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Full text of "Recherches sur l'origine de la propriété foncière et des noms de lieux habités en France (période celtique et période romaine)"

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RECHERCHES 

SUR  L'ORIGINE  DE  LA 

PROPRIÉTÉ  FONCIÈRE 

ET  DBS 

NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS 

EN  FRANCK 

(PÉRIODE  CELTIQUE  ET  PÉRIODE  ROUAINE) 
H.  D'ARBOIS  DE  JUBAINVILLE 


A.'s^ec  la  collaboi-ation  de  G.  DOTTIN 


PARIS 

tllMiST  THOBIN,  ÉULTEUII 

DI  L*  SOtlËTft  UKS  tnJDES  IIISTOKIQI'KS 


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PROPRIÉTÉ  FONCIÈRE 


NOMS  DE  LIEUX  HABITES 


EN  FRANCE 


OUVRAGES  DE  M.  H.  D'ARBOIS  DE  JUBAiNVILLE 


EN    VENTE 

Chez  THORIN,  libraire-éditeur,  7,  rue  de  Médicis,  Paris. 

Histoire  des  ducs  et  des  comtes  de  Champagne^  six  tomes  en  sept  volumes, 
in-8o  (1859-1867).  52  50 

Ouvrage  presque  épuisé. 

Essai  d'un  catalogue  sur  la  littérature  épique  de  l'Irlande ,  précédé  d'une 
étude  sur  les  manuscrits  de  la  langue  irlandaise  conservés  dans  les 
Iles-Bi'itanoiques  et  sur  le  Continent,  in-8o,  1884.  12     » 

Inventaire  sommaire  des  archives  de  la  ville  de  Bar-sur-Seine ,  1864 , 
in-4o.  5     » 

Résumé  d*un  cours  de  droit  irlandais,  professé  au  Collège  de  France  pen- 
dant le  premier  semestre  de  Tannée  1887-1888  (Sources  du  droit  celtique  ; 
Date  du  Senchtjs  Môa;  Divisions  du  6bnchus  Môa,  etc.),  brochure 
in-8o.       •  '  1  50 

Résumé  d'un  cours  de  droit  irlandais,  professé  au  Collège  de  France  pen- 
dant le  second  semestre  de  Tannée  1887-1888  et  pendant  le  premier 
semestre  de' Tannée  1888-1889  (La  saisie  mobilière  dans  le  Senchus  M6r), 

brochure  in-8''.  1  50 

« 

Les  premierfjkabitants  de  l'Europe,  d'aprôs  les  auteurs  de  Tantiquité  et  les 
recherches  des  linguistiques.  Seconde  édition,  corrigée  et  considéra- 
blement augmentée  par  Tauteur,  avec  la  collaboration  de  G.  Dottin , 
secrélairc  de  la  rédaction  de  la  Revue  celtique,  2  beaux  volumes  grand 
in -80  raisin. 

En  vente  :  Tome  l*',  contenant  :  1»  Peuples  étrangers  à  la  race  indo- 
européenne (habitants  des  cavernes,  Ibères,  Pélasges,  Etrusques,  Phé- 
niciens); 2»  Indo-Européens,  l'«  partie  (Scythes,  Thraces,  lUyriens, 
Ligures).  —  Prix  de  ce  volume  :  10    » 

N.  B.  —  Le  tome  12  paraîtra  fin  1890. 

Catalogue  d^ actes  des  comtes  de  Brienne,  in*8<*,  1872.  3  50 

Cours  de  littérature  celtique,  t.  I  à  IV.  Prix  de  chaque  vol.  in-8*».      8     » 
Tome  I»*"  :  Introduction  à  Vhistoire  rfe  la  littérature  celtique, 
ToMis  II  :  Le  cycle  mythologique  irlandais  et  la  mythologie  celtique. 
ToMiss  III  el  IV  :  Les  Mabinogion^  suivis  en  appendice  d'une  traduc- 
tion et  d'un  commentaire  des  triades  historiques  et  légendaires 
des  Gallois  et  de  divers  autres  documents,  par  J.  Loth,  profes- 
seur à  la  Faculté  des  lettres  de  Rennes,  2  vol.  in-8*. 

Ouvrage  couronné  par  T Académie  française  en  1890  (prix  Langlois). 


TOULOUSE.   —  IHP.   A.   CHAUVIN  R  FILS,   RUB  DBS  BALBlfQUBS  ,  tS. 


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RECHERCHES 

SUR  L'ORIGINE  DE  LA 

PROPRIÉTÉ  FONCIÈRE 

KT  DES 

NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS 
EN  FRANCK 

(PÉRIODE  CELTIQUE  ET  PÉRIODE  ROHAINB) 

A    •  "" 

Hf'D;iPOIS  DE  JUBAINVILLE  ,   185-7  -  19  10, 
Avec  la  coUabor-ation  de  G;  DOTTIN      \S(c?)  — 


PARIS 

EKNEST  THORIK,  ÊUITEUH 

I.IHRAiHI!   DUS   ÉCOLES   rHANÇAlBIiB    d'aTUÈKEK    ET 
OU  coulai  DE  TEikECB  ET  DE  l'ECOLE  EOHEELi  EOTl 
M  U  HOaiTt  DES  ETCDES  B[STOELODES 


CV^ 


-*T" 


ASTOH,  LENOX  AND 

TLLDEN  FOUNDATION  S 

R  1926  L 


4.MI. 


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  LA  MÉMOIRE  DE 


Jules  QUICHERAT 


A  Monsieur  Eugène  de  ROZIÈRE 


a 


PRÉFACE 


Le  travail  qui  suit  se  divise  en  deux  parties.  L'une 
traite  spécialement  de  Torigine  de  la  propriété  foncière 
en  France,  c'est  le  premier  livre;  l'autre  a  pour' ob- 
jet de  montrer  qu'en  France  un  grand  nombre  de 
noms  de  lieux  habités  sont  dérivés  d'un  nom  de  pro- 
priétaire ,  c'est  le  second  livre. 


I 


Il  y  a  deux  manières  de  chercher  d'où  vient  la  pro- 
priété foncière  :  l'une  est  d'examiner  comment  ce 
grand  fait  contemporain  se  peut  justifier  par  la  mo- 
rale ou  par  le  droit  naturel ,  voire  même  par  l'intérêt 
économique  et  politique  des  sociétés  ;  l'autre  est 
d'étudier  quels  sont  les  faits  antérieurs  et  successifs 
par  lesquels  ce  fait  moderne  a  été  engendré.  Cette 
seconde  manière  a  été  la  nôtre. 

Nous  n'entendons,  en  aucune  façon,  contester  le 

mérite  de  la  première.  Nous  ne  chercherons  pas  à 

vérifier  si  les  philosophes,  les  orateurs,  les  élégants 

écrivains,    qui'  exposent  quelle    est    suivant  eux 

la  base  rationnelle  du  droit  de  propriété  foncière , 

n'attribuent  pas  quelquefois  un  caractère  absolu  et 

immuable  à  des  doctrines  qui  sont  le  résultat  de  faits 

politiques  et  sociaux  transitoires  ;  nous  ne  discuterons 

I 


II  PRÉFACE. 

pas  la  question  de  savoir  si  leurs  doctrines  ne  sont 
pas  la  formule  ou  la  négation  d'un  certain  degré  de 
civilisation,  qu'un  autre  a  précédé  et  qu'un  autre 
suivra;  nous  ne  demanderons  pas  si  eux-mêmes, 
en  donnant  ou  refusant  un  fondement  moral  au  fait 
de  la  propriété  foncière  moderne ,  n'ont  pas  été  sou- 
vent guidés  par  des  idées  préconçues  et  si  ces  idées 
ne  sont  pas  le  résultat  de  l'éducation ,  s'ils  ne  les 
doivent  pas  à  l'influence  du  milieu  déterminé  où  ils 
ont  vécu. 

Leur  méthode,  qu'on  peut  appeler  philosophique 
et  oratoire ,  est  celle  que  préfèrent  le  plus  grand  nom- 
bre des  esprits;  elle  a  été  suivie,  dans  un  cours 
de  philosophie  du  droit,  par  un  des  maîtres  les 
plus  éminents  et  les  plus  goûtés  qui  se  soit  assis 
dans  une  chaire  française  en  notre  siècle.  Dans  une 
de  ses  leçons,  donnée  le  29  mai  1849,  mais  restée 
inédite  jusqu'en  1888,  le  spirituel  et  disert  profes- 
seur met  en  présence  deux  formules  qui  sont  la  néga- 
tion l'une  de  Tautre  :  la  première  est  de  Bentham, 
la  seconde  de  Ballanche.  Voici  celle  de  Bentham  : 
«  La  propriété  et  la  loi  sont  nées  ensemble  et  mour- 
»  ront  ensemble.  Avant  les  lois ,  point  de  propriété. 
»  Otez  les  lois,  toute  propriété  cesse.  »  Ballanche  ré- 
pond :  «  La  propriété  est  une  institution  divine.  Les 
»  déclamations  du  dernier  siècle  contre  le  tien  et  le 
»  mien  ne  peuvent  soutenir  le  regard  de  la  raison , 
»  malgré  le  secours  que  l'éloquence  de  Rousseau  a 
»  daigné  leur  prêter.  L'homme  fait  le  sol,  la  terre 
»  c'est  lui  (1).  »  La  thèse  de  Ballanche  est  celle  qu'a 
défendue  Edouard  Laboulaye. 

(1)  Trente  ans  d'enseignement  au  Collège  de  France^  1849-1882.  —  Cours 
inédits  de  M.  Edouard  Laboulaye,  publiés  par  tes  fils,  avec  le  concours  de 


PRÉFACE.  III 

Le  but  qu'on  se  "propose  ici  n'est  pas  de  résoudre  la 
question  de  savoir  qui  de  Bentham  ou  de  Ballanche 
a  raison  :  il  est  de  chercher  à  discerner  comment ,  à 
l'origine  de  l'histoire,  la  notion  de  la  propriété  immo- 
bilière était  conçue  dans  la  région  qui  est  aujourd'hui 
la  France. 

Dès  la  période  de  l'unité  indo-européenne,  les  Indo- 
européens ont  eu  l'idée  de  la  propriété  mobilière  et 
du  vol  qui  en  est  la  négation.  La  propriété  mobilière 
—  de  la  famille ,  plutôt  que  de  l'individu  comme  au- 
jourd'hui —  était  alors  une  des  bases  de  l'organisa- 
tion sociale  ;  les  travaux  des  linguistes  et  les  recher- 
ches des  historiens  du  droit  l'établissent;  mais  il 
n'est  pas  prouvé  que  les  premiers  Indo-européens 
connussent  la  propriété  foncière,  telle  du  moins 
qu'on  la  conçoit  ordinairement  de  nos  jours  en 
France. 

On  peut  distinguer  deux  sortes  de  propriété  fon- 
cière :  1**  la  propriété  individuelle  ou  la  propriété  fa- 
miliale dont  dérive  la  propriété  individuelle  qui ,  au- 
jourd'hui ,  en  France ,  détient  presque  tout  le  sol  ; 
2'  la  propriété  qui  appartient  à  un  groupe  différent 
de  la  famille  et  plus  vaste  ;  cette  seconde  espèce  de 
propriété  foncière  existe  encore  de  nos  jours  par 
exception  en  France  sous  forme  1**  de  propriété  d'État, 
2'  de  propriété  appartenant  à  une  personne  morale 
inférieure,  de  propriété  communale  par  exemple. 

La  propriété  communale  peut  être  l'objet  de  modes 
de  jouissance  très  variés  :  un  chemin  qui  appartient 
à  une  commune  est  afifecté  à  la  jouissance  publique, 
sans  distinction  entre  les  habitants  de  la  commune 

M.  Marcel  Pournier,  et  avec  une  préface  par  M.  R.  Dareste,  membre  de 
rinstitut,  p.  133,  159. 


IV  PRÉFACE. 

et  les  étrangers;  les  uns  et  les  autres  ont  également 
le  droit  de  passer  dans  le  chemin  communal.  Une 
pâture  communale  est  affectée  à  la  jouissance  com- 
mune des  habitants ,  avec  exclusion  des  étrangers  ; 
tous  les  habitants  de  la  commune  y  font  paître  leurs 
bestiaux,  les  étrangers  n'ont  pas  le  droit  d'y  envoyer 
les  leurs.  Enfin  une  terre  communale  peut  être 
partagée  entre  tous  les  habitants  de  la  commune  qui 
ont  chacun  la  jouissance  temporaire ,  viagère  quel- 
quefois, d'un  lot  à  l'exclusion  des  autres  habitants 
de  la  même  commune  ainsi  que  des  étrangers  ;  ils 
exploitent  chacun  séparément  leur  part  sans  préju- 
dice du  droit  collectif  de  propriété  appartenant  à  la 
commune ,  et  ce  droit  de  la  commune  est  représenté 
par  une  légère  redevance  annuelle. 

Il  n'est  pas  ici  question  d'examiner  si  ce  dernier 
mode  d'exploitation  de  la  terre  est  ou  n'est  pas  en 
contradiction  avec  ce  que  Ballanche  appelait  «  l'insti- 
tution divine,  »  mais  ce  mode  d'exploitation ,  aujour- 
d'hui rare  en  France ,  présente  une  grande  analogie 
avec  le  procédé  généralement  usité  dans  la  Gaule 
barbare  au  moment  où  César  en  fit  la  conquête.  Rem- 
plaçons la  commune,  propriétaire,  par  le  peuple; 
au  lieu  des  habitants  de  la  commune  qui  jouissent 
chacun  précairement  d'un  lot  de  la  terre  communale 
mettons  les  membres  de  l'aristocratie  gauloise,  et 
nous  aurons  une  idée  approximative  de  la  condition 
de  la  terre  dans  la  Gaule  barbare  quand  elle  perdit 
son  indépendance  au  milieu  du  premier  siècle  avant 
notre  ère.  Vager  publicus  romain ,  sans  être  ex- 
ploité exactement  aux  mêmes  conditions  que  la  terre 
communale  française  offre  avec  elle  beaucoup  de 
ressemblance,  il  peut  aussi  être  comparé  à  Vager 


PRÉFACE.  V 

gaulois,  et  la  comparaison  serait  également  justifiée. 
Nous  avons  déjà  soutenu  cette  doctrine  dans  plu- 
sieurs mémoires  ;  elle  est  en  contradiction  avec  l'opi- 
nion d'un  des  hommes  qui  aujourd'hui,  par  leur  talent 
et  par  leur  caractère,  honorent  le  plus  la  science 
et  le  professorat  français.  On  trouvera ,  à  la  fin  de 
cette  préface,  une  réponse  à  plusieurs  de  ses  critiques  : 
cette  réponse,  destinée  d'abord  à  une  revue,  sera 
plus  à  sa  place  ici  ;  quant  aux  autres  points  sur  les- 
quels notre  savant  confrère  a  contesté  nos  conclu- 
sions, on  les  verra  discutés  plus  loin. 


II 


La  seconde  partie  du  présent  ouvrage  est  une  étude 
étymologique  sur  une  partie  des  noms  les  plus  an- 
ciens de  lieux  habités  qu'on  trouve  en  France.  Par 
les  plus  anciens ,  nous  entendons  ceux  de  ces  noms 
qui  remontent  à  une  date  antérieure  à  la  conquête 
franque.  Nous  disons  lieux  habités ,  parce  que  les 
noms  de  coufâ  d'eau  et  de  montagnes  restent  en  de- 
hors de  notre  travail.  Les  noms  de  cours  d'eau  et  de 
montagnes,  qui  remontent  à  l'antiquité,  appartiennent 
pour  la  plupart  à  une  ou  plusieurs  langues  antérieu- 
res à  la  conquête  celtique  et  sont  inexplicables  pour 
nous  ;  tandis  que  les  noms  des  lieux  habités  sont 
souvent  faciles  à  comprendre ,  quand  les  lois  de  la 
phonétique  et  les  siècles  n'en  ont  pas  trop  modifié  les 
formes  primitives  et  les  organes. 

L'étude  des  noms  de  lieux  habités  se  rattache  aux 
recherches  sur  l'origine  de  la  propriété  foncière  par 
une  doctrine  qui  est  fondamentale  en  fait  de  topo- 
nymie française  :  les  noms  anciens  de  lieux  habités 


VI  PRÉFACE. 

sont  pour  la  plupart  tirés  du  nom  porté  par  un  pro- 
priétaire antique  :  il  s'agit  du  premier  propriétaire  de 
bâtiments  qui  à  la  fois  servaient  à  son  habitation  et 
étaient  le  centre  d'une  exploitation  agricole  dirigée 
par  lui  ou  faite  en  tout  cas  par  ses  gens. 

Pour  la  période  franque ,  cette  doctrine  est  d'une 
complète  évidence  :  des  diplômes  nombreux  nous 
donnent  les  formes  géographiques  de  cette  période  ; 
les  noms  d'hommes  francs  sont  bien  connus ,  grâce 
aux  diplômes,  aux  chroniques  et  à  divers  autres  docu- 
ments ;  en  mettant  à  profit  ces  textes  on  peut,  sans  de 
trop  longues  recherches,  parvenir  à  reconnaître  dans 
nos  cartes  de  géographie  les  noms  d'une  quantité 
considérable  de  villa£y  de  viHaria,  de  contes  j  fondées 
par  les  Francs,  vainqueurs  et  conquérants,  les  noms 
d'une  foule  de  valles ,  de  montes  où  ces  dominateurs 
barbares  ont  construit  leurs  demeures.  Us  s'établis- 
saient tantôt  à  côté  des  villae  gallo-romaines  détruites 
par  les  invasions  précédentes ,  tantôt  même  sur  les 
ruines  déjà  vieilles  et  innommées  de  ces  mllae  anti- 
ques, tantôt  peut-être  près  d'autres  mllae  gallo-ro- 
maines encore  debout  et  habitées  par  les  descendants 
des  anciens  propriétaires,  mais  que  réduisit  à  un 
territoire  moins  vaste  le  voisinage  d'une  nouvelle 
exploitation  imposée  par  la  conquête.  La  terre ,  dans 
la  Gaule  dépeuplée,  avait  probablement  si  peu  de  va- 
leur, était  si  souvent  sans  emploi ,  que  le  vaincu  n'a 
guère  souffert  de  cette  spoliation. 

Voici  quelques  exemples  de  ces  fondations  fran- 
ques. 

Dans  le  département  de  Meurthe-et-Moselle  :  Gon- 
dreville  est  une  ancienne  Gandulfi-mlla.  Voilà  son 
nom  au  huitième  et  au  neuvième  siècle;  or,  Gundul- 


PREFACE.  vil 

fus  est  un  nom  d'homme  franc  déjà  assez  répandu  au 
sixième  siècle  pour  avoir  été  alors  adopté ,  à  l'exemple 
des  vainqueurs,  dans  une  famille  sénatoriale  gallo-ro- 
maine :  on  le  voit  par  un  duc  Gundulfus,  grand  oncle 
maternel  de  Tévèque  historien  Grégoire  de  Tours  (1). 

Une  charte  en  faveur  de  l'abbaye  de  Saint-Denis , 
en  766,  est  datée  d'une  localité  appelée  Ansoaldo-viln 
lare  (2).  On  trouve  un  exemple  du  nom  d'homme 
Ansoaldus  dans  V Histoire  des  Francs  de  Grégoire  de 
Tours.  Il  s'agit  d'un  grand  seigneur  de  la  cour  ;  c'est, 
pour  employer  la  langue  du  temps ,  un  des  proceres 
du  roi  Chilpéric  I",  en  576  et  les  années  suivantes  (3), 
Plusieurs  autres  personnages  du  nom  d' Ansoaldus  se 
rencontrent  dans  divers  documents  mérovingiens. 
Tel  est,  au  milieu  du  septième  siècle,  à  la  fîn  du  règne 
de  Dagobert  P',  un  fonctionnaire  royal  qui  protégeait 
l'église  de  Poitiers  (4).  Tels  sont,  un  peu  plus  tard, 
sous  Glovis  III ,  un  comte  du  palais  en  691  (5) ,  un 
évêque  en  693  ou  en  694  (6).  La  bonne  orthographe 
de  ce  nom  serait  Ansi-taldtts ,  il  signifie  «  celui  qui 
a  la  puissance  des  dieux  dits  Anses.  »  Ansoaldo-ml" 
lare  paraît  être  aujourd'hui  Ansauvilliers  (Oise).  Il  y 
a  longtemps  que  dans  ce  village  personne  ne  pense 
plus  ni  aux  Anses  ni  à  d'autres  divinités  de  l'antique 
panthéon  germanique. 

En  693  ou  en  694,  Clovis  III  ordonne,  par  un  juge- 
ment, la  restitution  d'une  propriété  foncière  appelée 


(1)  Historié  Francorum  ^  1.  VI,  c.  ii,  édition  Arndt,  p.  255,  1.  35;  p.  250, 
1.  1-3. 

(2)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  i9. 

(3)  Grégoire  de  Tours,  Historia  Franco rum^  V,  3,  édition  Arndt,  p.  105, 1.  2» 
(A)  Gesta  Dagoberii,  c.  44  ;  édit.  Krusch,  p.  421. 

(5)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  691,  col.  1. 

(6)  /6id.,  p.  26,  col,  2. 


VIII  PREFACE. 

Baddane^urtis  (1).  Baddane  est  le  génitif  féminin  de 
Baddo.  Baddo  est  le  nom  d'un  envoyé  de  Frédégonde 
qui ,  en  587,  fut  accusé  d'avoir  tenté  de  faire  assas- 
siner le  roi  Gontran  (2).  Un  diplôme  royal  de  Tannée 
625  mentionne  un  autre  Baddo ,  père  de  Dodo ,  abbé 
de  Saint-Denis  (3).  Baddane-'Curtis  paratt  être  au- 
jourd'hui Bethencourt  (Oise). 

Bougival  (Seine-et-Oise)  est  appelé  BaudechisHo-- 
vallis  dans  une  charte  de  Tannée  697.  Baude-chisilo- 
est  le  thème  du  nom  d'un  grand  personnage  franc  de 
la  fin  du  sixième  siècle  ;  pour  ce  nom,  il  y  a  plusieurs 
orthographes  :  Bate-chisilus  (4) ,  Baude-gysilus  (5) , 
Bade-gysilus  (6) ,  Badi-gysilus  (7)  :  le  personnage , 
d'abord  maire  du  palais ,  581 ,  devint ,  vers  584 , 
quoique  marié,  évêque  du  Mans.  Un  certain  Baude- 
gisilus,  simple  diacre,  avait  été  envoyé  par  le  roi 
Chilpéric,  en  577,  porter  sur  le  tombeau  de  saint 
Martin ,  à  Tours ,  une  lettre  avec  demande  d'une  ré- 
ponse que  naturellement  saint  Martin  ne  donna  pas  ; 
il  est  peut-être  le  même  que  celui  qui  fut  élevé  à  la 
dignité  de  maire  du  palais,  puis  à  Tépiscopat.  Le  fon- 
dateur de  Bougival  avait,  comme  le  diacre,  le  même 
nom  que  le  maire-évêque.  Ce  nom  ne  doit  pas  avoir 
été  rare  à  l'époque  méroVingienhe  :  Grégoire  de  Tours 
cite   deux  autres    Baudegisilus  ,   tous   deux  gens 


(1)  Lcpagc,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  la  Meurthe  ^ 

p.  149. 

(2)  Historia  Francorum,  VIII,  44  ;  IX,  13,  édit.  Arndt.  p.  356, 1.  11;  p.  369, 

1.  13. 

(3)  Tardif,  Monuments  historiques^  p.  4,  col.  2. 

(4)  Historia  Francorum,  VI,  9;  édit.  Arndt,  p.  255,  1.  3. 

(5)  Ibid,,  VII,  15;  édit.  Arndt,  p.  300,  1.  9. 

(6)  Ibid.,  VIII,  39;  édit.  Arndt,  p.  352,  1.  1. 

(7)  Ibid.,  X,  5,  édit.  Arndt,  p.  413,  1.  20. 

(8)  Ibid,,  X,  5  ;  édit.  Arndt,  p.  205,  1.  1-7. 


PRÉFACE.  IX 

obscurs,  l'un  d'Anjou  (1),  l'autre  de  Nantes  (2). 

Le  nom  de  Vaudéraont  (Meurthe-et-Moselle) ,  ap- 
parrftt  pour  la  première  fois  au  douzième  siècle ,  où 
on  le  trouve  écrit  Vadoni-mons;  mais  ce  nom  de 
lieu  est  beaucoup  plus  ancien.  Son  premier  terme  est 
un  nom  hypocoristique  franc.  Un  certain  Waddo  a 
été,  au  sixième  siècle,  maire  du  palais  de  Rigunthe, 
fille  de  Chilpéric  P',  roi  des  Francs,  et  femme  de  Ré- 
carôde,  roi  des  Wisigoths;  il  avait  été  comte  de 
Saintes  (3).  On  doit  croire  que  le  nom  de  Vaudémont 
remonte  aux  premiers  siècles  de  la  période  franque  ; 
s'il  datait  du  neuvième  siècle,  par  exemple,  l'ordre 
des  termes  serait  différent  et  on  aurait  dit  Morts  Wor 
doniSy  comme  on  a  dit  Monasterium  Adremari  pour 
désigner  l'abbaye  dite  plus  tard  de  Montiéramey,  qui 
a  été  fondée  en  837  par  le  prêtre  Adrémare. 

Ce  ne  sont  pas  les  Francs ,  ce  sont  les  Gallo-Ro- 
mains  qui  ont  donné  ces  noms  aux  villae  fondées  par 
les  conquérants.  Les  Francs  auraient  employé  comme 
second  terme  des  mots  germaniques  :  ils  auraient  dit 
au  lieu  de  mlla  et  de  mllare^  heim;  au  lieu  de  cortiSj 
hof;  au  lieu  de  mons^  berg  ;  au  lieu  de  vallis,  thaï; 
je  donne  ces  mots  sous  la  forme  allemande  moderne, 
sans  chercher  à  restituer  la  forme  franque  de  l'épo- 
que mérovingienne.  Les  seconds  termes  latins  :  mUa, 
mllare,  cortis,  valliSy  monsy  attestent  que  nous  som- 
mes en  présence  d'une  idée  gallo-romaine  identique 
à  l'idée  germanique  ;  cette  idée  est  que  la  manière  la 
plus  commode  de  désigner  une  maison  nouvellement 


(1)  De  virtutibus  sancti  Martini,  IV,  14  ;  édit.  Krusch,  p.  653, 1.  6. 

(2)  Ibid,,  IV,  27  ;  édit.  Krusch,  p.  656,  1.  14. 

(3)  Grégoire  de  Tours,  Historia  Francorurrit  1.  VI,  c.  45,  édit.  Arndt, 
p.  285,  I.  18,  19. 


X  PRÉFACE. 

bâtie  est  de  lui  donner  le  nom  de  son  propriétaire. 

Pour  atteindre  ce  but ,  il  y  avait  deux  principaux 
procédés;  outre  le  procédé  de  la  composition,  celui 
de  la  dérivation.  C*est  le  procédé  de  la  dérivation  qui, 
sous  la  domination  romaine,  a  été  ordinairement  pré- 
féré, exemple  JaliaciiSj  de  Julius.  Ce  procédé  était 
plus  conforme  au  génie  de  la  langue  latine;  mais 
sous  la  domination  romaine  on  a  aussi  fait  usage  de 
la  composition.  Ce  serait  une  erreur  de  croire  que  la 
conquête  germanique,  en  introduisant  en  Gaule  des 
noms  de  lieu  composés  dont  le  premier  terme  est  un 
nom  de  propriétaire  germain,  ait  importé  dans  notre 
patrie  un  procédé  nouveau  :  ce  procédé  était  usité 
antérieurement  comme  le  prouvent  les  noms  com- 
posés suivants  qui  désignent  des  localités  de  la  Gaule 
dans  des  documents  du  temps  de  l'empire  romain  : 

Claudio-magus ,  «  champ  de  Claudius ,  »  aujour-* 
d'hui  Clion,  Indre  (1). 

Nerich-magus ,  «  champ  de  Nérius ,  »  Neris  (Al- 
lier) (2). 

Arganto-magus  y  «  champ  d'Argantos,  »  Argen- 
ton-sur-Creuse  (Indre)  (3). 

Caranto-maguSj  «  champ  de  Carantos,  »  Cran  ton, 
commune  de  Campolibat  (Aveyron)  (4). 


(1)  Sulpice  Sévère,  DiaL,  2,  8.  Cet  auteur  écrivait  au  commencement  du 
cinquième  siècle.  J.  Quichcrat,  De  la  formation,  p.  50,  traduit  Claxidiomagus 
par  Cloue  (Vienne),  ce  qui  est  phonétiquement  inadmissible.  M.  Longnon, 
Atlas  historique,  p.  27,  préfère  Clion. 

(2)  Vicani  Neriomagienses,  inscription  romaine;  E.  Desjardins,  Géogra- 
phie  de  la  Gaule  d'après  la  Table  de  Peutînger,  p.  299.  Sur  le  gentilice 
Norius,  voir  ci-dessous,  p.  155. 

(3)  Table  de  Peutingery  chez  E.  Desjardins,  ibid,,  p.  272.  Arganto  est  le  thème 
gaulois  du  nom  d'homme  écrit  Argant  dans  te  Cartulaire  de  Redon ,  p.  83. 

(4)  Table  de  Peutinger,  chez  E.  Desjardins,  ibid,,  p.  312;  cf.  Longnon, 
Atlas  historique^  p.  26.  Sur  le  nom  pérégrin  Carantos,  voir  ci-dessous, 
p.  109. 


PREFACE.  XI 

Germanico-maguSy  «  champ  de  Germanicus,  » 
Sainte- Sévère  (Charente)  (1). 

Ic[c]io-magus^  «champ d'Iccius,»  Usson  (Loire)  (2). 

Marco-magus ,  «  champ  de  Marcus ,  »  Marmagen 
(Prusse  Rhénane)  (3). 

Eburo-duntimj  «  Forteresse  d'Eburos,  »  Yverdun 
(Suisse)  (4). 

Velatw-durum  j  «  forteresse  de  *  Velatus  ou  Ve- 
ladus,  »  Velleret-les-Belvoir  (Doubs)  (5). 

Vitu-durum ,  «  forteresse  de  Vitus,  »  Winterthûr 
(Suisse)  (6). 

Eburo-briga ,  «  château  d'Eburos  »  (7) ,  A vrolies 
(Yonne)  (8). 

De  ces  noms  composés,  dont  le  premier  terme  est 
un  nom  d^homme  propriétaire,  on  ne  peut  séparer 
celui  de  Caturigo-magus  (9) ,  «  champ  des  Caturi- 
ges ,  »  où  le  nom  de  propriétaire  qui  a  fourni  le  pre- 
mier terme  est  un  nom  de  peuple;  c'est  aujourd'hui 
Chorges  (Hautes- Alpes)  (10). 

A  ces  exemples  antiques  on  peut  ajouter  ceux  que 


(1)  Table  de  Peutinger^  choz  E.  Desjardins,  ibid,,  p.  274;  cf.  Longnon, 
Atlas  historique t  p.  28. 

(2)  Table  de  Peutinger,  chez  E.  Desjardins ,  ibid.^  p.  302;  cf.  Longnon, 
Atlas  historique,  p.  29.  Sur  le  gontilice  Iccius^  voir  ci-dessous,  p.  148. 

(3)  Table  de  Peutinger^  chez  E.  Desjardins,  ibid.y  p.  110;  cf.  Longnon , 
Allas  historique^  p.  29.  Sur  le  cognomen  romain  Marcus,  voy.  Do-Vit,  Ono- 
masticon,  t.  IV.  p.  .340. 

(4)  Table  de  Pcuiinger,  chez  E.  Desjardins,  ibid.^  p.  234.  Sur  le  nom  pé- 
régrin  Eburus^  voir  ci-dessous,  p.  108. 

(5)  Velatudoro  dans  Vilinéraire  d'Anloinn^  p.  349, 1.  1  ;  cf.  Longnon,  Allas 
historique,  p.  32.  Le  nom  pérégrin  Veladus  est  conservé  par  une  inscription 
de  Nimes  (C.  /.  L.,  XII,  3984). 

(6)  Itinéraire  d'Antonin,  p.  251,  1.  5.  Le  nom  pérégrin  Vitus  est  attesté 
par  une  marque  de  potier  trouvée  à  Vienne  (Isère)  (C.  /.  L.,  XII,  5686,  942). 

(7)  Itinéraire  d'Antonin,  p.  361,  1.  2. 

(8)  Longnon,  Atlas  historique,  p.  28. 

(9)  Table  de  Peulinger,  chez  E.  Desjardins,  i6id.,  p.  22. 

(10)  Longnon,  Atlas  historique,  p.  27. 


xn  PREFACE. 

donnent  les  documents  du  moyen  Age;  tels  sont  : 

Turno-magus  y  «  champ  de  Turnus  (1),  »  aujour- 
d'hui Tournon-Saint-Pierre  (Indre-et-Loire)  (2). 

Ic[c]ÙMiurum  (3),  «  champ  d'Iccius ,  »  Izeures 
(Indre-et-Loire)  (4) ,  et  Issoire  (Puy-de-Dôme)  (5). 

Albio-duram  (6),  «  forteresse  d'AIbius,  »  Augers, 
(Seine-et-Marne)  (7). 

Turno-durum  (8),  «  forteresse  de  Turnus,  »  Ton- 
nerre (Yonne). 

Arto-dunum  (9) ,  «  forteresse  d'Artos  ou  Ar- 
tus  (10),  »  Arthun  (Loire). 

Curtio-dunum  (11),  «forteresse  de  Curtius,» 
Ck)urson  (Yonne)  (12). 


(I)  VicuB  Tornomagensis,  chez  Grégoire  de  Tours,  HisLFrancorum,!.  X, 
c.  zxxi,  éd.  Amdt,  p.  444,  1.  4.  Sur  le  cognomen  Turnus,  voir  ci-dessous, 
p.  170. 

(?)  Longnon,  La  Gaule  au  sixième  siècle,  p.  294. 

(3)  !•  îciodoro,  Grégoire  de  Tours,  Hisloria  Francorurrii  1.  X,  c.  xxxi, 
édition  Arndt,  p.  431, 1.  20;  pagus  Isiodorensis,  ibid.^  1.  VI,  c.  xn,  p.  257, 
1.  10  ;  vicus  Iciodorensis ,  dans  le  Gloria  Martyrum .  c.  LViii,  éd.  Krusch , 
p.  528,  1.  10.  —  2*  Iciodorensis  Vicus  dans  le  Gloria  confessorum,  c.  xxix, 
éd.  Krusch,  p.  766,  1.  4-5. 

(4)  Longnon,  La  Gaule  au  sixième  siècle^  p.  273-274. 

(5)  Ibid,,  p.  499-500. 

(6)  Albioderum^  chez  Frédégaire,  1.  IV  c.  Lxxxni,  éd.  Krusch,  p.  163,  1.  18; 
comparez  la  vallis  Albi-drum  au  comté  de  Rioz  (Basses- Alpes),  dans  une 
charte  do  la  fin  du  dixième  siècle  ;  Bruel ,  Recueil  des  chaires  de  Cluny, 
t.  III,  p.  81. 

(7)  Longnon,  Atlas  historique^  p.  163. 

(8)  In  Tornoderensi  pago^  Grégoire  de  Tours,  Gloria  confessorum,  c.  85; 
éd.  Krusch ,  p.  803 ,  1.  5  ;  avec  un  e  (mauvaise  notation)  à  la  première  syl- 
labe :  Ternoderensem  castrum  dans  Historia  Francorum,  1.  V,  c.  5,  édit. 
Amdt,  p.  196, 1.  25;  et  Ternoderensis  caslri  dans  Gloria  confessorum^  c.  11, 
éd.  Krusch,  p.  754,  1.  26  :  cf.  Quantin,  Dict,  top,  de  l'Yonne,  p.  129. 

(9)  In  villa  que  Artidunus  dicitur,  943;  Bruel,  Recueil  des  chartes  de 
Cluny^  t.  I,  p.  598;  in  villa  Arteuno,  981;  ibid,^  t.  II,  p.  623;  Artadunum^ 
994;  ibid.f  t.  III,  p.  386;  Artedunus  villa,  vers  1080,  Aug.  Bernard,  Cari,  de 
Savigny,  1. 1,  p.  414. 

(10)  Sur  ce  nom  d'homme,  voir  livre  II,  chap.  m,  g  3,  au  mot  Ariia. 

(II)  Curcedonus,  Règlement  de  Saint- Aulaire ,  sixième  siècle,  cité  par 
Quantin,  Dict,  top,  de  l'Yonne,  p.  41. 

(12)  Longnon,  Atlas  historique,  p.  176. 


PRÉFACE.  XIII 

Liber[o]-dunum  (1),  «  forteresse  de  Liber  (2),  » 
liverdun  (Meurthe-et-Moselle) . 

Donno-briga  (3),  «  château  de  Donnos  (4);  »  Deneu- 
vre (Meurthe-et-Moselle),  et Chatel-Deneuvre  (Allier). 

Vindo-briga  y  «  château  de  Vindos  (5) ,  »  aujour- 
d'hui Vendeuvre  (Vienne)  (6),  Vandoeuvre  (Meurthe- 
et-Moselle)  (7),  Vendeuvre-sur-Barse,  (Aube),  Ven- 
deuvre  (Calvados)  (8). 

Entre  ces  formations  antiques  et  celles  de  la  pé- 
riode firanque ,  il  n'y  a  qu'une  différence  :  elle  con- 
siste dans  la  langue  à  laquelle  les  termes  appartien- 
nent. Dans  les  formations  de  la  période  franque  le 
premier  terme  des  noms  de  lieu  est  germanique, 
tandis  que  dans  les  formations  antérieures  le  premier 
terme  est  gaulois,  comme  Argantos,  Artos,  Carantos, 
Donnos,  Eburos,  Vindos,  qui  sont  des  noms  gaulois 
d'hommes,  ou  il  est  romain  comme  Glaudius,  Albius, 


(!)  Liber-dunum,  en  894;  Lepage,  Dict.  top.  de  la,  Meurthe,  p.  79. 

P)  C.  /.  L.,  XII/2916;  5686,  480. 

(3J  Ecclesia  Donobrii,  1120;  castrum  quod  dicitur  Donobrium,  1127;  Le- 
page,  Dict.  top.  de  la  Meurthe,  p.  40.  —  In  fundis  Donobrens^  950;  vicaria 
Donobrena,  954;  vicaria  Donobrensia,  966;  chez  Bruel,  Recueil  des  chartes 
de  Cluny,  t.  I,  p.  736,  825;  t.  II,  p.  286;  cf.  Longnon,  Atlas,  p.  143,  147. 

(4)  Sur  ce  nom  pérégrin,  voyez  De- Vit,  Onomasticon,  t.  II,  p.  663. 

(5)  Sur  le  nom  d'homme  Vindos,  voir  Rhys,  Lectures,  1"  éd.,  p.  171. 

(6)  Terra  Sancti  Petn  VindobHae,  973-974;  Curtis  VindobHa,  988-1020; 
Vindovria,  vers  l'an  1000  ;  Redet.  Dict.  top,  de  la  Vienne,  p.  431.  Il  a  existé 
une  villa  de  même  nom  dans  la  Côte  d'Or  ;  de  là  vient  la  Finis  Vendo- 
brensis  de  la  Chronique  de  Bèze  ;  Gamier,  Nomenclature,  p.  55,  n*  239  ;  cf. 
p.  41,  n- 175. 

(7)  Pour  cette  localité,  nous  n'avons  que  l'orthographe  prétendue  savante 
Vindopcra  (971)  ;  Vendopera,  même  siècle  ;  Lepage,  Dict.  top,  de  la  Meur- 
the, p.  148.  On  trouve  aussi  villa  Vindopere  en  938,  pour  Vendeuvre  (Vienne). 
Redet,  Dict.  top.  de  la  Vienne,  p.  431. 

(8)  Les  Bretons,  venus  de  Grande  Bretagne  sur  le  continent,  au  cinquième 
siècle,  apportèrent  le  même  procédé  de  formation,  mais  l'âge  relativement 
moderne  de  leur  langue  leur  imposa  l'ordre  inverse  des  composés  :  Plu- 
maugat  et  Ploufragan  (Côtes-du-Nord)  ;  Ploermel  et  Pleucadec  (Morbihan) 
sont  d'anciens  Plebs  Maelcat,  Plebs  Fracan,  Plebs  Arthmael,  Plebs  Catoc  ; 
Maeicat,  Fracan,  Arthmael,  Catoc  sout  des  noms  d'hommes. 


XIV  PRÉFACE. 

Curtius  qui  sont  des  gentilices  romains,  comme  Ger- 
manicus ,  Liber  et  Marcus  qui  sont  des  cognomina 
romains. 

La  même  différence  entre  le  procédé  antique  et 
le  procédé  de  la  période  franque  se  remarque  pour 
le  second  terme  des  noms  de  lieux  :  dans  les  for- 
mations de  la  période  franque,  le  second  terme, 
mlUiy  villarey  cortiSj  mons^  vallis  est  latin,  tandis  que 
dans  les  formations  antérieures  il  est  gaulois.  Les 
noms  communs  gaulois  magus  «  champ,  »  dunum 
et  durum  «  forteresse ,  »  briga  «  château  »  étaient 
encore  usités  comme  mots  indépendants  et  en  dehors 
de  la  composition,  quand  ont  été  formés,  tant  à  l'épo- 
que de  l'indépendance  celtique  que  sous  l'Empire  ro- 
main, les  noms  propres  de  lieux  dont  ces  noms  com- 
muns sont  le  second  terme. 

Alors  les  habitants  de  la  plus  grande  partie  de  la 
Gaule  parlaient  gaulois.  Ils  parlaient  gaulois ,  quand 
ils  étaient  libres  et  que  César  les  subjugua;  ils  ont 
continué  à  parler  gaulois  pendant  les  premiers  temps 
de  l'Empire  romain ,  et  alors  ils  ont  créé  des  compo- 
sés hybrides  comme  Claudio-maguSj  Marco-magaSj 
Germanico-magus  j  Albio-dururriy  Curtio-dunum  , 
Libero-dunanij  dont  le  premier  terme  est  latin  quoi- 
que le  second  soit  gaulois.  Mais  quand,  au  cinquième 
siècle,  la  domination  franque  se  superposa  aux  ruines 
de  l'Empire  romain,  les  habitants  de  la  Gaule  ne 
parlaient  plus  gaulois ,  leur  lajigue  était  le  latin  ;  ce 
fut  au  latin  qu'ils  empruntèrent  le  second  terme  des 
noms  de  lieu  composés  qui  sont  encore ,  dans  notre 
nomenclature  géographique ,  les  monuments  de  la 
grande  révolution  politique  accomplie  à  cette  date. 
Dans  le  second  terme   des  formations  nouvelles, 


PRÉFACE.  XV 

pendant  la  période  franque,  les  mots  latins  villa  y 
cortiSj  morts  f  vallis  supplantèrent  les  mots  gaulois 
mcxgus ,  dunum ,  durum ,  briga ,  en  même  temps 
qu'au  premier  terme  les  noms  francs,  comme  Gun- 
dulfus ,  Ansevaldus ,  Baddo ,  Baudechisilus ,  etc. , 
remplaçaient  les  gentilices  romains  Claudius,  Albius, 
Curtîus,  etc.,  les  cognomina  romains,  Germanicus, 
liber,  Marcus  et  autres. 


III 


Il  n'y  a  donc  pas  à  douter  du  rôle  important  que 
les  noms  d'hommes  ont  joué  dans  la  formation  des 
noms  de  lieux  habités ,  et  voilà  comment  il  y  a  une 
liaison  entre  les  deux  livres  dont  cet  ouvrage  se 
compose ,  comment  l'étymologie  des  noms  de  lieux 
offre  un  rapport  intime  avec  les  recherches  sur  l'ori- 
gine de  la  propriété  foncière. 

Cependant  le  second  livre ,  qui  traite  de  l'étymo- 
logie des  noms  de  lieu ,  n'a  pas  été  engendré  par  le 
premier  où  est  étudiée  l'origine  de  la  propriété  fon- 
cière ;  la  paternité  de  ce  second  livre  remonte  à  un 
petit  ouvrage  dont  l'auteur,  aujourd'hui  défunt, 
n'avait  guère  attaché  d'importance ,  à  la  relation 
entre  l'étymologie  des  noms  de  lieu  et  l'origine  de  la 
propriété  foncière  :  ce  petit  ouvrage  est  le  traité  De  la 
formation  française  des  anciens  noms  de  lieu,  par 
Jules  Quicherat,  courte  brochure,  qui  a  paru  en  1867. 

Jules  Quicherat,  maître  dont  les  élèves  ne  peuvent 
parler  sans  une  noble  fierté,  était  surtout  remarqua- 
ble comme  professeur  d'archéologie  ;  autant  il  possé- 
dait à  fond  la  matière  de  cet  enseignement ,  autant  il 
sentait  vivement  ce  que  cet  enseignement  pouvait 


XVI  PREFACE. 

avoir  d'incomplet  et  de  défectueux.  Aussi  est-il  mort 
sans  avoir  pu  se  décider  à  publier  ce  cours  qui  aurait 
été  son  chef-d'œuvre.  Quand  les  circonstances  l'ame- 
naient à  étudier  un  sujet  qu'il  connaissait  moins ,  il 
était  plus  facilement  satisfait  et  il  se  décidait  plus  ra- 
pidement à  publier  ses  travaux  ;  telle  est  la  loi  psycho- 
logique qui  a  fait  mettre  au  jour  le  court  traité  De  la 
formation  française  des  anciens  noms  de  lieu.  Ce 
petit,  volume,  malgré  d'inévitables  lacunes  et  bien  des 
défauts,  porte  à  toutes  les  pages  la  vigoureuse  em- 
preinte du  puissant  esprit  auquel  nous  le  devons. 

Beaucoup  de  gens  penseront  sans  doute  qu'en  le 
recommençant  je  fais  acte  de  grande  témérité.  Deux 
raisons  m'ont  déterminé  cependant  à  publier  le  pré- 
sent ouvrage  :  il  est  sur  un  grand  nombre  de  points 
beaucoup  plus  complet  que  celui  de  Jules  Quicherat; 
d'autre  part,  il  y  a  chez  mon  savant  maître  un  cer- 
tain nombre  de  doctrines  linguistiques  qui  à  mes 
yeux  sont  arriérées.  Ainsi  il  n'avait  pas  une  notion 
très  nette  de  la  différence  qui  existe  entre  les  com- 
posés et  les  dérivés  ;  il  réunit,  dans  le  chapitre  II  inti- 
tulé :  accidents  particuliers  de  la  désinende  (p.  27) , 
le  suffixe  --acus  (p.  41)  et  les  mots  danum,  magus 
(p.  48-51) ,  employés  souvent  comme  second  terme  de 
composés.  A  ce  chapitre  II ,  dans  lequel  il  comprend 
les  noms  de  lieux  formés  à  l'aide  de  ces  deux  mots , 
il  oppose  un  chapitre  III  intitulé  :  des  noms  composés 
(p.  53)  ;  et  les  noms  composés  dont  dunum  et  magus 
sont  le  second  terme  n'apparaissent  pas  dans  ce  cha- 
pitre. 

Je  n'admets  pas,  comme  Jules  Quicherat,  que  pen- 
dant la  période  romaine  on  ait  formé  des  noms  de 
lieu  avec  un  suffixe  -iacus  :  le  suffixe  -iacus  date  de 


PRÉFACE.  XYii 

la  période  mérovingienne.  On  peut  être  étonné  de 
voir  Jules  Quicherat  citer  comme  autorité ,  à  Tappui 
de  sa  thèse  (p.  34) ,  la  légende  de  saint  Domitien  où 
il  est  dit  que  le  nom  de  lieu  Latiniacus  vient  de 
Latinus  (1).  Cette  légende  n'est  pas  antérieure  au 
neuvième  siècle,  et  elle  s'appuie  sur  un  document 
évidemment  faux,  puisqu'il  est  daté  de  l'an  l"*  de 
l'empereur  Valentinien ,  contrairement  à  l'usage  ro- 
main et  suivant  celui  des  chancelleries  carlovin- 
giennes  (2). 

Dès  le  sixième  siècle  on  a  dû  former  des  noms  de 
lieu  en  ajoutant  -iacus  à  un  nom  d'homme.  Autre- 
ment Grégoire  de  Tours  n'aurait  pas  rattaché  le  nom 
de  Martiniacas  à  celui  de  saint  Martin  (3) .  L'usage 
du  suffixe  "iactis  est  attesté  au  milieu  du  septième 
siècle  par  le  nom  de  Daccognaca  ou  Daccugnaca 
(pour  Dacœniaca)  villa  y  dans  un  diplôme  de  Clo- 
taire  III  (4)  ;  ce  nom  de  lieu  est  dérivé  du  nom 
d'homme  hypocoristique  franc  Dacco;  un  personnage 
de  ce  nom,  fils  de  Dagaricus,  fut  mis  à  mort  en 
578  (5).  Un  autre  témoignage  de  l'époque  mérovin- 
gienne est  le  nom  de  lieu  écrit  Childriciaecas ,  Chil- 
driciagas  et  Childriciaegas  dans  un  diplôme  de  Chil- 
debert  III  en  709  (6)  ;  ce  nom  de  lieu  dérive  du  nom 
d'homme  si  connu  Childericus ,  porté  par  trois  rois 


(1)  BoUand,  juillet,  t.  I,  p.  51,  col.  2;  p.  52,  col.  1. 

[*2]  c  Data  octavo  calendarum  julianim  anno  primo  Valentiniani  impera- 
toris.  9  (Bolland,  juillet,  t.  I,  p.  57,  col.  1.) 

(3)  c  Oratorium situm  in  villa  Martiniacensim,  in  quo  célèbre  ferebatur 

saepius  orasse  Martinum.  v  Gloria  confeasorum,  ch.  viii,  éd.  Krusch,  p.  753, 
1.  11  et  12. 

(4]t  Tardif,  Monuments  hisU,  p.  13,  col.  2. 

(5)  Grégoire  de  Tours,  Historia  Francoruniy  1.  V,  ch.  xxv,  éd.  Amdt, 
p.  220, 1. 11. 

(6)  Tardif,  Monum,  hist,^  p.  36. 

II 


^viii  PREFACE. 

francs  dont  le  premier  était  père  de  Clovis  et  vivait 
au  cinquième  siècle.  Le  nom  de  Childericus  n'était 
pas  en  usage  seulement  dans  la  famille  royale  :  Gré- 
goire de  Tours  parle  d'un  certain  duc  Childéric  qui 
vivait  à  la  fin  du  sixième  siècle  (1), 

Le  nom  de  lieu  Teodeberciaco  j  dans  la  légende 
d'une  monnaie  mérovingienne  (2),  aurait  été  écrit 
Theudebercthiacus  par  un  scribe  plus  exact  que  les 
monnoyers,  et  ce  nom  dérive  du  nom  d'homme 
Theudebercthus  porté  par  deux  rois  francs,  534*548 
et  596-612. 

Ainsi ,  créer  des  noms  de  lieu  en  développant  des 
noms  d'homme  à  l'aide  du  suffixe  -iacus  est  un  pro- 
cédé de  formation  usité  à  l'époque  mérovingienne. 
Les  auteurs  de  l'époque  carlovingienne  le  connais- 
saient, et  ils  l'ont  formulé  en  en  faisant  une  ap- 
plication inexacte  et  en  prétendant  en  faire  remonter 
l'usage  au  temps  de  l'empire  romain  :  c'est  ainsi  que, 
suivant  le  biographe  du  roi  Dagobert,  le  mot  Catal-- 
liacus,  nom  primitif  de  Saint-Denis,  près  Paris,  s'ex- 
plique par  CatuUa,  nom  d'une  matrone  qui,  au  temps 
de  Domitien,  81-96  de  notre  ère,  aurait  fait  enterrer 
saint  Denys  et  ses  compagnons? (3).  Catulliacus  vient 
de  Catullius  et  non  de  Catulla. 

Il  y  a  donc  certains  points  sur  lequels  je  ne  par- 
tage pas  la  manière  de  voir  de  Jules  Quicherat, 
c'est  ce  qui  m'a  décidé  à  étudier  de  nouveau  le  sujet 
qu'il  avait  traité  lui-même  il  y  a  un  peu  plus  de  vingt 
ans  avec  une  si  légitime  autorité.  Je  ne  crois  point 


(1)  Historia  Fr&ncorum,  Vn,  3;  VHI,  18;  X,  22,  éd.  Arndt,  p.  29J,  1,  2; 
p.  337, 1.  10;  p.  434,1.24. 

(2)  A.  de  Barthélémy,  Bibl,  de  VEc.  des  Chartes^  6*  série,  1. 1,  p.  462,  n*  634. 

(3)  Krusch,  Scriptorum  rerum  merovingicArum,  t.  H,  p.  401, 1.  24-32. 


PREFACE.  XIX 

en  cela  faire  outrage  à  sa  mémoire  ;  la  vraie  manière 
d'honorer  un  maître  est  de  marcher  sur  ses  traces 
et  de  chercher  à  faire  faire  des  progrès  nouveaux  à 
la  science  que  sa  langue,  glacée  par  la  mort,  ne  peut 
plus  professer.  Le  livre  lui-même  que  je  publie  n'est 
ni  complet  ni  parfait  :  je  suis  loin  d'avoir  épuisé  le 
sujet;  mon  unique  prétention  est  d'avoir  tracé,  à 
côté  des  sillons  ouverts  par  Jules  Quicherat,  quel- 
ques sillons  nouveaux  dans  un  champ  à  peu  près 
friche  que  d'autres  achèveront  de  défricher  après 
nous. 

Il  y  a  plus  de  quarante  ans  que,  sous  la  direction 
de  Benjamin  Guérard  et  assis  à  côté  de  mon  excel- 
lent et  malheureux  camarade,  Alfred  Jacobs,  j'ai 
commencé  à  étudier  les  textes  géographiques  du 
moyen  âge  mérovingien  et  carlovingien  ;  je  con- 
sidère mon  livre  comme  un  testament  par  lequel 
je  lègue  à  ceux  qui  auront  la  patience  de  me  lire  le 
dernier  résultat  de  mes  travaux.  Ils  y  trouveront 
beaucoup  à  reprendre  et  à  rectifier,  notamment  en  ce 
qui  concerne  le  rapport  des  noms  de  lieu  du  haut 
moyen  âge  avec  les  noms  de  lieu  modernes  au 
double  point  de  vue  de  la  linguistique  et  de  la  géogra- 
phie; il  me  semble  déjà  entendre  résonner  à  mes 
oreilles  une  sorte  de  murmure  précurseur  et  des 
critiques  que  m'adresseront  mes  savants  amis 
MM.  G.  Paris,  P.  Meyer,  *A.  Longnon,  l'abbé  Rous- 
selot,  et  de  l'écho  unanime  qui  leur  répondra  dans 
le  monde  si  nombreux  des  érudits  dont  les  loisirs 
sont  consacrés  à  l'histoire  locale.  J'espère  qu'un  jour 
les  nombreux  travaux  entre  lesquels  M.  Longnon  se 
partage  lui  laisseront  le  loisir  de  reprendre  le  même 
sujet  pour  remplacer  mon  œuvre  par  un  travail  dé- 


PREFACE. 

flnitif ,  et  qu'en  se  servant  peut-être  un  peu  d'elle  il 
la  fera  oublier  :  c'est  le  sort  ordinaire  des  leçons  et 
des  livres.  Un  écrivain  qui,  au  moyen  âge,  avait  fré- 
quenté l'université  de  Paris  le  constatait  déjà  : 

«  Dis-moi  où  sont  maintenant  tous  ces  maîtres 
»  que  tu  as  bien  connus  quand  ils  vivaient  et  qu'ils 
»  brillaient  par  les  études.  Déjà  d'autres  touchent 
»  leurs  appointements,  et  je  ne  sais  si  ces  docteurs 
»  nouveaux  pensent  à  leurs  prédécesseurs.  Ceux-ci, 
»  pendant  leur  vie,  avaient  l'air  d'être  quelque  chose 
»  et  maintenant  on  ne  parle  plus  d'eux  (1).  » 

Un  grand  nombre  de  ces  vieux  maîtres  n'écrivaient 
point  ;  mais  à  quoi  sert  un  livre  qui ,  remplacé  par 
un  meilleur,  ne  se  lit  plus?  Il  a  pu  être  quelque 
temps  utile,  comme  l'œuvre  obscure  du  laboureur 
qui  trace  des  sillons  et  qui  ainsi,  travaillant  pour  sa 
part  à  l'alimentation  annuelle  de  ses  concitoyens, 
collabore  à  la  vie  d'une  grande  nation ,  puis  meurt 
oublié.  Tel  est  le  sort  de  la  plupart  des  livres  d'éru- 
dition :  dans  l'avenir,  leur  seule  notoriété  est  celle 
qu'assurent  les  recueils  bibliographiques  ;  l'immor- 
talité qu'ils  confèrent  à  leurs  auteurs  peut  être  com- 
parée à  celle  que  donnent  aux  potiers  de  l'empire 
romain  les  index  du  Corpus  inscriptionam  latinarum. 

Jubainville  (Vosges),  le  2  septembre  1889. 


(1)  •  Die  mihi  ubi  sunt  modo  omnes  illi  domini  et  magistri,  quos  bene  no- 
visti,  dum  adhuc  vivercnt  et  studiis  florerent?  Jam  eorum  praebendas  alii 
possident  et  nescio  utrum  de  eis  recogitant.  In  vita  sua  aliquid  esse  vide- 
bantur,  et  modo  de  illis  tacetur.  »  [De  Imitatione  Christi^  liv.  I,  c.  ,iil  {  5.) 


PREFACE.  XXI 


POST-SCRIPTUM 

En  corrigeant  les  épreuves  de  cette  préface,  j'ap- 
prends que  M.  Fustel  de  Coulanges  a  été  enlevé  par 
la  mort  aux  lettres,  à  l'attachement  et  à  Tadmiration 
de  ses  élèves.  Il  est  dans  la  vie  un  âge  où  c'est  sur 
des  tombeaux  qu'ordinairement  le  regard  s'arrête, 
quand  la  pensée  se  reporte  aux  maîtres,  souvent 
même  aux  compagnons  de  travail  et  aux  émules  qu'on 
a  entendus,  qu'on  a  aimés,  dont  on  a  plaint  les  mal- 
heurs ou  quelquefois  peut-être  envié  les  succès.  Cet 
âge  sérieux,  c'est  le  mien. 

La  bibliothèque  d'un  érudit  est  toujours  une  sorte 
de  nécropole  ;  les  livres  des  morts  y  sont  bien  plus 
nombreux  que  ceux  des  vivants,  et  la  plupart  des 
titres  ressemblent  à  des  épitaphes  ;  mais  ce  qui,  dans 
ma  bibliothèque,  est  surtout  émouvant  pour  moi, 
c'est  que  presque  sur  chaque  rayon  il  y  a  un  livre 
écrit  par  un  défunt  que  j'ai  personnellement  connu, 
qui  a  été  pour  moi  soit  un  maître,  soit  un  ami,  quel- 
quefois tous  les  deux  :  je  ne  puis  jeter  les  yeux  sur 
ses  œuvres  sans  voir  se  dresser  à  côté  de  moi  sa 
figure  bienveillante  et  douce  qui  semble  me  sourire 
comme  autrefois  et  m'encourager  dans  mes  travaux, 
en  attendant  que  j'aille  le  rejoindre  dans  une  autre 
vie.  Pardessus,  B.  Guérard,  F.  Guessard,  Natalis  de 
Wailly,  Ad.  Renier,  Ch.  Jourdain,  E.Benoist,  E.  Des- 
jardins, P.  Paris,  Henri  Martin,  Pitra  et  combien 
d'autres  dont,  en  ce  moment,  le  nom  m'échappe, 
mais  qui  font  battre  mon  cœur  chaque  fois  que  des 
travaux  analogues  aux  leurs  me  ramènent  à  leurs 
livres.  Ils  n'avaient  ni  les  mêmes  croyances,  ni  le 


XXII  PREFACE. 

même  genre  de  vie,  mais  tous  étaient  dominés  par  le 
même  amour  pour  la  science  et  pour  la  vérité  histo- 
rique ;  et  aujourd'hui  leur  carrière  littéraire  est  ter- 
minée, comme  va  Têtre  bientôt  la  mienne. 

Mais  Térudition  ne  meurt  pas  avec  les  érudits  : 
elle  continue  à  vivre  avec  les  élèves  ;  à  côté  de  mon 
nom  on  lira,  dans  le  titre  de  ce  livre,  le  nom  de  mon 
jeune  et  zélé  collaborateur,  M.  G.  Dottin,  dont  le 
concours  a  aidé  mes  recherches ,  et  qui  a  rédigé  les 
index  de  ce  volume.  Tous  les  professeurs  auxquels 
j'ai  dû  le  bienfait  de  l'instruction  n'ont  pas  encore 
disparu  de  ce  monde,  et  dans  la  dédicace  de  cet 
ouvrage,  j'ai  pu  réunir  au  nom  de  M.  J.  Quicherat , 
mon  maître  défunt,  celui  du  maître  encore  vivant  qui 
m'a  initié  à  l'étude  historique  du  droit,  il  y  a  qua- 
rante ans,  M.  Eugène  de  Rozière,  alors  professeur 
à  l'Ecole  des  Chartes,  aujourd'hui  toujours  vigoureux 
et  ferme  en  dépit  des  années ,  et  un  des  membres 
les  plus  écoutés  de  l'Académie  des  inscriptions  et 
belles-lettres. 

JubainvillS)  le  30  septembre  1889. 


RÉPONSE  A  M.  FUSTEL  DE  GOULANGBS 


M.  Fustel  de  Goulanges  a  fait  paraître  dans  la  Revue  des  ques- 
lions  historiques  y  en  avril  dernier,  la  critique  d'un  petit  mémoire 
que  j*avais  publié  en  1887  dans  les  Comptes  rendus  de  V Académie 
des  inscriptions,  sous  ce  titre  :  la  Propriété  foncière  en  Gaule.  Le 
savant  académicien  a  eu  l'attention  de  m'adresser  un  exemplaire 
de  son  travail  (1)  en  raccompagnant  d'une  lettre  dont  la  grâce  ai- 
mable et  cordiale  m'a  profondément  touché.  Dans  son  texte  im- 
primé, il  parle  de  moi  dans  les  termes  les  plus  flatteurs  :  «  L'un 
»  des  premiers  érudits  de  notre  temps,  >  dit-il,  c  M.  d'Ârbois  de 

>  Jubainville,  dont  les  travaux  sur  le  moyen  âge  et  sur  la  litté- 

>  rature  irlandaise  sont  si  hautement  appréciés.  > 
Toutefois,  je  ne  songe  pas  à  tirer  la  moindre  vanité  de  la  gra- 
cieuse appréciation  faite  de  mes  écrits  par  un  juge  aussi  compé- 
tent. Car  je  n'ai  pas  Tillusion  do  croire  qu'il  les  ait  lus.  Mes  écrits 
n'ont  en  général  aucun  rapport  avec  les  sujets  que  M.  Fustel  de 
(boulanges  a  traités  dans  les  beaux  livres  qui  lui  ont  acquis  en 
France  une  si  légitime  renommée.  Les  seuls  lecteurs  qu'aient  trou- 
vé:>  mes  livres  ont  été  ceux  qu'attirait  l'intérêt  du  sujet,  et  même 
la  plupart  de  ces  lecteurs  se  bornent  à  de  courtes  recherches  faites 
à  Taide  des  index  dont  chaque  ouvrage  est  muni. 

Tout  autre  a  été  la  fortune  des  travaux  do  M.  Fustel  de  Cou- 
langes.  Ils  ont  ou  d'innombrables  lecteurs  et  chacun  d'eux,  après 
avoir  commencé  un  volume,  n'a  pu  s'en  détacher  avant  d'avoir 
atteint  la  dernière  lip:nc.  De  ces  lecteurs,  j'ai  été  un  des  plus  pas- 
sionnés. Plusieurs,  af»rès  avoir  lu  une  première  fois  les  livres  do 


(1)  La  critique  de  mon  mémoire  occupe  les  pages  83-93  d'une  brochure 
intitulée  :  Le  problème  des  origines  de  la  propriété  foncière  y  Bruxelles, 
Vromant,  1889,  in-8',  95  pages,  qui  est  un  tirage  à  part  de  la  Revue  des 
questions  historiques. 


XXIV  REPONSE  A  M.  FUSTEL  DE  C0ULANGE8. 

M.  Fustel  de  Goulanges,  ont  recommencé.  Je  suis  de  ces  der- 
niers. Je  crains  de  n'avoir  pas  obtenu  auprès  de  lui  le  même 
succès  avec  les  vingt  pages  dont  se  compose  ma  notice  sur  la  pro- 
priété foncière  en  Gaule  dans  les  Comptes  rendus  de  l'Académie  des 
inscriptions  pour  1887.  Certainement  M.  Fustel  de  Goulanges  l'a 
lue^  car  il  la  cite  deux  fois  ;  mais  il  a  fait  cette  lecture  d'une 
façon  quelque  peu  distraite,  l'esprit  préoccupé  de  questions  étran- 
gères à  mon  sujets  et  certainement  il  ne  m'a  pas  relu. 

II 

Voici  ce  que  je  dis  au  début  de  mon  petit  mémoire,  p.  66  des 
Comptes  rendus  de  f  Académie  des  inscriptions  pour  1887  :  «  Ce  que 
»  j'entends,  c'est  qu'en  général  chaque  peuple  gaulois  avait  sur 
»  tout  son  territoire  un  droit  analogue  à  celui  du  peuple  romain 
•  sur  Vager  publicus;  c'est  qu'ordinairement  en  Gaule,  vers  le 
»  milieu  du  premier  siècle  avant  notre  ère,  le  particulier  qui 
»  jouissait  d'une  portion  plus  ou  moins  considérable  du  sol  de  sa 
1  cité  détenait  cette  portion  à  titre  précaire.  11  se  trouvait  légale- 
»  ment  dans  une  situation  analogue  à  celle  des  patriciens  et  des 
»  nobles  romains,  qui,  après  avoir  occupé  des  parcelles  plus  ou 
»  moins  étendues  de  Yager  publicus^  en  furent  expulsés  en  partie 
»  par  les  lois  agraires,  quand  ces  lois  déterminèrent  le  maximum 
»  de  la  fraction  de  Vager  publicus  qu'un  particulier  pouvait  pos- 
»  séder.  » 

Rien  n'est  plus  banal  que  le  fait  de  l'histoire  romaine  auquel 
je  me  réfère  ici ,  et  l'histoire  de  Vager  publicus  romain  peut  être 
considérée  dans  ses  traits  généraux  comme  universellement  con- 
nue. Cependant  je  vais,  pour  plus  de  clarté,  insérer  ici  la  traduc- 
tion de  quelques  lignes  du  Manuel  des  antiquités  romaines  de 
MM.  Mommsen  et  Marquardt  : 

«  La  partie  la  plus  importante  et  la  plus  lucrative  de  la  pro- 
»  priété  de  l'Etat  romain  consistait  en  Vager  publicus  italique.  Cet 
»  ager  publicus  remontait  aux  temps  les  plus  anciens,  il  s'agrandit 
»  de  plus  en  plus  à  mesure  que  se  développait  l'étendue  des  terri- 
»  toires  soumis  à  la  domination  romaine,  puis  il  alla  se  réduisant 
»  dans  les  derniers  siècles  de  la  république...  Parmi  les  terres 
»  réunies  par  la  conquête  à  Vager  publicus,  celles  qui  n'étaient 
»  point  cultivées  étaient  abandonnées  à  l'occupation  dont  le  but 
»  était  le  défrichement  à  charge  d'une  redevance  annuelle  égale 
»  au  dixième  du  produit  en  blé  et  au  cinquième  du  produit  des 
»  arbres  à  fruit.  En  outre,  une  condition  de  l'occupation  était 


REPONSE  A  M.  FU8TEL  DE  C0ULANQE8.  xxv 

>  que  TEtat  aurait  toujours  le  droit  de  reprendre  ces  fonds  de  terre. 
»  On  les  appelait  agri  occupatoHi  ;  leur  transmission  se  faisait  par 
»  héritage,  donation  et  vente.  Jamais  on  no  pouvait  par  usuca- 
»  pion  les  transformer  en  propriété  privée.  Ils  restaient  propriété 
»  de  TEtat  à  charge  de  redevance  annuelle  et  le  terme  technique 
«  pour  désigner  la  relation  précaire  établie  entre  eux  et  le  déten- 

>  teur  s'appelait  possessio  (1).  » 

Ainsi,  les  portions  de  Vager  publicus  occupées  par  les  patriciens 
et  les  nobles  romains  se  transmettaient  héréditairement.  Voilà  en 
Italie  un  des  caractères  distinctifs  de  Fespëce  de  biens  immobi- 
liers que  je  crois  retrouver  dans  la  Gaule  barbare  au  moment  où 
César  en  a  fait  la  conquête.  Or,  M.  Fustel  dé  Coulanges  m'attri- 
bue la  doctrine  que  voici  :  en  Gaule ,  suivant  moi ,  «  la  règle 
•  d'hérédité  ne  devait  pas  exister  ;  »  voyez  son  tirage  à  part , 
p.  86 ,  ligne  8.  Je  n'ai  rien  dit  de  pareil.  J'ai  simplement  affirmé 
que  M.  Fustel  de  Coulanges  tirait,  suivant  moi,  une  conséquence 
exagérée  du  passage  de  César,  De  bello  gallico ,  où  il  est  dit  que 
les  diniides  jugent  les  procès  de  heredilate.  Suivant  lui,  un  procès 
de  hereditaie  suppose  nécessairement  la  propriété  foncière  dans  le 
sens  où ,  en  France ,  nous  entendons  ce  mot.  Mais  Iweditas  n'est 
pas  synonyme  d'heredium  qui  est  le  terme  technique  du  vieux 
droit  romain  pour  désigner  la  propriété  immobilière  dans  le  sens 
qu'a  cette  expression  en  français  aujourd'hui.  Hereditas^  c'est 
Tensemble  des  biens  quelconques  du  défunt;  c'est  ce  qu'ont  dit 
sous  l'Empire  romain  deux  jurisconsultes  qui  répètent  la  même 
formule  :  Nihil  est  aliud  heredilas  quam  successio  in  universum  jus 
quod  defuncius  habuU  (2).  Hereditas  nihil  aliud  est  quam  successio 
in  universum  'lus  quod  defuncius  habueril  (3).  Cicéron  auparavant 
l'avait  dit  en  d'autres  termes  :  Heredilas  est  pecunia  quae  morte 
alicujus  ad  quempiam  pervenit  jure  (4).  Dans  ce  dernier  texte , 
contemporain  de  César,  pecunia  est  employé  comme  synonyme 
en  quelque  sorte  d'heredilas.  Pecunia,  dans  la  langue  de  la  loi  des 
Douze  Tables,  est  à  pou  près  Téquivalent  du  mot  français  «  for- 
tune »  :  un  U'fjassit  super  pecunia  tulelave  suae  rel,  itajus  eslo  (5). 
Tel  est  le  texte  que  savaient  par  cœur  à  l'Ecole  de  droit  de  Paris, 
il  y  a  quarante-trois  ans,  tous  les  étudiants  quelque  peu  studieux. 


(1)  Handbucfi  der  rœmischen  Aller thûmer,  2*  édit.,  t.  V,  p.  151,  152,  155. 

(2)  Gaius,  Ad  ediclum  provinciale^  livre  VI  (Digeste,  livre  L,  lit.  xvi,  §  24). 

(3)  Junianus,  Digesta,  livre  VI  (Digeste,  livre  L,  titre  xvir,  {  62). 

(4)  Cicéron,  Topica,  {  29. 

(5)  Ulpicn,  Liber  regularum,  titre  xi,  |  14. 


XXYi  REPONSE  K  M.  FUSTEL  DE  COULANGES. 

M.  Fustel  de  Coulanges,  craignant  que  depuis  cette  époque  j'aie 
oublié  le  sens  de  ce  mot  pecunia ,  prend  soin  de  me  le  rappeler. 
Je  lui  sais  beaucoup  de  gré  de  cette  attention,  mais  je  ne  croyais 
pas  avoir,  autant  qu'il  le  pense,  perdu  la  mémoire  des  leçons  de 
mes  maîtres  Ducaurroy  et  Pellat.  Par  pecunia,  on  entend  non 
seulement  l'argent  comptant,  mais  tout  bien,  soit  meuble,  soi^ 
immeuble.  On  doit  cotte  observation  à  Ulpien  (1)  et  à  Hermogé- 
nien  (2).  L'hérédité  peut  donc  comprendre  des  biens-fonds;  dans 
l'hérédité,  il  peut  se  trouver  des  heredia  dont  le  défunt  avait 
la  pleine  propriété,  comme  des  possessiones  sur  lesquels ,  pendant 
une  longue  période  de  l'histoire  romaine ,  il  n'a  pu  avoir  qu'un 
droit  précaire.  Mais  il  peut  aussi  dans  l'hérédité  ne  se  trouver 
aucun  droit  immobilier.  L'hérédité  peut  consister  exclusivement 
en  meubles;  ainsi,  de  ce  que,  suivant  César,  les  druides  jugeaient 
les  contestations  de  hereditale,  on  ne  peut  conclure  qu^il  y  eut 
dans  la  Gaule  indépendante  des  heredia,  c'est-à-dire  des  biens- 
fonds  dont  le  défunt  aurait  eu  la  pleine  et  entière  propriété. 

J'ai  dit  en  1887,  dans  le  passage  des  Comptes  rendus  de  l'Acadé- 
mie des  inscriptions  reproduit  plus  haut  :  «  Ordinairement  en 
»  Gaule,  vers  le  milieu  du  premier  siècle  avant  notre  ère,  le  par- 
»  ticulier  qui  jouissait  d'une  portion  plus  ou  moins  considérable 
»  du  sol  de  sa  cité  détenait  cette  portion  à  titre  précaire.  » 

Voilà  ma  doctrine;  or,  suivant  M.  Fustel  de  Coulanges  (p.  83 
de  son  tirage  à  part),  j'ai  voulu  —  parlant  des  Gaulois  —  «  intro- 
»  duire  dans  leur  histoire  l'indivision  du  sol.  »  J'ai  eu  tort  évi- 
demment ,  car,  dit-il  plus  bas  (p.  84) ,  César  «  ne  mentionne  pas 

>  cette  indivision  du  sol.  »  Cependant ,  répète  M.  Fustel  de  Cou- 
langes (p.  85),  «  M.  d'Arbois  de  Jubain ville  a  cru  voir  chez  eux 
•  (les  Gaulois)  l'indivision  du  sol.  »  J'ai  même,  suivant  M.  Fus- 
tel de  Coulanges  (p.  92),  commis  l'erreur  de  «  supposer  que  l'Etat 

>  gaulois  fût  le  maître  de  tout  le  sol  et  le  distribuât  annuellement 
9  entre  les  citoyens.  >  Les  membres  de  phrase  entre  guillemets 
sont  littéralement  copiés  dans  la  brochure  de  M.  Fustel  de  Cou- 
langes :  les  passages  de  mon  mémoire  auxquels  ces  membres  de 
phrase  font  allusion  existaient  dans  la  pensée  de  M.  Fustel  de 
Coulanges  quand  il  écrivait,  mais  ils  ne  se  trouvent  ni  dans  l'édi- 
tion de  mon  mémoire  qu'on  peut  lire  dans  les  Comptes  rendus  de 
l'Académie  des  inscriptions ,  ni  dans  le  tirage  à  part.  Je  n'ai  parlé 
ni  de  l'indivision  du  sol  gaulois,  ni  d'un  partage  annuel  entre  les 


(1)  Ad  S&binumt  livre  XLIX  (Digeste,  livre  L,  titre  xvi,  {  178). 

(2)  Juris  Epitomê,  livre  II  (Digeste,  livre  L,  titre  xvi,  {  222). 


RÉPONSE  A  M.  FUSTEL  DE  COULANGES.  xx^ii 

citoyens  de  la  Gaule  indépendante  ;  j'ai  dit  qu*en  Gaule,  au  milieu 
du  premier  siècle ,  ordinairement  les  particuliers  possesseurs  du 
sol  le  détenaient ,  me  semble-t-il ,  à  titre  précaire ,  à  peu  près 
comme  les  patriciens  et  les  nobles  romains  possesseurs  d'une 
grande  grande  partie  de  Vager  publicus  avant  les  lois  Licinia  et 
Sempronia.  Or,  entre  ces  patriciens  et  ces  nobles,  il  n'y  avait  ni 
partage  annuel,  ni  jouissance  indivise;  leur  domaine  s*appelle 
ager  occupatorius ,  arcifinalis  ou  arcifinius  (1);  il  n'a  pas  été  offi- 
ciellement divisé  ot  délimité  (2)^  mais  il  a  des  limites,  fines  ^  de 
fait. 

III 


Par  quel  phénomène  psychologique  M.  Fustel  de  Coulanges 
a-t-il  été  amené  à  m'attribuer  ainsi  une  doctrine  qui  n'est  point 
la  mienne?  On  le  comprend  facilement  quand  on  connaît  Ten- 
semble  de  son  œuvre  littéraire  et  qu'on  s'est  rendu  compte  des  lois 
qui  dominent  sa  puissante  intelligence,  qui  en  font  la  force  et  qui 
lui  ont  assuré  le  succès;  ce  succès,  il  le  doit  à  la  simplicité  dos 
idées  qu'il  conçoit  et  qu'il  expose  :  les  faits  dont  il  parle  sont  mul- 
tiples ,  présentent  une  infinie  variété  ;  mais  son  vigoureux  esprit 
les  a  disposés  de  manière  à  constituer  le  développement  d'un  tout 
petit  groupe  de  doctrines  très  simples,  et  qui  par  conséquent  sont 
exposées  sans  effort  avec  une  merveilleuse  clarté.  Ouvrez  la  Cité 
antiquej  le  premier  en  date  des  livres  de  M.  Fustel  de  Coulanges, 
le  type  de  ceux  qu'il  a  écrits  depuis,  un  des  chefs-d'œuvre  de  la 
littérature  fi*ançaise  au  dix-neuvième  siècle.  Ce  livre  est  tout  en- 
tier le  déYoloppement  d'une  thèse  qui  peut  se  résumer  en  quel- 
ques lignes. 

La  société  antique  a  commencé  par  la  famille  et  la  famille  an- 
tii^e  a  pour  base  le  culte  des  ancêtres.  Ce  culte  se  célèbre  sur  le 
foyer  et  sur  le  tombeau.  La  permanence  de  la  famille  suppose  la 
permanence  du  foyer  et  du  tombeau ,  par  conséquent  la  propriété 
du  sol  où  tous  deux  sont  établis.  La  cité  est  une  association  de 


(1)  «  Occupatorii  autom  dicuntur  agri  quos  quidam  arcifinales  vocant, 
qnibas  agris  victor  populus  occupando  nomen  dédit  ;  bellis  enim  gcstis 
victores  populi  terras  omncs  ex  quibus  victos  ejecerant  publicavcro..., 
deinde  ut  quisque  virtuto  colendi  quid  occupavit,  arcendo  vicinum  arcifi- 
nalem  dixit.  b  (Siculus  Flaccus ,  De  conditione  agrorum ,  chez  Lachmann , 
Grom&tici  veteres,  p.  138.) 

(2)  «  Ager  ergo  divisus  adsignatus  est  coloniarum.  »  (Frontin,  De  agrorum 
qualitate^  édit.  Lachmann,  p.  2.) 


XXVIII  RÉPONSE  A  M.  FUSTEL  DE  COULANQES. 

familles,  et  c'est  sur  la  famille  qu'elle  se  modèle.  A  cet  antique 
système ,  qui  a  pour  principe  une  infinie  multiplicité ,  l'empire 
romain  substitua  le  despotisme  unitaire  d'un  seul  homme;  et 
le  christianisme,  auquel  la  philosophie  grecque  a  préparé  les 
voies,  a  complété  ce  système  nouveau  en  mettant  le  culte  d'un 
seul  Dieu,  d'un  Dieu  universel  à  la  place  des  dieux  innombrables 
et  spéciaux  des  familles  et  des  cités. 

Il  y  a  dans  cette  doctrine  une  grande  part  de  vérité,  mais  elle 
est  inexacte  en  ce  qu'elle  est  incomplètiî.  L'idée  d*un  Dieu  uni- 
versel ne  date  pas  seulement  du  christianisme;  dans  les  plus  an- 
ciens monuments  de  la  littérature  grecque,  Zeus  n'est  le  mo- 
nopole ni  d'une  famille,  ni  d'une  cité.  La  cité  antique  n*est  pas 
exclusivement  une  institution  religieuse  :  c'est  la  conquête  à  main 
armée  et  ce  n'est  pas  la  religion  qui  est  Torigine  de  la  propriété 
foncière  indo-européenne.  Si  le  père ,  le  mari ,  le  frère  ont  une 
situation  si  eiclusivement  dominante  dans  la  famille  antique,  ils 
ne  le  doivent  pas  seulement  à  une  conception  religieuse  ;  leur  rôle 
sacerdotal  n'est  que  l'accessoire  de  leur  supériorité  guerrière  sur 
l'enfant,  la  femme  et  la  sœur.  M.  Fustel  de  Coulanges  n'a  vu  dans 
les  textes  antiques  qu'un  côté  secondaire  de  l'histoire  de  la  famille 
et  de  la  cité  ;  l'ensemble  lui  a  échappé  ;  une  loi  de  son  esprit  l'em- 
pêchait de  saisir  cet  ensemble;  si  cette  loi  de  son  esprit  a  été  une 
cause  de  faiblesse  au  point  de  vue  où  se  placent  les  érudits,  elle 
a  été  sa  force  dans  Tordre  littéraire,  car  elle  a  fait  la  merveilleuse 
simplicité  d'un  livre  qui,  s'il  eût  été  complet ,  aurait  été,  comme 
on  dit  aujourd'hui ,  louffa ,  ce  qui  est  bien  près  de  confus ,  c'est- 
à-dire  obscur  pour  le  plus  grand  nombre  des  lecteurs,  fatigant 
pour  tous. 

M.  Fustel  de  Coulanges,  en  écrivant  la  Cité  antique^  a  cru  faire 
toujours  œuvre  d'historien  ;  il  a  fait  œuvre  de  philosophe  quand 
il  s*est  lancé  dans  des  hypothèses  préhistoriques  qu'aucun  texte 
ne  justifie.  Aucun  document  historique  par  exemple  n'établit  qu'il 
ait  existé  dans  le  monde  indo-européen  un  temps  où  la  famille  ne 
vivait  pas  dans  la  société  politique  ;  il  n'y  a  pas  de  preuve  que  le 
mot  indo-européen  «  pjère  »  soit  plus  ancien  que  le  mot  indo- 
européen «  roi.  » 

IV 

Quand  M.  Fustel  de  Coulanges  est  dominé  par  une  idée,  cette 
idée,  dont  un  article  ou  un  livre  va  être  le  développement,  est 
plus  puissante  que  ses  lectures  si  variées  et  si  attentives;  elle 


RÉPONSE  A  M.  FUSTEL  DE  C0ULANGE8.       xxix 

remporte  sur  sa  mémoire  cependant  si  vigoureuse,  elle  est  plus 
forte  que  son  érudition ,  qui  pourtant  provoque  chez  tous  ses  lec- 
teurs une  si  légitime  admiration  ;  de  là  certaines  citations  singu- 
lières qu  on  peut  recueillir  dans  ses  écrits.  Ainsi  M.  Fustel  de 
Coulanges  cite  entre  guillemets  comme  étant  de  moi  des  phrases 
que  je  n'ai  jamais  écrites  :  «  A  Rome ,  modas  agri  était  Texpres- 
3  sion  consacrée  quand  on  parlait  de  Vager  pubUcus,  >  M.  Fustel 
de  Coulanges  m'attribue  cette  phrase,  page  92,  note  1,  de  son 
tirage  à  part;  or,  voici  ce  que  j*ai  écrit,  page  18  de  mon  mémoire  : 
«  Modus  agrorum ,  modus  agri  est  à  Rome  le  terme  consacré  dont 
»  se  servent  les  lois  agraires  quand  elles  fixent  la  quantité  de 
»  Vager  publicus  que  peut  détenir  un  citoyen.  »  Après  avoir  sub- 
stitué à  mes  expressions  la  phrase  qui  précède,  M.  Fustel  de 
Coulanges  continue  :  «  Mais  où  a-t-il  vu  cela ,  »  dit-il  en  parlant 
de  moi.  Or,  voici  comment  je  continuais  ma  rédaction  :  «  On  le 

>  voit  par  Tite-Live  quand  il  parle  de  la  loi  Licinia  de  Tan  367 
»  avant  J.-C,  par  le  passage  où  Siculus  Flaccus  analyse  la  loi 

>  Semprania  de  Taunée  133  :  dans  ces  textes  latins,  nous  lisons 
D  que  la  loi  Licinia  était  de  modo  agrorum  ne  guis  plus  quingenta 
»  jugera  agri  possideret  (1)  et  que  suivant  Ti.  Gracchus,  auteur  de 

>  la  loi  Sempronia ,  il  ne  fallait  pas  :  majorem  modum  possidere 

>  quam  qui  ah  ipso  possidenu  coli  possil  (2).  »  J'ai  donc  répété  ce 
que  disaient  Tite-Live  etSiculus  Flaccus  ;  j*ai  cité  ces  auteurs,  et 
j'ai  même  indiqué  pour  Tun  le  livre  et  le  chapitre,  pour  l'autre 
l'édition  y  le  tome,  la  page;  M.  Fustel  de  Coulanges  demande  : 
«  Où  a-t-il  vu  cela?  » 

Rendre  inexactement  mes  doctrines  et  m'attribuer,  en  les  pla- 
çant entre  guillemets,  des  phrases  qui  ne  sont  pas  de  moi;  ajouter 
ensuite  que  l'opinion  exprimée  dans  ces  phrases  manque  de  fon- 
dement c'est  un  acte  dont  les  conséquences  n'ont  aucune  gra- 
vité ;  ce  qui  est  beaucoup  plus  sérieux ,  c'est  quand  la  préoccupa- 
tion exclusive  d'une  seule  et  unique  idée  oblitère  la  mémoire  de 
M.  Fustel  de  Coulanges  au  point  de  lui  faire  traduire  les  textes 
des  auteurs  anciens  de  la  même  façon  qu'il  a  rendu  ma  pensée. 
Dans  les  Topiques  de  Cicéron ,  c.  10 ,  §  43 ,  il  y  a  un  passage  ainsi 
conçu  :  Si  in  Drbe  de  finibus  controversia  est,  quia  fines  magis  agro- 
rum esse  videntur  quam  Urbis,  finibtAS  regundis  adigere  arbitrum 
non  passis,  c'est-à-dire  :  «  Si  à  Rome  il  y  a  contestation  sur  des 
1  limites,  le  demandeur  ne  peut  contraindre  son  adversaire  à 

(!)  Tite-Live,  1.  VI,  c.  xxxv. 

{2)  Lachmann,  Gromatici  veteres^  t.  I,  p.  136. 


XXX  RÉPONSE  A  M.  FU8TEL  DE  C0ULANGE8. 

»  paraître  devant  le  jage  en  vertu  de  l'action  finium  regundorum^ 
»  parce  que  le  mot  fines  paraît  convenir  plutôt  aux  champs  qu'à 
»  Rome  (1).  »  Voici  comment  s'exprime  M.  Fustel  de  Goulanges 
(p.  88  de  son  tirage  à  part)  :  «  Cicéron...  écrit  :  Quand  vous  dites 
»  si  de  finibus  conlroversia  est ,  c'est  de  limite  de  propriété  qu'il 
B  s'agit  visiblement.  »  Les  guillemets  sont  de  M.  Fustel  de  Cou- 
langes.  Evidemment,  quand  M.  Fustel  de  Goulanges  a  fait  cette 
traduction ,  il  n'avait  plus  présent  à  l'esprit  le  passage  précité  du 
grand  orateur  romain;  à  ce  moment  d'oubli  rien  d'étonnant, 
mais  ce  qui  pourra  sembler  bizarre,  c'est  que,  traduisant  ainsi,  il 
croie  devoir  me  donner  des  leçons  de  traduction  :  «  M.  de  Jubain- 
»  ville  ne  traduit  pas  très  exactement  les  textes  latins  »  (p.  92,  n). 
Les  renvois  au  texte  de  César  n'ont  pas  toujours  plus  d'exacti- 
tude que  cette  traduction  de  Cicéron.  A  la  page  88  de  son  tirage 
à  part,  parlant  de  l'auteur  des  Commentaires  De  bello  gallico^ 
M.  Fustel  de  Coulanges  écrit  :  a  Au  milieu  de  ses  récits  de  guerre, 
)>  il  se  trouve  seulement  sept  paragraphes  sur  les  mœurs  des  6au- 
»  lois  et  leurs  institutions  en  temps  de  paix(YI,  11,  13,  15,  18, 
»  19,  21,  22).  Or,  dans  ces  sept  chapitres,  vous  rencontrez  trois 
»  fois  le  mot  fines  avec  le  sens  parfaitement  certain  de  limites  de 
»  champs.  »  Dans  ce  passage,  M.  Fustel  de  Coulanges  emploie 
paragraphe  comme  synonyme  de  chapitre ,  oubliant  que  chez 
César  les  paragraphes  sont  une  subdivision  des  chapitres;  cette 
observation  a  peu  d'importance;  ceci  est  plus  sérieux  :  les  chapi- 
tresde  César  concernant  les  mœurs  des  Gaulois  sont  les  chapitres  xi 
à  XX  du  livre  Yl.  Les  chapitres  suivants  xxi  et  xxii  concernent, 
quoi  qu'en  dise  M.  Fustel  de  Coulanges ,  non  les  Gaulois,  mais 
les  Germains.  Des  trois  exemples  du  mot  fines^  «  avec  le  sens  par- 
»  faitement  certain  de  limites  des  champs,  »  comme  dit  M.  Fustel 
de  Coulanges,  deux  se  trouvent  dans  le  chapitre  xxii  ;  par  consé- 
quent dans  un  passage  où  il  est  question  des  Germains  et  non 
des  Gaulois ,  en  sorte  que  les  trois  exemples  qui  me  sont  opposés 
et  qui  se  trouveraient  dans  les^chapitres  relatifs  aux  mœurs  des 
Gaulois  sont  réduits  à  un  (livre  VI ,  chapitre  xni).  Or  c'est  préci- 
sément celui  dont  le  sens  est  à  déterminer.  On  y  reviendra  plus 
loin  (2). 

(1)  G^est  resté  la  doctrine  des  jurisconsultes  postérieurs.  Ulpien,  Ad  Edic- 
tum^  liv.  XIX,  dit  que  l'action  finium  regundorum  :  «  Pertinet  ad  praedia 
rustica.  »  —  Paul,  Ad  Edicium^  liv.  XXIII,  a  écrit,  en  parlant  de  la  même 
procédure  :  c  Hoc  judicium  locum  habet  in  confinio  praediorum  rusticorum  : 
urbanorum  displicuit.  »  (Digeste,  liv.  X,  tit.  i,  1.  2  pr.;  1.  4,  |  10. 

(2)  P.  117. 


RÉPONSE  A  M.  FU8TEL  DE  COULANQES.       xxzi 

Nous  croyons  devoir  arrêter  ici  cette  discussion  :  il  nous  sem- 
ble avoir  montré  quel  est  le  défaut  de  la  méthode  d'un  historien 
dont  on  ne  peut  cependant  trop  admirer  Térudition  comme  le 
talent  littéraire.  Il  raisonne  sur  des  lambeaux  de  phrases  ou  sur 
des  mots  isolés  qu'après  de  longues  et  persévérantes  lectures  sa 
mémoire  a  conservés;  il  écrit  sans  avoir  sous  les  yeux  un  texte 
complet,  des  fragments  seuls  lui  sont  présents  à  l'esprit;  ces 
fragments  mêmes,  par  un  travail  inconscient  de  sa  vigoureuse 
intelligence ,  ont  été  transformés  quelquefois  au  point  d'être  de- 
venus méconnaissables.  On  peut  admirer  en  lui  un  héritier  de 
Montesquieu ,  mais  il  est  difficile  d'être  à  la  fois  le  continuateur 
de  ce  grand  penseur ,  de  cet  admirable  écrivain,  et  d'observer 
partout ,  dans  un  travail  d'érudition ,  les  règles  minutieuses  aux- 
quelles se  sont  assujettis  autrefois  les  Bénédictins  et ,  dans  ce 
siècle-ci ,  le  laborieux ,  sympathique  mais  glacial  maître  auquel 
on  doit  les  prolégomènes  du  Polyptyque  dlrminon. 


Paris,  le  l**  mai  1889. 


LIVRE  PREMIER 

RECHERCHES  SUR  L'ORIGINE  DE  LA  PROPRIÉTÉ  FONCIÈRE 

EN  FRANCE. 


CHAPITRE  PREMIER. 

NOTIONS   GÉNÉRALES   SUR   l'hISTOIRE    DE    LA    PROPRIÉTÉ 

li'ONGIÈRE  EN    FRANCE. 


Sommaire  : 

l  \»  Conquête  de  la  Gaule  par  les  peuples  gaulois.  —  {  2.  Le  sol  conquis 
est  réparti  entre  les  peuples  conquérants  ;  il  devient  propriété  d'Etat , 
laristocratie  se  le  partage  ensuite  et  en  jouit  à  titre  précaire.  ^  {  3.  La 
conquête  romaine,  le  cadastre  d'Auguste ,  ses  effets  sur  la  propriété  fon- 
cière. —  {4.  Origine  de  la  commune  rurale  en  France.  —  {  5.  La  pro- 
priété foncière  en  France  d'Auguste  à  nos  jours. 


S  l"".  —  Conquête  de  la  Gaule  par  les  peuples  gaulois. 

La  propriété  foncière  en  France  tire  son  origine  de 
la  conquête.  Pour  atteindre  cette  origine,  il  faut  remonter 
à  l'époque  inconnue  où  les  Gaulois  passant  le  Rhin  vin- 
rent s'établir  à  Touest  de  ce  fleuve.  Ce  n'était  peut-être 
guère  plus  tôt  que  Tan  500  avant  notre  ère.  Alors,  armés 
d'épées  de  fer  et  du  gaison,  redoutable  javelot  qu'ils  lan- 
çaient du  haut  de  leurs  chars  de  guerre,  les  Gaulois  entrè- 
rent vainqueurs  et  conquérants  dans  la  vaste  contrée 
qui  depuis  deux  mille  ans,  après  tant  de  révolutions  et  de 
désastres,  porte  encore  leur  nom  dans  les  livres  des  his- 
toriens. 

Cette  contrée,  que  nous  appelons  Gaule,  était  habitée 
déjà  par  une  population  qui  avait  atteint  un  degré  élevé  de 
civilisation,  qui  possédait  des  chevaux  et  des  bœufs,  qui 


4  LIVRE  !•'.  CHAPITRE  !•'.  {  2. 

connaissait  le  bronze  et  Tor.  Cette  population  était  probable- 
ment bien  plus  nombreuse  que  les  conquérants.  Nous  igno- 
rons son  nom.  Les  Grecs  ont  connu  les  prédécesseurs  des 
Gaulois ,  et  distinguent  chez  eux  deux  groupes ,  les  Ibères 
et  les  Ligures.  Les  principaux  monuments  de  cette  popu- 
lation antique  semblent  être  aujourd'hui  les  cimetières  où 
elle  repose  depuis  plus  de  vingt  siècles  :  c*est  par  les  débris 
qu'elle  y  a  enfouis  que  nous  cherchons  à  nous  faire  d'elle 
une  idée.  Mais  il  est  vraisemblable  qu'outre  ces  monuments 
lugubres,  cette  population  antique  en  a  laissé  d'autres, 
qui  sont  moins  loin  de  nous  et  dont  l'étude  est  moins  fu- 
nèbre :  c'est  nous-mêmes  ;  car  nous  sommes ,  pour  la  plu- 
part j  les  descendants  des  peuples  oubliés  dont  les  Gaulois , 
nos  aïeux  supposés,  ont  triomphé  et  qu'ils  ont  asservis  avant 
d'être  eux-mêmes  conquis  par  les  Romains.  Nous  sommes 
les  petits-fils  de  cette  plèbe  vaincue,  mais  toujours  vivante, 
que  l'orgueil  gaulois,  au  temps  de  César,  traitait  à  peu 
près  comme  les  Romains  traitaient  leurs  esclaves  :  pêne 
servorum  habetur  loco. 

§  2.  —  Le  sol  conquis  est  réparti  entre  les  peuples  conquérants  ; 
il  devient  propriété  d'Etat^  Varistocratie  se  le  partage 
ensuite  et  en  jouit  à  titre  précaire. 

La  conquête  gauloise  eut  l'effet  que  produisait  toute 
conquête  dans  les  idées  du  monde  antique  :  la  spoliation 
des  vaincus.  Chez  les  anciens,  la  victoire  conférait  à  la 
fois  au  vainqueur  et  le  droit  de  souveraineté  et  le  droit  de 
propriété  sur  le  territoire,  sur  les  personnes  et  sur  les 
biens  mobiliers  du  peuple  contre  lequel  avait  tourné  la 
fortune  des  armes.  Les  Gaulois  devinrent  donc  proprié- 
taires du  sol  conquis.  Ils  étaient  divisés  en  un  certain 
nombre  de  peuples.  Nous  connaissons,  par  César  et  par 
les  auteurs  postérieurs ,  romains  et  grecs ,  les  noms  d'un 
certain  nombre  de  ces  peuples.  Chacun  de  ces  peuples  eut 
pour  lot  une  portion  du  territoire  conquis.  Ainsi ,  à  une  épo- 


NOTIONS  GÉNÉRALES.  5 

que  plus  ancienne ,  lorsque ,  arrivant  du  nord  des  Alpes ,  la 
race  latine  était  venue  s'établir  au  sud  du  Tibre,  chacune  des 
genks^  dont  l'association  devait  plus  tard  donner  naissance 
à  la  ville  de  Rome ,  avait  reçu  une  portion  de  territoire 
dont  elle  eut  d'abord  la  propriété  collective  (1).  Ainsi,  plus 
tard,  Rome  conquérante  réunit  à  son  domaine  public  le 
domaine  des  cités  vaincues.  Dans  chacun  des  groupes  de 
guerriers  dont  Tassociation  constituait  un  peuple  gaulois  : 
Arvemit  BiturigéSj  Remi^  Aedui^  etc.,  c'était  la  coopération 
des  courages  qui  avait  produit  le  succès  des  armes.  Le  sol, 
dont  la  conquête  avait  été  le  résultat  de  ce  concours,  resta 
propriété  collective  de  chaque  peuple.  Il  ne  fut  partagé 
(pi'entre  les  peuples  :  le  butin  mobilier  fut  seul  d'abord 
partagé  entre  les  guerriers.  Ce  procédé  est  celui  que  pa- 
raissent avoir  suivi ,  dans  toute  l'Europe,  les  conquérants 
indo-européens.  La  propriété  collective  du  sol  était  le  prin- 
cipe; la  propriété  immobilière  individuelle  n'apparaissait 
qu'à  l'état  d'exception.  A  Rome ,  lorsque  le  roi  légendaire 
Romulus  fit  le  premier  partage  des  terres,  chaque  chef 
de  famille  ne  reçut  que  deux  jugera  ou  cinquante  ares , 
c'est-à-dire  de  quoi  se  créer  un  enclos  autour  de  la  maison 
des  champs.  Tel  fut  primitivement  Vherêdium  romain.  Le 
reste  du  territoire  de  Rome  était  affecté  à  une  jouissance 
soit  commune,  soit  précaire  :  en  d'autres  termes,  consti- 
tuait le  domaine  public. 

Vherediwn  romain  parait  identique  à  l'enclos,  faithce, 
que  la  loi  irlandaise  nous  montre  attenant  à  la  maison  des 
membres  de  la  noblesse  irlandaise.  Telle  est  aussi  la  terra 
salica  du  titre  LXII  de  la  loi  des  Francs  Saliens.  Dans  la 
période  historique  primitive  dont  les  Gaulois  n'étaient  pas 
çncore  sortis ,  quand  César  les  assujettit  au  joug  romain , 
ie  territoire  de  chaque  peuple  était  affecté  à  la  propriété 
collective  de  ce  peuple,  sauf  peut-être  le  sol  des  maisons  de 
ville,  des  maisons  des  champs,  et  l'enclos  attenant  à  cha- 

(t)  Mommsen,  Rœmiêche  Geêchiehtêj  6*  édition,  t.  I,  p.  35,  150. 


G  LIVRE  !•'.  CHAPITRE  1*\  l  3. 

cune  de  ces  propriétés  bâties.  Cette  situation  peut  sembler 
démocratique  au  plus  haut  point,  quand  elle  est  Tobjet 
d'une  observation  superficielle.  En  réalité,  rien  ne  se  con- 
cilie mieux  avec  la  constitution  aristocratique  des  Etats  et 
des  fortunes.  La  propriété  collective  n*a  pas  pour  consé- 
quence nécessaire  la  jouissance  collective  ;  la  propriété 
collective  qui  appartient  à  TEtat  se  combine  facilement  avec 
la  jouissance  individuelle  au  profit  d'un  petit  nombre. 
L'exploitation  du  sol  public  par  Tagriculture  ou  par  le 
pâturage  exige  un  capital  que  possèdent  seuls  les  gens 
riches ,  c'est-à-dire  les  membres  de  l'aristocratie ,  car  c'est 
par  abus  de  langage  que  chez  nous,  dans  l'usage  vulgaire, 
on  distingue  naïvement  de  la  richesse  l'aristocratie.  Les 
gens  riches  seuls  avaient  les  bœufs  ou  les  chevaux ,  les 
charrues  nécessaires  au  labourage  ;  seuls ,  ils  pouvaient 
faire  l'avance  de  la  semence  et  des  salaires,  loger  et  nourrir 
bétes  et  gens  jusqu'à  la  récolte  ;  seuls,  ils  avaient  les  trou- 
peaux nécessaires  pour  exploiter  le  sol  en  le  pâturant  ;  en 
sorte  qu'en  fait  ils  divisèrent  entre  eux  le  domaine  public 
et  en  jouirent,  comme  s'il  leur  eût  appartenu,  à  charge  de 
redevances  insignifiantes,  tandis  que,  dans  notre  organisa- 
tion moderne,  ceux  qui  possèdent  les  mêmes  capitaux  sont 
obligés  d'acheter  ou  de  tenir  à  bail  des  particuliers  la 
terre  qu'ils  labourent ,  les  pâtures  et  les  prés  qui  nourris- 
sent leurs  bestiaux,  et  ces  particuliers  ne  leur  font  pas 
les  conditions  qu'une  aristocratie  obtient  de  l'Etat. 

S  3.  —  La  conquête  romaine  ,  le  cadastre  d* Auguste,  ses  effets 

sur  la  propriété  foncière. 

Le  système  d'impôts  qu'Auguste  établit  en  Gaule  eut 
pour  effet  la  substitution  de  la  propriété  privée  à  la  pro- 
priété collective  ou  publique  de  la  terre.  Il  consolida  la 
jouissance  jusque-là  précaire  du  sol  par  les  membres  de 
l'aristocratie ,  et  transforma  cette  jouissance  en  une  sorte 
de  droit  de  propriété  définitive. 


NOTIONS  GÉNÉRALES.  7 

César  vainqueur  avait  frappé  la  Gaule  d'un  impôt  de 
répartition,  iributum  ou  stipendium^  qui  s'élevait  à  qua- 
rante millions  de  sesterces,  c'est-à-dire  un  peu  plus  de  huit 
millions  de  francs  (1)  ;  chaque  peuple  ou  Etat  supportait , 
dans  cet  impôt,  une  part  déterminée  et  se  procurait  les 
fonds  comme  il  l'entendait.  À  ce  système  primitif,  Auguste 
substitua  le  cens,  c'est  à-dire  un  impôt  de  quotité  qui  frap- 
pait à  la  fois  les  personnes  et  les  terres  ;  le  montant  total 
n'en  était  pas  fixé  d'avance  ;  chaque  particulier  contribuable 
payait  d'après  un  tarif  uniforme,  et  les  exonérations  indivi- 
duelles, quand  elles  avaient  lieu,  n'étaient  pas  compensées 
par  une  surtaxe  des  imposés  ;  la  perte  qui  en  résultait  était 
supportée  par  le  fisc  impérial  (2).  L'établissement  du  cens 
changea  les  rapports  de  chaque  contribuable  gaulois  avec 
sa  cité ,  et  de  chaque  portion  du  sol  avec  celui  qui  la  dé- 
tenait :  les  particuliers  délenteurs  du  sol  cessèrent  de  ver- 
ser dans  la  caisse  de  la  cité  la  redevance  annuelle  qui  était 
la  condition  de  leur  jouissance  précaire  ;  cette  redevance 
fut  remplacée  par  l'impôt  dû  au  fisc  romain  ;  et,  par  l'efTet 
de  la  loi  fiscale  romaine,  ces  particuliers  furent  substitués 
à  la  cité  comme  possesseurs  légaux  des  parcelles  territo- 
riales qui ,  en  fait,  étaient  entre  leurs  mains  :  payant  l'im- 
pôt foncier  au  fisc,  ils  furent  considérés  comme  investis 
d'une  sorte  de  propriété  foncière  au  lieu  et  place  du  peuple 
ou  de  la  cité. 

Le  recensement  qui  servit  de  base  à  l'établissement  de 
ce  nouveau  système  d'impôts  fut  commencé  par  Auguste 
l'an  27  avant  notre  ère  (3).  Il  paraît  avoir  été  précédé  d'un 
arpentage  général  de  l'empire  prescrit  par  Jules  César  et 


il)  Entropc,  Ht.  VI,  ch.  xvn.  Cf.  Suétone,  Ca^ar,  cb.  XXV,  et  le  com- 
mentaire donné  sur  ces  deux  textes  par  Marquardt,  Handbuch  dor  rômis- 
chen  Alterthûmer,  2*  édit.,  t.  V,  p.  191,  note  10. 

(2)  Suétone,  Auguste,  ch.  XL  :  <  Liviae  pro  quodam  tributario  Gallo  ro- 
ganti  civitatem  negavit,  immunitatem  optulit  :  affirmans,  se  faciiius  passu- 
rtim  fisco  detrabi  aliquid,  quam  civitatis  Roroanae  vulgari  honorem.  » 

(3)  E.  Desjardins  ,  Géographie  historique  el  administrative  de  la  Oaulc 
romaine,  t.  III,  p-  154. 


8  LIVRE  I".  CHAPITRE  !•'.  {  3. 

dirigé  par  quatre  géomètres,  à  chacun  desquels  fut  attribué 
un  quart  de  cette  vaste  circonscription.  La  portion  occi- 
dentale de  Tempire,  qui  comprenait  la  Gaule,  avait  été 
confiée,  dit-on,  à  un  certain  Didyme,  dont  le  travail  avait 
duré  seize  ans  et  trois  mois;  commencé  Tannée  44,  il 
s'était  terminé  l'an  27  avant  notre  ère  (1).  Un  des  résultats 
géographiques  de  cette  vaste  entreprise  fut  la  rédaction 
d'un  livre  publié  sous  le  nom  d' Agrippa,  et  qui  était  une 
sorte  de  géographie  géométrique  de  Tempire  romain  ;  pour 
donner  à  cette  œuvre  une  publicité  plus  grande.  Agrippa 
et  Auguste  voulurent  qu'une  carte  représentant  l'empire 
romain  fût  peinte  et  exposée  aux  yeux  du  public,  à  Rome 
même ,  dans  un  portique  (2).  Cette  grande  opération  géo- 
graphique était  inspirée  par  des  préoccupations  beaucoup 
plus  administratives  que  scientifiques  ;  elle  jetait  les  bases 
du  cadastre  qui  devait  servir  à  l'assiette  de  l'impôt  foncier. 
La  Gallia  comata  (3) ,  ou  la  Gaule  conquise  par  César,  pa- 
rait avoir  compris  trois  cent  cinq  peuples  (4).  Auguste  trouva 
ce  nombre  trop  considérable,  il  maintint,  à  quelques  mo- 
difications près,  une  grande  partie  de  ces  peuples  dans 
l'état  de  subordination  où  ils  se  trouvaient  à  l'égard  d'au- 
tres peuples  plus  importants,  et  il  divisa  la  Gallia  comata 
en  soixante  circonscriptions  financières ,  si  nous  nous  en 
rapportons  à  Strabon  ;  en  soixante-quatre ,  si  nous  en 
croyons  d'autres  documents  (5).  On  se  sert  souvent  du  mot 

(1)  Voyez  les  textes  réunis  chez  Marquardt  et  Mommsen,  Handbuch  der 
rœmischen  Alterthûmer  ^  2«  édit.,  t.  V,  p.  209-210.  Les  divisions  de  la  cos- 
mographie de  Julius  Honorius  et  de  la  cosmographie  d'Ethicus  ont  pour 
base  le  partage  de  l'empire  romain  entre  les  quatre  géomètres.  Pour  la 
section  occidentale,  voy.  Riese,  Geographi  latini  minores ,  p.  33-40,  ^8-86. 

(2)  Riese,  Geographi  latini  minores,  p.  i-xvi,  1-8. 

(3)  On  trouve  déjà  cette  expression  chez  Catulle ,  29 ,  3,  c'est-à-dire  dans 
une  pièce  contemporaine  de  la  guerre  des  Gaules. 

(4)  C'est  le  chiffre  donné  par  Josèphe ,  icévre  8è  xal  xp laxoaioïc  icXv)Ouovt£; 
ëOveat.  De  bello  judaico,  liv.  II,  ch.  xvi ,  édit.  Didot,  p.  119, 1.  11  et  12.  Ce 
chiffre  exact  est  remplacé  par  des  chiffres  ronds  chez  Plutarque  qui  dit  trois 
cents,  èOvY)  5à  éx8ipiQ(raT0  Tpiaxôaïa.  César,  ch.  XV,  édit.  Didot,  p.  852,  1.  43, 
44,  et  chez  Appien  qui  dit  quatre  cents,  iOvY)  de  TCTpaxôoia.  De  rébus  galliciti, 
ch.  II,  édit.  Didot,  p.  24. 

(5)  Marquardt  et  Mommsen,  Handbuch  der  rœmischen   AUerihûmer , 


NOTIONS  GÉNÉRALES.  9 

civikts  pour  désigner  ces  circonscriptions  ;  mais  cette  ex- 
pression désigne  plutôt  Tétre  moral  qui,  créé  par  un  fait 
politique ,  vivait  sur  chacune  de  ces  circonscription ,  et,  à 
proprement  parler,  cette  circonscription  elle  même  s'appe- 
lait en  latin  terriiorium  (1)  ou  regio  (2).  Le  sol  de  la  cité  se 
divisait  en  pagi,  et  le  pagixs  lui-même,  dans  le  système 
romain,  se  subdivisait  en  fundi.  Cette  triple  division  du  sol 
est  la  base  du  cadastre  et  de  Timpôt  foncier  romains  (3). 
On  peut  comparer  la  cité  à  notre  département;  le  pagus  (4), 
à  notre  arrondissement;  le  fundus,  à  notre  commune.  Pour 
constituer  un  fundus,  il  faut  une  certaine  étendue  de  ter- 
rain, officiellement  délimitée,  qu'on  appelle  a^er,  et  sur 
ce  terrain,  des  bâtiments  qu'on  appelle  villa  (5). 

2*  édiL,  t.  IV,  p.  268.  Cf.  Desjardins,  Géographie  de  la  Gûule  romaine,  t.  HI, 
p.  156  et  suIt. 

(1)  a  Territormm  est  nniversitas  agrorum  intra  fines  cujusque  civitatis.  » 
Pomponius,  Liber  êingularis  EncMridii;  Digeste,  lib.  L,  tit.  xyi,  1.  239,  {  8. 

(2)  a  Regiones  autem  dicimus ,  intra  quarum  fines  singulamm  coloniarum 
ant  mnnicipiorum  magistratibus  jus  dicendi  coercondique  est  libéra  potes- 
tas.  »  Sicttlus  Flaccus  ,  chez  Blume  ,  Lachmann  et  Rudorff ,  Die  Schriften 
der  rœmischen  Feldmessery  Gromatici  veteres,  t.  I,  p.  135,  1.  4-7. 

(3)  c  Forma  censuali  cavetur,  ut  agri  sic  in  censum  reforantur  :  Nomen 
fondi  cujusque;  et  in  qua  civitate  et  in  quo  pago  sit;  et  quos  duos  vicinos 
proximos  habeat.  »  Ulpien ,  De  censibus,  livre  III ,  dans  Digeste ,  livre  L , 
tit.  XV,  1.  4. 

(4)  Il  est  déjà  question  des  pagi  de  la  Gaule  chez  César  qui  les  oppose 
d'une  façon  générale  aux  cités  ;  In  omnibus  civitaiibus  atque  pagis,  livre  VI, 
ch.  10,  et  qui  mentionne  les  pagi  des  Helvètes,  livre  I,  ch.  12,  13,  27  ;  ceux 
des  Morini ,  livre  IV,  ch.  22  ;  ceux  des  Arvemes ,  livre  VII ,  ch.  64.  Tacit<^ 
parle  de  ceux  des  Sequani,  Annales  y  I,  45,  et  de  ceux  des  Aedui,  His- 
toires,  II,  61. 

(5)  «  Locus...  sine  aedificio...  rure...  ager  appellatur.  Idemque  ager  cum 
aedificio  fundus  dicitur.  Florentinus,  libro  VIII  Institutionum ,  »  dans  Di- 
geste, livre  L,  titre  xvi,  1.  211.  —  «  Locus  est  non  fundus  sed  portio  aliqua 
fondi  ;  fundus  autem  integrum  aliquid  est ,  et  plerumque  sine  villa  locum 
accipimus...  Sed  fundus  quidem  suos  habet  fines.  »  Ulpien,  livre  LXIX,  Ad 
edictum,  dans  Digeste ,  livre  L ,  titre  xvi,  1.  60.  —  t  Ager  est  locus  qui  sine 
villa  est.  >  Ulpien,  livre  XVII,  Ad  ediclum,  dans  Digeste,  livre  L,  titre  xvi, 
1.  27.  —  Les  passages  suivants  de  Caton,  De  re  rustica,  achèveront  de  faire 
comprendre  le  rapport  qui  existe  entre  fundvs  et  villa  :  a  Paterfamilias, 
ubi  ad  villam  venit,  ubi  larem  familiarem  salutavit,  fundum  eodem  die,  si 
potest,  circumeat;  si  non  eo  die,  at  postridie...  Ita  aedifices  ne  villa  fundum 
quaerat  neve  fundus  villam  »  (c.  II ,  III).  Le  sens  de  cette  maxime  est  que 
les  bâtiments  d'exploitation  doivent  avoir  une  importance  proportionnée  à 
celle  du  domaine.  On  la  trouve  reproduite   chez  Pline  le   Naturaliste , 


10  LIVRE  I".  CHAPITRE  I".  {  4. 

S  4.  —  Origine  de  la  commune  rurale  en  France. 

On  doit  reconnaître  dans  le  fundus  romain  Torigine  de 
nos  communes  rurales.  Les  plus  anciennes  de  ces  com- 
munes, portant  en  général  un  nom  formé  avec  un  gentilice 
romain  et  avec  le  suffixe  acus^  comme  Juli-acu$y  remontent 
à  un  fundus  qui  date  de  TEmpire  romain  (1) ,  et  dont  les 
limites  ont  été  primitivement  fixées  par  les  arpenteurs,  agri- 
mensores^  employés  à  la  confection  du  cens,  sous  le  règne 
d'Auguste.  Le  premier  propriétaire  est  un  grand  seigneur 
gaulois  qui ,  ordinairement ,  en  devenant  citoyen  romain , 
avait  pris  le  gentilice  de  son  protecteur  romain.  De  ce 
gentilice  vint  le  nom  de  son  fundus.  La  villa  construite 
dans  ce  fundus  eut  avec  lui,  pour  premiers  habitants,  ses 
obaerati,  ses  clients  qui,  jadis,  consacraient  leur  temps  au 
soin  des  troupeaux,  à  l'agriculture  et  aux  armes.  Sous  la 
domination  romaine,  cessant  de  combattre,  ils  ne  furent 
plus  que  laboureurs  et  pâtres.  Leur  ancien  chef,  devenu 
leur  propriétaire,  leur  partagea  une  partie  de  son  domaine, 
à  charge  de  redevances  ;  pour  la  pâture ,  le  bois  de  chauf- 
fage et  de  construction,  il  leur  donna  Tusage  collectif  d'une 
autre  portion  :  on  appela  villa  leurs  habitations  groupées 
autour  de  la  sienne  ;  à  la  villa,  le  village  a  succédé  (2). 

Cette  nouvelle  organisation  de  la  propriété  eut  financiè- 
rement l'avantage  de  répartir  la  charge  de  l'impôt  foncier 
entre  les  Gaulois  les  plus  riches  et,  par  conséquent,  les 

livre  XVIII,  ch.  vi  (7),  {  32.  Cf.  Columelle,  livre  I,  ch.  iv.  —  Sur  les  modi 
Qcations  dont  les  fonds  étaient  susceptibles,  voyez  Pomponius,  livre  V,  Ad 
Sadintim ,  dans  Digeste,  livre  XXX,  titre  unique,  1.  24,  }  3.  Cf.  Ulpien, 
livre  LXIX»  Ad  edictum,  dans  Digeste,  livre  L,  titre  xvi,  1.  GO. 

(1)  Je  ne  parle  pas  ici  de  colles  de  nos  communes,  évidemment  peu  nom- 
breuses, qui  remontent  à  un  vicus  ou  à  un  oppidum. 

(2)  Un  passage  d'Apulée,  Métamorphones ,  1.  VIII ,  nous  donne  un  exem- 
ple d'une  villA  qui  est  déjà  un  village  moderne  :  «  Villae  vero  quam  forte 
tu)^^  praeteril>amus  coloni,  roultitudinem  nostram  latrones  rati,  satis  agcntes 
rerum  suarum,  ezimieque  trepidi,  canes  rabidos  et  immanes  et  quibusvo 
iupis  et  ursis  saeviores.  quos  ad  tutelae  praesidia  curiose  fuerant  alumnaii 
Jubilationibus  solitis  ci  cujuscemodi  vocibus  nobis  inhortantur. 


NOTIONS  GÉNÉRALES.  11 

plus  solvables.  L'impôt  foncier  était  payé  par  les  proprié- 
taires des  fundi.  Le  plaisir  que  leur  fit  éprouver  l'acquisi- 
tion du  droit  de  propriété  leur  fit  accepter,  sans  trop  de 
peine ,  la  charge  d*un  impôt  probablement  plus  considérable 
que  la  redevance  autrefois  due  à  la  cité.  Quant  à  la  plèbe, 
condamnée  à  cultiver  le  bien  d'autrui,  elle  ne  perdait  rien 
à  la  révolution  qui  faisait  partager  entre  les  membres  de 
l'aristocratie  le  droit  au  sol  :  ce  droit  jusque-là  était  resté 
en  théorie  dans  les  mains  de  chaque  peuple  ou  de  chaque 
Etat,  et  il  cessait  de  lui  appartenir  ;  mais,  au  point  de  vue 
de  la  plèbe ,  il  n'y  avait  pas  de  changement  pratique  :  en 
efTet,  presque  toujours,  par  la  force  des  choses,  Taristo- 
cratie  seule  avait  jusque-là  joui  de  la  terre. 

La  contenance  moyenne  de  ^os  communes  est  aujour- 
d'hui de  treize  à  quatorze  cents  hectares.  Il  serait  certai- 
nement téméraire  d'affirmer  qu'au  temps  d'Auguste  telle 
fut  l'étendue  moyenne  des  fundi.  Le  fundus  était  une  créa- 
tion arbitraire  que  l'homme  pouvait  modifier  suivant  les 
exigences  de  sa  fortune  et  de  sa  fantaisie.  Des  fundi, 
reconnaissables  à  leur  nom,  sont  aujourd'hui  de  simples 
sections  de  communes;  les  villae,  qui  leur  servaient  de 
centre,  sont  réduites  à  l'état  de  hameaux,  ou  même  elles 
ont  disparu  sans  laisser  d*autres  traces  qu'un  nom  dans  de 
vieux  titres  ou  que  des  ruines  innommées  qu'étudient  quel- 
ques archéologues.  Des  villae  nouvelles  ou,  pour  se  servir 
d'une  autre  expression ,  des  cartes  de  création  plus  récente 
ont  surgi  :  monuments  des  grandes  invasions  qui  amenè- 
rent la  chute  de  l'empire  romain  ou  qui  en  furent  la  con- 
séquence ;  leurs  noms  sont  des  composés  dont  le  premier 
terme  est  un  nom  propre  d'homme  d'origine  germanique , 
dont  le  second,-ville, -court, -mont, -val,  appartient  à  la 
langue  que  parlaient  les  vaincus  du  cinquième  siècle  après 
notre  ère.  A  côté  de  Clichy,  Clippiacus^  d'Antony,  Anto^ 
niacusj  noms  d'anciens  fundi  formés  à  Taide  d'un  gentilice 
romain  et  du  suffixe  gaulois  -acus ,  témoins  qui  attestent , 
lout  près  de  Paris  même ,  la  conquête  de  la  Gaule  par  les 


n 


12  LIVRE  !•'.  CHAPITRB  I".  {  5. 

Romains ,  nous  trouvons  des  noms  de  lieu  :  Billan-court , 
Clîgnan-court  et  Bougi-val,  Baudechisilo-valliSj  mots  de  for- 
mation hybride,  mi-partie  germains,  mi-partie  gallo-ro- 
mains, qui  rappellent  la  conquête  franque  et  la  création 
de  villcte  nouvelles,  faite  sur  les  ruines  de  villae  gallo- 
romaines,  ou  à  côté  d'elles  en  démembrant  leur  territoire. 
Ce  serait  donc  une  opération  fort  délicate  que  de  cher- 
cher à  retrouver  sur  notre  sol  les  limites  exactes  des  fundi 
gallo-romains  dont  un  grand  nombre  de  nos  communes  ont 
conservé  le  nom.  Mais  je  crois  qu'il  ne  faut  pas  désespérer 
d'arriver  un  jour  à  ce  résultat  par  une  étude  attentive,  là 
surtout  où  les  textes  nous  permettent  d'atteindre  les  pre- 
miers siècles  du  moyen  Age.  Il  est  fort  possible  qu'un  cer- 
tain nombre  de  nos  communes  représentent  exactement  la 
circonscription  de  fundi  gallo-romains.  L'étendue  n'est  pas 
un  obstacle.  Nos  communes,  ai-je  dit,  contiennent  de  treize 
à  quatorze  cents  hectares.  Les  fundi  gallo-romains  pou- 
vaient avoir  une  étendue  moyenne  approchant  de  celle-là, 
puisqu'Ausone  appelle  parvum  herediolum  sa  propriété  de 
famille ,  dont  la  contenance  dépassait  mille  jugera,  c'est-à- 
dire  deux  cent  cinquante  hectares  (1). 

S  5.  —  La  propriété  foncière  en  France  d'Auguste  à  nos  jours. 

Les  clients  de  chaque  eques  gaulois,  installés  par  lui 
sur  son  fundus^  c'est-à-dire  sur  la  portion  du  territoire 
commun  que  le  cens  impérial  lui  avait  attribuée,  détinrent, 
partagée  entre  eux,  une  section,  ordinairement  la  plus 
considérable,  de  ce  fundus;  une  autre  resta  affectée  à  la 
jouissance  directe  du  propriétaire  nouveau  que  la  puis- 
sance romaine  avait  créé.  Une  troisième  section  fut  attri- 
buée à  la  jouissance  commune  des  habitants  du  fundus, 
logés  autour  du  maître  dans  IdL  villa.  Ce  qui  subsiste  de 
pette  dernière  section  constitue  aujourd'hui  nos  biens  corn- 

(1)  Ausone^  idylle  III,  v.  9. 


NOTIONS  QÉNÉRAUBS.  13 

munaux;  la  seconde  est  la  terra  indominieata  du  moyen 
âge;  quant  à  la  première,  c*est  en  elle  que  nous  devons 
reconnaître  l'origine  de  la  plus  grande  partie  de  la  pro- 
priété immobilière  telle  que  nous  la  connaissons  dans  la 
France  moderne. 

Chacun  des  obcterati,  des  clientes^  des  ambacti  eut  un  lot 
à  cultiver.  Fermier  au  point  de  vue  du  droit  romain ,  il 
considérait  peut-être  son  petit  lot  comme  la  part  qui  légale- 
ment lui  revenait  dans  Tantique  propriété  collective  de  la 
cité.  De  là  ce  caractère  mixte  du  colonat,  où  le  tenancier, 
irrévocablement  lié  au  ftmdus ,  et  comme  tel ,  en  une  cer- 
taine mesure  y  esclave ,  a  cependant  un  droit  sur  le  terrain 
qu'il  cultive.  Ce  droit,  qui  remonte  au  droit  collectif  de  la 
cité  fut  pendant  des  siècles  en  lutte  avec  celui  que  le  pro- 
priétaire du  fandus  reçut  de  la  loi  romaine.  On  appelle  ce 
dernier  droit  domaine  émineni;  le  premier,  celui  du  tenan- 
cier, est  le  domaine  utile.  Ces  deux  droits  avaient  pour 
objet  le  même  immeuble.  En  France ,  aujourd'hui ,  le  do- 
maine utile  subsiste  seul.  Le  moyen  âge  avait,  en  général, 
fixé  en  argent  les  redevances  qui  grevaient  le  domaine 
utile  au  profit  du  domaine  éminent.  Du  treizième  siècle  à 
1789,  la  quantité  de  matières  précieuses  contenues  dans  les 
espèces  monétaires  diminua  dans  la  proportion  de  vingt  à 
un ,  et  le  pouvoir  commercial  de  l'or  et  de  l'argent  s'abaissa 
dans  la  proportion  de  trois  à  un  ;  en  sorte  que ,  dans  cette 
période,  le  poids  des  redevances  pécuniaires  annuelles  qui 
grevaient  le  domaine  utile  au  profit  du  domaine  éminent 
s'était  réduit,  suivant  un  rapport  que  l'on  peut  comparer, 
à  celui  de  soixante  à  un.  Ainsi ,  le  domaine  éminent  en 
France  n'était  plus  guère  qu'une  institution  honorifique, 
lorsqu'il  disparut  dans  la  tourmente  révolutionnaire  comme 
les  feuilles  des  arbres  que  le  vent  des  derniers  mois  d'au- 
tomne emporte  au  loin  quand  les  premières  gelées  ont 
achevé  l'œuvre  du  soleil  de  juillet  et  d'août. 

Tout  Butte  a  été  l'histoire  économique  en  Ecosse  et  en 
Irlande.  Une  législation  aristocratique  à  outrance,  de  date 


1 


14  LIVtlE  I".  CHAPITRE  !•'.  |  f,. 

toute  récente,  a  fait  considérer  comme  bail  temporaire  et 
non  écrit  le  titre  du  tenancier.  Elle  a  permis  d'accroître 
indéfiniment  sa  redevance,  que  la  loi  française  diminuait 
progressivement  et  finissait  par  supprimer  ;  elle  a  livré  le 
tenancier  à  la  merci  du  landlordy  maître  de  l'expulser 
suivant  son  intérêt  ou  son  caprice.  Le  domaine  utile  a 
disparu,  et  Ton  ne  connaît  plus,  en  général ,  qu'une  seule 
forme  de  la  propriété ,  qui  est  le  domaine  éminent. 

Le  droit  que  récbment  les  tenanciers  d'Irlande  et 
d'Ecosse  est  le  droit  ancien  :  ils  en  ont  été  dépouillés  par 
une  révolution  économique  et  législative,  qui  est  l'op- 
posé de  celle  dont  la  secousse  politique  de  la  fin  du  siècle 
dernier  a  été  chez  nous  la  conséquence  logique  et  le  cou- 
ronnement. 


CHAPITRE  II. 


RAPPORT  DE  LA  PROPRIÉTÉ    FONCIÈRE  AVEC   LA   SOUVERAINETÉ 
DANS   LE    DROIT   PUBLIC    DE    ROME  ET  DES  GERMAINS.    Vager 
pUblicUS  ET  LES  LOIS  AGRAIRES  A  ROME  AVANT  CÉSAR  ET  DE 
SON  TEMPS. 

SOMMAIBB  : 

I  1.  La  notion  de  la  propriété  foncière  dans  la  France  moderne.  Autres 
manières  de  concevoir  la  propriété  foncière  soit  dans  l'ancienne  France, 
soit  hors  de  France.  Le  domaine  éminent ,  le  domaine  utile.  —  {  2.  Le 
droit  de  souveraineté  comprend-il  le  droit  de  propriété  ?  Réponse  à  cette 
question  dans  le  droit  public  de  Rome  et  des  Germains.  La  deditio, 
Arioviste  et  les  Burgundes  en  Gaule.  —  i  3.  Uager  publicus  romain  et 
les  lois  agraires. 


S  I*^  —  La-  notion  de  la  propriété  foncière  dans  la  France 
moderne.  Autre  manière  de  concevoir  la  propriété  foncière 
mt  dans  V ancienne  France^  soit  hors  de  France  :  le  domaine 
éminentf  le  domaine  utile. 

Nous  avons  de  la  propriété  foncière,  nous  Français  de 
la  fin  du  dix-neuvième  siècle ,  une  notion  qui  est  le  résultat 
d'habitudes  d'esprit  toutes  récentes,  car  la  législation  qui 
les  a  produites  remonte  à  environ  cent  ans  :  cette  notion 
n'est  pas  conforme  aux  doctrines  reçues  chez  nos  ancêtres 
à  une  date  très  rapprochée  de  nous.  En  France ,  la  pro- 
priété foncière  était  conçue,  au  siècle  dernier,  tout  au- 
trement qu'aujourd'hui ,  et  alors  elle  comportait  certains 
démembrements  qu'un  droit  nouveau  a  fait  disparaître  en 
prohibant  le  bail  perpétuel ,  en  déclarant  la  rente  foncière 


16  LIVRE  I-.  CHAPITRE  II.  |  1. 

rachetable  ou  même  en  la  supprimant  sans  indemnité 
quand  on  la  considérait  comme  féodale.  Ainsi ,  des  deux 
éléments  de  la  propriété  foncière  en  France  sous  Tancienne 
monarchie,  domaine  éminent  du  seigneur  ou,  théorique- 
ment, du  propriétaire  primitif,  et  domaine  utile  du  tenan- 
cier, le  second  seul  subsiste;  il  est  théoriquement  une 
émanation  du  premier;  il  est  certainement  plus  ancien 
dans  bien  des  cas;  mais  peu  importe  la  solution  qu'on 
donne  à  cette  question  historique  ;  ce  qui  est  certain,  c'est 
qu'en  France  le  domaine  utile  a ,  de  nos  jours ,  absorbé  le 
domaine  éminent. 

Beaucoup  de  nos  compatriotes,  même  instruits,  parais- 
sent ignorer  combien  est  nouvelle  la  notion  française  mo- 
derne de  la  propriété  foncière.  L'ardeur  de  la  discussion 
de  ce  qu'on  appelle  chez  nous  les  questions  sociales  a  créé 
dans  leur  esprit  l'habitude  de  considérer  comme  une  base 
nécessaire  de  la  société  la  propriété  foncière  individuelle , 
telle  que  nos  lois  actuelles  la  définissent  ;  quand  ils  vont 
dans  certains  pays  étrangers  où  la  propriété  foncière  n'a 
pas  eu  la  même  histoire  que  chez  nous  et  où  elle  est  com- 
prise autrement,  ils  n'en  peuvent  croire  leurs  yeux.  Rien 
n'est  ridicule,  par  exemple,  comme  les  observations  des 
publicistes  français  qui  vont  se  promener  en  Irlande.  Là , 
il  y  a  deux  siècles,  par  une  révolution  opposée  à  la  nôtre, 
le  domaine  éminent ,  quoique  de  date  récente ,  a  absorbé 
le  domaine  utile,  dont  l'origine  se  perdait  dans  la  nuit  des 
temps ,  et  la  généreuse  équité  du  gouvernement  anglais 
d'aujourd'hui  cherche  à  rétablir  le  domaine  utile  au  profit 
du  tenancier  spolié.  Le  voyageur  français  n'y  comprend 
rien  et  croit  assister  à  la  réalisation  des  théories  à  priori 
émises  par  les  socialistes  du  continent.  —  Il  s'agit  de  donner 
à  toute  une  nation ,  une  réparation  analogue  à  celle  qu'en 
France  obtinrent,  il  y  a  un  demi-siècle,  quelques  milliers 
de  vaincus,  et  qu'on  appelle  1'  «  indemnité  des  émigrés.  » 

Un  peuple  contemporain  a  beau  être  rapproché  de  nous 
géographiquement ,  on  ne  peut  avoir  l'intelligence  de  ses 


SOUVERAINETÉ  ET  PROPRIÉTÉ  FONCIÈRE.  It 

institutions  présentes  et  des  passions  qui  raniment,  si  Ton 
ne  se  donne  pas  la  peine  d*ëtudier  son  histoire  et  si  Ton 
n'arrive  pas  ainsi  à  se  rendre  compte  de  l'influence  qui . 
dans  ce  peuple ,  est  exercée  sur  chaque  homme  par  la  tra- 
dition. Combien^  sont  puissants  les  souvenirs  d*une  nation, 
ces  souvenirs ,  les  uns  brillants  et  doux ,  les  autres  péni- 
bles et  irritants  qui ,  traduits  par  la  langue  passionnée  des 
mères ,  passent  de  leur  bouche  dans  Toreille  des  enfants 
et  deviennent  le  premier  aliment  de  leur  jeune  intelli- 
gence. Il  n'y  a  pas  en  Irlande  une  pierre  ou  un  brin 
d'herbe  qui  ne  rappelle  à  un  Irlandais  la  spoliation  si 
récente  dont  sa  race  a  été  victime. 

Ainsi,  pour  se  rendre  compte  des  passions  qui  agitent 
aujourd'hui  un  peuple  étranger,  pour  concevoir  comment  il 
comprend  ses  institutions  présentes,  il  faut  connaître  son 
passé  ;  sans  connaître  son  passé  à  lui,  on  ne  peut  apprécier 
en  quelle  mesure  ses  idées  sont  différentes  des  idées  d'un 
peuple  qui,  comme  nous,  a  derrière  lui  un  passé  différent. 
Si  quelqu'un  ne  saisit  pas  bien  ce  en  quoi  la  façon  de  pen- 
ser des  voisins  qu'il  veut  observer  s*éloigne  de  la  sienne , 
l'étude  qu'il  prétend  faire  de  leurs  actes  sera  frappée  de 
stérilité. 

Quand,  au  lieu  d'un  peuple  contemporain,  c'est  le  monde 
antique  que  l'on  veut  étudier,  il  faut  commencer  par  une  pré- 
paration analogue  et  chercher  à  se  rendre  compte  de  ce  en 
quoi  se  distinguent  de  nos  doctrines  modernes  les  doctrines 
analogues  admises  à  ces  âges  reculés.  Si  à  l'idée  que  nous 
exprimons  actuellement  en  France  par  le  mot  de  propriété 
foncière ,  on  compare  les  idées  similaires  dans  le  droit  ro- 
main, vers  la  fin  de  la  République ,  à  Tépoque  où  la  Oaule 
a  perdu  son  indépendance,  on  est  obligé  de  reconnaître 
entre  ces  idées  romaines  et  la  nôtre  des  différences  impor- 
tantes. 

S  2.  —  Le  droU  de  souveraineté  comprend-il   le  droit  de 
propriété?   La  réponse  à  cette  question  en   droit  public 

2 


18  LIVRE  I".  CHAPITRE  II.  |  2. 

romain  et  germanique.   La  deditio  ;   Arioviste  et  les  Bur- 
gundes. 

Aujourd'hui  la  notion  de  la  distinction  entre  la  propriété 
et  la  souveraineté  a  fait  des  progrès  considérables.  Quand 
une  province  conquise  est  réunie  au  territoire  d'un  Etat 
vainqueur ,  cette  province  change  de  souverain  ;  mais  la 
propriété  privée  reste  dans  les  mains  qui  la  détenaient 
avant  la  conquête.  C'est  une  maxime  du  droit  public  euro- 
péen. Si  ce  principe  subit  quelques  exceptions ,  lorsqu'il 
s'agit  de  la  propriété  mobilière ,  c'est-à-dire  si ,  dans  une 
certaine  mesure,  la  propriété  mobilière  du  vaincu  passe 
entre  les  mains  du  vainqueur  par  le  pillage  ou  par  l'indem- 
nité de  guerre  qui  est  le  rachat  du  droit  au  pillage,  il  est 
de  principe  que  la  propriété  foncière  privée  tout  entière  et 
sans  exception  continue  d'appartenir  au  vaincu.  La  pro- 
priété foncière  publique  du  vaincu  est  la  seule  que  la  con- 
quête fasse  passer  entre  les  mains  du  vainqueur. 

Tel  n'était  pas  le  droit  des  Romains.  On  connaît  la  for- 
mule terrible  de  ce  qu'ils  appelaient  deditio.  Voici  comment 
Tite-Live  raconte  la  capitulation  de  CoUatie ,  ville  sabine , 
qui,  dit-on,  se  rendit  aux  Romains  au  temps  de  Tarquin 
l'Ancien.  Quand  les  délégués  des  habitants  se  présentèrent 
à  lui,  Tarquin  leur  demanda  :  «  Etes-vous  les  ambassa- 
»  deurs  envoyés  par  le  peuple  coUatin  pour  consentir  à  la 
»  deditio  du  peuple  coUatin ?»  —  «  Nous  le  sommes ,  » 
répondirent-ils.  —  «  Le  peuple  coUatin  a-t-il  le  droit  de 
»  disposer  de  lui-même?  »  reprit  Tarquin.  —  «  Il  Ta,  » 
répondirent  les  délégués.  —  «  Donnez-vous ,  pour  être  en 
»  mon  pouvoir  et  en  celui  du  peuple  romain,  vos  personnes 
»  et  le  peuple  coUatin ,  la  ville ,  les  champs ,  les  eaux ,  les 
»  limites,  les  temples,  les  meubles,  toutes  les  choses  di- 
))  vines  et  humaines?  »  —  «  Nous  les  donnons,  »  répon- 
dirent les  députés.  —  «  Et  moi  je  les  accepte ,  »  répondit 
le  roi.  Cette  formule  se  trouve  répétée  à  peu  près  dans 
les  mêmes  termes  par  Tite-Live  dans  le  récit  des  événe- 


SOUVERAINETÉ  ET  PROPRIÉTÉ  FONCIÈRE.  19 

ments  de  Tan  343  av.  J.  C.  (1).  II  était  de  principe  que  le 
sol  du  territoire  appartenant  aux  dedititii ,  c'est-à-dire  aux 
vaincus  qui  s'étaient  rendus  sans  conditions  comme  les 
CoUatins,  devenait  «  propriété  »  de  l'Etat  romain.  La  formule 
de  la  deditio  ne  doit  pas  être  entendue  en  ce  sens  que 
Rome  acquit  simplement  la  souveraineté.  A  la  souve- 
raineté acquise  par  la  conquête  se  joignait  un  droit  de 
a  propriété  »  absolue.  Les  champs  conquis  cessaient  d'ap- 
partenir aux  vaincus  et  entraient  dans  le  domaine  public 
romain.  C'est  encore  la  doctrine  formulée  par  un  des  juris- 
consultes les  plus  célèbres  du  temps  d'Hadrien  et  de  Marc- 
Aurèle  au  second  siècle  de  notre  ère  :  «  Fait  partie  du 
domaine  public  le  champ  qui  est  pris  à  l'ennemi  (2),  »  et 
cette  règle  persiste  dans  le  droit  de  Justinien  ;  du  livre  de 
Pomponius,  elle  est  passée  dans  un  des  grands  recueils  de 
droit  compilés  par  ordre  du  prince  byzantin  (3). 

Quand  la  capitulation  était  conditionnelle,  il  ne  se  sui- 
vait pas  de  là  que  le  vaincu  dût  conserver  la  totalité  de 
son  territoire.  Ainsi  en  Tan  486  avant  notre  ère  la  guerre 
avec  les  Herniques  se  termina  par  un  traité  qui  leur  enleva 
les  deux  tiers  de  leur  territoire.  C'est  alors  que  fut  présen- 
tée la  première  loi  agraire.  Elle  proposait  que  le  territoire 
conquis  fût  partagé  moitié  entre  des  Latins  moitié  entre  des 
plébéiens  romains  (4). 

(1)  a  Deditosque  Collatinos  ita  accipio  eamque  dedîtionis  formulam  esse  : 
rex  interrogavit  «  Estisno  vos  legaU  oratorcsque  missi  a  populo  collatiao  ut 
vos  populumque  coUatinum  dederetis?  »  —  a  Sumus.  »  —  «  Estne  populus 
coUatinus  in  sua  potestate?  »  —  «  Est.  »  —  «  Deditisnc  vos,  populumque 
collatinum,  urbem,  agros,  aquam,  tcrminos,  dolubra,  ustcnsilia,  divina  hu- 
manaque  omnia  in  mcam  populiquc  romani  dicioncm?  »  —  a  Dedimus.  » 
—  «  At  ego  recipio.  »  Tite-Live,  livre  I,  c.  xxxviii  (éd.  Teubncr-Wcissen- 
born,  t.  I ,  p.  41).  Cf.  Mommscn  et  Marquardt,  Handbuch  der  rômischen 
Alterihûmer,  t,  III,  p.  55-56,  138-139,  723.  Comparez  ce  que  rapporte  Tite- 
Livc,  livre  VII,  c.  xxxr. 

(2)  c  Publicatur  euim  illo  agcr  qui  ex  hostibus  captus  sit.  »  Pomponius , 
Ad  Sàbinum,  livre  XXXVI. 

(3)  Digeste,  livre  XLIX,  titre  xv,  loi  20,  g  1. 

(4)  t  Cum  Hemicis  foodus  ictum,  agri  partes  duae  ademptae.  Inde  dimi- 
dioxn  Lalinis,  diinidium  plebi  divisurus  consul  Cassius  crat.  »  Tite-Live, 
livre  II,  c.  XLi  ;  éd.  Teubner-Weissemborn,  t.  I,  p.  102. 


20  LIVRE  !•'.  CHAPITRE  II.  {  2. 

Telle  était  donc  la  doctrine  des  Romains  sur  le  droit  du 
vainqueur  lorsque  Jules  César,  de  58  à  51,  fit  la  conquête 
de  la  portion  de  la  Gaule  restée  jusque-là  indépendante.  Il 
régla  en  Gaule  sa  conduite  sur  cette  doctrine.  Nous  voyons 
par  exemple  que  deux  Allobroges ,  Raucillus  et  Egus ,  fils 
d'Adbucillus,  prince  de  la  cité  des  Allobroges,  reçurent  de 
lui  en  présent  des  champs  pris  sur  l'ennemi  en  Gaule. 
Grâce  à  ce  cadeau  et  à  des  dons  importants  en  argent ,  ils 
devinrent  riches  de  pauvres  qu'ils  étaient  d'abord  (1). 

Les  Germains,  qui  avaient  comme  César  la  prétention  de 
conquérir  la  Gaule  et  auxquels  César  venait  disputer  cette 
proie,  avaient  la  même  notion  que  lui  du  droit  du  vainqueur 
sur  le  sol  du  territoire  habité  et  cultivé  par  le  vaincu. 
Quand  le  général  romain  arriva  en  Gaule,  Arioviste  avait 
dé^k  occupé  un  tiers  du  territoire  des  Sequani,  et  il  voulait 
en  occuper  un  second  tiers  (2)  ;  or  il  ne  faut  pas  se  mépren- 
dre sur  le  sens  du  latin  occupare  dont  César  se  sert  et  que 
nous  avons  tant  bien  que  mal  rendu  par  le  français  occu- 
p&i^  ;  occupare  agi^m  en  droit  romain ,  c'est  s'eu  mettre  en 
possession  par  un  acte  d'exploitation  agricole.  A  la  même 
date,  les  Aedui^  vaincus  par  les  Germains,  avaient  perdu  de 
la  même  façon  que  les  Sequani  la  plus  grande  partie  de 
leur  territoire  (3). 

Etait-ce  le  tiers  ou  les  deux  tiers  comme  les  Sequani , 
nous  n'en  savons  rien.  En  tout  cas,  il  est  curieux  de  voir, 
cinq  siècles  plus  tard,  les  Burgundes  réaliser  définitivement 
dans  la  même  région  l'entreprise  où  Arioviste  échoua,  et 
procéder  d'une  façon  analogue  à  l'égard  des  anciens  habi- 
tants du  pays.  En  443 ,  les  Burgundes  prirent  aux  posses- 


(1)  a  His...  agros  in  Gallia  ex  hostibus  captos  pracmiaquo  rei  pecuniariae 
magna  tribuerat  locuplctesque  ox  egcntibus  fccorat.  »  De  bello  civili , 
III,  59. 

(2)  «  Ariovistus  rox  Germanorum...  tcrtiam  partcm  agri  Sequani  qui  es- 
set  optimus  totius  Galliao  occupavisset  et  nunc  de  altéra  parte  tertia  Se- 
quanos  decedere  juboret.  n  De  bello  gallico,  I,  31,  |  10. 

(3)  «  Multatos  agris.  »  De  bello  gallico,  VII,  54,  g  4. 


SOUVERAINETÉ  ET  PROPRIÉTÉ  FONCIÈRE.  21 

seurs  romains  une  partie  de  leurs  biens  immobiliers  (1  , 
d'abord  la  moitié  des  terres  tant  arables  que  friches,  bois  et 
jardins  (2).  Us  avaient  droit  à  un  tiers  desb&timents  comme 
hôtes  en  exécution  d*une  loi  des  empereurs  Ârcadius  et 
Honorius  en  398  (3)  ;  mais  ils  semblent  bien  en  avoir  pris 
moitié  comme  du  reste  (4).  Vers  l'année  500,  la  part  des 
Burgundes  dans  les  terres  arables  fut  augmentée  ;  on  Téleva 
de  la  moitié  aux  deux  tiers  pour  tous  les  Burgundes  qui 
n'avaient  pas  reçu  de  leur  roi  des  dons  immobiliers  équi- 
valents (5). 

Ce  chiffre  des  deux  tiers  enlevés  aux  anciens  possesseurs 
semble  copié  sur  l'exemple  donné  par  Arioviste  au  premier 
siècle  avant  notre  ère,  quand,  ayant  pris  ^uxSeqtuini  un  tiers 
de  leurs  terres,  il  voulut  les  contraindre  à  lui  en  livrer  un 
second  tiers,  et  sur  l'exemple  donné  par  les  Romains  quatre 
cents  ans  plus  tôt  qu'Arioviste,  huit  siècles  avant  les  Bur- 
gundes, quand  ils  enlevèrent  aux  Herniques  les  deux  tiers 
de  leur  territoire.  11  y  a  toutefois  une  grande  différence. 

Lors  de  la  conquête  burgunde ,  ce  n'est  pas  en  un  bloc 
les  deux  tiers  d'une  province  que  les  Barbares  occupent.  11 
y  a  autant  de  partages  qu'il  y  avait  d'exploitations  agricoles 
ou  de  villœ:  chacune  est  partagée  entre  l'ancien  propriétaire 
romain  et  un  Barbare  nouveau  venu  qui  prend  moitié  des 


(1)  c  Sabaudia  Burgnndionum  reliquiis  datur  cum  indigenig  dividunda.  » 
Chronique  de  Prosper^  sur  Tannée  443.  ir  Eo  anno  Burgundiones  partem 
GaUiae  occupavenint  terrasque  cum  Gallicis  senatoribus  diviserunt.  » 
Chrofiique  de  Marius,  à  l'année  456. 

(2)  C'est  ce  que  l'on  doit  conclure,  semble-t-il,  des  titres  XIII  et  XXXI  de 
la  loi  des  Burgundes.  Ces  titres  appartiennent  à  la  partie  la  plus  ancienne 
de  la  loi,  488-490,  et  traitent,  Tun  des  défrichements,  Tautre  des  plantations 
de  vignes ,  et  supposent  tous  deux  le  principe  de  Tégalité  du  partage.  Le 
même  principe  parût  rappelé  par  les  paragraphes  2  et  3  du  titre  LIV  qui 
est  postérieur. 

(3)  Cade  Tlièodosien,  livre  VII,  titre  viii,  loi  5. 

(4)  a  Si  militer  de  curte  et  pomariis  circa  faramannos  condicione  servata, 
id  est  ut  medietatem  Romani  estiment  praesumendam.  »  Loi  des  Burgundes, 
^H.LIV.  |3. 

(5)  c  Tempore  quo  populus  noster  mancipiorum  tertiam  et  duas  terrarura 
partes  accepit.  »  Lot  des  Burgundes,  titre  LIV,  2  1.  Cf.  Binding,  Geschichte 
des  Burgundisch-romsinischen^KQnigreichSf  p.  U^tsuiv. 


22  LIVRE  I".  CHAPITRE  IL  |  3. 

bâtiments  et  de  l'enclos ,  moitié  des  friches  et  des  bois , 
moitié  d'abord,  et  deux  tiers  ensuite,  des  terres  arables 
comprises  dans  l'exploitation.  D'Arioviste  aux  Burgundes, 
il  s'est  écoulé  cinq  siècles.  Dans  cet  intervalle ,  il  s'est 
produit  une  grande  modification  dans  les  doctrines  sur  la 
valeur  du  lien  que  la  jouissance  plus  ou  moins  prolongée 
du  sol  produit  entre  Thomme  et  la  terre  qu'il  cultive  et 
dont  il  récolte  les  produits.  Les  possesseurs  romains  étaient 
considérés  comme  ayant  sur  la  terre  un  droit  dont  au  mo- 
ment de  l'établissement  des  Burgundes ,  au  cinquième  siè- 
cle de  notre  ère ,  on  ne  crut  pas  possible  de  les  dépouil- 
ler entièrement.  Quand,  au  contraire,  Arioviste  prit  aux 
Sequani  un  tiers  de  leur  territoire,  quand  les  Sequani^  avec 
l'alliance  d' Arioviste,  s'emparèrent  d'une  grande  partie  des 
champs  des  Aedui,  ne  leur  laissant  guère  que  leurs  vil- 
les (1) ,  l'opération  doit  s'entendre  en  ce  sens  qu'une  vaste 
région,  sans  exception  ni  réserve  (2),  fut  détachée  du  terri- 
toire des  Sequani  et  du  territoire  des  Aeduiy  que  les  déten- 
teurs gaulois  furent  chassés  de  cette  région  et  qu'elle  fut 
occupée  par  de  nouveaux  habitants  et  par  de  nouveaux 
cultivateurs  en  même  temps  qu'elle  changea  de  souverain. 

§  3.  —  i'ager  publions  romains  et  les  lois  agraires. 

A  Rome,  le  terrain  conquis  sur  l'ennemi  était  propriété 
publique.  Telle  est  l'origine  de  Vager  publicus,  qui,  après 
la  conquête  de  l'Italie  par  les  Romains,  comprit  une  grande 
partie  du  sol  de  la  péninsule  et  qui  s'étendit  ensuite  hors 
d'Italie  dans  de  vastes  territoires.  On  ne  pouvait  sans  une 
loi,  sous  la  république  romaine,  détacher  de  Y ager  publions, 
à  titre  définitif,  une  portion  quelconque  du  sol  pour  en  at- 
tribuer à  un  Romain  la  propriété ,  ce  que  la  loi  romaine 


(1)  c  Compulsos  in  oppida,  multatos  agris.  »  César,  De  bello  gMico, 
VII,  54.  i  4. 

(2)  «  Tertiam  partem  agri  sequani...  occupavisset,  et  nunc  de  altéra  parte 
tertia  Sequanos  decedere  juberet.  Ibidem,  I>  31,  |  10.  » 


SOUVERAINETÉ  ET  PROPRIÉTÉ  FONCIÈRE.  23 

appelait  le  dominium  ex  jure  Quiritium  (1).  En  règle  gé- 
nérale, Vager  pviblicus  n'était  l'objet  que  d'une  jouissance 
précaire,  toujours  révocable  et  grevée  d'une  redevance 
annuelle  ;  cette  jouissance  s'appelait  possessio  par  opposition 
au  dominium  qui  était  la  pleine  propriété.  La  possessio  de 
Vager  publicus  était,  dans  les  premiers  siècles  de  la  répu- 
blique romaine,  une  sorte  de  monopole  que  se  réservaient 
les  patriciens  et  les  familles  nobles  élevés  par  les  fonc- 
tions publiques  au  niveau  du  patriciat.  Ce  monopole  était 
un  fait  inévitable  économiquement  aussi  bien  que  poli- 
tiquement :  seuls,  les  patriciens  et  les  nobles  avaient  à 
leur  disposition ,  soit  en  esclaves ,  soit  en  bestiaux ,  soit 
en  argent,  les  capitaux  nécessaires  pour  mettre  en  valeur 
les  vastes  domaines  de  l'Etat  romain. 

Avec  le  temps  la  possessio  de  Vager  publicus  romain,  per- 
sistant héréditairement  dans  les  mêmes  mains ,  se  rappro- 
cha peu  à  peu  du  dominium ^  ou,  si  l'on  veut  parler 
français,  de  la  propriété.  Mais  les  lois  agraires  dont  la 
première  fut  présentée  par  le  consul  Cassius,  l'an  486 
avant  notre  ère ,  et  dont  la  plus  célèbre  est  la  loi  Sempro- 
nia  présentée  par  Ti.  Gracchus ,  l'an  133  avant  notre  ère, 
furent  une  protestation  de  l'ancien  droit  et  du  sentiment 
populaire  contre  le  droit  nouveau  que  l'aristocratie  avait 
la  prétention  d'introduire  à  son  profit.  Les  dernières  lois 
agraires  furent  votées  en  59  pendant  le  consulat  de  César, 
grâce  à  la  puissante  influence  acquise  par  le  futur  dictateur 
qui,  pendant  les  années  suivantes,  se  créa  par  la  conquête 
de  la  Gaule  les  titres  définitifs  à  la  domination  du  monde 
romain.  César  était  le  chef  du  parti  démocratique  et  conti- 
nuait à  chercher  la  faveur  populaire  par  les  moyens  qu'a- 
vaient employés  les  agitateurs  les  plus  anciens.  Les  por- 
tions de  Vager  publicus  italique,  détenues  depuis  longtemps 
par  la  noblesse  romaine ,  étaient  devenues  entre  les  mains 


(OHommsen  et  Marquardt,  Uàndbuch  der  rômiechen  Alterthûmer,  2*  éd., 
t.  ÏV,  p.  94  et  suiv.;  t.  V,  p.  I5i  et  suiv.  Cf.  t.  III,  p.  731  et  Buiy. 


24  LIVRE  !•'.  CHAPITRE  II.  g  3. 

de  cette  noblesse  une  sorte  de  propriété,  à  laquelle  pendant 
le  premier  siècle  avant  notre  ère  on  n'osait  plus  opposer 
le  droit  primitif  de  l'Etat,  mais  TEtat  empêchait  cette 
quasi-propriété  de  s'étendre  à  des  territoires  nouveaux  et 
voilà  comment  César  ât  partager  Vager  publions  de  Cam- 
panie  (1),  qui  remontait  à  la  seconde  guerre  punique  et  qui 
n'avait  ainsi  qu'un  siècle  et  demi  de  date. 

Les  lois  agraires  (3)  dont  César  obtint  le  vote  en  59  étaient 
en  quelque  sorte  une  seconde  édition  d'une  loi  déjà  présen- 
tée par  son  parti  sous  le  consulat  de  Cicéron,  en  63,  quatre 
ans  plus  tôt  et  qu'avait  fait  échouer  l'éloquence  du  grand 
orateur  romain  Quand  la  loi  agraire  de  63  fut  présentée , 
Vager  publicus  de  Campanie  était  partagé  entre  des  locatai- 
res qui  seraient  arrivés  peu  à  peu  à  acquérir  les  mêmes 
droits  que  les  noblessur  l'ancien  ager  publicus  italique,  sans  la 
mesure  qui  les  remplaça  parles  protégés  de  Jules  César  (3). 
Cicéron,  dans  un  de  ses  discours  contre  le  projet  de  loi  de 
l'année  63,  cherche  à  exciter  la  pitié  en  faveur  de  ces  bra- 
ves gens  qui  cultivent  et  possèdent  tout  Y  ager  campanus^ 
qui  y  sont  nés,  qui  y  ont  été  élevés  et  que  la  colonisation 
expulsera  sans  leur  laisser  d'asile  (4). 

Ces  considérations  n'arrêtèrent  point  le  parti  démocrati- 
que ni  son  chef  tout-puissant ,  et  quand  César  arriva  dans 
la  Gaule  barbare  pour  en  faire  la  conquête,  l'exécution  de 


(1)  Sur  rhistoire  de  Vager  publicus  romain  et  des  lois  agraires  jusqu'au 
premier  consulat  de  César ,  voy.  Mommsen  et  Marquardt ,  Handbuch  der 
rômischen  Alterthûmer,  t.  IV,  2*  éd.,  p.  96-114. 

{2,  Ces  lois  paraissent  avoir  été  au  nombre  do  deux  ;  Tune  ayant  pour  ob- 
jet spécial  rétablissement  d'une  colonie  romaine  à  Capoue,  Tautre  con- 
tenant un  règlement  général  sur  la  fondation  des  colonies.  Celle-ci  est  ap- 
pelée, du  nom  de  ses  rédacteurs  :  Lex  Mamilia,  Roscia,  Peducea,  AJliena, 
Fabia. 

(3)  Voyez  les  textes  réunis  par  Mommsen,  Corpus  inêcriptionum  lattna- 
rum,  t.  X,  p.  366,  368. 

(4)  «  Sic  enim  dico  :  Si  Campanus  ager  dividatur,  exturbari  et  expelli  pie- 
bem  ex  agris,  non  constitui  et  collocari.  Totus  enim  ager  Campanus  coli- 
tur  et  possidetur  a  plebe  et  a  plebe  optima  et  modestissima...  Atqne  illi 
miser!  nati  in  illis  agris  et  aducati...  quo  se  subito  confetant.iioii  habent.  ■ 
De  lege  agraria  çratio  secunda,  c.  XXXI>  {84. 


SOUVERAINETi  ET  PROPRIÉTÉ  FONCIËRB.  tt 

ses  lois  agraires  commençait ,  au  grand  désespoir  de  la  no- 
blesse romaine  (1).  Pendant  ses  campagnes  en  Graule,  Ce* 
sar  n'oubliait  pas  Rome  ;  ses  Commentaires  en  offrent  plu- 
sieurs traces  et  il  y  a  un  passage  où  ses  préoccupations 
agraires  se  sont  fait  jour  clairement.  Ce  passage  fait  partie 
de  la  description  des  mœurs  des  Germains.  «  Personne 
parmi  eux ,  »  dit  César ,  «  n'a  une  quantité  de  champ  dé- 
terminé ou  des  limites  qui  lui  appartiennent  en  propre , 
mais  chaque  année,  les  magistrats  et  les  princes  attribuent 
aux  familles  et  aux  parents  par  les  femmes,  qui  se  sont  as- 
sociés entre  eux,  la  quantité  de  champs  qu'ils  jugent  à  pro- 
pos, dans  l'endroit  qui  leur  parait  convenable,  et  Tannée  sui- 
vante ils  les  obligent  à  se  rendre  ailleurs  (2).  »  Âpres  avoir 
ainsi  décrit  des  mœurs  si  différentes  de  celles  de  Rome, 
César  se  demande  la  cause  qui  les  a  fait  établir,  et  mettant 
dans  la  bouche  des  Germains  ses  propres  doctrines,  il  leur 
fait  dire  que  le  but  de  ces  institutions  est  d'empêcher  qu'il 
ne  se  crée  en  Germanie  de  vastes  domaines  et  que  les  gens 
puissants  ne  chassent  les  petits  de  leurs  possessions.  Ne 
latos  fines  parare  studeant  potentioresque  humiliores  passes^ 
Hùnibus  eœpellanL  Latos  fines ^  ce  sont  déjà  ces  latifundia  Aoni 
parlent  les  moralistes  du  temps  de  l'empire  romain  :  lati^ 
fundia  perdidere  Italiam  (3).  Quant  à  la  spoliation  des  pau- 
vres par  les  riches ,  c'est  un  des  motifs  par  lesquels  on 
justifiait  la  loi  agraire  de  Ti.  Gracchus.  La  loi  Licinia,  en 

367  av.  J.-C. ,  avait  fixé  à  cinq  cents  jugera ,  c'est-à-dire 

* 

à  cent  vingt-six  hectares,  la  portion  de  Vager  publieus 
que  pouvait  détenir ,  à  titre  de  possessio ,  un  citoyen  ro- 
main. Cette  loi  fut  quelque  temps  exécutée ,  et  l'on  voyait 
souvent,  à  côté  du  riche  possesseur  de  cinq  cents  jugera  y 
des  voisins  pauvres  jouissant  chacun  d'une  portion  beau- 
coup moins  étendue.  Mais  peu  à  peu  ces  petites  fermes 
passèrent  malgré  la  loi  entre  les  mains  de  riches  voisins  qui 

(1)  Cicéron,  Ad  Atticuniy  livre  II,  ép.  xvîii,  {  2, 

(2)  De  beUo  gallico,  VI,  Î2. 

(3)  Pline,  Uvrs  XVIII»  1  35, 


1 


36  LIVRE  I-   CHAPITRB  H.  {  3. 

les  achetèrent  d*abord  par  personnes  interposées,  ensuite 
ostensiblement.  Telle  fut  la  cause  de  la  loi  agraire  de  Ti. 
Gracchus  en  133  avant  J.-C.  Nous  l'apprenons  par  Plutar- 
que  (1)  et  surtout  par  Salluste,  contemporain,  comme  on 
le  sait ,  de  Jules  César.  Salluste  raconte  qu'après  la  chute 
de  Carthage  en  146  avant  J.-C.  ,  la  noblesse  romaine 
triomphante  abusa  de  son  pouvoir.  Le  peuple  était  accablé 
par  le  service  militaire  et  par  la  pauvreté.  Les  généraux 
s'emparaient  du  butin  fait  à  la  guerre  et  le  partageaient 
avec  quelques  amis  ;  pendant  ce  temps ,  les  pères  et  les 
jeunes  enfants  des  soldats  étaient  chassés  de  leurs  maisons 
par  des  voisins  plus  puissants  qu'eux  :  uii  quisque  poten- 
tiori  eonfinû  erat  sedibus  pellebatur  (2) ,  ce  sont  presque  les 
expressions  dont  César  se  sert  dans  le  passage  des  Com- 
mentaires cité  plus  haut.  Plus  tard ,  Horace ,  un  des  fami- 
liers d'Auguste,  c'est-à-dire  du  continuateur  de  César, 
exprime  en  vers  la  même  idée  ;  il  peint  le  pauvre  expulsé 
par  un  riche  voisin  ;  «  on  voit  partir  la  femme  et  le  mari  ; 
»  ils  portent  dans  leur  sein  les  dieux  paternels  et  des  en- 
»  fiants  en  haillons  (3).  » 

César,  dans  sa  description  des  mœurs  des  Gaulois,  s'at- 
tache à  mettre  en  relief  les  différences  entre  cette  nation 
barbare  et  les  usages  romains.  Il  est  naturel  que  trouvant 
chez  tous  les  peuples  de  la  Gaule  cet  ager^  publicus  qui ,  à 
Rome ,  occupait  si  vivement  le  parti  démocratique ,  il  ait 
cru  inutile  d'en  parler.  En  quoi  renonciation  d'un  fait  aussi 
banal  pouvait-il  piquer  la  curiosité  de  ses  lecteurs  ? 

Pour  bien  comprendre  ce  qu'était  en  Gaule  la  propriété 


(1)  Vie  de  Tib.  Grecchue,  ch.  VIII. 

m  Jngiirtlia,  41. 

(S)  Qnid  qnod  osqiie  proximos 

RevelUs  agri  tenninos  et  ultra 

Limites  clientium. 

Salis  aTams  ?  Pellitnr  patemos. 

In  sinu  ferons  deos. 

Et  nxor  et  yir  sordidosqne  natos. 

Horace,  Odee,  U,  18,  vers  23-28. 


SOUVERAINETÉ  ET  PROPRIÉTÉ  FONCIÈRE.  H 

foncière  au  temps  de  la  conquête ,  il  faut  commencer  par 
se  rendre  compte  de  Torganisation  de  la  société  politique 
dans  le  même  pays ,  à  la  même  date.  Les  lois  qui  règlent 
la  condition  de  la  terre  sont  toujours  une  conséquence  des 
lois  qui  fixent  la  condition  des  hommes. 


CHAPITRE  III. 


LA  GAULE  BARBARE  AU  MOMENT  DE  LA  CONQUÊTE  PAR  CÉSAR. 
INÉGALITÉ  DES  PEUPLES  ET  DES  HOMMES. 


Sommaire  : 

Sbgtiom  I.  Les  PEUPLES ,  distingués  en  principes  et  en  clientes.  —  Sec- 
non  II.  Les  HOMMES  :  A.  Rois  ;  —  B.  Magistrats  et  principes  ;  —  C.  Sé- 
nats ;  —  D.  Equités  ;  —  E.  Ch>nles  ;  ^  F.  Comparaison  avec  la  Féodalité 
française;  —  Q.  Caractères  distinctifs  de  la  Féodalité  celtique. 


Section  première. 
Les  PEUPLES,  distingués  en  principes  et  en  clientes. 

Dans  la  Gaule  indépendante ,  à  rarrivée  de  César ,  Tan 
58  avant  notre  ère ,  nous  ne  comprendrons  pas  TAquitaine , 
qui  appartient  ethnographiquement  à  TEspagne  et  qui  n'a 
fait  partie  de  la  Gaule  que  lorsque  celle-ci  est  devenue  une 
circonscription  administrative  de  TEtat  romain.  Sans  doute 
Fauteur  des  Commentaires  nous  dit  que  TAquitaine  est  en 
Gaule  ;  mais ,  en  s*exprimant  ainsi ,  il  n*énonce  pas  plus 
un  fait  politique  qu*un  fait  ethnographique.  Il  parle  en 
conquérant.  Dans  sa  bouche,  le  mot  Gaule  exprime  déjà  une 
conception  administrative  :  de  cette  conception,  due  proba- 
blement à  son  génie ,  il  donne  connaissance  à  ses  compa- 
triotes pour  leur  apprendre  comment  ils  devront  gou- 
verner le  pays  vaincu. 

Quand  César  commence  au  nord  des  Alpes  sa  première 


INÉGALITÉ  DE8  PEUPLES  EN  GAULE.  29 

campagne ,  la  Gaule  indépendante  est  divisée  en  deux  par- 
ties qui,  chacune,  forment  un  groupe  politique  séparé  :  la 
Celtique  et  la  Belgique.  Dans  la  Celtique  sont  concentrés 
ceux  des  Gaulois  encore  libres  qui  ont  les  premiers  passé 
le  Rhin,  peut-être  vers  Tan  500  avant  notre  ère.  La  Bel- 
gique est  habitée  par  d'autres  Gaulois  qui  plus  récemment, 
peut-être  vers  Tannée  250,  ont  été,  par  les  Germains, 
chassés  de  la  région  située  à  Test  du  Rhin,  leur  séjour 
primitif.  Par  une  exception  due  à  un  phénomène  géogra- 
phique, les  Helvetii,  quoique  tout  nouveaux  venus,  parais- 
sent compris  dans  la  Celtique  dont  ils  sont  voisins ,  sans 
communication  immédiate  avec  les  Belges.  Des  nécessités 
topographiques  l'emportent  ici  sur  Fethnographie. 

Dans  chacun  des  deux  groupes  politiques  entre  lesquels 
la  Gaule  se  divise ,  il  y  a  un  peuple  qui  a  exercé  la  supré- 
matie sur  les  autres  peuples  du  même  groupe  pendant 
Tâge  précédent ,  et  qui  prétend  la  conserver.  Ce  peuple , 
en  Celtique,  ce  sont  les  Arverni;  en  Belgique,  ce  sont  les 
Suessiones,  Mais  les  Arverni  et  les  Suessiones  ont  des  enne- 
mis qui  se  placent  sous  la  direction  d*un  ou  de  plusieurs 
peuples  rivaux.  Ceux-ci  demandent  l'appui  des  Romains, 
qui  en  profitent  pour  imposer  leur  domination  à  tout  le 
pays  en  ne  laissant  à  leurs  protégés  qu'une  indépendance 
nominale  avec  le  titre  honorifique  d'alliés ,  foederati  (1). 


(1)  Les  Aedui  et  les  Rémi  reçurent  le  titre  de  foederati.  Us  avaient  été , 
les  uns  en  Celtique,  les  autres  en  Belgique ,  chefs  du  parti  romain  pendant 
les  campagnes  de  César.  Le  même  honneur  fut  conféré  aux  Lingone$  et 
anx  Camutes.  Les  Lingonea  dominaient  sur  un  territoire  très  vaste ,  puis- 
que les  Tricasses  (Troyos),  et  les  Caluellauni  (Chàlons-sur-Marno) ,  parais- 
sent avoir  été  leurs  sujets  et  que,  par  conséquent,  le  pays  qui  s'étend  de 
Dijon  à  Chàlons-sur-M^c  était  soumis  à  leur  autorité.  Sans  avoir  un  rôle 
aussi  éclatant  que  les  Aedui  ou  les  Rémi,  ils  furent  du  nombre  dos  plus 
fidèles  alliés  de  César.  Dés  l'année  de*  sa  première  campagne,  en  58,  ils  lui 
fournissent  du  froment  {De  bello  gallicOy  I,  40)  ;  en  52,  ils  sont  un  des  trois 
peuples  (ftemi,  Lingones,  Treveri)  qui  refusent  de  prendre  part  à  l'insur- 
rection générale  de  la  Gaule  iVII,  63);  en  51,  leurs  cavaliers  sont  mentionnés 
parmi  les  cavaliers  gaulois  qui  donnent  leur  concours  aux  opérations  mili- 
taires des  Romains  (VIII,  11). 

Quant  aux  Carnutes^  la  concession  du  titre  de  foederati  qu'ils  obtinrent 


30  LIVRE  I".  CHAPITRE  III.  SECtION  1-. 

L'histoire  de  la  Gaule ,  à  l'époque  de  la  conquête ,  pré- 
sente une  analogie  curieuse  avec  celle  de  TAUemagne  pen- 
dant les  derniers  siècles.  En  Allemagne  dominait  la  maison 
d'Autriche ,  comme  en  Celtique  les  Àrverni  et  en  Belgique 
les  Suessiones,  La  politique  française  consista  à  soutenir  les 
ennemis  de  cette  maison,  comme  la  politique  romaine  à 
soutenir  ceux  des  Arverni  et  des  Suessiones;  mais,  entre  les 
mains  inexpérimentées  des  hommes  d*Etat  français,  Tarme 
qui,  aux  mains  des  Romains,  était  devenue  Tinstrument 
de  la  conquête,  a  créé  dans  le  vieil  empire  germanique 
une  puissance  beaucoup  plus  redoutable  à  la  France  que 
n'avait  jamais  été  celle  des  princes  autrichiens.  Les  rois 
de  Prusse,  chefs  en  Allemagne  du  parti  protestant  que  la 
France  soutenait  jadis  contre  TAutriche,  n'ont  pas  marché 
jusqu'au  bout  sur  la  trace  des  magistrats  qui,  par  haine 
pour  les  Arverni  et  les  Suessiones  ^  ont  jeté  les  Aeduiy  les 
Rémi  et  leurs  clients  dans  les  bras  des  Romains. 

La  Celtique  et  la  Belgique,  au  moment  où  César  en  fait 
la  conquête,  sont  divisées  en  un  certain  nombre  d'Etats 
que  César  appelle  civitates.  Ces  Etats  ne  sont  point  égaux 
entre  eux.  Certains ,  plus  importants ,  ont  les  autres  dans 
leur  clientèle.  Toutefois ,  les  Etats  clients  conservent  leur 
autonomie;  ils  ont  leur  armée  distincte  de  celle  de  l'Etat 
dominant.  Ils  sont  en  quelque  sorte  les  membres  d'une 
ligue  dont  l'Etat  dominant  est  chef.  Il  ne  faut  pas  confon- 
dre les  Etats  clients  avec  les  peuples  clients  qui  ont  cessé 
de  former  un  Etat  séparé  et  dont  l'armée  est  fondue  dans 
celle  de  l'Etat  sous  l'autorité  ou  imperium  duquel  ils  se  sont 
placés.  Ces  clients  de  second  ordre  ou  sujets  ne  reçoivent 
pas  dans  les  Commentaires  de  César  le  titre  d'Etat,  civitas^ 
donné  par  l'auteur  aux  clients  de  premier  ordre  ou  alliés. 

En  Celtique ,  l'Etat  qui ,  au  temps  de  César ,  a  la  clien- 
tèle la  plus  considérable  est  celui  des  Aedui  qui ,  en  con- 

peut  avoir  été  la  conséquence  de  ce  que  pour  être  agréables  aux  Romains, 
ils  s'étaient  placés  dans  la  clientèle  des  Rémi  (De  hello  gallico  VI,  4).  On 
étendit  à  eux  la  dignité  de  foederati  accordée  aux  Rémi, 


INÉGALITÉ  DES  PEUPLES  EN  GAULE.  31 

séquence,  possède  sur  la  Celtique  ce  que  César  appelle  le 
principal  (1).  L'Etat  des  Aedui  est  rival  des  Arvemi  que  les 
Romains  ont  vaincus  et  contre  lesquels  les  Romains  le 
protègent.  Des  Etats  de  la  Celtique  qui  s'étaient  placés 
dans  la  clientèle  des  Aedui,  nous  connaissons  les  Bitvr' 
rige$  (2) ,  les  Senones  (3) ,  les  Parisii  (4) ,  les  Boii  (5) ,  qui , 
dans  la  guerre  entreprise  par  Vercingétorix ,  fournirent 
chacun  un  contingent  séparé ,  et  reçurent  directement  les 
ordres  du  conseil  des  principes  de  la  Gaule.  On  demanda 
aux  Bituriges  12,000  hommes,  autant  aux  Senones^  10,000 
aux  Parisii ,  2,000  aux  Boii  ;  aussi  ces  quatre  peuples  ob- 
tiennent-ils chez  César  la  qualification  de  civiias. 

Mais,  en  outre  des  Etats  clients  dont  nous  connaissons 
quatre,  les  Aedui  avaient  d  autres  clients  qui  étaient  en  quel- 
que sorte  des  sujets  dont  le  contingent  militaire  se  confon- 


(1)  César,  s* adressant  au  roi  germain  Arioviste,  prétend  que  les  Aedui 
ont  obtenu  «  oroni  tempore  totius  Galiiae  principatum  »  (De  bello  gallicOj 
l,  43, 1  7).  C'est  une  exagération  contredite  par  les  faits  puisque  les  Arvemi 
avaient  eu  ce  principal.  Dans  les  idées  reçues  en  Gaule  à  cette  époque ,  il 
est  nécessaire  qu*un  peuple  ait  le  principat.  Chez  les  Aedui^  un  parti  sou- 
tient qoe  si  les  Aedut  ne  peuvent  obtenir  le  principat  de  la  Qaule ,  prin- 
cipatum Galiiae ,  il  faut  accepter  le  principat  des  Arvernes,  car  la  domina- 
tion des  Gaulois  vaut  mieux  que  celle  des  Romains  (De  bello  gallico , 
1, 17, 1  3.  Remarquons  bien  que,  dans  ces  passages,  Gaule  et  gaulois  veulent 
dire  Celtique  et  Celte,  à  l'exclusion  de  la  Belgique). 

(2)  «  Bituriges  ad  Acduos  quorum  erant  in  fide  legatos  mittunt.  »  De  bello 
gallico,  VII,  5,  {  2.  Il  s'agit  vraisemblablement  ici  des  Bituriges  Cubi,  dont 
la  ville  principale  est  Avaricum.  César  ne  parle  pas,  seroble-t-il,  des  Bitu~ 
rigesVivisci  qui,  sous  Tempire  romain,  ont  Bordeaux  pour  capitale.  Peut- 
être  cependant  le  mot  Bituriges  désigne- t-il  à  la  fois  chez  César  les  Bitu- 
riges Vivisci  et  les  Bituriges  Cubi, 

(3)  «  Senones...  Caesarem...  adeunt  per  Aeduos  quorum  antiquitus  erat 
in  fide  civitas.  »  {De  bello  gallico,  VI,  4,  |  1-3.) 

(4)  c  Concilium  Lutetiam  Parisiorum  transfert.  Confines  erant  hi  Senoni- 
Ims  civitatcmque  patrum  memoria  conjunxerat.  »  (De  bello  gallico,  VI,  3, 2  5.) 

(5)  «  Boios  petentibus  Aeduis  quod  egrcgia  virtute  erant  cogniti  ut  in 
finibus  suis  coUocaront  concessit  :  quibus  illi  agros  dederunt  quosque  pos- 
tca  in  parem  juris  libertatisque  condicioncm  atque  ipsi  erant  receperunt.  » 
De  bello  gallico,  I,  28.  Les  Boii  payaient  tribut,  slipendium,  aux  Aedui, 
Qaand  Vercingétorix  attaqua  Gorgobina,  oppidum  des  Doti.(quos  ibi  helve*  . 
tico  proelio  victos  Caesar  coUocaverat,  Aeduisque  attribuorat),  César  vint 

à  leur  secours,  «  ne  stipendiariis  Aeduorum  expugnatis  cuncta  Gallia 
deficeret  »  (De  bello  gallico,  VII,  10,  {  1.) 


32  LIVRE  I".  CHAPITRE  111.  SECTION  1". 

dait  avec  le  leur.  Ces  derniers  ne  reçurent  pas  d*ordres  directs 
quand  le  conseil  des  principes  de  la  Gaule ,  conformément 
aux  instructions  de  Vercingétorix,  prescrivit  la  levée  d'une 
armée  pour  secourir  Alesia.  C'étaient  les  Segusiavi^  les  Am- 
bivareti,  les  Aulerci  Brannovices  et  les  Brannovii.  L'effectif 
imposé  à  ces  quatre  peuples  se  confondait  avec  celui  des 
Aedui  fixé  en  bloc  à  35,000  hommes.  Au  début  de  la  guerre, 
le  plus  important  de  ces  clients  de  second  ordre  des  Aeèuiy 
le  peuple  des  Segusiavi^  avait  été  compris  par  Vercingé- 
torix, dans  Tordre  donné  aux  Aedui,  de  fournir  10,000  fan- 
tassins pour  attaquer  les  Allobroges  (1).  Ces  fantassins,  tant 
Segusiavi  qu' Aedui  ^  avaient  été  placés  sous  le  comman- 
dement d'un  chef  appartenant  à  la  tribu  dominante  des 
Aedui  j  malgré  l'antipathie  naturelle  de  Vercingétorix  pour 
ce  peuple  rival  du  sien  (2). 

On  sait  que  les  Aedui  étaient ,  dès  le  second  siècle  avant 
notre  ère,  les  alliés  du  peuple  romain  (3).  Hs  restèrent  les 
alliés  de  César  pendant  toute  la  guerre  des  Gaules,  sauf 
durant  la  grande  insurrection  de  l'année  52.  Sous  l'empire 
romain,  ils  portent  encore  le  titre  d'alliés,  foederati^ 
donné  alors  en  Gaule  à  trois  autres  peuples  seulement  : 
les  Remit  les  Linganes,  les  Carnutes, 

Les  Arverni ,  rivaux  des  Aedui ,  apparaissent  dans  l'his- 
toire comme  ennemis  du  peuple  romain.  C'est  en  l'année 
121  avant  notre  ère.  Leur  clientèle  atteignait  à  cette  date  : 
au  sud ,  Narbonne ,  les  Pyrénées  et  le  territoire  de  Mar- 
seille; à  l'ouest,  l'Océan;  à  l'est,  le  Rhin  (4);  les  Allô- 


(1)  «  Âediiis  Segusiavisque...  decem  millia  peditum  imperat.  >  (De  bello 
gallico,  VII,  64,  {  4.) 

(2)  «  His  praofecit  fratrem  Eporedorigis.  »  {De  bello  gallicOf  VII ,  64,  {  5.) 

(3)  «  Quodque  Âeduorum  agros  socionim  populi  romani  vastassent.  • 
Titc-Live,  Epitome  du  livre  LXl,  Les  événements  dont  il  s'agit  dans  ce 
texte  se  rapportent  à  Tannée  122  avant  notre  ère.  Mommsen,  Rœmische 
Geschichte,  6*  édit.,  t.  II,  p.  162.  Cf.  Desjardins  ,  Géographie  historique  et 
administrative  de  la  Gaule  romaine,  t.  II,  p.  274. 

(4)  «  AUTttvav  8è  Ti^v  àpx^v  ol  'Apovepvoi  xal  ii^xP^  Nap6wvoc  xal  tûv  6pc0v  tl)c 
MaaffoXiutiSoc,  ixpàTouv  8è  xal  to^v  (iéxpt  OupiQvT);  iOvûv  xal  fiixp^  'OxcavoO  xai 
*P^ov.  »  Strabon,  liv.  IV,  ch.  ii,  {  3,  édit.  Didot,  p.  159,  1.  9-12.  Mommsen, 


INÉGALITÉ  DES  PEUPLES  EN  GAULE.  33 

broges,  alors,  devaient  être  leurs  clients  (1).  Au  temps  de 
César,  la  clientèle  des  Arverni  est  bien  réduite  ;  leurs 
clients  méridionaux  sont  tombés  sous  la  domination  romaine 
et  forment  la  Province  ;  les  peuples  du  nord ,  qui  avaient 
été  placés  originairement  dans  la  clientèle  des  Awerni  en 
conservant  leur  indépendance ,  et  plutôt  comme  alliés  que 
comme  sujets,  paraissent  avoir  brisé  en  grande  partie  ce 
lien. 

On  vit  même  les  Sequani^  un  des  principaux  clients 
septentrionaux  des  Ai^emi,  supplanter  les  Arverni  comme 
chefs  du  parti  opposé  aux  Aedui  pendant  les  premières  an- 
nées du  séjour  de  César  en  Gaule  (2).  Plusieurs  des  peuples 
ennemis  des  Aedui,  après  avoir  été  successivement  clients 
des  Arverni  et  des  Sequani ,  voulant  s'assurer  Tamitié  des 
Romains,  demandèrent  Tappui  d'un  peuple  allié  de  Rome, 
et  se  placèrent  dans  la  clientèle  des  Rémi  (3),  peuple  belge, 
mais  immédiatement  voisin  de  la  Celtique  ;  de  ce  nombre 
furent  les  Carnutes  (4). 

Dès  les  premiers  succès  de  César,  il  ne  resta  guère  aux 
Arverni  d'autres  clients  que  leurs  sujets ,  c'est-à-dire  les 
peuples  dont  le  contingent  militaire  se  confondait  avec  le 


Rœmische  Geschichte^  6*  édit.,  t.  II,  p.  162.  Desjardins,  Géographie  histori- 
que et  administrative  de  la  Gaule  romaine,  t.  II,  p.  217,  274.  Los  Sequani, 
clients  des  Arverni,  atteignaient  le  Rhin. 

(t)  «  AUobroges  deinde  et  Arverni  cum  adversus  eos  similes  Aeduorum 
querelae,  opem  et  auxilium  nostrum  flagitarent.  »  Florus,  livre  I,  ch.  xxxvi, 
ou  liv.  III,  ch.  II.  Edition  d'Otto  lahn,  p.  159,  1.  21-23.  Nous  pouvons  en- 
core citer  les  Ruleni  (Oello  supcratos  esse  Arvernos  et  Kutcnos)  comme 
clients  des  Arverni,  au  deuxième  siècle  avant  J.-C.  (De  bello  gallico,  î,  45, 
i  2),  et  les  Carnutes  {De  bello  gallico,  VI,  4,  §  2  ;  12,  |  7). 

(2}  «  Galliac  totius  factioncs  esse  duas,  Tiarum  alterius  principatum  tenere 
Aeduos,  alterius  Arvernos.  Hi,  cum  tantopcre  de  potost.itu  intor  se  multos 
annos  contcndercnt,  factum  esse  uti  ab  ArvernisÔcquauisqucGenuani  mor- 
cedc  arcesscrontur.  »  (De  bello  g  illico,  1 ,  31 ,  §  3-4.)  «  Sequani  principatum 
diiiiiscrant ,  in  corum  locum  Rcmi  successcrant.  »  (De  bello  gallico,  VI, 
12,  l  6,  7.) 

(3)  «  li,  qui  proptcr  veteres  inimicitias  nullo  modo  cum  Acduis  conjungi 
potorant,  se  Remis  In  clientelam  dicabaut.  »  (De  bello  gallico,  VI,  12,  §  7.) 

(4)  •  £odem  Carnutes  legatos  obsidesquo  mittunt,  usi  deprecatoribus  Re- 
mis, quorum  erant  in  clientela.  »  (De  bello  gallico,  VI,  4,  g  2.) 

3 


34  LIVRE  !•'.  CHAPITRE  III.  SECTION  1-. 

leur  et  sur  lesquels  ils  exerçaient  une  autorité  appelée  par 
César  imperium.  Quand  le  conseil  des  principes  de  la  Gaule 
convoqua  Tannée  qui  devait  inutilement  tenter  de  secourir 
Alésia,  il  prescrivit  une  levée  de  35,000  hommes  chez  les 
Àrvemi ,  y  compris  les  Eleuteti ,  les  Cadurci ,  les  Gabali  et 
les  Vellavi  (1).  Cependant  les  Cadurci  semblent  avoir  été , 
dans  une  certaine  mesure ,  indépendants ,  puisque  César 
leur  donne  dans  un  endroit  le  titre  de  civitas  (2),  que  dans 
un  autre  endroit  nous  voyons  marcher,  distinct  des  troupes 
arvernes,  un  corps  de  Buteni  et  de  Cadurci  (3). 

Les  Arvemi,  après  la  conquête  romaine ,  conservèrent 
une  situation  privilégiée,  l'exemption  d'impôts,  une  admi- 
nistration et  une  juridiction  locale  indépendante  avec  le 
titre  de  libres  liberi,  mais  ils  perdirent  leur  suprématie 
sur  les  Cadurci  y  les  Gabali  et  les  Vellavi  qui  devinrent 
autant  de  cités  immédiatement  subordonnées  aux  magis- 
trats romains.  Les  Eleuteti  seuls  semblent  être  restés  soumis 
aux  Arverni  sous  la  domination  des  Romains. 

Dans  la  Gaule  Belgique ,  les  Suessiones  ont  eu ,  avant 
l'arrivée  de  César,  une  situation  dominante  analogue  à  celle 
des  Arvemi  dans  la  Celtique.  Leur  roi  Divitiacus ,  quelque 
temps  avant  l'arrivée  de  César ,  a  étendu  son  autorité  sur 
une  grande  partie  des  régions  voisines  du  pays  des  Sues^ 
siones  et  même  sur  la  Grande-Bretagne.  En  57,  Galba,  suc- 
cesseur de  Divitiacus ,  est  général  en  chef  de  l'armée  des 
Belges  coalisés  contre  les  Romains  (4).  Jusqu'à  cette  date, 
les  Rémi  ont  vécu  sous  la  domination  des  Suessiones  ;  ils  ont 
été  soumis  au  même  droit,  aux  mêmes  lois,  ont  obéi  au  même 
commandement,  et  au  même  magistrat  qui  est  le  roi  des  Sues- 


(1)  a  Parem  numerum  Arvemis ,  adjunctis  Eleutetis  ,  Gadurcis ,  Qaballs  « 
Vellavis  qui  sub  imporio  Arvemorum  esse  consuerunt.  »  {De  bello  gallico, 
VII,  75,  §  2.) 

(2)  0  Celeriter  sibi  Benones ,  Parisios ,  Pictones,  Cadurcos...  adjungit... 
bis  civitatibus  obsides  imperat.  »  (De  bello  gallicOf  VII,  4,  §  6.) 

(3)  a  Rutonos  Gadurcosque  ad  fines  Volcarum  Ârecomicorum  depopulan- 
dos  mittit.  »  [De  bello  gallico,  VII,  64,  i  6.) 

(4)  De  bello  gallico,  II,  4,  i  7. 


INÉGALITÉ  DES  PEUPLES  EN  GAULE.  35 

siones  (1).  Alors  les  Rémi  se  révoltent  contre  les  Suessiones, 
demandent  le  secours  des  Romains  qui  sont  vainqueurs, 
qui  contraignent  les  Suessiones  à  se  rendre  à  discrétion  et 
qui  leur  font  grâce  sur  la  demande  des  Rémi  (2).  Mais  les 
rôles  sont  renversés  ;  de  maîtres ,  les  Suessiones  deviennent 
sujets;  ils  passent  sous  la  domination  des  Rémi  qui,  autre- 
fois, leur  obéissaient  (3)  et  sous  la  protection  desquels 
viennent  se  placer  même  des  peuples  de  la  Celtique  autre- 
fois clients  des  Arverni.  Telle  est  l'origine  de  la  haute  for- 
tune qu'a  eu  depuis  la  ville  de  Reims  ;  de  là  son  rang  de 
métropole  dans  Tordre  administratif  sous  les  Romains,  dans 
Tordre  religieux  jusqu'à  nos  jours ,  et  même  dans  Tordre 
industriel  et  commercial  où  elle  a  encore  maintenant,  sur 
Sûissons  5  la  suprématie  acquise  avec  Taide  du  conquérant 
des  Gaules,  il  y  a  près  de  deux  mille  ans. 

Les  deux  grandes  clientèles  des  Arverni  et  des  AedAii 
paraissent  s'être  partagé  la  Gaule  celtique  avant  Tarrivée 
de  César.  Nous  ne  voyons  pas  que  les  Arterni  aient  eu 
aucun  Belge  parmi  leurs  clients ,  et  quant  aux  Aedui ,  s'ils 
entrsdnent  les  Bellovaci  dans  leur  clientèle,  c'est  une  nou- 
veauté ,  résultat  de  l'ambition  des  Bellovaci ,  qui  veulent , 
comme  les  Rémi ,  se  soustraire  à  la  suprématie  des  Sues- 
siones (4). 

(1)  a  Suessiones...  fratres  consanguineosque  suos,  qui  eodem  jure  et  iis- 
dem  legibas  utantur,  unum  imperium,  unumque  magistratum  cum  ipsis  ha- 
béant.  »  {De  beUo  gallico^  II,  3,  §  5.) 

(3)  a  Petentibus  Remis,  ut  conservarentur,  impétrant,  o  (De  bello  gallico, 
II,  12, 1  5.) 

(3)  «  In  fines  Suessionum  qui  Remis  erant  attributi.  »  (De  bello  gallicOy 
vm,  6.  i  2.) 

(4)  Quand  Divitiacus  ,  celui  des  chefs  des  Aedui  qui  est  le  plus  dévoué 
anx  Romains ,  vient  demander  à  César  la  grâce  des  Bellov&ci  vaincus ,  il 
prétend  que  les  Bellovaci  ont  été  de  tout  temps  les  alliés  des  Aedui  ;  a  Bello- 
vacos  omni  tomporc  infide  atque  amicitiacivitatis  Âeduae  fuisse  »  (De  bello 
yailtco,  II.  14,  I  2).  Il  exagère  évidemment  la  durée  de  la  période  pendant 
laquelle  les  Bellovaci  ont  accepté  ce  que  César  appelle  ailleurs  le  principat 
des  Aedui,  11  est  inadmissible  qu'à  l'époque  où  le  roi  des  Suessiones  était 
le  plus  puissant  de  la  Gaule  et  avait  mis  sous  son  autorité  la  plus  grande 
partie  de  la  Belgique  et  de  la  Grande-Bretagne  :  Divitiacum  totius  Galliae 
potentiorem   qui  cum  magnae  partis   harum   regionum   etiam   Britanniae 


36  LIVRE  I".  CHAPITRE  III.  SECTION  1". 

Les  Suessiones  étaient  évidemment  le  peuple  de  la  Bel- 
gique qui,  avant  César,  avait  dans  cette  région  la  clientèle 
la  plus  considérable.  Après  eux  venaient  les  Nervii  et  les 
Treveri.  Cinq  petits  peuples  formaient  la  clientèle  des  Nei-- 
vii^  dont  ils  étaient  en  quelque  sorte  les  sujets;  ils  étaient, 
nous  dit  César,  soumis  à  leur  commandement.  César  nous 
apprend  leurs  noms  :  Ceutrones,  Grudii,  Levaci,  Pleumoxii, 
Geidumni  (1). 

Les  Treveri  avaient  sur  leurs  clients  beaucoup  moins 
d'autorité.  C'étaient  les  Eburones  et  les  Condrusi  (2) ,  et 
probablement  aussi  deux  peuples  moins  connus ,  les  Cae- 
roesi  et  les  Paemani.  On  réunissait  ces  quatre  peuples  sous 
la  domination  générique  de  Germani  (3),  ce  qui  ne  veut 
pas  dire  qu'ils  fussent  Germains  dans  le  sens  ethnogra- 
phique exclusivement  admis  de  nos  jours  (4).  Ces  peuples, 
clients  des  Treveri,  n'étaient  pas  soumis  à  leur  commande- 
ment. Lors  de  la  coalition  des  Belges  contre  les  Romains, 
en  57,  ils  entrèrent  dans  cette  ligue  qui  accepta  pour  chef 
le  roi  des  Suessiones,  et  ils  firent  défection  aux  Treveri  dont 
la  cavalerie  se  joignit  à  l'armée  romaine  (5).  Ils  étaient  fort 
nombreux,  puisque  leur  effectif  fut  fixé  en  bloc  à  40,000 
hommes.  C'était  le  plus  considérable,  après  ceux  des  Bello- 


imperium  obtinuerit  (De  bello  gallico^  II,  4,  §  7),  les  Bellovacif  ses  voisins  lei« 
plus  proches,  n'aient  pas  été  soumis  à  sa  domination. 

(1)  (c  Facile  hac  oratione  Ncrviis  persuadet.  Itaque  confestim  dimissis 
nuntiis  ad  Ceutrones,  Grudios,  Levacos,  Pleumoxios,  Geidumnos,  qui  om> 
nés  sub  eorum  imperio  sunt.  »  (De  bello  gallico,  V,  39,  {1.) 

(2)  a  In  fines  Eburonum  et  Condrusorum  qui  sunt  Treverorum  clientes 
pcrvenerant.  »  (De  bello  g&llico,  IV,  6,  g  4.) 

(3)  «  Condrusos,  Eburones ,  Caeroesos ,  Paemanos ,  qui  uno  nomine  Ger- 
mani appellantur.  »  (De  bello  gallico^  II ,  4,  2  10.)  u  Segni  Gondnisiquo  ex 
gente  et  numéro  Germanorum  qui  sunt  inter  Eburones  Treverosque.  » 
(/bid.,  VI,  32,  i  1.) 

(4)  Ces  peuples  n'étaient  pas  plus  Germains  dans  le  sens  ethnographique 
que  les  Oretani,  a  qui  et  Germani  cognominantur  »  en  Espagne  (Pline, 
liv.  III,  §  25)  ou  que  les  Treveri  et  les  Nervii  qui  se  vantaient  d'avoir  une 
origine  germanique,  comme  Tacite  nous  l'apprend  (Germanta,  28). 

(5)  «  Equités  Treveri  quorum  inter  Galles  virtutis  opinio  est  singularis 
qui  auxilii  causa  ab  civitate  ad  Caesarem  missi  vénérant.  »  (De  bello  gallicOj 
II,  24,  i  4.) 


INÉGALITÉ  DES  PEUPLES  EN  GAULE.  37 

uoci, 60,000  hommes;  des  Suessiones  et  des  Neivii^  chacun 
50,000.  Cette  comparaison  nous  montre  quelle  aurait  du 
être  en  Belgique  la  puissance  des  Treveri ,  si  leurs  clients 
leur  avaient  été  fidèles.  De  ces  clients ,  dont  quatre  nous 
sont  connus,  les  plus  importants  étaient  les  Eburones. 

Il  fallait  que  les  Eburones  fussent  non  seulement  belli- 
queux mais  en  état  de  mettre  sous  les  armes  un  nombre 
de  guerriers  considérable ,  puisqu'ils  détruisirent  un  corps 
de  troupes  romaines  composé  de  quinze  cohortes  ou  d'une 
légion  et  demie.  Cependant  leur  état  de  subordination  à 
l'égard  des  Treveri  nuisait  à  leur  considération.  Voilà  pour- 
quoi César  les  appelle  une  cité  peu  connue  et  de  mince 
dignité  (1).  La  cause  qui  provoqua  leur  seconde  prise  d'ar- 
mes contre  les  Romains  atteste  Tinfluence  que  les  Treveri 
avaient  conservée  chez  eux.  Ils  vinrent  attaquer  les  Ro- 
mains sur  le  conseil  d'Indutiomarus ,  chef  du  parti  qui, 
chez  les  Treveri^  était  hostile  à  César  (2).  C'était  en  54,  trois 
ans  après  la  guerre  de  Tannée  57,  où  les  Treveri  avaient 
envoyé  leur  cavalerie  dans  le  camp  romain,  tandis  que 
leurs  clients  étaient  dans  le  parti  opposé. 

La  maxime  de  Tégalité  des  peuples  était  aussi  étrangère 
à  la  politique  de  César  qu'à  celle  des  Gaulois.  Nous  avons 
vu  César  placer  sous  la  domination  des  Rémi  les  Suessiones 
vaincus.  Il  y  a  un  autre  exemple  du  même  procédé.  César, 
content  des  services  de  Commius,  roi  des  Atrebates,  fit  sortir 
ce  peuple  de  la  catégorie  des  dedititii  ou  sujets  de  Rome 
pour  le  faire  entrer  dans  celle  des  peuples  libres ,  et  mit 
dans  sa  dépendance  les  Morini  (3).  En  général,  le  principal 

(1)  «  Civitatem  ignobilem  atque  humilem  Eburonum.  »  (De  bello  gallico, 
V,28,il.) 

(2)  a  Indutiomari  Treveri  nuntiis  impulsi.  »  {De  bello  gallico ,  V,  26 ,  g  2.) 
f3)  (!  Quibus  illo  pro  mcritis  civitatem  ejus  immunem  esse  jusserat ,  jura- 

que  legcsque  rcddiderat  atque  ipsi  Morinos  attribuerat.  »  (De  bello  gallico, 
VII,  76,  i  1).  Les  Atrebates  avaient  fait  partie  de  la  ligue  des  Belges  en  57  (De 
bello  gallico,  II,  4,  16,  23).  Ils  furent  évidemment  deditilii  à  la  fin  de  cette 
campagne.  César  leur  imposa  Commius  comme  roi  et  renvoya  en  ambas- 
sade en  BreUgne  en  55  (De  bello  gallico,  IV,  21),  gj  6-7.  Les  Morini  furent 
conquis  par  Labiénus  la  même  année  (De  bello  gallico,  IV,  38). 


38  LIVRE  I".  CHAPITRE  III.  SECTION  l~. 

des  Aedui  en  Gaule  fut  le  résultat  de  la  politique  romaine. 
Cette  politique  n'était  qu'une  façon  particulière  d'appliquer 
le  système  gaulois  du  principat,  que  le  parti  opposé  aux 
Romains,  entendait  appliquer  différemment  :  Vercingétorix 
proposa  aux  Allobroges  le  «  principat  »  de  la  province  ro- 
maine (1),  et  quand  l'assemblée  générale  de  la  Gaule  in- 
surgée élut,  à  Bibracte,  Vercingétorix  général  en  chef,  les 
Aedui  virent  avec  douleur  que  le  «  principat  »  leur  était 
enlevé  et  retournait  aux  Arverni  (2). 

Un  détail  de  la  politique  de  César  après  la  prise  d'Alésia 
et  la  capture  de  Vercingétorix  montre  combien  le  général 
romain  entendait  peu  changer,  au  moins  dans  la  forme, 
le  système  général  de  l'organisation  gauloise  :  les  Aedui 
l'avaient  trahi ,  les  Arvernes  avaient  été  à  la  tête  de  l'in- 
surrection qui  avait  semblé  sur  le  point  de  terminer  par 
un  désastre  six  années  de  victoires.  Or  César,  qui  livra, 
en  règle  générale,  les  Gaulois  captifs  à  ses  soldats,  avec 
droit  d'en  disposer  comme  esclaves,  fit  exception  pour  les 
prisonniers  Arverni  et  Aedui  qui  furent,  la  plupart,  ren- 
voyés chez  eux.  Les  Arverni^  comme  peuple,  restèrent 
liberi  avec  une  sorte  d'indépendance  municipale  et  l'exemp- 
tion d'impôts,  les  Aedui  non  seulement  gardèrent  leurs 
magistrats,  jouirent  de  l'exemption  des  impôts,  mais  de- 
meurèrent foederati^  conservèrent  le  titre  d'alliés  des  Ro- 
mains dont  ils  avaient  abandonné  la  cause  au  moment  du 
danger.  Au  contraire,  la  plupart  des  peuples  de  la  Gaule, 
dont  le  tort  unique  avait  été  de  se  laisser  entraîner  par  les 
Arverni  et  par  les  Aedui^  furent  comprisjdans  la  catégorie  in- 
fime des  dedititii  et  frappés  d'impôt  au  profit  de  l'Etat  ro- 
main :  tant  le  respect  des  privilèges  consacrés  par  l'usage 
l'emportait  sur  l'équité  !  Ainsi  le  voulait  la  politique. 

Nous  ne  pouvons  pas  donner  d'une  façon  absolument  cer- 


(1)  ((  Imperium  totius  provinciae.  »  (De  hello  gallicOf  VII,  64,  (  8.) 

(2)  a  MagQo  dolore  Aedui  ferunt  se  dejectos  principatu.  »  (De  belîo  gallico, 
VII,  63,  g  8.) 


INÉGALITÉ  DES  PEUPLES  EN  GAULE.  39 

laine  la  liste  des  Etats  dont  la  Gaule  se  composait  au  temps  de 
César.  Au  commencement  de  Tempire  romain ,  leur  nombre 
s'élevait  à  soixante  ou  soixante-cinq.  Les  Commentaires  en 
nomment  un  nombre  moindre,  quarante-quatre  seulement  (1). 
Il  est  possible  que  cette  différence  soit ,  dans  une  certaine 
mesure ,  le  résultat  d'omissions  commises  par  César  ;  mais 
nous  n'avons  aucune  raison  pour  supposer  qu'Auguste  ait 
diminué  dans  la  Gaule  conquise  le  nombre  des  cités  ou 
états.  Il  est  même  certain  qu'il  en  a  créé  de  nouveaux. 
Tels  sont  les  Vellavi  et  les  Gabali,  qu'il  a  fait  sortir  de  la 
dépendance  des  Arvemi  ;  les  Tricasses  et  les  Catuellauni , 
affranchis  de  la  domination  des  Lingones  ;2)  ;  les  Silvanectes 
et  les  Meldi ,  enlevés  aux  Suessiones  (3)  ;  les  Segusiavi ,  dé- 
tachés  du  territoire  des  Aed^ii  et  attribués  à  celui  de  la  co- 
lonie de  Lyon  ;  les  Aulerci  Brannovices ,  sujets  des  Aedui , 
qui  forment  une  cité  dont  la  capitale  est  Autessiodurum  (4). 
Auguste,  s'attachant  surtout  à  diminuer  l'influence  exa- 
gérée que  certains  peuples  avaient  acquise ,  ne  maintint 
pas  les  agrandissements  de  territoires  accordés  par  César 
à  des  protégés.  Il  ôta  aux  Rémi  le  territoire  des  Suessiones 


(1)  Aedui,  Ambiani  (VII,  75;  VIII,  7),  Ambibarii  (VII,  75),  Ambiliati  (III, 
9,  10),  Andes  (VII,  4),  Arvemi,  Atrebates,  Aulerci  Genomanni  et  Aulerci 
Eburovices  (VII,  75),  confondus  ailleurs  sous  le  nom  d'Aulerci(II,  34;  III,  29; 
VII,  4;  VIII, 7), Bellovaci  (11,4,15;  V,  24;  VII,  59,  75;  VIII,7,  21),Bituriges 
(Vn,  15,  75;  VIII,  11).  Boii  (VII,  17,  75),  Cadurci  (VII,  4;  VIII,  32),  Caleti 
(VII,  75;  VIII,  7).  Camutes  (V,  25,  56;  VII,  43 ,  75;  VIII,  31,  38),  Curioso- 
lites  (II,  34;  III,  7;  VII,  75),  Diablintes  (III,  9,  10),  Eburones  (V,  24,  27,  28; 

VI,  34;  VIII,  38).  Elvetii  (I,  2,  4,  9,  12;  VII,  75),  Esubii  (II,  34;  III,  7;  V, 
24),  Lcmovici  (VII,  4,  75),  Lexovii  (III,  9,  10,  29;  VII,  75),  Lingones  (VIII, 
U),  Mediomatrici  (VII,  75).  Menapii  (III,  9,  10),  Morini  (III,  9,  10;  V,  24; 

VII,  75,  76),  Namnetes  (III,  9,  10),  Nenrii  (II,  28;  V  ,  24  ;  VII,  75),  Nitiobro- 
ges  (VII,  75),  Osismi  (II,  34;  III,  9,  10;  VII,  75),  Parisii  (VI,  3  ;  VII.  4,  75) , 
Petrucorii  (VII,  75),  Pictones  (VII,  4,  75;  VIII,  26),  Rauraci  (VII,  75),  Re- 
doncs  (II,  34  ;  VII,  75),  Rémi,  Ruteni  (VII,  7,  75),  Santoni  (VII,  75),  Senones 
(V,  54,  56;  VI,  5;  VII,  4,  75),  Sequani  (I,  3,  31  ;  VII,  75),  Suessiones  (II,  13; 
VIU,  6),  Treveri  (II,  24;  V,  3,  4;  VI,  8  ;  VIII,  25),  Turoni  (VII ,  4,  75),  Ve- 
liocasses  (VII,  75;  VIII,  7),  Venelli  (II,  34;  VII,  75). 

(2)  Longnon,  Atlas  historique  de  la  France,  texte  explicatif  des  planches, 
page  6. 

(3)  Longnon,  tbtd.,  p.  7. 

(4)  Longnon,  ibid.,  p.  4. 


40  LIVRE  !•'.  CHAPITRE  III.  SECTION  2. 

et  aux  Atrebatcs  celui  des  Morini.  Il  n'y  a  donc  pas  contra- 
diction entre  le  chiffre  de  quarante-quatre  cités  ou  Etats 
fourni  par  les  Commentaires  de  César  et  celui  de  soixante 
ou  soixante-cinq  au  début  de  l'empire  romain. 

Nous  savons  par  Josèphe  le  chifiFre  officiel ,  semble-t-il , 
du  nombre  des  peuples  de  la  Gaule  indépendante,  Aqui- 
taine comprise.  Il  est  de  trois  cent  cinq  (1).  En  retranchant 
pour  l'Aquitaine  les  trente  peuples  dont  Pline  fait  Ténu- 
mération  (2),  il  reste  deux  cent  soixante-quinze  peuples 
comme  total  pour  la  Belgique  et  la  Celtique.  Déduisons  les 
quarante-quatre  peuples  qui  constituent  des  Etats,  nous 
trouvons  deux  cent  trente  et  un  peuples  sujets,  c'est-à-dire 
un  peu  plus  de  cinq  par  peuple  autonome  et  dominant  à 
l'époque  de  César. 

Section  II. 

Les  hommes. 
A.  —  Rois. 

Chez  les  Gaulois,  l'égalité  des  hommes  n'est  pas  plus 
un  dogme  politique  que  l'égalité  des  peuples.  Cependant  la 
plupart  des  Etats  gaulois  sont  des  républiques.  Mais  les 
républiques  établies  sur  les  ruines  des  monarchies  sont  en 
général  aristocratiques.  Cette  loi  est  confirmée  par  l'exem- 
ple de  la  Gaule. 

En  Celtique,  à  l'arrivée  de  César,  il  n'y  a  plus  que  deux 
rois  :  l'un  Teutomatus  ou  son  père  et  prédécesseur  Ollovico, 
sur  la  frontière  de  l'Aquitaine,  chez  les  Nitiobroges  {3)] 

(1)  «  flevTe  8è  xal  TptaxoaCot;  7r).r|6uovTec  {Bve^i.  »  (De  bello  jud&ico^  livre  II, 
cb.  XYi,  édit.  Didot,  p.  119,  1.  11 ,  12.)  Ce  chiffre  précis  a  été  remplacé  par 
un  nombre  rond  chez  Plutarquo  qui  dit  trois  cents,  a  iOvv)  Si  iyjtiçv^tra'zo  Tpia- 
xoffia  u  [Césary  15,  édit.  Didot,  p.  852.  1.  43,  44),  et  cbcz  Appien  qui  dit  qua- 
tre cents,  «  iOvT]  tï  tExpaxosta  »  (De  rébus  gallicis^  ch.  II,  édit.  Didot,  p.  24). 

(2)  Histoire  naturelle ^  liv.  IV,  g  108.  à  partir  du  mot  Sediboviates.  Les 
peuples  dont  les  noms  précèdent  appartiennent  à  la  Celtique  de  César  dont 
Auguste  les  a  démembrés. 

(3)  De  bello  gallico,  VII,  31,  |  5,  46  ,{  5. 


INÉGALITÉ  DES  HOMMES  EN  GAULE.  41 

l'autre  Moritasgus ,  dans  le  nord ,  chez  les  Senones  (1)  ;  or 
dans  ce  dernier  peuple,  Cavarinus ,  pour  succéder  à  Mori- 
tasgus, son  frère,  qui  lui-même  succédait  à  ses  ancêtres,  a 
besoin  de  la  protection  de  César;  malgré  cet  appui  si  puis- 
sant, une  assemblée  publique  le  condamne  à  mort  et  il 
n'échappe  au  supplice  que  par  la  fuite  (2).  Partout  ailleurs 
la  royauté  parait  avoir  péri  antérieurement  au  début  de  la 
guerre  des  Gaules.  Comme  exemple,  nous  pouvons  citer 
cinq  peuples  :  les  Arverni ,  les  Sequani ,  les  Helvetii ,  les 
Camutes^  les  Aedui, 

César  est  notre  autorité.  Chez  les  Arverni  le  fameux  roi 
Bituitus ,  qui  a  été  au  siècle  précédent  vaincu  par  les  Ro- 
mains ,  n'a  pas  de  successeur  ;  le  père  de  Vercingétorix , 
Celtillus ,  accusé  de  prétendre  à  la  royauté ,  a  payé  cette 
ambition  de  sa  vie  (3).  Chez  les  Sequani ,  Casticus ,  fils  du 
dernier  roi ,  n'a  pas  obtenu  la  couronne  et  cherche  en  vain 
à  se  la  faire  donner  (4).  Chez  les  Helvetii^  Orgetorix,  accusé 
de  prétendre  à  la  royauté ,  est  traduit  devant  le  tribunal 
suprême  de  l'Etat  et  aurait  été  condamné  au  supplice  du 
feu  si  une  mort  subite  et  probablement  volontaire  ne  l'eût 
soustrait  au  jugement  (5).  Chez  les  Carnutes,  le  conquérant 
romain  fait  rendre  à  Tasgetius  la  royauté  de  ses  aïeux, 
en  56  avant  notre  ère.  Tasgetius  règne  un  peu  plus  de 
deux  ans,  puis  ses  ennemis  le  tuent  publiquement  avec 
Tapprobation  de  la  plus  grande  partie  de  leurs  concito- 
yens (6). 

(1)  De  bello  gallico,  V,  54.  Cf.  note  7. 

(2)  «  Cavarinuro,  qucm  Caesar  apud  eos  rcgem  constituerai,  cujus  frater 
Horitasgiis  advcntu  in  Galliam  Caesaris  cujusque  majores  rcgnum  obtinue- 
rant,  interficore  publico  consilio  conati.  »  (De  bello  gallicOy  V,  54,  2  2.) 

(3)  De  bello  g&llico,  VII,  4,  §  1. 

(4)  «  Orgetorix  persuadet  Castico,  Catamantalocdis  filio  ,  sequano,  cujus 
patcr  rcgnum  in  Scquanis  multos  annos  obtinuorat  et  a  senatu  populi  ro- 
mani auiicus  appcUatus  erat,  ut  rognum  in  ci  vitale  sua  occuparet,  quod  pa- 
1er  anle  habuorat.  »  (De  bello  gallico,  I,  3,  §  4.) 

(5)  De  bello  gallico,  I,  4. 

(6)  De  bello  gallico ,  V,  25,  29;  VI,  2,  4.  Acco  avait  pris  l'initiative  de  ce 
meurtre;  César  le  fit  périr  sous  les  verges  puis  décapiter  (VI,  44,  9.  2; 
cf.  VIII,  38,  l  5). 


42  LIVRE  I".  CHAPITRE  III.  SECTION  2. 

Chez  les  Aedui,  Tambitieux  Dumnorix  prétend  aussi  à  la 
royauté  ;  mais  comme  il  sait  que  cette  institution  est  anti- 
pathique à  ses  concitoyens,  c'est  par  Tappui  de  Tétranger 
qu'il  compte  s'assurer  le  succès.  Il  arrivera,  pense-t-il 
d'abord,  avec  l'aide  des  Helt)eHi  (1)  ;  et  après  la  défaite  de  ce 
peuple ,  quand  il  a  vu  César  créer  des  rois  chez  les  Carnutes 
et  les  Senones ,  il  espère  obtenir  du  général  romain  la  même 
faveur  et  il  a  l'imprudence  de  s'en  vanter  dans  l'assemblée 
des  Aedui,  propos  qui  provoque  un  mécontentement  général 
parmi  ses  concitoyens  (2).  César  le  fait  tuer,  et  dans  cette 
circonstance,  sa  politique  est  d'accord  avec  l'opinion  domi- 
nante contre  laquelle  il  s'était  inutilement  mis  en  lutte 
lorsqu'il  avait  donné  des  rois  aux  Senones  et  aux  Carnu- 
tes, 

Pour  rendre  un  peu  de  popularité  à  la  royauté  en  Celtique, 
il  fallut  le  grand  soulèvement  de  l'année  52  et  la  nécessité 
universellement  sentie  d'un  chef  militaire  unique  et  tout- 
puissant;  on  proclama  roi  Vercingétorix  (4).  Mais  ce  chan- 
gement d'opinion  fut  éphémère.  Au  bout  de  quelques  mois, 
le  nouveau  roi  est  déjà  accusé  de  trahison.  On  prétend 
qu'il  voudrait  tenir  de  César  plutôt  que  des  Gaulois  le 
titre  que  ceux-ci  lui  ont  conféré  (5).  Nous  savons  le  reste 
de  sa  tragique  histoire.  L'impopularité  du  titre  qu'on  lui 
avait  donné  a  pu  être  une  des  causes  du  désastre  final. 
Généralement,  en  Celtique,  à  cette  époque,  on  n'aime  pas 
les  rois. 

En  Belgique,  la  royauté  paraît  moins  antipathique  à  la 
masse  de  la  population.  Lors  de  la  coalition  formée  contre 
César,  en  57,  un  roi  est  choisi  pour  général  en  chef;  c'est 


(1)  De  bello  gallico,  I,  3,  9,  18. 

(2)  <x  In  concilio  Aeduorum  Dumnorix  dixerat  sibi  a  Caesare  regnum  ci- 
vitatis  deforri,  quod  dictum  Aedui  graviter  ferebant.  »  (De  bello  gallico, 
V,  6,  î  2.) 

(3)  De  bello  gallico,  V,  7,  §  7-9.  C'était  en  54. 

(4)  «  Rex  ab  suis  appellatur.  »  (De  bello  gallico^  VII,  4,  §  4.) 

(5)  a  Regnum  illum  Galliae  malle  Caosaris  concessu  quam  ipsorum  haberc 
beneficio.  »  (De  bello  gallico,  VII,  20,  i  2.) 


INÉGALITÉ  DES  HOMMES  EN  GAULE.  43 

Galba ,  qui  règne  sur  les  Suessiones  (1).  Les  Eburones ,  ce 
peuple  obscur  qui  tue  aux  Romains  une  légion  et  demie , 
c'est-à-dire  un  corps  d'au  moins  cinq  mille  hommes ,  sont 
gouvernés  par  deux  rois  qui  ont  soulevé  leur  peuple  contre 
les  Romains  (2).  Il  y  eut  en  Belgique  un  roi  créé  par  César, 
comme  en  Celtique  Cavarinus  et  Tasgetius  ;  ce  fut  Com- 
mius,  chez  les  Airebates  (3).  Mais  Commius  fut  plus  heureux 
que  ses  collègues  nommés  par  César  chez  les  Senones  et 
chez  les  Camutes;  son  autorité  fut  respectée  de  ses  conci- 
toyens ;  il  devint  un  prince  national ,  prit  part  aux  insur- 
rections de  52  et  de  51  (4)  ;  ce  furent  les  Romains,  et  non 
ses  concitoyens,  qui  lui  ôtèrent  le  pouvoir  (5). 

Quoi  qu'il  en  soit ,  même  en  Belgique ,  la  royauté  est 
une  exception.  La  plupart  des  Etats  de  la  Gaule  indépen- 
dante sont  des  républiques  à  la  tête  desquelles  nous  voyons 
des  magistrats  (6) ,  un  sénat ,  et  au-dessous  d'eux  des  ci- 
toyens divisés  en  deux  catégories  :  les  équités^  cavaliers 
ou  chevaliers,  qui  combattent  à  cheval,  et  la  plèbe  ou 
multitude,  plebs,  multitudo^  qui  fournit  aux  armées  l'in- 
fanterie. 

B.  —  Magistrats  et  principes. 

Les  magistrats  des  Helvetii  prennent  la  défense  de  la  loi 
à  laquelle  Orgétorix  veut  se  soustraire  et  réunissent  contre 
lui  les  citoyens  en  armes  (7).  Il  y  a  aussi  des  magistrats 


(1)  De  bello  gallico,  II,  4,  i  7. 

(2)  c  Initinm  repentini  tumultus  ac  defectionis  ortum  est  ab  Âmbiorige  et 
GatUTolco,  qui,  cum  ad  fines  regni  sui...  »  {De  bello  gallico ,  V,  26,  {{  1-2.) 
«  Catnvolcus,  rez  dimidiae  partis  Eburonum.  »  (De  bello  gallico,  VI,  31,  {  5.) 

(3)  a  Gommium,  quem  ipse  Atrebatibus  superatis  regem  ibi  constituerat,  » 
{De  bello  gallico,  IV,  21,  {  7.) 

(4)  De  bello  gallico,  VII,  75,  76,  79;  VIII,  6,  7,  10. 

(5)  Ibid.,  VIII,  21,  23,  47,  48. 

(6)  César,  VI,  20,  §2  2-3,  parlant  en  général  de  Tadministration  des  cités 
de  la  Gaule,  désigne  l'autorité  suprême  par  le  mot  magistraiui  employé  une 
fois  an  singulier,  une  fois  au  pluriel. 

(7)  «  Cum  civitas  ob  eam  rem  incitata  armis  jus  suum  exsequi  conaretur. 


44  LIVRE  !•'.  CHAPITRE  III.  SECTION  2. 

chez  les  Aedui.  On  prétend  que  chez  eux ,  Dumnorix  s'est 
acquis  sur  le  peuple  une  influence  qui  surpasse  Tautorité 
des  magistrats  (1). 

Parmi  ces  magistrats  des  cités ,  il  y  en  a  un  qui  est  in- 
vesti d'une  autorité  supérieure  à  celle  des  autres  et  que 
César  appelle  magistrat  suprême ,  summus  magistratus  (2) , 
ou  plus  brièvement  magisiratus  (3).  Chez  les  Aedui  et  chez 
les  Lexovii^  le  magistrat  suprême  se  nommait,  en  gaulois, 
vergobretos  ;  il  était  annuel  et  unique  (4).  Nous  connaissons 


DQUltitudinomque  hominum  ex  agris  magistratus  cogèrent.  »  {De  bello  gai- 
lico,  I,  4,  g  3.) 

(1)  «  Esse  nonnullos  quorum  auctoritas  apud  plebem  plurimum  valeat , 
qui  privatim  plus  posscnt  quam  ipsi  magistratus.  »  (De  bello  gallico ,  I , 
17,  {  1.  Cf.  Intcrmissis  magistratibus,  ibid.y  VII»  33,4.) 

(2)  De  bello  gallico,  I,  16.  §  5;  VII,  33,  §  2. 

(3)  De  bello  gallico,  1,  19,  §  1  ;  VII,  32,  §  1  ;  37,  §  6;  55,  g  4.  Dans  I,  19,  |  3-4; 
le  magisiratus  qui  accuse  Dumnorix  est  Liscus,  vergobret,  comme  on  le 
voit  aux  chap.  IG  et  17. 

(4)  ff  Convocatis  eorura  principibus...  in  his  Divitiaco,  et  Lisco  qui  summo 
magistratui  pracerat  quem  vergobretum  appellant  Acdui,  qui  creatur  anuus 
et  vitae  necisquo  in  suos  habot  potestatom.  o  (De  bello  gallico,  I,  16,  g  5.) 
M.  Mowat  a  soutenu  qu'il  fallait  lire  praeerant  et  qu'il  y  avait  deux  vergo- 
brets  comme  à  Rome  doux  consuls  ;  mais  cette  doctrine  est  contredite  par 
le  passage  de  César.  VII,  32,  g  3.  où  les  principes  des  Aedui  racontent  que  : 
«  Cum  singuli  magistratus  antiquitus  creari  atque  rcgiam  potestatom  annum 
obtincre  consucsscnt,  duo  magislratum  gérant  et  se  uterque  eorum  legibus 
crcatum  esse  dicat.  »  César  annule  une  des  deux,  élections.  De  ces  textes 
il  ne  faut  pas  séparer  le  passage  suivant  de  Strabou,  liv.  IV,  ch.  iv,  g  3, 
édit.  Didot,  164,  I.  6-9  :  «  ^Ëva  6*iflYE|ji6va  f,(/oOvTO  xat*  évtauxàv  x6  icaXaiov,  (b; 
fi'aOxfii);  el;  icoXepiov  si;  uicà  toO  icXiq^ou;  dire6eCxvvT0  orpatriYÔç.  »  Ainsi ,  outre  le 
magistrat  annuel,  chaque  état  avait,  en  cas  de  guerre,  nous  dit  Strabon, 
un  général  élu  par  la  multitude.  C'est  elle  qui  élit  Vercingétorix  {De  bello 
gallico^  VII,  21,  g  1.)  Les  Commentaires  nomment,  outre  Vercingétorix, 
sept  de  ces  généraux  :  Divico  qui  commandait  les  Helvelii  quand ,  en  107 , 
ils  battirent  et  tuèrent  le  consul  L.  Cassius  Longinus  (De  bello  gallico  ,  I , 
13,  g  2.  Cf.  Mommsen,  Rœmisrhe  Geschichte,  6"  édit.,  t.  II,  p.  174,  175);  Epo- 
redorix ,  sous  les  ordres  duquel  les  Aedui ,  s'étaient  fait  battre  par  les  Se- 
quani  avant  l'arrivée  de  César  en  Gaule  {De  bello  gallico,  VII,  67,  g  7);  Bo- 
duognatus,  général  des  Nervii  en  57  (Duce  Boduognato  qui  summain  imperii 
tonebat.  Ibidem,  II,  23,  H);  Camulogenus,  général  des  Aulerci  et  do  leurs 
alliés  en  53  (8umma  imperii  traditur  Camulogeno  Aulerco.  Ibid. ,\ll,  57,  g  3. 
Dux  hostium  Camulogenus,  VII,  62,  g 5);  Sedulius,  général  des  Lemootces 
la  môme  année  (Sedulius,  dux  et  princcps  Lemovicum  occiditur.  Ibid.,  \ll, 
88);  Correus,  général  des  Bcllovaci  en  52  (Bellovacos...  duce  Correo  Bello- 
vaco.  Ibid.y  VIII,  6;  cf.  17),  et  Dumnacus,  qui,  la  même  année,  comman- 
dait les  Andecavi  (A  Dumnaco ,  duce  Andium,  /6td.,  VIII,  26).  Chez  les 


INÉGALITÉ  DES  HOMMES  EN  GAULE.  45 

les  noms  de  trois  vergobrets  des  Aediii,  L'un  est  Liscus , 
investi  de  cette  fonction  en  Tannée  58  (1).  Valetiacus  la 
remplit  en  53  ;  son  frère  Cotus  prétendit  lui  succéder  en 
52;  mais  le  parti  opposé  lui  préféra  Convictolitavis ,  qui 
l'emporta  grâce  à  Tintervention  de  César,  et  qui  cependant 
se  laissa  entraîner  du  côté  de  Vercingétorix  (2). 

Nous  apprenons  par  une  monnaie  le  nom  de  Cattos,  ver- 
gobretos  chez  les  Lexovii  (3). 

Tel  est  le  mot  gaulois  que  César  rend  par  summus  ma- 
gistratus.  On  n'a  pas  encore  déterminé  d'une  manière  pré- 
cise en  quoi  consiste  la  situation  qu'il  désigne  par  le  mot 
de  principatus .  Chez  les  Aedui^  Dumnorix,  en  l'an  61,  ob- 
tenait le  principatus  (4).  César  parait  lui  avoir  ôté  cette 
dignité  (5).  En  53,  Eporedorix,  jeune  homme  de  haute 
naissance ,  et  Viridomarus ,  d'origine  moins  distinguée , 
mais  protégé  de  César,  prétendent  tous  deux  au  principatus 
chez  le  même  peuple,  et  lors  de  l'élection  du  vergobretos^ 
l'un  avait  donné  son  appui  à  Convictolitavis,  l'autre  à 
Cotus,  concurrent  de  ce  dernier  (6). 

Aedui,  le  vergobret  ne  pouvait  commander  l'armée  parce  qu'il  lui  était  in- 
terdit de  sortir  du  territoire  de  la  cité  (Ibid, ,  VII ,  33,  §  2).  Il  est  possible 
que  la  même  loi  existât  chez  d'autres  peuples  et  ainsi  s'expliquerait  l'é- 
lection d'un  général  en  cas  de  guerre  par  la  multitude ,  comme  nous 
l'apprend  Strabon.  Cette  distinction  entre  l'autorité  civile  et  l'autorité 
militaire  n'existait  pas  à  Rome. 

(1)  De  bello  gallico,  I,  16,  |  5. 

(2)  De  bello  gallico,  VII,  32,  37,  42,  55,  67. 

(J}  Cette  monnaie  a  fourni  le  sujet  d'intéressantes  dissertations  à 
MM.  Mowat,  Charles  Robert  et  Emile  Ernault.  Nous  adoptons  l'opinion  des 
deux  derniers. 

(4)  «  Qui  eo  tcmpore  principatum  in  civitate  obtinebat.  »  (De  bello  gai- 
lico,  I,  3,  I  5.) 

(5)  «  Dumnorigem...  odisse  etiam  suo  nominc  Cacsarem  et  Romanes  quod 
eomm  advenlu  potentia  cjus  deminuta  et  Divitiacus  fratcr  in  antiquum 
locum  gratiae  atque  honoris  sit  rcstitutus.  x>  {De  bello  gallicOj  I,  18,  |  8.) 

(6)  a  Uis  erat  inter  se  de  principatu  contcntio ,  et  in  illa  magistratuum 
controversia,  alter  pro  Convictoiitavi  .  altcr  pro  Goto  summis  opibus  pug- 
naverant.  »  {De  bello  gallicOy  VII,  39,  g  2.)  César  les  appelle  collectivement 
princes  do  la  cité  :  «  Principes  civitatis  Eporedorix  et  Viridomarus.  »  (De 
bello  gallico,  VII,  38,  g  2.)  La  magislratuum  conlrovcrsia  dont  il  est  ques- 
tien  au  chap.  39  est  celle  dont  il  a  été  traité  aux  chap.  32  et  33  du  même 
livre. 


46  LÎVRE  I".  CHAPITRE  lîl.  SECTION  2. 

En  54,  Indutiomarus  et  Cingétorix  se  disputent  le  prin^ 
cipatus  chez  les  Treveri ,  et  César ,  après  des  démarches  en 
faveur  du  second,  semble  les  laisser  tous  deux  au  pouvoir 
concurremment  jusqu*à  Tannée  suivante  où,  Indutiomarus 
étant  tué ,  Cingétorix  est  investi  du  principatus  et  du  com- 
mandement, —  probablement  militaire  (1).  —  Plus  tard,  dans 
le  De  bello  civili ,  il  est  question  d'un  certain  Adbucillus 
qui  avait  obtenu  le  principatus  chez  les  AUobroges  pendant 
un  grand  nombre  d'années  (2). 

Si  Ton  se  bornait  à  étudier  les  textes  que  nous  venons 
de  citer,  le  mot  principatus  pourrait  sembler  indiquer  une 
magistrature  qui  aurait  dû  régulièrement  être  occupée  par 
un  seul  individu  dans  chacun  des  trois  peuples  dont  il  vient 
d'être  question,  c'est-à-dire  chez  les  Aedut^  chez  les  Tre- 
veri  et  chez  les  AUobroges.  Mais  cette  explication  présente 
une  difficulté.  C'est  que  ,  précisément  pour  chacun  de  ces 
trois  peuples.  César,  dans  d'autres  textes,  nous  fait  connaî- 
tre l'existence  simultanée  de  plusieurs  principes. 

Prenons  d'abord  les  Aedui. 

Avant  l'arrivée  de  César  en  Gaule,  au  moment  même 
où  Dumnorix  avait  le  principatus  chez  les  Aedui ,  ceux-ci 
vaincus  sont  contraints  à  livrer  comme  otages  les  fils  de 
leurs  principes  aux  Sequani  qui,  avec  l'aide  d'Arioviste, 
les  ont,  en  61 ,  battus  dans  plusieurs  combats  (3).  César, 
en  58 ,  a  dans  son  camp  un  grand  nombre  de  principes  des 
Aedui;  il  les  convoque  à  une  assemblée  (4).  En  53 ,  il  reçoit 
une  ambassade  composée  de  principes  des  Aedui  (5). 


(1)  «  Duo  de  principatu  inter  se  contendebant ,  Indutiomarus  et  Cingé- 
torix. »  (De  bello  gallicOy  V,  3,  g  2.)  a  Cingetorigi...  principatus  atque  impe- 
rium  est  traditum.  »  (De  bello  g&llicOj  VI,  8,  §  9.) 

(2)  a  Qui  principatum  in  civitato  multis  annis  obtinuerat.  »  (De  bello  ci- 
vili,  III,  59.) 

(3)  a  Obsides  ab  iis  principum  filios  acciperent.  »  (De  bello  gàllico ,  VI,  12, 
8  4.) 

(4)  <x  Gonvocatis  eorum  principibus  quorum  magnam  copiam  in  castris 
habebat.  »  (De  bello  gallico,  I,  16,  g  5.) 

(5)  «  Legati  ad  eum  principes  Aeduorum  veniunt.  »  (/)e  bello  gallico, 
VII,  32,  8  2.) 


INÉGALITÉ  DES  HOMMES  EN  GAULE.  47 

On  peut  faire  la  même  observation  chez  les  Treveri, 

A  rinslant  même  où  Indutiomarus  et  Cingétorix  se  dis- 
putent le  principatus  chez  les  Treveri ,  César ,  qui  préfère 
Cingétorix,  convoque  les  principes  des  Treveri  et  obtient 
d'eux  qu'ils  se  mettent  du  côté  de  Cingétorix  (1). 

La  même  pluralité  dans  le  principat  se  rencontre  chez  les 
Allobroges  :  en  52,  Vercingétorix ,  cherchant  à  les  gagner, 
promet  de  l'argent  à  leurs  principes  (2),  et  cependant  nous 
lisons  ailleurs  que  chez  les  Allobroges^  Adbucillus  avait  eu 
le  principatus  pendant  un  grand  nombre  d'années  (3). 

Les /îemi  donnent  lieu  à  une  remarque  analogue.  En  57, 
César  leur  ordonne  de  lui  amener  comme  otages  les  fils  de 
leurs  principes  (4)  ;  six  ans  plus  tard,  les  Rémi  perdent  dans 
une  bataille  Vertiscus ,  princeps  de  leur  cité ,  qui  comman- 
dait leur  cavalerie (5).  Conclurons-nous  de  là  que  la  con- 
stitution des  Rémi  était  changée  et  qu'en  51  le  nombre  des 
principes  était  réduit  à  un  ?  Il  nous  semble  que  non.  Ver- 
tiscus est  un  des  principes  qui  momentanément  a  plus  d'in- 
fluence que  tous  les  autres,  puisqu'il  est  parvenu  à  se 
faire  donner  le  commandement  de  la  cavalerie. 

Il  y  a  dans  chaque  peuple  gaulois  un  certain  nombre  de 
personnages  influents  ;  ils  sont  riches ,  commandent  à  une 
gensj  à  un  clan  puissant,  à  une  clientèle  nombreuse.  César 
les  appelle  principes.  Tels  sont  les  principes  des  Aedui,  des 
Treveri,  des  Allobroges  et  des  Rémi  dont  nous  venons  de 
parler.  Tels  sont  ceux  des  Arverni  qui  résistent  inutilement 
à  Vercingétorix  (6);  ceux  des  Bellovaci  qui  entraînent  ce 


(1)  e  Principibus  Treverorum  ad  se  convocatis ,  hos  singiUatim  Gingeto- 
hgi  conciUavit.  »  {De  bello  gallicOf  V,  4,  §  3.) 

(2)  e  Horum  principibus  pecunias.  »  {De  bello  gallico,  VII,  64,  g  8.) 

(3)  «  ÂdbuciUi  filii,  qui  principatum  in  civitate  multis  annis  obtinuerat.  » 
(De  bello  civili,  III,  59.) 

(4)  «  Principum  liberos  ad  se  adduci  jussit.  »  {De  bello  gallico^  II,  5,  §  1.) 

(5)  «  Amisso  Vertisco ,  principe  civitatis ,  praefecto  equitum.  »  {De  bello 
gàllico,  Vni,  12,  §  4.) 

(6)  «  Probibetur  ab  Gobannitione  patruo  suo  reliquisquc  principibus,  » 
{De  bello  gallico,  VII,  4,  {  1-) 


48  LIVRE  I".  CHAPITRE  III.  SECTION  2. 

peuple  à  combattre  les  Romains  en  57  (1).  et  qui  donnent 
leur  consentement  au  soulèvement  de  Tannée  51  (2);  ceux 
des  Nervii  qui,  avec  les  généraux  du  même  peuple,  ont,  en 
54 ,  une  entrevue  avec  Cicéron ,  lieutenant  de  César ,  et 
cherchent  à  le  tromper  (3  .  Tels  sont  les  principes  de  toutes 
les  cités  de  la  Gaule  (4)  que  César,  près  de  s'embarquer 
pour  la  Grande-Bretagne,  réunit  au  portus  Itius  en  54;  les 
principes  des  cités  qui  viennent  demander  à  César   son 
appui  contre  Arioviste  en  58  (5)  et  ceux  qui  se  trouvent 
auprès  de  Vercingétorix  en  53  (6).  Tels  sont  :  les  principes 
Galliae  dont  il  est  question  dans  d'autres  passages  des 
Commentaires  (7).  La  seule  circonstance  où  ils  paraissent 
remplir  une  fonction  publique  oflBcielle  se  présente  lors- 
qu'ils se  rendent  à  une  assemblée  générale  de  la  Gaule. 
Alors  César  leur  donne ,  dans  un  passage ,  la  qualification 
de  legati  (8),  que  nous  pouvons  traduire  par  «  députés.  » 
Mais  ordinairement  princeps  veut  dire,  ce  semble,  homme 
influent,  non  fonctionnaire,  —  qui,  quelquefois,  parvient 
à  se  faire  nommer  général  ;  —  princeps  s'oppose  à  magis- 
Praius  (9). 


(1)  <c  Impulses  a  suis  principibus.  »  (De  bello  yallico^  II,  14,  {  3.) 

(2)  a  Omnium  principum  conscnsu.  »  (De  bello  gallico,  VIII,  7, 1 6.)  a  Nemi- 
nem  vero  tantum  pollere  ut  invitis  principibus...  »  (lbid.<,  VIII,  22,  2  2.) 

(3)  a  Tune  duces  principosquc  Nerviorum.  »  (De  bello  g&llico^  V,  41.)  Je  ne 
cito  pas  ici  les  passages  oii  il  est  question  des  principes  de  plusieurs  peu- 
ples à  la  fois.  On  no  peut  démontrer  que  les  principes  dont  ces  passages 
font  mention  soient  plusieurs  pour  chaque  peuple  ;  exemple  :  les  pHncipes 
des  Esubii ,  des  Curiosolites  et  des  Veneti  qui  se  liguent  contre  César  en 
56  (ibid,,  111,8,  §  3);  les  principes  des  Ambiani,  des  Aulerci^  des  Caleti,  des 
Veliocasses ,  des  Alrebales  f  qui  ont  pris  parti  contre  les  Romains  en  51  : 
a  Gomplures  principes  esse  belli  auctores.  »  (Ibid.^  VIII,  7,  2  ^•) 

(4)  «  Principes  ex  omnibus  civitatibus.  »  {De  bello  gallicOy  V,  5,  2  3.) 

(5)  De  bello  yallico,  h  31,  2  ^ 

(6)  /6id.,  VII,  28,  2  6. 

(7)  a  Principibus  Galliae  cvocatis.  »  (De  bello  gallico,  IV,  6,  2  5.)  «  Prin- 
cipes Galliae  sollicitare.  »  (Ibid.^  V,  6,  2  4.)  a  Indictis  inter  se  principes 
Galliae  conciliis.  »  (Ibid.,  VII,  1,  2  ^0 

(8)  «  Totius  fore  Galliae  legati  principes  civitatum.  »  (De  bello  gallico, 
I.  30,  2  !■) 

(d)  Une  manière  de  voir  différente  de  la  nôtre  a  été  soutenue  par  M.  De- 
loche  dans  son  savant  mémoire  intitulé  :  Eludes  sur  la  géographie  histori- 


INÉGALITÉ  DES  HOMMES  EN  GAULE.  49 

Le  titre  de  princeps  ne  désigne  pas  une  magistrature, 
quand  même  il  est  employé  au  singulier  comme  pour 
Sedulius,  général  des  Lemovices  en  53  (1).  C.  Valerius 
Procillus,  que  César  appelle  princeps  de  la  province  de 
Gaule  (2),  est  simplement  un  des  hommes  qui  exercent  le 
plus  d'influence  dans  cette  province  ;  à  Valerius  Procillus 
on  peut  comparer,  chez  les  Helvii^  c'est-à-dire  chez  un 
peuple  de  la  province  de  Gaule,  Valerius  Donnotaurus 
qui,  suivant  César,  est  princeps  de  la  cité  (3). 

Principatus  au  singulier,  cette  situation  qu'à  occupée 
Dumnorix  chez  les  Aedui,  que  se  disputent  chez  le  même 
peuple  Eporedorix  et  Viridomarus,  chez  les  Trévères  Indu- 
tiomarus  et  Cingétorix,  dont  a  joui  Adbucillus  chez  les 
Allobroges,  c'est  la  primauté  parmi  les  principes^  probable- 
ment une  sorte  de  prépondérance  au  Sénat.  Cette  primauté 
peut  durer  plusieurs  années,  tandis  que  la  magistrature  est 
annuelle.  Résultat  d'une  influence  personnelle,  elle  peut 
être  fixée  sur  la  même  tête  que  le  commandement  des 
troupes ,  qui  est  décerné  annuellement  par  le  suffrage  po- 
pulaire (4). 


que  de  la  Gaule ,  p.  43  et  suiv.  Suivant  lui ,  le  princeps  est  un  magistrat. 
Mais  le  passage  en  apparence  décisif  des  Commentaires,  VI,  23,  sur  lequel 
M.  Deioehe  appuie  sa  thèse,  concerne  la  Germanie  et  non  la  Gaule.  Lo 
principalus  Galliae  qu'avait  eu  Cellillus  avant  César  {Ibid. ,  VII ,  4)  était 
l'influence  exercée  en  Gaule  par  Coltillus  quand  il  était  le  plus  puissant 
des  Arvemes  et  que  les  Arvemcs  avaient  la  suprématie  en  Gaule  {De  bello 
gallico,  VII ,  4).  Les  passages  relatifs  aux  Aedui  {De  bello  gallico,  VII,  38, 
39)  cités  plus  haut  (p.  45,  n.  6)  établissent  nettement  la  distinction  entre  la 
magistrature  et  le  principatus.  Au  même  moment,  chez  les  Aedui,  Epore- 
dorix et  Viridomarus  étaient  principes,  Convictolitavis  et  Cotus  se  préscn- 
daicnt  chacun  investis  du  magislratus  unique  et  annuel  auquel  était  attaché 
la  puissance  royale.  Il  no  parait  pas  qu'il  y  ait  grande  ressemblance  entre 
les  pnnctpes  des  cités  de  la  Gaule  au  temps  de  César,  et  le  principalis 
qui,  an  commencement  du  cinquième  siècle,  est  dans  certaines  cités  de  la 
Gaule  le  chef  de  l'administration  {Code  Théodosien,  liv.  xii,  t.  I,  1.  170). 

(1)  c  Sedulius,  dux  et  princeps  Lemovicum.  »  {De  bello  galliro,  VII,  88,  (4.) 

(2)  a  C.  Valerium  Procillum,  principem  Galliae  provinciae.  »  {De  bello  gai- 
iico,  I,  19,  i  3.) 

(3)  c  Gaio  Valerio  Donnotauro,  Caburi  filio,  principe  civitatis.  »  {De  bello 
gêllico,  VII,  65,  I  2.) 

(4)  Sur  rélection  annuelle  du  chef  do  l'armée  par  le  peuple,  voy.  Strabon, 

4 


50  LIVRE  l".  CHAPITRE  III.  SECTION  1. 

C.  -  SénaU. 

A  côté  du  magistrat ,  nous  trouvons  le  sénat.  C'est  une 
institution  commune  à  la  Celtique  et  à  la  Belgique.  Parmi 
les  sénats  de  la  Celtique ,  le  sénat  des  Aedui  est  celui  sur 
lequel  César  nous  donne  les  indications  les  plus  précises. 
En  l'année  52,  au  moment  où  Convictolitavis  et  Cotus  se 
disputent  chez  les  Aedui  la  dignité  suprême  de  vergobretos^ 
une  partie  du  sénat  se  met  du  côté  de  Cotus,  l'autre  soutient 
Convictolitavis;  César,  voulant  juger  la  question,  fait  venir 
le  sénat  à  Decetia  (1).  Quand,  la  môme  année,  les  Aedui 
se  laissent  entraîner  dans  le  soulèvement  dirigé  par  Ver- 
cingétorix,  la  résolution  d'abandonner  la  cause  romaine  est 
prise  dans  une  assemblée  du  sénat  à  Bibracte;  la  plus 
grande  partie  des  sénateurs  s'y  trouvent;  quelques-uns 
seulement,  restés  fidèles  à  César,  font  défaut  (2). 

Quatre  autres  sénats  de  la  Celtique  sont  mentionnés  par 
les  Commentaires, 

Lors  de  la  grande  insurrection  des  cités  du  nord-ouest . 
en  56,  le  sénat  des  Veneti  se  met  à  la  tête  du  mouvement  ; 
et,  pour  jeter  la  terreur  parmi  les  ennemis  du  peuple  ro- 
main ,  César  vainqueur  fait  mettre  à  mort  tous  les  séna- 
teurs prisonniers  (3).  Les  sénateurs  des  Aulerci  Eburovices 
et  des  Lexovii  ne  veulent  pas  prendre  parti  contre  les 
Romains  ;  ils  sont  massacrés  par  leurs  concitoyens  (4). 
L'année  suivante,  quand  chez  les  Carnutes  le  parti  hostile 
aux  Romains ,  uni  à  celui  qui  ne  voulait  plus  de  roi .  eut 
chassé  le  roi  Cavarinus  que  César  avait  nommé  ,  le  général 
romain  envoya  au  sénat  des  Carnutes  Tordre  de  se  présen- 


liv.  IV,  ch.  IV,  §  3,  édition  Didot,  p.  164,  li^ne  6-9),  et  ci-dessus,  p.  44, 
note  4. 
(î)  De  bello  gallico,  VU,  32,  33. 

(2)  /bic/.,  VII,  55,  I  4. 

(3)  a  Omni  scnatu  nccato.  »  {De  bello  gallico,  III,  IG,  J  4.) 

(4)  «  Aulorci  Eburovices  Lcxoviiquc,  scnatu  suo  interfecto,  quod  auctorcs 
belli  ossc  nolobant.  »  {Dp.  bello  gallico,  III,  17,  g  3.) 


INÉGALITÉ  DES  HOMMES  EN  GAULE.  51 

ter  tout  entier  devant  lui ,  mais  le  sénat  se  garda  bien  de 
venir  (1).  Voilà  donc  cinq  peuples  dont  les  sénats  appa- 
raissent chez  César  :  Aedui^  Veneti,  Aulerci  Eburovices, 
léxoviiy  Camutes,  et  qui  appartiennent  à  la  Celtique. 

En  Belgique,  trois  sénats  sont  mentionnés  :  ceux  des 
Remij  des  Nervii^  des  Bellovaci.  Quand,  seuls  avec  les  Tre- 
veri  et  les  Letici  »  les  Rémi  prennent  parti  pour  les  Romains 
en  57 ,  César  ne  se  contente  pas  des  promesses  que  deux 
ambassadeurs  des  Rémi  lui  apportent  ;  il  exige  que  tout  le 
sénat  des  Rémi  vienne  le  trouver  (2).  Dans  la  guerre  qu'il 
fait  aux  coalisés ,  l'armée  des  Nervii  est  presque  entière- 
ment détruite;  de  six  cents  sénateurs,  trois  seulement 
survivent  (3).  Plus  tard,  lors  du  dernier  effort  de  la  Gaule 
contre  le  vainqueur  de  Vercingétorix,  le  Bellbvaque  Cor- 
reus  perd  la  vie  en  se  mettant  à  la  tête  d*un  inutile  soulë- 
vement  ;  les  sénateurs  des  Bellovaci  soutiennent  que  la 
guerre  s'est  faite  malgré  eux  (4). 

Le  nombre  total  des  sénats  gaulois,  tant  Celtiques  que 
Belges,  dont  il  est  question  dans  les  Commentaires  est  de 
huit. 

Un  des  faits  que  nous  venons  de  citer  nous  montre  que 
les  sénats  des  Etats  gaulois  étaient  fort  nombreux  :  chez 
les  Nervii  il  y  avait  six  cents  sénateurs.  Nous  voyons  ail- 
leurs, chez  les  Aeduiy  les  lois  défendre  que  deux  per- 
sonnes de  la  même  famille  fissent  en  même  temps  partie 
du  sénat  (5).  Il  semble  que  ces  deux  faits  nous  mettent  en 
présence  d'une  organisation  analogue  à  celle  de  Rome  pri- 
mitive. En  Gaule,  la  race  dominante  dans  chaque  civitas 


(i)  «  CtUD  is  omnem  ad  se  sonatum  vonire  jussissot,  dicto  audientes  non 
ftierunt.  »  {De  bello  gallico,  V,  54,  §  3.) 

(2)  •  Omncm  senatum  ad  se  convcnirc.  a  {De  bello  gallico,  II,  5,  |  1.) 

(3)  «  Ex  soxccutis  nd  trcs  scnatorcs.  »  (De  bello  gullico,  II,  28,  §  1.) 

(4}  f  Numquam  cnim  senatum  tantum  in  civltatc  illo  vivo  quara  impcritam 
plebem  potuissc.  —  Nemincm  vcro  tantum  pollcro  ut...  rcsistcnte  sonatu.  » 
pc  bello  gallico,  VIII,  21,  g  4;  22.  i  2.) 

(5)  f  Cum  loges  duo  ex  una  familia...  in  sonatu  osso  prohibèrent.  •  {De 
bello  galHco,  VII,  33,  {  3.) 


52  LIVRE  !•'.  CHAPITRE  III.  SECTION  2. 

se  compose  d*an  certain  nombre  de  génies  représentées 
chacune  au  sénat  par  son  chef  qui ,  dans  cette  assemblée , 
ne  peut  jamais  disposer  de  plus  d'une  voix;  le  nombre  des 
gentes  est  probablement  de  six  cents  chez  les  Nervii;  voilà 
pourquoi  le  sénat  des  Nervii  compte  six  cents  membres.  Le 
sénat  romain  en  avait  originairement  trois  cents ,  corres- 
pondant à  autant  de  gentes  groupées  elles-mêmes  en  trois 
tribus  de  cent  gentes  chacune  (1). 

D.  —  Equités. 

L'organisation  militaire  était  constituée  primitivement,  à 
Rome,  sur  les  mêmes  bases  que  le  sénat  ;  chaque  gens  devait 
un  cavalier,  9ques,  et  dix  fantassins  ;  dans  chaque  gensy  il 
y  avait  deux  groupes  :  le  premier,  peu  nombreux,  qui 
exerçait  la  suprématie,  fournissait  le  sénateur  et  le  cava- 
lier ;  le  second  groupe,  qui  acceptait  la  suprématie  du  pre- 
mier, fournissait  les  fantassins,  dix  fois  plus  nombreux 
que  les  cavaliers.  Chaque  peuple  gaulois  avait,  ce  semble, 
une  organisation  analogue  :  il  était  formé  de  gentes  ou  clans, 
au-dessus  de  chacun  desquels  s'élevait  une  famille  plus 
noble  et  plus  riche  que  les  autres,  c'est-à-dire  un  petit 
groupe  aristocratique  qu'entouraient  des  clients  de  race 
moins  distinguée  et  de  moindre  fortune. 

L'ensemble  de  ces  petits  groupes  aristocratiques  domi- 
nant le  reste  de  chacune  des  gentes  est  ce  qui  constitue,  dans 
la  doctrine  de  César,  la  classe  des  équités,  chevaliers  ou  ca- 
valiers, rivaux  des  druides  et  qui  se  partagent  avec  eux,  en 
Gaule ,  la  considération  et  le  pouvoir  (2).  Cette  classe  four- 
nit les  sénateurs  en  même  temps  que  les  équités  ;  mais  chez 
César,  le  côté  stratégique  domine  :  César  a  eu  moins  affaire 


(1)  Mommsen,  Roemische  Geschichte,  livre  I,  c.  iv,  v  ;  6*  édit.,  t.  I,  p.  41 
et  suiv.,  64  et  suiv.,  74  et  suiv. 

(2)  (I  In  omni  Gallia  eorum  hominum  qui  aliquo  sunt  numéro  atque  honore, 
gênera  sunt  duo  ..  de  his  duobus  generibus  alterum  est  druidum,  alterum 
equitum.  »  (De  bello  gallico,  VI,  13,  §  1,  3.) 


INÉGALITÉ  DES  HOMMES  EN  GAULE.  53 

aux  sénats  qu'à  la  cavalerie  gauloise  qui  lui  a  fourni  d'uti- 
les auxiliaires  et  dans  laquelle  il  a  aussi  trouvé ,  sur  les 
champs  de  bataille,  de  redoutables  ennemis. 

En  arrivant  dans  la  Gaule  transalpine,  il  navait  que  de 
l'infanterie.  Il  prit  sa  cavalerie  dans  le  pays.  Dès  la  pre- 
mière année,  elle  fut  de  quatre  mille  hommes,  fournis  une 
partie  par  la  province  romaine ,  mais  le  reste  par  les  Aedui 
et  leurs  alliés  ou  clients  (1)  ;  c'était  en  58.  En  55,  le  chifiFre 
était  le  même  (2)  ;  César  en  emmena  moitié  en  Bretagne  et 
laissa  le  reste  à  Labiénus,  sur  le  continent  (3). 

Lors  de  la  grande  insurrection  de  l'année  52 ,  le  patrio- 
tisme fit  faire  aux  Qaulois  contre  les  Romains  un  effort 
beaucoup  plus  grand  que  celui  que  le  conquérant  avait  exigé 
d'eux  pour  assurer  le  succès  de  ses  armes.  Quand  les  Aedui 
eurent  abandonné  les  Romains  et  que  tous  les  Etats  gau- 
lois, sauf  les  Rémi,  les  Lingones  et  les  Treveri^  se  furent 
laissés  entraîner  dans  le  parti  national ,  Vercingétorix  put 
compter  sur  quinze  mille  cavaliers  (4). 

Une  fois  sur  le  point  d'être  enfermé  dans  Alésia,  il  ren- 
voya sa  cavalerie  et  garda  son  infanterie  au  nombre  de 
quatre-vingt  mille  hommes ,  chiffre  très  inférieur  au  total 
des  forces  de  pied  dont  la  Gaule  pouvait  disposer.  Mais 
Vercingétorix  n'en  avait  pas  voulu  davantage  (5).  La  com- 
position de  l'armée  de  secours  que  les  Gaulois  lui  en- 
voyèrent peut  montrer  dans  quelles  proportions  la  popu- 
lation militaire  de  la  Gaule  se  répartissait  entre  l'aristo- 
cratie et  la  classe  inférieure.  L'assemblée  générale  craignit 


(1)  «  Gaesar  equitatum  omnem  ad  numerum  quattuor  milium  quem  ex 
onmi  provincia  et  Aodnis  atque  eomm  sociis  coactum  habcbat  praemittit.  » 
(De  bello  gtLllico,  I,  15,  |  1.) 

(2)  «  Equitatus  totius  Qalliae  convenit  numéro  milium  quattuor.  »  (De  bello 
palHco,  V,  5,  i  3.) 

(3)  De  bello  gallico,  V,  S,  §  1. 

(4)  a  Omnes  équités  quindecim  milia  numéro  celeritcr  convenire  jubet.  » 
{De  bello  g&llico,  VII,  64,  {  1.) 

(5)  c  Peditatu  quem  ante  habuerat  se  fore  contcntum  dicit.  »  (De  bello 
gaUiro,  VII.  64,  {  1.)  a  Omnem  ab  se  equitatum  noctu  dimittere,  VII,  71,  §  i. 
Milia  hominum  délecta  LXXX  una  secum  interitura demonàtrat.  »  (Ibid.jl  3.) 


54  LIVRE  I-.  CHAPITRE  III.  SECTION  2. 

qu'une  année  trop  considérable  ne  pût  être  ni  conduite  ni 
approvisionnée  ;  elle  réduisit  le  nombre  des  cavaliers  à  en- 
viron moitié  :  de  quinze  mille  à  huit  mille ,  et  elle  réunit 
deux  cent  cinquante  mille  fantassins  (1).  C'est  trente  et  un 
fantassins  pour  un  cavalier,  trois  fois  plus  que  dans  la 
Rome  primitive  où  Ton  comptait  dix  fantassins  seulement 
pour  un  cavalier. 

E.  —  Clientes. 

Le  grand  vice  qu'offrait  la  constitution  politique  de  cha- 
cun des  Etats  gaulois  consistait  dans  le  système  de  la  gens 
ou  du  clan  et  de  la  clientèle,  et  dans  la  compétence  res- 
treinte des  tribunaux. 

La  Loi  des  Douze  Tables,  qui  remonte  au  milieu  du 
cinquième  siècle  avant  notre  ère ,  débute  par  une  procé- 
dure qui  appartient  déjà,  ou  peut  le  dire,  malgré  sa  haute 
antiquité ,  à  la  civilisation  moderne  ;  il  s'agit  de  la  citation 
à  comparaître  devant  le  magistrat  :  la  comparution  sera 
forcée;  le  juge,  sans  le  consentement  du  défendeur,  ren- 
dra, quoique  l'intérêt  privé  soit  seul  en  jeu,  une  sentence 
dont  l'exécution  sera  assurée  par  la  force  publique. 

Dans  le  droit  primitif  des  Indo-Européens,  cette  procédure 
est  inconnue,  il  n'y  a  de  juridiction  obligatoire  que  lorsqu'il 
s'agit  de  crimes  contre  la  sûreté  de  l'Etat  ;  c'est  alors  que 
le  magistrat  intervient.  Alors  l'accusé,  contraint  à  compa- 
raître devant  le  tribunal  qu'a  institué  la  coutume ,  c'est- 
à-dire  ordinairement  devant  le  peuple  ou  devant  le  roi , 
est,  en  cas  de  condamnation,  frappé  d'une  peine  que  la 
puissance  publique  fait  exécuter. 

Mais  la  puissance  publique  se  désintéresse  des  questions 
qui  ne  touchent  pas  aux  droits  et  à  la  sûreté  de  l'Etat  ;  et, 
à  cette  période  reculée,  les  crimes  et  les  délits  contre  les 


(1)  «  Coactis  equitum  VIII  milibus  et  peditum  circitcr  CCL.  »  {De  6#'//o 
gàUico,  VII,  76,  {  3.) 


INÉGALITÉ  DES  HOMMES  EN  GAULE.  5ô 

particuliers ,  même  le  meurtre  et  Tassassinat ,  sont  consi- 
dérés comme  aussi  indifférents  à  TEtat  que  les  contesta- 
tions civiles  :  la  mort  violente  d'un  homme  est  affaire  qui 
concerne  sa  famille  et  non  la  société.  Â  plus  forte  raison , 
le  vol  d'un  objet  appartenant  à  un  particulier  n'est  pas  du 
nombre  des  crimes  que  les  magistrats  ont  reçu  mission  de 
châtier.  Par  conséquent ,  celui  qui  est  accusé  de  vol  n'est 
pas  obligé  de  se  soumettre  à  la  juridiction  du  tribunal  pu- 
blic; à  ce  point  de  vue ,  pas  de  différence  entre  lui  et  la 
personne  à  laquelle  on  réclame  le  paiement  d'une  créance 
quelconque  ou  la  restitution  d'un  objet  emprunté. 

Celte  manière  de  distinguer  entre  l'intérêt  public  et  l'in- 
térêt privé ,  cette  indifférence  de  l'Etat  à  l'égard  du  second, 
nous  explique  la  constitution  de  la  société  en  Gaule  ,  à 
l'époque  de  la  conquête  romaine ,  sous  un  double  aspect  ; 
elle  nous  fait  comprendre  l'origine  de  la  juridiction  des 
Druides  et  le  grand  développement  du  système  de  la  clien- 
tèle. Il  V  avait  deux  façons  de  résoudre  les  contestations 
privées  :  Tune  était  de  s'adresser  à  un  tribunal  arbitral,  à 
des  hommes  investis  de  la  confiance  des  parties  et  dont 
les  deux  adversaires  promettaient  d'accepter  la  sentence  ; 
l'autre  consistait  à  employer  la  force  :  la  famille  de  celui 
qui  avait  été  tué  prenait  les  armes,  obtenait  Taide  du  chef 
dans  la  clientèle  duquel  elle  était  placée  (1),  se  faisait  sou- 
tenir par  ses  clients  si  elle  en  avait  au-dessous  d'elle, 
puis  elle  tuait  le  meurtrier  quand  il  ne  lui  payait  pas  la 
composition  pour  meurtre;  le  volé,  accompagné  de  ses 
parents,  de  ses  clients,  ou  de  son  patron  s'il  était  lui- 
même  dans  la  clientèle  d'un  autre ,  cherchait  à  reprendre 
l'objet  volé  et  à  enlever  en  outre  d'autres  objets  équivalant 
comme  prix  à  l'indemnité  pour  vol ,  fixée  par  l'usage  ;  en 
cas  d'insolvabilité  du  voleur,  ce  qui  était  le  plus  fréquent, 
le  volé ,  s'il  le  pouvait ,  s'emparait  de  la  personne  du  vo- 


lt) •  âuos  enim  qnisque  opprimi  et  circumveni  non  patitur.  »)  (De  bello 
gMieo,  livre  VI,  c.  il,  |  4). 


56  LIVRE  !•'.  CHAPITRE  III.  SECTION  2. 

leur ,  et  la  coutume  lui  reconnaissait  sur  ce  malheureux  le 
droit  de  vie  et  de  mort  (1). 

Quand  on  n'avait  pas  recours  à  la  force ,  le  tribunal  ar- 
bitral auquel  on  s'adressait  ordinairement  en  Gaule,  au 
temps  de  César ,  était  celui  des  Druides  (2)  :  cela  résultait 
de  leur  réputation  de  science  et  de  leur  prestige  religieux. 
Parmi  les  Gaulois ,  un  certain  nombre  avaient  été  leurs 
élèves,  ou  leur  confiaient  eux-mêmes  l'éducation  et  l'in- 
struction de  leurs  enfants  ;  tous  les  Gaulois  les  considé- 
raient comme  investis  d'une  puissance  surnaturelle  et  en 
quelque  sorte  divine ,  qui  leur  faisait  prévoir  l'avenir  et 
connaître  dans  le  présent  les  choses  les  plus  secrètes  :  il 
était  logique  de  les  prendre  pour  arbitres  quand,  dans  une 
contestation ,  on  voulait  éviter  TefFusion  du  sang  (3).  Mais 
s'adresser  à  cet  arbitrage  n'était  pas  obligatoire. 

Lorsqu'on  recourait  à  la  force,  il  est  clair  que  les  chances 
les  plus  nombreuses  étaient  du  côté  de  celui  qui  pouvait 
mettre  en  ligne  le  plus  grand  nombre  de  combattants  :  de 
là  l'utilité  de  la  clientèle ,  qui  donnait  aux  parents  de  la 
partie  lésée  des  auxiliaires  quelquefois  très  nombreux  et 
qui  pouvait  d'autre  part  assurer  l'impunité  du  coupable  en 
lui  donnant  un  appui.  On  connaît  par  César  l'histoire  d'Or- 
gétorix  qui,  accusé  de  haute  trahison,  se  présenta  devant 
le  tribunal  national  en  amenant  avec  lui  ses  parents ,  ses 
esclaves,  ses  clients  et  ses  débiteurs;  il  inspira  ainsi  à  ses 


(1)  Naturellement  le  meurtrier  et  le  voleur  cherchaient  à  se  défendre  et 
appelaient  à  leur  aide  leur  famille  et  leur  patron.  De  là  ces  guerres  conti> 
nuelles  dont  parle  César,  VI,  15, 1 1  :  Hi  [équités]  cum  est  usus  atque  aliqnod 
bellum  incidit  (quod  fere  ante  Caesaris  adventum  quotannis  accidere  solebat 
uti  aut  ipsi  injurias  inferrent  aut  illatas  propulsarent)  omnes  in  bello  versantur. 

(2)  Caesar,  De  bello  gallico^  VI,  13,  §  5  :  a  Nam  fere  de  omnibus  contro- 
yersiis  publicis  privatisquc  constituunt;  et,  si  quod  est  admissum  faci- 
nus,  si  caedes  facta,  si  de  hercditatc,  do  finibus  controvorsia  est,  iidem 
decernunt  ;  praemia  pocnasque  constituunt.  »  —  Les  druides  ne  jugeaient, 
comme  on  dit,  qu'au  civil,  même  en  cas  de  crime ,  oh  ils  fixaient  le  chiffre 
de  la  composition  due  par  le  condamné  et  ne  prononçaient  pas  de  peine 
dans  le  sens  français  du  mot  en  droit  criminel. 

(3)Z)ebe2{oyaaico,  VI,  13,  14;  Cicéron,  De  divinalione,  livre  1,  |90.  Diodore 
de  Bielle,  1.  V,  c.  31,  f  5;  éd.  Didot,  p.  273, 1.  4-15. 


INÉGALITÉ  DES  HOMMES  EN  GAULE.  57 

juges  une  terreur  si  grande  qu'ils  n'osèrent  d'abord  enta- 
mer son  procès  (l). 

La  majorité  du  sénat  des  cités  gauloises  était  impuissante 
contre  le  sénateur  ou  le  chevalier  qui  réunissait  autour  de 
lui ,  grâce  à  Tappui  de  sa  gen^  et  de  ses  clients ,  une  force 
armée  supérieure  à  celle  dont  la  majorité  du  sénat  pouvait 
disposer.  Chez  les  Helvetii,  le  chiffre  total  de  la  population 
s'élevait  à  263,000  âmes  ,  dont  un  quart ,  soit  environ 
65,000  ou  66,000,  en  état  de  porter  les  armes  (2)  ;  les  «  gens  » 
d'Orgétorix ,  sa  gens  ou  son  clan ,  c'est-à-dire  ses  parents 
et  ses  esclaves ,  débiteurs  et  clients  non  compris ,  étaient 
au  nombre  de  10,000  hommes,  près  du  sixième  de  la  popu- 
lation guerrière  totale  ;  Orgétorix  entreprit  de  tenir  tête  à 
l'autorité  légale,  et,  après  un  succès  momentané,  il  ne  put 
échapper  à  une  défaite  certaine  qu'en  perdant  la  vie. 

D'autres,  par  leur  clientèle,  furent  maîtres  de  leur  cité. 
Quand  en  51,  Correus,  après  avoir  soulevé  en  vain  les 
Bellovaques  contre  les  Romains,  eut  succombé  dans  la 
lutte ,  les  sénateurs  bellovaques  soutinrent  que  cette  ré- 
volte avait  eu  lieu  malgré  eux,  et  ils  obtinrent  grâce  de 
César  (3).  L'année  précédente ,  Vercingétorix  avait  pris  les 
armes  contrairement  à  la  volonté  des  principes  de  sa  cité  (4) 
et  l'avait  emporté  sur  eux  à  l'aide  des  clients  qu'il  avait 
réunis  (5). 

C'était  l'anarchie  ;  elle  a  fait  le  succès  des  Romains.  La 
brillante  entreprise  de  Vercingétorix  a  été,  par  son  succQ^ 
momentané,  un  des  symptômes  les  plus  caractéristiques 


(1)  «  Orgetoriz  ad  judicium  omnem  suam  familiam,  ad  hominum  milia 
decem,  nndique  coegit,  et  omnes  clientes  obaeratosque  suos,  quorum  mag- 
num nuroemm  babebat ,  eodom  conduzit  ;  per  eos  ,  ne  causam  diceret ,  se 
eripnit.  >  {De  bello  gaUico^  livre  I,  4,  §  2.) 

(2)  D€  bello  gallico,  I,  29,  i  2. 

(3)  Ibid.,  VIII,  21,  22. 

(4)  «  Probibetur  a  Gobannitione  patnio  suo  reliquisque  prineipibut.  »  (De 
beUo  gallico,  VII,  4,  {  2.) 

(5)  <  In  agris  babet  dilectum  egentium  ac  perditonim.  »  (De  bello  paUtco, 
VII.  4.  I  3.) 


58  LIVRE  I".  CHAPITRE  III.  SECTION  2. 

de  la  défectueuse  organisation  sociale  qui  a  rendu  défini- 
tive la  défaite  des  Gaulois. 

Il  est  question  de  la  clientèle  des  chefs  gaulois  dans  un 
certain  nombre  d'autres  passages  du  De  belle  gallico.  Nous 
les  citons  en  note.  On  y  voit,  par  exemple,  qu'une  ville 
entière  pouvait  être  comprise  dans  la  clientèle  d'un  chef. 
Telle  était  Uxellodunum  chez  les  Cadurci^  cet  oppidum 
dont  le  siège  par  César  fut  un  des  événements  principaux 
de  la  campagne  de  51  (1). 

Quand  le  chef  considérait  ou  prétendait  considérer  la 
cause  du  client  comme  légitime,  il  lui  donnait  sa  protection  : 
rien  n'était  dangereux  comme  de  faire  tort  au  client  d'un 
chef  puissant;  de  là,  la  multiplication  de  la  clientèle,  qui 
était,  pour  les  hommes  de  condition  inférieure,  une  garan- 


(1)  Dumnorigom...  magnum  numonim  equitatus  suo  sumptu  semper  alere 
et  circum  se  habere  »  (I,  18,  §  5). 

«  Equitum...  ut  quisque  est  genero  copiisque  amplissimus ,  ita  plurimos 
circum  se  ambactos  clicntesque  habet,  Hanc  unam  gratiam  potentiamque 
novorunt  »  (De  bello  gstUico  VI,  15,  g  2).  —  La  même  organisation  existait 
chez  les  Gaulois  d*Italio  :  «  Ilepl  5è  xàç  étaipeCoc  (icyiorviv  oicoufi^v  éiroioOvro, 
ttà  TÔv  foCtpbiTaxov  xal  SuvaTcoxatov  slvai  irap*  aOxoTc  toOtov  8c  &v  icXeCorou; 
i^tiv dox)  Toùc  OftpaiccuovToc,  xal  av|Aicepi9epo(iévovc  aÙTû  »  (Polybe,  1.  II,  c.  XVII , 
I  12).  Cf.  circum  se  habere  et  ou|iitepi9epo|iivovc.  Le  mot  grec,  comme  les 
trois  mots  latins,  traduit  le  gaulois  ambactos  =s  ambi-acto-s. 

«  Paulo  supra  hanc  memoriam  servi  et  clientes ,  quos  ab  lis  dilectos  esse 
constabat,  justis  funeribus  confectis,  una  cremabantur  d  {De  bello  gallico  ^ 
VI,  19.84). 

ff  Vercingotoriz ,  Celtilli  filius ,  arvernus ,  summae  potentiae  adulescens 
(cujus  pater  principatum  Galliae  totius  obtinuerat,  et  ob  oam  causam,  qood 
regnum  appetebat,  ab  civitate  erat  interfcctus)  convocatis  suis  dientibus, 
facile  inccndit  »  (VII,  4,  g  1). 

«(  [Aoduorum]  civitatem  esse  omnem  in  armis,  divisum  scnatum,  divisum 
populum  ;  suas  cujusque  eorum  clientelas  »  (VII,  32,  g  5). 

«  Litaviccus  cum  suis  clientibus  «  quibus  more  Gallorum  nefas  est  etiam 
in  extrema  fortuna  desercre  patronos,  Gergoviam  profugit  »  ^VII ,  40,  {  7). 

«  Lucterius...  oppidum  Uxellodunum  quod  in  clientela  fuerat  ejus...  oc- 
cupât »  (VIII,  32,  i  2). 

Aux  fragments  VI,  19,  g  4,  et  VII.  4,  §  1,  comparez  le  fragment  suivant,  III, 
22, 1-3  :  «  Adiatunnus...  cum  sexcentis  devotis,  quos  illi  soldurios  appellant 
(quorum  baec  est  condlcio,  uti  omnibus  in  vita  commodis  una  cum  his 
fruantur  quorum  se  amicitiae  dediderint;  si  quid  ils  per  vim  accidat,  aut 
eundem  casum  una  ferant ,  aut  sibi  mortom  consciscant  ;  neque  adhuc  ho- 
minum  memoria  ropertus  est  quisquam,  qui ,  eo  interfecto ,  cujus  se  amici- 
tiae dei^ovisset,  mori  recusaret).  » 


INÉGALITÉ  DES  HOMMES  EN  GAULE.  59 

tie  de  sécurité  beaucoup  plus  qu'un  état  de  servitude  (1). 
Entre  le  système  de  la  clientèle  gauloise  et  la  féodalité 
française  du  moyen  &ge,  il  y  a  une  grande  analogie ,  mais 
aussi  de  grandes  différences. 

F.  <—  La  féodalité  française  repose  sur  le  ffrincipe  de  la  propriété 
individueUe  du  sol ,  et  ce  principe  n'existe  pas  chez  les  Celtes, 

La  féodalité  si  puissante  au  moyen  &ge  en  France,  dans 
les  Etats  voisins,  même  en  Orient,  et  qui  jouait  encore  chez 
nous  un  rôle  si  brillant  au  siècle  dernier,  était  fondée 
sur  la  propriété  immobilière.  La  France  féodale  nous  appa- 
raît comme  un  vaste  ensemble  de  domaines  fonciers  sys- 
tématiquement étages  les  uns  au-dessus  des  autres.  Les 
relations  de  suprématie  et  de  subordination  qui  relient 
entre  eux  le  suzerain  et  le  vassal  sont  la  conséquence  de 
relations  identiques  entre  le  domaine  du  premier  et  le  do- 
maine du  second.  Ces  relations  se  répétant  de  degré  en 
degré,  on  peut  se  figurer  la  France  féodale  comme  une 
sorte  de  pyramide ,  au  sommet  de  laquelle  la  royauté  repose 
sur  les  grands  fiefs  :  duchés  de  Normandie,  de  Bourgogne 
et  de  Guyenne ,  comtés  de  Flandre ,  de  Champagne  et  de 
Toulouse  ;  les  grands  fiefs  s  appuient  sur  des  fiefs  secon- 
daires mouvant  d*eux  en  pins  grand  nombre  ;  ces  derniers 
sur  d*autres  moins  importants  et  dont  le  nombre  est  en- 
core bien  plus  considérable. 

Un  fief  consiste  en  une  habitation  grande  ou  petite,  avec 
des  dépendances  plas  ou  moins  étendues  ;  c*est  d*abord 
un  chftteau  magnifique  avec  une  vaste  province,  c'est  en- 


(1)  «  No  quis  ex  plèbe  contra  potentiorem  auxilii  egeret.  Suos  onim  quis- 
que  opprimi  et  circumveni  non  patitur;  neque,  aliter  si  faciat,  ullam  inter 
suos  babet  auctoritatom.  »  (De  belle  gallico,  VI,  il,  f  4.)  La  société  germa- 
nique était  organisée  d'après  les  mêmes  principes  ;  celui  qui  tuait  le  client 
d*un  hommo  puissant  était  exposé  à  une  vengeance  d'autant  plus  redouta- 
ble que  la  clientèle  du  patron  était  plus  nombreuse,  plus  habile  au  manie- 
ment des  armes  et  bien  commandée  ;  c'est  une  dos  raisons  pour  lesquelles 
dans  la  loi  sallque  le  v^ehrgeld  des  leudes  royaux  est  si  élevé. 


