les Celtes a été attribuée
à un minéral : Hoiarn-gen = *Esarno-genos « fils du fer »,
Dubr-ien = *Dubro-genos « fils de Teau » dans le Cartulaire
de Redon. En regard de ce nom aquatique conservé au
moyen âge on pourrait mettre le nom plus gai de Medu-
genus « fils de l'hydromel, » porté par un Gaulois d'Espagne
sous l'empire romain (2). Mais Dubr-ien = *Dubro-genos
« fils de l'eau » s'explique par la croyance à la divinité des
rivières.
Cette croyance explique aussi le vers où Properce, par-
lant du chef gaulois Virdumaros tué par le consul M. Clau-
dius Marcellus Tan 222 av. J.-C, dit que Virdumaros
prétendait compter le Rhin parmi ses ancêtres :
...genus hic Rheno jactabat ab ipso (3).
(1) Pline, livre V, { U6.
C2) C. /. L., II, 162.
(3) Livre V, élégie 10, v. 41.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILIGE8 EN -IU8. 393
Cela veut dire qu'il était flls de Reno-genus. Il s'appelait
Virdumaros *Renogeni-cnos. Le Rhin (c'est-à-dire non seu-
lement le grand fleuve, mais tout amas d'eau, rian^ en ir-
landais « la mer ») était dieu : on pouvait s'appeler par
piété Renos dans le monde celtique, comme Mercurius dans
le monde romain. Parmi les inscriptions romaines de Pa-
doue se trouve le nom d'une femme appelée Isellia Rena (1).
Ainsi Renos, nom de fleuve, était devenu nom d'homme.
De Renos, nom d'homme, on a tiré, en abrégeant Ve et
en doublant l'n, le gentilice Rennius. Les Gaulois ont porté
ce gentilice dans diverses parties de l'empire romain. On
le rencontre par exemple à Aquilée (2), à Adria (3), à
Oderzo (4), dans l'Italie du Nord ; à Nonnberg, près de
Salzburg en Autriche (5). On le trouve enfin en Gaule, à
Narbonne (6).
Il a donné naissance au nom de lieu * Renniacus très ré-
pandu en France. On doit reconnaître d'anciens Renniacus
dans les nombreux — Regney, Regny , Reignac, Reignat ,
Reigny, — Rignac. Rigneux, Rigné, Rigny — que la France
possède. Les uns ont conservé Ve de la première syl-
labe, les autres l'ont assimilé à la syllabe suivante. Dans la
première catégorie sont : Regney (Vosges), Regnié (Rhône),
Regniactis au dixième siècle (7); Regny (Aisne), appelé Re-
gni en 1110, et Reini en 1143 (8); et six autres Regny (Cher,
Isère, Loire), sept Reignac (Charente, Corrèze, Gironde,
Indre-et-Loire , Lot-et-Garonne) , deux Reignat (Puy-de-
Dôme), un Reigny (Cher), total dix-neuf. La seconde caté-
gorie comprend trente-trois localités : Rignac (Aveyron) ,
encore appelé à l'ablatif de Regniaoo au onzième siè-
(1) C. /. L., V, 2967.
(2) lbid.,V, 8444.
(3) Ibid., V, 2359.
(4) Ibid., V, 19T7.
(5) Ibid., III, 5554.
(6) Ibid,, XII, 5967. — Comparez le nom d'homme Rodanus , Rhodanus,
dans deux inscriptions de la Qanle cisalpine (C. J. L.» V, 3677, 5559),
(7) Ragut, C&rt, de Saint-Vincent de Mâcon, p. 59.
(S) Matton, Dictionn. topogr, du départ, de l'Aisne, p. 228.
394 LIVRE II. CHAPITRE III. g 3.
cle (1) , et huit autres Rignac (Cantal , Corrèze, Dordogne.
Gers, lUe-et-Vilaine, Lot), Rigné (Maine-et-Loire) qui
s'appelait déjà ainsi vers 1100 (2), Rigney (Doubs), deux
Rigneu dans TAin et dix-neuf Rigny , dont il est inutile
d'énumérer les départements , et enfin Rinhac (Lot) ; cela
donne un total de cinquante-deux Renniacus, noms de
lieux dérivés du gentilice Rennius, dérivé lui-même de
Renus et ayant pour point de départ la croyance à la divi-
nité du grand fleuve, comme *Reno-genos, fils du Rhin,
nom du père de Virdumaros.
Rennius, gentilice en Gaule, est le résultat d'un procède
de formation grammaticale analogue à celui qui, en Grande-
Bretagne , a donné naissance au cognomen Bslismius (3;.
Belismius, surnom d'une personne dans une inscription
romaine de Caerleon en Galles, est dérivé de Belisama qui,
en Grande-Bretagne , est l'embouchure d'une rivière prés
de Liverpool, tandis qu'à Saint-Bertrand de Comminges,
Belisama est une Minerve (4).
De *Reno-genos on peut rapprocher Eni-genus, nom du
père d'un certain Secundus, qui près de Vence fit élever
une stèle funéraire à ses enfants (5). Eni-genus veut dire
fils de TEnus ou mieux de IVEnus , qui est Tlnn (6;. Du
thème Eno- on a peut-être tiré le gentilice Enius conservé
par une inscription des environs de Vence (7) et qu'on croit
reconnaître dans la marque de potier où le nom du fabri-
cant est écrit au génitif Q. Eni (8) ; cf. Eni-boudius, « vain-
(1) G. Desjardins, C&rtulaire de ConqueSt p. 3, 4.
(2) Port, Dictionn. de Mitine-et-Loire^ t. III, p. 257.
(3) C. /. L., VII, 97.
(4) OreUi, 1431. Cf. Ptolémée, 1. II, c. 3, { 2, éd. Didot, t. I, p. 85.
(5) C. /. L., XII, 33.
(6) Enignus, nom pérégrin dans trois inscriptions de la Pannonie supé-
rieure (C. /. L. , III, 3784, 3793, 3871), paraît ne différer d'Eni-genus que
par une variante orthographique. Enicenius pour Enigenius, cognomen
conservé par une inscription d'Esté, en Italie (C. /. L., V, 2620), est dérivé
d'Eni-genus.
(7) C. /. L., XII, 17.
(8) Ibid,, XII, 5686, 329.
NOMS DE UEU IDENTIQUES A DES GENTILICES EN -lUS. 395
queur de Tlnn », gentilice connu par deux inscriptions des
environs de Nice (1). L'Inn est un affluent du Danube.
La croyance à la divinité de Teau et du fer, qui a donné
naissance à des noms comme * Dubro-genos « fils de l'eau »,
*Esarno-genos « fils du fer », a eu son effet dans Tordre
des choses juridiques. Le fer, c'est-à-dire l'épée, était le
juge des contestations, non seulement quand les parties
recouraient aux armes, mais aussi quand le serment d'une
des parties décidait du gain du procès : les Irlandais
juraient sur leur épée et croyaient que l'épée se levait
elle-même pour frapper le parjure (2). L'épreuve de l'eau
bouillante était usitée dans le droit irlandais comme dans
celui des Germains; des deux côtés on l'appelait l'épreuve
du chaudron , caire en irlandais (3) , (leneum dans la loi
salique (4); mais ce n'était pas le chaudron, c'était l'eau
qui, en brûlant le coupable, faisait triompher la justice.
Le Rhin, en qualité de Dieu, était le juge des femmes
mariées dont les maris suspectaient la fidélité ; il englou-
tissait, disait-on, l'enfant adultérin qui., couché sur un
bouclier, était exposé aux hasards des flots par un mari
soupçonneux; l'enfant légitime surnageait.
Un poète grec anonyme a chanté cette épreuve juridi-
que : il peint les inquiétudes de la mère qui, après les dou-
leurs de l'enfantement, ressent des angoisses nouvelles et
attend toute tremblante le jugement des flots agités. Si l'on
prenait cet auteur à la lettre , tous les enfants des Celtes
auraient été soumis à cette redoutable épreuve (5) ; il est
évident qu'il ne faut pas l'entendre ainsi. En règle géné-
rale , chez les Celtes comme chez les Germains, on ne re-
courait aux ordalies, au jugement de Dieu, que lorsqu'il y
avait contestation et que les autres preuves faisaient dé-
(1) C. /. L., y, 7865, 7866.
(2) Revue celtique, t. IX, p. 144.
(3) Ancient Uws of Ireland, t. I, p. 194, 1. 23; 198, 1. 19.
(4) Ad inium ambulat, Loi salique, XIV, 2, cod. 2, édition Hes^çls, col. 83.
(^) ... xal oO icàpoc elal ToxS)ec
396 LIVRE II. CHAPITRE III. | 3.
faut : il faudrait connaître bien mal le cœur humain pour
admettre qu'un mari croyant être père aurait exposé son
enfant au danger de périr dans les flots (1).
Il serait intéressant de savoir à quelle date Tépigramme
grecque dont nous parlons remonte. Nous l'ignorons; eUe
est probablement la source où a puisé l'empereur Julien
quand il parle de cet usage dans son second discours à
l'empereur Constance et surtout dans une lettre au philo-
sophe Maxime.
Voici comment Julien s'exprime dans son discours :
« On dit que chez les Celtes un fleuve est- le juge in-
» corruptible de la légitimité des enfants ; jamais les pleurs
» des mères n'obtiennent de lui qu'il voile et cache leur
» faute; les pères attendent sans crainte la sentence qu'il
» prononce sur les femmes et sur les enfants; c'est un juge
» véridique et qui ne ment pas (2). » Julien ne dit pas ici
le nom du fleuve dont il s'agit , il est plus explicite dans
sa lettre au philosophe Maxime : « On ne peut, » écri-
vait-il, « accuser le Rhin d'injustice envers les Celtes, car
» il engloutit dans ses flots tourbillonnants les bâtards et
» punit ainsi la profanation du lit conjugal; mais quand il
» reconnaît qu'un enfant est légitime, il le tient élevé au-
» dessus des eaux et le ramène entre les mains de la mère
» tremblante ; en le lui rendant plein de vie il est en quel-
» que sorte le témoin incorruptible de la vertu et de l'hou-
» neur de l'épouse (3). »
Des ijoms de rivières divinisées , on peut rapprocher le
mot gaulois nemeton qui signifiait « temple », ou, plus
exactement, « espace de terrain consacré à un ou plusieurs
dieux. » On disait Reno-genos « fils du Rhin, » on disait
aussi Nemeto-genos , « fils du temple. »
(1) AnthologitL, livre IX, ép. 125; éd. Didot, t. U, p. 24.
(2) Oratio II, éd. Toubner-Hortlein, p. 104-105.
(3) Edit. Teubner-HcrUein, p. 495 ; Tidéo de la mare tremblante» Tpcftouoii,
est évidemment empruntée par Julien à l'épigramme dont l'auteur a écrit
Tpotiiouaou
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES QENTILIGE8 EN -lUH. 397
Il y eut à Bordeaux , sous Tempîre romain , une esclave
de la cité, ancilla publica^ qui s'appelait Nemeto-gena
« fille du temple (i). » On a trouvé dans la même ville
Tépitaphe d'une autre femme qui portait le môme nom,
mais avec une légère modification dans Torthographe , le
second terme est écrit avec un c au lieu d'un g : Nemeto-
cena(2). Cette particularité orthographique se remarque avec
une autre, qui est le doublement de Tn, dans le nom le
plus ancien d'Arras, Nemeto-cenna pour Nemeto-gena^ formule
abrégée probablement pour Neineto-geno-bona (3). Le dou-
blement de Tn de gêna se rencontre ailleurs, par exemple
dans Nitio-genna, surnom d'une femme qui fit à la Victoire
une dédicace conservée au musée de Lausanne (4). G&na
a été altéré en cenna , non seulement dans Nemeto-cenna ,
mais aussi dans Sumelo-cenna , nom d'une station romaine
inscrite dans la carte de Peutinger. Sumelo-cenna paraît
avoir occupé remplacement de la ville moderne de Rotten-
burg et donna son nom au territoire appelé dans une ins-
cription romaine salttÀS sumelo-cennensis (5). Samelocenna
doit probablement son nom à un personnage appelé Su-
melo-genus ; mais le premier terme de ce nom , probable-
ment nom de divinité, reste obscur, tandis qu'on peut
expliquer Nemeto-gena. qui signifie, ce semble, « fille du
temple personnifié et divinisé. »
Quelquefois le père que l'imagination celtique donne à
un homme est un végétal : Guidgen = *Vidu-genos « fil%
de l'arbre , Guern-gen = * Verno-genos « fils de l'aune , »
dans le Liber LandaA)ensis ; Der-gen = * Dervo-genos « fils
(1) JuUian, Inscriptions romaines de Bordeaux^ t. I, p. 194.
(î) /6W.. p. 366.
(3) Nemetocenna = Nemeto-gena , est le nom d'Arras chez Hirtius, De
beilo gallico, 1. VIII, c. 46, § 23; c. 52, § 2. La variante Nemetacus^ dans le
milliaire de Tongres,la Table de Peutinger et 17linéraire d'Antonin, pourrait
bien n'être qu'une traduction de Nemetocenna, et signifier fils de Nemetos.
Nemetacus serait, comme Nemetocenna ^ un nom d'homme employé avec
sens de nom de lieu.
(4) C. J. L., XII, 162.
(5) Brambach, 1633; cf. Sumeli, C. /. L., XII, 1351.
1
398 LlVRE II. CHAPITRE III. g 3.
du chêne » dans le Cartulaire de Redon. Der-gen, notation
du neuvième siècle, est devenu plus tard Der-ien qu'on
trouve au treizième siècle dans une charte de Beauport.
Aujourd'hui on écrit Derrien , c'est la dernière partie du
nom de La Roche-Derrien (Côtes-du-Nord). Ce nom de lieu
veut dire « La Roche du fils du chêne. »
Enfin le père mythique peut être un animal divinisé.
Un prêtre du nom de Con-gen = * Cuno-genos « fils du
chien » est témoin dans une charte du neuvième siècle 1
en Bretagne. A la même catégorie appartiennent chez le>
Celtes contemporains de Tempire romain :
1** *Uro-genos « fils de Tauroch » (ûrus), nécessaire pour
expliquer le gentilice Uro-genius dans une épitaphe trouvée
à Lyon (2) et le nom c^ vétéran Uro-geno-nertus « celui
qui a la force du fils de Tauroch, » dont l'épitaphe a été
découverte à Lyon comme la précédente (3) ;
2** Branno-genos « fils du corbeau, » nom d'homme bar-
bare nécessaire pour expliquer le terme géographique Bran-
no-genium qui désigne dans V Itinéraire d'Antonin une station
romaine de Grande-Bretagne. Branno-genium^ sous-entendu
praedium , est le neutre d'un gentilice romain Branno-
genius , dérivé de Branno-genos ;
3** Matu-genos « fils de Tours , » synonyme antique , —
mais avec sens mythologique — du moderne Mac-Mahou
(p. 289-390), qui désigne une filiation réelle et veut dire fils
d'un homme appelé Mahon ou l'ours ;
4* Un autre synonyme antique de Mac Mahon est un
mot dont nous n'avons rien dit encore, *Arto-genos, ou,
avec une légère variante, Arti-genos qui explique le nom,
Arti-geni, d'un endroit où l'abbaye de Saint-Victor de Mar-
seille avait une colonica au commencement du neuvième
siècle (4). Artigeni, sous-entendu fundi, est un domaine formé
(1) A. de Gourson, Cartulaire de Redon, p. 25.
(2) Boissieu, p. 193.
(3) Ibid,, p. 330.
(4) Guérard, C&rt. de $9int'Victor de Marseille, t. II, p. 641.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICES EN -lUS. 399
par la réunion de plusieurs fonds de terre dont le plus an-
cien propriétaire connu s'appelait Arto-genos ou Arti-genos
« Gis de Tours, » de Tours divinisé. Il ne faut pas confon-
dre ce nom avec Arti-cnos , qui veut dire fils d'un homme
appelé Artos ou Tours (p. 382).
4° Les noms propres d'hommes identiques à ceux d'animaux divi-
nisés : UrO'S, Branno-s, Matus et leurs dérivés.
Le nom d'homme Arto-s « ours » était adopté sous Tin-
fluence d'une idée religieuse analogue à celle qui a fait créer
le nom d'Artigenos. Les noms d'homme Uros « auroch, »
Brannos « corbeau, » parallèles à Uro-genos et à Branno-
genos s'expliquent de même par un sentiment religieux.
On a trouvé à Bordeaux Tépitaphe de Julia Uri fllia (1);
Uro-maguSy « champ d'Uros, » est le nom probable d'une
station romaine de Suisse (2).
D'UrO'S on a tiré un gentilice Urius\ je n'en connais pas
d'exemple dans les inscriptions; mais son existence est
prouvée par le nom de lieu dérivé Uriaeus dans une charte
de Louis VI en 1113 (3), c'est aujourd'hui Ury (Seine-
et-Marne). L'w du latin se prononce u en français parce
qu'il était long : telle est la quantité d'urus :
Silvestres uri assidue capraeque sequaces
lUudunt (4).
Quaesitas ad sacra boves Junonis, et uris
Imparibus ductos alta ad donaria currus (5).
C'est le nom d'homme Brânos par a long et simple n ,
variante de branno-s « corbeau , » par a bref et n double ,
qui explique le terme géographique Brano-dunum, nom
(1) Jullian, Inscriptions romaines de Bordeaux, p. 351.
(2) C. /. L., XII, p. 21.
(3) Lastoyrio, Carf. de Paris, p. 188.
(4) Virgile, Géorgiques, II, 373-374.
(5) Virgile, i6id., III, 532-533.
400 LIVRE II. CHAPITRE III. g 3.
d'une localité de Grande-Bretagne, où dans les derniers
temps de l'empire romain les cavaliers dalmates tenaient
garnison (1). La villa Brandono^ d'une charte de l'an 1,000
ou environ (2) , est un ancien Brano^dunum ou Branno-
dunum; c'est aujourd'hui Brandon (Saône-et-Loire). Braine
(Aisne) appelé Braina par Flodoard au dixième siècle
dans son histoire de l'église de Reims, est une an-
cienne villa Brana ainsi nommée à cause d'un ancien pro-
priétaire Brfinos. On retrouve le double n chez César (3;,
dans le surnom des -rfuterct Branno-vices où Branno- est un
nom d'homme , comme Eburo- dans le surnom des Aulerci
Eburo-vices chez le même écrivain. On doit reconnaître
Brannos dans le nom d'homme Bran « corbeau » fréquent
au neuvième siècle dans le Cartulaire de Redon, De Bran-
nos ou de Brânos est venu un gentilice *Brannius ou
*Brânius, d'où le dérivé Braniacus qui, dans un pouillé
du onzième siècle, désigne Bragny-en-Charolais (Saône-el-
Loire) (4).
De matU'S « ours » employé comme nom d'homme, nous
n'avons pas trouvé d'exemple, mais de ce mot viennent les
cognomina dérivés primaires : 1** Matuus et Matua à Bor-
deaux (5) ; 2* Matucus en Grande-Bretagne (6) d'où Matuco
et Matuccius. Matuco est un cognomen qu'on trouve en
Norique (7). Matuco, au génitif Matuconis , a donné nais-
sance au gentilice Matuconius dans une inscription de
Castellane (Alpes-Maritimes) (8). Matucius, autre dérivé de
Matucus, est un gentilice qu'une inscription de Nice nous
a conservé (9). Ces noms complètent ce que peut nous
(1) Notitia occidentis, c. 25, | 4; édit. Bœcking, t. II, p. 81.
(2) Ragut,'CaW. de Saint'Vincent de M&corif p. 225.
(3) De bello gallico, 1. VII, c. 75, i 7.
(4) Aug. Bernard, Car(. de S&vigny^ t. Il, p. 1052, 1109.
(5) JuUian, Inscriptions romaines de Bordeaux, t. I, p. 287-288.
(6) C. /. L., VII, 1336, 682.
(7) Ibid,, III. 5624.
(8) ibtd., XII, 66.
(9) /M4., V, 7923, p. 925.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICE8 EN -IU8. 401
apprendre du culte de Tours chez les Gaulois Tétude du
thème arto- et ses dérivés.
^ ObiecUon tirée de la phonétique : ar notation d*r voyeUê.
On ne s'est pas arrêté dans cet article à une difficulté
phonétique : le nom indo-européen de Tours est *rft-^-5
avec r voyelle initiale dont la résonnance produit en grec
un a, en latin un u (ou un o) antécédent : (ïpxToç, ursus.
Ordinairement cette voyelle r produit en celtique r con-
sonne avec un e ou un i subséquent : on devrait donc, ce
semble, avoir ici rectos, ou ricto-s] or ici Vr voyelle pro-
duit r consonne avec une voyelle antécédente a identique
à celle du grec.
Mais ce phénomène n'est pas isolé en celtique. Compa-
rez au latin mortuosj d*une racine réduite mr avec la
voyelle brève r, Tirlandais marb , le breton marv « mort. »
Dans rctos « ours » comme dans mrtvos « mort » IV voyelle
est suivi de plusieurs consonnes, il est devenu ar au lieu
de re ou ri; la voyelle produite par la résonnance de IV
dans ces mots celtiques est la même que la voyelle pro-
duite par la résonnance d'n voyelle suivi d'une consonne,
par exemple iaouank « jeune, » en breton = yovnkos.
Atteia. Ateia dans une charte de Tannée 907 , concer-
nant Tabbaye de Saint-Martin de Tours, désigne Athée (In-
dre-et-Loire) (1). Ateia ^ dans une charte du douzième siè-
cle (2); est aujourd'hui Athée (Mayenne). On trouve aussi
ce nom au pluriel : Ateias dans des chartes, en 877 et
en 880 ; ces deux mentions s'appliquent à deux localités
différentes, Tune du département de TYonne, Tautre de la
Côte-d'Or; la première concerne Athée, commune de Ton-
nerre (3), la seconde est Athée près d'Auxonne (4). Aties ^
(1) Habille, La pancarte noire, p. 218; cf. p. 183.
(2) Léon Maitre, Dict, topogr. du départ, de la Afaj/enne, p. 6. '
(3) Qnantin, Dictionnaire topogr&phique du département de l'Yonne, p. 5.
(4) (Hmier, Nomenclature, p. 13, n* 46.
26
402 LIVRE II. CHAPITRE III. | 3.
1131, aujourd'hui Athies (Aisne) (1), semble n'être qu'une
autre notation d'Ateias. Aieias lui-môme doit s'être prononcé
primitivement comme Ateia avec un t double, Audm^
Atuia, autrement cette dentale ne subsisterait pas aujour-
d'hui. Ateia est donc la forme féminine d'un gentilice
Atteins.
Comme exemple de l'orthographe par double t nous cite
rons deux épitaphes trouvées à Rome , l'une est celle <le
C. Atteins Antiochus, l'autre, celle d'Atteia Fortunate %
Mais l'orthographe ordinaire est Ateius par un seul t. De
la gens Ateia, le membre le plus connu est le jurisconsulte
C. Ateius Capito, consul suffectus l'an 5 après Jésus-Christ,
et mort en 22 ; il laissa un ouvrage de droit intitulé Conjecr
tanea qui contenait au moins neuf livres.
Barbâria. Par une charte dont la date se place en 971
ou en 972 , il fut fait donation à l'abbaye de Cluny d'une
vigne in Barbâria (3).
Le gentilice Barbarius, dont Barbâria est le féminin, est
rare, mais s'est rencontré en Italie et en France. Une
inscription ti'Avella, en Campanie , nous fait connaître les
noms de Barbarius Pompeianus v[ir] c[larissimus] cons[ula-
risl Kampaniae (4). On a trouvé à Valence, en France, l'épi-
taphe que M. Barbarius Perpetuus fit graver pour sa
femme (5).
l^' Itinéraire dCAntonin mentionne un nom de lieu dérivé
de ce gentilice , c'est Barbariana : ainsi s'appellent deux
stations romaines d'Espagne. A l'aide du même suffixe a
été formé le nom Barbarianus, noté Barbairanum en 1185,
d'une ferme appelée aujourd'hui Barbayrac (Hérault) (6).
(1) Matton, Dict, topogr, du départ, de l'Aisne^ p. 10.
(2) C. l. L., VI, 12573, 12577.
(3) Bruel, Recueil des chartes de Vabbaye de Cluny^ t. II, p. 386.
(4) C. /. L., X, 1199. %
(5) Ibid., XII, 1756.
(6) E. Thomas, Dict, topogr. du départ, de VHéraulty p. 13.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICES EN -lUS. 403
Le sufiBxe -act« est ordinairement préféré en France.
Une terra de Barbariaco est mentionnée, au neuvième
siècle, dans une charte de Tabbaye de Saint- Vincent de
Mâcon (1). En 992, il fut fait don, à Tabbaye de Cluny,
d un champ et d'une vigne in villa Barberiacense ; cette
ville était située au pays de Chalon-sur-Saône, in pago
Cabilonense , dans le territoire de Ballore (Saône-et-Loire) ,
in fine Baloronense (2). Suivant la chronique de Saint-Beni-
gne de Dijon , qui date du milieu du onzième siècle , le
roi Gontran, Tan 23 de son règne, soit en 587, aurait donné
à cette abbaye des biens situés dans plusieurs localités
voisines de Dijon, notamment in Barbiriaco (3), il s'agit
de Barbirey (Côte-d'Or) (4). Vers Tannée 1100, l'église de
Barberey (Savoie) est appelée ecclesia de Barbariaco dans
une nomenclature des bénéfices qui dépendaient de l'évô-
ché de Grenoble (5). Barberey (Aube) est nommé Barbaria-
cum dans deux documents du douzième siècle , Barberi
dans un autre du môme siècle (6).
Catussia. C'est ainsi que doit être restituée l'ortho-
graphe antique du nom d'un village du département de
l'Aube qui s'écrit aujourd'hui Chaource et qu'on trouve
écrit : Cad/ascia = Cadussia dans la copie d'une charte de
l'année 896 , Cadusia avec une s simple pour une s dou-
ble dans la copie d'une charte de l'année 878, Cadmsia
en 1117 (7). Dans Chaource, -i^ce = -ssia offre la môme
dissimilation que Marseille de Massilia.
Catussia est la forme féminine d'un gentilice Catussius
(1) Ragnt, Cartulaire de Saint-Vincent de Maçons p. 243.
(2) Bruei, Recueil des chartes de l'abbaye de Cluny^ t. III, p. 147.
(3) Migne, Patrologia latina^ t. CLXII, col. 768; édit. Bougaud et Garnier,
p. 29.
(4) Gamier, Nomenclature, p. 57, n* 246.
(5) Cartulaire de Saint-Hugues de Grenoble, p. 187.
(6) Boutiot et Socard, Dict, lopogr, du département de VAube, p. 12.
(7) Boutiot et Socard , Dictionn. topogr, du départ, de l'Aube , p. 36.
Cf. H. d'A. de J., Voyage paléogr, dans le dép, de l'Aubej p, 67, 70.
404 LIVRE II. CHAPITRE! III. | 3.
dont une variante par s simple est conservée par une ins-
cription de Pola, en Istrie (1). Catussius est dérivé du nom
d'homme gaulois Catussa que des citoyens romains , d'ori-
gine gauloise, gardèrent intact en en faisant un cognomen,
tandis que d'autres en tirèrent un gentilice. Nous avons
encore deux exemples du cognomen Catussa. Ils ont été re-
cueillis, l'un en France, à Lyon, Tautre dans l'empire
d'Autriche, à Seckau en Styrie. A Lyon, Pompeius Ca-
tussa, originaire de Besançon, cives sequanus, exerçait le
métier de tector^ c'est-à-dire couvrait les murs d'enduits en
stuc , quand il perdit sa femme à laquelle il fit élever un
monument funèbre (2). A Seckau, on a trouvé l'épitaphe de
Vibius Catussa (3). Le même nom^ écrit Cadussa, suivant la
prononciation du neuvième siècle , dans un diplôme du
roi Charles le Chauve en 867, y désigne un village du dé-
partement de l'Aisne , aujourd'hui écrit Chaource (4).
Catussa est dérivé du gaulois catu-s c< bataille. » Catns
est inscrit en grandes capitales sur un des boucliere gau-
lois de l'arc de triomphe d'Orange ; c'est là probablement
un nom d'homme. On retrouve ce substantif dans des
composés où il est premier terme, tels sont : Caturslogi^
« troupes de ^bataille » nom d'un peuple de la Gaule
Belgique écrit Cato-slugi chez Pline (5), Catu-riges, « rois
de la bataille, » nom de peuple de la Gaule du sud-est qui
persiste dans celui de Chorges (Hautes-Alpes) ; c'était sous
l'empire romain une dépendance de la cité d'Embrun;
Catu-[v]ellauni ce les bons dans la bataille » ancienne forme
du nom de peuple qui est devenu Catalauni au moyen
âge, comme l'a établi M. Longnon; c'est aujourd'hui Chà-
lons-sur-Marne , et la conquête belge , vers l'an 200 avant
notre ère, a porté en Grande Bretagne le nom des Ca^
(Ij C. /. L. 8uppU italicA, fasc. 1, n* 1096.
(2) Boissieu, Inscriptions de Lyon, p. 429. OreUi, n* 4803.
(3) C. /. L., m, 5392.
(4) Tardif, Monuments historiques, p. 129, col. 1.
(5) Histoire naturelle^ 1. IV, ( 106.
NOMS DE tilEU IDENTIQUES A DES GENTILICES EN -lUS. 405
vellc^uni. On peut citer aussi Catu-volcus, nom d'un roi des
Eburons chez César (1). Enfin le nom de Caen, Cadum^
Cadomus au onzième siècle (2), parait être la forme mo-
derne d*un antique Catu-magus.
Du thème catu- sont venus plusieurs dérivés ; l'un est le
cognomen Catuso. Il existe à Genève une dédicace à Apol-
lon par M. Aufustius Catuso (3). Le suflBxe est noté par ^
simple dans ce monument comme dans Tinscription de Pola
déjà citée qui est Tépitaphe de Q. Catusius Severianus ,
marchand d*oiigine gauloise, civigallo^ negotianti^ a écrit le
lapicide. De Catusius est venu Catusiacus^ qui est dans
V Itinéraire d'Antcmin le nom d'une station située sur la
route de Bavay à Reims (4).
Catusius, comme Catussius, est un dérivé secondaire de
ca*t«-, il suppose un dérivé antérieur contenant un suiBBlxe
sigmatique auquel on a ultérieurement ajouté le sufl&xe
-îo-, caractéristique de la plupart des gentilices romains. En
ajoutant immédiatement le suffise -to- au thème catur- , on
en a tiré le gentilice Catu-ius ; nous n'avons pas rencon-
tré d'exemple de ce gentilice dans les inscriptions ni dans
les auteurs du temps de l'empire romain, mais il est néces-
saire pour expliquer le nom de lieu CaPuiaca d'une station
située sur la route de Milan à Arles dans VltirUraire d'Àn-
ionin ; l'emplacement de Catuiaca serait dans les Basses-
Alpes suivant M. Longnon (5).* Catuius, perdu comme nom
d'homme, se reconnaît comme nom de lieu au cas indirect
Cadugio , dans le testament de Vigile , évêque d'Auxerre
à la fin du septième siècle ; c'est aujourd'hui Chéu
(Yonne) (6).
(1) De bello g&llico, V, 24, 26 ; VI, 31.
(2) Hippeau, Dict. topogr. du dépa,rt. du Calvados, p. 50.
(3) C. /. L., XII, 2585. -
(4) Itinéraire d'Antonin, p. 381, 1. 3.
(5) Atlas historique de la France, p. 26; cf. Itinéraire d'Antonin, p. 343,
1.2.
(6) Pardessus, Diplomate, U, J53. ûuantin, Dict, top, de l'Yonne, p. 35.
406 LIVRE II. CHAPITRE lU. { 3.
Cepia ou Cipia. Une localité appelée villa Cipia en 848 .
Cepia en 1035, Cechia^ 1052-1082, est aujourd'hui Seiches
(Maine-et-Loire) , comme Ta reconnu M . Port (1) . Ce nom de lie « i
est la forme féminine d'un gentilice romain qui a été si-
gnalé dans plusieurs inscriptions. On le trouve écrit ave»
un « à la première syllabe dans les formes masculines Ce-
pius et Ceppius en Campanie (2) ; et dans la forme féminine
Cepia en Afrique (3). On le voit avec un i dans la pre-
mière syllabe : Cipius au masculin à Rome (4), à Ostie (5 ,
en Grande-Bretagne (6) ; Cipia au féminin , à Padoue (7, .
et à Vérone (8), etc.
Il y a une variante par ae : Caepius, Caepia, en Campa-
nie (9); Caepius à Ostie (10). Antérieurement à ce gentilice,
le cognomen Caepio a existé dans la gens Servilia. Cn. Ser-
vilius Caepio fut consul en 203 avant J.-C. Un autre per-
sonnage qui porte exactement les mômes noms* apparaît
dans les fastes consulaires, en 141 et en 140 avant J.-C.
Caepio, Caepius, Cepius, Cipius paraissent dériver de
caepa^ cepa^ « ognon, » qui a donné, avec un autre suffixe,
le nom de lieu dérivé Cepetum.
Cepetum est un endroit où Ton cultive les oignons. Ce
nom de lieu est devenu , dans le midi , Cepet ; c'est une
commune du départemeni de la Haute-Garonne ; elle est
appelée Ceped au onzième siècle (11). Dans le Nord, le d
final est toujours tombé, et Ve qui précède est devenu oi
dans trois exemples certains : Cepoy (Loiret), Spoy (Aube).
Spoy (Côte-d'Or). Le dernier est appelé Cypetum dans un
(I) DicL de Maine-et-Loire, t. III, p. 516.
p) C. /. L., X, 479 (Ceppius), 2251 (Cepius).
(3) Ibid,, VIII, 1510.
(4) Ibid., VI, 14832, 14833.
(5) Ibid,, XIV, 250, 251, 252.
(6) Ibid., VII, 1293.
(7) Jbid., V, 2928.
(8) Ibid., V, 3399.
(9) Ibid., X, 2191.
(10) Ibid,, X, 256, 1. 149.
(II) G. Desjardins, Cartulaire de Conques, p. 62, 63.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICES EN -lUB. 407
diplôme royal de Tannée 664 en faveur de Tabbaye de
Bèze (1). Quant à Spoy (Aube), il avait encore deux syllabes
et s'écrivait par c initial, Cepoi^ au treizième siècle (2). Mais
\e de etum est resté dans le nom de Spay (Sarthe), qui
semble être le Cipid/us d'un diplôme mérovingien fabriqué
au neuvième siècle (3).
De Cepius on a tiré deux dérivés : l'un est* Cepianus^ d'où
Sepian, commune de Valeyrac (Gironde) ; l'autre est ^Cepia-
eus , qui a donné probablement Séchy, commune de Viry
(Saône-et-Loire) , et Séchy, commune de Thonon (Haute-
Savoie).
Cronia. En 739, Abbon donne à l'abbaye de Novalèse
Cronia in pago Tolonense (4).
Cronia est la forme féminine du gentilice Cronius. On
conserve , dans la bibliothèque de Lucera , ville de l'Italie
méridionale, l'épitaphe de M. Cronius (5). Cronius, mieux
Chronius , est un nom grec, XpiSvioç, dérivé du nom divin
Xpdvo^. La bonne orthographe par ch est respectée dans
l'épitaphe d'une femme appelée Chronia ; cette épitaphe est
conservée au palais épiscopal de Porto, près de Rome (6).
De Cronios on a pu tirer * Croniacus, d'où Crogny, com-
mune des Loges-Margueron (Aube).
Decia. Vers l'année 1015, Humbert, évoque de Grenoble,
céda à Manassès , comte d'Albon (Drôme) , des biens de
l'église cathédrale de Grenoble dans plusieurs localités du
pays de Genève, notamment in Desia (7). Desia est une
orthographe du moyen âge pour Decia.
Decia est le féminin du gentilice Decius, un dès plus
(1) Pertz, DiplomatSL, p. 40, 1. 21.
(2) Boutiot et Socard, Dict. topogr. du dép, de l'Aube, p. 157.
(3) Pertz, Diplomatay p. 122, 1. 36.
W C^rtulaire de Saint-Hugues de Grenoblef p. 41.
(5) C. /. L., IX, 848.
(6) Ibid., XIV, 801.
(7) Cartulaire de Saint-Hugues de Grenobley p. 173.
408 LIVRE IL CHAPITRE III. ( 3.
illustres de Rome (1). Trois membres de la gens Decia por-
tant les mêmes noms, P. Decius Mus, furent consuls à Rome
de Tan 340 à Tan 279 avant J.-C. Suivant la tradition romaine,
ils auraient tous trois successivement assuré aux Romains
la victoire en allant chercher la mort au milieu des batail-
lons ennemis après avoir rempli les formalités de la devo-
tio ; cela ne parait vrai que pour les deux derniers.
Le gentilice Decius pénétra en Gaule. Un des monu-
ments les plus intéressants qui rétablissent est une inscrip-
tion trouvée près de Genève. Elle est datée du consulat de
C. Marcius Censorinus, c'est-à-dire de Tan 8 avant J.-C.
On y lit les noms de P. Decius Esunertus, fils de Trouce-
teius Vepus. Elle nous apprend, en outre, que ce person-
nage appartenait à la tribu Voltinia (3). P. Decius Esuner-
tus avait obtenu la dignité de citoyen romain que n*avait
pas eue son père. Son nom gaulois était Esu-nerto-s « celui
qui a la force du dieu Esu-s, »
Son père s'appelait Vepus , et lui-môme était fils de
Trouces, au génitif * Troucetos, ou, avec la désinence latine,
Troucetis, comme on l'apprend par une inscription de
Saint- Alban (Isère) (4). C'est de Vepus qu a été tiré le gen-
tilice Vipius conservé par une inscription de Genève (5) ,
et d'où le dérivé * Vipiacus = Vichy (Allier). Trouces, Trou-
cetos était dérivé d'un thème trouco- qui a donné le dérivé
Troucillus, nom pérégrin dans une inscription de Nimes (6).
Trouco- est devenu ensuite trôco- par o long = ou, comme
la phonétique l'enseigne, et de troco on a tiré le gentilice
* Trôcius ou Troccius ; la seconde notation est celle de deui
inscriptions, Tune à Nimes (7), l'autre à Tresques -(Gard) (8).
(1) De- Vit, Onomaisiicon, t. II, .p. 575, 579.
(2) Mommsen, Roemische GeschichtBy 6* édition, 1. 1, p. 355 note.
(3) C. /. L., XII, 2623.
(4) Ibid., XII, 2356.
(5) J6id., XII, 2590.
(6) Ibid,, XII, 3944.
(7) Ibid., XII, 3961.
(8) Ibid,, XII, 2758.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILIGES EN -lUB. 409
De ce . gentilice est venu le nom de lieu Trociacus. En 844,
dans un diplôme de Charles le Chauve , c'.est une localité
du pc^gus Belvacensis (1) ; on suppose qu'il s'agit de Trocy
(Seine-et-Marne). En 885 , dans un di[dôme de Charles le
Gros pour la cathédrale de Toul (2); en 894, dans un
diplôme d'Arnoul, roi de Germanie, pour la même église (3),
le môme nom désigne Troussey (Meuse).
Ainsi , les noms du père et du grand-père de P. Decius
Esunertus ont donné chacun un dérivé en -acus qui se
retrouve dans la géographie moderne de la France. Decius
a eu la même fortune. Ou doit reconnaître un ancien De-
ciaciAS dans la villa Disiacus que mentionne, en 662, la
charte de fondation de l'abbaye d'Hautvilliers (4) ; c'est au-
jourd'hui Dizy (Marne). Ce nom, écrit Disciacus en 713 dans
une charte datée de Sarrebourg (Alsace-Lorraine), désigne
une localité située dans le pagiis auquel la Sarre, qui passe
à Sarrebourg, donnait son- nom. En 907, Disiacus^ d'où
Charles le Simple date un diplôme (5), parait être Dizy-le-
Gros (Aisne), qu'on retrouve sous le môme nom en 1060.
dans une charte d'Henri P' (6). Le nom de Dicy (Yonne)
parait avoir la même origine ; il aurait conservé sourde la
gutturale assibilée qui est devenue sonore dans|Dizy (Aisne),
et dans Dizy (Yontie).
r
Gracilia. m. Port (7) a cité des chartes des années 1100 et
1105 où apparaît, sous le nom de Grésilla, Gresilia^ Grisilia,
le village appelé aujourd'hui Grésille, commune d'Am-
billon (Maine-el-Loire). Ces notations modernes représen-
tent un antique Gracilia,
Le gentilice Gracilius se rencontre au masculin dans une
(1) Dom Bouquet, VIII, 454 c.
(2) Ibid., IX, 343 a.
(3) ma., IX, 368 c. Cf. Liénard, DicU top. de la Meuse, p. 238.
(4) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 129.
(5) Dom Bouquet, IX, 505 d.
(6) Lasteyrie, CartuUire de Paris, p. 123.
(7) Dictionnaire de Maine-et-Loire, t. II, p. 301.
410 LIVRE II. CHAPITRE III. | 3.
inscription du Norique (1); au féminin, dans une inscrip-
tion de Campanie (2).
On en a tiré un dérivé en -ociw: Grésillé (Maine-et-Loire),
Gresillac (Gironde) semblent être d'anciens * Graciliacus.
HisPANiA. Dans, le cartulaire de Molesme (Côte-d*Or),
c'est le nom porté, en 1097, par Epagne (Aube) (3). 11 y a
en France une autre commune d'Epagne dans le déparle-
ment de la Somme.
On n'a pas encore, je crois, rencontré d'exemple du gen-
tilice Hispanius ; ce qu'on a trouvé , c'est le gentilice 8pa-
nius, dans une inscription italienne (4) et dans une ins-
cription d'Afrique (5) ; Spanius = Hispanius avec aphérèse
de la voyelle initiale. Tiré du cognomen Hispanus, Spanius
a été dépouillé de sa syllabe initiale sous l'influence peut-
être du grec ot^vcoç « rare. »
[Hijspanius a dojiné un dérivé * Hispaniacus que Ton re-
connaît dans les noms d'Epagny (Aisne, Côte-d'Or, Haule-
Savoie); d'Epiniac (lUe-et-Vilaine) ; d'Espagnac (Corréze).
LiviA. En 892, il y avait dans le pays de Vienne, en
Dauphiné , in pago \iennmse , une villa Livia (6). On doit
reconnaître le même nom dans une chafte de Tannée 885,
où , par erreur , on a , dans le Cartulaire de Saint-Hugues
de Grenoble, imprimé Luvam pour Liviam (7).
Tout le monde connaît le nom de la gens Livia , qui a
donné à Rome plusieurs consuls, la femme de l'empereur
Auguste et le plus célèbre des historiens romains.
Les inscriptions attestent que le gentilice Livius pénétra
(1) C, I. L., III, 5482.
(2) Jbid., X, 3413.
(3) Boutiot et Socard , Dictionnaire topographique du d^artement de
l'Aube, p. 61.
(4) C. /. L., X. 4349.
(5) Ibid., VIII, 2978.
(6) Cartulaire de Saint-Hugueê de Grenoble, p. 73.
(7)idid., p. 11.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICE8 EN -IU8. 411
en Gaule (1), mais il parait y avoir laissé peu de traces daus
la géographie. Peut-être Ligeay (Loire) , Légé (Loire-Infé-
rieure), sont-ils chacun un ancien fundus Liviacus?
Mabcia. Une charte de Tannée 892 (2) parle d'une villa
quae nominatur Marcia et qui aurait été située dans le pays
de Vienne (Isère) , in pago Vianense. C'est le même nom
qui est devenu, dans le département de Meurthe-et-Moselle,
Maixe, prononcé encore en patois Mâche, en donnant au
ch la valeur du ch allemand. Marciacus est très fréquent
dans les textes français du moyen âge ; nous l'avons étudié
p. 270-275, il est dérivé ordinairement du gentilice Marcius,
peut-être quelquefois du gentilice Martius.
Papia. Deux chartes du onzième siècle , conservées par
le Cartulaire de Saint- Victor de Marseille , parlent d'un cas-
iruim appelé Papia : in territorio de Castro quod nominatur
Papia j 1056 (3) ; caspf^m de Papia juxta Marinanam, 1095 (4).
11 est aussi question de Papia sans mention de castrum,
dans le même cartulaire, en 1079 (5). Le château de Papia
était situé près de Marignane (Bouches-du-Rhône), comme
nous l'apprenons par la charte de 1095 précitée.
Papius est un gentilice romain d'origine samnite qui
doit à diverses circonstances une certaine notoriété. A deux
reprises , dans le Samnium , un Papius fut chef de guerre
contre Rome : Papius Brutulus en 326 avant J.-C. , Gains
Papius Mutilus en 91. En l'an 9 de J.-C, le consul M.
Papius Mutilus et son collègue , Q. Poppaeus Secundus ,
donnèrent leur nom à la loi Papia Poppaea, célèbre par
ses dispositions contre le célibat. 11 y avait des Papius à
Rome antérieurement à cette date ; en l'an 65 avant J.-C,
(1) C. /. L., XII, 217, 1604, 1927, 2805, 4951, 4952.
(2) Bruel, Recueil des chartes de l'abbaye de Cluny, t. I, p. 54.
(3) Quérard, Cartulaire de Saint-Victor de MarseilUt tome I, p. 237.
(4) Ibid., tome II, p. 209.
(5) Ibid., tome II, p. 219.
412 UVBE II. CHAPITRE III. | 3.
le tribun du peuple C. Papius fit voter la loi Papia qui ex-
pulsait de Rome les pérégrius. Ce nom pénétra en Gaule ;
on conserve encore à Grenoble l'épitaphe du décurion G.
Papius Secundus (1).
Papia, en français, donnerait Pache. C'est le nom d'un
maire de Paris ; ce nom d'homme tire peut-être son ori-
gine d'un nom de lieu. En Italie, Papia est devenu Pavia^
nom qui s'est substitué , dès le commencement du moyen
&ge , à celui de la ville de Ticinum ; c'est probablement le
nom d'un faubourg, construit sur l'emplacement d'une an-
cienne villa Papiay et qui a fini par supplanter la ville an-
cienne de Ticinum.
Un phénomène analogue s'est produit en France : 1^ quand
le nom antique de Cénabum a été remplacé par celui des
fundi Aureliani, qui se prononce aujourd'hui Orléans;
2*" quand, au vieux nom de Divodurum, capitale des Medioma-
irici^ l'usage a substitué celui des fundi MetH, au datif plu-
riel Mettis, comme on écrivait en latin à la fin de l'empire
et au début du moyen âge ; Metti est le- nominatif pluriel
du gentilice Mettius ; Mettis en est le datif-ablatif pluriel.
En France , Pachan (Lot-et-Garonne) est probablement
un ancien fandus * Papianus^ et Paché (Indre-et-Loire), un
ancien fundus * Papiacus.
ScoTiA. Une charte du milieu du dixième siècle, donnée
en faveur de l'abbaye de Cluny , met dans le Maçonnais
une villa Scotia (2).
C'est la forme féminine du nom du potier Scotius dont
on trouve la marque en France, au musée de Vienne
(Isère) (3) ; en Suisse, au musée de Genève (4) ; dans l'empire
d'Autriche, à Bregenz (5). On a lu au musée de Tarragone
(1) c. /. L., Xll, 2246. Sur la gens Papia, voyez Paulj, Real-Eneyciop^t-
die, t. V, p. 1139-lUl
(2) Bniel, Recueil des chartes de l'abbaye de Cluny, t. I, p. 539.
(3) C. /. L., XII, 5686, 795.
(4) Ibid.
(5) Ibid., III, 6010, 199.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICE8 EN -lUS. 413
(Espagne) la marque de potier, ScoH m[anu], qui nous offre
probablement le génitif singulier de Scotius (1). Scotius
est un nom patronymique dérivé du nom pérégrin Scottus,
dont la marque Scottus fe{cit) a été relevée au musée de
Vienne (Isère) (2). Au même musée, le môme nom Scottus
est inscrit sur un contre-poids de craie (3). Enfin , le nom
pérégrin de femme Scotta est conservé par une inscription
trouvée près de Saint-Gilles (Gard) (4). Scottus veut dire
« irlandais. » On s'est appelé Scottus ou Scôtus sous l'em-
pire romain, comme de nos jours, Lallemand, Langlois.
Scotius de Scôtus a donné un dérivé en -aciLSy Scotiacus
d'où la villa Scociacus située au comté de Mâcon , suivant
une charte de l'abbaye de Cluny, 938-939 (5). Le môme nom
est écrit à l'ablatif villa EscuHaco dans une autre charte
du même siècle, 965-966 (6).
Le procédé grammatical auquel nous devons le nom de
lieu Scotia ne doit pas être confondu avec celui qui nous a
donné les noms de villages français Allemagne, Marmagne,
Sermaise ou Sermoise, plus anciennement Alamarmia^
Marcomannia , Sarmatia. Scotia offre matériellement une
grande ressemblance avec ces trois noms. Scotia, comme
Alamannia^ Marconumnia^ Sarmatia, est dérivé d'un nom
de peuple à l'aide du suflBxe -ia ; mais Scotia, féminin d'un
gentilice romain, était tout formé antérieurement à la date
où il a acquis une valeur topographique ; tandis que Ala-
mannia, Marcomannia, Sarmatia doivent leur sens topogra-
phique au phénomène morphologique par lequel le suflfee
-ia est venu s'ajouter aux noms de peuples, Alamannus,
Marcomannus , Sarmata. Scotia veut dire villa de Scotius ,
Al^mam/nia, Marcomannia ^ Sarmasia, ou mieux Sarmatia ^
<1) C. J. L., II, 4970, 458.
(2) Ibid., XII, 5686, 797.
(3) Ibid., XII, 5688, 8.
(4) Ibid., XII, 4127.
(5) Bmel, Recueil des chartes de Vabbaye de Cluny, U I, p. 478.
(6) Ibid., t U, p. 276.
414 LIVRE II. CSAPmŒl UI. } S.
signifient villa d'Alamannus, de Marcomannus, de Sarmata.
Ce sont des formations identiques à Gallia de Gallus, à
Graecia de Graecus, à Germania de Germanus. Gallia,
Graecia, Germania sont des substantifs et n'ont pas de
masculin ; Alamanniay Marcomannia Sarmatia donnent
lieu à la même observation. Scotia {villa) est un adjectif :
ce mot a un masculin qui est Scotius.
Sermaise (Maine-et-Loire) s'appelait, au onzième siècle,
Sarmasias ; lisez Sarmatias sous-entendu villas (1). C'est
ainsi que doivent s'expliquer les noms de Sermaise (Loiret,
Marne, Oise, Seine-et-Oise). Sermoise (Nièvre) est désigné,
en 903 , par les mots Sarmasia villa et villa Sarmasias (2) ;
corrigez Sarmatia, Sarmatias. La môme observation s'ap-
plique à Sermoise (Aisne), Sarmasia en 1223 (3), et à Ser-
moise (Yonne).
Sarmatia a donné un diminutif * Sarmatiolae , en 1199
SarmisoliaSy aujourd'hui Sermizelles (Yonne) (4).
M. Fustel de Coulange, dans un livre éloquent et
curieux (5), a deux chapitres fort intéressants sur les
(( Germains établis dans Tempire comme laboureurs et
comme soldats. » Il aurait pu dire, non pas <c Germains, »
mais en général barbares, puisque dans le nombre nous
trouvons des Sarmates (6).
Marmagne (Côte-d*Or) portait, en 723, le nom de Marco-
mannia (7). Marmagne (Cher), Marmagne (Saône-et-Loire;,
ont probablement la même origine. Tout le monde sait que
les Marcomans sont un peuple germain.
(1) Port, Dictionnaire de Maine-et-Loire, t. III, p. 521.
(2) Soultrait, Dictionnaire topographique du département de la Nièvre,
1877, p. 174.
(3) Matton, Dict. topogr. du département de l'Aisne, p. 260.
(4) Quantin, Dict. topographique du déparlement de l'Yonne, p. 123.
(5) Histoire des institutions politiques de l'ancienne France, 2* édition,
p. 377 et suiv.
(6) Sur les Sarmates de Gaule, voyez Tétude que le D' Lagnean a donnée,
sous le titre de France (anthropologie), dans le Dict tonna tre encyclopédique
des sciences mcdicales^ 4* série, t. V, p. 1.
(7) Garnier, Nomenclature, p. 163, n* 648,
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICE8 EN -lus. 415
Allemagne (Calvados) est une ancienne Alamannia^ dont
on trouve le nom écrit au onzième siècle, Alemannia (1).
Ces noms conservent le souvenir des mesures par les-
quelles les empereurs romains du troisième et du quatrième
siècle ont eu recours aux barbares pour combler les vides
de la population agricole et des armées. Mais Scotia (villa)
n'a pas la même origine. ScoHa {villa) doit son nom à une
famille irlandaise qui avait acquis droit de cité dans Tem-
pire; elle avait tiré son gentilice du terme ethnique Scottus
ou Scôtus qui désignait son ancienne patrie.
SoLiA, dans le pagus Rigomagensis , c'est-à-dire, comme
nous l'apprend M. Longnon , dans la vallée de Colmars
(Basses-Alpes), est mentionné par un acte de Tannée 739 (2).
C'est le féminin du gentilice Soiius dont la forme mas-
culine a été employée comme nom de lieu , ainsi qu'on Ta
vu plus haut, p, 370.
SoLiGiA est le nom d'un vicus mentionné dans une in-
scription conservée à Basoilles (Vosges). On y lit les deux
mots vico Soliciae. C'est aujourd'hui Soulosse (Vosges),
comme Ta établi M. Longnon (3). Cette localité a donné
son nom au pagus Solocensis du moyen âge. Solocensis vient
de * Solocia^ tiré de Solicia par assimilation de la seconde
syllabe à la première.
Solicia est la forme féminine du gentilice Solicius dont la
forme féminine nous est conservée en Italie par une in-
scription de Suse (4). Ce gentilice pénétra en Gaule. On
conserve à Embrun Tépitaphe de Solicia Vera (5). Les noms
1* de L. Solicius Aurelianus , 2'' de Q. Solicius Maximus
(1) Hippeau, Dictionnaire topographique du département du Calvados f
p. 3.
(2) Pardessus, Dtptomafa, II, 373.
(3) Revue archéologique d*août 1877; nouvelle série, t. XXV, p. 127-132
(4) C. /. L., V, 7316.
(5) Ibid., XII, 91.
416 LIVRE II. CHAPITRE HI. { 3.
et de Q. Solicius Euhodus, nous ont été transmis par des
inscriptions de Fréjus (Var) (1) et du Beausset (Var) (2).
TiLiA. Une charte de Tannée 1151 (3) mentionne prata
Thiliae; ce sont les prés de Theil (Yonne). Le Teil, commune
de Hambers (Mayenne), a aussi porté le môme nom, écrit
Tilia dans un document du treizième siècle (4). Le Theil,
commune de Saint-Gervais (Puy-de-Dôme), est deux fois
appelé Tylia dans un acte du treizième siècle (5).
Tilia est le féminin de Tilius dont il a été question plus
haut, p. 373.
ViNDiciA. Une charte de l'année 946 (6) met dans le
comté de Brioude (Haute-Loire) la villa quae dicitur Ymir
decia.
Yendecia est une notation en bas latin du latin classique
Vindicia, forme féminine d'un gentilice dérivé de Vindei.
On trouve ce gentilice dans deux inscriptions d'Afrique (7;.
De Vindicius dérive Vindiciacus , nom de lieu écrit au cas
indirect Vindiciaco dans la légende d'une monnaie méro-
vingienne ; on en a parlé plus haut, p. 337 (8).
ViNiciA. Une charte du douzième siècle place en Au-
vergne, dans la vicaria Bonorochensis^ une villa quae vocatw
Vinecia, Vinecia = Vinicia (9). *
Vinicius est un gentilice romain très répandu. Il y eut
plusieurs consuls de ce nom; nous citerons : L. Vinicius,
l'an 33; M. Vinicius, l'an 19; L. Vinicius l'an 5, avant
(1) C. /. L., XII, 264.
(2) ma., XII, 323.
(3) Quantin, C&rtulàire de VYonne^ t. I, p. 484.
(4) Léon Maître, Dictionnaire topogr&phique du département de U
UayennÊf p. 308.
(5) Gbassaizig, Spicilegium Briv&ten8ey p. 65, 69.
(6) Doniol, Cartulaire de Brioude, p. 289.
(7) C. /. L., VIII, 112, 323.
(8) Vojr. Longnon, Géographie de la Gaule au sixième siècle, p. 517.
(9) Doniol, Cartulaire de Brioude^ p. 173.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICES EN -lUS. 417
J.-C. M. Viaicius, au sortir de son consulat, fut gou-
verneur de la Gaule septentrionale jusque vers Tan 15
avant notre ère (1). Le gentilice Vinicius se rencontre sou-
vent dans les inscriptions de la Gaule (2) : il a donné le
dérivé Vinicicicfis^ d'où Venizy (Yonne), Venissieux (Rhône),
Vinezas (Ardèche), Vennecy (Loiret).
VisELLiA doit être l'orthographe latine classique du nom
de lieu écrit Visilia en 996 dans une charte de Tabbaye de
Cluny (3), vers 1100 et en 1109 dans des chartes de la
cathédrale de Grenoble (4), aujourd'hui Visille (Isère).
C'est la forme féminine du gentilice Visellius, connu
principalement par la loi Visellia, qui est antérieure à
l'an 71 avant J.-C. Ce gentilice se trouve dans plusieurs
volumes du C. L L, Il fut porté par deux consuls, C. Vi-
sellius Varro en Tan 12, et L. Visellius Varro en Tan 24
de notre ère; le second avait été légat en Germanie en
Tannée 21 (5). Les noms de Visellius Sabinus nous ont été
conservés par une inscription d'Aix-la-Chapelle (6).
Magontia, Mogontiacus. Le premier de ces deux mots est
la forme hypocoristique, le second est la forme romaine offi-
cielle du nom de Mayence ; le second nous ofiFre l'ortho-
graphe des inscriptions et de la plupart des auteurs con-
temporains de l'empire romain. Une variante Magontiacus
avec un a et non un o dans la première syllabe — parce qu'a-
lors cette syllabe était atone — apparaît chez Tacite. Le plus
(1) E. Desjardins, Géographie... de la Gaule romaine , t. III, p. 184. Sur
le gentilice Vinicius, voyez Pauly, Real-Encyclopaedie, t. VI, p. 2626-2629.
ffl C. /. L., XII, 43, 1075, 1515. 1528, 2735, 4020, 4021, etc.
(3) Bruel, Recueil, t. III, p. 430.
(4) Cartulaire de Saint-Huguea de Grenoble, p. 110, 132.
(5) Tacite, Annales, III, 41.
(6) Brambach, 57U. Sur le gentilice Visellius, voyez Pauly, Real-Encyclo-
paedic, t. VI, p. 2C79-2680. Cf. villam ... Visiliaco, 1188, aujourd'hui Visiago,
en Italie, dans la province de Reggio, Tiraboschi, Memorie Sloriche Mode-
nesi, t. III, Preuves, p. 107.
27
418 LIVRE II. CHAPITRE HI. { 3.
court Magontia^ d'où la prononciation moderne « Mayence r
en France , Mainz en Allemagne , ne se montre dans les
textes qu'après la chute de Tempire romain (1).
Mogontiacus est dérivé d*un gentilice romain, * Mogontius,
dont nous n'avons pas d'exemple. * Mogontius était à son
tour dérivé du nom divin écrit au datif Mogonti dans deux
inscriptions de la Grande-Bretagne (2). De mogont-, thème
du nom de ce dieu , on avait dérivé un nom d'homme bar-
bare, *Mogontinus, d'où le gentilice Mogontinius dans une
inscription des bords du Rhin (3).
Des noms d'hommes gaulois dérivent de noms divins .tel
est Beliniccus, de Belenus ou Belinus, dans une inscription
de Bordeaux (4); il y a eu un potier du nom de Beliniccus,
on trouve en Grande-Bretagne et en Gaule les produite de
son industrie (5). On avait créé à côté de ce nom barbare
un gentilice Belinius ; on peut le conclure avec cer-
titude du nom de lieu Beliniacus dans des diplômes de
Louis le Bègue en 878 (6) , de Boson, roi de Bourgogne,
en 879 (7); et dans le testament d'Hervé, évêque d'Autun
en 919 (8) ; c'est aujourd'hui Bligny-sur-Ouche (Côte-
d'Or) (9). Il y a, dans le même département, deux autres
Bligny : Bligny-sous-Beaune , appelé Beliniacum dans une
charte de l'année 1160 (10), et Bligny-le-Sec , appelé M-
gniacum en 1199 (11). Il faut éviter de confondre ces Bli-
gny avec ceux qui sont d'anciens Blaniacus.
Belinius venait, comme Beliniccus, du nom de dieu gau-
(1) E. Desjardins , Géographie de la. Gaule d'après la carte de Peutinger,
p. 58-59.
(2) C. /. L., VII, 958, 996.
(3) Brambach, n* 1988.
(4) JuUian, Inscriptions romaines de Bordeaux^ t. I, p. 503.
(5) C. /. L., VII, 133.i, 138, 140, 141 ; XII, 5686, 124.
(6) Gall. CkrisL, IV, instr,, col. 61 a. Dom Bouquet, IX, 415 c.
(7) Dom Bouquet, IX, 670 c.
(8) Ibid., IX, 717 e.
(9) Garnier, Nomenclature^ p. 76, n* 317.
(10) Garnier, ibid., p. 67, n* 281.
(11) Garnier, ibid., p. 48, n* 212.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES QENTILICE8 EN -lUS 419
lois Belenus ou Belinus, principalement honoré à Âquilée,
mais eonnu aussi en Gaule, comme rattcstent plusieurs
documents. Nous avons parlé p. 356, de Camulius qui
vient de Camulus ; on peut citer aussi Esuvius, d'Esus (1).
Le thème mogont-^ employé comme nom divin, d*oti, le
nom d'homme ^Mogontius, parait être le participe présent
d'un thème verbal mogo-y « grandir ; » son féminin devait
être en celtique mogonti, avec un i final que les Romains
ont remplacé par --ia. Le nom de la de a Mo€M)N7ia , sur
un monument de Metz que M. Prost a publié (2), n'est pas
autre chose que la notation romaine du féminin du nom
divin écrit au datif Mogonti en Grande-Bretagne. C'est,
quant à la désinence, le pendant de Brigantia, déesse cel-
tique de Grande-Bretagne au temps des Romains (3). Bri-
gantia est une notation romaine de * Briganti , mot celti-
que qui explique le nom de la déesse irlandaise Brigit,
confondu plus tard avec la sainte de même Aom : i long
était, en celtique comme en sanscrit, la désinence du nomi-
natif singulier féminin du participe présent (4).
A côté du participe présent mogonP-, le verbe dont le
thème est au présent mogo- a eu un participe passé primitif
mocto-s , en vieil irlandais mocht , « grand » (5) ; de mockt
dérive le participe passé vieil irlandais mochtae « grandi, »
et par extension, « loué beaucoup, » d'où a été tiré le
verbe dénominatif moidim « je loue. » Le participe passé
mochtae est la notation au moyen âge d'un antique *moctios^
et chose remarquable, ce mot, écrit par les Romains Moc-
(1) C. /. L., VIII, 2564 c, 88; cf. De-Vit, OnomsLSlicon, t. II, p. 764-765; et
J. de Witte, Recherches sur les empereurs qui ont régné en Gaule au
troisième siècle de 1ère chrétienne, p. 157 et 181, pi. xxxiz, n* 154; pi. xlv,
n*4.
(2) Mémoires de la société des antiquaires de France^ t. XLI, p. 7.
(3) C. I. L., VII, 200, 203, 875, 1062.
(4) R. Thurneysen, dans le tomo XXVIII, p. 145 de la Revue de Kuhn.
Briganti est le nominatif singulier du participe présent féminin d'un thème
verbal dérivé en â, mogont- est le thème du participe présent d'un verbe
primitif en -o-.
(5) Qlossaire d'O'Clery, dans la Revue celtique, t. V, p. 24.
420 LIVRE II. CHAPITRE III. { 3.
tius , a existé comme nom d'homme dans la Gaule Cisal-
pine : une inscription romaine des environs de Saluces
Tatteste (1). De la même racine on avait tiré un thème dé-
rivé moget- « celui qui grandit : » comparez le thème ch^get-
(c guerrier, » littéralement « celui qui marche » du thème
verbal cingo- « marcher. » Du thème moja^ dérive le gentilice
Mogetius qu'on trouve quelquefois dans les inscriptions ^2).
De Mogetius vient le nom de la station romaine appelée
Mogetiana dans la Pannonie supérieure , nom écrit par er-
reur, dans un passage de V Itinéraire d'Antonin^ Mogenlianis
avec un n de trop entre Ve et le t (3).
Il y a entre Mogetiana et Mogontiacus une sorte de
parallélisme ; tous deux ont à peu près la même valeur et
dérivent de la même racine au moyen de suflBxes différents.
mais dont le sens est analogue.
On aurait tort du supposer une parenté quelconque entre
le nom de Mayenceet celui de la rivière du Main. Le nom
du Main apparaît pour la première fois dans Thistoire en
Tannée 214 avant J.-C. avec le nom du roi gaulois Moeni-
captus, tué en Espagne dans une bataille contre les Ro-
mains (4) ; Mœni-captus veut dire « captif , esclave du
Main, » du Main considéré comme dieu. C'est aussi la
croyance au caractère divin des fleuves qui a donné nais-
sance au gentilice Mœnius dont on a deux exemples ^5 .
On s'appelait Mœnius, u fils du Main, » comme Rennius,
« fils du Rhin, » comme Eni-genus, « fils de Tlnn. »
Il n'y a pas plus trace de g dans Mœni-captus, nom de roi,
chez Tite-Live, que plus tard dans Mœnis ou Mœnus, nom
de rivière, chez Mêla, Pline et Tacite (6). Il n*y a donc
aucun rapport étymologique entre le nom de la rivière et
(1) c. /. L., V, 7639.
(2) Ibid,, III, 4452, 4568, 5635; V, 782, 6350, 6576.
(3) llinérAire d'Anlonin, p. 233, 1. 4 : Mogeti&na ; p. 263, 1. 5 : MogerUisnis.
(4) Tite-Live, XXIV, 42.
(5) C. /. L., III, 2436, et V, 2995.
(6) Mêla, 1. III, § 30, édition Teubner-Frick , p. 62, I. 15, écrit Mœnis;
Pline, 1. IX, § 45 ; Tacite, Germani&, 28, ont, paraît-il, préféré Moernis.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICE8 EN -lUB. 421
celui de la ville de Mogontiacus près de laquelle la rivière
se jette dans le Rhin.
MogonOa^ Maguntia^ nom de Mayence, Mainz, au moyen
âge, n'est autre chose que la forme féminine du gentilice
dont Mogontiacus est dérivé ; c'est Texpression familière et
plus courte par laquelle le peuple rendait l'idée que les
lettrés exprimaient par le mot savant MogonticLcus (sous-
entendu fundus),
S 4. — Des gentilices employés adjectivement avec sens
géographique au datif-ablatif pluriel en -is = -iis.
Des fundi contigus pouvaient porter le même nom , soit
qu'ils eussent appartenu au même propriétaire soit que le
hasard leur eut donné des propriétaires qui avaient le
même gentilice. On a des exemples certains de ce phéno-
mène pour des fundi dont le nom est dérivé de gentilices
au moyen du suffixe -anus. A la première page de la
table alimentaire de Veleia, on lit : « Fundos sive saltus
Xarianos Catusanianos... qui sunt in Veleiate pago Junonio,
adfinibus C. Coelio Vero et Dellio Proculo... Fundos Teren-
tianos et Malapacios qui sunt in Veleiate pago Statiello,
adfinibus republica Lucensium et Licinio Ruparcellio et
populo (1). » L'itinéraire d'Antonin nous donne plusieurs
exemples de noms de lieux qui sont d'anciens noms de
fundi au pluriel : Albianis, Alphen, d'Albius (2); Aquilianis
d'Aquilius (3); Bassianis de Bassius (4) ; Clodianis de Clo-
dius (5); Quintianis de Quintius (6) ; Varianis de Varius (7);
comparez à ces deux derniers Quintiano (8) et Variana (9).
(1) L. 28-30, 54-56. C. 7. L., t. XI, p. 208, 209.
(2) Page 369, 1. 1.
(3) Page 43, 1. 5.
(4) Page 131, l. 5.
(5j Page 329, 1. 7.
(6) Page 249, 1. 6.
(7) Pages 260, 1. 3; 265, 1. 6.
(8) Page 499, 1. 3.
(9) Page 220, 1. 3.
422 UVRE II. CHAPITRE III. g 4.
Des noms de fvmdi en -Ktnus au pluriel se rencontrent en-
core dans les documents du moyen âge; ainsi, en 814,
dans le Polyptyque de Saint-Victor de Marseille : in Siveria-
nis = Severianis (1).
Des noms de lieux ainsi formés, le plus connu en France
est celui de la ville d'Orléans. On sait qu'Orléans, donl le
plus ancien nom est Cenabum^ a pris le nom à^Aurtliani
vers la fin de l'empire romain , comme nous le montre la
Notitia provinciarum et civitatum Galliae, où Orléans est
appelé civitas Aurelianofum (2). Chez Grégoire de Tours,
Orléans s'appelle, au cas indirect, Àurilianus (3), c'est-à-dire
Aurelianos , accusatif pluriel , et Aurilianis (4) , c'est-à-dire
Aurelianis, datif-ablatif pluriel ; et les habitants s'appellent
Aurilianenses (5). La conclusion à en tirer, c'est que, vers la
fin de l'empire, l'antique Cenabum, se développant, couvrit
plusieurs fundi Aureliani et en prit le nom. Ce nom doit
être rapproché du passage de la table alimentaire de Veleia,
où C. Vibius se reconnaît débiteur de sommes hypothéquées
sur les fundos Aurelianos Yettianos et sur les fundos Betu-
iianos Aurelianos (6). D'Anville propose l'hypothèse que
Cenabum aurait pris le nom de l'empereur Aurélien (7);
mais cette hypothèse se concilie difficilement avec l'emploi
du masculin pluriel. Les villes qui prennent le nom d'un
empereur le mettent au féminin singulier : Augusta Sues-
sionum^ Soissons; Flavia Constantia, Coutances. Pour faire
intervenir un empereur dans l'étymologie du nom d'Or-
léans il n'y a pas plus de raisons que dans l'étymologie du
nom d*Albiniani^ Alphen, ou des fundi Aureliani de Veleia.
A côté des noms de lieu dont le cas indirect se termine
(1) Guérard, Cartulaire de Saint-Victor de Marseille, t. II, p. GSi
(2) Desjardins, Géographie historique et administrative de la GauU ro-
maine, t. m, p. 505. Longnon, Atlas historique de la France^ p. 14, 111.
(3) Edition Arndt, p. 57, 1. 19.
(4) Edition Arndt, p. 68. 1. 18; p. 83, 1. 5; p. 160, 1. Il; p. 324, 1. 12.
(5) Edition Arndt, p. 287, 1. 17 ; p. 292, 1. 17-18 ; p. 302. 1. 22.
(6) P. 4, 1. 93, 97, 98. C. /. L., t. XI, p. 214.
(7) D'Anville, Notice de l'ancienne Gaule, p. 347 (au mot Genabum),
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICE8 EN -lUS. 423
en -anis et qui sont dérivés de gentilices , on peut placer
ceux qui sont identiques à des gentilices et qui se terminent
en is j désinence populaire égale à la désinence classique
iis. Un de ces noms a une telle importance que , pour lui ,
on peut faire une exception à l'ordre alphabétique ; c'est :
Mettis (Metz). Ce nom supplante le nom gaulois de
Divodwrum^ vers la fin du quatrième siècle, dans la Notitia
dignitatum : « Legio prima Plavia Métis (1). C'est ce nom
nouveau qu'on trouve au sixième siècle chez Fortunat :
Hoc Mettis Aindata loco speciosa coruscans (2),
«
et plus tard chez Frédégaire (3). Mettis et ses variantes
Métis ^ Mettes sont, à l'époque mérovingienne, les formes
adoptées dans les légendes monétaires (4).
De là l'adjectif Mettensis, et, chez Grégoire de Tours, la
formule habituelle urbem Mettensem. Mettis est le datif ablatif
pluriel du gentilice Mettius, qui tire son origine du prénom
Met tus. Il y a deux Mettus dans la légende romaine. Le
premier, Mettus Curtius, est chef des Sabins dans leur
guerre contre les Romains au temps de Romulus (5). Le
second est Mettus Fufetius, dictateur des Sabins quand
TuUus Hostilius était roi de Rome ; il trahit les Romains ,
et TuUus Hostilius le fit écarteler (6). Les scribes et les
grammairiens qui nous ont conservé le texte de Tite-Live
au temps de l'Empire romain connaissaient le gentilice
(1) Edition Bœcking, t. II, p. 28.
(2) Livre III, 13 : « Ad Vilicum episcopam Mettensem, » vers 9: édition
Léo, p. 65.
(3) C. 39, 74, 75, édit. Monod, p. 134, 1. 21; p. 153, 1. 13, 31. Ed. Krusch,
p. 140, 1. 9; p. 158, 1. 14, 28.
(4) A. de Barthélémy, Bibliothèque de l'école des chartes, t. XXVI, p. 458,
col. 2.
(5) Tite-Live, I, 12. Denys d'Halicamasse, II, 42, 46; éd. Didot-Kiessling,
p. 98-102.
(6) Tite-Livo, I, 23-28. Dcnys d'Halicamasse, III, 5; éd. Didot-Kiessling,
p. 128. Après avoir adopté la bonne orthographe Méttoc, l'éditeur lui subs-
titue celle des éditions de Tite-Live, Mixxioç, p. 155, 158.
424 LIVRE II. CHAPITRE IIL l 4.
Mettius, et non le prénom Mettus ; ils ont, dans le texte de
rhistorien romain, changé Mettus en Mettius, mais un vers
de Virgile protestait contre cette réforme :
Haud procal inde citae Mettum in diversa quadrigac
Distulerant
Enéide, VIII, 642-643.
Le grammairien Servius a prétendu qu'en écrivant Met-
tum au lieu de Mettium , Virgile avait mutilé un nom à
cause du mètre (1). Il est pitoyable de trouver Virgile entre
les mains de cet inepte commentateur.
Mettius, dérivé de Mettus, est un gentilice peu commun
à Rome sous la République. Cependant, Cicéron connaissait
un certain Mettius dont il parle dans une lettre à Atticus ;2;,
Tan 44 avant Jésus-Christ. M. Metius, que César envoya
comme ambassadeur au roi Arioviste , Tan 58 avant notre
ère (3) , portait le . même nom , et Metius ne diffère de
Mettius que par une variante d'orthographe.
Le gentilice Mettius pénétra en Gaule. On en a trouvé,
aux environs de Mayence, deux exemples dans des inscrip-
tions romaines, Tun avec double t (4), l'autre avec t sim-
ple (5). Les inscriptions romaines de Lyon en offrent quatre
exemples avec double t (6) ; celles de Nimes trois (7), celles
d'Arles un (8).
Avec nos habitudes classiques , il peut sembler étrange
que le datif ablatif pluriel de Mettius fût Mettis, et noo
Mettiis. En effet, le datif ablatif pluriel classique de Met-
tius contient deux i , comme le génitif singulier Mettii^ et
comme le nominatif pluriel qui est encore Mettii. Mais cette
(1) Ed. de Georges ThUo, t. II, p. 290.
(2) XV, 27.
(3) De bello gallicOf I, 47, g 5; des mss. donnent Mettius. Ed. Holder,p.29.
(4) Brambach, 1182.
(5) Ibid., 1339.
(6) Boissieu, p. 340, 472, 518.
(7) C. /. L., XII, 3064, 3661, 3750.
(8)/bid., XII, 5814; p. 819.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICES EN -lUS. 425
prononciation savante était contraire à la tradition, et
Tusage de Tépoque impériale était conforme à la tradition :
quelques inscriptions l'attestent en nous donnant le génitif
singulier Metti, par un seul i, du gentilice Mettius. On le
trouve ainsi noté dans des inscriptions de Rome (1), de
Calabre (2), de Lyon (3), dans une marque de potier trouvée
en Angleterre et à Vienne (Isère) (4). De môme, au datif
pluriel des thèmes en io, les deux i de iis pouvaient se
contracter en un seul ; c'est une loi de la grammaire latine,
et on en a réuni de nombreux exemples (5).
Metti , nom pluriel , et Mettis , datif ablatif pluriel , pour
MeUii, Mettiis, sont donc parfaitement réguliers ; du nom
des fundi Metti, — dont Tltalie moderne nous offre deux
exemples : Metti, province de Parme, et Metti, province
de Massa et Carrara, — on a tiré plus tard V didjecHf Mettensis
en latin vulgaire, au lieu de Mettiensis (6).
Toutefois, Mettius, avec le suflBxe -acus, donne le dérivé
*MettiacuSy qui conserve Vi caractéristique du gentilice,
cet i perdu dans Mettis. On peut reconnaître un ancien
Mettiacus dans IdL Metsiacv^ villa, en Poitou, de deux diplô-
mes du dixième siècle, donnés, l'un en 915, l'autre en
941 (7) ; c'est aujourd'hui Messay (Vienne) (8).
Nous avons déjà parlé de Metius , variante de Mettius.
Le gentilice Metius a pu avoir pour pendant un gentilice
* Metenus. De Metenus a pu venir Metenaous^ ancien nom
de Maynal (Jura). Maynal est probablement l'orthographe
moderne substituée à une notation plus ancienne, Mayna.
(1) C. I. L., VI, 22478.
(2) Ibid., IX, 1416.
(3) Boissieu, p. 340, 518.
(4) C. /. L., VII, 1336, 706; XII, 5686, 589.
(5) Bûcheler, Précis de la, dèclinsiison latine , traduction de M. L. Uavet,
p. 205.
(6) Messin est un dérivé moderne du français Metz qui se prononce Messe
et non Metse comme en allemand.
(7) Dom Bouquet, IX, 524 e, 594 a.
(8) Redet, Dictionnaire topographique du département de la Vienne ^
p. 261.
426 LIVRE II. GHAPITAfi III. { 4.
Metenacus (1), que nous connaissons par J. Quicherat, avait
été emprunté par lui, comme nous l'apprend M. Longnon,
à une bulle du pape Léon IX, datée de 1049, qui a été
publiée par les Bollandistes (2).
Nous allons reprendre Tordre alphabétique.
AuRiis. Un pouillé, rédigé de 1080 à 1132 et publié
dans le Cartulaire de Saint-Hugueê de Grenoble , mentionne
une ecclesia de Auries (3). La cure de Àuriis apparaît dans
un rôle des décimes du diocèse de Grenoble au quator-
zième siècle (4).
Âurius est un gentilice romain assez rare, dont il est
question Tan 62 avant Jésus-Christ dans le plaidoyer de
Cicéron, pro Clumtio. Ce gentilice parait d'origine gan-
loise. M. JuUian (5) a publié une épitaphe gravée par les
soins d'Aurelus Auri-knus, c'est-àrdire d'Aurelus, fils
d'Auro-s. Le féminin Aura a été employé comme cognomen
de femme dans une inscription de Narbonne (6) et dans
une inscription de Milan (7).
Du gentilice Aurius est venu peut^tre le nom de wUis
Auria , près de Cavaillon (Vaucluse) , dans une charte du
onzième siècle (8). En tout cas , le nom de lieu Awiam
dérive d' Aurius. On reconnaît Auriac (Var), dans le casirum
nomine Auriacvm d'une charte de Tannée 1032 (9). Âuriac
(Basses-Alpes) porte aussi le nom d'i4umoum dans une charte
du douzième siècle (10). La vicaria Auriœensis tire son nom
(1) Quicherat , Etude sur la formation française des anctent noms di
lieu, p. 41.
(2) Tome I de juin, p. 675.
(3) Cartulaire de Saint-Hugues^ p. 189.
(4) Ibid., p. 272.
(5) Inscriptions romaines de Bordeaux, t. I, p. 339-338.
(6) C. /. L., XII, 4684.
(7) /6id., V, 5963.
(8) Guérard, Cartulaire de Saint-Victor de Marseille^ t. I, p. 429.
(9) Cartulaire de Saint-Victor de Marseille, t. I, p. 327; t. Il, p. Mi
(10) Romans, Dictionnaire iopographique du département des Basses-Al-
pes, p. 7.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES QENTILIGE8 EN -lUS. 427
d'un autre Auriacus qui est aujourd'hui Auriac (Creuse) (1).
Il y a encore d'autres Auriac en France, mais, pour la plu-
part, nous ne connaissons pas de formes anciennes.
Bassiis. En 959 ou 960, l'abbé de Cluny abandonna, à
titre de précaire , à un évêque d'Apt (Vaucluse), des biens
situés au comté d'Apt , in villa quae vocatur Bassiis (2).
Bassins est un gentilice, qui apparaît pour la première fois
dans l'histoire romaine, l'an 79 avant Jésus-Christ. C'était
le nom de la femme de Papius Mutilus ; Papius étant pros-
crit vint chercher asile chez elle , elle refusa de le rece-
voir, il se poignarda devant la porte (3). On a trouvé à
Rome Tépitaphe de l'affranchi T. Bassins Diogenes (4).
Une épitaphe du Musée de Naples nous a conservé le nom
de C. Bassins Marcellus (5). Sur un vase trouvé à Vienne
(Isère) , on a lu la marque : of(fîcina) Bassi (6).
Bassins a donné des noms de lieux dérivés au moyen
des suffixes -anus et -acms. V Itinéraire d'Antonin mentionne
deux stations de Pannonie appelées l'une Bassiana (7), l'autre
Bassianis (8). Des diplômes du neuvième et du dixième siè-
cle mettent dans le voisinage de Narbonne une villa Bas-
sianus (9). Au dixième siècle, des chartes de Cluny placent
au comté de Mâcon une villa Bassiacus (10).
Calbtiis. Suivant une charte de l'année 924 (il), il y
(1) Deloche, Cartulatre de Beatih'eu, p. glxv, 370.
(2) Brael, Becueil des chartes de Cluny, t. II, p. 166.
(3] De-Vit, Onom&sticon, h 685.
(4) C. 1. L., VI, 13522.
(5) Ihid.y X, 3549.
(6) Ibid., XII, 5686, 122.
(7) Itinéraire d'Antonin, p. 262, 1. 10 ; cf. C. /. L., t. III, p. 536.
(8) Ibid,y p. 131, 1. 5. Itinéraire de Bordeaux à Jérusalem^ p. 5fô, 1« 11 ;
cf. C. /. L., t. III, p. 417.
(9) Dom Bouquet, IX, 421 e, 455 a, 480 o, 555 d.
(10) Bruel, Recueil des chartes de Cluny, t. I, p« 191 ; t. Il, p. 215, 347.
(11) Doniol, Cartulaire de Brioude, p. 39.
^
428 LIVRE II. CHAPITRE III. { 4.
avait, dans la vicaria Calariensis, une villa appelée Calezii$;
c'est une notation relativement moderne d*un plus ancien
Caletiis.
Le musée de Brescia possède Tépitaphe de C. Caletius
Victor (1). On cite, d'après une autre inscription, les
noms de S. Caletius Félix (2). Caletius dérive d'un thème
gaulois calet^ on caleto- qui se trouve dans le nt)m d*un
peuple de la Gaule, les Caletes (3) ou Caleti (4). Ce nom
ethnique survit en français dans le nom du pays de Caux.
Le thème gaulois caleto- se reconnaît : l"* dans le breton
kalet^ 2^ dans l'irlandais calath ou calad; la notation bre-
tonne et la notation irlandaise représentent deux pronon-
ciations du même adjectif qui veut dire a dur. » Le latin
callum, « callosité, » d'où callerej « avoir des callosités
aux mains », « savoir, » a probablement la même racine.
L'allemand hart , « dur, » suppose une variante kar de la
racine kal, « être dur. »
On peut supposer qu'il y a eu un nom d'homme gaulois
Caletos, Ce serait ce nom qui apparaîtrait au génitif dans
la marque de potier Caleti , qui a été lue sur un plat con-
servé au Musée britannique (5). Mais Caleti peut être le
génitif de Caletius. Il y a eu un nom divin gaulois, CaU-
tos, Caletios ou Cales. Il explique la dédicace Deo Mercurio
VASSO Caleti, « Au dieu Mercure serviteur de Caletos,
serviteur de Caletios, ou serviteur cales (dur?), » suivant
que l'on considère Caleti comme le génitif de Caletos,
comme, le génitif de Caletios, ou comme le datif de cal^,
caletis. Cette dédicace existe à Bittburg (Prusse rhénane) (6).
Il y a deux noms de personnes dérivés du thème caUto-,
L'un est Caletinus, nom de potier, au musée de Vienne
(1) c. /. L., y. 4556.
(2) De- Vit, OnomMlicoUy II, 64.
(3) César, De bello gallico, VII, 75, { 5. Ed. Holder, p. 192.
(4) /6td., II, 4, ; 9. Ed. Holder, p. 36.
(5) C. /. L., VII, 1336, 211.
(6) Brambach, 835.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILIGES EN -lUS. 429
(Isère) (1) ; Fautre est un nom de femme : Caletiu , Adna-
mati filia, dans une inscription du Norique (2).
Il est impossible de distinguer, au moyen âge, Caletiacus
de CalciaouSj qui est dérivé de Calcius. Nous ne savons
donc si nous devons rattacher à Caletius, Chelsey, hameau
dépendant de Sussey (Côte-d'Or); Chelsey s'appelle Cal-
ciacus dans une charte de Tannée 852 (3). Nous ne pouvons
préciser davantage l'origine du nom de la villa Calziacus ,
en Forez, in agro Forensi, mentionné en 1025 dans une
charte de l'abbaye de Savigny (4).
SoLLEMNiis. C'est, vers 1130, le nom de Soulaines (Maine-
et-Loire), suivant une charte citée par M. Port (5). Ce nom
de lieu est le datif pluriel du gentilice Sollemnius déjà étudié
p. 328, cf. 369 ; on le reconnaît encore sous la forme plus
altérée Solenniis, dans une charte de 1149, à laquelle ren-
voie le même auteur au môme endroit. C'est probablement
aussi par le pluriel du gentilice Sollemnius que doit s'expli-
quer le nom de Soulaines (Aube) ; ce nom a fort embarrassé,
au moyen &ge et depuis, les savants locaux qui ont voulu le
traduire en latin ; tel s'est tiré d'affaire sans travail étymolo-
gique et en habillant le mot français d'une désinence latine,
Sollcmia^ 1155 ; d'autres ont voulu mieux faire, et ont traduit
le français village de Soulaines par villa de Sublanis; c'est
l'orthographe d'un pouillé de Troyes au commencement du
quinzième siècle, et de là en français « Soubz Laines » au
dix septième siècle (6).
Valemis. En 877, Charles le Chauve donna à un de ses
fidèles des biens situés dans le Tonnerrois, in villa Vale-
(l) C. /. L., XII, 5686, 157.
P) iWd., ni, 5474.
(3) Qamier, Nomenclature, p. 86, n* 350.
(4) A. Bernard, Carfulatre de Savigny, t. I, p. 370.
