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SEPTIEME
RECUEIL.
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A m
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AVIS.
Ce feptîeme kecueil & les précédens fe trouvent à Bruxelles,
che^ Mr. Lemaire , Imprimeur - Libraire ; à Courtray , cke^
Mr. Gambar , Libraire ; & che^ tous Us principaux Libraires
des Pays-Sas Autrichiens, fi'c. &c.
Iavisau relieur.
!-<
Ce feptierpe Recueil doit commencer par l.i feuille
A *f 'f 1" , jiirques & y coinpris la petite Table. On
fera fuivre le Faux - Titre : Suite de la quatrième
Partie du premier Recueil^ & la fignature 1***,
juiqu'à la fin, avec la Table des Mati&res.
QUATRIEME PARTIE
D U*
SECOND RECUEIL.
m iHi. Il I S
k%
>*iim-:.
RECUEIL
DES
REPRÉSENTATIONS,
PROTESTATIONS
ET RÉCLAMATIONS
Z) E tous les Ordres de Citoyens , dans les Pays-Bas
Catholiques ; au fujct des Infractions faites à la
Conftitution , les Privilèges , Coutumes & Ufages de
la Nation , & des Provinces refpeclives.
On y a joint la Joyeuse Entrée, avec Tes
Additions, &c.
Il y il roH.rta.nt une chofe que Von peut queljj'.efvis oppofer a.
la volonté du Prince ; t'e/i Ij. Religion. LiS Leix de la,
Religion font d'un précepte fiipérieur , parce qu'' elles font
données fur la tète du Prince comme fur celle des Sujets,
MONTESQ. Efprit des Loix , L. III , c. X.
'4^
De l' I m p r I m e r I e des Nation s.
M. Dec. L X X X V I [.
-t. 7
V
^ OCT 25 1968 ^
(7)
REMONTRANCES de^ rUniverfitc
de Lo'uvain , à Sa Majeflé U Empereur
& Roi ^ &c, 6'c. &c, (^)
SIRE,
V<
OTRE Université de Louvain n'a été principale-
ment fondée que pour lervir de boulevard & de
foutien à la piété ôc à la foi Catholique (h) : ceux qui
la compofent, font chargés par état, & par les ordres,
les plus exprès , émanés du Trône , de l'Inftruclion
littéraire &: chrétienne de toute la jeunefie du
Pays (cr). Former cette jeuneffe à la fcience.& à la
vertu , éloigner d'elle tout ce qui eft capable de la
pervertir, tels ont été toujours les devoirs facrés de
fes Inftituteurs , & la partie la plus efientielle de leurs
fondions.
Fidelle à Dieu & à fon devoir , TUniverfité op-
poia conilaniment un digue impénétrable à toutes les
néréfies , particulièrement à celles , qui depuis le
malheureux fiecle de Luther & de Calvin , ont dé-
folé l'Eglife , & màs l'Etat à deux doigts de fa perte.
L'Univcrlité écarta touiours fort loin de la jeunefl'ff
l'eiprit con-tagieux des difputes en matière de Rcli-
(a) Lz date manque au manulcrit de cette Pièce; mais
il parole par tout fon contenu, qu'elle eft de l'an 1782.
{b) Tous les Diplômes & autres rrioauniens, concernsnt
l'érection ■ de l'Univerfité , prouvent cette aiicrtion. On iss
trouve raflemblés dans le Livre impriitîé fous le titre de
Privllepa Acad. Lovan. 6'c. Lov. 17^2 in-Ato.
(c) On peut voir entre autres , k célèbre Règlement de
la vinte de l'Univerfité des Sét-cniirimes Princes Albert &
irabellç^, dci'an 1617, iupiœmio &. ailleurs.
A A
C8 )
giori', Se tout ce qui pouvoit fervlr le moins du raoïulc
a corrompre les mœurs , ou altérer la pureté de fa
Doftrine.
Sa fermeté à cet égard , le vrai 2ele , la piété , le
déiinrérelTcment, & enfin le courage héroïque de nos
ancêcres , fe trouvent confignés à chaque page de nos
fafre? , comme dans toutes les hiftoires de ce tems
défaftreux , dont la Belgique malheureufcment garde
un il profond fouvenir , & qui ont fouîlrait fept flo-
riflantes Provinces à leur légitime Souverain. Tout
cela a été reconnu enfin en plus d'une occafion par
nos Souverains mêmes , les auguftes & pieux Pré-
déceiïeurs de Votre Majeflé , qui attribuèrent haute-
ment à rUniverfité , non -feulement la confervation
de la Foi orthodoxe dans ces Provinces , mais en-
core celle de l'Etat, & la fidélité des Sujets à l'au-
torité légitime (a^.
Animée ainfi par l'hifloire du palTé & par de fi
beaux exemples , l'Univerfité de Louvain ne peut en
ce moment, que fe ietter aux pieds de \otre Majefté,
à la vue des dangers , auxquels TEdit fur la Tolérance
va expofer tout ce qu'elle a eu iufqu'ici de plus cher !
Elle ofe , Sire , vous fupplier d'éloigner ces maux &
ces dangers , dont la crainte nous pénètre , de les
éloigner de cette ieuneffe nombreufe & brillante , la
fleur, refpérance, &c le renouvellement de la Patrie;
& de quelle Patrie , Sire ! du Pays le plus florilîant
peut-être de vos vaftes dominations.
L'expérience nous apprend , que jamais Théréfie
n'a pu être tolérée dans un Pays où la Religion Ca-
tholique eft la feule Religion dominante, fans exci-
ter tôt ou tard les troubles les plus funeftes ; car,
ou la Tolérence civile y entraînera la Tolérap.ce
Eccléfiaftique &:Religieufe ( & en ce cas la Foi efl
(a^ On peut voir à ce fu;et A^icol. VcrnuUl Academ»
Lov. lé, I cap. 4. Se fur tout lib, 7. cap. ij, & dans l'E-
pitre dédicat.
perdue ) (a) , ou elle fera le germe des clUTenîions ,
des haines Se c!e la fureur interminables des difputes (/>).
Ces diffentions, ces haines, ces difoutes , font
la fuite naturelle de la diverfité des Dogmes entre
des Concitoyens , Se elles ne peuvent manquer d'être
portées au comble , lorfqu'une de ces Religions , qu'on
îiippofe être la dominante, condamne les Seftateurs
des autres à la privation de tous les biens & de tou-
tes les récompenfes d'une vie à venir , & les regarde
même en général comme des viâ:ime3 dévouées à
toute l'horreur d'un fupplice éternel : or c'eft pré-
cifément ce que fait & doit faire la Religion Ca-
tholique à l'égard de toutes les Se£les hérétiques fans
diftindion , puifque Jefus-Chrift l'a fait lui-même , &:
c'eft ce qu'elle propofe à fes enfans comme Dogme ,
& comme un Article eiTentiel & invariable de leur
croyance (f) ; Iç moyen après cela, que les Héré]
(j) La profeiTion de Foi de Fie IV, porte exprefTéinent:
Hancvcrarn catholicam FiJerti ^ extra quant ncrno jhlvus efje fotcQ:.
La Tolérance Ecciéfiaftiqne & Reiigicufe où. clcnc incompa-
tible avec notre Foi.
ik) Les troubles des Pays-Bas foiis le Règne de Phiiippe
II , Ceux de la France iufqu au Règne de Louis XIV &c.
ce qui eft arrivé en Bohême du tems & fous la conduite
îougueufe d'un Ziska, enWeftphalie f()i;s celle d'un Jean de
Leyde , en Hongrie & dans d'autres Etats Catholiques en. diffé-
rents tems ; tout cela prouve alfez notre aOertion.
k) Voyez la Note {a) ci-deiTus & le Cathechifme de l'Ar-
clievèché de Malines & des autres Diocefes de la même Pro-
vince, leçon 3,
On connoit aiTe?. racharnement des Hérétiques, & fur-
toiit du parti Fhllofophiile contre TEglife Catholique au fu-
jct de ce Dogme, qu'ils appellent cruel & barbare; mais
fi Jefus-Chrlft l'a enleigné lui-même Ci)^' '^* Apôtres l'eu:
prêché (2) & fi l'Egiiie n'a fait que le répéter d'après eux ,
a) Marc. 16, i'. 16. Ma::h. i3 , i>. 17. — Joan. 3 , y. 1%.
(i) G-Uc. j , jr. 20. 21. — ad Tu. 3 , ^. 10. n, &c.
C'O)
t'iques puiffent vivre long-tems en paix avec ceut dont
ils fe croient regardés comme féparés , non - feulement
pendant cette vie , mais pendant réternitc (^).
en le propofant à la croyance des Fidèles ; qui mérite le
mieux le nom de cruel & de barbare , ou le feclaire , & le
prétendu Philofophe , qui à force de clameurs étourdiffent
le monde fur la crainte falutaire de fe perdre ; ou le Catho-
lique qui lui anaonce une vérité rigide , fi on veut , mais
néceflaiie pour affurer fon falut ? Aufurpli:s, il y a long-
tems que tous ces vains fophifmes & ces déclamations éter-
nelles & fcandaleufes ont été réfutes , pulvérifés même , par
nos Apologilles. Les Nicole (i) les Thomaffm (a) les Papin
(31 les Bergier ( 4 ) les Nonotte ( ^ ) le favant Evèque du
Puy (maintenant Archevêque de Vienne en Provence (6),
d'autres en grand nombre , ne lailTent rien à défirer à ce {ii]et.
Il eft néanmoins à remarquer , que quoique ce foit un Do^me
parmi nous, que hors de l'EgUie point de falut , nous ne difons
cependant à p.ucun Seclaire en particulier : Fous fere^ damné :
Nous ne nions pas qis'il foit abfolument poffible , que
des Hérétiques , qui font baptifés & qui croient en Jefus-
Chrift , puiiTcni; fe fauver à la faveur d'une giande inno-
cence des mœurs accompagnée d'une bonne foi, & d'une
ignorance invincible: c'eft que dans cette fuppofit.on ils ne
cefient pas encore d'être enfans de TEglife à laquelle la
difpoution de leur cœur & le baptême , qu'ils ont reçu , les
tient toujours attachés. Au refîe ce cas naturellement fort rare
parmi les adultes , ne forme pas une exception bien pro-
pre à appaifer les Hérétiques fur le Dogme dont il s'agit ,
ri à dimiuuer fort la haine qu'ils lui ont vouée.
{a] C'eft de qi'.oi le fameux Miniftre Jurieu Auteur infinî-
mçnt confidéré parmi les P.éformés, ne fait aucune difficulté
de convenir. Après avoir parlé de la paix dans les Etats, 8c
fis la concorde entre les Citoyens, qu'on fe promet de la
(1) De l'unité de PEglife chap. X. &:c.
(2) Traité de l'unité de l'EgiiTe- Paris 1686.
(î) Recueil des Ouvrages de M. Papin. Paris 1723 J-vo. Tit. Ij
^, I &: fuiv.
(4) Le Déifmc refuté par iui-même Lett. $. & ailleurs.
(5) Didioii. Philofophique de la Religiot» , Art. Tolérance.
(â) inUcudion Paftùrale fut la prttcndue P.iilofopliie de* Incrc-
«S'.ile^ modernes , tome 2^ cbap. lo
D'un autre côté , comment Ce feroit-il que c!e xrms.
& zélés Catholique? pourroient entendre fans ef-
froi , &: fans un faififfement mêlé d'horreur & d'indi-
gnation, les horribles blafphêmes &: les calomnies^
atroces que les Hérériques , les Calviniftes fur-tout,
vomifTent continuellement contre les plus auguftes
èc les plus redoutables de nos Myfteres ! Comment
pourroient-ils entendre de fang_ froid prononcer à tout
propos le nom odieux & infâme d'Ante-Chrift &
de fils de perdition , que ces Set^aires prodiguent ,
fans honte 6c fans retenue , au Chef vifible de i'E-
glife , que nous appelions notre Père (a) 1 Comment
pourroient-ils gnfin fouffrir toujours en paix , qu'on
pouffe la témérité jufqu'à ofer taxer leur Culte d'ido-
lâtrie , éc de tout ce que la fuperftition a marnais en-
fanté d'odieux (h) ! Nous en corxluons , Sire , que
des Religions fi oppofées &: fi incompatibles dans un
Etat, llir-tout lorlqu'elles participent toutes deux aux
Tolérance civile, il ajoute, „ Que pour en venir à cette paix,
„ il faut encore établir, qu'en ei\ fauv:en tpr.tes Religions.
„ J'avoue, /^ou-yài^-i/, qu'avec une telle Théologie, on pour-
„ toit fort bien nourrir la paix entre les dlveries Religions r
„ mais tandis que le Papille me regardera ccir.ir.c r.n cam-
„ né, & que je regarderai le Mahoir.éran comme un réprou-
„ vé, & ie Socinlen comme hors du Chriftianifme, il iera
„ impofrible de nourrir la pnix entre nous* car nou5 ne fau^
„ rions aimer, foutfrir, ni tolérer ceiix qui nous damnent.
„ Nos Mefneiirs lentent bien cela; c'ert pourquoi très ailtt-
„ rément leur, but eft de nous porter à l'indiiTérence des Re-
„ ligions , fans laquelle leur Tolérance civile ne fei-viroit de rien
^ du tout à la paix de la Société. Lstt. de furïeu. Lat. S. p. //<;.
(a) Voyez la prière ce Dimancl'.e, après 'a prcôication,
imprimée avec les Bibles de Dordrecht. La ConfofTion Belgi-
que, §. 36. La Préface qui fe trouve à la tète du Synode
de Dordrecht Les ouvrages de Luther, des Flaccus llly-
ricus &c. en cent endroits.
•ybj Cathéchirme d'Heidelberg , approuvé dans le Syno'-ie
de Dordrecht , Home. Dcr,j.:i^i. R:cueiî des Acres 5c Nîén'o'reî.
du Clergé de France, l^aris, 1768, tome i. pag. 35. oi iulv.
( II)
emplois Se à radminiftration publique, font des ar-
mées toujours en préfence , & toujours prêtes à s'af-
faiiir les uns &: les autres (a).
Peut-être nous objedera-t-on que l'expérience eft
contraire à ce raifonnement : que l'exemple de la
Hollande , de l'Angleterre , de la SuiiTe , & enfin d'au-
tres Pays Proteftans, prouve affez , que les difréren-
tes Sedes , fans en excepter la Religion Catholique ,
peuvent fe fouffrir mutuellement & fe trouver en-
iemble, fous un même Gouvernement, fans en trou-
bler l'harmonie ^ en défunir les Sujets entre eux.
Mais ( &: c'eft à quoi il faut prendre garde )
dans toutes ces contrées , ce n'eft pas notre fainte
Religion , c'eft une Sefte hérétique qui tient le ti-
îiion du Gouvernement , & qui forme la Religion
dominante de l'Etat : &: dès-lors la différence eft
trop palpable , pour que des efprits juiles êsi attentifs
puiffent s'y méprendre.