60  LIVRE  I".  CHAPITRE  III.  SECTION  2. 

suite  un  château  moins  beau  dont  dépend  un  petit  comté 
ou  une  baronnie  ;  plus  bas  c'est  une  maison  forte  qui  do- 
mine un  village ,  enfin  c'est  une  chaumière  avec  un  petit 
champ  ;  à  chacune  de  ces  propriétés  s'attachent  des  droits 
ou  des  charges,  de  là  le  rang  occupé  dans  la  société  féo- 
dale par  rhomme  auquel  le  flef  appartient. 

Soit  le  comté  de  Champagne  :  c'est  un  des  grands  fiefs 
du  royaume  de  France  ;  si  Thibaut  le  Chansonnier  est  vas- 
sal du  roi  saint  Louis,  c'est  que  Thibaut  le  Chansonnier  a 
hérité  du  comté  de  Champagne.  Du  comté  de  Champagne 
dépend  le  comté  de  Brienne  ;  Gautier  IV,  prenant  posses- 
sion du  comté  de  Brienne  au  temps  où  Thibaut  le  Chan- 
sonnier était  comte  de  Champagne ,  devient  par  là  vassal 
de  Thibaut  le  Chansonnier.  A  son  tour,  le  comté  de  Brienne 
a,  comme  on  dit,  une  mouvance  :  de  lui  meut,  par  exemple, 
la  seigneurie  d'Epagne ,  qui  est  un  simple  village  où  une 
petite  maison  forte  sert  d'abri  à  un  modeste  feudataire ,  à 
un  petit  gentilhomme;  celui-ci,  à  cause  de  sa  maison  forte 
et  de  sa  seigneurie ,  dépendance  du  comté  de  Brienne ,  est 
vassal  de  Gautier  IV,  comte  de  Brienne.  Au  pied  de  la  pe- 
tite maison  forte  du  seigneur  d'Epagne,  on  voit  rangées 
de  pauvres  cabanes  en  bois  couvertes  de  chaume  ;  des  vi- 
lains les  habitent  et ,  à  cause  de  ces  masures ,  ils  sont  les 
vassaux  du  seigneur  d'Epagne. 

Que  les  vilains  d'Epagne  abandonnent  leur  misérable 
chaumière,  que,  mécontents,  ils  partent,  laissant  au  seigneur 
d'Epagne  l'immeuble  qui  a  créé  le  lien  féodal  entre  eux  et 
lui,  ils  sont  dégagés  et  cessent  d'être  ses  vassaux.  De 
même,  le  seigneur  d'Epagne  peut  remettre  sa  terre  aux 
mains  de  Gautier  IV,  comte  de  Brienne ,  et  briser  ainsi  le 
lien  qui  l'unit  à  son  suzerain.  A  leur  tour ,  le  comte  de 
Brienne,  le  comte  de  Champagne  ont  chacun,  à  l'égard  de 
leur  suzerain ,  le  même  droit.  La  propriété  territoriale  est 
la  base  de  la  féodalité  française  au  moyen  âge  ;  et ,  dans 
les  temps  modernes,  ce  principe  a  persisté  jusqu'à  la  Ré- 
volution, 


INÉGALITÉ  DES  HOMMES  EN  GAULE.  61 

La  féodalité  celtique  se  fonde  sur  un  principe  tout  diffé- 
rent. En  général ,  chez  les  Celtes ,  la  propriété  immobilière 
est  collective  ;  le  sol  appartient  au  peuple ,  c'est  principa- 
lement un  vaste  pâturage  semé  çà  et  là  d'ilôts  cultivés  ;  en 
droit,  il  est  commun  à  tous  les  citoyens,  et  par  consé- 
quent les  chefs  du  peuple ,  les  membres  influents  de  Taris- 
tocratie,  qui,  de  fait,  en  ont  principalement  la  jouissance, 
mais  qui  n'en  ont  pas  la  propriété,  n'ont  sur  lui  aucun 
droit  réel,  ils  ne  peuvent  donc  transformer  le  sol  en  sa- 
laire, ils  ne  peuvent  en  disposer  pour  payer  le  dévouement 
de  leur  clientèle  ;  c'est  par  le  don  ou  le  prêt  d'objets  mo- 
biliers qu'ils  se  créent  des  vassaux. 

Cette  doctrine  n'est  pas  imaginaire ,  ce  ne  sont  pas  des 
raisonnements  arbitraires  qui  nous  ont  conduit  à  la  soutenir, 
elle  résulte  des  textes.  Un  des  plus  anciens  auteurs  qui  nous 
ait  laissé  des  indications  un  peu  précises  sur  les  mœurs  des 
Gaulois  est  Polybe  ;  il  écrivait  au  second  siècle  avant  notre 
ère  ;  nous  lui  devons  d'intéressants  détails  sur  les  guerres 
soutenues  par  les  Romains  contre  les  Gaulois  en  Italie  à 
partir  des  premières  années  du  quatrième  siècle  avant  J.-C. 
Or,  suivant  lui,  ces  Gaulois  qui  prirent  Rome,  et  qui  depuis 
la  firent  longtemps  trembler,  se  nourrissaient  principalement 
de  viande ,  et  chez  eux  la  fortune  de  chacun  consistait 
exclusivement  en  or  et  en  troupeaux  (1).  Ce  qu'ils  man- 
geaient, c'était  surtout  la  chair  de  leur  bétail  (2)  ;  ils  vivaient 
de  l'élevage  du  bétail ,  et ,  sans  ignorer  l'agriculture ,  ils 
demandaient  aux  céréales  une  très  petite  partie  de  leur 
alimentation.  Ce  fut  seulement  après  la  conquête  romaine 
que  la  culture  du  sol  prit  en  Gaule  une  place  importante. 
«  Autrefois,  »  nous  dit  Strabon  en  l'an  19  de  notre  ère, 
environ  un  siècle  et  demi  après  Polybe,  «  autrefois  les 
Gaulois  étaient  guerriers  plutôt  que  laboureurs,  aujour- 


(!)  «  "YwoipCfc  ye  i*^  ixàtnoiQ  fy  (^éy.\iaxa  xaX  xpw^«  »  (Polybe.^  livre  ÎI , 
c.  XVII,  i  11;  cf.  i  10).  Seconde  édition  de  Didot,  p.  80. 
(2)  0  KpttdçoYeîv  »  (Polybe?  ibid,,  l  10). 


6Î  LIVRE  I-.  CHAPITRE  III.  SECTION  2. 

d'hui  ils  sont  forcés  de  cultiver  la  terre  (1).  »  La  conquête 
romaine  donna  la  paix  :  on  vit  se  développer  ragriculture, 
tandis  que  se  transformait  en  propriété  individuelle  le  do- 
maine collectif  de  chaque  peuple,  ager  publicus. 

G.  —  jLa  féodalité  eeUique  dans  Vantiquité. 

Dès  Tépoque  reculée  à  laquelle  nous  fait  remonter  la 
description  des  mœurs  des  gaulois  chez  Polybe,  —  que  cette 
époque  soit,  comme  cet  auteur  le  semble  dire ,  celle  de  la 
prise  de  Rome  par  les  Gaulois,  390  avant  J.-C,  que  ce 
soit  la  fin  du  troisième  siècle  avant  J.-C,  date  à  laquelle 
a  été  écrite  l'histoire  romaine  de  Fabius  Pictor,  source 
probable  de  ce  passage  de  Polybe,  peu  importe,  —  à  l'épo- 
que dont  il  s'agit,  une  sorte  de  féodalité  celtique  existait, 
fondée,  comme  nous  le  disons,  sur  le  don  ou  le  prêt  d'ob- 
jets mobiliers,  c'est-à-dire  évidemment  de  bestiaux  dans 
la  plupart  des  cas.  De  là,  chez  les  Gaulois,  des  groupes 
d'hommes  réunis  chacun  sous  l'autorité  d'un  chef,  comme 
nous  le  raconte  Polybe.  «  Parmi  les  Gaulois,  »  dit-il, 
«  celui  qui  se  fait  le  plus  craindre,  celui  qui  exerce  la  plus 
grande  puissance ,  est  celui  qui  se  montre  entouré  du 
nombre  le  plus  considérable  de  serviteurs.  »  Je  traduis  par 
«  serviteurs  »  le  mot  grec  ôepaiwuovraç  ;  mais  il  y  a  dans  la 
phrase  grecque  une  autre  expression  qui  relève  singuliè- 
rement la  dignité  de  ces  serviteurs  gaulois  :  Ces  hommes, 
nous  dit  Polybe ,  forment  avec  leur  chef  une  association 
de  camarades,  âtaipeia  (?). 

  une  autre  extrémité  du  monde  celtique ,  en  Irlande , 
le  mot  consacré  par  l'usage  pour  désigner  un  vassal  signifie 


(i)  «  01  8'dvdpsç  \uf,yi\xa\  (iâX).ov  fj  yecopYot,  vvv  S'&vaYxdCovxat  YMSpT'îv ,  xaTa- 
esiJLcvoi  Ta  IhrXa  »  (Strâbon,  livre  IV,  c.  I,  §  2,  édit.  Didot,  p.  147,  1.  51-52). 

(2)  «  IIcpl  8è  tac  éxaiptta;  piEy'oTTiv  oicov6if|v  èicotoûvto ,  8tà  ri  xal  9o6cpwTaTov 
xal  (uvaTcoTaTov  cTvai  icap*  avToT;  toOtov  ,  d;  &v  ir>t(aTov;  Ix^t^^  ^ox^  toOc  Scpa* 
ittuovToc  xal  av|»cepi9Kpo|iévou;  aOTCf»  »  (Polybe,  livre  II,  c.  XVli,  {  12,  2*  édit. 
Didot,  p.  80-.  Le  grec  av|jiitepifepo(i(vo;  est  la  traduction  du  gaulois  ambactus. 
César  exprime  la  mémo  idée  par  circum  se  habere  (VI,  16,  2). 


INÉGALITÉ  DES  HOMMES  EN  GAULE.  6S 

en  même  temps  «  associé ,  »  ce  mot  est  cèle.  Il  appartient 
au  vocabulaire  de  Tecclésiastique  irlandais  qui ,  au  neu- 
yième  siècle,  a  glosé  les  épitres  de  saint  Paul.  Chez  ce 
glossateur  le  mari  est  le  cèle  de  sa  femme,  la  femme  est 
le  cèle  de  son  mari  (1)  ;  les  membres  d*une  paroisse  chré- 
tienne qui  se  réunissent  pour  manger  les  agapes  sont  cèle 
l'un  de  l'autre  (2).  Or,  dans  la  langue  du  droit  irlandais, 
le  vassal  est  le  cèle  de  son  suzerain  ;  cèle  veut  dire  «  vassal  » 
dans  le  Senchus  Môr.  Les  jurisconsultes  irlandais  distin- 
guent le  soer-chéle  (3)  ou  «  vassal  franc  »  du  doer-chéle  (4) 
ou  «  vassal  dépourvu  de  liberté  ;  »  la  première  de  ces 
expressions  glose  au  neuvième  siècle  le  liberlus  Domini 
«  affranchi  du  Seigneur  »  de  saint  Paul  (5). 

La  c(  vassalité  »  s'appelle  céilsine ,  au  moyen  âge  dans  le 
Senckus  Môr  et  dans  les  autres  écrits  des  vieux  juriscon- 
sultes irlandais,  et  au  neuvième  siècle  le  glossateur  irlan- 
dais de  saint  Paul  emploie  le  composé  co-cèilsine  pour 
expliquer  à  ses  compatriotes  le  latin  societas  dans  le  pas- 
sage où  saint  Paul  parle  de  Tassociation  formée  entre  lui 
et  les  apôtres  pour  la  prédication  de  TEvangile  (6).  Il  y 
eut  dès  lors ,  entre  saint  Paul  et  les  apôtres ,  une  sorte  de 
camaraderie,  tel  est  le  sens  du  mot  irlandais  céilsine  : 
saint  Paul  et  les  apôtres  furent  des  camarades ,  cèli.  Or, 
céiUine  est  l'expression  consacrée  pour  désigner  les  rela- 

(1)  Manuscrit  de  Wurzbourg ,  f  9  d ,  glose  sur  la  première  aux  Corin- 
ihicns,  c.  VII,  verset  5  ;  chez  Zimmer,  Glossae  hibemicae,  p.  64.  Cèle  veut 
dire  mari  dans  le  Senchus  Môr  {Ancient  Iaw«  of  Ireland,  I,  52,  250;  II,  386, 
396,400). 

(2)  Manuscrit  do  Wurzbourg,  {•  11  d,  glose  sur  la  première  aux  Corin- 
thiens, c.  II,  verset  33,  chez  Zimmer,  p.  72. 

(3)  Glose  du  Senchus  Môr  {Ancient  iaw»  of  Ireland,  II,  204,  ligne  24). 

(4)  Daercheile,  0*Donovan,  supplément  à  O'Reilly. 

(5)  Sàirchele  do  Dia  (Ad  Corinthios,  I,  c.  vu,  verset  22,  ms.  de  Wurz- 
bourg) texte,  bien  lu  par  Zcuss-Ebel,  Gr.  Ci,  31,  mal  lu  par  Zimmer,  Clos- 
Me  hibemicae,  60,  corrigé  par  Whitley  Stokos,  Literarisches  Ceniralblatt , 
1883,  p.  1673,  col.  1,  ligne  18,  correction  admise  par  M.  Zimmer,  Supple- 
mentum^  p.  8. 

(6)  Ms.  de  Wurzbourg,  ^  19  a,  glose  sur  l'épîtrc  aux  Galatos,  ch.  II,  v.  9, 
chez  Zimmer,  p.  119.  Le  mot  céilsine  se  trouve  dans  le  Senchus  Môr  y  aux 
pessages  publiés  dans  Ancient  Inws,  II,  206,  268,  282. 


64  LIVRE  I-.  CHAPITRE  IIl.  SECTION  2. 

lions  que  là  vassalité  créait  entre  le  chef  irlandais  et  les 
subordonnés  attirés  par  ses  largesses.  Les  formes  égalitai- 
res  qui  déguisaient  la  rudesse  de  la  hiérarchie  sociale 
irlandaise  au  moyen  âge  étaient  si  puissantes  que  les 
relations  du  vassal  au  suzerain  étaient  considérées  comme 
établissant  entre  eux  une  sorte  de  camaraderie.  Déjà  la 
vassalité  était  une  camaraderie,  suivant  Polybe,  chez  les 
Gaulois  du  sud  des  Alpes  à  Tépoque  reculée  où  ils  se  sont 
emparés  de  Rome,  390  ans  avant  J.-C. 

Nous  retrouvons  le  vasselage  à  Tépoque  de  César  dans 
la  Gaule  transalpine ,  avec  cette  différence  toutefois  que , 
si  nous  en  croyons  le  grand  capitaine,  la  condition  des 
vassaux  aurait  été  fort  dure.  La  plèbe,  dit-il,  vit  dans  une 
situation  qui  est  presque  celle  des  esclaves ,  elle  ne  prend 
l'initiative  de  rien,  elle  n'est  appelée  à  aucun  conseil.  La 
plupart  de  ses  membres ,  accablés  soit  par  les  dettes ,  soit 
par  de  lourds  impôts ,  soit  par  l'injustice  des  grands ,  se 
soumettent  eux-mêmes  à  la  servitude  en  prenant  pour  maî- 
tres les  nobles  qui  ont  sur  eux  les  mômes  droits  que  sur 
des  esclaves  (1). 

Il  y  a  certainement  là  beaucoup  d'exagération ,  puisque 
nous  savons  par  Strabon  que  dans  chaque  peuple  Gau- 
lois ,  le  chef  de  l'armée  était  élu  par  la  plèbe  (2) ,  et  que 
conformément  à  cette  théorie,  nous  voyons,  chez  César, 
la  plèbe  Arverne  élever  Vercingétorix  à  l'autorité  suprême 
pour  faire  la  guerre  aux  Romains.  Parmi  les  vassaux  des 
nobles ,  on  doit  distinguer  deux  classes ,  les  hommes  libres 
et  ceux  qui  ne  le  sont  pas.  Tous  les  débiteurs  des  nobles 
n'étaient  pas  réduits  à  une  condition  analogue  à  celle 
de  l'esclave  romain.  Orgétorix,  accusé  de  haute  trahi- 
son et  menacé  du  dernier  supplice ,  se  rend  devant  ses 


(1)  «  Plerique  cum  aut  aère  alieno ,  aut  magnitudine  tributorum ,  aut  in* 
juria  potcntiorum  premuntur,  sese  in  servitutom  dicant  nobilibus ,  quitus 
in  h08  eadem  omnia  sunt  jura  quac  dominis  in  servos.  »  (De  bello  gallico, 
VI,  13,  2.) 

(2)  Voir  plus  haut,  p.  44,  n.  4. 


INÉGALITÉ  DES  HOMMES  EN  GAULE.  65 

juges ,  accompagné  non  seulement  de  dix  mille  parents  et 
esclaves ,  mais  aussi  d'un  grand  nombre  de  clients  et  de 
débiteurs  qui  n'étaient  par  conséquent  ni  ses  parents  ni 
ses  esclaves  :  le  procès  est  suspendu  (1).  César  se  plaint  de 
ce  qu  un  des  obstacles  à  la  conquête  de  la  Gaule  par  les 
Romains  était  la  puissance  des  gens  assez  riches  pour 
prendre,  moyennant  salaire,  des  hommes  à  leur  service  (2). 
Ces  hommes  étaient  des  guerriers  libres  qui  vendaient  leur 
concours.  Les  clients  et  les  débiteurs  qui  firent  suspendre 
le  procès  d'Orgétorix  étaient  des  hommes  libres  qui  avaient 
accepté  un  suzerain  et  qui  lui  devaient  leur  appui.  Tels  sont 
aussi  cf  ces  pauvres  et  ces  hommes  perdus ,  »  —  delecium 
egentium  et  perditonimi ,  dit  César ,  —  que  Vercingétorix, 
banni  par  l'aristocratie  arverne,  joint  à  sa  clientèle  et  avec 
Taide  desquels,  devenu  maître  de  TEtat,  il  exile  à  son  tour 
ceux  qui  l'avaient  chassé  (3). 

Il  est  évident  que  les  chefs  gaulois  avaient  deux  catégo- 
ries de  vassaux  :  les  uns ,  compagnons  de  leurs  combats , 
tenaient ,  quoique  pauvres ,  un  rang  presque  égal  au  leur  ; 
les  sôer-chéli  de  l'Irlande ,  vassaux  francs ,  dont  le  nom 
glose  le  libertus  Domini  de  saint  Paul ,  leur  ressemblent 
beaucoup  ;  les  autres  étaient  des  bergers ,  des  ouvriers  ru- 
raux ,  dont  la  condition  était  analogue  à  celle  des  esclaves 
romains  :  on  peut  leur  comparer  les  vassaux  non  libres, 
doer-chéli ,  de  l'Irlande.  Ce  sont  les  vassaux  francs ,  sôer- 
chéli^  que  César  a  en  vue  quand,  parlant  des  habitudes 
belliqueuses  de  la  noblesse  gauloise,  il  dit  que  chez  elle  : 
«  Plus  un  homme  se  distingue  par  la  naissance  et  les  ri- 
chesses, plus  est  grand  le  nombre  des  ambacti  et  des 
clients  qui  l'entourent  à  la  guerre  (4).  »  Ambactus  est  un 


(1)  f  Omnem  snam  familiam...  omnes  cUentes  et  obaeratos  suos,  quorum 
magnum  numerum  habebat,  eodem  conduxit...  »  (De  bello  gallico,  I,  4,  §  2.) 

(2}  «  Quod  in  GaUia  a  potentioribus  atque  iis,  qui  ad  conducondos  homi- 
nés  facultatcs  babcbant ,  volgo  régna  occupabantur.  »  {De  bello  gallico,  II, 

1, 1  4.) 

(3)  De  bello  gallico,  VII,  4,  2§  2-4. 

(4)  n  Atquc  cornm  ut  quisque  est  ganere  copiisque  amplissimus,  ita  plu* 

5 


66  LIVRE  I**.  CHAPITRE  III.  SECTION  H. 

mot  gaulois  dont  «  client  »  est  la  glose  (1).  Diodore  de  Sicile, 
écrivant  après  César ,  mais  copiant  un  auteur  plus  ancien 
que  César  de  plus  d'un  demi-siècle,  parle  aussi  de  ces 
compagnons  de  guerre  des  chefs  gaulois  :  «  Ceux-ci,  »  dit-il, 
«  emmènent  avec  eux  des  domestiques,  qui  sont  des  hom* 
»  mes  libres ,  mais  pauvres ,  et  qui  leur  servent  de  cochers 
»  et  de  satellites  dans  les  combats  (2).  »  Diodore  ici  repro- 
duit probablement  la  relation  de  Poseidonios  d*Apamée  qui 
avait  visité  la  Gaule  vers  l'an  100  avant  notre  ère  ;  il  s'ac- 
corde avec  le  passage  plus  ancien  de  Polybe  que  nous 
avons  cité ,  au  commencement  de  ce  paragraphe  (3)  et  qui 
parle  de  «  camaraderie  »  entre  les  vassaux  et  les  chefs 
gaulois. 

Ainsi  en  Gaule,  au  premier  siècle  avant  notre  ère,  anté- 
rieurement à  la  conquête  romaine ,  il  existait  une  sorte 
d'organisation  féodale  ;  elle  était  distincte  de  l'Etat  :  à  côté 
des  magistrats  de  la  cité,  quelquefois  en  opposition  avec 
eux,  vivaient  des  grands  seigneurs  entourés  d'une  foule 
de  vassaux.  Avec  l'aide  de  ces  vassaux,  de  hauts  person- 
nages comme  Orgétorix  et  Correus,  tenaient  tète  aux  ma- 
gistrats ;  en  outre,  ils  avaient  le  concours  de  leurs  vassaux 
dans  les  guerres  privées,  fréquentes,  que  causait  l'absence 
de  toute  juridiction  établie  par  la  loi  pour  réprimer  les  cri- 
mes et  délits  contre  les  particuliers  (4). 

rimoB  circum  se  ambactos  clientesque  habet.  »  {De  bello  oialHco,  VI,  15,  {  2.) 

(1)  Le  mot  ambactus  a  été  employé  par  Ennius,  239-169  avant  Jcsus- 
Cbrist.  Il  parût  donc  avoir  été  porté  de  la  Gaule  Cisalpine  à  Rome,  an 
pins  tard  vers  le  commencement  du  second  siècle  avant  notre  ère.  Fcstus, 
qui  nous  a  conservé  cette  citation  d'Ennius,  en  nous  disant  que  le  mot  est 
gaulois,  traduit  ambactus  par  servu».  Il  ne  faut  pas  entendre  cette  traduc« 
tion  dans  le  sens  littéral;  elle  est  seulement  approximative.  Le  gaulois 
ambactus  n'avait  pas,  en  latin,  d'équivalent  exact  ;  sa  valeur  était  intermé- 
diaire entre  servus  et  clienê;  le  Uen  qui  attache  l'ambactus  au  chef  est 
moins  étroit  que  celui  qui  attache  le  servus  au  maître,  moins  lAche  que 
celui  qui  attache  le  client  romain  au  patron. 

(2)  a  *  Effdrfovxai  Sk  xal  OipairovTa;  éXeuOlpev;  Ix  Tâv  «sv^^taiv  xcRoXiYOVTtc ,  oTc 
^6xoK  xal  icoLpoomaraTc  XP^^'^  *^^^  ^^c  f^^*  ^  (Diodore  de  Sicile,  V,  29, 
1 2,  éd.  Didot,  I,  271.) 

(3)  Voyez  ci-dessus,  p.  58,  n.  i. 

(4)  t.  Alterum  genus  est  equitum.  Hi ,  cum  est  usus  atque  aliquod  bollum 


INÉGALITÉ  DES  HOMMES  EN  QAULE.  «7 

Mais  les  dons  par  lesquels  les  suzerains  gaulois,  au 
milieu  du  premier  siècle  avant  Jésus-Christ,  tenaient  ces 
Yassaux  dans  leur  dépendance  n'étaient  pas  immobiliers. 
Ces  gnmds  seigneurs  n'avaient  pas  d'immeubles  dont  ils 
pussent  disposer.  La  propriété  rurale  en  Gaule  était  encore 
indivise  dans  chaque  peuple;  la  propriété  b&tie  était  la 
seule  que  jusque-là  les  individus  se  fussent  attribuée ,  et 
la  nature  de  leurs  droits  sur  elle  n'est  pas  déterminée. 

Toutefois  la  terre  cultivée  en  Gaule,  bien  qu'appartenant 
à  chaque  peuple,  à  la  date  où  écrit  César,  est  l'objet  d'une 
jouissance  analogue ,  en  une  certaine  mesure ,  à  la  jouis- 
sance que  justifie  la  propriété  individuelle  ;  les  sénateurs 
et  les  chevaliers  jouissent  précairement  de  la  terre  culti- 
vée ;  ils  paient  pour  elle  une  redevance  à  l'Etat,  et  c'est 
pour  eux  que  cette  terre  est  labourée  et  moissonnée  par  la 
plèbe  réduite  presque  en  esclavage.  Quant  aux  prés,  pâtu- 
res et  bois ,  ils  sont  livrés  à  la  jouissance  commune  (1)  ; 
mais  c'est  principalement  aux  sénateurs  et  aux  chevaliers 
qu'appartiennent  les  bestiaux  qui  y  trouvent  leur  nourri- 
ture. 

incidit  (quod  fere  ante  Caesaris  advcntum  qnotannis  accidere  solebat ,  uU 
sut  ipsi  injurias  inforrent,  aut  illatas  propulsaront),  omnes  in  bello  veraan- 
tur.  >  {De  hello  gallico,  VI.  15,  {  1.) 

(1)  Cest  en  partie  Thistoire  de  Taper  publicus  romain.  Quand,  à  Romo,  la 
propriété  immobilière  individuelle  n*czi8tait  pas  et  que  la  fortune  de  cha» 
caa  consistait  en  esclaves  et  en  troupeaux,  lo^mot  pecunia  t  troupeaux  » 
fat  Texpression  créée  pour  désigner  la  fortune  de  chaque  particulier,  es- 
claves {familia)  déduits  ;  ce  sens  subsista  quand  les  immeubles  furent  en- 
trés dans  le  domaine  privé,  et  alors  on  entendit  que  les  immeubles  comme 
les  meubles  étaient  compris  dans  la  pecunia  de  chacun.  (Hcrmogénion  au 
Digeste,  livre  L,  t.  xvi,  loi  222.  Comparez  Tarticle  de  la  loi  des  Douze 
Tables  :  «  Utl  Icgassit  super  pecunia  [familiaque]  tutelave  suae  rei,  ita  jus 
este.  9  On  cite  ordinairement  ce  texte  d*aprës  Ulpien.  Le  mot  familia^  ou- 
blié par  Ulpien  ou  par  ses  copistes,  nous  a  été  conservé  par  Cicéron.) 


CHAPITRE   IV. 


l'agriculture  bt  les  lieux  habités  dans  la  gaule  barbare 
au  moment  de  sa  conquête  par  césar. 

Sommaire  : 

I  !•'.  L'agriculture.  —  f  2.  Les  lieux  habités  :  A.  Vici ,  —  B.  OppidM.  — 
C.  Aedi/lcia. 

S  !•'.  —  L'agriculture. 

Cicéron,  dans  sa  République^  prétend  qu'aux  yeux  des 
Gaulois  il  est  honteux  de  produire  le  blé  par  le  travail  des 
mains,  et  en  conséquence,  dit-il,  les  Gaulois  vont  ar- 
més moissonner  les  champs  d'autrui  (1).  Le  grand  orateur 
commet  là  une  grande  exagération.  Entendue  en  un  sens 
absolu ,  sa  doctrine  ne  peut  se  concilier  avec  les  faits  que 
nous  apprennent  Polybe  et  César. 

Si  nous  nous  en  rapportons  à  Polybe ,  les  Gaulois  qui 
ont  pris  Rome  au  quatrième  siècle ,  ou  plus  exactement 
ceux  qui  habitaient  l'Italie  du  Nord  au  troisième  siè- 
cle ,  se  nourrissaient  principalement  de  viande ,  mais  il  ne 
se  suit  pas  de  là  qu'ils  dédaignassent  l'agriculture  :  le 


(1)  0  Qalli  turpe  ducunt  frumentum  manu  quaerere,  itaque  armati  alienos 
agros  demetunt.  »  (De  re  pubiica,  livre  III ,  c.  iz,  2  15.)  -^  La  source  de  ce 
passage  parait  être  la  même  que  celle  de  Strabon,  quand  il  a  écrit  dans  sa 
description  de  la  Gaule  :  a  01  8*àv8pec  fiax^iTal  (iSXXov  ij  yttù^'^oi  »  (Poseido- 
nios?  vers  100  av.  J.-G.)'  —  La  suite  du  texte  de  Strabon  est  de  source 
plus  récente  :  «  Nûv  8e  àvapidCovrai  yuàçyiîw  xata6i(tevoi  Ta  6iû<a  »  (Strabon, 
livre  IV,  c.  I,  I  2,  édit.  Didot,  p.  147.  1.  51-52,  écrit  vers  l'an  20  de  J.-C). 


AGRICULTURE  EN  GAULE.  69 

contraire  est  même  établi,  puisque,  Fauteur  grec  le  dit 
formellement  :  ils  cultivaient  la  terre.  La  guerre  et  l'agri- 
culture étaient,  suivant  lui,  les  seuls  arts  qu'ils  connussent, 
et  la  simplicité  de  leur  vie  était  si  grande  qu'ils  couchaient 
sur  de  la  litière  (I).  Polybe,  dans  ce  passage,  copie  le  récit 
de  Fabius  Pictor  ;  ce  dernier ,  qui  écrivait  à  la  fin  du  troi- 
sième siècle,  décrit  probablement  les  mœurs  des  Gaulois 
italiens  de  son  temps. 

Au  troisième  siècle  avant  J.-C,  les  Gaulois  d'Italie 
mangeaient  de  la  viande ,  donc  ils  élevaient  du  bétail  ; 
des  deux  éléments  dont  chez  eux  alors  se  constituait  la 
fortune  et  qui  étaient  le  bétail  et  l'or,  le  bétail  est  celui 
que  l'historien  grec  nomme  le  premier  (2).  César  nous  parle 
aussi  du  bétail  élevé  par  les  Gaulois  auxquels  il  fit  la 
guerre  (3),  mais  nous  ne  pouvons  savoir  si  la  nourriture 


(1)  «  Ità  YÀp  ta  (rrt^aSoxoiTcTv  xal  xpeiiifaYsTv,  Iri  H  \Lrfiht  dlXXo  irXi^v  xà  icoXt- 
|taà  «aI  xà  «axà  yu&çrxia^  &axttv  dncXovç  e^X^  '^^C  pCouc  *  oOt*  éniOT^|iY)C  àXXiic , 
oÛTS  téxviK  '>^>p'  oOtoTç  to  icapdicGtv  yvmaino^isi^  »  (Polybe ,  livro  II ,  c.  XVII , 
i  10,  2*  édit.  de  Didot,  p.  80). 

(2)  «  Ticoplic  yt  i&^v  tnéaxoii  ^v  Opt|&|&aTa  xai  x^m^oç  »  (Polybe ,  livro  II , 
c.  rvn,  i  il). 

(3)  Nous  citerons  les  exemples  suivants  :  Dans  la  campagne  de  Tannée  56, 
César  s'empare  des  troupeaux  des  Morini  et  des  Menapii  :  a  Cum  jam  pe- 
eus  atque  extrema  impedimenta  ab  nostris  tenerentur.  »  (De  bello  g&HicOf  III, 
29,  2.)  En  Tannée  53,  il  prend  aux  Nervii  et  donne  à  ses  soldats  une  grande 
quantité  de  bestiaux  et  d'hommes  :  «  Magno  pecoris  atque  hominum  nu- 
méro capto  atque  ea  praeda  militibus  concessa  »  {Ibid,,  VI,  3,  2).  Il  entre 
dans  le  pays  des  Menapii  ;  un  grand  nombre  de  bestiaux  et  d'hommes  tom- 
bent en  son  pouvoir  :  t  Magno  pecoris  atque  hominum  numéro  potitur  » 
(Ibid.,  VI,  6,  1).  Les  Germains  appelés  par  César  s'emparent  des  nombreux 
troupeaux  que  possédaient  les  £5iirone8  :  a  Magno  pecoris  numéro...  po- 
tiantur  »  {Ibid.,  VI,  35,  6).  Au  siège  d'Avaricum,  en  52,  les  Romains  trouvent 
des  bestiaux  dans  la  campagne  »  {Ibid,^  VII,  17,  3  ;  cf.  20,  10).  La  même  an- 
née, César  s'empare  d'une  certaine  quantité  de  bestiaux  :  «  Pecoris  copiam 
nactus  9  surles  bords  de  la  Loire  {Ibid.,  VII,  56, 5);  les  défenseurs  d'Alésia 
ont  du  bétail  (VII,  71, 7).  En  51,  César  prend  aux  Eburones  leurs  troupeaux 
{ibid,,  VIII,  24,  4),  et  il  trouve  des  bestiaux  à  UxeHodunum,  chez  les  Cadurct 
(ibid.,  VIII,  41,  6).  Après  la  conquête,  les  Gaulois  fournissaient  de  manteaux 
de  laine  et  de  salaisons  Rome  et  une  grande  partie  de  l'Italie  au  commen- 
cement de  Tére  chrétienne  :  «  0\ktù;  S'Iorl  SaipiXfj,  xal  xà  iTo(|ivia  xal  Ta  {lofop- 
6ta  6tfT«  Tûv  ffdcyuv  xal  Ti)c  ToipixeCoiç  àçOovCav  \i^  t^  *Pb)|jL^  yopjiytXafiai  |i6vov  &).Xà 
xai  Toî;  «XsCoTOtc  fiipcat  T^jc  IvaXCaç  »  (Strabon,  livre  IV,  c.  iv,  )  3,  éd.  Didot, 
p.  164,  I.  2-5. 


10  LIVRE  I*.  CHAPITRE  IV.  |  t. 

animale  avait  chez  les  Gaulois  da  temps  de  César  Fimpor- 
tance  que  d*après  Polybe  on  devrait  lui  attribuer  chez 
ceux  du  troisième  siècle.  U  est  cependant  vraisemblable 
que ,  dans  la  Gaule  vaincue  par  César ,  ragriculture  et  le 
froment  tenaient  plus  de  {dace  que  dans  le  monde  celtique 
plus  ancien  de  l'Italie  du  Nord  auquel  se  rapporte  le  texte 
de  Poljhe. 

Le  degré  de  civilisation  auquel  étaient  parvenus  les 
Gaulois  transalpins  du  I"  siècle  av.  J.-C.  comportait  un 
développement  de  l'agriculture  qui  fusait  contraste  avec  le 
genre  de  vie  des  Germains.  «  Ceux-ci ,  »  nous  dit  César  y  «  ne 
mangent  pas  beaucoup  de  froment  et  vivent  principalement 
du  lait  et  de  la  chair  de  leurs  bestiaux  (1':;  >  les  Germains, 
ijoute  César ,  s*appliquent  peu  à  ragriculture  (2)  :  tandis 
qu*il  nous  représente  la  plupart  des  Gaulois  comme  occu- 
pés de  travaux  agricoles  {Z.  De  crainte  de  manquer  de 
blé,  le  général  romain  n*ose  pénétrer  en  Germanie  (4)  ;  au 
contraire,  en  Gaule,  fl  fût  habituellement  sans  diflSculté 
les  approvisionnements  de  Ué  nécessaires  à  la  nourriture 
de  son  armée. 

César  naturellement  parie  beaucoup  plus  de  ses  appro- 
visionnements que  de  ceux  des  Gaulois.  Cependant  son 
récit  nous  montre  les  HelTètes  faisant  les  semailles  les  plus 
considérables  qu*ils  peuvent  pour  se  procurer  le  blé  dont 
ils  auront  besoin  dans  la  grande  expédition  qu'ils  projet- 


•  'JOe  ktOm  faOâc»,  VI,  S,  {  1.)  —  «  Mi- 

.  ibêé^  VI,  a,  1 1). 

'!uni«l«  «lint  ex  GaBia  pcrditonim  homi- 
q^os  spcs  yrmfiliaiii  ■!» <i«—mc  beHandi  ab 
agrîcQltarm  et  coci%îiiao  Uiborv  mocatel.  >  Dt  d«L^  faHâca»  III»  17,  1.)  De 
BB  ae  doit  pas  tootefMs  ai  y  mu  œhu  oà  Straboa .  im  peu  plus 
et  dix  aa»  ptes  Uni .  pnesseabe  les  pcyrs  de  ragncoltnre  en 
le  ressttu  de  U  ciaayiète  rofluùel  «  *ài4fc;  pez^tsl  pAliv 
t  -ï— r;*^  '  wir»T«C»«~  T«iig?«S^  iiÉlàpâ»^  q  i^m»  C^î^re  IV,  c  i,  1  2, 
Pl  u:,  L  ^1-4^ ,  CL  o-dessss.  p.  Cts.  ■.  L 

»  U»«  W£;o  gaOica,  VI,  ^  I  U) 


AORICULTURB  EN  GAULE.  71 

tent  (1)  ;  au  moment  de  partir,  ils  brûlent  le  froment  qu'ils 
ne  peuvent  emporter  (2);  quand,  vaincus,  ils  retournent 
chez  eux,  c'est  du  froment  qu*il  leur  faut  pour  vivre,  et  les 
Âllobroges  le  leur  fournissent  par  ordre  du  vainqueur  (3). 

Lia  suite  de  son  récit  nous  apprend  que  les  approvi- 
sionnements des  défenseurs  d'Âlésia  et  d'Uxellodunum 
consistaient  en  froment  comme  en  bétail  (4).  Mais  c'est  au 
siège  d'Alésia  surtout  que  la  réserve  de  froment  réunie 
par  les  Gaulois  parait  avoir  été  considérable  :  il  y  avait 
de  quoi  nourrir  quatre-vingt  mille  hommes  pendant  un 
mois,  un  peu  plus  longtemps  même,  avec  de  l'économie  (5)  ; 
et  quand  cette  réserve  fut  épuisée  (6) ,  on  eut  beau  se  dé- 
faire des  bouches  inutiles ,  condamner  à  mourir  de  faim  les 
vieillards,  les  enfants  et  les  femmes,  et  joindre  à  cette 
cruauté  des  prodiges  de  valeur,  il  fallut  se  rendre. 

Antérieurement  à  ce  siège  célèbre,  quand  les  Belges 
rassemblèrent  contre  César  une  armée  de  plus  de  trois  cent 
mille  hommes ,  c'est-à-dire  un  effectif  environ  décuple  du 
sien  qui  était  de  huit  légions,  une  circonstance  imprévue 
les  mit  dans  l'impossibilité  de  tirer  parti  de  cette  énorme 
supériorité  numérique  :  le  froment  leur  manqua,  et  après 


(1)  «  Sementes  quam  maximas  facere  ut  in  itinera  copia  frumenti  suppe- 
teret.  b  (Oe  bello  gallico,  I,  3,  |  1.) 

(2)  c  Fnunentnm  omne,  praeterquam  quod  secum  portaturi  erant  combu- 
mnt.  »  {De  bello  gallico,  l,  5,  {  3.) 

(3)  «  AUobro^bus  imperavit  ut  iis  frumenti  copiam  facerent.  •  (i>e  bello 
yallico,  I,  28,  {  3.) 

(4)  An  siège  d^Alésia,  Vercingétorix  déclare  :  «  8e  exiguë  dierum  triginta 
habere  fmmentum...  Pecus  cujus  magna  erat  copia  ab  Mandubiis  compulsa, 
Tiritim  distribuit,  fmmentum  parce  et  paulattm  metiri  instituit.  »  (De  bello 
gellico,  VII,  71,  {  4.)  —  Avant  le  siège  d*Uxellodunum ,  Drapes  et  Lucte- 
rins  :  «  Magnum  numerum  frumenti  comparant  d  (ibtcf. ,  VIII,  34,  {  3).  — - 
Quand  la  source  où  les  assiégés  se  fournissaient  d'eau  est  coupée  :  «  Non 
tantnm  pecora  atque  jumenta,  sed  etiam  magna  hostium  multitudo  siti 
eonsumebatur  i»  {ibid,,  VIII,  41,  {  6).  —  Quand  César,  Tannée  précédente, 
avait  pris  Avaricum,  il  avait  trouvé  du  froment  et  d'autres  approvision- 
nements :  f  Summamque  ibi  copiam  frumenti  et  reliqui  commeatus  nanctus  » 
{ibid,y  VII,  32,  {  1).  Le  bétail  est  probablement  l'élément  fondamental  du 
reliqiMê  eommealus. 

(5)  De  bello  yalltco,  VH,  71,  {  4. 

(Q  m  Gonsainpto  onmî  frumanito.  »  {De  bello  geUicOf  VU,  77,  |  1.) 


n  LIVRE  !•'.  CHAPITRE  IV.  )  l. 

avoir  tenu  conseil ,  ils  conclurent  que  le  plus  sage  était  de 
retourner  chacun  chez  soi  (1).  Voilà  comment  les  Gaulois 
apprirent  Futilité  des  approvisionnements.  Aussi,  lorsque 
Tannée  suivante  les  Esubii^  les  Curiosolites  et  les  Veneti  se 
préparèrent  à  la  guerre ,  ils  transportèrent  des  champs  le 
froment  dans  les  oppida  (2).  Cet  exemple  fut  suivi  plus 
tard  à  Alésia  et  à  Uxellodunum. 

Pour  nourrir  son  armée ,  César  trouvait  du  froment  dans 
toutes  les  parties  de  la  Gaule  celtique  et  de  la  Belgique. 

Dans  la  Gaule  celtique ,  il  s'en  procure  chez  les  Aedui , 
chez  les  Sequani  et  chez  les  Lingones  (3) ,  c'est-à-dire  dans 
la  région  orientale  de  cette  contrée.  L'armée  romaine  en 
trouve  aussi  à  l'ouest  :  P.  Crassus,  prenant  avec  la  septième 
légion  ses  quartiers  d'hiver  chez  les  Andeccwi  que  César  ap- 
pelle Andesy  et  ne  pouvant  réunir  chez  eux  les  approvision- 
nements nécessaires,  envoie  chercher  le  reste,  notam- 
ment du  froment,  chez  les  Esubii,  les  Curiosolites  et  les 
Veneti  {i).  La  région  centrale  de  la  Celtique  fournit  aussi 
du  froment  aux  Romains  :  César  fait  observer  quAvaricum 
est  situé  au  milieu  d'une  campagne  très  fertile  (5),  et  quand 
il  a  commencé  le  siège  de  cette  place,  Vercingétorix  entame 
les  hostilités  en  faisant  attaquer  les  détachements  romains 
qui  vont  chercher  aux  environs  du  fourrage  et  du  fro- 


(1)  «  Ipsos  res  frumentaria  deficere  coepit,  eoncilio  convocato  constitue- 
runt  optimum  esse ,  domum  suam  quemque  reverti.  »  {De  bello  gallico,  II, 
10,  1  4.) 

(2)  c  Frumenta  ex  agris  in  oppida  comportant.  »  (De  bello  g&llico^  III, 
9,  l  8.) 

(3)  Arioviste  veut  couper  les  vivres  à  César  :  «  Uti  frumento  commeatuque 
qui  ex  Sequanis  et  Aeduis  supportaretur ,  Gaesarem  intercluderet,  >  [De 
bello  gallico^  I,  48,  {  2.)  Dans  la  même  campagne,  César  s'approvisionne 
chez  les  Sequani  et  les  Lingones  :  n  Frumentum  Sequanos...  Lingones 
subministrare  »  (tbtd.,  I»  40»  §  11).  Plus  tard  :  «  Q.  Tullium  Ciceronem  et  P. 
Sulpicium  Cabilloni  et  Matiscone  in  Aeduis  ad  Ararim  rei  frumentariae 
causa  collocat  »  (ibid.,  VII,  90,  §  7). 

(4)  «  Praefectos  tribunosque  militum  complures  in  finitimas  civitates  fni- 
menti  causa  dimisit ,  quo  in  numéro  est  T.  Terrasidius  missus  in  Esubios , 
M.  Trebius  Qallus  in  Curiosolitas,  Q.  Velanius  cum  T.  Silio  in  Venotos.  » 
{De  bello  g&llico,  III,  7,  U  3-4.) 

(5)  c  Agri  fertilissima  regione.  »  (De  bello  gàllico,  VII,  13,  {  3). 


AGRICULTURE  EN  GAULE.  73 

ment  (1).  Pendant  quelques  jours,  les  soldats  romains  furent 
réduits  à  ne  se  nourrir  que  de  viande.  Pour  leurs  estomacs 
italiens,  c'était  la  famine  poussée  à  ses  extrêmes  limites; 
mais,  suivant  leur  général,  ils  ne  montrèrent  jamais  plus 
de  grandeur  d'âme  ;  dans  cette  rude  épreuve ,  ils  ne  firent 
pas  entendre  une  plainte,  il  ne  sortit  pas  de  leur  bouche 
une  parole  indigne  de  la  majesté  du  peuple  romain  et  de 
leurs  précédentes  victoires  (2).  Cette  disette  momentanée 
fat  le  résultat  des  opérations  militaires  faites  par  Vercin- 
gétorix;  car  la  région  était  abondamment  pourvue  de  fro- 
ment. 

La  Gaule  Belgique  produisait  aussi  du  froment.  Les  Leixi 
en  fournissent  aux  Romains ,  pendant  la  guerre  contre 
Arioviste,  58  (3).  Dès  le  début  de  la  première  campagne  de 
Belgique,  57,  les  Rémi  promettent  du  froment  à  César  (4). 
À  la  fin  de  la  campagne  de  Tannée  54 ,  César,  sachant  que 
le  froment  n'avait  été  généralement  récolté  qu'en  petite 
quantité  dans  la  Gaule ,  disperse  ses  légions  afin  qu'elles 
trouvent  partout  sur  place  les  vivres  nécessaires;  il  met 
dans  la  Belgique  sept  légions  et  demie,  dont  une  chez  les 
Moriniy  une  chez  les  Nervii^  une  chez  les  Remif  une  et 
demie  chez  les  Eburones,  trois  chez  les  Bellovaci  (5)  ;  il  avait 
alors  à  Samarobriva,  chez  les  Ambiani,  une  réserve  de 
froment  recueilli  sans  doute  dans  les  environs  (6).  D'autres 
faits  de  guerre  établissent  l'importance  de  la  culture  du 
froment  chez  les  Belges.  Ainsi,  dans  la  campagne  de  l'an- 


(1)  9  Omnis  nostras  pabulationes  frumentationesque  observabat ,  disper- 
sosque...  adoriebatur.  »  (De  bello  gallico,  VII,  16,  {  3.) 

(2)  a  Usque  eo  ni  eomplures  dies  frumento  milites  canierint,  et  pecore  ex 
longinqnioribns  vicis  adacto  extremam  famem  sustentarent.  NuUa  tamen 
Toz  est  ab  eis  audita,  populi  romani  majestate  et  superioribus  victoriis  in- 
digna. 1  (De  bello  gallico^  VII,  17,  2  3.) 

(3)  «  Pramentum...  Leucos...  subministrare.  »  (De  béllo  gallico^  l,  40,  2  ^^O 

(4)  «  Paratos  esse...  frumento  ceterisque  rébus  juvare.  »  (De  bello  gal- 
lico,  n,  3,  2  3.) 

(5)  De  bello  gallico,  V,  24,  2  2. 

(6)  c  Samarobrivae...  frumentum  omne  quod  eo  tolerandae  hiemis  causa 
devexeral  relinquebat.  9  (De  bello  gaUico^  V,  47»  2  2) 


74  LIVRE  I".  CHAPITRE  IV.  {  1. 

née  55,  les  Romains  dévastent  les  champs  des  Mennpii  et 
coupent  leur  froment  (1).  Pendant  Tannée  54,  des  cavaliers 
germains  vont  chercher  du  froment  chez  les  Ambivaritiy 
sur  la  rive  gauche  de  la  Meuse  (2).  Quand,  en  Tannée  53, 
César  fit  saccager  le  pays  des  Eburones ,  les  froments  de 
ce  malheureux  peuple  furent  partie  mangés,  partie  dé- 
truits (3). 

Il  7  avait  cependant  en  Belgique,  à  côté  des  champs  de 
blé,  de  nombreuses  forêts.  L'une  d'entre  elle  existe  encore 
sous  le  nom  que  lui  donne  César  ;  c'est  la  forêt  d'Ardenne, 
autrefois  Arduinna  ;  elle  commençait  au  Rhin  à  Test,  cou- 
vrait une  partie  du  territoire  des  Treveri^  atteignait  à  l'ouest 
celui  des  Remi^  au  nord  celui  des  Nervii  et  TEscaut;  c'était 
la  plus  grande  de  toute  la  Gaule  (4)  ;  on  Thonorait  comme 
une  divinité  et  après  la  conquête  romaine  elle  fut  assimi- 
lée à  Diane  (5).  La  Gaule  renfermait  bien  d'autres  forêts , 
principalement  en  Belgique.  Ainsi  César,  lors  de  sa  dernière 
campagne,  en  51,  trouve  les  Bellovaci  et  leurs  alliés  cam- 
pés sur  une  colline,  au  milieu  d*une  forêt  qu'un  marais  en- 
veloppait (6).  Les  forêts  des  Eburones  (7),  celles  des  Mench- 
pii  (8),  des  Morini  (9)  et  des  Nervii  (10),  tiennent  une  grande 
place  dans  le  récit  des  opérations  militaires  qui  eurent  lieu 
chez  ces  quatre  peuples. 

Les  forêts  de  la  Celtique   paraissent  avoir  été   moins 

(1)  c  Omnibus  eorum  agris  vastatis,  framentis  succisis.  »  (De  bêllo  g^llico, 
IV,  38,  {  3.) 

(2)  «  Magnam  partom  equitatus...  praedandi  frumentandique  causa  ad 
Ambivaritos  trans  Mosam  missam.  »  (De  bello  gallico,  IV,  9,  {  3.)  c  Qui  fni- 
montandi  causa  ierant  trans  Mosam  »  (tbtd.,  IV,  12,  {  1  ;  cf.  IV,  16,  {  2). 

(3)  «  Frumenta  non  solum  a  tanta  multitudine  jumentorum  atque  hominum 
consumebantur  sed,  etiamanni  temporo  atque  imbribus  procubuerant.  »  {De 
bello  gallico,  VI,  43,  {  3.) 

(4)  De  bello  g&llico,  V,  3,  |  4;  VI,  29,  |  4;  51,  §  2;  33,  {  3. 

(5)  Corpus  inscriplionum  laiinarum,  t.  VI,  n*  46;  cf.  Brambach,  Inscrip- 
Hones  rhenanae,  n*  589. 

(6)  De  bello  gallico,  VIII,  7,  {  4;  cf.  c.  12,  g  1  ;  18,  {  1  ;  19,  1 1. 

(7)  Ibid.,  V,  32,  î  1  ;  37,  {  7;  VI,  30,  l  3;  34,  J  2;  37,  {  2. 

(8)  ma.,  III,  28,  29  ;  IV,  38  ;  VI,  5. 

(9)  I6id.,  III,  28,  29. 

(10)  /5W.,  II,  18,  19  ;  V,  39,  52, 


AGRICULTURE  EN  GAULE.  75 

considérables.  Cependant  le  récit  de  César  nous  en  montre 
chez  les  Arvemi  près  de  Gergovia  (1);  chez  les  BHuriges^ 
près  d'Avaricum  (2)  ;  chez  les  Cadurci ,  dans  le  voisinage 
d'Uxellodunum  (3);  chez  les  CamuteSy  qui,  fuyant  devant 
César,  se  réfugient  dans  }es  bois  et  en  sont  chassés  par  les 
rigueurs  de  Thiver  (4)  ;  chez  les  Senones  dont  les  bois  ser- 
vent d*asile  aux  soldats  vaincus  de  Camulogenus  (5);  chez 
les  Sequani  dont  les  bois  abritent  les  Tigurini  qui  échap- 
pent aux  légions  de  César  (6)  :  ces  bois  des  Sequani  de- 
viennent ensuite  par  leur  étendue  une  cause  d*effroi  pour 
les  Romains  au  début  de  la  guerre  contre  Ârioviste  (7). 

Mais  les  forêts  de  la  Gaule  semblent  avoir  été  considé- 
rées comme  dépourvues  de  valeur.  La  portion  du  territoire 
à  laquelle  on  attribue  du  prix  au  temps  de  César  est  celle 
qui  est  cultivée,  ce  sont  les  champs,  agri.  Ainsi,  quand  au 
conseil  de  guerre  tenu  par  les  défenseurs  d'Alise,  peu  de 
temps  avant  la  capitulation,  TArverne  Critognatus  rappelle 
la  guerre  des  Cimbres  et  les  maux  affreux  qu*elle  avait 
amenés,  il  ajoute  que  ce  peuple  est  parti  laissant  aux  Gau- 
lois leurs  lois,  leurs  champs,  agros,  et  leur  liberté,  et  que 
dans  ces  champs  les  Romains  veulent  s'établir  pour  impo- 
ser au  peuple  qui  les  habite  une  servitude  sans  fin  (8)  ;  des 
forêts  de  la  Gaule,  Critognatus  ne  dit  pas  un  mot. 

Les  Germains  contemporains  de  César  ont  pris  ou  veu- 
lent prendre  aux  Gaulois  non  pas  des  forêts,  mais  des 
champs;  ils  aiment  les  champs  des  Gaulois  (9);  une  des 
raisons  pour  lesquelles  César  force  les  Helvètes  vaincus  à 
retourner  dans  leur  pays  est,  dit-il,  la  crainte  que  séduits 


(1)  De  bello  g^llico,  VII,  44,  {  3;  45,  {  5. 

(2)  /6id.,  VII,  !6.  I  1  ;  18.  {  3. 

(3)  Ibid.,  VIII,  35, 1  3. 
l4)  Ibid.,  VIII.  5,  I  4. 

(5)  Ibid.,  VII.  62.  i  9. 

(6)  Ibid.,  I,  12,  1  3. 

(7)  Ibid.,  I,  39,  i  6. 

(8)  Ibid.,  VII,  77,  I  5, 

(9)  c  Agroft...  GaUorum...  adaniMseat.  »  {De  bello  gMllico,  I,  91,  |  ^\ 


76  LIVRE  !••.  CHAPITRE  IV.  |  1. 

par  la  bonne  qualité  de  leurs  champs ,  les  Germains  ne 
viennent  s'y  établir  (1).  Arioviste ,  lisons-nous  ensuite  ,  a 
forcé  les  Sequani  à  lui  abandonner  le  tiers  de  leur  ager 
qui  est  le  meilleur  de  toute  la  Gaule  ;  et  au  moment  où  les 
Gaulois  terrifiés  sollicitent  Tintervention  de  César,  le  roi 
barbare  vient  d'enjoindre  aux  malheureux  Sequani  de  lui 
céder  un  second  tiers  de  cet  ager  (2).  Quand  Arioviste, 
vaincu  par  les  Romains,  a  été  contraint  de  s'enfuir,  on  voit 
apparaître  d'autres  Germains  qui  demandent  des  champs , 
agros,  et  César  leur  répond  qu'il  n'y  en  a  pas  de  vacants  (3). 

Ce  sont  aussi  les  champs  et  non  les  bois  qu'entre  peu- 
ples gaulois  on  se  dispute.  Ainsi,  avant  l'arrivée  de  César, 
les  Sequani ,  grâce  à  l'appui  d' Arioviste ,  s'étaient  emparés 
d'une  partie  des  champs  des  Aedui  (4).  Les  Bellovaci  parlent 
à  César  avec  envie  des  champs  fertiles  que  possèdent  les 
SuessiùneSj  leurs  voisins  (5). 

Les  Aedui  y  ayant  besoin  d'auxiliaires  dans  leur  lutte 
contre  les  Sequani ,  espèrent  en  trouver  parmi  les  Boii  que 
l'audace  entreprenante  des  Helvetii  avait  entraînés  en  Gaule. 
Us  établissent  ces  Boii  dans  leur  territoire  et  leur  donnent, 
moyennant  une  redevance  annuelle,  des  champs,  agros  (6), 
où  ceux-ci  fondent  un  Etat  gaulois  nouveau. 

Le  récit  des  opérations  militaires ,  qui  sont  le  principal 
objet  des  Commentaires  de  César,  nous  offre  de  fréquentes 
mentions  des  champs  des  Gaulois.  Ainsi,  dans  la  Celtique, 


(1)  c  Ne  propter  bonitatem  agrorum,  Germani...  in  Helvetiorum  fines 
transirent.  »  (De  bello  gallico^  I,  28,  g  4.) 

(2)  Tertiam  partem  agri  Sequani  qui  esset  optimus  totius  Galliae  occupa- 
visset  et  nunc  de  altéra  parte  tertia  Sequanos  decedero  juberet.  »  (De  bello 
g&llico,  I,  31,  i  10.) 

(3)  De  bello  gallico,  IV,  7,  §  4  ;  8,  2  2. 

(4)  «  Partem  finitimi  agri  per  vim  occupatam  possiderent.  »  (De  bello  gai- 
lico ,  VI ,  12,  2  4).  Le  même  fait  est  rappelé  plus  loin  par  l'expression  mul- 
tàtoi  agris,  VII,  54,  2  4. 

(5)  a  Suessiones...  feracissimos  agros  possidere.  »  (De  bello  gallico,  II, 
4,  S  6.) 

(6)  c  Quibus  illi  agros  dederunt.  »  (De  bello  gallico,  1 ,  28,  2  ^0  César  ap- 
pelle les  Boii,  «  stipendiarii  Àeduorum  »  (De  bello  gallico,  VII,  10,  2  !•) 


AGRICULTURE  EN  GAULE.  77 

nous  voyons  les  Helvetii  ravager  les  champs  des  Aedui  (1) , 
les  Ymeti  transporter  des  champs  le  froment  dans  les  op- 
pida  (2).  César  invite  les  Aedui  à  venir  en  Belgique  ravager 
les  champs  des  Bellovaci  (3)  ;  dans  la  même  partie  de  la 
Oaule,  son  armée  dévaste  les  champs  des  Morini  et  des 
Menapii  (4)  ;  les  Menapii  qui  avaient  des  champs  sur  les 
deux  rives  du  Rhin  abandonnent  aux  Germains  ceux  qui 
étaient  sur  la  rive  droite  (5)  ;  Indutiomarus ,  chef  des  7V«- 
um,  annonce  qu'il  viendra  ravager  les  champs  des  Rémi  (6); 
César  dévaste  ceux  des  Nervii  et  par  là  les  contraint  à  la 
soumission  (7). 

Alors  donc  Tagriculture  était  un  facteur  important  de  la 
civilisation  Gauloise,  et  la  Gaule  avait  sur  la  Germanie 
une  grande  supériorité  agricole  ;  ajoutons  que ,  si  Ton  en 
croit  César ,  le  développement  de  l'agriculture  en  Grande- 
Bretagne,  à  cette  date ,  était  dû  à  la  colonisation  de  cette 
lie  par  les  Gaulois  du  continent  (8). 

§  2.  —  Les  lieux  habités. 

A.  —  Fict. 

Si  nous  nous  en  rapportons  à  Polybe ,  les  Gaulois  qui 
envahirent  l'Italie  au  quatrième  siècle  groupaient  leurs  ha- 
bitations en  villages  sans  murailles  (9).  Nous  devons  inter- 


(1)  c  In  Aeduomm  fines  pervenerant ,  eorumque  agros  populabantur.  » 
[ùt  bello  gallico,  1,  11,  {  1.) 
(^)  De  bello  gallico,  III,  9,  {  8. 

(3)  Ibid.,  II,  5,  i  3. 

(4)  t  Vastatis  omnibns  eoram  agris.  »  {De  bello  gàllico,  III,  29,  {  3,  {  3.) 

(5)  De  bello  çaIHco,  IV,  4,  {  3. 

(6)  Ibid,,  V,  56,  i  5. 

0)  «  Vastatisqne  agris,  in  deditionem  venire  atque  obsides  sibi  dare  coe- 
git.  •  (De  bello  gàllico,  VI,  3,  {  2.) 

(8)  c  Britanniae...  incolitur...  maritima  pars  ab  iis  qui  praedae  ac  belli  in- 
ferendi  causa  ex  Belgio  transienint...  et  beUo  iUato  ibi  permansenint  atque 
agn>8  colère  coeperunt.  »  (De  bello  gallico ,  V,  12, 1 1-2.)  «  Interiores  pie- 
riqtie  framenta  non  serunt  »  {Ibid,,  V,  14,  |  2). 

(9)  •  *Qxouv  Sa  xaxà  xib|iac  àxuxiarwç  »  (Polybe,  livre  II,  c.  XVii,  |  9  ;  2*  éd. 
Didot,  p.  80. 


78  LIVRE  !•'.  CHAPITRE  IV.  |  1 

prêter  ce  texte  en  ce  sens  que  tel  était  encore  l'usage  des 
Gaulois  dltalie  au  temps  de  Fabius  Pictor,  à  la  fin  du 
troisième  siècle.  Dans  ces  villages  sans  murailles  de  la 
Gaule  Cisalpine,  dont  parle  Polybe,  nous  devons  recon- 
naître des  groupes  d'habitations  analogues  aux  vici  transal- 
pins dont  il  est  souvent  question  chez  César. 

Ainsi,  au  début  de  la  guerre,  en  58,  les  Helvetii  ont  quatre 
cents  vici  qu'ils  brûlent  avant  de  quitter  leur  pays  (1)  et 
que  César  vainqueur  leur  ordonne  de  rebâtir  (2)  ;  les  Allô- 
broges  ont  des  vici  sur  la  rive  droite  du  Rhône  et  les  Hel- 
vetii les  détruisent  (3).  Les  Belges  coalisés  en  Tannée  57 
brûlent  tous  les  vici  des  Rémi  qu'ils  peuvent  atteindre  (4). 
L'année  suivante,  Servius  Galba  avec  huit  cohortes  de  la 
douzième  légion  s'établit  pour  hiverner  dans  un  vicus  des 
Veragri  qui  est  appelé  Octodurus;  il  prend  pour  lui  et  pour 
ses  soldats  une  partie  du  vicus  et  il  en  chasse  les  habitants 
qu'il  oblige  à  se  réfugier  dans  l'autre  partie  de  ce  vicus  (5). 
La  même  année.  César  brûle  les  vici  des  Morini  et  des 
Menapii  (6).  Les  Menapii  avaient  des  vici  sur  les  deux  rives 
du  Rhin  (7)  ;  en  l'année  53 ,  César  brûle  ceux  qui  étaient 
sur  la  rive  gauche  (8)  ;  il  traite  de  même  ceux  des  Eburo^ 
nés  (9).  Vercingétorix  ,  au  début  de  la  grande  lutte  de 
l'année  52 ,  prescrit  de  brûler  les  vici  où  les  Romains  pour- 


(1)  De  bello  gallico,  I,  5,  |  1.  Quatre  cents  vici  pour  263,000  habitants 
supposent  par  viens  656  habitants ,  s'il  n'y  avait  pas  d'habitants  dans  les 
édifices  agricoles  isolés.  Les  Raurici,  les  Tulingi  et  les  Latovici  avaient 
aussi  des  vici  qu'ils  brûlent  (tbtd.,  |  4). 

(2)  Ibid.,  I,  28.  2  3. 

(3)  Ibid,,  I,  il,  i  5. 

(4)  Ibid.,  II,  7,  i  3. 

(5)  Ibid,,  III,  1,  l  4-6.  Le  nom  d*Octoduru8  désigne,  à  proprement  parler, 
un  point  fortifié  ;  mais  il  n'y  avait  probablement  de  fortifié  que  l'habitation 
d'un  chef  et  cette  habitation  avait  donné  son  nom  à  un  groupe  d'habita- 
tions moins  importantes  qu'aucune  enceinte  ne  protégeait.  Tcla  étaient, 
au  moyen  âge,  les  villages  bâtis  autour  des  châteaux. 

(6)  Ibid.,  III,  29,  {  3. 
CT)  Ibid.,  IV,  4,  i  3. 

(8)  Ibid.,  VI,  6,  i  1. 

(9)  Ibid.,  VI,  43,  I  2. 


LIBUX  HABITÉS  EN  GAULE.  79 

ront  trouver  du  fourrage  (1)  ;  pendant  le  siège  d'Avaricum , 
c'est  dans  les  vici  épargnés  par  les  Gaulois  que  César 
troavele  bétail  nécessaire  à  la  nourriture  de  son  armée  (2). 
Durant  la  dernière  campagne,  en  51,  les  Camutes  aban- 
donnent leurs  vici  (3}. 

Ainsi ,  les  Oaulois ,  au  temps  de  César ,  possédaient  un 
certain  nombre  de  vici,  c'est-à-dire  de  villages  ou  de  bourgs 
non  clos  de  murs  et  semblables  à  ceux  qui  faisaient  Thabi- 
tation  exclusive  de  leurs  compatriotes  italiens  du  troisième 
siècle  dont  Polybe  nous  parle.  Mais  ce  n'était  pas  tout.  Ils 
avaient  des  villes  fortes  que  César  appelle  oppida  ordinai- 
rement, et  quelquefois  urbes.  Ils  avaient  aussi  des  maisons 
isolées  I  aedificia, 

B.^  Oppida. 

L'usage  des  lieux  fortifiés  appelés  oppida  par  les  Romains 
existait  déjà  en  Gaule  au  temps  de  la  guerre  des  Cimbres, 
c'est-à-dire  à  la  fin  du  second  siècle  avant  notre  ère  (4)  ; 
au  siège  d'Alésia,  Critognatus  rappelle  à  ses  compatriotes 
qu'à  l'époque  où  les  Cimbres  et  les  Teutons  avaient  envahi 
la  Gaule,  les  guerriers  gaulois,  réfugiés  dans  les  oppida  et 
souffrant  les  plus  extrêmes  rigueurs  de  la  faim,  avaient  été 
réduits  à  se  nourrir  de  chair  humaine  (5). 

César  distingue  deux  sortes  à! oppida.  Les  oppida  des 
Bretons  consistent  en  une  portion  de  forêt  dont  une  levée 
de  terre  garnie  de  palissades  et  précédée  d  un  fossé  interdit 
l'accès  ;  c*est  un  lieu  de  refuge  momentané  où  l'on  cherche 
un  abri  contre  les  incursions  de  l'ennemi  (6).  Mais  les 


(1)  De  bello  g&llico,  VII,  14,  {  5. 
P)  Jbid.,  VIL  17,  I  3. 
(8)  16W..  VIII.  5,  i  1. 

(4)  La  défaite  du  consul  M.  Julius  Silanus ,  envoyé  pour  protéger  le  ter- 
ritoire des  AUobrogos,  eut  lieu  Tannée  109  avant  notre  ère. 

(5)  De  bello  gtUlico,  VII,  77,  {  l^- 

(6)  •  Oppidum  autem  Britanni  vocant  cum  silvas  impeditaa  vallo  atque 
fossa  munierunt,  quo  incursionis  hostium  vitandae  causa  convenire  consue- 
mat.  •  (De  beUo  gallico,  V,  21,  i  3.) 


M 


80  LIVRE  I-.  CHAPITRE  IV.  {  2. 

oppida  de  la  Gaule  sont  de  vraies  villes  :  des  murailles 
percées  de  portes  les  entourent;  elles  contiennent  des 
maisons  où  vit  une  population  stable,  ce  qui  ne  les  empêche 
pas  d'offrir,  en  cas  de  guerre,  un  refuge  aux  habitants  des 
campagnes  voisines,  non  seulement  pour  eux-mêmes,  mais 
aussi  pour  leurs  troupeaux,  leurs  approvisionnements  et  le 
reste  de  leur  avoir  mobilier. 

Deux  passages  intéressants  des  Commentaires  de  César  nous 
expliquent  comment  les  Gaulois  construisaient  les  murailles 
qui  interdisaient  rentrée  de  leurs  oppida  (1).  Les  portes 
dont  ces  murailles  étaient  percées  se  fermaient  en  cas  de 
guerre,  comme  celles  des  oppida  possédées  par  les  Aulerci 
Eburovices  et  les  Leœovii  en  Tannée  56  (2)  ;  dans  le  récit  du 
siège  d'Avaricum,  il  est  souvent  question  des  portes  percées 
dans  les  murailles  de  cet  oppidum  (3).  Derrière  les  murailles 
des  oppida^  il  y  a  des  maisons  :  en  51,  César  faisant  camper 
son  armée  dans  Voppidum  de  Cenabum,  chez  les  Carnutes^ 
y  loge  une  partie  de  ses  soldats  dans  les  maisons  des 
Gaulois  (4)  ;  l'incendie  des  oppida  exécuté  chez  les  Helvètes 
en  58  (5) ,  prescrit  d'une  façon  générale  par  Vercingétorix , 
en  Tannée  52  (6),  suppose  des  maisons  dans  les  oppida  ;  et 
ce  qui  l'établit  d'une  façon  formelle,  ce  sont  les  expressions 
dont  se  sert  Tauteur  latin  pour  nous  faire  connaître  comment 

(1)  Dans  le  premier ,  il  est  question  de  Voppidum ,  où  se  réfugièrent  les 
Aduatuci  :  «  Quod  cum  ex  omnibus  in  circuitu  partibus  altissimas  nipes 
despectusque  haberet,  una  ex  parte  Icniter  acclivis  aditus  in  latitudinem 
non  amplius  ducentonim  pedum  relinquebatur;  quem  locum  duplici  altis- 
simo  muro  munierant  ;  tum  magni  ponderis  saxa  et  praeacutas  trabes  in 
muro  collocabant.  »  (De  bello  gallico,  II,  29.)  L'autre  passage,  plus  détaillé, 
se  trouve  au  livre  VII,  c.  23;  il  est  trop  long  pour  être  rapporté  ici. 

(2)  «  Aulerci  Eburovices  Lexoviique...  portas  clauserunt.  »  (De  bello  gàl- 
lico,  III,  17,  i  3.) 

(3)  De  bello  g&llico,  VII,  24,  25,  28,  47,  50. 

(4)  «  Gaesar...  in  oppido  Carnutum  Cenabo  castra  ponit  atque  in  tecta 
partim  Galloruro  partim  quae  collectis  celeriter  stramentis  (tentoriorum  in- 
tegendorum  gratia)  erant  inaedificata  milites  compegit.  »  (De  bello  g&llico , 
VIII,  5,  l  1.) 

(5)  De  bello  gallicOy  1 ,  5,  {  2;  cf.  28,  {  3  :  a  Oppida  sua  omnia  numéro 
ad  duodecim  incendunt.  » 

(6)  f  Oppida  incendi  oportere.  »  (De  bello  gallico^  VII,  14,  |  9.) 


UEVX  HABITÉS  EN  QAULE.  81 

chez  les  Bituriges  cet  ordre  fut  exécuté.  En  un  jour,  chez 
ce  peuple,  on  brûla  plus  de  vingt  villes,  urbes  (1).  UrbSj  en 
Gaule,  est  synonyme  d'oppidum  :  voilà  pourquoi  les  trois 
oppida  d'Avaricum,  de  Gergovia  et  d'Alésia  sont  désignés 
chez  César,  non  seulement  par  le  nom  à! oppidum^  mais 
aussi  par  celui  d'urbs  (2). 

Le  mot  latin  wrbs  suppose  non  seulement  des  maisons, 
mais  une  population  permanente  qui  les  habite  en  temps 
de  paix.  Cette  population  permanente  des  oppida  apparaît 
dans  le  passage  où  César,  racontant  un  usage  de  la  Gaule, 
dit  que  les  marchands  dans  les  oppida  sont  entourés  de  la 
foule  qui  les  questionne  sur  les  pays  d'où  ils  viennent ,  et 
qui  leur  fait  «raconter  les  nouvelles  qu'ils  y  ont  apprises  (3). 
C'est  la  population  permanente  des  oppida  qui  attire  dans 
ces  oppida  les  négociants  romains  pendant  les  campagnes 
de  César,  par  exemple  à  Cenabum,  chez  les  Commutes  (4), 
à  Cabillonum  (5)  et  à  Noviodunum  (6)  chez  les  Aedui  ;  ces 
négociants  furent  massacrés  dans  l'insurrection  de  l'an- 
née 52. 

Les  oppida  sont  beaucoup  moins  nombreux  que  les  vici  : 
chez  les  Helvetii,  on  compte  quatre  cents  vici  contre  douze 
oppida  :  un  oppidum  pour  trente-trois  vici.  Comme  chez 
les  Helvetii ,  il  y  a ,  chez  les  Suessiones ,  douze  oppida  ;  on 
en  trouve  plus  de  vingt  chez  les  Bituriges. 

Les  peuples  de  la  Gaule,  tant  Celtique  que  Belgique  où 


(1)  «  Uno  die  y  amplius  viginti  nrbes  Biturigum  incenduntur.  »  (De  bello 
gillico,  VII,  15,  !  1.) 

(2)  Pour  Avaricum,  y  oyez  De  bello  g&llicOy  VII,  15,  g  3,  4.  Pour  Gergovia, 
iWd.,  vu,  36,  î  1  ;  47,  }  4.  Pour  Alesia,  VII,  68,  g  3. 

(3)  c  Hoc  gadlicae  consuetudinis  uti...  mercatores  in  oppidis  volgus  cir- 
cnmsistat  quibusque  ex  regionibos  veniant  quasque  ibi  res  cognoverint 
pronuntiare  cogant.  »  (De  bello  gallico,  IV,  5,  g  2.) 

(4)  «  Cenabam...  cives  romanos  qui  negotiandi  causa  ibi  constiterant...  , 
interficiunt,  bonaqne  eorum  diripiunt.  »  {De  bello  gallico,  VII,  3,  g  1.) 

(5)  a  Ex  oppido  Cabillono  educunt...  qui  negotiandi  causa  ibi  constite- 
rant. >  (De  bello  gallico,  VII,  42,  g  5.) 

(6)  «  Interfectis  Novioduni  custodibus  quique  eo  negotiandi  causa  conve- 
aenat  {De  belh  gallico,  VII,  55,  g  5.) 

6 


«2  LIVRE  !•'.  CHAPITRE  IV.  {  2. 

nous  pouvons  signaler  des  oppida  sont  au  nombre  de  vingt- 
cinq,  savoir  dix-neuf  dans  la  Celtique  :  Aedui,  Ambarri, 
Arverni,  Aulerciy  Bituriges^  Biri,  Cadurci^  Camutes^  Curioso- 
lites,  Elvetii,  EsuAii,  Lexovii,  Mandubil^  Parisii^  Ptctones^ 
Raurici,  Senones,  Sequani^  Veneti;  six  dans  la  Belgique  : 
Aduatuci,  Bellovaci,  Eburones^  Nervii ,  Remif  Suessiones, 
plus  un  peuple  d'Aquitaine,  les  Sontiates. 

Nous  suivrons  Tordre  alphabétique  : 

Aduatii4)i.  Ils  avaient  des  oppida  dont  César  ne  nous  fait 
point  connaître  le  nombre.  L'auteur  latin  leur  attribue 
aussi  des  castella  qui  seraient  des  points  fortifiés  d'une  im- 
portance moindre.  Ils  abandonnèrent  à  Tennemi  tous  leurs 
castella  et  même  leurs  oppida,  à  l'exception  d'un  qui  était 
assez  considérable  pour  que  Ton  ait  pu,  après  plusieurs 
combats  meurtriers  dans  Tun  desquels  quatre  mille  guer- 
riers Aduatuques  périrent ,  y  faire  encore  cinquante-trois 
mille  prisonniers.  César  donne  des  détails  intéressants  sur 
la  double  muraille  de  cette  forteresse  et  parle  deux  fois 
des  portes  dont  cette  muraille  était  percée  (1). 

Aed^i.  Ce  peuple  possédait  un  nombre  d' oppida  qui  n'est 
pas  indiqué  et  Sont  quelques-uns  furent  pris  par  les  Hel- 
vetii  en  58  (2).  Cependant  il  ne  parait  pas  que  les  Germains 
ou  les  Sequani  en  eussent  enlevé  aucun  aux  Aedui  dans  la 
guerre  des  années  précédentes  (3).  Trois  oppida  des  Aedui 
sont  nommés  par  César  ;  ce  sont  Bibracte ,  Cdbillonum  et 
Noviodunum.  —  Bibracte  était  le  plus  important  des  trois  : 
c'était  même  le  plus  grand ,  le  plus  riche ,  le  mieux  appro- 
visionné de  tous  les  oppida  de  ce  peuple.  Nous  voyons  le 
général  romain  à  la  poursuite  des  Helvetii  se  détourner  de 
sa  route  dans  l'espérance  de  trouver  à  Bibracte  le  froment 
nécessaire  à  la  nourriture  de  ses  soldats  (4).  Bibracte  chez 

(1)  De  bello  gallicOj  II,  29-33;  cf.  p.  80,  note  1. 

(2)  «  Oppida  expugnari  non  debucrint.  »  (De  bello  gallico^  l,  11,  |  3.) 

(3)  «  Compulsos  in  oppida.  »  (De  bello  gallico,  VII,  54»  g  4.) 

(4)  «  Gum  exercitui  frumentum  metiri  oporteret,  et  quod  a  Bibracte,  op- 
pido  Aeduonim  longe  maximo  et  copiosissimo,  non  amplius  passuum  octo- 
dccim  aberat...,  Bibracte  iri  contendit.  »  (De  bello  g&llico,  I,  23,  {1.) 


LIEUX  HABITÉS  EN  QAULE.  83 

les  Aedui  semble  avoir  été  une  sorte  de  capitale  (1)  :  quand 
en  l'année  52 ,  les  Aedui  abandonnent  la  cause  romaine  et 
se  laissent  entraîner  dans  le  parti  opposé  dont  Vercingéto- 
rix  est  le  chef,  un  des  faits  principaux  par  lesquels  le  chan- 
gement des  esprits  se  manifeste  est  la  réception  à  Bibracte 
de  Litaviccus,  partisan  de  Vercingétorix,  et  quelque  temps 
auparavant  obligé  à  se  réfugier  à  Gergovie  chez  les  Arver- 
nes  (2)  ;  Convictolitavis ,  magistrat  suprême  de  la  cité , 
c'est-à-dire  vergobret ,  et  une  grande  partie  du  sénat  des 
Aedui  viennent  trouver  Litaviccus  à  Bibracte  ;  c'est  de  là 
qu'ils  envoient  des  ambassadeurs  à  Vercingétorix  ;  c'est  là 
qu'on  amène  à  Convictolitavis  les  otages  que  César  s'était 
fait  livrer  par  les  peuples  de  la  Gaule  ,  comme  garantie  de 
leur  fidélité  (3)  ;  une  assemblée  générale  de  toute  la  Gaule 
y  est  convoquée  et  s'y  réunit,  et  Vercingétorix  y  est  élu 
général  en  chef  (4)  ;  quelques  mois  après ,  César,  vain- 
queur de  Vercingétorix,  prend,  à  Bibracte,  ses  quartiers 
d'hiver  (5).  —  Cabillanum  parait  avoir  été  moins  important  : 
quand  les  Aedui  commencèrent  à  se  tourner  du  côté  de 
Vercingétorix ,  en  52 ,  un  de  leurs*  premiers  actes  fut  de 
chasser  les  négociants  romains  de  VoppidAAm  de  Cabillonum 
où  ils  s'étaient  établis  et  de  les  massacrer  en  route  (6)  ; 
c'est  aujourd'hui  Chalon-sur-Saône.  —  Noviodunum,  autre 
oppidum  des  Aedui^  probablement  Nevers,  était  en  quelque 
sorte  en  52  la  capitale  romaine  de  toute  la  Gaule  ;  César  y 
avait  placé  ses  approvisionnements  de  froment,  la  caisse 
centrale  de  l'armée,  les  chevaux  achetés  pour  sa  cavalerie, 
les  otages  qui  lui  garantissaient  la  fidélité  des  peuples  vain- 
cus ;  des  marchands  romains  s'y  étaient  installés  ;  une  gar- 
nison protégeait  le  tout  ;  cette  garnison  fut  massacrée  par 


(1)  «  Bibracii  quod  est  oppidum  apud  eos  maximae  auctoritatis.  p  (De  bello 
gàllico,  VII,  55,  i  4.) 
P)  De  bello  gallico,  VII,  40,  (  7. 

(3)  Ihid,,  VII,  55,  i  4,  6. 

(4)  Ibid,,  VII,  63,  i  5. 

(5)i6W„  VII,  90,  Î8;  VIII,  2,  J  l. 
(6) /6id.,  VII,  42,  J5,  6. 


84  LIVRE  I-.  CHAPITRE  IV.  |  1 

les  Gaulois  qui  s'emparèrent  de  Voppidum  et  de  ce  qu'il 
contenait,  et  livrèrent  Yoppidwm  aux  flammes  (1). 

Les  Ambarri,  clients  des  Aedui ,  avaient  des  oppida  que 
les  Helvetii  attaquèrent  pendant  la  campagne  de  Tan- 
née 58  (2). 

Arverni.  Chez  eux  était  le  fameux  oppidum  de  Oergovia 
près  Clermont-Ferrand,  assiégé,  pris  par  César  en  52  ;  Cé- 
sar qualifie  ordinairement  cette  localité  d*oppidum  ;  mais  il 
Fappelle  aussi  urbs  (3). 

Aulerci  Eburovices.  Ce  peuple  avait  des  oppida  dont  il  fit 
fermer  les  portes  en  56 ,  quand  il  se  prépara  à  la  guerre 
contre  les  Romains  (4). 

Bellovaci.  Dans  la  campagne  de  Tannée  57 ,  les  Bellova^i 
paraissent  avoir  abandonné,  sans  aucun  essai  de  résistance, 
leur  territoire  aux  Romains,  sauf  Voppidum  de  Bratus- 
pantium  où  ils  s'étaient  réfugiés  tous.  Or  ils  pouvaient  met- 
tre cent  mille  hommes  sous  les  armes  (5) ,  ce  qui  suppose 
une  population  de  quatre  cent  mille  âmes  réunie  dans 
Tenceinte  de  Bratuspantium.  Mais  probablement  ils  man- 
quaient de  vivres,  aussi  demandèrent-ils  la  paix,  en  sorte 
qu'en  approchant,  les  Romains  virent  sur  les  remparts ,  au 
lieu  de  guerriers,  des  femmes  et  des  enfants  qui  leur  ten- 
daient des  mains  suppliantes  (6). 

Bituriges.  Ce  peuple  avait  beaucoup  d'oppida  (7).  César 
en  nomme  deux  :  Avcmcum  et  Noviodunum.  Il  donne  au 
premier  non  seulement  la  qualification   d'oppidum  j  mais 

(1)  De  bello  g^lico,  VU,  55.  César,  ibid.y  VII,  33,  {  2  ;  90,  {  7,  menUozme  deux 
autres  localités  dépendant  des  Aedui.  C'est  d'abord  Decetia;  il  y  réunit,  en 
52 ,  le  sénat  des  Aedui  et  y  tint  une  sorte  d*assemblée  générale  de  la  cité, 
n  ne  nous  dit  pas  si  Decetia  était  un  oppidum  ou  un  vicus,  —  La  même 
observation  peut  être  faite  au  sujet  de  M&tisco ,  Mâcon ,  où  une  partie  des 
troupes  romaines  prirent  leurs  quartiers  d'hiver  à  la  fin  de  Tannée. 

(2)  De  bello  gallico,  I,  11,  {  4;  14,  {  3. 

(3)  Ibid.,  VII,  36,  l  1  ;  47,  |  4. 

(4)  Ibid.,  III,  17,  i  3. 

(5)  Zbid.,  II,  4,  {  5. 

(6)  Ibid.,  II,  13,  g  3. 

(7)  ff  Gum  latos  fines  et  complura  oppida  haberent.  c  (De  bello  gëUico , 
VIII,  2,  i  2.) 


LIEUX  HABITÉS  EN  GAULE.  85 

aussi  celle  de  ville,  urbs;  c'était  à  peu  près  la  plus  belle 
de  toute  la  Gaule.  Ou  évaluait  à  quarante  mille  personnes 
la  population  abritée  derrière  ses  murs  ;  toutes ,  sauf  huit 
cents,  furent  massacrées  par  les  Romains  irrités  de  leur 
révolte  (1),  Parmi  les  oppida  des  Bituriges,  Avaricum  ne 
méritait  pas  seul  le  titre  d'urbs  ;  plus  de  vingt  autres,  nous 
dit  César,  étaient  des  villes,  urbes^  et  on  fit  le  sacrifice  de 
les  brûler  pendant  la  grande  insurrection  de  Tannée  52  (2). 
Malheureusement  César  ne  nous  dit  pas  le  nom  de  ces 
vingt  villes  ou  oppida  des  Bituriges ,  un  seul  excepté ,  qui 
s'appelait  Noviodunum  et  dont  les  Romains  s'étaient  em- 
parés au  début  de  la  campagne  (3). 

Boii.  Ce  petit  peuple,  dont  rétablissement  en  Gaule  date 
de  Tannée  58,  avait  un  oppidum  qui  s'appelait  Gorgobina. 
Vercingétorix  voulut  le  prendre  (4).  César  lui  fit  lever  le 
siège  (5). 

Cadwci.  Chez  eux  se  trouvait  Toppidum  (ï  Uxellodunum^ 
qui  était  dans  la  clientèle  de  Lucterius  c'est-à-dire  dont  les 
habitants  étaient  clients  de  ce  chef  gaulois  lorsqu'il  prit 
les  armes  contre  les  Romains,  en  Tannée  51.  Le  continua- 
teur de  César  raconte  longuement  comment  cette  place  fut 
approvisionnée,  assiégée,  défendue  et  prise,  et  comment 
César,  dont  il  vante  la  clémence  politique,  laissa  la  vie 
aux  vaincus,  mais  ordonna  de  couper  les  mains  à  tous  ceux 
d'entre  eux  qui  avaient  porté  les  armes,  et  fit  ainsi  de 
chacun  d'eux  un  témoin  de  sa  vengeance  (6). 

Camutes.  En  Tannée  51 ,  terrifiés  par  Tannonce  de  la 
prochaine  arrivée  de  César,  ils  abandonnent  les  oppida  où 
ils  s'étaient  réunis ,  se  dispersent  dans  les  bois  et  finissent 


(1)  c  Pulcherrimam  prope  totius  Galliae  urbem  quae  praesidio  et  orna- 
mento  sit  civiUU.  »  (De  bello  gallico,  VII,  15,  }  4;  c.  28,  §  4.) 

(2)  a  Uno  die  ampUus  viginti  urbes  Biturigum  incenduntur.  »  (De  bello 
gàlUco,  VII,  15,  î  1.)  • 

(3)  De  belU)  gallico,  VII,  12,  13. 

(4)  ma.,  VII,  9,  t  6. 

(5)  Ibid,,  VII,  12,  §  1. 

(6)  Ibid,,  VIII,  32-44. 


86  LIVRE  I".  CHAPITRE  IV.  |  2. 

par  se  réfugier  chez  les  peuples  voisins.  César  explique  à 
ce  propos  que  les  Camutes  avaient  un  certain  nombre  d'op- 
piday  qu'à  la  suite  des  revers  subis  par  eux  Tannée  précé- 
dente (1)  ils  en  avaient  abandonné  une  partie,  s'étaient 
concentrés  dans  les  autres  et  dans  plusieurs  vici,  et  habi- 
taient fort  à  l'étroit  de  petites  maisons  construites  à  la  hâte 
pour  résister  aux  rigueurs  de  Fhiver  (2).  Il  n'y  a  qu'un  de 
leurs  oppida  dont  le  nom  nous  soit  connu  :  Cenabum ,  où 
s'étaient  établis  des  négociants  romains  dont  le  massacre 
donna  le  signal  de  la  grande  insurrection  de  l'année  52  (3). 
César,  irrité,  parut  presque  immédiatement  sous  les  murs 
de  Cenabum.  Après  en  avoir  fait  brûler  les  portes ,  il  pé- 
nétra avec  son  armée  dans  l'intérieur  des  fortifications. 
Pour  venger  les  citoyens  romains  qui  avaient  été  mis  à 
mort  dans  cet  oppidum,  ses  soldats  massacrèrent  non  seu- 
lement les  hommes,  mais  encore  les  femmes  et  les  enfants. 
Après  avoir  enlevé  le  butin,  les  Romains  livrèrent  les 
maisons  aux  flammes  (4).  L'année  suivante,  César  revint 
dans  cet  oppidum  avec  deux  légions  qu'il  y  fit  camper. 
Les  Gaulois  avaient  rebâti  les  maisons  brûlées  l'année 
précédente.  Une  partie  des  soldats  s'y  logea;  les  autres 
s'établirent  dans  des  cabanes  construites  à  la  hâte  (5). 

Curiosolites.  C'est  un  des  trois  peuples  qu'en  l'année  56 
César  nous  montre  fortifiant  leurs  oppida  et  y  réunissant 
des  approvisionnements  de  froment  (6). 

Eburones.  Quand  César ,  en  l'année  53 ,  eut  entrepris  de 

(1)  De  bello  gallico,  VII,  11. 

(2)  a  Desertis  vicis  oppidisquc,  quae  tolerandao  hiemis  causa  constitutis 
repente  exiguis  ad  noccssitatem  aedifîciis  incolobant  (nuper  enim  devicti 
complura  oppida  dimiserant),  dispersi  profugiunt.  v  (De  bello  gallico^  VIII, 

5,  i  1.) 

(3)  De  bello  g&llico,  VII,  3,  §  1  ;  17,  g  7.  * 

(4)  «  Oppidum  diripit  atque  incendit.  »  (De  bello  gallico,  VII,  11,  }  9; 
cf.  28,  8  4). 

(5)  «  In  oppido  Carnutum  Cen&bo  castra  ponit  atque  in  tecta  partim  Gai- 
lorum,  partim  quae  collectis  celcriter  stramentis...  erant  inaedificata,  milites 
compegit.  »  (De  bello  gallico,  VIII,  5,  §  2.) 

(6)  a  Oppida  muniunt...  frumenta  ex  agris  in  oppida  comportant.  »  (De 
bello  gallico,  III,  9,  {  8 ;  cf.  6,  g  4;  8,  g  3.) 


LIEUX  HABITES  EN  GAULE.  87 

détruire  ce  peuple  obscur  (1),  qui  lui  avait  infligé  l'humilia-  I 

lion  d'extenniner  un  corps  de  troupes  de  quinze  cohortes  i 

ou  d'une  légion  et  demie ,  il  ne  trouva  pas  d'oppidum  qui 

lui  résistât  (2).  Il  ne  nomme  qu'un  de  ces  oppida^  auquel  il  , 

donne  le  titre  de  castellum;  c'est  AduaPuca,  point  central 

de  la  contrée.  César  y  plaça  ses  bagages  sous  la  garde 

d'une  légion  (3). 

Elvetii^ynlgBiTemeni  Helvetii.  Ce  peuple  possédait,  comme 
les  Suessiones^  douze  oppida  qu'il  brûla,  croyant  les  aban- 
donner pour  toujours.  César  obligea  les  Helvetii  d'y  re- 
tourner et  de  les  reb&tir  ;  mais  il  ne  nous  donne  les  noms 
d'aucune  de  ces  places  fortes  (4). 

Esubii.  C'est  un  des  trois  peuples  que  César  nous  mon- 
tre fortifiant  et  approvisionnant  leurs  oppida ,  au  commen- 
cement de  la  campagne  de  l'année  56  (5). 

Leœovii,  Ce  peuple  prit  les  armes  contre  les  Romains  en 
l'année  56;  après  avoir  massacré  tous  les  sénateurs  qui 
s'opposaient  à  la  guerre,  les  Leœovii  fermèrent  les  portes 
de  leurs  oppida  (6). 

Mandubii.  Chez  eux  était  Alesia ,  place  assez  vaste  pour 
renfermer  les  quatre-vingt  mille  soldats  de  Vercingétorix. 
C'est  un  des  oppida  que  César  appelle  urbs.  Tout  le  monde 
connaît  l'histoire  du  siège  célèbre  de  cette  place ,  dont  la 
prise  rendit  définitive  la  conquête  de  la  Gaule  (7). 

Nervii.  César  vainqueur  et  leur  ayant,  prétend-il,  tué 
cinquante-neuf  mille  cinq  cents  guerriers  sur  soixante 
mille  qu'ils  avaient,   leur  laissa  leur  territoire  et  leurs 

(1)  •  Civitatem  ignobilem  atque  humilem.  »  (De  bello  gallicOf  V,  28,  |  1.) 
8ar  le  sens  de  ces  mots,  voyez  ci-dessus,  p.  37. 

(2)  ff  Non  oppidum,  non  praesidium,  quod  se  armis  defendoret.  »  (De  bello 
gàllico,  VI,  34.) 

(3)  c  Impedimenta  omnium  legionum  Aduatucam  contulit.  Id  casteUi  no- 
men  est.  Hoc  fere  est  in  mediis  Eburonum  finibus.  »  {De  bello  g&llicoy 
VI,  32,  I  3,  4.) 

(4)  De  bello  gallico,  I,  5,  {  2  ;  28,  |  3. 

(5)  Jbtd.,  III,  9,  l  8. 

(6)  /Md.,  m,  17,  i  3. 

(7)  /Md.,  VII,  68-89. 


88  LIVRE  I-.  CHAPITRE  IV.  |  2. 

oppida  dout  il  ne  s'est  pas  soucié  de  nous  faire  connaître 
les  noms  (1). 

Poâ^isii,  Ils  avaient  un  oppidum  que  les  manuscrits  des 
Commentaires  de  César  appellent  LuteHa.  Les  Gaulois  y 
mirent  eux-mômes  le  feu  (2).  L'année  précédente ,  César  y 
avait  réuni  l'assemblée  générale  des  Gaulois  (3). 

Pictones.  Chez  eux  se  trouvait  Voppidum  Lemon/umt  où 
Duratius,  partisan  des  Romains,  fut  inutilement  assiégé 
en  51 ,  par  Dumnacus ,  chef  des  Andecavi  (4). 

Raurici.  Entraînés  par  l'exemple  des  Helvetii^  ils  brûlent 
comme  eux  leurs  oppida  en  58  (5). 

Rémi.  Lors  de  la  coalition  des  Belges  contre  les  Ro- 
mains, en  57,  les  Rémi  ofifrent  à  César  de  recevoir  ses 
troupes  dans  leurs  oppida  (6).  César  nous  apprend  le  nom 
d'une  de  ces  places  fortes  :  c'est  Bibrax.  Les  Belges  coa- 
lisés assiégèrent  cet  oppidAAm\  mais  l'arrivée  du  général 
romain  les  contraignit  à  battre  en  retraite  (7).  Plus  bas , 
César  nous  parle  d'une  autre  localité  située  chez  les  Remi^ 
Durocortorum  ^  où  il  tint  une  assemblée  générale  de  la 
Gaule  en  53.  Mais  il  ne  nous  dit  pas  si  c'était  un  oppidum 
ou  un  simple  vicus  (8). 

Senones,  En  53 ,  Acco  qui  s'est  mis  à  la  tète  de  la  résis- 
tance contre  les  Romains  chez  les  Senones ,  ordonne  à  la 
multitude  de  se  réunir  dans  les  oppida  (9)  ;  mais  l'arrivée 
rapide  de  César  empêcha  la  réalisation  de  cette  mesure. 
Les  Commentaires  nous  font  connaître  les  noms  de  trpis 


(i)  De  bello  gallico,  II,  28. 

(2)  «  Lutetiam... ,  oppidum  Parisiorum  quod  positum  est  in  insula  fla- 
minis  Sequanae...  Lutetiam  incendi  pontesque  ejus  oppidi  rescindi  jubent.  » 
(De  bello  gallico  y  VII,  57,  J  1  ;  58 ,  |  8.)  Les  manuscrits  de  Vmnértiire 
d'Antonin  offrent  Luticiaj  Luiecta,  Lutitia^  Lotica, 

(3)  De  bello  gallico,  VI,  3,  §  4. 

(4)  Ibid.,  VIII,  26,  27. 

(5)  Ibid.,  I,  5,  i  4. 

(6)  «  Oppidis  recipere.  »  (De  bello  gallicOf  II,  3,  {  3.) 

(7)  De  bello  gallico,  II,  6,  7. 

(8)  Ibid.,  VI,  44,  8  l. 

(9)  «  Jubet  in  oppida  multitudinem  convenire.  »  (De  bello  palitco,  VI,  4, 1 1.) 


LIEUX  HABITÉS  EN  GAULE.  89 

de  ces  appida  :  1^  Melodunum^  ou  en  adoptant  une  autre 
leçon ,  Meiiosedum^  dans  une  lie  de  la  Seine  ;  Labienus  s'en 
empara  dans  la  campagne  de  Tannée  52  (1);  2''  Vellav/noA^ 
ntim ,  pris  par  César  dans  la  même  campagne ,  après  un 
siège  de  trois  jours  (2)  ;  3^  Agedincum  auquel  les  Commsn^ 
taires  ne  donnent  ni  la  qualification  d'oppidum ,  ni  celle 
de  vious ,  mais  qui  doit  avoir  été  un  oppidum  important , 
puisqu*en  53  six  légions  y  prirent  leurs  quartiers  d^hiver  (3) 
et  puisqu'on  52  nous  voyons  César  y  laisser  deux  légions 
et  tout  le  bagage  de  l'armée  romaine  (4). 

Seqifani.  En  58 ,  au  moment  où  César  entreprit  sa  cam- 
pagne contre  Ârioviste ,  tous  leurs  oppida  étaient  au  pou- 
voir du  roi  germain  (5).  Voilà  du  moins  ce  que  César  rap- 
porte ,  et  par  une  contradiction  singulière  il  nous  montre , 
quelques  lignes  plus  loin,  Arioviste  s'avançant  avec  ses 
troupes  pour  aller  occuper  Vesoniio^  le  principal  oppidum 
des  Sequani  où  se  trouvait  un  grand  approvisionnement 
de  munitions  de  guerres.  César  prévient  Arioviste,  s'em- 
pare de  Vesontio ,  y  met  garnison  et  y  reste  plusieurs 
jours  (6). 

Sontiatesj  peuple  de  l'Aquitaine;  son  oppidum  fut  pris 
par  Crassus ,  en  56  (7). 

Suessiones.  Ils  avaient,  comme  les  Helvetii,  douze  op- 
pida (8).  Un  s'appelait  Noviodunum  ;  César  l'assiégea  en  57  ; 
il  fait  remarquer  que  le  fossé  était  large  et  le  mur  élevé , 
cependant  les  défenseurs  effrayés  se  rendirent  (9). 

Yenetù  Ce  peuple  est,  en  56,  à  la  tôte  de  l'insurrection 
des  cités  armoricaines.  Il  fortifie  ses  oppida  et  y  transporte 


(1)  De  beUo  g^llico,  VII,  58.  Cf.  60,  61. 

(2)  Ibid.,  VII,  11,  §  1. 

(3)  /ôid.,  VI,  44,  l  3. 

(4)  Ibid.,  VII,  10,  l  4;  67,  1 1  ;  62,  I  10.  Cf.  59.  |  4. 

(5)  «  Qui  intra  fines  sucs  ArioTiBtum  recepittent ,  quorum  oppida  omma 
in  potattate  ejua  essent.  b  {De  beUo  gtillico,  I,  32,  )  5.) 

(6)  De  bello  yaUico,  I,  38. 

(7)  Ibia,,  m,  21.  22. 

9)  ma.,  u,  4,  i  8. 

(9)  Jbtd,,  II,  12. 


90  LIVRE  !••.  CHAPITRE  IV.  (  2. 

des  approvisionnements  de  froment  (1).  La  plupart  de  ces 
oppida  étaient  situés  sur  le  bord  de  la  mer,  dans  des  pres- 
qu'îles qui  devenaient  inaccessibles  lorsque  la  marée  mon- 
tait (2).  Quand  la  guerre  commença,  les  habitants  se  réfu- 
gièrent chacun  dans  les  oppida  les  plus  rapprochés  (3); 
César  en  prit  plusieurs  (4).  Puis  les  Veneti  furent  vain- 
cus dans  une  bataille  navale ,  alors  ils  reconnurent  qu'ils 
ne  pouvaient  plus  défendre  leurs  oppida  et  la  résistance 
cessa  (5). 

G.  —  Aedificia, 

Outre  les  vici  et  les  oppida,  les  Gaulois  possédaient  des 
aedificia  épars  dans  la  campagne.  La  distinction  est  nette- 
ment apparente  dans  un  grand  nombre  de  passages  des 
Commentaires  ;  par  exemple  à  propos  des  Helvetii  (6) ,  des 
Menapii  (7).  Le  plan  de  campagne  de  Vercingétorix  en  52 
applique  cette  distinction  à  la  Gaule  entière  ;  il  a  pour  ob- 
jet de  réduire  les  Romains  par  la  famine  :  «  Il  faut  brûler 
les  vici  et  les  aedificia  où  l'ennemi  pourrait  trouver  du 
fourrage ,  il  faut  brûler  les  oppida  quand  on  n'est  pas  sûr 
de  les  empocher  de  tomber  entre  les  mains  de  l'ennemi 
avec  les  approvisionnements  qu'ils  contiennent  (8).  » 

Parmi  les  aedificia  on  peut  distinguer  deux  catégories  : 
la  première  comprend  les  maisons  de  maître,  les  habita- 


(1)  De  bello  gallico,  III,  9,  {  8. 

(2)  Ibid.,  III,  12,  Il  1. 

(3)  «  8eque  in  proxima  oppida  recipiebant.  »  (De  bello  g&llico,  III,  12, 1 4.) 

(4)  «  Compluribus  exptignatis  oppidis.  »  (De  bello  g&llico,  III,  14,  {1.) 

(5)  «  Neque  quemadmodum  oppida  defenderent,  babebant.  »  (De  bello  gal- 
lico,  III,  16,  i  3.) 

(6)  Oppida  sua  omnia  numéro  ad  duodecim ,  vicos  ad  quadringentos ,  re- 
liqua  privata  aedificia  incendunt.  »  (De  bello  gallicOy  I,  5,  {  2.) 

(7)  a  Ad  Rhenum  pervenerunt,  quas  regiones  Menapii  incoiebant,  et  ad 
utramque  ripam  fluminis  agros,  aedificia  vicosque  babebant.  o  (De  bello 
gallico,  IV,  4,  {  3.) 

(8)  «  Vicos  atque  aedificia  incendi  oportere...,  quo  pabulandi  causa  adiré 
posse  videantur...  praetera  oppida  incendi  oportere,  quae  non  munitione  et 
loci  natura  ab  omni  sint  poriculo  tuta.  »  (De  bello  gallico,  VII,  14,  {  5,  9.) 


LIEUX  HABITÉS  EN  GAULE.  91 

tions  qui  ont  précédé  les  châteaux  modernes.  Le  château 
ne  se  conçoit  pas  aujourd'hui  sans  ce  qu'on  appelle  un 
parc ,  un  bosquet.  Il  en  était  de  même  au  premier  siècle 
avant  notre  ère ,  quand  César  fit  la  conquête  de  la  Gaule  ; 
il  nous  le  raconte  à  propos  de  la  tentative  inutile  qu'il  fit 
en  53  pour  s'emparer  de  la  personne  d'Ambiorix ,  chef  des 
Eburones  :  Ambiorix  fut  surpris  par  un  parti  de  cavalerie 
que  César  envoyait  à  sa  recherche  dans  un  aedificiii/m  en- 
touré d'un  bois,  «  comme  sont,  »  ajoutent  les  Commentai- 
res^ «  presque  toutes  les  demeures  des  Gaulois  (1),  »  lisons  : 
des  membres  de  l'aristocratie  gauloise. 

D'autres  acdi/Çcia*  étaient  des  bâtiments  d'exploitation 
habités  par  des  cultivateurs.  Quand  César ,  en  51 ,  fit  sa 
dernière  expédition  contre  les  Bellovaci^  il  envoya  en 
avant  des  éclaireurs  et  ceux-ci  lui  rapportèrent  que  dans  les 
aedificia  ils  avaient  trouvé  peu  de  monde  ;  les  Bellovaci 
qu'ils  avaient  rencontrés  dans  les  aedificia  n'étaient  pas 
des  ouvriers  agricoles  restés  pour  cultiver  les  champs, 
ceux-là  étaient  partis,  et  dans  les  aedificia  il  n'y  avait  que 
des  émissaires  envoyés  pour  espionner  les  Romains  (2). 

Dans  ces  aedificia  étaient  logés  non  seulement  les  ou- 
vriers employés  à  la  culture,  mais  aussi,  avec  eux,  les 
bestiaux  et  les  récoltes.  Quand,  en  51,  César  vient  à 
l'improviste  attaquer  les  Bituriges^  sa  cavalerie  surprend 
les  habitants  des  campagnes  avant  qu'ils  n'aient  pu  se 
réfugier  dans  les  oppida  (3).  Et  comment  ce  résultat  a-t-il 
été  obtenu?  César  avait  défendu  à  ses  soldats  de  met- 
tre le  feu  aux  aedificia.  De  là  double  avantage  ;  les  in- 
cendies ne  prévenaient  pas  la  population  de  l'approche  des 
Romains,  et  les   approvisionnements  contenus  dans   les 

(1)  a  Aedificio  circamdato  silva,  ut  sunt  fere  domicilia  GaUomm.  >  (D« 
tello  gallico,  VI,  30,  {  3.) 

(2)  «  Pancos  in  aedificiis  esse  inventes,  atque  hos  non  qui  agrorum  colen- 
donim  causa  remansissent  (namque  esse  undique  diligenter  demigratum), 
sed  qui  speculandi  causa  essent  remissi.  »  {De  beîlo  gallico,  VIII,  7,  1 3.) 

(3)  «  Accidit...  ut  sine  timoré  uUo  rura  colentes  prius  ab  equitatu  opprime- 
rentur  quam  confngere  in  oppida  possent.  »  {De  bello  g&llico,  VIII,  3, 1 1.) 


92  LIVRE  !•'.  CHAPITRE  IV.  }  2. 

aedificia  donnaient  à  César  Tassurance  que  les  chevaux 
trouveraient  le  fourrage  nécessaire ,  ses  soldats  le  froment 
dont  ils  avaient  besoin  (1).  Ordinairement  César  faisait  la 
guerre  d'une  tout  autre  façon  ;  il  avait  pour  ses  soldats  des 
approvisionnements  préparés  d'avance  ou  fournis  par  les 
alliés;  il  trouvait  dans  les  champs  elles  prés  la  nourriture 
de  ses  chevaux  :  il  n'avait  par  conséquent  aucune  raison 
pour  ménager  les  aedificia  de  Tennemi. 

En  56 ,  César  dévaste  tous  les  champs  des  Morini  et  des 
Menapii  ;  il  brûle  leurs  vici  et  leurs  aedificia  (2).  L'année 
suivante  les  Menapii  reprennent  les  armes  ;  deux  lieutenants 
de  César  saccagent  leurs  champs,  coupent  leur  froment, 
brûlent  leurs  aedificia  (3).  Cette  opération  est  renouvelée 
contre  le  même  peuple  en  53  :  César  brûle  les  aedificia  et 
les  vici  des  Menapii  et  leur  prend  une  grande  quantité  de 
bestiaux  et  d'hommes  (4).  Les  Eburones  subissent  aussi  ce 
dur  traitement  :  tous  les  vici  et  tous  les  aedificia  que  l'ar- 
mée romaine  trouve  sur  sa  route  sont  brûlés  (5). 

Quand  les  Gaulois  faisaient  la  guerre  aux  Gaulois  ils  pro- 
cédaient avec  la  môme  rigueur  :  en  l'année  57,  les  Rémi 
refusèrent  de  prendre  part  à  la  coalition  des  Belges  contre 
les  Romains;  l'armée  confédérée  se  mit  à  dévaster  les 
champs  des  Rémi ,  à  brûler  leurs  vici  et  leurs  aedificia  (6). 

Ces  aedificia  de  la  Gaule  jouent  dans  l'histoire  militaire 
un  rôle  identique  à  celui  des  villae  de  l'Italie  et  des  autres 


(1)  «  Namque  etiam  illud  vulgare  incursionis  hostium  signum ,  quod  in- 
cendiis  aedificiorum  intellegi  consuevit,  Caesaris  erat  interdicto  sublatum, 
ne  aut  copia  pabuli  fnimentiqtie,  si  longius  progredi  vellet,  deficeretur,  aut 
hostes  incendiis  terrerentur.  »  (Dtt  bello  gallico,  VIII,  3,  {  2.) 

(2)  a  Vastatis  omnibus  eorum  agris,  vicis  aedificiisque  incensis.  s  (De 
bello  gallico,  III,  29,  i  3.) 

(3)  «  Omnibus  eorum  agris  vastatis,  frumentis  succisis,  aedificiis  incen- 
sis. 0  (De  bello  gallico,  IV,  38,  g  3.) 

(4)  ff  Aedificia  vicosque  incendit,  magno  pecoris  atque  hominum  numéro 
potitur.  »  (De  bello  gallico,  VI,  6,  §  1.) 

(5)  «  Omnes  vici  atque  omnia  aedificia,  quae  quisque  conspexerat,  incen- 
debantur.  »  (De  bello  gallico,  VI,  43,  g  2.) 

(6)  a  Agros  Remorum  depopulati,  omnibus  vicis  aedificiisque,  quos  adiré 
potuerant,  incensis.  »  (De  bello  gallico,  II,  7,  g  3.) 


LIBUX  HABITÉS  EN  GAULE.  9S 

parties  de  Tempire  romain.  Ainsi,  à  la  fin  du  troisième 
siècle  avant  notre  ère ,  quand  Annibal  porta  la  guerre  en 
Italie ,  une  partie  de  la  péninsule  était  déjà  couverte  de 
villae  :  Tite-Live  nous  montre  le  général  carthaginois 
campé  sur  les  bords  du  Vulturne;;  la  partie  la  plus  sédui- 
sante de  la  campagne  italienne  est  en  flammes  ;  de  distance 
en  distance  on  voit  la  fumée  des  villae  incendiées  (1)  ; 
c'était  en  l'année  217  avant  notre  ère.  Deux  ans  après 
un  consul  voulant  affamer  l'ennemi  enjoint  de  rentrer  les 
froments  dans  les  places  fortes,  avant  le  !•'  juin;  en 
cas  d'inexécution  de  cet  ordre ,  il  dévastera  les  champs , 
saisira  et  fera  vendre  les  esclaves ,  brûlera  les  villae  (2). 
Un  siècle  et  demi  plus  tard,  une  autre  guerre  moins  flat- 
teuse pour  la  vanité  des  vainqueurs  du  monde  vient  porter 
la  terreur  dans  Rome  :  presque  à  ses  portes ,  le  gladiateur 
Spartacus  tient  tête  aux  légions  ;  il  ne  se  contente  pas  de 
dévaster  les  villae  et  les  vici  (3)  ;  il  s'attaque  aux  urbes  ; 
ceci  se  passait  en  Tannée  73  avant  J.-C.  De  môme  dans 
l'Afrique  romanisée ,  lorsque  la  guerre  civile  y  porta  la  dé- 
vastation dans  les  années  47  et  46,  on  brûlait  les  villae; 
cet  acte  de  guerre  était  inséparable  de  la  dévastation  des 
champs,  de  la  destruction  des  oppida  (4). 

Au  premier  siècle  de  notre  ère,  quand  de  barbare  la 
Gaule  est  devenue  romaine ,  les  villae  ont  en  Gaule  rem- 
placé les  aedificia.  Tacite,  racontant  la  guerre  de  l'année  70, 
fait  briller  à  nos  yeux  le  feu  des  villae  incendiées  qui  an- 
nonce l'arrivée  d'une  armée  victorieuse  (5)  ;  c'était  près  de 
la  rive  gauche  du  Rhin,  à  peu  de  distance  de  Cologne.  Il 


(1)  «  Exurebatur  amoenissimus  Italiae  ager,  viUaeque  passim  incendiift 
fumabant.  »  (Ti^e-Live,  XXII,  14.) 

(2)  «  ViUas  incensurum.  »  (Tite-Live,  XXIII,  32.) 

(3)  a  Nec  viUarum  atqne  vicorum  vastatione  content!,  u  (Flonu ,  livre  II , 
c.  g,  on  III,  c.  20.  Edition  d*Otto  lahn,  p.  86, 1.  22.) 

(4)  a  ViHas  exnri,  agros  vastari...  oppida  casteUaque  dirui.  »  (De  bello 
ifric^no^  c.  26.) 

(5)  c  Vastatione  incendiisque  flagrantium  viUarum  venire  victorem  exer- 
citnm  intellegebatnr.  »  {Historiaej  IV,  34.) 


94  LIVRE  I-.  CHAPITRE  IV.  i  2. 

y  avait  alors  des  villae  jusque  dans  l'île  des  Bataves  ;  Ci- 
vilis  en  possédait,  et  quand,  en  71,  Cerialis  alla  saccager 
ce  pays ,  il  épargna  les  villae  de  Civilis ,  pour  rendre  le 
chef  ennemi  odieux  à  ses  concitoyens  (1).  A  cette  époque, 
en  Gaule,  les  fortunes  privées  n'étaient  plus  exclusivement 
mobilières  :  ainsi  qu'à  Rome  la  villa,  et  le  fundus  ou  la 
terre  que  la  villa  suppose,  en  étaient  la  base  principale, 
comme  le  dit  Horace  environ  dix  ans  avant  notre  ère  : 

Vos  sapere  et  solos  aio  bene  vivere,  quorum 
Conspicitur  nitidis  fundata  pecunia  villis  (2). 

Dès  le  début  du  premier  siècle  de  notre  ère,  les  aedificia, 
habitation  des  chefs  gaulois  chez  César,  ont  été  transfor- 
més en  villae.  Sacrovir  a  poussé  les  Aedui  à  la  révolte  ;  il 
s'est  emparé  d'Augustodunum,  c'est-à-dire  de  la  «  forte- 
resse d'Auguste,  »  d'Autun,  ville  alors  nouvelle  dont  le  nom 
môme  est  un  témoignage  de  la  grande  révolution  qui  s'est 
produite,  ville  qui  déjà  possède  des  écoles  où  les  fils  des 
nobles  gaulois  se  transforment  en  Romains  ;  il  est  vaincu  ; 
il  gagne  dans  sa  fuite  une  villa  près  d'Autun  et  c'est  là 
qu'il  se  donne  la  mort,  l'an  21  de  notre  ère  (3).  Un  demi- 
siècle  plus  tard,  Julius  Sabinus  aussi  malheureux  que  Sa- 
crovir veut  échapper  à  la  mort  ;  il  se  rend  dans  une  villa 
du  pays  des  Lingones,  y  met  le  feu  et  s'enfuit  :  on  croira, 
pense-t-il,  qu'il  a  péri  dans  les  flammes  (4). 

La  villa  où  Sacrovir  va  se  tuer,  en  21 ,  comme  celle  où 
se  réfugiera,  en  71,  Julius  Sabinus,  remplace,  grâce  à  la 
civilisation  gallo-romaine,  Vaedificium,  demeure  ordinaire 
des  membres  de  l'aristocratie  gauloise  soixante-treize  ans 
avant  le  suicide  de  Sacrovir.  En  Tan  53  avant  notre  ère, 

(i)  «  Agros  villasque  Civilis  intactas  nota  arte  ducum  sinebat.  v  (Tacite, 
HistoHae,  V,  23.) 

(2)  Horace,  Epist.,  livre  I,  15,  v.  45,  46. 

(3)  «  Sacrovir  primo  Augustodunum,  dein  metu  deditionis  in  villam  pro- 
pinquam  cum  fidissimis  pengit.  Dlic  sua  manu,  reliqui  mutuis  ictibus  occi- 
dere.  »  (Tacite,  Annales,  III,  46.) 

(4)  a  Sabinus...  villam,  in  quam  perfugerat,  cremavit.  »  (Tacite,  HistoriAe^ 
IV,  67.) 


LIEUX  HABITÉS  EN  GAULE.  95 

les  soldats  romains  qui  venaient  tuer  Ambiorix  le  surpri- 
rent daos  une  maison  ronde ,  construite  en  charpente  et 
en  osier  (l),  couverte  de  paille;  un  bois  entourait  cette 
maison  (2^  bâtie  sur  un  sol  qui ,  théoriquement  au  moins, 
était  la  propriété  du  peuple  des  Eburons.  Au  siècle  suivant 
la  villa  du  chef  gaulois  s'élève  au  milieu  d'une  vaste  pièce 
de  terre ,  d'un  fundus  qui  lui  appartient  et  que  ses  clients 
et  vassaux  cultivent  ;  des  constructions  rectangulaires  en 
maçonnerie,  couvertes  en  tuiles,  commencent  à  remplacer 
les  maisons  circulaires  de  bois  à  toit  de  chaume  conique 
qu'habitaient  les  Gaulois  au  temps  de  l'indépendance. 

Fundus  et  villa  sont  deux  termes  corrélatifs.  Fundus  est 
la  portion  du  sol  qui  forme  une  exploitation  agricole  ap- 
partenant à  un  propriétaire  déterminé.  Villa  est  le  groupe 
des  bâtiments  où  le  propriétaire  du  fundus  se  loge  et  qui 
servent  à  l'exploitation.  Il  n'y  a  pas  de  villa  sans  fundus^ 
ni  de  fundus  sans  villa.  Supprimez  la  villa  ,  le  fundus  est 
réduit  à  l'état  d'ager  ou  de  locus.  Supprimez  le  fundus^ 
la  villa   n'est  plus  qu'un  aedificium  (3). 

La  division  du  sol  de  l'empire  en  cités ,  subdivisées  en 
pagi ,  formant  eux-mêmes  un  certain  nombre  de  fundi ,  tel 
est  le  principe  fondamental  du  cadastre  qui ,  sous  l'empire 
romain ,  servait  de  base  à  l'impôt  foncier  :  «  Forma  cenn 


(1)  Toù;  $*o!xouc,  i%  ffoivCScov  xal  yippoiv  ixouai  lu^àXoMc  OoXoeidsZci  Apofov  icoXiiv 
istSdXXovte;  (Strabon,  livre  IV,  ch.  iv,  {  3,  édit.  Didot»  p.  163-164).  Casas 
qaae  more  gaUico  strainantis  erant  tectae.  (De  bello  gallico,  W,  43,  )  1.) 

(2)  Caesar,  De  bello  gaUico,  'VI,  30,  g  3  :  «  aedificio  circumdato  silva.  o 

(3)  Voir  les  citations  d'UIpien  et  de  Florentinus  réanies  au  Digeste 
(livre  L,  titre  XVI,  lois  27,  60,  211)  :  «  Ager  est  locus  qui  sine  villa  est.  Lo- 
cus non  est  fundus ,  sed  portio  aliqua  fundi.  Fundus  autem  integrum  aii- 
qnid  est,  et  plerumque  sine  villa  locum  accipimus.  Locus...  sine  aedificio 
rare...  ager  appellatur  ;  idemque  ager  cnm  aedificio  fundus  dicitur.  »  —  Il  y 
a,  dans  le  diplôme  n*  25  de  Tardif,  p.  20,  col.  2  (689-690),  un  passage  con- 
forme à  la  définition  légale  :  «  Locus  non  est  fundus  sed  portio  aliqua 
ftmdi.  •  Voici  le  texte  mérovingien  :  «  In  loco  qui  dicitur  SiUacos  qui  fuit 
Arulfo  qnondam  et  ibidem  usque  nunc  ad  ipso  Latiniaco  aspezit.  b  Les  bA- 
timents  construits  sur  le  fundus  Siliacue  ont  été  détruits,  et  ce  fundus  a 
été  réuni  au  fundus  Latiniacus  de  manière  à  ne  former  avec  lui  qu'une 
seule  exploitation  rurale  ;  en  conséquence ,  le  fundus  Siliacus  n'a  plus  été 
qu'on  locus. 


96  LIVRE  !•'.  CHAPITRB  IV.  {  1 

suali  cavetur,  ut  agri  sic  in  censwrrv  referanpaf  :  ft&men 
fundi  cujusque ,  et  in  qua  civitate ,  et  in  quo  pagtf  Ht ,  et 
quos  duos  proximos  habeat  (1).  »  Ulpien ,  à  qui  nous  em- 
pruntons ce  texte,  est  mort  en  228.  Mais  le  principe 
énoncé  par  ce  juriconsulte  est  beaucoup  plus  ancien  que 
lui.  La  Table  alimentaire  de  Veleia^  qui  remonte  à  l'année 
104  de  notre  ère ,  est  rédigée  conformément  à  la  règle 
qu'énonce  Ulpien  :  «  C.  Volumnius  Memor  et  Volumnia 
Alce.,.  professi  sunt  fundum  Quintiaoum'Aurelian/um..,  qui 
est  in  Veleiate  pago  Ambitrebio ,  adfinibus  M.  Mummeio  Per- 
sicoj  Satrio  Severo  et  populo,  » 

La  division  du  sol  de  la  Gaule  en  fundi  date  évidem- 
ment de  rintroduction  du  cens  commencée  par  Auguste 
en  Tan  27  avant  notre  ère.  Dès  que  les  pagi  gaulois,  cha- 
cun propriété  collective  d'un  peuple ,  furent  subdivisés  en 
fundi,  les  aedificia  que  César  avait  trouvés  en  Gaule  épars 
dans  Vager  des  divers  peuples  se  transformèrent  en  villae. 
De  ces  villae,  celle  qui  est  le  plus  anciennement  signalée 
par  un  texte  est  celle  de  Sacrovir  sons  Tibère,  l'an  21  de 
notre  ère.  Mais  on  doit  croire  que  la  plupart  des  nomsr  de 
lieu  en  -ociw  remontent  à  l'époque  où  la  politique  d'Au- 
guste imposa  aux  Gaulois  les  institutions  financières  de 
Rome ,  par  conséquent  la  théorie  du  fundum  qui  n'en  peut 
être  séparée  (2)  ;  ordinairement  les  noms  de  lieu  en  -otcus 
proviennent  de  gentilices  quand  un  i  précède  le  suflSbte  ; 
ils  dérivent  de  cognomina  dans  le  cas  contraire.  Ces  genti- 
lices et  ces  cognmnina  sont  ceux  du  premier  propriétaire , 
qui  avait  pris  un  gentilice  quand  il  avait  obtenu  droit  de 
cité  romaine,  qui  se  contentait  d*un  cognomen  quand  il 
était  resté  barbare. 


(1)  Ulpien,  De  cenMug^  III;  au  Digeste,  L,  xv,  4;  cf.  Mommsen  et  Har- 
qtiaTdt,  Handbuch  der  rômischen  Alterthûmer^  2*  édit.,  t.  V,  p.  221. 

(2)  Auguste  fit  un  premier  recensement  de  la  Gallia  Comata  (Aquitaine , 
Celtique,  Belgique)  en  Tan  27  avant  J.-C.  Voir  plus  haut,  p.  7,  8.  Un  second 
recensement  eut  lieu  en  Gaule  sous  son  régne  par  les  soins  de  Drusus, 
12-8  ayant  Jésus-Christ.  Voir  Jes  textes  réunis  par  M.  E.  Desjardins ,  Géo^ 
graphie  politique  et  administrative  de  la  Gaule  romainef  t.  III,  p.  185. 


LIEUX  HABITÉS  EN  GAULE.  97 

Les  noms  composés  dont  le  second  terme  est  villa,  cor-' 
tiSjValliSj  monsj  appartiennent  à  un  autre  âge.  Ils  datent  de 
la  conquête  germanique  ;  leur  premier  terme  est  le  nom  du 
propriétaire  barbare  qui  a  fondé  la  cortis  ou  la  villa ,  qui 
s'est  construit  une  habitation  sur  le  mons  ou  dans  la  vallis. 
Au  septième  siècle ,  où  ces  noms  commencent  à  paraître 
dans  les  chartes ,  il  n'est  plus  question  du  c&nsus  romain 
ni  des  fundi;  à  Tordre  politique  nouveau  correspondent 
des  noms  géographiques  formés  d'après  des  lois  linguisti- 
ques nouvelles.  Us  sont  les  monuments  de  la  civilisation 
qui  a  succédé  à  la  civilisation  romaine ,  mais  de  celle-ci 
les  noms  de  lieux  en  -aciLS  ne  sont  pas  les  moindres  dé- 
bris (1). 

A  la  môme  époque,  dans  les  chartes  mérovingiennes  du 
septième  et  du  huitième  siècle,  et,  plus  tard,  dans  les 
chartes  carlovingiennes,  en  Gaule,  Tancien  nom  du  fundus 
persiste  souvent,  avec  sa  désinence  masculine,  associé  au 
mot  villa,  avec  lequel  il  ne  s'accorde  point  ;  exemple  :  villa 
Latiniaco,  dans  un  diplôme  de  Thierry  III,  688-689  (2); 
villa  cui  vQcabulum  est  Prisciniacus,  dans  un  acte  de  682 
ou  683  (3)  ;  villa  quae  dicitur  Masciacu^^  dans  un  diplôme 
de  Louis  le  Débonnaire  en  820  (4).  Mais ,  en  Italie ,  les 
chartes  de  Ravenne ,  à  la  même  époque ,  attestent  par  de 
nombreux  exemples  le  maintien  de  l'usage  romain  :  Fundus 


(\)  Les  imitations  barbares  du  procédé  romain,  comme  Teodeberciacus  ou 
Linderidacae  (sons-entendu  villae) ,  doivent  être  soigneusement  démêlées 
des  fonnations  antiques.  II  7  a  un  point  sur  lequel  le  procédé  linguistique 
employé  par  les  Germains  est  identique  à  celui  dont  les  Romains  avaient 
fait  usage  avant  eux  :  les  uns  et  les  autres  ont  emprunté  au  peuple  vaincu 
le  dernier  élément  du  nom  de  lieu.  Dans  le  composé  Bougi-val ,  par  exem- 
ple, à  l'époque  mérovingienne,  B&udechisilo-vallis ,  chez  Tardif,  Monuments 
historiques^  p.  32,  col.  2  (acte  de  Tannée  697) ,  le  dernier  terme  vallis  est 
latin,  tandis  que  le  premier  terme  est  francique.  Ainsi,  dans  le  dérivé  Quin^ 
tiàcuSj  qui  remonte  à  Fempire  romain  et  dont  un  exemple  a  été  conservé, 
par  on  texte  du  deuxième  siècle  de  notre  ère ,  le  dernier  élément  est  le 
suffixe  gaulois  -aco-s,  tandis  que  le  premier  élément  est  le  mot  la^n  Quinctius. 

(2)  Tardif,  Monuments  historiques^  p.  20. 

(3)  Tardif,  ibid,,  p.  19. 

(4)  Tardif,  iWd.,  p.  80. 

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96  LIVRE  I".  CHAPITRE  IV.  {  2. 

Antonianus  (1),  fundus  Flavinianus  (2),  fundorum  corum  vo- 
cabula  sunt  Valliano.,.  (3).  En  France,  on  aurait  dit  :  villa 
Antoniacus^'  villa  Flaviniacus^  villarum  qtwrum  vocabula 
sunt  Valliaco,.,  Le  mot  fundus  appartient  à  la  langue  flnan- 
p.  cière  de  Tadministration  romaine,  et,  à  Ravenne,  cette 

»  administration  a  duré  plus  longtemps  qu'en  France  :  la 

5  prise  de  Ravenne  par  les  Lombards  ne  date  que  du  milieu 

r.  du  huitième  siècle;  or  c'est  dès  le  cinquième  siècle  qu'en 

y  Gaule  les  Burgundes,  les  Goths  et  les  Francs  se  sont  établis 

sur  les  ruines  de  l'Empire  Romain  ;  voilà  pourquoi  on  a 
^  continué  à  se  servir  du  terme  administratif  romain  fundus 

I  dans  les  actes,  à  Ravenne,  longtemps  après  qu'en  France, 

"t'  ce  mot  était  tombé  en  désuétude. 


i'  (1)  Fantuzzi,  Monumenti  RavennAti^  p.  57,  acte  du  temps  de  l'archevêque 

iv  Honestus,  971-983. 

"-  (2)  Ibid,,  p.  63,  acte  du  temps  de  l'archevêque  Sergius,  752-770. 

(3)  Ibid.,  p.  102,  acte  de  Tannée  903.  On  peut  aussi  comparer  au  fundo  qui 
voc&tur  SRvinianum ,  d'une  charte  de  Ravenne  en  955  (Fantuzzi,  p.  136),  la 
formule  in  villa  S&vinisLCO  du  cartulaire  d'Ainay,  à  Lyon,  en  989  (Aug.  Ber- 
nard, Carf.  de  Savigny,  t.  II,  p.  632). 


CHAPITRE  V. 


PREUVES  DU  GABAGTÉRS  PRÉCAIRE  DE  Ul  POSSESSION  DU  SOL 
PAR  LES  PARTICULIERS  DANS  LA  GAULE  BARBARE,  AU  MO- 
MENT OU  CÉSAR  EN  FIT  LA  CONQUÊTE*  (58-51   aV.  J.-C.)- 

SOMMAIRB  : 

1 1.  Position  de  la  question.  —  {  2.  La  propriété  foncière  individuelle  n'exis- 
tait pas  encore  chez  les  Gaulois  d'Italie  à  la  fin  du  troisième  siècle  avant 
Jéstts-Christ.  —  {  3.  La  propriété  foncière  individuelle  est  inconciliable 
avec  rémigration  des  Helvetii  Tan  58  avant  Jésus-Christ.  —  {  4.  La  pro- 
priété foncière  individuelle  est  inconciliable  avec  rétablissement  des  Boii 
dans  le  territoire  des  Aedut.  —  {  5.  L'absence  de  propriété  foncière  in- 
dividuelle en  Qaule  explique  le  système  particulier  de  communauté  entre 
époux  que  César  constate  chez  les  Gaulois.  —  |  6.  Objection  tirée  d'un 
passage  de  César  oU  il  est  question  de  la  juridiction  des  druides.  — 
i  7.  Conclusion.  U&ger  publicus  romain  et  l'ayer  publicus  gaulois.  La 
propriété  bâtie  en  Gaule  pendant  la  guerre  de  la  conquête. 

5  !•'.  —  Position  de  la  question. 

Il  a  été  dit  plus  haut  qu'à  Tépoque  où  la  Gaule  a  été 
conquise  par  César,  la  propriété  rurale  dans  ce  pays  était 
restée  collective.  Cette  doctrine  a  besoin  d'être  précisée. 
Le  terme  de  propriété  collective  a  le  défaut  d'être  moderne, 
et,  pour  rendre  avec  netteté  les  croyances  et  les  institu- 
tions des  anciens ,  il  faut  ou  se  servir  de  périphrases ,  ou 
conserver  les  expressions  reçues  dans  l'antiquité.  Ce  qu'on 
doit  entendre,  c'est  qu'en  général  chaque  peuple  gaulois 
avait  sur  tout  son  territoire  un  droit  analogue  à  celui  du 
peuple  romain  sur  Vager  pijiilicus  ;  c'est  qu'ordinairement 


•iv 


c>^^^^^'^ 


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100  LIVRE  I»'.  CHAPITRE  V.  (  2. 

en  Gaule,  vers  le  milieu  du  premier. siècle  avant  notre  ère, 
le  particulier  qui  jouissait  d'une  portion  plus  ou  moins 
considérable  du  sol  de  sa  cité  détenait  cette  portion  à  titre 
précaire.  Il  se  trouvait  légalement  dans  une  situation  ana- 
logue à  celle  des  patriciens  et  des  nobles  romains  qui, 
après  avoir  occupé  des  parcelles  plus  ou  moins  étendues 
de  Vager  publicus,  en  furent  expulsés  en  partie  par  les  lois 
agraires,  quand  ces  loi«  déterminèrent  le  maximum  de  la 
fraction  de  Vager  publicus  qu'un  particulier  pouvait  posséder. 

§  2.  —  La  propriété  foncière  individuelle  n* existait  pas  encore 
chez  les  Gaulois  d'Italie  à  la  fin  du  troisième  siècle  avant 
Jésus-Christ. 

Le  plus  ancien  texte  que  nous  ayons  sur  la  constitution 
de  la  propriété  chez  les  Gaulois  appartient  à  Polybe  (livre  II, 
chap.  XVII.  §  11).  C'est  un  des  traits  de  la  description,  que 
le  grand  historien  nous  fait ,  des  mœurs  apportées  par  les 
Gaulois  dans  les  régions  voisines  du  Pô  quand,  dit-il,  ils 
vinrent  s'y  établir  après  la  chute  de  la  domination  étrusque 
en  Campanie.  On  sait  que  la  domination  étrusque  en  Cam- 
panie  cessa  vers  la  fin  du  cinquième  siècle  avant  Jésus- 
Christ.  Il  est  clair,  donc,  que  Polybe,  dans  le  passage  en 
question ,  veut  parler  des  Gaulois  d'Italie  au  commence- 
ment du  quatrième  ?iècle  avant  notre  ère.  Mais  cette  pein- 
ture est  empruntée  par  le  célèbre  auteur  grec  à  un  histo- 
rien de  la  fin  du  troisième  siècle.  Les  écrivains  grecs  du 
quatrième  siècle  ne  sont  pas  ici  la  source  de  Polybe.  Au 
quatrième  siècle,  les  Grecs  connaissaient  fort  mal  l'Italie 
du  Nord  :  Héraclide  de  Pont,  disciple  d'Aristote,  croyait 
que  Rome  était  une  ville  grecque,  et  il  confond  avec  les 
Hyperboréens  de  la  mythologie  les  Celtes  qui  prirent  cette 
ville  en  390  (1). 

La  source  probable  de  Polybe  dans  le  passage  dont  il 

(1)  Plutarque,  Camille,  XXH,  2. 


POSSESSION  PRÉCAIRE  DU  SOL  EN  GAULE.  101 

s'agit  est  le  grand  ouvrage  que  Fabius  Pictor  avait  com- 
posé et  qui  est  connu  sous  le  titre  latin  de  Graecae  his- 
toriae  ou  Graeci  annales.  Cet  ouvrage  connu  de  Polybe, 
qui  le  cite  plusieurs  fois  (1),  était  postérieur  de  près  de 
deux  siècles  à  la  conquête  de  l'Italie  du  Nord  par  les  Gau- 
lois; il  datait  de  la  fin  du  troisième  siècle,  et  les  mœurs 
gauloises  qui  s'y  trouvaient  dépeintes  étaient  par  consé- 
quent celles  de  la  fin  du  troisième  siècle.  Fabius  Pictor, 
qui  vécut  de  254  à  200  environ  avant  Jésus-Christ,  avait 
pris  part  à  une  campagne  des  troupes  romaines  dans  la 
Gaule  cisalpine,  en  225  (2)  :  il  pouvait  donc  parler  en 
connaissance  de  cause  des  habitants  de  cette  région. 

Or,  voici  en  quels  termes  le  texte  dont  nous  parlons,  et 
qui  doit  être  emprunté  à  Fabius  Pictor,  nous  fait  connaître 
la  constitution  de  la  propriété  individuelle  chez  les  Gaulois 
d'Italie.  Polybe  vient  de  dire  que  les  villages  habités  par 
ces  Gaulois  n'étaient  pas  clos  de  murs ,  que  leur  genre  de 
vie  était  d'une  simplicité  extrême.  Il  continue  :  «  La  for- 
tune de  chacun  d'eux  consistait  en  troupeaux  et  en  or, 
parce  que  ces  objets  seuls  peuvent  facilement,  quand  les 
circonstances  l'exigent,  être  emmenés  partout  et  changés 
de  place  à  volonté  (3).  »  Ainsi,  chez  les  Gaulois  d'Italie  au 
troisième  siècle,  la  fortune  immobilière  était  inconnue  aux 
particuliers.  Si  les  Gaulois  d'Italie  n'avaient  pas  organisé 
à  leur  profit ,  dans  ce  pays  nouvellement  conquis ,  la  pro- 
priété individuelle  du  sol ,  c'est  qu'ils  n'avaient  point 
apporté  de  leur  pays  d'origine  la  notion  de  cette  propriété. 


(1)  Polybe ,  livre  I ,  ch.  xiy,  2  U  dit  que  ses  sources ,  pour  la  première 
guerre  punique ,  sont  Philinos  [auteur  sicilien]  et  Fabius  [Pictor].  l\  s'est 
encore  servi  de  Fabius  Pictor  pour  la  deuxième  guerre  punique,  comme  on 
le  voit  au  livre  III,  cb.  viii  et  ix  (éd.  Didot.  p.  10,  125).  Le  texte  concer- 
nant les  mœurs  des  Gaulois  se  trouve  entre  le  récit  de  la  première  guerre 
panique  et  celui  de  la  deuxième  (éd.  Didot,  p.  80). 

(2)  Hermann  Peter,  Veterum  historicorum  rom&norum  reHtqutae,  p.  lxix 
etsniv. 

(3)  TncLçilç  ye  (ii^v  énàatoi^  y}v  5pé(i,(AaTa  xal  xp^ero;  8ià  t6  {i/6va  ravTa  Y.axà  Tàc 
ocpiffréffeic  ^^Bitaç  duvoiaOat  oavTox^  tarepiayaYetv  xai  |Ae6iotdévai  xarà  toç  aOT<ôv 
ofooipitfiK  (Polybe,  livre  II,  ch.  xvii,  §  11). 


102  LIVRE  !•'.  CHAPITRE  V.  |  3. 

En  règle  générale,  un  peuple  qui  vient  s'établir  par 
la  conquête  et  la  colonisation  dans  un  pays,  y  importe  sa 
législation.  Les  Anglais  et  les  Français  des  derniers  siè- 
cles et  du  siècle  courant  ont  introduit  en  Amérique  et 
en  Afrique  la  théorie  juridique  de  la  propriété  individuelle 
du  sol,  telle  qu'ils  la  concevaient  dans  leur  patrie.  Us  ont, 
les  uns  et  les  autres,  constitué  dans  leurs  colonies,  la  pro- 
priété immobilière  suivant  les  règles  usitées  dans  leur 
pays  d'origine. 

Mais  les  Gaulois  n'ont  pas  apporté  en  Italie  la  théorie  de 
la  propriété  individuelle  du  sol  ;  près  de  deux  siècles  après 
leur  arrivée  en  Italie,  cette  théorie  leur  faisait  encore  défaut. 
Donc,  à  la  date  où  ils  sont  venus  s'établir  en  Italie,  c'est- 
à-dire  au  commencement  du  quatrième  siècle  avant  notre 
ère ,  ils  n'avaient  pas  cette  théorie.  Ainsi ,  au  commence- 
ment du  quatrième  siècle ,  les  Gaulois  qui  de  Germanie  et 
de  Gaule  vinrent  conquérir  l'Italie  septentrionale  ne  prati- 
quaient pas  la  propriété  individuelle  du  sol.  La  prati- 
quaient-ils en  Gaule  à  l'époque  de  César,  trois  siècles  et 
demi  plus  tard  ?  On  doit,  ce  semble,  répondre  à  peu  près 
négativement  à  cette  question,  et  il  y  a  pour  cela  plusieurs 
raisons. 

S  3.  —  La  propriété  foncière  individuelle  est  inconciliable  avec 
Vémigration  des  Helvetii  l'om  58  avant  J.'C. 

D'abord  l'émigration  des  Helvetii  en  Tan  58  avant  notre 
ère  ne  peut  s'accorder  avec  la  propriété  individuelle  du  sol. 

L'assemblée  générale  des  Helvetii  décide  que  toute  la  po- 
pulation helvétique,  au  nombre  de  deux  cent  soixante-trois 
mille  âmes,  abandonnera  sa  patrie  et  ira  s'établir  à  l'autre 
extrémité  de  la  Gaule,  sur  les  bords  de  l'Océan  (1).  Si  ras- 
semblée générale  des  Helvetii  prend  cette  résolution,  ce 

(1)  De  bello  gallico,  l,  2,  3,  5,  28,  29. 


b 


POSSESSION  PRÉCAIRE  DU  SOL  EN  GAULE.       103 

n'est  point  par  contrainte  ;  ce  n'est  pas  qu'un  ennemi  plus 
puissant  chasse  les  Helvetii  de  leur  patrie  ;  en  effet,  quand   ^/' 
ils  en  furent  partis,  personne  ne  vint  les  y  remplacer.  Non  ; 
ils  espèrent  trouver  ailleurs  un  territoire  plus  fertile  et  sa-    / 
tisfaire  leur  goût  pour  les  aventures  glorieuses  (1). 

Ce  n'est  pas  un  entraînement  passager.  La  décision  est 
prise  en  Tannée  61  ;  trois  ans  sont  consacrés  aux  prépara-  '^ 
tifs  (2),  Puis,  en  58,  les  Helvetii  partent  (3),  et,  si  l'armée 
romaine  ne  se  fût  portée  à  leur  rencontre ,  ils  ne  seraient 
pas  rentrés  dans  leur  pays.  Les  Helvetii  perdirent,  dans  la 
lutte  contre  César,  plus  des  deux  tiers  de  leur  effectif,  et 
ce  fut  alors  seulement  que  les  survivants  se  décidèrent  à 
rentrer  dans  le  pays  qu'ils  avaient  abandonné  (4). 

8e  figure-t-on  le  conseil  général  d'un  département  fran- 
çais, fût-ce  un  des  moins  fertiles  (la  Lozère  ou  les  Hautes- 
Alpes),  votant  rémigration  en  masse  de  ses  habitants,  par 
exemple  en  Afrique,  la  population  exécutant  cette  décision  '^ 
et  le  département  abandonné  restant  vide  d'habitants  ?  Le 
droit  de  propriété  tel  que  nous  l'entendons  et  l'attachement 
de  chaque  propriétaire  pour  le  lambeau  de  terre  qu'il  pos- 
sède serait  un  obstacle  insurmontable  à  cette  résolution  . 
étrange  et  à  son  exécution.  Le  Français  qui  aujourd'hui 
quitte  son  pays  pour  aller  s'établir  en  Algérie  ou  à  l'étranger, 
n'est  à  peu  près  jamais  propriétaire  foncier.  D'ordinaire,  le 
paysan  français  n'émigre  point ,  et  c'est  parce  qu'il  est 
propriétaire  de  champs  ;  le  paysan  français  qui,  par  excep- 
tion, transporte  son  domicile  en  Algérie,  ne  se  décide  à 
prendre  ce  grand  parti  qu'après  s'être  ruiné.  Si  le  paysan 
anglais,  part  facilement  pour  les  Etats-Unis  ou  pour  l'Aus- 
tralie c'est  parce  qu'il  ne  possède  aucun  immeuble  et 
qu'aucun  lien  ne  l'attache  au  sol  qu'il  cultive,  pauvre  et  mé- 
content, dans  l'intérêt  d'autrui. 


(1)  De  bello  g&llico,  I,  2,  10. 

(2)  Ce  chiflEre  de  trois  ans  parait  attester  Tusage  de  l'assoUement  triennal. 

(3)  De  bello  g&llico,  l,  2,  3,  6,  8. 

(4)  Ihid,,  l,  29. 


104  LIVRE  I".  CHAPITRE  V.  g  4. 

S  4.  —  La  propriété  foncière  individuelle  est  inconciliable 
avec  l'établissement  des  Boii  dans  le  territoire  des  Aedui. 

Le  second  fait  que  nous  avons  à  expliquer  est  l'instal- 
lation des  Boii  dans  une  portion  du  territoire  des  Àedui. 
Ces  Boii  appartenaient  à  la  grande  nation  de  ce  nom, 
établie  à  l'est  du  Rhin,  principalement  entre  le  Danube 
et  les  Alpes.  Au  nombre  de  trente-deux  mille  (hommes, 
femmes  et  enfants) ,  ils  avaient  pris  part  à  l'expédition  des 
Helvetii  en  Gaule,  et,  défaits  comme  eux  par  César,  ils 
avaient  perdu ,  comme  leurs  compagnons  de  guerre ,  un 
peu  plus  des  deux  tiers  de  leur  effectif  :  leur  nombre  de- 
vait être  réduit  à  environ  dix  mille  âmes.  César  avait  dé- 
cidé que  les  vaincus  devaient  retourner  chacun  chez  eux  : 
les  Boii  étaient  donc  condamnés  à  regagner  les  régions 
transrhénanes. 

Mais  les  Aedui  ne  consentirent  pas  à  les  laisser  partir  : 
ils  voulurent  profiter  de  l'occasion  pour  augmenter  le 
nombre  de  leurs  clients  et  pour  donner  à  leur  puissance 
en  Gaule  une  base  plus  solide.  Avec  l'autorisation  du 
général  romain,  ils  établirent  dans  une  portion  de  leur 
territoire  ces  Boii  vaincus,  leur  permirent  de  s'y  orga- 
niser en  une  cité,  en  un  petit  Etat  dépendant  de  la  cité 
ou  de  l'Etat  des  Aedui,  mais  sur  le  pied  d'une  sorte  d'éga- 
lité (1).  Le  signe  de  la  dépendance  des  Boii  fut  une  rede- 
vance annuelle,  stipendium  (2),  qu'ils  payèrent  aux  Aedui  : 
César,  dans  le  récit  de  sa  campagne  contre  Vercingétorix, 
en  52,  donne  aux  Boii  l'épithète  de  stipen4iarii  Aeduo^ 
rum  (3)  ;  ce  stipendium  exigé  des  Boii  par  les  Aedui  repré- 


(l)<i  [Caesar]  Boios»  potentibus  Aeduis,  qupd  egregia  virtute  erant  cogniti, 
ut  in  finibus  suis  coUocarent,  concessit;  quibus  illi  agros  dederunt,  quosque 
postea  in  parem  juris  libertatisquo  condicionem  atque  ipsi  erant,  recepe- 
runt.  »  (De  bello  gallico,  I,  28,  |  5.) 

(2)  Marquardt,  dans  Handbuch  der  rômischen  Alterthûmer,  t.  V,  2*  édit., 
p.  183,  n.  5;  cf.  184.  Voir  aussi  p.  162.  Goniulter  enfin  t.  IV,  p.  80. 

(3)  De  bello  gallico,  VII,  10,  |  1. 


POSSESSION  PRÉCAIRE  DU  SOL  EN  GAULE.  105 

sentait  la  rente  due  à  la  cité  des  Aedui  pour  la  portion 
à'ager  pubhcus  dont  les  Aedui  avaient  abandonné  la  jouis- 
sance aux  Boii. 

L'état  de  dépendance  où  sont  placés  les  Boii  ne  les  em- 
pêche pas  d'avoir  en  Gaule  une  personnalité  politique  dis- 
tincte de  celle  des  Aedui^  leurs  suzerains.  Us  ont,  en  52,  un 
oppidum^  et  Vercingétorix  en  entreprend  le  siège  (1),  que 
César  en  personne  fait  lever  (2).  Bien  que  peu  nombreux 
et  faibles,  ils  constituent,  nous  dit  César,  une  cité,  qui 
lui  fournit  des  vivres  (3)  au  début  de  la  guerre  contre  Ver- 
cingétorix. Peu  après,  les  Boii  se  laissent  entraîner  dans 
le  grand  mouvement  patriotique  qui  soulève  la  Gaule 
presque  entière' contre  les  Romains;  il  leur  est  enjoint  de 
fournir  à  Tarmée  nationale  un  contingent  de  deux  mille 
soldats  (4)  ;  ce  contingent  est  distinct  de  celui  qui  est 
imposé  aux  Aedui  et  à  leurs  sujets,  parce  que,  bien  que 
subordonnés  {stipendiarii)  des  Aedui ,  ils  sont  à  leur  égard 
sur  le  pied  d'une  sorte  d'égalité  {parem  juris  libertatisque 
condicionem)  (5).  Vaincus,  les  Boiij  sauf  le  stipendium 
quils  payent  aux  Aedui ,  sont  en  Gaule  dans  une  situation 
identique  à  celle  des  Germains  conquérants  avant  la  dé- 
faite d'Arioviste  par  César. 

Arioviste  vainqueur  s'est  emparé  du  tiers  du  territoire  des 
Sequani ,  et  d'une  partie  de  celui  des  Aedui ,  où  il  a  établi 
120,000  Germains  (6);  24,000  autres  Germains  viennent 
d'arriver,  et,  pour  leur  donner  un  établissement,  il  va 

(1)  De  bello  gallico,  VII,  9,  {  6. 
(2)/Wd.,  VII.  10,  Î3,4;  12,  Jl. 

(3)  c  De  re  frumentaria  Boios  atque  Aeduos  adhortari  non  destitit  :  quorum 
alteri,  qnod  nullo  studio  agebant,  non  multum  adjuvabant  ;  alteri  non  mag- 
nis  facultatibiis,  quod  civitas  erat  exigua  et  infirma,  celeriter  quod  habue- 
mut  consumpsenint  Bumma  difficultate  rei  frumentariie  affecto  ezercitu, 
tenuiute  Boiorum...  s  {De  bello  g&llicOy  VII,  17,  |  2,  3.) 

(4)  «  Boiis  [bina]  mUia.  »  (De  bello  gallico,  VII,  75,  |  3.) 

(5)  De  bello  gallico,  I,  28,  |  5.  Cf.  VII,  10,  {  1. 

(Q  ■  Nunc  esse  in  Gallia  ad  centum  et  yiginti  milium  numerum.  »  (De  bello 
giUico,  I,  31 ,  {  5.)  «  Ariovistus...  tertiam  partem  agri  Sequani...  occupa- 
Tisset...  •  (/btd.,  1 10.)  «  Aeduos...  multatos  agris.  o  (De  bello  gallico,  VII,  54, 

H) 


106  LIVRE  I".  CHAPITRE  V.  {  4. 

prendrjB  aux  Sequani  un  second  tiers  de  leur  territoire  (1). 
Ce  n'est  pas  seulement  de  la  souveraineté,  c'est  de  la 
jouissance  du  sol  que  les  Sequani  et  les  Aedai  sont  dé- 
pouillés. Les  Germains  sont  les  plus  forts;  ils  ont  vaincu 
les  Aed/ai ,  dont  les  sénateurs  et  les  chevaliers  ont  presque 
tous  péri  dans  les  combats,  et  les  Sequani^  bien  qu'alliés 
des  Germains ,  sont  réduits  par  Ârioviste  presque  à  l'état 
de  sujets. 

Comment  les  Aedui ,  après  avoir  associé  leur  cause  à  celle 
de  César  vainqueur  des  Boii ,  sont-ils  amenés  à  concéder  à 
ce  peuple  vaincu  des  avantages  qui  sont  presque  les  mê- 
mes que  ceux  qu'Ârioviste  vainqueur  a  violemment  exi- 
gés? Ce  n'est  pas  le  procédé  ordinaire  des  peuples  victo- 
rieux.  Au  sort  des  Boiiy  vaincus  en  Gaule  l'an  58  av.  J.-C, 
comparons  celui  d'autres  vaincus,  dans  le  même  pays, 
trois  siècles  et  demi  plus  tard. . 

Constance  Chlore ,  vainqueur ,  amène  de  Germanie  en 
Gaule  des  Germains  prisonniers;  il  en  fait  des  colons 
qui  labourent  et  moissonnent  les  terres  des  propriétaires 
gallo-romains  :  «  Le  Chamave  et  le  Frison  labourent  pour 
moi,  »  dit  en  296  un  panégyriste  de  Constance  Chlore,  «  et, 
grâce  à  tes  victoires,  César  invincible,  les  parties  inhabitées 
des  territoires  d'Amiens,  de  Beauvais,  de  Troyes,  de  Langres 
reverdissent  par  le  travail  du  cultivateur  barbare  (2).  »  Le 
môme  auteur  nous  peint  un  peu  plu  s  haut  les  portiques  des  cités 
encombrés  par  la  foule  des  barbares  captifs  :  «  Les  hom- 
mes s'agitent  partagés  entre  la  surprise  de  la  défaite  et 
leur  naturelle  fierté  ;  les  vieilles  mères  témoignent  aux  fils, 

(1)  c  Nunc  de  altéra  parte  tertia  Sequanos  decedere  juberet,  propterea 
quod  paucis  mensibus  ante .  Harudum  milia  hominum  viginti  quatuor  ad 
eum  venissenty  quibus  locus  ac  sedes  pararentur.  »  (De  btllo  gallico^  I»  31, 

I  10.) 

(2)  «  Arat  ergo  nunc  mibi  Cbamavus  et  Frisius.  »  {Incerti  pànegyricuê 
Constantio  Cœsari^  ix,  édit.  Teubner-Bœhrens,  p.  138,  1.  17-18.)  «  Fer  victo- 
rias  tuas,  Constanti  Gaesar  invicte ,  quicquid  infrequens  Ambiano  et  BeUo* 
vaco  et  Tricassino  solo  Lingonicoque  rostabat,  barbaro  cultore  revirescit.  • 
(/6id.,  XXI,  p.  147,  1.  26-29.)  Cf.  Fustel  de  Coulanges,  Recherches  eur  quel- 
que$  problèmes  d'histoire,  p.  49. 


POSSESSION  PRÉCAIRE  DU  SOL  EN  GAULE.  107 

les  jeunes  femmes  aux  maris  le  mépris  que  méritent  les 
lâches;  mais  les  jeunes  garçons  et  les  jeunes  filles  réunis 
dans  les  mêmes  chaînes  parlent  familièrement  à  demi-voix 
sur  un  ton  tout  différent.  Prince,  vous  les  avez  partagés 
entre  les  habitants  de  vos  provinces  ;  ils  vont  servir  ces 
maîtres,  et  ils  attendent  qu'on  les  conduise  aux  solitudes 
qu'ils  doivent  cultiver  (1).  »  Ces  barbares  vaincus  sont 
réduits  en  esclavage  ;  c'est  en  qualité  d'«  esclaves  »  (5^*- 
viendo)  qu'ils  vont  remettre  en  culture  des  champs  aban- 
donnés, les  mêmes  champs  peut-être  que  leurs  dévasta- 
tions avaient  rendus  incultes  (2). 

Les  Boii  sont  traités  tout  autrement.  Ils  ne  deviennent 
ni  les  esclaves ,  ni  les  domestiques ,  ni  les  fermiers  d'au- 
cun particulier.  Les  Aeduiy  dans  la  guerre  contre  Ârioviste» 
avaient  perdu  beaucoup  de  monde  (3)  ;  ils  n'étaient  plus 
en  état  de  cultiver  tout  leur  territoire ,  ils  en  détachent  un 
vaste  canton  qu'ils  livrent  aux  Boii,  Ce  n'est  point  de  par- 
ticuliers, c'est  de  la  cité  des  Aedui  que  les  Boii  tiennent  le 
territoire  qui  leur  est  attribué ,  et  c'est  à  elle  qu'ils  payent 
la  redevance  annuelle  appelée  par  César  stipendium.  C'esl 
donc  la  cité  des  Aedui  qui  est  propriétaire  de  ce  territoire  ; 
les  détenteurs  'dépossédés  au  profit  des  Boii  n'avaient  sur 
ce  territoire  qu'un  droit  analogue  à  celui  des  nobles  ro- 
mains sur  les  portions  de  Vager  pvblicus  dont  ils  avaient  la 
jouissance  au  temps  des  lois  agraires. 

Ces  détenteurs  en  avaient  joui  à  charge  de  payer  à  la 
cité  la  redevance  annuelle  qui  est  imposée  aux  Boii,  La 
redevance  annuelle  due  par  ces  détenteurs  avait  été  com- 


(1)  •  Totis  portieibus  civitatum  sedere  captiva  agmina  barbarorum,  viros 
tttonita  feritate  trépidantes,  despicientes  anus  ignaviam  flliorum,  nuptas 
maritorum ,  Yincnlis  copulatos  pueros  ac  pueUas  familiari  murmure  blan- 
dientes,  atque  bos  omnes  provincialibus  vestris  ad  obsequium  distributos, 
donec  ad  destinâtes  sibi  cultus  solitudinum  ducerentur.  »  (Incerti  panegy' 
ncuê  ConsUntio  Caesan,  ix,  édit.  Teubner-Bœhrens,  p.  138,  1.  8-15.) 

(2)  t  Ut,  qnae  fortasse  ipsi  quondam  depraedando  vastaverant,  cul  ta  red- 
derent  »er?iendo.  >  [Ibid.,  viii,  p.  138, 1.  3-5.) 

(3)  c  Magnam  calamitatem  pulsos  accepisse  :  omnem  nobilitatem,  omnem 
M&atam,  omnem  equitatem  amisisse.  m  (De  bello  gallico,  I,  31,  |  6.) 


108  LIVRE  I".  CHAPITRE  V.  {  5. 

prise  dans  les  vectigalia  que  Dumnorix  avait  pris  à  bail  de 
la  cité  des  Aedui  avant  la  campagne  de  César  contre  les 
Helvetii  (1). 

Quand,  par  la  conquête,  le  Germain  vainqueur  s'empare 
d'une  portion  du  territoire  gaulois,  il  expulse  les  Gaulois 
qui  la  cultivent,  parce  qu'il  ne  fait  pas  de  distinction  entre 
la  souveraineté  et  la  propriété  du  vaincu  ;  c'est  aussi  la 
doctrine  du  Romain  victorieux.  Mais  la  législation  romaine 
conçoit  pour  le  citoyen  de  Rome  un  droit  de  propriété 
foncière  qu'elle  distingue  de  la  souveraineté  de  l'Etat  :  à 
côté  de  Vager  publiais,  le  domaine  privé  ;  or,  cette  concep- 
tion n'existe  ni  chez  les  Germains,  ni  chez  les  Gaulois  :  le 
Germain,  au  temps  de  César,  ne  met  pas  de  différence 
entre  le  droit  individuel  du  vaincu  et  le  droit  individuel 
du  citoyen  sur  la  terre;  à  la  même  époque,  le  Gaulois 
comprend  à  peu  prés  comme  le  Germain  la  relation  juridi- 
que entre  le  champ  et  le  possesseur,  que  ce  possesseur 
soit  un  étranger  vaincu  ou  le  citoyen  d'un  état  victorieux. 

Nous  avons  de  la  propriété  foncière  des  citoyens  une 
rdée  analogue  à  la  notion  du  dominium  romain.  Supposons 
qu'en  France  un  gouvernement  dépouille  et  expulse  d'un 
arrondissement  toute  la  population  française  qui  l'habite 
et  y  établisse  une  population  étrangère,  de  même  langue 
que  nous  si  l'on  veut ,  venue  de  la  Belgique  wallonne  ou 
de  la  Suisse  romande  :  —  tels  étaient  les  Boii  parlant  gau- 
lois comme  les  Aedui  :  —  cette  hypothèse  est  absurde, 
parce  que,  chez  nous,  c'est  aux  particuliers  et  non  à  l'Etat 
qu'en  général  appartient  la  propriété  du  sol. 

5  5.  —  L'absence  de  propriété  foncière  individuelle  en  Gaule 
explique  le  système  particulier  de  communauté  entre  époux 
que  César  constate  chez  les  Gaulois. 

Nous  arrivons  à  un  troisième  texte  qui  semble  confirmer 


(1)  «  Omnia  Aeduorum  vectigalia  parvo  pretio  redempta  habere.  »  (De 
btllo  gallico,  I,  18,  {  3.) 


POSSESSION  PRÉCAIRE  DU  SOL  EN  GAULE.  109 

cette  doctrine,  qu'en  général  le  territoire  de  la  Gaule 
était  ager  publicus  à  la  date  de  la  conquête.  Nous  commen- 
cerons par  rappeler  le  passage  de  Polybe  :  «  La  propriété 
de  chacun  des  Gaulois  consistait  en  troupeaux  et  en  or  (1).  » 
Or  César,  exposant  en  termes  très  brefs  les  principaux 
traits  de  la  législation  des  Gaulois,  nous  fait  connaître 
ainsi  qu'il  suit  le  régime  des  biens  entre  époux  :  «  Les 
hommes  reçoivent  de  leur  femme  une  dot  et,  après  esti- 
mation, mettent  en  commun  avec  cette  dot,  des  biens 
d'une  valeur  égale  pris  sur  leur  avoir.  Ces  biens  mis  en 
commun  sont  l'objet  d'un  compte;  ou  conserve  les  fruits; 
le  survivant  des  deux  époux  reçoit  les  deux  parts  avec  les 
fruits  produits  par  elles  pendant  le  mariage  (2).  » 

Ce  contrat  qui ,  à  première  vue ,  peut  sembler  bizarre , 
devient  quelque  chose  de  rationnel  et  de  très  simple  si, 
s'inspirant  du  texte  de  Polybe,  on  suppose  que  la  dot 
des  femmes  et  la  portion  de  l'apport  des  maris  mise  en 
commun  avec  cette  dot  consistent  en  troupeaux  et  que  les 
fruits  qui  viennent  s'y  ajouter  sont  le  croit  des  troupeaux. 
La  convention  dont  il  s'agit  offre  une  grande  analogie  avec 
notre  cheptel  du  Code  civil.  On  garde  les  fruits,  c'est-à- 
dire  le  croit  ;  cela  ne  veut  pas  dire  qu'on  garde  les  bes- 
tiaux jusqu'à  les  laisser  mourir  de  vieillesse.  Cela  signifie 
qu'on  élève  les  veaux  et  les  génisses,  et  que,  pour  les 
abattre,  on  attend  l'âge  où,  devenus  adultes,  ils  peuvent 
atteindre,  après  engraissement,  la  valeur  la  plus  élevée, 
soit  comme  bœufs  après  avoir  servi  à  la  culture,  soit 
comme  vaches  après  avoir  donné  plusieurs  veaux.  Admet- 
tons qu'un  troupeau  ainsi  administré  vienne  à  doubler 
tous  les  trois  ans,  ce  qui  peut  fort  bien  arriver,  sauf  le  cas 


(1)  Txap^iç  Yc  \^H  ixduTToïc  ^v  dpé|i{jLaTa  xal  xP^ffoç  (Polybe,  livre  II,  eh.  xvxi, 
Jll). 

(2)  c  Viri,  quantas  pecunias  ab  uxohbus  dotis  nomine  accepenint,  tantas 
ex  suis  bonis  aestimatione  facta  cum  dotibus  communicant.  Hujus  omnis 
pecnûiae  conjunctim  ratio  habetur  fructusque  servantur  :  uter  eorum  vitA 
Sttporavit,  ad  en  m  pars  utriusque  cum  fructibus  superiorum  temporum  per- 
venit.  »  (César,  De  bello  gallico.  VI,  19,  {  1,  2.) 


110  LIVRE  I-.  CHAPITRE  V.  {  5. 

d'épidémie ,  de  disette  ou  de  guerre  ;  avec  deux  vaches  au 
début,  ou  aura,  au  bout  de  trente  ans,  un  troupeau  de 
plus  de  2,000  têtes,  à  condition  qu'on  puisse  le  nourrir  (1). 

On  comprend  ce  procédé  ;  un  troupeau  ainsi  traité  donne 
tous  les  ans  un  produit  en  laitage,  en  fumier,  en  bêtes 
qu'il  faut  abattre,  parce  que  Tàge  qu'indique  une  bonne 
administration  est  atteint,  ou  parce  qu'un  accident,  une 
difficulté  quelconque  rend  l'élevage  impossible.  De  ce  pro- 
duit ,  le  ménage  vivra.  Mais  que  la  dot  consiste  en  terre 
et  que  l'apport  associé  à  la  dot  par  le  mari  soit  encore  de 
la  terre;  tant  que  le  mariage  durera,  on  ne  touchera  pas 
au  revenu  de  ces  terres.;  les  blés  et  les  pailles  seront  em- 
magasinés dans  des  greniers,  et  on  les  y  conservera  jusqu'à 
la  mort  de  l'un  des  conjoints ,  ou ,  si  on  les  vend ,  on  en 
gardera  soigneusement  le  produit  dans  un  coffre-fort  sans 
jamais  y  toucher  :  on  mourra  de  faim  à  côté.  De  telles 
hypothèses  peuvent  être  émises  dans  le  silence  du  cabinet 
par  des  savants  qui  vivent  entre  leur  imagination  et  leurs 
livres ,  mais  elles  sont  impraticables  et  ne  peuvent  avoir 
été  la  loi  à  laquelle ,  dans  un  grand  peuple ,  tous  les  mé- 
nages aisés  aient  dû  soumettre  leur  existence  journalière. 

Gouverner  un  troupeau  comme  nous  l'entendons  suppose 
une  économie  qui  n'est  compatible  qu'avec  la  fortune  ;  mais 
quels  étaient  ces  maris  auxquels  les  femmes  apportaient 
des  dots  et  qui  mettaient  en  commun  avec  cette  dot  un  ca- 
pital égal?  Us  n'appartenaient  point  à  la  plèbe  réduite 
presque  à  l'esclavage,  accablée  par  le  poids  des  dettes  et 
des  impôts  (2).  Ces  maris,  ce  sont  des  membres  de  l'aristo- 
cratie ,  ce  sont  des  sénateurs  et  des  chevaliers  ;  c'est  un 
groupe  de  population  très  riche  et  peu  nombreux,  puisque 
Vercingétorix ,  voulant  réimir  contre  César  tous  les  cheva- 


(1)  Voici  la  progression  :  le  premier  chiffre  indiquera  les  années,  le  second 
le  nombre  des  têtes  :  1,  2;  3,  4;  6,  8;  9,  16;  n,  32;  15,  64;  18,  128;  21,  256; 
,24,  512;  27,  1024;  30,2048. 

(2)  «  Plèbes  paene  servorum  habetur  loco...  plerique  cum  aut  aère  alieno 
aut  magnitudine  tributorum...  premuntur...  »  {De  bello  gallicOf  VI,  13,  {  1,  2.) 


POSSESSION  PRÉCAIRE  DU  SOL  EN  GAULE.  111 

liers  de  la  Gaule  insurgée  contre  Rome,  n'en  a  pas  trouvé 
plus  de  quinze  mille  à  convoquer  (1).  Comment  ont-ils  créé 
la  fortune  qui  leur  a  permis  de  transformer  en  débiteurs 
une  grande  partie  des  membres  de  la  plèbe?  C'est  par  la 
sage  administration  de  leurs  troupeaux,  c'est  en  conservant 
les  fruits,  c'est-à-dire  le  croit,  le  croit  des  troupeaux  appor- 
tés en  dot  par  les  femmes  et  celui  de  troupeaux  d'une 
valeur  égale  pris  sur  l'avoir  des  maris. 

§  6.  —  Objection  tirée  d'un  passage  de  César  où  il  est  question 

de  la  juridiction  des  Druides.- 

A  notre  doctrine  il  a  été  fait  plusieurs  objections  par  un 
savant  professeur  de  la  Faculté  des  lettres  de  Paris.  Le  ta- 
lent littéraire  de  cet  habile  critique  est  égal  à  son  érudi- 
tion. Aussi  semble-t-il  nécessaire  de  répondre  ici  à  la  prin- 
cipale de  ses  objections.  Cette  objection  est  fondée  sur 
une  interprétation  erronée  d'un  passage  de  César,  dont  il 
est  impossible  de  tirer  aucun  argument  ni  pour  ni  contre  la 
thèse  soutenue  ici. 

César  vient  de  parler  de  l'enseignement  des  druides  ;  de 
ce  sujet  il  passe  à  leur  juridiction.  Voici  comment  il  s'ex- 
prime :  Fere  de  omnibus  controversiis  publicis  PRiVATisgutf 
constituunt  ;  et,  si  quod  est  admissum  facinuSy  si  caedes  facta^ 
si  de  hereditate,  si  de  finibus  controversia  est^  idem  decer^ 
nunt,  praemia  poenasque  constituunt ,  si  gui  aut  privatus  aut 
POPULus  eorum  decreto  non  stetit,  sacrificiis  interdicunt  (2). 
Voici  la  traduction  que  nous  proposons  :  «  Les  druides 
»  jugent  presque  toutes  les  contestations ,  qu'elles  con- 
»  cernent  soit  un  peuple^  soit  un  particulier]  si  quelque 
»  crime  a  été  commis ,  s!il  a  été  fait  un  meurtre ,  s'il  y  a 
»  contestation  sur  héritage  ou  sur  limites  ce  sont  encore  eux 

(1)  f  Omnes  équités,  quindecim  milia  numéro,  celeriter  convenire  jubet.  » 
[Ikhello  g&llico,  VII,  64,  J  1.) 

(2)  De  bello  gallico,  VI,  13,  {  5. 


llï  LIVRE  I".  CHAPITRE  V.  {  6. 

»  qui  décident  et  qui  fixent  le  montant  de  la  composition 
»  pécuniaire  à  recevoir  par  le  demandeur  et  à  payer  par  le 
»  défendeur  ;  si  soit  un  particulier  soit  un  peuple  ne  se 
»  conforme  pas  à  leur  décision ,  ils  l'excluent  des  sacrifi- 
»  ces.  »  M.  Fustel  de  Coulanges  rend  ainsi  ce  passage  : 
«  Il  (César)  dit  que  les  druides  jugent  presque  tous  les  pro- 
»  ces  aussi  bien  au  criminel  qu'au  civil.  Puis  il  fait  Ténu- 
»  mération  de  ces  débats  portés  devant  les  druides  :  au 
»  criminel  il  cite  le  meurtre  ;  au  civil  il  mentionne  le  pro- 
»  ces  sur  héritage  ou  sur  des  limites  :  Si  de  hereditate^  si 
9  de  finibus  controversia  est.  Dès  qu'il  y  a  en  Gaule  des 
»  procès  sur  héritage  et  sur  des  limites,  c'est  que  les  Gau- 
»  lois  ont  la  règle  de  l'hérédité  et  l'usage  des  limites,  c'est- 
»  à-dire  la  propriété  héréditaire  du  sol  (1).  » 

M.  Fustel  de  Coulanges  parait  n'avoir  pas  compris 
ce  que  César  a  voulu  dire.  D'abord,  suivant  le  docte 
professeur,  quand  César  a  écrit  en  parlant  des  druides  : 
Fere  de  omnibus  controversiis  publicis  PRiVATisg^ti^  consti- 
tuunt,  cela  signifie  «  que  les  druides  jugent  presque  tous 
»  les  procès  aussi  bien  au  criminel  qu'au  civil.  »  Dans 
cette  traduction  de  M.  Fustel  de  Coulanges,  il  y  a  un 
contre  sens.  Pour  bien  comprendre  le  membre  de  phrase 
ainsi  traduit  par  M.  Fustel  de  Coulanges,  et  qui  est  la 
première  des  cinq  lignes  de  César  reproduites  plus  haut, 
il  faut  en  rapprocher  le  dernier  membre  de  phrase  qui  est 
pour  ainsi  dire  le  pendant  du  premier  :  Si  qui  dut  privatus 
aut  POPULUS  eorum  decreto  non  stetit,  sacri/lciis  interdicunt  ; 
«  si ,  soit  un  particulier,  soit  un  peuple ,  ne  se  conforme 
pas  à  leur  décision  ils  l'excluent  du  sacrifice.  » 

A  pvèlicis,  dans  le  premier  membre  de  phrase,  corres- 
pond populus  dans  le  second  membre  de  phrase ,  comme  à 
privatis,  dans  le  premier,  privatus  dans  le  second.  Evidem- 
ment, controversia  publica  veut  dire  «  contestation  concer- 


(1)  Le  problème  des  origines  de  la  propriété  foncière^  Bruxelles,  Alfred 
VromAnt,  1889,  in-8*,  p.  84-85. 


POSSESSION  PRÉCAIRE  DU  SOL  EN  GAULE.  113 

nant  un  peuple.  »  M.  Pustel  de  Coulanges  croit  que  con- 
troversiae  publicas  est  synonyme  de  judicia  publica.  Il  en 
conclut  qu'en  français  controversia  publica  doit  être  tra- 
duit par  «  procès  au  criminel.  »  «  On  sait,  »  dit  le  savant 
auteur  «  que  ,  dans  la  langue  du  droit ,  les  judicia  publica 
»  sont  les  jugements  criminels ,  littéralement  ceux  qui 
»  portent  sur  Tun  des  crimes  que  l'autorité  publique  pour- 
»  suit  »  (p.  84,  note). 

Nous  allons  examiner  deux  questions  ;  la  première  est  de 
savoir  si  César,  en  se  servant  des  mots  controversiae  publicae 
a  eu  l'intention  d'exprimer  l'idée  qui  est  rendue  ordinaire- 
ment en  droit  romain  par  les  mots  judicia  publica  ;  la  se- 
conde est  de  savoir  si,  même  en  ce  cas,  la  traduction  «  pro- 
cès au  criminel  »  rendrait  clairement  la  doctrine  de 
l'historien  romain. 

Controversia,  en  latin,  est  le  terme  technique  pour  dési- 
gner les  procès  civils  par  opposition  aux  procès  criminels. 
On  a  souvent  cité  pour  la  détermination  de  ce  sens,  un  pas- 
sage de  Cicéron,  pro  Caecina^  c.  2,  §  6  :  Omnia  judicia  aut 
distrahendarum  controversiarum  ^  aut  puniendorum  malefi- 
ciorum  caussa  reperta  sunt ,  et  on  en  rapproche  un  passage 
in  De  oratore,  limre  II,  c.  24,  §  104  :  Sive  ex  crimine  caussa 
constat  ut  facinoriSy  sive  ex  controversia  ut  hereditatis.  Contre- 
versia  est  donc  l'opposé  de  judicium  publicum. 

Théoriquement,  à  l'origine  du  droit,  il  n'y  a  de  judicium 
publicum  que  pour  les  crimes  commis  contre  l'Etat,  tels  que 
la  haute  trahison,  laesa  majestas\  plus  tard,  à  Rome,  cer- 
tains crimes  contre  les  particuliers,  tels  que  le  meurtre, 
ont  été  compris  dans  la  nomenclature  des  actes  qui  don- 
nent lieu  à  des  judicia  publica^  tandis  que  les  autres ,  tels 
que  le  vol,  restaient  ce  que  le  Digeste  appelle  privata 
delicta  (1), 

César,  en  employant  le  terme  de  controversia  dans  le 


(l)  Livre  XLVII,  titre  I,  De  privatis  delictis.  Cf.  livre  XLVIII,  titre  I, 
De  publicis  judiciis. 

8 


114  LIVRE  1^,  CHAPITRE  V.  {  6. 

passage  précité,  exclut  l'idée  romaine  de  judicium  jmblicum. 
et  on  ne  peut  dire  qu'il  ait  employé  cette  expression  au  ha- 
sard, car  il  insiste  quelques  lignes  plus  loin.  Après  avoir  dit 
que  tous  les  ans,  à  une  date  déterminée,  les  druides  se  réu- 
nissent dans  le  territoire  de  Chartres,  il  ajoute  :  «  là,  de 
toutes  parts  s'assemblent  tous  ceux  qui  ont  des  contesta- 
tions :  qui  controversias  habeat.  » 

Les  Gaulois  vivaient  encore  sous  le  régime  de  la  com- 
position pécuniaire,  et  les  druides,  même  en  ce  que  nous 
appelons  aujourd'hui  matière  criminelle ,  ne  prononçaient 
que  des  condamnations  civiles.  Les  druides  ne  pouvaient 
donc  rendre  des  jugements  lorsqu'il  s'agissait  de  judicium 
publicum  dans  le  sens  primitif  et  restreint  du  mot ,  c'est- 
à-dire  quand  quelqu'un  était  accusé  de  haute  trahison  si 
nous  pouvons  rendre  ainsi  le  latin  lassae  majestatis.  Voilà 
pourquoi  César  appelle  controversiae ,  c'est-à-dire  procès 
civils,  les  contestations  jugées  par  les  Druides. 

C'est  un  ^  procès  de  haute  trahison  —  lesae  majestatis 
comme  on  aurait  dit  à  Rome  —  qui,  au  début  des  Com- 
mentaires^ est  intenté  à  Orgetorix,  accusé  de  prétendre  à 
la  royauté  ;  une  condamnation  à  mort  doit  s'ensuivre  ;  il 
doit  être  brûlé  ;  dans  le  récit  de  cette  afi^ire  il  n'est  pas 
dit  un  inot  des  druides  ni  du  voyage  à  Chartres.  Le  procès 
doit  se  plaider  sur  le  territoire  helvétique;  c'est  évidem- 
ment l'assemblée  du  peuple  qui  doit  le  juger  (1). 

On  doit  interpréter  de  même  le  passage  où  il  est  dit  que 
les  Senones  veulent  mettre  à  mort  Cavarinus  que,  sans  leur 
consentement,  César  leur  a  imposé  comme  roi  :  interficere 
publico  consilio  conati  (2).  Le  publicum  consilium  dont  parle 
César  est  l'assemblée  du  peuple  des  Sénons  qui  voulant 
conserver  ses  institutions  républicaines  a  condamné  à  mort 
l'usurpateur  Cavarinus.  Le  pays  des  Sénons  est  tout  près 
de  celui  de  Chartres  où  se  tient  annuellement  l'assemblée 


(1)  De  hello  gallico,  I,  4. 

(2)  /bid.,  I,  54. 


POSSESSION  PRÉCAIRE  DU  SOL  EN  GAULE.  115 

des  druides  et  cependant  le  peuple  des  Sénons  n'a  point 
fait  appel  à  la  juridiction  druidique.  Et  pourquoi  cela?  C'est 
que  les  druides  ne  jugeaient  que  des  controversiasy  c'est-à- 
dire  des  procès  civils.  Les  procès  criminels  échappaient  à 
leur  compétence.  Mais  les  procès,  pour  ce  que  nous  appel- 
lerions des  crimes  contre  les  personnes,  contre  les  pro- 
priétés, par  exemple  pour  meurtre  et  pour  vol,  ne  pou- 
vaient alors  en  Gaule  donner  lieu  qu'à  des  réparations 
civiles  et  appartenaient  à  la  catégorie  des  controversiae , 
les  Druides  pouvaient  les  juger. 

M.  Pustel  de  Coulanges  se  trompe  donc  certainement 
quand  il  suppose  que  César,  en  employant  la  formule  con- 
troversiae publicae,  a  voulu  parler  de  judicia  publica.  Mais 
même  en  admettant  un  instant  que  cette  supposition  soit 
exacte ,  la  traduction  de  controversiae  puOlicae  par  «  procès 
au  criminel  »  opposés  aux  procès  civils,  controversiae privatae^ 
est  très  dangereuse  et  donne  au  lecteur  une  idée  fausse  du 
droit  criminel  antique.  En  efifet ,  la  poursuite  pour  vol,  en 
droit  romain ,  n'a  jamais  donné  lieu  à  un  judicium  publi- 
cum\  cependant  elle  pouvait  avoir  pour  effet,  dans  l'ancien 
droit  romain,  de  faire  livrer  par  le  juge  la  personne  du  cou- 
pable au  volé  dont  le  voleur  devenait  l'esclave  et  qui  avait 
sur  lui  droit  de  vie  ou  de  mort  :  tel  était  le  résultat  de  la 
condamnation  pour  furtum  manifestum.  Il  en  était  de  même 
dans  la  Gaule  barbare  :  en  Gaule,  le  voleur,  c'est-à-dire 
l'insolvable  qui  s'était  emparé  d'un  objet  mobilier  apparte- 
nant à  autrui ,  et  qui ,  naturellement ,  ne  pouvait  payer 
la  composition  pécuniaire,  devenait  l'esclave  du  volé, 
et  souvent  ce  dernier  se  débarrassait  de  lui  en  le  faisant 
briller  vif  (1).  Ainsi  M.  Fustel  de  Coulanges,  expliquant 
controversia  jmblica  par  judicium  publicum,  qu'il  rend  par 
les  mots  français  «  procès  au  criminel  » ,  n'a  pas  le  droit 
de  comprendre  parmi  ces  procès  la  procédure  motivée  par 
un  acte  (le  furtum  manifestum)  qui  a  pour  conséquence  une 

(l)De  bellQ  gallico,  VI,  16,  l  5. 


i  116  LIVRE  !•'.  CHAPITRE  V.  |  6. 


condamnation  à  une  peine  équivalente  soit  à  nos  travaux 
forcés  à  perpétuité  soit  à  notre  condamnation  à  mort. 

Mais  qu'est-ce  qu'un  procès  au  criminel  ?  qu'est-ce  qu'un 
crime  dans  la  langue  du  droit  français  ?  «  L'infraction  que 
»  les  lois  punissent  d'une  peine  afflictive  ou  infamante  est 
»  un  crime.  »  {Code  pénal^  article  1,  §  3.)  «  Les  peines 
»  afflictives  et  infamantes  sont  :  1**  la  mort  ;  2**  les  travaux 
»  forcés  à  perpétuité  ;  3^  la  déportation  ;  4*  les  travaux 
»  forcés  à  temps  ;  5®  la  détention  ;  6*"  la  réclusion  »  {Code 
pénal,  article  7).  Donc,  suivant  ces  définitions,  le  furtum 
manifesPum  est  un  crime.  Par  conséquent  il  est  certain 
qu'en  traduisant  en  français  ytedicia  publica  par  «  procès  au 
criminel ,  »  on  amène  le  lecteur  à  comprendre  dans  les 
judicia  publica^  les  poursuites  pour  furtum  manifestum 
que  le  droit  romain,  conforme  au  droit  indo-européen  le 
plus  ancien,  n'y  comprenait  point.  C'est  ici  le  cas  de  rap- 
peler une  observation  du  jurisconsulte  Macer,  insérée  au 
Digeste ,  livre  XLVIII ,  titre  I ,  loi  1  :  non  omnia  judicia 
in  quibus  crimen  vertitur  publioa  su/nt ,  sed  ea  tantum  quae 
ex  legihus  publicorv/m  judicioru/m  veniunt. 

Erreur  donc  sur  le  sens  dejudicium  publicum^  comme  de 
controversia.  M.  F.  de  Coulanges  continue  :  «  il  (César)  fait 
»  une  énumération  de  ces  débats  portés  devant  les  druides; 
»  au  criminel  il  cite  le  meurtre,  au  civil  il  mentionne  les 
»  procès  sur  un  héritage  ou  sur  des  limites  :  Si  de  heredi- 
»  tate,  si  de  finibus,  controversia  est.  Dès  qu'il  y  a  en 
♦  »  Gaule  des  procès  sur  l'héritage  ou  sur  les  limites,  c'est 
»  que  les  Gaulois  ont  la  règle  d'hérédité  et  l'usage  des 
»  limites,  c'est-à-dire  la  propriété  héréditaire  du  sol.  César 
n  dit  ailleurs  que  les  Germains  n'ont  pas  de  finesy  il  dit  ici 
»  que  les  Gaulois  en  ont  »  (p.  84-85). 

Il  y  a  sur  ce  passage  plusieurs  observations  à  présenter. 
L'opposition  que  fait  ici  M.  Fustel  de  Coulanges  entre  le 
criminel  et  le  civil  dans  la  juridiction  druidique  n'existe 
que  dans  son  imagination.  Après  un  meurtre,  les  drui- 
des ne  jugeaient  que  ce  que  notre  Code  d'instruction  cri- 


POSSESSION  PRÉCAIRE  DU  SOL  EN  GAULE.  117 

mnelldj  article  2,  appelle  raction  civile  par  opposition  à 
raction  publique,  et  ce  que  le  môme  code,  article  1,  définit  * 
«  Taction  en  réparation  du  dommage  causé  par  un  crime.  » 

D'autre  part ,  César,  dans  le  passage  dont  il  s'agit ,  n'a 
pas  distingué  en  deux  catégories ,  Tune  criminelle ,  l'autre 
civile,  les  causes  de  procès  qu'il  énumère  :  crime  quel- 
conque, meurtre,  héritage,  limite.  Il  annonce  qu'il  veut 
parler  de  procès  concernant  soit  un  peuple,  soit  un  par- 
ticulier ;  il  termine  en  disant  que  si  le  peuple  ou  le  parti- 
culier condamné  n'exécute  pas  le  jugement,  ce  particulier 
ou  ce  peuple  sera  exclus  des  sacrifices  ;  mais  il  ne  dit  nulle 
part  qui  est  demandeur  ni  qui  est  défendeur,  qu'il  s'agisse 
de  crime,  de  meurtre,  d'héritage  ou  de  limites.  Affirmer 
que  lorsqu'il  s'agit  de  crime ,  notamment  de  meurtre ,  le 
peuple  sera  partie  dans  l'affaire ,  que  lorsqu'il  s'agira  d'hé- 
ritage ou  de  limites  ce  sera  un  particulier,  c'est  une  hypo- 
thèse arbitraire  que  rien  ne  justifie. 

«  Les  Gaulois  ont,  »  continue  M.  Pustel  de  Coulanges, 
«  la  règle  d'hérédité  et  l'usage  des  limites ,  c'est-à-dire  la 
»  propriété  héréditaire  du  sol.  »  Mais,  dans  le  texte  de  Cé- 
sar, rien  ne  dit  que  l'hérédité  dont  il  s'agit  eût  pour  objet 
la  propriété  du  sol.  L'hérédité  réclamée  par  un  particulier 
contre  un  autre  particulier  pouvait  avoir  pour  objet 
soit  un  meuble  soit  un  droit  temporaire  ou  précaire  sur  le 
sol.  L'hérédité  réclamée  par  un  particulier  contre  un  peu- 
ple pouvait  avoir  pour  objet  une  fonction  héréditaire,  par 
exemple  la  royauté  (1).  Pourquoi  prétendre  déterminer 
l'objet  de  cette  hereditas^  dire  que  cet  objet  est  nécessaire- 
ment la  propriété  du  sol  quand  César  ne  le  dit  point? 

Les  limites ,  fines ,  si  elles  étaient  réclamées  par  un  peu- 
ple contre  un  autre  peuple  pouvaient  être  des  limites 
d'Etats  ;  réclamées  par  un  particulier  contre  un  particulier , 
elles  pouvaient  être  une  limite  de  champ ,  de  cour  ou  de 
yerger  ;  mais  sur  ce  champ ,  sur  cette  cour ,  sur  ce  verger , 

(1)  Cf.  Regni  kerediUs^  herM  regni  dans  la  Guerre  d'Alexandrie,  c.  66. 


tl8  LIVRE  !••.  CHAPITRE  V.  (  7. 

quel  étail  le  droit  réel  prétendu  par  les  plaideurs?  On  voit 
tous  les  jours  dans  la  France  de  notre  temps  des  procès 
pour  limites  entre  fermiers  ;  à  Rome  Vager  occupatorius  ou 
arcifinius,  c'est-à-dire  celui  dont,  à  Torigine  et  pendant  des 
siècles,  la  détention  par  le  possesseur  a  été  précaire,  c'est- 
à-dire  celui  qui  faisait  partie  de  Yager  publicus  et  dont  les 
lois  agraires  ont  plusieurs  fois  expulsé  les  détenteurs,  ce 
champ,  auquel  nous  comparons  le  c^hamp  gaulois,  avait  des 
limites,  fines  :  De  fine  similis  est  controversia...  sed  de  fim 
disconvenu  per  ftexus  quitus  arcifinii  agri  coniinentur  (1). 

Il  n'y  a  donc  rien  à  tirer  du  texte  de  César  contre  la 
doctrine  que  nous  exposons.  Ce  texte  ne  prouve  pas  que 
la  propriété  foncière  individuelle,  telle  que  nous  la  conce- 
vons aujourd'hui  en  France ,  existât  dans  la  Gaule  barbare 
quand  cette  contrée  a  été  conquise  par  les  Romains. 

S  7.  —  Conclusion,  L'ager  publicus  romain  et  /'ager  publi- 
cus gaulois,  La  propriété  bâtie  en  Gaule  pendant  la  guerre 
de  la  conquête. 

En  Gaule ,  à  l'époque  de  la  conquête  romaine,  le  déten- 
teur de  la  terre  n'a  pas  de  titre  à  opposer  à  l'Etat.  La  con- 
séquence est  qu'il  ne  s'attache  pas  à  la  terre.  Voilà  pour- 
quoi les  Helvetii  abandonnent  leur  territoire  ;  voilà  pourquoi 
les  Aedui  cèdent  aux  Boii  une  partie  du  leur.  Cela  nous 
montre  que  le  droit  de  l'Etat  avait  en  Gaule  un  caractère 
beaucoup  plus  pratique  et  beaucoup  moins  platonique  à 
l'époque  de  la  conquête  romaine,  que  dans  l'Italie  du  même 
temps.  Un  signe  du  droit  de  l'Etat  en  Italie  avait  été  une 
redevance  annuelle,  vectigaU  imposée  au  propriétaire.  Une 
loi,  de  la  fin  du  deuxième  siècle  avant  J.-C,  avait  aboli 
cette  redevance  en  Italie.  Mais,  au  temps  de  César,  les 
Aedui  la  percevaient  chez  eux.   Dumnorix  l'avait  prise  à 


(1)  Frontin,  chez  Lachman,  GromtLtici  veteres,  p.  13. 


POSSESSION  PRÉCAIRE  DU  SOL  EN  GAULE.  119 

fenne  en  même  temps  que  les  impôts  indirects  (1).  Quand 
les  Boii  reçurent  la  concession  d'une  partie  du  territoire  des 
Aedai,  ce  fut  à  charge  de  payer  la  même  redevance,  et  ce 
fut  ainsi  qu'ils  devinrent ,  comme  le  dit  César,  stipendiarii 
des  Aedui  :  stipendium  est  un  synonyme  de  vectigaL 

On  se  demandera  pourquoi  les  Gaulois  détenteurs  de 
Yager  publicus  appartenant  à  leur  cité  auraient  eu  une  situa- 
tion plus  précaire  que  celle  des  citoyens  romains  déten- 
teurs de  Yiiger  publicus  de  Rome  en  Italie.  Cette  différence 
s'explique  par  la  date  récente  de  rétablissement  de  chaque 
peuple  gaulois  sur  le  territoire  qu'il  occupait  à  l'arrivée  de 
César  et  par  l'incertitude  qui  y  régnait  sur  l'avenir,  tandis 
que  rorigine  de  Vager  publicus  de  Rome  remontait  à  sept 
siècles,  et  que  les  citoyens  de  Rome  n'en  prévoyaient 
pas  la  fin. 

La  migration  des  Volcae  Àrecomici  n'était  pas  terminée  à 
la  fin  du  troisième  siècle,  puisque ,  au  moment  du  passage 
d'Annibal ,  une  partie  d'entre  eux  habitait  encore  à  l'est  du 
Rhône  (2),  et  qu'ils  avaient  disparu  de  cette  région  quand 
les  Romains  conquérants  mirent  un  terme  aux  déplace- 
ments de  peuples  en  Gaule.  La  venue  des  Helvetii  dans 
le  pays  qui  est  aujourd'hui  la  Suisse  était  un  fait  encore 
tout  récent  en  l'an  58  avant  notre  ère ,  car  l'histoire  nous 
a  conservé  le  souvenir  de  leur  établissement  antérieur  de 
l'autre  côté  du  Rhin  (3).  L'arrivée  des  Belges  à  l'ouest  du 
Rhin  ne  pouvait  pas  être  bien  ancienne  à  l'époque  de  Cé- 
sar, puisqu'on  en  gardait  le  souvenir  en  Gaule,  et  on  sait 
combien  le  souvenir  des  migrations  s'efface  vite  chez  les 
peuples  qui  n'écrivent  pas.  Le  plus  ancien  événement 
connu  de  l'histoire  des  Belges  en  Gaule  est  leur  résistance 
aux  Cimbres  et  aux  Teutons  à  la  fin  du  deuxième  siècle 
avant  notre  ère.  Il  n'est  pas  probable  que  leur  arrivée  sur 

(1)  «  Complnris  annos  portoria  reliqaaque  omnia  Aeduonim  vectigalia 
pwe  preiio  redempta  habere.  »  (De  hello  gsillico,  I,  18,  J  3.) 

(2)  Tite-Live,  XXI,  26. 

(3)  Tacite,  Germania,  28. 


120  LIVRE  I".  CHAPITRE  V.  {  7. 

la  rive  gauche  du  Rhin  soit  antérieure  au  troisième  siècle 
avant  J.-C.  Le  grand  territoire  qui  devint  belge  à  cette 
date  était  précédemment  occupé  par  des  Celtes  ou  Gaulois, 
dans  le  sens  restreint  du  mot,  qui  furent  rejetés  vers  le  midi  ; 
et  ainsi  s'explique  par  exemple  l'établissement  des  Sequani 
dans  le  bassin  du  Rhône  :  les  Sequani  semblent  avoir  été 
originairement  les  habitants  des  bords  de  la  Seine  {Sequana). 
En  tout  cas,  il  dut  y  avoir  en  Gaule,  au  troisième  siècle, 
un  grand  nombre  de  peuples  contraints  à  se  déplacer,  puis- 
qu*à  cette  époque  le  domaine  du  groupe  appelé  celtique  ou 
gaulois ,  dans  le  sens  restreint  de  ces  mots ,  fut  réduit  aux 
deux  tiers  environ  de  l'espace  qu'il  avait  précédemment 
occupé  (1). 

Ainsi ,  à  l'arrivée  de  César ,  le  territoire  habité  par  cha- 
que peuple  ne  devait  pas  être  en  sa  possession  depuis  beau- 
coup plus  d'environ  deux  siècles.  Il  était  donc  naturel  que 
la  détention  de  chacune  des  parcelles  de  ce  territoire  par 
les  membres  de  l'aristocratie,  seuls  en  état  d'en  tirer  parti, 
eût  conservé  un  caractère  précaire  qui  alors,  en  Italie, 
s'était  peu  à  peu  eflfacé ,  non  en  théorie ,  mais  en  fait  ;  ce 
caractère  précaire  de  la  détention  du  sol  par  les  particuliers 
en  Gaule ,  explique  la  facilité  avec  laquelle  les  Helvetii 
prirent  le  parti  d'émigrer  en  masse  et  la  libéralité  avec 
laquelle  les  Aedui  abandonnèrent  une  portion  de  leur  ter- 
ritoire aux  Boii. 

On  ne  trouve  guère ,  dans  le  De  bello  gallico ,  qu*un  seul 
exemple  où  des  Gaulois  montrent  de  l'attachement  pour 
des  propriétés  immobilières  privées.  Cet  exemple  est  donné 
par  les  Bituriges ,  qui  refusent  de  laisser  brûler  Avaricum , 
leur  ville  principale,  et  qui,  par  là,  contraignent  Vercin- 
gétorix  a  changer  son  plan  de  campagne  contre  les  Ro- 

(l}.a  Cum  ab  his  quaereret,  quae  civitates  quantaeque  in  armis  essent  et 
quid  in  beUo  possent,  sic  reperiebat  :  plerosque  Belgas  esse  ortos  ab  Ger- 
manis  Rhonumque  antiquitus  traductos  propter  loci  fertilitatem  ibi  conse- 
disse,  Gallosque,  qui  ea  loca  incolerent,  oxpulisse  solosque  esse  qui  patmm 
nostrorum  memoria  omni  GalUa  vexata  Teutonos  Cimbrosque  intra  fines 
suos  ingredi  prohibuerint.  »  (De  bello  g&llicoy  II,  4,  §  1,  2.) 


POSSESSION  PRÉCAIRE  DU  SOL  EN  GAULE.  121 

mains.  César  nous  les  montre  prosternés  aux  pieds  des  re- 
présentants de  la  nation  gauloise  :  ils  prétendent  que  leur 
ville  est  presque  la  plus  belle  de  toute  la  Gaule,  qu'elle  est 
la  défense  et  Tornenient  de  leur  cité  ;  finalement ,  ils  ob- 
tiennent gain  de  cause.  Ves  Bituriges,  qui  se  jettent  aux 
pieds  de  leurs  collègues  dans  l'assemblée  générale  de  la 
Gaule ,  étaient  de  grands  seigneurs ,  propriétaires  des  prin- 
cipales maisons  d'Avaricum ,  tandis  que ,  prés  d'eux ,  une 
plèbe  sans  influence  habitait  des  maisons  plus  modestes,  ou 
même  pauvres.  Vercingétorix  eut  pitié  de  ces  misérables 
que  rincendie  devait  ruiner,  et  accorda  ce  que  demandait 
Taristocratie  biturige  (1).  Ainsi,  la  propriété  immobilière 
privée  existait  dans  Tenceinte  fortifiée  d'Avaricum^  et  Ver- 
cingétorix la  respecta.  Cette  propriété  urbaine  est  inconnue 
aux  Gaulois  Italiens  de  Polybe ,  qui  n'habitent  que  des  vil- 
lages dépourvus  de  murailles  (2)  ;  tel  est  l'unique  progrès 
qu'eût  fait  la  notion  de  la  propriété  immobilière  entre  la 
période  décrite  par  l'historien  grec,  fin  du  troisième  siècle, 
et  celle  où  nous  transportent  les  Commentaires  de  César,  au 
milieu  du  premier  siècle  avant  J.-C. 

Un  progrès  nouveau  s'accomplit  quand ,  après  la  conquête 
romaine,  vers  la  fin  du  premier  siècle  avant  J.-C,  les 
portions  de  territoire  occupées  par  les  grands  seigneurs 
gaulois  furent  assimilées  aux  fundi  italiens,  et  quand  ces 
grands  seigneurs ,  devenus  citoyens  romains ,  donnèrent  à 
ces  fundi  des  noms  dérivés  des  gentilices  qu'ils  avaient 
adoptés. 


(1)  •  Datur  petentibns  Tonia,  dissuadente  primo  Vercingetorige ,  post 
concedente  et  precibas  ipsomin  et  misericordia  volgi.  v  (De  bello  gallico, 
VU,  15,  i  6.) 

(2)  •  'Oxow  tt  xaTà  xc&(iac  &Tti](((rrovc.  •  (Polybe,  II,  zvil,  {  9.) 


LIVRE  II 

RECHERCHES   SUR   L'ORIGINE  DES   NOMS   DE  LIEUX 

HABITÉS   EN  FRANCE. 


CHAPITRE  PREMIER. 

ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS  EN  FRANCE.  —  PRINCIPES 
6ÉNÉRAUX  APPUYÉS  PRINCIPALEMENT  SUR  DES  TEXTES  CON- 
TEMPORAINS   DE   LA   RÉPUBLIQUE    ET    DE    l'BMPIRE    ROMAIN. 

Sommaire  : 

i  1.  La  propriété  du  sol  devient  individuelle.  Les  fundi  dans  la  Gaule  ro- 
maine ;  le  fundus  Sabiniacus,  —  |  2.  Les  noms  de  fundi  formés  à  Taide 
du  suffixe  latin  -anus  dans  la  Table  alimentaire  de  Veleia.  —  |  3.  Les 
noms  d'hommes  en  Gaule  après  la  conquête.  —  |  4.  Les  noms  de  fundi 
en  'inus  dans  la  Table  alimentaire  auxquels  correspondent  des  noms  de 
fundi  gallo-romains  dérivés  des  mêmes  gentilices ,  mais  avec  le  suffixe 
gaulois  'âcu8.  —  {5.  Les  noms  de  fundi  dérivés  de  gentilices  chez  les 
populations  celtiques  sont  postérieurs  à  la  conquête  romaine.  —  §  6.  Qua- 
tre espèces  de  noms  de  lieux  habités  en  Gaule ,  chez  César.  —  {7.  Cinq 
espèces  de  noms  de  lieux  habités  dans  les  pays  celtiques,  suivant  les  do- 
cuments du  temps  de  TEmpire.  —  {  8.  Le  suffixe  -âcus  placé  à  la  suite  du 
gentilice  pour  former  des  noms  de  lieux,  dans  les  documents  du  temps 
de  TEmpire.  —  )  9.  Comparaison  entre  les  noms  de  lieux  formés  en 
France  à  l'aide  du  suffixe  -âcus  et  quelques  noms  de  lieux  en  -anus  dans 
diverses  parties  de  TEmpire  romain.  —  {  10.  Noms  de  fundi  formés  à 
Faide  de  surnoms  dans  les  pays  celtiques  et  qui  se  rencontrent  dans  des 
documents  écrits  au  temps  de  TEmpire  romain.  —  {11.  Examen  de  la 
question  de  savoir  s'il  y  a  en  France  des  noms  de  lieux  en  -âcus  dérivés 
de  noms  communs.  —  }  12.  Etude  sur  divers  noms  de  lieu  d'origine  cel- 
tique ou  gallo-romaine  qui  n'offrent  pas  le  suffixe  -âcus  et  qui  apparais- 
sent pour  la  première  fois  dans  les  documents  de  la  période  mérovin- 
gienne et  de  la  période  carlovingienne. 

S  !•'.  —  La  propriété  du  sol  devient  individuelle.  Les  fundi 
dcms  la  Gaule  romaine.  Le  fundus  Sabiniacus. 

La  division  de  la  Gaule  en  fundi  ou  propriétés  immobi- 
lières individuelles  date  de  Tépoque  romaine;  cela  résulte 


126  LIVRE  II.  CHAPITRE  I-.  {  l. 

des  noms  qu'un  grand  nombre  de  ces  ftmdi^  devenus  s(  u- 
vent  aujourd'hui  territoires  de  communes ,  ou  réduits  à  la 
condition  de  hameaux ,  ont  conservés.  Ces  noms  sont  dé- 
rivés de  gentilices  romains.  Pour  le  moment,  un  exemple 
sufBra  au  lecteur. 

Il  y  a  en  France  plus  de  cinquante  communes  et  de 
trente  écarts  dont  le  nom  moderne  Savigna,  Savignac^ 
Savignat,  Savigné,  Savigneux,  Savigny,  Sevignac,  Sevi- 
gny ,  s'explique  par  un  primitif  Sabiniaous  dérivé  d'un  gen- 
tilice  Sabinius ,  usité  en  Gaule  et  dans  d'autres  parties  de 
l'empire  romain  (1).  L'origine  latine  de  Sabinius  et  de 
Sabiniacus  est  évidente. 

Nous  trouvons  d'abord  le  mot  Sabinus,  nom  d'un  des 
peuples  italiotes  qui  ont  fourni  à  la  population  de  Rome 
le  plus  fort  contingent  ;  l'addition  du  suffixe  -io-  au  thème 
SabinO'  de  ce  nom  ethnique  a  transformé  Sabinus  en  un 
nom  de  famille  ou  gentilice.  Sabinius,  transporté  en  Gaule 
par  la  conquête  romaine,  et  pris  comme  nom  par  des 
Gaulois  romanisés,  a  donné,  grâce  au  suffixe  gaulois  -aco-s, 
un  dérivé  Sabiniacus^  qui  a  servi  à  désigner  la  part  de  cha- 
que Sabinius  dans  la  propriété  collective  de  son  peuple  ou 
de  sa  cité;  et,  après  vingt  siècles,  après  des  révolutions 
multipliées  qui  ont  toutes  eu  leur  contre-coup  dans  la  géo- 
graphie, on  peut  recueillir,  dans  le  dictionnaire  des  postes 
de  France,  plus  de  quatre-vingts  exemples  du  nom  que 


(1)  M.  Sabinius  Gandidus,  à  Nimégue.  Brambach ,  n*  72. 

T.  Sabinius,  à  Gléves.  Brambach,  143. 

FI.  Sabinius  AttiHus,  à  Huttich.  Brambach,  1342. 

Sabin[ia]  Marcella,  à  Mûnchweiler.  Mommsen,  Inscviptiones  helvelicae,  16(). 

L.  Sabinius  Severus,  à  Colias  (Gard).  (C.  /.  L.,  XII,  2579.) 

Sabinius  Quintilianus,  à  Nimes.  (C.  /.  L.,  XII,  3866.) 

Sabinius  Voratianus,  à  Vaison  (Vaucluse).  (C.  /.  L.,  XII,  5843.) 

Voilà  donc  pour  la  Gaule  sept  exemples  du  gentilice  Sabinius. 

Le  nombre  des  hommes  dont  le  gentilice  est  Sabinius  est  de  dix->neur 
dans  le  tome  III  du  Corpus  inscriptionum  lalinarum;  do  un  dans  le 
tome  V  et  dans  le  tome  VII;  de  trois  dans  le  tome  IX;  de  deux  dans  le 
tomo  X.  Les  femmes  dont  le  gentilice  est  Sabinia  sont  six  dans  le  tome  III, 
deux  dans  le  tome  V,  deux  dans  lo  tome  IX ,  une  dans  le  tome  X ,  etc.  Sur 
le  cognomen  Sabinus,  voyez  Paulj,  Real-EncyclopaediCy  t.  VI,  p.  626. 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  127 

donnèrent  à  leurs  fundi  les  Gallo-Romains  du  nom  de 
Sabinius,  quand  ils  devinrent  propriétaires  des  petits  ter- 
ritoires encore  désignés  par  les  diverses  formes  modernes 
du  nom  de  lieu  Sabiniacus,  dérivé  du  gentilice  Sabinius. 
Ces  petits  territoires,  appelés  aujourd'hui  Savigna,  Savi- 
gnac,  Savigny,  Savigné,  etc.,  appartiennent  à  toutes  les 
parties  de  la  France,  depuis  TAriège  jusqu'aux  Ardennes, 
depuis  les  Basses-Pyrénées  jusques  aux  Côtes-du-Nord , 
depuis  la  Gironde  jusqu'à  la  Haute-Savoie  (1). 

S  2.  —  Les  noms  de  fundi  formés  à  Vaide  du  suffixe  latin 
-anus  dans  la  table  alimentaire  de  Veleia, 

La  Tabula  Alimentaria  de  Veleia,  dont  M.  Ernest  Des- 
jardins a  publié  une  savante  édition  (2) ,  nous  montre  clai- 
rement comment  .se  créaient  ordinairement  dans  l'empire 
romain  les  noms  de  fundi.  En  l'an  104  de  notre  ère, 
l'empereur  Trajan  voulut  établir  à  Veleia  (3)  un  fonds  de 
secours  au  profit  des  enfants  pauvres  ;  il  prêta  aux  pro- 
priétaires fonciers  de  la  ville,  moyennant  hypothèque,  un 
capital,  à  charge  par  eux  de  payer  chaque  année  l'intérêt, 
et  cet  intérêt  devait  être  employé  en  allocations  annuelles 
aux  enfants  sans  fortune.  Les  noms  des  propriétaires  em- 
prunteurs et  des  fonds  de  terre  hypothéqués  furent  inscrits 
sur  une  table  de  bronze  qu'un  hasard  heureux  nous  a 
conservée.  La  plupart  de  ces  fundi  portent  des  noms  ter- 
minés en  'anus  et  dérivés  de  gentilices  romains  bien  connus. 
En  voici  quelques  exemples  : 

Acilianus,  d'Aciliits, 
Aemilianus^  à'Aemilius. 
Afranianus,  à!Afranius. 

(1)  L'équivalent  italien  est  Savignano,  forme  moderne  du  latin  SsibiniAnus. 

(2)  Depuis  l'époque  où  ce  mémoire  a  été  écrit ,  une  nouveUo  édition  a 
paru  dans  le  C.  L  L.,  t.  XI,  p.  205-231. 

(3)  Veleia  était  situé  prés  de  Plaisance ,  au  sud  du  Pô ,  dans  la  Gaule 
cisalpine.  On  verra  cités  plus  bas  quelques  noms  de  fundi  en  -acus  qui  at- 
testent la  présence  d'éléments  gaulois  dans  le  territoire  de  cette  viUe. 


m  LIVRE  II.  CHAPITRE  !•'.  |  2. 

Anionianus,  à'Antoniiis, 

AppianuSf  A'Appius. 

Àtilianus,  d'AHliiLS. 

AurelianuSj  d'Aurelius. 

Caecilianus^  de  Caecilius. 

Calidianus,  de  Calidius. 

CctssianiLSy  de  Cassius. 

Comelianus^  de  Cornélius, 

Domitianus,  de  Domitius. 

EnnianuSj  à*EnniiLS. 

Fabianus^  de  Fabius. 

Furianus,  de  Furius. 

Gellianus,  de  Gellius. 

Granianus,  de  Granius. 

Julianus^  de  Julius, 

Junianus^  de  Junius, 

Latinianus,  de  Laiinius, 

Licinianus,  de  Licinius. 

LucilianuSy  de  Lucilius, 

Manlianus^  de  Manlius, 

Marcilianus^  de  Marcellius  ou  de  MarciUus. 

Marianus,  de  Marius. 

Mucianus^  de  Mucius. 

Munatianus,  de  Munatius, 

Numerianus,  de  Numerius. 

Octavianus^  d'Octavius. 

PapirianuSj  de  Papirius. 

Petronianus^  de  Peironius. 

Propertianus,  de  Propertius. 

Statianus,  de  Siatius. 

Valerianus^  de  Valerius, 

VelleianuSy  de  Velleius. 

Vibianus^  de  Kifcius. 

Kmant(5,  de  Finiw  (1). 

(1)  Les  premiers  de  ces  gentilices  sont  chacun  Tobjet  d*un  article  dans  la 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  129 

Les  fundi  désignés  par  ces  noms  ne  doivent  pas  ces 
noms  aux  propriétaires  qui  les  hypothèquent  à  l'empereur 
en  l'an  104  de  notre  ère ,  ils  les  ont  reçu  de  propriétaires 
plus  anciens.  Ainsi  le  fandus  Acilianus  appartenait  au 
temps  de  Trajan  à  M.  Virius  Nepos  ;  le  fundus  Aemilianiis 
à  Yaleria  Ingenua,  le  fundus  Afranianus  à  C.  Dellius  Pro- 
culus,  le  fundus  Appianus  à  Cornelia  Severa,  un  fundus 
Atilianus.  à  M.  Antonius  Priscus ,  un  autre  à  C.  Coelius 
Verus,  un  autre  encore  à  L.  Granius  Priscus,  etc.  C'est 
par  hasard  et  par  exception  que  M.  Antonius  Priscus  et  ses 
parents  se  trouvent  propriétaires  de  quelques  fundi  Anto- 
nianij  et  C.  Vibius  d'un  fundus  Vibianus,  Depuis  le  lotis- 
sement primitif  les  fundi  ont  changé  de  mains,  et,  malgré 
les  mutations,  leur  nom  d'origine  leur  a  été  conservé.  En 
Gaule,  les  noms  d'un  nombre  considérable  de  fundi  offrent 
à  l'observation  la  même  stabilité  persistant  depuis  l'empire 
romain  jusqu'à  nos  jours.  Pour  le  bien  comprendre,  il  faut 
résumer  en  quelques  mots  l'histoire  de  l'onomastique  en 
Gaule  pendant  les  premiers  temps  qui  ont  suivi  la  conquête 
romaine. 

S  3.  —  Les  noms  d*hommes  en  Gaule  après  la  conquête. 

Les  Gaulois  indépendants  ne  faisaient  usage  ni  de  pré- 
uoms ,  ni  de  gentilices  :  en  d'autres  termes ,  les  noms  de 
famille  leur  étaient  inconnus.  Chacun  d'eux  avait  un  nom 
auquel,  en  cas  de  besoin ,  pour  éviter  la  confusion ,  il  joi- 
gnait soit  un  surnom,  ex.  Licnos  Contextos  (1),  soit  plutôt  le 
nom  de  son  père  au  génitif  en  le  faisant  suivre  du  mot 
cnos  a  fils  »  :  Aiegnatos  Druti-cnos,  t  Ategnatos,  fils  de 
Drutos  (2)  ;  »  KatroiTaXoç  OWpautvoç ,  «  Cassitalos ,  fils  de  Ver- 


partie  déjà  publiée  du  Totiuê  laliniiAtis  onomaslicorif  t.  MV,  que  nous 
devons  à  la  patience  érudite  de  M.  Vincent  De-vit.  On  peut  consulter  sur 
les  derniers  Pauly,  Real  Encyclopaedie,  t.  V  et  VI. 

(1)  Inscription  d'Autun. 

(2)  Inscription  de  Todi. 

9 


180  LIVRE  IL  CHAPITRE  I-.  {  9. 

SOS  (1);  »  Iccavos  Oppiani^cnos  ^  «  Iccavos,  fils  d'Oppia- 
nus  (2),  »  Andecamulos  Toutissi-cnos  ^  «  Andecamulos,  fils 
de  Toutîssos  (3)  ;  »  Bratronos  Nantoni-cnos,  «  Bratonos,  fils 
de  Nantonos  (4).  »  Quelquefois  même  on  supprimait  le  mot 
cnos  en  laissant  le  nom  du  père  au  génitif  :  Doiros  Sego- 
mari,  «  Doiros,  fils  de  Segomaros  (5);  »  Ma/rtialis  Danno- 
taliy  ((  Martialis,  fils  de  Dannotalos  (6).  » 

Quand,  après  la  conquête,  les  membres  de  l'aristocratie 
gauloise  voulurent  s'agréger  à  la  race  conquérante ,  ils  ne 
se  bornèrent  pas  à  revêtir  la  toge  et  à  parler  latin  ;  ils 
adoptèrent  aussi  le  système  onomastique  des  Romains,  ils 
prirent  par  conséquent  un  prénom,  un  gentilice  et  un  sur- 
nom. Pour  arriver  à  ce  résultat ,  ils  ne  suivirent  pas  tous 
le  même  procédé  ;  quatre  systèmes  différents  se  firent  con- 
currence :  —  1®  Le  plus  répandu  fut  celui  des  copistes  ;  ils 
prirent  à  Rome  les  trois  éléments  onomastiques  par  les- 
quels ils  prétendaient  distinguer  leur  personnalité  :  leur 
prénom,  leur  nom  et  leur  surnom  furent  tous  trois  romains; 
on  ne  peut  ordinairement ,  dans  les  textes ,  distinguer  ces 
Gaulois  des  Romains  établis  en  Gaule.  —  2''  Quelques- 
uns  montrèrent  plus  d'originalité  :  demandant  à  Rome  un 
prénom  et  un  surnom ,  ils  se  firent  un  gentilice  avec  un 
nom  Gaulois,  probablement  celui  de  leur  père,  en  y  ajou- 
tant la  désinence  ius.  —  3®  D'autres ,  empruntant  à  Rome 
un  prénom  et  un  nom  ou  gentilice,  firent  de  leur  nom 
gaulois  un  surnom.  —  4®  D'autres  enfin  ne  prirent  à  Rome 


(1)  Inscription  de  Nimes. 

(2)  Inscription  de  Volnay. 

(3)  Inscription  de  Nevers. 

(4)  Inscription  de  Paris,  que  M.  Mowat  a  le  premier  interprétée. 

(5)  Inscription  de  Dijon. 

(6)  Inscription  d'Alise  ;  deux  inscriptions  gauloises  nous  offrent  un  sjs- 
tème  intermédiaire  entre  celui-ci  et  l'adoption  du  système  onomastique  ro- 
main. Le  Gaulois  fait  suivre  son  nom  d'une  espèce  de  gentilice  formé  avec 
le  nom  de  son  père  et  la  désinence  -eo«.  Ex.  :  1*  Bi|jl|jloc  A(Tov|i6ptoç.  Aitov- 
{AipEoc  est  un  dérivé  de  Litumaros  ;  Héron  de  Villefosse ,  Inscriptions  de 
saint  Remy,  2*  £syô|Mipoc  OiSiXX6vsoc.  Inscription  de  Vaison,  aujourd'hui  au 
musée  Galvet  d'Avignon.  OàiXX6vfio<  pai'sdt  dérivé  d'un  nom  propre  Vtllo. 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  131 

que  le  prénom,  et  le  firent  suivre  de  deux  noms  gaulois , 
employés  l'un  comme  nom,  l'autre  comme  surnom. 

Du  premier  système ,  —  emprunt  à  Rome  des  trois  élé- 
ments :  prénom ,  nom ,  surnom ,  —  un  exemple  ancien  et 
connu  est  celui  de  C.  Valerius  Procillus,  un  des  agents  de 
César  pendant  la  conquête  des  Gaules  :  C.  Valerius  Procillus 
était  gaulois  d*origine  et  le  second  citoyen  romain  de  sa 
famiUe  (1)  ;  son  surnom  Procillus  est  dérivé  du  latin  procus^ 
comme  le  gentilice  romain  Procilius ,  nom  d*un  tribun  du 
peuple  qui  fut  historien  et  qui  était  contemporain  de  Ci- 
céron  (2)  ;  le  prénom  et  le  nom  de  C.  Valerius  Procillus 
sont  ceux  de  C.  Valerius  Flaccus,  propréteur  de  la  Gaule 
Narbonnaise  en  83  (3),  à  qui  son  père  avait  dû  le  titre  de 
citoyen  romain.  On  peut  lui  comparer  C.  Julius  Magnus^ 
dont  Torigine  gauloise  est  attestée  par  le  surnom  de  son 
père  Eporedirix ,  et  dont  une  inscription  votive ,  à  Bour- 
bonne-les-Bains ,  a  conservé  le  souvenir  (4). 

Le  procédé  suivi  par  des  hommes  obscurs  comme  C.  Va- 
lerius  Procillus^  et  C.  Julius  Magnus^  fut  celui  de  membres 
plus  illustres  de  l'aristocratie  gallo-romaine  qui  de  même 
empruntèrent  aux  Romains  les  trois  éléments  de  leur 
onomastique.  Julius  Florus,  de  Trêves,  un  des  chefs  de 
l'insurrection  gauloise  en  Tan  21  de  notre  ère ,  en  est  un 
témoin,  bien  que  Tacite  ne  nous  ait  pas  conservé  son 
prénom  (5) ,  probablement  Gains.  Tel  est  encore  Gains 
Julius  Vindex ,  gaulois  d*origine ,  de  race  royale ,  dont  le 
père  avait  été  élevé  à  la  dignité  de  sénateur,  et  qui  fut 
lui-même  légat  impérial  en  Gaule;  il  est  célèbre  par  sa 
révolte  contre  Néron ,  Tan  68  de  notre  ère  (6). 

(1)  De  bello  gàllico,  l,  47. 

(2)  TenBel,  Geschichte  der  rômischen  LUer&tur,  3*  édition,  p.  299,  300. 
Cf.  Pauly,  Real  Encyclopaedie,  VI,  61. 

(3)  Desjardins,  Géographie  historique  et  administrative  de  la  Gaule 
romaine,  i,  II,  p.  329. 

(4)  Revue  archéologique,  nouvelle  série,  t.  XXXIX  (1880),  p.  80,  article  de 
M.  ChabouUlet. 

(5)  Annale*,  III,  43. 

(Q  Dion  Gassius,  LXIII,  2.  Suétone,  Néron,  40. 


132  LIVRE  II.  CHAPITRE  1-.  )  3. 

Voici  des  exemples  du  second  système  qui  consiste  à 
intercaler  entre  deux  éléments  romains,  Tun  prénom,  l'autre 
surnom,  un  gentilice  en  -ius  dérivé  d*un  nom  gaulois, 
probablement  du  nom  du  père  ou  d*un  ancêtre  : 

L.  Carantius  Atticus  (1),  M.  Carantius  Macrinus  (2)  et 
L.  Carantius  Gratus  (3).  Carantius  dérive  du  nom  gaulois 
Carantos ,  «  ami,  parent,  »  écrit  Carantus  dans  la  période 
romaine  et  conservé  par  quatre  inscriptions ,  Tune  de  la 
Grande-Bretagne,  les  autres  des  contrées  rhénanes  (4).  Le 
même  nom  gaulois  forme  le  premier  terme  du  composé 
Caranto-magus ;  celui-ci,  vers  la  fin  du  troisième  siècle, 
date  de  la  table  de  Peutinger,  était  le  nom  porté  par  une 
station  romaine  qu'on  croit  reconnaître  dans  Cranton, 
commune  de  Compolibat  (Aveyron)  (5). 

C.  Carantinius  Maternus  (6).  Carantinius  est  dérivé  de 
Carantinus  et  nous  avons  un  exemple  de  Carantinus  em- 
ployé comme  nom  d'homme,  c'est  le  nom  d'un  potier  (7). 

C.  Mogillonius  Priscianus  (8).  Mogillonius  est  dérivé  de 
Mogillo  (9)  qui  est  une  variante  de  Magilo  ;  celui-ci  se 
trouve  quelquefois  dans  les  inscriptions  d'Espagne  (10). 

C.  Meddignatius  Severus  (11).  Meddignatius  est  dérivé  de 
Meddi-gnatos  dont  le  second  terme  est  un  adjectif  gaulois 
>  signifiant  <(  habitué  à  »  et  fréquent  dans  les  composés. 

Passons  au  troisième  système  :  emprunter  prénom  et 
gentilice  à  Rome  en  faisant  du  nom  gaulois  un  surnom. 
On  peut  citer  d'abord  le  grand-père  de  l'historien  Trogue 
Pompée.   C'était  un  gaulois  du  peuple  des  Voconces ,  il 

(1)  Brambach,  Corpus  inscriptionem  rhenanarum,  n*  713. 

(2)  Allmer,  Inscriptions  antiques  de  Viennef  I,  404. 

(3)  C.  I.  L.,  III,  3916. 

(4)  C./.  L.,  t.  VII,  n»  1033;  Brambach,  n"  921, 1321,  1769. 

(5)  Longnon,  Atlas  historique  de  la  Gaule,  1**  livraison,  p.  26. 

(6)  Brambach,  1329. 

(7)  Allmer,  Inscriptions  antiques  de  Vienne,  t.  IV,  p.  74. 

(8)  Brambach,  1425. 

(9)  C.  /.  L.,  XII,  3407. 

(10)  Ibid.,  II,  809,  865,  2633,  3051. 

(11)  Brambach,  1336. 


i 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  133 

s'appelait  Trogus.  Cn.  Pompius  le  fit  citoyen  romain  ;  ce 
Cn.  Pompeius  est  le  célèbre  Pompée ,  Pompeius  Magnus , 
propréteur  en  Espagne,  de  76  à  74,  ou  de  75  à  73.  Il  eut 
à  traverser  la  Gaule  pour  se  rendre  en  Espagne  et  pour  en 
revenir;  il  en  tira  peut-être  des  approvisionnements  et  des 
troupes.  C'est  alors  qu'il  donna  droit  de  cité  romaine  au 
gaulois  Trogus.  Dès  lors,  Trogus  s'appela  Cn.  Pompeius 
Trogus.  L'historien  parait  avoir  eu  la  même  onomastique  (1). 
Un  autre  exemple  de  ce  procédé  nous  est  connu  par  César  : 
l'auteur  des  Commentaires  nous  parle  de  C.  Valerius  Cabu- 
rus,  élevé  à  la  dignité  de  citoyen  romain  par  le  propréteur 
C.  Valerius  Flaccus  et  qui  avait  adopté  le  prénom  et  le  nom 
de  son  bienfaiteur  en  y  ajoutant  comme  surnom  son  propre 
aom  gaulois  Caburus,  en  83  (2).  Tite-Live  nous  apprend 
que  le  premier  prêtre  de  l'autel  construit  en  l'honneur  de 
Jules  César  fut  TEduen  C.  Julius  Vercondaridubnus  (3). 
Nous  citerons  ensuite  : 

C.  Antestius  Lutu-marus  (4). 

M.  Antestius  Vogi-toutus  (5). 

P.  Decius  Esu-nertus  (6). 

G.  Julius  Comatu-marus  (7). 

6.  Julius  Vogi-toutus  (8). 

Q.  Valerius  Esu-nertus  (9). 

L.  Valerius  Tarvius  (10). 

Nous  arrivons  enfin  au  quatrième  système  :  prénom  ro- 
main, nom  et  surnom  gaulois.  Exemples  : 


(1)  Justin,  XLIII,  5,  11,  et  Teuffel,  Geschichte  der  rœmischen  Ltteratur, 
3*  édition,  p.  558. 

(2)  De  bello  çaIHco,  I,  47. 

(3)  Bpitome^  139.  Edition  d*Otto  Jahn,  p.  108. 
(A)  C.  i.  L.,  III,  4724. 

(5)  Ibid.,  ni ,  4724. 

(6)  Mommsea,  Inscriptioneê  Hëlveticae^  n*  80. 

(7)  C.  /.  L.,  III,  337. 

(8)  Ibid,,  m,  4908. 

(9)  /Wd.,  VII,  1334,  61. 
(10)/Md.,III,D.  41. 


13^  LIVRE  II.  CHAPITRE  I-.  1  4. 

C.  Commius  Bitutio  (1).  Commius  est  chez  César  le  nom 
d'un  roi  des  Atrébates  (2). 

Q.  Solimarius  Bitus  (3).  Solimarius  est  dérivé  du  nom 
gaulois  Solimarus  (4). 

L.  Carantius  Cinto  (5).  On  a  déjà  vu  (p.  132)  que  Caran- 
tius  vient  du  nom  gaulois  Carantos. 

Sextus  Nertomarius  Nertonius  (6).  Nertomarius  est  tiré 
du  nom  gaulois  Nertomâros ,  «  grand  par  la  force.  »  Les 
surnoms  Bitutio,  Bitus,  Cinto,  Nertonius  sont  gaulois. 

S  4.  —  Les  noms  de  fundi  en  -anus  dans  la  Table  alimertr 
taire  auxquels  correspondent  des  noms  de  fundi  gallo-ro- 
mains  dérivés  des  mêmes  gentilices ,  mais  avec  le  suffixe 
gaulois  -àcus. 

Les  membres  de  l'aristocratie  gallo-romaine  s'étant  pro- 
curé' des  gentilices  par  les  divers  procédés  que  nous  ve- 
nons d'exposer,  tirèrent  habituellement  de  ces  gentilices 
les  noms  de  leurs  fundi  en  ajoutant  à  ces  gentilices ,  non 
pas  le  suffixe  dnus,  suivant  l'usage  romain ,  mais  le  sufiBxe 
àcus  par  à  long.  On  sait  que  les  suffixes  àcus  par  à  bref  et 
àcus  par  d  long  sout  d'un  emploi  rare  en  latin,  tandis  que 
le  suffixe  àcus ,  mieux  àco-s ,  par  a  long ,  est  d'un  usage 
très  fréquent  dans  les  langues  celtiques  (7).    . 

Le  plus  ancien  exemple  connu  d'un  mot  où  le  suffixe 
celtique  àcus  apparaisse  avec  indication  de  sa  quantité,  nous 
est  donné  à  deux  reprises  par  Virgile  : 

Fluctibus  et  fremitu  assurgens  Benace  marino  (8). 
Quos  pâtre  Benaco ,  velatus  arundine  longa  (9). 

(1)  Herzog,  n*  206. 

(2)  De  bello  g&llico,  1.  IV,  c.  21,  27,  etc. 

(3)  Brambach,  855. 

(4)  Ibid.,  1380,  1439, 1778. 

(5)  AUmer,  III,  414. 

(6)  Brambach,  29. 

(7)  Gr&mm&tica,  celtica,  2*  éd.,  p.  806,  809,  849.  Cf.  p.  15. 

(8)  Géorgiquei,  1.  II,  vers  159. 

(9)  Enéides,  1.  X,  vers  205. 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  135 

Béndcus^  variante  de  *bennacuSj  en  vieil  irlandais  bennach, 
«  cornu ,  »  <c  aux  promontoires  multiples ,  »  est  le  lac  de 
Garde,  dans  la  Gaule  cisalpine  ;  comparez  le  nom  de  Berm 
Etaifj  a  corne  »  ou  «  promontoire  d'Etar,  »  porté  autrefois 
par  le  promontoire  qui  borde  au  nord  la  baie  de  Dublin. 
La  quantité  attribuée  deux  fois  par  Virgile  au  suffixe  -dois 
dans  Bêndcus  doit  une  grande  autorité  à  la  date  où  écri- 
vait le  célèbre  poète  et  à  sa  patrie.  A  l'époque  où  vivait 
Virgile,  la  langue  latine  distinguait  nettement  Va  long  de 
la  bref.  Virgile,  originaire  de  Padoue,  devait  savoir,  autre- 
ment que  par  l'écriture,  la  quantité  des  voyelles  du  nom 
porté  de  son  temps  par  le  lac  de  Garde,  et  n'a  pu  commettre 
d'erreur  sur  ce  point  de  prosodie.  Enfin,  aucun  obsta- 
cle ne  l'eût  empêché  de  respecter  cete  quantité  :  Bendcus 
par  d  bref  eût  pu  entrer  dans  un  vers  comme  Bendcus  par 
à  long  (1). 

La  même  quantité  se  trouve  pour  le  même  mot  chez 
Glaudien  : 

Quas  Benacus  alit,  quas  excipit  amne  quieto 

Mincius...  (2). 

Benacumque  pntat  littora  rubra  lacum  (3). 

Et  chez  Sidoine  Apollinaire  le  vers  : 

Si  quis  Ayitacum  dignaris  visere  nostram  (4). 

nous  offre  encore  de  môme  un  <J  long  dans  le  suffixe  -âcus. 
Toutefois,  on  ne  peut  voir  là  que  le  respect  de  la  tradition. 
Pendant  les  derniers  temps  de  l'empire  romain,  la  distinc- 

(1)  On  ne  pent  tirer  aucune  conclusion  des  vers  de  Juvénal  :  Bebriaci  campo 
spolinm  affectare  palati  (Satires ,  II ,  106) ,  et  de  Martial  :  Accipe  Mattiacas 
qao  tibi  calva  pilas  {Epigrammes^  XIV,  27).  Bebrtacus  et  Math'actcs  ont  pris 
la  quantité  que  le  vers  exigeait.  Originaires  Tun  de  l'Italie  méridionale  et 
l'antre  d*Espagne ,  Juvénal  et  Martial  ont  pu ,  sans  se  sentir  ToreiUe  bles- 
sée, donner  une  quantité  inexacte  à  Ta  du  suffixe  celtique  -aciis ,  et  le  faire 
bref  comme  dans  AcIUlcus  ,  Aegyptiaicus» 

(2)  EpithaXaLTnium  dictum  PalUdio  et  Celertnae,  y.  107.  Edition  Jeep,  p.  75. 

(3)  Carmina  minora,  XIII,  v.  18.  Edition  Jeep,  p.  144. 

(4)  Carmen,  XVIII,  ▼.  1.  Migne,  Patrologia  latinm,  t.  LVIII,  col.  723,  B. 


136  LIVRE  IL  CHAPITRE  I-.  |  4.  ^ 

tion  entre  ïa  bref  et  Ya  long  avait  disparu  de  la  pronon- 
ciation. Bien  qu'écrivant  en  Gaule,  Ausone,  qui  vivait  au 
quatrième  siècle,  fait  bref,  contrairement  aux  lois  ancien- 
nement respectées  de  la  quantité  celtique,  Va  du  sufiSxe 
'ocus  dans  les  deux  vers  pentamètres  : 

Pauliacus  tanti  non  mihi  villa  foret. 
Villa  Lucani mox  potieris aco  (1). 

On  peut  donc  se  demander  s'il  y  a  lieu  d'attacher  grande 
importance  aux  vers  précités  de  Claudien  et  de  Sidoine 
Apollinaire,  qui  sont  postérieurs  à  Ausone,  et  surtout  à 
Texemple  de  Fortunat,  poète  du  sixième  siècle,  qui  a  comme 
eux  fait  long  l'a  du  suffixe  gaulois  -octw,  témoin  son  vers  : 

Antonnacensis  castelli  promptus  ad  arces  (2). 

Mais  la  quantité  de  Va  de  ce  suffixe  est  établie  d'une  ma- 
nière incontestable  par  Taccord  de  Virgile  avec  une  ins- 
cription de  Nimes  et  avec  une  loi  phonétique  des  dialectes 
bretons.  Virgile,  avons-nous  dit,  qui  écrivait  à  une  époque 
où  les  Romains  prononçaient  Va  long  autrement  que  Va 
bref,  fait  long  Va  du  suffixe  gaulois  -acus  dans  Benacus,  Or, 
l'inscription  de  Nimes  sur  laquelle  nous  nous  appuyons 
distingue  les  longues  par  un  apex  (3).  L'o  d^tixôrù  y  est 
surmonté  d'un  apex ,  de  même  l'a  de  Mânibus  «  aux  Mâ- 
nes, »  celui  du  cognomen  Vitâlis^  et  enfin,  c'est  là  que  nous 
voulons  arriver,  le  premier  a  de  Togiàciae.  Ce  dernier  mot 
est  le  génitif  du  gentilice  Togidcia^  dérivé  de  Togidcus  (4) , 
lequel  vient  lui-même  d'un  thème  Togio-  masculin  du 
nom  propre  féminin  Togia  (5).  Togidcus  avait  l'a  long.  Nous 


(1)  EpxBtoU  V,  VY.  16  et  36.  Edit.  Schenkl,  p.  163. 

(2)  De  ntivigio  auo  -  Carminum,  lib.  X,  c  9,  ▼.  63.  Edition  de  Frid.  Léo, 
p.  243. 

(3)  Herzog,  Galltae  ridirbonensis...  historia,  t.  II,  p.  34,  n*  136.  Gommani- 
cation  de  M.  Mowat  à  la  Société  de  Linguistique  dans  la  séance  du  27  jan- 
vier 1882.  Bulletin^  n*  23,  p.  lx. 

(4)  Qruter,  845.  5. 

(5)  C.  /.  L. ,  t.  III,  n*  5470.  Togia,  dérive  de  Togus  :  Togorum  libertus, 
C.  /.  L.,  III,  4169. 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  137 

retrouvons  cet  d  long  du  suffixe  â4)us  dans  des  documents 
postérieurs  d'une  haute  autorité. 

Les  langues  néo-celtiques  du  rameau  breton  ont  con- 
servé la  distinction  de  Va  bref  et  de  1'^  long  dont  le  bas- 
latin  avait  perdu  le  sentiment.  Chez  elles,  la  plus  ancienne 
notation  de  Y  à  long  est  o,  qui  devient  plus  tard  en  breton 
de  France  eu,  e,  en  gallois  oti,  aw^  tandis  que  Va  bref  reste 
a;  or  les  notations  eu^  e  en  breton,  au,  aw  en  gallois  sont 
celles  que  ces  deux  langues  emploient  pour  représenter  Va 
du  suflBxe  celtique  âcus.  Un  exemple  curieux  en  est  donné 
vers  le  neuvième  siècle  par  Nennius  dans  sa  nomenclature 
des  cités  de  la  Grande-Bretagne  ;  il  y  rend  par  Ebrauc  le 
latin  Eburâcus,  ancien  nom  de  la  ville  d'York  (1),  dérivé  du 
nom  d'homme  Eburus.  Un  autre  exemple ,  fourni  par  des 
documents  postérieurs  d'environ  trois  siècles ,  est  le  nom 
de  la  région  alors  appelée  Brecheniauc  (2).  Brecheniauc  est 
dérivé  de  Brachan^  nom  d'homme,  au  moyen  du  gentilice 
fictif  *Bracanius  et  du  suffixe  -âcyus  ajouté  à  ce  gentilice 
fictif  suivant  un  procédé  emprunté  aux  usages  de  la  pé- 
riode romaine  et  employé  après  la  chute  de  l'empire  ro- 
main en  Grande-Bretagne  comme  en  Gaule. 

Quand,  au  cinquième  siècle,  des  habitants  de  la  Grande- 
Bretagne,  chassés  par  l'invasion  anglo-saxonne,  vinrent  se 
réfugier  sur  le  continent,  ils  apportèrent  avec  eux  le  suffixe 
-dcus  par  d  long,  aujourd'hui  dans  leur  langue,  dans  le 
breton  de  France ,  -ek  ou  -euk  ;  mais  ils  trouvèrent  sur  le 
territoire  conquis  par  eux  une  population  gallo-romaine  qui 
désignait  certaines  localités  par  des  noms  de  lieux  créés 
sous  la  domination  romaine  à  l'aide  de  gentilices  romains 


(1)  La  leçon  Ebroauc  que  préfèrent  Pétrie,  Monumenta  historica  Bri- 
Unnica,  I,  p.  77  A,  et  Giles  History  of  the  ancient  BritonSy  t.  II,  p.  335, 
doit  ce  semble  être  corrigée  en  Ehorauc.  Dans  la  même  nomenclature  se 
trouve  le  nom  de  Cair  Caratauc,  chez  Geoffroy  de  Monmouth  Kaer-Caradauc, 
composé  dont  le  second  terme  représente  le  génitif  britanno-latin  Caralâci. 
Bar  Eturacus  yoir  plus  bas,  g  10. 

(2)  Liber  Landavensis  et  manuscrit  du  Musée  britannique ,  Gottonien , 
Vesp.  A,  14,  cités  dans  la  Grammatica  Celtica,  deuxième  édition,  p.  807. 


138  LIVRE  II.  CHAPITRE  I-.  {  4. 

et  du  su£Sxe  gaulois  --âcus  :  Avitidcus^  PaulidcuSj  Campa* 
nidcus^  et  autres  nopis  de  lieux,  dérivés  d^Avitius,  de  Pau- 
liusy  de  Campanius,  etc.  Les  Gallo-Romains  d'Annorique 
avaient  dans  ces  mots  remplacé  par  Va  commun  du  bas- 
latin  ïd  long  primitif  du  suffixe  âcm;  de  cet  a  commun  du 
bas-latin ,  les  Bretons  conquérants  firent  un  a  bref,  et  de 
là  est  venue  dans  ces  mots  la  prononciation  bretonne  -ac  : 
Avizac  (1),  Poliac  (2),  Kempeniae  (3)  au  neuvième  siècle,  au- 
jourd'hui Avessac  (Loire-Inférieure),  Peillac  (Morbihan), 
Campénéac  (Morbihan).  Brittiacus^  dérivé  de  Brittius  (4),  est 
écrit,  au  onzième  siècle,  Brithiac  dans  le  Cartulaire  de 
Landévennec;  aujourd'hui  il  est  devenu  Briec  par  analo- 
gie avec  la  désinence  -ec  =  dcos  par  d  long  des  noms  de 
lieux  créés  par  les  Bretons  comme  Beuzec  =  *  Bodidcos^ 
Gouezec  =  *  Vêdàcos^  —  tous  deux  noms  d'hommes  à  Tori- 
gine  ;  —  mais  c'est  un  phénomène  tout  récent  qui ,  dans 
Briec ,  a  fait  triompher  sur  la  prononciation  gallo-romaine 
des  bas  temps ,  la  prononciation  néo-celtique  de  Va  long 
dans  le  suffixe  dcm^  tandis  que  la  prononciation  gallo- 
romaine  de  la  fin  de  l'empire  persiste  encore  aujourd'hui 
dans  Avessac,  Campénéac,  Peillac,  mots  merveilleusement 
conservés  :  la  langue  bretonne  a  été  pour  eux  une  sorte 
d'écrin  qui  les  a  protégés  contre  les  révolutions  phonétiques 
du  français ,  depuis  le  cinquième  jusqu'au  onzième  siècle  ; 
sans  cette  sauvegarde,  l'a  et  le  c  seraient  perdus  :  on 
dirait  Avecé,  Champigné,  Fouillé. 

La  langue  latine  possède,  comme  le  celtique ,  un  suffixe 
'àcm  par  à  long,  et  parallèlement  on  y  trouve  un  sufiBxe 
âciis  par  à  bref.  Et  d'abord,  par  d  bref  :  tout  le  monde  a 


(1)  Le  Cartulaire  de  Redon  nous  ofifre  cette  orthographe,  pp.  65,  73,  89, 
95,  151,  159.  On  trouve  aussi  :  Avesiacus,  p.  49;  Aviciacuê,  p.  192;  Auezac, 
p.  291. 

(2)  Poliacenses  homineSy  Cartulaire  de  Redon^  p.  81. 

(3)  Cartulaire  de  Redon^  p.  81. 

(4)  Le  tome  X  du  C.  /.  L.  en  offre  douze  exemples  ;  c'est  une  variante  de 
Bruttius  ;  on  trouve  aussi  Britius  avec  un  seul  t  ;  mais  il  faut  un  double  t 
pour  expliquer  le  th  de  Brithiac, 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  139 

entendu  parler  de  la  Victoria  Actiàca,  du  triumphus  Actiâcus, 
du  bellum  Actiàcum  (1).  Ovide  fait  bref  Va  du  suflBxe,  par 
exemple  :  f 

Frondibtts  Actiacis  eomtos  redimlî|^  capiUos  (2). 

Nous  citerons  aussi  Tadjectif  Aegyptiàcus, 

Le  suffixe  àcus.  par  à  long  existait  de  même  en  latin  :  la 
cloàca  maxima  (3)  est  un  des  plus  anciens  monuments  de 
Rome;  la  bonne  orthographe  de  son  nom,  clouaca^  nous  a 
été  conservée  par  une  inscription  (4),  et  la  quantité  par 
un  vers  d'Horace  : 

niud  idem  in  rapidum  flumen  jacerotve  cloacam  (5). 

Toutefois  l'usage  n'existait  pas  chez  les  Romains  de  se 
servir  des  suffixes  -dcus  et  -àciis  pour  former  des  dérivés 
de  gentilices  qu'on  aurait  employés  à  désigner  des  fundi. 
Mais  ajouter  le  suffixe  celtique  -àcits  au  gentilice,  et  créer 
ainsi  les  mots  qui  servent  à  la  dénomination  des  fundi  est 
la  coutume  générale  des  Celtes  soumis  à  Rome  en  Oaule 
et  hors  de  Gaule.  Comme  les  gentilices  de  ces  Celtes  sont 
la  plupart  du  temps  empruntés  au  latin ,  il  résulte  de  là 
qu'ordinairement  le  nom  donné  par  le  Celte  romanisé  à  la 
terre  dont  il  est  propriétaire  est  un  mot  hybride  composé 
de  deux  éléments ,  le  premier  latin ,  le  second  celtique. 

Ainsi  le  Gaulois  qui  a  pris  le  gentilice  romain  Antonius^  au 
lieu  d'appeler  son  fonds  de  terre  Antonianus^  nom  plusieurs 
fois  inscrit  sur  la  table  alimentaire  de  Veleia  (6),  a  fait 
usage  de  l'adjectif  Antoniactu.  Un  fv/ndus  Antoniacus  était, 


(!)  Ces  expressions  se  trouvent  chez  Suétone  et  chez  VeUeius  Paterculus. 

(2)Fa«tef,  I,  711. 

(3)  Tite-Uve,  livre  I,  ch.  56,  %  2. 

(4)C. /.  L.,  I,  n*  1178. 

(5)  Satirea,  livre  II,  v.  242.  Cf.  Corsseni  Ueber  Ausspr&che,  etc.,  deuxième 
édition,  t.  Il,  p.  195. 

(6)  On  trouve  aussi  fundus  Antonianus  dans  les  chartes  de  Ravenne , 
Pantozzi,  Monumenti  Ravennati,  p.  57.  L'acte  est  du  temps  de  l'archevêque 
Honestus  ou  Aunestus,  971-983. 


140  LIVRE  IL  CHAPITRE  !•'.  {  4. 

au  onzième  siècle,  AntoniaciLs  villa  que  mentionne  en  1030 
une  charte  émanée  du  roi  Robert  (1)  ;  c'est  aujourd'hui 
Antony  (Seine).  On  doit  expliquer  de  même  les  noms  d'An- 
togny  (Indre-et-Loire),  Antoigné  (Maine-et-Loire),  Antoigny 
(Orne).  Antoigné  (Maine-et-Loire)  parait  être  la  villa  Anto- 
niacus,  d'un  diplôme  de  l'année  775  (2)  ;  et  Antogny  (Indre- 
et-Loire)  ,  est  appelé  villa  Antoniacus  dans  un  diplôme  de 
Tannée  925  (3).  Le  gentilice  Antonius  n'était  pas  rare  en 
Gaule  dans  la  période  romaine.  Peut-être  les  premiers 
Gaulois  qui  l'ont  porté  étaient-ils  des  protégés  du  célèbre 
Marc  Antoine  qui  a  fait  un  séjour  en  Gaule,  près  de  César, 
de  l'an  55  à  Tan  51  avant  notre  ère  ;  et  qui,  plus  tard,  de- 
venu triumvir,  eut  la  Gaule  dans  son  lot.  M.  AUmer  a 
recueilli  neuf  exemples  du  gentilice  Antonius  dans  ses 
Inscriptions  antiques  de  Vienne  (4).  M.  Mommsen  en  a 
signalé  deux  dans  les  inscriptions  romaines  de  la  Suisse  (5). 
M.  Brambach  en  indique  trois  dans  celles  de  la  rive  gauche 
du  Rhin  (6).  M.  de  Boissieu  en  a  réuni  douze  dans  ses 
Inscriptions  antiques  de  Lyon  (7).  Antonius  Primus,  qui 
battit  Vitellius  à  Bedriacum  Tan  70  de  notre  ère ,  était  né 
à  Toulouse,  et  de  son  surnom  gaulois  Beccus,  identique  au 
mot  gaulois  qui  est  devenu  «  bec  »  en  français ,  on  peut 
conclure  qu'Antonius  Primus  était  d'origine  gauloise  (8).  Il 
est  donc  naturel  que  nous  trouvions  en  France  des  fundi 
Antoniaci. 
Naturellement  le  gentilice  Julius ,  celui  du  conquérant 

(1)  Tardif,  Monuments  historiques^  p.  264,  col.  2.  J'ignore  si  c'est  da  même 
Antoniacus  qu'il  est  question  en  829  dans  le  diplôme  de  Louis  le  Débon- 
naire, auquel  M.  Sickel  a  donné  le  n*  260,  Acta  Karolinorum ,  t.  II,  p.  163. 

(2)  Dom  Bouquet,  t.  V,  p.  737  c.  ;  cf.  Mabille,  La  Pancarte  noire  de  Saint- 
Martin  de  Tours,  p.  69,  106,  107,  151 ,  218;  et  Sickel,  Acta  Karolinorum, 
t.  II,  p.  27,  n-  42. 

(3)  D.  Bouquet,  t.  IV,  v.  325.  Cf.  MabiUe,  La  Pancarte  noire  de  Saint- 
Martin  de  Tours,  pp.  99,  185,  186,  218. 

(4)  Voyez  l'index  au  t.  IV,  p.  503.  Cf.  Bulletin  èpigr,,  t.  II,  p.  371,  n»  415. 

(5)  Inscriptiones  Helveticae,  n"  24. 

(6)  Inscriptiones  Rhenanae,  n"  199,  583,  602. 

(7)  Voyez  l'index,  p.  501. 

(8)  Suétone,  Vitellius,  18. 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  141 

de  la  Gaule,  et  d'Auguste  son  fils  adoptif,  est  plus  fréquent 
en  Gaule  que  celui  d'Antonius. 

Tout  le  inonde  a  entendu  parler  du  trévire  Julius  Plorus 
et  de  Téduen  Julius  Sacrovir ,  chefs  des  Gaulois  insurgés 
contre  Tempire  romain  sous  le  règne  de  Tibère,  Tan  21 
de  notre  ère  (1). 

M.  Allmer,  dans  ses  Inscriptions  de  Vienne,  a  réuni  quatre- 
vingt-quatre  exemples  du  gentilice  Julius  (2).  On  en  trouve 
quarante-neuf  dans  les  Inscriptions  antiques  de  Lyon  de 
M.  de  Boissieu.  M.  Mommsen  nous  en  donne  trente-deux, 
recueillis  en  Suisse  (3).  Dans  ces  relevés  on  a  laissé  de  côté 
les  femmes.  De  ce  gentilice  dérive  le  nom  de  fundus  gallo- 
romain  Juliacus,  correspondant  au  Julianus  de  la  table 
alimentaire  de  Veleia.  De  Juliacus  nous  viennent  dix  noms 
de  communes  :  quatre  Juillac  (Charente,  Corrèze,  Gers, 
Gironde);  trois  Juillé  (Charente,  Sarthe,  Deux-Sèvres);  un 
Juilley  (Manche);  deux  Juilly  (Côte-d*Or,  Seine-et-Marne); 
un  JuUié  (Rhône);  trois  Jully  (Aube,  Saône-et-Loire , 
Yonne).  A  ces  dix  noms  de  communes  il  faut  ajouter  treize 
noms  identiques  de  hameaux. 

Enfin,  en  Prusse  rhénane,  se  trouve  la  plus  connue  des 
localités  qui  appartiennent  à  ce  groupe  :  Juliers ,  en  alle- 
mand Jiilich,  connu  au  quatrième  siècle  sous  le  nom  de 
Juliacus,  comme  Tattestent  Ammien  Marcellin  ,  V Itinéraire 
SAntonin  et  la  Table  de  Peutinger  (4).  On  a  cru  que  Jules 
César  était  le  fondateur  de  Juliers.  Mais  l'obscur  Julius , 
qui  a  donné  son  nom  à  un  fundus  de  la  Colonia  Agrippina, 
et  qui  a  eu  Theureuse  fortune  qu'une  ville  bâtie  sur  ce 
fundus  ait  conservé  ce  nom  jusqu'à  nos  jours,  ne  doit  en 
aucun  cas  être  confondu  avec  le  célèbre  conquérant  de  la 
Gaule.  Peut-être  est-ce  un  de  ces  Ubiens  qu'en  l'an  39 


(1)  Tacite,  Annales,  III,  40. 

(2)  Voyez  l'index  au  t.  IV,  p.  506. 

(3)  Insrriptiones  Helvetic&ey  pp.  119,  120. 

(4)  Voyez  les  textes  réunis  par  E.  Desjardins,  Géographie  de  U  Gaule 
d'après  U  Uble  de  Peutinger,  p.  107. 


142  LIVRE  II.  CHAPITRE  I-.  {  4. 

avant  J.-C.  M.  Vipsanius  Agrippa,  depuis  gendre  d'Auguste, 
fit  passer  de  la  rive  droite  du  Rhin  sur  la  gauche  dans  les 
environs  de  la  ville  actuelle  de  Cologne  (1),  ou  c'est  un  de 
ces  vétérans  que  quatre-vingt-dix  ans  plus  tard,  en  Tan 
50  de  J.-C,  rimpératrice  Agrippine,  femme  de  Claude, 
envoya  fonder  une  colonie  dans  ce  nouveau  territoire  des 
Dbii  (2).  Colonia  Agrippina  est  aujourd'hui  Cologne  (3).  Les 
inscriptions  de  Cologne  réunies  par  Brambach  nous  mon- 
trent le  gentilice  Julius  douze  fois  répété  dans  les  noms 
d'hommes  : 

C.  Julius  Baccus,  n*"  310  ; 
T.  Julius  Tuttius,  n*  311  ; 
C.  Julpus]  Materuus,  n**  319  ; 
Jul[ius]  Primus,  n^  329  ; 
Q.  Julius  Flavos,  n*^  332  ; 
C.  Julius  Verecundus,  n**  363; 
Julius  Antoninus,  n**  368  ; 
Julius  Verinus,  n®  371  ; 
C.  Jul[ius]  Speratus,  n**  374; 
T.  Julius  Fortunatus,  n*  386  ; 
C.  Julius  Mansuetus,  n**  405; 
C.  Julius  Firminus,  n®  433. 

Il  est  possible  que  parmi  ces  douze  individus  se  trouve 
ou  le  premier  propriétaire ,  ou  un  descendant  du  premier 
propriétaire  du  fundus  Juliacus  sur  lequel  s'élève  aujour- 
d'hui la  ville  de  Juliers. 

La  variante  romaine  Julianus  de  Juliacus  parait  avoir 
donné  Juillan,  nom  d'une  commune  des  Hautes-Pyrénées, 
et  trois  noms  de  hameaux  :  Juillan  (Vaucluse),  Julhans 
(Bouches-du-Rhône),  JuUians  (Vaucluse). 

(1)  Tacite,  Germanta,  28.  Cf.  E.  Dosjardins,  Géogrtiphie  historique  et  âd' 
ministrative  de  la  Gaule  Romaine,  t.  III,  p.  36-37. 

(2)  Tacite,  Annales,  XII,  27. 

(3)  E.  DesjardinSy  Géographie  de  la  Gaule  d'après  la  Table  de  Peutinger, 
pp.  49-52. 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  143 

Du  gentilice  Cassius  est  dérivé  à  Veleia  le  nom  du  fundus 
Cassianus  (1).  Mais  sur  le  territoire  d'une  ville  gallo-romaine 
dltalie,  Mediolanum,  aujourd'hui  Milan,  le  même  gentilice 
a  donné  le  dérivé  Cassiacus^  d*où  le  nom  du  riLs  Cassiacum 
dont  le  propriétaire  Verecundus  offrit  asile  à  saint  Augustin 
Tan  386  ou  387  de  notre  ère.  Cette  localité  s'appelle  aujour- 
d'hui en  italien  Cassago  (2).  CassiacuSj  que  nous  trouvons 
ensuite  en  France  au  septième  siècle  dans  une  charte  de 
Vigile,  évoque  d'Auxerre  (3),  au  huitième  dans  le  testa- 
ment de  Widerad,  abbé  de  Flavigny  (4),  et  dans  un  diplôme 
de  Charlemagne  (5),  est  la  forme  primitive  du  nom  de 
quinze  communes  de  France,  savoir  :  un  Chassé  (Sarthe)  ; 
cinq  Chassey  (Côte-d'Or,  Jura,  Meuse,  Saône-et-Loire , 
Haute-Saône)  ;  un  Chassiecq  (Charente)  ;  un  Chassieu  (Isère)  ; 
quatre  Chassy  (Cher,  Nièvre,  Saône-et-Loire ,  Yonne); 
trois  Chessy  (Aube ,  Rhône ,  Seine-et-Marne)  (6)  ;  comme 
Cassago^  chacune  d'elles  tire  son  nom  d'un  ancien  fwndus 
gallo-romain,  dont  le  premier  propriétaire  portait  le  gentilice 
Cassius.  T>^Xi^\%s Inscriptions cmHqu^s de  Fienn^deM.  AUmer 
figurent  dix-sept  Cassius  (7);  M.  Mommsen  en  a  relevé 
quatre  dans  les  inscriptions  latines  de  la  Suisse  ;  on  en 
trouve  six  dans  les  Inscriptions  de  Lyon  de  M.  de  Boissieu. 
C'était  donc  un  nom  d'homme  fort  répandu  en  Gaule  pen- 
dant la  période  romaine. 

Le  gentilice  Latinius  n'est  pas  très  commun  dans  les 
inscriptions  romaines.  Cependant  un  homme  de  ce  nom 


(1)  Voir  aussi  dans  une  charte  de  Ravenne ,  sous  l'archevêque  Gratins , 
784-794,  un  fundus  Cassi&nua,  Pantiizzi,  p.  64. 

(2)  De-vit,  Totius  latinit&tis  onomasticon  ,  t.  I,  p.  t56.  Le  Casstctaco  des 
Confeêtions,  Uvre  IX,  {  5,  doit  être  corrigé  en  Cassiaco, 

(3)  Pardessus,  Diplomata,  t.  Il,  p.  153;  Quantin,  Cartulatre  général  de 
îTonne,  1. 1^  p.  19. 

(4)  Pardessus,  Jbtd.,  t.  II,  p.  400. 

(h)  0.  Bouquet ,  t.  V,  p.  737  c.  C'est  le  n*  42  des  Actes  de  Charlemagne 
chez  Sickel,  Acta  Karolinorum. 
(6)  Nous  ne  parlons  pas  des  hameaux,  au  nombre  de  onze. 
CO  V07.  l'index  au  t.  IV,  p.  504. 


144  LIVRE  IL  CHAPITRE  !•'.  l  4.  » 


paraît  avoir  fait  un  vœu  au  dieu  Pœuinus  (1).  Le  nom 
d'une  femme  appelée  Latinia  se  lit  dans  une  inscription 
d'Altenberg  (Prusse  rhénane)  (2).  M.  Latinius  figure  dans 
une  inscription  d'Espagne  (3).  Le  monument  funèbre  élevé 
par  P.  Latinius  Primus  à  P.  Latinius  Lepidus  son  père 
existe  encore  aujourd'hui  à  Tévéché  de  Tortone ,  dans  la 
partie  occidentale  de  la  vallée  du  Pô  (4).  Le  même  genti- 
lice  est  offert  par  un  nom  de  femme,  Latinia  Dextra,  peu 
loin  de  là,  dans  une  inscription  d'Acqui  (5).  Quatre  parents 
dont  le  gentilice  était  Latinius  apparaissent  dans  deux 
inscriptions  de  Bénévent  (6).  P.  Latinius  Lucanus  d'Atena, 
en  Lucanie ,  dédia  un  autel  à  Esculape  (7).  On  se  bornera 
à  ces  exemples  ;  ils  suffisent  pour  établir  Texistence  du 
gentilice  Latinius  duquel  sont  dérivés  à  la  fois  le  nom  du 
fundus  Latinianus  à  Veleia,  et  en  Gaule  celui  de  plusieurs 
fundi  Latiniaci.  L'un  est  aujourd'hui  Lagny  (Seine-et- 
Marne)  mentionné,  dès  le  septième  siècle,  dans  un  diplôme 
du  roi  Thierry  III  (8).  Nous  citerons  ensuite  Lagny-le-Sec 
(Oise),  appelé  d'abord,  comme  le  précédent,  LaHniacus  ;  son 
nom  apparaît  en  862  dans  un  diplôme  de  Charles  le 
Chauve  (9).  Nous  terminerons  par  Lagnieu  (Ain).  Sur  l'au- 
torité de  la  vie  de  saint  Domitien  qui  parait  dater  du  neu- 
vième siècle,  M.  Jules  Quicherat  admet  que  ce  village  tire 
son  nom  primitif,  Latiniacus ,  d'un  ancien  propriétaire  ap- 
pelé Latinus  :  lisons  Latinius  (10).  Le  biographe  a  écrit  Lati- 
nus  parce  que  de  son  temps  l'usage  des  gentilices  n'existait 


(1)  Mommsen,  ln9cr,  Helv.^  46. 

(2)  Brambach,  n-  303. 
(3)'c.  /.  L.,  II,  1501. 

(4)  Ibid.y  V,  7388. 

(5)  /6id.,  V,  7512. 

(6)  Ibid.,  IX,  1856  et  1857. 

(7)  Ibid.,  X,  330. 

(8)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  20,  col.  1  :  Villa  noncopanti  La- 
(tniaco,  que  ponitur  in  pago  Meldequo,  Ce  diplôme  a  été  rédigé  en  688  ou 
689;  cf.  ibid.,  p.  32,  col.  2;  p.  38,  col.  1;  p.  85,  col.  1. 

(9)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  117. 

(10)  Quicherat,  De  la  formation  française  des  anciens  noms  de  lieu,  p.  34. 


1 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  145 

plus,  et  parce  que,  dans  la  période  mérovingienne,  l'usage 
s'était  introduit  de  former  des  noms  de  lieux  en  ajoutant  à 
des  noms  d'hommes  barbares  la  désinence  iacus  :  Teode- 
b^ciacus,  de  Theodebercthus  ;  Landericiacus,  de  Landericus. 
3ous  Tempire  romain,  on  aurait  dit  Theodebercihacus ^  Lan- 
dericacus,  comme  Eburacus  «  York  »  (Angleterre),  d'Eburus; 
comme  Avitacus  «  Aydat  »  (Puy-de-Dôme),  d'Avitus;  et  par 
conséquent  Latinus  aurait  donné  le  dérivé  Latinacus,  dans 
le  patois  de  TAin  Laneu,  en  français  Lanay,  Laiiey ,  Lany, 
et  non  Lagneu,  ni  Lagny. 

Dans  les  tables  des  Inscriptions  antiques  de  Vienne.de 
M.  AUmer,  on  voit  apparaître  six  hommes  dont  le  gentilice 
est  Aurelius,  et  quarante  et  un  qui  portent  le  gentilice  Va- 
Imus.  Rien  donc  d'étonnant  si  on  trouve  en  Gaule  des 
fmdi  Aureliaci  et  Valeriaci  parallèles  aux  fundi  Aurelianus  et 
Yalerianus  de  Veleia  (1).  Aureillac  (Gard),  Aurillac  (Cantal), 
Orihac  (Lot),  Orly  (Seine),  sont  d'anciens  fundi  Aureliaci  (2). 
Vallery  (Yonne)  et  Valléry  (Haute-Savoie)  sont  d'anciens 
fundi  Valeriaci  (3).  Du  premier,  la  variante  romaine  en 
ànas  nous  est  conservée  par  deux  Aureilhan  (Landes  et 
Hautes-Pyrénées). 

Du  gentilice  romain  Marcellius^  connu  par  plusieurs  ins- 
criptions (4),  sont  venus  à  la  fois  le  nom  du  fundus  Marci- 
lianus,  à  Veleia,  et  celui  de  nombreux  fundi  gaulois  appelés 
Marciliacus  ou  Marcilliacw.  La  première  orthographe  est 
celle  de  la  vie  de  saint  Didier,  évéque  de  Cahors,  écrite  au 
septième  siècle ,  et  qui  raconte  la  fondation  du  coenobium 


(1)  Locus  Valeri&nus  en  926,  dans  une  charte  de  la  cathédrale  d'Âsti 
[Historiae  patriae  monumenia,  t.  I,  col.  127  c. 

(2)  Voyez  Quicherat,  De  la  formation  française  des  anciens  noms  de  lieu, 
p.  35.  Orly  (8oine),  est  désigné  par  le  nom  d'Auriliacus  dans  des  diplômes 
de  Charlemagne  et  de  Charles  le  Chauve,  Cartulaire  de  Noire-Dame  de 
PàriSy  t.  I,  pp.  24iJ,  251.  Ce  nom  de  lieu  se  trouve  aussi  en  Italie  :  Curiem 
que  foca/ur  Aureliacus,  896,  973;  Fantuzzi,  pp.  97,  180,  cf.  p.  XLViii. 

(3)  Quantin,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  l'Yonne  ^ 
p.  133. 

f\]C.  I.  L.,  V,  5642  {Additamenia,  p.  1085),  6038,  6542;  Allmcr,  Inscriptions 
de  Vienne,  III,  449. 

10 


146  LIVRE  IL  CHAPITRE  I-.  1  5. 

Marciliacense  (1).  La  seconde  est  celle  d*un  diplôme  de 
Louis  le  Débonnaire  remontant  à  l'année  834  (2).  Aujour- 
d'hui les  noms  de  trente-trois  communes  nous  conservent 
ce  dérivé  gallo-romain  sous  des  formes  plus  modernes  : 
Marcillac,  Marcillat,  Marcillé,  Marcilly.  En  y  ajoutant 
vingt-sept  hameaux ,  on  trouve  en  France  soixante  noms 
de  lieux  qui  dérivent  du  gentilice  Marcellius. 

ç  5  i^  noms  de  fundi  dérivés  de  gentilices  chez  les  popu- 
lation celtiques  sont  postérieurs  à  la  conquête  romaine. 

Les  noms  de  fundi  dérivés  de  gentilices  d'origine  ro- 
maine ne  peuvent  être  antérieurs  à  la  conquête.  On  en 
dira  autant  des  noms  de  lieux  tirés  des  gentilices  d'origine 
celtique.  Un  gentilice  d'origine  celtique  est  Carantius]  on 
en  a  donné  quatre  exemples  :  L.  Carantius  Atticus,  M.  Ca- 
rantius  Macrinus,  L.  Carantius  Gratus  et  L.  Carantius 
Cinto  (3)  ;  de  Carantius  vient  Carantiacus ,  nom  porté  par 
au  moins  dix-neuf  fundi  de  la  Gaule,  savoir  les  neuf  com- 
munes suivantes  :  Carancy  (Pas-de-Calais);  Charancieu 
(Isère)  ;  deux  Charancey  (Côte-d'Or  et  Moselle)  ;  Charency 
(Jura)  ;  deux  Cherancé  (Mayenne  et  Sarthe)  ;  Cherencé-le- 
Héron  et  Cherencé-le-Roussel  (Manche) ,  et  dix  hameaux. 
On  a  parlé  ensuite  du  gentilice  Carantinius  (4) ,  dont  le 
dérivé  est  Carantiniacus ,  d'où  Charantigny  (Aisne)  (5)  ; 
enfin  du  gentilice  Solimarius  (6) ,  d'où  le  Solimariaca  de 
Yltinéraire  entre  Neufchâteau  (Vosges)  et  Toul  (Meurthe- 
et-Moselle). 


(1)  D.  Bouquet,  III,  531  c. 

m  D  Bouquet.  VI,  595  E;  cf.  Sickel,  Acta  Karolinorum ,  t  II,  p.  183, 
n»  322.  bans  ce  document  il  s'agit  d'une  villa,  Marcilliacua  située  dans  le 
diocèse  de  Langres. 

(3)  Voyez  plus  haut,  p.  132. 

(4)  Voyez  plus  haut,  p.  132. 

(5)  Hameau  de  la  commune  do  Viilemontoire;  Matton,  Dictionnaire  topo- 
graphique  du  département  de  l'Aisne,  p.  58. 

(6)  Voyez  plus  haut,  p.  134. 


ORIGINE  DB8  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  147 

Comme  les  noms  de  fundi ,  précédemment  cités ,  et  qui 
dérivent  de  gentilices  d'origine  latine ,  les  noms  de  fundi 
dérivés  de  gentilices  d*origine  celtique  sont  postérieurs  à 
la  conquête  romaine ,  puisque  ,  avant  cette  conquête ,  les 
Gaulois  n'ont  pas  eu  de  gentilices. 

Il  est  vrai  que  parmi  les  noms  d'hommes  gaulois  du 
temps  de  l'indépendance ,  quelques-uns  se  terminaient  en 
'ius  ou  en  -w  et  auraient  pu  donner  des  dérivés  en  -iacus. 
Sur  soixante-deux  noms  celtiques  d'hommes,  tant  de  Gaule 
que  de  la  Grande-Bretagne,  que  Ton  peut  relever  dans  les 
Commentaires  de  César,  un  se  termine  en  -w,  c'est  Convie- 
tolitaviSf  et  dix  se  terminent  en  -ttw  ;  Andecuniborius^  Car- 
vilius,  Commius,  IceiuSj  Lucterius,  Mandubratius,  Nammeius^ 
SeduliiÂS^  TasgetiuSj  Vet^iÂeloetius.  Trois  au  moins  de  ces 
noms  persistent  sous  la  domination  romaine.  —  On  peut 
laisser  de  côté  Carvilius,  nom  d'un  des  quatre  rois  de  Kent 
en  l'an  54  de  notre  ère,  car  il  y  avait  à  Rome,  dès  le  troi- 
sième siècle  avant  Jésus-Christ ,  une  famille  noble  de  ce 
nom  ;  les  Carvilius  que  Ton  rencontre  plus  tard  peuvent 
se  rattacher  à  elle.  —  Mais  les  Commius,  Sedulius  et 
Iccius  des  commentaires  de  César  n'ont  pas  à  Rome 
d'homonymes  plus  anciens.  C'est  donc  à  ces  trois  noms 
gaulois  qu'on  doit  rattacher  les  gentilices  romains  identi- 
ques qui  apparaissent  postérieurement  ;  c'est  d'eux  que 
viennent  les  gentilices  romains  Commius,  Sedulius,  Iccius. 

Commius,  roi  des  Atrebates,  fut  envoyé  par  César  en 
Grande-Bretagne  l'an  55  avant  Jésus-Christ.  Son  nom  a 
été  employé  comme  gentilice  sous  l'Empire  romain  (1). 
Telle  a  été  aussi  la  fortune  du  nom  de  Sedulius,  que  porta 
un  chef  obscur  des  Lemovices ,  mort  les  armes  à  la  main , 
sous  les  murs  d'Alésia ,  52  ans  avant  notre  ère  ;  un  poète 
chrétien  du  cinquième  siècle  a  donné  à  ce  nom  une  cer- 
taine célébrité  ;  nous  avons  encore  les  œuvres  de  ce  poète  ; 
un  païen  du  même  nom  a  élevé  à  ses  dieux  un  monument 

(1)  Voyez  plus  haut,  p.  134. 


148  LIVRE  II.  CHAPITRE  I-.  {  5. 

trouvé  à  Cannstatt ,  en  Wurtemberg ,  et  dont  l'inscription 
a  été  plusieurs  fois  publiée  (1)  ;  elle  date  de  Tempire 
romain. 

IcciiLs  n'est  pas  seulement  le  nom  d'un  Rème  envoyé  en 
ambassade  à  César,  par  ses  concitoyens,  l'an  57  avant 
J.-C.  Vingt  et  quelques  années  plus  tard,  Horace  connut 
un  autre  Iccius  auquel  le  célèbre  poète  latin  adressa  une 
ode  et  une  épitre  (2).  Le  gentilice  Iccius  se  trouve  aussi 
sous  l'empire  dans  une  inscription  de  Nimes  (3),  et  il  avait 
une  variante  IciiLs  qui  a  pris  place  dans  la  géographie 
galle-romaine  comme  premier  terme  des  composés  Icio-ma- 
gus,  aujourd'hui  Usson  (Loire)  (4),  et  Icio-durum,  nom  porté 
par  deux  localités  différentes ,  l'une  en  Touraine ,  aujour- 
d'hui Izeures  (Indre-et-Loire)  (5);  l'autre  en  Auvergne;  au- 
jourd'hui Issoire  (Puy-de-Dôme)  (6). 

Quelques-uns  de  ces  noms  gaulois  mentionnés  chez  Cé- 
sar peuvent  avoir  donné  à  la  France  des  noms  de  lieux 
dérivés  en  -acus  qui  offrent  la  désinence  -i-acus.  Ainsi  les 
noms  de  Congé-sur-Orne  (Sarthe),  Congis  (Marne),  peuvent 
représenter  un  primitif*  Commiacus.  La  domus  Iciacmsis , 
en  Auvergne,  aujourd'hui  Yssac  (Puy-de-Dôme),  dont  parle 
Grégoire  de  Tours  (7),  a  été  construite  sur  un  fundus  Icia- 
(yus  dont  le  nom  est  dérivé  d'Iciics,  variante  A' Iccius, 
comme  il  a  été  dit  plus  haut  ;  les  noms  d'Issy  (Seine)  (8; , 
d'Issy-l'Evêque  (Saône-et-Loire),  et  d'Issé  (Loire-Inférieure), 


(1)  Brambach,  1575. 

(2)  Odes,  livre  I,  29,  1.  Epttres,  I,  12,  1.  Cf.  De  bello  g&llicOy  1.  II ,  c.  3, 1  2. 

(3)  Herzog,  t.  II,  p.  42,  n*  200. 

(4)  Dans  la  Table  de  Peutinger  on  a  écrit  Icidmago  pour  Iciomago.  Des- 
jardins, Géographie  de  la  Gaule  d'après  la  Table  de  Peutinger^  p.  !)02-3O4. 
Cf.  Longnon,  Allas  historique  de  la  France^  p.  29. 

(5)  Grégoire  do  Tours,  Historia  Francoy^m,  livre  X,  c.  31,  édition  Arndt, 
p.  444,  I.  20;  Longnon  ,  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle,  p.  273. 

(6)  Grégoire  de  Tours,  Gloria  confessorum^  c.  29,  édition  Àrndt  et  Krusch, 
p.  766,1.  4.  Longnon,  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle,  p.  499,  500. 

(7)  Gloria  mnrlyrum,  c.  65,  édit.  Arndt,  p.  432,  1,  22, 

(8)  Fiscus..,  Isciacus  dans  un  diplôme  faux  du  roi  Childebert  I*',  dont  le 
manuscrit  le  plus  ancien  est  du  neuvième  siècle.  Tardif,  Monuments  his- 
toriques,  p.  2  ;  Pertz,  Diplomatum  imperii  tomus  primus,  p.  7,  ligne  33. 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  t49 

peuvent  avoir  la  môme  origine.  Le  nom  gaulois  d'Iccius 
est  donc  encore  vivant  dans  la  géographie  de  la  France. 
Mais  il  ne  doit  cette  bonne  fortune  qu'à  la  chance  heureuse 
qu'il  a  eue  d'être  conservé  comme  gentilice  à  l'époque 
romaine. 

La  nomenclature  des  noms  de  lieux  de  la  Gaule  qui  se 
terminent  en  -acus  et  en  -iaciis  est  le  reflet  de  la  nomen- 
clature des  noms  d'hommes  usités  en  Gaule  pendant  l'em- 
pire romain  et  nullement  de  celle  des  noms  d'hommes 
aatérieurs  à  la  conquête.  Si  elle  était  le  produit  des  noms 
d'hommes  antérieurs  à  la  conquête,  elle  conserverait  un 
des  caractères  qui  distingue  la  liste  de  ces  noms. 

Une  observation  préalable  est  nécessaire  pour  faire  com- 
prendre ce  dont  il  s'agit.  Sont  terminés  en  -iacw  les  noms 
de  lieux  qui  dérivent  de  noms  d'hommes  en  -ius  et  peut- 
être  en  -M  ;  différente  est  l'origine  des  noms  de  lieux  qui 
n'ont  pas  d'i  devant  -acus.  Or  les  noms  celtiques  d'hommes 
en  -îttf  ou  en  -w  sont,  avant  la  conquête  romaine,  les  moins 
nombreux  ;  il  y  en  a  chez  César  onze  sur  soixante-deux , 
entre  le  cinquième  et  le  sixième  de  la  totalité  ;  cette  propor- 
tion est  vraisemblablement  celle  qui  existait  dans  les  noms 
d'homme  gaulois  avant  la  conquête  romaine  :  un  cinquième 
ou  un  sixième  se  terminait  en  i-s  ou  en  io-s  =  iu-s  et  au- 
raient pu  donner  des  dérivés  en  -tact^,  quatre  cinquièmes 
ou  cinq  sixièmes  se  terminaient  autrement  et  auraient  for- 
cément donné  des  dérivés  en  -aous  sans  i  avant  l'a  d'-acus. 
Si  les  noms  de  lieux  de  la  Gaule  en  -(was  dérivaient  des 
noms  d'hommes  gaulois  antérieurs  à  la  conquête,  nous  de- 
vrions en  Gaule,  parmi  les  noms  de  lieu  en  -aous,  en 
trouver  un  cinquième  ou  un  sixième  seulement  avec  i 
devant  l'a  d'acus  ;  dans  les  quatre  cinquièmes  ou  les  cinq 
sixièmes,  le  suflBxe  -aciLs  serait  précédé  d'une  lettre  autre 
que  i.  Mais  c'est  la  proportion  inverse  qu'on  rencontre  dans 
la  nomenclature  géographique  de  la  Gaule  romaine. 