(5) C. Port, Dictionnaire de Maine-et-Loire , t. III, p. 538.
(6} Boutiot ot Socard, Dictionnaire topographique du département de
VAuhe, p. 156.
490 LIVRE II. GHAPITRB m. | 4.
n[a> (1) ; ce nom est écrit Ka/ma pour Valerws dans un
diplôme de Charles le Simple, en 901 (2); il s'agit de
Vallières (Aube). Le même nom se rencontre à la fin du
onzième siècle dans une région fort éloignée de celle-là :
en 1097 Tabbaye de Saint-Sernin de Toulouse était pro-
priétaire de Téglise Saint-Pierre de Valeriis (3) ; douze ans
auparavant, un donateur, parlant de la même église, avait
dit qu'elle était située juxta portum qui appellatur Vale-
fias (4).
Le gentilice Valerius est un des plus illustres de Rome.
Tout le monde connaît, au moins de nom, P. Valerius
Publicola , un des auteurs de la révolution aristocratique
qui renversa les Tarquins ; il obtint quatre fois les hon-
neurs consulaires. Il est inutile de donner la liste des
Valerius qui, après lui, occupèrent des charges curules (5".
Il suffira de parler de deux d'entre eux dont les noms
appartiennent à l'histoire de la Gaule pendant les premiers
temps de la domination romaine. L'un est C. Valerius
Flaccus, propréteur de la Narbonnaise l'an 83 avant Jésus-
Christ ; c'est à lui que dut le droit de cité romaine un car*
tain Caburus, père de C. Valerius Procillus, employé comme
interprète par J. César l'an 58 avant notre ère (6). Nous
citerons ensuite M. Valerius Messala Corvinus, deux fois
gouverneur de la Oaule, d'abord de 35 à 34, ensuite Tan 28
avant Jésus-Christ (7). Il est probable qu'un certain nombre
de Gaulois obtinrent par lui le titre de citoyens romains et
prirent son gentilice. Ce gentilice fut assez répandu en
Gaule sous l'empire romain. Dans le recueil des inscriptions
(1) Quantin, Cartulaire de l'Yonne^ t. I, p. 103.
(2) Ibid., p. 132.
(3) C. Douais, Cartulaire de Saint-Sernirij p. 196.
(4) Ibid., p. 494.
(5) Sur le gentilice Valerius , vojres Pauly , Réal-Encyelopàedie , t. VI ,
p. 2322-2373.
(6) De bello gallico , I, 47, | 4 : cf. E. Desjardins , Géographie de Ut Gaulf
romaine, t. II, p. 329-330.
(7) E. Desjardins, tbid., t. III, p. 45, 246.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES QBNTILICE8 EN -lUB. 491
romaines de la Gaule narbonnaise et des trois provinces
alpines (1) qui l'avoisinent, on a recueilli plus de deux
cents exemples d'hommes qui portent le gentilice Valerius ;
le recueil des inscriptions romaines de Lyon en mentionne
dix-sept. Dès le règne de Caligula, un Gaulois de Vienne
(Isère), Valerius Âsiaticus, jouait un rôle important à Rome;
il fut le chef de la conspiration qui eut pour résultat le
meurtre de cet empereur, et, après avoir revêtu deux fois
la pourpre consulaire , il fut condamné à mort par Claude
Tan 47 de notre ère (2).
Vallery (Yonne) parait être un ancien Valeriacw.
Valeriis, Valières , et Solemniis , Soulaines , paraissent le
datif de substantifs féminins pluriels; si ces substantifs
avaient été masculins, il auraient donné en français des
désinences masculines comme Aurelianis^ Aurelianos^
Orléans.
Nous allons passer aux noms de lieux qui apparaissent
exclusivement dans les textes avec la désinence du nomi-
natif accusatif féminin pluriel bas latin de la première
déclinaison : -as.
§ 5. — Gentiliees employés adjectivement avec sens géogra^
phique au nominatif^accusatif pluriel féminin.
Ces noms de lieu s'expliquent par un substantif sous-
entendu vilUiSy domus^ casas. Le dernier de ces substantifs
est exprimé, dans V Itinéraire d^Antonin (3), casas Caesa-
rianas; il s'agit d'une localité d'Italie entre Florence et
Àrrezzo.
ÂMMONiAS. AU huitième siècle, on donnait ce nom à une
contrée qui couvrait une partie des pagus d'Âvalon et de
(1) C. /. L., t. XII, p. 883-884.
(i) Tacite, Annales, XI, 1-3.
(3) Page 285, 1. 3.
482 LIVRE II. CHAPITRE III. g 5.
Nevers (1). Dans le siècle suivant, la même expression
géographique se rencontre dans Tacte de fondation de Tab-
baye de Corbigny (2). Le nom de cette contrée persiste dans
celui de la commune de Saint-Jean-aux-Amognes (Niévre\
arrondissement de Nevers, canton de Saint-Benin-d'Azv.
Ammonias, sous-entendu casas ou villas^ est le féminin
pluriel du gentilice Ammonius ou Amonius qui, avant
d'être un mot latin, a été grec : 'AfxfiLwvtoç , ou mieux *Aawvw;,
est dérivé d'Ammon, ou mieux Amon, nom d'une divinité
égyptienne ; comparez Aiovudioç de Atrfvoaoç. Le musée de
Naples possède Tépitaphe de M. Amonius Bassus natione
Aegyptius (3). L'indication du pays dont le défunt était
originaire, et la bonne orthographe avec une m simple,
comme M. Maspero nous l'a fait observer, contrairement
à l'usage universel qui exige une double m y sont deux cir-
constances qui rendent ce monument digne d'attention.
Ailleurs Vm se double conformément aux habitudes grec-
ques , par exemple dans l'inscription de Pouzzoles , où se
lisent les noms d' Ammonius Ammonianus (4).
D'Ammonius ou Amonius est venu le nom de lieu dérivé
Ammoniacus ou Amoniacus , aujourd'hui Ameugny (Saône-
et-Loire), qu'on rencontre plusieurs fois dans le Cartulaire
de Saint- Vincent de Mâcon^ publié par M. Ragut. Ce nom y
est écrit : à l'ablatif, Ammoniaco (5), Amoniaco (6); au
génitif, Ammuniaci (7), Amoniaci (8) dans des chartes dont
les plus anciennes datent du neuvième siècle, les plus
récentes du douzième.
(1) « In pago Avalense et Nivcrnense, seu Ammonias curtem qui rocatnr
Corbiniacus, 721. » Pardessus, DipZomata, t. II, p. 325. Corbigny est un
cheMieu do canton du dcpartoment de la Nièvre, arrond. de Clamecy.
(2) « Apud Ammonias in loco qui a Corbone viro inclito Corbiniacus di-
citur. » (864). Gall. Christianaf IV, inslrum.f col. 58 c.
(3) C. J. L., X, 3514.
(4) Ibid., X, 3612.
(5) Page 335.
(6) Pages 140. 277.
(7) Pages 378, 379.
(8) Page 140.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICES EN -IU8. 433
Il est curieux d'être amené à reconnaître, dans la nomen-
clature géographique de la France moderne , deux monu-
meats de la religion des Egyptiens : Amognes et Ameugny,
dérivés du nom du dieu Amon ou Ammon. Ces deux
témoignages , entre autres , attestent de quel mélange de
races s'était formée la tourbe avide que le sein de Rome
conquérante déversait sur les pays vaincus.
At[t1eias in fine Tornodrinse, dans un diplôme de
l'année 877 (1), aujourd'hui Athée, commune de Tonnerre
(Yonne) (2); — At[t]eias^ suivant un diplôme de 880 que
M. Garnier a publié dans ses Chartes bourguignonnes^ aujour-
d'hui Athée (Côte-d'Or) (3); — Atyes en 1131, Athyes
en 1254, aujourd'hui Athies (Aisne) (4), sont le féminin
pluriel du gentilice Atteins dont il a été question, p. 402,
sous le nom de lieu Atteia.
AuRELiAs. *Une charte du 5 septembre 925 dispose de
trois manses situés m Aurelias^ en Auvergne (5).
La gens Auselia, — Aurélia par l'efiFet du rhotacisme, —
était plébéienne , mais elle donna plusieurs consuls à la
République Romaine ; elle est surtout célèbre par la dynas-
tie impériale que fonda , au deuxième siècle de notre ère ,
T. Aurelius Antonius Plus, l'empereur Antonin (138-161).
Bien antérieurement, dès Tan 44 avant J.-C, ce nom fut
porté en Gaule par Aurelius, légat d'Hirtius, qui, à cette
époque , avait le gouvernement de la Gaule Transalpine :
nous le savons par une lettre de Cicéron à Atticus (6). Ce
gentilice devint très commun en Gaule : rien que dans le
t. XII du C. 1. L. et dans les Inscriptions antiques de Lyon^
(1) Dom Bouquet, VHI, 668 c.
(2) Quantin, Diciionn, topogr. du départ, de l'Yonne^ p.
(3) Garnier, Nomenclature f p. 13, n* 46.
(4) Matton, DictionriHire topogr. du départ, de l'Aisne, p. 10.
(5) Dooiol, Carlulaire de Brioude^ p. 129.
(6) XIV, 9. E. Desjardins, Géographie historique et administrative de la
Gaule romaine, t. III, p. 26.
28
c
434 LIVRE II. CHAPITRE III. i 5.
de Boissieu , on en peut compter plus de cent exemples.
D'Aurelius dérivent : l"' Aurelianus dont le pluriel ei^t
devenu le nom d*Orléans; 2** Aureliacus. C'était, au hui-
tième , au neuvième et au dixième siècle , le nom d'Orly
(Seine) (1). Orly est la forme moderne, en français, d'uc
nom qui , dans une région plus méridionale , est resîp
bien plus près du latin ; nous voulons parler d'Aurillac,
chef-lieu du département du Cantal, appelé Aureliacus dans
un diplôme de Charles le Simple (899) (2) ; la seconde syl-
labe, qui est tombée dans Orly, persiste dans Aurillac (Can-
tal). Elle a disparu : dans Orlhac (Corrèze), appelé encore
au cas indirect Aureliaco^ par deux chartes du neuvième siè-
cle (3) ; dans Orliac (Dordogne) , déjà au treizième siècle
Orlhac (4); et dans les diminutifs : Orlhaguet, commune
de Sainte-Geneviève (Aveyron) , appelé encore au cas indi-
rect Aureliaco et Aureliageto dans des chartes du miUeu du
onzième siècle (5) , Orliaguet (Dordogne) , Orliaguet, com-
mune de Gimel (Corrèze).
, Barbarias. En 998, l'abbé de Cluny abandonne la jouis-
sance précaire d'un terrain situé dans le pays de Chalon-
sur-Saône, in villa Ba^^berias (6); Barberias tient lieu d'un
plus ancien Barbarias qui est le pluriel de Barbaria étudié
p. 402. Barbières (Drôme) serait-il un ancien Baii>arias?
Caprias. Dans une charte de l'année 667, il est question
d'une localité située en Berry, in pago Biturico, près de
Cabrlas vioo (7). On dit que c'est Chabris (Indre).
Le gentilice Caprins, dérivé du latin capei^^ n'est pas très
(1) F. de Lasteyrie, Cartulaive de Parts, p. 35, 50, 90, 93.
(2) Dom Bouquet, IX, 478 c. — Cf. curtis Aureliacus près de Forli, 896,
et près do Ravcnne, 973; Fantuzzi, Monumenti Ravennati^ t. I, p. xltiii.
97, 180.
(3) Delocho, Cart. de Beaulieu^ p. 254, 258.
(4) De Gourgues, Dicl. top. de la Dordogne^ p. 219.
(5) G. Desjardins, Cartulaire de Conques, p. 41.
(6) Bruel, RecUeil des chartes de Cluny, t III, p. 541.
(7) Pardessus, Diplomata, II, 143.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICES EN -IU8. 435
commun : on en trouve des exemples obscurs et peu nom-
breux dans les tomes III, V et X du C. L L.\ mais il b. dû
à une satire d*Horace un peu plus de notoriété. Le poète y
parle des délateurs Caprins et Sulcius, Teffroi des larrons :
Sulcius acer
Ambulat et Gaprius rauci maie camque libellis ,
MagnQS uterque.timor latronibus...
(Salircs. 1. 1,4, 65-67).
Il se défend de leur ressembler. C'était vers l'an 40
avant J.-C. La conquête romaine porta ce nom en Gaule :
le musée d'Avignon possède l'épitaphe de Q. Caprins,
découverte à Tarascon (1).
De Caprins on tira des dérivés en -acus : Cabriac , com-
mune de Douzens (Aude) ; Chabriac , au dix-septième siè-
cle Cabriac, commune de Barjac (Gard); Chevrey, com-
mune d'Arcenant (Côte-d'Or), Chevery, commune de
Saint-Maurice-en-Rivière (Saône-et-Loire) , Chevry (Ain ,
Haute-Savoie , Jura , Loiret , Manche , Seine-et-Marne ,
Seine-et-Oise, Vosges), paraissent être d'anciens Capriacus,
Je n'ai pas eu le talent de les trouver sous une forme an-
térieure à la période capétienne (2). ,
Mais de caper, développé à l'aide d'un suflBxe, on avait
tiré un gentilice Capronius, dont le génitif féminin Capro-
niae , est gravé sur une grifife de bronze trouvée dans le
midi de la France (3). Peut-être ce gentilice avait-il une va-
riante * Caprinius, De Capronius ou de *Caprinius dérive le
nom de lieu Capriniacus porté par deux villages de la
France dès les temps carlovingiens ; ce sont : 1* Che-
verny (Loir-et-Cher), Cabriniacensis condita, dans une charte
de l'abbaye de Saint-Martin de Tours en 841 (4) ; 2"* Che-
(1) c. /. L., XII, 987.
(2) Comparez, en Italie : Cavriago,*proviiice de Reggio; Cavriana, prov.
de Mantouc et de Milan; Capriano, prov. de Brescia et de Milan; Oabriani,
prov. de Padoue et de Venise.
(3) C. /. L., XII, 5690, 26.
(4) Mabille, La Pancarte noire, p. 221 ; cf. p. 155, 156; voir aussi p. 81.
J
43C LIVRE II. CHAPITRE III. | 5.
vregny (Aisne) , Capriniacus in pago Laudunensi en 893 ;
probablement la Capriniacus villa dont sont datés, en 946,
trois diplômes de Louis d'Outremer (1).
Tous ces noms de lieux dérivent de gentilices romain?
qui eux-mêmes dérivent du latin ca^er « bouc. » En gau-
lois caper se disait gabro-s. Gabros est devenu en vieil
irlandais gdbor^ gabur, en gallois f/a^r , en breton ^awr.
De là un gentilice romain Gabrius noté au féminin Gale-
ria^ dans une épitaphe trouvée à Narbonne (2).
Le gentilice Gabrius, sous sa forme féminine Gabria, eM
probablement l'origine du nom de lieu écrit Gavre au neu-
vième siècle dans les Gesta Aldrici, Aldricus « Audry » est
un évêque du Mans , qui vécut de 832 à 856. Il avait fait
construire un mansionile à Gavre (3). Gavre est aujourd'hui
Gesvres (Mayenne), avec deux s de trop, l'un au milieu,
l'autre à la fin (4). Voir si Gesvres-le-Chapitre (Seine-et-
Marne) n'aurait pas la même origine.
Du gentilice Gabrius, on a tiré un nom de lieu Gabriacvs
dont il y a plusieurs exemples en France. Tel est Gabriac.
commune de Mas-de-Londres (Hérault), en 804 Gabriacum
fiscus (5). Nous citerons encore Gebriactxs, dans un diplôme
donné à l'abbaye de Saint-Martin de Tours par Charles le
Chauve en 862 (6) ; Gebriacus est une variante moderne de
Gabriacus, Gevrey (Côte-d*Or), appelé Givriacus en 83^
dans un diplôme de Louis le Débonnaire (7), en 1015 el
en 1019, dans des chartes de l'abbaye de Cluny (8) , appa-
raît avec une orthographe plus ancienne Gibriacus dans là
(1) Matton, Diclionnaire topograph, du département de VAUne^ p. K
Dom Bouquet, IX, 460 d, 601 d, 602 d, 603 b. Bruel, Recueil des chartes <U
l'abbaye de Cluny, t. I, p. 642-643.
(2) C. /. L., XII, 4833.
(3) Gesta Aldrici, 30, chez Baluze, Miscellanea, in-8% t. III, p. 62; édition
de MM. Charles et Froger, p. 77.
(4) Léon Maître, Diclionnaire topoyr, du départ, de la Mayenne, p. 14".
(5) E. Thomas, Dict, topogr, de l'Hérault^ p. 71.
(6) Dom Bouquet, VIII, 573 a.
(7) Ibid.y VI, 596 a.
(8) Rec. des chartes de Cluny, t III, p. 721, 745.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICE8 EN -lUS. 437
Chronique de Bèze , qui date du onzième siècle mais qui a
été écrite avec des documents plus anciens ; la notation
Gibriacus appartient dans cette chronique à la notice de la
foudation de Tabbaye de Bèze sous le régne de Clotaire II,
vers Tannée 600 ; elle peut avoir pour base un document
écrit peu après cette date (1); Gibriacus vient de Gabriacus^
par assimilation de la première syllabe à la deuxième ,
comme dans Campiniacus de Campaniacus^ Pompiniacus
de Pomponiacus , etc.
Cadias. En 932 , Tabbaye de Cluny acheta un champ en
Maçonnais , in villa Cadias. La charte est datée du même
lieu : Actum Cadias villa (2).
Le gentilice Cadius est trois fois noté Kadius dans une
épitaphe de Campanie (3). Il fut introduit en Gaule par la
conquête romaine : on a trouvé près de Nimes, à Rodilhan,
commune de Bouillargues (Gard) , Tépitaphe de T. Cadius
TituUus (4). Le seul personnage connu qui ait porté ce
gentilice est G. Cadius Rufus , proconsul de Bithynie, con-
damné sur la plainte de ses administrés en Tan 49 de no-
ire ère et réintégré dans le sénat vingt ans plus tard , par
l'empereur Othon (5).
De Cadius on a tiré en Gaule le gentilice dérivé Cadia-
eus. En 917 , une charte de Cluny mentionne une villa si-
tuée en Maçonnais in agro Cadiacense (6). Cadiacus est le
pendant celtique du romain Cadianus, d'où le nom de la
station Mutatio Cadiano en Italie, près de Vérone, dans
l'itinéraire de Bordeaux à Jérusalem (7).
(1) Abbé Bougaud et J. Garnier, Analecta divionensia ; Chronique de
V&bbaye de Saint- Bénigne de Dijon, suivie de celle de Bèze. Dijon, Daren-
tière, 1875, p 298; cf. Migno, Pairologia latina, t. CLXII, col. 863 d.
(2) Bniel, Recueil des chartes de l'abbaye de Cluny, t. I, p. 387.
(3)C. /. L., X, 1158.
(4) /6td., XII, 4065.
(5) Tacite, Annales, XII, 22; Hist., I, 77; De- Vit, Onomasticon, II, 9.
(6) Brucl, Recueil des chartes de Cluny, t. I, p, 199.
[1) Itinéraire d'Anlonin, p. 558, 1. 12.
43S UVRE II. CHAPITRE IIL | 5.
Campilias. Une charte de Tannée 906 (1), parle d'une
paroisse quae dicitur Campilias. On a reconnu qu'il s agi!
de Saint-Etienne de Campelles , commune de Villefiranche
de Gonflent (Pyrénées-Orientales) (2).
Il y a eu sous Tempire romain un fabricant de lampes
du nom da Campilius ; des lampes avec sa marque , Camr
pili au génitif, sont conservées à Hermannstadt en TraD-
sylvanie (3), au musée d'Âscoli en Italie (4), au musée de
Palerme en Sicile (5) , à Vienne (Isère) (6). L'épitaphe de
L. Campylius Liberalis au musée de Naples (7), nous of-
fre probablement le même nom avec une légère variaute
d'orthographe.
Champillet (Indre) est peut-être un ancien Campiliacm.
Fabias- En 965 , Honorât, évéque de Marseille, fit res-
tituer à son église des biens situés dans plusieurs localités
aux environs de Marseille , inpago Massiliense, notamment
au lieu dit Fabias (8). •
Il est. inutile de dire que Fabias est le féminin pluriel
d'un des gentilices romains les plus célèbres de Rome.
Les inscriptions romaines de la Gaule attestent que ce
gentilice pénétra en Gaule. Trente-deux Fabius figurent
dans l'index du tome XII du C. 7. L ; deux dans les Ins-
criptions de Lyon de Boissieu.
De Fabius , en Italie , on a tiré le nom de lieu dérivé
Fabianus , il y avait à Plaisance un fundus Fabianus^ nous
le savons par la table alimentaire de Veleia, p. 4, 1. 49 i9j.
En Gaule on a dû préférer Fàbiacus. Fajac (Aude) doit être
*
(1) Guérard, C9LTtula.iTe de Sa.ini'Victor de Marseille, t. II, p. 506.
(2) Ibid., p. 853.
(3) C. /. L., III, 1634, 1.
(4) Ibid., IX, 6081, 14.
(5) Ibid., X, 8053, 43.
(6) Ibid., XII, 5682, 19.
(7) Ibid., X, 2224.
(8) Guérard, Cartul&ire de Saint-Victor de Marseille, t. I, p. 41.
(9) C. /. L., t. XI, p. 214. Cf. Fabiano, province de Gènes, Faibano, pro-
vince de Caserta en Italie.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICES EN -lUS. 439
un ancien Fabiacus. Mais les Fage de TAude , de la Cor-
rèze et de la Lozère peuvent être chacun une ancienne
villa Fabia.
LiiciNiAS. Vers la fin du onzième siècle, un bienfaiteur
donna à Tabbaye de Molesme (Côte-d'Or) , son aleu , situé
notamment apud,.. Lisinias (1). L'église de ce village est
appelée ecclesiam de Lisigniis en 1116, dans une charte
d'un évéque de Langres (2). En 1153, Tabbaye de Molesme,
dans un acte d'échange, abandonne ses biens apud Lisin-
nias et in finagio Lisinniarum (3). 11 s'agit de Lézin-
nes (Yonne).
Licinius est un, des gentilices romains les plus connus.
Nous avons parlé de ses dérivés en -acus^ p. 254, 255.
Petrinias doit avoir été dans le haut moyen âge le nom
de Prignes, commune de Seiches (Maine-et-Loire). On
trouve ce nom écrit Petrignas^ au onzième siècle (4).
Ce nom de lieu suppose un gentilice *PeLrinius; il re-
présente une prononciation basse et vulgaire du gentilice
Petronius. Le gentilice *Petrinius serait l'explication du
cognomen Petrinianus dont l'existence est attestée par
deux inscriptions de Rome au temps de la république ; on
lit dans ces inscriptions les noms de L. Titinius Petrinia-
nus (5). *Petrinius aurait été une variante romaine de
Petronius. Petronius est un gentilice obscur sous la répu-
blique, mais qui fut inscrit six fpis dans les fastes consu-
laires au premier siècle de notre ère (6). Petronius est dérivé
(1) Quantin, Cartul. de l'Yonne, t. II, p. 18.
(2) Quantin, ibid., t. I, p. 232.
(3) Quantin, ibid., t. I, p. 507.
(4) Port, Dictionnaire de Maine-et-Loire, t. III, p. 188.
(5) C. /. L., I, 1400, 1401. Cf. le nom de lieu Petrigniano , provinces
d'Aquila, de Macerata et de Pérouse (Italie).
(6) Sur le gentilice Petronius, voyez Pauly , Real-Encyrlopnedie , t. V,
p. 14O;-1410. Le Dictionnario geografico postale del regno d'Italia, 1880,
mentioDne sept localités appelées Petrognano.
440 LIVRE II. CHAPITRE III. } 5.
du nom de nombre cardinal osque et ombrien qui veut
dire quatre. Le double suffixe ôn-ius de Petr-on-ius se
retrouve dans Pomponius dérivé du nom de nombre car-
dinal qui, en osque et en ombrien, signifie cinq ; Pompeius
vient du même nom de nombre et ne diffère de Pompo-
nius que par le suffixe. Il y a entre Petronius et Petreius
le môme rapport qu'entre Pomponius et Pompeius.
M. Petreius, dont Cicéron, dans le plaidoyer Pro Seœtio,
Tan 56 avant J.-C, vante le mérite, est le général qui avait,
quatre ans plus tôt, battu à Pistoia la petite armée de Cali-
lina; il fut dix ans plus tard, pendant la campagne de Cé-
sar en Afrique , un des vaincus de la bataille de Thapsus,
et pour ne pas tomber vivant entre les mains du vain-
queur, il se fit tuer en combat singulier par Juba, roi de
Numidie (1). Son gentilice apparaît comme nom de lieu
en 955, dans le nom de la villa Petreio, en Maçonnais, que
jious conserve une charte de Cluny ; de là dérive, dans la
même charte, le nom de Vager Petriacensis (2). La villa
Petreio y de Tannée 955, est appelée, un siècle plus tard,
villa Petroio et villa Perroy (3).
TuRRiAS. Dans une charte du milieu du onzième siècle,
il est fait à Tabbaye de Saint-Victor de Marseille donation
d'un manse in Castro quod vocatur Turrias (4).
Malgré le doublement de IV, ce nom de lieu parait iden-
tique au gentilice Turius fréquent dans les inscriptions
romaines , comme on peut s'en assurer en consultant les
index du C. L L., t. II, III, VIII, X et XIV (5). Ce gentilice
a même donné un dérivé Turellius (6) , et Turelius (7). Le
(1) Sur le gentilice Petreius, voyez Pauly, Tte&l'Encyclùptiedit ^ t V,
p. 1398-1399.
(2) Bruel, Recueil des chartes de Clunyf t. I, p. 767.
(3) Ragut, Cartulaire de Saint-Vincent de Mâcon, p. 259, 272.
(4) Guérard, Cartulaire de Saint-Victor de Marseille^ t. II, p. 37.
(5) Sur le gentilice Turius, voir Pauly, Real-Encyclopaedie^ t. VI,
p. 2253. Cf. le nom de lieu Turiano , province de Novare en Italie.
(6) C. /. L., Il, 787, 3103, 3104; V, 8819.
(7) Ibid.y III, 4150.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICES EN -lUS. 441
gentilice Turius n'est pas ancien dans l'histoire romaine ,
le plus vieil exemple appartient au premier siècle avant
notre ère ; c'est le nom d'un Romain établi en Campanie,
L. Turius (1).
On peut croire que ce gentilice est d'origine gauloise.
11 dérive de Turrus. Turrus est le nom d'un roi celtibère ,
qui, Tan 179 avant J.-C, se soumit aux Romains et devint
leur fidèle allié (2). Sous l'empire romain, ce nom est
noté par une seule r dans le nom d'une ville d'Espagne,
TurO'Briga ou Turi^briga, dont vient l'adjectif rtiro-frrfgren-
sis (3), ou Twri-brigensis (4). Turobriga veut dire forteresse,
château de Turos. Pline (5) met cette ville dans la région
de l'Espagne dite Celtique , à cause de sa population , où
l'élément celtique était dominant; le plus récent éditeur
a imaginé de corriger Turo-briga en Ituro-briga. En
Espagne, sous l'empire romain, on trouve écrit avec une
seule r les noms d'hommes dérivés Tureus, Turaius et
Turo : Tureus Bouti fllius (6) , Samalus Turei filius (7) ,
Turaius Clouti (8) , Clodio Turoni au datif (9) , et le nom
de lieu dérivé Turissa (10). La même orthographe, avec une
seule r est constatée dans l'adjectif Turicensis : cet adjec-
tif dérive de *Turicus, forme primitive du nom de la ville
de Zurich (11). L'r est aussi seule dans le nom, au cas in-
direct TurOj d'une station romaine de l'Allemagne méridio-
nale tel que nous le fait connaître Y Itinéraire dCAntonin (12) ;
Turo devait être au nominatif Turus, sous-entendu fundus.
(1) C. i. L., I, 574.
(2) Tite-Live, 1. XL, c. 49.
(3) C. /. L., II, 964.
(4) /Md., II. 462.
(5) Pliae, 1. III, § 14.
(6) C. /. L., II, 744.
(7) Ibid., II, 745.
(8) Ibid., II, 2633.
(9) /Wd., II, 2504.
(10) Itinér&ire d'Antonin, p. 455, 1. 6,
(11) Mommsen, Inscripiiones helveticae^ n* 236.
(12) Page 259, 1. 4. Cf. Turro, nom de localités d'Italie, provinces de Corne,
Milan, Plaisance et Naples.
442 LIVRE II. CHAPITRE III. APPENDICE.
Nous retrouvons la double r du Turrus de Tite-Live dans
deux noms d'homme dérivés en Espagne sous Tempire
romain : Tun est le nom pérégrin du père d'Optatus Tur-
rionis f. (1) , l'autre est le cognomen de la prêtresse ViLia
Turrina (2).
Dans Turrina IV est double , Vn simple ; on remarque
l'inverse dans Turennus au génitif Turenni , cognomen
du père d'Adius Flaccus, dans une inscription d'Espa-
gne (3). Ce cognom&n reparaît en France comme nom de
lieu au moyen âge : Torennam castrtêm en 859 (4), Torinna
en 932 (5), au douzième siècle Turenna (6), et Tormna (7;;
il s'agit de Turenne (Corrèze). Ce nom d'homme, devenu
nom de lieu , rentra dans la catégorie des noms d'homme ,
grâce aux comtes et aux vicomtes de Turenne et, dans
cette carrière nouvelle , acquit une célébrité qu'il n'avait
pas eu dans la première. Turenne , le fameux homme de
guerre du dix-septième siècle , était un La Tour d'Auver-
gne , vicomte de Turenne (Corrèze).
Appendice*. — Les cognomina en ius employés adjectivement
comme nom^ de lieu.
On s'occupera plus loin des noms de lieu identiques
à des cognomina dans lesquels la désinence -o-j, -us est
précédée d'une consonne. Les cognomina en ius étudiés au
point de vue de la phonétique forment une sorte d'appen-
dice aux gentilices en ius : les phénomènes phonétiques
qu'ils offrent à l'observation sont identiques à ceux qu'on
(1) c. /. L., II, 336.
(2) Ibid,, II, 1958.
(3) Ibid., II, 2671.
(4) Deloche, Carlulaire de Be&ulieu, p. 65.
(5) Ibid., p. 161.
(6) Ibid., p. 272.
(7) G. Desjardins, Cartulaire de Conques , p. 373. Cf. Turenno en Italie,
province de Brescia.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES SURNOMS EN -lUS. 443
peut étudier dans les gentilices en -ius : on en citera trois :
Âmbactius, Ambrosius, Mercurius. Cf. ci-dessus, p. 339.
ÂMBAGTiA a dû être , sous l'empire romain , la notation
régulière du nom de lieu écrit à Taccusatif vicum Amba-
ciensim par Gi^goire de Tours (1) , et à l'ablatif Amba-
ciensi (2). La seconde syllabe était primitivement longue,
bien que Fortunat Tait faite brève au livre IV, vers 210,
de sa Vie de saint Martin (3) :
Mirumaliud vico quod contigit Ambaciensi.
La seconde syllabe à'Ambaciensij au sixième siècle, était
prononcée brève puisqu'elle était atone.
Dans ces textes , il s'agit d'Amboîse (Loir-et-Cher) ; c'est
un nom féminin. C'est par conséquent à tort qu'au
dixième siècle, dans un traité d'Odon, abbé deCluny (927-
942), on trouve le nom d'Amboise écrit à l'ablatif masculin
ou neutre Ambazio (4). Ambactius ou Ambactium serait
devenu en français « Ambais » ou « Ambois. » La vraie
finale est restituée par la notation Ambasia^ du nom de cette
ville , dans une chronique d'Angers écrite vers la fin du
douzième siècle (5).
Le cognomen^ dont le nom d'Amboise est le féminin,
nous est conservé avec l'orthographe franque dans une
inscription de Zeeland, qui est une dédicace à la dea Neha-
lennia par Januarinius Ambacthius ; la notation cth du
groupe indo-européen et est caractéristique de la langue des
Francs Mérovingiens : comparez Theodebercthus. Ambacthius
est un dérivé du substantif gaulois ambactos : ambactos a
été emprunté aux Gaulois par les Germains.
En gaulois, ambactos avait le sens des mots français
(1) UisloriA Francorum, II, 35 ; édit. Arndt, t. I, p. 98, 1. 17,
(2) Ibid,, X, 31 ; édit. Arndt, t. I, p. 444, 1. 4,
(3) Edit. Léo, t. II, p. 354.
(4) Dom Bouquet, VI, 318 b,
(5) Dom Bouquet, X, 272 &.
444 LIVRE II. CHAPITRE III. APPENDICE.
« vassal, domestique, serviteur : » il conserva la même
valeur dans la langue des Germains ; noté andbahis chez
Vulfîla, il traduit ordinairement les mots grecs Smucovoç et
ôw>ipiTiQç, par exception XitToupY<Jç « ministre du culte. » En
germanique, le dérivé ambactio- ou ambactia a un sens
abstrait; Vulflla fait d' ambactio- un substantif neutre ; il le
note andbahti et remploie ordinairement comme équivalent
du grec Staxov(a, par exception comme traduction du grec
Les Francs et les Burgundes préférèrent le fémi-
nin pour lequel les manuscrits donnent deux orthogra-
phes ambascia et ambaxa, comme on le peut voir dans
les éditions de la loi salique et de la loi des Burgundes :
ambacthia aurait été la bonne orthographe de ce mot, dans
la langue des Francs mérovingiens. De ce substantif est
venu le verbe bas latin ambasciare « traiter une affaire
pour autrui; » d'où ambasciator, en espagnol ambaxador^
en italien ambasciadore , en français « ambassadeur. »
Ce mot, comme « ambassade » = ambasciata^ tire son
origine du substantif abstrait ambacthia- ou ambahtia-,
apporté dans l'empire romain par la conquête germanique.
AmbahUa- persiste chez les Allemands modernes qui le
prononcent amt et chez qui il veut dire « fonction, »
« bureau. » Mais chez eux il est d'origine gauloise. Il dé-
rive du Gaulois ambactos^ déjà connu par Ennius (239-169
avant J.-C.) un siècle environ avant la date où les Ro-
mains eurent pour la première fois des relations avec les
Germains. Ennius donne ambactus pour gaulois et le traduit
par servus.
César constate que, de son temps, au milieu du pre-
mier siècle avant notre ère , ce mot continuait à être
employé par les Gaulois comme nom commun. Il était
aussi employé par eux comme nom d'homme , c'est avec
cette valeur qu'il est inscrit sur une monnaie gauloise (I).
(1) Â. de Barthélémy, dans la Revue celtique, t. IX, p. 28.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES SURNOMS EN -lUS. 445
L'affranchi L. Appuleius Ambactus, dans une inscription
de Cislerna en Campanie (1) , s'appelait Ambactus tout
court quand il était esclave : et il devait être Gaulois d'ori-
gine. Nous n'avons pas de raison pour croire que les
Francs eussent le monopole du cognomen dérivé qu'un
lapicide grava sous leur dictée : Arribacthius; un Gallo-
Romain a du porter ce cognomen avec l'orthographe Am-
bactius^ et de là sera venu le nom de la villa * Ambactia^
aujourd'hui Amboise.
D'Ambactius, on a aussi tiré le nom de lieu Ambactiacus.
Ambazac (Haute-Vienne) est un ancien Ambactiacus, Awbas-
ciacus^ relevé dans la Chronique de Saint-Bénigne de Dijon
par M. Garnier (2) , est une autre notation du môme
nom.
Ambrosius. Mutatio Ambrosio^ dans l'Itinéraire de Bor-
deaux à Jérusalem (3), est le nom d'une station romaine de
de Gaule , aujourd'hui Pont-Ambroix , commune de Lu-
nel (Gard). On la reconnaît dans VAmbrusium de la Table
de Peutinger. Il faut corriger en Aifnbrusium ou Ambrosium
VAmbrussum de V Itinéraire d'Antonin (4).
Ambrosius, au féminin Ambrosia, est un cognomen ro-
main d'origine grecque. D'abord le féminin a seul existé dans
la langue grecque, il appartenait à la mythologie : 'A[A6(>o<r{a
est la nourriture où la boisson des dieux, chez Homère;
ce fut ensuite le nom d'une nymphe , ce devint plus tard
un nom de femme. Enfin , *A|ii6poff(a eut un masculin et on
vit paraître le nom d'homme \\t^<s\oç, La langue latine
adopta les deux genres. Les inscriptions d'Italie nous mon-
trent, à côté de Servilia Ambrosia (5), G. Julius Ambro-
(1) C. /. L., X, 6494.
(2) Nomenclature, p. 68, n* 286.
(3) Itinéraire d'Antonin, p. 552, 1. 7.
«
(4) Desjardins, Géographie de la Gaule d'après la Table de Peutinger,
p. 347. Cf. Itinéraire d'Antonin, p. 389, 1. 1 ; p. 396, 1. 6.
(5) C. /. L., X, 1497.
446 LIVRE II. CHAPITRE III. APPENDICE.
sius (I), Q. Clodius Ambrosius (2). Ce cognomen est devenu
célèbre, dans l'histoire ecclésiastique , grâce à Tévêque de
Milan , mort à la fin du quatrième siècle.
Mergurius. En 887, un donateur fait à Tabbaye de
Ëeaulieu (Corrèze) présent de sa villa appelée Mercorius (3) ;
dans l'acte qui constate la mise eh possession de l'abbaye,
ce bien est nommé au cas indirect villa de Mercorio , et il
est dit que la villa dont il s'agit était située en Limou-
sin (4) ; c'est Mercœur (Corrèze). Le même cartulaire met
dans le comté de Cahors une autre villa de même nom, et
il l'écrit avec une orthographe plus conforme à l'usage
classique : Mercurio k l'ablatif ; c'est dans une charte
de 932 (5)^ ici le nom antique a disparu et un nom nou-
veau l'a supplanté, Saint-Julien près Cazillac (Lot). Un
troisième Mercurius apparaît vers 1020 , dans une charte
de l'abbaye de Savigny (Rhône) ; cette charte est l'acte de
donation d'une vigne située : in parrochia Sancti Christo-
phori de Mercurio villa (6); on croit qu'il s'agit de Mar-
coux (Loire). Un quatrième Meicorius, aujourd'hui Mercœur,
commune d'Ardes (Puy-de-Dôme) , est plusieurs fois men-
tionné au treizième siècle (7).
Le cartulaire de Brioude (Haute-Loire) nous met sous les
yeux la forme féminine de ce nom. Il contient une charte
de l'année 911, où il est question d'une église Saint-
Etienne située in villa quae dicitur Mercoria , et de man-
ses : in superiori Mercoira (8) ; ces deux localités, probable-
ment contiguës, étaient situées dans le pays de Brioude, in
(1) C. /. L., IX, 24^.
(2) Ibid., IX, 6078, 62. "^
(3) Dcloche, Cartulaire de Beau/teu, p. 225.
(4) Ibid., p. 226.
(5) Deloche, Cartulaire de Beauh'eu, p. 87, 334.
(6) A. Bernard, Cartulaire de Savigny, p. 81.
(7) A. Chassaing, Spicilegium BrivateniBy p. 35-39, 120, 135-139, etc.
Cf. Mercurio, en Italie, province de Forli.
(8) Doniol, Cart. de Brioude, p. 61.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES SURNOMS EN -1U8. 4*7
vice Brivatense' : on doit probablement reconnaître en elles
Mercœur, arrondissement de Brioude (Haute-Loire). La
première de ces deux localités, Mercoria, est aussi mention-
née par ce cartulaire dans deux autres chartes du dixième
siècle (1), et dans une charte du douzième siècle (2), en
sorte qu'il est difficile de révoquer en doute l'exactitude de
l'orthographe féminine Mercorta. Celte orthographe est
cooSrmée par un compte du receveur d'Auvergne en 1401,
où figure une recette « de la parroisse de Mercures (3). »
11 y a dans « Mercures » un s detrop. Aujourd'hui en fran-
çais Mercœur (Haute-Loire) devrait s'écrire avec un e
final Mercœure.
Mercurius est un cogjwmen latin d'un usage assez fré-
quent : on peut s'en convaincre en consultant les index du
Corpus imcriptionum latinarum, t. V, IX, X, XII et XIV.
Dans le tome XIV, qui contient les inscriptions du
Latium, on en peut compter vingt-quatre exemples. Il
parait avoir été moins commun en Gaule, cependant il y
avait pénétré : le musée de Marseille possède l'épitaphe
de C. Manlius Mercurius (4) : à Nimes, on a trouvé deux
épitaphes intéressantes au même point de vue : celle
que Q. Seccius Mercurius fit graver pour sa femme (5);
et l'épitaphe de T. Sempronius Mercurius (6).
De Mercurius, on a tiré un dérivé Mercuriactts. Mercu-
rey (Saône-et-Loire), Mercury-Geroilly (Savoie), Mercury,
commune de Saint-Privat (Haute-Loire), paraissent être
chacun un ancien Mercuriacus (7).
Quelques personnes sont habituées k ne voir dans Mer-
cœur, Mercurey, Mercury, autre chose que l'expression
d'un culte; elles considéreront comme arbitraires l'hypo-
(1) DonJol, Cart. de Brioude, p. 30 et 315.
(î) Ibid., p. 292.
(3) A. Cbassaing, Spicilegium Brivatente, p. 473.
(4) C. /, t., xn. 449.
(5) /bW., xn, 3709.
(6] Ibid., XII, 3S94.
(7) Comparoi Uercurago, on Italie, province de Novare.
448 LIVRE II. CHAPITRE III. APPENDICE.
thèse d'hommes de chair et d'os venant s'interposer entre
le dieu romain et nous, empruntant son nom, humanisant
ce nom divin, et le transformant en cognomen^ avant
d'en tirer une expression géographique. Mais il n'est pas
nécessaire d'attribuer à cette thèse un caractère absolu. En
certaines circonstances un nom divin peut avoir donné
immédiatement naissance à un nom de lieu. Ainsi, deux
chartes du dixième siècle mettent prés de Brioude (Haute-
Loire) une terre de Monte Jove (1) , une villa quae dicUur
Montem Jovem (2); la même localité est appelée Montgeu
dans un document du quatorzième siècle (3); il y a vraisem-
blement là un témoignage du culte de Jupiter. De même,
le Mons Mercurius^ qu'une charte de l'année 975 met dans
le pagus lucdunensis, en Lyonnais (4), paraît être un témoi-
gnage du culte de Mercure.
(1) Doniol, Cartulaire de Brioude, p. 61.
(2) Pago 189.
(3) Chassaing, Spicilegium Brivatense^ p. 433. Comparez, en Italie, Mon-
tcgiove, provinces de Pérouse et dç Turin, Montegiovi, provinces de
Qrosseto et d*Arezzo.
(4) Bruel, Recueil des chartes de Clunyy t. II, p. 469.
CHAPITRE IV.
EXEMPLES , AU HOTBN AQE , DE NOMS DE LIEU EN -OCUS I
VÉS DE GENTILIGBS ROMAINS EN -enUS.
{ 1. Lea gentilices Tomains en -enui. — { 2. Les noms de lien en
dérivés de gentilices romains en -eniii qui se rencontrent dans les i:
tions , on dont on trouve un dérivé dans les inscriptions ; premier
tion , caractérisée par le doublement de l'n du suffixe -enus, — {
noms de lieu on -acus dérivés de gentilices romains en -enus qui i
contrent dans lea inscriptions, ou dont on trouve un dérivé da
inscriptions ; deujiiéme section, caractérisée par l'n iion doublée du
-enus. — I 4. Les noms da lieu en -acui dérivés da gentilices en
dont les inscriptions n'ont conservé d'autre trace que le gentilice e
correspondant.
§ !•'. — Les gentilices romains en -enus.
La langue latiae avait la faculté de remplacer p
suffixe -enus le suffixe -iut, qui fournit la désineoce
naire des gentilices. A côté A'Albitis ou de sa vat
Alfiw :
Ha«c nbi locntus foenerator Alflua (I),
on trouve Alfenus :
Aifeoe immemor atqne unaniinis false sodalibns (Z).
450 LIVRE II. CHAPITRE IV. J 1.
Ces deux gentilices se retrouvent dans les recueils d'in-
scriptions (1). A l'aide d'un de ces recueils a été dressée
la liste que voici, qui pourrait être plus considérable :
Arrius
Aufidius (4)
Aulius
Avius (6)
Babidius
Babrius
Bisius (11)
Caesius
Calidius (14)
Calius (16)
Calvius
Canius
Fadius
Lancidius (21)
Maecius
Arrenus (2)
Aufldenus (3)
Aulenus (5)
Avenus (7) , Avena (masculin) (8
Babidenus (9)
Babrenus (10)
Bisena (12)
Caesenus (13)
Calidenus (15)
Calenus (17)
Calvenus (18)
Canenus (19)
Fadenus (20)
Lancidena (22)
Maecena (23)
(1) De- Vit, Onom&Bticon, t. I, p. 225-226.
(2) C. /. L., III, 2919, 6220; V, 2073, 6954-
(3) Ibid., IX, 5015, 5092.
(4) Ibid., IX, 45, 46, 82 ; cf. Fabretti, Glossarium italicum, col. 223.
(5) Ibid,, IX, 2221, 2300.
(6) /6id., I, 571 ; XII, 3453, 3612.
(7) Ibid., IX, 2379.
(8) Ibid., V, 3382.
(9) Ibid,, IX, 5048.
(10) Ibid., IX, 5591.
(11) Ibid., V, 3702, 5841; cf. Fabretti, Gloss, iUL, col. 256.
(12) Ibid., V, 1363.
(13) Ibid., IX, 2248, 2276, 2277.
(14) Ibid,, V, 806, 1144, 2180, 5170; IX, 2645, 2689.
(15) Ibid., IX, 5052.
(16) Ibid., V, 977, 8666; cf. Fabretti, Gloss, i/al., col. 739
(17) Ibid., IX, 4457.
(18) Ibid., IX, 3538, 3979, 4141.
(19) Ibid., IX, 4252.
(20) /5id., I, 748; IX, 4408, 4594, 4627, 5104, 5796.
(21) Ibid,, V, 1891.
(22) ibid., V, 1931.
(23) Ibid., V, 44.
NOUS DE LIEU DÉRlVâS DE OENTILICES EN -ENUB.
Marcius
Hessîus
NumJsiug
Pomponius
Salius
Salvidius (6)
Sarius (8)
Satrius
Septimius
Trebellius
Umbrius
Varius
Vesius (15)
Vettius
Vicrius (18)
Volussiua
Harcena (1)
Hessenus (3)
Numiseuus (3)
Pomponenus (4)
Salenus (5)
Salvidenus (7)
Sarenus (9)
Satreuus (10)
Septimenus (11)
Trebellenus (12)
Umbrenus (13)
Varenus (14)
Vesenus (16)
Vettenus (17)
Vicrena (19)
Volussena (20)
Nous allons voir que lorsque le suffixe primaire -et
est développé à l'aide d'un suffixe secondaire , il doul
souvent son n; par exception, ce doublement a lieu 3!
(1) C. /. L.. X. 63T7.
[îl ;bid., XIV, 3359.
(3)»>id.. IX, 3*29.
(1) i6id., V, 2669.
(i) ibid., IX, 5843.
(6) Ibid., VIII, 2565 b 8. Cf. Salvidieous, X, 769, 2928.
(7) Ibid,, X, 2408.
(S) Ibid., V, 6115, toa.
(9) Ibid., V, 2013.
(10) Ibid., IX, 665, 4ff72.
(tl) Ibid., IX, 4336; X, 8377.
(lî) Ibid., V, IB78.
(13) Ibid., IX, 4171.
(14) fbtd., V, 14391 IX, 3463, 4333, 4970, 5124; X, 1333, 8048, 46: XII,
XIV, 3010, 3687, 3688.
(16) Ibid., IX, 2838; cf. Fabretti, Gloss. ilal., col. 1941.
116) Ibid., IX, 4604.
(IT) Ibid., IX, 4157; X, 3094.
(18) Ibid., IX, 4390.
(19) Ibid., IX, 3363, 5257.
pO) IMd„ Vin, 439, 1386.
45Î LIVRE II. CHAPITRE IV. | 1.
addition d'un suffixe secondaire : dans Vibenna (1), corres-
pondant à Vibius, dans Artenna (2), correspondant à Artius.
Les gentilices en ^enus se développent et donnent nais-
sance à des gentilices nouveaux par l'addition du suffixe
•ius. Les inscriptions nous offrent les dérivés :
Alfenius (3) d'Alfenus
Arrenia (4) d'Arrenus
Avenia (5) d'Avenus
Calenius (6) de Calenus
Messenius (7) de Messenus
Satrenius (8) de Satrenus
Varenius (9) de Varenus
Vettenius (10) de Vettenus
Volussenius (11) de Volussenus.
Le suffixe -ênius par e long et simple n peut se trans-
former en -enniits par e bref et double n. On a déjà deux
exemples du doublement de Vn dans le suffixe -mus :
Vibenna, Artenna. Ce doublement est beaucoup plus fré-
quent lorsque ce suffixe se développe à l'aide d'un suffixe
secondaire. C'est ainsi qu'à côté d' Avenia ci-dessus, une
inscription nous fournit Avennius(12); de même on a tiré:
•
de Caesenus Caesennius (13),
de Vesenus Vesennius (14).
(1) C. /. L., XIV, 2213. Cf. Fabretti, Glossarium italicum, col. 1969.
(2) Ibid., IX, 2838. Cf. Fabretti, Gloss. UaL, col. 180.
(3)/Md., X, 3334. 5, 7, 8; XIV, 2801.
(4)/bid., V, 4390; VIII, 8460.
(5) /6id., V, 3382.
(6) /6id., III, 1762.
(7) /6id., X, 1403 a 1, 12, 23, 24; T 3, 16.
(8) /Md., III, 2513; IX, 338, l, 7.
(9) Ibid,, III, 1198, 1482, 1513, 1514; X, 3337, 3500; XII, 2760; XIV, 246.
(10) Ibid., X, 3095.
(11) Ibid., VIII, 570, 813, 2560. 3; 8745.
(12) Ibid., VI, 12807.
(13) Ibid., V. 5315; VI, 13937-13952; VII, index; X, 722; XIV, index.
(14) Ibid., IX, 5439.
NOMS DE LIEU DÉRIVÉS DE GENTILICES EN -ENUS. 453
Attius a dû avoir un parallèle * AUeuus, d'où les gentilices
Attenius (1) et Attennius (2).
Caetennius (3) et Caetia supposent un intermédiaire
' Caetenus ;
Gavennius (4) et Gavius, un intermédiaire 'Gavenus ;
Nasennius (5) et Nasius (6), un intermédiaire 'Nasenus;
Pontennius (7) et Pontius, un intermédiaire 'Pontenus;
Tettennius (8) et Tettius, un intermédiaire 'Tettenus.
Ces principes posés, on peut passer à l'étude des noms
de lieux de la France qui sont des dérivés en -acus de
gentilices en -etms ou en -ennus.
S 2. — Les noms de lieu en -acus, dérivés de gentilices ro-
maÏTis en -enus qui se rencontrent dans les inscriptions
ou dont on trov/ve un dérivé dans les inscriptions ; 1" sec-
tion, caractérisée par le doublement de l'n du suffixe -enus.
L'addition d'un suffixe au gentilîce -enus produit sou-
vent en Gaule l'abrègement de la voyelle e et le double-
ment de Vn du suf&xe 'nus. On peut observer ce phéno-
mène dans le nom d'
AvENNACcs, aujourd'hui Avenay (Marne), tel que l'écri-
vent, au neuvième siècle, Les Annotes de Saint-Berlin (9) et
Frodoard (10).
Le doublement de Vn ne se produit pas dans une
charte donnée en 926 k l'abbaye de Cluny où il est ques-
lion d'une curtis Avenacus, située dans le pagus Equestricus,
(I) c. /. L., II, 537.
P) Ibid., II. 2159, 6038 ; XIV, 631.
(3) Ibid., XIV, 246.
H) Ibid., IX, 3353.
(5)Ibfd., IX, 1646, 4764.
(6) /6id., IX. 3191 : NasBiua ; IX, 5803 : Nasia, Cf. c
(7) Ibid., VIII. 2618 b, 24.
(8) Ibid., III. Î054 ; Tettonius, IK, 2959.
(9) Dora Bouquet, VIII. 26 d.
(10) Dom Bouquet, VIII, 156c; 167 a; 168 a; 194 a
454 * LIVRE II. CHAPITRE IV. { 2.
c'est-à-dire dans rancien territoire de la cité dont Nyon. en
Suisse, était la capitale (1). On ne ne trouve pas non plus la
double n dans les chartes de Tabbaye de Saint-Vincent de
Mâcon, où est mentionnée une villa Avenacus située en
Maçonnais aux dixième, onzième, et douzième siècles (2;;
cette villa était dans Vager Viriacensis^ dont le nom survit
aujourd'hui dans Viré (Saône-et-Loire). Mais les inscrip-
tions romaines nous donnent pour le suffixe -enifâs ou
-ennius dans les gentilices la même alternance d'n simple
ou de double n.
Avennacus et Avenacus sont tous deux dérivés du genti-
lice Avenus ou Avena constaté par les deux inscriptions
italiennes où on lit les noms de C. Avenus Fa... et de
M. Avena Macer (3).
Mabcennagus offre le doublement de Vn , comme Aven-
nacuSy Avenay (Marne). Marcennacus est la forme ancienne
du nom des quatre communes de Marsannay-la-Cdte .
Marsannay-le-Bois et Marcenay (Côte-d'Or) (4); de Mar-
cenat (Cantal) (5) et Marcenet , écart de la conmiune de
Saint-Maurice-sur-Loire (Loire) (6) , comme on peut le voir
par la chronique de Bèze , par le cartulaire de Conques et
par des chartes de Tabbaye de Cluny. Marcennacus, plus
tard Marcennagus , est un dérivé de Mafcenus, dont la
forme féminine nous est donnée par Tépitaphe de Marcena
Clementilla, trouvée près de Terracine (7).|
^J Bruel, Recueil des chartes de Vabh&ye de Cluny ^ t. I, p. 247, 948, 249.
(2) Ragut, CartuL de Saint-Vincent de Mâcon ^ p. 23, 200, 202, 209,210,
211, 215, 221, 352.
(3) C. /. L., IX, 2379; V, 3382.
(4) Garnier , Nomenclature historique des Communes , etc, , de la Cdle-
d'Or, p. 11, n* 38; p. 36, n» 158; p. 134 , n» 539. U faut corriger en Mircen-
nacum le Marcenniacum de la Chronique de Béze, édit. Boiigaad et Gar-
nier, p. 235 (Cf. Pardessus, Diplomata, t. Il, p. 366). Voir la bonne leçon
MarcennacOf p. 256, 259 de la même édition.
(5) G. Desjardins, Cartulaire de Conques, p. 78, n'83; cf. p. 479.
(6) Aug. Bernard. Cariuiaire de Savigny^ p. 82, 282, 1128; Bruel, Recudî
des chartes de l'abbaye de Cluny ^ t. II, p. 295; t. III, p. 278.
(7) C. /. L., X, 6377. — Cf. Marcius ci-dessus, p. 270-275, 411.
NOMS DE UEU DERIVES DE Q^NTILICEB EN - E N U S . 455
LucENNACUS est le nom ancien de Luceiiay-le-Duc (Côte-
d'Or), de Luzinay (Isère) et de Lucenay (Rhône). C'est
établi pour lés deux premiers par des chartes du neu-
vième siècle (1), pour le secoud par une charte du
dixième (2). lAicennacw suppose un gentilice * Lucenus dont
nous n'avons pas d'exemple; mais 'Lucenus n'est pas néces-
saire seulement pour expliquer Lucennacus : de * Lucenus
dérive le gentilice Lucenius attesté par deux inscriptions (3).
L'une est italienne. Mais l'autre est tout particulièrement
intéressante pour nous parce qu'elle a été trouvée eo France,
près de Nîmes ; c'est l'épitaphe de Lucenia Duritata (4).
Fenay (Côte-d'Or), déjà Faenay en 1163 (5/, se serait
appelé Fedenniacuê f au huitième siècle, si l'on s'en rap-
porte aux diverses éditions d'un diplôme de l'année 734 (6);
il faut ûter l'i, il faut écrire Fedennacus, notation basse
d'un plus ancien Fidennacus. Fidennacus dérive du gen-
tilice 'Fidenus, et 'Fidenus est nécessaire pour expli-
quer le gentilice dérivé Fidenius dont le féminin Fidenia
nous est conservé par une inscription d'Afrique, c'est l'épi-
taphe de Fidenia Victoria (7). 'Fidenus sert de pendant à
Pidius, gentilice qui se rencontre dans les inscriptions
d'Espagne (8) et d'Italie (9). En France , le musée de Mar-
seille possède une lampe qui provient de la fabrique de
L. Fidius Secundus; elle a été trouvée dans la ville d'Ar-
les (10).
(1) Ponr Lucenay-le-Duc , un diplAme de l'année 8S3 (Dom Bouquet, IX,
430 c); pour Luzinay (lEére), un diplôme de 653 environ (Dom Bouquet,
V]II,389d)et un autre de 885 (Cari u (aire de Saint-Hugues de Grenoble, p. 11).
(ï) AuK- Bernard. CaHuIatrs de Saoigny, p. 654, t12T.
(3) C. /. L., V, 7890; XII, 1063.
(4) ma., t. XII, p. 497 Bt 84Î, n- 4063. — Cf. Luciua. ci-dessus, p. 259.
[b] cmu Christiann, IV, coi. 584 s.
(6] Pardessuc, DiplomtU, t. Il, p. 366; cf. Oaraier, Nomenetaturt hlgto-
Tiqut, p. 27, n' 118.
(7) C. ;. L., VIII, 5582.
(Stibid.. 11,834, 835,2153.
(B) Ibid., V, 3609; X, 4136, 6606.
(10) Ibid., XII, 5663, 45. - Cf. ci-dessus, p. 231.
4i6 LIVRE II. CHAPITRE IV, { 3.
§3. — Les noms de lieux en -acus, dérivés de gentilices
romains en -enus qui se rencontrent dans le-s inscriptions
ou dont on trouve un dérivé dans les inscriptions; T section
caractérisée par Vn non doublée du suffixe -enus.
II y a deux noms de lieux dérivés de gentilices en
-enus , dont les documents romains établissent l'existence ,
mais pour lesquels les documents français n'offrent aucune
trace du doublement de Vn. Ce sont Artenacus et Catenacus.
ÂRTENAGus a été un nom de lieu assez répandu en
France. Le plus ancien exemple que j'en aie recueilli date
de Tannée 1164 (1), c'est Artenac, aujourd'hui commune
de Saverdun (Ariège). Le Dictionnaire des Postes men-
tionne deux autres Artenac, l'un est une commune du
département de la Charente, l'autre un hameau du même
département; tous deux ornent leur nom d'une h après le
t. On admire la même décoration dans le nom d'Arthenas,
commune du Jura, et dans celui d'Arthenay, écart de
l'Hommet (Manche). On écrit sans h les noms d'Artenay,
commune du département du Loiret et des trois hameaux
d'Artenay (Maine-et-Loire, Deux Sèvres et Vienne).
Artenacus est dérivé d**Artenus variante d'Artennus, dont
la forme féminine employée avec sens masculin nous est
conservée par une inscription d'Histonium dans Tltalie
centrale ; cette inscription débute par les noms de C. Ar-
tenna Pudens (2).
Le nom de la vicaria Catenacensis, en Anjou, apparaît
dans une charte de l'année 818 (3). Le nom de cette vicai-
rie est dérivé de celui dune villa * Catenacus^ dérivé lui-
même d'un gentilice * Catenus^ dont on n'a pas d'exemple,
(1) Douais, CariulsLire de Saint-Sernin de Toulouse, p. 370, 586.
(2) C. /. L., IX, 2838. — Sur Artius, voyez ci-dessus, p, 381-401.
(3) Mabille, Pancarte noire de Saint-Martin de Tours, p. 82.
NOHB DE LIEU DÉRIVÉS DE OENTILICEB EN -ENUS. 157
mais qui a certainement existé puisqu'il a donné le genti-
lice dérivé Catenius attesté par deux inscriptions (l). ' Cate-
Dus était parallèle à Catius qui est fréquent.
S 4. — Les noms de lieux en -acus dérivés de gentilices en
-enus dont les inscriptions n'ont conservé d'autre trace que
le gentilice en -ius correspondant.
Ayant donné ces exemples de noms de lieux en -ennaous
ou -enacus, dérivés de gentilices romains en -«tus dont
l'existence est démontrée, on pourra, ce semble, sans témé-
rité, faire remonter à des gentilices en -enus les noms de
lieu suivants, pour lesquels les textes antiques ne nous
offrent que des gentilices en -ius.
Albucennacus villa in agro Forensi (2) est mentionné
dans une chîirte de 960 environ. Les inscriptions n'ont
pas fourni d'exemple d'*AlbuceQus, mais Albucius est très
connu ; on en compte quarante-trois exemples masculins
dans les tomes III, V, et XII, du Corpus Inscript, latin.
Antennacus, au diocèse de Reims, aujourd'hui Anthe-
nay (Marne), nommé plusieurs fois au neuvième siècle par
les Annales de Saint-Bertin (3), dérive du gentilice * Ante-
nus dont on n'a pas d'exemple, mais qui était parallèle au
gentilice Antius (4). Cf. Ance et Ancy, p. 378, 379.
Bessenacensis ager et Bessenacus villa, dont il est question
plusieurs fois au neuvième et au dixième siècle dans les
chartes de l'abbaye de Savigny (5) , suppose un gentilice
'Bessenus; ce gentilice, qui n'a pas été signalé jusqu'ici,
(I) C. I. L., m, 33TT; X, 4345. — Sur CbUub, voyez ci-deuna, p. 213.
[1) A. Bernard, Carlulslre de Swigny, p. Kt,
(3) D. Bonquet, VII, 122 d, 123 b. Higne, Pair. laL, 1. CXXV, col. 1280, 128t.
(4) C. ;. z,., I, 834 ; II, 438; X, 4584, 4597, 7228, 7352; XIV, 324, 325, 1731.
(5) A. Bernard, Carlulafre de Savigny, p. 3t, 110, 254.
458 LIVRE II. CHAPITRE IV. { 4.
était parallèle à Bessius, gentilice ou cognomen connu par
une loi de Tan 291 de notre ère (1), et probablement dérivé
du nom de peuple Bessus. Bessenacus est aujourd'hui Bes-
senay (Rhône). De Bessius est dérivé Bissiacus^ nom de
Bissy-la-Màconnaise et de Bissy-sous-Uxelles (Saône-et-
Loire) dans un pouillé de 1500 environ (2).
BouTENACHus, aujourd'hui Boutenac (Aude), apparaît dans
une charte en 1185 (3). Ce nom de lieu dérive du gentilice
* Boutenus , parallèle à Boutius. Boutius est employé avec
valeur de cognomen ou de nom pérégrin dans sept inscrip-
tions d'Espagne ; c'est le nom d'un potier : un vase du mu-
sée de Vienne (Isère) porte la marque Boutius f(ecit) (4).
Carendenacus , aujourd'hui Carennac (Lot), memionné
en 932 dans une charte que nous a conservé le Cartulaire
de Beaulieu (Corrèze) (5) , a dû s'appeler primitivement Ca-
rantenacus et dérive d'un gentilice *Carantenus, parallèle
à Carantius, gentilice d'origine gauloise, dont plusieurs
inscriptions attestent l'existence (6). Cf. ci-dessus, p. 211.
Cavennacus est le nom d'une villa au neuvième siècle
dans une charte de l'abbaye de Savigny, c'est aujourd'hui
Chevinay (Rhône) (7). Cavennacus dérive de ''Cavenus dont
on n'a pas d'exemple (8), mais qui est parallèle au genti-
lice Cavius (9).
CoRTENNAGus pour Curtennocus ^ aujourd'hui Courtenay
(1) Gode Justinien, livre IV, t. i, 1. 6.
(2) Aug. Bernard, CaHuIatre de Savigny, p. 1049, l!08.
(3) Guérard, Cariulàire de Saint-Victor de Marwilte, t. II, p. 401, 819.
(4) C. /. L., II, 408, 458, 620, 744, 756, 794, 2786; XU, 5686, 140.
(5) Deloche, Cartulaire de Beaulieu, p. 88.
(6) C. J. L., III, 3916; XII. 2602, 2854, 2860, 3208, 3209.
(7) Aug. Bernard, Cartulaire de Savigny, p. 243, 1115.
(8) On pourrait supposer que Cavinnius (C. /. L., X, 4325) = *Caveimias,
dérivé de ^Cavenus.
(9) C. /. L., XIV, 790 ; cf. II, 4970, 127, 128.
NOMS DE LIEU DÉRIVÉS DE GENTIL1CE8 EN -ENUB. 45!
(Isère), apparaît dans deux chartes du neuvième siècle (1).
H suppose un gentilice 'Curtenus, parallèle au célèbre gen-
tilice romain Curtius, qui pénétra en Gaule comme oc
peut le voir par l'inscription de Nimes où figure C. Curtius
Primitus (2), et par l'èpitaphe de A. Curtius Zosimus, qui
a autrefois existé & Narbonne (3).
CosENACus. Une charte du dixième siècle met dans k
pays de MAcou un ager Cosenacensis (4). Le nom de ce1
aggr suppose une villa Cosenacus, dont le nom dérive d'un
gentilice 'Cosenus, parallèle à Cosius. Le musée d'Arles
possède l'èpitaphe de C. Cosius Trophimas (5). Il a existé,
sous l'empire romain, deux potiers nommés Cosius UraniuE
et Cosius Vrappus; on a recueilli aux musées d'Arles, de
Narbonne et de Nimes , des produits de leur industrie (6).
Frontennacus est le nom d'une villa qui parait avoii
été située en Lyonnais suivant un document écrit vers Is
fin du dixième siècle ou le commencement du onzième (7):
c'est Prontenas (Rhône). On peut en rapprocher ; Frontena-
gtis , au comté de Brioude, suivant une charte de l'an
née 895 (8) ; les trois communes de Frontenay (Jura .
Deux-Sèvres , Vienne) ; les deux communes de Fronte-
nac (Gironde et Lot). L'orthographe Fronteniacus = Fron
lenay (Vienne), dans une charte de l'année 889 (9), esl
défectueuse, il faut retrancher un i et écrire Frontenacus
Frontenaeus vient de ' Frontenus, parallèle à Frontius doni
te féminin Frontia est conservé par une inscriptior
d'Aouste (Drôme) (10).
(1) Carlulairc d« Safnt-Huguu de Grenoble, p. 11, 73, 527,
(î) C. /. L., XII, 3773.
(3) Ibid., XII, 4766, — Cf. ci-dessus, p. 225-226.
(4) Brnel, Recueil de» chsriM de J'abbaj/e de Cluny, t. II, p. 492.
(b)rbfd.,XII, 890.
(6) Ibid., XII, 56S6, 268, 269.
(7) Brnel, Becueil des cftariee de l'abbaye de Cluny, t. III, p. 361.
(8) DonJol, Car[u(afre de Brioude, p. 161.
(9) Redet, Dictionnaire topograph, du d^parlemenl de (a Vienne, p. 161
(10) C. /. L., XM, 1723, — Do là Fronaac (Hante-Oaronne. Gironde),
460 LIVRE II. CHAPITRE IV. 2 4.
Lentennacus. Suivant la chronique de Tabbaye de
Saint-Bénigne de Dijon , le roi Gontran aurait , en 587 ,
donné à cette abbaye, des biens dans plusieurs villae^
notamment in Lantennaco (1), qui est aujourd'hui Lante-
nay (Côte-d'Or) (2). Il y a un autre Lantenay dans le dépar-
tement de l'Ain. Lanthenay (Loir-et-Cher) n'en diffère que
par une fantaisie orthographique. Il est probable que
l'a de la première syllabe tient lieu d'un e primitif; la
forme primitive serait donc Lentennacus^ dérivé d'un genti-
lice * Lentenus. * Lentenus est parallèle à Lentius conservé
par Tépitaphe de Lentius Pudentius à Cabasse (Var) (3), et
par le nom de Lentia, aujourd'hui Linz, en Autriche.
La Notitia Dignitatum nous apprend que le duc de la
Pannonie première avait sous ses ordres 1"* des archers à
cheval cantonnés à Linz , équités sagitta/i*ii Lentiae ; 2* un
préfet de la legio secunda italica , établi avec une section
de cette légion dans la même ville , Lentiae (4).
Sentennacus. Santenay, nom de deux communes, l'une
de la Côte-d'Or, l'autre de Loir-et-Cher, et d'un hameau
de rindre-et-Loire, commune de Bourgueil, paraît être un
ancien Sentennacus dérivé de *Sentenus; et de *Sentenus
on peut rapprocher Sentius , gentilice assez fréquemment
employé sous l'empire romain : quatre Sentius furent
consuls de l'an 19 avant J.-C. à Tan 41 après J.-C. On
peut compter soixante et dix exemples du gentilice Sentius
au masculin dans les tomes II, III, V, VIII, X et XII du
C. L L. ; sur le nombre, six appartiennent à la Gaule. Ce
gentilice existait déjà sous la république. Ainsi en l'an 82
avant notre ère , C. Sentius Saturninus était préteur et
(1) Chez Migne» P&trologia latin&y t. CLXII, col. 768 c, Lantennaco, par
ri pour n, contient uno faute d'impression. Comparez Tédition de cette
chronique donnée par Bougaud et Garnier, p. 29 et 100.
(2) Gamier, Nomenclature^ p. 10, n» 36.
(3) C. /. L., XII, 345.
(4) Edition Bœcking, t. II, p. 99, 100; cf. Mommsen dans le C. /. L., t. III,
p. 690. — Voyez aussi ci-dessus, p. 361.
NOMS DE LIEU DÉRIVÉS DE GENTILIGES EN -ENUe. 461
exerçait un commandement en Macédoine, Gicéron fait son
éloge dans sa deuxième Verrine (1), et parle aussi de lui
dans son discours contre Pison (2). Cf. Sentiacus, p. 315.
Trebennacus, Une finis de Trevennaco est mentionnée
par une charte de l'anoée 889 (?) (3). Trevennaeus parait
une notation de basse époque pour Trebennacus de ' Tre-
benus. *Trebenus est le pendant de Trebius. Trebius ap-
paraît pour la première fois dans l'histoire romaine en
l'an 216 avant J.-C; c'était le cognomen du Samnite 9ta-
tius Trebius, de Compsa, aujourd'hui Conza, qui se rangea
du côté d'Annibal contre les Romains après la bataille de
Cannes (4). Au siècle suivant, Trebius fut le gentilice d'un
savant romain, Trebius Niger (5). Le gentilice Trebius de-
vint assez répandu sous l'empire : en l'an 133 de notre ère,
C. Trebius Sergianus obtint les honneurs consulaires (6),
on peut compter dans les tomes II, III, V, VIII et XII du
C. I. L. quarante-deux exemples masculins du gentilice
Trebius ; sur ce nombre sept appartiennent à la Gaule.
On terminera par deux noms de lieu dont l'étymologie
pourrait sembler difficile si les faits précédemment énoncés
n'étaient connus. Ces noms de lieux sont Neriennacus et
Aspemaous.
Nertennacus. En 1145, une bulle du pape Eugène III
énumére les biens de l'abbaye de Crisenon (Yonne) : dans
le nombre se trouve une grange de Nertennaco (7). Nerten-
(1) Livre III, î 217.
(2) ! 84. ~ Sur lu gens Seatia, vojez Paul/, Real-Encyclopaedie , t. VI.
p. 1047-1049. — Mon savant confrère M. Simèon Luce, ai connu par ses
savants travaux sur l'histoire du quatorziâme et du quinzième siècle, me
signale un exemple do Sentenacus, c'eat Saint-Eny, lisez Bainteny (Manche).
(3) Aug. Bernard, Carlulaire de Sivigny (Rhône), p. tj.
(4) Tite-Live, 1. XXIII, c. 1.
(5) Pline, Hiiloire naturelle, I. IX, J S9i cf. TeuSel, GeschichU der rœ-
miichen Lileratur, 3" édit., p. 211,
(6) Jos. Klein, Fasli consuUres, p. 6â.
(7) Quantin, CaH. de fY'mne. t. I, p. 391.
462 LIVRE II. CHAPITRB IV. { 4.
nacus suppose un gentilice * Nertenus et ^Nertonus un paral-
lèle *Nertius ; on ne trouve ni * Nertenus ni ^Nertius, mais
le dérivé Nertennacus prouve l'existence de * Nertenus ; et
quant à * Nertius son existence est démontrée par le dérivé
Nertiaous écrit Nerciacus au cas direct, Neroiaco au cas
indirect, dans deux chartes des environs de l'an mil (1);
c'était une villa située en Forez. * Nertius est un dérivé du
gaulois nerk>'n « force. »
ÀsPERNAGus. Près d'Aveuay (Marne) == Àvemuicus, se
trouve Epernay , même département ; c'est un ancien
Aspernacus avec métathèse de Vr pour Asprenacus d'As-
prenus. Asprenus est le gentilice corrélatif d'A^rius (2).
D'Asprenus je ne connais d'exemple qu'avec la valeur de
cognomen{3). Des savants français, au neuvième siècle, ont
cru bien faire de supprimer la voyelle initiale du dérivé
comme on la supprimait quand on remontait d' <k espérer » au
latin sperare, d' « esprit » kspirilus; ils ont donc écriiSpemor
cus,Sparnacus(k).\ud^ bonne orthographe est conservée par le
Cartulaire de Saint-Hugues de Grenoble^ où des gens moius
instruits ont écrit , dans une charte du commencement du
douzième siècle , parrochia de Aspemaico (5) , un nom de
village, aujourd'hui Epernay,communed'Entremont(Savoie).
Il n'y a pas à s'occuper ici de l'orthographe -aious^ où Yi
représente la prononciation réelle de la gutturale dans le
suffixe -acus à partir de Tan 700 environ , et où le c a une
valeur historique. Aspernaiciis = Aspernacus = Asprenacus.
(1) Aug. Bernard, Cart, de Savignyy p. 72, 373.
(2) Asprius, C. /. L., XII, 2633.
(3) C. /. L., X, 2848. Le dérivé Asprenas est plus fréquent.
(4) La notation Spern&cus se trouve dans un diplôme de Tannée 825
(D. Bouquet, VI, 544 a); Sparnacus dans la partie des Annales de Stint-
Berlin écrite par Prudence, évéque de Troyes, année 846 (D. Bouquet,
t. VI, p. 64 b; Migne, Patrologia latina, t. 115, col. 1399 a), etc. Il s'agit
d'Ëpernay (Marne). Spernacus, dans un diplôme de 834 (D. Bouquet, t VI,
p. 596 b, désigne Epernay (Côte-d*Or).
(5) Page 172, cf. 519.
CHAPITRE V.
EXEHPLB9 , kfl MOYEN AGE , DE NOMS DE LIEU
A DES eHNTILIGBS H0MAIN3 EN -#nW
) 1. Noms de lisuz identiques à des gentilicas es -enuê
étudiés. — I 2. Noms do lieux identiques à des gentilice!
on ne connut que des parallétee en 'iut. Ces noms de liei
«ulins singuliers, B. Féminins singnllera. G. Féminins pli
S 1". — Noms de lieux identiques à des gentilii
précédemment étudiés.
Atekna est, dans une charte de 1115, le non
mune d'Avéne (Hérault) (1). Il a été question
p. 454 , du gentilice Avenus. Peut-être doit-c
(le la même façon le nom de la colUs Aven
charte de 1043 qui concerne une localité siti
Saiiit-Cassian, commune du Muy (Var) (2).
TuRENNA ou Torenna, nom de Turenne ('
moyen âge, est, comme on l'a dit p. 442,
Turennus, employé comme eognomen dans uni
d'Espagne, mais qui doit avoir été aussi un ge
léle au gentilice romain Turius.
(I) Eugèno Thomas , Dictionnaire lopographique du
VUirauU, p. 10.
G) Guérard, Carlulajre de Saint-Victor de Marxpille. t. 1
464 LIVRE II. CHAPITRE V. { 2.
Cavenas, en 885, dans un diplôme de Saint-Marcel de
Ch&lon-sur-Saône (1) est identique au gentilice qui expli-
que le dérivé Cavennacus cité p. 458.
§2. — Noms de lieux identiques à des gentilices en -enus
dont on ne connaît que les parallèles en -lus.
Les trois noms de lieux dont il vient d'être question
sont féminins; les deux premiers singuliers, le dernier
pluriel. Ceux dont il nous reste à parler se divisent en
trois classes : A masculins singuliers ; B féminins singu-
liers ; C féminins pluriels.
Â. — ' Sont masculins singuliers :
CuRENNus , situé dans le pays de Gap, suivant le testa-
ment d'Abbon, en 739 (2) ; c'est aujourd'hui Corenc (Isère).
Une charte de 924 mentionne une villa appelée altus Co-
r&nnus (3), c'est le môme nom. Curennus est un gentilice
parallèle à Curius. Curius est un gentilice romain bien
connu qui a été surtout illustré par M\ Curius Dentatus,
trois fois consul, en 290, en 275 et en 274 av. J.-C, enfin
censeur en 272. Ce gentilice se maintint, sous Tempire, à
Rome et hors de Rome comme on peut le voir par les in-
scriptions (4). On le trouve en Gaule : à Vaison (5) , à Ni-
mes (6).
Maurennus est écrit au cas indirect Morennum^ en 849,
dans une charte du Cartulaire de Brioude qui nous apprend
que cette localité était située en Auvergne, dans Yaicis
(1) Dom Bouquet, IX, 337 c.
(2) Pardessus, Diplom&la,^ t. II, p. 373.
(3) Doniol, Cartulaire de Brioude, p. 39.
(4) C. /. L., VI, 16629-16633; X, 4103, etc.
(5) Ibid., XII, 1407.
(6) Ibid.y XII, 3201. — Sur le gentilice Curius, voyez De-Vit, Onomëtticon,
t. II, p. 513, 516, 517.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GENTILICE8 EN -E NU 8. 465
Mussiacensis (1). *Maurennus est un gentilicê parallèle à
Maurius dont on a parlé p. 281, 282.
* Severennus est probablement l'orthographe primitive
du nom de lieu appelé Cevrennus dans une bulle du pape
Urbain II pour le prieuré de Saint-Martin des Champs de
Paris, en 1096. C'est aujourd'hui Sevron (Seine-et-Oise) (2).
Severenus est un gentilice parallèle à Severius qui a donné
Severiacus^ Civry ou Sivry, étudié p. 316-319.
B. — Sont féminins singuliers les suivants :
Takvenna, aujourd'hui Thérouanne (Pas-de-Calais). Cette
ville existait déjà au second siècle de notre ère puisqu'elle
est mentionnée par le géographe Ptolémée. L'orthographe
de son nom a varié. Celle à laquelle on doit, ce semble,
donner la préférence a été adoptée par Vltinéraire d'An-
tonin où on la trouve trois fois (3) ; elle est confirmée par
Grégoire de Tours (4) , qui appelle les habitants Darabenn
nenses en intercalant un a hystérogène entre Vr et le b.
Une orthographe moins bonne substitue un a à Ve de
Tavant-dernière syllabe ; c'est la notation préférée par
Ptolémée (5) ; on la trouve aussi dans un diplôme de l'an-
née 662 , où se rencontre plusieurs fois le dérivé Tarvan^
mnsis (6); dans la chronique dite de Prédégaire, où le
même adjectif est noté Tharawanninsis (7). Il faut corriger
eu Tarvenna le Tervanna de la Table de PeuHnger (8) où,
comme aujourd'hui, l'ordre d'à et à'e est interverti.
Tarvenna, nom de lieu, doit son origine à un gentilice
(1) Doniol, Cartulëiire de Brioude, p. 112.
(2) Robert de Lasteyrie, Cartulaire de Pari», p. 489.
(3) Itinéraire d'Antoniny p. 376, 1. 4; p. 378, 1. 9; p. 379, 1. 1.
(4) Historia Francorum, livre V, c. 18; édit. Arndt, p. 215, 1. 6.
(5) Ta(>ovàvva, livre II, c. 9, i 4; édit. Didot-MûUer, t. I, p. 223.
(6) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 124.
(7) Livre III, c. 78; éd. Krusch, p. 114.
(8) E. Desjardins, Géographie de la Gaule d'après la Table de Peulinger
p. 85.
30
parallèle à Tarvius, epiployé cojsxme gentilice ^Uos uoe
inscription de Crémone (1). Ta?viijis est d^riw 4u cognomm
Tarvos recueilli dans une inscription de Lucanie (2). De
Tarvos est venu non seulement le gentilice Tarviu», mais
aussi le nom pérégrin Tanracus, gui a été porté par un
potier dont on a trouvé des produits en Suisse (3) et dans
TÂllemagne méridionale (4). Le nom de k ▼ille de Tré-
vise , en latin Turviswm (&) , paraît aussi être dérivé de
tarvos; on sait que Èarvo$ est le xiom gaulois du tsureati.
^ViTULENA villa est profetblement Terthographe la plus
ancienne du nom d'une localité appelée Vitlena , en 927 ,
dans un diplôme des empereurs Louis le Débonnaire et
Lothaîre (6). Le même nom de lieu parait désigner une ou
deux localités différentes dans deux diplômes de Charles le
Chauve pour Tabbaye de Saint-Martin de Tours en 849 et
en 862 (7). Le gentilice *VituIeuus était parallèle à un gen-
tilice Vitulius (8), variante de VituUius (9), et, probable-
ment aussi, du gentilice beaucoup plus connu Vitellius (10).
C. — B»t au féminin pkifiél :
* Cât^nas noté Cadmo dans le Polyptyque de SainhGer^
n^in des Prés (il). M. Loagnon a constaté, que c*est au-
jourd'hui Chône^Chenu (JËure^t^Loir). Ce nom de liaa
s'explique par un gentilice ^Catenus, parallèle à Çatius; il
4 été question de Gatius p. 2i3'r214.
(1) c. h L., V, 4091 ; «1 t. m, p. 8SS.
(2) /Md., X, 292«
(3) Ibid., XII, 5686, 863.
(4) Ibid., III, 6010. 217.
(5) Voyez les textes rémniê par M. MttasMB, C. I. L», i, V, p.
(6) Tardif, Monuments Mâioriquêe^ p. 83, col. 1.
(7) MabUla, Lap&ncarto noire dû Saint^Martin de Tàurû, p. 238 ; cf. UT, m.
(8) C. /. L., X, 5589.
(9) Ibid,, V, 3233, 4541.
(10) Sur le gentilice Vitellius, voyez Pauly, Rfi&l^SncyclopMêdie , t. VI,
p. 2681-2689.
(11) Ed. Longnon, p. 124.
CHAPITRE VI,
ElEMPl.ES, AU MOYEN AGB, DS NOMS DE LIEUX EN -OCUS
t>ÉRfVlÈâ ANlnÈRlEURÉMENT DE GOdNOMINA ROMAINS.
SoiouiRs :
1 1. Co^nùTHinSL é^tftigitré latine. — ( ^. CognotninsL d'érlgine ethbograpbî-
%«e. — i 3. Cogrmrhin% d^origint groQ^tie. -^ | é. Cocmomtea diveri d*ort-
giaa barbare.
§ !•'. — Cognomina d'origine latine.
^ÂssLLAGus. Une charte du douzième siècle, insérée dans
le Ca/rtulaire de Vctbbaye de Conques (Aveyron)^ a pour objet
la donation, à cet établissement monastique, de l'église
d'Àsellac (1). M. Gustave Desjardins , éditeur de ce cartu-
laire, suppose (2) que cette église était située prés de
Montpezat (Tarn-et-Garonne).
Asellac eèt dérivé à*Asellus. Dans deux inscriptions,
Asella, féminin d'Asellus, est un cognomen. Chacune de
ces inscriptions nous montre une veuve élevant un tom-
beau à son mari. L'une de ces femmes , en Afrique , s'ap-
pelle Gteminià Asella (3). L'autre, en f^rance, à Narfconne ,
s'appelle Roscia Asella ; l'inscription est consetvée au mu-
sée de Narbonne (4).
(1) Page 379.
(2) Page xcv.
(3) C. /. L., VIII, 2595.
(4) JWd., XII, 5171.
468 LIVRE II. CHAPITRE VI. l 1.
AselliÂSj d*où le cognomen féminin Asella, est un dimi-
nutif d'asinus « àne , » usité à la fois chez les poètes et
chez les prosateurs. Ovide (1) compare certaines femmes à
Tànesse qui brait, rudit, en faisant tourner la meule du
moulin :
Ut mdit a scabra turpis asella mola.
Les pères qui ont donné le surnom d'Asella aux deux
femmes mentionnées dans les inscriptions précitées
n'avaient pas ce vers présent à Tesprit, et Asella exprimait
pour eux une idée gracieuse.
Dans d'autres inscriptions , Asellus , Asella est un nom
pérégrin. A Cagliari, Asella, morte à vingt-deux ans, est la
fille d' Asellus , qui lui fit élever un monument funèbre et
qui, plus tard, âgé de soixante et dix-neuf ans, vint repo-
ser à côté d'elle (2); ni Tun ni l'autre n'a de gentilice. Près
d'Aquilée, on a recueilli l'épitaphe d'un enfant mort à deux
ans trois mois et vingt et un jours, qui s'appelait Asellus ,
également sans gentilice (3). Il est probable que, dans ces
deux cas, nous devons reconnaître le substantif latin
asellus , « petit âne , » donné comme nom à des esclaves.
On trouve aussi ce nom porté par des Juifs tant au mas-
culin (4) qu'au féminin (5); ici on peut supposer une ori-
gine étrangère , mais il est peu probable qu'en Gaule il y
ait eu , sous l'empire romain , des Juifs propriétaires et
donnant leur nom à un fundus,
* AcERACus parait la forme primitive d!Azeracus^ qui, dans
une charte du douzième siècle, est le nom d'Azerat, com-
mune du département de la Haute-Loire (6).
(1) At9 amatoria, HI, 290.
(2) C. I. L., X, 7629.
(3) /Md., V, 8572.
(4) Ihid,, IX, 6220.
(5) Ihid., IX, 6212, 6223.
(6) Ghassaing, Spicilegixim Briva-tense, p. 15.
DÉRIVÉS EN -AC US DE SURNOMS ROMAINS. 469
Ce nom de lieu est dérivé du cognomen Acer. On a trouvé,
à Nimes , Tépitaphe de Justus Carinius Âcer. Justus était
le prénom de ce personnage; Carinius, son gentilice;
Acer, son surnom (1). On a , dit-on , rencontré à Aix , en
Provence , un vase de terre avec le nom de potier au gé-
nitif Acri (2), qui doit probablement s'expliquer par un
nominatif Acer. Acer est un adjectif latin qui veut dire « vif,
ardent, brave. »
* BoNACus. Une ecclesia de Bonago est mentionnée dans
une charte probablement du onzième siècle (3) ; ce paraît
être une localité des environs de Toulouse. Bonagus est
une notation basse pour un plus ancien * Bonacus dérivé de
Bonus.