Les Seftes , quelqu'oppofées qu'elles foient entre elles,
6>c fur-tout avec la Pveligion Catholique , ne s'entre-
condamnent cependant plus abfolument. Elles difent,
elles croient , que pourvu qu'on foit d'accord fur les
Articles , qu'il leur plaît , d'appeller fondamentaux ,
toutes les Religions font bonnes jufqu'à un certain
pomt , & que du moins il n'y en a aucune , à qui
le Ciel foit fermé {h).
Avec cette manière de penfer & d'envifager les
chofes , il n'eft pas furprenant , qu'on puiffe vivre
iû) On "voit aïïez , qse c'efl du faic S: non du droit, que
nous parions ici ; la Religion nous ordonne d'aimer tous les
hommes fans exceprion, même nos plus grands ennemis,
ïk les plus grands pécheurs : ello l'c permet donc de hai'r per-
fonne; mais en même tems elle permet, elle ordonne de haïr
les vices, & fur-tout i'iiércfie. O^tte difiiaftlon eli très-vraie
^'L très-néce.Taire ; malheurcuiement la folbleiTe harn aine eft
gr.tTde , & rexpérieace prouve qu'on ne la fait pas toujours.
ib) Mémoires de i'Eglife , par M., de la Pvoque. Paris ^
1C93 , in-^to. llv. 4. pag. 46S & (iilv.
€11 paix avec Tes Concitoyens : les diiïenîion.ç cîî
matière de Religion , fous ce point ce vue , ne font
plus , à proprement parler , que des difputes d'EccIe ,
des opinions fans confcquence , & très-conîpatibks
entin avec le maintien du bon ordre ck de la tran-
quillité publique.
Il faut cependant que l'enthoufiarme ne s'en môle
pas , &c que les têtes ne s'échauffent pas trop. Sans
ctre obligé de feuilleter les liiftoires des teins plus
éloignés, ce qui eu arrivé depuis peu à Flefiingen,
en Ecoffe , fur-tout en Angleterre , ious la 'conduitt
d'un Gordon , fait bien voir , qu'à un certain point
d'elfervefcence*, il n'y a de fécurité nulle part.
On nous demandera peut-être ici , comment il fe
fait , que les Catholiques foient du moins laifiés en
repos , & qu'ils y lalfient les Hérétiques à leur tour,
dans les Pays qu'on vient de nommer ; ceux qui ne
peuvent en aucune manière ni en aucun tems traliir
ce dogme exclulif de leur Religion.
La réponfe eft faite : d'abord on vient de voir parf
l'exemple de ce qui eu arrivé fous nos ^-eux en An-
gleterre & ailleurs , que ce repos n'eft déjà pas trop
alTuré : mais quand il le feroit davantage qu'il ne l'cfl
réellement , la chofe n'auroit encore rien de furpre-
nant , ni rien d'applicable aux Pays , où la Religion
Catholique domine avec la liberté entière , qui lui eft
due de Droit divin , pour tout ce qui concerne l'exer-
cice public de l'on culte. >j
C'cft que dans les Pays , o« pour le malheur des
Peuples & des Souverains, elle n'eft pas la Religion
du Prince & de l'Etat; c'eft-à-dire , où elle n'eft
pas dominante , les Fidèles 5c: leurs Miniftres font
tenus dans un abaiffement & dans une fujetion con-
tinuelle : point de culte publique , nulle apparence
extérieure de K.eligion ne leur eft permife ; nul moyen
de la défendre ou de la propager; il leur eft détendu ,
fous les peines les plus grieves , de travailler en pu-
blic ou en fecret à la converfion de qui que ce puifTe
être : ils font exclus fans ménagement Se iàns excep-
{«4>
tjon ^e tout Emploi Civil ou Eccl^fiaftique , ■& Ae
tout ce qui a le mouiclré rapport avec l'Adminiflration
publique. En un mot, les Loix du Pays moulées fur
l'ciprit de la Seéle dominante , leur ferment abfolumant
la bouche pour combattre l'erreur , ou pour foutenir
la vérité.
Il en eft , &: il doit , fans doute en être tout au-
trement dans les Etats Catholiques , où , grâce à la
divine Providence & à la foi du Souverain , la vé-
l'ité n'eft pas encore captive , & rie fauroit l'être à
ce point, tant qu'on ne voudra pas l'abjurer.
Dans ces Etats, où les Miniftres de la vraie Re-
ligion &: de la îainte Dodrine ont , &; doivent avoir
nécefTairement la liberté de marcher tête levée , de
montrer l'appareil de leur minillere , & d'annoncer
en public au Peuple aflemblé autour d'eux dans les
Temples du Seigneur, les vérités immuables de l'E-
vangile ; où il leur eil permis , où il efl un de leurs
pi'emiers devoirs, de crier tout haut, Cave.u a jer-^
mcnto : dans ces Etats , Sire , s'il y a encore de la
Religion parmi le Peuple, s'il y a de vrais Catho-
liques ( & certainement il y en a au Pays-Bas ) il y
aura de l'oppo/ltion entre eux & les prétendus Ré-
formés; & cette ôppofition eft de nature à exciter
des troubles. Parmi le Vulgaire fouvent on commence
par difputer , on finit par fe battre. Le Peuple eft
toujours Peuple , & n*eft pas en tout tems maître du
mouvement de fon zèle.
Qu'il nous foit permi'? , Sire, d'ajouter ici une ob-
iervation particulière. Parmi les différentes Seftes ,
que Votre Majedé s'efi propofé de tolérer dans fes
Etats , le Calvjnifme n'efï pas feulement le plus incom-
patible avec la Ca:holicité , mais avec les droits du
Trône même , & le Gouvernement d'un feul. Cette
Seéte ne refpire que l'indépendance (a) , elle ne recou-
('a.^ „ Quand la F-ligion chrérierme ( dit le Prcf. Montef-
„ (juleu^ £Jpr. des Loix , liv. 24. c. 5. ) toufi'iit , U y a deux
r 15)
noît ni auforité ni Hiérarchie ; &: on Ta vu plus
d'une fois renverfer , avec les autels , le Gouverne-
ment civil qu'elle tiouva établi. Nous en avons fait
la trifle expérience fous le Roi Philippe II, ôc le
cœur faigne encore, quand nous lifons les fcenes
affrcufes, que le Calvinifme donna pour lors dans ce
Pays. L'Angleterre , la France , le Nouveau Monde
ont eu auffi les leurs, & on rapporte que Jacques I,
Roi d'Angleterre , qui dans ce moment-là fembloit
lire dans l'avenir 6^ prévoir le fort infortuné de fon
fucceffeur , avoit coutume de dire , que point d'Evé-
qiies , point de Hoi ; maxime qui peut-être n'eft pas
aifez connue ni méditée aujourd'hui.
Nous efpérons enfin , que la bonté paternelle de
Votre Majefté fe laiffera toucher à la vue de nos
craintes. Nos gémifîemens, nos humbles mais fer-
ventes prières , réunies aux Remontrances refpeftueufes
des Evêques, des Villes, des Communautés, & enfin
de tous les ordres de l'Etat , empêcheront que Votre
Majefté n'y étende leé effets de Tolérance civile, aulîi
loin fur-tout qu'elle l'avoit projette ; &: le meilleur
de tous les Souverains ne permettra pas , que nos
Contrées heureufes & tranquilles voient renaître aw
milieu d'elles le germe des diffentions, qui leur ont
été fi funeftes , & qu'une P^ehgion fainte, qui y eft
„ fiecles , ce malheureux partage , qui la divifa en Cathollqi:e
„ & en Proteftante , les Peuples du Nord embrafferent la
„ Piotcftantc. & ceux du Midi gardèrent la Catho.ique: ceft
,,, que les Peuples du No d ont & auront toujours un ejfiù
„ d'indépendance & de liberté que n'ont pas les Peuples dv\
3j Midi, & qu'une Religion, qui n'a pas de Chef vifible,
„ convient mieux à l'indépendance du climat , que celle qui
.,, en a un. "Nous n'avons garde d'adopter l'influence des cli-
anats; c'eft le fyftême le plus faux que l'efprit humain ait pu
^funter, abftrailion même fàre de la Religion : mais nous
nous fervoo* 4)] t^xte, 11 éj^ablit biçp les principes du C?il--
Kinjfme.
( i6)
feule révérée depuis tant de fiecles , vienne à fouffi-îr
de la contagion des feftes.
Mais dût-on avoir le malheur de voir pénétrer les
Seftes dans l'étendue de vos Provinces Beigiques, du
moins , Sire , ne permettez pas , que ce^ foit dans votre
Univerfité de Louvain , la feule que vous ayez dans
cette belle Contré-\ Confervez à la Religion cette
refTfturce tout entière ; permettez de tirer un cordon
ferré au tour de la cité privilégiée, & qu'aucun feftaire
ne foit en droit de le franchir. Tel eft l'objet par-
ticulier de nos très-humbles & tres-refpedueufes Re-
montrances ; & notre confiance eft fondée fur des
raifons , qui nous paroiïïent de la plus grande force ,
&: que nous ne craignons pas de porter à la confidé-
ration de Votre Majefté.
Nous l'avons déjà obfervé, l'Univerfité de Lou-
vain eft la feule Ecole publique de tous les Pays-Bas,
6^: môme des Pays voilîns. La jeuneiTe nombreufe ,
qui forme le corps de fes élevés, eft deftinée à rem-
plir un jour la plupart des Emplois Civils &: Ecclé-
liaftiques du Pays. Quel dommage, quel tort à jamais
irréparable pour la Religion , fi cette jeunefle venoit
à fe corron.ipre ! fi au lieu d'être am jour les Défen-
feurs de la Foi antique , qu'ils ont héritée de leurs
pères, &de cette Religion fainte qu'ils ont fucée avec
le lait, ils parvenoient à en être de vils apoftats !
La plupart des jeunes gens fe rendent à l'Univer-
fité depuis l'âge de quatorze jufqu'à vingt-cinq ans.
C'eft l'âge des paftions , & de cette mobilité de ca-
raftere , qui n'oppofe qu'une foible réfiftance aux
impreflions étrangères , fur-tout quand celles-ci ont
le charme de la nouveauté & préfentent l'amorce d'une
plus grande hberté, ou plutôt d'une plus grande licence.
Que n'aurons - nous donc pas à craindre de tout ce
qu'ils verront , de tout x:e qu'ils entendront autour
d'eux ? fi des Inftituteùrs , des Profefteurs publics ,
on des Dofteurs viennent à être imlîus de maximes
oppofées aux Dogmes Catholiques ; S: ce que l'on
doit envifager comme le côté le plijs dangereux des
Se6les
( '7 )
S.cles Se des Se6^aires, û jamais les maîtres fe laiffent
gr.gner à cet efprit d'indépendance , qui refiife de
croire, ce que notre foible raifon n'approuve pas;
n'eft-il pas à craindre que leurs Diiciples participe-
mat plus ou moins au même elprit & aux mêmes
ézaremens ? Des hommes faits , qui voient leurs voi-
sins impunément n'oblerver ni abrtinence , ni Fêtes ,
qui les voient fe moquer de la Confeffion , de la
Mefîc 6^ des cenfures de TEglik , doivent être bien
sfrermis par la grâce , pour ne pas être ébranlés quei-
qiiefois par l'exemple. Quefera-ce d'une jeuneiTe foible
Çiirréfolue, aujourd'hui fur-tout, que nos Philolb-
phes, que nos libertins ont ébranlé les fondemens de
la foi ; que les âmes tiedes & pareffeufes traînent im-
patiemment le joug de la Religion : hidGclU juga
collo trahcntes. Horat. lib. 3. od. 3 , &é qu'ils n'at-
tendent peut-être que le moment de le fecouer ?
Rien n'eft fi facile à féduire que la jeuneffe , elle
ouvre le flanc aux coups qu'on s'apprête à lui porter.
L'expérience l'a fait voir de tout tems. Le Roi Phi-
lippe II , en étoit fi perfuadé , c\v.e voyant les Pays
voi(ins du nôtre , la France fur-tout , infcftés du vc-
n m dangereux des héréiies, il aima mieux fonder ex-
Bès &: à grand fraix une nouvelle Univerfité à
ouay , que de fouffrir plus long-tems , que les pa-
rer« expofaffent leurs enfans aux dangers de la fé-
dufiion , en les envoyant faire leur cours d'Etudes
d.ins des Dniverfités étrangères où la contagion s'é-
toit dé]a répandue.
C'eft le fameux Joachim Hopper , Confeiller &: Gar-
de-des-Scéaux du Roi Philippe, qui nous apprend
ces cifconflances &: ces motifs {a) ; ils font d'ailleurs
énoncés d'une manière bien cl.iire & bie-; précife
dans le Diplôme d'ére6lion ce la mên.e Univerfité.
Voici ce, qu'on y trouve « : Quôd cùm P».egio in-
C û ) Hoynck Van l'anendrecht , AnakB. Bd^, tom. s.
part. 2 y pas, 20 ^ 21,
B ttt
( >8 )
» ferioris Germanise ipfîus Phllippi Régis diclioni
» hereditario ]ure lubjeéia , omni ferè ex parte à
» Popuiis haereticis atque fchifmaticis cinfta 6»:: ob-
» ftiTa eflet, & propter eorum infidias peftiferafqiie
» doctrinas Cadiolica illic Fides , & aniniarum Ik-
» lus maximo in dircrimine verfaretur : tam gravi-
» ter periclitanti in illis partibus fidei orthodoxa; &
V animarum faluti aptiffimum elle remedium duxerat,
» li in dicla Regione , quae à tôt tantii'que Popuiis
» &: gentibus incolebitur , pra^ter illam celtberri-
» mam ac famoram Univeriitatem fludii generalis
>i Lovanienlem , alia quoque fimilis Uuiverlitas ftudii
» generalis erigeretur Ça). «
Le célèbre Boéce , qui fut lire de l'Uni verfi té de
Louvain , pour ttre le premier ProfeiTeur en Droit
dans cette Univerfité naifTante , qui a tant loué le
R*oi Philippe, de l'avoir, érigée , ck qui confirme
dé plus en plus ce qu'on vient de dire touchant les
grands modfs. de .cette éreâ:ion (/•) ; les juftifie en
même tems 'd'uae manière bièh feniible 6c bien pro-
pre à faire impreluon par ion propre exemple , &
par le récit de ce qui lui étoit, arrivé perronnelleintiit.
dans le tems qvV.il , étoit allé étudier le^ Belles Lettres
fous des maîtres ' & dans la fociété jjl^^ cUfqiplcs cor- .
rompus ft).. (',.;;)V af; ii'.V;
. Au relie , Sire 5 ce n'efl: pas Boéce ,' ce n'eft pasr
Philippe II Teuls V "qui penferent ainli : tous nos Sou-,
verains depuis Gharlemagne jufqu'à no5 jours, eurent
les mêmes vue^ &: les mêmes principes., oc ils agirent
conftamment d'après- les mêmes .règles..- Par-tout le
même efprit, par- tout les mêmes ioins &: les mêmes
attentions pour éloigner loin de leurs Sujets la con-
tagion de l'erreur & l'attrait de la nouveauté en ma-
(.2) Mirai Optra d'iplom. tom. i. cjp. ii6.
t b) In orat. funch. nomine Univerjluûs Duacena dïHA
Pk'Uppo I] , per Boctium Eponeni. ■
{c) In prcf. jynui^mat, j,nùquït, Ecdef. pa^- _j , ^,
( »9 )
tiere de Religion ; mais fur-tout pour éloigner cette
pefte des Ecoles deftinées à l'inflruéiion de la JeunelTe.