Si  à  l'aide  du  récent  travail  de  M.  Longnon  sur  la  géo- 
graphie de  la  Gaule  romaine,  on  dresse  la  liste  des  localités 


150  LIVRE  II.  CHAPITRE  I-.  |  5. 

qui ,  sous  Tempire  romain ,  ont  porté  des  noms  terminés 
en  -acm^  on  en  trouve  quarante-quatre,  sur  lesquels  huit 
seulement  n'ofifrent  pas  à'i  avant  ce  suffixe  :  Antunnacus^ 
Aunedonnacus ,  Avitacus ,  Bagacus  ,  Camaracus ,  Cunnacus , 
SolonacuSy  Turnacus,  Ces  huit  mots  supposent  des  noms 
d'hommes  dont  le  thème  était  consonn antique  ou  se  termi- 
nait en  0  précédé  d'une  consonne.  Les  trente-six  autres 
noms  de  lieux  en  -acus  de  la  Gaule  romaine  offrent  la  dési- 
nence 'iacus ,  et  s'expliquent  par  des  noms  d'hommes  qui 
avaient  une  terminaison  différente  de  celle  des  premiers, 
c'est-à-dire  le  suffixe  -iiis  des  gentilices  romains.  Ainsi 
les  quatre  cinquièmes  des  noms  de  lieux  en  -acus  que 
M.  Longnon  a  recueillis  dans  les  monuments  de  la  domi- 
nation romaine  en  Gaule  dérivent  de  noms  d'hommes  en 
-iiw.  La  proportion  est  inverse  de  celle  que  nous  devrions 
rencontrer  si  les  noms  de  lieux  en  -acvs  de  la  période  ro- 
maine avaient  pour  base  des  noms  d'hommes  antérieurs  à 
la  conquête. 

La  liste  des  noms  de  lieu  de  la  Gaule  au  sixième  siècle, 
dressée  par  M.  "  Longnon ,  donne  lieu  à  une  observation 
analogue;  quarante-cinq  se  terminent  en  -î-aciw,  il  y  en 
a  huit  qui ,  devant  le  suffixe  -acus ,  nous  offrent  une  lettre 
autre  que  i.  Sur  un  total  de  cinquante-trois,  c'est  un 
sixième  environ  qui  n'ont  pas  d'^  devant  le  suffixe  -octw , 
tandis  que  les  noms  celtiques  d'hommes  recueillis  par  Cé- 
sar devraient  donner  un  sixième  ou  un  cinquième  de  dé- 
rivés en  'iacus  et  cinq  sixièmes  ou  quatre  cinquièmes  de 
dérivés  où  le  suffixe  -acus  serait  précédé  d'une  lettre  autre 
que  i. 

La  table  géographique  du  tome  VII  du  Recueil  des  histo- 
riens de  la  France^  qui  contient  des  documents  relatifs  aux 
fils  de  Louis  le  Débonnaire ,  entre  autres  une  nombreuse 
collection  de  diplômes,  nous  offre  une  quantité  considérable 
de  noms  de  lieux  de  la  Gaule  au.  neuvième  siècle.  J'en  ai 
compté  quatre  cent  quatre-vingt-dix-sept  qui  se  terminent 
en  -acus  ;  sept  huitièmes,  soit  quatre  cent  trente-neuf,  ont 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  151 

un  t  devant  ce  suffixe,  un  huitième,  soit  cinquante-huit 
seulement,  n'ont  pas  à*i  avant  -acus. 

Ces  relevés  suffisent  pour  établir  que  les  noms  géogra- 
phiques en  -acus  de  la  Gaule  ne  tirent  pas  leur  origine 
des  noms  d'hommes  antérieurs  à  la  conquête  romaine.  Si 
les  noms  de  lieux  en  -aotis  de  la  Gaule  remontaient  à  la 
période  de  Tindépendance,  ce  serait  le  plus  petit  nombre 
de  ces  noms,  un  cinquième  au  plus,  qui  nous^offrirait  un  i 
avant  Va  d'aous;  au  contraire,  les  plus  nombreux  de  beau- 
coup nous  offrent  cet  i  qu'explique  la  désinence  ordinaire 
du  gentilice  romain. 

S  6.  —  Quatre  espèces  de  noms  de  lieux  habités  en  Gaule  chez 

César. 

Les  noms  de  lieux  habités  dans  la  Gaule  indépendante 
qui  sont  mentionnés  par  César  ne  semblent  presque  aucuns 
<^tre  tirés  de  noms  d'hommes.  Parmi  ces  noms  de  lieux 
habités  on  peut  distinguer  quatre  sections  : 

La  première  comprend  les  noms  à  sens  topographique. 
11  y  en  a  un  qui  exprime  une  relation  avec  un  cours  d'eau. 
Le  nom  i'Avaricum^  «  Bourges,  »  situé  sur  TEvre  (1),  vient 
i'Avara ,  ancien  nom  de  TE vre  ;  ainsi ,  plus  tard ,  le  nom 
à'Auiricuin,  «  Chartres,  »  est  dérivé  d'Àutura^  ancien  nom 
de  l'Eure.  On  peut  comparer  Gena^a ,  «  Genève ,  »  qui  si- 
gnifie ,  à  proprement  parler ,  «  bouche ,  »  parce  que  cette 
ville  se  trouve  à  l'endroit  où  le  lac  Léman  vomit  le  Rhône. 

La  seconde  section  des  noms  de  villes  de  la  Gaule  indé- 
pendante mentionnés  par  César  se  rapporte  aux  produits 
du  sol  ou ,  plus  spécialement ,  à  la  faune  locale  :  tels  Bi- 
bracte  et  Bibrax^  dont  les  noms  dérivent  du  gaulois  *bebros, 
en  latin  fiber^  mais  en  français  bièvre,  qui  vient  du  gaulois  ; 
le  bièvre  ou  castor  a  précédé  l'homme  dans  ces  deux  loca- 
lités. Cabillonum^  paraissant  dérivé  de  caballus,  «  cheval,  » 

(1)  GràmmàticM  ceUtca.  f  édit.,  p.  779-806. 


15a  LIVRE  II.  CHAPITRE  I".  {  7. 

désigne ,  ce  semble ,  une  ville  dont  la  principale  industrie 
était  rélève  du  cheval. 

La  troisième  section  doit  son  origine  à  des  idées  reli- 
gieuses :  comme  plus  tard  Lugudunum  est  la  forteresse 
du  dieu  Lugus,  Nemetocenna  est  chez  César,  soit  un  dérivé 
de  nemeton,  «  temple,  »  soit  un  composé  dont  nemeton  est 
le  premier  terme. 

Les  noms  des  lieux  habités  compris  dans  la  quatrième 
section  sont  formés  de  deux  termes ,  un  adjectif  placé  le 
premier  et  un  nom  qui  est  le  second  terme  d*un  composé. 
Ce  composé  exprime  l'opinion  que  les  fondateurs  avaient 
de  leur  nouvel  établissement;  ainsi  Uœellodunum  veut  dire 
«  haute  forteresse  ;  »  Vellaunodunum^  «  bonne  forteresse  ;  » 
Noviodunum ,  «  forteresse  neuve  ;  »  c'est  l'opposé  du  vieil 
irlandais  Sen-dûn  ^  aujourd'hui  Shandon  ou  Shannon^  dont 
le  sens  est  «  vieille  forteresse  (1).  » 

§  7.  —  Cinq  espèces  de  noms  de  Lieux  habités  dans  les  pays 
celtiques  suivant  les  documents  du  temps  de  l'empire. 

Si  des  noms  de  lieu  de  la  Gaule  qu'on  lit  chez  César 
nous  passons  aux  noms  de  lieux  qui,  appartenant  à  des 
pays  celtiques,  sont  contenus  dans  les  textes  contemporains 
de  l'empire  romain,  notamment  dans  les  plus  importants 
de  ces  textes  :  Itinéraire  d'Antonin^  fin  du  troisième  siècle; 
Table  de  Peutinger^  Notice  des  provinces  et  des  cités  de  la 
Gaule,  quatrième  siècle  ;  nous  y  retrouvons  les  quatre  sec- 
tions qui  viennent  d'être  signalées,  plus  certainement  une 
cinquième  composée  des  noms  de  lieu  qui  expriment  un 
rapport  avec  une  personne  (2). 

En  première  ligne ,  voici  des  noms  de  lieu  gaulois  du 

(1)  The  origin  and  hislory  of  irish  names  of  places ^  hy  P.-W.  Joyce, 
5-  édit.  Dublin,  1883,  t.  I,  p.  282. 

(2)  Il  a  pu  exister ,  dès  le  temps  de  César ,  en  Gaule ,  des  noms  de  lieu 
composés  dont  un  nom  d'homme  formait  le  premier  terme  :  Samaro-briva, 
pont  d'un  homme  appelé  Samaros,  et  Admageto-briga,  forteresse  d'un  gau- 
lois nommé  Admagctos;  mais  pas  de  noms  de  terre,  magua,  ainsi  formés. 


1 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  153 

quatrième  siècle  qui  expriment  un  rapport  avec  un  cours 
d*eau  :  Brivalsarae ,  «  pont  de  l'Oise ,  »  aujourd'hui  Pon- 
toise  ;  Brivo^durum ,  «  forteresse  du  pont ,  »  aujourd'hui 
Briare  (Loiret)  ;  Brivate,  «  endroit  où  il  y  a  un  pont,  »  au- 
jourd'hui Brioude  (Haute-Loire)  ;  Moso-magus ,  «  champ  de 
la  Meuse ,  »  aujourd'hui  Mouzon  (Ardennes)  ;  Bitu-magus , 
a  champ  du  gué,  »  aujourd'hui  Radepont  (Eure)  ;  Condato- 
magiis,  «  champ  du  confluent,  »  aujourd'hui  Millau  (Avey- 
ron),  et  enfin  plusieurs  localités  du  nom  de  Condate.  A 
Moso-magus ^  «  champ  de  la  Meuse,  »  on  peut  comparer 
Bodinco-magus ,  a  champ  du  Bodincus  ou  Pô  »  dans  une 
inscription  (1).  On  verra  même  cette  section  se  développer 
grâce  à  des  indications  topographiques  d'un  autre  ordre  : 
Àcaunum,  «  Saint-Maurice  en  Valais  ;  »  Acunum ,  «  Notre- 
Dame  d'Aygu  »  (Aveyron),  veulent  dire  «  Le  Rocher  (2)  ;  » 
ces  noms  du  moyen  âge  remontent  à  l'époque  celtique. 

  la  seconde  section  appartiennent  les  noms  de  lieu  de 
période  romaine  qui  se  rapportent  à  la  faune  locale  :  Go- 
bro-sentuiriy  «  chemin  des  chèvres,  »  en  Grande-Bretagne  ; 
Gcèro-magus,  «  champ  des  chèvres,  »  et  Matucaium,  «  che- 
min des  ours,  »  en  Norique.  Cette  catégorie  se  développe 
par  des  noms  relatifs  à  la  végétation  et  à  l'industrie  loca- 
les :  1*  en  Gaule,  Aballo^  aujourd'hui  Avallpn,  signifie 
probablement  «  la  pommeraie  ;  »  en  Grande-Bretagne,  Der- 
ventione ,  «  la  chênaie  ;  »  2®  en  Grande-Bretagne ,  Goban- 
nium^  «  la  forge;  »  en  Gaule,  Carpentorate,  «  la  fabrique 
de  chars  :  »  son  nom  dérive  d'un  thème  Carpento- ,  écrit 
CarhantO'  dans  Carbantorigum  (Grande-Bretagne).  De  Car- 
banto-  dérive  Carbantia  ,  «  la  ville  des  chars ,  »  en  Italie , 
au  nord  du  Pô ,  non  loin  d!Epo-redia ,  «  la  ville  des  bons 
dompteurs  de  chevaux ,  »  comme  dit  Pline.  Citons  encore 
Figlinae  pour  Figulinae ^  «  les  poteries,  »  près  de  Saint- 
Rambert  d'Albon  (Drôme). 


(1)  C.  /.  L.,  t,  V,  p.  845. 

C-)  Longnon,  At2a«  historique  de  la  France,  p.  25  et  suivantosi. 


154  LIVRE  II.  CHAPITRE  I".  }  7. 

Dans  la  troisième  section ,  noms  de  lieu  d'origine  reli- 
gieuse, prend  place  Divona,  «  la  divine,  »  aujourd'hui  Ca- 
hors  ;  Divo-Durum ,  «  forteresse  des  dieux ,  »  aujourd'hui 
Metz ,  tous  deux  en  Gaule  ;  rapprochons  Deo-brigula ,  «  la 
petite  forteresse  des  dieux,  »  en  Espagne;  Camulo-dunum, 
forteresse  du  dieu  Camulus^  en  Grande-Bretagne.  De  plus, 
puisqu 'Auguste  et  César  sont  élevés  au  rang  des  dieux,  il 
faut  ranger  dans  cette  catégorie  Augusto-nemetum ,  «  temple 
d'Auguste,  »  aujourd'hui  Clermond-Ferrand ;  Augusto-dxh 
num,  «  forteresse  d'Auguste,  »  Autun;  Augusto- dw^m , 
môme  sens,  aujourd'hui  Bayeux;  Augusto-^tum ^  «  gué 
d'Auguste,  »  aujourd'hui  Limoges;  Augusto-magus^  «  champ 
d'Auguste,  »  aujourd'hui  Senlis  (comparez  Augusto-briga ^ 
«  forteresse  d'Auguste  ,  »  en  Espagne)  ;  Cciesaro-dunum , 
ce  forteresse  de  César,  »  aujourd'hui  Tours  ;  Caesaro-magus^ 
«  champ  de  César ,  »  aujourd'hui  Beauvais  (comparez  un 
autre  Caesaro-magus  en  Grande-Bretagne). 

A  la  quatrième  section  se  rattachent  Novio-magus,  «  le 
champ  neuf  ou  le  champ  nouvellement  défriché,  »  dont  la 
Table  de  Peutinger  nous  offre  en  Gaule  quatre  exemples  ; 
Vhinéraire  d'Antonin  nous  en  montre  trois  hors  de  Gaule, 

■ 

dont  un  en  Grande-Bretagne,  deux  en  Germanie.  On  peut 
leur  opposer  Seno-magus ,  «  le  vieux  champ ,  »  près  de 
Saint- Paul -Trois -Châteaux  (Drôme);  de  SenomagtASj  on 
rapprocherait  le  Sen-mag  de  la  mythologie  irlandaise  (i)  :  le 
Sen-mag  aurait  été  la  plaine  la  plus  anciennement  défrichée 
de  rirlande  ;  elle  était  déjà  défrichée  quand  arrivèrent  les 
premiers  habitants  de  l'île.  On  citera  encore  Litanobrigay 
«  la  forteresse  large ,  »  près  de  Creil  (Oise)  ;  comparez  les 
deux  Cambodunum  ou  «  forteresse  courbe,  »  l'un  de 
Grande-Bretagne,  l'autre  de  Rhétie. 

Nous  arrivons  à  la  cinquième  section,  qui  atteste  des  re- 
lations entre  l'homme  propriétaire  et  sa  portion  de  terre . 
son    champ.    Elle    est  postérieure  aux    Commentaires   de 

(t)  Livre  de  Leinster^  p.  5,  col.  1,  ligne  38. 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  1S5 

César.  Elle  comprend  deux  groupes.  Dans  l'un  de  ces  grou- 
pes ,  le  terme  qui  désigne  Thomme  est  un  gentilice  ;  dans 
l'autre,  ce  terme  est  un  cognomen  ou  c'est  le  nom  unique 
et  pérégrin  employé  pour  désigner  une  personne  qui  n'a 
pas  de  gentilice. 

Dans  le  premier  groupe,  noms  de  lieu  tirés  du  gentilice 
du  propriétaire ,  on  trouve  réunis  des  composés  et  des  dé- 
rivés ;  les  composés  sont  les  moins  nombreux.  On  a  parlé 
àlci<Mnagu$j  «  champ  d'Iccius,  »  p.  148,  on  peut  ajouter  : 
Claudichmagus ,  aujourd'hui  Clion  (Indre)  "(1);  Nerio-magus, 
aujourd'hui  Néris,  dont  le  premier  terme,  Nerius^  est  un 
gentilice  connu  par  plusieurs  inscriptions  et  par  le  nom  de 
lieu  dérivé  Niriacus  (2).  Il  y  a  peu  de  dérivés  en  -ont**; 
cependant  on  rencontre  Liviana^  sous-entendu  donius  ou 
villa,  aujourd'hui  Capendu  (Aude)  (3),  dérivé  de  Livius,  et 
Âlbaniani  ou  Àlbiniani^  situé  sur  la  rive  gauche  du  Rhin  (4), 
aujourd'hui  Halphen  (Pays-Bas).  Albaniani  ou  Albiniani  est 
dérivé  à'Albanius  ou  d'Albiniu^,  deux  gentilices  attestés  par 
les  inscriptions  (5).  Albaniani  ou  Albiniani  est  un  adjectif 
au  pluriel  qui  se  rapporte  au  substantif  sous-entendu  fundi. 
Comparez  pour  le  suffixe  le  français  moderne  Lusignan, 
d'abord  Lesignan,  c'est-à-dire  fundus  Licinianus. 

Le  procédé  de  dérivation  le  plus  commun  est  celui  dont 
il  sera  question  dans  le  paragraphe  suivant. 

(1)  Claudio-magus  chez  Sulpice  Sévère,  Dialogues^  II»  8  (Migne,  Pttirologia, 
latina,  t  XX,  col.  207).  Julio-bona  dans  la  Table  de  Peutinger,  et  17/tnë- 
mred'Anioninj  Julio-maguSf  aujourd'hui  Angers,  dans  la  Table  de  Peu^ 
linger  et  chez  Ptolémée  ne  sont  probablement  pas  des  noms  de  fundi ,  et 
le  premier  terme  de  leur  nom  rappelle  le  souvenir  du  divin  Jules ,  d'abord 
conquérant  de  la  Gaule  et  depuis  Dieu.  Comparez  Caesaro-magus,  Beauvais, 
et  Auguslo-bona,  Troyes. 

1^)  Vicani  Neriomagienses ^  inscription.  Desjardins,  Géographie...,  etc., 
p.  299;  Nerius,  C.  /.  L.,  t.  III,  3215,  10;  6008,  42;  V,  8114,  98;  X,  cinq  ex. 
fUriicus,  diplômes  de  832  et  862  ;  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  85,  1 17. 

(3)  Table  de  Peutinger;  Desjardins,  Géographie,  p.  362. 

(4)  La  première  orthographe  est  celle  de  la  Table  de  Peutinger;  la  se- 
conde, celle  de  17(mëratre  d'Antonin, 

(3}3f.  Albanius  Paternus;  Brambach,  385.  T.  Albanius  Primanus;  Bram- 
bach.  1301.  T.  Albinius  Januarius;  Brambach,  73.  P.  Albinius  Antonius , 
^'  /  L.,  UI,  5143,  etc. 


156  LIVRE  II.  CHAPITRE  1-.  {  8. 

S  8.  —  Le  suffixe  -ftcus  placé  à  la  suite  du  gentilice  pour 
former  des  noms  de  lieux  dans  les  documents  du  temps  de 
l'Empire, 

En  Gaule,  le  suffixe  -dcus  est  plus  fréquent  que  le  suffixe 
'Anu^s  (1).  On  le  trouve  aussi  hors  de  Gaule  dans  les  régions 
celtiques.  Ainsi,  à  Veleia,  on  peut  citer  le  fundus  Quintia- 
cus^  dont  le  nom  est  dérivé  du  gentilice  Quintius  ou  Quinc- 
tius^  très  fréquent  dans  le  monde  romain  (2).  La  Table 
alimentaire  qui  nous  fournit  ce  nom  date,  comme  on  l'a 
dit  plus  haut,  de  l'an  104  de  notre  ère.  Le  plus  ancien 
exemple  de  ce  nom  de  fu/ndus  que  nous  ayons  trouvé  dans 
la  Gaule  transalpine  date  de  Tannée  697,  où  une  propriété 
appelée  Quiniiacus^  et  située  près  de  la  Loire,  fut  donnée 
à  Tabbaye  de  Limours  (3).  Quintiacus  doit,  à  l'époque 
romaine,  avoir  été  un  nom  de  lieu  fort  répandu  en  Gaule; 
il  existe  en  France  dix-neuf  communes  dont  le  nom  mo- 
derne en  vient  :  Cuinchy  (Pas-de-Calais)  ;  Cuincy  (Nord)  ; 
Quinçay  (Vienne)  ;  Quincé  (Maine-et-Loire)  ;  trois  Quincey 
(Aube,  Côte-d'Or,  Haute-Saône);  un  Quincié  (Rhône); 
Quincieu  (Isère);  Quincieux  (Rhône);  sept  Quincy  (Aisne, 
Cher,  Côte-d'Or,  Meuse,  Seine-et-Marne,  Seine-et-Oise) ; 
deux  Quinsac  (Dordogne,  Gironde).  En  y  ajoutant  dix-sept 
hameaux  on  trouve  un  total  de  trente-six  Quintiacus  en 
France.  De  ces  localités  diverses,  celle  pour  laquelle  on  a, 


(1)  Dos  l'empire  romain,  il  y  a  des  noms  de  lieux  créés  à  Taide  d'autre$ 
suffixes,  comme  le  suffixe  -o  ;  il  y  a  aussi  un  système  qui  consiste  à  employer 
les  gentilices  ou  les  cognomen  comme  noms  de  lieu.  Nous  parlerons  de  ces 
procédés  quand  nous  passerons  à  Texamen  des  textes  du  moyen  âge  où  les 
noms  de  lieu  sont  beaucoup  plus  nombreux  que  dans  les  textes  contempo- 
rains de  l'empire  romain. 

(2)  Le  C.  /.  L.  nous  en  offre  six  exemples  dans  le  t.  III ,  trente-huit  dans 
le  t.  V,  vingt  dans  le  t.  X.  En  Qaule,  Quintius  Primulus  dans  une  inscrip- 
tion de  Saint- Victor-des-Oules,  près  Uzès  (Allmer,  Aeuue  épigraphique, 
t.  I,  p.  394,  n*  435);  Quintius  Valentinius  dans  une  inscription  de  Greno- 
ble (Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  III ,  p.  163). 

(3)  Pardessus,  Diplom&ta,  t.^II,  p.  244. 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  157 

je  crois,  le  témoignage  le  plus  ancien,  est  Quincieu  (Isère), 
dont  il  est  question  dans  une  charte  de  Tannée  739,  où 
Quincieu  est  appelé  à  Tablatif  Quintiaco  (1).  Viennent 
ensuite  :  Quincy  (Meuse),  mentionné  sous  le  nom  de 
Quinciacum  dans  deux  chartes  de  Tannée  770  (2)  ;  le  Quin- 
cey  du  département  de  T Aube ,  appelé  Quincictcus  dans  un 
diplôme  royal  de  886  (3).  Quinciacus  est  une  orthographe 
de  la  basse  latinité  pour  Quintiactis.  La  forme  latine  de  ce 
terme  gallo-romain  est  Quintianus ,  deux  fois  inscrit  dans 
yhinéraire  d'Antonin ,  une  fois  pour  désigner  une  station 
romaine  de  Rhétie;  une  autre  fois  pour  désigner  une 
station  romaine  d'Italie  (4).  Cette  forme  a  pénétré  en 
France,  témoin  la  commune  de  TAUier  qui  s'appelle  Quin- 
saines,  c*est-à-dire  Quintianae,  sous-eniendu  villae. 

Il  y  avait  à  Veleia  un  fundus  Arsuniacus.  Arsuniacus 
dérive  d'un  gentilice  *  Arsunius  qui  ne  diffère  que  par  une 
voyelle  d^Arsiiiius  (5)  et  à'Arseniiis  (6)  conservées  chacun 
dans  une  inscription. 

Le  fundus  Pisunictcus  à  Veleia  tire  son  nom  du  gen- 
tilice *  Pisunius ,  variante  de  Pisonius ,  qu'une  inscription 
nous  a  gardé  (7).  Piney  (Aube),  s'appelait,  en  869,  Pm- 
niacum  (8) ,  mot  dérivé  de  Pisinius ,  et  qui  ne  semble  être 
qu'une  variante  de  Pisuniacus. 

Le  fundus  Cabwrdiacus  de  Veleia  est  dérivé  du  gen- 
tilice *Cabardius,  écrit  Cabarsits  dans  une  inscription  (9). 


(1)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  372. 

(2)  Liénard,  Diclionnaire  topographique  du  département  de  la  Meuse  ^ 
p.  1B5.  • 

(3)Dom  Bouquet,  t.  IX,  p.  353  B.  Cf.  Boutiot  et  8ocard,  Dictionnaire  io- 
pogrsLphique  du  département  de  l'Aube,  p.  131. 

(4)  Quintianis^  Rhétie,  Itinéraire  d'Antonin,  édit.  Parthey  et  Pinder, 
p.  249  de  l'édition  Wesseling  ;  Quintiano  ,  Italie ,  ibid, ,  p.  499  de  Tédition 
Wesseling. 

(5)  C.  I.  L.,  III,  3435. 

(6)  C.  /,  L.,  X,  1791. 

(î)  C.  /.  L.,  X,  3515.  Cf.  Pisenius,  III,  1789,  et  Pisinius^  Brambach,  810. 

(8)  Boutiot  et  Socard,  Dictionnaire  topographique  du  département  de 
l'Aube,  p.  121. 

(9)  Af .  Cabarsus  Patiens,  C.  /.  L.,  V,  5134.  Cabaraus  est  pour  Cabarzus; 


158  UVRE  II.  CHAPITRE  I-*.  {  8. 

Cahardiacus  est  devenu  en  italien  Caverzago.  Caverzago  est 
situé  sur  la  rive  gauche  de  la  Trébie,  près  de  Trevi.  En 
français,  Cabardiacus  s'est  changé  en  Chevresis^  nom  d'une 
commune  et  d'un  hameau  du  département  de  l'Aisne  ;  ces 
deux  localités  sont  voisines ,  et  1'^  final  de  Chevresis  parait 
avoir  été  originairement  le  signe  du  pluriel  employé  quand 
on  voulait  désigner  ces  deux  localités  par  un  seul  mot  ;  du 
reste,  cet  s  final  manque  dans  deux  documents  du  dou- 
zième siècle  (1).  Le  hameau  de  Chaversey  (Oise),  peut  avoir 
la  même  origine. 

Le  fundus  Caudiacus  de  Veleia  dérive  du  gentilice  Cau- 
dius  conservé  par  une  inscription  (2).  Cavdiacus  est  de- 
venu ,  en  français  du  nord ,  Gaugé ,  nom  d'une  commune 
du  département  de  l'Eure,  Caugy,  nom  d'un  hameau  du 
Calvados,  et,  en  français  du  midi,  Caujac,  nom  d'une 
commune  de  la  Haute-Garonne. 

Le  fundus  Orbiniacus  de  Veleia  dérive  son  nom  du  gen- 
tilice *OrbiniuSf  dont  je  n'ai  pas  rencontré  d'exemple.  Ou 
trouve  dans  les  inscriptions  Orbius  (3).  A  côté  d'*Orbinius 
a  pu  exister  le  gentilice  *  Orbanius  ;  il  expliquerait  la  forme 
Orbaniacus  donnée  par  la  plupart  des  manuscrits  de  Gré- 
goire de  Tours  au  nom  d'Orbigny  (Indre-et-Loire)  (4).  11  y 
a  aussi,  dans  le  département  de  la  Haute-Marne,  deux 
villages  du  nom  d'Orbigny. 

Nous  ne  parlerons  pas  plus  longuement  des  fundi  de 
Veleia  dont  le  nom ,  conservé  par  la  Table  alimentaire  de 
l'an  104  de  notre  ère,  consiste  en  dérivés  tirés  de  gentilices 
au  moyen  du  suffixe  -aciis.  Passons  maintenant  aux  fundi 
de  la  Gaule  transalpine  dont  le  nom  est  formé  de  la  même 


comparez  za,bolu8  pour  di&bolus  et  zaconua  pour  diaconus,  Diez ,  Gràm- 
m&ire  des  langues  romanes,  traduite  par  Brachet  et  Paris,  t.  I,  p.  216. 

(1)  Matton,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  l'Aisne,  p.  67. 

(2)  C.  /.  L.,  X,  2246. 

(3)  Voyez,  dans  Corpus  inscriptionum  latinarum^  Tindex  des  tomes  V  et 
X,  et  tome  VI ,  n«  23558. 

(4)  Historia  Francorum,  10,  31  ;  GIoHa  Martyrum,  89,  édit.  Arndt,  p.  448, 
1.  6,  et  p.  548, 1.  10. 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  159 

manière,  et  que  Ton  trouve  transcrits  dans  les  textes 
géographiques  compilés  au  temps  de  Tempire  romain.  Il  a 
été  déjà  question,  p.  141,  du  fundus  Juliacus  où  a  été  bâtie 
la  ville  de  Juliers.  Un  autre  fundus,  aussi  intéressant,  est 
Geminiacus  (1) ,  sur  la  route  de  Tongres  à  Boulogne.  Son 
nom  est  dérivé  du  gentilice  Geminius ,  qu'on  trouve  dans 
plusieurs  inscriptions  (2).  A  côté  de  Geminiacus^  il  y  a  une 
forme  plus  latine  Geminianus  qui  est  le  nom  d'un  fundus 
de  Veleia.  La  forme  gallo-romaine  Geminiacus  survit  dans 
le  nom  des  communes  de  Gemigny  (Loiret),  et  de  Jumigny 
(Aisne). 

Tiberiacus  (3),  nom  d'une  station  romaine  près  de  Cologne, 
est  dérivé  de  Tiherius,  prénom  romain  employé  quelquefois 
comme  gentilice  (4). 

Artiaca,  nom  d'une  station  romaine  entre  Troyes  et 
Chàlons-sur-Marne  (5),  vient  A'Artius,  gentilice  romain 
dont  on  a  recueilli  deux  exemples ,  et  qu'on  trouve  aussi 
employé  comme  surnom  (6). 

Mimtiacus,  nom  d'une  station  située  près  de  Reims  (7), 
dérive  de  Minatius,  gentilice  romain  dont  il  y  a  quelques 
exemples  (8). 

Solimariaca ,   nom  d'une  station  voisine  de  Toul  (9), 


(1)  Itinéraire  d'Antonin  et  Table  de  Peutinger.  Ernest  Desjardins  ,  Géo- 
graphie de  la.  Gaule  d'après  la  Table  de  Peutinger ^  p.  77. 

3  C.  /.  L.,  III,  96,  513,  2916,  4116,  4436.  Sur  la  gens  Geminia,  voyez 
I)e-vit,  Onomasticony  t.  II,  p.  223;  XII,  11  ex.  masc,  3  féminins. 

[3!)  Itinér&ire  d'Antonin  j  édit.  Parthey  et  Pinder,  p.  375  de  l'édition  de 
Wesseling. 

(4)C.  Tiberius  Verus^  Brambach,  150.  T.  Tiberius  Marcus  (C.  /.  L.,  X,  3640). 

(ô)  liinéraire  d'Antonin^  édition  Partbey  et  Pinder,  p.  361  de  l'édition  de 
Wesseling, 

(6)  De-vit,  Totius  latinitatis  Onomasticon,  t.  I,  p.  494 ,  aux  mots  Artia^ 

Arlius. 

Çf)  Uinérstire  d'Antonin,  édition  Parthey  et  Pinder,  p.  381  de  l'édition  de 
Wesseling. 

(8)  CI.  L.,  V,  1301.  7850;  VI.  22495-22501;  IX,  867,  1031,  2403,  4825,  etc. 

(9)  Itinéraire  d'Antonin ^  édit.  Parthey  et  Pinder,  p.  385  de  l'édition  de 
Wesseling.  —  Du  nom  de  cette  station,  rapprocher  celui  de  Somméré 
(Saône-et-Loire) ,  en  878 ,  Solmeriacus  pour  Solimeriacus ,  Solimariacus. 
Th.  Chavot,  Le  AlàconnaiSt  p.  264. 


160  LIVRE  II.  CHAPITRE  I".  {  8. 

dérive  du  gentilice  gallo-romain  Solimarius  mentionné  plus 
haut  (1) ,  et  qui  dérive  lui-même  du  nom  d'homme  gaulois 
Solimaros. 

Hermoniactts  y  écrit  à  tort  Hermomacum  dans  la  Table  de 
Peutinger,  est  une  station  romaine  située  non  loin  de 
Cambrai  (2).  Son  nom  dérive  A'HermoniuSn  gentilice  con- 
servé par  des  inscriptions  (3). 

Ricciacus^  station  voisine  de  Trêves  (4),  tire  son  nom  de 
RicciuSj  gentilice  dont  plusieurs  inscriptions  établissent 
Texistence  (5). 

Aux  exemples  qu'offrent  les  monuments  géographiques 
de  l'empire  romain,  on  peut  en  ajouter  deux  fournis  par 
un  poète. 

Pauliacus ,  villa  mentionnée  par  Âusone  (6) .  porte  un 
nom  qu'explique  le  gentilice  Paulius,  variante  de  PaulliusÇi). 

Lucaniacus,  villa  à  laquelle  le  même  auteur  a  donné  une 
célébrité  relative  par  le  vers  bizarre  : 

Villa  Lucani mox  potieris aco  (8) , 

doit  son  nom  à  un  propriétaire  primitif ,  dont  le  gentilice 
était  LucaniuSy  comme  celui  de  L.  Lucanius  Censorinus. 
auteur  d'une  dédicace  à  la  déesse  Sirona  ;  ce  monument 
est  conservé  au  musée  de  Trêves  (9).  On  a  trouvé  à  Va- 


(1)  Voir  plus  haut,  p.  133. 

(2)  Desjardins,  Géographie  de  ta  Gaule  d'après  2a  Table  de  Peutinger, 
p.  89.  La  correction  est  due  à  M.  Longnon. 

(3)  C.  /.  L.,  IX,  5352  ;  X,  1690,  1691. 

(4)  Ta5Ze  de  Peutinger  chez  Desjardins,  Géographie,  etc.,  p.  117. 

(5)  C.  /.  L.,  III,  1818;  AUmer,  Inscriptions  antiques  de  Vienne,  II,  245,246). 

(6)  a  Pauliacos  tanti  non  mihi  villa  foret  ;  o  Epitres,  V,  v.  16.  Edit.  Scbenkl 
p.  163. 

(7)  Paullius,  C.  /.  L.,  II,  4546;  Paulia,  Boissieu,  Inscriptions  antiques  de 
Lyon,  p.  187. 

(8)  Ausone,  Epîtres,  V,  v.  36.  Ibid.  Cf.  Lucaniaco ,  nom  d'un  locellus 
donné  on  696  pour  la  dotation  d*un  hôpital  fondé  à  Poitiers;  Pardessus, 
Diplomata,  t.  II,  p.  240. 

(9)  Branibach ,  n'  814.  Deux  femmes  nommées  Lucania  figurent  dans  les 
n**  920  et  922.  Trois  autres  exemples  du  même  gentilice  se  trouvent  dans  le 
C.  /.  L.,  VI,  21518-21520. 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  161 

lence  (Drôme)  Tépitaphe  de  D.  Lucanius  Threption  (1)  ; 
à  Esparron  celle  que  Q.  Lucanius  Insequens  fit  graver 
pour  sa  femme  (2);  à  Nimes,  Tépitaphe  de  L.  Lucanius 
Cornélius  (3). 

Ausone  écrivait  au  quatrième  siècle;  il  fut  élevé  au 
consulat  en  379,  et  mourut  en  390.  Ses  écrits  fournissent 
donc  un  complément  à  Vltinéraire  d'Antonin  et  à  la  Table 
de  Peuting&r ,  pour  Tétude  des  noms  de  lieux  de  la  Gaule 
pendant  la  période  romaine. 

Les  documents  de  la  période  romaine  offrent  aussi  des 
noms  de  lieux  en  -âciùSf  dérivés  de  gentilices,  à  Test  de 
la  Gaule.  Dans  la  Rhétie,  une  des  régions  de  Tempire 
romain  où  l'élément  gaulois  paraît  avoir  eu  le  plus  d'im- 
portance, Abiidiacus ,  nom  d'une  station  romaine  près 
d'Augsbourg  (4),  dérive  du  gentilice  Abudius;  on  trouve  ce 
gentilice  dans  les  inscriptions  (5) .,  et  sous  Tibère ,  il  fut 
porté  à  Rome  par  Tédile  Abudius  Ruso  (6). 

Plus  au  nord ,  en  Germanie ,  mais  près  de  la  rive  droite 
du  Rhin,  dans  une  région  où  domina  quelque  temps  la 
civilisation  gallo-romaine,  se  trouvait  une  ville  que  Pto- 
lémée  appelle  Mattiacum  (7).  Son  nom  est  un  dérivé  du 
gentilice  Mauius  dont  nous  avons  relevé  douze  exemples 
dans  les  inscriptions  (8). 

De  même ,  en  Espagne ,  on  rencontre  une  station  d'i4r- 
Tiaca  (9)  dont  le  nom  dérive  du  gentilice  Arrius.  Les 
inscriptions  d'Espagne  offrent  neuf  exemples  de  ce  genti- 


(i)  c.  /.  L.,  xn,  ms. 

P)  c.  /.  L.,  xn,  350. 

(3)  c.  /.  L.,  xn,  3707. 

(4)  Ecrit  AbuztLCo  dans  17ttnératr6  d'Antonin^  éd.  Parthey  et  Pinder, 
p.  275  de  redit,  de  Wesseling  ;  dans  la  Table  de  Peutinger  on  lit  AhodUcum. 

(5)  C.  /.  L.,  III,  2938;  V,  328,  329  5i«,  8322,  8110,  34. 

(6)  Tacite,  Annales,  VI,  30  ;  cf.  De-vit,  Ùnomaaixcon^  1. 1,  p.  19. 

(7)  M(mie»ôv,  Ptolémée,  II,  11,  29.  Edit.  Nobbe,  t.  I,  p.  122;  II,  11,  U; 
édit.  MùUer,  t.  I,  p.  272.  Cf.  Brambach,  n"  987,  1313. 

(8)  Cl.  L.,  III,  378,  5286;  V,  6957;  VI,  22303-22311. 

(9)  Kinératre  d'Antonin,  édit.  Parthey-Pinder,  p.  436,  438  de  Wesseling. 

11 


lea  LIVRE  n.  chapitre  i».  j  9. 

lice  (1)  dont  il  y  a  encore  d'autres  exemples  ailleurs  (3). 
En  Grande  Bretagne,  Epiacum{Sj  parait  dérivé  i'Eppius, 
gentilice  dont  l'existence  est  aussi  prouvée  par  les  inscrip- 
tions (4). 

S  9.  —  Comparaison  entre  les  noms  de  lieux  formés  en  France 
à  l'aide  du  suffixe  -âcus,  et  quelques  noms  de  lieux  en  -4nus 
dans  diverses  parties  de  l'empire  romain. 

Les  dérivés  en  -anus  que  nous  offrent ,  dans  une  lettre 
de  Pline  le  Jeune,  dans  la  Table  de  Peutinger,  dans  Vlliné- 
raire  d'Antonin^  et  dans  quelques  inscriptions,  les  noms  de 
lieux  étrangers  aux  pays  celtiques,  sont  quelquefois  au 
moins  aussi  intéressants  que  les  noms  de  lieux  en  àcut 
mentionnés  jusqu'ici.  En  effet,  certains  de  ces  noms  de 
lieux  en  anus  ont  eu  des  équivalents  gallo-romains  en 
âcus  qui  existent  encore  en  France  sous  une  forme  plus 
moderne.  Telle  est  la  Camilliana  villa  en  Campanie  (0). 
Elle  appartenait  au  beau-père  de  Pline  le  Jeune,  elle  tirait 
son  nom  du  gentilice  Camillius  dont  on  a  recueilli  quel- 
ques exemples  (6).  La  forme  gallo-romaine  de  l'adjectif 
Camillianus  est  Camilliaaus,  dont  neuf  noms  de  communes  : 
Chamilly  {Saône-et-Loire)  ;  un  Chemilla  (Jura)  ;  trois  Che- 
millé  {Indre-et-Loire,  Maine-et-Loire};  ChemiUi  (Orne),  et 
quatre  Chemilly  (Allier,  Haute-Saône,  Yonne)  (7);  enfin 
dix  noms  de  hameaux,  total  dix-neuf  noms  de  lieux  mo- 
dernes en  France.  Nous  citerons  ensuite  : 


(1)  C.  J.  L.,  t.  II. 

(2)  Va/  aotamment  Brambach,  934,  1835. 

(3)  'EnilcaDv,  Ptolémàe,  II,  3,  16;  édit.  Nobbe,  t.  I,  p.  71;  II,  3,  10;  «dit 
Uûller,  t.  I,  p.  9G. 

(4)  C.I.L.,  111,3925,  4799,  4819;  V,  2623,  4857,  8379;  VI,  17246-17248.  Cf. 
De-vit,  Onomatticon,  t.  II,  p.  744. 

(5)  Pline  le  Jeune,  Epistularum.  1.  VI.  !  30. 

(6)  C.  /.  L.,  VI,  14302.14304-,  cf.  De-vit,  Onomasifcon,  t.  Il,  p.  97, 

(7)  Camiliscum,  Chumbly  (Oise),  d'où  le  pagus  CamUiaceniU  des  ctaartet 
du  septième  siècle  (Tardif,  Monuments  historiques,  p.  24,  31,  63,  84)  pftralt 
n'avoir  eu  qu'une  1  et  être  un  mot  différent. 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  163 

Florianay  sous-entendu  villa^  en  Pannonie  (1),  dérivé  du 
gentilice  Florius  (2).  Sa  forme  gallo-romaine  est  Floriacus  (3), 
aujourd'hui  Fleury,  Fleurieu  ou  Fleurieux  et  Floirac.  Il  y 
a  en  France  dix-neuf  communes  du  nom  de  Fleury  dans 
les  départements  de  l'Aisne,  de  l'Aude,  de  TEure,  du 
Loiret,  de  la  Marne,  de  la  Meuse,  de  la  Nièvre,  de  TOise, 
du  Pas-de-Calais,  de  8aône-et-Loire,  de  Seine-et-Marne,  de 
8eine-et-0ise  et  de  T Yonne.  Fleurieu  et  Fleurieux  sont  dans 
le  département  du  Rhône.  Il  y  a  trois  Floirac  (Charente- 
Inférieure,  Gironde,  Lot).  En  ajoutant  vingt-trois  noms  de 
hameaux  à  ces  vingt-quatre  noms  de  communes,  on  trouve 
un  total  de  quarante-sept  noms  de  lieu  qui  représentent , 
dans  la  France  d'aujourd'hui ,  autant  d'antiques  Floriacus, 

Blandiana ,  sous-entendu  villa ,  en  Dacie  (4) ,  dérive  du 
gentilice  Blandius  conservé  par  des  inscriptions,  par  exem- 
ple dans  ritalie  septentrionale  (5),  et  en  Gaule  (6).  De  Blan- 
dius  sont  dérivés  des  noms  de  fundi  en  -dcit^,  dont  la  forme 
primitive  Blandiacus  se  reconnaît  sous  les  formes  modernes 
de  seize  noms  de  communes  de  France  :  deux  Blandy 
(Seine-et-Marne,  Seine-et-Oise) ;  cinq  Blangy  (Calvados, 
Pas-de-Calais ,  Seine-Inférieure ,  Somme)  ;  quatre  Blanzac 
(Charente,  Charente-Inférieure,  Haute-Loire,  Haute-Vienne); 
un  Blanzat  (Puy-de-Dôme);  un  Blanzay  (Charente-Infé- 
rieure); quatre  Blanzy  (Aisne,  Ardennes,  Saône-et-Loire). 
11  faut  ajouter  treize  noms  de  hameaux,  total  vingt-neuf 
noms  de  lieux.  Une  de  ces  localités  apparaît  sous  le  nom 
de  BUmziacus  dans  un  diplôme  de  l'année  832  (7). 


(1)  Itinéraire  d'Antonin,  édition  Parthey-Pinder ,  p.  263,  265  de  ceUe  de 
Wesseling. 

(2)  C.  /.  L.,  VI,  18482-18488;  X,  4370,  5414,  5732;  Brambach,  1067,  etc. 

(3)  Grégoire  de  Toars,  Historia  Fr&ncorum,  III,  35,  édition  Arndt,  t.  I, 
p.  138,1.  9  :  Diplôme  de  835,  chez  D.  Bouquet,  VI,  601;  Diplôme  de  866, 
chez  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  127. 

(4)  Table  de  Peutinger,  édit.  de  M.  E.  Desjardins,  segment  VII,  B.  Cf. 
C.  J.  L.,  t.  III,  p.  225. 

(5)  C.  /.  L.,  t.  V,  index,  p.  1106,  col.  3. 

(6)  Allmer,  Inscriptions  antiques  de  Vienne^  I,  349. 

(7)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  85,  col.  1. 


IM  LIVRE  n.  CHAPITRE  I".  J  9. 

Pacciani  ou  Paccianae,  nom  d'une  station  romaioe 
d'Afrique  (!)  est  dérivé  de  Paccius,  gentiiice  latin  bien 
connu  (2).  Paccius  a  une  variante  Pacius  (3);  de  Pacius 
dérive  le  nom  de  lieu  gallo-romain  Paciacus  conservé 
par  des  documents  de  l'époque  carlovingienne  (4)  ;  et  de 
Paciactis  viennent  onze  noms  de  communes  de  France  : 
deux  Pacé  {lUe-et- Vilaine ,  Orne)  ;  deux  Pacy  (Eure , 
Yonne);  sept  Passy  (Aisne,  Marne,  9aôae-et-Loire,  Haute- 
Savoie,  aeine-et-Mame,  Yonne)  ;  les  noms  de  six  hameaux; 
enfin  le  nom  de  Passy,  seizième  arrondissement  de  Paris. 
De  Paccius  a  dû  venir  '  Pacciacus,  écrit  Paxiacwn  en  1136, 
aujourd'hui  Paissy  (Aisne)  (5).  Comparez  le  nom  du  furdui 
Paccianus  dans  la  table  alimentaire  des  Ligures  Baebiani  (6). 

Mariniani  ou  Marinianae,  nom  d'une  station  romaine  de 
la  Pannonie  inférieure  (7),  est  un  dérivé  en  -anus  du  gen- 
tiiice Marinius  qui  se  trouve  dans  les  inscriptions  (8).  On 
reconnaît  le  même  dérivé  dans  le  nom  de  Marignano  porté 
par  une  petite  ville  d'Italie,  dans  celui  de  Marignane  qui 
désigne  un  bourg  des  Bouches-du-Rhône ,  et  dont  la  va- 
riante Marignana  distingue  un  village  de  Corse.  Sa  forme 
gallo-romaine  était  Mariniacus ,  dont  il  sera  question  plus 
loin,  et  d'où  viennent,  les  uns  certainement,  et  les  autres 
probablement,  les  noms  des  communes  appelées  :  Mari- 
gnac,  Marigné,  Marigneu,  Marigny. 

L'Itinéraire  d'Antonin  mentionne  en  Espagne  deux  Bar- 


(I)  Jlin^rafre  d'Antonin  ;  Paccfanii,  p.  18  de  l'édition  de  Wesseliug. 
(î)  Brambach,  n^673;  C.  I.  L.,  111,  sii  exemples;  V,  quatre  ex.;  IX,  seÎM 
es.;  X,  trois  ex. 

(3)  Les.tonies  V  et  IX  du  C,  I.  L.  offrent  cbacim  quatre  exemples  de  Pa- 
cius ;  ou  trouve  la  variaute  Paquius  dans  deux  inscriptions  d'Arles,  Henog, 
n-  3*2,  343. 

(4)  Diplômes  des  années  832  et  S36,  chez  D.  Bouquet,  t.  VI,  p.  586  A  «I 
611  B. 

(5)  Hatton,  DicCionnaire  (opographique  du  dipartement  de  VAitne,  p.  208. 

(6)  Edition  de  H.  E.  Desjardins,  p.  lxv. 

(7)  ItiiUraire  d'Antonin ,  édit.  Parthey  et  Pinder,  p,  130  de  l'édition  de 
Wosseling. 

(S)  Brambacb,  n*  1529.  Allmer,  Intcriplions  de  VUnne,  II,  &3T. 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  165 

bariana  (î).  Le  gentilice  Barbarius  nous  a  été  conservé  (2)  : 
de  là  le  nom  de  Barberey  (Aube),  au  moyen  âge  Barba^ 
rioùusy  et  celui  de  Berbirey  (Côte-d'Or)  (3). 

Une  inscription  nous  donne  le  nom  d'un  vicus  Valenti- 
nianus  en  Dacie  (4).  C'est  un  dérivé  en  -4nu5  d'un  gentilice 
Yalentinius  conservé  par  les  inscriptions  (5).  La  forme 
gallo-romaine  correspondante  était  Yalentiniaeus  ^  d'où  le 
nom  de  deux  communes  de  France ,  Valentigney  (Doubs) , 
et  Valentigny  (Aube).  Le  dernier  est  appelé  Valentiniacum 
dans  un  document  du  douzième  siècle  (6).  Un  hameau  de 
Valentigny  se  trouve  dans  le  Cher. 

Une  inscription  de  Buccino,  autrefois  Volcei,  dans  l'Italie 
méridionale,  fournit  une  nomenclature  de  fundi  contenus 
dans  cette  cité  (7).  Parmi  ces  fundi ^  le  fundus  Casinianus  ^ 
mieux  Cassinianus^  a  dû  avoir  pour  parallèle  en  Gaule  un 
fundm  Cassiniacus  ou  plutôt  plusieurs  fundi  Cassiniaci. 
Témoin  les  deux  communes  de  Chassigny,  Tune  de  la 
Haute-Marne,  l'autre  de  Saône-et-Loire,  celle  de  Chassigneu 
(Isère),  et  trois  hameaux  du  nom  de  Chassigny. 

Le  fundus  Micerianus  de  la  môme  inscription  nous  permet 
de  supposer  en  Gaule  des  fundi  Miceriaci;  d'où  cinq  noms 
de  communes  en  France ,  savoir  :  deux  Miserey  (Doubs  et 
Eure)  ;  un  Misery  (Somme)  ;  Missery  (Côte-d'Or)  ;  Missiriac 
(Morbihan).  Ce  dernier  s'appelait  Miceriac  en  1130  (8).  Il 
faut  y  ajouter  cinq  noms  de  hameaux. 


(1)  Itinér&ire  d'Antonin^  édit.  Parthoy  ot  Pinder,  p.  406  et  450  de  l'édition 
Wesseling. 

(2)  C.  /.  L.,  X,  1199. 

(3)  Boutiot  et  Socard ,  Diclionnaire  topogr&phique  du  département  de 
l'AubBj  p.  17.  Joseph  Gamier,  Nomenclature  historique^  p.  246. 

{4)C.7.  L.,  III,  371. 

(5)Brambach,  1245;  C.  7.  L.,  III,  4981. 

(6)  Boutiot  et  Socard ,  Dictionnaire  topographique  du  département  de 
l'Aube,  p.  172. 

(7)  C.  J.  L.,  X,  407. 

(8)  Rosenzwcig ,  Dictionnaire  topographique  du  département  du  Mor- 
bih^n,  p.  281.  Missery  (Côte-d'Or)  est  appelé  Meseriacum  dans  un  diplôme 
âe  l'année  721.  Pardessus,  Diplomata,  II,  324. 


166  LIVRE  II.  CHAPITRE  I".  i  10. 

§  10.  —  Noms  de  fundi  formés  à  l'aide  de  surnoms^  dans  les 
pays  celtiques  au  temps  de  Vempire  romain. 

Sous  la  domination  romaine,  les  habitants  des  provinces 
n'ont  pas  tous  adopté  le  système  onomastique  de  la  race 
conquérante.  Un  certain  nombre,  probablement  même  au 
début  le  plus  grand  nombre ,  c'est-à-dire  ceux  qui  n'ont 
pas  obtenu  la  dignité  de  citoyens  romains,  ont  conservé 
l'usage  ancien  de  leur  nation,  en  ne  portant  qu'un  nom,  et, 
dans  le  cas  où  ils  craignaient  la  confusion  avec  d'autres, 
en  plaçant  ensuite  le  nom  de  leur  père,  au  génitif,  suivi  du 
mot  filius.  Tels  sont  les  cavaliers  :  Adbogius  Coinagi  f[ilius], 
na[tione]  Petrucorius  ^  c'est-à-dire  originaire  du  Périgord; 
Ru  fus  y  Coutusuati  f[ilius]y  natiolne]  Elvetius ,  c'est-à-dire 
originaire  de  Suisse  ;  Argiotalus,  Smertulitani  f[ilius],  Nam- 
nis,  c'est-à-dire  de  Nantes,  leurs  monuments  funèbres 
sont  conservés  aux  musées  deMannheim  (i)  et  de  Worms(2). 
On  peut  aussi  citer  lantumarus ,  Andedunis  f  [ilius] ,  Var- 
cianv^^  originaire  probablement  de  Varcia  entre  Langres  et 
Besançon  (3),  et  Cattaus,  Bardi  f[ilius],  Helvetius;  tous  deux, 
après  avoir  servi  comme  les  précédents  en  qualité  de  cava- 
liers dans  l'armée  romaine ,  reçurent  de  l'empereur  Néron 
le  droit  de  cité,  l'un  en  l'an  60,  l'autre  en  l'an  64  de  notre 
ère;  et  les  diplômes  par  lesquels  cette  faveur  leur  est 
concédée,  sont  conservés  aux  musées  de  Vienne  et  de 
Munich  (4). 

Parmi  les  hommes  de  condition  inférieure  qui  étaient 
ainsi  dépourvus  de  gentilices ,  quelques-uns  furent  cepen- 
dant propriétaires,  et  de  là  un  certain  nombre  de  noms  de 
fundi,  les  uns  composés,  les  autres  dérivés.  Les  composés 
sont  formés  en  employant  comme  second  terme  le  mot 


(1)  Brambach,  1230,  1227. 

(2)  Brambach,  891. 

(3)  Itinérsiire  d^Antonin,  éd.  Parthoy  et  Pinder,  p.  386  de  l'éd.  Wesseling. 
(4),C.  /.  L.,  t.  III,  p.  845-846. 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  167 

-magus^  champ  ;  et  on  peut  en  rapprocher  les  noms  de  lieu 
composés  dont  le  second  terme  est  -dunum  ou  -briga^  deux 
mots  signifiant  forteresse.  Quant  aux  dérivés,  ils  sont, 
comme  les  dérivés  de  gentilices,  formés  avec  le  suffixe 
-acus;  ils  se  distinguent  des  dérivés  de  gentilices  en  ce 
que  le  suffixe  --acus  n'est  pas  précédé  d'un  i.  Exemple 
Ami'Ocus^  Ebur-acus,  Turn-acus. 

Comme  exemple  de  composés  dont  -magus  est  le  second 
terme,  nous  citerons  Caranto-magus^  station  située  entre 
Cahors  et  Rodez,  aujourd'hui  Cranton  (1);  Draso-magus^ 
localité  de  Rhétie,  dans  le  voisinage  du  Rhin,  mentionnée 
par  Ptolémée  (2)  ;  Bardo-magas ,  victÂS  voisin  de  Milan  (3)  ; 
Eburo-jnagtis ,  station  romaine  de  Gaule,  près  de  Carcas- 
sonne  (4).  Les  deux  premiers  termes,  Carantus  et  DrusuSy 
sont  des  noms  gaulois  ;  on  l'a  dit  pour  le  premier  (p.  132), 
à  propos  du  gentilice  Carantius;  quant  au  second,  qui  a 
deux  orthographes,  Drausus  la  plus  ancienne,  Drusus  la  plus 
récente ,  il  fut  »  sous  la  seconde  forme ,  adopté  par  la  gens 
Livia,  La  gens  Livia  prenait,  disait-elle ,  le  surnom  de  Dru- 
sus,  à  cause  d'un  barbare  nommé  Drausus^  qu'un  ancêtre 
avait  tué  à  la  guerre  (5).  Drausus,  Drusus  parait  identique  à 
la  seconde  partie  du  nom  des  Con-drusiy  peuple  de  la  Gaule 
Belgique  dont  il  est  deux  fois  question  chez  César  (6). 

Le  premier  terme  de  Bardo-magm  est  Bardo-s,  usité  comme 
nom  propre  d'homme  et  comme  surnom  dans  la  population 
gallo-romaine  au  temps  de  l'empire.  En  l'an  64  de  notre 

(1)  TMe  de  Peutinger.  Cf.  Ernest  Desjardins ,  Géographie  de  la  Gaule 
d'après  la  Table  de  Peutinger,  p.  312. 

(2)  Ptolémée,  livre  II,  ch.  xii,  |  5;  édition  Nobbe,  t.  I,  p.  125;  livre  II, 
ch.  XIII,  I  3  ;  éd.  Ch.  MûUcr,  t.  I,  p.  282. 

(3)  C.  /.  L.,  V,  5872,  5878. 

(4)  Table  de  Peutinger;  Eraest  Desjardins,  Géographie  de  la  Gaule  d'après 
là  Table  de  Peutinger,  p.  364. 

(5)  Suétone,  Tibère,  3. 

(6)  De  bello  gallico,  livre  IV,  ch.  vi;  livre  VI,  ch.  xxxii.  Dans  ce  passage. 
César  dit  que  les  Condrusi  sont  d'origine  germanique  :  ex  g  ente  et  numéro 
Germanorum;  ceci  doit  être  entendu  dans  un  sens  géographique,  et  non 
ethnographique;  de  même  au  livre  II,  ch.  iv  :  plerosque  Belgas  esse  ortoe 
a6  Germanis. 


168  LIVRE  II.  CHAPITRE  I*».  (  10. 

ère ,  Néron ,  comme  on  Ta  déjà  vu ,  donna  droit  de  cité  à 
Cattaus^  Bardi  filius,  d'origine  helvète  (1).  On  a  trouvé 
prés  de  Knittelfeld ,  en  Styrie ,  le  monument  funèbre  de 
Banona  Bardi,  c'est-à-dire  fille  de  Bardus  (2);  les  deux 
Bardus,  pères,  l'un  de  Cattaus^  l'autre  de  Banona^  n'avaient 
point  de  gentilice.  Mais,  dans  une  troisième  inscription 
trouvée  en  Carinthie ,  on  lit  le  nom  de  Julia  Bard[i  filia] 
Eliomara  (3)  dont,  par  conséquent,  le  père  portait  le  genti- 
lice Julius  avec  le  surnom  Bardais, 

Eburo-magus  a  pour  premier  terme  le  nom  d'homme 
Eburos,  latinisé  en  Eburus,  qu'on  a  lu  plusieurs  fois  dans 
les  inscriptions  romaines  de  la  période  impériale.  Dans 
l'une,  qui  a  été  trouvée  en.  Hongrie  et  qui  est  au  musée  de 
Pesth ,  un  certain  Eburus  fait  une  dédicace  à  Vénus  (4). 
Dans  une  autre,  recueillie  en  Carinthie,  Bufius  Mosgaitus  et 
sa  femme  élèvent  un  monument  tant  à  eux-mêmes  qu'à 
leur  fils  Eburus  (5).  Enfin,  sur  un  vase  de  terre  trouvé  en 
Styrie,  on  a  lu  la  marque  de  potier  EBVRVS  FEC.  (6).  La 
marque  EBVRV  trouvée  à  Douai  (7)  est  peut-être  du  même 
potier.  D*Ebunts  on  tira  même  le  dérivé  Eburius,  employé 
comme  gentilice  avec  un  surnom  dans  trois  inscriptions, 
Tune  des  environs  de  Novare  (8),  une  autre  de  Novare 
même  (9),  la  dernière  de  Rome  (10);  d'Eburius  vient  Ebu- 
riacuSj  au  moyen  âge  Eboriacus,  nom  de  la  localité  où  fut 
fondée,  au  septième  siècle,  l'abbaye  de  Faremoutiers  (Seine- 
et-Marne),  dite  d'abord  Eboriacense  monasterium  (il).  Ebur 

(1)  c.  /.  L.,  t.  III,  p.  846. 

(2)  Ibid.,  III,  5473. 

(3)  Ibid.,  III,  4838. 

(4)  Ibtd.,  III,  4167. 

(5)  Ibid.,  III,  5033. 

(6)  f  5id.,  III,  6010,  82. 

(7)  Schuermans,  Sigles  figulins^  n*  2048. 

(8)  C.  /.  L.»  t.  V,  addit&menta,  p.  1087,  n*  6578. 

(9)  C.  /.  L.,  V,  6573. 

(10)  Ibid.,  VI,  17086.  On  trouve  aussi  Eburius  employé  comme  surnom. 
Jbid.,  v,  3541  et  6537;  JuUian  ,  Inscriptions  romaines  de  Bordeaux,  1. 1, 

p.  199. 

(11)  Pardessus,  Diplom,,  II,  15-17. 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  169 

riacus  est  probablement  la  forme  primitive  des  noms  des 
communes  d'Evry  (Seine-et-Marne,  Seine-et-Oise,  Yonne), 
et  d'Ivry  (Eure,  Oise  et  Seine). 

Comme  exemples  de  composés  dont  le  premier  terme  est 
un  nom  d'homme,  et  dont  le  second  tenue  est  -dunum  ou 
'briga^  nous  avons  trois  Eburo-dunum,  deux  en  Gaule,  un 
en  Germanie ,  et  Eburo-briga  en  Gaule.  Les  deux  Eburotki- 
num  de  Gaule  sont  aujourd'hui  la  petite  ville  d'Yverdun , 
en  Suisse,  dans  le  canton  de  Vaud  (1),  et  Embrun,  sous- 
préfecture  du  département  des  Hautes-Alpes  (2).  Eburodu- 
num,  de  Germanie,  nous  est  connu  par  Ptolémée  (3);  on 
suppose  que  c'est  aujourd'hui  Briinn,  en  Moravie.  Quant 
à  Eburobriga,  on  croit  que  c'est  aujourd'hui  AvroUes 
(Yonne)  (4). 

Des  noms  de  lieux  gallo-romains  en  -acus  qui ,  sans 
être  dérivés  de  gentilices,  sont  cependant  tirés  de  noms 
d'hommes,  le  plus  fameux  est  Eburacus,  Yorck  (cf.  p.  137). 
La  variante  orthographique  Eboracus,  qui  sent  déjà  la  basse 
latinité ,  est  la  plus  connue  ;  mais  une  inscription  appelle 
les  habitants  Ebur[ac€nses]  (5) ,  et  on  lit  Eburacum  dans  les 
meilleurs  manuscrits  de  V Itinéraire  dCAntonin  (6).  Eburacus^ 
en  Angleterre,  Ebu/riacus,  ancien  nom  de  Faremoutiers  en 
France,  sont  intéressants  à  rapprocher;  puisque  l'un  dé- 


(1)  Voyez  les  textes  réunis  par  M.  E.  Desjardins,  Géographie  de  /a  Gaule 
d'après  la  Table  de  Peutinger,  p.  234. 

Ç)  V07.  les  textes  réunis  par  M.  E.  Desjardins,  Géographie  de  la  Gaule,  etc., 
p.  423.  Deux  autres  Eburo-dunum  apparaissent  dans  les  textes  du  moyen 
âge.  L'un  a  donné  son  nom  à  la  vicaria  Everdunensis ,  mentionnée  en  865 
dans  une  charte  de  l'abbaye  Saint-Martin  de  Tours  (Mabille,  Pancarte  notre, 
p.  224;  cf.  159);  c*est  aujourd'hui  Averdon  (Loir-et-Cher).  De  l'autre  vient 
le  nom  de  la  utcan'a  Ebredenensis ,  on  919 ,  dans  le  cartulaire  de  Brioude  , 
p.  323;  cette  vicairie  était  située  en  Auvergne  au  comté  de  Tallende  (Puy- 
de-Dôme). 

(3)  Livre  II,  ch.  xi,  i  30;  édition  Nobbe,  1. 1,  p.  123;  édit.  Wilberg,  p.  156. 
Livre  II,  ch.  xi,  i  15,  chez  Charles  Mùller,  t.  I,  275:  cf.  p.  273,  note. 

(4)  Desjardins ,  Géographie  de  la  Gaule  d'après  la  Table  de  Peutinger  , 
p.  168-169. 

(5)  C.  /.  L.,  VII,  236. 

(6)  md.,  VII,  61. 


170  LIVRE  IL  CHAPITRE  I-.  {  10. 

rive  du  surnom  Eburus ,  l'autre  du  gentilice  Eburius ,  lui- 
môme  dérivé  d'Eburus. 

Turnacus ,  nom  de  la  ville  de  Tournai  dans  la  Table  de 
Pèutinger  et  dans  V Itinéraire  d'Antonin  (1),  est  dérivé  de 
Tv/rniLs ,  nom  porté  par  un  personnage  mythique  que  Vir- 
gile a  chanté  et  qu'on  rencontre  dans  une  inscription  écrite 
sur  les  murs  de  Pompéi  peu  avant  la  catastrophe  qui  dé- 
truisit cette  ville,  l'an  79  de  notre  ère  (2).  Vers  la  même 
époque  vivait  à  Rome  le  satirique  Tumus^  fils  d'affranchi, 
qui  acquit  de  l'influence  dans  les  cours  de  Vespasien,  de 
Titus  et  de  Domitien  ;  Martial  parle  de  lui  (3).  Un  autre 
Twrnus  a  été  un  des  correspondants  de  Sidoine  Apolli- 
naire au  cinquième  siècle  de  notre  ère  (4).  Un  monument 
qui  nous  conserve  ce  surnom  est  le  nom  du  village  de 
Tournon  (Indre-et-Loire),  anciennement  Turno-magus^  écrit 
Tomo-magus  par  Grégoire  de  Tours  au  sixième  siècle  de 
notre  ère  (5). 

Le  nom  d^Avitacum  praedium ,  chez  Sidoine  Apolli- 
naire (6) ,  vient  d'Avitus ,  surnom  qui  n'est  point  rare  dans 
les  inscriptions  latines  (7).  Nous  le  trouvons  quelquefois 
employé  seul.  Un  des  amis  du  poète  Martial  s'appelait  Avi- 
tus  ;  son  nom  se  lit  plusieurs  fois  dans  les  épigrammes  de 
Martial  ;  cinq  lui  sont  adressées  (8)  ;  il  est  simplement  ques- 
tion de  lui  dans  une  sixième  (9)  ;  c'était  vers  la  fin  du  pre- 
mier siècle  de  notre  ère.  Deux  autres  Avitus  apparaissent 
dans  le  Code  ;  un  rescrit  impérial  fut  adressé  à  chacun  ;  le 
premier  est  d'Alexandre  Sévère  et  de  l'année  224  de  notre 


(1)  Géographie  de  la  Gaule  d'après  la  Table  de  Pèutinger,  pp.  80,  81. 

(2)  Enéidey  livres  VII-XI  (cf.  Tite-Live,  livre  I,  ch.  ii);  C.  /.  L.,  IV,  1237. 

(3)  Martial,  XI,  10;  VII,  97.  Voyez  du  reste  les  textes  réunis  par  Tcuffel, 
Gechichte  der  rœmischen  Literatur,  troisième  édition,  p.  733. 

(4)  Sidoine  Apollinaire,  Episiolae .  livre  IV,  lettre  24. 

(5)  Historia  Francorum,  livre  X,  ch.  xxxi,  éd.  Arndt,  p.  444,  ligne  4. 

(6)  Epistolarurrif  liber  II,  epistola  ii;  comparez  Carmen,  XVIII. 

(7)  Voir  notamment  Allmer,  Inscriptions  antiques  de  Vienne,  II,  453;  III, 
424  ;  IV,  64,  207. 

(8)  Epigrammaton,  I,  16;  VI,  84;  IX,  1;  X,  96,  102. 

(9)  /Md.,iXII.  24. 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  171 

ère  (I),  l'autre  est  des  empereurs  Dioclétien  et  Maximin  et 
date  de  Tannée  286  (2).  Il  n'est  pas  rigoureusement  établi 
que  YAvitacum  praedium  de  Sidoine  Apollinaire,  bien 
qu'appartenant  à  sa  femme ,  iLœoriv/in ,  comme  le  dit  Técri- 
vaiû  latin,  dût  son  nom  au  père  de  sa  femme,  Marcus  Mae- 
cilius  Avitus,  mort  empereur  en  456.  Le  nom  de  cette  lo- 
calité peut  être  beaucoup  plus  ancien  et  remonter  à  un 
autre  Avitus.  A  côté  d'Avitacus,  se  place  AvitiacuSy  dérivé 
d'Avitius  (3),  gentilice  qui  vient  lui-même  d'Avitus.  On  a 
écrit  au  moyen  âge  Aviciacus  pour  Avitiacus.  Il  a  été  parlé 
plus  haut,  p.  138,  à! Aviciacus^  aujourd'hui  Avessac  (Mor- 
bihan). Un  autre  Aviciacus ^  situé  en  Bourgogne,  est  men- 
tionné dans  une  charte  de  721  (4). 

Camaracus ,  «  Cambrai ,  »  dont  on  a  écrit  au  moyen  âge 
le  nom  Cameracum  (5),  est  un  dérivé  de  Camarus,  surnom 
qu'on  a  lu  deux  fois  sur  les  murs  de  Poinpéi  (6),  C'est 
peut-être  une  variante  de  Ca/mmarusy  «  crabe,  »  c'est-à-dire 
un  sobriquet.  Cammarus  a  donné  le  nom  d'homme  dérivé 
Cammariitë  d'une  inscription  de  Capoue  (7);  et  de  Camma- 
rius  vient  Camariacus ,  nom  d'une  localité  où  l'abbaye  de 
Flavigny  (Côte-d'Or)  avait  des  vignes  au  neuvième  siècle , 
témoin  un  diplôme  de  l'empereur  Lothaire  (8) ,  nom  aussi 
d'une  villa  Camariacus  qui  appartenait ,  dans  le  même  siè- 
cle ,  à  l'église  du  Mans ,  comme  l'établit  un  diplôme  de 
Charlemagne  (9). 


(I)  Code,  livre  III,  titre  37,  1.  2. 

(2)/bi(f.,  livre  IV,  titre  38,  1.  2;  cf.  De-vit,  Totius  Utinitatis  onomM- 
ticon,  t.  I,  p.  591. 

(3)  Le  gentilice  Avitius  apparaît  dans  une  inscription  de  Lyon  (Boissieu, 
p.  303),  et  dans  des  inscriptions  d'Afrique,  C.  /.  L.,  VIII,  2560,  3450,  4485. 
Il  a  existé  aussi  ailleurs,  comme  le  prouve  le  dérivé  Avitianus.  C.  I,  L. ,  II, 
513,  1000,  3399,  3401  ;  III,  8371  ;  V,  5128,  etc. 

(4)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  324. 

(5)  Desjardins ,  Géographie  de  la.  Gaule  d'après  la  Table  de  Peutinger , 
pp.  88,  89. 

(6)  C.  /.  L.,  IV,  656,  2110. 

(7)  Ihid..  X,  2812. 

(8)  D.  Bouquet,  VIII,  377  B. 

(9)  Jbid.,  V,  769  A.  Cf.  Sickel,  AcU  Karolinorum,  t.  II,  p.  67,  n- 181. 


LIVRE  II.  CHAPITRE  I".  |  10. 
[unedonnacus ,  «  Aulnay  »  (Charente-Infërieure) ,  station 
laine  dont  il  est  question  à  la  fois  dans  l'Itinéraire  d'An- 
in  et  dans  la  Table  de  Peutinger  (1)  est  un  dérivé  d'-^u- 
o,  nom  de  potier  relevé  par  M.  l'abbé  Thédenat  sur  un 
jment  de  vase  trouvé  à  Reims  (2). 
'olonacus,  aujourd'hui  Sonnay  (Indre-et-Loire),  s'explique 

le  cognomen  Solo ,  -onis  qu'on  rencontre  dans  une 
cription  de  Milan  (3)  ;  Solo  peut  dériver  de  SoUos,  nom 
ilois  gravé  sur  une  monnaie  (4). 
Toilà  donc  six  noms  de  lieux  de  la  Gaule  romaine  qui 
ivent  certainement  de  surnoms.  Le  lecteur  en  verra 
jtres  exemples ,  bien  plus  nombreux ,  dans  la  suite  de 

ouvrage ,  quand  on  parlera  des  noms  de  lieu  formés 
cette  façon  qui  se  rencontrent  dans  les  documents  du 
yen  âge. 

)n  a  supposé,  avec  une  certaine  vraisemblance,  qa'An- 
nacus ,  aujourd'hui  Andernach  (5) ,  dérivait  également 
n  surnom  qui  serait  'Antunmts.  Ce  qui  parait  jus- 
îr  cette  hypothèse  ,  c'est  d'abord  l'existence  du  surnom 
'ullus  en  Espagne  (6),  en  Suisse  (7),  en  Italie  (8).  Martial, 
is  deux  épigrammes,  pleure  la  mort  d'une  jeune  fille 
lelée  Antulla  (9).  Le  thème  antu-  aurait  donné  deux  dé- 
Ss  :  Antullo-  et  'Antunno-,  dont  le  dernier  serait  cou- 
vé seulement  dans  Antunnacvs  (10).  Une  autre  preuve,  — 

I  Deajardins,  Géographie  de  la  Gaule  d'aprét  la   carte  de  Peulingtr, 
63;  Longnon,  Atlas  historique  de  ta  France,  texte,  1**  livraison,  p.  15. 
I  Bullelin  de  la  Société  des  antiquaires  de  France,  1884,  p.  135, 
I  C.  I.  t.,  V,  5946. 

I  A,  de  Barthélémy,  Reoue  celtique,  t.  X,  p.  34. 

.  LongnoD  a  admis  Solonacus  dans  sa  liste,  quoique   cette  localité  ne 
pas  mentionnée  avant  Grégoire  de  Tours,  Hisl.  Francorurn,  X,  31. 
)  Desjardins,  Géographie  de  la  Gauie  d'après  la   Table  de  Peutinger, 
4. 

I  C.  /.  L„  II,  1426,  1727,  2240.  Cf.  Antulla,  ibid.,  1305,  1401,  1713,  3986. 
I  Hommson,  Inscriptiones  Heloeticae ,  35. 
)  C.  I.  L.,  V.  6874. 
1  Episrammalôn,  lib.  I,  114,  tt6, 

&)  Voyez  Grammalica  cellica,  î*  édit..  p.  77i,  et  un  mémoire  de  Quiria 
)r  dans  le  Programme  du  Progv"""'*''  d'Aridernach,  pour  l'année  1873- 
,  Andernach,  i8T4,i,in~4*.  p.  9. 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITES.  173 

et  celle-ci  décisive ,  —  se  tire  du  nom  de  lieu  Antonnava 
(965)  ou  Ant(yn[n]avi  (1152),  aujourd'hui  Antonnaves  (Hau- 
tes-Alpes) (1) ,  qui  suppose  un  antique  Antunnava ,  Antu/nr- 
navij  dérivé  d'Antunnus,  à  Taide  du  sufiBxe  -avus  (2).  Voilà 
comment  quelquefois  un  texte  du  moyen  âge  peut  expliquer 
un  fait  antique. 

511-  —  Examen  de  la  question  de  savoir  s'il  y  a  eu  en  France 
des  noms  de  lieux  en  -§cus  dérivés  de  noms  communs. 

Il  est  incontestable  qu'à  l'époque  de  l'empire  romain  les 
régions  celtiques  soumises  à  la  domination  romaine  ont  eu 
des  noms  de  lieux  en  -dcus  dérivés  de  noms  d'hommes  ;  les 
noms  de  lieux  finissant  en  -idcus^  c'est-à-dire  où  le  suffixe 
'âcus  est  précédé  d'un  i,  viennent  ordinairement  de  genti- 
lices  ;  les  noms  de  lieux  qui  se  terminent  en  -dcu^  précédé 
d'une  consonne  viennent ,  en  règle  générale ,  de  surnoms , 
cognomina.  Les  courtes  listes  données  ci-dessus ,  de  noms 
géographiques  ayant  cette  double  origine  peuvent  se  déve- 
lopper considérablement  à  l'aide  des  documents  postérieurs 
à  la  chute  de  l'empire  romain.  On  en  verra  des  exemples  un 
peu  plus  loin,  quand  il  sera  question  des  noms  de  lieux  que 
fournissent  les  textes  du  moyen  âge ,  surtout  de  la  période 


(1)  Romans,  Dict.  top,  des  Hautes-Alpes^  p.  4. 

(2)  Parmi  les  huit  nom  de  lieux  en  -acus  do  Gaule  conservés  par  des 
documents  du  temps  de  l'empire  romain  et  mentionnés  plus  haut,  p.  150, 
deux  sont  laissés  sans  explication  :  Bagacus,  Cunnacus.  Cunnacus  peut 
être  corrigé  en  Connacus  qui  dériverait  de  Gonno[s],  nom  d'honune  gaulois 
dans  une  légende  monétaire  (A.  de  Barthélémy ,  Revue  celtique ,  X ,  30  ;  cf. 
De-vit,  OnomasticoTif  II,  397);  de  Connos  est  venu  le  gentilice  Gonnius 
(Mommscn,  Inscript,  helv.,  94;  AUmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  II,  263, 
306, 490,  491).  Bagacus  suppose  un  cognomen  Bagus  ;  Bagus  aurait  été  d'ori- 
gine gauloise  et  aurait  signifié  «  bataille  ;  »  comparez  le  vieil  irlandais  bàg, 
thème  bâga,  qui  a  ce  sens;  Bagus  aurait  été  synonyme  de  Catus  «  ba- 
taille, »  et  nom  d'homme.  Salomacus  {Itinéraire  d'Antonin ,  457) ,  THospi- 
talet,  conunune  de  Belis  (Landes),  peut  être  corrigé  en  Salo-magus;  cf. 
Sàlo-<iurum,  Soleure  (Suisse) ,  dont  le  nom  est  écrit  Salod.  dans  une  in- 
scription (Mommsen,  Inscript,  helvet,^  219);  Salo-magus  signifierait  et  champ 
de  Salos  '>  comme  Salo^durum  «  forteresse  de  Salos,  » 


174  LIVRB  II.  CHAPITRE  I-.  |  U. 

mérovingienne  et  de  la  période  carlovingienne.  Mais,  préa- 
lablement ,  on  peut  se  demander  si ,  parmi  les  noms  de 
lieux  en  -iacta,  ou  en  -acus  précédé  d'une  consonne,  dans 
les  pays  celtiques  soumis  à  i'empire  romain ,  il  n'y  a  pas 
des  dérivés  de  substantifs  autres  que  des  noms  d'hommes. 

L'étude  des  langues  néo-celtiques  pourrait  porter  à 
l'admettre.  L'irlandais  nous  offre  le  substantif  dristenach , 
glosant  le  latin  dumetum  dans  un  manuscrit  du  neuvième 
siècle  (1).  Dristenach,  signifiant  a  endroit  où  il  y  a  des  buis- 
sons épineux,  »  est  un  dérivé  du  thème  dristen,  dérivé  lui- 
même  de  dris ,  «  buisson  épineux,  "  qui  glose  vêpres  dans 
le  même  manuscrit  (2).  J'ignore  s'il  y  a  des  exemples  de 
ee  mot  dans  la  nomenclature  géographique  de  l'Irlande.  On 
y  a  signalé  six  exemples  du  nom  de  lieu  Drishaghaun  (3) , 
qui  aurait  été,  en  vieil  irlandais,  Drisachân,  c'est-à-dire  un 
diminutif  de  drisach,  lui-même  dérivé,  par  -ack  =  deo-s,  du 
Dom  commun  dris,  n  buisson  épineux,  n  Mais  l'antiquité 
de  Drisachân  n'est  pas  démontrée.  U  n'est  même  pas  prouvé 
que  dans  drisach  la  finale  -ach  soit  identique  au  suffixe  -ach 
du  moyen  irlandais  et  ne  tienne  pas  lieu  d'un  plus  ancien 
■eaoh  -ech,  ^  ico.  Cf.  Are-moricus. 

Mais  on  ne  peut  contester  qu'on  ne  doive  reconnaître  le 
suffixe  -ach  dans  le  nom  de  lieu  Tamnach  du  livre  d'Ar- 
magb,  neuvième  siècle  (4).  Tamnach  fait  au  datif  Tamnuch  (5) 
et  suppose  un  thème  Tamonâeo- ,  différent  de  celui  qui  a 
fourni  au  même  ms,  l'accusatif  Tamnich  (6)  =  *  Tamonicin, 
au  nominatif  singulier  '  Tamonica.  Les  deux  mots  sont 
dérivés  de  tamon ,  «  tronc  d'arbre ,  »  et  veulent  dire  «  en- 


Ci)  PritcUn  de  Saini-Gall,  n*  904,  p.  53  a,  édition  Ascoli,  p.  50. 
{1)  Prigcien  de  Saint-GRll,  p.  47  a,  édiUon  Atcoli,  p.  46. 

(3)  Joyce,  The  origin  and  history  o(  frtgh  nameg  of  places,  1883,  l.  II, 
p.  356. 

(4)  F*  15.  Voir  l'édition  donnée  par  le  R.  P.  Edmond  Hogan,  Artalecla 
Bollandiana,  t.  II,  p.  63,  I.  17, 

(5)  Livre  d'Armagh,  f  11,  Analecta  Botlsndiana,  t.  II,  p.  48,  I.  18. 

(6}  Liure  d'Armagh,  f>  17,  Analecls  Bollandtana,  t.  II,  p.  232,  1.  1.  Wliit- 
[«7  Stokes,  Gofdslica,  2*  édit.,  p.  85, 1.  15. 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  175 

droit  où  il  y  a  des  troncs  d'arbres  (1).  »  La  voyelle  de  la 
seconde  syllabe  de  tamon  est  tombée  dans  le  dérivé  ;  com- 
parez debthachj  «  dissident,  »  de  débuith^  a  dissentiment  ;  » 
caHhach ,  «  celui  qui  aime  (2) ,  »  de  carad ,  infinitif  de 
carim^  «  j'aime.  » 

Le  Chronicum  ScotoiMm,  monument  du  douzième  siè- 
cle, mais  composé  avec  des  documents  plus  anciens,  nous 
offre  le  nom  de  Flesccach ,  endroit  où  une  bataille  se  serait 
livrée  en  652  (3).  Ce  mot  veut  dire  aujourd'hui  «  champ  de 
blé  ;  »  il  est  dérivé  de  flesc ,  «  baguette ,  bâton ,  »  et  aussi 
«  gerbe  de  blé ,  »  et  veut  dire  littéralement  un  endroit  où 
il  y  a  soit  des  baguettes,  soit  des  gerbes  de  blé. 

Suivant  les  Annales  des  quatre  maîtres,  compilation  du 
dix-septième  siècle ,  mais  qui  est  souvent  la  reproduction 
de  vieilles  chroniques  monastiques ,  il  faut  dater  de  l'an- 
née 695  une  bataille  de  Crannach  ;  ce  nom ,  au  génitif 
Crandcha  =  *qrennacâs  (au  nominatif  qrennaca),  est  dérivé 
de  crann  =  *qrennos ,  «  arbre ,  »  et  veut  dire  «  endroit 
boisé.  »  C'est  l'irlandais  moderne  Crannagh  encore  usité  en 
Irlande  comme  nom  de  lieu  (4). 

Dans  le  même  ouvrage ,  mais  à  propos  d'événements  du 
seizième  siècle ,  on  trouve  mentionnés  deux  lieux  dits  du 
nom  de  Leacach;  ce  mot,  dérivé  de  lia,  génitif  liacc, 
«  pierre ,  »  veut  dire  «  pierreux ,  endroit  où  il  y  a  des 
pierres.  » 

Il  y  donc  en  Irlande  quelques  noms  de  lieux  en  -ach  = 
âco-s,  dérivés  de  noms  communs.  Mais  ils  sont  fort  rares , 
et  rien  ne  prouve  qu'ils  remontent  plus  haut  que  le  moyen 


(1)  M.  Jojce,  The  origin  and  hiatory  of  irish  natnes  of  pUces,  1. 1,  5*  éd., 
P-  44,  231,  prétend  que  ce  mot  yeut  dire  prairie.  C'est  la  doctrine  d*0*Do- 
novan  dans  son  supplément  an  dictionnaire  d'O'Reilly,  p.  708.  Ce  n'est  pas 
le  sens  étymologique. 

(2)  Gràmmatica  celHca,  2»  édit.,  p.  810. 

(3)  Chronicum  Scotorum,  édit.  Hennessy,  p.  94.  Cf.  O'Donoyan,  Annals 
ofthê  four  masters,  1851,  t.  I,  p.  264,  265. 

(4)io3rce,  The  origin  and  history  of  irish  names  ofplaceSf  1. 1,  5-  édit., 
p.  499. 


^:» 


« 


V. 

7i 


176  LIVRE  II.  CHAPITRE  I-.  {  11. 

âge.  Les  noms  de  lieu  de  la  Bretagne  continentale  donnent 
lieu  à  une  observation  analogue. 

Dans  la  Bretagne  continentale  on  trouve,  à  partir  du  on- 
zième siècle,  des  noms  de  lieu  dérivés  de  noms  communs 
à  Taide  du  suffixe  dcus.  Ce  sont  d*anciens  adjectifs.  Le  plus 
ancien  que  nous  puissions  citer  est  Les  Rattenuc  (1)  ou  Les 
Radenuc  (2),  «  château  ou  cour  de  la  fougeraie  ;  »  Rattenuc^ 
Radenuc  est  dérivé  de  raten^  raden^  «  fougère.  »  Au  dou- 
zième siècle ,  Terra  an  Prunuc  signifie  «  terre  de  la  pru- 
naie,  »  terre  de  Tendroit  qui  produit  des  prunes  :  on  dirait 
aujourd'hui  prunek.  Au  treizième  siècle ,  Banazlec ,  dérivé 
de  banazl^  «  genêt,  »  veut  dire  terrain  qui  produit  du  genêt, 
et  c'est  un  nom  de  lieu  dans  une  charte  de  l'année  1230 
aux  archives  des  Côtes-du-Nord  (3).  Quelermecy  «  la  Hous- 
saie,  »  dérivé  de  quelen,  «  houx,  »  apparaît  au  quatorzième 
siècle  (4). 

Le  Dictionnaire  topographique  du  Morbihan ,  par  M.  Ro- 
senzweig,  mentionne  onze  lieux  habités  du  nom  de  Quele- 
nec  ou  QuelleneCj  et  plusieurs  autres  formations  du  même 
genre,  comme  :  Avallecy  nom  de  hameau,  «  pommeraie,  » 
dérivé  A'avall ,  «  pomme  ;  »  —  une  ferme  dite  Le  Blevec , 
«  l'endroit  où  il  y  a  des  fleurs  ;  »  au  quinzième  siècle , 
blezvec  (5),  qui  vient  de  *blezvy  a  fleur,  »  usité  au  quinzième 
siècle  sous  la  forme  dérivée  blezvenn^  aujourd'hui  bleun  ;  — 
un  écart  dit  Bruguec,  «  endroit  où  il  y  a  des  bruyères,  »  de 
bruc,  bruQy  au  singulier  brugen,  «  bruyère;  »  —  un  village 
appelé  SperneCy  «  endroit  où  il  y  a  des  épines,  »  de  spem, 
«  épine.  » 

Drenek ,  nom  d'une  commune  du  Finistère ,  est  peut-être 
identique  à  l'adjectif  moderne  draenek,  dreinek,  drenek f 


(1)  Gartulaire  de  Landévennec,  publié  par  Le  Men  et  Ernault,  n*  10.  Do^ 
cuments  inédits.  Mélanges,  t.  V,  p.  555. 

(2)  /btd.,  n*  19.  Documents  inédits,  Mélanges,  t.  V,  p.  558. 

(3)  Revue  celtique,  t.  III,  p.  400. 

(4)  Morice,  Preuves,  t.  I,  col.  1214. 

(5)  C&tholicon  de  Lagadeuc,  édition  de  Le  Men,  p.  28. 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  177 

«  épineux,  »  de  draerij  drean^  dren,  «  épine,  »  et,  en  ce  cas, 
ce  nom  de  commune  signifie  «  lieu  où  il  y  a  des  épines.  » 

Mais,  en  général ,  il  ne  faut  pas  attribuer  une  étymolo- 
gie  topographique  aux  dérivés  en  ec  =  dçus  que  nous 
ofiFrent  en  Bretagne  les  noms  do  lieu  un  peu  anciens.  Ces 
dérivés  sont,  la  plupart  du  temps,  de  vieux  noms  d'hom- 
mes. Ainsi  Beuzec,  nom  de  trois  communes  du  départe- 
ment du  Finistère,  n'est  pas  un  dérivé  de  beuz  «  buis.  » 
De  beuz^  «  buis,  »  le  dérivé  usité  en  breton  est  d'origine 
latine  :  c'est  au  treizième  siècle  beuzid;  au  onzième  dans 
le  Cartulaire  de  Landévennec,  busit,  mot  identique  au  bas 
latin  buœituin^  plus  anciennement  buxetum,  Beuzec,  au 
onzième  siècle  vicarium  Buduc,  Les  Buduc  (c'est-à-dire 
«  vicairie,  cour  de  Buduc  »)  dans  le  Cartulaire  de  Landé^ 
vennecj  est  un  nom  d'homme  signifiant  «  victorieux,  » 
variante  Budoc  =  *  Bôdi-âcus.  Goxiezec,  nom  d'une  commune 
du  Finistère,  au  onzième  siècle  vicarium  Woeduc,  «  vicairie 
de  Woeduc,  »  est  encore  un  nom  d'homme  (1). 

Au  neuvième  siècle,  tous  les  noms  formés  à  l'aide  du 
sulBxe  'âeusj  qu'on  trouve  dans  la  Bretagne  française,  sont 
des  noms  d'homme,  par  exemple  :  Dubroc,  «  aqueux,  » 
=  *  DubrdcuSf  larnoc,  «  ferreux,  =  *  Isarnâcus,  »  etc.  Compa- 
rez chez  César  les  noms  d'hommes  qui  se  terminent  par  le 
même  suffixe  :  Divitiacus,  Dumnacus,  Valetiacus,  et  en  Ir- 
lande, au  neuvième  siècle,  dans  le  Livre  d'Armagh,  les 
noms  d'hommes  analogues,  tels  que  Camulacus,  Lochar- 
uach ,  Senachus  (2). 

Y  avait-il  dans  la  Gaule  transalpine,  au  temps  de  l'em- 
pire romain ,  des  noms  de  lieux  formés  comme  Dubroc  et 
Isarnoc,  en  plaçant  le  suffice  -dctw  à  la  suite  d'un  nom  com- 
mun désignant  les  objets  qui  se  trouvaient  dans  la  localité 
dénommée  à  l'aide  du  dérivé  ainsi  créé  ?  Le  fait  est  pos- 


(1)  Sur  les  noms  de  lieux  bretons  en  -ec,  voyez  Grammsitica  ceiftca,  2*  éd., 
p.  850.  Documents  inédits,  Mélanges,  t.  V,  p.  581,  582,  599.  (Table  du  Car- 
tulaire de  Lajidévennec,  par  M.  Ernault.) 

C2)  V^iUey  Stokes,  The  tripartite  life,  p.  304,  320. 

12 


178  LIVRE  II.  CHAPITRE  I-.  {  12. 

sible,  mais  non  prouvé.  Dans  la  Gaule  cisalpine,  Bêndcus 
pour  BennâcuSy  dérive  de  benUy  m  corne,  promontoire  » 
(cf.  p.  135).  Je  ne  puis  indiquer  un  nom  de  lieu  formé 
de  la  même  façon  dans  la  Gaule  transalpine.  Les  noms  de 
lieux  qui  offrent  la  désinence  -iâcus^  et  qu'on  peut  expli- 
quer, sont  dérivés  de  gentilices  ou  exceptionnellement  de 
surnoms  en  ius,  comme  Mercurius  ;  les  noms  de  lieu  où  la 
désinence  -âcus  se  trouve  immédiatement  précédée  d'une 
consonne ,  dérivent  ou  de  surnoms  qui  ont  été  employés 
comme  noms  pérégrins  par  des  individus  dépourvus  de 
gentilices ,  ou  exceptionnellement  de  gentilices  qui  ne  se 
terminaient  pas  en  -ius, 

§  12.  —  Etude  sur  divers  noms  de  lieu  d'origine  celtique  qui 
n'offrent  pas  le  suffixe  -âcus  et  qui  apparaissent  pour  la 
première  fois  dans  les  documents  du  moyen  âge  (1). 

Les  résultats  acquis  par  Tétude  des  documents  contem- 
porains de  Tempire  romain  sont  justifiés  par  Texamen  des 
monuments  postérieurs  si  Ton  a  soin  d'y  faire  la  distinction 
entre  les  noms  de  lieux  dont  la  création  remonte  à  la  do- 
mination romaine,  quelquefois  plus  haut,  et  ceux  qui  sont 
le  résultat  soit  do  la  conquête  franque,  soit  de  tout  autre 
fait  nouveau.  Je  dis  les  noms  de  lieux  qui  remontent  à  la 
conquête  romaine  et  quelquefois  plus  haut  ;  dans  les  textes 
mérovingiens,  carlovingiens  et  même  à  des  dates  bien  pos- 
térieures, on  voit  quelquefois  apparaître  pour  la  première 
fois  des  noms  de  lieux  gaulois  non  mentionnés  jusque-là. 

Certains  ont  un  sens  topographique  (cf.  p.  151 ,  152). 
Tels  sont  :  Acaunum ,  avec  affaiblissement  de  la  sourde  en 
moyenne  Agaunum,  qui  veut  dire  «  rocher,  »  aujourd'hui 
Saint-Maurice-en-Valais  (2);  Duèrum,  «  eau,  »  aujourd'hui 
Douvres  (Seine-et-Marne),  arrondissement  de  Meaux,  can- 

(1)  Comparez  les  §  6  et  7,  p.  151-155. 

(2)  Voyez  les  textes  réunis  par  M.  Longnon,  La  Gaule  au  sixième  siècle, 
p.  232.  L'orthographe  Ac&uno  avec  un  c  se  trouve  dans  une  monnaie  mé- 
rovingienne (A.  de  Barthélémy,  Bibl.  de  l'Ecole  des  Chartes,  t.  XXVI,  p.  450, 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  179 

ton  de  Lagny,  commune  de  Torcy  (1).  Canto-benniexAs^  nom 
d'une  montagne  d'Auvergne,  le  mont  Chanturgue,  près  de 
Clermont-Ferrand ,  a  été  aussi  le  nom  d'une  forteresse,  et 
plus  tard  d'un  monastère  dont  parle  Grégoire  de  Tours  (2). 
CanUhbennicus  est  dérivé  d'un  composé  Canto-benno-^  dont 
le  second  terme  veut  dire  sommet,  littéralement  corne, 
et  dont  le  premier  nous  offre  le  mot  d*où  dérive  probable- 
ment Cantiumy  nom  du  pays  de  Kent  chez  César.  On  sup- 
pose que  ce  mot  canto-  veut  dire  «  blanc,  »  mais  cela  n'est 
pas  encore  prouvé. 

Quelques-uns  de  ces  noms  de  lieux  s'expliquent  par  la 
religion  (cf.  p.  152, 153,  154).  Du  nom  divin  Belenos  dérive 
le  terme  géographique  Mons  Belenatensis,  Grégoire  de  Tours 
rapporte  qu'un  jour  saint  Martin  passa  dans  cet  endroit  ; 
c'est,  nous  apprend-il,  une  montagne  du  haut  de  laquelle 
on  voyait  le  vicus  Ricomagensis ^  aujourd'hui  Riom  (Puy- 
de-Dôme).  La  villa  Belenatensis^  dont  parle  un  diplôme  de 
Pépin  le  Bref,  devait  son  nom  à  cette  montagne,  c'est 
aujourd'hui  Saint-Bonnet  (Puy-de-Dôme)  (3).  Le  BelenO" 
Castro  d'une  monnaie  mérovingienne  (4) ,  la  Belna-villa  de 
deux  diplômes  carlovingiens  des  années  832  et  862  (5), 
aujourd'hui  Beaune-la-Rolande  (Loiret),  nous  rappellent 
le  souvenir  de  la  même  divinité,  à  moins  qu'il  ne  s'agisse 
d'un  homme  qui  aurait  porté  le  nom  gaulois  de  Belenos  ou 
Belinos  (6). 


et  dans  la  chronique  de  Marius,  chez  D.  Bouquet,  t.  II,  p.  14  d.  L'ortho- 
graphe plus  récente,  Agaunum  par  un  g,  est  ceUe  de  Grégoire  de  Tours. 
Quant  au  sens,  comparez  le  grec  àxôw;,  «  pierre  à  aiguiser,  »  et  le  sanscrit 
açan  a  pierre,  rocher.  » 

(1)  Diplôme  de  854;  chez  Tardif,  Monuments  historiques^  p.  106,  col.  1. 

(2)  Grégoire  de  Tours,  Historia  Francorum,  II,  21,  édit.  Arndt,  p.  84, 
I.  23.  Cf.  Longnon,  La  Gaule  au  sixième  siècle,  p.  497. 

(3)  Longnon,  La  Gaule  au  sixième  siècle,  p.  491,  492. 

(4)  A.  do  Barthélémy,  dans  la  Bibliothèque  de  l'Ecole  des  Chartes,  t.  XXVI, 
p.  452.  Quichcrat,  De  la  formation  française  des  anciens  noms  de  lieux,  p.  97; 
cf.  ci-dessous,  p.  181,  note  1. 

(5)  Tardif,  Monuments  historiques,  n*  123,  p.  85,  et  n*  186,  p.  119. 

{€)  Bellinus  dans  les  inscriptions  :  Mommsen,  Inscriptiones  helveticae, 
n-  289;  C.  /.  L.,  t.  V,  n-  8122,  3  ;  t.  VII,  n-  430. 


180  LIVRE  II.  CHAPITRE  I".  {  12. 

Le  dieu  était  connu  dans  plusieurs  pays  celtiques.  Ter- 
tuUien,  dans  son  Apologétique,  écrite  en  199,  ditqueBelenus 
était  la  divinité  principale  des  habitants  du  Norique  (1).  On 
sait  qu'il  était  aussi  adoré  dans  la  ville  d'Aquilée.  En  238, 
les  habitants,  assiégés  par  l'empereur  Maximin,  puisèrent 
le  courage  de  résister  dans  la  croyance  à  la  protection  du 
dieu  Belenus  ou  Belinus,  qu'ils  assimilaient  à  Apollon,  et 
qui  leur  avait,  disait-on,  promis  la  victoire.  Le  succès  cou- 
ronna leur  confiance.  Les  soldats  de  Maximin  découragés 
coupèrent  la  tête  à  leur  prince  et  levèrent  le  siège  (2).  On 
a  recueilli  dans  Aquilée  vingt-deux  inscriptions  antiques 
en  l'honneur  du  dieu  Belenus  ou  Belinus  (3),  et  dans  six 
d'entre  elles,  son  nom  apparaît  comme  épithète  d'Apol- 
lon (4)  ;  une  est  une  dédicace  par  les  empereurs  Dioclétien 
et  Maximin  (286-305)  (5).  Deux  de  ces  inscriptions  rappel- 
lent qu'une  fontaine  lui  était  consacrée  (6).  Il  avait  non 
loin  de  là  un  temple  à  Zuglio,  l'ancien  Julium  Carnicum  (7). 

Son  culte  avait  pénétré  en  Gaule.  Ausone  raconte  la 
chance  heureuse  d'un  certain  Phœbicius,  Armoricain  de 
naissance,  comptant  des  druides  parmi  ses  ancêtres,  qui  fut 
d'abord  sacristain  de  Belenus;  mais  c'était  au  quatrième 
siècle  :  le  nombre  des  adorateurs  des  dieux  et  leur  libéra- 
lité avait  diminué  ;  la  place  était  peu  lucrative  ;  Phœbicius 
obtint,  ce  qui  valait  mieux,  une  chaire  à  l'école  de  Bor- 
deaux (8).  Le  nom  du  Dieu  Belenus  a  été  lu  dernièrement 
dans  une  inscription  de  Nimes  (9). 

Une  des  montagnes  qui  dominent  Riom  était  dédiée  à 
ce  dieu  comme  la  fontaine  sacrée  d'Aquilée,  et  cette  mon- 


(1)  Tertullien,  Apolog,^  c.  24;  Ad  naftones,  liv.II,  c.8.  Ed.  Migne,  1, 419,595. 

(2)  Capitolin,  Les  deux  Af aximtns,  c.  22.  Cf.  Hérodien,  VIII ,  3. 

(3)  C.  /.  L.,  V,  n"  732-735,  737-741,  743-755. 

(4)  Ibid.,  V,  n"  732,  737,  741,  748,  749.  753. 

(5)  Ibid.,  v,  n-  732. 

(6)  /5id.,  v,  n-  754,  755. 

(7)  Ibid.,  V,  n*  1829. 

(8)  Ausone,  Prof  essores  t  II,  vers  16-25.  Edit.  Schenkl,  p.  63-64. 

(9)  BtiXtivoç,  c.  /.  L.,  XII,  5693,  12. 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  181 

tagne,  au  temps  de  Grégoire  de  Tours,  c'est-à-dire  au 
sixième  siècle,  s'appelait  encore  Mons  Belenatensis ,  Belena- 
tensis  est  dérivé  de  Belenatis  ou  Belenatus,  dérivé  lui-même 
(le  Belentis.  D'autres  localités  portaient  simplement  le  nom 
de  ce  dieu  sans  suffixe  de  dérivation  (1). 

Souvent  les  noms  de  lieux  ont  été  divinisés  :  récipro- 
quement certaines  localités  ont  pris  des  noms  de  divinités. 
En  Grande-Bretagne  une  baie  portait,  suivant  Ptolémée,  le 
nom  de  Belisa/ma  (2).  Or,  Belisama  est  une  déesse  assimilée 
à  Minerve  à  Tépoque  romaine,  et  qui  fut  l'objet  d'un  culte 
à  Conserans  (Ariège)  (3),  et  à  Vaison  (Vaucluse)  (4).  Le  nom 
de  Belisama  doit  être  reconnu  dans  ceux  de  Belisma  et 
de  Belesmay  portés  l'un  par  Blismes  (Nièvre) ,  en  1287  (5)  ; 
l'autre  par  Blesmes  (Marne),  dans  le  siècle  précédent  (6). 

Quelques  noms  de  lieux  habités  qu'on  ne  trouve  pas  dans 
les  textes  avant  le  moyen  âge,  sont  des  composés  gaulois  : 
le  premier  terme  est  l'épithéte  considérée  comme  caractéris- 
tique (152, 154)  ;  exemple  :  1®  Cambidonno  pour  Cambo-dunum, 
«  courbe  forteresse,  »  dans  la  légende  d'une  monnaie  méro- 
vingienne (7),  nom  de  lieu  qui,  à  l'époque  romaine,  se  trouve 
en  Grande-Bretagne  et  en  Rhétie  et  qui ,  dans  la  légende 
monétaire,  désignerait  Cambon  (Loire-Inférieure);  2®  *  Cam- 
bidubro'j  <c  la  courbe  eau,  »  d'où  vient  le  nom  du  Cambi- 
dobrense  monasterium  de  Grégoire  de  Tours  construit  pro- 
bablement sur  les  ruines  d'un  établissement  plus  ancien  (8). 


(1)  Chez  Ausone,  dans  le  passage  auquel  renvoie»  p.  180,  la  note  8,  le  second 
e  de  Belenns  est  long.  J.  Quîchcrat  en  conclut  que  cet  e  était  accentué ,  et 
que,  par  conséquent,  le  nom  de  Heu  Belna  «  Beauno  »  ne  peut  être  un  fé- 
minin du  nom  divin  Belenus.  U  a  eu  tort  d'attribuer  à  l'accent  gaulois  les 
lois  de  l'accent  latin. 

(2)  Ptolémée,  II,  c.  3,  g  2,  BikiaayM  etoxvaic,  Edit.  de  Charles  Mûner,  t.  I, 
p.  84. 

(3)  Orclli,  n-  1431,  1969. 

(4)  Inscription  gauloise  de  Vaison  au  musée  d'Avignon. 

(5)  Soultrait,  Dictionnaire  topographique  de  la  Nièvre^  p.  16. 

(6)  E.  de  Barthélémy,  Diocèse  ancien  de  Chàlons-sur-Marne ,  t.  II,  p.  91. 

(7)  A.  de  Barthélémy,  dansla  Bibliothèque  de  l'Ecole  des  Chartes^  t.  XXVI, 
p.  453. 

(8)  Longnon,  La  Gaule  au  sixième  siècle^  p.  496,  497. 


182  LIVRE  II.  CHAPITRE  I".  {  12. 

Ces  noms  semblent  rappeler  Tépoque  où  la  langue  gau- 
loise régnait  en  maîtresse  dans  notre  patrie.  D'autres  peu- 
vent dater  plutôt  du  temps  où  le  gaulois  y  était  en  lutte 
avec  le  latin.  Tels  sont  les  composés  suivants  dont  le 
premier  terme  est  un  nom  propre  d'homme. 

On  a  déjà  parlé,  page  148,  de  deux  Iciodwum,  Tun  en 
Touraine,  aujourd'hui  Izeures  (Indre-et-Loire)  (1),  l'autre 
en  Auvergne ,  aujourd'hui  Issoire  (Puy-de-Dôme)  (2).  Icio- 
durv/m  veut  dire  forteresse  dUccius,  Iccius  est  un  nom 
d'homme  gaulois  et  romain. 

Cisomagus  où ,  suivant  Grégoire  de  Tours ,  saint  Martin 
bâtit  une  église  (3).  C'est  probablement  aujourd'hui  Ciran- 
la-Latte  (Indre-et-Loire)  (4).  Ciso-magus  veut  dire  champ 
de  Cisus  ou  CissiLs.  Cùssils  est  un  surnom  gallo-romain,  pré- 
cédemment nom  d'esclave  dans  l'inscription  d'Aquilée  ainsi 
conçue  :  Silvano  Aug[usto]  in  hoiiore[m]  M.  Trosi  Daphni  se- 
viri  et  M.  Trosi  Cissi  lib[erti]  (5).  L'affranchi  Jf.  Trosius  Os- 
5ti5,  d'abord  esclave  sous  le  nom  de  Cissus^  avait  emprunté 
le  prénom  et  le  nom  de  son  maître.  Dans  une  inscription 
de  Milan,  c'est  le  contraire  :  Q.  Lucilius  Ossias  est  un  pa- 
tron auquel  Pasicrates,  son  esclave,  doit  à  la  fois  la  liberté, 
un  prénom  et  un  nom  (6).  Enfin,  dans  le  musée  du  mont 
Saint-Bernard  se  trouve  une  tablette  de  cuivre,  sur  laquelle 
un  Gallo-Romain  a  fait  écrire  ses  noms  pour  les  laisser  en 
souvenir  à  Jupiter  Poeninus,  et  ses  noms  sont  T.  Annius 
Cissus  (7).  La  variante  Cissa  nous  est  fournie  par  le  génitif 

(1)  Historia  Fr&ncorum,  livre  VI,  c.  12  ;  livre  X,  c.  31.  in  Gloria  Màrty- 
rum,  c.  58.  édit.  Arndt  et  Krusch,  p.  257, 1.  11  ;  p.  444,  1.  20;  p.  528, 1.  15. 
Cf.  Longnon,  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  stècie,  p.  273. 

(2)  In  gloria  confessorum ,  c.  30.  Edition  Arndt  et  Krusch,  p.  766, 1.  4-5. 
Cf.  Longnon,  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle^  p.  499,  500. 

(3)  Grégoire  de  Tours,  Historia  Francorum,\h  X,  c.  31  ;  éd.  Arndt,  p.  444, 
1.  4. 

(4)  Longnon,  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle,  p.  269,  270. 

(5)  C.  /.  L.,  V,  830. 

(6)  Ibid,,  V,  6034. 

(7)  Ibid.^  v,  6863.  On  peut  citer  encore  P.  Cornélius  Cissus  y  C.  I.  L., 
IX,  3626,  et  la  signature  L.  Publii  Cissi,  C.  I.  L.,  X,  8509,  334.  Il  j  a  enfin 
quatre  exemples  de  Cissus  dans  les  inscriptions  pariétaires  de  Pompéi. 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  183 

Cissoe^  du  nom  du  père  dUbliomarius^  dans  une  inscription 
d'Alsace  (1).  L'existence  d'une  orthographe  Cisus  avec  une 
seule  s  est  prouvée  par  plusieurs  dérivés.  Tel  est  Cisius, 
connu  par  la  signature  C.  Cisi  sur  un  vase  (2)  et  d'où  vien- 
nent :  1®  Cisionig,^  nom  de  femme  dans  une  inscription  de 
Noie  (3)  ;  2^  Cisiacus^  un  des  surnoms  d'un  procurateur  im- 
périal, prolégat  de  la  province  de  Rhétie,  de  Vindélicie  et 
de  la  Vallis  Poenina ,  dont  les  noms  ont  été  conservés  par 
une  inscription  de  Vérone  :  Q,  Caicilius  Cisiacus  Septicius 
Pica  Caicilianus  (4). 

C'est  l'orthographe  par  une  seule  s,  qui  se  retrouve  chez 
Grégoire  de  Tours  dans  le  nom  de  lieu  Cisomagus^  «  champ 
de  Cisus.  » 

La  vie  de  sainte  Geneviève  nous  apprend  que  cette  vierge 
célèbre  naquit  à  Nemetodorum,  près  de  Paris;  c'était  au 
cinquième  siècle.  Grégoire  de  Tours  parle  aussi  de  ce  vil- 
lage et  l'appelle  Nemptodurus  :  Gontran  y  fit  baptiser,  en 
591,  Clotaire  II,  son  neveu,  fils  de  Chilpéric  (5).  C'est  au- 
jourd'hui Nanterre  (Seine)  (6).  La  forme  la  plus  ancienne 
du  nom  de  cette  localité  a  dû  être  *  Nemeto-durum,  dont  le 
sens  est  «  forteresse  de  Nemetus  ou  Nemetos.  »  L'adjectif 
gaulois  *  nemetos,  «  sacré,  »  employé  au  neutre,  signifiait 
a  temple  »  ;  au  masculin ,  il  était  employé  comme  nom 
d'homme  ;  il  a  persisté  avec  cette  valeur  en  gallois,  au 
moyen  âge,  sous  les  formes  Nimet  (7)  et  Nevet  (8).  Nemeta^ 
cum,  nom  de  la  ville  d'Arras  à  l'époque  romaine,  semble 
être  aussi  un  dérivé  du  nom  d'homme  Nemetos, 

(1)  Brambach,  1876. 
m  C.  J.  L.,  X,  8056,  92. 

(3)  Ibid.,  X,  1266. 

(4)  Ibid.,  V,  3936. 

(5)  Grégoire  de  Tours,  Historia  Francorurrif  X,  28,  édition  Arndt,  p.  439, 
1.23. 

(6]  Longaon,  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle^  p.  359. 

(7)  Chronique  galloise  du  dixième  siècle  conservée  dans  le  manuscrit  du 
Musée  britannique ,  Harleian ,  3859.  Fragment  publié  par  Aneurin  Owen , 
Ancient  laws  and  institutes  of  WaleSy  p.  5. 

(8)  Mabinogion,  édition  de  Charlotte  Guest,  t.  II,  p.  243.  Cf.  Grammatica 
celtica,  2*  édit,  p.  85. 


184  LIVRE  II.  CHAPITRE  I-'.  g  12. 

*  Isarnodurum^  aujourd'hui  Isernore  (Ain)  (1),  apparaît 
dans  la  légende  d'une  monnaie  mérovingienne  avec  Tor- 
thographe  Isernodero  (2).  Dans  une  vie  de  saint  Oyand, 
écrite  au  sixième  siècle ,  l'orthographe  suivie  est  au  géni- 
tif Isarnodori  (3).  Saint  Oyand  naquit  près  de  ce  vicus,  au 
milieu  du  cinquième  siècle.  Le  nom  de  ce  vicus  veut  dire 
c(  forteresse  dlsamm.  » 

Nous  ne  rencontrons  pas  le  nom  d'homme  Isamus  dans 
les  documents  de  l'époque  romaine.  Mais  il  apparaît  au 
neuvième  siècle  5  sous  la  forme  bretonne  Hoiarn,  dans  six 
chartes  du  Cartulaire  de  Redon ,  il  désigne  un  témoin  dont 
la  qualité  n'est  pas  désignée  dans  cinq  de  ces  chartes  (4^  ; 
dans  une  autre ,  Hoiarn  est,  dit  le  texte  latin,  un  t  tyran- 
nus,  »  c'est-à-dire  un  machtiern^  sorte  de  magistrat  (5). 
Dans  le  breton  du  neuvième  siècle,  hoiarn  veut  dire  «  fer.  » 
En  Irlande,  l'équivalent  dialectal  de  hoiarn  est  iarn^  qui 
signifie  aussi  «  fer;  »  le  diminutif  larndn  est  un  nom 
d'homme  irlandais  au  dixième  siècle  :  un  personnage  qui  le 
porte  est  tué  par  trahison  en  1003  (6).  Ainsi,  dans  les  deux 
branches  entre  lesquelles  se  divisent  les  dialectes  néocelti- 
ques, Tusage  a  existé  d'employer  comme  nom  d'homme  le 
nom  commun  qui  veut  dire  «  fer.  »  On  trouve  des  exem- 
ples analogues,  au  moyen  âge,  dans  la  région  sud-est  de  la 
Gaule,  à  laquelle  appartient  Isernore  :  au  dixième  siècle, 
il  y  eut  à  Grenoble  un  évéque  nommé  Isamus  (7)  ;  Isamus 
fut  aussi,  au  siècle  suivant,  le  nom  d'un  abbé  de  Saint-Vic- 
tor de  Marseille  (8)  ;  vers  le  môme  temps ,  on  rencontre  le 

(1)  Quicherat,  De  la,  formation  française  des  anciens  noms  de  Heu,  p.  49. 

(2)  A.  de  Barthélémy,  dans  la  Bibliothèque  de  l'Ecole  des  chartes^  t.  XXVI, 
p.  457. 

(3)  Dom  Bouquet,  t.  III,  p.  396  d. 

(4)  Cartulaire  de  Redon,  p.  51,  104,  106,  108,  114. 

(5)  Ibid.,  p.  207. 

(6)  Annales  des  quatre  maîtres,  édit.  d*0*Donovan,  1851,  t.  II,  p.  748-750. 

(7)  Des  chartes  de  lui ,  datées  de  950  et  de  976,  ont  été  publiées  dans  le 
Cartulaire  de  Saint-Hugues  de  Grenoble,  p.  19  et  26. 

(8)  Des  chartes  de  lui,  datées  des  années  1031  à  1044,  ont  été  publiées  dans 
le  Cartulaire  de  Saint-Victor  de  Marseille,  tome  I,  n^  430,  564;  tome  II, 
n"  659,  685. 


ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS.  185 

nom  d'homme  Isarn  dans  d'autres  parties  de  la  France  (1). 
L'antiquité  de  ce  nom  résulte  de  son  dérivé  Isaminu$ 
inscrit,  a  l'époque  romaine,  sur  six  vases  d'étain  trouvés 
en  Angleterre  (2)  ;  Isseminus,  avec  une  légère  variante  d'or- 
thographe, est  au  cinquième  siècle  le  nom  d'un  compagnon 
de  saint  Patrice  (3),  son  collaborateur  pour  la  rédaction 
d'un  texte  canonique. 

Le  biographe  de  saint  Oyand,  écrivant  au  sixième  siècle, 
afcme  qu'en  langue  gauloise  le  sens  àUsarnodorum  est 
«  porte  de  fer  (4).  »  Il  commet  en  cela  deux  erreurs  :  Isar- 
nos,  employé  comme  nom  commun,  a  dû,  en  effet,  vouloir 
dire  «  fer  »  en  gaulois  ;  mais  ce  mot  est  ici  employé  comme 
nom  propre  d'homme.  Quant  à  dorum,  c'est  une  orthogra- 
phe de  basse  époque  pour  le  classique  durumiy  «  forte- 
resse, »  avec  lequel  le  breton  dor^  «  porte ,  »  et  l'irlandais 
dorus,  même  sens,  n'ont  aucun  rapport.  Il  est,  du  reste,  à 
craindre  que  l'auteur  de  la  vie  de  saint  Oyand  ne  connût 
la  langue  gauloise  beaucoup  moins  qu'il  le  prétend.  C'était 
aux  langues  des  Burgundes  et  des  Francs  qu'il  empruntait 
probablement  sa  science.  On  sait  combien  ces  langues 
étaient  prochainement  apparentées  au  gothique  ;  or ,  les 
deux  mots  dont  il  s'agit  étaient  du  nombre  des  quelques 
expressions  qui  appartenaient  en  commun  aux  Celtes  et  aux 
Goths.  «  Porte,  »  en  gothique,  s'appelait  daur  :  prononcez 
dor]  a  fer  »  s'appelait  eisam  :  prononcez  isarn  (5).  La  lan- 


(1)  Inseription  de  Minerve  (Hérault) ,  chartes  du  dixième  siècle  dans  les 
preuves  de  VHistoire  de  Languedoc  ;  Le  Blant ,  Inscriptions  chrétiennes , 
t.  n,  p.  444.  Voyez  aussi  les  exemples  du  nom  d'homme  Jsarnus  réunis  par 
Gustave  Desjardins,  C&rtulaire  àe  l'abbaye  de  Conques,  p.  474,  col.  1. 

(2)  C.  /.  L.,  VII,  1270. 

(3)  Arthur  West  Haddan  and  William  Stubbs,  CouncHs  and  ecclesiastical 
doccuments  relating  to  Great  Britain  and  Ireland,  t.  II,  p.  328. 

(4)  c  Haud  longe  a  yico  cui  vestusta  paganitas ,  ob  celebritatem  clausu- 
ramqae  fortissimam  supcrstitiosissimi  templi,  gallica  lingua /sarnodort ,  id 
est  [errei  ostii,  indidit  nomen  »  (Dom  Bouquet,  t.  III,  p.  396  c,  d.). 

(5)  L'orthographe  dor  et  isarn  est  celle  du  vieux  saxon.  Voyez  Oskar 
Schade,  Alt  deutsches  Wœrterbuch ,  t.  II ,  p.  946  au  mot  tor,  et  t.  I,  p.  458 
ftu  mot  isarn. 


186  LIVRE  II.  CHAPITRE  I-'.  {  12. 

gue  gauloise,  gallica  lingua^  du  biographe  parait  donc  avoir 
été  tout  simplement  le  burgunde  ou  le  francique. 

Quoi  qu'il  en  soit,  Icio-durum^  Nemeto-durum ,  Isamo-dumm 
et  Ciso-magus  sont  plus  anciens  que  les  textes  du  moyen 
âge  par  lesquels  ils  sont  parvenus  jusqu'à  nous.  Ils  ont  été 
contemporains  de  l'empire  romain ,  les  trois  premiers 
comme  Augn^sto-dururriy  aujourd'hui  Bayeux,  le  dernier 
comme  Augusto-magus  et  Caesaro-magm,  aujourd'hui  Senlis 
et  Beauvais.  Les  trois  premiers  remontent  peut-être  même 
plus  haut.  Les  Gaulois  ont  dû  donner  leur  nom  à  des  ha- 
bitations avant  de  le  donner  à  des  champs.  Admageto-briga, 
où,  comme  César  nous  l'apprend,  Arioviste  battit  les  Gau- 
lois soixante  et  un  ans  avant  notre  ère,  peut  tirer  son  nom 
d'un  ancien  propriétaire  et  signifier  «  château  d'Admage- 
tos  (1).  »  Rien  ne  s'oppose  à  ce  que  Icio-durum^  Nemeto-dU" 
rum,  IsarnO'durum  aient  été  contemporains  d'Arioviste. 

Mais  il  n'y  a  pas  de  preuve  que  ces  trois  noms  soient  an- 
térieurs à  l'empire  romain.  On  a,  sous  l'empire  romain, 
continué  à  créer  des  noms  de  lieux  composés  dont  -durum- 
était  le  second  terme.  Tel  est  Albio-durum ,  écrit  Albiode- 
rum  dans  la  Chronique  dite  de  Frédégaire  (2)  ;  le  premier 
terme  de  ce  nom  de  lieu  est  le  gentilice  romain  Albm 
qui  sera  étudié  p.  190.  Tel  est  encore  Alio-durumj  d'où  le 
nom  du  pagus  Aliodremis ,  probablement  au  diocèse  de 
Meaux  en  632  (3)  ;  le  premier  terme  A'AliO'dumm  est  un 
gentilice  romain  dont  il  sera  question  p.  192. 

Ainsi,  les  textes  du  moyen  âge  peuvent  servir  à  com- 
pléter diverses  catégories  de  noms  de  lieux  gaulois  distin- 
gués d'après  les  textes  antérieurs  au  moyen  âge ,  dans  les 
§  6  et  7  de  ce  chapitre  (ci-dessus,  p.  151-155). 


(1)  Mommsen»  Rœmische  Geschichte,  6»  édit.,  t.  III,  p.  247,  note;  cf.  De 
bello  gallicOf  l,  31. 

(2)  Frédégaire,  1.  IV,  c.  83,  éd.  Krusch,  p.  163,  1.  18. 

(3)  Pardessus,  Diplom.,  t.  II,  p.  16. 


CHAPITRE  II. 


EXEMPLES  EN  FRANCE,  AU  MOYEN  AGE,  DE  NOMS  DE  «  FUNDI  » 
FORMÉS  PLUS  ANCIENNEMENT  A  l'aIDE  DE  GENTILICES  RO- 
MAINS EN  'ius  ET  DU  SUFFIXE  -aCUS  (1). 

AcHiNiAGAS ,  pour  Aquiuiacas  (sous-entendu  villas  ou  do- 
mu$) ,  est  un  nom  de  lieu  mentionné  dans  un  diplôme  de 
Charlemagne  remontant  à  Tannée  779  (2). 

Ce  nom  dérive  d'Aquinius.  Aquinius  est  un  gentilice 
romain,  le  nom,  par  exemple,  d'un  poète  contemporain 
de  Cicéron  et  mentionné  par  Catulle  (3).  Il  a  été  porté 
aussi  par  plusieurs  personnages  qui  figurent  dans  les  ins- 
criptions, une  notamment  de  Lyon  (4).  Acigné,  nom  d'une 
commune  de  l'IUe-et-Vilaine ,  suppose  la  forme  gallo-ro- 
maine Aquiniacus  ou  sa  variante  Aciniacus. 

AciACus,  dans  un  diplôme  faux  de  Childebert  I",  attribué 
à  l'année  541  (5),  désigne  une  localité  du  nom  d'Assé 
au  diocèse  du  Mans,  soit  Assé-le-Bérenger  (Mayenne),  soit 


(1)  La  première  partie  de  ce  chapitre,  lettres  A  et  B,  a  paru  en  1887  dans 
la  Bibliothèque  de  l'Ecole  des  chartes,  t.  XLVIII,  p.  357-370.  La  suite  a  été 
publiée  dans  les  t.  VIII  et  IX  de  la  Revue  celtique,  1887,  1888. 

P)  Ce  diplôme  porte  le  numéro  71 ,  chez  Sickel  :  Acta  regum  et  impera- 
iorum  Karolinorum. 

(3)  Vojrez  les  textes  réunis  par  De- Vit ,  Totius  latinitatis  Onomasticon  , 
p.  403. 

(4)  A.  de  Boissieu,  p.  355,  356. 

(5)  Pardessus,  Dtp{oma/a,  t.  I,  p.  103;  K.  Pertz,  Diplomatum  imperii  tq- 
mus  /,  p.  122,  ligne  36,  p.  123,  ligne  6. 


/ 


188  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

Assé-le-Boisne ,  soit  enfin  Assé-le-Biboul ,  tous  deux  dans 
la  Sarthe.  Aciacus^  dans  le  pagus  Pauliacensis.  fut  donné  à 
la  basilique  de  Saint-Fargeau ,  par  Tabbé  Widerad,  en 
721  (1).  Aciacus  est  une  orthographe  de  basse  époque  pour 
Acciacus ,  avec  un  double  c.  La  variante  Acciagus ,  par  un 
double  c  et  par  un  g,  substitut  bas-latin  du  c  antique,  nous 
est  offerte  par  un  diplôme  d'Angilramme,  évoque  de  Metz, 
qui,  en  780,  donne  à  Tabbaye  de  Gorze  des  biens  dans  la 
villa  Acciagus  (2);  il  s'agit  d'Essey,  qui  est,  en  quelque 
sorte,  un  faubourg  de  Nancy  (3).  Un  autre  Essey,  situé  en 
Meurthe-et-Moselle,  comme  le  précédent,  est  appelé  Aciacus 
dans  une  charte  de  Tannée  846  ;  mais  une  pièce  de  Tannée 
895,  où  la  même  localité  est  appelée  Acci ,  nous  autorise  à 
restituer  l'orthographe  AcciaciLs  par  un  double  c  (4).  Ce 
nom  de  lieu  dérive  d'Accius. 

Accius  est  un  gentilice  romain  porté  par  divers  person- 
nages, dont  le  plus  connu  est  le  poète  tragique  L.  Accius, 
né  Tan  170  avant  J.-C.  et  qui  parait  avoir  vécu  fort  long- 
temps, car  Cicéron  raconte  qu'il  a  souvent  causé  avec  lui  ; 
il  serait  mort  vers  Tannée  94  avant  notre  ère  (5).  Ce  gen- 
tilice se  rencontre  de  temps  en  temps  dans  les  inscriptions; 
ainsi  T.  Accius  Marcus  figure  avec  Accius  Maximus  dans 
une  inscription  de  Carinthie  (6).  T.  Accius  est  un  fabricant 
de  tuiles  dont  la  marque  est  conservée  au  musée  de  Kla- 
genfurt  (7).  On  a  trouvé  près  d'Esté  le  tombeau  de  C.  Ac- 
cius Boethus  (8),  à  Moggio  celui  de  L.  Accius  Libellus(9); 

(1)  Pardessus,  Diplomata^  t.  II,  p.  324. 

(2)  Dom  Calmet,  Histoire  de  Lorraine;  PreuveSf  I,  col.  289. 

(3)  Lepage ,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  la  Meurlh« , 
p.  47. 

(4)  Lepage,  t'bid.,  p.  47. 

(5)  Voir  les  textes  réunis  par  Teuffel ,  Geschichte  der  rœmischen  Liten- 
tur,  3*  édit.,  p.  214-217;  Ribbock,  Tragicorum  latinorum  reliquiae^  l'appelle 
Attius,  Il  a  réuni  ses  fragments  aux  pages  114-194  du  volume  dont  le  titre 
vient  d'être  donné. 

(6)  C.  7.  L.,  III,  4830. 

(7)  Ibid,,  III,  5758. 

(8)  Ibid.,  V,  2551. 

(9)  Ibid.,  V,  1827. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACU8  AU  MOYEN  AGE.  189 

Este  et  Moggio  sont  deux  localités  de  l'Italie  septentrionale. 
D'autres  inscriptions  établissent  la  fréquence  de  ce  nom 
dans  l'Italie  méridionale  (1).  On  le  rencontre  aussi  en  Es- 
pagne (2).  L'existence  de  ce  gentilice  en  Gaule  est  attestée 
par  un  monument  funèbre  de  Lyon;  ce  monument  fut 
élevé  par  les  héritiers  du  défunt ,  et  l'un  de  ces  héritiers 
était  le  soldat  M.  Accius  Modestus  (3). 

AcoNucA  finis  est  un  territoire  situé  dans  le  pagus  Scar- 
pone)isis ,  aux  termes  du  diplôme  par  lequel  Chrodegang , 
évêque  de  Metz,  fonda,  en  745,  l'abbaye  de  Gorze  (4).  Aco- 
niaca  dérive  d'Aconius. 

Aconius  est  un  gentilice  d'abord  obscur,  mais  qui  dut 
une  certaine  notoriété  à  deux  Aconius  Catulinus,  l'un  pro- 
consul d'Afrique  de  l'an  316  à  319  après  J.-G. ,  et  l'autre 
consul  trente  ans  plus  tard  (5).  D'autres  Aconius  sont  con- 
nus par  les  inscriptions.  L'un  est  auteur  d'une  inscription 
votive  au  dieu  Mercure ,  à  Spire  (6).  Un  autre  a  dédié  un 
autel  à  Jupiter  sur  les  bords  du  lac  Majeur  (7).  Leur  nom 
est  écrit  par  un  double  c ,  Acconius.  Mais  le  nom  de  Q. 
Aconius  et  celui  d'Aconia,  son  affranchie,  tous  deux  par  un 
simple  c,  sont  conservés  par  une  inscription  de  Treia  (8). 
La  même  orthographe  Aconia  a  été  relevée  dans  la  nécro- 
pole de  Lambessa  (9). 

AcuTiACus  apparaît,  écrit  Aguciacus^  dans  un  diplôme  du 
roi  Clotaire  III  donné  vers  l'année  657  (10).  M.  Longnon  a 
reconnu  qu'il  s'agit  d'Aguisy ,  hameau  de  la  commune  de 


(1)  Voyez  les  index  du  C.  /.  L.,  t.  IX,  p.  703  ;  t.  X,  p.  1023. 

(2)  C.  /.  L.,  t.  n,  index,  à  la  page  715. 

(3)  A.  de  Boissieu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon,  p.  355,  356. 
j[4)  Pardessus,  Diploma,ta,  t.  II,  p.  398. 

(5)  De- Vit,  Onomasticonf  t.  I,  p.  43. 

(6)  Brambach,  n-  1797. 

(7)  C.  i.  L.,  V,  5496. 
(S)  Ibid,y  IX,  5660. 

(9)  ma.,  VIII,  3319. 

(10)  Tardif,  Monument»  historiques,  n*  13,  p.  11. 


y 


à 


190  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

Chelles  (Oise).  Aiguisy,  nom  d'un  hameau  du  département 
de  TAisne,  s'explique  aussi  par  un  primitif  Acutia>cus. 

Ce  nom  de  lieu  dérive  du  gentilice  Acutius.  Acutius  est 
le  nom  d'un  tribun  du  peuple  élu  par  Tinfluence  des  patri- 
ciens en  Tan  399  avant  J.-C.  Le  même  nom  est  porté  plus 
tard  par  un  grand  nombre  de  personnages  dont  la  mémoire 
nous  a  été  gardée  par  des  inscriptions  (1).  L'une  de  ces 
inscriptions  est  conservée  au  musée  d'Aix-en-Provence  (2). 

Albiacus  ,  dans  la  légende  d'une  monnaie  mérovin- 
gienne (3),  et  dans  un  diplôme  de  Charles  le  Chauve  (4), 
vient  d'Albius. 

Albius  est  le  nom  d'une  gens  à  laquelle  appartenait  la 
mère  de  l'empereur  Othon,  Albia  Terentia  (5).  Ce  gentilice 
se  rencontre  de  temps  en  temps  dans  les  inscriptions  et 
dans  quelques  autres  documents  (6) ,  dont  le  plus  connu 
est  le  discours  de  Cicéron  pro  Cluentio ,  où  il  est  souvent 
question  de  l'empoisonneur  Statius  Albius  Oppianicus  La- 
rinas.  Des  inscriptions  nous  apprennent  que  ce  gentilice 
avait  pénétré  en  Gaule  (7).  Il  y  a  en  France  :  1®  Deux  commu- 
nes du  nom  d'Albiac,  l'une  dans  la  Haute-Garonne,  l'autre 
dans  le  Lot;  celle-ci  appelée,  au  cas  indirect,  Àlbiaco,  en 
967  (8)  ;  2''  trois  communes  du  nom  d'Aubiac  :  deux  dans 
la  Gironde,  une  dans  le  Lot-et-Garonne.  Ce  sont  d'anciens 
Albiacus,  comme  Aubiat  (Puy-de-Dôme)  (9).  Le  Cari,  de 


(1)  C,  I.  L.fWy  douze  exemples;  VIII,  quatre;  IX,  deux;  X,  huit.  Sans 
compter  les  femmes. 

(2)  Herzog,  Galliae  Narbonensis  historiaf  t.  II,  p.  77,  n*  366. 

(3)  A.  de  Barthélémy,  dans  la  Bibl,  de  l'Ecole  des  chartes,  t.  XXVI,  p.  450. 

(4)  Tardif,  Monuments  historiques^  n*  212,  p.  136. 

(5)  Suétone,  Othon,  ch.  I. 

(C)  De-Vit,  Onomasticon,  t.  I,  p.  194,  197.  198. 

(7)  A.  de  Boissicu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon,  p.  28,  30;  Allmer,  Ins- 
criptions de  Vienne,  I,  78;  III,  419.  C.  /.  L.,  XII.  748,  1390,  1782,  3258.  3561, 
4379,  4506,  4563,  5111.  Albius,  en  latin,  est  un  dérivé  d'albus.  Les  Gaulois 
possédaient  un  thème  albio-,  dont  nous  ignorons  le  sens,  et  qui  nous  est 
connu  par  la  dédicace  Marti  Albio^rigi  (OreUi-Henzen,  5867). 

(8)  Deloche,  Cartulaire  de  Deaulieu,  p.  125. 

(9)  Houzé,  chez  Doniol,  Cartulaire  de  Sauxilange,  p.  687. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUB  AU  MOYEN  AGE.  191 

Saint-Victor  de  Marseille  (1),  nous  montre,  dans  un  docu- 
ment de  Tannée  814,  le  nom  de  lieu  Albianus. 

Albiniacus  est  le  nom  d'une  propriété  de  Tabbaye  de 
Saint-Martin  de  Tours,  suivant  un  diplôme  donné  par 
Charlemagne  en  775  (2).  C'est  aujourd'hui  Aubigny-sur- 
Xére  (Cher).  Deux  autres  Albiniacus^  situés  en  Rouergue , 
apparaissent  au  onzième  siècle  dans  le  cartulaire  de  l'ab- 
baye de  Conques  (3). 

Albinius,  d'où  vient  Albiniacus^  est  le  nom  d'une  gens 
plébéienne  de  Rome ,  dont  les  plus  anciens  membres  con- 
nus sont  :  1®  L.  Albinius  Paterculus,  un  des  deux  premiers 
Romains  créés  tribuns  du  peuple  en  l'an  493  avant  notre 
ère  (4);  2**  un  certain  L.  Albinius,  contemporain  de  la 
prise  de  Rome  par  les  Gaulois  en  390  ;  celui-ci  est  connu 
par  le  zèle  pieux  qu'il  aurait ,  dit-on  ,  montré  après  la  ba- 
taille de  l'Allia ,  quand ,  prenant  en  pitié  les  vestales  qui 
s'en  allaient  de  Rome  à  pied,  il  les  aurait  fait  monter  dans 
son  char ,  après  en  avoir  fait  descendre  sa  femme  et  ses 
enfants  (5). 

Ce  nom  persista  sous  l'empire  romain  :  des  inscriptions 
d'Italie  l'attestent  (6).  Il  pénétra  en  Gaule;  un  certain  T. 
Albinius  Januarius  figure  dans  une  inscription  de  Niraé- 
gue  (7).  Ce  nom  a  fourni  à  la  Gaule  septentrionale  un  nom 
de  lieu  formé  au  moyen  du  suffixe  -anus;  c'est  Albiniani, 
aujourd'hui  Halphen ,  mentionné  à  la  fois  dans  V Itinéraire 
d'Antonin  et  dans  la  Table  de  Peutinger.  (8)  Le  nom  d'Au- 


(1)  T.  n,  p.  643. 

(2)  Ce  diplôme,  publié  sans  date  par  dom  Bouquet,  t.  V ,  p.  737,  est  lo 
n*  42,  p.  27,  de  Sickel,  Acta  Karolinorum ,  et  le  n*  XVIII  de  Mabille,  La 
pancarte  notre  de  Saint-Martin  de  TourSf  p.  69. 

(3)  Desjardius,  Cartulaire  de  l'abbaye  de  Conques^  p.  39,  40,  311. 

(4)  Tite-Live,  II,  33.  Cf.  De-Vit,  Onomasticon,  I,  196. 

(5)  Tite-Live ,  V ,  40.  C'est  probablement  une  légende  généalogique 
empruntée  à  une  laudatio  funebris. 

(6)  Voyez,  par  exemple,  C.  /.  L.,  V,  5506,  5522,  5478,  6375. 

(7)  Brambach,  n*  73. 

(8)  Desjardins,  Géographie  de  la  Gaule  d'après  la  table  de  Peutinger ,  p.  39. 


192  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

bignan  (Vaucluse)  a  été  formé  d'après  le  même  procédé. 
Mais  c'est  à  remploi  du  sufiBxe  -acus  qu'on  doit  les  noms 
d'Albignac  (Corrèze) ,  de  quatre  Aubigné  (lUe-el-Vilaine , 
Sarthe,  Deux-Sèvres,  Maine-et-Loire),  d'Aubigiley  (Haute- 
Saône),  et  de  dix-huit  autres  communes  qui  s'appellent  Au- 
bigny  (Aisne,  Allier,  Ardennes,  Aube,  Calvados,  Cher, 
Côte-d'Or,  Nièvre,  Nord,  Pas-de-Calais,  Deux-Sèvres, 
Somme,  Vendée)  ;  total  :  vingt-quatre  communes,  dont  le 
nom  actuel  s'explique  par  un  primitif  Albiniacus. 

Aliacus  est  le  nom  d'une  localité  où  Berchaire ,  fonda- 
teur de  l'abbaye  de  Montier-en-Der,  avait  une  propriété 
dont  il  fit  donation  à  cette  abbaye  en  673  (1). 

AUius  est  un  gentilice  romain  ;  les  personnages  les  plus 
importants  de  ce  nom  paraissent  avoir  été  :  C.  Allius 
Alba,  triumvir  monetalis,  de  l'an  106  à  l'an  102  avant  notre 
ère  (2)  ;  M.  Allius  Nepos ,  contemporain  de  l'empereur  Ti- 
bère et  célèbre  par  ses  dettes  (3)  ;  Q.  Allius  Maximus,  con- 
sul, l'an  49  de  notre  ère  (4).  On  rencontre  plusieurs  autres 
Allius  dans  les  inscriptions  :  L.  Allius  Victor ,  dans  une 
inscription  funéraire  de  Mayence  (5)  ;  le  légionnaire  C.  Al- 
lius, fils  de  Caius,  dans  une  autre  inscription  funéraire  du 
musée  de  la  même  ville  (6);  un  second,  C.  Allius,  égale- 
ment C.  fllius,  dans  une  inscription  funéraire  de  Guel- 
dre  (7). 

Nous  ne  savons  pas  où  était  située  la  villa  Al[l]iacu5 
mentionnée  dans  la  donation  de  Berchaire.  Alliacus  a  dû 
donner  en  français  Ailly ,  en  provençal  Aillac.  Il  y  a  en 
France  cinq  communes  du  nom  d' Ailly ,  une  dans  l'Eure , 


(1)  Pardessus,  Diplomala,  t.  II,  p.  159. 

(2)  De-Vit,  Onomaslicon,  t.  I,  p.  230. 

(3)  Sénéque,  De  Beneficiis,  liv.  II.  c.  vu,  g  2. 

(4)  De- Vit,  Onomasticon^  t.  I ,  p.  230. 

(5)  Brambach ,  1280. 
(6)/5id.,  1172. 

(7)  Ibid.,  84. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  193 

une  dans  la  Meuse,  trois  dans  la  Somme,  et  une  commune 
d'Aillac  (Dordogne). 

Alsiacus  était  une  villa  qui  appartenait  à  l'abbaye  de 
8aint-Germain-des-Prés ,  suivant  un  diplôme  de  Charle- 
magne  daté  de  786  (1). 

Alsius  est  un  gentilice  assez  rare  ;  cependant,  nous  pou- 
vons en  signaler  deux  exemples  dans  des  inscriptions  ;  dans 
un  cas,  il  s'agit  d'un  homme,  L.  Alsius  Verecundus  (2); 
dans  l'autre,  il  s'agit  d'une  femme,  Alsia  Postuma  (3). 

Andiacus  est  le  nom  d'un  des  quatre  palais  que  Louis  le 
Débonnaire ,  alors  roi  d'Aquitaine ,  choisit  en  795  pour  y 
passer  l'hiver  (4).  Il  en  est  aussi  question  dans  un  diplôme 
de  son  fils  Pépin  donné  en  825  (5).  C'est  probablement  au- 
jourd'hui un  des  deux  Angeac  du  département  de  la  Cha- 
rente. 

Le  gentilice  Andius ,  dont  ce  mot  dérive ,  se  rencontre 
quelquefois  dans  les  inscriptions  (6).  On  le  trouve  notam- 
ment en  Gaule  (7). 

Anisiacus  est  le  nom. d'une  villa  qui,  suivant  Hincmar, 
aurait  appartenu  à  l'évôché  de  Laon  au  temps  du  roi  Pépin 
le  Bref  (8).  C'est  aujourd'hui  Anizy-le-Château  (Aisne)  (9). 
Une  monnaie  mérovingienne  porte  la  légende  Anisiaco 
vico  (10)  ;  il  est  vraisemblable  qu'elle  a  été  frappée  dans 
cette  localité  ;  cependant,  il  y  a  en  France  un  autre  Anizy, 
dans  le  département  du  Calvados. 


(1)  Dom  Bouquet,  t.  V,  p.  750  6.  '. 

(2)  C.  /.  L.,  X,  1403. 

(3)  Ibid.,  V,  1813.  ^ 

(4}  ViU'Ludovici  Fit,  chez  Dom  Bouquet,  t.  VI,  p.  90  c. 

(5)  Dom  Bouquet,  t.  VI,  p.  664  d. 

(6)  De- Vit,  Onomasticon,  t.  I,  p.  292,  col.  2. 

(7)  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  III,  135,  158. 

(8)  Hincmar,  Vie  et  Miracles  de  saint  Remy,  D.  Bouquet,  t.  V,  p.  452  c. 
(9j  Matton,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  l'Aisne ,  p.  6. 
;iO)  A.  de  Barthélémy,  dans  la  Bibl.  de  l'Ecole  des  Chartes,  t.  XXVI,  p.  451. 

13 


94  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

Anisiacus  dérive  d*Anicius ,  nom  d*une  gens  romaine  qui 
s'est  fort  illustrée  sous  la  république  et  sous  l'empire  ;  plu- 
sieurs Anicius  furent  consuls  avant  et  après  notre  ère  (1). 
Ce  nom  pénétra  dans  les  provinces.  Un  certain  Anicius 
Victor  est  mentionné  dans  une  inscription  de  Bade  (2).  Un 
autre  Anicius,  distingué  par  le  prénom  de  Marcus,  apparaît 
dans  une  inscription  de  Nimègue  (3). 

Appiacus  colonia  fut  donnée  à  l'église  du  Mans,  par  Tévê- 
que  Hadoind ,  en  642  (4)  ;  c'est  aujourd'hui  Saint-Ulphas 
(Sarthe)  (5).  Appiacus  est  dérivé  d'Appius. 

Appius,  célèbre  comme  prénom  dans  la  gens  Claudia,  se 
rencontre  aussi  quelquefois  avec  valeur  de  gentilice. 
L'exemple  le  plus  connu  est  fourni  par  L.  Appius  Maximus 
Norbanus,  deux  fois  consul  :  une  première  fois  comme 
remplaçant,  suffecius,  sous  Domitien  ;  l'autre  comme  consul 
ordinaire  sous  Trajan,  en  l'année  103.  Avant  lui,  on 
trouve  Sex.  Appius  Severus ,  questeur  de  l'empereur  Ti- 
tus (6) ,  et  le  sénateur  Appius  Appianus ,  expulsé  du  sénat 
par  Tibère,  l'an  17  avant  Jésus-Christ  (7).  Ce  gentilice 
pénétra  en  Gaule.  L'inscription  funéraire  d'une  femme 
nommée  Appia  a  été  signalée  à  Lyon  (8),  et  Appia,  mère 
d'un  légionnaire,  éleva  à  son  fils  mort  un  monument  dont 
un  débris  a  été  trouvé  dans  la  même  ville  (9).  On  signale 
au  musée  de  Narbonne  la  marque  du  potier  Appius  (10).  Ou 
a  trouvé  à  Cologne  le  monument  funèbre  élevé  par  Appius 
Severus  à  sa  fille  Appia  Verina  (11).  Dans  une  inscription 


(1)  De- Vit,  OnomsLSticony  t.  I,  p.  300-305. 

(2)  Brambach,  n-  1659. 

(3)  Ibid. ,  n*  85. 

(4)  Pardessus,  DiplomulSL,  II,  70. 

(5)  Quichorat,  De  la  formation  française  des  anciens  noms  de  lieu,  p.  76. 

(6)  De-Vit,  Onomasticonf  p.  386. 

(7)  Tacite,  Annales,  II,  48. 

(8)  A.  de  Boissieu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon,  p.  481. 

(9)  Ibid,,  p.  300. 

(10)  Schuermans,  Siglcs  figulins,  n*  397. 

(11)  Brambach,  n*  415. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACU8  AU  MOYEN  AGE.  195 

de  Payerne,  en  Suisse,  on  lit  le  nom  de  D.  Appius  Augus- 
tus  .,1). 

Àppiacum  a  pu  donner  :  1®  Achy  ;  il  y  a  une  commune 
de  ce  nom  dans  l'Oise  ;  2**  Achey  ;  il  y  a  une  commune 
d'Achey  dans  la  Haute-Saône. 

Appiliacus,  sur  l'Oise,  dans  le  pagus  Noviomensis,  aux  ter- 
mes d'une  charte  de  l'année  708  en  faveur  de  l'abbaye  de 
Saint-Bertin,  est  aujourd'hui  Apilly  (Oise)  (2). 

11  n'y  a  pas  d'exemples  certains  d'un  gentilice  *  Appilius  (3). 
Mais  on  a  trouvé  un  exemple  du  gentilice  Apillius  dans  le 
monument  funèbre  de  L.  Apillius  Successus,  près  d'Aqui- 
lée  (4).  Une  autre  variante  est  fournie  par  le  nom  d'Apilia 
Severina  dans  une  inscription  découverte  non  loin  de  là  à 
Cividale  (5).  Citons  encore  la  variante  Appalius  dans  une 
inscription  de  Fermo  (6)  ;  on  y  trouve  le  double  p ,  mais 
non  Yi  à! Appiliacus,  Or,  Appiliacus  peut  dériver  d' Appalius 
comme  d'*  Appilius. 

Apponiacus  est  le  nom  d'une  villa  située  près  d'Orléans, 
et  qui  appartenait  à  l'abbaye  de  Saint-Aignan  aux  termes 
d'un  diplôme  de  Charlemagne  donné  entre  les  années  774 
et  800  (7). 

Apponius,  par  deux  p  dans  le  gentilice  de  M.  Apponius 
Firmus ,  conservé  par  une  inscription  de  Pouzzoles  (8), 
offre  une  orthographe  confirmée  par  le  double  p  d'Appo- 
niolen[us]  dans  une  autre  inscription  d'Italie  (9)  ;  on  trouve 
encore  les  deux  p  dans  le  nom  de  femme  Apponia  Sisso[i], 


(1)  Mommsen,  Inscriptiones  helveticaef  n*  151. 

(2)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  277,  499. 

(3}  De- Vit,   Onosm&ticon ^  t.  I,  p.  385,  au  mot  Appilia.  Cf.  Mommsen, 
C.  /.  L.,  V,  2896. 

(4)  C.  J.  L.,  V,  8452. 

(5)  Ibid.,  V.  1771. 

(6)  Ihid.,  IX,  5357. 

(7)  Sickel,  Acia  regum  et  imperatorum  Karolinorum,  t.  II,  p.  64,  n*  168. 

(8)  C.  I.  L.,  X,  3475. 

(9)  /Md.,  IX,  3451. 


196  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

d'une  inscription  d'Afrique  (1).  C'est  une  variante  d'Apo- 
nius,  gentilice  fréquent  dans  les  inscriptions.  Le  person- 
nage le  plus  célèbre  de  ce  nom  a  été  M.  Aponius  Satur- 
ninus,  consul  sous  Néron,  président  de  la  Mésie  sous 
Othon,  et  qui,  dans  la  guerre  civile  entre  Vitellius  et  Ves- 
pasien,  prit  parti  pour  ce  dernier  (2). 

Le  nom  d'Apoigny  (Yonne),  bien  qu'offrant  avec  Appo- 
niacus  une  grande  ressemblance,  parait  s'expliquer  par 
un  primitif,  Epponiacus  (3),  dérivé  d'*Epponius,  variante 
d'  *Eponius ,  qui  n'est  lui-même  qu'une  variante  dialectale 
d'Equonius,  gentilice  relaté  dans  une  inscription  d'Alsace  (4). 

Archiniacus,  villa  mentionnée  dans  un  diplôme  faux  de 
Dagobert  I",  en  faveur  de  l'abbaye  de  Saint-Denis  (5),  est 
aujourd'hui  Archignat  (Allier)  (6). 

Le  gentilice  Arquinius  explique  le  nom  d'une  affranchie, 
Arquinia  Artemisia,  dont  la  tombe  a  été  trouvée  en  Cam- 
panie  (7).  On  trouve  aussi  M.  Arquinius  Secundus  (8). 

* 

Artiliacus,  dans  un  diplôme  de  Pépin  le  Bref,  remontant 
à  l'année  751  ou  environ  (9),  est  le  nom  d'une  propriété 
•  de  l'abbaye  de  Saint-Denis. 

Artilius  est  un  gentilice  dont  il  y  a  quelques  exemples 
dans  les  inscriptions.  On  l'a  trouvé  dans  une  inscription 
lapidaire  de  Brescia  (10).  Il  est  gravé  sur  un  vase  d'airain 
recueilli  dans  la  ville  d'Aquilée  (11).  Il  a  pénétré  en  Gaule  : 


(1)  C.  /.  L.,  VIII,  10918. 

(2)  Les  textes  qui  le  concernent  ont  été  réunis  par  De-Vit,  Onom^siicon, 
t.  I.  p.  383,  col.'  1. 

(3)  Quantin,  Diciionnsiire  topographique  du  dép&rlement  de  l'Yonne,]^.  3. 

(4)  Brarabach,  n*  1848. 

(5)  Pardessus,  t.  II,  p.  42  ;  K.  Pertz,  Diplomalum  imperii  tomus  /,  p.  159. 
l.  27. 

(6)  Longnon,  Examen  géographique  ^  p.  12. 

(7)  CI.  L.,  X,  4335. 

(8)  De- Vit,  Onomasticortf  t.  I,  p.  471. 

(9)  Tardif,  Monumenls  historiqueSy  p.  45,  col,  2. 

(10)  C.  /.  L.,  V,  4535. 

(11)  Ibid.,  V,  812,3,6. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACU8AU  MOYEN  AGE.  19^ 

ie  tombeau  d'Artilia  Martia,  femme  de  T.  Munatius  Félix, 
curateur  des  seviri  aitgustales  de  Lyon,  a  été  découvert 
dans  cette  ville  au  dix-septième  siècle  (1). 

Attiniacus  est  le  nom  d'un  village  où  les  rois  mérovin- 
giens et  carlovingiens  eurent  un  palais.  Thierry  IV  y  mou- 
rut en  737  (2).  Pépin  le  Bref,  maire  du  palais,  y  rendit  un 
jugement  en  749  (3).  Pépin  le  Bref,  devenu  roi,  Carloman, 
Louis  le  Débonnaire ,  Charles  le  Chauve  ont  daté  des  di- 
plômes du  palais  public  ou  du  palais  royal  d*Attiniacus  (4). 

Âttinius  par  deux  t  est  une  variante  d'Atinius  par  un 
seul  tj  gentilice  romain  qui  n'est  pas  rare.  Nous  citerons 
C.  Atinius  Labeo,  préteur  l'an  190  avant  Jésus-Christ  (5), 
et  un  autre  C.  Atinius  Labeo,  tribun  du  peuple  en  l'an- 
née 130,  et  célèbre  pour  avoir  voulu  faire  mettre  à  mort  le 
censeur  Q.  Caecilius  Metellus  (6).  La  bonne  orthographe 
de  ce  nom  est  celle  qui  n'offre  qu'un  t;  on  la  trouve,  par 
exemple,  dans  une  inscription  de  Trêves  (7)  et  dans  une 
inscription  du  musée  de  Mayence  (8).  Mais  les  manuscrits 
nous  offrent  quelquefois  le  double  t  (9) ,  et  cette  variante 
doit  être  ancienne ,  témoin  le  génitif  féminin  Atteniae  lu 
sur  une  anse  d'amphore  (10)  ;  le  génitif  masculin  Attenii , 
dans  une  inscription  d'Espagne  (il),  et  le  nominatif  féminin 


(1)  A.  de  Boissieu,  Inscriptions  ds  Lyon^  p.  200. 

(2)  Annales  Pet&viani,  chez  dom  Bouquet,  II,  641  c. 

(3)  Pardessus,  Diplomata^  t.  II,  p.  414.  K.  Pertz,  Diplomatum  imperii  to- 
mus  /,  p.  106. 

(4)  Pépin  le  Bref,  en  753,  757  et  760  (Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  Il,  p.  3, 
4,  6).  Carloman,  en'769  (Sickel,  ibid.^  p.  13).  Louis  le  Débonnaire,  en  822, 
834,  MO  (Sickel,  ibid.,  p.  138,  139,  184,203).  Charles  le  Chauve,  en  860  (Tar- 
dif, Monumen /s  historiques,  p.  110,  111). 

(5)  Tite-Uve,  livre  XXXVl,  c.  45. 

(6)  Tite-Live,  Periochae,  livre  LIX. 

(7)  Brambach,  n*  825. 

(8)  Brambacfa,  n*  932. 

(9)  De- Vit,  Onomasticon,  t.  I,  p.  556,  col.  2. 

(10)  C.  /.  L.,  III,  6007,  4. 

(11)  /Md.,  II,  537. 


198  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

Attenia  dans  une  autre  (1)  ;  le  double  t  s'explique  par  celui 
d'Attius  et  de  son  dérivé  Attilius  (2). 

Attigny  est  un  chef-lieu  de  canton  du  département  des 
Ardennes  ;  un  autre  Attigny  se  trouve  dans  le  département 
des  Vosges. 

AuLiACus  est  une  localité  mentionnée  en  642  dans  le 
testament  de  Hadoind,  évoque  du  Mans  (3). 

Aulius  est  un  gentilice  qu'on  trouve  quelquefois  dans 
les  inscriptions,  par  exemple  à  Augst,  en  Suisse,  sur  la 
stèle  funéraire  de  P.  Aulius  Memusus  (4),  à  Salzbourg, 
Aulia  Venusta,  nom  de  femme  (5).  On  a  recueilli,  tant  en 
France  qu'en  Angleterre,  des  produits  de  la  fabrication  du 
potier  Aulius  (6).  Ce  gentilice  n'était  pas  rare  en  Italie  (7). 

AuRiACus.  Un  Castrum  nomine  Auriacum  est  mentionné, 
en  1032,  dans  le  Cartulaire  de  Saint-Victor  de  Marseille  (8). 
C'est  aujourd'hui  Auriac  (Var). 

Il  y  avait,  au  premier  siècle  avant  notre  ère,  une  gens 
Auria  à  Larinum,  en  Italie.  Statius  Albius  Oppianicus  fil 
périr  une  partie  de  cette  famille  :  on  le  voit  par  le  plai- 
doyer de  Cicéron  pour  Cluentius,  qui  a  été  prononcé 
l'an  66  avant  notre  ère. 

Auriactis  est  peut-être  la  bonne  orthographe  du  nom 
d'Orry-la-ville  (Oise)  (9). 

Balbiacus.  Grégoire  de  Tours  raconte  qu'un  jour,  tra- 


(1)  C.  /.  L.,  II,  1092. 

(2)  AUmer,  III,  423. 

(3)  Pardessus,  Diplomafa,  t.  II,  p.  70. 

(4)  Mommsen,  Inscriptiones  helveticae,  n*  288. 

(5)  C.  /.  L.,  III,  n-  552. 

(6)  Schuermans,  Sigles  figulins,  n"  693,  694. 

(7)  Voyez,  par  exemple,  C.  /.  L.,  t.  V,  index,  p.  1105,  col.  1;  t,  IX,  index, 
p.  706,  col.  4;  t.  X,  index,  p.  1028,  col.  1. 

(8)  T.  II ,  p.  327.  Il  est  aussi  question  de  la  même  localité  dans  le  même 
cartulaire,  au  racmc  siècle,  t.  Il,  p.  32,  et  t.  I,  p.  251. 

(9)  R.  de  Lasteyrie,  CsnHulaire  de  Parie,  p.  274;  cf.  cependant  Oriacuf, 
ibid.,  p.  128. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACU8  AU  MOYEN  AOE.  199 

versant  le  pagus  Balbiacensis  ^  il  atteignit  la  Loire  (1).  Sui- 
vant M.  Longnon,  le  nom  de  la  petite  localité  dont  Balbia- 
censis  est  dérivé  serait  aujourd'hui  Baugy  (Saône-et-Loire), 
identique  peut-être  au  Balbiago  de  Tacte  de  fondation  de 
Tabbaye  de  Limours,  en  697  (2). 

Balbius  n'est  pas  jun  gentilice  fréquent  ;  cependant  une 
inscription  de  Venafri ,  en  Italie , .  nous  fait  connaître  le 
nom  d'un  certain  C.  Balbius  Speratus  (3).  Dans  d'autres 
inscriptions ,  on  trouve  mentionnés  Balbia  Secundilla  (4) , 
L.  Balbius  Rufi  Ipbertus]  (5),  M.  Balbius  P.  f[ilius]  (6). 

Basiliaga  est  le  nom  d'une  villa  où  l'abbaye  de  Saint- 
Sulpice  de  Bourges  avait  un  manse  au  neuvième  siècle, 
suivant  un  diplôme  émané  de  Charles  le  Chauve  en  855  (7). 

Ce  nom  est  dérivé  de  Basilius,  nom  d'origine  grecque 
qui  a  été  porté  par  d'importants  personnages  romains,  au 
troisième  et  au  quatrième  siècle.  Ainsi,  il  y  a  au  Code  de 
Justinien  un  rescrit  de  l'empereur  Alexandre  Sévère  adressé 
à  un  certain  Basilius  (8).  On  sait  qu'Alexandre  Sévère  régna 
de  222  à  235.  Un  autre  Basilius,  vivant  un  demi-siècle  plus 
lard,  est  le  destinataire  d'un  rescrit  des  empereurs  Dioclé- 
tien  et  Maximien  (9),  qui  régnèreqt  de  286  à  305.  Un  troi- 
sième Basilius  fut  comte  des  largesses  sacrées  en  Occident 
environ  un  siècle  après.  On  l'apprend  par  plusieurs  lois 
insérées  dans  le  Code  Théodosien  et  qui  datent  des  an- 
nées 379  et  383  (10). 

Le  gentilice  Basilius  se  rencontre  quelquefois  dans  les 
inscriptions  en  Italie  méridionale  et  en  Afrique.  La  signa- 


il)  Mir^culdL  beaii  HtivHni,  livre  II,  ch.  xvi. 

(2)  Pardessus,  Diplomate,  t.  II,  p.  244. 

(3)  C.  /.  L.,  X,  4852. 

(4)  De- Vit,  OnomMticon,  t.  II,  p.  666,  col.  1. 

(5)  C.  J.  L..  V,  5201. 

(6)  Ihid,,  V,  344. 

(7)  Dom  Bouquet,  t.  VIII,  p.  543  6. 

(8)  Code  de  Justinien^  livre  V,  titre  62,  loi  5. 

(9)  /Md.,  VIII,  titre  36,  loi  5. 

(10)  Code  Théodosien,  livre  IV,  titre  20,  loi  i  ;  livre  XII,  titre  l,  loi  101.  etc. 


200  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

ture  Q.  Basili  Min...  a  été  lue  à  Fermo  sur  une  tuile  (1). 
Le  musée  de  Naples  possède  la  stèle  funéraire  élevée  à  C. 
Valerius  Bassus,  soldat  de  la  flotte  de  Ravenne,  par  Basi- 
lius  Germanus  (2).  Q.  Basilius  Placcianus,  flamen  perpeiuus, 
augure  et  curateur  à  Calama,  aujourd'hui  Guelma,  en  Al- 
gérie, au  temps  des  empereurs  Valentinien  et  Valens 
(364-375),  est  connu  par  deux  inscriptions  du  musée  de 
cette  ville  (3).  On  a  trouvé,  dans  le  même  pays,  les  stèles 
funéraires  de  Q.  Basilius  Fortunatus  (4),  de  P.  Basilius 
Maximus  (5),  de  L.  Basilius  Meleager  (6). 

Basiniacus  ou  mieux  Bassiniacus  est  le  nom  d'un  pagus 
compris,  au  neuvième  siècle,  dans  le  royaume  de  Lorraine 
et  attribué  à  Louis  le  Germanique  par  un  partage  en  870  (7). 
Rançonnières  (Haute-Marne)  faisait  partie  de  ce  pagus  en 
892  (8).  L'orthographe  moderne  est  Bassigny. 

Une  inscription  d'Augsbourg  conserve  la  mémoire  d'un 
vœu  fait  à  Mercure  par  M.  Bassinius  Vitalis  (9).  Bassinius 
est  un  dérivé  de  Bassinus,  dérivé  lui-même  de  Bassus, 
deux  surnoms  qui  se  trouvent  dans  les  inscriptions,  le 
dernier  très  souvent  (10). 

Blaciacus  ,  locellus  donné  à  l'église  cathédrale  du  Mans 
par  Bertrand,  évêque  de  cette  ville ,  en  615  (11)  ;  Blaciacus, 
dans  les  environs  de  Vienne  (Isère),  donné  à  Tabbaye  de 


(1)  c.  /.  L.,  IX,  6078,  47. 

(2)  /bid.,  X,  3645. 
(3)/6id.,  VIII,  5335,  5337. 

(4)  Ihid,,  VIII,  6396. 

(5)  Ihid.,  VIII,  7230. 

(6)  /6id.,  VIII,  7231. 

(7)  Annales  de  Saint-Bertin,  dom  Bouquet,  t.  VII,  p.  110  a  :  Basiniacus 
avec  une  seule  s. 

(8)  Diplôme  de  Louis ^  roi  de  Provence,  dom  Bouquet,  t.  IX,  p.  675  a  ■ 
Bassiniacensis  avec  deux  s. 

(9)  C.  /.  L..  III,  5794. 

(10)  Voyez  les  exemples  réunis  par  De- Vit,  Onomasticony  t.  I,  p.  686. 

(11)  Pardessus,  Diplomata,  t.  I,  p.  211. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  201 

Novalèse  par  Albon,  en  739  (1);  Blaciacus,  dans  le  Ton- 
nerrois,  donné  à  Tabbaye  de  Flavigny  par  Tabbé  Widerad 
en  746  (2),  et -qui  eM  aujourd'hui  Blacy  (Yonne),  ont,  tous 
trois,  dû  s'appeler  originairement  Blatiacus. 

Blatius  par  un  t  est  un  gentilice  qu'on  trouve  deux  fois 
dans  les  inscriptions  d'Espagne  :  elles  nous  fournissent  les 
noms  de  L.  Blatius  Calpurnianus  (3)  et  de  L.  Blatius  Ven- 
tinus  ou  Serventinus  (4).  On  trouve  aussi  Blattius  avec 
deux  t  :h.  et  M.  Blattius  dans  une  inscription  trouvée  aux 
environs  d'Esté  (5),  dans  l'Italie  du  nord  ;  les  noms  de  P. 
Blattius  Criticus  sont  gravés  sur  une  inscription  votive 
trouvée  au  sommet  du  mont  Saint-Bernard  (6)  ;  Blattius 
Dexier  éleva  à  sa  femme  un  jnonument  funèbre,  trouvé  à 
Altilia,  dans  l'Italie  méridionale  (7). 

BRiTn<iNiACus ,  dans  l'acte  de  fondation  de  l'abbaye  de 
Limeurs,  en  697  (8),  offre  à  la  piemière  syllabe  un  i  aii 
lieu  d'un  e  dans  le  Bret[t]iniacus  d'un  diplôme  des  empereurs 
Louis  et  Lothaire  pour  l'église  de  Reims,  826-830  (9). 

Britan[n]ius  est  un  des  évêques  sectateurs  de  l'hérésie 
macédonienne  auxquels  le  pape  Libère,  vers  le  milieu  du 
quatrième  siècle ,  adressa  une  lettre  conservée  par  Cassio- 
dore  (10);  Socrate  a  écrit  son  nom  BpcTrtîvtoç  (11).  Ce  nom 
d'homme  dérive  du  nom  de  peuple  Britannus  ou  Bretta- 
nus,  et  Britinniacus  ou  Brettiniacus  en  vient. 

II  y  a  en  France  six  communes  dont  le  nom  s'explique 


(1)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  372. 

(2)  Jbid.  p.  400. 

(3)  C.  /.  L.,  n,  998. 
(4)/Md.,  II,  1176. 

(5)  Ibid.,  V,  2704.     • 

(6)  /Md.,  V,  6866. 

(7)  Ihid.,  IX,  2492. 

(^  Pardessus,  Diplomàta,  t.  II,  p.  244. 

(9)  Sickel,  Acta  regum  et  imperatorum  Karolinorum^  t.  II,  p.  168,  n*  276. 

(10)  Historia  tripartita,  livre  VII,  ch.  xxv  ;  chez  Migne,  Patrologie  latine, 
t.  LXIX,  col.  1088  b. 

(W)  Histoire  ecclésiastique,  IV,  12;  cf.  De- Vit,  Onômastihon,  t.  II,  p.  759. 


202  LIVRE  IL  CHAPITRE  IL 

par  un  primitif  BriHnniacus  ou  Brettiniacus  :  ce  sont  deux 
Bretigney  (Doubs)  et  quatre  Brétigny  (Côte-d'Or,  Eure, 
Oise,  Seine-et-Oise). 

BuGiAGus  est  un  nom  de  lieu  inscrit  dans  un  diplôme 
original  de  Tannée  689  (1). 

Bucius ,  d'où  le  nom  de  femme  Bucia  Âpta ,  fourni  par 
une  inscription  de  Pompéi  (2),  est  une  variante  orthogra- 
phique de  Buccins^  qu'on  trouve  probablement  pour  la 
môme  femme  appelé  Apta  Buccia  dans  une  autre  inscrip- 
tion trouvée  à  côté  de  la  première  (3).  Le  nom  d'homme 
A.  Buccins  Victor  se  lit  dans  une  inscription  du  musée  de 
Naples,  qui  a  la  même  origine  (4).  Si  d'Italie  nous  passons 
en  Afrique,  nous  y  trouvons  la  môme  alternance  entre  Bu- 
cius et  Buccins  :  dans  une  inscription  de  Lambessa,  le 
nom  de  femme  Bucia  Saturnina  (5)  ;  dans  une  autre,  le 
nom  d'homme  Buccins  Antoninus  (6).  Bucia  est  encore  un 
nom  de  femme  dans  une  inscription  de  Cilly  en  Styrie  : 
Vetulla  Bucia  Urbani  f[ilia]  (7). 

La  forme  française  de  ce  nom  est  Bucey,  Bucy,  Bussy. 
Il  y  a  en  France  trois  communes  du  nom  de  Bucey  :  une 
dans  l'Aube ,  deux  dans  la  Haute-Saône  ;  cinq  du  nom  de 
Bucy ,  dont  trois  dans  l'Aisne  et  deux  dans  le  Loiret  ;  et 
dix-sept  communes  du  nom  de  Bussy  réparties  entre  dix 
départements  :  Cher,  Côte-d'Or,  Loire,  Marne,  Meuse, 
Nièvre,  Oise,  Seine-et-Marne,  Somme,  Yonne.  Il  ne  faut 
pas  confondre  ce  nom  avec  celui  de  Boussy,  qui  repré- 
sente le  latin  Buxetum. 


(1)  Tardif,  MonumentB  historiques,  p.  638,  col.  L 

(2)  C.  /.  L.,  X,  lOOL 
(S)  Jbid.,  X,  1002. 

(4)  Ibid.,  X,  1000. 

(5)  /bid.,  VIII,  4027. 

(6)  Ibid.,  VIII,  2811. 

(7)  Ibid.,  III.  5265. 


LA  DfiSINENGE  -I-ACU8  AU  MOYEN  AGE.  203 

BuRiAGA,  villa  mentionnée  dans  un  diplôme  faux  attribué 
au  roi  Dagobert  !•'  et  à  Tannée  637  (1). 

Le  gentilice  Burius  se  lit  deux  fois  dans  Tinscription 
funéraire  du  légionnaire  Burius  Nocina,  qui  existe  encore 
à  Novare  (2). 

Un  primitif  Buriacus  explique  les  noms  de  trois  com- 
munes qui  s'appellent  Burey  :  Tune  dans  l'Eure,  deux 
dans  la  Meuse  ;  et  celui  de  la  commune  de  Bury  (Oise). 

Cadoniacus,  nom  d'une  curtis  donnée  par  Tabbé  Wide- 
rad  à  TaMaye  de  Flavigny  (3),  est  bas-latin  pour  Cato- 
niacûs. 

Catonius  Justus,  centurion,  fut,  en  l'an  14  de  notre  ère, 
un  des  délégués  que  les  légions  de  Pannonie  révoltées 
envoyèrent  à  Tibère  pour  lui  demander  leur  grâce  (4)  ; 
il  devint  préfet  du  prétoire  sous  Claude  ;  il  périt  victime 
de  la  cruauté  de  Messaline  ;  Sénèque  dans  son  Ludn^  de 
morte  Claudii  le  met  au  nombre  des  défunts  de  la  connais- 
sance de  Claude,  qui  seraient  venus  au-devant  de  leur 
prince  à  son  arrivée  dans  les  enfers  (5).  Sous  Hadrien,  117- 
138,  vivait  Catonius  Verus  auquel  cet  empereur  adressa 
un  rescrit  relatif  à  une  des  causes  de  nullité  des  testa- 
ments (6).  On  a  trouvé,  non  loin  de  Crémone,  une  inscrip- 
tion votive  à  Hercule  par  Catonius  Maximianus  (7).  Une 
inscription  des  environs  de  Chierio  nous  a  conservé  le 
nom  de  femme  Catonia  (8). 


(1)  Pardessus,  DipZomAto,  t.  Il,  p.  58;  K.  Pertz,  Diplom&tum  imperii  io- 
m\u  I,  p.  168,  h  18. 

(2)  C.  /.  L.,  y,  6512. 

(Zj  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  400. 

(4)  Tacite,  Annales,  livre  I,  c.  29. 

(5)  Sénèque,  Ludua  de  morte  Claudii,  ch.  XIII»  §  5;  cf.  Dion  Cassius, 
livre  LX,  ch.  xviii,  {  3. 

(6)  Code  Juatinien,  livre  VI,  titre  XXIII,  loi  1  ;  cf.  Institutes  de  Justinien, 
livre  II,  titre  X,  i  7. 

(7)  C.  /.  L.,  V,  4147. 

(8)  I6td.,  V,  7502, 


204  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

Çalciacus  ,  aussi  appelé  villa  Chrausobaci  à  la  fin  du 
septième  siècle  (1),  paraît  être  Chaussy  (Seine-et-Oise). 

Ce  nom  de  lieu  peut  dériver,  soit  du  gentilice  Calcius 
qu'on  trouve  en  Italie  (2),  soit  du  gentilice  Calicius  dont 
on  a  constaté  l'existence  à  Narbonne  (3). 

Caliace,  est  le  nom  d'une  villa  située  près  d'Orléans,  au 
sud  de  la  Loire ^  aux  termes  d'une  charte  de  Tannée  667 
en  faveur  des  abbayes  de  Saint-Aignan  d'Orléans  et  de 
Saint-Benoit-sur-Loire  (4). 

Le  gentilice  Callius  est  conservé  par  l'inscription  funé- 
raire de  L.  Callius  Julianus  recueillie  en  Afrique  (5),  par 
celle  de  Callius  Crispinus  trouvée  à  Pola  en  Istrie  (6),  par 
celle  du  vétéran  L.  Callius  Restitutus  (7)  qui  appartient  à 
ritalie  centrale.  On  trouve  aussi  ce  gentilice  écrit  avec  une 
seule  ly  exemple  :  G.  Calius  dans  une  inscription  votive 
de  Dalmartie  (8)  et  au  génitif  M.  Cali  dans  un  diplôme  qui 
dgCte  de  l'an  92  de  notre  ère  (9). 

Caliacus  a  dû  donner  dans  le  midi  Chaillac,  dans  l'ouest 
Chaillé,  dans  le  centre  et  Test  Chailley  et  Chailly.  On 
trouve  en  i^'rance  deux  communes  de  Chaillac  (Indre  et 
Haute-Vienne)  :  deux  communes  de  Chaillé  (Vendée),  une 
commune  de  Chailley  (Yonne),  et  trois  communes  de 
Chailly  dont  une  dans  la  Côte-d'Or,  une  dans  le  Loiret, 
et  une  dans  Seine-et-Marne.  Chailly-en-Brie  (Seine-et- 
Marne)  est  identique  au  Calagum  de  la  Table  de  Peutin- 
ger,  et  Calagum  doit,  suivant  M.  Longnon,  être  corrigé 
en  Caliacum. 


(1)  Tardif,  Monuments  hisioriqueSt  p.  1,  col.  2. 

(2)  De- Vit,  OnomsLSticon,  1. 1,  p.  61. 

(3)  C.  /.  L.,  XII,  4675. 

(4)  Pardessus,  Dtplomata,  t.  II,  p.  144. 

(5)  C.  /.  L.,  VIII,  5892. 

(6)  Ibid.,  V,  142. 

(7)  Ibid.,  IX,  4120. 

(8)  Ibid.,  III,  2820. 

(9)  Ibid.y  tome  III,  p.  858. 


LA  DÉSINENCE  -Ï-ACU8  AU  MOYEN  AGE.  Î05 

La  variante  latine  Calianus  est  notée  Chalianjus  en  943 , 
dans  le  cartulaire  de  Saint-Chaffre  du  Monestier,  en  Velay  ; 
c'est  aujourd'hui  Chalias  (Ardèche)  (1). 

Caliniacus  est  le  nom  d'une  localité  où  l'église  du  Mans 
avait  une  propriété  en  833,  témoin  un  diplôme  de  Louis 
le  Débonnaire  donné  à  cette  date  (2). 

Calinius  est  un  gentilice  originairement  étrusque  et 
osque.  Les  inscriptions  étrusques  de  Pérouse  nous  en 
offrent  plusieurs  exemples.  Sa  forme  osque  était  Kalinis  (3). 
Il  pénétra  dans  le  monde  romain.  Les  inscriptions  nous 
font  connaître  plusieurs  individus  qui  le  portèrent  :  Cali- 
nius Félix  (4)  ;  T.  Calinius  Marcellus  ;  et,  avec  une  double  /  : 
L.  Callinius  Aviola  (5).  On  trouve  aussi  la  variante  Ca- 
lenius  (6). 

Calviacus  est  un  locus  donné  à  l'église  du  Mans  par 
Bertrand,  évêque  de  cette  ville  en  615  (7).  Vers  l'an- 
née 835 ,  Nithard  nous  montre  Louis  le  Débonnaire  et  son 
fils  Lothaire  campant  près  d'Orléans ,  sur  le  fleuve ,  à  côté 
de  la  villa  appelée  Calviacus  (8). 

Le  gentilice  Calvius  n'est  pas  rare  dans  les  documents 
romains  qui  datent  du  haut  Empire.  Une  femme  de  ce 
nom,  Calvia  Crispinilla,  joua  un  certain  rôle  à  Rome  vers 
la  fin  du  règne  de  Néron  :  Tacite  l'appelle  «  magistra  libi- 
dinum  Neronis  ;  »  elle  faillit  périr  victime  du  soulèvement 
qui  eut  pour  effet  la  mort  de  ce  prince  ;  ses  richesses  et 
son  habileté  la  sauvèrent  (9). 


(1)  Edition  de  Tabbé  U.  Chevalier,  p.  111,  122. 

(2)  Dom  Bouquet,  t.  VI,  p.  5^7  C  ;  cf.  Sickel,  ActSi  regum  et  impertitorum 
Karolinorum,  t.  II,  p.  179,  n»  309. 

(3)  Fabretti,  Glossarium  it&licum,  col.  740,  741. 

(4)  C.  /.  L.,  X,  2204. 

(5)  De- Vit,  Onom&sticony  t.  II,  p.  66. 

(6)  C.  /.  L.,  III,  1762. 

(7)  Pardessus,  Diplomata,  t.  I,  p.  214. 

(8)  Dom  Bouquet,  t.  VI,  p.  69  E. 

(9)  Dion  Gassius,  abrégé  par  Xiphilin,  livre  LXIII,  c.  12,  §  3.  Tacite,  His- 
toires, livre  I,  c.  73. 


206  LIVRE  IL  CHAPITRE  IL 

On  a  trouvé  près  de  Rome  le  monument  funèbre  d'une 
autre  Calvia  Crispinilla  morte  à  Tâge  de  dix-huit  mois  (1). 
Une  inscription  nous  a  conservé  la  mémoire  d'un  certain 
M.  Calvius  ,  introduit  dans  le  sénat  par  l'empereur 
Claude  (2).  On  a  découvert  à  Bonn  le  monument  funèbre 
du  légionnaire  Calvius  Fronto  (3)  ;  à  Leybach  on  conserve 
celui  de  C.  Calvius  Priscus,  etc.  (4). 

Cambariagus  est  un  nom  de  lieu  mentionné  vers  658 
dans  un  jugement  rendu  par  le  roi  Clotaire  III  (5)  ;  il 
s'agit  d'une  villa  située  dans  le  Maine.  Un  autre  Cambor 
riacus  apparaît  au  dixième  siècle  dans  le  Cartulaire  de  Sa- 
Vigny  {6!)  ;  il  s'agit  d'un  Ioculs  situé  en  Lyonnais.  Deux  autres 
localités  de  même  nom  figurent  dans  les  titres  de  la  cathé- 
drale de  Grenoble ,  Tune  est  Chambéry ,  chef-lieu  du 
département  de  la  Savoie  (7),  l'autre  est  Chambéry-le- 
Vieux,  même  département  (8). 

Cambariacus  est  dérivé  d'un  gentilice  Cambarius  attesté 
par  trois  inscriptions  de  Nimes  (9). 

Cambiacus  est  une  localité  tenue  en  fief  de  l'abbaye  de 
Saint-Père-de-Chartres  vers  l'année  1100  (10). 

Cambiacus  dérive  de  Cambius,  gentilice  deux  fois  gravé 
dans  une  inscription  de  Nimes  (il);  le  gentilice  romain 
parait  avoir  été  précédemment  un  nom  d'homme  gaulois 
qui  a  donné  le  dérivé  ou  composé  Cambio-vix  d'où,  à  l'épo- 
que romaine,  le  nom  de  peuple  dérivé  Cambiovicenses 
dans  la  TaAle  de  Peutinger, 

(1)  OreUi,  II,  4990.  C.  /.  L.,  VI,  142,  90. 

(2)  Ibid.,  3112. 

(3)  Brambach,  n*  476. 

(4)  C.  /.  L.,  III,  3856;  cf.  VI,  14282-14290.  De- Vit,  Onomasticon,  t.  II.  p.  89. 

(5)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  13,  col.  1. 

(6)  Page  148,  221,  244. 

(7)  Cartulaire  de  Saint-Hugues  de  Grenoble,  p.  186,  194. 

(8)  Ibid.,  p.  99,  186,  193. 

(9)  C.  I.  L.,  XII,  3505,  3756,  3706. 

(10)  Guérard,  Cartulaire  de  Saint-Père-de-Chartres,  p.  316. 

(11)  C./.  L.,  XII,  3503. 


LA  DÉSINENCE  -1-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  207 

Camiliacus  ou  Camliacus,  aujourd'hui  Chambly  (Oise), 
dont  est  daté  un  diplômé  de  Tannée  689  (1) ,  donna  son  nom 
au  pagus  Camiliacensis  ou  Camliacensis  dont  il  est  question 
dans  beaucoup  de  documents  mérovingiens  et  carlovin- 
giens  à  partir  de  Tannée  640  (2).  Une  monnaie  mérovin- 
gienne porte  la  légende  Camiliaeo  (3). 

Ce  nom  de  lieu  peut  s'expliquer  par  les  deux  gentilices 
Camulius  et  Camilius. 

Camulius  est  le  nom  d'un  légionnaire  qui ,  comme  nous 
rapprend  une  inscription  du  second  siècle  de  notre  ère, 
reçut  à  la  fois  son  congé ,  des  colliers  et  des  bracelets 
d'honneur;  il  fut  enterré  à  Grenoble;  sa  sœur  Camulia  lui 
survécut  et  s'associa  à  une  affranchie  pour  lui  élever  un 
monument  funèbre  (4).  Le  gentilice  Camulius  est  dérivé 
du  nom  divin  gaulois  Camulus.  Il  ne  faut  pas  le  confondre 
avec  le  gentilice  d'origine  latine  Camillius ,  dérivé  du  sur- 
nom si  fameux  de  Camilius  ;  nous  en  parlerons  plus  loin. 
Ce  gentilice  Camillius  ,  par  deux  l ,  a  une  variante  Cami- 
lius par  une  seule  l  qui  peut,  comme  Camulius,  expliquer  le 
nom  de  lieu  Camiliacus,  Camliacus. 

Camilius  se  lit  dans  des  inscriptions.  On  a  découvert  en 
Espagne  les  monuments  funèbres  :  de  Camilia  Aemi- 
liana  (5),  de  C.  Camilius  Paternus  (6),  de  Camilia  Natula  :  le 
monument  de  ce  dernier  fut  élevé  par  l'affranchi  Camilius 
Saturnalis  (7).  L'Z  unique  par  laquelle  ce  gentilice  est  dis- 
tingué se  retrouve  dans  le  nom  d'une  des  trente-cinq 
tribus  de  Rome,  la  tribu  Camilia  (8). 

Camiuacus,    mieux   Camilliacus  ^  aujourd'hui  Chemillé 

(1)  Tardif,  Monument  historique^,  n9  25  6i»,  p.  638,  col.  1. 
P)  Ibid.,  p.  8,  25,  30,  31,  45,  81,  etc. 

(3)  On  rattribue  à  Chomillé  (Maine-et-Loire).  A.  de  Barthélémy ,  Biblio- 
ihèque^de  l'Ecole  des  chartes,  t.  XXVI,  p.  453. 

(4)  OreUi,  II,  3571. 

(5)  C.  /.  L.,  II,  2738. 

(6)  Ibid.,  II,  4345. 

Çf)  Ibid,,  III,  4346;  cf.  VI.  14301. 

(8)  Cf.  De- Vit,  Onom&sticon,  t.  II,  p.  97. 


208  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

(Maine-et-Loire),  était,  en  775,  une  propriété  de  Tabbaye  de 
Saint-Martin  de  Tours,  comme  notte  l'apprend  un  diplôme 
de  Charlemagne  (1). 

On  a  trouvé  près  d'Ayenche  le  monument  que  se  fit  éle- 
ver le  sévir  augustal  L.  Camillius  Faustus,  mort  depuis, 
à  Tâge  de  quatre-vingt-douze  ans  (2).  Dans  Tltalie  du  nord, 
à  Pavie,  on  a  découvert  la  stèle  funéraire  d'un  certain 
G.  Camillius  (3).  Le  même  gentilice  a  été  lu  dans  une 
inscription  de  Venosa  (4). 

Campaniacus  était  un  viciis  publiais  appartenant  à  l'église 
du  Mans  ,  au  commencement  du  neuvième  siècle ,  ainsi 
que  l'établit  un  diplôme  donné  par  Charlemagne  en  802  (5). 
C'est  Champagne  (Sarthe) ,  comme  nous  le  fait  remarquer 
M.  Longnon.  La  variante  Campiniacus  est  donnée  par  la 
chronique  de  Saint-Bénigne  de  Dijon  ,  écrite  au  onzième 
siècle ,  mais  qui ,  dans  ce  passage ,  se  réfère  à  une  dona- 
tion de  biens  en  ce  lieu  faite  à  l'abbaye  de  *  Saint-Bénigne 
par  le  roi  Gontran ,  au  sixième  siècle  (6)  ;  elle  nous  trans- 
porte par  conséquent  du  Maine  en  Bourgogne.  On  trouve 
encore  la  variante  Campiniacus  dans  un  diplôme  donné  par 
Charles  le  Chauve  à  l'abbaye  de  Saint-Denis  en  862  7); 
il  s'agit  ici  de  Champigny-sur-Marne  (Seine). 

La  vieille  orthographe  Campaniacus  nous  est  offerte  par 
deux  documents  fort  anciens  bien  que  dépourvus  d'au- 
thenticité. Ce  sont  deux  diplômes  faux  attribués  l'un  à 
Clovis  I*',  l'autre  à  Dagobert  P'.  Dans  l'un  on  veut  parler 


(1)  Dom  Bouquet,  t.  V,  p.  737  C.  Ôf.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  27, 
n*  42.  MabiUe,  La,  pancsLrte  noire  de  Saint-Martin  de  Tours,  p.  69, 106, 151, 
221. 

(2)  Mommsen,  Inscriptiones  Helveticae,  n"  187. 

(3)  C.  /.  L.,  V,  6439. 

(4)  Ibid.,  IX,  445;  cf.  VI,  14302-14304. 

(5)  Dom  Bouquet,  t.  V,  p  768  G  ;  cf.  Sickel,  Acta  Karolinorum ,  t.  II, 
p.  67,  n*  181. 

(6)  Dom  Bouquet,  t.  III,  p.  469  B. 

(7)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  117,  col.  2. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  209 

de  Champagné-Saint-Hilaire  (Vienne)  (1)  ;  dans  Tautre ,  de 
Champagnat  (Creuse)  (2). 

Campanius  est  un  gentilice  qui  n'est  pas  rare  dans  les 
inscriptions  latines.  On  1q  trouve  en  Gaule  et  hors  de 
Gaule.  Nous  citerons  :  Oampania  Geminia,  femme  associée 
à  son  mari  dans  l'inscription  d'un  monument  funèbre  dé- 
couvert à  Lyon  (3);  T.  Campanius  Priscus  Maximianus, 
consulaire  dont  la  tombe  tirée  du  sol  de  la  cathédrale  de 
Sien  est  conservée  dans  cette  église  (4);  C.  Campanius 
Victor,  auteur  d'une  dédicace  aux  Matronae  Gabiae  qui 
a  été  découverte  dans  les  environs  de  Cologne  (5)  ;  Cam- 
panius Materninus  qui  éleva  un  monument  à  Mercure  prés 
de  Blieskastel  dans  le  Palatinat  (6)  ;  C.  Campanius  Vitalis, 
centurion  de  la  cohorte  «  prima  Batavorum  miliaria  »  mort 
en  Dacie,  comme  l'atteste  l'inscription  de  sa  stèle  funé- 
raire (7);  Campanius  Âcutus,  dont  le  nom  se  lit  dans 
une  inscription  du  musée  de  Klagenfurt  (8);  L.  Campa- 
nius Celer,  qui  fit  graver  en  l'honneur  de  Jupiter  une 
stèle  aujourd'hui  placée  au  sommet  du  clocher  du  monas- 
tère de  Reun  près  Graz  (9);  L.  Campanius  Verecundus, 
légionnaire  vétéran,  dont  la  tombe  a  été  trouvé  près  de 
Rovigno  en  Istrie  (10).  Nous  nous  contenterons  de  ces  huit 
exemples  dont  le  nombre  pourrait  être  facilement  augmenté. 
Inutile  de  dire  que  Campanius  est  un  dérivé  de  Campanus 
^ui  veut  dire  habitant  ou  originaire  de  la  Campanie. 


(l)  «  Curtem,  quae  Campaniacum  vocatur.  »  Pardessus,  DiplomaUj  t.  I, 
p.  61.  Pertz,  Diplomatum  iomus  I,  p.  121,  ligne  47;  cf.  Longnon,  Examen 
géographique  du  tome  /"'  des  diplomata,  p.  16. 

(^)  «  Campaniacum  cum  ecclesia.  »  Pardessus ,  Diplomala  >  t.  II ,  p.  42. 
Pertz,  Diplomatum.  tomus  I,  p.  159,  ligne  23;  cf.  Longnon,  Examen  géogra- 
phique^ p.  16. 

(3)  Boissieu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon,  p.  520. 

(4)  Mommsen,  Inscriptiones  confoederationis  helveticae,  n*  9. 

(5)  Brambacb,  n*  560. 

(6)  Brambach,  n*  1782. 
P)  C.  I.  L.,  III,  839. 

(8)  /Wd.,  m,  4779. 

(9)  Ibid,,  III,  5443. 

(10)  Ibid.,  V,  8185. 

14 


210  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

Il  y  a  en  France  trente-huit  communes  dont  le  nom 
s'explique  par  le  primitif  Campaniacus  ou  par  le  plus 
récent  Campiniacus,  Sur  ce  nombre ,  vingt-quatre ,  —  plus 
de  moitié,  —  supposent  la  forme  la  plus  ancienne,  Campa- 
niacus; ce  sont  :  trois  Campagnac  (Aveyron,  Dordogne, 
Tarn)  ;  huit  Champagnac  (Cantal,  Charente-Inférieure,  Cor- 
rèze,  Creuse,  Dordogne,  Haute-Loire,  Haute-Vienne)  ;  deux 
Champagnat (Creuse,  Puy-de-Dôme,  Saône-et-Loire)  ;  quatre 
Champagne  (Sarthe,  Vendée,  Vienne);  un  Champagneux 
(Savoie)  ;  trois'  Champagney  (Doubs ,  Jura ,  Haute-Saône)  ; 
trois  Champagny  (Côte-d*Or,  Jura,  Savoie).  Quatorze  exi- 
gent une  forme  latine  Campiniacus,  avec  assimilation  de  la 
seconde  syllabe  à  la  troisième.  Ce  sont  :  Campénéac  (Mor- 
bihan) ,  au  neuvième  siècle  Kempeniac  ou  Kenpeniac  (1)  ; 
deux  Campigny  (Calvados ,  Eure)  ;  un  Champigné  (Maine- 
et-Loire)  ;  dix  Champigny  (Aube ,  Eure ,  Indre-et-Loire , 
Loir-et-Cher ,  Marne ,  Haute-Marne ,  Seine ,  Yonne). 

Campagnan  (Hérault)  vient  de  Campanianus  avec  le  suf- 
fixe -anus  au  lieu  du  suffixe  gallo-romain  -octw.  Un  fundus 
Campam,ianu$  est  mentionné,  au  huitième  siècle,  dans  une 
charte  de  Ravenne  (2). 

Caniagus,  propriété  de  Tabbaye  de  Saint-Martin  de 
Tours ,  suivant  un  diplôme  donné  par  Charlemagne  en 
795  (3),  est  aujourd'hui  Chennay  (Indre-et-Loire),  et  ne 
doit  pas  être  confondu  avec  CaniacuSy  aujourd'hui  Cheny 
(Yonne) ,  propriété  de  l'abbaye  de  Saint-Remy  de  Sens  aux 
termes  d'un  diplôme  émané  de  Charles  le  Chauve  en  853  (4). 
L'n  n'est  pas  mouillé  dans  ces  deux  mots  :  Chigné  (Maine- 
et-Loire)  paraît  plus  régulier. 

Canins  a  été  le  nom  de  deux  poètes  latins;  l'un  est  cHé 

(1)  Cartulair.e  de  Redon,  p.  81,  150;  cf.  Rosenzweig,  Dictionnaire  topo- 
graphique  du  département  du  Morbihan,  p.  34. 

(2)  Fantuzzi,  Monumenti  Ravennati,  t.  I,  p.  62. 

(3)  Dom  Bouquot,  t.  V,  p.  737  ;  cf.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  U  II,  p.  27, 
n»  42.  MabiUe,  La  pancarte  noire  de  Saint-Martin  de  Tours,  p.  221. 

(4)  D.  Bouquet,  t.  VIII,  p.  523  E. 


LA  DÉSINENCE  -I-AGUS  AU  MOYEN  AGE.  211 

par  Varron ,  qui  écrivait  au  premier  siècle  avant  notre 
ère  (1)  ;  l'autre  parait  avoir  écrit  vers  la  fin  du  premier  siè- 
cle de  notre  ère,  c'est  Canins  Rufus,  originaire  de  Cadix 
et  dont  Martial  parle  en  admirateur  et  en  ami  (2).  Cicéron, 
dans  ses  traités  De  (h^atore  et  De  ofjiciis  nous  fait  connaître 
un  chevalier  romain  appelé  C.  Canins  à  la  fois  lettré  et 
homme  d'esprit ,  mais  peu  habile  en  affaires  et  qui,  dans 
un  voyage  d'agrément  à  Syracuse ,  fut  la  dupe  d'un  ban- 
quier (3).  On  rencontre  aussi  ce  nom  dans  les  inscriptions  : 
Canius  Crescens,  T.  Canins  Cinnamus,  T.  Canins  Aeter- 
nalis  et  L.  Canius  Cinna  dans  deux  inscriptions  de  Hon- 
grie (4).  On  a  trouvé  à  Grado,  près  de  Trieste,  la  stèle  fu- 
néraire de  T.  Canius  Restitutus  (5). 

*Canio$ùus,  Kagnoscus^  aujourd'hui  Saint- Jacques-de-Ca- 
gnosc,  commune  de  Gonfaron  (Var)  (6),  est  le  dérivé  li- 
gure correspondant  au  gaulois  Caniacus.  Le  dérivé  latin 
est  Canianus  •  on  trouve  dans  une  charte  de  Ravenne,  au 
neuvième  siècle,  un  fwidus  Canianus  CI), 

Cahanciagus  =s  *  CarantiaciAs  est  dans  un  diplôme  de 
Tannée  901 ,  en  faveur  de  l'abbaye  de  Conques ,  le  nom 
d'une  villa  située  dans  le  Rouergue  (8)  ;  c'est  aujourd'hui 
Cransac  (Aveyron). 

*  Carantiaaus  dérive  du  gentilice  gallo-romain  Carantius 
étudié  p.  132 ,  134 ,  et  qui  dérive  lui-même  du  nom  gau- 
lois Garantes.  Dans  le  nord  de  la  France ,  Carantiacus  est 
le  primitif  qui  explique  les  six  noms  de  communes  :  Ca- 
rency  (Pas-de-Calais)  ;  Charancieu  (Isère)  ;  Charencey  (Côte- 


(1)  De  lingua.  Ia(tna,  livre  VI,  c.  81;  édit.  Mûller,  p.  105. 

(2)  Epigrammes,  livre  III,  20,  64;  livre  VII,  69;  cf.  Teuffel,  Geschichie  der 
mmischen  Literatur,  3"  édit.,  p.  736.  De- Vit,  Onomasiicorij  t.  II,  p.  105. 

(3)  De  oratore,  livre  II,  c.  69,  §  278.  De  officiis,  Hvre  III,  c.  14,  g  58. 

(4)  C.  J.  L.,  m,  4150,  4250. 

(5)  Ihid,,  III,  8353. 

(6)  Cartulaire  de  Saint-Victor  de  Maraeillet  1. 1,  p.  388;  cf.  Ghainosc,  tbtd., 
p.  348. 

(7)  Fantuzzi,  Monumenti  Ravennati,  1. 1,  p.  6. 

(8)  Desjardins,  Cartulaire  de  l'abbaye  de  Conques,  p.  274. 


212  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

d'Or);  Charency  (Jura),  (Meurthe-et-Moselle);  Charensat 
Puy-de-Dôme.  En  comptant  la  forme  méridionale  Cransac, 
(Aveyron) ,  nous  trouvons  sept  noms  de  communes  qui 
s'expliquent  par  *  Carantiacus  (1).  Il  faut  en  distinguer 
Charentay  (Rhône)  =  *  Carantacus. 

Carisiacus  ,  aujourd'hui  Quierzy  (Oise) ,  était  souvent  la 
résidence  des  princes  carlovingiens  ;  on  a  quatorze  diplô- 
mes de  Gharlemagne,  sept  diplômes  de  Louis  le  Débon- 
naire, datés  de  Quierzy  (2).  Un  autre  Carisiacus  était  situé 
au  comté  de  Brioude  dans  la  viguerie  d'Usson  (Puy-de- 
Dôme)  (3). 

Le  gentilice  qui  explique  ce  nom  de  lieu  se  présente 
avec  deux  orthographes  différentes  :  on  trouve  Charisius  et 
Carisius.  La  première  orthographe  a  été  constatée  dans  le 
nom  de  plusieurs  personnages  historiques.  Tels  sont  : 
T.  Charisius,  triumvir  monetalis  au  temps  de  César;  ses 
monnaies  ont  été  frappées  vers  les  années  45  et  44  avant 
J.-C;  P.  Charisius,  legatus  pro  praetore  d'Auguste  en  Lu- 
sitanie,  de  l'an  25  à  l'an  22  avant  J.-C.  ;  pendant  son  gou- 
vernement ,  il  réprima  les  révoltes  des  Astures  et  des  Can- 
tabres.  Nous  aurions  tort  d'oublier  le  grammairien  FI. 
Charisius  Sosipater  dont  il  existe  encore  des  écrits  et  qui 
vivait  vers  la  fin  du  quatrième  siècle  ou  le  commencement 
du  cinquième  (4). 

L'orthographe  Carisius  est  celle  que  nous  oflfrent  les 
inscriptions.  On  a  trouvé  à  Coblentz  la  stèle  funéraire 
du  vétéran  T.  Carisius  Alba  (5).  Le  musée  d'Avignon  pos- 
sède une  dédicace  à  Vulcain  par  le  préteur  T.  Carisius  (6). 
Il  existe  à  Die  une  dédicace  à  une  divinité  locale  par 


(1)  Desjardins,  C&rt.  de  l'abbaye  de  Conques,  p.  57. 

(2)  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  462,  col.  2. 

(3)  Cartulaire  de  SauxUlange,  édit.  Doniol,  p.  136. 

(4)  De- Vit,  Onomasticon,  t.  II,  p.  248,  249. 

(5)  Brambach,  493. 

(6)  Uerzog,  Galliae  Narbonensis  provinciae  romanae  historia,  t.  II,  p.  85, 
n*  403. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACU8  AU  MOYEN  AGE.  213 

L.  Carisius  Serenus,  sévir  augustal  (i).  Les  noms  de  L.  Ca- 
risius  Faber  se  lisent  dans  une  inscription  d'Âdria,  en 
Italie  (2). 

Carraciacus  est  une  localité  dont ,  en  702 ,  le  roi  Chil- 
debert  III  a  daté  un  jugement  (3)  ;  il  ne  faut  pas  la  confon- 
dre avec  Carisiacus  (4)  et  nous  n'en  connaissons  pas  la  si- 
tuation, peut-être  Charcé  (Maine-et-Loire). 

Carraciacus^  orthographe  de  basse  époque  pour  Caratia-- 
eus  dont  il  y  a  un  exemple  chez  Frédégaire  (5),  dérive  du 
gentilice  Caratius.  On  a  trouvé  à  Saverne  le  monument 
funèbre  d'un  certain  Caratius  (6).  Une  autre  inscription 
a  fourni  les  noms  de  Sex.  Caratius  Onesimus  (7). 

Catiacus,  nom  d'une  villa  située  en  Anjou  et  dont  Tab- 
baje  de  Priim  est  reconnue  propriétaire  par  un  diplôme  de 
Charlemagne  donné  en  797  (8),  est  probablement  aujour- 
d'hui Chacé  (Maine-et-Loire). 

Catius  est  un  gentilice  fréquent  à  Rome.  Q.  Catius, 
édile  deux  cent  dix  ans  avant  notre  ère,  se  fit  remarquer, 
dit  Tite-Live,  par  les  jeux  magnifiques  qu'il  donna  (9). 
T.  Catius  Insuber ,  philosophe  épicurien ,  écrivit  quatre  li- 
vres «c  de  la  nature  des  choses  et  du  souverain  bien  »; 
Cicéron,  dans  une  lettre  écrite  Tannée  45  avant  notre  ère, 
le  cite  et  nous  apprend  qu'à  cette  date  la  mort  de  cet  au- 
teur était  toute  récente  (10).  Il  y  «eut  plusieurs  consuls  du 


(1)  Hêrzog,  idtd.,  t.  II,  p.  99,  n*  465. 

(2>C./.  L.,  V,  2328;  cf.  VI,  14404,  14405,  et  De-Vit,  Onomaeticon,  t.  II, 
p.  248. 

(3)  Tardif,  Monuments  higtoriques,  p.  36,  col.  1;  cf.  PerU,  Diplom&tum 
imperii  tomus  primus^  p.  65. 

(4)  Longnon,  Examen  géographique  du  tome  /*'  des  Diplomata,  p.  16,  17. 

(5)  Frédégaire,  1.  IV,  c.  27;  édit.  Krusch,  p.  31, 1.  27. 

(6)  Brambacb,  1862. 

(7)  De-Vit,  Onomasticon,  t.  II,  p.  127. 

(8)  Sickel,  Acta  Karolinorumy  t.  II,  p.  59,  n*  150. 

(9)  Tite-Utre,  XXVII,  c.  6. 

(10)  Voyez  les  textes  réunis  par  Teuffel ,  Geschichte  der  rœmischen  lite- 
ratur,  3"  édit.,  p.  301,  et  par  De-Vit,  Onomasticon,  t.  II,  p.  181. 


214  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

nom  de  Catius  :  Ti.  Catius  Caesius  Fronto,  Tàn  96  de  no- 
tre ère;  Â.  Catius  Sabinus,  en  210  et  en  216;  Sex.  Catius 
Clementinus  en  230  (1).  Ce  gentilice  pénétra  en  Gaule,  té- 
moin le  monument  funèbre  élevé  à  C.  Catius  Driburo, 
utriculaire,  c'est-à-dire  fabricant  d'outrés,  à  Lyon,  par 
Catius  Pupus  son  fils  et  par  Catia  Silvina,  sa  femipe;  oa 
a  trouvé  ce  monument  près  de  Lyon  (2).  On  a  tiré  du 
sol  même  de  cette  ville  la  stèle  funéraire  élevée  à  la  mé- 
moire de  Catia  Severa  (3).  Le  Musée  de  Nimes  possède 
Tépitaphe  de  Catia,  fille  de  Catius  (4).  On  a  trouvé  à  Saint- 
Paul-Trois-Châteaux  celle  de  Catius  TertuUinus  (5). 

Catulliâgus  est  le  nom  primitif  d'une  villa  qui  a  pré- 
cédé la  ville  de  Saint-Denis,  près  Paris;  cette  villa  a 
changé  de  nom  à  cause  de  l'importance  acquise  par  l'ab- 
baye fondée  au  sixième  siècle  sous  le  vocable  du  premier 
évéque  de  Paris  (6).  Une  autre  localité  de  même  nom,  dans 
une  autre  partie  de  la  France,  appartenait  à  l'église  de 
Lyon;  elle  est  appelée  Caduliacus  dans  plusieurs  diplômes 
de  la  seconde  moitié  du  neuvième  siècle  (7)  ;  dans  ces  do- 
cuments ,  il  s'agit  de  Chelieu  (Isère). 

CatuUius,  d'où  vient  Catulliacus,  est  un  gentilice  rare,  mais 
dont  il  y  a  cependant  quelques  exemples.  Ainsi ,  près  de 
^  Corno  en  Italie,  en  Tan  104  de  notre  ère,  M.  CatuUius  Mercator 
et  M.  CatuUitis  Secundus  élevèrent  un  monument  aux  dées- 
ses dites  Matronae  (8).  On  conserve  à  Trêves  le  monument 


(l)De-Vit,  Onomasticon,  t.  Il,  p.  185;  cf.  C.  /.  L.,  VI,  14589-14596. 

(2)  Boissieu,  Inscriptions  de  Lyon,  p.  403. 

(3)  Boissieu,  tbid.,  p.  483. 

(4)  Allmer,  Revue  épigr&phique,  t.  I,  p.  406,  n'  451. 

(5)  Rev.  épigr.^A.  II,  p.  25,  n»  474. 

(6)  Nous  trouvons  l'orthographe  C&tulliacus  dans  les  Gesta  Dagoberti 
Francorum  régis,  c.  2;  chez  Dom  Bouquet,  t.  II,  p.  580  d,  édition  Krnsch, 
p.  401,  ligne  24,  et  dans  une  charte  de  Tannée  1154  (Tardif,  Monuments  his- 
toriques, p.  278).  Aimoin,  De  gestis  Francorum^  livre  IV,  c.  17,  écrit  Catu- 
liacus  par  une  seule  l  (Dom  Bouquet,  III,  125  ej. 

(7)  863-869,  Cartulaire  de  l'église  cathédrale  de  Grenoble,  p.  71  ;  885,  ibid., 
p.  11;  892,  ibid,,  p.  73. 

(8)  C.  /.  L.,  V,  5252. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  215 

funèbre  de  M.  Catullius  Martialis  (i).  Le  musée  de  Lyon 
possède  Tépitaphe  d'une  femme  appelée  CatuUia  Ca- 
milla(2). 

Cauciactjs  est  l'endroit  où  fut  enterré  Childebert  III, 
mort  en  711,(3).  C'est  aujourd'hui  Choisy-sur-Aisne  (Oise). 
Bertrade,  ou  Berte,  mère  de  Charlemagne,  y  mourut  en 
783  (4).  Il  y  eut  dans  cette  localité  une  abbaye  de  Saint- 
Etienne  (5)  qui  fut  plus  tard  réunie  à  l'abbaye  de  Saint- 
Médard  de  Soissons  ;  l'auteur  de  cette  réunion  serait , 
dit-on,  Louis  le  Débonnaire  ;  mais  le  diplôme  est  faux  (6). 
Nous  trouvons  ce  nom  écrit  Cautiacus  dans  un  diplôme 
sans  date  de  Charles  le  Chauve  (7). 

Cauciacus ,  écrit  avec  un  c  à  une  date  où  c  et  ^  suivis  à*i 
se  confondent ,  peut  venir  soit  du  gentîlice  Caucius ,  soit 
du  gentilice  Cautius,  tous  deux  peu  célèbres,  mais  connus 
par  les  inscriptions.  Le  nom  de  M.  Caucius  se  lit  dans 
une  inscription  de  Bénévent  (8)  ;  le  village  appelé  Licalci , 
prés  de  Vitolano ,  non  loin  de  Bénévent ,  paraît  avoir  été 
fondé  et  possédé  uù  certain'  temps  par  une  gens  Caucia 
dont  le  plus  ancien  membre  connu  aurait  été  P.  Caucius , 
citoyen  romain  (9)  ;  le  monument  funèbre  d'A.  Caucius  Epa- 
phroditus  est  conservé  au  musée  de  Naples  (10).  Quant  à 
l'orthographe  Cautius,  elle  est  celle  de  l'épitaphe  du  lé- 
gionnaire vétéran  L.  Cautius,  qui  appartient  au  musée  de 


(1)  Brambacb,  n*  749. 

(2)  Boissieu,  Inscriptions  de  Lyon,  p.  505. 

(3)  Continuation  de  Frédégaire^  2*  partie,  c.  104,  chez  Dom  Bouquet,  II, 
4S3  b;  dans  rédition  Krusch,  p.  172. 1.  16,  Cauciaecus  avec  ae  ss  a. 

(4)  Chronique  abrégée  chez  Dom  Bouquet,  V,  29  c.  Annales  de  Metz,  ibid., 
3Ud. 

(5)  Liber  translationis  reliquiarum  S,  Sebastiani,  chez  Dom  Bouquet, 
VI,  323  a. 

(6)  Dom  Bouquet,  VI,  539;  cf.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  422. 

(7)  Tardif,  Monuments  historiques,  n*  212,  p.  136. 

(8)  C.  /.  Z,.,  IX,  1784. 

(9)  /Wd.,  IX,  2131. 

(10)  Ibid.y  X,  2245. 


216  LIVRE  II.  CHAPITRE  n. 

Vienne  en  Autriche  (i).  Caucius  et  Gautius  sont  deux  mots 
différents  dérivés  Tun  de  caucus  «  vase  à  boire  »,  Tautre 
de  cauttcs  «  prudent,  adroit.  » 

Il  y  ,en  France  cinq  villages  du  nom  de  Choisy  =  Cau- 
ciacus  ou  Cautiaous ,  savoir  :  deux  dans  l'Oise ,  les  trois  au- 
tres, dans  la  Haute-Savoie,  Seine-et-Marne  et  la  Seine. 
Chaussy  (Loiret),  Chaussy  (Seine-et-Oise),  Choisey  (Jura), 
Chouzé-sur-Loire  (Indre-et-Loire),  Chouzy  et  Choussy 
(Loir-et-Cher) ,  paraissent  avoir  la  même  origine.  Choisies 
(Nord)  suppose  un  primitif  Cauciacae  ou  CauHctcas,  sous- 
entendu  domus  ou  villae. 

L'ortographe  Camiacus  substituée  à  Cauciacus  dans  quel- 
ques documents  où  il  est  question  de  Choisy-sur-Aisne  est 
relativement  moderne  (2).  Il  ne  parait  pas  avoir  existé  de 
gentilice  Cousins.  Causia^  fille  d'Occus,  qui  fit  élever  dans 
les  environs  de  Klagenfurt ,  un  monument  funèbre  à  Ter- 
tius,  son  mari,  affranchi  de  César,  est  désignée  par  un  nom 
barbare,  qu'il  ne  faut  pas  confondre  avec  un  gentilice  ro- 
main (3). 

Cauliaca  ,  villa  donnée  à  l'abbaye  de  Notre-Dame  d'Au- 
xerre,  par  l'évéque  Vigile  en  670,  est  aujourd'hui  Chouilly, 
portion  du  territoire  de  la  ville  d'Auxerre  (Yonne)  (4).  Son 
nom  dérive  du  gentilice  Caulius. 

Caulius  est  le  nom  du  sénateur  romain  L.  Caulius  Mer- 
gus,  un  des  meilleurs  juges  dont,  nous  dit  Cicéron,  on  eut 
conservé  la  mémoire  (5).  D'autres  Caulius  paraissent  avoir 
été  moins  célèbres.  Tels  sont  :  P.  Caulius  Coeranus,  mar- 
chand dont  la  tombe  est  venue  de  Pouzzoles  au  musée  de 


(1)  C.  /.  L.,  III,  4463. 

(2)  Chronique  de  SBini  Médard  de  Sotssonc,  chez  Dom  Bouquet,  III, 
367  a.  Cette  chronique  est  du  treizième  siècle.  Vie  de  saint  Drausius,  chez 
Dom  Bouquet,  III,  610  c. 

(3)  C.  /.  L.,  III,  4987. 

(4)  Pardessus,  II,  152;  cf.  Quantin,  Dictionnaire  topographique  du  dé- 
partement de  l'Yonne,  p.  36. 

(5)  Pro  Cluentio,  c.  38,  §  107. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUB  AU  MOYEN  AGE.  217 

Naples(l);  P.  Caulius  Restitutus,  dont  le  nom  est  inscrit  sur 
un  diplôme  donné  par  Trajan  en  l'an  105  de  notre  ère  (2); 
P.  Caulius  Vitalis  dont  les  noms  se  lisent  sur  le  même  di- 
plôme et  sur  un  autre  donné  par  le  même  empereur  deux 
ans  auparavant,  etc.  (3). 

Chaulhac  (Lozère) ,  Choilley  (Haute-Marne) ,  et  Chouilly 
(Marne) ,  nous  offrent  probablement  des  formes  modernes 
d*un  plus  ancien  Cauliaous. 

Gblsiagus  ,  nom  d'une  villa  mentionnée  dans  une  do- 
nation à  Saint-Germain-des-Prés  en  849  (4),  dérive  de 
CeUius. 

Celsius  est  un  gentilice  obscur  qu'on  trouve  dans  diver- 
ses parties  de  Tempire  romain.  Un  grand  nombre  de  lam- 
pes recueillies  à  Naples  ou  aux  environs  et  en  Sicile,  por- 
tent la  signature  du  fabricant  qui  s^appelait  Celsius  (5).  Un 
certain  Celsius  Aprilis  servit  dans  la  cavalerie  au  camp  de 
Lambèze  avec  grade  à'optio,  c'est-à-dire  de  lieutenant  (6). 
A  Tarragone  en  Espagne ,  Celsia  Flavina  est  une  mère  qui 
élève  une  tombe  à  sa  fille  (7).  A  Strasbourg,  T.  Celsius  Vic- 
torinus  apparaît  dans  une  inscription  religieuse  de  Tan  202 
de  notre  ère  (8). 

CiPiLiACus ,  villa  située  dans  les  environs  d'Amiens  fut 
donnée  à  l'abbaye  de  Corbie  par  le  roi  Clotaire  III,  en 
659  (9). 

Son  nom  dérive  de  Cipellius.  Cipellius,  gentilice  connu 


(1)  c.  /.  L.,  X,  ld31. 

(2)  tbid.,  t.  m,  p.  865. 

(3)/6id.,  t.  III,  p.  864,  865;  cf.  VI,  14612-14622. 

(4)  Longnon,  Polyptyque  de  l'abbaye  de  Saint-Germain  des  Prés,  p.  153. 

(5)  C.  /.  L.,  X,  8053,  46. 

(6)  /5id.,  VIII,  2568,  18. 

(7)  /Wd.,  II,  4119. 

(8)  Orelli-Henzen,  6778;  Brambach,  1883. 

(9)  Pertz,  Diplomatum  imperii  tomus  primus,  p.  37,  ligne  22  ;  Pardessus, 
D4>I<mula,  II,  115, 


218  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

par  une  inscription  (1),  est  lui-même  un  dérivé  de  Cipius, 
nom  beaucoup  plus  fréquent  et  porté  notamment  par  un 
personnage  qui  avait  fourni  aux  Romains  le  type  légendaire 
du  sommeil  simulé;  d*où  le  proverbe  «  non  omnibus 
dormio  (2).  » 

Clamenciacus  ,  pour  Clementiacus ,  est  le  nom  d'une  vi/to 
donnée  à  Tabbaye  de  Gigny,  par  Raoul,  roi  de  Bourgogne, 
en  903  (3). 

Il  dérive  du  gentilice  Clementius.  Clementius  Silvius 
dédia  au  génie  de  l'empereur  Gallien  une  stèle  aujourd'hui 
conservée  au  musée  de  Pesth  (4). 

*  Clariacus  qui  explique  le  terminus  Clariacensis  d'un  di- 
plôme de  l'année  667  (5)  aujourd'hui  Cléry  (Loiret)  comme 
nous  l'apprend  M.  Longnon,  dérive  de  Clarius,  gentilice 
rare,  dont  on  n'a  trouvé  jusqu'à  présent  qu'un  exemple 
certain  dans  les  inscriptions  et  qui  a  donné  le  surnom  dé- 
rivé Clarianus  (6). 

Clérieux  (Drôme),  Clarei^  au  douzième  siècle,  est  un 
ancien  Clariacus  (7). 

Clippiacus  ou  Clipiacus  est  l'ancien  nom  de  Clichy,  près 
Paris.  Le  plus  ancien  document  où  ce  nom  de  lieu  figure 
est  un  diplôme  du  roi  Dagobert  P%  qui  remonte  à  l'année 
631  ou  632.  Nous  ne  pouvons  savoir  laquelle  des  deux  or- 
thographes ,  par  un  seul  p  ou  par  un  double  p ,  le  scribe 
avait  adoptée.  Le  commencement  du  mot  n'est  plus  lisible. 
Les  éditeurs  les  plus  récents  ont  restitué  [Cli]piaco^  avec 


(1)  De- Vit,  Onomasticon,  t.  Il,  p.  288. 

(2)  Voy.  De-Vit,  Onom&sticon,  t.  II,  p.  288;  cf.  C.  /.  L.,  VI,  14832,  14833, 

(3)  D.  Bouquet,  IX,  692  D. 

(4)  C.  /.  L.,  III,  4424. 

(5)  Pardessus,  Diplomata,  II,  143. 

(6)  De-Vit,  Onom&sticon^  t.  II,  p.  297,  col.  2. 

(7)  GhevaUer,  Cartulaire  de  l'abb&ye  de  Saint-Chaffre,  p.  149. 


LA  DÉSINENCE  -I-AGUS  AU  MOYEN  AGE.  219 

un  seul  p.  Peut-être  faudrait-il  restituer  [Clip]piaco  (1)  avec 
deux  p. 

Nous  trouvons  le  double  p  dans  un  diplôme  de  Chilpé- 
rié  II,  de  Tannée  717,  où  le  nom  qui  nous  occupe  est  écrit 
trois  fois  Clippiaco  (2).  C'est  l'orthographe  de  la  chronique 
dite  de  Frédégaire ,  qui  nous  apprend  qu'en  l'année  625 , 
Dagobert  P',  sur  l'ordre  de  son  père  auquel  il  était  associé  et 
allait  bientôt  succéder,  vint  à  Clichy  près  de  Paris  et  s'y 
maria  (3).  Deux  ans  plus  tard,  suivant  la  môme  chronique, 
Clotaire  tint  à  Clichy  une  assemblée  des  grands  et  des  évo- 
ques de  Bourgogne  et  de  Neustrie  (4).  Dans  ces  deux  cir- 
constances, on  lit  chez  le  chroniqueur  comme  dans  le  di- 
plôme, Clippiaco  9  par  deux  p. 

Ces  deuxp  sont  réduits  à  un  1®  dans  deux  diplômes,  l'un 
de  Tannée  832,  l'autre  de  l'année  862,  émanés,  l'un  d'Hil- 
duin,  abbé  de  Saint-Denis  (5),  l'autre  de  Charles  le 
Chauve  (6)  ;  2"  dans  deux  passages  de  la  chronique  de  Fré- 
dégaire et  dans  un  passage  du  Gesta  regum  Prancœ^m  (7). 

La  môme  alternance  entre  le  p  simple  et  le  double  p 
nous  est  offerte  par  plusieurs  documents  relatifs  à  un  au- 
tre Clippiaous  ou  Clipiaous  siiué  dans  le  diocèse  de  Lyon  (8). 
M.  Longnon  nous  fait  observer  que  le  double  p  s'est  main- 

(1)  Tardif,  Monuments  historiques  ^  p.  6.  Pertz,  Diplomatum  imperii  to- 
musprimus,  p.  16. 

(2)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  42,  col.  1  ;  Pertz,  Diplomatum  im- 
perii tomus  primus,  p.  77,  lignes  33,  34,  41. 

(3)  Frédégaire,  c.  53;  chez  Dom  Bouquet,  t.  H,  434  a;  Krusch,  Scripto- 
res  rerum  merovingicarum ,  t.  II,  p.  147,  1.  1;  cf.  c.  78,  ibid,,  p.  160,  1.  19, 
22.  Le  territoire  de  Clichy  était  alors  plus  étendu  qu*aujourd*hui  et  com- 
prenait le  territoire  de  Saint-Ouen,  où  se  trouvait  le  palais  des  rois. 

(4)  Frédégaire,  c.  55;  chez  Dom  Bouquet,  t.  II,  p.  435  a;  Krusch,  Scrip- 
tores  rerum  merovingicarum,  t.  II,  p.  118,  1.  12. 

(5)  Tardif,  Monuments  historiques^  p  85. 

(6)  Tardif,  i  nd.,  p.  117. 

(7)  Frédégaire,  livre  IV ,  c.  78  :  Krusch,  Scriptores  rerum  merovingica^ 
rum,  t.  II,  p.  161,  1.  2;  c.  83,  ibid.,  p.  163,  1.  16;  Clepiaco  ou  CHpiago, 
dans  le  Liber  historiae  Francorum,  c.  47,  ibid.,  p.  322,  1.  1-2,  etc. 

(8)  Voyez  le  Gartulaire  d*Ainay ,  publié  par  Aug.  Bernard ,  Car  tu/aire  de 
Vsbbaye  de  Savigny,  t.  II  ;  Clippiacus,  p.  261  ;  Clippiacensis,  ibid,  ;  Clipiacus^ 
p.  614,  616,  617,  621,  671,  674,  675,  676;  cf.  1075, 


220  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

tenu  dans  l'orthographe  moderne  du  nom  de  cette  localité, 
aujourd'hui  Cleppé  (Loire)  ;  cette  forme  justifie  la  vieille  or- 
thographe Clippiacus  par  deux  p,  car  Clipiacus  par  un  seul 
p  aurait  donné  Clevé.  On  n*a  jusqu'ici  trouvé  qu'un  seul  p 
dans  la  plus  ancienne  forme  du  nom  de  Clapiers  (Hérault), 
Clipiagum  au  dixième  siècle  (1). 

On  trouve  les  deux  variantes  dans  l'orthographe  du  gen- 
tilice  romain  dont  ce  nom  de  lieu  est  dérivé.  On  conserve 
à  Rome  les  épitaphes  de  L.  Cleppius  et  de  Cleppia  (2).  Le 
nom  de  Q.  Cleppius  se  lit  dans  une  inscription  de  Venosa 
en  Campanie  (3).  On  a  trouvé  dans  la  même  région  le  mo- 
nument funèbre  de  M.  Cleppius  Maximinus  (4).  Les  deux  p 
persistent  et  nous  trouvons  déjà  Vi  de  la  première  syllabe 
de  Clippiacus  dans  le  nom  de  femme  dérivé  Clippiana,  ins- 
crit deux  fois  sur  un  monument  funèbre  de  Bénévent  (5). 
C'est  l'orthographe  la  plus  fréquente  des  textes  mérovin- 
giens relatifs  à  Clichy.  Mais  des  inscriptions  romaines, 
d'accord  avec  l'autre  notation  du  nom  de  la  même  localité, 
nous  offrent  aussi  l'orthographe  Clepius  avec  un  seul  p. 
On  peut  citer  une  stèle  funéraire  de  Cittanova  en  Istrie, 
où  ce  gentilice  apparaît  quatre  fois  (6).  Deux  inscriptions 
gardent  le  souvenir  de  C.  Clepius  Sodalis  à  San  Séverine 
en  Ombrie  (7). 

CocciACus  est  un  nom  de  lieu  mentionné  dans  un  acte 
faux,  mais  qui  existait  dès  le  neuvième  siècle  et  qui  était 
attribué  à  Louis  le  Débonnaire  (8).  On  trouve  la  variante 


(1)  Eug.  Thomas ,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  VHé- 
rault^  p.  46. 

(2)  C.  /.  L.,  VI,  15679,  15680. 

(3)  Ibid,,  IX,  465. 

(4)  Ihid.,  IX,  1434. 

(5)  Ibid,,  IX,  1792. 

(6)  Ibid.,  V,  381. 

(7)  Ibid.,  IX,  5597,  5598. 

(8)  Dom  Bouquet,  t.  VI,  p.  631  a;  cf.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  U, 
p.  398,  n»  5. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  2i\ 

CocHacus  dans  un  diplôme  de  Charlemagne  en  802  (1).  Ces 
'  diplômes  étant  donnés  en  faveur  de  la  cathédrale  du  Mans, 
il  s'agit  de  la  même  localité  dans  tous  les  deux,  et  cette  lo- 
calité peut  être  Cossé-en-Champagne  ou  Cossé-le-Vivien , 
deux  communes  du  département  de  la  Mayenne.  Une  mon- 
naie mérovingienne  nous  offre  les  orthographes  Cociaco^ 
avec  un  seul  c ,  et  Coccaco  sans  i.  Mais  on  ignore  à  quelle 
localité  ces  légendes  monétaires  peuvent  se  rapporter  (2). 
Cocciactis  et  Coctiacus  dérivent  du  gentilice  Coccius. 

Cocceius  est  plus  fréquent  que  Coccius  ;  c'est  un  genti- 
lice romain  fort  connu,  et  qui,  entre  autres  personnages  no- 
tables, a  été  porté  par  l'empereur  Nerva.  Coccius  semble 
être  une  variante  de  Cocceius.  On  conserve  à  Bene  en  Pié- 
mont, le  monument  funèbre  d'un  affranchi  appelé  L.  Coccius 
Stacius  et  de  sa  femme,  Coccia  Erotis  (3).  L'orthographe 
Cocius  avec  un  seul  c  a  été  préférée  dans  une  inscription 
de  Canosa  où  se  lisent  les  noms  de  l'affranchi  C.  Cocius 
Chresimus  (4) ,  et  dans  les  marques  d'un  tuilier  d'Italie  et 
d'un  potier  de  Gaule  ;  au  génitif  Coci  (5). 

CoMUGus  était  en  802  une  villa  de  l'église  du  Mans  (6). 
Il  vaudrait  mieux  écrire  *  Commiacus ,  mot  dérivé  de  Com- 
mius.  Commius  fut  le  nom  d'un  roi  des  Atrebates,  d'abord 
ami  des  Romains ,  qui  ensuite  rentra  dans  le  parti  natio- 
nal (7).  Le  même  nom ,  avec  l'orthographe  Commios ,  pas 
encore  latinisé,  se  lit  sur  des  monnaies,  tant  de  Gaule  que 
de  Grande-Bretagne  (8).  Sous  l'empire  romain,  ce  nom  de- 


(i)  Dom  Bouquet,  V,  768  e,  cf.  Sickel,  Acla,  K&rolinorum ,  t.  II,  p.  67, 
n«  181. 

(2)  A.  do  Barthélémy ,  dans  la  Bibliothèque   de  l'Ecole  des  chartes , 
t.  XXVI,  p.  454,  n-  227,  228. 

(3)  C.  /.  L.,  V,  7692. 

(4)  Ibid.y  IX,  370. 

(5)/btcf.,  V,  8110,  428.  Boissiou,  Inscriptions  antiques  de  Lyon,  p.  434, 
n"  38,  39.  Schuermans,  Sigles  figulins,  n»  1501. 

(6)  Dom  Bouquet,  V,  769  a.  Sickel,  Acla  Karolinorum,  t.  II,  p.  67,  n*  181. 

(7)  Voir  plus  haut,  p.  134,  147,  148. 

(8)  À.  de  Barthélémy,  dans  la  Revue  celtique,  t.  I,  p.  294. 


222  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

vint  un  gentilîce.  Le  nom  de  C.  Commius  L.  filius  se  lit 
dans  une  inscription  d'Istrie  (1)  et  celui  de  T.  Commius 
sévir  augustalis,  dans  une  inscription  de  Manduel  prés  de 
Nimes  (2). 

Le  Comiacus  qui  appartenait  à  l'église  du  Mans  paraît 
être  Congé-sur-Orne  (Sarthe).  C'est  par  Commiacus  que 
s'explique  Comiac ,  nom  d'une  section  de  la  commune  de 
Logrian  et  Comiac-de-Florian  (Gard). 

Crisciacus  est  le  nom  d'un  palais  des  rois  mérovin- 
giens (3)  et  d'une  localité  donnée  par  le  roi  Childéric  II, 
vers  l'année  670  à  Lambert ,  abbé  de  Fontenelle  (4).  Il  dé- 
rive de  Crixsius.  Crixsius  était,  en  236,  le  gentilice  de 
Crixsius  Adnamatus  ,  l'un  des  hastiferi  de  la  cité  des  Mat- 
tiaci  sur  la  rive  droite  du  Rhin ,  comme  nous  l'apprend 
une  inscription  du  Musée  de  Mayence  (5).  Deux  inscrip- 
tions de  Lyon  nous  ont  'conservé  les  noms  de  M.  Crixsius 
Antonius  et  de  sa  fille,  Crixsia  Secundina  (6).  Ce  gentilice 
est  dérivé  de  Crixsus,  surnom,  ou  nom  servile  qu'on  a 
trouvé  inscrit  sur  les  murs  de  Pompéi  (7).  Il  a  été  rendu 
célèbre  par  un  gladiateur  de  Capoue,  d'origine  gauloise,  qui 
fut  un  des  chefs  des  esclaves  révoltés  contre  Rome  et  qui 
périt  en  combattant,  l'an  71  avant  notre  ère  (8). 

C'est  à  Criœsiacus,  venu  de  Crixsius,  que  paraissent  re- 
monter dix  noms  de  communes,  savoir  :  cinq  Crécy,  deux 
dans  TAisne  et  un  dans  chacun  des  trois  départements 


(1)  c.  I.  L.,  v,  425. 

(2)  Herzog,  GaHiae  Narbonensis  histori&f  t.  II,  p.  52,  n*  253. 

(3)  Diplômes  :  de  Glotaire  III,  662  (Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  123; 
Pertz,  p.  36)  ;  —  de  Thierry,  III,  687  (Pardessus,  p.  203  ;  Pertz,  p.  51);  -  de 
Childebert  III,  709  (Pertz,  p.  67;  Tardif,  p.  36),  qui  nous  offre,  comme 
Frédégaire  (Krusch,  Scriptores  rerum  merovingicarum,  t.  II,  p.  169, 1.  15), 
la  variante  orthographique  Crisciaecus,  etc. 

(4)  Vte  de  saint  Lamberty  chez  Dom  Bouquet,  III,  585  a. 

(5)  Brambach,  n*  1336. 

(6)  Boissieu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon^  p.  507,  n"  34  et  35. 

(7)  C.  J.  L.,  IV,  1916. 

(8)  Tite-Live,  Periochae,  96.  Eutrope,  livre  VI,  c.  7.  Orose,  livre  V,  c.  25 
Cf.  De-Vit,  Onomasticon,  t.  II,  p.  501. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  223 

d'Eure-et-Loir,  de  la  Somme,  de  Seine-et-Marne;  Cressac 
(Charente);  Cressey,  (Côte-d'Or);  et  trois  Cressy  (Saône-et- 
Loire,  Seine-Inférieure,  Somme.  M.  Longnon  me  rappelle 
que  le  Crisdacus  où  se  trouvait  un  palais  des  rois  méro- 
vingiens est  Crécy-en-Ponthieu  (Somme). 

Crispiacus  est  le  nom  d'un  d'un  locus  situé  aux  envi- 
rons de  Grenoble  et  donné  à  Tabbaye  de  Saint-Jean-de- 
Maurienne  en  739  (1).  Il  y  avait  près  de  Laon  un  autre 
*  Crispiacus  d'où  vient  le  nom  de  la  Crispiacensis  finis  où 
Amand,  évêque  d'Utrecht,  avait  une  vigne  en  664  (2). 

Crispiacus  vient  de  Crispius  ;  Crispius  est  le  gentilice  :  de 
C.  Crispius  Hesperio,  sévir  de  Brescia  (3);  de  M.  Crispius 
Firmus  dont  la  stèle  funéraire  est  conservée  au  séminaire 
de  Suze  (4);  de  Crispius  Saturninus,  dont  une  dédicace  à 
Jupiter  a  été  trouvée  en  Hongrie  (5);  de  L.  Crispius,  dont 
les  noms  au  génitif  L.  Crispi  ont  été  écrits  sur  un 
vase  recueilli  à  Windisch,  en  Suisse,  Tantique  Vindo- 
nissa  (6);  de  T.  Crispius  Antiquus,  dont  le  monument  funè- 
bre a  été  découvert  à  Domessin,  Savoie  (7);  de  T.  Crispius 
Reburrus,  dont  le  nom  est  gravé  sur  Tampbithéâtre  de  Ni- 
mes  (8),  etc. 

Il  y  a  en  France  trois  communes  du  nom  de  Crépy 
(Aisne,  Oise ,  Pas-de-Calais),  et  une  commune  de  Crespy 
(Aube)  ;  Crépy  (Aisne)  paraît  être  la  finis  Crispiacensis  du  di- 
plôme de  664  cité  plus  haut.  Comparez  Crespian  (Gard) , 
dont  la  désinence  -an  vient  de  -anus, 

Crispiniacus   est  le  nom  d'une  villa  qui  fut   donnée 


(1)  Pardessus,  Diplom&ta,  t.  II,  p.  376. 
(î)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  13.3. 

(3)  C.  /.  L.,  V,  4418. 

(4)  Ibid^  V,  7283. 

(5)  Ibid.,  III,  1030. 

(6)  Mommsen,  Inscriptiones  helveticae,  n*  352,  118. 

(7)  Allmer,  Inscriptions  antiques  de  Vienne,  III,  p.  215. 

(8)  Allmer,  Revue  épigr&ghique,  t.  I,  p.  374,  n*  417. 


224  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

comme  réparation  de  Tinsulte  commise  envers  saint  Judoc 
en  violant  sa  sépulture  ;  c'était  probablement  vers  la  fin  du 
septième  siècle  (1)  ;  l'auteur  de  la  donation  était  un  duc 
de  Ponthieu.  Ce  nom  de  lieu  dérive  du  gentilice  Crispi- 
nius. 

Crispinius  Félix  éleva  à  sa  femme  un  monument  funè- 
bre qu'on  a  trouvé  à  Salone  (2).  On  a  découvert  près  de 
Klagenfurt  et  transporté  dans  cette  ville  la  stèle  funéraire 
de  C.  Crispinius  Rufus  (3).  Sex.  Crispinius  Nigrinus  est 
Fauteur  d'une  dédicace  à  Mars  Caturix ,  trouvée  près  de 
Genève  (4). 

Il  n'y  a  pas  en  France  de  communes  qui  portent  le  nom 
de  Crépigny  ou  Crespigny.  Crépigny  est  un.  écart  de  la 
commune  de  Caillouel-Crépigny  dans  le  département  de 
l'Aisne;  Crespigny  fait  partie  de  la  commune  de  Saint- 
Jean-le-Blanc  (Calvados). 

Croniagus  apparaît  dans  un  diplôme  faux  du  pape  Jean  III, 
pour  l'abbaye  de  Saint-Médard  de  Soissons  (5). 

Cronius,  d'où  Croniacus  dérive,  est  un  gentilice  rare, 
porté  par  M.  Cronius  Sp.  f[ilius]  dans  une  inscription  de 
Lucera  en  Italie  (6),  et  par  Cronius  Eusebius  dans  une  ins- 
cription de  Rome  qui  date  de  l'an  399  de  notre  ère  (7). 
C'est  un  nom  grec  chez  Pline  quand  cet  auteur  nomme 
Cronius  parmi  les  plus  célèbres  graveurs  de  pierres  pré- 
cieuses (8).  On  connaît  plusieurs  exemples  du  nom  d'homme 
Kprfvtoç  dans  les  textes  grecs  ;  c'était  originairement  un  nom 
divin,  un  de  ceux  de  Zeus,  fils  de  Crcaos. 

De  Croniacus  peut  venir  le  nom  de  Crogny,  commune 


(1)  Vita  Sancti  Judoci,  c.  15;  chez  Dom  Bouquet,  III,  521. 

(2)  C.  J.  L.,  III,  2238. 

(3)  Ibid.,  III,  5074. 

(4)  Mommsen,  Inscripliones  helvetic&e^  n*  70. 

(5)  Pardessus,  Diplomataf  t.  I,  p.  122. 

(6)  C.  /.  L.,  IX,  848. 

(7)  Ibid.,  VI,  1715. 

(8)  Histoire  naturelle,  Uvre  XXXVII,  c.  4,  {  8. 


T-wT 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  225 

des  Loges-Margueron  (Aube),  et  celui  de  Crognac  com- 
mune de  Saint- Allier  (Dordogne). 

CuRCiACus  ou  Cursiacus.  La  première  orthographe  est 
celle  d'un  diplôme  faux  de  Clovis  II,  qui  daterait  de 
644  (1)  ;  la  seconde  est  celle  d*un  diplôme  également  faux 
de  Dagobert  I*"' ,  qui  daterait  de  636  (2).  Il  s'agit  de  Cour- 
eais  (Allier)  (3)  ;  la  bonne  orthographe  serait  Curtiacus  par 
un  t\  mais  les  textes  de  Tépoque  carlovingienne  rempla- 
cent ce  t  par  un  c.  Tel  est  le  diplôme  donné  par  Charle- 
magne  en  775  pour  confirmer  l'établissement  de  la  mansô 
canoniale  à  Saint-Martin  de  Tours  (4)  ;  le  Curciacus  dont  il 
s'agit  dans  ce  document  parait  être  Curçay  (Vienne)  (5).  Tel 
est  aussi  l'acte  de  la  donation  faite  par  Amalric  à  Saint-Mar- 
tin de  Tours  en  841  (6)  ;  le  Curciacus  mentionné  dans  ce 
document  est  aujourd'hui  Courçay  (Indre-et-Loire)  (7). 

Curciacus ,  ou  mieux  Curtiacus ,  vient  de  Curtius ,  gen- 
tilice  romain  célèbre  qui  remonte  à  la  période  légendaire  : 
on  connaît  les  récits  fabuleux  qui  parlent  d'abord  du  sa- 
biu  Curtius  Mettius ,  ou  Mettius  Curtius ,  mort  dans  une 
bataille  contre  le  roi  Romulus,  huitième  siècle  avant  notre 
ère,  à  l'endroit  qui  fut  plus  tard  le  forum  romain  (8),  puis 
du  jeune  romain  M.  Curtius  qui ,  en  l'an  362  avant  J.-C, 
se  serait  patriotiquement  précipité  dans  un  gouffre  mena- 
çant ouvert  au  milieu  du  forum  parla  colère  des  dieux  (9). 


(1)  Pertz,  Diplomaium  imperii  tomus  primus,  p.  180,  ligne  47.  Pardessus, 
Diplomata,  t.  II,  p.  81. 

(2)  Pertz,  Diplomaium  imperii  lomus  primus^  p.  159,  ligne  36.  Pardessus, 
Diplomata,  t.  Il,  p.  81. 

(3)  Longnon,  Examen  géographique  du  lome  premier  des  Diplomala  im- 
perii, p.  1. 

(4)  Dom  Bouquet,  V,  737  6;  cf.  Sickel,  Acla  Karolinorum ,  t.  II,'  p.  27, 
n-  42. 

(5)  Mabille,  La  pancarte  noire  de  Saint'Marlin  de  Tours,  p.  223;  cf.  69, 151. 

(6)  Martene,  Thésaurus  novus  anecdolorum,  t.  I,  col.  33  6. 

(7)  Habillo,  La  pancarte  noire  de  Sainl-Marlin  de  Tours  ^  p.  223;  cf.  81, 
155,  156. 

(8)  Tite-Live,  livre  I,  c.  12. 

(9)  Tite-Live,  livre  I,  c.  12;  livre  VII,  c.  6. 

15 


226  LIVRE  II.  CHAPITRE  IL 

G.  Curtius  Filo  fut  consul  Tan  446  avant  J.-C  (1).  On 
trouve  plusieurs  exemples  de  ce  gentilice  vers  la  fin  de  la 
république  et  sous  Tempire.  C'est  ainsi  que  dans  les  œu- 
vres de  Cicéron  on  voit  apparaître  :  le  préteur  C.  Curtius 
Peducaeanus,  le  sénateur  C.  Curtius;  le  tribun  militaire 
M.  Curtius  Postumus,  ami  de  César  et  qui  fut  assez  ambi- 
tieux pour  prétendre  au  consulat  ;  Cicéron  s'en  indigne 
dans  une  lettre  à  Atticus  (2).  Nous  citerons  aussi  le  séna- 
teur Curtius  Montanus ,  contemporain  de  Néron  et  de  Ves- 
pasien  et  connu  par  le  témoignage  de  Tacite  (3)  ;  enfin  le 
'plus  célèbre  de  tous,  Q.  Curtius  Rufus,  qui  vivait  dans  la 
seconde  moitié  du  premier  siècle  de  notre  ère  et  qui  écri- 
vit une  histoire  d'Alexandre. 

Outre  Courçais  et  Courçay,  il  y  a  en  France  quatre 
communes  dont  le  nom  semble  représenter  un  ancien  Cur- 
tiacus  ;  ce  sont  autant  de  Courcy  (Calvados,  Loiret,  Man- 
che, Marne). 

De  la  forme  latine  correspondante  Curtianus,  un  exem- 
ple est  donné,  vers  Tan  700,  par  une  charte  de  Ravenne 
où  est  mentionné  un  fundus  Curcianus^  lisez  Curtianus  (4). 

CusiACus,  nom  d'une  forêt  dans  un  diplôme  faux  de 
Dagobert  P"'  qui  daterait  de  Tannée  633  (5),  est  dans  un 
diplôme  du  roi  Eude  en  893,  un  fisc  royal  donné  par 
ce  prince  à  l'abbaye  de  Saint-Médard  de  Soissons  (6;. 
En  936 ,  dans  un  diplôme  de  Louis  d'Outremer ,  c'est  une 
propriété  de  l'église  cathédrale  d'Autun  (7).  Cusiacus  vient 
de  Cusius. 

Cusius  est  un  gentilice  romain  dépourvu  de  célébrité, 


(1)  Tite-Live,  livre  IV,  c.  1.  Dc-Vit,  Onom&siicon^  t.  II,  p.  519. 

(2)  Cicéron,  Ad  Aiiicum,  XII,  49. 

(3)  Tacite,  Annales,  XVI,  28,  29,  33;  Histoires,  IV,  40,  42. 

(4)  Fantuzzi,  Monumenti  Ravennati,  t.  I,  p.  21. 

(5)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  27.  Pertz ,  Dip.  im.  t,  primus,  p.  152, 
ligne  20. 

(6)  Dom  Bouquet,  t.  IX,  p.  460  d. 

(7)  Dom  Bouquet,  IX,  584  d. 


LA  UL'mntlItGE  -1-AUU8  AU  MOYEN  AGE.  227 

mais  connu  par  les  inscriptions.  Ainsi ,  on  a  trouvé  :  en 
Hongrie  le  monument  funèbre  de  Cusius  Callistio  (1)  ;  à 
Turin ,  les  tombes  de  T.  Cusius  Rufus  (2) ,  de  C.  Cusius 
Cavisius  et  de  Q.  Cusius,  frère  de  ce  dernier  (3).  Le  nom 
d'une  femme  qui  avait  le  même  gentilice,  CusiaHil[ara]  se 
lit  dans  une  inscription  du  musée  de  Naples  qui  provient 
(le  Capoue  (4). 

Le  Cusiacus  du  diplôme  du  roi  Eude  est  Cuizy-en-Almont, 
(.\isne)  (5).  D'autres  noms  de  communes  peuvent  s'expli- 
quer par  un  primitif  Cusiacus.  Ce  sont  :  Cuisy  (Meuse)  (6); 
Cuisy  (Seine-et-Marne)  ;  Cusey  (Haute-Marne);  Cuzac(Lot). 

DiTiAGUS ,  nom  d'une  villa  donnée  à  l'abbaye  de  Wissem- 
bourg,  en  Alsace,  en  713  (7),  est  écrit  Disciacu  dans  un  au- 
tre document  de  la  même  date  et  concernant  la  même 
donation  (8).  Le  nom  primitif  est  vraisemblablement'  De- 
ciacus ,  que  l'on  doit  reconnaître  aussi  dans  le  Disiacus 
d'une  charte  émanée  eu  672  de  Nivard ,  archevêque  de 
Reims,  pour  l'abbaye  d'Hautvillers  (9)  ;  ce  Disiacus  est  au- 
jourd'hui Dizy  (Marne)  (10). 

Decius  est  un  gentilice  romain  bien  connu;  les  plus  cé- 
lèbres de  ceux  qui  le  portèrent  sous  la  république  sont  deux 
P.  Decius  Mus,  l'un  consul  en  l'an  340  avant  notre  ère, 
l'autre  fils  du  précédent  et  quatre  fois  consul ,  la  première 
fois  en  312,  la  dernière  en  295,  fameux  pour  avoir  —  tous 
deux,  dit-on,  —  en  des  circonstances  désespérées,  assuré  la 
victoire  à  leur  armée  par  leur  mort,  en  exécutant  solcnnel- 

(1)  c.  1.  L.,  m,  4330. 

(2)  Jbid.,  V,  7027. 

(3)  Ibid.,  V,  7028. 
(1|  ma.,  X,  «îl. 

(5)  Matton,  Dfcfionnaire  lopographique  du  département  de  l'Aisne,  p.  90. 
(5)  Voyez  Licnarc]  ,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  la 
McuM,  p.  64. 
0)  Pardessus,  Diplomafa,  t.  II,  p.  439. 
(8)/bt((.,  (.  II,  p.  437. 

(9)  Ibid.,  t.  II,  p.  129. 

(10)  LoDgDon,  Elude  sur  les  pafff  de  la  Gaule,  2*  parCic,  p.  lî. 


228  LIVRE  IL  CHAPITRE  IL 

lement  les  prescriptions  du  cérémonial  romain  sur  la  «  de- 
votio  (1).  »  Ce  gentilice  pénétra  en  Gaule.  C'est  ainsi  que 
dans  une  inscription  de  Suisse,  remontant  à  Tan  8  de  notre 
ère,  on  a  trouvé  les  noms  de  P.  Decius  Esunertus  (2).  Une 
inscription  de  Savoie  rappelle  la  mémoire  de  Sex.  Decius, 
tribun  militaire,  contemporain  de  Tempereur  Tibère  qui 
mourut  Tan  37  après  J.-C.  (3).  Une  brique,  trouvée  à  Vienne 
(Isère),  porte  la  marque  d'A.  Decius  Alpinus  (4).  La  variante 
Deccius  par  deux  c  nous  est  offerte  à  Cologne  par  la  tombe 
du  légionnaire  C.  Deccius,  fils  de  Lucius  (5),  et  à  Lyon  par 
celle  de  Q.  Deccius  Verecundus  (6). 

DociACus ,  une  des  villae  de  Tabbaye  de  Saint-Martin  de 
Tours  en  775  (7),  est  aujourd'hui  Doussay  (Vienne)  (8). 

Docius  Elaesi,  dans  une  inscription  d'Espagne  transférée 
au  musée  de  Berlin,  est  le  nom  d'un  personnage  qui 
n'avait  pas  de  gentilice  (9).  Mais  une  inscription  du  musée 
de  Manheim  nous  donne  la  variante  Doccius  par  un  double 
c,  employée  comme  gentilice  par  le  sévir  Doccius  Aprissus 
dans  une  dédicace  à  Mercure  et  à  Rosmerta  (10). 

Une  inscription  d'Italie  fait  connaître  le  gentilice  Dotius 
de  L.  Dotius  Antiochus  et  de  Dotia  Jucunda,  tous  deux 
affranchis  (il).  La  variante  Dottius  par  deux  t  apparaît  dans 
le  gentilice  de  Cn.  Dottius  Plancianus ,  un  des  principaux 
magistrats  d'Antioche  de  Pisidie ,  personnage  dont  deux 


(1)  Gela  ne  paraît  certain  que  pour  le  second  des  deux. 

(2)  Mommsen ,  Inscriptiones  helvetic&e ,  n*  80.  Allmer ,  Inscriptions  de 
Vienne,  t.  III,  p.  246. 

(3)  AUmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  II,  p.  210. 

(4)  Ibid.,  t.  IV,  p.  226. 

(5)  Brambach,  n"  377. 

(6)  Boissieu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon,  p.  508. 

(7)  Dom  Bouquet,  V,  737  c.  Cf.  Sickel,  Acta  K&rolinorum ,  t.  II,  p.  27, 
n-42. 

(8)  Mabille,  La  pancarte  noire  de  Saint-Martin  de  Tours,  p.  224;  cf.  69,  loi- 

(9)  C.  J.  L.,  II,  2633. 

(10)  Brambach,  n»  1711. 

(11)  C.  /.  L.,  X,  5673. 


'i'T 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  229 

inscriptions  nous  ont  conservé  la  mémoire  (1).  Le  Dociacus 
carlovingien  peut  avoir  été  primitivement  appelé  Docciacus^ 
Dotiacus  ou  DoUiacus. 

Telle  est  Forigine  probable  des  noms  des  communes  de 
Doucey  (Marne),  Doucy  (Savoie),  Doussay  (Vienne).  Douzy 
(Ardennes). 

DoMiTiACus  est  le  nom  de  fundus  d'où  dérive  Tadjectif  ca- 
ractéristique de  Vager  Domitiacinsis  mentionné  en  670,  dans 
une  charte  de  Vigile,  évéque  d'Auxerre  (2).  Domitiacus 
vient  de  Domitius. 

Domltius  est  un  célèbre  gentilice  romain.  La  gens  Do- 
mitia,  quoique  plébéienne,  est  une  des  plus  anciennes  de 
Rome  et  une  de  celles  qui  ont  obtenu  le  plus  d'honneurs. 
Une  de  ses  branches ,  celle  qui  portait  le  surnom  d*Aeno- 
barbus,  a  donné  à  Rome  l^neuf  consuls,  de  Tan  192  avant 
J.-C.  à  l'an  31  ap.  J.-C;  2®  vingt-trois  ans  plus  tard,  l'em- 
pereur Néron,  d'abord  appelé  L.  Domitius  Aenobarbus,  et 
qui,  adopté  par  son  beau-père  Claude,  prit  les  noms  de  son 
père  adoptif .  Dans  une  autre  branche ,  celle  des  Calvinus , 
on  compte  quatre  consuls,  de  l'an  332  à  l'an  124  avant 
J.-C.  (3).  Ce  nom  pénétra  en  Gaule;  c'est  ainsi  qu'à  Nimes 
vers  Tan  14  avant  notre  ère,  naquit  Cn.  Domitius  Afer  qui 
obtint,  à  Rome,  une  certaine  célébrité  comme  orateur,  qui 
fut  élevé  à  la  préture  l'an  26  de  J.-C,  au  consulat  l'an  39, 
et  qui  vieux,  sans  enfants ,  mourut  d'un  excès  de  table , 
au  milieu  d'un  festin,  en  l'an  59  (4).  Les  inscriptions  de  la 
Gaule  mentionnent  un  certain  nombre  d'autres  Domitius 
moins  connus,  tels  que  :  Domitius  lias  dont  la  tombe  est 
conservée  au  musée  de  Lyon  (5),  P.  Domitius  Didymus, 

(1)  C.  /.  L,  III,  296,  297. 

(2)  Pardessus,  Diplom&ta,  II,  p.  154. 

(3)  De-Vit,  Onomasticon,  t.  II,  p.  651-655. 

(4)  Voir  sur  lui  les  textes  réunis  par  De-Vit,  Onomasticon ,  t.  II,  p.  650; 
cf.  Jos.  Klein ,  Fasti  consulares  inde  a  Caesaris  nece  usque  ad  imperium 
Diocletiani,  p.  31. 

(5)  Boissieu,  Inscriptions  de  Lyon,  p.  508. 


230  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

auteur  d'une  dédicace  à  la  déesse  Aventia  trouvée  à  Mun- 
chweiler  en  Suisse  (1),  et  M.  Domitius  Magnus  qui  élevaeii 
l'honneur  de  Mercure  un  monument  conservé  à  Yverdun . 
aussi  en  Suisse  (2).  On  a  trouvé  à  Turin  la  tombe  de  L.  Do- 
mitius Virilis,  originaire  de  Vienne  (Isère)  (2). 

L'introduction  de  ce  gentilice  en  Gaule  remonte  peul- 
être  à  Cn.  Domitius  Aenobarbus,  consul  l'an  122  avant 
notre  ère,  qui  vint  en  Gaule  et  y  resta  comme  proconsul 
l'année  suivante  ;  il  remporta  la  victoire  de  Vindalium  sur 
les  Gaulois  et  il  triompha  en  l'an  120  (4). 

Le  nom  de  Donzy ,  porté  par  une  commune  du  départe- 
ment de  la  Nièvre  et  par  deux  communes  du  département 
de  Saône-et-Loire  ;  celui  de  Donzac  (Gironde,  Tani-el- 
Garonne)  ;  celui  de  Donzacq  (Landes),  paraissent  s'expliquer 
par  un  primitif  Domiciacus. 

De  la  forme  latine  correspondante,  Domitianus,  un  exem- 
ple nous  est  fourni  vers  l'année  700,  par  une  charte  df 
Ravenne  où  est  mentionné  un  fundus  Domicianus,  lisez 
Domitianus  (5). 

Drusciacus  pour  Drussiaeus  est  le  nom  d'une  possession 
de  l'abbaye  de  Saint-Riquier  au  diocèse  d'Amiens,  suivani 
deux  diplômes,  l'un  de  Louis  le  Débonnaire ,  qui  remonlo 
à  l'année  830  (6)  ;  l'autre ,  de  Charles  le  Chauve ,  en  844  !7i. 
Nous  ignorons  son  nom  moderne,  mais  on  peut  recon- 
naître un  ancien  Drussiaeus  dans  Droussac,  commune  <k- 
Lissac  (Haute- Loire),  l>ntssiacus  dérive  de  Drussius. 


(1)  Mommsen,  Iriêcriptionei  helueticue,  n°  iii. 

(2)  Ibid.,  a'  138. 

(3)  AUmor,  Inscriptiom  de  Vienne,  t.  II.  p.  140. 

(4)  Les  teites  relatifs  à  cotte  partie  do  notre  histoire  sont  indiqués  et  dis- 
cutés dans  lu  savante  Géographie  historique  et  adminislratiae  de  U  Gaiilf 
romaine,  que  nous  devons  à  M.  Ernest  Desjardins,  t.  II,  p.  273-280:  et,  Lc- 
bcguG,  Fastes  de  la  Narbonnaine,  p.  6-9. 

(5)  Fantuzzi,  Monumenli  Racennati,  t.  I,  p.  2!. 

(G)  Dom  Bouquet ,  VI ,  563  a  ;  cf.  Sickel ,  Acla  Karolinoriim ,  t.  II,  p.  I«, 


(7)  Dom)Bouquet,  VIII,  466  E. 


LA  DESINENCE  -I-ACU8  A,U  MOYEN  AGE. 

Drussius  au  masculin,  Drussia  au  féminin,  appara 
comme  gentilices  dans  une  inscription  de  Venosa,  e 
lie  (1).  On  reconnaît  Dru3sius,  bien  que  mutilé,  dan 
autre  inscription  de  la  même  localité  (2).  Ailleurs,  ci 
liliee  est  écrit  avec  une  seule  s,  Drusius  :  par  exe 
daDs  une  inscription  de  Cilly  en  Styrie  (3);  sur  le  i 
ment  funèbre  de  M.  Drusius  Philodamus  à  Larino  (4): 
i'icscription  de  la  tombe  élevée  par  Drusius  Valens 
fille  et  qui  est  conservée  au  musée  de  Naples  (5). 

Drussius  ou  Drusius  dérive  de  Drusus ,  cognomen 
geas  Livia.  Drusus  est  d'origine  barbare,  et  sa  for 
plus  ancienne  est  Drausus  (6).  De  là  vient  la  variante 
sius,  nom  d'un  évéque  de  Soissons  qui  vivait  au  sep 
siècle  et  dont  une  vie  nous  a  été  conservée  (7).  Drausiu: 
s'écrire  plus  anciennement  par  deux  s,  et  sous  cette 
ce  mol  constitue  le  second  terme  du  composé  Con-( 
sius  que  l'on  dit  avoir  lu  dans  une  inscription  de  la  Gi 
Bretagne  (8).  Condraussius  dérive  d'un  thème,  Con-dr 
qui  est  probablement  identique  à  celui  du  nom  des 
dntsi,  peuple  de  Gaule,  chez  César  (9). 

PmiACus,  villa  dont  Charles  Martel  data  une  cbai 
717  (10),  porte  un  nom  dérivé  de  Pidius. 

Fidius  est  le  gentilice  de  deux  personnages  romaini 
l'un,  C.  Fidius,  n'a  échappé  à  un  complet  oubli  qu' 
portant  accusateur  de  M.  Saufeius,  cinquante-deu 


(1)  c.  I.  L.,  IX.  505. 

i^lbid.,  IX,  506. 

|3)  Jbid.,  III,  5170. 

(*)  Ibid.,  IX,  75!. 

(5)Il.(d.,  X,Î701. 

IB]  1  Drusus,  hostiuQi  duce  Drauso  cominus  trucidato,  sîbi  posi 
suis  tognomon  invenit  •  (Suétone,  Tibère,  3). 

(7]  Polthaat,  Bibiiolheca  historien  medii  aevi,  p.  671. 

(W  C.  I.  L.,  VII,  922. 

{•S)  De  btUo  galtico,  ].  Il,  c.  4;  1.  IV,  c.  6;I.  VI,  c.  3!. 

ilO)  Pardessus,  Diplomafa,  t.  II,  p.  311.  Pertz,  Oiplomalum  imperi 
primut,  p.  S7,  ligno  30. 


231  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

avant  notre  ère  (1).  L'autre,  Fidius  Optatus,  était  gram- 
mairien ,  vivait  au  second  siècle  de  notre  ère;  il  avait,  dit 
Aulu-Gelle,  une  grande  réputation  à  Rome.  Aulu-Gelle  ra- 
conte avoir  vu  entre  ses  mains  un  vieil  exemplaire  du  se- 
cond livre  de  l'Enéide  :  on  croyait  que  ce  volume  avait 
tenu  à  Virgile  même.  Le  nom  de  ce  grammairien 
autrefois  Fidus  conformément  aux  manuscrits,  est 
rd'hui  avec  raison  corrigé  en  Pidius  (2).  U  y  a  quel- 
exemples  de  ce  gentilice  dans  les  inscriptions.  Dans 
i'entre  elles,  en  Italie,  Fidius  Dexter  est  un  père 
îureux  qui  élève  une  tombe  à  ses  enfants  (3).  Dans 
lutre ,  Fidius  Faustus  est  un  oncle  qui ,  probablement 
moins  de  chagrin,  a  pourvu  son  neveu  d'une  dernière 
ure  (4).  Ailleurs  Gaius  Fidius  Dexter  est  un  maître 
reux  qui,  après  avoir  affranchi  son  esclave  Typhera, 
lousée,  et  elle  l'enterre  (5). 

iiACus,  nom  d'une  abbaye  célèbre,  aujourd'hui  Fîgeac 
commence  à  paraître  au  huitième  siècle;  c'est  ou  un 
n  fundus  F'tdiactis  ou  un  ancien  fundus  Fibiacvs.  Pour 
yas,  dérivé  du  célébra  gentilice  Fabius,  comparez  le 
M  FibiantLs  de  deux  chartes  de  Ravenne  (6). 

fcCiACTJS  est  le  nom  d'une  propriété  de  l'église  cathé- 
du  Mans,  aux  termes  d'un  diplôme  faux  de  Charle- 
Le  conservé  par  un  manuscrit  du  douzième  siècle  (7). 
jous  vient  de  Flaccius. 
iccius  est  un  gentilice  dont  un  exemple  au  féminin, 


^sconiue,  dans  son  commentaire  du  Pro  UUone.  De-Vît,  Onomadicon, 

p.  es. 

ulu-Gelle,  livre  II,  c.  3,  J  5;  édition  de  Martin  Hertz,  t.  I,  p.  76. 

.  /.  L.,  IX,  2528. 

iid.,  IX,  3659. 

bid.,  X,  6606. 

antuzzi,  Monumenti  RstiennaU,  t.  I,  p.  57,  62. 

om  Bouquet,  V,  756  e.  Cf.  Sickel,  Acta  Karolfnorum,  t.  II,  p.  397,  d*  I, 


.r^ 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  233 

Flaccia,  est  conservé  par  une  inscription  de  Trieste  (1). 
On  cite  le  nom  masculin  au  génitif  Flacci  Montani  (2). 

FlaciaciLSy  dont  il  est  question  dans  le  diplôme  faux  de 
Charlemagne,  parait  être  Placé  (Sarthe),  hameau  de  la 
commune  de  Souligné-sous- Vallon.  Il  y  a  en  France  cinq 
noms  de  communes  qui  paraissent  avoir  la  môme  origine  : 
Placé  (Saône-et-Loire)  ;  trois  Flacey  (Côte-d'Or,  Eure-et- 
Loir,  Saône-et-Loire) ,  le  second  désigné  par  le  nom  de 
Flaciacum  dans  un  document  du  douzième  siècle  (3)  ;  enfin 
Flacy  (Yonne).  Pour  celui-ci,  la  gutturale  de  la  dernière 
syllabe  était  déjà  tombée  en  1023,  année  où  cette  localité 
est  désignée  par  le  nom  de  Flaceius.  Au  seizième  siècle,  la 
tradition  savante  fit  rétablir  la  gutturale  perdue,  et  on 
écrivit  Flaciacmn  (4). 

De  la  variante  latine  fundus  Flacianus,  il  y  a  un  exemple 
dans  les  chartes  de  Ravenne,  au  neuvième  siècle  (5). 

Flaviagus  =  Flaviacus,  est  le  nom  d'une  localité  où  des 
biens  furent  donnés  à  Tabbaye  de  Limours  en  697  (6). 
Flaviacus  est  aussi  le  nom  porté  vers  la  môme  époque  par 
l'abbaye  de  Saint-Germer-de-Fly  (Oise) ,  fondée  en  655  par 
Geremarus  dont  on  a  conservé  une  vie  presque  contempo- 
raine (7).  Flaviacus,  au  neuvième  siècle,  est  le  nom  d'une 
villa  de  Tabbaye  de  Saint-Denis ,  comme  l'attestent  une 
charte  de  l'abbé  Hilduin  et  un  diplôme  de  Louis  le  Débon- 
naire en  832  (8),  un  diplôme  de  Charles  le  Chauve 
en  862  (9);   elle  était  située  dans  les  environs  d'Etam- 


(1)  c.  J.  L.,  V,  595. 

(2)  D€-Vit,  Onomasticoriy  t.  III,  p.  72. 

(3)  Merlet ,  Dictionnaire  topographique  du  département  d' Eure-et-Loir , 
p.  69. 

(4)  Quantin ,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  l'Yonne , 
p.  52. 

(5)  Fantuzzi,  Monumenti  Ravennati,  t.  I,  p.  19. 

(6)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  244. 

(7)  Dom  Bouquet,  III,  552  a.  Cf.  Chronicon  Fontanellense,  ibid,y  V,  316  a-b. 

(8)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  85,  col.  2.  Dom  Bouquet,  VI,  580  b, 

(9)  Tardif,  ibid.,  p.  119,  col.  2. 


234  LIVRE  II.  CHAPITRE  IL 

pes  (1).  Un  quatrième  Flaviacus ^  en  Rouergue,  apparaît, 
vers  Fan  1000,  sous  le  règne  du  roi  Robert  dans  une  charte 
que  nous  a  conservée  le  cartulaire  de  Conques  (Aveyron)  (2,. 
Flavius  est  un  gentilice  très  répandu  dans  les  derniers 
temps  de  l'empire  romain.  On  sait  qu'un  grand  nombre 
d'empereurs  le  portèrent  au  quatrième  et  au  cinquième 
siècle.  Auparavant  Flavius  avait  été  à  la  fin  du  premier 
siècle  le  gentilice  d'empereurs ,  plus  connus  Vespasien  et 
Domitien  par  leur  surnom ,  et  Titus  par  son  prénom  (3).  II 
y  avait  déjà  des  Flavius  au  temps  de  la  république 
romaine.  Dès  Tannée  327  avant  notre  ère,  un  certain 
M.  Flavius ,  ayant  perdu  sa  mère,  fit  à  l'occasion  des  funé- 
railles une  distribution  de  viande  au  peuple ,  et  le  peuple 
reconnaissant  le  nomma  tribun  sans  qu'il  eût  la  peine  de 
le  demander  (4)  ;  en  cette  qualité ,  il  proposa  une  loi  con- 
tre la  ville  de  Tusculum  (5).  Un  personnage  de  même  nom, 
plus  célèbre,  est  Cn.  Flavius,  fils  d'affranchi,  et  qui, mal- 
gré sa  naissance ,  s'éleva  par  son  éloquence  et  son  adresse 
à  l'édilité  curule  ;  c'était  en  l'an  305  avant  notre  ère  ;  il  s'est 
acquis  une  grande  place  dans  l'histoire  romaine  en  divul- 
guant les  règles  de  droit  dont  la  connaissance,  jusque-là 
réservée  aux  pontifes ,  constituait  pour  l'aristocratie  une 
sorte  de  monopole  (6).  Dans  les  œuvres  de  Cicéron,  il  est 
question  de  huit  Flavius ,  outre  celui  dont  nous  venons  de 
parler;  l'un  est  C.  Flavius  Fimbria,  consul  Tan  104  avant 
notre  ère.  Le  nom  de  Flavius  pénétra  en  Gaule  :  on  en 
trouve  douze  exemples  dans  les  Inscriptio^is  de  Lyoïx  de 
Boissieu;  sept  dans  les  Inscriptions  de  Vienne  de  M.  AUmer. 
Flavius  dérive  du  cognomen  Flavus  :  en  Tan  70  de  J.-C. 
Flavus  est  en  Gaule  un  des  chefs  du  parti  à  la  tête  duquel 

(1)  In  pago  Stampinse  sitam.  Diplôme  de  Charles  le  Chauve  précité. 

(2)  G.  Desjardins,  Cartulaire  de  l'abbaye  de  Conques^  p.  220. 

(3)  Voir  C.  /.  L.,  VI,  17961-18469,  les  inscriptions  funéraires  de  Rome  oîi 
se  rencontre  le  gentilice  Flavius. 

(4)  Tite-Live,  livre  VIII,  c.  22. 

(5)  Tite-Live,  livre  VIII,  c.  37. 

(6)  Tite-Live,  livre  IX,  c.  46. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  235 

s'est  placé  C.  Julius  Vindex,  et  Vitellius  le  condamne  à 
mort  (1). 

Flaviacus  dérivé  de  Flavius,  devint  dans  le  midi  Fla- 
viac ,  nom  d'une  commune  de  TArdèche ,  Flaugeac ,  nom 
d'une  commune  de  la  Dordogne ,  Flaujac ,  nom  de  deux 
communes  du  Lot;  dans  le  nord  Flavy,  nom  d'une  com- 
mune deTOise. 

Sont  dérivés  du  même  gentilice  avec  le  suffixe  latin  -anus 
le  nom  du  fundus  Flavianus  dans  les  chartes  de  Ravenne 
vers  la  fin  du  septième  siècle  et  au  commencement  du 
neuvième  (2),  et  le  nom  de  la  vallis  Flaviana,  près  du 
Rhône ,  dans  les  environs  de  Saint-Gilles  (Gard) ,  au  neu- 
vième siècle  (3). 

Flàviniacus,  nom  d'un  locus  situé  dans  Vager  Burnaccn- 
sis  et  dans  le  pagus  Alsinsis  et  où  Widerad,  dans  un  acte 
de  Tannée  721 ,  raconte  qu'il  avait  fondé  une  abbaye  (4), 
est  aujourd'hui  Flavigny  (Côte-d'Or)  ;  il  y  avait  dans  cet 
endroit  un  castrum  à  la  même  date  (5)  ;  ce  Flaviniacus  est 
sans  doute  le  même  que  celui  où,  suivant  la  chronique  de 
Saint-Bénigne  de  Dijon ,  auraient  été  situés  des  biens  don- 
nés à  l'abbaye  de  Saint-Bénigne  par  le  roi  Gontran  (561- 
593),  c'est-à-dire  environ  un  siècle  et  demi  plus  tôt  (6). 
Un  autre  Flaviniacus  ,  situé  dans  l'ouest  de  la  France ,  est 
mentionné  dans  un  jugement  rendu  par  Clotaire  III  en  fa- 
veur de  l'abbaye  de  Saint-Denis,  vers  l'année  058  (7).  Fla- 
viniacus vient  de  Flavinius. 

Flavinius  est  un  gentilice  rare;  il  y  en  a  cependant  quel- 
ques exemples  ;  ainsi  on  a  trouvé  en  Espagne  la  tombe  d'un 
certain  Marnon ,  esclave  de  Flavinius  Carpetus ,  de  la  ville 

(1)  Tacite.  Histoires,  livre  II,  c.  94,  4-  édit.  de  Halm,  t.  II,  p.  98. 
[1]  Fantuzzi,  Monumeriti  Ravennati,  t.  I,  p.  2,  9,  21. 

(3)  Molinier,  Géographie  historique  de  la  province  de  Languedoc^  p.  166, 

(4)  Pardessus,  Dip/omafa,  II,  123. 

(5)  ibid.,  p.  324;  cf.  p.  399. 

(6)  Dom  Bouquet,  III,  469  b. 

P)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  13,  col  1, 


236  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

d'Uxama  Barca  (1),  et  celle  du  fils  de  Flavinius  Flavus  (2). 
Il  y  a  en  France ,  outre  Flavigny  (Côte-d'Or),  cinq  com- 
munes du  nom  de  Flavigny  :  deux  dans  TAisne,  les  au- 
tres dans  le  Cher,  la  Marne  et  dans  Meurthe-et-Moselle. 
Citons  enfin  Flavignac  (Haute-Vienne).  De  la  formule  latine 
fundus  Flavinianusj  il  y  a,  au  huitième  siècle,  un  exemple 
dans  les  chartes  de  Ravenne  (3). 

Floriacus  ,  le  nom  de  Fleurey-sur-Ouche  (Côte-d'Or) 
au  sixième  siècle,  était  le  domaine  d'un  certain  Siri- 
vald ,  ennemi  d'Agéric ,  évêque  de  Verdun  ;  Agéric  avait 
un  fils  qui  vint  à  Floriacus  et  y  tua  Sirivald  (4);  c'était 
en  547.  Une  villa  Floriacus ,  située  entre  deux  mers  dans 
le  voisinage  de  Bordeaux ,  est  mentionnée  dans  un  testa- 
ment fait  par  Bertramne,  évoque  du  Mans  en  615  (5),  Dans 
une  charte  émanée  de  Leodebodus,  abbé  de  Saint- Aignan 
d'Orléans  en  667,  Yager  Floriacus  est  le  territoire  sur 
lequel  on  va  bâtir  un  monastère  que  le  même  document 
appelle  S.  Petrus  Floriacensis  (6).  Dans  un  diplôme  de  Tan- 
née 706  donné  par  Arnoulf,  duc  de  Bourgogne,  en  faveur 
de  Tabbaye  des  Saints-Apôtres ,  près  de  Metz ,  il  est  fait 
don  à  cette  abbaye  d'un  praedium  Floriacum^  situé  dans  le 
pays  de  Voivre ,  au  comté  de  Scarpone  ,  dont  le  chef-lieu 
est  situé  dans  le  département  de  Meurthe-et-Moselle  (7). 
En  866,  Charles  le  Chauve  donna  à  l'abbaye  de  Saint- 
Maur-les-Fossés  des  biens  dans  une  villa  nommée  Floria- 
cus et  située  dans  le  comté  de  Reims  (8)  ;  c'est  aujourd'hui 


(1)  C.LL,,  II,  2854. 

(2)  /bid.,  II,  2868. 

(3)  Fantuzzi,  Monumenti  Aauennafi,  t.  I,  p.  63. 

(4)  Historia  Francorum^  livre  III,  c.  35.  Chez  Dom  Bouquet,  t.  II,  p.  202  c 
Cf.  Longnon,  Géographie  de  la  Gattle  au  sixième  siècle f  p.  213. 

(5)  Pardessus,  Diplomafa,  t.  I,  p.  206. 

(6)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  142-144.  C'est  aujourd'hui  Saint-Be- 
noît-sur-Loire (Loiret). 

(7)  Pardessus,  Diplomata^  t.  II,  p.  276. 

(8)  Tardif,  Monuments  historiques,  n*  194,  p.  127. 


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LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  237 

Fleury-la-Rivière  (Marne)  (1).  Au  même  siècle,  dans  la  vie 
du  roi  Dagobert,  Floriacus  est  Fleury-sur-Andelle  (Eure)  (2). 

Florins,  d'où  vient  Floriacus,  est  un  gentilice  que  nous 
font  connaître  quelques  inscriptions.  Telle  est  celle  du 
tombeau  du  vétéran  T.  Florins  Saturninus ,  au  musée  de 
Mayence  (3).  Telle  est  Tinscription  d'Espagne  qui  nous  ap- 
prend le  nom  et  le  surnom  de  Florins  Vegetus,  flamine  de 
la  province  d'Espagne  citérieure  (4).  Nous  citerons  encore 
la  tombe  élevée  à  P.  Florins  Crispinus  par  P.  Florins  Se- 
verus,  son  père,  en  Dalmatie  (5). 

Le  nombre  des  communes  dont  le  nom  moderne  s'expli- 
que par  un  primitif  Floriacus  est  d'au  moins  vingt-neuf,  sa- 
voir :  deux  Fleuré  (Orne  et  Vienne);  cinq  Fleurey  (Doubs, 
Haute-Saône  et  Côte-d'Or);  Fleurieu-sur-Saône  et  Fleu- 
rieux-sur-l'Arbresle  (Rhône);  dix-sept  Fleury  (Aisne,  Aude, 
Eure,  Loiret,  Manche,  Marne,  Meuse,  Nièvre,  Oise,  Pas- 
de-Calais,  Saône-et-Loire ,  Seine-et-Marne,  Seine-et-Oise, 
Somme  ,  Yonne)  ;  trois  Floirac  (Charente-Inférieure ,  Gi- 
ronde, Lot).  Fleurian,  écart  de  Capens  (Haute-Garonne),  et 
Florian ,  hameau  de  la  commune  de  Logrian  et  Comiac  de 
Florian  (Gard),  s'expliquent  par  un  primitif  f/ormniw  équi- 
valent romain  du  gallo-romain  Floriacus. 

FusciACus,  villa  située  en  Limousin,  fut  donnée  à  la  ca- 
thédrale de  Châlons-sur-Marne  par  Elafius,  évéque  de  cette 
ville  en  565  (6).  Le  même  nom  apparaît  dans  un  diplôme 
faux  de  Clovis  P'  (7)  qui  désigne  par  là  une  localité  du  pa- 
gus  SenoniciLs,  aujourd'hui  Foissy ,  canton  de  Villeneuve- 
l'Archevéque  (Yonne)  (8).  Un  ager  Fusciacensis  en  Maçonnais 

(1)  Longnon,  Etude  sur  les  pagi  de  la  Gaule,  2*  partie,  p.  15. 

(2)  Krusch,  Scriptores  rerum  merovingicarurriy  t.  II,  p.  516, 1.  16. 

(3)  Brambach,  n«  1667. 

(4)  C.  /.  L.,  II,  4210. 

{5)/Md.,  ni,  1923;  cf.  VI,  18482-18488. 

(6)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  423. 

(7)  Pertz,  Diplomatum  imperii  tomus  primus,  p.  115,  ligne  47.  Ce  nom  a 
été  écrit  Furtiacum  chez  Pardessus,  Diplomata^  1. 1,  p.  35. 

(8)  Quantin,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  l'Yonne^  p.  53. 