Bonus est un adjectif latin bien connu qui a été em-
ployé quelquefois comme cognomen. Le consulaire Rupi-
lius Bonus a dû vivre au premier siècle de notre ère ; il fut
le père de Rupilia Faustina, grand*mère|paternelle de Tem-
pereur Marc-Aurèle, né Tan 121 (4). Un rescrit de l'empe-
reur Gordien fut adressé, en 241, à un certain A. Bonus
dont le gentilice ne nous a pas été conservé (5). Le fémi-
nin Bona se rencontre comme surnom de femme en Afri-
que, Caecilia Bona (6), Geminia Bona (7), Cittia Bona (8).
Bonacus parait la forme primitive du nom des commu-
nes de Bonac et Bonnac (Ariège), de Bonnac (Cantal), de
Bonnac (Haute-Vienne) , de Bonnat (Creuse) , du hameau
deBonnat commune de Mons (Puy-de-Dôme), peut-être des
deux communes de Bonnay (Doubs, Somme).
Bonnay (Saône-et-Loire) parait avoir une autre origine.
(1) C. /. L., XII. 3687.
(2) IMd., XII, 5686, 1054.
(3) Douais, Cartulaire de Saiini-Sernin de Toulouse^ p. 192.
(4) Capitolin, Vie de Mure-Antoine le philosophe, c. 1, § 4.
(5) Code de Justinien, livre VI, titre 40, loi 1.
(6) C. /. L„ VIII, 2252.
. (7) Ihid,, 5709.
(8) Ibid., 7768.
m LIVKE n. CHAPITRE VI. f 1.
^CAtuLAGu^ doit avoi* été là notaticm aBticjue' du nom
ê» )i6u éotit ft )'abtaiif Cadolaicù , dans^ un di|yléin6 méro-
vingien de Ta-ûnée 7t0 (i).
CafahiB e^mmom commun latht qui veut dire « petit duo
animrâi >y et, dans un sen^ phis restreint, « petit chien. »
Il a été employé comtne^ cognoi/nen en Ganle sous Tempire
romaifi. Aili«), oft a trouvé : à Nimes, utté ins^criptroof funè-
bre gravée par ordre d'un affranchi de Q. Maximlus Catu^
lus (2) ; à Narbonne, Tépitaphe de M. Aemilius Catulus (3,.
Une kisori|rtioû de Oologné est destinée à rappeler la
reicoBistruction du prétoire par les' soins^ du légaf impérial
Q. Tarquitius Catulus (4). Une inscription funé^raiS'e de
Ntîm«rs noos fait connaître un cefrtahi Catulus auquel elle
ne donne ni prénom ni gentilice et qui avait un affrsifehr;
ee)ui-«i donna à un de SÉfô enfanta le nom de CatUnw
pour Cutfulmu^^ diminutif du coffnùmên ou du nom pérè-
grin porté par le paUon (5).
Le cognomen^ Catulus fut aussi employé comme nom de
ti«a san» addition de suffib^. Une charte de l'année 936
emiservée dana le fonds du chapitre de Rodez aux archi-
ves de TAveyroQ met en Rouergue un ministm'ium Catu-
lensê (fi) , c'e8tHà*4ire une vigoef ie dont le chef-lieu s'ap-
pelait Catuluâ^ et tîraH ce nom de eélm d'un ancien
propriétaire.
Il ne &ut pas confondre le cognomen Catulus avec le
aognomen plus connu Oatullus , ni ayec le gentilice Oatol-
lius d'oH CmuUiacm^ ancien nom du fundus romain où
fut bâtie l'abbaye de 3aint-Deni». On Suppose que ïe * Catu-
loGiÀS du dipiôme précité est Chailly , cotnniune de Vai-
res (Seine-et-Marne) : Chailly , semble-t-il , s'expliquerait
(1) Tardif, Monuments historiques^ p. 38, col. 1.
(2) C. /. L., XII, 4009.
(3) Ibid., 4569»
(4) Brambach, 331.
(5) C. /. L., XII, 3929.
(6)|Cette charte a été publiée par M. Gustave Desjardins datfs IsiBiblMftè»
que de l'École des chartes^ t. XXIV, p. 170.
DÉRIVÉS Et^ -ACUB blË SUftNOilS ROMAINS. 471
mietix par ttù ancien Catulia&uê. Dans le testament de
Pult^d, abbé de Saint-Denis, 777, Cadolacô (1) est une
faute pour CadolUaco =*= CatulliacOy et désigne Saint-Denis.
*GANACtJS est évidemment la forme ancienne du nom de
la localité appelée Chânac dans un dénombrement des
Yassauit qu'Alphonse, comte de Poitiers, frère du roi Saint-
Louis, a^aît en Auvergne, au milieu du treizième siècle (î) ;
c'est aujourd'hui Chanat, commune de Nohànent (Puy-de-
Dôme). *Canaetts, qui explique Chanac, est un dérivé de
l'adjectif latin canus « blanc , » qu'on trouve quelquefois
employé comme surnom. Cornélius Nepos (3) raconte
comment Q. Julius Canus, ami de Cicéroti, après avoir
été inscrit sur la liste de proscription à cause de la haine
du triumvir Antoine pour le grand orateur , en fut ensuite
rayé comme ami d'AtticuS. Dans le siéde suivant, JuliûS
Kanus fut une des victimes de la cruauté de Caligula. 8é-
nèque vante la tranquillité d'âme avec laquelle il apprit sa
condamnation. Il quittait l'empereur quand celui-ci lui dit :
« Ne te flatte pas d'une sotte espérance. J'ai donné l'ordre
de te conduire au supplice. » — « Je te remercie, excellent
prince, » répondit Julius Kanus, et il alla jouer une partie
d'échecs qui n'était pas terminée quand un centurion vint
le chercher. Julius Kanus constata que son partenaire
n'avait pas gagné et l'emportait seulement d'un point sur
lui , puis il partit , disant à ses amis en larmes : « Pour-
quoi êtes- vous tristes? vous cherchez si les âmes sont im-
mortelles , moi je vais le savoir (4). » Le cognomen Canus
ou Kanus n'est pas rare en Gaule. Une inscription de Ge-
nève mentionne un certain Valerius Kanus (5). L'épitaphe
d'A. Cornélius Kanus, trouvée à Laudun (Gard), est conser-
(1) Tardif, Monuments historiques, p. 61, col. 2.
(2) Chassaing, Spicilegium Brivatense, p. 58-59.
(3) Vie d'Atticus, c. 10.
(4) Sénéque, De tranquillitate anfmf, C. 14.
(5) C. J. L., XII, 2634.
472 LIVRE II. CHAPITRE VI. § 1.
vée au musée d'Aix eu Provence (1). L'aflFranchi Q. Reu-
conius Canus éleva à son patron un monument funèbre
qui a été trouvé à Nimes et qui est conservé au musée
d'Avignon (2). Parmi les débris romains employés à la con-
struction des remparts de Narbonne , on a reconnu Tépi-
taphe de M. Annius Kanus et on l'a transportée au musée
de cette ville où elle existe encore (3). Une inscription de
Vienne (Isère) rappelle la mémoire de Sex. Coelius Canus
questeur en cette ville (4).
Il y a en France deux communes de Chanac, Tune dans
la Lozère, l'autre dans la Corrèze ; mais une charte ,5
écrit le nom de la seconde Chalnac , ce qui permettrait de
supposer une origine différente. Chaney (Ain) peut être un
ancien Canacus, On peut admettre une origine identique
pour un certain nombre de hameaux. Tels sont quatre
Canac, savoir : deux dans le Tarn et un dans chacun des
deux départements de l'Aveyron et du Tarn-et-Garonne.
Nous citerons encore Chanac commune de Simeyrols (Dor-
dogne).
Chenove (Côte-d'Or) est, comme Chanac, un dérivé de
CanWj seulement le sufSxe est différent.
*Capitônacus ou ^Capitunnacus, tous deux avec reslilu-
tion d'un i bref atone, sont des variantes du nom de lieu ecril
à l'ablatif Capiunnaco^ en 691, dans la date d*uu jugement
du roi Clovis III et Captonaco, en 696, dans la date duii
privilège accordé par Agerad, évéque de Chartres (6). On
ne peut déterminer le nom moderne de ces deux localités
mais le primitif doit nous offrir la forme ancienne du nom
de lieu qui a fourni Tadjectif dérivé Capdenaceme à une
charte de l'année 861 , en faveur de Téglise cathédrale de
(1) c. /. L., XII, 2777.
(2) /6W., XII, 3265.
(3) Ibid., XII, 4585.
(4) ma., XII, 5864.
(5) Deloche, Carfulaire de BeaiUieu^ p. 251.
(6) Tardif, Monuments historiques^ p. 23, 3(
DÉRIVÉS EN -ACU& DE SURNOMS ROMAINS. 473
Rodez ; cette charte a été publiée par M. G. Desjardins (1) ;
le Cartulaire de Conques, édité par le même savant (p. 33),
donne le nom de lieu dont cet adjectif dérive ; ce nom est
écrit à Tablatif Capdenago; la charte date du milieu du
onzième siècle ; de * Capitônacus , on a tiré vers la même
époque le dérivé Captinacensis (2) dont Vi n'est autre chose
qu'une notation arbitraire d'un e substitué dès le neuvième
siècle à un 0 plus ancien ; il s'agit de Capdenac (Lot).
Capitônacus et sa variante Captunnacus sont dérivés de
Capito. Capito est un substantif latin; il vient de caput,
« tête , » et veut dire « qui a une grosse tête. » Ce mot ,
devenu une sorte de sobriquet, a servi de cognomen dans
la gens Fonteia et dans la gens Ateia. Quatre Fonteius Ca-
pito ont été successivement consuls : Tan 33 avant J.-C,
Tan 12, Tan 59 et Tan 67 après J.-C. G. Ateius Capito était
tribun du peuple, Tan 54 avant notre ère. L. Atteins Capito était
sénateur trois ans plus tard, et, en Tan 5 de notre ère, les
honneurs du consulat furent accordes à C. Atteius Capito
beaucoup plus connu comme jurisconsulte (3). Le cognomen
Capito est fréquent en Gaule. Nous signalerons d'abord la
variante Capitu dont Vu final peut être rapproché de Vu
médial du Captunnacus mérovingien ; elle nous est fournie
par une signature de potier conservée au musée de Vienne
(Isère) (4). Parmi les autres inscriptions où se rencontre ce
cognomen, on peut remarquer celles qui nous ont conservé
les noms de D. Julius Capito, citoyen romain et censeur
de la cité fédérée de Reims (5) ; l'une de ces inscriptions
existe encore au musée de Vienne. On a autrefois trouvé
à Aix, en Provence, l'épitaphe de L. Julius Capito (6). Une
inscription du musée de Narbonne nous apprend qu'il y
(1) Bibliothèque de l'Ecole des chartes, t. XXIV, p. 166.
(2) Ibid., p. 219.
(3) De- Vit, Onom&sticon, t. I, p. 535, 536.
(4) C. I. L., XII, 5686, 177.
(5) Ibid., XII, 1869-1870.
(6) Ibid., XII, 2470.
474 LIVitfi II. OHAPITOB m. f 4.
avait daoa cette ville un autel de Vulcain accompagné d'ii&e
piscine, le tout construit aux frais de la cité pdf lei$ BOim
dtt pl'éteur-duttmyir M. Variu» Capito (1). On a découvert,
dan^ la même ville , le» épltaphes de T. Fadioa Capito (3)
el de Q. Cornélius Capito. La seecmde exiete eneoi^ au
mesée local (3).
CahIonacus, villa où Louià le Débonnaire avait uu
pl^ai« d*ob il data une charte en 822 (4) , porte ub nom
dérivé de Carbo, -oni». Carbo n'est pas seulement le soriKiin
du célèbre orateur C. Papirius Carbo, coinsul en Tan 120 (5),
et d'autres membres de familles illustres de Rome ^ de la
§Ms Papiria et de la gens Manttia, il a été aussi porté par
des personnages moins notables ; tel est le potier dent la
ttiarque> Carb^mis[manu]f est empreinte sur un plat conserve
au musée de Genève (6)* Une inscription de Brescia nous
apprend aussi qu'il y eut dans cette ville un qualuorvir
p»ri dionmdo qui portait le surnom de Carbo (7). Le ^o^no^
m$n Carbo parait identique au nom commun latin earbo^
-^niA il ckkarbon. »
Catusagus est le nom d'une localité située aux environs
du Puy (Haute-Loire), vers le milieu du dixième siècle (8). Ce
nom doit peut-être se corriger en Catussacus, et, en ce cas,
dérive de Catussa, cognoman étudié page 104. Si la bonne
orthographe est par un seul s » Catusacus , ce mot vient de
*Catusa ou *Catusos. variante de Catussa. Comparez le
dérivé Catusanianm cité ci-dessus, page 421.
Cavannagus est le nom d*une propriété de l'abbaye de
(1) c. /. L., XII, 4338.
(2) Ibid,, XII. 4806.
(3) Ibid., XII, 5089.
(4) Bickel, Acta regum et imperaiorum Karolinorum^ t. II« pr. t^, 0* f81.
(5) ToufiFel, Geschichte der rœr^iêchen Literaêu^^ ZF ééît., p. ^0.
(6) Allmer, Inscriptions de Vienne^ t. IV, p. 70, n* 10(56^
(7) C. /. L., V, 4325.
(8) U. Chevalier, Cariulaire de Saint'Chaffte-du-Moft0^€9*, p. ^
à
DÉRIVÉS E)N -AOUB txe SUKNOM» ROMAINS. 4*3^
Saint-* Epttrès€-lè»-AngOttléme, aux fermer tftwi dipèôtne
donné par Charlemagne en 769, si nous en croyons la fie
*i célèbre efflpet^ur par le moitié d'Angouléme (i). Catan-
nacus dérite dé Cavanmis, nom d*tin potier dont la signa-
ture, conservé© au musée de Liège (2), a été récettiment
trouTée afUsôi à Reims (3). Cavannus, nom propre, est iden-
tique à un nom commun latin qui désigne une espèce
d'oisjeaw, le hibou. De Cavcmrms on pourrait rapprocher le
geBtilice Oavînnîus, atfssi par denx nw, conntï par une
inscription de Capoue (4). Mais Cavinnius dérive prol)able*
ment de Cavinus (5), et il a dû exister un gentîlice *Oavaïi-
nii» ou * Cavaniuâ ; c'est ce gentîlice qui explique le» tioûis
de Cavagnae (Lot), Chavagnac (Cantal, Dordogne), Ohava-
gné (Deux-Sèvres), Chavagnieu (Isère). Cabannaeu9y Cha-
vanay (Loire), dans une charte de 902 (6), doit être corrigé
en CavannaetÂS^ et dérive du cognomen Cavannus, tandis
que Cabckmuiria vient du nom commun caba^rmay « ca«
bane. n
OonifffNAGus. Dans les chartes* de l'abbaye de Cluny,
publiées' par M. Bruel, il est plusieurs fois question, au
dixième siècle, d'un, ager Communacensis (7) ou Commen-
Mcensis (8) situé dans lepagus de Vienne (Isère). La bonne
orthographe est la première, comme l'établit la formule in
(i) Dom Bouquet, V, 184 e. Migne, Patrologia lah'na, t. CXLI, col. 27 6.
Cf. Cavanac (Aude), appelé Caoannac en 1065, Cavanags en 1075. Gustave
Desjardins, Cartulaire de V&bbaye de Conques^ p. 5, 362, 450.
(2) Schuermans, Sigles figulinSt n* 1182.
(3) M. Tabbé Thédenat, Bulletin de la Société des antiquaires de France,
1884, p. 136.
(4) C. /. L., X, 4427.
(5) Un exemple du cognomen Gavinus est cité par De'-vit , OnomAStiùon^
t. n, p. 187.
(6) U. Chevalier, CaHuIaire de l'abbaye de Saint-Andté-lef-Bas-de-Viennet
p. 220, 228.
(7) Tome I, p. 509.
(8) Tome U, p. 375, 376, 377. Ce nom est écrit Comennaieo, Commenatêo,
Commcnnaico, chez Tabbé U. Chevalier, Cartulaire de 3aifit'€Hafp'e, p. f42,
145.
476 LIVRE II. CHAPITRE VI. î 1.
monte Communaco^ 940-941 (1). C'est aujourd'hui Commu-
nay (Isère).
Il n'y a aucun rapport entre ce nom de lieu et l'idée de
commune ou de biens communaux ; Communacus vient du
cognomen Communis. Un des sens de l'adjectif latin corn-
munis est « affable ; » c'est avec cette valeur que cet adjec-
tif a été employé comme surnom.
En voici des exemples italiens. Il y eut à Ostie, sous Tem-
pire romain, une corporation de fabri navales dont fit par-
tie un certain Badusius Communis (2). Une autre inscrip-
tion de la ville d'Ostie nous a conservé les noms de
l'affranchi A. Atinius Communis (3). On a trouvé à Pompéi
l'épitaphe de L. Ceius Communis (4). On lit dans une
inscription d'Herculanum les noms des affranchis C. BIos-
sius Communis (5) et P. Marins Communis (6). L'épitaphe de
l'affranchi C. RuUius Communis a été recueillie à Capoue(7).
Une inscription de S. Benedetto, l'antique Marsi Marruvium^
nous apprend les noms de T. Veturius Communis (8). Il
y avait à Reate, aujourd'hui Rieti, un collège d'adorateurs
d'Hercule, cultores HerculiSy et ce collège était propriétaire
d'un terrain, locm, qu'agrandit la libéralité de deux dona-
teurs , dont l'un s'appelait Q. Octavius Communis (9). La
même ville possède encore le monument funèbre élevé par
Varius Communis à sa fllle (10) ; il provient de la ville de
Rome. Une inscription d'Adria nous a conservé les noms
de L. Poblicius Communis (il), et deux inscriptions de Milan
(1) Bruel, tomo I, p. 508.
(2) C. /, L., XIV, n- 256, 1. 204.
(3) Ibid., XIV, 630.
(4) /6id., X, 1039.
(5) /bïd., X, 1408 r, col. 2, 1. 4.
(6) Ibid., x, 1403 g, col. 2, 1. 37.
(7) Ibid,, X, 4319.
(8) Ibid., IX, 3769.
(9) Ibid., IX, 4673.
(10) Ibid., IX, 4723 add.
(11) Ibid., V, 2357.
DÉRIVÉS EN -ACU8 DE SURNOMS ROMAINS. 477
ceux de Q. Bisius Communis (1) et de Furius Communis (2).
D'Italie le cognomen Communis pénétra en Gaule. Le
musée d'Arles contient le monument funèbre élevé par
Sex. Julius Communis à Flora, sa, côntuAemalis (3). Il existe
encore à Nimes une épitaphe que L. Karius Comniiunis a
fait gi'aver pour son fils au deuxième siècle de notre ère (4).
On doit considérer comme plus ancienne l'épitaphe d'un
soldat de la cohorte I des Thraces, monument consetvé au
musée de Cologne, et gravé par les soins de Bassins Com-
munis ; dans cette épitaphe , le nom de Lyon , au génitif
LugtAduniy conserve encore son second w, déjà supprimé
chez Strabon (5).
* DoMiNAGus. C'est ainsi qu'on doit restituer la forme pri-
mitive du nom de Dompnac (Ardèche) , appelé Dompnacus
en 1365 (6). Mais Dorrmacus sans i a dû être une variante
de Dominacus dès le temps de l'empire romain.
* Dominacus vient de dominus, nom commun dont le sens
est bien connu, qui a été employé au féminin comme cog^
nomen. On a trouvé en Italie, à Misène, et on conserve au
musée de Florence l'épitaphe d'Antonia Domina (7). M. Ger-
mer Durand a signalé à Gailhan (Gard) T épitaphe d'une
femme d'origine pannonienne, et dont le surnom était
Domina (8). La forme abrégée Domna est constatée par une
inscription romaine du Norique, aujourd'hui encastrée dans
un mur de l'église de Mœderndorf, près de Klagenfurt;
cette femme s'appelait Claudia Domna (9). On peut citer
aussi une inscription de Pescara, en Italie, qui est Tépi-
(1) C. I. L., V, 5841.
P) ma., v, 6107.
(3) IHd., XII, 814.
(4) ma., XII, 3693.
(5) Brambach, 310.
(6) Chassaing, SpicUegium Briijatense, p. 399, 653.
0) C. /. L., X, 3395.
(8) Jbid., XII, 3020.
(9) ma., m, 4828.
tapba de Pulc?ia Domna (1). Tout le n^oiid^ a
parler de Julîa Domna, née Yen 1&&« devenue « yéVB 175,
Icaome de Tempeireiir Septisae Sév^e, motie en 317, et
oôlàbfe par Thiâiiieiice ^qu'elLd eœrça &w wn mm et gw
Cancallft wx^ flU. £Ue était d'eri^ine ^ymaîncr. Maw lee
iu$cri{ri;k>a8 précitées montrent qua son cognamm était uajté
dftD$ Tempire ailleurs i^'eu Syrie. Le$ zMcriptîea» n'ofbesA
pa8 d'ei^es^ple du ^og^Mmm ^aasculin Docamus* Gekiî que
d&ime VOnûmoêHc^n du savant I>^Vit est le résvUat d*uae
mauvaise lecture : Dominus pour Domitus (2). Oapeudaot
(ML ai da la v«f iaute loasculme Douuius, 4eux exeiojples qui
remontent au commencement du troisième étende de n^re
ère ; ils nous ont été conservés par des rescrits d'Alexandre
Sévêce (2S2^235) insérés au Code àa JusCinlea (â)* Dans
obacua des deux cas, I>oinnua est le cognomen d'un hom»e
dont le prénom et la gentilice ne sont pas donnée.
* LiBEiAiCUs est la notation primitive du nom de lieu écrit
à Tablatif Idberaga : GQlonin in Liberago dans un état de
serfs appartenant à l'églîise Sainte Victor de Marseille au
dixième siècle (4).
" lsiberçu>u» dérive du cogr^komen romain Liber. On a trouvé
en Italie quelques exemples du féminin Lil>era. Dans uu
cas c'est le nom d'une femme esclave , con$ubem(^i$ d'une
autP9 esclave (5), mais ailleurs c'est le cognomsn de femmes
lilMre^; tellfls sont PuUiliia Libère à Osta, en Âpulie (6),
Pompeni» Libéra à Capone (7), Cauinia Libéra à Naples (B).
Ëo Qaule , le nom d*homme masculin Liber apparaît dans
(1) C. I. L., IX, 3341.
(2) Ibid., IX, 2188, add., p. 673.
(3) Livre IX, t. ix, loi 8, et livre XII, t. xxxvi, loi 7{ ees «xeat|)i^ et
d'aatres postérieurs sont cités par De-vit, Onomasticorit i. II, p^ 65a,<ool. t.
(4) Ouérard, C&rtulaire de Saint-Victor, t. I. p. 309.
(5) C. /. L., V, 4139.
(6) Ibid., IX, 694.
(7) Jbtd., X, 4298.
(8) Ibid., X, 1502.
DÉRIVÉS EW -AOlJf 9K &VW9m ROMAINS. «W
dm in«eri|Hio»ô de Trêves (1) et de Briguo» (Oafd) (2) ;
dana ç^ deia ovQdiujoaents il n -efit paa aciconiimgaé da 0en-
UUû8, Il a copiste un potiar du nom de Liber ; de9 vases
roMQi^ de aa marque »ont eooservéA aux musées de Mar^
sdèlle et d'Avignon {^). La foroie féminine s'eat rencontoée
edi G»u1b, à Nimes ; eUe est préeâdàe d'un gentilioe $M9Îa
(Caaaiaf) Libéra (4).
G*eat pftr le wm d'homme Liber gme «'ei^pUquent 1^
à»u^ pregiiâres syllabes d^ is^mi du Wurg de LlverduA
(Meup(ba-etrMo0eUe) , w nwvièiike ai^cld Uibi^rdunum (^^
Il y a w France ei«q eommunes de Livry (Maroe , Nié*
¥00, Seioe^et^Mame, Seiii^e-ietwOife), et deu» Livra (Ulenein
Vilaii3be, Mayenne). Ces nom» de lieu sont prûbableBief^
tous d'ancie&s Libmaçm dérivas itnm^diatemeat , non pas
du ùognom/^ Liber , mais de son dérivé 1^ gentmce Libe«-
rius. Il a autrefois existé 4 Lyon un^e inscription intéres*
santé; c'est l'épitaphe de G* Liberiu^ Deeimiuiuei eitoyein
de Vienne , marinier sur la Saône ; il était meiKij^re de la
corporation dea utriculaires de Lyon , l%giji^ni , et cette
orthogrAphe du nom de la ville est oelle des premiers temps
de la domination romaine (6). On a trouvé en Gueldre une
dédicace aux déeeses-màres dites Mopata» pa^r M.. Liberius
Victor, qui se qualifie de Nervien, civm H^rmm (7).
" MACfiiucus. C'est ainsi ^u'on doit restituer la forme la
plus ancienne du nom de lien écrit d$ Ma^erag^ dans une
charte de l'année 9ft^, Ma%mw^ dmis une autre charte du
même cartulaise (8). Le leoalité ^appelée ^Ulmn Maim^
(l) Brambach, n» 7TI.
B) C. /. 1^, %ll, 2Wa.
(3) ma., XII, 5686, 480.
(4) Ibid., XII, 3509.
\h) Lepage , DiciionnsLire topographique du département 4e ta Jf ewlètf ,
p. 79.
(6) Boisaien, Inscriptions de Lyon, p. 389.
(7) Brambach, n* 71.
(8) Doniol, Ctirtulaire de Brioude, p. 42, 49.
480 LIVRE IL CHAPITRE VL i L
cum (1) paraît nous offrir une variante du même nom.
Maceracus est un dérivé du cognomen Macer, « maigre, »
très fréquent à Rome , où il a été usité dans plusieurs
familles différentes. Au temps de Cicéron, par exemple,
vivait Licinius Macer, orateur et historien, qui fut succes-
sivement tribun du peuple et préteur . et dont Hermann
Peter a écrit la vie et recueilli les fragments (2). L. Baebius
Macer, qui composa un livre intitulé Festalia sacrùmm,
paraît avoir été contemporain d'Auguste (3). On a recueilli
en Gaule quelques exemples du cognomen Macer. Ainsi, à
Auriol (Bouches-du-Rhône) , un esclave nommé Alphios fit
une dédicace au génie de deux Annius , probablement ses
maîtres , surnommés l'un Macer , et l'autre Licinianus ,4;.
Le musée de Genève possède une liste de seviri^ en tête
de laquelle est inscrit le nom de Q. Stardius Macer (5/. Od
a trouvé à Neuss , dans la Prusse rhénane , l'épitaphe du
légionnaire vétéran Julius Macer (6). On a tiré déterre,
près de Mayence, l'épitaphe du légionnaire T. Julius Macer,
originaire de la ville celtibérienne de Nertobriga en Espa-
gne (7). Le cognomen Macer , sans gentilice , est gravé sur
une amphore que possède le musée de Vienne (Isère^ ,8.
Il y a aujourd'hui, en France, une commune de Mazeray
(Charente - Inférieure) , et quatre hameaux de Mazerao
(Gironde, Lot, Lot-et-Garonne, Tarn-et-Garonne). Le nom
de Maizeray (Meuse), celui de la commune de Mezeray
(Sarthe), et de plusieurs hameaux de même nom. peuvent
être des variantes de Mazerai. Dé Macer on a tiré un
gentilice Macerius conservé par une inscription du No-
(1) Deloche, Cartulaire de BeauHeu, vers 930, p. 91.
(2) Hermann Peter, Historicorum romanorum relliquiae, p. «cciïXYin-
GGGLm, 300-310.
(3) De- Vit, Onomaaticon, I, 659.
(4) C. 7. L., XII, 619.
(5) Ibid,, XII, 2617.
(6) Brambach, n* 261.
(7) Ibid,, n* 4160.
(8) C. /. L., XII, 5686, 518.
DÉRIVÉS EN -ACU8 DE SURNOMS ROMAINS. 481
rique (1) , d'où * Maceriacus , aujourd'hui Mezeriat (Ain).
*Masculacus, *Masclacus. Telles doivent avoir été les
formes primitives du nom de lieu qui s'est plus tard écrit
Maslacus, Un diplôme du roi Thierry III , qui a dû être
donné en 677 ou en 678 , est daté d'une localité appelée à
l'ablatif Maslaco (2). A la fin du onzième siècle un moine
de Saint-Père de Chartres, écrivant une sorte de cartu-
laire de cette abbaye, y inscrit trois fois le nom d'une loca-
lité qu'il écrit la première fois Maslaico. les deux autres j
fois Maslaco à l'ablatif (3) ; il s'agit de Meslay-le-Orenet i
(Eure-et-Loir).
Ce nom de lieu est dérivé du cognomen Masculus « m&le,
viril , » dont la variante Masclus n'est pas rare. On la
trouve en Italie, mais on peut se borner à donner des
exemples empruntés à la Gaule : épitaphes de L. Marins
Masclus (4), de L. Gaienina Masclus (5), de C. Mains Mas-
clus (6), àNarbonne. Masclus est aussi le nom de personnes
dépourvues de gentilice : épitaphe de Quarta Mascli fllia,
trouvée dans le département de l'Hérault (7); marques de
potier : of[ficina] Mascli, M[a]sclus fe[cit] (8).
Maihilacus , nom d'une localité dont il est question dans
un diplôme de Tannée 697 (9), est dérivé du surnom Ma-
ryllus, Marillus qui apparait comme variante de Marullus
dans les manuscrits de Sénèque le rhéteur (10), et qui est
(1) c. /. L., III, 5339.
(2) Pertz, Diplomataif p. 44, ligne 53. Tardif, Monuments historiques,
p. 18, col. 1.
(3) Quérard, Cartulaire de Saint-Père de Chartres, p. 44, 45.
(4) C. I. L., XII, 4980.
(5) Ibid., XII, 4493.
(6) Ibid., XII, 4964.
(7) Ibid., XII, 4209.
(8) md., XII, 5686, 560, m, t).
(9) Tardif, Monuments historiques^ p. 32, col. 1.
(iO)8énéque, Conlroversiae ;Yoyez Annaei Senecae, Oratorum et rhetorum
sententiae, divisiones, colores, éd. Teubner-Kiessling , p. 66, 67, 73, etc.,
et Vindex, p. 545; cf. Teujafel, Geschichte der roemischen Literatur. 3* édit.,
p. 594.
31
4fi2 I^IVRE II. CHAPITRE VI. | 1.
jusUflë par las dérivés MarUlina (i), Maiûlio (%) relevés dias
deux inscriptions. On peut supposer que Marillius vient
de mas, maris « mâle. » De Marillus on a tiré un gentilice
* Marillius, d'où Marillac (Charente).
M^dsoLACUB, villa où les rois mérovingiens aviieat
un palais au septième siècle (3) , porte un nom dérivé de
Massula, surnom d'une femme, dans une inscription trou-
vé(9 près de Cologne et conservée au musée de Bonn (4j.
Massplc^m est aujourd'hui, suivant M. Longnon, Ifday-le^
Roi (YoQna) (5). Massula, dont Massolacus dérive, est un
diminutif de massa « masse. »
PiVTERNACus est le nom 4d la comipune de Pernay (In-
dre-et-Loire) , dapis une charte de l'année 791 (6).
M. Eugène Thomas a réuni plusieurs textes sur une Loca-
lité appelée, en 1094, villa Paderni^ c'est-à-dire Patemi; en
1156, villa Patornoga, c'est-à-dire P^iernaca et située dans
la commune de Gigean (Hérault) (7).
Patemacus ne veut pas dire « bien paternel , » pas plus
q\i' Avitaciis a bien de l'aïeul : » Paternao^s est dérivé de Pa-
ternus, cognomen très fréquent. Pour la Gaule, le tome XII
du Corpus en donne soixante-huit exemples masculins et
trente-*cinq féminins. Il y en a seize exemples masculins et
six féminins, dans les Inseriptiones rJèsnanae de Brambach.
Ox;l sait que de Paternus est venu le gentilice Pater-
nius , d'où le nom de lieu Patemiacus , plus commun que
Patemacus, Le musée de Nimes possède Tépitaphe de
(1) MariUina, C. /. L., X, 2841.
(2) Marilio, C. /. L., V, 6815.
(3) Frédégaire, 1. IV, c. 44, 79, édit. Krusch, p. 143, 1. 2, p. 161, 1. 22, doue
diverses variantes. MaMoIacus, bas latin, pour un plus tmàen^MMSuUcut^
parait être la bonne leçon; cf. Vita Dagoberti, (i. 45; i^ûU, 9. 422, U 1(^11.
(4) Brambach, n* 434.
(5) Longnon, Atl&a hUtoriqiis de U France^ p. 189.
(6) Mabille, La panc&rte noire de Saint-Harlin de Tours, p. 230; cf.
p. 151, 152, n* 24.
(7) Dict. top. de l'Hérault, p. 191, col. 1.
DÉRIVÉS EN -AC US DE SURNOMS ROMAINS. 483
Sex. Paternius Maccianus (1) ; le musée de Bonn , une
dédicace aux déesses-mères de Trêves par T. Pater-
nius Perpetuus (2) ; le musée de Mayence , Tépitaphe de
C. Paternius Postuminus (3). Paterniacw, dans plusieurs
documents de l'époque carlovingienne , est le nom de
Pîlgii0j-^errière-Barine , de Pagny-sur-Moselle (Meurthe-
et-Mos€iUe) (4) et de Pagny-sur-Meuse (Meuse) (5). Pater-
niaca ou /^atemiocus^ nom de Payerne en Suisse, canton de
Vaud, dans les textes du dixième et du onzième siècle (6),
est la ioimB solennelle du nom de cette localité, qui devait
s'appeler vulgairement * Patemia^ d*où le moderne Payerne.
En Italie, on disait PaternianuSy d'où les mots de oasale
Patemiane, lisez Patemiano dans un diplôme de Charle-
magne concernant une abbaye du diocèse de Spolète (7).
PiPERACus est le nom d'une abbaye fondée au onzième
siècle dans le diocèse de Saint-Flour, aujourd'hui Pe-
brac (Haute-Loire). Pibrac (Haute-Garonne) paraît une va-
riante du même nom.
Pijferacus est dérivé du cognomen Piper qui a été lu sur
une marque de potier trouvée à Die (Drôme) (8) et à
Tarragone en Espagne (9). On a aussi employé en qualité
de cognomen les diminutifs Piperolus et Piperculus. L'épi-
taphe de Sex. Spurius Piperolus existe encore à Nimes (10);
et sur un monument funèbre aujourd'hui détruit, on a lu
dans la même ville une épitaphe qu'avait fait graver un
(1) c, I. L., XII, 3787.
(2) Brambach, 149.'
(3) Brambach, 1241.
(4) Lepage , Dictionnaire topographique du déparjiemeni de la Meurihe ,
p. 106, col. 1.
(5) F. Liénard, Dictionnaire topogr. du départ, de la Meuse, p. 175, col. 1.
(6) Diplôme de Tannée 962, chez D. Bouquet, IX, 667 C; cf. D. Bouquet,
X, 364 A, 374 C.
(7) Sickel, Acta regum et imperatorum karolinorunij t. II, p. 3^2, n* 57.
(8) C. J. L., XII, 5686, 692.
(9) Ibid., II. 4970, 392.
(10) Ibid., XII, 3333.
484 LIVRE II. CHAPITRE VI. l 1.
personnage dont le cognomen était Piperculus (1). Un autre
dérivé de Piper était Piperas; Aquilius Piperas fit gravera
sa femme une épitaphe, dont un fragment est conservé au
musée d'Augsbourg (2).
Le cognomen Piper a été aussi employé comme nom de
lieu sans suflBxe; témoin Poivre (Aube), appelé Pi^m
en 1032, Piper en 1202 (3). Ce cognomen parait identique
au nom commun piper « poivre. »
*PusiNNACus. Ce nom de lieu est écrit en 860 Pusinnaco,
en 887 Puzenaco^ à l'ablatif latin; au douzième siècle,
Poznac en langue vulgaire (4). Il s*agit d'une localité située
en Quercy.
Pusinnacus est un dérivé du cognomen Pusinnus, au fémi-
nin Fusinna. Le premier se rencontre dans une inscrip-
tion de Narbonne (5) , le second dans une inscription de
Die (6) , dans trois inscriptions d^Espagne (7) et dans au-
tant d'inscriptions de l'Italie du Nord (8). Pusinnus dérive
de pu^its « petit garçon, » au féminin pusa.
§ 2. — Cognomina avec sens ethnographique.
A cette liste de noms de lieu dérivés de cognomina dont
l'origine est latine, nous donnerons comme complément
quelques noms de lieux dérivés de cognomina qui avaient
été empruntés à des noms ethniques , les uns latins d'ori-
gine, les autres adoptés par la langue latine quoique leur
origine fût étrangère.
(1) C. /. L., XII, 3896.
(2) Jbid., III, 5837.
(3) Boutiot et Socard , Dictionnaire topographique du département de
l'Aube, p. 124, col. 1.
(4) Deloche, Cartulaire de Beaulieu, p. 254. 229, 62.
(5) C. /. L., XII, 4422.
(6) Jbid., XII, l(i58.
(7) Ibid,, II, 2284, 2414, 2589.
(8) Ibid., V, 4430, 4993, 5639.
DÉRIVÉS EN -ACUS DE SURNOMS ROMAINS. 485
Les noms de peuples employés comine cognomina ne
sont pas rares. En voici quelques exemples empruntés
à la Gaule. Une inscription de Narbonne fait connaître
les noms de P. Lucius Graecus (1) et une inscription
de Nimes ceux de Junius Graecus (2). Des inscriptions
de Vienne (Isère) et de Narbonne, ont conservé ceux
de Messins Italus (3) ; de M. Fulvius Italus (4) et de C. Ju-
lius Italus (5). Remarquons pour ce dernier que son cogno-
men ne contient nullement une indication d'origine , car
C. Julius Italus ne venait pas d'Italie ; il était de Sego-
briga en Espagne. Ligus c'est-à-dire « ligure , » est un
cognomen fréquent dans les inscriptions de la Gaule : à
rUe Sainte-Marguerite, M. Julius Ligus (6); à Fréjus,
C. Vibius Ligus (7); à Marseille, Julius Ligus (8); à Aix
en Provence, Albucius Ligus (9); à Narbonne, L. Baebius
Ligus (10). Citons encore : le cognomen Cantaber; à Vienne,
Isère), A. Lucilius Cantaber (11); à Villetelle (Gard), G. Sta-
tius Cantaber (12); — le cognomen Marsus ; à Narbonne,
L. Aufidius Marsus (13); — le cognomen Noricus ; à Nimes,
On. Reiconius Noricus (14) ; — le cognomen Tuscus; à Fré-
jus, Trebellius Tuscus (15).
Voilà, ce semble, un nombre d'exemples suffisant pour
montrer que les termes ethniques qui ont servi à former
les noms de lieux dont il va être question ont dû cette
(1) c. /. L., XII, 4957.
(2) Ibid., XII, 3686.
(3) Ibid., XII, 1985.
(4) JMd., XII, 4362.
(5) Ibid., XII, 4536.
(6) JMd., XII, 174.
(7) Ibid., XII, 306.
(8) Ibid,, XII, 462.
(9) /Md.. XII, .538.
(10) 76id., XII, 4656.
(11) 75id., XII, 1892, 1976.
(12) Ibid., XII, 4169.
(13) Ibid., XII, 4648.
(14) ïbid., XII, 3860.
:i5) ibid,, XII, 5738.
486 LIVRE II. CHAPITRE VI. | 2.
fonction à leur usage en qualité de cognomina. Nous les
diviserons en trois catégories. Il y en a deux dont Tusage
en qualité de cognomen est démontré, ce sont Mauruliis et
Romanus ; un a été employé comme nom pérégrin , c'est
Catalus ; enfin , il y en a trois que nous supposons avoir
été employés comme noms de personnes ou comme cog^
nomina quoique nous n'eu ayons pas trouvé d'exemple
avec cet emploi; ce sont : Britannus, Camus et Rutulus.
*Maurulacae. Telle est vraisemblablement Torthographe
primitive du nom de lieu écrit à l'accusatif Morlacas^ dans la
date d'un diplôme mérovingien du septième siècle (1); ce
serait dit-on, La Morlaye (Oise).
Le cognomen Maurulus est rare. Nous n'avons rencontré
qu'un exemple : dans une inscription d'Espagne, figure
une femme appelée Fabia Maurula (2). Mais Maurus, dont
Maurulus est un diminutif, se trouve fréquemment en Espa-
gne , soit comme nom pérégrin , soit comme cognomen , ce
qui s'explique par le voisinage de l'Afrique puisque mourus
veut dire « originaire de Mauritanie » ou , d'une manière
générale; « africain. » On rencontre aussi Maurus avec
valeur de cognomen dans d'autres parties de l'empire
romain. On peut citer à Bénévent l'épitaphe d'Umbrius
Maurus (3) ; à Concordia, dans l'Italie du Nord , le monu-
ment funèbre élevé à un chef des écuries impériales par
Aurélia Maura, sa femme (4).
De Maurus , on a tiré le gentilice Maurius , d'où le nam
de lieu Mauriacus, dont il y a en France un certain nom-
bre d'exemples. On l'a vu, pages 281-282.
RoMANAGus est uuo localité dont il est déjà question au
(1) Tardif, Monuments historiques^ p. 17, col. 1.
(2) C. /. L., II, 4362.
(3) /6id., IX, 2038.
(4) /Md., V, 1880.
. DÉRIVES CN -ACU8 DE 6URN0MS R0MMN6. 487
btiitièitie siècle (1). Au dixième siècle, cette localité est
qualifiée de villa dans une charte de Tabbaye de Saint-
Viûcent-de-M&con (2), et une charte de l'abbaye de Cluny
parle de Vager romanctcus (3). Ces deux actes sont d'accord
pour mettre cette localité dans le pagvs Lagdunensis^ c'est-
à-dire dans le Lyonnais. Vers Tan 1000, une charte du
cartulaire de Saint-Vincent de Mâcon mentionne la sei-
gneurie et la parolisse de Romanacus : ex potestate Roma-
naca et parroôhia (4). Dans tous ces documents il s'agît de
Romenay (8aône-et-Loire).
De l'emploi du cognomen Romanus en Gaule, nous cite-
rons les trois exemples suivants : à Arles, L. Grànius Ko-*
manus (5) ; à Annemasse (Haute-Savoie) , Aurelius Roma-
nus (6); à Cologne, Superinius Romanus (7). A Mayence,
Romanus est le nom d'un esclave dont le maître fait gra-
ver l'épitaphe (8). On a trouvé à Toulon l'épi taphe d'une
femme appelée Romana, et qui n'avait pas d'autre nom (&).
Romanus a été un nom de potier; le musée de Vienne
possède des échantillons de sa fabrication (10).
De Romanus on a tîté un gentîlice Romanius , d'où le
nom de lieu dérivé Romaniacus étudié pages 303-304.
Catalacus. Saint Ouen, archevêque de Rouen, écrivant
au septième siècle la vie de son contemporain saint Eloi ,
évoque de Noyon, le fait naître en Limousin, in villa Cata-
lacense (11).
Catalus est un nom d'homme pérégrin dans une inscrip-
(1) Ragtit, Cartulaire de Saini-Vincent de Màcon^ p. 54.
(2) Itid,, p. 184.
(3) Bniel, Recueil des chartes de Cluny , t. I, p. 730. |
(4) Ragut, p. 190.
(5) C. I. L.. XII, 727.
(6> ma., xir, 2576.
(7) Brambaeh, 318.
(8) Ibid,, 1244.
(9) Ibid., XII. 5760.
(10) Ibid., XII, 5686, 750.
(11) Dom Bouquet, III, 552 c.
488 LIVRE IL CHAPITRE VI. ( 2.
tion d'Aquilée qui est Tépitaphe du cavalier Catalus Callaei
fllius, séquane de nation, c'est-à-dire originaire de Besan-
çon ou des environs (1). On trouve souvent ce nom d'homme
en Irlande; par exemple Cathal, fils d'Aed, est un roi de
Munster qui serait mort en 625 (2). Catalus est aussi un
nom ethnique : les Catali sont un petit peuple des Alpes
dont il est question chez Pline (3).
De Catalus on a tiré un gentilice ^Catalius, d'où le nom
de la localité appelée, au onzième siècle , Kadaliacus pour
Cataliacus) villa 4). Cette localité était située dans le pays
de Bar (Corréze), et, suivant M. Deloche, elle s'est appelée
plus tard Cazillac.
*Britannacus. Ce nom de lieu se reconnaît sous le?
formes légèrement altérées Brittannaicus ei Britiniticus ûbus
des chartes du dixième siècle appartenant à l'abbaye de
Saint-Martin de Tours (5} ; c'est aujourd'hui Berthenay
(Indre-et-Loire). 11 y a, dans le département de TAisue, un
hameau de même nom. Brethenay, nom d'une commune
du département de la Haute-Marne , en est une variante.
Britannacus s'explique par un cognomen * Britannus dont
le sens primitif est ethnique. Du cognomen * Britannus est
dérivé le gentilice Britannius, et celui-ci, comme on Ta dit
p. 201, a donné naissance au nom de lieu BrUinniacus^
Bretiniacus^ aujourd'hui Bretigney et Brétigny.
Carnacus. Dans le testament d'Abbon, en 739, est le
nom de la commune de Charnay, arrondissement de Màcon
(Saône-et-Loire), in pago Matascense, c'est-à-dire en Maçon-
nais (6); nous retrouvons la même commune sous le même
(1) C. /. L., V, 907.
(2) Chron, Scotorum^ édit. Hennessy, p. 79. 8a mort est datée de 620 ptr
les Annales des quatre maîtres, Ed. O'Donovan, 1851, t. I, p. 244.
(3) Livre III, g 133.
(4) Deloche, Etudes sur la géographie historique de la Gaule, p. 323.
(5) Mabille, La pancarte noire, p. 220, cf. p. 187-189.
(6) Pardessus, Diplomata, II, 372, 505,
DÉRIVÉS EN -A eu 8 DE SURNOMS ROMAINS. 489
noin antique dans deux chartes du dixième siècle (1). Il y
a en France quatre autres communes de Charnay; elles
sont situées dans les départements du Doubs, du Jura, du
Rhône , enfin dans celui de Saône-et-Loire, arrondissement
de Chalon-sur-Saône. Les noms des communes de Carnac
(Lot), et Carnac (Morbihan) ont la môme origine. Il y a en
Italie , dans la province de Come , une commune de Car-
nago ; une localité de même nom dans le canton de Tessin,
en Suisse , figure dans la feuille VII de la carte générale
du théâtre de la guerre en Italie par Bacler-Dalbe.
* Camus a dû être un cognomen^ et ce cognomen était
identique au nom d*un peuple celtique, les Carni, établis au
nord-est de l'Italie, dans les Alpes. Ce cognomen a donné
naissance au gentilice Carnius dont on a des exemples à
Padoue (2) et en Afrique (3). Carnius explique le nom de la
commune de Saint-Remy-de-Chargnat (Puy-de-Dôme), des
hameaux de Chargnac (Corrèze et Dordogne), peut-être
aussi celui des Charny de la Côte d'Or, de la Meuse, de
Seine-et-Marne ,de TYonne et de l'Aube.
* RuTULACiE, sous-entendu villae, doit être la forme anti-
que du nom du lieu appelé, au cas indirect, termino Rodo-
laigas vers Tan mil dans une charte de Tabbaye de Con-
ques, qui met cette localité dans le pays de Toulouse : in
pago Tolosano (4). Un siècle environ plus tard, une autre
charte de la même abbaye écrit le même nom Rodolaiguas (5).
Rutulus est le nom des Rutuli, peuple bien connu de
Vltaiie centrale.
§ 3. — Cognomina d'origine grecque.
Nous arrivons aux noms de lieu qu'à Taide du sufiEbce
(1) Ragut, Carlul&ire de Saint- Vincent de MÂcon, p. 234, 276.
(2) C. /. L., V, 2522.
(3) Ibid., VIII, 6870, 6871, 7275.
(4) G. Desjardins, Cartul&ire de l'abbaye de Conques, p. 63.
(5) Ibid., p. 82.
490 hmos: n. chapitre vi. i si
"«eus OD a tiré de cognomina^ étrangers à la langue latine.
Noii» commençons par les oognomina grecs.
ÂTfiAN^cus. Àthanaous, aujourd'hui Âinay, au confiueiit
de la S&dne et du Rhône^ à Lyon, est devenu célèbre dkm
dans l'antiquité chrétienne par la mort des martyrs dits
Attdanao&nses y et dont parle le premier Grégoire de Tours,
dans son livre De la gtoire des martyrs^ c. 48 (1). Il fut
construit en ce lieu unô basilique qui donna naissaaïce à
une abbaye. Gette abbaiye a une notice dans le Gallia ohriê-
Hana (2), et son cartulaire a été publié par Auguste Ber-
nard à la suite de celui die Savigny.
À^hânaciiê dévive du nom d*homme grec 'AMvok, Ce nom
fut porté par un historien originaire de Syracuse , et doai
pafrle Diodore de Sicile (3). On connaît davantage le dérivé
'AtordÉcnoç, Athan^asc.
* HETRMfi^ftACts parait être Totthograpbe la plus ancienne
du nom du lieu appelé, a:u cas indirect, Herme^ogo rnlh
dans un diplôme de Charlemagne pour Tabbaye de Saint-
Denis, en 775 (4). Lepage (5) émet Thypothèse que ce
serait Remeréville (Meurthe-et-Moselle).
* Hermeracus est dérivé du cognomén Hermerus. De^Vit,
dans son Onomasticon, cite l'exemple : T. Statîlius Herme-
rus, fourni par une inscription. Ce cognomén est d'origine
grecque ; le nom d'homme "Èpfxefïoc a été relevé par Pape.
C*est une variante de 'lîpfx/pax, -»toç, Htermeros, -otis, qui
n*est pas rare dans les inscriptions latines, et dont on
trouve des exemples en Gaule : ainsi il existe encore à
Fréjus répitaphe de L. Valerius Hermeros (6) ; on a trouvé
(1) Edition Knisch, p. 522, 1. 10, il.
(2) Tome IV, eol. 233^241.
(3) Uyre XV, c. 94, g 4; édit. Didot, t. II, p. 64, I. i%
(4) Dom Bouquet, V, 736 c.
(5) Dictionn&irë tùpoffréphiquê du dép&rttiment de ta itf«ut«^he, p. 117.
(6) C. /. X.., XU, 271.
DÉRIVÉS EN -ACU» DÉ BURNOMS ROMAINS. 49f
à Aîx, en Provence, celle de L. Pompeius Hermeros (1).
Prtjnacûs. Une charte des environs de Tan mil met
dans le Lyonnais , in pago Lugdimensi , une villa qu'elle
appelle, à l'ablatif, Pnmaco (2).
Pru7%(j^cus paraît dérivé du cognomen féminin Prune,
variante latine de Phryne. Prune est, dans une inscription
d'Espagne (3), le nom d'une esclave affranchie par ses
maîtres Plotius et Fufla. Une autre inscription d'Espagne
est l'épitaphe d'une autre affranchie qui avait le même
cognomen , mais avec une orthographe plus grecque. Elle
est appelée au datif Valeriae Phryni (4).
*PARfHENACus. Le uom bien connu de Parthenay (Deux-
Sèvres) doit s'expliquer par un primitif Parthena^tiS dérivé
d'un cognomen Parthenus. Celui-ci est identique au sub-
stantif grec Bbtpô*wç, et se rencontre comme nom de saint
chez les BoUandistes aux dates des 1*'' avril et 17 mai.
Le dérivé Parthenius était plus usité, mais il aurait donné
le nom de lieu Pa/rth&niacus , qui serait , en français , Par-
thigny, Parthigûé, et non Parthenay.
§ 4. — Cognomina d'origine barbare.
Parmi ces cognomina de provenances diverses , dont on
a tiré des noms de lieu par l'addition du suffixe -acus , on
en remarque de gaulois. Nous suivrons l'ordre alphabétique
sans distinction d'origine.
Argentay, commune des Verchers (Maine-et-Loire), est
appelé Àrgenteium dans une charte écrite vers l'année 1 160 (5).
(1) C. /. L., XII, 524.
(2) Aug. Bernard, Cartulaire de Savigny, p. 248.
(3) C. /. L., H, 3495.
(4) /Md., II, 2068.
(5) Port, Dictionnaire historique de Maine-et-Loire, t. I, p. 132.
492 LIVRE IL CHAPITRE VI. { 4.
C'est un ancien ^Argeniacus qui suppose un cognomen
*Argentus ou, avec une légère variante orthographique,
*Arganto$^ au neuvième siècle Arganl dans le Cartulaire de
Redon : une charte datée de 869 par l'éditeur de ce cartu-
laire constate l'adoption de Salomon, roi de Bretagne, par
une femme appelée Roiant-dreh , arrière petite-fille d'Ar-
gant (1). D'Argant est dérivé le nom de femme Argantan ,
écrit deux fois dans le même cartulaire (2). L'orthogra-
phe irlandaise de ce dernier mot est Argatân. Argatân est
le nom d'un abbé irlandais qui serait mort en 894, suivant
les Annales des quatre maîtres (3), en 899 d'après le Chrch
nicon Scotorum (4), en 898 si l'on en croit les Annales
d'Ulster (5). Argantan ou Argatân est un diminutif d'Argant.
Argant est le premier terme des noms d'hommes composés
Argant-hael, Argant-lon, Argant-louuen et Argant-monoc,
qu'on rencontre aussi dans le Cartulaire de Redon (6).
Le nom d'homme, noté Argant dans le Cartulaire de
Redon^ au neuvième siècle, est identique au premier terme
de plusieurs noms de lieux composés de la Gaule. Le plus
connu de ces noms de lieux est Argento-ratus, comme l'écrit
Ammien Marcellin dans sa description de la Gaule (Tj :
Argentoratus barbaricis cladibus nota (8). C'est aujourd'hui
Strasbourg, chez Grégoire de Tours Strateburgum.
A la leçon Argento-ratus d'Ammieu Marcellin , les mo-
dernes ont préféré la variante Argento-ratum^ 'Apftvtoporrov ,
comme l'écrit Ptolémée (9). Pour déterminer avec certi-
tude quel était le genre du second terme de ce mot, on ne
peut faire usage ni de l'Itinéraire d'Antonin , où ce mot se
(1) Cartulaire de Redon, p. 83.
(2) Ibid., p. 118.
(3) Edition d'O' Donovan, 1851, t. I, p. 552.
(4) Edition Hennessy, p. 176.
(5) Edition Hennessj, t. I» p. 414.
(6) Pages 99, 103, 136, 146, 205.
(7) Livre XV. ch. xi. ) 8.
(8) Edition Teubner-Gardthausen, t. I, p. 72, J. 34
(9) Livre II, ch. ix, { 9, édit Didot-Mûller, t. I, p. 229, 1. 6.
DÉRIVÉS EN -AGUS DE SURNOMS ROMAINS. 493
trouve plusieurs fois au cas indirect Argentorato , ni d'un
passage d'Eutrope qui nous l'offre à l'accusatif : apud
Argentoratum Galliae urbem (1). On ne saurait donc afi&rmer
avec certitude que le genre du second terme d'Argento-
ratîÂS ou Argento^ratum fût le masculin ou le neutre.
Comment traduire ce nom de lieu? Il y a, en irlandais,
un nom commun rdih , forteresse. Il pourrait paraître très
séduisant de rendre Argento-ratus par « forteresse d'Ar-
gantos. )> Seulement rdth en irlandais, ou est une mau-
vaise orthographe pour râith, thème rdti-, ou vient de rdta,
féminin (2).
La variante Argento-7ate de la Table de Peutinger pouTTsii
être le cas indirect à'Argento-^dti-s , mais nous ne savons
quelle peut être la valeur de cette variante. Le -forw de
Ptolémée pourrait être considéré comme identique à l'irlan-
dais rath, « faveur, grâce, » qui est un thème neutre en -o,
mais la traduction « don d'Argentos » paraîtrait bizarre. Il
est donc prudent de laisser sans traduction le nom de lieu
Argento-ratus ^ Argento-ratum ^ ou de donner comme hypo-
thétique l'interprétation « fort d'Argantos. »
Le nom d'Argento-ratum, Argento-ratus, supplanté par celui
de Strasbourg, en Alsace, paraît persister dans le départe-
ment de la Mayenne sous la forme moderne Argentré. Le
nom de l'église d' Argentré, de Argent-rato, est compris dans
la liste des paroisses fondées par Turibius, évêque du Mans,
à la fin du cinquième siècle. Cette liste nous a été con-
servée par le compilateur auquel on doit les Gesta pontifia
ùum Cenomannensiwm (3) .
(1) Livre X, ch. xiv: édition Teubnor-Dietsch, p. 76.
(2) Voyez Tarticle 1 ràth et riith dans le glossaire de Windisch , Irische
Texte, I, 732; Rathi, dans le livre d'Armagh (WhiUey Stokes, The Tripar-
tite life of Palvick , t. II , p. 289 , 1. 21), est peut-être l'accusatif pluriel du
thème rati-, ce qui semblerait établir l'antiquité de ce thème; mais cette
explication de rathi est rendue douteuse par la variante fossam castelli.
Voyez la note 9 de la page précitée du livre de M. Whitlej Stokes.
(3) Mabillon, Vctera analecta, in-8% t. III, p. 64 (cf. Madtre, Dictionnaire
topographique du département de la Mayenne^ au mot Argentré; et Cauvin,
Géographie ancienne du diocèse du Afans, p. 24, col. 2.
éM LIVRC H. GHAPCram. f 4e.
Un nom de lieu beaucoup moins connu quUi
2Q3JS beaucoup plus clair , est celui de la station appelée
Âr^n^maçiJi»^ d^Q^ V Itinéraire d'Antonin. Arffcmto-'magus
vavit dire « 4^amp d'Axgantos. » C^est aujourd'hui Argen-
ton-sur-Crwse (Indre) (1). Il faut foire attention à l'or-
tb^Qgrapbe du premier terme de ce con^posé Arganta^ avec
un a, et non Argenio^ avec un e. Comparez le breton Ar-
gent, déj^ cité d'après le Cartulaire de Bedon, Argen4(h
p^^t une orthographe latine produite par rînfluence du
vooi latin argentum» De 1^ dan,s la Notitm dignUatum ...
Occidentis , chapitre VIII , l'orthographe par e du dérive
AriimM>'rwfien9U{i)i cowgie da»s Vltinéraire, c'est, paraît-il,
d!AjrgenJtQn-9ur-Creuse gu'il s'agit.
l)U oognomen * Argentus, on a tiré le dérivé Argentillus.
Arge^tillys , co^ime le breton Argantan , est un diminutif
d' * Argentus ou * Argantos. * Argentus ou * Argantos doit avoir
été usité comme surnom d'homme sous l'empire romain ,
mais nous n'en avons pas trouvé d'exemple. On est plus
heuj^eux pour Argentillus* Argentillus est le surnom d'un
affranchi dans une inscription de Narbonne (3). Le musée
d|3 la même ville nous a conservé le monuipent funèbre
que l'affranchie Annia Argentilla avait fait élever pour elle
et pour son patron (4). De Gaule, ce cognomen pénétra en
Italie, d'abord dans celle du Nord, où nous en trouvons six
exeipples (5) ; puis même plus au sud , car nous le ren-
controns comme nom pérégrii> dans une inscription de
3é^yent; c'est Tépitaphe d'une femme appelée Argen-
tilla (6).
Artonacus ou Artunnacus. La première leçon est celle
(1) Itinéraire d'Antonin, p. 460^ 1. 2; p. 461, 1. 2-3; p. 462, I. 3. Longnon,
Atlas historique de U France^ texte, p. 25.
(2) Edition Bôcking, t. Il, p. 43.
(3) C. /. t., t. XH, p. 853. n- 6006.
(4) Jbid., XII, 4586.
(5) Ibid., V, 1001, 1820, 1829, 1830, 1846, 7298.
(6) Ibid., IX, 1749.
DÉRIVÉS mi -AGUa DB SURNOMS ROMAINS. «15
d'une moimaie siéroviragiennc (1) ', ia seconde est x^elle
d'une charte du (mzième siècle en faveur de Tabbaye «de
Moléme (S). Ce dernier doottment eonceme ÀrtiioHaaiy
(Yonne) (3). Nous oe saiyorn pcus où a été &appée la mei^
naie mérovingienne.
Le nom d'homme Arto, d'eài ce nom de lieu dérive, «pr
paratt dans une inscription publiée par M. Mommsen (4);
c'est probablement un dérivé 4^2 nom gaulois de Tiours
dont on a paarlé plus haut, p. 384. On doit^ ce eemble,
rattacher à la même origioe le nom d'Aortonne (Puywiei-
Dôme), Àrkma vieOj sur une monnaie métovi<HgÎ0QflQ (B).
BnsNNAeus est surtout connu pour avoir été le nom d*«ine
habitation des rois mérovingiens. M. Longnon a éitabii
qu'avec ce sens ce nom désigna Berny-rRivière (Aisoe) {â).
Dans les documents de la période mérovin^ime , Toiv-
thographe préférée parait avoir été Brinnaeus ; c'est , du
moins, la notation adoptée par les nouveaux éditeur» de
Grégoire de Tours et de Fortunat. Un autre Binnnaem
était situé aux environs d'Evreux ; il en est question dans
un diplôme de l'année 689 (7) ; on suppose que ce peut être
Brenay, commune de Branville (Eure) (8). Le Ccurtuiairs de
Briûude mentionne deux fois une villa appelée à l'atdfitif
Brminago, située en Auvergne, dans la vicairie de Brioude
(Haute-Loire) (9) ; c'était probablement au dixième siècle ;
nous retrouvons la même localité sous le même nom, de
BrennacOj au quatorzième siècle (10) : c'est Brenat, commune
(1) A. de Qarthélemar , ^^m ia BâUiùfh, 4^ l'Jfaqh d^f 9h^^^ K ^^fYif
p. 451.
(2) Quantin, Cartulaire général de l'Yonney t. II, p. 27.
(3] Quantin, Dictionnaire topographique du département de l'Yonne, p. 5.
(4) /. R, iV., 6833. De- Vit, OnomaêHeon, t. II, p. 494.
(o) A. de Barthélémy, dans la BibL de l'Ecole des chartes^ t. XXVI, p. 451.
(6) Géographie de la Gaule au êixième sièelej p. 896.
(7) Tardif, Monuments historiques, p. 637, col. 2.
(8) BloBseville, Dictionnaire topogr, du département de l'Eurs^ p. 8^.
(9) Doniol, p. 101 ; cf. p. 92.
(10) Ghauaing, Spicilegium Brivatense, p. 4S7, 629.
496 LIVRE II. CHAPITRE VI. { 4.
de Saint- Just (Haute-Loire). Deux chartes du dixième
siècle mettent en Lyonnais une villa Brenacus (1) , appelée
aussi Brennacus : in Brennaco vers Tan 1000 (2) ; c'est Le
Barnay, commune de Bessenay (Rhône). Brennacus a dà
être la forme primitive des noms des communes de Bre-
nat (Puy-de-Dôme), de Brenac (Aude), des deux hameaux
de Brené (Maine-et-Loire), etc. Ainsi s'explique aussi le
nom de Bernay (Eure), appelé Brenaicus dans un document
des environs de l'an 1000 (3), et probablement aussi les
noms des communes de Bernay (Charente-Inférieure , Sar-
the, Seine-et-Marne) ; ceux des communes de Bemac (Cha-
rente, Tarn, Hautes-Pyrénées).
Brennacus est dérivé du nom d'homme gaulois bien
connu, Brennos, qui s'est maintenu sous l'empire romain,
comme l'établit une inscription de Bordeaux (4). La forme
féminine de ce nom nous a été conservée par une inscrip-
tion de Rome, qui est l'épitaphe de Brena Secunda (5). De
ce nom gaulois on a tiré un gentilice romain noté Brenia
au féminin dans une inscription du Latium (6), et Brinnius
dans plusieurs inscriptions de Campanie (7). De ce genti-
lice vient un nom de lieu, *Brinniacus^ qui explique le
nom moderne de Brigné (Maine-et-Loire), de Brignac (Cor
rèze), Brignac (Morbihan). Brennus et Brenna, en italien
Brenno et Brenna, ont été employés comme noms de lieux
en Italie : Brenno dans les provinces de Come et de Turin;
Brenna dans celles de Come et de Sienne.
* BuRNAGus est la forme primitive du nom de la commune
de Saint-Jean-de-Bournay (Isère) , appelée à l'ablatif Bor-
(1) A. Bernard, CaHuiaire de Savigny, p. 38, 109.
(2) Ibid., p. 231.
(3) Blosseville, Dictionn, topogr, du départ, de l'Eure^ p. 17.
(4) Jullian, Inscriptions romaines de Bordeaux, t. I, p. 317.
(5) C. /. L., VI, 13633
(6) Ibid., XIV, 4155.
(7) Ibid., X, 451, 1403, 2174, 2175.
DÉRIVÉS EN -A eu S DE SXmNOMS ROMAINS. 497
naco dans un diplôme de Tannée 739 (1). Le nom de cette
commune est identique à celui de Bournac , hameau de la
commune de Saint-Affrique (Aveyron), appelé à Tablatif
Bomctco, dans une charte du treizième siècle (2).
*Bumacus vient de Burnus, nom d'homme qui parait
gaulois. On a trouvé en Espagne Tépitaphe de Camalus,
fils de Burnus (3). Le même nom d'homme a donné le pre-
mier terme du nom de lieu * Burno^magus , appelé Burno-
mus au neuvième et au onzième siècle, aujourd'hui Bour-
nan, hameau du département de la Vienne (4).
* Cedracus. Une charte de l'année 689 met dans le Maine
une localité appelée au cas indirect Càedraco (5). Il faut
corriger Cedraco.
Ce nom de lieu est dérivé de Cedrus, cognomen dans
une inscription d'Ostie (6). Le nom d'homme Cedrus se
rencontre, employé comme nom de lieu, dans l'itinéraire
de Bordeaux à Jérusalem, Cedros (7),, dont l'emplacement
aurait été à Villesèque (Aude), suivant M. Longnon (8).
CoRBONACus est une des résidences des rois carlovin-
giens. Nous y trouvons Charlemagne en 771, suivant les
Annales dites Tiliani^ suivant celles d'Eginhard et de
Fulda(9). Charles le Chauve en date un diplôme en 841 (10).
Antérieurement, une charte de l'année 708 mentionne la
même localité au cas indirect sous le nom de Corbunaco (11).
Il s'agit de Corbeny (Aisne) (12).
(1) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 372; CaWulairc de S&int-Hugues de
Grenoble, p. 37.
(2) Guérard, C&rtuUire de Saint-Victor de Marseille, t. II, p.- 282, 849.
(3) C. /. L., II, 2484.
(4) Redet, Dict. topogr, du départ, de la Vienne^ p. 58.
(5) Tardif, Monuments historiques, p. 637, col. 2.
(6) C. /. L., XIV, 427.
(7) Itinéraire d'Antonin, p. 551, 1. 8.
(8) Atlas historique de la France, p. 27.
(9) Dom Bouquet, V, 18 e, 201 b, 328 a.
(10) Ibid,, VIII, 431 d.
(U) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 277.
(12) Matton, Dict. topogr. du départ, de l'Aisne, p. 76.
32
498 LIVRB n. CHAPITRE VI. { 4.
Corbonacm est dérivé de Corbo, eogwimen d'un affranchi
dans une inscription de Pannonie (1).
De Cori3o on a probablement tiré un gentilice, *Corbo-
nius , d'où CorbiniacuSy nom de Corbigny (Nièvre), au hui-
tième et au neuvième siècle (2).
Gorbo, -onis dérive d'un nom d'homme barbare, Corbus,
conservé par une inscription du Norique contemporaine
de l'empire romain (3). Ce nom était probablement gaulois.
On en trouve une variante en Espagne Tan 206 avant notre
ère. Les Romains font la conquête de l'Espagne sur les
Carthaginois, et une partie des habitants est entrée dans
l'alliance romaine. Parmi ceux-ci, on compte deux hommes
illustres, Corbis et Orsua, qui, se disputant le pouvoir dans
leur ville natale , se battent en duel à Carthagène sous les
yeux du général romain, lui procurant ainsi gratuitement
le plaisir d'un combat de gladiateurs (4). De Corbis parait
venir le nom de la ville espagnole de Corbio^ chez les Sues-
setani^ peuple probablement gaulois. Corbio fut prise par
les Romains l'an 184 avant notre ère (5).
*CoTTONACus. Deux chartes, l'une de Tan 1000, l'autre de
1003, concernent une propriété située dans le pays de
Grenoble, in villa Cotonaco (6).
Ce nom de lieu est dérivé du nom barbare Cotto, Cot-
tonis. Ce nom était porté, en l'an 179 avant notre ère, par
un noble bastarne, ami des Macédoniens (7). Il est dérivé
de Cottos, nom probablement gaulois d'un potier dont on
peut encore lire la marque au musée de Vienne (Isère) :
CoTTi OFFicina (8). Ce nom d'homme semble identique au
(1) C. I. L., I, 1466 ; III, 3776.
(2) Soultrait, Dicl, topogr» du départ, de la, Nièvre, p. 54.
(3) C. /. L., III, 6497.
(4) Tite-Uve, 1. XXVIII, c. 21.
(5) Ibid., L XXXIX, c. 42.
(6) Carlulaire de Saint-Hugues de Grenoble, p. 16, 17.
(7) Tite-Live, 1. XL, c. 57.
(8) C. /. L.. XII, 5686, 272.
DÉRIVÉS EN -AC US DE SURNOMS ROMAINS. 499
breton coz^ « vieux. » Outre Cotto, il a donné un autre
dérivé plus connu, Cottius, nom porté par le roi à cause
duquel on appela Cottiennes un tronçon des Alpes.
* Eburulacus. C'est ainsi qu'il faut restituer le substantif
doii l'on a dérivé l'adjectif Eborolacensis^ qui qualifie le
substantif praedium^ dans une épitre de Sidoine Apolli-
naire (1). Cette épitre parait avoir été écrite en 474 , et la
localité dont il s'agit était située dans le voisinage de
Clermont (Puy-de-Dôme), qui fut cédé aux Wisigoths Tan-
uée suivante.
"Eburulacus est dérivé d'^Eburulus qui est un diminutif
d'Eburus. On a émis l'hypothèse qoi Eburulacus serait iden-
tique à Evrogilum, un des quatre palais de Louis le Débon-
uaire du vivant de Charlemagne (2). Evrogilum est aujour-
d'hui Ebreuil (Allier) (3) ; c'est un dérivé d'Eburus et non
d'*Eburulus. Eburus a été étudié déjà, p. 168-169.
* Isarnacus doit être la forme la plus ancienne du nom de
la commune appelée aujourd'hui Yzernay (Maine-et-Loire).
Nous n'avons pas d'exemple du nom d'homme Isarnus
dans la période romaine , mais il a été fréquent dans les
premiers temps du moyen âge (4).
Sedegenacus , avec une orthographe savante , en 929 ;
Sedegenagus notation plus rapprochée de la prononciation
du temps, en 893 (5), est aujourd'hui La Touche, commune
de Cherves (Vienne), et s'explique par un nom d'homme
gaulois *Sede-genos, ou peut-être *Sedio-genos « fils de
Sedios. y>
(1) Lib. III, 5. Migne, Patrologia UiineL, t. LVIIt, col. 499 6.
(2) VU& Ludovici PU, c. 7. D. Bouquet, VI, 90 c. Migno, t. CIV, col. 932 d.
(3) Longnon, Atlas historique de la France, p. 178.
(4) Voir plus haut, p. 184-186.
(5) Redet, Dici, topogr. du départ, de la Vienne, p. 411, 412.
■
CHAPITRE VII.
EXEMPLES , AU MOYEN AGE , DE NOMS DE LIEUX IDENTIQUES A
DES cognomina romains.
SOMHAIRB :
( 1*'. CognominsL employés au masculin singulier. — 2 2. Cognomina em-
ployés au masculin pluriel. — {3. Cognomina, employés au féminin sin-
gulier. — {4. Cognomina employés au féminin pluriel.
§ !•'. — Cognomina employés au masculin singulier.
Brannus. Une villa Brannus en Auvergne est mention-
née plusieurs fois dans le cartulaire de Sauxillanges (i .
Elle était située dans la viguerie d'Usson (Puy-de-Dôme *2
Il a été question du nom d'homme Brannus, pages 399-400.
Catalus. C'est par ce nom d*homme pérégrin que s'ex-
plique le nom de lieu d'où dérive l'adjectif catalensis. On
le trouve dans la formule in aice Catalense, qui désigne une
petite circonscription géographique située en Auvergne au
neuvième siècle (3). Le Sequane Catalus Callaei filiiis:
nous est connu par une inscription (4).
Catulus. Un fundus Catulus explique l'adjectif dérive
(1) Ed. Doniol, p. 91, 268, 387, 549.
(2) Ibid., p. 387, 685-687.
(3) Deloche, Cartulaire de Beaulteu, p. 244.
(4) C. /. L., V, 907.
i
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES COGNOMINA. 501
catulensis qui se trouve au dixième siècle dans le nom
d'une petite circonscription du Rouergue, ministerium CaPur
lense (1).
Catulus est un substantif latin qui a été employé comme
cogncnnen à Rome dans la gens Dutatia. Plusieurs Lutatius
Catulus ont été consuls en 242, en 220, en 102, en 78
avant notre ère. Les inscriptions latines de la Narbon-
naise nous offrent des exemples de ce cognomen : par
exemple à Nimes, Q. Maximius Catulus (2); Catulus était
aussi un nom pérégrin comme l'atteste une inscription de
la même ville (3). On doit probablement reconnaître la forme
féminine de ce cognomen dans Cadola, nom de hameau en
Italie, province de Bellune.
Celtus. Une villa Celtus figure au dixième siècle dans le
testament apocryphe de saint Rémi, que Flodoard a inséré
dans son histoire de Reims (4).
Celtus, originairement nom de peuple, est un nom péré-
grin attesté en Gaule par une inscription d'Uzès (5), en
Espagne par une inscription d'Âlcantara (6).
Mahcellus. Un vious Marcellus figure deux fois dans une
charte de Tannée 729, en faveur de Tabbaye de Wissem-
bourg (7). On reconnaît dans ce nom de lieu le cognomen
romain qu'a illustré la gens Claudia. Il a été très fréquent
en Gaule sous Tempire romain ; on peut en compter plus
de cinquante exemples tant masculins que féminins , dans
Vindex du tome XII du Corpus inscriptionum latinarum ;
dans les uns c'est un cognomen proprement dit, dans d'au-
(1) La charte qui l'établit a été publiée par M. G. Desjardins dans la Bi-
bliothèque de VEcole des chartes, t. XXIV, p. 170.
(2) C. i. L., XII, 4009.
(3) Ibid., XII, 3929..
(4) Pardessus, Diplomata^ t. I,p. 85. Migne, Pair. Iat.,t. CXXXV, col. 66 d.
(5) C. /. L., XII, 2928.
(6) Ibid., II, 755.
(7) Pardessus, DtpZomata, t. II, p. 454, 455.
502 LIVRE- ïl. CHAPITRE VII. | L
très lé nom de personnages qui n'avaient pas de gentilice,
comme dans les insctiptions 1314, 1675, etc. — Marcello
est le nom de deux hameaux d'Italie, provinces de Padôue
Ql de Brescia.
Marcus est, au neuvième siècle, le nom d'uD locu$
situé en Limousin dans la viguerie d'Espagnac ; c'est
aujourd'hui Matc-la-Tour (Cofréze) (1). Marcus est un cog-
nomen qu'on trouve quelquefois dans les inscriptions de la
Gaule : T. Tossius Marcus, à Arles i2);C. Lucceius Marcus,
à Orange (3); G. SoUius Marcus (4), à Grenoble; L. Sanctius
Marcus, à Genève (5). Marcus est aussi uù nom pérégrin ;
Marcus Caeci fllius, à Uzès (6); Marcus Hermolai fllius (7
et Marcus Nigrini filius (8), à Nimes.
SOLLEMNis. Urle localité, appelée Solemnis villa et viens.
est comprise deux fois dans l'énumération des propriété?
de Téglise du Mans par des diplômes impériaux carlovin-
giens, la première fois en 802 (9), la seconde fois en 832 (10).
SoUemnis est un ôognomm usité aussi comme nom péré-
grin; il est par exemple cognomen dans une inscription de
Worms (11), Servandius Sollemnis; dans une inscription
du musée de Carlsruhe, Q. Caecilius Sollemnis (12); il est
nom pérégrin dans une inscription de Nimes, Manibus
BoUemnis (13).
(1) Deloche, Cartulaivê de Beau2t«i4, p. 240, 378.
(2) C. /. L., XII, 719.
(3) Ibid., XII, 1247.
(4) Ibid., XII, 2252.
(5) Ibid., XII, 2597.
(6) tbid., Xn, 2936.
(7) Ibid., XII, 3081.
(8) Ibid., XII, 3732.
(9) Dom Bouquet, V, 768 e. Sickel, Acta Karolinorum, t. II, p. «T, n- \M
(10) tbld., VI, 585 e. Sickel, Acta Karoliho'ritfn, i. ÎI, p. 179, n* 308.
(11) Brambach, 902,
(12) Ibid,, 1674.
(13) C./. L.,. XII, 3923.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GOGNOMINA. 503
TuBNtJS est uûe villu située près de Reims, sur la Marne,
M qui appartenait au neuvième siècle à la cathédrale de
Tours, comme l'atteste un diplôme de Charles le Gros
en 886 (1). C'est aujourd'hui Tours-sur-Mame (Marne) dont
r^ final s'explique par Turres, étymologie erronée. Deux
diplômes de Charles le Simple en 899, sont datés d'une
localité qui porte le même nom, Tti/rnuts (2). La date in
villa TiÂmis se trouve dans un diplôme du môme roi en
914 (3). Mansus de Turnis est, en 1269, le nom de la Tour,
commune d'Aumessas (Gard) (4).
Ce nom de lieu est identique à un cognomen romain
porté au premier siècle de notre ère par un affranchi qui
exerça de l'influence à la cour impériale sous Titus et
Domitien et qui composa des poésies satiriques (5).
De ce cognomen vient le dérivé TurnaciLs forme primitive
non seulement du nom de Tournay (Belgique), mais encore
du nom d'autres localités ; tel est aujourd'hui, en France,
Tornac (Gard), appelé Tomagus dans deux diplômes du
neuvième siècle et plus tard avec une orthographe plus
savante, Tornacus (6). On peut citer aussi, en France,
Tomay (Haute-Marne), Tournay (Orne), Tournay (Calvados),
Tourny (Eure); en Italie, Tornaco (province de Novare),
Tornago (province de Milan); comparez, avec le suffixe latin
-anuSy Tornano (province de Porlî).
Vassillus est le nom d'une villa qui, en 898, était située
dans le comté de Turluron et dans la vîguerie de Bil-
lom (Puy-de-Dôme). C'est aujourd'hui Vassel (Puy-de-
Dôme) (7).
(1) « Tnmum in Remensi pago super fluvium Haternam poaitûtn. »
Dom Bonquet, IX, 355 b.
(2) Ibid,, IX, 476 d, 478 a.
(3) /Md., IX, 522 b.
(4) Germer Durand, Dictionnsiire topogr&phiquê du Gard, p. 246.
(5) Sur le nom d'homme Turnus, voir plus haut, p. 170.
(6) Germer Durand, Dictionnaire topogr&phique du Gard, pé 245.
(7) Doniol, Cartul de Brioude, p. 314; cf. Cartul. de SauxilUngeê, p. 681.
504 LIVRE IL CHAPITRE VIL l 2.
Une inscription de Grenoble nous a conservé les noms
de Primius Vassillus (1); une inscription de Vérone ceux
de Pacilia Vassilla (2), Vassilla est un diminutif d'un
thème gaulois Vasso- , conservé par exemple dans le nom
d'homme composé Vasso-rix d'une inscription d'Alsace (3-.
De Vassillus on a tiré le gentilice Vassillius attesté par
une inscription trouvée à Cadenet (Gard) (4) , et par une
inscription des environs d'Uzès, aujourd'hui conservée au
musée Calvet d'Avignon (5).
Ces exemples empruntés à des textes du moyen âge
justifient Texplication que voici d'un nom de ville qui se
trouve déjà dans des textes du temps de l'empire romain.
TuLLUM est le nom de Toul (Meurthe-et-Moselle),
chez Ptolémée au deuxième siècle, puis dans V Itinéraire
d'Antonin{Q), Tullum^ sous-entendu jpraerfmm, est identique
à un cognomen romain. Nous connaissons, par une inscrip-
tion de l'Italie septentrionale, les noms de P. Sertorius
TuUus (7) , par une inscription de Nimes ceux de M. Man-
lius Tullus (8), par une inscription d'Arles, ceux de L. An-
nius Tullus (9).
§ 2. — Gognomina employés au morsculin pluriel.
Sont employés au pluriel masculin, Artigeni, mentionné
plus haut (p. 398), et :
*Blaesi. Blaesus est un adjectif latin qui veut dire
(1) C. L L., XII, 2286.
(2) Ibid., V, 3570.
(3) Brambacb, 1858.
(4) C. /. L., XII, 2746.
(5) Ibid., XII, 2857.
(6) Voyez ci-dessus, p. 374.
(7) C. J. L., V, 7545.
(8) Ibid., XII, 3726.
(9) Ibid., XII, 5804.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES GOQNOMINA. 505
« bègue ; » il a été employé comme cognomen. En Tan 36
de notre ère, deux Junius Blaesus furent réduits au sui-
cide par la tyrannie de Tibère (1). En 70, un autre Junius
Blaesus était recteur de la Gaule lyonnaise (2) ; Vitellius
le fit mettre à mort (3). Ce cognomen se répandit en Gaule.
Le tome XII du C. /. L nous en ofiFre neuf exemples. Sur
une patère comprise dans le trésor de Bernay, qui est,
comme on sait, conservé au cabinet des antiques de la
Bibliothèque nationale, on lit, gravés au pointillé, les noms
de Q. Lucanius Blaesus (4). Dans une inscription de Cais-
sargues(Gard}, ce nom, au féminin, apparaît sans gentilice :
Blaesa Blandi filia (5).
De là le nom de la ville de Blois, qui se rencontre pour
la première fois, vers la fin du septième siècle, au datif
pluriel Blezis, dans Tanonyme de Ravenne (6). Mais le dé-
rivé Blesensis est attesté plus anciennement ; on le trouve
un siècle plus tôt chez Grégoire de Tours , il désigne les
habitants de Blois (7).
Le nom de la ville de Blois est identique à l'adjectif
vieux français blois, « bègue, » et nous donne, comme cet
adjectif, un exemple de la notation française oi, représen-
tant Vae latin = é long : comparez proie de praeda ; mais
ciel de caelum nous offre cw = * bref.
S 3. — Cognomina employés au féminin singulier.
" CupiTA est le nom ancien de Cotte, écart de la com-
mune de Cortambert (8aône-et-Loire); car il faut probable-
ment restituer ainsi le nom de la villa Copia ^ mise en
Maçonnais par une charte du commencement du onzième
(1) Tacite» Anna2««, VI, 40.
(2) Tacite, HUtoirei, I, 59; II, 59.
(3) Ibid., III, 28.
(4) R. Mowat, Notice épigraphique de diverses antiquitéê, p. 156.
(5) C. I. L., XII, 4074.
(Q Edition Pinder et Parthey, p. 235, ]. 3. Alfred Jacobs, Gallia ab anonymo
RavennaU descripta^ p. 35.
(7) HUtorU Francorum, Uvre VU, c. 2; édit Amdt, p. 292, 1. 18.
506 LIVRB II. CHAPITRE VU. | S.
siècle en faveur de Tabbaye de Cluny (1). Dans le même
chartrier on trouve l'orthographe Cobta en 945 (2) et vers
953 (3). Comparez le pluriel *Cupztas, Cubtas^ dont il sera
question plus loin, p. 508.
Cupitus est un cognomen latin assez fréquent, et dont
les inscriptions de la Gaule fournissent plusieurs exemples :
ainsi M. Velocius Cupitus , près de Vence (4) ; Ti. Julius
Cupitus, àPréjus{5), etc. On le trouve aussi employé comme
nom pérégrin : Cupitus Tolosani filius, 6 Toulouse (6).
RoMULA était, en 950, le nom d'une villa située près de
Chamboulive (Corrèze) (7).
Romulus est un cognomm latin qu'on rencontre quel-
quefois dans les inscriptions romaines en Gaule et hors de
Gaule. Nous citerons : C. Terentius Romulus, à Nime8(8);
T. Domitius Romulus, à Narbonne (9). Quelquefois on voit ce
cognomen employé seul sans gentilice : Romula, au féminin,
dans une inscription d'Arles (10).
Urbana parait être la bonne orthographe du nom de la
villa Orbanay mentionnée en 695 dans un diplôme du roi
Childebert III (1 1). C'est le féminin du cognomen Urbanus qui
n'est pas rare dans les inscriptions du temps de Tempire
romain : C. Attius Urbanus (12), Cn. Cornélius Urbanus (13),
à Nimes ; L. Cornélius Urbanus, à Bonn (14), etc.
(I) Bruel, Recueil des chartes de Cluny , t. I, p. 121.
(î) Ibid., p. 6Î8.
(3) Ibid., p. 787.
(4) C. L L., XU, 49.
(5) Jhid., Xn, 289.
(6) Ibid,y XII, 5389.
(7) Deloche, Etudes sur la géographie historfquê de U Oaule^ p. S28.
(8) C. /. L., XII, 3350.
(9) Ibid., XII, 4335.
(10) Ibid,, XII, 870.
(II) Tardif, Monuments historiques, p. 27, col. 1.
(12) C. /. L., XII, 3441.
(13) Ibid.y XII, 3564.
(14) BrMibadH 4da.
NOMS DE LIEU IDENTIQUES A DES COGNOMINA. 507
Nous terminerons ce paragraphe en proposant pour un
nom de lieu attesté par des documents antérieurs au moyen
âge une explication analogue à celle que nous donnons
pour les noms de lieux dont il vient d'être question.
LuTEVA, aujourd'liui Lodève, est un nom de lieu qui re-
monte à Tempire romain ; on le trouve dans la Table de
Peutinger avec l'orthographe Loteva^ variante de basse épo-
que que Ton peut corriger à l'aide du dérivé Lutevani dans
Pline (1), et en se servant de documents plus récents,
comme la flotice des provinces de la Gaule et les textes
réunis par M. Longnon dans sa Géographie de la Gaule au
sixième siècle.
Luteva n'est pas autre chose que le féminin du cognomen
et du nom pérégrin Lutevus, conservé par des inscriptions
de Saint-Remy (Bouches-du-Rhône) (2), de Vaison (Vau-
cluse) (8), d'Aramont (Gard) (4).
S 4. — Cognomina employés au féminin pluriel.
AcuLLAS , noté Agolas dans une charte des environs de
Tan 1000 (5), parait être aujourd'hui Goules (Corrèze).
AcuUa est le nom de la mère d'un affranchi dont l'épi-
taphe a été trouvée à Este , en Italie (6).
Albinas est un nom de lieu dans une charte du Cartu-
laire de Sauxilkmges (Puy-de-Dôme) (7).