Pour ce qui regarde l'Univerlîîé de Louvain eu
particulier , on peut voir une file d'Edits , de Ré-
gleinens , de confultations , de Lettres , Edites de
la part des Souverains, tendans tous au même but
& dirigés par le même zèle , depuis le Duc Jean IV ,
qui tilt notre Fondateur, iulqu'à l'Impératrice Au-
gufte & Religieufe qui laiffa le Trône & le Dladé-
à Votre Majefté (^a).
L'Univerfité de fon côté n'eut en aucun tems rien
plus à cœur , que d'obéir le plus ponftuellement à
des Réglemens auffi fages , faits pour la gloire du
Très-Haut & pour fa propre profpérité. Elle fit plus ;
elle porta elle-même , en diffirens tems , félon l'exi-
gence des cas &: la nature des circonftance*: ., un grand
nombre de Réglemens de Difclpline £v de Poli-
ce ( b.) , qui furent tous moulés f.ir l'efprit &: les
intentions connues du Souverain ; & elle les fit conf-
tamment exécuter , &c à la lettre , avec la dernière
pondualité.
Ce fut ainfi que dès l'an 1545 (c) , c'eft-à-dire ,
dès la première époque des hérefies naiffantes de Lu-
ther & de Calvin , elle fit ce fl:atut falutaire toujours
obfervé depuis , confirmé en 1557 6>c 1579 (^) , fo-
(a) Nos Aftes font remplis de ces pièces: on en trouve
Î>lufieurs auffi dans la coUeftior' dfs Placards ou Edi:s pour
e Brabant 8c pour la Flandre ; les bornes , qu'on s'efl pref-
crit dans ces très-h'jmbles Remontr.;nces, ne permettent pas
de les inférer ici, mais la chofe eft bien certaine.
(b) Tous ces Réglemens fe trouvent dans nos Actes; il ne
feroit paspoifible oe leur donner une place ici, fans devenir
extrêmement diffus : mais nous fommes prêts à les pro-
duire à tout inftant.
(c) VaL Andrex Fafli Acai. Lov. 16 jo, \n-/i,to. pa^. j62.
(^d) Vernulei Acad. Lov. Le Règlement de 1579, fe
trouve im'^jrimé tout au long à la tête des Lettres d'imma»
triculation, qu'on délivre à chaque Ecolier,
B %
( 10 )
iemnellemeat approuvé &: renouvelle en 1617 parr
les Art. I , 2 , 76 & m du céltbre Règlement de
la viilte des Séréiiiffimes Princes Albert & Ilabelle ,
èc dont on s'efi: fi bien trouvé juiqu'ici , qui exclut
formellement de toute profefTion publique , ou privée
dans l'Uni ver (i té , ainfi que du droit d'y être reçus ,
comme Ecoliers , tous ceux qui refuierolent d'abjurer
les héréiies , 6c de prêter le ferment de catholici'ié.
L'Univerllté a toujours été fi terme dans ce prin-
cipe , qu'aidée & Ibutenue de fes auguftes Maîtres ,
elle auroit préféré de tout facrifier , plurô'. que d'ad-
mettre dans fon fein une feule perfonne, de quelque
rang qu'elle pût être , dont elle n'auroit pas été
àiTurée , qu'elle apportoit la plus fiine Doi^lrine :
On l'a vue refufer ainfi un Eraime (a) un Jufte-Lip-
(fl) Erafme. dans une Lettre qu'il écrivit à George Haloin
le 29 Août 1517, Si. qu'on trouve clans la dernière colledion
de fes Ouvrages .tom. 3 , part. 1. Eplr. 264 , s'énonce de
cette manière : Totus, hoc efi cum blbliothcca Lovanium cornini-
frari : cum Th:o!ogis alùjfima pax , ai<^u: adeb necej/îtudo ....
Dejîinant me in Juum orciinem coovtare &c. Il confie cependant
par les Archives de la Faculté de Théologie, qu'il n'a pu
parvenir à y être aggrégé: indubitiblement par la feule rai-
Ion , qu'il étoit fufpeâ; de nouveauté. Il s'en plaint : ''ez ou-
veneii»3nt dans fa Lettre du y Juillet IT21, aJ liîch^rd. Pa.-
.€<ium ; & dans celle ad Petrum B.rblrlum de la même an-
née, ièii. Eplt. 583, & 587. Au relie, l'Univerfité deLou-
vain n'efl pas la feule, à qui la Dcftiiae d'Erairae ait pa-
j-u fufpefle. La Faculté de Théologie de Paris cenfura pu-
bliquement, en 15 31, un grand nonîbre de propofiuons ex-
traites de fes paraphrafes fur le Nouvean Teflument , '6l de
quelques autres de fes Ouvrages. Ses Colloques fureur éga-
lement condamnés par la So bonne eu IÇ26 & la lecture en
■flit défendue dans l'Uni vcrfité en 15 28. Il efl vrai cepen-
dant qu'Erî-nne déclara plus d'une fois de vouloir fonmetrri
tous fes fentimens à l'Eglife ; & que fe trouvant à Bnfle ,
peu de tems avant fa Uiorc , il témoigna im grand déftr
i'en fortir , pour ne pas finir fa vie dans un Pays , où il
étoit -envii-onaé d'Hérétiques. Voyez fa Lettre du 20 Jui»
( ^o
fe (a) un Blls (A) on l'a vue fur le point de rejetter
un Marti'.i Dorpius (c) on l'a vue abandonner un Joiîe
Velfin (ci) malgré les talens éminens qui Ijvilloient en
eux &:ma[g'é le grand luitre, qu'ils dévoient pro-
curer à nos Ecoles. On a vu enfin renvoyer d'illuf-
tres Allemands , des Danois , des Polonois , des An-
glois , des jeunes Gens d'autres Pays (c) aufïi diftin-
gués par leur nom , que propres à porter au loin la
réputation de l'Univerlité , par la feule raifon qu'ils ne
faifoient pas proreffion de la Foi Catholique.
Seroit-il polfibie , Sire, que tant de Prirxes , &
tant d'Hommes célèbres, qui ont fait & feront à ja-
mais la gloire de l'Univerfité , fe fuflent trompés tous ,.
pendant le laps de trois ficclcs , fur une affaire de
1536, à Conrard Gocleniiis , ihhi Epir. 1199; ce n'eft donc
pûS ici notre intention de lui co;uef1;er ici fa Catholicité.
(a) Juûe Lipfe a été reçu dans rUniverfué, & ilyeilmort:
Vi:ns ce n'a été qu'après avoir donné des preuves non équi-
voques de fon changement , & de fa foiimiffîon entière *
la Dodrine de l'Eglife, daiis laquelle il a toujours perfévéré
depuis.
f.h) Louis Bils, Seigneur de Coppenfdamme , célèbre Ana-
tomifte. La Lettre que l'Univerfiré écrivit à fon fujet au Marquis-
dsCarafena, Gouverneur des Pays-Bas, îe 7 Mai 1664 , nor.9
paroit trop remarquable pour ne pas la joindre ici. On la
trouvera ci-après yi^Z; lit. A-
(c^ Cette hiiloire fe trouve tout au long dans les Aélcs
de la Faculté de Théologie , du aS .^aillée , du 4 Août 6c
.du 3-0 Septembre 1520.
(^) Joffe Velfin Juftus Velfuis Dofteur en Médecine trè«
renommé donna da^s les erreurs du Proteiîantifme ; il prit
fagement le parti de fe retirer à Louvain , & de ne pas at-
tendre qu'on y exécutât à fa chnrge les Décrets portés par
rUniverfité en 1545, dont il a été fait niention plus haurJ
Voyez fon Art. dans le Dlclionn. de Bayle, & dans les
Mémoires pour fervir à l'Hilloire litt. des Pays-Bas par J,
■N. Paquot Lov. ij6j.
{C) Voyez fa Lettre fub lia. A. & VernuUi Acud. Lov, , . ,
Nos Ailes d'ailleurs en font pleinement foi,
Bj.
( 2i )
cette îiîiportaiice ? Se pourroit-il, que croyant avancer
le bien public ,^ils n'auroient fait que le reculer? Pour-
roit-on s'imagi;\er enfin , que dans le tems , qu'on les
a cru remplis d'un faint & véritable zèle pour l'hon-
neur de Dieu Se l'avancement de la Religion , ils n'au-
roient été que des Entlioufiaftes & clés VilioAnaires ?
Non , il en coûteroit trop au cœur fenf.bîe & géné-
reux de Votre Maïeuc , de prononcer aufîi durement
fur tant de pcrfonnageî vertueux , ainii qiie fur les
Princes Tes Prédécefieurs : il en coûteroit trop à nous
aiiili, de dégrader ainfi la mémoire de ceux, qui nous
ont comblé de bienfaits , qui nous ont laifîe leurs lu-
mières dans des Ecrits qui paffercnt à la pofterité la
plus reculée ^ &C de qui enfin , nous tenons en tout
6i par-tout, notre état &: notre exiftence.
Mais , dira-t-on, les circonftances peuvent changer ,
ce qui fut utile au Public dans un tems , peut ceffer
de l'être dans un autre. Les chofes humaines font
lujettes \ des viciffitudes , qui ne permettent guère
à un Legiflateur , quelque fage , quelque prévoyant ,
qu'il foit, de porter une Loi, qu'il ne pût jamais être
queftion de réformer : oui , Sire , les chofes humaines
font lujettes à ces viciffitudes , puifque l'homme qui
les fait naître , y eft lui-même foumis : mais la Reli*
gion ne l'efl pas ; elle eil: immuable dans fon effence ,
comm.e fon divin Auteur : elle le fera toujours ( puif-
que Dieu ne peut faillir) jufqa'à la conibmmation des
iiecles : &c c'elr ainfi , 'que tout ce qui foutient cette
Religion , tout ce qui , de la part des hommes miême ,
tend à ihn. avancement, devroit l'être également.
Les nouveautés d'ailleiu'S , font toujours fufpeftes au
fage ; elle font fouvent fune/les à la République. Il y
a grand doute (difoit Montagne (^)) s'il peut fe trou-
;ver auffi évident profit au changement d'une Loi re-
çue , telle qu'elle foit, qu'il y a de mal à la remuer.
C'efl aînfi que penfoient les Philofophes de l'anti-
tf— r'iin.'ji ■#Wi>^i; m
4*) Liv. I, p. 162»
( ^î )
qiiité : Platon (a) ne croyoit pas que l'on pût changer
h miilique , fans altérer la conftitution de l'Etat. C'cil:
pouiier les chofes trop loin , nous l'avouons : mais
de quel œil lui oc fes femblables auroient - ils vu la
moindre altération dans les chofes , qui intéreffent une
Religion juftement reconnue pour la feule véritable?
Enfin , nous ne hnirions pas , ii nous nous livrions à la
confiance d'accumuler ici la foule des obfervations qui
fe préfentent à notre efprit. Nous finirons pourtant ,
Sire , après nous être de nouveau jetés aux pieds de
V. M., la fuppliant le plus humblement & inftamment
de daigner avoir un favorable égard pour les refpeftueu-
fes R-cmontrances de fon Univerfité , de calmer fes
alarmes , & d'empêcher qu'une Loi , qui enheindroit
nos fcrmens (b) , & porteroit atteinte à notre ancienne
& perpétuelle Conftitution , qui jetteroit le trouble ,
enfin, parmi nos Profeffeurs &: nos Elevesj, puilTe
y avoir fon exécution. "
C'eft la grâce &:c.
D E VOTRE MAJESTÉ,
Les très-humbles Si très-foumis
ferviîeurs &■: fui ers , les Refteurs
& autres de l'Univerfité de Lou-
vain.
Erat Jignatum Af. /. ,
Van-Gobbelsckroy ,
comme Recéeur actuel.
Hic habehamr Par Ordonnance , Signatum : P. H.
HeNDRICK, Secret.
(a) Liv. 4. des Lcix.
(b) La prcfejTion de Foi de Pie IV , que nous avons tows
jurée , porte expreffément : Hanc veram CathoUcam fidcm , ex-
tra quum nmo jalvus ejp potefi.. . eamJem imegiam & inviola-
tam , ufquc ad extrsmum vita Jpiritum , confianhjjîmè , Deo ju^
•vante, à mtis fubditls ,vel illis , quorum curdad me in munere me»
fpeftahh, tencri , docerl & predicari, quantum in me erlt , cura-
tknim. Après quoi fuit le Serinent.
»4
(M)
(A) ExcELLENTissiME Domine,
XNCREDlBlLEefl: quàm «ratanter & qiio applaufu
ab Acaciemiis noflris , exceptum fit irainus illud quin-
que cadaverum , quod tua munihcentia 6c te procurante
lifibus medicorum noftrorum deftinatum eft, & cum
illis hoc fît fingulare, quod condita aetatem , quin imo
&: aDternitatem latura ibnt , toto illo , quo hœc dura-
bunt , tempore tui memorla apud nos vigebit , ut qui
in ils tibi fixeris Monuinentum. Sed & iftud beneficio
accedit , quod Anatomicus , qui ea corpora condivit ,
dicatur docuiff; Profeilores noftros, artem veteribus
ignotam , ut fine miflione Sanguinis cadavera recen-
tia , imo &: animalia viva in partes difiecentur , quo
invento, velut novus quidam Elbulapius , multa in cor-
poribus humanis profectura, & fcientia; quae iîla cu-
rât , opportuna producat : illud nihilomninus in authore
difplicet, quod alienam aneftraReligionem profiteatur ,
quodque iMvis legibus Academicis , is apud nos tolerari
non poterit : habent illse a prima ereclione, ut or-
thodoxi foli in ca profiteantur , &: difcant , quas oppor-
tuna fuerint oppugnandis illis , qui a vera fide defcive-
runt. Idem perpétue ufu receptum, & per ScrenifTimos
Principes Albertum & liabellam , in vïf.taûonc com-
probatum , ut nemo apud nos Academiœ matriculae
mferatur, nili qui profcirionem fîdei Catholicse , juxta
BuUam Pii IV , Pontiiîcis , publiée & folemniter emi-
ferit : quod adeo ilriftô obfervatur , cùm enim anno
1642, ad civitatem Lovanienlem , très Dani nobiles,
iique Lutherani adveniffent, nequidem per commen-
datitlas Régis fui , ab aula Regia obtinere poruerint,
tit in Academia permanerent. Speranres , quod pro eo
quo es & quem oflendifti , in nos afFeftu atque in Ca-
tholicam Religionem zelo, idem prsEftabi^:, non parie: is
inter nos vivere , qui alieni funt ab ea Religione , quam
ab incunabulis cdofti , etiam fanguine noftro tueri fiimus
parati. Accedit hoc ad cumulum glorix tUcC , uî te non
tantiîm benefaclorem nofirum , led 6<: fidei Catholicafr
propugnatorem colère & revereri tenea- mur &c.