'^r^ri 


238  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

est  mentionné ,  au  neuvième  siècle ,  dans  les  chartes  de 
Tabbaye  de  Saint-Vincent  de  Mâcon.  C'est  aujourd'hui 
Fuisse  (Saône-et-Loire)  (1). 

Fuscius,  d'où  Fusciacus^  est  un  gentilice  conservé  par 
une  inscription  de  Nimes  où  on  lit  les  noms  de  M.  Fuscius 
Nedymus  (2).  On  trouve  aussi  les  noms  de  femmes  :  Fus- 
cia  Cypare,  dans  une  inscription  d'Espagne  (3),  Fuscia  Ci- 
tata ,  dans  une  inscription  de  Carinthie  (4),  Fuscia  Aemilia 
dans  une  inscription  d'Afrique  (5).  L'orthographe  Fouscius 
est  offerte  par  une  inscription  de  Gemona  dans  l'Italie  du 
nord-est  ;  il  s'agit  d'une  tombe  élevée  à  M.  Fouscius  Licnus 
et  à  C.  Fouscius  Balbus  (6). 

Fusciacus  explique  sept  noms  de  communes  :  deux  Fois- 
sac  (Aveyron  et  Gard)  ;  un  Foissiat  (Ain)  ;  trois  Foissy,  dont 
un  dans  la  Côte-d'Or  et  deux  dans  l'Yonne  ;  enfin  Fuisse 
(Saône-et-Loire). 

Galiacus,  locellus  situé  dans  le  Blaisois  ou  le  Dunois, 
dépendait  de  l'abbaye  de  Marmoutiers,  aux  termes  d'un  di- 
plôme émané  de  Louis  le  Débonnaire  en  832  (7).  La  bonne 
orthographe  de  ce  nom  doit  être  Galliacus, 

Gallius,  dont  Galliacus  dérive,  est  un  gentilice  romain 
porté  notamment  par  Q.  Gallius,  édile,  l'an  67  avant  J.-C, 
préteur  deux  ans  plus  tard ,  et  qui ,  probablement  Tannée 
suivante,  fut  accusé  d'avoir  employé  des  moyens  fraudu- 
leux pour  obtenir  cette  charge  ;  Cicéron  fut  son  avocat  ;  la 
plaidoirie  du  célèbre  orateur  est  perdue  ;  on  n'en  a  con- 
servé que  de  très  courts  fragments.  Q.  Gallius  eut  deuxfils  : 
l'un ,  qui  portait  le  prénom  de  Marcus ,  prit  le  parti  d'An- 


Ci)  Ragut,  Cart.  de  Saint-Vincent- de-Mâcon,  p.  ccviir,  62,  112. 

(2)  C.  /.  L.,  XII,  3499. 

(3)  Ibid.,  II,  1370. 

(4)  Ihid.,  III,  4917. 

(5)  Ibid.,  VIII,  9862. 

(6)  Ibid.,  V,  1818. 

(7)  Dom  Bouquet,  VI,  583  c.  Cf.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  178, 
n*  306. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  239 

toine  contre  Auguste  et  mourut  en  laissant  un  testament 
par  lequel  il  adoptait  Tibère  (1);  Tautre,  appelé  Quintus 
comme  sou  père,  devint  préteur,  et  Auguste,  pendant  son 
triumvirat,  le  lit  tuer  après  Tavoir  fait  mettre  à  la  torture 
et  lui  avoir  de  sa  main  arraché  les  yeux  (2). 

On  trouve  plusieurs  Gallius  dans  les  inscriptions.  Ainsi 
à  Feyzin  (Isère),  une  tombe  a  été  élevée  par  D.  Gallius  Sa- 
cer  pour  lui-même  et  pour  D.  Gallius  Lascivius  son  père  (3). 
En  Istrie ,  près  de  Rozzi ,  on  a  lu  sur  une  stèle  funéraire 
les  noms  du  soldat  L.  Gallius  Silvester  (4).  On  a  recueilli 
en  Pannonie  une  dédicace  à  Jupiter  par  M.  Gallius  Cel- 
sinus  (5). 

Par  Galliacus  dérivé  de  Gallius  s'explique  le  nom  de 
Gaillac,  porté  par  trois  communes  :  Aveyron,  Haute-Ga- 
ronne, Tarn;  celui  de  Jailly  qui  désigne  deux  commu- 
nes, Gôte-d'Or,  Nièvre;  enfin  celui  de  Jallieu  (Isère). 

Gacdiacus,  enTouraine,  était  un  vicus  où  du  temps  de 
Grégoire  de  Tours,  sixième  siècle ,  on  conservait  des  reli- 
ques de  saint  Julien  de  Brioude,  et  on  prétait  serment 
sur  elles  (7);  c'est  aujourd'hui  Joué-les-Tours  (Indre-et- 
Loire)  (8),  localité  plusieurs  fois  mentionnée  sous  le  même 
nom  de  Gaudiacus,  dans  les  titres  de  l'abbaye  de  Saint- 
Martin  de  Tours,  au  dixième  siècle  (9).  Un  autre  Gaudia- 
eus  est  le  lieu  d'origine  d'une  jeune  fille  qui,  lors  de  la 
translation  des  reliques  de  saint  Léger,  vers  la  fin  du  sep- 
tième siècle,  dut  sa  guérison  à  l'intercession  du  saint;  on 


(1)  De- Vit,  OnomsLSiicon,  t.  III,  p.  203. 

(2)  Suétone,  Auguste^  c.  27. 

(3)  ÂUmer,  Inscriptions  de  Vienne^  t.  III,  p.  96. 

(4)  C,  /.  L.,  V,  430. 

(5)  /5id.,  III,  4405.  Cf.  VI,  18866-18873. 

(C)  Fantuzzi,  Monumenii  Ravennatij  t.  I,  p.  16,  35,  166. 

(7)  Grégoire  de  Tours,  De  miraculis  sancti  JuUani^  c.  40,  édition  Arndt 
et  Krusch,  t.  II,  p.  580,  ligne  18.  Bordier,  Les  livres  des  miracles^  I,  376. 

(i>)  Longnon,  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle,  p.  273. 

(9)  Mabille,  La  pancarte  noire  de  Saint-Martin  de  Tours^  p.  125,  143,  144, 
187,  188,  225. 


240  LIVRE  II.  CHAPITRE  IL 

suppose  que  ce  Gaudiacus  était  situé  dans  le  territoire  de 
Chartres  (1).  Un  troisième  Gaudiacus^  situé  près  de  la  ri- 
vière appelée  Aïbeta^  en  Berry,  aujourd'hui  Jouet-sur-FAu- 
bois  (Cher) ,  eut ,  au  septième  siècle ,  un  monastère  habité 
par  des  religieux  de  Tordre  de  Saint-Colomban  (2).  Gaudia- 
cus^ in  pago  Wabrinse,  fut  donné,  en  770,  à  Tabbaye  de 
Gorze,  par  Angelramme,  évoque  de  Metz  (3)  ;  on  pense  re- 
connaître cette  villa  dans  Jouy-sous-les-Côtes  (Meuse)  (4\ 
ou,  suivant  d'autres,  Jouy-aux- Arches  (Moselle)  {^).  Gaudia- 
cus^ propriété  de  l'abbaye  de  Jumièges  en  849,  suivant  un 
diplôme  de  Charles  le  Chauve  (6),  est  aujourd'hui,  croit-on, 
Jouy-sur-Eure ,  près  d'Evreux  (7).  En  978 ,  une  localité 
appelée  Gaudiacus  appartenait  à  Letgarde,  comtesse  de 
Champagne  et  de  Blois,  bien  que  sa  mère  Richilde  l'eut 
donnée  à  Saint-Martin  de  Tours;  c'est  maintenant  Jouy- 
le-Châtel  (Seine-et-Marne)  (8). 

Gaudiacus  =  *  Gavidiacus  est  dérivé  de  Gavidius.  Gavi- 
dius  est  un  gentilice  romain  peu  commun,  mais  dont  les 
inscriptions  nous  ofiFrent  quelques  exemples.  Tel  est  le 
nom  de  femme  Gavidia  Torquata,  dans  deux  inscriptions 
de  Karlsburg  en  Hongrie,  autrefois  en  Dacie,  que  pos- 
sède aujourd'hui  la  bibliothèque  de  Vienne  en  Autriche  (9\ 
Une  inscription  d'Aquilée  nous  apprend  les  noms  de  L.  Ga- 
vidius Secundinus  (10);  des  inscriptions  de  l'Italie  méridio- 


(1)  ViiB,  s&ncti  Leodegarii,  c.  18,  chez  Dom  Bouquet,  II,  625  b. 

(2)  Vita  sancH  Eustasii,  chez  Dom  Bouquet,  III,  501  c. 

(3)  Dom  Calmet,  Histoire  de  Lorraine^  1**  édition.  Preuves,  col.  285. 

(4)  Liénard ,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  la  Meuse , 
p.  117.  On  remarquera  que  dans  plusieurs  pièces  du  huitième  et  du  dixième 
siècle,  cette  localité  est  appelée  Gaugiacum, 

(5)  Bouteiller,  Dictionnaire  topographique  du  déparlement  de  la  Moselle^ 
p.  132, 

(6)  Dom  Bouquet,  VII,  499  6. 

(7)  Blossevillc,  Dtcttonnatre  topographique  du  département  de  VEure, 
p.  220. 

(8)  Mabilie,  La  pancarte  notre  de  Saint-Martin  de  Tours,  p.  143,  225. 

(9)  C.  I.  L.,  III,  1071,  1072. 

(10)  Ibid.,  V,  909. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  241 

nale,  ceux  de  Gavidius  Ëutychius,  de  Gavidia  Ma[D]3ueta  (1) 
et  d'A.  Gavidius  Félix  (2). 

La  variante  Gavedius  nous  est  donnée  par  une  stèle  fu- 
néraire de  l'Italie  centrale  où  se  lisent  les  noms  de  Q.  Ga- 
vedius Verus  (3). 

II  est  certain  que  ce  nom.  pénétra  en  Gaule  ;  on  a  trouvé 
à  Narbonne  les  épitaphes  de  L.  Gavidius  PoUio  et  de 
L.  Gavidius  Scaeva  (4).  L'Aquitain  Sulpice  Sévère ,  dans 
son  récit  du  concile  de  Rimini ,  en  359 ,  rapporte  qu'il 
tient  certains  détails  de  Gavidius,  et  il  l'appelle  episcopum 
nostrwn  (5). 

De  Gauidiaous  paraissent  venir  le  nom  de  Joué,  porté  par 
sept  communes  :  Indre-et-Loire ,  Loire-Inférieure ,  Maine- 
et-Loire  ,  Orne ,  Sarthe  ;  celui  de  Jouey  (Côte-d'Or) ,  et  ce- 
lui de  Jouy,  porté  par  seize  communes  :  Aisne,  Eure, 
Eure-et-Loir,  Loiret,  Marne,  Meuse,  Oise,  Seine-et- 
Marne,  Seine-et-Oise ,  Yonne.  En  comptant  Jouet  (Cher), 
nous  arrivons  à  un  total  de  vingt-cinq  communes  dont  le 
nom  primitif  est  Gaudiacus, 

Geniciagus  ,  villa  donnée  à  la  cathédrale  de  Vienne 
(Isère)  par  Ephibius,  en  696  (6),  est  appelée  à  l'ablatif  Genecio 
pour  Gmiciaco^  dans  un  diplôme  faux  de  Childebert  III  (7); 
c'est  aujourd'hui  Genissieux  (Drôme). 

Genicius,  d'où  Geniciacus^  est  une  variante  de  Genucius  ; 
exemple,  M.  Genicius  Menecrates  dans  une  inscription  de 
Nocera  en  Italie  (8).  Genucius  est  le  nom  d'une  gens  plé- 
béienne de  Rome  qui  a  fourni  sept  consuls  de  Tan  451  à 


(1)  C.  /.  L.,  X,  2474. 

(2)  /Wd.,  X,  6713.  Cf.  VI,  1888,  1889. 

(3)  /btd.,  IX,  5683. 

(4)  IWd.,  Xn,  4834. 

(5)  HûtoHa  sacra,  Uvre  II,  c.  41  ;  Hign«,  Psitrologia,  lah'na,  t.  XX,  col.  152  c. 

(6)  Pardessus,  Dtplomata,  t.  II,  p.  240,  241. 

(7)  /Wd.,  p.  247.  Cf.  Pertz,  Diplom^tum  imperii  tomus  primus,  p.  194, 
ligne  33. 

(8)  C.  J.  L.,  X,  1084. 

16 


242  LIVRE,  II.  CHAPITRftMI. 

l'an  271  avant  J.-C,  et  dont  les  inscriptions  du  temps  de 
Tempire  ofifrent  quelques  exemples  (1). 

Outre  Genissieux  (Drôme),  Geniciacus  explique  Genissac 
(Gironde). 

Gentiliacus  ,  où  Pépin  le  Bref  célébra  les  fêtes  de  Noël 
et  de  Pâques  en  762,  celles  de  Pâques  en  766  (2),  est 
aujourd'hui  Gentilly  (Seine),  alors  dépendance  du  domaine 
royal;  Louis  II  le  Bègue  détacha  Gentilly  du  domaine 
royal  en  878  et  le  donna  à  la  cathédrale  de  Paris,  à  la  con- 
dition que  les  revenus  seraient  employés  au  luminaire  (3). 

Gentiliacus  dérive  de  Gentilius.  Ce  gentilice  était  porté 
par  le  légionnaire  vétéran  G.  Gentilius  Victor  qui  fit  élever 
à  Mayence  un  autel  de  marbre  en  Thonneur  de  l'empereur 
Commode  alors  régnant,  193-211  après  J.-C.  (4). 

Germaniacus  est  une  villa  que  le  roi  d'Austrasie  Thierry  I*', 
fils  de  Clovis ,  donna  à  saint  Thierry,  abbé  de  Saint-Remy 
de  Reims  ;  c'était  dans  la  première  moitié  du  sixième  siècle, 
entre  les  années  511,  date  de  Tavènement  du  roi,  et  533 
environ ,  date  de  la  mort  du  saint ,  auquel  survécut  le  roi 
mort  en  534  (5)  ;  cette  localité  est  aujourd'hui  Germigny 
(Marne).  Dans  la  plupart  des  textes,  l'a  de  la  seconde  syl- 
labe de  Germaniacus  s'assimile  à  Vi  de  la  syllabe  suivante  : 
Germiniacus.  C'est  ainsi  que  se  trouve  écrit  le  nom  d'un 
village  du  pagus  Remensis ,  qui  s'est  appelé  au  moyen  âge 
Germigny-Pend-la-Pie,  et  dont  on  a  retrouvé  l'emplace- 
ment dans  le  département  des  Ardennes  (6)  ;  ce  Germi' 


(1)  De- Vit,  Onomasticon,  t.  III,  p.  230-231;  cf.  C.  I.  L.,  VI,  19022-19026. 

(2)  Annales  Francorum  Tiliani ,  chez  Dom  Bouquet ,  V ,  17  d ,  18  b  ;  An- 
nales Francorum  LotaeZtani,  tbid.,  36  b.  Eginhardt  Annales,  ibid,,  199,  c,  d, 
200  a;  Annales  Metenses,  iMd.,  338  e. 

(3)  C&rtulaire  de  Notre-Dame  de  Paris,  t.  I,  p.  262. 

(4)  Brambach,  n*  1076.  Cf.  C.  /.  L.,  XII,  857. 

(5)  Vita  s.  T/ieoden'ct,  chez  Dom  Bouquet,  III,  406  c. 

(6)  Longnon,  Etude  sur  les  pagi  de  la  Gaule,  2*  partie,  p.  11,  12;  £jcanien 
géographique  du  tome  premier  des  Diplomata  tmpeni,  p.  24. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACU8AU  MOYEN  AGE.  243 

niaous  fut  donné  au  duc  Grimoald,  maire  du  palais  d'Aus- 
trasie,  fils  de  Pépin  le  Vieux,  par  le  roi  mérovingien 
Sigebert  IIL  qui  régna  de  630  à  654  ;  Orimoald  en  transféra 
la  propriété  à  l'abbaye  de  Malmedy  (1),  qui  fit  confirmer 
cette  donation  par  le  roi  Childcric  II  en  664  (2)  et  par  Da- 
gobert  II  en  677  (3).  Germiniacus  est  aussi  l'orthographe 
adoptée  pour  Germigny  (Yonne),  dans  deux  diplômes  faux 
qu'auraient  donnés  à  Tabbaye  de  Saint-Pierre-le-Vif  de 
Sens  le  roi  Clovis  I"  (4)  et  Theudechilde ,  sa  fille  (5).  Ger- 
migny (Loiret)  est  appelé  Germiniacus  au  dixième  siècle  par 
l'auteur  du  Livre  des  Miracles  de  saint  Maximin  de  Micy  :  cet 
auteur  raconte  que  Théodulphe,  évoque  d'Orléans,  787-821, 
fit  construire  à  Germiniacus  une  basilique  imitée  de  celle 
d'Aix-la-ChapeUe  (6). 

Germanius,  dont  viennent  Germaniacus  et  Germiniacus, 
est  un  gentilice  qu'on  a  rencontré  quelquefois  dans  des 
inscriptions  :  Q.  Germanius  Valens,  sur  une  stèle  du  musée 
de  Pettau  en  Styrie  (7)  ;  Germanius  Dentilianus,  Germanius 
Petronianus,  Germanius  Valens,  dans  une  inscription 
d'Afrique  (8)  ;  Magius  Germanius  Statorius  Marsianus,  dans 
une  inscription  de  Milan  (9)  ;  G.  Germanius  Corobus,  dans 
une  inscription  du  musée  de  Metz  (10). 

L'orthographe  la  plus  ancienne  Germaniacus ,  avec  un  a 


(1)  Pardessus,  DiplomtiU,  t  II,  p.  92.  Pertz,  Diplomtitum  imperii  tomus 
primua,  p.  91. 

(2)  Pardessus,  Diploma-ia, ,  t.  II,  p.  137 ,  138.  Pertz ,  Diplom^turri  imperii 
lomuB  primuSy  p.  26,  ligne  37. 

(3)  Pardessus,  Dtplomafa,  t.  II,  p.  176.  Pertz,  DiplomAtum  imperii  tomus 
primus,  p.  42. 

(4)  Pertz,  Diploma,tum  imperii  tomus  primus^  p.  116,  ligne  3;  chez  Par- 
dessus, Diplomata,  t.  I,  p.  .36,  au  lieu  de  GerminiacOy  on  a  imprimé  Tra- 
minaco.  Cf.  Quantin,  Dictionnaire  topographique  du  département  de 
l'Yonne,  p.  60. 

(&)  Pertz,  Diplomatum  imperii  tomus  primus,  p.  133,  ligne  7. 

(6)  Dom  Bouquet,  V,  469  c. 

(7)  C.  I.  L.,  III,  4067. 

(8)  JWd.,  VIII,  440. 

(9)  /bid.,  V,  5869. 

(10)  Robert,  Epigraphte  j/allo-romaine  de  la  Moselle,  fascicule  premier, 
p.  31-33. 


244  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

après  Tm,  persiste  dans  deux  noms  de  communes  :  Ger- 
magnat  (Ain),  Germagny  (Saône-et-Loire).  Ailleurs  Tortho- 
graphe  la  plus  moderne  avec  Yi  après  ïm  a  été  préférée, 
Germignac  (Charente-Inférieure);  Germigney  (Jura  et 
Haute- Saône)  ;  Germigny  (Cher,  Loiret,  Marne,  Nièvre, 
Seine-et-Marne,  Yonne).  Chacun  de  ces  départements  con- 
tient une  commune  du  nom  de  Germigny,  sauf  Seine-et- 
Marne  qui  en  renferme  deux.  Le  nombre  des  communes 
dont  le  nom  est  un  dérivé  du  gentilice  Germanius  est  de 
douze. 

Il  ne  faut  pas  confondre  ces  noms  avec  celui  de  Ger- 
menay  (Nièvre),  Germanayum  dans  un  document  du  trei- 
zième siècle  (1).  Germanayum  s'est  dit  évidemment  *  Ger- 
managus  à  l'époque  mérovingienne  et  *  Germ^nacas  sous 
l'empire  romain.  C'est  un  dérivé  du  surnom  Germanus. 
Exemples  :  L.  Sennius  Germanus,  dans  une  inscription  du 
musée  de  Vienne  (Isère)  (2)  ;  Nonnius  Germanus,  dans  une 
inscription  de  Trêves  (3);  M.  Aurelius  Germanus,  dans  une 
inscription  de  Mombach  en  Hesse  (4),  Fabius  Germanus, 
dans  une  inscription  de  Gundelsheim  en  Wurtemberg  (5). 
C'est  du  surnom  Germanus  (6)  que  dérive  le  gentilice 
Germanius. 

Gessiagus  est  un  locellus  ou  une  colonica  donné  à  l'ab- 
baye de  Flavigny  par  l'abbé  Widerad  en  721  (7).  On  croit 
le  reconnaître  dans  Gissey-sous-Flavigny  (Côte-d'Or). 

Le  gentilice  Gessius  a  reçu  une  certaine  notoriété  grâce 
à  Gessius  Florus  nommé  procurateur  de  Judée,  en  l'an  66 
de  notre  ère,  par  l'empereur  Néron;  Gessius  Florus  dut 

(1)  Soultrait ,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  la  Nièvre, 
p.  82. 

(2)  AUmer,  Inscriptions  antiques  de  Vienne,  t.  II,  p.  559. 

(3)  Brambach,  n*  825. 

(4)  Brambach,  n*  972.  Cf.  n*  1017. 

(5)  Brambach,  n*  1606. 

(6)  Le  C.  /.  L.,  VI,.  19030-19032,  offre  des  exemples  d'individus  qui  s'kppe- 
làient  Germanus- sans  gentilice  ni  prénom. 

(7)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  324. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  245 

cette  dignité  à  Tinfluence  de  la  fameuse  Poppée ,  amie  de 
sa  femme  et  maîtresse  de  Néron  ;  ses  injustices  criantes 
causèrent,  dit-on,  la  révolte  des  Juifs  dont  la  répression 
par  Titus  se  termina  par  la  ruine  de  Jérusalem  (1).  D'autres 
Gessius  nous  sont  connus  par  les  inscriptions  ;  tels  sont  : 
L.  Gessius  Optatus,  auteur  d'une  dédicace  à  Neptune  qui 
appartient  au  musée  de  Turin  (2);  C.  Gessius  Rogatus  (3), 
dans  une  inscription  d'Afrique  ;  P.  Gessius  Ampliatus,  nom 
inscrit  sur  un  vase  de  verre  trouvé  en  Italie  (4)  ;  D.  Gessius 
Félix,  nom  inscrit  sur  une  lampe  antique  (5).  C.  Gessius 
Miccio  et  M.  Gessius  Augur,  connus  par  des  inscriptions 
de  Vienne  (Isère)  et  de  Nimes  (6). 

Il  y  a,  dans  la  Côte-d'Or,  trois  communes  de  Gissey; 
Gissac  (Aveyron)  parait  être  aussi  un  Gessiacus.  Geyssans 
(Drôme)  est  identique  à  la  variante  latine  *  Gessiarms. 

Graciacus,  donné  à  la  basilique  de  Saint-Germain  par 
Bertramne ,  évêque  du  Mans  en  615  (7) ,  est  aujourd'hui 
Grazay  (Mayenne);  on  doit  probablement  supposer  une 
orthographe  primitive  Gratiacus  ou  Grattiacus,  C'est  Gra- 
tiacus  qu'on  trouve,  au  dixième  siècle,  dans  le  Cartulaire 
de  Savigny  ;  il  s'agit  de  Grézieux-le-Marché  (Rhône)  (8)  ; 
mais  le  territoire  de  ce  village  est  appelé,  au  même  siècle, 
Grassiacensis  ager  (9).  Graissago^  au  cas  indirect,  est,  en  894, 
le  nom  d'une  villa  située  dans  le  territoire  de  Brioude 
(Haute-Loire)  (10). 

Gratins  est  le  nom  porté  au  premier  siècle  avant  notre 

(1)  Josèphe,  Antiquités  judaïques  y  livre  X,  c.  11,  édit.  Didot,  p.  791.  Cf. 
Tacite,  livre  V,  c.  10. 
P)  C.  /.  L..  V.  7457. 

(3)  IMd.,  VIII.  278. 

(4)  Ibid.,  X,  8062,  5. 

(5)  Ibid.,  X,  8053,  91.  Voir  aussi  C.  I.  L  ,  VI,  19040-19044. 
(6) /6id.,  XII,  1914,  3224 

(7)  Pardessus,  Diplom&ta,  t.  I,  p.  209. 

(8)  Aug.  Bernard,  C&rtuUire  de  Savigny,  t.  II,  p.  827.  On  y  trouve  aussi 
Graciacus  en  1087,  t.  I,  p.  437. 

(9)  Ibid.,  t.  I,  p.  103;  t.  II,  p.  1078. 

(10)  Doniol,  Cartulaire  de  Brioude,  p.  41. 


246  LIVRE  II.  CHAPITRE  IL 

ère  par  le  poète  Gratius  Faliscus,  auteur  d'une  Cynégéti- 
que en  vers  latins  que  nous  avons  encore,  et  qui  est  citée 
par  Ovide.  Il  y  a  quelques  exemples  de  ce  gentilice  dans 
les  inscriptions.  Ainsi,  on  a  trouvé  à  Ancône  le  monument 
élevé  à  la  mémoire  de  M.  Gratius  Coronarius,  mort  sur 
mer ,  victime  d'une  tempête  (1).  Le  nom  de  fabricant 
G.  Grati,  au  génitif,  a  été  lu  sur  un  vase  de  terre  trouvé 
en  Espagne  (2).  Le  nom  de  femme,  Gratia  Hibern[a],a 
été  fourni  par  une  inscription  funéraire  de  la  Hesse  (3); 
celui  de  Gratia  Gratiana  par  une  inscription  de  Grenoble  (4). 

On  a  signalé  aussi  l'orthographe  Gracius  avec  un  c,  dans 
l'épitaphe  de  Gracius  Auspecio  (5),  et  Grattius  avec  deux  (. 
Cette  dernière  orthographe  est  même  la  plus  fréquente 
dans  les  inscriptions  ;  plusieurs  exemples  appartiennent  à 
la  Gaule  ;  telles  sont  les  épitaphes  de  Q.  Grattius  Proclio 
et  de  Grattia  sa  fille,  provenant  de  Vienne  (Isère)  et  con- 
servées au  musée  de  Lyon  (6).  Dans  une  inscription  de 
Vienne  (Isère),  les  deux  orthographes  par  un  seul  i  ou  par 
un  double  ^,  Gratius  et  Grattia,  paraissent  avoir  été  em- 
ployées concurremment  (7). 

Outre  Grazay  (Mayenne)  et  Grézieux-le-Marché  (Rhône), 
GratiacuSj  Grattiacus  ou  peut-être  Graciacus  explique  le 
nom  de  trois  communes  de  Grazac  (Haute-Garonne,  Haute- 
Loire,  Tarn);  de  celles  de  Gressey  (Seine-et-Oise),  Gressy 
(Seine-et-Marne),  Grésy  (Savoie,  Isère),  Grézac  (Charente- 
Inférieure)  ;  des  deux  communes  de  Grézieu-la-Varenne 
(Rhône)  et  de  Grézieux  (Loire). 

Gratiasca  (8) ,  Graciasca  (9) ,  aujourd'hui  Gréasque  (Bou- 

(1)  c.  I.  L.,  IX,  59Î0. 

(2)  ma.,  II,  4970,  219. 

(3)  Brambach,  1238. 

(4)  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne^  t.  II,  p.  312. 

(5)  Brambach,  p.  29,  n*  2045. 

(6)  Allmer,  InscHpiions  de  Vienne,  t.  II,  p.  502;  cf.  C.  /.  L.,  VI,  19tl7- 
19125. 

(7)  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  II,  p.  508. 

(8)  Quérard,  Csirlulaire  de  Saint-Victor  de  Marseille,  1. 1,  p.  155,  vers  1035. 

(9)  Ibid.f  p.  276,  1059-1085.  Grezasca,  plus  moderne,  est  plus  fréquent 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUB  AU  MOYEN  AGE.  247 

ches-du-Rhône),  est  la  forme  ligure  ;   Grézian  (Hautes- 
Pyrénées),  la  forme  latine  du  gaulois  Gratiacus. 

Graniagengis  finis  est  située  dans  le  pagus  Waldensis, 
suivant  deux  chartes  données  à  Téglise  de  Lausanne,  Tune 
en  881  (1),  l'autre  en  929  (2).  Griniacus^  villa  qui  apparte- 
nait à  l'église  du  Mans,  aux  termes  d'un  diplôme  émané 
de  Louis  le  Débonnaire  en  832  (3),  nous  offre  le  môme 
nom  avec  assimilation  de  Va  de  la  première  syllabe  à  Vi 
de  la  seconde. 

Granius  est  un  gentilice  romain  fréquent  chez  les  auteurs 
comme  dans  les  inscriptions.  Un  des  Granius  les  plus  con* 
nus  est  le  grammairien  Granius  Flaccus  qui  vivait  au  pre- 
mier siècle  avant  notr^  ère  ;  il  laissa  un  recueil  d'indi- 
gitamenia,  c'est-à-dire  de  formules  de  prières  (4),  et  un 
livre  De  jure  Papiriano ,  c'est-à-dire  sur  la  législation  attri- 
buée aux  rois  de  Rome  (5).  Au  même  siècle  appartiennent  : 
P.  Granius,  témoin  dans  le  procès  de  Verres  (6)  ;  On.  Gra- 
nius, beau-fils  de  Marins,  et  son  compagnon  dans  sa 
fuite  (7);  enfin,  un  chevalier  romain,  nommé  A.  Granius, 
qui  fit  partie  de  l'armée  de  César  dans  la  guerre  contre 
Pompée  et  qui  fut  tué  à  Dyrrachium  (8).  D'autres  Granius 
apparaissent  dans  les  inscriptions  de  Rome  (9). 


(t)  Cartulaire  du  chapitre  de  Notre-Dame  de  Lausanne,  publié  par  la  So- 
ciété de  rhistoire  de  la  Suisse  romande,  p.  343.  Cf.  Regestre  soit  répertoire 
chronologique  de  documents  relatifs  à  l'histoire  de  la  Suisse  romande,  par 
Frinçois  Forel,  p.  26,  n»  79. 

(2)  Cartulaire  du  chapitre  de  Notre-Dame  de  Lausanne ,  p.  232.  Cf.  Re- 
gestre, etc.,  p.  42,  !!•  133. 

(3)  Dom  Bouquet,  VI,  586  a.  Cf.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  179. 
n*308. 

(4)  Censorin,  De  die  natali,  c.  3,  g  2. 

(5)  Paul,  livre  X,  «  ad  legom  Juliam  et  Papiam ,  i>  au  Digeste,  livre  L , 
titre  lYf,  loi  144.  Cf.  Touffel,  Geschichte  der  rœmischen  Literatur^  3*  édit., 
p.  380. 

(6)  Cicéron,  In  Verrem,  action  II,  livre  V,  c.  59,  §  154. 

(7)  Appien,  De  bello  civili,  livre  I,  c.  60,  62,  édit.  Didot,  p.  311,  312.  Plu- 
tarque,  Marius,  c.  35,  37,  40,  édit.  Didot,  p..  508,  509,  511. 

(8)  De  bello  civili,  livre  III,  c.  71. 

(9)  0. 1.  L.,  VI,  19072-19106, 


248  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

Ce  nom  pénétra  en  Gaule.  On  a  trouvé  à  Lyon  un  frag- 
ment de  la  stèle  funéraire  d'un  certain  Granius,  qui  était 
originaire  de  Trêves,  marchand  de  vins  et  citoyen  romain(i). 
Un  potier,  son  homonyme,  faisait  usage  d'une  marque  où 
son  nom  était  inscrit  au  nominatif  (2).  On  a  recueilli  près 
de  Xanten  une  dédicace  à  Mercure  par  T.  Granius  Victo- 
rinus  (3). 

Graniaca^  s'accordant  avec  villa  ^  comme  Graniacus  avec 
fundus^  a  donné  Gragnague,  nom  d'une  commune  du  dépar- 
tement de  la  Haute-Garonne.  Griniacus  =  Graniacus  se 
prononce  aujourd'hui  Grigny  et  c'est  le  nom  de  trois  com- 
munes, Pas-deCalais,  Rhône,  Seine-et-Oise.  Le  gallo-romain 
Graniacus  avait  pour  pendant  le  latin  Granianus^  nom  d'un 
fundus  de  Veleia  sous  l'empire  romain  (4) ,  et  d'un  autre 
fundus  Granianus  au  moyen  âge ,  dans  les  chartes  de 
Ravenne  (5).  Grinianus^  variante  de  Granianus^  est  devenu, 
dans  la  France  moderne,  Grignan  (Drôme). 

[HIermoniace  ,  cédé  par  un  certain  Ebroin  à  l'abbaye  de 
Saint-Denis,  aux  termes  d'un  acte  d'échange  que  Charles 
le  Chauve  coniBrma  en  867  (6),  porte  un  nom  qui  a  dû 
primitivement  se  prononcer  Harmoniacus,  et  qui  dérive 
à^Harmoniîis. 

Harmonius  est  un  mot  d'origine  grecque  ;  on  le  trouve 
employé  comme  surnom  :  Q.  Gavius  [H]armonius,  dans  une 
inscription  de  Rome  (7);  et  comme  nom  :  Harmonius  Janua- 
rius ,  dans  une  inscription  tirée  du  fond  de  la  mer,  près  de 


(1)  Boissieu,  Inscriptions  de  Lyon^  p.  400,  430. 

(2)  Boissieu,  Inscriptions  de  Lyon»  p.  433  ;  Schuermans ,  Sigles  figulins , 
p.  131,  n-  2466. 

(3)  Brambach,  n*  154. 

(4)  Table  alimentaire  de  Veleia,  col.  6,  ligne  13. 

(5)  Fantuzzi,  Monumenti  R&vennatit  t.  I,  p.  38,  49. 

(6)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  129,  n*  199.  Suivant  M.  Matton, 
Dictionnaire  topographique  du  dôpartement  de  l'Aisne ^  p.  186,  ce  serait 
aujourd'hui  Morgny-en-Tiérache. 

(7)  OreUi,  n*  2618;  C.  I.  L.,  VI,  10093. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  249 

Naples,  et  aujourd'hui  conservée  au  musée  de  Leyde  (1). 
Ce  nom  pénétra  en  Gaule  ;  au  quatrième  siècle ,  Ausone 
l'atteste  dans  son  épitre  à  Ursule ,  grammairien  de  Trêves  ; 
il  félicite  Ursule  d'être  collègue  d'Harmonius ,  célèbre 
en  ce  temps  par  un  travail  sur  Homère,  et  qui,  à  cette 
époque  de  décadence ,  par  une  sorte  de  merveilleux  mono- 
pole, associait  à  la  connaissance  du  latin  celle  du  grec  alors 
à  peu  près  inconnu  en  Gaule  (2). 

[H]elariacus  est  une  villa  donnée  par  le  testament 
du  roi  Contran  à  l'abbaye  de  Saint-Bénigne  de  Dijon, 
comme  nous  l'apprend  un  diplôme  du  roi  Clotaire  III,  en 
663  (3);  on  sait  que  Gontran  mourut  en  593.  Plus  tard, 
Hileriacus  est  le  nom  d'une  villa  appartenant  à  l'église 
Notre-Dame  de  Paris,  aux  termes  d'un  diplôme  faux  de 
Charlemagne  (4)  et  de  deux  diplômes  authentiques,  l'un 
de  l'évéque  Inchad,  en  829  (5),  l'autre  de  Charles  le  Chauve, 
en  850  (6).  [H]elariacus ,  propriété  de  l'abbaye  de  Saint- 
Bénigne  de  Dijon,  parait  être  aujourd'hui  Larrey  (Côte- 
d'Or).  Quant  à  la  variante  Hileriacus  y  nom  de.  la  propriété 
du  chapitre  de  Notre-Dame  de  Paris ,  on  n'en  connaît  pas 
la  forme  en  français. 

Ces  noms  de  lieux  sont  dérivés  du  gentilice  Hilarius 
porté  par  Hilarius  Lucus  dans  une  inscription  de  Trêves  (7), 
par  Hilarius  Sequens  dans  une  inscription  du  musée  de 


(1)  C.  I.  L.,  X,  2496. 

(2)  Quique  sacri  lacenim  collegit  corpus  Homeri , 

Quique  notas  spuriis  versibus  apposait , 

Gccropiae  commune  decus,  Latiacque  Camenae  , 

Solus  qui  Ghium  miscet,  et  Ammineum. 

Ausone,  épitre  XVIII,  v.  28-31. 

(3)  Pertz,  Diplomatum  imperii  tomus  primuSf  p.  39,  lignes  4,  5.  Pardes- 
sus, Diplomata,  t.  I,  p.  132. 

(4)  Cartulaire  de  Notre-Dame  de  Paris  y  t.  I,  p.  240.  Sickel,  Ac(a  Karoli- 
norum,  t.  II,  p.  431. 

(5)  Cartulaire  de  Notre-Dame  de  Paris  t.  I,  p.  322. 

(6)  Ibid.,  t.  I,  p.  251. 

(7)  Brambach,  n*  825. 


250  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

Wiesbaden  (1),  par  Hilaria  Quintilla  dans  une  inscription  de 
Grenoble  (2).  Ce  nom  fut  illustré  au  quatrième  siècle  par 
saint  Hilaire,  évéque  de  Poitiers,  mort  en  368  (3),  plus 
tard  par  Hilaire,  évoque  d'Arles,  qui  vivait  dans  la  première 
moitié  du  cinquième  siècle  (4). 

JocuNDiACus  est  le  nom  d'une  maison  située  près  de 
Tours  ;  là  s'aventurèrent ,  en  577 ,  Mérovée ,  fils  du  roi 
Chilpéric,  et  Gontran  Boson,  qui  s'étaient  réfugiés  dans 
la  basilique  de  Saint-Martin  de  Tours,  pour  y  jouir  du 
droit  d'asile  et  par  là  conserver  leur  vie  (5).  Mons  Jocunr 
diacus  était,  au  neuvième  siècle,  le  nom  d'une  montagne; 
au-dessus  s'élevait  une  cella  sancti  Martini  qui  apparte- 
nait à  l'abbaye  de  Saint-Denis  :  on  l'apprend  par  un 
diplôme  de  Charle  le  Chauve  qui  remonte  à  l'année  862  (6). 
Au  même  siècle  et  dès  le  précédent,  les  rois  d'Aquitaine 
avaient  en  Limousin  un  palais  appelé,  au  neuvième  siècle, 
Jocundiacum ,  dans  la  vie  de  Louis  le  Débonnaire ,  dite  de 
«  de  l'Astronome  (7),  »  et  Jogundiacum  dans  un  diplôme 
de  l'année  794  (8).  L'orthographe  Joguntiacum  nous  est 
ofiferte  par  un  document  du  onzième  siècle  (9).  Nous  devons 
partout  restituer  *  Jucundictcus. 

Jucundius  est  un  gentilice  qu'on  peut  relever  dans  quel- 
ques inscriptions.  Dans  une  dédicace  à  Jupiter  trouvée  à 
Dottendorf ,  on  voit  apparaître  le  légionnaire  C.  Jucundius 
Similis  (iO).  Jucundius  est  un  des  noms  propres  qui  se  lisent 


(1)  Brambach,  n*  1027. 

(2)  AUmer,  Inscriptions  de  Vienne^  t.  II,  p.  316. 

(3)  Teuffol,  Geschichte  der  rœmischen  Liter&tur,  3*  édit.,  p.  976,  977. 

(4)  Teulfel,  ibid.,  p.  1078. 

(5)  Grégoire  de  Tours,  Historia  Francorum^  livre  V,  chapitre  14,  édi- 
tion Arndt,  p.  204;  cf.  Longnon,  Géographie  de  U  Gaule  au  sixième  siècle, 
p.  274. 

(6)  Tardif,  Monuments  histqriqueSf  p.  119. 

(7)  C.  47,  chez  Dom  Bouquet,  VI,  112  d. 

(8)  Dom  Bouqaet,  VI,  453  b  ;  Sickel,  Acta  Karoltnorum,  t.  II,  p.  84. 

(9)  Translalio  sancti  Genulfi  episcopi,  D.  Bouquet,  VI,  331  a. 
(10)  Brambach,  n*  512. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  251 

dans  les  fragments  d*inscriptions  recueillis  à  la  porte  noire 
de  Trêves  (1).  On  a  trouvé  en  Hongrie  une  dédicace  à 
Jupiter  par  Jucundius  Juvenalis  (2).  Une  inscription  d'Afri- 
que sur  une  borne  de  champ  nous  apprend  que  cette  borne 
a  été  placée  au  temps  de  l'empire  romain  par  ordre  du 
praeses  Jucundius  Peregrinus  (3). 

Par  Jucundiacus  ^  on  peut  expliquer  les  noms  de  Janzé 
( lUe-et- Vilaine ) ;  Janzat  (Allier);  Jonzac  (Charente-Infé- 
rieure) ;  Jonzieux  (Loire). 

JuvENCiACUM  est  le  nom  d'un  palais  dont  la  situation 
nous  est  inconnue  et  d'où  Louis  le  Débonnaire  a  daté  un 
diplôme  en  832  (4).  L'orthographe  primitive  a  dû  être 
^Juventiacus, 

Juventius  est  un  gentilice  romain  connu  à  la  fois  par  les 
auteurs  et  par  les  inscriptions.  Ainsi  Tite-Live  nous  apprend 
qu'en  l'an  197  avant  J.-C,  le  tribun  militaire  T.  Juventius 
pérît  dans  une  bataille  contre  les  Gaulois  (5).  T.  Juventius 
Thalna  devint  préteur  en  l'an  195  (6).  Vers  la  même  épo- 
que paraît  avoir  vécu  le  poète  comique  Juventius  (7).  L.  Ju- 
ventius Thalna  fut  lieutenant  du  préteur  Calpurnius  en 
Espagne,  l'an  185  avant  notre  ère  (8).  M.  Juventius  Thalna, 
d'abord  tribun  du  peuple,  devint  préteur  l'an  167  avant 
notre  ère  (9),  consul  en  163,  et  mourut  subitement  en  célé- 
brant un  sacrifice  (10).  Vers  le  commencement  du  premier 
siècle  avant  J.-C,  dn  comptait  parmi  les  disciples  du  juris- 
consulte Q.  Mucius  Scaevola  un  certain  C.  Juventius,  et  il 


(1)  Brambach,  n*  826. 

(2)  C.  /.  L.,  III,  887. 
(3)/bid.,  VIII,  8811. 

(4)Dom  Bonquet,  VI,  581  c.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  178,  n»  304. 

(5)  Tite-Live,  livre  XXXIII,  c.  22. 

(6)  Tite-Live,  livre  XXXIV,  c.  42,  43. 

(7)  Voyez  les  textes  réunis  par  Teuffel ,  Geschichte  der  rœmischen  Lite- 
rafur,  3'  cdit.,  p.  187. 

(8)  Tite-Live,  livre  XXXIX,  c.  31,  38. 

(9)  Ibid.,  livre  XLV,  c.  16,  21. 

(10)  C.  /.  L.,  t.  I,  p.  437.  Pline,  Histoire  naturelle,  livre  VII,  }  182. 


252  LIVRE  IL  CHAPITRE  IL 

acquit  lui-môme  une  autorité  dont  le  souvenir  subsistait 
encore  deux  cents  ans  plus  tard  comme  Tatteste  un  frag- 
ment du  jurisconsulte  Pomponius  (1).  Il  y  eut  sous  le  haut 
empire  deux  autres  jurisconsultes  du  même  nom,  les  deui 
Juventius  Celsus ,  père  et  fils ,  qui  vécurent ,  l'un  vers  le 
milieu  du  premier  siècle  de  notre  ère  (2) ,  Tautre  vers  la 
fin  de  ce  siècle  ou  le  commencement  du  suivant  ;  ce  der- 
nier laissa  d*importants  ouvrages  dont  le  Digeste  nous  a 
conservé  des  débris  nombreux  ;  il  fut  élevé  une  fois  à  la 
préture  et  deux  fois  au  consulat  (3). 

Ce  gentilice  pénétra  en  Gaule,  témoin  une  inscription  de 
Grenoble  où  se  lisaient  les  noms  de  Q.  Juventius  Victor  (4) 
et  une  inscription  de  Lornay  où  on  lit  ceux  de  G.  Juventius 
Secundinus  (5). 

Jouancy,  commune  du  département  de  l'Yonne,  est  ap- 
pelé Jovenciacum  dans  un  document  de  Tannée  1157;  il 
faut  corriger  *  Juventiacus  et  reconnaître  dans  ce  nom  de 
lieu  un  dérivé  du  gentilice  Juventius.  La  forme  gallo- 
romaine  "  Juventiacus  avait  pour  variante  proprement  ro- 
maine JuventianuSy  nom  d'une  villa  dépendant  de  Fabbaye 
de  Saint- Vaast  d'Arras  en  867  :  nous  l'apprenons  par  un 
diplôme  de  Charles-le-Chauve  (6). 

JuviNiACus  est,  suivant  la  Vie  de  saint  Arnoul,  le  nom 
d'une  localité  située  dans  le  Soissonnais  et  où  Clovis  se 
serait  rendu  après  la  célèbre  victoire  contre  les  Allemands 
qui  le  décida  à  se  convertir  au  christianisme  l'an  496  de 
notre  ère; on  pense  que  c'est  aujourd'hui  Juvigny  (Aisne) (7). 

(1)  Pomponius,  Liber  singul&ris  enchiridii^  au  Digeste,  livre  I,  titre  2, 
loi  2,  i  42. 

(2)  Teuffel,  Geschichte  derrœmischen  Liter&tur,  3*  édit.,  p.  712,  713. 

(3)  Teuflfel,  ibid,,  p.  795.  Le  C,  /.  L.,  VI,  20940-20958,  nous  donne  des 
exemples  de  ce  gentilice  dans  les  inscriptions  de  Rome. 

(4)  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  III,  p.  147. 

(5)  Allmer,  ibid..  t.  III,  p.  277. 

(6)  Dom  Bouquet,  VIII,  605  a. 

(7)  Dom  Bouquet,  III,  383  d.  Matton,  Dictionnaire  topographique  du  dé- 
partement de  l'Aisne,  p.  146. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACU8  AU  MOYEN  AGE.  253 

En  799,  Juviniacus  est  le  nom  d*un  fisctis  dont  une  partie 
est  cédée  par  Châriemagne  à  l'abbaye  de  Saint-Sauveur 
d'Aniane  (Hérault)  (1) ,  et  cette  libéralité  est  confirmée  par 
Louis  le  Débonnaire  en  837  (2).  Un  diplôme  de  Charles  le 
Chauve  nous  apprend  qu'il  y  avait  dans  le  comté  de  Troyes, 
en  877,  une  villa  appelée  Juviniacus,  aujourd'hui  Jeugny 
(Aube)  (3).  Un  autre  Juviniacus  qui  aurait  été  situé  dans  la 
Champagne  septentrionale  est  mentionné  dans  le  polypty- 
que de  Saint-Remy  de  Reims;  suivant  M.  Longnon,  ce 
serait  Jouaignes  (Aisne)  (4).  Est-ce  le  Juveniacum  oppidum 
d'une  lettre  de  Gerbert  qui  aurait  été  écrite  en  986  (5)? 
Une  autre  villa  Juviniacus  était  située  en  M&connais,  et 
l'église  cathédrale  de  Nevers  en  devint  propriétaire  à  la  fin 
du  neuvième  siècle,  ainsi  qu'il  résulte  d'un  diplôme  émané 
du  roi  Eude  en  894  (6). 

Juvinitums  par  deux  i  ou  mieux  Juveniacum  par  un  seul  z, 
vient  du  gentilice  Juvinius,  ou  mieux  Juvenius  qui  dérive 
àejuvenis,  jeune,  et  qui  se  rencontre  quelquefois  au  temps 
de  l'empire  romain.  Une  inscription  de  Gloett,  en  Bavière, 
conserve  le  souvenir  d'un  vœu  fait  à  Jupiter,  Junon  et 
Minerve ,  dans  l'espérance  de  conserver  la  vie  à  Juvenius 
Speratus  (7);  le  musée  de  Ratisbonne  possède  l'inscription 
placée  sur  le  tombeau  d'une  famille  dont  le  chef  était 
M.  Juvenius,  ancien  porte-étendard  de  la  légion  III  Ao- 
lica  (8).  La  variante  Juvinius  par  deux  i  correspondant  à 
Juviniacus  nous  est  mise  sous  les  yeux  par  une  épitaphe 
romaine  d'Espagne  placée  sur  le  tombeau  de  Juvinia  Sabina, 
gr&ce  aux  soins  de  L.  Juvinius  (9). 

(l)Dom  Bouquet,  V,  762  a.  Sickel,  Acta,  JSCaroItnorum,  t.  II,  p.  61,  n*  159. 

(2)  Dom  Bouquet,  VI,  616  b.  Sickel,  Acta  Karolinorum ,  t.  II,  p.  194, 
r355. 

(3)  Dom  Bouquet,  VIII,  659  b, 

(4)  Longnon,  Etude  sur  les  pagi  de  la  Gaule,  2*  partie,  p.  92. 

(5)  Dom  Bouquet,  IX,  291  a.  OUeris,  Œuvres  de  Gerbert^  p.  55. 

(6)  Dom  Bouquet,  IX,  464  b. 

(7)  C.  /.  L.,  III,  5867, 

(8)  Ibid.,  III,  5966. 
(9|  Ibiff .,  n,  495. 


254  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

Le  nom  gallo-romain  Juviniacus  a  perdu,  en  français, 
la  syllabe  médiale  vi  dans  le  nom  de  Jeugny  (Aube)  dont 
nous  avons  parlé  à  la  page  précédente.  Mais  ordinairement 
la  syllabe  médiale  vi  est  conservée.  Nous  citerons  comme 
exemple  du  maintien  de  cette  syllabe  les  deux  Juvigny  du 
département  de  la  Meuse  dont  l'un  possédait  une  abbaye 
de  femmes  fondée,  dit-on,  par  Richilde,  femme  de' Char- 
les le  Chauve  (1).  Il  y  a  en  France  sept  autres  communes 
du  nom  de  Juvigny.  Nous  avons,  p.  252,   cité  Juvigny 
(Aisne)  ;  les  autres  sont  situées  dans  les  départements  du 
Calvados  (2) ,  de  la  Manche ,  de  la  Marne  ,  de  l'Orne  et  de 
la  Haute-Savoie,  et  chacun  de  ces  départements  contient 
un  Juvigny,   sauf  l'Orne  où  Ton  en  compte  deux.  Juvi- 
gnies  (Oise)  suppose  un  primitif  Juviniacae ,  sous-entendu 
villae  ;  quant  à  Juvigné  (Maine) ,  il  nous  offre  la  pronon- 
ciation occidentale  de  la  désinence  -iacus  dont  Juvignac 
(Hérault)  nous  donne  la  prononciation  méridionale.  De  ce 
relevé  il  résulte  que  douze  noms  de  communes  en  France 
représentent  Tadjectif  dérivé  gallo-romain  yuvemoctw  en  en 
conservant  la  seconde  syllabe.  Un  autre  au  moins  a  perdu 
cette  syllabe  en  traversant  les  siècles.   Quant  à  Jouai- 
gnes  (Aisne) ,  il  représente  une  variante  Juveniae,  sous- 
entendu  villae  :  ici  le  gentilice ,  transformé  en  adjectif, 
ne  prend  pas  de  sufi&xe. 

LiziNiACus  est  le  nom  d'une  villa  mentionnée  en  963 
dans  une  charte  d'Etienne,  évéque  de  Clermont,  en  faveur 
de  l'abbaye  de  Saint-Julien  de  Brioude  (3).  Suivant  Ja- 
cobs  (4)  et  M.  Longnon  (5) ,  cette  localité  a  changé  de 
nom,  et  c'est  aujourd'hui  Saint-Germain-Lembron  (Puy- 


(1)  Liénard,  Dictionnaire  topogr&phique  du  département  de  la  Meuse, 
p.  118,  119. 

(2)  Hippeau ,  Dictionnaire  topographique  du  département  du  Calvados^ 
p.  154. 

(3)  Doniol,  Cartulaire  de  Brioude,  p.  341. 

(4)  Géographie  de  Grégoire  de  Tours,  2*  édit.,  p.  130. 

(5)  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle^  p.  501. 


LA  DÉSINENCE  -1-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  1S5 

de-Dôme);  au  dixième  siècle,  elle  n'avait  pas  d'autre  nom 
que  Lisiniaeua;  mais  il  s'y  trouvait  une  église  dédiée  à 
saint  Germain  (1).  On  a  dû  écrire  plus  anciennement  Liei- 
niacus  par  un  c  au  lieu  du  s;  Grégoire  de  Tours  nous 
apprend  qu'en  l'année  479 ,  le  duc  de  Septimaniej  Victo- 
rius ,  fit  construire  une  basilique  dans  le  Licaniacensis  vi- 
cus  (3)  ;  Jacobs  et  M.  Longnon  proposent  de  corriger  Lici- 
macentis  (3)  et  croient  qu'il  s'agit  du  vious  ou  de  la  villa 
qui ,  dans  les  chartes  précitées ,  porte  le  nom  de  Lisinia- 
cai.  Un  diplôme,  émané  de  Charles  le  Chauve  en  869  (4),  nous 
parle  d'un  locus  qui  portait  le  même  nom  :  &  l'accusatif  plu- 
riel Lûiniacas  dans  le  comté  de  Laon  ;  c'est  aujourd'hui 
Résigny  (Aisne)  (5).  Une  villa  Lisiniaca  est  mentionnée  au 
onzième  siècle  dans  un  cartulaire  de  l'abbaye  de  Mo- 
léme  (Côte-d'Or)  (6)  ;  c'est  Léslgny,  commune  de  Mailly-la- 
ViUe  (Yonne). 

Licinius  est  un  des  gentilices  romains  les  plus  connus. 
Un  des  hommes  les  plus  célèbres  qui  l'aient  porté  est  le 
plébéien  C.  Licinius  Calvus  Stolo,  gendre  du  patricien 
M.  Fabius  Ambustus;  il  a  surtout  marqué  sa  place  dans 
l'histoire  romaine  par  l'influence  que,  poussé  par  l'ambi- 
tioQ  de  sa  femme ,  il  exerça  à  la  tête  des  plébéiens ,  dans 
la  lutte  contre  les  patriciens ,  pendant  la  première  moitié 
du  quatrième  siècle  avant  notre  ère  (7);  il  parvint  au 
consulat  l'an  361  avant  J.-C.  (8).  Déjà,  avant  lui,  deux 
membres  de  la  même  gens,  tous  deux  appelés  C.  Licinius 
Calvus,  avaient   été   élus  tribuns   militaires   avec  puis- 


(1)  Doniol,  Carlulalre  de  Brioude,  p.  341. 

(31  Grégoire  d«  Tour»,  Bistoria  Frsncorum,  livre  II,  c.  30,  èdit.  Arndt, 
p.  M. 

(3)  C'Mt  la  Tariuits  A'na  muiiiBerït,  Voj,  Dom  Bonqnet,  tom.  II ,  p,  171, 
not«0. 

H)  Tardif,  Uonumanli  hi$torique$,  W  199,  p.  129. 

&)  HatloD,  Dictioniiaire  topographique  du  liéparUment  de  l'AUne,  p.  239. 

(et  Qnuitiii,  Cart.  dt  l'Yonne,  t.  II,  p.  20. 

m  Tito-LiTe,  livre  VI,  c.  34. 

^  r.  I.  L.,  t.  I,  p.  510,  511.  Tite-Uve,  Uvm  VU,  c.  0. 


256  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

sance  consulaire,  l'un  pour  Tannée  400  avant  notre  ère  (1), 
l'autre  pour  l'année  396  (2).  A  une  époque  moins  éloignée 
de  nous ,  le  gentilice  Licinius  fut  porté  par  les  deux  Cras- 
sus  ;  l'un ,  qui  compte  parmi  les  grands  orateurs  de  Rome, 
fit  fonder,  l'an  118  avant  notre  ère,  la  colonie  de  Nar- 
bonne,  et  mourut  l'an  91  ;  il  s'appelait  L.  Licinius  Crassus; 
l'autre  est  le  triumvir  M.  Licinius  Crassus  qui  périt  dans  la 
guerre  contre  les  Parthes,  l'an  53  avant  J.-C.  Son  contem- 
porain, L.  Licinius  Murena,  consul  Tan  62  avant  notre  ère, 
est  connu  parmi  les  humanistes,  grâce  à  une  éloquente  plai- 
doirie de  Cicéron  ;  comme  L.  Licinius  Crassus,  il  porta 
son  gentilice  en  Gaule  où  il  fut  propréteur  en  64  (3). 

Les  inscriptions  de  la  Gaule  nous  font  connaître  plusieurs 
exemples  de  Licinius  employé  comme  nom  :  à  Saint-Pierre- 
d'Albigny  (Savoie),  C.  Licinius  Calvinus  dédie  une  basilique 
à  Jupiter  (4).  A  Saint- Alban-du-Rhône,  P.  Licinius  Floridus 
élève  un  monument  funèbre  à  sa  femme  (5).  A  Aix-les- 
Bains,  M.  Licinius  Ruso  fait  un  vœu  au  dieu  thermal 
Bormo  (6).  Une  inscription  provenant  d'un  mur  de  con- 
struction romaine ,  près  d'Annecy ,  atteste  que  ce  mur  était 
la  propriété  de  L.  Licinius  Titurianus  (7).  On  a  trouvé  à 
Nimes  l'épitaphe  de  Licinia  Flavilla  (8).  M.  Aimer  a  derniè- 
rement publié  une  dédicace  à  Mars  par  Licinius  Myrtillus  ; 
ce  monument  a  été  trouvé  à  Aire  (9). 

Outre  Résigny  (Aisne),  plusieurs  noms  de  communes 
s'expliquent  par  le  primitif  Liciniacus.  Nous  citerons  Lési- 
gnat  (Charente) ,  Lésigné  (Maine-et-Loire) ,  deux  Lésigny 
(Seine-et-Marne,  Vienne);  Lézignieux  (Loire).  La  variante 


(1)  Tite-Live,  Uvre  V,  c.  12;  C.  /.  L.,  t.  I,  p.  502,  503. 

(2)  Tite-Live,  Uvre  V,  c.  18  ;  C.  /.  L.,  t.  I,  p.  502. 

(3)  Voyez  les  textes  réunis  par  M.  Desjardins,  Géographie  de  la  Gaule  ro- 
maine, t.  II,  p.  290,  347-349. 

(4)  AUmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  III,  p.  228. 

(5)  Allmer,  ibtd.,  t.  III,  p.  103. 

(6)  AUmer,  iMd.,  t.  III,  p.  304. 

(7)  Allmer,  ibid.y  t.  III,  p.  343. 

(8)  AUmer,  Revue  épigr,^  t.  I,  p.  392,  n*  434. 

(9)  AUmer,  ibid.,  t.  II,  p.  161,  n*  575. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACU8  AU  MOYEN  AGE.  257 

Lieinianw  se  trouve  au  Moyen  Age,  en  Italie,  dans  les  char- 
tes de  Rayonne  (1)  ;  elle  est  constatée  en  France  par  Lézi- 
gnan  (Aude,  Hautes-Pyrénées,  Hérault),  et  par  Lusignan 
(Vienne)  qui  s'est  écrit  au  treizième  siècle,  en  français, 
Lizegnen  (2).  Lézinnes  (Yonne),  s'est  appelé,  en  français, 
Lizignes  (1234),  et  en  latin  Lisigniae  (1116),  Lisiniae  (1080); 
on  peut  corriger  Uciniae  par  un  c  en  sous-entendant  domus 
an  pluriel  ;  domiâs  Liciniae  est  un  équivalent  latin  de  domus 
lÀciniaeae  ou  Licinicmae. 

LiLiACus,  villa  située'dans  le  pays  de  Chalon-sur-Saône, 
aurait  été  donnée  à  l'église  Saint-Marcel  de  Ch&lon  en  584  ; 
mais  le  diplôme  qui  contient  cette  disposition ,  bien  que 
remontant  au  Moyen  Age,  est  faux  (3).  Liliacus  s'expli- 
que par  un  primitif  Laeliacus  dérivé  de  Laelius. 

Laelius  est  le  nom  d'une  gens  plébéienne  qui  arriva  au 
consulat  en  190,  dans  la  personne  de  C.  Laelius,  en  cette 
année  collègue  de  L.  Cornélius  Scipio,  plus  tard  surnommé 
l'Asiatique.  C.  Laelius  est  surtout  connu  par  sa  liaison  avec 
le  frère  de  son  collègue,  c'est-à-dire  avec  P.  Cornélius  Scipio 
Africanus,  vainqueur  d'Annibal  à  Zama,  202  ;  il  l'accompa- 
gna sur  tous  les  champs  de  bataille  et  partagea  sa  gloire. 
C.  Laelius  Sapiens  son  fils,  consul  en  140,  ami  du  second 
Scipion  l'Africain,  se  trouva  avec  lui  à  la  prise  de  Car- 
thage,  146,  et  mourut  vers  115  :  il  est  un  des  personnages 
que  Cicéron  met  en  scène  dans  ses  dialogues  philosophiques. 

Les  inscriptions  nous  montrent  que  ce  gentilice  pénétra 
dans  les  provinces  où  il  persiste  pendant  la  période  impé- 
riale. On  a  recueilli  en  Espagne  les  épitaphes  de  Q.  Laelius 
Scipio  (4)  et  de  M.  Laelius  Sabinianus  (5);  à  Seckau,  en 


(1)  Fundus  Licinianus,  Fantnzzi,  Monumenti  R&venn&ii,  t.  I,  p.  70. 

(2)  Charte  de  Tannée  1202,  vieux  style  ;  chez  L.  Delisle,  CaLtalogue  deê  ac- 
tes de  Philippe-Auguste,  p.  173,  n*  752.  Cf.  p.  612  au  mot  Lusignan, 

(3)  Pardessus,  Dtpjomata,  t.  I,  p.  150;  Pertz,  Diplomsitum  imperii  tomus 
primus,  p.  129,  ligne  19. 

(4)  C.  /.  L.,  Il,  347. 

(5)  Ibtd.,  II,  4180. 

17 


258  LIVRE  IL  CHAPITRE  IL  ! 

Styrie,  celles  de  P.  Laelius  Heracla  et  de  Laelius  Vitalis(l\ 
Liliacus  pour  *  Laeliacus  a  donné  à  la  France  deux  noms 
de  communes  :  Lilhac  (Haute-Garonne) ,  et  Lilly  (Eure); 
cette  dernière  localité  est  appelée  Liliacum  dans  un  docu- 
ment de  Tannée  1157  (2). 

LiPiDiACus  est  le  nom  d'un  pagus  d'Auvergne  où  habita, 
enfermé  dans  une  cellule,  et  où  mourut,  vers  l'année  500, 
saint  Lupicin,  dont  Grégoire  de  Tours  raconte  l'his- 
toire (3).  Le  vicus  chef-lieu  de  ce  pagiLs  s'appelait,  du  nom 
de  la  rivière  qui  y  coule ,  Berberensis ,  parce  que  le  nom  de 
cette  rivière,  aujourd'hui  la  Bèbre,  affluent  de  la  Loire; 
était  autrefois  Berbera  ;  M.  Longnon  a  démontré  que  ce 
vicus  est  probablement  Dampierre-sur-Bèbre  (Allier). 

Tout  le  monde  connaît  le  cognomen  latin  Lepidus  illustré 
par  une  branche  de  la  gens  Aemilia  et  notamment  par  le 
triumvir  M.  Aemilius  Lepidus,  collègue  d'Antoine  et  d'Au- 
guste. De  Lepidus  dérive  un  gentilice  Lepidius  moins  célè- 
bre que  le  surnom.  On  le  rencontre  deux  fois  dans  uoe 
inscription  d'Espagne  (4)  ;  une  fois  dans  une  inscription  de 
Bulgarie  (5).  Les  exemples  n'en  sont  pas  rares  en  Italie  (6). 
Il  pénétra  en  Afrique  (7)  et  en  Gaule  :  de  nouveaux  exem- 
ples ont  confirmé  la  lecture  proposée  par  M.  AUmer  pour 
une  inscription  de  Grenoble  qui  est  l'épitaphe  du  tombeau 
élevé  par  L.  Lepidius  Basilaeus  à  sa  femme  (8). 

LuciACus,  actuellement  Lussac  (Charente),  est,  en  573 


(1)  C.  /.  L.,  III,  5365,  5366. 

(2)  Blosseville,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  l'Eure, 
p.  125. 

(3)  Grégoire  de  Tours,  Vita  patrum,  c.  13,  §  3;  édit.  Amdt  et  Krusch , 
p.  716,  1.  33  ;  Bordier,  Les  livres  des  miracles,  t.  III,  p.  306. 

(4)  C.  /.  L.,  II,  1647. 

(5)  Ibid.,  III,  6293. 

(6)  Voyez  C.  /.  L.,  VI,  21188-21198,  et  les  index  du  C.  I.  L.,  t.  V,p.  1117; 
t.  IX,  p.  716;  t.  X,  p.  1043. 

(7)  C.  /.  L.,  VIII,  index,  p.  1006. 

(8)  InscHptions  de  Vienne,  III,  150;  C.  L  L.,  XII,  2270;  cf.  1910,2723. 


LA  DÉSINENCE  -I-AGU8  AU  MOYEN  AGE.  259 

OU  591 ,  le  nom  d'une  propriété  donnée  par  le  prêtre  Are- 
dius,  en  français  saint  Yrieix,  à  l'abbaye  d'Attanum^  au- 
jourd'hui 8aint-Yrieix-la-Perche  (Haute- Vienne)  (1).  Un  au- 
tre locellus  appelé  Luciacus  est  légué,  en  615, par  Bertramne, 
évoque  du  Mans ,  à  la  basilique  de  Saint-Pierre  et  Saint- 
Paul  ,  fondée  par  lui  près  de  cette  ville  (2)  ;  ce  doit  être 
Lucé-sous-Ballon  (Sarthe).  Une  localité  appelée  Luciacus , 
dans  le  Parisis,  est  mentionnée  en  846  dans  un  diplôme  de 
Charles  le  Chauve  (3).  En  855,  ce  roi  donne  à  l'abbaye  de 
Saint-Oermain  d'Âuxerre  une  propriété  à  Liu>iacus ,  aujour- 
d'hui Lucy-le-Bois  (Yonne)  (4).  L'abbaye  de  Saint-Lucien 
de  Beauvais  reçoit  du  même  prince,  en  869,  le  don  de  la 
villa  de  Lucic^i^  en  Beauvaisis ,  aujourd'hui  Luchy 
(Oise)  (5).  En  885 ,  un  diplôme  de  l'empereur  Charles  le 
Gros  nous  montre  le  chapitre  de  Toul  propriétaire  de  la 
dîme  du  vin  à  Litciacus ,  aujourd'hui  Lucey  (Meurthe-et- 
Moselle)  (6). 

Lucius,  d'où  Luciaous  dérive,  est  plus  connu  comme  pré- 
nom que  comme  gentilice.  Cependant  il  était  déjà  employé 
comme  gentilice  avant  la  fin  de  la  république,  témoin  une 
inscription  de  Terracine  qui  nous  fournit  les  noms  de 
C.  Lucius  M.  f[ilius]  (7)  et  deux  autres  inscriptions  où  la 
quantité  de  la  syllabe  initiale  est  indiquée  par  le  double- 
ment de  Vu  :  M.  Luucius  M.  f[ilius],  à  Spolète  (8);  Sex. 
Luucius,  Sex.  l[ibertus],  Caen[us],  à  Carthagëne  en  Espa- 
gne (9).  Dès  cette  période  primitive,  nous  rencontrons  la 


(1)  Pardessus,  DiplomaiitL^  t.  I,  p.  138.  Cf.  Mabme,  La  panctiTte  noire  de 
Sèint'MArtin  de  Tours^  p.  148. 

(2)  Pardessus,  DiplomaU^  t.  I,  p.  210. 

(3)  Tardif,  Monuments  historiques,  n*  150,  p.  98. 

(4)  Dom  Bouquet,  VIII,  553  b.  Cf.  Quantin,  Dictionnsire  topographique 
du  département  de  l'Yonne,  p.  74. 

(5)  Dom  Bouquet,  VIII,  617  b. 

(6)  Dom  Bouquet,  IX,  343  b.  Cf.  Lepage,  Dictionnaire  topographique  du 
département  de  la  Meurthe,  p.  80. 

P)  C.  I.  L.,  I,  n»  1187. 

(8)  iMcC.,  I,  1407. 

(9)  Ibid.,  I,  1477. 


260  LIVRE  II.  CHAPITRB  II. 

variante  Laccius ,  avec  deux  c  et  probablement  avec  Tabrè- 
gement  de  Vu  dans  une  inscription  du  mont  Athos  (1).  Les 
deux  variantes,  Tune  par  u  long  et  un  seul  c,  Tautre  par  « 
bref  et  deux  c,  persistent  dans  les  monuments  du  temps  de 
Tempire.  Voici  quelques  exemples  de  la  première  :  L.  Lu- 
cius  L.  l[ibertus]  Cimber  (2)  et  M.  Lucius  M.  Ipbertus 
Dromo  (avec  un  apex  sur  Vu  pour  montrer  qu'il  est  long), 
Aquilée  (3);  M.  Lucius  Maximas,  Parenzo  en  Istrie  (4); 
C.  Lucius,  Saint-Jean-de-Garguier  (5),  Lucius  Sevenis, 
Aries  (6) ,  P.  Lucius  Festus  et  P.  Lncius  Auctus ,  Nar- 
bonne  (7).  La  variante  Luccius  par  deux  ù  est  as^z  fré- 
quente :  Q.  Luccius  Maximus,  Carinthie  (8);  C.  Luccius 
Alexander,  oculiste,  dont  on  a  trouvé  plusieurs  cachets  près 
d'Utrecht  (9);  Q.  Luccius  Faustus,  légionnaire  dont  Tépita- 
phe ,  découverte  à  Zahlbach ,  est  conservée  au  musée  de 
Mayence  (10)  ;  Luccius  Marcianus,  Apt  (11)  ;  M.  Luccius  à 
Narbonne  (12). 

L'orthographe  par  u  bref  et  double  c  explique  probable- 
ment Vou  de  Loucé  (Orne),  qui  suppose  un  primitif  Luccia- 
eus.  La  variante  Luciacus  par  u  long  et  un  seul  c  a  dû  con- 
server son  u  en  français.  Elle  a  donné  les  noms  de 
dix-neuf  communes ,  savoir  :  les  deux  Luçay  du  départe- 
ment de  rindre,  Lucé  (Eure  et-Loir)  (13),  Lucé-sous-Ballon 
(Sarthe) ,  dont  on  a  parlé  plus  haut;  trois  Lucey  (Côte- 
d'Or,   Meurthe-et-Moselle,   Savoie),  du   second  desquels 


(1)  c.  l  L.,  I,  579  ;  m,  714. 

(2)  Ibid.,  V,  8252. 

(3)  Ibid.,  V,  994. 

(4)  Ibid.,  V,  333. 

(5)  Ibid.,  XII,  597. 

(6)  Ibid.,  G84. 

(7)  Ibid.,  4581,  4950,  4957,  etc. 

(8)  Ibid.,  III,  4786. 

(9)  Brambach,  136. 

(10)  Brambach,  1180. 

(11)  C.  /.  L.,  XII,  2656.   . 

(12)  /6id..  4954,  etc. 

(13)  Cf.  Mcriet,  Dictionnaire  topographique  du  département  d'Eure-et- 
Loir  ^  p.  106,  oU  l'on  voit,  en  1116,  cette  localité  appelée  Luciacum, 


LA  DÉSINENCE  -I-ÂGUS  AU  MOYEN  AGE.  261 

il  a  été  question  déjà;  six  Lucy,  un  dans  l'Aisne,  un 
dans  la  Marne,  un  dans  la  Seine-Inférieure,  trois  dans 
ITonne  dont  un  mentionné  plus  haut;  Luchy  (Oise),  déjà 
cité  ;  cinq  Lussac ,  de  Tun  desquels  on  a  déjà  parlé  (Cha- 
rente, Charente-Inférieure,  Gironde,  Vienne  et  Haute- 
Vienne)  ;  deux  Lussat  (Creuse  et  Puy-de-Dôme). 

A  côté  de  Luciacu^  on  trouve  la  variante  Luçianus.  Elle 
apparaît  déjà  sous  l'empire  romain  ;  il  y  avait  à  Veleia  un 
fundus  Lucianus  (1).  Deux  localités  du  nom  de  Lacianus 
figurent  dans  les  diplômes  mérovingiens  qu'a  publiés 
Pardessus,  l'une  en  615  dans  le  testament  de  Bertramne, 
évoque  du  Mans  (2),  l'autre  en  739  dans  le  testament  d'Ab- 
bon,  en  faveur  de  l'abbaye  de  la  Novaleze  en  Piémont  (3). 
Comparez  à  ces  formes  anciennes  le  nom  de  Lussan,  porté 
aujourd'hui  par  trois  communes  :  Gard,  Haute-Garonne, 
Gers.  Celle  de  ces  communes  qui  est  dans  le  département 
de  la  Haute-Garonne  a  donné  son  nom  au  terminium  Lur- 
cianense  d'une  charte  de  l'abbaye  de  Lezat  (4).  Il  y  a  aussi 
un  fundus  Lucianus  dans  une  charte  de  Ravenne  au  hui- 
tième siècle  (5). 

LuciLiACus  vicus  fut  fondé,  suivant  Grégoire  de  Tours, 
sous  l'épiscopat  de  l'évéque  Injuriosus  (529-546)  (6),  cela 
veut  dire  certainement  que  la  paroisse  fut  érigée  par  ce 
prélat;  ce  vicus  est  identique  à  Luzillé  (Indre-et-Loire). 

Lucilius,  d'où  Luciliacus  dérive,  est  le  nom  d'une  gens 
romaine  qui  remonte  à  la  république  comme  l'attestent  à 
la  fois  les  inscriptions  (7)  et  les  auteurs.  Il  a  été  illustré 


(i)  Table  alimentaire,  p.  4,  I.  43. 

(2)  Tome  I,  p.  210. 

l3)  Tome  II,  p.  374. 

(4)Molinier,  Géographie  historique  de  la  province  de  Languedoc,  col.  141. 

(5)  Fantuzzi,  Monumenti  Ravennatiy  t.  I,  p.  13. 

(6)  Hisioria  Francorum,  livre  X,  c.  31,  g  15;  chez  Dom  Bouquet,  t.  II, 
p.  388  b;  Amdt,  p.  447,  ligne  13.  Cf.  Longnon,  Géographie  de  la  Gaule  au 
tixième  siècle,  p.  276. 

(7)  C.  /.  L.,  I,  408,:896,  1430. 


262  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

par  le  chevalier  C.  Lucilius  mort  cent  trois  ans  avant  notre 
ère ,  le  premier  en  date  des  satiriques  romains  (1).  Il  était 
assez  répandu  au  siècle  suivant,  car  Cicéron,  dans  ceux  de 
ses  écrits  qui  nous  ont  été  conservés,  parle  de  six  Lucilius 
qui  semblent  avoir  été  ses  contemporains  (2) ,  et  l'auteur 
du  De  bello  civili  mentionne  un  septième  Lucilius  parmi  les 
partisans  de  Pompée  (3). 

Lucilius  est  aussi  sous  l'empire  un  nom  assez  répandu. 
On  connaît  Lucilius  Longus,  mort  Tan  23  de  notre  ère,  in- 
time ami  de  Tempereur  Tibère  (4)  ;  Lucilius  Capito,  procu- 
rateur d'Asie  à  la  môme  époque  (5)  ;  Lucilius,  le  correspon- 
dant de  Sénèque  ;  Lucilius  Bassus,  chargé  par  Vitellius,  en 
70,  du  commandement  des  flottes  de  Ravenne  et  de  Mi- 
sène  (6)  et  qui  presque  immédiatement,  trahissant  son 
protecteur,  embrassa  le  parti  de  Vespasien  (7).  Les  inscrip- 
tions de  la  période  impériale  mentionnent  un  grand  nombre 
de  Lucilius.  Plusieurs  de  ces  inscriptions  appartiennent  à  la 
Gaule  ;  deux  sont  conservées  au  musée  de  Vienne  (Isère)  ;  ce 
sont  les  épitaphes  de  Lucilius  Metrobius  (8)  et  de  A.  Luci- 
lius Cantaber  (9). 

Le  primitif  Luciliacus  explique ,  outre  le  nom  de  Luzillé 
(Indre-et-Loire) ,  celui  de  Luzillat  (Puy-de-Dôme). 

Luliâgus  est  le  nom  d'une  curtis  qui  aurait  été  donnée 
à  l'abbaye  de  Saint-Maurice  en  Valais,  par  Sigismond,  roi 
des  Burgondes,  en  523.  Ce  diplôme  est  faux;  mais  il  a  été 


(1)  Teuffel,  Geschichte  der  rœmischen  Lt'ferafur,  3*  édit. ,  p.  232  etsuiv. 

(2)  Les  deux  plus  connus  sont  les  deux  Lucilius  Balbus  appelés  Tun  Lu- 
cius,  l'autre  Quintus,  le  premier  jurisconsulte  ,  le  second  philosophe,  sur 
lesquels  on  peut  voir  Teufifel,  Geschichte  der  rœmischen  Literalur,  3*  édit., 
p.  250,  251,  264. 

(3)  Oe  bello  civili,  livre  I,  c.  15;  liv.  III,  c.  82. 

(4)  Tacite,  Annales,  livre  IV,  c.  15. 

(5)  Ibid. 

(6)  Ibid.y  Histoires^  livre  II,  c.  100. 

(7)  Ibid.,  HistoireSy  livre  III,  c.  12,  36,  40. 

(8)  AUmer,  Inscriplionê  de  Vienne,  t.  I,  p.  337. 

1(9)  Ibid.,  t.  II,  p.  269.  Cf.  C.  /.  L.,  XII,  447,  456,  1203,  etc. 


\ 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUB  AU  MOYEN  AGE.  263 

fabriqué  fort  anciennement  (1).  Un  autre  Luliacus ,  dépen- 
dance de  Tarchevôché  de  Reims  et  où  Louis ,  roi  de  Ger- 
manie, aurait  séjourné  en  841 ,  est  mentionné  par  Hincmar 
dans  sa  vie  de  saint  Rémi  (2).  Luliacus  parait  tenir  lieu  d'un 
plus  ancien  *  Lolliacus. 

LoUius ,  dont  *  Lolliacus  est  dérivé ,  est  un  gentilice  ro- 
main dont  les  exemples  sont  nombreux.  On  a  relevé  l'indi- 
cation d*au  moins  sept  LoUius  dans  les  œuvres  de  Cicéron. 
Au  commencement  de  l'empire ,  en  Tannée  21  avant  notre 
ère,  M.  LoUius  jouit  des  honneurs  du  consulat;  c'est  une 
des  causes  qui,  vers  cette  époque,  le  firent  chanter  par  Ho- 
race (3);  cinq  ans  plus  tard,  en  Tan  16,  il  devint  légat  de 
l'empereur  Auguste  en  Germanie,  et  il  s'y  fit  battre  par 
les  Sicambres,  les  Usipètes  et  les  Tenctères  (4),  défaite 
honteuse ,  dit  Suétone  (5).  C'est  peut-être  à  l'influence  de 
M.  LolUus  qu'est  due  la  présence  du  nom  de  C.  LoUius 
dans  une  inscription  de  la  Gaule ,  à  Crombach  (Prusse 
rhénane)  (6).  Le  potier  LoUius,  dont  on  a  trouvé  la  marque 
dans  diverses  parties  de  l'empire  romain,  était  peut-être 
Gaulois  (7). 

Leuilly  (Aisne);  Loeuilly  (Somme);  et  Loeuilly  (Haute- 
Saône),  sont  chacun  un  ancien  fundus  Lolliacus,  Pour  le 
premier  on  trouve,  au  douzième  siècle,  l'orthographe  it^/ia- 
cum^  Luilliacumy  Lulliacu/m  avec  ti  =  o  comme  dans  le 
Luliacus  des  textes  les  plus  anciens. 

LupiACus ,  dans  un  diplôme  faux  de  Clovis  I"  pour  l'ab- 


(1)  Pardessus,  Dtplomata,  t.  I,  71. 

(2)  Dom  Bouquet,  V,  432  c;  VII,  345  c. 

(3)  Horace,  Carmina,  livre  IV,  9,  vers  30  et  suiv. 

(4)  Dion  Cassius,  livre  LIV,  c,  20;  Cougny ,  Extraits  des  auteurs  grecs, 
t.  IV,  p.  470. 

(5)  Suétone,  Auguste,  c.  23. 

(6)  Brambach,  389.  Cf.  C.  /.  L.,  XII,  4174:  5686,  489. 

(7)  Les  inscriptions  funéraires  de  Rome  fournissent  de  nombreux  Lollius 
(C.  1,  L.,  VI,  21443-21497). 


264  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

baye  de  Saiat-Pierre-le-Vif  de  Sens  (1),  est  aujourd'hui 
Loupiac  (Cantal).  Un  autre  Lupiaoas  est  mentionné  parmi 
les  propriétés  de  Saint-Martin  de  Tours  dans  un  diplôme 
donné  par  Charlemagne  en  775  (2).  Un  troisième  Lupiactis 
est  une  villa  située  en  Limousin  et  dans  laquelle  était  si- 
tuée une  propriété  qu'un  certain  Avitus  donna,  en  891,  à 
l'abbaye  de  Beaulieu  (Corrèze)  (3). 

iMpiacus  est  peut-être  une  variante  d*un  plus  ancien 
*  Loppiacus.  Les  noms  de  L.  Loppius  Proculus  nous  ont  été 
fournis  par  une  inscripticm  de  Pompéi  (4). 

Il  y  a  en  France  cinq  communes  du  nom  de  Loupiac, 
outre  celle  dont  nous  venons  de  parler;  elles  sont  situées 
daijs  les  départements  de  TAveyron,  de  la  Gironde,  du  Lot 
et  du  Tarn.  Il  y  a  deux  Loupiac  dans  la  Gironde ,  un  seul 
dans  chacun  des  trois  autres  départements;  Louchy  (Al- 
lier) a  probablement  la  même  origine.  Loupian  (Hérault), 
appelé  Lupianus  en  990  dans  le  testament  de  Guillaume, 
vicomte  d'Agde  (5) ,  nous  offre  la  forme  romaine  du  gallo- 
romain  Luppiacus  pour  ^  Loppiacus.  Les  trois  Louppy  du 
département  de  la  Meuse  ont  la  môme  origine  :  inutile 
de  supposer  un  plus  ancien  *  Loppeiacus  dérivé  d'un 
gentilice  perdu  *  Loppeius  (6). 

Magniacus  est  donné  à  l'abbaye  de  Saint-Pierve-le-Vif 
de  Sens  dans  un  diplôme  faux  qui  serait  émané ,  en  569 
de  Theudechilde,  fille  de  Clovis  (7)  ;  il  s'agit  probablement 

(1)  Pardessus,  Dfplomata,  t.  I,  p.  39;  Pertz,  Diplomsitum.  imperii  tomus 
primusj  p.  117,  ligne  15. 

(2)  Dom  Bouquet,  V,  737  b.  Cf.  Mabille,  La  pancarte  noire  de  Saint-Mar- 
tin de  Tours,  p.  69,  n»  xviii;  p.  106,  n*  lxxix;  p.  151,  n*  18;  p.  227.  Sickel, 
Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  27,  n«  42. 

(3)  M.  Deloche,  Cartulaire  de  Beaulieu,  p.  210. 

(4)  C.  /.  L.,  X,  p.  1064,  col.  3.  De- Vit,  Onomasticonf  IV,  217,  propose  un 
gentilice  Lupius. 

(5)  Martene,  Thésaurus  novus  anecdotorum ,  t.  I,  col.  180.  Cf.  Eugène 
Thomas,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  l'Hérault,  p.  96. 

(6)  La  plus  ancienne  orthographe  connue  est  Lopei,  Lopeium,  Liénard, 
Dictionnaire  topographique  du  département  de  la  Meuse,  p.  134. 

(7)  Pertz,  Diplomatum  imperii  tomus  primus,  p.  133,  ligne  26. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUB  AU  MOYEN  AGE.  265 

de  Magny  (Yonne),  mentionné  sous  le  même  nom  dans  une 
charte  de  864  (1).  Un  autre  acte  faux  attribué  à  Louis  le 
Débonnaire  prétend  que  Charlemagne  aurait  fait  à  Tabbaye 
de  Micy  présent  de  l'église  dite  Magniacus,  en  Limou- 
sin (2).  En  835 ,  un  diplôme  authentique  de  Pépin  P%  roi 
d'Aquitaine,  en  faveur  de  Tabbaye  de  Mont-Olieu  (Aude), 
met  dans  le  pctgiLs  Tolosanus  une  villa  Magniacus  (3).  En 
845,  un  diplôme  de  Charles  le  Chauve  compte,  parmi  les 
propriétés  de  l'abbaye  de  Marmoutiers,  une  villa  Magnia- 
cus (4).  Un  diplôme  du  môme  roi ,  donné  le  20  décem- 
bre 858 ,  est  daté  de  Magniacus ,  viens  situé  dans  le  comté 
de  Nevers  (5).  Trois  Magniacus  apparaissent  au  dixième  et 
au  onzième  siècle  dans  les  chartes  relatives  au  départe- 
ment de  Maine-et-Loire  (6).  Une  Magniacus  villa  figure 
trois  fois  dans  le  cartulaire  de  Savigny  (Rhône)  (7). 

Magnius,  d'où  vient  Magniacus,  est  un  gentilice  qui  exis- 
tait déjà  au  temps  de  la  république  romaine,  comme  l'at- 
teste une  inscription  de  Spolète ,  où  Ton  a  lu  les  noms  de 
l'afTranchi  L.  Magnius  Alaucus  qui  exerçait  dans  cette  ville 
le  métier  de  foulon  (8).  On  a  trouvé  en  Espagne  l'épitaphe 
de  C.  Magnius  Martialis  (9)  et  une  inscription  en  l'honneur 
du  procurateur  P.  Magnius  Rufus  Magonianus  (10).  Une  ins- 
cription de  Trévise  provient  de  la  tombe  élevée  par  Ma- 
gnius Semnus  à  sa  mère  (11).  Le  même  gentilice  se  rencon- 
tre dans  les  inscriptions  funéraires  de  Rome  (12). 

Magniacus^  dérivé  de  Magnius,  est  devenu  dans  le  midi 


(t)  Quantin,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  l  Yonne,  p.  75. 
\2)  Dom  Bouquet,  VI,  556  b. 

(3)  Ibid.,  VI,  673  b, 

(4)  Ibid.,  VIII,  474  c. 

(5)  Ibid.,  VIII,  552. 

(6)  Port,  Dictionnaire  de  Maine-et-Loire,  t.  II,  p.  637-639. 

(7)  Aug.  Bernard,  Cartulaire  de  Savigny,  p.  147,  262,  269. 

(8)  C.  /.  L.,  I,  1406. 

(9)  /Md.,  II,  1706. 

(10)  Ibid.,  II,  2029. 

(11)  IMd.,  V,  2137. 

(12)  Ibid,,  VI,  21848-21853. 


266  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

de  la  France  Magnac  ou  Manhac.  Les  communes  appelées 
Magnac  sont  au  nombre  de  quatre ,  deux  dans  la  Charente, 
deux  dans  la  Haute- Vienne.  Il  y  a  une  commune  de  Ma- 
nhac (Aveyron).  Dans  le  nord-ouest,  nous  trouvons  deux 
Magné  (Deux-Sèvres  ,  Vienne)  ;  dans  le  centre ,  le  nord  et 
le  nord-est ,  vingt-sept  communes  de  Magny  réparties  en- 
tre les  départements  suivants  :  Aisne,  Doubs,  Eure-et- 
Loir  ,  Indre ,  Orne ,  Seine-et-Marne ,  Vosges ,  Yonne ,  cha- 
cun une  ;  Nièvre ,  Seine-et-Oise ,  chacun  deux  ;  Calvados , 
trois  ;  Haute-Saône ,  cinq  ;  Côte-d*Or,  sept.  A  Test  de  Lyon. 
Magniacus  devient  Magnieu  (Ain).  Il  y  a  donc  en  France 
trente-cinq  noms  de  communes  qui  s'expliquent  par  un 
primitif  Magniacus.  On  peut  ajouter  Montmagny  (Seine-et- 
Oise),  mons  Magniacus  dans  une  charte  de  la  fin  du  onzième 
siècle  (1).  La  variante  romaine  Magnianus  est  représentée 
par  Magnan  (Gers),  et  par  Magnien  (Côte-d'Or). 

Malliagus,  plus  tard  Maillé,  puis  du  nom  de  ses  ducs, 
depuis  le  dix-septième  siècle,  Luynes,  avait,  au  temps  de 
Grégoire  de  Tours,  c'est-à-dire  au  sixième  siècle,  un  monas- 
tère entouré  de  vieux  édifices  en  ruines  (2).  Un  autre  Mal- 
liacus,  situé  dans  le  Berry,  à  deux  milles  du  Cher,  appa- 
raît dans  un  diplôme  faux  que  le  roi  Dagobert  I"  aurait 
donné  à  Tabbaye  de  Saint-Denis ,  en  635  (3).  Un  troisième 
Malliacus^  au  pays  d'Arcis  (Aube),  fut  donné  à  la  cathédrale 
de  Châlons-sur-Marne  par  un  bienfaiteur  dont  Charles  le 
Chauve  confirma  la  libéralité  en  859  (4). 

Mallius  est  un  gentilice  souvent  confondu  avec  Manlius. 
Cn.  Mallius  fut  consul  Tan  105  avant  notre  ère.  L'ortho- 


(1)  Robert  de  Lasteyrie,  Cartulatre  de  Paris^  p.  151. 

(2)  Grégoire  de  Tours ,  De  gloriSL  confessorum ,  c.  21,  chez  Bordier,  Les 
livres  des  miracles,  t.  II,  p.  384;  édit.  Arndt  et  Krusch ,  p.  760,  1.  18.  Cf. 
Longnon,  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle,  p.  277. 

(3)  Pardessus,  Dtplomata,  t.  II,  p.  36.  Pertz,  Diplomatum  imperii  tomus 
primuSy  p.  155,  ligne  43. 

(4)  H.  d'Ârbois  de  JubainviUe,  Pout'Hé  du  diocèse  de  Troyes,  p.  312.  Cf.  Boa- 
tiot  et  Socard,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  l'Aube,  p.  90. 


\ 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUB  AU  MOYEN  AGE.  267 

graphe  exacte  de  son  nom ,  —  écrit  Manlius  et  Manilîus 
chez  certains  auteurs,  tandis  que  d'autres  écrivent  Mai- 
llas (1) ,  —  est  donnée  par  une  inscription  de  Pouzzoles , 
aujourd'hui  conservée  au  musée  de  Naples,  en  tête  de  la- 
quelle on  lit  :  P  Rutilio,  Cn  Mallio  cos  (2).  Cicéron,  dans 
son  discours  pro  Cn,  Plancio,  parle  de  Cn.  Mallius  avec  le 
plus  profond  mépris  :  C'était ,  dit-il ,  un  homme  sans  mé- 
rite ni  talent  et  d'une  vie  honteuse  (3).  Un  autre  Mallius 
était  centurion  et  partisan  de  Catilina  (4).  Ce  gentilice  se 
rencontre  dans  les  inscriptions  de  l'époque  impériale  :  on 
a  trouvé  à  Worms  une  dédicace  à  Jupiter  par  Mallius  Fo- 
fio  (5);  deux  inscriptions  d'Espagne  nous  fournissent  les 
noms  de  l'affranchie  Mallia  Galla  (6)  et  de  P.  Malins  For- 
tunatus  (7).  Dans  ce  dernier  monument ,  Malins  est  écrit 
avec  une  seule  /  ;  on  trouve  la  même  orthographe  dans 
Vépitaphe  de  Malia  Severa,  récemment  trouvée  à  Allègre 
(Gard)  (8). 

Outre  le  nom  de  Mailly  (Aube),  dont  nous  avons  parlé 
déjà,  Malliaciis  a  donné  à  la  France  moderne  les  noms  de 
communes  suivants  :  trois  Maillé  (Indre-et-Loire,  Vendée, 
Vienne);  un  Mailley  (Haute-Saône);  huit  Mailly  :  les  dépar- 
tements de  la  Côte-d'Or,  de  la  Marne,  de  Meurthe-et-Mo- 
selle ,  de  Saône-et-Loire  en  possèdent  un  chacun  ;  il  y  eri 
a  deux  dans  la  Somme  et  autant  dans  l'Yonne;  en  ajoutant 
Mailhac  (Aude),  et  Mailhac  (Haute-Vienne),  on  trouve  en 
France  seize  communes  dont  le  nom  remonte  à  un  primi- 
tif Malliaous.  Maillanne  (Bouches-du-Rhône)  est  une  an- 
cienne villa  Malliana,  Une  charte  de  Ravenne,  écrite  vers 
Tannée  700,  nous  offre  un  fundus  Mallianus  (9). 

(1)  C.  /.  L.,  t.  I,  p.  536-537. 

P)  /Md.,  t.  I,  n*  5T7  ;  t.  X,  n*  1781. 

(3)  Pro  Cn,  Pl&ncio^  c.  5,  {  12. 

(4)  Première  Catilinaire,  c.  3,  {  7.  Cf.  Balluste,  C&tilina,  c.  30. 

(5)  Brambach,  881. 

(6)  C.  /.  L.,  II,  558. 

(7)  /Wd.,  II,  4970,  292. 

(8)  Allmer,  Revue  épigr&phique,  t.  II,  p.  78,  n*  515.  Cf.  C.  /.  L.,  XII,  4466. 

(9)  FantQzzi,  Monumenti  R&vennati^  t.  I,  p.  62. 


268  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

Mangiâgus,  nom  d'une  villa  donnée  à  la  basilique  de 
Saint-Germain  du  Mans,  en  615,  par  le  testament  de 
Tévéque  Bertramne  (1) ,  a  dû  s'écrire  primitivement  *  Man- 
tiacus. 

Ce  nom  de  lieu  dérive  du  gentilice  Mantius.  Sur  une 
pierre  découverte  près  de  Vintimille,  on  lit  les  noms  de 
Q.  Mantius  Placidus,  édile,  duumvir,  et  prêtre  de  Lanu- 
vium  (2).  A  Saint-Pons  (Alpes-Maritimes)  se  trouve  Tépi- 
taphe  de  G.  Mantius  Paternus,  duumvir  et  flamine  (3).  Le 
musée  de  Tebessa,  en  Algérie,  possède  une  inscription  qui 
contient  une  dédicace  à  Jupiter,  et  dans  laquelle  on  lit  le 
nom  de  Q.  Mantius  (4).  Il  existe  à  Lambessa  l'épitapbe  de 
la  femme  du  légionnaire  Mantius  Hispanus  faite  aux  frais 
de  L.  Mantius  Caecilianus ,  son  fils  (5)  et  l'épitaphe  de 
L.  Mantius  Victorinus  (6). 

Mantiacus  est  probablement  la  forme  primitive  du  nom 
des  communes  de  Maincy  (Seine-et-Marne),  Mancey  (Saôoe- 
et-Loire),  Mancy  (Marne). 

*  Marcelldlcus  ,  dont  le  dérivé  Marcelliacenses  se  lit  dans 
un  diplôme  attribué  à  Domnolus,  évoque  du  Mans  au 
sixième  siècle,  —  diplôme  certainement  interpolé  (7) ,  —  se 
rapporte  probablement  dans  ce  texte  à  Marcillé  (Mayenne). 
On  trouve  plus  souvent  Marcilliacus  ou  Marciliacus. 

Ainsi  une  vie  de  saint  Didier,  évéque  de  Cahors,  écrite  au 
septième  siècle,  raconte  la  fondation  de  Tabbaye  de  Mar- 
cillac  qu'elle  appelle  Marcilliacense  coenobium  (8).  En  834,  un 
diplôme  de  Louis  le  Débonnaire  nous  montre,  aux  environs 


(1)  Pardessus,  Diplom&ta,  t.  I,  p.  209. 

(2)  C.  /.  L.,  V,  7814. 

(3)  /6id.,  V,  7913. 

(4)  Ibid.y  VIII,  1839. 

(5)  Ibid.,  VIII,  2939. 

(6)  Ibid.,  VIII,  3886.  Cf.  XII,  708,  2717. 

(7)  Pardessus,  Diplom&ta^  t.  I,  p.  134. 

(8)  Dom  Bouquet,  III,  531  c. 


LA  DËSINBKOE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  26» 

de  Langres  une  villa  appelée  Maroilliacus  (1),  aujourd'hui 
Marcilly  (Haute-Marne). 

Maroiliacus  est  le  nom  d'une  dépendance  de  Tabbaye  de 
Moissac,  dans  un  diplôme  de  Pépin  II,  roi  d'Aquitaine,  en 
844  (2).  En  867  ,  un  diplôme  de  Charles  le  Chauve  men- 
tioBoe  une  villa  Maroiliacus  parmi  les  localités  où  l'abbaye 
de  Saint-Amand  de  Tournay  était  propriétaire  (3). 

De  ces  trois  orthographes ,  Uarcelliacus ,  Marcilliacus  et 
Marciliacus ,  la  plus  ancienne  est  Uarcelliacus.  Ce  nom  dé- 
rive du  gentilice  assez  rare  Marcellius  qui ,  lui-même ,  est 
dérivé  du  cognom&n  Marcellus  illustré  par  plusieurs  mem- 
bres de  la  gens  Claudia.  Le  musée  de  Milan  possède  une 
dédicace  à  Hercule  par  Q.  Marcellius  Rufinus  (4).  Une 
inscription  de  Novare  nous  fournit  les  noms  de  Marcellius 
Marcellinus  (5).  Ce  gentilice  apparaît  au  génitif  Marcellii 
dans  une  inscription  de  Milan  (6).  On  a  trouvé  à  Echa- 
gnieu  l'épitaphe  de  Marcellia  Catta  posée  par  ordre  de  son 
père  et  de  sa  mère  Marcellius  Ingenuus  et  Marcellia  Pe- 
troniana  (7). 

Marcelliacfês  est  devenu  en  France  Marcillac ,  Marcillat , 
Marcillé,  Marcilly  et  Marsilly.  Il  y  a  sept  communes  de 
Marcillac,  savoir  :  deux  dans  la  Corrèze ,  et  une  dans  cha- 
cun des  cinq  départements  de  l'Aveyron ,  de  la  Charente , 
de  la  Dordogne,  de  la  Gironde  et  du  Lot;  deux  commu- 
nes de  Marcillat ,  l'une  dans  l'Allier ,  l'autre  dans  le  Puy- 
de-Dôme;  trois  communes  de  Marcillé  dont  une  dans  la 
Mayenne  et  deux  dans  l'IUe-et- Vilaine  ;  dix-sept  commu- 
nes de  Marcilly  dans  les  départements  suivants,  savoir  : 
Côte-d'Or,  Eure,  Loir-et-Cher  et  Saône-et-Loire  qui  en 


(1)  Doin  Bouqaet,  VI,  595  e.  Cf.  Sickel,  AcU  K&rolinorum ,  t.  II,  p.  183, 
n»322. 

(2)  Dom  Bouquet,  VIII,  357  a. 

(3)  Dom  Bouquet,  VIII,  604  a. 

(4)  C.  /.  L.,  t.  V,  p.  1085,  n*  5642. 

(5)  i6id.,  V,  6543  a. 

(6)  /Wd.,  V,  6038. 

Ç)  AUmer,  Inscriptiong  de  Vienne,  t.  III,  p.  449. 


270  LIVRE  II.  CHAPITRB  11. 

contiennent  chacun  deux;  Aube,  Cher,  Indre-et-Loire, 
Isère ,  Loire,  Loiret ,  Manche,  Haute- Marne,  Rhône,  Seine- 
et-Marne  qui  en  contiennent  une  chacun.  Marsilly  (Cha- 
rente-Inférieure) a  la  même  origine;  cela  fait  trente  com- 
munes dont  le  nom  primitif  est  Marcelliacus ,  Les  trois 
communes  de  Marseillan  (Gers ,  Hérault,  Hautes-Pyrénées) 
doivent  être  d'anciens  fundi  Marcelliani ,  avec  la  désinence 
romaine  -anus  au  lieu  de  la  désinence  gallo-romaine  -acus. 
On  trouve  la  variante  fundus  Marcilianus  dans  une  charte 
de  Ravenne,  au  neuvième  siècle  (1).    . 

De  *Maiigiacus  dérive  Fadjectif  marctac^rww,  épithète  de 
domus ,  et  qui ,  chez  Grégoire  de  Tours ,  désigne  une  loca- 
lité de  l'Auvergne  ;  il  s'y  trouvait  une  chapelle  de  la  Vierge 
où  l'historien  Grégoire  de  Tours  raconte  qu'il  alla  prier  (2); 
c'est  aujourd'hui  Marsat  (Puy-de-Dôme)  (3),  qu'on  recon- 
naît aussi  dans  la  villa  Marciagus,..  in  pago  Arvemico,  d'un 
diplôme  de  Pépin  P%  roi  d'Aquitaine ,  en  828  (4)  et  dans  le 
MarciactAS  d'un  diplôme  de  Charles  le  Chauve  en  869  (5). 
Une  villa  Marciacensis  ^  comme  nous  l'apprend  Grégoire 
de  Tours ,  était  de  son  temps  située  dans  le  territoire  de 
Bordeaux,  et  avait  une  église  dédiée  à  saint  Martin ,  elle  a 
été  reconnue  identique  à  Marsas  (Gironde)  (6).  Un  ager 
Marciacensis^  en  M&connais,  figure  d'abord  en  898,  et  plu- 
sieurs fois  ensuite  au  dixième  siècle ,  dans  les  chartes  de 
l'abbaye  de  Cluny  (7),  c'est  Saint-Jean  de  Merzé,  commune 
de  Cortambert.  Une  charte  du  dixième  siècle  provenant  de 


(1)  Fantuzzi,  Monumenti  Ravenn&ti,  t.  I,  p.  55.  Cf.  ci-dessus,  p.  145. 

(2)  De  gloria,  martyrum,  c.  9;  Bordier,  Les  livres  des  miracles,  1. 1,  p.  28, 
29;  chez  Amdt  et  Krusch,  c.  8.  p.  493,  1.  20. 

(S)  Longnon,  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle,  p.  504. 

(4)  Dom  Bouquet,  VI,  666  e. 

(5)  Ibid.,  VIII,  613  b. 

(6)  De  virtutibus  sancti  Martini^  livre  III,  c.  33  ;  chez  Bordier,  Les  livres 
des  miracles,  t.  II,  p.  234;  Amdt  et  Krusch«  p.  640,  1.  16.  Cf.  Longnon,  Géo- 
graphie de  la  Gaule  au  stjctème  siècle,  p.  547. 

(7)  Bruel,  Recueil  des  chartes  de  l'abbaye  de  Cluny -^  1. 1,  p.  72-73 ,  186 
209,226,227. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACU8  AU  MOYEN  AGE.  271 

la  même  abbaye  mentionne  une  Marciacus  villa  au  comté 
de  Ch&lon-sur-Sadne  (1).  Dans  les  textes  de  la  basse  lati- 
nité, il  n'y  a  pas  de  distinction  à  faire  entre  Torthographe 
Ma/rciaçus  par  un  c  qu'on  trouve  dans  les  documents  pré- 
cités et  l'orthographe  Martiacus  par  un  t  qu'on  rencontre 
dans  la  vie  de  saint  Melaine ,  évéque  de  Rennes ,  contem- 
porain du  roi  Clovis  l"  :  dans  cette  vie,  Martiacus  est  le 
nom  d'un  castrum  situé  dans  le  Vannetais  (2)  ;  on  prononce 
aujourd'hui  Marsac;  c'est  un  villaga  qui  fait  partie  de  la 
commune  de  Carentoir  (Morbihan)  (3).  Martiacus  est  aussi, 
en  993,  dans  les  titres  de  la  cathédrale  d'Âutun,  le  nom 
d'un  village  du  département  de  la  Côte-d'Or ,  Mercey , 
commune  de  Saint-Prix-lès-Arnay  (4). 

Le  Marciacus  ou  Martiacus  du  moyen  âge  dérive  du  gen- 
tilice  Marcius  ou  du  gentilice  Martius, 

On  trouve  dans  les  textes  latins  ces  deux  gentilices. 
Marcius  est  le  plus  ancien  des  deux;  il  dérive  du  prénom 
Marcus  et  il  est  le  seul  qu'on  rencontre  dans  les  inscrip- 
tions antérieures  à  la  période  impériale  (5).  Parmi  les  nom- 
breux Marcius  dont  l'histoire  de  la  république  romaine  nous 
a  conservé  le  souvenir,  nous  citerons  C.  Marcius  Rutilus, 
([uatre  fois  consul,  de  l'an  357  à  l'an  342  avant  J.-C.  Il 
était  d'origine  plébéienne ,  ce  qui  ne  l'empôcha  pas  d'être 
élevé  à  la  dictature  et  d'être  élu  censeur,  dignités  auxquel- 
les aucun  plébéien  n'était  parvenu  avant  lui  (6).  Il  obtint 
deux  fois  les  honneurs  triomphaux  (7).  Un  autre  C.  Mar- 
cius Rutilus ,  consul  en  310  (8) ,  fut  nommé  pontife 
en  300  (9);  censeur  quelques  années  plus  tard,  il  fit  avec 

(1)  Brael,  Recueil,  t.  I,  p.  965. 

(2)  Dom  Bouquet,  t.  III,  p.  395. 

(3)  Longnon,  Atlas  historique  de  la  France,  texte  explicatif,  1"*  livraison, 
p.  29. 

(4)  Gamier,  Nomenclature  historique,  p.  75,  n*  314. 

(5)  Voyez  les  exemples  réunis  dans  le  C.  7.  L.,  t.  I,  index,  p.  585,  col.  3. 

(6)  Tite-Li?e,  livre  VII,  c.  16,  17,  21,  22,  28,  38.  Cf.  C.  /.  L.,  1. 1,  p.  510-513. 

(7)  C.  /.  L,,  1. 1,  p.  455. 

(8)  Titc-Live,  livre  IX,  c.  33. 

(9)  ma.,  Uvre  X,  c.  9. 


1 


272  LIVRE  IL  CHAPITRE  IL 

son  collègue  le  dix-neuvième  recensement  de  la  popula- 
tion de  Rome.  C'était  en  293  (I).  Un  autre  membre  de  la 
gens  Marcia .,  Q.  Marcius  Tremulus ,  consul  en  306 ,  battit 
les  Herniques ,  et  obtint  les  honneurs  du  triomphe  (2).  A 
une  date  moins  éloignée ,  Q.  Marcius  Philippus  fut  deux 
fois  élevé  au  consulat  :  la  première  en  186,  la  seconde 
en  169  (3)  ;  battu  honteusement  par  les  Ligures ,  il  laissa 
son  nom  au  théâtre  de  sa  défaite ,  saltw  Marcius  (4)  ;  il  y 
a  une  monnaie  romaine  frappée  à  son  nom  (5).  D'autres 
monnaies  portent  le  nom  de  C.  Marcius  Censorinus,  consul 
Tan  8  avant  J.-C.  (6). 

Le  gentilice  Marcius  est  des  plus  répandus  dans  les 
inscriptions  du  temps  de  Tempire.  On  en  a  trouvé,  sans 
compter  les  femmes,  vingt-sept  exemples  en  Espagne, 
trente-neuf  en  Afrique  ,  quatre  en  Grande-Bretagne.  On  le 
rencontre  aussi  en  Gaule;  le  musée  de  Lyon  possède  une 
inscription  que  Q.  Marcius  Donatianus  fit  graver  en  Thon- 
neur  d'un  procurateur  des  provinces  de  Lyonnaise  et 
d'Aquitaine;  il  était  attaché  k  ce  personnage  en  qualité 
à!eques  cornicularius  (7).  Une  inscription  de  Grésy-sur- 
Isère  (Savoie) ,  est  Tépitaphe  que  s'est  fait  graver  de  son 
vivant  T.  Marcius  Taurinus,  tribun  militaire  de  la  sixième 
légion  victriw  (8).  On  a  trouvé  à  Marseille  l'épitaphe  de  D. 
Marcius  Ingenuus  et  de  Marcius  Lenaeus  (9)  ;  aux  Vans , 
celle  de  D.  Marcius  Félix  (10);  à  Nimes,  celle  de  C.  Marcius 
Philologus  (il)  et  de  C.  Marcius  Cosmio  (12);  à  Narbonne, 


(î)  Tite-Uve,  livre  X,  c.  47. 

(2)  Ibid.,  livre  IX,  c.  42,  43.  C.  I.  L.,  t.  I,  p.  456,  515. 

(3)  Ibid,,  livre  XXXIX,  c.  6;  1.  XLIII,  c.  13.  C.  /.  L.,  t.  I,  p.  526-529. 

(4)  Ibid.,  livre  XXXIX,  c.  20. 

(5)  C.  /.  L.,  t.  I,  p    133,  n*  354. 

(6)  Ibid.,  p.  137,  n*  432  ;  cf.  p.  546,  547.  Cf,  XII,  2623. 

(7)  Boissieu,  Inscriptions  de  Lyon,  p.  236. 

(8)  AUmer,  InscHptions  de  Vienne,  t.  II,  p.  229  ;  C.  I.  L.,  XII,  2456. 

(9)  C.  /.  L.,  XII,  450-451. 

(10)  Ibid,,  2717. 

(11)  Ibid.,  3251. 

(12)  Ibid.,  3991. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  273 

celles  de  M.  Marcius  Rufus  (1),  de  P.  Marcius  Alexander  (2) , 
de  S.  Marcius  Anteros  (3).  Les  noms  de  Marcius  Modestus 
sont  conservés  par  une  inscription  de  Gebensdorf,  en 
Suisse  (4).  On  a  trouvé  près  d'Aix-la-Chapelle  une  inscription 
qui  rappelait  la  construction  d'un  temple  par  L.  Marcius 
Similis  (5).  Le  musée  de  Bonn  a  une  inscription  qui  pro- 
vient des  environs  de  Cologne  et  constate  Tacqùittement 
d'un  vœu  par  L.  Marcius  Verecundus,  légionnaire  (6). 

Quelques  inscriptions  nous  offrent  l'orthographe  Martius. 
Telle  est,  en  Alsace,  celle  qui  nous  apprend  que  Q.  Mar- 
tius Optatus  avait,  par  son  testament,  fait  élever  une 
colonne  et  une  statue  pour  rendre  honneur  à  la  maison 
impériale ,  au  génie  du  vicus  Ccmabbarum  et  aux  vicani 
Canabbenses  (7).  Des  inscriptions  du  musée  de  Mayence 
conservent  les  noms  de  Martius  Marcellus  (8)  et  de  Martius 
Severus  (9).  Il  existe  au  musée  de  Bonn  une  inscription 
datée  de  l'an  230  et  qui  est  une  dédicace  à  Jupiter  par 
Martius  Victor,  porte-étendard  de  la  légion  trente  Severiana 
Alexandria  (10).  Une  épitaphe  de  Virieu-le-Grand  (Ain)  a 
été  gravée  par  Tordre  de  Martius  Saturhus  (11).  Une  in- 
scription d'Arles  fournit  les  noms  de  Martius  Victor  (12), 
une  de  Narbonne,  celle  de  Martius  Diogenes  (13). 

L'orthographe  Martius  ne  peut  s'expliquer  dans  les  textes 
les  plus  anciens  que  par  un  dérivé  du  nom  du  dieu  Mars  ; 
car  dans  les  monuments  de  la  bonne  latinité  la  confusion 
entre  les  groupes  ciu  et   tiu  est  impossible.    Il  semble 

(I)  C.  L  L.,  XU,  4365. 
P)  Ibid.,  4685. 

(3)  ma.,  4978. 

(4)  Hoi&mëen,  Inscriptiones  hêlveticAe,  n*  254. 

(5)  Brambach,  n*  637. 

(6)  /6id.,  n«  541. 

(7)  Ibid.,  n*  1891.  Cf.  C.  I.  L.,  t.  III,  p.  183,  n*  1008*. 

(8)  ibid,,  H»  1330: 

(9)  Ibid.,  n*  1331  a. 

(10)  Ibid.y  n*  202. 

(II)  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne^  t.  III,  p.  399. 

(12)  C.  /.L.,  XII,  850. 

(13)  /Wd.,  4983. 

18 


274  LIVRE  IL  CHAPITRE  IL 

difficile  d'admettre  que  cette  confusion  ait  été  faite  dans 
l'inscription  d'Iglitza,  aujourd'hui  à  la  Bibliothèque  Natio- 
nale de  Paris  ;  cette  inscription  a  été  gravée  entre  les 
années  161  et  169  :  nous  y  lisons  les  noms  dun  lieutenant 
impérial,  au  génitif  Marti  Veri  ;  il  s'agit  de  P.  Martius  Ve- 
rus  qui  fut  consul  en  179  (1). 

De  Marciacus  ou  Martiacus  viennent  les  noms  de  com- 
munes suivants  :  Marçay  (Indre-et-Loire),  Marçay  (Vienne); 
Marcé  (Indre-et-Loire),  Marcé  (Maine-et-Loire),  Marcé  (Man- 
che) ;  Marcey  (Orne)  ;  Marciac  (Gers)  ;  Marcieu  (Isère)  ;  Mar- 
cieux  (Savoie)  ;  deux  Marcy  dans  l'Aisne ,  autant  dans  le 
Rhône ,  un  dans  la  Nièvre  ;  sept  Marsac  (Charente ,  Creuse, 
Dordogne,  Loire-Inférieure,  Puy-de-Dôme,  Hautes-Pyré- 
nées, Tarn-et-Garonne)  ;  trois  Marsas  (Drôme,  Gironde, 
Hautes-Pyrénées)  ;  Marsac  (Tarn)  ;  Maxey-sur-Vaize  (Meuse), 
appelé  Marcey  au  quatorzième  siècle  (2)  ;  Maxey-sur-Meuse 
(Vosges)  ;  deux  Mercy  (Meurthe-et-Moselle)  et  un  Mercy 
(Lorraine  allemande),  pour  lesquels  on  a  Torthographe 
plus  ancienne  Marciacus  et  Marceium  (3).  On  peut  ratta- 
cher à  la  même -origine  Mercy  (Allier),  Mercy  (Yonne^ 
et  les  trois  Mercey  de  TEure ,  du  Doubs  et  de  la  Haute- 
Saône.  Nous  avons  ainsi  en  France  trente  quatre  noms 
dé  communes  qui  supposent  un  primitif  Marciacus  ou 
Martiacus. 

La  forme  romaine  de  cet  adjectif,  marcianys  ou  martia- 
riAjis  se  rencontre  au  féminin  singulier,  Marciana  villa^  dans 
deux  documents  conservés  par  les  archives  de  Saint- Victor 
de  Marseille,  Tun  de  814  (4),  l'autre  du  dixième  siècle  (5j. 
Elle  nous  est  donnée  ,  à  l'accusatif  féminin  pluriel ,  par  le 
nom  de  Marchiennes  (Nord),  villas  ou  domos  Marcianas; 


(1)  C.  /.  L.,  m,  6169. 

(2)  Liénard,  Dictionnaire  topogr&phique  du  département  de  U  Meuse  ^ 
p.  145. 

(3)  Bouteiller,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  la  Mo- 
selle, p.  165,  16G. 

(4)  Gucrard,  Cart,  de  Saint-Victor,  t.  II,  p.  636. 

(5)  Ibid.,  t.  I,  p.  309. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACU8  AU  MOYEN  AGE.  275 

à  raccusatif  masculia  singulier,  par  Marsan  (Gers),  /tm- 
dum  Marcianv/m  ou  Martianum  :  les  deux  se  lisent  dans 
les  chartes  de  Ravenne  (1). 

Les  Romains  disaient  aussi,  comme  nous  l'apprend  Tite- 
Uye ,  saltus  Mordus ,  en  transformant  le  gentilice  en  ad- 
jectif, et  en  le  faisant  accorder  avec  un  nom  commun. 
Maixe  (Meurthe-et-Moselle),  dont  la  prononciation  vulgaire 
est  Mâche ,  en  donnant  à  ch  le  son  de  gutturale  spirante , 
s'est  écrit  Marches  du  douzième  siècle  au  quinzième  (2)  et 
peut  s'expliquer  par  un  primitif  ifarciaa,  sous-entendu  domus 
ou  villae.  L'a?  a ,  dans  ce  mot ,  la  même  valeur  étymolo- 
gique que  dans  Maxey-sur-Meuse  et  Maxey-sur-Vaize. 

Le  ligure  *  Marcioscus ,  au  dixième  siècle  Marzoscus  (3) , 
ne  diffère  que  par  le  sufiBbce  du  gallo-romain  Marciacus  et 
du  latin  Marcianus. 

Mariagus  est  le  nom  d'une  villa  où  Raoul,  archevêque 
de  Bourges ,  avait  des  propriétés  qu'il  donna  à  l'abbaye  de 
Dèvre ,  près  Vierzon  (Cher) ,  comme  nous  l'apprend  un  di- 
plôme de  Charles  le  Chauve  (4).  Un  lieu  appelé  Mariacus, 
dans  le  pays  de  Nimes ,  est  mentionné  dans  un  diplôme 
de  Charles  le  Chauve  en  845  (5).  Un  autre  Mariacus^  situé, 
soit  en  Franche-Comté,  soit  en  Suisse,  soit  dans  les  envi- 
rons de  Lyon ,  apparaît  en  866  dans  un  diplôme  de  Lo- 
thaire ,  roi  de  Lorraine  (6). 

Mariacus  est  dérivé  de  Marins,  gentilice  romain,  illus- 
tré par  le  vainqueur  des  Cimbres.  Il  fut  usité  en  Gaule 
comme  l'atteste  le  savant  recueil  des  inscriptions  antiques 
de  Vienne  par  M.  AUmer;  on  y  voit  réunis  neuf  exemples 
du  nom  Marins  ;  trois  sont  fournis  par  une  inscription  du 

(1)  Fantuzzi,  Monumenti  Ravennatiy  t.  I,  p.  36. 

(2)  Lepage,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  la  Meurthe, 
p.  84. 

(3)  Gaérard,  Cartulaire  de  Saint-Victor  de  Marseille,  t.  I,  p.  591. 

(4)  Dom  Bouquet,  t.  VIII,  p.  447  6.       . 

(5)  Ibid.,  t  VIII,  p.  467  b. 

(6)  /Wd.,  t.  VIII,  p.  412  d. 


27G  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

musée  de  Vienne  où  sont  mentionnés  Tédile  Sex.  Marius 
Navus  (1)  et  deux  personnages  dont  la  qualité  n'est  pas  in- 
diquée et  qui  s'appelaient  tous  deux  D.  Marins  Martinus  (t; 
à  Aix-les-Bains  on  a  conservé  Tépitaphe  de  M.  Marius  Ta- 
racio  (3);  sur  une  épitaphe  de  Lyon  on  lit  les  noms  de 
T.  Marius  Tiro  (4),  etc. 

C'est  de  Mariaous  que  vient  une  partie  des  noms  des 
communes  appelées  Maire,  Mairy,  Maray,  Marey,  Ma- 
riac,  Mérey,  Méry.  Ces  communes  sont  au  nombre  de 
vingt-quatre,  savoir  :  deux  Maire  (Deux-Sèvres,  Vienne»; 
trois  Mairy  (Ardennes,  Marne,  Meurthe-et-Moselle);  Maray 
(Loir-et-Cher)  ;  trois  Marey ,  dont  deux  dans  la  Côte-d'Or 
et  un  dans  les  Vosges;  Mariac  (Ardèche);  deux  Méré 
(Seine-et-Oise ,  Yonne)  ;  trois  Mérey ,  dont  deux  dans  le 
Doubs,  un  dans  l'Eure;  neuf  Méry,  deux  dans  le  Cher, 
un  dans  chacun  des  département  de  TAube,  du  Calvados, 
de  la  Marne ,  de  l'Oise ,  de  la  Savoie ,  de  Seine-et-Marne 
et  de  Seine-et-Oise.  Plusieurs  de  ces  noms  de  lieux  ont  pu 
perdre  une  dentale  avant  IV  et  doivent  en  ce  cas  s'expli- 
quer par  un  primitif  *Matriacus^  écrit  Madriacus  dès  l'époque 
mérovingienne ,  comme  l'attestent  les  diplômes  relatifs  au 
pagus  Madriacensis. 

La  forme  latine  correspondant  à  Mariacus  est  celle  du 
fundus  Mariarms^  qu'on  trouve  au  Moyen  Age  dans  les 
chartes  de  Ravenne  (5). 

Mariniacus  est  une  curtis  située  dans  le  royaume  des 
Burgundes  suivant  un  diplôme  qui  aurait  été  donné  par  le 
roi  Sigismond  en  523  et  dont  l'authenticité  est  contestée  (6). 
En  667,  Leodebodus,  abbé  de  Saint-Aignan  d'Orléans, 
donne  à  son  abbaye  une  portion  de  terre  appelée  Mari- 


(1)  Allmer»  Inscriptions  de  Vienne^  t.  II,  p.  261. 

(2)  Allmor,  ihid.,  t.  II,  p.  261. 

(3)  AHmer,  ibid.,  t.  III,  p.  311. 

(4)  Allmer,  ibid,,  t.  III,  p.  29. 

(5)  Fantuzzi,  Monumenti  Ravennali,  t.  I,  p.  19,  20. 
{('})  Pardessus,  Diploynaia,  t.  I,  p.  70. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  277 

niacus  et  située  dans  le  territoire  de  Bourges  (1).  Une  villa 
Mariniacus  est  donnée  à  la  cathédrale  d'Âutun ,  par  saint 
Léger,  évoque  de  cette  ville,  aux  termes  d'un  testament 
qui  daterait  de  676,  mais  qui  a  dû  être  fabriqué  au  neu- 
vième siècle  (2)  ;  ce  Mariniacus  enlevé  à  cette  église  lui  est 
rendu  en  883  par  le  roi  Karloman  (3)  ;  et  le  pape  Jean  X , 
dans  une  bulle  de  l'année  919,  comprend  Mariniacus  parmi 
les  propriétés  de  la  cathédrale  d'Autun  (4)  ;  il  s'agit  proba- 
blement de  Marigny  (Saône-et-Loire).  Un  autre  Mariniacus 
est  mentionné  dans  l'acte  de  fondation  de  l'hôpital  de  Pont- 
sur-Seine  par  Alcuin ,  vers  l'année  804  (5)  ;  c'est  aujour- 
d'hui Marigny-le-Châtel  (Aube). 

Mariniacus  dérive  de  Marinius ,  gentilice  romain ,  dérivé 
lui-même  du  surnom  Marinus.  Marinius,  qu'on  ne  trouve 
pas  à  Rome  dans  les  documents  du  temps  de  la  républi- 
que ,  se  rencontre  parfois  en  Gaule  sous  l'empire.  On  a 
recueilli  à  Vienne  l'épitaphe  du  grammairien  L.  Marinius 
Italicensis  dont  le  fils  s'appelait  Marinius  Claudianus  (6). 
A  Lyon ,  a  été  découverte  l'inscription  du  monument  élevé 
par  Marinius  Demetrius  à  sa  sœur  Marinia  (7).  Un  légion- 
naire d'origine  probablement  gauloise,  L.  Marinius  Mari- 
niacus, éleva  sur  la  rive  droite  du  Rhin,  non  loin  de 
Mayence,  une  stèle  en  l'honneur  de  la  maison  impériale 
et  du  dieu  gaulois  ApoUo  Toutiorix  (8). 

C'est  par  un  primitif  Mariniacus,  dérivé  de  Marinius, 
que  s'expliquent  probablement  la  plupart  des  trente-trois 
noms  de  communes  suivants  :  cinqjMarignac,  dont  deux 
dans  la  Haute-Garonne,  et  les  trois  autres  dans  la  Cha- 

(1)  Pardessus,  ibid,,  t.  II,  p.  143. 

(2)  Pardessus,  ibid.,  t.  II,  p.  174. 

(3)  Dom  Bonqnet,  IX,  430  c. 

(4)  Ibid,  IX,  215  a. 

(5)  Mabillon,  Acta.  sanctorum  ordinis  s&ncti  Benedicti ,  sect.  IV,  part.  I , 
p.  177.  Migne,  Pairologia  latina,  t.  C,  col.  71  b;  t.  CI,  col.  1432  c.  Cf.  Ma- 
bille,  La  pancarte  noire  de  Saint-Martin  de  Tours,  p.  153,  228. 

(6)  Allmer,  InscripiionB  de  Vienne,  t.  II,  p.  537. 

(7)  Boissieu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon,  p.  516. 

(8)  Brambach,  n*  1529. 


278  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

rente-Inférieure ,  la  Drôme  et  Tarn-et-Garonne  ;  deux  Ma- 
rigna  (Haute-Garonne,  Jura)  ;  deux  Marigné  (Maine-et-Loire, 
Sarthe)  ;  Marignier  (Haute- Savoie);  dix-sept  Marigny;  il 
y  en  a  deux  dans  la  Côte-d'Or,  deux  dans  la  Nièvre  et 
deux  dans  la  Vienne;  un  dans  chacun  des  départements 
suivants  :  Aisne,  Allier,  Aube,  Deux-Sèvres,  Indre-et- 
Loire,  Jura,  Loiret,  Manche,  Marne,  Saône-et-Loire , 
Haute-Savoie;  trois  Mérignac  (Charente,  Charente-Infé- 
rieure, Gironde);  Mérignas  (Gironde);  deux  Mérignat  (Ain, 
Creuse);  Mérigny  (Indre). 

Toutefois,  parmi  ces  noms  modernes,  un  certain  nombre 
peut  s'expliquer  par  un  primitif  Matriniacus  (1) ,  tout  aussi 
bien  que  par  Mariniacus, 

En  regard  du  gallo-romain  Mariniacus,  se  place  l'adjectif 
latin  marinianus  qui  a  été  étudié  plus  haut  (2). 

De  Martiniacus  dérive  Tadjectif  marUniacensis ,  qui 
sert  d'épithète  à  villa  ^  dans  un  passage  de  Grégoire  de 
Tours  ;  là  ces  deux  mots  désignent  une  localité  située  prés 
de  Tours  (3) ,  aujourd'hui  Martigny ,  commune  de  Fondet- 
tes  (Indre-et-Loire)  (4).  Une  autre  villa  Martiniacus  est  don- 
née par  Hadoind ,  évoque  du  Mans ,  à  la  basilique  Saint- 
Pierre  et  Saint-Paul  de  cette  ville,  en  642  (5).  Une 
troisième  localité  appelée  Martiniacus,  située  dans  le  Co- 
tentin ,  est  mentionnée  dans  un  acte  du  commencement 
du  huitième  siècle  qui  nous  a  été  conservé  par  le  cartu- 
laire  de  Saint-Florent-le- Vieil ,   au  diocèse  d'Angers  (6). 


(1)  Mamay  (Aube),  appelé  MadrinîAcus  au  neuvième  siècle ,  est  un  anti- 
que Matriniacus.  Boutiot  et  Socard,  Dictionnaire  topographique  du  dépir- 
tentent  de  l'Aube,  p.  93.  U  y  a  un  Madriniacus  dans  le  Cartulaire  de  Beau- 
lieu,  publié  par  M.  Deloche;  c'est  Mayrinhac  (Lot).  Des  exemples  da 
gentilice  Matrinius  ont  été  recueillis  par  De-vit,  Onomasticon,  t.  IV^  p.  400. 

(2)  Voir  ci-dessus,  p.  164. 

(3)  Gloria  confessorum,  %  8;  chez  Bordier,  Les  livres  des  miracles,  t.  II, 
p.  3^8;  chez  Arndt  et  Krusch,  p.  753,  1.  16-17. 

(4)  Longnon,  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle^  p.  279. 

(5)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  70. 

(6)  Pardessus,  ibid,,  t.  II,  p.  450. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  279 

Une  monnaie  mérovingienne  porte  en  légende  le  nom  de 
lieu  Martiniaco  (1).  Plus  tard  Martiniacus  est  une  des  villae 
dans  lesquelles  Féglise  cathédrale  du  Mans  a  droit  de  dîme, 
suivant  un  diplôme  donné  par  Charlemagne  en  802  (2). 
Dans  le  pays  de  Nimes  il  y  avait ,  en  845 ,  une  colonica  ap- 
pelée à  la  fois  Amantianicus  et  Martiniacus  qui  appartenait 
alors  à  l'abbaye  de  Psalmodi ,  suivant  un  diplôme  de  Char- 
les le  Chauve  (3). 

Le  gentilice  Martinius,  d'où  vient  Martiniacus  y  est  rare. 
On  en  a  cependant  recueilli  quelques  exemples.  L'un  nous 
est  fourni  par  le  cachet  de  Toculiste  Sp.  Martinius  Ablaptus, 
trouvé  à  Vieux  (Calvados),  et  conservé  au  musée  de 
Caen  (4).  Une  femme ,  appelée  Martinia  Martiname ,  figure 
dans  une  inscription  votive  de  Tan  276  de  notre  ère  ;  ce 
monument  a  été  découvert  à  Mayence,  et  il  est  conservé 
au  musée  de  cette  ville  (5).  Les  noms  de  Mar[ti]nius  Seno- 
condus  se  lisent  sur  une  table  de  marbre  qui  appartient  au 
même  musée  (6).  Une  épitaphe  trouvée  à  Lyon  a  été 
gravée  par  Tordre  d'une  femme  appelée  Martinia  Lea  (7). 
Ce  gentilice  dérive  du  cognomen  beaucoup  plus  fréquent , 
Marlinus  ;  un  exemple  du  procédé  nous  est  offert  par  une 
inscription  de  Worms  :  c'est  Tépitaphe  de  C.  Candidius 
Martinus  ;  sa  fille  y  est  nommée  ;  elle  s'appelle  Candidia 
sive  Martinia  Dignilla  (8). 

C'est  par  Martiniacus  que  s'expliquent  en  France  qua- 
torze noms  de  communes  :  Martigna  (Jura)  ;  Martignas 
(Gironde)  ;  Martignat  (Ain)  ;  trois  Martigné  (lUe-et- Vilaine , 


(1)  A.   de  BarUiélemy,  dans   la  Bibliothèque   de   l'Ecole  des   chartes  y 
t.  XXVI,  p.  458. 

(2)  Dom  Bouquet ,  V ,  769  a  ;  cf.  Sickel ,  Àcta  Karolinorum  ,  t.  II ,  p.  67 , 

!!•  181. 

(3)  Dom  Bouquet.  VIII,  467  6. 

(4)  Héron  de  Villefosse  et  Thédenat / Cachets  d'oculistes  romains,  t.  I, 
p.  116.  117. 

(5)  Brambach,  n»  1130. 

(6)  Ibid.,  n«  1330. 

(!)  Boissieu,  Inscriptions  de  Lyon^  p.  424. 
(8)  Brambach,  n-  904. 


280  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

Maine-et-Loire,  Mayenne)  ;  et  huit  Martigny,  savoir  :  deux 
dans  TAisne,  deux  dans  les  Vosges,  et  les  quatre  autres 
dans  les  quatre  départements  du  Calvados,  de  la  Manche, 
de  Saône-et-Loire  et  de  la  Seine-Inférieure.  Nous  citerons 
hors  de  France  Martigny  (Valais).  Quant  à  Martignac,  va- 
riante méridionale  de  Martigny,  rendue  célèbre  par  un 
homme  politique  français  qui  donna  son  nom  au  ministère 
du  4  janvier  1828,  ce  n*est  pas  un  nom  de  commune  :  le 
dictionnaire  des  postes  indique  deux  Martignac  ;  ce  sont 
deux  hameaux,  Tun  du  département  de  TAriège,  l'autre  de 
celui  du  Lot. 

*Matriacus  est  le  nom  primitif  d'une  localité  qui  donna 
son  nom  au  pagus  Madriacensis ,  mentionné  dans  quel- 
ques documents  du  huitième  siècle  ;  tels  sont  :  un  juge- 
ment rendu  par  Pépin  le  Bref  vers  751  (1),  un  diplôme  de 
Karloman  en  771  (2),  deux  diplômes  donnés  par  Charlema- 
gne,  Tun  en  774  (3),  Tautre  en  775  (4).  Il  est  question  de 
ce  pagiis  dans  divers  documents  postérieurs.  Matriacus, 
plus  tard  Madriacus  d'où  Madriacensis  dérive,  est  aujour- 
d'hui Mérey  (Eure)  (5). 

*  Matriacus  est  dérivé  de  Matrius,  gentilice  rare  qui  nous 
est  conservé  par  une  inscription  datée  de  l'an  714  de  Rome, 
50  av.  J.-C,  et  trouvée  à  San-Gennano,  prés  du  mont 
Cassin  ;  elle  nous  apprend  qu'à  cette  date  L.  Matrius  était 
duumvir  ju/ri  dicundoldn  municipe  de  Casinum  (6).  Man, 
commune  de  Berzé  (Saône-et-Loire)  (7) ,  Méré  (Yonne)  (8) , 
et  Mérey  (Seine-et-Oise)  (9) ,  sont  d'anciens  Matriacus  qui, 


(1)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  45,  col.  2. 

(2)  Dom  Bouquet,  V,  721  6.  Sickel,  Acta  Karolinorunif  t.  II,  p.  15,  n*  12. 

(3)  Dom  Bouquet,  V,  726  e.  Sickel,  ibid,,  t.  II,  p.  25,  n"  33. 

(4)  Dom  Bouquet,  V,  734  a.  Sickel,  ibid,,  t.  II,  p.  28,  n*  45. 

(5)  Longnon,  Allas  historique  de  la  France,  p.  99. 

(6)  C.  /.  L.,  X,  5159. 

(7)  Ragut,  Cart.  de  Saint-Vincent  de  Afâcon,  p.  229. 

(8)  Quantin,  Dictionnaire,  topographique  du  département  de  iYonnej  p.  81, 

(9)  Longnon,  Atlas  historique  de  la  France,  p.  188. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACU8  AU  MOYEN  AGE.  281 

au  Moyen  Age ,  se  sont  appelés  Madriacus,  C'est  aussi  à 
MatiHacus  que  nous  font  remonter  certainement  Merry-la- 
Vallée  et  Merry-le-Sec  (Yonne)  (1);  et  probablement  Merry- 
sur- Yonne  ,  môme  département  ;  Merrey  (Aube)  ;  Merrey 
;  Haute-Marne);  Merry  (Orne). 

Matriolaôy  MaroUes,  est  un  autre  dérivé  du  même  genti- 
lice. 

Mauriagus  est  le  nom  de  la  localité  où  Attila  fut  battu 
par  Aétius ,  en  451  ;  la  première  mention  se  trouve  dans 
une  loi  burgunde  écrite  probablement  entre  488  et  490  (2)  ; 
une  seconde  mention  apparaît  au  siècle  suivant  chez  Gré- 
goire de  Tours  (3)  ;  nous  en  lisons  une  troisième  au  sep- 
tième siècle  dans  la  compilation  connue  sous  le  nom  de 
Frédégaire  (4)  ;  on  a  émis  Thypothèse  que  ce  Mauriacus  de- 
vait être  reconnu  dans  Moirey,  qui  a  été  au  Moyen  Age  le 
chef-lieu  d'une  paroisse  au  diocèse  de  Troyes  ;  son  empla- 
cement est  aujourd'hui  compris  dans  le  territoire  de  la 
commune  de  Dierrey-saint-Julien  (Aube)  (5).  Un  autre  Mau- 
riacus^ que  Ton  croit  être  Mory  (Seine-et-Marne),  commune 
de  Mitry,  est  compris,  en  982,  dans  une  liste  des  domaines 
de  la  cathédrale  de  Paris  (6).  Mauriacense  ministerium  ^ 
mentionné  en  920,  est  Mauriac,  commune  de  Saint-Léons 
(Aveyron)  (7).  Mauriac  (Cantal),  avait  une  abbaye  appelée 
en  948  S.  Petrus  JUau/riaceiisis  dans  le  Cart.  de  Beaulieu  (8). 

Mauriacus  dérive  de  Maurius^  gentilice  conservé  par  une 


(1)  Qaantin,  Diciionnsiire  topogr&phique  du  département  de  l'Yonne, 
p.  81,  82. 

C2}  Lex  Burgundionumy  t.  XVH,  §  1»  chez  Dom  Bouquet,  IV,  261  c.  Pertz, 
Leges,  t.  III,  p.  540,  1.  10;  cf.  Binding,  Das  burgundisch-romanische  Koeni- 
greich,  t.  I,  p.  26,  45,  46. 

(3)  Hisioria  Francorum,  livre  II,  c.  7,  chez  Dom  Bouquet,  t.  II,  p,  162  a; 
Aradt,  p.  69,  1.  15. 

(4)  Dom  Bouquet,  II,  462  d;  Krusch,  p.  73,  1.  25. 

(5)  LongnoQ,  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle,  p.  334-340. 

(6)  Cartulaire  de  Notre-Dame  de  Paris,  t.  I,  p.  275;  t.  IV,  p.  396,  401. 

(O  Molinier,  Géographie  historique  de  la  province  de  Languedoc,  col.  178, 
\^)  Deloche,  Cart.  de  Beaulieu,  p.  193. 


282  LIVRE  IL  CHAPITRE  IL 

inscription  d'Ain-Temuschent,  en  Algérie,  qui  est  Tépila- 
phe  d'un  personnage  appelé  Maurius  Cocidius  (1).  Maurius 
vient  lui-même  de  Maurtis^  surnom  plus  fréquent  (2),  qui  a 
donné  plusieurs  autres  dérivés  employés  comme  surnoms, 
tels  que  Maurinus  et  Maurentius, 

Mauriacus  est  la  forme  primitive  de  treize  noms  de  com- 
munes :  deux  Mauriac  (Cantal  et  Gironde);  un  Mauriat 
(Puy-de-Dôme)  ;  Moreac  (Morbihan),  appelé  Moriacum  dans 
un  acte  de  Tannée  1008  (3);  quatre  Morey  (Côte-d'Or, 
Meurthe-et-Moselle,  Haute-Saône,  Saône-et-Loire) ;  deux 
Mory  (Oise,  Pas-de-Calais);  Moiré  (Rhône);  Moirey  (Meuse); 
Moiry  (Ardennes). 

Melliacus  est  une  potestas  que  Leodebodus,  abbé  de 
Saint-Aignan  d'Orléans,  raconte  avoir  achetée,  et  dont  il 
fait  donation  par  acte  de  Tannée  667  (4)  ;  ce  nom,  qui  doit 
ici  désigner  une  localité  située  près  d'Orléans,  paraît  iden- 
tique à  celui  de  Miliacus,  Miliaous  est  un  fisc  royal  du  pays 
de  Béziers  ;  ce  fisc  devint  propriété  de  Tabbaye  d'Aniane, 
suivant  un  diplôme  émané  en  807  de  Louis  le  Pieux,  alors 
roi  d'Aquitaine  (5)  ;  sont  à  consulter,  sur  le  même  Miliacus^ 
trois  diplômes  donnés  par  Louis  le  Pieux  après  son  éléva- 
tion à  l'empire  (6). 

Melliacus ,  où  VI  a  été  probablement  doublée  pour  com- 
penser l'abrègement  de  Te,  dérive,  comme  MiliacuSy  de 
Maelius ,  gentilice  romain ,  connu  à  la  fois  par  les  auteurs 
et  par  les  inscriptions. 

En  Tannée  439  avant  notre  ère,  le  chevalier  Sp.  Maelius, 


(1)  C.  L  L.,  t.  VIII,  n»  9814. 

(2)  Voyez,  par  exemple,  C.  /.  L.,  VI,  22316.  22317. 

(3)  Rosenzweig,  Dictionnaire  topogr&phique  du  dép9Lrtêment  du  Mor- 
bihan, p.  183. 

(4)  Pardessus,  Diplomala,  t.  II,  p.  144. 

(5)  Dom  Bouquet,  VI,  454  b  ;  Sickel,  Acta  Karolinorum^  t.  II,  p.  86,  d*  2. 

(6)  1'  814,  Dom  Bouquet,  VI,  457  a;  2*  822,  Dom  Bouquet,  VI,  527  d; 
3*  837,  Dom  Bouquet,  V,  616  a.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  86, 137, 
194,  !!••  8,  177,  356. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACU8  AU  MOYEN  AGE.  283 

un  des  plus  riches  habitants  de  Rome,  fit  distribuer  du  blé 
au  peuple,  et,  accusé  pour  cette  raison  d'aspirer  à  la 
royauté,  il  fut  tué  par  le  maître  de  la  cavalerie  (1).  P.  Maelius, 
son  fils ,  devint  deux  fois  tribun  militaire  avec  puissance 
consulaire  :  d'abord  Tan  400,  ensuite  Tan  396  avant  J.-C.  (2). 
Q.  Maelius  était  tribun  du  peuple  en  320  (3). 

Ce  gentilice  se  répandit  dans  les  provinces  où  nous  le 
montrent  les  inscriptions  du  temps  de  l'empire.  Telles  sont 
en  Espagne  l'épitaphe  de  Maelia  TertuUa  (4)  et  celle  qui 
était  gravée  sur  le  monument  que  Maelia  Martialis  avait 
élevé  à  sa  mère  (5).  Sur  une  tuile  trouvée  près  de  Verceil, 
en  Italie,  on  a  lu  les  noms  de  M.  Maelius  Attiacus  (6).  En 
France ,  les  noms  de  Maelia  Secundina  nous  sont  fournis 
par  une  inscription  de  Chazey  (7)  ;  ceux  de  Cn.  Maelius 
Pudens  et  de  Cn.  Maelius  Flavus  par  une  inscription  de 
Camoins-les-Bains  (Bouches-du-Rhône)  (8). 

Quelques  monuments  nous  offrent  l'orthographe  Melius, 
par  e  au  lieu  à*ae  :  Melius  Zosimus ,  à  Lyon  (9)  ;  Melius 
Martinianus,  qui,  étant  augure  de  la  colonie  de  Vienne 
(Isère),  dédia  à  Mercure  un  autel  conservé  encore  aujour- 
d'hui près  d'Amblagnieu  (Isère)  (10)  ;  Melia  Anniana,  dans 
une  inscription  de  Zara  (Dalmatie)  (il)  ;  Q.  Melius  Auctus, 
dans  une  épitaphe  recueillie  prés  de  Vérone  (12). 

Melliacus  ou  Miliacus  pour  Maeliacus  est  devenu  en 
France  Meilhac  (Haute- Vienne)  ;  Meillac  (llle-et-Vilaine)  ; 
Meilly  (Côte-d*Or)  ;  Milhac,  noms  de  deux  communes  de  la 


(l)  Tite-Uve,  Uv.  IV,  c.  13,  14. 
(î)  C.  /.  L..  t.  I,  p.  502. 

(3)  Tite-Live,  Uv.  IX,  c.  8. 

(4)  C.  /.  L.,  II,  121. 

(5)  Ibid.,  II,  385. 
(6)/6id.,  V,  8110,  393. 

(7)  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne^  t.  III,  p.  416. 

(8)  Allmer,  Revue  épigraphique.  t.  II,  p.  78,  n*  515. 

(9)  Boissieu,  Inscriptions  de  Lyon,  p.  513. 

(10)  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  II,  p.  285. 
(tl)  C.  /.  L.,  III,  2922. 

(12)  /Wd.,  V,  3680. 


284  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

Dordogne  et  d'une  commune  du  Lot  ;  Millac  (Vienne); 
Milly,  nom  de  six  communes  (Manche,  Meuse,  Oise,  Saône- 
et-Loire,  Seine-et-Oise,  Yonne). 

MoNTiNiACus,  nom  d'une  villa  donnée  à  Téglise  du  Mans 
par  Tévéque  Bertramne  en  615  (1),  doit  probablement  être 
reconnu  dans  Montigné  (Mayenne).  Au  même  siècle,  Ber- 
chaire,  abbé  de  Montier-en-Der,  avait  une  propriété  dans 
une  localité  appelée  Montiniacus,  et  située  au  sud-ouest  de 
la  Loire  (2).  Une  monnaie  mérovingienne  a  été  frappée 
dans  un  lieu  appelé  Montiniacus  que  Ton  suppose  être  Mon- 
tignac  (Creuse)  (3).  Une  église  Saint-Christophe  de  Monti- 
niacus  appartenait,  en  819,  à  Tabbaye  de  Conques  (Aveyron), 
comme  nous  le  voyons  par  un  diplôme  de  Louis  le  Dé- 
bonnaire (4);  c'est  aujourd'hui  Montignac,  commune  de 
Conques  (Aveyron).  En  830,  une  villa  Montiniacus,  située 
dans  le  pays  de  Meaux,  appartenait  à  l'abbaye  de  Charroux 
(Vienne)  ;  on  l'apprend  par  une  confirmation  émanée  de 
Louis  le  Pieux  et  de  Lothaire,  son  fils  (5). 

Avant  de  prononcer  Montiniacus^  on  a  dû  dire  Montor 
niacus  en  plaçant  après  le  *  un  a  qui  s'est  plus  tard  assi- 
milé à  Vi  de  la  syllabe  suivante.  C'est  l'orthographe  de  la 
chronique  de  Béze  écrite  au  douzième  siècle,  mais  proba- 
blement à  l'aide  de  documents  plus  anciens  ;  cette  chroni- 
que désigne  par  le  nom  de  villa  Montaniacus  (6)  Montagny- 
lès-Seurre  (Côte-d'Or)  (7). 

Montaniacus ,  dont  Montiniacus  est  une  variante ,  est  un 
dérivé  de  Montanius,  gentilice  rare,  mais  dont  l'existence 


(1)  Pardessus,  Diplomata,f  t.  I,  p.  211. 

(2)  Ibid.,  t.  II,  p.  159. 

(3)  A.  de  Barthélémy,  dans  la  Bibliothèque  de  l'Ecole  des  chartes,  vingt- 
sixième  année,  p.  459,  n*  444. 

(4)  Gustave  Desjardins,  Cariulaire  de  l'abbaye  de  Conques,  p.  410.  Dom 
Bouquet,  VI,  517  d.  Sickel,  Acta  Karolinorum^  t.  II,  p.  123,  n*  135. 

(5)  Dom  Bouquet,  VI,  566  d.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  1C7,  n'TA. 

(6)  Migne,  Patrologia  latina,  t.  CLXII,  col.  866  a. 

(7)  Garnier,  Nomenclature  historique  des  communes ,  etc, ,  du  déparle- 
ment de  la  Côte-d'Or,  p.  200,  n*  438;  cf.  p.  109,  même  numéro. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACU8  AU  MOYEN  AGE.  285 

est  constatée.  On  le  trouve  dans  une  inscription  de  la 
Dacie  (1).  Une  épitaphe  découverte  à  Milan  nous  fait  con- 
naître les  noms  de  M.  Montanius  Primus  (2)  ;  une  inscrip- 
tion de  Cagliari,  'en  Sardaigne,  ceux  de  Q.  Montanius 
Pollio  (3).  Le  gentilice  Montanius  est  dérivé  du  cognomen 
Montanus,  très  fréquent  dans  les  inscriptions.  Ce  surnom 
était  déjà  usité  au  siècle  d'Auguste.  Julius  Montanus,  poète 
élégiaque  et  en  même  temps  épique,  est  mentionné  par 
Ovide  et  par  les  deux  Sénèque  (4).  De  Montanus  est  dérivé 
•  MonUmacuSy  aujourd'hui  Montenay  (Mayenne)  ;  Montanius 
a  donné  Montaniacus^  Montiniacus^  Montanianus , 

De  Montaniacus  sont  venus  les  vingt-quatre  noms  de 
communes  suivants  :  six  Montagnac,  savoir  :  deux  dans  la 
Dordogne,  deux  dans  le  Lot-et-Garonne,  un  dans  les  Basses- 
Alpes,  un  dans  THérault  ;  deux  Montagna  (Jura)  ;  un  Mon- 
tagnat  (Ain)  ;  deux  Montagney,  un  dans  le  Doubs ,  Tautre 
dans  la  Haute-Saône  ;  deux  Montagnieu  (Ain ,  Isère)  ;  onze 
Montagny,  savoir  :  trois  dans  Saône-et-Loire,  deux  dans  la 
Côte-d'Or ,  autant  dans  l'Oise ,  un  dans  chacun  des  dépar- 
tements de  la  Loire,  du  Rhône,  de  la  Savoie  et  de  la 
Haute-Savoie. 

C'est  par  Moniiniacus  que  s'expliquent  les  noms  de  qua- 
rante-neuf communes  :  sept  Montignac,  savoir  :  deux  dans 
la  Charente,  autant  dans  Lot-et-Garonne;  un  dans  la  Dor- 
dogne, autant  dans  la  Charente  et  les  Hautes-Pyrénées; 
cinq  Montigné,  savoir  :  deux  dans  Maine-et-Loire,  un  dans 
chacun  des  trois  départements  de  la  Charente,  de  la 
Mayenne  et  des  Deux-Sèvres;  quarante-neuf  Montigny, 
savoir  :  six  dans  l'Aisne,  cinq  dans  la  Côte-d'Or,  trois  dans 
chacun  des  départements  d'Eure-et-Loir,  de  la  Nièvre  et 
de  Seine-et-Marne  ;  deux  dans  les  Ardennes ,  autant  dans 
le  Jura ,  dans  Meurthe-et-Moselle ,  dans  la  Meuse ,  dans  le 


(1)  C.  7.  L.,  t.  m,  n*  792, 

(2)  Ibid,,  V,  6043. 

(3)  IWd.,  X,  7580. 

(4)  Teuffel»  Geschichte  der  rœmischen  Literatur,  S*  édit.,  p.  539. 


286  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

Nord,  dans  la  Haute-Saône ,  dans  Seine-et-Oise  et  dans  la 
Somme  ;  un  dans  chacun  des  départements  de  l'Aube ,  du 
Calvados,  du  Cher,  du  Loiret,  de  la  Manche,  de  la  Haute- 
Marne,  de  la  Marne,  de  TOise,  du  Pas-de-Calais,  de  la 
Sarthe,  de  la  Seine-Inférieure,  des  Deux-Sèvres  et  de 
r Yonne.  Ainsi,  au  total,  les  noms  de  soixante-treize  com- 
munes dérivent  du  gentilice  Montanius. 

La  forme  latine  fundus  Monianianus  se  rencontre  daos 
une  charte  de  Ravenne  (1). 

MusGiAGiE  est  le  nom  d'un  vicus  qui  avait  une  église  ;  et. 
dans  cette  église ,  un  personnage  arverne ,  nommé  Nunni- 
nus,  qui  vivait  dans  la  seconde  moitié  du  sixième  siècle, 
déposa  une  relique  de  saint  Germain  d'Auxerre  ;  c'était  un 
fragment  du  tombeau  de  ce  saint  (2).  Musciacae^  sous-entendu 
domus,  au  masculin  singulier  Musciacus^  sous-entendu 
vicus^  et  plus  anciennement  fundus,  doit-étre  aujourd'hui 
Moissat  (Puy-de-Dôme).  Parmi  les  localités  situées  au  sud- 
ouest  de  la  Loire,  et  qu'en  673  Berchaire  donna  à  l'abbaye 
de  Montier-en-Der ,  se  trouve  un  certain  Musciacus  [S).  Un 
monasterium  Musciacum  fut  l'objet  des  libéralités  de  Louis 
le  Débonnaire  (4)  ;  il  était  situé  à  Moissac  (Tarn-et-Garonne). 

Musciacus  s'explique  par  le  gentilice  Mustius.  Le  chevalier 
romain  C.  Mustius  fut  défendu  par  Cicéron- qui  parle  de 
lui  dans  les  Verrines  (5).  C.  Mustius  Tettianus  fit  deui 
dédicaces,  Tune  à  Jupiter,  l'autre  à  Epona,  qui  ont  été 
trouvées  à  Cilly  en  Styrie  (6).  Les  inscriptions  d'Afrique 
nous   font   connaître  plusieurs   Mustius   :    à   Lambessa. 


(1)  Fantuzzi,  Monumenti  Ravennati,  t.  I,  p.  29. 

(2)  Grégoire  de  Tours,  De  gloria  confeasorum,  c.  41.  Chez  Bordier,  Us 
livres  des  miracles,  t.  II,  p.  422-425.  Amdt  et  Krusch,  p.  773, 1.  20;  cf.  Lon- 
gnon,  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle^  p.  506-507. 

(3)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  159. 

(4)  Vie  de  ce  prince  par  l'Astronome,  chez  Dom  Bouquet,  t.  VI,  p.  95c. 
Constitutio  de  monasteriis,  en  817,  tbid.,  409  a. 

(5)  Pauly,  Rêal'Encyclopaedie,  t.  V,  p.  283. 

(6)  C.  /.  L.,  III,  5175,  5176. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  287 

C.  Mustius  Portunatus  (1);  à  Sadjar,  Q.  Mustius  (2);  à 
Arsacal,  G.  Mustius  Rusticus  (3);  à  Beni-Ziad,  A.  Mus- 
tius (4).  Mustius  a  donné  le  dériy é  *  Mv^tiaciLS  dont  Musciacus 
n'est  qu'une  variante  orthographique. 

De  Musciacus  viennent  les  noms  de  communes  suivants  : 
trois  Moissac  (Lozère ,  Tarn-et-Garonne ,  Tarn)  ;  Moissat 
(Puy-de-Dôme)  ;  Moissey  (Jura)  ;  Moissieu  (Isère)  ;  Moissy 
(Seine-et-Marne ,  Nièvre)  ;  peut-être  Moussac  (Gard  et 
Vienne);  Moussey  (Aube  et  Vosges);  enfin  probablement 
six  Moussy,  dont  deux  dans  Seine-et-Marne  et  un  dans 
chacun  des  quatre  départements  de  TAisne ,  de  la  Marne , 
de  la  Nièvre  et  de  Seine-et-Oise.  Moussy  (Aisne)  est  ap- 
pelé Musceium  dans  la  vie  anonyme  de  saint  Rigobert,  ar- 
chevêque de  Reims ,  mort  en  749  (5)  ;  le  groupe  se  que 
nous  ofifre  cette  orthographe  est  d'accord  avec  Tétymologie 
que  nous  proposons.  Cette  étymologie  est  contredite  par 
Torthographe  Mulciacum ,  Molceiv/m^  du  nom  de  Moussey 
(Aube) ,  dans  des  textes  du  douzième  siècle  (6)  ;  mais  cette 
orthographe  est  peut-être  le  résultat  d'une  hypothèse  étymo- 
logique, plutôt  que  le  reflet  de  la  tradition;  cependant 
Mulciacum  peut  s'expliquer  par  un  primitif  *  Molliciacus 
qui  dériverait  de  MoUicius ,  geutilice  connu  par  quelques 
inscriptions  (7). 

Une  colonica  du  nom  de  Noniacus  appartenait  à  l'abbé 
Aridius ,  qui  vivait  au  sixième  siècle  ;  elle  était  probable- 
ment située  en  Limousin  ;  voilà  ce  que  nous  apprend  une 
vie  de  ce  personnage  attribuée  à  Grégoire  de  Tours  (8)  ; 

(1)  c.  1.  L.,  VIII ,  2949,  3204. 

(2)  Ibid,,  VIII,  6022. 

(3)  JbW.,  VIII,  6152. 

(4)  Ibid.,  VIII,  6532. 

(5)  Matton,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  l'AisnCy  p.  194. 

(6)  Bontiot  et  Socard,  Dictionnaire  topographique  du  département  de 
VAube,  p.  109. 

(7)  MoUicius,  C.  /.  L.,  III,  341,  342;  V,  1305;  Mollicia,  X,  6501. 

(8)  Vita  sancti  Aridii  abbatis,  c.  VIII;  chez  Bordier,  Les  livres  des  mi- 
ncies, t  IV,  p.  173. 


288  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

cette  localité  est  aussi  mentionnée  dans  |le  texte  qu'on 
nous  a  conservé  du  testament  du  même  Aridius  (1). 

Nonius  est  un  gentilice  romain  qu'on  rencontre  quelque- 
fois (2).  En  Tan  50  avant  notre  ère,  M.  Nonius  Sufifenas  était 
propréteur  de  Crète  et  de  Cyrène  (3).  Un  sénateur  du  nom 
de  Nonius  fut  proscrit  par  Antoine  (4).  Auguste  gratifia 
d'un  collier  d'or  Nonius  Asprenas  (5).  Deux  ou  trois  Nonius 
Asprenas  figurent  dans  la  liste  deè  consuls ,  aux  années  6, 
29  et  38  après  notre  ère  (6).  De  tous  les  Nonius,  celui  qui  est 
le  plus  connu  de  nos  jours  est  le  grammairien  Nonius 
Marcellus;  il  écrivait  au  troisième  siècle  de  notre  ère  et 
a  laissé  un  ouvrage  souvent  édité  (7).  Ce  gentilice  fut  porté 
chez  nous  par  M.  Nonius  Gallus  qui  fut  gouverneur  de  la 
Gaule  transalpine  en  l'an  29  avant  notre  ère,  et  qui  soumit 
les  Treveri  ;  il  reçut  pour  cette  raison  le  titre  dHmperaior  (8\ 
Deux  inscriptions  de  Lyon  contiennent  le  nom  de  Nonius 
précédé  du  prénom  Caius  et  suivi  dans  lune  d'elles  du 
surnom  Euposius  (9).  Une  inscription  de  Trêves  nous  of- 
fre l'orthographe  Nonnius  avec  deux  n  et  le  surnom  Ger- 
manus  (10). 

Nogna  (Jura),  suppose  un  plus  ancien  Noniacus. 

NoviACUM  castrum  fut  en  752  donné  à  l'abbaye  de  Prlim 
par  le  roi  Pépin  le  Bref  (11). 


(1)  Pardessus,  Diplomata,  t.  I,  p.  138.  On  y  lit  Nonniacus  avec  deux  n; 
cf.  Longnon,  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle,  p.  527. 

(2)  Pauly,  Real'Bncyclopaedie,  t.  V,  p.  687-692. 

(3)  Cicéron,  à  Atticus,  livre  VI,  lettre  i. 

(4)  Pline,  Histoire  naturelle,  livre  XXXVII,  c.  81. 

(5)  Suétone,  Auguste,  c.  43. 

(6)  Joseph  Klein.  Fasti  consulares,  p.  17,  27,  30. 

(7)  Teuflfel,  Gcschichte  der  roemischen  Literatur,  3»  édition,  p.  909-912 

(8)  Voy.  Desjardins,  Géographie  historique  et  administrative  de  la  Giule 
romaine,  t.  IH,  p.  40,  45. 

(9)  Boissieu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon,  p.  18,  53. 

(10)  Brambach,  n*  835.  Nonius  dérive  du  nombre  ordinal  nonus,  c  neu- 
vième »;  Nonnius,  du  cognomen  Nonnus,  sur  lequel  on  peut  voir  Paul/, 
Real'Encyclopaedie,  t.  V,  p.  692-694. 

(11)  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  2,  n*  4. 


' 


LA  DÉSINENCE  - 1  -  A  C  U  S  AU  MOYEN  AGE.  289 

Les  auteurs  et  les  inscriptions  nous  font  connaître  de 
nombreux  exemples  du  gentilice  Novius.  Tels  sont  le  poète 
comique  Q.  Novius  qui  vivait  au  commencement  du  P'  siè- 
cle avant  notre  ère  (1).  En  58  avant  notre  ère,  L.  Novius 
était  tribun    du  peuple  ;  on   l'apprend   par  Asconius  (2). 
Novius  Niger  était  questeur  au  temps  de  la  conjuration  de 
Catilina,  en  l'an  56  avant  J.-C   (3).   Ce  nom  se  répandit 
dans  les  provinces.  Deux  inscriptions  de  Spalatro ,  Tan- 
cienne  Salona,  nous  font  connaître  les  noms  de  Novius 
Persicus  et  de  P.  Novius  Laurus  (4).  Dans  une  inscription 
des  environs  de  Bude ,  on  lit  les  noms  du  légionnaire  No- 
vius Provincialis  (5).  Une  inscription  de  Worms  rappelle 
un  vœu  de  Novia  Prisca  (6).  A  Schwanden ,  dans  le  Pala- 
tinat,  on  a  trouvé  l'épitaphe  d'une  femme  appelée  Novia  (7). 
Nous  nous  bornons  à  ces  exemples ,  dont  il  serait  facile 
d'augmenter  le  nombre  (8). 

De  Novius  est  dérivé  Noviacus  qui  est  devenu  Neuvy , 
dans  dix-neuf  noms  de  communes ,  savoir  :  trois  dans  le 
Cher,  deux  dans  l'Eure-et-Loir  et  dans  Tlndre;  un  dans 
chacun  des  départements  de  l'Allier,  des  Deux-Sèvres,  de 
rindre-et-Loire ,  de  Loir-et-Cher ,  du  Loiret ,  de  Maine-et- 
Loire  ,  de  la  Nièvre ,  de  l'Orne ,  de  Saône-et-Loire ,  de  la 
Sarthe  et  de  l'Yonne.  A  la  même  origine  se  peuvent 
rattacher  Neufvy  (Oise)  ;  Nevy  (Ardennes)  ;  et  probablement 
les  deux  Nevy ,  du  Jura. 

Au  neuvième  siècle,  la  véritable  étymologie  de  Noviacus 
était  oubliée,  et  on  considérait  ce  mot  comme  un  dérivé 
de  l'adjectif  latin  noviis.  C'est  pour  cela  que  Jérémie,  ar- 
chevêque de  Sens,  imagina  d'appeler  Noviacus  l'abbaye 


(1)  Teoffel,  Geschichte  der  rœmiachen  Literatur,  3*  édit.,  p.  243. 
(?)  Asconias,  6ur  le  c.  14  du  Pro  Milone  de  Gicéron. 

(3)  Suétone,  César,  c.  17. 

(4)  C.  /.  L.,  III,  2511,  2552. 

(5)  /Wd.,  III,  3556. 

(6)  Brmmbach,  n»  907. 
fT)  Brambach,  n-  1765. 

(8)  Voyez  Pauly,  Re&l-Encyclopaedie,  t.  V,  p.  717-719. 

19 


I 

« 


290  LIVRE  IL  CHAPITRE  IL 

qu'il  fonda  en  818,  à  Mauriacus,  en  Auvergne  (1).  Mais 
cette  dénomination  nouvelle ,  qu'une  erreur  avait  inspirée, 
ne  fut  pas  [adoptée  par  la  population ,  et  l'ancien  nom  de 
Mauriacus  persiste  encore  ,  à  peine  modifié ,  dans  celui  de 
Mauriac  (Cantal). 

La  villa  Novilliàgus  fut  donnée  à  Téglise  cathédrale  de 
Reims  par  le  roi  Karloman  en  771 ,  et  Charlemagne  con- 
firma cette  libéralité  ;  les  diplômes,  aujourd'hui  perdus,  sont 
analysés  dans  l'appendice  à  Flodoard ,  écrit  vers  la  fin  du 
dixième  siècle  (2).  Ce  nom  de  lieu  est  assez  fréquent,  mais 
le  plus  souvent  altéré.  On  le  trouve  écrit  avec  une  seule  i, 
Noviliacus.  Ainsi  Grégoire  de  Tours  écrit  Noviliacus  le  nom 
de  deux  vici  qui  auraient  été ,  suivant  lui ,  fondés ,  c'est- 
à-dire  évidemment,  dont  les  paroisses  auraient  été  créées 
par  les  évoques  Injuriosus  et  Baudinus,  tous  deux  ses  pré- 
décesseurs, l'un  de  529  à  546,  l'autre  de  546  à  552  (3).  On 
remarque  la  môme  orthographe  dans  le  diplôme  de  Clo- 
taire  III  pour  l'abbaye  de  Bèze ,  en  664 ,  tel  que  nous  l'a 
conservé  la  chronique  de  cette  abbaye  (4)  ;  dans  la  charte 
originale  contenant  les  donations  faites  par  Wandmir  et 
Ercamberte  à  diverses  églises  en  689  (5);  dans  les  diplô- 
mes donnés  :  en  705  par  Childebert  III  à  l'abbaye  de  Saint- 
Serge  et  de  Saint-Médard  d'Angers  (6)  ;  en  802  par  Char- 
lemagne (7) ,  en  832  par  Louis  le  Débonnaire ,  à  la 
cathédrale  du  Mans  (8).  Au  lieu  de  Noviliacus,  on  a  écrit 
quelquefois  Nobiliacus  avec  un  b  au  lieu  d'un  v,  phéno- 

(1)  Chronique  de  Siint-Pierre-Ie-Vtf  de  Sens;  chez  Dom  Bouquet,  VI, 237 a. 

(2)  Dom  Bouquet,  t.  V,  p.  362  b,  c;  cf.  t.  VI,  p.  216  c,  d.  Bickèl,  Actolt- 
rolinorumt  t.  II,  p.  380. 

(3)  Hietoria,  Francorum^  livre  X,  c.  31,  i  15,  édit  Amdt,  p.  447,  lignes  13-20. 
Cf.  Longnon,  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle^  p.  282. 

(4)  Pertz,  Diplomatum  imperii  tomus  primvLS,  p.  40, 1.  23. 

(5)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  637,  col.  1. 

(6)  Pertz,  Diplomatum  imperii  tomus  primus,  p.  65, 1.  44. 

(7)  Dom  Bouquet,  V,  768  e;  cf.  Sickel ,  Acta  Karolinorum,  t.  Il,  p.  67, 
n-  181. 

(8)  Dom  Bouquet ,  VI ,  585  e;  cf.  Bickel,  Acta  Karolinorum^  U  II,  p.  179, 
n*  308. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUB  AU  MOYEN  AGE.  291 

mène  fréquent  dans  la  basse  latinité.  Cette  orthographe 
se  rencontre  dans  certains  manuscrits  de  Grégoire  de 
Tours  (1) ,  dans  un  diplôme  de  [Fannée  680  en  faveur  de 
l'abbaye  de  Saint-.Wast  d'Arras  (2),  et  dans  la  vie  de  Louis 
le  Débonnaire  dite  de  l'Astronome ,  où  Tabbaye  de  Saint- 
Vaast  est  appelée  monasterium  Nobiliacum  (3). 

Le  gentilice  d'où  est  dérivé  le  nom  de  lieu  qui  se  pré- 
sente dans  les  textes  sous  ces  trois  formes  a  été  porté  sous 
le  règne  de  l'empereur  Tibère  par  Novellius  Torquatus,  de 
Milan,  qui  devint  préteur  et  proconsul  et  qui  dut  une 
grande  notoriété,  non  à  l'habileté  avec  laquelle  il  s'acquit- 
tait de  ses  hautes  fonctions ,  mais  au  talent  qu'il  avait  de 
boire  d'un  trait ,  en  se  conformant  à  toutes  les  règles  de 
l'art,  trois  congés,  c'est-à-dire  environ  neuf  litres  de  vin; 
Pline,  dans  son  Histoire  natv/relle^  s'étend  avec  détails  sur 
les  faits  qui  attestent  combien  Novellius  s'acquittait  cons- 
ciencieusement de  cette  tâche  glorieuse,  vraie  merveille 
dont  l'empereur  lui-même  fut  témoin  (4).  D'autres  Novel- 
lius, moins  célèbres,  nous  sont  connus  par  les  inscriptions. 
Tels  sont  Novellius  Optatus ,  dont  l'épitaphe  a  été  trouvée 
près  de  Salzbourg  (5)  ;  Novellius  Aequalis  (6) ,  Novellius 
Agilis,  Novellius  Euodius  dont  les  épitaphes  ont  été  re- 
cueillies à  Milan  (7).  Il  serait  trop  long  d'énumérer  tous  les 
autres  exemples  de  ce  gentilice  que  l'Italie  nous  offre. 
U  pénétra  en  Gaule.  Nous  citerons  C.  Novellius  Amphio 
dans  une  inscription  de  Genève  (8),  L.  Novellius  Hispelo  (9) 

(1)  Voyez  les  notes  placées  par  Amdt  au  bas  de  la  page  447  citée  plus 
haut;  cf.  Gloria  confessorurrif  c.  7;  chez  Bordier,  Les  livres  des  miracles, 
t  II,  p.  358;  Krasch,  p.  753,  1.  9. 

(2)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  181. 

(3)  Dom  Bouquet,  VI,  95  c. 

(4)  Pline,  Histoire  natureUe,  livre  XIV,  g  144-146;  cf.  Pauly,  Real-Ency- 
clopsedie,  t.  V,  p.  714. 

(5)  C.  /.  L.,  t.  ni,  n*  5626. 

(6)  /Wd.,  V,  6051. 

(7)  Ibid.,  V,  6054. 

(8)  Mommsen  ,  Inscriptiones  confoederationis  helveticae  ,  n*  92.  AUmer , 
îmeriptions  antiques  de  ViennSy  t.  II,  p.  319. 

(9)  Brambach,  n*  1201. 


292  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

et  M.  Novellius  (1)  au  musée  de  -Mayence ,  Tépitaphe  de 
P.  Novellius  Novanus  et  de  ses  enfants  qui  a  été  trouvée 
à  Apt  (2). 

*  Novelliacus ,  Noviliacus ,  dérivé  de  Novellius ,  peut  se 
reconnaître  dans  trente-six  noms  de  communes  :  Neuillac 
(Charente-Inférieure),  Neuillay  (Indre),  deux  Neuillé  (Indre- 
et-Loire)  ,  Neuillé  (Maine-et-Loire) ,  Neuilli  (Orne)  ;  vingt- 
trois  Neuilly,  savoir  :  deux  dans  chacun  des  départements 
de  l'Allier,  du  Calvados,  du  Cher,  de  la  Haute-Marne,  de 
l'Oise ,  de  Seine-et-Oise  et  de  la  Somme  ;  un  seulement 
dans  chacun  des  départements  suivants  :  Aisne,  Côte-d'Or, 
Eure ,  Indre-et-Loire ,  Mayenne ,  Nièvre ,  Orne ,  Yonne  ; 
NeuUiac  (Morbihan)  ;  Neuvilley  (Jura)  ;  Neuvilly  (Meuse), 
et  Neuvilly  (Nord)  ;  trois  Nuillé ,  dont  un  dans  la  Sarthe 
et  deux  dans  la  Mayenne;  enfin  NuUy  (Haute-Marne). 

De  ces  noms  de  lieux  il  faut  distinguer  Nouaillé  (Vienne), 
au  huitième  siècle  Novaliacus ,  comme  nous  l'apprend  un 
diplôme  émané  en  794  de  Louis  le  Débonnaire ,  alors  roi 
d'Aquitaine  (3).  Novaliacus  suppose  un  geniïlice  *  Novalius 
dérivé  de  Tadjectif  novalis. 

PiçiACus  est  le  nom  d'une  localité  située  dans  le  Perche, 
et  où  saint  Avit,  mort  vers  Tannée  527,  mena  la  vie  éré- 
mitique  ;  on  le  sait  par  une  vie  anonyme ,  à  peu  près  con- 
temporaine (4).  On  ignore  où  était  l'emplacement  précis 
de  Piciacus, 

Ce  mot  est  dérivé  de  Pitius.  On  a  trouvé  à  Veglia,  île 
voisine  de  la  côte  de  Dalmatie,  Tépitaphe  du  décurion 
P.  Pitius  Marullus  (5)  ;  à  Petronell ,  en  Autriche  ,  celle  de 


(1)  Brambach,  n*  1216. 

(2)  C.  J.  L.,  XII,  1133. 

(3)  Dom  Bouquet,  t.  VI,  p.  452  c  ;  cf.  Sickel,  Acta,  KArolinorum.^  t.  VL,  p.  84, 
n-  1. 

(4)  Dom  Bouquet,  t.  III,  p.  439  d;  cf.  Longnon,  Géographie  de  <a  GdMk 
au  sixièifne  siècle,  p.  328,  329. 

(5)  C.  L  L.,  III,  3128. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  293 

l'affranchi  C.  Pitius  Hilarus  (1).  On  conserve  à  Ebersdorf 
(Autriche),  celle  de  l'affranchi  C.  Pitius  Jucundus  (2). 

De  Pitius  on  a  tiré  *  Pitiacus ,  puis  par  effet  de  Tassibi- 
lation  et  avec  substitution  du  c  au  t^  Piciacus.  Peut-être  ce 
nom  explique-t-il  celui  de  Pécy  (Seine-et-Marne).  On  doit 
aussi  probablement  le  reconnaître  dans  les  deux  Pessac  du 
département  de  la  Gironde  ;  dans  Pessat  (Puy-de-Dôme)  ; 
dans  Pissy  (Somme  et  Seine-Inférieure).  Pissy  (Somme) 
est  vraisemblablement  le  Pisciacus  qu'un  diplôme  émané 
de  Pépin  le  Bref,  en  751,  met  dans  \e^  pagus^^Ambianen-' 
m  (3)  ;  mais  cette  orthographe  peut  être  le  résultat  d'une 
étymologie  populaire  qui  rapprochait  le  nom  de  lieu  Pissy 
du  latin  jnscis ,  poisson ,  bien  connu  à  une  époque  où  de- 
puis longtemps  le  gentilice  Pitius  était  oublié.  Nous  termi- 
nerons par  Pizy  (Yonne),  qui,  suivant  M.  Quantin,  s'est 
appelé  Piciacum  au  septième  siècle  (4). 

PociACus  est  le  nom  d'une  des  villae  qui ,  au  huitième 
siècle,  appartenaient  à  Tabbaye  de  Saint-Martin  de  Tours. 
Nous  l'apprenons  par  un  diplôme  de  Charlemagne  qui  re- 
monte à  l'année  775  (5).  La  situation  de  Pociacus  est 
inconnue. 

Ce  mot  peut  être  dérivé  du  gentilice  Paucius,  dérivé  lui- 
même  de  l'adjectif  paucus.  Une  inscription  de  Bénévent 
contient  le  nom  du  décurion  Q.  Paucius  (6). 

PoDENTiACus  (7),  lisez  PuDENTiACus,  dérivc  de  Pudentius 
qui  est  un  gentilice  romain,  probablement  d'assez  basse 


(1)  c.  /.  L.,  III,  4518. 

(2)  7Wd.,  III.  4602. 

(3)  Perte,  Diplomatiim  imperii  lomus  primuSy  p.  109,  1.  16. 

ik)  Dictionnaire  topogr&phique  du  département  de  l'Yonne^  p.  99. 

(5}Pom  Bouquet»  V,  737  c;  cf.  Sickel,  Acta  Karolinorum  ,  t.  II,  p.  27, 
nMî;  cf.  Habille,  La  pancarte  noire  de  Saint-Martin  de  Tours,  p.  69,  106, 
107. 

(6)  C.  /.  L.,  IX,  1653. 

(7)  Cartulaire  de  Saint-Seine  cité  par  Garnier,  Nomnnrlattirp  historiqvp, 
etc„  du  département  de  la  Côte-d'Or,  p.  51. 


294  LIVRE  II.  CHAPITRE  IL 

époque  :  Pudentius  Maximinus,  vétéran,  fît  à  Hercule 
une  dédicace  trouvée  près  de  Salzbourg  (1).  C'est  aussi  le 
nom  d'un  saint  qui  fut  martyrisé  à  Alexandrie,  et  dont  od 
célèbre  la  fête  le  29  avril  (2). 

Poncey-lez-Pellerey  (Côte-d'Or) ,  Pouançay  (Vienne), 
Pouancé  (Maine-et-Loire) ,  peuvent  être  d'anciens  Puden- 
tiacus. 

PoMPEiAGUM  est  le  nom  d'un  castrum  où ,  suivant  les 
actes  du  martyre  de  saint  Vincent  d' Agen ,  le  corps  de  ce 
saint,  mis  à  mort  sous  Dioclétien,  aurait  été  transféré  et  se- 
rait devenu  l'objet  d'un  culte  vers  le  milieu  du  cinquième 
siècle  (3)  ;  ce  castrum  était  situé,  suivant  M.  Longnon,  au 
Mas-d'Agenais  (Lot-et-Garonne)  (4).  En  829,  Pépin  I",  roi 
d'Aquitaine ,  confirma  l'abbaye  de  Saint-Maur-les-Fossés 
dans  la  possession  du  quart  d'une  propriété  que  son  diplôme 
appelle  Pompeiaci  villa  (5).  La  vie  de  saint  Theuderius. 
abbé  de  Vienne  (Isère)  au  sixième  siècle ,  écrite  trois  siè- 
cles plus  tard,  met  dans  le  voisinage  de  Vienne  (Isère), 
alors  bien  fortifiée,  cinq  forts  destinés  en  cas  de  guerre  à 
tenir  l'assiégeant  à  distance;  un  de  ces  forts  s'appelait 
Pompeiacus  (6). 

Pompeiacus  dérive  du  genlilice  d'abord  obscur  Pompeius, 
qui  est  d'origine  ombrienne  et  vient  du  nom  de  nombre 
*  pompe  =  quinque,  cinq.  Ce  gentîlice  fut  à  peu  près  ia- 
connu  avant  le  consul  Q.  Pompeius,  141,  un  des  généraux 
romains  qui  échouèrent  dans  la  guerre  contre  les  Celtibè- 
res  (7).  Après  lui  Cn.  Pompeius  Strabo  et  Q.  Pompeius 
Rufus,  parvinrent  aussi  au  consulat,  l'un,  Tan  89,  Tau- 

(1)  C.  /.  L.,  III,  5531. 

(2)  BoUandistes,  avril,  t.  III,  p.  617. 

(3)  Voir  les  actes  du  martyre  de  saint  Vincent,  dans  les  Bollandistes,  t.  II 
de  juin,  p.  166-168. 

(4)  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle,  p.  549-552. 

(5)  Tardif,  Monuments  historiques^  n»  121,  p.  84,  col.  1. 

(6)  Dom  Bouquet,  t.  III,  p.  470  b. 

(7)  Sur  la  gens  Pompeia,  voyez  Pauly,  Real-Encyclopaedie^  t.  V,  p.  1844- 

1858. 


LA  DÉSINENCE  -I<ACU8  AU  MOYEN  AGE.  295 

tre,  Tan  88  avant  J.-C.  ;  ce  nom  d'homme  dut  surtout 
sa  célébrité  au  fils  du  premier  des  deux ,  Cn.  Pompeius , 
surnommé  le  Grand.  Entre  autres  affaires  importantes 
dont  il  fut  chargé,  une  des  plus  graves  fut  la  guerre  con- 
tre Sertorius,  en  Espagne.  Elle  l'occupa  de  77  à  72,  et 
pendant  ce  temps  il  parait  avoir  exercé  Tautorité  suprême 
dans  la  Gaule,  administrée  sous  ses  ordres  par  le  propréteur 
Fonteius  (1).  C'est  à  cette  date  que  doit  remonter  l'introduc- 
tion en  Gaule  du  gentilice  Pompeius.  Un  des  monuments 
antiques  les  plus  curieux  de  la  France  est  la  porte  d'entrée 
de  la  sépulture  d'une  famille  Pompeia ,  à  Âix ,  en  Savoie  ; 
L.  Pompeius  Campanus  la  fit  construire  de  son  vivant ,  et 
les  épitaphes  d'un  certain  nombre  de  ses  parents  s'y  lisent 
encore  aujourd'hui  (2).  Nous  citerons  ensuite  Sex.  Pom- 
peius Macrinus,  connu  par  une  inscription  de  Novairy  (3)  ; 
Ponpeius  Octavianus,  dont  l'épitaphe  a  été  trouvée  près 
de  Ghozeau  (Isère)  (4)  ;  Q.  Pompeius  Adjutor,  dont  les  noms 
se  lisent  dans  une  inscription  d'Annecy  (5)  ;  Pompeia  Da- 
tiva,  dont  l'épitaphe  vient  d'être  découverte  à  Arles  (6); 
une  autre  Pompeia  dont  le  musée  de  Bordeaux  possède 
l'épitaphe  (7).  Je  me  bornerai  à  ces  exemples  :  on  en 
trouvera  beaucoup  d'autres  dans  le  t.  XII  du  C.  /.  L 

De  Pompeiacus  viennent  les  noms  de  Pompejac  (Gironde), 
et  Pompiac  (Gers). 

PoNGiAGus  est  une  villa  dépendant  de  l'église  du  Mans, 
aux  termes  d'un  diplôme  de  Louis  le  Débonnaire  en  832  (8)  ; 
c'est  probablement  aujourd'hui  Poncé  (Sarthe). 

Ce  nom  de  lieu  dérive  du  gentilice  Pontius  qui  est  latin , 

(1)  E.  Desjardins,  Géogr&phie  de  U  Gaule  romaine^  t.  II,  p.  330-334,  347. 
(?)  E.  Desjardins,  ihid.,  t.  III,  p.  118;  cf.  Allmer,  Inscriptions  antiques 
de  Vienne,  t.  III,  p.  312-317. 

(3)  AUmer,  Inscriptions  antiques  de  Vienne,  t.  III,  p.  245. 

(4)  AUmer,  ibid.,  t.  III,  p.  182. 

(5)  Allmer,  ibid.,  t.  III,  p.  340. 

(Q  AUmer,  Revue  épigraphique,  t.  I,  p.  268,  n*  296. 

m  AUmer,  ibid,,  t.  II,  p.  22,  n*  469. 

(8)Dom  Bouquet,  VI,  586  a;  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  179. 


296  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

mais  d'origine  samnite  (1),  e}  vient  du  thème  ombrien 
*ponto-  =:  *pomptO',  identique  au  thème  latin  *quintO'  = 
*  quinqtO'  du  nom  de  nombre  ordinal  signifiant  cinquième. 
Pontius  est  la  forme  ombrienne  du  gentilice  latin  Quintius, 
mieux  Quinctiiis.  Le  plus  célèbre  personnage  de  ce  nom 
que  Ton  rencontre  dans  l'histoire  de  la  république  romaine 
est  C.  Pontius,  fils  d'Herennius,  qui  commandait  les  Sam- 
nites  quand  ils  firent  Tarmée  romaine  prisonnière  aux 
Fourches  Caudines,  l'an  321  avant  J.-C.  (2).  Ce  gentilice 
avait  pénétré  à  Rome  de  fort  bonne  heure,  si  Ton  en  croit 
la  légende  ;  en  effet,  dès  le  siège  de  Rome  par  les  Gaulois. 
en  Tan  390  avant  notre  ère ,  un  jeune  et  ardent  patriote 
romain,  Pontius  Cominius ,  aurait  rendu  son  nom  illustre 
par  l'heureuse  audace  avec  laquelle,  trompant  la  sur\'eii- 
lance  des  assiégeants,  il  pénétra,  dit-on,  dans  le  Capitole  3 . 
Plus  tard,  L.  Pontius  Aquila  fut  du  nombre  des  meurtriers 
sous  les  coups  desquels  César  perdit  la  vie.  Tan  44  avant 
notre  ère  (4)  :  ici  nous  sommes  en  présence  d'un  fait  his- 
torique. Enfin  tout  le  monde  connaît  le  nom  du  procuni- 
teur  de  Judée,  Pontius  Pilatus  (5). 

On  rencontre  ce  gentilice  dans  les  inscriptions  de  Rome 
et  des  provinces,  Q.  Pontius  Severus,  à  Tarragone  6'; 
P.  Pontius  Blandus,  P.  Pontius  Pontianus,  P.  Pontius  Se- 
cundinus,  dans  une  inscription  de  Hongrie  (7).  On  a  trouve 
nombre  de  fois  en  Gaule  et  en  Grande-Bretagne  la  marque 
du  potier  Pontius. 

De  Pontius  on  a  tiré  ;  1**  un  dérivé  en  -anus  :  Pontianus 
qui  explique  Ponsan  (Gers),  et  qui  est  à  comparer  au  fundus 

(1)  Corssen,  Ueher  Aussprache,  Vohalismus  und  Betonung  der  lateini' 
schen  Sprache,  2*édit.,  1. 1,  p.  116.  Ponto-  est  pour  *pomp''lO''  comme  quin- 
tus  pour  *  quinqU'tus. 

(2)  Tite-Live,  liv.  IX,  ch.  i  et  suivants.  Sur  le  gentilice  Pontius,  voyez 
Pauly,  Real'Encyclopaedie,  t.  V,  p.  1891-1893. 

(3)  Tite-Live,  livre  V,  c.  46. 

(4)  Suétone,  César,  c.  78  ;  édit.  Teubner-Roth,  p.  32,  1.  3-4. 

(5)  Tacite,  Annales,  livre  XV,  c.  44. 

(6)  C.  /.  L.,  II,  4937. 

(7)  Ibid,,  III,  6271. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  2fl7 

Poncianus  d'une  charte  de^  Ravenne  (1) ,  2®  un  dérivé  en 
acus  ;  *  PontiaciÀS,  écrit  Ponciacus  au  moyen  âge.  De  là  pro- 
bablement, outre  le  nom  de  Poncé  (Sarthe),  déjà  cité,  ceux 
de  :  Pontiacq  (Basses-Pyrénées),  Poinchy  (Yonne),  Poincy 
(Seine-et-Marne),  et  Poncey-lez-Athée  (Côte-d'Or).  Poncey- 
lez-Pellerey,  aut?e  commune  du  même  département,  parait 
devoir  s'expliquer  par  un  bas-latin  Podentiacus  (p.  293). 

PoNTiLiACDS  est  le  nom  d'un  palais  d'où  Charles  le 
Chauve  data,  en  873,  un  diplôme  en  faveur  des  églises 
Saint-Mammès  de  Langres ,  et  Saint-Etienne  de  Dijon  (2)  ; 
c'est  aujourd'hui  Pontailler-sur-Saône  (Côte-d'Or).  La 
forme  latine  correspondant  à  ce  nom  de  lieu  gallo-romain 
est  Poniilianus^  nom  d'une  villa  située  dans  le  Roussillon  ; 
on  l'apprend  par  un  diplôme  du  roi  Lothaire,  982  (3). 

Pontiliacus  et  PontUianus  sont  dérivés  de  Pontilius,  gen- 
tihce  romain  dérivé  lui-même  de  Pontius,  Le  plus  ancien 
exemple  de  Pontilius  nous  est  offert  par  une  inscription 
recueillie  en  Espagne,  près  de  Carthagène  (4).  On  le  trouve 
deux  fois  répété  dans  une  inscription  d'Afrique  (5).  Il  appa- 
raît dans  plusieurs  inscriptions  d'Italie  (6). 

PosTHiMiAGus  est  le  nom  d'un  locus  de  situation  inconnue 
donné  à  l'abbaye  de  Limours  (Seine-et-Oise) ,  aux  termes 
de  l'acte  de  sa  fondation  par  Gammon ,  en  697  (7).  Un 
diplôme  de  Charles  le  Gros,  en  faveur  de  l'abbaye  de  Saint- 
Etienne  de  Dijon,  en  885,  nous  donne  le  même  nom  de 
lieu  avec  l'orthographe  un  peu  plus  archaïque  Postu- 
miacus  (8)  ;  il  s'agirait  ici  de  Potangey,  commune  d'Aiserey 


(1)  Fantuzzi,  Monumenti  AavennaCt,  t.  I,  p.  64. 

(2)  Dom  Bouquet,  VIII.  643  d. 

(3)  Dom  Bouquet,  IX,  649  b. 

(4)  C.  /.  L.,  I,  1478  ;  II,  3433. 

(5)  /Wd.,  VIII,  8799. 

(6)  Ibid.,  IX,  5799;  X,  47,  363,  364. 

(7)  Pardessus,  DiplomsiU,  t.  II,  p.  244, 

(8)  Dom  Bouquet,  IX,  336  c. 


298  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

(Côte-d'Or) ,  suivant  M.  Garnier,  le  savant  archiviste  de  ce 
département  (1). 

Posthumiacus  vient  de  Postumius.  h^gens  Postumia  était 
patricienne  (2)  ;  elle  atteignit  de  très  bonne  heure  aux  plus 
hautes  magistratures  de  Rome.  Le  premier  consul  qu'elle 
donna  à  la  république  romaine  fut  P.  Postumius  Tubertus, 
élevé  à  cette  dignité  d'abord  Tan  249  de  Rome  (av.  J.-C. 
505) ,  puis  Tan  252  (503) ,  et  qui  obtint  deux  fois  les  hon- 
neurs du  triomphe  (3).  Quelques  années  plus  tard  (496 
avant  J.-C),  le  dictateur  A.  Postumius  Albus,  fils  du  pré- 
cédent, battait  les  Latins  près  du  lac  Régille  et  triom- 
phait (4).  Nous  nous  bornons  à  ces  deux  exemples.  La 
gens  Postumia  donna  son  nom  à  un  des  plus  anciens  mo- 
numents de  la  législation  de  Rome ,  une  des  lois  somp- 
tuaires  attribuées  à  Numa  (5).  Le  même  nom  fut  aussi 
porté  par  une  des  grandes  routes  de  la  Gaule  Cisalpine,  la 
via  Postumia^  construite,  à  ce  que  Ton  croit,  par  le  consul 
Sp.  Postumius  Albinus,  Tan  148  avant  notre  ère  (6).  Le 
gentilice  Postumius  persista  sous  l'empire  ;  ainsi ,  au 
second  siècle  de  notre  ère ,  Postumius  Festus  fut  célèbre 
par  son  éloquence  (7).  On  trouve  ce  nom  fréquemment  dans 
les  inscriptions  d'Espagne  (8) ,  d'Afrique  (9),  d'Italie  (10), 


(1)  Garnier ,  NomencleLture  historique  des  communes  du  département  de 
te  Côte-d'Or,  p.  19. 

(2)  Sur  la  gens  Postumia,  voyez  Pauly,  Real-Encyclopaedie,  t.  V,  p.  1932- 
1944. 

(3)  Tite-Live,  livre  II,  c.  16.  Pline,  livre  XV,  }  125;  cf.  Acta  triumphorum 
capitolina  dans  le  C.  /.  L.,  t.  I,  p.  454.  Fastes  consulaires,  ibid.,  p.  486487. 

(4)  Tite-Live,  livre  II,  c.  19,  20,  et  Acta  triumphorum  capitolina  dans  le 
C.  /.  L.,  1. 1,  p.  454. 

(5)  Pline,  livre  XIV,  {  88. 

(6)  Voyez  ce  que  dit  de  cette  route  M.  Mommsen  dans  le  C,  /.  L. ,  t.  V , 
p.  827. 

C7)  Aulu-Gelle,  livre  XIX,  c.  13.  Gomp.  le  passage  de  Fronton  cité  par 
Teuffel,  Geschichte  der  rœmischen  Literatur,  3*  édit.,  p.  848. 

(8)  C.  /.  L..  t.  II,  index,  p.  728,  col.  4. 

(9)  Ibid.,  t.  VIII,  index,  p.  1012,  col.  2. 

(10)  ibid.,  t.  V,  index,  p.  1123,  col.  4,  1124,  col.  1  ;  t  IX,  index,  p.  723, 
col.  1  ;  t.  X,  p.  1052,  col.  2,  1065,  col.  4. 


LA  DÉSINENCE  -1-AOUSAU  MOYEN  AGE.  299 

de  Grande-Bretagne  (1),  etc.  (2).  Nous  jfignalerons  en  Gaule 
trois  exemples  :  Tun  est  une  dédicace  à  Diane  par  Q.  Pos- 
tumius  Potens  ;  elle  a  été  trouvée  près  de  Trêves  (3)  ;  le 
second  monument,  qui  existe  encore  dans  la  ville  d'Aven- 
che,  en  Suisse^  est  aussi  une  dédicace  à  des  dieux  ;  ses  au- 
teurs sont  Q.  Postumius  Hyginus  et  Postumius  Hermès  (4)  ; 
enfin  le  musée  de  Toulouse  possède  le  signaculum  de  Pos- 
tumius Faustinus  (5). 

Pbimiagus  est  une  villa  mentionnée  dans  un  diplôme 
de  Louis  le  Débonnaire  en  faveur  d'Albéric,  évéque  de 
Langres,  834  (6)  ;  c'est  aujourd'hui  Prangey  (Haute-Marne). 
Une  autre  villa ,  du  nom  de  Primiacus ,  fut  donnée  en  866 
par  Lothaire,  roi  de  Lorraine,  à  sa  femme  Theodeberge  (7). 

Ce  nom  de  lieu  dérive  de  Primius ,  gentilice  tiré  du  sur- 
nom Primus,  et  qu'une  inscription  découverte  en  Autri- 
che nous  montre  dans  le  nom  de  femme  Primia  Hono- 
rata  (8).  Nous  le  retrouvons  dans  une  inscription  du  musée 
de  Mannheim  qui  débute  par  le  nom  de  femme  Primia 
Accepta  (9)  ;  dans  une  inscription  d'Oppenheim,  en  Hesse, 
qui  nous  fait  connaître  le  nom  de  femme  Primia  Am- 
miUa  (10).  On  a  découvert  à  Meylan  (Isère),  Tépitaphe  de 
L.  Primius  Valerius  gravée  par  ordre  de  son  fils  Primius 
Vassillus  et  de  sa  fille  Primia  Valeria  (il).  On  a  recueilli  à 
Lyon  Tépitaphe  de  M.  Primius  Secundianus,  sévir  augus- 
tal,  gravée  par  les  soins  de  M.  Primius  Augustus,   son 


(1)  C.  /.  L.,  t.  VII,  index,  p.  320,  col.  1. 

(2)  Ibid.,  t.  III,  index,  p.  1082,  col.  2. 

(3)  Brambach,  n*  844. 

(4)  Mommsen,  Inscriptiones  helveticae,  n*  164. 

(5)  C.  /.  L.,  XII,  5690.  106. 

(6)  Dom  Bouquet,  VI,  596  a;  cf.  Sickel,  Acta  Karolinorum ,  t.  II,  p.  183, 
n*322. 

(7)  Dom  Bouquet,  VIII,  412  d. 

(8)  C.  /.  L.,  III,  5606. 

(9)  Brambach,  n*  868. 

(10)  Brambach,  n*  917. 

(11)  AUmer,  InBcriptions  de  Vienne,  t.  III,  p.  176. 


300  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

fils  (1),  et  celle  de,  P.  Primius  Eglectianus ,  aflFranchi  de 
P.  Primius  Cupitus  (2). 

Le  nom  Premiacus ,  d'une  localité  située  dans  le  pagiu 
Aurelianensis  suivant  un  diplôme  de  Tannée  689  (3),  parait 
être  une  variante  orthographique  de  Primiacus.  C*est  par  un 
primitif  Primiacus  que  semble  devoir  s'expliquer  le  nom  des 
trois  communes  de  Pringy  situées  dans  les  départements 
de  la  Marne ,  de  la  Haute-Savoie  et  de  Seine-et-Marne. 

Prisciacus  est  une  villa  d'Auvergne  donnée  à  Téglise 
Saint-Etienne  de  Châlons-sur-Marne ,  en  565 ,  par  Elafius, 
évoque  de  la  môme  ville  (4).  Un  autre  Prisciacus^  dans 
le  pays  de  Chambly  (Oise) ,  apparaît  dans  un  diplôme  de 
l'année  689  (5).  Une  villa  Prisciacus  qui  forme  aujourd'hui 
deux  communes,  Précy-Notre-Dame  et  Précy-Saint-Martin 
(Aube) ,  appartenait  au  neuvième  siècle  à  l'abbaye  de  Mon- 
tier-en-Der,  comme  on  le  voit  par  deux  diplômes  de 
Charles-le-Chauve  donnés  l'un  en  845 ,  l'autre  en  854  (6;. 
Une  villa  Prisciacus^  située  dans  le  Poitou,  fut  donnée 
pour  partie  à  l'abbaye  de  Noirmoutier  par  Charles  le  Chauve 
en  854  (7).  Une  villa  Prisciacus  y  dans  l'Autunois,  apparaît 
dans  une  charte  de  Cluny  au  commencement  du  dixième 
siècle  (8).  Plusieurs  chartes  de  la  même  abbaye  mention- 
nent au  même  siècle  une  villa  Prisciacus  et  un  ager  Priscia- 
censis  situés  dans  le  [Maçonnais ,  c'est  Prisse  (Saône-et- 
Loire)  (9). 


(1)  Boissieu,  p.  203,  204. 

(2)  Boissieu,  p.  494.  Voir  d'autres  exemples  dans  le  t.  XII  xlu  C.  I,  L. 

(3)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  637;  cf.  Pardessus,  DtploTiuta,  t.  II, 
p..  209. 

(4)  Pardessus,  Dtpfomata,  t.  II,  p.  423. 

(5) Tardif,  Monuments  historiques,  p.  637,  col.  2.  Pardessus,  Dipforrute, 
t.  II,  p.  210. 
■(6)  Dom  Bouquet,  VIII,  477  a,  529  e. 

(7)  Dom  Bouquet,  VII,  344  a  ;  VIII.  529  a. 

(8)  Bruel,  Recueil  des  chartes  de  l'abbaye  de  Cluny,  t.  I,  p.  164. 

(9)  Bruel,  Recueil,  t.  I,  p.  133,  243,  296,  298,  402,  408,  513,  664;  cf.  Ang. 
Bernard,  Cartulaire  de  Savigny,  t.  II,  p.  1092,  col.  1  ;  1095,  col.  2. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACU8  AU  MOYEN  AGE.  301 

Priscioums  est  dérivé  du  gentilice  Priscius,  venant  lui- 
même  de  Priscus ,  usité  d'abord  comme  surnom  :  P.  Ser- 
vilius  Priscus  fut  consul  Tan  495  avant  J.-C.  (1).  T.  Numi- 
cius  Priscus  remplit  la  même  fonction  en  469  (2).  Priscius 
est  beaucoup  plus  récent ,  et  nous  n'en  avons  pas  constaté 
Texistence  avant  l'établissement  de  l'empire.  On  conserve 
près  de  Klagenfurt,  en  Styrie,  l'épitaphe  de  C.  Priscius 
Surio  (3).  On  a  recueilli  près  de  Leibnitz,  dans  la  même 
province,  l'épitaphe  de  Priscia  Albina  (4).  Priscia  Restituta 
est  le  nom  d'une  propriétaire  mentionnée  dans  la  table 
alimentaire  des  Ligures  Baebiani  (5). 

Prisciacus  paraît  être  la  forme  ancienne  du  nom  :  1**  de 
huit  communes  appelées  aujourd'hui  Précy ,  savoir  :  deux 
dans  l'Aube ,  deux  dans  l'Yonne ,  et  une  dans  chacun  des 
quatre  départements  du  Cher,  de  la  Côte-d'Or,  de  l'Oise  et 
de  Seine-et-Marne  ;  2*  des  deux  communes  de  Pressy  (Pas- 
de-Calais  ,  Saône-et-Loire)  ;  enfin  des  communes  de  Pré- 
cey  (Manche)  ;  Pressac  (Vienne)  ;  Prétieux  et  Preyssac  (Dor- 
dogne)  ;  total ,  quatorze  communes ,  dont  le  nom  actuel 
tient  lieu  d'un  primitif  Prisciacus, 

De  *  Prisciniacus  dérive  V Biàjectif  prisciniaeensis,  employé 
avec  le  substantif  vicus ,  par  Grégoire  de  Tours ,  pour  dé- 
signer un  bourg  de  son  diocèse  dans  l'église  duquel  il  mit 
des  reliques  de  saint  Nizier,  évêque  de  Lyon,  mort 
en  573  (6)  ;  il  s'agit,  soit  du  Grand-Pressigny,  soit  du  Petit - 
Pressigny  (Indre-et-Loire)  (7).  Un  second  Prisciniacus,  au- 
jourd'hui Pressagny l'Orgueilleux  (Eure),  était  situé  dans 


(1)  Denys  d'Halicamasse,  Uvre  VI,  c.  23.  C.  /.  L.,  t.  I,  p.  487. 
^)  Tite-Liive,  livre  II,  c.  63.  Denys  d'Halicamasse ,  livre  IX,  c.  56;  cf. 
C.  /.  t.,  t,  I,  p.  491. 

(3)  C.  /.  L.,  III,  4951. 

(4)  Ibid.,  III,  5362. 

(5)  C.  /.  L.,  IX,  1455. 

(6)  Viiae  patrum^  c.  VIII,  |  11.  Bordier,  Les  livres  des  mtraoleâ,  t.  III, 
p.  ^.  Bdit.  Arndt  et  Kruscb,  t.  II,  p.  700,  1.  15. 

(7)  Longnon,  Géographie  de  la  GaxO.e  au  sixième  siècle^  p.  285,  286. 


302  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

le  Vexin,  et,  dès  le  septième  siècle,  appartenait  pour  moitié 
à  Tabbaye  de  Saint-Denis,  comme  Tatteste  une  charte 
donnée  en  682  ou  683  (1).  Un  troisième  Prisciniacus  dépen- 
dait de  l'abbaye  de  Saint-Martin  de  Tours  ;  c'est  aujour- 
d'hui Précigné  (Sarthe)  (2)  ;  il  en  est  question  pour  la  pre- 
mière fois  dans  un  diplôme  donné  par  Charlemagne, 
en  775  (3)  ;  nous  le  retrouvons  mentionné  dans  des  diplô- 
'mes  de  Charles  le  Simple,  en  903  (4),  en  904  (5),  et 
en  919  (6),  et  dans  un  diplôme  du  roi  Raoul,  en  931  (7. 
Un  quatrième  Prisciniacus  dépendait  de  Tabbaye  de  Saint- 
Ouen  de  Rouen,  comme  nous  le  voyons  dans  un  diplôme 
donné  par  Charles  le  Chauve  en  876  (8).  Un  cinquième 
Prisciniacus  appartenait  à  l'église  d'Orléans ,  ainsi  qu'il  ré- 
sulte d'un  diplôme  du  roi  Louis  V,  daté  de  979  (9).  Un 
sixième  Prisciniacus  était  situé  en  Lyonnais  (10). 

Ce  nom  de  lieu  dérive  du  gentilice  Priscinius  qui  nous 
est  connu  par  une  inscription  de  Neuss  où  l'on  trouve 
mentionné  le  vétéran  Priscinius  Florus  (1 1).  Priscinius  vient 
lui-même  du  surnom  Priscinus  qui  est  plus  fréquent  (12). 

Les  communes  dont  le  nom  moderne  parait  tenir  lieu 
d'un  primitif  Prisciniacus  sont  au  nombre  de  neuf,  savoir  : 
Précigné  (Sarthe),  et  Pressagny  (Eure),  déjà  cités;  deux 
Pressignac  (Charente  et  Dordogne),  et  cinq  Pressigny,  sur 
lesquels  deux  dans  l'Indre-et-Loire,  dont  il  a  été  déjà  ques- 


(1)  Tardif,  Monuments  historiques  ^  p.  19,  col.  2.  Marquis  de  Blosseville , 
Dictionnaire  topographique  du  département  de  l'Eure,  p.  175. 

(2)  MabiUe,  La  pancarte  noire  de  Saint-Martin  de  Tours,  p.  231. 

(3)  Dom  Bouquet,  V ,  737  c;  cf.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II ,  p.  27, 
n*  42;  cf.  MabiUe,  La  pancarte  noire  de  Saint-Martin  de  Tours^  p.  67, 106- 
107. 

(4)  Dom  Bouquet,  IX,  497  b, 

(5)  Dom  Bouquet,  IX,  511  c.  Mabille,  La  pancarte  notre,  p.  88,  n*  XLV. 

(6)  Dom  Bouquet,  IX,  543  b  ;  cf.  MabiUe,  ibtd.,  p.  58,  n*  VII. 

(7)  Dom  Bouquet,  IX,  574  e;  cf.  MabiUe,  ibid.y  p.  57,  n*  VI. 

(8)  Dom  Bouquet,  VIII,  650  e. 

(9)  Dom  Bouquet,  IX,  660  d. 

(10)  Aug.  Bernard,  Cart.  de  Savigny,  t.  II,  p.  1083. 

(11)  Brambach,  n*  265. 

(12)  C.  /.  L.,  VIII,  9476;  IX,  338,  3,  36;  2152,  2153,  3180. 


LA  DâSINENGE  -I-ACUB  AU  MOYEN  AGE.  303 

lion,  et  les  trois  autres  dans  les  départements  du  Loiret  » 
de  la  Haute-Marne  et  des  Deux-Sèvres. 

RoMANiAGus,  chez  Orégoire  de  Tours,  est  un  adjectif  qui 
sert  d'épithète  au  substantif  campus  et  qui  désigne  un  en- 
droit où,  en  Tannée  560,  deux  armées  de  sauterelles  se 
livrèrent  bataille,  dit-on,  non  sans  éprouver  de  part  et 
d'autre  de  grandes  avaries  (1)  ;  c*est  aujourd'hui  Romagnat 
(Puy-de-Dôme)  (2). 

La  variante  Rominiacus,  avec  i  pour  a  dans  la  seconde 
syllabe,  nous  est  fournie  par  un  diplôme  de  Charles  le 
Chauve  pour  l'abbaye  de  Saint-Médard  de  Soissons  (3)  ; 
il  s'agit  de  Romeny  (Aisne) ,  au  seizième  siècle  Romigni , 
Roumigny  (4).  La  forme  romaine  de  ce  nom  est  écrite 
Romagnanus  pour  *  Romanianu^j  en  899,  dans  un  diplôme 
de  Charles  le  Simple,  où  elle  désigne  une  villa  située  dans 
le  comté  de  Besalu,  en  Catalogne  (5). 

*  Romanianus  et  Romaniacus  dérivent  de  Romanius,  gen- 
tilice  dérivé  lui-même  du  cognomen  Romanus,  et  qui  exis- 
tait déjà  au  commencement  de  l'empire ,  comme  l'atteste 
le  nom  de  Romanius  Hispo ,  délateur  et  rhéteur  souvent 
cité  par  Sénèque  le  rhéteur,  et  dont  la  première  mention 
datée  remonte  à  l'an  14  de  notre  ère  (6).  D'autres  Romanius 
nous  sont  connus  par  les  inscriptions,  par  exemple  L.  Ro- 
manius Justus,  dans  une  inscription  de  Patras  en  Grèce  (7)  ; 
M.  Romanius  Encolpus,  dans  une  inscription  d'Hermanns- 
tadt,  en  Hongrie  (8)  ;  Q.  Romanius  Verecundus,  dans  une 
inscription   de  Oebensdorf  en  Suisse  (9);  Q.  Romanius 


(1)  BistoriM  Pnncorum,  1.  IV,  c.  20;  édition  Amdt,  p.  157,  1.  12. 

(2)  Longnon,  Géographie  de  ta  Gaula  au  êixième  tiède,  p.  510. 

(3)  Tardif,  Monuments  hUtoriqueêf  p.  136. 

,  (4)  Matton,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  l'Aisne,  p.  235. 

(5)  Dom  Bouquet,  t.  IX,  p.  484  b. 

(6)  Tacite,  Annales,  livre  I,  c.  74.  Voir  l'édition  de  Bénéque  le  Rhéteur 
donnée  chez  Teubner  par  KiessUng,  p.  551  (Jlndex), 

(7)  C.  /.  L.,  m,  505. 

(8)  C.  J.  L.,  III,  1613. 

(9)  Uommsen,  Inscriptiones  helveticae,  jy  254. 


304  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

Probus,  dans  une  inscription  du  musée  de  Mannheim  {[): 
C.  Romanius  Capito,  dans  une  inscription  du  musée  de 
Mayence  (2)  ;  T.  Romanius  Epictetus  (3)  et  Romanius  Sol- 
lemnis  (4),  dans  des  inscriptions  de  Lyon.  On  a  trouvé  à 
Saint-Aubin-suT-Gaillon  (Eure),  le  cachet  de  l'oculiste  Sex. 
Romanius  Symforus  (5)  ;  à  Arles  l'épitaphe  de  Romanius 
Adrastus  (6),  etc. 

A  Romaniacus  remontent  les  huit  noms  de  communes 
suivants  :  Romagnat  (Puy-de-Dôme)  ;  Romagné  (lUe-et-Vi- 
laine)  ;  Romagnieu  (Isère)  ;  Romagny  (Manche  et  territoire  de 
Béfort)  ;  Rômigny  (Marne)  ;  Rumigy  (Ardennes  et  Sommet. 

RoMiLiACus  est  une  villa  où ,  en  629 ,  le  roi  Dagobert  I" 
répudia  Gomatrude,  sa  femme,  et  la  remplaça  par  Nan- 
thilde  (7)  ;  Jacobs  a  pensé  que  c'est  Reuilly ,  aujourd'hui 
compris  dans  Paris.  On  doit  probablement  reconnaître  le 
môme  nom ,  malgré  la  différence  d'orthographe ,  dans  un 
locus  Rumliacus  sis  au  pays  de  Thérouanne  et  acheté  par 
Tabbaye  de  Saint-Bertin,  eti  704  (8).  On  lit  Rumeliacus  dans 
un  diplôme  de  Charles  le  Chauve  en  842  (9) ,  Rumiliacus 
dans  un  diplôme  de  Louis  de  Germanie  en  875  (10),  tous 
deux  en  faveur  de  l'abbaye  de  Saint-Arnould ,  de  Metz ,  et 
dans  ces  deux  documents  il  s'agît  de  Remilly  (Moselle", 
aujourd'hui  Alsace-Lorraine  (il). 


(1)  Brambach,  n*  600. 

(2)  Brambach,  n*  1229. 

(3)  Boissieu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon^  p.  189. 

(4)  Boissieu,  ibid,,  p.  477. 

(5)  Héron  de  Xillefosse  et  Thédenat,  Cachets  d'oculistes  romsinSy  1. 1, 
pp.  193-198. 

(6)  C.  /.  L.f  XII,  871.  Voir  neuf  autres  exemples  dans  le  même  tome. 

(7)  Frédégaire,  c.  58,  chez  Dom  Bouquet,  t.  II,  p.  436  b  ;  édition  Kruscb, 
Scriptorum  rerum  merovingicarum ,  t.  Il;  p.  150  1.  8;  Gesta  D&gobeHit 
I,  c.  22,  t6td.,  p.  585  c  ;  édition  Knisch,  ibid.,  p.  408, 1.  10. 

(8)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  265. 

(9)  Dom  Bouquet,  VIII,  430  b. 

(10)  Dom  Bouquet,  VIII,  424  c. 

(11)  De  Bouteiller,  Dictionnaire  topographique  de  l'ancien  département 
de  la  Moselle,  p.  213. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACU8  AU  MOYEN  AGE.  305 

RomiliaeuSj  Rumiliaciis,  Rumeliacus^  Rumliacus,  dérivent 
de  Romilius  ou  Romulius ,  un  des  plus  anciens  ^entilices 
romains  qui  donna  son  nom  à  une  tribu ,  du  nombre  des 
rustiques  ;  le  territoire  de  cette  tribu  était  au  nord  du  Tibre. 
A  cette  gens  appartenait  T.  Romilius  ou  Romulius,  consul 
Van  455  avant  notre  ère,  décemvir  en  451  (1).  Ce  nom  se 
rencontre  rarement  depuis.  Cependant  Tacite  parle  d'un 
centurion  appelé  Romilius  Marcellus  qui ,  en  70 ,  lors  de 
rinsurrection  par  laquelle  Galba  fut  renversé ,  défendit  en 
vain  les  images  de  ce  prince  contre  les  soldats  révoltés  (2). 
On  a  trouvé  en  Hongrie  une  dédicace  à  Jupiter  par  L.  Ro- 
mulius Quintus  (3).  Une  inscription  recueillie  aux  environs 
de  Milan  nous  fait  connaître  les  noms  de  C.  Romilius 
Calla  (4). 

Romilitu^us  ou  *  Romuliacus  est  la  forme  primitive  des 
dix-sept  noms  de  communes  qui  suivent  :  Romillé  (lUe-et- 
Vilaine)  ;  cinq  Romilly ,  sur  lesquels  deux  dans  l'Eure  et 
un  dans  chacun  des  trois  départements  de  TAube,  d'Eure- 
et-Loir  et  de  Loir-et-Cher  ;  quatre  Rumilly  (Aube ,  Nord  , 
Pas-de-Calais,  Haute-Savoie);  sept  Remilly,  sur  lesquels 
deux  dans  les  Ardennes,  autant  dans  la  Côte-d'Or,  et  un 
dans  chacun  des  trois  départements  de  la  Manche,  de  la 
Nièvre  et  du  Pas-de-Calais. 

RuFiAGus  ou  Ruffiacus  est  une  villa  où  étaient  situés  des 
biens  qui  furent  donnés  en  715  à  Tabbaye  de  Saint-Béni- 
gne, de  Dijon  (5);  c*est  aujourd'hui  Rufifey-lès-Echi- 
rey  (Côte-d'Or)  (6).  Une  monnaie  mérovingienne  a  été  frap- 

(1)  Voyez  les  textes  cités  par  Mommseii,  C.  I.  L.,  t.  I,  p.  492, 493.  Of.  Pauly, 
Re^l'Encyclopaedie,  t.  VI,  p.  545. 

(2)  Tacite,  Histoires,  1.  I,  c.  56. 

(3)  C.  7.  L.,  m,  1352. 

(4)  /6id.,  V,  6026. 

(5)  Pardessus ,  Diplomata ,  t.  II,  p.  300.  Voir  aussi  sur  la  même  localité  la 
Chronique  de  saint  Bénigne^  chez  Dom  Bouquet,  VII,  380  d  ;  elle  nous  offre 
l'analyse  d'un  diplôme  de  Charles  le  Chauve  dont  on  trouve  le  texte  chez 
Dom  Bouquet,  VIII,  618. 

(6)  Gamier,  Nomenclature  historique  des  communes  du  département  de 
là  Côte-d'Or,  p.  8. 

20 


306  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

pée  à  Rufiacu,  que  Ton  croit  être  Roufiac  (Cantal)  (1).  Une 
église  de  Ruflac  apparaît  en  860  ou  866  dans  le  Cartulaire 
de  Redon  (2)  ;  la  paroisse  de  Ruflac,  plebs  Rufiac^  est  men- 
tionnée dans  une  autre  charte  du  même  Cartulaire  en  867; 
cette  paroisse  est  aujourd'hui  la  commune  de  RuflBac  (Mor- 
bihan) (3).  La  même  année ,  Charles  le  Chauve  donne  un 
diplôme  dans  une  villa  Rufiacus  dont  on  ignore  la  situa- 
tion (4).  Rufiacus  a  une  variante  Rofiacus]  un  fundus  Rofia' 
eus  apparaît  en  575  dans  le  testament  du  fondateur  de  Tab- 
baye  de  Saint-Yrieix  (Haute-Vienne)  (5).  Il  est  question 
d'une  villa  Rofiacus  en  891,  dans  une  charte  de  l'abbaye  de 
Cluny;  cette  villa  était  située  dans  le  Maçonnais  (6). 

Le  gentilice  Rufius  est  rare  sous  la  république.  Cepen- 
dant une  inscription  qui  le  mentionne  et  qui  a  été  trouvée 
prés  de  Pérouse  paraît  antérieure  à  la  période  impériale  (7). 
Sous  Claude ,  le  chevalier  Rufius  Crispinus  fut  préfet  du 
prétoire  (8)  ;  élevé  à  la  préture  par  cet  empereur  (9) ,  il  de- 
vint sous  Néron  le  mari  de  la  trop  célèbre  Poppée  (10).  Ce 
gentilice  est  très  fréquent  dans  les  inscriptions.  On  le 
trouve  notamment  en  Gaule  :  à  Genève,  une  inscription 
nous  a  conservé  les  noms  de  Rufla  Aquilina  (11)  ;  à  Chazey 
(Ain),  on  voit  encore  Tépitaphe  de  M.  Rufius  Cassiolus  (12;; 
à  Murs  (Ain),  celle  de  Rufius  CatuUus  (13);  à  Uriage,  celle 


(1)  Deloche,  cité  par  A.  de  BarUiélemy  dans  la  Bibliothèque  de  VEcole 
des  chartes,  t.  XXVI,  p.  460. 

(2)  A.  de  Gourson,  CArtuUire  de  l'abbaye  de  Redon^  p.  106. 

(3)  A.  de  Courson,  ibid.,  p.  106,  747. 

(4)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  129,  col.  2  ;  cf.  Dom  Bouquet,  VHI, 
602  c ,  603  a.  M.  Matton ,  Dictionnaire  topographique  du  département  de 
l'Aisne,  p.  238,  émet  l'hypothèse  que  ce  serait  Rouy ,  commune  d'Amignj 
(Aisne). 

(5)  Pardessus,  Dtptomata,  1. 1,  p.  138. 

(6)  Bruel,  Recueil  des  chartes  de  l'abbaye  de  Cluny ^  t.  I,  p.  51,  52« 

(7)  C.  /.  L.,  t.  I,  n*  1394. 

(8)  Tacite,  Annales,  liv.  XI,  c.  1. 

(9)  Tacite,  ibid.,  liv.  XI,  c.  4, 

(10)  Tacite,  ibid,,  liv.  XIII,  c.  45. 

(11)  Mommsen,  Inscriptiones  helveticae,  n*  76. 

(12)  AUmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  III,  p.  417. 

(13)  AUmer,  ibid.,  t.  III,  p.  435. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  307 

(le  M.  Rufius  Marcianus  (1).  L7  est  quelquefois  doublé  ; 
deux  exemples  de  cette  orthographe  nous  sont  fournis  par 
Tépitaphe  du  gladiateur  RufiBus  RufiBanus  (2).  Le  double  f 
se  rencontre  aussi  dans  une  marque  du  potier  Ruffi 
m[anu]  (3). 

De  Rafiacus  ou  Ruffiacus  viennent  les  dix-neuf  noms  de 
communes  suivants  :  Rofifey  (Yonne)  ;  Roffiac  (Cantal)  ;  sept 
RoufiBac ,  sur  lesquels  deux  dans  l'Aude  et  cinq  dans  cha- 
cun des  cinq  départements  du  Cantal ,  de  la  Charente ,  de 
Charente-Inférieure ,  de  Haute-Garonne  et  du  Lot  ;  Rouffy 
(Marne)  ;  deux  Ruflfec  (Charente,  Indre)  ;  trois  Ruffey ,  sur 
lesquels  deux  dans  la  Côte-d'Or,  un  dans  le  Jura;  deux 
Ruffiac  (Lot-et-Garonne ,  Morbihan)  ;  Ruffleu  (Ain)  ;  Ruf- 
fieux  (Savoie).  L'ou  de  RoufiBac  et  de  Rouflfy  s'explique  par 
le  redoublement  de  Vf  qui  compensait  l'abrègement  de  Vu 
primitivement  long  du  latin  Rufus,  Rufius.  Nous  avons  cité 
plus  haut ,  d'après  des  textes  qui  remontent  à  l'époque  ro- 
maine ,  trois  exemples  de  ce  redoublement  de  Vf,  dans  le 
nom  RuflBus  et  dans  son  dérivé  RufiBanus.  Quant  à  l'ortho- 
graphe française,  RufiFec,  Rufifey,  RufiBac,  RufiBeu  et  Ruf- 
fieux  par  double  /",  elle  est  défectueuse ,  Vu  de  ces  mots 
suppose  en  latin  un  u  long  suivi  d'un  f  simple ,  Rufiacus 
dérivé  de  Rufius,  ce  qui  est  la  bonne  orthographe  latine. 

RuLLiACus  est  un  agellus  situé  dans  le  territoire  de 
Troyes  et  mentionné  en  635  dans  une  charte  de  Palladius, 
évêque  d'Auxerre  (4)  ;  on  suppose  que  c'est  Rouilly-Saint- 
Loup  (Aube)  (5).  Un  autre  Rulliacus  apparaît  en  877  dans 
un  diplôme  de  Charles  le  Chauve  pour  l'abbaye  de  Mar- 
chiennes  (6).  L'orthographe  Ruilliacum  nous  est  ofiferte  par 

(1)  C.  /.  L,,  XII,  2251  a.  Voir  d'autres  Rufius  dans  le  même  tome. 
{2)AUmer,  ibid,,  t.  III,  p.  397. 

(3)  Boissieu,  Inscriptions  de  Lyon^  p.  435,  n*  119. 

(4)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  37. 

(5)  Boutiot  et  Boc&vd^  Dictionnaire  topographique  du  département  de 
i'Auhe,  p.  138. 

(6)  Dom  Bouquet,  VIII,  667  c. 


I 
308  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

un  diplôme  faux ,  attribué  au  roi  Dagobert  !•'  (1).  On  lit 
Ruiliacus  dans  un  diplôme  de  Louis  le  Débonnaire  pour 
Téglise  du  Mans,  en  832  (2).  La  variante  Roliacus  nous 
est  donnée  deux  fois  dans  la  vie  de  Charlemagne  par  le 
moine  d'Angoulême ,  qui  appartenait  à  l'abbaye  de  Saint- 
Cybard-lès-Angouléme  :  dans  un  passage  où  est  résumé  un 
diplôme  de  Charlemagne  en  faveur  de  cette  abbaye ,  il  est 
question  de  deux  localités,  appelées  Tune  Roliacus  (3),  l'au- 
tre Roliacus  minor  (4)  ;  elles  reparaissent  dans  un  diplôme 
de  Charles  le  Chauve  en  852  et  y  sont  appelées  lune  Ro- 
liacus super  Noiram ,  et  l'autre  Ruliacus  Minor  (5). 

On  voit  que  ce  nom  de  lieu  a  été  écrit  tantôt  avec  dou- 
ble  l  et  probablement  u  bref,  tantôt  avec  /  simple  et  pro- 
bablement u  long.  L'orthographe  étymologique  est  avec 
double  /  :  le  gentilice  Rullius,  d'où  le  nom  de  lieu  dérive, 
est  lui-même  un  dérivé  de  l'adjectif  rullus^  rural,  rustique, 
employé  quelquefois  comme  surnom  (6).  Le  plus  ancien  exem- 
ple du  gentilice  Rullius  nous  est  offert  par  une  inscription 
du  temps  de  la  république ,  qui  a  été  découverte  à  Aquino, 
en  Italie  ;  on  y  lit  le  nom  de  M.  Rullius  M.  fllius  (7).  Nous 
trouvons  ensuite  :  C.  Rullius  Communis,  à  Capoue  (8);  Rul- 
lius Celer,  à  Formies  (9);  RuUia  Galla,  à  Aquilée  (10): 
Cn.  Rullius  Calais,  à  Isernia  (11);  P.  Rullius  Faustus,  en 
Afrique  (12). 

Rullius,  avec  double  /  a  donné  le  dérivé  Ruiliacus 
d'où,  en  France,  Roilly  (Côte-d*Or),  Rouillac  (Charente  et 

(1)  Pertz,  Diplom&tum  imperii  tomus  primus^  p.  163,  1.  20. 

(2)  Dom  Bouquet,  VI,  586  a  ;  cf.  Sickel ,  Acta.  Karolinorum ,  t  II,  p.  179, 
n-  308. 

(3)  Dom  Bouquet,  V,  184  é. 

(4)  Ihid.,  V,  185  a. 

(5)  Ibid.,  VIII,  521  a. 

(6)  Pauly,  Real-Encyclopaedie^  t.  VI,  p.  564. 

(7)  C.  /.  L.,  I,  1181. 

(8)  Ibid.,  X,  4319. 

(9)  Ibid.,  X,  6097. 

(10)  Ibid.,  V,  1170. 
(U)  Ibid.,  IX.  2682. 
(12)  Ibid.,  Vin,  1635. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  309 

Côtes-du-Nord),  Rouillé  (Vienne),  deux  Rouilly  (Aube),  uu 
troisième,  Seine-et-Marne.  De  la  variante  Rulius  par  u 
long  et  simple  /  est  venu  Ruliacus  également  par  u  long  et 
simple  /,  en  français  de  l'ouest,  Ruillé,  nom  de  quatre 
communes,  deux  dans  la  Sarthe  et  autant  dans  la  Mayenne  ; 
ailleurs  RuUy ,  nom  de  trois  communes  :  Calvados,  Oise , 
3aône-et-Loire.  Ainsi  le  nombre  des  communes  qui  tirent 
leur  origine  du  gentilice  Rullitis ,  RuUils  ,  est  de  quatorze. 

Sabiacus  est  une  villa  qui ,  dès  Tannée  769 ,  appartenait 
à  l'abbaye  de  Saint-Aubin  d'Angers,  comme  l'atteste,  à 
cette  date,  un  diplôme  de  Charlemagne  (1).  Ce  nom  de 
lieu  a  probablement  la  même  origine  que  celui  de  Savia- 
eus  porté  par  une  localité  des  environs  de  Lyon;  là  étaient 
situées  deux  manses  qu'en  878  Louis  le  Bègue  donna  à 
l'église  de  Mâcon  (2). 

Ces  noms  de  lieux  supposent  un  gentilice  Sapins ,  en 
basse  latinité  Sabius  ou  Savius.  Sapins,  adjectif  signifiant 
sage,  se  rencontre  dans  le  composé  nesapius  «  dépourvu 
de  sagesse  ou  de  science  »  et  a  été  employé  comme 
gentilice,  exemple  :  M.  Sapins  Maximus  dans  une  inscrip- 
tion de  Turin  (3).  La  variante  par  6  :=  p  est  constatée  par 
le  nom  de  femme  Sabia  Optata  porté  par  une  affranchie 
de  Sabius  Plaetor  dans  une  inscription  d'Aquilée  (4). 

De  Sapius ,  Sabius  ou  Savius  est  venu  Sapiacus ,  Sabia- 
eus  ou  Saviacus.  De  Sabiacus  ou  Saviacus  sont  venus  pro- 
bablement en  français  :  Savy,  nom  de  deux  communes, 
l'une  dans  l'Aisne,  l'autre  dans  le  Pas-de-Calais,  et  Sagy, 
aussi  nom  de  deux  communes,  Saône-et-Loire  et  Seine-et 
Oise.  Quant  à  Sapiacus,  c'est  de  cette  forme  que  paraissent 
venir  Sache  (Indre-et-Loire)  et  Sachy  (Ardennes). 

Sacugus  est  le  nom   d'une   villa  dont  Vigile,  évoque 

(1)  Sickel,  Acia  Karolinorum,  p.  17,  n»  4.  Dom  Bouquet,  V,  717  b. 
P)  Dom  Bouquet,  IX,  411  e. 

(3)  C.  /.  L.,  V,  7192. 

(4)  Ibid.,  V,  1359. 


310  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

d'Auxerre ,  dispose  par  une  charte  de  rannée  670  (1).  C'est 
aujourd'hui  Sacy  (Yonne).  Saciacus,  variante  archaïque  de 
ce  nom  désigne  un  locus  du  Beauvaisis  dans  une  charte  de 
Pépin  le  Bref,  en  faveur  de  Tabbaye  de  Saint-Denis,  en 
751  (2).  Dans  un  diplôme  de  Charles  le  Chauve  pour  l'ab- 
baye de  Compiègne,  en  877,  apparaît  une  villa  Sacciacm, 
également  située  en  Beauvaisis ,  qui  est  probablement  dif- 
férente (3).  En  892,  un  diplôme  de  Louis,  roi  de  ProveDce. 
nous  montre  Téglise  de  Lyon  en  possession  d'une  Sacia- 
clis  villa,  près  de  Valence  (4).  En  912,  une  charte  de  l'ab- 
baye de  Cluny  mentionne  une  villa  Saciagus  dans  le  Ma- 
çonnais (5).  En  926,  une  Saciacus  villa  appartenait  à  l'église 
Saint-Bénigne,  de  Dijon,  comme  nous  l'apprend  une  charte 
du  roi  Raoul  (6). 

De  ce  nom  de  lieu ,  l'orthographe  la  plus  ancienne,  bien 
que  nous  n'en  ayons  rencontré  qu'un  exemple,  parait  être 
Sacciacus,  dérivé  du  gentilice  Saccius  conservé  par  Tinscrip- 
tion  d'Igel ,  près  Trêves ,  où  se  lisent  les  noms  de  L.  îSac- 
cius  Modestus  (7).  Saccius  a  donné  le  dérivé  Sacciarius 
employé  comme  cognomen  dans  une  inscription  de  Ley- 
bach  (8).  Il  est  dérivé  de  Saccus,  autre  cognomen  porté  par 
un  chrétien  d'Afrique  qui  fut  martyrisé  et  dont  le  culte  est 
célébré  le  27  mai.  Le  cognomen  Saccus  est  probablement 
identique  au  nom  commun  signifiant  «  sac  ».  De  Saccus 
vient  le  dérivé  Sacco,  employé  à  titre  de  cognomen  dans  une 
inscription  de  Terracine  (9),  d'où  le  gentilice  Sacconius  dans 
deux  inscriptions,  l'une  de  Naples  (10),  l'autre  de  Lyon  (11). 


(1)  Pardessus,  t.  II,  p.  454. 

(2)  Pertz,  Diplomaitum  imperii  tomus  primuSy  p.  109,  I.  9. 

(3)  Dom  Bouquet,  VIII,  660  c. 

(4)  Ibid.,  IX,  674  c. 

(5)  £ruel,  Recueil  des  chartes  de  l'abbaye  de  Cluny,  p.  175. 

(6)  Dom  Bouquet,  IX,  570  c. 

(7)  Brambach,  n»  830. 

(8)  C.  /.  L.,  III,  3874. 

(9)  Ibid.,  X,  6394. 

(10)  Ibid.,  X,  2198. 

(11)  Boissieu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon,  p.  241. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  311 

De  Sacdacus  viennent  les  noms  de  Sacé  (Mayenne) ,  de 
Sacey  (Manche),  et  de  quatre  communes  de  Sacy,  deux 
dans  roise,  les  deux  autres  dans  la  Marne  et  TYonne. 

Salviacus,  où  Tabbaye  de  Saint-Denis  posséda  une  église 
dédiée  à  saint  Martial  et  que  mentionnent  deux  diplômes 
faux,  Tun  de  Dagobert  I"  (1),  Tautre  de  Clovis  II  (2),  est 
aujourd'hui  Saujat,  commune  de  Montluçon  (Allier)  (3). 

Le  gentilice  Salvius,  d'où  Salviacus,  remonte  à  la  pé- 
riode  de  la  république,  comme  le  prouve  Tépitaphe  de  C. 
Salvius  Cassiae  gn[atus]  (4)  et  Tinscription  de  Pescina  qui 
nous  a  conservé  les  noms  de  A.  Salvius  Cledus  (5).  Ce 
gentilice,  d  abord  obscur,  fut  rendu  célèbre  par  l'empereur 
Othon ,  dont  le  régne  éphémère  appartient ,  comme  on  le 
sait,  à  l'an  70  de  notre  ère  :  ce  prince  s'appelait  M.  Salvius 
Otho;  son  père,  L.  Salvius  Otho  Titianus,  avait  été  con- 
sul en  52 ,  et  son  grand-père  avait  été  préteur  (6).  Un  cer- 
tain Salvius  fut  chargé  du  gouvernement  de  l'Aquitaine 
avec  titre  de  légat  sous  l'empereur  Hadrien  (117-138);  nous 
avons  encore  l'analyse  d'un  rescrit  que  lui  adressa  cet 
empereur  (7)  ;  on  pense  que  ce  Salvius  est  identique  au  cé- 
lèbre jurisconsulte  Salvius  Julianus  (8).  Le  gentilice  Sal- 
m\të  n'est  pas  rare  dans  les  inscriptions  du  temps  de  l'em- 
pire (9).  Ce  gentilice  pénétra  en  Gaule,  comme  l'atteste 

(1)  Pertz,  Diplojn&tum  imperii  tomus  primus^  p.  159, 1.  36. 
P)  Pertz,  ibid.,  p.  180,  1.  45. 

(3)  Longnon,  Examen  géographique  du  tome  premier  des  diplomata  im- 
perii^ p.  33. 

(4)  C.  /.  L.,  I,  1383. 

(5)  /Md.,  I,  1541  a.  Pour  plus  do  détails,  voir  Tarticle  Salvii  chez  Pauly, 
Real'Encyclopaedie,  t.  VI,  p.  720-722. 

(6)  Tacite,  Histoires,  1.  II,  c.  50;  cf.  Josephus  Klein,  Fasti  consulares,  p.  35. 

(7)  Callistrate,  livre  V,  De  ^ognitionibus,  passage  reproduit  au  Digeste, 
Uvrc  XLVÏII,  titre  m,  loi  12. 

(8)  Desjardins ,  Géographie  historique  et  administrative  de  la  Gaule  ro- 
maine, t.  III,  p.  253.  Voy.  Teufifcl,  Geschichte  der  rœmischen  Literatur , 
3-édit.,  p.  817. 

(9j  Voyez  les  index  du  C.  /.  L.,  t.  II,  p.  729,  col.  3;  t.  III,  p.  1083,  col.  2  ; 
t.  V,  p.  1125,  col.  4;  t.  VII,  p.  370,  col.  1;  t.  VIII,  p.  1013,  col  3;  t.  IX, 
p.  724,  col.  2;  t.  X,  p.  1054,  col.  1. 


312  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

Tépitaphe  de  C.  Salvius  Mercurius,  trouvée  à  Pourvieres 
et  conservée  au  palais  des  Arts,  à  Lyon  (1). 

De  SalviacuSf  la  forme  moderne  dans  les  régions  méri- 
dionales de  la  France  est  :  Salviac  (Lot)  ;  Sauviac  (Gers, 
Gironde);  Sauviat  (Puy-de-Dôme,  Hau te- Vienne) ;  Saujac 
(Aveyron)  :  six  noms  de  communes ,  sans  compter  les 
écarts  ;  parmi  ceux-ci ,  nous  citerons  Saugey  (Savoie  et 
Haute-Savoie)  qui  nous  offrent  une  forme  septentrionale 
de  ce  nom;  la  variante  romaine  est  Salvia/nus^  qui  a  donne 
Sauvian  (Hérault). 

Salviniacus  est  une  villa  du  Tonnerrois  qui  appartenait 
au  neuvième  siècle  à  l'abbaye  de  Montier-la-Celle,  comme 
nous  l'apprend  un  diplôme  de  Charles  le  Chauve  (2). 

Sâlvinius .  d'où  Salviniactis  dérive,  n'est  pas  un  gentilice 
commun  ;  on  l'a  trouvé  dans  une  inscription  de  Constan- 
tine  qui  nous  apprend^les  noms  de  P.  Sâlvinius  Arat[orj  '3.. 
Sâlvinius  est  dérivé  de  Salvinus,  qui  a  été  employé  comme 
surnom,  exemple  :  Ulpius  Salvinus  dans  une  inscription  de 
Carlsbourg  (4).  Salvinus,  nom  de  deux  saints  évêques,  l'un 
de  Vérone  mort  vers  562,  l'autre  de  Verdun  qui  vivait  au 
siècle  précédent  (5),  n'est  autre  chose  que  ce  cognomen  dont 
le  gentilice  Sâlvinius  est  dérivé. 

De  Salviniacus  viennent  les  noms  de  communes  suivante  : 
Sauvignac  (Charente)  ;  deux  Sauvigney  (Haute-Saône)  ;  et 
quatre  Sauvigny,  sur  lesquels  deux  dans  l'Yonne  (6),  un 
dans  la  Meuse  (7),  un  dans  la  Nièvre  (8). 

(1)  Boissieu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon^  p.  184.  On  trouvera  deux 
autres  Salvius  et  quatre  Salvia  dans  le  t.  XII  du  C.  I.  L.  ^ 

(2)  Dom  Bouquet,  t.  VIII,  p.  642  e, 

(3)  C.  I.  L.,  VIII,  7706. 

(4)  Ibid.,  III,  1145. 

(5)  Leurs  fêtes  ont  été  mises  Tune  au  12  octobre,  l'autre  au  4  septembre. 

(6)  S&lvigniacum^  1217.  Quantin,  Dictionnaire  topographique  de  l'Yonne, 
p.  121. 

(7)  Salviniaco ,  846.  Liénard  .  Dictionnaire  iopographique  de  la  Meuse, 
p.  219. 

(8)  Salviniacum,  817.  Soultrait,  Dictionnaire  topographique  de  la  Nièvre^ 
p.  172. 


LA  DÉSINENCE  -I-A<3U8  AU  MOYEN  AGE.  313 

Sansiacus  est  le  nom  d'une  des  propriétés  de  Tabbaye 
de  Saint-Ouen  de  Rouen,  aux  termes  d'un  diplôme  donné 
par  Charles  le  Chauve  en  876  (1).  Sansiacus  vient,  peut- 
être  ,  d*un  plus  ancien  *  Sanctiacus ,  dont  la  forme  romaine 
était  Sanctianus  ;  ce  dernier  mot  aurait  conservé  son  t  dans 
Torthographe  Sanlianae,  d'un  nom  de  lieu  que  mentionne, 
vers  Tannée  846,  un  diplôme  de  l'empereur  Lothaire  en 
faveur  d'un  archevêque  de  Lyon  (2). 

Sanctictcits  et  Sanctianus  dériveraient  du  gentilice  Sanc- 
tius  dont  un  exemple  nous  est  conservé  par  une  inscrip- 
tion de  la  Bavière  rhénane  où  figure  un  personnage  appelé 
Sanctius  Honoratus  (3).  On  en  trouve  un  autre  exemple 
dans  une  dédicace  conservée  au  musée  de  Genève,  et  qui 
a  pour  auteur  L.  Sanctius  Marcus  (4).  Ce  gentilice  est  lui- 
même  dérivé  du  cognomen  Sanctus,  plus  fréquent. 

On  peut  aussi  supposer  un  primitif  Sentiacus^  Sentianus 
dérivé  du  gentilice  Sentius,  connu  sous  la  république,  fré- 
quent dans  les  inscriptions  sous  l'empire  romain,  où  quatre 
personnages  de  ce  nom  revêtirent  la  pourpre  consulaire  (5). 

*SancHacus  —  ou  SenHacus  (?)  —  a  donné  à  la  géographie 
moderne  de  la  France  les  huit  noms  de  communes  suivants  : 
deux  Sansac  (Cantal);  Sansais  (Deux-Sèvres);  Sanssac  (Haute- 
Loire)  ;  Sanssat  (Allier)  ;  Sanxay  (Vienne)  ;  Sanzay  (Deux- 
Sèvres),  et  Sanzey  (Meurthe-et-Moselle).  *  Sanctianus 
peut  expliquer  Sansan  (Gers)  (Cf.  p.  315-316). 

Secundiaca  est  le  nom  d'une  cors,  c'est-à-dire  d'une  villa 
mentionnée  dans  le  diplôme  de  fondation  de  l'abbaye  de 
la  Sainte-Trinité  de  Poitiers,  vers  l'année  962  (6).  Cette 
localité  était  située  près  de  Melle  (Deux-Sèvres). 


(!)  Dom  Bouquet,  t.  VIII,  p.  650  e. 
[%  Ibid.,  VIII,  384.a. 

(3)  Brambach,  1764. 

(4)  Mommsen,  Inscriptiones  helveticae^  n"  75. 

(5)  Sur  los  Sentii,  voyez  Pauly,  Real-Enclopaedie,  t.  VI,  p.  1047-1049,  et 
ci-dessous,  p.  315-316. 

(6^  Dom  Bouquet,  t.  IX,  p.  626  d. 


314  LIVRE  II.  CHAPITRE  IL 

Secundiacus  est  dérivé  de  Secundius ,  gentilice  qui  ne?* 
pas  rare  dans  les  inscriptions,  et  qui  est  dérivé  du  surnom 
plus  fréquent  encore  Secundus  (1).  Nous  citerons  :  Secuii- 
dius  Crispus,  dans  une  inscription  de  Trêves  (2);  Secun- 
dius Ursio ,  au  musée  de  Bonn  (3)  ;  Secundius  Agricola,  à 
Wiesbaden  (4);  M.  Secundius  Saturninus,  M.  Secundius 
Acceptus,  dans  une  inscription  de  Lyon  (5). 

De  Secundius  est  venu  Secundiacus  qui,  dans  le  midi  de 
la  France,  a  donné  Ségonzac  (Charente,  Corrèze  et  Dordo 
gne).  Quant  à  Secondigné  et  Secondigny  (Deux-Sèvres),  ils 
supposent  un  primitif  *  Secundiniacus ,  dérivé  de  Secundi- 
nius  qu'on  trouve  dans  la  dédicace  lyonnaise  à  Mithra,  par 
Aur.  Secundinius  Donatus  (6),  et  dans  plusieurs  autres 
inscriptions  (7).  Il  peut  se  faire  que,  dans  le  diplôme  cite 
plus  haut,  on  ait  imprimé  Secundiacus  pour  Secundiniacus^ 
et  que  la  localité  mentionnée  soit  Secondigné  (Deux- 
Sèvres),  arrondissement  de  Melle. 

Securiacus  est  un  locus  situé  en  Brabant ,  comme  nous 
l'apprennent  deux  diplômes,  l'un  de  Louis  le  Débonnaire. 
qui  parait  dater  de  Tannée  822  (8),  l'autre  de  Charles  le 
Chauve,  en  847  (9).  Dans  un  diplôme  de  Charles  le  Simple, 
en  899,  Securiacus  est  qualifié  de  villa  (10). 

Ce  nom  de  lieu  dérive  du  gentilice  Securius,  qui  parait 
très  rare.  Le  seul  exemple  rigoureusement  certain  que 
nous  en  puissions  signaler  se  rencontre  dans  une  dédicace 


(1)  Pauly,  Real-EncyclopaLedie^  t.  V,  p.  914. 

(2)  Br&mbach,  n*  825. 

(3)  /bid.,  n*  846. 

(4)  Ibid,,  n-  1526. 

(5)  Boissieu,  Inscript,  de  Lyon,  p.  521.  Cf.  C.  /.  L.,  t.  XII,  p.  881,  col.  2 

(6)  Boissieu,  ibid,,  p.  40.  Ces  lignes  ont  été  écrites  avant  la  publicaUon 
du  t.  XII  du  C.  /.  L.  où  ont  été  recueillis  dix  exemples  de  ce  gentilice. 

(7)  Voyez  les  index  du  C.  /.  L. ,  t.  III,  p.  1083,  col.  2;  t.  V,  p.  1126,  col.  1. 

(8)  Dom  Bouquet,  VI,  530  c  ;  cf.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  I3vV 
n*  180. 

(9)  Dom  Bouquet,  VIII,  488  e. 

(10)  Ibid.,  IX,  474  6. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  315 

à  Jupiter  trouvée  près  de  Mayence  ;  Tauteur  de  cette  dé- 
dicace est  le  légionnaire  Securius  Carantus  (1).  On  suppose 
que  le  même  gentilice  était  inscrit  dans  une  épitaphe 
recueillie  à  Neumayer  (Prusse  rhénane)  ;  cette  épitaphe 
aurait  été  gravée  par  les  soins  de  Securius  Novellus  ;  mais 
quand  a  été  trouvée  cette  inscription  aujourd'hui  perdue , 
le  commencement  de  la  ligne  où  ce  nom  avait  été  gravé 
manquait,  et  dans  cette  lacune  était  comprise  la  lettre 
initiale  s  de  Securius  (2). 

Sentiacus,  aujourd'hui  Sinzig,  près  de  Coblenz  (3),  est 
une  localité  où  se  trouvait  un  palais  d'où  Pépin  le  Bref  a 
daté  un  diplôme,  en  762  (4).  Sentiacus  est  aussi  mentionné 
dans  un  autre  diplôme  du  même  prince  et  de  la  même 
année  (5).  L'empereur  Lothaire  y  fit  un  feéjour  en  842 ,  et 
en  nous  rapportant  ce  fait,  les  Annales  de  Saint-Bertin  se 
servent  de  l'expression  Sentiacum  palatium  (6),  les  Annales 
de  Fulde  emploient  celle  de  villa  Sentiaca  (7).  Mais  la  forme 
mascuUne  était  la  plus  usitée  :  en  876,  nous  la  retrouvons 
encore;  Louis,  fils  de  Louis  le  Germanique,  allant  d'An- 
dernach  à  Aix-la-Chapelle,  passe  à  Senciacus  (8). 

La  forme  romaine  de  ce  nom  est  Sentianus ,  nom  d'une 
station  de  l'Italie  méridionale,  non  loin  de  Bénévent  (9). 

Sentiacus  dérive  du  gentilice  romain  Sentius  (10).  Le  pré- 


(1)  Brambacb,  n*  921. 

(2)  Ibid.,  n*  858. 

(3)  Sickel,  Acta  Karolinorum ,  t.  II,  p.  483;  cf.  Mabillon,  De  re  diploma- 
ttca,liv.  IV,  J  131. 

(4)  Sickel,  Acia  Karolinorum,  t.  II,  p.  6,  n*  19. 

(5)  Sickel,  ibid.,  t.  II,  p.  6,  n*  20.  Migne,  Patrologia  latina,  t.  XGVI, 
col.  1539  d. 

(6)  Dom  Bouquet,  VII,  60  d. 

(7)  Ibid.,  VII,  160  a. 

(8)  Migne,  Palrologia  latina,  t.  CXXVI,  col.  1280  b;  Annales  de  Saint-Ber- 
iin,  chez  Dom  Bouquet,  VII,  122  e. 

(9)  Itinéraire  d'Antonin,  édit.  Parthey  et  Pinder,  p.  112  ;  cf.  C.  /.  L.,  t.  IX, 
p.  657. 

(10)  Sur  la  gens  Sentia,  voyez  Pauly,  Real-Encyclopaedie,  t.  V,  p.  1047- 
1049. 


316  LIVRE  IL  CHAPITRE  II. 

teur  C.Sentius,  connu  surtout  parce  que,  comme  le  raconle 
Varron ,  il  ne  buvait  de  vin  de  Chio  que  par  ordonnance 
de  médecin  (1) ,  fut  battu  par  les  Thraces  Tan  89  avant 
notre  ère  (2).  On  lit  sur  des  monnaies  romaines  les  noms 
de  L.  Sentius  C.  fllius  (3).  G.  Sentius  Saturninus  obtint 
les  honneurs  consulaires  l'an  19  avant  J.-C.  (4).  Un  autre 
C.  Sentius  fut  préteur  de  Syrie  trente-huit  ans  plus 
tard. (5).  Cegentilice,  fréquent  dans  les  inscriptions  delà 
période  impériale  (6),  pénétra  en  Gaule  :  un  certain  C.  Sen 
tins  apparaît  dans  une  inscription  du  musée  de  Mayence  ;7i  ; 
Sentius  Ursio ,  dans  une  inscription  de  Gologne  (8)  ;  Sen- 
tius Successianus  dans  une  épitaphe  trouvée  à  FuUy,  près 
Martigny,  en  Suisse  (9);  G.  Sentius  Diadumenus,  médecin, 
fit  à  Mars  une  dédicace  dont  on  signale  l'existence  à  Yver- 
dun  dans  le  même  pays  (10). 

Seniiacus^  dérivé  de  Sentius,  n'a  pas  laissé  en  France  de 
traces  certaines.  Il  est  cependant  possible  que  Sincey 
(Gôte-d'Or)  soit  un  ancien  Sentiacus  (il).  En  général,  on 
peut  croire  qu'en  français  Sentiacus  s'est  confondu  avec 
"  SanciiacuSy  traité  plus  haut,  p.  313. 

Severiacus  est  le  nom  d'une  villa  située  près  de  Tours, 
et  qui  appartenait  à  l'église  de  Paris  au  sixième  siècle. 


(1)  Pline,  Histoire  naturelle,  livre  XIV,  J  96. 

(2)  Tite-Live,  Epitome  du  livre  LXX;  cf.  Cicéron,  In  Verrem,  II,  93;  /n 
Pisonevrif  34,  et  Mommsen,  Histoire  romaine,  6*  édit.,  t.  II,  p.  285. 

(3)  C.  /.  L.,  I,  409. 

(4)  Ibid,,  t.  I,  n»»  742,  743,  p.  546,  547;  c'est  sous  son  consulat  que  mou- 
rut Virgile.  Voyez  les  fragments  de  Suétone  dans  l'édition  de  cet  auteur 
donnée  par  L.  Roth,  chez  Teubner,  p.  796. 

(5)  Tacite,  Annales,  II,  74. 

(6)  C.  /.  L.,  t.  V,  p.  1126,  col.  1  et  2;  t.  VIII,  p.  lOll,  col.  i  ;  t.  X,  p.  1054. 
col.  3  et  4;  p.  1065,  col.  4. 

(7)  Brambach,  n»  78. 

(8)  Ibid.,  n*  361. 

(9)  Mommsen,  Inscriptiones  helveticae,  n*  13. 

(10)  Mommsen,  ibid,,  n*  136.  On  trouvera  sept  autres  exemples  dans  le 
t.  XII  du  C.  /.  L. 

(11)  Cotte  hypothèse  n'est  pas  admise  par  Gamier,  Nomenclature  hiitori- 
que  des  communes,  etc.,  du  département  de  la  Côte-d'Or,  p.  171,  n"  67?. 


LA  DESINENCE  -I-ACU8  AU  MOYEN  AGE.  317 

ronime  nous  le  voyons  par  la  vie  de  saint  Germain,  évoque 
de  Paris ,  qu'écrivit  Fortunat  (1).  Des  documents  de  Tépo- 
que  carlovingienne  et  du  commencement  de  la  période 
capétienne  conservés  par  le  Cartulaire  de  Tabbaye  de  Con- 
ques (Aveyron) ,  nous  font  connaître  trois  Severiacus  situés 
dans  le  voisinage  de  ce  monastère  (2). 

SeveriaciAs  est  dérivé  de  Severius,  gentilice  romain  dérivé 
lui-même  du  cognomen  plus  ancien  Severus  (3).  Le  genti- 
lice Severius  se  trouve  en  Italie  ;  on  a  recueilli,  par  exem- 
ple, à  Milan,  Tépitaphe  de  Q.  Severius  Saturianus  (4).  Ce 
nom  pénétra  en  Gaule.  Le  musée  de  Nimes  a  Tépitaphé 
de  L.  Severius  Severinus,  édile  de  la  colonie  de  Nimes  (5); 
celui  d'Avignon,  l'épitaphe  de  Severius  Viator  (6).  Le  musée 
de  Genève  possède  une  dédicace  au  dieu  Liber  par  P.  Se- 
verius Lucanus  ;  elle  a  été  trouvée  à  Saint-Prex ,  dans 
l'ancien  territoire  de  la  colonie  de  Noviodunum,  aujour- 
d'hui Nyon  (7).  L.  Severius  Martius  fit  faire  à  sa  femme 
une  épitaphe  découverte,  il  y  a  plus  de  deux  siècles,  près 
d'Avenche,  en  Suisse  (8).  Non  loin  de  là,  à  Wifelsburg,  on 
a  lu  jadis  une  épitaphe  que  Severius  Marcianus  fit  graver 
pour  sa  sœur  (9).  Le  musée  de  Chalon-sur-Saône  possède 
l'épitaphe  de  Severia  Severa(lO).  Une  seconde  Severia  Se- 
vera  figure  dans  une  autre  épitaphe  trouvée  à  Lyon  (11). 
L'épitaphe  de  Severia  Fuscina  existe  au  palais  des  Arts ,  à 

(1)  Vt^a  gancti  Germant  parisiensis  episcopij  c.  64.  Migne,  Patrologiê,  la- 
iina,  t.  LXXXVIII,  col.  474  c,  édit.  de  Fortunat  donnée  par  B.  Krusch  dans 
les  Monumenta  Germaniae,  in-4*,  t.  II,  p.  24;  cf.  Longnon,  Géographie  de 
la  Gaule  au  sixième  siècle,  p.  292. 

(2)  Desjardins,  Cartulaire  de  l'abbaye  de  Conques,  p.  35,  135,  136,  185, 
192,  505. 

(3)  Voyez,  par  exemple,  C.  J.  L.,  t.  I,  n»  1422  ;  cf.  Pauly .  Real-Encyclo- 
paedte,  t.  V,  p.  1132. 

(4)  C.  7.  L.,  V,  5962. 

(5)  Herzog,  Galliae  Narbonensis..,  historia,  t.  II,  p.  35,  n*  140. 

(6)  Herzog,  ibid.,  p.  74,  n-  357. 

(7)  Mommsen,  Inscriptiones  helveticae,  n*  113. 

(8)  Mommsen,  ibid.,  n*  191. 

(9)  Mommsen,  tbtd.,  n*  202. 

(10}  Bcissien,  Inscriptions  antiques  de  Lyon,  p.  217. 
(U)  Boissieu,  ibid.,  p.  421. 


(1)  Boissieu,  ibid.^  p.  523. 

(2)  Bulletin  épigraphique ,  t.  I,  p.  74.  Le  tome  XII  du  C  /.  L.  mentionne 
six  autres  Severius  et  trois  autres  Severia. 

(3)  Siveriacum^  vers  1250.  Lucien  Merlet,  Dictionnaire  topographique  du 
département  d'Eure-et-Loir ,  p.  49. 

(4)  Sivriacum,  en  1170.  Quantin,  Dictionnaire  topographique  du  dépar- 
tement de  l'Yonne^  p.  36. 

(5)  Ce  sont  deux  des  Severiacua  du  Cartulaire  de  Conques,  Severac 
(Loire-Inférieure),  suppose  un  ancien  *SeveracuSf  dérivé  du  cognomen 
Beverus.  Voy.  Cartulaire  de  Redon^  p.  314. 


318  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

Lyon  (1).  M.  Germer  Durand  a  lu,  il  y  a  quelques  années, 
les  noms  de  L.  Severius  Severus  dans  une  inscription  de 
Bruges,  commune  de  Palhers  (Lozère)  (2). 

Suivant  M.  Longûon ,  le  Severiacus  dont  parle  Fortunat, 
au  sixième  siècle ,  est  Civray-sur-Cher  (Indre-et-Loire).  Le 
même  département  contient  une  autre  commune  dont  le 
nom  s'explique  par  la  môme  étymologie ,  c'est  Civray-sur- 
Esves,  Il  y  a  encore  en  France  deux  autres  communes  de 
Civray ,  l'une  dans  le  Cher ,  l'autre  dans  la  Vienne ,  et  le 
nom  de  chacune  a  probablement  la  même  origine.  Dans  le 
midi,  Severiacus  a  donné  Civrac;  on  compte  dans  la  Gironde 
trois  communes  de  Civrac  ;  ailleurs ,  la  désinence  -act«  est 
devenu  -ieux  ou  -y  :  nous  citerons  deux  Civrieux  (Ain, 
Rhône);  quatre  Civry  (Côte-d'Or,  Eure-et-Loir  (3),  Seine- 
et-Oise,  Yonne)  (4).  Dans  tous  ces  noms,  1'^  initial  a  été 
supplanté  par  un  c.  L'*  persiste  dans  les  suivants  :  Sevrai, 
(Orne)  ;  Sevrey  (Saône-et-Loire)  ;,  Sévry  (Cher)  ;  deux  Seve- 
rac dans  l'Aveyron  (5). 

On  pourrait  expliquer  aussi  par  Severiacus  le  nom  de  sLx 
communes  de  Sivry,  parmi  lesquelles  deux  dans  la  Meuse 
et  quatre  dans  les  départements  des  Ardennes,  de  la  Marne, 
de  Meurthe-et-Moselle  et  de  Seine-et-Marne. 

Toutefois,  le  nom  d'une  de  ces  communes  remontée 
une  autre  origine.  Sivry-sur-Meuse ,  dans  le  département 
de  la  Meuse,  s'est  appelé  superiacus  au  dixième,  au 
onzième  et  au  douzième  siècle  ;  Vu  de  la  première  syllabe 
n'a  commencé  à  se  prononcer  i  qu'au  treizième  siècle. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACU8  AU  MOYEN  AGE.  319 

comme  Ta  établi  M.  Liénard  (1).  &aperiacus  est  dérivé  de 
Siiperius,  gentilice  que  nous  fait  connaître  une  épitaphe 
africaine ,  celle  de  Superius  Flavianus  (2).  On  ne  peut 
donc  comprendre  Sivry-sur-Meuse  dans  la  liste  des  noms 
de  communes  qui  offrent  la  forme  moderne  d*un  pri- 
mitif Severiacus.  Il  en  reste  vingt-trois.  Il  est  possible  que 
dans  le  nombre  quelques-uns  soient,  comme  Sivry-sur- 
Meuse,  d'anciens  Superiacus,  cependant,  le  gentilice  Supe- 
rius étant  beaucoup  plus  rare  que  le  gentilice  Severius,  le 
dérivé  Severiacus  a  dû  être  plus  fréquent  que  le  dérivé 

*  Sexciacus  est  un  nom  de  fundus ,  d'où  vient  le  nom 
du  vicus  Seœciacensis  situé  dans  le  Bigorre,  c'est-à-dire  pro- 
bablement dans  le  département  des  Hautes-Pyrénées;  vers, 
la  fin  du  sixième  siècle,  Grégoire  de  Tours  nous  rapporte 
que  là  fut  enterré  le  prêtre  saint  Justin  et  que ,  dans  une 
dépendance  de  ce  victis,  le  prêtre  saint  Sévère  fit  bâ- 
tir une  église  (3).  *  Seœciacus  est  une  orthographe  de  basse 
époque  pour  *  Sextiacus.  L'orthographe  plus  altérée  encore, 
Smiacus,  nous  est  offerte  en  854  par  un  diplôme  de  l'em- 
pereur Lothaire  pour  l'abbaye  de  Saint-Claude  (4). 

Ces  noms  de  lieux  sont  dérivés  du  gentilice  romain 
Sextius,  porté  par  une  famille  plébéienne.  Dès  l'an  339 
avant  notre  ère,  L.  Sextius  était  tribun  du  peuple  à 
Rome  (5).  Un  autre  L.  Sextius,  tribun  du  peuple  en  377, 
se  rendit  célèbre  par  l'ardeur  et  le  succès  de  sa  lutte  con- 
tre les  patriciens  (6)  ;  il  fut  le  premier  plébéien  élevé  au 
consulat,  l'an  366  avant  notre  ère  (7).  C.  Sextius  Calvinus, 


(i)  Dictionnaire  topogr&phique  du  département  de  la  Meuse,  p.  224. 
(2)  C.  /.  L.,  t.  VIII,  n-  9639.  Cf.  Superinius,  à  Arles,  XII,  687. 
(Z)  Gloria   confessorum,  c.  49,  50.  Bordier ,  Les  livres  des   miracles, 
t.  II,  p.  436,  438,  édit.  Arndt  et  Krusch,  c.  48,  49,  p.  777, 1.  3,  11. 

(4)  Dom  Bouquet,  VIII,  394  a. 

(5)  Tite-Uve,  livre  IV,  c.  49,  }  6. 

(6)  Jbid,,  livre  VI,  c.  35. 

(7)  /5id.,  livre  VII,  c.  1. 


3Î0  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

consul  Tan  124  avant  notre  ère  (1),  porta  ce  nom  en  Gaule: 
il  y  fut  proconsul  les  deux  années  qui  suivirent  son  con- 
sulat ,  et  y  fonda  la  ville  d'Aquae  Sextiae ,  aujourd'hui  Aii 
en  Provence,  le  premier  établissement  des  Romains  dans 
la  région  qui  est  devenue  la  France  (2).  On  a  recueilli  quel- 
ques inscriptions  qui  attestent  Texistence  en  Gaule  du  gen- 
tilice  de  ce  consul  :  telles  sont  Tépitaphe  de  M.  Sextius 
Atticus ,  trouvée  à  Verenay  (Rhône)  (3) ,  les  marques  de  fa- 
brique de  C.  Sex[tius]  Eutyches  (4),  et  de  G.  Sext[iu5; 
Post[umus]  au  musée  de  Vienne  (Isère)  (5).  Une  inscrip- 
tion de  Lyon  nous  a  conservé  les  noms  de  P.  Sextitis  Flo- 
rus  (6);  une  inscription  d'Ingweiler  (Alsace),  ceux  de  L. 
Sextius  Marcianus  (7);  une  inscription  d'Huttich,  en  Hesse, 
ceux  de  L.  Sextius  Perwincus  (8). 

C'est  d'un  primitif  *  Sextiacus  que  viennent  probable- 
ment les  noms  de  deux  communes  de  Sexey  (Meurthe-et- 
Moselle)  ,  appelées  chacune  Sessiacum  en  1050  (9).  Sissy 
(Aisne),  est  aussi  appelé  Sessiacum  en  1168  (10).  Peut-être 
Cessey  (Doubs),  et  Cession  (Isère),  ont-ils  la  même  origine. 
On  doit,  ce  semble,  expliquer  autrement  le  nom  de  Cessey- 
sur-Tille  (Côte-d'Or)  (11),  et  de  Cessy-les-Bois  (Nièvre)  (lÎ!; 
ce  sont  des  dérivés  du  gentilice  Saccius,  étudié  page  310. 


(1)  c.  I.  L.,  t.  I,  p.  534,  535;  cf.  n»  632. 

(2)  Voyez  Tétude  faite  sur  lui  par  M.  E.  Desjardins,  Géographie  historique 
et  administrative  de  la  Gaule  romaine,  t.  II,  p.  271-273  ;  et  sur  la  gens 
Seztia,  consultez  Pauly,  Real-Encyclopaedie ,  t.  VII,  p.  1142-1146. 

(3)  AUmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  III,  p.  5. 

(4)  Allmer,  ibid.,  t.  IV,  p.  9. 

(5)  AUmer,  ibid,,  t.  IV,  p.  194. 

(6)  Bolssieu,  Insûriptions  de  Lyon,  p.  194. 

(7)  Brambach,  Inscriptiones  rhenanae,  n*  1878. 

(8)  Ibid.f  n*  1088.  Plusieurs  autres  Sextius  sont  mentionnés  dans  le  tome  XII 
du  C.  /.  L.  On  y  trouve  aussi  Seccius,  3709,  et  Seccia,  415. 

(9)  Lepage ,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  la  Meurthe , 
p.  129. 

(10)  Matton,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  V Aisne,  p.  261. 

(11)  Sactacus.  Garnier,  Nomenclature  historique  des  communes,  etc.,  du 
département  de  la  Côte-d'Or,  p.  20,  n*  80. 

(12)  Sassiacense  monasterium,  cenobium  Saxiacense.  Soultrait,  Diction- 
naire topographique  du  département  de  la  Nièvre,  p.  32. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACU8  AU  MOYEN  AGE.  321 

SiuACus  est  un  loous  dépendant  de  Lagny-le-Sec  (Oise), 
suivant  un  diplôme  de  Thierry  III  qui  remonte  à  688  (1). 
Un  diplôme  de  Charlemagne  pour  Tabbaye  de  Saint-Calais, 
en  774 ,  nous  transporte  dans  le  Maine  «  in  condita  Silia^ 
censé  »  ;  dans  cette  condita  se  trouve  une  villa  appelée 
mrte  Bosane  (2).  Un  diplôme  de  Charles  le  Gros,  en  faveur 
de  l'abbaye  de  Saint-Etienne  de  Dijon,  en  885,  nous  mon- 
tre en  Bourgogne  un  autre  Siliacus  situé  «  in  comitatu 
Uscarensi  »,  c'est-à-dire  un  peu  au  sud  de  Dijon  (3). 

Siliacus  vient  de  Silius,  gentilice  qui  apparaît  dans  les 
derniers  temps  de  la  république  romaine,  et  qui  n'était 
pas  rare  sous  l'empire  (4).  Ainsi,  sous  la  république,  P.  Si- 
lius Nerva ,  élevé  à  la  préture  Tan  59  avant  notre  ère,  fut, 
quelques  années  après,  avec  le  titre  de  propréteur,  chargé 
de  Tadministration  de  la  Bithynie  et  du  Pont  ;  c'était  un 
des  amis  de  Gicéron  (5).  Le  grand  orateur  eut  des  relations 
d'affaires  avec  un  autre  Silius  dont  le  prénom  était  Âu- 
lus  (6).  Sous  Tempire,  on  trouve  dans  les  fastes  consulai- 
res, en  Tan  20  avant  J.-C,  P.  Silius  Nerva  (7).  P.  Silius 
fut  consul  suffecPus  en  l'an  3  après  J.-C  (8).  C.  Silius  par- 
vint au  consulat  en  l'an  13  de  notre  ère  (9).  P.  Silius 
Nerva  obtint  la  même  dignité  en  l'an  28  (10).  Sous  Claude, 
C.  Silius,  consul  désigné,  dut  une  célébrité  scandaleuse  à 
son  mariage  avec  Messaline  (11).  Le  poète  Silius  Italiens 


(1)  Pardessus ,  Diplomata,  t.  II,  p.  205.  Tardif,  Monuments  hUtoriques^ 
p.  20,  col.  2.  Pertz  ,  Diplomatum  imperii  tomus  primus  ,  p.  51,  ligne  32  ; 
et  Longnon,  Ex&nien  géographique^  p.  26. 

(2)  Dom  Bouquet,  V,  724  b;  cf.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  22,  n*  22. 

(3)  ma.,  IX,  336  c. 

(4)  On  peut  trouver  une  étude  sur  la  gens  Silia  chez  Pauly,  Real-Ency- 
clopaedie,  t.  V,  p.  1190-1195. 

(5)  Gicéron,  Ad  familiares,  livre  VII,  ép.  21  ;  livre  IX,  ép.  16  ;  livre  XIII, 
ép.  61,  62,  63,  64,  65. 

(6)  Ad  Atticum,  Uvre  XII,  ép.  24-31,  33,  35. 

(7)  C.  i.  L.,  t.  I,  p.  540,  547.  Josephus  Klein,  Fasti  consulares^  p.  9. 

(8)  Ihid.j  t.  I,  p.  548.  Josephus  Klein,  p.  13. 

(9)lbid.,  t.  I,  p.  550,  551,  n**  762,  763.  Josephus  Klein,  p.  20. 

(10)  Josephus  Klein,  p.  26. 

(11)  Tacite,  Annales,  livre  XI,  c.  26,  27. 

21 


322  LIVRE  IT.  CHAPITRE  II. 

acquit  par  ses  vers  d'autres  titres  à  la  notoriété  ;  mais  il 
n'était  pas  seulement  homme  de  lettres,  il  obtint  les 
honneurs  consulaires  en  Tan  68  de  notre  ère  (1). 

Les  noms  de  lieux  que  nous  avons  cités  attestent  que 
ce  gentilice  pénétra  en  Gaule.  Nous  ignorons  si  ce  fut  par 
l'influence  de  l'un  des  personnages  que  nous  venons  de 
mentionner;  ce  que  nous  savons,  c'est  que  le  C.  Silius. 
consul  en  l'an  13,  commanda  l'armée  de  la  Germanie  su- 
périeure, avec  titre  de  légat,  pendant  sept  ans,  de  l'an  14 
à  l'an  21  de  notre  ère  (2). 

SiliaciÀSy  dérivé  de  Silius,  est  devenu  dans  le  Midi  Si- 
Ihac  ;  c'est  le  nom  d'une  commune  du  département  de  l'Ar- 
dèche  ;  dans  le  Nord ,  d'autres  formes  modernes  de  Silia- 
eus  nous»  sont  offertes  par  :  Sillé,  nom  de  deux  communes 
de  la  Sarthe;  Silley,  nom  de  deux  communes  du  Doubs; 
Silli,  nom  d'une  commune  de  l'Orne  ;  Silly,  nom  porté  par 
trois  communes ,  deux  dans  l'Oise ,  une  dans  l'Aisne.  Le 
nombre  total  de  ces  communes  s'élève  à  neuf. 

La  forme  latine  de  Siliacus  était  Silianus  ;  une  charte  de 
Ravenne  mentionne  un  fundum  qui  vocatur  Siliamim  (3!. 

*8iLVANiACus  est  probablement  l'orthographe  primitiTe 
du  nom  de  lieu  écrit  Selvaniacus  dans  un  diplôme  accordé 
par  Louis  le  Débonnaire  à  l'abbaye  de  Conques,  en  819  (4;. 
En  effet,  nous  trouvons  le  même  nom  de  lieu  écrit  à 
l'ablatif  Silvaniago^  avec  un  i  à  la  première  syllabe,  dans 
une  charte  du  onzième  siècle  conservée  par  le  Cartulaire 
de  Conques  (5).  Le  nom  actuel  de  cette  localité  est  Savi- 
gnac,  c'est  une  dépendance  de  la  commune  d'Asprières 
(Aveyron). 


(1)  Josephus  Klein,  Fasti  consul&res,  p.  41. 

(2)  E.  Desjardins,  Géographie  historique  et  administrative  de  U  GauU 
romaine,  t.  III,  p.  248. 

(3)  Fantuzzi,  Monumenti  Ravennati^  t.  I,  p.  35. 

(4)  Dom  Bouquet ,  VI,  717  e,  Gustave  Desjardins ,  Cartulaire  de  l'abbaye 
de  Conques,  p.  410. 

(5)  Gust.  Desjardins,  ibid.y  p.  81. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACU8  AU  MOYEN  AGE.  3Î3 

Silvaniacus  est  dérivé  du  gentilice  Silvanius,  dérivé  lui- 
même  du  surnom  Silvanus.  L'épitaphe  de  Silvanius  For- 
tunatus  existe  encore  à  Vienne  (Isère)  (1).  Les  noms  de 
L.  Silvanius  Probus  nous  ont  été  conservés  par  une  inscrip- 
tion de  Rheinzabern ,  en  Bavière  rhénane  (2),  et  ceux  de 
C.  Silvanius  Matemus  par  une  inscription  de  Saint-Hippo- 
iyte-de-Caton  (Gard)  (3). 

Les  noms  de  lieux  dérivés  du  gentilice  Silvanius  offrent 
une  grande  analogie  avec  ceux  qui  sont  tirés  de  Silvinius 
[p.  325),  et  il  doit  être  souvent  difficile  de  les  en  distinguer. 

SiLviAGus ,  orthographe  de  basse  époque  pour  Silviacus^ 
est  le  nom  d'un  vious  où  étaient  situées  des  vignes  qu'en 
615  Bertramne,  évoque  du  Mans,  donna  à  la  basilique  de 
Saiot-Germain,  fondée  par  lui  près  de  la  ville  du  Mans  (4). 
La  légende  Silviaco  se  lit  sur  une  monnaie  mérovin- 
gienne (5) ,  et  nous  ignorons  où  était  située  la  localité  que 
désigne  cette  légende  monétaire.  Mais  il  est  vraisemblable 
que  le  Silviacus ,  inscrit  en  832  dans  la  liste  des  villas  et 
des  vici  dépendant  de  Téglise  du  Mans  que  nous  a  con- 
servée un  diplôme  de  Louis  le  Débonnaire  (6),  est  identi- 
que au  Silviagus  du  testament  de  Bertramne.  Un  autre 
SilviaciLs  est  aujourd'hui  Servais  (Aisne)  (7)  ;  les  empereurs 
carlovingiens  y  avaient  un  palais  dont  il  est  question  pour 
la  première  fois  sous  le  règne  de  Louis  le  Débonnaire  ;  ce 
prince  data  du  palais  royal  de  Silviacus  deux  diplômes,  le 
premier  en  820  (8) ,  le  second  en  830  (9)  ;  plusieurs  diplô- 

(1)  Allmer,  Inscriptions  antiques  de  Vienne,  t.  III,  p.  6. 
P)  Brambach,  n-  1814. 

(3)  C.  I.  L.,  XII,  2887. 

(4)  Pardessus,  DiplomaLta,  t.  I,  p.  209. 

(5)  A«  de   BarUiélemy,  dans   la  Bibliothèque   de   l'Ecole   des    chartes 
t.  XXVI,  p.  462,  n-  599. 

(6)  Dom  Bouquet,  VI,  585  e;  cf.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  179, 
n*  308. 

(7)  Matton,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  l'Aisne,  p.  260. 

(8)  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  132,  n-  162. 

(9)  Sickel,  ibid.,  t.  II,  p.  166,  n-  270. 


324  LIVRE  IL  CHAPITRE  IL 

mes  de  Charles  le  Chauve  ont  été  donnés  au  palais  de 
viacus  en  846  (1),  en  847  (2),  en  879  (3);  on  peut  considé- 
rer comme  défectueuse  l'orthographe  Silvaico  palatio,  dans 
un  diplôme  du  môme  roi  en  850  (4),  et  l'orthographe  Sil- 
vacus  employée  pour  désigner  le  nom  du  lieu  où  aurait  été 
promulgué  aussi  par  Charles  le  Chauve  un  célèbre  capitu- 
laire  de  l'année  853  (5).  Un  troisième  Silviacus,  situé  dans 
une  tout  autre  partie  de  la  France,  dépendait  en  967  du 
monastère  de  Saint-Pierre  de  Vienne  (Isère)  ;  nous  l'appre- 
nons par  un  diplôme  de  Conrad  le  Pacifique ,  roi  de  Bour- 
gogne transjurane  et  de  Provence  (6). 

Silvius,  d'où  Silviacus,  est  un  nom  qui  appartiient  d'abord 
à  l'histoire  mythologique  de  Rome  :  le  fils  d'Ascagne ,  fils 
lui-même  d'Enée ,  s'appelle  Silvius ,  règne  sur  les  Latins. 
et  après  lui ,  Silvius  devient  un  surnom  commun  à  ses  suc- 
cesseurs (7).  C'est  dans  les  inscriptions  du  temps  de  Tem- 
pire  que  le  gentilice  Silvius  apparaît.  La  Gaule  nous  en 
offre  quelques  exemples  :  le  musée  du  mont  Saint-Bernard 
contient  une  dédicace  à  Jupiter  Poeninus  par  Q.  Silvius 
Perennius,  tabellariu^  de  la  colonie  des  Séquanes  (8)  ;  une 
inscription  d'Yverdun  nous  a  conservé  les  noms  de  T.  Sil- 
vius Similis  (9).  Ceux  de  Q.  Silvius  Spe[ratus],  centurion 
de  la  première  cohorte  des  Belges ,  nous  sont  connus  par 
une  inscription  de  l'île  de  Brazza  sur  la  côte  de  Dalma- 
tie  (10).  On  a  trouvé  plusieurs  fois,  tant  en  Gaule  qu'en 
Angleterre,  la  marque  du  potier  Silvius  (11). 