Le cognomen Albinus est très répandu, et il a été employé
comme nom pérégrin, par exemple dans une inscription
(1) Pline, livre III, | 36; cf. Table de Peutinger, segment ii , 3; Desjar-
dins, Géographie de la Gaule d'après la Table de Peutinger, p. 374.
(2) C. /. L., XII, 998.
(3) I5td., XII, 1431.
(4) 76id., XII, 2813.
(5) Deloche, Cartulaire de Beaulieu, p. 262.
(6) C. /. L., V, 2568.
(7) Doniol, p. 410.
608 LIVRE II. CHAPITRE VU. { 4.
trouvée aux environs d'Aps (Ardèche) (1), dans une inscrip-
tion de Die (Drôme) (2).
CupiTAS est le nom d'une commune du département de
la Marne, aujourd'hui Queudes. Les habitants étaient
appelés Cupedenses au neuvième siècle , comme on le voit
par les Annales de Saint-Bertin ^ sous la date de 858 (3}.
C'était le oheMieu d'une vicairie appelée Copedinsis dans
une charte de Tannée 813 ; cette vicairie est qualifiée de
centaine, centena Cupedensis, dans la notice du décès de
saint Ursus , évéque de Troyes , mort en 426 , et , dans la
même i;iotice, Queudes est appelé Cubtas. Cette notice a
été conservée par un martyrologe de Provins (4).
On a parlé du cognomen Cupitus plus haut, à l'article
Cu/piUx, p. 505-506.
RoMULAS est, dans une charte des environs de 1020, le
nom d'un château situé dans le comté de Riez (Basses-
Alpes) (5). C'est aujourd'hui Roumoules (Basses-Alpes) (6).
Romulas est le pluriel féminin du cognomen Romulus dont
il a été donné des exemples à l'article Romula^ p. 506.
(1) C. J. L., XII, 2680.
(2) Ibid., XII, 1674.
(3) Dom Bouquet, VII, 74 a. Migne, P&trologià latina, t. GXV, col. 1415 c.
(4) D. Bouquet, VIII, 74, note a. Voyez aussi Habille, La pancarte notre
de S&int-M&rtin de Tours, p. 22.3; cf. p. 153, n* 29; p. 187, n»» 139, 140.
(5) Guérard, Cartul&ire de S&int-Victor de Marseille, t. I, p. 609.
(6) /btd., t. II, p. 898.
CHAPITRE VIII.
EXEMPLES, AU MOYEN AGE, DE NOMS DE LIEUX EN -t^OniS ^
FORMÉS ANTÉRIEUREMENT A L'aIDE DE GBNTILIGES EN -iUS
KT DU SUFFIXE -0, -OniS.
ÂLBUGio , indéclinable pour AWucion , en latin * AlbuciOj
-onis , est le nom d'Âubusson , commune de Mazerat
(Haute-Loire), dans une charte de la fin du onzième siè-
cle (1). Albucio est dérivé d'Albucius, gentilice romain
connu par les inscriptions. On en trouve des exemples à
Rome (2). Il pénétra en Gaule , par exemple à Antibes (3) ,
à Genève (4), à Nimes (5). C'est par un antique Albucio
que s'expliquent les noms de la petite ville d'Aubusson
(Creuse) et des communes d'Aubusson (Orne) et d'Aubusson
(Puy-de-Dôme). Albussac (Corrèze) == *Albuciacus.
AiLLON (Savoie), où était un prioratus de Ayllone au qua-
torzième siècle (6), paraît être un ancien Allio, ^onis dé-
rivé du gentilice Allius^ comme Alliacus ou Aliacus étudié
page 192.
* Arcio, 'Onis^ à l'accusatif *Arcionemy était, en 830, le nom
(1) Cbassaing, Spicilegium Brivatense^ p. 8-12, 607.
(2) C. /. L.. VI, 11366-11370.
(3) Jbid.y XII, 192-195.
(4) /btd., XII, 2617.
(5) Ibid., XII, 3357, 5924.
(6) Cariul&ire de S&int-Hugues de Grenoble, p. 279.
510 LIVRE n. caikPiTRE vm.
d'Arçon (Côte d'Or), qui appartenait & Tabbaye de Bèze en
830 , conformément à un diplôme des empereurs Louis le
Débonnaire et Lothaire, que nous a conservé la chronique
de cette abbaye. D*Achery, et d'après lui Dom Bouquet (1)
et Migne (2) ont imprimé Arconem sans i. C'est une leçon
défectueuse pour Àrcionem^ tenant lui-même lieu dun
pl!is ancien Artionem, dérivé du gentilice Artius étudié
p. 381-401.
AvANÇON, nom de deux communes, Tune du département
de3 Hautes-AJlpe$ , l'autre de celui des Ardennes et d'un
écart de la commune d'Exireuil (Deux- Sèvres)^ est un an-
cien ÀventiOy --oniSy dérivé d'un gentilice Aventius connu
par plusieurs inscriptions (3). Ce gentilice a donné aussi les
dérivés * Aventiacus^ aujourd'hui Avensac (Gers), et *Aventia-
nus y aujourd'hui Avensan (Gironde). Aventius parait dérivé
d'un thème plus court avant- ou avenU)-, d'où le nom
d'Avanton (Vienne), appelé Aventun en 1085 (4). De ce
thème, avent' ou avento- vient probablement Aventieum,
aujourd'hui Avenche (Suisse). Le nom de la Dea Aventia,
déesse d'Aventicum (5), a la même origine.
Barbahio, -onis est le nom d'une villa appelée au cas
indirect Barbarione dans une charte de Tannée 697 en fa-
veur de l'abbaye de Limours (Seine-et-Oise) (6). Barbario
dérive du gentilice Barbarius , dont on a parlé p. 402.
Brignon (Maine-et-Loire), ancienne abbaye de l'ordre de
Saint-Benoit, aujourd'hui située dans la commune de Saint-
Macaire-du-Bois (Maine-et-Loire), dont on trouve le nom
(1) Tome VI, p. 565 d.
(2) Patrologia, Utina, t. GLXII, col. 874 d.
(3) De-Vit, OnomsLBticon, t. I, p. 574, co). 2; C. /. L., VIII, 1973.
(4) Redet, Dictionnaire iopograp. du département de la Vienne, p. 14.
(5) Mommsen, Inscriptiones helveticae, 154-156.
(6) Pardessus, DiplotMita, t. Il, p. 244.
NOMS DE LIEU SN «I-O DÉRIVBB DE GENTILICE8. 511
écrit Brignum, indéclinalDle au douzième siècle (1), est un
UQcien ^Brinnio, <07m dérivé du gentilice Brinnius, p^Jr assi*
milatioa pour Bremiius > doat IL a été queaiioa plui haut ,
p. 493, à rarticle Brmia%aw$.
Buixio, -oni>, à Tablatif BulUane^ dana uns cba?te de
l'année 1052 (2), est aujourd'hui Bulhou (Puy-de-Dôme)*
Ce nom dérive du gentilioe BuUiua, attesté par une inaeriiiK
tion de Narbonne où il est écrit trois fois (3).
Caldio, aujourd'hui Chaudion (Ârdenues), eat mentionné
dans la chronique de Flodoard sous la date 949 (4), Cat*-
éio tient lieu d'un plus ancien * Catidiù av«c i bref entre l
et d. Ce nom dérive du gentilice Calidius. Q. CalidiuSi
préteur en Tan 79 av. J.-C, exerça un commandement
en Espagne. M. Galidius, son flls^ se distingua paruxi les
orateurs contemporains de Cicéron; il fut préteur en 57 et
mourut en 44 (5). Ce gentilice pénétra en Oaule, La forme
féminine Calidia de ce gentilice se rencontre dans dQvx
inscriptions de Nimes où apparaissent Calidia Munatia (6)
et OaUdia Dons (7).
Cambrio, -onû, au cas indirect CanU>ri(me en Brabani,
dans un document du milieu du huitième siècle (ft), peut
dériver d un gentilice, Cambarius, attesté par deux inscrip*
tiens de Nimes qui mentionnent une femme appelée Gam^
baria Chrysanthe (9). La forme masculine de ce gentilice
(1) Port, Dictionnaire historique de Maine-et-Loire^ t. I, p. 501.
(2) Cbassaing, Spicilegium Brivatense, p. 6, 632.
(S) C. /. L., XII, 4664.
(4) Ooiii Bouquet, t. VIII, p. 206 a. Migoe, P9klrol9çiA latiM, L CXXXV,
col. 175 b; cf. Longnon, Etudes sur les pagi de- la GêMle, 2* partie» p. 73.
(5) De- Vit, Onomasticon, t. II, p. 65. Teuffel, GeschichU der r^m^^ofien
Literatur, 3* édition, p. 384-385.
(6) C. I. L., XII, 3286,
(7) Ibid., XII, p. 839, addition au n* 3721.
(8) Tardif, Monuments historiques, p. 45, col. 1.
(9) C. J. L., XII. 3505 et 3756.
512 LIVRE II. CHAPITRE VHI.
doit probablement être lue dans une autre inscription de
la môme ville (i). On peut aussi expliquer Cambrio par
Oammarius , dérivé de Cammarus , d*où Camaracus , Cam-
brai (Nord), dont il a déjà été question p. 171.
CoRNELio, 'oniSf au moyen âge Comilio en latin, Comil-
Ion en français, est un nom de lieu dont on trouve des
exemples dans les Cartulaires de Saint- Victor de Ma/rseille
et de Saint-Hugues de Grenoble. Les textes datent des en-
virons de Tan 1000. Il s*agit de Cornillon, commune de
Fontanil (Isère) (2), de Cornillon, commune de Saint-
Egrève (Isère) (3), de Cornillon-en-Trièves (Isère) (4) et
de Cornillon (Drôme) (5). Ces noms de lieux s'ont dérivés
du gentilice Cornélius étudié p. 357-358.
CuRTio, -ONis doit être le nom écrit à Tablatif, Corciane^
dans Tétat des serfs de l'église de Marseille, en 814; c'est,
dit-on, aujourd'hui Courchon, commune de Rougon (Basses-
Alpes) (6). Ce nom parait le même que celui de Courçon
(Charente-Inférieure) et que celui de Courson , écart de la
commune de Landricourt (Aisne), écrit Courcon en 1158 (7).
Quant à Courson, commune du département du Calvados,
appelé Corcho et Courchon au treizième siècle (8), ce nom
suppose un gentilice, *Curcius, parc, qui serait une variante
de Curtius, et dont nous ne connaissons pas d'exemple.
Courson (Yonne), au sixième siècle Curcedonus (9), semble
être un antique * Curtio-dunum. Sur le gentilice Curtius,
voyez ci-dessus, page 225.
(1) C. /. L., XII, 3706.
(2) Cartul&ire de Saint-Hugues, p. 104, 112, 114.
(3) Ibid.y p. 124, 185.
(4) Ibid,, p. 155.
(5) Guérard, Cartulaire de Saint-Victor, t. II, p. 237, 861.
(6) Guérard, Cartulaire de Saint-Victor, t. II, p. 651, 861.
(7) Matton, Dictionnaire topographique de VAisne^ p. 82.
(8) Hippeau, Dictionnaire topographique du Calvados, p. 88.
(9) Quantin, Dictionnaire topographique de VYonne, p. 41.
NOMS DE LIEU EN -I-O DÉRIVÉS DE GENTILICES. 513
Gaillon (Eure), Gaillo^ -onis pour Gallio, -oniSy au com-
mencement du treizième siècle (1), est un dérivé du genti-
lice Gallius, étudié ci-dessus, p. 238-239 ,|pour expliquer
le nom de lieu Galliacus.
*Gentio, -onis est évidemment la forme antique du
nom de paroisse écrit Gensson dans un compte de Tan-
née 1401 (2); suivant l'éditeur, M. Chassaing, c'est Janson,
lieu détruit, commune La Godivelle (Puy-de-Dôme). C'est
un dérivé du gentilice Gentius; au Palais des Arts de
Lyon, oui conserve une dédicace à Diane par C. Gentius
Olillus, magister du pagus de Condate, c'est-à-dire d'un
bourg établi au confluent de la Saône et du Rhône (3). De
Gentius sont dérivés les noms de la commune de Jansac
(Drôme) et du hameau de Jansiac, commune de Saint- Vincent
(Basses- Alpes).
Grinio, -onis est, en Fan 1000, le nom de la commune
de Grigïion (Côte-d'Or) (4); au commencement du dou-
zième siècle, c'est le nom de Grignon, commune de Coron
(Maine-et-Loire) (5). On trouve lé même nom écrit Grigno
vers Tannée 1100 (6); il s'agit de Grignon, commune de
Pontcharâ (Isère). Grinio tient lieu d'un primitif Granio^
■
dont la première syllabe a été assimilée à la seconde, et
il est dérivé du gentilice Granius , dont il a été question
p. 247 à propos du nom de lieu Graniactts.
* Lantio, -onis semble être la forme la plus ancienne du
nom de lieu écrit in Lancùme, en 814, dans l'état des serfs
de Tabbaye de Saint- Victor de Marseille (7) ; c'est proba-
blement Lançon (Bouches-du-Rhône). Une vicaria Lancio-
(1) B^osseville, Dictionnaire topographique de l'Eure, p. 94.
(2) Chassaing, SpicUegfuyn Briv&tensef p. 469, 664.
(3) Boissieu, Inscriptions antiques de Lyon^ p. 19.
(4) Qamier, Nomenclature historique, p. 162, n* 646.
(5) Port, Dictionnaire historique de Maine-et-Loire, t. II, p. 304.
(6) Cartulaire de Saint-Hugues de Grenoble, p. 191.
(7) Quérard, Cartulaire de Saint'Victor de Marseille, t. II, p. 640*
33
514 LIVRE II. CHAPITRE VIIL
nensis est mentionnée dans une charte de Tannée 900, en
faveur de Tabbaye de Saint-Martin de Tours ; il paraît que
c'est aujourd'hui Alençon (Orne) (1). Dans une charte de
la seconde moitié du onzième siècle, on trouve mentionné
un bosculus Lancioni , et il s'agit de Lançon , commune de
Brézé (Maine-et-Loire) (2). Ces noms de lieux sont dérivés
soit du gentilice Lantius, soit du gentilice Lentius, dont il
a été question p. 361, 362. Il y a encore en France d'autres
Lançon que ceux que nous venons de citer : telles sont les
communes de Lançon (Ardennes) et de Lançon (Hautes-
Pyrénées).
* Lattio , 'Onis est la forme la plus ancienne du nom de
la localité appelée Latcio en 813 , dans une charte en faveur
de l'abbaye de Saint-Martin de Tours (3). Il s'agit de
La Chapelle-Lasson (Marne). * Lattio est dérivé de Lattius,
gentilice romain assez rare , mais attesté par deux inscrip-
tions, l'une de Vienne (Isère), qui nous fait connaître les
noms de M. Lattius Optatus (4), l'autre italienne, qui est
Tépitaphe d'une femme appelée Lattia (5).
Lenio , 'Onis ou Laenio^ -onis est le nom de lieu imprimé
par erreur Leuione pour Lenione, dans un diplôme de Kar-
loman , maire du palais , 746 (6) ; il s'agit de Leignon en
Belgique , province de Namur. C'est un dérivé du gentilice
Laenius : M. Laenius Flaccus s'est assuré l'immortalité en
donnant dans ses jardins de Brindes asile à Cicéron pros-
crit par la loi Clodia, en l'année 58 avant notre ère (J). On
a trouvé à Tarente l'épitaphe de Laenia Primigenia (8).
(1) Mabille, La pancarte noire, p. 226 ; cf. p. 182 et p. 72.
(2) Port, Dictionnaire historique de Maine-et-Loire ^ t. Il, p. 441.
(3) Mabille, La pancarte noire, p. 226; cf. p. 153, 93-94.
(4) C. i. L., XII, 1974.
(5) /6id., IX, 5051.
(6) Pertz, Diplomatum imperii t. I, p. 102, 1. 24; cf. Longnon, Exmmên
géographique, p. 26.
(7) De- Vit, Onomasticon, t. IV, p. 22.
(8) C. I. L., IX, 244.
NOMS DE LIEU EN -I-O DÉRIVÉS DE GENTILICES. 515
Lucio, 'Onis est le nom d'une villa située en Lyonnais,
suivant une charte des environs de l'an 1000 (1). C'est la
forme antique qui explique le nom de Luçon (Vendée), des
hameaux de Luçon (Dordogne) et de Luçon (Eure-et-Loir),
de ceux de Lusson (Cher, Landes et Basses-Pyrénées);
ê
enfin la seconde partie du nom de Montluçon (Allier).
LfÀcio est un dérivé du gentilice Lucius ou Luccius, étudié
p. 258-261, pour expliquer son dérivé Luciaoas.
Marcio , 'Onis ou peut-être Martio , -onis est la forme an-
tique du nom de la localité appelée Martionis villa en 1106,
Manona et Marzona en 1135, aujourd'hui Marson (Meuse) (2).
Ce nom de lieu est dérivé , soit du gentilice Marcius , soit
du gentilice Martius étudiés p. 270-275 à propos du nom de
lieu Marciacus. Il y a une commune de Marson dans le
département de la Marne ; son nom est le même que celui
d'une commune de Marçon du département de la Sarthe.
On trouve deux hameaux de Marçon dans le Loir-et-Cher,
un dans la Haute-Loire ; deux hameaux de Marson dans la
Dordogne et le Maine-et-Loire.
MuGio , 'Onis était , en 862 , le nom d'une ourtis qui ap-
partenait à l'abbaye de Saint-Martin de Tours (3). Ce nom
de lieu parait dérivé du gentilice Mucius , illustré par une
famille romaine qui y joignait le surnom de Scaevula et
qui fournit cinq consuls à la république, de l'an 175 à
Tan 95 avant J.-C. Tout le monde connaît le nom du héros
légendaire Mucius Scaevula , fabriqué au second ou au pre-
mier siècle avant notre ère pour faire remonter aux pre-
miers temps de Rome la gloire de cette puissante famille (4).
Ce nom fut en Gaule celui d'un personnage moins im-
portant ; on conserve , au musée de Genève , une tuile sur
(1) Aug. Bernard, C&rtuUire de Savigny^ t. I, p. 877.
(2) Lâénard, Dictionnaire topographique de la Meuse, p. 142.
(3) Habille, La pancarte noire, p. 224; cf. p. 159, n* 161 et p. 65, 66.
(4) Sar la gens Macia, voyez Pauly, Real-Encyclopaedie, V, p. 178*190.
516 LIVRE IL CHAPITRE VIII.
laquelle ou a lu la marque du fabricant Q. Mucius Anle-
ros (1). Mussey (Meuse), Mussey (Haute-Mame) ; les trois
communes de Mussy (Côte-d'Or , 8aône-et-Loire et Aube)
sont peut-être d'anciens * Muciacus.
■
* PoNTio , 'Onis doit être l'orthographe primitive du nom
de lieu écrit Poncio dans un pouillé du diocèse d'Autun
que M. Aug. Bernard attribue au onzième siècle (2). Ce se-
rait aujourd'hui Poisson (Saône-et-Loire) . C'est un dérivé
du gentilice Pontius étudié p. 295-297 à propos de son
dérivé Ponciacus, Poisson (Saône-et-Loire), n'est pas le
seul exemple de Pontio que nous trouvions en France. Le
département de la Haute-Marne nous offre trois exemples
de la variante Poinson et un exemple du dérivé Poiase-
not. Poinçon (Côte-d'Or) ne diffère des précédents que
par une fantaisie orthographique. Le nom des deux com-
munes de Ponson (Basses-Pyrénées), Ponzo au douzième
siècle , diffère des précédents en ce que Yi du suffixe n'a
pas exercé d'action sur la première syllabe (3).
* QuiNCTio , 'Onis est le nom antique dont un diminutif
nous est offert par un texte de la fin du onzième siècle : à
Tablatif Quincioneto (4). Le nom de Quinson (Basses- Alpes)
a la même origine. On a parlé du gentilice Quinctius
p. 155-156, à propos du dérivé Quintiacus.
Samnio, à l'ablatif 5ammon« , est une villa placée dans le
pagus Avinionensis par une charte de Tabbaye de Cluny
en 958 (5). Ce nom de lieu est dérivé du gentilice Samnius
attesté par deux inscriptions d'Espagne (6).
(1) C. I. L., XII, 5679, 58.
(2) Cartulaire de Sàvigny, t. Il» p. 1052, C(^. 2.
(3) Raymond, Dictionnaire topogr. des Bassm^Py rénées, p. 137*
(4) Guérard, Cartulaire de Saint^Vi4^r de Marseitle, 1. 1, p. 388.
(5) Bruel, Recueil des chartes de Cluny^ U II, p. 152.
(6) C. I. L., U, 1044» 12S7.
NOMS DE LIEU EN -I-O DÉRIVÉS DE QENTILICES. 517
*TuLLio écrit Tollio^ dans une charte de la fin du onzième
siècle, est aujourd'hui Touillon(Côte-d*Or) (t). C'est un dimi-
nutif du gentilice Tullius. Tullius est un gentilice romain
que tout le monde connaît puisqu'il a été celui de Cicéron.
Cicéron, comme on le sait, était un homme nouveau.
Mais cela n'empêche pas qu'il ait existé une gens Tullia qui
était patricienne. C'est à elle qu'appartient M. Tullius Lon-
gus, consul l'an 254 de Rome avant J.-C, 500; et dix-
huit ans avant le consulat de Cicéron, 63, les honneurs
consulaires avaient été obtenus par M. Tullius Decula,
81 avant J.-C. Ce gentilice fut porté en Gaule par Q. Tul-
lius Cicero, qui fut lieutenant de César dans la guerre
contre les Gaulois pendant trois ans, de 54 à 52 avant J.-C.
Quelques Gaulois durent probablement à son influence la
dignité de citoyen romain et de là , en Gaule, la fréquence
du gentilice Tullius que nous rencontrons dans des ins-
criptions. Le musée de Lausanne possède une dédicace à
la Victoire , par Nitiogenna Tullia (2) ; Nitiogenna est un
cognomen d'origine gauloise associé au gentilice romain.
On a trouvé : à Antibes, l'épitaphe de Tullius Valerius,
gravée par les soins de Tullius Primus son fils (3) ; à Bé-
ziers , l'épitaphe de Tullia Avia (4) ; à Narbonne , celles
de Tullia Capella (5) et de L. Tullius Félix (6) ; à Lyon ,
celle de M. Tullius Thermianus (7).
Touille (Haute-Garonne) est probablement une ancienne
villa Tullia. Thuilley (Meurthe-et-Moselle) paraît identique
au Tulliacus d'une charte du roi de Germanie, Louis IV
l'enfant, pour l'abbaye Saint-Evre de Toul en 906 (8). Quel-
(1) Garnier, Nomenclature historique y p. 130, n* 525; cf. p. 202 sous le
même numéro.
(2) C. /. L., XII, 162.
(3) Ibid., XII, 228.
(4) Ibid,, XII, 4249.
(5) Ibid., XII, p. 852, n* 4960.
(éj Ibid., XII, n* 5969.
(7) Boissieu, Inscriptiona antiques de Lyon, p« 101. Sur la gens Tullia,
voyez Pauly, Real-Encyclopaedie, t. VI, p. 2181-2*244.
(8) Dom Bouquet, IX, 372 a.
518 LIVRE II. CHAPITRE VIII. APPENDICE.
ques années après, le môme nom est écrit d'une façon plus
conforme à la prononciation Tuilliacum villam^ dans un
diplôme de l'empereur Othon I , pour l'abbaye de Saînl-
Mansuy de Toul (1).
Vencio, 'Onis, à l'ablatif Venoione^ est le nom d'une loca-
lité où l'abbaye de Saint-Victor de Marseille avait un serf
en 814 (2). Ce nom de lieu est dérivé du gentilice Ven-
dus étudié, p. 336-337, à propos du dérivé Vinciacus.
Appendice. — Noms de lieux en -io, -onis, dérivés de gen-
tilices en -ius au moyen du suffixe -o, -ionis, dans Us
documents contemporains de Vempire romain.
AvENNio, nom de la ville d'Avignon, doit s'écrire avec
deux n comme l'atteste une inscription conservée au mu-
sée de Nimes , qui nous offre le dérivé Avenmens[es] (3) ,
d'accord avec une inscription de Riez qui est mutilée et
où on n'aperçoit qu'un fragment du second n (4) ; comme l'a
fait observer M. Hirschfeld (5) , on trouve le double n chez
Mêla (6), chez Pline (7), chez Ptolémée (8). Ce nom n'est
pas d'origine celtique comme M. Hirschfeld suppose (9);
c'est un dérivé en -o , -onis du gentilice Avennius attesté
par une inscription de Rome (10), où ce gentilice est écrit
deux fois; cette inscription est l'épitaphe de L. Avennius
Rufus , gravée sur un monument dressé par ordre du fils
du mort; et les noms du fils, comme les noms du père,
sont écrits sur ce monument.
(1) Dom Bouquet, IX, ,389 d.
(2) Quérard, Cartul&ire de SsLint-Victor de Marseille, t. Il, p. 638.
(S) C. /. L., XII, p. 837, n* 3275.
(4) Ibid., XII, 366.
(5) /Md., XII, p. 130.
(6) Livre II, | 75; édit. Teubner-Frick, 1880, p. 45, 1. 1.
(7) Livre III, ! 36; édit. Teubner-Ianus, t. I, p. 130, 1. 20.
(8) Livre II, c. 10, | 8;' édit. Didot-MûUer, t. I, p. 243, 1. 4.
(9) C. /. L., XII, p. 130, col. 2.
(10) Jbid., VI, 12807.
NOMS DE LIEU EN -I-O DÉRIVÉS DE GENTILICES. 519
Il y a en France d'autres Avignon dont il faut dire un
mot ici quoiqu'ils soient mentionnés pour la première fois
dans des textes beaucoup moins anciens que lorsqu'il s'a-
git du chef-lieu du département du Vaucluse. Une bulle
du pape Grégoire VII, en 1079, qui contient l'énumération
des propriétés de l'abbaye Saint- Victor de Marseille, men-
tionne un monastère de Sainte-Marie de Avinione dans le
diocèse d'Albi (1) ; nous retrouvons ce monastère, en 1113,
dans une bulle du pape Pascal II (2), et en 1135, dans
une bulle du pape Innocent II (3). Une autre abbaye de
Sainte-Marie de Avinione dans le diocèse d'Antibes est
mentionnée dans la bulle de Grégoire VII, précitée (4). Il
y a aujourd'hui, en France, une commune d'Avignon (Jura),
et deux communes d'Avignonet (Haute-Garonne et Isère).
Cabellio, 'Onis est le nom de la ville de Cavaillon (Vau-
cluse). L'orthographe de ce nom, telle que nous la donnons
ici, est attestée par plusieurs inscriptions romaines, comme
l'a établi M. Hirschfeld (5) ; c'est l'orthographe de Pline (6)
et de Ptolémée (7). L'orthographe Caballio dans les manus-
crits de Strabon est le résultat d'une assimilation de la pre-
mière syllabe à la seconde ; cette assimilation se faisait déjà
dialectalement dans les premiers temps de l'empire romain ,
comme l'atteste une inscription du musée de Mayence (8) ;
elle a prévalu dans la prononciation moderne Cavaillon.
Cabellio est dérivé du gentilice Cabellius attesté par une
inscription de Troesmes (9) et qui parait une variante de
Capellius conservé par une inscription de Rome (10).
(1) CartuUire de Saint-Victor de Marseille, p. 219.
(2) Ibid., p. 239.
(3) /Md., p. 222.
(4) Ibid,, p. 219.
(5) C. /. L., XII, p. 136.
(6) Pline, L II, | 36.
(7) Ptolémée, 1. II, c. 10, | 8; édit. Mùller, t. I, p. 244, 1. 2.
(8) Brambach, 1203.
(9) C. I. L., in, 6179.
(10) Ibid., VI, 14379,
520 LIVRE II. CHAPITRE VIII. APPENDICE.
Divio -onis, — avec une variante orthographique fltéio,
à Vdhlsiif Dibione^ dans une inscription romaine (1), — chez
Grégoire de Tours Castrum Divionense (2), Divione (3), to-
cus Divionensis (4), est} un dérivé du gentilice Divins. On a
trouvé à Grenoble une dédicace à Mercure, par L. Divius
Rufus (5). D'autres exemples de ce gentilice ont été re-
cueillis dans d'autres parties de l'empire romain en Ita-
lie (6), etjhôrs d'Italie (7).
Elusio, 'Onis est le nom d'une station romaine con-
nue par Yltinéraire de Bordeaux à Jérusalem. Suivant
M. Longnon, c'est Font-d'Alzonne , commune de Monl-
ferrand (Aude) (8). Elusio est dérivé du gentilice Elusius
connu par une inscription de Capoue (9) , c'est l'épitaphe
de Tafifranchi M. Elusius. Elusius paraît dérivé HElusa,
forme antique du nom d'Eause (Gers).
Arausio, Orange (Vaucluse) (10), peut être ajouté à celte
liste. Ce nom de lieu dérive d'un gentilice *Arausius, dé-
rivé lui-même du nom d'homme gaulois Arausa que nous
a conservé une inscription d'Espagne (11).
(1) Desjardins, Géographie historique de U G&ule romaine, 1. 1, p. 417.
M. Lejay , Inscriptions antiques de la Côte-d'Or, p. 237-238, révoqne en
doute l'authenticité de cette inscription.
(2) Hist. Franc, 1. H, c. 23; édit. Aradt, p. 86, l. 25.
(3) Ibid., 1. II, c. 32, p. 94, 1. 7.
(4) Ibid,, L III, c. 19, p. 129, I. 9.
(5) C. I. L., XII, 2222.
(6) Ibid., IX, 3717. 3718, 3719, 6347.
(7) Ibid., III, 6257.
(8) Itinéraire d'Antonin, p. 551, 1. 5. Atlas historique de la France, p. 28.
(9) C. /. L., X, 4119.
(10) E. Desjardins, Géographie de la Gaule d'après la Table de Peutinger,
p. 330. C. /. L., t. XII, p. 152.
(11) C. /. L., 11,2633.
CHAPITRE IX.
EXEMPLES AU MOYEN AGE DE NOMS DE LIEUX QUI OFFRENT
LA DÉSINENCE -OltÂS ET QUI ONT ÉTÉ FORMÉS EN DÉVELOP-
PANT A l'aide du SUFFIXE -lo- UN THÈME NOMINAL EN -0-,
-»a-, -to-.
Sommaire :
I 1. Le mot dont dérive le nom de lieu en -o-lus est un nom commun,
i 2, J^e mot dont dérive le nom de Heu en -o-lus est un nom propre,
gentilice ou cognomen, — en -tu«.
S !•'• — Le mot dont dérive le nom de lieu en -o-lus est un
nom commun.
Parmi les noms en -o-/w* quelques-uns sont des dérivés
primaires de noms communs; tel est le Fornolus villa,
mis en Limousin par une charte de Tannée 631 (1), et par
un diplôme du roi Dagobert I, en 636 (2); c'est un dimi-
nutif du substantif latin fumus « four. »
Le suffixe -o-lus est d'un emploi assez fréquent comme
suffixe secondaire ; il sert à former des diminutifs des
nombreux noms de lieux en -aria que nous offre la géogra-
phie de la France et qui sont à proprement parler des noms
communs féminins identiques à la forme féminine d'adjec-
(1) Pardessus, Diptomata, t. II, p. 10.
(2) Pardessus, tMd., t. U, p. 42«
522 UVRE II. CHAPITRE IX. | l.
tifs en 'orius, dérivés eux-mêmes des noms communs.
Tels sont :
Apiar[i]olas, AcheroUes, lieu dit de la commune Theury-
Achères (Eure-et-Loir) (1); c'est un diminutif dUjoiarto* ,
Achéres, môme commune (2). On trouve un SMlre Apiarias
près d'Avignon , dans une charte de Tannée 1010 (3). Le
nom de lieu Apiaria existait déjà sous l'empire romain : il
faut écrire avec un seul p le nom de lieu de Mésie, que les
éditeurs de V Itinéraire d'Antonin ont cru devoir écrire avec
deux p^ Appiaria (4), à cause de la gens Appia et de la via
Appia avec lesquelles il n'a aucune relation. Apiaria est un
endroit où il y a des abeilles , opes , au singulier apis.
Favariolas, dans un diplôme de Tannée 690 (5)^ aujour-
d'hui FaveroUes-la-Campagne (Eure) (6) ; Favairolas dans le
Oévaudan, aux termes de deux chartes du commencement
du onzième siècle (7), et les nombreux FaveroUes
épars dans le reste de la France : Aisne , Cantal , Côte-
d'Or, Eure-et-Loir, Indre, Marne, Haute-Marne, Orne,
Somme, etc., sont autant de diminutifs d'un antique Faba-
ria , substantif identique au féminin de Tadjectif fabarius^
dérivé de faba, « fève; » et les Favières d'Eure-et-Loir,
Meurthe-et-Moselle, Seine-et-Marne, Somme, etc., sont des
pluriels de Fabaria.
*
. JuNGARiOLAS ost eu 814, le nom d'une localité où Tabbaye
de Saint-Victor de Marseille avait des colons (8). C'est la
forme la plus ancienne du nom de lieu qui est devenu Jon-
(1) LongnoB, Polyptyque de Saint^Germain^ p. 122.
(2) Ibid., p. 126.
(S) Guérard, CartuUire de Saint-Victor de Marseille, t. I, p. 215.
(4) Page 222, 1. 5.
(5) Tardif, Monumentê historiqueSt p. 21, col. 1.
(6) Blosseville, Dictionnaire topographique de l'Eurej p. 82.
(7) Doniol, Cartulaire de Brioude^ p. 315, 336. •
(8) Quérard, Cartulaire de Saini-Yictor, t. Il, p. 641.
NOMS DE LIEU EN -I0-LU8. 523
cherolles dans la Haute- Vienne. C'est en même temps un
diminutif du nom de lieu Juncaria qui, dans V Itinéraire d'An-
tonin , désigne une station romaine d'Espagne , près des
Pyrénées (1). On ne trouve pas ce mot employé comme
adjectif, mais il a été tiré du nom commutï juncw « jonc »
et on le reconnaît aujourd'hui dans les nombreux Jonchère
ou Jonchères, Jonquière ou Jonquières, de France.
LiNAiaoLAS, dani un diplôme du' milieu du iuitième sié*
cle (2), nous offre la forme la plus ancienne du nom de
lieu français assez répandu, LigneroUes (Allier, Côte-d'Or,
Eure, Indre, Orne, etc.). C'est un diminutif de Linarias,
qu'on trouve, par exemple, dans un diplôme de Tan-
née 799 (3). Linarias est la forme la plus ancienne du fran-
çais Ligniéres, plus commun encore : Aube, Cher, Indre-
et-Loire, Loir-et-Cher, Meuse, Sarthe, Somme, etc., et ce
substantif est le féminin de l'adjectif latin linarius^ dérivé
de linum, a lin. »
NoGABiOLAS, mentionné dans une charte du commence-
ment du neuvième siècle (4) , est un diminutif du nom de
lieu écrit Nucerias^ en 928, dans une charte d& l'abbaye de
Cluny (5) , et dont le Cartulaire de Conqvss nous offre une
forme masculine, de Nogario, au onzième siècle (Q), Nogeir
au douzième siècle (7). Nucerias et Nogario ou Nogeir sont
identiques l'un à la forme féminine, l'autre à la forme
masculine d'un adjectif nucarius, dont les auteurs latins
classiques n'offrent pas d'exemple, mais qui a été formé
comme les précédents et qui dérive du substantif latin nuw^
nucis, « noix. »
(1) Pages 390, 1. 3; 397, 1. 8.
(l) Tardif, Monuments historiques, p. 45, col. 1.
(3) Tardif, ibid,, p. 73, col. 2.
(4) Habille, La pancarte noire, p. 230.
(5) Bniel, Recueil des chartes de Cluny, t. I, p. 335.
(6) Page 307.
(7) Page 387.
m LIVRE p. CHAPITRE IX. i 2.
S 2. — Le mot dont dérive le nom de lieu en -o-lus est un nom
.propre^ — gentilice ou cognomen,, — en -ius.
D^autres noms de lieux eu -o-lus sont des diminutifs de
gentilices.
Ainsi , dans le nom de la vallis Aviniolensis , au comté
de Fréjus (1), dans une charte de Tartnée 1030, on peut
reconnaître un dérivé du gentilice Avennius , dont il a été
question plus haut, p. 518, au sujet du nom de la ville
d'Avignon.
La localité appelée Bhacious dans une charte de Tan-
née 866 (2) , et Braciolas dans un document postérieur (3) ,
porte un nom qui est un diminutif du gentilice Braccius,
étudié plus haut, p. 352.
Une villa Carenciolas, en Autunois , est mentionnée,
en 936, par une charte de Cluny (4). Son nom est un
diminutif du gentilice Carantius^ dont on a parlé ci-dessus,
p. 132, 134.
Cairolus pour * Cariolus est, en 917, le nom d'une villa
dans laquelle on reconnaît Queiroles (Corrèze) (5). C'est un
diminutif du gentilice Karius^ dont l'existence en France
est attestée par plusieurs inscriptions (6). De là un dérivé,
*Cariacus^ qui explique le nom de la commune de Chéry-
lez-Pouilly (Aisne), et peut-être celui de Chéry (Cher).
,. t
Graniolus , dans un titre de l'abbaye de Saint-Germain
(1) Quérard, CaWuIatre de SdAnX-Vicior de Mar<eiUe, 1. 1, p. 592.
(2) Deloche, CaHuIaire de Beaulteu, p. 11.
(3) Jbtd., p. 271.
(4) Bniel, Aecuett des chartes de Cluny^ t. I, p. 431.
(5) Deloche, CartuUire de Beaulieu, p. 222.
(6) C. /. L., XII, 2962, 3243, 4062.
NOHET DE LIEU e!n -I0-LIT6. 525
d'Auxerre Graniolo à Tablatif en 864 (1) , et un autre ùra-
nioltis en Périgord dans le Cartulaire de Vdbbaye de Conques
(Aveyron), à la fin du onzième siècle : Castello de Gra-
niolo (2), Castellu/m de Graniol (3) sont des diminutifs du
gentilice Granius, étudié déjà, p. 247.
Mariolas est le nom d*une villa où Ârnulf, duc de Bout^
gogne, avait des biens qu'il donna, en 706, à l'abbaye des
Saints- Apôtres , depuis de Saint-Arnoul , de Metz (4). Le
même nom de lieu est mentionné dans une charte fausse
de son père Drogon pour la môme abbaye (5). Mariolas
est un diminutif féminin d'un gentilice, Marins, d'où Ma-
riaoïts dont il a été question plus haut, p. 275-276.
Matriolas est le nom de MaroUes-sur-Seine (Seine-et-
Marne), dans une charte de Louis le Débonnaire (829) (6)
et dans le Polyptyque de Saint- Germain des Prés (7) ; la môme
localité est mentionnée avec une orthographe moins ar-
chaïque, Madriolas, dans un diplôme de Chariemagne, en
786' (8). Une église de Matriolis figure, au douzièm'e sièelè,
dans les titres de l'abbaye de Saint-Jean-de-Sens (§][ ; il
s'agit, parait-il, de Marolles-sous-Lignières (Aube). Il y a,
en France, quatorze communes du nom de MaroHes.' Elles
sont situées dans les départements suivants : Aùbé, Calva-
dos, Eure-et-Loir, Loir-et-Cher, Marne, Oîse; Sarthe,
Seine-et-Marne, 8eine-et-0ise. Matriolae^ qui explique Ma-
roUes, est un dérivé de Matrius, gentilice 'doûtoU a' paWé
ci-dessus, page 280, au sujet du dérivé Matriacus.
(1) Quantin, Cartulaire de l'Yonne^ U I, p. 88.
(2) Ed. de Q. Deajardins, p. 281.
(3) Ibid,, p. 286.
(4) Pardessus, Dtploma^a, t. n, p. 276.
(5) /btd., p. 214.
(6) R. de Lasteyrie, Cartulaire {général de Paris, p. 48.
(7) Edition Longnon, p. 47.
(8) Tardif, Monumente historiqueSy p. 65, col. 2.
(0) Quantin, Cartulaire de VTonne^ t. I, p. 290, 502.
526 LIVRE U. CHAPITRE IX. | %.
Merguriolus est im uom de lieu mentioimé, en 808,
dans une charte de Tabbaye dft Saint-Martin de Tours (1).
Il s*agit de Mequeroil, dans VUb Saint-Côme (Indre-et-
Loire) (2). Un autre Mercurioltis , noté ifereortoZo, apparaît,
en 924, dans le Cartulaire de Conques (Âveyron) (3^ Mercur
riolus est dérivé de Mercurius, cognomen étudié plus haut»
page 447.
ScoTioLAE doit être la forme primitive du nom de la
localité appelée Escozolas, en 936, dans deux chartes de
Fabbaye de Cluny (4). L'orthographe plus archaïque ScoUo-
las nous est offerte, dans la seconde moitié du même siè-
cle, par une autre charte de la même abbaye (5). C'est
peut-être la même localité qui est appelée, à l'ablatif, Sco-
ciolis dans un diplôme faux du roi Contran en faveur de
l'abbaye de Saint-Marcel de Ch&lon-sur-Saône (6). Scotiolae
est un diminutif de Scotius, dont on s'est déjà occupé plus
haut, p. 412-413. Si nous admettons une hypothèse très
vraisemblable de M. Longnon (7), Scotiolae aurait été une
dépendance d'Ecuisses (Saône-et-Loire), qui serait un ancien
Seotiaê.
SouoLus est , en 878 , le nom d'un locus où étaient si-
tuées des manses données à l'abbaye de Beaulieu; c est au-
jourd'hui Soulliol, commune de Frayssinhes (8). Le genti-
lice Sollius ou Solius a été déjà cité , p. 328-329, à propos
de son dérivé Soliaous.
Valbntiola, aujourd'hui Valensolle (Basses-Alpes), est
(1) Habilla» La pancarte noire, p. 184, n* 117.
(2) Ibid., p. 228.
(3) G. Desjardina, CartuUire de Conquee, p. 7.
(4) Brael, Recueil des chartes de Cluny, t. I, p. 435, 439.
(5) Bniel, ibid., t. II, p. 6.
(6) Pertz, DiplomaU, p. 129, 1. 21.
(7) Examen géographique, p. 34.
(8)'Delocha, Cartulaire de Beaulieu, p. 84, 383,
NOMS DE LIEU EN -lO-LUB. 527
probablement la localité mentionnée sous le nom de Valen-
tiola ou Valenoiolay au dixième siècle, dans plusieurs
chartes de Tabbaye de Cluny (1). Valentiola est un dérivé
du gentilice Valentius, qu'on trouve quelquefois dans les
inscriptions. Ainsi, on a découvert près de Novare le mo-
nument élevé sur la tombe de T. Valentius père, de T.
Valentius fils et d'une sœur de ce dernier, par Valentia,
fille du premier, sœur des deux autres (2). On conserve
encore à Vérone l'épitaphe de L. Valentius Eutychus (3).
Ce gentilice a donné naissance, en France, à trois autres
dérivés : * Valentiacus, aujourd'hui Valençay (Indre) ; Va-
lenlicmaej aujourd'hui Valenciennes (Nord), et*Valmtio,
-onis^ aujourd'hui Valençon, nom de deux hameaux : Allier
et Pas-de-Calais. Les rois mérovingiens et, après eux, les
Carlovingiens eurent un palais à Valenciennes (Nord) (4).
(1) Bruel, Recueil, t. I, p. 119; t II, p. 367; t. III, p. 80, etc.
(2) C. J. L., V, 6591.
(3) Ibid., V, 2791.
(4) Mabillon, De re diplom&tica^ 3* ôdit., t. I, p. 346.
CHAPITRE X.
DB LA DÉsiNBNGE -0-to/tim, '^o^ialum^ -o-9»oZtim, -o-gihm,
'O'gelum^ -o-tlum» -o-^itim, en français moderne -ml,
DIALBGTALEMBNT -HL
SOMMAIBS :
I 1. Les noms de lieu en -o-iolum nous offrent la forme familière en bas
latin de noms composés gaulois dont les deux termes étaient 1* ordinai-
rement un cognomen d*origine gauloise ou latine; 2* toujours le nom
commun gaulois maguSf « champ ; » exemples de noms en -o-to(um dont
on a trouvé la notation primitive et solennelle en -magus, — {2. Liste
alphabétique de noms de lieu en -o-iolum pour lesquels on n*a pas cronvé
le primitif en rtiAgus^ bien que ce primitif en ma^^us ait dû exister, et qoi
tous dérivent de cognominaL,
S 1*'. — Les noms de lieu en o-iolum nous offrent la forme
familière en bas latin de noms composés gaulois dont les
deux premiers termes étaient : 4^ ordinairement un cogno-
men d'origins gauloise ou latine ; 2® toujours le nom com-
mun gaulois magus « champ ; » exemples de noms en
-o-iolum, dont on a Prouvé la notation primitive et solen-
nelle en -magus.
Dans la désinence --o-iolum dont la représentation gra-
phique est très variée et dont le son s'est modiâé par la
suite des siècles , il y a deux éléments à distinguer : o est
la finale d'un thème par lequel le mot commence ; iolum,
qui termine le mot, est un suffixe qui apparaît, pour la
NOMS DE LIEU EN -0-IOLUM. 529
première fois, vers la fin de l'empire romain, dans une
lettre de saint Paulin de Noie à Ausone :
Cumque Maro-ialicis tua prodigis otia thennis (1).
On sait que Paulin de Noie vécut de 353 à 431. Mais le
vers dont il s'agit est bien antérieur à 431 , puisqu'il est
adressé à Ausone, qui mourut en 390. Il a donc été écrit
avant la fin du quatrième siècle. C'est la date du plus
ancien exemple que nous ayons trouvé de la désinence
dont il s'agit ici, -o-ialum, notation basse d'un primitif
On suppose généralement que cette désinence est celti-
que. Cette doctrine est inadmissible, puisqu'on n'a pas
d'exemple de cette désinence antérieurement à la fin du
quatrième siècle, et qu'on ne la trouve pas dans les dia-
lectes néo-celtiques. 0-ialum, mieux o-iolv/mj est une dési-
nence hypocoristique ou familière néo-latine à l'aide de
laquelle on a formé des diminutifs de certains noms de
lieux. Ces noms de lieux avaient, en général, pour premier
terme , un nom propre d'homme , cognomen ou nom péré-
grin, — quelques-uns avaient peut-être pour premier terme
un nom commun ou un adjectif, — tous avaient pour se-
cond terme, le gaulois --maguSy « champ. » Magus a été
remplacé par la désinence -iolum empruntée aux noms de
lieu en -iolus dérivés de gentilices en -iiLs. C'est un phé- '
nomëne grammatical identique à celui qui a produit le
sufBxe 'iacus des noms de lieux tels que Teodeberc-iacuSj de
Theodebercthus. Dans la désinence -o-iolum , le second o
étant atone, a pris un son indéterminé a ou i avant de
tomber; de là les notations -oialum^ "Ogilum; dans 'Ogilumy
g est la notation d'un i consonne.
Revenons à Maro-ialum. C'est, en français moderne, Ma-
reuil ou Mareil. Nous avons débuté par un exemple de ce
(t) Poème X véra U^; chet Migùe, Pairologia l&tiriâ, t. LXI, col. 458.
34
530 L.IVRS II. CHAPITRE X. | 1.
nom de lieu emprunté à saint Paulin de Noie. Il y en a
de nombreux exemples dans d'autres documents. Ainsi,
Mareuil (Loir-et-Cher) est appelé Maroialus (I), vers la
fin du huitième siècle, dans un diplôme de Charlemagne
pour Saint-Martin de Tx)urs. De Maroialus dérive Maroia-
lensis chez Grégoire de Tours (2) ; Grégoire de Tours (3)
mentionne une Maroialensis villa ^ qui doit être un des
deux Mareil du département de la Sarthe. Un diplôme
de Charles le Chauve , en 862 , place une villam Marogi-
lum dans le pays de Meaux; c'est aujourd'hui Mareuil
(Seine-et-Marne) (4). Un autre Marogilum apparaît dans le
Polyptyque de Saint- Germain des PréSy où il est noté à l'abla-
tif, Maroilo (5), Mairoilo (6); c'est Mareil-sur-Mandre (Seine-
et-Oise). Il y a, en France, six communes de Mareil situées
dans les départements de la Sarthe et de Seine-et-Oise, et
treize communes de Mareuil (Aisne, Charente, Cher, Dor-
dogne, Loir-et-Cher, Marne, Oise, Seine-et-Marne, Somme,
Vendée). Inutile de parler des hameaux.
Mareil et Mareuil sont le môme dérivé d'up cognomen
latin d'origine gauloise, Marus, qui veut dire « grand. »
Marus, ou mieux maros en gaulois, est un adjectif, et nous
n'en avons d'exemple, en Gaule, que dans les composés,
comme Indutio-marus , lUio-marus, Soli-marus, etc. Mais
on a relevé plusieurs exemples de cet adjectif employé
comme surnom ou nom d'homme dans des inscriptions
d'Italie : C. Ignatius Marus (7), C. Pontius Mari f. (8),
M. Ofasius Firmus Marus (9).
(1) Dans réditioD donnée par Dom Bouq^uet, V, 737, c, on a imprimé li«-
zoyalus; c'est une faute rectifiée par Mabille, La pancarte noire ^ p. 228;
cC. 151 et 69.
(2) Historia Francorum, livre VII, c, 12; édif . ^Afjnfjt, p. 257^1 15^.
(3) Livre X, c. 5; édit. Amdt, p. 413, 1. 22,
(4) Tardif, Monuments hUtoriqueê^ p. 119, col. i.
(5) Edit. Longnon, p. 280.
(6) Ibid,, p. 284.
(7) C. /. L.y IX, 652.
(8) Ibid., 1015.
(9} Ibid., X, 6565.
NOMS M: LIEU EN -0-IOLUM. 681
Du coffnomen ou nom pérégrin Marus ou Maros on' a
formé le nom de lieu Maro-magus, nom d*une ville d€f
Grande-Bretagne qui nous est connue par Tanonyme de
Ravenne (1). Mutroialum ou mieux itaroiolum en est un
diminutif. Il tient lieu d'un trop long * Maromagulum.
Pour lefe exemples suivants, nous prendrons Tordre
alphabétique.
Le nom de lieu de Gaule Argento-magui (2), champ dit
d'Argentos, du nom d'un ancien propriétaire, aurait
donné régulièrement le diminutif Argento-magulum ; à ce
diminutif fut substitué * Argento-iolum ; * Argentogelv/m ^
Argenteuil, d'où le dérivé Argentogelensis , en 769 (3).
Les Chasseneuil de la Charente, de l'Indre, de la Vienne
et de la Haute-Vienne sont d'anciens * Cassino-iolum pour
Cassino-magulum , comparez Cassino-magus « Chassenon , »
Casino-mago dans la Table de Peutinger (4).
NoviOLiUM , à l'ablatif Noviolio , Nueil (Maine-et-Loire) ,
dans un diplôme dé Tannée 690 (5) , tient lieu d'un plus
ancien NoviO'iolum^ Novio-ialum pour Novio-magulum, com-
parez NovionMgus^ Noyon (6j.
RAiDOLimr, aujourd'hui Reuil (Seine-et-Miàrnë) (7), est
un ancien Ratii-ioluin pour * Ratu-magulum , comparez le
nom de lieu Ratumacos pour Ratu-nuigOÈ y Raiu^maguè ;
RaPamacos est fourni par une monnaie (8).
(1> Edition Pinder et Partb«y, p. 434; 1. 8.
(2) Mieux Arganio-magus,' Table de Peutingèt'. E: Desjai^dixls, Géùgtàptiie'
de la. Gaule d'après la Table de Peutinger^ p. 272.
(3) Tardif, HonumenU hiatorittHës y p. 52>, col; 1. Of. Guéràrd; Cartulaire
de Noire-Dame de Paris, t. I, p. 03^,* 100,-101.
mDBBiardiûs, Géographie de lec-Ga^èle d'aprèê la Tabtè'der^eUiin'gery p. 369.
(5) R. de Lasteyrie, Carlulaire de Parts, p. 18.
(&)JHnérairt d'Anlortin, p. 362, 1. 3.
(7) Chronique d'Aimoin et Vie de saint Aile, chez Dom Bouquet, III,'
138 e, 513 a.
(8) A. de Barthélémy, dans la ReûHê CélHquêy t. IX, p. 33.
532 LIVRE II. CHAPITRE X. J l.
Rueil (Seine-et-Oise), Rioilum dans un diplôme de
Louis le Débonnaire en 817 (1), tient lieu d'un plus ancien
*RigO'iolumj * Rigo-ialum ^ d'où Tadjectif noté à l'accusatif
singulier Rigoialinsim chez Grégoire de Tours (2). Rigo-ialum
est le diminutif de Rigo-magus, qui est le nom primitif
Remagen (Prusse rhénane) (3), de la ville de Riom (Puy-
de-Dôme) (4) , et qui signifie « champ du roi. »
Le Vaudreuil (Eure), appelé Rodolium au onzième siè-
cle (5), est un ancien * Roto-iolum pour * Roto-mc^ulum ;
comparez Roto^magus (Rouen).
Senogalum, à Tablatif Senogalo, nom d'un lacus d'Au-
vergne dans Vaicis Brivatensis , aux termes d'une charte de
l'année 821 (6), est un équivalent de ^Seno-ialum pour 5^-
no-iolum, * Seno-ialum tient lieu de * Senomagulwn ^ dimi-
nutif de Seno^maguSy nom de lieu connu par la Table de
Peutinger (7). La forme moderne du diminutif est en fran-
çais Seneuil , nom de hameaux de la Charente , de la
Dordogne, du Doubs et de la Haute-Loire (8).
Vendoilo, à l'ablatif, est en 1115, le nom de la commune
de Vendeuil (Aisne) (9). On a trouvé le même nom de lieu
écrit Vendoil en 1147 (10). C'est un ancien * Vindo-iolum pour
(1) Dom Bouquet, VI, 505 e.
(2) Historia Francorum^ Uvre IX, c. 13; édit* Krusch, t. I, p. 370, 1. 3.
(3) Ë. Desjardins, Géographie de la Gaule d'après la Table de Peutinger,
p. 53.
(4) Rigomagensis , bonne orthographe, alterne, chez Grégoire de Tours,
avec l'orthographe corrompue Ricomagensis , édit. Amdt, p. 751, 1. 26;
p. 7G8, 1. l, etc.
(5) BlosseviUe, Dictionnaire topographique de l'Eure, p. 227.
(6) Doniol, Cartulaire de Brioude^ p. 143.
(7) £. Desjardins, Géographie de la Gaule d'après la Tablé de Peutinger^
p. 53.
(8) E. Desjardins, Géographie de la GauZe d'après la Table de Peutinger^
p. 276.
(9) Guérard, Cartulaire de Notre-Dame de Paris, t, I, p. 307.
(10) Matton, Dictionnaire topographique de l'Aisne, p. 285.
NOMS DE LIEU EN -O-IOLUM. 533
* Vindo-magulum. Comparez Vindo-magics nom d'une ville
des Volcae Arecomici dans la Gaule Narbonnaise chez Pto-
lémée (1).
Ne considérons pas la création des noms hypocoristi-
ques en -o-iolum, -euil, comme un phénomène phonétique ;
c'est un fait morphologique ; les noms de lieux celtiques
ou gallo-romains terminés par les deux syllabes magus ,
étaient des composés de deux termes, comme la plupart
des noms d'hommes germaniques. Ces derniers ont laissé
tomber le second terme dans les noms hypocoristiques en
-0 'Onis ; tel est Fritha-reiks , « roi de la paix, » aujour-
d'hui Friedrich , que nous écrivons Frédéric , en français
Ferry et dont la forme familière était au huitième et au
neuvième siècle Fritto, Friddo, aujourd'hui Fritz. Argento-
iolum, plus tard Argentogelum ^ Argentoilum^ Argenteuil;
YindO'iolum y plus tard Vendoialum, Vendoilum, Vandeuil,
nous mettent en présence d'un phénomène analogue.
L'accent, dans le celtique primitif, ne frappait pas la
syllabe initiale comme dans Frithareiks, Friddo; dans les
composés gaulois dont le second terme est magus ^ la syl-
labe tonique était la finale du premier terme. Ainsi dans
Cassino-magus , Chassenon, l'accent était placé sur la syl-
labe no, le second terme magus était atone. Dans l'hypo-
coristique * Ca^ino-iolum, Chasseneuil, l'accent reste sur la
syllabe no comme dans Cassino-magus,
Parmi les noms de lieux en -euil , dont nous avons
donné déjà la liste , Argenteuil dérive du nom d'homme
4rgentos, déjà étudié (2); Vandeuil vient de Vindos, le Find
irlandais, et dont le féminin est Vinda, exemples : Ulpia
Vinda (3) , Vinda nom pérégrin d'une femme (4). Le nom
de Vindo'bona , Vienne (Autriche), peut s'expliquer par un
(1) Livre II, ch. x, | 6. Edition Didot-MûUer, p. 241, 1. 5.
(2) Voyez ci-dessus, p. 491.
(3) C. /. L., III, 4110.
(4) /6id., III, 5663; cf. VII, 509 et X, 4963.
534 LIVIiE II. CHAPITRE X. { 2.
nom d'homrpe Viudos. Vindos a donné Iqs dérivés : Vin-
dius geutilice qui a .pénétré dans les fastes consulaires
avec M. Vindius Verus, Tan 138 de notre ère, et qui ©st^-
testé par plusieurs inscriptions ; Vindillus , cognomen et
nom pérégrin conservé par deux inscriptions (1) ; Vindonius,
gentilice de Vindonia Vera, dans une inscription duNori-
que (2). De Vindonius vient Yindonissa, nom primitif de
Windiscb, en Suisse, et de plusieurs petites communes de
France : deux Vendeuesse (Saône-et-Loire) , deux Vapde-
nesse (Côte-d'Or, Nièvre), etc.
Dans Rigo-magus « champ du roi » rigo- est uu nom
commun.
Nueil, Seneuil sont des dérivés de novios et de setm,
peuvent signifier ou « champ nouveau, » « champ vieux »
ou « champ de Novios » « champ de Senos , » car les ad-
jectifs novios el senos ont été aussi des noms d'hommes.
§ 2. — Lisêe alphabétique de noms de lieu en o-iolum pour
lesquels on n'a pas trouvé de primitif en magus , — bim
que ce primitif en magus ait dû exister , — et qui tous
dérivent de cognomina.
Barolia est, en 1063, le nom de Bareil, commune de
Chalonnes (Maine-et-Loire i (3). C'est un ancien * Baro-iola^
dérivé d'un thème Baro-, employé comme cognomen au
féminin dans une inscription de Narbonne, où il est le sur-
nom d'une affranchie (4). Le masculin Barus apparaît dans
une inscription de Cilli, en Styrie, l'antique Celeia; on y
trouve les noms de M. Licovius Barus réunis à ceux d'au-
tres membres de la même famille, qui parait avoir été gau-
loise (5). Barus donna un dérivé, Baro, qu'on rencontrée
la fois dans la Gaule transalpine et dans la Gaule cisalpine.
(1) C. /. L., III, 4767 ; V, 5818.
(2) /bid., III, 5098.
(3) Port, Dictionnaire historique de Maine-et-Loire, t. I, p. 206w
(4) C. /. L., XII, 4966.
(5) Ibid., III, 5265.
NOMS DE LIEU EN -0-IOLUM. 535
Ainsi, on a trouvé & Embrun Tépitaphe de L. Vestonius
Baronis fllius, qui est aujourd'hui conservée à Tévêché de
Gap (1) ; dans les environs de Como, une dédicace à des di-
vinités, par Valerius Baronis fliius (2) ; sur les bords du lac
Majeur, Tépitaphe de Novellius Baro (3) ; à Ivrée, celle de
C. Attius Baro (4).
BoNOGiLUM, à l'ablatif Bonogilo, est, dans deux diplômes,
l'un de 832, l'autre de 862, le nom d*une localité où l'ab-
baye de Saint-Denis possédait un manse (5) ; c'est proba-
blement Bonneuil (Seine-et-Oise) ; il s'agit probablement de
la même localité dans un diplôme de l'empereur Lothaire,
en 841, dont la date de lieu est ainsi conçue : acium Bo-
noilo villa (6). Il faut distinguer cette localité de Bonneuil-
sur-Mame (Seine), dont est datée, en 811, une charte du
comte Etienne, en faveur de Tévêché de Paris : actum Bo-
noilo villa :7). Le Cariulaire de Saint- Victor de Marseille
nous fait connaître une autre localité de même nom : une
charte du onzième siècle, contenue dans ce Cartulaire, a
pour objet des biens situés au comté d'Uzès (Gard), in villa
qxmm nominant Bonoilo (8).
* BonO'iolus, forme primitive, dérive du cognomen Bonus,
étudié p. 469 à propos du dérivé Bonacus. Le nom de
Bonneuil est assez répandu en France ; outre les deux com-
munes mentionnées plus haut, il y en a six de ce nom : deux
dans l'Oise ; une dans chacun des départements de la Cha-
rente, de rindre, de la Vienne ; enfin une dans le Calva-
dos, dont l'orthographe soi-disant étymologique nous offre
l'explication populaire du mot : Bonn-œil. Le hasard de l'or-
(1) c. /. L., XII, 9t.
(2) Jbid,, V. 4450.
(3) /Md., V, 6645.
(4) Supplément au tomo V du C. /. L., n* 906.
(5) Tardif, Monuments historique*, p. 85, col. 2 et p. 119, col. 2.
(6) Tardif, ibid,, p. 94, col. 1.
(7) Robert de Lasteyrie, Cartulaire de Paris, p. 39.
(8) Gaérard, Cartulaire de Saint-Victor de Marseille, t. II, p. 53*9.
536 LIVRE II CHAPITRE X. l 2,
dre alphabétique place Bonn-œil (Calvados) à côté de Bonn-
œuvre (Loire-Inférieure), qui est probablement un ancien
*BonO'briga^ « forteresse de Bonus, » encore un exemple
intéressant d'étyniologie populaire. La prononciation mo-
derne du primitif Bono-iolus n'a pas donné lieu aux mêmes
rêveries étymologiques dans le département de l'Aisne ; là
une villa Bonogilus, mentionnée par la Vie de Louis le Pieux,
dite de l'Astronome, dans le récit des événements de Tan-
née 834 (1), est devenue Bonneil (2).
Une localité appelée Bragogilo est mentionnée, en 697,
dans une charte en faveur de l'abbaye de Limours {Seine-
et-Oise) (3). Ce nom de lieu est dérivé du nom pérégrin
Bracus, conservé par une épitaphe du Latium (4). Bracus
avait une variante par double c, d'où les dérivés 1* Brac-
killo , nom d'un potier dont on a trouvé la marque à Lon-
dres (5) ; 2® Braccius , employé comme gentilice et étudié
plus haut, page 352.
Britogilum, nom de Breteuil-sur-Noye (Oise), en 1031 .6!,
est un dérivé du nom pérégrin Brittus, dont le féminin
Britta apparaît dans une inscription d'Espagne (T. On le
retrouve dans une inscription de la Pannonie inférieure,
qui est l'épitaphe de Ti. Claudius Valerius, fils de Brittus,
décurion du deuxième escadron des Aravaci et originaire
d'Espagne (8). Enfin, il se rencontre dans l'Italie du Nord :
on a trouvé , près du lac de Garde , une dédicace aux fées
masculines par un certain Staumus, fils de Vesumus Brit-
tus (9).
(1) C. 51; Dom Bouquet, VI, 115 h,
(2) Matton, Dictionnaire topographique de TAisne, p. 33.
(3) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 244.
(4) C. /. L., XIV, 2345.
(5) Ibid., VII, 1336, 175.
(6) Merlet, Cartulaire de Notre-Dame de ChartreSj t. I, p. 88.
(7) C. I. L., II, 1335.
(8) /6id., III, 3271.
(9) Ibid., V, 5002.
NOMS DE LIEU EN -0-IOLUM. 537
Cabrogilo est, dans deux chartes du commencement du
dixième siècle (1), le nom d'une villa située près de
Brioude (Haute-Loire). Le thème cabro-, dont ce nom de
lieu dérive, s'offre ici avec une notation moderne pour
capro'y plus ancien. C'est le. thème du nom pérégrin Ca-
per, attesté par une inscription de Dalmatie (2) et du
cognomen Caper, qu'on croit avoir retrouvé dans une ins-
cription de la vallée du Pô (3). La variante barbare Caprus,
au nominatif, nous est offerte par une inscription de Ca-
nosa (4). Dans une inscription de Campanie, la forme fé-
minine Capra est employée au masculin : L. Aninius Ca-
pra (5). Le seul personnage de quelque notoriété qui ait
porté ce cognomen est le grammairien Flavius Caper, qui
vivait vers la fin du premier siècle de notre ère , et dont
on a deux petits traités, l'un de orthographia, l'autre de
verbis dubiis (6).
Caloili villa ^ dans une charte de l'année 1124 (7), est
Chaillot, aujourd'hui compris dans l'enceinte de Paris.
C'est un dérivé du nom pérégrin Calus, lu sur une marque
de potier à Orange (8). On a trouvé, en Afrique, l'épitaphe
de C. Claudius Calus (9). Ce cognomen est quelquefois iden-
tique à l'adjectif grec xaXdç, « beau. » Il a été surtout em-
ployé pour les femmes. Ainsi, les inscriptions de la Campa-
nie nous offrent six exemples de femmes appelées Cale : à
Antium, l'épitaphe de Junia Cale (10); à Pouzzoles, celle de
l'esclave Cale (il); à Capoue, celle de Babullia Cale (12), etc.
*
(1) Doniol, Ca.rtuULire de Brioude, p. 39, 60.
(2) C. /. L., III, 2848.
(3) îbid., V, suppléments, itslics, fasc. I, 972.
(4) /6id., IX, 387.
(5) Ibid., X, 6463.
(6) Teuflfel, Geschichte der rômischen LiteratuVy 3* édit., p. 798-799.
C?) Robert de Lasteyrie, C&rtulaire de Paris, p. 221.
(8) C. /. L., XII, 5686, 161.
(9) Ibid., Vni, 6413.
(10) Ibid., X, 6733.
(11) Ibid., X, 2203.
(12) Ibid., X, 4037.
538 ^IVRE H. OHAPITRE X | ^
Le nom primitif de Chelles (Seine-et-Marne), noté Cala
dans le testament d'Erminthrude, vers 700 (1), et Kala, en
811, dans la donation du comte Etienne (2), n'est autre
chose que la forme féminine du nom d'homme Calus,
employé adjectivement : Cala, sous-entendu villa ^ ce qui
veut dire non pas « belle ville, » mais « villa de Calus, »
c'est-à-dire « propriété de Lebeau , » à moins qu'il n'y ait
eu, à côté de l'adjectif grec, un mot gaulois de môme son
dont le sens nous échappe. Il a existé deux Cala-dwmmy
l'un en Espagne, l'autre en France, aujourd'hui Châlons
(Mayenne) (3).
Cantogilum est le nom d'un bien donné en 936 à l'abbaye
de Saint-Julien de Brioude (4). C'est probablement de la
même localité qu'il est question au même siècle, dans les
chartes de Cluny, sous le nom écrit à l'ablatif Canioiolo (5)
et Quantoiolo (6). L'abbaye qui s'y trouvait est appelée
Cantoiolense mona^terium dans une charte de l'année 1 137 (7).
C'est aujourd'hui Chanteuges (Haute-Loire). Ce nom de
lieu est dérivé d'un nom barbare *Cantos, nécessaire pour
expliquer le gentilice Cantius d'une inscription de Lyon
qui est l'épitaphe d'Acutia Amatrix gravée par les soins de
son mari C. Cantius Elventinus (8) ; Cantius veut dire « fils
de Cantos. » Nous connaissons à Cantos deux autres dé-
rivés : Canto et Cantaius, noms de potiers dont les marques
sont conservées au musée Britannique (9). Cantos était un
nom d'homme gaulois ; son thème , Canto- , se retrouve
comme second terme dans le nom divin Àvi-cantus con-
(1) Tardif, Monuments historiques^ p. 33, col. 2.
(2) Tardif, ibid.^ p. 811. Robert de Lasteyrie, Cartulaire de Paris ^ p. 39.
(3) Ptolémée, t. II, c. 6, 2 38; édit. Didot-Mûller, t. I, p. 162, 1. 7. L. Maî-
tre, Dictionnaire iopographique du département de la Mayenne, p. 66.
(4) Doniol, Cartulaire de Brioude^ p. 344.
(5) Bruol, Recueil, t. I, p. 532; t. II, p. 242, 239.
(6) Ibid., t. II, p. 266.
(7) Ghassai'ng, Spicilegium Brivatense, p. 13, 14.
(8) Boissieu, Inscriptions de Lyon, p. 501.
(9) C. i. L., VIII, 1330, 8 et 1336, 225.
N0M6 BE>LIBU'EN nO-IOLUM. 889
serve par une inscription de Nimes (1), et dans le nom
d'homme Viro-cantus qu'on a trouvé dans une inscription
de Milan (2).
CAUCIN0GU.UM. Plusieurs chartes du cartulaire de Brioude
(Haute-Loire) , à la fin du neuvième siècle et au commen-
cement du dixième, mettent dans la circonscription, vicaria^
aieis ou eomitatus dont Brioude était capitale, une villa
appelée, au cas indirect, Caucinogàlo (3), Caucinogilo (4), et
par abus Caucionogile (5), Cacinogilo (6). Les deux dernières
leçons doivent être corrigées Tune en Caucinogile , l'autre
en Caucinogilo. Caucinus, d'où ce nom de lieu dérive, est
un cognomen connu par une inscription de Madrid qui est
l'épitaphe de L. Domitius Caucinus (7).
Cavenoilus, nom de lieu mentionné dans une charte
du roi de France Robert en faveur des religieuses d'Argen-
teuîl (Seine-et-Oise) , en 1004 (8), dérive du gentilice Ca-
venus dont on a vu plus haut, p. 458, le dérivé Cavennacus.
CoRBOLius est le nom d'une ville , oppidum , dans une
charte du roi Robert, en Tan 1000 (9) : oppidum Corbolii,
Lé même nom apparaît avec une légère différence d'ortho-
graphe dans une autre charte du môme roi, en 1029 : a
castello Carboili (10). Il s'agit de Corbeil (Seine-et-Oise). Ce
noni de lieu dérive du nom d'homme pérégrin Corbus
qu'on trouve dans une inscription du Norique (il). De Cor-
Ci) C. /. L., XII, 3077.
(2) /Md., V, 5883.
(3) Doniol, C&rtulaire de Brioude, p. 102, 133.
(4j Page 285.
(5) Page 173.
(6) Page 253.
(7) C. /. L., II, 3055.
(8) Guérard, C&rtulaire de Notre-Dame de Paris, t. 1, p. 95.
(9) Tardif, Monuments liistoriques, p. 152, col. 1.
(10) Jbid,, p. 163, col. 1.
(11) C. /. L., III, 6497.
540 LIVRE II. CHAPITRE X, { 2,
bus est venu le dérivé Corbo dans une inscription de Pan-
nonie, C. Fabius Corbo (1). Le nom pérégrin Corbus parait
avoir persisté en Gaule sous la domination franque : en
603 ou en 604, le roi Thierry II eut, d'une concubine, un
enfant qu'on appela Corbus (2) ; Corbus fut mis à mort en
613 (3).
CuRTOGiLO, au cas indirect, est le nom d'une villa située
en Quercy, suivant une charte de Tabbaye de Beaulieu
(Corrèze) (4). Ce nom de lieu est dérivé du cognomen Curtus,
connu par une inscription d'Afrique (5).
Christoilo , à l'ablatif , est le nom d'une villa que met
en Parisis un diplôme de Charles le Simple en 900 (6). Il
s'agit de Créteil Seine). Ce nom de lieu est dérivé du cog-
nomen Chrestus , d'origine grecque , fréquent dans les
inscriptions romaines , notamment en Gaule ; exemples :
Numisius Chrestus, afifranchi, à Fréjus (7); Q. Pacuius
Chrestus (8), et Valeria Chreste (9), à Narbonne.
Ebrolio est à Tablatif, au treizième siècle, le nom
d'Ebreuil (Allier) (10). C'est le nom d'une abbaye fondée à
la fin du dixième siècle. Il est dérivé du nom d'homme
Eburus étudié plus haut, p. 168.
Germolio est, à l'ablatif, le nom d'une localité men-
tionnée plusieurs fois dans des chartes du onzième siècle,
au cartulaire de l'abbaye de Conques (Aveyron) (11). Ce nom
(1) c. /. L., III, 3776.
(2) Frédégaire, livre IV, c. 34; édit. Krusch, p. 130, 1. 7-8.
(3) Frédégaire, livre IV, c. 42; édit. Knisch, p. 141, 1. 24.
(4) Deloche, Cartulaire de Beaulieu^ p. 219.
(5) C. i. L., VIII, 5641.
(6) Robert de Lastoyrie, Cartulaire de Part«, p. 76.
(7) C. /. L., XII, 264.
(8) /bid., 4322.
(9) /6td., 5194.
(10) Chassaing, Spicilegium Brivatense, p. 210.
(11) Desjardins, CaHuiatre de Conques^ p. 29, 167, 240.
NOMS DE LIEU EN -0-IOLUM. 54i
de lieu est dérivé de Germus, cognomen dans une inscrip-
tion romaine de Dalmatie qui est Tépitaphe de Sex. Gavi-
lius Germus (1). Germus explique Germay (Haute-Marne).
LiNOGiLE , nom d'une villa cédée , à titre d'échange ,
par Tabbaye de Saint-Julien de Brioude (Haute-Loire)
en 884 (2), dérive du cognomen Linus qu'on trouve de
temps en temps dans les inscriptions romaines ; il y en a
un exemple à Narbonne, C. Valerius Linus (3); on en
trouve aussi dans d'autres parties de l'empire romain :
L. Titius Linus, à Trévise (4) ; T. Pullius Linus, à Este (5).
On pourrait aussi expliquer Linogilus par le nom d'homme
gaulois Licnos qui se trouve dans l'inscription gauloise
d'Autun, et dans deux inscriptions romaines, Tune de Pola,
en Istrie (6), l'autre de Gemona (7); dans ces deux derniers
monuments Licnus est cognomen.
Petroilum est, en 1030, le nom de Preuil, commune de
Nueil (Maine-et-Loire) (8). Le même nom de lieu désignant
une localité différente est écrit à l'ablatif PedroliOy vers
l'an 1000, dans une charte de l'abbaye de Cluny (9) ; il s'agit
probablement du Pérolet, commune de Loche (Saône-et-
Loiref) ; ce nom de lieu est noté d'une façon plus conforme
à la prononciation^ Perroilo, dans une charte contemporaine
de la précédente (10). Petroilum vient du nom d'homme péré-
grin Petrus , connu par des marques de potiers trouvées à
Orange et à Die (11). La variante Petra est attestée par une
(1) c. 1. L., III, 3054.
(2) Doniol, C&rtulaire de Brioudej p. 279.
(3) C. /. L., XII, 5188.
(4) Ibid., V, 2119.
(5) Ibid., V, 2428.
(6) Ibid., v, 21.
Ç!) Ibid., V, 1818.
(8) Port, Dictionnaire historique de Maine-et-Loire, t. III, p. 184.
(9) Bniel, Recueil, i. III, p. 240. Chavot, Le Mâconnaii, p. 218.
(10) Ibid., p. 279.
(il) C. J. L., XII, 5686, 686.
54ft LIVRD IL> CHAPITRE XJ fZ
inscription du musée de\ Naples : M.^ Musidius Petm'{l).
Petras est surtout fréquent dans les inscriptions chrétiennes.
PiNOLio, à Tablatif, est une ancienne notation du nom
de PiiMKiilih (Gironde) (2). Ce nom de lieu est dérivé du
cognomen PîmoSy attesté par deux inscriptions romaines de
Campanie; ce sont les épitaf^bes de C. LoUius Piaus (3) et
de Q. Vilius Pinus (4). PiBiiSJkvaÂt une variante Pina au
masculin; on a copié, à Brindes» Tépitaphe d*Octavius
Pina (5). On trouve de Pina une variante pv double n ;
L. LoUius Pinna, dans une inscription d*Âfriqu<i (Q^Piana,
nom pérégrin dans une épitaphe de Campanie (7).
RusGOiALUM, nom de lieu mentionné dans une charte
de l'abbaye de Saint-Martin de Tours en 791 (8), dérive du
nom pérégrin Ruscus. Ruscus nous est conservé par Tépi-
taphe gravée sur le monument funèbre que se fit élever de
son vivant Cotula, fils de Ruscus (9).
•
SpitïOGiLUM {cujus vocaiulum est Spinogiium), est'le nom
d'Epinay-sur-Orge (Seine-et-Oise), plus anciennement Epi-
neil, dans un diplôme des empereurs Louis le Pieux et
Lothaire pour l'abbaye de Saint-Germaîn-des-Prés en
829 (10). Dans le Polyptyque de Saint-Germain des Prés (11),
ce nom de lieu a été écrit à Tablatîf Ispinogilo , co'i^rigé
ensuite en Spinogilo. Il dérive du nom d'homme Spinus
attesté' par une inscription de Nîmes (12).
(1) c. 1. L., X, 3387.
(2) Qustaye Desjardins, C&rtuUdrB de Conques, p. XG(Vf«'
(3) C. /. L., X, 2663 a.
(4) Ibid., X, 4911.
(5) Ihid,, IX, 155.
(6) Ibid., VIII, 6783.
(7) Ihid., X, 1944.
(8) Mabille, La. pancarte noire, p. 232; cf. 151.
(9) C. ;.»t., III,' 5107.
(10) Robert de JLaatayri*,',/C?«Hu2aire de PnWs, p^'48.
(11) Edit. Longnon, p. 66.
(12) C. /. L., XII, 3355.
NOJf a DE : LIEU EBT - Oi- lOE U M . MS
ToaNOLii, au génitif, est le nom d^un château- et d^m
village dans un document du milieu du treizième siècl^e^ (1).
C'est aujourd'hui Tournoel (Puy-de-Dôme). Ce nom de
lieu ^t dérivé an cognomen Turnus déjà étudié^ page 179<
TuROLLiUM, nom du Toureil, commune du départe-
ment de Maine-et-Loire , dans des documents du onzième
siècle (2) dérive de Turrus, cognomen romain dont il a été
question plus haut, page 441.
Vaboiol est le nom d'une paroisse mentionnée ao-
onzième siècle dans le Cartulaire de Cornues (Aveyron) (3):
U est dérivé du cogriomen latin Varus rendu célèbre par
la gens Quintilia (4).
Vebmouuh ou VemoiHum , à l'ablatif Vemolio ou Yernoi^
lio^ est, à la Sn du dixième siècle, le nom de VemouiUèt,
commune de Poissy (Seine-et-Oise) , dans deux diplômes
royaux (5). Une autre localité de môme nom apparaît
au même siècle dans deux chartes, Tune de Tabbaye de
Cluny (6), l'autre de Tabbaye de Saint-Vinoent de Mâr
cou (7); la notation Vemulio nous est offerte à la môme
époque par une charte de Cluny (8)î il s'agit de Verneuil^.
conamune de Charnay-lés-Mâcon (Saône-et-Loire). Vernoil-
le-Fourrier (Maine-et-Loire), au douzième siècle Vernaliumi.
nous offre une autre notation du môme mot (9). Une troi-
sième notation nous est offerte par les deux Ve^nei}., l'un
de Savoie, l'autre de la Sarthe. Verneuil est un nom de
(1) Gbassaing, Spicilegium Briv&tensê, p. 56» 57» 59.
(2) Port, Dictionnaire de Afaine-et-Loire, t. III, p. 605.
(3) EdiUon G. Desjardins, p. 173.
(4) Pauly, Real-Encyclop&edie, t. VI, p. 372-373.
(5) R. de Lasteyrie, C&rtulaire de Paris, p. 88, 99.
(6) Bruel, Recueil, U I, p. 604.
C7) Ragut, Cartulaire de Saint^Vincent, p. 153.
(8) Brael, Recueil, t. II, p. 390.
(9) Port, Dictionnaire de Maine-et-Loire, U III, p. 693, 694.
544 LIVRE IL CHAPITRE X. { 2.
lieu très répandu en France ; il y a dix-neuf communes de
ce nom réparties entre quatorze départements : Aisne,
Allier , Charente , Cher , Eure , Indre , Indre-et-Loir ,
Marne , Meuse , Nièvre , Oise , Haute- Vienne , Seine-et-
Marne , Seine-et-Oise. Nous ne parlons pas des hameaux.
Ce nom de lieu est un dérivé du cognomen Vernus at-
testé par les inscriptions ; exemple : en Espagne, L. Titius
Vernus (1) , Veranius Vernus (2) , M. Atilius Vernus (3) ,
D. Julius Vernus (4); en Italie, Aunatius Vernus (5),
L. Volceius Vernus (6), L. Marius Vernus (7). Ce cognomen
se trouve aussi en Gaule. On a trouvé à Saint-Michel
d'Euzet (Gard) l'épitaphe de P. Sammius Vernus (8). Il
pourrait bien se faire que les Vernon de TArdèche, de
•
TEure et de la Vienne soient tous les trois d'anciens
* Vemo-magus^. De Vernus on a tiré un gentilice Vemius
qui explique le nom de lieu Vemiacus dans une charte du
dixième siècle (9). Vernolium et de Vemiaciis viennent de
noms d'hommes ; Vemetum dérive d'un nom d'arbre.
Verolias est, au dixième siècle, suivant plusieurs chartes
de Cluny (10), le nom d'une localité située en Maçonnais. Ce
nom de lieu est dérivé du cognomen Verus qui est des plus
communs; pour la Gaule on en peut compter quarante
exemples dans le tome XII du Corpus inscripHonum Lati-
narum^ onze dans le recueil de Brambach.
De l'examen de ces noms de lieu on doit conclure que
(1) c. /. L., Il, 1306.
(2) Ibid., 3050.
(3) Ibid,, 3695.
(4) Ibid., 4574.
(5) /Wd., V, 5972.
(6) Ibid,, IX, 2256.
(7) Ibid., 4923.
(8) Ibid,, XII, 2730.
(9) Aug. Bernard, Cartulaire de S&vigny, t. I, p. 185.
(10) Bruel, Recueil, t. II, p. 620, 635, 718.
NOMS DE LIEU EN -0-IOLUM. 545
la plupart des noms de lieux terminés par la désinence
•oiolum ou par ses variantes dérivent de cognomina.
Nous placerons le dernier , malgré Tordre alphabétique ,
un mot qui peut donner lieu à contestation :
Altooilum, à Tablatif AltogilOy est le nom d'Auteuil (Seine-
et-Oise), dans le Polyptyque de Saint-Germain des Prés (1).
Pour Auteuil, ancienne commune du département de la
Seine, aujourd'hui réunie à Paris, on trouve, au dou-
zième siècle, la notation Altoilum (2). Mais ces orthographes
ne représentaient ni Tune ni l'autre au moyen âge la pro-
nonciation réelle de la première syllabe du mot qu'on pro-
nonce aujourd'hui Auteuil. Cette première syllabe , dès le
douzième siècle , se prononçait comme aujourd'hui : cela
est prouvé par la notation Àuteolum (3). Dès l'époque où fut
écrit le Polyptyqtie de Saint-Germain des Prés , c'est-à-dire
dès la période carlovingienne , on prononçait déjà a/u la
première syllabe de ce mot; bien plus, on ne l'a jamais
prononcée autrement, et l'orthographe al a été inspirée
par des savants heureux de montrer qu'ils n'ignoraient
pas l'identité du français kaut et du latin alPus. Auteuil est
la notation moderne d'un primitif Aucto-iolum^ Autto-ialum
dont le premier élément est le cognomen ou nom d'esclave
latin Auctus (4).
Auctus veut dire acheté aux enchères. C'est donc , éty-
mologiquement, un nom servile, et une fois devenus libres
par l'affranchissement, d'anciens esclaves l'ont conservé :
tels sont, dans des inscriptions de Narbonne, L. Baebius
Auctus, D. Vleius Auctus (5).
Le cognomen Auctus avait une variante Autus, lisez
Auttus avec assimilation du c au ^ suivant. On en trouve
(1) Edit. Loagnoû, p. 280, $83, 317.
(2) Robert de Lasteyrie, Cartul&ire de Paris, p. 176.
(3) Ibid., p. 451.
(4) De- Vit, Onom&aticon, t. I, p. 573.
(5) C. /. L., XII, 4358, 4495.
35
546 LIVRE lï. CHÀPkTRte t. t 1.
la forme féminine : dans une inscription d'Aqnilèe (l), ot
c'est un nom soit d'esclave , soit d'étrangère ; dans une
inscription d'Ostie, où Laberia Auta est une afiFranchie (2),
dans une inscriptiott de Baies (3), qui est l'é^itaphe Juliâ
Auta, originaire de Nuceria, aujourd'hui Nocera en Italie.
Autus est employé comme gentilifee d^atos uM inscription
de Vérone qui est l'épitaphe de C. Autus Narcîssns (4).
Autus, Auta a donné plusieurs dérivés, tels sont '. Auto,
-^niSy nom du père de Tertius Bresius , dans une inscrip-
tion de Bodincomagxbs^ aujourd'hui Monteu da Po, en Italie,
sur les bords du Pô (5) ; et son dérivé Autonius qui est un
gentilice dans une inscription de l'Italie méridionale (6); Au-
teîus, employé comme gentilice dans une inscription du La-
tium (7); Autestius, gentilice dans une inscription de Ni-
mes (8), enfin *Autessius qui doit avoir été un gentilice
romain et qui explique à la fois la première partie du nom
à! AutessiO'4'wrum ^ Auxerre, et le nom dérivé locus Autessia-
nus , dans une charte de Tannée 948 , conservée aux archi-
ves de la cathédrale d'Asti (9). La notation Olsiodra par i = m
du nom d'Auxerre dans le livre d'Armagh , au neuviènie
siècle, explique l'orthographe AltogiluifH par / = u, du nom
d'Auteuil , dans le Polyptyque de Saint-Germain des Prés.
Toutefois le maintien du t dans Auteuil prouve que le t
de ce mot était primitivement double : la forme primitive
esiAuttoiolum=Auctoiolumy tandis que dBXis Auiessûhdummj
Auxerre, le t étant simple est tombé.
(1) c. /. L., V, 1637.
(2) Ibid,, XIV, 1215.
(3) Ibid., X, 1981.
(4) Ibid., V, 3500.
(5) Ibid., V, 7480.
(6) Ibid., IX, 2998.
(7)J6W., XIV, 2311.
(8) Ibid., XII, 3462.
(9) Historiae patriae monumenUj chtLrUrum tomus primuB, col. 162 et.
CHAPITRE XI.
m? SUFFIXE -MOUS.
SoMMAniB :
i 1. Le suffixe gaulois -isco-8, — { ?. Noms de lieux dérivés de gentilices
romaiBs à l'aide du suffixe gaulois -isco-s dans les textes du temps dto
l'empire romain. — { 3« Noms de lieu en -iscus d'origine romaine dans las
docnments du moyen âge. — § 4. Noms de lieu en -iscus d'origine ger-
manique.