Inicriiis habebatur,
Huinilli fervi Reftor &
Univerfitas ftudii genera-
lis , oppidi Lovanienfis.
Hac fcptlma Mail i6'6'/\.
Supgrcriptio erat Excellentifîîmo Domino , Domino
Marchioni de Carai'ena Belgii & Burgundiae Gu-
bernaîori &c.
REMONTRANCE des Etats de Flandre à
Leurs Alitjjes Royales^ au fujet des Remontrances
du Chapitre de la Métropole de Ma ('mes.
Madame, Monseigneur!
XjES Prévôt, Doyen, &: Chapitre cela Métropole
ce Malines, nous ont adrefié une Requête en date
du 26 de Juin dernier ('■) , que nous prenons la ref-
peélueufe confiance de joindre ici ,' par laquelle ils
demandent notre interceiïion en qualité d'Eglitc-Mere
de Flandre, pour faire pafler à Vos AlteiTes Royales
leur réclamation contre les intraftions graves &
multipliées faites à leurs Droits, Franchifes &: Pré-
Togatives , & les fupplier très-refpectueufement de le.<;
tranfmettrc à Sa Majefté l'Empereur & Roi , pour
qu'il daigne leur en accorder la réintégration & re-
drefîement complet.
Ils réclament également avec autant d'empreife-
ment que d'amour pour leur Chef, le retour de fon
Eminence le Cardinal- Archevêque & de i'Archi-
Prêtre Huleu , dans leur Diocele , comme le trou-
peau qui cherche de toute part ion Palpeur.
Nous croirions afi'ûiblir les caufes hi motifs qui
C*) Fo^t^ tcHi, 5. Part. Eccléfiaft. pag. 7.
( lO
les ont portés à donner leurs très-humbles Remon-
trances à Vos Altefles Royales , fî nous entreprenions
d'ajouter quelque choie à leur plainte.
V e Chapitre cftimable , par la Conftitution , comme-
par 4es Membres qui le compolent , mérite à tous
égards la coniîdération & la bienveillance de Vos
AltelTes Royales.
Convaincus de leur attachement , de leur zèle ,
&; de leur amour pour tout ce qui peut contribuer
à l'accroiflement de la Religion, nous iupplions en
très-profond refpeélVos AlteiTes royales, i®. défaire
parvenir au pied du Trône leurs jufles réclamadons ,
& de les appuyer de leur puiûante & Royale protec-
tion, pour obtenir le redreflement complet de tou-
tes les infracl:ions quelconques qui ont été faites à
leurs Droits , Franchifes , & Prérogatives ; comme
il a été fait pour tous les autres Corps.
2^ De demander & d'iniifter avec cette bonté fi
naturelle à Vos AltefTes Royales , le prompt retour de
Son Eminence le Cardinal-Archevêque de Malines
dans fon Diocefe , & de rapptller prompteraent de
fon exil rArchi-Prêtre Huleu.
Enfin, nous fupplions Vos AlteiTes Royales d'ac-
corder à ce Chapitre les mêmes Décrets qu'il leur
a plu de faire émaner pour tous les autres Corps
& Etats de ce Pa5's , pour le redrefTement aux in-
fractions de leurs Droits , Franchifes , & Préroga-
tives, efijérant que Vos AltefTes Royales feront toute
l'attention poinble à notre interceiiîon , pour des ob-
jets fî intérefiants à la Religion , &: à la confervation
de nos Loix fondam.entales.
Nous avons l'honneur d'être avec le plus profond
refpefl: ,
Madame, Monseigneur,
Z>E Fos Altesses P^oyâles,
Les tns-humMes & très-obcijfams Serviteurs ^
Les Etats de Flandre,
De notre AjfanbUz. G and le 4 Juillet 1787.
Far Ordonnance , Jignc F. D. »' Ho OP,
( ^7)
DISCOURS adnjjc a Monjeigneur d'Ji^iuville
d: MilLincourt , Evéque £Amyclcs , Sii-^ragant
de Cambrai &c. 6'c. donnant la Conjirmadon
en La Ville de Mons , /e 24 Juillet 1787.
B
Monseigneur,
É N I Toit celui qui vient au nom du Dieu de
nos Pères 5 difoient autrefois les enfans des Hébreux,
dans les tranfports de la' plus vive alégrefle : ne
pourrois-^e pas faire ici l'application de ce même
texte à votre entrée dans nos murs ? Béni foit celui
qui vient au nom du Seigneur, qui le reprcfente fi
fainteraent & par les fonctions de fon miniftere , &
par la régularité de fes mœurs & par les travaux
Apoftoliques ! Béni fcit celui qià vient au nom du
Dieu , qui nous protège ii manir'eileip.ent d'un regard
de fa bonté , dans la fecoufife terrible , qui agite ce
notre R-eligion & notre Liberté !
Dans quelles circonftances , Monfeigneur , pour-
riez-vous lamais paroître plus à propos au milieu de
nous ? dans quel autre tcms votre préfence nous
feroit-elle plv.s agréable ? fi jamais la vue d'un Pafteur
chéri a rempli de joie {es ouailles, c'eft fans doute,
lorfque , après avoir effuyé loin de lui , les efforts
multipliés d'une tempête défaftreufe ; leurs yeux le
rencontrent en miême tems que le calme renaît. C'eft
alors qu'avec le plus tendr-e empreffement , on court
à fa rencontre , pour fe réjouir avec lui. Avec quel
ardeur ne lui peint-on pas les tnftes dangers auxquels
on vient d'échapper ! quelle douce conlblation n°é-
prouve-t-oîl pas à lui raconter comment on a fouftrait
la tête à la foudre menaçante ! Qu'il eft délicieux
pour nous , Monfeigneur , de pouvoir dépofer dans
votre fein le fu]et des juPtes craintes , qui nous ont
alarmés depuis quelque tems ] Vous avez partagé n®s
( ^8 )
■inquiétudes , vous avez gémi fur notre fituatlon , vos
enirailks fe font émues, à la vue de tant de périls
qui nous menacoient ; vous avez éievé avec nous
vos yeux vers le Ciel , pour le conjurer de jctter fur
nos Régions un regard de pitié. Nous ne doutons
pas que vous ne voyez auiourd'hui avec joie , qu'il
a entendu nos foupirs , qu'il a difperfé les Artifans de
nos maux , qu'il fait enfin briller au grand jour fa
Juflice & fa Pu^f^ance fuprême.
Lcrfqu'à la voix du Souverain , l'on vit tomber
toutes les fortifications de nos Villes... croyoit-il peut-
être que le feul courage des Belges fût dans leurs
murailles ? Croyoit-il qx^t déchus de leur ancienne
valeur , qui faifoit dire à J. Céfar , que de tous les
Peuples des Gaules les Belges font les plus courageux ,
les plus redoutables ; croyoit - il que ne connoiffant
plus l'honneur , ils n'auroient pas la force d'efi'aj'er
leurs bras , pour foutenir leur liberté ? . . . Lorfqu'oii
vit nos forterefîes fe détruire , tout le monde s'é-
cria unanimement : Vienne a des deffeins , Vienne
nous prépara des chaînes ! ce prcfleiitiment général
ne s'efl malheureufemcnt que trop vérifié. Perfonne
cependant n'auroit ofé s'oppofer à la volonté de celui
qui i'ordonnoit , le moment n'en étoit pas encore
venu.
Inceffamment après , les entreprlfes attentatoires à
notre liberté fe fuccéderent fans mefure , on frappa
coups far coups. Nous avons vu les Cloîtres brifés ,
les P».eligieux des deux fexcs bannis , chafics de leurs
Maifons , leurs Biens devenir la proie de dépréda-
teurs autorifés , leurs 1 emplcs dépouillés , détruits ,
les Ornemens des Autels convertis en toutes iortcs
d'ufages , les Statues des Saints, leurs Reliques en-
levées , arrachées de nos Eglifes : nous avons vu ces
maux fans pouvoir y parer , réduits à en gémir amè-
rement dans le fecrct de nos cœurs , jufqu'à ce qu'il
plairoit au Tout - Puiflant de nous venir confolcr.
Nous avons vu , fpour ainfi dire, lesMéforcr«is fcan-
daleux du XMe. fiecle fe rc-nouvcUcr dans ces iours
( 19 )
de défolation. Nous n'avions plus à craindre l'Inqul-
iition , il ell vrai , parce qu'au lieu que Philippe II
dilbit alors : la tolhanu mt rcndrcit irifiddc à nus
fermeras : Joibph 11 venoit de la permettre , de la
protéger ; nous ne redoutions plus ce Tribunal ; mais
il s'en élevoit un autre , qui n'auroit été qu'une
Inquilitron civile , Tintendance. Les revenus des Ab-
bayes, que l'on fupprimoiî, n'étoient plus pour doter
de nouveaux Evêchés ; mais pour s'engouffrer dans
la CaiiTe de Religion. On ne s'efïbrcoit plus de faire
admettre le Concile de Trente , il étoit reçu , fuivi ;
mais on vouloit l'anéantir par des Edits. Toute com-
munication avec Rome étoit interdite , on avoiî dé-
fendu aux enfans de recourir à leur père. Ces Edits
menacoient de faire tomber les clets des mains du
Souverain Pontife , d'enchaîner le Spirituel fous le
jOug du fceptre. A la faveur de ces Edits, l'impiété,
l'irréligion levoient la tcte, triomphoient impunémen*",
èf ne faifoient qu'enhardir le blafphéme. Vos Prcties,
ô mon Dieu ! étoient tombés dans le mépris le plu*
marqué, votre Culte tourné en dérifion, vo:; Sacre-
mens méprifés , vos A4yiteres infultés , votre Peuple
devenu le jouet de fes perfides ennemis , de façon
qu'il pouvoit dire avec David : Dais vcncrunt Gsnîcs.
in htzndïtaum tuam : Grand Dieu les Nations font
entrées dans votre héritage : ellesont profané leTemple
où réfîde Votre Sainteté redoutable : elles ont fait
de Jérufalem des monceaux des ruines ! . . . Mais nous
nous femmes fouvenus que notre Dieu ell encore le
Dieu de vengeances ; qu'entre (ts mains repofe le
glaive de la juftice; qu'il ne lailTe élever aux hommes
l'édifice de leur orgueil , que pour le renverfer avec
plus d'éclat ; nous nous en fommes fouvenus , nous
avons mis en lui notre confiance, & nous ne lérors
pas trompés , mais nous n'étions pas encore au terme
de nos alarmes.
Des Prêtres , le dirai-je ? que ne puis-je l'enfeve-
lir dans les ombres d'un éternel oubli! des Prêtres,
l'opprob.e du fîiçré ÎVlirdlIçre , chargés du pouvoir
( 30 )
exécutif , étoient venus fcandaleufement fans Bré-
viaire , Tans Habi-t; Clérical ', lans Science , n'apportant
avec eux que la morgue allemande & les ordres ar-
bitraires du Souverain ; ils étoient venus faire preuve
de jeur miiTion , en détruifant, au lieu d'édifier. A-î-
on jamais vu d'une manière plus î1.-appante , la dif-
tance qui exifte entre les bons Pafteurs & les Merce-
naires ? Quelle cfl: énorme! Vous , Monfeigneur , conG
tamment attaché à remplir dignement les îaborieufe^
foQci:ions de rApofîolat , dont vous êtes chargé ,
vous iall:ruifez par vos exemples , vous attirez par
vos vertus , vous répandez la bonne odeur de Jefus-
Chrift , en femant par-tout fa parole ; vous parcou-
rez votre Diocefe , pour diftribuer l'a grâce , pour
fortifier les tendres agneaux , l'efpérance du bercail
dans la génération future : vous donnez de iaints
Mmifties aux Autels , de vigilans Pafteurs aux trou-
peaux , vous vous faites tout à tous. Il n'en eft pas
de même de ces Etrangers accourus du bout de la
Germanie dans nos Contrées , ils ont cherché à s'in-
troduire fous l'habit de Berger bienfaifant ; mais bien-
tôt on s'apperçut qu'ils n'étoient que des loups vo-
races. Aux premiers fons de leur voix , le troupeau
s'effarouche & refufe de prendre la nourriture que
leurs mains perfides lui piéparoient. lis appellent à
leur fecours la force 6i la contrainte. Déjà pour mieux
érayer leur entreprife , le Gouveruv^ment , dont un
Miniilre odieux tenoit les rênes d'une main abfolue ,
avoit indignement dégradé les Fi//z de Felde & les
Soutiens de la bonne caufe ; déia fous les prétextes
vains & mfidieux on nous avoit privés de la colonne
inébranlable de l'Eglife , en appelîant à Vienne le
Cardinal de Malines. Déjà s'élevoit à grands fraix ,
ibus le nom de Séminaire-Général , le vafre édifice ,
où, pour répandre plus aifément &avcc plus de fuccès
la Do61:rine- peftilentielle qu'on vouloit introduire ,
devoir fe raffembler pêle-mêle la jevuieife de tous les
^. > Diocefes du Pays. Une partie refu'a conftamment
Aq s'y rendre. D'autres attirés par l'appât des plus
( ?■ )
belles promeffes , y entrèrent , mais en fortirent prc^
que auffi-tôt en fecouant la poufuere cle leurs pitds.
Les Religieux, ô vaine prudence du iîecle ! avoient
quitté rhabit de leur Ordre , pour prendre l'uniforme
du séminaire. Les feuls Pères Capucins , par une fer-
meté intrépide, louable &: digne des liecles paiïés^
avoient .vigourerfement réfifcé : deux de leurs Chefs
venoient d'en être dégradés , proicrits , exilés. Le
digne Evcque de Namur, pour avoir éiudé l'ordre
réitéré d'envoyer à Louvain fes jeunes Théologiens ,
avoir cffuyé le même outrage. Rien n'auroit pu ré-
fifler à ce torrent impétueux , fi Dieu , qui fe piaït à
confondre les forts par les foibies , n'étoit venu au
fecours de fon Peuple à l'inftant or il alloit fuccom-
ber fous les coups redoublés du pouvoir.
Jufqu'ici les entreprifes détachées , les in fuites par-
ticulières faites à tout ce qui tient à la Religion , n"a-
voient été que des eflais. Ces téméraires Architectes
d'une nouvelle tour de Babel , qu'ils vouloient éle-
ver contre l'Eglife , méditoient dans la profondeur
de leurs vues une entreprife digne d'eux , qui , en ren-
dant leurs noms immortels , eût changé la face de
toute l'Eglife Belgique. Ils méditoient , les infenfcs !
d'exterminer dans le même pur , & ce jour n'étoit
plus éloigné, toutes les maifons confàcrées à l'Eter-
nel , Monafteres & Couvens. L'irréligion fe feroit
affife fur leurs débris, &: d'un ris moqueur, le blas-
phème fur les lèvres , elle auroit infulté à ces mor--
tels vertueux , qui vivent aujourd'hui dans l'obfcurité
du Cloître , & qui dans la kiite , rodant à l'entour de
leurs afyles détruits , auroient traîné les refies d'une
vie miférable , dans les larmes & les foupirs.