(1)  Dom  Bouquet,  VIII,  484  0. 

(2)  ma,,  VIII,  492  b. 

(3)  Ibid.,  VIII,  636  d. 

(4)  Ibid.y  VIII,  508  0. 

(5)  Ibid.,  VII,  613  c.  Cf.  MabiUon,  De  re  diplomatica,  livre  IV,  c.  132. 

(6)  Dom  Bouquet,  IX,  702  b. 

(7)  Tite-Live,  liv.  I,  c.  3,  {{  6,  7.  8;  cf.  Virgile,  Enéide,  VI,  768,  769. 

(8)  C.  /.  L.,  V,  6887.  Mommsen,  Inseriptiones  helvetictte,  n*  42. 

(9)  Mommsen,  Inttcriptiones  helveticae,  n*  138. 

(10)  C.  /.  L.,  III,  3093. 

(11)  Scbuormans,  Sigles  figulins,  p.  248,  n"  5240-5246:  Trois  autres  SUtIos 
sont  mentionnés  dans  le  t.  XII  du  C.  /.  L. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACU8  AU  MOYEN  AGE.  325 

SiLviNiAGus  est  le  nom  d'une  villa  dépendant  de  l'abbaye 
de  Saint-Aubin  d'Angers,  comme  on  le  voit  par  un  diplôme 
émané  de  Charles  le  Chauve ,  en  851  (1).  Une  autre  villa 
Silviniacu^  était  située  dans  le  Tonnerrois,  et  dépendait  de 
1  abbaye  de  Montier-la-Celle  (Aube),  à  laquelle  elle  fut 
donnée  en  856  par  le  môme  roi  (2).  Un  troisième  Silvi- 
niacus  appartenait  à  l'église  d'Autun ,  et ,  à  la  fin  du  neu- 
vième siècle ,  était  possédé ,  à  titre  de  précaire ,  par  une 
femme  noble  ;  le  roi  Eudes  la  maintint  en  possession  de  ce 
bien  en  890  (3).  En  979,  le  roi  Louis  V  comprend  un  qua- 
trième Silviniacus  dans  la  nomenclature  qu'il  donne  des 
propriétés  de  l'église  d'Orléans  (4). 

La  forme  romaine  de  ce  nom  de  lieu  est  Silvinianus ,  et 
nous  la  trouvons,  en  814,  dans  un  diplôme  de  Louis  le 
Débonnaire  concernant  une  abbaye  située  à  Brescia,  et  une 
autre  abbaye  à  Nonantola,  près  de  Modène  (5). 

Silviniacus  est  dérivé  de  Silvinius.  Une  femme,  dont 
Tépitaphe  a  été  trouvée  à  Lyon,  avait  pour  mari  un  certain 
Silvinius  Balbinus  (6).  Une  dédicace  par  L.  Silvinius  Res- 
pectus  est  conservée  au  musée  de  Cologne  (7).  On  a  re- 
cueilli ,  dans  la  Bavière  rhénane ,  une  autre  dédicace  par 
deux  Silvinius  surnommés ,  l'un  Justus ,  et  Tautre  Dubi- 
tatus  (8). 

De  Silviniacus  vient  Selvigny,  nom  d'une  commune  du 
département  du  Nord. 

SiMPLicGiAGus  est  le  nom  d'une  villa  placée  dans  le  Maine 
en  658,  par  un  diplôme  de  Clotaire  III  (9).  Elle  reparait  en 

(t)  Dom  Bouquet,  VIII,  518  b. 
(2)  /Md..  VIII,  547  c. 
(3}  Ibid.,  IX,  454  b. 

(4)  /btd.,  IX,  660  e,  661  a. 

(5)  Migne,  Patrologia  iafina,  t.  CIV,  col.  1007.  Sickel,  Acta,  Kar&linorum, 
t.  Il,  p.  87,  88,  n-  12. 

(6)  Boissieu,  Inscriptions  de  Lyon,  p.  613. 

(7)  Brambach,  n*  406. 

(8)  Ibid.,  n-  1790. 

(9)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  13,  col  1.  Pertz,  Oiplom&tum  im- 
p«ni  tomus  primus,  p.  33,  lignes  40,  41. 


326  LIVRE  II.  CHAPITRE  IL 

862,  dans  un  diplôme  de  Charles  le  Chauve  où  son  nom 
est  écrit  sans  doublement  du  c  de  la  troisième  syllabe, 
Simpliciaco  (1). 

Simplicius,  d'où  Simpliciacus  est  dérivé,  est  un  genli- 
lice  peu  fréquent,  mais  usité  en  Gaule;  ainsi  on  a  trouvé 
en  Gueldre  deux  dédicaces  émanées  de  personnages  qui 
avaient  ce  gentilice.  L'une  a  pour  auteur  Simplicius  Supe- 
rus,  decurio  alae  Vocontiorum  dans  l'année  de  Bretagne  ,;2  ; 
on  sait  que  les  Vocontii  habitaient  Vaison  (Vaucluse)  et  les 
environs.  L'autre  dédicace  a  été  faite  par  Simplicius  Inge- 
nuus  (3).  L'épitaphe  de  Simplicia  Acutilla,  conservée  a 
Milan  (4) ,  nous  ofifre  aussi  un  exemple  du  gentilice  Sim- 
plicius. Dans  d'autres  monuments,  c'est  un  cognomen^. 

SociACus  est  une  villa  qu'un  testament ,  écrit  vers  Tan- 
née 690,  met  en  Vexin  (6).  Un  autre  Sociacus,  qualifié  de 
colonia,  appartenait  à  l'église  Saint-Martin  de  Tours, 
en  862 ,  comme  on  le  voit  par  un  diplôme  de  Charles  le 
Chauve  (7)  ;  on  croit  que  c'est  Sausay,  commune  de  Monl- 
richard  (Loir-et-Cher). 

Sociacus  est  dérivé  de  Socius,  gentilice  peu  commun; 
sa  forme  féminine  nous  est  conservée  par  une  inscrip- 
tion de  Pola,  en  Istrie ,  où  on  lit  les  noms  de  Soda 
Maxima  (8).  La  variante  Soccius  résulte  d'une  inscription 
de  Cherasco  où  l'on  trouve  les  noms  de  Soccia  Modesta  9 . 

Un  gentilice  qui  présente  avec  celui-là  une  grande  res- 
semblance de  son,  et  qui  a  été  beaucoup  plus  fréquent,  est 


(1)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  117,  col.  2. 

(2)  Brambach,  n*  67. 

(3)  Ibid.,  n*  97. 

(4)  C.  /.  L.,  V,  6093. 

(5)  Ibid.,  Xll,  964,  2063. 

(6)  Tardif,  Monuments  historiques^  p.  21,  col.  1. 

(7)  Dom  Bouquet,  VIII,  573  a.  Cf.  Mabille,  La  pancarte  noire  de  Saint- 
Martin  de  Tours,  p.  65,  n'  14,  p.  159,  n*  61,  p.  235. 

(8)  C.  /.  L.,  V,  141. 

(9)  Ibid.,  V,  7678. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  327 

Sosius,  nom  par  exemple  d'un  des  deux  partisans  d'Antoine 
qui,  à  la  bataille  d*Âctium,  commandaient  sa  flotte  (1). 

De  Sosius  on  a  pu  tirer  le  nom  de  lieu  dérivé  Sosiacus 
qui ,  à  une  basse  époque ,  devait  se  confondre  avec  Socia- 
eus.  C'est  par  l'un  ou  l'autre  que  doivent  probablement 
s'expliquer  les  noms  des  trois  Soisy  du  département  de 
Seine-et-Oise ,  de  Soisy  (Seine-et-Marne),  de  Soizé  (Eure- 
et-Loir),  de  Soisy  (Marne). 

De  SoLLEMNiACus ,  par  abus  Solemniacus  ^  dérive  l'ad- 
jectif soUmniacensis,  épithète  d'un  ager  situé  en  Limousin, 
suivant  l'acte  de  fondation  de  l'abbaye  de  Solignac  (Haute- 
Vienne)  par  saint  Eloi,  en  631  (2)  ;  Solignac  est  une  forme 
moderne  de  Sollemniacus  (3).  Un  autre  ager  SolemniacensiSf 
situé  dans  le  Tonnerrois ,  est  mentionné  dans  un  acte  de 
Vigile,  évêque  d'Auxerre,  en  faveur  de  l'abbaye  de  Notre- 
Dame  ,  fondée  par  lui  près  de  cette  ville ,  vers  680  (4)  ;  on 
l'a  reconnu  dans  Soulangy ,  commune  de  Sarry  (Yonne). 
Une  villa  Sollemniacus ,  située  en  Anjou ,  aujourd'hui  Sou- 
langé  (Maine-et-Loire) ,  fut  donnée  à  l'abbaye  de  Saint- 
Maur-sur-Loire,  par  Charles-le-Chauve  en  850  (5).  Un  titre 
de  la  cathédrale  de  Lyon  appelle  Solemniacus  Soleymieux 
^Loire),  et  quoique  ce  document  soit  sans  date  et  ne  soit 
conservé  qu'en  copie  du  seizième  siècle ,  il  parait  conser- 
ver une  ancienne  tradition  (6).  Nous  ne  savons  où  était  si- 
tuée la  villa  Sollempniacus  donnée  à  Tabbaye  de  Cluny  au 
commencement  du  dixième  siècle  (7). 

(1)  Velleius  Paterculus,  liy.  II,  c.  85,  §  2;  cf.  c.  86,  {  3.  8ur  le  gentilice 
Sosius,  voyez  Pauly,  Real-Encyclopaedie.  t.  VI,  p.  1329,  1330. 
(21  Pardessus,  Diplomata,  t.  II.  p.  11. 

(3)  Voir,  sur  la  même  abbaje,  un  diplôme  de  Louis  le  Débonnaire  en  817 
Dom  Bouquet,  VI,  504);  son  nom  est  écrit  avec  deux  2  :  Sollemniacus;  cf. 
Sickel,  Acta  Karolinorurriy  t.  II,  p.  117,  n«  111. 

(4)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  153.  Quantin,  Cart.  de  VYonne,  t.  I, 
p.  19,  596. 

(5)  Tardif,  Monuments  histoHques,  p.  103,  col.  2.  Port,  Dict.  de  Maine- 
et-Loire,  t.  III,  p.  541. 

(6)  A.  Bernard ,  Cart.  de  Savigny^  t.  II,  p.  1055. 

(7)  Bruel,  Rec.  des  chartes  de,.,  Cluny,  t.  I,  p.  165. 


328  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

Solemniaous^  ou  mieux  Sollemniacus ,  dérive  de  Sollem* 
nius,  gentilice  assez  rare.  Une  inscription  d'Arabie  nous  a 
conservé  les  noms  de  Cl.  SoUemnius  Pac[atianus] ,  legatm 
AugusH  pro  praetore  (1).  On  a  trouvé  dans  une  inscription 
de  la  Bavière  rhénane,  la  mention  d*une  femme  appelée 
Sollemnia  Justa  (2).  L*épitaphe  de  Solemnius  Fidus  parait 
e^ster  encore  à  Lyon  (3). 

^SoLiACus  est  le  nom  de  lieu  que  suppose  Fadjectif  ^ofad- 
censis  dans  le  livre  second  des  miracles  de  saint  Benoit. 
écrit  au  temps  d'Archambauld  de  Sully,  archevêque  de 
Tours ,  980-1007  (4).  Ce  castrum  est  aujourd'hui  Sully-sur- 
Loire  (Loiret).  Un  autre  Soliacus^  moins  connu,  aujour- 
d'hui Souillac  (Lot) ,  est  mentionné  en  962  dans  le  testa- 
ment de  Raimond  !•',  comte  de  Rodez  (5).  Soliacus^ 
aujourd'hui  Souillé  (Sarthe) ,  apparaît  dans  un  titre  de 
l'église  du  Mans  qui  daterait  de  572  (6). 

Soliacus  paraît  dériver  de  Solius,  gentilice  conservé  par 
une  inscription  du  musée  de  Mannheim  qui  nous  apprend 
les  noms  de  P.  Solius  Suavis  (7).  Cependant,  l'orthogra- 
phe la  plus  fréquente  est  SoUius  par  deux  L  L.  SoUius  Se- 
cundo, dans  une  inscription  de  Vérone  (8);  M.  SoUius  At 
tiens,  dans  une  inscription  de  Nerelo,  Italie  centrale  (9.; 
SoUia  Salvia,  à  Milan  (10);  G.  SoUius  Marculus  et  G.  Sol- 
lius  Marcus,  à  Grenoble  (11);  Sex  SoUius  Demosthenianus, 


(1)  C.  /.  L.,  t.  m,  n*  94;  AddiUmenta,  p.  969. 

(2)  Brambach,  n*  1764. 

(3)  Boissieu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon,  p.  299. 

(4)  E.  de  Certain,  Les  miracles  de  saint  Benoit,  p.  107  ;  ci.  Dom  Bouquet, 
IX,  140  c. 

(5)  Dom  Bouquet,  IX,  727  c. 

(6)  Pardessus,  Diplomata^  t.  I,  p.  136. 

(7)  Brambach,  1382. 

(8)  C.  /.  L..  V,  3469. 

(9)  Ibid.,  IX,  5155. 

(10)  Ibid.y  V,  6094. 

(11)  Allmer,  Inscriptions  antiques  de  Vienne,  t.  I,  p.  329. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUB  AU  MOYEN  AGE.  329 

à  Cheyssieu  (Isère)  (1)  ;  M.  SoUius  Marcellus  et  G.  SoUius 
Verus,  à  La  Chapelle-Blanche  (Savoie)  (2). 

Solicums  ou  * Solliacus,  dérivé  de  Solius  ou  de  SoUius, 
a  donné  les  noms  de  communes  :  Souillac  (Lot),  dont  le 
diminutif  est  Souillaguet,  même  département  ;  Souillé  (Sar- 
the);  Souilly  (Meuse)  (3)  ;  enfin  six  Sully,  savoir  :  deux  dans 
le  Ldiret ,  les  autres  dans  les  départements  du  Calvados , 
de  la  Nièvre,  de  l'Oise,  de  Saône-et-Loire.  Un  des  Sully 
du  Loiret  a  donné  son  nom  au  célèbre  ministre  de  Henri  IV. 
Nous  ne  savons  duquel  des  villages  appelés  Sully  M.  Sully 
Prudhomme  tire  la  première  partie  de  son  nom;  cet  aima- 
ble poète  ignore  probablement  sa  parenté  grammaticale  avec 
un  écrivain  antique  :  dans  les  derniers  temps  de  l'empire 
romain,  SoUius  d'où  Solliacus  =  Sully  était  le  gentilice  du 
poète  Sidoine  Apollinaire  (430-488),  qui  s'appelait  C.  SoUius 
ApoUinaris  Sidonius,  qui  appartenait  à  une  famille  noble 
de  Lyon  et  qui  fut  évoque  de  Clermont  (4). 

Tauwacus,  noté  Tauryaous.  est  une  villa  de  l'Orléanais 
donnée  à  l'abbaye  de  Saint-Denis  par  Dagobert  P',  en 
635  (5).  Un  second  Tauriacus ,  situé  dans  le  Maine ,  est 
mentionné  dans  un  diplôme  donné  par  Glotaire  III, 
en  658  ;  c'était .  dit  ce  diplôme ,  une  villa ,  propriété  de 
l'abbaye  de  Saint-Denis  et  détenue  indûment  par  un 
tiers  (6);  ce  Tauriacus  est  peut-être  le  même  que  celui 
dont  il  est  question  en  615 ,  dans  le  testament  de  Ber- 
tramne ,  évoque  du  Mans  (7).  Un  troisième  Tauriacus  ap- 

■ 

(1)  Allmer,  InBcHptions  antiques  de  Vienne,  t.  III,  p.  100. 

(2)  Allmer,  ibid.,  t.  III,  p.  470.  Quelques  autres  SoUius  sont  mentionnés 
dans  le  t.  XII  du  C.  1.  L, 

(3)  M.  Liénard,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  la  Meuse, 
p.  i27,  propose  de  rapporter  à  Souilly  la  monnaie  mérovingienne  ob  Ton 
trouve  la  légende  SauHaco  vico.  Mais,  dans  tous  les  autres  textes  qu'il  cite, 
le  nom  de  Souilly  est  écrit  avec  o  et  non  au. 

(4)  Teuffel,  Geschichte  der  roemischen  Literatur,  3*  édition,  p.  1100, 

(5)  Pertz,  Diplomatum  imperii  tomus  primus^  p.  18,  1,  22. 

(6)  Pertz,  ÎMd.,  p.  33,1.  41,  44. 

(7)  Pardessus,  Diplomala,  t.  I,  p.  210. 


330  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

partenait  à  l'abbaye  de  Saint-Martin  de  Tours;  nous  en 
trouvons  la  première  mention  dans  un  diplôme  de  Charle- 
magne  en  775  (1)  ;  son  nom  reparait  dans  deux  diplômes 
de  Charles  le  Chauve  en  862  ;  l'un  de  ces  diplômes  nous 
apprend  que  cette  villa  était  située  en  Touraine  (2).  Une 
quatrième  villa  de  ce  nom  appartenait  à  l'abbaye  de  Sainte- 
Colombe  de  Sens,  comme  le  constate  un  diplôme  de  Louis 
le  Débonnaire  en  836  (3).  Un  cinquième  Tauria^cus  était  si- 
tué dans  le  diocèse  de  Rodez  ;  l'abbaye  de  Joncelle  y  avait 
une  église  dans  la  possession  de  laquelle  elle  fut  confirmée 
par  un  diplôme  du  roi  Raoul  en  891  (4). 

Tauriacus  dérive  de  Taurins.  Ce  gentilice ,  bien  qu'as- 
sez rare ,  apparaît  déjà  avant  la  fin  de  la  république  ro- 
maine ,  dans  une  inscription  de  Carthagène ,  où  se  lisent 
les  noms  de  L.  Taurins  Aefolan[us] ,  c'est-à-dire  originaire 
d'Aefula,  dans  le  Latium  (5).  P.  Taurins  Secundus  figure 
dans  une  inscription  trouvée  près  d'Aquilée  (6)  ;  C.  Tau- 
rins Ursinus ,  dans  une  inscription  des  environs  d'Esté  (7). 
Une  épitaphe  trouvée  à  Viel-Arzew ,  en  Afrique ,  nous  fait 
connaître  les  noms  de  Taurins  Senecio  (8). 

Tauriacus  est  devenu  dans  le  midi  de  la  France  Tauriac, 
nom  de  quatre  communes ,  savoir  :  deux  dans  l'Aveyron , 
un  dans  chacun  des  départements  de  la  Gironde  et  du  Lot. 
On  doit  probablement  attribuer  la  même  origine  aux  deux 
Thoiré  du  département  de  la  Sarthe  ;  aux  trois  Thoiry  de 
l'Ain ,  de  la  Savoie  et  de  Seine-et-Oise  ;  à  Thoré  (Loir-et- 
Cher)  ;  à  cinq  Thorey ,  dont  trois  dans  la  Côte-d'Or ,  un 


(1)  Dom  Bouquet,  V,  737  c ,  où  Ton  a  imprimé  T&uciacus,  Cf.  Habille ,  U 
pancaWe  notre  de  Saint-Martin  de  Tours^  p.  69,  n*  18;  p.  151,  n«  18;  p.  236, 
col.  1. 

(2)  Dom  Bouquet,  VIII,  576  e;  cf.  573  a. 

(3)  Dom  Bouquet,  VI,  611  a  ;  cf.  Sickel,  Acta  Karolinorum ,  t.  II,  p.  VA, 
n*  347. 

(4)  Dom  Bouquet,  IX,  456  a. 

(5)  C.  /.  L.,  t.  I,  p.  564,  n*  1555;  t.  II,  n*  3408. 

(6)  /6id.,  V,  8253. 

(7)  Ibid.,  V,  2702. 

(8)  Ibid.,  VIII,  9765. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACU8  AU  MOYEN  AGE.  331 

dans  chacun  des  deux  départements  de  Meurthe-et-Moselle 
et  dTonne  ;  à  deux  Thoury  (Loir-et-Cher,  Seine-et-Marne)  ; 
à  Thuré  (Vienne)  ;  Thurey  (Doubs,  Saône-et-Loire)  ;  à  cinq 
Thury ,  sur  lesquels  deux  dans  l'Oise ,  un  dans  chacun 
des  départements  du  Calvados,  de  la  Côte-d'Or  et  de 
TYonne  (1)  ;  enfin  trois  Toury  dont  un  dans  TEure-et- 
Loir  (2),  les  deux  autres  dans  la  Nièvre  (3).  Cela  forme  un 
total  de  vingt-huit  noms  de  communes  dérivés  du  gentilice 
Taurins  qui  paraît  avoir  été  fort  répandu  en  Gaule  à 
Tépoque  romaine. 

Tauricciacus  est  une  villa  mentionnée  dans  un  juge- 
ment du  roi  Clotaire  III,  en  638  (4). 

Tauricciacus  dont  le  c  a  été  doublé  pour  représenter  le 
double  son  qu'avait  pris  le  c  en  s'assibilant,  dérive  de  Tau- 
ricius,  gentilice  conservé  :  1**  par  une  inscription  dédicatoire 
c[ui  a  été  jadis  trouvée  dans  un  endroit  inconnu,  sur  les 
bords  du  Rhin  inférieur,  et  qui  contient  les  noms  de 
C.  Tauricius  Verus  (5),  2**  par  une  inscription  de  Lyon  où 
se  trouvent  les  noms  de  L.  Tauricius  Florentins  (6). 

De  Tauricius  on  forma  le  dérivé  Tauriciacu^,  par  lequel 
s'expliquent  les  noms  :  de  trois  communes  appelées  Torcé 
(lUe-et- Vilaine ,  Mayenne ,  Sarthe)  ;  de  Torcieu  (Ain)  ;  de 
de  neuf  communes  du  nom  de  Torcy  :  deux  dans  l'Aube , 
deux  dans  la  Seine-Inférieure,  les  cinq  autres  dans  TAisne, 
la  Côte-d'Or,  le  Pas-de-Calais,  Saône-et-Loire,  Seine-et- 
Marne;  de  Torsac  (Charente);  de  Torciac  (Haute-Loire); 


(1)  Thury  (Yonne),  s'est  d'abord  appelé  Tauriacus.  Quantin,  Dictionnaire 
topographique  du  département  de  l'Yonne,  p.  128. 

(2)  Thauriacus,  vers  1020.  Merlet,  Dictionnaire  topographique  du  dépar- 
tement d'Eure-et-Loir,  p.  180. 

(3)  Toury-sur-Abron  (Nièvre)  est  appelé  Tauriacus  par  une  charte  de 
l'année  1103.  Soultrait,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  la 
Nièvre,  p.  181. 

(4)  Tardif,  Monuments  HistoriqueSy  p.  12,  col.  2.  Pertz,  Diplomatum  tm- 
perii  tomus  primus,  p.  32,  1.  44. 

(5)  Brambach,  n*  1993. 

(6)  Boissieu,  Inscriptions  de  Lyon^  p.  259. 


332  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

de   Torxé   (Charente-Inférieure).   Le   total    de    ces    noms 
s'élève  à  seize  (I). 

faurmociw,  nom  d'un  viens  du  diocèse  de  Tours  où  une 
église  aurait  été  construite  par  ordre  de  Tarchevêque  Eu- 
phronius  (556-573)  (2)  est  une  variante  de  Tauriciacus  ou 
dérive  d'un  gentilice  *Taurisius. 

Tauriniacus  est  un  nom  de  lieu  mentionné  vers  l'année 
700  dans  le  testament  d'Erminthrude  qui  est  daté  de  Pa- 
ris (3)  et  qui  parait  concerner  des  biens  situés  à  peu  de 
distance  de  cette  ville.  Vers  la  même  époque ,  c'est-à-dire 
en  692 ,  Aiglibert ,  évéque  du  Mans ,  dispose  des  dîmes  de 
plusieurs  églises,  entre  autres  Tauriniacus^  qui  paraît  ici 
être  le  nom  d'une  paroisse  de  son  diocèse  (4). 

Tauriniacus  dérive  du  gentilice  Taurinius  dont  nous  ne 
pouvons  citer  que  deux  exemples,  ce  sont  les  épilaphes 
de  Taurinius  Montanus,  à  Augsbourg  (5),  et  de  L.  Taurinius 
Aurelius,  à  Nimes  (6).  Taurinius  est  dérivé  de  Taurinus, 
surnom  que  l'on  rencontre  quelquefois  ;  par  exemple, 
dans  une  inscription  de  Fontaine,  près  Grésy-sur-Isère  (7), 
et  qui  est  identique  à  un  nom  de  peuple  Ligure,  de  l'Italie 
du  nord-ouest  :  tout  le  monde  a  entendu  parler  des  Tau- 
fini  dont  Turin  conserve  le  souvenir  dans  la  nomenclature 
géographique  de  l'Europe  moderne. 

Tau/riniacuLs  est  le  nom  primitif  de  dix  communes  de 
France;  cinq  Thorigné  (Ille-et-Vilaine ,  Maine-et-Loire, 
Mayenne  (8),  Sarthe,  Deux-Sèvres);  quatre  Thorigny (Seine- 


(1)  Cf.  Longnon,  Examen  géographique  du  tome  premier  des  diplomàta, 
imperii,  p.  36. 

(2)  Grégoire  de  Tours,  livre  X,  c.  31  ;  édit.  Amdt,  p.  448,  1.  5.  Les  précé- 
dents éditeurs  avaient  préféré  la  variante  Tauriacus. 

(3)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II ,  p.  256 ,  257.  Tardif,  Monuments  histori- 
ques, p.  33. 

(4)  Pardessus,  Diplom&ta,  t.  II,  p.  226. 

(5)  C.  /.  L..  III,  5820. 

(6)  Ibid.,  XII,  3361. 

*  (7)  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne^  t.  II,  p.  227. 
(8)  M-   L,  Maître,  Dictionnaire   topographique  du   département  de  Is 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUB  AU  MOYEN  AGE.  333 

et-Marne,  Deux-Sévres,  Vendée,  Yonne);  Torigny  (Manche)» 
La  forme  romaine  correspondant  au  gallo-romain  Tauri-- 
niacus  est  Tauriniomus,  nom  de  lieu  mentionné  en  871 
dans  un  diplôme  de  Charles  le  Chauve  qui  approuve  la 
fondation  du  monastère  de  Saint-André  au  diocèse  d'Elne, 
Pyrénées  Orientales  (1)  ;  c'est  peut-être  Taurinya  (Pyrénées- 
Orientales).  Le  nom  des  deux  communes  de  Taurignan 
(Ariège) ,  est  mieux  conservé. 

TuRiLiACus  est  le  nom  d'un  villare  situé  en  Vexin  et 
donné  à  l'abbaye  de  Saint-Denis  vers  Tannée  690  par  le 
testament  du  fils  d'Idda  (2). 

Turiliacus  est  dérivé  de  Turelius ,  gentilice  rare ,  mais 
dont  on  rencontre  les  variantes  Turellius  et  Turillius.  Un 
certain  Turelius  Flavinus  était,  en  Tan  188  de  notre  ère, 
curiale  à  Savaria,  aujourd'hui  Stein-am-Anger  en  Hon- 
grie (3).  L'épitaphe  de  M.  Turellius  Maximus  a  été  trouvée 
à  Guelma,  en  Algérie  (4)  ;  celle  de  Turillius  Caeso  est  con- 
servée au  musée  de  Vérone  (5)  ;  celle  de  Turillius  Amian- 
tus  a  été  trouvée  à  Montelione,  dans  l'Italie  méridio- 
nale (6). 

C'est  par  Turiliacus^  dérivé  de  Turelius,  que  s'expli- 
quent les  noms  de  Tourliac  (Lot-et-Garonne)  et  de  Tourly 
(Oise). 

Vassiacus  ,  nom  de  Vassy  (Haute-Marne) ,  dans  la  vie  de 
saint  Berchaire,  écrite  par  Adson,  à^la  fin  du  dixième  siè- 
cle (7) ,  est  dérivé  de  Vassius ,  gentilice  dont  les  inscrip- 

tfayeriTM,  p.  312,  donne  deux  exemples  de  la  diphtongue  tLU  à  la  première 
syllabe  du  nom  de  ce  viUage;  7aurtntacu«,  douzième  siècle;  Taurigné , 
1217;  TuriniSLcuSf  802,  est  probablement  une  mauvaise  leçon. 

(1)  Dom  Bouquet,  VIII,  637  a. 

(2)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  21 ,  col.  2.  Pardessus,  DiplomàU^ 
t.  II,  p.  211. 

(3)  C.  I.  L.,  III,  4150. 

(4)  Ibid.,  VIII,  5466. 

(5)  ma.,  V,  8825. 

(6)  Ibid.,  X,  85. 

(7)  Migne,  P&trologia  laiina,  t.  XXII,  p.  137,  col.  683  A. 


334  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

tions  romaines  d'Italie  nous  offrent  quelques  exemples  (i). 
Ce  gentilice  est  dérivé  du  thème  gaulois  vasso-, 

ViCTOR^ACus  est  le  nom  d'une  forteresse,  castrum,  qui 
servit  de  retraite  à  Munderic,  prétendant  à  la  royauté,  vers 
532  (2)  ;  M.  Longnon  pense  que  ce  castrwm  est  Vitry-le- 
Brûlé  (Marne)  (3).  Un  second  Victoriacus  était  situé  prés 
d'Arras  ;  c'était  au  sixième  siècle  une  villa  publica  servant 
quelquefois  de  résidence  aux  rois  des  Francs  :  Clotaire  II  y 
épousa  sainte  Radegonde  en  538  (4)  ;  Sigebert  I  y  fut  assas- 
siné en  575  par  deux  émissaires  de  Frédégonde  (5)  ;  en  584, 
Chilpéric  donna  Tordre  d'y  élever  son  fils  nouveau-né  (6). 
Un  troisième  Victoriacus  était  situé  près  de  Brioude  ;  il  est 
qualifié  de  castrwm  en  825,  dans  un  diplôme  de  Louis  le 
Débonnaire  (7). 

Victoriacus  dérive  de  Victorius ,  gentilice  qui  existe  déjà 
sous  la  république.  En  Tannée  194  avant  notre  ère,  Q. 
Victorius,  centurion  de  la  seconde  légion,  se  distingua 
dan»  une  bataille  contre  les  Gaulois  (8).  Sous  Tempire,  vers 
la  fin  du  premier  siècle  de  Tére  chrétienne,  Quintilien  dé- 
dia à  Victorius  Marcellus  ses  douze  livres  Institution^  ora- 
toriae.  Ce  gentilice  se  rencontre  dans  les  inscriptions.  On 
a  trouvé  à  Altenbourg,  en  Hongrie,  Tépitaphe  du  vétéran 


(1)  C.  /.  L.,  IX,  2015,  2016,  4366,  4447, 4937;  XIV,  2964.  On  trouve  en  Gaule 
les  dérivés  Vassetius,  C.  /.  L.,  XII,  4163,  et  VassiUius,  ibtd.,  2746,  2857. 

(2)  Historia.  Francorurrit  livre  III,  c.  14.  M.  Amdt,  p.  120, 1.  24,  a  imprimé 
Victuriaci  castn,  au  génitif,  pour  Victori&ci  castri,  avec  Vu  tenant  lieu  d*o, 
qu'on  rencontre  si  souvent  à  l'époque  mérovingienne. 

(3)  Géographie  de  la,  Gaule  au  sixième  siècle^  p.  409,  410. 

(4)  Fortunat,  Vie  de  sainte  Radegonde^  livre  I,  c.  2.  Dom  Bouquet,  t.  III, 
p.  456  c  ;  édition  Krusch,  t.  II,  p.  39,  1.  8. 

(5)  «  Villam  cui  nomen  est  Vtc(urtacon.  Grégoire  de  Tours,  Historia 
Francorum,  1.  IV,  c.  51  ;  édition  Arndt ,  p.  186,  1.  15;  cf.  1.  V,  c.  1,  ibid,, 
p.  191 ,  I.  14«  Jonas,  Vita  §ancti  Columbani^  c.  31  ;  Dom  Bouquet,  t.  III, 
p.  478  b,  c. 

(6)  Grégoire  de  Tours,  Historia  Francorunit  livre  VI,  <î.  41  ;  édit  Aradt, 
p.  281.  1.  19,  20. 

(7)  Dom  Bouquet,  VI,  547  b;  et.  Sickel,  Acta  Karolinorum ,  t.  II,  p.  U9 
n*216. 

(8)  Tite-Ldve,  Uvre  XXXIV,  c.  46. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  335 

G.  Victorius  Urso  (1).  Le  musée  de  Wiesbaden  possède 
une  dédicace  à  Jupiter  par  G.  Victorius  Januarius  (2)  ;  le 
musée  de  Trêves,  une  dédicace  à  la  déesse  Calva,  par 
M.  Victorius  PoUentinus,  monument  gravé  Tan  124  de  no- 
tre ère  (3).  On  a  trouvé,  à  Huttich,  en  Hesse  rhénane ,  Tépita- 
phe  du  vétéran  Victorius  Cassianus  (4).  Une  inscription  de 
Lyon  a  conservé  les  noms  de  deux  femmes  qui,  toutes 
les  deux,  avaient  le  gentilice  Victoria;  elles  y  joignaient, 
l'une,  un  surnom  commençant  par  les  trois  lettres  Lam.; 
la  seconde,  fille  de  la  première,  le  surnom  de  Novella  (5). 
Le  musée  de  Narbonne  possède  le  signaculum  de  G.  Vic- 
torius Verinus  (6). 

Le  nom  de  lieu  Victoriaous ,  dérivé  de  Victorius ,  paraît 
avoir,  dès  le  neuvième  siècle,  perdu  dans  la  prononciation 
To  de  la  seconde  syllabe,  témoin  les  distiques  d'Ermoldus 
Nigellus  dans  son  poème  sur  Louis  le  Débonnaire  : 

Aurelianenses  sensim  dehinc  visitât  agros , 
Victriacum  villam  jam  pius  ingreditur  (7) 

En  règle  générale ,  dans  la  langue  moderne  de  la  France, 
Yictoriacus  perd  Vo  de  la  seconde  syllabe.  Il  devient  Vi- 
trac  dans  le  Midi  ;  c'est  le  nom  de  cinq  communes,  Avey- 
ron,  Cantal,  Gharente,  Corrèze,  Dordogne,  Puy-de-Dôme. 
Dans  le  Nord,  la  désinence  varie  :  Vitray  est  le  nom  d'une 
commune  du  département  de  l'Orne  ;  on  compte  deux  com- 
munes de  Vitray  dans  l'Eure-et-Loir,  une  dans  l'Allier;  i 
y  a  une  commune  de  Vitré  dans  Tllle-et- Vilaine,  une  autre 
dans  les  Deux-Sèvres;  le  Jura  nous  offre  la  variante  Vi- 
treux; Meurthe-et-Moselle  et  la  Haute-Saône  ont  chacun 


(1)  C.  /.  L.,  m,  4489. 

(2)  Brambach,  n»  1452. 

(3)  ma.,  n*  853. 

(4)  iWd.,  n*  1064. 

(5)  Boissieu,  p.  507,  n*  24. 

(6)  C.  /.  L.,  XII,  5690,  129. 

fî)  De  rébus  gestie  Ludovid  Pii,  livre  III,  vers  275, 276.  Dom  Bouquet,  VI, 
43  b,  n  s'agit  de  Vitry-aux-Loges  (Loiret). 


336  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

une  commune  de  Vitrey.  La  forme  la  plus  fréquente  est 
Vitry  ;  ce  nom  est  porté  par  douze  communes  :  trois  dans 
chacun  des  départements  de  la  Marne  et  de  Saône-ei- 
Loire,  deux  dans  la  Haute-Marne,  les  quatre  autres  dans 
TAube ,  le  Loiret ,  le  Pas-de-Calais  et  la  Seine.  Le  nombre 
total  des  communes  dont  le  nom  offre  une  forme  moderne 
du  primitif  Victoricums  est  de  vingt-six. 

ViLLiACus ,  Villy  (Yonne) ,  au  douzième  siècle  (1) ,  noté 
Viliacus  par  une  seule  l  dans  deux  chartes  de  Saint-Hugue 
de  Grenoble ,  au  neuvième  siècle  (2) ,  où  il  représente  Vi- 
lieux  (Isère),  est  dérivé  de  Villius ,  gentilice  romain  qui  se 
rencontre  six  fois  chez  Tite-Live  et  qui  fut  principalement 
illustré  par  P.  Villius  Tappulus,  consul  Tan  200  avant  J.-C.(3). 

A  Villiaous  correspondent  le  dérivé  ligure  Vil[l]ioscus, 
aujourd'hui  Vilhosc  (Basses-Alpes)  (4),  et  le  dérivé  latin 
FÏZ[f|fanu5,  nom  d'une  localité  située  en  Italie,  aux  en- 
virons de  Modène,  suivant  une  charte  de  1041  (5). 

ViNGiAGus  est  un  lacus  situé  aux  environs  de  Cambrai  et 
où  Charles  Martel  battit  Chilpéric  II  et  Rainfroi ,  maire  de 
Neustrie  en  717  (6).  La  même  localité  reparait  dans  un  di- 
plôme faux  de  Dagobert  I"  (7).  C'est  aujourd'hui  Vincy, 
commune  de  Crèvecœur  (Nord)  (8). 

Le  bas  latin  Vinciaous  est  dérivé  de  Vintius  ou  de  Ven- 
dus. Une  inscription  de  l'Italie  méridionale  nous  fait  con- 
naître les  noms  de  l'affranchi  M.  Vintius  Acceptus  et  de  sa 


(t)  Quantin,  Car<.  de  VYonn^  t.  Il,  p.  190. 

(2)  CartuUire  de  Saint-Hugues  de  Grenoble,  p.  10,  73. 

(3)  Sur  le  gentilice  Villius,  voyez  Pauly,  Real-Bncyclopaediey  VI,  p.  2611- 
2613. 

(4)  Qnérard,  Cart.  de  Saint-Victor  de  Marseille,  t.  II,  p.  65,  70. 

(5)  Tiraboschi,  Memorie  storiche  Modenesi,  t.  II,  preuves,  p.  37. 

(6)  Continuation  de  Frédégaire,  c.  106.  Chez  Dom  Bouquet,  II,  454  a,  cf. 
Paul  Diacre,  De  Gestis  Langobardorum,  livre  VI,  c.  42;  ibid.,  p.  639  a. 

(7)  Pertz,  Diplomatum  imperii  tomus  primus,  p.  168, 1.  21  ;  cf.  Pardanns, 
Diplomaê^  t.  II,  p.  5& 

(8)  Longnon,  Examen  géographique,  p.  39. 


LA  DÉ8INBNGE  -I-ACU8  AU  MOYEN  AQE.  337 

patronne  Vintia  Satumia  (1)  ;  et  une  inscription  de  Die , 

« 

ceux  de  Sex.  Vendus  Juventianus  (2). 

Il  y  a  en  France  trois  communes  dont  le  nom  dérive  du 
bas  latin  Vinciacus.  Ce  sont  Vincey  (Vosges),  Viucy  (Aisne), 
et  Vincy  (Seine-et-Marne). 

ViNBiciACus  est  le  nom  d'une  localité  d'Auvergne  où  Ton 
battit  monnaie  à  l'époque  mérovingienne  ainsi  que  l'atteste 
la  légende  monétaire  Vindiciaco  (3).  Ce  nom  de  lieu  a 
donné  le  dérivé  vindiciacensis ,  épithëte  de  domus  dans  un 
manuscrit  des  Vitas  pairum  de  Grégoire  de  Tours  (4).  Dans 
le  passage  de  Grégoire  de  Tours  dont  il  s'agit  ici,  c'est  en- 
core d'une  localité  d'Auvergne  qu'il  est  question. 

Vindiciacus  est  dérivé  de  Vindicius.  Vindicius  est  le  nom 
deTeselave  qui,  à  Rome,  l'an  509  avant  J.-C,  découvrit 
une  conspiration  pour  le  rétablissement  de  la  royauté  (5). 
Vindicius,  sous  l'empire,  est  un  gentilice  que  l'on  rencon- 
tre dans  quelques  inscriptions  ;  exemple  :  en  Afrique ,  les 
noms  de  femme  Vindicia  Theodora  (6),  Vindicia  Victo- 
rina  (7);  à  Lyon ,  le  nom  de  femme  Vindicia  Luperca  (8). 
On  trouve  aussi  le  nom  d'homme  P.  Vindicius  (9). 

Vindecy  (Saône-et-Loire)  est  probablement  un  ancien 
Vindiciacus. 

Certains  manuscrits  de  Grégoire  de  Tours  écrivent  vin- 
DucENSis  l'adjectif  dérivé  dont  nous  avons  cité  la  leçon 
vindiciacensis,  Vindiacensis  suppose  un  nom  de  lieu  Vindia- 


il)  c.  /.  L.,  X,  431 . 

(2)  Herzog,  G^lliae  Narbonensis,,.  historia,  t.  Il,  p.  97,  n*  453. 

(3)  A.  de  Barthélémy,  dans  la  Bibliothèque  de  l'Ecole  des  chartes,  t.  XXVI, 
p.  464,  n«  707. 

(4)  G.  12,  {  3.  Bordier,  Les  livres  des  miracles,  t.  III,  p.  296.  Comparez 
Amdt  et  Knuch ,  p.  713 ,  1.  33 ,  et  Longnon ,  Géographie  de  la  Gaule  au 
sixième  siècle,  p.  517. 

(5)  Tite-Live,  livre  II,  c.  5,  i  10. 

(6)  C.  /.  L.,  VIII,  112. 

(7)  JWd.,  VIII,  323. 

(8)  Boissieu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon,  p.  527. 

(9)  Allmer,  Revue  épigraphique,  t.  I,  n*  209. 

22 


338  LIVRE  II.  CHAPITRE  II. 

eus,  dérivé  lui-même  de  Vindius.  Tandis  que  Vindicixis,  dé 
rivé  de  Vindex ,  est  rorigine  latine ,  Vindius  paraît  d'ori- 
gine gauloise  et  dérivé  de  Tadjectif  vindos  qui ,  dans  cette 
langue,  a  dû  signifier  «  blanc,  »  et  par  extension  «  beau, 
heureux.  »  On  a  trouvé  à  Vérone  une  inscription  votive  à 
Hercule  par  Taffranchi  G.  Vindius  Priscus  (1).  Une  inscrip- 
tion de  Pavie  conserve  les  noms  de  Vindia  Secunda  i?. 
On  a  signalé  près  d*Uzès  (Gard)  Tépitaphe  de  Vindia 
Quartina  (3). 
Vindey  (Marne)  paraît  être  un  ancien  Vindiacus, 

Wakiacus  est  le  nom  d'un  loctts  situé  dans  le  pagus  Tel- 
lau  ,  aujourd'hui  compris  dans  le  département  de  la  Seine- 
Inférieure.  Ce  lociLS  (appartenait  à  Tabbaye  de  Saint-Denis 
en  775,  comme  on  le  voit  par  un  diplôme  de  Charlema- 
gne  (4).  Ce  même  nom  est  écrit  (îManacti^  dans  un  jugement 
rendu^  par  Pépin  le  Bref  en  faveur  de  Tabbaye  de  Saint- 
Denis  vers  Tannée  751 ,  et  où  il  s'agit  évidemment  de  la 
même  localité  (5). 

Wariacus  ou  Guariacus  tiennent  lieu  d'un  primitif  *  Varia- 
eus ,  dérivé  du  gentilice  Varius ,  qui  est  déjà  fréquent  à 
Rome  au  premier  siècle  avant  notre  ère  (6).  Six  Varius  sont 

■ 

mentionnés  dans  les  œuvres  de  Cicéron.  Le  plus  connu 
est  Q.  Varius  Hybrida,  tribun  du  peuple  Tan  91  avant  notre 
ère,  grand  orateur,  très  influent,  et  qui,  après  avoir  com- 
mis deux  assassinats ,  finit  par  le  dernier  supplice  (7).  Le 
poète  tragique  L.  Varius  Rufus  fut  contemporain  de  César 
et  d'Auguste  et  se  rendit  célèbre  par  sa  pièce  intitulée 


(1)  C.  /.  L.,  V,  3228. 

(2)  Ibid.^  V,  6457. 

(3)  /6id.,  XII,  2853. 

(4)  Dom  Bouquet,  V,  734.  a.  Sickel,  AcU  Karoltnorum,  t.  II,  p.  28,  n'  45. 

(5)  Pertz,  Diploma.tum  imperii  tomus  primus ,  p.  109 , 1.  14.  Tardif,  Mo- 
numents historiqueSf  p.  45,  col.  2. 

(6)  Sur  le  gentilice  Varias,  voyez  Pauly,  Real-Encyclopaedie,  t.  VI, 
p.  2380-2382. 

(7)  Cicéron,  De  Or&tore,  liv.  I,  c.  15,  8  117  ;  Bruius,  c.  62,  {  221  ;  De  natura 
deorum,  liy.  II,  c.  33,  |  81. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUBAU  MOYEN  AGE.  339 

Thyestes ,  plus  encore  peut-être  par  sa  liaison  avec  Virgile 
et  Horace  (1).  Un  des  premiers  Romains  qui  portèrent  ce 
nom  en  Gaule  fut  le  propréteur  Varius  Cotylo ,  c'est-à-dire 
«  le  buveur,  »  légat  d'Antoine  en  Gaule,  Tan  43  avant  no- 
tre ère  (2).  Une  inscription  gravée  sur  un  rocher  à  Gros- 
lée  (Ain),  nous  apprend  qu'un  certain  L.  Varius  Lucanus  a 
fait,  dès  la  période  romaine,  les  travaux  de  canalisation  qui 
fournissent  encore  aujourd'hui  de  Teau  de  source  aux  ha- 
bitants de  ce  village  (3).  M.  Varius  Capito ,  étant  préteur 
et  duumvir  à  Narbonne ,  dirigea  avec  son  collègue  des  tra- 
vaux publics  dont  une  inscription,  conservée  au  musée  de 
cette  ville,  perpétue  la  mémoire  (4).  Inutile  de  citer  les  nom- 
breux exemples  qui  attestent  combien  ce  gentilice  fut  ré- 
pandu dans  les  provinces  au  temps  de  l'empire  (5). 

De  Varius  on  a  fait  le  dérivé  *  Variaous  d'où  les  noms  de 
communes  Vayrac  (Lot)  ;  Vairé  (Vendée)  ;  et  Verry  (Meuse), 
ou  mieux  Véry ,  qui  est  en  outre  le  nom  de  trois  hameaux 
(Loire,  Haute-Savoie,  Vaucluse).  La  variante  Guéry,  cor- 
respondant à  l'orthographe  Guariacus  du  diplôme  de  Char- 
lemagne  cité  plus  haut ,  est  conservée  par  le  nom  de  deux 
hameaux  (Cher,  Lot-et-Garonne). 

APPENDICE  A. 

.NOMS  DB  LiBUX  EN  'Ocus  DÉRIVÉS  DB  cognomina  LATINS  EN  ius, 

Dalmatiagus,  au  onzième  siècle  ,  villa  quae  dicitur  Dalmaciaco, 
daas  une  charte  conservée  par  le  Cartulaire  de  Saint-Julien  de 

« 

Brioude  (6) ,  est  un  dérivé  du  cognomen  Dalmatius.  Un  exemple 


(1)  Teaffel,  Geschichte  der  rœmischen  Liter&tur,  3*  édit.,  p.  453,  454. 

(2)  Voyez  les  textes  réunis  par  M.  E.  Desjardins ,  Géogr.  hislor.  et  ad- 
ministrative de  la  Gaule  romaine,  t.  III,  p.  34. 

(3)  Allmer,  Inscript,  de  Vienne,  t.  III,  Y>.  441. 

(4)  Herzog,  Galliae  Narbonensis.,.  hisloria,  t.  II,  p.  8,  n»  16. 

(5)  Voyez  les  Index  du  C.  /.  L.,  t.  III.  V,  VII,  VIII,  IX,  X,  XII. 

(6)  Doniol,  Cart,  de  Brioude ,  p.  190. 


340  LIVRE  II.  CHAPITRE  II.  APPENDICE  A. 

notable  de  ce  cognomen  a  été  donné  par  le  père  de  Tempereur  Pro- 
bus  ;  on  sait  que  Probus  régna  de  276  à  281.  D'autres  exemples 
en  ont  été  réunis  (1).  On  le  rencontre  à  Vienne  (Isère)  dans  deui 
inscriptions  chrétiennes  (2).  A  côté  du  dérivé  gaulois  Dalmatiam^ 
on  trouve  le  dérivé  romain  Dalmatianus,  aujourd'hui  Daumaïao 
(Ariège),  qui  a  été  le  chef-lieu  de  la  Vicaria  Dalmatianensis  (3). 

FiDENTiAGus ,  écrit  Pedentiacus  dans  la  vie  de  Louis  le  Déiwn- 
naire,  dite  de  l'Astronome,  était  alors  le  nom  d'un  comté,  dont 
le  souvenir  est  conservé  par  la  seconde  partie  du  nom  de  Vic-de- 
Fézensac  (Gers)  (4).  Les  comtes  de  Fézensac  ont  eu ,  au  Moyen 
Age ,  une  certaine  notoriété. 

Fidentiactis  est  dérivé  du  cognomen  Fidentius  signalé  dans  ooe 
inscription  romaine  et  qui  fut  porté  par  plusieurs  évâques  aa 
quatrième  et  au  cinquième  siècles  (5). 

*  Maurbntiagus  est  l'orthographe  régulière  d'un  adjectif  dérivé 
du  surnom  Maurentius  et  qui  a  reçu  des  scribes  du  moyen  âge 
une  orthographe  variée.  Ainsi  Maurinciagi  curtis  est  le  nom 
d'une  villa  donnée  à  l'abbaye  de  Saint-Denis  par  un  certain  I^ea- 
ton,  comme  nous  l'apprend  un  diplôme  émané  de  Charles  le 
Chauve  en  844  (6)  ;  la  môme  villa  est  appelée  Morinciaea  curiis 
dans  un  autre  diplôme  de  ce  prince  en  862  (7)  ;  cette  localité  était 
située  sur  l'Oise,  dans  le  comitaius  Camliacensis  ;  c'est  aujourd'hui 
Morancy,  commune  de  Boran  (Oise).  Montmorency  ,  près  de  Pa- 
ris, beaucoup  plus  connu  dans  la  seccmdd  partie  du  moyen  âge  et 
à  l'époque  moderne,  fait  son  apparition  dans  Thistoire  au  dixième 
siècle  ;  il  fut  assiégé  par  l'empereur  Othon  II  en  978  (8). 

*  Maurentiacus  dérive  du  cognomen  Maurentius  employé  seul 
dans  des  documents  de  basse  époque  où  généralement  les  genti- 
lices  étaient  tombés  en  désuétude.  C'est  ainsi  que  sous  Diodétien, 


(1)  De- Vit,  Onom&sticon,  t.  Il,  p.  554, 

(2)  C.  I.  L.,  XII,  2069,  2141. 

(3)  Molinier,  Géogr.  histor,  de  la,  province  de  Languedoc,  col.  189. 

(4)  Longnon,  Atl&s  historique  de  la  France,  p.  152-153,  résume  stram- 
ment  la  plus  ancienne  histoire  de  ce  comté. 

(5)  De- Vit,  .Onowiashcon ,  t.  III,#p.  65. 

(6)  Tardif,  Monuments  historiques,  n»  147,  p.  97,  col.  i. 

(7)  Tardif,  Ibid.,  n*  186,  p.  119,  col.  1. 

(8)  GestA  consulum  andegavensium,  Dom  Bouquet,  X,  249  a. 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  341 

284-305,  le  chrétien  Maurentius  fut  martyrisé  à  Fossombrone,  en 
Ombrie  (1).  A  Trieste  existe  encore  Tépitaphe  d'un  certain  Mau- 
rentius» mort  en  571  (2);  celle  de  Maurentius  Fabricensis,  con- 
servée à  Spalatro,  en  Dalmatie  (3),  ne  remonte  pas  non  plus  aux 
premiers  sièdes  de  l'Empire  romain. 

Morancé  (Rhône)  est  probablement  un  ancien  *MaurentiactiS. 
Morenchies  (Nord)  suppose  un  primitif  *  Maurenliacas  villas.  Mo- 
raacez  (Eure-et-Loir) ,  écrit  Morentiae^  en  1110 ,  suppose  un  pri- 
mitif *  Maxirtniiacaij  sous-entendu  domus  ou  villas,  et  cette  forme 
persiste  dans  Torthographe  actuelle,  tandis  que  la  variante  Moren- 
ciaeum ,  pour  * Maurentiacus  funditSy  est  tombée  en  désuétude  (4). 

Patrigiaqus,  nom  de  villa  duquel  dérive  celui  de  Vager  patrida- 
ctnsis^  situé  dans  TAutunois  au  neuvième  siècle  »  comme  nous 
rapprennent  deux  diplômes,  l'un  de  Pépin ,  roi  d'Aquitaine,  eu 
838  (5),  l'autre  de  Louis  le  Débonnaire,  en  839  (6),  désigne,  dans 
ces  documents,  Perrecy  (Saône-et-Loire)  ;  le  même  nom  reparaît, 
en  885 ,  dans  un  diplôme  de  Charles  le  Gros  pour  les  chanoines 
de  Saint-Marcel  de  Chalon-sur-Saône  (7)  ;  il  s'agit,  probablement, 
de  la  même  localité.  Un  autre  PalridacxtSy  aujourd'hui  Parce 
(Sarthe),  appartenait  à  l'abbaye  de  Saint-Martin  de  Tours,  comme 
on  le  voit  par  plusieurs  diplômes  dont  le  plus  ancien  est  de  l'an- 
née 775  et  émane  de  Charlemagne  (8). 

Patriciaeus  est  dérivé  de  Patricius,  qui  est,  à  proprement  parler, 
UD  eognomefiy  mais  qui  n'apparaît  qu'à  une  époque  basse  et  pour 
des  gens  qui  n'avaient  pas  de  gentilice  ou  dont  legentilice  est  in- 
connu. Tel  est  le  potier  Patricius  dont  on  a  recueilli  la  marque 


(1)  On  célèbre  sa  fête  le  31  août.  V07.  les  Bollandistes,  août,  t.  VI,  p.  665. 
p)  C.  /.  L.,  V,  694. 

(3)  C.  /.  L.,  III,  2043. 

(4)  V07.  Lucien  Merlot,  Dictionnaire  topographique  du  département 
d'Eure-et-Loir,  p.  124. 

(5)  Dom  Bouquet,  VI,  677  6. 

(6)  /Wd.,  VI,  628  c. 
Ci)  Ibid     IX,  337  c. 

(8)  C'est  le  numéro  42  de  Sickel,  Acta  Karolinorum ,  t.  II,  p.  27;  chez 
Dom  Bouquet,  t.  V,  p.  737  c,  on  a  imprimé,  par  erreur,  Parriciacus  avec 
deux  r  au  lieu  do  Patriciaeus  avec  tr.  Pour  Tétude  des  documents  qui 
concernent  cette  localité,  voir  Mabille,  La  pancarte  notre  de  Saint-Martin 
de  Tours,  p.  230. 


M2  LIVRE  n.  CHAPITRE  II.  APPENDICE  B. 

sur  un  grand  nombre  de  vases  (1).  Telle  est  Pesclave  Patricia  dont 
on  a  trouvé  l'épitaphe  en  Espagne  (2).  On  a  copié,  en  Italie  et  eu 
France,  cinq  épitapbes  d'hommes  appelés  Patricius,  mais  elles 
sont  des  derniers  temps  de  TEmpire  romain  (3). 

De  Patriciacui ,  dérivé  de  Patricius,  paraissent  venir  quinze 
noms  de  communes  :  deux  Parçay  (Indre-et-Loire)  ;  trois  Parce 
(Ille-et-Tiiaine ,  Maine-et-Loire,  Sarthe);  Parcey  (Jura);  Par- 
cieux  (Ain)  ;  Parcy  (Aisne)  ;  quatre  Percey,  savoir  :  deux  dans  la 
Haute-Marne,  un  dans  la  Haute-Saône,  un  dans  T Yonne;  trois 
Percy  (Calvados,  Isère,  Manche). 

APPENDICE  B. 

NOMS  DE  LIBUX  EN  -OCUS  DÉRIVÉS  OB  &BNTILIGBS  PBRDU8. 

L'étude  des  noms  géographiques  français  du  moyen  âge  peut 
faire  connaître  un  grand  nombre  de  gentilices  romains  dont  les 
textes  antérieurs  à  la  chute  de  l'empire  romain  n*ont  pas  conservé 
d'exemple.  Nous  nous  bornerons  à  établir  l'existence  de  deux  de 
ces  gentilices. 

Bbggiacus  est  le  nom  d'un  vicus  mentionné  par  Grégoire  de 
Tours  ;  M.  Longnon  a  reconnu,  dans  ce  vieus^  Bessay  (Vendée)  (4). 
De  Becciacus  on  peut  conclure  un  gentilice  *  Beccius ,  dérivé  du 
cognomen  Beccus,  qui  était  originairement  un  nom  commun  gau- 
lois signifiant  c  bec,  »  et  qui  est  identique  à  ce  mot  français.  Bec- 
cus fut  employé  en  Gaule  comme  surnom.  Antonius  Primus,qui, 
par  la  victoire  de  BedriacuSy  Tan  70  de  J.-C. ,  assura  le  triomphe 
de  Vespasien  sur  Vitellius,  avait  été  surnommé  Beccus  dans  sou 
enfance  ;  il  était  né  à  Toulouse  (5).  Beccus  fut  aussi ,  en  Gaule, 
un  nom  pérégrin  ;  on  a  trouvé  à  Ruffleux  (Ain)  une  dédicace  à 


(1)  c.  /.  L.,  II,  4970,  376;  t.  VII,  n-  1336,  806-811 ,  1079,  1080.  AUmcr,  Ins- 
criptions de  Vienne,  t.  IV,  p.  137. 

(2)  C.  /.  L.,  t.  II,  2796. 

(3)  Ibid.,  IX,  6408;  X,  1379,  8174;  XII,  2133,  3791. 

(4)  Longnon,  Géogr.  de  la  Gaule  au  sixième  siècle^  p.  565. 

(5)  Suétone,  Vitellius^  18. 


^4 


LA  DÉSINENCE  -I-ACUS  AU  MOYEN  AGE.  343 

Apollon  par  un  certain  Beccus  (1).  Le  cognomen  ou  nom  pérégrin 
Beccus  a,  comme  d'autres,  cités  plus  haut,  p.  132,  donné  un 
dérivé  en  ius  qui  a  été  employé  comme  gentilice. 

BiuifiAcus,  au  neuvième  et  au  dixième  siècle,  dans  les  titres 
de  la  cathédrale  d'Autun,  est  le  nom  de  Bligny-sur-Ouche  (Côte- 
d'0r)(2).  Dans  les  titres  de  la  cathédrale  de  Grenoble,  au  neuvième 
siècle,  le  même  nom  de  Beliniacus  désigne  Beligneux  (Ain)  (3). 
Les  trois  Belligné  du  département  de  Maine-et-Loire  paraissent 
être  aussi  d'antiques  Beliniacus  (4).  On  doit  en  dire  autant  de 
Bligny-sous-Beaune  (Gôte-d*Or)  pour  lequel  on  a  trouvé,  au 
douzième  siècle ,  la  forme  Beliniacum  (5). 

De  Tezistence  du  nom  de  lieu  Beliniacus^  on  est  en  droit  de 
conclure  Tezistence  d'un  gentilice  Belinius.  11  y  a  un  gentilice 
Camulius,  probablement  dérivé  du  nom  divin  Camulos(6),  et 
Camiilius  a  donné  le  nom  de  lieu  Gamuliacus  (7).  De  même,  le 
nom  divin  gaulois  bien  connu  Belenos  avait  donné  un  dérivé, 
'Belenius,  ou  *  Belinius  avec  assimilation  de  la  seconde  syllabe 
à  la  troisième,  et  ^Belenius  explique  le  nom  de  lieu  Beliniacus. 


(1)  C.  7.  L.,  XII.  2514. 

(2)  A.  de  Charmasse,  Ctirtulaire  de  l'église  d'Autun,  p.  22,  26,  27,  42,  78, 
86;  cf.  Gamier,  Nomenclature...  de  la  Côte-d'OVy  p.  76,  n*  317. 

(3)  Carlulaire  de  Saint-Hugues  de  Grenoble ,  p.  11  ;  à  la  p.  73,  Beliacum 
paraît  être  une  faute  de  copie  pour  Beliniacum. 

(4)  Port,  Dictionnaire  historique  du  département  de  Maine-et-Loire,  t.  I, 
p.  300. 

(5)  Gamier,  Nomenclature,  p.  61. 

(6)  De- Vit,  Onomasticon,  t.  II,  p.  103. 

(7)  Voyez  ci-dessous,  chap.  III,  {  2,  p.  356  :  cf.  ci-dessus,  p.  207. 


CHAPITRE  III. 

EXEMPLES    AU    MOYEN    AGE   DE   NOMS   DE    fUtuH  IDENTIQUBS  A 

DES    GENTILIGES   ROMAINS   EN   iiiS  (1). 

Sommaire  : 

§  1.  Généralités  :  gentilices  romains  en  -ius  employés  substantivement  avec 
un  sens  géographique  au  génitif  dans  les  textes  de  Tompire  romain  et  du 
moyen  âge  ;  gentilices  romains  en  -lus  employéis  adjectivement  avec  no 
sens  géographique  au  masculin  singulier  dans  les  textes  de  l'empire 
romain.  —  §  2.  Gentilices  romains  en  -ius  employés  adjectivement  avec 
un  sens  géographique  aii  masculin  singulier  dans  les  textes  du  moyen  âge. 

—  I  3.  Gentilices  romains  en  -tus  employés  adjectivemeot  avec  un  sens 
géographique  au  féminin  singulier.  —  2  4.  Gentilices  romains  en  -ius 
employés  adjectivement  avec  un  sens  géographique  au  datif-ablatif  pluriel. 

—  §  5.  Gentilices  romains  en  -tus  employés  adjectivement  avec  an  se&5 
géographique  à  l'accusatif  féminin  pluriel.  —  Appendice.  Les  cognomins 
en  -tus  employés  adjectivement  avec  un  sens  géographique. 

S  l®^  —  Généralités.  Gentilices  romains  en  -ius  employés 
substantivement  au  génitif,  avec  un  sens  géographique^  sous 
V Empire  romain  et  au  moyen  âge  ;  gentilices  en  -ius  em- 
ployés adjectivement j  avec  un  sens  géographique,  dans  les 
textes  contemporains  de  l'Empire  romain. 

Nous  allons  nous  occuper  des  noms  de  lieux  habités  qui, 
dans  les  documents  du  moyen  âge,  offrent  des  exemples 
d'une  désinencejautre  que  -iacus.  Nous  parlerons  d'abord 


(1)  Texte  de  leçons  faites  au  Collège  do  Franco  en  décembre  1888.  La 
première  a  été  déjà  publiée  dans  la  Revue  des  patois  yaZfo-romanx,  de 
MM.  Gilliéron  et  Rousselot,  t.  II,  p.  241-256. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  QENTILICE8  EN  -lUS.    345 

des  cas  où  le  gentilice  qui  sert  à  désigner  un  lieu  habité 
se  termine  en  -iti^,  et  n'est  pas  développé  à  l'aide  d*un 
suffixe.  Ce  gentilice  peut  rester  substantif  et  être  mis  au 
génitif  ;  bien  plus  souvent  il  prend  la  valeur  d*adjectif  et 
s'accorde  avec  un  substantif  quelquefois  exprimé,  la  plu- 
part du  temps  sous-entendu. 

D'abord  les  gentilices  peuvent  être  au  génitif  pluriel. 
En  voici  un  exemple  qui  remonte  à  l'empire  romain  : 
Casas  villa  Anieiorum^  en  Afrique  (1).  Villa  Aniciorwn  veut 
dire  exploitation  agricole  et  maison  de  campagne  des  Ani«- 
cius.  La  gens  Anicia  est  une  famille  noble  qui  a  donné  à 
Rome  plusieurs  consuls  avant  et  après  l'ère  chrétienne.  Au 
lieu  de  villa  ^  fundus  Anidorunij  on  pouvait  dire  aussi  : 
1*"  fundus  Anicianus ,  villa  Aniciana ,  ou  ,  dans  les  régions 
celtiques,  fundus  Aniciacus^  villa  Aniciaca^  cf.  Anisiacus 
villa  in  agro  Forensi  dans  une  charte  de  980  (?)  (2)  ;  2®  Fun- 
dus Anicius  :  Anicius  est  le  plus  ancien  nom  connu  de  la 
ville  du  Puy  (Haute-Loire),  comme  on  le  verra  p.  349. 

Voici  deux  exemples  du  génitif  pluriel  d'un  gentilice 
romain  dans  des  documents  géographiques  du  moyen  âge  : 
Curtis  Acutior,  dans  une  charte  de  877  (3)  ;  ecclesia  de  Monte 
Aguzor^  in  monte  Aguzor^  dans  deux  chartes  de  la  fin  du 
onzième  siècle  (4).  Acutior^  Aguzor  =  Acutiorum,  génitif 
pluriel  d'Acutius.  On  aurait  pu  dire  AcutianuSj  Acutiana, 
Acutiaous^  Acutiaca  :  Acutianus  est  le  nom  d'un  monastère 
d'Italie  dont  il  est  question  au  neuvième  siècle  dans  les  do- 
cuments recueillis  par  D.  Bouquet;  Acutiacus  est  un  nom 
de  lieu  étudié  ci-dessus  (5).  Acutianus  et  Acutiaous  déri- 
vent du  gentilice  Acutius. 


(1)  n\néT8iire  d'Antonin,  p.  61,  1.  2, 

(2)  A.  Bernard,  Cartulaire  de  SsLvigny,  p.  174.  Voir  aussi  ci-dessus,  p.  193. 

(3)  Matton,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  l'Aisne,  p.  2, 
col.  2.  —  Une  autre  localité  de  mômonom,  Curtis  Agutior,  aujourd'hui 
Courtisols  (Marne),  est  citée  par  M.  Longnon  dans  le  texte  explicatif  de  son 
savant  Atlas  historique  de  la  France,  p.  176. 

(4)  G.  Desjardins,  Cartulaire  de  Conques^  p.  281,  286» 

(5)  Page  189-190. 


34^  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  {  1. 

Le  gentilice  peut  être  au  génitif  singulier  :  Aquis  Neri, 
dans  la  table  de  Peutinger,  désigne  Néris  (Allier).  Une 
inscription  appelle  les  habitants  Nerio-magienses  ^  d'où  ré- 
sulte que  Nerio-magas ,  «  champ  de  Nérios ,  »  est  le  nom 
le  plus  ancien  de  remplacement  sur  lequel  Néris  est  bâti  : 
Nerios  ou  Nerius  est  le  nom  du  propriétaire  primitif  des 
eaux  et  du  champ.  On  trouve  le  gentilice  Nerius  dans  plu- 
sieurs inscriptions  du  temps  de  l'empire  romain;  de  ce 
gentilice  vient  le  nom  de  lieu  dérivé  écrit  Niriaeus  au  neu- 
vième siècle  (1). 

Dans  la  langue  géographique,  un  certain  nombre  de  gen- 
tilices  transformés  en  adjectifs  s'accordent  avec  un  substantif 
sous-entendu  soit  masculin,  comme  fundus^  soit  féminin, 
comme  villa  ou  cortis.  La  plupart  des  exemples  de  genti- 
lices  employés  adjectivement  dans  la  langue  géographi- 
que ne  se  rencontrent  pas  dans  les  monuments  antérieurs 
au  Moyen  Age.  Il  y  a  cependant  quelques  exceptions  : 
ainsi ,  une  inscription  du  temps  de  Fempire  romain  men- 
tionne, dans  la  cité  d'Arles,  un  pagus  Lucretius  (2).  On  sait 
que  la  gens  Lucretia  est  une  des  plus  anciennes  et  des 
plus  célèbres  de  Rome,  qu'elle  était  patricienne,  et  qu'elle 
a  eu  des  consuls  au  commencement  de  la  république.  Les 
inscriptions  de  l'époque  impériale  attestent  que  ce  genti- 
lice pénétra  en  Gaule  (3). 

V Itinéraire  d'Antonin  (4)  nous  montre ,  en  Espagne ,  un 
CsBcilius  vic%LS,  La  gens  Cœcilia  est  une  des  plus  illustres 
familles  plébéiennes  de  Rome  ;  Cœciliiis  est  le  gentilice  des 
Metellus.  Grammaticalement,  il  n'y  a  pas  de  différence 
entre  Cœcilius  vicus  et  Pons  JEmilius,  Il  y  avait,  à  Rome, 
un  pons  jEmilius^  c'était  Tancien  pons  Sublicius^  d'abord 
bâti  en  bois  ;  il  devait  son  nom  nouveau  à  M' iEmilius, 
qui  l'avait  fait  rebâtir  en  pierre.  Dans  ces  exemples,  le 


(1)  Voy.  ci-dessus,  p.  155,  note  2. 

(2)  C.  /.  L.,  t.  XII,  p.  594. 

(3)  Ibid,,  t.  XII,  p.  876,  col.  4. 

(4)  Pa^e  4M, 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILIGE8  EN  -lUS.    347 

gentilice  est  employé  adjectivement  au  masculin  ;  il  Test 
au  féminin  dans  les  noms  des  grandes  routes  de  Tempire 
romain,  comme  «fa  Aurélia^  via  Clodia,  via  Flaminia^  via 
Yaleria.  Aurélia,  Clodia,  Flaminia ,  Valeria  sont  autant  de 
gentilices  bien  connus.  La  première  de  ces  routes ,  via 
Atirelia,  arrivait  en  Gaule;  elle  allait  de  Rome  à  Arles. 
Elle  était  encore  désignée  par  son  nom  antique,  aux  envi- 
rons de  Marseille,  dans  le  courant  du  onzième  siècle  ;  on 
le  voit  par  une  charte  de  Tannée  1056  (1). 

§2.  —  Genlilices  romains  en  -ius  employés  adjectivement  au 
Tnasculin  singulier^  avec  sens  géographique^  dans  les  textes 
du  moyen  âge. 

iEMiLius.  Colonia  in  Amelio ,  dixième  siècle  (2).  Amelius 
pour  iEmilius  nous  offre  deux  déformations  caractéristiques 
du  latin  vulgaire  :  a  pour  œ,  e  pour  i,  M.  Schuchardt  (3)  a 
réuni  un  certain  nombre  d'exemples  d'à  pour  »,  parmi  les- 
quels nous  citerons  Amilia  =  Mmilia.  Quant  aux  exemples 
de  pour  i,  ils  sont  très  nombreux ,  comme  on  peut  le  voir 
chez  le  même  auteur  (4),  et  nous  signalerons  Emelius^ 
Mmelia^  Mmelius^  Mmelii^  Emelio  (5). 

Le  plus  ancien  exemple  d'Amelius  nous  est  donné  par 
le  gentilice  d  un  élève  de  Plotin,  Amelius  Gentilianus,  qui 
eut,  comme  philosophe,  une  certaine  célébrité  ;  il  était  ori- 
ginaire d'Etrurie  ;  il  vivait  au  troisième  siècle  de  notre  ère  ; 
il  suivit,  à  Rome,  les  leçons  de  Plotin,  qui  enseigna,  dans 
cette  ville,  de  241  à  270;  sous  la  plume  grecque  de  Por- 
phyre, son  nom  'Af^Atoç  se  rapproche  d'âfAiXiiç,  «  sans 
souci,  »  et  la  forme  primitive  de  ce  nom,  -^milius,  n'est 
plus  reconnaissable.  Amelius  devient  fréquent  en  Gaule 


(1)  Guérard,  CaHulaire  de  SeLint-Victor  de  Marseille,  t.  I ,  p.  264,  a  pu- 
blié co  document. 

(2)  Guépard,  Cartulaire  de  Saint-Victor  de  Marseille,  t.  I,  p.  309. 

(3)  Vohalismus  des  Vulgaerlateins,  t.  I,  p.  220-223. 

(4)  Ibid,,  tome  II,  p.  1-91. 

(5)  Ibid.,  tome  II,  p.  15. 


848  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  t  2. 

à  partir  du  sixième  siècle  de  notre  ère.  C'est  le  nom  d'un 
archevêque  de  Bordeaux,  chanté  par  le  poète  Fortunat  (1), 
et  d'un  évoque  de  Tarbes  dont  il  est  deux  fois  ques- 
tion dans  l'histoire  des  Francs ,  de  Grégoire  de  Tours  (2). 
M.  Le  Blant  a  relevé  le  nom  d'Ameliûs  parmi  les  graffiti 
mérovingiens  de  l'autel  de  Minerve  (Hérault)  (3).  On  trouve 
ce  nom  parmi  ceux  des  témoins  d*ua  diplôme  de  l'an- 
née 706 ,  donné  dans  le  pays  de  Liège  (4).  Âgde  eut,  au 
neuvième  et  au  dixième  siècle ,  deux  évéques  du  nom 
d'Âmelius.  Le  nom  d'Ameliûs  est  fréquent  d^ns  le  Cam- 
laire  de  Conques  (Aveyron) ,  se  rencontre  dans  ceux  de 
Savigny  (Rhône) ,  de  Saint-  Victor  de  Marseille ,  de  Bea/alm 
(Corrèze),  etc. 

Le  gentilice  -flEmilius,  dont  Amelius  est  la  variante  vul- 
gaire, appartient  à  une  maison  patricienne,  et  fut  porté  en 
Gaule  par  M.  ^milius  Lepidus,  triumvir,  qui  eut  laNar- 
bonnaise  sous  son  autorité,  de  44  à  42  avant  Jésus-Christ. 
Il  est  très  commun  dans  les  inscriptions  de  la  Gaule  au 
temps  de  l'empire  romain.  Il  y  avait  notamment  des  iEmi- 
lius  à  Aix,  en  Provence  ;  voir  l'inscription  qui  porte  le 
n*  537  au  t.  XII  du  C.  I.  L.  Ces  iEmilius  n'étaient  pas 
éloignés  du  lieu  dit  Amelius ,  où  Tabbaye  de  Saint- Victor 
de  Marseille  avait  des  colons.  Ce  sont  peut-être  ces  ^mi- 
lius  qui  ont  donné  leur  nom  au  lieu  dit  Amelius. 

Le  gentilice  iEmilius  a  fourni  à  la  géographie  de  la 
Gaule  les  deux  dérivés  :  JSmiliacu^  et  JSmiliavus.  Comme 
exemple  du  premier,  nous  citerons  :  Amilly  (Eure-et-Loir), 
appelé  à  l'accusatif  Amiliacum  villam  dans  une  charte 
de  986  (5)  ;  Millac  (Vienne) ,  appelé  Amellac ,  Ameilhac , 
Ameillac  au  quatorzième  et  au  quinzième  siècle  (6)  ;  enfin 


(1)  Fortunat,  I,  2,  5  ;  éd.  de  Frédéric  Léo,  t.  I,  p.  13. 

(2)  VIII,  28;  IX,  6;  édit.  Amdt,  t.  I,  p.  341,  1.  23;  p.  363,  1  13. 

(3)  Inscriptions  chrétiennes  de  la  GauZe,  t.  II,  p.  437. 

(4)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  276. 

(5)  Guérard,  Cartulaire  de  Satnt-Pére  de  Chartres,  p.  76. 

(6)  Redet,  Dictionnaire  topogr.  du  départ,  de  la  Vienne^  p.  263. 


NOMS  DB  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICES  EN  -lUS.    349 

Amilly  (Loiret),  Amillis  (Seine-et-Marne).  Pour  le  second , 
£miliavus,  on  peut  donner  comme  exemples  :  Millau  (Âvey- 
ron),  appelé,  au  onzième  siècle,  villa  AmeliavênHs  (1),  et 
de  Amiliavo  (2)  ;  Milhaud  (Gard) ,  au  douzième  siècle  Ami- 
liau  (3). 

Afranius  :  Nostram  mcclesicmi  quœ  vocatur  AfragniOy  1061- 
1065  (4)  ;  aecclesiam  quB  vocatur  Afragnio  sive  Vauro^  1060-* 
1065  (5).  Il  s'agit  de  Lavaur  (Tarn). 

La  gens  Afrania  a  donné  à  Rome  plusieurs  personnages 
historiques,  entre  autres  L.  Afranius,  consul  Tan  60 
av.  J.-G.  Ce  gentilice  pénétra  en  Gaule,  comme  nous  l'ap- 
prennent des  inscriptions  :  de  Trêves  (6),  de  Narbonne  (7), 
et  de  Vaison  (8).  La  dernière  concerne  Sextus  Afranius 
Burrus ,  préfet  du  prétoire  sous  Claude  et  sous  Néron  ; 
Sextus  Afranius  Burrus  parait  avoir  été  originaire  de  Vai- 
son; on  sait  qu'avec  Sénëque  il  exerça  une  grande  in- 
fluence pendant  les  premières  années  du  règne  de  Néron, 
sous  lequel  il  mourut  Tan  62  de  Jésus-Christ. 

D'Afranius  est  dérivé  le  nom  du  fwndus  Afranian/us  dans 
la  table  alimentaire  de  Veleia  (9).  Les  deux  Fragny  du  dé- 
partement de  la  Nièvre  peuvent  avoir  la  même  origine  ;  ils 
seraient  d'anciens  fundi  Afraniaoi. 

Anicius.  Grégoire  de  Tours  (10),  parlant  des  événements 
de  Tannée  591,  nomme  un  lieu  appelé  Anicius,  hcum  quem 
Anicium  vocitant^  dans  la  cité  des  Vellavi  (11).  C'est  le  plus 


(1)  G.  Desjardins,  CartuUire  de  Conques,  p.  21. 

(2)  Qnérard,  CartuUire  de  Saint-Victor  de  Marseille,  t.  II,  p.  201. 

(3)  Germer-Durand,  Dictionnaire  topogr,  du  départ,  du  Oard,  p.  1S6. 

(4)  G.  Desjardins,  Cartulaire  de  Conquës^  p.  61. 

(5)  Ibid.,  p.  880. 
(6)Brambach,  787. 

(7)  C.  /.  L.,  XII,  n*  4377. 

(8)  /Wd.,  n-  1309,  5842. 

(9)  Page  3,  h  3-4;  C.  /.  L.,  t.  XI,  p.  211. 

(10)  UiêtmrU  Francorum,  X,  25. 

(11)  Edit.  Amdt,  1. 1,  p.  437, 1.  26.  Les  manuscrits  offrent  deux  leçons  Ani- 
Hum  par  t  et  Anicium  par  c. 


350  LIVRE  II.  CHAPITRE  HL  i  2. 

ancien  nom  connu  du  Puy  en  Velay.  Ce  nom  est  encore 
porté  par  le  mont  Ânis ,  sur  les  flancs  duquel  est  bâtie  la 
ville  du  Puy  (1). 

La  gens  Anicia,  originaire  de  Préneste,  est  une  des  plus 
illustres  de  Rome,  à  qui  elle  a  donné  plusieurs  consuls 
avant  et  après  notre  ère.  On  trouve  le  gentilice  Anicius 
en  Gaule,  dans  les  inscriptions,  par  exemple  à  Nimes  [f. 
à  Narbonne  (3),  à  Orange  (4). 

Une  charte  de  la  fin  du  dixième  siècle  nous  fait  connaître 
un  nom  de  lieu  dérivé  d'Anicius  ;  c'est  Anisiacus  villa  in 
agro  Forensi^  c'est-à-dire  en  Forez  (5).  Il  a  été  parlé,  p.  193, 
d'Anisy-le-Château  (Aisne),  appelé,  au  neuvième  siècle, 
Anisiacus  par  Hincmar  (6).  Cf.  Anicianwm^  aujourd'hui 
Nissan  (Hérault),  dans  une  charte  de  1199  (7). 

•  Antonius.  In  pago  Arvernico,  in  comitatu  Talamitensi,  in 
vicaria  Ambronense^  in  villa  quœ  nominatur  Antonio^  13  juil- 
let 898  (8);  in  villa  quss  dicitur  Anionio,  937-938  (9);  in 
villa  quB  diciPur  Antonio,  906?  (10)  ;  ad  ecclesiam  de  AnUmio, 
27  décembre  906  (11).  C'est  Antoingt  (Puy-de-Dôme)  (12). 

Antoingt  tire  son  nom  du  gentilice  Antonius.  Le  plus 
célèbre  des  hommes  que  ce  gentilice  a  désignés  est  Marc- 
Ajitoine,  le  fameux  triumvir  ;  il  a  exercé  pendant  plusieurs 
années  une  grande  influence  en  Gaule ,  d'abord  quand ,  à 
partir  de  Tan  55  avant  Jésus-Christ ,  il  fut  le  compagnon 


(1)  Longnon,  Géographie  de  la  Gauie  au  sixième  siècle,  p.  533. 

(2)  C.  /.  L.,  XII,  3402,  3403,  3424. 

(3)  Ibid,,  4500. 

(4)  Ihid.,  1247. 

(5)  Aug.  Bernard,  Cartutaire  de  Savigny^  t.  I,  p.  174. 

(6)  Vie  et  miracles  de  saint  Remy,  Dom  Bouquet,  V,  452  G. 

(7)  E.  Thomas,  Dictionnaire  topogr,  de  l'Hérault,  p.  133. 

(8)  Doniol,  Cartulaire  de  Brioude,  p.  48. 
»(9)  Ibid,,  p.  94. 

(10)  Ibid.,  p.  255. 

(ll)7bid.,  p.  334. 

(12)  M.  Houzé  l'a  établi  à  la  p.  678  de  sa  dissertation  géographique  pnbliée 
en  appendice  à  l'édition  du  Carfuiatre  de  Sauxillanges  donnée  par  M.  Do- 
niol. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILIGES  EN  -IU8.    351 

de  Jules  César  pendant  la  guerre  contre  les  Gaulois  ;  en- 
suite, quand,  de  43  à  40,  en  qualité  de  triumvir,  il  eut 
dans  la  Gaule  conquise  un  pouvoir  absolu.  Un  grand  nom- 
bre de  Gaulois  prirent  son  nom  ;  de  là  résulte  la  fréquence 
du  gentilice  Antonius  dans  les  inscriptions  de  la  Gaule. 

Du  gentilice  Antonius  vient  le  nom  de  lieu  Antoniacv^. 
Parmi  les  villes  de  Saint-Germain-des-Prés  nous  trouvons 
mentionnée  celle  qui  est  appelée ,  en  828 ,  au  cas  indirect 
Antaniacum  (1),  plus  tard  Antoniaco  (2),  c'est  Antony  (Seine- 
et-Oise).  Les  diplômes  de  Saint-Martin  de  Tours  mention- 
nent deux  Antoniaous  :  le  premier  parait,  dès  775,  dans  un 
diplôme  de  Cbarlemagne  (3),  c'est  Antogné  (Maine-et-Loire); 
du  second,  il  es,t  question  pour  la  première  fois,  au  dixième 
siècle  (4),  c'est  Antogny  (Indre-et-Loire).  Antogné  (Vienne), 
nommé  Antoignec  vers  la  fin  du  onzième  siècle  (5),  a  la 
même  origine.  Antoigné  (Sarthe)  est  probablement  la  loca- 
lité appelée  au  cas  indirect  :  villa  Antoniaco  dans  les  diplô- 
mes de  Téglise  du  Mans ,  en  802  (6)  et  en  832  (7)  ;  c'est 
encore  un  dérivé  en  -acus  du  gentilice  Antonius  (8).  Dans 
la  table  alimentaire  de  Veleia,  on  trouve  onze  fundi  Anto- 
niani. 

Ascins.  Les  mots  Actum  Ascio  villa  dominica  se  lisent 
dans  une  charte  de  Tannée  648  (9)  :  In  Ascio  super  fluviwm, 
Widolaci  dans  une  charte  de  l'an  800  (10).  Il  s'agit  d'Aix-en- 
Erquigny  (Pas-de-Calais). 


(1)  Diplôme  des  empereurs  Louis  le  Pieux  et  Lothaire ,  chez  Lasteyrie , 
CàrtuUire  de  Paris,  p.  48. 

(2)  Longnon,  Polyptyque  de  S&int-Germ&in^des-PréSf  p.  48. 

(3)  Dom  Bouquet,  V,  737  c. 

(4)  Habille,  La  pancarte  noire  de  Saint-Martin  de  Tours,  p.  186,  n*  131. 

(5)  Redet,  Dte^onnatre  topogr.  du  départ,  de  la  Vienne,  p.  9. 

(6)  Dom  Bouquet,  V,  768  c. 
.   (7)  Ibid.,  VI,  586  a. 

(8)  n  a  déjà  été  question  du  nom  de  lieu  Anioniacus  ci-dessus,  p.  140; 
des  textes  différents  y  sont  cités. 

(9)  Guérard,  Cartulaire  de  Saint-Bertin,  p.  19. 
(10]  Ihid.,  p.  65. 


36t  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  {  2. 

Àsoius  ne  diffère  du  gentilice  Àstius  que  par  remploi  du 
c  pour  tf  substitution  qui  est  sans  importance  phonétique 
au  moyen  &ge.  Le  gentilice  Astius  se  trouve  dans  trois 
inscriptions  d'Afrique  (1).  Ascius  n'a  été  trouvé,  au  temps 
de  Tempire,  qu'avec  valeur  de  cognomen  :  Asinia  Ascia 
Veausta  dans  une  inscription  de  Salerne,  en  Campanie  (2). 

Braccius.  La  formule  locella  nostra  in  pago  Regense  mm- 
cupantes  Braccio ,  et  plus  bas  les  mots  ad  ipsv/m  Bractio^ 
désignant  une  localité  située  au  pays  de  Riez,  se  rencon- 
trent dans  un  passage  d'une  charte  de  Tannée  739  (3 . 
La  localité  dont  il  s'agit  est  Bras  d'Asse  (Basses- Alpes). 

Braccius  et  sa  variante  Bractius  sont  identiques  au  genti- 
lice Braccius  qui  se  trouve  dans  les  inscriptions  romaines 
en  Campanie  (4),  et  qui  dérive  probablement  àebrdcca^ 
variante  de  bràca,  nom  de  la  culotte  gauloise.  De  Braccius 
vient  le  nom  de  lieu  Bracciacus  :  celui-ci ,  dans  une  charte 
du  neuvième  siècle,  désigne  Bracy,  commune  d'Egrisel- 
les-le-Bocage  (Yonne) ,  comme  nous  l'apprend  M.  Quantin 
dans  son  Dictionnaire  topographique  de  VYonns.  Le  CarUi- 
laire  d'Ainay  (Rhône),  nous  offre  l'orthographe  Braxiacus  : 
in  villa  qux  dicitur  BraxiacOj  dans  une  charte  de  l'an- 
née 990  (5)  ;  cette  localité  était  dans  le  pagus  Lugdunensis. 
Une  variante  Braciacus  curtis  par  un  seul  c  nous  a  été  con- 
servée par  une  charte  de  926  reproduite  dans  le  Carfulaire 
de  Saint' Julien  de  Brioude  (Haute-Loire)  (6)  ;  il  s'agît  probable- 
ment ici  de  Brassac  (Puy-de-Dôme).  Citons  encore  Bras- 
sac  (Tarn-et-Garonne) ,  qui  a  été  appelé  Bradaeias  au 
moyen  &ge  (7). 


(1)  c.  I.  L.,  Vm,  460,  4605,  10526. 

(2)  Ibid.,  X,  559. 

(S)  Carful«ir«  de  Satnt-Huyues  de  Grenoble,  p.  44. 

(4)  C.  /.  L.,  X,  6233,  6234,  6235. 

(5)  A«  Bernard,  Cartulatre  de  Sàmgnyy  p.  596. 

(6)  Page  319. 

(7)  Delocbo,  Carfulaire  de  fiaaulieu,  p.  201. 


NOHB  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILIGES  EN  -1U8.  U3 
Centolius.  Les  mots  Unus  campus  voeatw  Ceni/uXio  36 
lisent  dans  une  charte  de  l'an  1055  ou  environ,  dans 
laquelle  ils  désignent  une  localité  de  l'Aveyron,  commune 
de  Leuc  (Aude)  (1).  Comparez  le  gentiiice  de  C.  Centullius 
Fortunatus  dans  une  inscription  trouvée  en  Gaule  cisalpine, 
à  Toscolano ,  près  du  lac  de  Garde  (2). 

C\HnLius.£cclMidHnsandféeJfariâ3(IeCamuIio,  vers  1100(3). 

Camulius  est  un  gentiiice  romain  dont  on  trouve  quel- 
ques exemples  en  Gaule.  Deux  inscriptions  romaines  nous 
doDQent  la  forme  masculine ,  ce  sont  l'ëpitapbe  de  Juliiis 
Camulius  Verus  à  Carsan  (Gard)  (4),  et  celle  du  légion- 
naire C.  Camulius  Lavenius  à  Grenoble  ^).  Nous  rencon- 
trons aussi  la  forme  féminine  :  Camulia  Marcella  dans  une 
inscription  de  Vienne  (Isère)  (6)  ;  Camulia  Procla  dans  une 
inscription  de  Narbonne  (1).  Camulius  a  une  variante  par 
lieux  l  :  CamuUius  ;  exemples  :  T.  Camullius  ^milianua, 
dans  une  inscription  d*Apt  (8);  T.  Camullius  Telesphorus, 
dans  une  inscription  de  Vaison  (9);  Camullia  Tertulla,  dans 
une  inscription  d'Apt  (10). 

Ce  gentiiice  romain  parait  être  un  ancien  nom  gaulois. 
Il  a  cette  valeur  dans  l'inscription  de  Bordeaux  :  D.  M.  Ca- 
mulia patribus  Blasto  et  Ivorigi  (p)osuit  (11),  et  dans  l'in- 
scription du  Norique  où  une  femme  s'appelle  Camulia 
Quarti  (12). 

Camulius  est  un  dérivé  du  nom  divin  Caraulos.  Un  pro- 


(1)  0.  Desjardina,  Carlulaire  de  Conquet,  p.  cit,  72. 

P)  C.  /.  L.,  V,  *870. 

0)  C.  thraait,  CtrtuMre  de  Sttint-Semin  de  Toutouae,  p.  131. 

(4)C.  1,L.,  XII,  372*. 

(5)  /bld.,  XII,  2230. 

(6}  IMd.,  XII,  1960. 

(T)  ma.,  XII,  4677. 

(8j  ibid.,  XII,  1116. 

0)tMd.,  XII,  1401. 

(10)  Ibid.,  XII.  1125. 

(U)  Jullian,  tntcriptions  romaines  de  boràeiux,  t.  1,  p.  8«  8t  ! 

(12)  C./.  L.,  111,4687. 


354  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  |  2. 

cédé  identique  a  donné   à  la  langue   grecque  les  noms 

d'homme    Atovuaioç   de    Atovoaoç    et     'AttoXXwvcoç    d'AicoXXttiv;   ces 

noms  grecs  d'homme,  comme  le  gaulois  Camulius  ou 
mieux  Camulios ,  ont  été  dérivés  de  noms  divins  au 
moyen  du  suffixe  io-. 

Le  plus  célèbre  peut-être  des  monuments  du  culte  du 
dieu  Camulos  est  au  musée  du  Vatican.  Il  a  été  dédié  à 
cinq  divinités  :  1®  aux  deux  divinités  gauloises  Arduinna 
(la  forêt  d'Ardenne)  et  Camulos  ;  2**  aux  trois  dieux  romains 
Jupiter,  Mercure,  Hercule,  par  M.  Quartinius  Sabinius, 
citoyen  de  Reims ,  cives  remus ,  soldat  prétorien  de  la  sep- 
tième cohorte  ;  Camulos  est  représenté  avec  les  attribuai 
distinctifs  du  Mars  romain  (1).  On  voit  par  ce  monument 
que  le  culte  de  Camulos  était  en  honneur  chez  les  Rmi. 
Une  autre  preuve  en  est  donnée  par  une  inscription  trou- 
vée près  de  Clèves  et  conservée  en  cette  ville ,  c'est  une 
dédicace  à  Mars  Camulos  par  les  habitants  de  Reims, 
cives  Rémi ,  qui ,  dit  cette  inscription,  ont  construit  un  tem- 
ple pour  le  salut  de  l'empereur  Néron  (2).  Cette  inscription 
est  un  témoignage  de  l'attachement  des  populations  de  la 
Belgique  pour  Néron ,  auquel  elles  restèrent  fidèles  pen- 
dant la  révolte  de  Vindex;  Galba,  vainqueur,  s'en  ven- 
gea (3). 

Le  culte  de  Camulus  était  aussi  connu  en  Grande-Bre- 
tagne. On  a  trouvé  dans  le  nord  de  cette  île  une  dédicace 
Deo  Marti  Camulo  ;  elle  est  conservée  au  musée  de  Glas- 
gow ,  en  Ecosse  (4).  La  piété  celtique  envers  le  dieu  Ca- 
mulus ne  se  manifeste  pas  seulement  par  des  inscriptions 
dédicatoires.  On  donna  son  nom  à  une  ville  de  Grande- 
Bretagne,  CamulO'dunum  y  aujourd'hui  Colchester.  Cette 
ville ,  antérieure  à  la  conquête  romaine ,  était  la  capitale  du 
roi  Cunobelinos  et  l'empereur  romain  Claude  la  prit  en 


(1)  c.  /.  L.,  VI,  46. 

(2)  Brambach,  n*  164. 

(3)  Tacite,  Histoires,  1.  I,  c.  8,  51. 

(4)  C.  /.  L.,  VII,  1103. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  OENTILICES  EN  -lUS.    355 

l'an  43  (1).  Devenue  colonie  romaine,  elle  tomba  entre 
les  mains  des  Bretons  insurgés  qui  massacrèrent  les  colons, 
l'an  62  de  notre  ère  (2). 

Le  nom  divin  Camulus  fournit  à  des  noms  d'hommes 
leur  premier  ou  leur  second  élément  :  on  connaît  le  nom 
de  Camulo-gffnus ,  eburovicr,  c'est-à-dire  d'Evreux ,  qui  fut 
chef  des  Parisii  et  des  peuples  voisins  révoltés  contre  Cé- 
sar, et  qui ,  dans  une  bataille  contre  Labienus,  perdit  à  la 
fuis  la  victoire  et  la  vie  (3),  en  l'an  52  avant  Jésus-Christ  ; 
Camulogenus  veut  dire  Qls  de  Camulos.  Camulognata,  «  ha- 
bituée à  Camulos,  »  «  adoratrice  de  Camulos  »  est  le  nom 
d  une  femme  gauloise  qui  offrit  à  Mercure  un  des  vases 
(l'argent  trouvés  à  Bernay  (Eure);  ce  vase  appartient  au 
cabinet  des  antiques  de  la  Bibliothèque  nationale  à  Paris. 
Camulos  est  le  second  élément  du  nom  d'homme,  Ande- 
cj'mulos ,  probablement  «  très  [semblable  à]  Camulos,  u 
cûDservé  par  l'inscription  gauloise  de  Nevers  ;  Ande-camulos 
est  devenu  un  nom  de  lieu  en  Limousin ,  comme  l'atteste 
uae  inscription  trouvée  à  Rançon  (Haute-Vienne)  :  on  y 
voit  les  Andecamulenses  dédier  aux  divinités  impériales 
une  chapelle  de  Pluton  (4). 

Quelques  personnes  portèrent  par  piété  le  nom  de  Ca- 
mulos comme  on  porte  aujourd'hui  un  nom  de  saint.  On 
en  trouve  des  exemples  :  au  musée  d'Arles,  où  une  inscrip- 
tion nous  offre  le  nom  de  femme  Camula  (5)  ;  à  Bordeaux, 
011  le  musée  possède  l'épitaphe  d'un  certain  Camulus  (6). 
Daus  l'antique  Noricum,  prés  de  Klagenfurt,  dans  l'empire 
d'Autriche,  sur  le  bord  d'un  chemin,  on  lit,  encastrée 
dans  une  croix  de  pierre ,  l'épitaphe  de  Camulianus,  ûls  de 


(I)  Les  textes  des  autenrs  anciens  < 
nis  p«r  HûbQor,  C.  l.  L.,  VII,  33-34. 
(î)  Tacite,  .Annales,  XII,  32;  XIV,  31-3Î. 
(3)  De  btHo  gmico.  Vil,  57,  59,  62. 
(4]  OreUi,  n-  1804. 

(5)  C.  î.  L.,  XII,  744. 

(6)  JoUian,  ImcripUont  Tomaine»  de  Bordeaux,  t.  I,  p.  331. 


356  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  |  2. 

Camulus  (1).  A  Indenburg,  dans  la  même  région,  on  â  logé 
dans  la  tour  de  Tégliâe  Tépitaphe  de  Qtlartâ,  affranchie  de 
Camula  (2). 

Camulus  donna  des  dérivés.  L'un  est  Caiïltiliuô  ou  Ca- 
mullius,  dont  il  a  déjà  été  question.  On  trouve  aussi 
Camulatus,  qui  est  un  cognomen;  ainsi  :  C.  Valeriùs  Se- 
norigis  fllius  Camulatus  se  fit  construire  un  monument 
funèbre  dont  un  débris  existe  encore  à  Aix-les-Bains ,  en 
Savoie  (3).  De  Camulatus  on  tira  le  gentilice  Camulatius  : 
à  Nimes  existe  encore  Tépitaphe  de  Camulatia  Severa  (4). 
On  peut  en  rapprocher  Camulates ,  nom  de  fabricant  ins- 
crit sur  une  tuile  qui  a  été  trouvée  en  Espagne  (5).  Un 
autre  dérivé  de  Camulus  est  Camulinius ,  c'est  un  gentilice 
attesté  par  une  inscription  de  Trêves ,  où  se  lisent  les  noms 
de  Camulinius  Oledo  (6). 

Des  dérivés  de  Camulus ,  il  en  est  un  qui  a  laîésé  des 
traces  évidentes  dans  la  géographie  tnoderïle  de  la  France, 
c'est  le  gentilice  Camulîus  ou  CamuUius.  L'ecclesia  de  Ca- 
mulio  citée  ci-dessus  doit  avoir  été  située  pi*ês  Toiilouse; 
elle  a  pour  pendant  Chamouille  (Aisne).  Chamôuille  (Aisnel 
est  une  ancienne  villa  Camulia  ou  Canïullia]  Son  nom 
est  écrit  Camolia  dans  une  charte  de  l'année  1151  (7).  Nous 
citerons  ensuite  deux  dérivés  en  -acus  de  Câttiulius  ou 
CamuUius  :  Chamouillac  (Charente-Inférieure) ,  Chamouil- 
let  (Haute-Marne);  ce  sont  des  communes  dont  le  nom 
rappelle  le  culte  de  Camulus.  Peut-être  en  est-il  de  même 
de  Chamolay,  commune  des  Avenières  (Isère),  qui  serait 
un  p^ncien  Camulacus^  c'est-à-dire  la  propriété  d'un  honune 
appelé  Camulus  à  cause  de  la  piété  de  seô  parents  envers 
le  dieu  de  ce  nom. 


(1)  c.  /.  L.,  m,  4892. 
(l)  Ibid.,  III,  5479. 

(3)  Ibid.y  XII,  2480. 

(4)  Ibid,,  XII,  3645. 

(5)  Ibid.,  II,  4967,  34. 

(6)  Brambach,  825. 

(7)  Matton,  Dtctionnatre  topogr,  du  département  de  rAitne,  p.  55. 


NOHB  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DBS  0BNTIUCB8  EN  -lUB.    357 
Caucius  en  Limousin.  In  villa  Caticius ,  charte  d'octo- 
bre 887  (1);  in  alio  loco  qui  vocatur  Caucius,  autre  charte 
d'octobre  887  (2)  ;  villam  meam  qus  vocatur  Caucius  média- 
nus,  1165-1170  (3). 

On  a  parlé,  pages  215-216,  du  gentilice  Caucius  et  de  son 
dérivé  Cauciacw,  aujourd'hui  Choisy-sur- Aisne  (Oise),  où 
le  roi  Childebert  III  fut  enterré  en  711.  Caucius  parait 
dérivé  de  cottcw,  gobelet;  mais,  au  moyen  âge,  il  pou- 
vait se  confondre  avec  Gautius,  dérivé  de  cautus,  avisé, 
prudent. 

COMARTDS.  Les  mots  in  Comario  dans  le  testament  d'Ab- 
bon  en  739  (4),  désignent  Gommiers  (Isère). 

Ce  nom  de  lieu  est  identique  à  un  gentilice  que  nous 
fait  coQDaitre  l'épitaphe  de  Quintus  Comarius ,  conservée  à 
Milan  (5). 

Comarius  a  donné  le  dérivé  Comariacus,  écrit  Comariago 
au  cas  indirect  en  615  dans  le  testament  de  Bertramne , 
eïêque  du  Mans  (6).  Un  diplôme  de  Gbarlemagne,  en  775, 
nous  offre  la  variante  Comoriaco  (7) ,  et  dans  un  diplôme  de 
Louis  le  Débonnaire  en  832,  on  trouve  la  variante  Commo- 
Tiaco  (8);  dans  ces  deux  exemples,  la  seconde  syllabe  est 
assimilée  à  la  première.  Il  s'agit,  semble-t-il,  de  Comeré, 
commune  de  Ballée  (Mayenne). 

Cornélius.  Mansum  de  Comilio...  Mansus  vero  de  Corni- 
lio,  vers  971  (9).  Il  s'agit  de  Gornil,  près  de  Queyssac  (Gor- 
rèïe);  on  peut  en  rapprocher  Cornille  (Dordogne),  proba- 
blement Comelia  (villa). 


(1)  D«loehe,  CsrluUlrs  de  Beaulieu,  p.  22&. 

(1)  Daloehe,  ibtd.,  p.  226. 

(3]  Ibii.,  p.  62. 

H)  CtriitUire  de  Suint-Huguet  de  Grtnoblê,  p.  48. 

(i)  C-  I.  L.,  V,  5997. 

[^  PudeMos,  DiplomalA,  I,  200. 

(7)  Dom  Boaqnet,  V,  769  a. 

(8)  Ibid.,  VI,  586  a. 

<3)  Deloch«,  C«rluUIr«  de  Beaulieu,  p.  228. 


35$  LIVRE  IL  CHAPITRE  III.  {  2. 

Cornélius  est  un  des   gentilices  les  plus  célèbres  de 
Rome,  celui  des  Scipion  et  du  dictateur  Sylla.  On  le  ren- 
contre très  fréquemment  en  Gaule,  sous  l'empire  romain 
dans  les  inscriptions  ;  il  y  a  été  porté  par  Cornélius  Gaelu 
licus,    légat    de    Germanie   supérieure,    28-39  de  Jésus- 
Christ  (1). 

Il  a  donné  à  la  France  des  dérivés  en  -acus,  en  -anus  ei 
en  -0 ,  -onis,  Cornillé  (Maine-et-Loire)  :  villa  7iomim  Cof 
niliacus  apparaît,  au  onzième  siècle,  dans  une  charte  citée 
par  M.  Port  (2);  Cornillé  (lUe-et-Vilaine),  Cornillac  (Drôme, 
Cornillac,  commune  de  Saint-Clair  (Tarn-et-Garonne) ,  pa- 
raissent être  aussi  d'anciens  Corneliacus.  Corneilhan  (Hh- 
rault),  Corneillan  (Gers),  les  trois  Corneilla  des  Pyrénées- 
Orientales  sont  chacun  un  ancien  fiindus  Corneliatius  ;  k 
premier  apparaît  à  l'ablatif,  de  Comeliano^  dans  une  cliarte 
de  1135  (3). 

Il  y  avait  à  Veleia  quatre  fundi  Comeliani\  il  y  en 
avait  deux  à  Plaisance  (4).  On  parlera  plus  bas  du  dérive 
ComeliOy  -onis. 

Grussius  est  le  nom  d'une  villa  située  dans  le  pagus 
Turonicus,  et  où  deux  chanoines  de  Saint-Martin  de  Tours, 
Haganon  et  Adjuteur,  frères,  avaient  un  manse  seigneurial 
qu'ils  donnèrent  à  l'abbaye  de  Saint-Martin  (5).  Celait 
eu  818,  et  la  localité  dont  il  s'agit  est  aujourd'hui  Greus 
(Indre-et-Loire)  v^^-  La  même  localité  est  mentioniii'e 
dès  785  dans  une  autre  donation  à  la  même  abbaye,  mais 
dans  les  copies  que  nous  avons  de  cet  acte,  on  a  écrit,  en 
omettant  un  i  :  Grussas  au  lieu  de  Grussius  (7). 


vl>  K.  DcsJAr\iins.  G^v'^P^^î'  hiMorique  de  Im.  Gaule  romaine,  II,  *^4^ 
^S'  Gw^Tani^  Oarh.lJiï-v    V  S'.:-.f-Vi -:or  de  Marseille^  t.  I,  p.  2^. 

(4>  0.  L  L.,  XI,  p,  mn  ^y.  :si.  ^î.v  :i.x  *:i7. 

v,^^  M^rtone,  Th^sn.é^-.^s  \:t'>s  i••.'.^:^:c•-î<•n,  t.  I,  col,  ÎO. 

(7'  Matk^ïic,  r*ïr,<;:).-î.*    ,:r't.f  Jt~.r.  .:::.  T4»n,  U  I,  p.  68.  Mabille,  U  pa» 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  QENTILICES  EN  -IU8. 

Ce  nom  de  lieu  est  identique  au  geatilice  écrit  Grusi 

avec  une  seule  s,  dans  une  inscriptioD  romaine  d'Italie  i 

Iccius.  In  pago  Athoariorum  Hicio.  721  (2)  ;  suivi 
J.  Garnier  (3) ,  il  faut  lire  Hiccio  ;  c'est  Is-sur-Tille  (Cô 
d'Or),  Comparez  Icius  pour  Iccius  dans  les  deux  tex 
suivants  :  In  patria  Arvernica  in  aice  Brivatense  in  vi 
cui  nomen  est  Icio  ,  i"  mai-  843  (4);  in  Alvemia,  in  cor 
iatu  ipsius  Brivatis...  in  îoco  dicto  Icio,  novembre  926  (5 
[  Iccius  est  le  nom  d'un  Gaulois  de  la  cité  de  Rein 
'  envoyé  en  ambassade  à  César  l'an  57  avant  Jésus-Chri 
Mais  ce  nom  était  déjà,  à  cette  époque,  ua  gentilice  roma 
En  l'an  44,  c'est-à-dire  dix-sept  ans  plus  tard,  Cicén 
dans  sa  troisième  philippique ,  parle  du  préteur  M.  Icc 
qui  eut  pour  lot  la  Sicile.  Dix-sept  ans  encore  après,  en  ! 
nous  trouvons  à  Rome  un  autre  Iccius,  c'est  un  famil 
d'Horace  ;  il  a  d'abord  cultivé  la  philosophie  ;  mais ,  trt 
vant  cette  science  peu  lucrative,  il  veut  chercher  la  riche; 
dans  le  métier  des  armes,  et  va  se  joindre  à  une  expéi 
lieu  militaire  contre  les  Arabes  :  Horace  lui  adresse  u 
ode,  la  vingt-huitième  du  premier  livre.  En  l'an  20,  i 
Iccius,  ayant  encore  une  fois  changé  de  carrière,  admin 
trait  les  biens  d'Agrippa  en  Sicile;  Horace  lui  adres 
l'épître  12  du  livre  I  ;  elle  commence  par  le  vers  : 

Pmctibus  Agrippao  siculia,  qnos  colligis,  Icci. 

3ous  l'empire,  le  nom  propre  Iccius  persista  en  Gai 
comme  gentilice.  Les  inscriptions  l'attestent.  Nous  le  In 
vous  à  Vaison  (Vaucluse)  (6),  où  il  produit  Vagnomen  déri 

(I)  C.I.L,  X.  37M;  cf.  De-Vil.  Onomamcon,  III,  378. 
(!)  Pftrdessas,  Dfplomala,  II.  3Î5. 

(3)  iVomfncUlure  hiiloriqxie  de»  communes  du  itépurUment  de  la  Ci 
<iOr,  p.  M,  n-  146. 

(4)  Doniol,  Carlufaire  d«  Brioude,  p.  210. 
(5)fbid.,  p.  169. 

(6)  C.  I.  Z,,,  XII,  1335. 


360  LIVHB  II.  CHAPITRE  III.  {  2. 

Iccianus  (1);  nous  le  trouvons  au  Pégue;  près  de  Valréas 
(Vauduse)  (2),  à  Saint-Paul-Trois-Chàteaux  (Drôme)  (3),  à 
Nimes  (Gard)  (4). 

On  doit  le  reconnaître  dans  le  premier  terme  àlcio- 
magus^  aujourd'hui  Usson  (Loire),  nom  de  station  romaine 
inscrit  dans  la  table  de  Peutinger,  et  qui  veut  dire  «  champ 
d'Iccius;  »  dans  le  premier  terme  d7cf o-dwrtfm ,  «  forte- 
resse dlccius ,  »  gui  apparaît  au  sixième  siècle  chez  Gré- 
goire de  Tours,  qui,  chez  cet  historien,  désigne  à  la  fois 
Izeures  (Indre-et-Loire)  et  Issoire  (Puy-de-Dôme)  (5),  et  qu'on 
retrouve  au  huitième  siècle  dans  une  charte  où  il  est  la 
forme  antique  du  nom  dlzeure  (Côte-d*Or) ,  comme  nous 
rapprend  M.  J.  Garnier  (6). 

Le  gentilice  Iccius  donna  aussi  naissance  à  un  dérivé 
en  -aous  :  Icciacus.  Ce  dérivé  est  écrit  par  deux  $,  en 
928,  dans  une  charte  de  Tabbaye  de  Cluny  (8aône-et- 
Loire)  ;  il  y  est  question  de  biens  situés  in  pago  Matisco- 
nense,  in  fine  Hissiaoense^  in  Hissiaco  (7);  Torthographe 
moins  bonne  in  Hisiaco  par  une  seule  «,  se  trouve,  en  935, 
dans  une  autre  charte  de  la  même  abbaye  ;  il  s'agit  proba- 
blement Issy-r Evoque  (Saône-et-Loire)  (8).  On  trouve  la 
même  faute  dans  l'orthographe  in  potestate  Isiaca  d'un 
diplôme  de  980  provenant  de  Tabbaye  de  Saint-Magloire(9); 
mais  cette  orthographe  est  rectifiée  en  1085  dans  une  charte 
de  Marmoutier,  où  il  est  question  de  l'église  de  Issiaco  (10); 
enfin,  dans  le  diplôme  faux  de  Childebert  I"  pour  la  fon- 
dation de  Saint-Germain-des-Prés  :  on  y  lit  Isciacus  {li) ] 


(1)  C.  /.  L..  1319. 

(2)  Ibid.,  1705. 

(3)  Ibid.,  1733. 

(4)  Ibid.,  3226,  3494. 

(5)  Voir  plus  haut,  p.  148,  154,  182. 

(6)  Nomenclaturey  p.  21,  n*  86. 

(7)  Bruel,  Recueil  des  chartes  de  l'abbaye  de  Cluny ,  t.  I,  p.  337,  338. 

(8)  Bruel,  ibid.,  p.  429. 

(9)  Robert  de  Lasteyrie,  Cartulaire  général  de  Paris,  p.  88. 

(10)  Ibid.,  p.  133. 

(11)  Ibid,,  p.  3. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  PES  QBNTILICES  EN  -IU8.    36 

c'est  Issy-sur-Seine,  près  Paris.  Issac  {Dordogne),  appeli 
Issacum  dans  un  pouillé  du  treizième  siàcle  (1).  doit  ôtr< 
aussi  un  ancien  fondus  Icciacus.  Les  Issac  de  l'AUier ,  di 
l'Ardècbe,  de  la  Gironde,  de  Lot-et-Oaronne  ont  probable 
meut  la  même  origine.  On  peut  faire  la  même  bypothèa< 
au  sujet  d'issay  (Eure-et-Loir),  qui  s'appelait,  au  quatorziènif 
et  au  quinzième  siècle  Isaâ,  et  au  sujet  d'Issè  (Loire- 
Inférieure). 

Enfin  Is-en-Bassigny  (Haute-Marne)  ne  serait-il  pas  m 
ancien  fundus  Iccius,  Isse  (Marne),  une  ancienne  villa  Iccia  i 

Ingenius.  Ecclesiam  S.  Johannis  de  Ingénia,  1080,  aujour- 
d'hui Engins  (Isère)  (3),  s'explique  par  le  gentilice  Ingenius 
conservé  par  une  inscription  d'Afrique  (3). 

Lancius.  Ce  nom  de  lieu  apparaît  au  cas  indirect  :  ville 
qva  vocatw  Lanceum,  dans  une  charte  de  l'année  1080  (4): 
de  Lancio,  en  1090(5);  Lantium  et  Lanz,  en  1109  (6).  C'est 
aujourd'hui  Laos  (Isère). 

Lancius,  nom  de  lieu  est  identique,  soit  au  gentilice  Len- 
tius,  soit  au  gentilice  Lancius.  Le  gentilice  Lentius  est  coU' 
serve  par  une  inscription  de  l'ancien  territoire  d'Aix  en  Pro- 
vence (7)  ;  comparez  le  cognomen  Lentiaus  en  Afrique  (8| 
et  le  gentilice  Lentidius  à  Rome  (9).  Le  gentilice  Lancius 
se  trouve  dans  une  inscription  d'Espagne  (10),  la  variante 
féminine  Lcmtia  a  été  relevée  dans  une  inscription  ài 
Campanie  (11). 


(1)  Da  Qoargnea,  IHctfonnalre  topogr.  de  la  Dordogne,  p.  160. 

(2)  CartuUire  de  Sainl-Haguee  dt  Grenoble,  p.  147. 
f3)  C.  /.  L.,  VIII,  6775. 

(4)  Carlulalre  de  SaiTU-Bugu»»  d<  Grenoble,  p.  117. 

(5)  ma.,  p.  U9. 

(6)  /6fd.,  p.  152. 

(7)  C.  I.  L..  XII,  M5. 

(8)  Ibid.,  VIII,  996Ï. 

(9)  ibid.,   VI,  21181. 

(10)  Ibid.,  II,  573. 
(ll]It>ld.,  X,  4955. 


362  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  {  2. 

Lancius  ou  Lentius  a  donné  des  noms  de  lieu  dérivés 
en  -0  et  en  -ctcus. 

Des  dérivés  de  Lancius ,  voici  des  exemples  :  1®  le  po- 
lyptyque de  Saint- Victor  de  Marseille,  qui  date  du  neu- 
vième siècle,  mentionne  :  Colonica  in  Lancions  (1)  ;  il  s'agit 
probablement  de  Lançon  (Bouches-du-Rhône)  ;  2*  Une 
charte  de  Cluny,  de  Tannée  930,  parle  d'un  ager  Lancianis 
dans  le  M&connais  (2) ,  et  une  villa  LanciaciAs  est  nommée 
dans  une  charte  de  la  même  abbaye,  que  l'éditeur  met 
entre  les  années  997  et  1031  (3). 

On  reconnaît  un  dérivé  de  Lentius  dans  une  charte  de 
Tannée  696  :  Lentiacus  en  Angoumois  (4).  Comparez  la 
curtis  Lenziacus  donnée  à  Tabbaye  de  Beaulieu  au  dixième 
siècle  (5),  c'est  Lanzac  (Lot).  L'existence  du  gentilice  Len- 
tius en  Gaule  paraît  établie  par  les  dérivés  :  1®  *  Lentinius; 
2^  *Lentilius  nécessaires  pour  expliquer  :  a)Lentigny  (Loire , 
Lantignie  (Rhône)  ;  ce  dernier,  écrit  Lantigneu  vers  1300  ;6;; 
b)  Lentilly  (Rhône),  appelé  Lentiliacus  en  975  (7)  ;  les  trois 
Lentilliac  du  département  du  Lot;  Lantilly  (Côte-dOr) , 
appelé  villam  Lentiliacum  dans  un  diplôme  du  roi  Karlo- 
man,  en  883  (8)  ;  comparez  Lantillac  (Morbihan). 

Lucius.  C'est  ainsi  qu'on  doit  lire  un  nom  de  lieu  écrit 
Lucus  dans  plusieurs  documents  du  moyen  âge,  dont  les 
auteurs  ont  écrit  sous  l'influence  de  leurs  études  gramma- 
ticales et  du  mot  latin  lucus.  Le  plus  ancien  de  ces  docu- 
ments est  le  testament  de  Tabbé  Widerad  ;  il  date  de  721 , 
mais  on  n'en  a  que  des  copies  et  la  plus  ancienne  ne  re- 
monte pas  au  delà  du  onzième  siècle.  Le  testateur  réserve 


(1)  Quérard,  Cartul&ire  de  Saint-Victor  de  Marseille,  t.  II,  p.  640. 

(2)  Bniel,  Recueil  des  chartes  de  Cluny,  t.  I,  p.  816. 

(3)  Bruel,  ibid.,  t.  III,  p.  525. 

(4)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  240. 

(5)  Deloche,  Cartulaire  de  Beaulieu,  p.  58. 

(6)  A.  Bernard,  Cartulaire  de  Savigny,  t.  II,  p.  914. 

(7)  Ibid.,  t.  I,  p.  130. 

(8)  Dom  Bouquet,  IX,  430  c. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICEB  EN  -lUB.  31 
à  ses  héritiers  divers  bieas,  dans  la  propriété  appelée  Luc 
et  située  dans  le  pagus  Âtkoariorum  (I);  c'est  aujourd'hi 
Lux  (Côte-d'Or).  Il  est  possible  que  Lux  {Saône-et-Loire}  ( 
Lux  (Haute-Garonne)  s'expliquent  de  la  même  façon. 

11  ne  faut  pas  confondre  ce  nom  avec  celui  de  Luccas  o 
litcas,  comme  l'écrivent  les  manuscrits  de  Y Historia  Frari 
nrum  de  Grégoire  de  Tours  (2),  ou  de  Loceis,  Locas  dans  le 
manuscrits  du  livre  des  Vitœ  Patrum  du  même  auteur  (3) 
il  s'agit  de  Loches  (Indre-et-Loire),  dont  le  nom  primit 
Luccœ  et  en  latin  vulgaire  Luccas,  sous-entendu  casas,  es 
le  féminin  pluriel  du  cognomen  Luccus.  Une  inscriptio 
de  Trêves  mentionne  un  certain  Hilarius  Luccus  (4).  Ces 
à  ce  cognomen  que  correspond  le  gentilice  Luccîus  coe 
serve  par  quelques  inscriptions  à  Rome  (5)  et  en  Gauk 
par  exemple  à  Aps  (Ardéche)  (6)  et  à  Narbonne  (7).  Voi 
p.  258-261  ce  qui  a  été  dit  du  gentilice  Luccius,  du  gent 
lice  Lucius,  sa  variante,  et  des  noms  de  lieu  en  -acus  qx. 
en  sont  dérivés. 

Quelqu'un  pourrait  essayer  d'expliquer  par  le  gentilic 
Lucius  te  nom  de  Castellucius  dans  les  deux  cartulaires  d 
Beaulieu  et  de  Brioude.  Le  cartulaire  de  Beaulieu  oËFre  c 
nom  dans  deux  chartes  de  l'année  885  :  Cum  ipso  castell 
qui  vocatur  Castel- Lucius  (8) ,  Cum  ipso  castello  quod  voco 
iur  Castellucio  (9)  ;  dans  ces  deux  documents ,  il  s'agit  d 
Chalus  (Haute-Vienne).  Le  même  nom  se  lit  dans  deu 
chartes  d'Auvergne  qui  datent  du  siècle  suivant  :  In  pag 
irvemico,  in  comitatu  Telamitensi...  in  monte  qui  vocatti 
Castellucius,  juin  932  (10);  In  patria  Arvemica  in  comitat 

(]}  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  325. 

(?)  L.  10,  c.  31  ;  édit.  Aradt,  t.  I,  p.  444,  1.  20, 

(3)  Arndt  et  Knisch,  t.  II,  p.  734,  1.  I 

(4)  Brarabach,  n-  825. 
(i)  C.  /.  t.,  VI,  21557,  21560. 
(6)  Ibid.,  XII,  265G. 
(T)  ma.,  Xli,  4954. 

(8)  Doloche,  Carlulaire  (ie  Beaulieu,  p.  100. 

(9)  Deloche,  Una.,  p.  530. 
■.10)  Doniol ,  CaWuIaire  de  Brioude,  p.  96, 


364  ;.IVRE  IL  CHAPITRE  IILI 1 

Telamitensi...  in  villa  qwB  diciPur  Castelluoio,  mai  945  (1); 
il  s'agit  ici  de  Chalus  (Puy-de-Dôme),  comme  Ta  établi 
}i.  Hou9é  (2).  Il  y  a  au  moins  une  troisième  localité  de 
môme  nom,  c'est  Chastelux  (Yonne) ^  en  1147  Casteluz  (3). 

Il  parait  invraisemblable  qu'un  composé  syntstctique 
CasteJfluS'lAicius  ait  été  fabriqué  en  France  daus  trois  ré- 
gions éloignées  Tune  de  l'autre,  comme  la  Haute- Vienne , 
le  Puy-de-Dôme  et  l'Yonne  ;  on  doit,  ce  semble,  préférer 
à  cette  hypothèse  celle  de  la  dérivation.  Castellucius  serait 
dérivé  4^  castellum  comme  Castellio ,  Châtillon.  La  langue 
latine  a  un  suffixe  ûceus  qu'on  trouve  dans  pannûc&ÂS^  «  dé- 
guenillé ;  ce  suffixe  s'est  prononcé  ûcius  dans  les  bas  temps 
et  s'est  confondu  avec  celui  qui  a  servi  à  former  fidûoia^ 
«  confiance ,  »  cadûoia,  «  épilepsie  ;  »  on  trouve  ce  suffixe 
en  France  dans  les  noms  de  lieu  Tumucius  et  Petronudus. 

Turnucius  est  noté  Turnuciv/m,  villa/m  dans  un  diplôme  de 
Charles-le-Chauve  en  875  (4)  ;  l'orthographe  Tomotium,  en 
853,  dans  un  autre  diplôme  du  môme  prince  (5)  repré- 
sente le  môme  son  ;  il  s'agit  de  Tournus  (Saône-et-Loire)  ; 
Turnucius  est  un  dérivé  du  cognomen  Turnus  étudié  p.  170, 
Le  cognomen  Turnus  a  donné,  outre  Turnucius,  les  dérivés 
primaires  :  Turnacus  ;  —  Tournay  (Belgique,  Calvados,  Orne), 
Tournac  (Ariège),  —  et  *Turnius,  gentilice  dont  l'existence 
est  attestée  par  les  noms  dérivés  Tourny  (Eure),  Tournhac 
(Aveyron),  Tourniac  (Ariège,  Cantal ,  Lot),  autant  de  nota- 
tions modernes  du  gallo-romain  Tumiacu^. 

PePronuciuSj  écrit  au  cas  indirect  Petronutio^  dans  un 
diplôme  de  Charles  le  Chauve  pour  l'abbaye  de  Saint- 
Riquier  (Somme)  en  844  (6) ,  est  un  nom  de  lieu  dérivé  de 
Petro,  Petronis;  Petro  est  un  cognomen;  on  a  trouvé  dans 


(1)  Doniol,  ibid.,  p.  182. 

(2)  Chez  Doniol,  Cartulatre  de  SauxilUnges,  p.  677,  679. 

(3)  Quantin,  Dictionnaire  topogr&phique  du  département  de  l'Yonne,  p.  31. 

(4)  Dom  Bouquet,  VIII,  647  c. 

(5)  /Md.,  VIII,  524  c. 

(6)  Ibid.y  VIII,  468  e. 


NOMS  DE  LIEU  IDÈNTIQUtîÔ  A  DBS  GEirt'iLICES  EN  -IU8. 

les  murailles  de  la  ville  de  Narbonne  l'épitaphe  que  L.  Ss 
nius  Petro,  affranchi  de  L.  Salonius,  fit  graver  pour  di 
personnes  et  pour  lui-ûiôme  (1). 

LucAKtDs.  Par  unô  chartâ  qui  se  place  entre  les  ann 
1031  et  1065,  Aimoù  de  Gombrouse  donna  &  l'abbaye 
Sainte-Pby-de-Conques  le  manse  de  Causeria ,  situé  in 
caria  iMgafiiensi  (3).  Luganiensis  est  un  adjectif  dérivé 
Substantif  Lut/am'tu,  dans  lequel  on  reconnaît  Lugan,c( 
mune  de  Villeneuve  (Aveyron)  ;  Luganim  représente  \ 
prononciation  basse  du  latin  classique  huccmim. 

On  a  parlé,  p.  160-161,  de  ce  gentilice  et  de  ses  déri 
en  -octu. 

Mabcids.  Dans  une  charte  de  l'année  940  ou  de  l'an: 
941,  qui  fait  partie  des  archives  de  l'abbaye  de  Cluny, 
bienfaiteur  donne  à  ce  monastère  les  biens  qu'il  poss< 
in  villa  Marcio  (3).  Il  s'agit  d'une  localité  située  dans  le 
gus  communacensis ,  dont  le  chef-lieu  était  Communac 
aujourd'hui  Coinmunay  (Isère).  \l  y  avait  dans  le  dépai 
ment  do  Gard  un  autre  ifartius  ou  Marcius  :  de  Jiartio 
de  iBarcio  dans  plusieurs  chartes  du  douzième ,  du  qua 
zième  et  dii  quinzième  siècle,  citées  par  M.  Qermer-1 
rand  (4};  ce  Martius  ou  Marcius  s'appelle  aujourd'hui  Mi 

Il  a  été  déjà  question ,  p.  270-275 ,  de  ce  gentilice  el 
ses  dérivés  en  -acus  et  en  -aniis. 

Matroïhbs.  Une  charte  de  l'année  921  f?),  a  pour 
jet  la  donation  de  biens  situés  en  Auvergne,  dans  la  vii 
rie  de  Nonette  {Puy-de-t)ôme) ,  in  villa  quà  dicihiir 
Aronio  (5). 


(I]  c.  I.  L.,  XII,  4650. 

(I)  Dealardina,  Carlul«ir«  da  ConquM,  p.  313-314. 

(3)  Bniel,  R«cu«tt  de»  charlu  de  l'abbaK*  de  dluViv,  1. 1,  jt.^. 

(4)  tticHonnaire  fopopraphfgue  du  département  du  Gard,  p.  123. 

(5)  Doniol,  Carlulaire  de  Srloude,  p.  157. 


366  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  {  2. 

Matronius  est  un  gentilice  mentionné  dans  une  inscrip- 
tion de  Vérone  (Italie)  ;  c'est  l'épitaphe  de  Matronia  Mater- 
nina  (1).  On  trouve  plus  souvent  Matrinius,  exemple  :  les 
épitaphes  de  L.  Matrinius  Secundus,  de  L.  Matrinius 
Stichianus  et  de  Matrinia  à  Rome  (2)  ;  une  dédicace  aux 
mères  Veteranehœ  par  C.  Matrinius  Primus  aux  envii-ons 
d'Aix-la-Chapelle  (3)  ;  Tinscription  de  Mayence,  qui  nous  a 
conservé  les  noms  de  Matrinius  Zmaragdus  (4).  Le  philoso- 
phe épicurien  C.  Matrinius  Valentius  nous  est  connu  par 
son  épitaphe  qu'on  trouve  chez  Orelli  sous  le  n®  1192. 

De  Matrinius  vient  le  nom  de  Matriniacus^  au  neuvième 
siècle  Madriniacus,  aujourd'hui  Marnay  (Aube),  donnée 
Tabbaye  de  Saint-Denis  en  859  par  le  roi  Charles-le- 
Chauve  (5).  Un  autre  Madriniacus  qui  serait  Marigny-Mar- 
mande  (Indre-et-Loire) ,  apparaît  au  neuvième  siècle  dans 
une  charte  de  Tabbaye  de  Saint-Martin-de-Tours  (6). 

PoMPONius.  En  861 ,  Charles-le-chauve  donna  à  Tabbaye 
de  Saint-Denis,  pour  subvenir  aux  dépenses  du  luminaire, 
une  partie  des  biens  qui  composaient  le  domaine  royal  dit 
Pomponius  en  Beauvaisis  :  ex  rébus  fisoi  nost/ri  Pomponii  in 
pago  Belvacensi  (7).  M.  Longnon  a  reconnu  que  la  localité 
dont  il  s'agit  est  Pontpoint  (Oise).  L'orthographe  moderne 
de  ce  nom  offre  un  exemple  caractéristique  de  la  façon  intel- 
ligente dont  les  scribes  officiels  entendent  Tétymologie. 

Le  gentilice  Pomponius  est  celui  d'une  gens  plébéienne 
de  Rome  qui  arriva  aux  dignités  curules.  M.  Pomponius 
Matho  fut  consul  deux  fois,  l'an  233  et  Tan  231  avant 
Jésus-Christ  ;  la  première  fois  il  obtint  les  honneurs  triom- 
phaux pour  avoir  vaincu  les  Sardes.  Bien  antérieurement, 


(1)  c.  /.  L.,  t.  y,  n-  3668. 

(2)  Ibid.,  VI,  22298-22300. 

(3)  Brambach,  575. 
(4)/bid.,  1124. 

(5)  Dom  Bouquet,  VIII,  558  d. 

(6)  MabiUe,  La  pancarte  noire,  p.  227. 

(7)  Dom  Bouquet,  VIII,  569  a. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICE8  EN  -lUS.  9 
des  PomponJus  avaient  occupé  des  magistratures  inférieu 
res.  été  par  exemple  tribuns  du  peuple.  Dés  449,  un  de 
dix  tribuns  élus  par  la  plèbe  romaine  fut  M.  Pomponius  (1 
Pomponius  n'est  pas  originairement  un  nom  romain 
c'est  un  dérivé  du  nom  de  nombre  pompe  «  cinq  »  qui  ei 
osque  et  ombrien  ;  c'est  un  des  témoins  qui  attestent  ] 
présence  d'éléments  étrangers  dans  la  population  romair 
dès  les  premiers  siècles  de  son  histoire. 

La  conquête  romaine  introduisit  ce  gentilice  en  Oauli 
A  Aime  (Savoie),  on  a  trouvé  encastré  dans  un  mur  d'églif 
une  dédicace  à  la  déesse  Silvana  par  T.  Pomponius  Victo 
procurator  augustorum  (2)  dans  les  Alpes  Graiae  et  Poenina 
Le  cimetière  des  Aliscamps  d'Arles,  a  fourni  l'épitaphe  c 
C.  Pomponius  Polycarpus  (3).  On  a  autrefois  lu  à  Uzi 
l'épitaphe  de  Pomponius  Orbus  (4),  etc.  De  Pomponius  déi 
vent  deux  noms  de  lieu  conservés  par  la  géographie  au 
derae  de  la  France  :  Pompignac  (Gironde)  =  Pomfi 
niacm  ;  Pompignan  (1°  Gard ,  2°  Tarn-et-Garonne)  ■ 
Pomponiarwtë.  Des  fundi  Pomponiani  sont  inscrits  sur 
table  alimentaire  de  Veleia,  p.  5,  1.  60  et  91  (5). 

La  parenté  grammaticale  du  poète  Le  Franc  de  Pomp 
gnan  avec  le  tribun  du  peuple  Pomponius,  qui  vivait  dei 
mille  deux  cents  ans  ans  plus  t6t,  est  le  résultat  d'un  basa: 
dont  l'étymologie  géographique  offre  de  nombreux  exei 
pies. 

Pompogne  (Lot-et-Garonne)  parait  être  une  ancieni 
villa  Pomponia. 

Priscius.  Une  charte  de  l'an  801 ,  par  laquelle  débute 
cartulaire  de   l'abbaye  de  Conques   (Aveyron) ,    contie 


(1)  Tit«-Livo,  III,  H.  Sor  U  gtn»  Pomponia,  voyaz  Paul;,  Real-Bncye 
p«ed!B.  (.  V,  p,  1874-I88Ï. 
{!)C.  I.L.,  XU,  103. 

(3)  /btd.,  XII,  836. 

(4)  IbU.,  Xll,  29*6. 

[i)  IbU.,  t.  XI,  p.  315-216, 


m  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  (  2. 

donation  à  ce  monastère  de  biens  situés  en  Rouergue ,  in 
locis  vel  villù  nuncopantilms  ubi  vocabulum  est  Prisdo  (1). 
Le  donateur,  énumérant  ses  largesses,  parle  plus  bas  de 
ipsa  rocca  Prisdo  (2).  Dans  le  même  cartulaire,  vers  1100, 
cette  localité  est  appelée  Pris  (3).  Dans  un  autre  document 
de  la  môme  époque,  conservé  par  le  même  cartulaire,  le  ré- 
dacteur voulant  faire  de  la  science  a  écrit  Pri9cm  (4)  ; 
c'est  une  faute  pour  Prisdu^. 

On  a  parlé  plus  haut,  p.  300-301,  du  gentilioe  Priseius 
et  de  son  dérivé  Prisôiatms. 

QtjmTiLttJs.  Par  une  charte  dont  la  date  se  place  entre 
les  années  1061  et  1065,  un  bienfaiteur  de  Tabbaye  de 
Conques  (Aveyron)  donne  à  ce  monastère  ecclesiam  nostram 
de  Quintilio  (5).  M.  G.  Desjardins,  éditeur  de  ce  document, 
a  établi  que  l'église  de  Quintilio  devait  être  située  près  de 
Touk)iise  (6).  En  1107,  on  disait  Quintil  :  Bernardus  de 
Quintil  (7). 

La  bonne  orthographe  de  ce  gentilice  est  Quinctilins , 
bien  qu'on  trouve  déjà  Quintilius  sans  c  daûs  les  inscrip- 
tions romaines.  La  gens  Quinctilia  était  patricienne  et  remon- 
tait, dit"0n,  au  temps  de  Romuius  où  un  de  ses  ïnembres 
aurait  présidé  les  prêtres  dits  Qmnctiliani  Luperei  (8).  Les 
Luperrcales,  fête  fixée  au  15  février,  étaient  célébrées  par 
deux  groupes  de  prêtres  :  les  Quinctiliani  Luperei  et  les 
Fabiani  Lupèixi^  tirant  chacun  leur  surnom  d'Urne  ^nde 
famille  de  Rome. 

La  branche  la  plus  importante  de  la  gen>s  QuinctiUa  était 


(1)  Q.  Desjardins,  CtirtuUire  de  Conques^  p.  1. 
(î)  îbid.,  p.  2. 

(3)  Ibid.,  p.  347. 

(4)  ïbtd.,  p.  3^. 

(5)  /bid.,  p.  62. 

(6)  Ibid.y  p.  cvi,  cvii. 

(7)  Ibid.,  p.  386. 

(8)  Pestas,  livre  XVI.  Sur  la  gens  Quin[c]tilia ,  voyez  t^aùly,  ReaX-Èncy- 
clopaêdiê,  t.  VI,  p.  372-373. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICEB  EN  -lUB.  36» 
celle  des  Quiaclilius  Varus.  Un  d'entre  eux  devint  dicta- 
teur l'an  331  av.  J.-C.  ;  un  autre,  tribun  militaire  en  l'année 
403;  deux,  consuls,  l'un  l'an  453,  l'autre  l'an  13  av.  J.-C. 
Le  dictateur  fut  élu  pour  apaiser  une  émeute  populaire  ;  le 
moyen  qu'il  employa  et  qui  eut  plein  succès,  fut  d'enfon- 
cer un  clou  dans  la  paroi  d'un  temple  ;  c'était  le  moyen  le 
plus  sûr  d'apaiser  la  colère  des  dieux  et  de  faire  cesser  les 
calamités  publiques  (1).  Les  deux  consuls  furent  moins 
heureux.  Le  premier,  étant  en  fonctions,  mourut  d'une 
maladie  épidëmique  qui,  cette  année-là,  fit  beaucoup  de 
victimes;  le  second  est  ce  fameux  Varus  qui,  l'an  9  av. 
J.-C,  commandant  en  Germanie  trois  légions,  périt  avec 
son  armée  ;  il  s'appelait  P.  Quinctilius  Varus, 

Son  gentilice  pénétra  en  Gaule.  Trois  inscriptions  l'attes- 
teul  ;  au  musée  de  Narbonne  est  wnservée  l'ëpitapbe  que 
de  son  vivant  se  ût  préparer  C.  Quintilius  Celsus  (2)  ; 
à  Nimes,  C.  Quintilius  Eutychus  fît  graver  celle  de  sa 
femme  (3)  ;  on  a  trouvé ,  à  Vaison ,  l'épitapbe  de  Quintilia 
Paterna  (4). 

Quintilius  a  donné  à  la  géographie  de  la  Gaule  le  dérivé 
Quiniiliacus,  aujourd'hui  conservé  par  les  noms  de  Quan- 
tiliy  (Cher)  et  de  Cantillac  (Dordogne).  Celui-ci,  écrit  au- 
jourd'hui par  un  C  initial,  a  commencé  autrefois  par  un  Q. 
On  le  voit  écrit  Qentilhacum  au  treizième  siècle,  Qumtillac 
en  1382  (5). 

SoLLEMNius.  Vers  l'année  751,  Pépin  le  Bref,  encore 
maire  du  palais,  ordonna,  par  un  jugement  conservé  en 
original,  la  restitution  de  divers  biens  à  l'abbaye  de  Saint- 
Denis.  Dans  la  nomenclature  se  trouve  le  monastère  dit 


(l|Tit«-Liv0,  VIII,  18;  et.  VII,  3. 

lî)  C.  I.  L.,  XII,  4990. 

(i|  ibid.,  XII,  uns. 

H)  Ibid..  XII,  tSTt. 

[i]  De  Qowgaes,  Dictionnaire  topogr.  du  départ,  de  la  Dordogne 

24 


370  LIVRE  IL  CHAPITRE  IIL  {  2. 

C)^ce,  aujourd'hui  Croix-Nord,  arrondissement  d' A vesnes  1 , 
alors  situé  dans  le  pagm  de  Famars  (Nord)  (2)  et  près  du 
fiscus  ou  domaine  royal  appelé  au  cas  indirect  Solemnio  /, . 
précédemment  donné  à  Saint-Denis  par  le  roi  Childeben. 
Les  mêmes  indications  géographiques  se  retrouvent  en  773 
dans  un  diplôme  de  Charlemagne  (4).  La  donation  par  le 
roi  Childebert  à  Tabbaye  de  Saint-Denis  avait  eu  lieu  ei: 
706;  on  n*en  a  plus  qu'une  copie,  et  le  nom  du  domaine 
royal  y  est  écrit  deux  fois  Solemio  (5),  sans  n  entre  Vm  et 
Vi  ;  il  faut  corriger  Solemnio.  Il  s'agit,  parait-il,  de  Soles- 
mes  (Belgique)  (6). 

On  a  parlé  déjà,  p.  327,  du  gentilice  Sollemnius  et  de  son 
dérivé  Sollemniacus . 

SoLius.  In  alio  loco  nfuod  vulgo  dicitur  Solius,  telle  est  la 
formule  employée  en  1055  par  le  rédacteur  d'une  charte 
pour  désigner  une  localité  située  dans  le  Val  de  Salerne 
au  comté  de  Fréjus  (7). 

On  a  étudié  déjà,  p.  328-329,  le  gentilice  Solius  et  son 
dérivé  Soliacus. 

Tertius.  En  896,  il  fut  fait  à  l'abbaye  de  Cluny  dona- 
tion d'un  bien  situé  dans  le  comté  de  Vienne,  in  villa 
Tercio  superiori  (8). 

Tertius  fut  d'abord  un  surnom.  C'était  celui  de  Junia  Ter- 
tia,  sœur  de  M.  Junius  Brutus  et  femme  de  C.  Cassius 
Longinus.  Elle  passait  pour  être  devenue  la  maîtresse  de 


(i)  Longnon,  Examen  géographique  du  tome  premier  des  Dtplomala  im- 
periif  p.  19. 

(2)  Sur  ce  pagus^  voy.  Longnon,  texte  de  VAtlas  historique  de  U  France, 
p.  124. 

(3)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  45,  col.  1.  Pertz,  Diplomalum  im- 
perii  tomus  primus,  p.  109,  1.  5. 

(4)  Dom  Bouquet,  V,  733  e. 

(5)  Pertz,  Diplomatum  imperii  tomus  primus^  p.  66,  1.  41,  et  p.  67,1. 10. 

(6)  Longnon,  Atlas  historique  de  la  France,  p.  202. 

(7)  Guérard,  CartuL  de  Saint-Victor  de  Marseille^  t.  I,  p.  506. 

(8)  Bruel,  Rec,  des  chartes  de  Cluny,  t.  I,  p.  68. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICES  EN  -lUS.    371 

Jules  César,  et  la  mère  de  Tertia  était  accusée  de  favoriser 
les  relations  des  deux  amants.  César  rendit  à  cette  mère  in- 
dulgente le  service  de  lui  adjuger  en  vente  publique,  pour 
une  somme  fort  modique ,  de  vastes  domaines  confisqués  ; 
Cicéron  dit  en  plaisantant  que  le  prix  avait  été  fixé  Tertia 
deducta.  On  pouvait  comprendre  au  choix ,  ou  que  le  tiers 
avait  été  déduit,  ou  que  la  valeur  de  Tertia  avait  été  retran- 
chée du  prix,  ou  que  Tertia  avait  été  conduite  par  sa  mère 
à  César  (1).  Dans  le  langage  familier,  Tertia  s'appelait  Ter- 
luUa  :  Cicéron  la  nomme  ainsi  dans  ses  lettres  à  Atticus  (2). 
Antérieurement  à  cela,  en  Tan  168  avant  Jésus-Christ, 
le  consul  L.  Aemilius  Paulus  avait  une  fille  qui  se  distin- 
guait des  autres  Aemilia  par  le  cognomen  de  Tertia  ;  elle 
se  fit  un  nom  dans  l'histoire  romaine  par  une  parole  enfan- 
tine où  Ton  vit  une  prédiction  de  la  défaite  du  roi  de  Macé- 
doine, Persée  (3). 

Une  Tertia  moins  illustre,  était  la  ûlle  du  mime  Isidore. 
Cicéron  parle  d'elle  dans  ses  Verrines. 

Sous  l'empire  romain  nous  trouvons  dans  Tacite  le  cog- 
nomen  Tertius,  passé  à  la  dignité  de  gentilice.  En  l'an  70 
de  notre  ère ,  Tertius  Julianus  commandait ,  avec  titre  de 
légat,  la  septième  légion  ;  il  faillit  être  une  des  victimes  des 
discordes  civiles  (4)  ;  l'année  suivante ,  il  fut  préteur  (5). 
D'autres  Tertius  moins  connus  apparaissent  dans  les  in- 
scriptions :  T.  Tertius  Italiens  et  T.  Tertius  Paullus ,  au 
musée  de  Nimes  (6);  T.  Tertius  Félix,  au  musée  de 
Mayence  (7),  etc. 

Le  gentilice  Tercius  a  donné  un  dérivé  en  -acus  qui 
désigne  plusieurs  localités  différentes.  Au  commencement 
du  neuvième  siècle,  le  Polyptyque   de  Saint-Victor  de 

(1)  Suétone,  César,  c.  50. 

(2)  Livre  XIV,  20;  livre  XV,  11. 

(3)  Cicéron,  De  divin&tione,  livre  I,  c.  46,  i  103  ;  livre  II,  c.  40,  g  83. 

(4)  Tacite,  Histoires,  livre  II,  c.  85. 

(5)  Ibid.,  livre  IV,  c.  3940. 

(6)  C.  /.  L.,  XII,  3593,  3945. 

(7)  Brambacb,  1049. 


372  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  {  2. 

Marseille  nous  apprend  que  cette  abbaye  avait  une  colo- 
nica  in  Terciago^  c'est-à-dire   une   propriété  immobilieiv 
habitée  par  des  colons  dans   un  ancien   fundu$  Tertio- 
cv^  (1).  En  860,  Raoul,  archevêque  de  Bordeaux,  donne 
pour  la  fondation   de  l'abbaye    de  Beaulieu    un   manse 
in    villa  Terciaco  ;  il    ajoute   que    cette   villa  est   situe^ 
in  orbe  Lemovicino  et  t&iTitorio  Tornense ,    c'est-à-dire  f-w 
Limousin  dans  la  pays  de  Turenne  ;  c'est  aujourd'hui  Ter 
sac  (Haute-Vienne)  (2).  Dans  le  siècle  suivant,  les  cha^le^ 
de  Cluny  mentionnent  deux  Teriiacus  ;  le  premier  apparaît 
en  956  :  il  s'agit  de  la  donation  d'une  curtis^  située  dans  le 
pays    d'Autun   dans   Vager  Marcilliacensis  ^   in   villa  Ter- 
ciaco (3),    c'est    aujourd'hui    Terzé,    commune   de  Mar- 
cilly  (Saône-et-Loire)  ;  le  second  est   nommé   dans  une 
charte  de  960,  où  il  est  dit  qu'une  villa  Buciagusesi^iw^-^ 
en  Maçonnais  in  fine  Terciacensi  (4). 

Terssac  (Tarn)  parait  être  aussi  un  ancien  Teriiacus. 
Ainsi  peut  s'expliquer  également  le  nom  de  Tressé  (Maine- 
et-Loire),  qu'on  a  autrefois  écrit  Tercé  (5). 

TiLius  ou  plutôt  TiLLius.  Une  villa  Tilius,  ou  mieux 
Tillius^  mentionnée  en  845  et  en  854  dans  des  diplômes  de 
Charles  le  Chauve  pour  l'abbaye  de  Montiérender  ^6, 
est  aujourd'hui  Thil  (Aube).  Un  autre  Tilius  :  [in  alio  loc- 
qui  vocatur  Tilius)  apparaît  en  878  dans  une  charte  de 
l'abbaye  de  Beaulieu  (Corrèze)  (7);  ce  parait  être  Tillet, 
commune  de  Molières,  ou  Tillet,  commune  de  Lenlil- 
lac,  tous  deux  dans  le  département  du  Lot.  Une  troisième 


(1)  Guérard,  Cart.  de  Saint-Victor  de  MarsetHe,  t.  II,  p.  638. 

(2)  Deloche,  CaW.  de  Beaulieu,  p.  4,  384,  385. 

(3)  Bruel,  Recueil  des  chartes  de  Cluny^  t.  II,  p.  90. 

(4)  Bruel,  ibtd.,  t.  II,  p.  183. 

(5)  Port,  Dictionnaire  de  Maine-et-Loire^  t.  III,  p.  626. 

(6)  Dom  Bouquet,  VIII,  477  a,  429  e.  Lalore,  Collection  des  principm 
cartulaires  du  diocèse  de  Troyes,  t.  IV,  p.  126,  128. 

(7)  Deloche,  Car(.  de  Beaulieu,  p.  84. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICES  EN  -lUS.    373 

villa  Tilifis,  située  dans  TAutunois  figure  dans  une  charte 
de  l'abbaye  de  Saint-Germain-d'Auxerre  en  924  (1). 

Tillius  est  un  gentilice  qui  n'était  pas  rare  sous  Tempire 
romain.  On  peut  s'en  assurer  en  consultant  les  index  du  C. 
I.  L. ,  t.  V  ,  VIII ,  IX,  X ,  XIV.  Ce  gentilice  a  pénétré  en 
Gaule  ;  on  a  lu  le  nom  de  femme  Tillia  dans  une  inscription 
de  Narbonne  (2). 

Tillius  a  des  dérivés  en  -a(yus  :  on  a  reconnu  que  la 
Tilliacus  villa  d'une  charte  de  989  est  aujourd'hui  Tillé, 
commune  de  Champgéneteux  (Mayenne)  (3).  En  952,  une 
charte  d'Otton  I",  roi  de  Germanie,  pour  l'abbaye  de 
Saint- Vannes ,  parle  d'un  Tilliacus  (4)  qui  est  aujourd'hui 
Thilly  ou  Tilly-sur-Meuse  (Meuse)  (5). 

Les  formes  modernes  de  Tilliacus^  dérivé  en  -aous  de 
Tillius,  nom  d'homme,  doivent  être  soigneusement  distin- 
guées des  formes  modernes  de  Tilietum ,  dérivé  en  -etum 
de  iilia ,  nom  d'une  espèce  d'arbre ,  c'est-à-dire  du  tilleul  ; 
ainsi  Tillay  (Eure-et-Loir) ,  est  un  ancien  Tilietum  comme 
l'a  montré  M.  Merlet  (6);  Tilietum  est  un  endroit  où  il  y 
a  des  tilleuls,  Tilliacus  est  la  propriété  de  Tillius. 


Nous  sommes  arrivés,  par  ordre  alphabétique,  au  dernier 
des  exemples  que  nous  voulions  donner  de  gentilices  romains 
employés  au  masculin  comme  noms  de  lieux  dans  les  textes 
du  moyen  âge. 

Nous  terminerons  par  un  exemple  d'un  phénomène  ana- 
logue en  Gaule  au  temps  de  l'empire  romain.  C'est  : 

Nasium.   Ptolémée   au   deuxième   siècle    de    notre  ère 

(1)  Dom  Bouquet,  IX,  563  e,  564  a. 
P)  C.  /.  L.,  XII,  p.  854,  col.  1,  n-  5135. 

(3)  Léon  Maître,  Diciionnaire  topogr&phique  du  département  de  la 
Mayenne,  p.  313. 

(4)  Dom  Bouquet,  IX»  384  a. 

(5)  Liénard,  Dict.  iopogr,  du  départ,  de  la  Meuse^  p,  235. 

(6)  L.  Merlet,  Dictionn,  topogr,  du  départ.  d'Eure-et-Loir^  p,  178. 


874  LIVRE  IL  CHAPITRE  IIL  {  2, 

nomme  deux  villes  des  Leuci  :  ce  sont,  au  nominatif  singu- 
lier, TooXXov  «  Toul  »  (Meurthe-et-Moselle)  etNaatov  a  Naix» 
(Meuse)  (1). 

Pour  comprendre  ces  deux  noms  de  lieux  qui  sont  des 
substantifs  masculins  employés  adjectivement  au  neutre,  il 
faut  les  écrire  en  caractères  latins  Tullum  et  Nasium,  comme 
dans  Vltinéf^aire  d'Antonin  et  suppléer  praedium,  Tullum  et 
Nasium  sont  le  premier  un  cognomen  latin  (2),  l'autre  un 
gentilice ,  employés  tous  deux  adjectivement  au  neutre. 

L'orthographe  du  gentilice  Nasius  par  une  seule  s  est 
conforme  à  Tétymologie,  car  ce  nom  d'homme  dérive  de 
nasuSj  «  nez.  »  comme  les  cognomina  bien  connus  du  poète 
Ovide,  P.  Ovidius  Naso,  et  du  consul  P.  Cornélius  Scipio 
Nasica.  De  nasus  viennent  aussi  les  gentilices  Nasellius, 
Nasennius,  Nasidius,  Nasonius,  qu'on  trouve  dans  les 
inscriptions.  Dans  tous  ces  dérivés  Vs  est  simple  et  Va  long 
comme  dans  nasv^.  Cette  orthographe  est  respectée  dans 
Nasium  et  dans  le  gentilice  de  Maxima  Nasia  que  nous  a 
conservé  une  inscription  dédicatoire  à  Apollon  trouvée  à 
Maurovalle  dans  l'Italie  méridionale  (3). 

Mais  par  un  phénomène  dont  l'onomastique  latine  offre 
d'autres  exemples,  le  gentilice  Nâsius  double  ordinaire- 
ment son  s  en  abrégeant  son  a  et  s'écrit  Nassius  (4). 
Comme  exemple  de  cette  notation  nous  citerons  une  ins- 
cription de  Narbonne;  c'est  l'épitaphe  gravée  sur  une  stèle 
funéraire  par  les  soins  de  Nassius  Eutycus  (5). 

(1)  Ptolémée,  1.  II,  c.  9,  §  7;  édition  Didot-MûUer.  t.  I,  p.  225.  Un  certain 
nombre  de  mss.  donnent  la  forme  TouXXtov  d*accord  avec  la  table  de  Pentia- 
gor,  où  on  lit  Tullio  :  ToOXXov  est  l'orthographe  des  autres  mss.  de  Ptolémée 
d'accord  avec  l'Itinéraire  d'Antonin,  où  on  lit  Tullum,  p.  365, 1.  4;  p.  385, 
1.  10;  et  TullOf  p.  385,  1.  6.  ToOXXov,  Tullum  est  la  bonne  leçon  confirmée 
par  la  prononciation  moderne  Toul.  Tullium  aurait  donné  Touille.  Voyez, 
du  reste,  les  textes  réunis  par  £.  Dosjardins,  Géographie  de  la  Gaule  d'après 
le  lable  de  Peutinger,  p.  123-124, 

(2)  C.  /.  L.,  V,  2845,  3930,  7576;  VII,  794,  1336  (1136);  VIII,  2556;  IX,  5560; 
X,  2625,  8048;  XII,  3726,  5804. 

(3)  C.  J.  L.,  IX,  5803. 

(4)  Ibid.,  VI,  22283;  IX,  3191  ;  X,  1403,  2765;  XIV,  2966. 

(5)  Ibid,,  XII,  4910. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICES  EN  -lUS.    375 

§3.  —  Gentilices  romains  en  -ius  employés  adjectivement 
avec  un  sens  géographique  au  féminin  singulier,  (1). 

U Itinéraire  cTAntonin  nous  donne  un  exemple  d'un  nom 
de  fundus  employé  au  féminin  et  s'accordant  avec  villa  ex- 
primé :  ad  villam  Servilianam  (p.  42),  c'est  en  Afrique.  Le 
plus  souvent,  dans  V Itinéraire  d'Antonin,  le  mot  villa  est 
sous-entendu  :  voici  des  exemples  de  noms  de  fundi  au 
féminin  tirés  de  gentilices  à  l'aide  du  suffixe  --anus  : 

Antistiana  {Itinéraire^  p.  398) 
Barbariana  (p.  406) 
Bassiana  (p.  262) 
Clodiana  (p.  318) 
Crispiana  (p.  267) 
Domitiana  (p.  499,  500) 
Malliana  (p.  38) 
Manliana  (p.  292) 
Marcelliana  (p.  110) 
Mariana  (p.  445) 
Valeriana,  Variana  (p.  220) 

Ont  été  formés  avec  le  suffixe  -aci«  : 

Arriaca  [Itinéraire  d'Antonin,  p.  436,  438) 

Artiaca  (iWd.,  p.  361) 

Darentiaca  {Itinéraire  de  Jérusalem^  p.  554). 

Il  ne  faut  donc  pas  s'étonner  si  les  gentilices  employés 
comme  noms  de  lieux  se  rencontrent  quelquefois  au  fémi- 
nin dans  les  documents  du  moyen  âge.  On  en  peut  citer 
pour  la  France  un  exemple  qui  remonte  au  temps  de  l'Em- 
pire romain  : 

Cantilia,  dans  la  Table  de  Peutinger,  aujourd'hui  Chan- 

(1)  Go  paragraphe  contient  le  texte  de  leçons  faites  au  Collège  de  France 
en  janvier  1889.  l\  a  paru  en  partie  dans  la  Revue  celtique,  t.  X,  p.  153-177. 


376  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  {  3. 

telle  (Allier)  (1),  est  la  forme  féminine  du  gentilice  Cantilius. 

La  forme  féminine  Cantilia  de  ce  gentilice  est  ua  nom 
de  femme  dans  une  inscription  du  musée  de  Naples  (2). 
Au  masculin,  L.  Cantilius  est  le  nom  d'un  scriba  pontificis 
mentionné  par  Tite-Live  (3)  ;  il  fut  condamné  à  mort  pour 
avoir  rendu  grosse  une  vestale  et  périt  sous  les  verges. 

Au  lieu  de  villa  Cantilia  y  on  aurait  pu  dire  villa  Canti^ 
liana  ou  fundus  Cantilianus.  C'est  d*un  fimdus  Cantilianus 
que  tire  probablement  son  nom  la  vicaria  Cantilianenns 
mentionnée  dans  une  charte  de  926  et  qui  était  située  dans 
le  comté  de  Brioude  (Haute-Loire)  (4).  De  Cantilianus  est 
venu  le  dérivé  Cantilianicus  écrit  Cantillanicus  dans  une 
charte  de  894  relative  à  la  même  région  (5). 

Les  dérivés  en  -acus  de  Cantilius  ne  sont  pas  rares  en 
France.  Nous  citerons  Chantilly  (Oise),  Chantilly,  commune 
de  Courcelles  (Indre-et-Loire),  Chantillac  (Charente),  Chan- 
tillac,  commune  de  Ceyssac  (Haute-Loirq),  Cantillac  (Dor- 
dogne),  Cantilly,  hameau  de  Cerisy-la-Forêt  (Manche). 

De  cet  exemple  fourni  par  un- document  contemporain  de 
l'empire  romain ,  nous  passons  à  ceux  qu'offrent  les  textes 
du  moyen  âge. 

AcuLiA.  Une  localité  de  ce  nom  dans  le  pays  de  Vosge, 
in  pago  Vosago,  est  mentionnée  en  713  par  une  charte  de 
l'abbaye  de  Wissembourg  (6).  En  1056,  une  charte  deTab- 
baye  de  Saint-Victor  de  Marseille  parle  d'un  château  ap- 
pelé Agulia  :  castrum  quem  vocatur  Agulia  (7).  Agulia  est 
une  orthographe  moderne  pour  Àculia. 

Àculia  est  le  féminin  d'Aculius ,  gentilice  écrit  Aqulius 


(1)  E.  Desjardins,  Géographie  de  la  Gaule  d'après  la  Table  de  Peutinger, 
p.  298. 

(2)  C.  /.  L.,  X,  4116. 

(3)  Tite-Live,  Uvre  XXII,  c.  57. 

(4)  Douiol,  Cartul&ire  de  Brioude^  p.  63. 

(5)  Doniol,  i6id.,  p.  115. 

(6)  Pardessus,  DtpZomata,  t.  II,  p.  437. 

(7)  Guérard,  Cari,  de  SAint-Victor  de  MarsetHe,  t.  I,  p.  264. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICES  EN  -IU6.    377 

dans  la  marque  d'un  potier  qu'on  a  relevée  sur  un  vase 
trouvé  à  Aix  en  Provence  :  C.  Aqulius  Félix  (1).  Aculius 
est  le  pendant  du  gentilice  Âculenus  (2).  En  dérivent  le 
coff^nomen  Aculinus  (3)  et  quelques  noms  de  lieu. 

Tel  est  Aguliacus  pour  Aculiacus  dans  une  charte  de  Tan- 
née 850;  c'est  aujourd'hui  Saint- Apollinaire  (Côte-d'Or) 
comme  Ta  reconnu  M.  J.  Gamier  (4).  Un  primitif  i4ctiKa- 
ctis  explique  :  Eguilly  (Aube),  au  douzième  siècle  Aguilley  (5)  ; 
Eguilly,  commune  de  Saint-Avit  (Eure-et-Loir),  au  quator- 
zième siècle  Aguilly  (6). 

Aiguillan ,  commune  de  Mérindol  (Drôme) ,  Aiguillanes , 
commune  de  Vilhac-Aiguillanes  (Ardèche),  sont  dérivés  du 
gentilice  Aculius  au  moyen  du  suflBxe  ^anus.  Aiguillon 
•Lot-et-Garonne)  et  les  deux  Aiguillon  de  la  Vendée  nous 
offrent  le  môme  gentilice  développé  à  Taide  du  suffixe  -o, 
■onis. 

Albâniâ.  Les  mots  in  territorio  quod  dicitur  Albania  (7), 
in  territorio  villae  Albaniae  (8) ,  in  Castro  Albaniae  (9) ,  dans 
des  chartes  du  onzième  siècle ,  paraissent  désigner  Auba- 
gne  (Bouches-du-Rhône). 

C'est  un  gentilice  dont  les  inscriptions  romaines  nous 
offrent  quelques  exemples  en  Afrique  et  en  Italie  (10).  On 
le  trouve  aussi  dans  une  inscription  romaine  de  Valence 
(Drôme)  (11). 

Le  nom  d'Aubagnan  (Landes)  est  un  dérivé  en  -anus  de 
ce  gentilice.  Les  dérivés  en  -actÀS  sont  plus  nombreux  en 


(1)  c.  I.  L.,  XII,  5686,  69. 

(2)  Ibid.,  IX,  3351. 

(3)  JMd,,  VIII,  7973. 

(4)  Nomenclature  historiqtu^  p.  190,  n*  28;  cf.  p.  8,  même  numéro* 

(5)  Boutiot  et  Socard,  Dicî.  topogr.  du  départ  de  l'Aube,  p.  61. 

(6)  Merlet,  Dict,  topogr.  du  départ.  d'Eure-et-Loir,  p.  63. 

(7)  Guérard,  Cari,  de  Saint-Victor  de  Marseille,  t.  I,  p.  67. 

(8)  Ibid.,  p.  83. 

(9)  Ibid.,  p.  162. 

(10)  C.  /.  L.,  VIII.  6718,  7185,  8003,  8005;  IX,  1639,  5351  ;  X,  6132. 

(11)  Ibid.,  XII,  1759. 


378  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  §  3. 

France  ;  tels  sont  :  trois  hameaux  du  département  de 
TAveyron,  tous  appelés  Albagnac,  communes  de  Monla- 
gnol,  Sauveterre  et  Saint-Igest;  Albagnac,  commune  de 
Saint-Etienne-de-Chomeil  (Cantal)  ;  Aubagnat,  commune  de 
Frugières-le-Pin  (Haute-Loire)  (1). 

Albia.  C'est  Albi ,  chef-lieu  du  département  du  Tarn. 

La  plupart  des  textes  les  plus  anciens  supposent  une  or- 
thographe Albiga  avec  un  g  parasite  entre  Vi  et  Va.  C'est 
ainsi  que  la  Notitia  dignitatum  parle  des  équités  cataphrao 
tarii  albigenses  placés  sous  les  ordres  du  magister  militum 
de  Thrace  (2);  et  que  la  civitas  Albigensium  figure  dans  la 
«  Notice  des  provinces  et  des  cités  de  la  Gaule  (3).  »  Gré- 
goire de  Tours  appelle  Albi  au  génitif  Àlbige  (4)  et  en  tire 
V ^d^eciit  Albigensis  f  Albiginsis  (5). 

D'Anville  (6)  a  reconnu  qu' Albiga  est  une  notation  à'Al- 
bia.  M.  Schuchardt  (7)  a  relevé  des  exemples  analogues 
d'épenthèse  de  g  entre  deux  voyelles  :  aligenare  pour  alie- 
nare,  aliginigenus  pour  alienigenus ;  origeniis  pour  oi'imtis. 

On  a  étudié,  p.  190,  le  gentilice  Albius  et  son  dérivé 
Albidcu^. 

Antia.  Ancia ,  forme  vulgaire  pour  Antia,  est  un  nom  de 
lieu  mentionné  dans  un  diplôme  faux  du  roi  Dagobert  II 
en  faveur  d'une  abbaye  du  diocèse  de  Trêves  (8. 
Ance  (Basses-Pyrénées) ,  Anse  (Rhône) ,  se  sont  peut-être 
appelés  primitivement  Antia. 

Antius  est  un  gentilice  romain  peu  connu.  Le  moins  obs- 


(1)  Voy.  Ghassaing,  Spicilegium  Brivatense,  p.  579,  585. 

(2)  Notitia  orientis,  ch.  VII,  g  l,  b.  1.  Ed.  Boecking,  t.  I,  p.  Si,  216. 

(3)  Longnon,  Atlas  historique  de  la  France,  p.  15. 

(4)  Historia  Francorum,  1.  IX,  c.  20;  édit.  Arndt,  p.  375, 1.  16. 

(5)  Historia  Francorum,  1.  II,  c.  3,  37;  1.  VI,  c.  33;  1.  VII,  c.  1;  1.  VIII, 
c.  22,  45;  édition  Arndt,  p.  65,  1.  18;  p.  102,  I.  l;  p.  274,  1.  5;  p.  292,1.2; 
p.  340,  1.  9;  p.  356, 1.  14. 

(6)  Notice  des  Gaules,  p.  45. 

(7)  Vohalismus  des  VulgaerlateinSt  I,  170  ;  III,  25. 

(8)  Pardessus,  Dtplomata,  II,  168. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICE8  EN  -lUS.    379 

cur  de  ceux  qui  l'ont  porté  sous  la  république  est  Antius 
Restio  ;  étant  tribun  du  peuple ,  édile  ou  préteur ,  on  ne 
sait  lequel ,  il  fit  voter  une  loi  pour  empêcher  les  candi- 
dats aux  magistratures  et  les  magistrats  d*aller  dîner  en 
ville.  Sa  loi  ne  fut  exécutée  par  personne ,  lui  excepté  ; 
avant  soin  de  bien  dîner  chez  lui  tous  les  soirs ,  il  n'eut 
jamais  la  tentation  de  dîner  une  seconde  fois  chez  les  au- 
tres (1). 

On  trouve  ce  gentilice  sous  l'empire  à  Rome  et  hors  de 
Rome,  par  exemple  en  Gaule  (2). 

Le  gentilice  Antius  a  donné  à  la  France  des  noms  de 
lieu  dérivés  en  -actw  et  en  -anus  :  Ancy-le-Franc  (Yonne) 
est  appelé  à  l'accusatif  Ànciacum  dans  deux  testaments , 
Tun  de  Tannée  721 ,  Tautre  de  746  (3) ,  et  dans  une  dona- 
tion de  la  fin  du  onzième  siècle  (4).  L'église  d'^ncy-le- 
Serveux  (Yonne)  est  en  latin  ecclesia  Anciaci  dans  une 
charte  de  1108  (5).  Ancey  (Côte-d'Or)  a  la  môme  origine, 
bien  que  les  textes  les  plus  anciens ,  douzième  siècle ,  ne 
conservent  la  tradition  ni  de  l'a  ni  du  c  du  suffixe  et  écri- 
vent son  nom  Ancium  (6).  Ancy  (Rhône)  dans  une  charte 
de  la  fin  du  onzième  siècle  est  à  l'ablatif  Anciaco  (7).  An- 
sac  (Charente)  paraît  être  la  notation  méridionale  d'un  an- 
tique Anti(iciis.  Ansan  (Gers)  doit  être  la  forme  moderne 
d'un  primitif  Antianits. 

Aria,  mieux  arriâ.  Une  charte  de  l'année  856  contient 
la  date  de  lieu  Actum  Aria  monasterio  (8).  Il  s'agit  d'Aire- 
sur-la-Lys  (Pas-de-Calais). 

(1)  Aulu-Gelle,  II,  24,  13;  Macrobe,  Saturnales,  III,  17,  13;  cf.  De- Vit, 
Onomisticon,  I,  345. 

(2)  C.  /.  L.,  VI,  11940-11945;  XII,  753,  1392. 

(3)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  324,  400;  cf.  Quantin,  Cartulaire  de 
l'Yonne,  U  II,  p.  2. 

(4)  Quantin,  Cartul.  de  l'Yonne,  t.  II,  p.  18. 

(5)  Ibid.,  t.  I,  p.  216. 

(6)  Garnier,  Nomenclature  historique,  p.  56,  n*  243. 

(7)  A.  Bernard,  Cartul.  de  Savigny,  p.  429. 

(8)  Guérard,  Cartul.  de  Saint-Berlin,  p.  162. 


380  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  {  3. 

On  a  trouvé  à  Rome  les  épitaphes  de  L.  Arius  Abascan- 
tus,  d'Arius  Amandus  et  ë'Aria  Gemella  (I).  Cependant  les 
inscriptions  et  les  textes  classiques  écrivent  ordinairement 
ce  gentilice  avec  deux  r;  la  bonne  orthographe  du  nom  de 
lieu  serait  donc  Arria.  C'est  la  forme  féminine  du  gentilice 
Arrius.  Arrius  est  le  nom  d'un  centurion  qui  s'empara  du 
bien  de  Virgile  près  de  Mantoue.  Servius  nous  l'apprend 
dans  son  commentaire  sur  le  vers  47  de  la  première  éclo- 
gue ,  sur  le  vers  94  de  la  troisième  et  sur  le  premier  vers 
de  la  neuvième  (2).  On  y  voit  que  le  domaine  occupé  par 
Arrius  touchait  au  Mincio,  un  affluent  du  Pô  ;  que,  Virgile 
s'étant  remis  en  possession,  Arrius  voulut  le  tuer,  et  que  le 
poète  ne  put  sauver  sa  vie  qu'en  se  jetant  dans  la  rivière 
et  en  la  traversant  à  la  nage. 

Catulle  (poème  84)  se  moque  de  la  prononciation  d'un  au- 
tre Arrius  qui  ornait  la  langue  latine  d'aspirations  inutiles  : 

Ghommoda  dicebat,  si  quando  commoda  vellet 
Dicere,  et  hinsidias  Arrius  insidias. 

Arrius  est  fréquent  chez  les  auteurs,  et  on  rencontre  par 
exemple  chez  Cicéron  plusieurs  Arrius.  On  trouve  souvent 
aussi  ce  gentilice  dans  les  inscriptions  romaines.  Ainsi, 
parmi  celles  de  la  ville  de  Rome,  on  a  publié  les  épitaphes 
de  dix-sept  Arrius  et  de  vingt  Arria  (3).  On  peut  citer  dans 
la  Gaule  méridionale  le  nom  du  potier  Arrius  au  musée  de 
Nimes  (4).  L'épitaphe  d'un  certain  Capito ,  trouvée  prés  de 
Mayence ,  nous  apprend  que  ce  Capito  était  affranchi  d'Ar- 
rius  et  qu'Arrius ,  son  patron ,  avait  un  esclave  nommé 
Diomède  (5).  Une  inscription  de  la  Bavière  rhénane  rap- 
pelle que  G.  Arrius  Patruitus  avait  élevé  un  temple  à  la 
déesse  Maia  (6). 

(1)  C.  /.  L.,  VI,  12328-12330. 

(2)  Ed.  Thilo,  t.  III,  p.  11,  41,  108. 

(3)  C.  /.  L„  VI,  12366-12415. 

(4)  Ihid.,  XII,  5686,  76. 

(5)  Brambach,  934. 

(6)  /btd.,  1835. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICEB  EN  -IU8.    381 

Les  noms  de  lieu  dérivés  d'Arrius  ne  nous  offrent 
qu'une  seule  r  dans  les  monuments  du  moyen  âge.  En 
721,  l'abbé  Wideradus  donne  à  l'abbaye  de  Flavigny  (Côte- 
d'Or),  une  cotonica  in  Ariaco,  c'est-à-dire  à  Herry  (Niè- 
vre) (1).  Dans  la  charte  de  Saint-Bertin ,  d'après  laquelle 
on  a  cité,  p.  379,  le  nom  ancien,  Aria,  d'Aire-sur-la-Lys , 
on  trouve  aussi  l'indication  géographique  in  Ariaco.  Une 
charte  du  neuvième  siècle,  comme  la  précédente  (3),  donne 
une  énumération  de  localités  comprises  dans  le  comté  de 
Vienne,  et  nous  y  lisons  au  cas  indirect  Ariaco,  c'est  Hey- 
rieux  (Isère).  Nous  parlerons  encore  de  la  viearia  Ariacensis 
mentionnée  au  dixième  siècle  (3)  ;  elle  était  située  en 
Rouergue,  c'est  aujourd'hui  Arjac,  commune  de  Saint- 
Cyprien  (Aveyron).  La  bonne  orthographe  par  double  r 
nous  est  conservée  par  l'ItiTiéraire  d'Antonin,  où  une  sta- 
tion d'Espagne  est  deux  fois  appelée  Arriaea  (4). 

A  côté  du  dérivé  en  -actts,  il  y  en  a  un  autre  en  -anus 
dont  la  forme  féminine  nous  est  offerte  par  le  nom  de  lieu 
Ariana.  Ce  nom  de  lieu  sert  à  distinguer  des  autres  Giraud, 
Giraldus  de  Ariana  dans  une  charte  de  ta  Qn  du  onzième 
siècle  (5).  Ariana  a  dû  s'écrire  originairement  par  deux  r  : 
dans  une  inscription  de  Pompeii,  il  est  question  de  Vln- 
suia  Arricma  (6). 

Art[a.  Nous  diviserons  cet  article  en  cinq  paragraphes. 
Le  premier  traitera  de  l'étymologie  du  nom  de  lieu  Artia 
dérivé  d'Artos  «  ours.  »  Dans  le  deuxième,  àh  dira  qu'unf 
idée  religieuse  était  associée  au  mot  Artos.  La  preuve  «c 
sera  donnée  dans  le  troisième  paragraphe  par  l'examen  de: 
noms  d'hommes  composés  gaulois  dont  le  second  terme  es 
genos.  Le  quatrième  paragraphe  concernera  1°  trois  noms 

0)  QuanUo,  Carlul.  de  VYonne,  t.  II,  p.  S40. 

(!)  Cartulaice  de  Saint-Hugues  de  Grenoble,  p.  15, 

(ij  G.  DeajardiDS,  Carlulaire  de  Conques,  p.  230. 

(4)  IlinérairB  d'Anfonin,  p.  436,  1.  3  ;  p.  438,  1.  10. 

(5)  Carlulaire  de  Saint-Hugues  de  Grenoble,  p.  12?. 
(6)C.  ;.'!,.,  IV,  138, 


382  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  {  3. 

propres  d'hommes  gaulois  identiques  comme  Artos  à  des 
noms  communs  d'animaux  divinisés,  2**  les  dérivés  de  ces 
noms  propres.  Dans  le  cinquième  paragraphe,  on  répondra 
à  une  objection  possible  qui  serait  tirée  de  la  phonétique. 

4«  EtymologU  du  nom  de  lieu  Ârtia  ;  c'est  un  genUlice  dérivé  d'Artos 

c  Oun.  > 

Le  testament  d'Abbon,  en  739,  met  in  pago  GraHanopoli- 
tano,  c'est-à-dire  en  Graisivaudan ,  une  colonica  (c'est-à- 
dire  une  terre  habitée  par  des  colons)...  prope  Arcia  (1). 
La  même  localité  est  appelée  Arces  vers  1100  (2);  c'est  au- 
jourd'hui Arces ,  commune  de  Saint-Ismier  (Isère).  Arcia, 
Arces  (lisez  Arce) ,  figurent  la  prononciation  moderne  d'un 
antique  Artia,  féminin  d'Artius. 

Artius  est  un  gentilice  romain  peu  répandu.  De-Vit  (3', 
au  mot  Artia  ^  en  offre  deux  exemples.  On  trouve  Artius 
servant  de  cognomen  dans  une  inscription  de  Pozzuoli  en 
Campanie;  c'est  l'épitaphe  d'un  monument  funèbre  élevé 
par  deux  affranchis  à  leur  mère,  affranchie  comme  eux 
d'un  certain  Junius  :  l'un  s'appelle  M.  Junius  Artius  (4}. 
Artius  est  dérivé  d'Artus  ou  Artos ,  que  l'on  suppose  être 
le  nominatif  d'Arti  1®  dans  le  composé  syntactique  gaulois 
Arti-cnos  «  fils  d'Artos ,  »  conservé  par  une  inscription 
grecque  d'Ancyre  (5)  en  Galatie,  2"*  dans  une  inscription  de 
la  Pannonie  supérieure  où  est  mentionnée  la  tvrma  Àrti, 
le  «  peloton  d'Artos  »  qui  faisait  partie  de  Vala  Pannonio- 
rumy  c'est-à-dire  de  l'escadron  des  Pannoniens  (6).  Arti  peut 
être  le  génitif  d'Artius  aussi  bien  que  d'Artos.  Cependant 
l'existence  d'un  nom  d'homme  Artos  ou  Artus  parait  dé- 
montrée par  le  nom  de  lieu  Arto-briga,  forteresse  d'Artos , 

(1)  Cartul.  de  Saint'Hugues  de  Grenoble^  p.  44. 

(2)  Ibid,,  p.  105. 

(3)  Onom&sticonj  t.  I,  p.  494. 

(4)  C.  /.  L.,  X,  2626. 

(5)  Mouaavoc  'Aprtxvw.  Bœck,  C.  /.  Gr.,  t.  III,  n»  4039, 1.  37. 

(6)  C.  /.  L.,  III,  4376. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQTJEB  A  DES  GENTILICE8  EN  -IU8.    383 

en  Norique  suivant  la  table  de  Peutinger,  en  Vindélicie 
suivant  Ptolémée  (1)  ;  c'est  par  un  premier  terme  primitif 
ArtO"  que  s^explique  le  nom  à! Arte-dunus ,  Arti-dunus  ou 
Arta-dunum  porté  au  huitième  et  au  dixième  siècle  par  Ar- 
thun  (Loire)  dans  les  Cartulaires  de  Savigny  et  de  Saint- 
Victor  de  Marseille. 

A  ArtO'briga  comparez  Eburo-briga  «  forteresse  d'Ebur 
ros,  »  nom  d'une  station  romaine  des  Gaules;  Augusto- 
briga ,  Caesaro-briga ,  noms  de  villes  d'Espagne  dont  le 
premier  terme  est  un  cognomen  romain  comme  Eburus  ; 
Coelio-briga^  Flavio-briga^  Julio-briga^  noms  de  villes  d'Es- 
pagne dont  le  premier  terme  est  un  gentilice  romain.  A 
* ArtO'dunum ,  comparez  Augusto-dunv/m  ^  Caesaro-dunumi. 

Arto-s  a  donné  plusieurs  dérivés;  l'un  est  Artinus,  cogno- 
men d'Acceptius,  dans  une  épitaphe  trouvée  à  Trêves  (2); 
un  autre  est  Artilius ,  gentilice  employé  au  féminin  dans 
une  inscription  de  Lyon  (3),  au  masculin  dans  une  inscrip- 
tion de  Brescia  (4).  On  trouve  les  gentilices  Artanius  et 
Ârtidius  dans  des  inscriptions  de  Rome  (5). 

D'Artius  est  venu  le  nom  de  lieu  dérivé  Artiacus,  em- 
ployé au  féminin  dans  Y  Itinéraire  d'Antonin  où  Artiaca  est 
Arcis-sur-Aube  (Aube)  (6).  L'accusatif  pluriel  féminin  Arda- 
cas^  dans  un  diplôme  de  Charlemagne  en  802,  désigne  Assé- 
le-Bérenger  (Mayenne)  (7).  Ailleurs  le  masculin  l'emporte  .% 
Âriiacas  est  Arçay  (Vienne)  dans  un  acte  de  l'année  791  (8)  ; 
Arcy-sur-Cure  (Yonne),  s'appelle  à  l'ablatif  Arsiaco  dans 
une  charte  du  douzième  siècle  (9)  ;  Arciacus  est  en  11251e 


(1)  Ptolémée.  1.  II,  c.  12,  §  4;  édition  Didot-Mûller,  t.  I,  p.  283,  1.  7;  cf. 
p.  284,  la  note  de  la  ligne  8. 

(2)  Brambach,  817. 

(3)  Boissieu,  p.  200. 

(4)  C.  /.  L.,  V,  4535. 

(5)  ma.,  VI,  12452,  12471. 

(6)  Voyez  ci-dessns,  p.  159. 

(7)  L.  Maître,  Diciionnsiire  topogr,  du  départ,  de  2a  Mayenne,  p.  7. 

(8)  Redet,  Dictionnaire  topogr.  du  départ,  de  la  Vienne,  p.  11. 

(9)  Qaantin,  CarfuZaire  de  l'Yonne^  t.  I,  p.  71. 


384  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  |  3. 

nom  d'Arcy-Sainte-Restitute  (Aisne)  (1)  ;  le  même  nom  de- 
signe  au  onzième  et  au  douzième  siècle  (2),  Arciat  ou  Ar- 
cieux,  commune  de  Saint- Jean-de-Thurigneux  (Ain). 

Dans  le  midi  de  la  France ,  les  communes  d'Arsac  (Gi- 
ronde) et  d'Arzacq  (Basses-Pyrénées),  les  hameaux  d*Arzac, 
commune  de  Cahuzac  (Tarn)  ;  d'Arsac,  commune  d'Auzer? 
(Cantal)  ;  d'Arsac ,  commune  de  Garât  (Charente)  ;  d'Arsac. 
commune  de  Saint-Fréjoux  (Corrèze)  •  d'Arsac ,  commune 
de  Coubon  ;  d'Arsac ,  commune  de  Saint^Pierre-du-Champ, 
tous  deux  dans  la  Haute-Loire ,  se  sont  probablement  ap- 
pelés primitivement  chacun  Ariiacus.  Arsague  (Landes)  pa- 
rait être  une  ancienne  Artiaca  villa.  Ces  formations  ne 
sont  pas   spéciales  à  la  France    :   M.  Flechia,  dans  le 
t.  XXVII  des  mémoires  de  l'Académie  des  sciences  de  Tu- 
rin, signale  les  noms  de  lieu  Arzago  etArzaga^  près  de  Mi- 
lan et  près  de  Bergame,  Une  charte  de  976  qui  fait  partie 
des  archives  de  la  cathédrale  de  Novare  mentionne  près  de 
cette  ville  un  fundus  Arciacus  (3). 

Le  nom  d'homme  gaulois  Arto-s ,  dont  le  gentilice  Ar- 
tins  dérive,  parait  identique  au  gallois  arth  «  ours.  »  Le 
nom  latin  de  cet  animal,  ursiÀS^  a  été  employé  en  Gaule 
comme  cognomen  sous  l'empire  romain.  A  Grézy,  près 
Aix  en  Savoie,  existe  encore  l'épitaphe  de  Rutilia  Ursa(4l 
On  a  autrefois  copié  à  Narbonne  les  épitaphes  de  Cornelia 
Ursa  (5)  et  d'Usulena  Ursa  (6).  On  a  trouvé  :  à  Vienne 
(Isère),  une  lampe  romaine  qui  porte  la  marque  du  fabri- 
cant de  poterie  L.  Aemilius  (?)  Ursus  (7)  ;  près  de  Mayence, 
une  dédicace  au  génie  du  collège  de  la  jeunesse  d'un  n- 
cu$  par  Acutius  Ursus  et  par  Acutia  Ursa  (8). 


(1)  Matton,  Dictionnaire  topogr.  du  départ,  de  VAisne,  p.  8. 

(2)  Ragut,  Cartulaire  dé  Saint-Vincent  de  MAcon,  p.  340  et  374. 

(3)  Historiae  patriae  monumenta  ;  Chartae^  tome  I,  col.  249. 

(4)  C.  /.  L.,  XII,  2476. 

(5)  Ibid.,  XII,  4747.         t 

(6)  Ibid.,  XII,  5265, 

(7)  Ibid.,  XII,  5682,  53. 

(8)  Brambach,  1138. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICES  EN  - 1 U  8 .    385 

Ursus  fut  un  nom  fréquent  chez  les  chrétiens  vers  la  fin 
de  l'Empire  romain,  et  dans  les  siècles  qui  ont  suivi  sa 
chute  ;  on  peut  citer  :  saint  Ursus,  évêque  de  Troyes,  au 
commencement  du  cinquième  siècle;  saint  Ursus,  évêque 
d'Auxerre,  vers  la  fin  du  même  siècle;  saint  Ursus,  né  à 
Cahors,  qui  devint  abbé  de  Loches  et  dont  Grégoire  de 
Tours  a  raconté  l'histoire  (1);  il  était  contemporain  du  roi 
Alaric  et  vivait  sbu^^Ja  domination  de  ce  prince  qui  pérît, 
comme  on  sait,  à  la  bataille  de  Veuille  en  507.  Grégoire  de 
Tours  raconte  (2)  comment,  au  temps  du  roi  Sigebert  (561- 
575),  un  certain  Ursus,  riche  habitant  de  Ctermont-Ferrand, 
faillit  être  dépouillé  de  sa  fortune  par  les  intrigues  d'un 
aventurier   appelé    Andarchius.  Andarchius  avait   trouvé 
pour  compère  un  pauvre  diable  nommé  aussi  Ursus  qui 
s'était  engagé  à  lui  donner  sa  fille  en  mariage ,  et  il  pré- 
tendait contraindre  le  riche  Ursus  à  exécuter  cette  pro- 
messe. 

D'Ursus  est  venu  le  gentilice  Ursius  dans  les  inscrip- 
tions romaines ,  par  exemple  aux  environs  de  Mayence  (3) 
et  dans  l'Italie  méridionale  (4).  On  peut  y  rattacher  le  nom 
d'Orsay  (Seine-et-Oise)  et  d'Orçay  (Loir-et-Cher)  qui  seraient 
d'anciens  Ursiacus;  ces  noms  de  lieu  ont  le  même  sens 
qu'Arcis,  Arcy,  Arçay,  etc.,  ceux-ci  dérivés  d'un  gentilice 
tiré  du  gaulois  artos  «  ours,  »  tandis  qu'Orsay  parait  venir 
d'un  gentilice  dérivé  du  latin  ursus. 

On  ne  doit  pas  hésiter  à  reconnaître  l'identité  du  mot 
gallois  arth  «  ours,  »  en  gaulois  arto-s^  avec  le  premier 
terme  des  noms  d'hommes  composés  :  1®  Arth-mael, 
2*  Arth-uuiu ,  fréquents  au  neuvième  siècle  dans  les  char- 
tes de  la  Bretagne  continentale  que  nous  a  conservées  le 
Curtulaire  de  Redon ,  S""  Arthbiu ,  qui  s'y  rencontre  aussi , 
mais  une    fois    seulement.   Arth-mael   =  *  Arto-maglo-s 


(1)  V«ae  p&trum,  ch.  XVHI,  K  U  2;  édition  Arndt  et  Krusch,  p.  733-735. 
P)  Hisloria  Francorum,  1,  IV,  c.  46;  édition  Arndt,  p.  180-182. 

(3)  Brambach,  1238. 

(4)  C.  /.  L.,  X,  6238. 

25 


386  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  {  3. 

parait  signifier  «  prince,  roi  des  ours  (1);  »  Arth-uuiu 
«  digne  d'être  un  ours;  »  Arth-biu  «  vif  comme  un  ours.  » 
On  a  proposé  d'expliquer  le  premier  terme  de  ces  nom? 
composés  par  Tirlandais  art  «  pierre  ;  »  il  est  bien  plus  na 
turel  de  Texpliquer  par  le  gallois.  Le  premier  et  le  dernier 
de  ces  deux  noms  composés  ont  été  usités  chez  les  Gallois 
comme  chez  les  Bretons.  On  trouve  dans  le  Cartulairc  de 
Llandaf,  au  douzième  siècle,  le  nom  d'homme  Arthtnail  = 
Arth-mael  «  roi  des  ours  (2)  »  ;  Artbeu  =  Arthbiu  «  vif 
comme  un  ours  »  est  un  nom  d'homme  inscrit  au  hui- 
tième ou  au  neuvième  siècle  sur  une  stèle  funéraire  du 
pays  de  Galles  (3).  M.  Rhys  traduit  comme  nous  les 
substantifs  arth  et  mail  dans  les  noms  d'homme  composés 
gallois  (4). 

Il  y  a  un  nom  d'homme  germanique  dont  la  compa- 
raison avec  Arth-mael  devra,  ce  semble,  convaincre  les 
plus  sceptiques ,  c'est  Bern-rich  «  roi  des  ours  »,  dont 
M.  Fœrstemann  a  réuni  des  exemples  (5).  Un  exemple 
français  est  fourni  par  les  actes  des  évoques  du  Mans 
fabriqués  au  neuvième  siècle  ;  on  y  voit  paraître  les  té- 
moins Berna-ricus  (6),  Berne-richus  (7)  et  Berne-ricus  (8). 
Ces  personnages,  créés  par  le  même  faussaire,  constituent, 
à  côté  des  exemples  allemands  colligés  par  M.  Fœrstemann, 
un  témoignage  français  unique,  mais  ce  témoignage  atteste 
que  le  nom  dont  il  s'agit  était  connu  dans  le  diocèse  du 
Mans  au  neuvième  siècle.  Un  autre  nom  bien  plus  répandu 
est  le  nom  germanique  Bern-hard,  littéralement  «  dur 
comme  un  ours  ;  »  il  peut  se  comparer  aux  noms  bretons 

(1)  M.  Rhys,  Lectures  on  Welsh  Philology,  2*  édit.,p.  369,  rend  par  noble^ 
prince t  hing  ^  ma,el  =  maglos,  ot  on  peut  voir  dans  le  même  ouvrage, 
p.  358 ,  que  arth  (bear)  a  été  employé  comme  nom  d'homme  en  Galles. 

(2)  Grammatica  celtica,  2*  édition,  p.  114. 

(3)  Hûbnor,  Inscripliones  Britanniae  Christianae,  n*  57. 

(4)  Lectures  on  Welsh  Philology,  2-  édit.,  p.  358,  369. 

(5)  Altdeutsches  Namenbuch,  t.  II,  col.  233. 

(6)  Pardessus,  Dtplomafa,  t.  I,  p.  95. 

(7)  Ibid,,  t.  I,  p.  98. 
{8)/6td.,  t.  I,  p.  99,  127;  11,45. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTIUCE8  EN  -IU8.    387 

Arlh-biu  «  vif  comme  un  ours,  »  Arth-uuiu  «  digne  d'être 
un  ours.  » 

Le  nom  d'homme  Arth-mael  a  fourni  le  second  élément 
du  nom  de  lieu  breton  Ploermel  (Morbihan).  Ploermel 
s'appelait  Plebs  Arihmael  au  neuvième  siècle,  comme  nous 
l'apprend  une  charte  du  temps  (1). 

Plebs  Arihmael  signifie  «  paroisse  d'Arthmael ,  »  c'est-à- 
dire  du  «  roî  des  ours,  »  comme  Artiaca,  sous-entendu 
y//ia,  signifie  «  ferme  d'Artius,  »  c'est-à-dire  «  ferme  du 
fils  d'Arlos,  du  fils  de  Tours,  »  Qi  Ario-Briga,  *Arto-dunum^ 
«  château  d'Artos,  »  c'est-à-dire  d'un  homme  dont  le  nom 
était  le  nom  gaulois  de  l'ours. 

Nous  serions  incomplet  si  nous  ne  disions  qu'Artilius, 
signalé  plus  haut  comme  dérivé  d'Artos,  a  donné  un  nom 
de  lieu  en  -actis ,  c'est  Artiliacus  dans  le  Talou  ,  pagus 
Tellavus  (2),  c'est-à-dire  aux  environs  d'Eu  (Seine-Inférieure), 
suivant  un  diplôme  de  Pépin  le  Bref  pour  l'abbaye  de 
Saint-Denis  en  751  (3). 

Artiliacus  a  pour  pendant  Ursiliacus  en  Lyonnais  donné 
à  l'abbaye  d'Ainay  vers  le  milieu  du  onzième  siècle  (4). 

^  De  l'idée  religieuse  associée  au  mot  Arlos.  —  Les  animaux  divins. 

Une  des  causes  qui  ont  dû  contribuer  à  faire  adopter  à 
certaines  personnes  dans  le  monde  gaulois  le  nom  d'Artos 
et  les  noms  dérivés  d'Artos,  est  le  sentiment  religieux. 
L'ours  était  considéré  comme  un  animal  divin.  Chez  les 
Celtes ,  on  avait  divinisé  l'ours  et  l'auroch ,  qui  étaient  les 
plus  redoutables  animaux  des  forêts ,  et  le  corbeau  qui , 
après  la  bataille,  rongeait  le  cadavre  du  guerrier  vaincu. 
Les  Germains  avaient  des  croyances  analogues.  En  Scan- 


(1)  A.  de  Courson,  Cartulaire  de  Redon^  p.  20. 

(^)  Voyez,  sur  ce  pagu8 ,  dont  le  nom  est  ordinairement  écrit  Tellauai 
Longaon,  Atlas  historique  de  la  France,  p.  98. 

(3)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  45,  col.  2. 

(4)  Aug.  Bernard,  Cart,  de  Savigny,  t.  II,  p.  568. 


388  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  {  3. 

dinavie ,  ours,  biorn^  était  un  surnom  de  Thorr,  dieu  de  la 
foudre  (1) ,  et  un  corbeau  perchait  sur  chaque  épaule  du 
grand  dieu  Odin  (2).  Dans  les  premiers  siècles  du  royaume 
de  France  des  parents  donnant  à  leurs  fils  les  noms  de 
Bero  «  ours,  »  de  Chramnus  ou  Hrabanus  «  corbeau,  »  ont 
dû  avoir  présentes  à  l'esprit  ces  croyances  religieuses. 

En  Irlande,  le  mot  art  =  artos,  au  gén.  airt  =  arti 
«  ours,  »  tombé  en  désuétude  comme  nom  d'animal,  sur- 
vécut dans  la  littérature  la  plus  ancienne  comme  nom  de 
dieu  en  général;  on  le  trouve  même  appliqué  à  Jésus- 
Christ  (3). 

En  Gaule ,  au  temps  de  l'empire  romain  ,  nous  le  recon- 
naissons au  féminin  dans  le  nom  And-arta  =  Ande-arta 
d'une  déesse  honorée  à  Die  (Drôme) ,  comme  l'établissent 
plusieurs  inscriptions  dédicatoires  (4).  And[e]-arta,  dontle 
premier  terme  est  la  particule  augmentative  ande,  dont  le 
second  terme  est  un  nom  d'animal  divinisé,  peut  être  com- 
paré à  deux  noms  d'homme  qui  devinrent  noms  de  lieux  : 
Ande-matunnum  et  Ande^camultis .  Tous  deux  ont  pour  pre- 
mier terme  le  préfixe  ande  et  pour  second  terme  un  nom 
de  divinité.  Ande-^matunnum ,  nom  de  la  ville  de  Langres 
sous  l'empire  romtiin ,  est  probablement  une  expression 
abrégée  pour  Ande-matunno-dunum ,  forteresse  d^Ande- 
maPumnus,  et  le  second  terme  de  ce  nom  d'homme  n'est 
autre  chose  que  le  nom  du  dieu  Matunus ,  probablement 
par  u  long ,  mentionné  dans  une  inscription  romaine  de  la 
Grande-Bretagne  (5) ,  et  employé  au  féminin  comme  cogno- 
men  dans  une  inscription  romaine  de  Séville  (6).  Quant  à 
Andecamulus  [fandus]  ou  Ande-oa/mulum  (pour  And&camulO' 


(1)  Qrimm,  Deutsche  Mythologie,  3*  édit.,  p.  633.  Simrock,  H&ndbuch  der 
deutschen  Mythologie,  5*  édit.,  p.  239. 

(2)  Simrock,  Handbitnh  der  deutschen  Mythologie,  5*  édit.,  p.  174. 

(3)  Glossaire  de  Cormac^  V  Art,  chez  WhiUey  Stokes,  Three  Irish  glos- 
saries,  p.  2. 

(4)  C.  /.  L.,  XII,  1554-1560. 

(5)  Ibid.,  VII,  995. 

(6)  Ibid.,  II,  1209. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  QBNTILICE8  EN  -IU8.    389 

dunum  ou  pour  Andecamulum  praedium)  (i),  tout  le  monde 
connait  le  nom  de  Camulus ,  un  des  dieux  gaulois  de  la 
guerre,  qui  a  fourni  le  second  terme  de  ce  composé. 

\y*artos^  nom  de  l'ours  m&le,  ou  d'arkz,  nom  de  sa 
femelle ,  paraissent  tirés  deux  autres  noms  de  divinités  : 
i""  celui  de  la  déesse  Ârtio  :  un  fragment  de  statue  dé  cette 
divinité  a  été  découvert  dans  le  canton  de  Berne  (2)  ; 
2"^  celui  du  dieu  Ârtaios  assimilé  à  Mercure  :  une  dédicace 
Mercurio  Augusto  Ârtaio  a  été  trouvée  à  Beaucroissant 
(Isère)  (3). 

On  comprend  Timportance  du  culte  de  Tours  dans  le 
voisinage  des  Alpes,  mais  ce  culte  parait  avoir  été  connu 
dans  le  monde  celtique  en  des  régions  bien  éloignées  de 
ces  montagnes. 

3*  Nom$  d^homme  composés  dont  le  second  terme  est  genos  :  Matu^ 

genos,  Arti-^enoSf  etc. 

De  Tétude  du  mot  art-o-s,  qui  est  un  des  noms  de  Tours, 
nous  ne  pouvons  guère  séparer  Tétude  du  thème  maPur-  qui 
est  un  autre  nom  du  même  animal.  Maiu-s  est  en  moyen- 
irlandais  Tnath^  gén.  matho  (4).  Les  dictionnaires  de  Tirlan- 
dais  moderne  fournissent  le  composé  math-ghamhain  ou 
math'-ghamhuiny  dont  le  second  terme  veut  dire  «  veau.  » 
Math-ghamhain  est,  à  proprement  parler,  «  le  veau  de  Tours  », 
c'est-à-dire  «  Tourson  ».  Cependant  ce  mot  signifie  «  ours  » 
aujourd'hui.  C'est  l'expression  qui,  dans  la  traduction  ir- 
landaise de  la  Bible,  correspond  à  Vursus  de  la  Vulgate. 
De  Math^ghamhna,  gén.  sing.  de  mathghamhain,  la  notation 
anglaise  est  aujourd'hui  Mahon,  c'est  la  seconde  partie  du 


(1)  Uinscription  1804  d*Orelli  nous  fait  connaître  les  Andec&mulenaes , 
c'est-à-dire  les  habitants  d^Ande-camulus  ou  Ande-camulum.  Cette  in- 
cription  a  été  trouvée  à  Rançon  (Haute- Vienne). 

(2)  Mommsen,  Inscriptiones  helveticae^  215. 

(3)  C.  /.  L..  XII,  2199.  ♦ 

(4)  Windisch,  Irische  Texte,  t.  I,  p.  681,  col.  2. 


390  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  {  3. 

nom  de  famille  Mac-Mahon  ;  ce  nom  de  famille ,  écrit  en 
irlandais  Mac-Mathghamhna ^  veut  dire  «  fils  de  Tours.  » 

Le  principal  témoignage  qui  atteste  le  culte  de  Tours 
sous  le  nom  de  maPa-s  dans  le  monde  celtique  est  le  nom 
d'homme  Matu-genos  «  fils  de  Tours.  »  On  le  lit  écrit  sur 
une  monnaie  gauloise  comme  on  peut  le  voir  dans  le  der- 
nier travail  de  M.  A.  de  Barthélémy  sur  les  légendes  nu- 
mismatiques  de  la  Gaule  (1).  On  a  trouvé  en  France,  tant 
dans  le  département  du  Qard  qu'à  Narbonne,  les  épitaphes 
de  trois  Matugenus  (2)  ;  à  Bordeaux,  un  autel  dédié  à  Jupi- 
ter par  les  soins  d'un  quatrième  Matugenus  (3).  On  con- 
serve au  Musée  Britannique  quelques  vases  qui  portent  la 
marque  du  potier  Matugenus  (4).  De  ce  nom  gaulois  dérive 
le  gentilice  Matugenius  dont  le  féminin  Matiigenia  nous  a  été 
conservé  par  une  inscription  de  Soleure  en  Suisse  (5)  et 
dont  la  forme  masculine  apparaît  avec  un  c  au  lieu  d'un  ^  : 
Matuceni  au  génitif,  dans  une  inscription  trouvée  à  Saint- 
Benézet-de-Cheyran  (Gard)  (6). 

Les  composés  asyntactiques  dont  le  second  terme  est 
-genos  expriment  une  filiation  mythologique  ;  ils  s'opposent 
aux  composés  syntactiques  dont  le  premier  terme  est  un 
nom  d'homme  au  génitif  et  dont  le  second  terme  est  eno-s  : 
exemple,  Druti-cnos  «  fils  de  Drutus,  »  Dannotali-cnos  «  fils 
de  Dannotalos ,  »  Toutissi-cnos  «  fils  de  Toutissos ,  »  Arti- 
cnos  cité  p.  382,  etc.  Ces  derniers  noms  expriment  la 
relation  juridique  de  fils  à  père;  tandis  que  les  noms  dont 
le  second  terme  est  -genos  ont  un  sens  religieux  :  tel  est 
dans  une  inscription  de  Rome  (7)  Totati-gen[u]s,  «fils  deTo- 
tatis,  »  ailleurs  Toutatis,  dieu  assimilé  à  Mars,  le  Tentâtes 
de  Lucain.  Totati-genus  est  le  nom  d'un  soldat  gaulois  au 


(1)  Revue  celtique,  t.  IX,  p.  33,  col.  1. 

(2)  C.  /.  t.,  XII,  2865,  2880,  4986. 

(3)  JuUian,  Inscriptions  romaines  de  Bordeaux^  p.  25. 

(4)  C.  /.  L.,  VII,  1334,  34  ;  1336,  683. 

(5)  Mommsen,  Inscr,  helveticàe,  231. 

(6)  C.  /.  L.,  XII,  3935. 

(7)  Ibid.,  VI,  2407. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICE8  EN  -  lUS.    391 

service  de  Tempire  romain.  Camulo-genus ,  chef  aulerque 
d'Evreux,  qui  prend  les  armes  contre  César  en  Tan  52 
avant  J.-C,  est  étymologiquement  un  fils  du  dieu  Camu- 
los.  Divo-genus  ,  Divo-gena  dans  des  inscriptions  de  Bor- 
deaux (1),  variantes  dialectales  d'un  plus  régulier  *Dévo- 
genos,  *  Dévo-gena,  signifient  «  fils  »  et  «  fille  de  Dieu  ». 
Le  grec  a  des  composés  analogues,  Aio-y<vt)ç,  *Ep[jto-Y^vT)ç , 
«  fils  de  Zeus  »,  «  fils  d'Hermès  ». 

Des  noms  gaulois  dont  le  second  terme  est  genos  et  dont 
le  premier  terme  est  un  nom  de  divinité ,  on  peut  rappro- 
cher les  noms  gaulois  en  genos  dont  le  premier  terme  est 
le  nom  d'un  être  abstrait  :  Rectu-genus  (2)  «  fils  du  droit  » 
dans  deux  inscriptions  romaines  d'Espagne  (3),  Boduogenus 
«  fils  de  la  volonté,  du  bon  plaisir  »,  peut-être  «  du  des- 
tin, »  dans  une  inscription  romaine  de  Grande-Bretagne  (4)  ; 
Litu-genus  «  fils  de  la  fête  »  dans  un  graffito  romain  de 
Grande-Bretagne  (5). et  dans  des  marques  de  potier  du 
même  pays  (6);  au  féminin  Litu-gena  «  fille  de  la  fête  » 
oogiiomen  de  femmes  dans  plusieurs  inscriptions  romaines 
du  Xorique  (7).  Litugena  faisait  au  génitif  Litugenes  ou, 
avec  une  orthographe  moins  exacte ,  Litogenes  :  c'était  le 
nom  d'une  fabricante  de  lampes  en  terre  dont  on  a  trouvé 
des  spécimens  dans  plusieurs  localités  de  l'Italie  septen- 
trionale (8).  Ce  nom  antique  a  persisté  en  Grande-Bretagne 
après  la  chute  de  l'empire  romain;  on  signale  encore,  dans 
le  comté  de  Pembroke ,  l'épitaphe  du  fils  de  Lito-genus , 
gravée  entre  les  années  500  et  700  de  notre  ère  (9). 

Les  chartes  du  moyen  âge  gallois  et  breton  nous  offrent 
des  exemples  de  noms  d'hommes  formés  de  cette  façon  : 

(1)  Jullian,  p.  129,  27. 

(2)  Rextu-genos,  dans  rinscription  de  la  figurine  de  Caudebec. 

(3)  C.  /.  L.,  II.  2402.  2907. 

(4)  Ibid.,  VII.  1202. 

(5)  Ibid.,  VII,  1256. 

(6)fMd.,  VII,  1331,  66;  1336,  563. 

(7)  Ibid.,  III.  5066,  5099.  5269.  5430. 

(8)/6id..  V,  8114,  81. 

(9)  Hûbner.  Inscriptiones  BHtanniae  ChHsUanae.  n*  98. 


392  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  §  S. 

Anaugen  =  *  Anavo-genos  «  fils  de  la  musique  et  de  la 
poésie  »  dans  le  Liber  Landavensis ,  manuscrit  du  pays  de 
Galles,  et  dans  le  Cartulaire  de  Redon ^  qui  est  breton; 
Cat-gen  =  *  Catu-genos  dans  le  Liber  Landavensis^  veut  dire 
«  fils  de  la  bataille;  »  Bud-ien  =  *Bodi-genos,  dans  le  Car- 
tulaire de  Redon ,  signifie  «  fils  de  la  victoire.  »  *  Bodi- 
genos  exprime  une  idée  analogue  au  sens  de  Bodiacos  qui 
veut  dire  «  celui  qui  appartient  à  la  victoire,  »  «  celui  qui 
est  en  quelque  sorte  membre  de  la  famille  dont  la  victoire 
personnifiée  est  le  chef  :  »  le  suffixe  celtique  -acus  a  une  valeur 
analogue  à  celle  du  suffixe  latin  -anus^  et  celui-ci,  dans  les 
noms  d*hommes ,  exprime  la  filiation  naturelle  de  Tenfant 
adoptif  par  opposition  à  sa  filiation  légale  :  Octavianus  est 
celui  qui,  de  par  la  nature,  a  appartenu  à  Octavius  et  auquel 
une  fiction  légale  adonné  un  père  nouveau.  Bodiacus  forme 
le  second  terme  du  nom  d'un  peuple  de  Galatie,  les  Teuto- 
bodi-aci  (1)  ;  ce  nom  peut  être  rendu  par  :  «  fils  ou  protégés 
de  la  divinité  qui  préside  aux  victoires  sur  les  peuples.  » 

La  paternité  mythologique  chez  les  Celtes  a  été  attribuée 
à  un  minéral  :  Hoiarn-gen  =  *Esarno-genos  «  fils  du  fer  », 
Dubr-ien  =  *Dubro-genos  «  fils  de  Teau  »  dans  le  Cartulaire 
de  Redon.  En  regard  de  ce  nom  aquatique  conservé  au 
moyen  âge  on  pourrait  mettre  le  nom  plus  gai  de  Medu- 
genus  «  fils  de  l'hydromel,  »  porté  par  un  Gaulois  d'Espagne 
sous  l'empire  romain  (2).  Mais  Dubr-ien  =  *Dubro-genos 
«  fils  de  l'eau  »  s'explique  par  la  croyance  à  la  divinité  des 
rivières. 

Cette  croyance  explique  aussi  le  vers  où  Properce,  par- 
lant du  chef  gaulois  Virdumaros  tué  par  le  consul  M.  Clau- 
dius  Marcellus  Tan  222  av.  J.-C,  dit  que  Virdumaros 
prétendait  compter  le  Rhin  parmi  ses  ancêtres  : 


...genus  hic  Rheno  jactabat  ab  ipso  (3). 


(1)  Pline,  livre  V,  {  U6. 

C2)  C.  /.  L.,  II,  162. 

(3)  Livre  V,  élégie  10,  v.  41. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILIGE8  EN  -IU8.    393 

Cela  veut  dire  qu'il  était  flls  de  Reno-genus.  Il  s'appelait 
Virdumaros  *Renogeni-cnos.  Le  Rhin  (c'est-à-dire  non  seu- 
lement le  grand  fleuve,  mais  tout  amas  d'eau,  rian^  en  ir- 
landais «  la  mer  »)  était  dieu  :  on  pouvait  s'appeler  par 
piété  Renos  dans  le  monde  celtique,  comme  Mercurius  dans 
le  monde  romain.  Parmi  les  inscriptions  romaines  de  Pa- 
doue  se  trouve  le  nom  d'une  femme  appelée  Isellia  Rena  (1). 

Ainsi  Renos,  nom  de  fleuve,  était  devenu  nom  d'homme. 

De  Renos,  nom  d'homme,  on  a  tiré,  en  abrégeant  Ve  et 
en  doublant  l'n,  le  gentilice  Rennius.  Les  Gaulois  ont  porté 
ce  gentilice  dans  diverses  parties  de  l'empire  romain.  On 
le  rencontre  par  exemple  à  Aquilée  (2),  à  Adria  (3),  à 
Oderzo  (4),  dans  l'Italie  du  Nord  ;  à  Nonnberg,  près  de 
Salzburg  en  Autriche  (5).  On  le  trouve  enfin  en  Gaule,  à 
Narbonne  (6). 

Il  a  donné  naissance  au  nom  de  lieu  *  Renniacus  très  ré- 
pandu en  France.  On  doit  reconnaître  d'anciens  Renniacus 
dans  les  nombreux  —  Regney,  Regny ,  Reignac,  Reignat , 
Reigny,  —  Rignac.  Rigneux,  Rigné,  Rigny  —  que  la  France 
possède.  Les  uns  ont  conservé  Ve  de  la  première  syl- 
labe, les  autres  l'ont  assimilé  à  la  syllabe  suivante.  Dans  la 
première  catégorie  sont  :  Regney  (Vosges),  Regnié  (Rhône), 
Regniactis  au  dixième  siècle  (7);  Regny  (Aisne),  appelé  Re- 
gni  en  1110,  et  Reini  en  1143  (8);  et  six  autres  Regny  (Cher, 
Isère,  Loire),  sept  Reignac  (Charente,  Corrèze,  Gironde, 
Indre-et-Loire ,  Lot-et-Garonne) ,  deux  Reignat  (Puy-de- 
Dôme),  un  Reigny  (Cher),  total  dix-neuf.  La  seconde  caté- 
gorie comprend  trente-trois  localités  :  Rignac  (Aveyron) , 
encore  appelé  à  l'ablatif    de  Regniaoo  au    onzième    siè- 

(1)  C.  /.  L.,  V,  2967. 

(2)  lbid.,V,  8444. 

(3)  Ibid.,  V,  2359. 

(4)  Ibid.,  V,  19T7. 

(5)  Ibid.,  III,  5554. 

(6)  Ibid,,  XII,  5967.  —  Comparez  le  nom  d'homme  Rodanus ,  Rhodanus, 
dans  deux  inscriptions  de  la  Qanle  cisalpine  (C.  J.  L.»  V,  3677,  5559), 

(7)  Ragut,  C&rt,  de  Saint-Vincent  de  Mâcon,  p.  59. 

(S)  Matton,  Dictionn.  topogr,  du  départ,  de  l'Aisne,  p.  228. 


394  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  g  3. 

cle  (1) ,  et  huit  autres  Rignac  (Cantal ,  Corrèze,  Dordogne. 
Gers,  lUe-et-Vilaine,  Lot),  Rigné  (Maine-et-Loire)  qui 
s'appelait  déjà  ainsi  vers  1100  (2),  Rigney  (Doubs),  deux 
Rigneu  dans  TAin  et  dix-neuf  Rigny ,  dont  il  est  inutile 
d'énumérer  les  départements ,  et  enfin  Rinhac  (Lot)  ;  cela 
donne  un  total  de  cinquante-deux  Renniacus,  noms  de 
lieux  dérivés  du  gentilice  Rennius,  dérivé  lui-même  de 
Renus  et  ayant  pour  point  de  départ  la  croyance  à  la  divi- 
nité du  grand  fleuve,  comme  *Reno-genos,  fils  du  Rhin, 
nom  du  père  de  Virdumaros. 

Rennius,  gentilice  en  Gaule,  est  le  résultat  d'un  procède 
de  formation  grammaticale  analogue  à  celui  qui,  en  Grande- 
Bretagne  ,  a  donné  naissance  au  cognomen  Bslismius  (3;. 
Belismius,  surnom  d'une  personne  dans  une  inscription 
romaine  de  Caerleon  en  Galles,  est  dérivé  de  Belisama  qui, 
en  Grande-Bretagne ,  est  l'embouchure  d'une  rivière  prés 
de  Liverpool,  tandis  qu'à  Saint-Bertrand  de  Comminges, 
Belisama  est  une  Minerve  (4). 

De  *Reno-genos  on  peut  rapprocher  Eni-genus,  nom  du 
père  d'un  certain  Secundus,  qui  près  de  Vence  fit  élever 
une  stèle  funéraire  à  ses  enfants  (5).  Eni-genus  veut  dire 
fils  de  TEnus  ou  mieux  de  IVEnus ,  qui  est  Tlnn  (6;.  Du 
thème  Eno-  on  a  peut-être  tiré  le  gentilice  Enius  conservé 
par  une  inscription  des  environs  de  Vence  (7)  et  qu'on  croit 
reconnaître  dans  la  marque  de  potier  où  le  nom  du  fabri- 
cant est  écrit  au  génitif  Q.  Eni  (8)  ;  cf.  Eni-boudius,  «  vain- 


(1)  G.  Desjardins,  C&rtulaire  de  ConqueSt  p.  3,  4. 

(2)  Port,  Dictionn.  de  Mitine-et-Loire^  t.  III,  p.  257. 

(3)  C.  /.  L.,  VII,  97. 

(4)  OreUi,  1431.  Cf.  Ptolémée,  1.  II,  c.  3,  {  2,  éd.  Didot,  t.  I,  p.  85. 

(5)  C.  /.  L.,  XII,  33. 

(6)  Enignus,  nom  pérégrin  dans  trois  inscriptions  de  la  Pannonie  supé- 
rieure (C.  /.  L. ,  III,  3784,  3793,  3871),  paraît  ne  différer  d'Eni-genus  que 
par  une  variante  orthographique.  Enicenius  pour  Enigenius,  cognomen 
conservé  par  une  inscription  d'Esté,  en  Italie  (C.  /.  L.,  V,  2620),  est  dérivé 
d'Eni-genus. 

(7)  C.  /.  L.,  XII,  17. 

(8)  Ibid,,  XII,  5686,  329. 


NOMS  DE  UEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICES  EN  -lUS.    395 

queur  de  Tlnn  »,  gentilice  connu  par  deux  inscriptions  des 
environs  de  Nice  (1).  L'Inn  est  un  affluent  du  Danube. 

La  croyance  à  la  divinité  de  Teau  et  du  fer,  qui  a  donné 
naissance  à  des  noms  comme  *  Dubro-genos  «  fils  de  l'eau  », 
*Esarno-genos  «  fils  du  fer  »,  a  eu  son  effet  dans  Tordre 
des  choses  juridiques.  Le  fer,  c'est-à-dire  l'épée,  était  le 
juge  des  contestations,  non  seulement  quand  les  parties 
recouraient  aux  armes,  mais  aussi  quand  le  serment  d'une 
des  parties  décidait  du  gain  du  procès  :  les  Irlandais 
juraient  sur  leur  épée  et  croyaient  que  l'épée  se  levait 
elle-même  pour  frapper  le  parjure  (2).  L'épreuve  de  l'eau 
bouillante  était  usitée  dans  le  droit  irlandais  comme  dans 
celui  des  Germains;  des  deux  côtés  on  l'appelait  l'épreuve 
du  chaudron ,  caire  en  irlandais  (3) ,  (leneum  dans  la  loi 
salique  (4);  mais  ce  n'était  pas  le  chaudron,  c'était  l'eau 
qui,  en  brûlant  le  coupable,  faisait  triompher  la  justice. 
Le  Rhin,  en  qualité  de  Dieu,  était  le  juge  des  femmes 
mariées  dont  les  maris  suspectaient  la  fidélité  ;  il  englou- 
tissait, disait-on,  l'enfant  adultérin  qui.,  couché  sur  un 
bouclier,  était  exposé  aux  hasards  des  flots  par  un  mari 
soupçonneux;  l'enfant  légitime  surnageait. 

Un  poète  grec  anonyme  a  chanté  cette  épreuve  juridi- 
que :  il  peint  les  inquiétudes  de  la  mère  qui,  après  les  dou- 
leurs de  l'enfantement,  ressent  des  angoisses  nouvelles  et 
attend  toute  tremblante  le  jugement  des  flots  agités.  Si  l'on 
prenait  cet  auteur  à  la  lettre ,  tous  les  enfants  des  Celtes 
auraient  été  soumis  à  cette  redoutable  épreuve  (5)  ;  il  est 
évident  qu'il  ne  faut  pas  l'entendre  ainsi.  En  règle  géné- 
rale ,  chez  les  Celtes  comme  chez  les  Germains,  on  ne  re- 
courait aux  ordalies,  au  jugement  de  Dieu,  que  lorsqu'il  y 
avait  contestation  et  que  les  autres  preuves  faisaient  dé- 

(1)  C.  /.  L.,  y,  7865,  7866. 

(2)  Revue  celtique,  t.  IX,  p.  144. 

(3)  Ancient  Uws  of  Ireland,  t.  I,  p.  194,  1.  23;  198,  1.  19. 

(4)  Ad  inium  ambulat,  Loi  salique,  XIV,  2,  cod.  2,  édition  Hes^çls,  col.  83. 
(^)  ...  xal  oO  icàpoc  elal  ToxS)ec 


396  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  |  3. 

faut  :  il  faudrait  connaître  bien  mal  le  cœur  humain  pour 
admettre  qu'un  mari  croyant  être  père  aurait  exposé  son 
enfant  au  danger  de  périr  dans  les  flots  (1). 

Il  serait  intéressant  de  savoir  à  quelle  date  Tépigramme 
grecque  dont  nous  parlons  remonte.  Nous  l'ignorons;  eUe 
est  probablement  la  source  où  a  puisé  l'empereur  Julien 
quand  il  parle  de  cet  usage  dans  son  second  discours  à 
l'empereur  Constance  et  surtout  dans  une  lettre  au  philo- 
sophe Maxime. 

Voici  comment  Julien  s'exprime  dans  son  discours  : 

«  On  dit  que  chez  les  Celtes  un  fleuve  est-  le  juge  in- 
»  corruptible  de  la  légitimité  des  enfants  ;  jamais  les  pleurs 
»  des  mères  n'obtiennent  de  lui  qu'il  voile  et  cache  leur 
»  faute;  les  pères  attendent  sans  crainte  la  sentence  qu'il 
»  prononce  sur  les  femmes  et  sur  les  enfants;  c'est  un  juge 
»  véridique  et  qui  ne  ment  pas  (2).  »  Julien  ne  dit  pas  ici 
le  nom  du  fleuve  dont  il  s'agit ,  il  est  plus  explicite  dans 
sa  lettre  au  philosophe  Maxime  :  «  On  ne  peut,  »  écri- 
vait-il, «  accuser  le  Rhin  d'injustice  envers  les  Celtes,  car 
»  il  engloutit  dans  ses  flots  tourbillonnants  les  bâtards  et 
»  punit  ainsi  la  profanation  du  lit  conjugal;  mais  quand  il 
»  reconnaît  qu'un  enfant  est  légitime,  il  le  tient  élevé  au- 
»  dessus  des  eaux  et  le  ramène  entre  les  mains  de  la  mère 
»  tremblante  ;  en  le  lui  rendant  plein  de  vie  il  est  en  quel- 
»  que  sorte  le  témoin  incorruptible  de  la  vertu  et  de  l'hou- 
»  neur  de  l'épouse  (3).  » 

Des  ijoms  de  rivières  divinisées ,  on  peut  rapprocher  le 
mot  gaulois  nemeton  qui  signifiait  «  temple  »,  ou,  plus 
exactement,  «  espace  de  terrain  consacré  à  un  ou  plusieurs 
dieux.  »  On  disait  Reno-genos  «  fils  du  Rhin,  »  on  disait 
aussi  Nemeto-genos ,  «  fils  du  temple.  » 


(1)  AnthologitL,  livre  IX,  ép.  125;  éd.  Didot,  t.  U,  p.  24. 

(2)  Oratio  II,  éd.  Toubner-Hortlein,  p.  104-105. 

(3)  Edit.  Teubner-HcrUein,  p.  495  ;  Tidéo  de  la  mare  tremblante»  Tpcftouoii, 
est  évidemment  empruntée  par  Julien  à  l'épigramme  dont  l'auteur  a  écrit 
Tpotiiouaou 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  QENTILIGE8  EN  -lUH.    397 

Il  y  eut  à  Bordeaux ,  sous  Tempîre  romain ,  une  esclave 
de  la   cité,  ancilla  publica^   qui  s'appelait  Nemeto-gena 
«  fille  du  temple  (i).  »  On  a  trouvé  dans  la  même  ville 
Tépitaphe  d'une  autre  femme  qui  portait  le  môme  nom, 
mais  avec  une  légère  modification  dans  Torthographe ,  le 
second  terme  est  écrit  avec  un  c  au  lieu  d'un  g  :  Nemeto- 
cena(2).  Cette  particularité  orthographique  se  remarque  avec 
une  autre,  qui  est  le  doublement  de  Tn,  dans  le  nom  le 
plus  ancien  d'Arras,  Nemeto-cenna  pour  Nemeto-gena^  formule 
abrégée  probablement  pour  Neineto-geno-bona  (3).  Le  dou- 
blement de  Tn  de  gêna  se  rencontre  ailleurs,  par  exemple 
dans  Nitio-genna,  surnom  d'une  femme  qui  fit  à  la  Victoire 
une  dédicace  conservée  au  musée  de  Lausanne  (4).  G&na 
a  été  altéré  en  cenna ,  non  seulement  dans  Nemeto-cenna , 
mais  aussi  dans  Sumelo-cenna ,  nom  d'une  station  romaine 
inscrite  dans  la  carte  de  Peutinger.  Sumelo-cenna  paraît 
avoir  occupé  remplacement  de  la  ville  moderne  de  Rotten- 
burg  et  donna  son  nom  au  territoire  appelé  dans  une  ins- 
cription romaine  salttÀS  sumelo-cennensis  (5).  Samelocenna 
doit  probablement  son  nom  à  un  personnage  appelé  Su- 
melo-genus  ;  mais  le  premier  terme  de  ce  nom ,  probable- 
ment nom  de  divinité,  reste  obscur,  tandis  qu'on  peut 
expliquer  Nemeto-gena.  qui  signifie,  ce  semble,  «  fille  du 
temple  personnifié  et  divinisé.  » 

Quelquefois  le  père  que  l'imagination  celtique  donne  à 
un  homme  est  un  végétal  :  Guidgen  =  *Vidu-genos  «  fil% 
de  l'arbre ,  Guern-gen  =  *  Verno-genos  «  fils  de  l'aune ,  » 
dans  le  Liber  LandaA)ensis  ;  Der-gen  =  *  Dervo-genos  «  fils 

(1)  JuUian,  Inscriptions  romaines  de  Bordeaux^  t.  I,  p.  194. 
(î)  /6W..  p.  366. 

(3)  Nemetocenna  =  Nemeto-gena ,  est  le  nom  d'Arras  chez  Hirtius,  De 
beilo  gallico,  1.  VIII,  c.  46,  §  23;  c.  52,  §  2.  La  variante  Nemetacus^  dans  le 
milliaire  de  Tongres,la  Table  de  Peutinger  et  17linéraire  d'Antonin,  pourrait 
bien  n'être  qu'une  traduction  de  Nemetocenna,  et  signifier  fils  de  Nemetos. 
Nemetacus  serait,  comme  Nemetocenna  ^  un  nom  d'homme  employé  avec 
sens  de  nom  de  lieu. 

(4)  C.  J.  L.,  XII,  162. 

(5)  Brambach,  1633;  cf.  Sumeli,  C.  /.  L.,  XII,  1351. 


1 


398  LlVRE  II.  CHAPITRE  III.  g  3. 

du  chêne  »  dans  le  Cartulaire  de  Redon.  Der-gen,  notation 
du  neuvième  siècle,  est  devenu  plus  tard  Der-ien  qu'on 
trouve  au  treizième  siècle  dans  une  charte  de  Beauport. 
Aujourd'hui  on  écrit  Derrien ,  c'est  la  dernière  partie  du 
nom  de  La  Roche-Derrien  (Côtes-du-Nord).  Ce  nom  de  lieu 
veut  dire  «  La  Roche  du  fils  du  chêne.  » 

Enfin  le  père  mythique  peut  être  un  animal  divinisé. 
Un  prêtre  du  nom  de  Con-gen  =  *  Cuno-genos  «  fils  du 
chien  »  est  témoin  dans  une  charte  du  neuvième  siècle  1 
en  Bretagne.  A  la  même  catégorie  appartiennent  chez  le> 
Celtes  contemporains  de  Tempire  romain  : 

1**  *Uro-genos  «  fils  de  Tauroch  »  (ûrus),  nécessaire  pour 
expliquer  le  gentilice  Uro-genius  dans  une  épitaphe  trouvée 
à  Lyon  (2)  et  le  nom  c^  vétéran  Uro-geno-nertus  «  celui 
qui  a  la  force  du  fils  de  Tauroch,  »  dont  l'épitaphe  a  été 
découverte  à  Lyon  comme  la  précédente  (3)  ; 

2**  Branno-genos  «  fils  du  corbeau,  »  nom  d'homme  bar- 
bare nécessaire  pour  expliquer  le  terme  géographique  Bran- 
no-genium  qui  désigne  dans  V Itinéraire  d'Antonin  une  station 
romaine  de  Grande-Bretagne.  Branno-genium^  sous-entendu 
praedium ,  est  le  neutre  d'un  gentilice  romain  Branno- 
genius ,  dérivé  de  Branno-genos  ; 

3**  Matu-genos  «  fils  de  Tours ,  »  synonyme  antique ,  — 
mais  avec  sens  mythologique  —  du  moderne  Mac-Mahou 
(p.  289-390),  qui  désigne  une  filiation  réelle  et  veut  dire  fils 
d'un  homme  appelé  Mahon  ou  l'ours  ; 

4*  Un  autre  synonyme  antique  de  Mac  Mahon  est  un 
mot  dont  nous  n'avons  rien  dit  encore,  *Arto-genos,  ou, 
avec  une  légère  variante,  Arti-genos  qui  explique  le  nom, 
Arti-geni,  d'un  endroit  où  l'abbaye  de  Saint-Victor  de  Mar- 
seille avait  une  colonica  au  commencement  du  neuvième 
siècle  (4).  Artigeni,  sous-entendu  fundi,  est  un  domaine  formé 


(1)  A.  de  Gourson,  Cartulaire  de  Redon,  p.  25. 

(2)  Boissieu,  p.  193. 

(3)  Ibid,,  p.  330. 

(4)  Guérard,  C&rt.  de  $9int'Victor  de  Marseille,  t.  II,  p.  641. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICES  EN  -lUS.    399 

par  la  réunion  de  plusieurs  fonds  de  terre  dont  le  plus  an- 
cien propriétaire  connu  s'appelait  Arto-genos  ou  Arti-genos 
«  Gis  de  Tours,  »  de  Tours  divinisé.  Il  ne  faut  pas  confon- 
dre ce  nom  avec  Arti-cnos ,  qui  veut  dire  fils  d'un  homme 
appelé  Artos  ou  Tours  (p.  382). 

4°  Les  noms  propres  d'hommes  identiques  à  ceux  d'animaux  divi- 
nisés :  UrO'S,  Branno-s,  Matus  et  leurs  dérivés. 

Le  nom  d'homme  Arto-s  «  ours  »  était  adopté  sous  Tin- 
fluence  d'une  idée  religieuse  analogue  à  celle  qui  a  fait  créer 
le  nom  d'Artigenos.  Les  noms  d'homme  Uros  «  auroch,  » 
Brannos  «  corbeau,  »  parallèles  à  Uro-genos  et  à  Branno- 
genos  s'expliquent  de  même  par  un  sentiment  religieux. 

On  a  trouvé  à  Bordeaux  Tépitaphe  de  Julia  Uri  fllia  (1); 
Uro-maguSy  «  champ  d'Uros,  »  est  le  nom  probable  d'une 
station  romaine  de  Suisse  (2). 

D'UrO'S  on  a  tiré  un  gentilice  Urius\  je  n'en  connais  pas 
d'exemple  dans  les  inscriptions;  mais  son  existence  est 
prouvée  par  le  nom  de  lieu  dérivé  Uriaeus  dans  une  charte 
de  Louis  VI  en  1113  (3),  c'est  aujourd'hui  Ury  (Seine- 
et-Marne).  L'w  du  latin  se  prononce  u  en  français  parce 
qu'il  était  long  :  telle  est  la  quantité  d'urus  : 

Silvestres  uri  assidue  capraeque  sequaces 
lUudunt  (4). 

Quaesitas  ad  sacra  boves  Junonis,  et  uris 
Imparibus  ductos  alta  ad  donaria  currus  (5). 

C'est  le  nom  d'homme  Brânos  par  a  long  et  simple  n , 
variante  de  branno-s  «  corbeau ,  »  par  a  bref  et  n  double , 
qui  explique  le  terme  géographique   Brano-dunum,  nom 


(1)  Jullian,  Inscriptions  romaines  de  Bordeaux,  p.  351. 

(2)  C.  /.  L.,  XII,  p.  21. 

(3)  Lastoyrio,  Carf.  de  Paris,  p.  188. 

(4)  Virgile,  Géorgiques,  II,  373-374. 

(5)  Virgile,  i6id.,  III,  532-533. 


400  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  g  3. 

d'une  localité  de  Grande-Bretagne,  où  dans  les  derniers 
temps  de  l'empire  romain  les  cavaliers  dalmates  tenaient 
garnison  (1).  La  villa  Brandono^  d'une  charte  de  l'an  1,000 
ou  environ  (2) ,  est  un  ancien  Brano^dunum  ou  Branno- 
dunum;  c'est  aujourd'hui  Brandon  (Saône-et-Loire).  Braine 
(Aisne)    appelé   Braina  par    Flodoard   au  dixième  siècle 
dans   son   histoire   de   l'église    de  Reims,    est  une  an- 
cienne villa  Brana  ainsi  nommée  à  cause  d'un  ancien  pro- 
priétaire Brfinos.  On  retrouve  le  double  n  chez  César  (3;, 
dans  le  surnom  des -rfuterct  Branno-vices  où  Branno-  est  un 
nom  d'homme ,  comme  Eburo-  dans  le  surnom  des  Aulerci 
Eburo-vices  chez  le  même  écrivain.  On  doit  reconnaître 
Brannos  dans  le  nom  d'homme  Bran  «  corbeau  »  fréquent 
au  neuvième  siècle  dans  le  Cartulaire  de  Redon,  De  Bran- 
nos ou  de   Brânos   est  venu  un  gentilice   *Brannius  ou 
*Brânius,  d'où  le  dérivé  Braniacus  qui,  dans  un  pouillé 
du  onzième  siècle,  désigne  Bragny-en-Charolais  (Saône-el- 
Loire)  (4). 

De  matU'S  «  ours  »  employé  comme  nom  d'homme,  nous 
n'avons  pas  trouvé  d'exemple,  mais  de  ce  mot  viennent  les 
cognomina  dérivés  primaires  :  1**  Matuus  et  Matua  à  Bor- 
deaux (5)  ;  2*  Matucus  en  Grande-Bretagne  (6)  d'où  Matuco 
et  Matuccius.  Matuco  est  un  cognomen  qu'on  trouve  en 
Norique  (7).  Matuco,  au  génitif  Matuconis ,  a  donné  nais- 
sance au  gentilice  Matuconius  dans  une  inscription  de 
Castellane  (Alpes-Maritimes)  (8).  Matucius,  autre  dérivé  de 
Matucus,  est  un  gentilice  qu'une  inscription  de  Nice  nous 
a  conservé  (9).  Ces  noms  complètent  ce  que  peut  nous 


(1)  Notitia  occidentis,  c.  25,  |  4;  édit.  Bœcking,  t.  II,  p.  81. 

(2)  Ragut,'CaW.  de  Saint'Vincent  de  M&corif  p.  225. 

(3)  De  bello  gallico,  1.  VII,  c.  75,  i  7. 

(4)  Aug.  Bernard,  Car(.  de  S&vigny^  t.  Il,  p.  1052,  1109. 

(5)  JuUian,  Inscriptions  romaines  de  Bordeaux,  t.  I,  p.  287-288. 

(6)  C.  /.  L.,  VII,  1336,  682. 

(7)  Ibid,,  III.  5624. 

(8)  ibtd.,  XII,  66. 

(9)  /M4.,  V,  7923,  p.  925. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICE8  EN  -IU8.    401 

apprendre  du  culte  de  Tours  chez  les  Gaulois  Tétude  du 
thème  arto-  et  ses  dérivés. 

^  ObiecUon  tirée  de  la  phonétique  :  ar  notation  d*r  voyeUê. 

On  ne  s'est  pas  arrêté  dans  cet  article  à  une  difficulté 
phonétique  :  le  nom  indo-européen  de  Tours  est  *rft-^-5 
avec  r  voyelle  initiale  dont  la  résonnance  produit  en  grec 
un  a,  en  latin  un  u  (ou  un  o)  antécédent  :  (ïpxToç,  ursus. 
Ordinairement  cette  voyelle  r  produit  en  celtique  r  con- 
sonne avec  un  e  ou  un  i  subséquent  :  on  devrait  donc,  ce 
semble,  avoir  ici  rectos,  ou  ricto-s]  or  ici  Vr  voyelle  pro- 
duit r  consonne  avec  une  voyelle  antécédente  a  identique 
à  celle  du  grec. 

Mais  ce  phénomène  n'est  pas  isolé  en  celtique.  Compa- 
rez au  latin  mortuosj  d*une  racine  réduite  mr  avec  la 
voyelle  brève  r,  Tirlandais  marb ,  le  breton  marv  «  mort.  » 
Dans  rctos  «  ours  »  comme  dans  mrtvos  «  mort  »  IV  voyelle 
est  suivi  de  plusieurs  consonnes,  il  est  devenu  ar  au  lieu 
de  re  ou  ri;  la  voyelle  produite  par  la  résonnance  de  IV 
dans  ces  mots  celtiques  est  la  même  que  la  voyelle  pro- 
duite par  la  résonnance  d'n  voyelle  suivi  d'une  consonne, 
par  exemple  iaouank  «  jeune,  »  en  breton  =  yovnkos. 

Atteia.  Ateia  dans  une  charte  de  Tannée  907 ,  concer- 
nant Tabbaye  de  Saint-Martin  de  Tours,  désigne  Athée  (In- 
dre-et-Loire) (1).  Ateia ^  dans  une  charte  du  douzième  siè- 
cle (2);  est  aujourd'hui  Athée  (Mayenne).  On  trouve  aussi 
ce  nom  au  pluriel  :  Ateias  dans  des  chartes,  en  877  et 
en  880  ;  ces  deux  mentions  s'appliquent  à  deux  localités 
différentes,  Tune  du  département  de  TYonne,  Tautre  de  la 
Côte-d'Or;  la  première  concerne  Athée,  commune  de  Ton- 
nerre (3),  la  seconde  est  Athée  près  d'Auxonne  (4).  Aties  ^ 

(1)  Habille,  La  pancarte  noire,  p.  218;  cf.  p.  183. 

(2)  Léon  Maitre,  Dict,  topogr.  du  départ,  de  la  Afaj/enne,  p.  6.    ' 

(3)  Qnantin,  Dictionnaire  topogr&phique  du  département  de  l'Yonne,  p.  5. 

(4)  (Hmier,  Nomenclature,  p.  13,  n*  46. 

26 


402  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  |  3. 

1131,  aujourd'hui  Athies  (Aisne)  (1),  semble  n'être  qu'une 
autre  notation  d'Ateias.  Aieias  lui-môme  doit  s'être  prononcé 
primitivement  comme  Ateia  avec  un  t  double,  Audm^ 
Atuia,  autrement  cette  dentale  ne  subsisterait  pas  aujour- 
d'hui. Ateia  est  donc  la  forme  féminine  d'un  gentilice 
Atteins. 

Comme  exemple  de  l'orthographe  par  double  t  nous  cite 
rons  deux  épitaphes  trouvées  à  Rome ,  l'une  est  celle  <le 
C.  Atteins  Antiochus,  l'autre,  celle  d'Atteia  Fortunate  % 
Mais  l'orthographe  ordinaire  est  Ateius  par  un  seul  t.  De 
la  gens  Ateia,  le  membre  le  plus  connu  est  le  jurisconsulte 
C.  Ateius  Capito,  consul  suffectus  l'an  5  après  Jésus-Christ, 
et  mort  en  22  ;  il  laissa  un  ouvrage  de  droit  intitulé  Conjecr 
tanea  qui  contenait  au  moins  neuf  livres. 

Barbâria.  Par  une  charte  dont  la  date  se  place  en  971 
ou  en  972 ,  il  fut  fait  donation  à  l'abbaye  de  Cluny  d'une 
vigne  in  Barbâria  (3). 

Le  gentilice  Barbarius,  dont  Barbâria  est  le  féminin,  est 
rare,  mais  s'est  rencontré  en  Italie  et  en  France.  Une 
inscription  ti'Avella,  en  Campanie  ,  nous  fait  connaître  les 
noms  de  Barbarius  Pompeianus  v[ir]  c[larissimus]  cons[ula- 
risl  Kampaniae  (4).  On  a  trouvé  à  Valence,  en  France,  l'épi- 
taphe  que  M.  Barbarius  Perpetuus  fit  graver  pour  sa 
femme  (5). 

l^' Itinéraire  dCAntonin  mentionne  un  nom  de  lieu  dérivé 
de  ce  gentilice ,  c'est  Barbariana  :  ainsi  s'appellent  deux 
stations  romaines  d'Espagne.  A  l'aide  du  même  suffixe  a 
été  formé  le  nom  Barbarianus,  noté  Barbairanum  en  1185, 
d'une  ferme  appelée  aujourd'hui  Barbayrac  (Hérault)  (6). 


(1)  Matton,  Dict,  topogr,  du  départ,  de  l'Aisne^  p.  10. 

(2)  C.  l.  L.,  VI,  12573,  12577. 

(3)  Bruel,  Recueil  des  chartes  de  Vabbaye  de  Cluny^  t.  II,  p.  386. 

(4)  C.  /.  L.,  X,  1199.  % 

(5)  Ibid.,  XII,  1756. 

(6)  E.  Thomas,  Dict,  topogr.  du  départ,  de  VHéraulty  p.  13. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICES  EN  -lUS.    403 

Le  sufiBxe  -act«  est  ordinairement  préféré  en  France. 
Une  terra  de  Barbariaco  est  mentionnée,  au  neuvième 
siècle,  dans  une  charte  de  Tabbaye  de  Saint- Vincent  de 
Mâcon  (1).  En  992,  il  fut  fait  don,  à  Tabbaye  de  Cluny, 
d  un  champ  et  d'une  vigne  in  villa  Barberiacense  ;  cette 
ville  était  située  au  pays  de  Chalon-sur-Saône,  in  pago 
Cabilonense ,  dans  le  territoire  de  Ballore  (Saône-et-Loire) , 
in  fine  Baloronense  (2).  Suivant  la  chronique  de  Saint-Beni- 
gne  de  Dijon ,  qui  date  du  milieu  du  onzième  siècle ,  le 
roi  Gontran,  Tan  23  de  son  règne,  soit  en  587,  aurait  donné 
à  cette  abbaye  des  biens  situés  dans  plusieurs  localités 
voisines  de  Dijon,  notamment  in  Barbiriaco  (3),  il  s'agit 
de  Barbirey  (Côte-d'Or)  (4).  Vers  Tannée  1100,  l'église  de 
Barberey  (Savoie)  est  appelée  ecclesia  de  Barbariaco  dans 
une  nomenclature  des  bénéfices  qui  dépendaient  de  l'évô- 
ché  de  Grenoble  (5).  Barberey  (Aube)  est  nommé  Barbaria- 
cum  dans  deux  documents  du  douzième  siècle ,  Barberi 
dans  un  autre  du  môme  siècle  (6). 

Catussia.  C'est  ainsi  que  doit  être  restituée  l'ortho- 
graphe antique  du  nom  d'un  village  du  département  de 
l'Aube  qui  s'écrit  aujourd'hui  Chaource  et  qu'on  trouve 
écrit  :  Cad/ascia  =  Cadussia  dans  la  copie  d'une  charte  de 
l'année  896 ,  Cadusia  avec  une  s  simple  pour  une  s  dou- 
ble dans  la  copie  d'une  charte  de  l'année  878,  Cadmsia 
en  1117  (7).  Dans  Chaource,  -i^ce  =  -ssia  offre  la  môme 
dissimilation  que  Marseille  de  Massilia. 

Catussia  est  la  forme  féminine  d'un  gentilice  Catussius 


(1)  Ragnt,  Cartulaire  de  Saint-Vincent  de  Maçons  p.  243. 

(2)  Bruei,  Recueil  des  chartes  de  l'abbaye  de  Cluny^  t.  III,  p.  147. 

(3)  Migne,  Patrologia  latina^  t.  CLXII,  col.  768;  édit.  Bougaud  et  Garnier, 
p.  29. 

(4)  Gamier,  Nomenclature,  p.  57,  n*  246. 

(5)  Cartulaire  de  Saint-Hugues  de  Grenoble,  p.  187. 

(6)  Boutiot  et  Socard,  Dict,  lopogr,  du  département  de  VAube,  p.  12. 

(7)  Boutiot  et   Socard ,  Dictionn.  topogr,  du  départ,  de  l'Aube ,  p.  36. 
Cf.  H.  d'A.  de  J.,  Voyage  paléogr,  dans  le  dép,  de  l'Aubej  p,  67,  70. 


404  LIVRE  II.  CHAPITRE!  III.  |  3. 

dont  une  variante  par  s  simple  est  conservée  par  une  ins- 
cription de  Pola,  en  Istrie  (1).  Catussius  est  dérivé  du  nom 
d'homme  gaulois  Catussa  que  des  citoyens  romains ,  d'ori- 
gine gauloise,  gardèrent  intact  en  en  faisant  un  cognomen, 
tandis  que  d'autres  en  tirèrent  un  gentilice.  Nous  avons 
encore  deux  exemples  du  cognomen  Catussa.  Ils  ont  été  re- 
cueillis, l'un  en  France,  à  Lyon,  Tautre  dans  l'empire 
d'Autriche,  à  Seckau  en  Styrie.  A  Lyon,  Pompeius  Ca- 
tussa, originaire  de  Besançon,  cives  sequanus,  exerçait  le 
métier  de  tector^  c'est-à-dire  couvrait  les  murs  d'enduits  en 
stuc ,  quand  il  perdit  sa  femme  à  laquelle  il  fit  élever  un 
monument  funèbre  (2).  A  Seckau,  on  a  trouvé  l'épitaphe  de 
Vibius  Catussa  (3).  Le  même  nom^  écrit  Cadussa,  suivant  la 
prononciation  du  neuvième  siècle ,  dans  un  diplôme  du 
roi  Charles  le  Chauve  en  867,  y  désigne  un  village  du  dé- 
partement de  l'Aisne ,  aujourd'hui  écrit  Chaource  (4). 

Catussa  est  dérivé  du  gaulois  catu-s  c<  bataille.  »  Catns 
est  inscrit  en  grandes  capitales  sur  un  des  boucliere  gau- 
lois de  l'arc  de  triomphe  d'Orange  ;  c'est  là  probablement 
un  nom  d'homme.  On  retrouve  ce  substantif  dans  des 
composés  où  il  est  premier  terme,  tels  sont  :  Caturslogi^ 
«  troupes  de  ^bataille  »  nom  d'un  peuple  de  la  Gaule 
Belgique  écrit  Cato-slugi  chez  Pline  (5),  Catu-riges,  «  rois 
de  la  bataille,  »  nom  de  peuple  de  la  Gaule  du  sud-est  qui 
persiste  dans  celui  de  Chorges  (Hautes-Alpes)  ;  c'était  sous 
l'empire  romain  une  dépendance  de  la  cité  d'Embrun; 
Catu-[v]ellauni  ce  les  bons  dans  la  bataille  »  ancienne  forme 
du  nom  de  peuple  qui  est  devenu  Catalauni  au  moyen 
âge,  comme  l'a  établi  M.  Longnon;  c'est  aujourd'hui  Chà- 
lons-sur-Marne ,  et  la  conquête  belge ,  vers  l'an  200  avant 
notre  ère,  a  porté  en  Grande  Bretagne  le  nom  des  Ca^ 


(Ij  C.  /.  L.  8uppU  italicA,  fasc.  1,  n*  1096. 

(2)  Boissieu,  Inscriptions  de  Lyon,  p.  429.  OreUi,  n*  4803. 

(3)  C.  /.  L.,  m,  5392. 

(4)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  129,  col.  1. 

(5)  Histoire  naturelle^  1.  IV,  (  106. 


NOMS  DE  tilEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICES  EN  -lUS.    405 

vellc^uni.  On  peut  citer  aussi  Catu-volcus,  nom  d'un  roi  des 
Eburons  chez  César  (1).  Enfin  le  nom  de  Caen,  Cadum^ 
Cadomus  au  onzième  siècle  (2),  parait  être  la  forme  mo- 
derne d*un  antique  Catu-magus. 

Du  thème  catu-  sont  venus  plusieurs  dérivés  ;  l'un  est  le 
cognomen  Catuso.  Il  existe  à  Genève  une  dédicace  à  Apol- 
lon par  M.  Aufustius  Catuso  (3).  Le  suflBxe  est  noté  par  ^ 
simple  dans  ce  monument  comme  dans  Tinscription  de  Pola 
déjà  citée  qui  est  Tépitaphe  de  Q.  Catusius  Severianus , 
marchand  d*oiigine  gauloise,  civigallo^  negotianti^  a  écrit  le 
lapicide.  De  Catusius  est  venu  Catusiacus^  qui  est  dans 
V Itinéraire  d'Antcmin  le  nom  d'une  station  située  sur  la 
route  de  Bavay  à  Reims  (4). 

Catusius,  comme  Catussius,  est  un  dérivé  secondaire  de 
ca*t«-,  il  suppose  un  dérivé  antérieur  contenant  un  suiBBlxe 
sigmatique    auquel  on  a  ultérieurement  ajouté  le  sufl&xe 
-îo-,  caractéristique  de  la  plupart  des  gentilices  romains.  En 
ajoutant  immédiatement  le  suffise  -to-  au  thème  catur- ,  on 
en  a  tiré  le  gentilice  Catu-ius  ;  nous  n'avons  pas  rencon- 
tré d'exemple  de  ce  gentilice  dans  les  inscriptions  ni  dans 
les  auteurs  du  temps  de  l'empire  romain,  mais  il  est  néces- 
saire pour  expliquer  le  nom  de  lieu  CaPuiaca  d'une  station 
située  sur  la  route  de  Milan  à  Arles  dans  VltirUraire  d'Àn- 
ionin  ;  l'emplacement  de  Catuiaca  serait  dans  les  Basses- 
Alpes  suivant  M.  Longnon  (5).*  Catuius,  perdu  comme  nom 
d'homme,  se  reconnaît  comme  nom  de  lieu  au  cas  indirect 
Cadugio ,  dans  le  testament  de  Vigile ,  évêque  d'Auxerre 
à  la   fin    du    septième    siècle  ;    c'est   aujourd'hui    Chéu 
(Yonne)  (6). 


(1)  De  bello  g&llico,  V,  24,  26  ;  VI,  31. 

(2)  Hippeau,  Dict.  topogr.  du  dépa,rt.  du  Calvados,  p.  50. 

(3)  C.  /.  L.,  XII,  2585.  - 

(4)  Itinéraire  d'Antonin,  p.  381,  1.  3. 

(5)  Atlas  historique  de  la  France,  p.  26;  cf.  Itinéraire  d'Antonin,  p.  343, 
1.2. 

(6)  Pardessus,  Diplomate,  U,  J53.  ûuantin,  Dict,  top,  de  l'Yonne,  p.  35. 


406  LIVRE  II.  CHAPITRE  lU.  {  3. 

Cepia  ou  Cipia.  Une  localité  appelée  villa  Cipia  en  848 . 
Cepia  en  1035,  Cechia^  1052-1082,  est  aujourd'hui  Seiches 
(Maine-et-Loire) ,  comme  Ta  reconnu  M .  Port  (1) .  Ce  nom  de  lie  «  i 
est  la  forme  féminine  d'un  gentilice  romain  qui  a  été  si- 
gnalé dans  plusieurs  inscriptions.  On  le  trouve  écrit  ave» 
un  «  à  la  première  syllabe  dans  les  formes  masculines  Ce- 
pius  et  Ceppius  en  Campanie  (2)  ;  et  dans  la  forme  féminine 
Cepia  en  Afrique  (3).  On  le  voit  avec  un  i  dans  la  pre- 
mière syllabe  :  Cipius  au  masculin  à  Rome  (4),  à  Ostie  (5 , 
en  Grande-Bretagne  (6)  ;  Cipia  au  féminin ,  à  Padoue  (7, . 
et  à  Vérone  (8),  etc. 

Il  y  a  une  variante  par  ae  :  Caepius,  Caepia,  en  Campa- 
nie (9);  Caepius  à  Ostie  (10).  Antérieurement  à  ce  gentilice, 
le  cognomen  Caepio  a  existé  dans  la  gens  Servilia.  Cn.  Ser- 
vilius  Caepio  fut  consul  en  203  avant  J.-C.  Un  autre  per- 
sonnage qui  porte  exactement  les  mômes  noms*  apparaît 
dans  les  fastes  consulaires,  en  141  et  en  140  avant  J.-C. 
Caepio,  Caepius,  Cepius,  Cipius  paraissent  dériver  de 
caepa^  cepa^  «  ognon,  »  qui  a  donné,  avec  un  autre  suffixe, 
le  nom  de  lieu  dérivé  Cepetum. 

Cepetum  est  un  endroit  où  Ton  cultive  les  oignons.  Ce 
nom  de  lieu  est  devenu ,  dans  le  midi ,  Cepet  ;  c'est  une 
commune  du  départemeni  de  la  Haute-Garonne  ;  elle  est 
appelée  Ceped  au  onzième  siècle  (11).  Dans  le  Nord,  le  d 
final  est  toujours  tombé,  et  Ve  qui  précède  est  devenu  oi 
dans  trois  exemples  certains  :  Cepoy  (Loiret),  Spoy  (Aube). 
Spoy  (Côte-d'Or).  Le  dernier  est  appelé  Cypetum  dans  un 


(I)  DicL  de  Maine-et-Loire,  t.  III,  p.  516. 
p)  C.  /.  L.,  X,  479  (Ceppius),  2251  (Cepius). 

(3)  Ibid,,  VIII,  1510. 

(4)  Ibid.,  VI,  14832,  14833. 

(5)  Ibid,,  XIV,  250,  251,  252. 

(6)  Ibid.,  VII,  1293. 

(7)  Jbid.,  V,  2928. 

(8)  Ibid.,  V,  3399. 

(9)  Ibid.,  X,  2191. 

(10)  Ibid,,  X,  256,  1.  149. 

(II)  G.  Desjardins,  Cartulaire  de  Conques,  p.  62,  63. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICES  EN  -lUB.    407 

diplôme  royal  de  Tannée  664  en  faveur  de  Tabbaye  de 
Bèze  (1).  Quant  à  Spoy  (Aube),  il  avait  encore  deux  syllabes 
et  s'écrivait  par  c  initial,  Cepoi^  au  treizième  siècle  (2).  Mais 
\e  de  etum  est  resté  dans  le  nom  de  Spay  (Sarthe),  qui 
semble  être  le  Cipid/us  d'un  diplôme  mérovingien  fabriqué 
au  neuvième  siècle  (3). 

De  Cepius  on  a  tiré  deux  dérivés  :  l'un  est* Cepianus^ d'où 
Sepian,  commune  de  Valeyrac  (Gironde)  ;  l'autre  est  ^Cepia- 
eus ,  qui  a  donné  probablement  Séchy,  commune  de  Viry 
(Saône-et-Loire) ,  et  Séchy,  commune  de  Thonon  (Haute- 
Savoie). 

Cronia.  En  739,  Abbon  donne  à  l'abbaye  de  Novalèse 
Cronia  in  pago  Tolonense  (4). 

Cronia  est  la  forme  féminine  du  gentilice  Cronius.  On 
conserve ,  dans  la  bibliothèque  de  Lucera ,  ville  de  l'Italie 
méridionale,  l'épitaphe  de  M.  Cronius  (5).  Cronius,  mieux 
Chronius ,  est  un  nom  grec,  XpiSvioç,  dérivé  du  nom  divin 
Xpdvo^.  La  bonne  orthographe  par  ch  est  respectée  dans 
l'épitaphe  d'une  femme  appelée  Chronia  ;  cette  épitaphe  est 
conservée  au  palais  épiscopal  de  Porto,  près  de  Rome  (6). 

De  Cronios  on  a  pu  tirer  *  Croniacus,  d'où  Crogny,  com- 
mune des  Loges-Margueron  (Aube). 

Decia.  Vers  l'année  1015,  Humbert,  évoque  de  Grenoble, 
céda  à  Manassès ,  comte  d'Albon  (Drôme) ,  des  biens  de 
l'église  cathédrale  de  Grenoble  dans  plusieurs  localités  du 
pays  de  Genève,  notamment  in  Desia  (7).  Desia  est  une 
orthographe  du  moyen  âge  pour  Decia. 

Decia  est  le  féminin  du  gentilice  Decius,  un  dès  plus 

(1)  Pertz,  DiplomatSL,  p.  40, 1.  21. 

(2)  Boutiot  et  Socard,  Dict.  topogr.  du  dép,  de  l'Aube,  p.  157. 

(3)  Pertz,  Diplomatay  p.  122,  1.  36. 

W  C^rtulaire  de  Saint-Hugues  de  Grenoblef  p.  41. 

(5)  C.  /.  L.,  IX,  848. 

(6)  Ibid.,  XIV,  801. 

(7)  Cartulaire  de  Saint-Hugues  de  Grenobley  p.  173. 


408  LIVRE  IL  CHAPITRE  III.  (  3. 

illustres  de  Rome  (1).  Trois  membres  de  la  gens  Decia  por- 
tant les  mêmes  noms,  P.  Decius  Mus,  furent  consuls  à  Rome 
de  Tan  340  à  Tan  279  avant  J.-C.  Suivant  la  tradition  romaine, 
ils  auraient  tous  trois  successivement  assuré  aux  Romains 
la  victoire  en  allant  chercher  la  mort  au  milieu  des  batail- 
lons ennemis  après  avoir  rempli  les  formalités  de  la  devo- 
tio  ;  cela  ne  parait  vrai  que  pour  les  deux  derniers. 

Le  gentilice  Decius  pénétra  en  Gaule.  Un  des  monu- 
ments les  plus  intéressants  qui  rétablissent  est  une  inscrip- 
tion trouvée  près  de  Genève.  Elle  est  datée  du  consulat  de 
C.  Marcius  Censorinus,  c'est-à-dire  de  Tan  8  avant  J.-C. 
On  y  lit  les  noms  de  P.  Decius  Esunertus,  fils  de  Trouce- 
teius  Vepus.  Elle  nous  apprend,  en  outre,  que  ce  person- 
nage appartenait  à  la  tribu  Voltinia  (3).  P.  Decius  Esuner- 
tus avait  obtenu  la  dignité  de  citoyen  romain  que  n*avait 
pas  eue  son  père.  Son  nom  gaulois  était  Esu-nerto-s  «  celui 
qui  a  la  force  du  dieu  Esu-s,  » 

Son  père  s'appelait  Vepus ,  et  lui-môme  était  fils  de 
Trouces,  au  génitif  *  Troucetos,  ou,  avec  la  désinence  latine, 
Troucetis,  comme  on  l'apprend  par  une  inscription  de 
Saint- Alban  (Isère)  (4).  C'est  de  Vepus  qu  a  été  tiré  le  gen- 
tilice Vipius  conservé  par  une  inscription  de  Genève  (5) , 
et  d'où  le  dérivé  *  Vipiacus  =  Vichy  (Allier).  Trouces,  Trou- 
cetos  était  dérivé  d'un  thème  trouco-  qui  a  donné  le  dérivé 
Troucillus,  nom  pérégrin  dans  une  inscription  de  Nimes  (6). 
Trouco-  est  devenu  ensuite  trôco-  par  o  long  =  ou,  comme 
la  phonétique  l'enseigne,  et  de  troco  on  a  tiré  le  gentilice 
*  Trôcius  ou  Troccius  ;  la  seconde  notation  est  celle  de  deui 
inscriptions,  Tune  à  Nimes  (7),  l'autre  à  Tresques -(Gard)  (8). 


(1)  De- Vit,  Onomaisiicon,  t.  II,  .p.  575,  579. 

(2)  Mommsen,  Roemische  GeschichtBy  6*  édition,  1. 1,  p.  355  note. 

(3)  C.  /.  L.,  XII,  2623. 

(4)  Ibid.,  XII,  2356. 

(5)  J6id.,  XII,  2590. 

(6)  Ibid,,  XII,  3944. 

(7)  Ibid.,  XII,  3961. 

(8)  Ibid,,  XII,  2758. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILIGES  EN  -lUB.    409 

De  ce .  gentilice  est  venu  le  nom  de  lieu  Trociacus.  En  844, 
dans  un  diplôme  de  Charles  le  Chauve ,  c'.est  une  localité 
du  pc^gus  Belvacensis  (1)  ;  on  suppose  qu'il  s'agit  de  Trocy 
(Seine-et-Marne).  En  885 ,  dans  un  di[dôme  de  Charles  le 
Gros  pour  la  cathédrale  de  Toul  (2);  en  894,  dans  un 
diplôme  d'Arnoul,  roi  de  Germanie,  pour  la  même  église  (3), 
le  môme  nom  désigne  Troussey  (Meuse). 

Ainsi ,  les  noms  du  père  et  du  grand-père  de  P.  Decius 
Esunertus  ont  donné  chacun  un  dérivé  en  -acus  qui  se 
retrouve  dans  la  géographie  moderne  de  la  France.  Decius 
a  eu  la  même  fortune.  Ou  doit  reconnaître  un  ancien  De- 
ciaciAS  dans  la  villa  Disiacus  que  mentionne,  en  662,  la 
charte  de  fondation  de  l'abbaye  d'Hautvilliers  (4)  ;  c'est  au- 
jourd'hui Dizy  (Marne).  Ce  nom,  écrit  Disciacus  en  713  dans 
une  charte  datée  de  Sarrebourg  (Alsace-Lorraine),  désigne 
une  localité  située  dans  le  pagiis  auquel  la  Sarre,  qui  passe 
à  Sarrebourg,  donnait  son- nom.  En  907,  Disiacus^  d'où 
Charles  le  Simple  date  un  diplôme  (5),  parait  être  Dizy-le- 
Gros  (Aisne),  qu'on  retrouve  sous  le  môme  nom  en  1060. 
dans  une  charte  d'Henri  P'  (6).  Le  nom  de  Dicy  (Yonne) 
parait  avoir  la  même  origine  ;  il  aurait  conservé  sourde  la 
gutturale  assibilée  qui  est  devenue  sonore  dans|Dizy  (Aisne), 
et  dans  Dizy  (Yontie). 

r 

Gracilia.  m.  Port  (7)  a  cité  des  chartes  des  années  1100  et 
1105  où  apparaît,  sous  le  nom  de  Grésilla,  Gresilia^  Grisilia, 
le  village  appelé  aujourd'hui  Grésille,  commune  d'Am- 
billon  (Maine-el-Loire).  Ces  notations  modernes  représen- 
tent un  antique  Gracilia, 

Le  gentilice  Gracilius  se  rencontre  au  masculin  dans  une 


(1)  Dom  Bouquet,  VIII,  454  c. 

(2)  Ibid.,  IX,  343  a. 

(3)  ma.,  IX,  368  c.  Cf.  Liénard,  DicU  top.  de  la  Meuse,  p.  238. 

(4)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  129. 

(5)  Dom  Bouquet,  IX,  505  d. 

(6)  Lasteyrie,  CartuUire  de  Paris,  p.  123. 

(7)  Dictionnaire  de  Maine-et-Loire,  t.  II,  p.  301. 


410  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  |  3. 

inscription  du  Norique  (1);  au  féminin,  dans  une  inscrip- 
tion de  Campanie  (2). 

On  en  a  tiré  un  dérivé  en  -ociw:  Grésillé  (Maine-et-Loire), 
Gresillac  (Gironde)  semblent  être  d'anciens  *  Graciliacus. 

HisPANiA.  Dans,  le  cartulaire  de  Molesme  (Côte-d*Or), 
c'est  le  nom  porté,  en  1097,  par  Epagne  (Aube)  (3).  11  y  a 
en  France  une  autre  commune  d'Epagne  dans  le  déparle- 
ment de  la  Somme. 

On  n'a  pas  encore,  je  crois,  rencontré  d'exemple  du  gen- 
tilice  Hispanius  ;  ce  qu'on  a  trouvé ,  c'est  le  gentilice  8pa- 
nius,  dans  une  inscription  italienne  (4)  et  dans  une  ins- 
cription d'Afrique  (5)  ;  Spanius  =  Hispanius  avec  aphérèse 
de  la  voyelle  initiale.  Tiré  du  cognomen  Hispanus,  Spanius 
a  été  dépouillé  de  sa  syllabe  initiale  sous  l'influence  peut- 
être  du  grec  ot^vcoç  «  rare.  » 

[Hijspanius  a  dojiné  un  dérivé  *  Hispaniacus  que  Ton  re- 
connaît dans  les  noms  d'Epagny  (Aisne,  Côte-d'Or,  Haule- 
Savoie);  d'Epiniac  (lUe-et-Vilaine)  ;  d'Espagnac  (Corréze). 

LiviA.  En  892,  il  y  avait  dans  le  pays  de  Vienne,  en 
Dauphiné ,  in  pago  \iennmse ,  une  villa  Livia  (6).  On  doit 
reconnaître  le  même  nom  dans  une  chafte  de  Tannée  885, 
où ,  par  erreur ,  on  a ,  dans  le  Cartulaire  de  Saint-Hugues 
de  Grenoble,  imprimé  Luvam  pour  Liviam  (7). 

Tout  le  monde  connaît  le  nom  de  la  gens  Livia ,  qui  a 
donné  à  Rome  plusieurs  consuls,  la  femme  de  l'empereur 
Auguste  et  le  plus  célèbre  des  historiens  romains. 

Les  inscriptions  attestent  que  le  gentilice  Livius  pénétra 


(1)  C,  I.  L.,  III,  5482. 

(2)  Jbid.,  X,  3413. 

(3)  Boutiot  et  Socard ,  Dictionnaire  topographique  du  d^artement  de 
l'Aube,  p.  61. 

(4)  C.  /.  L.,  X.  4349. 

(5)  Ibid.,  VIII,  2978. 

(6)  Cartulaire  de  Saint-Hugueê  de  Grenoble,  p.  73. 
(7)idid.,  p.  11. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICE8  EN  -IU8.    411 

en  Gaule  (1),  mais  il  parait  y  avoir  laissé  peu  de  traces  daus 
la  géographie.  Peut-être  Ligeay  (Loire) ,  Légé  (Loire-Infé- 
rieure), sont-ils  chacun  un  ancien  fundus  Liviacus? 

Mabcia.  Une  charte  de  Tannée  892  (2)  parle  d'une  villa 
quae  nominatur  Marcia  et  qui  aurait  été  située  dans  le  pays 
de  Vienne  (Isère) ,  in  pago  Vianense.  C'est  le  même  nom 
qui  est  devenu,  dans  le  département  de  Meurthe-et-Moselle, 
Maixe,  prononcé  encore  en  patois  Mâche,  en  donnant  au 
ch  la  valeur  du  ch  allemand.  Marciacus  est  très  fréquent 
dans  les  textes  français  du  moyen  âge  ;  nous  l'avons  étudié 
p.  270-275,  il  est  dérivé  ordinairement  du  gentilice  Marcius, 
peut-être  quelquefois  du  gentilice  Martius. 

Papia.  Deux  chartes  du  onzième  siècle ,  conservées  par 
le  Cartulaire  de  Saint-  Victor  de  Marseille ,  parlent  d'un  cas- 
iruim  appelé  Papia  :  in  territorio  de  Castro  quod  nominatur 
Papia j  1056  (3)  ;  caspf^m  de  Papia  juxta  Marinanam,  1095  (4). 
11  est  aussi  question  de  Papia  sans  mention  de  castrum, 
dans  le  même  cartulaire,  en  1079  (5).  Le  château  de  Papia 
était  situé  près  de  Marignane  (Bouches-du-Rhône),  comme 
nous  l'apprenons  par  la  charte  de  1095  précitée. 

Papius  est  un  gentilice  romain  d'origine  samnite  qui 
doit  à  diverses  circonstances  une  certaine  notoriété.  A  deux 
reprises ,  dans  le  Samnium ,  un  Papius  fut  chef  de  guerre 
contre  Rome  :  Papius  Brutulus  en  326  avant  J.-C. ,  Gains 
Papius  Mutilus  en  91.  En  l'an  9  de  J.-C,  le  consul  M. 
Papius  Mutilus  et  son  collègue ,  Q.  Poppaeus  Secundus , 
donnèrent  leur  nom  à  la  loi  Papia  Poppaea,  célèbre  par 
ses  dispositions  contre  le  célibat.  11  y  avait  des  Papius  à 
Rome  antérieurement  à  cette  date  ;  en  l'an  65  avant  J.-C, 


(1)  C.  /.  L.,  XII,  217,  1604,  1927,  2805,  4951,  4952. 

(2)  Bruel,  Recueil  des  chartes  de  l'abbaye  de  Cluny,  t.  I,  p.  54. 

(3)  Quérard,  Cartulaire  de  Saint-Victor  de  MarseilUt  tome  I,  p.  237. 

(4)  Ibid.,  tome  II,  p.  209. 

(5)  Ibid.,  tome  II,  p.  219. 


412  UVBE  II.  CHAPITRE  III.  |  3. 

le  tribun  du  peuple  C.  Papius  fit  voter  la  loi  Papia  qui  ex- 
pulsait de  Rome  les  pérégrius.  Ce  nom  pénétra  en  Gaule  ; 
on  conserve  encore  à  Grenoble  l'épitaphe  du  décurion  G. 
Papius  Secundus  (1). 

Papia,  en  français,  donnerait  Pache.  C'est  le  nom  d'un 
maire  de  Paris  ;  ce  nom  d'homme  tire  peut-être  son  ori- 
gine d'un  nom  de  lieu.  En  Italie,  Papia  est  devenu  Pavia^ 
nom  qui  s'est  substitué ,  dès  le  commencement  du  moyen 
&ge ,  à  celui  de  la  ville  de  Ticinum  ;  c'est  probablement  le 
nom  d'un  faubourg,  construit  sur  l'emplacement  d'une  an- 
cienne villa  Papiay  et  qui  a  fini  par  supplanter  la  ville  an- 
cienne de  Ticinum. 

Un  phénomène  analogue  s'est  produit  en  France  :  1^  quand 
le  nom  antique  de  Cénabum  a  été  remplacé  par  celui  des 
fundi  Aureliani,  qui  se  prononce  aujourd'hui  Orléans; 
2*"  quand,  au  vieux  nom  de  Divodurum,  capitale  des  Medioma- 
irici^  l'usage  a  substitué  celui  des  fundi  MetH,  au  datif  plu- 
riel Mettis,  comme  on  écrivait  en  latin  à  la  fin  de  l'empire 
et  au  début  du  moyen  âge  ;  Metti  est  le-  nominatif  pluriel 
du  gentilice  Mettius  ;  Mettis  en  est  le  datif-ablatif  pluriel. 

En  France ,  Pachan  (Lot-et-Garonne)  est  probablement 
un  ancien  fandus  *  Papianus^  et  Paché  (Indre-et-Loire),  un 
ancien  fundus  *  Papiacus. 

ScoTiA.  Une  charte  du  milieu  du  dixième  siècle,  donnée 
en  faveur  de  l'abbaye  de  Cluny ,  met  dans  le  Maçonnais 
une  villa  Scotia  (2). 

C'est  la  forme  féminine  du  nom  du  potier  Scotius  dont 
on  trouve  la  marque  en  France,  au  musée  de  Vienne 
(Isère)  (3)  ;  en  Suisse,  au  musée  de  Genève  (4)  ;  dans  l'empire 
d'Autriche,  à  Bregenz  (5).  On  a  lu  au  musée  de  Tarragone 

(1)  c.  /.  L.,  Xll,  2246.  Sur  la  gens  Papia,  voyez  Paulj,  Real-Eneyciop^t- 
die,  t.  V,  p.  1139-lUl 

(2)  Bniel,  Recueil  des  chartes  de  l'abbaye  de  Cluny,  t.  I,  p.  539. 

(3)  C.  /.  L.,  XII,  5686,  795. 

(4)  Ibid. 

(5)  Ibid.,  III,  6010,  199. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICE8  EN  -lUS.    413 

(Espagne)  la  marque  de  potier,  ScoH  m[anu],  qui  nous  offre 
probablement  le  génitif  singulier  de  Scotius  (1).  Scotius 
est  un  nom  patronymique  dérivé  du  nom  pérégrin  Scottus, 
dont  la  marque  Scottus  fe{cit)  a  été  relevée  au  musée  de 
Vienne  (Isère)  (2).  Au  même  musée,  le  môme  nom  Scottus 
est  inscrit  sur  un  contre-poids  de  craie  (3).  Enfin ,  le  nom 
pérégrin  de  femme  Scotta  est  conservé  par  une  inscription 
trouvée  près  de  Saint-Gilles  (Gard)  (4).  Scottus  veut  dire 
«  irlandais.  »  On  s'est  appelé  Scottus  ou  Scôtus  sous  l'em- 
pire romain,  comme  de  nos  jours,  Lallemand,  Langlois. 

Scotius  de  Scôtus  a  donné  un  dérivé  en  -aciLSy  Scotiacus 
d'où  la  villa  Scociacus  située  au  comté  de  Mâcon ,  suivant 
une  charte  de  l'abbaye  de  Cluny,  938-939  (5).  Le  môme  nom 
est  écrit  à  l'ablatif  villa  EscuHaco  dans  une  autre  charte 
du  même  siècle,  965-966  (6). 

Le  procédé  grammatical  auquel  nous  devons  le  nom  de 
lieu  Scotia  ne  doit  pas  être  confondu  avec  celui  qui  nous  a 
donné  les  noms  de  villages  français  Allemagne,  Marmagne, 
Sermaise  ou  Sermoise,  plus  anciennement  Alamarmia^ 
Marcomannia ,  Sarmatia.  Scotia  offre  matériellement  une 
grande  ressemblance  avec  ces  trois  noms.  Scotia,  comme 
Alamannia^  Marconumnia^  Sarmatia,  est  dérivé  d'un  nom 
de  peuple  à  l'aide  du  suflBxe  -ia  ;  mais  Scotia,  féminin  d'un 
gentilice  romain,  était  tout  formé  antérieurement  à  la  date 
où  il  a  acquis  une  valeur  topographique  ;  tandis  que  Ala- 
mannia,  Marcomannia,  Sarmatia  doivent  leur  sens  topogra- 
phique au  phénomène  morphologique  par  lequel  le  suflfee 
-ia  est  venu  s'ajouter  aux  noms  de  peuples,  Alamannus, 
Marcomannus ,  Sarmata.  Scotia  veut  dire  villa  de  Scotius , 
Al^mam/nia,  Marcomannia  ^  Sarmasia,  ou  mieux  Sarmatia  ^ 


<1)  C.  J.  L.,  II,  4970,  458. 

(2)  Ibid.,  XII,  5686,  797. 

(3)  Ibid.,  XII,  5688,  8. 

(4)  Ibid.,  XII,  4127. 

(5)  Bmel,  Recueil  des  chartes  de  Vabbaye  de  Cluny,  U  I,  p.  478. 

(6)  Ibid.,  t  U,  p.  276. 


414  LIVRE  II.  CSAPmŒl  UI.  }  S. 

signifient  villa  d'Alamannus,  de  Marcomannus,  de  Sarmata. 
Ce  sont  des  formations  identiques  à  Gallia  de  Gallus,  à 
Graecia  de  Graecus,  à  Germania  de  Germanus.  Gallia, 
Graecia,  Germania  sont  des  substantifs  et  n'ont  pas  de 
masculin  ;  Alamanniay  Marcomannia  Sarmatia  donnent 
lieu  à  la  même  observation.  Scotia  {villa)  est  un  adjectif  : 
ce  mot  a  un  masculin  qui  est  Scotius. 

Sermaise  (Maine-et-Loire)  s'appelait,  au  onzième  siècle, 
Sarmasias  ;  lisez  Sarmatias  sous-entendu  villas  (1).  C'est 
ainsi  que  doivent  s'expliquer  les  noms  de  Sermaise  (Loiret, 
Marne,  Oise,  Seine-et-Oise).  Sermoise  (Nièvre)  est  désigné, 
en  903 ,  par  les  mots  Sarmasia  villa  et  villa  Sarmasias  (2)  ; 
corrigez  Sarmatia,  Sarmatias.  La  môme  observation  s'ap- 
plique à  Sermoise  (Aisne),  Sarmasia  en  1223  (3),  et  à  Ser- 
moise (Yonne). 

Sarmatia  a  donné  un  diminutif  *  Sarmatiolae ,  en  1199 
SarmisoliaSy  aujourd'hui  Sermizelles  (Yonne)  (4). 

M.  Fustel  de  Coulange,  dans  un  livre  éloquent  et 
curieux  (5),  a  deux  chapitres  fort  intéressants  sur  les 
((  Germains  établis  dans  Tempire  comme  laboureurs  et 
comme  soldats.  »  Il  aurait  pu  dire,  non  pas  <c  Germains,  » 
mais  en  général  barbares,  puisque  dans  le  nombre  nous 
trouvons  des  Sarmates  (6). 

Marmagne  (Côte-d*Or)  portait,  en  723,  le  nom  de  Marco- 
mannia (7).  Marmagne  (Cher),  Marmagne  (Saône-et-Loire;, 
ont  probablement  la  même  origine.  Tout  le  monde  sait  que 
les  Marcomans  sont  un  peuple  germain. 


(1)  Port,  Dictionnaire  de  Maine-et-Loire,  t.  III,  p.  521. 

(2)  Soultrait,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  la  Nièvre, 
1877,  p.  174. 

(3)  Matton,  Dict.  topogr.  du  département  de  l'Aisne,  p.  260. 

(4)  Quantin,  Dict.  topographique  du  déparlement  de  l'Yonne,  p.  123. 