S 1*'. -^ Le suffixe gaulois -iscO'^s.
Les Gaulois ont eu un suffixe -iscos. C'est ayec ce suffixe
que parait avoir été formé le nom du peuple gaulois des
Scordisci;cG nom semble dérivé de celui de la montagne appe^
lée Scardus par Tite Live (1), dans le récit des événements
des années 169 et 168 av. J.-C; c'est probablemetnt à-tor^
que, dans les éditions des auteurs grecs, ce nom est écrit
awpêoç, par exemple chez ^ Polybe (2) , chez Strabon (3) et
chez Ptolémée (4) ; le Scorchia est aujourd'hui le Schardag
en Albanie. On attribue une orjigine aaa^oguâ au nom des
Taurisci, peuple des régions sud-ouest de l'empire d'Au-
triche ; ce nom serait dérivé de celui des ynontagnes dites
Tauern eu Tkol, en Garj&thie et en Stirie.
(1) Livre XLIII, c. 20, et livre XLIV, c. 31.
(2) Livre XXVIII, c. 8, { 3; ^^^ Didot, t. II, p. 31.
(â) Lvrre VU, fragm. 10; édit. Didot, p. 275, 1. 12, 13.
(4) Uvre II, c. 16, { 1 ; édit. Didot, p. 303, 1. 8.
548 LIVRE II. CHAPITRE XI. { 2.
Du suffixe 'iscO'S il y a un dérivé secondaire en -on- : -isco,
"isconis dans les textes latins et dont un exemple parait clair :
c'est l'ancien nom de Tabbaye de Saint-Claude (Jura), Corir
datiscOf dérivé de condate « confluent ; » on trouve Condatisoo
chez Grégoire de Tours (1).
§ 2. — Noms de lieux dérivés de gentilices romains à Vaide
du suffixe gaulois -isco-s dans les textes du temps de Vem-
pire romain.
Des exemples, Scordiscus, Tauriscus et Condatisoo y on
conclura que les suffixes -isco-s, et -isco^ isconis ont servi
chez les Gaulois à former des termes géographiques dérivés
de noms de lieux. Sous l'empire romain ces suffixes ont
été employés pour créer des noms de lieux dérivés de
noms de personne. Nous citerons Petenisca^ Yibiscus,
Latisco et Lavisco.
Petenisca est, dans la TcAle de Peutinger, une station ro-
maine de Suisse, entre Avenches et Soleure (2). Petenisca,
probablement pour Petinisca^ est un dérivé du gentilice
Petinius, qu'on trouve en Italie dans deux inscriptions, Tune
de Venosa (3), l'autre de Ligurie (4). Petinius paraît ne
différer que par une variante orthographique de Petîlius
plus fréquent.
ViBiscus (5), aujourd'hui Vevey, canton de Vaud, en
Suisse , sur les bords du lac de Genève , est un dérivé du
gentilice Vibius, porté à Rome par plusieurs consuls, le
(1) Liber vitae patrum^ c. 2; édit. Krusch, p. 664, 1. 33.
(2) Segment, III, 3. Cf. E. Desjardins, Géographie de la Gaule d'après U
Table de Peutinger, p. 237.
(3) C. /. L., IX, 422.
(4) Ibid,, V, 7739.
(5) Itinéraire d'Antonin ^ p. 352, 1. 1. Dans la Table de Peutinger, seg-
ment III, 3, Vivisco à i'ablatif. Desjardins, Géographie de la Gaule d'apru
(a Table de Peulinger, p. 240.
NOMS DE LIEU EN -ISCUS. 549
premier en Tan 43 avant notre ère. Ce gentilice fut très
fréquent en Gaule sous Tempire romain. Les inscriptions
de la Qaule Narbonnaise, réunies par M. Hirschfeld, men-
tionnent quarante-deux Vibius (1). Il y avait de ce nom
une variante Vivius : quatre exemples nous en sont fournis
par des marques de potiers trouvées à Annecy (Haute-Savoie),
à Vienne (Isère) et à Sisteron (Basses-Alpes) (2).
Lâtisco, "Onis, où saint Loup, évoque de Troyes, trouva
un asile vers le milieu du cinquième siècle , suivant un
biographe contemporain (3) , est aujourd'hui le Mont-Las-
sois, Mons Latisc[dn]ensis, près de Châtillon-sur-Seine (Côte-
d*Or). Ce nom de lieu semble être un dérivé du gentilice
Latius , au féminin Latia dans une inscription de l'Italie
méridionale (4), au masculin Lattius avec deux t dans une
inscription de Vienne (Isère) (5). On peut supposer que c'est
un dérivé d*un thème gaulois lati-, peut-être identique au
vieil irlandais laith « vaillant héros , » qui se trouve aussi
dans les noms d'homme composés Es-cengo-lati-s , nom
d'homme pérégrin dans une inscription d'Aubagne (Bou-
ches-du-Rhône) ; Sego-lati-us , gentilice conservé par une
inscription de Narbonne (6); peut-être dans Are-late^ Arles.
Lavisco, 'One est dans la table de Peutinger une station
romaine entre Aoste (Isère) et Chambéry (7). Ce nom de lieu
parait dérivé du nom d'homme Lavius employé comme gen-
tilice dans une épitaphe de Dacie (8) et dans la marque
(1) C. 7. L., Xn, Index, Cf. Pauly. Real-Encyclop., V, 2565-2575.
(2) îbid., XII, 5683, 314; 5686, 943, 944, 945. Vivisci, surnom qui distin-
guait des Bituriges Cnbi, à Bourges, les Bituriges de Bordeaux, doit être
un mot différent de Vibiscus , Vevey. Viviscus dérive probablement d'un
thème vivo-, en gallois gwiw, en irlandais /iu, « apte, propre à, digne. »
(3) Dom Bouquet, I, 645 a.
(4) C. I. L., X, 51.
(5) Ibid., XII, 1974.
(6) Ibid., XII, 602. 5127.
(7) Table de Peutinger, segment III, t. E. Desjardins, Géographie de la
Gaule d'après la Table de Peutinger, p. 389.
(8) C. I. L., III, 1269.
550 LIVRE IL CHAPITRE XI. | 3.
d'une patère trouvée à Aquilée (1) ; dans ce dernier docu-
ment il s'agit d'un individu appelé C. Lavius Summacus,
qui était probablement gaulois.
Nous ne dirons rien de Matisco^ M&con, où Ton reconoait
le même suffixe , mais qui est antérieur à la conquête
romaine (2) et qui dérive d'un mot dont la valeur reste
obscure.
Cette courte nomenclature empruntée aux textes contem-
porains de Tempire romain, peut être facilement augmen-
tée en recourant aux documents du moyen âge. Toutefois,
parmi les noms de lieux terminés en -iscus, ou en escus
avec une variante orthographique sans importance, dans
les chartes du moyen âge, il y a deux catégories à distin-
guer. Les uns dérivent de noms d'hommes usités sous
Tempire romain, les autres de noms d'hommes germani-
ques introduits par la conquête barbare. Les noms de lieu
en 'iscus dérivés de noms germaniques d'hommes peuvent
être germaniques tout entiers, et le suffixe iscus qui a
servi à les former peut être d'origine germanique lui-même:
nous distinguerons donc ces noms de lieux (§ 4) de ceux
qui sont tirés de noms d'hommes usités antérieurement à
la conquête germanique (§ 3) ; dans ceux-ci le suffixe -wctw
paraît être , comme dans les mots étudiés au présent para-
graphe, le suffixe gaulois que nous avons constaté au para-
graphe premier, p. 547, dans des noms de lieux formés
avant la chute de l'empire romain.
S 3. — Noms de lieux en -iscus (Torigine romaine dans Us
documents du moyen âge.
ÂMELESCA. C'est une localité qualifiée d'appendaria dans
(1) c. I. L., Supplemenia italica, V, 1082, 232.
(2) Caosar, De bello gallico, 1. VII, c. 90, g 7.
NOMS DE LIEU EN -I8CU8. 551
une charte du milieu du onzième siècle (i). Elle parait
avoir été située près de Salles-Courbatiès (Aveyron). Ame^
lesca^ pour Amelisca , est un dérivé d'Âmelius , variante du
gentilice Âemilius comme on a vu plus haut, p. 347, 348.
Bârbaresga est le nom d'une villa située en Maçonnais,
comme nous l'apprend une charte de Tannée 963 , publiée
par M. Bruel (2). Il faut en rapprocher le Barbariscum [cas^
trum] d'un compromis entre les villes d'Alba et d'Asti en
1223 (3). Barbarescay pour Barbarisca^ est dérivé soit du gen-
tilice Barbarius étudié plus haut. p. 402, soit du cognomen
Barbarus qu'on a lu dans des inscriptions romaines de
Narbonne (4), d'Aubagne (5) et de Fréjus (6).
Calisgus est une localité placée en Lyonnais par un di-
plôme de l'empereur Charles le Gros en 885 (7) , et par un
diplôme du roi Louis l'Aveugle en 892 (8). La môme loca-
lité est appelée Calliscus dans trois chartes du cartulaire
d'Ainay, vers l'an 1000 (9), en 1003 (10) et en 1007 (11), et
Calescus [in villa de Calesco) vers l'an 1000 (12). Ce nom de
lieu peut dériver ou du gentilice Callius étudié p. 204, ou
du cognomen Calus qui parait d'origine grecque. En grec,
c'est un adjectif qui veut dire beau; or cet adjectif a été
employé comme nom d'homme latin, Calus (13), et surtout
comme nom de femme ; exemple , les affranchies Remania
(1) G. Desjardins, Cartul&ire de Conques (Aveyron), p. 32.
(2) hecueil des chartes de l'abbaye de Cluny^ t. II, p. 250.
(3) Historiae palriae monumenta, chartarum t. I, col, 1273.
(4) C. /. L., XII, 4661.
(5) Ibid., XII, 604.
(6) /6id., XII, 268.
(7) Cartuîaire de Saint-Hugues de Grenoble^ p. 11.
(8) Ibid,, p. 73.
(9) Aug. Bernard, Cartuîaire de Savigny, t. II, p. p. 595.
(10) Ibid., p. 574.
(11) Ibid., p. 579.
(12) Aug. Bernard, Cartuîaire de Savigny, t I , p. 223.
(13) De- Vit, Onomasticon, t. II, p. 76.
552 LIVRE II. CHAPITRE XI. J 3,
Cale dans une inscription de Die (1), Appia Cale dans une
inscription de Novare (2); nous citerons encore Âudasia
Cale dans une inscription des environs de Milan (3) ; celle-ci
était ingenua comme Âlbonia Cala dans une inscription de
Chieri (4).
Galiscus , nom de lieu mentionné en 739 dans le testa-
ment d'Abbon qui le met dans le pays de Gap (Hautes-
Alpes) (5), peut dériver soit du gentilice Gallius, soit du
oognomen Gallus. Le premier a été étudié p. 238-239. Le se-
cond est un œgnomen fréquent à Rome au premier siècle
avant notre ère et dans les siècles suivants. Ainsi C. Asi-
nius Gallus fut consul Tan 8 avant J.-C. Plusieurs Gallus
apparaissent dans les écrits de Cicéron, de Catulle, d'Ovide
et de Properce , et les inscriptions de la Gaule nous
offrent des exemples de ce cognomen : à Vienne (Isère),
Tépitaphe d'A. Vinnius Gallus (6); à Grenoble celle de
Sextilius Gallus (7).
LoDiscus est le nom d'une villa située dans la paroisse
de Mornant (Rhône). Elle est mentionnée par le Cartulaire
de Savigny^ dans trois chartes du dixième siècle (8) et dans
trois chartes des environs de Tan 1000 (9). Ce nom de lieu
peut dériver du gentilice Lodius, attesté par plusieurs épi-
taphes qu'on a recueillies à Rome (10). On pourrait aussi
l'expliquer par un œgnomen Lautus, attesté par deux ins-
criptions d'Italie (il). Ce cognomen a une variante, Lotus,
(1) c. I. L., XII, 1662.
(2) /&<d., V, 5616.
(3) Ibid., V, 5749.
(4) Ibid., V, 7499. Cf. ci-dessus, p. 537.
(5) C&rtul&ire de Saint-Hugues de Grenoble, p. 39.
(6) C. /. L., XII, 2032.
(7) Ibid., XII, 2247.
(8) Ed. Aug. Bernard, p. 31, 202, 205.
(9) Ibid., p. 210,212,277.
(10) C. /. L., VI, 21165-21171.
(11) Ibid., V, 1028; X, 2930.
NOMS DE LIEU EN -I8CU8. 553
qu'on rencontre dans deux inscriptions d'Italie (1). Le nom
du potier Lottus, lu sur une amphore, à Vienne (Isère),
peut être une variante de Lotus ou un mot différent (2).
Marinesgae. Une charte du douzième siècle, conservée
par le Cartulaire de Conques (3), parle d'un locus de Ma-
riiiescas ; c'est aujourd'hui Marinesques, commune de Naus-
sac (Aveyron). Moânnescae pour * Mariniscae peut venir du
gentilice Marinius, étudié plus haut, p. 277, ou du cogno-
mm Marinus, qui a donné naissance à ce gentilice.
Martinesque , commune de Mouret (Aveyron) , est une
ancienne villa *MarHmsca. Il y a un lapsus oalami dans le
passage où le Cartulaire de Conques (4) l'appelle Mariinex,
Martinisca peut dériver de Martinius, dont on s'est occupé
ci-dessus, p. 279, ou du cognomen bien connu, Martinus,
d'où vient ce gentilice (5).
Matriscus, mentionné en 884 dans un diplôme du roi
Karloman (6), est un nom de lieu dérivé du gentilice itfo-
trius, déjà étudié p. 280.
Maurisca est une colonica qui appartenait à l'abbaye
Saint- Victor de Marseille, au commencement du neuvième
siècle (7). Une charte de 1038, concernant la môme abbaye,
parle (lu gué Maurisque, deguado Maurisco (8). En 879, une
charte du Cartulaire de Brioude (9) mentionne une vinea Mau-
risca ^ située en Auvergne, in vicaria Ambronensi, c'est-à-
(1) C. /. L., X, 1050, 6185.
(2) Ibid., XII, 5683, 81.
(3) Q. Desjardins, p. 395.
(4) Page 327.
(5) Snrle cognomen Martinus, voyez De- Vit, Onomasticon^ t. IV, p. 380,
381.
(6) Qnantin, Cartulaire de l'Yonne, p. 111.
(7) Quérard, Cartulaire de Saint-Victor de Marseille, t. II, p. 635.
(8) Ibid., t. II, p. 597.
(9) Ed. Doniol, p. 276.
&54 LIVRE II. CHAPITRE XI. t 4.
dire près de Saint-Germain-Lembron (Puy-de-Dôme). Le
nom de lieu Mauriscus dérive soit du gentilice Maurius, sur
lequel on peut voir ce qui a été dit plus haut, p. 281-282,
soit du cognomen Maurus , dont Maurius dérive et dont il
a été question déjà, p. 486.
Ramigescus est le nom d'une localité du Cantal où il y
avait une église, au XV siècle (1), de Ramigesco. La variante
in Ramegesco se trouve dans un texte de même date (3). Il
s*agit d'une variante du gentilice ou cognomen romain Re-
migius, ou mieux Remedius, qu'a rendu célèbre un arche-
vêque de Reims, 459-533.
On peut probablement placer dans cette nomenclature
Romanôche (Saône-et-Loire) , qui serait un ancien Roma-
NisGA ou RoMANisGAE : cslla sancH Pétri de RomaniscaSj
comme dit une charte de Tan 1120 (3), et il faudrait cor-
riger en Romanisca le Romanasca du Cartulaire de Saint-
Vincent de Mdcon (4). Dans le cas où l'orthographe Roma-
nasca devrait être préférée, nous aurions là un témoin de
la persistance du suffixe ligure -ascus^ dans une région
bien septentrionale. Romanascus serait dérivé du cognomen
Romanus, fréquent dans les inscriptions romaines et dont
on a cité, p. 487, quelques exemples empruntés à des
inscriptions de la Gaule ; Romaniscus viendrait ou de c^
cognomen, ou du gentilice Romanius, qui a été étu4ié plus
haut, p. 303-304.
S 4. — Noms de lieu en -iscus, d'origine germanique.
Attaniscus est le nom d'une localité que met dans le
pays de Cavaillon, in pago Cavellico, le testament d'Abbon,
(1) Q. Desjardins, Cartulaire de Conques^ p. 45*, cf. p. zci.
(2) Ibid., p. 274.
(3) Chavot, Le Maçonnais, p. 237.
(4) Edition Ragut, p. 114.
NOMS DE LIEU BN -I80U8. 555
en 739 (1). Oe nom de lieu est dérivé d*un thème , Attan-,
qui est ou la forme féminine du nom d'homme franc bien
connu, Âtto, Âttonis, ou la forme masculine du même nom
d'homme en gothique. Âtto, Atta appartient à la classe
nombreuse des noms hypocoristiques de personnes. On
sait que les noms germaniques de personnes sont ordinai-
rement composés de deux termes ; la langue familière sup-
prime le second terme et le remplace par un suffixe qui
appartient à la déclinaison faible.
AuLBRANDiscus. Uu Heu appelé appendaria Aulbrandisca
est mis en Auvergne, dans la viguerie de Brioude (Haute-
Loire), par une charte de Tannée 912 (2). Comparez le nom
d'homme germanique Alt-brandus (3). Le premier terme
de ce nom d'homme, ait, veut dire « vieux ; » le second
terme, brand, « tison allumé, » en français, brandon.
Un clos AuTBERTEScus apparaît dans une charte du
Rouergue aux environs de l'an 1000 (4). Comparez le nom
germanique d'homme, Autbertus (5). Le premier terme aut,
plus anciennement auda, veut dire « richesse, bien; » le
second terme berht, « brillant. »
Belteirescus. Un certain Rigualdus del Beltsiresco inter-
vient dans une charte, enRouergue, au milieu du X* siècle (6).
Ce nom de lieu est dérivé d'un nom d'homme germanique,
dont la plus ancienne forme a dû être ^ Balda-harias et qui
est écrit Balterius dans la légende d'une monnaie méro-
vingienne (7), et Baldierus, dans le Polyptyque de Saint-
(1) CsLVtuMre de Saint-Hugues de Grenoblût p. 42.
(2) Doniol, Cariulaire de Brioude^ p. 192.
(3) Longnon, Polyptyque de Vabbaye de Saint-Germain des Préa^ p. 183;
cf. Fôrstemann, Personennamen, 2* édition, col. 47.
(4) G. Deajardins, Cartulaire de Conques, p. 88.
(5) Polyptyque de Saint-Germain des Prés^ p. 3; cf. Fôrstemann» p. 166.
(6) G. Dosjardins, Cartulaire de Conques, p. 389.
(7) A. de Barthélémy, Bibliothèque de l'Ecole des chartes^ i, XLII, p. 290,
556 LIVRE IL CHAPITRE XI. { 4.
Remy de Reims (1). Le premier terme de * Balda-harias veut
dire « brave, » le second « armée. »
BORNONESGA, aujourd'hui Bounihounesque, commune de
Nauviale (Aveyron), est mentionné vers le milieu du
dixième siècle dans une charte de Tabbaye de Conques (2).
Ce nom de lieu est dérivé du nom germanique hypocoris-
tique Borno , dont des exemples ont été relevés par
M. Fôrstemann (3).
DoMARiESGus, uom d'uue localité où, vers la fin du
onzième siècle, Tabbaye de Conques avait des biens (4),
est un dérivé du nom d'homme germanique Dom-[h]arius ,
dont M. Fôrstemann signale deux exemples dans les actes
de deux conciles de Tolède, au septième siècle. Le nom de
monétaire mérovingien, écrit Domaro sur une monnaie de
Blois (5), doit probablement être corrigé en Dom-[h]ario.
Des deux termes de Dom-harius, le premier parait signifier
c( jugement, » le second veut dire « armée. »
Eldegrimiscus est, en 963, dans le Cartulaire de Brioude'^]^
le nom d'un clos situé en Auvergne, au comté de Tallende
(Puy-de-Dôme). La bonne orthographe de ce nom de lieu
serait Hildi-grimmiscus , dérivé de *Hildi-grimmas, nom
d'homme germanique noté Hilde-grimmus dans le Polyp-
tyque de Saint-Remy de Reims (7). Le premier terme de ce
mot veut dire « bataille, » et le second « cruel. »
Frotgaresc, nom de lieu mentionné au onzième siè-
cle dans le Cartulaire de Conques (8), est dérivé du nom
(i) Publié par Guérard, p. 43.
(2) Desjardins, CartuZaire de Conques, p. 328.
(3) Personenna.men, 2* édition, col. 276.
(4) Desjardins, CartuZaire de Conques, p. 81.
(5) A. do Barthélémy, Bibliothèque de l'Ecole des chartes^ t. XLII, p. 293.
(6) Ed. Doniol. p. 124.
(7) Ed. Quérard, p. 51, 55; cf. Fôrstemann, col. 675.
(8) Ed. Desjardins, p. 307.
NOMS DE LIEU EN -I8CU8. 557
d'homme germanique Frot-garius (1). Ce nom aurait été,
à l'époque mérovingienne , * Frodo-garius. La variante
Frude-garius se trouve dans le Polyptyque de Saint-Ger-
main des Prés (2). Le premier terme de ce composé est une
variante franque du thème germanique hrotha-, <c gloire, »
dont la gutturale initiale oh peut, dans le dialecte mérovin-
gien, être remplacée par f. Le second terme, noté ^garius
dans les textes latins, veut dire « désireux, avide de. »
Ainsi, le sens du composé est « avide de gloire. »
GoDiNBSGA est un nom de lieu, dans une charte des
environs de Rodez (Aveyron), seconde moitié du onzième
siècle (3). Ce mot est dérivé du nom d'homme d'origine
germanique écrit Godinus dans les textes latins du moyen
âge, par exemple dans le Polyptyque de Saint- Germain des
Prés (4).
Odalrigesgus , dans une charte des environs de l'an
1000 (5), est le nom d'un manse, c'est-à-dire d'une petite
ferme située dans le département de TAveyron et où, dit
le rédacteur de la charte, habita Odalrigus.
Odal-rigus, mieux Odal-ricus, est un nom très fréquent
dans le Cartulaire de Conques^ où on l'écrit ordinairement
Odol-ricus (6). Il est, au moyen âge, excessivement com-
mun (7). Le premier terme en vieil allemand, uodal, si-
gnifie « domaine héréditaire et inaliénable d'une famille ; »
le second terme, « roi, maître. » Ce composé existe encore
en allemand ; il a perdu une syllabe, c'est Ulrich.
Rainalbesgus est le nom d'un alleu dans une charte des
(1) Longnon, Polyptyque de Satnt-Germatn des Prés^ p. 4 et 133.
(2) Edit. Lon^non, p. 133.
(3) G. Desjardins, Cartulaire de Conques, p. 41.
(4) Edit. Longnon, p. 3, 4.
(5) O. Dosjardins, Cartulaire de Conques, p. 146.
(6) Voyez Vindex, p. 486.
f7) Purstomann, Personennameriy 2* édition, col. 980-981.
568 LfVBB IL OttAPItltS 10. tk.
environs de l'an 1000 pour Tabbaye de Oonques (A^«g«iHi)(l}.
Rainaldêscue dériTé d'un nom d'homme germanique 66rft
Rainoldus dans le Polyptyque dé SaitU-Germain de^ Prés (2).
Une fonne plus complète, Ragenoldus, se trouve dans le
môm^ PolyptyqiM (3). Au fiixiéme siècle, Grégoire de Tours
écrivait Ragnovaldus (4). La notation oom^éte «uriit été
BiB^imi-^alâus ; le premier terme veut dire a conseil, » et le
second « puissant. » Le sens du tout parait être « poissant
par le conseil. »
TEUDOAnnBSGus est le nom d'un manse au onzième siè-
cle, dans le Cartulaire de Conques (5). La variante Teutgai-
rêscm est donnée par une charte de la même époque (6).
Le nom d'homme dont ce nom de lieu dérive est écrit
Teut*garius dans le Polyptyque de Saint-Germain des Prés (7).
Le premier terme de ce composé est le germanique thmii^f
« peuple ; » le second est un adjectif germanique qui veut
dire « désireux, avide de. »
Unaldescus, nom d'un manse, apparaît au onzième siècle,
dans le Cartulaire de Conques (8). Le nom d'homme dont ce
nom de lieu dérive est écrit, dans les textes du moyen 4ge,
ordinairement tantôt Unoldus, tantôt Unaldus. Le person-
nage le plus célèbre qui Tait porté est un duc d'Âquitdine,
mort en 774, et ainsi nommé dans les chroniques carolin-
giennes. Mais ce nom a été aussi donné à des gens moins
illustres ; ainsi, le Polyptyque de Saint-Germain des Prés (9)
parle d'un colon dont un en&nt s'appelait Unoldus. Le Po-
(1) Qt» Besjardmft, CftWuIaïn? de Congixeft, p. 314.
(2) EdiU Longnon, p. 180.
(3) Page 8.
(4) HisioHa Francor\Am , livre Vï, c. lî ; livre VII , c, 10. Voir le texte et
les yariantes de Tédition Arndt, p. 257, 1. 4; 296, 1. 20.
(5) Ed. Desjardins, p. 144.
(6) Page 145.
(7) Edit. Longnon, p. 223.
(8) Pages 145 et 206.
(9) Edit. Longnon, p. 167.
NOMS DE LIEU EN -I8CU8. 559
lyptyque de Saint-Remy de Reims nous a conservé , pour ce
nom d'homme, une orthographe plus archaïque, Unval-
dus (1). L'orthographe mérovingienne complète de ce mot
aurait été *Chuno-valdus. Le troisième continuateur de Fré-
dégaire appelle Chunoaldus le duc d'Aquitaine, dont nous
avons parlé plus haut (2). Le premier terme de ce nom
d'homme veut dire à la fois « Hua , » nom de peuple , et
« géant ; » le second terme est le thème féminin germar
nique valda, « puissance, » en'sorte que le composé signifie
« celui qui a la puissance des géants » oti « des Hùns. »
On dit, en français, (c fbrt comthe un Turc. »
Dans tous ces dérivés en -wciai de noms propres d'hom-
mes d'origine germanique, nous devons probablement re-
connaître des adjectifs germaniques formés à l'aide du suf-
fixe 'isca-s, en allemand moderne -ûcA, comme himmliech,
a céleste, » de Himmel, « ciel; » kindtsch^ « puértT, » de
Kind^ <c enfant » (en anglais, childish^ de child, qui est le
même mot que Kind) ; mânnischy en parlant d'une femme
qui affecte les manières d'un homme, Mann; heidnisch^
« païen, » adjectif dérivé du substantif vieux germanique
Heidariy conservé dans le dérivé Heidentum, « paganisme. »
On aurait tort de faire intervenir ici la langue grecque
qui se sert du suffixe -(«to-ç , -(«tn) pour former des ditniiiu-
tifs : d&XCexoç, « petite broche, » d'ôôeX^, « broche, « poXfifffxoç,
« ognon, » de poX&Jç, « ognon, » TOtiW<fXY), « petite fille, »
de ««Tç, icaiWç, « enfant. » Les noms die lieu étudiés ici lie
sont pas des diminutifs.
Le suffixe germanique -isca^s a pénétré dans quei)}uôa
dialectes romans en Italie et dans le midi de la France où,
comme dans les langues germaniques, il sert à 'ctëev de!9
adjectifs dérivés de substantifs.
(1) Edition Ouérard, p. 105, col. 2.
(2) I)om Bouquet, U, 458 c. Edition Krusch, p. 180, 1. 7.
CHAPITRE XII.
LE SUFFIXE GAULOIS -aVO-S BANS LES NOMS DE LIEUX PENDANT
l'antiquité et le moyen AGE.
SOMlLàlRB :
) 1. Le suffixe gaulois -aoo-s noté -avua dans les textes latins. — } 2. Le
suffixe -&vu$ employé pour former des noms de lieux dérivés de genti-
lices romains. — { 3. Le suffixe -avu« employé pour former des noms de
lieu dérivés de cognomina romains.
§ !•'. — Le suffixe gaulois -avo-s, noté -avus dans les textes
latins.
ÂYO-s est un suffixe gaulois qui a été employé pour la
formation des noms de lieu ; ainsi Llydaw^ nom gallois de la
Bretagne continentale, et, probablement à Torigine, de toute
la Gaule, suppose un primitif litavos^ d*où le nom d'homme
dérivé Litaviccus porté en 52 av. J.-C. par un gaulois no-
ble de la cité des Aedui qui abandonna César pour se tour-
ner du côté de Vercingétorix (1). Le nom des Seffusiavi,
peuple bien connu de la Gaule celtique sur le territoire
duquel la colonie romaine de Lyon fut établie , est dérivé
d'un thème Segusio- qu'on retrouve en Italie dans le nom
de la ville de Suse, en Piémont : Segusium ou Segusio.
Les noms de lieu formés avec le suffixe -avus dans la pt»-
riode celtique n'étaient pas tous dérivés de noms d*hom-
(1) Grammattca celtica, p. 831; cf. César, De bello gallico, VII, 37-40, :>4.
NOMS DE LIEU EN -AVO-S. 561
mes , c'est ainsi que le Talou . pagus Tellaus , à Tépoque
carlovingienne (1) pour * Tellaxms ; le Vimeu, à Tépoque mé-
rovingienne paji^ Viminausi^) pour*F«mînai;t/5, tirent cha-
cun leur nom de celui de la petite rivière qui Tarrose , la
Telle pour le Talou, la Visme, Vimina^ pour le Vimeu (3) ;
de même le pagus Masaus ^ MosoAms, doit son nom à la
Meuse, Mosa (4). Mais, sous la domination romaine, le
sufllxe -avos a aussi servi à former des dérivés de noms
d'hommes, tant gentilices que cognomina ou noms péré-
grins.
S 2. — Le suffixe -avos, -avus employé pour former des noms
de lieu dérivés de gentilices romains.
* Ambiliavus est la forme primitive du nom de la com-
mune d*Ambillou (Maine-et-Loire) ; la notation Àmbilloumif
dans une charte du onzième siècle (5) , est le résultat d'un
essai malheureux fait par un scribe qui voulait latiniser un
nom dont il ne connaissait que la prononciation usitée de
son temps. Ce nom est dérivé du gentilice Ambilius connu
par quelques inscriptions (6).
Abcbliavus est le nom de Milhau (Aveyron), auon zième
siècle dans les chartes de l'abbaye de Saint- Victor de Mar-
seille (7) et de Tabbaye de Conques (8). Ce nom de lieu
est dérivé d'Amelius, orthographe en bas latin du gentilice
Aemilius étudié p. 348.
(1) Longnon, Atlas historique de la France, p. 98.
(2) Longnon, Atlas historique de la France^ p. 127.
(3) La Telle est aujourd'hui la Béthune, arrondissement de Neufchâtel et de
Dieppe (Seine-Inférieure). La Visme, arrondissement d'Abbeville (Somme),
est un affluent de la Bresle qui sépare le département de la Somme de celui
de la Seine-Inférieure.
(4) Longnon, ibid., p. 132.
(5) Port, Dictionnaire historique de Maine-et-Loire, t. I, p. 16.
(6) De-Vit, Onomasticon^ t. I, p. 252.
(7) Quérard, Cartulaire de Saint-Victor de Marseille, t. II, p. 201.
(8) 6. Desjardins, Cartulaire d,e l'abbaye de Conques, p. 21.
36
562 LIVRE n. aHAPlTIl]& 2lf: | 3.
§ 3. — Le suffixe -avus employé pour former des noms de lim
dérivés de cognomina romains,
«
Antonnava ou Antonavi, aujourd'hui Antonaves (Hautes-
Alpes) (1) est dérivé d'un cognomen *Antônus ou *Antuu-
nus dont on n'a pas d'exemple , mais dont l'existence est
prouvée par le dérivé Antunnacus (2), Antonacus (3), Anton-
nacus (4), aujourd'hui Anderuach (Prusse Rhénane). Le co-
gnomen * Antunnus a été aussi employé comme nom de
lieu saus être développé à l'aide d'un suflke : un lieu dit
Antunnus était situé prés d'Octodurum, aujourd'hui Marti-
gny en Valais ; nous le savons par un diplôme de l'année
1011 , dont une copie du douzième siècle a été conservée
dans les archives de l'abbaye Saint-Maurice d'Agaune (5].
Comparez Antona, en Italie, province de Massa.
* Andelavus doit être la forme primitive du nom de lieu
appelé Andelaus par Grégoire de Tours (6) et Frédégaire (7);
c'est aujourd'hui Andelot (Haute-Marne) (8). Ce nom de
lieu suppose un nom d'homme barbare *Andelus (9) ou *An-
dilus, d'où l'on a tiré, avec le sufilxe -acus, le nom de lieu
* Andelacus écrit Andelagus au neuvième siècle (10), Andeleius
(1) Roman, Dictionn. topogr. du déport, des Hàutes-Alpes^ p. 4.
(2) Antennacus chez Ammien MarceUin, livre XVIII, c. 2, |4;éd. Teubner-
Gardthausen , p. 147, I. 33; mais Antunnaco, Ètinéraire d'Antonin, p. t54,
L 1.
(3)iVo(ttta dignitsttum occidentis, c. 39, éd. Boecking, t. II, p. 116, 117.
(4) OreUi-Heûzen, n» 5236.
(5) Historiae patri&e monumenta, Chartae, t. I, col. 391.
(6) HisioHa Francorum, IX, 20; édit. Amdt, t. I, p. 374, l. 27-28.
(7) IV, 38; édit. Krusch, p. 139, 1. 6.
(8) Longnon, Géographie de la Gaule au sixième siècle, p. 371.
(9) Andeios, 'AvfiviXo;, est, chez Ptolémée, 1. II, c. 6, 1 66 (éd. Didot-Mûller,
t. I, p. 189, 1. 11), le nom d'une ville d'Espagne chez les Vascones ou chez
les Varduli. De ce nom de lieu on a tiré le dérivé Andelonensis (C. I. L,,
II, 2963).
(10) Testament d'Angésise, abbé de Fontenello, cité par Blosseville, Dic-
tionnaire topogr, du département de l'Eure^ p. b*
NOMS DE LIEU EN -AVUS. 563
un peu plus tard (1). Il y eut d'abord deux bourgs voisins
de ce nom dont la réunion a produit la commune des An-
delys (Eure). Andelat (Cantal) parait être aussi un ancien
Andelacus.
Du nom barbare * Andelus ou * Andilus on a tiré un
gentilice * Andilius , d*où est venu le nom de lieu dérivé
AndiliaciAs ; c'est la forme primitive du nom de sept com-
munes de France : Andillac (Tarn) ; Andillé (Vienne) ; An-
dilly (Charente-Inférieure , Haute-Marne , Haute-Savoie ,
Seine-et-Marne).
Andillou, commune de Saint-Pellerin (Eure-et-Loir),
doit être un ancien " AridiliaiHjLs dérivé du même gentilice
avec le suffixe -avus.
Bellenavus est dans la chronique de Bèze (2) , le nom
de Belleneuve (Côte-d'Or). C'est un dérivé du nom
d'homme gaulois écrit Bellinus dans les inscriptions. Trois
de ces inscriptions trouvées à Vienne (Isère), sont des épi-
taphes gravées par les soins de l'affranchi Bellinus (3) , de
T. Servilius Bellinus (4), et de Valerius Bellinus (5). Une
autre qui existe encore à Nimes est l'épitaphe de T. Mes-
sius Bellinus ^.(6).
Canavi, dans les chroniques de Saint-Bénigne (7) et de
Bèze (8), est le nom de Chenôve[s] (Côte-d'Or). Ce nom de
lieu est dérivé du cognomen latin Canus usité dans plu-
sieurs familles romaines. Ainsi Q. Gellius Canus était un
des amis de Cicéron (9); Julius Canus fut condamné à
(1) Vie de s&inte Clotilde; chez Kroa^h, Scripk)rw(a r^rum meaoningiaà-
ntm, t. II, p. 346, 1. 32.
(2) Edit. Oarnier, p. 255, 258.
(3);c. /. L., XII, 1866.
(4) Ibid,, XII, 2002.
(5) Ibid,, XII, 2018.
(6) Ibid., XII, 3748.
(7) Edit. Ganûer, p. 92.
(8) /dtd., p. 236.
(9) De- Vit, Onomastwçn, t. m, p. 220.
564 LIVRE II. CHAPITRE XII. { 3.
mort par Caligula (1). Ce cognomen pénétra en Gaule. On
conserve au musée d*Aix Tépitaphe de A. Cornélius
Canus (2) ; on a trouvé à Genève celle de Valerius
Kanus (3) ; on a recueilli à Narbonne et le musée de cette
ville possède Tépitaphe de M. Annius Kanus (4). Une
inscription découverte à Vienne (Isère) rappelle la mémoire
du questeur Sex. Cœlius Canus, jugé digne d'obtenir la
dignité de décurion (5). On trouve en France des tuiles et
des vases de Tépoque romaine avec la marque du fabricant
écrit au génitif Cani ou Kani (6).
C'est de Canus que dérive le gentilice Canins, étudié plus
haut, p. 210-21 i , à Toccasion du nom de lieu dérivé Canidcus.
La villa de Merlaus, pour *MerulaviLs, aujourd'hui Mer-
lan (Marne) , est plusieurs fois mentionnée dans les char-
tes de l'abbaye de Saint-Martin de Tours à partir de Tan-
née 878, où elle fut donnée à cette abbaye par le roi
Louis le Bègue (7). Un autre Merlaus était situé dans le
Maçonnais au dixième siècle, c'est aujourd'hui Merloux,
commune de Saint-Point (Saône-et-Loire) (8).
* Merulavus est dérivé de Merula , cognomen latin usité
dans une branche de la gens Cornelia; deux L. Cornélius
Merula furent consuls à Rome sous la république , l'un en
193, l'autre en 87 avant J.-C. Ce cognomen pénétra en
Gaule, témoin M. Sappius Merula, dont l'épitaphe a été re-
cueillie à Nimes (9).
Le cognomen Merula a été employé comme nom de lieu.
Le Mesle (Orne) est un ancien Merula (10).
(1) De- Vit, OnomMticon^ t. III, p. 679.
(2) C. /. L.. XII, 2777.
(3) /btd., XII, 2634.
(4) Ibid., XII, 4585.
(5) Ibid., XII, 5864.
(6) Ibid,, XII, 5679, 71 ; 5686, 43.
(7) Mabille, La, p&ncarte noire de Saint-Martin de Tours, p. 228; et 177.
(8) Ragut, Cartulaire de Saint-Vincent de Mâcori^ p. 58, 565.
(9) C. /. L., XII, 3873.
(10} Longnon, AiUts historique de U France^ p. 189.
CHAPITRE XIII.
LE SUFFIXE GAULOIS -tCO-S DANS LES NOMS DE LIEUX PEN-
DANT L* ANTIQUITÉ ET AU MOYEN AGE.
Sommaire :
) i. Le suffixe -ico-s en gaulois. — 2 2. Le suffixe -ico-s ou -icus employé
à former des noms de lieu dérivés de cognomiriA romains ou de noms
pérégrins. — { 3. Le suffixe -icus employé à former dos noms de lieu
dérivés de cognomina latins en -anus qui eux-mêmes dérivent de genti-
lices en -ius.
S !•'. — Le suffixe -ico-s en Gaulois.
Le suffixe gaulois -icus a servi, avant la conquête
romaine, à former des noms de lieu qui n'ont pas des noms
d'homme pour origine : tels sont : Are-morici qui veut
dire « voisins de la mer, » mori\ Avaricum (Bourges),
Autrioum (Evreux), qui veulent dire « arrosé par VAvara, »
« par YAutura, » aujourd'hui l'Evre et TEure ; on peut en rap-
procher le nom de la vallis Bebronica (1) , ou Bevronica (2) ,
qui doit son nom à la Brevenne, Bebronna (3) (département
du Rhône), celui du pagu^ Uzeticusy pour Uceticus, dérivé
A'Ucetia, Uzès (Gard) (4).
(1) Auguste Bernard, Cartul&ire de Savigny, p. 379.
(2) Ibid., p. 3, H.
(3) Ibid., p. 219, 294, 300, 344, 347, 354.
(4) Molinier, Géographie historique de la province de Languedoc, col. 169,
170.
566 LIVRE IL CHAPITRE XIII. | 2.
§2. — Le suffixe -ico-s, -icus employé à former des noms de
lieu dérivés de cognomina romains ou de noms pérégrins.
Antérieurement au moyen âge , on a tiré de cognomim
ou de noms pérégrins à l'aide du suflke -icus un certain
nombre de termes géographiques. Nous citerons d'abord
les noms de lieu suivants : ils sont dérivés de noms d'hom-
mes qui n'offrent pas la désinence -ianus :
Carantonicus, nom d'un ager situé dans le pays de
Vienne (Isère). Une charte de Tannée 928 nous apprend
que cet ager comprenait la villa Columberius aujourd'hui
Colombier-Sognieu (Isère (1). Par une charte plus an-
cienne de près d'un siècle, mais dont l'orthographe est
moins bonne, nous voyons que dans cet (iger , nomme
Carentonicus , avec e pour a dans la seconde syllabe , il y
avait une villa Carentennacus^ lisez Carantonnacus, aujour-
d'hui Charentonnay (Isère), Carantonicus et Carantonnacus
dérivent tous les deux du nom d'homme Caranto, au géni-
tif Carantonis , conservé par une inscription de Nimes :
cette inscription remonte au commencement du premier
siècle de notre ère (2). Cai^afitonnacus devait être le chef-
lieu de Vager Carantonicus qui comprenait en outre la villo
Columberius. Il est intéressant d'observer que le nom de
Vager ait été formé à l'aide du suflBxe -icits et le nom de la
villa au moyen du suffixe -acus en faisant dériver les deux
noms géographiques du nom du même propriétaire, Ca-
ranto. L'usage ordinaire dans les textes du moyen âge est
de tirer le nom de Vager de celui de la xnlla au moyen du
suffixe latin ^ensis, on aurait dit ainsi ager Carantonnacen-
sis] la formation Ca7'anto?iicy^ semble remonter à une épo-
que où on parlait encore gaulois dans les environs de
(1) Voy. Chevalier, Cartulstire de Saint-André-le-Btiêy p. 94, 330, 331.
(2) C. /. L., XII, 3802.
NOMB DE LIEU EN -ICU8. 507
Vienne et où le sufilxe latin -ensis n'était pas encore usité,
Cassinigus, dans une charte donnée en 1019 à M&con,
en faveur de Tabbaye de Cluny (1). Cassinictis dérive de
*Cassinus, cognomen dont on n'a pas trouvé d'exemple ,
mais dont l'existence est prouvée par le composé Cassino-
magus (2), et qui est avec Cassius dans le même rapport que
Maximinus avec Maximius , que Quintinus avec Quintius ,
que Messinus avec Messius , que Marcinus avec Marcius ,
que Marcellinus avec Marcellius, que Marinus avec Marins.
Catuicus est une villa placée dans le comté de Chalon-
sur-Saône par une charte de 958 pour Tabbaye de Cluny (3).
Ce nom de lieu est dérivé du nom d'homme gaulois Catus,
« Bataille, » inscrit sur l'arc de triomphe d'Orange (4). Ce
nom était de la quatrième déclinaison, tandis que le nom
d'homme latin Catus est de la seconde. Un exemple inté-
ressant de ces deux mots est donné par des marques de
potier trouvées à Vienne (Isère). Dans la marque 0¥{ficina)
CATUS (5) nous reconnaissons le génitif du nom gaulois,
et la marque OFiG(ina) gati (6) nous offre le génitif du
nom latin.
SiLVANiGus est le nom d'un mansus abandonné par l'ab-
baye de Savigny en échange de biens situés en Lyonnais;
cet acte eut lieu en 947 (7). Silvanicus dérive de Silvanus ,
cognomen très répandu dans le monde romain. On le
trouve par exemple dans la gens Licinia : Q. Licinius Silva-
(1) Bruel, Recueil des chartes de l'&bbaye de Cluny^ t. III, p. 742.
(2) Cassinomago dans la Table de Peutinger ^ aujourd'hui Chassonon
(Charente) (E. Desjardins, Géographie de la Gaule d'après la Table de
Peutinger, p. 276).
(3) Bruel, Recueil, t. II, p. 139.
(4) C. /. L., XII, 1231, 7.
(5) /6id., XII, 5186, 207.
(6) Ibid,, XII, 5686, 206. Cf. ci-dessous, p. 580-581.
(7) Auguste Bernard, Cartulaire de l'abbaye de Saoigny, t. I, p. 55.
568 LIVRE II. CHAPITRE XIII. { 2.
nus fut flamen Augusti de TEspagne citérieure, et son fils,
qui porta les mêmes noms que lui, arriva au consulat
Tan 106 de notre ère (1). On rencontre beaucoup d'exemples
du cognomen Silvanus en Gaule : ainsi on a trouvé , dans
la ville d'Arles, l'épitaphe de L. Hostilius Silvanus i :
une inscription de Narbonne a conservé les noms de
C. Pellius Silvanus (3) ; le musée de cette ville possède
Tépitaphe del M. Abillius Silvanus recueillie dans les rem-
parts (4). Silvanus a été aussi employé comme nom père-
grin : on le voit par des inscriptions de Die (5), d'Aoste 6 ,
de Marguerittes (Gard) (7), de la ville antique de Sextantv»,
près de Castelnau-le-Lez (Hérault) 8), etc.
* Urbanicus est l'orthographe primitive du nom de villa
écrit Orbanicus dans le Cartulaire de Brioude; il s'agit d'une
localité située en Auvergne : une des chartes qui la men-
tionnent a été rédigée vers Tannée 900 (9), l'autre au com-
mencement du onzième siècle (10). Urbanus est un cog-
nomen latin. Le grammairien Urbanus a été un des
commentateurs de Virgile; on croit qu'il écrivait au second
siècle de notre ère (11). Dans le siècle suivant vivait Agri-
cola Urbanus, consul en 234 (12). Ce cognomen a pénétre
en Gaule : on a découvert à Nimes l'épitaphe de G. Attius
Urbanus (13); à Narbonne, celles de : Coelia Urbanail4,
(1) De-Vit, Onomasticon, IV, 152.
(2) C. /. L., XII, 810.
(3) Ibid., XII. 4408.
(4) Ibid,, XII, 4541.
(5) Ibid., XII, 1596.
(6) /6<d., XII, 2394.
(l)Ibid., XII, 3011 a.
(8) Ibid., XII, 4213.
(9) Doniol, Cartulaire de firtoude, p. 152.
(10) Doniol, t6td., p. 55.
(11) Touffcl, Goschichte der rômischen Literatur, 3» édit., p. 798-799.
(12) Kloin, Fasti consulHreSf p. 100.
(13) C. /. L., XII, 3441.
(14) Ibid.y XII, 4709.
NOMS DE LIEU EN -I OU 8. 569
Cupuia Urbana (1), Laelia Urbana f2), Pollia Urbana (3).
De ces noms de lieux dérivés de noms d*hommes on
peut rapprocher les noms de pagi, dérivés de noms de peu-
ples comme Arvemicus d'Arverni (4), Catalaunicus (5), de
Catalauni pour un plus ancien Catuellauni (6) ; Suessionicus
de Suessiones (7) , Vellavicus de Vellavi (8) , Rutenicus , d'où
le français Rouergue, de Ruteni (9); Santonicus (10), Sanio-
nica, d'où le français Saintonge, de Santones,
On peut leur comparer Arausici, nom des habitants
d'Orange (Vaucluse) dans la Notitia provinciarum et civiia-
tum Gallùe (11). Arausicits vient non d^Arausio^ Orange, mais
directement du gentilice * Arausius, dont Arausio dérive, ou
peut-être du primitif Arausa, dont *Arausius dérive lui-
même comme on a vu p. 520.
§ 3. — Le suffixe -icus employé à former des nom^ de lieu
dérivés de cognomina a^i -anus qui eux-mêmes dérivent
de gentilices en- ius.
Parmi les noms de lieux en -ictw, un certain nombre
ont, avant cette désinence, les trois lettres ian, débris de
deux autres suffixes ; et ils sont formés à Taide d*un suffixe
composé 'iar^icus où sont réunis les trois suffixes -ia ou
-1145, -anuSy -icus. En effet, le suffixe -icus a servi, dans le
midi de la France , à créer des noms de lieu dérivés de
surnoms qui offrent la désinence -ianus = ia H- anus , ou
(1) C. /. L., XII, 4756.
(2) Ibid., XII, 4935.
(3) Ibid., XII, 5061.
(4) Longnon, Atlas historique^ p. 143.
(5) Longnon, tbid., p. 122.
(6) Longnon, ibid., p. 121.
(7) Longnon, i6id., p. 120.
(8) Longnon, ibid,, p. 146.
(9) Longnon, ibid,, p. 144.
(10) Longnon, ibid., p. 147.
(11) Longnon, tdtd., p. 15.
STO LIVRE II. CHAPITRE XHI. | 3.
io -+- anus. Ces surnoms en -ianus peuvent se diviser ea
deux catégories : la première, dont nous ne citerons qu'un
exemple, a une origine géographique ; la seconde vient de
oognomina dérivés de gentilices en -ius à l'aide du suflke
-anus. Commençons par la première catégorie.
Du nom de lieu Àndmia, conservé par une inscription
du musée de Nimes (1), et qui est aujourd'hui Anduze
(Gard), on a formé un dérivé Àndusianus, comme de Borna.
Romanus, d'Elusa, Elusanus ; de là le dérivé Andusianicm .
plus tard Andusenque , pays d*Andusia , au lieu de Andu-
siensis, comme on dit Narbonensis et Nemausensis (2).
La seconde catégorie est très considérable dans le midi
de la France ; on pourrait en donner bien des exemples.
Les surnoms en "Uanus d'où viennent des noms de lieu en
-tciis, et qui dérivent de gentilices en -itw, sont as«^ez
communs pour que nous puissions considérer leur exis-
tence comme démontrée dans le ca^ où , connaissant par
des documents de Tépoque romaine le gentilice corres-
pondant, nous n'aurions trouvé, dans ces documents,
aucun exemple du cognomen en -i-anit5 ; mais cette lacune
se produit seulement pour quelques-uns des noms de lieu
que nous allons citer.
Les noms de lieu en -ious venant de cognomina en -i-mm
ne sont pas spéciaux à la France. Dans une charte de
Ravenne, nous trouvons, au dixième siècle, un fundus
Flavianicus (3). Flavianicus est dérivé du cognomen Flavia-
nus, très fréquent dans le monde romain (4).
Passons aux documents français.
*AcuTiANiCAS a dû être originairement le nom de la villo
(1) C. /. L,y XII, 3362.
(2) AndvLSiSinicus , dérivé A' AndusUnus ^ « habitants d'Andu«ia, » peat
être comparé à Ruienicus^ dérivé de Rutenus, nom do peuple gaulois, /.u
ienicus est identique au français Rouergue.
(3) Fantuzzi, Monumenti Aavennati, p. 63.
(4) De- Vit, Onomasticon, III, 80.
NOMS DE LIEU EN -lANICUS. 571
appelée de Agusanicis dans une charte de Tannée 922, et
qui est aujourd'hui Gusargues (Hérault) (1). Ce nom de
lieu vient du cognomen Acutianus, dont on signale deux
exemples (2); Acutianus dérive du gentilice Acutius dont
on a parlé plus haut, p. 190.
* Albucianicas , au quatorzième siècle villa de Albussa-
nicis, aujourd'hui Aubussargues (Gard) (3), dérive d'Albu-
cianus, cognomen romain dont on a des exemples (4), et qui
dérive lui-même du gentilice bien connu Albucius étudié
p. 509.
AuREUAïftous est, au dixième siècle, le nom d'une dépen-
dance de la ville de Nimes : il faut probablement lire
Aurelianicas ; ce mot a été écrit, au quatorzième siècle,
Aurelhargues (5). Aurelianus, dérivé d'Aurelius (p. 433),
est un cognomen latin bien connu : il a été celui d'un em-
pereur romain. Il a été aussi porté en Gaule par des
hommes moins illustres, tels sont : Q. Curius Aurelianus,
qui fit graver à Nimes l'épitaphe de son père (6), et
L. Solicius Aurelianus, qui fit graver celle de sa femme à
Fréjus (7). On peut citer aussi l'épitaphe de Nigidia Au-
reliana à Vienne (Isère) (8).
BuLiANicus est le nom de Bouillargues (Gard), dans deux
chartes, l'une du dixième, l'autre du onzième siècle (9).
Ce mot doit être écrit avec deux / , et probablement être
mis au féminin pluriel Bullianicas, Il dérive de * BuUianus
(1) Eugène Thomas, Dictionnaire topographique de VHéraultj p. 80.
(2) De-Vit, Onomasticon, II, 50.
(3) Qermer-Durand, Dictionnaire topographique du Gard, p. 14.
(4) De- Vit, Onomasticon, I, 199.
(5) Germer-Durand, Dictionnaire topographique du Gard, p. 163.
(6) C. /. L., XII, 3201.
(7) Ibid., XII, 264.
(8) Ibid.y XII, 1987.
(9^ Qermer- Durand, Dictionnaire topographique du Gard, p. 31,
572 LIVRE II. CHAPITRE XIII. { 3.
que nous n'avons pas trouvé, mais qui dérive lui-même de
BuUius, gentilice attesté par une inscription de Narbonne;;
dans cette inscription sont mentionnés Q. BuUius Fronto,
L. BuUius, et une femme appelée BuUia (1).
* Cantilianicus , noté Cantillanicus ^ est le nom d'une
petite circonscription géographique dite aicis^ où étai:
située une villa Lamiacus donnée à Tabbaye de Saint-
Julien de Brioude (Haute-Loire), en 894 (2). Cantilianicm
vient de * Cantilianus , surnom dérivé de Cantilius. Le
gentilice Cantilius a été étudié plus haut, p. 376.
* Cassianicas est la forme antique qui explique le nom de
Caissargues, commune de BouiUargues (Gard), qu'on trouve
écrit Caissanicus au dixième siècle, Caissanicis au dou-
zième (3). Ce nom de lieu est dérivé de Cassianus, cogno-
men latin très répandu (4) , et dont les exemples ne son'
pas rares en Gaule. On a trouvé à Carpentras l'épitaphe de
L. Tettius Cassianus (5) ; à Uzès, celle de L. Baebius Cas-
sianus (6) ; à Nimes , des épitaphes ont été gravées par les
soins de M. Aurelius Cassianus (7) et de M. Cornélius Cas
sianus (8). A Caissargues (Gard), comparez Cassanigo, pro-
vince de Ferrare, en Italie.
Cavillianicas est la forme primitive du nom de Cavil-
largues (Gard), encore écrit Cavithanicae en 1384 (9). Ces'
un dérivé du cognomen *Cavillianus, dont nous n'avou!^
pas recueilli d'exemple, mais qu'on peut conclure du gei:
(1) C. /. L., Xll, 4664.
(2) Doniol, Cartulaire de Saint-Julien de Brioude, p. 115.
(3) Gormer-Durand, Dictionnaire topographique du Gard, p. 41.
(4) De-Vit, Onomasticony II, 157.
(5) C. /. L., XII, 1208.
(6) Ibid., XII, 2934.
(7) ïbid., XII, 3457.
(8) Ibid., XII, 3889.
(9) Qermer-Durand, Dict. top. du Gard, p. 52.
r
NOMS DE LIEU EN -IANICU8. 573
tilice Cavillius, ou avec une seule Z, Cavilius ; Texistence
de ce gentilice est établie par des inscriptions (1).
0
Celsinianicas , aujourd'hui Sauxillanges (Puy-de-Dôme),
nom d'une abbaye dont M. Doniol a publié le Cartulaire,
dérive d'un cognomen^ *Celsinianus, dérivé lui-môme d'un
gentilice, Celsinius, qui, à son tour, wient du cognomen
Celsinus, tiré de l'adjectif ceisus (2).
CoDiGiANiGAS , Villa de Codicianicis au douzième siècle ,
aujourd'hui Coussergues (Hérault) (3), vient d'un cognomen
latin , * Coticianus ou * Codicianus , dérivé d'un gentilice ,
* Coticius ou * Codicius , dont il n'y a pas d'exemple , mais
dont l'existence est prouvée par le nom de lieu Codiciacus,
forme ancienne de Coucy (Aisne), douzième siècle (4).
* FiRMiNiANiCAS, eu 1254 FirminhanicaBy aujourd'hui Fir-
minargues , commune de Montaren (Gard) (5) , dérive de
Firminianus , cognomen attesté par des inscriptions et par
d'autres monuments écrits (6). Firminianus vient de Fir-
minius, gentilice trouvé dans des inscriptions près de Co-
logne et de Coblentz (7), et dérive du cog^noTnen Firminus ;
c'est, en quelque sorte, un développement du gentilice
Firmius. Il y eut à Rome, sous Tibère, un sénateur ap-
pelé Firmius Catus (8) , et d'autres Firmius se rencontrent
dans les inscriptions ; exemple : épitaphe de Firmia , gra-
vée par les soins de T. Firmius Victor à Florian (Gard) (9);
Firmia était fille de Firmius Blaesus , peut-être celui dont
on a trouvé l'épitaphe à Nimes (10); épitaphe, à Nimes,
(1) De- Vit, OnomMticon, II, 187.
(î) Do- Vit, ibid., II, 202.
(3) Eugène Thomas, Dictionnaire topographique de l'HérauIf, p. 53.
(4) Matton, Dictionnaire topographique de TAisne, p. 77.
(5) Germer>Daraad, Dictionnaire topographique du Gard, p. 83.
(6) De- Vit, Onomasticon, III, 70.
(7) Brambach, 562, 745.
(8) Tacite, Annales, II, 27; IV, 31. Dfe-Vit, Onomasticony III, 70.
(9) C. /. L., XII, 3037.
(10) Ibtd.. XII, 3585.
574 Lnn» IL GSAPITRE XIII. t 3.
de T. Firmiiis Marinus (1), qui avait fait graver dans la
même ville Tépitaphe aujourd'hui perdue de aoa père
Firmanus, fils de Firmus (2).
^Mallianiga (vallis)^ vallis Mallanica en 1257 est la no-
tation primitive du nom de Val-maillargues , commune de
Grabels (Hérault (3). Mallianica dérive du cognomen Mal-
lianus. L*épitaphe de Q. Aelius Mallianus se trouve à
Aime (Savoie) (4). Mallianus dérive du gentilice Mallius,
étudié p. 266-267, et qui a donné naissance, dans le dépar-
tement de THérauIt, au nom de trois Ualliacus aujourd'hui
Maillac ou Mailhac , communes de Montpellier , La Salvetat
et Saint-Pons (5).
* Marcbllianigas parait être la forme primitive du nom
de deux localités appelées Tune aujourd'hui Marsillargues
(Hérault) (6) ; l'autre Massillargues (Gard) (7). Marcellianicas
vient de Marcellianus , qui dérive du gentilice Marcellius
étudié p. 269. Le gentilice Marcellius a donné : dans le
département du Gard, Marcelliacus^ au dixième siècle Mar-
ceglago, plus tard Massillac, aujourd'hui détruit (8); dans
le département de l'Hérault, Marcellianus, notation quou
trouve encore au onzième et au douzième siècle, aujour-
d'hui Marseillan (9). Il y a quelques exemples du cognomen
Marcellianus (10) : un appartient à la Gaule : T. Salluslius
Marcellianus fit faire à sa mère un monument funèbre qui,
découvert à Vaison, est aujourd'hui conservé au musée
d'Avignon (II).
(1) C. I. L., XII, 3358.
(2) Ibid,, XII, 3583.
(3) E. Thomas, Dictionnaire topogr&phique de {'ttératfU, p. 217.
(4) C. /. L., XII, 120.
(5) E. Thomas, Dictionnaire topographique de VBiratàU^ p. 103.
(6) E. Thomas, tbtd., p. 107.
(7) Germer-Durand, Dictionnaire topographique du Gard, p. 13t.
(8) Germer-Durand, ibid,^ p. 131.
(9) E. Thomas, Dictionnaire topogrH.phique de THératUt, p. 107.
(10) De- Vit, Onomasticon, IV, 320.
(11) C. /. L., XII, 1395.
NOMS DB LIEU EN -lANICUS. 575
*Mamanicas, vers 1050 MarcmigaSy aujourd'hui Meyrar-
gues (Bouches-du-Rhône (1); en 1166 villa de Mairanicis,
aujourd'hui Meyrargues, commune de Vendargues (Hérault),
dérive du cognomen Marianus, fréquent chez les auteurs et
dans les inscriptions (2). En Gaule , on peut signaler :
L. Caecilius Marianus à Vienne (Isère) (3), et Sennius Ma-
rianus à Soyon (Ardèche) (4). Marianus dérive du gentilice
bien connu Marins dont il a été déjà question p. 275.
* Mabinianicas est devenu Mérignargues , commune de
Nimes (Gard) (5). Ce mot est dérivé du cognomen Marinia-
nus, dont il y a des exemples chez les auteurs et dans les
inscriptions. Deux Marinianus furent consuls Tun en 268,
l'autre en 423 de Tère chrétienne (6). Ce cognomen est dé-
rivé du gentilice Marinius , dont on connaît des exemples
en Gaule, et qui a été étudié plus haut, p. 277.
* Martinianigas est la forme primitive que suppose le nom
moderne de Martignargues (Gard) , au quatorzième siècle
Mariinhanicae (7). Le cognomen Martinianus, dont ce nom
de lieu dérive, se rencontre souvent dans les textes histo-
riques au quatrième et au cinquième siècle. Les inscrip-
tions en fournissent aussi plusieurs exemples (8) ; quel-
ques-uns de ces exemples appartiennent à la Gaule :
Latinius Martinianus, procurator Augustin Aime (Savoie) (9) ;
Melius Martinianus dans une autre inscription de la même
région (10). Ce cognomen est employé sans gentilice dans
(1) Ouérard, CartuUtre de SAint-Vicior de MarteiZZé, p. 287, 879.
(2) De- Vit, OnomMiicon, IV, 351.
(3) C. /. L., XII. 1912.
(4) ïbid,, XII, 2656.
(5) Germer- Durand, Dictionnsiire topogr&phique du Gard^ p. 136.
(6) De- Vit, Onomasticon, IV, 353.
(7) Germor-Durand, Dictionnaire topographique du Gard, p. 124.
(8) De- Vit, Onomasticon, IV, 380.
(9) C. /. L., XII, liO.
HP) Ibid., XII, 2378.
576 LIVRE II. CHAPITRE XIII. { 3.
une inscription chrétienne de Vienne (Isère) (1); il est dé-
rivé du gentilice Martinius étudié ci-dessus, p. 279.
* Galatianigus , écrit Galacianicus en 1007, Galasanicus
en 1031, Oalazanegues en 1219, aujourd'hui Galargues
(Gard), notation qu'on trouve pour la première fois en 1226 (2 ,
dérive du cognomen *Galatianus qu'on n'a pas signalé jus-
qu'ici ; mais Galatianus vient du gentilice ou cognomen
Galatius dont on a un exemple (3), et qui est lui-même
dérivé du nom de peuple Galata, employé comme cogno-
men (4). Polybe nous donne de Galata la variante Galatos
qui était le nom d'un roi gaulois (5).
*Petronianigas, appelé Petroniacum pour Petronianicum
en 812 dans la copie, évidemment défectueuse, d'une
charte; Pedrognanicus ^ en 931, est aujourd'hui Parignar-
gues (Gard) (6). Ce mot dérive du cognomen Petronianus ,
dérivé lui-même du gentilice Petronius, un des plus fré-
quents qui existent (7), et assez répandu en Gaule (8).
* QuiNTinANiCAS , au douzièmc siècle Quintilianegues ,
aujourd'hui Sainte -Croix- de -Quintiliargues (Hérault) ,9.,
est un dérivé du cognomen romain Quintilianus qui, lui-
môme, vient du gentilice Quintilius. Ce gentilice est connu
surtout par P. Quintilius Varus, consul l'an 13 avant J.-C,
et qui périt avec ses lésions dans une bataille contre les
Germains en l'an 9 de notre ère ; mais plusieurs autres
Quintilius Varus l'avaient précédé dans les hautes charges
de Rome; déjà, en Tan 453 avant J.-C, Sextus Quintilius
(1) C, /. L., XII, 2143.
(2) Germer-Durand, Dictionnaire lopographique du Gard, p. 94.
(3) De- Vit, Onomasticon, III, 190.
(4) De-Vit, ibid., III, 188.
(5) Polybe, 1. II, c. xxi, | 5: éd. Didot, t. I, p. 83.
(6) Germer-Durand, Dictionnaire topographique du Gard^ p. 159.
(7) Pauly, Real-Encyclopaedie, t V, p. 1400-1410.
(8) C. I.L., XII, p. 879, col. 1.
(9) E. Thomas, Dictionnaire topographique de l'Hérault, p. 175.
NOMS DE LIEU EN -[ANICUB. 577
Varua avait été élevé au consuls (1). On trouve en Oaule
quelques axemples du eognomen QuintilianuB : à Nimes ,
Sabinius Quiotiitanus <3) ; à Vienne (Isère), âextue Minoius
Quintilianus (3); à Arles (6ouch«s-dH-R)iôtie) , M. Julrâs
Quintilianus (4], etc. M. Fabius Quintilianus, le célèbre
auteur de l'Institutio oratorio, était originùra d'Espagne.
'Sabinianicas, à l'ablatif Savinanicis en 1156, et Savin-
nanicis en 1174, aujourd'hui Savignargues (Gard) (5), dé-
rive du eognomen Sabinianus. On a trouvé à Die (Drôme)
l'épitaphe de M. Eutychiua Sabinianus (6). Une inscription
d'Andancette (Drôme) nous fait connaître les noms d'Aldus
Sabinianus (7). Sabinianus vient de Sabinius, gentitice
dont on a parlé déjà p. 126 (8).
' SiLviNiAMCus . nom d'une villa située au comté de
Brioude (Haute-Loire) : villammeam quae vocatur Silvigna-
nictts (9), dérive du eognomen " Sitvinianus, qui vient lui-
même du gentilice Silvinius. Ce gentilice est attesté par
une inscription de Savoie qui nous fait connaître les noms
de Titus Silvinius CatuUus (10), et par une inscription
d'Aps (Ardèche) , gravée par les soins de Silvinius Euty-
chianus (11); voyez aussi les inscriptions citées p. 335.
* Vbnebianicas , en 924 villa Venerianicus , aujourd'hui
Vendargues, commune de Nimes (Gard) (12), dérive de
(t} Paoly, Retl-Bncyclopiedie, l. VI, p. 372.
(î) C. I. L., SII, 3866.
{3} IbU., XII, 1871.
(t) Ibid.. Xll, 893.
(5) Oermer-Duraud, Oicfionnaire lopognpkique du Gard, p. 234.
(6) C. I. L., XII, 1615.
(7) IbiH., XII, I796l
(8) Snr le eognomen Sabinus, dont Sabinius dérive, voyez Pauly, ReaJ-
Bncgcloptedie, t. VI, p. 626.
(9} Doniol, Carfulalre de Brioude, p. 30t.
(10) C. /. L., XII, 2425.
(11) /Md., XII, 2684.
(12) Qermer-Durand, DictionMire topographique du Gard, p, 25S-259.
37
578 LIVRE II. CHAPITRE XIII. { 3.
*Venerianus, dérivé lui-même de Venerius, nom d'homme
écrit deux fois dans une inscription de Narbonne qui date
de l'an 445 de notre ère (1). Vandré (Charente-Inférieure)
serait-il un ancien Venericbcus?
(1) c. /. L,, XII, 5336.
"w-
CHAPITRE XIV.
LE SUFFIXE GAULOIS -SSa DANS l' ANTIQUITÉ BT AU MOYEN AGE.
SOMMAIRB :
i 1. Le suffixe ganlois -sso-s -Ma. — { 2. Noms de lieu dérivés de genti-
lices roioainfl à l'aide du suffixe gaulois -ssa.
§ !•'. — Le suffiaf& ga/ulois -sso-s, -ssa.
Le gaulois possédait un sufBxe -sso-, -ssa, dont le dou-
ble s se rencontre précédé d'à, d'e , d't , d'u, dans des noms
d'hommes. Les inscriptions nous apprennent par exemple
les noms d'hommes gaulois Tagassos , Lucressa , Magissa ,
Catussa (1). Le suffixe qui termine ces mots a été aussi
employé pour former des noms de lieux; quelques-uns
ne paraissent pas dérivés de noms d'honunes; tels sont
par exemple le nom du mont Jura, Jurassus^ et celui de la
rivière IhmmisstÀSy qui nous est connu par Âusone :
Prsatereo arentem sitientibus undique terris
Dumnissum, riguasque perenni fonte Tabemas (2).
On peut croire, avec les auteurs de la Grammatica Celtica^
que ces vers désignent un cours d'eau souvent à sec et
(1) Grammattca celtica, 2* édit., p. 786. Le poète Gergissus, cité en cet
endroit d'après le grammairien Virgile, devient Qergesus dans Tédition de ce
grammairien donnée chez Teubner par J. Huemer, p. 15, 1. 15.
(2) iroM{U, yen 7, 8.
580 LIVRE II. CHAPITRE XIV. { 1.
non une ville comme Tadmettent E. Desjardins (1 ,
M. Longnon (2). Ce nom de rivière est dérivé d'une varia
du/mni- du thème dubno-s, dumno^s, « profond. »
Ce procédé de formation apparaît clairement dans
nom d'homme gaulois Medu-ssa, que fournissent df
inscriptions , Tune des environs de Brescia (3) , l'autre
la Valteline (4). Medu-ssa,, comjQe le nom de la dée;
Medu-na (5), est dérivé d'un thème medu-, a hydromel (6
d'où le surnom gaulois Medu-genus, « fils de l'hydromel
dans une inscription d'Espagne (7).
De môme, le cognomen romain Catu-ssa, masculi
d'origine gauloise (8) , parait dérivé d'un thème catu- c
forme le premier terme 1® des noms de peuples Cal
riges{9)^ Catu-slogi (10) ; Catu-vellauni (11); 2* du nom div
Catu-rix (12) , un des surnoms du Mars gallo-romaii
3® des noms d'homme, Catu-gnatos (13), Catu-mandus I
Catu-marus (15), Catu-volcus (16) ; ce thème a probableme
(1) Géographie de la Gaule d'après la Table de Peutinger, p. It6.
(^) Allaà historique de la France, texte, 1** Urfaison, p. VL
(3) C. /. L., V, 4278.
(4) Ibid,, V, 8896.
(5) Brambach, 709.
(6) Ea moyen irlandais, mid ?s mtud, gcn. msda (V^indisch, Irische Ttx
p. 689); en vieux comique, medu {Grammaiica celtica, 2* édit., p. 107y;
moyen breton, mez {Catholicon do Lâgadeuc publié par Le Hen, p. 151';)
gallois, meddy d'où le dérivé breton mezo, galiois med^dw-^ c ivre, » ==s * yti
duo-M. Cet adjectif a donné un verbe dénominatif dont l'infinitif e>t . (
moyen breton, meimff, en gallois, medàviy <n enivrer, » == *meduimu'ti
*meduimO"8, ,
(7) C. /. L., III, 162. I
(8) Ibid., III, 5392. Orelli, 4803.
(9) César, De bello gallico, I. I, c. 10.
(10) Pline, livre IV, { 106.
(11) C. /. L., VII, 863; cf. Forbiger, Handbuch der atlen Géograpfd
t. III, p. 293.
(12) Brambach, 1588 ; Mommsen, Inscriptiones helveticae, 70.
(13) Dion Cassius, livre XXXVII, c. 47. Cougiiy, Extraite déê âuteurt g
t. IV, p. 228. Catu-gnatos commandait les troupes allobroges l'an 61 av. J.<
(14) Justin, livre XLIH, c. 5. ( 5.
(15) Catumarus a été employé comme surnom dans là période roma
L. Sempronius Catumarus^ inscription de la Pannonie supérieure (C. /.
III, 4263).
(16 (César, De bello gallico, L V, c 24, 25; U VI, c. 31.
NOIfS D^ LIEU EN -BSA. 581
aussi fotirni le second terpie des noms d'hommes Vello-
calus (1), Codda-catus (2). Enfin, employé seul et sans suf-
fixe de dérivation, il a donné le nom d'homme Catus,
inscrit sur de$ boucliers de chefs gaulois révoltés contre
Tempereur Tibère, avec Julius Florus et Sacrovir, en
Tan 21 de Tère chrétienne. L'arc de triomphe d'Orange
nous a conservé la reproduction de ces boucliers (3).
Ce thème catii- veut dire « bataille. » Le nom d'homme
Bataille, qui exprime la même idée, se rencontre encore en
France aujourd'hui ; et à côté du nom d'homme dérivé
Catu-ssa, signifiant probablement « batailleur, » on peut
placer plusieurs autres dérivés du même thème formés à
l'aide de suffixes différei^ts; tels sont Catu-cus (4), Catu-
ena (5), Catu-enus (6), Catu-rus (7), Catu-so (8), dont le
sens probablement se rapprochait de celui de Catu-ssa.
S 2. — Noms de lieu dérivés de gentilices romains à l'aide
du suffixe gaulois -ssa.
Le gaulDîs avait donc un suffixe -sso- -wa; ce suffixe
usité en gaulois à là fois pour former dès noms d'hommes
et pour former des noms de lieux, a été employé à l'épo-
que gallo-romainô pour créer, à l'aide de gentilices, des
noms de lieux nouveaux, qui se terminent en -ma, sous-
entendu villa ou dormis. Dans cette désinence , i est un
débris du suffixe -iu^ caractéristique ordinaire des gentilices
romains; ssa est le nominatif singulier féminin du suf-
fixe -W0-.
(1) Tacite, Histoires^ livre III, c. 45.
(2) Dans une inscription de Besançon, Orelli, 2064.
(3) E. Desjardins, Géographie de la Gaule romaine^ pi. xii. Comparez les
moulages du musée de Saint-Germain.
(4) C. /. L.y VII, 1336, 265.
(5) Ibid., II, 780.
(6) /Md., II, 431, 780, 865.
(7) /Md., II, 2903.
(8) Mommaen, Inscriptiones helveticae^ 62.
582 LIVRE IL CHAPITRE XIY. { 2.
Cantissa est un nom de lieu qui apparaît plusieurs
fois dans les cartulaires de Saint-Hugues de Grenoble
Les documents sont de la fin du onzième siècle et di
commencement du douzième. L'orthographe la plus an
cienne Cantissa (i), y alterne avec l'orthographe plui
récente Cantessa (2), ou même Chantessa (3). Ghantess^
est une commune du département de l'Isère.
Cantissa dérive du gentilice Cantius, qui vient du cogno-
men Cantus. Le gentilice Cantius est fréquent dans le:
inscriptions de Tltalie du nord (4). On le trouve aussi dan;
les régions celtiques situées au nord des Alpes. Une ins-
cription de Laybach y en Carniole , nous apprend les nom^
de L. Cantius Proculus et de L. Cantius Probatus (5.
Dans un einscription des environs de Gratz en Styrie , ou
lit les noms de L. Cantius Secundus (6). Une épitaphe d^.
Lyon a été gravée par Tordre de C. Cantius Elvetinus 7 .
Dans une épitaphe d'Ânglefort (Ain) , Cantius est un sur-
nom juxtaposé au gentilice Matussius (8). Dans une inscrip
tion de Paris , c'est le nom d'un personnage qui n'a pas d»^
gentilice (9). Cantius = Cantio-s dérive de canto-s^ adjectil
gaulois qui parait signifier « blanc (10). »
Canto-s, fréquent dans les composés, a fourni plusieurs
dérivés outre Cantios. Tel est le cognomen Canto, -onis 11
auquel se rattache le nom de Chantonay (Haute-Saône ej
Vendée), et dont vient le dérivé Cantonius employé comni'
gentilice (12); tel est le gentilice Cantilius, conservé par \im
(1) C&rtuUires de Véglise cathédrale de Grenobley p.' 127, 162, 163.
(2) Ibid,, p. 100, 196, 239.
(3) I6ict., p. 100, 101.
(4) C. L L., V, index, p. 1108, col. 2.
(5) /Md., III, 3857.
(6) Ibid,, m, 5437, 5438.
(7) Boissieu, Inscriptions antiques de Lyon^ p. 501.
(8) Allmer, Inscriptions antiques de Vienne, t. III, p. 319.
(9) OreUi, 5907.
(10) Grammatica celtica, 2* édit., p. 162, 857.
(11) C. /. L., VII, 1330.
(12) Ibid., m, 4838.
NOMS DE LIEU EN -8 SA. 583
inscription d'Espagne (1), et qui explique le nom de Chan-
tilly (Oise) , de Chantillac (Charente), et de Cantillac (Dor-
dogne).
ViNDomssA , aujourd'hui Windisch (Suisse) , existait dès
Tannée 71 de notre ère. Il s y trouvait, à cette date, un
camp romain dont parle Tacite (2). Quelques années plus
tard , en 79 , les vicani Vindonissenses élevèrent un arc en
rhonneur de Mars, d'Apollon et de Minerve (3). Des textes
du moyen âge nous font connaître plusieurs localités du
même nom; telle est Vindonissa^ qu'en 977 un certain Ma-
nassès tenait à titre de précaire du chapitre de Reims (4) ;
c'est aujourd'hui Vendresse (Ardennes). On peut citer
aussi « Vandonesse, » ainsi appelée en 1287, aujourd'hui
Vandenesse (Nièvre) (5) ; et Vindonissa qui , comme nous
l'apprend Quicherat , est aujourd'hui Saint-Didier de For-
mans (Ain) (6). Vandenesse (Côte-d'Or), Vendenesse-lès-
CharoUes, et Vendenesse-sur-Arroux (Saône-et-Loire), sont
également d'anciens Vindonissa; le nom du dernier a été
écrit au onzième siècle Vindenissa (7) et Vendonessa (8).
Vindonissa est dérivé de Vindonius. Vindonius est un
gentilice qui nous a été conservé par une dédicace au dieu
Latobius dont l'auteur est Vindonia Vera ; ce monument a
été découvert en Styrie (9). Il faut probablement lire Vin-
donius le gentilice de T. Vindonus leranus, connu par une
inscription du Piémont (10). Dans une inscription du grand
(1) A. Cantilius, C. I. L„ II, 2113. Cf. ci-dessus, p. 376.
(2) HislnireSy liv. IV, c. 61 ; cf. Mommsen, Inscripiiones helvelicae, 344.
(3) Mommsen, Inscriptiones helveticae, n* 245.
(4) Appendicula hitttoriae Flodoardi ^ chez Migne, Patrologia latina ,
t. CXXXV, col. 415, où Ton a, par erreur, imprimé Vindenissa; cf. Lon-
gnon, Etude sur les pagi de la Gaule, 2* partie, p. 38.
(5) Soultrait, Dictionnaire topographique du déparlement de la Nièvre y
p. 187.
(6) De la formation française des anciens noms de lieu, p. 74.
(7) Auguste Bernard, Cartulaire de l'abbaye de Savigny, p. 1052, col. 2.
(8) Ibid., p. 592.
(9) C. /. L., III, 5098.
(10) fWd., V, 7228.
584 LrVBE II. C^AJPlTRi; XfV. 1 2.
duché de Bade on a la les noms de Gn. Vindoniùls Medsor (1).
Vindonius est dérivé de Vindo, -onis, sumoin d'origine
gauloise, employé seul pour désigner des individus qui
n'avaient point de gentilice, comme nous l'apprennent les
noms d'Atressà, Vi"ndoms' fllia, dans ûwé' iiïs'ériptîôn de
Hongrie (2) , de Bôniafta, Vindohi^ fllia (3) ; de Vibentis ,
Vindonis Mus (4), dans des inscriptions de Styi^îe. Viïrtfo,
-onis est lui-môtne dérivé d*un thème innâo- employé
comme surnom, sùi^tout au féminin. Une femme appelée
Ulpia Vinda nous est connue par un^ inscription d'E^cla-
vonie (5) ; Vinda Terti filia se reùcontre dans une inscrip-
tion d'Autriche (6) ; Nûmisia Viiida , dans une inscription
de ritalie méridionale {7).- Dans un'é inscription d'Angle-
terre, Vinda est le nom d'un personnage dont le sexe est
inconnu , et qui fait une dédicacé à Mars (8). Vindos de-
vient, en irlandais , find, plus tard finn; c'est un adjectif
qui veut dire « blanc, » et par extension <c beau » « bon ; »
en même temps, c'est un nom propre porté par un héros
épique et par divers personnages historiques (9).
L'ancien norti de la ville de Vienne, en Autriche, est
VindO'bona, composé de deux termes, dont le second signifie
probablement « ville , » et a fourni , tant à l'Italie qu'à la
Gaule, le dérivé bien connu Bononia. La question se pose
de savoir si le premier terme est un adjectif se rapportant
au second terme (10), ou s'il est un substantif complément
déterminatif du second terme (il). Dans la première hypo-
(1) Brambach, Inscriptiones rhenanaa, n* 1701.
(2) C. /. L., III, 3380.
(3) Ibid., III, 5076.
(4) Ibid., III, 5105.
(5) I6id., III, 4110.
(6) Ibid., lU, 5663.
(7) Ibid,, X, 4969.
(8) /6id., VII, 509.
(9) Voyez O'Donovaa, Annale of the kingdom of IreUnd by the four
masiers, 1851, t. VII, p. 179, col. 2.
(10) Dans ce cas, Vindo-bona constituerait un composé déterminatif, comme
dit Bopp, en sanscrit liarmadharaya.
(1 1) Dans ce cas, Vindo-bona serait un composé de dépendance, tatpuruscHa.
NOMS DE LIEU EN -S 8 A. 585
thèse, VindO'bona veut dire « la bonne » ou « la belle
ville ; » dans le second il signifierait « ville de Vindos. »
Le second sens s'accorde avec le sens probable d'Augusto-
bona, ancien nom de Troyes (Aube), qui paraît signifier
« ville d'Auguste ; » de Julio-bona^ Lillebonne (Seine-Infé-
rieure), qui semble vouloir dire « ville de Jules. »
ViLLONissA est le nom de Villenauxe (Aube) dans une
charte de Tannée 1153; on trouve ensuite Vilonissa^ 1194;
Velonasse, 1223; et des formes plus corrompues (1). Villo-
nissa vient d'un gentilice Villonius dont la forme féminine
se rencontre dans une inscription de Pavie (2), et dont la
variante Vilonius a été relevée dans trois autres inscrip-
tions de ritalie septentrionale (4). Villonius dérive du nom
pérégrin Villo, -onis, que nous a conservé la marque de
potier VILLO fecit, musée de Genève (4). Comparez le
gentilice Villius, ci-dessus p. 336.
(1) Bôutiot et Socssdf Dictionnaire topographique de VAube^ p. 183.
(2) C. /. L., V, 6438.
(3) Ibid,, V, 1949, 2092, 2136.
(4) Ibid., XII, 5686. 935.
CHAPITRE XV.
LE SUFFIXE LIGURE '-OSCUS , -OSCUS ^ -ItSCUS DANS L ANTIQUIT?.
ET AU MOYEN AGE.
SOMMAIRB :
1 1. Lo suffixe -ascuê, -asca dans TlUlie du nord -ouest d*aprés les docu-
ments antérieurs au mojren âge. — 1 2. Le suffixe -ascu« employé à for-
mer des noms de lieu dérivés de gentilices romains dans l'Italie du nord-
ouest d'après les documents du moyen âge. — § 3. Le suffibie -ascus
employé à former des noms de lieux dérivés de cognomina romains dan?
ritalie du nord-ouest d'après les documents du moyen âge. — { 4. Le
suffixe -ascus et ses variantes -oscus, -uacus employés à former des noms
de lieu dérivés de gentilices romains en Gaule d*aprés les documenU du
moyen âge. — ( 5. Le suffixe -ascus^ -oscus^ -uscus^ et son dérivé -^isro.
'OniSf employés à former des noms de lieux dérivés de cognomim
romains en Oaule d'après les documents du moyen âge.
S !•'. — Le suffixe -ascus, -asca dans V Italie du nord-oueM.
d'après les documents antérieurs au moyen âge.
L'antiquité du suffixe ligure -ascus est établie par une
inscription de l'an 113 av. J.-C. C'est un jugement arbitral
portant délimitation entre les habitants de Gènes et leurs
voisins les Viturii Langenses. Dans ce document sont men-
tionnées quatre rivières dont le nom se termine par la
forme féminine du suffixe -ascus : Vinelasca^ Neviasca^ Vera-
glasca et Tulelasca, La forme masculine de ce suffixe nous
est donnée par deux lieux dits que mentionne la table
alimentaire de Véleia : Àreliascus et Caudalascus (1).
(l)GoL 5, 1. 20; édition E. Desjardins, p. xyii, u; cf. Giovanni Flechia, Di
NOMS DE LIEU EN -A8GUS , -08CUS , -U8CU8. 58
S 2. - — Le suffixe -ascus employé à former des noms de li
dérivés de gentilices roTnains dans l'Italie du nord-oa»
d'après les documents du moyen dge.
Le sufBxe -asous n'est pas rare dans les chartes qui fc
ment le tome I" des Historiae patriae momementa, publié
Turin en 1836. Parmi les noms de lieu ainsi terminés, c*
tains peuvent être tout entiers ligures comme les noms i
rivière cités plus haut ; mais d'autres dérivent certaineme
tantôt de gentilices romains, tantôt de cognomina romain
De gentilices romains, viennent les suivants :
Ansasca (pour Antiasea) vallis, dans une charte d'A
nulfe, archevêque de Milan, 999 (1). Ce nom de lieu e
dérivé d'un gentilice Antius, d'où vient aussi Antiacus {'.
BuRiASGus eurtis, mentionné dans un diplôme de Ter
pereur Frédéric Barberousse, pour l'église cathédrale (
Turin, en 1159 '3), dérive du gentilice Burrius, dont on
réuni quelques exemples, et qui a donné son nom à la st
tion romaine de Burrium, en Grande-Bretagne. Ce geni
lice dérive du cognomen Burrhus , usité dans la gens Afr
nia et dans la gens Antistia. Comparez Bur[r]iacus (4).
Gragnasgus locus en 1191 (5), Castellum Grignascum f
1014 (6), dans des chartes obtenues par l'abbaye de Sav
gliano et par ta cathédrale de Pavie, sont tous les deux â<
notations modernes d'un antique * Graniaseus, qui dérii
du gentilice Granius, d'où aussi Graniacus et Grinio (7).
aleune forme loc^li dell' ItalU superfore, diêterttizione linguitttca. Turi
1871. p. 62 et Buiv. — C. I. L., t. I. p. 7Î; t. V, p. 888; t. XI. p. 215.
(1) Col. 3Î9 b.
(2) Voyez ci-dessus, page 378-379; cf. De-Vit, Onomteticon, I, 344-345
(3) Col, 816 c.
(4) Voyei ci-dessus, p. 203; et. De- Vil, OnomaiHcon, I, 77Î.
(5) CoL 973 c, a.
(6) Col. 406 d.
CÎÎVoyei ci-dessus, page 247, 513; cf. De-Vit, OnomuUoon, III, 271.
m UVRE }\. CHAPITHE XV. | 2.