Oui , Monfeigjieur , peu s'en eft fallu que vous
n'ayez plus marché que ilir des ruines , que fur des
décombres de ces faintes demeures. Le jour étoit mar-
qué pour leur deftru6tion totale ; mais le doigt invi-
lible , qui traça fur les fables les bornes aux mers ,
qui fufpendit le foleil au firmament , qui fait fouffler
les veiits_ à fon gré , qui d'un figne appaife les tera-
pète , le doigt du Seigneur en avoir difpofé autre-
ment. Et dans ces circonftances fâcheufes , où nous
étions réduits à dévorer en fecret nos inquiétudes 6>c
nos chagrins ; dans ces jours d'alarmes , où la vio-
lence alloit nous arracher à nos retraites ; dans le
juonient où l'on ne paroiffoit plus attendre que le
lignai de la dévaftation ; Dieu qui Te rit des vains
projets des hommes , qui d'un fouffle difïipe leurs au-
dacieux complots. Dieu , du haut de ion trône ,
avoit confondu les vaftes plans de ces orgueilleux
Mortels , renverfé toutes les mcliires , changé la face
des chofes. Tous ces Miniilres d'iniquité , obftinés à
notre perte , avoient difparu ; ils s'étoient enfuis ,
pour cacher leur opprobre ; la honte & le mépris
ont flétri leur ouvrage , & fe font par-tout attachés
à leurs pas , femblables à l'impie , dont le Roi Pro-
phète a dit : f^idi impium fiipcrcxaltatiim , & cleva-
tum jîcut cedrus Libanï ; & tranjîvi & ecce non erat :
Pf. 36 : J'ai vu l'impie honore 6>C élevé aufli haut
que les cèdres du Liban ; je n'ai fait que pafTer &
il n'étoit déjà plus. Tels ces Fabricateurs de fyftê-
ïîies , ces Ouvriers du menfonge n'ont fait que paroî-
tre , & font rentrés dans le néant. Le foleil a diffipé
les ténèbres , les noirs nuages , qui du bout de la
Germanie étoient venus fondre fur nos, tranquilles
Régions, viennent d'être difperfés en un clin- d'œil.
Heureux fi les fureurs des aquilons ne les repouffent
plus fur nos têtes !
Mille aitions de grâces au fouverain Arbitre de
l'Univers , qui nous a fi vihblement protégés de fon
bras puiiTant i mille reconnoifiances à ceux , dont il
a voulu fe fervir pour opérer cet heureux change-
ment, cette réfurreclion , pour aim'î m'exprimer, de
nstre Liberté & de notre Rehgion. L'eût-on cru que
l'on pût revenir de fi loin ? en voyant la marche
des chofes , eût-on put s'imaginer qu'il fe feroit
trouvé des gens affez zélés , affez courageux , affez
fermes , pour mettre la main au devant des projets
de Céi'ar &: rarrêter au milieu de fa courte ? Le Ciel ,
le
(33)
le Ciel a infplré ces grandes Ames , ^^ leur a donné
ce courage vainqueur de tous les obftacles. Oui , Mon-
feigneur , nous avons la douce &: dëlîcieufe confolation
de poiléder encore, au milieu de nos Provinces , diS
hommes dont les mœurs &c la religion font à tou e
épreuve. Nous avons des Citoyens intègres , des Sei-
gneurs non moins grands par leur attachement aux bons
principes , que par les titres rfe leur naillance, qui, dans
le moment , où nous tremblions pour nos Tsmples ,
n'ont pas craint de Ibutenir l'Autel de la mêm.e main ,
dont ils défendent les Loix , les Droits , les Privilè-
ges du Pays. Nous avons de ces hommes reipecla-
bles , que la Nation regarde comme les Pères & les
Sauveurs de la Patrie , & dont le fouvenir nous fera
éternellement précieux ; mais pourquoi ne nomme-
rai-je pas ici ceS' intrépides Défenfeurs de la Liberté?
pourquoi ne pas citer ici les Limmiuk^kc , les Van
dcr Noot , les d'Are/nberg Se tous ces Membre^ va-
leureux qui compoiént nos Etats .■' Voilà , Monfei-
gneur , les dignes objets de notre julie reconnoiffance ,
voilà ceux qui ont repoufTi les chaînes , au bruit del-
quelles nous avions frémi. Noms bénis à iamais ! im-
primez-les dans votre Ibuvenir ces noius immortels ;
à votre re*:our dires à ces Peuples heureux , qui vi-
vent fous l'Empire des Lys , dites leur que , îur les
bords de Tabyme , nous avons trouvé dans ces hom-
mes à jamais mémorables & l'appui de la Rehgion
ê"! le Soutien des Loix. Souvenez-vous de ces noms
il chers à votre troupeau : Souvenez-vous fur- tout
de celui , dont la main bienfaifante vient de nourrir
tant de milliers de Pauvres ; &j chaque fois que fur
l'Autel , vous immolerez l'Agneau fans tache , qui de
fon fang a cimenté notre Religion , n'oubliez pas de
l'interélTer pour eux & de demander à Dieu la force
&c la fenneté qui leur font néceffaires , pour ache-
ver ce qu'ils ont fi heureufement commencé.
cftt
C 54 )
P^EQUÊTE de Mr. LemEORY , ci-devant Prieur de
Hou-^ali^c & Députe de fEtat Eccléfiaflique de la
Province de Luxembourg, à Mgrs. Us Trois Etats
du Pays.
A
M E s s E I G N E U R s !
SSEMBLÉS pour réclamer contre les atteintes
données aux Conftitutions du Pays , vous recherchez
avec zèle , & l'on vous expoie avec confiance les
difFérens chefs d'entreprifes & de léiions faites con-
•tre les Privilèges & les Propriétés des Corps &: àts
individus de cette Province,
Qui a plus de droit que moi, Mgrs., à vous faire
parvenir mes juftes réclamations? Je vois d'ici, en
idée, la place que j'occupois laciis parmi vous. J'étois
im des Membres de votre Afiemblce ; & vous devez
vous rappeller qu'au moment de la liippreflion de
;iotre Prieuré de Houffalize , i'exerçois la Dépura-
tion au nom de l'Etat Ecclenailique, 5c à la fatis-
fa6lion générale du Corps.
Depuis cette fatale époque , à quoi mes Conireres
& moi n'avons-nous pas été réièrvés.^ On nous a
dépouillés de notre Etat , de notre exiftence légale ,
de nos titres , de nos propriétés, & de nos Droits
de Citoyens. On nous a réduits à tramer une vie
îfolée , inutile , ignoble , contre le vœu de la Reli-
gion , les difpofitions des Fondateurs , les Ocirois des
Soviverains , & le cri de l'humanité. Notre demeure a
çté abondonnée à la déprédation , à un ]:ouieverfe-
m^vii général; tout y a été changé, dévafté , & dan?
cette deftruâ;ion on, ne reconnoît plu? le fejOur.de
la piété , de l'étude , de la paix & de ia régularité.
Les pauvres , les malades des environs ne retrouvent
plus cette charitable habitation , où ils vcnoient de-
mander , &r d'où ils étoieut aifurés de remporter de«
(35)
iecours de toute efpece. Les Peuples voudroient en
Vdin fatisfaire leur piété dans des folemnités qui ont
difparu ; les refiources du Saint Miniltere pour la fré-
quentation des Sacreniens, pour le pain de la divine
parole , & pour les exercices publics de la Religion ,
ne fubfiftent plus. On cherche Houffalize dans Houf-
falize même : tant il eft changé depuis notre expullion.
Au moment qi;e ]e trace ces lignes , Melleigneurs ,
on me communique la Dépêche de L. A. R. en date
du 2 de Juillet 1787. J y vois que toutes les intrac-
tions ceffent , & que tout doit erre rétabh dans Ton
premier état. J'ai donc droit à la même faveur, c^-: ce
feroit faire iniure à votre équité , à votre religion
& à votre zèle pour le bien de la Patrie , fi ]e Ibup-
connois , Meffeigneurs , ou que vous ne me rappel-
lerez pas pour reprendre ma Séance parmi vous , 011
que vous ne vous intérelTerez pas vivement au réta-
bliffement de notre Prieuré , fur le pied qu'il étoit
avant ces triftes changemens.
S'il y a des plans &: des projets à former pour
cela, dans l'état de dégradation où fe trouve actuel-
lement notre Monaftere & ce qui en dépend, je me
flatte que vous voudrez bien me les communiquer ,
6c aux indi\adus de notre Communauté , dont ie
fuis ici l'organe ; perfonne n'étant plus à même que
nous de lever tous les inconvéniens & les obilacles
qu'on pourroit oppofer à notre rétabhïïeirient.
J'attends avec confiance le favorable réfultat de
-•cette Remontrance , &c.
C'eft la grâce, &c.
%,,„^
C 1
(30
Re dV E T E des Religieufes fupprimées de. Jéricho ,
aux bennes gens des neuf Nations de cette Fille de
Bruxelles^ du i^ Mai l'y 8 y {a).
Bons et Respectables Citoyens,
i-j E S Dames Religieufes Se Sœiirs-Converfes du Mo
naftere de Jéricho , dans cette Ville de Bruxelles , ayant
été expuliées dans l'année 1783 , privées de leurs biens ,
revenus , & pofieffions , ainfi que des penfions , ou
rentes-viagères , qui leur avoient été refpcftivement
aflîgnées par leurs parens ou amis ; ayant porté au
Confeil-Fiical , des plaintes intr^t^tueures contre de
telles entreprifes; ayant appris, que d'autres Religieu-
fes , qui ont fubi le même fort , ont également pré*
fentes fans fuceès leurs juftes plaintes , par des Mé-
moires adrefies à Sa Majefté ; ces Religieufes n'ont
eu d'autre confoîation , que celle d'efpérer que par la
continuité de leurs prières , par une humble réfigna-
tion, 6c par l'accompliilement non interrompu de leurs
devoirs de B.eligion , autant que cela peut îë faire au
milieu du Siècle, elles obtiendroient du Ciel, un Pro-
tefteur dont rinierceffion les feroit rétablir dans leur
état , & dans leurs propriétés.
Dans la conjonfture actuelle , où le peuple de Bra-
bant commence à éprouver de la confoîation, après
avoir eu le chagrin de fe voir enlever la plupart de
(â) Nous arrêtons ici , la publication des pièces de la même
nature, préfentccs :.a Gouvernement , ou à différentes corpo-
rations, au nom d'une multltiïde de maifons Religieufes. On
a vu, dans les Ripvcfenuùons des EtJts de Flandres, combien
de ces demandes s'étoient faites dans les feules Ville de Gand
& de Bruges (4e. vol. Part. civ. p. 120. —-Autres Ibid, p.
211. Part. £ccl.)
(37)
Ces Droits ^ Privilèges conftitutionnels , elles font clans
la terme confiance , qu'elles auront déformais le Protec-
teur fi vivement defiré , &; qu'elles recevront bientôt le
prix de leur confl:ante efpérance en Dieu , en recou-
vrant , pour fon honneur & fa gloire , l'état Religieux
qu'elles avoient embraifé à jamais , en continuant à
vivre en conformité de leurs vœux , & fuivant les obli-
gations monafliques de leur Maifon , hors de laquelle
( c'efi: à dire hors de leur Communauté ipirituelle ,
&; indifi~oluble ) , elles n'ont pas un inftant de vérita-
ble repos à attendre.
Les démonftrations publiques leur apprennent afifez
qui eft ce Protecteur : Eh I ;qui pourroit-ce être que le
Peuple , dont la voix, regardée comme celle de Dieu
même , doit en avoir aufîî la force & les effets ?
Elles ne peuvent donc s'emipêcher de croire que leurs
vœux font accomplis.
Hommes edimables, dignes à jamais des plus grands
éloges ! c'efi: par votre bienfaifant miniftere , que l'on
peut porter à ce défsnfeur incorruptible fes juftes plain-
tes. Daignez aujourd'hui recevoir les nôtres , pour l'a-
mour & pour la gloire de Dieu tout-puilTant ! apprenez
à la Nation , que les Religieufes de Jericho , ont
été établies à Tercluyfen , le jour de Saint Laurent ,
l'an 1399 ; que leur Maifon ayant été incendiée dans
le mois d'Avril 1456, Philippe & IJabel'e ^ Ducs de
Brabant , leur ont donné le Couvent de Jéricho , dont
elles ont pris polTefllion le 7 Septembre fuivant , dont
l«s lettres leur ont été octroyées le 9 Février 1457,
& approuvées par le Pape Caiixte , le 26 Avril de la
même année , comme il fe voit dans la Brabantia il-
lujlrata.
Dites à cette Nation ( Dieu vous en récorapenfera )
qu'indépendamment de ces titres , leur pofi^eflTion a été
confirmée par toutes les inaugurations , ou Joycujcs
Entrées , &c , en dernier lieu , par , & au nom de Sa
Majefté ; que néanmoins, on leur a enlevé cette pof-
feflTion également au nom de Sa Majefiié. Paflez fous
filence , toutefois les maux fans nombre , qu'elles ont
C3
( 38 )
ciTuyés par rapport à la modicité de la penfion à la-
quelle o.i les a bornées , foit qu'elles jouiffent de la
fanté , ou qu'elles foient malades : tout cela , aind
qu'pne infinité d'autres malheurs , font des chofes paf-
fées , & fans remède ; d'ailleurs la Providence ne les
a jamais abandonnées. Dites feulement à cette Nation,
à laquelle vous êtes fi chers, que de tous les maux
de toutes les calamités , de tous les chagrins , auxquels
l'homme eft ailuietti dans ce Monde , le pire feroit,
pour elles , de n'être point rétablies dans leur ancien
état, de ne pouvoir reprendre les devoirs, & les rè-
gles de leur Conftitution; affurez-la, nous vous en
fupplions , que nous n'avons pas d'autres defirs , que
cehii de nous retrouver dans notre premier état , avec
la décence reqiiife.
Nous ne doutons point , Hommes refpeflables ,
que vous ne daigniez expofer iincérement , & avec
énergie , nos chagrins inexprimables , & nos juftes
plaintes à l'AiTemblée générale des Seigneurs Etats
de Brabant^ intercéder pour nous auprès d'eux , ôc
les aiïïirer que jamais nous ne cefferons de prier le
Ciel , pour qu'il veuille accorder au Peuple , & à
tous fes ' Repréfentans, une paix confiante, & un
bonheur fans réferve , pour le corps OC pour l'ame.
C'eft dans cette ferme confiance , que nous avons
foufcrit la procuration ci-]ointe , &: que la fouffignée
fe déclare , en toute humilité ,
Bons et respectables Citoyens,
Votre très-humble ■&; très-obéiiTiinte
Servante Dame E. J. f^ERBRUGG-
11 EN Frkure de JeRICHO.
à Bruxelles le zS Mai lySy.