(5)  Histoire  des  institutions  politiques  de  l'ancienne  France,  2*  édition, 
p.  377  et  suiv. 

(6)  Sur  les  Sarmates  de  Gaule,  voyez  Tétude  que  le  D'  Lagnean  a  donnée, 
sous  le  titre  de  France  (anthropologie),  dans  le  Dict  tonna  tre  encyclopédique 
des  sciences  mcdicales^  4*  série,  t.  V,  p.  1. 

(7)  Garnier,  Nomenclature,  p.  163,  n*  648, 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICE8  EN -lus.    415 

Allemagne  (Calvados)  est  une  ancienne  Alamannia^  dont 
on  trouve  le  nom  écrit  au  onzième  siècle,  Alemannia  (1). 

Ces  noms  conservent  le  souvenir  des  mesures  par  les- 
quelles les  empereurs  romains  du  troisième  et  du  quatrième 
siècle  ont  eu  recours  aux  barbares  pour  combler  les  vides 
de  la  population  agricole  et  des  armées.  Mais  Scotia  (villa) 
n'a  pas  la  même  origine.  ScoHa  {villa)  doit  son  nom  à  une 
famille  irlandaise  qui  avait  acquis  droit  de  cité  dans  Tem- 
pire;  elle  avait  tiré  son  gentilice  du  terme  ethnique  Scottus 
ou  Scôtus  qui  désignait  son  ancienne  patrie. 

SoLiA,  dans  le  pagus  Rigomagensis ,  c'est-à-dire,  comme 
nous  l'apprend  M.  Longnon ,  dans  la  vallée  de  Colmars 
(Basses-Alpes),  est  mentionné  par  un  acte  de  Tannée  739  (2). 
C'est  le  féminin  du  gentilice  Soiius  dont  la  forme  mas- 
culine a  été  employée  comme  nom  de  lieu ,  ainsi  qu'on  Ta 
vu  plus  haut,  p,  370. 

SoLiGiA  est  le  nom  d'un  vicus  mentionné  dans  une  in- 
scription conservée  à  Basoilles  (Vosges).  On  y  lit  les  deux 
mots  vico  Soliciae.  C'est  aujourd'hui  Soulosse  (Vosges), 
comme  Ta  établi  M.  Longnon  (3).  Cette  localité  a  donné 
son  nom  au  pagus  Solocensis  du  moyen  âge.  Solocensis  vient 
de  *  Solocia^  tiré  de  Solicia  par  assimilation  de  la  seconde 
syllabe  à  la  première. 

Solicia  est  la  forme  féminine  du  gentilice  Solicius  dont  la 
forme  féminine  nous  est  conservée  en  Italie  par  une  in- 
scription de  Suse  (4).  Ce  gentilice  pénétra  en  Gaule.  On 
conserve  à  Embrun  Tépitaphe  de  Solicia  Vera  (5).  Les  noms 
1*  de  L.  Solicius  Aurelianus ,  2''  de  Q.  Solicius  Maximus 


(1)  Hippeau,  Dictionnaire  topographique  du  département  du  Calvados  f 
p.  3. 

(2)  Pardessus,  Dtptomafa,  II,  373. 

(3)  Revue  archéologique  d*août  1877;  nouvelle  série,  t.  XXV,  p.  127-132 

(4)  C.  /.  L.,  V,  7316. 

(5)  Ibid.,  XII,  91. 


416  LIVRE  II.  CHAPITRE  HI.  {  3. 

et  de  Q.  Solicius  Euhodus,  nous  ont  été  transmis  par  des 
inscriptions  de  Fréjus  (Var)  (1)  et  du  Beausset  (Var)  (2). 

TiLiA.  Une  charte  de  Tannée  1151  (3)  mentionne  prata 
Thiliae;  ce  sont  les  prés  de  Theil  (Yonne).  Le  Teil,  commune 
de  Hambers  (Mayenne),  a  aussi  porté  le  môme  nom,  écrit 
Tilia  dans  un  document  du  treizième  siècle  (4).  Le  Theil, 
commune  de  Saint-Gervais  (Puy-de-Dôme),  est  deux  fois 
appelé  Tylia  dans  un  acte  du  treizième  siècle  (5). 

Tilia  est  le  féminin  de  Tilius  dont  il  a  été  question  plus 
haut,  p.  373. 

ViNDiciA.  Une  charte  de  l'année  946  (6)  met  dans  le 
comté  de  Brioude  (Haute-Loire)  la  villa  quae  dicitur  Ymir 
decia. 

Yendecia  est  une  notation  en  bas  latin  du  latin  classique 
Vindicia,  forme  féminine  d'un  gentilice  dérivé  de  Vindei. 
On  trouve  ce  gentilice  dans  deux  inscriptions  d'Afrique  (7;. 
De  Vindicius  dérive  Vindiciacus ,  nom  de  lieu  écrit  au  cas 
indirect  Vindiciaco  dans  la  légende  d'une  monnaie  méro- 
vingienne ;  on  en  a  parlé  plus  haut,  p.  337  (8). 

ViNiciA.  Une  charte  du  douzième  siècle  place  en  Au- 
vergne, dans  la  vicaria  Bonorochensis^  une  villa  quae  vocatw 
Vinecia,  Vinecia  =  Vinicia  (9).  * 

Vinicius  est  un  gentilice  romain  très  répandu.  Il  y  eut 
plusieurs  consuls  de  ce  nom;  nous  citerons  :  L.  Vinicius, 
l'an  33;  M.  Vinicius,  l'an  19;   L.  Vinicius  l'an  5,  avant 

(1)  C.  /.  L.,  XII,  264. 

(2)  ma.,  XII,  323. 

(3)  Quantin,  C&rtulàire  de  VYonne^  t.  I,  p.  484. 

(4)  Léon  Maître,  Dictionnaire   topogr&phique   du  département  de  U 
UayennÊf  p.  308. 

(5)  Gbassaizig,  Spicilegium  Briv&ten8ey  p.  65,  69. 

(6)  Doniol,  Cartulaire  de  Brioude,  p.  289. 

(7)  C.  /.  L.,  VIII,  112,  323. 

(8)  Vojr.  Longnon,  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle,  p.  517. 

(9)  Doniol,  Cartulaire  de  Brioude^  p.  173. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICES  EN  -lUS.    417 

J.-C.  M.  Viaicius,  au  sortir  de  son  consulat,  fut  gou- 
verneur de  la  Gaule  septentrionale  jusque  vers  Tan  15 
avant  notre  ère  (1).  Le  gentilice  Vinicius  se  rencontre  sou- 
vent dans  les  inscriptions  de  la  Gaule  (2)  :  il  a  donné  le 
dérivé  Vinicicicfis^  d'où  Venizy  (Yonne),  Venissieux  (Rhône), 
Vinezas  (Ardèche),  Vennecy  (Loiret). 

VisELLiA  doit  être  l'orthographe  latine  classique  du  nom 
de  lieu  écrit  Visilia  en  996  dans  une  charte  de  Tabbaye  de 
Cluny  (3),  vers  1100  et  en  1109  dans  des  chartes  de  la 
cathédrale  de  Grenoble  (4),  aujourd'hui  Visille  (Isère). 

C'est  la  forme  féminine  du  gentilice  Visellius,  connu 
principalement  par  la  loi  Visellia,  qui  est  antérieure  à 
l'an  71  avant  J.-C.  Ce  gentilice  se  trouve  dans  plusieurs 
volumes  du  C.  L  L,  Il  fut  porté  par  deux  consuls,  C.  Vi- 
sellius Varro  en  Tan  12,  et  L.  Visellius  Varro  en  Tan  24 
de  notre  ère;  le  second  avait  été  légat  en  Germanie  en 
Tannée  21  (5).  Les  noms  de  Visellius  Sabinus  nous  ont  été 
conservés  par  une  inscription  d'Aix-la-Chapelle  (6). 

Magontia,  Mogontiacus.  Le  premier  de  ces  deux  mots  est 
la  forme  hypocoristique,  le  second  est  la  forme  romaine  offi- 
cielle du  nom  de  Mayence  ;  le  second  nous  ofiFre  l'ortho- 
graphe des  inscriptions  et  de  la  plupart  des  auteurs  con- 
temporains de  l'empire  romain.  Une  variante  Magontiacus 
avec  un  a  et  non  un  o  dans  la  première  syllabe  —  parce  qu'a- 
lors cette  syllabe  était  atone  —  apparaît  chez  Tacite.  Le  plus 


(1)  E.  Desjardins,  Géographie...  de  la  Gaule  romaine ,  t.  III,  p.  184.  Sur 
le  gentilice  Vinicius,  voyez  Pauly,  Real-Encyclopaedie,  t.  VI,  p.  2626-2629. 
ffl  C.  /.  L.,  XII,  43,  1075,  1515.  1528,  2735,  4020,  4021,  etc. 

(3)  Bruel,  Recueil,  t.  III,  p.  430. 

(4)  Cartulaire  de  Saint-Huguea  de  Grenoble,  p.  110,  132. 

(5)  Tacite,  Annales,  III,  41. 

(6)  Brambach,  57U.  Sur  le  gentilice  Visellius,  voyez  Pauly,  Real-Encyclo- 
paedic,  t.  VI,  p.  2C79-2680.  Cf.  villam  ...  Visiliaco,  1188,  aujourd'hui  Visiago, 
en  Italie,  dans  la  province  de  Reggio,  Tiraboschi,  Memorie  Sloriche  Mode- 
nesi,  t.  III,  Preuves,  p.  107. 

27 


418  LIVRE  II.  CHAPITRE  HI.  {  3. 

court  Magontia^  d'où  la  prononciation  moderne  «  Mayence  r 
en  France ,  Mainz  en  Allemagne ,  ne  se  montre  dans  les 
textes  qu'après  la  chute  de  Tempire  romain  (1). 

Mogontiacus  est  dérivé  d*un  gentilice  romain,  *  Mogontius, 
dont  nous  n'avons  pas  d'exemple.  *  Mogontius  était  à  son 
tour  dérivé  du  nom  divin  écrit  au  datif  Mogonti  dans  deux 
inscriptions  de  la  Grande-Bretagne  (2).  De  mogont-,  thème 
du  nom  de  ce  dieu ,  on  avait  dérivé  un  nom  d'homme  bar- 
bare,  *Mogontinus,  d'où  le  gentilice  Mogontinius  dans  une 
inscription  des  bords  du  Rhin  (3). 

Des  noms  d'hommes  gaulois  dérivent  de  noms  divins  .tel 
est  Beliniccus,  de  Belenus  ou  Belinus,  dans  une  inscription 
de  Bordeaux  (4);  il  y  a  eu  un  potier  du  nom  de  Beliniccus, 
on  trouve  en  Grande-Bretagne  et  en  Gaule  les  produite  de 
son  industrie  (5).  On  avait  créé  à  côté  de  ce  nom  barbare 
un  gentilice  Belinius  ;  on  peut  le  conclure  avec  cer- 
titude du  nom  de  lieu  Beliniacus  dans  des  diplômes  de 
Louis  le  Bègue  en  878  (6) ,  de  Boson,  roi  de  Bourgogne, 
en  879  (7);  et  dans  le  testament  d'Hervé,  évêque  d'Autun 
en  919  (8)  ;  c'est  aujourd'hui  Bligny-sur-Ouche  (Côte- 
d'Or)  (9).  Il  y  a,  dans  le  même  département,  deux  autres 
Bligny  :  Bligny-sous-Beaune ,  appelé  Beliniacum  dans  une 
charte  de  l'année  1160  (10),  et  Bligny-le-Sec ,  appelé  M- 
gniacum  en  1199  (11).  Il  faut  éviter  de  confondre  ces  Bli- 
gny avec  ceux  qui  sont  d'anciens  Blaniacus. 

Belinius  venait,  comme  Beliniccus,  du  nom  de  dieu  gau- 


(1)  E.  Desjardins ,  Géographie  de  la.  Gaule  d'après  la  carte  de  Peutinger, 
p.  58-59. 

(2)  C.  /.  L.,  VII,  958,  996. 

(3)  Brambach,  n*  1988. 

(4)  JuUian,  Inscriptions  romaines  de  Bordeaux^  t.  I,  p.  503. 

(5)  C.  /.  L.,  VII,  133.i,  138,  140,  141  ;  XII,  5686,  124. 

(6)  Gall.  CkrisL,  IV,  instr,,  col.  61  a.  Dom  Bouquet,  IX,  415  c. 

(7)  Dom  Bouquet,  IX,  670  c. 

(8)  Ibid.,  IX,  717  e. 

(9)  Garnier,  Nomenclature^  p.  76,  n*  317. 

(10)  Garnier,  ibid.,  p.  67,  n*  281. 

(11)  Garnier,  ibid.,  p.  48,  n*  212. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  QENTILICE8  EN  -lUS      419 

lois  Belenus  ou  Belinus,  principalement  honoré  à  Âquilée, 
mais   eonnu  aussi  en  Gaule,  comme  rattcstent  plusieurs 
documents.  Nous   avons  parlé  p.  356,  de  Camulius  qui 
vient  de  Camulus  ;  on  peut  citer  aussi  Esuvius,  d'Esus  (1). 
Le  thème  mogont-^  employé  comme  nom  divin,  d*oti,  le 
nom  d'homme  ^Mogontius,  parait  être  le  participe  présent 
d'un  thème  verbal  mogo-y  «  grandir  ;  »  son  féminin  devait 
être  en  celtique  mogonti,  avec  un  i  final  que  les  Romains 
ont  remplacé  par  --ia.  Le  nom  de  la  de  a  Mo€M)N7ia  ,  sur 
un  monument  de  Metz  que  M.  Prost  a  publié  (2),  n'est  pas 
autre  chose  que  la  notation  romaine  du  féminin  du  nom 
divin  écrit  au  datif  Mogonti  en  Grande-Bretagne.  C'est, 
quant  à  la  désinence,  le  pendant  de  Brigantia,  déesse  cel- 
tique de  Grande-Bretagne  au  temps  des  Romains  (3).  Bri- 
gantia est  une  notation  romaine  de  *  Briganti ,  mot  celti- 
que qui  explique  le  nom  de  la  déesse  irlandaise  Brigit, 
confondu  plus  tard  avec  la  sainte  de  même  Aom  :  i  long 
était,  en  celtique  comme  en  sanscrit,  la  désinence  du  nomi- 
natif singulier  féminin  du  participe  présent  (4). 

A  côté  du  participe  présent  mogonP-,  le  verbe  dont  le 
thème  est  au  présent  mogo-  a  eu  un  participe  passé  primitif 
mocto-s ,  en  vieil  irlandais  mocht ,  «  grand  »  (5)  ;  de  mockt 
dérive  le  participe  passé  vieil  irlandais  mochtae  «  grandi,  » 
et  par  extension,  «  loué  beaucoup,  »  d'où  a  été  tiré  le 
verbe  dénominatif  moidim  «  je  loue.  »  Le  participe  passé 
mochtae  est  la  notation  au  moyen  âge  d'un  antique  *moctios^ 
et  chose  remarquable,  ce  mot,  écrit  par  les  Romains  Moc- 


(1)  C.  /.  L.,  VIII,  2564  c,  88;  cf.  De-Vit,  OnomsLSlicon,  t.  II,  p.  764-765;  et 
J.  de  Witte,  Recherches  sur  les  empereurs  qui  ont  régné  en  Gaule  au 
troisième  siècle  de  1ère  chrétienne,  p.  157  et  181,  pi.  xxxiz,  n*  154;  pi.  xlv, 
n*4. 

(2)  Mémoires  de  la  société  des  antiquaires  de  France^  t.  XLI,  p.  7. 

(3)  C.  I.  L.,  VII,  200,  203,  875,  1062. 

(4)  R.  Thurneysen,  dans  le  tomo  XXVIII,  p.  145  de  la  Revue  de  Kuhn. 
Briganti  est  le  nominatif  singulier  du  participe  présent  féminin  d'un  thème 
verbal  dérivé  en  â,  mogont-  est  le  thème  du  participe  présent  d'un  verbe 
primitif  en  -o-. 

(5)  Qlossaire  d'O'Clery,  dans  la  Revue  celtique,  t.  V,  p.  24. 


420  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  {  3. 

tius ,  a  existé  comme  nom  d'homme  dans  la  Gaule  Cisal- 
pine :  une  inscription  romaine  des  environs  de  Saluces 
Tatteste  (1).  De  la  même  racine  on  avait  tiré  un  thème  dé- 
rivé moget-  «  celui  qui  grandit  :  »  comparez  le  thème  ch^get- 
(c  guerrier,  »  littéralement  «  celui  qui  marche  »  du  thème 
verbal  cingo-  «  marcher.  »  Du  thème  moja^  dérive  le  gentilice 
Mogetius  qu'on  trouve  quelquefois  dans  les  inscriptions  ^2). 
De  Mogetius  vient  le  nom  de  la  station  romaine  appelée 
Mogetiana  dans  la  Pannonie  supérieure ,  nom  écrit  par  er- 
reur, dans  un  passage  de  V Itinéraire  d'Antonin^  Mogenlianis 
avec  un  n  de  trop  entre  Ve  et  le  t  (3). 

Il  y  a  entre  Mogetiana  et  Mogontiacus  une  sorte  de 
parallélisme  ;  tous  deux  ont  à  peu  près  la  même  valeur  et 
dérivent  de  la  même  racine  au  moyen  de  suflBxes  différents. 
mais  dont  le  sens  est  analogue. 

On  aurait  tort  du  supposer  une  parenté  quelconque  entre 
le  nom  de  Mayenceet  celui  de  la  rivière  du  Main.  Le  nom 
du  Main  apparaît  pour  la  première  fois  dans  Thistoire  en 
Tannée  214  avant  J.-C.  avec  le  nom  du  roi  gaulois  Moeni- 
captus,  tué  en  Espagne  dans  une  bataille  contre  les  Ro- 
mains (4)  ;  Mœni-captus  veut  dire  «  captif ,  esclave  du 
Main,  »  du  Main  considéré  comme  dieu.  C'est  aussi  la 
croyance  au  caractère  divin  des  fleuves  qui  a  donné  nais- 
sance au  gentilice  Mœnius  dont  on  a  deux  exemples  ^5 . 
On  s'appelait  Mœnius,  u  fils  du  Main,  »  comme  Rennius, 
«  fils  du  Rhin,  »  comme  Eni-genus,  «  fils  de  Tlnn.  » 

Il  n'y  a  pas  plus  trace  de  g  dans  Mœni-captus,  nom  de  roi, 
chez  Tite-Live,  que  plus  tard  dans  Mœnis  ou  Mœnus,  nom 
de  rivière,  chez  Mêla,  Pline  et  Tacite  (6).  Il  n*y  a  donc 
aucun  rapport  étymologique  entre  le  nom  de  la  rivière  et 


(1)  c.  /.  L.,  V,  7639. 

(2)  Ibid,,  III,  4452,  4568,  5635;  V,  782,  6350,  6576. 

(3)  llinérAire  d'Anlonin,  p.  233, 1.  4  :  Mogeti&na  ;  p.  263, 1.  5  :  MogerUisnis. 

(4)  Tite-Live,  XXIV,  42. 

(5)  C.  /.  L.,  III,  2436,  et  V,  2995. 

(6)  Mêla,  1.  III,  §  30,  édition  Teubner-Frick ,  p.  62,  I.  15,  écrit  Mœnis; 
Pline,  1.  IX,  §  45  ;  Tacite,  Germani&,  28,  ont,  paraît-il,  préféré  Moernis. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICE8  EN  -lUB.    421 

celui  de  la  ville  de  Mogontiacus  près  de  laquelle  la  rivière 
se  jette  dans  le  Rhin. 

MogonOa^  Maguntia^  nom  de  Mayence,  Mainz,  au  moyen 
âge,  n'est  autre  chose  que  la  forme  féminine  du  gentilice 
dont  Mogontiacus  est  dérivé  ;  c'est  Texpression  familière  et 
plus  courte  par  laquelle  le  peuple  rendait  l'idée  que  les 
lettrés  exprimaient  par  le  mot  savant  MogonticLcus  (sous- 
entendu  fundus), 

S  4.   —   Des   gentilices    employés    adjectivement  avec  sens 
géographique  au  datif-ablatif  pluriel  en  -is  =  -iis. 

Des  fundi  contigus  pouvaient  porter  le  même  nom ,  soit 
qu'ils  eussent  appartenu  au  même  propriétaire  soit  que  le 
hasard  leur  eut  donné  des  propriétaires  qui  avaient  le 
même  gentilice.  On  a  des  exemples  certains  de  ce  phéno- 
mène pour  des  fundi  dont  le  nom  est  dérivé  de  gentilices 
au  moyen  du  suffixe  -anus.  A  la  première  page  de  la 
table  alimentaire  de  Veleia,  on  lit  :  «  Fundos  sive  saltus 
Xarianos  Catusanianos...  qui  sunt  in  Veleiate  pago  Junonio, 
adfinibus  C.  Coelio  Vero  et  Dellio  Proculo...  Fundos  Teren- 
tianos  et  Malapacios  qui  sunt  in  Veleiate  pago  Statiello, 
adfinibus  republica  Lucensium  et  Licinio  Ruparcellio  et 
populo  (1).  »  L'itinéraire  d'Antonin  nous  donne  plusieurs 
exemples  de  noms  de  lieux  qui  sont  d'anciens  noms  de 
fundi  au  pluriel  :  Albianis,  Alphen,  d'Albius  (2);  Aquilianis 
d'Aquilius  (3);  Bassianis  de  Bassius  (4)  ;  Clodianis  de  Clo- 
dius  (5);  Quintianis  de  Quintius  (6)  ;  Varianis  de  Varius  (7); 
comparez  à  ces  deux  derniers  Quintiano  (8)  et  Variana  (9). 

(1)  L.  28-30,  54-56.  C.  7.  L.,  t.  XI,  p.  208,  209. 

(2)  Page  369,  1.  1. 

(3)  Page  43,  1.  5. 

(4)  Page  131,  l.  5. 
(5j  Page  329,  1.  7. 

(6)  Page  249, 1.  6. 

(7)  Pages  260,  1.  3;  265,  1.  6. 

(8)  Page  499, 1.  3. 

(9)  Page  220, 1.  3. 


422  UVRE  II.  CHAPITRE  III.  g  4. 

Des  noms  de  fvmdi  en  -Ktnus  au  pluriel  se  rencontrent  en- 
core dans  les  documents  du  moyen  âge;  ainsi,  en  814, 
dans  le  Polyptyque  de  Saint-Victor  de  Marseille  :  in  Siveria- 
nis  =  Severianis  (1). 

Des  noms  de  lieux  ainsi  formés,  le  plus  connu  en  France 
est  celui  de  la  ville  d'Orléans.  On  sait  qu'Orléans,  donl  le 
plus  ancien  nom  est  Cenabum^  a  pris  le  nom  à^Aurtliani 
vers  la  fin  de  l'empire  romain ,  comme  nous  le  montre  la 
Notitia  provinciarum  et  civitatum  Galliae,  où  Orléans  est 
appelé  civitas  Aurelianofum  (2).  Chez  Grégoire  de  Tours, 
Orléans  s'appelle,  au  cas  indirect,  Àurilianus  (3),  c'est-à-dire 
Aurelianos ,  accusatif  pluriel ,  et  Aurilianis  (4) ,  c'est-à-dire 
Aurelianis,  datif-ablatif  pluriel  ;  et  les  habitants  s'appellent 
Aurilianenses  (5).  La  conclusion  à  en  tirer,  c'est  que,  vers  la 
fin  de  l'empire,  l'antique  Cenabum,  se  développant,  couvrit 
plusieurs  fundi  Aureliani  et  en  prit  le  nom.  Ce  nom  doit 
être  rapproché  du  passage  de  la  table  alimentaire  de  Veleia, 
où  C.  Vibius  se  reconnaît  débiteur  de  sommes  hypothéquées 
sur  les  fundos  Aurelianos  Yettianos  et  sur  les  fundos  Betu- 
iianos  Aurelianos  (6).  D'Anville  propose  l'hypothèse  que 
Cenabum  aurait  pris  le  nom  de  l'empereur  Aurélien  (7); 
mais  cette  hypothèse  se  concilie  difficilement  avec  l'emploi 
du  masculin  pluriel.  Les  villes  qui  prennent  le  nom  d'un 
empereur  le  mettent  au  féminin  singulier  :  Augusta  Sues- 
sionum^  Soissons;  Flavia  Constantia,  Coutances.  Pour  faire 
intervenir  un  empereur  dans  l'étymologie  du  nom  d'Or- 
léans il  n'y  a  pas  plus  de  raisons  que  dans  l'étymologie  du 
nom  d*Albiniani^  Alphen,  ou  des  fundi  Aureliani  de  Veleia. 

A  côté  des  noms  de  lieu  dont  le  cas  indirect  se  termine 


(1)  Guérard,  Cartulaire  de  Saint-Victor  de  Marseille,  t.  II,  p.  GSi 

(2)  Desjardins,  Géographie  historique  et  administrative  de  la  GauU  ro- 
maine, t.  m,  p.  505.  Longnon,  Atlas  historique  de  la  France^  p.  14, 111. 

(3)  Edition  Arndt,  p.  57, 1.  19. 

(4)  Edition  Arndt,  p.  68.  1.  18;  p.  83, 1.  5;  p.  160,  1.  Il;  p.  324, 1.  12. 

(5)  Edition  Arndt,  p.  287,  1.  17  ;  p.  292,  1.  17-18  ;  p.  302.  1.  22. 

(6)  P.  4,  1.  93,  97,  98.  C.  /.  L.,  t.  XI,  p.  214. 

(7)  D'Anville,  Notice  de  l'ancienne  Gaule,  p.  347  (au  mot  Genabum), 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICE8  EN  -lUS.    423 

en  -anis  et  qui  sont  dérivés  de  gentilices ,  on  peut  placer 
ceux  qui  sont  identiques  à  des  gentilices  et  qui  se  terminent 
en  is  j  désinence  populaire  égale  à  la  désinence  classique 
iis.  Un  de  ces  noms  a  une  telle  importance  que ,  pour  lui , 
on  peut  faire  une  exception  à  l'ordre  alphabétique  ;  c'est  : 

Mettis  (Metz).  Ce  nom  supplante  le  nom  gaulois  de 
Divodwrum^  vers  la  fin  du  quatrième  siècle,  dans  la  Notitia 
dignitatum  :  «  Legio  prima  Plavia  Métis  (1).  C'est  ce  nom 
nouveau  qu'on  trouve  au  sixième  siècle  chez  Fortunat  : 

Hoc  Mettis  Aindata  loco  speciosa  coruscans  (2), 

« 

et  plus  tard  chez  Frédégaire  (3).  Mettis  et  ses  variantes 
Métis ^  Mettes  sont,  à  l'époque  mérovingienne,  les  formes 
adoptées  dans  les  légendes  monétaires  (4). 

De  là  l'adjectif  Mettensis,  et,  chez  Grégoire  de  Tours,  la 
formule  habituelle  urbem  Mettensem.  Mettis  est  le  datif  ablatif 
pluriel  du  gentilice  Mettius,  qui  tire  son  origine  du  prénom 
Met  tus.  Il  y  a  deux  Mettus  dans  la  légende  romaine.  Le 
premier,  Mettus  Curtius,  est  chef  des  Sabins  dans  leur 
guerre  contre  les  Romains  au  temps  de  Romulus  (5).  Le 
second  est  Mettus  Fufetius,  dictateur  des  Sabins  quand 
TuUus  Hostilius  était  roi  de  Rome  ;  il  trahit  les  Romains , 
et  TuUus  Hostilius  le  fit  écarteler  (6).  Les  scribes  et  les 
grammairiens  qui  nous  ont  conservé  le  texte  de  Tite-Live 
au  temps  de  l'Empire  romain  connaissaient  le  gentilice 


(1)  Edition  Bœcking,  t.  II,  p.  28. 

(2)  Livre  III,  13  :  «  Ad  Vilicum  episcopam  Mettensem,  »  vers  9:  édition 
Léo,  p.  65. 

(3)  C.  39,  74,  75,  édit.  Monod,  p.  134, 1.  21;  p.  153,  1.  13,  31.  Ed.  Krusch, 
p.  140,  1.  9;  p.  158,  1.  14,  28. 

(4)  A.  de  Barthélémy,  Bibliothèque  de  l'école  des  chartes,  t.  XXVI,  p.  458, 
col.  2. 

(5)  Tite-Live,  I,  12.  Denys  d'Halicamasse,  II,  42,  46;  éd.  Didot-Kiessling, 
p.  98-102. 

(6)  Tite-Livo,  I,  23-28.  Dcnys  d'Halicamasse,  III,  5;  éd.  Didot-Kiessling, 
p.  128.  Après  avoir  adopté  la  bonne  orthographe  Méttoc,  l'éditeur  lui  subs- 
titue celle  des  éditions  de  Tite-Live,  Mixxioç,  p.  155,  158. 


424  LIVRE  II.  CHAPITRE  IIL  l  4. 

Mettius,  et  non  le  prénom  Mettus  ;  ils  ont,  dans  le  texte  de 
rhistorien  romain,  changé  Mettus  en  Mettius,  mais  un  vers 
de  Virgile  protestait  contre  cette  réforme  : 

Haud  procal  inde  citae  Mettum  in  diversa  quadrigac 

Distulerant 

Enéide,  VIII,  642-643. 

Le  grammairien  Servius  a  prétendu  qu'en  écrivant  Met- 
tum au  lieu  de  Mettium ,  Virgile  avait  mutilé  un  nom  à 
cause  du  mètre  (1).  Il  est  pitoyable  de  trouver  Virgile  entre 
les  mains  de  cet  inepte  commentateur. 

Mettius,  dérivé  de  Mettus,  est  un  gentilice  peu  commun 
à  Rome  sous  la  République.  Cependant,  Cicéron  connaissait 
un  certain  Mettius  dont  il  parle  dans  une  lettre  à  Atticus  ;2;, 
Tan  44  avant  Jésus-Christ.  M.  Metius,  que  César  envoya 
comme  ambassadeur  au  roi  Arioviste ,  Tan  58  avant  notre 
ère  (3) ,  portait  le .  même  nom ,  et  Metius  ne  diffère  de 
Mettius  que  par  une  variante  d'orthographe. 

Le  gentilice  Mettius  pénétra  en  Gaule.  On  en  a  trouvé, 
aux  environs  de  Mayence,  deux  exemples  dans  des  inscrip- 
tions romaines,  Tun  avec  double  t  (4),  l'autre  avec  t  sim- 
ple (5).  Les  inscriptions  romaines  de  Lyon  en  offrent  quatre 
exemples  avec  double  t  (6)  ;  celles  de  Nimes  trois  (7),  celles 
d'Arles  un  (8). 

Avec  nos  habitudes  classiques ,  il  peut  sembler  étrange 
que  le  datif  ablatif  pluriel  de  Mettius  fût  Mettis,  et  noo 
Mettiis.  En  effet,  le  datif  ablatif  pluriel  classique  de  Met- 
tius contient  deux  i ,  comme  le  génitif  singulier  Mettii^  et 
comme  le  nominatif  pluriel  qui  est  encore  Mettii.  Mais  cette 


(1)  Ed.  de  Georges  ThUo,  t.  II,  p.  290. 

(2)  XV,  27. 

(3)  De  bello  gallicOf  I,  47,  g  5;  des  mss.  donnent  Mettius.  Ed.  Holder,p.29. 

(4)  Brambach,  1182. 

(5)  Ibid.,  1339. 

(6)  Boissieu,  p.  340,  472,  518. 

(7)  C.  /.  L.,  XII,  3064,  3661,  3750. 
(8)/bid.,  XII,  5814;  p.  819. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICES  EN  -lUS.    425 

prononciation  savante  était  contraire  à  la  tradition,  et 
Tusage  de  Tépoque  impériale  était  conforme  à  la  tradition  : 
quelques  inscriptions  l'attestent  en  nous  donnant  le  génitif 
singulier  Metti,  par  un  seul  i,  du  gentilice  Mettius.  On  le 
trouve  ainsi  noté  dans  des  inscriptions  de  Rome  (1),  de 
Calabre  (2),  de  Lyon  (3),  dans  une  marque  de  potier  trouvée 
en  Angleterre  et  à  Vienne  (Isère)  (4).  De  môme,  au  datif 
pluriel  des  thèmes  en  io,  les  deux  i  de  iis  pouvaient  se 
contracter  en  un  seul  ;  c'est  une  loi  de  la  grammaire  latine, 
et  on  en  a  réuni  de  nombreux  exemples  (5). 

Metti ,  nom  pluriel ,  et  Mettis ,  datif  ablatif  pluriel ,  pour 
MeUii,  Mettiis,  sont  donc  parfaitement  réguliers  ;  du  nom 
des  fundi  Metti,  —  dont  Tltalie  moderne  nous  offre  deux 
exemples  :  Metti,  province  de  Parme,  et  Metti,  province 
de  Massa  et  Carrara,  —  on  a  tiré  plus  tard  V didjecHf  Mettensis 
en  latin  vulgaire,  au  lieu  de  Mettiensis  (6). 

Toutefois,  Mettius,  avec  le  suflBxe  -acus,  donne  le  dérivé 
*MettiacuSy  qui  conserve  Vi  caractéristique  du  gentilice, 
cet  i  perdu  dans  Mettis.  On  peut  reconnaître  un  ancien 
Mettiacus  dans  IdL  Metsiacv^  villa,  en  Poitou,  de  deux  diplô- 
mes du  dixième  siècle,  donnés,  l'un  en  915,  l'autre  en 
941  (7)  ;  c'est  aujourd'hui  Messay  (Vienne)  (8). 

Nous  avons  déjà  parlé  de  Metius ,  variante  de  Mettius. 
Le  gentilice  Metius  a  pu  avoir  pour  pendant  un  gentilice 
*  Metenus.  De  Metenus  a  pu  venir  Metenaous^  ancien  nom 
de  Maynal  (Jura).  Maynal  est  probablement  l'orthographe 
moderne  substituée  à  une  notation  plus  ancienne,  Mayna. 


(1)  C.  I.  L.,  VI,  22478. 

(2)  Ibid.,  IX,  1416. 

(3)  Boissieu,  p.  340,  518. 

(4)  C.  /.  L.,  VII,  1336,  706;  XII,  5686,  589. 

(5)  Bûcheler,  Précis  de  la,  dèclinsiison  latine ,  traduction  de  M.  L.  Uavet, 
p.  205. 

(6)  Messin  est  un  dérivé  moderne  du  français  Metz  qui  se  prononce  Messe 
et  non  Metse  comme  en  allemand. 

(7)  Dom  Bouquet,  IX,  524  e,  594  a. 

(8)  Redet,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  la  Vienne  ^ 
p.  261. 


426  LIVRE  II.  GHAPITAfi  III.  {  4. 

Metenacus  (1),  que  nous  connaissons  par  J.  Quicherat,  avait 
été  emprunté  par  lui,  comme  nous  l'apprend  M.  Longnon, 
à  une  bulle  du  pape  Léon  IX,  datée  de  1049,  qui  a  été 
publiée  par  les  Bollandistes  (2). 
Nous  allons  reprendre  Tordre  alphabétique. 

AuRiis.  Un  pouillé,  rédigé  de  1080  à  1132  et  publié 
dans  le  Cartulaire  de  Saint-Hugueê  de  Grenoble ,  mentionne 
une  ecclesia  de  Auries  (3).  La  cure  de  Àuriis  apparaît  dans 
un  rôle  des  décimes  du  diocèse  de  Grenoble  au  quator- 
zième siècle  (4). 

Âurius  est  un  gentilice  romain  assez  rare,  dont  il  est 
question  Tan  62  avant  Jésus-Christ  dans  le  plaidoyer  de 
Cicéron,  pro  Clumtio.  Ce  gentilice  parait  d'origine  gan- 
loise.  M.  JuUian  (5)  a  publié  une  épitaphe  gravée  par  les 
soins  d'Aurelus  Auri-knus,  c'est-àrdire  d'Aurelus,  fils 
d'Auro-s.  Le  féminin  Aura  a  été  employé  comme  cognomen 
de  femme  dans  une  inscription  de  Narbonne  (6)  et  dans 
une  inscription  de  Milan  (7). 

Du  gentilice  Aurius  est  venu  peut^tre  le  nom  de  wUis 
Auria ,  près  de  Cavaillon  (Vaucluse) ,  dans  une  charte  du 
onzième  siècle  (8).  En  tout  cas ,  le  nom  de  lieu  Awiam 
dérive  d' Aurius.  On  reconnaît  Auriac  (Var),  dans  le  casirum 
nomine  Auriacvm  d'une  charte  de  Tannée  1032  (9).  Âuriac 
(Basses-Alpes)  porte  aussi  le  nom  d'i4umoum  dans  une  charte 
du  douzième  siècle  (10).  La  vicaria  Auriœensis  tire  son  nom 


(1)  Quicherat ,  Etude  sur  la  formation  française  des  anctent  noms  di 
lieu,  p.  41. 

(2)  Tome  I  de  juin,  p.  675. 

(3)  Cartulaire  de  Saint-Hugues^  p.  189. 

(4)  Ibid.,  p.  272. 

(5)  Inscriptions  romaines  de  Bordeaux,  t.  I,  p.  339-338. 

(6)  C.  /.  L.,  XII,  4684. 

(7)  /6id.,  V,  5963. 

(8)  Guérard,  Cartulaire  de  Saint-Victor  de  Marseille^  t.  I,  p.  429. 

(9)  Cartulaire  de  Saint-Victor  de  Marseille,  t.  I,  p.  327;  t.  Il,  p.  Mi 

(10)  Romans,  Dictionnaire  iopographique  du  département  des  Basses-Al- 
pes, p.  7. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  QENTILIGE8  EN  -lUS.    427 

d'un  autre  Auriacus  qui  est  aujourd'hui  Auriac  (Creuse)  (1). 
Il  y  a  encore  d'autres  Auriac  en  France,  mais,  pour  la  plu- 
part, nous  ne  connaissons  pas  de  formes  anciennes. 

Bassiis.  En  959  ou  960,  l'abbé  de  Cluny  abandonna,  à 
titre  de  précaire ,  à  un  évêque  d'Apt  (Vaucluse),  des  biens 
situés  au  comté  d'Apt ,  in  villa  quae  vocatur  Bassiis  (2). 

Bassins  est  un  gentilice,  qui  apparaît  pour  la  première  fois 
dans  l'histoire  romaine,  l'an  79  avant  Jésus-Christ.  C'était 
le  nom  de  la  femme  de  Papius  Mutilus  ;  Papius  étant  pros- 
crit vint  chercher  asile  chez  elle ,  elle  refusa  de  le  rece- 
voir, il  se  poignarda  devant  la  porte  (3).  On  a  trouvé  à 
Rome  Tépitaphe  de  l'affranchi  T.  Bassins  Diogenes  (4). 
Une  épitaphe  du  Musée  de  Naples  nous  a  conservé  le  nom 
de  C.  Bassins  Marcellus  (5).  Sur  un  vase  trouvé  à  Vienne 
(Isère) ,  on  a  lu  la  marque  :  of(fîcina)  Bassi  (6). 

Bassins  a  donné  des  noms  de  lieux  dérivés  au  moyen 
des  suffixes  -anus  et  -acms.  V Itinéraire  d'Antonin  mentionne 
deux  stations  de  Pannonie  appelées  l'une  Bassiana  (7),  l'autre 
Bassianis  (8).  Des  diplômes  du  neuvième  et  du  dixième  siè- 
cle mettent  dans  le  voisinage  de  Narbonne  une  villa  Bas- 
sianus  (9).  Au  dixième  siècle,  des  chartes  de  Cluny  placent 
au  comté  de  Mâcon  une  villa  Bassiacus  (10). 

Calbtiis.  Suivant  une  charte  de  l'année  924  (il),  il  y 


(1)  Deloche,  Cartulatre  de  Beatih'eu,  p.  glxv,  370. 

(2)  Brael,  Becueil  des  chartes  de  Cluny,  t.  II,  p.  166. 
(3]  De-Vit,  Onom&sticon,  h  685. 

(4)  C.  1.  L.,  VI,  13522. 

(5)  Ihid.y  X,  3549. 

(6)  Ibid.,  XII,  5686,  122. 

(7)  Itinéraire  d'Antonin,  p.  262,  1.  10  ;  cf.  C.  /.  L.,  t.  III,  p.  536. 

(8)  Ibid,y  p.  131,  1.  5.  Itinéraire  de  Bordeaux  à  Jérusalem^  p.  5fô,  1«  11  ; 
cf.  C.  /.  L.,  t.  III,  p.  417. 

(9)  Dom  Bouquet,  IX,  421  e,  455  a,  480  o,  555  d. 

(10)  Bruel,  Recueil  des  chartes  de  Cluny,  t.  I,  p«  191  ;  t.  Il,  p.  215,  347. 

(11)  Doniol,  Cartulaire  de  Brioude,  p.  39. 


^ 


428  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  {  4. 

avait,  dans  la  vicaria  Calariensis,  une  villa  appelée  Calezii$; 
c'est  une  notation  relativement  moderne  d*un  plus  ancien 
Caletiis. 

Le  musée  de  Brescia  possède  Tépitaphe  de  C.  Caletius 
Victor  (1).  On  cite,  d'après  une  autre  inscription,  les 
noms  de  S.  Caletius  Félix  (2).  Caletius  dérive  d'un  thème 
gaulois  calet^  on  caleto-  qui  se  trouve  dans  le  nt)m  d*un 
peuple  de  la  Gaule,  les  Caletes  (3)  ou  Caleti  (4).  Ce  nom 
ethnique  survit  en  français  dans  le  nom  du  pays  de  Caux. 
Le  thème  gaulois  caleto-  se  reconnaît  :  l"*  dans  le  breton 
kalet^  2^  dans  l'irlandais  calath  ou  calad;  la  notation  bre- 
tonne et  la  notation  irlandaise  représentent  deux  pronon- 
ciations du  même  adjectif  qui  veut  dire  a  dur.  »  Le  latin 
callum,  «  callosité,  »  d'où  callerej  «  avoir  des  callosités 
aux  mains  »,  «  savoir,  »  a  probablement  la  même  racine. 
L'allemand  hart ,  «  dur,  »  suppose  une  variante  kar  de  la 
racine  kal,  «  être  dur.  » 

On  peut  supposer  qu'il  y  a  eu  un  nom  d'homme  gaulois 
Caletos,  Ce  serait  ce  nom  qui  apparaîtrait  au  génitif  dans 
la  marque  de  potier  Caleti ,  qui  a  été  lue  sur  un  plat  con- 
servé au  Musée  britannique  (5).  Mais  Caleti  peut  être  le 
génitif  de  Caletius.  Il  y  a  eu  un  nom  divin  gaulois,  CaU- 
tos,  Caletios  ou  Cales.  Il  explique  la  dédicace  Deo  Mercurio 
VASSO  Caleti,  «  Au  dieu  Mercure  serviteur  de  Caletos, 
serviteur  de  Caletios,  ou  serviteur  cales  (dur?),  »  suivant 
que  l'on  considère  Caleti  comme  le  génitif  de  Caletos, 
comme,  le  génitif  de  Caletios,  ou  comme  le  datif  de  cal^, 
caletis.  Cette  dédicace  existe  à  Bittburg  (Prusse  rhénane)  (6). 

Il  y  a  deux  noms  de  personnes  dérivés  du  thème  caUto-, 
L'un  est  Caletinus,  nom  de  potier,  au  musée  de  Vienne 


(1)  c.  /.  L.,  y.  4556. 

(2)  De- Vit,  OnomMlicoUy  II,  64. 

(3)  César,  De  bello  gallico,  VII,  75,  {  5.  Ed.  Holder,  p.  192. 

(4)  /6td.,  II,  4,  ;  9.  Ed.  Holder,  p.  36. 

(5)  C.  /.  L.,  VII,  1336,  211. 

(6)  Brambach,  835. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILIGES  EN  -lUS.    429 

(Isère)  (1)  ;  Fautre  est  un  nom  de  femme  :  Caletiu ,  Adna- 
mati  filia,  dans  une  inscription  du  Norique  (2). 

Il  est  impossible  de  distinguer,  au  moyen  âge,  Caletiacus 
de  CalciaouSj  qui  est  dérivé  de  Calcius.  Nous  ne  savons 
donc  si  nous  devons  rattacher  à  Caletius,  Chelsey,  hameau 
dépendant  de  Sussey  (Côte-d'Or);  Chelsey  s'appelle  Cal- 
ciacus  dans  une  charte  de  Tannée  852  (3).  Nous  ne  pouvons 
préciser  davantage  l'origine  du  nom  de  la  villa  Calziacus , 
en  Forez,  in  agro  Forensi,  mentionné  en  1025  dans  une 
charte  de  l'abbaye  de  Savigny  (4). 

SoLLEMNiis.  C'est,  vers  1130,  le  nom  de  Soulaines  (Maine- 
et-Loire),  suivant  une  charte  citée  par  M.  Port  (5).  Ce  nom 
de  lieu  est  le  datif  pluriel  du  gentilice  Sollemnius  déjà  étudié 
p.  328,  cf.  369  ;  on  le  reconnaît  encore  sous  la  forme  plus 
altérée  Solenniis,  dans  une  charte  de  1149,  à  laquelle  ren- 
voie le  même  auteur  au  môme  endroit.  C'est  probablement 
aussi  par  le  pluriel  du  gentilice  Sollemnius  que  doit  s'expli- 
quer le  nom  de  Soulaines  (Aube)  ;  ce  nom  a  fort  embarrassé, 
au  moyen  &ge  et  depuis,  les  savants  locaux  qui  ont  voulu  le 
traduire  en  latin  ;  tel  s'est  tiré  d'affaire  sans  travail  étymolo- 
gique et  en  habillant  le  mot  français  d'une  désinence  latine, 
Sollcmia^  1155  ;  d'autres  ont  voulu  mieux  faire,  et  ont  traduit 
le  français  village  de  Soulaines  par  villa  de  Sublanis;  c'est 
l'orthographe  d'un  pouillé  de  Troyes  au  commencement  du 
quinzième  siècle,  et  de  là  en  français  «  Soubz  Laines  »  au 
dix  septième  siècle  (6). 

Valemis.  En  877,  Charles  le  Chauve  donna  à  un  de  ses 
fidèles  des  biens  situés  dans  le  Tonnerrois,  in  villa  Vale- 


(l)  C.  /.  L.,  XII,  5686,  157. 
P)  iWd.,  ni,  5474. 

(3)  Qamier,  Nomenclature,  p.  86,  n*  350. 

(4)  A.  Bernard,  Carfulatre  de  Savigny,  t.  I,  p.  370. 

(5)  C.  Port,  Dictionnaire  de  Maine-et-Loire ,  t.  III,  p.  538. 

(6}  Boutiot  ot  Socard,  Dictionnaire  topographique  du  département  de 
VAuhe,  p.  156. 


490  LIVRE  II.  GHAPITRB  m.  |  4. 

n[a>  (1)  ;  ce  nom  est  écrit  Ka/ma  pour  Valerws  dans  un 
diplôme  de  Charles  le  Simple,  en  901  (2);  il  s'agit  de 
Vallières  (Aube).  Le  même  nom  se  rencontre  à  la  fin  du 
onzième  siècle  dans  une  région  fort  éloignée  de  celle-là  : 
en  1097  Tabbaye  de  Saint-Sernin  de  Toulouse  était  pro- 
priétaire de  Téglise  Saint-Pierre  de  Valeriis  (3)  ;  douze  ans 
auparavant,  un  donateur,  parlant  de  la  même  église,  avait 
dit  qu'elle  était  située  juxta  portum  qui  appellatur  Vale- 
fias  (4). 

Le  gentilice  Valerius  est  un  des  plus  illustres  de  Rome. 
Tout  le  monde  connaît,  au  moins  de  nom,  P.  Valerius 
Publicola ,  un  des  auteurs  de  la  révolution  aristocratique 
qui  renversa  les  Tarquins  ;  il  obtint  quatre  fois  les  hon- 
neurs consulaires.  Il  est  inutile  de  donner  la  liste  des 
Valerius  qui,  après  lui,  occupèrent  des  charges  curules  (5". 
Il  suffira  de  parler  de  deux  d'entre  eux  dont  les  noms 
appartiennent  à  l'histoire  de  la  Gaule  pendant  les  premiers 
temps  de  la  domination  romaine.  L'un  est  C.  Valerius 
Flaccus,  propréteur  de  la  Narbonnaise  l'an  83  avant  Jésus- 
Christ  ;  c'est  à  lui  que  dut  le  droit  de  cité  romaine  un  car* 
tain  Caburus,  père  de  C.  Valerius  Procillus,  employé  comme 
interprète  par  J.  César  l'an  58  avant  notre  ère  (6).  Nous 
citerons  ensuite  M.  Valerius  Messala  Corvinus,  deux  fois 
gouverneur  de  la  Oaule,  d'abord  de  35  à  34,  ensuite  Tan  28 
avant  Jésus-Christ  (7).  Il  est  probable  qu'un  certain  nombre 
de  Gaulois  obtinrent  par  lui  le  titre  de  citoyens  romains  et 
prirent  son  gentilice.  Ce  gentilice  fut  assez  répandu  en 
Gaule  sous  l'empire  romain.  Dans  le  recueil  des  inscriptions 


(1)  Quantin,  Cartulaire  de  l'Yonne^  t.  I,  p.  103. 

(2)  Ibid.,  p.  132. 

(3)  C.  Douais,  Cartulaire  de  Saint-Sernirij  p.  196. 

(4)  Ibid.,  p.  494. 

(5)  Sur  le  gentilice  Valerius ,  vojres  Pauly ,  Réal-Encyelopàedie ,  t.  VI , 
p.  2322-2373. 

(6)  De  bello  gallico ,  I,  47,  |  4  :  cf.  E.  Desjardins ,  Géographie  de  Ut  Gaulf 
romaine,  t.  II,  p.  329-330. 

(7)  E.  Desjardins,  tbid.,  t.  III,  p.  45,  246. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  QBNTILICE8  EN  -lUB.    491 

romaines  de  la  Gaule  narbonnaise  et  des  trois  provinces 
alpines  (1)  qui  l'avoisinent,  on  a  recueilli  plus  de  deux 
cents  exemples  d'hommes  qui  portent  le  gentilice  Valerius  ; 
le  recueil  des  inscriptions  romaines  de  Lyon  en  mentionne 
dix-sept.  Dès  le  règne  de  Caligula,  un  Gaulois  de  Vienne 
(Isère),  Valerius  Âsiaticus,  jouait  un  rôle  important  à  Rome; 
il  fut  le  chef  de  la  conspiration  qui  eut  pour  résultat  le 
meurtre  de  cet  empereur,  et,  après  avoir  revêtu  deux  fois 
la  pourpre  consulaire ,  il  fut  condamné  à  mort  par  Claude 
Tan  47  de  notre  ère  (2). 

Vallery  (Yonne)  parait  être  un  ancien  Valeriacw. 

Valeriis,  Valières ,  et  Solemniis ,  Soulaines ,  paraissent  le 
datif  de  substantifs  féminins  pluriels;  si  ces  substantifs 
avaient  été  masculins,  il  auraient  donné  en  français  des 
désinences  masculines  comme  Aurelianis^  Aurelianos^ 
Orléans. 

Nous  allons  passer  aux  noms  de  lieux  qui  apparaissent 
exclusivement  dans  les  textes  avec  la  désinence  du  nomi- 
natif accusatif  féminin  pluriel  bas  latin  de  la  première 
déclinaison  :  -as. 

§  5.  —  Gentiliees  employés  adjectivement  avec  sens  géogra^ 
phique  au  nominatif^accusatif  pluriel  féminin. 

Ces  noms  de  lieu  s'expliquent  par  un  substantif  sous- 
entendu  vilUiSy  domus^  casas.  Le  dernier  de  ces  substantifs 
est  exprimé,  dans  V Itinéraire  d^Antonin  (3),  casas  Caesa- 
rianas;  il  s'agit  d'une  localité  d'Italie  entre  Florence  et 
Àrrezzo. 

ÂMMONiAS.  AU  huitième  siècle,  on  donnait  ce  nom  à  une 
contrée  qui  couvrait  une  partie  des  pagus  d'Âvalon  et  de 


(1)  C.  /.  L.,  t.  XII,  p.  883-884. 
(i)  Tacite,  Annales,  XI,  1-3. 
(3)  Page  285, 1.  3. 


482  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  g  5. 

Nevers  (1).  Dans  le  siècle  suivant,  la  même  expression 
géographique  se  rencontre  dans  Tacte  de  fondation  de  Tab- 
baye  de  Corbigny  (2).  Le  nom  de  cette  contrée  persiste  dans 
celui  de  la  commune  de  Saint-Jean-aux-Amognes  (Niévre\ 
arrondissement  de  Nevers,  canton  de  Saint-Benin-d'Azv. 

Ammonias,  sous-entendu  casas  ou  villas^  est  le  féminin 
pluriel  du  gentilice  Ammonius  ou  Amonius  qui,  avant 
d'être  un  mot  latin,  a  été  grec  :  'AfxfiLwvtoç ,  ou  mieux  *Aawvw;, 
est  dérivé  d'Ammon,  ou  mieux  Amon,  nom  d'une  divinité 
égyptienne  ;  comparez  Aiovudioç  de  Atrfvoaoç.  Le  musée  de 
Naples  possède  Tépitaphe  de  M.  Amonius  Bassus  natione 
Aegyptius  (3).  L'indication  du  pays  dont  le  défunt  était 
originaire,  et  la  bonne  orthographe  avec  une  m  simple, 
comme  M.  Maspero  nous  l'a  fait  observer,  contrairement 
à  l'usage  universel  qui  exige  une  double  m  y  sont  deux  cir- 
constances qui  rendent  ce  monument  digne  d'attention. 
Ailleurs  Vm  se  double  conformément  aux  habitudes  grec- 
ques ,  par  exemple  dans  l'inscription  de  Pouzzoles ,  où  se 
lisent  les  noms  d' Ammonius  Ammonianus  (4). 

D'Ammonius  ou  Amonius  est  venu  le  nom  de  lieu  dérivé 
Ammoniacus  ou  Amoniacus ,  aujourd'hui  Ameugny  (Saône- 
et-Loire),  qu'on  rencontre  plusieurs  fois  dans  le  Cartulaire 
de  Saint- Vincent  de  Mâcon^  publié  par  M.  Ragut.  Ce  nom  y 
est  écrit  :  à  l'ablatif,  Ammoniaco  (5),  Amoniaco  (6);  au 
génitif,  Ammuniaci  (7),  Amoniaci  (8)  dans  des  chartes  dont 
les  plus  anciennes  datent  du  neuvième  siècle,  les  plus 
récentes  du  douzième. 


(1)  «  In  pago  Avalense  et  Nivcrnense,  seu  Ammonias  curtem  qui  rocatnr 
Corbiniacus,  721.  »  Pardessus,  DipZomata,  t.  II,  p.  325.  Corbigny  est  un 
cheMieu  do  canton  du  dcpartoment  de  la  Nièvre,  arrond.  de  Clamecy. 

(2)  «  Apud  Ammonias  in  loco  qui  a  Corbone  viro  inclito  Corbiniacus  di- 
citur.  »  (864).  Gall.  Christianaf  IV,  inslrum.f  col.  58  c. 

(3)  C.  J.  L.,  X,  3514. 

(4)  Ibid.,  X,  3612. 

(5)  Page  335. 

(6)  Pages  140.  277. 

(7)  Pages  378,  379. 

(8)  Page  140. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICES  EN  -IU8.    433 

Il  est  curieux  d'être  amené  à  reconnaître,  dans  la  nomen- 
clature géographique  de  la  France  moderne ,  deux  monu- 
meats  de  la  religion  des  Egyptiens  :  Amognes  et  Ameugny, 
dérivés  du  nom  du  dieu  Amon  ou  Ammon.  Ces  deux 
témoignages ,  entre  autres ,  attestent  de  quel  mélange  de 
races  s'était  formée  la  tourbe  avide  que  le  sein  de  Rome 
conquérante  déversait  sur  les  pays  vaincus. 

At[t1eias  in  fine  Tornodrinse,  dans  un  diplôme  de 
l'année  877  (1),  aujourd'hui  Athée,  commune  de  Tonnerre 
(Yonne)  (2);  —  At[t]eias^  suivant  un  diplôme  de  880  que 
M.  Garnier  a  publié  dans  ses  Chartes  bourguignonnes^  aujour- 
d'hui Athée  (Côte-d'Or)  (3);  —  Atyes  en  1131,  Athyes 
en  1254,  aujourd'hui  Athies  (Aisne)  (4),  sont  le  féminin 
pluriel  du  gentilice  Atteins  dont  il  a  été  question,  p.  402, 
sous  le  nom  de  lieu  Atteia. 

AuRELiAs.  *Une  charte  du  5  septembre  925  dispose  de 
trois  manses  situés  m  Aurelias^  en  Auvergne  (5). 

La  gens  Auselia,  —  Aurélia  par  l'efiFet  du  rhotacisme,  — 
était  plébéienne ,  mais  elle  donna  plusieurs  consuls  à  la 
République  Romaine  ;  elle  est  surtout  célèbre  par  la  dynas- 
tie impériale  que  fonda ,  au  deuxième  siècle  de  notre  ère , 
T.  Aurelius  Antonius  Plus,  l'empereur  Antonin  (138-161). 
Bien  antérieurement,  dès  Tan  44  avant  J.-C,  ce  nom  fut 
porté  en  Gaule  par  Aurelius,  légat  d'Hirtius,  qui,  à  cette 
époque ,  avait  le  gouvernement  de  la  Gaule  Transalpine  : 
nous  le  savons  par  une  lettre  de  Cicéron  à  Atticus  (6).  Ce 
gentilice  devint  très  commun  en  Gaule  :  rien  que  dans  le 
t.  XII  du  C.  1.  L.  et  dans  les  Inscriptions  antiques  de  Lyon^ 


(1)  Dom  Bouquet,  VHI,  668  c. 

(2)  Quantin,  Diciionn,  topogr.  du  départ,  de  l'Yonne^  p. 

(3)  Garnier,  Nomenclature f  p.  13,  n*  46. 

(4)  Matton,  DictionriHire  topogr.  du  départ,  de  l'Aisne,  p.  10. 

(5)  Dooiol,  Carlulaire  de  Brioude^  p.  129. 

(6)  XIV,  9.  E.  Desjardins,  Géographie  historique  et  administrative  de  la 
Gaule  romaine,  t.  III,  p.  26. 

28 


c 


434  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  i  5. 

de  Boissieu ,  on  en  peut  compter  plus  de  cent  exemples. 
D'Aurelius  dérivent  :   l"'  Aurelianus  dont  le  pluriel  ei^t 
devenu  le  nom  d*Orléans;  2**  Aureliacus.  C'était,  au  hui- 
tième ,  au  neuvième  et  au  dixième  siècle ,  le  nom  d'Orly 
(Seine)  (1).  Orly  est  la  forme  moderne,  en  français,  d'uc 
nom   qui ,   dans  une  région  plus  méridionale ,  est  resîp 
bien  plus  près  du  latin  ;  nous  voulons  parler  d'Aurillac, 
chef-lieu  du  département  du  Cantal,  appelé  Aureliacus  dans 
un  diplôme  de  Charles  le  Simple  (899)  (2)  ;  la  seconde  syl- 
labe, qui  est  tombée  dans  Orly,  persiste  dans  Aurillac  (Can- 
tal). Elle  a  disparu  :  dans  Orlhac  (Corrèze),  appelé  encore 
au  cas  indirect  Aureliaco^  par  deux  chartes  du  neuvième  siè- 
cle (3)  ;  dans  Orliac  (Dordogne) ,  déjà  au  treizième  siècle 
Orlhac  (4);  et  dans  les  diminutifs  :  Orlhaguet,  commune 
de  Sainte-Geneviève  (Aveyron) ,  appelé  encore  au  cas  indi- 
rect Aureliaco  et  Aureliageto  dans  des  chartes  du  miUeu  du 
onzième  siècle  (5) ,  Orliaguet  (Dordogne) ,  Orliaguet,  com- 
mune de  Gimel  (Corrèze). 

,  Barbarias.  En  998,  l'abbé  de  Cluny  abandonne  la  jouis- 
sance précaire  d'un  terrain  situé  dans  le  pays  de  Chalon- 
sur-Saône,  in  villa  Ba^^berias  (6);  Barberias  tient  lieu  d'un 
plus  ancien  Barbarias  qui  est  le  pluriel  de  Barbaria  étudié 
p.  402.  Barbières  (Drôme)  serait-il  un  ancien  Baii>arias? 

Caprias.  Dans  une  charte  de  l'année  667,  il  est  question 
d'une  localité  située  en  Berry,  in  pago  Biturico,  près  de 
Cabrlas  vioo  (7).  On  dit  que  c'est  Chabris  (Indre). 

Le  gentilice  Caprins,  dérivé  du  latin  capei^^  n'est  pas  très 


(1)  F.  de  Lasteyrie,  Cartulaive  de  Parts,  p.  35,  50,  90,  93. 

(2)  Dom  Bouquet,  IX,  478  c.  —  Cf.  curtis  Aureliacus  près  de  Forli,  896, 
et  près  do  Ravcnne,  973;  Fantuzzi,  Monumenti  Ravennati^  t.  I,  p.  xltiii. 
97,  180. 

(3)  Delocho,  Cart.  de  Beaulieu^  p.  254,  258. 

(4)  De  Gourgues,  Dicl.  top.  de  la  Dordogne^  p.  219. 

(5)  G.  Desjardins,  Cartulaire  de  Conques,  p.  41. 

(6)  Bruel,  RecUeil  des  chartes  de  Cluny,  t  III,  p.  541. 

(7)  Pardessus,  Diplomata,  II,  143. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICES  EN  -IU8.    435 

commun  :  on  en  trouve  des  exemples  obscurs  et  peu  nom- 
breux dans  les  tomes  III,  V  et  X  du  C.  L  L.\  mais  il  b.  dû 
à  une  satire  d*Horace  un  peu  plus  de  notoriété.  Le  poète  y 
parle  des  délateurs  Caprins  et  Sulcius,  Teffroi  des  larrons  : 

Sulcius  acer 
Ambulat  et  Gaprius  rauci  maie  camque  libellis , 
MagnQS  uterque.timor  latronibus... 

(Salircs.  1.  1,4,  65-67). 

Il  se  défend  de  leur  ressembler.  C'était  vers  l'an  40 
avant  J.-C.  La  conquête  romaine  porta  ce  nom  en  Gaule  : 
le  musée  d'Avignon  possède  l'épitaphe  de  Q.  Caprins, 
découverte  à  Tarascon  (1). 

De  Caprins  on  tira  des  dérivés  en  -acus  :  Cabriac ,  com- 
mune de  Douzens  (Aude)  ;  Chabriac ,  au  dix-septième  siè- 
cle Cabriac,  commune  de  Barjac  (Gard);  Chevrey,  com- 
mune d'Arcenant  (Côte-d'Or),  Chevery,  commune  de 
Saint-Maurice-en-Rivière  (Saône-et-Loire) ,  Chevry  (Ain , 
Haute-Savoie ,  Jura ,  Loiret ,  Manche ,  Seine-et-Marne  , 
Seine-et-Oise,  Vosges),  paraissent  être  d'anciens  Capriacus, 
Je  n'ai  pas  eu  le  talent  de  les  trouver  sous  une  forme  an- 
térieure à  la  période  capétienne  (2).    , 

Mais  de  caper,  développé  à  l'aide  d'un  suflBxe,  on  avait 
tiré  un  gentilice  Capronius,  dont  le  génitif  féminin  Capro- 
niae ,  est  gravé  sur  une  grifife  de  bronze  trouvée  dans  le 
midi  de  la  France  (3).  Peut-être  ce  gentilice  avait-il  une  va- 
riante *  Caprinius,  De  Capronius  ou  de  *Caprinius  dérive  le 
nom  de  lieu  Capriniacus  porté  par  deux  villages  de  la 
France  dès  les  temps  carlovingiens  ;  ce  sont  :  1*  Che- 
verny  (Loir-et-Cher),  Cabriniacensis  condita,  dans  une  charte 
de  l'abbaye  de  Saint-Martin  de  Tours  en  841  (4)  ;  2"*  Che- 


(1)  c.  /.  L.,  XII,  987. 

(2)  Comparez,  en  Italie  :  Cavriago,*proviiice  de  Reggio;  Cavriana,  prov. 
de  Mantouc  et  de  Milan;  Capriano,  prov.  de  Brescia  et  de  Milan;  Oabriani, 
prov.  de  Padoue  et  de  Venise. 

(3)  C.  /.  L.,  XII,  5690,  26. 

(4)  Mabille,  La  Pancarte  noire,  p.  221  ;  cf.  p.  155,  156;  voir  aussi  p.  81. 


J 


43C  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  |  5. 

vregny  (Aisne) ,  Capriniacus  in  pago  Laudunensi  en  893  ; 
probablement  la  Capriniacus  villa  dont  sont  datés,  en  946, 
trois  diplômes  de  Louis  d'Outremer  (1). 

Tous  ces  noms  de  lieux  dérivent  de  gentilices  romain? 
qui  eux-mêmes  dérivent  du  latin  ca^er  «  bouc.  »  En  gau- 
lois caper  se  disait  gabro-s.  Gabros  est  devenu  en  vieil 
irlandais  gdbor^  gabur,  en  gallois  f/a^r ,  en  breton  ^awr. 
De  là  un  gentilice  romain  Gabrius  noté  au  féminin  Gale- 
ria^  dans  une  épitaphe  trouvée  à  Narbonne  (2). 

Le  gentilice  Gabrius,  sous  sa  forme  féminine  Gabria,  eM 
probablement  l'origine  du  nom  de  lieu  écrit  Gavre  au  neu- 
vième siècle  dans  les  Gesta  Aldrici,  Aldricus  «  Audry  »  est 
un  évêque  du  Mans ,  qui  vécut  de  832  à  856.  Il  avait  fait 
construire  un  mansionile  à  Gavre  (3).  Gavre  est  aujourd'hui 
Gesvres  (Mayenne),  avec  deux  s  de  trop,  l'un  au  milieu, 
l'autre  à  la  fin  (4).  Voir  si  Gesvres-le-Chapitre  (Seine-et- 
Marne)  n'aurait  pas  la  même  origine. 

Du  gentilice  Gabrius,  on  a  tiré  un  nom  de  lieu  Gabriacvs 
dont  il  y  a  plusieurs  exemples  en  France.  Tel  est  Gabriac. 
commune  de  Mas-de-Londres  (Hérault),  en  804  Gabriacum 
fiscus  (5).  Nous  citerons  encore  Gebriactxs,  dans  un  diplôme 
donné  à  l'abbaye  de  Saint-Martin  de  Tours  par  Charles  le 
Chauve  en  862  (6)  ;  Gebriacus  est  une  variante  moderne  de 
Gabriacus,  Gevrey  (Côte-d*Or),  appelé  Givriacus  en  83^ 
dans  un  diplôme  de  Louis  le  Débonnaire  (7),  en  1015  el 
en  1019,  dans  des  chartes  de  l'abbaye  de  Cluny  (8) ,  appa- 
raît avec  une  orthographe  plus  ancienne  Gibriacus  dans  là 


(1)  Matton,  Diclionnaire  topograph,  du  département  de  VAUne^  p.  K 
Dom  Bouquet,  IX,  460  d,  601  d,  602  d,  603  b.  Bruel,  Recueil  des  chartes  <U 
l'abbaye  de  Cluny,  t.  I,  p.  642-643. 

(2)  C.  /.  L.,  XII,  4833. 

(3)  Gesta  Aldrici,  30,  chez  Baluze,  Miscellanea,  in-8%  t.  III,  p.  62;  édition 
de  MM.  Charles  et  Froger,  p.  77. 

(4)  Léon  Maître,  Diclionnaire  topoyr,  du  départ,  de  la  Mayenne,  p.  14". 

(5)  E.  Thomas,  Dict,  topogr,  de  l'Hérault^  p.  71. 

(6)  Dom  Bouquet,  VIII,  573  a. 

(7)  Ibid.y  VI,  596  a. 

(8)  Rec.  des  chartes  de  Cluny,  t  III,  p.  721,  745. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICE8  EN  -lUS.    437 

Chronique  de  Bèze ,  qui  date  du  onzième  siècle  mais  qui  a 
été  écrite  avec  des  documents  plus  anciens  ;  la  notation 
Gibriacus  appartient  dans  cette  chronique  à  la  notice  de  la 
foudation  de  Tabbaye  de  Bèze  sous  le  régne  de  Clotaire  II, 
vers  Tannée  600  ;  elle  peut  avoir  pour  base  un  document 
écrit  peu  après  cette  date  (1);  Gibriacus  vient  de  Gabriacus^ 
par  assimilation  de  la  première  syllabe  à  la  deuxième , 
comme  dans  Campiniacus  de  Campaniacus^  Pompiniacus 
de  Pomponiacus ,  etc. 

Cadias.  En  932 ,  Tabbaye  de  Cluny  acheta  un  champ  en 
Maçonnais ,  in  villa  Cadias.  La  charte  est  datée  du  même 
lieu  :  Actum  Cadias  villa  (2). 

Le  gentilice  Cadius  est  trois  fois  noté  Kadius  dans  une 
épitaphe  de  Campanie  (3).  Il  fut  introduit  en  Gaule  par  la 
conquête  romaine  :  on  a  trouvé  près  de  Nimes,  à  Rodilhan, 
commune  de  Bouillargues  (Gard) ,  Tépitaphe  de  T.  Cadius 
TituUus  (4).  Le  seul  personnage  connu  qui  ait  porté  ce 
gentilice  est  G.  Cadius  Rufus  ,  proconsul  de  Bithynie,  con- 
damné sur  la  plainte  de  ses  administrés  en  Tan  49  de  no- 
ire ère  et  réintégré  dans  le  sénat  vingt  ans  plus  tard ,  par 
l'empereur  Othon  (5). 

De  Cadius  on  a  tiré  en  Gaule  le  gentilice  dérivé  Cadia- 
eus.  En  917 ,  une  charte  de  Cluny  mentionne  une  villa  si- 
tuée en  Maçonnais  in  agro  Cadiacense  (6).  Cadiacus  est  le 
pendant  celtique  du  romain  Cadianus,  d'où  le  nom  de  la 
station  Mutatio  Cadiano  en  Italie,  près  de  Vérone,  dans 
l'itinéraire  de  Bordeaux  à  Jérusalem  (7). 


(1)  Abbé  Bougaud  et  J.  Garnier,  Analecta  divionensia  ;  Chronique  de 
V&bbaye  de  Saint- Bénigne  de  Dijon,  suivie  de  celle  de  Bèze.  Dijon,  Daren- 
tière,  1875,  p  298;  cf.  Migno,  Pairologia  latina,  t.  CLXII,  col.  863  d. 

(2)  Bniel,  Recueil  des  chartes  de  l'abbaye  de  Cluny,  t.  I,  p.  387. 
(3)C. /.  L.,  X,  1158. 

(4)  /6td.,  XII,  4065. 

(5)  Tacite,  Annales,  XII,  22;  Hist.,  I,  77;  De- Vit,  Onomasticon,  II,  9. 

(6)  Brucl,  Recueil  des  chartes  de  Cluny,  t.  I,  p,  199. 
[1)  Itinéraire  d'Anlonin,  p.  558,  1.  12. 


43S  UVRE  II.  CHAPITRE  IIL  |  5. 

Campilias.  Une  charte  de  Tannée  906  (1),  parle  d'une 
paroisse  quae  dicitur  Campilias.  On  a  reconnu  qu'il  s  agi! 
de  Saint-Etienne  de  Campelles ,  commune  de  Villefiranche 
de  Gonflent  (Pyrénées-Orientales)  (2). 

Il  y  a  eu  sous  Tempire  romain  un  fabricant  de  lampes 
du  nom  da  Campilius  ;  des  lampes  avec  sa  marque ,  Camr 
pili  au  génitif,  sont  conservées  à  Hermannstadt  en  TraD- 
sylvanie  (3),  au  musée  d'Âscoli  en  Italie  (4),  au  musée  de 
Palerme  en  Sicile  (5) ,  à  Vienne  (Isère)  (6).  L'épitaphe  de 
L.  Campylius  Liberalis  au  musée  de  Naples  (7),  nous  of- 
fre probablement  le  même  nom  avec  une  légère  variaute 
d'orthographe. 

Champillet  (Indre)  est  peut-être  un  ancien  Campiliacm. 

Fabias-  En  965 ,  Honorât,  évéque  de  Marseille,  fit  res- 
tituer à  son  église  des  biens  situés  dans  plusieurs  localités 
aux  environs  de  Marseille  ,  inpago  Massiliense,  notamment 
au  lieu  dit  Fabias  (8).  • 

Il  est.  inutile  de  dire  que  Fabias  est  le  féminin  pluriel 
d'un  des  gentilices  romains  les  plus  célèbres  de  Rome. 
Les  inscriptions  romaines  de  la  Gaule  attestent  que  ce 
gentilice  pénétra  en  Gaule.  Trente-deux  Fabius  figurent 
dans  l'index  du  tome  XII  du  C.  7.  L  ;  deux  dans  les  Ins- 
criptions de  Lyon  de  Boissieu. 

De  Fabius ,  en  Italie ,  on  a  tiré  le  nom  de  lieu  dérivé 
Fabianus ,  il  y  avait  à  Plaisance  un  fundus  Fabianus^  nous 
le  savons  par  la  table  alimentaire  de  Veleia,  p.  4, 1. 49  i9j. 
En  Gaule  on  a  dû  préférer  Fàbiacus.  Fajac  (Aude)  doit  être 

* 

(1)  Guérard,  C9LTtula.iTe  de  Sa.ini'Victor  de  Marseille,  t.  II,  p.  506. 

(2)  Ibid.,  p.  853. 

(3)  C.  /.  L.,  III,  1634,  1. 

(4)  Ibid.,  IX,  6081,  14. 

(5)  Ibid.,  X,  8053,  43. 

(6)  Ibid.,  XII,  5682,  19. 

(7)  Ibid.,  X,  2224. 

(8)  Guérard,  Cartul&ire  de  Saint-Victor  de  Marseille,  t.  I,  p.  41. 

(9)  C.  /.  L.,  t.  XI,  p.  214.  Cf.  Fabiano,  province  de  Gènes,  Faibano, pro- 
vince de  Caserta  en  Italie. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICES  EN  -lUS.    439 

un  ancien  Fabiacus.  Mais  les  Fage  de  TAude ,  de  la  Cor- 
rèze  et  de  la  Lozère  peuvent  être  chacun  une  ancienne 
villa  Fabia. 

LiiciNiAS.  Vers  la  fin  du  onzième  siècle,  un  bienfaiteur 
donna  à  Tabbaye  de  Molesme  (Côte-d'Or) ,  son  aleu ,  situé 
notamment  apud,..  Lisinias  (1).  L'église  de  ce  village  est 
appelée  ecclesiam  de  Lisigniis  en  1116,  dans  une  charte 
d'un  évéque  de  Langres  (2).  En  1153,  Tabbaye  de  Molesme, 
dans  un  acte  d'échange,  abandonne  ses  biens  apud  Lisin- 
nias  et  in  finagio  Lisinniarum  (3).  11  s'agit  de  Lézin- 
nes  (Yonne). 

Licinius  est  un, des  gentilices  romains  les  plus  connus. 
Nous  avons  parlé  de  ses  dérivés  en  -acus^  p.  254,  255. 

Petrinias  doit  avoir  été  dans  le  haut  moyen  âge  le  nom 
de  Prignes,  commune  de  Seiches  (Maine-et-Loire).  On 
trouve  ce  nom  écrit  Petrignas^  au  onzième  siècle  (4). 

Ce  nom  de  lieu  suppose  un  gentilice  *PeLrinius;  il  re- 
présente une  prononciation  basse  et  vulgaire  du  gentilice 
Petronius.  Le  gentilice  *Petrinius  serait  l'explication  du 
cognomen  Petrinianus  dont  l'existence  est  attestée  par 
deux  inscriptions  de  Rome  au  temps  de  la  république  ;  on 
lit  dans  ces  inscriptions  les  noms  de  L.  Titinius  Petrinia- 
nus (5).  *Petrinius  aurait  été  une  variante  romaine  de 
Petronius.  Petronius  est  un  gentilice  obscur  sous  la  répu- 
blique, mais  qui  fut  inscrit  six  fpis  dans  les  fastes  consu- 
laires au  premier  siècle  de  notre  ère  (6).  Petronius  est  dérivé 


(1)  Quantin,  Cartul.  de  l'Yonne,  t.  II,  p.  18. 

(2)  Quantin,  ibid.,  t.  I,  p.  232. 

(3)  Quantin,  ibid.,  t.  I,  p.  507. 

(4)  Port,  Dictionnaire  de  Maine-et-Loire,  t.  III,  p.  188. 

(5)  C.  /.  L.,  I,  1400,  1401.  Cf.  le  nom  de  lieu  Petrigniano ,  provinces 
d'Aquila,  de  Macerata  et  de  Pérouse  (Italie). 

(6)  Sur  le  gentilice  Petronius,  voyez  Pauly ,  Real-Encyrlopnedie ,  t.  V, 
p.  14O;-1410.  Le  Dictionnario  geografico  postale  del  regno  d'Italia,  1880, 
mentioDne  sept  localités  appelées  Petrognano. 


440  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  }  5. 

du  nom  de  nombre  cardinal  osque  et  ombrien  qui   veut 
dire   quatre.  Le  double   suffixe  ôn-ius  de  Petr-on-ius  se 
retrouve  dans  Pomponius  dérivé  du  nom  de  nombre  car- 
dinal qui,  en  osque  et  en  ombrien,  signifie  cinq  ;  Pompeius 
vient  du  même  nom  de  nombre  et  ne  diffère  de  Pompo- 
nius que  par  le  suffixe.  Il  y  a  entre  Petronius  et  Petreius 
le    môme    rapport    qu'entre    Pomponius    et    Pompeius. 
M.  Petreius,  dont  Cicéron,  dans  le  plaidoyer  Pro  Seœtio, 
Tan  56  avant  J.-C,  vante  le  mérite,  est  le  général  qui  avait, 
quatre  ans  plus  tôt,  battu  à  Pistoia  la  petite  armée  de  Cali- 
lina;  il  fut  dix  ans  plus  tard,  pendant  la  campagne  de  Cé- 
sar en  Afrique ,  un  des  vaincus  de  la  bataille  de  Thapsus, 
et  pour  ne  pas  tomber  vivant  entre  les  mains  du  vain- 
queur, il  se  fit  tuer  en  combat  singulier  par  Juba,  roi  de 
Numidie  (1).  Son  gentilice  apparaît  comme  nom  de  lieu 
en  955,  dans  le  nom  de  la  villa  Petreio,  en  Maçonnais,  que 
jious  conserve  une  charte  de  Cluny  ;  de  là  dérive,  dans  la 
même   charte,  le  nom  de  Vager  Petriacensis  (2).  La  villa 
Petreio  y  de  Tannée  955,  est  appelée,  un  siècle  plus  tard, 
villa  Petroio  et  villa  Perroy  (3). 

TuRRiAS.  Dans  une  charte  du  milieu  du  onzième  siècle, 
il  est  fait  à  Tabbaye  de  Saint-Victor  de  Marseille  donation 
d'un  manse  in  Castro  quod  vocatur  Turrias  (4). 

Malgré  le  doublement  de  IV,  ce  nom  de  lieu  parait  iden- 
tique au  gentilice  Turius  fréquent  dans  les  inscriptions 
romaines ,  comme  on  peut  s'en  assurer  en  consultant  les 
index  du  C.  L  L.,  t.  II,  III,  VIII,  X  et  XIV  (5).  Ce  gentilice 
a  même  donné  un  dérivé  Turellius  (6) ,  et  Turelius  (7).  Le 

(1)  Sur  le  gentilice  Petreius,  voyez  Pauly,  Tte&l'Encyclùptiedit ^  t  V, 
p.  1398-1399. 

(2)  Bruel,  Recueil  des  chartes  de  Clunyf  t.  I,  p.  767. 

(3)  Ragut,  Cartulaire  de  Saint-Vincent  de  Mâcon,  p.  259,  272. 

(4)  Guérard,  Cartulaire  de  Saint-Victor  de  Marseille^  t.  II,  p.  37. 

(5)  Sur  le  gentilice  Turius,  voir  Pauly,  Real-Encyclopaedie^  t.  VI, 
p.  2253.  Cf.  le  nom  de  lieu  Turiano ,  province  de  Novare  en  Italie. 

(6)  C.  /.  L.,  Il,  787,  3103,  3104;  V,  8819. 

(7)  Ibid.y  III,  4150. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICES  EN  -lUS.    441 

gentilice  Turius  n'est  pas  ancien  dans  l'histoire  romaine , 
le  plus  vieil  exemple  appartient  au  premier  siècle  avant 
notre  ère  ;  c'est  le  nom  d'un  Romain  établi  en  Campanie, 
L.  Turius  (1). 

On  peut  croire  que  ce  gentilice  est  d'origine  gauloise. 
11  dérive  de  Turrus.  Turrus  est  le  nom  d'un  roi  celtibère , 
qui,  Tan  179  avant  J.-C,  se  soumit  aux  Romains  et  devint 
leur  fidèle  allié  (2).  Sous  l'empire  romain,  ce  nom  est 
noté  par  une  seule  r  dans  le  nom  d'une  ville  d'Espagne, 
TurO'Briga  ou  Turi^briga,  dont  vient  l'adjectif  rtiro-frrfgren- 
sis  (3),  ou  Twri-brigensis  (4).  Turobriga  veut  dire  forteresse, 
château  de  Turos.  Pline  (5)  met  cette  ville  dans  la  région 
de  l'Espagne  dite  Celtique ,  à  cause  de  sa  population ,  où 
l'élément  celtique  était  dominant;  le  plus  récent  éditeur 
a  imaginé  de  corriger  Turo-briga  en  Ituro-briga.  En 
Espagne,  sous  l'empire  romain,  on  trouve  écrit  avec  une 
seule  r  les  noms  d'hommes  dérivés  Tureus,  Turaius  et 
Turo  :  Tureus  Bouti  fllius  (6) ,  Samalus  Turei  filius  (7) , 
Turaius  Clouti  (8) ,  Clodio  Turoni  au  datif  (9) ,  et  le  nom 
de  lieu  dérivé  Turissa  (10).  La  même  orthographe,  avec  une 
seule  r  est  constatée  dans  l'adjectif  Turicensis  :  cet  adjec- 
tif dérive  de  *Turicus,  forme  primitive  du  nom  de  la  ville 
de  Zurich  (11).  L'r  est  aussi  seule  dans  le  nom,  au  cas  in- 
direct TurOj  d'une  station  romaine  de  l'Allemagne  méridio- 
nale tel  que  nous  le  fait  connaître  Y  Itinéraire  dCAntonin  (12)  ; 
Turo  devait  être  au  nominatif  Turus,  sous-entendu  fundus. 

(1)  C.  i.  L.,  I,  574. 

(2)  Tite-Live,  1.  XL,  c.  49. 

(3)  C.  /.  L.,  II,  964. 

(4)  /Md.,  II.  462. 

(5)  Pliae,  1.  III,  §  14. 

(6)  C.  /.  L.,  II,  744. 

(7)  Ibid.,  II,  745. 

(8)  Ibid.,  II,  2633. 

(9)  /Wd.,  II,  2504. 

(10)  Itinér&ire  d'Antonin,  p.  455,  1.  6, 

(11)  Mommsen,  Inscripiiones  helveticae^  n*  236. 

(12)  Page  259, 1.  4.  Cf.  Turro,  nom  de  localités  d'Italie,  provinces  de  Corne, 
Milan,  Plaisance  et  Naples. 


442  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  APPENDICE. 

Nous  retrouvons  la  double  r  du  Turrus  de  Tite-Live  dans 
deux  noms  d'homme  dérivés  en  Espagne  sous  Tempire 
romain  :  Tun  est  le  nom  pérégrin  du  père  d'Optatus  Tur- 
rionis  f.  (1) ,  l'autre  est  le  cognomen  de  la  prêtresse  ViLia 
Turrina  (2). 

Dans  Turrina  IV  est  double ,  Vn  simple  ;  on  remarque 
l'inverse   dans  Turennus  au   génitif  Turenni ,  cognomen 
du   père   d'Adius  Flaccus,  dans  une  inscription  d'Espa- 
gne (3).  Ce  cognom&n  reparaît  en  France  comme  nom  de 
lieu  au  moyen  âge  :  Torennam  castrtêm  en  859  (4),  Torinna 
en  932  (5),  au  douzième  siècle  Turenna  (6),  et  Tormna  (7;; 
il  s'agit  de  Turenne  (Corrèze).  Ce  nom  d'homme,  devenu 
nom  de  lieu ,  rentra  dans  la  catégorie  des  noms  d'homme , 
grâce  aux  comtes  et  aux  vicomtes  de  Turenne  et,  dans 
cette  carrière  nouvelle ,  acquit  une  célébrité  qu'il  n'avait 
pas  eu  dans  la  première.  Turenne ,  le  fameux  homme  de 
guerre  du  dix-septième  siècle ,  était  un  La  Tour  d'Auver- 
gne ,  vicomte  de  Turenne  (Corrèze). 

Appendice*.  —  Les  cognomina  en  ius  employés  adjectivement 

comme  nom^  de  lieu. 

On  s'occupera  plus  loin  des  noms  de  lieu  identiques 
à  des  cognomina  dans  lesquels  la  désinence  -o-j,  -us  est 
précédée  d'une  consonne.  Les  cognomina  en  ius  étudiés  au 
point  de  vue  de  la  phonétique  forment  une  sorte  d'appen- 
dice aux  gentilices  en  ius  :  les  phénomènes  phonétiques 
qu'ils  offrent  à  l'observation  sont  identiques  à  ceux  qu'on 


(1)  c.  /.  L.,  II,  336. 

(2)  Ibid,,  II,  1958. 

(3)  Ibid.,  II,  2671. 

(4)  Deloche,  Carlulaire  de  Be&ulieu,  p.  65. 

(5)  Ibid.,  p.  161. 

(6)  Ibid.,  p.  272. 

(7)  G.  Desjardins,  Cartulaire  de  Conques ,  p.  373.  Cf.  Turenno  en  Italie, 
province  de  Brescia. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  SURNOMS  EN  -lUS.     443 

peut  étudier  dans  les  gentilices  en  -ius  :  on  en  citera  trois  : 
Âmbactius,  Ambrosius,  Mercurius.  Cf.  ci-dessus,  p.  339. 

ÂMBAGTiA  a  dû  être ,  sous  l'empire  romain ,  la  notation 
régulière  du  nom  de  lieu  écrit  à  Taccusatif  vicum  Amba- 
ciensim  par  Gi^goire  de  Tours  (1) ,  et  à  l'ablatif  Amba- 
ciensi  (2).  La  seconde  syllabe  était  primitivement  longue, 
bien  que  Fortunat  Tait  faite  brève  au  livre  IV,  vers  210, 
de  sa  Vie  de  saint  Martin  (3)  : 

Mirumaliud  vico  quod  contigit  Ambaciensi. 

La  seconde  syllabe  à'Ambaciensij  au  sixième  siècle,  était 
prononcée  brève  puisqu'elle  était  atone. 

Dans  ces  textes ,  il  s'agit  d'Amboîse  (Loir-et-Cher)  ;  c'est 
un  nom  féminin.  C'est  par  conséquent  à  tort  qu'au 
dixième  siècle,  dans  un  traité  d'Odon,  abbé  deCluny  (927- 
942),  on  trouve  le  nom  d'Amboise  écrit  à  l'ablatif  masculin 
ou  neutre  Ambazio  (4).  Ambactius  ou  Ambactium  serait 
devenu  en  français  «  Ambais  »  ou  «  Ambois.  »  La  vraie 
finale  est  restituée  par  la  notation  Ambasia^  du  nom  de  cette 
ville ,  dans  une  chronique  d'Angers  écrite  vers  la  fin  du 
douzième  siècle  (5). 

Le  cognomen^  dont  le  nom  d'Amboise  est  le  féminin, 
nous  est  conservé  avec  l'orthographe  franque  dans  une 
inscription  de  Zeeland,  qui  est  une  dédicace  à  la  dea  Neha- 
lennia  par  Januarinius  Ambacthius  ;  la  notation  cth  du 
groupe  indo-européen  et  est  caractéristique  de  la  langue  des 
Francs  Mérovingiens  :  comparez  Theodebercthus.  Ambacthius 
est  un  dérivé  du  substantif  gaulois  ambactos  :  ambactos  a 
été  emprunté  aux  Gaulois  par  les  Germains. 

En  gaulois,  ambactos  avait  le  sens  des  mots  français 


(1)  UisloriA  Francorum,  II,  35  ;  édit.  Arndt,  t.  I,  p.  98,  1.  17, 

(2)  Ibid,,  X,  31  ;  édit.  Arndt,  t.  I,  p.  444,  1.  4, 

(3)  Edit.  Léo,  t.  II,  p.  354. 

(4)  Dom  Bouquet,  VI,  318  b, 

(5)  Dom  Bouquet,  X,  272  &. 


444  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  APPENDICE. 

«  vassal,  domestique,  serviteur  :  »  il  conserva  la  même 
valeur  dans  la  langue  des  Germains  ;  noté  andbahis  chez 
Vulfîla,  il  traduit  ordinairement  les  mots  grecs  Smucovoç  et 
ôw>ipiTiQç,  par  exception  XitToupY<Jç  «  ministre  du  culte.  »  En 
germanique,  le  dérivé  ambactio-  ou  ambactia  a  un  sens 
abstrait;  Vulflla  fait  d' ambactio-  un  substantif  neutre  ;  il  le 
note  andbahti  et  remploie  ordinairement  comme  équivalent 
du  grec  Staxov(a,  par  exception  comme  traduction  du  grec 

Les  Francs  et  les  Burgundes  préférèrent  le  fémi- 
nin pour  lequel  les  manuscrits  donnent  deux  orthogra- 
phes ambascia  et  ambaxa,  comme  on  le  peut  voir  dans 
les  éditions  de  la  loi  salique  et  de  la  loi  des  Burgundes  : 
ambacthia  aurait  été  la  bonne  orthographe  de  ce  mot,  dans 
la  langue  des  Francs  mérovingiens.  De  ce  substantif  est 
venu  le  verbe  bas  latin  ambasciare  «  traiter  une  affaire 
pour  autrui;  »  d'où  ambasciator,  en  espagnol  ambaxador^ 
en  italien  ambasciadore ,  en  français  «  ambassadeur.  » 

Ce  mot,  comme  «  ambassade  »  =  ambasciata^  tire  son 
origine  du  substantif  abstrait  ambacthia-  ou  ambahtia-, 
apporté  dans  l'empire  romain  par  la  conquête  germanique. 
AmbahUa-  persiste  chez  les  Allemands  modernes  qui  le 
prononcent  amt  et  chez  qui  il  veut  dire  «  fonction,  » 
«  bureau.  »  Mais  chez  eux  il  est  d'origine  gauloise.  Il  dé- 
rive du  Gaulois  ambactos^  déjà  connu  par  Ennius  (239-169 
avant  J.-C.)  un  siècle  environ  avant  la  date  où  les  Ro- 
mains eurent  pour  la  première  fois  des  relations  avec  les 
Germains.  Ennius  donne  ambactus  pour  gaulois  et  le  traduit 
par  servus. 

César  constate  que,  de  son  temps,  au  milieu  du  pre- 
mier siècle  avant  notre  ère ,  ce  mot  continuait  à  être 
employé  par  les  Gaulois  comme  nom  commun.  Il  était 
aussi  employé  par  eux  comme  nom  d'homme ,  c'est  avec 
cette  valeur  qu'il  est  inscrit  sur  une  monnaie  gauloise  (I). 

(1)  Â.  de  Barthélémy,  dans  la  Revue  celtique,  t.  IX,  p.  28. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  SURNOMS  EN  -lUS.     445 

L'affranchi  L.  Appuleius  Ambactus,  dans  une  inscription 
de  Cislerna  en  Campanie  (1) ,  s'appelait  Ambactus  tout 
court  quand  il  était  esclave  :  et  il  devait  être  Gaulois  d'ori- 
gine. Nous  n'avons  pas  de  raison  pour  croire  que  les 
Francs  eussent  le  monopole  du  cognomen  dérivé  qu'un 
lapicide  grava  sous  leur  dictée  :  Arribacthius;  un  Gallo- 
Romain  a  du  porter  ce  cognomen  avec  l'orthographe  Am- 
bactius^  et  de  là  sera  venu  le  nom  de  la  villa  *  Ambactia^ 
aujourd'hui  Amboise. 

D'Ambactius,  on  a  aussi  tiré  le  nom  de  lieu  Ambactiacus. 
Ambazac  (Haute-Vienne)  est  un  ancien  Ambactiacus,  Awbas- 
ciacus^  relevé  dans  la  Chronique  de  Saint-Bénigne  de  Dijon 
par  M.  Garnier  (2) ,  est  une  autre  notation  du  môme 
nom. 

Ambrosius.  Mutatio  Ambrosio^  dans  l'Itinéraire  de  Bor- 
deaux à  Jérusalem  (3),  est  le  nom  d'une  station  romaine  de 
de  Gaule ,  aujourd'hui  Pont-Ambroix ,  commune  de  Lu- 
nel  (Gard).  On  la  reconnaît  dans  VAmbrusium  de  la  Table 
de  Peutinger.  Il  faut  corriger  en  Aifnbrusium  ou  Ambrosium 
VAmbrussum  de  V Itinéraire  d'Antonin  (4). 

Ambrosius,  au  féminin  Ambrosia,  est  un  cognomen  ro- 
main d'origine  grecque.  D'abord  le  féminin  a  seul  existé  dans 
la  langue  grecque,  il  appartenait  à  la  mythologie  :  'A[A6(>o<r{a 
est  la  nourriture  où  la  boisson  des  dieux,  chez  Homère; 
ce  fut  ensuite  le  nom  d'une  nymphe ,  ce  devint  plus  tard 
un  nom  de  femme.  Enfin ,  *A|ii6poff(a  eut  un  masculin  et  on 
vit  paraître  le  nom  d'homme  \\t^<s\oç,  La  langue  latine 
adopta  les  deux  genres.  Les  inscriptions  d'Italie  nous  mon- 
trent, à  côté  de  Servilia  Ambrosia  (5),  G.  Julius  Ambro- 


(1)  C.  /.  L.,  X,  6494. 

(2)  Nomenclature,  p.  68,  n*  286. 

(3)  Itinéraire  d'Antonin,  p.  552,  1.  7. 

« 

(4)  Desjardins,  Géographie  de  la  Gaule  d'après  la  Table  de  Peutinger, 
p.  347.  Cf.  Itinéraire  d'Antonin,  p.  389, 1.  1  ;  p.  396, 1.  6. 

(5)  C.  /.  L.,  X,  1497. 


446  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  APPENDICE. 

sius  (I),  Q.  Clodius  Ambrosius  (2).  Ce  cognomen  est  devenu 
célèbre,  dans  l'histoire  ecclésiastique ,  grâce  à  Tévêque  de 
Milan ,  mort  à  la  fin  du  quatrième  siècle. 

Mergurius.  En  887,  un  donateur  fait  à  Tabbaye  de 
Ëeaulieu  (Corrèze)  présent  de  sa  villa  appelée  Mercorius  (3)  ; 
dans  l'acte  qui  constate  la  mise  eh  possession  de  l'abbaye, 
ce  bien  est  nommé  au  cas  indirect  villa  de  Mercorio ,  et  il 
est  dit  que  la  villa  dont  il  s'agit  était  située  en  Limou- 
sin (4)  ;  c'est  Mercœur  (Corrèze).  Le  même  cartulaire  met 
dans  le  comté  de  Cahors  une  autre  villa  de  même  nom,  et 
il  l'écrit  avec  une  orthographe  plus  conforme  à  l'usage 
classique  :  Mercurio  k  l'ablatif  ;  c'est  dans  une  charte 
de  932  (5)^  ici  le  nom  antique  a  disparu  et  un  nom  nou- 
veau l'a  supplanté,  Saint-Julien  près  Cazillac  (Lot).  Un 
troisième  Mercurius  apparaît  vers  1020 ,  dans  une  charte 
de  l'abbaye  de  Savigny  (Rhône)  ;  cette  charte  est  l'acte  de 
donation  d'une  vigne  située  :  in  parrochia  Sancti  Christo- 
phori  de  Mercurio  villa  (6);  on  croit  qu'il  s'agit  de  Mar- 
coux  (Loire).  Un  quatrième  Meicorius,  aujourd'hui  Mercœur, 
commune  d'Ardes  (Puy-de-Dôme) ,  est  plusieurs  fois  men- 
tionné au  treizième  siècle  (7). 

Le  cartulaire  de  Brioude  (Haute-Loire)  nous  met  sous  les 
yeux  la  forme  féminine  de  ce  nom.  Il  contient  une  charte 
de  l'année  911,  où  il  est  question  d'une  église  Saint- 
Etienne  située  in  villa  quae  dicitur  Mercoria ,  et  de  man- 
ses  :  in  superiori  Mercoira  (8)  ;  ces  deux  localités,  probable- 
ment contiguës,  étaient  situées  dans  le  pays  de  Brioude,  in 


(1)  C.  /.  L.,  IX,  24^. 

(2)  Ibid.,  IX,  6078,  62.  "^ 

(3)  Dcloche,  Cartulaire  de  Beau/teu,  p.  225. 

(4)  Ibid.,  p.  226. 

(5)  Deloche,  Cartulaire  de  Beauh'eu,  p.  87,  334. 

(6)  A.  Bernard,  Cartulaire  de  Savigny,  p.  81. 

(7)  A.   Chassaing,  Spicilegium  BrivateniBy  p.  35-39,  120,   135-139,  etc. 
Cf.  Mercurio,  en  Italie,  province  de  Forli. 

(8)  Doniol,  Cart.  de  Brioude,  p.  61. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  SURNOMS  EN  -1U8.  4*7 
vice  Brivatense' :  on  doit  probablement  reconnaître  en  elles 
Mercœur,  arrondissement  de  Brioude  (Haute-Loire).  La 
première  de  ces  deux  localités,  Mercoria,  est  aussi  mention- 
née par  ce  cartulaire  dans  deux  autres  chartes  du  dixième 
siècle  (1),  et  dans  une  charte  du  douzième  siècle  (2),  en 
sorte  qu'il  est  difficile  de  révoquer  en  doute  l'exactitude  de 
l'orthographe  féminine  Mercorta.  Celte  orthographe  est 
cooSrmée  par  un  compte  du  receveur  d'Auvergne  en  1401, 
où  figure  une  recette  «  de  la  parroisse  de  Mercures  (3).  » 
11  y  a  dans  «  Mercures  »  un  s  detrop.  Aujourd'hui  en  fran- 
çais Mercœur  (Haute-Loire)  devrait  s'écrire  avec  un  e 
final  Mercœure. 

Mercurius  est  un  cogjwmen  latin  d'un  usage  assez  fré- 
quent :  on  peut  s'en  convaincre  en  consultant  les  index  du 
Corpus  imcriptionum  latinarum,  t.  V,  IX,  X,  XII  et  XIV. 
Dans  le  tome  XIV,  qui  contient  les  inscriptions  du 
Latium,  on  en  peut  compter  vingt-quatre  exemples.  Il 
parait  avoir  été  moins  commun  en  Gaule,  cependant  il  y 
avait  pénétré  :  le  musée  de  Marseille  possède  l'épitaphe 
de  C.  Manlius  Mercurius  (4)  :  à  Nimes,  on  a  trouvé  deux 
épitaphes  intéressantes  au  même  point  de  vue  :  celle 
que  Q.  Seccius  Mercurius  fit  graver  pour  sa  femme  (5); 
et  l'épitaphe  de  T.  Sempronius  Mercurius  (6). 

De  Mercurius,  on  a  tiré  un  dérivé  Mercuriactts.  Mercu- 
rey  (Saône-et-Loire),  Mercury-Geroilly  (Savoie),  Mercury, 
commune  de  Saint-Privat  (Haute-Loire),  paraissent  être 
chacun  un  ancien  Mercuriacus  (7). 

Quelques  personnes  sont  habituées  k  ne  voir  dans  Mer- 
cœur, Mercurey,  Mercury,  autre  chose  que  l'expression 
d'un  culte;  elles  considéreront  comme  arbitraires  l'hypo- 

(1)  DonJol,  Cart.  de  Brioude,  p.  30  et  315. 
(î)  Ibid.,  p.  292. 

(3)  A.  Cbassaing,  Spicilegium  Brivatente,  p.  473. 

(4)  C.  /,  t.,  xn.  449. 

(5)  /bW.,  xn,  3709. 
(6]  Ibid.,  XII,  3S94. 

(7)  Comparoi  Uercurago,  on  Italie,  province  de  Novare. 


448  LIVRE  II.  CHAPITRE  III.  APPENDICE. 

thèse  d'hommes  de  chair  et  d'os  venant  s'interposer  entre 
le  dieu  romain  et  nous,  empruntant  son  nom,  humanisant 
ce    nom    divin,  et  le  transformant  en  cognomen^  avant 
d'en  tirer  une  expression  géographique.  Mais  il  n'est  pas 
nécessaire  d'attribuer  à  cette  thèse  un  caractère  absolu.  En 
certaines  circonstances  un  nom  divin  peut  avoir  donné 
immédiatement  naissance  à  un  nom  de  lieu.  Ainsi,  deux 
chartes  du  dixième  siècle  mettent  prés  de  Brioude  (Haute- 
Loire)  une  terre  de  Monte  Jove  (1) ,  une  villa  quae  dicUur 
Montem  Jovem  (2);  la  même  localité  est  appelée  Montgeu 
dans  un  document  du  quatorzième  siècle  (3);  il  y  a  vraisem- 
blement  là  un  témoignage  du  culte  de  Jupiter.  De  même, 
le  Mons  Mercurius^  qu'une  charte  de  l'année  975  met  dans 
le  pagus  lucdunensis,  en  Lyonnais  (4),  paraît  être  un  témoi- 
gnage du  culte  de  Mercure. 


(1)  Doniol,  Cartulaire  de  Brioude,  p.  61. 

(2)  Pago  189. 

(3)  Chassaing,  Spicilegium  Brivatense^  p.  433.  Comparez,  en  Italie,  Mon- 
tcgiove,  provinces  de  Pérouse  et  dç  Turin,  Montegiovi,  provinces  de 
Qrosseto  et  d*Arezzo. 

(4)  Bruel,  Recueil  des  chartes  de  Clunyy  t.  II,  p.  469. 


CHAPITRE  IV. 


EXEMPLES  ,  AU  HOTBN  AQE  ,  DE  NOMS  DE  LIEU  EN  -OCUS  I 
VÉS   DE   GENTILIGBS   ROMAINS   EN   -enUS. 


{  1.  Lea  gentilices  Tomains  en  -enui.  —  {  2.  Les  noms  de  lien  en 
dérivés  de  gentilices  romains  en  -eniii  qui  se  rencontrent  dans  les  i: 
tions ,  on  dont  on  trouve  un  dérivé  dans  les  inscriptions  ;  premier 
tion ,  caractérisée  par  le  doublement  de  l'n  du  suffixe  -enus,  —  { 
noms  de  lieu  on  -acus  dérivés  de  gentilices  romains  en  -enus  qui  i 
contrent  dans  lea  inscriptions,  ou  dont  on  trouve  un  dérivé  da 
inscriptions  ;  deujiiéme  section,  caractérisée  par  l'n  iion  doublée  du 
-enus.  —  I  4.  Les  noms  da  lieu  en  -acui  dérivés  da  gentilices  en 
dont  les  inscriptions  n'ont  conservé  d'autre  trace  que  le  gentilice  e 
correspondant. 

§  !•'.  —  Les  gentilices  romains  en  -enus. 

La  langue  latiae  avait  la  faculté  de  remplacer  p 
suffixe  -enus  le  suffixe  -iut,  qui  fournit  la  désineoce 
naire  des  gentilices.  A  côté  A'Albitis  ou  de  sa  vat 
Alfiw  : 

Ha«c  nbi  locntus  foenerator  Alflua  (I), 

on  trouve  Alfenus  : 

Aifeoe  immemor  atqne  unaniinis  false  sodalibns  (Z). 


450  LIVRE  II.  CHAPITRE  IV.  J  1. 

Ces  deux  gentilices  se  retrouvent  dans  les  recueils  d'in- 
scriptions (1).  A  l'aide  d'un  de  ces  recueils  a  été  dressée 
la  liste  que  voici,  qui  pourrait  être  plus  considérable  : 


Arrius 

Aufidius  (4) 

Aulius 

Avius  (6) 

Babidius 

Babrius 

Bisius  (11) 

Caesius 

Calidius  (14) 

Calius  (16) 

Calvius 

Canius 

Fadius 

Lancidius  (21) 

Maecius 


Arrenus  (2) 

Aufldenus  (3) 

Aulenus  (5) 

Avenus  (7) ,  Avena  (masculin)  (8 

Babidenus  (9) 

Babrenus  (10) 

Bisena  (12) 

Caesenus  (13) 

Calidenus  (15) 

Calenus  (17) 

Calvenus  (18) 

Canenus  (19) 

Fadenus  (20) 

Lancidena  (22) 

Maecena  (23) 


(1)  De- Vit,  Onom&Bticon,  t.  I,  p.  225-226. 

(2)  C.  /.  L.,  III,  2919,  6220;  V,  2073,  6954- 

(3)  Ibid.,  IX,  5015,  5092. 

(4)  Ibid.,  IX,  45,  46,  82  ;  cf.  Fabretti,  Glossarium  italicum,  col.  223. 

(5)  Ibid,,  IX,  2221,  2300. 

(6)  /6id.,  I,  571  ;  XII,  3453,  3612. 

(7)  Ibid.,  IX,  2379. 

(8)  Ibid.,  V,  3382. 

(9)  Ibid,,  IX,  5048. 

(10)  Ibid.,  IX,  5591. 

(11)  Ibid.,  V,  3702,  5841;  cf.  Fabretti,  Gloss,  iUL,  col.  256. 

(12)  Ibid.,  V,  1363. 

(13)  Ibid.,  IX,  2248,  2276,  2277. 

(14)  Ibid,,  V,  806,  1144,  2180,  5170;  IX,  2645,  2689. 

(15)  Ibid.,  IX,  5052. 

(16)  Ibid.,  V,  977,  8666;  cf.  Fabretti,  Gloss,  i/al.,  col.  739 

(17)  Ibid.,  IX,  4457. 

(18)  Ibid.,  IX,  3538,  3979,  4141. 

(19)  Ibid.,  IX,  4252. 

(20) /5id.,  I,  748;  IX,  4408,  4594,  4627,  5104,  5796. 

(21)  Ibid,,  V,  1891. 

(22)  ibid.,  V,  1931. 

(23)  Ibid.,  V,  44. 


NOUS  DE  LIEU  DÉRlVâS  DE  OENTILICES  EN  -ENUB. 


Marcius 

Hessîus 

NumJsiug 

Pomponius 

Salius 

Salvidius  (6) 

Sarius  (8) 

Satrius 

Septimius 

Trebellius 

Umbrius 

Varius 

Vesius  (15) 

Vettius 

Vicrius  (18) 

Volussiua 


Harcena  (1) 
Hessenus  (3) 
Numiseuus  (3) 
Pomponenus  (4) 
Salenus  (5) 
Salvidenus  (7) 
Sarenus  (9) 
Satreuus  (10) 
Septimenus  (11) 
Trebellenus  (12) 
Umbrenus  (13) 
Varenus  (14) 
Vesenus  (16) 
Vettenus  (17) 
Vicrena  (19) 
Volussena  (20) 


Nous  allons  voir  que  lorsque  le  suffixe  primaire  -et 
est  développé  à  l'aide  d'un  suffixe  secondaire ,  il  doul 
souvent  son  n;  par  exception,  ce  doublement  a  lieu  3! 


(1)  C.  /.  L..  X.  63T7. 
[îl  ;bid.,  XIV,  3359. 
(3)»>id..  IX,  3*29. 
(1)  i6id.,  V,  2669. 
(i)  ibid.,  IX,  5843. 

(6)  Ibid.,  VIII,  2565  b  8.  Cf.  Salvidieous,  X,  769,  2928. 

(7)  Ibid,,  X,  2408. 

(S)  Ibid.,  V,  6115,  toa. 

(9)  Ibid.,  V,  2013. 

(10)  Ibid.,  IX,  665,  4ff72. 

(tl)  Ibid.,  IX,  4336;  X,  8377. 
(lî)  Ibid.,  V,  IB78. 

(13)  Ibid.,  IX,  4171. 

(14)  fbtd.,  V,  14391  IX,  3463,  4333,  4970,  5124;  X,  1333,  8048,  46:  XII, 
XIV,  3010,  3687,  3688. 

(16)  Ibid.,  IX,  2838;  cf.  Fabretti,  Gloss.   ilal.,  col.  1941. 

116)  Ibid.,  IX,  4604. 

(IT)  Ibid.,  IX,  4157;  X,  3094. 

(18)  Ibid.,  IX,  4390. 

(19)  Ibid.,  IX,  3363,  5257. 
pO)  IMd„  Vin,  439,  1386. 


45Î  LIVRE  II.  CHAPITRE  IV.  |  1. 

addition  d'un  suffixe  secondaire  :  dans  Vibenna  (1),  corres- 
pondant à  Vibius,  dans  Artenna  (2),  correspondant  à  Artius. 
Les  gentilices  en  ^enus  se  développent  et  donnent  nais- 
sance à  des  gentilices  nouveaux  par  l'addition  du  suffixe 
•ius.  Les  inscriptions  nous  offrent  les  dérivés  : 

Alfenius  (3)  d'Alfenus 

Arrenia  (4)  d'Arrenus 

Avenia  (5)  d'Avenus 

Calenius  (6)  de  Calenus 

Messenius  (7)  de  Messenus 

Satrenius  (8)  de  Satrenus 

Varenius  (9)  de  Varenus 

Vettenius  (10)  de  Vettenus 

Volussenius  (11)  de  Volussenus. 

Le  suffixe  -ênius  par  e  long  et  simple  n  peut  se  trans- 
former  en  -enniits  par  e  bref  et  double  n.  On  a  déjà  deux 
exemples  du  doublement  de  Vn  dans  le  suffixe  -mus  : 
Vibenna,  Artenna.  Ce  doublement  est  beaucoup  plus  fré- 
quent lorsque  ce  suffixe  se  développe  à  l'aide  d'un  suffixe 
secondaire.  C'est  ainsi  qu'à  côté  d' Avenia  ci-dessus,  une 
inscription  nous  fournit  Avennius(12);  de  même  on  a  tiré: 

• 

de  Caesenus  Caesennius  (13), 

de  Vesenus  Vesennius  (14). 

(1)  C.  /.  L.,  XIV,  2213.  Cf.  Fabretti,  Glossarium  italicum,  col.  1969. 

(2)  Ibid.,  IX,  2838.  Cf.  Fabretti,  Gloss.  UaL,  col.  180. 
(3)/Md.,  X,  3334.  5,  7,  8;  XIV,  2801. 

(4)/bid.,  V,  4390;  VIII,  8460. 

(5)  /6id.,  V,  3382. 

(6)  /6id.,  III,  1762. 

(7)  /6id.,  X,  1403  a  1,  12,  23,  24;  T  3,  16. 

(8)  /Md.,  III,  2513;  IX,  338,  l,  7. 

(9)  Ibid,,  III,  1198,  1482,  1513,  1514;  X,  3337,  3500;  XII,  2760;  XIV,  246. 

(10)  Ibid.,  X,  3095. 

(11)  Ibid.,  VIII,  570,  813,  2560.  3;  8745. 

(12)  Ibid.,  VI,  12807. 

(13)  Ibid.,  V.  5315;  VI,  13937-13952;  VII,  index;  X,  722;  XIV,  index. 

(14)  Ibid.,  IX,  5439. 


NOMS  DE  LIEU  DÉRIVÉS  DE  GENTILICES  EN  -ENUS.       453 

Attius  a  dû  avoir  un  parallèle  *  AUeuus,  d'où  les  gentilices 
Attenius  (1)  et  Attennius  (2). 

Caetennius  (3)  et  Caetia  supposent  un  intermédiaire 
'  Caetenus  ; 

Gavennius  (4)  et  Gavius,  un  intermédiaire  'Gavenus  ; 

Nasennius  (5)  et  Nasius  (6),  un  intermédiaire  'Nasenus; 

Pontennius  (7)  et  Pontius,  un  intermédiaire  'Pontenus; 

Tettennius  (8)  et  Tettius,  un  intermédiaire  'Tettenus. 

Ces  principes  posés,  on  peut  passer  à  l'étude  des  noms 
de  lieux  de  la  France  qui  sont  des  dérivés  en  -acus  de 
gentilices  en  -etms  ou  en  -ennus. 

S  2.  —  Les  noms  de  lieu  en  -acus,  dérivés  de  gentilices  ro- 
maÏTis  en  -enus  qui  se  rencontrent  dans  les  inscriptions 
ou  dont  on  trov/ve  un  dérivé  dans  les  inscriptions  ;  1"  sec- 
tion, caractérisée  par  le  doublement  de  l'n  du  suffixe  -enus. 

L'addition  d'un  suffixe  au  gentilîce  -enus  produit  sou- 
vent en  Gaule  l'abrègement  de  la  voyelle  e  et  le  double- 
ment de  Vn  du  suf&xe  'nus.  On  peut  observer  ce  phéno- 
mène dans  le  nom  d' 

AvENNACcs,  aujourd'hui  Avenay  (Marne),  tel  que  l'écri- 
vent, au  neuvième  siècle,  Les  Annotes  de  Saint-Berlin  (9)  et 
Frodoard  (10). 

Le  doublement  de  Vn  ne  se  produit  pas  dans  une 
charte  donnée  en  926  k  l'abbaye  de  Cluny  où  il  est  ques- 
lion  d'une  curtis  Avenacus,  située  dans  le  pagus  Equestricus, 


(I)  c.  /.  L.,  II,  537. 

P)  Ibid.,  II.  2159,  6038  ;  XIV,  631. 

(3)  Ibid.,  XIV,  246. 

H)  Ibid.,  IX,  3353. 

(5)Ibfd.,  IX,  1646,  4764. 

(6)  /6id.,  IX.  3191  :  NasBiua  ;  IX,  5803  :  Nasia,  Cf.  c 

(7)  Ibid.,  VIII.  2618  b,  24. 

(8)  Ibid.,  III.  Î054  ;  Tettonius,  IK,  2959. 

(9)  Dora  Bouquet,  VIII.  26  d. 

(10)  Dom  Bouquet,  VIII,  156c;  167  a;  168  a;  194  a 


454     *  LIVRE  II.  CHAPITRE  IV.  {  2. 

c'est-à-dire  dans  rancien  territoire  de  la  cité  dont  Nyon.  en 
Suisse,  était  la  capitale  (1).  On  ne  ne  trouve  pas  non  plus  la 
double  n  dans  les  chartes  de  Tabbaye  de  Saint-Vincent  de 
Mâcon,  où  est  mentionnée  une  villa  Avenacus  située  en 
Maçonnais  aux  dixième,  onzième,  et  douzième  siècles  (2;; 
cette  villa  était  dans  Vager  Viriacensis^  dont  le  nom  survit 
aujourd'hui  dans  Viré  (Saône-et-Loire).  Mais  les  inscrip- 
tions romaines  nous  donnent  pour  le  suffixe  -enifâs  ou 
-ennius  dans  les  gentilices  la  même  alternance  d'n  simple 
ou  de  double  n. 

Avennacus  et  Avenacus  sont  tous  deux  dérivés  du  genti- 
lice  Avenus  ou  Avena  constaté  par  les  deux  inscriptions 
italiennes  où  on  lit  les  noms  de  C.  Avenus  Fa...  et  de 
M.  Avena  Macer  (3). 

Mabcennagus  offre  le  doublement  de  Vn ,  comme  Aven- 
nacuSy  Avenay  (Marne).  Marcennacus  est  la  forme  ancienne 
du  nom  des  quatre  communes  de  Marsannay-la-Cdte . 
Marsannay-le-Bois  et  Marcenay  (Côte-d'Or)  (4);  de  Mar- 
cenat  (Cantal)  (5)  et  Marcenet ,  écart  de  la  conmiune  de 
Saint-Maurice-sur-Loire  (Loire)  (6) ,  comme  on  peut  le  voir 
par  la  chronique  de  Bèze ,  par  le  cartulaire  de  Conques  et 
par  des  chartes  de  Tabbaye  de  Cluny.  Marcennacus,  plus 
tard  Marcennagus ,  est  un  dérivé  de  Mafcenus,  dont  la 
forme  féminine  nous  est  donnée  par  Tépitaphe  de  Marcena 
Clementilla,  trouvée  près  de  Terracine  (7).| 

^J  Bruel,  Recueil  des  chartes  de  Vabh&ye  de  Cluny ^  t.  I,  p.  247,  948, 249. 

(2)  Ragut,  CartuL  de  Saint-Vincent  de  Mâcon ^  p.  23,  200,  202,  209,210, 
211,  215,  221,  352. 

(3)  C.  /.  L.,  IX,  2379;  V,  3382. 

(4)  Garnier ,  Nomenclature  historique  des  Communes ,  etc, ,  de  la  Cdle- 
d'Or,  p.  11,  n*  38;  p.  36,  n»  158;  p.  134 ,  n»  539.  U  faut  corriger  en  Mircen- 
nacum  le  Marcenniacum  de  la  Chronique  de  Béze,  édit.  Boiigaad  et  Gar- 
nier, p.  235  (Cf.  Pardessus,  Diplomata,  t.  Il,  p.  366).  Voir  la  bonne  leçon 
MarcennacOf  p.  256,  259  de  la  même  édition. 

(5)  G.  Desjardins,  Cartulaire  de  Conques,  p.  78,  n'83;  cf.  p.  479. 

(6)  Aug.  Bernard.  Cariuiaire  de  Savigny^  p.  82,  282,  1128;  Bruel,  Recudî 
des  chartes  de  l'abbaye  de  Cluny ^  t.  II,  p.  295;  t.  III,  p.  278. 

(7)  C.  /.  L.,  X,  6377.  —  Cf.  Marcius  ci-dessus,  p.  270-275,  411. 


NOMS  DE  UEU  DERIVES  DE  Q^NTILICEB  EN  -  E  N  U  S .       455 

LucENNACUS  est  le  nom  ancien  de  Luceiiay-le-Duc  (Côte- 
d'Or),  de  Luzinay  (Isère)  et  de  Lucenay  (Rhône).  C'est 
établi  pour  lés  deux  premiers  par  des  chartes  du  neu- 
vième siècle  (1),  pour  le  secoud  par  une  charte  du 
dixième  (2).  lAicennacw  suppose  un  gentilice  *  Lucenus  dont 
nous  n'avons  pas  d'exemple;  mais 'Lucenus  n'est  pas  néces- 
saire seulement  pour  expliquer  Lucennacus  :  de  *  Lucenus 
dérive  le  gentilice  Lucenius  attesté  par  deux  inscriptions  (3). 
L'une  est  italienne.  Mais  l'autre  est  tout  particulièrement 
intéressante  pour  nous  parce  qu'elle  a  été  trouvée  eo  France, 
près  de  Nîmes  ;  c'est  l'épitaphe  de  Lucenia  Duritata  (4). 

Fenay  (Côte-d'Or),  déjà  Faenay  en  1163  (5/,  se  serait 
appelé  Fedenniacuê f  au  huitième  siècle,  si  l'on  s'en  rap- 
porte aux  diverses  éditions  d'un  diplôme  de  l'année  734  (6); 
il  faut  ûter  l'i,  il  faut  écrire  Fedennacus,  notation  basse 
d'un  plus  ancien  Fidennacus.  Fidennacus  dérive  du  gen- 
tilice 'Fidenus,  et  'Fidenus  est  nécessaire  pour  expli- 
quer le  gentilice  dérivé  Fidenius  dont  le  féminin  Fidenia 
nous  est  conservé  par  une  inscription  d'Afrique,  c'est  l'épi- 
taphe de  Fidenia  Victoria  (7).  'Fidenus  sert  de  pendant  à 
Pidius,  gentilice  qui  se  rencontre  dans  les  inscriptions 
d'Espagne  (8)  et  d'Italie  (9).  En  France ,  le  musée  de  Mar- 
seille possède  une  lampe  qui  provient  de  la  fabrique  de 
L.  Fidius  Secundus;  elle  a  été  trouvée  dans  la  ville  d'Ar- 
les (10). 

(1)  Ponr  Lucenay-le-Duc ,  un  diplAme  de  l'année  8S3  (Dom  Bouquet,  IX, 
430  c);  pour  Luzinay  (lEére),  un  diplôme  de  653  environ  (Dom  Bouquet, 
V]II,389d)et  un  autre  de  885  (Cari  u  (aire  de  Saint-Hugues  de  Grenoble,  p.  11). 

(ï)  AuK-  Bernard.  CaHuIatrs  de  Saoigny,  p.  654,  t12T. 

(3)  C.  /.  L.,  V,  7890;  XII,  1063. 

(4)  ma.,  t.  XII,  p.  497  Bt  84Î,  n-  4063.  —  Cf.  Luciua.  ci-dessus,  p.  259. 
[b]  cmu  Christiann,  IV,  coi.  584  s. 

(6]  Pardessuc,  DiplomtU,  t.  Il,  p.  366;  cf.  Oaraier,  Nomenetaturt  hlgto- 
Tiqut,  p.  27,  n'  118. 
(7)  C.  ;.  L.,  VIII,  5582. 
(Stibid..  11,834,  835,2153. 
(B)  Ibid.,  V,  3609;  X,  4136,  6606. 
(10)  Ibid.,  XII,  5663,  45.  -  Cf.  ci-dessus,  p.  231. 


4i6  LIVRE  II.  CHAPITRE  IV,  {  3. 

§3.  —  Les  noms  de  lieux  en  -acus,  dérivés  de  gentilices 
romains  en  -enus  qui  se  rencontrent  dans  le-s  inscriptions 
ou  dont  on  trouve  un  dérivé  dans  les  inscriptions;  T  section 
caractérisée  par  Vn  non  doublée  du  suffixe  -enus. 

II  y  a  deux  noms  de  lieux  dérivés  de  gentilices  en 
-enus ,  dont  les  documents  romains  établissent  l'existence , 
mais  pour  lesquels  les  documents  français  n'offrent  aucune 
trace  du  doublement  de  Vn.  Ce  sont  Artenacus  et  Catenacus. 

ÂRTENAGus  a  été  un  nom  de  lieu  assez  répandu  en 
France.  Le  plus  ancien  exemple  que  j'en  aie  recueilli  date 
de  Tannée  1164  (1),  c'est  Artenac,  aujourd'hui  commune 
de  Saverdun  (Ariège).  Le  Dictionnaire  des  Postes  men- 
tionne deux  autres  Artenac,  l'un  est  une  commune  du 
département  de  la  Charente,  l'autre  un  hameau  du  même 
département;  tous  deux  ornent  leur  nom  d'une  h  après  le 
t.  On  admire  la  même  décoration  dans  le  nom  d'Arthenas, 
commune  du  Jura,  et  dans  celui  d'Arthenay,  écart  de 
l'Hommet  (Manche).  On  écrit  sans  h  les  noms  d'Artenay, 
commune  du  département  du  Loiret  et  des  trois  hameaux 
d'Artenay  (Maine-et-Loire,  Deux  Sèvres  et  Vienne). 

Artenacus  est  dérivé  d**Artenus  variante  d'Artennus,  dont 
la  forme  féminine  employée  avec  sens  masculin  nous  est 
conservée  par  une  inscription  d'Histonium  dans  Tltalie 
centrale  ;  cette  inscription  débute  par  les  noms  de  C.  Ar- 
tenna  Pudens  (2). 

Le  nom  de  la  vicaria  Catenacensis,  en  Anjou,  apparaît 
dans  une  charte  de  l'année  818  (3).  Le  nom  de  cette  vicai- 
rie  est  dérivé  de  celui  dune  villa  *  Catenacus^  dérivé  lui- 
même  d'un  gentilice  *  Catenus^  dont  on  n'a  pas  d'exemple, 


(1)  Douais,  CariulsLire  de  Saint-Sernin  de  Toulouse,  p.  370,  586. 

(2)  C.  /.  L.,  IX,  2838.  —  Sur  Artius,  voyez  ci-dessus,  p,  381-401. 

(3)  Mabille,  Pancarte  noire  de  Saint-Martin  de  Tours,  p.  82. 


NOHB  DE  LIEU  DÉRIVÉS  DE  OENTILICEB  EN  -ENUS.       157 

mais  qui  a  certainement  existé  puisqu'il  a  donné  le  genti- 
lice  dérivé  Catenius  attesté  par  deux  inscriptions  (l).  '  Cate- 
Dus  était  parallèle  à  Catius  qui  est  fréquent. 

S  4.  —  Les  noms  de  lieux  en  -acus  dérivés  de  gentilices  en 
-enus  dont  les  inscriptions  n'ont  conservé  d'autre  trace  que 
le  gentilice  en  -ius  correspondant. 

Ayant  donné  ces  exemples  de  noms  de  lieux  en  -ennaous 
ou  -enacus,  dérivés  de  gentilices  romains  en  -«tus  dont 
l'existence  est  démontrée,  on  pourra,  ce  semble,  sans  témé- 
rité, faire  remonter  à  des  gentilices  en  -enus  les  noms  de 
lieu  suivants,  pour  lesquels  les  textes  antiques  ne  nous 
offrent  que  des  gentilices  en  -ius. 

Albucennacus  villa  in  agro  Forensi  (2)  est  mentionné 
dans  une  chîirte  de  960  environ.  Les  inscriptions  n'ont 
pas  fourni  d'exemple  d'*AlbuceQus,  mais  Albucius  est  très 
connu  ;  on  en  compte  quarante-trois  exemples  masculins 
dans  les  tomes  III,  V,  et  XII,  du  Corpus  Inscript,  latin. 

Antennacus,  au  diocèse  de  Reims,  aujourd'hui  Anthe- 
nay  (Marne),  nommé  plusieurs  fois  au  neuvième  siècle  par 
les  Annales  de  Saint-Bertin  (3),  dérive  du  gentilice  *  Ante- 
nus  dont  on  n'a  pas  d'exemple,  mais  qui  était  parallèle  au 
gentilice  Antius  (4).  Cf.  Ance  et  Ancy,  p.  378,  379. 

Bessenacensis  ager  et  Bessenacus  villa,  dont  il  est  question 
plusieurs  fois  au  neuvième  et  au  dixième  siècle  dans  les 
chartes  de  l'abbaye  de  Savigny  (5) ,  suppose  un  gentilice 
'Bessenus;  ce  gentilice,  qui  n'a  pas  été  signalé  jusqu'ici, 


(I)  C.  I.  L.,  m,  33TT;  X,  4345.  —  Sur  CbUub,  voyez  ci-deuna,  p.  213. 
[1)  A.  Bernard,  Carlulslre  de  Swigny,  p.  Kt, 

(3)  D.  Bonquet,  VII,  122  d,  123  b.  Higne, Pair.  laL,  1.  CXXV,  col.  1280,  128t. 

(4)  C.  ;.  z,.,  I,  834  ;  II,  438;  X,  4584,  4597,  7228,  7352;  XIV,  324,  325,  1731. 

(5)  A.  Bernard,  Carlulafre  de  Savigny,  p.  3t,  110,  254. 


458  LIVRE  II.  CHAPITRE  IV.  {  4. 

était  parallèle  à  Bessius,  gentilice  ou  cognomen  connu  par 
une  loi  de  Tan  291  de  notre  ère  (1),  et  probablement  dérivé 
du  nom  de  peuple  Bessus.  Bessenacus  est  aujourd'hui  Bes- 
senay  (Rhône).  De  Bessius  est  dérivé  Bissiacus^  nom  de 
Bissy-la-Màconnaise  et  de  Bissy-sous-Uxelles  (Saône-et- 
Loire)  dans  un  pouillé  de  1500  environ  (2). 

BouTENACHus,  aujourd'hui  Boutenac  (Aude),  apparaît  dans 
une  charte  en  1185  (3).  Ce  nom  de  lieu  dérive  du  gentilice 
*  Boutenus ,  parallèle  à  Boutius.  Boutius  est  employé  avec 
valeur  de  cognomen  ou  de  nom  pérégrin  dans  sept  inscrip- 
tions d'Espagne  ;  c'est  le  nom  d'un  potier  :  un  vase  du  mu- 
sée de  Vienne  (Isère)  porte  la  marque  Boutius  f(ecit)  (4). 

Carendenacus ,  aujourd'hui  Carennac  (Lot),  memionné 
en  932  dans  une  charte  que  nous  a  conservé  le  Cartulaire 
de  Beaulieu  (Corrèze)  (5) ,  a  dû  s'appeler  primitivement  Ca- 
rantenacus  et  dérive  d'un  gentilice  *Carantenus,  parallèle 
à  Carantius,  gentilice  d'origine  gauloise,  dont  plusieurs 
inscriptions  attestent  l'existence  (6).  Cf.  ci-dessus,  p.  211. 

Cavennacus  est  le  nom  d'une  villa  au  neuvième  siècle 
dans  une  charte  de  l'abbaye  de  Savigny,  c'est  aujourd'hui 
Chevinay  (Rhône)  (7).  Cavennacus  dérive  de  ''Cavenus  dont 
on  n'a  pas  d'exemple  (8),  mais  qui  est  parallèle  au  genti- 
lice Cavius  (9). 

CoRTENNAGus  pour  Curtennocus  ^  aujourd'hui  Courtenay 


(1)  Gode  Justinien,  livre  IV,  t.  i,  1.  6. 

(2)  Aug.  Bernard,  CaHuIatre  de  Savigny,  p.  1049,  l!08. 

(3)  Guérard,  Cariulàire  de  Saint-Victor  de  Marwilte,  t.  II,  p.  401,  819. 

(4)  C.  /.  L.,  II,  408,  458,  620,  744,  756,  794,  2786;  XU,  5686,  140. 

(5)  Deloche,  Cartulaire  de  Beaulieu,  p.  88. 

(6)  C.  J.  L.,  III,  3916;  XII.  2602,  2854,  2860,  3208,  3209. 

(7)  Aug.  Bernard,  Cartulaire  de  Savigny,  p.  243,  1115. 

(8)  On  pourrait  supposer  que  Cavinnius  (C.  /.  L.,  X,  4325)  =  *Caveimias, 
dérivé  de  ^Cavenus. 

(9)  C.  /.  L.,  XIV,  790  ;  cf.  II,  4970,  127,  128. 


NOMS  DE  LIEU  DÉRIVÉS  DE  GENTIL1CE8  EN  -ENUB.  45! 
(Isère),  apparaît  dans  deux  chartes  du  neuvième  siècle  (1). 
H  suppose  un  gentilice  'Curtenus,  parallèle  au  célèbre  gen- 
tilice  romain  Curtius,  qui  pénétra  en  Gaule  comme  oc 
peut  le  voir  par  l'inscription  de  Nimes  où  figure  C.  Curtius 
Primitus  (2),  et  par  l'èpitaphe  de  A.  Curtius  Zosimus,  qui 
a  autrefois  existé  &  Narbonne  (3). 

CosENACus.  Une  charte  du  dixième  siècle  met  dans  k 
pays  de  MAcou  un  ager  Cosenacensis  (4).  Le  nom  de  ce1 
aggr  suppose  une  villa  Cosenacus,  dont  le  nom  dérive  d'un 
gentilice  'Cosenus,  parallèle  à  Cosius.  Le  musée  d'Arles 
possède  l'èpitaphe  de  C.  Cosius  Trophimas  (5).  Il  a  existé, 
sous  l'empire  romain,  deux  potiers  nommés  Cosius  UraniuE 
et  Cosius  Vrappus;  on  a  recueilli  aux  musées  d'Arles,  de 
Narbonne  et  de  Nimes ,  des  produits  de  leur  industrie  (6). 

Frontennacus  est  le  nom  d'une  villa  qui  parait  avoii 
été  située  en  Lyonnais  suivant  un  document  écrit  vers  Is 
fin  du  dixième  siècle  ou  le  commencement  du  onzième  (7): 
c'est  Prontenas  (Rhône).  On  peut  en  rapprocher  ;  Frontena- 
gtis ,  au  comté  de  Brioude,  suivant  une  charte  de  l'an 
née  895  (8)  ;  les  trois  communes  de  Frontenay  (Jura . 
Deux-Sèvres ,  Vienne)  ;  les  deux  communes  de  Fronte- 
nac (Gironde  et  Lot).  L'orthographe  Fronteniacus  =  Fron 
lenay  (Vienne),  dans  une  charte  de  l'année  889  (9),  esl 
défectueuse,  il  faut  retrancher  un  i  et  écrire  Frontenacus 
Frontenaeus  vient  de  '  Frontenus,  parallèle  à  Frontius  doni 
te  féminin  Frontia  est  conservé  par  une  inscriptior 
d'Aouste  (Drôme)  (10). 

(1)  Carlulairc  d«  Safnt-Huguu  de  Grenoble,  p.  11,  73,  527, 
(î)  C.  /.  L.,  XII,  3773. 

(3)  Ibid.,  XII,  4766,  —  Cf.  ci-dessus,  p.  225-226. 

(4)  Brnel,  Recueil  de»  chsriM  de  J'abbaj/e  de  Cluny,  t.  II,  p.  492. 
(b)rbfd.,XII,  890. 

(6)  Ibid.,  XII,  56S6,  268,  269. 

(7)  Brnel,  Becueil  des  cftariee  de  l'abbaye  de  Cluny,  t.  III,  p.  361. 

(8)  DonJol,  Car[u(afre  de  Brioude,  p.  161. 

(9)  Redet,  Dictionnaire  topograph,  du  d^parlemenl  de  (a  Vienne,  p.  161 

(10)  C.  /.  L.,  XM,  1723,  —  Do  là  Fronaac  (Hante-Oaronne.  Gironde), 


460  LIVRE  II.  CHAPITRE  IV.  2  4. 

Lentennacus.  Suivant  la  chronique  de  Tabbaye  de 
Saint-Bénigne  de  Dijon ,  le  roi  Gontran  aurait ,  en  587 , 
donné  à  cette  abbaye,  des  biens  dans  plusieurs  villae^ 
notamment  in  Lantennaco  (1),  qui  est  aujourd'hui  Lante- 
nay  (Côte-d'Or)  (2).  Il  y  a  un  autre  Lantenay  dans  le  dépar- 
tement de  l'Ain.  Lanthenay  (Loir-et-Cher)  n'en  diffère  que 
par  une  fantaisie  orthographique.  Il  est  probable  que 
l'a  de  la  première  syllabe  tient  lieu  d'un  e  primitif;  la 
forme  primitive  serait  donc  Lentennacus^  dérivé  d'un  genti- 
lice  *  Lentenus.  *  Lentenus  est  parallèle  à  Lentius  conservé 
par  Tépitaphe  de  Lentius  Pudentius  à  Cabasse  (Var)  (3),  et 
par  le  nom  de  Lentia,  aujourd'hui  Linz,  en  Autriche. 
La  Notitia  Dignitatum  nous  apprend  que  le  duc  de  la 
Pannonie  première  avait  sous  ses  ordres  1"*  des  archers  à 
cheval  cantonnés  à  Linz ,  équités  sagitta/i*ii  Lentiae  ;  2*  un 
préfet  de  la  legio  secunda  italica ,  établi  avec  une  section 
de  cette  légion  dans  la  même  ville ,  Lentiae  (4). 

Sentennacus.  Santenay,  nom  de  deux  communes,  l'une 
de  la  Côte-d'Or,  l'autre  de  Loir-et-Cher,  et  d'un  hameau 
de  rindre-et-Loire,  commune  de  Bourgueil,  paraît  être  un 
ancien  Sentennacus  dérivé  de  *Sentenus;  et  de  *Sentenus 
on  peut  rapprocher  Sentius ,  gentilice  assez  fréquemment 
employé  sous  l'empire  romain  :  quatre  Sentius  furent 
consuls  de  l'an  19  avant  J.-C.  à  Tan  41  après  J.-C.  On 
peut  compter  soixante  et  dix  exemples  du  gentilice  Sentius 
au  masculin  dans  les  tomes  II,  III,  V,  VIII,  X  et  XII  du 
C.  L  L.  ;  sur  le  nombre,  six  appartiennent  à  la  Gaule.  Ce 
gentilice  existait  déjà  sous  la  république.  Ainsi  en  l'an  82 
avant  notre  ère ,  C.   Sentius  Saturninus  était  préteur  et 


(1)  Chez  Migne»  P&trologia  latin&y  t.  CLXII,  col.  768  c,  Lantennaco,  par 
ri  pour  n,  contient  uno  faute  d'impression.  Comparez  Tédition  de  cette 
chronique  donnée  par  Bougaud  et  Garnier,  p.  29  et  100. 

(2)  Gamier,  Nomenclature^  p.  10,  n»  36. 

(3)  C.  /.  L.,  XII,  345. 

(4)  Edition  Bœcking,  t.  II,  p.  99, 100;  cf.  Mommsen  dans  le  C.  /.  L.,  t.  III, 
p.  690.  —  Voyez  aussi  ci-dessus,  p.  361. 


NOMS  DE  LIEU  DÉRIVÉS  DE  GENTILIGES  EN  -ENUe.       461 

exerçait  un  commandement  en  Macédoine,  Gicéron  fait  son 
éloge  dans  sa  deuxième  Verrine  (1),  et  parle  aussi  de  lui 
dans  son  discours  contre  Pison  (2).  Cf.  Sentiacus,  p.  315. 

Trebennacus,  Une  finis  de  Trevennaco  est  mentionnée 
par  une  charte  de  l'anoée  889  (?)  (3).  Trevennaeus  parait 
une  notation  de  basse  époque  pour  Trebennacus  de  '  Tre- 
benus.  *Trebenus  est  le  pendant  de  Trebius.  Trebius  ap- 
paraît pour  la  première  fois  dans  l'histoire  romaine  en 
l'an  216  avant  J.-C;  c'était  le  cognomen  du  Samnite  9ta- 
tius  Trebius,  de  Compsa,  aujourd'hui  Conza,  qui  se  rangea 
du  côté  d'Annibal  contre  les  Romains  après  la  bataille  de 
Cannes  (4).  Au  siècle  suivant,  Trebius  fut  le  gentilice  d'un 
savant  romain,  Trebius  Niger  (5).  Le  gentilice  Trebius  de- 
vint assez  répandu  sous  l'empire  :  en  l'an  133  de  notre  ère, 
C.  Trebius  Sergianus  obtint  les  honneurs  consulaires  (6), 
on  peut  compter  dans  les  tomes  II,  III,  V,  VIII  et  XII  du 
C.  I.  L.  quarante-deux  exemples  masculins  du  gentilice 
Trebius  ;  sur  ce  nombre  sept  appartiennent  à  la  Gaule. 

On  terminera  par  deux  noms  de  lieu  dont  l'étymologie 
pourrait  sembler  difficile  si  les  faits  précédemment  énoncés 
n'étaient  connus.  Ces  noms  de  lieux  sont  Neriennacus  et 
Aspemaous. 

Nertennacus.  En  1145,  une  bulle  du  pape  Eugène  III 
énumére  les  biens  de  l'abbaye  de  Crisenon  (Yonne)  :  dans 
le  nombre  se  trouve  une  grange  de  Nertennaco  (7).  Nerten- 

(1)  Livre  III,  î  217. 

(2)  !  84.  ~  Sur  lu  gens  Seatia,  vojez  Paul/,  Real-Encyclopaedie ,  t.  VI. 
p.  1047-1049.  —  Mon  savant  confrère  M.  Simèon  Luce,  ai  connu  par  ses 
savants  travaux  sur  l'histoire  du  quatorziâme  et  du  quinzième  siècle,  me 
signale  un  exemple  do  Sentenacus,  c'eat  Saint-Eny,  lisez  Bainteny  (Manche). 

(3)  Aug.  Bernard,  Carlulaire  de  Sivigny  (Rhône),  p.  tj. 

(4)  Tite-Live,  1.  XXIII,  c.  1. 

(5)  Pline,  Hiiloire  naturelle,  I.  IX,  J  S9i  cf.  TeuSel,  GeschichU  der  rœ- 
miichen  Lileratur,  3"  édit.,  p.  211, 

(6)  Jos.  Klein,  Fasli  consuUres,  p.  6â. 

(7)  Quantin,  CaH.  de  fY'mne.  t.  I,  p.  391. 


462  LIVRE  II.  CHAPITRB  IV.  {  4. 

nacus  suppose  un  gentilice  *  Nertenus  et  ^Nertonus  un  paral- 
lèle *Nertius  ;  on  ne  trouve  ni  *  Nertenus  ni  ^Nertius,  mais 
le  dérivé  Nertennacus  prouve  l'existence  de  *  Nertenus  ;  et 
quant  à  *  Nertius  son  existence  est  démontrée  par  le  dérivé 
Nertiaous  écrit  Nerciacus  au  cas  direct,  Neroiaco  au  cas 
indirect,  dans  deux  chartes  des  environs  de  l'an  mil  (1); 
c'était  une  villa  située  en  Forez.  *  Nertius  est  un  dérivé  du 
gaulois  nerk>'n  «  force.  » 

ÀsPERNAGus.  Près  d'Aveuay  (Marne)  ==  Àvemuicus,  se 
trouve  Epernay ,  même  département  ;  c'est  un  ancien 
Aspernacus  avec  métathèse  de  Vr  pour  Asprenacus  d'As- 
prenus.  Asprenus  est  le  gentilice  corrélatif  d'A^rius  (2). 
D'Asprenus  je  ne  connais  d'exemple  qu'avec  la  valeur  de 
cognomen{3).  Des  savants  français,  au  neuvième  siècle,  ont 
cru  bien  faire  de  supprimer  la  voyelle  initiale  du  dérivé 
comme  on  la  supprimait  quand  on  remontait  d'  <k  espérer  »  au 
latin  sperare,  d'  «  esprit  »  kspirilus;  ils  ont  donc  écriiSpemor 
cus,Sparnacus(k).\ud^  bonne  orthographe  est  conservée  par  le 
Cartulaire  de  Saint-Hugues  de  Grenoble^  où  des  gens  moius 
instruits  ont  écrit ,  dans  une  charte  du  commencement  du 
douzième  siècle ,  parrochia  de  Aspemaico  (5) ,  un  nom  de 
village,  aujourd'hui  Epernay,communed'Entremont(Savoie). 
Il  n'y  a  pas  à  s'occuper  ici  de  l'orthographe  -aious^  où  Yi 
représente  la  prononciation  réelle  de  la  gutturale  dans  le 
suffixe  -acus  à  partir  de  Tan  700  environ ,  et  où  le  c  a  une 
valeur  historique.  Aspernaiciis  =  Aspernacus  =  Asprenacus. 


(1)  Aug.  Bernard,  Cart,  de  Savignyy  p.  72,  373. 

(2)  Asprius,  C.  /.  L.,  XII,  2633. 

(3)  C.  /.  L.,  X,  2848.  Le  dérivé  Asprenas  est  plus  fréquent. 

(4)  La  notation  Spern&cus  se  trouve  dans  un  diplôme  de  Tannée  825 
(D.  Bouquet,  VI,  544  a);  Sparnacus  dans  la  partie  des  Annales  de  Stint- 
Berlin  écrite  par  Prudence,  évéque  de  Troyes,  année  846  (D.  Bouquet, 
t.  VI,  p.  64  b;  Migne,  Patrologia  latina,  t.  115,  col.  1399  a),  etc.  Il  s'agit 
d'Ëpernay  (Marne).  Spernacus,  dans  un  diplôme  de  834  (D.  Bouquet,  t  VI, 
p.  596  b,  désigne  Epernay  (Côte-d*Or). 

(5)  Page  172,  cf.  519. 


CHAPITRE  V. 


EXEHPLB9  ,    kfl    MOYEN    AGE ,   DE    NOMS   DE    LIEU 
A   DES   eHNTILIGBS   H0MAIN3   EN   -#nW 


)  1.  Noms  de  lisuz  identiques  à  des  gentilicas  es  -enuê 
étudiés.  —  I  2.  Noms  do  lieux  identiques  à  des  gentilice! 
on  ne  connut  que  des  parallétee  en  'iut.  Ces  noms  de  liei 
«ulins  singuliers,  B.  Féminins  singnllera.  G.  Féminins  pli 

S  1".  —  Noms  de  lieux  identiques  à  des  gentilii 
précédemment  étudiés. 

Atekna  est,  dans  une  charte  de  1115,  le  non 
mune  d'Avéne  (Hérault)  (1).  Il  a  été  question 
p.  454 ,  du  gentilice  Avenus.  Peut-être  doit-c 
(le  la  même  façon  le  nom  de  la  colUs  Aven 
charte  de  1043  qui  concerne  une  localité  siti 
Saiiit-Cassian,  commune  du  Muy  (Var)  (2). 

TuRENNA  ou  Torenna,  nom  de  Turenne  (' 
moyen  âge,  est,  comme  on  l'a  dit  p.  442, 
Turennus,  employé  comme  eognomen  dans  uni 
d'Espagne,  mais  qui  doit  avoir  été  aussi  un  ge 
léle  au  gentilice  romain  Turius. 


(I)  Eugèno   Thomas ,   Dictionnaire   lopographique    du 
VUirauU,  p.  10. 
G)  Guérard,  Carlulajre  de  Saint-Victor  de  Marxpille.  t.  1 


464  LIVRE  II.  CHAPITRE  V.  {  2. 

Cavenas,  en  885,  dans  un  diplôme  de  Saint-Marcel  de 
Ch&lon-sur-Saône  (1)  est  identique  au  gentilice  qui  expli- 
que le  dérivé  Cavennacus  cité  p.  458. 

§2.  —  Noms  de  lieux  identiques  à  des  gentilices  en  -enus 
dont  on  ne  connaît  que  les  parallèles  en  -lus. 

Les  trois  noms  de  lieux  dont  il  vient  d'être  question 
sont  féminins;  les  deux  premiers  singuliers,  le  dernier 
pluriel.  Ceux  dont  il  nous  reste  à  parler  se  divisent  en 
trois  classes  :  A  masculins  singuliers  ;  B  féminins  singu- 
liers ;  C  féminins  pluriels. 

Â.  — '  Sont  masculins  singuliers  : 

CuRENNus ,  situé  dans  le  pays  de  Gap,  suivant  le  testa- 
ment d'Abbon,  en  739  (2)  ;  c'est  aujourd'hui  Corenc  (Isère). 
Une  charte  de  924  mentionne  une  villa  appelée  altus  Co- 
r&nnus  (3),  c'est  le  môme  nom.  Curennus  est  un  gentilice 
parallèle  à  Curius.  Curius  est  un  gentilice  romain  bien 
connu  qui  a  été  surtout  illustré  par  M\  Curius  Dentatus, 
trois  fois  consul,  en  290,  en  275  et  en  274  av.  J.-C,  enfin 
censeur  en  272.  Ce  gentilice  se  maintint,  sous  Tempire,  à 
Rome  et  hors  de  Rome  comme  on  peut  le  voir  par  les  in- 
scriptions (4).  On  le  trouve  en  Gaule  :  à  Vaison  (5) ,  à  Ni- 
mes  (6). 

Maurennus  est  écrit  au  cas  indirect  Morennum^  en  849, 
dans  une  charte  du  Cartulaire  de  Brioude  qui  nous  apprend 
que  cette  localité  était  située  en  Auvergne,  dans  Yaicis 


(1)  Dom  Bouquet,  IX,  337  c. 

(2)  Pardessus,  Diplom&la,^  t.  II,  p.  373. 

(3)  Doniol,  Cartulaire  de  Brioude,  p.  39. 

(4)  C.  /.  L.,  VI,  16629-16633;  X,  4103,  etc. 

(5)  Ibid.,  XII,  1407. 

(6)  Ibid.y  XII,  3201.  —  Sur  le  gentilice  Curius,  voyez  De-Vit,  Onomëtticon, 
t.  II,  p.  513,  516,  517. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GENTILICE8  EN  -E NU 8.  465 

Mussiacensis  (1).  *Maurennus  est  un  gentilicê  parallèle  à 
Maurius  dont  on  a  parlé  p.  281,  282. 

*  Severennus  est  probablement  l'orthographe  primitive 
du  nom  de  lieu  appelé  Cevrennus  dans  une  bulle  du  pape 
Urbain  II  pour  le  prieuré  de  Saint-Martin  des  Champs  de 
Paris,  en  1096.  C'est  aujourd'hui  Sevron  (Seine-et-Oise)  (2). 
Severenus  est  un  gentilice  parallèle  à  Severius  qui  a  donné 
Severiacus^  Civry  ou  Sivry,  étudié  p.  316-319. 

B.  —  Sont  féminins  singuliers  les  suivants  : 

Takvenna,  aujourd'hui  Thérouanne  (Pas-de-Calais).  Cette 
ville  existait  déjà  au  second  siècle  de  notre  ère  puisqu'elle 
est  mentionnée  par  le  géographe  Ptolémée.  L'orthographe 
de  son  nom  a  varié.  Celle  à  laquelle  on  doit,  ce  semble, 
donner  la  préférence  a  été  adoptée  par  Vltinéraire  d'An- 
tonin  où  on  la  trouve  trois  fois  (3)  ;  elle  est  confirmée  par 
Grégoire  de  Tours  (4) ,  qui  appelle  les  habitants  Darabenn 
nenses  en  intercalant  un  a  hystérogène  entre  Vr  et  le  b. 
Une  orthographe  moins  bonne  substitue  un  a  à  Ve  de 
Tavant-dernière  syllabe  ;  c'est  la  notation  préférée  par 
Ptolémée  (5)  ;  on  la  trouve  aussi  dans  un  diplôme  de  l'an- 
née 662 ,  où  se  rencontre  plusieurs  fois  le  dérivé  Tarvan^ 
mnsis  (6);  dans  la  chronique  dite  de  Prédégaire,  où  le 
même  adjectif  est  noté  Tharawanninsis  (7).  Il  faut  corriger 
eu  Tarvenna  le  Tervanna  de  la  Table  de  PeuHnger  (8)  où, 
comme  aujourd'hui,  l'ordre  d'à  et  à'e  est  interverti. 

Tarvenna,  nom  de  lieu,  doit  son  origine  à  un  gentilice 


(1)  Doniol,  Cartulëiire  de  Brioude,  p.  112. 

(2)  Robert  de  Lasteyrie,  Cartulaire  de  Pari»,  p.  489. 

(3)  Itinéraire  d'Antoniny  p.  376,  1.  4;  p.  378,  1.  9;  p.  379,  1.  1. 

(4)  Historia  Francorum,  livre  V,  c.  18;  édit.  Arndt,  p.  215,  1.  6. 

(5)  Ta(>ovàvva,  livre  II,  c.  9,  i  4;  édit.  Didot-MûUer,  t.  I,  p.  223. 

(6)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  124. 

(7)  Livre  III,  c.  78;  éd.  Krusch,  p.  114. 

(8)  E.  Desjardins,  Géographie  de  la  Gaule  d'après  la  Table  de  Peulinger 
p.  85. 

30 


parallèle  à  Tarvius,  epiployé  cojsxme  gentilice  ^Uos  uoe 
inscription  de  Crémone  (1).  Ta?viijis  est  d^riw  4u  cognomm 
Tarvos  recueilli  dans  une  inscription  de  Lucanie  (2).  De 
Tarvos  est  venu  non  seulement  le  gentilice  Tarviu»,  mais 
aussi  le  nom  pérégrin  Tanracus,  gui  a  été  porté  par  un 
potier  dont  on  a  trouvé  des  produits  en  Suisse  (3)  et  dans 
TÂllemagne  méridionale  (4).  Le  nom  de  k  ▼ille  de  Tré- 
vise ,  en  latin  Turviswm  (&) ,  paraît  aussi  être  dérivé  de 
tarvos;  on  sait  que  Èarvo$  est  le  xiom  gaulois  du  tsureati. 

^ViTULENA  villa  est  profetblement  Terthographe  la  plus 
ancienne  du  nom  d'une  localité  appelée  Vitlena ,  en  927 , 
dans  un  diplôme  des  empereurs  Louis  le  Débonnaire  et 
Lothaîre  (6).  Le  même  nom  de  lieu  parait  désigner  une  ou 
deux  localités  différentes  dans  deux  diplômes  de  Charles  le 
Chauve  pour  Tabbaye  de  Saint-Martin  de  Tours  en  849  et 
en  862  (7).  Le  gentilice  *VituIeuus  était  parallèle  à  un  gen- 
tilice Vitulius  (8),  variante  de  VituUius  (9),  et,  probable- 
ment aussi,  du  gentilice  beaucoup  plus  connu  Vitellius  (10). 

C.  —  B»t  au  féminin  pkifiél  : 

*  Cât^nas  noté  Cadmo  dans  le  Polyptyque  de  SainhGer^ 
n^in  des  Prés  (il).  M.  Loagnon  a  constaté,  que  c*est  au- 
jourd'hui Chône^Chenu  (JËure^t^Loir).  Ce  nom  de  liaa 
s'explique  par  un  gentilice  ^Catenus,  parallèle  à  Çatius;  il 
4  été  question  de  Gatius  p.  2i3'r214. 


(1)  c.  h  L.,  V,  4091  ;  «1  t.  m,  p.  8SS. 

(2)  /Md.,  X,  292« 

(3)  Ibid.,  XII,  5686,  863. 

(4)  Ibid.,  III,  6010.  217. 

(5)  Voyez  les  textes  rémniê  par  M.  MttasMB,  C.  I.  L»,  i,  V,  p. 

(6)  Tardif,  Monuments  Mâioriquêe^  p.  83,  col.  1. 

(7)  MabUla,  Lap&ncarto  noire  dû  Saint^Martin  de  Tàurû,  p.  238  ;  cf.  UT,  m. 

(8)  C.  /.  L.,  X,  5589. 

(9)  Ibid,,  V,  3233,  4541. 

(10)  Sur  le  gentilice  Vitellius,  voyez  Pauly,  Rfi&l^SncyclopMêdie ,  t.  VI, 
p.  2681-2689. 

(11)  Ed.  Longnon,  p.  124. 


CHAPITRE  VI, 

ElEMPl.ES,    AU    MOYEN    AGB,    DS    NOMS    DE    LIEUX    EN    -OCUS 
t>ÉRfVlÈâ   ANlnÈRlEURÉMENT   DE   GOdNOMINA  ROMAINS. 

SoiouiRs  : 

1 1.  Co^nùTHinSL  é^tftigitré  latine.  —  (  ^.  CognotninsL  d'érlgine  ethbograpbî- 
%«e.  —  i  3.  Cogrmrhin%  d^origint  groQ^tie.  -^  |  é.  Cocmomtea  diveri  d*ort- 
giaa  barbare. 

§  !•'.  —  Cognomina  d'origine  latine. 

^ÂssLLAGus.  Une  charte  du  douzième  siècle,  insérée  dans 
le  Ca/rtulaire  de  Vctbbaye  de  Conques  (Aveyron)^  a  pour  objet 
la  donation,  à  cet  établissement  monastique,  de  l'église 
d'Àsellac  (1).  M.  Gustave  Desjardins ,  éditeur  de  ce  cartu- 
laire,  suppose  (2)  que  cette  église  était  située  prés  de 
Montpezat  (Tarn-et-Garonne). 

Asellac  eèt  dérivé  à*Asellus.  Dans  deux  inscriptions, 
Asella,  féminin  d'Asellus,  est  un  cognomen.  Chacune  de 
ces  inscriptions  nous  montre  une  veuve  élevant  un  tom- 
beau à  son  mari.  L'une  de  ces  femmes ,  en  Afrique ,  s'ap- 
pelle Gteminià  Asella  (3).  L'autre,  en  f^rance,  à  Narfconne , 
s'appelle  Roscia  Asella  ;  l'inscription  est  consetvée  au  mu- 
sée de  Narbonne  (4). 

(1)  Page  379. 

(2)  Page  xcv. 

(3)  C.  /.  L.,  VIII,  2595. 

(4)  JWd.,  XII,  5171. 


468  LIVRE  II.  CHAPITRE  VI.  l  1. 

AselliÂSj  d*où  le  cognomen  féminin  Asella,  est  un  dimi- 
nutif d'asinus  «  àne ,  »  usité  à  la  fois  chez  les  poètes  et 
chez  les  prosateurs.  Ovide  (1)  compare  certaines  femmes  à 
Tànesse  qui  brait,  rudit,  en  faisant  tourner  la  meule  du 
moulin  : 

Ut  mdit  a  scabra  turpis  asella  mola. 

Les  pères  qui  ont  donné  le  surnom  d'Asella  aux  deux 
femmes  mentionnées  dans  les  inscriptions  précitées 
n'avaient  pas  ce  vers  présent  à  Tesprit,  et  Asella  exprimait 
pour  eux  une  idée  gracieuse. 

Dans  d'autres  inscriptions ,  Asellus ,  Asella  est  un  nom 
pérégrin.  A  Cagliari,  Asella,  morte  à  vingt-deux  ans,  est  la 
fille  d' Asellus ,  qui  lui  fit  élever  un  monument  funèbre  et 
qui,  plus  tard,  âgé  de  soixante  et  dix-neuf  ans,  vint  repo- 
ser à  côté  d'elle  (2);  ni  Tun  ni  l'autre  n'a  de  gentilice.  Près 
d'Aquilée,  on  a  recueilli  l'épitaphe  d'un  enfant  mort  à  deux 
ans  trois  mois  et  vingt  et  un  jours,  qui  s'appelait  Asellus , 
également  sans  gentilice  (3).  Il  est  probable  que,  dans  ces 
deux  cas,  nous  devons  reconnaître  le  substantif  latin 
asellus ,  «  petit  âne ,  »  donné  comme  nom  à  des  esclaves. 
On  trouve  aussi  ce  nom  porté  par  des  Juifs  tant  au  mas- 
culin (4)  qu'au  féminin  (5);  ici  on  peut  supposer  une  ori- 
gine étrangère ,  mais  il  est  peu  probable  qu'en  Gaule  il  y 
ait  eu ,  sous  l'empire  romain ,  des  Juifs  propriétaires  et 
donnant  leur  nom  à  un  fundus, 

*  AcERACus  parait  la  forme  primitive  d!Azeracus^  qui,  dans 
une  charte  du  douzième  siècle,  est  le  nom  d'Azerat,  com- 
mune du  département  de  la  Haute-Loire  (6). 

(1)  At9  amatoria,  HI,  290. 

(2)  C.  I.  L.,  X,  7629. 

(3)  /Md.,  V,  8572. 

(4)  Ihid,,  IX,  6220. 

(5)  Ihid.,  IX,  6212,  6223. 

(6)  Ghassaing,  Spicilegixim  Briva-tense,  p.  15. 


DÉRIVÉS  EN  -AC US  DE  SURNOMS  ROMAINS.  469 

Ce  nom  de  lieu  est  dérivé  du  cognomen  Acer.  On  a  trouvé, 
à  Nimes ,  Tépitaphe  de  Justus  Carinius  Âcer.  Justus  était 
le  prénom  de  ce  personnage;  Carinius,  son  gentilice; 
Acer,  son  surnom  (1).  On  a ,  dit-on ,  rencontré  à  Aix ,  en 
Provence ,  un  vase  de  terre  avec  le  nom  de  potier  au  gé- 
nitif Acri  (2),  qui  doit  probablement  s'expliquer  par  un 
nominatif  Acer.  Acer  est  un  adjectif  latin  qui  veut  dire  «  vif, 
ardent,  brave.  » 

*  BoNACus.  Une  ecclesia  de  Bonago  est  mentionnée  dans 
une  charte  probablement  du  onzième  siècle  (3)  ;  ce  paraît 
être  une  localité  des  environs  de  Toulouse.  Bonagus  est 
une  notation  basse  pour  un  plus  ancien  *  Bonacus  dérivé  de 
Bonus. 

Bonus  est  un  adjectif  latin  bien  connu  qui  a  été  em- 
ployé quelquefois  comme  cognomen.  Le  consulaire  Rupi- 
lius  Bonus  a  dû  vivre  au  premier  siècle  de  notre  ère  ;  il  fut 
le  père  de  Rupilia  Faustina,  grand*mère|paternelle  de  Tem- 
pereur  Marc-Aurèle,  né  Tan  121  (4).  Un  rescrit  de  l'empe- 
reur Gordien  fut  adressé,  en  241,  à  un  certain  A.  Bonus 
dont  le  gentilice  ne  nous  a  pas  été  conservé  (5).  Le  fémi- 
nin Bona  se  rencontre  comme  surnom  de  femme  en  Afri- 
que, Caecilia  Bona  (6),  Geminia  Bona  (7),  Cittia  Bona  (8). 

Bonacus  parait  la  forme  primitive  du  nom  des  commu- 
nes de  Bonac  et  Bonnac  (Ariège),  de  Bonnac  (Cantal),  de 
Bonnac  (Haute-Vienne) ,  de  Bonnat  (Creuse) ,  du  hameau 
deBonnat  commune  de  Mons  (Puy-de-Dôme),  peut-être  des 
deux  communes  de  Bonnay  (Doubs,  Somme). 

Bonnay  (Saône-et-Loire)  parait  avoir  une  autre  origine. 


(1)  C.  /.  L.,  XII.  3687. 

(2)  IMd.,  XII,  5686,  1054. 

(3)  Douais,  Cartulaire  de  Saiini-Sernin  de  Toulouse^  p.  192. 

(4)  Capitolin,  Vie  de  Mure-Antoine  le  philosophe,  c.  1,  §  4. 

(5)  Code  de  Justinien,  livre  VI,  titre  40,  loi  1. 

(6)  C.  /.  L„  VIII,  2252. 
.  (7)  Ihid,,  5709. 

(8)  Ibid.,  7768. 


m  LIVKE  n.  CHAPITRE  VI.  f  1. 

^CAtuLAGu^  doit  avoi*  été  là  notaticm  aBticjue'  du  nom 
ê»  )i6u  éotit  ft  )'abtaiif  Cadolaicù ,  dans^  un  di|yléin6  méro- 
vingien de  Ta-ûnée  7t0  (i). 

CafahiB  e^mmom  commun  latht  qui  veut  dire  «  petit  duo 
animrâi  >y  et,  dans  un  sen^  phis  restreint,  «  petit  chien.  » 
Il  a  été  employé  comtne^  cognoi/nen  en  Ganle  sous  Tempire 
romaifi.  Aili«),  oft  a  trouvé  :  à  Nimes,  utté  ins^criptroof  funè- 
bre gravée  par  ordre  d'un  affranchi  de  Q.  Maximlus  Catu^ 
lus  (2)  ;  à  Narbonne,  Tépitaphe  de  M.  Aemilius  Catulus  (3,. 
Une  kisori|rtioû  de  Oologné  est  destinée  à  rappeler  la 
reicoBistruction  du  prétoire  par  les'  soins^  du  légaf  impérial 
Q.  Tarquitius  Catulus  (4).  Une  inscription  funé^raiS'e  de 
Ntîm«rs  noos  fait  connaître  un  cefrtahi  Catulus  auquel  elle 
ne  donne  ni  prénom  ni  gentilice  et  qui  avait  un  affrsifehr; 
ee)ui-«i  donna  à  un  de  SÉfô  enfanta  le  nom  de  CatUnw 
pour  Cutfulmu^^  diminutif  du  coffnùmên  ou  du  nom  pérè- 
grin  porté  par  le  paUon  (5). 

Le  cognomen^  Catulus  fut  aussi  employé  comme  nom  de 
ti«a  san»  addition  de  suffib^.  Une  charte  de  l'année  936 
emiservée  dana  le  fonds  du  chapitre  de  Rodez  aux  archi- 
ves de  TAveyroQ  met  en  Rouergue  un  ministm'ium  Catu- 
lensê  (fi) ,  c'e8tHà*4ire  une  vigoef  ie  dont  le  chef-lieu  s'ap- 
pelait Catuluâ^  et  tîraH  ce  nom  de  eélm  d'un  ancien 
propriétaire. 

Il  ne  &ut  pas  confondre  le  cognomen  Catulus  avec  le 
aognomen  plus  connu  Oatullus ,  ni  ayec  le  gentilice  Oatol- 
lius  d'oH  CmuUiacm^  ancien  nom  du  fundus  romain  où 
fut  bâtie  l'abbaye  de  3aint-Deni».  On  Suppose  que  ïe  *  Catu- 
loGiÀS  du  dipiôme  précité  est  Chailly ,  cotnniune  de  Vai- 
res  (Seine-et-Marne)  :  Chailly ,  semble-t-il ,  s'expliquerait 


(1)  Tardif,  Monuments  historiques^  p.  38,  col.  1. 

(2)  C.  /.  L.,  XII,  4009. 

(3)  Ibid.,  4569» 

(4)  Brambach,  331. 

(5)  C.  /.  L.,  XII,  3929. 

(6)|Cette  charte  a  été  publiée  par  M.  Gustave  Desjardins  datfs  IsiBiblMftè» 
que  de  l'École  des  chartes^  t.  XXIV,  p.  170. 


DÉRIVÉS  Et^  -ACUB  blË  SUftNOilS  ROMAINS.  471 

mietix  par  ttù  ancien  Catulia&uê.  Dans  le  testament  de 
Pult^d,  abbé  de  Saint-Denis,  777,  Cadolacô  (1)  est  une 
faute  pour  CadolUaco  =*=  CatulliacOy  et  désigne  Saint-Denis. 

*GANACtJS  est  évidemment  la  forme  ancienne  du  nom  de 
la  localité  appelée  Chânac  dans  un  dénombrement  des 
Yassauit  qu'Alphonse,  comte  de  Poitiers,  frère  du  roi  Saint- 
Louis,  a^aît  en  Auvergne,  au  milieu  du  treizième  siècle  (î)  ; 
c'est  aujourd'hui  Chanat,  commune  de  Nohànent  (Puy-de- 
Dôme).  *Canaetts,  qui  explique  Chanac,  est  un  dérivé  de 
l'adjectif  latin  canus  «  blanc ,  »  qu'on  trouve  quelquefois 
employé  comme  surnom.  Cornélius  Nepos  (3)  raconte 
comment  Q.  Julius  Canus,  ami  de  Cicéroti,  après  avoir 
été  inscrit  sur  la  liste  de  proscription  à  cause  de  la  haine 
du  triumvir  Antoine  pour  le  grand  orateur ,  en  fut  ensuite 
rayé  comme  ami  d'AtticuS.  Dans  le  siéde  suivant,  JuliûS 
Kanus  fut  une  des  victimes  de  la  cruauté  de  Caligula.  8é- 
nèque  vante  la  tranquillité  d'âme  avec  laquelle  il  apprit  sa 
condamnation.  Il  quittait  l'empereur  quand  celui-ci  lui  dit  : 
«  Ne  te  flatte  pas  d'une  sotte  espérance.  J'ai  donné  l'ordre 
de  te  conduire  au  supplice.  »  —  «  Je  te  remercie,  excellent 
prince,  »  répondit  Julius  Kanus,  et  il  alla  jouer  une  partie 
d'échecs  qui  n'était  pas  terminée  quand  un  centurion  vint 
le  chercher.  Julius  Kanus  constata  que  son  partenaire 
n'avait  pas  gagné  et  l'emportait  seulement  d'un  point  sur 
lui ,  puis  il  partit ,  disant  à  ses  amis  en  larmes  :  «  Pour- 
quoi êtes- vous  tristes?  vous  cherchez  si  les  âmes  sont  im- 
mortelles ,  moi  je  vais  le  savoir  (4).  »  Le  cognomen  Canus 
ou  Kanus  n'est  pas  rare  en  Gaule.  Une  inscription  de  Ge- 
nève mentionne  un  certain  Valerius  Kanus  (5).  L'épitaphe 
d'A.  Cornélius  Kanus,  trouvée  à  Laudun  (Gard),  est  conser- 


(1)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  61,  col.  2. 

(2)  Chassaing,  Spicilegium  Brivatense,  p.  58-59. 

(3)  Vie  d'Atticus,  c.  10. 

(4)  Sénéque,  De  tranquillitate  anfmf,  C.  14. 

(5)  C.  J.  L.,  XII,  2634. 


472  LIVRE  II.  CHAPITRE  VI.  §  1. 

vée  au  musée  d'Aix  eu  Provence  (1).  L'aflFranchi  Q.  Reu- 
conius  Canus  éleva  à  son  patron  un  monument  funèbre 
qui  a  été  trouvé  à  Nimes  et  qui  est  conservé  au  musée 
d'Avignon  (2).  Parmi  les  débris  romains  employés  à  la  con- 
struction des  remparts  de  Narbonne ,  on  a  reconnu  Tépi- 
taphe  de  M.  Annius  Kanus  et  on  l'a  transportée  au  musée 
de  cette  ville  où  elle  existe  encore  (3).  Une  inscription  de 
Vienne  (Isère)  rappelle  la  mémoire  de  Sex.  Coelius  Canus 
questeur  en  cette  ville  (4). 

Il  y  a  en  France  deux  communes  de  Chanac,  Tune  dans 
la  Lozère,  l'autre  dans  la  Corrèze  ;  mais  une  charte  ,5 
écrit  le  nom  de  la  seconde  Chalnac ,  ce  qui  permettrait  de 
supposer  une  origine  différente.  Chaney  (Ain)  peut  être  un 
ancien  Canacus,  On  peut  admettre  une  origine  identique 
pour  un  certain  nombre  de  hameaux.  Tels  sont  quatre 
Canac,  savoir  :  deux  dans  le  Tarn  et  un  dans  chacun  des 
deux  départements  de  l'Aveyron  et  du  Tarn-et-Garonne. 
Nous  citerons  encore  Chanac  commune  de  Simeyrols  (Dor- 
dogne). 

Chenove  (Côte-d'Or)  est,  comme  Chanac,  un  dérivé  de 
CanWj  seulement  le  sufSxe  est  différent. 

*Capitônacus  ou  ^Capitunnacus,  tous  deux  avec  reslilu- 
tion  d'un  i  bref  atone,  sont  des  variantes  du  nom  de  lieu  ecril 
à  l'ablatif  Capiunnaco^  en  691,  dans  la  date  d*uu  jugement 
du  roi  Clovis  III  et  Captonaco,  en  696,  dans  la  date  duii 
privilège  accordé  par  Agerad,  évéque  de  Chartres  (6).  On 
ne  peut  déterminer  le  nom  moderne  de  ces  deux  localités 
mais  le  primitif  doit  nous  offrir  la  forme  ancienne  du  nom 
de  lieu  qui  a  fourni  Tadjectif  dérivé  Capdenaceme  à  une 
charte  de  l'année  861 ,  en  faveur  de  Téglise  cathédrale  de 


(1)  c.  /.  L.,  XII,  2777. 

(2)  /6W.,  XII,  3265. 

(3)  Ibid.,  XII,  4585. 

(4)  ma.,  XII,  5864. 

(5)  Deloche,  Carfulaire  de  BeaiUieu^  p.  251. 

(6)  Tardif,  Monuments  historiques^  p.  23,  3( 


DÉRIVÉS  EN  -ACU&  DE  SURNOMS  ROMAINS.  473 

Rodez  ;  cette  charte  a  été  publiée  par  M.  G.  Desjardins  (1)  ; 
le  Cartulaire  de  Conques,  édité  par  le  même  savant  (p.  33), 
donne  le  nom  de  lieu  dont  cet  adjectif  dérive  ;  ce  nom  est 
écrit  à  Tablatif  Capdenago;  la  charte  date  du  milieu  du 
onzième  siècle  ;  de  *  Capitônacus ,  on  a  tiré  vers  la  même 
époque  le  dérivé  Captinacensis  (2)  dont  Vi  n'est  autre  chose 
qu'une  notation  arbitraire  d'un  e  substitué  dès  le  neuvième 
siècle  à  un  0  plus  ancien  ;  il  s'agit  de  Capdenac  (Lot). 

Capitônacus  et  sa  variante  Captunnacus  sont  dérivés  de 
Capito.  Capito  est  un  substantif  latin;  il  vient  de  caput, 
«  tête ,  »  et  veut  dire  «  qui  a  une  grosse  tête.  »  Ce  mot , 
devenu  une  sorte  de  sobriquet,  a  servi  de  cognomen  dans 
la  gens  Fonteia  et  dans  la  gens  Ateia.  Quatre  Fonteius  Ca- 
pito ont  été  successivement  consuls  :  Tan  33  avant  J.-C, 
Tan  12,  Tan  59  et  Tan  67  après  J.-C.  G.  Ateius  Capito  était 
tribun  du  peuple,  Tan  54  avant  notre  ère.  L.  Atteins  Capito  était 
sénateur  trois  ans  plus  tard,  et,  en  Tan  5  de  notre  ère,  les 
honneurs  du  consulat  furent  accordes  à  C.  Atteius  Capito 
beaucoup  plus  connu  comme  jurisconsulte  (3).  Le  cognomen 
Capito  est  fréquent  en  Gaule.  Nous  signalerons  d'abord  la 
variante  Capitu  dont  Vu  final  peut  être  rapproché  de  Vu 
médial  du  Captunnacus  mérovingien  ;  elle  nous  est  fournie 
par  une  signature  de  potier  conservée  au  musée  de  Vienne 
(Isère)  (4).  Parmi  les  autres  inscriptions  où  se  rencontre  ce 
cognomen,  on  peut  remarquer  celles  qui  nous  ont  conservé 
les  noms  de  D.  Julius  Capito,  citoyen  romain  et  censeur 
de  la  cité  fédérée  de  Reims  (5)  ;  l'une  de  ces  inscriptions 
existe  encore  au  musée  de  Vienne.  On  a  autrefois  trouvé 
à  Aix,  en  Provence,  l'épitaphe  de  L.  Julius  Capito  (6).  Une 
inscription  du  musée  de  Narbonne  nous  apprend  qu'il  y 


(1)  Bibliothèque  de  l'Ecole  des  chartes,  t.  XXIV,  p.  166. 

(2)  Ibid.,  p.  219. 

(3)  De- Vit,  Onom&sticon,  t.  I,  p.  535,  536. 

(4)  C.  I.  L.,  XII,  5686,  177. 

(5)  Ibid.,  XII,  1869-1870. 

(6)  Ibid.,  XII,  2470. 


474  LIVitfi  II.  OHAPITOB  m.  f  4. 

avait  daoa  cette  ville  un  autel  de  Vulcain  accompagné  d'ii&e 
piscine,  le  tout  construit  aux  frais  de  la  cité  pdf  lei$  BOim 
dtt  pl'éteur-duttmyir  M.  Variu»  Capito  (1).  On  a  découvert, 
dan^  la  même  ville ,  le»  épltaphes  de  T.  Fadioa  Capito  (3) 
el  de  Q.  Cornélius  Capito.  La  seecmde  exiete  eneoi^  au 
mesée  local  (3). 

CahIonacus,  villa  où  Louià  le  Débonnaire  avait  uu 
pl^ai«  d*ob  il  data  une  charte  en  822  (4) ,  porte  ub  nom 
dérivé  de  Carbo,  -oni».  Carbo  n'est  pas  seulement  le  soriKiin 
du  célèbre  orateur  C.  Papirius  Carbo,  coinsul  en  Tan  120  (5), 
et  d'autres  membres  de  familles  illustres  de  Rome  ^  de  la 
§Ms  Papiria  et  de  la  gens  Manttia,  il  a  été  aussi  porté  par 
des  personnages  moins  notables  ;  tel  est  le  potier  dent  la 
ttiarque>  Carb^mis[manu]f  est  empreinte  sur  un  plat  conserve 
au  musée  de  Genève  (6)*  Une  inscription  de  Brescia  nous 
apprend  aussi  qu'il  y  eut  dans  cette  ville  un  qualuorvir 
p»ri  dionmdo  qui  portait  le  surnom  de  Carbo  (7).  Le  ^o^no^ 
m$n  Carbo  parait  identique  au  nom  commun  latin  earbo^ 
-^niA  il  ckkarbon.  » 

Catusagus  est  le  nom  d'une  localité  située  aux  environs 
du  Puy  (Haute-Loire),  vers  le  milieu  du  dixième  siècle  (8).  Ce 
nom  doit  peut-être  se  corriger  en  Catussacus,  et,  en  ce  cas, 
dérive  de  Catussa,  cognoman  étudié  page  104.  Si  la  bonne 
orthographe  est  par  un  seul  s  »  Catusacus ,  ce  mot  vient  de 
*Catusa  ou  *Catusos.  variante  de  Catussa.  Comparez  le 
dérivé  Catusanianm  cité  ci-dessus,  page  421. 

Cavannagus  est  le  nom  d*une  propriété  de  l'abbaye  de 

(1)  c.  /.  L.,  XII,  4338. 

(2)  Ibid,,  XII.  4806. 

(3)  Ibid.,  XII,  5089. 

(4)  Bickel,  Acta  regum  et  imperaiorum  Karolinorum^  t.  II«  pr.  t^,  0*  f81. 

(5)  ToufiFel,  Geschichte  der  rœr^iêchen  Literaêu^^  ZF  ééît.,  p.  ^0. 

(6)  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne^  t.  IV,  p.  70,  n*  10(56^ 

(7)  C.  /.  L.,  V,  4325. 

(8)  U.  Chevalier,  Cariulaire  de  Saint'Chaffte-du-Moft0^€9*,  p.  ^ 


à 


DÉRIVÉS  E)N  -AOUB  txe  SUKNOM»  ROMAINS.  4*3^ 

Saint-* Epttrès€-lè»-AngOttléme,  aux  fermer  tftwi  dipèôtne 
donné  par  Charlemagne  en  769,  si  nous  en  croyons  la  fie 
*i  célèbre  efflpet^ur  par  le  moitié  d'Angouléme  (i).  Catan- 
nacus  dérite  dé  Cavanmis,  nom  d*tin  potier  dont  la  signa- 
ture, conservé©  au  musée  de  Liège  (2),  a  été  récettiment 
trouTée  afUsôi  à  Reims  (3).  Cavannus,  nom  propre,  est  iden- 
tique à  un  nom  commun  latin  qui  désigne  une  espèce 
d'oisjeaw,  le  hibou.  De  Cavcmrms  on  pourrait  rapprocher  le 
geBtilice  Oavînnîus,  atfssi  par  denx  nw,  conntï  par  une 
inscription  de  Capoue  (4).  Mais  Cavinnius  dérive  prol)able* 
ment  de  Cavinus  (5),  et  il  a  dû  exister  un  gentîlice  *Oavaïi- 
nii»  ou  *  Cavaniuâ  ;  c'est  ce  gentîlice  qui  explique  le»  tioûis 
de  Cavagnae  (Lot),  Chavagnac  (Cantal,  Dordogne),  Ohava- 
gné  (Deux-Sèvres),  Chavagnieu  (Isère).  Cabannaeu9y  Cha- 
vanay  (Loire),  dans  une  charte  de  902  (6),  doit  être  corrigé 
en  CavannaetÂS^  et  dérive  du  cognomen  Cavannus,  tandis 
que  Cabckmuiria  vient  du  nom  commun  caba^rmay  «  ca« 
bane.  n 

OonifffNAGus.  Dans  les  chartes*  de  l'abbaye  de  Cluny, 
publiées'  par  M.  Bruel,  il  est  plusieurs  fois  question,  au 
dixième  siècle,  d'un,  ager  Communacensis  (7)  ou  Commen- 
Mcensis  (8)  situé  dans  lepagus  de  Vienne  (Isère).  La  bonne 
orthographe  est  la  première,  comme  l'établit  la  formule  in 


(i)  Dom  Bouquet,  V,  184  e.  Migne,  Patrologia  lah'na,  t.  CXLI,  col.  27  6. 
Cf.  Cavanac  (Aude),  appelé  Caoannac  en  1065,  Cavanags  en  1075.  Gustave 
Desjardins,  Cartulaire  de  V&bbaye  de  Conques^  p.  5,  362,  450. 

(2)  Schuermans,  Sigles  figulinSt  n*  1182. 

(3)  M.  Tabbé  Thédenat,  Bulletin  de  la  Société  des  antiquaires  de  France, 
1884,  p.  136. 

(4)  C.  /.  L.,  X,  4427. 

(5)  Un  exemple  du  cognomen  Gavinus  est  cité  par  De'-vit ,  OnomAStiùon^ 
t.  n,  p.  187. 

(6)  U.  Chevalier,  CaHuIaire  de  l'abbaye  de  Saint-Andté-lef-Bas-de-Viennet 
p.  220,  228. 

(7)  Tome  I,  p.  509. 

(8)  Tome  U,  p.  375,  376,  377.  Ce  nom  est  écrit  Comennaieo,  Commenatêo, 
Commcnnaico,  chez  Tabbé  U.  Chevalier,  Cartulaire  de  3aifit'€Hafp'e,  p.  f42, 
145. 


476  LIVRE  II.  CHAPITRE  VI.  î  1. 

monte  Communaco^  940-941  (1).  C'est  aujourd'hui  Commu- 
nay  (Isère). 

Il  n'y  a  aucun  rapport  entre  ce  nom  de  lieu  et  l'idée  de 
commune  ou  de  biens  communaux  ;  Communacus  vient  du 
cognomen  Communis.  Un  des  sens  de  l'adjectif  latin  corn- 
munis  est  «  affable  ;  »  c'est  avec  cette  valeur  que  cet  adjec- 
tif  a  été  employé  comme  surnom. 

En  voici  des  exemples  italiens.  Il  y  eut  à  Ostie,  sous  Tem- 
pire  romain,  une  corporation  de  fabri  navales  dont  fit  par- 
tie un  certain  Badusius  Communis  (2).  Une  autre  inscrip- 
tion de  la  ville  d'Ostie  nous  a  conservé  les  noms  de 
l'affranchi  A.  Atinius  Communis  (3).  On  a  trouvé  à  Pompéi 
l'épitaphe  de  L.  Ceius  Communis  (4).  On  lit  dans  une 
inscription  d'Herculanum  les  noms  des  affranchis  C.  BIos- 
sius  Communis  (5)  et  P.  Marins  Communis  (6).  L'épitaphe  de 
l'affranchi  C.  RuUius  Communis  a  été  recueillie  à  Capoue(7). 
Une  inscription  de  S.  Benedetto,  l'antique  Marsi  Marruvium^ 
nous  apprend  les  noms  de  T.  Veturius  Communis  (8).  Il 
y  avait  à  Reate,  aujourd'hui  Rieti,  un  collège  d'adorateurs 
d'Hercule,  cultores  HerculiSy  et  ce  collège  était  propriétaire 
d'un  terrain,  locm,  qu'agrandit  la  libéralité  de  deux  dona- 
teurs ,  dont  l'un  s'appelait  Q.  Octavius  Communis  (9).  La 
même  ville  possède  encore  le  monument  funèbre  élevé  par 
Varius  Communis  à  sa  fllle  (10)  ;  il  provient  de  la  ville  de 
Rome.  Une  inscription  d'Adria  nous  a  conservé  les  noms 
de  L.  Poblicius  Communis  (il),  et  deux  inscriptions  de  Milan 


(1)  Bruel,  tomo  I,  p.  508. 

(2)  C.  /,  L.,   XIV,  n-  256,  1.  204. 

(3)  Ibid.,  XIV,  630. 

(4)  /6id.,  X,  1039. 

(5)  /bïd.,  X,  1408  r,  col.  2,  1.  4. 

(6)  Ibid.,  x,  1403  g,  col.  2,  1.  37. 

(7)  Ibid,,  X,  4319. 

(8)  Ibid.,  IX,  3769. 

(9)  Ibid.,  IX,  4673. 

(10)  Ibid.,  IX,  4723  add. 

(11)  Ibid.,  V,  2357. 


DÉRIVÉS  EN  -ACU8  DE  SURNOMS  ROMAINS.  477 

ceux  de  Q.  Bisius  Communis  (1)  et  de  Furius  Communis  (2). 
D'Italie  le  cognomen  Communis  pénétra  en  Gaule.  Le 
musée  d'Arles  contient  le  monument  funèbre  élevé  par 
Sex.  Julius  Communis  à  Flora,  sa,  côntuAemalis  (3).  Il  existe 
encore  à  Nimes  une  épitaphe  que  L.  Karius  Comniiunis  a 
fait  gi'aver  pour  son  fils  au  deuxième  siècle  de  notre  ère  (4). 
On  doit  considérer  comme  plus  ancienne  l'épitaphe  d'un 
soldat  de  la  cohorte  I  des  Thraces,  monument  consetvé  au 
musée  de  Cologne,  et  gravé  par  les  soins  de  Bassins  Com- 
munis ;  dans  cette  épitaphe ,  le  nom  de  Lyon ,  au  génitif 
LugtAduniy  conserve  encore  son  second  w,  déjà  supprimé 
chez  Strabon  (5). 

*  DoMiNAGus.  C'est  ainsi  qu'on  doit  restituer  la  forme  pri- 
mitive du  nom  de  Dompnac  (Ardèche) ,  appelé  Dompnacus 
en  1365  (6).  Mais  Dorrmacus  sans  i  a  dû  être  une  variante 
de  Dominacus  dès  le  temps  de  l'empire  romain. 

*  Dominacus  vient  de  dominus,  nom  commun  dont  le  sens 
est  bien  connu,  qui  a  été  employé  au  féminin  comme  cog^ 
nomen.  On  a  trouvé  en  Italie,  à  Misène,  et  on  conserve  au 
musée  de  Florence  l'épitaphe  d'Antonia  Domina  (7).  M.  Ger- 
mer Durand  a  signalé  à  Gailhan  (Gard)  T  épitaphe  d'une 
femme  d'origine  pannonienne,  et  dont  le  surnom  était 
Domina  (8).  La  forme  abrégée  Domna  est  constatée  par  une 
inscription  romaine  du  Norique,  aujourd'hui  encastrée  dans 
un  mur  de  l'église  de  Mœderndorf,  près  de  Klagenfurt; 
cette  femme  s'appelait  Claudia  Domna  (9).  On  peut  citer 
aussi  une  inscription  de  Pescara,  en  Italie,  qui  est  Tépi- 


(1)  C.  I.  L.,  V,  5841. 

P)  ma.,  v,  6107. 

(3)  IHd.,  XII,  814. 

(4)  ma.,  XII,  3693. 

(5)  Brambach,  310. 

(6)  Chassaing,  SpicUegium  Briijatense,  p.  399,  653. 
0)  C.  /.  L.,  X,  3395. 

(8)  Jbid.,  XII,  3020. 

(9)  ma.,  m,  4828. 


tapba  de  Pulc?ia  Domna  (1).  Tout  le  n^oiid^  a 
parler  de  Julîa  Domna,  née  Yen  1&&«  devenue  «  yéVB  175, 
Icaome  de  Tempeireiir  Septisae  Sév^e,  motie  en  317,  et 
oôlàbfe  par  Thiâiiieiice  ^qu'elLd  eœrça  &w  wn  mm  et  gw 
Cancallft  wx^  flU.  £Ue  était  d'eri^ine  ^ymaîncr.  Maw  lee 
iu$cri{ri;k>a8  précitées  montrent  qua  son  cognamm  était  uajté 
dftD$  Tempire  ailleurs  i^'eu  Syrie.  Le$  zMcriptîea»  n'ofbesA 
pa8  d'ei^es^ple  du  ^og^Mmm  ^aasculin  Docamus*  Gekiî  que 
d&ime  VOnûmoêHc^n  du  savant  I>^Vit  est  le  résvUat  d*uae 
mauvaise  lecture  :  Dominus  pour  Domitus  (2).  Oapeudaot 
(ML  ai  da  la  v«f  iaute  loasculme  Douuius,  4eux  exeiojples  qui 
remontent  au  commencement  du  troisième  étende  de  n^re 
ère  ;  ils  nous  ont  été  conservés  par  des  rescrits  d'Alexandre 
Sévêce  (2S2^235)  insérés  au  Code  àa  JusCinlea  (â)*  Dans 
obacua  des  deux  cas,  I>oinnua  est  le  cognomen  d'un  hom»e 
dont  le  prénom  et  la  gentilice  ne  sont  pas  donnée. 

*  LiBEiAiCUs  est  la  notation  primitive  du  nom  de  lieu  écrit 
à  Tablatif  Idberaga  :  GQlonin  in  Liberago  dans  un  état  de 
serfs  appartenant  à  l'églîise  Sainte  Victor  de  Marseille  au 
dixième  siècle  (4). 

"  lsiberçu>u»  dérive  du  cogr^komen  romain  Liber.  On  a  trouvé 
en  Italie  quelques  exemples  du  féminin  Lil>era.  Dans  uu 
cas  c'est  le  nom  d'une  femme  esclave ,  con$ubem(^i$  d'une 
autP9  esclave  (5),  mais  ailleurs  c'est  le  cognomsn  de  femmes 
lilMre^;  tellfls  sont  PuUiliia  Libère  à  Osta,  en  Âpulie  (6), 
Pompeni»  Libéra  à  Capone  (7),  Cauinia  Libéra  à  Naples  (B). 
Ëo  Qaule ,  le  nom  d*homme  masculin  Liber  apparaît  dans 


(1)  C.  I.  L.,  IX,  3341. 

(2)  Ibid.,  IX,  2188,  add.,  p.  673. 

(3)  Livre  IX,  t.  ix,  loi  8,  et  livre  XII,  t.  xxxvi,  loi  7{  ees  «xeat|)i^  et 
d'aatres  postérieurs  sont  cités  par  De-vit,  Onomasticorit  i.  II,  p^  65a,<ool.  t. 

(4)  Ouérard,  C&rtulaire  de  Saint-Victor,  t.  I.  p.  309. 

(5)  C.  /.  L.,  V,  4139. 

(6)  Ibid.,  IX,  694. 

(7)  Jbtd.,  X,  4298. 

(8)  Ibid.,  X,  1502. 


DÉRIVÉS  EW  -AOlJf  9K  &VW9m  ROMAINS.  «W 

dm  in«eri|Hio»ô  de  Trêves  (1)  et  de  Briguo»  (Oafd)  (2)  ; 
dana  ç^  deia  ovQdiujoaents  il  n -efit  paa  aciconiimgaé  da  0en- 
UUû8,  Il  a  copiste  un  potiar  du  nom  de  Liber  ;  de9  vases 
roMQi^  de  aa  marque  »ont  eooservéA  aux  musées  de  Mar^ 
sdèlle  et  d'Avignon  {^).  La  foroie  féminine  s'eat  rencontoée 
edi  G»u1b,  à  Nimes  ;  eUe  est  préeâdàe  d'un  gentilioe  $M9Îa 
(Caaaiaf)  Libéra  (4). 

G*eat  pftr  le  wm  d'homme  Liber  gme  «'ei^pUquent  1^ 
à»u^  pregiiâres  syllabes  d^  is^mi  du  Wurg  de  LlverduA 
(Meup(ba-etrMo0eUe) ,  w  nwvièiike  ai^cld  Uibi^rdunum  (^^ 

Il  y  a  w  France  ei«q  eommunes  de  Livry  (Maroe ,  Nié* 
¥00,  Seioe^et^Mame,  Seiii^e-ietwOife),  et  deu»  Livra  (Ulenein 
Vilaii3be,  Mayenne).  Ces  nom»  de  lieu  sont  prûbableBief^ 
tous  d'ancie&s  Libmaçm  dérivas  itnm^diatemeat ,  non  pas 
du  ùognom/^  Liber ,  mais  de  son  dérivé  1^  gentmce  Libe«- 
rius.  Il  a  autrefois  existé  4  Lyon  un^e  inscription  intéres* 
santé;  c'est  l'épitaphe  de  G*  Liberiu^  Deeimiuiuei  eitoyein 
de  Vienne ,  marinier  sur  la  Saône  ;  il  était  meiKij^re  de  la 
corporation  dea  utriculaires  de  Lyon ,  l%giji^ni ,  et  cette 
orthogrAphe  du  nom  de  la  ville  est  oelle  des  premiers  temps 
de  la  domination  romaine  (6).  On  a  trouvé  en  Gueldre  une 
dédicace  aux  déeeses-màres  dites  Mopata»  pa^r  M..  Liberius 
Victor,  qui  se  qualifie  de  Nervien,  civm  H^rmm  (7). 

"  MACfiiucus.  C'est  ainsi  ^u'on  doit  restituer  la  forme  la 
plus  ancienne  du  nom  de  lien  écrit  d$  Ma^erag^  dans  une 
charte  de  l'année  9ft^,  Ma%mw^  dmis  une  autre  charte  du 
même  cartulaise  (8).  Le  leoalité  ^appelée  ^Ulmn  Maim^ 


(l)  Brambach,  n»  7TI. 
B)  C.  /.  1^,  %ll,  2Wa. 

(3)  ma.,  XII,  5686,  480. 

(4)  Ibid.,  XII,  3509. 

\h)  Lepage ,  DiciionnsLire  topographique  du  département  4e  ta  Jf  ewlètf , 
p.  79. 

(6)  Boisaien,  Inscriptions  de  Lyon,  p.  389. 

(7)  Brambach,  n*  71. 

(8)  Doniol,  Ctirtulaire  de  Brioude,  p.  42,  49. 


480  LIVRE  IL  CHAPITRE  VL  i  L 

cum  (1)  paraît  nous  offrir  une  variante  du  même  nom. 

Maceracus  est  un  dérivé  du  cognomen  Macer,  «  maigre,  » 
très  fréquent  à  Rome ,  où  il  a  été  usité  dans  plusieurs 
familles  différentes.  Au  temps  de  Cicéron,  par  exemple, 
vivait  Licinius  Macer,  orateur  et  historien,  qui  fut  succes- 
sivement tribun  du  peuple  et  préteur .  et  dont  Hermann 
Peter  a  écrit  la  vie  et  recueilli  les  fragments  (2).  L.  Baebius 
Macer,  qui  composa  un  livre  intitulé  Festalia  sacrùmm, 
paraît  avoir  été  contemporain  d'Auguste  (3).  On  a  recueilli 
en  Gaule  quelques  exemples  du  cognomen  Macer.  Ainsi,  à 
Auriol  (Bouches-du-Rhône) ,  un  esclave  nommé  Alphios  fit 
une  dédicace  au  génie  de  deux  Annius ,  probablement  ses 
maîtres ,  surnommés  l'un  Macer ,  et  l'autre  Licinianus  ,4;. 
Le  musée  de  Genève  possède  une  liste  de  seviri^  en  tête 
de  laquelle  est  inscrit  le  nom  de  Q.  Stardius  Macer  (5/.  Od 
a  trouvé  à  Neuss ,  dans  la  Prusse  rhénane ,  l'épitaphe  du 
légionnaire  vétéran  Julius  Macer  (6).  On  a  tiré  déterre, 
près  de  Mayence,  l'épitaphe  du  légionnaire  T.  Julius  Macer, 
originaire  de  la  ville  celtibérienne  de  Nertobriga  en  Espa- 
gne (7).  Le  cognomen  Macer ,  sans  gentilice  ,  est  gravé  sur 
une  amphore  que  possède  le  musée  de  Vienne  (Isère^  ,8. 

Il  y  a  aujourd'hui,  en  France,  une  commune  de  Mazeray 
(Charente  -  Inférieure) ,  et  quatre  hameaux  de  Mazerao 
(Gironde,  Lot,  Lot-et-Garonne,  Tarn-et-Garonne).  Le  nom 
de  Maizeray  (Meuse),  celui  de  la  commune  de  Mezeray 
(Sarthe),  et  de  plusieurs  hameaux  de  même  nom.  peuvent 
être  des  variantes  de  Mazerai.  Dé  Macer  on  a  tiré  un 
gentilice  Macerius  conservé  par  une  inscription  du  No- 


(1)  Deloche,  Cartulaire  de  BeauHeu,  vers  930,  p.  91. 

(2)  Hermann  Peter,  Historicorum  romanorum  relliquiae,  p.  «cciïXYin- 
GGGLm,  300-310. 

(3)  De- Vit,  Onomaaticon,  I,  659. 

(4)  C.  7.  L.,  XII,  619. 

(5)  Ibid,,  XII,  2617. 

(6)  Brambach,  n*  261. 

(7)  Ibid,,  n*  4160. 

(8)  C.  /.  L.,  XII,  5686,  518. 


DÉRIVÉS  EN  -ACU8  DE  SURNOMS  ROMAINS.  481 

rique  (1) ,  d'où  *  Maceriacus ,  aujourd'hui  Mezeriat  (Ain). 

*Masculacus,  *Masclacus.  Telles  doivent  avoir  été  les 
formes  primitives  du  nom  de  lieu  qui  s'est  plus  tard  écrit 
Maslacus,  Un  diplôme  du  roi  Thierry  III ,  qui  a  dû  être 
donné  en  677  ou  en  678 ,  est  daté  d'une  localité  appelée  à 
l'ablatif  Maslaco  (2).  A  la  fin  du  onzième  siècle  un  moine 
de  Saint-Père  de  Chartres,  écrivant  une  sorte  de  cartu- 
laire  de  cette  abbaye,  y  inscrit  trois  fois  le  nom  d'une  loca- 


lité qu'il  écrit  la  première  fois  Maslaico.  les  deux  autres  j 

fois  Maslaco  à  l'ablatif  (3)  ;  il  s'agit  de  Meslay-le-Orenet  i 

(Eure-et-Loir). 

Ce  nom  de  lieu  est  dérivé  du  cognomen  Masculus  «  m&le, 
viril ,  »  dont  la  variante  Masclus  n'est  pas  rare.  On  la 
trouve  en  Italie,  mais  on  peut  se  borner  à  donner  des 
exemples  empruntés  à  la  Gaule  :  épitaphes  de  L.  Marins 
Masclus  (4),  de  L.  Gaienina  Masclus  (5),  de  C.  Mains  Mas- 
clus (6),  àNarbonne.  Masclus  est  aussi  le  nom  de  personnes 
dépourvues  de  gentilice  :  épitaphe  de  Quarta  Mascli  fllia, 
trouvée  dans  le  département  de  l'Hérault  (7);  marques  de 
potier  :  of[ficina]  Mascli,  M[a]sclus  fe[cit]  (8). 

Maihilacus  ,  nom  d'une  localité  dont  il  est  question  dans 
un  diplôme  de  Tannée  697  (9),  est  dérivé  du  surnom  Ma- 
ryllus,  Marillus  qui  apparait  comme  variante  de  Marullus 
dans  les  manuscrits  de  Sénèque  le  rhéteur  (10),  et  qui  est 

(1)  c.  /.  L.,  III,  5339. 

(2)  Pertz,  Diplomataif  p.  44,  ligne  53.  Tardif,  Monuments  historiques, 
p.  18,  col.  1. 

(3)  Quérard,  Cartulaire  de  Saint-Père  de  Chartres,  p.  44,  45. 

(4)  C.  I.  L.,  XII,  4980. 

(5)  Ibid.,  XII,  4493. 

(6)  Ibid.,  XII,  4964. 

(7)  Ibid.,  XII,  4209. 

(8)  md.,  XII,  5686,  560,  m,  t). 

(9)  Tardif,  Monuments  historiques^  p.  32,  col.  1. 
(iO)8énéque,  Conlroversiae ;Yoyez  Annaei  Senecae,  Oratorum  et  rhetorum 

sententiae,  divisiones,  colores,  éd.  Teubner-Kiessling ,  p.  66,  67,  73,  etc., 
et  Vindex,  p.  545;  cf.  Teujafel,  Geschichte  der  roemischen  Literatur.  3*  édit., 
p.  594. 

31 


4fi2  I^IVRE  II.  CHAPITRE  VI.  |  1. 

jusUflë  par  las  dérivés  MarUlina  (i),  Maiûlio  (%)  relevés  dias 
deux  inscriptions.  On  peut  supposer  que  Marillius  vient 
de  mas,  maris  «  mâle.  »  De  Marillus  on  a  tiré  un  gentilice 
*  Marillius,  d'où  Marillac  (Charente). 

M^dsoLACUB,  villa  où  les  rois  mérovingiens  aviieat 
un  palais  au  septième  siècle  (3) ,  porte  un  nom  dérivé  de 
Massula,  surnom  d'une  femme,  dans  une  inscription  trou- 
vé(9  près  de  Cologne  et  conservée  au  musée  de  Bonn  (4j. 
Massplc^m  est  aujourd'hui,  suivant  M.  Longnon,  Ifday-le^ 
Roi  (YoQna)  (5).  Massula,  dont  Massolacus  dérive,  est  un 
diminutif  de  massa  «  masse.  » 

PiVTERNACus  est  le  nom  4d  la  comipune  de  Pernay  (In- 
dre-et-Loire) ,  dapis  une  charte  de  l'année  791  (6). 
M.  Eugène  Thomas  a  réuni  plusieurs  textes  sur  une  Loca- 
lité appelée,  en  1094,  villa  Paderni^  c'est-à-dire  Patemi;  en 
1156,  villa  Patornoga,  c'est-à-dire  P^iernaca  et  située  dans 
la  commune  de  Gigean  (Hérault)  (7). 

Patemacus  ne  veut  pas  dire  «  bien  paternel ,  »  pas  plus 
q\i' Avitaciis  a  bien  de  l'aïeul  :  »  Paternao^s  est  dérivé  de  Pa- 
ternus,  cognomen  très  fréquent.  Pour  la  Gaule,  le  tome  XII 
du  Corpus  en  donne  soixante-huit  exemples  masculins  et 
trente-*cinq  féminins.  Il  y  en  a  seize  exemples  masculins  et 
six  féminins,  dans  les  Inseriptiones  rJèsnanae  de  Brambach. 

Ox;l  sait  que  de  Paternus  est  venu  le  gentilice  Pater- 
nius ,  d'où  le  nom  de  lieu  Patemiacus ,  plus  commun  que 
Patemacus,  Le  musée  de   Nimes  possède  Tépitaphe  de 


(1)  MariUina,  C.  /.  L.,  X,  2841. 

(2)  Marilio,  C.  /.  L.,  V,  6815. 

(3)  Frédégaire,  1.  IV,  c.  44,  79,  édit.  Krusch,  p.  143, 1.  2,  p.  161, 1.  22,  doue 
diverses  variantes.  MaMoIacus,  bas  latin,  pour  un  plus  tmàen^MMSuUcut^ 
parait  être  la  bonne  leçon;  cf.  Vita  Dagoberti,  (i.  45;  i^ûU,  9.  422,  U  1(^11. 

(4)  Brambach,  n*  434. 

(5)  Longnon,  Atl&a  hUtoriqiis  de  U  France^  p.  189. 

(6)  Mabille,  La  panc&rte  noire  de  Saint-Harlin  de  Tours,  p.  230;  cf. 
p.  151,  152,  n*  24. 

(7)  Dict.  top.  de  l'Hérault,  p.  191,  col.  1. 


DÉRIVÉS  EN  -AC US  DE  SURNOMS  ROMAINS.  483 

Sex.  Paternius  Maccianus  (1)  ;  le  musée  de  Bonn ,  une 
dédicace  aux  déesses-mères  de  Trêves  par  T.  Pater- 
nius Perpetuus  (2)  ;  le  musée  de  Mayence ,  Tépitaphe  de 
C.  Paternius  Postuminus  (3).  Paterniacw,  dans  plusieurs 
documents  de  l'époque  carlovingienne ,  est  le  nom  de 
Pîlgii0j-^errière-Barine ,  de  Pagny-sur-Moselle  (Meurthe- 
et-Mos€iUe)  (4)  et  de  Pagny-sur-Meuse  (Meuse)  (5).  Pater- 
niaca  ou  /^atemiocus^  nom  de  Payerne  en  Suisse,  canton  de 
Vaud,  dans  les  textes  du  dixième  et  du  onzième  siècle  (6), 
est  la  ioimB  solennelle  du  nom  de  cette  localité,  qui  devait 
s'appeler  vulgairement  *  Patemia^  d*où  le  moderne  Payerne. 
En  Italie,  on  disait  PaternianuSy  d'où  les  mots  de  oasale 
Patemiane,  lisez  Patemiano  dans  un  diplôme  de  Charle- 
magne  concernant  une  abbaye  du  diocèse  de  Spolète  (7). 

PiPERACus  est  le  nom  d'une  abbaye  fondée  au  onzième 
siècle  dans  le  diocèse  de  Saint-Flour,  aujourd'hui  Pe- 
brac  (Haute-Loire).  Pibrac  (Haute-Garonne)  paraît  une  va- 
riante du  même  nom. 

Pijferacus  est  dérivé  du  cognomen  Piper  qui  a  été  lu  sur 
une  marque  de  potier  trouvée  à  Die  (Drôme)  (8)  et  à 
Tarragone  en  Espagne  (9).  On  a  aussi  employé  en  qualité 
de  cognomen  les  diminutifs  Piperolus  et  Piperculus.  L'épi- 
taphe  de  Sex.  Spurius  Piperolus  existe  encore  à  Nimes  (10); 
et  sur  un  monument  funèbre  aujourd'hui  détruit,  on  a  lu 
dans  la  même  ville  une  épitaphe  qu'avait  fait  graver  un 


(1)  c,  I.  L.,  XII,  3787. 

(2)  Brambach,  149.' 

(3)  Brambach,  1241. 

(4)  Lepage ,  Dictionnaire  topographique  du  déparjiemeni  de  la  Meurihe , 
p.  106,  col.  1. 

(5)  F.  Liénard,  Dictionnaire  topogr.  du  départ,  de  la  Meuse,  p.  175,  col.  1. 

(6)  Diplôme  de  Tannée  962,  chez  D.  Bouquet,  IX,  667  C;  cf.  D.  Bouquet, 
X,  364  A,  374  C. 

(7)  Sickel,  Acta  regum  et  imperatorum  karolinorunij  t.  II,  p.  3^2,  n*  57. 

(8)  C.  J.  L.,  XII,  5686,  692. 

(9)  Ibid.,  II.  4970,  392. 

(10)  Ibid.,  XII,  3333. 


484  LIVRE  II.  CHAPITRE  VI.  l  1. 

personnage  dont  le  cognomen  était  Piperculus  (1).  Un  autre 
dérivé  de  Piper  était  Piperas;  Aquilius  Piperas  fit  gravera 
sa  femme  une  épitaphe,  dont  un  fragment  est  conservé  au 
musée  d'Augsbourg  (2). 

Le  cognomen  Piper  a  été  aussi  employé  comme  nom  de 
lieu  sans  suflBxe;  témoin  Poivre  (Aube),  appelé  Pi^m 
en  1032,  Piper  en  1202  (3).  Ce  cognomen  parait  identique 
au  nom  commun  piper  «  poivre.  » 

*PusiNNACus.  Ce  nom  de  lieu  est  écrit  en  860  Pusinnaco, 
en  887  Puzenaco^  à  l'ablatif  latin;  au  douzième  siècle, 
Poznac  en  langue  vulgaire  (4).  Il  s*agit  d'une  localité  située 
en  Quercy. 

Pusinnacus  est  un  dérivé  du  cognomen  Pusinnus,  au  fémi- 
nin Fusinna.  Le  premier  se  rencontre  dans  une  inscrip- 
tion de  Narbonne  (5) ,  le  second  dans  une  inscription  de 
Die  (6) ,  dans  trois  inscriptions  d^Espagne  (7)  et  dans  au- 
tant d'inscriptions  de  l'Italie  du  Nord  (8).  Pusinnus  dérive 
de  pu^its  «  petit  garçon,  »  au  féminin  pusa. 

§  2.  —  Cognomina  avec  sens  ethnographique. 

A  cette  liste  de  noms  de  lieu  dérivés  de  cognomina  dont 
l'origine  est  latine,  nous  donnerons  comme  complément 
quelques  noms  de  lieux  dérivés  de  cognomina  qui  avaient 
été  empruntés  à  des  noms  ethniques ,  les  uns  latins  d'ori- 
gine, les  autres  adoptés  par  la  langue  latine  quoique  leur 
origine  fût  étrangère. 


(1)  C.  /.  L.,  XII,  3896. 

(2)  Jbid.,  III,  5837. 

(3)  Boutiot  et  Socard  ,  Dictionnaire  topographique  du  département  de 
l'Aube,  p.  124,  col.  1. 

(4)  Deloche,  Cartulaire  de  Beaulieu,  p.  254.  229,  62. 

(5)  C.  /.  L.,  XII,  4422. 

(6)  Jbid.,  XII,  l(i58. 

(7)  Ibid,,  II,  2284,  2414,  2589. 

(8)  Ibid.,  V,  4430,  4993,  5639. 


DÉRIVÉS  EN  -ACUS  DE  SURNOMS  ROMAINS.  485 

Les  noms  de  peuples  employés  comine  cognomina  ne 
sont  pas  rares.  En  voici  quelques  exemples  empruntés 
à  la  Gaule.  Une  inscription  de  Narbonne  fait  connaître 
les  noms  de  P.  Lucius  Graecus  (1)  et  une  inscription 
de  Nimes  ceux  de  Junius  Graecus  (2).  Des  inscriptions 
de  Vienne  (Isère)  et  de  Narbonne,  ont  conservé  ceux 
de  Messins  Italus  (3)  ;  de  M.  Fulvius  Italus  (4)  et  de  C.  Ju- 
lius  Italus  (5).  Remarquons  pour  ce  dernier  que  son  cogno- 
men  ne  contient  nullement  une  indication  d'origine ,  car 
C.  Julius  Italus  ne  venait  pas  d'Italie  ;  il  était  de  Sego- 
briga  en  Espagne.  Ligus  c'est-à-dire  «  ligure ,  »  est  un 
cognomen  fréquent  dans  les  inscriptions  de  la  Gaule  :  à 
rUe  Sainte-Marguerite,  M.  Julius  Ligus  (6);  à  Fréjus, 
C.  Vibius  Ligus  (7);  à  Marseille,  Julius  Ligus  (8);  à  Aix 
en  Provence,  Albucius  Ligus  (9);  à  Narbonne,  L.  Baebius 
Ligus  (10).  Citons  encore  :  le  cognomen  Cantaber;  à  Vienne, 
Isère),  A.  Lucilius  Cantaber  (11);  à  Villetelle  (Gard),  G.  Sta- 
tius  Cantaber  (12);  —  le  cognomen  Marsus  ;  à  Narbonne, 
L.  Aufidius  Marsus  (13);  —  le  cognomen  Noricus  ;  à  Nimes, 
On.  Reiconius  Noricus  (14)  ;  —  le  cognomen  Tuscus;  à  Fré- 
jus, Trebellius  Tuscus  (15). 

Voilà,  ce  semble,  un  nombre  d'exemples  suffisant  pour 
montrer  que  les  termes  ethniques  qui  ont  servi  à  former 
les  noms  de  lieux  dont  il  va  être  question  ont  dû  cette 


(1)  c.  /.  L.,  XII,  4957. 

(2)  Ibid.,  XII,  3686. 

(3)  Ibid.,  XII,  1985. 

(4)  JMd.,  XII,  4362. 

(5)  Ibid.,  XII,  4536. 

(6)  JMd.,  XII,  174. 

(7)  Ibid.,  XII,  306. 

(8)  Ibid,,  XII,  462. 

(9)  /Md..  XII,  .538. 

(10)  76id.,  XII,  4656. 

(11)  75id.,  XII,  1892,  1976. 

(12)  Ibid.,  XII,  4169. 

(13)  Ibid.,  XII,  4648. 

(14)  ïbid.,  XII,  3860. 
:i5)  ibid,,  XII,  5738. 


486  LIVRE  II.  CHAPITRE  VI.  |  2. 

fonction  à  leur  usage  en  qualité  de  cognomina.  Nous  les 
diviserons  en  trois  catégories.  Il  y  en  a  deux  dont  Tusage 
en  qualité  de  cognomen  est  démontré,  ce  sont  Mauruliis  et 
Romanus  ;  un  a  été  employé  comme  nom  pérégrin ,  c'est 
Catalus  ;  enfin ,  il  y  en  a  trois  que  nous  supposons  avoir 
été  employés  comme  noms  de  personnes  ou  comme  cog^ 
nomina  quoique  nous  n'eu  ayons  pas  trouvé  d'exemple 
avec  cet  emploi;  ce  sont  :  Britannus,  Camus  et  Rutulus. 

*Maurulacae.  Telle  est  vraisemblablement  Torthographe 
primitive  du  nom  de  lieu  écrit  à  l'accusatif  Morlacas^  dans  la 
date  d'un  diplôme  mérovingien  du  septième  siècle  (1);  ce 
serait  dit-on,  La  Morlaye  (Oise). 

Le  cognomen  Maurulus  est  rare.  Nous  n'avons  rencontré 
qu'un  exemple  :  dans  une  inscription  d'Espagne,  figure 
une  femme  appelée  Fabia  Maurula  (2).  Mais  Maurus,  dont 
Maurulus  est  un  diminutif,  se  trouve  fréquemment  en  Espa- 
gne ,  soit  comme  nom  pérégrin ,  soit  comme  cognomen ,  ce 
qui  s'explique  par  le  voisinage  de  l'Afrique  puisque  mourus 
veut  dire  «  originaire  de  Mauritanie  »  ou ,  d'une  manière 
générale;  «  africain.  »  On  rencontre  aussi  Maurus  avec 
valeur  de  cognomen  dans  d'autres  parties  de  l'empire 
romain.  On  peut  citer  à  Bénévent  l'épitaphe  d'Umbrius 
Maurus  (3)  ;  à  Concordia,  dans  l'Italie  du  Nord ,  le  monu- 
ment funèbre  élevé  à  un  chef  des  écuries  impériales  par 
Aurélia  Maura,  sa  femme  (4). 

De  Maurus ,  on  a  tiré  le  gentilice  Maurius ,  d'où  le  nam 
de  lieu  Mauriacus,  dont  il  y  a  en  France  un  certain  nom- 
bre d'exemples.  On  l'a  vu,  pages  281-282. 

RoMANAGus  est  uuo  localité  dont  il  est  déjà  question  au 


(1)  Tardif,  Monuments  historiques^  p.  17,  col.  1. 

(2)  C.  /.  L.,  II,  4362. 

(3)  /6id.,  IX,  2038. 

(4)  /Md.,  V,  1880. 


.     DÉRIVES  CN  -ACU8  DE  6URN0MS  R0MMN6.  487 

btiitièitie  siècle  (1).  Au  dixième  siècle,  cette  localité  est 
qualifiée  de  villa  dans  une  charte  de  Tabbaye  de  Saint- 
Viûcent-de-M&con  (2),  et  une  charte  de  l'abbaye  de  Cluny 
parle  de  Vager  romanctcus  (3).  Ces  deux  actes  sont  d'accord 
pour  mettre  cette  localité  dans  le  pagvs  Lagdunensis^  c'est- 
à-dire  dans  le  Lyonnais.  Vers  Tan  1000,  une  charte  du 
cartulaire  de  Saint-Vincent  de  Mâcon  mentionne  la  sei- 
gneurie et  la  parolisse  de  Romanacus  :  ex  potestate  Roma- 
naca  et  parroôhia  (4).  Dans  tous  ces  documents  il  s'agît  de 
Romenay  (8aône-et-Loire). 

De  l'emploi  du  cognomen  Romanus  en  Gaule,  nous  cite- 
rons les  trois  exemples  suivants  :  à  Arles,  L.  Grànius  Ko-* 
manus  (5)  ;  à  Annemasse  (Haute-Savoie) ,  Aurelius  Roma- 
nus (6);  à  Cologne,  Superinius  Romanus  (7).  A  Mayence, 
Romanus  est  le  nom  d'un  esclave  dont  le  maître  fait  gra- 
ver l'épitaphe  (8).  On  a  trouvé  à  Toulon  l'épi taphe  d'une 
femme  appelée  Romana,  et  qui  n'avait  pas  d'autre  nom  (&). 
Romanus  a  été  un  nom  de  potier;  le  musée  de  Vienne 
possède  des  échantillons  de  sa  fabrication  (10). 

De  Romanus  on  a  tîté  un  gentîlice  Romanius ,  d'où  le 
nom  de  lieu  dérivé  Romaniacus  étudié  pages  303-304. 

Catalacus.  Saint  Ouen,  archevêque  de  Rouen,  écrivant 
au  septième  siècle  la  vie  de  son  contemporain  saint  Eloi , 
évoque  de  Noyon,  le  fait  naître  en  Limousin,  in  villa  Cata- 
lacense  (11). 

Catalus  est  un  nom  d'homme  pérégrin  dans  une  inscrip- 


(1)  Ragtit,  Cartulaire  de  Saini-Vincent  de  Màcon^  p.  54. 

(2)  Itid,,  p.  184. 

(3)  Bniel,  Recueil  des  chartes  de  Cluny ,  t.  I,  p.  730.  | 

(4)  Ragut,  p.  190. 

(5)  C.  I.  L..  XII,  727. 

(6>  ma.,  xir,  2576. 

(7)  Brambaeh,  318. 

(8)  Ibid,,  1244. 

(9)  Ibid.,  XII.  5760. 

(10)  Ibid.,  XII,  5686,  750. 

(11)  Dom  Bouquet,  III,  552  c. 


488  LIVRE  IL  CHAPITRE  VI.  (  2. 

tion  d'Aquilée  qui  est  Tépitaphe  du  cavalier  Catalus  Callaei 
fllius,  séquane  de  nation,  c'est-à-dire  originaire  de  Besan- 
çon ou  des  environs  (1).  On  trouve  souvent  ce  nom  d'homme 
en  Irlande;  par  exemple  Cathal,  fils  d'Aed,  est  un  roi  de 
Munster  qui  serait  mort  en  625  (2).  Catalus  est  aussi  un 
nom  ethnique  :  les  Catali  sont  un  petit  peuple  des  Alpes 
dont  il  est  question  chez  Pline  (3). 

De  Catalus  on  a  tiré  un  gentilice  ^Catalius,  d'où  le  nom 
de  la  localité  appelée,  au  onzième  siècle ,  Kadaliacus  pour 
Cataliacus)  villa  4).  Cette  localité  était  située  dans  le  pays 
de  Bar  (Corréze),  et,  suivant  M.  Deloche,  elle  s'est  appelée 
plus  tard  Cazillac. 

*Britannacus.  Ce  nom  de  lieu  se  reconnaît  sous  le? 
formes  légèrement  altérées  Brittannaicus  ei  Britiniticus  ûbus 
des  chartes  du  dixième  siècle  appartenant  à  l'abbaye  de 
Saint-Martin  de  Tours  (5}  ;  c'est  aujourd'hui  Berthenay 
(Indre-et-Loire).  11  y  a,  dans  le  département  de  TAisue,  un 
hameau  de  même  nom.  Brethenay,  nom  d'une  commune 
du  département  de  la  Haute-Marne ,  en  est  une  variante. 

Britannacus  s'explique  par  un  cognomen  *  Britannus  dont 
le  sens  primitif  est  ethnique.  Du  cognomen  *  Britannus  est 
dérivé  le  gentilice  Britannius,  et  celui-ci,  comme  on  Ta  dit 
p.  201,  a  donné  naissance  au  nom  de  lieu  BrUinniacus^ 
Bretiniacus^  aujourd'hui  Bretigney  et  Brétigny. 

Carnacus.  Dans  le  testament  d'Abbon,  en  739,  est  le 
nom  de  la  commune  de  Charnay,  arrondissement  de  Màcon 
(Saône-et-Loire),  in  pago  Matascense,  c'est-à-dire  en  Maçon- 
nais (6);  nous  retrouvons  la  même  commune  sous  le  même 


(1)  C.  /.  L.,  V,  907. 

(2)  Chron,  Scotorum^  édit.  Hennessy,  p.  79.  8a  mort  est  datée  de  620  ptr 
les  Annales  des  quatre  maîtres,  Ed.  O'Donovan,  1851,  t.  I,  p.  244. 

(3)  Livre  III,  g  133. 

(4)  Deloche,  Etudes  sur  la  géographie  historique  de  la  Gaule,  p.  323. 

(5)  Mabille,  La  pancarte  noire,  p.  220,  cf.  p.  187-189. 

(6)  Pardessus,  Diplomata,  II,  372,  505, 


DÉRIVÉS  EN  -A eu 8  DE  SURNOMS  ROMAINS.  489 

noin  antique  dans  deux  chartes  du  dixième  siècle  (1).  Il  y 
a  en  France  quatre  autres  communes  de  Charnay;  elles 
sont  situées  dans  les  départements  du  Doubs,  du  Jura,  du 
Rhône ,  enfin  dans  celui  de  Saône-et-Loire,  arrondissement 
de  Chalon-sur-Saône.  Les  noms  des  communes  de  Carnac 
(Lot),  et  Carnac  (Morbihan)  ont  la  môme  origine.  Il  y  a  en 
Italie ,  dans  la  province  de  Come ,  une  commune  de  Car- 
nago  ;  une  localité  de  même  nom  dans  le  canton  de  Tessin, 
en  Suisse ,  figure  dans  la  feuille  VII  de  la  carte  générale 
du  théâtre  de  la  guerre  en  Italie  par  Bacler-Dalbe. 

*  Camus  a  dû  être  un  cognomen^  et  ce  cognomen  était 
identique  au  nom  d*un  peuple  celtique,  les  Carni,  établis  au 
nord-est  de  l'Italie,  dans  les  Alpes.  Ce  cognomen  a  donné 
naissance  au  gentilice  Carnius  dont  on  a  des  exemples  à 
Padoue  (2)  et  en  Afrique  (3).  Carnius  explique  le  nom  de  la 
commune  de  Saint-Remy-de-Chargnat  (Puy-de-Dôme),  des 
hameaux  de  Chargnac  (Corrèze  et  Dordogne),  peut-être 
aussi  celui  des  Charny  de  la  Côte  d'Or,  de  la  Meuse,  de 
Seine-et-Marne  ,de  TYonne  et  de  l'Aube. 

*  RuTULACiE,  sous-entendu  villae,  doit  être  la  forme  anti- 
que du  nom  du  lieu  appelé,  au  cas  indirect,  termino  Rodo- 
laigas  vers  Tan  mil  dans  une  charte  de  Tabbaye  de  Con- 
ques, qui  met  cette  localité  dans  le  pays  de  Toulouse  :  in 
pago  Tolosano  (4).  Un  siècle  environ  plus  tard,  une  autre 
charte  de  la  même  abbaye  écrit  le  même  nom  Rodolaiguas  (5). 
Rutulus  est  le  nom  des  Rutuli,  peuple  bien  connu  de 
Vltaiie  centrale. 

§  3.  —  Cognomina  d'origine  grecque. 

Nous  arrivons  aux  noms  de  lieu  qu'à  Taide  du  sufiEbce 

(1)  Ragut,  Carlul&ire  de  Saint- Vincent  de  MÂcon,  p.  234,  276. 

(2)  C.  /.  L.,  V,  2522. 

(3)  Ibid.,  VIII,  6870,  6871,  7275. 

(4)  G.  Desjardins,  Cartul&ire  de  l'abbaye  de  Conques,  p.  63. 

(5)  Ibid.,  p.  82. 


490  hmos:  n.  chapitre  vi.  i  si 

"«eus  OD  a  tiré  de  cognomina^  étrangers  à  la  langue  latine. 
Noii»  commençons  par  les  oognomina  grecs. 

ÂTfiAN^cus.  Àthanaous,  aujourd'hui  Âinay,  au  confiueiit 
de  la  S&dne  et  du  Rhône^  à  Lyon,  est  devenu  célèbre  dkm 
dans  l'antiquité  chrétienne  par  la  mort  des  martyrs  dits 
Attdanao&nses  y  et  dont  parle  le  premier  Grégoire  de  Tours, 
dans  son  livre  De  la  gtoire  des  martyrs^  c.  48  (1).  Il  fut 
construit  en  ce  lieu  unô  basilique  qui  donna  naissaaïce  à 
une  abbaye.  Gette  abbaiye  a  une  notice  dans  le  Gallia  ohriê- 
Hana  (2),  et  son  cartulaire  a  été  publié  par  Auguste  Ber- 
nard à  la  suite  de  celui  die  Savigny. 

À^hânaciiê  dévive  du  nom  d*homme  grec  'AMvok,  Ce  nom 
fut  porté  par  un  historien  originaire  de  Syracuse ,  et  doai 
pafrle  Diodore  de  Sicile  (3).  On  connaît  davantage  le  dérivé 
'AtordÉcnoç,  Athan^asc. 

*  HETRMfi^ftACts  parait  être  Totthograpbe  la  plus  ancienne 
du  nom  du  lieu  appelé,  a:u  cas  indirect,  Herme^ogo  rnlh 
dans  un  diplôme  de  Charlemagne  pour  Tabbaye  de  Saint- 
Denis,  en  775  (4).  Lepage  (5)  émet  Thypothèse  que  ce 
serait  Remeréville  (Meurthe-et-Moselle). 

*  Hermeracus  est  dérivé  du  cognomén  Hermerus.  De^Vit, 
dans  son  Onomasticon,  cite  l'exemple  :  T.  Statîlius  Herme- 
rus, fourni  par  une  inscription.  Ce  cognomén  est  d'origine 
grecque  ;  le  nom  d'homme  "Èpfxefïoc  a  été  relevé  par  Pape. 
C*est  une  variante  de  'lîpfx/pax,  -»toç,  Htermeros,  -otis,  qui 
n*est  pas  rare  dans  les  inscriptions  latines,  et  dont  on 
trouve  des  exemples  en  Gaule  :  ainsi  il  existe  encore  à 
Fréjus  répitaphe  de  L.  Valerius  Hermeros  (6)  ;  on  a  trouvé 


(1)  Edition  Knisch,  p.  522,  1.  10,  il. 

(2)  Tome  IV,  eol.  233^241. 

(3)  Uyre  XV,  c.  94,  g  4;  édit.  Didot,  t.  II,  p.  64,  I.  i% 

(4)  Dom  Bouquet,  V,  736  c. 

(5)  Dictionn&irë  tùpoffréphiquê  du  dép&rttiment  de  ta  itf«ut«^he,  p.  117. 

(6)  C.  /.  X..,  XU,  271. 


DÉRIVÉS  EN  -ACU»  DÉ  BURNOMS  ROMAINS.  49f 

à  Aîx,  en  Provence,  celle  de  L.  Pompeius  Hermeros  (1). 

Prtjnacûs.  Une  charte  des  environs  de  Tan  mil  met 
dans  le  Lyonnais ,  in  pago  Lugdimensi ,  une  villa  qu'elle 
appelle,  à  l'ablatif,  Pnmaco  (2). 

Pru7%(j^cus  paraît  dérivé  du  cognomen  féminin  Prune, 
variante  latine  de  Phryne.  Prune  est,  dans  une  inscription 
d'Espagne  (3),  le  nom  d'une  esclave  affranchie  par  ses 
maîtres  Plotius  et  Fufla.  Une  autre  inscription  d'Espagne 
est  l'épitaphe  d'une  autre  affranchie  qui  avait  le  même 
cognomen ,  mais  avec  une  orthographe  plus  grecque.  Elle 
est  appelée  au  datif  Valeriae  Phryni  (4). 

*PARfHENACus.  Le  uom  bien  connu  de  Parthenay  (Deux- 
Sèvres)  doit  s'expliquer  par  un  primitif  Parthena^tiS  dérivé 
d'un  cognomen  Parthenus.  Celui-ci  est  identique  au  sub- 
stantif grec  Bbtpô*wç,  et  se  rencontre  comme  nom  de  saint 
chez  les  BoUandistes  aux  dates  des  1*''  avril  et  17  mai. 
Le  dérivé  Parthenius  était  plus  usité,  mais  il  aurait  donné 
le  nom  de  lieu  Pa/rth&niacus ,  qui  serait ,  en  français ,  Par- 
thigny,  Parthigûé,  et  non  Parthenay. 

§  4.  —  Cognomina  d'origine  barbare. 

Parmi  ces  cognomina  de  provenances  diverses ,  dont  on 
a  tiré  des  noms  de  lieu  par  l'addition  du  suffixe  -acus ,  on 
en  remarque  de  gaulois.  Nous  suivrons  l'ordre  alphabétique 
sans  distinction  d'origine. 

Argentay,  commune  des  Verchers  (Maine-et-Loire),  est 
appelé  Àrgenteium  dans  une  charte  écrite  vers  l'année  1 160  (5). 


(1)  C.  /.  L.,  XII,  524. 

(2)  Aug.  Bernard,  Cartulaire  de  Savigny,  p.  248. 

(3)  C.  /.  L.,  H,  3495. 

(4)  /Md.,  II,  2068. 

(5)  Port,  Dictionnaire  historique  de  Maine-et-Loire,  t.  I,  p.  132. 


492  LIVRE  IL  CHAPITRE  VI.  {  4. 

C'est  un  ancien  ^Argeniacus  qui  suppose  un  cognomen 
*Argentus  ou,  avec  une  légère  variante  orthographique, 
*Arganto$^  au  neuvième  siècle  Arganl  dans  le  Cartulaire  de 
Redon  :  une  charte  datée  de  869  par  l'éditeur  de  ce  cartu- 
laire constate  l'adoption  de  Salomon,  roi  de  Bretagne,  par 
une  femme  appelée  Roiant-dreh ,  arrière  petite-fille  d'Ar- 
gant  (1).  D'Argant  est  dérivé  le  nom  de  femme  Argantan , 
écrit  deux  fois  dans  le  même  cartulaire  (2).  L'orthogra- 
phe irlandaise  de  ce  dernier  mot  est  Argatân.  Argatân  est 
le  nom  d'un  abbé  irlandais  qui  serait  mort  en  894,  suivant 
les  Annales  des  quatre  maîtres  (3),  en  899  d'après  le  Chrch 
nicon  Scotorum  (4),  en  898  si  l'on  en  croit  les  Annales 
d'Ulster  (5).  Argantan  ou  Argatân  est  un  diminutif  d'Argant. 
Argant  est  le  premier  terme  des  noms  d'hommes  composés 
Argant-hael,  Argant-lon,  Argant-louuen  et  Argant-monoc, 
qu'on  rencontre  aussi  dans  le  Cartulaire  de  Redon  (6). 

Le  nom  d'homme,  noté  Argant  dans  le  Cartulaire  de 
Redon^  au  neuvième  siècle,  est  identique  au  premier  terme 
de  plusieurs  noms  de  lieux  composés  de  la  Gaule.  Le  plus 
connu  de  ces  noms  de  lieux  est  Argento-ratus,  comme  l'écrit 
Ammien  Marcellin  dans  sa  description  de  la  Gaule  (Tj  : 
Argentoratus  barbaricis  cladibus  nota  (8).  C'est  aujourd'hui 
Strasbourg,  chez  Grégoire  de  Tours  Strateburgum. 

A  la  leçon  Argento-ratus  d'Ammieu  Marcellin ,  les  mo- 
dernes ont  préféré  la  variante  Argento-ratum^  'Apftvtoporrov , 
comme  l'écrit  Ptolémée  (9).  Pour  déterminer  avec  certi- 
tude quel  était  le  genre  du  second  terme  de  ce  mot,  on  ne 
peut  faire  usage  ni  de  l'Itinéraire  d'Antonin ,  où  ce  mot  se 


(1)  Cartulaire  de  Redon,  p.  83. 

(2)  Ibid.,  p.  118. 

(3)  Edition  d'O'  Donovan,  1851,  t.  I,  p.  552. 

(4)  Edition  Hennessy,  p.  176. 

(5)  Edition  Hennessj,  t.  I»  p.  414. 

(6)  Pages  99,  103,  136,  146,  205. 

(7)  Livre  XV.  ch.  xi.  )  8. 

(8)  Edition  Teubner-Gardthausen,  t.  I,  p.  72,  J.  34 

(9)  Livre  II,  ch.  ix,  {  9,  édit  Didot-Mûller,  t.  I,  p.  229,  1.  6. 


DÉRIVÉS  EN  -AGUS  DE  SURNOMS  ROMAINS.  493 

trouve  plusieurs  fois  au  cas  indirect  Argentorato ,  ni  d'un 
passage  d'Eutrope  qui  nous  l'offre  à  l'accusatif  :  apud 
Argentoratum  Galliae  urbem  (1).  On  ne  saurait  donc  afi&rmer 
avec  certitude  que  le  genre  du  second  terme  d'Argento- 
ratîÂS  ou  Argento^ratum  fût  le  masculin  ou  le  neutre. 

Comment  traduire  ce  nom  de  lieu?  Il  y  a,  en  irlandais, 
un  nom  commun  rdih ,  forteresse.  Il  pourrait  paraître  très 
séduisant  de  rendre  Argento-ratus  par  «  forteresse  d'Ar- 
gantos.  )>  Seulement  rdth  en  irlandais,  ou  est  une  mau- 
vaise orthographe  pour  râith,  thème  rdti-,  ou  vient  de  rdta, 
féminin  (2). 

La  variante  Argento-7ate  de  la  Table  de  Peutinger  pouTTsii 
être  le  cas  indirect  à'Argento-^dti-s ,  mais  nous  ne  savons 
quelle  peut  être  la  valeur  de  cette  variante.  Le  -forw  de 
Ptolémée  pourrait  être  considéré  comme  identique  à  l'irlan- 
dais rath,  «  faveur,  grâce,  »  qui  est  un  thème  neutre  en  -o, 
mais  la  traduction  «  don  d'Argentos  »  paraîtrait  bizarre.  Il 
est  donc  prudent  de  laisser  sans  traduction  le  nom  de  lieu 
Argento-ratus  ^  Argento-ratum  ^  ou  de  donner  comme  hypo- 
thétique l'interprétation  «  fort  d'Argantos.  » 

Le  nom  d'Argento-ratum,  Argento-ratus,  supplanté  par  celui 
de  Strasbourg,  en  Alsace,  paraît  persister  dans  le  départe- 
ment de  la  Mayenne  sous  la  forme  moderne  Argentré.  Le 
nom  de  l'église  d' Argentré,  de  Argent-rato,  est  compris  dans 
la  liste  des  paroisses  fondées  par  Turibius,  évêque  du  Mans, 
à  la  fin  du  cinquième  siècle.  Cette  liste  nous  a  été  con- 
servée par  le  compilateur  auquel  on  doit  les  Gesta  pontifia 
ùum  Cenomannensiwm  (3) . 

(1)  Livre  X,  ch.  xiv:  édition  Teubnor-Dietsch,  p.  76. 

(2)  Voyez  Tarticle  1  ràth  et  riith  dans  le  glossaire  de  Windisch ,  Irische 
Texte,  I,  732;  Rathi,  dans  le  livre  d'Armagh  (WhiUey  Stokes,  The  Tripar- 
tite  life  of  Palvick ,  t.  II ,  p.  289 ,  1.  21),  est  peut-être  l'accusatif  pluriel  du 
thème  rati-,  ce  qui  semblerait  établir  l'antiquité  de  ce  thème;  mais  cette 
explication  de  rathi  est  rendue  douteuse  par  la  variante  fossam  castelli. 
Voyez  la  note  9  de  la  page  précitée  du  livre  de  M.  Whitlej  Stokes. 

(3)  Mabillon,  Vctera  analecta,  in-8%  t.  III,  p.  64  (cf.  Madtre,  Dictionnaire 
topographique  du  département  de  la  Mayenne^  au  mot  Argentré;  et  Cauvin, 
Géographie  ancienne  du  diocèse  du  Afans,  p.  24,  col.  2. 


éM  LIVRC  H.  GHAPCram.  f  4e. 

Un  nom  de  lieu  beaucoup  moins  connu  quUi 
2Q3JS  beaucoup  plus  clair ,  est  celui  de  la  station  appelée 
Âr^n^maçiJi»^  d^Q^  V Itinéraire  d'Antonin.  Arffcmto-'magus 
vavit  dire  «  4^amp  d'Axgantos.  »  C^est  aujourd'hui  Argen- 
ton-sur-Crwse  (Indre)  (1).  Il  faut  foire  attention  à  l'or- 
tb^Qgrapbe  du  premier  terme  de  ce  con^posé  Arganta^  avec 
un  a,  et  non  Argenio^  avec  un  e.  Comparez  le  breton  Ar- 
gent, déj^  cité  d'après  le  Cartulaire  de  Bedon,  Argen4(h 
p^^t  une  orthographe  latine  produite  par  rînfluence  du 
vooi  latin  argentum»  De  1^  dan,s  la  Notitm  dignUatum  ... 
Occidentis ,  chapitre  VIII ,  l'orthographe  par  e  du  dérive 
AriimM>'rwfien9U{i)i  cowgie  da»s  Vltinéraire,  c'est,  paraît-il, 
d!AjrgenJtQn-9ur-Creuse  gu'il  s'agit. 

l)U  oognomen  *  Argentus,  on  a  tiré  le  dérivé  Argentillus. 
Arge^tillys ,  co^ime  le  breton  Argantan ,  est  un  diminutif 
d'  *  Argentus  ou  *  Argantos.  *  Argentus  ou  *  Argantos  doit  avoir 
été  usité  comme  surnom  d'homme  sous  l'empire  romain , 
mais  nous  n'en  avons  pas  trouvé  d'exemple.  On  est  plus 
heuj^eux  pour  Argentillus*  Argentillus  est  le  surnom  d'un 
affranchi  dans  une  inscription  de  Narbonne  (3).  Le  musée 
d|3  la  même  ville  nous  a  conservé  le  monuipent  funèbre 
que  l'affranchie  Annia  Argentilla  avait  fait  élever  pour  elle 
et  pour  son  patron  (4).  De  Gaule,  ce  cognomen  pénétra  en 
Italie,  d'abord  dans  celle  du  Nord,  où  nous  en  trouvons  six 
exeipples  (5)  ;  puis  même  plus  au  sud ,  car  nous  le  ren- 
controns comme  nom  pérégrii>  dans  une  inscription  de 
3é^yent;  c'est  Tépitaphe  d'une  femme  appelée  Argen- 
tilla (6). 

Artonacus  ou  Artunnacus.  La  première  leçon  est  celle 


(1)  Itinéraire  d'Antonin,  p.  460^  1.  2;  p.  461,  1.  2-3;  p.  462,  I.  3.  Longnon, 
Atlas  historique  de  U  France^  texte,  p.  25. 

(2)  Edition  Bôcking,  t.  Il,  p.  43. 

(3)  C.  /.  t.,  t.  XH,  p.  853.  n-  6006. 

(4)  Jbid.,  XII,  4586. 

(5)  Ibid.,  V,  1001,  1820,  1829,  1830,  1846,  7298. 

(6)  Ibid.,  IX,  1749. 


DÉRIVÉS  mi  -AGUa  DB  SURNOMS  ROMAINS.  «15 

d'une  moimaie  siéroviragiennc  (1)  ',  ia  seconde  est  x^elle 
d'une  charte  du  (mzième  siècle  en  faveur  de  Tabbaye  «de 
Moléme  (S).  Ce  dernier  doottment  eonceme  ÀrtiioHaaiy 
(Yonne)  (3).  Nous  oe  saiyorn  pcus  où  a  été  &appée  la  mei^ 
naie  mérovingienne. 

Le  nom  d'homme  Arto,  d'eài  ce  nom  de  lieu  dérive,  «pr 
paratt  dans  une  inscription  publiée  par  M.  Mommsen  (4); 
c'est  probablement  un  dérivé  4^2  nom  gaulois  de  Tiours 
dont  on  a  paarlé  plus  haut,  p.  384.  On  doit^  ce  eemble, 
rattacher  à  la  même  origioe  le  nom  d'Aortonne  (Puywiei- 
Dôme),  Àrkma  vieOj  sur  une  monnaie  métovi<HgÎ0QflQ  (B). 

BnsNNAeus  est  surtout  connu  pour  avoir  été  le  nom  d*«ine 
habitation  des  rois  mérovingiens.  M.  Longnon  a  éitabii 
qu'avec  ce  sens  ce  nom  désigna  Berny-rRivière  (Aisoe)  {â). 
Dans  les  documents  de  la  période  mérovin^ime ,  Toiv- 
thographe  préférée  parait  avoir  été  Brinnaeus  ;  c'est ,  du 
moins,  la  notation  adoptée  par  les  nouveaux  éditeur»  de 
Grégoire  de  Tours  et  de  Fortunat.  Un  autre  Binnnaem 
était  situé  aux  environs  d'Evreux  ;  il  en  est  question  dans 
un  diplôme  de  l'année  689  (7)  ;  on  suppose  que  ce  peut  être 
Brenay,  commune  de  Branville  (Eure)  (8).  Le  Ccurtuiairs  de 
Briûude  mentionne  deux  fois  une  villa  appelée  à  l'atdfitif 
Brminago,  située  en  Auvergne,  dans  la  vicairie  de  Brioude 
(Haute-Loire)  (9)  ;  c'était  probablement  au  dixième  siècle  ; 
nous  retrouvons  la  même  localité  sous  le  même  nom,  de 
BrennacOj  au  quatorzième  siècle  (10)  :  c'est  Brenat,  commune 


(1)  A.  de  Qarthélemar ,  ^^m  ia  BâUiùfh,  4^  l'Jfaqh  d^f  9h^^^  K  ^^fYif 
p.  451. 

(2)  Quantin,  Cartulaire  général  de  l'Yonney  t.  II,  p.  27. 

(3]  Quantin,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  l'Yonne,  p.  5. 

(4)  /.  R,  iV.,  6833.  De- Vit,  OnomaêHeon,  t.  II,  p.  494. 

(o)  A.  de  Barthélémy,  dans  la  BibL  de  l'Ecole  des  chartes^  t.  XXVI,  p.  451. 

(6)  Géographie  de  la  Gaule  au  êixième  sièelej  p.  896. 

(7)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  637,  col.  2. 

(8)  BloBseville,  Dictionnaire  topogr,  du  département  de  l'Eurs^  p.  8^. 

(9)  Doniol,  p.  101  ;  cf.  p.  92. 

(10)  Ghauaing,  Spicilegium  Brivatense,  p.  4S7,  629. 


496  LIVRE  II.  CHAPITRE  VI.  {  4. 

de  Saint- Just  (Haute-Loire).  Deux  chartes  du  dixième 
siècle  mettent  en  Lyonnais  une  villa  Brenacus  (1) ,  appelée 
aussi  Brennacus  :  in  Brennaco  vers  Tan  1000  (2)  ;  c'est  Le 
Barnay,  commune  de  Bessenay  (Rhône).  Brennacus  a  dà 
être  la  forme  primitive  des  noms  des  communes  de  Bre- 
nat  (Puy-de-Dôme),  de  Brenac  (Aude),  des  deux  hameaux 
de  Brené  (Maine-et-Loire),  etc.  Ainsi  s'explique  aussi  le 
nom  de  Bernay  (Eure),  appelé  Brenaicus  dans  un  document 
des  environs  de  l'an  1000  (3),  et  probablement  aussi  les 
noms  des  communes  de  Bernay  (Charente-Inférieure ,  Sar- 
the,  Seine-et-Marne)  ;  ceux  des  communes  de  Bemac  (Cha- 
rente, Tarn,  Hautes-Pyrénées). 

Brennacus  est  dérivé  du  nom  d'homme  gaulois  bien 
connu,  Brennos,  qui  s'est  maintenu  sous  l'empire  romain, 
comme  l'établit  une  inscription  de  Bordeaux  (4).  La  forme 
féminine  de  ce  nom  nous  a  été  conservée  par  une  inscrip- 
tion de  Rome,  qui  est  l'épitaphe  de  Brena  Secunda  (5).  De 
ce  nom  gaulois  on  a  tiré  un  gentilice  romain  noté  Brenia 
au  féminin  dans  une  inscription  du  Latium  (6),  et  Brinnius 
dans  plusieurs  inscriptions  de  Campanie  (7).  De  ce  genti- 
lice vient  un  nom  de  lieu,  *Brinniacus^  qui  explique  le 
nom  moderne  de  Brigné  (Maine-et-Loire),  de  Brignac  (Cor 
rèze),  Brignac  (Morbihan).  Brennus  et  Brenna,  en  italien 
Brenno  et  Brenna,  ont  été  employés  comme  noms  de  lieux 
en  Italie  :  Brenno  dans  les  provinces  de  Come  et  de  Turin; 
Brenna  dans  celles  de  Come  et  de  Sienne. 

*  BuRNAGus  est  la  forme  primitive  du  nom  de  la  commune 
de  Saint-Jean-de-Bournay  (Isère) ,  appelée  à  l'ablatif  Bor- 


(1)  A.  Bernard,  CaHuiaire  de  Savigny,  p.  38,  109. 

(2)  Ibid.,  p.  231. 

(3)  Blosseville,  Dictionn,  topogr,  du  départ,  de  l'Eure^  p.  17. 

(4)  Jullian,  Inscriptions  romaines  de  Bordeaux,  t.  I,  p.  317. 

(5)  C.  /.  L.,  VI,  13633 

(6)  Ibid.,  XIV,  4155. 

(7)  Ibid.,  X,  451,  1403,  2174,  2175. 


DÉRIVÉS  EN  -A  eu  S  DE  SXmNOMS  ROMAINS.  497 

naco  dans  un  diplôme  de  Tannée  739  (1).  Le  nom  de  cette 
commune  est  identique  à  celui  de  Bournac ,  hameau  de  la 
commune  de  Saint-Affrique  (Aveyron),  appelé  à  Tablatif 
Bomctco,  dans  une  charte  du  treizième  siècle  (2). 

*Bumacus  vient  de  Burnus,  nom  d'homme  qui  parait 
gaulois.  On  a  trouvé  en  Espagne  Tépitaphe  de  Camalus, 
fils  de  Burnus  (3).  Le  même  nom  d'homme  a  donné  le  pre- 
mier terme  du  nom  de  lieu  *  Burno^magus ,  appelé  Burno- 
mus  au  neuvième  et  au  onzième  siècle,  aujourd'hui  Bour- 
nan,  hameau  du  département  de  la  Vienne  (4). 

*  Cedracus.  Une  charte  de  l'année  689  met  dans  le  Maine 
une  localité  appelée  au  cas  indirect  Càedraco  (5).  Il  faut 
corriger  Cedraco. 

Ce  nom  de  lieu  est  dérivé  de  Cedrus,  cognomen  dans 
une  inscription  d'Ostie  (6).  Le  nom  d'homme  Cedrus  se 
rencontre,  employé  comme  nom  de  lieu,  dans  l'itinéraire 
de  Bordeaux  à  Jérusalem,  Cedros  (7),,  dont  l'emplacement 
aurait  été  à  Villesèque  (Aude),  suivant  M.  Longnon  (8). 

CoRBONACus  est  une  des  résidences  des  rois  carlovin- 
giens.  Nous  y  trouvons  Charlemagne  en  771,  suivant  les 
Annales  dites  Tiliani^  suivant  celles  d'Eginhard  et  de 
Fulda(9).  Charles  le  Chauve  en  date  un  diplôme  en  841  (10). 
Antérieurement,  une  charte  de  l'année  708  mentionne  la 
même  localité  au  cas  indirect  sous  le  nom  de  Corbunaco  (11). 
Il  s'agit  de  Corbeny  (Aisne)  (12). 

(1)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  372;  CaWulairc  de  S&int-Hugues  de 
Grenoble,  p.  37. 

(2)  Guérard,  C&rtuUire  de  Saint-Victor  de  Marseille,  t.  II,  p.-  282,  849. 

(3)  C.  /.  L.,  II,  2484. 

(4)  Redet,  Dict.  topogr,  du  départ,  de  la  Vienne^  p.  58. 

(5)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  637,  col.  2. 

(6)  C.  /.  L.,  XIV,  427. 

(7)  Itinéraire  d'Antonin,  p.  551,  1.  8. 

(8)  Atlas  historique  de  la  France,  p.  27. 

(9)  Dom  Bouquet,  V,  18  e,  201  b,  328  a. 

(10)  Ibid,,  VIII,  431  d. 

(U)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  277. 

(12)  Matton,  Dict.  topogr.  du  départ,  de  l'Aisne,  p.  76. 

32 


498  LIVRB  n.  CHAPITRE  VI.  {  4. 

Corbonacm  est  dérivé  de  Corbo,  eogwimen  d'un  affranchi 
dans  une  inscription  de  Pannonie  (1). 

De  Cori3o  on  a  probablement  tiré  un  gentilice,  *Corbo- 
nius ,  d'où  CorbiniacuSy  nom  de  Corbigny  (Nièvre),  au  hui- 
tième et  au  neuvième  siècle  (2). 

Gorbo,  -onis  dérive  d'un  nom  d'homme  barbare,  Corbus, 
conservé  par  une  inscription  du  Norique  contemporaine 
de  l'empire  romain  (3).  Ce  nom  était  probablement  gaulois. 
On  en  trouve  une  variante  en  Espagne  Tan  206  avant  notre 
ère.  Les  Romains  font  la  conquête  de  l'Espagne  sur  les 
Carthaginois,  et  une  partie  des  habitants  est  entrée  dans 
l'alliance  romaine.  Parmi  ceux-ci,  on  compte  deux  hommes 
illustres,  Corbis  et  Orsua,  qui,  se  disputant  le  pouvoir  dans 
leur  ville  natale ,  se  battent  en  duel  à  Carthagène  sous  les 
yeux  du  général  romain,  lui  procurant  ainsi  gratuitement 
le  plaisir  d'un  combat  de  gladiateurs  (4).  De  Corbis  parait 
venir  le  nom  de  la  ville  espagnole  de  Corbio^  chez  les  Sues- 
setani^  peuple  probablement  gaulois.  Corbio  fut  prise  par 
les  Romains  l'an  184  avant  notre  ère  (5). 

*CoTTONACus.  Deux  chartes,  l'une  de  Tan  1000,  l'autre  de 
1003,  concernent  une  propriété  située  dans  le  pays  de 
Grenoble,  in  villa  Cotonaco  (6). 

Ce  nom  de  lieu  est  dérivé  du  nom  barbare  Cotto,  Cot- 
tonis.  Ce  nom  était  porté,  en  l'an  179  avant  notre  ère,  par 
un  noble  bastarne,  ami  des  Macédoniens  (7).  Il  est  dérivé 
de  Cottos,  nom  probablement  gaulois  d'un  potier  dont  on 
peut  encore  lire  la  marque  au  musée  de  Vienne  (Isère)  : 
CoTTi  OFFicina  (8).  Ce  nom  d'homme  semble  identique  au 


(1)  C.  I.  L.,  I,  1466  ;  III,  3776. 

(2)  Soultrait,  Dicl,  topogr»  du  départ,  de  la,  Nièvre,  p.  54. 

(3)  C.  /.  L.,  III,  6497. 

(4)  Tite-Uve,  1.  XXVIII,  c.  21. 

(5)  Ibid.,  L  XXXIX,  c.  42. 

(6)  Carlulaire  de  Saint-Hugues  de  Grenoble,  p.  16,  17. 

(7)  Tite-Live,  1.  XL,  c.  57. 

(8)  C.  /.  L..  XII,  5686,  272. 


DÉRIVÉS  EN  -AC US  DE  SURNOMS  ROMAINS.  499 

breton  coz^  «  vieux.  »  Outre  Cotto,  il  a  donné  un  autre 
dérivé  plus  connu,  Cottius,  nom  porté  par  le  roi  à  cause 
duquel  on  appela  Cottiennes  un  tronçon  des  Alpes. 

*  Eburulacus.  C'est  ainsi  qu'il  faut  restituer  le  substantif 
doii  l'on  a  dérivé  l'adjectif  Eborolacensis^  qui  qualifie  le 
substantif  praedium^  dans  une  épitre  de  Sidoine  Apolli- 
naire (1).  Cette  épitre  parait  avoir  été  écrite  en  474 ,  et  la 
localité  dont  il  s'agit  était  située  dans  le  voisinage  de 
Clermont  (Puy-de-Dôme),  qui  fut  cédé  aux  Wisigoths  Tan- 
uée  suivante. 

"Eburulacus  est  dérivé  d'^Eburulus  qui  est  un  diminutif 
d'Eburus.  On  a  émis  l'hypothèse  qoi  Eburulacus  serait  iden- 
tique à  Evrogilum,  un  des  quatre  palais  de  Louis  le  Débon- 
uaire  du  vivant  de  Charlemagne  (2).  Evrogilum  est  aujour- 
d'hui Ebreuil  (Allier)  (3)  ;  c'est  un  dérivé  d'Eburus  et  non 
d'*Eburulus.  Eburus  a  été  étudié  déjà,  p.  168-169. 

*  Isarnacus  doit  être  la  forme  la  plus  ancienne  du  nom  de 
la  commune  appelée  aujourd'hui  Yzernay  (Maine-et-Loire). 
Nous  n'avons  pas  d'exemple  du  nom  d'homme  Isarnus 
dans  la  période  romaine ,  mais  il  a  été  fréquent  dans  les 
premiers  temps  du  moyen  âge  (4). 

Sedegenacus  ,  avec  une  orthographe  savante ,  en  929  ; 
Sedegenagus  notation  plus  rapprochée  de  la  prononciation 
du  temps,  en  893  (5),  est  aujourd'hui  La  Touche,  commune 
de  Cherves  (Vienne),  et  s'explique  par  un  nom  d'homme 
gaulois  *Sede-genos,  ou  peut-être  *Sedio-genos  «  fils  de 
Sedios.  y> 


(1)  Lib.  III,  5.  Migne,  Patrologia  UiineL,  t.  LVIIt,  col.  499  6. 

(2)  VU&  Ludovici  PU,  c.  7.  D.  Bouquet,  VI,  90  c.  Migno,  t.  CIV,  col.  932  d. 

(3)  Longnon,  Atlas  historique  de  la  France,  p.  178. 

(4)  Voir  plus  haut,  p.  184-186. 

(5)  Redet,  Dici,  topogr.  du  départ,  de  la  Vienne,  p.  411,  412. 


■ 


CHAPITRE  VII. 


EXEMPLES  ,  AU   MOYEN  AGE  ,  DE  NOMS  DE  LIEUX   IDENTIQUES  A 

DES  cognomina  romains. 

SOMHAIRB  : 

(  1*'.  CognominsL  employés  au  masculin  singulier.  —  2  2.  Cognomina  em- 
ployés au  masculin  pluriel.  —  {3.  Cognomina,  employés  au  féminin  sin- 
gulier. —  {4.  Cognomina  employés  au  féminin  pluriel. 

§  !•'.  —  Cognomina  employés  au  masculin  singulier. 

Brannus.  Une  villa  Brannus  en  Auvergne  est  mention- 
née plusieurs  fois  dans  le  cartulaire  de  Sauxillanges  (i . 
Elle  était  située  dans  la  viguerie  d'Usson  (Puy-de-Dôme  *2 
Il  a  été  question  du  nom  d'homme  Brannus,  pages  399-400. 

Catalus.  C'est  par  ce  nom  d*homme  pérégrin  que  s'ex- 
plique le  nom  de  lieu  d'où  dérive  l'adjectif  catalensis.  On 
le  trouve  dans  la  formule  in  aice  Catalense,  qui  désigne  une 
petite  circonscription  géographique  située  en  Auvergne  au 
neuvième  siècle  (3).  Le  Sequane  Catalus  Callaei  filiiis: 
nous  est  connu  par  une  inscription  (4). 

Catulus.  Un  fundus  Catulus  explique  l'adjectif  dérive 


(1)  Ed.  Doniol,  p.  91,  268,  387,  549. 

(2)  Ibid.,  p.  387,  685-687. 

(3)  Deloche,  Cartulaire  de  Beaulteu,  p.  244. 

(4)  C.  /.  L.,  V,  907. 


i 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  COGNOMINA.         501 

catulensis  qui  se  trouve  au  dixième  siècle  dans  le  nom 
d'une  petite  circonscription  du  Rouergue,  ministerium  CaPur 
lense  (1). 

Catulus  est  un  substantif  latin  qui  a  été  employé  comme 
cogncnnen  à  Rome  dans  la  gens  Dutatia.  Plusieurs  Lutatius 
Catulus  ont  été  consuls  en  242,  en  220,  en  102,  en  78 
avant  notre  ère.  Les  inscriptions  latines  de  la  Narbon- 
naise  nous  offrent  des  exemples  de  ce  cognomen  :  par 
exemple  à  Nimes,  Q.  Maximius  Catulus  (2);  Catulus  était 
aussi  un  nom  pérégrin  comme  l'atteste  une  inscription  de 
la  même  ville  (3).  On  doit  probablement  reconnaître  la  forme 
féminine  de  ce  cognomen  dans  Cadola,  nom  de  hameau  en 
Italie,  province  de  Bellune. 

Celtus.  Une  villa  Celtus  figure  au  dixième  siècle  dans  le 
testament  apocryphe  de  saint  Rémi,  que  Flodoard  a  inséré 
dans  son  histoire  de  Reims  (4). 

Celtus,  originairement  nom  de  peuple,  est  un  nom  péré- 
grin attesté  en  Gaule  par  une  inscription  d'Uzès  (5),  en 
Espagne  par  une  inscription  d'Âlcantara  (6). 

Mahcellus.  Un  vious  Marcellus  figure  deux  fois  dans  une 
charte  de  Tannée  729,  en  faveur  de  Tabbaye  de  Wissem- 
bourg  (7).  On  reconnaît  dans  ce  nom  de  lieu  le  cognomen 
romain  qu'a  illustré  la  gens  Claudia.  Il  a  été  très  fréquent 
en  Gaule  sous  Tempire  romain  ;  on  peut  en  compter  plus 
de  cinquante  exemples  tant  masculins  que  féminins ,  dans 
Vindex  du  tome  XII  du  Corpus  inscriptionum  latinarum  ; 
dans  les  uns  c'est  un  cognomen  proprement  dit,  dans  d'au- 

(1)  La  charte  qui  l'établit  a  été  publiée  par  M.  G.  Desjardins  dans  la  Bi- 
bliothèque de  VEcole  des  chartes,  t.  XXIV,  p.  170. 

(2)  C.  i.  L.,  XII,  4009. 

(3)  Ibid.,  XII,  3929.. 

(4)  Pardessus,  Diplomata^  t.  I,p.  85.  Migne,  Pair.  Iat.,t.  CXXXV,  col.  66  d. 

(5)  C.  /.  L.,  XII,  2928. 

(6)  Ibid.,  II,  755. 

(7)  Pardessus,  DtpZomata,  t.  II,  p.  454,  455. 


502  LIVRE-  ïl.  CHAPITRE  VII.  |  L 

très  lé  nom  de  personnages  qui  n'avaient  pas  de  gentilice, 
comme  dans  les  insctiptions  1314,  1675,  etc.  —  Marcello 
est  le  nom  de  deux  hameaux  d'Italie,  provinces  de  Padôue 
Ql  de  Brescia. 

Marcus  est,  au  neuvième  siècle,  le  nom  d'uD  locu$ 
situé  en  Limousin  dans  la  viguerie  d'Espagnac  ;  c'est 
aujourd'hui  Matc-la-Tour  (Cofréze)  (1).  Marcus  est  un  cog- 
nomen  qu'on  trouve  quelquefois  dans  les  inscriptions  de  la 
Gaule  :  T.  Tossius  Marcus,  à  Arles  i2);C.  Lucceius  Marcus, 
à  Orange  (3);  G.  SoUius  Marcus  (4),  à  Grenoble;  L.  Sanctius 
Marcus,  à  Genève  (5).  Marcus  est  aussi  uù  nom  pérégrin  ; 
Marcus  Caeci  fllius,  à  Uzès  (6);  Marcus  Hermolai  fllius  (7 
et  Marcus  Nigrini  filius  (8),  à  Nimes. 

SOLLEMNis.  Urle  localité,  appelée  Solemnis  villa  et  viens. 
est  comprise  deux  fois  dans  l'énumération  des  propriété? 
de  Téglise  du  Mans  par  des  diplômes  impériaux  carlovin- 
giens,  la  première  fois  en  802  (9),  la  seconde  fois  en  832  (10). 

SoUemnis  est  un  ôognomm  usité  aussi  comme  nom  péré- 
grin; il  est  par  exemple  cognomen  dans  une  inscription  de 
Worms  (11),  Servandius  Sollemnis;  dans  une  inscription 
du  musée  de  Carlsruhe,  Q.  Caecilius  Sollemnis  (12);  il  est 
nom  pérégrin  dans  une  inscription  de  Nimes,  Manibus 
BoUemnis  (13). 


(1)  Deloche,  Cartulaivê  de  Beau2t«i4,  p.  240,  378. 

(2)  C.  /.  L.,  XII,  719. 

(3)  Ibid.,  XII,  1247. 

(4)  Ibid.,  XII,  2252. 

(5)  Ibid.,  XII,  2597. 

(6)  tbid.,  Xn,  2936. 

(7)  Ibid.,  XII,  3081. 

(8)  Ibid.,  XII,  3732. 

(9)  Dom  Bouquet,  V,  768  e.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  «T,  n-  \M 

(10)  tbld.,  VI,  585  e.  Sickel,  Acta  Karoliho'ritfn,  i.  ÎI,  p.  179,  n*  308. 

(11)  Brambach,  902, 

(12)  Ibid,,  1674. 

(13)  C./.  L.,. XII,  3923. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GOGNOMINA.         503 

TuBNtJS  est  uûe  villu  située  près  de  Reims,  sur  la  Marne, 
M  qui  appartenait  au  neuvième  siècle  à  la  cathédrale  de 
Tours,  comme  l'atteste  un  diplôme  de  Charles  le  Gros 
en  886  (1).  C'est  aujourd'hui  Tours-sur-Mame  (Marne)  dont 
r^  final  s'explique  par  Turres,  étymologie  erronée.  Deux 
diplômes  de  Charles  le  Simple  en  899,  sont  datés  d'une 
localité  qui  porte  le  même  nom,  Tti/rnuts  (2).  La  date  in 
villa  TiÂmis  se  trouve  dans  un  diplôme  du  môme  roi  en 
914  (3).  Mansus  de  Turnis  est,  en  1269,  le  nom  de  la  Tour, 
commune  d'Aumessas  (Gard)  (4). 

Ce  nom  de  lieu  est  identique  à  un  cognomen  romain 
porté  au  premier  siècle  de  notre  ère  par  un  affranchi  qui 
exerça  de  l'influence  à  la  cour  impériale  sous  Titus  et 
Domitien  et  qui  composa  des  poésies  satiriques  (5). 

De  ce  cognomen  vient  le  dérivé  TurnaciLs  forme  primitive 
non  seulement  du  nom  de  Tournay  (Belgique),  mais  encore 
du  nom  d'autres  localités  ;  tel  est  aujourd'hui,  en  France, 
Tornac  (Gard),  appelé  Tomagus  dans  deux  diplômes  du 
neuvième  siècle  et  plus  tard  avec  une  orthographe  plus 
savante,  Tornacus  (6).  On  peut  citer  aussi,  en  France, 
Tomay  (Haute-Marne),  Tournay  (Orne),  Tournay  (Calvados), 
Tourny  (Eure);  en  Italie,  Tornaco  (province  de  Novare), 
Tornago  (province  de  Milan);  comparez,  avec  le  suffixe  latin 
-anuSy  Tornano  (province  de  Porlî). 

Vassillus  est  le  nom  d'une  villa  qui,  en  898,  était  située 
dans  le  comté  de  Turluron  et  dans  la  vîguerie  de  Bil- 
lom  (Puy-de-Dôme).  C'est  aujourd'hui  Vassel  (Puy-de- 
Dôme)  (7). 


(1)  «  Tnmum  in  Remensi  pago  super  fluvium  Haternam  poaitûtn.    » 
Dom  Bonquet,  IX,  355  b. 

(2)  Ibid,,  IX,  476  d,  478  a. 

(3)  /Md.,  IX,  522  b. 

(4)  Germer  Durand,  Dictionnsiire  topogr&phiquê  du  Gard,  p.  246. 

(5)  Sur  le  nom  d'homme  Turnus,  voir  plus  haut,   p.  170. 

(6)  Germer  Durand,  Dictionnaire  topogr&phique  du  Gard,  pé  245. 

(7)  Doniol,  Cartul  de  Brioude,  p.  314;  cf.  Cartul.  de  SauxilUngeê,  p.  681. 


504  LIVRE  IL  CHAPITRE  VIL  l  2. 

Une  inscription  de  Grenoble  nous  a  conservé  les  noms 
de  Primius  Vassillus  (1);  une  inscription  de  Vérone  ceux 
de  Pacilia  Vassilla  (2),  Vassilla  est  un  diminutif  d'un 
thème  gaulois  Vasso- ,  conservé  par  exemple  dans  le  nom 
d'homme  composé  Vasso-rix  d'une  inscription  d'Alsace  (3-. 

De  Vassillus  on  a  tiré  le  gentilice  Vassillius  attesté  par 
une  inscription  trouvée  à  Cadenet  (Gard)  (4) ,  et  par  une 
inscription  des  environs  d'Uzès,  aujourd'hui  conservée  au 
musée  Calvet  d'Avignon  (5). 

Ces  exemples  empruntés  à  des  textes  du  moyen  âge 
justifient  Texplication  que  voici  d'un  nom  de  ville  qui  se 
trouve  déjà  dans  des  textes  du  temps  de  l'empire  romain. 

TuLLUM  est  le  nom  de  Toul  (Meurthe-et-Moselle), 
chez  Ptolémée  au  deuxième  siècle,  puis  dans  V Itinéraire 
d'Antonin{Q),  Tullum^  sous-entendu  jpraerfmm,  est  identique 
à  un  cognomen  romain.  Nous  connaissons,  par  une  inscrip- 
tion de  l'Italie  septentrionale,  les  noms  de  P.  Sertorius 
TuUus  (7) ,  par  une  inscription  de  Nimes  ceux  de  M.  Man- 
lius  Tullus  (8),  par  une  inscription  d'Arles,  ceux  de  L.  An- 
nius  Tullus  (9). 

§  2.  —  Gognomina  employés  au  morsculin  pluriel. 

Sont  employés  au  pluriel  masculin,  Artigeni,  mentionné 
plus  haut  (p.  398),  et  : 

*Blaesi.   Blaesus   est  un  adjectif  latin  qui  veut  dire 

(1)  C.  L  L.,  XII,  2286. 

(2)  Ibid.,  V,  3570. 

(3)  Brambacb,  1858. 

(4)  C.  /.  L.,  XII,  2746. 

(5)  Ibid.,  XII,  2857. 

(6)  Voyez  ci-dessus,  p.  374. 

(7)  C.  J.  L.,  V,  7545. 

(8)  Ibid.,  XII,  3726. 

(9)  Ibid.,  XII,  5804. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  GOQNOMINA.         505 

«  bègue  ;  »  il  a  été  employé  comme  cognomen.  En  Tan  36 
de  notre  ère,  deux  Junius  Blaesus  furent  réduits  au  sui- 
cide par  la  tyrannie  de  Tibère  (1).  En  70,  un  autre  Junius 
Blaesus  était  recteur  de  la  Gaule  lyonnaise  (2)  ;  Vitellius 
le  fit  mettre  à  mort  (3).  Ce  cognomen  se  répandit  en  Gaule. 
Le  tome  XII  du  C.  /.  L  nous  en  ofiFre  neuf  exemples.  Sur 
une  patère  comprise  dans  le  trésor  de  Bernay,  qui  est, 
comme  on  sait,  conservé  au  cabinet  des  antiques  de  la 
Bibliothèque  nationale,  on  lit,  gravés  au  pointillé,  les  noms 
de  Q.  Lucanius  Blaesus  (4).  Dans  une  inscription  de  Cais- 
sargues(Gard},  ce  nom,  au  féminin,  apparaît  sans  gentilice  : 
Blaesa  Blandi  filia  (5). 

De  là  le  nom  de  la  ville  de  Blois,  qui  se  rencontre  pour 
la  première  fois,  vers  la  fin  du  septième  siècle,  au  datif 
pluriel  Blezis,  dans  Tanonyme  de  Ravenne  (6).  Mais  le  dé- 
rivé Blesensis  est  attesté  plus  anciennement  ;  on  le  trouve 
un  siècle  plus  tôt  chez  Grégoire  de  Tours ,  il  désigne  les 
habitants  de  Blois  (7). 

Le  nom  de  la  ville  de  Blois  est  identique  à  l'adjectif 
vieux  français  blois,  «  bègue,  »  et  nous  donne,  comme  cet 
adjectif,  un  exemple  de  la  notation  française  oi,  représen- 
tant Vae  latin  =  é  long  :  comparez  proie  de  praeda  ;  mais 
ciel  de  caelum  nous  offre  cw  =  *  bref. 

S  3.  —  Cognomina  employés  au  féminin  singulier. 

"  CupiTA  est  le  nom  ancien  de  Cotte,  écart  de  la  com- 
mune de  Cortambert  (8aône-et-Loire);  car  il  faut  probable- 
ment restituer  ainsi  le  nom  de  la  villa  Copia  ^  mise  en 
Maçonnais  par  une  charte  du  commencement  du  onzième 

(1)  Tacite»  Anna2««,  VI,  40. 

(2)  Tacite,  HUtoirei,  I,  59;  II,  59. 

(3)  Ibid.,  III,  28. 

(4)  R.  Mowat,  Notice  épigraphique  de  diverses  antiquitéê,  p.  156. 

(5)  C.  I.  L.,  XII,  4074. 

(Q  Edition  Pinder  et  Parthey,  p.  235,  ].  3.  Alfred  Jacobs,  Gallia  ab  anonymo 
RavennaU  descripta^  p.  35. 
(7)  HUtorU  Francorum,  Uvre  VU,  c.  2;  édit  Amdt,  p.  292, 1.  18. 


506  LIVRB  II.  CHAPITRE  VU.  |  S. 

siècle  en  faveur  de  Tabbaye  de  Cluny  (1).  Dans  le  même 
chartrier  on  trouve  l'orthographe  Cobta  en  945  (2)  et  vers 
953  (3).  Comparez  le  pluriel  *Cupztas,  Cubtas^  dont  il  sera 
question  plus  loin,  p.  508. 

Cupitus  est  un  cognomen  latin  assez  fréquent,  et  dont 
les  inscriptions  de  la  Gaule  fournissent  plusieurs  exemples  : 
ainsi  M.  Velocius  Cupitus ,  près  de  Vence  (4)  ;  Ti.  Julius 
Cupitus,  àPréjus{5),  etc.  On  le  trouve  aussi  employé  comme 
nom  pérégrin  :  Cupitus  Tolosani  filius,  6  Toulouse  (6). 

RoMULA  était,  en  950,  le  nom  d'une  villa  située  près  de 
Chamboulive  (Corrèze)  (7). 

Romulus  est  un  cognomm  latin  qu'on  rencontre  quel- 
quefois dans  les  inscriptions  romaines  en  Gaule  et  hors  de 
Gaule.  Nous  citerons  :  C.  Terentius  Romulus,  à  Nime8(8); 
T.  Domitius  Romulus,  à  Narbonne  (9).  Quelquefois  on  voit  ce 
cognomen  employé  seul  sans  gentilice  :  Romula,  au  féminin, 
dans  une  inscription  d'Arles  (10). 

Urbana  parait  être  la  bonne  orthographe  du  nom  de  la 
villa  Orbanay  mentionnée  en  695  dans  un  diplôme  du  roi 
Childebert  III  (1 1).  C'est  le  féminin  du  cognomen  Urbanus  qui 
n'est  pas  rare  dans  les  inscriptions  du  temps  de  Tempire 
romain  :  C.  Attius  Urbanus  (12),  Cn.  Cornélius  Urbanus  (13), 
à  Nimes  ;  L.  Cornélius  Urbanus,  à  Bonn  (14),  etc. 


(I)  Bruel,  Recueil  des  chartes  de  Cluny ,  t.  I,  p.  121. 
(î)  Ibid.,  p.  6Î8. 

(3)  Ibid.,  p.  787. 

(4)  C.  L  L.,  XU,  49. 

(5)  Jhid.,  Xn,  289. 

(6)  Ibid,y  XII,  5389. 

(7)  Deloche,  Etudes  sur  la  géographie  historfquê  de  U  Oaule^  p.  S28. 

(8)  C.  /.  L.,  XII,  3350. 

(9)  Ibid.,  XII,  4335. 

(10)  Ibid,,  XII,  870. 

(II)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  27,  col.  1. 

(12)  C.  /.  L.,  XII,  3441. 

(13)  Ibid.y  XII,  3564. 

(14)  BrMibadH  4da. 


NOMS  DE  LIEU  IDENTIQUES  A  DES  COGNOMINA.         507 

Nous  terminerons  ce  paragraphe  en  proposant  pour  un 
nom  de  lieu  attesté  par  des  documents  antérieurs  au  moyen 
âge  une  explication  analogue  à  celle  que  nous  donnons 
pour  les  noms  de  lieux  dont  il  vient  d'être  question. 

LuTEVA,  aujourd'liui  Lodève,  est  un  nom  de  lieu  qui  re- 
monte à  Tempire  romain  ;  on  le  trouve  dans  la  Table  de 
Peutinger  avec  l'orthographe  Loteva^  variante  de  basse  épo- 
que que  Ton  peut  corriger  à  l'aide  du  dérivé  Lutevani  dans 
Pline  (1),  et  en  se  servant  de  documents  plus  récents, 
comme  la  flotice  des  provinces  de  la  Gaule  et  les  textes 
réunis  par  M.  Longnon  dans  sa  Géographie  de  la  Gaule  au 
sixième  siècle. 

Luteva  n'est  pas  autre  chose  que  le  féminin  du  cognomen 
et  du  nom  pérégrin  Lutevus,  conservé  par  des  inscriptions 
de  Saint-Remy  (Bouches-du-Rhône)  (2),  de  Vaison  (Vau- 
cluse)  (8),  d'Aramont  (Gard)  (4). 

S  4.  —  Cognomina  employés  au  féminin  pluriel. 

AcuLLAS ,  noté  Agolas  dans  une  charte  des  environs  de 
Tan  1000  (5),  parait  être  aujourd'hui  Goules  (Corrèze). 

AcuUa  est  le  nom  de  la  mère  d'un  affranchi  dont  l'épi- 
taphe  a  été  trouvée  à  Este ,  en  Italie  (6). 

Albinas  est  un  nom  de  lieu  dans  une  charte  du  Cartu- 
laire  de  Sauxilkmges  (Puy-de-Dôme)  (7). 