JuLiAscus villa ^ mentionné, en 1047, dans un diplôme
de retnpereur Henri III {)ouf le chapitre de Saint-Sauveur
de Turin (1), dérive du gentilice Juiius, d*où Juli0CHs (2).
Lagnaschus est le nom d'une cortis, en 1064, dans une
charte obtenue par Tabbayè N.-D. de Pigtterol (S). L^ortho-
grâphe prîmitiTe est * Ldniascus , dérivé du géntilice La-
nius, dont on a quelques exemples (4).
LismiAscus (porur * Lieiniasôus) locUs, en 1047, dans un
diplôme impérial pour le chapitre Saint-Sauveur de Tu-
rin (5) dérive du géntilice Licinius, d'où LiciniacuSy p. 255.
Maliascûs, nommé aussi en 1647 par le même diplôme
impérial, était Tendroit où se trouvait située l'église de
Saint-Etienne : Aeccle^ia SancU Stephani in Maliasco 6).
Ce nom de lieu dérive du géntilice bien connu, Mallius,
d'où Malliacus, p. 266-267.
PiNARiASCHA, valléc OÙ était une paroisse plebs donnée à
l'abbaye de Cavour, en 1037 (7); vallis Pinariasoay eu
1041 (8) et en 1159 (9), est un dérivé du géntilice Pinarius.
un des plus illustres de Rome. P. Pinarius Mamercinus Rufus
fut consul l'an 489 avant notre ère, L. Pinarius Mamercinus
Rufus fut élevé à la même dignité en 472. P. Pinarius fut
censeur en 430. Plusieurs Pinarius sont mentionnés dans
les œuvres de Cicéron ; d'autres dans les inscriptions du
temps des empereurs (10), exemple : G. Pinarius Albus, édile
(1) Col. 563 c.
(2) Sur Juiius et «Tuliacus, voyez ci-dessus, p. 141-142.
(3) Col. 607 c.
(4) De- Vit, OnomaiSticon, IV, 36.
(5) Col. ^3 h.
(6) Col. 563 b.
(7) Col. 515 c.
(8) Col. 541 a.
(9) Col. 816 c.
(10) Paulf, AMU-JSricycZopaedte, t. V, p. 1622 et suiv.
NOMS DE LÎEU EN -ASdÛB, -08CU8, -U8CUB. 5TO
à Nimes ; L. Pinarius Optalus, dont une inscription d'Aps
(Ârdèche), nous fait connaître les noms (1).
pLAtcîASCA pour * Pkmtiâsca , nom â*\in eastrmn , dont
est datée, en 1037, un diplôme de Femperetir Conrad II le
Salique, pour Tabbaye Saint-Just de 8use (2), Ptos^sefwm
en 1123 (3), dérive du gentilice Plautius, un des plus célè-
bres de Rome. O. Plautius Ppoculus fut consul en Tan 858
av. J.-C; C. Plautius Venno obtint la même tMgnîté en
347 ; L. Plautius Venno, en 330; C. Plautius Decianus,
en 329 ; M. Plautius Silvanus, Tan 2 avant J.-C, etc. (4).
RuvELiAscus en 940 (5), RuviliasctAS en 1010 (6) et en
1183 (7), dans des chartes de la cathédrale d'Asti, est au-
jourd'hui Revigliasco, qui tient lieu d*un antique *Rupi'
liascus,. Ce nom de lieu est dérivé du gentilice Rupil'rus.
P. Rupilius, homme d'origine obscure, obtint à Rome les
honneurs consulaires Tan 132 av. J.-C. P. Rupilius Rex,
postérieur d'un siècle, doit, dans le monde littéraire, une
certaine notoriété à une satire d'Horace qui est la septième
du livre premier, et qui commence ainsi :
Proscripti Ragis RupiU pu& a^[tte venenum (^
Venzasgus pour * Venciascus^ en 1192, dans le3 ai»l|iv09
de la ville de Verceil (9), dérive du gentilice Vendus. Une
iuscriptioQ, aujourd'hui détcuite, de Die (Drômoi), wMt été
giavée en l'honneur da de^ua Yeiiiiciitô Juvieaticiau»^ p^éii^
d'Auguste, en recounwasance de la lib^irs^Âtô ào^l il civi^t
(1) c. /. L., XII, 26T7, 3261.
(2) Col. 513 l>.
(3) Col. 755 c.
(4) Paul/, Real'Encyclopaedie, U V, p. 1721-1728.
(5) Col. 145 a.
(6) Col. 379 c.
(7) Col. 922 c.
(8) Sur les Rupilius, voyez Pauly, ReAl-Encyclop&edie , t. VI, p. 5{{5-$66.
(?) Col. 987 d.
5Q0 LIVRE II. CHAPITRE XV. { 3.
fait preuve ea donnant des spectacles au peuple des Fo-
contii (1).
§ 3. — Le suffixe -ascus employé à fbrmer des noms de lieu
dérivés de cognomina romains dans CHaUê du nord^-ouest
d'après les docu/ments du moyen âge.
En voici des exemples, empruntés comme les précédents
au t. I des Historiae patriœ monwnenta de Turin.
Cavrâscus (pour Caprascus) , nom d'une villa en 1033 ,
dans une charte du monastère de Saint-Etienne de Gè-
nes (2), dérive du cognomen Caper. Le grammairien Fla-
vius Caper, qui avait donné des leçons à un empereur,
s'est amusé à rechercher dans les œuvres de Cicéron les pas-
sages où le grand orateur s'était servi du superlatif piissi-
mus. L'intérêt de cette recherche tenait à ce que Cicéron avait
soutenu, dans une de ses Philippiques^ que le mot piissimus,
employé par le triumvir Antoine , n'était pas latin (3).
Clavascus, dans un diplôme de 1159, pour la cathé-
drale de Turin , est le nom d'une ourtis (4). Il dérive du
cognomen Clavus, porté par un personnage auquel fut
adressé, en 230, un rescrit de l'empereur Alexandre-
Sévère (5).
Martibiascus, en 1047, était une localité où se trouvait
une cortis et une chapelle. Nous l'apprenons par un diplôme
de l'empereur Henri III, pour le chapitre de Saint-Sauveur
de Turin (6). Ce nom de lieu est dérivé du cognomen Mar-
(1) C. /. L., XII, 1585» Cf. ci-de88U8, p. 337, VincUcuM de Vintius.
(2) Col. 502 a.
(3) TeufFel, Geschichte der rômischen Liter&tur, 3* édit, p. 801. De Caper
est venu le gentilice Caprins, ci-dessns, p. 435, 436.
(4) Col. 816 d.
(5) Gode Justinien, Uvre IX, t. xxzv, 1. 2.
(6) Col. 563 d.
NOMS DE UEU EN -A8CUB, -08CU8, -USCUS. 591
tyrius, dont on a des exemples dans des textes romains et
qui y a été introduit par une influence chrétienne (1).
NoYELLASCA est le nom d'une vallée dans une charte de
Saint-Sauveur de Turin vers Tannée 1120 (2), et dans un
diplôme accordé par l'empereur Frédéric P' à la cathédrale
de Turin en 1159 (3). C'est un dérivé du cognomen Novel-
lus très fréquent dans les inscriptions de la haute Italie et
de la Qaule (4).
QuiNTASGHA est uu endroit où se trouvait une église en
1190, comme on l'apprend par une charte de cette date
concernant la ville de Verceil (5). Ce nom de lieu dérive
du cognomen Quintus (6), qu'on trouve aussi employé
comme nom pérégrin (7).
§4. — Le suffire -ascus et ses vctriantes -oscus, -uscus,
employés à former des noms de lieu dérivés de gentilices
romains en Gaule d'après les documents du moyen âge.
Le suffixe -asous a une variante -^sous qu'on trouve , en
1212, dans une charte de l'abbaye Saint-Just de Suse (8),
où se rencontre deux fois le nom de lieu Canosgus, dérivé
du cognomen latin Canus étudié plus haut (9).
En France le suffixe ligure -oscus a deux variantes :
"Oscus et uscus. Comme dans l'Italie du nord, il a servi à
former des noms de lieux dérivés de gentilices romains et
et de cognomina romains.
(1) De- Vit, Onomaaticon, FV, 383.
(2) Col. 744 d ; cf. col. 816 c.
(3) Col. 816 c.
(4) Pauly, Real'Encyclop&edie , t. V, p. 715. — De là le gentilice Novel-
lius, ci-dessus, p. 291.
(5) Col. 957 b.
(6) C. I. L., XII, 4062.
(7) Ibid., XII, 3856, 4210, 5424, etc. Cf. Quintins, d*où Quintiacuê, p. 156.
(8) Col. 1187 d, 1188 b.
(9) Pages 471-472.
A. -: U st^^e ^^us en Gflule.
^Atisiasou^ est probablemeût la forme la i^us ad^enne
du m^m de la Localité app^ée à la fii» du oQÛèf&a sié-
€i^ AdimsfQ à Tablatif d«a& le Cartmladre d& Conqu^i;
elle étrà ùinée prè» ée ChaunhaG , eoimnuae de Sai-
1^9HC<mrbaUè8 (Aveyron) (1). *Mi$i0aGm yieat d'Aiisias,
gentilice connu par les inscriptions (2) , et doot oa trouve
quelques exemples en Gaule : C. Atisius Secundus, Ar-
les (3); G. Atisiuô Seduîns, Beiauci^oissanf (feérre) (♦); C. Ali-
sitts PauUintis, Saiùt-Aupre (Isère) (5), etc.
BASSîAâeus, écrit à Pablatif Basdusco dans un acte de
Tannée 739 , qui comprend cette localité dans Bïie liste de
noms de lieux situés dans le Viennois et dans le Lyon-
nais (6). Ge nom est dérivé du gentilice roDÈiafn Bassius (7),
qu'on trouve en Gaule dans une marque de potier (8), et
dont on a parlé plus haut, p. 427.
Au ligure Bassiascus, noté BasciascuSy on peut comparer
le gaulois BasciçkcHs pour Bmsiacus^ nom des commune» de
de Bes8ey*-la-Cour et de Bessey-les-Clteaux , dans des do-
euments du dixième et du onzième siècle. Ges deux com-
munes appartiennent au département de la Gôte-d'Or (0).
L'^orihiographe plus régulière Bamako à l'ablatif se trouve,
en 844 9 dan» uïie charte con^rvée |ilar le Gartuiaife de
Gonquofi* (Aveyron) (10). Des chsirtes du douzième siècle
dans le CartuLaire de Beaulieu {Cmtéw) nous offirent Ton
(1) G. Desjardins, Cartulaire de Conqu99f p^ 81, 429^ 4M.
(2) De- Vit, OnomaLSticoriy I, 557.
(3) C. /. L., XII, 764.
(4) 16id., XII, 2200.
(5) Ibid., XII, 2203.
(6) CaLrtul&ire de Saint-Hugues de Grenoble^ p. 37.
(7) De- Vit, Onomasticorif I, 685.
(8) C. /. L., XU, 5686, 122, 123.
(9) àtarnier, Nomenclature, p. 78, 19.
(10) G. Desjardins, Cartul&ire de Conques, p. 186.
NOMS DE LIEU EN -A8CUS, -0BCU8, -UBCUB. 593
thographe plus moderne de Baissiaco (1) et de Baissaco (2);
il s'agit ici de Beyssac, commune de Strenquels (Lot) (3).
Gratiasca, ai,Dsi nommé dans une charte du onzième siè-
cle (4), noté aussi à la même époque Graciasca [5) , fira-
ziasea (6), et Grezasca (7), pu Grezaschçt (8), aujourd'hui
Gréasque (Bouches-du-Rhône) , est un dérivé du gentilice
Gratius étudié plus haut, p. 346, et qui a donné le nom
de lieu dérivé gaulois Gratiams.
B. — Le tufUxe oscua en Gaule,
Albabioscus. Un document de l'année 739 met dans le
pays d'EmbruQ une coUmica quae dicitur Albariosco (9). Ce
nom de lieu dérive d'un gentilice "Albarius, dont on n'a
pas d'exemples dans les documents romains , mais dont
l'existence peut être conclue de celle du gentilice Albare-
nius (10), dérivé d"Albarenus, lequel suppose un parallèle
'Albarius.
Albioscus est une localité ou l'abbaye de Saint- Victor de
Marseille croyait avoir des colons en 814 (11). A la même
date cette abbaye avait des colons dans un lieu appelé
Àlbiomus (12). Albianus. est la forme romaine correspondant
au ligure AWioscus. On a étudié plus haut la forme gau-
loise Albiaous et à cette occasion le gentilice Alhius (13).
(I) 1118, Dalodia, Ctrtulair» ds Bsaulleu, p. 64.
(!) 1112, Deloche, Ibfd., p. 63.
(^ Deloche, xMd., p. 370.
(t) aa^rard, CarluUire d« Salnl-Viclor de UartilUe, t. 1, p. 1S&.
(5) Onérard, IMd., p. 176.
(6) Onérard, <bld., p. 160.
(T) Qnérard, Ibid., p. 373, 274.
(S) Onèrard, ibid., p. 132, 1S3, 154.
(tq CarluUfrs d« Saint-Hugxu» de Grenoble, p. 39; ef Pardesins, Ofplo-
mila, II, 372.
(10) De- VU, Onomaatfeon, t. I, p. 104.
(II) Qnérard, Cartula<r« de Stint-Victor de Wameflla, t. II, p. 637, n* 7.
[12) Oaèrard, ibfd,. p. 643, tf 23.
(O) Page 190.
38
594 LIVRE II. CHAPITRE XV. { 4.
* Canioscus ou Kanioscus doit être l'orthographe primitive
du nom du château appelé Kagnosco à l'ablatif latin, et
Cbainosc en langue vulgaire dans des chartes du onzième
siècle, c'est aujourd'hui Saint-Jacques-de-Cagnosc , com-
mune de Gonfaron (Var) (1). Ce nom de lieu est dérivé du
gentilice romain Canius, étudié plus haut, p. 210, 211,
au sujet de son dérivé gaulois Caniacus.
Catalioscus. Ce nom de lieu est écrit à l'ablatif Cata-
liosco dans une charte du onzième siècle conservée par le
Cartulaire de Saint- Victor de Marseille (2). Il s'agit proba-
blement d'une localité située dans les Bouches-du-Rhône.
Catalioscus est dérivé du gentilice Catalius. On a trouvé à
Tresques (Gard) l'épitaphe d'une femme appelée Catalia
Servata (3). Ce gentilice est dérivé de Catalus, qui est à la
fois un nom de peuple et un nom d'homme pérégrin (4).
CuRioscus , aujourd'hui Curiusque , commune du Brus-
quet (Basses- Alpes), est mentionné à l'ablatif Curiosco dans
la liste des terres où l'abbaye de Saint-Victor de Marseille
avait des colons, en 814 (5). Ce nom de lieu dérive du
gentilice romain Curius , illustré principalement par
M.' Curius Dentatus, trois fois consul, 290, 275, 274 avant
notre ère, enfln censeur en 272 (6). Il pénétra en Gaule,
comme l'attestent à Vaison (Vaucluse), le fragment d'inscrip-
tion : Sex. Curius (7), et à Nimes l'inscription gravée par
les soins de Q. Curius Aurelianus (8).
Ce gentilice a dû avoir un dérivé gaulois Curiaciu qui
(1) Guérard, Carfulatra de Saint-Victor de Ifaraeille, t. I, p. 148; cH 1. 1,
p. 388 et t. II, p. 874.
(2) Tome I, p. 599.
(3) C. /. L., XII, 2657.
(4) Voyex ci-dessus, p. 487-488.
(5) Guérard, Cartulaire de Saint-Victor de Marseille, t. II, p. 646» n* U.
(6) De- Vit, Onomasticon, t. II, p. 517.
(7) C. I. L., XII, 1407.
(8) Ibid., XII, 3201.
NOMS DE LIEU EN -A8CU8 , -0SCU8 , -U8CUS. 505
est noté Coriaco au cas indirect dans un diplôme royal
mérovingien du milieu du septième siècle (1). Les trois
communes de Cuiry, situées dans le département de TAisne,
doivent être d'anciens * CvHacus.
* Flavioscus est probablement la forme primitive du nom
de Flayosc (Var), écrite à Tablatif, au onzième siècle,
Plaiosco dans deux chartes conservées par le Cartulaire de
Saint' Victor de Marseille (2) , Flaiossco dans une autre (3) ,
en langue vulgaire Flaiosc (4). La forme gauloise corres-
pondante est Flaiacus = *Flamacus^ dans une charte du
département de l'Yonne, en 1133 (5); Flaiacus est aujour-
d'hui Fley. Fley pour Flaviacus (Yonne), comme Flaiosc
pour Flavioscus (Var) , ont perdu un v ; le môme phéno-
mène s'est produit dans le nom de Saint-Germer-de-Fly
(Oise), et dans celui de Flagy (Jura), qui sont d'anciens
Flaviacus (6). On a parlé plus haut (p. 234) du gentilice
Flavius.
* Manioscus ou * Magnioscus doit être la forme primitive
du nom de lieu appelé à l'ablatif Mainosco dans Tétat des
colons appartenant à l'abbaye de Saint- Victor de Marseille
en 814 (7). On connaît quelques exemples du gentilice Ma-
gnius ; nous l'avons étudié (p. 265) au sujet du nom de
Ueu Magniaaus, Manius est le nom d'un potier dont on a
trouvé la marque à Fréjus (8).
* Marcioscus doit être la forme primitive du nom de lieu
écrit au cas indirect Marzosco dans une charte de l'année 970.
(1) Tardif, Monuments historiqties, p. 13, col. 1.
(2) Quérard, Cartulaire de Saint-Victor de Maraeille^ t. I, p. 478, 513.
(3) Guérard, tbid., t. II, p. 209.
(4) Quérard, ibid., 1. 1, p. 4d8.
(5) Qnantin, Cartulaire de VYonne, t. I, p. 292.
(6) Longnon, Atlas historique de la France, p. 180.
(7) Quérard, Cartulaire de Saint-Victor de Afarseille, U II, p. 650.
(8) C. /. L., XII, 5686, 533.
596 LIVRE II. CHAPITRE XV. { 4.
Il s*agit d'une localité située dans le comté de Sisteron
(Basses-Alpes) (1). On a étudié plus haut (p. 272-274), à
propos du dérivé gaulois Marciacus, le gentilice romain
Marcius, dont le ligure Marcioscus dérive également.
*MoNTioscus est probablement la notation primitive du
nom de lieu appelé à Tablatif . dans les chartes de Cluny,
au dixième siècle, Montiosco (2), Monciosco (3), Manzosco (4).
Ce nom de lieu dérive d'un gentilice Moncius (?), Mon-
tius (?) ou Muntius (?) que nous n'avons pas trouvé, mais
qui explique le nom de lieu gaulois écrit à l'ablatif Jfun-
ciaco dans un diplôme royal mérovingien du septième
siècle (5). Mousson (Meurthe-et-Moselle), Montionis au gé-
nitif dans la période carlovingienne (6) nous offre un antre
dérivé du même gentilice avec un suffixe différent.
ViLioscus, à l'ablatif Viliosoo en 1038 (7), aujourd'hui
Vilhosc (Basses-Alpes) , est un dérivé du gentilice Viliins
(p. 336), bien connu dans l'histoire romaine (8) , et qui a
donné le dérivé gaulois Villiacus , d'où Villy (Yonnejf (9).
Villy-en-Trode et Villy-le-Maréchal (Aube) (10).
* ViTRioscus est la bonne notation du nom de lieu écrit
à l'ablatif, Vitrosco dans trois chartes du dixième siècle (11).
Aujourd'hui, pour désigner cette localité, on a substitué à
la désinence ligure celle par laquelle le patois du pays re-
(1) Guérard, C&riulaire de Saint-Victor de Marseille, t. I, p. 59Ï.
(2) Brael, Recueil des chartes de Vabbayè de Cluny, t. IT, p. 440.
(3) Bruel, ibid., t. II, p. 414.
(4) Bruel, ibid,, t. III, p. 151.
(5) Tardif, Monuments historiques, p. 13,
(6) Lepage, Dictionnaire topographique dé la Meurthê, art. Pont-à-
Mousson, p. 110.
(7) Guérard, Cartulaire de Saint-Victor de M^rs^illSy t. Il, p. 65.
(8) Pauly, Real-Encyclopaedie, t. VI, p. 2611-2613.
(9) Quantin, Dictionnaire topographique de VYonne, p. 144.
(10) Boutiot et Socard, Dictionnaire topographique de l'Aube, p. 187.
(11) Chevalier, Cartulaire de Saint-André^le-Baêy p. 35, 36.
NOMS DE LIEU EN -A8CU8, -08CUB, -U8CUS. 597
présente le suflSxe gaulois -acus ; l'ancien * Vitrioscus est
aujourd'hui Vitrieu, commune de Vernioz (Isère). Vitrieu
= Yitriacus. Vitriacus lui-même tient lieu d'un primitif
Victoriacus venant du gentilice Victorius, comme on Ta
montré plus haut (p. 334-335). * Vitrioscus^ noté Vitroscus.
est le successeur d'un plus ancien * Yictorioscus.
§5. — Les suffixes 1* -ascus, -oscus, -uscus, 2** -usco, -onis,
employés à former des noms de lieux dérivés de cognomina
romains en Gaule, d'après les documents du moyen âge.
Les noms de lieux suivants ont été tirés en partie cer-
tainement, en partie probablement de cognomina romains,
les uns d'origine latine, les autres d'origine barbare.
A. — £^ suffixe -ascus en Gaule.
Canasgus est une localité dans laquelle, en 911, l'abbaye
de Saint-Julien de Brioude acquit une propriété (1). La si-
tuation précise de cette localité n'est pas déterminée ; mais
il résulte du contexte qu'elle devait être située près de
Brioude (Haute-Loire). Canascus est dérivé de Canus, cog-
nomen latin dont on a quelques exemples : Q. Gellius
Canus, ami de Cicéron ; M. Annius Kanus, dont l'épitaphe
est conservée au musée de Narbonne (2).
B. — le suffixe -oscus, -uscus en Gaule.
Artonoscus, à l'ablatif Artonosco^ est un des noms de
lieu mentionnés, en 739, dans le testament d'Abbon pour
l'abbaye de Novalese (3). Artonoscus parait avoir été situé
dans le pays de Gap ; ce nom est dérivé du cogixomen Arto (4),
(1) Doniol, Cartui. de BrioudCf p. 61.
(2) De- Vit, Onomasticon, III, 220. C. /. L., XII, 4586.
(3) CàriptUire de Saint ^Hugues de Grenoble, p. 40.
(4) De-Vit, Onomaêticon, î, 494.
508 LIVRE II CHAPITRE XV. } 5.
dérivé lui-même d'Artos, « ours, » qui a été aussi employé
comme nom d'homme. Artos est gaulois (1) ; son dérive
Arto, -onis, avec les désinences latines, ou Artu, Artunos.
Artunnos, avec les désinences gauloises, a fourni à la géo-
graphie de la France un dérivé en -acus : c'est Arthonnay
(Yonne), au onzième siècle Àrtunnacus (2).
Blanuscus , en M&connais , dans une charte de 938 :3; ;
à Tablatif Blanusco en 930 (4), Blanosco au onzième siè-
cle (5), est aujourd'hui Blanot (Saône-et-Loire) (6). Ce nom
de lieu dérive du nom servile Blanus, d'origine grecque et
qui veut dire « chassieux (7). » De ce nom a été tiré uu
gentilice , Blanius , dont l'existence est démontrée par le
nom de lieu Blaniacus, Blanidcus désigne, dans la Chronique
de Bèze, Blagny (Côte-d'Or) (8).
Branoscus, aujourd'hui Branoux, commune de Blanna-
ves (Gard), était encore appelé à l'ablatif, au quatorzième
siècle, Branosco et Branasco (9). Ce nom de lieu est dérive
du nom d'homme gaulois Branus ou Brannus, dont le seus
primitif est « corbeau, » et dont on a déjà parlé plus haut.
p. 399-400.
Bricosci, à l'ablatif Bricoscis^ nom d'une localité située
dans la vallée de Maurienne, en 739 (10), dérive du nom
pérégrin Bricus par i long et un seul c, ou Briccus avec i
bref et c double. Ce nom pérégrin est conservé par une
(1) Voy. ci-dessns, p. 383.
(2) Quantin, C&rtuUire de VYonney t. II, p. 27.
(3) Bruci, Recueil des chartes de Cluny, t. I, p. 469. <
(4) Bniel, tbtd., p. 368.
(5) Bruel. ibid., t. III, p. 797.
(6) Chavot, Le Màconn&is, p. 72.
(7) De- Vit, OnomsLSticon, t. I, p. 729.
(8) Garnior, Nomenclature y p. 41, n* 177; cf., du même auteur, rèditiun
de la chronique de Bèze, p. 235.
(9) Germer-Durand, Dictionnaire topographique du Gard, p. 35.
(10) Cartul&ire de Saint-Hugues de Grenoble, p. 37.
NOMS DE LIEU EN -ASCU8, -OSCUB, -UBCUB. 5M
marque de potier qu'on a trouvée à Vienne (Isère) (11.
Briccus ou Bricus a donné le nom d'homme dérivé, Brico.
au génitif Briconis, gravé sur une patère de bronze qu'or
a découverte récemment près de Genève (2). De Briccus
aussi vient le gentilice Briccius, attesté par une épilaphc
que possède le musée de Narbonne (3). On a tiré de Briccius
le nom de lieu gaulois *Bncciacus, d'où probablement :
Brissac (Hérault), Brissiacum en 1189(4); Brissy (Aisne).
Brissiacus en 1123 ; Brixey-aux-Chanoines (Meuse), Bris-
Htum en 1141 (5).
Cauboscus , à l'ablatif Cambosco , est une villa située er
Lyonnais, vers l'an 1000 (6) ; il s'y trouvait une églis*
vers 1060 (7) ; c'est aujourd'hui Chambost-Longessaignf
(Rhône) (8). CamhoscMS est dérivé du nom pérégrin Cambus
attesté par une marque de potier (9). Ce nom est d'originf
gauloise ; c'est un adjectif qui veut dire «■ courbe ; » oi:
en a tiré ua nom d'homme, Cambius, d'oii le dérivé géo-
graphique Catnbiovicenses{i{!i). Un autre dérivé géographique
de Cambus est Cambo ou Cambonum, aujourd'hui le Cbam-
bon (Corréze) (11); comparez Cambonum, nom d'une statior
romaine qui est aujourd'hui Le Bègue commune de Le
Beaume (Hautes-Alpes) (12).
*Cahiiloscus, à l'ablatif Camblosco. en Sénunais, dau!
(1) c. /. L., xn, 141.
(I) Ibid., XII, 5698, 4.
(3) Ibid., XII, *663.
(4) Eugène Thomas, DicIionnairB topographiquK de l'Hiraiilt, p. 26,
(5) Liénard, Dictionnaire topographique de la Meuse, p. 26.
(6| Auguste Born^rd, Carlutaire de Savigny, t. I, p. 267.
(7) Auguste Bernard, ibid., p. 386.
(8) AugUBte Bernard, ihid., t. II, p. 1193.
(9) C. /, i... XII, 5686. 163, Allmor et Dissard, Trion, t. II, p. 367.
(10) Ibid., XII, 3503 ; Table de Peutinger, segment II, 4.
(II) Deloche. Carlutairc de Beaulieu, p. 90, 135, 372.
(12) Itinéraire do Bordeaux à Jérusalem publié à la suite do l'Klnérair.
d'Anlonln, p. bhb, 1. 1. — Cambo-, ci-dessus p. 1S1, est peut-être un non
d'homme dans !e composé Cambo-dunum.
600 LIVRE IL CHAPITRE XV. | 5.
un diplôme de Charles le Chauve (1), aujourd'hui Cham-
plost (Yonne), dérive du mot gaulois Camulus, usité à la fois
comme nom divin et comme nom pérégrin (2). De Camulus
on a tiré le gentilice Camulius, p. 353-354.
* Catharoscus est probablement un dérivé d'un cognomen.
Catharus, d'origine grecque. * Catharoscus parait plusieurs
fois dans les chartes d.e Tabbaye de Saint-Victor de Mar-
seille ; il est appelé, à l'ablatif^ en 845, Cadarosco villa (3) ;
en 1043, villa Kadarosco (4) ; en 1057, Castro Kadarosco (5), et€.
Son nom persiste dans celui de la chapelle de Notre-Dame
de Cadarot (6).
Le môme nom d'homme, avec un suflBxe gaulois, a donné,
à Paris, le nom de lieu Charonne, anciennement Cataronis
potestas (7), Cadorona (8).
*Venoscus, en langue vulgaire Venosc, vers 1100 (9). est
aujourd'hui Venosc (Isère). C'est probablement un dérivé
d'un cognomen *Venus, dont la variante masculine Vena
sert de cognomen à C. Donnius dans les inscriptions d'un
pont romain à Saint-Chamas (Bouches-du-Rhône) (10). On
trouve la variante Venna, nom pérégrin d'une femme,
dans une inscription de Briançon (11).
ViNDAuscA est l'orthographe la plus ancienne du nom de
Venasque (Vaucluse) , Vennasca au onzième siècle (12), Ke-
(1) Lalore, C&rlulaire de Montier-la-Celle, p. 194.
(2) De- Vit, Onomasticorif t. II, p. 104. Cf. Chamblay (Jura, Eure-et-Loir,
Indre).
(3) Guérard, Cartulaire de Saint-Victor de Marseille^ t. I, p. 33.
(4) Guérard, ibid., p. 226.
(5) Guérard, ibid., p. 225.
(6) Guérard, ibid,, t.~ II, p. 852.
CI) Robert de Lasteyrie, Cartulaire de Paris, p. 99.
(8) Robert de Lasteyrie, tbid., p. 107.
(9) Cartulaire de Saint-Huguea de Grenoble, p. 198.
(10) CI. L., XII, 647.
(ll)/6id., XII, 95.
(12) Guérard, Cartulaire de Saint-Victor de ManeilU^ t, II, p. 6.
NOMS DE LIEU EN -ABCUS , -08CUS , -U8CU8. 601
nasca au douzième (1). On lit Vinda/usca dans plusieurs ma-
nuscrits de la NoHce des provinces et cités de la Gaule (2).
On a tiré de Vindausca, sous Tempire romain, le gentilice
dérivé Vindauscius, au féminin Vindauscia, dans deux ins-
criptions de Valence (Drôme) (3) , et , au septième siècle ,
l'adjectif Vindauscensis, qualifiant le substantif episcopus (4).
Vindausca parait dérivé d'un nom pérégrin Vinda , mascu-
lin, variante de Vindos. On a parlé du nom pérégrin Vin-
dos, ci-dessus, p. 584.
G. — Suffixe -U8C0, -usconis en Gaule.
Tarusco, 'onis, nom de Tarascon (Bouches-du-Rhône)
chez Strabon (5) et chez Ptolémée (6), est aussi le nom de
Tarascon (Ariège), si ce sont bien les habitants de Tarascon
(Ariège) que Pline appelle Taru^scononienses (7), lisez Tarus-
conienses. Ce nom oflFre un suffixe -usco^ -onis^ qui est un
développement du suffixe -usco-s. Il dérive du nom d'homme
gaulois Taro-s, que Ton peut conclure de Taro-dunum.
aujourd'hui Zarten, grand duché de Bade (8) ; comparez les
noms d'hommes galates Dejo-taros, Brogi-taros.
(1) Guérard, Cartulaire de Saint-Victor de Marseille, U II, p. 223, 935.
(2) Longnon. Géographie de la Gaule au sixième siècle, p. 442.
(3) C. J. L., XII. 1751, 1777.
(4) Longnon, Géogr, de la Gaule au sixième siècle, p. 442, note.
(5) Strabon, livre IV, c. i, § 3 et 12; éd. Didot, p. 148, 1. 25; p. 155, i. M).
(6) Ptolémée, livre II, c. 10, f 8; éd. Didot, t. I, p. 24, 1. 4,
(7) Pline, livre III, § 37 ; C. /. L., t. XII, p. 125.
(8) Ptolémée, livre II, c. xi, g 15; éd. Didot, t. I, p. 274, 1. 7.
CHAPITRE XVI.
LE SUFFIXE LATIN -aHuS DANS LES NOMS DE LIEU PENDANT
l'antiquité et au moyen AGE.
Sommaire :
{ 1. Généralités. — {2. Noms de lieu en -Arias dérivés de noms de miné-
raux. — I 3. Noms de liou en -aria, -arta« dérivés de noms de végètaaz.
— 14. Noms de lieu en -arta, -ariaa, ^arius, dérivés de noms d*animaiiz.
— 15. Dérivés de noms d'hommes.
§ !•'. — Généralités.
Deux suflBxes ont été employés pendant la période ro-
maine pour créer des noms de lieux dérivés de noms com-
muns, ce sont : 1* -aritw, ou plus ordinairement au féminin
singulier -arta, au féminin pluriel -ariae, -arias; en fran-
ças, -ier, ière, -ières; — 2** -êtum, en français -oy, av.
Dans ce chapitre on s'occupera du premier.
Il sert originairement à former des noms de lieux dérivés
de noms de minéraux , de végétaux , d'animaux ; dans la
période franque et depuis , on s'en est servi pour former
des noms de lieu dérivés de noms d'homme.
§ 2. — Noms en -arias, dérivés de nom de miriéraux.
Sous l'empire romain on trouve un vicus Aquarius en
Espagne, sur la route d'Astorga à Saragosse (1).
(i) /anéraire d'Antonin, p. 439, L 9.
NOMS DE LIEU EN -ARIA, -ARIAS, -ARIU8. 603
Aqdarias est le nom d'une villa mentionnée en 993
dans une charte de Tabbaye de Cluny (1). C'est aujourd'hui
la Chapelle-sous-Brancion (Saône-et-Loire) (2). Aqiiarias
est le nominatif accusatif pluriel féminin de l'adjectif aqua-
riusy dérivé d'aqiui, eau.
Le village appelé Aquarias au neuvième siècle doit son
ancien nom à une source qui donne naissance à un ruis-
seau appelé aujourd'hui Naiguières, probablement pour En
Aiguières (3), en sorte que l'ancien nom persiste encore au-
jourd'hui.
Sous l'empire romain Ferraria, qui serait en français
« L^ Perrière, » est une localité de Sardaigne (4).
Ferrarias est, au moyen âge, un nom de lieu très com-
mun en France. Au neuvième siècle une villa Ferrarias ap-
partenait à Tabbaye de Saint-Denis (5) ; cette villa est déjà
nommée dans un diplôme de Dagobert I**", en 628 (6). Du
même roi est contemporaine la fondation de l'abbaye de
Feirarias, Ferrières (Loiret) (7). Vers 680, le testament de
Vigile, évéque d'Au.xerre, mentionne une colonica Ferrarias
qui parait être aujourd'hui Ferrières, commune d'Andryes
(Yonne) (8); non loin de là était situé, en 833, un Vieux
Ferrières, Vêtus Ferrarias que nous fait connaître une charte
d'un archevêque de Sens (9) et dont l'emplacement se
trouve dans le même département (10). Au même siècle, il y
avait en Rouergue une petite circonscription, aicis^ appelée
(1) Bruel, Recueil des chartes de Clurty, t. III, p. 170.
(2) Chavot, Le Maçonnais^ p. 93.
(3) Chavot, ibid., p. 208.
(4) Itinéraire d'Antonin, p. 80, 1. 6.
(5) Charte de Tabbé Hilduin, en 832, et de Charles le Chauve, en 862. Tar-
dif, Monuments historiques, p. 85, col. 1; p. 117, col. 2.
(6) Tardif, Monuments historiques^ p. 5, col. 1.
(7) GaHia christiana, XII, 157.
(8) Quantin, Cartulaire de l'Yonne^ t. I, p. 20; cf. Dictionnaire topograp.
de l'Yonne, p. 51.
(9) Quantin, Cartulaire de l'Yonne, t. I, p. 41.
(10) Quantin, Dict. top, de l'Yonne, p. 51.
Ferrarias (4), c'Qst aujourd'hui La Ferrairie, CQioiQune de
Çoi^ques (Aveyron) (2). Ferraria est le fémiuia de radjectif
ffitrarius, dérivé de ferrvm « fer ; » employé substantive-
ment, il signifie mine de fer, et, avec ce sens, il appartient
déjà à la langue de César. Le vainq.ueur des Gaulois constate
]^ur habilité conime ingénieurs militaires , quand il s'agis-
sait de pratiquer dQs galeries souterraines : c'est la consé-
quence de ce qu'il y a , dit-il , chez eux de grandes mines
de fer , magnae f&rrariae (3).
Gravières, nom d'une commune de TArdècbe et de plu-
sieurs hameaux, est une formation aijialogue..
Perribrj^s, commune du Calvados, est un auciç^n ^Petfo-
rias comme La Perrière , commune de la Côte-d'Or , une
ancienne * Petraria. La notation Petraria a été conservée
par un titre de 1173 pour le hameau de La Perrière com-
mune de Poiseul-la-Yille , môme département (4). Il y a
une variante masculine Perrier, commune du Puy-de-Dôme,
Le Perrjer, commune de la Vendée ; inutile de citer les
hameaux. L'adjectif petrarius dérivé de pePra « pierre, »
n'appartient pas à la latinité classique ; elle connaît le dé-
rivé pewosus, en français « pierreux, » quji a été remanié
sous l'influence du substantif « pierre ; » on devrait dire
« perreux ; » le masculin et le féminin de cet adjectif ont
fourni deux noms de commune au département de l'Yonne;
Perreux-les-Bois et Perreuse. La dernière est appelée Pe-
trosay dans un acte de Tannée 1172 (5). Il y a aussi une com-
mune de Perreux dans le département dé la Loire.
(1) Charte de mai, 887. G. Desjardins, Cartulatre de Conques^ p. 99: cf.
décembre 933, In vicaria Ferrariense, t&id., p. 139.
(2) G. Desjardins, Cartul&ire de Conques, p. 460.
(3) De bello gallico, VII, 22, i 2.
(4) Gamier, Nomenclature historique, p. 130, n* 522.
(5) Quantin, Dictionnaire topograph, du déparlement de l'Yonne , p. 97.
NOMS DE LIEU EK -ARIA, -AftlAd, -ARIUS. eOS
S 3. — Noms de lieux en -atia , -arias dérivés de norûs de
végétaux (Cf. -etum-j aretum, p. 616-634).
Nous commencerons par deux exemples (}tli datent 'de
l'empire romain; l'un est Juncaria^ dérivé dô /uncw, jonc;
Tautre Roboraria, dérivé de robur, chône.
JuNGARiA est sous Tempire romain une des stations de
la route d'Italie en Espagne ; elle est située au sud déà Py«
rénées , sur la frontière de là Gaule (1).
En 922 , il y a dans le comté de Tàlleûde (Puy-de-Dôme)
une villa appelée Juncherias (2) ; on aurait dit plus ancien-
nement Jv/ncarias. Comparez Jonchères , commune du dé-
partement de la Drôme, les deux communes de La Jonchère
(Vendée et Haute- Vienne) , etc., Junca/riolas ^ p. 522, Jwf^
caretum^ p, 632.
RoBOBAKiA est une station d'Italie près de Rome (3) ; là
forme française de ce mot serait Rouvrière ; elle est inu-
sitée ; on a préféré en Gaule la variante Roboretum dont il
sera question plus loin, p. 625.
D'après les textes du moyen âge, nous citerons les noms
en -arias suivants qui, comme les deux précédents, dérivent
de noms de végétaux.
ÂLN ARIAS, situé dans le pays de Blois et dans la condita
Cabrinacensis f aujourd'hui Cheverny (Loir-et-Cher); nous
l'apprenons par un diplôme de l'année 841 (4). Alruvrias est
dérivé d'a/nu*, « aune, » et devrait donner un dérivé
(1) IlinéraiiTe d*Anionin, p. 390, I. 3.
(2) Doniol, Cartulaira de Brioude^ p. 294.
(3) i(t)iéraire d*Anlonin, p. 305, 1. 9.
(4) Martene , ThezauruB am,ecdotoruyn , t. I , col. 32. Mabille , La pAncarie
notre, p. 81.
606 LIVRE n. CHAPITRE XVI. { 3.
c< Aunières » ou « les Aunières, » mais nous ne connaissons
pas d'exemple de cette formation ; le français a préféré le
dérivé Alnetum dont il sera question plus loin, p. 616.
Ad Avenarias est le nom d'un locus mentionné vers
Tannée 1100 dans une charte de Tévêché de Grenoble (i).
C'est aujourd'hui Les Avenières , commune importante du
département de Tlsére. Il y a en France quelques hameaux
du même nom (Loire, Mayenne, Haute-Savoie, Yonne).
Inutile de dire que ce nom dérive du latin avena, « avoine, »
d'où l'adjectif avenarius, employé par Pline le naturaliste ,
et qui veut dire « relatif à l'avoine. »
BuxARiAS, du latin buœus^ «buis, » est mentionné en 862
dans un diplôme de Charles le Chauve pour l'abbaye de
Saint-Martin de Tours : c'est aujourd'hui La Bussière,
commune d'Athée (Indre-et-Loire) (2). Ce nom, écrit Bus-
cerias et Busserias dans les chartes de Cluny au neuvième
et au dixième siècle (3), désigne la localité qui est aujour-
d'hui Bussières (Saône-et-Loire) (4). Une charte du dixième
siècle nous offre l'orthographe Bux&rias\ il s'agit d'une
viWa située en Forez ; c'est aujourd'hui Bussières (Loire) (5).
Il y a, de ce nom de lieu, une variante qui prend le sin-
gulier Buxaria à la fin du onzième siècle dans les titres de
la cathédrale de Grenoble (6) ; la formation française cor-
respondante, et qui désigne aujourd'hui la même localité,
est La Buissière (Isère). Cf. Buxetum, p. 617.
Canavarias est, dans une charte mérovingienne, une
localité de l'Orléanais (7) ; dans une charte de Saint-Martin
(1) Cartul&ire de Saint-Hugues de Grenoble, p. 127.
(2) Mabille, La pancarte notre, p. 220; cf. p. 159 et 65.
(3) Bruel, Recueil, t. II. p. 730; t. III, p. 339, 664.
(4) Chavot, Le Maçonnais, p. 85.
(5) Auguste Bernard, Carlulaire de Savigny, t. I. p. 247; t. II, p. 1111.
(6) Cartulaire de Saint-Hugues de Grenoble, p. 121, 187.
(7) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 144.
NOMS DE LIEU EN -ARIA , -ARIAS , - ARIUS. 607
de Tours , à la fin du neuvième siècle , c'est une dépen-
dance de Blévy (Eure-et-Loir) (1). Canavarias tient lieu
d'un plus ancien Ca/nnabarias dérivé de cannabis ou can-
nabm^ « chanvre. » Tout le monde connaît le français Che-
nevières, nom de quatre communes et de treize hameaux.
* Castanearias , du latin castanea , « châtaignier , » est
écrit Casianerias dans une charte de 996 pour l'abbaye
d'Ainay à Lyon; cette localité était située en Lyonnais,
dans le territoire de la villa Marcilliacus, aujourd'hui Mar-
cilly-d'Azergues (Rhône) (2).
* JuNiPBRABiA , du latiu juniperus, « genévrier, » est la
forme antique du nom de lieu écrit Genebreira en 1118,
Genebreria et Genebraria vers Tan 1000 (3), La Genevrière,
commune de Saint-Chamant (Corrèze). Cf. ci-dessous, p. 622.
LiNARiAS est une localité située in pago Adratinse^ c'est-
à-dire en Artois , aux termes d'un diplôme de l'abbaye de
Saint-Denis , qui date de l'année 799 (4). Deux autres loca-
lités de même nom sont mentionnées dans les titres de
l'abbaye de Saint-Martin de Tours, l'une en 862, l'autre
en 905 ; la première est aujourd'hui Linières-Bouton (Maine-
et-Loire) (5), la seconde est Lignières, commune de Veigné
(Indre-et-Loire) (6). Il y avait en Auvergne, au dixième
siècle, une villa Linaria où était situé un bien donné à
l'abbaye de Cluny (7). Vers la même époque il se trouvait
en Forez une villa appelée à l'ablatif Linaris, et dans
laquelle était située une propriété donnée à l'abbaye de
Savigny (8). Tous ces noms de lieu sont dérivés du latin
(1) Habille, La pancarte notra, p. 221 ; cf. p. 180.
(2) Auguste Bernard, C&rlulaire de Savigny^ t. II, p. 641, 845.
(3) Deloche, CariuUire de Beaulieu, p. 69, 137, 144.
(4) Tardif, Monuments historiques, p. 73.
(5) Port, Dictionnaire historique de Maine-et-Loire, t. II, p. 519.
(6) Mabllle, La pancarte notre, p. 227; cf. p. 183, n* 113
(7) Bruel, Recueil des chartes de Cluny, t. I, p. 168.
(8) Auguste Bernard, Cartulaire de Savigny, 1. 1, p. 9.
608 LIVRE II. CHAPITRE XVI. { 3.
linum^ « lin. » La langue latine connait le dérivé linnriusy
dont le masculin désigne Touvrier qui travaille le lin , et
dont le féminin désigne Tendroit où le lin est mis en
œuvre. Le terme géographique Linarias veut dire « terres
qui produisent du lin » ; Lignères , Lignières ou Linières
est un nom de lieu très répandu. Cf. Linariolas, p. 523.
SLâverias pour *Raparias^ du latin râpa ou rapum, « rave, »
est le nom de Ravières, commune de Saint-Martin-la-Sau-
vetè (Loire), dans plusieurs chartes de l'abbaye de Savigny
au dixième et au onzième siècle (1). Ravières (Yonne) est
probablement aussi un ancien *Raparias : dans le testament
de Tabbé Widerad , en 721 , Ribarias est écrit par erreur
pour Rabarias (2).
Ros ARIAS, pour *Rausarias^ vient du germanique rai«,
« roseau , » conservé en gothique , mais devenu , en alle-
mand , rohr. On trouve Rosarias , au onzième siècle , dans
une charte de Tabbaye de Conques (Aveyron) (3) ; il s'agit
de Rosières, commune de Noailhac (Aveyron). En 974, une
charte de Cluny mentionne une villa Hoserias en Châlon-
nais (4). Rosières ou Rozières est un nom de lieu très
fréquent en France. Comparez RausePum, p. 629.
Seoalarias pour * Secalarias^ du latin secale, « seigle, »
est un nom de lieu, en 1001, dans une charte de l'abbaye
de Saint- Victor de Marseille (5); c'était dans le voisinage
de Nans (Var).
Spigarias, dans deux diplômes de l'abbaye de Saint-
(1) Auguste Bernard, Cartulaire de Savigny^ t. I, p. 67, 84» 369.
(2) Voy. Quantin, Dictionnaire topographique de l'Yonne, p. 106.
(3) G. Desjardins, Cartulaire de Conques^ p. 159.
(4) Bruel. Recueil des charte^ de CAuny^ t. II, p. 446.
(5) Quérard, Cart. de Saint-Victor de Marseille^ t. I, p. 97.
NOMS DE LIEU BN -ARIA. -ARIAB, -ARIU8. 609
Martin de Tours, désigne une étendue de terrain aujour-
d'hui comprise dans la ville de Tours (1). C'est un dérivé
du latin spica^ « épis. »
ViOLAioAS, du iatîn viola, « violette, » désigna, en 946,
une localité de la vicciriti ChiriOfCensis ; le chef-lieu de cette
vicairie est Saint-Beauiire (Haute-Loire) (2). La langue latine
possède un adjectif violarius , dont le neutre violarium est
employé par Virgile et Ovide avec valeur de substantif et
veut dire « endroit où viennent des violettes : »
... irriguuiQque bibant violaria fontem (3).
Quelques-uns des noms géographiques eu aritt, aria$
présentent une difficulté : ce sont ceux dans lesquels le
dérivé en -artW désigne en français le végétal môme , et
non le terrain où le végétal étend ses racines : nous cite-
rons le français noyer «b * nucarius, de nuœ , micis. Gom-
ment expliquerons-nous le nom de Noyers (Yonne) ? Sera-ce
par nucarios, accusatif pluriel de n/ucarins, « noyer, » ou
par Nucariasl{i)y « lieux plantés. ^de noyers? » La bonne
explication est , je crois , la seconde , en dépit de Tortho-
graphe , mais l'autre serait possible : ainsi il y a en France
beaucoup de localités appelées Fresne, le Fresne, Fresnes
ou les Fresnes , à côté de Fresniëres =s Fraxinarias et de
Fresnoi ^ FraœwsPam (p. 621). Les noms de lieu Bruyère
et Bruyères , Brocaria (5) , Brogaria (6), Brugaria (7), Bro^
garias (8), peuveat donner lieu à la même difficulté.
(1) Habille, La pancarte noires p. 235; cf. 151, 159.
(2) Doniol, C&rtulaire de Brioude, p. 288. Hoozé, chez Ooniol, Cartulairé
de SatucilUngêê, p. 689.
(3) GéorgiquêBy 1. IV, ▼. 32. i
(4) Cf. Nogariolaa, p. 523; Ifuea^retumf p. 888»
(5) 670-671, chez Tardif, Monuments historiqueê^, p. 15, col. 2.
(6) 797, chez Tardif, ibid., p. 72, col. 2.
(7) }ÇI* siècle, O. Deajardins, <CarluIaire de Conquesy p. 296.
(8) 768, Tardif, Monuments historiqueSy p. 52, col. 1.
39
610 LIVRE IL CHAPITRE XVI. { 4.
§ 4. — Noms en -aria, -arias, -arius, dérivés de noms
d'animaux.
Appiaria, qu'il faut corriger Àpiaria, est le nom d'une
station romaine de Mésie (1) ; Apiaria veut dire « endroit
où il y a des abeilles , » apes , et n'a aucun rapport
avec le gentilice Âppius, étudié p. 94. En France, au
neuvième siècle, Apiarias, dans le Polyptique de Saint-
Germain des PréSj désigne Achères, commune de Theuvy-
Achéres (Eure-et-Loir) (2). Un autre Apiarias était situé
près d'Avignon en 1010 (3). Les localités nommées Achè-
res (Cher, Seine-et-Marne, Seine-et-Oise), doivent être
d'anciennes Apiarias, Cf. Apiariolas^ p. 522.
AsiNABiAS, d*asinus, c< ftne, » est devenu en français
« Asnières. » On voit un lieu dit Asinarias en 814, dans
la liste des colons de l'abbaye de Saint- Victor de Mar-
seille (4). Asinerias se trouve, en 1011, dans une charte de
Saint-Julien de Brioude (Haute-Loire) (5); Asnerias, dans
une charte des environs de l'an 1000 , désigne une villa
du Lyonnais (6) ; c'est une localité du Maçonnais dans une
charte qui se place en 1017 et 1025 (7). Asnières est un
nom de lieu très répandu en France : des communes de
ce nom se trouvent dans les départements de l'Ain, du
Calvados, de la Charente, de la Charente-Inférieure, de
la Côte-d'Or, de l'Eure, de la Sarthe, de la Seine, de
Seine-et-Oise, de la Vienne et de l'Yonne.
Caponarias , dérivé de capo , « chapon , » est la forme
(1) ItinirAire d'Antonin, p. 222, 1. 5.
(2) Longnon, Polyptyque de S&ini^GermtLin des Préê, p. 126.
(3) Guérard, Cartulaire de SatnN Victor de Marêeille, L I, p. 215.
(4) Guérard, ibid., t. II, p. 638.
(5) Doniol, Cartulaire de Brioude^ p. 110.
(6) Bniel, Recueil deê chartes de Cluny, t. III, p. 536.
(7) Bruel, ibid., p. 736.
J
NOMS DE LIEU EN -ARIA, -ARIA8, -ARIUS. 611
ancienne du nom de la villa appelée au onzième siècle
Caponerias (l) , et Capponerias (2). La Chaponnière est le
nom de quatre hameaux (Cher , Eure-et-Loir , Isère , Loi-
ret). La bonne orthographe Çaponarias a été conservée par
une charte du neuvième siècle (3).
Cervaria est, vers Tan 1000, le nom de Servières, com-
mune de Joursac (Cantal) (4). Il y a en France deux com-
munes de Servières (Corrèze et Lozère), plus huit hameaux
de môme nom : Ardèche , Cantal , Corrèze, Creuse, Haute-
Loire, Puy-de-Dôme. Une orthographe plus régulière Cer-
vières, est observée pour les noms de deux communes
(Hautes-Âlpes (5) et Loire); comparez le français cerf, du
latin cervus.
*Colubraria, du latin coluber^ « couleuvre, » est la nota-
tion ancienne du nom de la localité appelée au onzième siècle
de Colobreria (6) , Colubreriae (7) , de Colobraria (8) ; il s'agit
de CoUobrières (Var) ; c'est un chef-lieu de canton ; un au-
tre Collobrières , dans la Lozère , est un simple hameau.
Columbarius, « pigeonnier, de columbay est par exception
masculin; il ace genre dans la bonne latinité; il le conserve
ordinairement au moyen âge. Ainsi Columba/rius^ vers 1035,
est le nom dé CoUemiers (Yonne) (9). M. Deloche a eu rai-
son d'écrire Columbarius au nominatif le nom de Colom*
(1) Anguste Bernard, CartuUire de Savigny , t. I , p. S61 , n* 700 ; p. 683,
n* 177.
(2) Ang. Bernard, ibid., U I, p. 423, n* 806.
(^ Chevalier, Cartul&ire de Saint-André le fias, p. 217.
(4) G. Desjardins, Cartulaire de Conques, p. 274, 451, 504.
(5) Le nom de Gerviéres (Hantes-Alpes) parait avoir été originairement au
singulier Cervaria, Cerberia. Roman, Dictionnaire topographique des Hau-
tes-Alpes, p. 26.
(6) Ouérard, Cartulaire de Saint-Victor de Marsaille^ t. I, p. 470.
07) Gnérard, tbtd., p. 475.
(8) Guérard, ibid., p. 481.
(9) Qnantin, Cartulaire de VYonne, t. I, p. 41. Dans un diplôme do 853,
ibid», p. 65, Columbarium est à l'accusatif.
612 LIVRE II. CHAPITRE ZYL t 4.
hier, commune de Tureane (Corrèse), bien que dans les
textes publiés par lui ce nom n'apparaisse jamais qu*à Ta-
bla tif Columbario (1). Colombey (Meurthe-et-Moselle), ca-
pella in Colombario en 836, ecclesia in Colombario en
870 (2), s'explique de la môme façon. Dès le dixième siècle
Va du sufi&xe devient e dans ce mot , comme l'atteste , en
926, le Columberitwi castrum d'une charte de Saint-Martin
de Tours; il s'agit de Colombiers (Vienne) (3).
*Leporaria, de lepus, leporis, «lièvre, » est écrit Leperaria^
en 814, dans la liste des colons de l'abbaye de Saînt-Vic-
tor de Marseille (4).
LuPARiAS, de lupusj « loup, » est écrit Luperias au milieu
du onzième siècle dans une charte de l'abbaye de Saint-Vic-
tor de Marseille (5) ; il s'agit , semble-t-il, d'une localité si-
tuée près de Tarascon (Bouches-du-Rhône). Mais pour le
nom de Puyloubier (Bouches-du-Rhône), Podium luparium
Va persiste quelquefois assez tard : Podium luparium
en 1040 (6), de Podio lupario 1044 (7), à côté de Poddo lu-
perio 1046 (8).
PoRCARiAs, de porcus ^ porc, est mentioïinè dans un di-
plôme de Charlemagne pour l'abbaye de Saint-Benoit
d'Aniane (Hérautl) ; c'est aujourd'hui Porquières (Hérault ,
emplacement d'un hameau détruit (9).
SoRiCARiAS, dérivé de sorex^ soricis^ « souris, » est le nom
(1) 893, CartuL de Beaulieu, p. 194, 928> ibid,, p. 80; vers 97 1, ibid^ p. 9S.
(2) Lepage, Dictionnaire topographique de la Meurthe, p. 34.
(3) Mabille, La pancarte notre de Saint-Martin de Tourê, p. 223; cf. R«-
det, Dictionnaire topographique de la Vienne^, p. 130.
(4) Guérard, Cartulaire de Saint-Victor de Marseille^ t. II, p. 641.
(5) Vt^a Luperias; Quérard, ibid,, 1. 1, p. 211.
(6) Guérard, ibid., t. I, p. 22.
(7) Guérard, ibid,, p. 47.
(8) Guérard, ibid., p. 144.
(9) Eugène Thomas, Dictionnaire topographique de Vliéraultf p. 149; et
Teulet, Layettes du trésor des chartes^ U I, p. 5, cqL 1.
NOMS DE LIEU EN -AR! A , -ARIAS , -ARIU8. 013
d'une villa située au comté d'Apt (Vaucluse), comme nous
l'apprend une charte du douzième siècle émanée de Maiol,
abbé de Cluny (1). Un hameau du département de la Sar-
the s'appelle aujourd'hui les Souricières.
* VuLPECULAHiAs de vulpecula, diminutif de vulpes, « re-
nard, » est noté Vulpeglarias, en 814, dans la liste des colons
de r^baye de Saint- Victor de Marseille (2); on trouve Vulpi-
làrias au milieu du onzième siècle dans une charte de l'ab-
baye de Conques (Aveyron) (3) ; ce nom est devenu, dans le
nord de la France, Goupillières , nom de quatre commu-
nes (Calvados, Eure, Seine-et-Oise, Seine-Inférieure), et de
plusieurs hameaux. La variante Volpilière est le nom de
deux hameaux (Lozère , Puy-r^e-Dôme).
S 5. — Noms en -aria, -arias, dérivés de noms d^ hommes.
Au moyen âge Tusage commença de former des nqms
de lieu en -arius en les dérivant de noms d'homme. Cet
usage a persisté dans la période moderne. Ce genre de for-
mation se rencontre quelquefois dans l'est de la France.
Ainsi, dans le département de l'Aube: AUibaudières, en 1131
LibatMierie(i),e^{ un ancien *Leudobaldarias^ dérivé du nom
d'homme franc Leudo-baldus ; La Guillotiére, qui apparaît au
seizième siècle, est un dérivé moderne du nom d'homme
Guillot. Balderias, dans le pays d'Avallon (Yonne), à la fin
de la période mérovingienne (5), pourrait sembler dérivé
d'un nom d'homme Baldus. Mais Balderias = Baldo-charias
(1) Bruel, Recueil des chartes de Cluny, t. II, p. 165. La leçon Soricorias,
admise dans le texte, paraît moins bonne que la leçon Soricarias rejotée
en note.
(2) Guérard, Cartul&ire de iabbaye de Saint-Victor de Marseille, t. II,
p. 653.
(3) Gustave Desjardins, Carlulaire de Conques, p. 222.
(4) Botttiot et Socard, Dictionnaire lopographique du département de
l'Aube, p. 2.
(5) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 400. Quantin, Carlulaire de l'Yonne^
t. II, p. 2.
614 LIVRE II. CHAPITRE XVI. | 5.
[villas] et veut dire villae de Baldo-charius. Le procède de
dérivation , qui consiste à faire du sufiBxe -aria , -arias la
désinence d'un nom propre d'homme, est surtout répandu
dans l'ouest de la France, comme on peut s'en assurer
en consultant les répertoires topographiques des départe-
ments d'Eure-et-Loir , de l'Eure , de la Mayenne et du
Calvados. Ces formations sont généralement modernes ;
il serait intéressant de chercher à déterminer la date où
elles ont commencé. Â en juger par les Ges$a pantiftcum
Cenomannensium (1) et par les Gesta domni Àldrici (2), do-
cuments qui contiennent un grand nombre de noms de
lieu et qui remontent au neuvième siècle, il n'y aurait pas
eu dans le Maine à cette époque des noms de lieu en -aria,
•arias dérivés de noms d'homme.
(1) Mabillon, Vetera analecta, in-8*, t. III, p. 50-274. Canvin, Géographie
ancienne du diocèse du Mans, dans le volume intitulé Institut des provin-
ces de France, Mémoires, 2* série, 1. 1, p. i-lii.
(2) Baluze, Miscellanea, t. III, p. 1-178. Migne, Patrologia latine, t. CXV,
col. 29-103. Une nouvelle édition pourvue d'un index a été publiée en 1^9
à Mamers, chez Q. Fleury et A. Dangin, par MM. R. Charles et L. Froger.
CHAPITRE XVII.
i^ suffixe latin -btum dans les noms dk lieu i
l'antiquité et au moyen AOE.
I l. Oénéralités. — î 2. Noms eoinmuDS en -ttum dérivés de nomi
végétaux et qui ont éto emplojrés comme nom propres do liei
Dérivés en -efum de noms de végétaux qui ne sont p«s latins. ■
rivés en -eltim de noms commuas qui ne désignent pas des vé|
I i. Dérivés en -arelum.
S 1" Généralités,
Le suESxe -etum sert en latia classique à fon
noms commuas de lieux. Ces noms sont en ré^le f
dérivés de noms de végétaux. Ces végétaux peuv
de grande taille, quercetum, chez Varron et chez
de quercus, « chêne pédoncule; » castanetum, chc
melle , de castanea, « châtaignier; » ils peuvent
toute petite dimension : juncetum, chez Varron , di
H jonc. »
Dans les auteurs que nous citons, quercetwn, cosl
juncetum sont non pas des noms propres, mais d(
communs; ils désignent tout endroit peuplé de ch(
donculés, de châtaigniers, de joncs. Mais, dès le teir
république romaine et de l'empire romain on a coi
à employer comme noms propres les noms comn
■etum : Lauretum, de laurus, « laurier, » est un qui
616 LIVRE II. CHAPITRE XVH. | 2.
Rome chez Varron et chez Pline rancien ; Pinetum de pi-
nus ^ « pin, » Roboretum de robur^ roboris a chêne rouvre, »
sont plus tard des stations romaines d'Espagne (1).
Voici quelques exemples de noms propres géographiques
en -etum dans les textes du moyen &ge.
Nous les répartirons en quatre sections ; la première
sera consacrée aux dérivés de mots latins, la seconde aux
dérivés plus récents formés avec des noms de végétaux qui
ne sont pas latins, la troisième aux dérivés qui ne viennent
pas de noms de végétaux, la quatrième aux noms de lieux
formés avec le sufi&xe composé aretum , où sont réunis les
deux éléments -arius et -etum. Ces quatre sections forme-
ront les paragraphes 2-5 du présent chapitre.
S 2. — Noms communs en *etum dérivés de noms latins de
végétaux et qui ont été employés en France comme nams
propres de lieu.
Albugetum du latin albucum (2), « asphodèle » (sorte
de lys), est en 1060 le nom d'une localité voisine de Bioms
(Drôme) (3).
* Alnetum du latin ÀlnuSy « aune, » est écrit Àlnido dans
deux diplômes carlovingiens, en 832 (4) et en 862 (5) ; Alni-
dum dans le Polyptyque de Saint-Germain des Prés (6) , Aine-
dum en 1004 dans un diplôme du roi Robert (7), etc. Dans
ces documents il s'agit d'Aunay-sous-Auneau (Eure-et-Loir);
d'Aunay-sous-Crécy, même département, enfin d'un autre
Aunay ou Aulnay , situé soit dans le département de la Seine
soit en Seine-et-Oise. Cf. Alna^ias^ p. 605.
(1) Itinéraire d'Antonin, p. 422, 1. 7, 8.
(2) Pline,SHi8(oire naturelle, 1. XXI, | 109; 1. XXVI, { 21.
(3) Guérard, Cartulaire de Saint-Victor de Marseille^ t. II, p. 73.
(4) Tardif, Monuments historiques, p. 85, col. 1.
(5) Tardif, i6id., p. 117, col. 2.
(6) Edition Longnon, p. 98; cf. p. 114.
(7) Guérard, Cartulaire de N.-D. de Paris, t. I, p.|94.
NOMS DE LIEU EN -ETUM. 617
Alnetum, nom de liou très répandu, a donné en France
deux formes : l'une est Aulnay, Aunay , Aunai , Launay
avec un è final = é[tum] dans la dernière syllabe ; l'autre
Aulnois, Aulnoy, Aunois, Launois , Launoy, avec oi final
=s é[tum] ; la première forme est spéciale aux environs de
Paris et à la région du nord-ouest, la seconde à la région
du nord-est. Plus au sud on a préféré au mot aune, tiré du
latin, le mot verne qui est d'origine gauloise ; de là Vemet
dans la région provençale, ailleurs Vernay, Vemois, p. 630.
* Betulletuu (1} vient de betulla, « bouleau, " mot d'ori-
gine gauloise mais adopté par la langue latine comme
Pline l'atteste [2). Betulletum est écrit : Bedolitum dans une
charte de l'abbaye de Saint-Denis en 832 (3), Bidolidum
dans le Polyptyque de Saint-Germain des Prés (4); on écrit
aujourd'hui Boulaie , Boulay, Boulaye , Boulois , Bouloy.
C'est un nom de lieu très commun.
BuxETUM est un mot dont on trouve des exemples comme
nom commun dans la bonne latinité (5) ; il vient de btums,
« buis; » il est écrit fîtwsïfo en 691, dans un diplôme du
roi Clovis 111 (6) où il s'agit de Boissy-l'Aillerie [Seine-et-
Oise). Dans un acte de l'année 811 on trouve la notation
Binnidus (7) qui est reproduite dans un acte de 847 (8),
dans ces deux documents il est question de Boissy-Saint-
Léger(Seine-et-Oise). Buxido à l'ablatif dans le Polyptyque
de Saint-Germain des Prés parait désigner Boissy-Maugis
(1) Ce nom a coosorvé son double I dans un ac
Ouest en 1019 : Cum liluia BedoHetum (Hfdoriae pt
col. 429 a).
(2) HiXoire nalureJle, l. XVI, JJ 74, 176, S09.
(3) Tardif, Monumenta hittoriques, p. 85, col. %.
(4) Edition LoQgnoD, p. 100.
(5) Martial, II, 14, 15; III, S7 (58), 2.
(6) Tardif, lionumtntê hittoriquet, p. 23, col. t.
(7) Tardif, ibid., p. 74, col. î.
(B) Tardif, ibUI., p. 101, col. 1.
SIS LITRB n. CHAPITRB XVn. | 3.
(Orne) (1). En 946, Bi^idtts, dans une charte d'Hugues
l'abbé, duc de France, est Bucy-Saint-Liphard (LoîreC (2 .
Villa BuŒiti en Lyonnais, suivant une charte de 960 (3!,
reste indéterminé, comme villa Buxida en M&connais, dans
une charte de 987-988 (4). La notation Busitt avec i et den-
tale sourde se rencontre trois fois, au onzième siècle, dans
le Cartulaire de Landévennec (5 ; elle y désigne des localités
situées en pays breton, dans le département du Finistère :
une dans la commune de Briec , une autre dans celle de
Pleyben, la troisième dans une situation indéterminée.
Busitt est un nom latin qui, au onzième siècle, survivait
' encore à la conquête bretonne.
L'a long primitif de Buxetum persiste et ne 36 change
pas en t, eu 814, dans l'état des colons de Saint Victor de
Marseille, oii est mentionnée une cohnica in Buxeto (6), et
dans une charte de 1039 où il est question d'un château
appelé Boxeium {!) , c'est le Boisset , commune de Saint-
Martin de Castillon (Vaucluse) (8). Le même phénomène
se produit dans un diplôme de Charles le Chauve en 861 ,
où Buxedus est Pont-de-Bossay (Indre-et-Loire) (9). Od
3 villa Buxedo à l'ablatif, dans une charte de
s l'an 1000 {10}. En 1046, Buœeti Castrum est
eux (Loire) (11). Une charte de l'année 949 nous
i la forme méridionale moderne Bois[s]et, c'est
'une villa située au comté de Brioude (Haule-
On écrit aujourd'hui Boisset, c'est un nom de
1, dans son édition de ce document, p. 164, \lb.
Cartulaire de N.-D. de Chartres, t. I, p. 75; t. Il, p. 213.
rnard, Cartulaire lie Savigny, t. I, p. 215.
tecueti de$ clisrles de Cluny, t. III, p. 15.
nU inédits. Mélanges, t. V, p. 556, 566, 569.
, Cartulaire de Sainl-Viclor de Marseille, t, II, p. ti46, n- 61.
, ibid., t. I, p. 445.
I, ibid., t. II, p. 849.
La pancarte noire de Saint-htarlin de Tourt. p. ÎM; cf. p. 159.
Recueil des chartes de Cluny, t. III, p. 341.
emard, Carfulaire de Savigny, t. I, p. 378; t. II, p. 1111.
Csriulaire de Brioude, p. 103.
NOMS DE LIEU EN -ETUM. 619
lieu fréquent dans le midi de la France. On le trouve dans
le Gard (1), dans THérault (2), le Cantal, la Loire, etc.; on
peut en rapprocher la notation Boissey (Ain, Calvados,
Eure) ; quant à Boissy par y final, c'est le nom de huit com-
munes du département de Seine-et-Oise ; on le rencon-
tre aussi dans la Seine-et-Marne, la Marne, TOise, l'Eure,
r Eure-et-Loir, l'Orne, le Loiret. Cf. Buxarias^ p. 606.
Castanetum, qu'on trouve déjà comme nom commun
chez Columelle, c'est-à-dire au premier siècle de notre
ère (3), vient du latin castanea, « châtaigne » et « châtai-
gnier. » Castanetum est la forme classique du nom de la
villa Castanito près d'Etampes, mentionnée dans un docu-
ment mérovingien vers la fin du septième siècle (4). Gé-
néralement, dans ce mot, Ve du suffixe est conservé dans
les documents latins. Dans les titres de la cathédrale de
Paris, Castanedum en 795 (5), en 829 (6), en 850 (7), en
982 (8) , Castenedum en 984 (9) , est aujourd'hui Châtenay
(Seine-et-Oise). Chastenay (Yonne) est appelé à l'ablatif
Castaneto dans quatre documents du neuvième siècle (10).
Castanedo à l'ablatif, Castanedum à l'accusatif, sont au
dixième siècle le nom de Châtenay, commune de Sancé
(Saône-et-Loire) (11). La forme provençale moderne de ce
nom de lieu est Castanet (Aveyron , Haute-Garonne , Hé-
(1) Oerxner-Durand, DicU top, du Gard, p. 29.
(2) E. Thomas, Dict. topogr. de l'Hérault, p. 21.
(3) Un exemple de ce mot comme non propre de lieu habité en Italie nous
est fourni, en 1159, par un titre de l'archevêché de Turin : Ciirlem de Cas-
teneto {Histori&e patriae monumenta, t. I, col. 816 d).
(4) Tardif, Monuments historiques, p. 21.
(5) Guérard, Cartulaire de Notre-Dame de Parts, t. I, p. 240.
(6) Quérard, ibid., p. 322.
(7) Quérard, ibid., p. 251.
(8) Quérard, ibid,, p. 275.
(9) Quérard, tbid., p. 221.
(10) 1% 2* 864 (Quantin, Cartulaire de l'Yonne, 1. 1, p. 88, 92) ; 3- 884 {ibid.
p. 110); 4* 886 (ibid., p. 116).
(11) Bruel, Recueil des chartes de Cluny, t. II, p. 25 ; Ragut, Cartulaire de
Saint'Vincent de Mâcon, p. 7, 32, 120; cf. Chavot, Le Méconnais, p. 103.
«M) LIVRE II. OHAPITRB XVH. 1 2.
rault, Tarn, Tarn-et-Garonne) , etc. Dans la région inter-
médiaire, Charente, Cliarente-Inférieure , Creuse, Dordo-
gne , etc. , on trouve Châtenet, Chastenay ; dans le nord :
1** Châtenay, Chastenay avec «y final = é[tum]{8eine, Seine-
et-Oise, Eure-et-Loir, Seine-et-Marne, Haute-Marne, Yonne,
Saône-et-Loire , Ain, Isère); 2® Châtenois (Jura, Haute-
Saône, Vosges), ou Châlenoy (Loiret, Seine-et-Marne,
Saône-et-Loire), avec la désinence oi = é[tum],
*Cbpetum, du latin cepa^ « oignon, » est noté Ceped, au
onzième siècle , dans une charte de Tabbaye de Conques
(Aveyron) (1) ; c'est aujourd'hui Cépet (Haute-Garonne) (2).
Cepidum , à l'ablatif Cepido , est , au dixième siècle , un
hameau près de Chartres (Eure-et-Loir) (3). Aujourd'hui,
dans le nord de la France, Cepoix (Loiret) et Chepoix (Oiseï,
sont probablement d'anciens Cepetum. Spay (Sarthe), Spoy
(Aube), Spoy (Côte-d'Or), ont la môme origine. Le dernier
est le Cypetum de la Chronique de Bèze (4).
CoRYLETUM, mot employé comme nom commun par
Ovide (5), dérive du latin œryluSy « coudrier, d Coryleêum
est devenu par métathèse de IV dans le Polyplygtui de
Saint-Germain des Prés, Colridum : c'est le nom de Goudray-
sur-Seine (Seine-et-Oise) (6), et du Coudray, commune de
Senantes (Eure-et-Loir) (7). Le Coudray est un nom de
commune et de hameau très répandu en France ; on trouve
aussi le féminin La Coudraie.
*Fagetum, du latin fagus^ « hôtre, » est noté à l'ablatif
Fagito dans la liste des colons de l'abbaye de Saint-Victor
(1) G. Desjardins, Cartulaire de Conques^ p. 62-63.
(2) G. Oosjardins, tbid., p. cv.
(3) L. Merlet, Cartulairs de Notre-Dame de Chartres, t. I, p. 80.
(4) Garnier, Nomenclature historique, p. 37, n* 163; cf. ci-deesus, p. 406-4Cr7.
(5) Ovide, Fastes, II, 587.
(6) Longnon, Polyptyqv>e de Saint-Germain des Prés^ p. 256.
(7) Lox^non, iM4., p. ti6^
NOMS DE LIEU EN -BTUM. 621
de Marseille en 814 (1); dans le même siècle, une charte
de Brioude (Haute-Loire) constate la donation d'un bien
situé dans une villa dite Mediano Pagido (2). Fagetum est
devenu, dans le nord et le centre de la France, Fay, noto
de lieu très répandu ; dans le midi, Faget (Haute-Garonne,
Gers), etc.
*Praxinetum, du latin praùnnus^ « frêne, » est noté
Fraœnido, au neuvième siècle, dans deux chartes de l'abbayé
de Saint-Denis (3) ; il s'agit de Fresnay-l'Evôque (Eure-et-
Loir). Au douzième siècle , dans les titres de Notre-Dame
de Chartres, apparaît l'orthographe savante Fraxinetum (4).
Les chartes de Brioude nous offrent Fragsineto en 893 (5),
Froa^enePurri au onzième siècle (6) ; les chartes de Cluny,
Frcktenêdum aii dixième siècle (7) , Frasnedo en l'an 1000 (8) ;
les chartes de Saint- Victor de Marseille à la fin du dixième
siècle , dans le courant du onzième : de Fraœeneto (9) , in
Fraweneto (10), terra... Fraxeneium (11). Dans le nord de la
France, ce nom de lieu , très commun , s'écrit aujourd'hui
Frenay, Freney, Fresnay, Fresney; il y a une variante
Ffesnois, Fi'esnoy. Dans le midi on a Fraissinet, Frayssinet,
Freycenet, Preyssenet.
*Gentianetum, du latin gentianaj « gentiane, » est écrit
Gentianedo dans une charte de l'année 971. C'est le nom
(1) Gnérard, Cart. de SAint-yicior de HarseiHe, t. II, p. 641, a* 22.
(2) Douiol, Cartul&ire de Brioude^ p. 245.
(3) L^une de 832, Tardif, Monuments historiques, p. 85» col. 1; Tantre de
862, iMd.^ p. 117» col. 2.
(4) L. Merlet, Cart. de N.-D, de Chartres, t. I, p. 123, 170.
(5) Doniol, Cartulaire de Brioude, p. 218.
(6) Doniol, ioid., p. 337.
(7) Bruel, Recueil des chartes de Cluny, t. I, p. 561.
(8) Bruel, ibid., t. III, p. 579.
(9) Guérard, Cart. de Saint-Vicior de MarséiUs , t. I, p. 104 (993?) ; t. I
p. 24 (1008).
(10) Guérard, ibid,, t. I, p. 579 (1069).
(11) GTicrard, ibid., t. I, p. 581 (1058).
1
622 LIVRE II. CHAPITRE XVII. { 2.
d'une villa située dans la vicairie de Rageade (CantaJ) (l'i.
* Genistetum , dérivé du latin genista , « genêt , >^ est à
Tablatif Ginestedo dans l'état de colons de Tabbaye Saint-
Victor de Marseille en 814 (2) ; Genestedo en 917, dans une
charte de Tabbaye de Beaulieu (3), où il est question d'une
localité située près de RouflQac (Cantal) (4). Génetay (Eure,
Sarthe, Seine-Inférieure), est une prononciation française
du latin Genistetum,
* JuNiPERETUM, Au l3.iin juniperus, « genévrier» (cf.p.607\
est noté, au féminin. Genevreta, vers la fin du dixième siècle,
dans une charte de l'abbaye lyonnaise d'Ainay (5). Telle
est l'origine du nom des deux communes de La Genevraie
(Orne) , de La Genevraye (Seine-et-Marne). Le genre pri-
mitif persiste dans le nom de villa écrit à l'ablatif Genebreto
en 984, par un notaire de Tarchevéque de Vienne (Isère) !6;.
A comparer le nom de la commune de Genevray (Haute-
Saône). Le nom de quelques hameaux a la même origine.
Lauretum, mot employé déjà par Varron, au P' siècle
avant notre ère (7), dérive du latin laurus, « laurier. » On
rencontre deux fois ce nom de lieu au dixième siècle dans
les chartes de l'abbaye Saint-Victor de Marseille (8) ; il s'agit
d'une localité située près de Marseille. Une villa de Laureto,
dont on a une mention en 1115, est aujourd'hui Laurel,
commune de Sauteyrac-Lauret-et-Aleyrac (Hérault) (9). 11
y a une commune de Lauret dans les Landes, des hameaux
(1) Doniol, Càrtul&ire de Brtoude, p. 196; cf. Longnon, AtZas historique^
p. 195.
(2) Guérard, CartuL de Saint-Victor de MarseUUt t. II, p. 651.
(3) Deloche, Cartulaire de Beaulieu^ p. 223.
(4) Deioche, ibid., p. CLXix, 382.
\b) Aug. Beruard, Cartulaire de Savigny, t. Il, p. 581.
(6) Abbé Chevalier, Cartulaire de Saint-André-le-Bas, p. 247.
(7) De linyua latina, IV, 32.
(8) Quérard, Cartulaire de Saint-Victor de \f:\rsiùl1p, t. I. \i ô?, f'A).
(9) A. Thomas, Dict. top, de l'Hérault, p. 90.
NOMS DE LIEU EN -ETUM. 623
de Lauret dans le Gers et la Gironde; leur nom est le
même que celui du Lauretum situé à Rome sur le mont
Aventin.
Un fundo Laurito , avec i = é^ est mentionné dans une
charte de Ravenne, contemporaine de Tarchevôque Ser-
gius, 748-769 (1). Mais Ve est conservé, en 1169, dans un
titre de la cathédrale d'Asti, où ce mot est écrit Laureto (2),
et dans d'autres documents piémontais du onzième et du
douzième siècle où on trouve la notation Loreto (3).
NucETUM, mot déjà employé comme nom commun par
Stace au premier siècle de notre ère, et, après lui, par
TertuUien , dérive du latin ntw?, nucis^ a noix, noyer. »
Nttcetum devient Nocito, à la fin du septième siècle, dans
deux diplômes mérovingiens (4); il s'agit de Noisy-sur-
Oise (Seine et-Oise). Noisy-le-Sec (Seine), apparaît au neu-
vième siècle sous le nom de Nucitum (5). L'^ persiste dans
la notation Nocetus en 811 (6), mais la langue usuelle a
changé le suffixe, Nocetus est devenu Noiseau = NucellxAS-^
c'est une commune du département de Seine-et-Oise. Il y a
aujourd'hui, dans Seine-et-Oise, trois communes de Noisy;
on en trouve deux dans Seine-et-Marne. Cf. Nogariolas^
p. 523; Nucarias^ p. 609; Nucaretum^ p. 633.
Olivetum , déjà employé comme nom commun par Ci-
céron , dérive du latin oliva , « olive » et « olivier. »
On trouve ce mot désignant un lieu dit dans la liste des
(1) Fantnzzi, Monumenti Ravennati, p. 15.
(^) Hiatoriae pairiae monumenta, t. I, col. 855 a.
(3) Ibid., t. I, col. 400 6, 825 6, 914 b.
(4) 1* Villa NocitOy en 692, chez Tardif, Monuments historiques, p. 25,
col. 2 : trois exemples ; ~ 2* Nocito, en 697, ibid., p. 31, col. 2; — 3* Dans
le proiiiier de ces deux diplômes : Villa Nocita une fois.
(5) 1* En 832 , Tardif, Monuments historiques , p. 85, col. 2; 2* en 862,
iWd., p. 119, col. 2.
(6) Tardif, Monuments historiques, p. 74, col. 2 ; cf. Guérard , CartuUire
de N.-D. de Paris, U I, p. 290.
eu LIVRE IL CHAPITRE XVIL | %
colons de l'abbaye de Saint-Victor de Marseille en 814 fl).
PiNETUM est employé par Ovide comme nom commim
avec le sens de « bois de pins. » Pinetum, en latin, est
aussi un nom propre ; il désigne , nous Tavons déjà vu ,
une station romaine d'Espagne (2). Dans une charte de
Cluny, en 909 , il est question d'une villa Pineta située au
comté d'Aix (Bouches-du-Rhône) (3; ; c'est peut-être la
Pinède, commune d'Istres, arrondissement d'Aix. Une
Pinetus villa apparaît au même siècle dans deux chartes
de Savigny, c'est Pinay (Loire) (4). En 1081, un castrum
PinePum est Pinet , commune d'Eyzin (Isère) (5). Au qua-
torzième siècle, la Pineda est le nom de La Pénide, com-
mune de Saint-Just (Haute-Loire) (6).
PoMETUM, dérivé de pomus, a pommier, » est employé
comme nom commun par Palladius, au cinquième siècle.
Dans une charte de Cluny , en 984 , Pomedo à Tablatif dé-
signe une villa du pays d'Autun (7) ; c'est peut-être le Po-
moy, commune de Roussillon (Saône-et-Loire). Il y a un
autre Pomoy dans la Haute-Saône. Plus au midi, on trouve
Pomet ; par exemple , dans les Hautes-Alpes , c'est la no-
tation moderne du nom de la localité où était située , vers
1100, l'église de Pometo (8). Cf. Pomaretum, p. 633.
*Prunetum, de prunus y « prunier, » est noté Pruniéum
au huitième siècle, dans un document où ce mot désigne
Prény (Meurthe-et-Moselle) (9). Cette notation, qui remplace
(1) Guérard, Cartulaire de SB-ini-Victor de tfarseiZla^ t. II, p. 634.
(2) ItinéraLire d'Anionin, p. 422.
(3) Bruol. Recueil des charlee de Cluny, L I, p. 117.
(4) Aug. Beraard, Cartulaire de Savigny, t. I, p. 32, 233; t. II, p. 1136.
(5) Abbé Chevalior, Cartulaire de l'abbaye Saint-André^le^Bag, p. 197.
(6) Ghassaing, Spicilegium Brivatense, p. 328, 708.
(7) Bruel, Recueil des chartes de Cluny, t. II, p. 696.
(8) Roman, Dict. topog. des Hautes-Alpes, p. 115.
(9) Pardessus, Diplomata, t. II, p. 399; Lepage, Dictionnaire topoar. ée
U MeurUie, p. 113.
NOMS DE LIEU EN -ETUM. &b
par » Ve du suffixe , se trouve aussi dans k Chronique de
Saint-Bénigne de Difûn (1) ; lÀ Prumà/wn représente Prenois
(Côte-d*Or). Ve persiste dans la notation PruneUim d'une
charte d'Alcuin, pour Tabbaye de Cormery ; il s'agit proba-
blement de Prunay-Belle ville (Aube) (2). Il y a en France
huit communes de Prunay (Aube, Eure-et-Loir, Loir-et-
Cher, Marne, Seine-et-^Oise) ; une commune de Prunoy
(Yonne). Dans le midi, le t se maintient; il y a quatre
communes de Prunet (Ardèche, Cantal, Haute-Garonne,
Pyrénées-Orientales) .
RoBORETUK, de robar^ « chdoe rouvre, » est déjà un nom
propre de lieu dans V Itinéraire d'AnUmin. Dans un diplôme
mérovingien de Tannée 717, ce nom est écrit Roverito à
l'accusatif; il désigne une forêt située près de Paris (3). En
832 et en 862, Ruberido est compris dans la liste des ifillae
qui appartiennent à l'abbaye de Saint-Denis (4). Rubridum^
avec chute de la voyelle médiale , se trouve ailleurs (5).
Dans ces exemples, Vê primitif du suffixe est noté i; il
persiste dans les suivants : Rovereto^ Roveredo^ en 814, est
l'orthographe que nous offre la liste des colons de Saint-
Victor de Marseille (6) ; Rouvray (Yonne) est appelé, à l'abla-
tif, Roboreto dans deux diplômes carloviugiens, 884, 886 (7) ;
dans le Cartulaire de Brioude (Haute-Loire) , en 943 , il est
question d'une villam quae dicitur Rovereto (8). La forme
moderne est : 1® Rouvray, nom de deux communes du dé-
partement d'Eure-et-Loir, et de cinq autres dans les dé-
partements de la Côte-d'Or, de l'Eure, du Loiret, de la
Seine-Inférieure et de l'Yonne ; V il y a huit communes
(1) Edition Qamier» p. 29.
(2) Habille, La pancarte notre, p. 231 ; cf. p. 1^.
(3) Tardif» Monumentê historiques, p. 42, col. 1.
(4) Tardif, t6id., p. 85, col. 1 ; p. 117, col. 2.
(5) Pardessus, Diptomata, t. II, p. 35.
(6) Quérard, Cartulaire de Saint- Victor de MareeiJIe, t. Il, p. 634, 850.
(7) Qnantin, Cartulaire de ITonne, t. I, p. 111, 117.
^) Ooniol, Cartulaire de Brioude^ p. 300.
40
626 LIVRE II. CHAPITRE XVII. { 2.
de Rouvroy : Aisne, Ardennes, Marne, Haute-Marne, Oise,
Pas-de-Calais. Somme ; et deux de Rouvrois (Meuse), sans
compter les hameaux. Cf. Roboraria^ p. 605.
^Salicetum, plus régulièrement formé que le salictum
des auteurs classiques latins, et que le salictetum des Pan-
dectes, est dérivé de saHœ, « saule. » Il explique le Sao-
citho d'un diplôme mérovingien du septième siècle (1) ; le
de Salcido du Polyptyque de Saint- Germain des Prés, dans
une addition écrite au dixième siècle. La localité moderne
que ce dernier document désigne est Saussay, commune
du département d'Eure-et-Loir (2). Ue du suffixe -etum re-
paraît dans une charte qui, en 979, met en Lyonnais la
villa quae vocatur Salicetus (3). De Salicetum vient aujour-
d'hui le nom des communes de Saulcy (Aube et Vosges),
Sauchy (Pas-de-Calais), Saussey (Côte-d'Or et Manche^
Sauchay (Seine-Inférieure). Parmi les hameaux, nous ci-
terons ceux qui nous offrent les variantes : Saussoy (Seine-
et-Marne et Yonne) , Sausset (Ariège , Bouches-du-Rhône ,
Hautes-Pyrénées). La Saussaye (Eure, Seine-et-Marne), re-
présente un primitif, * Saliceta.