Les Religieufes fouffignées du Monaflere de Jèri-
eho , à Bruxelles déclarent que leur intention & leur
volonté eO: d'être réintégrées dans leur Poffeffion ,
de dcraeurcT en Communauté, comme Religieufes,
( 39 )
dans îe Monaftere fuklit ; fuppliant , Je auîoriiant ,
en confëquence , leur Supérieure Madame Elijaheth
Ferbruvyhen , paur taire tout ce qui Icra convenable
à cet effet.
Fait h ic) Mai lySj.
CF. Crokacrt. M. F. Fajîcnckds. C. rrankcn.
E. Boerrcmans. L. Bcrnacrts, M. A. Vcr-
licyliweghcn. A, C. Godtfurneau. C\ A. Dc^y
cor. E. A. De La Rocca. M. C. Furcndcth^
B. Ds. Bouk. M. A. Fajidcr liGôvcn. C.
Aî. Vandcn Dricfiche. J . M. Ons. J. van
Eejbcck. A, fan Langcnhoven, " A. De
Prince. J. Mcrtcns. A. Fctuns. C. Gicnps.
*|* marque dz Afarie De Roe. J. Vandcn Bor-
re. E. De Nys. A. VeUcmans. C. Paridons,
M. A. Jaiijj'ins. J. C. Heurs. M. A. Peaers,
M. S. Fander Elfr.
Lettre de CEviqut de Brlnn au Souverain
Pomije Pie FI.
Beatissime Pater , Très-Saint Père.
O USTULIT Au^uftif-
Jimus terres Princeps nojîer
mea in Diacefi tria re^u-
larium Monajieria , unum
Carthujîanorum , altetum
monialium ordinisS. Fran-
cifci diclarum , Francif-
canarum , tertium monia-
lium ordinis SancLe Clara.
Optio quidem Carthu-
Jianis relicla fuit , vel extra
urras Aupiasas ad aliam treufe hors àc^ Etats ce
C4
X-j'Empereur notre
Souverain , a fupprimé
dans mon Diocefe trois
Couvens , l'un de Char-
treux , l'autre de Reli-
gieufes dites Francifcaines,
le troifieme de Religieufes
de l'Ordre de Ste. Claire,
On a laiffe le choix aux
Chartreux ou de le te-
tirer dans une autre Char-
Carthujîam migrare , vel la Mailon d'Autriche , oti
intra cas aliud Religiofo- cl'embrafTer un autre Inl-
rum infuutum amp/.ai , titut d'Ordre Religieux
vel ad ftatum fctculartm ^^^^, ^^^ ^^'^^.^ ^f ^^ ^a-
tr^Tf^r/ . r,A «r/rr,^ . . c. 1^110, OU enfin dc rentrer
tranirc : Icd primo calu i ,,r- c > ^■
, ,•' • r n dans 1 ttat becr.lier: mais
le lu m iplis appiomi um ; , „
^ n • ■ , , V ^^^'^ ^^ premier cas on ne
cjl viaticum , nulla. vero jg^^ promet qu'un fimple
ulunor Vax jufl'.ntano , viatique & point de pen-
cafu aluro pro annua fîon alimentaire ; dans le
unius fujîcntûtione dcfig- deuxième cas , on a af-
nati junt 200 nojîii jlo- figné deux cents florins
reni , adjlatum autem Jcc-
cnlarem tïanjituri , pcn-
Jione annuâ ^00 jlorcno-
rum gaudèbunt.
Par fcre optio data fuit
Monialibus , hoc ttïam
de notre mounoie pour
la penlion annuelle de
chaque individu; & ceux
qui embrafferont TEtat Sé-
culier jouiront d'une pen-
fion annuelle de 300 flo-
rins.
On a prefque fait les
mêmes ofnes aux Reli-
addito : quod iftœ facida- gleufes : on y a ajouté ,
qu'elles poi-voient fe choi-
fir une M-ii^on Séculière
rem aliqunm Domum ,fibi ^^'^'^-^ poi-voient fe choi-
eligere pojjint , in qua fub
direcîionc cujufJam f^ecu-
laris prcfbyt&ri & penjinm
jlbi ajjig^nandâ communi-
ter vivant.
Facla diclorum Monaf-
ieriorum abrogatione Z?c-
cntum Aulicum medianrc
Provïncîce gubsrnin mihi
communicatum fuit ^ quo
reguiares ut nu fq ne fexus
( non tuntuni illorum Mo-
na(ii.rioTum , qua de jaclo
où , fous la direction d'un
Prêtre Séculier, elles pour-
roient vivre en commu-
nauté avec la penfîon qui
doit le'T être afîignée.
Après la fupprelTon de
ces Couvens , le Gou-
verneur de la Province
m'a intimé une Ordon-
nance de Sa Mp.jeft:é, par
laquelle les Religieux 5c
Reiigieures, non-iéulement
des Couvens Supprimés ,
mais tous ceux indiflinéle-
fublata junt , fid indif- ment , qui délirent d'être
(4
crlminat'im : ) qui a vous
fuis folvï cupiunt^ jubcn-
tw ad proprlos j'uoi Epif-
copos dïrigi , & apud hos
dejidaat.im Dijpuifatïo-
mm cvinctTi.
Non adeo multis pojl
diebus monitus fum a Ke-
giis Commijfariis , in nego-
tïofubLatorum Monajhrïo-
Tum ccnjiitutis , ut dlcm
indien rt m , quâ f^cularim
futi fucrint CaTihufiani.
Tandem ipjl P. P. Car-
thufîaniprues fuas , quibus
ad fiaium prefhytcrcrum
fscularium transjtrri ro-
gant , rclpfa mihi porrexe-
runt , quarumJimiUi tum a
Carthufiunis laicis ^ tum a
fupra mcmoratis rnonïali~
bus quajî in horas expcclo.
Uis nrum adjunclis
coarclatus confidtrabam ,
IX paru una , fort-fflmum
tjji prof:{Jionis RciLolofa
f^inculum , hujufquc fo-
lutionem fcdi jipofioUces,
rcfsrvatam , altéra ex parte
regulares illos , quibus fu-
premi Principis authori-
laie , jam jam interdicium
eji in terris aujlriacis more
Carthujianorum vivere ,
ebpingi non pejje , Jîvi
I )
délivrés de leurs vœux ,
doivent s'adreffer à leurs
propres Evéques pour en
obtenir la Difpenfe.
Peu de jours après je
fias avertis par les Com-
mifLires Royaux , Dépu-
tés pour les affaires des
Couvens lupprimés , de
défigner le jour que les
Chartreux avoient été fé-
culirifés.
Enfin les Pères Char-
treux me préfenterent eux-
mêmes des Suppliques par
lesquelles ils demandoient
de pafler à l'Etat de Prê-
tres Séculiers : j'attens
de mom.ent à autre de
Temblables Suppliques des
Chartreux laïques & des
prédites Religieufes.
Embarrafle dans ces cir-
conftaîices, j'ai conlidéré
cC\i.n côté , que la Protel-
iion Religieufe étoit un lien
très-fort , &C que la Dll-
penfe des vœux des Reli-
gieux étoit réfervée au S.
Siège ; d'un autre côté ,
j'ai confidéré que les Re-
ligieux à qui Sa Majellé
de Ton autorité a défendu
de vivre conformément à
la règle des Chartreux
dans toute l'éteudaî' de
ut alurius ordinls Injli- fes Etats , ne pouvoient
tutum projiuantur , Jivi
ut fuum , quod profiffi
funt , profcquendl gratid
ad terras exteras migrent^
cum inccrtitudinc prafcr-
tirn , niim ibi recipiendi
fine , & nifi rtcïpïantur ^
cum perlculo niccjjariœ.
vïta fufltmatïonis amit-
Und(Z. Implorato igiiur
divïno Luinlne , aliis viris
probis y & doclis conjul'
tis , ïn divina Clerneritia 6'
tacito Sanciitatis vcjlrj:
confcnju confijus^ ijludcgi. ,
ux nutlatcnus via difpcn-
Jationis , fcd Jimplicis
declarationis pjocederem ;
declaravi nempe : quod
{"jEpedifti Carthufiani ex
caufis mox adductis , ab
oblervandls Ordinis fui
ftatutis liberi (int , & ad
ftatum presbyterorum fas-
cularium tranfire, inque eo
iub obedientia ordlnarii ,
rémanente Voto caftita-
tls , & fervato , quantum
in diâ:o ftatu feculari po-
teft fieri, voto paupertatis ,
fuperflua prsefertim in pau-
peres , aut alias pias eau-
fas impendendo , vivere
poflînt. Adjccia adhorta-
tïone. , ut mimons aritpti
ctre contraints d'embraiTer
rinftitnt d'un autre Or-
dre , ou de Te tranfporter
dans les Pays étangers pour
continuer à vivre fous la
règle qu'ils avoient pro-
feffée , fur-tout avec l'in-
certitude s'ils y feroient
reclus , & avec le danger ,
en cas qu'ils n'y foient
pas reclus , de perdre la
penlion néceflaire à leur
fuftentation. C'eft pour-
quoi après avoir imploré
les lumières du Ciel , &
confulré des hommes de
probité & verfés dans les
Sciences, me confiant dans
la divine Clémence ÔC
dans le confentement ta-
cite de Votre Sainteté ,
j'ai procédé par voie de
fimple déclaration &: nul-
lement de Difpenfe ; j'ai
donc déclaré que Us pré-
dits Chartreux pour Its raï-
Jons alléguées étoient Li-
bérés de Cobfervancc des
Statuts de leurOrdre^ quils
pouvoient pajjer à l'Etat
de Prêtre Séculier , & y
vivre fous fobéijfartce de
C ordinaire , en gardant le
vœu de chajleté , dans toute
fon étendue , & celui de
pauvreté autant quil eflpof-
Jible dans l'Etat Séculier y
en donnant leur fuperjlu
(43 )
prîmî propofitî fui a con- aux Pauvres , ou en Vcm~
poti
um pro^rcdi conundant.
HumïVùmt jam fup-
plico , dignetur Saîicîiias
vejlra hanc circa Cartliu-
jianos pnsbyteros a me
jam fr.cîam , & tam circa
Canhujianos Laicos^ quam
fubtatorum Alonajierio-
rûm mor.iaUs Jimititer fil-
nant de leur premier état ,
ils ne le rclâchafTent point
de leur i'ainre ferveur ,
mais plutôt qu'ils redou-
blaffent leurs efforts pour
marcher de vertu en vertu.
Je fiipplie maintenant
Votre Sainteté , qu'elle
daigne ratifier &j; confir-
mer la Déclaration que
j'ai faite en faveur des
Chartreux Prêtres , &
celle que je médite de
faire tant pour les Char-
treux laïques que pour les
ciendam Dèclaraûonem, Religieufes dont les Cou-
ratam kabere ac confir' vens font fupprimés,
man.
Porro in cafus futuros , Pour les cas futurs , fi par
fi vel plura regularium exemple plufieurs Monaf-
Monafieria & convenus teres ou Couvens vendent
deinccps authoritate Pria-
cipis urra tolhrcntur , vd
fi regularium aliqui , quo-
rum Monajïcria in terris
Auftriacis etiam in futu-
rum fubfiflcnt , conjormi-
ter Décréta regio fupra
memorato , fingulatim pro
folutione Votorum Reli-
gio forum apud me infia-
rent , vel fi nonnulh il-
lorum , fin earum , quO"
à être fupprimés par l'au-
torité du Souverain , ou
fi quelques Religieux dont
les Monalteres pourroient
exifter dans les Terres de
la Domination Autrichien-
ne , venoient à folliciter
auprès de moi , confor-
mément à rOidonnance
Royale , dont j'ai fait
mention , la diiTolution de
leurs vœux ; ou fi enfin
quelqu'uns de ceux ou celles
(44)
rum Monajlerîa, jamjam
fublata funz , difpcnfa-
tïoncm in voto caji'uatis ,
& paupcrtatis , vdfalum
Ucentiam condcndl Tejla-'
mcma a me peter enc^ pw
kis & ejusmodi cafibus ,
yel miki necejfarias , &
opportunas facuUates a
Sancl'udU vejha providl
concedi , vel de alio ne-
cejjario , & opportiino
remedlo profpici Jupplici-
ter rogo^ qui hum'di , & Jin-
ceropedum ojculo gratiam
& benediclionem Apoflo'
licam implorans , pcrfc'
vero,
Sakctitatis Vestrm
Humillimus 6c Obedien-
tiflimus films , & crea-
tura M A T H I A S
Franciscus, Epifco'
pus Brunenfis,
Brun£ , die zda, Martii
dont les Couvens viennent
d'être Tupprimés , s'adref-
Toient à moi pour obtenir
la Dirpeufe du vœu de
chafteté hi de pauvreté ,
ou au moins la faculté
de faire des teftamens ,
pour ces cas & autres
femblables, ;e fupplie très-
humblement Votre Sain-
teté de m'accorder les
pouvoirs néceffaires &
convenables , ou d'y pour-
voir par un autre remède
néceffaire & opportun.
Quoi faifant , je demande
votre Bénédiftion Apof-
tolique en baifant bumble-
ment vos pieds & je fuis.
De Votre Sainteté,
Votre très-humble &:
très - ObéiiTant Fils
Mathias - Fran-
ç O I s , Evéque de
Brinn.
B RIN N , le 2
Mars
(45 )
Plus P. VI Vener.
Frat. Mathiae Brunen-
fium Epifcopo.
V EN. F R A T E R ^
S A L U T E M ^ &C.
J-j X Lïttcns quas G'^ .
non. Mardi ac iterum 3*.
7ion. Aprilis ad nos dc-
dijii gravem mœroris cau^
fam acccpimus. Dolcnda
qiùdim rcs ejl quœ non-
nullos Rcgular'mm Ordi-
nes , hue illucqiie fubmo-
\tt , ac Viras Rcligiojbs
facrufque Virgines dejicit
à MonaJIcriis ; fed nimis
te propcrajft arbitramur ,
eâ dcclaratione qua Dïo-
michjs Carthujïanos tuâ in
Diœceji ^Jîatim à proprds
Lcgihus S^tatutijque iiberos
foiutofquc renuntiat , ut
conditionem Jlatumque
Preshyterorum Jkciilarium
illicb inirc vaUant. Cenc-
ralis kœc namque DccLi-
ratio qu(Z infcid prorfus
Scde Apojlolicd, tibi, Ven.
Fratcr , opportuna malis
vija cjl^ nobis ciim intcm-
pefîiva tum pcriculis plcna
vidctur, Curandum impri-
Bref du Souverain
Pomifi Pie VI^
Pape , à notre vénéra^
bit Fnrt Mathias ,
Evêqui de Brinn.
VÉNÉRABLE Fre-
RE, Salut , ôcc.