Le  cognomen  Albinus  est  très  répandu,  et  il  a  été  employé 
comme  nom  pérégrin,  par  exemple  dans  une  inscription 


(1)  Pline,  livre  III,  |  36;  cf.  Table  de  Peutinger,  segment  ii ,  3;  Desjar- 
dins, Géographie  de  la  Gaule  d'après  la  Table  de  Peutinger,  p.  374. 

(2)  C.  /.  L.,  XII,  998. 

(3)  I5td.,  XII,  1431. 

(4)  76id.,  XII,  2813. 

(5)  Deloche,  Cartulaire  de  Beaulieu,  p.  262. 

(6)  C.  /.  L.,  V,  2568. 

(7)  Doniol,  p.  410. 


608  LIVRE  II.  CHAPITRE  VU.  {  4. 

trouvée  aux  environs  d'Aps  (Ardèche)  (1),  dans  une  inscrip- 
tion de  Die  (Drôme)  (2). 

CupiTAS  est  le  nom  d'une  commune  du  département  de 
la  Marne,  aujourd'hui  Queudes.  Les  habitants  étaient 
appelés  Cupedenses  au  neuvième  siècle ,  comme  on  le  voit 
par  les  Annales  de  Saint-Bertin ^  sous  la  date  de  858  (3}. 
C'était  le  oheMieu  d'une  vicairie  appelée  Copedinsis  dans 
une  charte  de  Tannée  813  ;  cette  vicairie  est  qualifiée  de 
centaine,  centena  Cupedensis,  dans  la  notice  du  décès  de 
saint  Ursus ,  évéque  de  Troyes ,  mort  en  426 ,  et ,  dans  la 
même  i;iotice,  Queudes  est  appelé  Cubtas.  Cette  notice  a 
été  conservée  par  un  martyrologe  de  Provins  (4). 

On  a  parlé  du  cognomen  Cupitus  plus  haut,  à  l'article 
Cu/piUx,  p.  505-506. 

RoMULAS  est,  dans  une  charte  des  environs  de  1020,  le 
nom  d'un  château  situé  dans  le  comté  de  Riez  (Basses- 
Alpes)  (5).  C'est  aujourd'hui  Roumoules  (Basses-Alpes)  (6). 

Romulas  est  le  pluriel  féminin  du  cognomen  Romulus  dont 
il  a  été  donné  des  exemples  à  l'article  Romula^  p.  506. 


(1)  C.  J.  L.,  XII,  2680. 

(2)  Ibid.,  XII,  1674. 

(3)  Dom  Bouquet,  VII,  74  a.  Migne,  P&trologià  latina,  t.  GXV,  col.  1415  c. 

(4)  D.  Bouquet,  VIII,  74,  note  a.  Voyez  aussi  Habille,  La  pancarte  notre 
de  S&int-M&rtin  de  Tours,  p.  22.3;  cf.  p.  153,  n*  29;  p.  187,  n»»  139,  140. 

(5)  Guérard,  Cartul&ire  de  S&int-Victor  de  Marseille,  t.  I,  p.  609. 

(6)  /btd.,  t.  II,  p.  898. 


CHAPITRE  VIII. 


EXEMPLES,  AU  MOYEN  AGE,  DE  NOMS  DE  LIEUX  EN  -t^OniS  ^ 
FORMÉS  ANTÉRIEUREMENT  A  L'aIDE  DE  GBNTILIGES  EN  -iUS 
KT  DU  SUFFIXE  -0,  -OniS. 

ÂLBUGio ,  indéclinable  pour  AWucion ,  en  latin  *  AlbuciOj 
-onis ,  est  le  nom  d'Âubusson ,  commune  de  Mazerat 
(Haute-Loire),  dans  une  charte  de  la  fin  du  onzième  siè- 
cle (1).  Albucio  est  dérivé  d'Albucius,  gentilice  romain 
connu  par  les  inscriptions.  On  en  trouve  des  exemples  à 
Rome  (2).  Il  pénétra  en  Gaule ,  par  exemple  à  Antibes  (3) , 
à  Genève  (4),  à  Nimes  (5).  C'est  par  un  antique  Albucio 
que  s'expliquent  les  noms  de  la  petite  ville  d'Aubusson 
(Creuse)  et  des  communes  d'Aubusson  (Orne)  et  d'Aubusson 
(Puy-de-Dôme).  Albussac  (Corrèze)  ==  *Albuciacus. 

AiLLON  (Savoie),  où  était  un  prioratus  de  Ayllone  au  qua- 
torzième siècle  (6),  paraît  être  un  ancien  Allio,  ^onis  dé- 
rivé du  gentilice  Allius^  comme  Alliacus  ou  Aliacus  étudié 
page  192. 

*  Arcio,  'Onis^  à  l'accusatif  *Arcionemy  était,  en  830,  le  nom 


(1)  Cbassaing,  Spicilegium  Brivatense^  p.  8-12,  607. 

(2)  C. /.  L..  VI,  11366-11370. 

(3)  Jbid.y  XII,  192-195. 

(4)  /btd.,  XII,  2617. 

(5)  Ibid.,  XII,  3357,  5924. 

(6)  Cariul&ire  de  S&int-Hugues  de  Grenoble,  p.  279. 


510  LIVRE  n.  caikPiTRE  vm. 

d'Arçon  (Côte  d'Or),  qui  appartenait  &  Tabbaye  de  Bèze  en 
830 ,  conformément  à  un  diplôme  des  empereurs  Louis  le 
Débonnaire  et  Lothaire,  que  nous  a  conservé  la  chronique 
de  cette  abbaye.  D*Achery,  et  d'après  lui  Dom  Bouquet  (1) 
et  Migne  (2)  ont  imprimé  Arconem  sans  i.  C'est  une  leçon 
défectueuse  pour  Àrcionem^  tenant  lui-même  lieu  dun 
pl!is  ancien  Artionem,  dérivé  du  gentilice  Artius  étudié 
p.  381-401. 

AvANÇON,  nom  de  deux  communes,  Tune  du  département 
de3  Hautes-AJlpe$ ,  l'autre  de  celui  des  Ardennes  et  d'un 
écart  de  la  commune  d'Exireuil  (Deux- Sèvres)^  est  un  an- 
cien ÀventiOy  --oniSy  dérivé  d'un  gentilice  Aventius  connu 
par  plusieurs  inscriptions  (3).  Ce  gentilice  a  donné  aussi  les 
dérivés  *  Aventiacus^  aujourd'hui  Avensac  (Gers),  et  *Aventia- 
nus  y  aujourd'hui  Avensan  (Gironde).  Aventius  parait  dérivé 
d'un  thème  plus  court  avant-  ou  avenU)-,  d'où  le  nom 
d'Avanton  (Vienne),  appelé  Aventun  en  1085  (4).  De  ce 
thème,  avent'  ou  avento-  vient  probablement  Aventieum, 
aujourd'hui  Avenche  (Suisse).  Le  nom  de  la  Dea  Aventia, 
déesse  d'Aventicum  (5),  a  la  même  origine. 

Barbahio,  -onis  est  le  nom  d'une  villa  appelée  au  cas 
indirect  Barbarione  dans  une  charte  de  Tannée  697  en  fa- 
veur de  l'abbaye  de  Limours  (Seine-et-Oise)  (6).  Barbario 
dérive  du  gentilice  Barbarius ,  dont  on  a  parlé  p.  402. 

Brignon  (Maine-et-Loire),  ancienne  abbaye  de  l'ordre  de 
Saint-Benoit,  aujourd'hui  située  dans  la  commune  de  Saint- 
Macaire-du-Bois  (Maine-et-Loire),  dont  on  trouve  le  nom 


(1)  Tome  VI,  p.  565  d. 

(2)  Patrologia,  Utina,  t.  GLXII,  col.  874  d. 

(3)  De-Vit,  OnomsLBticon,  t.  I,  p.  574,  co).  2;  C.  /.  L.,  VIII,  1973. 

(4)  Redet,  Dictionnaire  iopograp.  du  département  de  la  Vienne,  p.  14. 

(5)  Mommsen,  Inscriptiones  helveticae,  154-156. 

(6)  Pardessus,  DiplotMita,  t.  Il,  p.  244. 


NOMS  DE  LIEU  SN  «I-O  DÉRIVBB  DE  GENTILICE8.         511 

écrit  Brignum,  indéclinalDle  au  douzième  siècle  (1),  est  un 
UQcien  ^Brinnio,  <07m  dérivé  du  gentilice  Brinnius,  p^Jr  assi* 
milatioa  pour  Bremiius  >  doat  IL  a  été  queaiioa  plui  haut , 
p.  493,  à  rarticle  Brmia%aw$. 

Buixio,  -oni>,  à  Tablatif  BulUane^  dana  uns  cba?te  de 
l'année  1052  (2),  est  aujourd'hui  Bulhou  (Puy-de-Dôme)* 
Ce  nom  dérive  du  gentilioe  BuUiua,  attesté  par  une  inaeriiiK 
tion  de  Narbonne  où  il  est  écrit  trois  fois  (3). 

Caldio,  aujourd'hui  Chaudion  (Ârdenues),  eat  mentionné 
dans  la  chronique  de  Flodoard  sous  la  date  949  (4),  Cat*- 
éio  tient  lieu  d'un  plus  ancien  *  Catidiù  av«c  i  bref  entre  l 
et  d.  Ce  nom  dérive  du  gentilice  Calidius.  Q.  CalidiuSi 
préteur  en  Tan  79  av.  J.-C,  exerça  un  commandement 
en  Espagne.  M.  Galidius,  son  flls^  se  distingua  paruxi  les 
orateurs  contemporains  de  Cicéron;  il  fut  préteur  en  57  et 
mourut  en  44  (5).  Ce  gentilice  pénétra  en  Oaule,  La  forme 
féminine  Calidia  de  ce  gentilice  se  rencontre  dans  dQvx 
inscriptions  de  Nimes  où  apparaissent  Calidia  Munatia  (6) 
et  OaUdia  Dons  (7). 

Cambrio,  -onû,  au  cas  indirect  CanU>ri(me  en  Brabani, 
dans  un  document  du  milieu  du  huitième  siècle  (ft),  peut 
dériver  d  un  gentilice,  Cambarius,  attesté  par  deux  inscrip* 
tiens  de  Nimes  qui  mentionnent  une  femme  appelée  Gam^ 
baria  Chrysanthe  (9).  La  forme  masculine  de  ce  gentilice 


(1)  Port,  Dictionnaire  historique  de  Maine-et-Loire^  t.  I,  p.  501. 

(2)  Cbassaing,  Spicilegium  Brivatense,  p.  6,  632. 
(S)  C.  /.  L.,  XII,  4664. 

(4)  Ooiii  Bouquet,  t.  VIII,  p.  206  a.  Migoe,  P9klrol9çiA  latiM,  L  CXXXV, 
col.  175  b;  cf.  Longnon,  Etudes  sur  les  pagi  de-  la  GêMle,  2*  partie»  p.  73. 

(5)  De- Vit,  Onomasticon,  t.  II,  p.  65.  Teuffel,  GeschichU  der  r^m^^ofien 
Literatur,  3*  édition,  p.  384-385. 

(6)  C.  I.  L.,  XII,  3286, 

(7)  Ibid.,  XII,  p.  839,  addition  au  n*  3721. 

(8)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  45,  col.  1. 

(9)  C.  J.  L.,  XII.  3505  et  3756. 


512  LIVRE  II.  CHAPITRE  VHI. 

doit  probablement  être  lue  dans  une  autre  inscription  de 
la  môme  ville  (i).  On  peut  aussi  expliquer  Cambrio  par 
Oammarius ,  dérivé  de  Cammarus ,  d*où  Camaracus ,  Cam- 
brai (Nord),  dont  il  a  déjà  été  question  p.  171. 

CoRNELio,  'oniSf  au  moyen  âge  Comilio  en  latin,  Comil- 
Ion  en  français,  est  un  nom  de  lieu  dont  on  trouve  des 
exemples  dans  les  Cartulaires  de  Saint- Victor  de  Ma/rseille 
et  de  Saint-Hugues  de  Grenoble.  Les  textes  datent  des  en- 
virons de  Tan  1000.  Il  s*agit  de  Cornillon,  commune  de 
Fontanil  (Isère)  (2),  de  Cornillon,  commune  de  Saint- 
Egrève  (Isère)  (3),  de  Cornillon-en-Trièves  (Isère)  (4)  et 
de  Cornillon  (Drôme)  (5).  Ces  noms  de  lieux  s'ont  dérivés 
du  gentilice  Cornélius  étudié  p.  357-358. 

CuRTio,  -ONis  doit  être  le  nom  écrit  à  Tablatif,  Corciane^ 
dans  Tétat  des  serfs  de  l'église  de  Marseille,  en  814;  c'est, 
dit-on,  aujourd'hui  Courchon,  commune  de  Rougon  (Basses- 
Alpes)  (6).  Ce  nom  parait  le  même  que  celui  de  Courçon 
(Charente-Inférieure)  et  que  celui  de  Courson ,  écart  de  la 
commune  de  Landricourt  (Aisne),  écrit  Courcon  en  1158  (7). 
Quant  à  Courson,  commune  du  département  du  Calvados, 
appelé  Corcho  et  Courchon  au  treizième  siècle  (8),  ce  nom 
suppose  un  gentilice,  *Curcius,  parc,  qui  serait  une  variante 
de  Curtius,  et  dont  nous  ne  connaissons  pas  d'exemple. 
Courson  (Yonne),  au  sixième  siècle  Curcedonus  (9),  semble 
être  un  antique  *  Curtio-dunum.  Sur  le  gentilice  Curtius, 
voyez  ci-dessus,  page  225. 


(1)  C.  /.  L.,  XII,  3706. 

(2)  Cartul&ire  de  Saint-Hugues,  p.  104,  112,  114. 

(3)  Ibid.y  p.  124,  185. 

(4)  Ibid,,  p.  155. 

(5)  Guérard,  Cartulaire  de  Saint-Victor,  t.  II,  p.  237,  861. 

(6)  Guérard,  Cartulaire  de  Saint-Victor,  t.  II,  p.  651,  861. 

(7)  Matton,  Dictionnaire  topographique  de  VAisne^  p.  82. 

(8)  Hippeau,  Dictionnaire  topographique  du  Calvados,  p.  88. 

(9)  Quantin,  Dictionnaire  topographique  de  VYonne,  p.  41. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -I-O  DÉRIVÉS  DE  GENTILICES.         513 

Gaillon  (Eure),  Gaillo^  -onis  pour  Gallio,  -oniSy  au  com- 
mencement du  treizième  siècle  (1),  est  un  dérivé  du  genti- 
lice  Gallius,  étudié  ci-dessus,  p.  238-239 ,|pour  expliquer 
le  nom  de  lieu  Galliacus. 

*Gentio,  -onis  est  évidemment  la  forme  antique  du 
nom  de  paroisse  écrit  Gensson  dans  un  compte  de  Tan- 
née 1401  (2);  suivant  l'éditeur,  M.  Chassaing,  c'est  Janson, 
lieu  détruit,  commune  La  Godivelle  (Puy-de-Dôme).  C'est 
un  dérivé  du  gentilice  Gentius;  au  Palais  des  Arts  de 
Lyon,  oui  conserve  une  dédicace  à  Diane  par  C.  Gentius 
Olillus,  magister  du  pagus  de  Condate,  c'est-à-dire  d'un 
bourg  établi  au  confluent  de  la  Saône  et  du  Rhône  (3).  De 
Gentius  sont  dérivés  les  noms  de  la  commune  de  Jansac 
(Drôme)  et  du  hameau  de  Jansiac,  commune  de  Saint- Vincent 
(Basses- Alpes). 

Grinio,  -onis  est,  en  Fan  1000,  le  nom  de  la  commune 
de  Grigïion  (Côte-d'Or)  (4);  au  commencement  du  dou- 
zième siècle,  c'est  le  nom  de  Grignon,  commune  de  Coron 
(Maine-et-Loire)  (5).  On  trouve  lé  même  nom  écrit  Grigno 
vers  Tannée  1100  (6);  il  s'agit  de  Grignon,  commune  de 
Pontcharâ  (Isère).  Grinio  tient  lieu  d'un  primitif  Granio^ 

■ 

dont  la  première  syllabe  a  été  assimilée  à  la  seconde,  et 
il  est  dérivé  du  gentilice  Granius ,  dont  il  a  été  question 
p.  247  à  propos  du  nom  de  lieu  Graniactts. 

*  Lantio,  -onis  semble  être  la  forme  la  plus  ancienne  du 
nom  de  lieu  écrit  in  Lancùme,  en  814,  dans  l'état  des  serfs 
de  Tabbaye  de  Saint- Victor  de  Marseille  (7)  ;  c'est  proba- 
blement Lançon  (Bouches-du-Rhône).  Une  vicaria  Lancio- 

(1)  B^osseville,  Dictionnaire  topographique  de  l'Eure,  p.  94. 

(2)  Chassaing,  SpicUegfuyn  Briv&tensef  p.  469,  664. 

(3)  Boissieu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon^  p.  19. 

(4)  Qamier,  Nomenclature  historique,  p.  162,  n*  646. 

(5)  Port,  Dictionnaire  historique  de  Maine-et-Loire,  t.  II,  p.  304. 

(6)  Cartulaire  de  Saint-Hugues  de  Grenoble,  p.  191. 

(7)  Quérard,  Cartulaire  de  Saint'Victor  de  Marseille,  t.  II,  p.  640* 

33 


514  LIVRE  II.  CHAPITRE  VIIL 

nensis  est  mentionnée  dans  une  charte  de  Tannée  900,  en 
faveur  de  Tabbaye  de  Saint-Martin  de  Tours  ;  il  paraît  que 
c'est  aujourd'hui  Alençon  (Orne)  (1).  Dans  une  charte  de 
la  seconde  moitié  du  onzième  siècle,  on  trouve  mentionné 
un  bosculus  Lancioni ,  et  il  s'agit  de  Lançon ,  commune  de 
Brézé  (Maine-et-Loire)  (2).  Ces  noms  de  lieux  sont  dérivés 
soit  du  gentilice  Lantius,  soit  du  gentilice  Lentius,  dont  il 
a  été  question  p.  361,  362.  Il  y  a  encore  en  France  d'autres 
Lançon  que  ceux  que  nous  venons  de  citer  :  telles  sont  les 
communes  de  Lançon  (Ardennes)  et  de  Lançon  (Hautes- 
Pyrénées). 

*  Lattio  ,  'Onis  est  la  forme  la  plus  ancienne  du  nom  de 
la  localité  appelée  Latcio  en  813 ,  dans  une  charte  en  faveur 
de  l'abbaye  de  Saint-Martin  de  Tours  (3).  Il  s'agit  de 
La  Chapelle-Lasson  (Marne).  *  Lattio  est  dérivé  de  Lattius, 
gentilice  romain  assez  rare ,  mais  attesté  par  deux  inscrip- 
tions, l'une  de  Vienne  (Isère),  qui  nous  fait  connaître  les 
noms  de  M.  Lattius  Optatus  (4),  l'autre  italienne,  qui  est 
Tépitaphe  d'une  femme  appelée  Lattia  (5). 

Lenio  ,  'Onis  ou  Laenio^  -onis  est  le  nom  de  lieu  imprimé 
par  erreur  Leuione  pour  Lenione,  dans  un  diplôme  de  Kar- 
loman ,  maire  du  palais ,  746  (6)  ;  il  s'agit  de  Leignon  en 
Belgique ,  province  de  Namur.  C'est  un  dérivé  du  gentilice 
Laenius  :  M.  Laenius  Flaccus  s'est  assuré  l'immortalité  en 
donnant  dans  ses  jardins  de  Brindes  asile  à  Cicéron  pros- 
crit par  la  loi  Clodia,  en  l'année  58  avant  notre  ère  (J).  On 
a  trouvé  à  Tarente  l'épitaphe  de  Laenia  Primigenia  (8). 

(1)  Mabille,  La  pancarte  noire,  p.  226  ;  cf.  p.  182  et  p.  72. 

(2)  Port,  Dictionnaire  historique  de  Maine-et-Loire ^  t.  Il,  p.  441. 

(3)  Mabille,  La  pancarte  noire,  p.  226;  cf.  p.  153,  93-94. 

(4)  C.  i.  L.,  XII,  1974. 

(5)  /6id.,  IX,  5051. 

(6)  Pertz,  Diplomatum  imperii  t.  I,  p.  102,  1.  24;  cf.  Longnon,  Exmmên 
géographique,  p.  26. 

(7)  De- Vit,  Onomasticon,  t.  IV,  p.  22. 

(8)  C.  I.  L.,  IX,  244. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -I-O  DÉRIVÉS  DE  GENTILICES.         515 

Lucio,  'Onis  est  le  nom  d'une  villa  située  en  Lyonnais, 
suivant  une  charte  des  environs  de  l'an  1000  (1).  C'est  la 
forme  antique  qui  explique  le  nom  de  Luçon  (Vendée),  des 
hameaux  de  Luçon  (Dordogne)  et  de  Luçon  (Eure-et-Loir), 
de  ceux  de  Lusson  (Cher,  Landes  et  Basses-Pyrénées); 

ê 

enfin  la  seconde  partie  du  nom  de  Montluçon  (Allier). 
LfÀcio  est  un  dérivé  du  gentilice  Lucius  ou  Luccius,  étudié 
p.  258-261,  pour  expliquer  son  dérivé  Luciaoas. 

Marcio  ,  'Onis  ou  peut-être  Martio ,  -onis  est  la  forme  an- 
tique du  nom  de  la  localité  appelée  Martionis  villa  en  1106, 
Manona  et  Marzona  en  1135,  aujourd'hui  Marson  (Meuse)  (2). 
Ce  nom  de  lieu  est  dérivé ,  soit  du  gentilice  Marcius ,  soit 
du  gentilice  Martius  étudiés  p.  270-275  à  propos  du  nom  de 
lieu  Marciacus.  Il  y  a  une  commune  de  Marson  dans  le 
département  de  la  Marne  ;  son  nom  est  le  même  que  celui 
d'une  commune  de  Marçon  du  département  de  la  Sarthe. 
On  trouve  deux  hameaux  de  Marçon  dans  le  Loir-et-Cher, 
un  dans  la  Haute-Loire  ;  deux  hameaux  de  Marson  dans  la 
Dordogne  et  le  Maine-et-Loire. 

MuGio ,  'Onis  était ,  en  862 ,  le  nom  d'une  ourtis  qui  ap- 
partenait à  l'abbaye  de  Saint-Martin  de  Tours  (3).  Ce  nom 
de  lieu  parait  dérivé  du  gentilice  Mucius ,  illustré  par  une 
famille  romaine  qui  y  joignait  le  surnom  de  Scaevula  et 
qui  fournit  cinq  consuls  à  la  république,  de  l'an  175  à 
Tan  95  avant  J.-C.  Tout  le  monde  connaît  le  nom  du  héros 
légendaire  Mucius  Scaevula ,  fabriqué  au  second  ou  au  pre- 
mier siècle  avant  notre  ère  pour  faire  remonter  aux  pre- 
miers temps  de  Rome  la  gloire  de  cette  puissante  famille  (4). 
Ce  nom  fut  en  Gaule  celui  d'un  personnage  moins  im- 
portant ;  on  conserve ,  au  musée  de  Genève ,  une  tuile  sur 


(1)  Aug.  Bernard,  C&rtuUire  de  Savigny^  t.  I,  p.  877. 

(2)  Lâénard,  Dictionnaire  topographique  de  la  Meuse,  p.  142. 

(3)  Habille,  La  pancarte  noire,  p.  224;  cf.  p.  159,  n*  161  et  p.  65,  66. 

(4)  Sar  la  gens  Macia,  voyez  Pauly,  Real-Encyclopaedie,      V,  p.  178*190. 


516  LIVRE  IL  CHAPITRE  VIII. 

laquelle  ou  a  lu  la  marque  du  fabricant  Q.  Mucius  Anle- 
ros  (1).  Mussey  (Meuse),  Mussey  (Haute-Mame)  ;  les  trois 
communes  de  Mussy  (Côte-d'Or ,  8aône-et-Loire  et  Aube) 
sont  peut-être  d'anciens  *  Muciacus. 

■ 

*  PoNTio ,  'Onis  doit  être  l'orthographe  primitive  du  nom 
de  lieu  écrit  Poncio  dans  un  pouillé  du  diocèse  d'Autun 
que  M.  Aug.  Bernard  attribue  au  onzième  siècle  (2).  Ce  se- 
rait aujourd'hui  Poisson  (Saône-et-Loire) .  C'est  un  dérivé 
du  gentilice  Pontius  étudié  p.  295-297  à  propos  de  son 
dérivé  Ponciacus,  Poisson  (Saône-et-Loire),  n'est  pas  le 
seul  exemple  de  Pontio  que  nous  trouvions  en  France.  Le 
département  de  la  Haute-Marne  nous  offre  trois  exemples 
de  la  variante  Poinson  et  un  exemple  du  dérivé  Poiase- 
not.  Poinçon  (Côte-d'Or)  ne  diffère  des  précédents  que 
par  une  fantaisie  orthographique.  Le  nom  des  deux  com- 
munes de  Ponson  (Basses-Pyrénées),  Ponzo  au  douzième 
siècle ,  diffère  des  précédents  en  ce  que  Yi  du  suffixe  n'a 
pas  exercé  d'action  sur  la  première  syllabe  (3). 

*  QuiNCTio ,  'Onis  est  le  nom  antique  dont  un  diminutif 
nous  est  offert  par  un  texte  de  la  fin  du  onzième  siècle  :  à 
Tablatif  Quincioneto  (4).  Le  nom  de  Quinson  (Basses- Alpes) 
a  la  même  origine.  On  a  parlé  du  gentilice  Quinctius 
p.  155-156,  à  propos  du  dérivé  Quintiacus. 

Samnio,  à  l'ablatif  5ammon« ,  est  une  villa  placée  dans  le 
pagus  Avinionensis  par  une  charte  de  Tabbaye  de  Cluny 
en  958  (5).  Ce  nom  de  lieu  est  dérivé  du  gentilice  Samnius 
attesté  par  deux  inscriptions  d'Espagne  (6). 


(1)  C.  I.  L.,  XII,  5679,  58. 

(2)  Cartulaire  de  Sàvigny,  t.  Il»  p.  1052,  C(^.  2. 

(3)  Raymond,  Dictionnaire  topogr.  des  Bassm^Py rénées,  p.  137* 

(4)  Guérard,  Cartulaire  de  Saint^Vi4^r  de  Marseitle,  1. 1,  p.  388. 

(5)  Bruel,  Recueil  des  chartes  de  Cluny^  U  II,  p.  152. 

(6)  C.  I.  L.,  U,  1044»  12S7. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -I-O  DÉRIVÉS  DE  QENTILICES.         517 

*TuLLio  écrit  Tollio^  dans  une  charte  de  la  fin  du  onzième 
siècle,  est  aujourd'hui  Touillon(Côte-d*Or)  (t).  C'est  un  dimi- 
nutif du  gentilice  Tullius.  Tullius  est  un  gentilice  romain 
que  tout  le  monde  connaît  puisqu'il  a  été  celui  de  Cicéron. 
Cicéron,  comme  on  le  sait,  était  un  homme  nouveau. 
Mais  cela  n'empêche  pas  qu'il  ait  existé  une  gens  Tullia  qui 
était  patricienne.  C'est  à  elle  qu'appartient  M.  Tullius  Lon- 
gus,  consul  l'an  254  de  Rome  avant  J.-C,  500;  et  dix- 
huit  ans  avant  le  consulat  de  Cicéron,  63,  les  honneurs 
consulaires  avaient  été  obtenus  par  M.  Tullius  Decula, 
81  avant  J.-C.  Ce  gentilice  fut  porté  en  Gaule  par  Q.  Tul- 
lius Cicero,  qui  fut  lieutenant  de  César  dans  la  guerre 
contre  les  Gaulois  pendant  trois  ans,  de  54  à  52  avant  J.-C. 
Quelques  Gaulois  durent  probablement  à  son  influence  la 
dignité  de  citoyen  romain  et  de  là ,  en  Gaule,  la  fréquence 
du  gentilice  Tullius  que  nous  rencontrons  dans  des  ins- 
criptions. Le  musée  de  Lausanne  possède  une  dédicace  à 
la  Victoire ,  par  Nitiogenna  Tullia  (2)  ;  Nitiogenna  est  un 
cognomen  d'origine  gauloise  associé  au  gentilice  romain. 
On  a  trouvé  :  à  Antibes,  l'épitaphe  de  Tullius  Valerius, 
gravée  par  les  soins  de  Tullius  Primus  son  fils  (3)  ;  à  Bé- 
ziers ,  l'épitaphe  de  Tullia  Avia  (4)  ;  à  Narbonne ,  celles 
de  Tullia  Capella  (5)  et  de  L.  Tullius  Félix  (6)  ;  à  Lyon , 
celle  de  M.  Tullius  Thermianus  (7). 

Touille  (Haute-Garonne)  est  probablement  une  ancienne 
villa  Tullia.  Thuilley  (Meurthe-et-Moselle)  paraît  identique 
au  Tulliacus  d'une  charte  du  roi  de  Germanie,  Louis  IV 
l'enfant,  pour  l'abbaye  Saint-Evre  de  Toul  en  906  (8).  Quel- 

(1)  Garnier,  Nomenclature  historique  y  p.  130,  n*  525;  cf.  p.  202  sous  le 
même  numéro. 

(2)  C.  /.  L.,  XII,  162. 

(3)  Ibid.,  XII,  228. 

(4)  Ibid,,  XII,  4249. 

(5)  Ibid.,  XII,  p.  852,  n*  4960. 
(éj  Ibid.,  XII,  n*  5969. 

(7)  Boissieu,  Inscriptiona  antiques  de  Lyon,  p«  101.  Sur  la  gens  Tullia, 
voyez  Pauly,  Real-Encyclopaedie,  t.  VI,  p.  2181-2*244. 

(8)  Dom  Bouquet,  IX,  372  a. 


518  LIVRE  II.  CHAPITRE  VIII.  APPENDICE. 

ques  années  après,  le  môme  nom  est  écrit  d'une  façon  plus 
conforme  à  la  prononciation  Tuilliacum  villam^  dans  un 
diplôme  de  l'empereur  Othon  I ,  pour  l'abbaye  de  Saînl- 
Mansuy  de  Toul  (1). 

Vencio,  'Onis,  à  l'ablatif  Venoione^  est  le  nom  d'une  loca- 
lité où  l'abbaye  de  Saint-Victor  de  Marseille  avait  un  serf 
en  814  (2).  Ce  nom  de  lieu  est  dérivé  du  gentilice  Ven- 
dus étudié,  p.  336-337,  à  propos  du  dérivé  Vinciacus. 

Appendice.  —  Noms  de  lieux  en  -io,  -onis,  dérivés  de  gen- 
tilices  en  -ius  au  moyen  du  suffixe  -o,  -ionis,  dans  Us 
documents  contemporains  de  Vempire  romain. 

AvENNio,  nom  de  la  ville  d'Avignon,  doit  s'écrire  avec 
deux  n  comme  l'atteste  une  inscription  conservée  au  mu- 
sée de  Nimes ,  qui  nous  offre  le  dérivé  Avenmens[es]  (3) , 
d'accord  avec  une  inscription  de  Riez  qui  est  mutilée  et 
où  on  n'aperçoit  qu'un  fragment  du  second  n  (4)  ;  comme  l'a 
fait  observer  M.  Hirschfeld  (5) ,  on  trouve  le  double  n  chez 
Mêla  (6),  chez  Pline  (7),  chez  Ptolémée  (8).  Ce  nom  n'est 
pas  d'origine  celtique  comme  M.  Hirschfeld  suppose  (9); 
c'est  un  dérivé  en  -o ,  -onis  du  gentilice  Avennius  attesté 
par  une  inscription  de  Rome  (10),  où  ce  gentilice  est  écrit 
deux  fois;  cette  inscription  est  l'épitaphe  de  L.  Avennius 
Rufus ,  gravée  sur  un  monument  dressé  par  ordre  du  fils 
du  mort;  et  les  noms  du  fils,  comme  les  noms  du  père, 
sont  écrits  sur  ce  monument. 


(1)  Dom  Bouquet,  IX,  ,389  d. 

(2)  Quérard,  Cartul&ire  de  SsLint-Victor  de  Marseille,  t.  Il,  p.  638. 
(S)  C.  /.  L.,  XII,  p.  837,  n*  3275. 

(4)  Ibid.,  XII,  366. 

(5)  /Md.,  XII,  p.  130. 

(6)  Livre  II,  |  75;  édit.  Teubner-Frick,  1880,  p.  45, 1.  1. 

(7)  Livre  III,  !  36;  édit.  Teubner-Ianus,  t.  I,  p.  130, 1.  20. 

(8)  Livre  II,  c.  10,  |  8;' édit.  Didot-MûUer,  t.  I,  p.  243, 1.  4. 

(9)  C.  /.  L.,  XII,  p.  130,  col.  2. 

(10)  Jbid.,  VI,  12807. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -I-O  DÉRIVÉS  DE  GENTILICES.         519 

Il  y  a  en  France  d'autres  Avignon  dont  il  faut  dire  un 
mot  ici  quoiqu'ils  soient  mentionnés  pour  la  première  fois 
dans  des  textes  beaucoup  moins  anciens  que  lorsqu'il  s'a- 
git du  chef-lieu  du  département  du  Vaucluse.  Une  bulle 
du  pape  Grégoire  VII,  en  1079,  qui  contient  l'énumération 
des  propriétés  de  l'abbaye  Saint- Victor  de  Marseille,  men- 
tionne un  monastère  de  Sainte-Marie  de  Avinione  dans  le 
diocèse  d'Albi  (1)  ;  nous  retrouvons  ce  monastère,  en  1113, 
dans  une  bulle  du  pape  Pascal  II  (2),  et  en  1135,  dans 
une  bulle  du  pape  Innocent  II  (3).  Une  autre  abbaye  de 
Sainte-Marie  de  Avinione  dans  le  diocèse  d'Antibes  est 
mentionnée  dans  la  bulle  de  Grégoire  VII,  précitée  (4).  Il 
y  a  aujourd'hui,  en  France,  une  commune  d'Avignon  (Jura), 
et  deux  communes  d'Avignonet  (Haute-Garonne  et  Isère). 

Cabellio,  'Onis  est  le  nom  de  la  ville  de  Cavaillon  (Vau- 
cluse). L'orthographe  de  ce  nom,  telle  que  nous  la  donnons 
ici,  est  attestée  par  plusieurs  inscriptions  romaines,  comme 
l'a  établi  M.  Hirschfeld  (5)  ;  c'est  l'orthographe  de  Pline  (6) 
et  de  Ptolémée  (7).  L'orthographe  Caballio  dans  les  manus- 
crits de  Strabon  est  le  résultat  d'une  assimilation  de  la  pre- 
mière syllabe  à  la  seconde  ;  cette  assimilation  se  faisait  déjà 
dialectalement  dans  les  premiers  temps  de  l'empire  romain , 
comme  l'atteste  une  inscription  du  musée  de  Mayence  (8)  ; 
elle  a  prévalu  dans  la  prononciation  moderne  Cavaillon. 
Cabellio  est  dérivé  du  gentilice  Cabellius  attesté  par  une 
inscription  de  Troesmes  (9)  et  qui  parait  une  variante  de 
Capellius  conservé  par  une  inscription  de  Rome  (10). 


(1)  CartuUire  de  Saint-Victor  de  Marseille,  p.  219. 

(2)  Ibid.,  p.  239. 

(3)  /Md.,  p.  222. 

(4)  Ibid,,  p.  219. 

(5)  C.  /.  L.,  XII,  p.  136. 

(6)  Pline,  L  II,  |  36. 

(7)  Ptolémée,  1.  II,  c.  10,  |  8;  édit.  Mùller,  t.  I,  p.  244, 1.  2. 

(8)  Brambach,  1203. 

(9)  C.  I.  L.,  in,  6179. 

(10)  Ibid.,  VI,  14379, 


520  LIVRE  II.  CHAPITRE  VIII.  APPENDICE. 

Divio  -onis,  —  avec  une  variante  orthographique  fltéio, 
à  Vdhlsiif  Dibione^  dans  une  inscription  romaine  (1),  —  chez 
Grégoire  de  Tours  Castrum  Divionense  (2),  Divione  (3),  to- 
cus  Divionensis  (4),  est}  un  dérivé  du  gentilice  Divins.  On  a 
trouvé  à  Grenoble  une  dédicace  à  Mercure,  par  L.  Divius 
Rufus  (5).  D'autres  exemples  de  ce  gentilice  ont  été  re- 
cueillis dans  d'autres  parties  de  l'empire  romain  en  Ita- 
lie (6),  etjhôrs  d'Italie  (7). 

Elusio,  'Onis  est  le  nom  d'une  station  romaine  con- 
nue par  Yltinéraire  de  Bordeaux  à  Jérusalem.  Suivant 
M.  Longnon,  c'est  Font-d'Alzonne ,  commune  de  Monl- 
ferrand  (Aude)  (8).  Elusio  est  dérivé  du  gentilice  Elusius 
connu  par  une  inscription  de  Capoue  (9) ,  c'est  l'épitaphe 
de  Tafifranchi  M.  Elusius.  Elusius  paraît  dérivé  HElusa, 
forme  antique  du  nom  d'Eause  (Gers). 

Arausio,  Orange  (Vaucluse)  (10),  peut  être  ajouté  à  celte 
liste.  Ce  nom  de  lieu  dérive  d'un  gentilice  *Arausius,  dé- 
rivé lui-même  du  nom  d'homme  gaulois  Arausa  que  nous 
a  conservé  une  inscription  d'Espagne  (11). 


(1)  Desjardins,  Géographie  historique  de  U  G&ule  romaine,  1. 1,  p.  417. 
M.  Lejay ,  Inscriptions  antiques  de  la  Côte-d'Or,  p.  237-238,  révoqne  en 
doute  l'authenticité  de  cette  inscription. 

(2)  Hist.  Franc,  1.  H,  c.  23;  édit.  Aradt,  p.  86,  l.  25. 

(3)  Ibid.,  1.  II,  c.  32,  p.  94,  1.  7. 

(4)  Ibid,,  L  III,  c.  19,  p.  129,  I.  9. 

(5)  C.  I.  L.,  XII,  2222. 

(6)  Ibid.,  IX,  3717.  3718,  3719,  6347. 

(7)  Ibid.,  III,  6257. 

(8)  Itinéraire  d'Antonin,  p.  551,  1.  5.  Atlas  historique  de  la  France,  p.  28. 

(9)  C.  /.  L.,  X,  4119. 

(10)  E.  Desjardins,  Géographie  de  la  Gaule  d'après  la  Table  de  Peutinger, 
p.  330.  C.  /.  L.,  t.  XII,  p.  152. 

(11)  C.  /.  L.,  11,2633. 


CHAPITRE  IX. 


EXEMPLES  AU  MOYEN  AGE  DE  NOMS  DE  LIEUX  QUI  OFFRENT 
LA  DÉSINENCE  -OltÂS  ET  QUI  ONT  ÉTÉ  FORMÉS  EN  DÉVELOP- 
PANT  A   l'aide  du  SUFFIXE  -lo-  UN  THÈME  NOMINAL  EN  -0-, 


-»a-,  -to-. 


Sommaire  : 

I  1.  Le  mot  dont  dérive  le  nom  de  lieu  en  -o-lus  est  un  nom  commun, 
i  2,  J^e  mot  dont  dérive  le  nom  de  Heu  en  -o-lus  est  un  nom  propre, 
gentilice  ou  cognomen,  —  en  -tu«. 


S  !•'•  —  Le  mot  dont  dérive  le  nom  de  lieu  en  -o-lus  est  un 

nom  commun. 

Parmi  les  noms  en  -o-/w*  quelques-uns  sont  des  dérivés 
primaires  de  noms  communs;  tel  est  le  Fornolus  villa, 
mis  en  Limousin  par  une  charte  de  Tannée  631  (1),  et  par 
un  diplôme  du  roi  Dagobert  I,  en  636  (2);  c'est  un  dimi- 
nutif du  substantif  latin  fumus  «  four.  » 

Le  suffixe  -o-lus  est  d'un  emploi  assez  fréquent  comme 
suffixe  secondaire  ;  il  sert  à  former  des  diminutifs  des 
nombreux  noms  de  lieux  en  -aria  que  nous  offre  la  géogra- 
phie de  la  France  et  qui  sont  à  proprement  parler  des  noms 
communs  féminins  identiques  à  la  forme  féminine  d'adjec- 


(1)  Pardessus,  Diptomata,  t.  II,  p.  10. 

(2)  Pardessus,  tMd.,  t.  U,  p.  42« 


522  UVRE  II.  CHAPITRE  IX.  |  l. 

tifs  en  'orius,  dérivés  eux-mêmes  des  noms  communs. 
Tels  sont  : 

Apiar[i]olas,  AcheroUes,  lieu  dit  de  la  commune  Theury- 
Achères  (Eure-et-Loir)  (1);  c'est  un  diminutif  dUjoiarto* , 
Achéres,  môme  commune  (2).  On  trouve  un  SMlre  Apiarias 
près  d'Avignon ,  dans  une  charte  de  Tannée  1010  (3).  Le 
nom  de  lieu  Apiaria  existait  déjà  sous  l'empire  romain  :  il 
faut  écrire  avec  un  seul  p  le  nom  de  lieu  de  Mésie,  que  les 
éditeurs  de  V Itinéraire  d'Antonin  ont  cru  devoir  écrire  avec 
deux  p^  Appiaria  (4),  à  cause  de  la  gens  Appia  et  de  la  via 
Appia  avec  lesquelles  il  n'a  aucune  relation.  Apiaria  est  un 
endroit  où  il  y  a  des  abeilles ,  opes ,  au  singulier  apis. 

Favariolas,  dans  un  diplôme  de  Tannée  690  (5)^  aujour- 
d'hui FaveroUes-la-Campagne  (Eure)  (6)  ;  Favairolas  dans  le 
Oévaudan,  aux  termes  de  deux  chartes  du  commencement 
du  onzième  siècle  (7),  et  les  nombreux  FaveroUes 
épars  dans  le  reste  de  la  France  :  Aisne ,  Cantal ,  Côte- 
d'Or,  Eure-et-Loir,  Indre,  Marne,  Haute-Marne,  Orne, 
Somme,  etc.,  sont  autant  de  diminutifs  d'un  antique  Faba- 
ria ,  substantif  identique  au  féminin  de  Tadjectif  fabarius^ 
dérivé  de  faba,  «  fève;  »  et  les  Favières  d'Eure-et-Loir, 
Meurthe-et-Moselle,  Seine-et-Marne,  Somme,  etc.,  sont  des 
pluriels  de  Fabaria. 

* 

.  JuNGARiOLAS  ost  eu  814,  le  nom  d'une  localité  où  Tabbaye 
de  Saint-Victor  de  Marseille  avait  des  colons  (8).  C'est  la 
forme  la  plus  ancienne  du  nom  de  lieu  qui  est  devenu  Jon- 


(1)  LongnoB,  Polyptyque  de  Saint^Germain^  p.  122. 

(2)  Ibid.,  p.  126. 

(S)  Guérard,  CartuUire  de  Saint-Victor  de  Marseille,  t.  I,  p.  215. 

(4)  Page  222, 1.  5. 

(5)  Tardif,  Monumentê  historiqueSt  p.  21,  col.  1. 

(6)  Blosseville,  Dictionnaire  topographique  de  l'Eurej  p.  82. 

(7)  Doniol,  Cartulaire  de  Brioude^  p.  315,  336.  • 

(8)  Quérard,  Cartulaire  de  Saini-Yictor,  t.  Il,  p.  641. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -I0-LU8.  523 

cherolles  dans  la  Haute- Vienne.  C'est  en  même  temps  un 
diminutif  du  nom  de  lieu  Juncaria  qui,  dans  V Itinéraire  d'An- 
tonin ,  désigne  une  station  romaine  d'Espagne ,  près  des 
Pyrénées  (1).  On  ne  trouve  pas  ce  mot  employé  comme 
adjectif,  mais  il  a  été  tiré  du  nom  commutï  juncw  «  jonc  » 
et  on  le  reconnaît  aujourd'hui  dans  les  nombreux  Jonchère 
ou  Jonchères,  Jonquière  ou  Jonquières,  de  France. 

LiNAiaoLAS,  dani  un  diplôme  du'  milieu  du  iuitième  sié* 
cle  (2),  nous  offre  la  forme  la  plus  ancienne  du  nom  de 
lieu  français  assez  répandu,  LigneroUes  (Allier,  Côte-d'Or, 
Eure,  Indre,  Orne,  etc.).  C'est  un  diminutif  de  Linarias, 
qu'on  trouve,  par  exemple,  dans  un  diplôme  de  Tan- 
née 799  (3).  Linarias  est  la  forme  la  plus  ancienne  du  fran- 
çais Ligniéres,  plus  commun  encore  :  Aube,  Cher,  Indre- 
et-Loire,  Loir-et-Cher,  Meuse,  Sarthe,  Somme,  etc.,  et  ce 
substantif  est  le  féminin  de  l'adjectif  latin  linarius^  dérivé 
de  linum,  a  lin.  » 

NoGABiOLAS,  mentionné  dans  une  charte  du  commence- 
ment du  neuvième  siècle  (4) ,  est  un  diminutif  du  nom  de 
lieu  écrit  Nucerias^  en  928,  dans  une  charte  d&  l'abbaye  de 
Cluny  (5) ,  et  dont  le  Cartulaire  de  Conqvss  nous  offre  une 
forme  masculine,  de  Nogario,  au  onzième  siècle  (Q),  Nogeir 
au  douzième  siècle  (7).  Nucerias  et  Nogario  ou  Nogeir  sont 
identiques  l'un  à  la  forme  féminine,  l'autre  à  la  forme 
masculine  d'un  adjectif  nucarius,  dont  les  auteurs  latins 
classiques  n'offrent  pas  d'exemple,  mais  qui  a  été  formé 
comme  les  précédents  et  qui  dérive  du  substantif  latin  nuw^ 
nucis,  «  noix.  » 


(1)  Pages  390, 1.  3;  397, 1.  8. 

(l)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  45,  col.  1. 

(3)  Tardif,  ibid,,  p.  73,  col.  2. 

(4)  Habille,  La  pancarte  noire,  p.  230. 

(5)  Bniel,  Recueil  des  chartes  de  Cluny,  t.  I,  p.  335. 

(6)  Page  307. 

(7)  Page  387. 


m  LIVRE  p.  CHAPITRE  IX.  i  2. 

S  2.  —  Le  mot  dont  dérive  le  nom  de  lieu  en  -o-lus  est  un  nom 
.propre^  —  gentilice  ou  cognomen,,  —  en  -ius. 

D^autres  noms  de  lieux  eu  -o-lus  sont  des  diminutifs  de 
gentilices. 

Ainsi ,  dans  le  nom  de  la  vallis  Aviniolensis  ,  au  comté 
de  Fréjus  (1),  dans  une  charte  de  Tartnée  1030,  on  peut 
reconnaître  un  dérivé  du  gentilice  Avennius ,  dont  il  a  été 
question  plus  haut,  p.  518,  au  sujet  du  nom  de  la  ville 
d'Avignon. 

La  localité  appelée  Bhacious  dans  une  charte  de  Tan- 
née 866  (2) ,  et  Braciolas  dans  un  document  postérieur  (3) , 
porte  un  nom  qui  est  un  diminutif  du  gentilice  Braccius, 
étudié  plus  haut,  p.  352. 

Une  villa  Carenciolas,  en  Autunois ,  est  mentionnée, 
en  936,  par  une  charte  de  Cluny  (4).  Son  nom  est  un 
diminutif  du  gentilice  Carantius^  dont  on  a  parlé  ci-dessus, 
p.  132,  134. 

Cairolus  pour  *  Cariolus  est,  en  917,  le  nom  d'une  villa 
dans  laquelle  on  reconnaît  Queiroles  (Corrèze)  (5).  C'est  un 
diminutif  du  gentilice  Karius^  dont  l'existence  en  France 
est  attestée  par  plusieurs  inscriptions  (6).  De  là  un  dérivé, 
*Cariacus^  qui  explique  le  nom  de  la  commune  de  Chéry- 

lez-Pouilly  (Aisne),  et  peut-être  celui  de  Chéry  (Cher). 

,.  t 

Graniolus  ,  dans  un  titre  de  l'abbaye  de  Saint-Germain 

(1)  Quérard,  CaWuIatre  de  SdAnX-Vicior  de  Mar<eiUe,  1. 1,  p.  592. 

(2)  Deloche,  CaHuIaire  de  Beaulteu,  p.  11. 

(3)  Jbtd.,  p.  271. 

(4)  Bniel,  Aecuett  des  chartes  de  Cluny^  t.  I,  p.  431. 

(5)  Deloche,  CartuUire  de  Beaulieu,  p.  222. 

(6)  C.  /.  L.,  XII,  2962,  3243,  4062. 


NOHET  DE  LIEU  e!n  -I0-LIT6.  525 

d'Auxerre  Graniolo  à  Tablatif  en  864  (1) ,  et  un  autre  ùra- 
nioltis  en  Périgord  dans  le  Cartulaire  de  Vdbbaye  de  Conques 
(Aveyron),  à  la  fin  du  onzième  siècle  :  Castello  de  Gra- 
niolo (2),  Castellu/m  de  Graniol  (3)  sont  des  diminutifs  du 
gentilice  Granius,  étudié  déjà,  p.  247. 

Mariolas  est  le  nom  d*une  villa  où  Ârnulf,  duc  de  Bout^ 
gogne,  avait  des  biens  qu'il  donna,  en  706,  à  l'abbaye  des 
Saints- Apôtres ,  depuis  de  Saint-Arnoul ,  de  Metz  (4).  Le 
même  nom  de  lieu  est  mentionné  dans  une  charte  fausse 
de  son  père  Drogon  pour  la  môme  abbaye  (5).  Mariolas 
est  un  diminutif  féminin  d'un  gentilice,  Marins,  d'où  Ma- 
riaoïts  dont  il  a  été  question  plus  haut,  p.  275-276. 

Matriolas  est  le  nom  de  MaroUes-sur-Seine  (Seine-et- 
Marne),  dans  une  charte  de  Louis  le  Débonnaire  (829)  (6) 
et  dans  le  Polyptyque  de  Saint- Germain  des  Prés  (7)  ;  la  môme 
localité  est  mentionnée  avec  une  orthographe  moins  ar- 
chaïque, Madriolas,  dans  un  diplôme  de  Chariemagne,  en 
786'  (8).  Une  église  de  Matriolis  figure,  au  douzièm'e  sièelè, 
dans  les  titres  de  l'abbaye  de  Saint-Jean-de-Sens  (§][  ;  il 
s'agit,  parait-il,  de  Marolles-sous-Lignières  (Aube).  Il  y  a, 
en  France,  quatorze  communes  du  nom  de  MaroHes.' Elles 
sont  situées  dans  les  départements  suivants  :  Aùbé,  Calva- 
dos, Eure-et-Loir,  Loir-et-Cher,  Marne,  Oîse;  Sarthe, 
Seine-et-Marne,  8eine-et-0ise.  Matriolae^  qui  explique  Ma- 
roUes,  est  un  dérivé  de  Matrius,  gentilice 'doûtoU  a'  paWé 
ci-dessus,  page  280,  au  sujet  du  dérivé  Matriacus. 


(1)  Quantin,  Cartulaire  de  l'Yonne^  U  I,  p.  88. 

(2)  Ed.  de  Q.  Deajardins,  p.  281. 

(3)  Ibid,,  p.  286. 

(4)  Pardessus,  Dtploma^a,  t.  n,  p.  276. 

(5)  /btd.,  p.  214. 

(6)  R.  de  Lasteyrie,  Cartulaire  {général  de  Paris,  p.  48. 

(7)  Edition  Longnon,  p.  47. 

(8)  Tardif,  Monumente  historiqueSy  p.  65,  col.  2. 
(0)  Quantin,  Cartulaire  de  VTonne^  t.  I,  p.  290,  502. 


526  LIVRE  U.  CHAPITRE  IX.  |  %. 

Merguriolus  est  im  uom  de  lieu  mentioimé,  en  808, 
dans  une  charte  de  Tabbaye  dft  Saint-Martin  de  Tours  (1). 
Il  s*agit  de  Mequeroil,  dans  VUb  Saint-Côme  (Indre-et- 
Loire)  (2).  Un  autre  Mercurioltis ,  noté  ifereortoZo,  apparaît, 
en  924,  dans  le  Cartulaire  de  Conques  (Âveyron)  (3^  Mercur 
riolus  est  dérivé  de  Mercurius,  cognomen  étudié  plus  haut» 
page  447. 

ScoTioLAE  doit  être  la  forme  primitive  du  nom  de  la 
localité  appelée  Escozolas,  en  936,  dans  deux  chartes  de 
Fabbaye  de  Cluny  (4).  L'orthographe  plus  archaïque  ScoUo- 
las  nous  est  offerte,  dans  la  seconde  moitié  du  même  siè- 
cle, par  une  autre  charte  de  la  même  abbaye  (5).  C'est 
peut-être  la  même  localité  qui  est  appelée,  à  l'ablatif,  Sco- 
ciolis  dans  un  diplôme  faux  du  roi  Contran  en  faveur  de 
l'abbaye  de  Saint-Marcel  de  Ch&lon-sur-Saône  (6).  Scotiolae 
est  un  diminutif  de  Scotius,  dont  on  s'est  déjà  occupé  plus 
haut,  p.  412-413.  Si  nous  admettons  une  hypothèse  très 
vraisemblable  de  M.  Longnon  (7),  Scotiolae  aurait  été  une 
dépendance  d'Ecuisses  (Saône-et-Loire),  qui  serait  un  ancien 
Seotiaê. 

SouoLus  est ,  en  878 ,  le  nom  d'un  locus  où  étaient  si- 
tuées des  manses  données  à  l'abbaye  de  Beaulieu;  c  est  au- 
jourd'hui Soulliol,  commune  de  Frayssinhes  (8).  Le  genti- 
lice  Sollius  ou  Solius  a  été  déjà  cité ,  p.  328-329,  à  propos 
de  son  dérivé  Soliaous. 

Valbntiola,  aujourd'hui  Valensolle  (Basses-Alpes),  est 


(1)  Habilla»  La  pancarte  noire,  p.  184,  n*  117. 

(2)  Ibid.,  p.  228. 

(3)  G.  Desjardina,  CartuUire  de  Conquee,  p.  7. 

(4)  Brael,  Recueil  des  chartes  de  Cluny,  t.  I,  p.  435,  439. 

(5)  Bniel,  ibid.,  t.  II,  p.  6. 

(6)  Pertz,  DiplomaU,  p.  129,  1.  21. 

(7)  Examen  géographique,  p.  34. 
(8)'Delocha,  Cartulaire  de  Beaulieu,  p.  84,  383, 


NOMS  DE  LIEU  EN  -lO-LUB.  527 

probablement  la  localité  mentionnée  sous  le  nom  de  Valen- 
tiola  ou  Valenoiolay  au  dixième  siècle,  dans  plusieurs 
chartes  de  Tabbaye  de  Cluny  (1).  Valentiola  est  un  dérivé 
du  gentilice  Valentius,  qu'on  trouve  quelquefois  dans  les 
inscriptions.  Ainsi,  on  a  découvert  près  de  Novare  le  mo- 
nument élevé  sur  la  tombe  de  T.  Valentius  père,  de  T. 
Valentius  fils  et  d'une  sœur  de  ce  dernier,  par  Valentia, 
fille  du  premier,  sœur  des  deux  autres  (2).  On  conserve 
encore  à  Vérone  l'épitaphe  de  L.  Valentius  Eutychus  (3). 
Ce  gentilice  a  donné  naissance,  en  France,  à  trois  autres 
dérivés  :  *  Valentiacus,  aujourd'hui  Valençay  (Indre)  ;  Va- 
lenlicmaej  aujourd'hui  Valenciennes  (Nord),  et*Valmtio, 
-onis^  aujourd'hui  Valençon,  nom  de  deux  hameaux  :  Allier 
et  Pas-de-Calais.  Les  rois  mérovingiens  et,  après  eux,  les 
Carlovingiens  eurent  un  palais  à  Valenciennes  (Nord)  (4). 


(1)  Bruel,  Recueil,  t.  I,  p.  119;  t  II,  p.  367;  t.  III,  p.  80,  etc. 

(2)  C.  J.  L.,  V,  6591. 

(3)  Ibid.,  V,  2791. 

(4)  Mabillon,  De  re  diplom&tica^  3*  ôdit.,  t.  I,  p.  346. 


CHAPITRE  X. 


DB  LA  DÉsiNBNGE  -0-to/tim,  '^o^ialum^  -o-9»oZtim,  -o-gihm, 
'O'gelum^  -o-tlum»  -o-^itim,  en  français  moderne  -ml, 

DIALBGTALEMBNT  -HL 


SOMMAIBS  : 

I  1.  Les  noms  de  lieu  en  -o-iolum  nous  offrent  la  forme  familière  en  bas 
latin  de  noms  composés  gaulois  dont  les  deux  termes  étaient  1*  ordinai- 
rement un  cognomen  d*origine  gauloise  ou  latine;  2*  toujours  le  nom 
commun  gaulois  maguSf  «  champ  ;  »  exemples  de  noms  en  -o-to(um  dont 
on  a  trouvé  la  notation  primitive  et  solennelle  en  -magus,  —  {2.  Liste 
alphabétique  de  noms  de  lieu  en  -o-iolum  pour  lesquels  on  n*a  pas  cronvé 
le  primitif  en  rtiAgus^  bien  que  ce  primitif  en  ma^^us  ait  dû  exister,  et  qoi 
tous  dérivent  de  cognominaL, 


S  1*'.  —  Les  noms  de  lieu  en  o-iolum  nous  offrent  la  forme 
familière  en  bas  latin  de  noms  composés  gaulois  dont  les 
deux  premiers  termes  étaient  :  4^  ordinairement  un  cogno- 
men d'origins  gauloise  ou  latine  ;  2®  toujours  le  nom  com- 
mun gaulois  magus  «  champ  ;  »  exemples  de  noms  en 
-o-iolum,  dont  on  a  Prouvé  la  notation  primitive  et  solen- 
nelle en  -magus. 

Dans  la  désinence  --o-iolum  dont  la  représentation  gra- 
phique est  très  variée  et  dont  le  son  s'est  modiâé  par  la 
suite  des  siècles ,  il  y  a  deux  éléments  à  distinguer  :  o  est 
la  finale  d'un  thème  par  lequel  le  mot  commence  ;  iolum, 
qui  termine  le  mot,  est  un  suffixe  qui  apparaît,  pour  la 


NOMS  DE  LIEU  EN  -0-IOLUM.  529 

première  fois,  vers  la  fin  de  l'empire  romain,  dans  une 
lettre  de  saint  Paulin  de  Noie  à  Ausone  : 

Cumque  Maro-ialicis  tua  prodigis  otia  thennis  (1). 

On  sait  que  Paulin  de  Noie  vécut  de  353  à  431.  Mais  le 
vers  dont  il  s'agit  est  bien  antérieur  à  431 ,  puisqu'il  est 
adressé  à  Ausone,  qui  mourut  en  390.  Il  a  donc  été  écrit 
avant  la  fin  du  quatrième  siècle.  C'est  la  date  du  plus 
ancien  exemple  que  nous  ayons  trouvé  de  la  désinence 
dont  il  s'agit  ici,  -o-ialum,  notation  basse  d'un  primitif 

On  suppose  généralement  que  cette  désinence  est  celti- 
que. Cette  doctrine  est  inadmissible,  puisqu'on  n'a  pas 
d'exemple  de  cette  désinence  antérieurement  à  la  fin  du 
quatrième  siècle,  et  qu'on  ne  la  trouve  pas  dans  les  dia- 
lectes néo-celtiques.  0-ialum,  mieux  o-iolv/mj  est  une  dési- 
nence hypocoristique  ou  familière  néo-latine  à  l'aide  de 
laquelle  on  a  formé  des  diminutifs  de  certains  noms  de 
lieux.  Ces  noms  de  lieux  avaient,  en  général,  pour  premier 
terme ,  un  nom  propre  d'homme ,  cognomen  ou  nom  péré- 
grin,  —  quelques-uns  avaient  peut-être  pour  premier  terme 
un  nom  commun  ou  un  adjectif,  —  tous  avaient  pour  se- 
cond terme,  le  gaulois  --maguSy  «  champ.  »  Magus  a  été 
remplacé  par  la  désinence  -iolum  empruntée  aux  noms  de 
lieu  en  -iolus  dérivés  de  gentilices  en  -iiLs.  C'est  un  phé-  ' 
nomëne  grammatical  identique  à  celui  qui  a  produit  le 
sufBxe  'iacus  des  noms  de  lieux  tels  que  Teodeberc-iacuSj  de 
Theodebercthus.  Dans  la  désinence  -o-iolum ,  le  second  o 
étant  atone,  a  pris  un  son  indéterminé  a  ou  i  avant  de 
tomber;  de  là  les  notations  -oialum^  "Ogilum;  dans  'Ogilumy 
g  est  la  notation  d'un  i  consonne. 

Revenons  à  Maro-ialum.  C'est,  en  français  moderne,  Ma- 
reuil  ou  Mareil.  Nous  avons  débuté  par  un  exemple  de  ce 

(t)  Poème  X  véra  U^;  chet  Migùe,  Pairologia  l&tiriâ,  t.  LXI,  col.  458. 

34 


530  L.IVRS  II.  CHAPITRE  X.  |  1. 

nom  de  lieu  emprunté  à  saint  Paulin  de  Noie.  Il  y  en  a 
de  nombreux  exemples  dans  d'autres  documents.  Ainsi, 
Mareuil  (Loir-et-Cher)  est  appelé  Maroialus  (I),   vers  la 
fin  du  huitième  siècle,  dans  un  diplôme  de  Charlemagne 
pour  Saint-Martin  de  Tx)urs.  De  Maroialus  dérive  Maroia- 
lensis  chez  Grégoire  de  Tours  (2)  ;  Grégoire  de  Tours  (3) 
mentionne  une  Maroialensis  villa  ^  qui  doit  être  un  des 
deux  Mareil  du  département  de  la  Sarthe.  Un  diplôme 
de  Charles  le  Chauve ,  en  862 ,  place  une  villam  Marogi- 
lum  dans  le  pays  de  Meaux;  c'est  aujourd'hui  Mareuil 
(Seine-et-Marne)  (4).  Un  autre  Marogilum  apparaît  dans  le 
Polyptyque  de  Saint- Germain  des  PréSy  où  il  est  noté  à  l'abla- 
tif, Maroilo  (5),  Mairoilo  (6);  c'est  Mareil-sur-Mandre  (Seine- 
et-Oise).  Il  y  a,  en  France,  six  communes  de  Mareil  situées 
dans  les  départements  de  la  Sarthe  et  de  Seine-et-Oise,  et 
treize  communes  de  Mareuil  (Aisne,  Charente,  Cher,  Dor- 
dogne,  Loir-et-Cher,  Marne,  Oise,  Seine-et-Marne,  Somme, 
Vendée).  Inutile  de  parler  des  hameaux. 

Mareil  et  Mareuil  sont  le  môme  dérivé  d'up  cognomen 
latin  d'origine  gauloise,  Marus,  qui  veut  dire  «  grand.  » 
Marus,  ou  mieux  maros  en  gaulois,  est  un  adjectif,  et  nous 
n'en  avons  d'exemple,  en  Gaule,  que  dans  les  composés, 
comme  Indutio-marus ,  lUio-marus,  Soli-marus,  etc.  Mais 
on  a  relevé  plusieurs  exemples  de  cet  adjectif  employé 
comme  surnom  ou  nom  d'homme  dans  des  inscriptions 
d'Italie  :  C.  Ignatius  Marus  (7),  C.  Pontius  Mari  f.  (8), 
M.  Ofasius  Firmus  Marus  (9). 


(1)  Dans  réditioD  donnée  par  Dom  Bouq^uet,  V,  737, c,  on  a  imprimé  li«- 
zoyalus;  c'est  une  faute  rectifiée  par  Mabille,  La  pancarte  noire ^  p.  228; 

cC.  151  et  69. 

(2)  Historia  Francorum,  livre  VII,  c,  12;  édif .  ^Afjnfjt,  p.  257^1  15^. 

(3)  Livre  X,  c.  5;  édit.  Amdt,  p.  413,  1.  22, 

(4)  Tardif,  Monuments  hUtoriqueê^  p.  119,  col.  i. 

(5)  Edit.  Longnon,  p.  280. 

(6)  Ibid,,  p.  284. 

(7)  C.  /.  L.y  IX,  652. 

(8)  Ibid.,  1015. 
(9}  Ibid.,  X,  6565. 


NOMS  M:  LIEU  EN  -0-IOLUM.  681 

Du  coffnomen  ou  nom  pérégrin  Marus  ou  Maros  on'  a 
formé  le  nom  de  lieu  Maro-magus,  nom  d*une  ville  d€f 
Grande-Bretagne  qui  nous  est  connue  par  Tanonyme  de 
Ravenne  (1).  Mutroialum  ou  mieux  itaroiolum  en  est  un 
diminutif.  Il  tient  lieu  d'un  trop  long  *  Maromagulum. 

Pour  lefe  exemples  suivants,  nous  prendrons  Tordre 
alphabétique. 

Le  nom  de  lieu  de  Gaule  Argento-magui  (2),  champ  dit 
d'Argentos,  du  nom  d'un  ancien  propriétaire,  aurait 
donné  régulièrement  le  diminutif  Argento-magulum  ;  à  ce 
diminutif  fut  substitué  *  Argento-iolum  ;  *  Argentogelv/m  ^ 
Argenteuil,  d'où  le  dérivé  Argentogelensis ,  en  769  (3). 

Les  Chasseneuil  de  la  Charente,  de  l'Indre,  de  la  Vienne 
et  de  la  Haute-Vienne  sont  d'anciens  *  Cassino-iolum  pour 
Cassino-magulum ,  comparez  Cassino-magus  «  Chassenon ,  » 
Casino-mago  dans  la  Table  de  Peutinger  (4). 

NoviOLiUM ,  à  l'ablatif  Noviolio  ,  Nueil  (Maine-et-Loire) , 
dans  un  diplôme  dé  Tannée  690  (5) ,  tient  lieu  d'un  plus 
ancien  NoviO'iolum^  Novio-ialum  pour  Novio-magulum,  com- 
parez NovionMgus^  Noyon  (6j. 

RAiDOLimr,  aujourd'hui  Reuil  (Seine-et-Miàrnë)  (7),  est 
un  ancien  Ratii-ioluin  pour  *  Ratu-magulum ,  comparez  le 
nom  de  lieu  Ratumacos  pour  Ratu-nuigOÈ  y  Raiu^maguè  ; 
RaPamacos  est  fourni  par  une  monnaie  (8). 


(1>  Edition  Pinder  et  Partb«y,  p.  434;  1.  8. 

(2)  Mieux  Arganio-magus,' Table  de  Peutingèt'.  E:  Desjai^dixls,  Géùgtàptiie' 
de  la.  Gaule  d'après  la  Table  de  Peutinger^  p.  272. 

(3)  Tardif,  HonumenU  hiatorittHës y  p.  52>,  col;  1.  Of.  Guéràrd;  Cartulaire 
de  Noire-Dame  de  Paris,  t.  I,  p.  03^,*  100,-101. 

mDBBiardiûs,  Géographie  de  lec-Ga^èle  d'aprèê  la  Tabtè'der^eUiin'gery  p.  369. 
(5)  R.  de  Lasteyrie,  Carlulaire  de  Parts,  p.  18. 
(&)JHnérairt  d'Anlortin,  p.  362, 1.  3. 

(7)  Chronique  d'Aimoin  et  Vie  de  saint  Aile,  chez  Dom  Bouquet,  III,' 
138  e,  513  a. 

(8)  A.  de  Barthélémy,  dans  la  ReûHê  CélHquêy  t.  IX,  p.  33. 


532  LIVRE  II.  CHAPITRE  X.  J  l. 

Rueil  (Seine-et-Oise),  Rioilum  dans  un  diplôme  de 
Louis  le  Débonnaire  en  817  (1),  tient  lieu  d'un  plus  ancien 
*RigO'iolumj  *  Rigo-ialum  ^  d'où  Tadjectif  noté  à  l'accusatif 
singulier  Rigoialinsim  chez  Grégoire  de  Tours  (2).  Rigo-ialum 
est  le  diminutif  de  Rigo-magus,  qui  est  le  nom  primitif 
Remagen  (Prusse  rhénane)  (3),  de  la  ville  de  Riom  (Puy- 
de-Dôme)  (4) ,  et  qui  signifie  «  champ  du  roi.  » 

Le  Vaudreuil  (Eure),  appelé  Rodolium  au  onzième  siè- 
cle (5),  est  un  ancien  *  Roto-iolum  pour  *  Roto-mc^ulum  ; 
comparez  Roto^magus  (Rouen). 

Senogalum,  à  Tablatif  Senogalo,  nom  d'un  lacus  d'Au- 
vergne dans  Vaicis  Brivatensis ,  aux  termes  d'une  charte  de 
l'année  821  (6),  est  un  équivalent  de  ^Seno-ialum  pour  5^- 
no-iolum,  *  Seno-ialum  tient  lieu  de  * Senomagulwn  ^  dimi- 
nutif de  Seno^maguSy  nom  de  lieu  connu  par  la  Table  de 
Peutinger  (7).  La  forme  moderne  du  diminutif  est  en  fran- 
çais Seneuil ,  nom  de  hameaux  de  la  Charente ,  de  la 
Dordogne,  du  Doubs  et  de  la  Haute-Loire  (8). 

Vendoilo,  à  l'ablatif,  est  en  1115,  le  nom  de  la  commune 
de  Vendeuil  (Aisne)  (9).  On  a  trouvé  le  même  nom  de  lieu 
écrit  Vendoil  en  1147  (10).  C'est  un  ancien  *  Vindo-iolum  pour 


(1)  Dom  Bouquet,  VI,  505  e. 

(2)  Historia  Francorum^  Uvre  IX,  c.  13;  édit*  Krusch,  t.  I,  p.  370, 1.  3. 

(3)  Ë.  Desjardins,  Géographie  de  la  Gaule  d'après  la  Table  de  Peutinger, 
p.  53. 

(4)  Rigomagensis ,  bonne  orthographe,  alterne,  chez  Grégoire  de  Tours, 
avec  l'orthographe  corrompue  Ricomagensis ,  édit.  Amdt,  p.  751,  1.  26; 
p.  7G8,  1.  l,  etc. 

(5)  BlosseviUe,  Dictionnaire  topographique  de  l'Eure,  p.  227. 

(6)  Doniol,  Cartulaire  de  Brioude^  p.  143. 

(7)  £.  Desjardins,  Géographie  de  la  Gaule  d'après  la  Tablé  de  Peutinger^ 
p.  53. 

(8)  E.  Desjardins,  Géographie  de  la  GauZe  d'après  la  Table  de  Peutinger^ 
p.  276. 

(9)  Guérard,  Cartulaire  de  Notre-Dame  de  Paris,  t,  I,  p.  307. 

(10)  Matton,  Dictionnaire  topographique  de  l'Aisne,  p.  285. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -O-IOLUM.  533 

*  Vindo-magulum.  Comparez  Vindo-magics  nom  d'une  ville 
des  Volcae  Arecomici  dans  la  Gaule  Narbonnaise  chez  Pto- 
lémée  (1). 

Ne  considérons  pas  la  création  des  noms  hypocoristi- 
ques  en  -o-iolum,  -euil,  comme  un  phénomène  phonétique  ; 
c'est  un  fait  morphologique  ;  les  noms  de  lieux  celtiques 
ou  gallo-romains  terminés  par  les  deux  syllabes  magus , 
étaient  des  composés  de  deux  termes,  comme  la  plupart 
des  noms  d'hommes  germaniques.  Ces  derniers  ont  laissé 
tomber  le  second  terme  dans  les  noms  hypocoristiques  en 
-0  'Onis ;  tel  est  Fritha-reiks ,  «  roi  de  la  paix,  »  aujour- 
d'hui Friedrich  ,  que  nous  écrivons  Frédéric ,  en  français 
Ferry  et  dont  la  forme  familière  était  au  huitième  et  au 
neuvième  siècle  Fritto,  Friddo,  aujourd'hui  Fritz.  Argento- 
iolum,  plus  tard  Argentogelum  ^  Argentoilum^  Argenteuil; 
YindO'iolum  y  plus  tard  Vendoialum,  Vendoilum,  Vandeuil, 
nous  mettent  en  présence  d'un  phénomène  analogue. 

L'accent,  dans  le  celtique  primitif,  ne  frappait  pas  la 
syllabe  initiale  comme  dans  Frithareiks,  Friddo;  dans  les 
composés  gaulois  dont  le  second  terme  est  magus  ^  la  syl- 
labe tonique  était  la  finale  du  premier  terme.  Ainsi  dans 
Cassino-magus ,  Chassenon,  l'accent  était  placé  sur  la  syl- 
labe no,  le  second  terme  magus  était  atone.  Dans  l'hypo- 
coristique  *  Ca^ino-iolum,  Chasseneuil,  l'accent  reste  sur  la 
syllabe  no  comme  dans  Cassino-magus, 

Parmi  les  noms  de  lieux  en  -euil ,  dont  nous  avons 
donné  déjà  la  liste ,  Argenteuil  dérive  du  nom  d'homme 
4rgentos,  déjà  étudié  (2);  Vandeuil  vient  de  Vindos,  le  Find 
irlandais,  et  dont  le  féminin  est  Vinda,  exemples  :  Ulpia 
Vinda  (3) ,  Vinda  nom  pérégrin  d'une  femme  (4).  Le  nom 
de  Vindo'bona ,  Vienne  (Autriche),  peut  s'expliquer  par  un 


(1)  Livre  II,  ch.  x,  |  6.  Edition  Didot-MûUer,  p.  241, 1.  5. 

(2)  Voyez  ci-dessus,  p.  491. 

(3)  C.  /.  L.,  III,  4110. 

(4)  /6id.,  III,  5663;  cf.  VII,  509  et  X,  4963. 


534  LIVIiE  II.  CHAPITRE  X.  {  2. 

nom  d'homrpe  Viudos.  Vindos  a  donné  Iqs  dérivés  :  Vin- 
dius  geutilice  qui  a  .pénétré  dans  les  fastes  consulaires 
avec  M.  Vindius  Verus,  Tan  138  de  notre  ère,  et  qui  ©st^- 
testé  par  plusieurs  inscriptions  ;  Vindillus ,  cognomen  et 
nom  pérégrin  conservé  par  deux  inscriptions  (1)  ;  Vindonius, 
gentilice  de  Vindonia  Vera,  dans  une  inscription  duNori- 
que  (2).  De  Vindonius  vient  Yindonissa,  nom  primitif  de 
Windiscb,  en  Suisse,  et  de  plusieurs  petites  communes  de 
France  :  deux  Vendeuesse  (Saône-et-Loire) ,  deux  Vapde- 
nesse  (Côte-d'Or,  Nièvre),  etc. 

Dans  Rigo-magus  «  champ  du  roi  »  rigo-  est  uu  nom 
commun. 

Nueil,  Seneuil  sont  des  dérivés  de  novios  et  de  setm, 
peuvent  signifier  ou  «  champ  nouveau,  »  «  champ  vieux  » 
ou  «  champ  de  Novios  »  «  champ  de  Senos ,  »  car  les  ad- 
jectifs novios  el  senos  ont  été  aussi  des  noms  d'hommes. 

§  2.  —  Lisêe  alphabétique  de  noms  de  lieu  en  o-iolum  pour 
lesquels  on  n'a  pas  trouvé  de  primitif  en  magus ,  —  bim 
que  ce  primitif  en  magus  ait  dû  exister ,  —  et  qui  tous 
dérivent  de  cognomina. 

Barolia  est,  en  1063,  le  nom  de  Bareil,  commune  de 
Chalonnes  (Maine-et-Loire i  (3).  C'est  un  ancien  *  Baro-iola^ 
dérivé  d'un  thème  Baro-,  employé  comme  cognomen  au 
féminin  dans  une  inscription  de  Narbonne,  où  il  est  le  sur- 
nom d'une  affranchie  (4).  Le  masculin  Barus  apparaît  dans 
une  inscription  de  Cilli,  en  Styrie,  l'antique  Celeia;  on  y 
trouve  les  noms  de  M.  Licovius  Barus  réunis  à  ceux  d'au- 
tres membres  de  la  même  famille,  qui  parait  avoir  été  gau- 
loise (5).  Barus  donna  un  dérivé,  Baro,  qu'on  rencontrée 
la  fois  dans  la  Gaule  transalpine  et  dans  la  Gaule  cisalpine. 


(1)  C.  /.  L.,  III,  4767  ;  V,  5818. 

(2)  /bid.,  III,  5098. 

(3)  Port,  Dictionnaire  historique  de  Maine-et-Loire,  t.  I,  p.  206w 

(4)  C.  /.  L.,  XII,  4966. 

(5)  Ibid.,  III,  5265. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -0-IOLUM.  535 

Ainsi,  on  a  trouvé  &  Embrun  Tépitaphe  de  L.  Vestonius 
Baronis  fllius,  qui  est  aujourd'hui  conservée  à  Tévêché  de 
Gap  (1)  ;  dans  les  environs  de  Como,  une  dédicace  à  des  di- 
vinités, par  Valerius  Baronis  fliius  (2)  ;  sur  les  bords  du  lac 
Majeur,  Tépitaphe  de  Novellius  Baro  (3)  ;  à  Ivrée,  celle  de 
C.  Attius  Baro  (4). 

BoNOGiLUM,  à  l'ablatif  Bonogilo,  est,  dans  deux  diplômes, 
l'un  de  832,  l'autre  de  862,  le  nom  d*une  localité  où  l'ab- 
baye de  Saint-Denis  possédait  un  manse  (5)  ;  c'est  proba- 
blement Bonneuil  (Seine-et-Oise)  ;  il  s'agit  probablement  de 
la  même  localité  dans  un  diplôme  de  l'empereur  Lothaire, 
en  841,  dont  la  date  de  lieu  est  ainsi  conçue  :  acium  Bo- 
noilo  villa  (6).  Il  faut  distinguer  cette  localité  de  Bonneuil- 
sur-Mame  (Seine),  dont  est  datée,  en  811,  une  charte  du 
comte  Etienne,  en  faveur  de  Tévêché  de  Paris  :  actum  Bo- 
noilo  villa  :7).  Le  Cariulaire  de  Saint- Victor  de  Marseille 
nous  fait  connaître  une  autre  localité  de  même  nom  :  une 
charte  du  onzième  siècle,  contenue  dans  ce  Cartulaire,  a 
pour  objet  des  biens  situés  au  comté  d'Uzès  (Gard),  in  villa 
qxmm  nominant  Bonoilo  (8). 

*  BonO'iolus,  forme  primitive,  dérive  du  cognomen  Bonus, 
étudié  p.  469  à  propos  du  dérivé  Bonacus.  Le  nom  de 
Bonneuil  est  assez  répandu  en  France  ;  outre  les  deux  com- 
munes mentionnées  plus  haut,  il  y  en  a  six  de  ce  nom  :  deux 
dans  l'Oise  ;  une  dans  chacun  des  départements  de  la  Cha- 
rente, de  rindre,  de  la  Vienne  ;  enfin  une  dans  le  Calva- 
dos, dont  l'orthographe  soi-disant  étymologique  nous  offre 
l'explication  populaire  du  mot  :  Bonn-œil.  Le  hasard  de  l'or- 


(1)  c.  /.  L.,  XII,  9t. 

(2)  Jbid,,  V.  4450. 

(3)  /Md.,  V,  6645. 

(4)  Supplément  au  tomo  V  du  C.  /.  L.,  n*  906. 

(5)  Tardif,  Monuments  historique*,  p.  85,  col.  2  et  p.  119,  col.  2. 

(6)  Tardif,  ibid,,  p.  94,  col.  1. 

(7)  Robert  de  Lasteyrie,  Cartulaire  de  Paris,  p.  39. 

(8)  Gaérard,  Cartulaire  de  Saint-Victor  de  Marseille,  t.  II,  p.  53*9. 


536  LIVRE  II   CHAPITRE  X.  l  2, 

dre  alphabétique  place  Bonn-œil  (Calvados)  à  côté  de  Bonn- 
œuvre  (Loire-Inférieure),  qui  est  probablement  un  ancien 
*BonO'briga^  «  forteresse  de  Bonus,  »  encore  un  exemple 
intéressant  d'étyniologie  populaire.  La  prononciation  mo- 
derne du  primitif  Bono-iolus  n'a  pas  donné  lieu  aux  mêmes 
rêveries  étymologiques  dans  le  département  de  l'Aisne  ;  là 
une  villa  Bonogilus,  mentionnée  par  la  Vie  de  Louis  le  Pieux, 
dite  de  l'Astronome,  dans  le  récit  des  événements  de  Tan- 
née 834  (1),  est  devenue  Bonneil  (2). 

Une  localité  appelée  Bragogilo  est  mentionnée,  en  697, 
dans  une  charte  en  faveur  de  l'abbaye  de  Limours  {Seine- 
et-Oise)  (3).  Ce  nom  de  lieu  est  dérivé  du  nom  pérégrin 
Bracus,  conservé  par  une  épitaphe  du  Latium  (4).  Bracus 
avait  une  variante  par  double  c,  d'où  les  dérivés  1*  Brac- 
killo ,  nom  d'un  potier  dont  on  a  trouvé  la  marque  à  Lon- 
dres (5)  ;  2®  Braccius ,  employé  comme  gentilice  et  étudié 
plus  haut,  page  352. 

Britogilum,  nom  de  Breteuil-sur-Noye  (Oise),  en  1031  .6!, 
est  un  dérivé  du  nom  pérégrin  Brittus,  dont  le  féminin 
Britta  apparaît  dans  une  inscription  d'Espagne  (T.  On  le 
retrouve  dans  une  inscription  de  la  Pannonie  inférieure, 
qui  est  l'épitaphe  de  Ti.  Claudius  Valerius,  fils  de  Brittus, 
décurion  du  deuxième  escadron  des  Aravaci  et  originaire 
d'Espagne  (8).  Enfin,  il  se  rencontre  dans  l'Italie  du  Nord  : 
on  a  trouvé ,  près  du  lac  de  Garde ,  une  dédicace  aux  fées 
masculines  par  un  certain  Staumus,  fils  de  Vesumus  Brit- 
tus (9). 


(1)  C.  51;  Dom  Bouquet,  VI,  115  h, 

(2)  Matton,  Dictionnaire  topographique  de  TAisne,  p.  33. 

(3)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  244. 

(4)  C.  /.  L.,  XIV,  2345. 

(5)  Ibid.,  VII,  1336,  175. 

(6)  Merlet,  Cartulaire  de  Notre-Dame  de  ChartreSj  t.  I,  p.  88. 

(7)  C.  I.  L.,  II,  1335. 

(8)  /6id.,  III,  3271. 

(9)  Ibid.,  V,  5002. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -0-IOLUM.  537 

Cabrogilo  est,  dans  deux  chartes  du  commencement  du 
dixième  siècle  (1),  le  nom  d'une  villa  située  près  de 
Brioude  (Haute-Loire).  Le  thème  cabro-,  dont  ce  nom  de 
lieu  dérive,  s'offre  ici  avec  une  notation  moderne  pour 
capro'y  plus  ancien.  C'est  le.  thème  du  nom  pérégrin  Ca- 
per,  attesté  par  une  inscription  de  Dalmatie  (2)  et  du 
cognomen  Caper,  qu'on  croit  avoir  retrouvé  dans  une  ins- 
cription de  la  vallée  du  Pô  (3).  La  variante  barbare  Caprus, 
au  nominatif,  nous  est  offerte  par  une  inscription  de  Ca- 
nosa  (4).  Dans  une  inscription  de  Campanie,  la  forme  fé- 
minine Capra  est  employée  au  masculin  :  L.  Aninius  Ca- 
pra  (5).  Le  seul  personnage  de  quelque  notoriété  qui  ait 
porté  ce  cognomen  est  le  grammairien  Flavius  Caper,  qui 
vivait  vers  la  fin  du  premier  siècle  de  notre  ère ,  et  dont 
on  a  deux  petits  traités,  l'un  de  orthographia,  l'autre  de 
verbis  dubiis  (6). 

Caloili  villa  ^  dans  une  charte  de  l'année  1124  (7),  est 
Chaillot,  aujourd'hui  compris  dans  l'enceinte  de  Paris. 
C'est  un  dérivé  du  nom  pérégrin  Calus,  lu  sur  une  marque 
de  potier  à  Orange  (8).  On  a  trouvé,  en  Afrique,  l'épitaphe 
de  C.  Claudius  Calus  (9).  Ce  cognomen  est  quelquefois  iden- 
tique à  l'adjectif  grec  xaXdç,  «  beau.  »  Il  a  été  surtout  em- 
ployé pour  les  femmes.  Ainsi,  les  inscriptions  de  la  Campa- 
nie nous  offrent  six  exemples  de  femmes  appelées  Cale  :  à 
Antium,  l'épitaphe  de  Junia  Cale  (10);  à  Pouzzoles,  celle  de 
l'esclave  Cale  (il);  à  Capoue,  celle  de  Babullia Cale  (12),  etc. 

* 

(1)  Doniol,  Ca.rtuULire  de  Brioude,  p.  39,  60. 

(2)  C.  /.  L.,  III,  2848. 

(3)  îbid.,  V,  suppléments,  itslics,  fasc.  I,  972. 

(4)  /6id.,  IX,  387. 

(5)  Ibid.,  X,  6463. 

(6)  Teuflfel,  Geschichte  der  rômischen  LiteratuVy  3*  édit.,  p.  798-799. 
C?)  Robert  de  Lasteyrie,  C&rtulaire  de  Paris,  p.  221. 

(8)  C.  /.  L.,  XII,  5686,  161. 

(9)  Ibid.,  Vni,  6413. 

(10)  Ibid.,  X,  6733. 

(11)  Ibid.,  X,  2203. 

(12)  Ibid.,  X,  4037. 


538  ^IVRE  H.  OHAPITRE  X  |  ^ 

Le  nom  primitif  de  Chelles  (Seine-et-Marne),  noté  Cala 
dans  le  testament  d'Erminthrude,  vers  700  (1),  et  Kala,  en 
811,  dans  la  donation  du  comte  Etienne  (2),  n'est  autre 
chose  que  la  forme  féminine  du  nom  d'homme  Calus, 
employé  adjectivement  :  Cala,  sous-entendu  villa ^  ce  qui 
veut  dire  non  pas  «  belle  ville,  »  mais  «  villa  de  Calus,  » 
c'est-à-dire  «  propriété  de  Lebeau ,  »  à  moins  qu'il  n'y  ait 
eu,  à  côté  de  l'adjectif  grec,  un  mot  gaulois  de  môme  son 
dont  le  sens  nous  échappe.  Il  a  existé  deux  Cala-dwmmy 
l'un  en  Espagne,  l'autre  en  France,  aujourd'hui  Châlons 
(Mayenne)  (3). 

Cantogilum  est  le  nom  d'un  bien  donné  en  936  à  l'abbaye 
de  Saint-Julien  de  Brioude  (4).  C'est  probablement  de  la 
même  localité  qu'il  est  question  au  même  siècle,  dans  les 
chartes  de  Cluny,  sous  le  nom  écrit  à  l'ablatif  Canioiolo  (5) 
et  Quantoiolo  (6).  L'abbaye  qui  s'y  trouvait  est  appelée 
Cantoiolense  mona^terium  dans  une  charte  de  l'année  1 137  (7). 
C'est  aujourd'hui  Chanteuges  (Haute-Loire).  Ce  nom  de 
lieu  est  dérivé  d'un  nom  barbare  *Cantos,  nécessaire  pour 
expliquer  le  gentilice  Cantius  d'une  inscription  de  Lyon 
qui  est  l'épitaphe  d'Acutia  Amatrix  gravée  par  les  soins  de 
son  mari  C.  Cantius  Elventinus  (8)  ;  Cantius  veut  dire  «  fils 
de  Cantos.  »  Nous  connaissons  à  Cantos  deux  autres  dé- 
rivés :  Canto  et  Cantaius,  noms  de  potiers  dont  les  marques 
sont  conservées  au  musée  Britannique  (9).  Cantos  était  un 
nom  d'homme  gaulois  ;  son  thème ,  Canto- ,  se  retrouve 
comme  second  terme  dans  le  nom  divin  Àvi-cantus  con- 


(1)  Tardif,  Monuments  historiques^  p.  33,  col.  2. 

(2)  Tardif,  ibid.^  p.  811.  Robert  de  Lasteyrie,  Cartulaire  de  Paris ^  p.  39. 

(3)  Ptolémée,  t.  II,  c.  6,  2  38;  édit.  Didot-Mûller,  t.  I,  p.  162, 1.  7.  L.  Maî- 
tre, Dictionnaire  iopographique  du  département  de  la  Mayenne,  p.  66. 

(4)  Doniol,  Cartulaire  de  Brioude^  p.  344. 

(5)  Bruol,  Recueil,  t.  I,  p.  532;  t.  II,  p.  242,  239. 

(6)  Ibid.,  t.  II,  p.  266. 

(7)  Ghassai'ng,  Spicilegium  Brivatense,  p.  13,  14. 

(8)  Boissieu,  Inscriptions  de  Lyon,  p.  501. 

(9)  C.  i.  L.,  VIII,  1330,  8  et  1336,  225. 


N0M6  BE>LIBU'EN  nO-IOLUM.  889 

serve  par  une  inscription  de  Nimes  (1),  et  dans  le  nom 
d'homme  Viro-cantus  qu'on  a  trouvé  dans  une  inscription 
de  Milan  (2). 

CAUCIN0GU.UM.  Plusieurs  chartes  du  cartulaire  de  Brioude 
(Haute-Loire) ,  à  la  fin  du  neuvième  siècle  et  au  commen- 
cement du  dixième,  mettent  dans  la  circonscription,  vicaria^ 
aieis  ou  eomitatus  dont  Brioude  était  capitale,  une  villa 
appelée,  au  cas  indirect,  Caucinogàlo  (3),  Caucinogilo  (4),  et 
par  abus  Caucionogile  (5),  Cacinogilo  (6).  Les  deux  dernières 
leçons  doivent  être  corrigées  Tune  en  Caucinogile ,  l'autre 
en  Caucinogilo.  Caucinus,  d'où  ce  nom  de  lieu  dérive,  est 
un  cognomen  connu  par  une  inscription  de  Madrid  qui  est 
l'épitaphe  de  L.  Domitius  Caucinus  (7). 

Cavenoilus,  nom  de  lieu  mentionné  dans  une  charte 
du  roi  de  France  Robert  en  faveur  des  religieuses  d'Argen- 
teuîl  (Seine-et-Oise) ,  en  1004  (8),  dérive  du  gentilice  Ca- 
venus  dont  on  a  vu  plus  haut,  p.  458,  le  dérivé  Cavennacus. 

CoRBOLius  est  le  nom  d'une  ville ,  oppidum ,  dans  une 
charte  du  roi  Robert,  en  Tan  1000  (9)  :  oppidum  Corbolii, 
Lé  même  nom  apparaît  avec  une  légère  différence  d'ortho- 
graphe dans  une  autre  charte  du  môme  roi,  en  1029  :  a 
castello  Carboili  (10).  Il  s'agit  de  Corbeil  (Seine-et-Oise).  Ce 
noni  de  lieu  dérive  du  nom  d'homme  pérégrin  Corbus 
qu'on  trouve  dans  une  inscription  du  Norique  (il).  De  Cor- 


Ci)  C.  /.  L.,  XII,  3077. 

(2)  /Md.,  V,  5883. 

(3)  Doniol,  C&rtulaire  de  Brioude,  p.  102,  133. 
(4j  Page  285. 

(5)  Page  173. 

(6)  Page  253. 

(7)  C.  /.  L.,  II,  3055. 

(8)  Guérard,  C&rtulaire  de  Notre-Dame  de  Paris,  t.  1,  p.  95. 

(9)  Tardif,  Monuments  liistoriques,  p.  152,  col.  1. 

(10)  Jbid,,  p.  163,  col.  1. 

(11)  C.  /.  L.,  III,  6497. 


540  LIVRE  II.  CHAPITRE  X,  {  2, 

bus  est  venu  le  dérivé  Corbo  dans  une  inscription  de  Pan- 
nonie,  C.  Fabius  Corbo  (1).  Le  nom  pérégrin  Corbus  parait 
avoir  persisté  en  Gaule  sous  la  domination  franque  :  en 
603  ou  en  604,  le  roi  Thierry  II  eut,  d'une  concubine,  un 
enfant  qu'on  appela  Corbus  (2)  ;  Corbus  fut  mis  à  mort  en 
613  (3). 

CuRTOGiLO,  au  cas  indirect,  est  le  nom  d'une  villa  située 
en  Quercy,  suivant  une  charte  de  Tabbaye  de  Beaulieu 
(Corrèze)  (4).  Ce  nom  de  lieu  est  dérivé  du  cognomen  Curtus, 
connu  par  une  inscription  d'Afrique  (5). 

Christoilo  ,  à  l'ablatif ,  est  le  nom  d'une  villa  que  met 
en  Parisis  un  diplôme  de  Charles  le  Simple  en  900  (6).  Il 
s'agit  de  Créteil  Seine).  Ce  nom  de  lieu  est  dérivé  du  cog- 
nomen Chrestus ,  d'origine  grecque ,  fréquent  dans  les 
inscriptions  romaines ,  notamment  en  Gaule  ;  exemples  : 
Numisius  Chrestus,  afifranchi,  à  Fréjus  (7);  Q.  Pacuius 
Chrestus  (8),  et  Valeria  Chreste  (9),  à  Narbonne. 

Ebrolio  est  à  Tablatif,  au  treizième  siècle,  le  nom 
d'Ebreuil  (Allier)  (10).  C'est  le  nom  d'une  abbaye  fondée  à 
la  fin  du  dixième  siècle.  Il  est  dérivé  du  nom  d'homme 
Eburus  étudié  plus  haut,  p.  168. 

Germolio  est,  à  l'ablatif,  le  nom  d'une  localité  men- 
tionnée plusieurs  fois  dans  des  chartes  du  onzième  siècle, 
au  cartulaire  de  l'abbaye  de  Conques  (Aveyron)  (11).  Ce  nom 


(1)  c.  /.  L.,  III,  3776. 

(2)  Frédégaire,  livre  IV,  c.  34;  édit.  Krusch,  p.  130,  1.  7-8. 

(3)  Frédégaire,  livre  IV,  c.  42;  édit.  Knisch,  p.  141,  1.  24. 

(4)  Deloche,  Cartulaire  de  Beaulieu^  p.  219. 

(5)  C.  i.  L.,  VIII,  5641. 

(6)  Robert  de  Lastoyrie,  Cartulaire  de  Part«,  p.  76. 

(7)  C.  /.  L.,  XII,  264. 

(8)  /bid.,  4322. 

(9)  /6td.,  5194. 

(10)  Chassaing,  Spicilegium  Brivatense,  p.  210. 

(11)  Desjardins,  CaHuiatre  de  Conques^  p.  29,  167,  240. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -0-IOLUM.  54i 

de  lieu  est  dérivé  de  Germus,  cognomen  dans  une  inscrip- 
tion romaine  de  Dalmatie  qui  est  Tépitaphe  de  Sex.  Gavi- 
lius  Germus  (1).  Germus  explique  Germay  (Haute-Marne). 

LiNOGiLE ,  nom  d'une  villa  cédée ,  à  titre  d'échange , 
par  Tabbaye  de  Saint-Julien  de  Brioude  (Haute-Loire) 
en  884  (2),  dérive  du  cognomen  Linus  qu'on  trouve  de 
temps  en  temps  dans  les  inscriptions  romaines  ;  il  y  en  a 
un  exemple  à  Narbonne,  C.  Valerius  Linus  (3);  on  en 
trouve  aussi  dans  d'autres  parties  de  l'empire  romain  : 
L.  Titius  Linus,  à  Trévise  (4)  ;  T.  Pullius  Linus,  à  Este  (5). 
On  pourrait  aussi  expliquer  Linogilus  par  le  nom  d'homme 
gaulois  Licnos  qui  se  trouve  dans  l'inscription  gauloise 
d'Autun,  et  dans  deux  inscriptions  romaines,  Tune  de  Pola, 
en  Istrie  (6),  l'autre  de  Gemona  (7);  dans  ces  deux  derniers 
monuments  Licnus  est  cognomen. 

Petroilum  est,  en  1030,  le  nom  de  Preuil,  commune  de 
Nueil  (Maine-et-Loire)  (8).  Le  même  nom  de  lieu  désignant 
une  localité  différente  est  écrit  à  l'ablatif  PedroliOy  vers 
l'an  1000,  dans  une  charte  de  l'abbaye  de  Cluny  (9)  ;  il  s'agit 
probablement  du  Pérolet,  commune  de  Loche  (Saône-et- 
Loiref)  ;  ce  nom  de  lieu  est  noté  d'une  façon  plus  conforme 
à  la  prononciation^  Perroilo,  dans  une  charte  contemporaine 
de  la  précédente  (10).  Petroilum  vient  du  nom  d'homme  péré- 
grin  Petrus ,  connu  par  des  marques  de  potiers  trouvées  à 
Orange  et  à  Die  (11).  La  variante  Petra  est  attestée  par  une 


(1)  c.  1.  L.,  III,  3054. 

(2)  Doniol,  C&rtulaire  de  Brioudej  p.  279. 

(3)  C.  /.  L.,  XII,  5188. 

(4)  Ibid.,  V,  2119. 

(5)  Ibid.,  V,  2428. 

(6)  Ibid.,  v,  21. 
Ç!)  Ibid.,  V,  1818. 

(8)  Port,  Dictionnaire  historique  de  Maine-et-Loire,  t.  III,  p.  184. 

(9)  Bniel,  Recueil,  i.  III,  p.  240.  Chavot,  Le  Mâconnaii,  p.  218. 

(10)  Ibid.,  p.  279. 

(il)  C.  J.  L.,  XII,  5686,  686. 


54ft  LIVRD  IL>  CHAPITRE  XJ  fZ 

inscription  du  musée  de\  Naples  :  M.^  Musidius  Petm'{l). 
Petras  est  surtout  fréquent  dans  les  inscriptions  chrétiennes. 

PiNOLio,  à  Tablatif,  est  une  ancienne  notation  du  nom 
de  PiiMKiilih  (Gironde)  (2).  Ce  nom  de  lieu  est  dérivé  du 
cognomen  PîmoSy  attesté  par  deux  inscriptions  romaines  de 
Campanie;  ce  sont  les  épitaf^bes  de  C.  LoUius  Piaus  (3)  et 
de  Q.  Vilius  Pinus  (4).  PiBiiSJkvaÂt  une  variante  Pina  au 
masculin;  on  a  copié,  à  Brindes»  Tépitaphe  d*Octavius 
Pina  (5).  On  trouve  de  Pina  une  variante  pv  double  n  ; 
L.  LoUius  Pinna,  dans  une  inscription  d*Âfriqu<i  (Q^Piana, 
nom  pérégrin  dans  une  épitaphe  de  Campanie  (7). 

RusGOiALUM,  nom  de  lieu  mentionné  dans  une  charte 
de  l'abbaye  de  Saint-Martin  de  Tours  en  791  (8),  dérive  du 
nom  pérégrin  Ruscus.  Ruscus  nous  est  conservé  par  Tépi- 
taphe  gravée  sur  le  monument  funèbre  que  se  fit  élever  de 
son  vivant  Cotula,  fils  de  Ruscus  (9). 

• 

SpitïOGiLUM  {cujus  vocaiulum  est  Spinogiium),  est'le  nom 
d'Epinay-sur-Orge  (Seine-et-Oise),  plus  anciennement  Epi- 
neil,  dans  un  diplôme  des  empereurs  Louis  le  Pieux  et 
Lothaire  pour  l'abbaye  de  Saint-Germaîn-des-Prés  en 
829  (10).  Dans  le  Polyptyque  de  Saint-Germain  des  Prés  (11), 
ce  nom  de  lieu  a  été  écrit  à  Tablatîf  Ispinogilo ,  co'i^rigé 
ensuite  en  Spinogilo.  Il  dérive  du  nom  d'homme  Spinus 
attesté' par  une  inscription  de  Nîmes  (12). 


(1)  c.  1.  L.,  X,  3387. 

(2)  Qustaye  Desjardins,  C&rtuUdrB  de  Conques,  p.  XG(Vf«' 

(3)  C.  /.  L.,  X,  2663  a. 

(4)  Ibid.,  X,  4911. 

(5)  Ihid,,  IX,  155. 

(6)  Ibid.,  VIII,  6783. 

(7)  Ihid.,  X,  1944. 

(8)  Mabille,  La.  pancarte  noire,  p.  232;  cf.  151. 

(9)  C.  ;.»t.,  III,' 5107. 

(10)  Robert  de  JLaatayri*,',/C?«Hu2aire  de  PnWs,  p^'48. 

(11)  Edit.  Longnon,  p.  66. 

(12)  C.  /.  L.,  XII,  3355. 


NOJf  a  DE  :  LIEU  EBT  -  Oi-  lOE  U  M .  MS 

ToaNOLii,  au  génitif,  est  le  nom  d^un  château- et  d^m 
village  dans  un  document  du  milieu  du  treizième  siècl^e^  (1). 
C'est  aujourd'hui  Tournoel  (Puy-de-Dôme).  Ce  nom  de 
lieu  ^t  dérivé  an  cognomen  Turnus  déjà  étudié^  page  179< 

TuROLLiUM,  nom  du  Toureil,  commune  du  départe- 
ment de  Maine-et-Loire ,  dans  des  documents  du  onzième 
siècle  (2)  dérive  de  Turrus,  cognomen  romain  dont  il  a  été 
question  plus  haut,  page  441. 

Vaboiol  est  le  nom  d'une  paroisse  mentionnée  ao- 
onzième  siècle  dans  le  Cartulaire  de  Cornues  (Aveyron)  (3): 
U  est  dérivé  du  cogriomen  latin  Varus  rendu  célèbre  par 
la  gens  Quintilia  (4). 

Vebmouuh  ou  VemoiHum ,  à  l'ablatif  Vemolio  ou  Yernoi^ 
lio^  est,  à  la  Sn  du  dixième  siècle,  le  nom  de  VemouiUèt, 
commune  de  Poissy  (Seine-et-Oise) ,  dans  deux  diplômes 
royaux  (5).  Une  autre  localité  de  môme  nom  apparaît 
au  même  siècle  dans  deux  chartes,  Tune  de  Tabbaye  de 
Cluny  (6),  l'autre  de  Tabbaye  de  Saint-Vinoent  de  Mâr 
cou  (7);  la  notation  Vemulio  nous  est  offerte  à  la  môme 
époque  par  une  charte  de  Cluny  (8)î  il  s'agit  de  Verneuil^. 
conamune  de  Charnay-lés-Mâcon  (Saône-et-Loire).  Vernoil- 
le-Fourrier  (Maine-et-Loire),  au  douzième  siècle  Vernaliumi. 
nous  offre  une  autre  notation  du  môme  mot  (9).  Une  troi- 
sième notation  nous  est  offerte  par  les  deux  Ve^nei}.,  l'un 
de  Savoie,  l'autre  de  la  Sarthe.  Verneuil  est  un  nom  de 


(1)  Gbassaing,  Spicilegium  Briv&tensê,  p.  56»  57»  59. 

(2)  Port,  Dictionnaire  de  Afaine-et-Loire,  t.  III,  p.  605. 

(3)  EdiUon  G.  Desjardins,  p.  173. 

(4)  Pauly,  Real-Encyclop&edie,  t.  VI,  p.  372-373. 

(5)  R.  de  Lasteyrie,  C&rtulaire  de  Paris,  p.  88,  99. 

(6)  Bruel,  Recueil,  U  I,  p.  604. 

C7)  Ragut,  Cartulaire  de  Saint^Vincent,  p.  153. 

(8)  Brael,  Recueil,  t.  II,  p.  390. 

(9)  Port,  Dictionnaire  de  Maine-et-Loire,  U  III,  p.  693,  694. 


544  LIVRE  IL  CHAPITRE  X.  {  2. 

lieu  très  répandu  en  France  ;  il  y  a  dix-neuf  communes  de 
ce  nom  réparties  entre  quatorze  départements  :  Aisne, 
Allier ,  Charente ,  Cher ,  Eure ,  Indre ,  Indre-et-Loir , 
Marne  ,  Meuse ,  Nièvre ,  Oise ,  Haute- Vienne ,  Seine-et- 
Marne  ,  Seine-et-Oise.  Nous  ne  parlons  pas  des  hameaux. 
Ce  nom  de  lieu  est  un  dérivé  du  cognomen  Vernus  at- 
testé par  les  inscriptions  ;  exemple  :  en  Espagne,  L.  Titius 
Vernus  (1) ,  Veranius  Vernus  (2) ,  M.  Atilius  Vernus  (3) , 
D.  Julius  Vernus  (4);  en  Italie,  Aunatius  Vernus  (5), 
L.  Volceius  Vernus  (6),  L.  Marius  Vernus  (7).  Ce  cognomen 
se  trouve  aussi  en  Gaule.  On  a  trouvé  à  Saint-Michel 
d'Euzet  (Gard)  l'épitaphe  de  P.  Sammius  Vernus  (8).  Il 
pourrait  bien  se  faire  que  les  Vernon  de  TArdèche,  de 

• 

TEure  et  de  la  Vienne  soient  tous  les  trois  d'anciens 
*  Vemo-magus^.  De  Vernus  on  a  tiré  un  gentilice  Vemius 
qui  explique  le  nom  de  lieu  Vemiacus  dans  une  charte  du 
dixième  siècle  (9).  Vernolium  et  de  Vemiaciis  viennent  de 
noms  d'hommes  ;  Vemetum  dérive  d'un  nom  d'arbre. 

Verolias  est,  au  dixième  siècle,  suivant  plusieurs  chartes 
de  Cluny  (10),  le  nom  d'une  localité  située  en  Maçonnais.  Ce 
nom  de  lieu  est  dérivé  du  cognomen  Verus  qui  est  des  plus 
communs;  pour  la  Gaule  on  en  peut  compter  quarante 
exemples  dans  le  tome  XII  du  Corpus  inscripHonum  Lati- 
narum^  onze  dans  le  recueil  de  Brambach. 

De  l'examen  de  ces  noms  de  lieu  on  doit  conclure  que 


(1)  c.  /.  L.,  Il,  1306. 

(2)  Ibid.,  3050. 

(3)  Ibid,,  3695. 

(4)  Ibid.,  4574. 

(5)  /Wd.,  V,  5972. 

(6)  Ibid,,  IX,  2256. 

(7)  Ibid.,  4923. 

(8)  Ibid,,  XII,  2730. 

(9)  Aug.  Bernard,  Cartulaire  de  S&vigny,  t.  I,  p.  185. 

(10)  Bruel,  Recueil,  t.  II,  p.  620,  635,  718. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -0-IOLUM.  545 

la  plupart  des  noms  de  lieux  terminés  par  la  désinence 
•oiolum  ou  par  ses  variantes  dérivent  de  cognomina. 

Nous  placerons  le  dernier ,  malgré  Tordre  alphabétique , 
un  mot  qui  peut  donner  lieu  à  contestation  : 

Altooilum,  à  Tablatif  AltogilOy  est  le  nom  d'Auteuil  (Seine- 
et-Oise),  dans  le  Polyptyque  de  Saint-Germain  des  Prés  (1). 
Pour  Auteuil,  ancienne  commune  du  département  de  la 
Seine,  aujourd'hui  réunie  à  Paris,  on  trouve,  au  dou- 
zième siècle,  la  notation  Altoilum  (2).  Mais  ces  orthographes 
ne  représentaient  ni  Tune  ni  l'autre  au  moyen  âge  la  pro- 
nonciation réelle  de  la  première  syllabe  du  mot  qu'on  pro- 
nonce aujourd'hui  Auteuil.  Cette  première  syllabe ,  dès  le 
douzième  siècle ,  se  prononçait  comme  aujourd'hui  :  cela 
est  prouvé  par  la  notation  Àuteolum  (3).  Dès  l'époque  où  fut 
écrit  le  Polyptyqtie  de  Saint-Germain  des  Prés ,  c'est-à-dire 
dès  la  période  carlovingienne ,  on  prononçait  déjà  a/u  la 
première  syllabe  de  ce  mot;  bien  plus,  on  ne  l'a  jamais 
prononcée  autrement,  et  l'orthographe  al  a  été  inspirée 
par  des  savants  heureux  de  montrer  qu'ils  n'ignoraient 
pas  l'identité  du  français  kaut  et  du  latin  alPus.  Auteuil  est 
la  notation  moderne  d'un  primitif  Aucto-iolum^  Autto-ialum 
dont  le  premier  élément  est  le  cognomen  ou  nom  d'esclave 
latin  Auctus  (4). 

Auctus  veut  dire  acheté  aux  enchères.  C'est  donc ,  éty- 
mologiquement,  un  nom  servile,  et  une  fois  devenus  libres 
par  l'affranchissement,  d'anciens  esclaves  l'ont  conservé  : 
tels  sont,  dans  des  inscriptions  de  Narbonne,  L.  Baebius 
Auctus,  D.  Vleius  Auctus  (5). 

Le  cognomen  Auctus  avait  une  variante  Autus,  lisez 
Auttus  avec  assimilation  du  c  au  ^  suivant.  On  en  trouve 


(1)  Edit.  Loagnoû,  p.  280,  $83,  317. 

(2)  Robert  de  Lasteyrie,  Cartul&ire  de  Paris,  p.  176. 

(3)  Ibid.,  p.  451. 

(4)  De- Vit,  Onom&aticon,  t.  I,  p.  573. 

(5)  C.  /.  L.,  XII,  4358,  4495. 

35 


546  LIVRE  lï.  CHÀPkTRte  t.  t  1. 

la  forme  féminine  :  dans  une  inscription  d'Aqnilèe  (l),  ot 
c'est  un  nom  soit  d'esclave ,  soit  d'étrangère  ;  dans  une 
inscription  d'Ostie,  où  Laberia  Auta  est  une  afiFranchie  (2), 
dans  une  inscriptiott  de  Baies  (3),  qui  est  l'é^itaphe  Juliâ 
Auta,  originaire  de  Nuceria,  aujourd'hui  Nocera  en  Italie. 
Autus  est  employé  comme  gentilifee  d^atos  uM  inscription 
de  Vérone  qui  est  l'épitaphe  de  C.  Autus  Narcîssns  (4). 

Autus,  Auta  a  donné  plusieurs  dérivés,  tels  sont  '.  Auto, 
-^niSy  nom  du  père  de  Tertius  Bresius ,  dans  une  inscrip- 
tion de  Bodincomagxbs^  aujourd'hui  Monteu  da  Po,  en  Italie, 
sur  les  bords  du  Pô  (5)  ;  et  son  dérivé  Autonius  qui  est  un 
gentilice  dans  une  inscription  de  l'Italie  méridionale  (6);  Au- 
teîus,  employé  comme  gentilice  dans  une  inscription  du  La- 
tium  (7);  Autestius,  gentilice  dans  une  inscription  de  Ni- 
mes  (8),  enfin  *Autessius  qui  doit  avoir  été  un  gentilice 
romain  et  qui  explique  à  la  fois  la  première  partie  du  nom 
à! AutessiO'4'wrum  ^  Auxerre,  et  le  nom  dérivé  locus  Autessia- 
nus ,  dans  une  charte  de  Tannée  948 ,  conservée  aux  archi- 
ves de  la  cathédrale  d'Asti  (9).  La  notation  Olsiodra  par  i  =  m 
du  nom  d'Auxerre  dans  le  livre  d'Armagh ,  au  neuviènie 
siècle,  explique  l'orthographe  AltogiluifH  par  /  =  u,  du  nom 
d'Auteuil  ,  dans  le  Polyptyque  de  Saint-Germain  des  Prés. 
Toutefois  le  maintien  du  t  dans  Auteuil  prouve  que  le  t 
de  ce  mot  était  primitivement  double  :  la  forme  primitive 
esiAuttoiolum=Auctoiolumy  tandis  que  dBXis  Auiessûhdummj 
Auxerre,  le  t  étant  simple  est  tombé. 


(1)  c.  /.  L.,  V,  1637. 

(2)  Ibid,,  XIV,  1215. 

(3)  Ibid.,  X,  1981. 

(4)  Ibid.,  V,  3500. 

(5)  Ibid.,  V,  7480. 

(6)  Ibid.,  IX,  2998. 
(7)J6W.,  XIV,  2311. 

(8)  Ibid.,  XII,  3462. 

(9)  Historiae  patriae  monumenUj  chtLrUrum  tomus  primuB,  col.  162  et. 


CHAPITRE  XI. 


m?   SUFFIXE    -MOUS. 


SoMMAniB  : 

i  1.  Le  suffixe  gaulois  -isco-8,  —  {  ?.  Noms  de  lieux  dérivés  de  gentilices 
romaiBs  à  l'aide  du  suffixe  gaulois  -isco-s  dans  les  textes  du  temps  dto 
l'empire  romain.  —  {  3«  Noms  de  lieu  en  -iscus  d'origine  romaine  dans  las 
docnments  du  moyen  âge.  —  §  4.  Noms  de  lieu  en  -iscus  d'origine  ger- 
manique. 

S  1*'.  -^  Le  suffixe  gaulois  -iscO'^s. 

Les  Gaulois  ont  eu  un  suffixe  -iscos.  C'est  ayec  ce  suffixe 
que  parait  avoir  été  formé  le  nom  du  peuple  gaulois  des 
Scordisci;cG  nom  semble  dérivé  de  celui  de  la  montagne  appe^ 
lée  Scardus  par  Tite  Live  (1),  dans  le  récit  des  événements 
des  années  169  et  168  av.  J.-C;  c'est  probablemetnt  à-tor^ 
que,  dans  les  éditions  des  auteurs  grecs,  ce  nom  est  écrit 
awpêoç,  par  exemple  chez  ^  Polybe  (2) ,  chez  Strabon  (3)  et 
chez  Ptolémée  (4)  ;  le  Scorchia  est  aujourd'hui  le  Schardag 
en  Albanie.  On  attribue  une  orjigine  aaa^oguâ  au  nom  des 
Taurisci,  peuple  des  régions  sud-ouest  de  l'empire  d'Au- 
triche ;  ce  nom  serait  dérivé  de  celui  des  ynontagnes  dites 
Tauern  eu  Tkol,  en  Garj&thie  et  en  Stirie. 


(1)  Livre  XLIII,  c.  20,  et  livre  XLIV,  c.  31. 

(2)  Livre  XXVIII,  c.  8,  {  3;  ^^^  Didot,  t.  II,  p.  31. 
(â)  Lvrre  VU,  fragm.  10;  édit.  Didot,  p.  275,  1.  12,  13. 
(4)  Uvre  II,  c.  16,  {  1  ;  édit.  Didot,  p.  303,  1.  8. 


548  LIVRE  II.  CHAPITRE  XI.  {  2. 

Du  suffixe  'iscO'S  il  y  a  un  dérivé  secondaire  en  -on-  :  -isco, 
"isconis  dans  les  textes  latins  et  dont  un  exemple  parait  clair  : 
c'est  l'ancien  nom  de  Tabbaye  de  Saint-Claude  (Jura),  Corir 
datiscOf  dérivé  de  condate  «  confluent  ;  »  on  trouve  Condatisoo 
chez  Grégoire  de  Tours  (1). 

§  2.  —  Noms  de  lieux  dérivés  de  gentilices  romains  à  Vaide 
du  suffixe  gaulois  -isco-s  dans  les  textes  du  temps  de  Vem- 
pire  romain. 

Des  exemples,  Scordiscus,  Tauriscus  et  Condatisoo  y  on 
conclura  que  les  suffixes  -isco-s,  et  -isco^  isconis  ont  servi 
chez  les  Gaulois  à  former  des  termes  géographiques  dérivés 
de  noms  de  lieux.  Sous  l'empire  romain  ces  suffixes  ont 
été  employés  pour  créer  des  noms  de  lieux  dérivés  de 
noms  de  personne.  Nous  citerons  Petenisca^  Yibiscus, 
Latisco  et  Lavisco. 

Petenisca  est,  dans  la  TcAle  de  Peutinger,  une  station  ro- 
maine de  Suisse,  entre  Avenches  et  Soleure  (2).  Petenisca, 
probablement  pour  Petinisca^  est  un  dérivé  du  gentilice 
Petinius,  qu'on  trouve  en  Italie  dans  deux  inscriptions,  Tune 
de  Venosa  (3),  l'autre  de  Ligurie  (4).  Petinius  paraît  ne 
différer  que  par  une  variante  orthographique  de  Petîlius 
plus  fréquent. 

ViBiscus  (5),  aujourd'hui  Vevey,  canton  de  Vaud,  en 
Suisse ,  sur  les  bords  du  lac  de  Genève ,  est  un  dérivé  du 
gentilice  Vibius,  porté  à  Rome  par  plusieurs  consuls,  le 


(1)  Liber  vitae  patrum^  c.  2;  édit.  Krusch,  p.  664, 1.  33. 

(2)  Segment,  III,  3.  Cf.  E.  Desjardins,  Géographie  de  la  Gaule  d'après  U 
Table  de  Peutinger,  p.  237. 

(3)  C.  /.  L.,  IX,  422. 

(4)  Ibid,,  V,  7739. 

(5)  Itinéraire  d'Antonin  ^  p.  352,  1.  1.  Dans  la  Table  de  Peutinger,  seg- 
ment III,  3,  Vivisco  à  i'ablatif.  Desjardins,  Géographie  de  la  Gaule  d'apru 
(a  Table  de  Peulinger,  p.  240. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -ISCUS.  549 

premier  en  Tan  43  avant  notre  ère.  Ce  gentilice  fut  très 
fréquent  en  Gaule  sous  Tempire  romain.  Les  inscriptions 
de  la  Qaule  Narbonnaise,  réunies  par  M.  Hirschfeld,  men- 
tionnent quarante-deux  Vibius  (1).  Il  y  avait  de  ce  nom 
une  variante  Vivius  :  quatre  exemples  nous  en  sont  fournis 
par  des  marques  de  potiers  trouvées  à  Annecy  (Haute-Savoie), 
à  Vienne  (Isère)  et  à  Sisteron  (Basses-Alpes)  (2). 

Lâtisco,  "Onis,  où  saint  Loup,  évoque  de  Troyes,  trouva 
un  asile  vers  le  milieu  du  cinquième  siècle ,  suivant  un 
biographe  contemporain  (3) ,  est  aujourd'hui  le  Mont-Las- 
sois,  Mons  Latisc[dn]ensis,  près  de  Châtillon-sur-Seine  (Côte- 
d*Or).  Ce  nom  de  lieu  semble  être  un  dérivé  du  gentilice 
Latius ,  au  féminin  Latia  dans  une  inscription  de  l'Italie 
méridionale  (4),  au  masculin  Lattius  avec  deux  t  dans  une 
inscription  de  Vienne  (Isère)  (5).  On  peut  supposer  que  c'est 
un  dérivé  d*un  thème  gaulois  lati-,  peut-être  identique  au 
vieil  irlandais  laith  «  vaillant  héros ,  »  qui  se  trouve  aussi 
dans  les  noms  d'homme  composés  Es-cengo-lati-s ,  nom 
d'homme  pérégrin  dans  une  inscription  d'Aubagne  (Bou- 
ches-du-Rhône)  ;  Sego-lati-us ,  gentilice  conservé  par  une 
inscription  de  Narbonne  (6);  peut-être  dans  Are-late^  Arles. 

Lavisco,  'One  est  dans  la  table  de  Peutinger  une  station 
romaine  entre  Aoste  (Isère)  et  Chambéry  (7). Ce  nom  de  lieu 
parait  dérivé  du  nom  d'homme  Lavius  employé  comme  gen- 
tilice dans  une  épitaphe  de  Dacie  (8)  et  dans  la  marque 


(1)  C.  7.  L.,  Xn,  Index,  Cf.  Pauly.  Real-Encyclop.,  V,  2565-2575. 

(2)  îbid.,  XII,  5683,  314;  5686,  943,  944,  945.  Vivisci,  surnom  qui  distin- 
guait des  Bituriges  Cnbi,  à  Bourges,  les  Bituriges  de  Bordeaux,  doit  être 
un  mot  différent  de  Vibiscus ,  Vevey.  Viviscus  dérive  probablement  d'un 
thème  vivo-,  en  gallois  gwiw,  en  irlandais  /iu,  «  apte,  propre  à,  digne.  » 

(3)  Dom  Bouquet,  I,  645  a. 

(4)  C.  I.  L.,  X,  51. 

(5)  Ibid.,  XII,  1974. 

(6)  Ibid.,  XII,  602.  5127. 

(7)  Table  de  Peutinger,  segment  III,  t.  E.  Desjardins,  Géographie  de  la 
Gaule  d'après  la  Table  de  Peutinger,  p.  389. 

(8)  C.  I.  L.,  III,  1269. 


550  LIVRE  IL  CHAPITRE  XI.  |  3. 

d'une  patère  trouvée  à  Aquilée  (1)  ;  dans  ce  dernier  docu- 
ment il  s'agit  d'un  individu  appelé  C.  Lavius  Summacus, 
qui  était  probablement  gaulois. 

Nous  ne  dirons  rien  de  Matisco^  M&con,  où  Ton  reconoait 
le  même  suffixe ,  mais  qui  est  antérieur  à  la  conquête 
romaine  (2)  et  qui  dérive  d'un  mot  dont  la  valeur  reste 
obscure. 

Cette  courte  nomenclature  empruntée  aux  textes  contem- 
porains de  Tempire  romain,  peut  être  facilement  augmen- 
tée en  recourant  aux  documents  du  moyen  âge.  Toutefois, 
parmi  les  noms  de  lieux  terminés  en  -iscus,  ou  en  escus 
avec  une  variante  orthographique  sans  importance,  dans 
les  chartes  du  moyen  âge,  il  y  a  deux  catégories  à  distin- 
guer. Les  uns  dérivent  de  noms  d'hommes  usités  sous 
Tempire  romain,  les  autres  de  noms  d'hommes  germani- 
ques introduits  par  la  conquête  barbare.  Les  noms  de  lieu 
en  'iscus  dérivés  de  noms  germaniques  d'hommes  peuvent 
être  germaniques  tout  entiers,  et  le  suffixe  iscus  qui  a 
servi  à  les  former  peut  être  d'origine  germanique  lui-même: 
nous  distinguerons  donc  ces  noms  de  lieux  (§  4)  de  ceux 
qui  sont  tirés  de  noms  d'hommes  usités  antérieurement  à 
la  conquête  germanique  (§  3)  ;  dans  ceux-ci  le  suffixe  -wctw 
paraît  être ,  comme  dans  les  mots  étudiés  au  présent  para- 
graphe, le  suffixe  gaulois  que  nous  avons  constaté  au  para- 
graphe premier,  p.  547,  dans  des  noms  de  lieux  formés 
avant  la  chute  de  l'empire  romain. 

S  3.  —  Noms  de  lieux  en  -iscus  (Torigine  romaine  dans  Us 

documents  du  moyen  âge. 

ÂMELESCA.  C'est  une  localité  qualifiée  d'appendaria  dans 


(1)  c.  I.  L.,  Supplemenia  italica,  V,  1082,  232. 

(2)  Caosar,  De  bello  gallico,  1.  VII,  c.  90,  g  7. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -I8CU8.  551 

une  charte  du  milieu  du  onzième  siècle  (i).  Elle  parait 
avoir  été  située  près  de  Salles-Courbatiès  (Aveyron).  Ame^ 
lesca^  pour  Amelisca ,  est  un  dérivé  d'Âmelius ,  variante  du 
gentilice  Âemilius  comme  on  a  vu  plus  haut,  p.  347,  348. 

Bârbaresga  est  le  nom  d'une  villa  située  en  Maçonnais, 
comme  nous  l'apprend  une  charte  de  Tannée  963 ,  publiée 
par  M.  Bruel  (2).  Il  faut  en  rapprocher  le  Barbariscum  [cas^ 
trum]  d'un  compromis  entre  les  villes  d'Alba  et  d'Asti  en 
1223  (3).  Barbarescay  pour  Barbarisca^  est  dérivé  soit  du  gen- 
tilice Barbarius  étudié  plus  haut.  p.  402,  soit  du  cognomen 
Barbarus  qu'on  a  lu  dans  des  inscriptions  romaines  de 
Narbonne  (4),  d'Aubagne  (5)  et  de  Fréjus  (6). 

Calisgus  est  une  localité  placée  en  Lyonnais  par  un  di- 
plôme de  l'empereur  Charles  le  Gros  en  885  (7) ,  et  par  un 
diplôme  du  roi  Louis  l'Aveugle  en  892  (8).  La  môme  loca- 
lité est  appelée  Calliscus  dans  trois  chartes  du  cartulaire 
d'Ainay,  vers  l'an  1000  (9),  en  1003  (10)  et  en  1007  (11),  et 
Calescus  [in  villa  de  Calesco)  vers  l'an  1000  (12).  Ce  nom  de 
lieu  peut  dériver  ou  du  gentilice  Callius  étudié  p.  204,  ou 
du  cognomen  Calus  qui  parait  d'origine  grecque.  En  grec, 
c'est  un  adjectif  qui  veut  dire  beau;  or  cet  adjectif  a  été 
employé  comme  nom  d'homme  latin,  Calus  (13),  et  surtout 
comme  nom  de  femme  ;  exemple ,  les  affranchies  Remania 


(1)  G.  Desjardins,  Cartul&ire  de  Conques  (Aveyron),  p.  32. 

(2)  hecueil  des  chartes  de  l'abbaye  de  Cluny^  t.  II,  p.  250. 

(3)  Historiae  palriae  monumenta,  chartarum  t.  I,  col,  1273. 

(4)  C.  /.  L.,  XII,  4661. 

(5)  Ibid.,  XII,  604. 

(6)  /6id.,  XII,  268. 

(7)  Cartuîaire  de  Saint-Hugues  de  Grenoble^  p.  11. 

(8)  Ibid,,  p.  73. 

(9)  Aug.  Bernard,  Cartuîaire  de  Savigny,  t.  II,  p.  p.  595. 

(10)  Ibid.,  p.  574. 

(11)  Ibid.,  p.  579. 

(12)  Aug.  Bernard,  Cartuîaire  de  Savigny,  t  I ,  p.  223. 

(13)  De- Vit,  Onomasticon,  t.  II,  p.  76. 


552  LIVRE  II.  CHAPITRE  XI.  J  3, 

Cale  dans  une  inscription  de  Die  (1),  Appia  Cale  dans  une 
inscription  de  Novare  (2);  nous  citerons  encore  Âudasia 
Cale  dans  une  inscription  des  environs  de  Milan  (3)  ;  celle-ci 
était  ingenua  comme  Âlbonia  Cala  dans  une  inscription  de 
Chieri  (4). 

Galiscus  ,  nom  de  lieu  mentionné  en  739  dans  le  testa- 
ment d'Abbon  qui  le  met  dans  le  pays  de  Gap  (Hautes- 
Alpes)  (5),  peut  dériver  soit  du  gentilice  Gallius,  soit  du 
oognomen  Gallus.  Le  premier  a  été  étudié  p.  238-239.  Le  se- 
cond est  un  œgnomen  fréquent  à  Rome  au  premier  siècle 
avant  notre  ère  et  dans  les  siècles  suivants.  Ainsi  C.  Asi- 
nius  Gallus  fut  consul  Tan  8  avant  J.-C.  Plusieurs  Gallus 
apparaissent  dans  les  écrits  de  Cicéron,  de  Catulle,  d'Ovide 
et  de  Properce ,  et  les  inscriptions  de  la  Gaule  nous 
offrent  des  exemples  de  ce  cognomen  :  à  Vienne  (Isère), 
Tépitaphe  d'A.  Vinnius  Gallus  (6);  à  Grenoble  celle  de 
Sextilius  Gallus  (7). 

LoDiscus  est  le  nom  d'une  villa  située  dans  la  paroisse 
de  Mornant  (Rhône).  Elle  est  mentionnée  par  le  Cartulaire 
de  Savigny^  dans  trois  chartes  du  dixième  siècle  (8)  et  dans 
trois  chartes  des  environs  de  Tan  1000  (9).  Ce  nom  de  lieu 
peut  dériver  du  gentilice  Lodius,  attesté  par  plusieurs  épi- 
taphes  qu'on  a  recueillies  à  Rome  (10).  On  pourrait  aussi 
l'expliquer  par  un  œgnomen  Lautus,  attesté  par  deux  ins- 
criptions d'Italie  (il).  Ce  cognomen  a  une  variante,  Lotus, 


(1)  c.  I.  L.,  XII,  1662. 

(2)  /&<d.,  V,  5616. 

(3)  Ibid.,  V,  5749. 

(4)  Ibid.,  V,  7499.  Cf.  ci-dessus,  p.  537. 

(5)  C&rtul&ire  de  Saint-Hugues  de  Grenoble,  p.  39. 

(6)  C.  /.  L.,  XII,  2032. 

(7)  Ibid.,  XII,  2247. 

(8)  Ed.  Aug.  Bernard,  p.  31,  202,  205. 

(9)  Ibid.,  p.  210,212,277. 

(10)  C.  /.  L.,  VI,  21165-21171. 

(11)  Ibid.,  V,  1028;  X,  2930. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -I8CU8.  553 

qu'on  rencontre  dans  deux  inscriptions  d'Italie  (1).  Le  nom 
du  potier  Lottus,  lu  sur  une  amphore,  à  Vienne  (Isère), 
peut  être  une  variante  de  Lotus  ou  un  mot  différent  (2). 

Marinesgae.  Une  charte  du  douzième  siècle,  conservée 
par  le  Cartulaire  de  Conques  (3),  parle  d'un  locus  de  Ma- 
riiiescas  ;  c'est  aujourd'hui  Marinesques,  commune  de  Naus- 
sac  (Aveyron).  Moânnescae  pour  *  Mariniscae  peut  venir  du 
gentilice  Marinius,  étudié  plus  haut,  p.  277,  ou  du  cogno- 
mm  Marinus,  qui  a  donné  naissance  à  ce  gentilice. 

Martinesque  ,  commune  de  Mouret  (Aveyron) ,  est  une 
ancienne  villa  *MarHmsca.  Il  y  a  un  lapsus  oalami  dans  le 
passage  où  le  Cartulaire  de  Conques  (4)  l'appelle  Mariinex, 
Martinisca  peut  dériver  de  Martinius,  dont  on  s'est  occupé 
ci-dessus,  p.  279,  ou  du  cognomen  bien  connu,  Martinus, 
d'où  vient  ce  gentilice  (5). 

Matriscus,  mentionné  en  884  dans  un  diplôme  du  roi 
Karloman  (6),  est  un  nom  de  lieu  dérivé  du  gentilice  itfo- 
trius,  déjà  étudié  p.  280. 

Maurisca  est  une  colonica  qui  appartenait  à  l'abbaye 
Saint- Victor  de  Marseille,  au  commencement  du  neuvième 
siècle  (7).  Une  charte  de  1038,  concernant  la  môme  abbaye, 
parle  (lu  gué  Maurisque,  deguado  Maurisco  (8).  En  879,  une 
charte  du  Cartulaire  de  Brioude  (9)  mentionne  une  vinea  Mau- 
risca ^  située  en  Auvergne,  in  vicaria  Ambronensi,  c'est-à- 


(1)  C.  /.  L.,  X,  1050,  6185. 

(2)  Ibid.,  XII,  5683,  81. 

(3)  Q.  Desjardins,  p.  395. 

(4)  Page  327. 

(5)  Snrle  cognomen  Martinus,  voyez  De- Vit,  Onomasticon^  t.  IV,  p.  380, 
381. 

(6)  Qnantin,  Cartulaire  de  l'Yonne,  p.  111. 

(7)  Quérard,  Cartulaire  de  Saint-Victor  de  Marseille,  t.  II,  p.  635. 

(8)  Ibid.,  t.  II,  p.  597. 

(9)  Ed.  Doniol,  p.  276. 


&54  LIVRE  II.  CHAPITRE  XI.  t  4. 

dire  près  de  Saint-Germain-Lembron  (Puy-de-Dôme).  Le 
nom  de  lieu  Mauriscus  dérive  soit  du  gentilice  Maurius,  sur 
lequel  on  peut  voir  ce  qui  a  été  dit  plus  haut,  p.  281-282, 
soit  du  cognomen  Maurus ,  dont  Maurius  dérive  et  dont  il 
a  été  question  déjà,  p.  486. 

Ramigescus  est  le  nom  d'une  localité  du  Cantal  où  il  y 
avait  une  église,  au  XV  siècle  (1),  de  Ramigesco.  La  variante 
in  Ramegesco  se  trouve  dans  un  texte  de  même  date  (3).  Il 
s*agit  d'une  variante  du  gentilice  ou  cognomen  romain  Re- 
migius,  ou  mieux  Remedius,  qu'a  rendu  célèbre  un  arche- 
vêque de  Reims,  459-533. 

On  peut  probablement  placer  dans  cette  nomenclature 
Romanôche  (Saône-et-Loire) ,  qui  serait  un  ancien  Roma- 
NisGA  ou  RoMANisGAE  :  cslla  sancH  Pétri  de  RomaniscaSj 
comme  dit  une  charte  de  Tan  1120  (3),  et  il  faudrait  cor- 
riger en  Romanisca  le  Romanasca  du  Cartulaire  de  Saint- 
Vincent  de  Mdcon  (4).  Dans  le  cas  où  l'orthographe  Roma- 
nasca devrait  être  préférée,  nous  aurions  là  un  témoin  de 
la  persistance  du  suffixe  ligure  -ascus^  dans  une  région 
bien  septentrionale.  Romanascus  serait  dérivé  du  cognomen 
Romanus,  fréquent  dans  les  inscriptions  romaines  et  dont 
on  a  cité,  p.  487,  quelques  exemples  empruntés  à  des 
inscriptions  de  la  Gaule  ;  Romaniscus  viendrait  ou  de  c^ 
cognomen,  ou  du  gentilice  Romanius,  qui  a  été  étu4ié  plus 
haut,  p.  303-304. 

S  4.  —  Noms  de  lieu  en  -iscus,  d'origine  germanique. 

Attaniscus  est  le  nom  d'une  localité  que  met  dans  le 
pays  de  Cavaillon,  in  pago  Cavellico,  le  testament  d'Abbon, 


(1)  Q.  Desjardins,  Cartulaire  de  Conques^  p.  45*,  cf.  p.  zci. 

(2)  Ibid.,  p.  274. 

(3)  Chavot,  Le  Maçonnais,  p.  237. 

(4)  Edition  Ragut,  p.  114. 


NOMS  DE  LIEU  BN  -I80U8.  555 

en  739  (1).  Oe  nom  de  lieu  est  dérivé  d*un  thème ,  Attan-, 
qui  est  ou  la  forme  féminine  du  nom  d'homme  franc  bien 
connu,  Âtto,  Âttonis,  ou  la  forme  masculine  du  même  nom 
d'homme  en  gothique.  Âtto,  Atta  appartient  à  la  classe 
nombreuse  des  noms  hypocoristiques  de  personnes.  On 
sait  que  les  noms  germaniques  de  personnes  sont  ordinai- 
rement composés  de  deux  termes  ;  la  langue  familière  sup- 
prime le  second  terme  et  le  remplace  par  un  suffixe  qui 
appartient  à  la  déclinaison  faible. 

AuLBRANDiscus.  Uu  Heu  appelé  appendaria  Aulbrandisca 
est  mis  en  Auvergne,  dans  la  viguerie  de  Brioude  (Haute- 
Loire),  par  une  charte  de  Tannée  912  (2).  Comparez  le  nom 
d'homme  germanique  Alt-brandus  (3).  Le  premier  terme 
de  ce  nom  d'homme,  ait,  veut  dire  «  vieux  ;  »  le  second 
terme,  brand,  «  tison  allumé,  »  en  français,  brandon. 

Un  clos  AuTBERTEScus  apparaît  dans  une  charte  du 
Rouergue  aux  environs  de  l'an  1000  (4).  Comparez  le  nom 
germanique  d'homme,  Autbertus  (5).  Le  premier  terme  aut, 
plus  anciennement  auda,  veut  dire  «  richesse,  bien;  »  le 
second  terme  berht,  «  brillant.  » 

Belteirescus.  Un  certain  Rigualdus  del  Beltsiresco  inter- 
vient dans  une  charte,  enRouergue,  au  milieu  du  X*  siècle  (6). 
Ce  nom  de  lieu  est  dérivé  d'un  nom  d'homme  germanique, 
dont  la  plus  ancienne  forme  a  dû  être  ^  Balda-harias  et  qui 
est  écrit  Balterius  dans  la  légende  d'une  monnaie  méro- 
vingienne (7),  et  Baldierus,  dans  le  Polyptyque  de  Saint- 


(1)  CsLVtuMre  de  Saint-Hugues  de  Grenoblût  p.  42. 

(2)  Doniol,  Cariulaire  de  Brioude^  p.  192. 

(3)  Longnon,  Polyptyque  de  Vabbaye  de  Saint-Germain  des  Préa^  p.  183; 
cf.  Fôrstemann,  Personennamen,  2*  édition,  col.  47. 

(4)  G.  Deajardins,  Cartulaire  de  Conques,  p.  88. 

(5)  Polyptyque  de  Saint-Germain  des  Prés^  p.  3;  cf.  Fôrstemann»  p.  166. 

(6)  G.  Dosjardins,  Cartulaire  de  Conques,  p.  389. 

(7)  A.  de  Barthélémy,  Bibliothèque  de  l'Ecole  des  chartes^  i,  XLII,  p.  290, 


556  LIVRE  IL  CHAPITRE  XI.  {  4. 

Remy  de  Reims  (1).  Le  premier  terme  de  *  Balda-harias  veut 
dire  «  brave,  »  le  second  «  armée.  » 

BORNONESGA,  aujourd'hui  Bounihounesque,  commune  de 
Nauviale  (Aveyron),  est  mentionné  vers  le  milieu  du 
dixième  siècle  dans  une  charte  de  Tabbaye  de  Conques  (2). 
Ce  nom  de  lieu  est  dérivé  du  nom  germanique  hypocoris- 
tique  Borno ,  dont  des  exemples  ont  été  relevés  par 
M.  Fôrstemann  (3). 

DoMARiESGus,  uom  d'uue  localité  où,  vers  la  fin  du 
onzième  siècle,  Tabbaye  de  Conques  avait  des  biens  (4), 
est  un  dérivé  du  nom  d'homme  germanique  Dom-[h]arius , 
dont  M.  Fôrstemann  signale  deux  exemples  dans  les  actes 
de  deux  conciles  de  Tolède,  au  septième  siècle.  Le  nom  de 
monétaire  mérovingien,  écrit  Domaro  sur  une  monnaie  de 
Blois  (5),  doit  probablement  être  corrigé  en  Dom-[h]ario. 
Des  deux  termes  de  Dom-harius,  le  premier  parait  signifier 
c(  jugement,  »  le  second  veut  dire  «  armée.  » 

Eldegrimiscus  est,  en  963,  dans  le  Cartulaire  de Brioude'^]^ 
le  nom  d'un  clos  situé  en  Auvergne,  au  comté  de  Tallende 
(Puy-de-Dôme).  La  bonne  orthographe  de  ce  nom  de  lieu 
serait  Hildi-grimmiscus ,  dérivé  de  *Hildi-grimmas,  nom 
d'homme  germanique  noté  Hilde-grimmus  dans  le  Polyp- 
tyque de  Saint-Remy  de  Reims  (7).  Le  premier  terme  de  ce 
mot  veut  dire  «  bataille,  »  et  le  second  «  cruel.  » 

Frotgaresc,  nom  de  lieu  mentionné  au  onzième  siè- 
cle dans  le  Cartulaire  de  Conques  (8),  est  dérivé  du  nom 


(i)  Publié  par  Guérard,  p.  43. 

(2)  Desjardins,  CartuZaire  de  Conques,  p.  328. 

(3)  Personenna.men,  2*  édition,  col.  276. 

(4)  Desjardins,  CartuZaire  de  Conques,  p.  81. 

(5)  A.  do  Barthélémy,  Bibliothèque  de  l'Ecole  des  chartes^  t.  XLII,  p.  293. 

(6)  Ed.  Doniol.  p.  124. 

(7)  Ed.  Quérard,  p.  51,  55;  cf.  Fôrstemann,  col.  675. 

(8)  Ed.  Desjardins,  p.  307. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -I8CU8.  557 

d'homme  germanique  Frot-garius  (1).  Ce  nom  aurait  été, 
à  l'époque  mérovingienne ,  *  Frodo-garius.  La  variante 
Frude-garius  se  trouve  dans  le  Polyptyque  de  Saint-Ger- 
main  des  Prés  (2).  Le  premier  terme  de  ce  composé  est  une 
variante  franque  du  thème  germanique  hrotha-,  <c  gloire,  » 
dont  la  gutturale  initiale  oh  peut,  dans  le  dialecte  mérovin- 
gien, être  remplacée  par  f.  Le  second  terme,  noté  ^garius 
dans  les  textes  latins,  veut  dire  «  désireux,  avide  de.  » 
Ainsi,  le  sens  du  composé  est  «  avide  de  gloire.  » 

GoDiNBSGA  est  un  nom  de  lieu,  dans  une  charte  des 
environs  de  Rodez  (Aveyron),  seconde  moitié  du  onzième 
siècle  (3).  Ce  mot  est  dérivé  du  nom  d'homme  d'origine 
germanique  écrit  Godinus  dans  les  textes  latins  du  moyen 
âge,  par  exemple  dans  le  Polyptyque  de  Saint- Germain  des 
Prés  (4). 

Odalrigesgus  ,  dans  une  charte  des  environs  de  l'an 
1000  (5),  est  le  nom  d'un  manse,  c'est-à-dire  d'une  petite 
ferme  située  dans  le  département  de  TAveyron  et  où,  dit 
le  rédacteur  de  la  charte,  habita  Odalrigus. 

Odal-rigus,  mieux  Odal-ricus,  est  un  nom  très  fréquent 
dans  le  Cartulaire  de  Conques^  où  on  l'écrit  ordinairement 
Odol-ricus  (6).  Il  est,  au  moyen  âge,  excessivement  com- 
mun (7).  Le  premier  terme  en  vieil  allemand,  uodal,  si- 
gnifie «  domaine  héréditaire  et  inaliénable  d'une  famille  ;  » 
le  second  terme,  «  roi,  maître.  »  Ce  composé  existe  encore 
en  allemand  ;  il  a  perdu  une  syllabe,  c'est  Ulrich. 

Rainalbesgus  est  le  nom  d'un  alleu  dans  une  charte  des 


(1)  Longnon,  Polyptyque  de  Satnt-Germatn  des  Prés^  p.  4  et  133. 

(2)  Edit.  Lon^non,  p.  133. 

(3)  G.  Desjardins,  Cartulaire  de  Conques,  p.  41. 

(4)  Edit.  Longnon,  p.  3,  4. 

(5)  O.  Dosjardins,  Cartulaire  de  Conques,  p.  146. 

(6)  Voyez  Vindex,  p.  486. 

f7)  Purstomann,  Personennameriy  2*  édition,  col.  980-981. 


568  LfVBB  IL  OttAPItltS  10.  tk. 

environs  de  l'an  1000  pour  Tabbaye  de  Oonques  (A^«g«iHi)(l}. 
Rainaldêscue  dériTé  d'un  nom  d'homme  germanique  66rft 
Rainoldus  dans  le  Polyptyque  dé  SaitU-Germain  de^  Prés  (2). 
Une  fonne  plus  complète,  Ragenoldus,  se  trouve  dans  le 
môm^  PolyptyqiM  (3).  Au  fiixiéme  siècle,  Grégoire  de  Tours 
écrivait  Ragnovaldus  (4).  La  notation  oom^éte  «uriit  été 
BiB^imi-^alâus  ;  le  premier  terme  veut  dire  a  conseil,  »  et  le 
second  «  puissant.  »  Le  sens  du  tout  parait  être  «  poissant 
par  le  conseil.  » 

TEUDOAnnBSGus  est  le  nom  d'un  manse  au  onzième  siè- 
cle, dans  le  Cartulaire  de  Conques  (5).  La  variante  Teutgai- 
rêscm  est  donnée  par  une  charte  de  la  même  époque  (6). 
Le  nom  d'homme  dont  ce  nom  de  lieu  dérive  est  écrit 
Teut*garius  dans  le  Polyptyque  de  Saint-Germain  des  Prés  (7). 
Le  premier  terme  de  ce  composé  est  le  germanique  thmii^f 
«  peuple  ;  »  le  second  est  un  adjectif  germanique  qui  veut 
dire  «  désireux,  avide  de.  » 

Unaldescus,  nom  d'un  manse,  apparaît  au  onzième  siècle, 
dans  le  Cartulaire  de  Conques  (8).  Le  nom  d'homme  dont  ce 
nom  de  lieu  dérive  est  écrit,  dans  les  textes  du  moyen  4ge, 
ordinairement  tantôt  Unoldus,  tantôt  Unaldus.  Le  person- 
nage le  plus  célèbre  qui  Tait  porté  est  un  duc  d'Âquitdine, 
mort  en  774,  et  ainsi  nommé  dans  les  chroniques  carolin- 
giennes. Mais  ce  nom  a  été  aussi  donné  à  des  gens  moins 
illustres  ;  ainsi,  le  Polyptyque  de  Saint-Germain  des  Prés  (9) 
parle  d'un  colon  dont  un  en&nt  s'appelait  Unoldus.  Le  Po- 


(1)  Qt»  Besjardmft,  CftWuIaïn?  de  Congixeft,  p.  314. 

(2)  EdiU  Longnon,  p.  180. 

(3)  Page  8. 

(4)  HisioHa  Francor\Am ,  livre  Vï,  c.  lî  ;  livre  VII ,  c,  10.  Voir  le  texte  et 
les  yariantes  de  Tédition  Arndt,  p.  257, 1.  4;  296, 1.  20. 

(5)  Ed.  Desjardins,  p.  144. 

(6)  Page  145. 

(7)  Edit.  Longnon,  p.  223. 

(8)  Pages  145  et  206. 

(9)  Edit.  Longnon,  p.  167. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -I8CU8.  559 

lyptyque  de  Saint-Remy  de  Reims  nous  a  conservé ,  pour  ce 
nom  d'homme,  une  orthographe  plus  archaïque,  Unval- 
dus  (1).  L'orthographe  mérovingienne  complète  de  ce  mot 
aurait  été  *Chuno-valdus.  Le  troisième  continuateur  de  Fré- 
dégaire  appelle  Chunoaldus  le  duc  d'Aquitaine,  dont  nous 
avons  parlé  plus  haut  (2).  Le  premier  terme  de  ce  nom 
d'homme  veut  dire  à  la  fois  «  Hua ,  »  nom  de  peuple ,  et 
«  géant  ;  »  le  second  terme  est  le  thème  féminin  germar 
nique  valda,  «  puissance,  »  en'sorte  que  le  composé  signifie 
«  celui  qui  a  la  puissance  des  géants  »  oti  «  des  Hùns.  » 
On  dit,  en  français,  (c  fbrt  comthe  un  Turc.  » 

Dans  tous  ces  dérivés  en  -wciai  de  noms  propres  d'hom- 
mes d'origine  germanique,  nous  devons  probablement  re- 
connaître des  adjectifs  germaniques  formés  à  l'aide  du  suf- 
fixe 'isca-s,  en  allemand  moderne  -ûcA,  comme  himmliech, 
a  céleste,  »  de  Himmel,  «  ciel;  »  kindtsch^  «  puértT,  »  de 
Kind^  <c  enfant  »  (en  anglais,  childish^  de  child,  qui  est  le 
même  mot  que  Kind)  ;  mânnischy  en  parlant  d'une  femme 
qui  affecte  les  manières  d'un  homme,  Mann;  heidnisch^ 
«  païen,  »  adjectif  dérivé  du  substantif  vieux  germanique 
Heidariy  conservé  dans  le  dérivé  Heidentum,  «  paganisme.  » 

On  aurait  tort  de  faire  intervenir  ici  la  langue  grecque 
qui  se  sert  du  suffixe  -(«to-ç ,  -(«tn)  pour  former  des  ditniiiu- 
tifs  :  d&XCexoç,  «  petite  broche,  »  d'ôôeX^,  «  broche,  «  poXfifffxoç, 
«  ognon,  »  de  poX&Jç,  «  ognon,  »  TOtiW<fXY),  «  petite  fille,  » 
de  ««Tç,  icaiWç,  «  enfant.  »  Les  noms  die  lieu  étudiés  ici  lie 
sont  pas  des  diminutifs. 

Le  suffixe  germanique  -isca^s  a  pénétré  dans  quei)}uôa 
dialectes  romans  en  Italie  et  dans  le  midi  de  la  France  où, 
comme  dans  les  langues  germaniques,  il  sert  à  'ctëev  de!9 
adjectifs  dérivés  de  substantifs. 


(1)  Edition  Ouérard,  p.  105,  col.  2. 

(2)  I)om  Bouquet,  U,  458  c.  Edition  Krusch,  p.  180, 1.  7. 


CHAPITRE  XII. 


LE  SUFFIXE  GAULOIS  -aVO-S  BANS  LES  NOMS  DE  LIEUX  PENDANT 

l'antiquité  et  le  moyen  AGE. 

SOMlLàlRB  : 

)  1.  Le  suffixe  gaulois  -aoo-s  noté  -avua  dans  les  textes  latins.  —  }  2.  Le 
suffixe  -&vu$  employé  pour  former  des  noms  de  lieux  dérivés  de  genti- 
lices  romains.  —  {  3.  Le  suffixe  -avu«  employé  pour  former  des  noms  de 
lieu  dérivés  de  cognomina  romains. 

§  !•'.  —  Le  suffixe  gaulois  -avo-s,  noté  -avus  dans  les  textes 

latins. 

ÂYO-s  est  un  suffixe  gaulois  qui  a  été  employé  pour  la 
formation  des  noms  de  lieu  ;  ainsi  Llydaw^  nom  gallois  de  la 
Bretagne  continentale,  et,  probablement  à  Torigine,  de  toute 
la  Gaule,  suppose  un  primitif  litavos^  d*où  le  nom  d'homme 
dérivé  Litaviccus  porté  en  52  av.  J.-C.  par  un  gaulois  no- 
ble de  la  cité  des  Aedui  qui  abandonna  César  pour  se  tour- 
ner du  côté  de  Vercingétorix  (1).  Le  nom  des  Seffusiavi, 
peuple  bien  connu  de  la  Gaule  celtique  sur  le  territoire 
duquel  la  colonie  romaine  de  Lyon  fut  établie ,  est  dérivé 
d'un  thème  Segusio-  qu'on  retrouve  en  Italie  dans  le  nom 
de  la  ville  de  Suse,  en  Piémont  :  Segusium  ou  Segusio. 

Les  noms  de  lieu  formés  avec  le  suffixe  -avus  dans  la  pt»- 
riode  celtique  n'étaient  pas  tous  dérivés  de  noms  d*hom- 

(1)  Grammattca  celtica,  p.  831;  cf.  César,  De  bello  gallico,  VII,  37-40,  :>4. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -AVO-S.  561 

mes ,  c'est  ainsi  que  le  Talou .  pagus  Tellaus ,  à  Tépoque 
carlovingienne  (1)  pour  *  Tellaxms  ;  le  Vimeu,  à  Tépoque  mé- 
rovingienne paji^  Viminausi^)  pour*F«mînai;t/5,  tirent  cha- 
cun leur  nom  de  celui  de  la  petite  rivière  qui  Tarrose ,  la 
Telle  pour  le  Talou,  la  Visme,  Vimina^  pour  le  Vimeu  (3)  ; 
de  même  le  pagus  Masaus  ^  MosoAms,  doit  son  nom  à  la 
Meuse,  Mosa  (4).  Mais,  sous  la  domination  romaine,  le 
sufllxe  -avos  a  aussi  servi  à  former  des  dérivés  de  noms 
d'hommes,  tant  gentilices  que  cognomina  ou  noms  péré- 
grins. 

S  2.  —  Le  suffixe  -avos,  -avus  employé  pour  former  des  noms 

de  lieu  dérivés  de  gentilices  romains. 

*  Ambiliavus  est  la  forme  primitive  du  nom  de  la  com- 
mune d*Ambillou  (Maine-et-Loire)  ;  la  notation  Àmbilloumif 
dans  une  charte  du  onzième  siècle  (5) ,  est  le  résultat  d'un 
essai  malheureux  fait  par  un  scribe  qui  voulait  latiniser  un 
nom  dont  il  ne  connaissait  que  la  prononciation  usitée  de 
son  temps.  Ce  nom  est  dérivé  du  gentilice  Ambilius  connu 
par  quelques  inscriptions  (6). 

Abcbliavus  est  le  nom  de  Milhau  (Aveyron),  auon  zième 
siècle  dans  les  chartes  de  l'abbaye  de  Saint- Victor  de  Mar- 
seille (7)  et  de  Tabbaye  de  Conques  (8).  Ce  nom  de  lieu 
est  dérivé  d'Amelius,  orthographe  en  bas  latin  du  gentilice 
Aemilius  étudié  p.  348. 

(1)  Longnon,  Atlas  historique  de  la  France,  p.  98. 

(2)  Longnon,  Atlas  historique  de  la  France^  p.  127. 

(3)  La  Telle  est  aujourd'hui  la  Béthune,  arrondissement  de  Neufchâtel  et  de 
Dieppe  (Seine-Inférieure).  La  Visme,  arrondissement  d'Abbeville  (Somme), 
est  un  affluent  de  la  Bresle  qui  sépare  le  département  de  la  Somme  de  celui 
de  la  Seine-Inférieure. 

(4)  Longnon,  ibid.,  p.  132. 

(5)  Port,  Dictionnaire  historique  de  Maine-et-Loire,  t.  I,  p.  16. 

(6)  De-Vit,  Onomasticon^  t.  I,  p.  252. 

(7)  Quérard,  Cartulaire  de  Saint-Victor  de  Marseille,  t.  II,  p.  201. 

(8)  6.  Desjardins,  Cartulaire  d,e  l'abbaye  de  Conques,  p.  21. 

36 


562  LIVRE  n.  aHAPlTIl]&  2lf:  |  3. 

§  3.  —  Le  suffixe  -avus  employé  pour  former  des  noms  de  lim 

dérivés  de  cognomina  romains, 

« 

Antonnava  ou  Antonavi,  aujourd'hui  Antonaves  (Hautes- 
Alpes)  (1)  est  dérivé  d'un  cognomen  *Antônus  ou  *Antuu- 
nus  dont  on  n'a  pas  d'exemple ,  mais  dont  l'existence  est 
prouvée  par  le  dérivé  Antunnacus  (2),  Antonacus  (3),  Anton- 
nacus  (4),  aujourd'hui  Anderuach  (Prusse  Rhénane).  Le  co- 
gnomen *  Antunnus  a  été  aussi  employé  comme  nom  de 
lieu  saus  être  développé  à  l'aide  d'un  suflke  :  un  lieu  dit 
Antunnus  était  situé  prés  d'Octodurum,  aujourd'hui  Marti- 
gny  en  Valais  ;  nous  le  savons  par  un  diplôme  de  l'année 
1011 ,  dont  une  copie  du  douzième  siècle  a  été  conservée 
dans  les  archives  de  l'abbaye  Saint-Maurice  d'Agaune  (5]. 
Comparez  Antona,  en  Italie,  province  de  Massa. 

*  Andelavus  doit  être  la  forme  primitive  du  nom  de  lieu 
appelé  Andelaus  par  Grégoire  de  Tours  (6)  et  Frédégaire  (7); 
c'est  aujourd'hui  Andelot  (Haute-Marne)  (8).  Ce  nom  de 
lieu  suppose  un  nom  d'homme  barbare  *Andelus  (9)  ou  *An- 
dilus,  d'où  l'on  a  tiré,  avec  le  sufilxe  -acus,  le  nom  de  lieu 
*  Andelacus  écrit  Andelagus  au  neuvième  siècle  (10),  Andeleius 


(1)  Roman,  Dictionn.  topogr.  du  déport,  des  Hàutes-Alpes^  p.  4. 

(2)  Antennacus  chez  Ammien  MarceUin, livre  XVIII,  c. 2, |4;éd.  Teubner- 
Gardthausen ,  p.  147,  I.  33;  mais  Antunnaco,  Ètinéraire  d'Antonin,  p.  t54, 

L  1. 
(3)iVo(ttta  dignitsttum  occidentis,  c.  39,  éd.  Boecking,  t.  II,  p.  116,  117. 

(4)  OreUi-Heûzen,  n»  5236. 

(5)  Historiae  patri&e  monumenta,  Chartae,  t.  I,  col.  391. 

(6)  HisioHa  Francorum,  IX,  20;  édit.  Amdt,  t.  I,  p.  374,  l.  27-28. 

(7)  IV,  38;  édit.  Krusch,  p.  139,  1.  6. 

(8)  Longnon,  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle,  p.  371. 

(9)  Andeios,  'AvfiviXo;,  est,  chez  Ptolémée,  1.  II,  c.  6, 1 66  (éd.  Didot-Mûller, 
t.  I,  p.  189,  1.  11),  le  nom  d'une  ville  d'Espagne  chez  les  Vascones  ou  chez 
les  Varduli.  De  ce  nom  de  lieu  on  a  tiré  le  dérivé  Andelonensis  (C.  I.  L,, 
II,  2963). 

(10)  Testament  d'Angésise,  abbé  de  Fontenello,  cité  par  Blosseville,  Dic- 
tionnaire topogr,  du  département  de  l'Eure^  p.  b* 


NOMS  DE  LIEU  EN  -AVUS.  563 

un  peu  plus  tard  (1).  Il  y  eut  d'abord  deux  bourgs  voisins 
de  ce  nom  dont  la  réunion  a  produit  la  commune  des  An- 
delys  (Eure).  Andelat  (Cantal)  parait  être  aussi  un  ancien 
Andelacus. 

Du  nom  barbare  *  Andelus  ou  *  Andilus  on  a  tiré  un 
gentilice  *  Andilius ,  d*où  est  venu  le  nom  de  lieu  dérivé 
AndiliaciAs  ;  c'est  la  forme  primitive  du  nom  de  sept  com- 
munes de  France  :  Andillac  (Tarn)  ;  Andillé  (Vienne)  ;  An- 
dilly  (Charente-Inférieure  ,  Haute-Marne  ,  Haute-Savoie , 
Seine-et-Marne). 

Andillou,  commune  de  Saint-Pellerin  (Eure-et-Loir), 
doit  être  un  ancien  "  AridiliaiHjLs  dérivé  du  même  gentilice 
avec  le  suffixe  -avus. 

Bellenavus  est  dans  la  chronique  de  Bèze  (2) ,  le  nom 
de  Belleneuve  (Côte-d'Or).  C'est  un  dérivé  du  nom 
d'homme  gaulois  écrit  Bellinus  dans  les  inscriptions.  Trois 
de  ces  inscriptions  trouvées  à  Vienne  (Isère),  sont  des  épi- 
taphes  gravées  par  les  soins  de  l'affranchi  Bellinus  (3) ,  de 
T.  Servilius  Bellinus  (4),  et  de  Valerius  Bellinus  (5).  Une 
autre  qui  existe  encore  à  Nimes  est  l'épitaphe  de  T.  Mes- 
sius  Bellinus  ^.(6). 

Canavi,  dans  les  chroniques  de  Saint-Bénigne  (7)  et  de 
Bèze  (8),  est  le  nom  de  Chenôve[s]  (Côte-d'Or).  Ce  nom  de 
lieu  est  dérivé  du  cognomen  latin  Canus  usité  dans  plu- 
sieurs familles  romaines.  Ainsi  Q.  Gellius  Canus  était  un 
des  amis  de  Cicéron  (9);  Julius  Canus  fut  condamné  à 


(1)  Vie  de  s&inte  Clotilde;  chez  Kroa^h,  Scripk)rw(a  r^rum  meaoningiaà- 
ntm,  t.  II,  p.  346,  1.  32. 

(2)  Edit.  Oarnier,  p.  255,  258. 
(3);c.  /.  L.,  XII,  1866. 

(4)  Ibid,,  XII,  2002. 

(5)  Ibid,,  XII,  2018. 

(6)  Ibid.,  XII,  3748. 

(7)  Edit.  Ganûer,  p.  92. 

(8)  /dtd.,  p.  236. 

(9)  De- Vit,  Onomastwçn,  t.  m,  p.  220. 


564  LIVRE  II.  CHAPITRE  XII.  {  3. 

mort  par  Caligula  (1).  Ce  cognomen  pénétra  en  Gaule.  On 
conserve  au  musée  d*Aix  Tépitaphe  de  A.  Cornélius 
Canus  (2)  ;  on  a  trouvé  à  Genève  celle  de  Valerius 
Kanus  (3)  ;  on  a  recueilli  à  Narbonne  et  le  musée  de  cette 
ville  possède  Tépitaphe  de  M.  Annius  Kanus  (4).  Une 
inscription  découverte  à  Vienne  (Isère)  rappelle  la  mémoire 
du  questeur  Sex.  Cœlius  Canus,  jugé  digne  d'obtenir  la 
dignité  de  décurion  (5).  On  trouve  en  France  des  tuiles  et 
des  vases  de  Tépoque  romaine  avec  la  marque  du  fabricant 
écrit  au  génitif  Cani  ou  Kani  (6). 

C'est  de  Canus  que  dérive  le  gentilice  Canins,  étudié  plus 
haut,  p.  210-21  i ,  à  Toccasion  du  nom  de  lieu  dérivé  Canidcus. 

La  villa  de  Merlaus,  pour  *MerulaviLs,  aujourd'hui  Mer- 
lan (Marne) ,  est  plusieurs  fois  mentionnée  dans  les  char- 
tes de  l'abbaye  de  Saint-Martin  de  Tours  à  partir  de  Tan- 
née 878,  où  elle  fut  donnée  à  cette  abbaye  par  le  roi 
Louis  le  Bègue  (7).  Un  autre  Merlaus  était  situé  dans  le 
Maçonnais  au  dixième  siècle,  c'est  aujourd'hui  Merloux, 
commune  de  Saint-Point  (Saône-et-Loire)  (8). 

*  Merulavus  est  dérivé  de  Merula ,  cognomen  latin  usité 
dans  une  branche  de  la  gens  Cornelia;  deux  L.  Cornélius 
Merula  furent  consuls  à  Rome  sous  la  république ,  l'un  en 
193,  l'autre  en  87  avant  J.-C.  Ce  cognomen  pénétra  en 
Gaule,  témoin  M.  Sappius  Merula,  dont  l'épitaphe  a  été  re- 
cueillie à  Nimes  (9). 

Le  cognomen  Merula  a  été  employé  comme  nom  de  lieu. 
Le  Mesle  (Orne)  est  un  ancien  Merula  (10). 


(1)  De- Vit,  OnomMticon^  t.  III,  p.  679. 

(2)  C.  /.  L..  XII,  2777. 

(3)  /btd.,  XII,  2634. 

(4)  Ibid.,  XII,  4585. 

(5)  Ibid.,  XII,  5864. 

(6)  Ibid,,  XII,  5679,  71  ;  5686,  43. 

(7)  Mabille,  La,  p&ncarte  noire  de  Saint-Martin  de  Tours,  p.  228;  et  177. 

(8)  Ragut,  Cartulaire  de  Saint-Vincent  de  Mâcori^  p.  58,  565. 

(9)  C.  /.  L.,  XII,  3873. 

(10}  Longnon,  AiUts  historique  de  U  France^  p.  189. 


CHAPITRE  XIII. 


LE  SUFFIXE  GAULOIS  -tCO-S    DANS  LES  NOMS  DE  LIEUX  PEN- 
DANT L* ANTIQUITÉ  ET  AU  MOYEN  AGE. 


Sommaire  : 

)  i.  Le  suffixe  -ico-s  en  gaulois.  —  2  2.  Le  suffixe  -ico-s  ou  -icus  employé 
à  former  des  noms  de  lieu  dérivés  de  cognomiriA  romains  ou  de  noms 
pérégrins.  —  {  3.  Le  suffixe  -icus  employé  à  former  dos  noms  de  lieu 
dérivés  de  cognomina  latins  en  -anus  qui  eux-mêmes  dérivent  de  genti- 
lices  en  -ius. 


S  !•'.  —  Le  suffixe  -ico-s  en  Gaulois. 

Le  suffixe  gaulois  -icus  a  servi,  avant  la  conquête 
romaine,  à  former  des  noms  de  lieu  qui  n'ont  pas  des  noms 
d'homme  pour  origine  :  tels  sont  :  Are-morici  qui  veut 
dire  «  voisins  de  la  mer,  »  mori\  Avaricum  (Bourges), 
Autrioum  (Evreux),  qui  veulent  dire  «  arrosé  par  VAvara,  » 
«  par  YAutura,  »  aujourd'hui  l'Evre  et  TEure  ;  on  peut  en  rap- 
procher le  nom  de  la  vallis  Bebronica  (1) ,  ou  Bevronica  (2) , 
qui  doit  son  nom  à  la  Brevenne,  Bebronna  (3)  (département 
du  Rhône),  celui  du  pagu^  Uzeticusy  pour  Uceticus,  dérivé 
A'Ucetia,  Uzès  (Gard)  (4). 


(1)  Auguste  Bernard,  Cartul&ire  de  Savigny,  p.  379. 

(2)  Ibid.,  p.  3,  H. 

(3)  Ibid.,  p.  219,  294,  300,  344,  347,  354. 

(4)  Molinier,  Géographie  historique  de  la  province  de  Languedoc,  col.  169, 
170. 


566  LIVRE  IL  CHAPITRE  XIII.  |  2. 

§2.  —  Le  suffixe  -ico-s,  -icus  employé  à  former  des  noms  de 
lieu  dérivés  de  cognomina  romains  ou  de  noms  pérégrins. 

Antérieurement  au  moyen  âge  ,  on  a  tiré  de  cognomim 
ou  de  noms  pérégrins  à  l'aide  du  suflke  -icus  un  certain 
nombre  de  termes  géographiques.  Nous  citerons  d'abord 
les  noms  de  lieu  suivants  :  ils  sont  dérivés  de  noms  d'hom- 
mes qui  n'offrent  pas  la  désinence  -ianus  : 

Carantonicus,  nom  d'un  ager  situé  dans  le  pays  de 
Vienne  (Isère).  Une  charte  de  Tannée  928  nous  apprend 
que  cet  ager  comprenait  la  villa  Columberius  aujourd'hui 
Colombier-Sognieu  (Isère  (1).  Par  une  charte  plus  an- 
cienne de  près  d'un  siècle,  mais  dont  l'orthographe  est 
moins  bonne,  nous  voyons  que  dans  cet  (iger ,  nomme 
Carentonicus ,  avec  e  pour  a  dans  la  seconde  syllabe ,  il  y 
avait  une  villa  Carentennacus^  lisez  Carantonnacus,  aujour- 
d'hui Charentonnay  (Isère),  Carantonicus  et  Carantonnacus 
dérivent  tous  les  deux  du  nom  d'homme  Caranto,  au  géni- 
tif Carantonis ,  conservé  par  une  inscription  de  Nimes  : 
cette  inscription  remonte  au  commencement  du  premier 
siècle  de  notre  ère  (2).  Cai^afitonnacus  devait  être  le  chef- 
lieu  de  Vager  Carantonicus  qui  comprenait  en  outre  la  villo 
Columberius.  Il  est  intéressant  d'observer  que  le  nom  de 
Vager  ait  été  formé  à  l'aide  du  suflBxe  -icits  et  le  nom  de  la 
villa  au  moyen  du  suffixe  -acus  en  faisant  dériver  les  deux 
noms  géographiques  du  nom  du  même  propriétaire,  Ca- 
ranto. L'usage  ordinaire  dans  les  textes  du  moyen  âge  est 
de  tirer  le  nom  de  Vager  de  celui  de  la  xnlla  au  moyen  du 
suffixe  latin  ^ensis,  on  aurait  dit  ainsi  ager  Carantonnacen- 
sis]  la  formation  Ca7'anto?iicy^  semble  remonter  à  une  épo- 
que où  on   parlait  encore  gaulois  dans  les  environs  de 


(1)  Voy.  Chevalier,  Cartulstire  de  Saint-André-le-Btiêy  p.  94,  330,  331. 

(2)  C.  /.  L.,  XII,  3802. 


NOMB  DE  LIEU  EN  -ICU8.  507 

Vienne  et  où  le  sufilxe  latin  -ensis  n'était  pas  encore  usité, 

Cassinigus,  dans  une  charte  donnée  en  1019  à  M&con, 
en  faveur  de  Tabbaye  de  Cluny  (1).  Cassinictis  dérive  de 
*Cassinus,  cognomen  dont  on  n'a  pas  trouvé  d'exemple , 
mais  dont  l'existence  est  prouvée  par  le  composé  Cassino- 
magus  (2),  et  qui  est  avec  Cassius  dans  le  même  rapport  que 
Maximinus  avec  Maximius ,  que  Quintinus  avec  Quintius , 
que  Messinus  avec  Messius ,  que  Marcinus  avec  Marcius , 
que  Marcellinus  avec  Marcellius,  que  Marinus  avec  Marins. 

Catuicus  est  une  villa  placée  dans  le  comté  de  Chalon- 
sur-Saône  par  une  charte  de  958  pour  Tabbaye  de  Cluny  (3). 
Ce  nom  de  lieu  est  dérivé  du  nom  d'homme  gaulois  Catus, 
«  Bataille,  »  inscrit  sur  l'arc  de  triomphe  d'Orange  (4).  Ce 
nom  était  de  la  quatrième  déclinaison,  tandis  que  le  nom 
d'homme  latin  Catus  est  de  la  seconde.  Un  exemple  inté- 
ressant de  ces  deux  mots  est  donné  par  des  marques  de 
potier  trouvées  à  Vienne  (Isère).  Dans  la  marque  0¥{ficina) 
CATUS  (5)  nous  reconnaissons  le  génitif  du  nom  gaulois, 
et  la  marque  OFiG(ina)  gati  (6)  nous  offre  le  génitif  du 
nom  latin. 

SiLVANiGus  est  le  nom  d'un  mansus  abandonné  par  l'ab- 
baye de  Savigny  en  échange  de  biens  situés  en  Lyonnais; 
cet  acte  eut  lieu  en  947  (7).  Silvanicus  dérive  de  Silvanus , 
cognomen  très  répandu  dans  le  monde  romain.  On  le 
trouve  par  exemple  dans  la  gens  Licinia  :  Q.  Licinius  Silva- 


(1)  Bruel,  Recueil  des  chartes  de  l'&bbaye  de  Cluny^  t.  III,  p.  742. 

(2)  Cassinomago  dans  la  Table  de  Peutinger  ^  aujourd'hui  Chassonon 
(Charente)  (E.  Desjardins,  Géographie  de  la  Gaule  d'après  la  Table  de 
Peutinger,  p.  276). 

(3)  Bruel,  Recueil,  t.  II,  p.  139. 

(4)  C.  /.  L.,  XII,  1231,  7. 

(5)  /6id.,  XII,  5186,  207. 

(6)  Ibid,,  XII,  5686,  206.  Cf.  ci-dessous,  p.  580-581. 

(7)  Auguste  Bernard,  Cartulaire  de  l'abbaye  de  Saoigny,  t.  I,  p.  55. 


568  LIVRE  II.  CHAPITRE  XIII.  {  2. 

nus  fut  flamen  Augusti  de  TEspagne  citérieure,  et  son  fils, 
qui  porta  les  mêmes  noms  que  lui,  arriva  au  consulat 
Tan  106  de  notre  ère  (1).  On  rencontre  beaucoup  d'exemples 
du  cognomen  Silvanus  en  Gaule  :  ainsi  on  a  trouvé ,  dans 
la  ville  d'Arles,  l'épitaphe  de  L.  Hostilius  Silvanus  i  : 
une  inscription  de  Narbonne  a  conservé  les  noms  de 
C.  Pellius  Silvanus  (3)  ;  le  musée  de  cette  ville  possède 
Tépitaphe  del  M.  Abillius  Silvanus  recueillie  dans  les  rem- 
parts (4).  Silvanus  a  été  aussi  employé  comme  nom  père- 
grin  :  on  le  voit  par  des  inscriptions  de  Die  (5),  d'Aoste  6 , 
de  Marguerittes  (Gard)  (7),  de  la  ville  antique  de  Sextantv», 
près  de  Castelnau-le-Lez  (Hérault)  8),  etc. 

*  Urbanicus  est  l'orthographe  primitive  du  nom  de  villa 
écrit  Orbanicus  dans  le  Cartulaire  de  Brioude;  il  s'agit  d'une 
localité  située  en  Auvergne  :  une  des  chartes  qui  la  men- 
tionnent a  été  rédigée  vers  Tannée  900  (9),  l'autre  au  com- 
mencement du  onzième  siècle  (10).  Urbanus  est  un  cog- 
nomen  latin.  Le  grammairien  Urbanus  a  été  un  des 
commentateurs  de  Virgile;  on  croit  qu'il  écrivait  au  second 
siècle  de  notre  ère  (11).  Dans  le  siècle  suivant  vivait  Agri- 
cola  Urbanus,  consul  en  234  (12).  Ce  cognomen  a  pénétre 
en  Gaule  :  on  a  découvert  à  Nimes  l'épitaphe  de  G.  Attius 
Urbanus  (13);  à  Narbonne,  celles  de  :  Coelia  Urbanail4, 


(1)  De-Vit,  Onomasticon,  IV,  152. 

(2)  C.  /.  L.,  XII,  810. 

(3)  Ibid.,  XII.  4408. 

(4)  Ibid,,  XII,  4541. 

(5)  Ibid.,  XII,  1596. 

(6)  /6<d.,  XII,  2394. 
(l)Ibid.,  XII,  3011  a. 

(8)  Ibid.,  XII,  4213. 

(9)  Doniol,  Cartulaire  de  firtoude,  p.  152. 

(10)  Doniol,  t6td.,  p.  55. 

(11)  Touffcl,  Goschichte  der  rômischen  Literatur,  3»  édit.,  p.  798-799. 

(12)  Kloin,  Fasti  consulHreSf  p.  100. 

(13)  C.  /.  L.,  XII,  3441. 

(14)  Ibid.y  XII,  4709. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -I OU 8.  569 

Cupuia  Urbana  (1),  Laelia  Urbana  f2),  Pollia  Urbana  (3). 

De  ces  noms  de  lieux  dérivés  de  noms  d*hommes  on 
peut  rapprocher  les  noms  de  pagi,  dérivés  de  noms  de  peu- 
ples comme  Arvemicus  d'Arverni  (4),  Catalaunicus  (5),  de 
Catalauni  pour  un  plus  ancien  Catuellauni  (6)  ;  Suessionicus 
de  Suessiones  (7) ,  Vellavicus  de  Vellavi  (8) ,  Rutenicus ,  d'où 
le  français  Rouergue,  de  Ruteni  (9);  Santonicus  (10),  Sanio- 
nica,  d'où  le  français  Saintonge,  de  Santones, 

On  peut  leur  comparer  Arausici,  nom  des  habitants 
d'Orange  (Vaucluse)  dans  la  Notitia  provinciarum  et  civiia- 
tum  Gallùe  (11).  Arausicits  vient  non  d^Arausio^  Orange,  mais 
directement  du  gentilice  *  Arausius,  dont  Arausio  dérive,  ou 
peut-être  du  primitif  Arausa,  dont  *Arausius  dérive  lui- 
même  comme  on  a  vu  p.  520. 

§  3.  —  Le  suffixe  -icus  employé  à  former  des  nom^  de  lieu 
dérivés  de  cognomina  a^i  -anus  qui  eux-mêmes  dérivent 
de  gentilices  en-  ius. 

Parmi  les  noms  de  lieux  en  -ictw,  un  certain  nombre 
ont,  avant  cette  désinence,  les  trois  lettres  ian,  débris  de 
deux  autres  suffixes  ;  et  ils  sont  formés  à  Taide  d*un  suffixe 
composé  'iar^icus  où  sont  réunis  les  trois  suffixes  -ia  ou 
-1145,  -anuSy  -icus.  En  effet,  le  suffixe  -icus  a  servi,  dans  le 
midi  de  la  France ,  à  créer  des  noms  de  lieu  dérivés  de 
surnoms  qui  offrent  la  désinence  -ianus  =  ia  H-  anus ,  ou 


(1)  C.  /.  L.,  XII,  4756. 

(2)  Ibid.,  XII,  4935. 

(3)  Ibid.,  XII,  5061. 

(4)  Longnon,  Atlas  historique^  p.  143. 

(5)  Longnon,  tbid.,  p.  122. 

(6)  Longnon,  ibid.,  p.  121. 

(7)  Longnon,  i6id.,  p.  120. 

(8)  Longnon,  ibid,,  p.  146. 

(9)  Longnon,  ibid,,  p.  144. 

(10)  Longnon,  ibid.,  p.  147. 

(11)  Longnon,  tdtd.,  p.  15. 


STO  LIVRE  II.  CHAPITRE  XHI.  |  3. 

io  -+-  anus.  Ces  surnoms  en  -ianus  peuvent  se  diviser  ea 
deux  catégories  :  la  première,  dont  nous  ne  citerons  qu'un 
exemple,  a  une  origine  géographique  ;  la  seconde  vient  de 
oognomina  dérivés  de  gentilices  en  -ius  à  l'aide  du  suflke 
-anus.  Commençons  par  la  première  catégorie. 

Du  nom  de  lieu  Àndmia,  conservé  par  une  inscription 
du  musée  de  Nimes  (1),  et  qui  est  aujourd'hui  Anduze 
(Gard),  on  a  formé  un  dérivé  Àndusianus,  comme  de  Borna. 
Romanus,  d'Elusa,  Elusanus  ;  de  là  le  dérivé  Andusianicm . 
plus  tard  Andusenque ,  pays  d*Andusia ,  au  lieu  de  Andu- 
siensis,  comme  on  dit  Narbonensis  et  Nemausensis  (2). 

La  seconde  catégorie  est  très  considérable  dans  le  midi 
de  la  France  ;  on  pourrait  en  donner  bien  des  exemples. 
Les  surnoms  en  "Uanus  d'où  viennent  des  noms  de  lieu  en 
-tciis,  et  qui  dérivent  de  gentilices  en  -itw,  sont  as«^ez 
communs  pour  que  nous  puissions  considérer  leur  exis- 
tence comme  démontrée  dans  le  ca^  où ,  connaissant  par 
des  documents  de  Tépoque  romaine  le  gentilice  corres- 
pondant, nous  n'aurions  trouvé,  dans  ces  documents, 
aucun  exemple  du  cognomen  en  -i-anit5  ;  mais  cette  lacune 
se  produit  seulement  pour  quelques-uns  des  noms  de  lieu 
que  nous  allons  citer. 

Les  noms  de  lieu  en  -ious  venant  de  cognomina  en  -i-mm 
ne  sont  pas  spéciaux  à  la  France.  Dans  une  charte  de 
Ravenne,  nous  trouvons,  au  dixième  siècle,  un  fundus 
Flavianicus  (3).  Flavianicus  est  dérivé  du  cognomen  Flavia- 
nus,  très  fréquent  dans  le  monde  romain  (4). 

Passons  aux  documents  français. 

*AcuTiANiCAS  a  dû  être  originairement  le  nom  de  la  villo 


(1)  C.  /.  L,y  XII,  3362. 

(2)  AndvLSiSinicus ,  dérivé  A' AndusUnus ^  «  habitants  d'Andu«ia,  »  peat 
être  comparé  à  Ruienicus^  dérivé  de  Rutenus,  nom  do  peuple  gaulois,  /.u 
ienicus  est  identique  au  français  Rouergue. 

(3)  Fantuzzi,  Monumenti  Aavennati,  p.  63. 

(4)  De- Vit,  Onomasticon,  III,  80. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -lANICUS.  571 

appelée  de  Agusanicis  dans  une  charte  de  Tannée  922,  et 
qui  est  aujourd'hui  Gusargues  (Hérault)  (1).  Ce  nom  de 
lieu  vient  du  cognomen  Acutianus,  dont  on  signale  deux 
exemples  (2);  Acutianus  dérive  du  gentilice  Acutius  dont 
on  a  parlé  plus  haut,  p.  190. 

*  Albucianicas  ,  au  quatorzième  siècle  villa  de  Albussa- 
nicis,  aujourd'hui  Aubussargues  (Gard)  (3),  dérive  d'Albu- 
cianus,  cognomen  romain  dont  on  a  des  exemples  (4),  et  qui 
dérive  lui-même  du  gentilice  bien  connu  Albucius  étudié 
p.  509. 

AuREUAïftous  est,  au  dixième  siècle,  le  nom  d'une  dépen- 
dance de  la  ville  de  Nimes  :  il  faut  probablement  lire 
Aurelianicas ;  ce  mot  a  été  écrit,  au  quatorzième  siècle, 
Aurelhargues  (5).  Aurelianus,  dérivé  d'Aurelius  (p.  433), 
est  un  cognomen  latin  bien  connu  :  il  a  été  celui  d'un  em- 
pereur romain.  Il  a  été  aussi  porté  en  Gaule  par  des 
hommes  moins  illustres,  tels  sont  :  Q.  Curius  Aurelianus, 
qui  fit  graver  à  Nimes  l'épitaphe  de  son  père  (6),  et 
L.  Solicius  Aurelianus,  qui  fit  graver  celle  de  sa  femme  à 
Fréjus  (7).  On  peut  citer  aussi  l'épitaphe  de  Nigidia  Au- 
reliana  à  Vienne  (Isère)  (8). 

BuLiANicus  est  le  nom  de  Bouillargues  (Gard),  dans  deux 
chartes,  l'une  du  dixième,  l'autre  du  onzième  siècle  (9). 
Ce  mot  doit  être  écrit  avec  deux  / ,  et  probablement  être 
mis  au  féminin  pluriel  Bullianicas,  Il  dérive  de  *  BuUianus 


(1)  Eugène  Thomas,  Dictionnaire  topographique  de  VHéraultj  p.  80. 

(2)  De-Vit,  Onomasticon,  II,  50. 

(3)  Qermer-Durand,  Dictionnaire  topographique  du  Gard,  p.  14. 

(4)  De- Vit,  Onomasticon,  I,  199. 

(5)  Germer-Durand,  Dictionnaire  topographique  du  Gard,  p.  163. 

(6)  C.  /.  L.,  XII,  3201. 

(7)  Ibid.,  XII,  264. 

(8)  Ibid.y  XII,  1987. 

(9^  Qermer- Durand,  Dictionnaire  topographique  du  Gard,  p.  31, 


572  LIVRE  II.  CHAPITRE  XIII.  {  3. 

que  nous  n'avons  pas  trouvé,  mais  qui  dérive  lui-même  de 
BuUius,  gentilice  attesté  par  une  inscription  de  Narbonne;; 
dans  cette  inscription  sont  mentionnés  Q.  BuUius  Fronto, 
L.  BuUius,  et  une  femme  appelée  BuUia  (1). 

*  Cantilianicus  ,  noté  Cantillanicus  ^  est  le  nom  d'une 
petite  circonscription  géographique  dite  aicis^  où  étai: 
située  une  villa  Lamiacus  donnée  à  Tabbaye  de  Saint- 
Julien  de  Brioude  (Haute-Loire),  en  894  (2).  Cantilianicm 
vient  de  *  Cantilianus ,  surnom  dérivé  de  Cantilius.  Le 
gentilice  Cantilius  a  été  étudié  plus  haut,  p.  376. 

*  Cassianicas  est  la  forme  antique  qui  explique  le  nom  de 
Caissargues,  commune  de  BouiUargues  (Gard),  qu'on  trouve 
écrit  Caissanicus  au  dixième  siècle,  Caissanicis  au  dou- 
zième (3).  Ce  nom  de  lieu  est  dérivé  de  Cassianus,  cogno- 
men  latin  très  répandu  (4) ,  et  dont  les  exemples  ne  son' 
pas  rares  en  Gaule.  On  a  trouvé  à  Carpentras  l'épitaphe  de 
L.  Tettius  Cassianus  (5)  ;  à  Uzès,  celle  de  L.  Baebius  Cas- 
sianus (6)  ;  à  Nimes ,  des  épitaphes  ont  été  gravées  par  les 
soins  de  M.  Aurelius  Cassianus  (7)  et  de  M.  Cornélius  Cas 
sianus  (8).  A  Caissargues  (Gard),  comparez  Cassanigo,  pro- 
vince de  Ferrare,  en  Italie. 

Cavillianicas  est  la  forme  primitive  du  nom  de  Cavil- 
largues  (Gard),  encore  écrit  Cavithanicae  en  1384  (9).  Ces' 
un  dérivé  du  cognomen  *Cavillianus,  dont  nous  n'avou!^ 
pas  recueilli  d'exemple,  mais  qu'on  peut  conclure  du  gei: 


(1)  C.  /.  L.,  Xll,  4664. 

(2)  Doniol,  Cartulaire  de  Saint-Julien  de  Brioude,  p.  115. 

(3)  Gormer-Durand,  Dictionnaire  topographique  du  Gard,  p.  41. 

(4)  De-Vit,  Onomasticony  II,  157. 

(5)  C.  /.  L.,  XII,  1208. 

(6)  Ibid.,  XII,  2934. 

(7)  ïbid.,  XII,  3457. 

(8)  Ibid.,  XII,  3889. 

(9)  Qermer-Durand,  Dict.  top.  du  Gard,  p.  52. 


r 


NOMS  DE  LIEU  EN  -IANICU8.  573 

tilice  Cavillius,  ou  avec  une  seule  Z,  Cavilius  ;  Texistence 
de  ce  gentilice  est  établie  par  des  inscriptions  (1). 

0 

Celsinianicas  ,  aujourd'hui  Sauxillanges  (Puy-de-Dôme), 
nom  d'une  abbaye  dont  M.  Doniol  a  publié  le  Cartulaire, 
dérive  d'un  cognomen^  *Celsinianus,  dérivé  lui-môme  d'un 
gentilice,  Celsinius,  qui,  à  son  tour,  wient  du  cognomen 
Celsinus,  tiré  de  l'adjectif  ceisus  (2). 

CoDiGiANiGAS ,  Villa  de  Codicianicis  au  douzième  siècle , 
aujourd'hui  Coussergues  (Hérault)  (3),  vient  d'un  cognomen 
latin ,  *  Coticianus  ou  *  Codicianus ,  dérivé  d'un  gentilice , 
*  Coticius  ou  *  Codicius ,  dont  il  n'y  a  pas  d'exemple ,  mais 
dont  l'existence  est  prouvée  par  le  nom  de  lieu  Codiciacus, 
forme  ancienne  de  Coucy  (Aisne),  douzième  siècle  (4). 

*  FiRMiNiANiCAS,  eu  1254  FirminhanicaBy  aujourd'hui  Fir- 
minargues ,  commune  de  Montaren  (Gard)  (5) ,  dérive  de 
Firminianus ,  cognomen  attesté  par  des  inscriptions  et  par 
d'autres  monuments  écrits  (6).  Firminianus  vient  de  Fir- 
minius,  gentilice  trouvé  dans  des  inscriptions  près  de  Co- 
logne et  de  Coblentz  (7),  et  dérive  du  cog^noTnen  Firminus  ; 
c'est,  en  quelque  sorte,  un  développement  du  gentilice 
Firmius.  Il  y  eut  à  Rome,  sous  Tibère,  un  sénateur  ap- 
pelé Firmius  Catus  (8) ,  et  d'autres  Firmius  se  rencontrent 
dans  les  inscriptions  ;  exemple  :  épitaphe  de  Firmia ,  gra- 
vée par  les  soins  de  T.  Firmius  Victor  à  Florian  (Gard)  (9); 
Firmia  était  fille  de  Firmius  Blaesus ,  peut-être  celui  dont 
on  a  trouvé  l'épitaphe  à  Nimes  (10);  épitaphe,  à  Nimes, 

(1)  De- Vit,  OnomMticon,  II,  187. 
(î)  Do- Vit,  ibid.,  II,  202. 

(3)  Eugène  Thomas,  Dictionnaire  topographique  de  l'HérauIf,  p.  53. 

(4)  Matton,  Dictionnaire  topographique  de  TAisne,  p.  77. 

(5)  Germer>Daraad,  Dictionnaire  topographique  du  Gard,  p.  83. 

(6)  De- Vit,  Onomasticon,  III,  70. 

(7)  Brambach,  562,  745. 

(8)  Tacite,  Annales,  II,  27;  IV,  31.  Dfe-Vit,  Onomasticony  III,  70. 

(9)  C.  /.  L.,  XII,  3037. 

(10)  Ibtd..  XII,  3585. 


574  Lnn»  IL  GSAPITRE  XIII.  t  3. 

de  T.  Firmiiis  Marinus  (1),  qui  avait  fait  graver  dans  la 
même  ville  Tépitaphe  aujourd'hui  perdue  de  aoa  père 
Firmanus,  fils  de  Firmus  (2). 

^Mallianiga  (vallis)^  vallis  Mallanica  en  1257  est  la  no- 
tation  primitive  du  nom  de  Val-maillargues ,  commune  de 
Grabels  (Hérault  (3).  Mallianica  dérive  du  cognomen  Mal- 
lianus.  L*épitaphe  de  Q.  Aelius  Mallianus  se  trouve  à 
Aime  (Savoie)  (4).  Mallianus  dérive  du  gentilice  Mallius, 
étudié  p.  266-267,  et  qui  a  donné  naissance,  dans  le  dépar- 
tement de  THérauIt,  au  nom  de  trois  Ualliacus  aujourd'hui 
Maillac  ou  Mailhac ,  communes  de  Montpellier ,  La  Salvetat 
et  Saint-Pons  (5). 

*  Marcbllianigas  parait  être  la  forme  primitive  du  nom 
de  deux  localités  appelées  Tune  aujourd'hui  Marsillargues 
(Hérault)  (6)  ;  l'autre  Massillargues  (Gard)  (7).  Marcellianicas 
vient  de  Marcellianus ,  qui  dérive  du  gentilice  Marcellius 
étudié  p.  269.  Le  gentilice  Marcellius  a  donné  :  dans  le 
département  du  Gard,  Marcelliacus^  au  dixième  siècle  Mar- 
ceglago,  plus  tard  Massillac,  aujourd'hui  détruit  (8);  dans 
le  département  de  l'Hérault,  Marcellianus,  notation  quou 
trouve  encore  au  onzième  et  au  douzième  siècle,  aujour- 
d'hui Marseillan  (9).  Il  y  a  quelques  exemples  du  cognomen 
Marcellianus  (10)  :  un  appartient  à  la  Gaule  :  T.  Salluslius 
Marcellianus  fit  faire  à  sa  mère  un  monument  funèbre  qui, 
découvert  à  Vaison,  est  aujourd'hui  conservé  au  musée 
d'Avignon  (II). 

(1)  C.  I.  L.,  XII,  3358. 

(2)  Ibid,,  XII,  3583. 

(3)  E.  Thomas,  Dictionnaire  topogr&phique  de  {'ttératfU,  p.  217. 

(4)  C.  /.  L.,  XII,  120. 

(5)  E.  Thomas,  Dictionnaire  topographique  de  VBiratàU^  p.  103. 

(6)  E.  Thomas,  tbtd.,  p.  107. 

(7)  Germer-Durand,  Dictionnaire  topographique  du  Gard,  p.  13t. 

(8)  Germer-Durand,  ibid,^  p.  131. 

(9)  E.  Thomas,  Dictionnaire  topogrH.phique  de  THératUt,  p.  107. 

(10)  De- Vit,  Onomasticon,  IV,  320. 

(11)  C.  /.  L.,  XII,  1395. 


NOMS  DB  LIEU  EN  -lANICUS.  575 

*Mamanicas,  vers  1050  MarcmigaSy  aujourd'hui  Meyrar- 
gues  (Bouches-du-Rhône  (1);  en  1166  villa  de  Mairanicis, 
aujourd'hui  Meyrargues,  commune  de  Vendargues  (Hérault), 
dérive  du  cognomen  Marianus,  fréquent  chez  les  auteurs  et 
dans  les  inscriptions  (2).  En  Gaule ,  on  peut  signaler  : 
L.  Caecilius  Marianus  à  Vienne  (Isère)  (3),  et  Sennius  Ma- 
rianus à  Soyon  (Ardèche)  (4).  Marianus  dérive  du  gentilice 
bien  connu  Marins  dont  il  a  été  déjà  question  p.  275. 

*  Mabinianicas  est  devenu  Mérignargues ,  commune  de 
Nimes  (Gard)  (5).  Ce  mot  est  dérivé  du  cognomen  Marinia- 
nus,  dont  il  y  a  des  exemples  chez  les  auteurs  et  dans  les 
inscriptions.  Deux  Marinianus  furent  consuls  Tun  en  268, 
l'autre  en  423  de  Tère  chrétienne  (6).  Ce  cognomen  est  dé- 
rivé du  gentilice  Marinius ,  dont  on  connaît  des  exemples 
en  Gaule,  et  qui  a  été  étudié  plus  haut,  p.  277. 

*  Martinianigas  est  la  forme  primitive  que  suppose  le  nom 
moderne  de  Martignargues  (Gard) ,  au  quatorzième  siècle 
Mariinhanicae  (7).  Le  cognomen  Martinianus,  dont  ce  nom 
de  lieu  dérive,  se  rencontre  souvent  dans  les  textes  histo- 
riques au  quatrième  et  au  cinquième  siècle.  Les  inscrip- 
tions en  fournissent  aussi  plusieurs  exemples  (8)  ;  quel- 
ques-uns de  ces  exemples  appartiennent  à  la  Gaule  : 
Latinius  Martinianus,  procurator  Augustin  Aime  (Savoie)  (9)  ; 
Melius  Martinianus  dans  une  autre  inscription  de  la  même 
région  (10).  Ce  cognomen  est  employé  sans  gentilice  dans 


(1)  Ouérard,  CartuUtre  de  SAint-Vicior  de  MarteiZZé,  p.  287,  879. 

(2)  De- Vit,  OnomMiicon,  IV,  351. 

(3)  C.  /.  L.,  XII.  1912. 

(4)  ïbid,,  XII,  2656. 

(5)  Germer- Durand,  Dictionnsiire  topogr&phique  du  Gard^  p.  136. 

(6)  De- Vit,  Onomasticon,  IV,  353. 

(7)  Germor-Durand,  Dictionnaire  topographique  du  Gard,  p.  124. 

(8)  De- Vit,  Onomasticon,  IV,  380. 

(9)  C. /.  L.,  XII,  liO. 
HP)  Ibid.,  XII,  2378. 


576  LIVRE  II.  CHAPITRE  XIII.  {  3. 

une  inscription  chrétienne  de  Vienne  (Isère)  (1);  il  est  dé- 
rivé du  gentilice  Martinius  étudié  ci-dessus,  p.  279. 

*  Galatianigus  ,  écrit  Galacianicus  en  1007,  Galasanicus 
en  1031,  Oalazanegues  en  1219,  aujourd'hui  Galargues 
(Gard),  notation  qu'on  trouve  pour  la  première  fois  en  1226  (2 , 
dérive  du  cognomen  *Galatianus  qu'on  n'a  pas  signalé  jus- 
qu'ici ;  mais  Galatianus  vient  du  gentilice  ou  cognomen 
Galatius  dont  on  a  un  exemple  (3),  et  qui  est  lui-même 
dérivé  du  nom  de  peuple  Galata,  employé  comme  cogno- 
men  (4).  Polybe  nous  donne  de  Galata  la  variante  Galatos 
qui  était  le  nom  d'un  roi  gaulois  (5). 

*Petronianigas,  appelé  Petroniacum  pour  Petronianicum 
en  812  dans  la  copie,  évidemment  défectueuse,  d'une 
charte;  Pedrognanicus ^  en  931,  est  aujourd'hui  Parignar- 
gues  (Gard)  (6).  Ce  mot  dérive  du  cognomen  Petronianus , 
dérivé  lui-même  du  gentilice  Petronius,  un  des  plus  fré- 
quents qui  existent  (7),  et  assez  répandu  en  Gaule  (8). 

*  QuiNTinANiCAS ,  au  douzièmc  siècle  Quintilianegues , 
aujourd'hui  Sainte -Croix- de -Quintiliargues  (Hérault)  ,9., 
est  un  dérivé  du  cognomen  romain  Quintilianus  qui,  lui- 
môme,  vient  du  gentilice  Quintilius.  Ce  gentilice  est  connu 
surtout  par  P.  Quintilius  Varus,  consul  l'an  13  avant  J.-C, 
et  qui  périt  avec  ses  lésions  dans  une  bataille  contre  les 
Germains  en  l'an  9  de  notre  ère  ;  mais  plusieurs  autres 
Quintilius  Varus  l'avaient  précédé  dans  les  hautes  charges 
de  Rome;  déjà,  en  Tan  453  avant  J.-C,  Sextus  Quintilius 


(1)  C,  /.  L.,  XII,  2143. 

(2)  Germer-Durand,  Dictionnaire  lopographique  du  Gard,  p.  94. 

(3)  De- Vit,  Onomasticon,  III,  190. 

(4)  De-Vit,  ibid.,  III,  188. 

(5)  Polybe,  1.  II,  c.  xxi,  |  5:  éd.  Didot,  t.  I,  p.  83. 

(6)  Germer-Durand,  Dictionnaire  topographique  du  Gard^  p.  159. 

(7)  Pauly,  Real-Encyclopaedie,  t   V,  p.  1400-1410. 

(8)  C.  I.L.,  XII,  p.  879,  col.  1. 

(9)  E.  Thomas,  Dictionnaire  topographique  de  l'Hérault,  p.  175. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -[ANICUB.  577 

Varua  avait  été  élevé  au  consuls  (1).  On  trouve  en  Oaule 
quelques  axemples  du  eognomen  QuintilianuB  :  à  Nimes , 
Sabinius  Quiotiitanus  <3)  ;  à  Vienne  (Isère),  âextue  Minoius 
Quintilianus  (3);  à  Arles  (6ouch«s-dH-R)iôtie) ,  M.  Julrâs 
Quintilianus  (4],  etc.  M.  Fabius  Quintilianus,  le  célèbre 
auteur  de  l'Institutio  oratorio,  était  originùra  d'Espagne. 

'Sabinianicas,  à  l'ablatif  Savinanicis  en  1156,  et  Savin- 
nanicis  en  1174,  aujourd'hui  Savignargues  (Gard)  (5),  dé- 
rive du  eognomen  Sabinianus.  On  a  trouvé  à  Die  (Drôme) 
l'épitaphe  de  M.  Eutychiua  Sabinianus  (6).  Une  inscription 
d'Andancette  (Drôme)  nous  fait  connaître  les  noms  d'Aldus 
Sabinianus  (7).  Sabinianus  vient  de  Sabinius,  gentitice 
dont  on  a  parlé  déjà  p.  126  (8). 

'  SiLviNiAMCus .  nom  d'une  villa  située  au  comté  de 
Brioude  (Haute-Loire)  :  villammeam  quae  vocatur  Silvigna- 
nictts  (9),  dérive  du  eognomen  "  Sitvinianus,  qui  vient  lui- 
même  du  gentilice  Silvinius.  Ce  gentilice  est  attesté  par 
une  inscription  de  Savoie  qui  nous  fait  connaître  les  noms 
de  Titus  Silvinius  CatuUus  (10),  et  par  une  inscription 
d'Aps  (Ardèche) ,  gravée  par  les  soins  de  Silvinius  Euty- 
chianus  (11);  voyez  aussi  les  inscriptions  citées  p.  335. 

*  Vbnebianicas  ,  en  924  villa  Venerianicus ,  aujourd'hui 
Vendargues,  commune  de  Nimes  (Gard)  (12),  dérive  de 


(t}  Paoly,  Retl-Bncyclopiedie,  l.  VI,  p.  372. 
(î)  C.  I.  L.,  SII,  3866. 
{3}  IbU.,  XII,  1871. 
(t)  Ibid..  Xll,  893. 

(5)  Oermer-Duraud,  Oicfionnaire  lopognpkique  du  Gard,  p.  234. 

(6)  C.  I.  L.,  XII,  1615. 

(7)  IbiH.,  XII,  I796l 

(8)  Snr  le  eognomen  Sabinus,  dont  Sabinius  dérive,  voyez  Pauly,  ReaJ- 
Bncgcloptedie,  t.  VI,  p.  626. 

(9}  Doniol,  Carfulalre  de  Brioude,  p.  30t. 
(10)  C.  /.  L.,  XII,  2425. 
(11) /Md.,  XII,  2684. 

(12)  Qermer-Durand,  DictionMire  topographique  du  Gard,  p,  25S-259. 

37 


578  LIVRE  II.  CHAPITRE  XIII.  {  3. 

*Venerianus,  dérivé  lui-même  de  Venerius,  nom  d'homme 
écrit  deux  fois  dans  une  inscription  de  Narbonne  qui  date 
de  l'an  445  de  notre  ère  (1).  Vandré  (Charente-Inférieure) 
serait-il  un  ancien  Venericbcus? 

(1)  c.  /.  L,,  XII,  5336. 


"w- 


CHAPITRE  XIV. 


LE  SUFFIXE  GAULOIS  -SSa  DANS  l' ANTIQUITÉ  BT   AU  MOYEN  AGE. 


SOMMAIRB  : 

i  1.  Le  suffixe  ganlois  -sso-s  -Ma.  —  {  2.  Noms  de  lieu  dérivés  de  genti- 

lices  roioainfl  à  l'aide  du  suffixe  gaulois  -ssa. 

§  !•'.  —  Le  suffiaf&  ga/ulois  -sso-s,  -ssa. 

Le  gaulois  possédait  un  sufBxe  -sso-,  -ssa,  dont  le  dou- 
ble s  se  rencontre  précédé  d'à,  d'e ,  d't ,  d'u,  dans  des  noms 
d'hommes.  Les  inscriptions  nous  apprennent  par  exemple 
les  noms  d'hommes  gaulois  Tagassos ,  Lucressa ,  Magissa , 
Catussa  (1).  Le  suffixe  qui  termine  ces  mots  a  été  aussi 
employé  pour  former  des  noms  de  lieux;  quelques-uns 
ne  paraissent  pas  dérivés  de  noms  d'honunes;  tels  sont 
par  exemple  le  nom  du  mont  Jura,  Jurassus^  et  celui  de  la 
rivière  IhmmisstÀSy  qui  nous  est  connu  par  Âusone  : 

Prsatereo  arentem  sitientibus  undique  terris 
Dumnissum,  riguasque  perenni  fonte  Tabemas  (2). 

On  peut  croire,  avec  les  auteurs  de  la  Grammatica  Celtica^ 
que  ces  vers  désignent  un  cours  d'eau  souvent  à  sec  et 

(1)  Grammattca  celtica,  2*  édit.,  p.  786.  Le  poète  Gergissus,  cité  en  cet 
endroit  d'après  le  grammairien  Virgile,  devient  Qergesus  dans  Tédition  de  ce 
grammairien  donnée  chez  Teubner  par  J.  Huemer,  p.  15,  1.  15. 

(2)  iroM{U,  yen  7,  8. 


580  LIVRE  II.  CHAPITRE  XIV.  {  1. 

non  une  ville  comme  Tadmettent  E.  Desjardins  (1  , 
M.  Longnon  (2).  Ce  nom  de  rivière  est  dérivé  d'une  varia 
du/mni-  du  thème  dubno-s,  dumno^s,  «  profond.  » 

Ce  procédé  de  formation  apparaît  clairement  dans 
nom  d'homme  gaulois  Medu-ssa,  que  fournissent  df 
inscriptions ,  Tune  des  environs  de  Brescia  (3) ,  l'autre 
la  Valteline  (4).  Medu-ssa,,  comjQe  le  nom  de  la  dée; 
Medu-na  (5),  est  dérivé  d'un  thème  medu-,  a  hydromel  (6 
d'où  le  surnom  gaulois  Medu-genus,  «  fils  de  l'hydromel 
dans  une  inscription  d'Espagne  (7). 

De  môme,  le  cognomen  romain  Catu-ssa,  masculi 
d'origine  gauloise  (8) ,  parait  dérivé  d'un  thème  catu-  c 
forme  le  premier  terme  1®  des  noms  de  peuples  Cal 
riges{9)^  Catu-slogi  (10)  ;  Catu-vellauni  (11);  2*  du  nom  div 
Catu-rix  (12) ,  un  des  surnoms  du  Mars  gallo-romaii 
3®  des  noms  d'homme,  Catu-gnatos  (13),  Catu-mandus  I 
Catu-marus  (15),  Catu-volcus  (16)  ;  ce  thème  a  probableme 

(1)  Géographie  de  la  Gaule  d'après  la  Table  de  Peutinger,  p.  It6. 
(^)  Allaà  historique  de  la  France,  texte,  1**  Urfaison,  p.  VL 

(3)  C.  /.  L.,  V,  4278. 

(4)  Ibid,,  V,  8896. 

(5)  Brambach,  709. 

(6)  Ea  moyen  irlandais,  mid  ?s  mtud,  gcn.  msda  (V^indisch,  Irische  Ttx 
p.  689);  en  vieux  comique,  medu  {Grammaiica  celtica,  2*  édit.,  p.  107y; 
moyen  breton,  mez  {Catholicon  do  Lâgadeuc  publié  par  Le  Hen,  p.  151';) 
gallois,  meddy  d'où  le  dérivé  breton  mezo,  galiois  med^dw-^  c  ivre,  »  ==s  *  yti 
duo-M.  Cet  adjectif  a  donné  un  verbe  dénominatif  dont  l'infinitif  e>t .  ( 
moyen  breton,  meimff,  en  gallois,  medàviy  <n  enivrer,  »  ==  *meduimu'ti 
*meduimO"8,  , 

(7)  C.  /.  L.,  III,  162.  I 

(8)  Ibid.,  III,  5392.  Orelli,  4803. 

(9)  César,  De  bello  gallico,  I.  I,  c.  10. 

(10)  Pline,  livre  IV,  {  106. 

(11)  C.  /.  L.,  VII,  863;  cf.  Forbiger,  Handbuch  der  atlen  Géograpfd 
t.  III,  p.  293. 

(12)  Brambach,  1588  ;  Mommsen,  Inscriptiones  helveticae,  70. 

(13)  Dion  Cassius,  livre  XXXVII,  c.  47.  Cougiiy,  Extraite  déê  âuteurt  g 
t.  IV,  p.  228.  Catu-gnatos  commandait  les  troupes  allobroges  l'an  61  av.  J.< 

(14)  Justin,  livre  XLIH,  c.  5.  (  5. 

(15)  Catumarus  a  été  employé  comme  surnom  dans  là  période  roma 
L.  Sempronius  Catumarus^  inscription  de  la  Pannonie  supérieure  (C.  /. 
III,  4263). 

(16  (César,  De  bello  gallico,  L  V,  c  24,  25;  U  VI,  c.  31. 


NOIfS  D^  LIEU  EN  -BSA.  581 

aussi  fotirni  le  second  terpie  des  noms  d'hommes  Vello- 
calus  (1),  Codda-catus  (2).  Enfin,  employé  seul  et  sans  suf- 
fixe de  dérivation,  il  a  donné  le  nom  d'homme  Catus, 
inscrit  sur  de$  boucliers  de  chefs  gaulois  révoltés  contre 
Tempereur  Tibère,  avec  Julius  Florus  et  Sacrovir,  en 
Tan  21  de  Tère  chrétienne.  L'arc  de  triomphe  d'Orange 
nous  a  conservé  la  reproduction  de  ces  boucliers  (3). 

Ce  thème  catii-  veut  dire  «  bataille.  »  Le  nom  d'homme 
Bataille,  qui  exprime  la  même  idée,  se  rencontre  encore  en 
France  aujourd'hui  ;  et  à  côté  du  nom  d'homme  dérivé 
Catu-ssa,  signifiant  probablement  «  batailleur,  »  on  peut 
placer  plusieurs  autres  dérivés  du  même  thème  formés  à 
l'aide  de  suffixes  différei^ts;  tels  sont  Catu-cus  (4),  Catu- 
ena  (5),  Catu-enus  (6),  Catu-rus  (7),  Catu-so  (8),  dont  le 
sens  probablement  se  rapprochait  de  celui  de  Catu-ssa. 

S  2.  —  Noms  de  lieu  dérivés  de  gentilices  romains  à  l'aide 

du  suffixe  gaulois  -ssa. 

Le  gaulDîs  avait  donc  un  suffixe  -sso-  -wa;  ce  suffixe 
usité  en  gaulois  à  là  fois  pour  former  dès  noms  d'hommes 
et  pour  former  des  noms  de  lieux,  a  été  employé  à  l'épo- 
que gallo-romainô  pour  créer,  à  l'aide  de  gentilices,  des 
noms  de  lieux  nouveaux,  qui  se  terminent  en  -ma,  sous- 
entendu  villa  ou  dormis.  Dans  cette  désinence ,  i  est  un 
débris  du  suffixe  -iu^  caractéristique  ordinaire  des  gentilices 
romains;  ssa  est  le  nominatif  singulier  féminin  du  suf- 
fixe -W0-. 


(1)  Tacite,  Histoires^  livre  III,  c.  45. 

(2)  Dans  une  inscription  de  Besançon,  Orelli,  2064. 

(3)  E.  Desjardins,  Géographie  de  la  Gaule  romaine^  pi.  xii.  Comparez  les 
moulages  du  musée  de  Saint-Germain. 

(4)  C.  /.  L.y  VII,  1336,  265. 

(5)  Ibid.,  II,  780. 

(6)  /Md.,  II,  431,  780,  865. 

(7)  /Md.,  II,  2903. 

(8)  Mommaen,  Inscriptiones  helveticae^  62. 


582  LIVRE  IL  CHAPITRE  XIY.  {  2. 

Cantissa  est  un  nom  de  lieu  qui  apparaît  plusieurs 
fois  dans  les  cartulaires  de  Saint-Hugues  de  Grenoble 
Les  documents  sont  de  la  fin  du  onzième  siècle  et  di 
commencement  du  douzième.  L'orthographe  la  plus  an 
cienne  Cantissa  (i),  y  alterne  avec  l'orthographe  plui 
récente  Cantessa  (2),  ou  même  Chantessa  (3).  Ghantess^ 
est  une  commune  du  département  de  l'Isère. 

Cantissa  dérive  du  gentilice  Cantius,  qui  vient  du  cogno- 
men  Cantus.  Le  gentilice  Cantius  est  fréquent  dans  le: 
inscriptions  de  Tltalie  du  nord  (4).  On  le  trouve  aussi  dan; 
les  régions  celtiques  situées  au  nord  des  Alpes.  Une  ins- 
cription de  Laybach  y  en  Carniole ,  nous  apprend  les  nom^ 
de  L.  Cantius  Proculus  et  de  L.  Cantius  Probatus  (5. 
Dans  un  einscription  des  environs  de  Gratz  en  Styrie ,  ou 
lit  les  noms  de  L.  Cantius  Secundus  (6).  Une  épitaphe  d^. 
Lyon  a  été  gravée  par  Tordre  de  C.  Cantius  Elvetinus  7 . 
Dans  une  épitaphe  d'Ânglefort  (Ain) ,  Cantius  est  un  sur- 
nom juxtaposé  au  gentilice  Matussius  (8).  Dans  une  inscrip 
tion  de  Paris ,  c'est  le  nom  d'un  personnage  qui  n'a  pas  d»^ 
gentilice  (9).  Cantius  =  Cantio-s  dérive  de  canto-s^  adjectil 
gaulois  qui  parait  signifier  «  blanc  (10).  » 

Canto-s,  fréquent  dans  les  composés,  a  fourni  plusieurs 
dérivés  outre  Cantios.  Tel  est  le  cognomen  Canto,  -onis  11 
auquel  se  rattache  le  nom  de  Chantonay  (Haute-Saône  ej 
Vendée),  et  dont  vient  le  dérivé  Cantonius  employé  comni' 
gentilice  (12);  tel  est  le  gentilice  Cantilius,  conservé  par  \im 


(1)  C&rtuUires  de  Véglise  cathédrale  de  Grenobley  p.'  127,  162,  163. 

(2)  Ibid,,  p.  100,  196,  239. 

(3)  I6ict.,  p.  100,  101. 

(4)  C.  L  L.,  V,  index,  p.  1108,  col.  2. 

(5)  /Md.,  III,  3857. 

(6)  Ibid,,  m,  5437,  5438. 

(7)  Boissieu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon^  p.  501. 

(8)  Allmer,  Inscriptions  antiques  de  Vienne,  t.  III,  p.  319. 

(9)  OreUi,  5907. 

(10)  Grammatica  celtica,  2*  édit.,  p.  162,  857. 

(11)  C.  /.  L.,  VII,  1330. 

(12)  Ibid.,  m,  4838. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -8 SA.  583 

inscription  d'Espagne  (1),  et  qui  explique  le  nom  de  Chan- 
tilly (Oise) ,  de  Chantillac  (Charente),  et  de  Cantillac  (Dor- 
dogne). 

ViNDomssA ,  aujourd'hui  Windisch  (Suisse) ,  existait  dès 
Tannée  71  de  notre  ère.  Il  s  y  trouvait,  à  cette  date,  un 
camp  romain  dont  parle  Tacite  (2).  Quelques  années  plus 
tard ,  en  79 ,  les  vicani  Vindonissenses  élevèrent  un  arc  en 
rhonneur  de  Mars,  d'Apollon  et  de  Minerve  (3).  Des  textes 
du  moyen  âge  nous  font  connaître  plusieurs  localités  du 
même  nom;  telle  est  Vindonissa^  qu'en  977  un  certain  Ma- 
nassès  tenait  à  titre  de  précaire  du  chapitre  de  Reims  (4)  ; 
c'est  aujourd'hui  Vendresse  (Ardennes).  On  peut  citer 
aussi  «  Vandonesse,  »  ainsi  appelée  en  1287,  aujourd'hui 
Vandenesse  (Nièvre)  (5)  ;  et  Vindonissa  qui ,  comme  nous 
l'apprend  Quicherat ,  est  aujourd'hui  Saint-Didier  de  For- 
mans  (Ain)  (6).  Vandenesse  (Côte-d'Or),  Vendenesse-lès- 
CharoUes,  et  Vendenesse-sur-Arroux  (Saône-et-Loire),  sont 
également  d'anciens  Vindonissa;  le  nom  du  dernier  a  été 
écrit  au  onzième  siècle  Vindenissa  (7)  et  Vendonessa  (8). 

Vindonissa  est  dérivé  de  Vindonius.  Vindonius  est  un 
gentilice  qui  nous  a  été  conservé  par  une  dédicace  au  dieu 
Latobius  dont  l'auteur  est  Vindonia  Vera  ;  ce  monument  a 
été  découvert  en  Styrie  (9).  Il  faut  probablement  lire  Vin- 
donius le  gentilice  de  T.  Vindonus  leranus,  connu  par  une 
inscription  du  Piémont  (10).  Dans  une  inscription  du  grand 


(1)  A.  Cantilius,  C.  I.  L„  II,  2113.  Cf.  ci-dessus,  p.  376. 

(2)  HislnireSy  liv.  IV,  c.  61  ;  cf.  Mommsen,  Inscripiiones  helvelicae,  344. 

(3)  Mommsen,  Inscriptiones  helveticae,  n*  245. 

(4)  Appendicula  hitttoriae  Flodoardi  ^  chez  Migne,  Patrologia  latina , 
t.  CXXXV,  col.  415,  où  Ton  a,  par  erreur,  imprimé  Vindenissa;  cf.  Lon- 
gnon,  Etude  sur  les  pagi  de  la  Gaule,  2*  partie,  p.  38. 

(5)  Soultrait,  Dictionnaire  topographique  du  déparlement  de  la  Nièvre  y 
p.  187. 

(6)  De  la  formation  française  des  anciens  noms  de  lieu,  p.  74. 

(7)  Auguste  Bernard,  Cartulaire  de  l'abbaye  de  Savigny,  p.  1052,  col.  2. 

(8)  Ibid.,  p.  592. 

(9)  C.  /.  L.,  III,  5098. 

(10)  fWd.,  V,  7228. 


584  LrVBE  II.  C^AJPlTRi;  XfV.  1 2. 

duché  de  Bade  on  a  la  les  noms  de  Gn.  Vindoniùls  Medsor  (1). 

Vindonius  est  dérivé  de  Vindo,  -onis,  sumoin  d'origine 
gauloise,  employé  seul  pour  désigner  des  individus  qui 
n'avaient  point  de  gentilice,  comme  nous  l'apprennent  les 
noms  d'Atressà,  Vi"ndoms'  fllia,  dans  ûwé'  iiïs'ériptîôn  de 
Hongrie  (2) ,  de  Bôniafta,  Vindohi^  fllia  (3)  ;  de  Vibentis , 
Vindonis  Mus  (4),  dans  des  inscriptions  de  Styi^îe.  Viïrtfo, 
-onis  est  lui-môtne  dérivé  d*un  thème  innâo-  employé 
comme  surnom,  sùi^tout  au  féminin.  Une  femme  appelée 
Ulpia  Vinda  nous  est  connue  par  un^  inscription  d'E^cla- 
vonie  (5)  ;  Vinda  Terti  filia  se  reùcontre  dans  une  inscrip- 
tion d'Autriche  (6)  ;  Nûmisia  Viiida ,  dans  une  inscription 
de  ritalie  méridionale  {7).-  Dans  un'é  inscription  d'Angle- 
terre, Vinda  est  le  nom  d'un  personnage  dont  le  sexe  est 
inconnu ,  et  qui  fait  une  dédicacé  à  Mars  (8).  Vindos  de- 
vient, en  irlandais ,  find,  plus  tard  finn;  c'est  un  adjectif 
qui  veut  dire  «  blanc,  »  et  par  extension  <c  beau  »  «  bon  ;  » 
en  même  temps,  c'est  un  nom  propre  porté  par  un  héros 
épique  et  par  divers  personnages  historiques  (9). 

L'ancien  norti  de  la  ville  de  Vienne,  en  Autriche,  est 
VindO'bona,  composé  de  deux  termes,  dont  le  second  signifie 
probablement  «  ville ,  »  et  a  fourni ,  tant  à  l'Italie  qu'à  la 
Gaule,  le  dérivé  bien  connu  Bononia.  La  question  se  pose 
de  savoir  si  le  premier  terme  est  un  adjectif  se  rapportant 
au  second  terme  (10),  ou  s'il  est  un  substantif  complément 
déterminatif  du  second  terme  (il).  Dans  la  première  hypo- 

(1)  Brambach,  Inscriptiones  rhenanaa,  n*  1701. 

(2)  C.  /.  L.,  III,  3380. 

(3)  Ibid.,  III,  5076. 

(4)  Ibid.,  III,  5105. 

(5)  I6id.,  III,  4110. 

(6)  Ibid.,  lU,  5663. 

(7)  Ibid,,  X,  4969. 

(8)  /6id.,  VII,  509. 

(9)  Voyez  O'Donovaa,  Annale  of  the  kingdom  of  IreUnd  by  the  four 
masiers,  1851,  t.  VII,  p.  179,  col.  2. 

(10)  Dans  ce  cas,  Vindo-bona  constituerait  un  composé  déterminatif,  comme 
dit  Bopp,  en  sanscrit  liarmadharaya. 

(1 1)  Dans  ce  cas,  Vindo-bona  serait  un  composé  de  dépendance,  tatpuruscHa. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -S 8 A.  585 

thèse,  VindO'bona  veut  dire  «  la  bonne  »  ou  «  la  belle 
ville  ;  »  dans  le  second  il  signifierait  «  ville  de  Vindos.  » 
Le  second  sens  s'accorde  avec  le  sens  probable  d'Augusto- 
bona,  ancien  nom  de  Troyes  (Aube),  qui  paraît  signifier 
«  ville  d'Auguste  ;  »  de  Julio-bona^  Lillebonne  (Seine-Infé- 
rieure), qui  semble  vouloir  dire  «  ville  de  Jules.  » 

ViLLONissA  est  le  nom  de  Villenauxe  (Aube)  dans  une 
charte  de  Tannée  1153;  on  trouve  ensuite  Vilonissa^  1194; 
Velonasse,  1223;  et  des  formes  plus  corrompues  (1).  Villo- 
nissa  vient  d'un  gentilice  Villonius  dont  la  forme  féminine 
se  rencontre  dans  une  inscription  de  Pavie  (2),  et  dont  la 
variante  Vilonius  a  été  relevée  dans  trois  autres  inscrip- 
tions de  ritalie  septentrionale  (4).  Villonius  dérive  du  nom 
pérégrin  Villo,  -onis,  que  nous  a  conservé  la  marque  de 
potier  VILLO  fecit,  musée  de  Genève  (4).  Comparez  le 
gentilice  Villius,  ci-dessus  p.  336. 

(1)  Bôutiot  et  Socssdf  Dictionnaire  topographique  de  VAube^  p.  183. 

(2)  C.  /.  L.,  V,  6438. 

(3)  Ibid,,  V,  1949,  2092,  2136. 

(4)  Ibid.,  XII,  5686.  935. 


CHAPITRE  XV. 


LE   SUFFIXE    LIGURE   '-OSCUS ,   -OSCUS  ^  -ItSCUS    DANS   L  ANTIQUIT?. 

ET  AU   MOYEN   AGE. 

SOMMAIRB  : 

1  1.  Lo  suffixe  -ascuê,  -asca  dans  TlUlie  du  nord -ouest  d*aprés  les  docu- 
ments antérieurs  au  mojren  âge.  —  1  2.  Le  suffixe  -ascu«  employé  à  for- 
mer des  noms  de  lieu  dérivés  de  gentilices  romains  dans  l'Italie  du  nord- 
ouest  d'après  les  documents  du  moyen  âge.  —  §  3.  Le  suffibie  -ascus 
employé  à  former  des  noms  de  lieux  dérivés  de  cognomina  romains  dan? 
ritalie  du  nord-ouest  d'après  les  documents  du  moyen  âge.  —  {  4.  Le 
suffixe  -ascus  et  ses  variantes  -oscus,  -uacus  employés  à  former  des  noms 
de  lieu  dérivés  de  gentilices  romains  en  Gaule  d*aprés  les  documenU  du 
moyen  âge.  —  (  5.  Le  suffixe  -ascus^  -oscus^  -uscus^  et  son  dérivé  -^isro. 
'OniSf  employés  à  former  des  noms  de  lieux  dérivés  de  cognomim 
romains  en  Oaule  d'après  les  documents  du  moyen  âge. 

S  !•'.  —  Le  suffixe  -ascus,  -asca  dans  V Italie  du  nord-oueM. 
d'après  les  documents  antérieurs  au  moyen  âge. 

L'antiquité  du  suffixe  ligure  -ascus  est  établie  par  une 
inscription  de  l'an  113  av.  J.-C.  C'est  un  jugement  arbitral 
portant  délimitation  entre  les  habitants  de  Gènes  et  leurs 
voisins  les  Viturii  Langenses.  Dans  ce  document  sont  men- 
tionnées quatre  rivières  dont  le  nom  se  termine  par  la 
forme  féminine  du  suffixe  -ascus  :  Vinelasca^  Neviasca^  Vera- 
glasca  et  Tulelasca,  La  forme  masculine  de  ce  suffixe  nous 
est  donnée  par  deux  lieux  dits  que  mentionne  la  table 
alimentaire  de  Véleia  :  Àreliascus  et  Caudalascus  (1). 

(l)GoL  5, 1.  20;  édition  E.  Desjardins,  p.  xyii,  u;  cf.  Giovanni  Flechia,  Di 


NOMS  DE  LIEU  EN  -A8GUS  ,  -08CUS  ,  -U8CU8.         58 

S  2.  - —  Le  suffixe  -ascus  employé  à  former  des  noms  de  li 
dérivés  de  gentilices  roTnains  dans  l'Italie  du  nord-oa» 
d'après  les  documents  du  moyen  dge. 

Le  sufBxe  -asous  n'est  pas  rare  dans  les  chartes  qui  fc 
ment  le  tome  I"  des  Historiae  patriae  momementa,  publié 
Turin  en  1836.  Parmi  les  noms  de  lieu  ainsi  terminés,  c* 
tains  peuvent  être  tout  entiers  ligures  comme  les  noms  i 
rivière  cités  plus  haut  ;  mais  d'autres  dérivent  certaineme 
tantôt  de  gentilices  romains,  tantôt  de  cognomina  romain 
De  gentilices  romains,  viennent  les  suivants  : 

Ansasca  (pour  Antiasea)  vallis,  dans  une  charte  d'A 
nulfe,  archevêque  de  Milan,  999  (1).  Ce  nom  de  lieu  e 
dérivé  d'un  gentilice  Antius,  d'où  vient  aussi  Antiacus  {'. 

BuRiASGus  eurtis,  mentionné  dans  un  diplôme  de  Ter 
pereur  Frédéric  Barberousse,  pour  l'église  cathédrale  ( 
Turin,  en  1159  '3),  dérive  du  gentilice  Burrius,  dont  on 
réuni  quelques  exemples,  et  qui  a  donné  son  nom  à  la  st 
tion  romaine  de  Burrium,  en  Grande-Bretagne.  Ce  geni 
lice  dérive  du  cognomen  Burrhus ,  usité  dans  la  gens  Afr 
nia  et  dans  la  gens  Antistia.  Comparez  Bur[r]iacus  (4). 

Gragnasgus  locus  en  1191  (5),  Castellum  Grignascum  f 
1014  (6),  dans  des  chartes  obtenues  par  l'abbaye  de  Sav 
gliano  et  par  ta  cathédrale  de  Pavie,  sont  tous  les  deux  â< 
notations  modernes  d'un  antique  *  Graniaseus,  qui  dérii 
du  gentilice  Granius,  d'où  aussi  Graniacus  et  Grinio  (7). 

aleune  forme  loc^li  dell'  ItalU  superfore,  diêterttizione  linguitttca.  Turi 
1871.  p.  62  et  Buiv.  —  C.  I.  L.,  t.  I.  p.  7Î;  t.  V,  p.  888;  t.  XI.  p.  215. 

(1)  Col.  3Î9  b. 

(2)  Voyez  ci-dessus,  page  378-379;  cf.  De-Vit,  Onomteticon,  I,  344-345 

(3)  Col,  816  c. 

(4)  Voyei  ci-dessus,  p.  203;  et.  De- Vil,  OnomaiHcon,  I,  77Î. 

(5)  CoL  973  c,  a. 

(6)  Col.  406  d. 

CÎÎVoyei  ci-dessus,  page  247,  513;  cf.  De-Vit,  OnomuUoon,  III,  271. 


m  UVRE  }\.  CHAPITHE  XV.  |  2. 

JuLiAscus  villa ^  mentionné,  en  1047,  dans  un  diplôme 
de  retnpereur  Henri  III  {)ouf  le  chapitre  de  Saint-Sauveur 
de  Turin  (1),  dérive  du  gentilice  Juiius,  d*où  Juli0CHs  (2). 

Lagnaschus  est  le  nom  d'une  cortis,  en  1064,  dans  une 
charte  obtenue  par  Tabbayè  N.-D.  de  Pigtterol  (S).  L^ortho- 
grâphe  prîmitiTe  est  *  Ldniascus ,  dérivé  du  géntilice  La- 
nius,  dont  on  a  quelques  exemples  (4). 

LismiAscus  (porur  *  Lieiniasôus)  locUs,  en  1047,  dans  un 
diplôme  impérial  pour  le  chapitre  Saint-Sauveur  de  Tu- 
rin (5)  dérive  du  géntilice  Licinius,  d'où  LiciniacuSy  p.  255. 

Maliascûs,  nommé  aussi  en  1647  par  le  même  diplôme 
impérial,  était  Tendroit  où  se  trouvait  située  l'église  de 
Saint-Etienne  :  Aeccle^ia  SancU  Stephani  in  Maliasco  6). 
Ce  nom  de  lieu  dérive  du  géntilice  bien  connu,  Mallius, 
d'où  Malliacus,  p.  266-267. 

PiNARiASCHA,  valléc  OÙ  était  une  paroisse  plebs  donnée  à 
l'abbaye  de  Cavour,  en  1037  (7);  vallis  Pinariasoay  eu 
1041  (8)  et  en  1159  (9),  est  un  dérivé  du  géntilice  Pinarius. 
un  des  plus  illustres  de  Rome.  P.  Pinarius  Mamercinus  Rufus 
fut  consul  l'an  489  avant  notre  ère,  L.  Pinarius  Mamercinus 
Rufus  fut  élevé  à  la  même  dignité  en  472.  P.  Pinarius  fut 
censeur  en  430.  Plusieurs  Pinarius  sont  mentionnés  dans 
les  œuvres  de  Cicéron  ;  d'autres  dans  les  inscriptions  du 
temps  des  empereurs  (10),  exemple  :  G.  Pinarius  Albus,  édile 


(1)  Col.  563  c. 

(2)  Sur  Juiius  et  «Tuliacus,  voyez  ci-dessus,  p.  141-142. 

(3)  Col.  607  c. 

(4)  De- Vit,  OnomaiSticon,  IV,  36. 

(5)  Col.  ^3  h. 

(6)  Col.  563  b. 

(7)  Col.  515  c. 

(8)  Col.  541  a. 

(9)  Col.  816  c. 

(10)  Paulf,  AMU-JSricycZopaedte,  t.  V,  p.  1622  et  suiv. 


NOMS  DE  LÎEU  EN  -ASdÛB,  -08CU8,  -U8CUB.         5TO 

à  Nimes  ;  L.  Pinarius  Optalus,  dont  une  inscription  d'Aps 
(Ârdèche),  nous  fait  connaître  les  noms  (1). 

pLAtcîASCA  pour  *  Pkmtiâsca ,  nom  â*\in  eastrmn ,  dont 
est  datée,  en  1037,  un  diplôme  de  Femperetir  Conrad  II  le 
Salique,  pour  Tabbaye  Saint-Just  de  8use  (2),  Ptos^sefwm 
en  1123  (3),  dérive  du  gentilice  Plautius,  un  des  plus  célè- 
bres de  Rome.  O.  Plautius  Ppoculus  fut  consul  en  Tan  858 
av.  J.-C;  C.  Plautius  Venno  obtint  la  même  tMgnîté  en 
347  ;  L.  Plautius  Venno,  en  330;  C.  Plautius  Decianus, 
en  329  ;  M.  Plautius  Silvanus,  Tan  2  avant  J.-C,  etc.  (4). 

RuvELiAscus  en  940  (5),  RuviliasctAS  en  1010  (6)  et  en 
1183  (7),  dans  des  chartes  de  la  cathédrale  d'Asti,  est  au- 
jourd'hui Revigliasco,  qui  tient  lieu  d*un  antique  *Rupi' 
liascus,.  Ce  nom  de  lieu  est  dérivé  du  gentilice  Rupil'rus. 
P.  Rupilius,  homme  d'origine  obscure,  obtint  à  Rome  les 
honneurs  consulaires  Tan  132  av.  J.-C.  P.  Rupilius  Rex, 
postérieur  d'un  siècle,  doit,  dans  le  monde  littéraire,  une 
certaine  notoriété  à  une  satire  d'Horace  qui  est  la  septième 
du  livre  premier,  et  qui  commence  ainsi  : 

Proscripti  Ragis  RupiU  pu&  a^[tte  venenum  (^ 

Venzasgus  pour  *  Venciascus^  en  1192,  dans  le3  ai»l|iv09 
de  la  ville  de  Verceil  (9),  dérive  du  gentilice  Vendus.  Une 
iuscriptioQ,  aujourd'hui  détcuite,  de  Die  (Drômoi),  wMt  été 
giavée  en  l'honneur  da  de^ua  Yeiiiiciitô  Juvieaticiau»^  p^éii^ 
d'Auguste,  en  recounwasance  de  la  lib^irs^Âtô  ào^l  il  civi^t 


(1)  c.  /.  L.,  XII,  26T7,  3261. 

(2)  Col.  513  l>. 

(3)  Col.  755  c. 

(4)  Paul/,  Real'Encyclopaedie,  U  V,  p.  1721-1728. 

(5)  Col.  145  a. 

(6)  Col.  379  c. 

(7)  Col.  922  c. 

(8)  Sur  les  Rupilius,  voyez  Pauly,  ReAl-Encyclop&edie ,  t.  VI,  p.  5{{5-$66. 
(?)  Col.  987  d. 


5Q0  LIVRE  II.  CHAPITRE  XV.  {  3. 

fait  preuve  ea  donnant  des  spectacles  au  peuple  des  Fo- 
contii  (1). 

§  3.  —  Le  suffixe  -ascus  employé  à  fbrmer  des  noms  de  lieu 
dérivés  de  cognomina  romains  dans  CHaUê  du  nord^-ouest 
d'après  les  docu/ments  du  moyen  âge. 

En  voici  des  exemples,  empruntés  comme  les  précédents 
au  t.  I  des  Historiae  patriœ  monwnenta  de  Turin. 

Cavrâscus  (pour  Caprascus) ,  nom  d'une  villa  en  1033 , 
dans  une  charte  du  monastère  de  Saint-Etienne  de  Gè- 
nes (2),  dérive  du  cognomen  Caper.  Le  grammairien  Fla- 
vius Caper,  qui  avait  donné  des  leçons  à  un  empereur, 
s'est  amusé  à  rechercher  dans  les  œuvres  de  Cicéron  les  pas- 
sages où  le  grand  orateur  s'était  servi  du  superlatif  piissi- 
mus.  L'intérêt  de  cette  recherche  tenait  à  ce  que  Cicéron  avait 
soutenu,  dans  une  de  ses  Philippiques^  que  le  mot  piissimus, 
employé  par  le  triumvir  Antoine ,  n'était  pas  latin  (3). 

Clavascus,  dans  un  diplôme  de  1159,  pour  la  cathé- 
drale de  Turin ,  est  le  nom  d'une  ourtis  (4).  Il  dérive  du 
cognomen  Clavus,  porté  par  un  personnage  auquel  fut 
adressé,  en  230,  un  rescrit  de  l'empereur  Alexandre- 
Sévère  (5). 

Martibiascus,  en  1047,  était  une  localité  où  se  trouvait 
une  cortis  et  une  chapelle.  Nous  l'apprenons  par  un  diplôme 
de  l'empereur  Henri  III,  pour  le  chapitre  de  Saint-Sauveur 
de  Turin  (6).  Ce  nom  de  lieu  est  dérivé  du  cognomen  Mar- 


(1)  C.  /.  L.,  XII,  1585»  Cf.  ci-de88U8,  p.  337,  VincUcuM  de  Vintius. 

(2)  Col.  502  a. 

(3)  TeufFel,  Geschichte  der  rômischen  Liter&tur,  3*  édit,  p.  801.  De  Caper 
est  venu  le  gentilice  Caprins,  ci-dessns,  p.  435,  436. 

(4)  Col.  816  d. 

(5)  Gode  Justinien,  Uvre  IX,  t.  xxzv,  1.  2. 

(6)  Col.  563  d. 


NOMS  DE  UEU  EN  -A8CUB,  -08CU8,  -USCUS.         591 

tyrius,  dont  on  a  des  exemples  dans  des  textes  romains  et 
qui  y  a  été  introduit  par  une  influence  chrétienne  (1). 

NoYELLASCA  est  le  nom  d'une  vallée  dans  une  charte  de 
Saint-Sauveur  de  Turin  vers  Tannée  1120  (2),  et  dans  un 
diplôme  accordé  par  l'empereur  Frédéric  P'  à  la  cathédrale 
de  Turin  en  1159  (3).  C'est  un  dérivé  du  cognomen  Novel- 
lus  très  fréquent  dans  les  inscriptions  de  la  haute  Italie  et 
de  la  Qaule  (4). 

QuiNTASGHA  est  uu  endroit  où  se  trouvait  une  église  en 
1190,  comme  on  l'apprend  par  une  charte  de  cette  date 
concernant  la  ville  de  Verceil  (5).  Ce  nom  de  lieu  dérive 
du  cognomen  Quintus  (6),  qu'on  trouve  aussi  employé 
comme  nom  pérégrin  (7). 

§4.  —  Le  suffire  -ascus  et  ses  vctriantes  -oscus,  -uscus, 
employés  à  former  des  noms  de  lieu  dérivés  de  gentilices 
romains  en  Gaule  d'après  les  documents  du  moyen  âge. 

Le  suffixe  -asous  a  une  variante  -^sous  qu'on  trouve ,  en 
1212,  dans  une  charte  de  l'abbaye  Saint-Just  de  Suse  (8), 
où  se  rencontre  deux  fois  le  nom  de  lieu  Canosgus,  dérivé 
du  cognomen  latin  Canus  étudié  plus  haut  (9). 

En  France  le  suffixe  ligure  -oscus  a  deux  variantes  : 
"Oscus  et  uscus.  Comme  dans  l'Italie  du  nord,  il  a  servi  à 
former  des  noms  de  lieux  dérivés  de  gentilices  romains  et 
et  de  cognomina  romains. 


(1)  De- Vit,  Onomaaticon,  FV,  383. 

(2)  Col.  744  d  ;  cf.  col.  816  c. 

(3)  Col.  816  c. 

(4)  Pauly,  Real'Encyclop&edie ,  t.  V,  p.  715.  —  De  là  le  gentilice  Novel- 
lius,  ci-dessus,  p.  291. 

(5)  Col.  957  b. 

(6)  C.  I.  L.,  XII,  4062. 

(7)  Ibid.,  XII,  3856,  4210,  5424,  etc.  Cf.  Quintins,  d*où  Quintiacuê,  p.  156. 

(8)  Col.  1187  d,  1188  b. 

(9)  Pages  471-472. 


A.  -:  U  st^^e  ^^us  en  Gflule. 

^Atisiasou^  est  probablemeût  la  forme  la  i^us  ad^enne 
du  m^m  de  la  Localité  app^ée  à  la  fii»  du  oQÛèf&a  sié- 
€i^  AdimsfQ  à  Tablatif  d«a&  le  Cartmladre  d&  Conqu^i; 
elle  étrà  ùinée  prè»  ée  ChaunhaG ,  eoimnuae  de  Sai- 
1^9HC<mrbaUè8  (Aveyron)  (1).  *Mi$i0aGm  yieat  d'Aiisias, 
gentilice  connu  par  les  inscriptions  (2) ,  et  doot  oa  trouve 
quelques  exemples  en  Gaule  :  C.  Atisius  Secundus,  Ar- 
les (3);  G.  Atisiuô  Seduîns,  Beiauci^oissanf  (feérre)  (♦);  C.  Ali- 
sitts  PauUintis,  Saiùt-Aupre  (Isère)  (5),  etc. 

BASSîAâeus,  écrit  à  Pablatif  Basdusco  dans  un  acte  de 
Tannée  739 ,  qui  comprend  cette  localité  dans  Bïie  liste  de 
noms  de  lieux  situés  dans  le  Viennois  et  dans  le  Lyon- 
nais (6).  Ge  nom  est  dérivé  du  gentilice  roDÈiafn  Bassius  (7), 
qu'on  trouve  en  Gaule  dans  une  marque  de  potier  (8),  et 
dont  on  a  parlé  plus  haut,  p.  427. 

Au  ligure  Bassiascus,  noté  BasciascuSy  on  peut  comparer 
le  gaulois  BasciçkcHs  pour  Bmsiacus^  nom  des  commune»  de 
de  Bes8ey*-la-Cour  et  de  Bessey-les-Clteaux ,  dans  des  do- 
euments  du  dixième  et  du  onzième  siècle.  Ges  deux  com- 
munes appartiennent  au  département  de  la  Gôte-d'Or  (0). 
L'^orihiographe  plus  régulière  Bamako  à  l'ablatif  se  trouve, 
en  844  9  dan»  uïie  charte  con^rvée  |ilar  le  Gartuiaife  de 
Gonquofi*  (Aveyron)  (10).  Des  chsirtes  du  douzième  siècle 
dans  le  CartuLaire  de  Beaulieu  {Cmtéw)  nous  offirent  Ton 

(1)  G.  Desjardins,  Cartulaire  de  Conqu99f  p^  81,  429^  4M. 

(2)  De- Vit,  OnomaLSticoriy  I,  557. 

(3)  C.  /.  L.,  XII,  764. 

(4)  16id.,  XII,  2200. 

(5)  Ibid.,  XII,  2203. 

(6)  CaLrtul&ire  de  Saint-Hugues  de  Grenoble^  p.  37. 

(7)  De- Vit,  Onomasticorif  I,  685. 

(8)  C.  /.  L.,  XU,  5686,  122,  123. 

(9)  àtarnier,  Nomenclature,  p.  78,  19. 

(10)  G.  Desjardins,  Cartul&ire  de  Conques,  p.  186. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -A8CUS,  -0BCU8,  -UBCUB.  593 
thographe  plus  moderne  de  Baissiaco  (1)  et  de  Baissaco  (2); 
il  s'agit  ici  de  Beyssac,  commune  de  Strenquels  (Lot)  (3). 

Gratiasca,  ai,Dsi  nommé  dans  une  charte  du  onzième  siè- 
cle (4),  noté  aussi  à  la  même  époque  Graciasca  [5) ,  fira- 
ziasea  (6),  et  Grezasca  (7),  pu  Grezaschçt  (8),  aujourd'hui 
Gréasque  (Bouches-du-Rhône) ,  est  un  dérivé  du  gentilice 
Gratius  étudié  plus  haut,  p.  346,  et  qui  a  donné  le  nom 
de  lieu  dérivé  gaulois  Gratiams. 

B.  —  Le  tufUxe  oscua  en  Gaule, 

Albabioscus.  Un  document  de  l'année  739  met  dans  le 
pays  d'EmbruQ  une  coUmica  quae  dicitur  Albariosco  (9).  Ce 
nom  de  lieu  dérive  d'un  gentilice  "Albarius,  dont  on  n'a 
pas  d'exemples  dans  les  documents  romains ,  mais  dont 
l'existence  peut  être  conclue  de  celle  du  gentilice  Albare- 
nius  (10),  dérivé  d"Albarenus,  lequel  suppose  un  parallèle 
'Albarius. 

Albioscus  est  une  localité  ou  l'abbaye  de  Saint- Victor  de 
Marseille  croyait  avoir  des  colons  en  814  (11).  A  la  même 
date  cette  abbaye  avait  des  colons  dans  un  lieu  appelé 
Àlbiomus  (12).  Albianus.  est  la  forme  romaine  correspondant 
au  ligure  AWioscus.  On  a  étudié  plus  haut  la  forme  gau- 
loise Albiaous  et  à  cette  occasion  le  gentilice  Alhius  (13). 


(I)  1118,  Dalodia,  Ctrtulair»  ds  Bsaulleu,  p.  64. 
(!)  1112,  Deloche,  Ibfd.,  p.  63. 

(^  Deloche,  xMd.,  p.  370. 

(t)  aa^rard,  CarluUire  d«  Salnl-Viclor  de  UartilUe,  t.  1,  p.  1S&. 

(5)  Onérard,  IMd.,  p.  176. 

(6)  Onérard,  <bld.,  p.  160. 

(T)  Qnérard,  Ibid.,  p.  373,  274. 
(S)  Onèrard,  ibid.,  p.  132,  1S3,  154. 

(tq  CarluUfrs  d«  Saint-Hugxu»  de  Grenoble,  p.  39;  ef  Pardesins,  Ofplo- 
mila,  II,  372. 
(10)  De- VU,  Onomaatfeon,  t.  I,  p.  104. 

(II)  Qnérard,  Cartula<r«  de  Stint-Victor  de  Wameflla,  t.  II,  p.  637,  n*  7. 
[12)  Oaèrard,  ibfd,.  p.  643,  tf  23. 

(O)  Page  190. 

38 


594  LIVRE  II.  CHAPITRE  XV.  {  4. 

*  Canioscus  ou  Kanioscus  doit  être  l'orthographe  primitive 
du  nom  du  château  appelé  Kagnosco  à  l'ablatif  latin,  et 
Cbainosc  en  langue  vulgaire  dans  des  chartes  du  onzième 
siècle,  c'est  aujourd'hui  Saint-Jacques-de-Cagnosc ,  com- 
mune de  Gonfaron  (Var)  (1).  Ce  nom  de  lieu  est  dérivé  du 
gentilice  romain  Canius,  étudié  plus  haut,  p.  210,  211, 
au  sujet  de  son  dérivé  gaulois  Caniacus. 

Catalioscus.  Ce  nom  de  lieu  est  écrit  à  l'ablatif  Cata- 
liosco  dans  une  charte  du  onzième  siècle  conservée  par  le 
Cartulaire  de  Saint-  Victor  de  Marseille  (2).  Il  s'agit  proba- 
blement d'une  localité  située  dans  les  Bouches-du-Rhône. 
Catalioscus  est  dérivé  du  gentilice  Catalius.  On  a  trouvé  à 
Tresques  (Gard)  l'épitaphe  d'une  femme  appelée  Catalia 
Servata  (3).  Ce  gentilice  est  dérivé  de  Catalus,  qui  est  à  la 
fois  un  nom  de  peuple  et  un  nom  d'homme  pérégrin  (4). 

CuRioscus ,  aujourd'hui  Curiusque ,  commune  du  Brus- 
quet  (Basses- Alpes),  est  mentionné  à  l'ablatif  Curiosco  dans 
la  liste  des  terres  où  l'abbaye  de  Saint-Victor  de  Marseille 
avait  des  colons,  en  814  (5).  Ce  nom  de  lieu  dérive  du 
gentilice  romain  Curius ,  illustré  principalement  par 
M.'  Curius  Dentatus,  trois  fois  consul,  290,  275,  274  avant 
notre  ère,  enfln  censeur  en  272  (6).  Il  pénétra  en  Gaule, 
comme  l'attestent  à  Vaison  (Vaucluse),  le  fragment  d'inscrip- 
tion :  Sex.  Curius  (7),  et  à  Nimes  l'inscription  gravée  par 
les  soins  de  Q.  Curius  Aurelianus  (8). 

Ce  gentilice  a  dû  avoir  un  dérivé  gaulois  Curiaciu  qui 


(1)  Guérard,  Carfulatra  de  Saint-Victor  de  Ifaraeille,  t.  I,  p.  148;  cH  1. 1, 
p.  388  et  t.  II,  p.  874. 

(2)  Tome  I,  p.  599. 

(3)  C.  /.  L.,  XII,  2657. 

(4)  Voyex  ci-dessus,  p.  487-488. 

(5)  Guérard,  Cartulaire  de  Saint-Victor  de  Marseille,  t.  II,  p.  646»  n*  U. 

(6)  De- Vit,  Onomasticon,  t.  II,  p.  517. 

(7)  C.  I.  L.,  XII,  1407. 

(8)  Ibid.,  XII,  3201. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -A8CU8  ,  -0SCU8 ,  -U8CUS.         505 

est  noté  Coriaco  au  cas  indirect  dans  un  diplôme  royal 
mérovingien  du  milieu  du  septième  siècle  (1).  Les  trois 
communes  de  Cuiry,  situées  dans  le  département  de  TAisne, 
doivent  être  d'anciens  *  CvHacus. 

*  Flavioscus  est  probablement  la  forme  primitive  du  nom 
de  Flayosc  (Var),  écrite  à  Tablatif,  au  onzième  siècle, 
Plaiosco  dans  deux  chartes  conservées  par  le  Cartulaire  de 
Saint'  Victor  de  Marseille  (2) ,  Flaiossco  dans  une  autre  (3) , 
en  langue  vulgaire  Flaiosc  (4).  La  forme  gauloise  corres- 
pondante est  Flaiacus  =  *Flamacus^  dans  une  charte  du 
département  de  l'Yonne,  en  1133  (5);  Flaiacus  est  aujour- 
d'hui Fley.  Fley  pour  Flaviacus  (Yonne),  comme  Flaiosc 
pour  Flavioscus  (Var) ,  ont  perdu  un  v  ;  le  môme  phéno- 
mène s'est  produit  dans  le  nom  de  Saint-Germer-de-Fly 
(Oise),  et  dans  celui  de  Flagy  (Jura),  qui  sont  d'anciens 
Flaviacus  (6).  On  a  parlé  plus  haut  (p.  234)  du  gentilice 
Flavius. 

*  Manioscus  ou  *  Magnioscus  doit  être  la  forme  primitive 
du  nom  de  lieu  appelé  à  l'ablatif  Mainosco  dans  Tétat  des 
colons  appartenant  à  l'abbaye  de  Saint- Victor  de  Marseille 
en  814  (7).  On  connaît  quelques  exemples  du  gentilice  Ma- 
gnius  ;  nous  l'avons  étudié  (p.  265)  au  sujet  du  nom  de 
Ueu  Magniaaus,  Manius  est  le  nom  d'un  potier  dont  on  a 
trouvé  la  marque  à  Fréjus  (8). 

*  Marcioscus  doit  être  la  forme  primitive  du  nom  de  lieu 
écrit  au  cas  indirect  Marzosco  dans  une  charte  de  l'année  970. 


(1)  Tardif,  Monuments  historiqties,  p.  13,  col.  1. 

(2)  Quérard,  Cartulaire  de  Saint-Victor  de  Maraeille^  t.  I,  p.  478,  513. 

(3)  Guérard,  tbid.,  t.  II,  p.  209. 

(4)  Quérard,  ibid.,  1. 1,  p.  4d8. 

(5)  Qnantin,  Cartulaire  de  VYonne,  t.  I,  p.  292. 

(6)  Longnon,  Atlas  historique  de  la  France,  p.  180. 

(7)  Quérard,  Cartulaire  de  Saint-Victor  de  Afarseille,  U  II,  p.  650. 

(8)  C.  /.  L.,  XII,  5686,  533. 


596  LIVRE  II.  CHAPITRE  XV.  {  4. 

Il  s*agit  d'une  localité  située  dans  le  comté  de  Sisteron 
(Basses-Alpes)  (1).  On  a  étudié  plus  haut  (p.  272-274),  à 
propos  du  dérivé  gaulois  Marciacus,  le  gentilice  romain 
Marcius,  dont  le  ligure  Marcioscus  dérive  également. 

*MoNTioscus  est  probablement  la  notation  primitive  du 
nom  de  lieu  appelé  à  Tablatif .  dans  les  chartes  de  Cluny, 
au  dixième  siècle,  Montiosco  (2),  Monciosco  (3),  Manzosco  (4). 
Ce  nom  de  lieu  dérive  d'un  gentilice  Moncius  (?),  Mon- 
tius  (?)  ou  Muntius  (?)  que  nous  n'avons  pas  trouvé,  mais 
qui  explique  le  nom  de  lieu  gaulois  écrit  à  l'ablatif  Jfun- 
ciaco  dans  un  diplôme  royal  mérovingien  du  septième 
siècle  (5).  Mousson  (Meurthe-et-Moselle),  Montionis  au  gé- 
nitif dans  la  période  carlovingienne  (6)  nous  offre  un  antre 
dérivé  du  même  gentilice  avec  un  suffixe  différent. 

ViLioscus,  à  l'ablatif  Viliosoo  en  1038  (7),  aujourd'hui 
Vilhosc  (Basses-Alpes) ,  est  un  dérivé  du  gentilice  Viliins 
(p.  336),  bien  connu  dans  l'histoire  romaine  (8) ,  et  qui  a 
donné  le  dérivé  gaulois  Villiacus ,  d'où  Villy  (Yonnejf  (9). 
Villy-en-Trode  et  Villy-le-Maréchal  (Aube)  (10). 

*  ViTRioscus  est  la  bonne  notation  du  nom  de  lieu  écrit 
à  l'ablatif,  Vitrosco  dans  trois  chartes  du  dixième  siècle  (11). 
Aujourd'hui,  pour  désigner  cette  localité,  on  a  substitué  à 
la  désinence  ligure  celle  par  laquelle  le  patois  du  pays  re- 


(1)  Guérard,  C&riulaire  de  Saint-Victor  de  Marseille,  t.  I,  p.  59Ï. 

(2)  Brael,  Recueil  des  chartes  de  Vabbayè  de  Cluny,  t.  IT,  p.  440. 

(3)  Bruel,  ibid.,  t.  II,  p.  414. 

(4)  Bruel,  ibid,,  t.  III,  p.  151. 

(5)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  13, 

(6)  Lepage,  Dictionnaire  topographique  dé  la  Meurthê,  art.  Pont-à- 
Mousson,  p.  110. 

(7)  Guérard,  Cartulaire  de  Saint-Victor  de  M^rs^illSy  t.  Il,  p.  65. 

(8)  Pauly,  Real-Encyclopaedie,  t.  VI,  p.  2611-2613. 

(9)  Quantin,  Dictionnaire  topographique  de  VYonne,  p.  144. 

(10)  Boutiot  et  Socard,  Dictionnaire  topographique  de  l'Aube,  p.  187. 

(11)  Chevalier,  Cartulaire  de  Saint-André^le-Baêy  p.  35,  36. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -A8CU8,  -08CUB,  -U8CUS.         597 

présente  le  suflSxe  gaulois  -acus  ;  l'ancien  *  Vitrioscus  est 
aujourd'hui  Vitrieu,  commune  de  Vernioz  (Isère).  Vitrieu 
=  Yitriacus.  Vitriacus  lui-même  tient  lieu  d'un  primitif 
Victoriacus  venant  du  gentilice  Victorius,  comme  on  Ta 
montré  plus  haut  (p.  334-335).  *  Vitrioscus^  noté  Vitroscus. 
est  le  successeur  d'un  plus  ancien  *  Yictorioscus. 

§5.  —  Les  suffixes  1*  -ascus,  -oscus,  -uscus,  2**  -usco,  -onis, 
employés  à  former  des  noms  de  lieux  dérivés  de  cognomina 
romains  en  Gaule,  d'après  les  documents  du  moyen  âge. 

Les  noms  de  lieux  suivants  ont  été  tirés  en  partie  cer- 
tainement, en  partie  probablement  de  cognomina  romains, 
les  uns  d'origine  latine,  les  autres  d'origine  barbare. 

A.  —  £^  suffixe  -ascus  en  Gaule. 

Canasgus  est  une  localité  dans  laquelle,  en  911,  l'abbaye 
de  Saint-Julien  de  Brioude  acquit  une  propriété  (1).  La  si- 
tuation précise  de  cette  localité  n'est  pas  déterminée  ;  mais 
il  résulte  du  contexte  qu'elle  devait  être  située  près  de 
Brioude  (Haute-Loire).  Canascus  est  dérivé  de  Canus,  cog- 
nomen  latin  dont  on  a  quelques  exemples  :  Q.  Gellius 
Canus,  ami  de  Cicéron  ;  M.  Annius  Kanus,  dont  l'épitaphe 
est  conservée  au  musée  de  Narbonne  (2). 

B.  —  le  suffixe  -oscus,  -uscus  en  Gaule. 

Artonoscus,  à  l'ablatif  Artonosco^  est  un  des  noms  de 
lieu  mentionnés,  en  739,  dans  le  testament  d'Abbon  pour 
l'abbaye  de  Novalese  (3).  Artonoscus  parait  avoir  été  situé 
dans  le  pays  de  Gap  ;  ce  nom  est  dérivé  du  cogixomen  Arto  (4), 

(1)  Doniol,  Cartui.  de  BrioudCf  p.  61. 

(2)  De- Vit,  Onomasticon,  III,  220.  C.  /.  L.,  XII,  4586. 

(3)  CàriptUire  de  Saint  ^Hugues  de  Grenoble,  p.  40. 

(4)  De-Vit,  Onomaêticon,  î,  494. 


508  LIVRE  II    CHAPITRE  XV.  }  5. 

dérivé  lui-même  d'Artos,  «  ours,  »  qui  a  été  aussi  employé 
comme  nom  d'homme.  Artos  est  gaulois  (1)  ;  son  dérive 
Arto,  -onis,  avec  les  désinences  latines,  ou  Artu,  Artunos. 
Artunnos,  avec  les  désinences  gauloises,  a  fourni  à  la  géo- 
graphie de  la  France  un  dérivé  en  -acus  :  c'est  Arthonnay 
(Yonne),  au  onzième  siècle  Àrtunnacus  (2). 

Blanuscus  ,  en  M&connais ,  dans  une  charte  de  938  :3;  ; 
à  Tablatif  Blanusco  en  930  (4),  Blanosco  au  onzième  siè- 
cle (5),  est  aujourd'hui  Blanot  (Saône-et-Loire)  (6).  Ce  nom 
de  lieu  dérive  du  nom  servile  Blanus,  d'origine  grecque  et 
qui  veut  dire  «  chassieux  (7).  »  De  ce  nom  a  été  tiré  uu 
gentilice ,  Blanius ,  dont  l'existence  est  démontrée  par  le 
nom  de  lieu  Blaniacus,  Blanidcus  désigne,  dans  la  Chronique 
de  Bèze,  Blagny  (Côte-d'Or)  (8). 

Branoscus,  aujourd'hui  Branoux,  commune  de  Blanna- 
ves  (Gard),  était  encore  appelé  à  l'ablatif,  au  quatorzième 
siècle,  Branosco  et  Branasco  (9).  Ce  nom  de  lieu  est  dérive 
du  nom  d'homme  gaulois  Branus  ou  Brannus,  dont  le  seus 
primitif  est  «  corbeau,  »  et  dont  on  a  déjà  parlé  plus  haut. 
p.  399-400. 

Bricosci,  à  l'ablatif  Bricoscis^  nom  d'une  localité  située 
dans  la  vallée  de  Maurienne,  en  739  (10),  dérive  du  nom 
pérégrin  Bricus  par  i  long  et  un  seul  c,  ou  Briccus  avec  i 
bref  et  c  double.  Ce  nom  pérégrin  est  conservé  par  une 


(1)  Voy.  ci-dessns,  p.  383. 

(2)  Quantin,  C&rtuUire  de  VYonney  t.  II,  p.  27. 

(3)  Bruci,  Recueil  des  chartes  de  Cluny,  t.  I,  p.  469. < 

(4)  Bniel,  tbtd.,  p.  368. 

(5)  Bruel.  ibid.,  t.  III,  p.  797. 

(6)  Chavot,  Le  Màconn&is,  p.  72. 

(7)  De- Vit,  OnomsLSticon,  t.  I,  p.  729. 

(8)  Garnior,  Nomenclature  y  p.  41,  n*  177;  cf.,  du  même  auteur,  rèditiun 
de  la  chronique  de  Bèze,  p.  235. 

(9)  Germer-Durand,  Dictionnaire  topographique  du  Gard,  p.  35. 

(10)  Cartul&ire  de  Saint-Hugues  de  Grenoble,  p.  37. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -ASCU8,  -OSCUB,  -UBCUB.         5M 

marque  de  potier  qu'on  a  trouvée  à  Vienne  (Isère)  (11. 
Briccus  ou  Bricus  a  donné  le  nom  d'homme  dérivé,  Brico. 
au  génitif  Briconis,  gravé  sur  une  patère  de  bronze  qu'or 
a  découverte  récemment  près  de  Genève  (2).  De  Briccus 
aussi  vient  le  gentilice  Briccius,  attesté  par  une  épilaphc 
que  possède  le  musée  de  Narbonne  (3).  On  a  tiré  de  Briccius 
le  nom  de  lieu  gaulois  *Bncciacus,  d'où  probablement  : 
Brissac  (Hérault),  Brissiacum  en  1189(4);  Brissy  (Aisne). 
Brissiacus  en  1123  ;  Brixey-aux-Chanoines  (Meuse),  Bris- 
Htum  en  1141  (5). 

Cauboscus  ,  à  l'ablatif  Cambosco ,  est  une  villa  située  er 
Lyonnais,  vers  l'an  1000  (6)  ;  il  s'y  trouvait  une  églis* 
vers  1060  (7)  ;  c'est  aujourd'hui  Chambost-Longessaignf 
(Rhône)  (8).  CamhoscMS  est  dérivé  du  nom  pérégrin  Cambus 
attesté  par  une  marque  de  potier  (9).  Ce  nom  est  d'originf 
gauloise  ;  c'est  un  adjectif  qui  veut  dire  «■  courbe  ;  »  oi: 
en  a  tiré  ua  nom  d'homme,  Cambius,  d'oii  le  dérivé  géo- 
graphique Catnbiovicenses{i{!i).  Un  autre  dérivé  géographique 
de  Cambus  est  Cambo  ou  Cambonum,  aujourd'hui  le  Cbam- 
bon  (Corréze)  (11);  comparez  Cambonum,  nom  d'une  statior 
romaine  qui  est  aujourd'hui  Le  Bègue  commune  de  Le 
Beaume  (Hautes-Alpes)  (12). 

*Cahiiloscus,  à  l'ablatif  Camblosco.  en  Sénunais,  dau! 


(1)  c.  /.  L.,  xn,  141. 

(I)  Ibid.,  XII,  5698,  4. 

(3)  Ibid.,  XII,  *663. 

(4)  Eugène  Thomas,  DicIionnairB  topographiquK  de  l'Hiraiilt,  p.  26, 

(5)  Liénard,  Dictionnaire  topographique  de  la  Meuse,  p.  26. 
(6|  Auguste  Born^rd,  Carlutaire  de  Savigny,  t.  I,  p.  267. 

(7)  Auguste  Bernard,  ibid.,  p.  386. 

(8)  AugUBte  Bernard,  ihid.,  t.  II,  p.  1193. 

(9)  C.  /,  i...  XII,  5686.  163,  Allmor  et  Dissard,  Trion,  t.  II,  p.  367. 

(10)  Ibid.,  XII,  3503  ;  Table  de  Peutinger,  segment  II,  4. 

(II)  Deloche.  Carlutairc  de  Beaulieu,  p.  90,  135,  372. 

(12)  Itinéraire  do  Bordeaux  à  Jérusalem  publié  à  la  suite  do  l'Klnérair. 
d'Anlonln,  p.  bhb,  1.  1.  —  Cambo-,  ci-dessus  p.  1S1,  est  peut-être  un  non 
d'homme  dans  !e  composé  Cambo-dunum. 


600  LIVRE  IL  CHAPITRE  XV.  |  5. 

un  diplôme  de  Charles  le  Chauve  (1),  aujourd'hui  Cham- 
plost  (Yonne),  dérive  du  mot  gaulois  Camulus,  usité  à  la  fois 
comme  nom  divin  et  comme  nom  pérégrin  (2).  De  Camulus 
on  a  tiré  le  gentilice  Camulius,  p.  353-354. 

*  Catharoscus  est  probablement  un  dérivé  d'un  cognomen. 
Catharus,  d'origine  grecque.  *  Catharoscus  parait  plusieurs 
fois  dans  les  chartes  d.e  Tabbaye  de  Saint-Victor  de  Mar- 
seille ;  il  est  appelé,  à  l'ablatif^  en  845,  Cadarosco  villa  (3)  ; 
en  1043,  villa  Kadarosco  (4)  ;  en  1057,  Castro  Kadarosco  (5),  et€. 
Son  nom  persiste  dans  celui  de  la  chapelle  de  Notre-Dame 
de  Cadarot  (6). 

Le  môme  nom  d'homme,  avec  un  suflBxe  gaulois,  a  donné, 
à  Paris,  le  nom  de  lieu  Charonne,  anciennement  Cataronis 
potestas  (7),  Cadorona  (8). 

*Venoscus,  en  langue  vulgaire  Venosc,  vers  1100  (9).  est 
aujourd'hui  Venosc  (Isère).  C'est  probablement  un  dérivé 
d'un  cognomen  *Venus,  dont  la  variante  masculine  Vena 
sert  de  cognomen  à  C.  Donnius  dans  les  inscriptions  d'un 
pont  romain  à  Saint-Chamas  (Bouches-du-Rhône)  (10).  On 
trouve  la  variante  Venna,  nom  pérégrin  d'une  femme, 
dans  une  inscription  de  Briançon  (11). 

ViNDAuscA  est  l'orthographe  la  plus  ancienne  du  nom  de 
Venasque  (Vaucluse) ,  Vennasca  au  onzième  siècle  (12),  Ke- 


(1)  Lalore,  C&rlulaire  de  Montier-la-Celle,  p.  194. 

(2)  De- Vit,  Onomasticorif  t.  II,  p.  104.  Cf.  Chamblay  (Jura,  Eure-et-Loir, 
Indre). 

(3)  Guérard,  Cartulaire  de  Saint-Victor  de  Marseille^  t.  I,  p.  33. 

(4)  Guérard,  ibid.,  p.  226. 

(5)  Guérard,  ibid.,  p.  225. 

(6)  Guérard,  ibid,,  t.~  II,  p.  852. 

CI)  Robert  de  Lasteyrie,  Cartulaire  de  Paris,  p.  99. 

(8)  Robert  de  Lasteyrie,  tbid.,  p.  107. 

(9)  Cartulaire  de  Saint-Huguea  de  Grenoble,  p.  198. 

(10)  CI.  L.,  XII,  647. 
(ll)/6id.,  XII,  95. 

(12)  Guérard,  Cartulaire  de  Saint-Victor  de  ManeilU^  t,  II,  p.  6. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -ABCUS  ,  -08CUS ,  -U8CU8.         601 

nasca  au  douzième  (1).  On  lit  Vinda/usca  dans  plusieurs  ma- 
nuscrits de  la  NoHce  des  provinces  et  cités  de  la  Gaule  (2). 
On  a  tiré  de  Vindausca,  sous  Tempire  romain,  le  gentilice 
dérivé  Vindauscius,  au  féminin  Vindauscia,  dans  deux  ins- 
criptions de  Valence  (Drôme)  (3) ,  et ,  au  septième  siècle , 
l'adjectif  Vindauscensis,  qualifiant  le  substantif  episcopus  (4). 
Vindausca  parait  dérivé  d'un  nom  pérégrin  Vinda ,  mascu- 
lin, variante  de  Vindos.  On  a  parlé  du  nom  pérégrin  Vin- 
dos,  ci-dessus,  p.  584. 

G.  —  Suffixe  -U8C0,  -usconis  en  Gaule. 

Tarusco,  'onis,  nom  de  Tarascon  (Bouches-du-Rhône) 
chez  Strabon  (5)  et  chez  Ptolémée  (6),  est  aussi  le  nom  de 
Tarascon  (Ariège),  si  ce  sont  bien  les  habitants  de  Tarascon 
(Ariège)  que  Pline  appelle  Taru^scononienses  (7),  lisez  Tarus- 
conienses.  Ce  nom  oflFre  un  suffixe  -usco^  -onis^  qui  est  un 
développement  du  suffixe  -usco-s.  Il  dérive  du  nom  d'homme 
gaulois  Taro-s,  que  Ton  peut  conclure  de  Taro-dunum. 
aujourd'hui  Zarten,  grand  duché  de  Bade  (8)  ;  comparez  les 
noms  d'hommes  galates  Dejo-taros,  Brogi-taros. 


(1)  Guérard,  Cartulaire  de  Saint-Victor  de  Marseille,  U  II,  p.  223,  935. 

(2)  Longnon.  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle,  p.  442. 

(3)  C.  J.  L.,  XII.  1751,  1777. 

(4)  Longnon,  Géogr,  de  la  Gaule  au  sixième  siècle,  p.  442,  note. 

(5)  Strabon,  livre  IV,  c.  i,  §  3  et  12;  éd.  Didot,  p.  148, 1.  25;  p.  155,  i.  M). 

(6)  Ptolémée,  livre  II,  c.  10,  f  8;  éd.  Didot,  t.  I,  p.  24,  1.  4, 

(7)  Pline,  livre  III,  §  37  ;  C.  /.  L.,  t.  XII,  p.  125. 

(8)  Ptolémée,  livre  II,  c.  xi,  g  15;  éd.  Didot,  t.  I,  p.  274,  1.  7. 


CHAPITRE  XVI. 


LE   SUFFIXE   LATIN    -aHuS   DANS    LES    NOMS   DE    LIEU   PENDANT 

l'antiquité  et  au  moyen  AGE. 

Sommaire  : 

{  1.  Généralités.  —  {2.  Noms  de  lieu  en  -Arias  dérivés  de  noms  de  miné- 
raux. —  I  3.  Noms  de  liou  en  -aria,  -arta«  dérivés  de  noms  de  végètaaz. 

—  14.  Noms  de  lieu  en  -arta,  -ariaa,  ^arius,  dérivés  de  noms  d*animaiiz. 

—  15.  Dérivés  de  noms  d'hommes. 

§  !•'.  —  Généralités. 

Deux  suflBxes  ont  été  employés  pendant  la  période  ro- 
maine pour  créer  des  noms  de  lieux  dérivés  de  noms  com- 
muns, ce  sont  :  1*  -aritw,  ou  plus  ordinairement  au  féminin 
singulier  -arta,  au  féminin  pluriel  -ariae,  -arias;  en  fran- 
ças,  -ier,  ière,  -ières;  —  2**  -êtum,  en  français  -oy,  av. 
Dans  ce  chapitre  on  s'occupera  du  premier. 

Il  sert  originairement  à  former  des  noms  de  lieux  dérivés 
de  noms  de  minéraux ,  de  végétaux ,  d'animaux  ;  dans  la 
période  franque  et  depuis ,  on  s'en  est  servi  pour  former 
des  noms  de  lieu  dérivés  de  noms  d'homme. 

§  2.  —  Noms  en  -arias,  dérivés  de  nom  de  miriéraux. 

Sous  l'empire  romain  on  trouve  un  vicus  Aquarius  en 
Espagne,  sur  la  route  d'Astorga  à  Saragosse  (1). 

(i)  /anéraire  d'Antonin,  p.  439,  L  9. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -ARIA,  -ARIAS,  -ARIU8.  603 

Aqdarias  est  le  nom  d'une  villa  mentionnée  en  993 
dans  une  charte  de  Tabbaye  de  Cluny  (1).  C'est  aujourd'hui 
la  Chapelle-sous-Brancion  (Saône-et-Loire)  (2).  Aqiiarias 
est  le  nominatif  accusatif  pluriel  féminin  de  l'adjectif  aqua- 
riusy  dérivé  d'aqiui,  eau. 

Le  village  appelé  Aquarias  au  neuvième  siècle  doit  son 
ancien  nom  à  une  source  qui  donne  naissance  à  un  ruis- 
seau appelé  aujourd'hui  Naiguières,  probablement  pour  En 
Aiguières  (3),  en  sorte  que  l'ancien  nom  persiste  encore  au- 
jourd'hui. 

Sous  l'empire  romain  Ferraria,  qui  serait  en  français 
«  L^  Perrière,  »  est  une  localité  de  Sardaigne  (4). 

Ferrarias  est,  au  moyen  âge,  un  nom  de  lieu  très  com- 
mun en  France.  Au  neuvième  siècle  une  villa  Ferrarias  ap- 
partenait à  Tabbaye  de  Saint-Denis  (5)  ;  cette  villa  est  déjà 
nommée  dans  un  diplôme  de  Dagobert  I**",  en  628  (6).  Du 
même  roi  est  contemporaine  la  fondation  de  l'abbaye  de 
Feirarias,  Ferrières  (Loiret)  (7).  Vers  680,  le  testament  de 
Vigile,  évéque  d'Au.xerre,  mentionne  une  colonica  Ferrarias 
qui  parait  être  aujourd'hui  Ferrières,  commune  d'Andryes 
(Yonne)  (8);  non  loin  de  là  était  situé,  en  833,  un  Vieux 
Ferrières,  Vêtus  Ferrarias  que  nous  fait  connaître  une  charte 
d'un  archevêque  de  Sens  (9)  et  dont  l'emplacement  se 
trouve  dans  le  même  département  (10).  Au  même  siècle,  il  y 
avait  en  Rouergue  une  petite  circonscription,  aicis^  appelée 


(1)  Bruel,  Recueil  des  chartes  de  Clurty,  t.  III,  p.  170. 

(2)  Chavot,  Le  Maçonnais^  p.  93. 

(3)  Chavot,  ibid.,  p.  208. 

(4)  Itinéraire  d'Antonin,  p.  80,  1.  6. 

(5)  Charte  de  Tabbé  Hilduin,  en  832,  et  de  Charles  le  Chauve,  en  862.  Tar- 
dif, Monuments  historiques,  p.  85,  col.  1;  p.  117,  col.  2. 

(6)  Tardif,  Monuments  historiques^  p.  5,  col.  1. 

(7)  GaHia  christiana,  XII,  157. 

(8)  Quantin,  Cartulaire  de  l'Yonne^  t.  I,  p.  20;  cf.  Dictionnaire  topograp. 
de  l'Yonne,  p.  51. 

(9)  Quantin,  Cartulaire  de  l'Yonne,  t.  I,  p.  41. 

(10)  Quantin,  Dict.  top,  de  l'Yonne,  p.  51. 


Ferrarias  (4),  c'Qst  aujourd'hui  La  Ferrairie,  CQioiQune  de 
Çoi^ques  (Aveyron)  (2).  Ferraria  est  le  fémiuia  de  radjectif 
ffitrarius,  dérivé  de  ferrvm  «  fer  ;  »  employé  substantive- 
ment, il  signifie  mine  de  fer,  et,  avec  ce  sens,  il  appartient 
déjà  à  la  langue  de  César.  Le  vainq.ueur  des  Gaulois  constate 
]^ur  habilité  conime  ingénieurs  militaires ,  quand  il  s'agis- 
sait de  pratiquer  dQs  galeries  souterraines  :  c'est  la  consé- 
quence de  ce  qu'il  y  a ,  dit-il ,  chez  eux  de  grandes  mines 
de  fer ,  magnae  f&rrariae  (3). 

Gravières,  nom  d'une  commune  de  TArdècbe  et  de  plu- 
sieurs hameaux,  est  une  formation  aijialogue.. 