L'idée qui a fait créer ces noms de lieux est exprimée
autrement par le nom de la station romaine ad Salices, en
Mésie (4).
Spinetum, de spina^ « épine, » est employé comme nom
commun par Virgile :
Nunc virides etiam occultant spineta lacertos (5).
La variante Spinito , à l'ablatif, est conservée par le Po-
(1) Tardif, Monuments historiqueêy p. 17, col. 1.
(2) Longnon, Polyptyque de Saint-Germain des PréSy p. 39. Meriet, DicL
top, d'Eure-et-Loir^ p. 171.
(3) Aug. BamïLrd, CartuMre de S&vigny, t. I, p. 119.
(4) Itinéraire d'Antonin, p. 227, 1. 1.
(5) Eclogue II, v. 9.
NOMS DE LIEU EN -ETUM. 627
lyptyque de Saint-Germain des Prés (1). Mais il y a des exem-
ples de SpinePum, par exemple dans une charte du onzième
siècle, qui concerne Epinay, commune de La Chapelle du
Genêt (Maine-et-Loire) (2).
*TiLiETUM, de tiliay « tilleul, » est noté, à l'ablatif, Til-
lido dans deux chartes du neuvième siècle, qui concernent
la cathédrale d'Âutun (3). Il y avait, au même siècle, dans
le diocèse du Mans, un Tillidi monasterium (4), et aussi,
à la même époque, Pépin II, roi d'Aquitaine, disposait de
biens situés en Limousin , in Telido villa (5) ; ce dernier
paraît être aujourd'hui un des hameaux de Teillet, situés
dans le département de la Corrèze. Les communes de Til-
loy (Marne, Pas-de-Calais, Somme) sont probablement
d'anciens TiliePum ; mais les Tilly et Tillay peuvent être
aussi bien d'anciens Tilliacus que d'anciens Tilietum. Il est
difficile de les distinguer quand on n'a pas à sa disposition
des textes antérieurs au milieu du onzième siècle. Ce sujet
a été traité, p. 373.
Tremuletum, de trernula^ sous-entendu papulv^y « trem-
ble, » à l'ablatif : Trimlido dans une charte de 832 pour l'ab-
baye de Saint-Denis (6) ; de Tremoledo, au douzième siècle,
dans une charte de l'abbaye de Conques (7). La forme mo-
derne de ce nom de lieu est Tremblay, nom de communes
situées dans les départements de l'Eure, d'Eure-et-Loir ^
d'IUe-et-Vilaine, de Maine-et-Loire et de Seine-et-Oise. On
trouve, dans les Ârdennes et dans la Haute-Saône, la va-
riante Tremblois. Tremilly (Haute-Marne) a une tout autre
(i) Edition Longnon, p. 359.
(2) Port, Dictionnaire de Maine-et 'Loiret t. U, p. 111.
(3) Charmasse, C&rtul&ire de l'église d'Auiun, p. 30, 33. Le savant auteur
croit qu*il s*agit de Tilenay (Côte-d'Or) (p. 391). C'est impossible.
(4) Dom Bouquet, t. V, p. 768 c ; t. VI, p. 585 d, 701, col. 3.
(5) Deloche, Cartulaire de Beaulieu, p. 17.
(6) Tardif, Monuments historiques^ p. 86, col. 1.
(7) G. Desjardins, C&rtulaire de ConqueSy p. 373.
628 LIVRE lï. CHAPITRE XVÏÏ. i 3.
origine : c'est un ancien * Tremelliacus dérivé du geTitilîce
Tremellius, dont l'histoire romaine nous offre Quelques
exemples (1).
* Ulmetum, dérivé d'ttimitô, « orme, » est noté à l'ablatif
Ulmido, dans le Polyptyque de Saint- Germain des Prés; la
forme moderne correspondante est Osmoy, nom d'une com-
mune du département de Seine-et-Oise (2). Ce mot avait
une variante féminine , Ulmeta ; on la voit écrite Ulmita
dans une charte de Ravenne qui date, au plus tard, du
dixième siècle ; c'est le nom d'un fundus (3). La même
variante féminine se retrouve notée Vlmeta^ en 1057, dans
une charte de Saint-Victor de Marseille (4). La forme ordi-
naire de ce nom de lieu est aujourd'hui, en France, Ormoy,
nom de communes dans les départements d'Eure-et-Loir,
de la Haute-Marne, de l'Oise, de la Haute-Saône, de
Seine-et-Oise et de l'Yonne.
S 3. — Dérivés en -etum de noms de végétaux qui ne santpas
latins.
Casnetum de connus, « chêne » est à l'ablatif Casneto dans
une charte de la première moitié du douzième siècle où ce
mot désigne Chêne- Arnoult , commune du département de
l'Yonne (5). Une charte de Tannée 1012, conservée par la
chronique de Saint-Bénigne de Dijon (6) , nous a conservé
la notation plus ancienne et moins savante Casnedum. La
forme moderne est : Chesnay, nom d'une commune du
département de Seine-et-Oise ; Chesnois, nom d'une com-
mune des Ârdennes; Chesnoy, nom de hameaux (Loiret .
(1) Panly, Real-Encyclopaediey t. VI, p. 2085-2086.
(2) Longnon, Polyptyque de Saint-Germain des Pria, p. 337.
(3) Fantuzzi, Monumenti Ravennati, t. I, p. 19.
(4) Quérard» Cartulaire de Saint^Victor de Marseille, t. I, p. 77.
(5) Quantin, Cartulaire de l'Yonne, t. I, p. 466, 579.
(^ Edition Gamier, p. 100 ; cf. Qarnier, Nomenclature, p. 34, n* 148.
NOMS DE LIEU EN -ETUM. 629
Nièvre, Seine-et-Marne). Il y a aujourd'hui, dans Tltalie
du nord, province de Côme , un hameau de Casneda et un
hameau de Casnedo.
*Rausetum, du germanique ratis, « roseau, » conservé en
gothique, mais en allemand rohr. Cf. Rausarias^ p. 608. Vers
751, Rausedo est le nom d'un locus appartenant à Tabbaye
de Saint-Denis (1). Dans les documents postérieurs, la diph-
tongue au est remplacée par la voyelle o et le ^ classique
est substitué au d, qui représente la prononciation de l'épo-
que mérovingienne. C'est ainsi que dans des chartes du
neuvième, du dixième et du onzième siècle, telles du moins
que nous les a conservées le Cartulaire de Notre-Dame de
Paris, Rosoy-en-Brie (Seine-et-Marne) est appelé i?056mm (2).
On trouve aussi la variante Rosetus dans une charte origi-
nale de Tannée 1025 (3); dans une bulle de Tannée 1156,
les mots abbatia de Boseto désignent une abbaye située à
Rosoy-le-Jeune . commune d'Ervauville (Loiret) (4). Le
nom de Rosoy s'écrit tantôt avec s, tantôt avec z; il y a
quatre communes de Rosoy, deux dans l'Oise, une dans
la Haute-Marne , une dans TYonne et cinq communes de
Rozoy, trois dans TAisne, une dans le Loiret et l'autre
dans Seine-et-Marne. Les noms des deux communes de
Rosey (Haute-Saône et Saône-et-Loire) et les cinq com-
munes de Rosay (Eure, Jura, Marne, Seine-et-Marne,
Seine-Inférieure) peuvent avoir la même origine.
Vernetum, du gaulois vernoSy « aune (p. 617)-, » donne
villa de Veimedo, en Forez, dans une charte du onzième
siècle (5). Un manse de Verneto apparaît à la fin du
onzième siècle, dans une charte de l'abbaye de Con-
(1) Tardif, Monuments historiques, p. 45, col. 2.
(2) Guérard, Cartulaire de Notre-Dame de Paris, t. I, p. 275, 289, 321.
(3) Tardif, Monuments historiques, p 162, col. 1.
(4) Quantin, Cartulaire de l'Yonne, t. I, p. 538, 590.
(5) Aug. Bernard, Cartulaire de Savigny, t. I, p. 369.
630 LIVRE II. CHAPITRE XVII. { 4.
ques (1), son nom est écrit Vernedo dans un documeiit
un peu postérieur (2); il s'agit du Vernet, commune
de Nauviale (Aveyron) ; c'est Torthographe méridionale.
Dans le département de la Côte-d'Or, Vernois est la
notation de l'antique Vêrnetum (3). Il y a deux communes
de Vernois dans le département de la Côte-d'Or, on en
compte trois dans le Doubs , une dans le Jura , une autre
dans la Haute-Saône. Il y a une commune de Ver-
nay (Rhône); les communes de Vernet se trouvent dans
l'Allier, les Basses-Alpes, TAriège, la Haute-Garonne, la
Haute-Loire , le Puy-de-Dôme et les Pyrénées-Orientales.
S 4. — Dérivés en -etum de noms commims qui ne désignent
pas des végétaux.
CoRTiLETUM, dérfvé du bas latin cortile^ « jardin, » dé-
rive lui-même de cors^ cor Us , « ferme. » Des biens don-
nés à Tabbaye de Cluny , en 974 , étaient situés en Autu-
nois , in villa Curtilido (4).
EssARETUM est uu mot de fabrication récente, tiré du
français Essari , Essarts , terrain défriché dont le t ne se
prononce pas. Du latin ex-sartum, viendrait exartetum. Es-
saretum était, au douzième siècle, le nom latin d*Essarois.
commune du département de la Côte-d'Or (5).
FoNTANETUM dérivc de fontana, qui est originairement le
féminin de Tadjectif fonianus , dérivé de fon^ « source. »
Cet adjectif est déjà employé par Ovide :
... Ora fontana reclusi (6).
(1) Q. Desjardins, Càrtulaire de Conques, p. 108.
(2) G. Desjardins, ibid., p. 346.
(3) Garnier, Nomenclature, p. 55. n* 238.
(4) Bruel, Recueil des chartes de Cluny, t. II, p. 461.
(5) Garnier, Nomenclature, p. 141, n* 572.
(6) Fastes, I, 269.
NOMS DE LIEU EN -E TU M. 631
Fontaine en français, fontana en italien, sont des sub-
stantifs. Aussi le mot Fontanetum ne se rencontre pas seu-
ment en France. On le trouve en Tan mil, dans une charte
de l'empereur Otton III pour l'église de Verceil (1) ; dans
les archives de la ville de Verceil, on voit apparaître
comme témoins en 1182 et en 1192, Nicolaus de Fontor-
neto (2); en 1192, il y est question d'un certain Bartholomeus
de Fontaneto (3) ; la même année Nicola/us de FonUmeto
était consul à Verceil (4). En France, ce nom de lieu est
très commun; au septième siècle la fondatrice de l'abbaye
de Bruyères-le-Ghâtel (Seine-et-Oise) donne à cette abbaye :
locello cognomenante Funtaneto (5). Fontanetum, dans un
diplôme de Charles le Chauve en 845, est Fontenay (Cal-
vados) (6). Au dixième siècle une bulle, en faveur de
Notre-Dame de Paris , mentionne , parmi les propriétés de
cette église, Fontenetum^ qui est aujourd'hui Fontenay-
sous-Bois (Seine) (7); en efifet, en 887, Eudes, comte de
Paris, avait restitué à Téglise Notre-Dame les biens que
ses ancêtres y avaient usurpés : ex villa FonUmeto (8). Une
autre notation représente par i la voyelle du suflBxe : /bn-
tanido en 832 et en 862 , dans deux chartes de Tabbaye de
Saint-Denis (9) ; il s'agit de Fontenay-les-Louvres (Seine-
et-Oise). On trouve, au môme siècle, la môme notation : in
Fontanido, dans le PolyptyqtM de Saint-Germain des Prés;
elle désigne Fontenay-Mauvoisin (Seine-et-Oise) (10). Au
dixième siècle, Téglise cathédrale Notre-Dame de Chartres
avait des biens m Fontinido (11), c'est-à-dire à Fontenay-
(1) Historisie patriae monuments, Chartarum t. I, col. 338 c.
(2) X6id., col. 912 6, 982 c.
(3) Ibid., col. 985 b.
(4) Ibid., col. 989 d, 990 6.
(5) Tardif, Monuments historiques, p. 16, col. t.
(6) Tardif, ibid,, p. 98, col. 2.
(7) Guérard, Cartulaire de Notre-Dame de Paris, t. I, p. 221.
(8) Guérard, ibid., t. I, p. 298.
(9) Tardif, Monuments historiques, p. 85, col. 1 ; p. 117, col. 2.
(10) Longnon, Polyptyque de Saint-Germain des Prés, p. 322.
(11) Merlet, Cartulaire de Notre-Dame de Chartres, t. I, p. 80.
632 LIVRE II. CHAPITRE XVH. { 5.
sur-Eure (Eure-et-Loir) (1). Il y a en France trente com-
munes du nom de Fontenay : sept autres communes ont
conservé la notation oi de Ve long du sufBxe, ce sont deux
Fontenois (Haute- Saône) et cinq Fontenoy (Aisne, Meurthe-
et-Moselle, Vosges et Yonne). Il y a aujourd'hui, en Italie,
trois hameaux de Fontanedo, Tun dans la province de
Gôme, les deux autres dans celle de Massa.
S 5. — Dérivés en -aretum.
Ce suffixe est le résultat de la combinaison des deux suf-
fixes -arius et -etum. Cette combinaison appartient à la
basse latinité, et date probablement d'une époque où Tad-
jectif dérivé en -arius était arrivé à désigner Tarbre qui
produisait le fruit dont le mot simple était le nom. On a
dit ficaretum quand ficarius était le nom du figuier. Anté-
rieurement, on se servait du mot ficetum^ dérivé de fiea,
pour désigner un terrain planté de figuiers.
Ficaretum est un mot qu'on ne trouve pas seulement en
France ; il était usité en Italie au dixième siècle , comme
Tatteste une charte de Ravenne, où est mentionné un fonds
de terre borné fundo Ficareto (2). En Tan 1001, dans une
charte de l'abbaye de Saint- Victor de Marseille, il est ques-
tion d'un lieu dit in Figaredo (3). Il y a un hameau de Fi-
garet dans les Alpes-Maritimes, un château de Figaret dans
le Gard. Ficareto est aujourd'hui un nom de hameau en
Italie, province de Pérouse.
JuNCARETUM. L'abbayc de Conques a possédé, au diocèse
de Montauban, une église de la Madeleine de Juncaretis (4».
C*est par Juncaretum que s'explique le nom des hameaux
(1) Morlet, Cartulaire de Noire-Dame de Chartres, t. III, p. 261-262.
(2) Fantuzzi, Monumenti Ravennati, t. I, p. 10.
(3) Guérard, Cartulaire de Saint^Viclor de Marseille, t. I, p. 97.
(4) G. Desjardins, Cartulaire de Conques^ p. civ.
NOMS DE LIEU EN -ARETUM. 633
de Joncherais et Joncheray (Maine-et-Loire) (1) et de Jon-
cheray (Sarthe). Comparez Juncaria^ p. 605.
*NuCARETUM, dérivé de *nuoariu>Sj qui dérive lui-même
de nuxy « noix, noyer, » apparaît , au dixième siècle , sous
la forme basse Nogaredvm ; il s'agit de Norroy (Meurthe-et-
Moselle) (2). Une charte de 1080 mentionne une paroisse
de Saint-Paul de Nogareto, aujourd'hui de Noyarey (Isère) (3).
Le féminin Nogareda désigne une propriété située en Quercy
et donnée à Tabbaye de Conques, au onzième siècle (4).
Nogareda est la forme latinisée corespondant au moderne
Nogarède, nom de quatre hameaux : Ariège, Aude, Haute-
Garonne, Tarn. Du neutre vient le masculin Nogaret, nom
d'une commune de la Haute-Gâronrie et de trois hameaux :
Alpes-Maritimes, Lot-et-Garonne, Lozère. Il y a, en Italie,
quatre hameaux de Nogaredo , et le Dizionario geografico
postale offre trois exemples de la variante Nogarè. Cf. No-
gariolas, p. 523; Nucarias, p. 609; Nucetum, p. 623.
*PoMARETUM, dérivé de * pomarius^ « potnmier, » est écrit
à l'ablatif Pomei-ido au neuvième siècle, dans le Polyptyque
de Saint-Germain des Prés ; c'est le hameau, aujourd'hui dé-
truit, de Pommeray, commune de Gâtelles (Eure-et-Loir) (5).
Ce mot a une forme féminine Pomareda qu'on trouve vers
Tan 1000 dans le cartulaire de Conques; il s'agit de la
Pomarède, commune d'Espeyrac (Aveyron) (6). Cette forme
féminine explique les noms des communes de la Pom-
meraie (Vendée), de la Pommeray e (Calvados), de la Pom-
meraye-sur-Loire (Maine-et-Loire) et des nombreux hameaux
appelés la Pommeraie ou la Pommeraye. Pomaretum a
donné Pommeray, nom de hameaux : Eure-et-Loir, Nièvre,
(1) Port, Dictionnaire historique de Maine-et-Loire^ t. II, p. 409.
(2) Lepage, Dict, top, de la Mexirthe, p. 103.
(3) Cart. de Saint-Hugues de Grenoble, p. 147, 538.
(4) G. Desjardins, Cart. de Conques^ p. 33.
(5) Edition Longnon, p. 182.
(6) G. Desjardins, Cartulaire de ConqueSy p. lxz, 387.
634 LIVRE II. CHAPITRE XVII. { 4.
Orne, Sarthe. La variante Pomaritum, qui a certainemenl
existé à Tépoque mérovingienne ou vers la fin de Terapire
romain , est conservée intacte par le nom de deux com-
munes des Côtes-du-Nord , Pommerit-Jaudy et Pommerit-
le-Vicomte. Comparez Busitt, cité plus haut, p. 618.
Pometum^ p. 624, est d'une latinité plus ancienne que
PomarePum.
APPENDICE.
SUPPLÉMENT AUX CHAPITRES III, IV ET V DU LIVRE PREMIER.
S 1"'. — Population de la Gaule barbare gai momen^t de sa
conquête pa/r César.
Au chapitre III, section ii , § D , page 54 , on a constaté
que dans Tannée envoyée par les Gaulois au secours de
Vercingétorix , pendant le siège d'Alésia , on comptait
trente et un fantassins pour un cavalier; ce chiffre peut
donner une idée approximative de la proportion qui exis-
tait en Gaule entre la classe dominante, équités^ et la classe
inférieure , qui fournissait les fantassins. Il est peut-être
possible de traiter la question plus complètement.
A l'époque de César, il était admis à Rome, qu'en
naoyenne, dans une population quelconque, le nombre des
combattants était égal au quart du chiffre total. Le chiffre
total de la cavalerie que les équités gaulois pouvaient met-
tre sur pied, quand eut lieu la grande insurrection de Tan-
née 52, s'élevait à quinze mille hommes : c'était tout
l'effectif possible, omnes équités (1). Il se suit de là que la
population aristocratique de la Gaule barbare se montait au
total, femmes, enfants, vieillards compris, à soixante mille
âmes environ.
Quel était le chiffre de la population inférieure ? On ne
peut le déterminer avec certitude. M. Julius Beloch, dans
son savant ouvrage sur la population du monde gréco-ro-
(1) De bello g&llico, 1. VII, c. 64, i 1.
636 APPENDICE. — SUPPLÉMENT AU L. I, G. III. IV, V.
main qui a paru à Leipsig en 1886, évalue la population
de la Gaule barbare , au moment de la conquête , à
3,390,000 habitants (1). Il fonde principalement son calcul
sur rénumération détaillée par peuple des contingents
convoqués pour délivrer Vercingétorix assiégé dans Alésia.
L'année dernière, au moment où l'impression du présent
volume était déjà commencée, M. Levasseur a fait paraître
le tome premier du savent ouvrage intitulé : La popula-
tion française , histoire de la population avant 1789 et démo-
graphie de la France comparée à celle des autres nations au
dix-neuvième siècle. Il arrive à un chiffre un peu plus
élevé que M. Julius Beloch, environ 6,000,000 d'âmes; il
le conclut de données empruntées à Diodore de Sicile et
du chiffre des contingents belges que César prétend lui
avoir été opposés pendant la campagne de l'année 57 (2).
Si Ton considère comme exact le chiffre donné par M. Be-
loch , on en tirera la conséquence que l'aristocratie gau-
loise formait le cinquante-sixième de la population. Si Ion
donne la préférence au résultat adopté par M. Levasseur,
on admettra que Taristocratie formait seulement le cen-
tième de la population totale. Dans Tarmée de secours , il
y avait un cavalier pour trente et un fantassins, mais on au-
rait tort de conclure de là que la même proportion se re-
trouvait dans la population. Vercingétorix avait dit qu'il
était plus habile de réunir beaucoup de cavaliers pour
couper les vivres à César que d'assembler un grand nom-
bre de fantassins pour livrer une bataille rangée (3).
Ces observations , que nous ne pouvions faire avant la
publication du livre de M. Levasseur, sont un complément
indispensable du chapitre III, section il.
11 est essentiel aussi d'en tenir compte si l'on veut ap-
précier à leur juste valeur les renseignements que nous
avons réunis sur 1 état de l'agriculture en Gaule au § 1"
du chapitre IV, page 68 et suivantes. Suivant M. Beloch.
la densité de la population dans la Gaule barbare était de
(1) Die Bevœlkerung der griechisch-rômischen Well, p. 460.
(2) La population /rançaise, t. I, p. 99-101.
(3) De bello gallico, 1. VII, c. 64, { 2.
APPENDICE. — BUPPLÉME«T AU L. \. C. Ûi, IV, V. ^
6 habitaiils 3/10 par kilomètre carré , tandis qu'elle est au-
jourd'hui de 83, soit treize fois ^lus forte. H fésnlterait de
là que la surface cultivée dans la Gaule barbare à l'époque
de César aurait été toilt au plus le treizième de y^e qu'elle
est aujourd'hui, car où ne devait évidemmenl îàbôurer qui
les meilleures terres et de liangûes jachère^ devaient h-'
gement compenser l'insuffisance deâ fumures. Si l'on a
cepte la doctrine de M. Levassèur, la population dévi
être de 12 habitants par kilomètre carré, c'est-à-dire à pi
près le septième de celle qui éxi^e aujonrd'htii ; par coi
séquent, l'étendue du sol labouré chaque année u'éiiH
pas dépassé le septième de ce qu'elle est actuellement.
S 2. — Date dv partage du sol entre les parliciiliers en Manc
On a dit au chapitre V, § 2, page 101, que tes Uauk
n'ont pas apporté eu Italie la notion de la propriété inc
viduelle du sol, quand ils ont passé les Alpes, vers l'an 4i
avant notre ère, et qu'ils paraissent avoir été encore étra
gers à cette nation (en Italie) à la fin du troisième sièc
avant Jésus-Christ, environ cent cinquante ans avant Césa
On peut ajouter que la littérature irlandaise a conser
le souvenir du partage le plus ancien du sol irlandais ent
les habitants. Ce partage date du septième siècle de not
ère et des deux rois suprêmes Diarmait et Blathmac , q
régnèrent conjointement de 654 à 665; alors chaque home
d'Irlande reçut trois fois neuf sillons, c'est-à-dire neuf s:
Ions de marais, autant de terre, autant de bois (1). Jn
qu'à l'avènement de ces deux princes, dit un texte èpiqu
les chars de guerre purent sans obstacle pucourir l
campagnes de l'Irlande ; il n'y avait nulle part une limi
de champ, on n'y rencontrait ni mur, ni haie, ni fossé {!
Il y a donc sur ce point concordance entre te droit le pli
ancien des Celtes d'Irlande et le droit le plus ancien d
Celtes d'Italie.
(I) préface à rhymn« de Colroan, chei Whitlajr Stok», VoiaeUea, 1* iifi
p. lîl, I. 16-K.
(3) Compert Coneulainn, 1 2; chez Wiàdiscb, Iriiche Ttxie, t. I, p. 1
1. 11-M.
638 APPENDICE. — ADDITIONS DIVERSES.
ADDITIONS DIVERSES AUX LIVRES I J5T U.
A. — Au sujet de l'impôt foncier et personnel établi par
Auguste et dont il a été question page 7, on peut faire ob-
server qu'il atteignait les Gaulois des cités alliées et libres,
exemptes d'impôt dans le système de Jules César. Les ré-
sultats politiques de cette révolution financière sont étu-
diés dans un savant travail de M. P. Viollet qui paraîtra
dans les Mémoires de V Académie des inscriptions et belles-
lettres.
B. — Des chartes du Cartulaire de Brioude, publiées par
M. Doniol , sont souvent citées avec des dates précises à
partir de la page 350. Ces dates sont empruntées à un mé-
moire de M. Bruel qui a paru dans la Bibliothèque de l'Ecole
des chartes , 6® série , t. II , p. 445 et suiv. , sous ce titre :
Essai sur la chronologie du Cartulaire de Brioude,
C. — On a dit, page 462, qu'un gentilice Nertius a dû
exister, mais que jusqu'ici on n'en a pas trouvé d'exemple.
M. AUmer, TWon, p. 211, a publié l'épitaphe de C. Nertius
Censorinus avec les observations suivantes : « Nertius ap-
» parait pour la première fois à Lyon comme gentilice, mais
» s'est déjà montré comme cognomen. Peut-être est-ce un nom
» gaulois latinisé ; une inscription de Bordeaux fait con-
» naître une femme appelée « Nerta, fille de Canto-senus. »
Nertius parait signifier « fils de Nertos , » et Nertos n'est
autre chose que le masculin du nom commun neutre
nerto-n, « force, » qui a dû exister en gaulois.
D. — A CarnacuSy p. 488-489; comparez Carnamis^ nom
d'une curtis : Curtem de Carnano, dans un diplôme de l'em-
pereur Frédéric l" , pour la cathédrale de Milan, en 1149
(Historiae patriae monumenta. Chartarum t. I, col. 816 a).
Errata. p. 210, 1. 24, au lieu d^Chennay, lisez Channay.
P. 374, 1. 23, effacez : en abrégeant son o.
INDEX ALPHABÉTIQUE
NOMS DE LIEU ANCIENS
SOIT DE L'ANTIQUITÉ, SOIT DU MOYEN AGE
Lee chifTret précédés d'DD ïetériiqae * renvoieot à la page où l'an Ironvcra le pins impoi
des irticles; les noms de peuples sont diatingnés par remploi des petites cjpitales
uoms dn moyen ige sans lenninaison latine sont imprimés en iUliqnes.
Aballo, -oui», 153.
Abodiacum, Âbuzaco, 161.
Acaunum, 153, ITS.
Acciacus, 188.
Achinjagas. 187.
Aciacus, 187.
AciIJanuB, 127, 129.
AcoaiacaaDis, 189.
Aculia, 376.
Acutiacus, 345.
Acutior (cnrtis), 345.
Adisosgo (cas iadiract), 592.
Admagetobrigo, 186.
Adnatuca, oppidum Qt cMtellum des
EbuTonei, 87.
Aduatoci, leurs oppida, 82.
Abddi dépouiUëe par Arioviate, 20; —
foetterali, 29, n., 32; — leurs clients,
31, 36.105; — leurs sujets, 32; — më-
nagés par César, 38; — leurs vergo-
bret^, i\; — leurs princtpfS, 45, 46;
— leur sénat, 50; — leur froment,
72 ; — leurs champs , 77 ; — leurs
oppida, 82; — 39, n. I.
Aemîliauus, 127, 129.
Aemilius pons, 546.
Agau
■nàes Senonei,
Agedin
Agolas, 507.
Aguciacus, IS9.
Agniiacns, 377.
Aguaanicis (de), 571.
Aguzor (de Monte), 345.
Alauahhi, 413, 414.
Albauia (in territorio), 377.
Albaoiaai, 155.
Albariosco [ras indirect), 593.
AlbiacuB, 190.
AlbiaDis, 421 ; Albiauus, 191, 593.
Albigensium (civitas), 378.
Albinas, 507.
Albiniacus, 191.
AlbiaiaDJ, 155, 191.
Albiodurum, xii; Albioderum, 186
Albioacus, 593.
Albucennacus, 457.
Albucctum, 616.
Albucianus, 571.
Albuc
i, 509.
Albuasanicis (de), 571.
(1) CM indra H 1h dwi n
640
INDEX ALPHABETIQUE
Alesia, approvisionnements pendant
le siège, 71 ; •— urbs et oppidum des
Maindubii, 81, 87; — 635.
Aliacus, 192.
Aliodrensis (pagns), 186.
Allobrooes, clients des Arvemi, 33 ; —
leurs principe«,46,47; — leurs vici,78.
Alnarias, 605.
Alnido {pour Alnetum), 616.
Alsiacus, 193.
Aitogilo (pour Altoiolum), 545.
Ambaciensim (vicum), 443.
Ambarri, lenrs oppidii, 84.
Aipbasciacus, 445.
Ambasia, 443.
Ambiaiti, leur froment, 73; — 39, n. 1.
Ambibarii, 39, n. 1.
Ambiliati, 39, n. 1.
Ambivareti, sujets des Aedui, 32; —
leur froment, 74.
Ambronensi (in Ticaria), 553.
Ambrosio, cas indirect d'Ambrosius
(MuUUo), 445.
Ambrussum, 445.
Amelesca, 550, 551.
Ameliayus, 561.
Amelio (in), 347.
Amiliacum, 348.
Ammonias, 431.
Ammoniacus, 432.
Ancia, 378.
Anciacum, 379.
Andecamulenses, 355, 388.
Andelagus, 562.
Andelaus, 562.
Andelos (nominatif singulier),'^^^^ 9.
Andematunnum, 388.
Andbs, leur froment, 72; — 39, n. i.
Andiacus, 193.
Andusia, 570.
Andusianicus, 570.
Anicianum, 350.
Aniciorum (villa), S45.
Anicius (fùndus), 345; Anicins (loctts),
349.
AnisUeus, * 193, 345, 350.
Ansasca, 587.
Ansoaldo-viUare, vii.
Antennacus, 457.
Antistiana, 375.
Antoniacus, il, 139, * 351.
Antonianus, 98, 128, 129, 139, 351.
Antonio (villa), cas indirect^ 350.
Antonnava, 173, *562.
AnfunnAcus, 15(H 172, * 562.
Apiarias. 522, *610.
Apiar[i]oIas, 522.
Appiacus, 193.
AppianuB, 128, 129.
Appiaria, 610.
Appiiiàcus, Ï95.
Apponiacus, 195.
Aquao Sextiae, 320.
AquàKriB vidtfs, WL
Aquilianis, 421.
Arausici, 569.
Arausio, -onis, *520, 569.
Archiniacus, 196.
Arcia (prope), 382.
Arciacus, 384.
Arc[i]onem, accusât^/, 5<)9.
Arduinna, forêt divinisée, 74.
Arelate, 549.
Areliascus, 586.
Aremorici, 565.
Ar^antomagus, X, 494, S31.
Argentogelum, 531, 533.
Argentomagensis, 494.
Argentorate, 493.
Argentoratus, 492.
Aria (monasterium), 379.
Ariaco (in), 381.
Arriaca, 161. 375, ♦381.
Arriana (insula), 381.
Arsuniacus, 157.
Artedunns, 383.
Artenacus, 456.
Arthmael fpiebs), 987.
Artiaca. 159, 375, ♦383.
Artigeni (fundi), 398, 5M.
ArtiUacus, 196, '387.
Artobrlga, 382.
Artodunum, xn.
Artona (vteo), 495.
Artonacus, 494.
Artonbsco, cet8 indirect, 997.
Artunnacus, ^494, 598.
Arvërmi, leur prépondérance en Celti-
que, 30 ; — leurs clients, 33; — \fmn
sujets, 34;^ ménagés ^r César, 3H;
— liberi, 38: — leurs forêts, 75; -
leurs oppida, 84; — 39, u« 1 ; 569.
DES NOMS DE LIEU ANCIENS.
641
Arvemlcus (pagus), 569.
Ascio (villa), cas indirect^ 351.
Asinarias, 610.
Aspemaico (parrochia de), 462.
Ateias, 433.
Athanacus, 490.
AtiUanus, 128, 129.
Atrbbates élevés au rang de peuple
libre par César, 37; — leurs rois, 43;
— 39, n. 1.
Attaniscus, 554.
Attiniacus, 197.
Augusta Suessionum, 422.
Augustobona, 585.
Angnstobriga, 154, 383.
Angustodunum, 154; 383.
Augustodurum, 154.
Augustomagus, 154.
Augustonemetum, 154.
Augustoritum, 154.
Anlbrandisca (appendaria), 555.
AuLBBCi Brannovices, sujets des Ae-
dut, 32; — rendus indépendants par
Auguste, 39; — 400.
AuLERCi Cenomanni, 39, n. 1.
AuLBRGi Eburovices, leur sénat, 50|; —
leurs oppida, 80, 84; — 39, n. 1.
Auliacus, 198.
Aunedonnacus, 150, *.172.
Aurélia (via), 347; Aurelias, 433.
Aoreliacus, 145, "^434.
Aurelianicus, 571.
Anrelianus, 128, 145, 434; Aureliani
(fundi), 412; Aurelianorum civitas,
422.
Auria (vallis), 426.
Auriacus, 198, 426.
Auriis, 426.
Autbertescus, 555.
Autessianus, 546.
Autessiodorum, 546.
Autricum, 151, 165.
Autura, 151, 565.
Avara, 151, 565.
Avaricum, situé dans un pays fertile,
72; — urbs et oppidum des Bituri-
geSj 81, 84; — respecté par Vercin-
gétorix, 121 ; — 151, 565.
Avenacus, 453, 454.
Avenarias, 606.
Avenna, 463.
Avennacus, 453.
Avennio, -onis, 518, cf. 653, n.
Aventicum, 510.
Aviciacus, 171.
Aviniolensis (villa), 524.
Avinione (de), 519.
Avitacus, 135, 145, 150, 167, *170.
Avitiacus, 138.
Ayllone (prioratns de), 509.
Azeracus, 468.
Baddane-curtis, viii.
Bagacus, 150, 173, n. 2.
Baissiaco, cas indirect, 593.
Balbiacus, 198.
Balderias, 613.
Barbairanum, 402.
Barbaresca, 551.
Barbaria (in), 402.
Barbariacus, 165, 403.
Barbariana, 165, 375, 402.
Barbarione (villa), 510.
Barberias (villa), 434.
Bardomagus, 167.
Barolia, 534.
Basciacus, 592.
Basciasco, cas indirect, 592.
Basiliaca, 199.
Basiniacus, 200.
Bassiacus, 427.
Bassiago, 592.
Bassiana, 375 : Bassianis, 421 ; Bassia-
nus, 427.
Bassus (villa), 427.
Bassiniacus, 200.
Baudechisilo-vallls, vin, 12, 97.
Bebronica (vallis), 565.
Bebronna, 565.
Becciacus, 342.
Bedolitum, 617.
Bedolletum, 617, n. 1.
Belenatensis (villa, mons), 179, 18U
Beleno Castro, cai indirect^ 179.
Belesma, 181.
Beloae se révoltent contre César,
manquent d'approvisionnements, 71;
— leur arrivée en Qaule, 119.
Belgica (Gallia), 29.
Beliniacus, *343, 418.
Belisama (baie), 181.
Belisma, 181.
41
642
INDEX ALPHABÉTIQUE
Bellenavus, 563.
Bellovagi, clients des Aedut, 35; ~
leur sénat, 51; — leurs foréU, 74;
— leurs champs, 77 ; — leurs oppida^
84 ; — leurs aedificiaf 91 ; — 39, n. 1.
Belna, villa, 179.
Belteiresco (de), 555.
Benâcus, 134, 135, 136, 178.
Borberensis (pagus), 258.
Bcssenacus, 457.
Bibracte, lieu do réunion du sénat
des Aedui, 50; — oppidum des
Aedui, 82, 151.
Bibraz, oppidum des Remit 88, 151.
Bissiacus, 458.
BiTURiGES , clients des Aedut , 31 ; —
leurs forêts, 75; —leurs oppida, 81,
84; — leurs aedificia, 91 ; — 39, n. 1.
Blaciacus, 200.
Blandiacus, 163.
Blandiana, 163.
Blaniacus, 418,^598.
Blanusco, cas indireety 596.
Blanziacus, 163.
Blesensis, Blezis, 505.
Bodincoma^s, 153, 546.
Bodincus, 153.
Bon, clients des Aedui, 31 ; — s'éta-
blissent sur le territoire des Aedui^
76, 104, 108; — leur oppidum, 85; —
39, n. 1.
Bonago (ecclesia de), 469.
Bonogilum, 535.
Bomaco, cas indirect, 496, 497.
Bornonesca, 556.
Boutenachus, 458.
Bracciacus, 352.
Braccio (locellus), 352.
Braciacus, 352.
Braciolis, 524.
Braniacus, 400.
Brannogenium, 398.
Brannovices (Aulerci), 400.
Brannovii, sujets des Aedui, 32.
Brannus (villa), 500.
Branodunum, 399.
Branosco, cas indirect, 598.
Bratuspantium, oppidum des Bello-
vacit 84.
Brecheniauc^ 137.
Brenacus, 496.
Brennaco, cas indirect^ 495.
Bretiniacus, 201.
Bricoscis, 598.
Brignum, 511.
Brinnaco, cas indirect^ 495.
Brissiacus, 599.
Britannia, l'agricnltiire, 77; — les op-
pida, 79.
Britinniacus, 201.
Britogilum, 536.
Brittannaicus, 488.
Brittiacus, Brithiae, 138.
Briva Isarae, 153.
Brivate, 153.
Brivodnrum, 153.
Brocaria, 609.
Brugaria, 609.
Bnciacus, 202.
Buduc [Les), 177.
Bulianicus, 571.
BuUione, 511.
BuROUNDi (prise de possession ém
biens immobiliers p«r les), 21, 21
Buriaca, 203.
Buriascus, 587.
Burnomus, 497.
Buaitt, 177, 618.
Buxarias, 606.
Buxedus, 618: Buxido, 617,618; Box-
sito, 617.
Cabannacus, 475.
Gabannaria, 475.
Gabardiaeus, 157.
Gabellio, -onis, 519.
Cabillonum , oppidum des Aedui , 81.
83, 151.
Gabrias (vico), 434.
Gabriniacensis condita, 4215.
Gabrogilo pour Gabroiolum, 537.
Gadarosco, cas indirect de Oadaros-
eus, 600.
Gadenas, 466.
Gadiacense (in agro), 437.
Gadiano, cas indirect de Gadiaons
(Bmtotio), 437.
Oadias (TiUa), 437.
Gadolaico, caa indirect, 470.
Gadomus, 405.
Gadoniacus, 203.
Gadugio, cas indirect^ 405.
.m.^
DES NOMS DE LTEU ANCIENS.
64
Ctuiuliacaa, 31t.
Cadurci, sujets des Aruemi. 34; -
leurs forêts, TS; lenn oppida, 85; -
39, n. l.
Cadnscis, 403.
Caecilianas, I2B.
CsecUiOE vicuB, 346.
C«edr»co, cas iniUrtet, 497.
Cabrosi. clients des Treveri, 36.
Caesarobriga. 383.
Caesaroduaum, 154, 363.
Caesaromagua, lU.
Cair Caratauc, 137, n. t.
Caisaanlcus, 572.
C»l» (Tffla), 538.
CaladnnuiD, 538.
Calagnm, 204.
Calciacus, 204, 429.
Caldio, oois, 511.
CALETEtt, Caleti, 39, n. t, 428.
Caleilis (villa), 428.
Calia
., 204.
Calidianns, 128.
Calioiacus, 305.
Cftliscus, 551.
Caloili viUa, 537.
Calviacus, 30S.
Caiziacus, 429.
Cam^racus, 150, 'Hl, 512.
Camariacus. 171,
Cambariacus, 206.
Cambiacus, 206.
Cambidobrense (monasterium), 181.
Cambidonno pour Cambi-dunam, 181.
Cambiovicenaea. 599.
Camblosco, cas indirect, 599.
Cambo, -onis, 599.
Combodunum, 154, 599, d. 12.
Cambonum, 599.
Caœbosco, ca« indirect, 599.
CambrioDe, 511.
Cameracum, 171.
Camiliacus, 207.
Camilljaeus, 162.
Camilliaaa, 162.
CamlUcus, 30Î.
Campania {ager publicu* de), 24.
Campaniacns, 138, * 208.
Campanianus, 210.
CampiUas, 438.
Campiaiacus, 208.
CamuliacuB, 343.
Camulio (acclesja de), 353.
CamuIoduDuin, 154, 354.
Canascof, 597.
Canavi, 563.
Caniacus, 210.
Caniaans, 211.
Canoscus, 591.
Cantilia, 375.
Caotilianensia (TicarU), 376.
Cantillanicua, 376, *572.
Cantissa. 582.
Cantium, 179.
Gantobemucus, 1T9.
Cantogilum, 538.
Caponarias, 611.
Capriniacus, 435, 436.
Captunnaco, 472.
Caranciague, 211.
Oarantiacus, 146.
Carantiuiacns, 146.
CarautomaguB, l, IfiT, 181.
CarantoDiciu agsr, 566.
Carbantia, 153.
Carbantorigum, 153.
Carbonacus, 474.
Carenciolas, 524.
Careadenacus, 458.
CarsDteaaacus (villa), 566.
Carisiacus, 212.
Caraacus, 488, 638.
Caroano (de). 638.
Garni, 489.
Garnuïes sont foedtrati, 29 n., 3
— clients des Rémi , 33; — leur a
nat, 51; — leurs fordts, 75; — leu
ufci, 79; — leurs oppida, 80, 86;
39, n. 1.
Carpentorate, 153.
Carraciacus, 213.
Caaoeto, de Casnetum, 628.
CassiacDS, 143.
Cassianus, 128, 143.
Cassinicus, 567.
Casai Domagus, 531, 533, 5GT.
Castaoedum, 619.
Castanerias, 607.
Castaneto, de CastaaMum, 619 et
Castaaito, de Castanetum, 619.
Oaatellio, -onis, 3(ii.
644
INDEX ALPHABÉTIQUE
Oastellucius, 363.
Catalacense (in villa), 487.
Catalaunicus (pagus), 569.
Gatalense (in aice], 500.
Catali, 488.
Cataliosco, cas indirect, 594.
Gatenacensis (vicaria), 456.
Gatiacus, 213.
Gatuellauni , sujets des Lingoneê ,
29 n. ; — rendus indépendants par
Auguste, 39; — 404, 569. Voyez Ca-
tuvellauni,
Gatuiaca, 405.
Catuicus, 567.
Gatulenso ministerium, 470, *500, 501.
Gatulliacus, xviii, «214, 470.
Gaturiobs, XI, 404, 580.
GaturigomagnSi xi.
Gatusagus, 474.
Gatusanianos, 421.
Gatusiacus, 405.
Gatcslooi, 404, 580.
Gatuvellacni, 580. V. Catuellauni.
Gauciacus, 215.
Gaucinogilo pour Gaucinoiolum, 539.
Gaucius (villa), 357.
Gaudalascus, 586.
Gaudiacus, 158.
Gauliaca, 216.
Gausiacus, 216.
Gautiacus, 215.
Gavanarias, 606.
Gavannacus, 474, 475.
Gavenas, 464.
Gavennacns, 458.
Gavenoilus, 539.
Gavilhanicae, 572.
Gavrascus, 590.
Gedraco, cm indirect, 497.
Gedros, 497.
Gelsiacus, 217.
Gelsinianicus, 573.
Geltica (Gallia), 29.
Geltus (villa), 501.
Genabum, oppidum, des Garnutos, 80,
81, 86; — 412, 422.
Gentulio, cas indirect (campus], 353.
C«ped, 620.
Gepetum, 406.
Gepido pour Gepetum, 620.
Gervaria, 611.
Geutroneb, sujets des Neruii^ 36.
Ghalianns, 205.
Ghildriciaecas, xvii.
Ghrausobaci (villa), 204.
Ghristoilo, 540.
Gipia (villa), 406.
Gipidus, 407.
Gipiliacus, 217.
Gisomagus, 182.
Glamenciacus, 218.
Glariacensis (terminas), 218.
Glaudiomagns, x, 155.
Clavascus, 590.
Glipiacus, 218, 219.
Glippiacus, 11, 218, 219.
Glodia (via), 347.
Glodiana, 375; Clodianis, 421.
Gocciacus, 220.
Goctiacus, 221.
Godiciacas, 573.
Godicianicis (de), 573.
Goeliobriga, 383.
Golonia Agrippina, 142.
Golridum, 620.
Golubroriae, 611.
Golumbarius, 611, 612.
Golnmberius (viUa), 566.
Gomariago, cas indirect, 357.
Gomario (in), 357.
Gomiacus, ^1.
Gommunacensis ager, 475.
Gondate, 153.
Gondatisco, -onis, 548.
Gondatomagns, 153.
GONDRUSI, clients des Treveri, 36, 167
et n. 6, 231.
Gopto (viUa), 505.
Gorbiniacus, 432, 496.
Gorbio, -onis, 498.
Gorbolii (oppidum), 539.
Gorbonacus, 497.
Gorcione, 512.
Goriaco, cas indirect, 595.
Gomelianus, 128, 358.
Gornelio, -onis. Gf. Gomilio, 358.
Gomiliacos, 358.
Gomilio (mansus de), 357.
Gomilio, -onis, 512.
Gortennacus, 458.
Gosenacensis ager, 459*
Gotonaco (in villa), 496.
Crisciscns, 272.
Crispiacus, 233.
Crispian», 375.
CriaplniBcus, 224.
Cronik, 107.
Croniacus, 224.
Cnice, 370.
CubtDB, a06.
Cuunacus, (50, 173 a
Capedanses, 508.
CurcedoQUS, 512.
225.
DES NOUS DE LIEU ANCIENS.
Durocortomm, oppidum o
Rtmi, K.
, 594.
Curiosco, cas indir.
CuRioBOLiTEB , leur froment, 72;
lonrs oppida. S6; — 39, a. t.
Curaiacus, 22â.
Curtilido pour Curtiletum, 630.
CnrtioduDum, m.
Cnrtogilo pour Gurtoiolum, 540.
Casiacna, 226.
Daccognaca, iTii.
Dalmaciacus, 339.
DalmatianuB, 340.
Darabennenses, 465.
Darentiaca, 375.
Decetia, lieu de réunion du sénat
Aedui, 50.
Daobrigula, 154.
Derventione, 153.
Desia (ia}. 407.
DtABLINTBS, 39, a. 1.
Dibiooe. hlO.
DiEciacu, 227.
Disiacus, 227, 409.
Ditiagus, 227,
Diviono, 520.
Divodurum, IM, 412, 423.
Divoi
, 154.
Dociacus, 228.
Domariescus , 556.
Domicianus, 230,
Domitiacus. 229.
Domitiaaa, 375; Domitianus, 128.
Donnobriga, xi il.
Drusciacus, 230.
Drueomsgus, 167.
Dubrum, 178.
DamnisBDS, 579.
Eboracus, 169.
Eboriacus, I6S.
Ebo roi ac anse (praedium), 499
Ebrauc. 137.
Ebredenengia, 169, a.
Ebrolio, pour Eburoiolum, &
Eburacuï. -137, 145, 167, 169
Eburobriga, Xi, 169, 3S3.
Eburoduuum, it, 169.
Eburomagua, 167, 168.
Eburones, clients des 7reD»i
leurs rois, 43; — leur fron
— leurs vicl, 78 ; — leur»
87 ; — leurs aediflejs, 92 ; -
EburoTJces (Aularci), 400.
ElarlacuB, 249.
Bdegrimiscus, 556.
^BUTBTi, sujets des Aruemi
Blusa, 520, 570.
Ëlusanua, 570.
Elusio, -onis, 520.
En ni anus, 128.
Epiacum, 162.
Eporedia, 153.
EpponiacuB, 196.
Ermoniace, 248.
Escoiolas, 526.
Esentiaco (villa), cm fndjreci
Essaretum, 6311.
EeuBLi, leur [romeut, 72; — ',
pida, 87; — 39, n. I.
Evordunensia, 169, n.
EvrogilufQ, 499.
Pabianus, 128, 438.
Fabias, 438,
Fagito, de Pagetum, 620.
Favariolas, 522.
Fedonnacus, 455.
Fedentiacus, 340.
Ferraria, 603.
Fibiai
1,232.
Ficarctuin, 632,
Fidiacus, 231.
Figiacus, 232.
Figlinae, 15.1.
FirminhaDicae, 573.
646
INDEX ALPHABÉTIQUE
Flacianus, 233.
Flaiacus, 595.
Flaiosco, cas indirect, 595.
Flaminia (via), 347.
Flavia Constantia, 422.
Flayiacus,.233.
Flavianicas, 570.
Flavianus, 235.
Flaviniacus, 235.
Flavinianus, 98, 236.
Flaviobriga, 383.
Flesccachj 175.
Floriacus, 163, *236.
Floriana, 163.
Fontanetum, 630, 631.
Fomolns villa, 521.
Fraxenetum, 621.
Fraxnido, de Fraxiaetum , 621.
Frontennacus, 459.
Frotgaresc, 556.
Furianus, 128.
Fusciacus, 237.
Gabali, sujets des Arverni, 34; —
indépendants depuis Auguste, 39.
Qabriacum, 436.
Gabromagus, 153.
Gabrosentum, 153.
Gaillo, -onis, 513.
Galacianicus. 576.
Galiacus , 238.
Galiscus, 552.
Gaudiacus, 239, 240.
Gavre, 436.
Gcbriacus, 436.
Geidcmni, sujets dos Nerutt, 36.
Gellianus, 128.
Geminiacus, 159.
Geminianus, 159.
Genava, 151.
Genebraria, 607.
Genevreta, 622.
Geniciacus, 241.
Genistedo, de Genistetum, 622.
Gentianedo, de Gentianctum, 621.
Gentiliacus, 242.
Gergovia, uvbs et oppidum des Ar-
verniy 81, 84.
Germanayum, 244.
Germani recherchent les champs des
Gaulois, 75, 76.
Germaniacus, 242.
Germanicomagus, xi.
Germiniacus, 242.
Germolio, de Germoiolus, 540.
Gessiacus, 244.
Gibriacus, 436. 437.
Gobannium, 153.
Godinesca, 557.
Gorgobina, oppidum des Boiif 85.
Graciacus, 245.
Graciasca, 246.
Gragnasgus, 587.
Graniacensis, 247.
Granianus, 128. 248.
Graniolus, 524.
Gratiacus, 245.
Gratiasca , 246, ♦ 593.
Grésilla, 409.
Griniacus, 247.
Grinio, -onis, 513.
Grudii, sujets des Servii, 36.
Grussius (villa), 358.
Guariacus, 338. Voyez Wariacns.
Gundulfi (villa), yt.
Helvetii compris dans la Celtique, 29;
— brûlent leurs récoltes, 71 ; — leurs
vici, 78 ; — leurs oppida, 80, 81, b7;
leurs aedificia , 90 ; — leur émigra-
tion, 102, 103, 119 ; — 39, n. 1 ; 166,
Helvii, leur princeps, 49.
Hermerago (villa), cas indirect y 490.
Hermomacum, 160.
Hicio, ca« indirect , 359. Voyez Icio.
Hileriacus, 249.
Hispania, 410.
Iciacus, 148.
Icio (villa), cas indirect, 359.
Iciodurum, m, 148, 182, 360.
Iciomagus, xr, 148, 360.
Ingénie (ecclesia de), 361.
Isamodori, génitif, 18 i.
Isemodero, pour Isamodurum, 184.
Issiacus, 360.
Iturobriga, 441. Voyez Turobriga.
Jocundiacus, 250.
Jove (de monte), 448.
Jovenciacum, 252.
Juliacus, X, 141.
DES NOMS DK URU ANCIENS.
JulUnt», 118, 112.
Jnliascns, 588.
Juliobona, 5B5.
Juliobrig*. 381.
Juncuetia. 632.
JuQcaria, 533, 'âDâ.
Juncariolas, 532.
Juniaaa>, 13S.
JurasBna, 579.
Juvenciacum, 35 t.
Juventianvu, 353.
Juviniacus, 353.
Kadaliacna, 488.
Kaei'-Caradauc, 137, a. t.
Kagnosco, ca* indiract, iH; Kagnos-
cna.Stl.
K«np8nlac, 138, 210.
LagiiMchui, 588.
LamiacuB (villa), 573.
Lanceam (villa], 36t.
Lanciaeut, 363.
Laocione (in), 361, '513.
LBodericiacns, 145.
LantenoacuB. 460.
Lauterinaco, cat indirtct, 460, n. I.
Latcio, -onis, 511.
Latiniacus, 97, ■141.
Latin
Lalis
28, 144.
I. 519.
Lauretum, 615, 631, 623.
I, &U.
LenUa, 460.
LcntiacQS, 363.
Lcntiliacus. 363.
Lepuraria. 613.
LEUct, tour froment, 73.
Levaci, sujets des .Veruii, 36.
Leiuvii, leurs vcrgnbrcts, 14, <
Icursénnt, 50; — leurs ojiplits,
~ 39, n. 1.
Liberago (colonia ■□), 478.
Liberdnnnm, 479.
Libcroduanm, un.
Licaniaceusis, 355.
Licinianus, 138, 155. 257.
Uli»cui, 357.
Linarias, 607.
Unariolas, 523.
LiNOOHEB, sont foederail. 29, n.. 3!
— leur fl-omcnt. 72; — 39, n. 1.
Linogile, 541.
LipidiBcas,25S.
Lisignias, 357.
Lisiniaca, 355.
LiBiniae, 357; Lisiniu, 439.
Lisioisscus. 58S.
Litanobriga, 154.
Livia (villa), 410.
Liviana, 155.
Liziuiacus, 254.
Loccis, 363.
Lodiscus, 552.
Lucaniacus, 136, 160, Bt u. S.
Luccas, 363.
Lucennacus, 455.
Luciacus, 358.
LuciaDUS, 361.
Luciliacus. 361.
Lucilianus, 138.
Lucio, -onJB, 515.
Luco, ca* Indirect. 363.
Luc retins pagus, 346.
Luganiensi [in vicaria), 3Q5.
Lugudunnm, 163.
Luliacus, 262.
Luparias. 613; Luparium (podium
613.
LupiBCUS. 363.
Lu pi anus, 364.
Lutetia, oppidum des Paritii, 88,
Luteva, 507.
Hadriaceusis (pagus), 376, '380.
Hadriniacus, 366.
Uadronio (in villa), 365.
Magniacus, 364.
Hagontia, 117, 118.
Hagontiacus, 417.
I, 5U5.
Mairilac
s, 481.
Halapacios (Fundos), 431.
Haliascus, 588.
Hallanica (vailis), 571.
Malliftcus, '366, 574.
Mallianus, Mnllians, 367, 375.
Hanciacus, 268.
648
INDEX ALPHABÉTIQUE
Mandubii, leurs oppida, 87.
Manlianus, 128.
Maraniga8, 575.
Marccglago, cas indirect, 574.
Marcelliacenses, 268.
Marcellianus, Marcelliana, 375, 574.
Marcellus (vicas), 501.
Marcennacusy 454.
Marcia (villa), 411.
Marciacus, 270.
Marciana, 274; Marcianas, 274; Mar-
cianom, 275.
MarciliacQg, 145, *269.
MarcilianuB, 128, 145, 270.
Marcilliacus, 145, ♦268, 269, 607.
Marcio (in villa), 365.
Marcomagus, xi.
Marcomanni, 413, 414.
Marcomannia, 414.
Marcus (locus), 502.
Mariacus, 275.
Marianus, Mariana, 128, 375.
Marinescae, 553.
Mariniacus, 164, ^276.
Mariniani, 164.
Marioias, 525.
Marogllum, 530.
Maroialicis (thermis), 529, 530.
Maromagus, 531.
MartiacuB, 271.
Martianum, 275.
Martinhanicae, 575.
Martiniacus, xvii, 278
Martionis (villa), 515.
Marti riascus, 590.
Marzosco , cas indirect , 595 ; Marzos-
eus, 275.
Masaus (pagus), 561.
Masciacus (villa), 97.
Maslaco, cas indirect, 481.
Massolacus, 482.
Matisco, -onis, 550.
Matriolas, 525.
Matriscus, 553.
Mattiacum, 161.
Matucaium, 153.
Mauriacus, *281, 290.
Maurinciagus, 340.
Maurisca, 553.
Mazerago (de), 47'J.
Mkdiomatrici, 39, n. 1.
Meldi, sujets des Suessiones rendus
indépendants par Auguste. 39.
Melliacus, 282.
Melodunum, oppidum des Senones, 89.
Menapii, leurs champs, 74, 77; — leurs
forêts, 74; — leurs uici, 78; — leurs
acdt^cia, 90, 92; — 39. n. 1.
Mercoria, 446, 447; Mercorius (villa),
446.
Mercuriolus, 526.
Mercurius mons, 448.
Merlans, 564.
Merula, 564.
Meseriacum, 165, n.
Metenacus, 425.
Metiosedum, oppidum des Senones, 81i.
Métis, 423.
Metsiacus (villa), 425.
MetU (fundi). 412; Mettis, 423.
Micerianus, 165.
Miliacus, 282.
Minatiacus, 159.
Mogontiacus, 417, 418.
Monciaco, cas indirect, 596.
Monciosco, cas indirect, 596.
Montaniacus, 284.
Montanianus, 286.
Montiniacus, 284.
Montionis, 596.
Morennum, 464.
Morentiae, 341.
Morinciaca, 340.
MoRiNi, sujets des Atrebates, 37; —
affranchis par Auguste, 40 ; — leurs
forêts, 74; — leurs champs, 77; -
leurs vici, 78; — leurs aedificia 92;
— 39, n. 1.
Morlacas, 486.
Mosa, 561.
Mosavus (pagus), 561.
Mosomagus, 153.
Mucianus, 128.
Mucio-curtis, 515.
Mulciacum, 287.
Munatianus, 128.
Musciacus, 286.
Namnetes, 39, n. 1; 166.
Narbonensis, 570.
Narianos (fundos), 421.
Nasium, 374.
DES NOHB DE LIEU ANCIENS.
Nemausansis, 570.
Nemelacum, tB3; Nemelacus, 397, Q. 3.
Nametocenna, 153, 397.
Nemetodorum, 183.
Nemplodurus ,
Paemam, clients des Treveri, 36.
Papia (castrum), 411.
PapirUnua. 128.
Paribii. clients des Aeduj, 31 ; — le
Ni
i, 638.
Ne ri (Aquis), 316.
NeriomagioDBBs, 346.
Neriomagus, x, 155; 346.
Nerteuoaco (de), 461.
Nertii, leurs sujsts, 38 ; — leur sénat,
51, 5!; ~ leurs forftls, 74; — leurs
champs, 77; — leurs oppiUa, 88; —
39, n. I.
Neviasca (fluvius), 586.
Niriacus, 155, 346.
NiTiOBROOBS, 39, n. 1.
NobellascB, 591.
Nobiliacus, 29t.
Nocito, 633.
Nogareda, 633.
Nogareto, de Nucaretuia, 633.
Nogariolas, 523.
Noi
., 287.
Novaliacus, 292.
Noviacum (castrum), 2HH.
NovilïacuE, '.'90.
Novilliacns, 390.
Noviodunum , oppidum des Atdui,
81 , 83; — oppidum et urbs des Bi-
turige», 84; — oppfiJiim des Sue«-
sioneê, 89: — étymologie, 152.
Noviolio, de Novioiolum, 531.
Noviomagua, 154, 531.
Nucerias, 523.
Numerianus, 128.
OcUvianus, 128.
Octodurum, Octodurua, uicu» des Ve-
ragri, 78, 562,
udalrigescus, 557.
Olivetum, 623-6Î4.
Oltioilm, 546.
Orbaaa ivilla), 506.
Orbaniacua, 158.
Orbanicus, 568.
Osieui, 39, n. I.
pacciaoi, 164: Paccianus, 164.
Paciacus, 164.
Paderni (viUa), 482.
- 39, c
Paternacus, 482.
PateroiacuB, 483.
Patorsoga, 482.
Patrii
I, 341.
Pauliacus, 138, * 160.
Pavia, 412.
Paxiscum, 164.
PeteniBca, 548.
Petraria, 604
Petreio (villa). 440.
Pctriacensia ager, 440.
Petrignas, 439.
Petrollum, 541.
PelroDianicum, 576.
Petronianus, 128.
PetroDutius, 364.
Petrosa, 604.
Petrucobti, 39, n. I ; 166.
Piciacus, 292.
PiciONES. leurs oppida, 88 ; — 3il, n. I
Pinariaacha, 588,
Pinelum, lilO, '624.
Piuna, 542,
Pinolio, de Pinoiolum, 542; — 39, n. :
Piper, 484.
Piperacus. 483.
Pisciacus, 293.
Pisiniacum, 157.
PisunïacuB, 157.
Plauciasca, 589.
Pledmoiii, sujets des Neraii, 36.
Pociacus, 293.
Podentiacus, 293.
Pomareda, 633.
Pomedo, de Pomelum, 624,
Pomerido, de Pomai-otum, 633.
Pometum, *624. 034.
Pompeiacum, 294.
Pomponianua, 367.
Pomponius (fisc us), 366.
Ponciacus, 295.
Poncianus, 297.
Poncio, -onis, 516.
PontianUB, 29€.
Ponliliacus, 297.
Pontilianus, 297.
060
INDEX ALPHABÉTIQUE
Porcarias, 612.
Posthimiagiis, 297.
Postumiacus, 297.
Premiacus, 300.
Primiacus, 299.
Prisciacus, 300.
Prisciniacus Ivilla), 97, *30'1.
Priscio (villa), cas indirect, 368.
Prôpertianus, 128.
Pruûaco, cas indirecty 491.
Prunidum, 624.
Prutiuc (Terra an), 176.
Puzenaco, 484.
Puzinnaco, 484.
Quinciacus, 157.
Quincioneto, 516.
Quintascha, 591.
Quintiacus, 156.
Quintiacus-Aurelianus {fundua), 96.
Quintiano, 421 ; Quintianis, 421 ; Quin-
tianus, 157.
Quintilio (ecclesia de), 368.
Rainaldescus, 557.
Ramigescus, 554.
Rattenuc (Les), 176.
Ratumacos, 531.
Radrici, leurs oppida, 88; — 39, n. 1.
Rausedo, de Rausetum, 629.
Raverias, 608.
RED0NE8, 39, n. 1.
Regniaco (de), 393.
Rbmi sont foederati, 29, n.; — leurs
clients, 33; — sujets des Suesstones,
se révoltent, 35 ; — leurs principes,
47 ; — leur sénat , 51 ; — leur fro-
ment, 73; — leurs forêts, 74; — leurs
champs, 77 ; — leurs vici, 78 ; leurs
oppidn, 88; — leurs aedificia, 92;
— 39, n. 1.
Ribarias, 608.
Ricciacus, 160.
Ricomagonsis (vicus), 179.
Rigoialensim, 532.
Rigomagus, 532, 534.
Rioilum, 532.
Ritumagus, 153.
Roboraria, 605.
Roboretum, 605, 616.
Rodolaigas (terminus), 489.
RodoUum, 531, 532.
Roflacns, 306.
Roliacus, 308.
Roma, 570.
Romagnanus, 303.
Romanacus, 486, 487.
Romanasca, 554.
Romaniacus, 303.
Romaniscas, 554.
Romiliacus, 304.
Rominiacus, 303.
Romula (villa), t06; Romulas, 508.
Rosarias, 608.
Rosetum, 629.
Rotomagus, 532.
Roverito, de Roboretum, 625.
Rubridum, 625.
Ruffiacus, 305.
Rufiacus, 305.
Ruiliacus, 308.
Rulliacus, 307.
Rumeliacus, 304.
Rumiliacus, 304.
Ruscoialum, 542.
RuTENi, 34, 39, n. l, 569.
Kutenicus (pagus), 569, 570, n. 2.
RuTULi, 489.
Ruveliascus, 589.
Sabiacus, 309.
Sabiniacas, 126, 127.
Saciacus, 309-310.
Salices (ad), 626.
Salicetus, 626.
Salodurum, 173, n. 2.
Salomacus, 173, n. 2.
Salviacus, 311.
Salviniacus, 312.
Samnione, 516.
Sansiacus, 313.
Santianae, 313.
Baktones, 39, n. 1, 569.
Santonicus (pagus), 569.
Saocitho, de Salicetum, 626.
Sarmasias, 414.
Sarmatae, 413, 414.
Sarmisoliae, 414.
Saviacus, 309.
Savinanicis, 577.
Saviniaco (in villa), 98, n.
Savinianum, 98, n.
DES NOMS DE L^U ANCIENS.
Scociacus. 4t3.
ScoRDiSci, 547.
Scordue (moos), 547.
Scotia (ïiUo), 412.
Scotiolas, 536.
Secundiacft, 313.
Securi&cus, 314.
Sadegeaacas, 499.
SegalariBB, 608.
Sboubiavi, BUjeU des Aedui, 33; —
readus indépendants par Auguste,
39;
Segusium, 560.
Selvaniacus, 312.
Sen-ddn, 152.
Stn-mag, 154.
Senogalo, de Benoiolum, 532.
Benomagua, 154, 532.
Senones, clients des Aedui, 31 ; —
loars rois, 41; — leurs foréls, 75;
— letirs oppida, 88; — leur assem-
blée, 114; — 39. n. 1.
Sentiacus, 315.
Scntianus, 315.
Sequani dépouillés par Arioviste, 20,
Tfi, 105; — clients des Araerni, 33;
leur froment, 72; —leurs forêts, 75;
— s'emparent des champs des -4«ilii(,
76; — leurs oppidt, 89; — leur
pays d'origine, 120; — 39, n. 1.
Servilianam (ad villum), 375.
Scssiacus, 319, 320.
Severiacus, '316-313, 465.
Sexciaceasis, 313.
Sextantio, -onia, 56â. .
Siliacus, 321.
Bilianus, 322.
BiUVANEGTES, sujets des SuenêioneB,
nfTrancbis par Auguste, 39.
Silvaniagus, 3'J2.
Silvanicus, 567.
SiWiacus, 323.
Silvignanicus, 577.
Silviniacus, 325.
Silviniaaus, 325.
Simplicciacus, 325.
Simpliciacua, 326.
Sivarianis (in), 422.
Sociacus, 32G.
Bolemniacus, 327.
Ijolemnis (villa), 502.
Solamnius (Sscua), 370.
Solia, 415.
SoliacuE, 328,
Solicia (vicus), 415.
Solimariaca, 146, 159.
Soliolus, 526.
Solius (locQs), 370.
Bollemniacus, 327.
Sollemniis, 429.
SolmeriacuB, 159, n. 9.
[pagus), 415.
îoloi
i, 150, • 172.
SoNTiATES, leu^s opplda, 89.
Soricariaa, 612.
Sparnacus, 4&2.
Speraacus, 4G2.
Spicarias, 608.
Spinetum, 626, 627.
Bpinogilum, 542.
Btatianus, 128.
Stratebureum, 492.
SUESSETANI, 498.
SucBEiONES, leur prépondérai
35, 36; — leur lutte avec le)
35, 39; — leurs BuJoU,34.3g;
rois, 43; — leurs champs, 76;
opptda,8l,89;— 39, n. 1,5^
Sueasionicus (pagus), 5G9.
Sumeloeenna, 397.
Superiacus, 318.
Tamnach, 174.
Taroduuum. 601.
Tarusco, -onis, 601.
Taruscononienses, 601,
Tarvannensis. 465.
Tarvenna, 465.
Tarvisium, 466.
Tauriacus, 329.
Tauricciacus, 331.
Tauriniacus, 332.
Taurinianus, 333.
Tauhjsci, 547.
Taurisiacus, 332,
Telido, de Tilielum, 627.
Teltaus pagus, 561.
Teodcberciacus, iviii, 145.
Terciacus, 372,
Tercio (in villa), 370.
Terentiauos (fundos), 421.
Teudgariescua, 556.
652
INDEX ALPHABÉTIQUE
Teutobodiaci, 392.
Tbarawaaninsis, 465.
Tiberiacus, 159.
Ticinum, 412.
TiouRiNi, leurs forêts, 75.
Tilia, 416.
Tilietnm, 373.
Tilius (viUa), 372.
TiUiacus, 373, 627.
Tillido, de TUietum, 627.
Togiâciae, 136.
Tollio, -oois, 517.
Torennam castnim, 442.
Tornagus, 503.
Tomolii, génitif, 543.
Tomomagus, 170.
Tremoledo, de Tremaletum, 627.
Trevennaco (finis de), 461.
TREyERi , leurs clients , 36 ; — leurs
principes, 46, 47; — leurs forêts, 74;
— 39, n. 1.
Tricassks, sujets des Lingones, 29, n.;
rendus indépendants par Auguste,39.
Trimlido, de Tremuletum, 627.
Trociacus, 409.
TuUliacnm, 518.
Tulelasca, 586.
Tullum, 374, 504.
Turenna, 463.
Turibriga, 441.
Turicensis, 441.
Turiliacus. 333.
Turissa, 441.
Turnacus. 150, 167, 170, 364, *503.
Turnis (in villa), 503.
Tumncium (viliam), 364.
Turnus (villa), 503.
Turo, cas indirect, 441.
Turobriga, 441.
Turollium, 543.
TuRONi, 39, n. 1.
Turrias (in Castro), 440.
Ucctia, 565.
UlmeU. 628.
Ulmido, d'UImetum, 628.
Unaldescus, 558.
Uriacus, 399.
Uromagus, 399.
Ursiliacus, 387.
Uxellodunum, oppidum des CacCurct,
est compris dans la clientèle (ie
Lucterius, 58, 85; — approvision-
nements de cette ville, 71 : — 152.
Uzeticus (pagus), 565.
Vadoni-mons, ix.
Valentianae, 526.
Valentiniacus, 165.
Valentinianus, 165.
Valentiola, 526.
Valeria (via), 347.
Valeriacus, 145.
Valeriana, 375; Valerianus, 128, 145.
Valeris, 429, 430.
ValUano, 96, 99.
Varcia, 166.
Variana, 375, 421 ; Varianis, 421.
Varoiol, 543.
VasUlus (viUa), 503.
Vassiacus, 333.
Vauro, de Vaurus ou Vaurum, 349.
Velatudurum, xi.
VelQia (Table alimenUire de), 127-129,
Veliocasses, 39, n. 1.
Vellaunodunum , oppidum des Seno-
nés, 89, 152.
Vellavi. sujets des Arvemi, 34; —
affranchis par Auguste, 39 ; — 569.
Vellavicns (pagus), 569.
Velleianus, 128.
Vencione, 518.
Vendecia (viUa), 416.
Vendoilo, de Vindoiolus, 532, 533.
Venelli, 39, n. 1.
Venerianicus, 577.
Veneti, leur sénat, 50 ; — leur froment,
72 ; — leurs champs , 77 ; — leurs
oppida, 90.
Vennasca, 600.
Venzascus, 589.
Veraglasca (fluvius), 586.
Veraori, leurs oici, 78.
Vemeto, 629; Vemetnm, 544.
Vemiacus, 544.
Vemolio, de Vemoiolnm, 543.
Verolias, 544.
Vesontio, -onis, oppidum des Sequmi^
89.
Vibianus, 128, 129.
Vibiscus, 548.
Victoriacus, 334.
DES NOMS DE LIEU ANCIENS.
Victriacam, 33S.
VietoriacoD, 334, n.
ViliaenB, 336.
ViUunB, 336.
Viliosctu, 336. 596.
ViUiactu, S96.
ViUoniau, 585.
Viminans (pagns), 561.
Vinciacus, 336,
Vindanacft, 600.
Vîndiacensis, 337.
Vindiciacua, 337, 116.
Vindobona, 584.
Vindobriga, zni.
Vindomagaa, 533.
Viadonissa, 534. 583.
Vinecia (villa), 416.
VineUacft (flnTins), 586.
Violarias. 609.
Viriocensis ager, 454.
VirianuH, 128.
Viailia, 417.
Visiliaco (ïillam), 417.
Vitlena(TiUa]. 466.
Vitrosco, de Victorio*
Vitudarum, zi.
ViTUHii LangeneM, 581
ViviBCi (Bitnriges), 54S
ViviacD, ca« indlracl,
VOLCAB Arecomici, 1'
119(1).
Vnlpeglariai, 613.
Wftriacna, 33S. Vojei
Wosduc (Ticarinm), 17
(1) Quand j'ai expoaé la doctrine Boiit«nue dans ce psasage, je
pas encore les concluaions que H. Hirachfsld tire de la lectur
lui poar l'ineeription 1028 du toroe XII du Corpus intcriplion
Cette inscription, trouvée i Avignon, mentionnerait un prèti
Arecomict; le pouvoir de ce préteur se serait étendu au territo
c'est.i-dire sur la rive gauche du Rhône. H. Hirschreld croit qu
tian est antérieure i l'empire romain, et probablement contei
dictature de César, 48-44 av. J.-C. (C. /. L., XJI, p. 346, 381).
INDEX AIPHABETIQUE
NOMS DE LIEU MODERNES
Achères, 55?, *6t0.
Acherolles, 522.
Achey, 195.
Achy, 195.
Acigné, 187.
Aguisy, 189.
Aiguillan, 377.
Aiguillanes, 377.
Aiguillon, 377.
Aiguisy, 190.
Aillac, 193.
AiUy, 192.
Ainay, 490.
Aire-sur-la-Lys, 379.
Aix (Pas de-Calais), 351.
Aix-en-Provence, 320.
Albagnao, 378.
Albi, 378.
Albiac, 190.
Albignac, 192.
Albussac, 509.
Aleuçon, 514.
AUemagD», 413, 415.
AUibaudières. 613.
Alzoïme (Font d'), 520.
Ambazac, 445.
Ambillon, 561.
Amboise, 443.
Ameugny, 432, 433.
Amillis, 349.
AmiUy, 348, 349.
Amognes (Saint-Jean aux)
432, 433.
Ance, 378.
Anoey, 379.
Ancy, 379.
Andelal, 563.
Andelot, 562.
Andelys (Les), 563.
Andeniach, 172, 562.
Andillac. 563.
Andillé, 668.
Andillon, 563.
Andilly, 563.
Andusenque, 570.
Anduze, -570.
Angeac, 193.
Angers, xii.
Anis (Mont), 350.
Anisy, 350.
Anizy. 193.
Ansac, 379.
Ansan. 379.
Ansauvilliers, vu.
Anse, 378.
Anthenay, 457.
Antogné, 351.
Antogny, 140, 351.
Antoigné, 140.
Autoigny, 140.
Antoingt, 350.
Aniona, 562.
656
INDEX ALPHABÉTIQUE
Antonaves, 173, 562.
Antony, 11, 140, 351.
Apilly, 195.
Apoigny, 196.
Arçay, 383.
Arces, 382.
Archignat, 196.
Arciat, 384.
Arcieux 384.
Arcis-sur-Aube, 383.
Arçon, 510.
Arcy, 383, 384.
Argentay, 491.
Argenteuil, 531, 533.
Argenton, X, 494.
Argentré, 493.
Arjac, 381.
Arles, 549.
Arras, 183, 397.
Arsac, 384.
Arsague, 384.
Artenac, 456.
Artenay, 456.
Arthenac, 456.
Arthenas, 456.
Arthonnay, 495, 598.
Arthun, xii, 383.
Artonne, 495.
Arzac, 384.
Arzaga, Arzago, 384.
Asellac, 467.
Asnières, 610.
Assé*, 187, 383.
Athée, 401, 433.
Athies, *402, 433.
Attigny, 198.
Aubagne, 377.
Aubagnan, 377.
Aubagnat, 378.
Aubiac, 190.
Aubiat, 190.
Aubignan, 192.
Aubigné, 192.
Aubigney, 192.
Aubigny, 191, 192.
Aubussargues, 571.
Aubusson, 509.
Aulnay, 172, *616, 617.
Aulnois, 617.
Aulnoy, 617.
Aunay, 616, 617.
Aunois, 617.
Aureilhan, 145.
Aureillac, 145.
Aurelhargues, 571.
Auriac, 427.
Aurillac, 145, 434.
Auteuil, 545.
Autun, 154.
Auxerre, 546.
Avallec, 176.
Avallon, 153.
Avançon, 510.
Avanton, 510.
Avenay, 453.
Avenche, 510.
Avéne, 463.
Avenières fLesi, 606.
Avensac, 510.
Avensan, 510.
Averdon, 169, n.
Avessac, Avizac, 138.
Avignon, 518, 653, n.
Avignonet, 519.
Avrolles, xi, 169.
Aydat, 145.
Aygu (N.-D. d'), 153.
Azerat, 468.
Banazlec, 176.
Barbayrac, 402.
Barberey, 165, *403.
Barbières, 434.
Barbirey, 403.
Bareil, 534.
Barnay (Le), 496.
Bassigny, 200.
Baugy, 199.
Bayeux, 154.
Beaune, 179.
Beauvais, 154.
Bègue (Le), 599.
DES NOHB DE LIEU MODERNES.
Beligneux, 343.
Belleueuve, 563.
Berbirey, 165.
Bernac, 496.
Bemay, 496.
Bemy, 495.
Berthenay, 488.
Bessay, 342.
Bessenay, 458.
Bessey, 593.
Bethencourt, vni.
Beuzec, 138, m.
Beysaac, 593.
Billancourt, 13.
Bissy, 468.
Blacy, 201.
Blagny, 598.
Blandy, 163.
Blangy, 163.
BlaDot, 593.
Blanzac, 163.
Blanzal, 163.
Blanzay, 163.
Blanzy, 163.
Blesmes, 181.
Blevec (Le), 176.
Bligny, '343, 418.
Blismes, 181.
Blois, 505.
Boisset (Le), 618.
Boissey, 619.
Boisay, 617, 619.
Bonac, 469.
Bonnac, 469.
Bonnat, 469.
Bonnay, 469.
Bonneil, 536.
Bonoeuil, 535, 536.
Bonnœil, 535, 536.
Bonaœuvre, 536.
Bossay (Pont de) , 618.
Bougivai, vni, 12.
Bouiilargues, 571.
Boulaie, 617.
Boulayi 617.
Boulaye, 617.
Boulois, 617.
Bouloy, 617.
Bourges, 151 , 565.
Boumac, 497.
Bournan, 497.
Bournay (Saint-Jean de), 491
Bournhounesque , 556.
Boussy, 202.
Boutenac, 458.
Bracy, 352.
Bragny, 400.
Braisne, 400.
Brandon, 400.
Branoux, 598.
Bras d'Asse, 352.
Brassac, 352.
Brenac, 496.
Brenal, 495, 496.
Brenay, 495.
Brene, 496.
Brenna, 496; Brenno, 496.
Breteuil, 536.
Brethenay, 488.
Breligney, 202.
Bretigny, 202.
Brevenne (rivière), 565.
Briare, 153.
Briec, 138.
Brignac, 496.
Brigné, 496.
Brignon, 510.
Brioude, 153.
Brissac, 599.
Brissy, 599.
Brixey, 599.
Bruguec, 176.
BrUnn, 169.
Bucey, 202.
Bucy, 202, 618.
Buissière (La), 606.
BulhoD, 511.
Burey, 203.
Bury, 203.
Busît, 177.
Bussiëre (La), 606.
42
658
INDEX ALPHABÉTIQUE
Bussières, 606.
Bussy, 202.
Cabriac, 435.
Cadarot (N.-D. de), 600.
Cadola, 501.
Cagnosc (Saint-Jean de), 211,
594.
Cahors, 154.
Caissargues, 572.
Cambon, 181.
Cambrai, 512.
Campagnac, 210.
Campagnan, 210.
Campelles (Saint-Etienne de),
438.
Campénéac, 210.
Campigny, 210.
Canac, 472.
Cantillac, 369, 376, 583.
Cantilly, 376.
Capdenac, 473.
Carancy, 146.
Carency, 211.
Carennac, 458.
Carnac, 489.
Casneda, 629; Casnedo, 629.
Cassago, 143.
Cassanigo, 572.
Castanet, 619.
Caugé, 158.
Caugy, 158.
Caujac, 158.
Caux, 428.
Cavagnac, 475.
Cavaillon, 519.
Caverzago, 157.
Cazillac, 488.
Cepet, 406, 620.
Cepoix, 620.
Cepoy, 406.
Cervières, 611.
Cessey, 320.
Cessieu, 320.
Cessy, 320.
Chabriac, 435.
Chabris, 434.
Chacé, 213.
Chaillac, 204.
Chaillé, 204.
Chailley, 204.
Chaillot, 537.
Chailly, 204, 470.
Chalias, 205.
Chalnac, 472.
Chalon-sur-Saône, 83.
Châlons-sur-Marne, 404.
Châlons (Mayenne), 538.
Chalus, 363.
Chambéry, 206.
Chambly, 207.
Chambon (Le), 599.
Chambost-Longessaigne, 599.
Chamilly, 162.
Chamolay, 356.
Chamouillac, 356.
Chamouille, 356.
Chamouillet, 356.
Cbampagnac, 210.
Champagnat, 209, 210.
Champagne, 208, 210.
Charapagneux, 210.
Champagney, 210.
Champagny, 210.
Champigné, 210.
Champigny, 208, 210.
Champillet, 438.
Champlost, 600.
Chanac, 471, 472.
Chanat, 471.
Chaney, 472.
Channay, 210, 638.
Chantelle, 375-376.
Chantesse, 582.
Chanteuges, 538.
Chantillac, 376, 583.
Chantilly, *376, 583.
Chantonay, 582.
Chaource, 403.
Chapelle sous Brandon (La) ,
603.
Chaponnière (La), 611.
DES NOMS DE LIEU MODERNES.
659
Charancey, 146.
Charancieu, 146, 211.
Charantigny, 146.
Charcé, 213.
Charencey, 211.
Charency, 146, 212.
Charensat, 212.
Charentay, 212.
Charentonnay, 566.
Chargnac, 489.
Chargnat, 489.
Charnay, 488, 489.
Charny, 489.
Charonne, 600.
Chassé, 143.
Chasseneuil, 531, 533.
Chassenon, 531, 567, n. 2.
Chassey, 143.
Chassiecq, 143.
Chassieu, 143.
Chassigneu, 165.
Chassigny, 165.
Chassy, 143.
Chastelux, 364.
Chastenay, 619, 620.
Ghâtenay, 619, 620.
Châtenet, 620.
Chatenois, 620.
Châtenoy, 620.
Châtillon, 364.
Chaudion, 511.
Chaulhac, 217.
Chaussy, 216.
Chavagnac, 475.
Chavagné, 475.
Chavagnieu, 475.
Chaversey, 158.
Chelieu, 214.
Chelles, 538.
Chelsey, 429.
Chemilla, 162.
Chemillé, 162, 207.
Chemilli , 162.
ChemilW, 162.
Chêne-chenu, 466.
Chêne vières, 607.
Chenove, 472, 563.
Cheny, 210.
Chepoix, 620.
Cherancé, 146.
Cherencé, 146.
Chéry, 524.
Chesnay, 628.
Chesnois, 628.
Chesnoy, 628.
Chessy, 143.
Cheu, 405.
Cheverny, 435, 605.
Chevery, 435.
Chevinay, 458.
Chevregny, 436.
Chevresis, 158.
Chevrey, 435.
Chevry, 435.
Chigné, 210.
Choilley, 217
Choisey, 216.
Choisies, 216.
Choisy, 215, 216.
Chorges, xi, 404.
Chouilly, 216, 217.
Choussy, 216.
Chouzé, 216.
Chouzy, 216.
Ciran, 182.
Civrac, 318.
Civray, 318.
Civrieux, 318.
Civry, *318, 465.
Clapiers, 220.
Cleppé, 220.
Cléneux, 218.
Clermont-Ferrand, 154.
Clichy, 11, 218, 219.
Clignancourl, 12.
Clion, x.
Colchester, 354.
Collemiers, 611.
CoUobrières, 611.
Cologne, 142.
Colombey, 612.
Colombier, 611, 612.
660
INDEX ALPHABÉTIQUE
Colombier-Saugnieu, 566.
Colombiers, 612.
Comeré, 357.
Comiac, 222.
Gommiers, 357.
Communay, 476.
Congé, 148. 222.
Congis, 148.
Corbeil, 539.
Corbeny, 497.
Corbiguy, 498.
Corenc, 464.
Corneilhan, 358.
Corneilla, 358.
Corneillan, 358.
Cornil, 357.
Cornillac, 358.
Cornille, 357.
Cornillé, 358.
Coniillon, 512.
Cossé, 220.
Cotte, 505.
Cottieniies (Alpes), 499.
Coucy, 573.
Coudraie (La), 620.
Coudray (Le), 620.
Courçais, 225.
Courçay, 225.
Courchon, 512.
Courçon, 512.
Courcy, 226.
Courson, xii, 512.
Courtenay, 458.
Coussergues, 573.
Coutances, 422.
Crannach, 175.
Cransac, 211.
Cranton, x, 167.
Crécy, 222.
Crépigny, 224.
Crépy, 223.
Crespian, 223.
Cres[)igny, 224.
Cressac, 223.
Cressey, 223.
Cressy, 223.
Créteil, 540.
Crognac, 225.
Crogny, 224, 402.
Croix-Nord, 370.
Cuinchy, 156.
Cuincy, 156.
Cuiry, 595.
Cuisy, 227.
Cuizy, 227.
Curçay, 225.
Curiusque, 594.
Cusey, 227.
Cuzac, 227.
Daumazan, 340.
Deneuvre, xiii.
Derrien (La Roche-), 398.
Dicy, 409.
Dijon, 520.
Dizy, 227, 409.
Dompnac, 477.
Donzac, 230.
Donzacq, 230.
Donzy, 230.
Doucey, 229.
Doucy, 229.
Doussay, 228, 229.
Douvres, 178.
Douzy, 229.
Drenek, 176.
Drishaghaun, 174.
Droussac, 230,
Eause, 520.
Ebreuil, 499.
Ecosse, 14.
Ecuisse, 526.
Eguilly, 377.
Embrun, 169.
Engins, 361.
Epagne, 410.
Epagny, 410.
Epinay, 542, 627.
Epiniac, 410.
Espagnac, 410.
Essarois, 630.
DES NOMS DE LIEU MODERNES.
Eure (rivière), 151, 565.
Evre (rivière), 151, 565.
Evreux, 565.
Evry, 169.
Fabiaiio, 438, n. 9.
Page, 439.
Fagel, 621.
Fajac, 439.
FaveroUes, 522.
Favières, 522.
Fay, 621.
Feoay, 455.
Ferrairie (La), 604.
Ferrières, 603.
Fézensac (Vic-de-), 340.
Ficarelo, 632.
Figaret, 632.
Figeac, 232.
Firminargues, 573.
Flacé, 233.
Flacey, 233.
Placj, 233.
Flagy, 595.
Flaugeac, 236.
Flaujac, 235.
Flaviac, 235.
Flavignac, 236.
Flavigny, 236, 236.
Flavy, 235.
Flayosc, 595.
Flesccach, 175.
Fleuré, 237.
Fleurey, 236, 237.
Fleurian, 237.
Pleurieu, 163.
Fleurieui, 163, 237.
Fleury, 163, 237.
Fley, 595.
Floirac, 163, 237.
Florian, 237.