E S Lettres qne vous
nous avez adreiTées en
date du 2 Mars & du 3
d'Avril , nous ont eau Té
la plus vive douleur , car
c'eft un fpeélacle bien
affligeant de voir dirperfer
décote & d'autres difîerens
Ordres P».éguliers , & ex-
pulfer de leurs Monafleres
des Vierges qui s'y font
conlacrées à Dieu. Mais
nous femmes d'avis que
vous vous êtes trop pré-
cipité en, déclarant que les
Chartreux fupprimés dans
votre Diocefe , font en-
tièrement libres & exempts
de la pratique de leurs
Règles ce de leurs Statuts ,
&c qu'ils peuvent dès ce
moment fe ranger dans la
ClalTe des Précres Sécu-
liers. En effet , Vénérable
Frère , cette Déclaration ,
en termes fi généraux ,
que vous avez faite à l'infu
du Siège Apoftoiique, §C
( 4<^ ^
mis cjî ut oinncs in voca- que vous avez imaginée
tione (uâpcrmaiieant^ idcb- être propre à remédier aux
que in aiiâ vd proprii vd maux préfens , nous paroît
alterlus injUtial Monafi:- au contraire faite à con-
riafefc rccipiant^ ubï Kota
folcmnia quibus vitarn D&o
conf:crârunt , nù nclïqiu
perfolviznt. Nulla rerum ku-
tnanarum ratio , qiuiui te
in Monachorum cauja prce
ocul'is habuijjc fciibis , f'ed
nnà Confcientiœ & SaLutis
cura hcibcnda cfî. Hacfaiii
tretems &: fujette à beau-
coup de dangers. Il faut,
avant tout, employer les
moyens les plus efficaces
pour que tous perfiftent
dans leur vocation. C'efl:
pourquoi ils doivent fe re-
tirer dans d'autres Monaf-
teres , foit de leur Inftitut ,
nojîris vcrbis dicito Us , ad foit d'un autre Ordre , où
quos peninct , cofqm cou- ils pratiqueront parfaite-
jirma , (l a propojlto dcdl
narc cognofcas. Ai ji forte,
cuïp'tam acddat quod recep-
toremjibi mqiuat irzvcnire ,
in hoc tantum infortunio
ment les obligations atta-
chées aux Vœux folem-
nels par lefquek ils fe font
confacrés à Dieu. Il ne faut
ici avoir aucun égard à
Jinimus , pojje 'eiim tamdiu quelque intérêt temporel
injlaïuPresbytzriSacula- que ce puifTe-être : ( &
ris pcrniamre quamdiii ita
vivcrc folâ jucefjîtatc coge-
nir. Sed quijque dibet ver-
Jari in Saculo memor voca-
tionis fax , ejufqae tcnax
DifapUntz & VitiZ E.cg':-
laris oui fe pridzm adjcrip-
Jerit , J^oîa folemnia quce
c'eft cependant ce que
vous avez eu en vue dans
l'affaire de ces Religieux ,
comme vous en faites vous-
même l'aveu ; ) mais il
fiut envifager uniquement
le repos de leur confcience
& la fureté de leur falut
femper firma fempcrque im- •éternel. Voilà ce que vous
motcL pzrmanùunt dïltgui- • déclarerez de notre part à
tzr cujlodiat &ferv:t. Sacri- ceux à qui il appartient ;
hgnim profccio ejfet fi quïd Si vous en connoiflez qui
a purijjîmâ €ajîitatis obli- chancellent dans leur voca-
gatiom ditraherr.tur. Studio tion , & qui s'en écartent ,
ctiampaiiptrtatïs^quamiim ayez foin de les fouîenir
pro novd Vivendi r.itionc [as & de les raiTurer. Cepen-
erit, omnes addicii fint ^ ut dant s'il arrivoit que quel-
. ( 47 )
fallaci ternjîr'atm cupidl- qu'un ne put trouver d^a-
tau immumm Utumauc fyle , ce n'eil: que clans ce
aiiimumprafifcrant'yOhc- cas malheureux que nous
dicntiam quoqiii prajhnt lui permettons de vivre
Epijcopo & Jub vejlc ah- dans l'Etat de Prêtre Sécu-
quod Jignum gérant regu- lier , pour aufli long-tems
larisprofiJ/ionis,ne ex /iJc qu'il y lera torcé par la
revcrà exiijfc videantur. leale néceflité ; & alors il
Hahs itaquc Jentcntiam devra vivre dans le Siècle
nojlram ad quant conjilia. ians perdre le fouvenir de
omnia componcre acbss. (a. vocation , & obier ver
Hi/zc ficlU intclligcs nos conftamîr.ent la Difcipline
minime lis ajjcntin^ qui dif- Se les Obligations de la
penfationem a vous JoUm- vie Régulière qu'il avoir
embrafle'e , gardant fidè-
lement fes \ ceux foîem-
nels , qui demeurent & qui
demeureront dans toute
lewr force. Et certainement
le moindre manquement
en matière de cha{l:eté ,
feroit un facrilége. Tous
auffi devront s'attacher
autant qu'il leur lera pof-
£ble, dans leur nouveau
genre de vie , à pratiquer
mbus pojiulant ^ ut cania-
les nuptias contrahant , y cl
condcre vahant tejîamznta.
Cave igitur ne difpenfatio
hiijxtfmodi qua décor ^pul-
chritudo domûs Dci poilue-
rttur ^ andiri contingat in
Ecclijlâ. Neque tu potes
jure ordlnario concedere ,
ut recie cogitas , neque nos
tibi ejus tnbuenda jus po-
tcjiatemve ddegamus.
le Vœu de pauvreté , en
conferv'ant leur cœur libre &: dégasé de toutes affec-
tions aux biens trompeurs ec périfTables de la Terre.
Pour ce qui eft de l'Obéiffance , ils devront la ren-
dre à leur Evêque , hi fous leur habit , ils porteront
une marque dinflinetive de l'Ordre dans lequel ils
ont profeifés , afin qu'ils ne paroifTent pas l'avoir
réellement abandonné. Tels font, Vénérable Frère,
nos vrais' fentimens fur lèfquels vous devez régler
toutes vos démarches ; Se delà , il vous efl ailé de
comprendre que nous ne fommes nullement d'iaten-
tion d'accorder la difpenfe de leurs Vœux à ceux qui
la demandent , ou pour embraffer l'état de Mariage ,
(4^)
ou ponr faire des difpofitions teflàmentaires. Prenez
donc garde qu'on n'er.temîe jamais parler dans TE-
glif'e cle pareiiie.s Dirpsufes, qui terniroient le luftre
&: la beauté de la Maifon de Dieu. Vous fentez affez
te vous en convenez que vous ne pouvez , de votre
autorité , accorder ces fortes de Dilpenfes , & nous
ne vous donnons à cet effet aucun pouvoir.
Itaqiu cjîo mernor facer- C'eft pourquoi , fouve-
dotil vu ^ & rnacih an'uno ut nez- vous du facré Carac-
affiduis Deum prccibiis va- tere dont vous êtes déco-
lidani nohis opcm impctrarc ré , & armez-vous d'un
concris. Opdmd hâc fpz , nouveau zèle, afin que par
t'ibï , l'^cn. FïCLtcr ^ atquc vos prières redoublées ,
ovihus Jzdei tua creditis vous nous obteniez du
Apoliolicam Bcnediclionern Seigneur des fecours puii-
pcrmancntcr impertimur. fans, C'eft dans cette ef-
pérance , Vénérable Frère ,
que nous vous donnons & aux Ouailles confiées à vos
foins notre Bénédiftion Apoftolique,
Datis Videbona prïdic Donné à Vienne le il
idus Apr'dis lySl Avril 1782 , la hui-
P ontificatus nojlri, tieme année de no-
Anno 8v<9. tre Pontificat.
COPIE (Tune Lettre & cCun Mémoire préfenté
à Sa Majejlé ^Impératrice Douairière & Reine
Apojîolique , par les Evêques des Pays-Bas , co/z-
ternant CEtat Religieux^ tan lyy^.
Madame,
J-JES Evêques des Pays-Bas ont l'honneur d'adreïïer
à Votre Majefté de très-refpeftiieufes Répréfentations
fur les Edits du 13 Mai 1771 , & du iS Aril 1772..
Les fentiineiu de piété dont Votre Majefiié eft pé-
nétrée , leur infpire la plus vive confiance , que
vous
( 49 )^
vous entendrez avec autant d'attention que de bonté
des Evcques qui n'ont d'autres intérêts que ceux de
la Religion & de votre Gloire.
L'objet des deux Edits dont nous prenons la li-
berté de porter nos plaintes à Votre Majefté , concerne
trop direiflemcnt leur miniftere , pour qu'il leur loit
permis de s'en diflimuler les l'uites & de le taire iur
leurs difpofitions : &: dans quelle occalion une Au-
gufte Princeffe , encore plus recommandable par fes
vertus , que par l'éminence de Ion rang , écouteroit-
elle des Ev«3ques , fi elle refuibit de les entendre ,
de prendre par elle-même connoiffance de leurs mo-
tifs , & de les pefer avec maturité , fur une matière
qui tient de fi près au Gouvernem.ent de TEglife,
dont ils font refponfables à Jefus-Chrift qui le leur a
confié ?
Les Monafteres font par leur nature des Etal^liffe-
mens Eccléliaftiques, foumis à Tinfpedion des Evcques.
C'eft à FEglifc qu'ils doivent leur éredhon primitive,
c'eft elle qui dans tous les tems a réglé leur police ,
& leur deftination eft toute de fon reflbrt , puifque
ce font des Maifons de retraite deftinées aux Fidèles
qui défirent de fe vouer à la perfeâ:ion &: à la pra-
tique des confeils évangeliques.
Votre Majefié verra dans les très-humbles Repré-
fentations que nous avons l'honneur de lui adrefier
ce que les faints Dofteurs & les Conciles ont penfé
uniformément fur l'importance de ces Etabhfi^emens
précieux à la Religion , fur la nécefiîté de les con-
ferver, &: d'y entretenir ou d'y rappeller, par de fages
& de folides réformes, l'ordre, la difcipline & i'efprit
de régularité.
Si les deux Edits de 177 1 & 1771 n'étoient defiinés
qu'à réprimer les, abus qui ont pu s'introduire dans
les Cloîtres , nous nous ferions un devoir d'applaudir
à un but fi louable ; & fi nous avions été confultés
fur ces objets qui intérefient fi direftement notre laint
Miniftere , ce témoignage de la confiance de Votre
Majefté , que nous efpérons de mériter toujours , nous
D ttt
aurolt procuré la confolation de coopéerer à des
vues il clignes de fa Religion , & de lui propoler
les moyens les plus fûrs &: les plus efficaces pour
les reiTîpllr.
Mais , quoique les Edits s'annoncent fous des aufpices
fi favorables , nous ne craignons point de dire qu'en
y cherchant ce qu'ils annoncjoient , nos efpérances
ont été trompées ; & qu'au heu d'y trouver des Ré-
glemens tendant à la réforme , nous n'y avons apperçu
que des projets de deilrudion qui porteroient le
coup le plus funefte à l'Inftitut Monaftique.
Nous favons que rien ne fut plus éloigné de vos
intentions, & que votre rcfpefi: pour la Religion, que
votre amour pour TEghfe vous font voir dans Tétat Re-
ligieux ce qu'il eft en effet , un état faint par lui-
même qui doit perpétuer dans l'Eglife la vie des
premiers Chrétiens , &: qui eft un port de falut pour
beaucoup d'ames qui fe perdroient dans le tinnulte
du fiecle.
Cette idée eft celle qu'on s'en eft formée de l'o-
rigine des Màiibns Rehgieufes , & qui s'eft perpétuée
jufqu'à nous par une tradition confiante depuis 14
fiecles. On en a toujours conclu qu'il ne falloit pas
détruire ces Maifons Privilégiées , parce qu'elles
croient trop utiles pour les renverfer , & que , parce
que les avantages - qu'on en attend , étoient attachés
à la régularité , il falloit la maintenir dans ceux qui
l'avoient confervée , ou la rétablir dans ceux où elle
étoit affoiblie.
Mais rien ne feroit plus contraire à cet intérêt ef
fentiel que la ruine de l'inftitut Religieux , &: tout
projet qui tend à la fappreffion, ne fauroit être que
contraire au bien de la R.eligioii 6^ au vœu de
l'Eghlé.
Oui, Madame,, nous le difons avec douleur, il
n'y a pas lin feul Article dans les deux Edits , qui
ne nous paroifTe menacer l'état R.eligieux d'une perte
affurée. L'exécution de ces Loix fenneroit l'entrée
des Monafteres ; elle dégoûteroi!: ceux de vos Sujets
( 5' ) .
qui fe fentiroient portés à s'y retirer , fî même elle
n'infpiroit pas du mépris &: de Taverfion pour un
érat qui a formé tant de Saints , &: la décadence des
Monafteres bientôt abandonnés , feroit dans peu lui-
vie de leur ruine abiblue.
Nous olbns affurer Votre Majefté qu'elle en fera
elle-niême convaincue, û elle daigne fau'e lire nos
très-humbles Repréfentations , tant les preuves que
nous en avons mis fous les yeux de Votre Majefté
lont fenfibles, multipliées & frappantes.
L'extinftion de l'Inftitut Monaftique eft le cen-
tre , ou le terme commun auquel aboutit le fyftéme
général des deux Edits. C'eft ce qui nous allarme ,
& ce qui touchera fans doute votre piété &: la
bonté de votre cœur. Les deux Edits ont encore
l'inconvénient de porter atteinte dans leurs Régle-
mens particuliers , aux Décrets des Conciles , aux
Loix fondamentales de la vie Religieufe , principale-
ment fur l'étendue du vœu de pauvreté, &: fur les
devoirs qu'exige le renoncement , auxquels les Re-
ligieux s'engagent.
On ne fauroit leur laiiTer la liberté de toucher
leurs penfions , & d'en difpofer, fans les rendre pro-
priétaires , ou fans les inviter à le devenir.
C'eft l'effet nécefl'aire que produiroit l'Edit de 1772 ,
Se les Loix de la confcience ne permettent jamais
aux Religieux d'ufer de la liberté qu'il leur accorde.
Nous fommes avec le plus profond refpeél,
M A D A M E ,
DE F0TE.E MAJESTE^
Les très-humbles &: très-obéif-
fants ferviteurs & Suiets.
Etait Jigncs , f Jean-Henri Archevêque de
Maiines. J. R. Evêquc de. Bru-
gi$. M. G. EvêquiS d'Anvers,
•}• Félix Evéque d'Iprcs. M. J.
Evéque de liuremonde. G G,
Eveque de Gand. F. Evêqut
de Namur^
D 1
(50
MÉMOIRE préfcnté par les Evêques des Pays-Bas
à Sa Majtjîé i' Impératrice- Heine Douairière,
•ES Evéques à^s Paj's-Bas viennent avec la con-
fiance la plus refpeclueufe, expofer à Votre Maiefté
leurs allarmes les plus vives , celles que leur caufent
les clifjjofitions des deux Edits publiés de votre au-
torité les i"? Mai 1771, Se 18 Avril 1772, concer-
nant l'Erat Reûgieiix.