Perribrj^s,  commune  du  Calvados,  est  un  auciç^n  ^Petfo- 
rias  comme  La  Perrière ,  commune  de  la  Côte-d'Or ,  une 
ancienne  *  Petraria.  La  notation  Petraria  a  été  conservée 
par  un  titre  de  1173  pour  le  hameau  de  La  Perrière  com- 
mune de  Poiseul-la-Yille ,  môme  département  (4).  Il  y  a 
une  variante  masculine  Perrier,  commune  du  Puy-de-Dôme, 
Le  Perrjer,  commune  de  la  Vendée  ;  inutile  de  citer  les 
hameaux.  L'adjectif  petrarius  dérivé  de  pePra  «  pierre,  » 
n'appartient  pas  à  la  latinité  classique  ;  elle  connaît  le  dé- 
rivé pewosus,  en  français  «  pierreux,  »  quji  a  été  remanié 
sous  l'influence  du  substantif  «  pierre  ;  »  on  devrait  dire 
«  perreux  ;  »  le  masculin  et  le  féminin  de  cet  adjectif  ont 
fourni  deux  noms  de  commune  au  département  de  l'Yonne; 
Perreux-les-Bois  et  Perreuse.  La  dernière  est  appelée  Pe- 
trosay  dans  un  acte  de  Tannée  1172  (5).  Il  y  a  aussi  une  com- 
mune de  Perreux  dans  le  département  dé  la  Loire. 


(1)  Charte  de  mai,  887.  G.  Desjardins,  Cartulatre  de  Conques^  p.  99:  cf. 
décembre  933,  In  vicaria  Ferrariense,  t&id.,  p.  139. 

(2)  G.  Desjardins,  Cartul&ire  de  Conques,  p.  460. 

(3)  De  bello  gallico,  VII,  22,  i  2. 

(4)  Gamier,  Nomenclature  historique,  p.  130,  n*  522. 

(5)  Quantin,  Dictionnaire  topograph,  du  déparlement  de  l'Yonne ,  p.  97. 


NOMS  DE  LIEU  EK  -ARIA,  -AftlAd,  -ARIUS.  eOS 

S  3.  —  Noms  de  lieux  en  -atia ,  -arias  dérivés  de  norûs  de 
végétaux  (Cf.  -etum-j  aretum,  p.  616-634). 

Nous  commencerons  par  deux  exemples  (}tli  datent  'de 
l'empire  romain;  l'un  est  Juncaria^  dérivé dô /uncw,  jonc; 
Tautre  Roboraria,  dérivé  de  robur,  chône. 

JuNGARiA  est  sous  Tempire  romain  une  des  stations  de 
la  route  d'Italie  en  Espagne  ;  elle  est  située  au  sud  déà  Py« 
rénées ,  sur  la  frontière  de  là  Gaule  (1). 

En  922 ,  il  y  a  dans  le  comté  de  Tàlleûde  (Puy-de-Dôme) 
une  villa  appelée  Juncherias  (2)  ;  on  aurait  dit  plus  ancien- 
nement Jv/ncarias.  Comparez  Jonchères ,  commune  du  dé- 
partement de  la  Drôme,  les  deux  communes  de  La  Jonchère 
(Vendée  et  Haute- Vienne) ,  etc.,  Junca/riolas ^  p.  522,  Jwf^ 
caretum^  p,  632. 

RoBOBAKiA  est  une  station  d'Italie  près  de  Rome  (3)  ;  là 
forme  française  de  ce  mot  serait  Rouvrière  ;  elle  est  inu- 
sitée ;  on  a  préféré  en  Gaule  la  variante  Roboretum  dont  il 
sera  question  plus  loin,  p.  625. 

D'après  les  textes  du  moyen  âge,  nous  citerons  les  noms 
en  -arias  suivants  qui,  comme  les  deux  précédents,  dérivent 
de  noms  de  végétaux. 

ÂLN ARIAS,  situé  dans  le  pays  de  Blois  et  dans  la  condita 
Cabrinacensis f  aujourd'hui  Cheverny  (Loir-et-Cher);  nous 
l'apprenons  par  un  diplôme  de  l'année  841  (4).  Alruvrias  est 
dérivé  d'a/nu*,  «  aune,  »   et  devrait  donner  un  dérivé 


(1)  IlinéraiiTe  d*Anionin,  p.  390,  I.  3. 

(2)  Doniol,  Cartulaira  de  Brioude^  p.  294. 

(3)  i(t)iéraire  d*Anlonin,  p.  305,  1.  9. 

(4)  Martene ,  ThezauruB  am,ecdotoruyn ,  t.  I ,  col.  32.  Mabille ,  La  pAncarie 
notre,  p.  81. 


606  LIVRE  n.  CHAPITRE  XVI.  {  3. 

c<  Aunières  »  ou  «  les  Aunières,  »  mais  nous  ne  connaissons 
pas  d'exemple  de  cette  formation  ;  le  français  a  préféré  le 
dérivé  Alnetum  dont  il  sera  question  plus  loin,  p.  616. 

Ad  Avenarias  est  le  nom  d'un  locus  mentionné  vers 
Tannée  1100  dans  une  charte  de  Tévêché  de  Grenoble  (i). 
C'est  aujourd'hui  Les  Avenières ,  commune  importante  du 
département  de  Tlsére.  Il  y  a  en  France  quelques  hameaux 
du  même  nom  (Loire,  Mayenne,  Haute-Savoie,  Yonne). 
Inutile  de  dire  que  ce  nom  dérive  du  latin  avena,  «  avoine,  » 
d'où  l'adjectif  avenarius,  employé  par  Pline  le  naturaliste , 
et  qui  veut  dire  «  relatif  à  l'avoine.  » 

BuxARiAS,  du  latin  buœus^  «buis,  »  est  mentionné  en  862 
dans  un  diplôme  de  Charles  le  Chauve  pour  l'abbaye  de 
Saint-Martin  de  Tours  :  c'est  aujourd'hui  La  Bussière, 
commune  d'Athée  (Indre-et-Loire)  (2).  Ce  nom,  écrit  Bus- 
cerias  et  Busserias  dans  les  chartes  de  Cluny  au  neuvième 
et  au  dixième  siècle  (3),  désigne  la  localité  qui  est  aujour- 
d'hui Bussières  (Saône-et-Loire)  (4).  Une  charte  du  dixième 
siècle  nous  offre  l'orthographe  Bux&rias\  il  s'agit  d'une 
viWa  située  en  Forez  ;  c'est  aujourd'hui  Bussières  (Loire)  (5). 
Il  y  a,  de  ce  nom  de  lieu,  une  variante  qui  prend  le  sin- 
gulier Buxaria  à  la  fin  du  onzième  siècle  dans  les  titres  de 
la  cathédrale  de  Grenoble  (6)  ;  la  formation  française  cor- 
respondante, et  qui  désigne  aujourd'hui  la  même  localité, 
est  La  Buissière  (Isère).  Cf.  Buxetum,  p.  617. 

Canavarias  est,  dans  une  charte  mérovingienne,  une 
localité  de  l'Orléanais  (7)  ;  dans  une  charte  de  Saint-Martin 


(1)  Cartul&ire  de  Saint-Hugues  de  Grenoble,  p.  127. 

(2)  Mabille,  La  pancarte  notre,  p.  220;  cf.  p.  159  et  65. 

(3)  Bruel,  Recueil,  t.  II.  p.  730;  t.  III,  p.  339,  664. 

(4)  Chavot,  Le  Maçonnais,  p.  85. 

(5)  Auguste  Bernard,  Carlulaire  de  Savigny,  t.  I.  p.  247;  t.  II,  p.  1111. 

(6)  Cartulaire  de  Saint-Hugues  de  Grenoble,  p.  121,  187. 

(7)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  144. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -ARIA  ,  -ARIAS  ,  - ARIUS.  607 

de  Tours ,  à  la  fin  du  neuvième  siècle ,  c'est  une  dépen- 
dance de  Blévy  (Eure-et-Loir)  (1).  Canavarias  tient  lieu 
d'un  plus  ancien  Ca/nnabarias  dérivé  de  cannabis  ou  can- 
nabm^  «  chanvre.  »  Tout  le  monde  connaît  le  français  Che- 
nevières,  nom  de  quatre  communes  et  de  treize  hameaux. 

*  Castanearias  ,  du  latin  castanea ,  «  châtaignier ,  »  est 
écrit  Casianerias  dans  une  charte  de  996  pour  l'abbaye 
d'Ainay  à  Lyon;  cette  localité  était  située  en  Lyonnais, 
dans  le  territoire  de  la  villa  Marcilliacus,  aujourd'hui  Mar- 
cilly-d'Azergues  (Rhône)  (2). 

* JuNiPBRABiA ,  du  latiu  juniperus,  «  genévrier,  »  est  la 
forme  antique  du  nom  de  lieu  écrit  Genebreira  en  1118, 
Genebreria  et  Genebraria  vers  Tan  1000  (3),  La  Genevrière, 
commune  de  Saint-Chamant  (Corrèze).  Cf.  ci-dessous,  p.  622. 

LiNARiAS  est  une  localité  située  in  pago  Adratinse^  c'est- 
à-dire  en  Artois ,  aux  termes  d'un  diplôme  de  l'abbaye  de 
Saint-Denis ,  qui  date  de  l'année  799  (4).  Deux  autres  loca- 
lités de  même  nom  sont  mentionnées  dans  les  titres  de 
l'abbaye  de  Saint-Martin  de  Tours,  l'une  en  862,  l'autre 
en  905  ;  la  première  est  aujourd'hui  Linières-Bouton  (Maine- 
et-Loire)  (5),  la  seconde  est  Lignières,  commune  de  Veigné 
(Indre-et-Loire)  (6).  Il  y  avait  en  Auvergne,  au  dixième 
siècle,  une  villa  Linaria  où  était  situé  un  bien  donné  à 
l'abbaye  de  Cluny  (7).  Vers  la  même  époque  il  se  trouvait 
en  Forez  une  villa  appelée  à  l'ablatif  Linaris,  et  dans 
laquelle  était  située  une  propriété  donnée  à  l'abbaye  de 
Savigny  (8).  Tous  ces  noms  de  lieu  sont  dérivés  du  latin 


(1)  Habille,  La  pancarte  notra,  p.  221  ;  cf.  p.  180. 

(2)  Auguste  Bernard,  C&rlulaire  de  Savigny^  t.  II,  p.  641,  845. 

(3)  Deloche,  CariuUire  de  Beaulieu,  p.  69,  137,  144. 

(4)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  73. 

(5)  Port,  Dictionnaire  historique  de  Maine-et-Loire,  t.  II,  p.  519. 

(6)  Mabllle,  La  pancarte  notre,  p.  227;  cf.  p.  183,  n*  113 

(7)  Bruel,  Recueil  des  chartes  de  Cluny,  t.  I,  p.  168. 

(8)  Auguste  Bernard,  Cartulaire  de  Savigny,  1. 1,  p.  9. 


608  LIVRE  II.  CHAPITRE  XVI.  {  3. 

linum^  «  lin.  »  La  langue  latine  connait  le  dérivé  linnriusy 
dont  le  masculin  désigne  Touvrier  qui  travaille  le  lin ,  et 
dont  le  féminin  désigne  Tendroit  où  le  lin  est  mis  en 
œuvre.  Le  terme  géographique  Linarias  veut  dire  «  terres 
qui  produisent  du  lin  »  ;  Lignères ,  Lignières  ou  Linières 
est  un  nom  de  lieu  très  répandu.  Cf.  Linariolas,  p.  523. 

SLâverias  pour  *Raparias^  du  latin  râpa  ou  rapum,  «  rave,  » 
est  le  nom  de  Ravières,  commune  de  Saint-Martin-la-Sau- 
vetè  (Loire),  dans  plusieurs  chartes  de  l'abbaye  de  Savigny 
au  dixième  et  au  onzième  siècle  (1).  Ravières  (Yonne)  est 
probablement  aussi  un  ancien  *Raparias  :  dans  le  testament 
de  Tabbé  Widerad ,  en  721 ,  Ribarias  est  écrit  par  erreur 
pour  Rabarias  (2). 

Ros ARIAS,  pour  *Rausarias^  vient  du  germanique  rai«, 
«  roseau ,  »  conservé  en  gothique ,  mais  devenu ,  en  alle- 
mand ,  rohr.  On  trouve  Rosarias ,  au  onzième  siècle ,  dans 
une  charte  de  Tabbaye  de  Conques  (Aveyron)  (3)  ;  il  s'agit 
de  Rosières,  commune  de  Noailhac  (Aveyron).  En  974,  une 
charte  de  Cluny  mentionne  une  villa  Hoserias  en  Châlon- 
nais  (4).  Rosières  ou  Rozières  est  un  nom  de  lieu  très 
fréquent  en  France.  Comparez  RausePum,  p.  629. 

Seoalarias  pour  *  Secalarias^  du  latin  secale,  «  seigle,  » 
est  un  nom  de  lieu,  en  1001,  dans  une  charte  de  l'abbaye 
de  Saint- Victor  de  Marseille  (5);  c'était  dans  le  voisinage 
de  Nans  (Var). 

Spigarias,  dans  deux  diplômes  de  l'abbaye  de  Saint- 


(1)  Auguste  Bernard,  Cartulaire  de  Savigny^  t.  I,  p.  67,  84»  369. 

(2)  Voy.  Quantin,  Dictionnaire  topographique  de  l'Yonne,  p.  106. 

(3)  G.  Desjardins,  Cartulaire  de  Conques^  p.  159. 

(4)  Bruel.  Recueil  des  charte^  de  CAuny^  t.  II,  p.  446. 

(5)  Quérard,  Cart.  de  Saint-Victor  de  Marseille^  t.  I,  p.  97. 


NOMS  DE  LIEU  BN  -ARIA.  -ARIAB,  -ARIU8.  609 

Martin  de  Tours,  désigne  une  étendue  de  terrain  aujour- 
d'hui comprise  dans  la  ville  de  Tours  (1).  C'est  un  dérivé 
du  latin  spica^  «  épis.  » 

ViOLAioAS,  du  iatîn  viola,  «  violette,  »  désigna,  en  946, 
une  localité  de  la  vicciriti  ChiriOfCensis  ;  le  chef-lieu  de  cette 
vicairie  est  Saint-Beauiire  (Haute-Loire)  (2).  La  langue  latine 
possède  un  adjectif  violarius ,  dont  le  neutre  violarium  est 
employé  par  Virgile  et  Ovide  avec  valeur  de  substantif  et 
veut  dire  «  endroit  où  viennent  des  violettes  :  » 

...  irriguuiQque  bibant  violaria  fontem  (3). 

Quelques-uns  des  noms  géographiques  eu  aritt,  aria$ 
présentent  une  difficulté  :  ce  sont  ceux  dans  lesquels  le 
dérivé  en  -artW  désigne  en  français  le  végétal  môme ,  et 
non  le  terrain  où  le  végétal  étend  ses  racines  :  nous  cite- 
rons le  français  noyer  «b  *  nucarius,  de  nuœ ,  micis.  Gom- 
ment expliquerons-nous  le  nom  de  Noyers  (Yonne)  ?  Sera-ce 
par  nucarios,  accusatif  pluriel  de  n/ucarins,  «  noyer,  »  ou 
par  Nucariasl{i)y  «  lieux  plantés. ^de  noyers?  »  La  bonne 
explication  est ,  je  crois ,  la  seconde ,  en  dépit  de  Tortho- 
graphe ,  mais  l'autre  serait  possible  :  ainsi  il  y  a  en  France 
beaucoup  de  localités  appelées  Fresne,  le  Fresne,  Fresnes 
ou  les  Fresnes ,  à  côté  de  Fresniëres  =s  Fraxinarias  et  de 
Fresnoi  ^  FraœwsPam  (p.  621).  Les  noms  de  lieu  Bruyère 
et  Bruyères ,  Brocaria  (5) ,  Brogaria  (6),  Brugaria  (7),  Bro^ 
garias  (8),  peuveat  donner  lieu  à  la  même  difficulté. 


(1)  Habille,  La  pancarte  noires  p.  235;  cf.  151,  159. 

(2)  Doniol,  C&rtulaire  de  Brioude,  p.  288.  Hoozé,  chez  Ooniol,  Cartulairé 
de  SatucilUngêê,  p.  689. 

(3)  GéorgiquêBy  1.  IV,  ▼.  32.  i 

(4)  Cf.  Nogariolaa,  p.  523;  Ifuea^retumf  p.  888» 

(5)  670-671,  chez  Tardif,  Monuments  historiqueê^,  p.  15,  col.  2. 

(6)  797,  chez  Tardif,  ibid.,  p.  72,  col.  2. 

(7)  }ÇI*  siècle,  O.  Deajardins,  <CarluIaire  de  Conquesy  p.  296. 

(8)  768,  Tardif,  Monuments  historiqueSy  p.  52,  col.  1. 

39 


610  LIVRE  IL  CHAPITRE  XVI.  {  4. 

§  4.  —  Noms  en  -aria,  -arias,  -arius,  dérivés  de  noms 

d'animaux. 

Appiaria,  qu'il  faut  corriger  Àpiaria,  est  le  nom  d'une 
station  romaine  de  Mésie  (1)  ;  Apiaria  veut  dire  «  endroit 
où  il  y  a  des  abeilles ,  »  apes ,  et  n'a  aucun  rapport 
avec  le  gentilice  Âppius,  étudié  p.  94.  En  France,  au 
neuvième  siècle,  Apiarias,  dans  le  Polyptique  de  Saint- 
Germain  des  PréSj  désigne  Achères,  commune  de  Theuvy- 
Achéres  (Eure-et-Loir)  (2).  Un  autre  Apiarias  était  situé 
près  d'Avignon  en  1010  (3).  Les  localités  nommées  Achè- 
res (Cher,  Seine-et-Marne,  Seine-et-Oise),  doivent  être 
d'anciennes  Apiarias,  Cf.  Apiariolas^  p.  522. 

AsiNABiAS,  d*asinus,  c<  ftne,  »  est  devenu  en  français 
«  Asnières.  »  On  voit  un  lieu  dit  Asinarias  en  814,  dans 
la  liste  des  colons  de  l'abbaye  de  Saint- Victor  de  Mar- 
seille (4).  Asinerias  se  trouve,  en  1011,  dans  une  charte  de 
Saint-Julien  de  Brioude  (Haute-Loire)  (5);  Asnerias,  dans 
une  charte  des  environs  de  l'an  1000 ,  désigne  une  villa 
du  Lyonnais  (6)  ;  c'est  une  localité  du  Maçonnais  dans  une 
charte  qui  se  place  en  1017  et  1025  (7).  Asnières  est  un 
nom  de  lieu  très  répandu  en  France  :  des  communes  de 
ce  nom  se  trouvent  dans  les  départements  de  l'Ain,  du 
Calvados,  de  la  Charente,  de  la  Charente-Inférieure,  de 
la  Côte-d'Or,  de  l'Eure,  de  la  Sarthe,  de  la  Seine,  de 
Seine-et-Oise,  de  la  Vienne  et  de  l'Yonne. 

Caponarias  ,  dérivé  de  capo ,  «  chapon ,  »  est  la  forme 


(1)  ItinirAire  d'Antonin,  p.  222, 1.  5. 

(2)  Longnon,  Polyptyque  de  S&ini^GermtLin  des  Préê,  p.  126. 

(3)  Guérard,  Cartulaire  de  SatnN Victor  de  Marêeille,  L  I,  p.  215. 

(4)  Guérard,  ibid.,  t.  II,  p.  638. 

(5)  Doniol,  Cartulaire  de  Brioude^  p.  110. 

(6)  Bniel,  Recueil  deê  chartes  de  Cluny,  t.  III,  p.  536. 

(7)  Bruel,  ibid.,  p.  736. 


J 


NOMS  DE  LIEU  EN  -ARIA,  -ARIA8,  -ARIUS.  611 

ancienne  du  nom  de  la  villa  appelée  au  onzième  siècle 
Caponerias  (l) ,  et  Capponerias  (2).  La  Chaponnière  est  le 
nom  de  quatre  hameaux  (Cher ,  Eure-et-Loir ,  Isère ,  Loi- 
ret). La  bonne  orthographe  Çaponarias  a  été  conservée  par 
une  charte  du  neuvième  siècle  (3). 

Cervaria  est,  vers  Tan  1000,  le  nom  de  Servières,  com- 
mune de  Joursac  (Cantal)  (4).  Il  y  a  en  France  deux  com- 
munes de  Servières  (Corrèze  et  Lozère),  plus  huit  hameaux 
de  môme  nom  :  Ardèche ,  Cantal ,  Corrèze,  Creuse,  Haute- 
Loire,  Puy-de-Dôme.  Une  orthographe  plus  régulière  Cer- 
vières,  est  observée  pour  les  noms  de  deux  communes 
(Hautes-Âlpes  (5)  et  Loire);  comparez  le  français  cerf,  du 
latin  cervus. 

*Colubraria,  du  latin  coluber^  «  couleuvre,  »  est  la  nota- 
tion ancienne  du  nom  de  la  localité  appelée  au  onzième  siècle 
de  Colobreria  (6) ,  Colubreriae  (7) ,  de  Colobraria  (8)  ;  il  s'agit 
de  CoUobrières  (Var)  ;  c'est  un  chef-lieu  de  canton  ;  un  au- 
tre Collobrières ,  dans  la  Lozère ,  est  un  simple  hameau. 

Columbarius,  «  pigeonnier,  de  columbay  est  par  exception 
masculin;  il  ace  genre  dans  la  bonne  latinité;  il  le  conserve 
ordinairement  au  moyen  âge.  Ainsi  Columba/rius^  vers  1035, 
est  le  nom  dé  CoUemiers  (Yonne)  (9).  M.  Deloche  a  eu  rai- 
son d'écrire  Columbarius  au  nominatif  le  nom  de  Colom* 


(1)  Anguste  Bernard,  CartuUire  de  Savigny ,  t.  I ,  p.  S61 ,  n*  700  ;  p.  683, 
n*  177. 

(2)  Ang.  Bernard,  ibid.,  U  I,  p.  423,  n*  806. 

(^  Chevalier,  Cartul&ire  de  Saint-André  le  fias,  p.  217. 

(4)  G.  Desjardins,  Cartulaire  de  Conques,  p.  274,  451,  504. 

(5)  Le  nom  de  Gerviéres  (Hantes-Alpes)  parait  avoir  été  originairement  au 
singulier  Cervaria,  Cerberia.  Roman,  Dictionnaire  topographique  des  Hau- 
tes-Alpes,  p.  26. 

(6)  Ouérard,  Cartulaire  de  Saint-Victor  de  Marsaille^  t.  I,  p.  470. 
07)  Gnérard,  tbtd.,  p.  475. 

(8)  Guérard,  ibid.,  p.  481. 

(9)  Qnantin,  Cartulaire  de  VYonne,  t.  I,  p.  41.  Dans  un  diplôme  do  853, 
ibid»,  p.  65,  Columbarium  est  à  l'accusatif. 


612  LIVRE  II.  CHAPITRE  ZYL  t  4. 

hier,  commune  de  Tureane  (Corrèse),  bien  que  dans  les 
textes  publiés  par  lui  ce  nom  n'apparaisse  jamais  qu*à  Ta- 
bla tif  Columbario  (1).  Colombey  (Meurthe-et-Moselle),  ca- 
pella  in  Colombario  en  836,  ecclesia  in  Colombario  en 
870  (2),  s'explique  de  la  môme  façon.  Dès  le  dixième  siècle 
Va  du  sufi&xe  devient  e  dans  ce  mot ,  comme  l'atteste ,  en 
926,  le  Columberitwi  castrum  d'une  charte  de  Saint-Martin 
de  Tours;  il  s'agit  de  Colombiers  (Vienne)  (3). 

*Leporaria, de  lepus,  leporis,  «lièvre,  »  est  écrit Leperaria^ 
en  814,  dans  la  liste  des  colons  de  l'abbaye  de  Saînt-Vic- 
tor  de  Marseille  (4). 

LuPARiAS,  de  lupusj  «  loup,  »  est  écrit  Luperias  au  milieu 
du  onzième  siècle  dans  une  charte  de  l'abbaye  de  Saint-Vic- 
tor de  Marseille  (5)  ;  il  s'agit ,  semble-t-il,  d'une  localité  si- 
tuée près  de  Tarascon  (Bouches-du-Rhône).  Mais  pour  le 
nom  de  Puyloubier  (Bouches-du-Rhône),  Podium  luparium 
Va  persiste  quelquefois  assez  tard  :  Podium  luparium 
en  1040  (6),  de  Podio  lupario  1044  (7),  à  côté  de  Poddo  lu- 
perio  1046  (8). 

PoRCARiAs,  de  porcus ^  porc,  est  mentioïinè  dans  un  di- 
plôme de  Charlemagne  pour  l'abbaye  de  Saint-Benoit 
d'Aniane  (Hérautl)  ;  c'est  aujourd'hui  Porquières  (Hérault , 
emplacement  d'un  hameau  détruit  (9). 

SoRiCARiAS,  dérivé  de  sorex^  soricis^  «  souris,  »  est  le  nom 


(1)  893,  CartuL  de  Beaulieu,  p.  194,  928>  ibid,,  p.  80;  vers  97 1,  ibid^  p.  9S. 

(2)  Lepage,  Dictionnaire  topographique  de  la  Meurthe,  p.  34. 

(3)  Mabille,  La  pancarte  notre  de  Saint-Martin  de  Tourê,  p.  223;  cf.  R«- 
det,  Dictionnaire  topographique  de  la  Vienne^,  p.  130. 

(4)  Guérard,  Cartulaire  de  Saint-Victor  de  Marseille^  t.  II,  p.  641. 

(5)  Vt^a  Luperias;  Quérard,  ibid,,  1. 1,  p.  211. 

(6)  Guérard,  ibid.,  t.  I,  p.  22. 

(7)  Guérard,  ibid,,  p.  47. 

(8)  Guérard,  ibid.,  p.  144. 

(9)  Eugène  Thomas,  Dictionnaire  topographique  de  Vliéraultf  p.  149;  et 
Teulet,  Layettes  du  trésor  des  chartes^  U  I,  p.  5,  cqL  1. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -AR! A  ,  -ARIAS  ,  -ARIU8.  013 

d'une  villa  située  au  comté  d'Apt  (Vaucluse),  comme  nous 
l'apprend  une  charte  du  douzième  siècle  émanée  de  Maiol, 
abbé  de  Cluny  (1).  Un  hameau  du  département  de  la  Sar- 
the  s'appelle  aujourd'hui  les  Souricières. 

*  VuLPECULAHiAs  de  vulpecula,  diminutif  de  vulpes,  «  re- 
nard, »  est  noté  Vulpeglarias,  en  814,  dans  la  liste  des  colons 
de  r^baye  de  Saint- Victor  de  Marseille  (2);  on  trouve  Vulpi- 
làrias  au  milieu  du  onzième  siècle  dans  une  charte  de  l'ab- 
baye de  Conques  (Aveyron)  (3)  ;  ce  nom  est  devenu,  dans  le 
nord  de  la  France,  Goupillières ,  nom  de  quatre  commu- 
nes (Calvados,  Eure,  Seine-et-Oise,  Seine-Inférieure),  et  de 
plusieurs  hameaux.  La  variante  Volpilière  est  le  nom  de 
deux  hameaux  (Lozère ,  Puy-r^e-Dôme). 

S  5.  —  Noms  en  -aria,  -arias,  dérivés  de  noms  d^ hommes. 

Au  moyen  âge  Tusage  commença  de  former  des  nqms 
de  lieu  en  -arius  en  les  dérivant  de  noms  d'homme.  Cet 
usage  a  persisté  dans  la  période  moderne.  Ce  genre  de  for- 
mation se  rencontre  quelquefois  dans  l'est  de  la  France. 
Ainsi,  dans  le  département  de  l'Aube:  AUibaudières,  en  1131 
LibatMierie(i),e^{  un  ancien  *Leudobaldarias^  dérivé  du  nom 
d'homme  franc  Leudo-baldus  ;  La  Guillotiére,  qui  apparaît  au 
seizième  siècle,  est  un  dérivé  moderne  du  nom  d'homme 
Guillot.  Balderias,  dans  le  pays  d'Avallon  (Yonne),  à  la  fin 
de  la  période  mérovingienne  (5),  pourrait  sembler  dérivé 
d'un  nom  d'homme  Baldus.  Mais  Balderias  =  Baldo-charias 


(1)  Bruel,  Recueil  des  chartes  de  Cluny,  t.  II,  p.  165.  La  leçon  Soricorias, 
admise  dans  le  texte,  paraît  moins  bonne  que  la  leçon  Soricarias  rejotée 
en  note. 

(2)  Guérard,  Cartul&ire  de  iabbaye  de  Saint-Victor  de  Marseille,  t.  II, 
p.  653. 

(3)  Gustave  Desjardins,  Carlulaire  de  Conques,  p.  222. 

(4)  Botttiot  et  Socard,  Dictionnaire  lopographique  du  département  de 
l'Aube,  p.  2. 

(5)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  400.  Quantin,  Carlulaire  de  l'Yonne^ 
t.  II,  p.  2. 


614  LIVRE  II.  CHAPITRE  XVI.  |  5. 

[villas]  et  veut  dire  villae  de  Baldo-charius.  Le  procède  de 
dérivation ,  qui  consiste  à  faire  du  sufiBxe  -aria ,  -arias  la 
désinence  d'un  nom  propre  d'homme,  est  surtout  répandu 
dans  l'ouest  de  la  France,  comme  on  peut  s'en  assurer 
en  consultant  les  répertoires  topographiques  des  départe- 
ments d'Eure-et-Loir ,  de  l'Eure ,  de  la  Mayenne  et  du 
Calvados.  Ces  formations  sont  généralement  modernes  ; 
il  serait  intéressant  de  chercher  à  déterminer  la  date  où 
elles  ont  commencé.  Â  en  juger  par  les  Ges$a  pantiftcum 
Cenomannensium  (1)  et  par  les  Gesta  domni  Àldrici  (2),  do- 
cuments qui  contiennent  un  grand  nombre  de  noms  de 
lieu  et  qui  remontent  au  neuvième  siècle,  il  n'y  aurait  pas 
eu  dans  le  Maine  à  cette  époque  des  noms  de  lieu  en  -aria, 
•arias  dérivés  de  noms  d'homme. 


(1)  Mabillon,  Vetera  analecta,  in-8*,  t.  III,  p.  50-274.  Canvin,  Géographie 
ancienne  du  diocèse  du  Mans,  dans  le  volume  intitulé  Institut  des  provin- 
ces de  France,  Mémoires,  2*  série,  1. 1,  p.  i-lii. 

(2)  Baluze,  Miscellanea,  t.  III,  p.  1-178.  Migne,  Patrologia  latine,  t.  CXV, 
col.  29-103.  Une  nouvelle  édition  pourvue  d'un  index  a  été  publiée  en  1^9 
à  Mamers,  chez  Q.  Fleury  et  A.  Dangin,  par  MM.  R.  Charles  et  L.  Froger. 


CHAPITRE  XVII. 


i^  suffixe  latin  -btum  dans  les  noms  dk  lieu  i 
l'antiquité  et  au  moyen  AOE. 


I  l.  Oénéralités.  —  î  2.  Noms  eoinmuDS  en  -ttum  dérivés  de  nomi 
végétaux  et  qui  ont  éto  emplojrés  comme  nom  propres  do  liei 
Dérivés  en  -efum  de  noms  de  végétaux  qui  ne  sont  p«s  latins.  ■ 
rivés  en  -eltim  de  noms  commuas  qui  ne  désignent  pas  des  vé| 
I  i.  Dérivés  en  -arelum. 


S   1"  Généralités, 

Le  suESxe  -etum  sert  en  latia  classique  à  fon 
noms  commuas  de  lieux.  Ces  noms  sont  en  ré^le  f 
dérivés  de  noms  de  végétaux.  Ces  végétaux  peuv 
de  grande  taille,  quercetum,  chez  Varron  et  chez 
de  quercus,  «  chêne  pédoncule;  »  castanetum,  chc 
melle  ,  de  castanea,  «  châtaignier;  »  ils  peuvent 
toute  petite  dimension  :  juncetum,  chez  Varron ,  di 
H  jonc.  » 

Dans  les  auteurs  que  nous  citons,  quercetwn,  cosl 
juncetum  sont  non  pas  des  noms  propres,  mais  d( 
communs;  ils  désignent  tout  endroit  peuplé  de  ch( 
donculés,  de  châtaigniers,  de  joncs.  Mais,  dès  le  teir 
république  romaine  et  de  l'empire  romain  on  a  coi 
à  employer  comme  noms  propres  les  noms  comn 
■etum  :  Lauretum,  de  laurus,  «  laurier,  »  est  un  qui 


616  LIVRE  II.  CHAPITRE  XVH.  |  2. 

Rome  chez  Varron  et  chez  Pline  rancien  ;  Pinetum  de  pi- 
nus  ^  «  pin,  »  Roboretum  de  robur^  roboris  a  chêne  rouvre,  » 
sont  plus  tard  des  stations  romaines  d'Espagne  (1). 

Voici  quelques  exemples  de  noms  propres  géographiques 
en  -etum  dans  les  textes  du  moyen  &ge. 

Nous  les  répartirons  en  quatre  sections  ;  la  première 
sera  consacrée  aux  dérivés  de  mots  latins,  la  seconde  aux 
dérivés  plus  récents  formés  avec  des  noms  de  végétaux  qui 
ne  sont  pas  latins,  la  troisième  aux  dérivés  qui  ne  viennent 
pas  de  noms  de  végétaux,  la  quatrième  aux  noms  de  lieux 
formés  avec  le  sufi&xe  composé  aretum ,  où  sont  réunis  les 
deux  éléments  -arius  et  -etum.  Ces  quatre  sections  forme- 
ront les  paragraphes  2-5  du  présent  chapitre. 

S  2.  —  Noms  communs  en  *etum  dérivés  de  noms  latins  de 
végétaux  et  qui  ont  été  employés  en  France  comme  nams 
propres  de  lieu. 

Albugetum  du  latin  albucum  (2),  «  asphodèle  »  (sorte 
de  lys),  est  en  1060  le  nom  d'une  localité  voisine  de  Bioms 
(Drôme)  (3). 

*  Alnetum  du  latin  ÀlnuSy  «  aune,  »  est  écrit  Àlnido  dans 
deux  diplômes  carlovingiens,  en  832  (4)  et  en  862  (5)  ;  Alni- 
dum  dans  le  Polyptyque  de  Saint-Germain  des  Prés  (6) ,  Aine- 
dum  en  1004  dans  un  diplôme  du  roi  Robert  (7),  etc.  Dans 
ces  documents  il  s'agit  d'Aunay-sous-Auneau  (Eure-et-Loir); 
d'Aunay-sous-Crécy,  même  département,  enfin  d'un  autre 
Aunay  ou  Aulnay ,  situé  soit  dans  le  département  de  la  Seine 
soit  en  Seine-et-Oise.  Cf.  Alna^ias^  p.  605. 


(1)  Itinéraire  d'Antonin,  p.  422,  1.  7,  8. 

(2)  Pline,SHi8(oire  naturelle,  1.  XXI,  |  109;  1.  XXVI,  {  21. 

(3)  Guérard,  Cartulaire  de  Saint-Victor  de  Marseille^  t.  II,  p.  73. 

(4)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  85,  col.  1. 

(5)  Tardif,  i6id.,  p.  117,  col.  2. 

(6)  Edition  Longnon,  p.  98;  cf.  p.  114. 

(7)  Guérard,  Cartulaire  de  N.-D.  de  Paris,  t.  I,  p.|94. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -ETUM.  617 

Alnetum,  nom  de  liou  très  répandu,  a  donné  en  France 
deux  formes  :  l'une  est  Aulnay,  Aunay  ,  Aunai ,  Launay 
avec  un  è  final  =  é[tum]  dans  la  dernière  syllabe  ;  l'autre 
Aulnois,  Aulnoy,  Aunois,  Launois ,  Launoy,  avec  oi  final 
=s  é[tum]  ;  la  première  forme  est  spéciale  aux  environs  de 
Paris  et  à  la  région  du  nord-ouest,  la  seconde  à  la  région 
du  nord-est.  Plus  au  sud  on  a  préféré  au  mot  aune,  tiré  du 
latin,  le  mot  verne  qui  est  d'origine  gauloise  ;  de  là  Vemet 
dans  la  région  provençale,  ailleurs  Vernay,  Vemois,  p.  630. 

*  Betulletuu  (1}  vient  de  betulla,  «  bouleau,  "  mot  d'ori- 
gine gauloise  mais  adopté  par  la  langue  latine  comme 
Pline  l'atteste  [2).  Betulletum  est  écrit  :  Bedolitum  dans  une 
charte  de  l'abbaye  de  Saint-Denis  en  832  (3),  Bidolidum 
dans  le  Polyptyque  de  Saint-Germain  des  Prés  (4);  on  écrit 
aujourd'hui  Boulaie ,  Boulay,  Boulaye ,  Boulois ,  Bouloy. 
C'est  un  nom  de  lieu  très  commun. 

BuxETUM  est  un  mot  dont  on  trouve  des  exemples  comme 
nom  commun  dans  la  bonne  latinité  (5)  ;  il  vient  de  btums, 
«  buis;  »  il  est  écrit  fîtwsïfo  en  691,  dans  un  diplôme  du 
roi  Clovis  111  (6)  où  il  s'agit  de  Boissy-l'Aillerie  [Seine-et- 
Oise).  Dans  un  acte  de  l'année  811  on  trouve  la  notation 
Binnidus  (7)  qui  est  reproduite  dans  un  acte  de  847  (8), 
dans  ces  deux  documents  il  est  question  de  Boissy-Saint- 
Léger(Seine-et-Oise).  Buxido  à  l'ablatif  dans  le  Polyptyque 
de  Saint-Germain  des  Prés  parait  désigner  Boissy-Maugis 


(1)  Ce  nom  a  coosorvé  son  double  I  dans  un  ac 
Ouest  en  1019  :  Cum  liluia  BedoHetum  (Hfdoriae  pt 
col.  429  a). 

(2)  HiXoire  nalureJle,  l.  XVI,  JJ  74,  176,  S09. 

(3)  Tardif,  Monumenta  hittoriques,  p.  85,  col.  %. 

(4)  Edition  LoQgnoD,  p.  100. 

(5)  Martial,  II,  14,  15;  III,  S7  (58),  2. 

(6)  Tardif,  lionumtntê  hittoriquet,  p.  23,  col.  t. 

(7)  Tardif,  ibid.,  p.  74,  col.  î. 
(B)  Tardif,  ibUI.,  p.  101,  col.  1. 


SIS  LITRB  n.  CHAPITRB  XVn.  |  3. 

(Orne)  (1).  En  946,  Bi^idtts,  dans  une  charte  d'Hugues 
l'abbé,  duc  de  France,  est  Bucy-Saint-Liphard  (LoîreC  (2 . 
Villa  BuŒiti  en  Lyonnais,  suivant  une  charte  de  960  (3!, 
reste  indéterminé,  comme  villa  Buxida  en  M&connais,  dans 
une  charte  de  987-988  (4).  La  notation  Busitt  avec  i  et  den- 
tale sourde  se  rencontre  trois  fois,  au  onzième  siècle,  dans 
le  Cartulaire  de  Landévennec  (5  ;  elle  y  désigne  des  localités 
situées  en  pays  breton,  dans  le  département  du  Finistère  : 
une  dans  la  commune  de  Briec ,  une  autre  dans  celle  de 
Pleyben,  la  troisième  dans  une  situation  indéterminée. 
Busitt  est  un  nom  latin  qui,  au  onzième  siècle,  survivait 
'  encore  à  la  conquête  bretonne. 

L'a  long  primitif  de  Buxetum  persiste  et  ne  36  change 
pas  en  t,  eu  814,  dans  l'état  des  colons  de  Saint  Victor  de 
Marseille,  oii  est  mentionnée  une  cohnica  in  Buxeto  (6),  et 
dans  une  charte  de  1039  où  il  est  question  d'un  château 
appelé  Boxeium  {!) ,  c'est  le  Boisset ,  commune  de  Saint- 
Martin  de  Castillon  (Vaucluse)  (8).  Le   même  phénomène 
se  produit  dans  un  diplôme  de  Charles  le  Chauve  en  861 , 
où    Buxedus  est   Pont-de-Bossay  (Indre-et-Loire)    (9).   Od 
3  villa  Buxedo   à  l'ablatif,  dans  une  charte  de 
s  l'an  1000  {10}.   En   1046,  Buœeti  Castrum  est 
eux  (Loire)  (11).  Une  charte  de  l'année  949  nous 
i  la  forme  méridionale  moderne  Bois[s]et,  c'est 
'une  villa  située  au  comté  de  Brioude   (Haule- 
On  écrit  aujourd'hui  Boisset,  c'est  un  nom  de 


1,  dans  son  édition  de  ce  document,  p.  164,  \lb. 
Cartulaire  de  N.-D.  de  Chartres,  t.  I,  p.  75;  t.  Il,  p.  213. 
rnard,  Cartulaire  lie  Savigny,  t.  I,  p.  215. 
tecueti  de$  clisrles  de  Cluny,  t.  III,  p.   15. 
nU  inédits.  Mélanges,  t.  V,  p.  556,  566,  569. 
,  Cartulaire  de  Sainl-Viclor  de  Marseille,  t,  II,  p.  ti46,  n-  61. 
,  ibid.,  t.  I,  p.  445. 
I,  ibid.,  t.  II,  p.  849. 

La  pancarte  noire  de  Saint-htarlin  de  Tourt.  p.  ÎM;  cf.  p.  159. 
Recueil  des  chartes  de  Cluny,  t.  III,  p.  341. 
emard,  Carfulaire  de  Savigny,  t.  I,  p.  378;  t.  II,  p.  1111. 
Csriulaire  de  Brioude,  p.  103. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -ETUM.  619 

lieu  fréquent  dans  le  midi  de  la  France.  On  le  trouve  dans 
le  Gard  (1),  dans  THérault  (2),  le  Cantal,  la  Loire,  etc.;  on 
peut  en  rapprocher  la  notation  Boissey  (Ain,  Calvados, 
Eure)  ;  quant  à  Boissy  par  y  final,  c'est  le  nom  de  huit  com- 
munes du  département  de  Seine-et-Oise  ;  on  le  rencon- 
tre aussi  dans  la  Seine-et-Marne,  la  Marne,  TOise,  l'Eure, 
r Eure-et-Loir,  l'Orne,  le  Loiret.  Cf.  Buxarias^  p.  606. 

Castanetum,  qu'on  trouve  déjà  comme  nom  commun 
chez  Columelle,  c'est-à-dire  au  premier  siècle  de  notre 
ère  (3),  vient  du  latin  castanea,  «  châtaigne  »  et  «  châtai- 
gnier. »  Castanetum  est  la  forme  classique  du  nom  de  la 
villa  Castanito  près  d'Etampes,  mentionnée  dans  un  docu- 
ment mérovingien  vers  la  fin  du  septième  siècle  (4).  Gé- 
néralement, dans  ce  mot,  Ve  du  suffixe  est  conservé  dans 
les  documents  latins.  Dans  les  titres  de  la  cathédrale  de 
Paris,  Castanedum  en  795  (5),  en  829  (6),  en  850  (7),  en 
982  (8) ,  Castenedum  en  984  (9) ,  est  aujourd'hui  Châtenay 
(Seine-et-Oise).  Chastenay  (Yonne)  est  appelé  à  l'ablatif 
Castaneto  dans  quatre  documents  du  neuvième  siècle  (10). 
Castanedo  à  l'ablatif,  Castanedum  à  l'accusatif,  sont  au 
dixième  siècle  le  nom  de  Châtenay,  commune  de  Sancé 
(Saône-et-Loire)  (11).  La  forme  provençale  moderne  de  ce 
nom  de  lieu  est  Castanet  (Aveyron ,  Haute-Garonne ,  Hé- 


(1)  Oerxner-Durand,  DicU  top,  du  Gard,  p.  29. 

(2)  E.  Thomas,  Dict.  topogr.  de  l'Hérault,  p.  21. 

(3)  Un  exemple  de  ce  mot  comme  non  propre  de  lieu  habité  en  Italie  nous 
est  fourni,  en  1159,  par  un  titre  de  l'archevêché  de  Turin  :  Ciirlem  de  Cas- 
teneto  {Histori&e  patriae  monumenta,  t.  I,  col.  816  d). 

(4)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  21. 

(5)  Guérard,  Cartulaire  de  Notre-Dame  de  Parts,  t.  I,  p.  240. 

(6)  Quérard,  ibid.,  p.  322. 

(7)  Quérard,  ibid.,  p.  251. 

(8)  Quérard,  ibid,,  p.  275. 

(9)  Quérard,  tbid.,  p.  221. 

(10)  1%  2*  864  (Quantin,  Cartulaire  de  l'Yonne,  1. 1,  p.  88,  92)  ;  3-  884  {ibid. 
p.  110);  4*  886  (ibid.,  p.  116). 

(11)  Bruel,  Recueil  des  chartes  de  Cluny,  t.  II,  p.  25  ;  Ragut,  Cartulaire  de 
Saint'Vincent  de  Mâcon,  p.  7,  32,  120;  cf.  Chavot,  Le  Méconnais,  p.  103. 


«M)  LIVRE  II.  OHAPITRB  XVH.  1  2. 

rault,  Tarn,  Tarn-et-Garonne) ,  etc.  Dans  la  région  inter- 
médiaire, Charente,  Cliarente-Inférieure ,  Creuse,  Dordo- 
gne ,  etc. ,  on  trouve  Châtenet,  Chastenay  ;  dans  le  nord  : 
1**  Châtenay,  Chastenay  avec  «y  final  =  é[tum]{8eine,  Seine- 
et-Oise,  Eure-et-Loir,  Seine-et-Marne,  Haute-Marne,  Yonne, 
Saône-et-Loire ,  Ain,  Isère);  2®  Châtenois  (Jura,  Haute- 
Saône,  Vosges),  ou  Châlenoy  (Loiret,  Seine-et-Marne, 
Saône-et-Loire),  avec  la  désinence  oi  =  é[tum], 

*Cbpetum,  du  latin  cepa^  «  oignon,  »  est  noté  Ceped,  au 
onzième  siècle ,  dans  une  charte  de  Tabbaye  de  Conques 
(Aveyron)  (1)  ;  c'est  aujourd'hui  Cépet  (Haute-Garonne)  (2). 
Cepidum ,  à  l'ablatif  Cepido ,  est ,  au  dixième  siècle ,  un 
hameau  près  de  Chartres  (Eure-et-Loir)  (3).  Aujourd'hui, 
dans  le  nord  de  la  France,  Cepoix  (Loiret)  et  Chepoix  (Oiseï, 
sont  probablement  d'anciens  Cepetum.  Spay  (Sarthe),  Spoy 
(Aube),  Spoy  (Côte-d'Or),  ont  la  môme  origine.  Le  dernier 
est  le  Cypetum  de  la  Chronique  de  Bèze  (4). 

CoRYLETUM,  mot  employé  comme  nom  commun  par 
Ovide  (5),  dérive  du  latin  œryluSy  «  coudrier,  d  Coryleêum 
est  devenu  par  métathèse  de  IV  dans  le  Polyplygtui  de 
Saint-Germain  des  Prés,  Colridum  :  c'est  le  nom  de  Goudray- 
sur-Seine  (Seine-et-Oise)  (6),  et  du  Coudray,  commune  de 
Senantes  (Eure-et-Loir)  (7).  Le  Coudray  est  un  nom  de 
commune  et  de  hameau  très  répandu  en  France  ;  on  trouve 
aussi  le  féminin  La  Coudraie. 

*Fagetum,  du  latin  fagus^  «  hôtre,  »  est  noté  à  l'ablatif 
Fagito  dans  la  liste  des  colons  de  l'abbaye  de  Saint-Victor 


(1)  G.  Desjardins,  Cartulaire  de  Conques^  p.  62-63. 

(2)  G.  Oosjardins,  tbid.,  p.  cv. 

(3)  L.  Merlet,  Cartulairs  de  Notre-Dame  de  Chartres,  t.  I,  p.  80. 

(4)  Garnier,  Nomenclature  historique,  p.  37,  n*  163;  cf.  ci-deesus,  p.  406-4Cr7. 

(5)  Ovide,  Fastes,  II,  587. 

(6)  Longnon,  Polyptyqv>e  de  Saint-Germain  des  Prés^  p.  256. 

(7)  Lox^non,  iM4.,  p.  ti6^ 


NOMS  DE  LIEU  EN  -BTUM.  621 

de  Marseille  en  814  (1);  dans  le  même  siècle,  une  charte 
de  Brioude  (Haute-Loire)  constate  la  donation  d'un  bien 
situé  dans  une  villa  dite  Mediano  Pagido  (2).  Fagetum  est 
devenu,  dans  le  nord  et  le  centre  de  la  France,  Fay,  noto 
de  lieu  très  répandu  ;  dans  le  midi,  Faget  (Haute-Garonne, 
Gers),  etc. 

*Praxinetum,  du  latin  praùnnus^  «  frêne,  »  est  noté 
Fraœnido,  au  neuvième  siècle,  dans  deux  chartes  de  l'abbayé 
de  Saint-Denis  (3)  ;  il  s'agit  de  Fresnay-l'Evôque  (Eure-et- 
Loir).  Au  douzième  siècle ,  dans  les  titres  de  Notre-Dame 
de  Chartres,  apparaît  l'orthographe  savante  Fraxinetum  (4). 
Les  chartes  de  Brioude  nous  offrent  Fragsineto  en  893  (5), 
Froa^enePurri  au  onzième  siècle  (6)  ;  les  chartes  de  Cluny, 
Frcktenêdum  aii  dixième  siècle  (7) ,  Frasnedo  en  l'an  1000  (8)  ; 
les  chartes  de  Saint- Victor  de  Marseille  à  la  fin  du  dixième 
siècle ,  dans  le  courant  du  onzième  :  de  Fraœeneto  (9) ,  in 
Fraweneto  (10),  terra...  Fraxeneium  (11).  Dans  le  nord  de  la 
France,  ce  nom  de  lieu ,  très  commun ,  s'écrit  aujourd'hui 
Frenay,  Freney,  Fresnay,  Fresney;  il  y  a  une  variante 
Ffesnois,  Fi'esnoy.  Dans  le  midi  on  a  Fraissinet,  Frayssinet, 
Freycenet,  Preyssenet. 

*Gentianetum,  du  latin  gentianaj  «  gentiane,  »  est  écrit 
Gentianedo  dans  une  charte  de  l'année  971.  C'est  le  nom 


(1)  Gnérard,  Cart.  de  SAint-yicior  de  HarseiHe,  t.  II,  p.  641,  a*  22. 

(2)  Douiol,  Cartul&ire  de  Brioude^  p.  245. 

(3)  L^une  de  832,  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  85»  col.  1;  Tantre  de 
862,  iMd.^  p.  117»  col.  2. 

(4)  L.  Merlet,  Cart.  de  N.-D,  de  Chartres,  t.  I,  p.  123,  170. 

(5)  Doniol,  Cartulaire  de  Brioude,  p.  218. 

(6)  Doniol,  ioid.,  p.  337. 

(7)  Bruel,  Recueil  des  chartes  de  Cluny,  t.  I,  p.  561. 

(8)  Bruel,  ibid.,  t.  III,  p.  579. 

(9)  Guérard,  Cart.  de  Saint-Vicior  de  MarséiUs ,  t.  I,  p.  104  (993?)  ;  t.    I 
p.  24  (1008). 

(10)  Guérard,  ibid,,  t.  I,  p.  579  (1069). 

(11)  GTicrard,  ibid.,  t.  I,  p.  581  (1058). 


1 


622  LIVRE  II.  CHAPITRE  XVII.  {  2. 

d'une  villa  située  dans  la  vicairie  de  Rageade  (CantaJ)  (l'i. 

*  Genistetum  ,  dérivé  du  latin  genista  ,  «  genêt ,  >^  est  à 
Tablatif  Ginestedo  dans  l'état  de  colons  de  Tabbaye  Saint- 
Victor  de  Marseille  en  814  (2)  ;  Genestedo  en  917,  dans  une 
charte  de  Tabbaye  de  Beaulieu  (3),  où  il  est  question  d'une 
localité  située  près  de  RouflQac  (Cantal)  (4).  Génetay  (Eure, 
Sarthe,  Seine-Inférieure),  est  une  prononciation  française 
du  latin  Genistetum, 

* JuNiPERETUM,  Au l3.iin  juniperus,  «  genévrier»  (cf.p.607\ 
est  noté,  au  féminin.  Genevreta,  vers  la  fin  du  dixième  siècle, 
dans  une  charte  de  l'abbaye  lyonnaise  d'Ainay  (5).  Telle 
est  l'origine  du  nom  des  deux  communes  de  La  Genevraie 
(Orne) ,  de  La  Genevraye  (Seine-et-Marne).  Le  genre  pri- 
mitif persiste  dans  le  nom  de  villa  écrit  à  l'ablatif  Genebreto 
en  984,  par  un  notaire  de  Tarchevéque  de  Vienne  (Isère)  !6;. 
A  comparer  le  nom  de  la  commune  de  Genevray  (Haute- 
Saône).  Le  nom  de  quelques  hameaux  a  la  même  origine. 

Lauretum,  mot  employé  déjà  par  Varron,  au  P'  siècle 
avant  notre  ère  (7),  dérive  du  latin  laurus,  «  laurier.  »  On 
rencontre  deux  fois  ce  nom  de  lieu  au  dixième  siècle  dans 
les  chartes  de  l'abbaye  Saint-Victor  de  Marseille  (8)  ;  il  s'agit 
d'une  localité  située  près  de  Marseille.  Une  villa  de  Laureto, 
dont  on  a  une  mention  en  1115,  est  aujourd'hui  Laurel, 
commune  de  Sauteyrac-Lauret-et-Aleyrac  (Hérault)  (9).  11 
y  a  une  commune  de  Lauret  dans  les  Landes,  des  hameaux 


(1)  Doniol,  Càrtul&ire  de  Brtoude,  p.  196;  cf.  Longnon,  AtZas  historique^ 
p.  195. 

(2)  Guérard,  CartuL  de  Saint-Victor  de  MarseUUt  t.  II,  p.  651. 

(3)  Deloche,  Cartulaire  de  Beaulieu^  p.  223. 

(4)  Deioche,  ibid.,  p.  CLXix,  382. 

\b)  Aug.  Beruard,  Cartulaire  de  Savigny,  t.  Il,  p.  581. 

(6)  Abbé  Chevalier,  Cartulaire  de  Saint-André-le-Bas,  p.  247. 

(7)  De  linyua  latina,  IV,  32. 

(8)  Quérard,  Cartulaire  de  Saint-Victor  de  \f:\rsiùl1p,  t.  I.  \i  ô?,  f'A). 

(9)  A.  Thomas,  Dict.  top,  de  l'Hérault,  p.  90. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -ETUM.  623 

de  Lauret  dans  le  Gers  et  la  Gironde;  leur  nom  est  le 
même  que  celui  du  Lauretum  situé  à  Rome  sur  le  mont 
Aventin. 

Un  fundo  Laurito ,  avec  i  =  é^  est  mentionné  dans  une 
charte  de  Ravenne,  contemporaine  de  Tarchevôque  Ser- 
gius,  748-769  (1).  Mais  Ve  est  conservé,  en  1169,  dans  un 
titre  de  la  cathédrale  d'Asti,  où  ce  mot  est  écrit  Laureto  (2), 
et  dans  d'autres  documents  piémontais  du  onzième  et  du 
douzième  siècle  où  on  trouve  la  notation  Loreto  (3). 

NucETUM,  mot  déjà  employé  comme  nom  commun  par 
Stace  au  premier  siècle  de  notre  ère,  et,  après  lui,  par 
TertuUien ,  dérive  du  latin  ntw?,  nucis^  a  noix,  noyer.  » 
Nttcetum  devient  Nocito,  à  la  fin  du  septième  siècle,  dans 
deux  diplômes  mérovingiens  (4);  il  s'agit  de  Noisy-sur- 
Oise  (Seine  et-Oise).  Noisy-le-Sec  (Seine),  apparaît  au  neu- 
vième siècle  sous  le  nom  de  Nucitum  (5).  L'^  persiste  dans 
la  notation  Nocetus  en  811  (6),  mais  la  langue  usuelle  a 
changé  le  suffixe,  Nocetus  est  devenu  Noiseau  =  NucellxAS-^ 
c'est  une  commune  du  département  de  Seine-et-Oise.  Il  y  a 
aujourd'hui,  dans  Seine-et-Oise,  trois  communes  de  Noisy; 
on  en  trouve  deux  dans  Seine-et-Marne.  Cf.  Nogariolas^ 
p.  523;  Nucarias^  p.  609;  Nucaretum^  p.  633. 

Olivetum  ,  déjà  employé  comme  nom  commun  par  Ci- 
céron ,  dérive  du  latin  oliva ,  «  olive  »  et  «  olivier.  » 
On  trouve  ce  mot  désignant  un  lieu  dit  dans  la  liste  des 


(1)  Fantnzzi,  Monumenti  Ravennati,  p.  15. 

(^)  Hiatoriae  pairiae  monumenta,  t.  I,  col.  855  a. 

(3)  Ibid.,  t.  I,  col.  400  6,  825  6,  914  b. 

(4)  1*  Villa  NocitOy  en  692,  chez  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  25, 
col.  2  :  trois  exemples  ;  ~  2*  Nocito,  en  697,  ibid.,  p.  31,  col.  2;  —  3*  Dans 
le  proiiiier  de  ces  deux  diplômes  :  Villa  Nocita  une  fois. 

(5)  1*  En  832  ,  Tardif,  Monuments  historiques ,  p.  85,  col.  2;  2*  en  862, 
iWd.,  p.  119,  col.  2. 

(6)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  74,  col.  2  ;  cf.  Guérard ,  CartuUire 
de  N.-D.  de  Paris,  U  I,  p.  290. 


eu  LIVRE  IL  CHAPITRE  XVIL  |  % 

colons  de  l'abbaye  de  Saint-Victor  de  Marseille  en  814  fl). 

PiNETUM  est  employé  par  Ovide  comme  nom  commim 
avec  le  sens  de  «  bois  de  pins.  »  Pinetum,  en  latin,  est 
aussi  un  nom  propre  ;  il  désigne ,  nous  Tavons  déjà  vu , 
une  station  romaine  d'Espagne  (2).  Dans  une  charte  de 
Cluny,  en  909 ,  il  est  question  d'une  villa  Pineta  située  au 
comté  d'Aix  (Bouches-du-Rhône)  (3;  ;  c'est  peut-être  la 
Pinède,  commune  d'Istres,  arrondissement  d'Aix.  Une 
Pinetus  villa  apparaît  au  même  siècle  dans  deux  chartes 
de  Savigny,  c'est  Pinay  (Loire)  (4).  En  1081,  un  castrum 
PinePum  est  Pinet ,  commune  d'Eyzin  (Isère)  (5).  Au  qua- 
torzième siècle,  la  Pineda  est  le  nom  de  La  Pénide,  com- 
mune de  Saint-Just  (Haute-Loire)  (6). 

PoMETUM,  dérivé  de  pomus,  a  pommier,  »  est  employé 
comme  nom  commun  par  Palladius,  au  cinquième  siècle. 
Dans  une  charte  de  Cluny ,  en  984 ,  Pomedo  à  Tablatif  dé- 
signe une  villa  du  pays  d'Autun  (7)  ;  c'est  peut-être  le  Po- 
moy,  commune  de  Roussillon  (Saône-et-Loire).  Il  y  a  un 
autre  Pomoy  dans  la  Haute-Saône.  Plus  au  midi,  on  trouve 
Pomet  ;  par  exemple ,  dans  les  Hautes-Alpes ,  c'est  la  no- 
tation moderne  du  nom  de  la  localité  où  était  située ,  vers 
1100,  l'église  de  Pometo  (8).  Cf.  Pomaretum,  p.  633. 

*Prunetum,  de  prunus  y  «  prunier,  »  est  noté  Pruniéum 
au  huitième  siècle,  dans  un  document  où  ce  mot  désigne 
Prény  (Meurthe-et-Moselle)  (9).  Cette  notation,  qui  remplace 


(1)  Guérard,  Cartulaire  de  SB-ini-Victor  de  tfarseiZla^  t.  II,  p.  634. 

(2)  ItinéraLire  d'Anionin,  p.  422. 

(3)  Bruol.  Recueil  des  charlee  de  Cluny,  L  I,  p.  117. 

(4)  Aug.  Beraard,  Cartulaire  de  Savigny,  t.  I,  p.  32,  233;  t.  II,  p.  1136. 

(5)  Abbé  Chevalior,  Cartulaire  de  l'abbaye  Saint-André^le^Bag,  p.  197. 

(6)  Ghassaing,  Spicilegium  Brivatense,  p.  328,  708. 

(7)  Bruel,  Recueil  des  chartes  de  Cluny,  t.  II,  p.  696. 

(8)  Roman,  Dict.  topog.  des  Hautes-Alpes,  p.  115. 

(9)  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  399;  Lepage,  Dictionnaire  topoar.  ée 
U  MeurUie,  p.  113. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -ETUM.  &b 

par  »  Ve  du  suffixe ,  se  trouve  aussi  dans  k  Chronique  de 
Saint-Bénigne  de  Difûn  (1)  ;  lÀ  Prumà/wn  représente  Prenois 
(Côte-d*Or).  Ve  persiste  dans  la  notation  PruneUim  d'une 
charte  d'Alcuin,  pour  Tabbaye  de  Cormery  ;  il  s'agit  proba- 
blement de  Prunay-Belle ville  (Aube)  (2).  Il  y  a  en  France 
huit  communes  de  Prunay  (Aube,  Eure-et-Loir,  Loir-et- 
Cher,  Marne,  Seine-et-^Oise)  ;  une  commune  de  Prunoy 
(Yonne).  Dans  le  midi,  le  t  se  maintient;  il  y  a  quatre 
communes  de  Prunet  (Ardèche,  Cantal,  Haute-Garonne, 
Pyrénées-Orientales) . 

RoBORETUK,  de  robar^  «  chdoe  rouvre,  »  est  déjà  un  nom 
propre  de  lieu  dans  V Itinéraire  d'AnUmin.  Dans  un  diplôme 
mérovingien  de  Tannée  717,  ce  nom  est  écrit  Roverito  à 
l'accusatif;  il  désigne  une  forêt  située  près  de  Paris  (3).  En 
832  et  en  862,  Ruberido  est  compris  dans  la  liste  des  ifillae 
qui  appartiennent  à  l'abbaye  de  Saint-Denis  (4).  Rubridum^ 
avec  chute  de  la  voyelle  médiale ,  se  trouve  ailleurs  (5). 
Dans  ces  exemples,  Vê  primitif  du  suffixe  est  noté  i;  il 
persiste  dans  les  suivants  :  Rovereto^  Roveredo^  en  814,  est 
l'orthographe  que  nous  offre  la  liste  des  colons  de  Saint- 
Victor  de  Marseille  (6)  ;  Rouvray  (Yonne)  est  appelé,  à  l'abla- 
tif, Roboreto  dans  deux  diplômes  carloviugiens,  884,  886  (7)  ; 
dans  le  Cartulaire  de  Brioude  (Haute-Loire) ,  en  943 ,  il  est 
question  d'une  villam  quae  dicitur  Rovereto  (8).  La  forme 
moderne  est  :  1®  Rouvray,  nom  de  deux  communes  du  dé- 
partement d'Eure-et-Loir,  et  de  cinq  autres  dans  les  dé- 
partements de  la  Côte-d'Or,  de  l'Eure,  du  Loiret,  de  la 
Seine-Inférieure  et  de  l'Yonne  ;  V  il  y  a  huit  communes 


(1)  Edition  Qamier»  p.  29. 

(2)  Habille,  La  pancarte  notre,  p.  231  ;  cf.  p.  1^. 

(3)  Tardif»  Monumentê  historiques,  p.  42,  col.  1. 

(4)  Tardif,  t6id.,  p.  85,  col.  1  ;  p.  117,  col.  2. 

(5)  Pardessus,  Diptomata,  t.  II,  p.  35. 

(6)  Quérard,  Cartulaire  de  Saint- Victor  de  MareeiJIe,  t.  Il,  p.  634,  850. 

(7)  Qnantin,  Cartulaire  de  ITonne,  t.  I,  p.  111,  117. 
^)  Ooniol,  Cartulaire  de  Brioude^  p.  300. 

40 


626  LIVRE  II.  CHAPITRE  XVII.  {  2. 

de  Rouvroy  :  Aisne,  Ardennes,  Marne,  Haute-Marne,  Oise, 
Pas-de-Calais.  Somme  ;  et  deux  de  Rouvrois  (Meuse),  sans 
compter  les  hameaux.  Cf.  Roboraria^  p.  605. 

^Salicetum,  plus  régulièrement  formé  que  le  salictum 
des  auteurs  classiques  latins,  et  que  le  salictetum  des  Pan- 
dectes,  est  dérivé  de  saHœ,  «  saule.  »  Il  explique  le  Sao- 
citho  d'un  diplôme  mérovingien  du  septième  siècle  (1)  ;  le 
de  Salcido  du  Polyptyque  de  Saint- Germain  des  Prés,  dans 
une  addition  écrite  au  dixième  siècle.  La  localité  moderne 
que  ce  dernier  document  désigne  est  Saussay,  commune 
du  département  d'Eure-et-Loir  (2).  Ue  du  suffixe  -etum  re- 
paraît dans  une  charte  qui,  en  979,  met  en  Lyonnais  la 
villa  quae  vocatur  Salicetus  (3).  De  Salicetum  vient  aujour- 
d'hui le  nom  des  communes  de  Saulcy  (Aube  et  Vosges), 
Sauchy  (Pas-de-Calais),  Saussey  (Côte-d'Or  et  Manche^ 
Sauchay  (Seine-Inférieure).  Parmi  les  hameaux,  nous  ci- 
terons ceux  qui  nous  offrent  les  variantes  :  Saussoy  (Seine- 
et-Marne  et  Yonne) ,  Sausset  (Ariège ,  Bouches-du-Rhône , 
Hautes-Pyrénées).  La  Saussaye  (Eure,  Seine-et-Marne),  re- 
présente un  primitif,  *  Saliceta. 

L'idée  qui  a  fait  créer  ces  noms  de  lieux  est  exprimée 
autrement  par  le  nom  de  la  station  romaine  ad  Salices,  en 
Mésie  (4). 

Spinetum,  de  spina^  «  épine,  »  est  employé  comme  nom 
commun  par  Virgile  : 

Nunc  virides  etiam  occultant  spineta  lacertos  (5). 

La  variante  Spinito ,  à  l'ablatif,  est  conservée  par  le  Po- 


(1)  Tardif,  Monuments  historiqueêy  p.  17,  col.  1. 

(2)  Longnon,  Polyptyque  de  Saint-Germain  des  PréSy  p.  39.  Meriet,  DicL 
top,  d'Eure-et-Loir^  p.  171. 

(3)  Aug.  BamïLrd,  CartuMre  de  S&vigny,  t.  I,  p.  119. 

(4)  Itinéraire  d'Antonin,  p.  227, 1. 1. 

(5)  Eclogue  II,  v.  9. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -ETUM.  627 

lyptyque  de  Saint-Germain  des  Prés  (1).  Mais  il  y  a  des  exem- 
ples de  SpinePum,  par  exemple  dans  une  charte  du  onzième 
siècle,  qui  concerne  Epinay,  commune  de  La  Chapelle  du 
Genêt  (Maine-et-Loire)  (2). 

*TiLiETUM,  de  tiliay  «  tilleul,  »  est  noté,  à  l'ablatif,  Til- 
lido  dans  deux  chartes  du  neuvième  siècle,  qui  concernent 
la  cathédrale  d'Âutun  (3).  Il  y  avait,  au  même  siècle,  dans 
le  diocèse  du  Mans,  un  Tillidi  monasterium  (4),  et  aussi, 
à  la  même  époque,  Pépin  II,  roi  d'Aquitaine,  disposait  de 
biens  situés  en  Limousin ,  in  Telido  villa  (5)  ;  ce  dernier 
paraît  être  aujourd'hui  un  des  hameaux  de  Teillet,  situés 
dans  le  département  de  la  Corrèze.  Les  communes  de  Til- 
loy  (Marne,  Pas-de-Calais,  Somme)  sont  probablement 
d'anciens  TiliePum  ;  mais  les  Tilly  et  Tillay  peuvent  être 
aussi  bien  d'anciens  Tilliacus  que  d'anciens  Tilietum.  Il  est 
difficile  de  les  distinguer  quand  on  n'a  pas  à  sa  disposition 
des  textes  antérieurs  au  milieu  du  onzième  siècle.  Ce  sujet 
a  été  traité,  p.  373. 

Tremuletum,  de  trernula^  sous-entendu  papulv^y  «  trem- 
ble, »  à  l'ablatif  :  Trimlido  dans  une  charte  de  832  pour  l'ab- 
baye de  Saint-Denis  (6)  ;  de  Tremoledo,  au  douzième  siècle, 
dans  une  charte  de  l'abbaye  de  Conques  (7).  La  forme  mo- 
derne de  ce  nom  de  lieu  est  Tremblay,  nom  de  communes 
situées  dans  les  départements  de  l'Eure,  d'Eure-et-Loir ^ 
d'IUe-et-Vilaine,  de  Maine-et-Loire  et  de  Seine-et-Oise.  On 
trouve,  dans  les  Ârdennes  et  dans  la  Haute-Saône,  la  va- 
riante Tremblois.  Tremilly  (Haute-Marne)  a  une  tout  autre 


(i)  Edition  Longnon,  p.  359. 

(2)  Port,  Dictionnaire  de  Maine-et 'Loiret  t.  U,  p.  111. 

(3)  Charmasse,  C&rtul&ire  de  l'église  d'Auiun,  p.  30,  33.  Le  savant  auteur 
croit  qu*il  s*agit  de  Tilenay  (Côte-d'Or)  (p.  391).  C'est  impossible. 

(4)  Dom  Bouquet,  t.  V,  p.  768  c  ;  t.  VI,  p.  585  d,  701,  col.  3. 

(5)  Deloche,  Cartulaire  de  Beaulieu,  p.  17. 

(6)  Tardif,  Monuments  historiques^  p.  86,  col.  1. 

(7)  G.  Desjardins,  C&rtulaire  de  ConqueSy  p.  373. 


628  LIVRE  lï.  CHAPITRE  XVÏÏ.  i  3. 

origine  :  c'est  un  ancien  *  Tremelliacus  dérivé  du  geTitilîce 
Tremellius,  dont  l'histoire  romaine  nous  offre  Quelques 
exemples  (1). 

*  Ulmetum,  dérivé  d'ttimitô,  «  orme,  »  est  noté  à  l'ablatif 
Ulmido,  dans  le  Polyptyque  de  Saint- Germain  des  Prés;  la 
forme  moderne  correspondante  est  Osmoy,  nom  d'une  com- 
mune du  département  de  Seine-et-Oise  (2).  Ce  mot  avait 
une  variante  féminine ,  Ulmeta  ;  on  la  voit  écrite  Ulmita 
dans  une  charte  de  Ravenne  qui  date,  au  plus  tard,  du 
dixième  siècle  ;  c'est  le  nom  d'un  fundus  (3).  La  même 
variante  féminine  se  retrouve  notée  Vlmeta^  en  1057,  dans 
une  charte  de  Saint-Victor  de  Marseille  (4).  La  forme  ordi- 
naire de  ce  nom  de  lieu  est  aujourd'hui,  en  France,  Ormoy, 
nom  de  communes  dans  les  départements  d'Eure-et-Loir, 
de  la  Haute-Marne,  de  l'Oise,  de  la  Haute-Saône,  de 
Seine-et-Oise  et  de  l'Yonne. 

S  3.  —  Dérivés  en  -etum  de  noms  de  végétaux  qui  ne  santpas 

latins. 

Casnetum  de  connus,  «  chêne  »  est  à  l'ablatif  Casneto  dans 
une  charte  de  la  première  moitié  du  douzième  siècle  où  ce 
mot  désigne  Chêne- Arnoult ,  commune  du  département  de 
l'Yonne  (5).  Une  charte  de  Tannée  1012,  conservée  par  la 
chronique  de  Saint-Bénigne  de  Dijon  (6) ,  nous  a  conservé 
la  notation  plus  ancienne  et  moins  savante  Casnedum.  La 
forme  moderne  est  :  Chesnay,  nom  d'une  commune  du 
département  de  Seine-et-Oise  ;  Chesnois,  nom  d'une  com- 
mune des  Ârdennes;  Chesnoy,  nom  de  hameaux  (Loiret . 


(1)  Panly,  Real-Encyclopaediey  t.  VI,  p.  2085-2086. 

(2)  Longnon,  Polyptyque  de  Saint-Germain  des  Pria,  p.  337. 

(3)  Fantuzzi,  Monumenti  Ravennati,  t.  I,  p.  19. 

(4)  Quérard»  Cartulaire  de  Saint^Victor  de  Marseille,  t.  I,  p.  77. 

(5)  Quantin,  Cartulaire  de  l'Yonne,  t.  I,  p.  466,  579. 

(^  Edition  Gamier,  p.  100  ;  cf.  Qarnier,  Nomenclature,  p.  34,  n*  148. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -ETUM.  629 

Nièvre,  Seine-et-Marne).  Il  y  a  aujourd'hui,  dans  Tltalie 
du  nord,  province  de  Côme ,  un  hameau  de  Casneda  et  un 
hameau  de  Casnedo. 

*Rausetum,  du  germanique  ratis,  «  roseau,  »  conservé  en 
gothique,  mais  en  allemand  rohr.  Cf.  Rausarias^  p.  608.  Vers 
751,  Rausedo  est  le  nom  d'un  locus  appartenant  à  Tabbaye 
de  Saint-Denis  (1).  Dans  les  documents  postérieurs,  la  diph- 
tongue au  est  remplacée  par  la  voyelle  o  et  le  ^  classique 
est  substitué  au  d,  qui  représente  la  prononciation  de  l'épo- 
que mérovingienne.  C'est  ainsi  que  dans  des  chartes  du 
neuvième,  du  dixième  et  du  onzième  siècle,  telles  du  moins 
que  nous  les  a  conservées  le  Cartulaire  de  Notre-Dame  de 
Paris,  Rosoy-en-Brie  (Seine-et-Marne)  est  appelé  i?056mm  (2). 
On  trouve  aussi  la  variante  Rosetus  dans  une  charte  origi- 
nale de  Tannée  1025  (3);  dans  une  bulle  de  Tannée  1156, 
les  mots  abbatia  de  Boseto  désignent  une  abbaye  située  à 
Rosoy-le-Jeune .  commune  d'Ervauville  (Loiret)  (4).  Le 
nom  de  Rosoy  s'écrit  tantôt  avec  s,  tantôt  avec  z;  il  y  a 
quatre  communes  de  Rosoy,  deux  dans  l'Oise,  une  dans 
la  Haute-Marne ,  une  dans  TYonne  et  cinq  communes  de 
Rozoy,  trois  dans  TAisne,  une  dans  le  Loiret  et  l'autre 
dans  Seine-et-Marne.  Les  noms  des  deux  communes  de 
Rosey  (Haute-Saône  et  Saône-et-Loire)  et  les  cinq  com- 
munes de  Rosay  (Eure,  Jura,  Marne,  Seine-et-Marne, 
Seine-Inférieure)  peuvent  avoir  la  même  origine. 

Vernetum,  du  gaulois  vernoSy  «  aune  (p.  617)-,  »  donne 
villa  de  Veimedo,  en  Forez,  dans  une  charte  du  onzième 
siècle  (5).  Un  manse  de  Verneto  apparaît  à  la  fin  du 
onzième  siècle,    dans  une  charte  de   l'abbaye   de  Con- 


(1)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  45,  col.  2. 

(2)  Guérard,  Cartulaire  de  Notre-Dame  de  Paris,  t.  I,  p.  275,  289,  321. 

(3)  Tardif,  Monuments  historiques,  p   162,  col.  1. 

(4)  Quantin,  Cartulaire  de  l'Yonne,  t.  I,  p.  538,  590. 

(5)  Aug.  Bernard,  Cartulaire  de  Savigny,  t.  I,  p.  369. 


630  LIVRE  II.  CHAPITRE  XVII.  {  4. 

ques  (1),  son  nom  est  écrit  Vernedo  dans  un  documeiit 
un  peu  postérieur  (2);  il  s'agit  du  Vernet,  commune 
de  Nauviale  (Aveyron)  ;  c'est  Torthographe  méridionale. 
Dans  le  département  de  la  Côte-d'Or,  Vernois  est  la 
notation  de  l'antique  Vêrnetum  (3).  Il  y  a  deux  communes 
de  Vernois  dans  le  département  de  la  Côte-d'Or,  on  en 
compte  trois  dans  le  Doubs ,  une  dans  le  Jura ,  une  autre 
dans  la  Haute-Saône.  Il  y  a  une  commune  de  Ver- 
nay  (Rhône);  les  communes  de  Vernet  se  trouvent  dans 
l'Allier,  les  Basses-Alpes,  TAriège,  la  Haute-Garonne,  la 
Haute-Loire ,  le  Puy-de-Dôme  et  les  Pyrénées-Orientales. 

S  4.  —  Dérivés  en  -etum  de  noms  commims  qui  ne  désignent 

pas  des  végétaux. 

CoRTiLETUM,  dérfvé  du  bas  latin  cortile^  «  jardin,  »  dé- 
rive lui-même  de  cors^  cor  Us ,  «  ferme.  »  Des  biens  don- 
nés à  Tabbaye  de  Cluny ,  en  974  ,  étaient  situés  en  Autu- 
nois ,  in  villa  Curtilido  (4). 

EssARETUM  est  uu  mot  de  fabrication  récente,  tiré  du 
français  Essari ,  Essarts ,  terrain  défriché  dont  le  t  ne  se 
prononce  pas.  Du  latin  ex-sartum,  viendrait  exartetum.  Es- 
saretum  était,  au  douzième  siècle,  le  nom  latin  d*Essarois. 
commune  du  département  de  la  Côte-d'Or  (5). 

FoNTANETUM  dérivc  de  fontana,  qui  est  originairement  le 
féminin  de  Tadjectif  fonianus ,  dérivé  de  fon^  «  source.  » 
Cet  adjectif  est  déjà  employé  par  Ovide  : 

...  Ora  fontana  reclusi  (6). 


(1)  Q.  Desjardins,  Càrtulaire  de  Conques,  p.  108. 

(2)  G.  Desjardins,  ibid.,  p.  346. 

(3)  Garnier,  Nomenclature,  p.  55.  n*  238. 

(4)  Bruel,  Recueil  des  chartes  de  Cluny,  t.  II,  p.  461. 

(5)  Garnier,  Nomenclature,  p.  141,  n*  572. 

(6)  Fastes,  I,  269. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -E  TU  M.  631 

Fontaine  en  français,  fontana  en  italien,  sont  des  sub- 
stantifs. Aussi  le  mot  Fontanetum  ne  se  rencontre  pas  seu- 
ment  en  France.  On  le  trouve  en  Tan  mil,  dans  une  charte 
de  l'empereur  Otton  III  pour  l'église  de  Verceil  (1)  ;  dans 
les  archives  de  la  ville  de  Verceil,  on  voit  apparaître 
comme  témoins  en  1182  et  en  1192,  Nicolaus  de  Fontor- 
neto  (2);  en  1192,  il  y  est  question  d'un  certain  Bartholomeus 
de  Fontaneto  (3)  ;  la  même  année  Nicola/us  de  FonUmeto 
était  consul  à  Verceil  (4).  En  France,  ce  nom  de  lieu  est 
très  commun;  au  septième  siècle  la  fondatrice  de  l'abbaye 
de  Bruyères-le-Ghâtel  (Seine-et-Oise)  donne  à  cette  abbaye  : 
locello  cognomenante  Funtaneto  (5).  Fontanetum,  dans  un 
diplôme  de  Charles  le  Chauve  en  845,  est  Fontenay  (Cal- 
vados) (6).  Au  dixième  siècle  une  bulle,  en  faveur  de 
Notre-Dame  de  Paris ,  mentionne ,  parmi  les  propriétés  de 
cette  église,  Fontenetum^  qui  est  aujourd'hui  Fontenay- 
sous-Bois  (Seine)  (7);  en  efifet,  en  887,  Eudes,  comte  de 
Paris,  avait  restitué  à  Téglise  Notre-Dame  les  biens  que 
ses  ancêtres  y  avaient  usurpés  :  ex  villa  FonUmeto  (8).  Une 
autre  notation  représente  par  i  la  voyelle  du  suflBxe  :  /bn- 
tanido  en  832  et  en  862 ,  dans  deux  chartes  de  Tabbaye  de 
Saint-Denis  (9)  ;  il  s'agit  de  Fontenay-les-Louvres  (Seine- 
et-Oise).  On  trouve,  au  môme  siècle,  la  môme  notation  :  in 
Fontanido,  dans  le  PolyptyqtM  de  Saint-Germain  des  Prés; 
elle  désigne  Fontenay-Mauvoisin  (Seine-et-Oise)  (10).  Au 
dixième  siècle,  Téglise  cathédrale  Notre-Dame  de  Chartres 
avait  des  biens  m  Fontinido  (11),  c'est-à-dire  à  Fontenay- 


(1)  Historisie  patriae  monuments,  Chartarum  t.  I,  col.  338  c. 

(2)  X6id.,  col.  912  6,  982  c. 

(3)  Ibid.,  col.  985  b. 

(4)  Ibid.,  col.  989  d,  990  6. 

(5)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  16,  col.  t. 

(6)  Tardif,  ibid,,  p.  98,  col.  2. 

(7)  Guérard,  Cartulaire  de  Notre-Dame  de  Paris,  t.  I,  p.  221. 

(8)  Guérard,  ibid.,  t.  I,  p.  298. 

(9)  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  85,  col.  1  ;  p.  117,  col.  2. 

(10)  Longnon,  Polyptyque  de  Saint-Germain  des  Prés,  p.  322. 

(11)  Merlet,  Cartulaire  de  Notre-Dame  de  Chartres,  t.  I,  p.  80. 


632  LIVRE  II.  CHAPITRE  XVH.  {  5. 

sur-Eure  (Eure-et-Loir)  (1).  Il  y  a  en  France  trente  com- 
munes du  nom  de  Fontenay  :  sept  autres  communes  ont 
conservé  la  notation  oi  de  Ve  long  du  sufBxe,  ce  sont  deux 
Fontenois  (Haute- Saône)  et  cinq  Fontenoy  (Aisne,  Meurthe- 
et-Moselle,  Vosges  et  Yonne).  Il  y  a  aujourd'hui,  en  Italie, 
trois  hameaux  de  Fontanedo,  Tun  dans  la  province  de 
Gôme,  les  deux  autres  dans  celle  de  Massa. 

S  5.  —  Dérivés  en  -aretum. 

Ce  suffixe  est  le  résultat  de  la  combinaison  des  deux  suf- 
fixes -arius  et  -etum.  Cette  combinaison  appartient  à  la 
basse  latinité,  et  date  probablement  d'une  époque  où  Tad- 
jectif  dérivé  en  -arius  était  arrivé  à  désigner  Tarbre  qui 
produisait  le  fruit  dont  le  mot  simple  était  le  nom.  On  a 
dit  ficaretum  quand  ficarius  était  le  nom  du  figuier.  Anté- 
rieurement, on  se  servait  du  mot  ficetum^  dérivé  de  fiea, 
pour  désigner  un  terrain  planté  de  figuiers. 

Ficaretum  est  un  mot  qu'on  ne  trouve  pas  seulement  en 
France  ;  il  était  usité  en  Italie  au  dixième  siècle ,  comme 
Tatteste  une  charte  de  Ravenne,  où  est  mentionné  un  fonds 
de  terre  borné  fundo  Ficareto  (2).  En  Tan  1001,  dans  une 
charte  de  l'abbaye  de  Saint- Victor  de  Marseille,  il  est  ques- 
tion d'un  lieu  dit  in  Figaredo  (3).  Il  y  a  un  hameau  de  Fi- 
garet  dans  les  Alpes-Maritimes,  un  château  de  Figaret  dans 
le  Gard.  Ficareto  est  aujourd'hui  un  nom  de  hameau  en 
Italie,  province  de  Pérouse. 

JuNCARETUM.  L'abbayc  de  Conques  a  possédé,  au  diocèse 
de  Montauban,  une  église  de  la  Madeleine  de  Juncaretis  (4». 
C*est  par  Juncaretum  que  s'explique  le  nom  des  hameaux 


(1)  Morlet,  Cartulaire  de  Noire-Dame  de  Chartres,  t.  III,  p.  261-262. 

(2)  Fantuzzi,  Monumenti  Ravennati,  t.  I,  p.  10. 

(3)  Guérard,  Cartulaire  de  Saint^Viclor  de  Marseille,  t.  I,  p.  97. 

(4)  G.  Desjardins,  Cartulaire  de  Conques^  p.  civ. 


NOMS  DE  LIEU  EN  -ARETUM.  633 

de  Joncherais  et  Joncheray  (Maine-et-Loire)  (1)  et  de  Jon- 
cheray  (Sarthe).  Comparez  Juncaria^  p.  605. 

*NuCARETUM,  dérivé  de  *nuoariu>Sj  qui  dérive  lui-même 
de  nuxy  «  noix,  noyer,  »  apparaît ,  au  dixième  siècle ,  sous 
la  forme  basse  Nogaredvm  ;  il  s'agit  de  Norroy  (Meurthe-et- 
Moselle)  (2).  Une  charte  de  1080  mentionne  une  paroisse 
de  Saint-Paul  de  Nogareto,  aujourd'hui  de  Noyarey  (Isère)  (3). 
Le  féminin  Nogareda  désigne  une  propriété  située  en  Quercy 
et  donnée  à  Tabbaye  de  Conques,  au  onzième  siècle  (4). 
Nogareda  est  la  forme  latinisée  corespondant  au  moderne 
Nogarède,  nom  de  quatre  hameaux  :  Ariège,  Aude,  Haute- 
Garonne,  Tarn.  Du  neutre  vient  le  masculin  Nogaret,  nom 
d'une  commune  de  la  Haute-Gâronrie  et  de  trois  hameaux  : 
Alpes-Maritimes,  Lot-et-Garonne,  Lozère.  Il  y  a,  en  Italie, 
quatre  hameaux  de  Nogaredo ,  et  le  Dizionario  geografico 
postale  offre  trois  exemples  de  la  variante  Nogarè.  Cf.  No- 
gariolas,  p.  523;  Nucarias,  p.  609;  Nucetum,  p.  623. 

*PoMARETUM,  dérivé  de  * pomarius^  «  potnmier,  »  est  écrit 
à  l'ablatif  Pomei-ido  au  neuvième  siècle,  dans  le  Polyptyque 
de  Saint-Germain  des  Prés  ;  c'est  le  hameau,  aujourd'hui  dé- 
truit, de  Pommeray,  commune  de  Gâtelles  (Eure-et-Loir)  (5). 
Ce  mot  a  une  forme  féminine  Pomareda  qu'on  trouve  vers 
Tan  1000  dans  le  cartulaire  de  Conques;  il  s'agit  de  la 
Pomarède,  commune  d'Espeyrac  (Aveyron)  (6).  Cette  forme 
féminine  explique  les  noms  des  communes  de  la  Pom- 
meraie (Vendée),  de  la  Pommeray e  (Calvados),  de  la  Pom- 
meraye-sur-Loire  (Maine-et-Loire)  et  des  nombreux  hameaux 
appelés  la  Pommeraie  ou  la  Pommeraye.  Pomaretum  a 
donné  Pommeray,  nom  de  hameaux  :  Eure-et-Loir,  Nièvre, 


(1)  Port,  Dictionnaire  historique  de  Maine-et-Loire^  t.  II,  p.  409. 

(2)  Lepage,  Dict,  top,  de  la  Mexirthe,  p.  103. 

(3)  Cart.  de  Saint-Hugues  de  Grenoble,  p.  147,  538. 

(4)  G.  Desjardins,  Cart.  de  Conques^  p.  33. 

(5)  Edition  Longnon,  p.  182. 

(6)  G.  Desjardins,  Cartulaire  de  ConqueSy  p.  lxz,  387. 


634  LIVRE  II.  CHAPITRE  XVII.  {  4. 

Orne,  Sarthe.  La  variante  Pomaritum,  qui  a  certainemenl 
existé  à  Tépoque  mérovingienne  ou  vers  la  fin  de  Terapire 
romain ,  est  conservée  intacte  par  le  nom  de  deux  com- 
munes des  Côtes-du-Nord ,  Pommerit-Jaudy  et  Pommerit- 
le-Vicomte.  Comparez  Busitt,  cité  plus  haut,  p.  618. 

Pometum^  p.  624,  est  d'une  latinité  plus  ancienne  que 
PomarePum. 


APPENDICE. 


SUPPLÉMENT  AUX  CHAPITRES  III,   IV   ET   V   DU    LIVRE  PREMIER. 

S  1"'.  —  Population  de  la  Gaule  barbare  gai  momen^t  de  sa 

conquête  pa/r  César. 

Au  chapitre  III,  section  ii ,  §  D ,  page  54 ,  on  a  constaté 
que  dans  Tannée  envoyée  par  les  Gaulois  au  secours  de 
Vercingétorix ,  pendant  le  siège  d'Alésia ,  on  comptait 
trente  et  un  fantassins  pour  un  cavalier;  ce  chiffre  peut 
donner  une  idée  approximative  de  la  proportion  qui  exis- 
tait en  Gaule  entre  la  classe  dominante,  équités^  et  la  classe 
inférieure ,  qui  fournissait  les  fantassins.  Il  est  peut-être 
possible  de  traiter  la  question  plus  complètement. 

A  l'époque  de  César,  il  était  admis  à  Rome,  qu'en 
naoyenne,  dans  une  population  quelconque,  le  nombre  des 
combattants  était  égal  au  quart  du  chiffre  total.  Le  chiffre 
total  de  la  cavalerie  que  les  équités  gaulois  pouvaient  met- 
tre sur  pied,  quand  eut  lieu  la  grande  insurrection  de  Tan- 
née 52,  s'élevait  à  quinze  mille  hommes  :  c'était  tout 
l'effectif  possible,  omnes  équités  (1).  Il  se  suit  de  là  que  la 
population  aristocratique  de  la  Gaule  barbare  se  montait  au 
total,  femmes,  enfants,  vieillards  compris,  à  soixante  mille 
âmes  environ. 

Quel  était  le  chiffre  de  la  population  inférieure  ?  On  ne 
peut  le  déterminer  avec  certitude.  M.  Julius  Beloch,  dans 
son  savant  ouvrage  sur  la  population  du  monde  gréco-ro- 

(1)  De  bello  g&llico,  1.  VII,  c.  64,  i  1. 


636         APPENDICE.  —  SUPPLÉMENT  AU  L.  I,  G.  III.  IV,  V. 

main  qui  a  paru  à  Leipsig  en  1886,  évalue  la  population 
de  la  Gaule  barbare ,  au  moment  de  la  conquête ,  à 
3,390,000  habitants  (1).  Il  fonde  principalement  son  calcul 
sur  rénumération  détaillée  par  peuple  des  contingents 
convoqués  pour  délivrer  Vercingétorix  assiégé  dans  Alésia. 

L'année  dernière,  au  moment  où  l'impression  du  présent 
volume  était  déjà  commencée,  M.  Levasseur  a  fait  paraître 
le  tome  premier  du  savent  ouvrage  intitulé  :  La  popula- 
tion française ,  histoire  de  la  population  avant  1789  et  démo- 
graphie de  la  France  comparée  à  celle  des  autres  nations  au 
dix-neuvième  siècle.  Il  arrive  à  un  chiffre  un  peu  plus 
élevé  que  M.  Julius  Beloch,  environ  6,000,000  d'âmes;  il 
le  conclut  de  données  empruntées  à  Diodore  de  Sicile  et 
du  chiffre  des  contingents  belges  que  César  prétend  lui 
avoir  été  opposés  pendant  la  campagne  de  l'année  57  (2). 

Si  Ton  considère  comme  exact  le  chiffre  donné  par  M.  Be- 
loch ,  on  en  tirera  la  conséquence  que  l'aristocratie  gau- 
loise formait  le  cinquante-sixième  de  la  population.  Si  Ion 
donne  la  préférence  au  résultat  adopté  par  M.  Levasseur, 
on  admettra  que  Taristocratie  formait  seulement  le  cen- 
tième de  la  population  totale.  Dans  Tarmée  de  secours ,  il 
y  avait  un  cavalier  pour  trente  et  un  fantassins,  mais  on  au- 
rait tort  de  conclure  de  là  que  la  même  proportion  se  re- 
trouvait dans  la  population.  Vercingétorix  avait  dit  qu'il 
était  plus  habile  de  réunir  beaucoup  de  cavaliers  pour 
couper  les  vivres  à  César  que  d'assembler  un  grand  nom- 
bre de  fantassins  pour  livrer  une  bataille  rangée  (3). 

Ces  observations ,  que  nous  ne  pouvions  faire  avant  la 
publication  du  livre  de  M.  Levasseur,  sont  un  complément 
indispensable  du  chapitre  III,  section  il. 

11  est  essentiel  aussi  d'en  tenir  compte  si  l'on  veut  ap- 
précier à  leur  juste  valeur  les  renseignements  que  nous 
avons  réunis  sur  1  état  de  l'agriculture  en  Gaule  au  §  1" 
du  chapitre  IV,  page  68  et  suivantes.  Suivant  M.  Beloch. 
la  densité  de  la  population  dans  la  Gaule  barbare  était  de 


(1)  Die  Bevœlkerung  der  griechisch-rômischen  Well,  p.  460. 

(2)  La  population  /rançaise,  t.  I,  p.  99-101. 

(3)  De  bello  gallico,  1.  VII,  c.  64,  {  2. 


APPENDICE.  —  BUPPLÉME«T  AU  L.  \.  C.  Ûi,  IV,  V.        ^ 

6  habitaiils  3/10  par  kilomètre  carré ,  tandis  qu'elle  est  au- 
jourd'hui de  83,  soit  treize  fois  ^lus  forte.  H  fésnlterait  de 
là  que  la  surface  cultivée  dans  la  Gaule  barbare  à  l'époque 
de  César  aurait  été  toilt  au  plus  le  treizième  de  y^e  qu'elle 
est  aujourd'hui,  car  où  ne  devait  évidemmenl  îàbôurer  qui 
les  meilleures  terres  et  de  liangûes  jachère^  devaient  h-' 
gement  compenser  l'insuffisance  deâ  fumures.  Si  l'on  a 
cepte  la  doctrine  de  M.  Levassèur,  la  population  dévi 
être  de  12  habitants  par  kilomètre  carré,  c'est-à-dire  à  pi 
près  le  septième  de  celle  qui  éxi^e  aujonrd'htii  ;  par  coi 
séquent,  l'étendue  du  sol  labouré  chaque  année  u'éiiH 
pas  dépassé  le  septième  de  ce  qu'elle  est  actuellement. 

S  2.  —  Date  dv  partage  du  sol  entre  les  parliciiliers  en  Manc 

On  a  dit  au  chapitre  V,  §  2,  page  101,  que  tes  Uauk 
n'ont  pas  apporté  eu  Italie  la  notion  de  la  propriété  inc 
viduelle  du  sol,  quand  ils  ont  passé  les  Alpes,  vers  l'an  4i 
avant  notre  ère,  et  qu'ils  paraissent  avoir  été  encore  étra 
gers  à  cette  nation  (en  Italie)  à  la  fin  du  troisième  sièc 
avant  Jésus-Christ,  environ  cent  cinquante  ans  avant  Césa 

On  peut  ajouter  que  la  littérature  irlandaise  a  conser 
le  souvenir  du  partage  le  plus  ancien  du  sol  irlandais  ent 
les  habitants.  Ce  partage  date  du  septième  siècle  de  not 
ère  et  des  deux  rois  suprêmes  Diarmait  et  Blathmac ,  q 
régnèrent  conjointement  de  654  à  665;  alors  chaque  home 
d'Irlande  reçut  trois  fois  neuf  sillons,  c'est-à-dire  neuf  s: 
Ions  de  marais,  autant  de  terre,  autant  de  bois  (1).  Jn 
qu'à  l'avènement  de  ces  deux  princes,  dit  un  texte  èpiqu 
les  chars  de  guerre  purent  sans  obstacle  pucourir  l 
campagnes  de  l'Irlande  ;  il  n'y  avait  nulle  part  une  limi 
de  champ,  on  n'y  rencontrait  ni  mur,  ni  haie,  ni  fossé  {! 

Il  y  a  donc  sur  ce  point  concordance  entre  te  droit  le  pli 
ancien  des  Celtes  d'Irlande  et  le  droit  le  plus  ancien  d 
Celtes  d'Italie. 


(I)  préface  à  rhymn«  de  Colroan,  chei  Whitlajr  Stok»,  VoiaeUea,  1*  iifi 
p.  lîl,  I.  16-K. 

(3)  Compert  Coneulainn,  1  2;  chez  Wiàdiscb,  Iriiche  Ttxie,  t.  I,  p.  1 
1.  11-M. 


638  APPENDICE.  —  ADDITIONS  DIVERSES. 

ADDITIONS    DIVERSES   AUX    LIVRES   I  J5T  U. 

A.  —  Au  sujet  de  l'impôt  foncier  et  personnel  établi  par 
Auguste  et  dont  il  a  été  question  page  7,  on  peut  faire  ob- 
server qu'il  atteignait  les  Gaulois  des  cités  alliées  et  libres, 
exemptes  d'impôt  dans  le  système  de  Jules  César.  Les  ré- 
sultats politiques  de  cette  révolution  financière  sont  étu- 
diés dans  un  savant  travail  de  M.  P.  Viollet  qui  paraîtra 
dans  les  Mémoires  de  V Académie  des  inscriptions  et  belles- 
lettres. 

B.  —  Des  chartes  du  Cartulaire  de  Brioude,  publiées  par 
M.  Doniol ,  sont  souvent  citées  avec  des  dates  précises  à 
partir  de  la  page  350.  Ces  dates  sont  empruntées  à  un  mé- 
moire de  M.  Bruel  qui  a  paru  dans  la  Bibliothèque  de  l'Ecole 
des  chartes ,  6®  série ,  t.  II ,  p.  445  et  suiv. ,  sous  ce  titre  : 
Essai  sur  la  chronologie  du  Cartulaire  de  Brioude, 

C.  —  On  a  dit,  page  462,  qu'un  gentilice  Nertius  a  dû 
exister,  mais  que  jusqu'ici  on  n'en  a  pas  trouvé  d'exemple. 
M.  AUmer,  TWon,  p.  211,  a  publié  l'épitaphe  de  C.  Nertius 
Censorinus  avec  les  observations  suivantes  :  «  Nertius  ap- 
»  parait  pour  la  première  fois  à  Lyon  comme  gentilice,  mais 
»  s'est  déjà  montré  comme  cognomen.  Peut-être  est-ce  un  nom 
»  gaulois  latinisé  ;  une  inscription  de  Bordeaux  fait  con- 
»  naître  une  femme  appelée  «  Nerta,  fille  de  Canto-senus.  » 
Nertius  parait  signifier  «  fils  de  Nertos ,  »  et  Nertos  n'est 
autre  chose  que  le  masculin  du  nom  commun  neutre 
nerto-n,  «  force,  »  qui  a  dû  exister  en  gaulois. 

D.  —  A  CarnacuSy  p.  488-489;  comparez  Carnamis^  nom 
d'une  curtis  :  Curtem  de  Carnano,  dans  un  diplôme  de  l'em- 
pereur Frédéric  l" ,  pour  la  cathédrale  de  Milan,  en  1149 
(Historiae  patriae  monumenta.  Chartarum  t.  I,  col.  816  a). 

Errata.  p.  210, 1.  24,  au  lieu  d^Chennay,  lisez  Channay. 
P.  374,  1.  23,  effacez  :  en  abrégeant  son  o. 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 


NOMS  DE  LIEU  ANCIENS 


SOIT  DE  L'ANTIQUITÉ,  SOIT  DU  MOYEN  AGE 


Lee  chifTret  précédés  d'DD  ïetériiqae  *  renvoieot  à  la  page  où  l'an  Ironvcra  le  pins  impoi 
des  irticles;  les  noms  de  peuples  sont  diatingnés  par  remploi  des  petites  cjpitales 
uoms  dn  moyen  ige  sans  lenninaison  latine  sont  imprimés  en  iUliqnes. 


Aballo,  -oui»,  153. 

Abodiacum,  Âbuzaco,  161. 

Acaunum,  153,  ITS. 

Acciacus,  188. 

Achinjagas.  187. 

Aciacus,  187. 

AciIJanuB,  127, 129. 

AcoaiacaaDis,  189. 

Aculia,  376. 

Acutiacus,  345. 

Acutior  (cnrtis),  345. 

Adisosgo  (cas  iadiract),  592. 

Admagetobrigo,  186. 

Adnatuca,  oppidum  Qt  cMtellum  des 
EbuTonei,  87. 

Aduatoci,  leurs  oppida,  82. 

Abddi  dépouiUëe  par  Arioviate,  20;  — 
foetterali,  29,  n.,  32;  —  leurs  clients, 
31,  36.105;  — leurs  sujets,  32;  — më- 
nagés  par  César,  38; —  leurs  vergo- 
bret^,  i\;  —  leurs  princtpfS,  45,  46; 
—  leur  sénat,  50;  —  leur  froment, 
72  ;  —  leurs  champs ,  77  ;  —  leurs 
oppida,  82;  —  39,  n.  I. 

Aemîliauus,  127,  129. 

Aemilius  pons,  546. 


Agau 


■nàes  Senonei, 


Agedin 

Agolas,  507. 

Aguciacus,  IS9. 

Agniiacns,  377. 

Aguaanicis  (de),  571. 

Aguzor  (de  Monte),  345. 

Alauahhi,  413,  414. 

Albauia  (in  territorio),  377. 

Albaoiaai,  155. 

Albariosco  [ras  indirect),  593. 

AlbiacuB,  190. 

AlbiaDis,  421  ;  Albiauus,  191,  593. 

Albigensium  (civitas),  378. 

Albinas,  507. 

Albiniacus,  191. 

AlbiaiaDJ,  155,  191. 

Albiodurum,  xii;  Albioderum,  186 

Albioacus,  593. 

Albucennacus,  457. 

Albucctum,  616. 

Albucianus,  571. 


Albuc 


i,  509. 


Albuasanicis  (de),  571. 


(1)  CM  indra  H  1h  dwi  n 


640 


INDEX  ALPHABETIQUE 


Alesia,   approvisionnements  pendant 

le  siège,  71  ;  •—  urbs  et  oppidum  des 

Maindubii,  81,  87;  —  635. 
Aliacus,  192. 
Aliodrensis  (pagns),  186. 
Allobrooes,  clients  des  Arvemi,  33  ; — 

leurs  principe«,46,47; — leurs  vici,78. 
Alnarias,  605. 

Alnido  {pour  Alnetum),  616. 
Alsiacus,  193. 

Aitogilo  (pour  Altoiolum),  545. 
Ambaciensim  (vicum),  443. 
Ambarri,  lenrs  oppidii,  84. 
Aipbasciacus,  445. 
Ambasia,  443. 

Ambiaiti,  leur  froment,  73;  —  39,  n.  1. 
Ambibarii,  39,  n.  1. 
Ambiliati,  39,  n.  1. 
Ambivareti,  sujets  des  Aedui,  32;  — 

leur  froment,  74. 
Ambronensi  (in  Ticaria),  553. 
Ambrosio,  cas  indirect  d'Ambrosius 

(MuUUo),  445. 
Ambrussum,  445. 
Amelesca,  550,  551. 
Ameliayus,  561. 
Amelio  (in),  347. 
Amiliacum,  348. 
Ammonias,  431. 
Ammoniacus,  432. 
Ancia,  378. 
Anciacum,  379. 
Andecamulenses,  355,  388. 
Andelagus,  562. 
Andelaus,  562. 

Andelos  (nominatif  singulier),'^^^^  9. 
Andematunnum,  388. 
Andbs,  leur  froment,  72;  —  39,  n.  i. 
Andiacus,  193. 
Andusia,  570. 
Andusianicus,  570. 
Anicianum,  350. 
Aniciorum  (villa),  S45. 
Anicius  (fùndus),  345;  Anicins  (loctts), 

349. 
AnisUeus,  *  193,  345,  350. 
Ansasca,  587. 
Ansoaldo-viUare,  vii. 
Antennacus,  457. 
Antistiana,  375. 
Antoniacus,  il,  139,  *  351. 


Antonianus,  98,  128,  129,  139,  351. 

Antonio  (villa),  cas  indirect^  350. 

Antonnava,  173,  *562. 

AnfunnAcus,  15(H  172,  *  562. 

Apiarias.  522,  *610. 

Apiar[i]oIas,  522. 

Appiacus,  193. 

AppianuB,  128,  129. 

Appiaria,  610. 

Appiiiàcus,  Ï95. 

Apponiacus,  195. 

Aquao  Sextiae,  320. 

AquàKriB  vidtfs,  WL 

Aquilianis,  421. 

Arausici,  569. 

Arausio,  -onis,  *520,  569. 

Archiniacus,  196. 

Arcia  (prope),  382. 

Arciacus,  384. 

Arc[i]onem,  accusât^/,  5<)9. 

Arduinna,  forêt  divinisée,  74. 

Arelate,  549. 

Areliascus,  586. 

Aremorici,  565. 

Ar^antomagus,  X,  494,  S31. 

Argentogelum,  531,  533. 

Argentomagensis,  494. 

Argentorate,  493. 

Argentoratus,  492. 

Aria  (monasterium),  379. 

Ariaco  (in),  381. 

Arriaca,  161.  375,  ♦381. 

Arriana  (insula),  381. 

Arsuniacus,  157. 

Artedunns,  383. 

Artenacus,  456. 

Arthmael  fpiebs),  987. 

Artiaca.  159,  375,  ♦383. 

Artigeni  (fundi),  398,  5M. 

ArtiUacus,  196,  '387. 

Artobrlga,  382. 

Artodunum,  xn. 

Artona  (vteo),  495. 

Artonacus,  494. 

Artonbsco,  cet8  indirect,  997. 

Artunnacus,  ^494,  598. 

Arvërmi,  leur  prépondérance  en  Celti- 
que, 30  ;  —  leurs  clients,  33;  —  \fmn 
sujets,  34;^  ménagés  ^r  César,  3H; 
—  liberi,  38:  —  leurs  forêts,  75;  - 
leurs  oppida,  84;  —  39,  u«  1  ;  569. 


DES  NOMS  DE  LIEU  ANCIENS. 


641 


Arvemlcus  (pagus),  569. 
Ascio  (villa),  cas  indirect^  351. 
Asinarias,  610. 

Aspemaico  (parrochia  de),  462. 
Ateias,  433. 
Athanacus,  490. 
AtiUanus,  128,  129. 

Atrbbates  élevés  au  rang  de  peuple 
libre  par  César,  37;  —  leurs  rois,  43; 
—  39,  n.  1. 
Attaniscus,  554. 
Attiniacus,  197. 
Augusta  Suessionum,  422. 
Augustobona,  585. 
Angnstobriga,  154,  383. 
Angustodunum,  154;  383. 
Augustodurum,  154. 
Augustomagus,  154. 
Augustonemetum,  154. 
Augustoritum,  154. 
Anlbrandisca  (appendaria),  555. 
AuLBBCi  Brannovices,  sujets  des  Ae- 
dut,  32;  —  rendus  indépendants  par 
Auguste,  39;  —  400. 
AuLERCi  Cenomanni,  39,  n.  1. 
AuLBRGi  Eburovices,  leur  sénat,  50|;  — 
leurs  oppida,  80,  84;  —  39,  n.  1. 

Auliacus,  198. 
Aunedonnacus,  150,  *.172. 

Aurélia  (via),  347;  Aurelias,  433. 

Aoreliacus,  145,  "^434. 

Aurelianicus,  571. 

Anrelianus,  128,  145,  434;  Aureliani 
(fundi),  412;  Aurelianorum  civitas, 
422. 

Auria  (vallis),  426. 

Auriacus,  198,  426. 

Auriis,  426. 

Autbertescus,  555. 

Autessianus,  546. 

Autessiodorum,  546. 

Autricum,  151,  165. 

Autura,  151,  565. 

Avara,  151,  565. 

Avaricum,  situé  dans  un  pays  fertile, 
72;  —  urbs  et  oppidum  des  Bituri- 
geSj  81,  84;  —  respecté  par  Vercin- 
gétorix,  121  ;  —  151,  565. 

Avenacus,  453,  454. 

Avenarias,  606. 

Avenna,  463. 


Avennacus,  453. 

Avennio,  -onis,  518,  cf.  653,  n. 

Aventicum,  510. 

Aviciacus,  171. 

Aviniolensis  (villa),  524. 

Avinione  (de),  519. 

Avitacus,  135, 145,  150,  167,  *170. 

Avitiacus,  138. 

Ayllone  (prioratns  de),  509. 

Azeracus,  468. 

Baddane-curtis,  viii. 

Bagacus,  150,  173,  n.  2. 

Baissiaco,  cas  indirect,  593. 

Balbiacus,  198. 

Balderias,  613. 

Barbairanum,  402. 

Barbaresca,  551. 

Barbaria  (in),  402. 

Barbariacus,  165,  403. 

Barbariana,  165,  375,  402. 

Barbarione  (villa),  510. 

Barberias  (villa),  434. 

Bardomagus,  167. 

Barolia,  534. 

Basciacus,  592. 

Basciasco,  cas  indirect,  592. 

Basiliaca,  199. 

Basiniacus,  200. 

Bassiacus,  427. 

Bassiago,  592. 

Bassiana,  375  :  Bassianis,  421  ;  Bassia- 

nus,  427. 
Bassus  (villa),  427. 
Bassiniacus,  200. 
Baudechisilo-vallls,  vin,  12,  97. 
Bebronica  (vallis),  565. 
Bebronna,  565. 
Becciacus,  342. 
Bedolitum,  617. 
Bedolletum,  617,  n.  1. 
Belenatensis  (villa,  mons),  179,  18U 
Beleno  Castro,  cai  indirect^  179. 
Belesma,  181. 
Beloae   se   révoltent  contre   César, 

manquent  d'approvisionnements,  71; 

—  leur  arrivée  en  Qaule,  119. 
Belgica  (Gallia),  29. 
Beliniacus,  *343,  418. 
Belisama  (baie),  181. 
Belisma,  181. 

41 


642 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 


Bellenavus,  563. 

Bellovagi,  clients  des  Aedut,  35;  ~ 
leur  sénat,  51;  —  leurs  foréU,  74; 
—  leurs  champs,  77  ;  —  leurs  oppida^ 
84  ;  —  leurs  aedificiaf  91  ;  —  39,  n.  1. 

Belna,  villa,  179. 

Belteiresco  (de),  555. 

Benâcus,  134,  135,  136,  178. 

Borberensis  (pagus),  258. 

Bcssenacus,  457. 

Bibracte,  lieu  do  réunion  du  sénat 
des  Aedui,  50;  —  oppidum  des 
Aedui,  82,  151. 

Bibraz,  oppidum  des  Remit  88,  151. 

Bissiacus,  458. 

BiTURiGES ,  clients  des  Aedut ,  31  ;  — 
leurs  forêts,  75;  —leurs  oppida,  81, 
84;  —  leurs  aedificia,  91  ;  —  39,  n.  1. 

Blaciacus,  200. 

Blandiacus,  163. 

Blandiana,  163. 

Blaniacus,  418,^598. 

Blanusco,  cas  indireety  596. 

Blanziacus,  163. 

Blesensis,  Blezis,  505. 

Bodincoma^s,  153,  546. 

Bodincus,  153. 

Bon,  clients  des  Aedui,  31  ;  —  s'éta- 
blissent sur  le  territoire  des  Aedui^ 
76,  104, 108;  —  leur  oppidum,  85;  — 
39,  n.  1. 

Bonago  (ecclesia  de),  469. 

Bonogilum,  535. 

Bomaco,  cas  indirect,  496,  497. 

Bornonesca,  556. 

Boutenachus,  458. 

Bracciacus,  352. 

Braccio  (locellus),  352. 

Braciacus,  352. 

Braciolis,  524. 

Braniacus,  400. 

Brannogenium,  398. 

Brannovices  (Aulerci),  400. 

Brannovii,  sujets  des  Aedui,  32. 

Brannus  (villa),  500. 

Branodunum,  399. 

Branosco,  cas  indirect,  598. 

Bratuspantium,  oppidum  des  Bello- 
vacit  84. 

Brecheniauc^  137. 

Brenacus,  496. 


Brennaco,  cas  indirect^  495. 

Bretiniacus,  201. 

Bricoscis,  598. 

Brignum,  511. 

Brinnaco,  cas  indirect^  495. 

Brissiacus,  599. 

Britannia,  l'agricnltiire,  77;  —  les  op- 

pida,  79. 
Britinniacus,  201. 
Britogilum,  536. 
Brittannaicus,  488. 
Brittiacus,  Brithiae,  138. 
Briva  Isarae,  153. 
Brivate,  153. 
Brivodnrum,  153. 
Brocaria,  609. 
Brugaria,  609. 
Bnciacus,  202. 
Buduc  [Les),  177. 
Bulianicus,  571. 
BuUione,  511. 
BuROUNDi  (prise   de   possession  ém 

biens  immobiliers  p«r  les),  21, 21 
Buriaca,  203. 
Buriascus,  587. 
Burnomus,  497. 
Buaitt,  177,  618. 
Buxarias,  606. 
Buxedus,  618:  Buxido,  617,618;  Box- 

sito,  617. 

Cabannacus,  475. 

Gabannaria,  475. 

Gabardiaeus,  157. 

Gabellio,  -onis,  519. 

Cabillonum ,  oppidum  des  Aedui ,  81. 

83,  151. 
Gabrias  (vico),  434. 
Gabriniacensis  condita,  4215. 
Gabrogilo  pour  Gabroiolum,  537. 
Gadarosco,  cas  indirect  de  Oadaros- 

eus,  600. 
Gadenas,  466. 
Gadiacense  (in  agro),  437. 
Gadiano,  cas  indirect  de  Gadiaons 

(Bmtotio),  437. 
Oadias  (TiUa),  437. 
Gadolaico,  caa  indirect,  470. 
Gadomus,  405. 
Gadoniacus,  203. 
Gadugio,  cas  indirect^  405. 


.m.^ 


DES  NOMS  DE  LTEU  ANCIENS. 


64 


Ctuiuliacaa,  31t. 

Cadurci,  sujets  des   Aruemi.  34;  - 

leurs  forêts,  TS;  lenn  oppida,  85;  - 

39,  n.  l. 
Cadnscis,  403. 
Caecilianas,  I2B. 
CsecUiOE  vicuB,  346. 
C«edr»co,  cas  iniUrtet,  497. 
Cabrosi.  clients  des  Treveri,  36. 
Caesarobriga.  383. 
Caesaroduaum,  154,  363. 
Caesaromagua,  lU. 
Cair  Caratauc,  137,  n.  t. 
Caisaanlcus,  572. 
C»l»  (Tffla),  538. 
CaladnnuiD,  538. 
Calagnm,  204. 
Calciacus,  204,  429. 
Caldio,   oois,  511. 
CALETEtt,  Caleti,  39,  n.  t,  428. 
Caleilis  (villa),  428. 


Calia 


.,  204. 


Calidianns,  128. 

Calioiacus,  305. 

Cftliscus,  551. 

Caloili  viUa,  537. 

Calviacus,  30S. 

Caiziacus,  429. 

Cam^racus,  150,  'Hl,  512. 

Camariacus.  171, 

Cambariacus,  206. 

Cambiacus,  206. 

Cambidobrense  (monasterium),  181. 

Cambidonno  pour  Cambi-dunam,  181. 

Cambiovicenaea.  599. 

Camblosco,  cas  indirect,  599. 

Cambo,  -onis,  599. 

Combodunum,  154,  599,  d.  12. 

Cambonum,  599. 

Caœbosco,  ca«  indirect,  599. 

CambrioDe,  511. 

Cameracum,  171. 

Camiliacus,  207. 

Camilljaeus,  162. 

Camilliaaa,  162. 

CamlUcus,  30Î. 

Campania  {ager  publicu*  de),  24. 

Campaniacns,  138,  *  208. 

Campanianus,  210. 

CampiUas,  438. 

Campiaiacus,  208. 


CamuliacuB,  343. 

Camulio  (acclesja  de),  353. 

CamuIoduDuin,  154,  354. 

Canascof,  597. 

Canavi,  563. 

Caniacus,  210. 

Caniaans,  211. 

Canoscus,  591. 

Cantilia,  375. 

Caotilianensia  (TicarU),  376. 

Cantillanicua,  376,  *572. 

Cantissa.  582. 

Cantium,  179. 

Gantobemucus,  1T9. 

Cantogilum,  538. 

Caponarias,  611. 

Capriniacus,  435,  436. 

Captunnaco,  472. 

Caranciague,  211. 

Oarantiacus,  146. 

Carantiuiacns,  146. 

CarautomaguB,  l,  IfiT,  181. 

CarantoDiciu  agsr,  566. 

Carbantia,  153. 

Carbantorigum,  153. 

Carbonacus,  474. 

Carenciolas,  524. 

Careadenacus,  458. 

CarsDteaaacus  (villa),  566. 

Carisiacus,  212. 

Caraacus,  488,  638. 

Caroano  (de).  638. 

Garni,  489. 

Garnuïes  sont  foedtrati,  29  n.,  3 
—  clients  des  Rémi ,  33;  —  leur  a 
nat,  51;  —  leurs  fordts,  75;  —  leu 
ufci,  79;  —  leurs  oppida,  80,  86; 
39,  n.  1. 

Carpentorate,  153. 

Carraciacus,  213. 


Caaoeto,  de  Casnetum,  628. 

CassiacDS,  143. 

Cassianus,  128,  143. 

Cassinicus,  567. 

Casai  Domagus,  531,  533,  5GT. 

Castaoedum,  619. 

Castanerias,  607. 

Castaneto,  de  CastaaMum,  619  et 

Castaaito,  de  Castanetum,  619. 

Oaatellio,  -onis,  3(ii. 


644 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 


Oastellucius,  363. 

Catalacense  (in  villa),  487. 

Catalaunicus  (pagus),  569. 

Gatalense  (in  aice],  500. 

Catali,  488. 

Cataliosco,  cas  indirect,  594. 

Gatenacensis  (vicaria),  456. 

Gatiacus,  213. 

Gatuellauni  ,  sujets    des  Lingoneê , 

29  n.  ;  —  rendus  indépendants  par 

Auguste,  39;  —  404,  569.  Voyez  Ca- 

tuvellauni, 
Gatuiaca,  405. 
Catuicus,  567. 

Gatulenso  ministerium,  470,  *500,  501. 
Gatulliacus,  xviii,  «214,  470. 
Gaturiobs,  XI,  404,  580. 
GaturigomagnSi  xi. 
Gatusagus,  474. 
Gatusanianos,  421. 
Gatusiacus,  405. 
Gatcslooi,  404,  580. 
Gatuvellacni,  580.  V.  Catuellauni. 
Gauciacus,  215. 

Gaucinogilo  pour  Gaucinoiolum,  539. 
Gaucius  (villa),  357. 
Gaudalascus,  586. 
Gaudiacus,  158. 
Gauliaca,  216. 
Gausiacus,  216. 
Gautiacus,  215. 
Gavanarias,  606. 
Gavannacus,  474,  475. 
Gavenas,  464. 
Gavennacns,  458. 
Gavenoilus,  539. 
Gavilhanicae,  572. 
Gavrascus,  590. 
Gedraco,  cm  indirect,  497. 
Gedros,  497. 
Gelsiacus,  217. 
Gelsinianicus,  573. 
Geltica  (Gallia),  29. 
Geltus  (villa),  501. 
Genabum,  oppidum,  des  Garnutos,  80, 

81,  86;  —  412,  422. 
Gentulio,  cas  indirect  (campus],  353. 
C«ped,  620. 
Gepetum,  406. 
Gepido  pour  Gepetum,  620. 
Gervaria,  611. 


Geutroneb,  sujets  des  Neruii^  36. 

Ghalianns,  205. 

Ghildriciaecas,  xvii. 

Ghrausobaci  (villa),  204. 

Ghristoilo,  540. 

Gipia  (villa),  406. 

Gipidus,  407. 

Gipiliacus,  217. 

Gisomagus,  182. 

Glamenciacus,  218. 

Glariacensis  (terminas),  218. 

Glaudiomagns,  x,  155. 

Clavascus,  590. 

Glipiacus,  218,  219. 

Glippiacus,  11,  218,  219. 

Glodia  (via),  347. 

Glodiana,  375;  Clodianis,  421. 

Gocciacus,  220. 

Goctiacus,  221. 

Godiciacas,  573. 

Godicianicis  (de),  573. 

Goeliobriga,  383. 

Golonia  Agrippina,  142. 

Golridum,  620. 

Golubroriae,  611. 

Golumbarius,  611,  612. 

Golnmberius  (viUa),  566. 

Gomariago,  cas  indirect,  357. 

Gomario  (in),  357. 

Gomiacus,  ^1. 

Gommunacensis  ager,  475. 

Gondate,  153. 

Gondatisco,  -onis,  548. 

Gondatomagns,  153. 

GONDRUSI,  clients  des  Treveri,  36, 167 

et  n.  6,  231. 
Gopto  (viUa),  505. 
Gorbiniacus,  432,  496. 
Gorbio,  -onis,  498. 
Gorbolii  (oppidum),  539. 
Gorbonacus,  497. 
Gorcione,  512. 
Goriaco,  cas  indirect,  595. 
Gomelianus,  128,  358. 
Gornelio,  -onis.  Gf.  Gomilio,  358. 
Gomiliacos,  358. 
Gomilio  (mansus  de),  357. 
Gomilio,  -onis,  512. 
Gortennacus,  458. 
Gosenacensis  ager,  459* 
Gotonaco  (in  villa),  496. 


Crisciscns,  272. 
Crispiacus,  233. 
Crispian»,  375. 
CriaplniBcus,  224. 
Cronik,  107. 
Croniacus,  224. 
Cnice,  370. 
CubtDB,  a06. 
Cuunacus,  (50,  173  a 
Capedanses,  508. 
CurcedoQUS,  512. 
225. 


DES  NOUS  DE  LIEU  ANCIENS. 

Durocortomm,  oppidum  o 
Rtmi,  K. 


,  594. 


Curiosco,  cas  indir. 
CuRioBOLiTEB ,  leur   froment,  72; 

lonrs  oppida.  S6;  —  39,  a.  t. 
Curaiacus,  22â. 

Curtilido  pour  Curtiletum,  630. 
CnrtioduDum,  m. 
Cnrtogilo  pour  Gurtoiolum,  540. 
Casiacna,  226. 

Daccognaca,  iTii. 
Dalmaciacus,  339. 
DalmatianuB,  340. 
Darabennenses,  465. 
Darentiaca,  375. 
Decetia,  lieu  de  réunion  du  sénat 

Aedui,  50. 
Daobrigula,  154. 
Derventione,  153. 
Desia  (ia}.  407. 
DtABLINTBS,  39,  a.  1. 
Dibiooe.  hlO. 
DiEciacu,  227. 
Disiacus,  227,  409. 
Ditiagus,  227, 
Diviono,  520. 
Divodurum,  IM,  412,  423. 


Divoi 


,  154. 


Dociacus,  228. 

Domariescus ,  556. 

Domicianus,  230, 

Domitiacus.  229. 

Domitiaaa,  375;  Domitianus,  128. 

Donnobriga,  xi  il. 

Drusciacus,  230. 

Drueomsgus,  167. 

Dubrum,  178. 

DamnisBDS,  579. 


Eboracus,  169. 

Eboriacus,  I6S. 

Ebo  roi  ac  anse  (praedium),  499 

Ebrauc.  137. 

Ebredenengia,  169,  a. 

Ebrolio,  pour  Eburoiolum,  & 

Eburacuï.  -137,  145,  167,  169 

Eburobriga,  Xi,  169,  3S3. 

Eburoduuum,  it,  169. 

Eburomagua,  167,  168. 

Eburones,  clients  des  7reD»i 
leurs  rois,  43;  —  leur  fron 
—  leurs  vicl,  78  ;  —  leur» 
87  ;  —  leurs  aediflejs,  92  ;  - 

EburoTJces  (Aularci),  400. 

ElarlacuB,  249. 

Bdegrimiscus,  556. 

^BUTBTi,  sujets  des  Aruemi 

Blusa,  520,  570. 

Ëlusanua,  570. 

Elusio,  -onis,  520. 

En  ni  anus,  128. 

Epiacum,  162. 

Eporedia,  153. 

EpponiacuB,  196. 

Ermoniace,  248. 

Escoiolas,  526. 

Esentiaco  (villa),  cm  fndjreci 

Essaretum,  6311. 

EeuBLi,  leur  [romeut,  72;  —  ', 
pida,  87;  —  39,  n.  I. 

Evordunensia,  169,  n. 

EvrogilufQ,  499. 

Pabianus,  128,  438. 
Fabias,  438, 

Fagito,  de  Pagetum,  620. 
Favariolas,  522. 
Fedonnacus,  455. 
Fedentiacus,  340. 
Ferraria,  603. 


Fibiai 


1,232. 


Ficarctuin,  632, 
Fidiacus,  231. 
Figiacus,  232. 
Figlinae,  15.1. 
FirminhaDicae,  573. 


646 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 


Flacianus,  233. 
Flaiacus,  595. 

Flaiosco,  cas  indirect,  595. 
Flaminia  (via),  347. 
Flavia  Constantia,  422. 
Flayiacus,.233. 
Flavianicas,  570. 
Flavianus,  235. 
Flaviniacus,  235. 
Flavinianus,  98,  236. 
Flaviobriga,  383. 
Flesccachj  175. 
Floriacus,  163,  *236. 
Floriana,  163. 
Fontanetum,  630,  631. 
Fomolns  villa,  521. 
Fraxenetum,  621. 
Fraxnido,  de  Fraxiaetum ,  621. 
Frontennacus,  459. 
Frotgaresc,  556. 
Furianus,  128. 
Fusciacus,  237. 

Gabali,  sujets  des  Arverni,  34;  — 
indépendants  depuis  Auguste,  39. 

Qabriacum,  436. 

Gabromagus,  153. 

Gabrosentum,  153. 

Gaillo,  -onis,  513. 

Galacianicus.  576. 

Galiacus ,  238. 

Galiscus,  552. 

Gaudiacus,  239,  240. 

Gavre,  436. 

Gcbriacus,  436. 

Geidcmni,  sujets  dos  Nerutt,  36. 

Gellianus,  128. 

Geminiacus,  159. 

Geminianus,  159. 

Genava,  151. 

Genebraria,  607. 

Genevreta,  622. 

Geniciacus,  241. 

Genistedo,  de  Genistetum,  622. 

Gentianedo,  de  Gentianctum,  621. 

Gentiliacus,  242. 

Gergovia,  uvbs  et  oppidum  des  Ar- 
verniy  81,  84. 

Germanayum,  244. 

Germani  recherchent  les  champs  des 
Gaulois,  75,  76. 


Germaniacus,  242. 

Germanicomagus,  xi. 

Germiniacus,  242. 

Germolio,  de  Germoiolus,  540. 

Gessiacus,  244. 

Gibriacus,  436.  437. 

Gobannium,  153. 

Godinesca,  557. 

Gorgobina,  oppidum  des  Boiif  85. 

Graciacus,  245. 

Graciasca,  246. 

Gragnasgus,  587. 

Graniacensis,  247. 

Granianus,  128.  248. 

Graniolus,  524. 

Gratiacus,  245. 

Gratiasca ,  246,  ♦  593. 

Grésilla,  409. 

Griniacus,  247. 

Grinio,  -onis,  513. 

Grudii,  sujets  des  Servii,  36. 

Grussius  (villa),  358. 

Guariacus,  338.  Voyez  Wariacns. 

Gundulfi  (villa),  yt. 

Helvetii  compris  dans  la  Celtique,  29; 
—  brûlent  leurs  récoltes,  71  ;  —  leurs 
vici,  78  ;  —  leurs  oppida,  80,  81,  b7; 
leurs  aedificia ,  90  ;  —  leur  émigra- 
tion, 102,  103,  119  ;  —  39,  n.  1  ;  166, 

Helvii,  leur  princeps,  49. 

Hermerago  (villa),  cas  indirect  y  490. 

Hermomacum,  160. 

Hicio,  ca«  indirect ,  359.  Voyez  Icio. 

Hileriacus,  249. 

Hispania,  410. 

Iciacus,  148. 

Icio  (villa),  cas  indirect,  359. 

Iciodurum,  m,  148,  182,  360. 

Iciomagus,  xr,  148,  360. 

Ingénie  (ecclesia  de),  361. 

Isamodori,  génitif,  18 i. 

Isemodero,  pour  Isamodurum,  184. 

Issiacus,  360. 

Iturobriga,  441.  Voyez  Turobriga. 

Jocundiacus,  250. 
Jove  (de  monte),  448. 
Jovenciacum,  252. 
Juliacus,  X,  141. 


DES  NOMS  DK  URU  ANCIENS. 


JulUnt»,  118,  112. 
Jnliascns,  588. 
Juliobona,  5B5. 
Juliobrig*.  381. 
Juncuetia.  632. 
JuQcaria,  533,  'âDâ. 
Juncariolas,  532. 
Juniaaa>,  13S. 
JurasBna,  579. 
Juvenciacum,  35  t. 
Juventianvu,  353. 
Juviniacus,  353. 

Kadaliacna,  488. 
Kaei'-Caradauc,  137,  a.  t. 
Kagnosco,  ca*  indiract,  iH;  Kagnos- 

cna.Stl. 
K«np8nlac,  138,  210. 

LagiiMchui,  588. 

LamiacuB  (villa),  573. 

Lanceam  (villa],  36t. 

Lanciaeut,  363. 

Laocione  (in),  361,  '513. 

LBodericiacns,  145. 

LantenoacuB.  460. 

Lauterinaco,  cat  indirtct,  460,  n.  I. 

Latcio,  -onis,  511. 

Latiniacus,  97,  ■141. 


Latin 
Lalis 


28,  144. 
I.  519. 


Lauretum,  615,  631,  623. 


I,  &U. 


LenUa,  460. 

LcntiacQS,  363. 

Lcntiliacus.  363. 

Lepuraria.  613. 

LEUct,  tour  froment,  73. 

Levaci,  sujets  des  .Veruii,  36. 

Leiuvii,  leurs  vcrgnbrcts,  14,  < 

Icursénnt,  50;  — leurs  ojiplits, 

~  39,  n.  1. 
Liberago  (colonia  ■□),  478. 
Liberdnnnm,  479. 
Libcroduanm,  un. 
Licaniaceusis,  355. 
Licinianus,  138,  155.  257. 
Uli»cui,  357. 


Linarias,  607. 

Unariolas,  523. 

LiNOOHEB,  sont  foederail.  29,  n..  3! 

—  leur  fl-omcnt.  72;  —  39,  n.  1. 
Linogile,  541. 
LipidiBcas,25S. 
Lisignias,  357. 
Lisiniaca,  355. 
LiBiniae,  357;  Lisiniu,  439. 
Lisioisscus.  58S. 
Litanobriga,  154. 
Livia  (villa),  410. 
Liviana,  155. 
Liziuiacus,  254. 
Loccis,  363. 
Lodiscus,  552. 

Lucaniacus,  136,  160,  Bt  u.  S. 
Luccas,  363. 
Lucennacus,  455. 
Luciacus,  358. 
LuciaDUS,  361. 
Luciliacus.  361. 
Lucilianus,  138. 
Lucio,  -onJB,  515. 
Luco,  ca*  Indirect.  363. 
Luc  retins  pagus,  346. 
Luganiensi  [in  vicaria),  3Q5. 
Lugudunnm,  163. 
Luliacus,  262. 
Luparias.   613;    Luparium   (podium 

613. 
LupiBCUS.  363. 
Lu  pi  anus,  364. 

Lutetia,  oppidum  des  Paritii,  88, 
Luteva,  507. 

Hadriaceusis  (pagus),  376,  '380. 
Hadriniacus,  366. 
Uadronio  (in  villa),  365. 
Magniacus,  364. 
Hagontia,  117,  118. 
Hagontiacus,  417. 


I,  5U5. 


Mairilac 


s,  481. 


Halapacios  (Fundos),  431. 
Haliascus,  588. 
Hallanica  (vailis),  571. 
Malliftcus,  '366,  574. 
Mallianus,  Mnllians,  367,  375. 
Hanciacus,  268. 


648 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 


Mandubii,  leurs  oppida,  87. 

Manlianus,  128. 

Maraniga8,  575. 

Marccglago,  cas  indirect,  574. 

Marcelliacenses,  268. 

Marcellianus,  Marcelliana,  375,  574. 

Marcellus  (vicas),  501. 

Marcennacusy  454. 

Marcia  (villa),  411. 

Marciacus,  270. 

Marciana,  274;  Marcianas,  274;  Mar- 

cianom,  275. 
MarciliacQg,  145,  *269. 
MarcilianuB,  128,  145,  270. 
Marcilliacus,  145,  ♦268,  269,  607. 
Marcio  (in  villa),  365. 
Marcomagus,  xi. 
Marcomanni,  413,  414. 
Marcomannia,  414. 
Marcus  (locus),  502. 
Mariacus,  275. 

Marianus,  Mariana,  128,  375. 
Marinescae,  553. 
Mariniacus,  164,  ^276. 
Mariniani,  164. 
Marioias,  525. 
Marogllum,  530. 
Maroialicis  (thermis),  529,  530. 
Maromagus,  531. 
MartiacuB,  271. 
Martianum,  275. 
Martinhanicae,  575. 
Martiniacus,  xvii,  278 
Martionis  (villa),  515. 
Marti  riascus,  590. 
Marzosco ,  cas  indirect ,  595  ;  Marzos- 

eus,  275. 
Masaus  (pagus),  561. 
Masciacus  (villa),  97. 
Maslaco,  cas  indirect,  481. 
Massolacus,  482. 
Matisco,  -onis,  550. 
Matriolas,  525. 
Matriscus,  553. 
Mattiacum,  161. 
Matucaium,  153. 
Mauriacus,  *281,  290. 
Maurinciagus,  340. 
Maurisca,  553. 
Mazerago  (de),  47'J. 
Mkdiomatrici,  39,  n.  1. 


Meldi,  sujets  des  Suessiones  rendus 
indépendants  par  Auguste.  39. 

Melliacus,  282. 

Melodunum,  oppidum  des  Senones,  89. 

Menapii,  leurs  champs,  74,  77;  —  leurs 
forêts,  74;  —  leurs  uici,  78;  —  leurs 
acdt^cia,  90,  92;  —  39.  n.  1. 

Mercoria,  446,  447;  Mercorius  (villa), 
446. 

Mercuriolus,  526. 

Mercurius  mons,  448. 

Merlans,  564. 

Merula,  564. 

Meseriacum,  165,  n. 

Metenacus,  425. 

Metiosedum,  oppidum  des  Senones,  81i. 

Métis,  423. 

Metsiacus  (villa),  425. 

MetU  (fundi).  412;  Mettis,  423. 

Micerianus,  165. 

Miliacus,  282. 

Minatiacus,  159. 

Mogontiacus,  417,  418. 

Monciaco,  cas  indirect,  596. 

Monciosco,  cas  indirect,  596. 

Montaniacus,  284. 

Montanianus,  286. 

Montiniacus,  284. 

Montionis,  596. 

Morennum,  464. 

Morentiae,  341. 

Morinciaca,  340. 

MoRiNi,  sujets  des  Atrebates,  37;  — 
affranchis  par  Auguste,  40  ;  —  leurs 
forêts,  74;  —  leurs  champs,  77;  - 
leurs  vici,  78;  —  leurs  aedificia  92; 
—  39,  n.  1. 

Morlacas,  486. 

Mosa,  561. 

Mosavus  (pagus),  561. 

Mosomagus,  153. 

Mucianus,  128. 

Mucio-curtis,  515. 

Mulciacum,  287. 

Munatianus,  128. 

Musciacus,  286. 

Namnetes,  39,  n.  1;  166. 
Narbonensis,  570. 
Narianos  (fundos),  421. 
Nasium,  374. 


DES  NOHB  DE  LIEU  ANCIENS. 


Nemausansis,  570. 

Nemelacum,  tB3;  Nemelacus,  397,  Q.  3. 

Nametocenna,  153,  397. 

Nemetodorum,  183. 

Nemplodurus , 


Paemam,  clients  des  Treveri,  36. 
Papia  (castrum),  411. 
PapirUnua.  128. 
Paribii.  clients  des  Aeduj,  31  ;  —  le 


Ni 


i,  638. 
Ne  ri  (Aquis),  316. 
NeriomagioDBBs,  346. 
Neriomagus,  x,  155;  346. 
Nerteuoaco  (de),  461. 
Nertii,  leurs  sujsts,  38  ;  —  leur  sénat, 
51,  5!;  ~  leurs  forftls,  74;  —  leurs 
champs,  77;  —  leurs  oppiUa,  88;  — 
39,  n.  I. 
Neviasca  (fluvius),  586. 
Niriacus,  155,  346. 
NiTiOBROOBS,  39,  n.  1. 
NobellascB,  591. 
Nobiliacus,  29t. 
Nocito,  633. 
Nogareda,  633. 
Nogareto,  de  Nucaretuia,  633. 
Nogariolas,  523. 


Noi 


.,  287. 


Novaliacus,  292. 

Noviacum  (castrum),  2HH. 

NovilïacuE,  '.'90. 

Novilliacns,  390. 

Noviodunum ,  oppidum  des  Atdui, 
81 ,  83;  —  oppidum  et  urbs  des  Bi- 
turige»,  84;  —  oppfiJiim  des  Sue«- 
sioneê,  89:  —  étymologie,  152. 

Noviolio,  de  Novioiolum,  531. 

Noviomagua,  154,  531. 

Nucerias,  523. 

Numerianus,  128. 

OcUvianus,  128. 

Octodurum,  Octodurua,  uicu»  des  Ve- 

ragri,  78,  562, 
udalrigescus,  557. 
Olivetum,  623-6Î4. 
Oltioilm,  546. 
Orbaaa  ivilla),  506. 
Orbaniacua,  158. 
Orbanicus,  568. 
Osieui,  39,  n.  I. 

pacciaoi,  164:  Paccianus,  164. 
Paciacus,  164. 
Paderni  (viUa),  482. 


-  39,  c 


Paternacus,  482. 
PateroiacuB,  483. 
Patorsoga,  482. 


Patrii 


I,  341. 


Pauliacus,  138,  *  160. 

Pavia,  412. 

Paxiscum,  164. 

PeteniBca,  548. 

Petraria,  604 

Petreio  (villa).  440. 

Pctriacensia  ager,  440. 

Petrignas,  439. 

Petrollum,  541. 

PelroDianicum,  576. 

Petronianus,  128. 

PetroDutius,  364. 

Petrosa,  604. 

Petrucobti,  39,  n.  I  ;  166. 

Piciacus,  292. 

PiciONES.  leurs  oppida,  88  ;  —  3il,  n.  I 

Pinariaacha,  588, 

Pinelum,  lilO,  '624. 

Piuna,  542, 

Pinolio,  de  Pinoiolum,  542;  —  39,  n.  : 

Piper,  484. 

Piperacus.  483. 

Pisciacus,  293. 

Pisiniacum,  157. 

PisunïacuB,  157. 

Plauciasca,  589. 

Pledmoiii,  sujets  des  Neraii,  36. 

Pociacus,  293. 

Podentiacus,  293. 

Pomareda,  633. 

Pomedo,  de  Pomelum,  624, 

Pomerido,  de  Pomai-otum,  633. 

Pometum,  *624.  034. 

Pompeiacum,  294. 

Pomponianua,  367. 

Pomponius  (fisc us),  366. 

Ponciacus,  295. 

Poncianus,  297. 

Poncio,  -onis,  516. 

PontianUB,  29€. 

Ponliliacus,  297. 

Pontilianus,  297. 


060 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 


Porcarias,  612. 
Posthimiagiis,  297. 
Postumiacus,  297. 
Premiacus,  300. 
Primiacus,  299. 
Prisciacus,  300. 
Prisciniacus  Ivilla),  97,  *30'1. 
Priscio  (villa),  cas  indirect,  368. 
Prôpertianus,  128. 
Pruûaco,  cas  indirecty  491. 
Prunidum,  624. 
Prutiuc  (Terra  an),  176. 
Puzenaco,  484. 
Puzinnaco,  484. 

Quinciacus,  157. 
Quincioneto,  516. 
Quintascha,  591. 
Quintiacus,  156. 

Quintiacus-Aurelianus  {fundua),  96. 
Quintiano,  421  ;  Quintianis,  421  ;  Quin- 

tianus,  157. 
Quintilio  (ecclesia  de),  368. 

Rainaldescus,  557. 

Ramigescus,  554. 

Rattenuc  (Les),  176. 

Ratumacos,  531. 

Radrici,  leurs  oppida,  88;  —  39,  n.  1. 

Rausedo,  de  Rausetum,  629. 

Raverias,  608. 

RED0NE8,  39,  n.  1. 

Regniaco  (de),  393. 

Rbmi  sont  foederati,  29,  n.;  —  leurs 
clients,  33;  —  sujets  des  Suesstones, 
se  révoltent,  35  ;  —  leurs  principes, 
47  ;  —  leur  sénat ,  51  ;  —  leur  fro- 
ment, 73;  —  leurs  forêts,  74;  —  leurs 
champs,  77  ;  —  leurs  vici,  78  ;  leurs 
oppidn,  88;  —  leurs  aedificia,  92; 
—  39,  n.  1. 

Ribarias,  608. 

Ricciacus,  160. 

Ricomagonsis  (vicus),  179. 

Rigoialensim,  532. 

Rigomagus,  532,  534. 

Rioilum,  532. 

Ritumagus,  153. 

Roboraria,  605. 

Roboretum,  605,  616. 

Rodolaigas  (terminus),  489. 


RodoUum,  531,  532. 

Roflacns,  306. 

Roliacus,  308. 

Roma,  570. 

Romagnanus,  303. 

Romanacus,  486,  487. 

Romanasca,  554. 

Romaniacus,  303. 

Romaniscas,  554. 

Romiliacus,  304. 

Rominiacus,  303. 

Romula  (villa),  t06;  Romulas,  508. 

Rosarias,  608. 

Rosetum,  629. 

Rotomagus,  532. 

Roverito,  de  Roboretum,  625. 

Rubridum,  625. 

Ruffiacus,  305. 

Rufiacus,  305. 

Ruiliacus,  308. 

Rulliacus,  307. 

Rumeliacus,  304. 

Rumiliacus,  304. 

Ruscoialum,  542. 

RuTENi,  34,  39,  n.  l,  569. 

Kutenicus  (pagus),  569,  570,  n.  2. 

RuTULi,  489. 

Ruveliascus,  589. 

Sabiacus,  309. 
Sabiniacas,  126,  127. 
Saciacus,  309-310. 
Salices  (ad),  626. 
Salicetus,  626. 
Salodurum,  173,  n.  2. 
Salomacus,  173,  n.  2. 
Salviacus,  311. 
Salviniacus,  312. 
Samnione,  516. 
Sansiacus,  313. 
Santianae,  313. 
Baktones,  39,  n.  1,  569. 
Santonicus  (pagus),  569. 
Saocitho,  de  Salicetum,  626. 
Sarmasias,  414. 
Sarmatae,  413,  414. 
Sarmisoliae,  414. 
Saviacus,  309. 
Savinanicis,  577. 
Saviniaco  (in  villa),  98,  n. 
Savinianum,  98,  n. 


DES  NOMS  DE  L^U  ANCIENS. 


Scociacus.  4t3. 
ScoRDiSci,  547. 
Scordue  (moos),  547. 
Scotia  (ïiUo),  412. 
Scotiolas,  536. 
Secundiacft,  313. 
Securi&cus,  314. 
Sadegeaacas,  499. 
SegalariBB,  608. 

Sboubiavi,  BUjeU  des  Aedui,  33;  — 
readus  indépendants  par  Auguste, 


39; 


Segusium,  560. 
Selvaniacus,  312. 
Sen-ddn,  152. 
Stn-mag,  154. 

Senogalo,  de  Benoiolum,  532. 
Benomagua,  154,  532. 
Senones,  clients  des  Aedui,  31  ;  — 
loars  rois,  41;  —  leurs  foréls,  75; 

—  letirs  oppida,  88;  —  leur  assem- 
blée, 114;  —  39.  n.  1. 

Sentiacus,  315. 
Scntianus,  315. 
Sequani  dépouillés  par  Arioviste,  20, 

Tfi,  105;  —  clients  des  Araerni,  33; 

leur  froment,  72;  —leurs  forêts,  75; 

—  s'emparent  des  champs  des -4«ilii(, 
76;  —  leurs  oppidt,  89;  —  leur 
pays  d'origine,  120;  —  39,  n.  1. 

Servilianam  (ad  villum),  375. 

Scssiacus,  319,  320. 

Severiacus,  '316-313,  465. 

Sexciaceasis,  313. 

Sextantio,  -onia,  56â.  . 

Siliacus,  321. 

Bilianus,  322. 

BiUVANEGTES,  sujets  des  SuenêioneB, 

nfTrancbis  par  Auguste,  39. 
Silvaniagus,  3'J2. 
Silvanicus,  567. 
SiWiacus,  323. 
Silvignanicus,  577. 
Silviniacus,  325. 
Silviniaaus,  325. 
Simplicciacus,  325. 
Simpliciacua,  326. 
Sivarianis  (in),  422. 
Sociacus,  32G. 
Bolemniacus,  327. 
Ijolemnis  (villa),  502. 


Solamnius  (Sscua),  370. 
Solia,  415. 

SoliacuE,  328, 
Solicia  (vicus),  415. 
Solimariaca,  146,  159. 
Soliolus,  526. 
Solius  (locQs),  370. 
Bollemniacus,  327. 
Sollemniis,  429. 
SolmeriacuB,  159,  n.  9. 
[pagus),  415. 


îoloi 


i,  150,  •  172. 


SoNTiATES,  leu^s  opplda,  89. 
Soricariaa,  612. 
Sparnacus,  4&2. 
Speraacus,  4G2. 
Spicarias,  608. 
Spinetum,  626,  627. 
Bpinogilum,  542. 
Btatianus,  128. 
Stratebureum,  492. 
SUESSETANI,  498. 
SucBEiONES,  leur  prépondérai 

35,  36;  —  leur  lutte  avec  le) 

35,  39;  — leurs  BuJoU,34.3g; 

rois,  43;  —  leurs  champs,  76; 

opptda,8l,89;—  39,  n.  1,5^ 
Sueasionicus  (pagus),  5G9. 
Sumeloeenna,  397. 
Superiacus,  318. 

Tamnach,  174. 
Taroduuum.  601. 
Tarusco,  -onis,  601. 
Taruscononienses,  601, 
Tarvannensis.  465. 
Tarvenna,  465. 
Tarvisium,  466. 
Tauriacus,  329. 
Tauricciacus,  331. 
Tauriniacus,  332. 
Taurinianus,  333. 
Tauhjsci,  547. 
Taurisiacus,  332, 
Telido,  de  Tilielum,  627. 
Teltaus  pagus,  561. 
Teodcberciacus,  iviii,  145. 
Terciacus,  372, 
Tercio  (in  villa),  370. 
Terentiauos  (fundos),  421. 
Teudgariescua,  556. 


652 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 


Teutobodiaci,  392. 

Tbarawaaninsis,  465. 

Tiberiacus,  159. 

Ticinum,  412. 

TiouRiNi,  leurs  forêts,  75. 

Tilia,  416. 

Tilietnm,  373. 

Tilius  (viUa),  372. 

TiUiacus,  373,  627. 

Tillido,  de  TUietum,  627. 

Togiâciae,  136. 

Tollio,  -oois,  517. 

Torennam  castnim,  442. 

Tornagus,  503. 

Tomolii,  génitif,  543. 

Tomomagus,  170. 

Tremoledo,  de  Tremaletum,  627. 

Trevennaco  (finis  de),  461. 

TREyERi ,  leurs  clients ,  36  ;  —  leurs 

principes,  46,  47;  —  leurs  forêts,  74; 

—  39,  n.  1. 
Tricassks,  sujets  des  Lingones,  29,  n.; 

rendus  indépendants  par  Auguste,39. 
Trimlido,  de  Tremuletum,  627. 
Trociacus,  409. 
TuUliacnm,  518. 
Tulelasca,  586. 
Tullum,  374,  504. 
Turenna,  463. 
Turibriga,  441. 
Turicensis,  441. 
Turiliacus.  333. 
Turissa,  441. 

Turnacus.  150,  167,  170,  364,  *503. 
Turnis  (in  villa),  503. 
Tumncium  (viliam),  364. 
Turnus  (villa),  503. 
Turo,  cas  indirect,  441. 
Turobriga,  441. 
Turollium,  543. 
TuRONi,  39,  n.  1. 
Turrias  (in  Castro),  440. 

Ucctia,  565. 

UlmeU.  628. 

Ulmido,  d'UImetum,  628. 

Unaldescus,  558. 

Uriacus,  399. 

Uromagus,  399. 

Ursiliacus,  387. 

Uxellodunum,  oppidum  des  CacCurct, 


est   compris   dans   la   clientèle   (ie 
Lucterius,  58,  85;  —  approvision- 
nements de  cette  ville,  71  :  —  152. 
Uzeticus  (pagus),  565. 

Vadoni-mons,  ix. 

Valentianae,  526. 

Valentiniacus,  165. 

Valentinianus,  165. 

Valentiola,  526. 

Valeria  (via),  347. 

Valeriacus,  145. 

Valeriana,  375;  Valerianus,  128,  145. 

Valeris,  429,  430. 

ValUano,  96,  99. 

Varcia,  166. 

Variana,  375,  421  ;  Varianis,  421. 

Varoiol,  543. 

VasUlus  (viUa),  503. 

Vassiacus,  333. 

Vauro,  de  Vaurus  ou  Vaurum,  349. 

Velatudurum,  xi. 

VelQia  (Table  alimenUire  de),  127-129, 

Veliocasses,  39,  n.  1. 

Vellaunodunum ,  oppidum  des  Seno- 

nés,  89,  152. 
Vellavi.  sujets  des  Arvemi,  34;  — 

affranchis  par  Auguste,  39  ;  —  569. 
Vellavicns  (pagus),  569. 
Velleianus,  128. 
Vencione,  518. 
Vendecia  (viUa),  416. 
Vendoilo,  de  Vindoiolus,  532,  533. 
Venelli,  39,  n.  1. 
Venerianicus,  577. 
Veneti,  leur  sénat,  50  ; — leur  froment, 

72  ;  —  leurs   champs ,  77  ;  —  leurs 

oppida,  90. 
Vennasca,  600. 
Venzascus,  589. 
Veraglasca  (fluvius),  586. 
Veraori,  leurs  oici,  78. 
Vemeto,  629;  Vemetnm,  544. 
Vemiacus,  544. 
Vemolio,  de  Vemoiolnm,  543. 
Verolias,  544. 
Vesontio,  -onis,  oppidum  des  Sequmi^ 

89. 
Vibianus,  128,  129. 
Vibiscus,  548. 
Victoriacus,  334. 


DES  NOMS  DE  LIEU  ANCIENS. 


Victriacam,  33S. 
VietoriacoD,  334,  n. 
ViliaenB,  336. 
ViUunB,  336. 
Viliosctu,  336.  596. 
ViUiactu,  S96. 
ViUoniau,  585. 
Viminans  (pagns),  561. 
Vinciacus,  336, 
Vindanacft,  600. 
Vîndiacensis,  337. 
Vindiciacua,  337,  116. 
Vindobona,  584. 
Vindobriga,  zni. 
Vindomagaa,  533. 
Viadonissa,  534.  583. 
Vinecia  (villa),  416. 
VineUacft  (flnTins),  586. 


Violarias.  609. 
Viriocensis  ager,  454. 
VirianuH,  128. 
Viailia,  417. 
Visiliaco  (ïillam),  417. 
Vitlena(TiUa].  466. 
Vitrosco,  de  Victorio* 
Vitudarum,  zi. 
ViTUHii  LangeneM,  581 
ViviBCi  (Bitnriges),  54S 
ViviacD,  ca«  indlracl, 
VOLCAB    Arecomici,  1' 

119(1). 
Vnlpeglariai,  613. 

Wftriacna,  33S.  Vojei 
Wosduc  (Ticarinm),  17 


(1)  Quand  j'ai  expoaé  la  doctrine  Boiit«nue  dans  ce  psasage,  je 
pas  encore  les  concluaions  que  H.  Hirachfsld  tire  de  la  lectur 
lui  poar  l'ineeription  1028  du  toroe  XII  du  Corpus  intcriplion 
Cette  inscription,  trouvée  i  Avignon,  mentionnerait  un  prèti 
Arecomict;  le  pouvoir  de  ce  préteur  se  serait  étendu  au  territo 
c'est.i-dire  sur  la  rive  gauche  du  Rhône.  H.  Hirschreld  croit  qu 
tian  est  antérieure  i  l'empire  romain,  et  probablement  contei 
dictature  de  César,  48-44  av.  J.-C.  (C.  /.  L.,  XJI,  p.  346,  381). 


INDEX  AIPHABETIQUE 


NOMS  DE  LIEU  MODERNES 


Achères,  55?,  *6t0. 
Acherolles,  522. 
Achey,  195. 
Achy,  195. 
Acigné,  187. 
Aguisy,  189. 
Aiguillan,  377. 
Aiguillanes,  377. 
Aiguillon,  377. 
Aiguisy,  190. 
Aillac,  193. 
AiUy,  192. 
Ainay,  490. 
Aire-sur-la-Lys,  379. 
Aix  (Pas  de-Calais),  351. 
Aix-en-Provence,  320. 
Albagnao,  378. 
Albi,  378. 
Albiac,  190. 
Albignac,  192. 
Albussac,  509. 
Aleuçon,  514. 
AUemagD»,  413,  415. 
AUibaudières.  613. 
Alzoïme  (Font  d'),  520. 
Ambazac,  445. 
Ambillon,  561. 
Amboise,  443. 
Ameugny,  432,  433. 
Amillis,  349. 
AmiUy,  348,  349. 


Amognes    (Saint-Jean   aux) 

432,  433. 
Ance,  378. 
Anoey,  379. 
Ancy,  379. 
Andelal,  563. 
Andelot,  562. 
Andelys  (Les),  563. 
Andeniach,  172,  562. 
Andillac.  563. 
Andillé,  668. 
Andillon,  563. 
Andilly,  563. 
Andusenque,  570. 
Anduze,  -570. 
Angeac,  193. 
Angers,  xii. 
Anis  (Mont),  350. 
Anisy,  350. 
Anizy.  193. 
Ansac,  379. 
Ansan.  379. 
Ansauvilliers,  vu. 
Anse,  378. 
Anthenay,  457. 
Antogné,  351. 
Antogny,  140,  351. 
Antoigné,  140. 
Autoigny,  140. 
Antoingt,  350. 
Aniona,  562. 


656 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 


Antonaves,  173,  562. 
Antony,  11,  140,  351. 
Apilly,  195. 
Apoigny,  196. 
Arçay,  383. 
Arces,  382. 
Archignat,  196. 
Arciat,  384. 
Arcieux  384. 
Arcis-sur-Aube,  383. 
Arçon,  510. 
Arcy,  383,  384. 
Argentay,  491. 
Argenteuil,  531,  533. 
Argenton,  X,  494. 
Argentré,  493. 
Arjac,  381. 
Arles,  549. 
Arras,  183,  397. 
Arsac,  384. 
Arsague,  384. 
Artenac,  456. 
Artenay,  456. 
Arthenac,  456. 
Arthenas,  456. 
Arthonnay,  495,  598. 
Arthun,  xii,  383. 
Artonne,  495. 
Arzac,  384. 
Arzaga,  Arzago,  384. 
Asellac,  467. 
Asnières,  610. 
Assé*,  187,  383. 
Athée,  401,  433. 
Athies,  *402,  433. 
Attigny,  198. 
Aubagne,  377. 
Aubagnan,  377. 
Aubagnat,  378. 
Aubiac,  190. 
Aubiat,  190. 
Aubignan,  192. 
Aubigné,  192. 
Aubigney,  192. 
Aubigny,  191,  192. 
Aubussargues,  571. 


Aubusson,  509. 
Aulnay,  172,  *616,  617. 
Aulnois,  617. 
Aulnoy,  617. 
Aunay,  616,  617. 
Aunois,  617. 
Aureilhan,  145. 
Aureillac,  145. 
Aurelhargues,  571. 
Auriac,  427. 
Aurillac,  145,  434. 
Auteuil,  545. 
Autun,  154. 
Auxerre,  546. 
Avallec,  176. 
Avallon,  153. 
Avançon,  510. 
Avanton,  510. 
Avenay,  453. 
Avenche,  510. 
Avéne,  463. 
Avenières  fLesi,  606. 
Avensac,  510. 
Avensan,  510. 
Averdon,  169,  n. 
Avessac,  Avizac,  138. 
Avignon,  518,  653,  n. 
Avignonet,  519. 
Avrolles,  xi,  169. 
Aydat,  145. 
Aygu  (N.-D.  d'),  153. 
Azerat,  468. 

Banazlec,  176. 
Barbayrac,  402. 
Barberey,  165,  *403. 
Barbières,  434. 
Barbirey,  403. 
Bareil,  534. 
Barnay  (Le),  496. 
Bassigny,  200. 
Baugy,  199. 
Bayeux,  154. 
Beaune,  179. 
Beauvais,  154. 
Bègue  (Le),  599. 


DES  NOHB  DE  LIEU  MODERNES. 


Beligneux,  343. 
Belleueuve,  563. 


Berbirey,  165. 
Bernac,  496. 
Bemay,  496. 
Bemy,  495. 
Berthenay,  488. 
Bessay,  342. 
Bessenay,  458. 
Bessey,  593. 
Bethencourt,  vni. 
Beuzec,  138,  m. 
Beysaac,  593. 
Billancourt,  13. 
Bissy,  468. 
Blacy,  201. 
Blagny,  598. 
Blandy,  163. 
Blangy,  163. 
BlaDot,  593. 
Blanzac,  163. 
Blanzal,  163. 
Blanzay,  163. 
Blanzy,  163. 
Blesmes,  181. 
Blevec  (Le),  176. 
Bligny,  '343,  418. 
Blismes,  181. 
Blois,  505. 
Boisset  (Le),  618. 
Boissey,  619. 
Boisay,  617,  619. 
Bonac,  469. 
Bonnac,  469. 
Bonnat,  469. 
Bonnay,  469. 
Bonneil,  536. 
Bonoeuil,  535,  536. 
Bonnœil,  535,  536. 
Bonaœuvre,  536. 
Bossay  (Pont  de) ,  618. 
Bougivai,  vni,  12. 
Bouiilargues,  571. 
Boulaie,  617. 
Boulayi  617. 


Boulaye,  617. 

Boulois,  617. 

Bouloy,  617. 

Bourges,  151 ,  565. 

Boumac,  497. 

Bournan,  497. 

Bournay  (Saint-Jean  de),  491 

Bournhounesque ,  556. 

Boussy,  202. 

Boutenac,  458. 

Bracy,  352. 

Bragny,  400. 

Braisne,  400. 

Brandon,  400. 

Branoux,  598. 

Bras  d'Asse,  352. 

Brassac,  352. 

Brenac,  496. 

Brenal,  495,  496. 

Brenay,  495. 

Brene,  496. 

Brenna,  496;  Brenno,  496. 

Breteuil,  536. 

Brethenay,  488. 

Breligney,  202. 

Bretigny,  202. 

Brevenne  (rivière),  565. 

Briare,  153. 

Briec,  138. 

Brignac,  496. 

Brigné,  496. 

Brignon,  510. 

Brioude,  153. 

Brissac,  599. 

Brissy,  599. 

Brixey,  599. 

Bruguec,  176. 

BrUnn,  169. 

Bucey,  202. 

Bucy,  202,  618. 

Buissière  (La),  606. 

BulhoD,  511. 

Burey,  203. 

Bury,  203. 

Busît,  177. 

Bussiëre  (La),  606. 

42 


658 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 


Bussières,  606. 
Bussy,  202. 


Cabriac,  435. 

Cadarot  (N.-D.  de),  600. 

Cadola,  501. 

Cagnosc  (Saint-Jean  de),  211, 

594. 
Cahors,  154. 
Caissargues,  572. 
Cambon,  181. 
Cambrai,  512. 
Campagnac,  210. 
Campagnan,  210. 
Campelles  (Saint-Etienne  de), 

438. 
Campénéac,  210. 
Campigny,  210. 
Canac,  472. 

Cantillac,  369,  376,  583. 
Cantilly,  376. 
Capdenac,  473. 
Carancy,  146. 
Carency,  211. 
Carennac,  458. 
Carnac,  489. 

Casneda,  629;  Casnedo,  629. 
Cassago,  143. 
Cassanigo,  572. 
Castanet,  619. 
Caugé,  158. 
Caugy,  158. 
Caujac,  158. 
Caux,  428. 
Cavagnac,  475. 
Cavaillon,  519. 
Caverzago,  157. 
Cazillac,  488. 
Cepet,  406,  620. 
Cepoix,  620. 
Cepoy,  406. 
Cervières,  611. 
Cessey,  320. 
Cessieu,  320. 
Cessy,  320. 
Chabriac,  435. 


Chabris,  434. 
Chacé,  213. 
Chaillac,  204. 
Chaillé,  204. 
Chailley,  204. 
Chaillot,  537. 
Chailly,  204,  470. 
Chalias,  205. 
Chalnac,  472. 
Chalon-sur-Saône,  83. 
Châlons-sur-Marne,  404. 
Châlons  (Mayenne),  538. 
Chalus,  363. 
Chambéry,  206. 
Chambly,  207. 
Chambon  (Le),  599. 
Chambost-Longessaigne,  599. 
Chamilly,  162. 
Chamolay,  356. 
Chamouillac,  356. 
Chamouille,  356. 
Chamouillet,  356. 
Cbampagnac,  210. 
Champagnat,  209,  210. 
Champagne,  208,  210. 
Charapagneux,  210. 
Champagney,  210. 
Champagny,  210. 
Champigné,  210. 
Champigny,  208,  210. 
Champillet,  438. 
Champlost,  600. 
Chanac,  471,  472. 
Chanat,  471. 
Chaney,  472. 
Channay,  210,  638. 
Chantelle,  375-376. 
Chantesse,  582. 
Chanteuges,  538. 
Chantillac,  376,  583. 
Chantilly,  *376,  583. 
Chantonay,  582. 
Chaource,  403. 
Chapelle  sous  Brandon  (La) , 

603. 
Chaponnière  (La),  611. 


DES  NOMS  DE  LIEU  MODERNES. 


659 


Charancey,  146. 
Charancieu,  146,  211. 
Charantigny,  146. 
Charcé,  213. 
Charencey,  211. 
Charency,  146,  212. 
Charensat,  212. 
Charentay,  212. 
Charentonnay,  566. 
Chargnac,  489. 
Chargnat,  489. 
Charnay,  488,  489. 
Charny,  489. 
Charonne,  600. 
Chassé,  143. 
Chasseneuil,  531,  533. 
Chassenon,  531,  567,  n.  2. 
Chassey,  143. 
Chassiecq,  143. 
Chassieu,  143. 
Chassigneu,  165. 
Chassigny,  165. 
Chassy,  143. 
Chastelux,  364. 
Chastenay,  619,  620. 
Ghâtenay,  619,  620. 
Châtenet,  620. 
Chatenois,  620. 
Châtenoy,  620. 
Châtillon,  364. 
Chaudion,  511. 
Chaulhac,  217. 
Chaussy,  216. 
Chavagnac,  475. 
Chavagné,  475. 
Chavagnieu,  475. 
Chaversey,  158. 
Chelieu,  214. 
Chelles,  538. 
Chelsey,  429. 
Chemilla,  162. 
Chemillé,  162,  207. 
Chemilli ,  162. 
ChemilW,  162. 
Chêne-chenu,  466. 
Chêne vières,  607. 


Chenove,  472,  563. 
Cheny,  210. 
Chepoix,  620. 
Cherancé,  146. 
Cherencé,  146. 
Chéry,  524. 
Chesnay,  628. 
Chesnois,  628. 
Chesnoy,  628. 
Chessy,  143. 
Cheu,  405. 
Cheverny,  435,  605. 
Chevery,  435. 
Chevinay,  458. 
Chevregny,  436. 
Chevresis,  158. 
Chevrey,  435. 
Chevry,  435. 
Chigné,  210. 
Choilley,  217 
Choisey,  216. 
Choisies,  216. 
Choisy,  215,  216. 
Chorges,  xi,  404. 
Chouilly,  216,  217. 
Choussy,  216. 
Chouzé,  216. 
Chouzy,  216. 
Ciran,  182. 
Civrac,  318. 
Civray,  318. 
Civrieux,  318. 
Civry,  *318,  465. 
Clapiers,  220. 
Cleppé,  220. 
Cléneux,  218. 
Clermont-Ferrand,  154. 
Clichy,  11,  218,  219. 
Clignancourl,  12. 
Clion,  x. 
Colchester,  354. 
Collemiers,  611. 
CoUobrières,  611. 
Cologne,  142. 
Colombey,  612. 
Colombier,  611,  612. 


660 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 


Colombier-Saugnieu,  566. 
Colombiers,  612. 
Comeré,  357. 
Comiac,  222. 
Gommiers,  357. 
Communay,  476. 
Congé,  148.  222. 
Congis,  148. 
Corbeil,  539. 
Corbeny,  497. 
Corbiguy,  498. 
Corenc,  464. 
Corneilhan,  358. 
Corneilla,  358. 
Corneillan,  358. 
Cornil,  357. 
Cornillac,  358. 
Cornille,  357. 
Cornillé,  358. 
Coniillon,  512. 
Cossé,  220. 
Cotte,  505. 

Cottieniies  (Alpes),  499. 
Coucy,  573. 
Coudraie  (La),  620. 
Coudray  (Le),  620. 
Courçais,  225. 
Courçay,  225. 
Courchon,  512. 
Courçon,  512. 
Courcy,  226. 
Courson,  xii,  512. 
Courtenay,  458. 
Coussergues,  573. 
Coutances,  422. 
Crannach,  175. 
Cransac,  211. 
Cranton,  x,  167. 
Crécy,  222. 
Crépigny,  224. 
Crépy,  223. 
Crespian,  223. 
Cres[)igny,  224. 
Cressac,  223. 
Cressey,  223. 
Cressy,  223. 


Créteil,  540. 
Crognac,  225. 
Crogny,  224,  402. 
Croix-Nord,  370. 
Cuinchy,  156. 
Cuincy,  156. 
Cuiry,  595. 
Cuisy,  227. 
Cuizy,  227. 
Curçay,  225. 
Curiusque,  594. 
Cusey,  227. 
Cuzac,  227. 

Daumazan,  340. 

Deneuvre,  xiii. 

Derrien  (La  Roche-),  398. 

Dicy,  409. 

Dijon,  520. 

Dizy,  227,  409. 

Dompnac,  477. 

Donzac,  230. 

Donzacq,  230. 

Donzy,  230. 

Doucey,  229. 

Doucy,  229. 

Doussay,  228,  229. 

Douvres,  178. 

Douzy,  229. 

Drenek,  176. 

Drishaghaun,  174. 

Droussac,  230, 

Eause,  520. 
Ebreuil,  499. 
Ecosse,  14. 
Ecuisse,  526. 
Eguilly,  377. 
Embrun,  169. 
Engins,  361. 
Epagne,  410. 
Epagny,  410. 
Epinay,  542,  627. 
Epiniac,  410. 
Espagnac,  410. 
Essarois,  630. 


DES  NOMS  DE  LIEU  MODERNES. 


Eure  (rivière),  151,  565. 
Evre  (rivière),  151,  565. 
Evreux,  565. 
Evry,  169. 

Fabiaiio,  438,  n.  9. 

Page,  439. 

Fagel,  621. 

Fajac,  439. 

FaveroUes,  522. 

Favières,  522. 

Fay,  621. 

Feoay,  455. 

Ferrairie  (La),  604. 

Ferrières,  603. 

Fézensac  (Vic-de-),  340. 

Ficarelo,  632. 

Figaret,  632. 

Figeac,  232. 

Firminargues,  573. 

Flacé,  233. 

Flacey,  233. 

Placj,  233. 

Flagy,  595. 

Flaugeac,  236. 

Flaujac,  235. 

Flaviac,  235. 

Flavignac,  236. 

Flavigny,  236,  236. 

Flavy,  235. 

Flayosc,  595. 

Flesccach,  175. 

Fleuré,  237. 

Fleurey,  236,  237. 

Fleurian,  237. 

Pleurieu,  163. 

Fleurieui,  163,  237. 

Fleury,  163,  237. 

Fley,  595. 

Floirac,  163,  237. 

Florian,  237. 

Fly  (Sainl-Germer  de),  596. 

Foissac,  238. 

Foissiat,  238. 

Foissj,  237,  238. 

Fonlanedo,  632. 


10. 


Fonlenay,  631,  632 
FoQtenois,  632. 
Fonleuoy,  632. 
Fragny,  349. 
Fraissiuet,  621. 
Frayssinet,  621. 
Frenay,  621. 
Preney,  621, 
Fresnay,  621. 
Presne,  609. 
Fresnes,  609. 
Fresney,  621. 
Presniéres,  609. 
Presnois,  609,  621 . 
Fresuoy,  621. 
Freycenet,  621. 
Freyssenet,  621. 
Fronsac,  459,  n. 
Frontenac,  459. 
Froatenas,  459. 
Frontenay,  459. 
Fuisse,  238. 


Oabriac,  436. 
OaiUac,  239. 
GaiUon,  513. 
Oalargues,  576. 
Gemigny,  159. 
Génetay,  622. 
Genève,  151. 
Genevraie  (La),  622. 
Genevray,  622. 
Genevraye  (La),  622. 
Genevriére  (La),  607. 
Genissac,  242. 
Geniasieux,  241. 
Gensson,  513. 
GenliUy,  242. 
Germagnat,  244. 
Germagny,  244. 
Gerraay,  541. 
Germenay,  244. 
Germignac,  244. 
Germigney,  244. 
Germigny,  242,  243,  244. 
Gesvres,  436. 


662 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 


Gevrey,  436. 
Geyssans,  245. 
Gissac,  245. 
Gissey,  244,  245. 
Gondreville,  vi. 
Gouezec,  138,  177. 
Goules,  507. 
Goupillières,  613. 
Gragnague,  248. 
Gravières,  604. 
Grazac,  246. 
Grazay,  245,  246. 
Grignan,  248. 
Grignon,  513. 
Grigny,  248. 
Gréasque,  246,  593. 
Gresillac,  410. 
Grésillé,  410. 
Gressey,  246. 
Gressy,  246. 
Grésy,  246. 
Greux,  358. 
Grézac,  246. 
Grézian,  247. 
Grézieu,  246. 
Grézieux,  245. 
Guéry,  339. 
Guillotière  (La),  613. 
Gusargues,  571. 

Halphen,  155,  191,  421. 
Herry,  381. 
Heyneux,  381. 

Irlande,  13,  14,  637. 

Is-en-Basigny,  361. 

Is-sur-Tille,  359. 

Isernore,  184. 

Issac,  361. 

Isse,  361. 

Issé,  361. 

Issoire,  xii,  148,  182,  360. 

Issy,  148,  360. 

Ivry,  169. 

Izeure,  360. 

Izeures,  xii,  148,  182,  360. 


Jailly,  239. 
Jallieu,  239. 
Jansac,  513. 
Jausiac,  513. 
Janson,  513. 
Janzé,  251. 
Jeugny,  253,  254. 
Joncherais,  633. 
Joncheray,  633. 
Jonchère,  523. 
Jonchère  (La),  605. 
Jonchéres,  523,  605. 
Joncherolles,  522,  523. 
Jonquièro,  523. 
Jonquières,  523. 
Jonzac,  251. 
Jonzieux,  251. 
Jouaignes,  253,  254. 
Jouancy,  252. 
Joué,  239,  241. 
Jouet,  240,  241. 
Jouey,  241. 
Jouy,  240,  241. 
Juillac,  141. 
Juillan,  142. 
Juillé,  141. 
Juilley,  141. 
Juilly,  141. 
Julhans,  142. 
Juliers,  141. 
Jullians,  142. 
Jullié,  141. 
JuUy,  141. 
Jumigny,  159. 
Juvigné,  254. 
Juvignies,  254. 
Juvigny,  252,  254. 

Kerapeniac,  138. 
Kent,  179. 

Lançon,  362,  513,  514. 
Laiigres,  388. 
Lans,  361. 
Lantenay,  460. 
Lanihenay,  460. 


DES  NOMS  DE  LIEU  MODERNES. 


Lantignie,  362. 

Lantiïlac,  362. 

Lantilly,  362. 

Lanzac,  362. 

Larrey,  249. 

Lassois  (Mont).  549. 

Lasson  (La  Chapelle),  514. 

Launay,  617. 

Launois,  617. 

Launoy,  617. 

Lauret  Sauteyrac),  622. 

Lavaur,  349. 

Leacach,  175. 

Légé,  411. 

Lelgnon,  514. 

Lembronf  Saint-Germain),  254, 

554. 
Lentigny,  362. 
Lentilliac,  362. 
Lenliily,  362. 
Lésignat,  256. 
Lésigné,  256. 
Lésigny,  255,  256. 
Leuilly,  263. 
Lézignan,  257. 
Lézignieux,  256. 
Lézinnes,  257,  439. 
Ligeay,  411. 
Lignères,  608. 
Lignerolles,  523. 
Ligoières,  523,  607. 
Lilhac,  258. 
Lillebonne,  585. 
Lilly,  258. 
Limoges,  154. 
Linières,  607. 
Linz,  460. 
Liverdun,  xiii,  479. 
Livré,  479. 
Livry,  479. 
Llydaw,  560. 
Loches,  363. 
Lotlève,  507. 
L.œuilly.  263. 
Loucé,  260, 
Louchj,  264. 


Loupiac,  264. 
Loupian,  264. 
Louppy,  264, 
Luçay.  260. 
Lucé.  259,  260. 
Lucenay,  455. 
Lucey,  259,  260. 
Luchy,  259,  261. 
Luçon,  515. 
Lucy,  261. 
Lugan,  365. 
Lusignan,  155,  257. 
Lussac,  258,  261. 
Lussan,  261. 
Lussat,  261. 
Lusson,  515. 
Lux,  363. 
Luynes,  266. 
LuziUat,  262. 
Luzillé,  261. 
Luzinay,  455. 

Maçon,  550. 
Magnac,  266. 
Magnan,  266. 
Magné,  266. 
Magnien,  266. 
Magnieu,  266. 
Magny,  265,  266. 
Mailhac,  267,  574. 
Maillac,  574. 
MaiUane,  267. 
Maillé,  266,  267. 
Mailley,  267. 
Mailly,  267. 
Maincy.  268. 
Mainz,  418- 
Mairé,  276. 
Mairy,  276. 
Maixe,  275,  411. 
Maizeray,  480. 
Malay,  482. 
Maiicey,  268. 
Mancy,  268. 
Manhac,  266. 
Maray,  276. 


664 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 


Marçay,  274. 
Marcé,  274. 
Marcello,  502. 
Marcenat,  454. 
Marcenay,  454. 
Marcenet,  454. 
Marcey,  274. 
Marchiennes,  274. 
Marciac,  274. 
Marcieu,  274. 
Marcieux,  274. 
Marcillac,  146,  269. 
Marcillat,  146,  269. 
Marcillé,  146,  268. 
Marcilly,  146,  269. 
Marcilly  d'Azergues,  607. 
Marc-la-Tour,  502. 
Marçon,  515. 
Marcoux,  446. 
Marcy,  274. 
Mareil,  529,  530. 
Mareuil,  529,  530. 
Marey,  276. 
Mariac,  276. 
Marigna,  278. 
Marignac,  164,  277. 
Marignana,  164. 
Marignane,  164. 
Marignano,  164. 
Marigné,  164,  278. 
Marigneu,  164. 
Marignier,  278. 
Marigny,  164,  277,  278,  366. 
Marillac,  482. 
Marinesques,  553. 
Marmagne,  413,  414. 
Marmogen,  xi. 
Marnay,  278  n.,  366. 
Marolles,  281,  525. 
Marsac,  271,  274. 
Marsan,  275. 
Marsannay,  454. 
Marsas,  270,  274. 
Marsat,  270. 
Marseillan,  270,  274. 
Marsillargues,  594. 


Marsilly,  269. 
Marson,  515. 
Martigna,  279. 
Martignac,  280. 
Martignargues,  575. 
Marti gnas,  279. 
Martignat,  279. 
Martigné,  279. 
Martigny,  278,  280. 
Martigny-en-Valais ,  562. 
Martinesque,  553. 
Mary,  280. 
Massillac,  574. 
Massillargues,  574. 
Mauriac,  281,  282,  290. 
Mauriat,  282. 
Maurisque,  553. 
Maxey,  274. 
Mayence,  418. 
Maynal,  425. 
Mayrinhac,  278  n. 
Mazerac,  480. 
Mazeray,  480. 
Meilhac,  283. 
Meillac,  283. 
Meilly,  283. 
Mequeroil,  526. 
Mercey,  271. 
Mercœur,  446,  447. 
Mercurago,  447,  n.  7. 
Mercurey,  447. 
Mercurio,  446,  n.  7. 
Mercury,  447. 
Mercy,  274. 
Méré,  280. 
Mérey,  276,  280. 
Mérignac,  278. 
Mérignargues ,  575. 
Mérignas,  278. 
Mérignat,  278. 
Mérigny,  278. 
Merlau,  564. 
Merloux,  564. 
Merrey,  281. 
Merry,  281. 
Méry,  276. 


DES  NOMS  DE  LIEU  MODERNES. 


665 


Merzé  (Saint-Jean  de),  270. 
Meslay,  481. 
Mesle,  564. 
Messay,  425. 
Metti,  425. 

Metz,  154,  423,  425  n.  6. 
Meuse,  561. 
Meyrargues,  575. 
Mezeray,  480. 
Mezeriat,  481. 
Miceriac,  165. 
Milhac,  283. 
Millac,  284,  348. 
Millau,  153. 
Milly,  284. 
Miserey,  165. 
Misery,  165. 
Missery,  165. 
Missiriac,  165. 
Moiré,  282. 
Moirey,  281,  282. 
Moiry,  282. 
Moissac,  286,  287. 
Moissat,  286,  287. 
Moissey,  287. 
Moissieu,  287. 
Moissy,  287. 
Montagna,  285. 
Montagnac,  285. 
Montagnat,  285. 
Montagne,  284,  285. 
Montagney,  285. 
Montagnieu,  285. 
Montagny,  285. 
Montegiove,  448. 
Montegiovi,  448. 
Montenay,  285. 
Mouteu  da  Po,  546. 
Moutignac,  284,  285. 
Montigné,  284,  285. 
Montigny,  285. 
Montluçon,  515. 
Montmagny,  266. 
Montmorency,  340. 
Morancé,  34 ï. 
Morancez,  341. 


Morancy,  340. 
Moreac,  282. 
Morenchies,  341. 
Morey,  282. 
Morlaye  (La),  486. 
Mory,  281,  282. 
Moussac,  287. 
Moussey,  287. 
Mousson,  596. 
Moussy,  287. 
Mouzon,  153. 
Mussey,  516. 
Mussy,  516. 

Naiguières,  603. 
Neris,  x,  155,  346. 
Neufvy,  289. 
Neuillac,  292. 
Neuillay,  292. 
Neuillé,  292. 
Neuilli,  292. 
Neuilly,  292. 
Neulliac,  292. 
Neuvilley,  292. 
Neuvilly,  292. 
Neuvy,  289. 
Nevers,  83. 
Nevy,  289. 
Nissan,  350. 
Nogarè,  633. 
Nogarède,  633. 
Nogaredo,  633. 
Nogaret,  633. 
Nogna,  288. 
Noiseau,  623. 
Noisy,  623. 
Nouaillé,  292. 
Noyers,  609. 
Noyon,  531. 
Nueil,  531,  534. 
Nuillé,  292. 
Nully,  292. 

Orange,  520,  569. 
Orbigny,  158. 
Orçay,  385. 


666 

Orléans,  412,  422. 
Orlhac,  145,  434. 
Orlhaguet,  434. 
Orliac,  434. 
Orliaguet,  434. 
Orly,  145,  434. 
Ormoy,  628. 
Orry,  198. 
Orsay,  385. 


Pacé,  164. 
Pachan,  412. 
Paché,  412. 
Pacy,  164. 
Pagney,  483. 
Pagny,  483. 
Paissy,  164. 
Parcay,  342. 
Parce,  341,  342. 
Parcey,  342. 
Parcy,  342. 
Parthenay,  491. 
Passy,  164. 
Payerne,  483. 
Pebrac,  483. 
Pécy,  293. 
Peillac,  Poliac,  138. 
Pénide  (La),  624. 
Percey,  342. 
Percy,  342. 
Pernay,  482. 
Pérolet  (Le),  541. 
Perrecy,  341. 
Perreuse,  604. 
Perreux,  604. 
Perrier  (Le),  604. 
Perrière  (La),  604. 
Perrières,  604. 
Pessac,  293. 
Pessat,  293. 
Petrigniano,  439,  n.  5. 
Petrognano,  439,  n.  6. 
Pibrac,  483. 
Pinay,  624. 
Pinède,  624. 
Pinet,  624. 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 


Pineuilh,  542. 
Piney,  157. 
Pissy,  293. 
Pizy,  293. 
Ploermel,  387. 
Poinchy,  297. 
Poinçon,  516. 
Poincy,  297. 
Poinsenot,  516. 
Poinson,  516. 
Poisson,  516. 
Poivre,  484. 
Pomaréde,  633. 
Pomet,  624. 
Pommeraie  (La),  633. 
Pommeray,  633. 
Pommeraye  (La),  633. 
Pommerit,  634. 
Pomoy  (Le),  624. 
Pompejac,  295. 
Pompiac,  295. 
Pompignac,  367. 
Pompignan,  367. 
Pompogne,  367. 
Poncé,  295,  297. 
Poncey,  294,  297. 
Ponsan,  296. 
Ponson,  516. 
Pontailïer,  297. 
Pontiacq,  297. 
Pontoise,  153. 
Pontpoint,  366. 
Porquières,  612. 
Potangey,  297. 
Pouançay,  294. 
Pouancé,  294. 
Poznac,  484. 
Prangey,  299. 
Précey,  301. 
Précigné,  302. 
Précy,  300,  301. 
Prenois,  625. 
Prény,  624. 
Pressac,  301. 
Pressagny,  301,  302. 
Pressignac,  302. 


DES  NOMS  DE  LIEU  MODERNES. 


Pressigny,  301,  302. 
Pressy,  301. 
Prétieux,  301. 
Preuil,  541. 
Preyssac,  301. 
Prignes,  439. 
Pringv,  300. 
Prisse",  300. 
Prunay,  625. 
Prunet,  625. 
Prunoy,  625. 
Puy  (Le),  350. 
Puyloubier,  612. 

Quautilly,  369. 
Queiroles,  524. 
Queleimec,  176. 
Quellenec,  176. 
Queudes,  508. 
Quierzy,  212. 
Quincay,  156. 
Quiûcé,  156. 
Quincey,  1.56. 
Quincié.  156. 
Quiiicieu,  156. 
Quincieux,  156. 
Qiiincy,  15G. 
Quinsac,  156. 
Quinsaiiies,  157. 
Quinson,  516. 

QuintillargLies  {Sle-Croix  de), 
576. 

Radepont,  153. 
Kaviéres.  608. 
Regney,  393. 
Regiiy,  393. 
Reiguac,  393. 
Reignat,  393. 
Reigiiy,  393. 
Remagen,  532. 
Remeréville.  490. 
Reinilly.  304,  305. 
Résigny.  255.  256. 
Reuil,  531. 
Reiiilly,  304. 


Revigliasco,  589. 
Rigiiac,  393. 
Rigné,  393. 
Rigneux,  393. 
Rigny,  393. 
Riom,  179,  532. 
Roffey,  307. 
Roilly,  308. 
Romagiiat,  303,  304. 
Romagné,  304. 
Romagnieu,  304. 
Romagny,  304. 
RoDianéche,  554. 
Romeny,  303. 
Romignv,  304. 
Romillé,'  305. 
Romilly,  305. 
Rosey,  629. 
Rosières,  608. 
Rosoy,  629. 
Rotlenburg,  397. 
Rouen,  532. 

Rouergue,  569,  570,  n.  2 
Roiifflac,  305,  307. 
Rouffy,  307. 
Roiiillac,  308. 
Rouillé,  309. 
Rouilly,  307,  309. 
Roumigny,  303. 
Roumoulcs,  508. 
Houvray,  625. 
Rouvrois,  626. 
Rouvroy,  626. 
Hozières,  608. 
Rozoy,  629. 
Ruffec,  307. 
Ruffey,  305,  307. 
Rufflac,  306,  307. 
Ruffleu,  307. 
Ruffieux,  307. 
Ruillé.  309. 
Rully.  309. 
Kuniigny.  304. 
Rumilly,  305. 

Sacé,  311. 


1 


668 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 


Sacey,  311. 
Sache,  309. 
Sachy,  309. 
Sacy,  311. 
Sagy,  309. 

Saint- Apollinaire,  377. 
Saint-Bonnet,  179. 
Saint-Claude,  548. 
Saint-Denis,  xviii,  214. 
Saint-Eny,  461,  n.  2. 
Sainte-Sévère,  xi. 
Saint-Julien  présCazillac,  446. 
Saint-Maurice  en  Valais,  153, 

178. 
Saint-Ulphas,  193. 
Saintonge,  569. 
Salviac,  312. 
Sansac,  313. 
Sansais,  313. 
Sansan,  313. 
Sanssac,  313. 
Sanssat,  313. 
Santenay,  460. 
Sanxay,  313. 
Sanzay,  313. 
Sanzey,  313. 
Sauchay,  626. 
Sauchy,  626. 
Saugey,  312. 
Saujac,  312. 
Sauiat,  311. 
Saulcy,  626. 
Sausay,  326. 
Saussaye  (La),  626. 
Sausset,  626. 
Saussey,  626. 
Saussoy,  626. 
Sauviac,  312. 
Sauvian,  312. 
Sauviat,  312. 
Sauvignac,  312. 
Sauvigney,  312. 
Sauvigny,  312. 
Sauxillanges,  573. 
Savigna.  126. 
Savignac,  126,  322. 


Savignargues,  577. 
Savignat,  126. 
Savigné,  126. 
Savigneux,  126. 
Savigny,  126. 
Savy,  309. 
Schardag,  547. 
Séchy,  407. 
Secondigné,  314. 
Secondigny,  314. 
Segonzac,  314. 
Selvigny,  325. 
Seneuil,  532,  534. 
Senlis,  154. 
Sepian,  407. 
Sermizelles,  414. 
Sermaise,  413,  414. 
Sermoise,  413,  414. 
Servais,  323. 
Servières,  611. 
Séverac,  318. 
Sevignac,  126. 
Sevigny,  126. 
Sevrai,  318. 
Sevrey,  318. 
Sevron,  465. 
Sevry,  318. 
Sexey,  320. 
Shannon,  152. 
Silhac,  322. 
Sillé,  322. 
Silley,  322. 
Silli,  322. 
Silly,  322. 
Sincey,  316. 
Sinzig,  315. 
Sissy,  320. 
Sivry,  318,  465. 
Soissons,  422. 
Soisy,  327. 
Solesmes,  370. 
Sommeré,  169,  n.  9 
Sonnay,  172. 
Souillac,  328,  329. 
Souillaguet,  329. 
Souillé,  328,  329. 


r 


DES  NOMS  DE  LIEU  MODERNES. 


Souilly,  329. 
Soulaines,  429,  431. 
SouUiol,  526. 
Soulosse,  415. 
Souricières  (Les),  613. 
Spay,  407,  620. 
Spernec,  176. 
Spoj,  405,  620. 
Strasbourg,  492. 
Sully,  328,  329. 
Suse,  560. 

Talou,  561. 
Tamnach,  174. 
Tarascon,  601. 
Tauern,  547. 
Tauriac,  330. 
Taurignan,  333. 
Tauriuya,  333. 
Teil  (Le),  416. 
TeiUet,  627. 
Telle  (rivière),  56t. 
Tersac,  372. 
Terssac,  372. 
Terzé,  372. 
Theil,  416. 
Thil,  372. 
TMUy,  873. 
Thoiré,  330. 
Thoiry,  330. 
Thoré,  330. 
Thorey,  331. 
Tliorigné,  332. 
Thorigny,  332. 
Thoury,  330. 
Thuilley,  517. 
Thuré,  331. 
Thurey,  331. 
Thury,  331. 
Tilcuay,  627,  n.  3. 
Tillay,  373,  627. 
Tille,  373. 
Tillet,  372. 
Tilly.  627. 
Tonnerre,  xii. 
Toroé,  331. 


Torcieu,  331. 
Torciac,  331. 
Torcy,  331. 
Torigny,  333. 
Toniac,  503. 
Tornaco,  503. 
Tornago,  503. 
Tornano,  503. 
Tornay,  503. 
Torsac,  331. 
Torié,  331. 
Touche  (La),  499. 
Touille,  517. 
Touillon,  517. 
Toul,  504. 
Tour  (La),  503. 
Toureil,  543. 
Tourliac,  333. 
Tourly,  333. 
Touraac,  364. 
Tournai,  170. 
Tournay,  364,  503. 
Tournhac,  364. 
Tourniac,  364. 
Tournoel,  543. 
Tournoo,  Xll,  170. 
Tourny,  364,  503. 
Tours,  154. 
Tours-sur-Marne.  503. 
Toury,  331. 
Tremblay,  627. 
Tremblois,  627. 
Tremilly,  627. 
Tressé,  372. 
Trévise,  466. 
Trocy,  409. 
Troussey,  409. 
Troyes,  585. 
Turenne,  442. 
Turenno,  442,  n.  7. 
Turiano,  440,  n.  5. 
Turro,  441,  n.  12. 

Ury,  399. 

Usson,  II,  148,  360. 

Uzes,  565. 


670       INDEéL<  ALPHABÉTIQUE  DES 

Vairé,  339. 
Valençay,  527. 
Valenciennes,  527. 
Valençon,  527. 
ValensoUe,  526. 
Valentigney,  165. 
Valentigny,  165. 
Vallery,  145,  431. 
Valléry,  145. 
Vallières,  430,  431. 
Valmaillargues,  574. 
Vandenesse,  534,  583. 
Vandœuvre,  xiii. 
Vandré,  578. 
Vassel,  503. 
Vassy,  333. 
Vaudemont,  ix. 
Vaudreuil  (Le),  532. 
Vayrac,  339. 
Velleret,  xi. 
Venasque,  600. 
Vendargues,  577. 
Vendenesse,  534,  583. 
Venderesse,  583. 
Veiideuil,  532,  533. 
Vendeuvre,  xiii. 
Vendresse,  583. 
Venissieux,  417. 
Venizy,  417. 
Vennecy,  417. 
Venosc,  600. 
Vernay,  617,  630. 
Verneil,  543. 
Veniet  (Le),  617,  630. 
Verneuil,  543. 
Vernoil,  543. 
Vernois,  617,  630. 
Vernon,  544. 


NOMS  DE  LIEU  MODERNES. 

Vemouillet,  543. 
Verry,  339. 
Véry,  339. 
Vevey,  548. 
Vichy,  408. 
Vienne,  584. 
Vilhosc,  336,  596. 
Villenauxe,  585. 
Villesèque,  497. 
Villy,  336,  596. 
Vimeu,  561. 
Vincey,  337. 
Vincy,  336,  337. 
Vindecy,  337. 
Vindey,  338. 
Vinezas,  417. 
Viré,  454. 
Visiago,  417. 
Visille,  417. 
Visme  (rivière),  561. 
Vitrac,  335. 
Vitray,  335. 
Vitré,  335. 
Vitreux,  335. 
Vitrey,  336. 
Vitrieu,  597. 
Vitry,  334,  336. 
Volpilière,  613. 

Windisch,  534,  583. 
Winterthur,  xi. 

York,  137,  145,  169. 
Yssac,  148. 
Yverdun,  xi,  169. 
Yzernay,  499. 

Zarten,  601. 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 


NOMS  DE  PERSON> 


Abndiiu,  161. 

Accius,  188. 

Acer,  469. 

Acilias,  l!7. 

Aconia».  189. 

Aculenns,  3T7. 

Acolinns,  377. 

Acull»,  507. 

AcutiaDua,  571. 

AcuUaa,  190,  345,  571. 

Adhogias  Coinagi  f.,  166. 

Adbacilltis ,  princepa  des  AJIobroges , 


Aegus,  Allobroge,  reçoit  e 
des  champs  pris  sur  l'eQDi 
Asmilius,  127,  348. 


présent 


AfraD 


i,  394. 


13,  127.  349. 
Albanius,  155,  377. 
AlbareaiUH,  593. 
AlbiDius,  155,  191. 
AlbîDQs,  507. 

AlbiuB,  III,  iiii,  1S6.  190.  37S,  421,  593. 
AlbuduK,  457,  509,  571. 
AlfuniUG,  452. 
Airenus,  449,  453. 
Alflus,  449. 
Alliu^,  19Î,  509. 
Alstus,  193. 
AUbraadas,  5^5. 
Ambacthias,  443. 
Ambactua,  444,  445. 
Ambiliiu,  &6I. 

Ambiorix.  son  aediflcjum ,  91:  —  sa 
cilla,  95. 


AmbrosJna,  445,  446. 
AmeliQS,  347,  551,  561 
Ammonius,  432. 
Amonius,  432. 
Anaugen,  392. 
Andarta,  388. 
Andecamuloa,  355. 
Andecumborius,  147. 
AadiuB,  193. 
Anicins,  194,  345,  350. 
Annibal,  brtUe  les  vil 
Ansoatdna,  th. 
Antin»,  379,  457.  587. 
Antoaius,  128,  140,  35i 
AntuUus,  172. 
Apiiliua,  195. 
Aponiua,  196. 
Appalius,  195. 
AppU,  522  ;  Appius,  1 
AppODias,  195. 
Aqailiua,  431  ;  cf.  377. 
Aquiniua,  187. 
Aqulius,  377. 
Ardninna,  354. 
Argant,  493. 
Argantan,  492. 
Argantbael,  492. 
ArgauUoaaeo,  493. 
Argantloa,  492. 
Argaatmoaoe,  493. 
ArgaatOB,  (,  un. 
Argftt&D,  493. 
Argentillua,  494. 
Argeotos,  531.  533. 
ArgioUloB  BmertnliUj 


672 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 


Ariovistus,  ses  acquisitions  de  territoi- 
res. 20.  21,  22,  76.  106. 
Arquinius,  196. 
Arrenia,  452. 
Arrenus,  450.  452. 
Arrius.  161.  380.  450. 
Arsenius.  157. 
Arsinius,  157. 
Artaio  (Mercurio))  389. 
Artanius.  383. 
Artenna.  452.  456. 
Arthbiu.  385.  386. 
Àrthmael.  385,  386. 
Arthuuiu,  385.  386. 
Articnos,  382.  390.  399. 
Artidios.  383. 
Artilius,  196.  383. 
Artinus.  383. 
Artio  (déesse).  389. 
Artius.  159.  382.  452,  510. 
Arto,  495.  597. 
Artos,  XII,  XIII,  382.  598. 
Ascius,  352. 
Asellus,  467,  468. 
Asprenas.  462.  n.  3. 
Asprenus,  462. 
Asprius,  462. 
Astius,  352. 
Ateius,  402. 
Athanas,  490. 
Athanasios.  490. 
AtiUus,  128. 
Atinius,  197., 
Atisius,  592. 
Atteius,  402,  433. 
Attenius,  198,  453. 
Attonnius.  453. 
Attius,  453. 
Atto,  555. 
Auctus,  545. 
Aofidenus,  450. 
Aufidius.  450. 
Aulenus,  450. 
Attlius.  198.  450. 
Aura,  426. 
Aurelianus,  571. 
Aurelius,  128,  145.  433,  571. 
Aurelus,  426. 
Auria  (gens),  198. 
Auriknus,  426. 
Aurius,  426. 


Autbertus.  555. 
Autestius,  546. 
Auto,  546. 
Autonius.  546. 
Autus,  545. 
Avena.  450,  454. 
Avenia,  452. 
Avennius.  452,  518,  524. 
Aventia  (Dea).  510. 
Aventios,  510. 
Avenus.  450,  452,  454,  463. 
Avicantus,  538. 
Avitianus,  171,  n.  3. 
Avitius,  138.  171. 
Avitus,  145.  170. 
Avius.  450. 

Babidenus,  450. 

Babidius.  450. 

Babrenus.  450. 

Babrius,  450. 

Baddo ,  Yiii. 

Badegysilus,  yiii. 

Badigjsllus,  Tiii. 

Balbius,  199. 

Baldierus,  555. 

Baldus,  613. 

Balterius,  555. 

Barbarius,  165,  402,  510,  551. 

Barbanis ,  551. 

Bardos,  167,  168. 

Baro,  534,  535. 

Banis,  534. 

BasUius.  199. 

Bassinius,  200. 

Bassinus.  200. 

Bassius.  421,  427,  592. 

Bassus,  200. 

Batechisilus,  viii. 

Baudegisiius.  Bandeg/silus,  vui. 

Beccus.  342. 

Belenos.  Belenus.  179,  180.  343,  418. 

Beliniccus.  418. 

Belinos,  179.  180. 

Belisama  (Dea).  181 ,  394. 

Belismius,  394. 

Bellinus,  180,  563. 

Bemhard,  386. 

Bernrich,  386. 

Bero,  388. 

Bessius,  458. 


DES  NOMS  DE  PERSONNES. 


BisflQB,  450. 

Bisiue,  450. 

Biraitus,  roi  des  Arvtmi,  4t. 

Blaesus,  505. 

Blandim.  163. 

mukus,  S98. 

BUtbmac,  637. 

Blatina,  201. 

BlatUiu,  301. 

Bodnogeoiis,  391. 

BoDne,  469,  535. 

Borao,  556. 

BouUus,  458, 

Braccius,  35!,  524. 

Bracbtm,  I3T. 

BrsnnuE,  500.  59S. 

BraQDs,  598. 

Breoa,  496. 

Breaia,496. 

BrADiiiia,  496. 

Briccius,  599. 

Briccng,  598. 

BrigaatJK,  419. 

Brigit,  419. 

BriQDÎus,  496,  511. 

Britanina,  301. 

BrittiuB,  138. 

BrittuB,  536. 

BragiUrœ,  601. 

BucciDS,  203, 

BuciR,  302. 

Badieo,  392. 

Budnc,  177. 

BuUiue,  511,  573. 

Burina,  203. 

Burmu,  497. 

Burrhus.  Burrus,  349,  587. 

BurriuB,  587. 


CabADiu,  157. 
Gab«lliuB,  519. 
CadiuB,  437. 
Caeciliot,  138. 
Caepio,  406. 
Caepiui,  406. 
Caeiennias,  452. 
Caeaflniu,  450,  453, 
Caesius,  450. 
Caet«iiiiiaa,  453, 
OaeUa,  453. 
Cairoltu,  524, 


34G. 


Calcius,  204. 

Caieuius,  452. 

Oaleuus.  450,  452. 

Caletj  (deo  Hercurio],  428. 

Caletinns,  428. 

Caletin,  429. 

Caletius,  438. 

Calicius,  304. 

CalidenoB,  450. 

CalidiuB,  t!8,  450,  511. 

CaliDius,  205. 

Calias,  204,  450. 

CalliQJuB,  205. 

Callius.  304. 

Gains,  537,  551. 

CalveDUS,  450. 

Calvius,  305,  450. 

Camarus.  171. 

Gambarius,  20G,  511. 

Gambiua,  206,  599. 

Cambus,  599,  cf.  d.  13. 

Camilius,  307. 

Caniilliag,  163,  207,  208. 

CuDmariuB,  171,  513. 

Gtunmarus,  513. 

Gamponios,  138,  309. 

CampUins,  438. 

CampyliuB,  438. 

GauiulacQS,  177. 

Camulates,  356. 

Camolatius,  356. 

CamolatDa,  356. 

Gamaliaios,  356. 

Camulius,  307.  343,  353,  356,  419, 

Camnllius,  353. 

Camuloganus,  355,  391. 

Camulognata,  355, 

Camulos  (Mars),  353,  35i 

Camnlus,  355.  389,  419,  600. 

CanenuB,  450, 

Canius,  210,  450,  564. 

Cantaber,  485. 

CanUioB,  538. 

Cantilina,  376,  573,  582. 

Cantini,  5B3. 

Canto,  563. 

Gantooins,  583. 

CantoacnuB,  638. 

Canua,  471,  563,  5B1,  597, 

CapeUinB,  519. 

Cttper,  590. 

43 


674 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 


Capito,  473. 

Capita,  473. 

Gaprini,  435. 

Gaproniaa,  435. 

CapruB,  537. 

Carantiniut,  146. 

CaranUn».  146,  211.  458,  «U. 

Caranto,  566. 

Carantos,  z,  xiii,  211. 

Carantus»  167. 

Caratins*  213. 

Carbo,  474. 

CariBius,  212. 

Gamins,  489. 

Garvilius,  147. 

Gassianas,  572. 

Gassius,  128, 143,  567. 

Gasticus,   séquane,   prétondant  à 

royauté,  41. 
Gatalios,  594. 
Gatalus,  487,  500,  594. 
GataroniB  potestas,  600. 
GateniuB,  457. 
Gatgen,  392. 
Gathal,  488. 
Gatharus,  600. 
GatiuB,  213,  457,  466. 
Gatlinus,  470. 
GatoniuB,  203. 
CattauB  Bardi  f.,  166. 
Gattos,  vergobret  des  Lexovii,  45. 
GatucuB,  581. 
Gatuena,  581. 
GatuenuB,  581. 
Gatugnatos,  580. 
GatoUa,  xviii;  GatuUus,  470. 
GatulUaB,  XYiii,  214,  470. 
GatuluB,  470,  501. 
GatnmanduB,  580. 
Gatnmarus,  580. 
Gatarix,  580. 
Gatunis,  581. 
Gatus,  404,  567,  581. 
GatusanianuB,  474. 
GatusiuB,  405. 
GatUBO,  405.  581. 
Gatussa,  404,  474,  579,  580. 
GatuBsiuB,  403,  404. 
Gatuvolcus,  405,  580. 
GaucinuB,  539. 
Gaucius,  215,  357. 


GaudiiiB,  158. 

GanHoB,  216. 

Gausia,  216. 

GauUns,  215,  357. 

Gavannus,  475. 

GavarinoB,  sénon,  fîrèr»  de  Moritaagos, 

41,  114. 
GaylUoB,  573. 
GavUliuB,  573. 
Gayinniiis,  475. 
GayinuB,  475. 
CaTins,  458. 
Gednu,  497. 
GelainiuB,  573. 
GelsinuB,  573. 
GelBiuB,  217. 

GeltilluB,  arverne,  accusé  de  prétendre 
la         à  la  royauté,  41,  49,  n. 
GentulliuB,  353. 
Gésar  fait  partager  l'ayer  puMieus  de 

Gampanie,  24. 
Gevrennus,  465. 
CharisiuB,  212. 
GhildericuB,  zyii. 
GhramnuB,  388. 
Ghrestns,  540. 
Ghronia,  407. 
Ghunoaldus,  559. 

Gingetorix ,  princepê  des  TreveH,  46. 
Gipeilius,  217. 
GipiuB,  218, 406. 
GisiacuB,  183. 
Gisionia,  183. 
GisiuB,  183. 
GisBUB,  182. 
GiviliB,  ses  vt'Hae,  94. 
GlarianuB,  218. 
Glarius,  218. 
GlaudiuB,  x,  xm. 
Glavns,  590. 
Glementius,  218. 
Glepius,  220. 
Gleppius,  220. 
Glippiana,  220. 
GlodiuB,  421. 
Gocceins,  221. 
Goécius,  221. 
Goddacatus,  581. 
Gommius,  roi  des  A£re5alet,  37,  43, 

147,  221. 
GommiuB,  222. 


DES  NOMB  DG  PERBONNBB. 


Conunuiiii,  416. 

CondrmnuinB,  131. 

Congen,  39B. 

Connitu,  113,  n.  3. 

GoDitanc»  Chlor«,  106. 

ConTi«toliUTia,  vergabrM  dM  Aflduf, 

45,  49,  n.,  »,  ni. 
Corbii,  496. 
Corbo,  498,  MO. 
Corbni,  49B,  539,  540. 
Comeliu,  128,  358,  511 
Cosias,  4S9. 
Cottia*,  499. 
Cotto,  498. 
Cottes,  49B. 
Cotna,  éduen,  49,  n,,  50. 
Crispinini,  214. 
Crispins,  213. 
Critogiutiu,  arrerna  (diieours  de),  15, 

79. 
Crixsiiu,  2K. 
Croniiu,  224,  407. 
Cnaobelinos,  354. 
Cnpitm,  506,  508. 
Curina,  464,  594. 
Onrtini,  xti,  XIY,  225,  4S9,  512. 
CDrtaa,  540. 


Dacco,  xth. 

Dslmatias,  339. 

Daiuiotalicnoa,  390. 

Deccina,  228. 

Dscioa,  227,  408. 

DejotiTM,  SOI. 

Dergen,  391. 

Di«nnait,  631. 

Au>T^,  391. 

Dlvitiaena,  171. 

Diviw,  52a 

Divogentu,  391. 

Docciiu,  228. 

Docius,  228. 

Domarioa,  556. 

DomiDna,  477. 

Domitina,  128,  229. 

Domna,  417. 

DoBnoa,  xni. 

Donnotannu,  prineepi  dM  Helvlf ,  49. 

Dotitu,  228. 

Dottina,  228. 


Dnasiiu,  23t. 
Dranana,  167,  231. 
Dniaina,  231. 
Dmaaina,  231. 
Dnuoa,  167,  231. 
Dnitienoa,  390. 
Dubrlen,  392. 
Oabroc,  117, 
Dnnmacoa,  177. 

Dnmnorix,  prine^n  das  Aadul,  4 
45;  —  prend  i  tanna  lea  impAta,  It 

Btnirina,  168  ot  a.  10. 

Bboroa,  Gbnma,  xi,  xm,  137,  145, 1( 

499,  MO. 
Blnains,  530. 
Bnibondiua,  394. 
BniceniQS,  334,  o.  6. 
Enigenua,  394,  420. 
Enignaa,  394,  o.  6. 
Ennina,  128. 
Gporedorix,  prtncepë  dea  Aedui,  4 

49,  n. 
Eppina,  162. 
Eqnonina,  196. 
Estmartos,  408. 
Eiua,  419. 
E) aviva,  419. 
Exeengolatia,  M9. 

Fabina,  128,  438. 
Fadeniu,  450. 
Padlna,  4E0. 
Fidenina,  455. 
Fidentlna,  340. 
Fidios,  231,  4U. 
Find.  533,  584. 
Pinninianiu,  513. 
Fimûiuiu,  573. 
Finnins,  573. 
FUccins,  232. 
FU*ianua,  510. 
FlaTiaiaa,  135. 
FUTins,  234, 695. 
FUvuB,234. 
Florioi,  163,  iSI. 
Ftnuehia,  238. 
Frédéric,  533. 
Frïtliaraika,  533. 
Fritto,  533. 
Frlti,  533. 


DES  NOUS  DE  PERSONNES. 


Linus,  &41. 

LiscDB,  vergobret  dM  Aedui,  ib. 

Lilaviccus,  560. 

LitogeoM  (génitif),  39t. 

LiiQgenuB.  39t. 

Livius,  155.  410,  4tl. 

Loehamach,  fT7. 

Lodius,  552. 

Lollina,  263. 

LoppivB,  264. 

LoUus,  553. 

Loi  us,  552. 

Lucanius,  160,  365. 

LacciuB,  260,  363. 

Luceus,  363. 

Lucenias,  455. 

Lncilins,  t38,  361. 

Litcius,  259,  515. 

LacreiMi,  579. 

Lncretiua,  346. 

Lacterius,  147. 

Lugua  (dieu),  tS2. 

Latevus,  507. 

Macer,  4S0. 
Hocerini,  480. 
Hac-Mahon,  389,  398 
Haocena,  450. 
Maecius.  450. 
Haelius,  282. 
Magisia,  579. 
MsgDius,  265,  595. 


Maliu 


,  267. 


Mal li anus.  574. 
Malliua.  367.  574,  588. 
Mandubralius,  147. 


Hanliu 


128. 


Harcolliaaug,  574. 

MarceiiitiQS,  561. 

Marcellius,  128,  145,  369,  5CT.  574. 

UarcoUiis.  269.  501.  503. 

HarcBoa,  451,  454. 

Uarciiius,  128. 

Marcinus,  567. 

Uarcins,  271,365,  411,  451,515.567,  596. 

Marcus.  Kl,  iiv,  27t. 

Harianus,  575. 

Harilio,  483. 

HariUiD»,  483. 


Uarillns,  4SI. 

MariaiaBus,  575. 

MarlDins,  164,  377,  553,  575. 

Marinus,  553,  567. 

Mariua.  138,  375,  535,  567.  575. 

UarEQg,  485. 

Martinianua,  575. 

Martinius,  279,  553,  5T6. 

Martinus,  279.  553. 

Martius,  273,  515. 

Martyriua,  591. 

Uarullua,  481. 

Haras,  530. 

UaryUua,  481. 

Hasclus,  481. 

Hasculus,  481, 

Uasiula,  482. 

Uatrinius,  378,  n.  366. 

Matrius,  280,  525,  553. 

Hatronia,  366. 

Hattins,  161. 

Hatucciaa,  400. 

Matuceoi  {génitir),  3». 

MatuciUB,  400. 

Uataco,  400. 

MatDConiuB,  400. 

Matucus,  400. 

Hatagenia,  390. 

Hatugenoï,  390,  398. 

MatuDae,  388. 

Matuus,  400. 

Maurenlius,  282,  340. 

Maurinua,  282. 

Mauriua.  381,  465,  486,  554. 

Mauruiiis,  486. 

Haurns,  486,  554. 

Maximinus,  567. 

Maximiiia.  567. 

Hcdugeana,  392,  580. 

Moduna,  580, 

Medussa,  580. 


McUu 


2R3. 


,  178.  447,  526. 
Herula,  564. 
Mossenini.  452. 
H«EBonDs,  45t. 
Mcssinus,  567. 
MesiiuB,  451,  567. 
MotiuB,  424. 
Uettiua,  424. 
Hettus,  423. 


678 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 


MinaUus,  159. 
MoenicaptoB,  420. 
MoenioB,  420. 
Mogetiana,  420. 
Mogetias,  420. 
Mogonti  (daUf),  418. 
Mogontia  (dea),  419. 
Mogontinios,  418. 
MoUicius,  287. 
Montanius,  284. 
Montanus,  285. 

Moritasgus,'  roi  dos  Senones^  41. 
Mucina,  128,  515. 
Mnnatius,  128. 
tint,  286. 


Nammeius,  147. 
Nasellius,  374. 
Nasennius,  374,  453. 
Nasia,  374. 
Nasica,  374. 
Nasidins,  374. 
Naaiua,  453. 
Naso,  374. 
Naaonius,  374. 
Nassius,  374,  453,  n.  6. 
Nemetocena,  397. 
Nemetogena,  397. 
Neriu8,  x,  155,  346. 
Neita,  638. 
Nortius,  638. 
Nevet,  183. 
Nimet,  183. 
Nitiogenna,  397. 
Nonlus,  288. 
Noricus,  485. 
Novellius,  291. 
Novellus,  591. 
Novins,  289. 
Numerius,  128. 
NumisenuB,  451. 
Numisius,  451. 

Octavianus,  392. 
Octavius,  128. 
Odolricus,  557. 

Ollovico,  roi  dos  Nitiobroges,  40. 
Orbius,  158. 

Orgetorix,  son  procès,  41,  5C,  114; 
ses  clienteSf  57,  G5. 


Paccius,  164. 

Pache,  412. 

Pacins,  164. 

Papirius,  128. 

Papina,  411. 

Parthenns,  491. 

Paternius,  483. 

Paternns,  482. 

Patriciui,  341. 

Paucius,  293. 

Paulius,  138,  160. 

PauUius,  160. 

Petilioa,  548. 

Petiniiu ,  548. 

Petreius,  440. 

Petrinianns,  439. 

Petro,  364. 

Petronianus,  576. 

Petronitts,  128,  439,  576. 

Petros,  541. 

Phryne,  491. 

Pinarius,  588. 

Pinns,  542. 

Piper,  483. 

Piperas,  484. 

Piperculus,  483. 

Piperolus,  483. 

Pisiniiu,  157. 

Pisonius,  157. 

PiUus,  292. 

Plautioa,  589. 

Pompeins,  294,  440. 

Pomponenus,  451. 

Pomponius,  366,  367,  440,  451. 

Pontennins,  453. 

Pontilius,  297. 

Pontius,  295,  453,  516. 

Postumius.  298. 

Primius,  299. 

Priscinios,  302. 

Priscitts,  301,368. 

Priscus,  301. 

Propertius,  128. 

Prune,  491. 

Pudentius,  294. 

Pusinnus,  484. 

Quinctilius,  368,  369. 
Quinctius,  156,  516. 
Quintilianus,  576,  577. 
QuintUius,  369,  576. 


DES  NOMS  DE  PERSONNES. 


QnintiaoB,  567. 
Quintini,  156,  421,  ipl. 
Qttintua,  591. 

nagenoldng,  558. 

Ragnoraldiu,  558. 

R&inoldus,  558, 

RaucillQi,  allobrogo,  raçolt  eu  priiant 

des  champs  pris  sur  reonemi,  20. 
Rectugenna,  391. 
Romedini,  554. 
RamlgiDa,  554. 
Rona,  393. 
RAOuiDi ,  393,  430. 
Rheuna  (diea),  393. 
RhodanuB,  Rodanus,.  393,  a.  6. 
Ricciui,  160. 
Romanins,  303,  4ST,  554. 

Romanns,  4B7,  554,  S70. 

RomiliOR,  305. 

Romolins,  305. 

Romulns,  5U6,  508. 

Raffiaons,  307. 

Ruffiiu,  307. 

Rufiiu,  306. 

Roftis  Cootusuati  t..  166. 

RuUius,  308. 

RupîliuB,  589. 

Rnsciu,  541. 

SabiuianDR,  577. 

Sabinins,  126,  127.  577. 

SabinDS,  sa  uflla,  94;  —  126. 

Sabins,  309. 

Sacciariaa,  310. 

Saccini,  310,  320. 

Sacco,  310. 

SaccoDiut,  310. 

S  accus,  310. 

Sacrovir,  sa  cilla,  94.  96. 

SaleDiia,  451. 

Salius,  451. 

Salvidenns,  451. 

Balvidius,  451. 

Salvinius,  313. 

BalviUB,  31t. 

Samnius ,  516. 

Sanctius,  313. 


Sapiu 


,309. 


Sarenus,  451. 
Barios,  451. 


Satrenins,  452. 

Satreaus,  451,  452. 

Satriu»,  451. 

ScotioB,  412,  S26. 

Scottns,  413. 

B«cundiniiis,  314. 

B«cimdiiia,  314. 

Becnritis,  314. 

Bednlins,  pHncept  de*  Lemavic 

—  147,  148. 
Segolatios,  549. 
Senacbua,  177. 
Seotins,  313,  315,  460. 
Septimeana,  451. 
SepUmina,  4SI. 
Ssirerlna,  317,  465. 
Sereroa,  317. 
B«xtiD8,  319. 
SiliUB,  321. 
SilTaniuB ,  323. 
SilTanua,  567,  568. 
BilTiniua,  325,  577. 
SilTÎus,  324. 
Simpliciua,  326. 
Soeeina,  327. 
Sociua,  326. 
SoiemDiua,  328. 
SoUcina,  41S. 
Solimarins,  146,  160. 
Bolimarue,  530. 
Bolius,  328,  370,  415. 
Sollemala,  502. 
SolleniiiiuB.  328,  370,  429. 
SoliiuB,  328,  329,  526. 
SoUoa,  m. 
Bolo,  172. 
Boaiua,  327. 
Sparuns,  410. 

Spartacus  brûla  lea  oitUe,  93. 
Spinns,  542. 
Statius,  128. 
Bnmeli,  397,  n.  5. 
Suporius,  319. 

Tagassoa,  579. 

Tarracaa,  466. 

Tarviua,  466. 

Tarvos.  466. 

Tasgetius,  roi   de*  Carnuteê, 

par  César,  41.  147. 
Taoriciug,  331. 


680 


Taurinius,  332. 

Taurius,  330. 

Tertius,  37!. 

Tettenius,  453,  n.  8. 

TcttcnniuB,  453. 

Tettius,  453. 

Teutgarius,  558. 

Teutomatus,  roi  des  Nitiobroges, 

Theodebercthus.  145. 

Theudebercthus,  xviii. 

Tiberius,  159. 

Tilius,  416. 

Tillius,  373. 

Togia,  136. 

Totatigens,  390. 

Toutatis,  390. 

Toutissicnos,  390. 

Trebellenus,  451. 

Trebellius,  451. 

Trebius,  461. 

Tremollius,  628. 

Troccius,  408. 

Trouces,  408. 

Troucillus,  408. 

Tul!ius,  517. 

Tullus,  504. 

Turaius,  441. 

Turelius.  333,  440. 

Turcllius,  333,  440. 

Turcnne,  442. 

Turennus,  442.  463. 

Tureus,  441. 

Turillius,  333. 

Turius,  440.  441,  463. 

Turnus,  xii,  170,  503,  543. 

Turo,  441. 

Turrina,  442. 

Turrio,  442. 

Turrus,  441,  543. 

Tuscus,  485. 

Ulrich,  557. 
Umbrenus,  451. 
Umbrius,  451. 
Unoldus,  558. 
Unvaldus,  559. 
Urbanus,  506,  568. 
Uri  (filia),  399. 
Urogenius,  398. 
Urogcnonertus,  398. 
Ursius,  385. 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 

Ursus,  384,  385. 


Valentinius,  165. 

Valentius,  527. 

Valerius,  128,  145,  430. 

Valetiacus,  vergobret  des  Aedui,  45, 
177. 
40.       Varenius,  452. 

Varenus,  451,  452. 

Varius,  338,  421,  451. 

Vanis,  543. 

Vassetias,  334,  n.  i. 

Vassillius,  334,  n.  1,  504. 

Vassillus,  504. 

Vassius,  333. 

VasBorix,  504. 

Veladus,  xi. 

Velleius,  128. 

Vellocatus,  581. 

Vena,  600. 

Vendus,  337,  518,  589. 

Venerius,  578. 

Venna,  GOO. 

Vepus,  408. 

Vercingctorix  proclame  roi ,  42  ;  —nom- 
bre des  cavaliers  de  son  armée,  53. 
635,  636;  —  ses  clienles,  57.  65. 

Vernus,  544. 

Vortiscus,  pHnceps  des  RemU  47. 

Verucloetius,  147. 

Verus,  544. 

Voscnnius,  453. 

Vesenus,  451,  452. 

Vesius,  451. 

Vettenius,  452. 

Vettenus,  451,  452. 

Vettius,  451. 

Vibenna,  452. 

Vibius,  128,  452,  548. 

Vicrcna,  451. 

Vicrius,  451. 

Victorius,  334,  597. 

Villius,  336,  585,  596. 

Villo,  585. 

Villonitts.  585. 

Vilonius,  585. 

Vinda.  533,  584,  601. 

Vindauscius,  601. 

Vindicia,  416. 

Vindicius,  337. 

VindiUus,  534. 


DES  NOMS  DE  PERSONNES. 


681 


Vindius,  338,  534. 

Vindo,  584. 

Vindonius,  534,  583. 

Vindos,  XIII,  601. 

Vinicius,  416,  417. 

Vintius,  336. 

Vipius,  408. 

Virdumaros,  393. 

Viridomanis,  princeps  des  Aeduif  45, 

49,  n. 
Virins,  128. 
Virocantus,  539. 


Visellius,  417. 
Vitellius,  466. 
Vitulius,  466. 
Vitullius,  466. 
Vitus,  XI. 
Viviscus,  549,  n.  2. 
Vivius,  549. 
Volussena,  451,  452. 
Volussenius,  452. 
Volussius,  451. 

Woeduc,  177. 


NOTA 


Les  doctrines  énoncées  aux  chapitres  III,  V  et  VII  du 
livre  II  pourraient  donner  lieu  d'ajouter  quelques  noms  à 
cette  liste  alphabétique ,  en  fournissant  une  explication  nou- 
velle de  quelques-uns  des  noms  de  lieux  étudiés  dans  le 
chapitre  I"  du  même  livre.  En  effet,  Eporedia^  en  Italie, 
pourrait  être  une  notation  abrégée  pour  Eporedio-briga , 
«  château  d'Eporedios.  »  Eporedios  veut  dire  equorum  domi- 
tor,  a  dompteur  de  chevaux;  »  mais  il  ne  se  suit  point  de  là 
qu'Eporedia  fût  «  la  ville  des  bons  dompteurs  de  chevaux  » 
comme  on  pourrait  le  conclure  de  ce  que  dit  Pline,  livre  III, 
§123  (voyez  ci-dessus,  p.  153).  De  même,  Carbantia  (môme 
page)  peut  tenir  lieu  d'un  plus  ancien  Carbantio-briga  et 
signifier  «  forteresse  de  Carbantius,  »  nom  d'homme  dérivé 
de  *carbantonj  variante  gauloise  du  latin  carpentumy  «  char.  » 
Gobannium  équivaudrait  à  Gobannio-dunum  et  serait  la  «  forte- 
resse de  Gobannius,  »  etc. 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 


DBS 


FINALES  DE  NOMS  DE  LIEU  ANCIENS 


Cet  index  comprend  :  1*  les  seconds  termes  dos  noms  composés  ;  2*  les  suffixes 
tels  qu'ils  se  rencontrent  et  sans  distinction  des  éléments  dont  ils  sont  formés. 


-a  (nominatif  singulier) ,  505- 
507,  538,  564.  —  Voyez  -ia. 

-acus,  XVI,  134-139,  149,  150, 
167178,  467-499,  503,  512, 
541,583,598.—  Foj/ez-iacus. 

-anicus.  —  Voyez  -ianicus. 

-anus,  127,  129,  155,  638.  — 
Voyez  -ianus. 

-aretum,  632-634. 

-aria  (nominatif  féminin  sin- 
gulier, 605,  607,  609,  610, 
611,  612. 

-arias  (nominatif-accusatif  fé- 
minin pluriel),  602-614. 

-ariolas  (nominatif-accusatif  fé- 
minin pluriel),  522-523. 

-arius,  602,611. 

-as  (nominatif-accusatif  fémi- 
nin pluriel),  507,  508.  — 
Voyez  -ias. 

-asca,  -ascus,  246,  586-593, 
597.  —  Voyez  -iasca,  -iascus. 

-çissus,  579. 

-ate,  153,  179,  181. 

-atus?  —  Voyez  -ate. 

-ava,  562.  —  Voyez  -iavus. 

-avi,  562, 563.  —  Voyez  -iavus. 

-avus,  173,  560-564. 


Bona,  155  n.,  397,  533,  584, 

585. 
Bria.  —  Voyez  Briga. 
Briga,  xi,  xiii,  xiv,  xv,  154, 

167,169,186,382,383,441, 

536. 
Brigula,  154. 
Brium.  —  Voyez  Briga. 

Caium,  153. 

Cenna,  152,  397. 

Cortis,  VI,  VIII,  IX,  XIV,  xv. 

Curtis,  VIII.  —  Voyez  Cortis. 

Derum.  —  Voyez  Durum. 
Dobrum.  —  Voyez  Dubrum. 
Donnus,  Donus.  —  Voyez  Du- 

num. 
Dorum.  —  Voyez  Durum. 
Drum.  —  Voyez  Durum. 
Dubrum,  181. 
Dunum,  xi,  xii,  xiii,  xiv,  xv, 

XVI,  152,154,167,169,  181, 

383,   388,   389,   399,   400, 

479,  512,  601. 
Durum,  xi,  xii,  xiv,  xv,  148, 

153,  154,  182-186,  360,  412, 

546. 


684 


INDEX  ALPHABÉTIQUE 


-ena,  -enna,  463-466. 
-enacus ,  -ennacus ,  425 ,  426 , 

449-462. 
-enas,  464,  466. 
-enna,  442,  463-466. 
-ennio,  -ennionis,  518. 
-ennus,  464-465. 
-esca,  pour  isca,  551,  557. 
-escae,  pour  iscae,  553. 
-escus,  pour  iscus,  554-558. 
-essa,  579,  582.  —  Voyez  -issa. 
-etum,    177,   202,  373,   406, 

407,  615-634. 

-i  (génitif  singulier),  346. 

-i  (nominatif  pluriel),  398, 504, 
505. 

-ia  (nominatif  singulier  fémi- 
nin), 153,  347,  356,  360, 
367,  375-421,  443,  460, 
517. 

-iaca,  375,  381,  405.  —  Voyez 
-iacus. 

-iacus ,  X ,  XVI ,  xvxi ,  xviii , 
126,  127,  149-151,  155-165, 
169,  171,  173,  178,  187-343, 
345,348,349,350,351,352, 
356,  357,  358,  360,  361, 
362,  366,  367,  369,  370,  372, 
373,376,377.379,381,383, 
384,  385,  387,  393,  394,  400, 
403,405,  407,409,410,411, 
412,  413,  416,  417-421,  426, 
427,  429,  431,  432,  434, 
435-437,  438,  439,  440,  445, 
447,458,459,462,471,479, 
481.  482,  483,  489,  496, 
509,  516,  517,  518,  529, 
544, 563,  583, 592,  594,  595, 
596,  597,  598,  599,  627. 

-iae.  —  Voyez  -ias. 

-iana,  375,  381,402,  420,421, 
427. 

-ianicas  (nominatif-  accusatif 
pluriel),  570-578. 

-ianicus,  376,  569-578. 


-ianis  (datif- ablatif  pluriel), 
421,  422,  427. 

-ianus,  127-129,  139,  143, 
144, 145. 155, 157,  159,  162- 
165,  191,  205,  210,  211, 
223,  226.  230,  232,  233. 
235-237,  245,  247,  248,  252, 
257,  261,  266,  267.  270, 
275,276.278,286,312,313, 
322, 333,  336,  340,  345,  349, 
350,351,358,367,377,379, 
402, 407, 412,  437,  438,  593. 

-ias  (nominatif-accusatif  fémi- 
nin pluriel),  431-441. 

-iasca,  586-589. 

-iascus,  586-589. 

-iavus,  349,  561,  563. 

-ica,  -icum,  -icus,  151 ,  179, 
441,  510,  565-578. 

-iis  (ablatif  pluriel),  421-431. 

-inae,  153. 

-inio,  -inionis,  519. 

"iniiâ   442 

-io,  -iouis,  153,  358,  498,  509- 
520,  596. 

-iola  (nominatif  singulier  fé- 
minin), 526. 

-iolas  (nominatif-accusatif  fé- 
minin pluriel),  281, 522-526. 

-iolis  (datif-ablatif  pluriel),  524. 

-iolus,  524,  526. 

-iorum  (génitif  pluriel),  345. 

-ioscus,  211,  275,  336,  593, 
597. 

-is  (nominatif  singulier) ,  502. 

-is  (datif-ablatif  pluriel),  421- 
431,  505. 

-isca,  548,  553. 

-isco,  -isconis,  549,  550. 

-iscus,  547-559. 

-issa,  441,  534,  579,  581-585. 

-issus   579. 

-ium,'-ius,  153,  275,  346-374, 
405,  445-448. 

Late,  549. 


DES  FINALES  DB  NOMS  DE  LIEU  ANCIENS. 

Rate,  493. 
Ratum,  492,  493. 
Ratus,  492,  497. 
Rigum,  153. 
Ri  tu  m,  154. 


Magus,  X,  XI,  XII,  xrv,  xt,  xti, 
148.153,154,155,167,170, 
173  note,  17Ô,  182,  186, 
360,  494,  497,  531-534,  567. 

MoDS,  Ti,  IX,  XIV,  XV,  448. 


Nemetum,  154.  Sentum,  153. 

-num,  178.  —  Voyes  -onum.      -ssa,  -saos,  579-58S 


-o,  -onis,  153,  510,  600.  — 

Voyei  -io,  -ionia. 
-ogilum,  499,  538-546. 
-oialum,  528-546. 
-oilum,  528-546. 
-olium,  528-546. 
-olus,  521.  —  Voyez  -iolug. 
-ona,  600. 
-onum,  151,  599. 
-opéra,  xin,   Q,  7.  —  Voyes 

Briga. 
-orate,  153. 

-oruin  (génitif  pluriel),  345. 
-os  (accusatif  pluriel},  497. 
-ûscus,  597-600.  —  Voye»  -io3- 

cus  (1). 


-uceus,  364. 
-ucia,  364. 
-ucius,  363-365. 
-um  (nominatif  sin 

tre).  374,  504. 
-us  (nominatif  sin{ 

culin),  496,  500- 
-usca,  600. 
-usco,  -usconis,  6( 
-utius,  364. 

Vallis,  VI,  vm,  jx, 
-vices,  -vicenses,  ■ 
Villa,  VI,  IX,  XIV,  ; 
Villare,  vi,  vu,  nt. 


(1)  L'avenir  résoudra  la  queatio 
comme  ligures  les  aufflzes  -oscus 


TABLE  DES  MATIÈRES 


Préface. 


LIVRE  PREMIER. 

RECHERCHES    SUR    L'ORIGINE    DE  LA  PROPRIÉTÉ   FONCIÈRE 

EN  FRANCE. 

CHAPITRE  PREMIER. 

NOTIONS  GÉNÉRALES  SUR   L*HISTOIRE  DE  LA  PROPRIÉTÉ  FONCIÈRE 

EN   FRANGE. 

S  1".  —  Conquête  de  la  Gaule  par  les  peuples  gaulois.  •        3 
S  2.  —  Le  sol  conquis  est  réparti  entre  les  peuples  con- 
quérants; il  devient  propriété  d'Etat,  Taristocratie  se 
le  partage  ensuite  et  en  jouit  à  titre  précaire.  ...        4 
S  3.  —  La  conquête  romaine,  le  cadastre  d'Auguste,  ses 

effets  sur  la  propriété  foncière 6 

S  4.  —  Origine  de  la  commune  rurale  en  France.     .     .      10 
S  5.  —  La  propriété  foncière  en  France  d'Auguste  à 
nos  jours 12 

CHAPITRE  II. 

RAPPORT  DE  LA  PROPRIÉTÉ  FONCIÈRE  AVEC  LA  SOUVERAINETÉ 
DANS  LE  DROIT  PUBLIC  DE  ROME  ET  DES  GERMAINS.  iJager 
ptibliCUS  ET  LES  LOIS  AGRAIRES  A  ROME  AVANT  CÉSAR  ET  DE 
SON  TEMPS. 

S  !•'.  —  La  notion  de  la  propriété  foncière  dans  la 
France  moderne.  Autre  manière  de  concevoir  la  pro- 
priété foncière  soit  dans  l'ancienne  France,  soit  hors 
de  France  :  le  domaine  éminent,  le  domaine  utile.    .      15 


688  TABLE  DES  MATIÈRES. 

S  2.  —  Le  droit  de  souveraineté  comprend-il  le  droit  de 
propriété  ?  La  réponse  à  cette  question  en  droit  pu- 
blic, romain  et  germanique.  La  dediiio;  Arioviste  et 
les  Burgundes 17 

§  3.  —  Uorger  publicus  romain  et  les  lois  agraires. ...      22 

CHAPITRE  IIL 

la  gaule  barbabe  au  moment  de  sa  conquête  par  césab. 
inégalité  des  peuples  et  des  hommes. 

Section  première. 
Les  peuples,  distingués  en  principes  et  en  clientes,    .     .      28 

Section  IL 

Les  hommes 40 

A.  —  Rois 40 

B.  —  Magistrats  et  principes 43 

C.  —  Sénats 50 

D.  —  Equités 52 

E.  —  Clientes 54 

P.  —  La  féodalité  française  repose  sur  le  principe 

de  la  propriété  individuelle  du  sol,  et  ce  principe 

n'existe  pas  chez  les  Celtes 59 

G.  —  La  féodalité  celtique  dans  Tantiquité.  ...  62 

CHAPITRE  IV. 

l'agriculture  et  les  lieux  habités  dans  la  gaule  barbare 
au  moment  de  sa  conquête  par  césar. 

S  !•'.— L'agriculture 68 

§  2.  —  Les  lieux  habités 77 

A.  —  Vici 77 

B.  —  Oppida 79 

C.  —Aedificia.. 90 

CHAPITRE  V. 

PREUVE  DU  CARACTÈRE  PRÉCAIRE   DE   LA  POSSESSION   DU  SOL  PAR 


TABLE  DES  MATIÈRES.  689 

LES   PARTICULIERS   DANS    LA    GAULE    BARBARE,    AU  MOMENT  OU 
CÉSAR  EN  FIT  LA  CONQUÊTE  (58-51  av.  J.-C.)- 

SI*'.  —  Position  de  la  question 99 

S  2.  —  La  propriété  foncière  individuelle  n'existait  pas 
encore  chez  les  Gaulois  d'Italie  à  la  fin  du  troisième 
siècle  avant  Jésus-Christ 100 

S  3.  —  La  propriété  foncière  individuelle  est  inconci- 
liable avec  rémigration  des  Helvetii  Tan  58  avant 
Jésus-Christ 102 

S  4.  —  La  propriété  foncière  individuelle  est  inconci- 
liable avec  rétablissement  des  Boii  dans  le  territoire 
des  Aedui 104 

S  5.  —  L'absence  de  propriété  foncière  individuelle  en 
Gaule  explique  le  système  particulier  de  communauté 
entre  époux  que  César  constate  chez  les  Gaulois. .     .     108 

S  6.  —  Objection  tirée  d'un  passage  de  César  où  il  est 
question  de  la  juridiction  des  druides 111 

S  7.  —  Conclusion.  Uager  pvblicus  romain  et  Yager 
publicus  gaulois.  La  propriété  bâtie  en  Gaule  pendant 
la  guerre  de  la  conquête 118 

LIVRE  IL 

RECHERCHES  SUR  L'ORIGINE   DES  NOMS  DE  UEUX   HABITÉS 

EN   FRANCE. 

CHAPITRE  PREMIER. 

ORIGINE  DES  NOMS  DE  LIEUX  HABITÉS  EN  FRANCE.  —  PRINCIPES 
GÉNÉRAUX  APPUYÉS  PRINCIPALEMENT  SUR  DES  TEXTES  CONTEM- 
PORAINS DE  LA  RÉPUBLIQUE  ET  DE   L'EMPIRE  ROMAIN. 

§  i*'.  —  La  propriété  du  sol  devient  individuelle.  Les 
fa/ndi  dans  la  Gaule  romaine.  Le  pandas  Sabiniacus,  .     125 

§  2.  —  Les  noms  de  fundi  formés  à  l'aide  du  suffixe 
latin  -ârms  dans  la  «  Table  alimentaire  de  Veleia.  »     127 

§  3.  —  Les  noms  d'hommes  en  Gaule  après  la  conquête.     129 

§  4.  —  Les  noms  de  fundi  en  -dnus  dans  la  Table  ali- 

44 


690  TABLE  DES  MATIÈRES. 

mentaire  auxquels  correspondent  des  noms  de  fundi 
gallo-romains  dérivés  des  mêmes  gentilices,  mais  avec 
le  suffixe  gaulois  -dcus 134 

§5.  —  Les  noms  de  fundi  dérivés  de  gentilices  romains 
chez  les  populations  celtiques  sont  postérieurs  à  la 
conquête  romaine 146 

S  6.  —  Quatre  espèces  de  noms  de  lieux  habités  en 
Gaule  chez  César 151 

§7.  —  Cinq  espèces  de  noms  de  lieux  habités  dans  les 
pays  celtiques  suivant  les  documents  du  temps  de 
Tempire  romain 152 

S  8.  —  Le  suffixe  -dci«  placé  à  la  suite  de  gentilices  ro- 
mains pour  former  des  noms  de  lieux  dans  les  do- 
cuments du  temps  de  l'empire  romain 156 

§  9.  —  Comparaison  entre  les  noms  de  lieux  formés  en 
France  à  Taide  du  suffixe  -dciw  et  quelques  noms  de 
lieux  en  -dnus  dans  diverses  parties  de  l'empire  ro- 
main  162 

§  10.  —  Noms  de  fundi  formés  à  l'aide  de  surnoms  dans 
les  pays  celtiques  au  temps  de  l'empire  romain.     .    .    166 

§11.  —  Examen  de  la  question  de  savoir  s'il  y  a  eu  en 
France  des  noms  de  lieux  en  -dous  dérivés  de  noms 
communs 173 

S  12.  —  Etude  sur  divers  noms  de  lieu  d'origine  celtique 
qui  n'offrent  pas  le  suffixe  -âcus  et  qui  apparaissent 
pour  la  première  fois  dans  les  documents  du  moyen 
âge 178 

CHAPITRE  IL 

EXEMPLES  EN  FRANGE,  AU  MOYEN  AGE,  DE  NOMS  DE  fundt  FOBMÉS 
PLUS  ANCIENNEMENT  A  l'aIDE  DE  GENTILICES  ROMAINS  EN  -iUS 
ET  DU  SUFFIXE  -OCtW. 

Achiniagas,  187.  Alsiacus,  193. 

Aciacus,  187.  Andiaeus,  193. 

Aconiaca,  189.  Anisiacus,  193. 

Acutiacns,  189.  Appiaeus,  194. 

Albiacus,  190.  Appiliaeos,  195. 

Albiniacus,  191.  Apponiacns,  195. 

Aliacus,  192.  Archmiacos»  196. 


TABLE  DES  MATIÈRES. 


691 


ArtJUacus,  196. 
Attiniacus,  197. 
Auliaeus,  198. 
Auriaens,  198. 
Balbiacns,  198. 
Basiliaca,  199. 
Bmsainiaens,  200. 
Blaeiacns,  200. 
Britixmiacns,  201. 
Bnciacus,  202. 
Bnriaca,  203. 
Cadoniacos,  203. 
Galciaciu,  204. 
Caliace,  204. 
Galiniacus,  205. 
Calviacos,  205. 
Cambariacns,  206. 
Gambiacus,  206. 
Camiliacus,  207. 
Camilliacus,  207. 
Gampaniacus,  208. 
GaniacuB,  210. 
Garanciagus,  211. 
Garisiacus,  212. 
Garraciacus,  213. 
Gatiacus,  213. 
Gatuiliacns,  214. 
CaQciacus,  215. 
Gauliaca,  216. 
Geltiaeus,  217. 
GipUlaous,  217. 
Clamenciaciis,  218. 
Clariaeixs,  218. 
Gllppiaens,  218. 
Gocciacua,  7SQ. 
Comiacus,  22t. 
Grisciacns,  222, 
Criapiacns,  22S. 
Grispiniacus,  223. 
Croniacns,  224. 
Gurciacusy  225. 
Gusiacos,  226. 
Ditiagus,  227. 
Dociacus,  228. 
Domitiacus,  229. 
Drusciacns,  230. 
Fidiacua,  231. 
Figiacus,  232. 
Flaciacus,  232. 
Flaviagus,  233. 
FlaTiniacus,  235. 


Ploriacus,  236. 
Fusciacus,  237. 
Galiacns,  238. 
Oaudiacus,  239. 
Geniciacus,  241. 
Qentiliacus,  242. 
Germaniacus,  242. 
Gessiacus,  244. 
Qraciacus,  245. 
Graniacensis  finis,  247. 
[H]ermoniace»  248. 
[H]elariacus,  249. 
Jocondiacns,  250. 
Juvenciacum  palaciom,  251. 
Juviniacus,  252. 
Liziniacus,  254. 
Liliacua,  257. 
Lipidiacns,  258. 
Luciacus,  258. 
Luciliacus,  261. 
Luliacus,  262. 
Lupiacns,  263. 
Magniacus,  264. 
Malliacus,  266. 
Manciacus,  268. 
Marceliiacus,  268. 
MarciacuB,  270. 
Mariacus,  275. 
Hariniacns,  276. 
Martiniacos,  278. 
Matriacus,  280. 
Mauriacua,  281. 
Melliacus,  282. 
Montiniacus,  284. 
Musciacae,  286. 
Noniacus,  287. 
Noviacum  castmm,  288. 
Noyilliacus,  290. 
Piciacua,  292. 
Pociacas,  293. 
Podentiacus,  293. 
Pompeiacum  castram,  294. 
Ponciacns,  295. 
PonUliacQS,  297. 
Posthimiagua,  297. 
Primiacus,  299. 
Prisciacos,  300. 
Prisciniacua,  301. 
Romaniacos,  303. 
Romiliacus,  304. 
Rufiacus,  305. 


692  TABLE  DES  MATIÈRES. 

RnlUacus,  307.  Simplicciacns,  325. 

Sabiacns,  309.  Soclacus,  326. 

Saciagus,  309.  SoUemniacus,  327. 

SalviacuB,  311.  Soliacus,  328. 

Salviniacus,  312.  Tauriacus,  329. 

Sansiacus,  313.  Tauricciaens,  331. 

Secundiaca,  313.  Tauriniacns,  332. 

Securiacus,  314.  Toriliacus,  333. 

Sentiacus,  315.  Vassiacus,  333. 

Seyeriacos,  316.  VictoriaciiB,  334. 

Sexciacus,  319.  Villiacus,  336. 

Siliacas,  321.  Vinciacus,  336. 

Silvaniacus,  322.  Vindiciacus,  337. 

SilyiaguB,  323.  Wariacns,  338. 
SilviniacuB,  325. 

APPENDICE  A. 

Noms  de  lieux  en  -acus  dérivés  de  cognomina  latins  en  -ius. 

Dalmatiacus,  339.  Maurentiacus,  340. 

Fidentiacus,  340.  Patriciacus,  341. 

Appendice  B. 
Noms  de  lieux  en  -acus  dérivés  de  gentilices  perdus. 

Becciacus,  342.  Beliniacus,  343. 

CHAPITRE  III. 

exemples  ,   AU   MOYEN   AGE  ,    DE    NOMS    DE    fundi    IDENTIQUES  A 

DES   GENTITIGES  ROMAINS    EN   -iUS. 

S  !•'.  —  Généralités.  Gentilices  romains  en  -it**  em- 
ployés substantivement  au  génitif,  avec  un  sens  géo- 
graphique ,  sous  l'empire  romain  et  au  moyen  âge  ; 
gentilices  en  -ius  employés  adjectivement ,  avec  \m 
sens  géographique ,  dans  les  textes  contemporains  de 
l'empire  romain 344 

S  2.  —  Gentilices  romains  en  -ius  employés  adjective- 
ment au  masculin  singulier,  avec  sens  géographique, 
dans  les  textes  du  moyen  âge. 347 

Aemilius,  347.  Ascius,  351. 

Afï'anius,  349.  Braccins,  352. 

AniciuSy  349.  Centulins,  353. 

Antonius,  350.  Gamulius,  353. 


TABLE  DES  MATifiRES. 


693 


Gaucinst  357. 
Comarius,  357. 
Cornélius,  357. 
Grussins,  358. 
IcciaSf  359. 
Ingenius,  361. 
Lancius,  361. 
Lucius,  362. 
LncaniuB,  365. 
Marcius,  365. 


Matronius,  365. 
Pomponius,  366. 
Priscius,  367. 
Quintilius,  368. 
Sollemnius,  369. 
Solins,  370. 
Tertius,  370. 
Ta[l]iu8,  372. 
Nasium,  373. 


5  3.  —  Gentilices  romains  en  -ius  employés  adjective- 
ment avec  un  sens  géographique  au  féminin  singu- 
lier  


375 


CanUUa,  375. 

Aculia»  376. 

Albania,  377. 

Albia,  378. 

Antia,  378. 

Ar[r]ia,  379. 

Artia,  381. 

1*  Etymologie  du  nom  de  lieu  Artia; 
c'est  un  gentilice  dérive  d'Artos, 
c  Ours,  »  382. 

2*  De  ridée  religieuse  associée  au  mot 
Artos.  Les  animaux  divins,  387. 

3*  Noms  d'hommes  composés  dont  le 
second  terme  est  genos  :  Matugenos, 
Arti-genos,  etc.,  389. 

4*  Les  noms  propres  d'hommes  iden- 
tiques à  ceux  d'animaux  divinisés  : 
Uro-s,  Branno-s,  Matu-s  et  leurs  dé- 
rivés, 399. 

5*  Objection  tirée  de  la  phonétique  : 


ar  notation  dV  voyelle,  401. 
Atteia,  401. 
Barbaria,  402. 
Catussia,  403. 
Cepia,  406. 
Gronia,  407. 
Decia,  407. 
Gracilia,  409. 
Hispania,  410. 
Livia,  410. 
Marcia,  411. 
Papia,  411. 
Scotia,  412. 
Solia,  415. 
Solicia,  415. 
Tilia.  416. 
Vindicia,  416. 
Vinicia,  416. 
Visellia,  417. 

Magontia,  Moguntiacus,  417. 


S  4.  —  Gentilices  romains  en  -ius  employés  adjective- 
ment avec  sens  géographique  au  datif-ablatif  pluriel 
en  -m  ou  en  -is  =  -Us 421 


Mettis,  423. 

Auriis,  426. 
Bassiis,  427. 


Caletiis,  427. 
Sollemniis,  429. 
Valeriis,  429. 


§5.  —  Gentilices  romains  en  -ius  employés  adjective- 
ment avec  sens  géographique  au  nominatif-accusatif 
pluriel  féminin 431 


Ammonias,  431. 
At[t]eias,  433. 


Aurelias,  433. 
Barbarias,  434. 


694  TABLE  DEB  MATIÈRES. 

Gaprias,  434.  Licinias,  439. 

Gadias,  437.  Petrinias,  439. 

CampiliaSp  438.  Torrias,  440. 
Fabias,  438. 

APPENDICE.* —  Les  cognomina  en  -iiw  employés  adjecti- 
yement  comme  noms  de  lieu 443 

Ambactia,  443.  Mercnrit»,  446. 

Ambroaios,  445. 

CHAPITRE  IV. 

EXEMPLES,  AU   MOYEN   AGE,    DE   NOMS  DE  LIEUX  EN   --OCUS  DÉRI- 
VÉS ANTÉRIEUREMENT  DE  GENTILICES  ROMAINS  EN  -etlUS. 

§  1*'.  —  Les  gentilices  romains  en  -enus 449 

S  2.  —  Les  noms  de  lieux  en  -acus  dérivés  de  gentilices 
romains  en  -enus  qui  se  rencontrent  dans  les  inscrip- 
tions ou  dont  on  trouve  un  dérivé  dans  les  inscrip- 
tions; 1"  section,  caractérisée  par  le  doublement  de 
Vn  du  suJQ^e  -enus 453 

Ayennacns,  453.  Lncennacas,  455. 

Marceimacas,  454.  Fidennaciia,  455. 

S  3.  —  Les  noms  de  lieux  eu  -acus ,  dérivés  de  gentili- 
ces romains  en  -enus,  qui  se  rencontrent  dans  les  ins- 
criptions ou  dont  on  trouve  un  dérivé  dans  les  ins- 
criptions ;  2*  section,  caractérisée  par  Vn  non  doublée 
du  suffixe  -enus 456 

Artenacus,  456.  Catenacensis  yicaria,  456. 

S  4.  —  Les  noms  de  lieux  en  -ocils,  dérivés  de  gentilices 
romains  en  -enus^  dont  les  inscriptions  n'ont  conservé 
d'autre  trace  que  le  gentilice  en  -ius  correspondant.  .    457 

Albucennacus,  457.  Coaenacus,  459. 

Antennacus,  457.  Frontennacus,  459. 

Bessenacensis  ager«  457.  Lentennacns,  460. 

BoutenachuSy  458.  8enteanacas,  460. 

Carendenacus,  458.  Trebennacus,  461. 
Cavexmacus,  458.  Nertannacus,  461. 

Gortennacus,  458.  Aspemacos,  462. 


TABLE  DES  MATIËRB8.  695 

CHAPITRE  V. 

EXEMPLES,    AU    MOYEN    AGE,    DE    NOMS    DE   LIEU    IDENTIQUES    A 

DES   GENTILIGES   ROMAINS   EN  -eniU. 

S  !•'.  —  Noms  de  lieux  identiques  à  des  gentilices  ro- 
mains en  -enus  précédemment  étudiés 463 

Avenna,  463.  Cavenas,  464. 

Tarenna,  463. 

§2.  —  Noms  de  lieux  identiques  à  des  gentilices  ro- 
mains en  -enus  dont  on  ne  connaît  que  les  parallèles 
en  'ius 464 

Â.  —  Sont  masculins  singuliers  : 

Curennus,  464.  Severennns,  465. 

Maurennus,  464. 

B.  —  Sont  féminins  singuliers  les  suivants  : 

Tarvenna,  465.  Vitulena,  466. 

C.  —  Est  au  féminin  pluriel  : 

Catenas,  466. 

CHAPITRE  VI. 

EXEMPLES,    AU   MOYEN   AGE,    DE  NOMS   DE    LIEUX  EN   -OCt»   DÉRI- 
VÉS   ANTÉRIEUREMENT   DE  COgnomina  ROMAINS. 

Si*'.  —  Cognomina  romains  d'origine  latine 467 

Asellacus,  467.  Dominacus,  477. 

Aceracus,  468.  Liberacus,  478. 

Bonacus,  469.  Maceracus,  479. 

Gatulacns,  470.  Masculacus,  481. 

Canacus,  471.  Mairilacns,  481. 

Capitônacus,  472.  Massolacus,  482. 

Carbonacus,  474.  Paternacus,  482. 

Catusagus,  474.  Piperacus,  483. 

Cavannacns,  474.  Pusinaacus,  484. 
Communacus,  475. 

§  2.  —  Cognomina  romains  avec  sens  ethnographique.  .     484 

Maurulacae,  486.  Britannacus,  488. 

Romanacus,  486.  Camacus,  488. 

Gatalacus,  487.  Rutulacae,  489. 


696  TABLE  DES  MATIÈRES. 

§  3.  —  Cognomina  romains  d'origine  grecque 489 

Athanacus,  490.  Pninacus,  491. 

Hermeracus,  490.  Parthenacus,  491. 

§  4.  —  Cognomina  romains  d'origine  barbare 491 

Argentacus,  491.  Corbonacas,  497. 

Artonacus,  494.  Cottonacus,  498. 

Brennacus,  495.  Ebumlacos,  499. 

Bumacus,  496.  Isamacus,  499. 

Cedracus,  497.  Sedegenacas,  499. 

CHAPITRE  VII. 

EXEMPLES  ,    AU   MOYEN    AGE  ,    DE    NOMS   DE   LIEUX    IDENTIQUES    A 

DES  cognomina  romains. 

§  1®'  —  Cognomina  romains  employés  au  masculin  sin- 
gulier  500 

Brannus,  500.  Marcus,  502. 

Catalus,  500.  SoUemnis,  502. 

Catulus,  500.  Turnus,  503. 

Celtus,  501.  Vassillus,  503. 
Marcollus,  501.  Tullum,  504. 

§  2.  —  Cognomina  romains  employés  au  masculin  pluriel.    504 

Artigoni,  504.  Blaesi,  504. 

§3.  —  Cognomina  employés  au  féminin  singulier.    .     .    505 

Cupita,  505.  Urbana,  506. 

Romula,  500.  Lutova,  507. 

§  4.  —  Cognomina  employés  au  féminin  pluriel.  .     .     .    507 

Acullas,  507.  Cupitas,  508. 

Albinas,  507.  Romulas,  508. 

CHAPITRE  VIIÏ. 

EXEMPLES,  AU  MOYEN  AGE,  DE  NOMS  DE  LIEUX  EN  -i-O  ^  -i-OUiS  ^ 
FORMÉS  ANTKUlKUnEMENT  A.  L'aIDE  DE  GENTILICES  EN  -iUS  ET 
DU   SUFFIXE   -0,    0?lis, 

Albucio,  509.  Avençon,  510. 

Aillon,  509.  Barbarie,  510. 

Arcio,  509.  Brignon,  510. 


TABLC  DBS  MATIËRfiB.  087 

Bullio,  511.  Lenio,  514. 

Caldio,  511.  Lucio,  515. 

Cambrio,  511.  Marcio,  515. 

Cornelio,  512.  Mucio,  515. 

Curtio,  512.  Poncio,  516. 

Gaillon,  513.  Quinctio,  516. 

Oentio,-513.  Samnio,  516. 

Grinio,  513.  TuUio,  517. 

Lantio,  513.  Vencio,  518. 
Latio,  514. 

Appendice.  —  Noms  de  lieux  en  -io,  -ionis  dérivés  de 
gentilices  en  -ius  au  moyen  du  suffixe  -o,  -oniSj  dans 
les  documents  contemporains  de  l'empire  romain.    .    518 

Avennio,  518.  Elusio,  520. 

Gabellio,  519.  *  Arausio»  520. 

Divio,  520. 

CHAPITRE  IX. 

EXEMPLES ,  AU  MOYEN  AGE  ,  DE  NOMS  DE  LIEUX  QUI  OFFRENT  LA 
DÉSINENCE  'OluS ,  ET  QUI  ONT  ÉTÉ  FORMÉS  EN  DÉVELOPPANT , 
A  l'aide  du  SUFFIXE  /O-  UN  THÈME  NOMINAL  EN  -0-,  -fo-,  -iO-. 

§  l•^  —  Le  mot  dont  dérive  le  nom  de  lieu  en  -olus  est 
un  nom  commun 521 

Fomolus,  521.  Juncariolas,  522. 

Apiar[i]ola8,  522.  Linariolas,  523. 

Favariolas,  522.  Nogariolae,  523. 

§  2.  —  Le  mot  dont  dérive  le  nom  de  lieu  en  -o/iw  est 
un  nom  propre,  —  gentilice  ou  cogriomeny  —  en  -ius.    524 

Aviniolensis  vallis,  524.  Matriolas,  525. 

Braciolis,  524.  Mercuriolus,  526. 

Carenciolas,  524.  Scotiolae,  526. 

Gairolus,  524.  Soliolus,  526. 

Graniolus,  524.  Valentiola,  526. 
Mariolas,  525. 

CHAPITRE  X. 

DE  LA  DÉSINENCE  -0-fo/tim ,  ^o^ialum^  -o-giolum ,  -o-gilum^ 
•^-glum ,   -o-t7wm ,   -o-lium ,  en  français  moderne  -euil , 

DIALECTALEMENT  -eil, 

S  1".  —  Les  noms  de  lieu  en  o-iolum  nous  offrent  la 
forme  familière,  en  bas  latin,  de  noms  composés  gau* 


698  TABLE  DES  MATIÈRES. 

lois  dont  les  deux  termes  étaient  :  1^  ordinairement 
un  cognomen  d'origine  gauloise  ou  latine;  2*  toujours 
le  nom  commun  gaulois  magus  «  champ  ;  »  exemples 
de  noms  en  o-iolum^  dont  on  a  trouvé  la  notation 
primitive  et  solennelle  en  -magus 528 

Maro-ialum,  529.  Rioilum. 

Argentoiolum,  531.  Rodolium,  532. 

Gassinoiolum,  531.  Senogalum,  532. 

Noviolium,  531.  Vendoilo,  532. 
fiadoUuiQ,  531. 

§  2.  —  Liste  alphabétique  de  noms  de  lieu  en  -o-iolum 
pour  lesquels  on  n*a  pas  trouvé  de  primitif  en  magus, 
bien  que  ce  primitif  en  magus  ait  dû  exister,  et  qui 
tous  dérivent  de  cognomina 534 

Barolia,  534.  Germolio,  540. 

Bonogilum,  535.  Linogile,  541. 

Bragogilo,  536.  Petroiium,  541. 

Britogilum,  536.  Pinolio,  542. 

Cabrogilo,  537.  Ruscoialum,  542. 

Caloili  villa,  537.  Spinogilum,  542. 

Cantogilum,  538.  Tornolii,  543. 

Caucinogilum,  539.  TuroUium,  543. 

Cavenoilus,  539.  Varoiol,  543 

Corbolius,  539.  Vernolium,  543. 

Gurtogilo,  540.  Verolias,  544. 
Ghristoilo,  540.  Altogilam,  545. 

Ebrolio,  540. 

CHAPITRE  XL 

DU    SUFFIXE    'iSCUS. 

§  !•'.  —  Le  suflBxe  gaulois  -isco-s 547 

§  2.  —  Noms  de  lieux  dérivés  de  gentilices  romains  à 
Taide  des  suffixes  gaulois  -isco-s  et  -isco^  -onis  dans  les 
textes  du  temps  de  l'empire  romain 548 

Petenisca,  548.  Latisco,  -onis,  549. 

Vibiscus,  548.  Lavisco,  -onis,  549. 

§  3.  —  Noms  de  lieux  en  -iscus  d'origine  romaine  dans 
les  documents  du  moyen  âge 550 

Amelesca,  550.  Martinesque,  553. 

Barbarcsca,  551.  Matriscus,  553. 

Caliscus,  551.  Maurisca,  553. 

Galiscus,  552.  Ramigescus,  554. 

Lodiscus,  552.  Romanisca,  554. 
Marinescae,  553. 


TABLE  DES  MATIÈRES.  699 

5  4,  —  Noms  de  lieu  en  -iscm  d'origine  germanique.    .    554 

Attaniscus,  554.  Frotgaresc,  556. 

Aulbrandiscus,  555.  Qodinesca,  557. 

Autbertescus,  555.  Odalrigescus,  557. 

Belteirescus,  555.  Rainaldescus,  557. 

Bomonesca,  556.  Teudgariescus,  558. 

Domariescoa,  556.  Unaldescus,  558. 
EldegrimiscuB,  556. 

CHAPITRE  XII. 

LE    SUFFIXE   GAULOIS    --aVO-S   DANS   LES   NOMS    DE    LIEU    PENDANT 

l'antiquité  ET   AU  MOYEN  AGE. 

§  !•'.  —  Le  sufiBxe  gaulois  -avosy  noté  -avus  dans  les 
textes  latins 560 

§  2.  —  Le  suffixe  -avtis  employé  pour  former  des  noms 
de  lieu  dérivés  de  gentilices  romains 561 

Ambiiiavus,  561.  Ameliavus,  561. 

S  3.  —  Le  sufiBxe  -avus  employé  pour  former  des  noms 
de  lieu  dérivés  de  cognomina  romains 562 

Antonnava,  562.  Ganavi,  563. 

Andelavus,  562.  Merlaus,  564. 

Bellenavus,  563. 

CHAPITRE  XIIL 

LE    SUFFIXE    GAULOIS   -iCOS    DANS   LES    NOMS    DE    LIEUX   PENDANT 

l'antiquité  et  au  MOYEN  AGE. 

S  !•'.  —  Le  suffixe  -icos  en  gaulois 565 

§  2.  —  Le  suffixe  -icos,  -icus  employé  à  former  des  noms 
de  lieu  dérivés  de  cognomina  romains  ou  de  noms 
pérégrins 566 

Carantonicus,  566.  Silvanicus,  567. 

Gassinicus,  567.  Urbanicus,  568. 

Gatuicus,  567. 

S  3.  —  Le  suffixe  4cils  employé  à  former  des  noms  de 
lieu  dérivés  de  cognomina  en  -anus  qui  eux-mêmes 
dérivent  de  gentilices  en  -ius 569 

Acutianicas,  570.  Aurelianicus,  571. 

Albucianicas,  571.  Bulianicus,  571. 


700  TABLE  DES  MATIÈRES. 

Cantilianicns,  572.  Marinianicas,  575. 

Gassianicas,  572.  Martinianicas,  575. 

Cavillianicas,  572.  Qalatianicus,  576. 

Celsinianicas,  573.  Petronianicaa,  576. 

Godicianicas,  573.  Quintilianicas,  576. 

Firminianicas.  573.  Sabinianicas,  577. 

Mallianica,  574.  Silvinianicus,  577. 

Marcellianicas,  574.  Venerianicas,  577. 
Marianicas,  575. 

CHAPITRE  XIV. 

LE  SUFFIXE    GAULOIS   -SSa   DANS    l'aNTIQUITÉ    ET  AU  MOYEN  AGE. 

§  !•'.  —  Le  suffixe  gaulois  -sso-s,  -«a 579 

§2.  —  Noms  de  lieu  dérivés  de  gentilices  romains  à 
Taide  du  suffixe  gaulois  -ssa 581 

Gantissa,  582.  Villonissa,  585. 

Vindonissa,  583. 

CHAPITRE  XV. 

LE  SUFFIXE  LIGURE   -a5Ct«  ,    -OSCUS  j  -USCUS   DANS  L* ANTIQUITÉ  ET 

AU  MOYEN  AGE. 

§  1"'.  —  Le  suffixe  -a^ciw,  -asca  dans  Tltalie  du  nord- 
ouest,  d'après  les  documents  antérieurs  au  moyen 
âge 586 

§  2.  —  Le  suffixe  -ascus  employé  à  former  des  noms  de 
lieu  dérivés  de  gentilices  romains  dans  l'Italie  du 
nord-ouest,  d'après  les  documents  du  moyen  âge..     .     587 

Ansasca,  587.  Maliascus,  588. 

Buriascus,  587.  Pinariascha,  588. 

Gragnasgus,  587.  Plauciasca,  589. 

Juliascus,  588.  Ruveliascus,  589. 

Lagnaschus,  588.  Venzascus,  589. 
Lisiniascus,  588. 

§  3.  —  Le  suffixe  -ascm  employé  à  former  des  noms  de 
lieu  dérivés  de  cognomina  romains  dans  l'Italie  du 
nord-ouest  d'après  les  documents  du  moyen  âge..     .     590 

Gavrascus,  590.  Novellasca,  591. 

Glavascus,  590.  Quintascha,  591. 

Martiriascus,  590. 


TABLE  DES  MATIÈRES.  701 

S  4.  —  Le  sufEixe  -ascu^  et  ses  variantes  -osciÂS^  -uscus 
employés  à  former  des  noms  de  lieu  dérivés  de  gen- 
tilices  romains  en  Gaule  d'après  les  documents  du 

moyen  âge 591 

Â.  —  Le  sufBbce  -ascits  en  Qaule 592 

AtisiascuSy  592.  Qratiasca,  593. 

Bassiascus,  592. 

B.  — <  Le  sufBxe  -oscus  en  Gaule 593 

Albariosciis,  593.  Manioscus,  595. 

Albioscus,  593.  Marcioscas,  595. 

Canioscus,  594.  Montioscus,  596. 

Catalioscus,  594.  Vilioscus,  596. 

Curioscns,  594.  Vitrioscus.  596. 
Flavioscns,  595. 

S  5.  —  Les  suffixes  1*  -ascus^  -osciis  2**  "Usco  -onis  em- 
ployés à  former  des  noms  de  lieux  dérivés  de  cogno- 
mina  romains  en  Gaule,  d'après  les  documents  du 
moyen  &ge 597 

A.  —  Suffixe  'OsciLs  en  Gaule 597 

Canascas,  597. 

B.  —  Suffixe  'OsouSj  -usous  en  Gaule 597 

Artonosciis,  597.  Gamuloscos,  599. 

Blanuscus,  598.  Oatharoscus,  600. 

BranoscuB,  598.  Venoscus,  600. 

Bricosci,  598.  Vindausca,  600. 
Camboscus,  599. 

C.  —  Sufflbce  usco,  onis  en  Gaule 601 

Tanuco,  601. 

CHAPITRE  XVL 

LB    SUFFIXE    LATIN    '^iHiiS    BANS    LES    NOMS    BE    LIEU    PENBANT 

l'antiquité  et  au  moyen  AGE. 

S  1".  —  Généralités 602 

§2.  —  Noms  en  -arias,  dérivés  de  noms  de  minéraux..    602 

Aqnarias,  603.  Gravières,  604. 

Ferrarias,  603.  Perridres,  604. 


702  TABLE  DES  MATIÈRES. 

53.  —  Noms  en  -aria^  -arias  dérivés  de  noms  de  véfj^ 
taux «    605 

Jimcaria,  605.  Juniperari^  607. 

Roboraria,  605.  Linarias,  607. 

Alnarias,  605.  Raverias,  606. 

Ad  Avenarias,  606.  Rosarias,  608. 

Buxariaa,  606.  Segalarias,  608. 

Canavarias,  606.  Spicarias,  608. 

Castanearias,  607.  Violarias,  609. 

§4.  —  Noms  en  -aria,  -arias,  -arius  dérivés  de  noms 
d'animaux 610 

Appiaria,  lisez  Apiaria,  610.  Leporaria,  612. 

Asinarias,  610.  Lnparias,  612. 

Caponarias,  610.  Porcarias,  612. 

Cervaria,  611.  Soricarias,  612« 

Colubraria,  611.  Vnlpecularias,  613. 
Columbarius,  611. 

§  5.  —  Noms  en  -aria,  -arias  dérivés  de  noms  d'hommes.    613 

CHAPITRE  XVII. 

LE     SUFFIXE    LATIN    -etum    DANS    LES    NOMS    DE    LIEU     PENDANT 

l'antiquité  et   au  moyen  AGE. 

S  1*'.  —  Généralités 615 

§  2.  —  Noms  communs  en  -etujf^  dérivés  de  noms  latins 
de  végétaux  et  qui  ont  été  employés  en  France  comme 
noms  propres  de  lieu 616 

Albucetum,  616.  Laoretnm,  622. 

Alnetom,  616.  Nucetum,  623. 

Betnlietum,  617.  Olivetum,  623. 

Bnxetum,  617.  Pinetnm,  624. 

Oastanetum,  619.  Pometum,  624. 

Cepetum,  620.  Pranetum,  624. 

Goryletum,  620.  Roboretum,  625. 

Pagetum,  620.  Salicetum,  626. 

Fraxinetum,  621.  Spinetum,  626. 

Gentianetum,  621.  Tilietum,  627. 

Genistetum,  622.  Tremuletum,  627. 

Juniperetum,  622.  Ulmetum,  628. 

§  3.  —  Dérivés  en  -etum  de  noms  de  végétaux  qui  ne 
sont  pas  latins 628 

Gasnetum,  628.  Vernetum,  629. 

Rausetum,  629. 


•*•        .■♦ 


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TABLE  DBS  MATIÈRES.  703 

S  4,  —  Dérivés  en  -etum  de  noms  communs  qui  ne  dé- 
signent pas  des  végétaux 630 

Oortiletum,  630.  Fontanetum,  630. 

Essaretum,  630. 

S  5.  —  Dérivés  en  -arePum 632 

Ficaretum,  632.  Nucaretnm,  633. 

Juncaretnm,  632.  Pomaretam,  633. 


APPENDICE 635 

Supplément  aux  chapitres  m,  iv  et  v  du  livre  i*'..  .  635 
§  !•'.  —  Population  de  la  Gaule  barbare  au  moment  de 

sa  conquête  par  César 635 

§  2.  —  Date  du  partage  du  sol  entre  les  particuliers  en 

Irlande 637 

Additions  diverses 638 

Erratum 638 

Index  alphabétique  des  noms  de  lieu  anciens.  .  .  .  639 

Index  alphabétique  des  noms  de  lieu  modernes.  .  .  655 

Index  alphabétique  des  noms  de  personnes.  :  ...  671 

Index  alphabétique  des  finales  de  noms  de  lieu 

anciens * 683 


CORRECTION 

Page  637,  lignes  17  et  18,  œu  lieu  de  qu'ils  paraissent  avoir 
été  encore  étrangers,  lisez  qu'elle  parait  avoir  été  encore 
étrangère. 


TOULOUSE.  —  UfP.  A.  CHAUVIN  ET  FILS,  RUE  DES  SALENQUES,  28. 


\ 


ERNEST  THORIN,   ÉDITEUR 


EXTRAIT  DU  CATALOGUE  DES  OUVRAGES  DE  FONDS  : 

BEN0I8T  (A.),  professeur  à  la  Faculté  des  lettres  de  Toulouse.  —  De  la  syntaxt  fran- 
çaise entre  Palsfjrave  et  Vaugelas.  \  vol.  grand  in-8**.  6    >» 

GAGNAT  (R.),  prof,  au  Collège  de  France.  —  Cours  d'àpigraphie  latine.  2*  édition,  eniv- 
rement refondue  et  accompagnée  de  planches  et  de  figures.  1  vol.  gr.  in-8«  raisin.  M   » 

CHAIQNET  (Ad. -Ed.),  recteur  à  Poitiers.  —  Théorie  de  la  d/:cLiiiaison  de»  noms  en 'jn': 
<(  en  latin  d'uprts  les  principes  de  la  philologie  comparée,  Ia-8°.  4    >» 

CR0I8ET  (Alf.  et  Maurice).  —  HisloÎTe  de  la  littératuTe  grecque^  par  M.  Alfred  Croièet, 
membre  de  l'Institut,  professeur  à  la  Sorbonne,  et  M.  Maurice  Croiset,  professeur  a  la 
Faculté  des  lettres  de  Montpellier.  5  vol.  in-S». 

Les  deux  premiers  volumes  sont  en  vente.  Prix  de  chAque  volume  :  8  fr. 

DEJOB  (C),  professeur  au  Collège  Stanislas,  docteur  es  lettres.  —  MarC'Ântoine  Murtt. 
Un  professeur  français  en  Italie  dans  la  seconde  moitié  du  seizième  siècle.  1  vol. 
iB-8".  7  50 

DELOUME  (.Ant.),  professeur  à  la  Faculté  de  droit  de  Toulouse.^  —  Les  manieurs  d'ar- 
gent à  Rome.  Etude  historique.  1  fort  volume  in-8°.  9   » 

DUCHE8NE  (l'abbé  L.i,  membre  de  l'Ioslilut.  —  Les  origines  du  culte  chrétien.  Etude  sar 
la  liturgie  latine  avant  Charlemagne.  1  vol.  in-8°.  8    ». 

ERNAULT  (Em.),  professeur  à  la  Faculté  des  lettres  de  Poitiers.  —  Le  mystère  de  minu 
Barbe,  tragédie  bretonne,  texte  de  1557,  publié  avec  trad.  française,  inlroductiou  et 
dictionnaire  étymologique  du  breton  moyen.  1  vol.  in-4*.  *  îk    » 

Ouvrage  couronne  par  l'InsUtut  de  France. 

FAVÉ  (général),  membre  de  l'Institut.  —  L'Empire  des  Francs  depuis  sa  fondation  jusfi'i 
son  dt^memtrrement.  1  fort  vol.  grand  in-S"  raisin.  15    « 

QA8QUY  (A.).  —  Cia^ron  jurist^onsulte.  1  vol.  in-8».  5    ». 

ORAUX  iCh.).  —  MHmges  Graux.  Recueil  de  travaux  d'érudition  classique  dédié  à  h 
mémoire  de  Charles  Grau.x.  I  fort  vol.  in-S*»  avec  planches.  50   « 

HOCHART  (P.).  —  Etudes  d'histoire  rdigiense.  1  vol.  gr.  in-8<»  avec  figures.  8    n 

—  De  l'authenticité  des  annales  et  des  histoires  de  Tacite  (Ouvrage  accompagné  des  pho- 
tographies de  cinq  pages  des  manuscrits  de  Florence,  et  de  68  lettres  de  Poggio  Brac- 
cioLini).  1  vol.  gr.  in-S"  raisin.  g    „ 

UCOUR-QAYET  (G.).  —  Antonin  le  Pieux  et  son  temps.  Essai  sur  l'histoire  de  l'empire 
romain  au  milieu  du  deuxième  siècle  (138-161).  1  fort  vol.  gr.  in-S».  12    d 

L0I8EAU  (A.).  —  Histoire  de  la  lawjue  franraise,  ses  origines  et  son  développement  jw^u'a 
la  fin  du  seizième  siècle,  t*  édit.  1  vol.  gr.  in-l8  jésus  {ouvrage  couronnr).        4  50 

—  Histoire  de  la  littérature  portugaise  depuis  ses  origines  jusqu'à  nos  jours  {ouvrage  cok- 
ronné).  2*  édit.  1  vol.  in-12.  3  50 

POIRET  (Jules).  —  Horace.  Etude  psychologique  et  littéraire.  1  vol.  in-18  jésus.  3  50 
RIEMANN  (0.),  maître  de  conférences  à  l'Ecole  normale  supérieure.  —  Etudes  sw  k 

langue  et  la  grammaire  de  Tite-Live.  ±'  édition.  1  vol.  grand  iu-8%  9    • 

8ID0INE  APOLLINAIRE.  —  Ses  œuvres  (texte  latm),  publiées  par  È.  Baret,  inspecteur 

général.  1  fort  vol.  gr.  in-S»  raisin.  16    „ 

SUMNER-MAINE  (H.),  membre  de  l'InsUtut.  —  Histoire  des  institutions  primitives,  i  tûI. 

i"-»'-  10   » 

—  L'anrJen  droit  et  la  coutume  primitive.  1  vol.  in-8«.  jo   " 

—  Etudes  sur  l'histoire  du  droit  (Les  communautés  de  village,  etc.).  1  vol.  in-8*.  12    » 

—  Essais  sur  le  gouvernement  populaire.  1  vol.  in-8*».  1             7  50 

—  Le  droit  international  (La  oreRnE).  1  vol  in-H".  7  5^, 
THOMAS  (Em.).  professeur  à  la  Faculté  des  lettres  de  Lille.   —  Scoliasles  de  YirgiU. 

Essai  sur  Servius  et  son  commentaire  sur  Vii-gile,  etc.  1  vol.  iû-8'.  '     8   " 


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