Fly (Sainl-Germer de), 596.
Foissac, 238.
Foissiat, 238.
Foissj, 237, 238.
Fonlanedo, 632.
10.
Fonlenay, 631, 632
FoQtenois, 632.
Fonleuoy, 632.
Fragny, 349.
Fraissiuet, 621.
Frayssinet, 621.
Frenay, 621.
Preney, 621,
Fresnay, 621.
Presne, 609.
Fresnes, 609.
Fresney, 621.
Presniéres, 609.
Presnois, 609, 621 .
Fresuoy, 621.
Freycenet, 621.
Freyssenet, 621.
Fronsac, 459, n.
Frontenac, 459.
Froatenas, 459.
Frontenay, 459.
Fuisse, 238.
Oabriac, 436.
OaiUac, 239.
GaiUon, 513.
Oalargues, 576.
Gemigny, 159.
Génetay, 622.
Genève, 151.
Genevraie (La), 622.
Genevray, 622.
Genevraye (La), 622.
Genevriére (La), 607.
Genissac, 242.
Geniasieux, 241.
Gensson, 513.
GenliUy, 242.
Germagnat, 244.
Germagny, 244.
Gerraay, 541.
Germenay, 244.
Germignac, 244.
Germigney, 244.
Germigny, 242, 243, 244.
Gesvres, 436.
662
INDEX ALPHABÉTIQUE
Gevrey, 436.
Geyssans, 245.
Gissac, 245.
Gissey, 244, 245.
Gondreville, vi.
Gouezec, 138, 177.
Goules, 507.
Goupillières, 613.
Gragnague, 248.
Gravières, 604.
Grazac, 246.
Grazay, 245, 246.
Grignan, 248.
Grignon, 513.
Grigny, 248.
Gréasque, 246, 593.
Gresillac, 410.
Grésillé, 410.
Gressey, 246.
Gressy, 246.
Grésy, 246.
Greux, 358.
Grézac, 246.
Grézian, 247.
Grézieu, 246.
Grézieux, 245.
Guéry, 339.
Guillotière (La), 613.
Gusargues, 571.
Halphen, 155, 191, 421.
Herry, 381.
Heyneux, 381.
Irlande, 13, 14, 637.
Is-en-Basigny, 361.
Is-sur-Tille, 359.
Isernore, 184.
Issac, 361.
Isse, 361.
Issé, 361.
Issoire, xii, 148, 182, 360.
Issy, 148, 360.
Ivry, 169.
Izeure, 360.
Izeures, xii, 148, 182, 360.
Jailly, 239.
Jallieu, 239.
Jansac, 513.
Jausiac, 513.
Janson, 513.
Janzé, 251.
Jeugny, 253, 254.
Joncherais, 633.
Joncheray, 633.
Jonchère, 523.
Jonchère (La), 605.
Jonchéres, 523, 605.
Joncherolles, 522, 523.
Jonquièro, 523.
Jonquières, 523.
Jonzac, 251.
Jonzieux, 251.
Jouaignes, 253, 254.
Jouancy, 252.
Joué, 239, 241.
Jouet, 240, 241.
Jouey, 241.
Jouy, 240, 241.
Juillac, 141.
Juillan, 142.
Juillé, 141.
Juilley, 141.
Juilly, 141.
Julhans, 142.
Juliers, 141.
Jullians, 142.
Jullié, 141.
JuUy, 141.
Jumigny, 159.
Juvigné, 254.
Juvignies, 254.
Juvigny, 252, 254.
Kerapeniac, 138.
Kent, 179.
Lançon, 362, 513, 514.
Laiigres, 388.
Lans, 361.
Lantenay, 460.
Lanihenay, 460.
DES NOMS DE LIEU MODERNES.
Lantignie, 362.
Lantiïlac, 362.
Lantilly, 362.
Lanzac, 362.
Larrey, 249.
Lassois (Mont). 549.
Lasson (La Chapelle), 514.
Launay, 617.
Launois, 617.
Launoy, 617.
Lauret Sauteyrac), 622.
Lavaur, 349.
Leacach, 175.
Légé, 411.
Lelgnon, 514.
Lembronf Saint-Germain), 254,
554.
Lentigny, 362.
Lentilliac, 362.
Lenliily, 362.
Lésignat, 256.
Lésigné, 256.
Lésigny, 255, 256.
Leuilly, 263.
Lézignan, 257.
Lézignieux, 256.
Lézinnes, 257, 439.
Ligeay, 411.
Lignères, 608.
Lignerolles, 523.
Ligoières, 523, 607.
Lilhac, 258.
Lillebonne, 585.
Lilly, 258.
Limoges, 154.
Linières, 607.
Linz, 460.
Liverdun, xiii, 479.
Livré, 479.
Livry, 479.
Llydaw, 560.
Loches, 363.
Lotlève, 507.
L.œuilly. 263.
Loucé, 260,
Louchj, 264.
Loupiac, 264.
Loupian, 264.
Louppy, 264,
Luçay. 260.
Lucé. 259, 260.
Lucenay, 455.
Lucey, 259, 260.
Luchy, 259, 261.
Luçon, 515.
Lucy, 261.
Lugan, 365.
Lusignan, 155, 257.
Lussac, 258, 261.
Lussan, 261.
Lussat, 261.
Lusson, 515.
Lux, 363.
Luynes, 266.
LuziUat, 262.
Luzillé, 261.
Luzinay, 455.
Maçon, 550.
Magnac, 266.
Magnan, 266.
Magné, 266.
Magnien, 266.
Magnieu, 266.
Magny, 265, 266.
Mailhac, 267, 574.
Maillac, 574.
MaiUane, 267.
Maillé, 266, 267.
Mailley, 267.
Mailly, 267.
Maincy. 268.
Mainz, 418-
Mairé, 276.
Mairy, 276.
Maixe, 275, 411.
Maizeray, 480.
Malay, 482.
Maiicey, 268.
Mancy, 268.
Manhac, 266.
Maray, 276.
664
INDEX ALPHABÉTIQUE
Marçay, 274.
Marcé, 274.
Marcello, 502.
Marcenat, 454.
Marcenay, 454.
Marcenet, 454.
Marcey, 274.
Marchiennes, 274.
Marciac, 274.
Marcieu, 274.
Marcieux, 274.
Marcillac, 146, 269.
Marcillat, 146, 269.
Marcillé, 146, 268.
Marcilly, 146, 269.
Marcilly d'Azergues, 607.
Marc-la-Tour, 502.
Marçon, 515.
Marcoux, 446.
Marcy, 274.
Mareil, 529, 530.
Mareuil, 529, 530.
Marey, 276.
Mariac, 276.
Marigna, 278.
Marignac, 164, 277.
Marignana, 164.
Marignane, 164.
Marignano, 164.
Marigné, 164, 278.
Marigneu, 164.
Marignier, 278.
Marigny, 164, 277, 278, 366.
Marillac, 482.
Marinesques, 553.
Marmagne, 413, 414.
Marmogen, xi.
Marnay, 278 n., 366.
Marolles, 281, 525.
Marsac, 271, 274.
Marsan, 275.
Marsannay, 454.
Marsas, 270, 274.
Marsat, 270.
Marseillan, 270, 274.
Marsillargues, 594.
Marsilly, 269.
Marson, 515.
Martigna, 279.
Martignac, 280.
Martignargues, 575.
Marti gnas, 279.
Martignat, 279.
Martigné, 279.
Martigny, 278, 280.
Martigny-en-Valais , 562.
Martinesque, 553.
Mary, 280.
Massillac, 574.
Massillargues, 574.
Mauriac, 281, 282, 290.
Mauriat, 282.
Maurisque, 553.
Maxey, 274.
Mayence, 418.
Maynal, 425.
Mayrinhac, 278 n.
Mazerac, 480.
Mazeray, 480.
Meilhac, 283.
Meillac, 283.
Meilly, 283.
Mequeroil, 526.
Mercey, 271.
Mercœur, 446, 447.
Mercurago, 447, n. 7.
Mercurey, 447.
Mercurio, 446, n. 7.
Mercury, 447.
Mercy, 274.
Méré, 280.
Mérey, 276, 280.
Mérignac, 278.
Mérignargues , 575.
Mérignas, 278.
Mérignat, 278.
Mérigny, 278.
Merlau, 564.
Merloux, 564.
Merrey, 281.
Merry, 281.
Méry, 276.
DES NOMS DE LIEU MODERNES.
665
Merzé (Saint-Jean de), 270.
Meslay, 481.
Mesle, 564.
Messay, 425.
Metti, 425.
Metz, 154, 423, 425 n. 6.
Meuse, 561.
Meyrargues, 575.
Mezeray, 480.
Mezeriat, 481.
Miceriac, 165.
Milhac, 283.
Millac, 284, 348.
Millau, 153.
Milly, 284.
Miserey, 165.
Misery, 165.
Missery, 165.
Missiriac, 165.
Moiré, 282.
Moirey, 281, 282.
Moiry, 282.
Moissac, 286, 287.
Moissat, 286, 287.
Moissey, 287.
Moissieu, 287.
Moissy, 287.
Montagna, 285.
Montagnac, 285.
Montagnat, 285.
Montagne, 284, 285.
Montagney, 285.
Montagnieu, 285.
Montagny, 285.
Montegiove, 448.
Montegiovi, 448.
Montenay, 285.
Mouteu da Po, 546.
Moutignac, 284, 285.
Montigné, 284, 285.
Montigny, 285.
Montluçon, 515.
Montmagny, 266.
Montmorency, 340.
Morancé, 34 ï.
Morancez, 341.
Morancy, 340.
Moreac, 282.
Morenchies, 341.
Morey, 282.
Morlaye (La), 486.
Mory, 281, 282.
Moussac, 287.
Moussey, 287.
Mousson, 596.
Moussy, 287.
Mouzon, 153.
Mussey, 516.
Mussy, 516.
Naiguières, 603.
Neris, x, 155, 346.
Neufvy, 289.
Neuillac, 292.
Neuillay, 292.
Neuillé, 292.
Neuilli, 292.
Neuilly, 292.
Neulliac, 292.
Neuvilley, 292.
Neuvilly, 292.
Neuvy, 289.
Nevers, 83.
Nevy, 289.
Nissan, 350.
Nogarè, 633.
Nogarède, 633.
Nogaredo, 633.
Nogaret, 633.
Nogna, 288.
Noiseau, 623.
Noisy, 623.
Nouaillé, 292.
Noyers, 609.
Noyon, 531.
Nueil, 531, 534.
Nuillé, 292.
Nully, 292.
Orange, 520, 569.
Orbigny, 158.
Orçay, 385.
666
Orléans, 412, 422.
Orlhac, 145, 434.
Orlhaguet, 434.
Orliac, 434.
Orliaguet, 434.
Orly, 145, 434.
Ormoy, 628.
Orry, 198.
Orsay, 385.
Pacé, 164.
Pachan, 412.
Paché, 412.
Pacy, 164.
Pagney, 483.
Pagny, 483.
Paissy, 164.
Parcay, 342.
Parce, 341, 342.
Parcey, 342.
Parcy, 342.
Parthenay, 491.
Passy, 164.
Payerne, 483.
Pebrac, 483.
Pécy, 293.
Peillac, Poliac, 138.
Pénide (La), 624.
Percey, 342.
Percy, 342.
Pernay, 482.
Pérolet (Le), 541.
Perrecy, 341.
Perreuse, 604.
Perreux, 604.
Perrier (Le), 604.
Perrière (La), 604.
Perrières, 604.
Pessac, 293.
Pessat, 293.
Petrigniano, 439, n. 5.
Petrognano, 439, n. 6.
Pibrac, 483.
Pinay, 624.
Pinède, 624.
Pinet, 624.
INDEX ALPHABÉTIQUE
Pineuilh, 542.
Piney, 157.
Pissy, 293.
Pizy, 293.
Ploermel, 387.
Poinchy, 297.
Poinçon, 516.
Poincy, 297.
Poinsenot, 516.
Poinson, 516.
Poisson, 516.
Poivre, 484.
Pomaréde, 633.
Pomet, 624.
Pommeraie (La), 633.
Pommeray, 633.
Pommeraye (La), 633.
Pommerit, 634.
Pomoy (Le), 624.
Pompejac, 295.
Pompiac, 295.
Pompignac, 367.
Pompignan, 367.
Pompogne, 367.
Poncé, 295, 297.
Poncey, 294, 297.
Ponsan, 296.
Ponson, 516.
Pontailïer, 297.
Pontiacq, 297.
Pontoise, 153.
Pontpoint, 366.
Porquières, 612.
Potangey, 297.
Pouançay, 294.
Pouancé, 294.
Poznac, 484.
Prangey, 299.
Précey, 301.
Précigné, 302.
Précy, 300, 301.
Prenois, 625.
Prény, 624.
Pressac, 301.
Pressagny, 301, 302.
Pressignac, 302.
DES NOMS DE LIEU MODERNES.
Pressigny, 301, 302.
Pressy, 301.
Prétieux, 301.
Preuil, 541.
Preyssac, 301.
Prignes, 439.
Pringv, 300.
Prisse", 300.
Prunay, 625.
Prunet, 625.
Prunoy, 625.
Puy (Le), 350.
Puyloubier, 612.
Quautilly, 369.
Queiroles, 524.
Queleimec, 176.
Quellenec, 176.
Queudes, 508.
Quierzy, 212.
Quincay, 156.
Quiûcé, 156.
Quincey, 1.56.
Quincié. 156.
Quiiicieu, 156.
Quincieux, 156.
Qiiincy, 15G.
Quinsac, 156.
Quinsaiiies, 157.
Quinson, 516.
QuintillargLies {Sle-Croix de),
576.
Radepont, 153.
Kaviéres. 608.
Regney, 393.
Regiiy, 393.
Reiguac, 393.
Reignat, 393.
Reigiiy, 393.
Remagen, 532.
Remeréville. 490.
Reinilly. 304, 305.
Résigny. 255. 256.
Reuil, 531.
Reiiilly, 304.
Revigliasco, 589.
Rigiiac, 393.
Rigné, 393.
Rigneux, 393.
Rigny, 393.
Riom, 179, 532.
Roffey, 307.
Roilly, 308.
Romagiiat, 303, 304.
Romagné, 304.
Romagnieu, 304.
Romagny, 304.
RoDianéche, 554.
Romeny, 303.
Romignv, 304.
Romillé,' 305.
Romilly, 305.
Rosey, 629.
Rosières, 608.
Rosoy, 629.
Rotlenburg, 397.
Rouen, 532.
Rouergue, 569, 570, n. 2
Roiifflac, 305, 307.
Rouffy, 307.
Roiiillac, 308.
Rouillé, 309.
Rouilly, 307, 309.
Roumigny, 303.
Roumoulcs, 508.
Houvray, 625.
Rouvrois, 626.
Rouvroy, 626.
Hozières, 608.
Rozoy, 629.
Ruffec, 307.
Ruffey, 305, 307.
Rufflac, 306, 307.
Ruffleu, 307.
Ruffieux, 307.
Ruillé. 309.
Rully. 309.
Kuniigny. 304.
Rumilly, 305.
Sacé, 311.
1
668
INDEX ALPHABÉTIQUE
Sacey, 311.
Sache, 309.
Sachy, 309.
Sacy, 311.
Sagy, 309.
Saint- Apollinaire, 377.
Saint-Bonnet, 179.
Saint-Claude, 548.
Saint-Denis, xviii, 214.
Saint-Eny, 461, n. 2.
Sainte-Sévère, xi.
Saint-Julien présCazillac, 446.
Saint-Maurice en Valais, 153,
178.
Saint-Ulphas, 193.
Saintonge, 569.
Salviac, 312.
Sansac, 313.
Sansais, 313.
Sansan, 313.
Sanssac, 313.
Sanssat, 313.
Santenay, 460.
Sanxay, 313.
Sanzay, 313.
Sanzey, 313.
Sauchay, 626.
Sauchy, 626.
Saugey, 312.
Saujac, 312.
Sauiat, 311.
Saulcy, 626.
Sausay, 326.
Saussaye (La), 626.
Sausset, 626.
Saussey, 626.
Saussoy, 626.
Sauviac, 312.
Sauvian, 312.
Sauviat, 312.
Sauvignac, 312.
Sauvigney, 312.
Sauvigny, 312.
Sauxillanges, 573.
Savigna. 126.
Savignac, 126, 322.
Savignargues, 577.
Savignat, 126.
Savigné, 126.
Savigneux, 126.
Savigny, 126.
Savy, 309.
Schardag, 547.
Séchy, 407.
Secondigné, 314.
Secondigny, 314.
Segonzac, 314.
Selvigny, 325.
Seneuil, 532, 534.
Senlis, 154.
Sepian, 407.
Sermizelles, 414.
Sermaise, 413, 414.
Sermoise, 413, 414.
Servais, 323.
Servières, 611.
Séverac, 318.
Sevignac, 126.
Sevigny, 126.
Sevrai, 318.
Sevrey, 318.
Sevron, 465.
Sevry, 318.
Sexey, 320.
Shannon, 152.
Silhac, 322.
Sillé, 322.
Silley, 322.
Silli, 322.
Silly, 322.
Sincey, 316.
Sinzig, 315.
Sissy, 320.
Sivry, 318, 465.
Soissons, 422.
Soisy, 327.
Solesmes, 370.
Sommeré, 169, n. 9
Sonnay, 172.
Souillac, 328, 329.
Souillaguet, 329.
Souillé, 328, 329.
r
DES NOMS DE LIEU MODERNES.
Souilly, 329.
Soulaines, 429, 431.
SouUiol, 526.
Soulosse, 415.
Souricières (Les), 613.
Spay, 407, 620.
Spernec, 176.
Spoj, 405, 620.
Strasbourg, 492.
Sully, 328, 329.
Suse, 560.
Talou, 561.
Tamnach, 174.
Tarascon, 601.
Tauern, 547.
Tauriac, 330.
Taurignan, 333.
Tauriuya, 333.
Teil (Le), 416.
TeiUet, 627.
Telle (rivière), 56t.
Tersac, 372.
Terssac, 372.
Terzé, 372.
Theil, 416.
Thil, 372.
TMUy, 873.
Thoiré, 330.
Thoiry, 330.
Thoré, 330.
Thorey, 331.
Tliorigné, 332.
Thorigny, 332.
Thoury, 330.
Thuilley, 517.
Thuré, 331.
Thurey, 331.
Thury, 331.
Tilcuay, 627, n. 3.
Tillay, 373, 627.
Tille, 373.
Tillet, 372.
Tilly. 627.
Tonnerre, xii.
Toroé, 331.
Torcieu, 331.
Torciac, 331.
Torcy, 331.
Torigny, 333.
Toniac, 503.
Tornaco, 503.
Tornago, 503.
Tornano, 503.
Tornay, 503.
Torsac, 331.
Torié, 331.
Touche (La), 499.
Touille, 517.
Touillon, 517.
Toul, 504.
Tour (La), 503.
Toureil, 543.
Tourliac, 333.
Tourly, 333.
Touraac, 364.
Tournai, 170.
Tournay, 364, 503.
Tournhac, 364.
Tourniac, 364.
Tournoel, 543.
Tournoo, Xll, 170.
Tourny, 364, 503.
Tours, 154.
Tours-sur-Marne. 503.
Toury, 331.
Tremblay, 627.
Tremblois, 627.
Tremilly, 627.
Tressé, 372.
Trévise, 466.
Trocy, 409.
Troussey, 409.
Troyes, 585.
Turenne, 442.
Turenno, 442, n. 7.
Turiano, 440, n. 5.
Turro, 441, n. 12.
Ury, 399.
Usson, II, 148, 360.
Uzes, 565.
670 INDEéL< ALPHABÉTIQUE DES
Vairé, 339.
Valençay, 527.
Valenciennes, 527.
Valençon, 527.
ValensoUe, 526.
Valentigney, 165.
Valentigny, 165.
Vallery, 145, 431.
Valléry, 145.
Vallières, 430, 431.
Valmaillargues, 574.
Vandenesse, 534, 583.
Vandœuvre, xiii.
Vandré, 578.
Vassel, 503.
Vassy, 333.
Vaudemont, ix.
Vaudreuil (Le), 532.
Vayrac, 339.
Velleret, xi.
Venasque, 600.
Vendargues, 577.
Vendenesse, 534, 583.
Venderesse, 583.
Veiideuil, 532, 533.
Vendeuvre, xiii.
Vendresse, 583.
Venissieux, 417.
Venizy, 417.
Vennecy, 417.
Venosc, 600.
Vernay, 617, 630.
Verneil, 543.
Veniet (Le), 617, 630.
Verneuil, 543.
Vernoil, 543.
Vernois, 617, 630.
Vernon, 544.
NOMS DE LIEU MODERNES.
Vemouillet, 543.
Verry, 339.
Véry, 339.
Vevey, 548.
Vichy, 408.
Vienne, 584.
Vilhosc, 336, 596.
Villenauxe, 585.
Villesèque, 497.
Villy, 336, 596.
Vimeu, 561.
Vincey, 337.
Vincy, 336, 337.
Vindecy, 337.
Vindey, 338.
Vinezas, 417.
Viré, 454.
Visiago, 417.
Visille, 417.
Visme (rivière), 561.
Vitrac, 335.
Vitray, 335.
Vitré, 335.
Vitreux, 335.
Vitrey, 336.
Vitrieu, 597.
Vitry, 334, 336.
Volpilière, 613.
Windisch, 534, 583.
Winterthur, xi.
York, 137, 145, 169.
Yssac, 148.
Yverdun, xi, 169.
Yzernay, 499.
Zarten, 601.
INDEX ALPHABÉTIQUE
NOMS DE PERSON>
Abndiiu, 161.
Accius, 188.
Acer, 469.
Acilias, l!7.
Aconia». 189.
Aculenns, 3T7.
Acolinns, 377.
Acull», 507.
AcutiaDua, 571.
AcuUaa, 190, 345, 571.
Adhogias Coinagi f., 166.
Adbacilltis , princepa des AJIobroges ,
Aegus, Allobroge, reçoit e
des champs pris sur l'eQDi
Asmilius, 127, 348.
présent
AfraD
i, 394.
13, 127. 349.
Albanius, 155, 377.
AlbareaiUH, 593.
AlbiDius, 155, 191.
AlbîDQs, 507.
AlbiuB, III, iiii, 1S6. 190. 37S, 421, 593.
AlbuduK, 457, 509, 571.
AlfuniUG, 452.
Airenus, 449, 453.
Alflus, 449.
Alliu^, 19Î, 509.
Alstus, 193.
AUbraadas, 5^5.
Ambacthias, 443.
Ambactua, 444, 445.
Ambiliiu, &6I.
Ambiorix. son aediflcjum , 91: — sa
cilla, 95.
AmbrosJna, 445, 446.
AmeliQS, 347, 551, 561
Ammonius, 432.
Amonius, 432.
Anaugen, 392.
Andarta, 388.
Andecamuloa, 355.
Andecumborius, 147.
AadiuB, 193.
Anicins, 194, 345, 350.
Annibal, brtUe les vil
Ansoatdna, th.
Antin», 379, 457. 587.
Antoaius, 128, 140, 35i
AntuUus, 172.
Apiiliua, 195.
Aponiua, 196.
Appalius, 195.
AppU, 522 ; Appius, 1
AppODias, 195.
Aqailiua, 431 ; cf. 377.
Aquiniua, 187.
Aqulius, 377.
Ardninna, 354.
Argant, 493.
Argantan, 492.
Argantbael, 492.
ArgauUoaaeo, 493.
Argantloa, 492.
Argaatmoaoe, 493.
ArgaatOB, (, un.
Argftt&D, 493.
Argentillua, 494.
Argeotos, 531. 533.
ArgioUloB BmertnliUj
672
INDEX ALPHABÉTIQUE
Ariovistus, ses acquisitions de territoi-
res. 20. 21, 22, 76. 106.
Arquinius, 196.
Arrenia, 452.
Arrenus, 450. 452.
Arrius. 161. 380. 450.
Arsenius. 157.
Arsinius, 157.
Artaio (Mercurio)) 389.
Artanius. 383.
Artenna. 452. 456.
Arthbiu. 385. 386.
Àrthmael. 385, 386.
Arthuuiu, 385. 386.
Articnos, 382. 390. 399.
Artidios. 383.
Artilius, 196. 383.
Artinus. 383.
Artio (déesse). 389.
Artius. 159. 382. 452, 510.
Arto, 495. 597.
Artos, XII, XIII, 382. 598.
Ascius, 352.
Asellus, 467, 468.
Asprenas. 462. n. 3.
Asprenus, 462.
Asprius, 462.
Astius, 352.
Ateius, 402.
Athanas, 490.
Athanasios. 490.
AtiUus, 128.
Atinius, 197.,
Atisius, 592.
Atteius, 402, 433.
Attenius, 198, 453.
Attonnius. 453.
Attius, 453.
Atto, 555.
Auctus, 545.
Aofidenus, 450.
Aufidius. 450.
Aulenus, 450.
Attlius. 198. 450.
Aura, 426.
Aurelianus, 571.
Aurelius, 128, 145. 433, 571.
Aurelus, 426.
Auria (gens), 198.
Auriknus, 426.
Aurius, 426.
Autbertus. 555.
Autestius, 546.
Auto, 546.
Autonius. 546.
Autus, 545.
Avena. 450, 454.
Avenia, 452.
Avennius. 452, 518, 524.
Aventia (Dea). 510.
Aventios, 510.
Avenus. 450, 452, 454, 463.
Avicantus, 538.
Avitianus, 171, n. 3.
Avitius, 138. 171.
Avitus, 145. 170.
Avius. 450.
Babidenus, 450.
Babidius. 450.
Babrenus. 450.
Babrius, 450.
Baddo , Yiii.
Badegysilus, yiii.
Badigjsllus, Tiii.
Balbius, 199.
Baldierus, 555.
Baldus, 613.
Balterius, 555.
Barbarius, 165, 402, 510, 551.
Barbanis , 551.
Bardos, 167, 168.
Baro, 534, 535.
Banis, 534.
BasUius. 199.
Bassinius, 200.
Bassinus. 200.
Bassius. 421, 427, 592.
Bassus, 200.
Batechisilus, viii.
Baudegisiius. Bandeg/silus, vui.
Beccus. 342.
Belenos. Belenus. 179, 180. 343, 418.
Beliniccus. 418.
Belinos, 179. 180.
Belisama (Dea). 181 , 394.
Belismius, 394.
Bellinus, 180, 563.
Bemhard, 386.
Bernrich, 386.
Bero, 388.
Bessius, 458.
DES NOMS DE PERSONNES.
BisflQB, 450.
Bisiue, 450.
Biraitus, roi des Arvtmi, 4t.
Blaesus, 505.
Blandim. 163.
mukus, S98.
BUtbmac, 637.
Blatina, 201.
BlatUiu, 301.
Bodnogeoiis, 391.
BoDne, 469, 535.
Borao, 556.
BouUus, 458,
Braccius, 35!, 524.
Bracbtm, I3T.
BrsnnuE, 500. 59S.
BraQDs, 598.
Breoa, 496.
Breaia,496.
BrADiiiia, 496.
Briccius, 599.
Briccng, 598.
BrigaatJK, 419.
Brigit, 419.
BriQDÎus, 496, 511.
Britanina, 301.
BrittiuB, 138.
BrittuB, 536.
BragiUrœ, 601.
BucciDS, 203,
BuciR, 302.
Badieo, 392.
Budnc, 177.
BuUiue, 511, 573.
Burina, 203.
Burmu, 497.
Burrhus. Burrus, 349, 587.
BurriuB, 587.
CabADiu, 157.
Gab«lliuB, 519.
CadiuB, 437.
Caeciliot, 138.
Caepio, 406.
Caepiui, 406.
Caeiennias, 452.
Caeaflniu, 450, 453,
Caesius, 450.
Caet«iiiiiaa, 453,
OaeUa, 453.
Cairoltu, 524,
34G.
Calcius, 204.
Caieuius, 452.
Oaleuus. 450, 452.
Caletj (deo Hercurio], 428.
Caletinns, 428.
Caletin, 429.
Caletius, 438.
Calicius, 304.
CalidenoB, 450.
CalidiuB, t!8, 450, 511.
CaliDius, 205.
Calias, 204, 450.
CalliQJuB, 205.
Callius. 304.
Gains, 537, 551.
CalveDUS, 450.
Calvius, 305, 450.
Camarus. 171.
Gambarius, 20G, 511.
Gambiua, 206, 599.
Cambus, 599, cf. d. 13.
Camilius, 307.
Caniilliag, 163, 207, 208.
CuDmariuB, 171, 513.
Gtunmarus, 513.
Gamponios, 138, 309.
CampUins, 438.
CampyliuB, 438.
GauiulacQS, 177.
Camulates, 356.
Camolatius, 356.
CamolatDa, 356.
Gamaliaios, 356.
Camulius, 307. 343, 353, 356, 419,
Camnllius, 353.
Camuloganus, 355, 391.
Camulognata, 355,
Camulos (Mars), 353, 35i
Camnlus, 355. 389, 419, 600.
CanenuB, 450,
Canius, 210, 450, 564.
Cantaber, 485.
CanUioB, 538.
Cantilina, 376, 573, 582.
Cantini, 5B3.
Canto, 563.
Gantooins, 583.
CantoacnuB, 638.
Canua, 471, 563, 5B1, 597,
CapeUinB, 519.
Cttper, 590.
43
674
INDEX ALPHABÉTIQUE
Capito, 473.
Capita, 473.
Gaprini, 435.
Gaproniaa, 435.
CapruB, 537.
Carantiniut, 146.
CaranUn». 146, 211. 458, «U.
Caranto, 566.
Carantos, z, xiii, 211.
Carantus» 167.
Caratins* 213.
Carbo, 474.
CariBius, 212.
Gamins, 489.
Garvilius, 147.
Gassianas, 572.
Gassius, 128, 143, 567.
Gasticus, séquane, prétondant à
royauté, 41.
Gatalios, 594.
Gatalus, 487, 500, 594.
GataroniB potestas, 600.
GateniuB, 457.
Gatgen, 392.
Gathal, 488.
Gatharus, 600.
GatiuB, 213, 457, 466.
Gatlinus, 470.
GatoniuB, 203.
CattauB Bardi f., 166.
Gattos, vergobret des Lexovii, 45.
GatucuB, 581.
Gatuena, 581.
GatuenuB, 581.
Gatugnatos, 580.
GatoUa, xviii; GatuUus, 470.
GatulUaB, XYiii, 214, 470.
GatuluB, 470, 501.
GatnmanduB, 580.
Gatnmarus, 580.
Gatarix, 580.
Gatunis, 581.
Gatus, 404, 567, 581.
GatusanianuB, 474.
GatusiuB, 405.
GatUBO, 405. 581.
Gatussa, 404, 474, 579, 580.
GatuBsiuB, 403, 404.
Gatuvolcus, 405, 580.
GaucinuB, 539.
Gaucius, 215, 357.
GaudiiiB, 158.
GanHoB, 216.
Gausia, 216.
GauUns, 215, 357.
Gavannus, 475.
GavarinoB, sénon, fîrèr» de Moritaagos,
41, 114.
GaylUoB, 573.
GavUliuB, 573.
Gayinniiis, 475.
GayinuB, 475.
CaTins, 458.
Gednu, 497.
GelainiuB, 573.
GelsinuB, 573.
GelBiuB, 217.
GeltilluB, arverne, accusé de prétendre
la à la royauté, 41, 49, n.
GentulliuB, 353.
Gésar fait partager l'ayer puMieus de
Gampanie, 24.
Gevrennus, 465.
CharisiuB, 212.
GhildericuB, zyii.
GhramnuB, 388.
Ghrestns, 540.
Ghronia, 407.
Ghunoaldus, 559.
Gingetorix , princepê des TreveH, 46.
Gipeilius, 217.
GipiuB, 218, 406.
GisiacuB, 183.
Gisionia, 183.
GisiuB, 183.
GisBUB, 182.
GiviliB, ses vt'Hae, 94.
GlarianuB, 218.
Glarius, 218.
GlaudiuB, x, xm.
Glavns, 590.
Glementius, 218.
Glepius, 220.
Gleppius, 220.
Glippiana, 220.
GlodiuB, 421.
Gocceins, 221.
Goécius, 221.
Goddacatus, 581.
Gommius, roi des A£re5alet, 37, 43,
147, 221.
GommiuB, 222.
DES NOMB DG PERBONNBB.
Conunuiiii, 416.
CondrmnuinB, 131.
Congen, 39B.
Connitu, 113, n. 3.
GoDitanc» Chlor«, 106.
ConTi«toliUTia, vergabrM dM Aflduf,
45, 49, n., », ni.
Corbii, 496.
Corbo, 498, MO.
Corbni, 49B, 539, 540.
Comeliu, 128, 358, 511
Cosias, 4S9.
Cottia*, 499.
Cotto, 498.
Cottes, 49B.
Cotna, éduen, 49, n,, 50.
Crispinini, 214.
Crispins, 213.
Critogiutiu, arrerna (diieours de), 15,
79.
Crixsiiu, 2K.
Croniiu, 224, 407.
Cnaobelinos, 354.
Cnpitm, 506, 508.
Curina, 464, 594.
Onrtini, xti, XIY, 225, 4S9, 512.
CDrtaa, 540.
Dacco, xth.
Dslmatias, 339.
Daiuiotalicnoa, 390.
Deccina, 228.
Dscioa, 227, 408.
DejotiTM, SOI.
Dergen, 391.
Di«nnait, 631.
Au>T^, 391.
Dlvitiaena, 171.
Diviw, 52a
Divogentu, 391.
Docciiu, 228.
Docius, 228.
Domarioa, 556.
DomiDna, 477.
Domitina, 128, 229.
Domna, 417.
DoBnoa, xni.
Donnotannu, prineepi dM Helvlf , 49.
Dotitu, 228.
Dottina, 228.
Dnasiiu, 23t.
Dranana, 167, 231.
Dniaina, 231.
Dmaaina, 231.
Dnuoa, 167, 231.
Dnitienoa, 390.
Dubrlen, 392.
Oabroc, 117,
Dnnmacoa, 177.
Dnmnorix, prine^n das Aadul, 4
45; — prend i tanna lea impAta, It
Btnirina, 168 ot a. 10.
Bboroa, Gbnma, xi, xm, 137, 145, 1(
499, MO.
Blnains, 530.
Bnibondiua, 394.
BniceniQS, 334, o. 6.
Enigenua, 394, 420.
Enignaa, 394, o. 6.
Ennina, 128.
Gporedorix, prtncepë dea Aedui, 4
49, n.
Eppina, 162.
Eqnonina, 196.
Estmartos, 408.
Eiua, 419.
E) aviva, 419.
Exeengolatia, M9.
Fabina, 128, 438.
Fadeniu, 450.
Padlna, 4E0.
Fidenina, 455.
Fidentlna, 340.
Fidios, 231, 4U.
Find. 533, 584.
Pinninianiu, 513.
Fimûiuiu, 573.
Finnins, 573.
FUccins, 232.
FU*ianua, 510.
FlaTiaiaa, 135.
FUTins, 234, 695.
FUvuB,234.
Florioi, 163, iSI.
Ftnuehia, 238.
Frédéric, 533.
Frïtliaraika, 533.
Fritto, 533.
Frlti, 533.
DES NOUS DE PERSONNES.
Linus, &41.
LiscDB, vergobret dM Aedui, ib.
Lilaviccus, 560.
LitogeoM (génitif), 39t.
LiiQgenuB. 39t.
Livius, 155. 410, 4tl.
Loehamach, fT7.
Lodius, 552.
Lollina, 263.
LoppivB, 264.
LoUus, 553.
Loi us, 552.
Lucanius, 160, 365.
LacciuB, 260, 363.
Luceus, 363.
Lucenias, 455.
Lncilins, t38, 361.
Litcius, 259, 515.
LacreiMi, 579.
Lncretiua, 346.
Lacterius, 147.
Lugua (dieu), tS2.
Latevus, 507.
Macer, 4S0.
Hocerini, 480.
Hac-Mahon, 389, 398
Haocena, 450.
Maecius. 450.
Haelius, 282.
Magisia, 579.
MsgDius, 265, 595.
Maliu
, 267.
Mal li anus. 574.
Malliua. 367. 574, 588.
Mandubralius, 147.
Hanliu
128.
Harcolliaaug, 574.
MarceiiitiQS, 561.
Marcellius, 128, 145, 369, 5CT. 574.
UarcoUiis. 269. 501. 503.
HarcBoa, 451, 454.
Uarciiius, 128.
Marcinus, 567.
Uarcins, 271,365, 411, 451,515.567, 596.
Marcus. Kl, iiv, 27t.
Harianus, 575.
Harilio, 483.
HariUiD», 483.
Uarillns, 4SI.
MariaiaBus, 575.
MarlDins, 164, 377, 553, 575.
Marinus, 553, 567.
Mariua. 138, 375, 535, 567. 575.
UarEQg, 485.
Martinianua, 575.
Martinius, 279, 553, 5T6.
Martinus, 279. 553.
Martius, 273, 515.
Martyriua, 591.
Uarullua, 481.
Haras, 530.
UaryUua, 481.
Hasclus, 481.
Hasculus, 481,
Uasiula, 482.
Uatrinius, 378, n. 366.
Matrius, 280, 525, 553.
Hatronia, 366.
Hattins, 161.
Hatucciaa, 400.
Matuceoi {génitir), 3».
MatuciUB, 400.
Uataco, 400.
MatDConiuB, 400.
Matucus, 400.
Hatagenia, 390.
Hatugenoï, 390, 398.
MatuDae, 388.
Matuus, 400.
Maurenlius, 282, 340.
Maurinua, 282.
Mauriua. 381, 465, 486, 554.
Mauruiiis, 486.
Haurns, 486, 554.
Maximinus, 567.
Maximiiia. 567.
Hcdugeana, 392, 580.
Moduna, 580,
Medussa, 580.
McUu
2R3.
, 178. 447, 526.
Herula, 564.
Mossenini. 452.
H«EBonDs, 45t.
Mcssinus, 567.
MesiiuB, 451, 567.
MotiuB, 424.
Uettiua, 424.
Hettus, 423.
678
INDEX ALPHABÉTIQUE
MinaUus, 159.
MoenicaptoB, 420.
MoenioB, 420.
Mogetiana, 420.
Mogetias, 420.
Mogonti (daUf), 418.
Mogontia (dea), 419.
Mogontinios, 418.
MoUicius, 287.
Montanius, 284.
Montanus, 285.
Moritasgus,' roi dos Senones^ 41.
Mucina, 128, 515.
Mnnatius, 128.
tint, 286.
Nammeius, 147.
Nasellius, 374.
Nasennius, 374, 453.
Nasia, 374.
Nasica, 374.
Nasidins, 374.
Naaiua, 453.
Naso, 374.
Naaonius, 374.
Nassius, 374, 453, n. 6.
Nemetocena, 397.
Nemetogena, 397.
Neriu8, x, 155, 346.
Neita, 638.
Nortius, 638.
Nevet, 183.
Nimet, 183.
Nitiogenna, 397.
Nonlus, 288.
Noricus, 485.
Novellius, 291.
Novellus, 591.
Novins, 289.
Numerius, 128.
NumisenuB, 451.
Numisius, 451.
Octavianus, 392.
Octavius, 128.
Odolricus, 557.
Ollovico, roi dos Nitiobroges, 40.
Orbius, 158.
Orgetorix, son procès, 41, 5C, 114;
ses clienteSf 57, G5.
Paccius, 164.
Pache, 412.
Pacins, 164.
Papirius, 128.
Papina, 411.
Parthenns, 491.
Paternius, 483.
Paternns, 482.
Patriciui, 341.
Paucius, 293.
Paulius, 138, 160.
PauUius, 160.
Petilioa, 548.
Petiniiu , 548.
Petreius, 440.
Petrinianns, 439.
Petro, 364.
Petronianus, 576.
Petronitts, 128, 439, 576.
Petros, 541.
Phryne, 491.
Pinarius, 588.
Pinns, 542.
Piper, 483.
Piperas, 484.
Piperculus, 483.
Piperolus, 483.
Pisiniiu, 157.
Pisonius, 157.
PiUus, 292.
Plautioa, 589.
Pompeins, 294, 440.
Pomponenus, 451.
Pomponius, 366, 367, 440, 451.
Pontennins, 453.
Pontilius, 297.
Pontius, 295, 453, 516.
Postumius. 298.
Primius, 299.
Priscinios, 302.
Priscitts, 301,368.
Priscus, 301.
Propertius, 128.
Prune, 491.
Pudentius, 294.
Pusinnus, 484.
Quinctilius, 368, 369.
Quinctius, 156, 516.
Quintilianus, 576, 577.
QuintUius, 369, 576.
DES NOMS DE PERSONNES.
QnintiaoB, 567.
Quintini, 156, 421, ipl.
Qttintua, 591.
nagenoldng, 558.
Ragnoraldiu, 558.
R&inoldus, 558,
RaucillQi, allobrogo, raçolt eu priiant
des champs pris sur reonemi, 20.
Rectugenna, 391.
Romedini, 554.
RamlgiDa, 554.
Rona, 393.
RAOuiDi , 393, 430.
Rheuna (diea), 393.
RhodanuB, Rodanus,. 393, a. 6.
Ricciui, 160.
Romanins, 303, 4ST, 554.
Romanns, 4B7, 554, S70.
RomiliOR, 305.
Romolins, 305.
Romulns, 5U6, 508.
Raffiaons, 307.
Ruffiiu, 307.
Rufiiu, 306.
Roftis Cootusuati t.. 166.
RuUius, 308.
RupîliuB, 589.
Rnsciu, 541.
SabiuianDR, 577.
Sabinins, 126, 127. 577.
SabinDS, sa uflla, 94; — 126.
Sabins, 309.
Sacciariaa, 310.
Saccini, 310, 320.
Sacco, 310.
SaccoDiut, 310.
S accus, 310.
Sacrovir, sa cilla, 94. 96.
SaleDiia, 451.
Salius, 451.
Salvidenns, 451.
Balvidius, 451.
Salvinius, 313.
BalviUB, 31t.
Samnius , 516.
Sanctius, 313.
Sapiu
,309.
Sarenus, 451.
Barios, 451.
Satrenins, 452.
Satreaus, 451, 452.
Satriu», 451.
ScotioB, 412, S26.
Scottns, 413.
B«cundiniiis, 314.
B«cimdiiia, 314.
Becnritis, 314.
Bednlins, pHncept de* Lemavic
— 147, 148.
Segolatios, 549.
Senacbua, 177.
Seotins, 313, 315, 460.
Septimeana, 451.
SepUmina, 4SI.
Ssirerlna, 317, 465.
Sereroa, 317.
B«xtiD8, 319.
SiliUB, 321.
SilTaniuB , 323.
SilTanua, 567, 568.
BilTiniua, 325, 577.
SilTÎus, 324.
Simpliciua, 326.
Soeeina, 327.
Sociua, 326.
SoiemDiua, 328.
SoUcina, 41S.
Solimarins, 146, 160.
Bolimarue, 530.
Bolius, 328, 370, 415.
Sollemala, 502.
SolleniiiiuB. 328, 370, 429.
SoliiuB, 328, 329, 526.
SoUoa, m.
Bolo, 172.
Boaiua, 327.
Sparuns, 410.
Spartacus brûla lea oitUe, 93.
Spinns, 542.
Statius, 128.
Bnmeli, 397, n. 5.
Suporius, 319.
Tagassoa, 579.
Tarracaa, 466.
Tarviua, 466.
Tarvos. 466.
Tasgetius, roi de* Carnuteê,
par César, 41. 147.
Taoriciug, 331.
680
Taurinius, 332.
Taurius, 330.
Tertius, 37!.
Tettenius, 453, n. 8.
TcttcnniuB, 453.
Tettius, 453.
Teutgarius, 558.
Teutomatus, roi des Nitiobroges,
Theodebercthus. 145.
Theudebercthus, xviii.
Tiberius, 159.
Tilius, 416.
Tillius, 373.
Togia, 136.
Totatigens, 390.
Toutatis, 390.
Toutissicnos, 390.
Trebellenus, 451.
Trebellius, 451.
Trebius, 461.
Tremollius, 628.
Troccius, 408.
Trouces, 408.
Troucillus, 408.
Tul!ius, 517.
Tullus, 504.
Turaius, 441.
Turelius. 333, 440.
Turcllius, 333, 440.
Turcnne, 442.
Turennus, 442. 463.
Tureus, 441.
Turillius, 333.
Turius, 440. 441, 463.
Turnus, xii, 170, 503, 543.
Turo, 441.
Turrina, 442.
Turrio, 442.
Turrus, 441, 543.
Tuscus, 485.
Ulrich, 557.
Umbrenus, 451.
Umbrius, 451.
Unoldus, 558.
Unvaldus, 559.
Urbanus, 506, 568.
Uri (filia), 399.
Urogenius, 398.
Urogcnonertus, 398.
Ursius, 385.
INDEX ALPHABÉTIQUE
Ursus, 384, 385.
Valentinius, 165.
Valentius, 527.
Valerius, 128, 145, 430.
Valetiacus, vergobret des Aedui, 45,
177.
40. Varenius, 452.
Varenus, 451, 452.
Varius, 338, 421, 451.
Vanis, 543.
Vassetias, 334, n. i.
Vassillius, 334, n. 1, 504.
Vassillus, 504.
Vassius, 333.
VasBorix, 504.
Veladus, xi.
Velleius, 128.
Vellocatus, 581.
Vena, 600.
Vendus, 337, 518, 589.
Venerius, 578.
Venna, GOO.
Vepus, 408.
Vercingctorix proclame roi , 42 ; —nom-
bre des cavaliers de son armée, 53.
635, 636; — ses clienles, 57. 65.
Vernus, 544.
Vortiscus, pHnceps des RemU 47.
Verucloetius, 147.
Verus, 544.
Voscnnius, 453.
Vesenus, 451, 452.
Vesius, 451.
Vettenius, 452.
Vettenus, 451, 452.
Vettius, 451.
Vibenna, 452.
Vibius, 128, 452, 548.
Vicrcna, 451.
Vicrius, 451.
Victorius, 334, 597.
Villius, 336, 585, 596.
Villo, 585.
Villonitts. 585.
Vilonius, 585.
Vinda. 533, 584, 601.
Vindauscius, 601.
Vindicia, 416.
Vindicius, 337.
VindiUus, 534.
DES NOMS DE PERSONNES.
681
Vindius, 338, 534.
Vindo, 584.
Vindonius, 534, 583.
Vindos, XIII, 601.
Vinicius, 416, 417.
Vintius, 336.
Vipius, 408.
Virdumaros, 393.
Viridomanis, princeps des Aeduif 45,
49, n.
Virins, 128.
Virocantus, 539.
Visellius, 417.
Vitellius, 466.
Vitulius, 466.
Vitullius, 466.
Vitus, XI.
Viviscus, 549, n. 2.
Vivius, 549.
Volussena, 451, 452.
Volussenius, 452.
Volussius, 451.
Woeduc, 177.
NOTA
Les doctrines énoncées aux chapitres III, V et VII du
livre II pourraient donner lieu d'ajouter quelques noms à
cette liste alphabétique , en fournissant une explication nou-
velle de quelques-uns des noms de lieux étudiés dans le
chapitre I" du même livre. En effet, Eporedia^ en Italie,
pourrait être une notation abrégée pour Eporedio-briga ,
« château d'Eporedios. » Eporedios veut dire equorum domi-
tor, a dompteur de chevaux; » mais il ne se suit point de là
qu'Eporedia fût « la ville des bons dompteurs de chevaux »
comme on pourrait le conclure de ce que dit Pline, livre III,
§123 (voyez ci-dessus, p. 153). De même, Carbantia (môme
page) peut tenir lieu d'un plus ancien Carbantio-briga et
signifier « forteresse de Carbantius, » nom d'homme dérivé
de *carbantonj variante gauloise du latin carpentumy « char. »
Gobannium équivaudrait à Gobannio-dunum et serait la « forte-
resse de Gobannius, » etc.
INDEX ALPHABÉTIQUE
DBS
FINALES DE NOMS DE LIEU ANCIENS
Cet index comprend : 1* les seconds termes dos noms composés ; 2* les suffixes
tels qu'ils se rencontrent et sans distinction des éléments dont ils sont formés.
-a (nominatif singulier) , 505-
507, 538, 564. — Voyez -ia.
-acus, XVI, 134-139, 149, 150,
167178, 467-499, 503, 512,
541,583,598.— Foj/ez-iacus.
-anicus. — Voyez -ianicus.
-anus, 127, 129, 155, 638. —
Voyez -ianus.
-aretum, 632-634.
-aria (nominatif féminin sin-
gulier, 605, 607, 609, 610,
611, 612.
-arias (nominatif-accusatif fé-
minin pluriel), 602-614.
-ariolas (nominatif-accusatif fé-
minin pluriel), 522-523.
-arius, 602,611.
-as (nominatif-accusatif fémi-
nin pluriel), 507, 508. —
Voyez -ias.
-asca, -ascus, 246, 586-593,
597. — Voyez -iasca, -iascus.
-çissus, 579.
-ate, 153, 179, 181.
-atus? — Voyez -ate.
-ava, 562. — Voyez -iavus.
-avi, 562, 563. — Voyez -iavus.
-avus, 173, 560-564.
Bona, 155 n., 397, 533, 584,
585.
Bria. — Voyez Briga.
Briga, xi, xiii, xiv, xv, 154,
167,169,186,382,383,441,
536.
Brigula, 154.
Brium. — Voyez Briga.
Caium, 153.
Cenna, 152, 397.
Cortis, VI, VIII, IX, XIV, xv.
Curtis, VIII. — Voyez Cortis.
Derum. — Voyez Durum.
Dobrum. — Voyez Dubrum.
Donnus, Donus. — Voyez Du-
num.
Dorum. — Voyez Durum.
Drum. — Voyez Durum.
Dubrum, 181.
Dunum, xi, xii, xiii, xiv, xv,
XVI, 152,154,167,169, 181,
383, 388, 389, 399, 400,
479, 512, 601.
Durum, xi, xii, xiv, xv, 148,
153, 154, 182-186, 360, 412,
546.
684
INDEX ALPHABÉTIQUE
-ena, -enna, 463-466.
-enacus , -ennacus , 425 , 426 ,
449-462.
-enas, 464, 466.
-enna, 442, 463-466.
-ennio, -ennionis, 518.
-ennus, 464-465.
-esca, pour isca, 551, 557.
-escae, pour iscae, 553.
-escus, pour iscus, 554-558.
-essa, 579, 582. — Voyez -issa.
-etum, 177, 202, 373, 406,
407, 615-634.
-i (génitif singulier), 346.
-i (nominatif pluriel), 398, 504,
505.
-ia (nominatif singulier fémi-
nin), 153, 347, 356, 360,
367, 375-421, 443, 460,
517.
-iaca, 375, 381, 405. — Voyez
-iacus.
-iacus , X , XVI , xvxi , xviii ,
126, 127, 149-151, 155-165,
169, 171, 173, 178, 187-343,
345,348,349,350,351,352,
356, 357, 358, 360, 361,
362, 366, 367, 369, 370, 372,
373,376,377.379,381,383,
384, 385, 387, 393, 394, 400,
403,405, 407,409,410,411,
412, 413, 416, 417-421, 426,
427, 429, 431, 432, 434,
435-437, 438, 439, 440, 445,
447,458,459,462,471,479,
481. 482, 483, 489, 496,
509, 516, 517, 518, 529,
544, 563, 583, 592, 594, 595,
596, 597, 598, 599, 627.
-iae. — Voyez -ias.
-iana, 375, 381,402, 420,421,
427.
-ianicas (nominatif- accusatif
pluriel), 570-578.
-ianicus, 376, 569-578.
-ianis (datif- ablatif pluriel),
421, 422, 427.
-ianus, 127-129, 139, 143,
144, 145. 155, 157, 159, 162-
165, 191, 205, 210, 211,
223, 226. 230, 232, 233.
235-237, 245, 247, 248, 252,
257, 261, 266, 267. 270,
275,276.278,286,312,313,
322, 333, 336, 340, 345, 349,
350,351,358,367,377,379,
402, 407, 412, 437, 438, 593.
-ias (nominatif-accusatif fémi-
nin pluriel), 431-441.
-iasca, 586-589.
-iascus, 586-589.
-iavus, 349, 561, 563.
-ica, -icum, -icus, 151 , 179,
441, 510, 565-578.
-iis (ablatif pluriel), 421-431.
-inae, 153.
-inio, -inionis, 519.
"iniiâ 442
-io, -iouis, 153, 358, 498, 509-
520, 596.
-iola (nominatif singulier fé-
minin), 526.
-iolas (nominatif-accusatif fé-
minin pluriel), 281, 522-526.
-iolis (datif-ablatif pluriel), 524.
-iolus, 524, 526.
-iorum (génitif pluriel), 345.
-ioscus, 211, 275, 336, 593,
597.
-is (nominatif singulier) , 502.
-is (datif-ablatif pluriel), 421-
431, 505.
-isca, 548, 553.
-isco, -isconis, 549, 550.
-iscus, 547-559.
-issa, 441, 534, 579, 581-585.
-issus 579.
-ium,'-ius, 153, 275, 346-374,
405, 445-448.
Late, 549.
DES FINALES DB NOMS DE LIEU ANCIENS.
Rate, 493.
Ratum, 492, 493.
Ratus, 492, 497.
Rigum, 153.
Ri tu m, 154.
Magus, X, XI, XII, xrv, xt, xti,
148.153,154,155,167,170,
173 note, 17Ô, 182, 186,
360, 494, 497, 531-534, 567.
MoDS, Ti, IX, XIV, XV, 448.
Nemetum, 154. Sentum, 153.
-num, 178. — Voyes -onum. -ssa, -saos, 579-58S
-o, -onis, 153, 510, 600. —
Voyei -io, -ionia.
-ogilum, 499, 538-546.
-oialum, 528-546.
-oilum, 528-546.
-olium, 528-546.
-olus, 521. — Voyez -iolug.
-ona, 600.
-onum, 151, 599.
-opéra, xin, Q, 7. — Voyes
Briga.
-orate, 153.
-oruin (génitif pluriel), 345.
-os (accusatif pluriel}, 497.
-ûscus, 597-600. — Voye» -io3-
cus (1).
-uceus, 364.
-ucia, 364.
-ucius, 363-365.
-um (nominatif sin
tre). 374, 504.
-us (nominatif sin{
culin), 496, 500-
-usca, 600.
-usco, -usconis, 6(
-utius, 364.
Vallis, VI, vm, jx,
-vices, -vicenses, ■
Villa, VI, IX, XIV, ;
Villare, vi, vu, nt.
(1) L'avenir résoudra la queatio
comme ligures les aufflzes -oscus
TABLE DES MATIÈRES
Préface.
LIVRE PREMIER.
RECHERCHES SUR L'ORIGINE DE LA PROPRIÉTÉ FONCIÈRE
EN FRANCE.
CHAPITRE PREMIER.
NOTIONS GÉNÉRALES SUR L*HISTOIRE DE LA PROPRIÉTÉ FONCIÈRE
EN FRANGE.
S 1". — Conquête de la Gaule par les peuples gaulois. • 3
S 2. — Le sol conquis est réparti entre les peuples con-
quérants; il devient propriété d'Etat, Taristocratie se
le partage ensuite et en jouit à titre précaire. ... 4
S 3. — La conquête romaine, le cadastre d'Auguste, ses
effets sur la propriété foncière 6
S 4. — Origine de la commune rurale en France. . . 10
S 5. — La propriété foncière en France d'Auguste à
nos jours 12
CHAPITRE II.
RAPPORT DE LA PROPRIÉTÉ FONCIÈRE AVEC LA SOUVERAINETÉ
DANS LE DROIT PUBLIC DE ROME ET DES GERMAINS. iJager
ptibliCUS ET LES LOIS AGRAIRES A ROME AVANT CÉSAR ET DE
SON TEMPS.
S !•'. — La notion de la propriété foncière dans la
France moderne. Autre manière de concevoir la pro-
priété foncière soit dans l'ancienne France, soit hors
de France : le domaine éminent, le domaine utile. . 15
688 TABLE DES MATIÈRES.
S 2. — Le droit de souveraineté comprend-il le droit de
propriété ? La réponse à cette question en droit pu-
blic, romain et germanique. La dediiio; Arioviste et
les Burgundes 17
§ 3. — Uorger publicus romain et les lois agraires. ... 22
CHAPITRE IIL
la gaule barbabe au moment de sa conquête par césab.
inégalité des peuples et des hommes.
Section première.
Les peuples, distingués en principes et en clientes, . . 28
Section IL
Les hommes 40
A. — Rois 40
B. — Magistrats et principes 43
C. — Sénats 50
D. — Equités 52
E. — Clientes 54
P. — La féodalité française repose sur le principe
de la propriété individuelle du sol, et ce principe
n'existe pas chez les Celtes 59
G. — La féodalité celtique dans Tantiquité. ... 62
CHAPITRE IV.
l'agriculture et les lieux habités dans la gaule barbare
au moment de sa conquête par césar.
S !•'.— L'agriculture 68
§ 2. — Les lieux habités 77
A. — Vici 77
B. — Oppida 79
C. —Aedificia.. 90
CHAPITRE V.
PREUVE DU CARACTÈRE PRÉCAIRE DE LA POSSESSION DU SOL PAR
TABLE DES MATIÈRES. 689
LES PARTICULIERS DANS LA GAULE BARBARE, AU MOMENT OU
CÉSAR EN FIT LA CONQUÊTE (58-51 av. J.-C.)-
SI*'. — Position de la question 99
S 2. — La propriété foncière individuelle n'existait pas
encore chez les Gaulois d'Italie à la fin du troisième
siècle avant Jésus-Christ 100
S 3. — La propriété foncière individuelle est inconci-
liable avec rémigration des Helvetii Tan 58 avant
Jésus-Christ 102
S 4. — La propriété foncière individuelle est inconci-
liable avec rétablissement des Boii dans le territoire
des Aedui 104
S 5. — L'absence de propriété foncière individuelle en
Gaule explique le système particulier de communauté
entre époux que César constate chez les Gaulois. . . 108
S 6. — Objection tirée d'un passage de César où il est
question de la juridiction des druides 111
S 7. — Conclusion. Uager pvblicus romain et Yager
publicus gaulois. La propriété bâtie en Gaule pendant
la guerre de la conquête 118
LIVRE IL
RECHERCHES SUR L'ORIGINE DES NOMS DE UEUX HABITÉS
EN FRANCE.
CHAPITRE PREMIER.
ORIGINE DES NOMS DE LIEUX HABITÉS EN FRANCE. — PRINCIPES
GÉNÉRAUX APPUYÉS PRINCIPALEMENT SUR DES TEXTES CONTEM-
PORAINS DE LA RÉPUBLIQUE ET DE L'EMPIRE ROMAIN.
§ i*'. — La propriété du sol devient individuelle. Les
fa/ndi dans la Gaule romaine. Le pandas Sabiniacus, . 125
§ 2. — Les noms de fundi formés à l'aide du suffixe
latin -ârms dans la « Table alimentaire de Veleia. » 127
§ 3. — Les noms d'hommes en Gaule après la conquête. 129
§ 4. — Les noms de fundi en -dnus dans la Table ali-
44
690 TABLE DES MATIÈRES.
mentaire auxquels correspondent des noms de fundi
gallo-romains dérivés des mêmes gentilices, mais avec
le suffixe gaulois -dcus 134
§5. — Les noms de fundi dérivés de gentilices romains
chez les populations celtiques sont postérieurs à la
conquête romaine 146
S 6. — Quatre espèces de noms de lieux habités en
Gaule chez César 151
§7. — Cinq espèces de noms de lieux habités dans les
pays celtiques suivant les documents du temps de
Tempire romain 152
S 8. — Le suffixe -dci« placé à la suite de gentilices ro-
mains pour former des noms de lieux dans les do-
cuments du temps de l'empire romain 156
§ 9. — Comparaison entre les noms de lieux formés en
France à Taide du suffixe -dciw et quelques noms de
lieux en -dnus dans diverses parties de l'empire ro-
main 162
§ 10. — Noms de fundi formés à l'aide de surnoms dans
les pays celtiques au temps de l'empire romain. . . 166
§11. — Examen de la question de savoir s'il y a eu en
France des noms de lieux en -dous dérivés de noms
communs 173
S 12. — Etude sur divers noms de lieu d'origine celtique
qui n'offrent pas le suffixe -âcus et qui apparaissent
pour la première fois dans les documents du moyen
âge 178
CHAPITRE IL
EXEMPLES EN FRANGE, AU MOYEN AGE, DE NOMS DE fundt FOBMÉS
PLUS ANCIENNEMENT A l'aIDE DE GENTILICES ROMAINS EN -iUS
ET DU SUFFIXE -OCtW.
Achiniagas, 187. Alsiacus, 193.
Aciacus, 187. Andiaeus, 193.
Aconiaca, 189. Anisiacus, 193.
Acutiacns, 189. Appiaeus, 194.
Albiacus, 190. Appiliaeos, 195.
Albiniacus, 191. Apponiacns, 195.
Aliacus, 192. Archmiacos» 196.
TABLE DES MATIÈRES.
691
ArtJUacus, 196.
Attiniacus, 197.
Auliaeus, 198.
Auriaens, 198.
Balbiacns, 198.
Basiliaca, 199.
Bmsainiaens, 200.
Blaeiacns, 200.
Britixmiacns, 201.
Bnciacus, 202.
Bnriaca, 203.
Cadoniacos, 203.
Galciaciu, 204.
Caliace, 204.
Galiniacus, 205.
Calviacos, 205.
Cambariacns, 206.
Gambiacus, 206.
Camiliacus, 207.
Camilliacus, 207.
Gampaniacus, 208.
GaniacuB, 210.
Garanciagus, 211.
Garisiacus, 212.
Garraciacus, 213.
Gatiacus, 213.
Gatuiliacns, 214.
CaQciacus, 215.
Gauliaca, 216.
Geltiaeus, 217.
GipUlaous, 217.
Clamenciaciis, 218.
Clariaeixs, 218.
Gllppiaens, 218.
Gocciacua, 7SQ.
Comiacus, 22t.
Grisciacns, 222,
Criapiacns, 22S.
Grispiniacus, 223.
Croniacns, 224.
Gurciacusy 225.
Gusiacos, 226.
Ditiagus, 227.
Dociacus, 228.
Domitiacus, 229.
Drusciacns, 230.
Fidiacua, 231.
Figiacus, 232.
Flaciacus, 232.
Flaviagus, 233.
FlaTiniacus, 235.
Ploriacus, 236.
Fusciacus, 237.
Galiacns, 238.
Oaudiacus, 239.
Geniciacus, 241.
Qentiliacus, 242.
Germaniacus, 242.
Gessiacus, 244.
Qraciacus, 245.
Graniacensis finis, 247.
[H]ermoniace» 248.
[H]elariacus, 249.
Jocondiacns, 250.
Juvenciacum palaciom, 251.
Juviniacus, 252.
Liziniacus, 254.
Liliacua, 257.
Lipidiacns, 258.
Luciacus, 258.
Luciliacus, 261.
Luliacus, 262.
Lupiacns, 263.
Magniacus, 264.
Malliacus, 266.
Manciacus, 268.
Marceliiacus, 268.
MarciacuB, 270.
Mariacus, 275.
Hariniacns, 276.
Martiniacos, 278.
Matriacus, 280.
Mauriacua, 281.
Melliacus, 282.
Montiniacus, 284.
Musciacae, 286.
Noniacus, 287.
Noviacum castmm, 288.
Noyilliacus, 290.
Piciacua, 292.
Pociacas, 293.
Podentiacus, 293.
Pompeiacum castram, 294.
Ponciacns, 295.
PonUliacQS, 297.
Posthimiagua, 297.
Primiacus, 299.
Prisciacos, 300.
Prisciniacua, 301.
Romaniacos, 303.
Romiliacus, 304.
Rufiacus, 305.
692 TABLE DES MATIÈRES.
RnlUacus, 307. Simplicciacns, 325.
Sabiacns, 309. Soclacus, 326.
Saciagus, 309. SoUemniacus, 327.
SalviacuB, 311. Soliacus, 328.
Salviniacus, 312. Tauriacus, 329.
Sansiacus, 313. Tauricciaens, 331.
Secundiaca, 313. Tauriniacns, 332.
Securiacus, 314. Toriliacus, 333.
Sentiacus, 315. Vassiacus, 333.
Seyeriacos, 316. VictoriaciiB, 334.
Sexciacus, 319. Villiacus, 336.
Siliacas, 321. Vinciacus, 336.
Silvaniacus, 322. Vindiciacus, 337.
SilyiaguB, 323. Wariacns, 338.
SilviniacuB, 325.
APPENDICE A.
Noms de lieux en -acus dérivés de cognomina latins en -ius.
Dalmatiacus, 339. Maurentiacus, 340.
Fidentiacus, 340. Patriciacus, 341.
Appendice B.
Noms de lieux en -acus dérivés de gentilices perdus.
Becciacus, 342. Beliniacus, 343.
CHAPITRE III.
exemples , AU MOYEN AGE , DE NOMS DE fundi IDENTIQUES A
DES GENTITIGES ROMAINS EN -iUS.
S !•'. — Généralités. Gentilices romains en -it** em-
ployés substantivement au génitif, avec un sens géo-
graphique , sous l'empire romain et au moyen âge ;
gentilices en -ius employés adjectivement , avec \m
sens géographique , dans les textes contemporains de
l'empire romain 344
S 2. — Gentilices romains en -ius employés adjective-
ment au masculin singulier, avec sens géographique,
dans les textes du moyen âge. 347
Aemilius, 347. Ascius, 351.
Afï'anius, 349. Braccins, 352.
AniciuSy 349. Centulins, 353.
Antonius, 350. Gamulius, 353.
TABLE DES MATifiRES.
693
Gaucinst 357.
Comarius, 357.
Cornélius, 357.
Grussins, 358.
IcciaSf 359.
Ingenius, 361.
Lancius, 361.
Lucius, 362.
LncaniuB, 365.
Marcius, 365.
Matronius, 365.
Pomponius, 366.
Priscius, 367.
Quintilius, 368.
Sollemnius, 369.
Solins, 370.
Tertius, 370.
Ta[l]iu8, 372.
Nasium, 373.
5 3. — Gentilices romains en -ius employés adjective-
ment avec un sens géographique au féminin singu-
lier
375
CanUUa, 375.
Aculia» 376.
Albania, 377.
Albia, 378.
Antia, 378.
Ar[r]ia, 379.
Artia, 381.
1* Etymologie du nom de lieu Artia;
c'est un gentilice dérive d'Artos,
c Ours, » 382.
2* De ridée religieuse associée au mot
Artos. Les animaux divins, 387.
3* Noms d'hommes composés dont le
second terme est genos : Matugenos,
Arti-genos, etc., 389.
4* Les noms propres d'hommes iden-
tiques à ceux d'animaux divinisés :
Uro-s, Branno-s, Matu-s et leurs dé-
rivés, 399.
5* Objection tirée de la phonétique :
ar notation dV voyelle, 401.
Atteia, 401.
Barbaria, 402.
Catussia, 403.
Cepia, 406.
Gronia, 407.
Decia, 407.
Gracilia, 409.
Hispania, 410.
Livia, 410.
Marcia, 411.
Papia, 411.
Scotia, 412.
Solia, 415.
Solicia, 415.
Tilia. 416.
Vindicia, 416.
Vinicia, 416.
Visellia, 417.
Magontia, Moguntiacus, 417.
S 4. — Gentilices romains en -ius employés adjective-
ment avec sens géographique au datif-ablatif pluriel
en -m ou en -is = -Us 421
Mettis, 423.
Auriis, 426.
Bassiis, 427.
Caletiis, 427.
Sollemniis, 429.
Valeriis, 429.
§5. — Gentilices romains en -ius employés adjective-
ment avec sens géographique au nominatif-accusatif
pluriel féminin 431
Ammonias, 431.
At[t]eias, 433.
Aurelias, 433.
Barbarias, 434.
694 TABLE DEB MATIÈRES.
Gaprias, 434. Licinias, 439.
Gadias, 437. Petrinias, 439.
CampiliaSp 438. Torrias, 440.
Fabias, 438.
APPENDICE.* — Les cognomina en -iiw employés adjecti-
yement comme noms de lieu 443
Ambactia, 443. Mercnrit», 446.
Ambroaios, 445.
CHAPITRE IV.
EXEMPLES, AU MOYEN AGE, DE NOMS DE LIEUX EN --OCUS DÉRI-
VÉS ANTÉRIEUREMENT DE GENTILICES ROMAINS EN -etlUS.
§ 1*'. — Les gentilices romains en -enus 449
S 2. — Les noms de lieux en -acus dérivés de gentilices
romains en -enus qui se rencontrent dans les inscrip-
tions ou dont on trouve un dérivé dans les inscrip-
tions; 1" section, caractérisée par le doublement de
Vn du suJQ^e -enus 453
Ayennacns, 453. Lncennacas, 455.
Marceimacas, 454. Fidennaciia, 455.
S 3. — Les noms de lieux eu -acus , dérivés de gentili-
ces romains en -enus, qui se rencontrent dans les ins-
criptions ou dont on trouve un dérivé dans les ins-
criptions ; 2* section, caractérisée par Vn non doublée
du suffixe -enus 456
Artenacus, 456. Catenacensis yicaria, 456.
S 4. — Les noms de lieux en -ocils, dérivés de gentilices
romains en -enus^ dont les inscriptions n'ont conservé
d'autre trace que le gentilice en -ius correspondant. . 457
Albucennacus, 457. Coaenacus, 459.
Antennacus, 457. Frontennacus, 459.
Bessenacensis ager« 457. Lentennacns, 460.
BoutenachuSy 458. 8enteanacas, 460.
Carendenacus, 458. Trebennacus, 461.
Cavexmacus, 458. Nertannacus, 461.
Gortennacus, 458. Aspemacos, 462.
TABLE DES MATIËRB8. 695
CHAPITRE V.
EXEMPLES, AU MOYEN AGE, DE NOMS DE LIEU IDENTIQUES A
DES GENTILIGES ROMAINS EN -eniU.
S !•'. — Noms de lieux identiques à des gentilices ro-
mains en -enus précédemment étudiés 463
Avenna, 463. Cavenas, 464.
Tarenna, 463.
§2. — Noms de lieux identiques à des gentilices ro-
mains en -enus dont on ne connaît que les parallèles
en 'ius 464
Â. — Sont masculins singuliers :
Curennus, 464. Severennns, 465.
Maurennus, 464.
B. — Sont féminins singuliers les suivants :
Tarvenna, 465. Vitulena, 466.
C. — Est au féminin pluriel :
Catenas, 466.
CHAPITRE VI.
EXEMPLES, AU MOYEN AGE, DE NOMS DE LIEUX EN -OCt» DÉRI-
VÉS ANTÉRIEUREMENT DE COgnomina ROMAINS.
Si*'. — Cognomina romains d'origine latine 467
Asellacus, 467. Dominacus, 477.
Aceracus, 468. Liberacus, 478.
Bonacus, 469. Maceracus, 479.
Gatulacns, 470. Masculacus, 481.
Canacus, 471. Mairilacns, 481.
Capitônacus, 472. Massolacus, 482.
Carbonacus, 474. Paternacus, 482.
Catusagus, 474. Piperacus, 483.
Cavannacns, 474. Pusinaacus, 484.
Communacus, 475.
§ 2. — Cognomina romains avec sens ethnographique. . 484
Maurulacae, 486. Britannacus, 488.
Romanacus, 486. Camacus, 488.
Gatalacus, 487. Rutulacae, 489.
696 TABLE DES MATIÈRES.
§ 3. — Cognomina romains d'origine grecque 489
Athanacus, 490. Pninacus, 491.
Hermeracus, 490. Parthenacus, 491.
§ 4. — Cognomina romains d'origine barbare 491
Argentacus, 491. Corbonacas, 497.
Artonacus, 494. Cottonacus, 498.
Brennacus, 495. Ebumlacos, 499.
Bumacus, 496. Isamacus, 499.
Cedracus, 497. Sedegenacas, 499.
CHAPITRE VII.
EXEMPLES , AU MOYEN AGE , DE NOMS DE LIEUX IDENTIQUES A
DES cognomina romains.
§ 1®' — Cognomina romains employés au masculin sin-
gulier 500
Brannus, 500. Marcus, 502.
Catalus, 500. SoUemnis, 502.
Catulus, 500. Turnus, 503.
Celtus, 501. Vassillus, 503.
Marcollus, 501. Tullum, 504.
§ 2. — Cognomina romains employés au masculin pluriel. 504
Artigoni, 504. Blaesi, 504.
§3. — Cognomina employés au féminin singulier. . . 505
Cupita, 505. Urbana, 506.
Romula, 500. Lutova, 507.
§ 4. — Cognomina employés au féminin pluriel. . . . 507
Acullas, 507. Cupitas, 508.
Albinas, 507. Romulas, 508.
CHAPITRE VIIÏ.
EXEMPLES, AU MOYEN AGE, DE NOMS DE LIEUX EN -i-O ^ -i-OUiS ^
FORMÉS ANTKUlKUnEMENT A. L'aIDE DE GENTILICES EN -iUS ET
DU SUFFIXE -0, 0?lis,
Albucio, 509. Avençon, 510.
Aillon, 509. Barbarie, 510.
Arcio, 509. Brignon, 510.
TABLC DBS MATIËRfiB. 087
Bullio, 511. Lenio, 514.
Caldio, 511. Lucio, 515.
Cambrio, 511. Marcio, 515.
Cornelio, 512. Mucio, 515.
Curtio, 512. Poncio, 516.
Gaillon, 513. Quinctio, 516.
Oentio,-513. Samnio, 516.
Grinio, 513. TuUio, 517.
Lantio, 513. Vencio, 518.
Latio, 514.
Appendice. — Noms de lieux en -io, -ionis dérivés de
gentilices en -ius au moyen du suffixe -o, -oniSj dans
les documents contemporains de l'empire romain. . 518
Avennio, 518. Elusio, 520.
Gabellio, 519. * Arausio» 520.
Divio, 520.
CHAPITRE IX.
EXEMPLES , AU MOYEN AGE , DE NOMS DE LIEUX QUI OFFRENT LA
DÉSINENCE 'OluS , ET QUI ONT ÉTÉ FORMÉS EN DÉVELOPPANT ,
A l'aide du SUFFIXE /O- UN THÈME NOMINAL EN -0-, -fo-, -iO-.
§ l•^ — Le mot dont dérive le nom de lieu en -olus est
un nom commun 521
Fomolus, 521. Juncariolas, 522.
Apiar[i]ola8, 522. Linariolas, 523.
Favariolas, 522. Nogariolae, 523.
§ 2. — Le mot dont dérive le nom de lieu en -o/iw est
un nom propre, — gentilice ou cogriomeny — en -ius. 524
Aviniolensis vallis, 524. Matriolas, 525.
Braciolis, 524. Mercuriolus, 526.
Carenciolas, 524. Scotiolae, 526.
Gairolus, 524. Soliolus, 526.
Graniolus, 524. Valentiola, 526.
Mariolas, 525.
CHAPITRE X.
DE LA DÉSINENCE -0-fo/tim , ^o^ialum^ -o-giolum , -o-gilum^
•^-glum , -o-t7wm , -o-lium , en français moderne -euil ,
DIALECTALEMENT -eil,
S 1". — Les noms de lieu en o-iolum nous offrent la
forme familière, en bas latin, de noms composés gau*
698 TABLE DES MATIÈRES.
lois dont les deux termes étaient : 1^ ordinairement
un cognomen d'origine gauloise ou latine; 2* toujours
le nom commun gaulois magus « champ ; » exemples
de noms en o-iolum^ dont on a trouvé la notation
primitive et solennelle en -magus 528
Maro-ialum, 529. Rioilum.
Argentoiolum, 531. Rodolium, 532.
Gassinoiolum, 531. Senogalum, 532.
Noviolium, 531. Vendoilo, 532.
fiadoUuiQ, 531.
§ 2. — Liste alphabétique de noms de lieu en -o-iolum
pour lesquels on n*a pas trouvé de primitif en magus,
bien que ce primitif en magus ait dû exister, et qui
tous dérivent de cognomina 534
Barolia, 534. Germolio, 540.
Bonogilum, 535. Linogile, 541.
Bragogilo, 536. Petroiium, 541.
Britogilum, 536. Pinolio, 542.
Cabrogilo, 537. Ruscoialum, 542.
Caloili villa, 537. Spinogilum, 542.
Cantogilum, 538. Tornolii, 543.
Caucinogilum, 539. TuroUium, 543.
Cavenoilus, 539. Varoiol, 543
Corbolius, 539. Vernolium, 543.
Gurtogilo, 540. Verolias, 544.
Ghristoilo, 540. Altogilam, 545.
Ebrolio, 540.
CHAPITRE XL
DU SUFFIXE 'iSCUS.
§ !•'. — Le suflBxe gaulois -isco-s 547
§ 2. — Noms de lieux dérivés de gentilices romains à
Taide des suffixes gaulois -isco-s et -isco^ -onis dans les
textes du temps de l'empire romain 548
Petenisca, 548. Latisco, -onis, 549.
Vibiscus, 548. Lavisco, -onis, 549.
§ 3. — Noms de lieux en -iscus d'origine romaine dans
les documents du moyen âge 550
Amelesca, 550. Martinesque, 553.
Barbarcsca, 551. Matriscus, 553.
Caliscus, 551. Maurisca, 553.
Galiscus, 552. Ramigescus, 554.
Lodiscus, 552. Romanisca, 554.
Marinescae, 553.
TABLE DES MATIÈRES. 699
5 4, — Noms de lieu en -iscm d'origine germanique. . 554
Attaniscus, 554. Frotgaresc, 556.
Aulbrandiscus, 555. Qodinesca, 557.
Autbertescus, 555. Odalrigescus, 557.
Belteirescus, 555. Rainaldescus, 557.
Bomonesca, 556. Teudgariescus, 558.
Domariescoa, 556. Unaldescus, 558.
EldegrimiscuB, 556.
CHAPITRE XII.
LE SUFFIXE GAULOIS --aVO-S DANS LES NOMS DE LIEU PENDANT
l'antiquité ET AU MOYEN AGE.
§ !•'. — Le sufiBxe gaulois -avosy noté -avus dans les
textes latins 560
§ 2. — Le suffixe -avtis employé pour former des noms
de lieu dérivés de gentilices romains 561
Ambiiiavus, 561. Ameliavus, 561.
S 3. — Le sufiBxe -avus employé pour former des noms
de lieu dérivés de cognomina romains 562
Antonnava, 562. Ganavi, 563.
Andelavus, 562. Merlaus, 564.
Bellenavus, 563.
CHAPITRE XIIL
LE SUFFIXE GAULOIS -iCOS DANS LES NOMS DE LIEUX PENDANT
l'antiquité et au MOYEN AGE.
S !•'. — Le suffixe -icos en gaulois 565
§ 2. — Le suffixe -icos, -icus employé à former des noms
de lieu dérivés de cognomina romains ou de noms
pérégrins 566
Carantonicus, 566. Silvanicus, 567.
Gassinicus, 567. Urbanicus, 568.
Gatuicus, 567.
S 3. — Le suffixe 4cils employé à former des noms de
lieu dérivés de cognomina en -anus qui eux-mêmes
dérivent de gentilices en -ius 569
Acutianicas, 570. Aurelianicus, 571.
Albucianicas, 571. Bulianicus, 571.
700 TABLE DES MATIÈRES.
Cantilianicns, 572. Marinianicas, 575.
Gassianicas, 572. Martinianicas, 575.
Cavillianicas, 572. Qalatianicus, 576.
Celsinianicas, 573. Petronianicaa, 576.
Godicianicas, 573. Quintilianicas, 576.
Firminianicas. 573. Sabinianicas, 577.
Mallianica, 574. Silvinianicus, 577.
Marcellianicas, 574. Venerianicas, 577.
Marianicas, 575.
CHAPITRE XIV.
LE SUFFIXE GAULOIS -SSa DANS l'aNTIQUITÉ ET AU MOYEN AGE.
§ !•'. — Le suffixe gaulois -sso-s, -«a 579
§2. — Noms de lieu dérivés de gentilices romains à
Taide du suffixe gaulois -ssa 581
Gantissa, 582. Villonissa, 585.
Vindonissa, 583.
CHAPITRE XV.
LE SUFFIXE LIGURE -a5Ct« , -OSCUS j -USCUS DANS L* ANTIQUITÉ ET
AU MOYEN AGE.
§ 1"'. — Le suffixe -a^ciw, -asca dans Tltalie du nord-
ouest, d'après les documents antérieurs au moyen
âge 586
§ 2. — Le suffixe -ascus employé à former des noms de
lieu dérivés de gentilices romains dans l'Italie du
nord-ouest, d'après les documents du moyen âge.. . 587
Ansasca, 587. Maliascus, 588.
Buriascus, 587. Pinariascha, 588.
Gragnasgus, 587. Plauciasca, 589.
Juliascus, 588. Ruveliascus, 589.
Lagnaschus, 588. Venzascus, 589.
Lisiniascus, 588.
§ 3. — Le suffixe -ascm employé à former des noms de
lieu dérivés de cognomina romains dans l'Italie du
nord-ouest d'après les documents du moyen âge.. . 590
Gavrascus, 590. Novellasca, 591.
Glavascus, 590. Quintascha, 591.
Martiriascus, 590.
TABLE DES MATIÈRES. 701
S 4. — Le sufEixe -ascu^ et ses variantes -osciÂS^ -uscus
employés à former des noms de lieu dérivés de gen-
tilices romains en Gaule d'après les documents du
moyen âge 591
Â. — Le sufBbce -ascits en Qaule 592
AtisiascuSy 592. Qratiasca, 593.
Bassiascus, 592.
B. — < Le sufBxe -oscus en Gaule 593
Albariosciis, 593. Manioscus, 595.
Albioscus, 593. Marcioscas, 595.
Canioscus, 594. Montioscus, 596.
Catalioscus, 594. Vilioscus, 596.
Curioscns, 594. Vitrioscus. 596.
Flavioscns, 595.
S 5. — Les suffixes 1* -ascus^ -osciis 2** "Usco -onis em-
ployés à former des noms de lieux dérivés de cogno-
mina romains en Gaule, d'après les documents du
moyen &ge 597
A. — Suffixe 'OsciLs en Gaule 597
Canascas, 597.
B. — Suffixe 'OsouSj -usous en Gaule 597
Artonosciis, 597. Gamuloscos, 599.
Blanuscus, 598. Oatharoscus, 600.
BranoscuB, 598. Venoscus, 600.
Bricosci, 598. Vindausca, 600.
Camboscus, 599.
C. — Sufflbce usco, onis en Gaule 601
Tanuco, 601.
CHAPITRE XVL
LB SUFFIXE LATIN '^iHiiS BANS LES NOMS BE LIEU PENBANT
l'antiquité et au moyen AGE.
S 1". — Généralités 602
§2. — Noms en -arias, dérivés de noms de minéraux.. 602
Aqnarias, 603. Gravières, 604.
Ferrarias, 603. Perridres, 604.
702 TABLE DES MATIÈRES.
53. — Noms en -aria^ -arias dérivés de noms de véfj^
taux « 605
Jimcaria, 605. Juniperari^ 607.
Roboraria, 605. Linarias, 607.
Alnarias, 605. Raverias, 606.
Ad Avenarias, 606. Rosarias, 608.
Buxariaa, 606. Segalarias, 608.
Canavarias, 606. Spicarias, 608.
Castanearias, 607. Violarias, 609.
§4. — Noms en -aria, -arias, -arius dérivés de noms
d'animaux 610
Appiaria, lisez Apiaria, 610. Leporaria, 612.
Asinarias, 610. Lnparias, 612.
Caponarias, 610. Porcarias, 612.
Cervaria, 611. Soricarias, 612«
Colubraria, 611. Vnlpecularias, 613.
Columbarius, 611.
§ 5. — Noms en -aria, -arias dérivés de noms d'hommes. 613
CHAPITRE XVII.
LE SUFFIXE LATIN -etum DANS LES NOMS DE LIEU PENDANT
l'antiquité et au moyen AGE.
S 1*'. — Généralités 615
§ 2. — Noms communs en -etujf^ dérivés de noms latins
de végétaux et qui ont été employés en France comme
noms propres de lieu 616
Albucetum, 616. Laoretnm, 622.
Alnetom, 616. Nucetum, 623.
Betnlietum, 617. Olivetum, 623.
Bnxetum, 617. Pinetnm, 624.
Oastanetum, 619. Pometum, 624.
Cepetum, 620. Pranetum, 624.
Goryletum, 620. Roboretum, 625.
Pagetum, 620. Salicetum, 626.
Fraxinetum, 621. Spinetum, 626.
Gentianetum, 621. Tilietum, 627.
Genistetum, 622. Tremuletum, 627.
Juniperetum, 622. Ulmetum, 628.
§ 3. — Dérivés en -etum de noms de végétaux qui ne
sont pas latins 628
Gasnetum, 628. Vernetum, 629.
Rausetum, 629.
•*• .■♦
r
/
TABLE DBS MATIÈRES. 703
S 4, — Dérivés en -etum de noms communs qui ne dé-
signent pas des végétaux 630
Oortiletum, 630. Fontanetum, 630.
Essaretum, 630.
S 5. — Dérivés en -arePum 632
Ficaretum, 632. Nucaretnm, 633.
Juncaretnm, 632. Pomaretam, 633.
APPENDICE 635
Supplément aux chapitres m, iv et v du livre i*'.. . 635
§ !•'. — Population de la Gaule barbare au moment de
sa conquête par César 635
§ 2. — Date du partage du sol entre les particuliers en
Irlande 637
Additions diverses 638
Erratum 638
Index alphabétique des noms de lieu anciens. . . . 639
Index alphabétique des noms de lieu modernes. . . 655
Index alphabétique des noms de personnes. : ... 671
Index alphabétique des finales de noms de lieu
anciens * 683
CORRECTION
Page 637, lignes 17 et 18, œu lieu de qu'ils paraissent avoir
été encore étrangers, lisez qu'elle parait avoir été encore
étrangère.
TOULOUSE. — UfP. A. CHAUVIN ET FILS, RUE DES SALENQUES, 28.
\
ERNEST THORIN, ÉDITEUR
EXTRAIT DU CATALOGUE DES OUVRAGES DE FONDS :
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çaise entre Palsfjrave et Vaugelas. \ vol. grand in-8**. 6 >»
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rement refondue et accompagnée de planches et de figures. 1 vol. gr. in-8« raisin. M »
CHAIQNET (Ad. -Ed.), recteur à Poitiers. — Théorie de la d/:cLiiiaison de» noms en 'jn':
<( en latin d'uprts les principes de la philologie comparée, Ia-8°. 4 >»
CR0I8ET (Alf. et Maurice). — HisloÎTe de la littératuTe grecque^ par M. Alfred Croièet,
membre de l'Institut, professeur à la Sorbonne, et M. Maurice Croiset, professeur a la
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THOMAS (Em.). professeur à la Faculté des lettres de Lille. — Scoliasles de YirgiU.
Essai sur Servius et son commentaire sur Vii-gile, etc. 1 vol. iû-8'. ' 8 "
f.^^"' ^ \t \SL^
1 1
\