Ces dei;x Loix paroiiTent avoir eu pour objet de
rétablir dans les Monafteres l'exaftitude de la difci-
pline régulière, en réprimant des abus propres à y
cailler le reiâchement ; & des Evêques occupés de
leur niiniilere , ne fauroient qu'applaudir à des vues
fi fage<: en elles-mêmes, fi dignes de la piété d'une
augulie PrincelTe qui m.et fa gloire à faire fleurir la,
Rtlgion dans fes Etats : mais quelle n'a pas été leur
cinfternation ," lorfqu'en lifant avec attention les deux
Edits , lorfqu'en comparant leur difpofirif avec les
motifs énoncés dans les préambules , ils ont eu la
douleur de voir , que ceux-ci plus apparens que réels ,
annonçoient une réforme , mais que l'effef des régle-
mens feroit infailliblement de porter à i'iitat Reli-
gieux un coup tunefte , qui produiroit , quoique peut-
être par des effets lents &: progreififs, la ruine totale
des Monafi:eres.
Les deux Edits peuvent être confidérés dans leur
généralité , & dans l'enfemble de leur iyftême , ou
dans les difpofitions particulières qu'ils renferment.
Sou<: ce dernier point de vue, ils préfentent parmi
qiielqies réçjlemens utiles , des articles qu'on ne
conciliera jamai., avec les Loix fondamentales de l'Inf-
titut Religieux ; fous le premier afpeéf , beaucoup
plus important, ils paroif^'ent menacer l'Ordre Re-
ligieux d'une chute alTurée.
Mais qu'il nous foit permis , avant de développer
(53)
Ibus les yeux de V. M. ce double fujet de nos juftes
inquiétudes, de lui rappeller les idées primitives qu'on
s'eft formées de l'Etat Religieux, l'intérêt que rÉglile
a pris à fa confervation , 6>c les avantages que la Re-
ligion a droit d'en attendre.
L'Etat Religieux doit fa naiiTance aux premiers
fîecles de l'Egllfe , & comme l'ont remarqué les Ecri-
vains les plus favans, c'efl dans les iiecles les plus faints
& les plus éclairé? qu'il a commencé , 6c qu'il s'eft
étendu avec des progrès qui rendent à jamais ces iiecles
les plus dlftlngués dans les faftes de l'Egllfe.
L'Etat Religieux eut le double avantage , de pro-
curer un afyie aux innocens , 6^ aux pécheurs touchés
d<; Dieu, une retraice, où ils puilcnt fe livrer aux
exercices de la pénitence. Tous , ou prefque tous
ceux qui avoient un délïr fincere de fe fauverjOU
qui fe fentolent appelles à embraiTer la voie des con-
feils évangellques , s'enfermoient dans les Monafte-
res , parce que le falut y étolt plus facile , qu'on y
étoit foutenu par l'exemple , & qu'à l'abri des ten-
tations auxquelles expofe la corruption du fîecle , on
yjvivoit fous l'empire d'une règle qui dirigeant toutes
les aftions , ne laifioit aucun vuide dans la journée.
Il n'efi: donc pas furprenant , que l'Egllfe ait pris le
plus vif intérêt à la confervation d'un Etat qui lui
étoit fi précieux ; qui rendant la pratique des confells
plus commune & plus facile , faifoit revivre dans les
Provinces chrétiennes , le beau modèle des Fidèles de
Jerufalem ; qui expofolt aux yeux de tous les peuples des
Pénitens publics , tous occupés à appalfer la colère di-
vine , &c à attirer les bénédicllons célei-les. Des Chré-
tiens parfaits dont la conduite édifiante , en prouvant
d'une manière fenfible la fainteté de l'Egllfe & la vé-
rité delà Religion chrétienne, apprenoit aux Fidèles que
la Foi évangélique , loin d'être impraticable dans fes
préceptes , a la puiflance de rendre les hommes étran-
gers à la terre, &: des êtres ici-bas , citoyens du Ciel.
Non-feulement les Monafteres étoient des Malfons
de falut, pour un grand nombre de perfonnes qui s'y
( 54 )
t^evouoicnt aux travaux d'une vie pénitente; il'; devin-
rent une fource de bénédiclions par l'exemple , les
prières & les bonnes œuvres des Religieux qu'ils rena
fermoient.
En travaillant à leur propre fanftification , les Reli-
gieux n'oublioient point les befoins de leurs frères , ils
mettoient au contraire au nombre de leurs plus ei-
lentielles obligations , celles de fléchir la Juftice divine,
d'implorer fa miféricorde , de lever des m.ains pure?
au Ciel , pour attirer la bénédiction de Dieu , fur les
travaux des Payeurs , & acquitter pour le commun
des Fidèles engagés dans le iiecle , & trop partagés
par les foins ôi les occupations extérieurs , le tribut des
louanges dû à la Majefté Suprême. C'efl pourquoi
Saint Bernard difoit aux Moines de Clairvaux, qu'ils
étoient entrés dans le Cloître pour répandre des lar-
mes continuelles fur leurs péchés & fur ceux du peu-
ple, ia) ^
Pour peu qu'on ait de connoiflance de i'Hiftoire ,
on fait quels fecoiirs TEglife a retirés des Monaderes ,
foit par les Minières évangeliques qu'elle y trouvoit,
foit parleur zèle à défendre la Foi contre fes ennemis.
Ceft dans la iblitude des Cloîtres qu'ont été formés
tant de faints Evêques , qui ont été la lumière de leur
Siècle. » Et il étoit ordinaire de prendre les plus faints ,
» d'entre les Moines , pour en faire des Prêtres 6v des
» Clercs; c'étoit un tonds où les Evoques étoient af-
» furés de trouver d'excellents fujets , & les Abbés
» préferoient volontiers l'utilité générale de l'Eglife , à
» l'avantage de leur Communauté, (b)
Il feroit trop long de rapporter les combats que les
Religieux ont foutenus pour la défenfe de l'Egliie , 6c
pour fa Doctrine , combats qui leur ont tait donner
par Saint Jérôme , le glorieux titre de colonne de l'E-
(4) In hoc enim Monafterlo intramus , ut peccata noflra
& populi defleamus. Ep. 445,
(b) Fkury z. Difcours, n. 3.
gîlle (u) , &: qui les a fait appeller par Saint Grégoire
de Naziance, le rempart cie la Foi, & le ibutien de
VUnivers (/^). On lait que lorfque le flambeau de la
Foi commença à s'éteindre dans l'Orient , l'Ordre de
Saint Benoît procura une nouvelle fécondité à l'E-
gliie , par ks Miffions en Angleterre &: dans tout le
Nord; &: c'eft encore principalement aux travaux des
Religieux, que, lorfque les dernières hérélies dévai-
Toient tant d'Etats Catholiques , la découverte de l'A-
mérique ayant ouvert un champ immenfe à la prédi-
cation de l'Evangile , ces nouvelles Contrées durent
leur vocation à la Foi de Jefus-Chrift. (c)
Mais rien n'eft plus propre à nous faire refpefler
rinftitutMonaftique, que l'acharnement des Hérétiques
pour le décrier , & le zèle confiant des faints Doéleurs
&: ds;s autres Eccléfiaftiques pour repouffer leurs in-
ventives.
Les Ariens , les Manichéens , les Donatiftes , fu-
rent les ennemis les plus déclarés de l'Etat Monaf-
tique : St. Augullin en prit hautement la défenfe dans
fon Traité des Mœurs de fEgli/è. Tels ont été dans
le 15™=. Iiecle >Viclef &c fes acil é.cns , &: dans les
fiecles fuivans les prétendus Réformés , contre lef-
quels nos Controveriiftes , chargés de la défenfe de
l'Eglife , {e font fait un devoir de repouiîer leurs
calomnies. C'eft en particulier l'objet du Traité que
le favant tk pieux Cardinal Belbrnîin a publié fur les
Moines.
De tout tems l'Etat Religieux trouva auffi des Ad-
verfaires parmi les gens du fiecle peu inflruits des
vérités , ou peu pénétrés des fentimens de R^eligion,
qui plus occupés d'une politique toute mondaine, ont
déclamé contre l'Etat R-cligieux ou infpiré contre
hfi de funeftcs préventions.
(a) EpiP. Sô.
(t) SubfiUium Fidel , plebis laus , & bafis orbis Admjv.uor.
Carm. pro Monachls.
•c) ThoiiKiiTin. D'ifàpL Eccl. T«m, 1. pa^c 1464.
i) 4
C 56)
En 592.5 clés CoLirtifans qui faifoient moins de cas
de la gloire de l'Eglife que de la profpérité tempo-
relle de TEtat, ayant eng.igé l'Empereur Maurice à
publier une Loi qui interclifoit aux Militaires la li-
berté d'exnbrafTer la vie monaftique , St. Grégoire-
le-Grand ne put voir qu'avec la plus profonde dou-
leur que l'entrée du Monaftere fût fermée aux Of-
ficiers & aux Soldats , & qu'une Loi publique les
privât d'un moyen fi utile de réparer par la Péni-
tence les défordres û communs dans la profeffion
des armes. 11 écrivit à l'Empereur pour lui faire fen-
tir le danger de la nouvelle Loi , & perfuadé qu'elle
intéreiToit fon falut , il le conjura de ne pas obfcur-
cir devant Dieu par cette démarche, tant de lar-
mes que ce Prince avoit répandues , tant de prières ,
de jeûnes &: d'aumônes que fa piété lui avoit fait
f.iire.
Peut-être pourroit-on penfer , en voyant l'intérêt
que les plus grandes lumières de l'Eglife ont pris à
l'Etat Monafiique , que tous les Religieux dans la
première ferveur de leur établiflement , couroient
d'un pas égal la carrière dans laquelle ils étoient en-
tjés. Mais nous apprenons des Saints Pères qu'il y
avoit dès- lors des Religieux non- feulement foibles ik
imparfaits , mais dont la conduite déshonoroit la
profelîion Monaftique.
St. Auguftin écrivoit à fon Clergé que , s'il y avoit
peu de Chrétiens plus parfaits que ceux <]ui avoient
efficacement travaillé dans les Monafleres à la ré-
forme de leurs mœurs , il connoilToit peu de Sujets
plus conompus que les Moines qui dans le Cloître
avoient dégénéré de leur vocation (rt). Frappé des
iViiies fâcheufes de ce défordre , il fe croyoit obligé
de prémunir fon Peuple contre le fcandale qui en ré-
' (a) Difficillimè fura expertiis meliores quàm qui in Monaf-
tcrio pr( feceriint ; ita non fum expertus pejores quam qui in
Monafieriis cecidcrunt. £f. yS,
(57)
^ultoît, & de l'avertir que la dépravation des mé-
dians Religieux ne devoit pas taire plus d'imprei-
iion lur les el'prits , que l'exemple des m.auvais Ecclé-
fiaftiques &c des mauvais Chrétiens.
Mais au lieu d'en conclure qu'il falloit les aban-
donner à leur malheureux ibrt , nos Pères n'en mon-
troient que plus de zèle pour rappeller les Religieux
à une exaéle difcipline , & en cela on peut dire qu'ils
fe font conformés aux vues de la Providence , puif-
qu'elle a fufcité en difFérens tems des hommes évan-
geliques qui , pénétrés de l'efprit des premiers Fon-
dateurs de rinltitut Monaftique, y ont reffufcité la fer-
veur de fon premier âge. Que (î fur la première
décadence de la vie régulière , ont eût pris le parti
défefpéré de fupprimer l'Ordre Monaftique , l'Eglife
eût été privée des abondantes bénédiftions qui ont
été la faite & des grandes réformes telles que celles
de Cluny & de Cîteaux , & de l'éreftion des nou-
veaux Ordres.
C'efi: parce qu'on n*a jamais varié dans ces fenti-
mens, que le Concile de Trente a ordonné de rétablir
la régularité dans les Maifons conventuelles où elle
étoit tombée , 8c de la fortifier avec foin dans les
lieux où elle s'étoit heureufement maintenue (a). Le
motif du Concile efl tiré des importans avantages
que la Religion retire des Monafleres pieux &: réglés :
Qiion'ia'n non ignorât fancia Synndus , quantum ex
MonaJUnis pie injîitutis , & récit adminijlratis in Ec-
clijïd Dit fplcndoris atque iitil'itatis oriatur. Ce motif
avoit été celurdu Concile d'Auiun de l'an 670. C'eft
celui qui fe trouve rappelle dans les Conciles pofté-
rieurs. Le Concile de Cologne de 1451 penfoit que
c'étoit contribuer à l'honneur de Dieu , au falut des
âmes & au bonheur du Peuple , que de travailler à
taire obfer\'^er aux Perfonnes Religieufes la règle à
laquelle elles s'étoient vouées {h). Le Concile de
(>z) Seflf, 25. Conc. Labb. tooi. 14. pag. 896.
Kb^ Ibid. tom. 13. p. 1381.
(5n
Malines Je i -570, en renouvellant îe Décret du Con-
çue de Trente , fondoit la nccelî:té de réformer les
Moiiaileres , lut ce que ceux qui ibnt hien réglés ,
font pour le Peuple Chrétien, ce que les Citadelles
fortifiées font dans un Pays expofé aux incurfions de
l'ennemi (a).
Quand oa connoit l'Infcitut MonaiHque , Ton objet,
fa fin , les importans fervices qu'il a rendus à l'Eglife ,
& qu'il lui rendra touiours , quand on veillera à en
coni'erver l'efprit dans les Ordres Religieux , on ne
pourra qu'être alarmé de tout projet qui îendroit à pri-
ver la Religion d'un Etr^blilTement fi faint en lui-même
& fi précieux à l'Eglife , dont il fait un des princi-
paux ornemens.
Dès le y, fiecle , le Concile général aïïemMé
à Chalcedoine , avoit défendu , fous peine d'être traité
comme violateur des fairxts Canons , de changer en
habitations féculieres , les Monafteres légitimement
érigés. La Loi portée par ce Concile, rappellée en 789 ,
dans le Concile d'Aix-la-Chapelle, & renouvellée
par celui de Conftantinople de l'an 370 , a été in-
i'erée dans le Corps de Droit (^).
Le Concile de Seviîle de 619 , en ordonnant que
le5 Monaileres fuïïent maintenus dans une mviolable
fl:..biliîé , déclara étranger au Royaume ele Dieu
quiconque entreprendroit de les renverfcr (t). Le
lécond Concile de Nicée , en 787 , regarcloit la del-
truclion de ces Maifons vénérahles ^ commme un fléau
attiré par les péchés des Peuples (_d).
(a) Monafteria rcflè inftituta , id funt in Populo Chrif-i
tiano , quoJ arces mnitJin pnefidio bene infiruoii in regione
hyitiuin incurfior.ibus expcfità. ( Tit. de regiJ. )
(^) Cor.c. Labb. t. 4. pag. 778.
(cj Si quis... qi'.odiibet Monailerium aut vi cupidiratis
fucViandum , av.t riiriuktiône aliquà frauôii conveilendum
tcr.taverit , anarhenia cftectus nianeat à Regno Dei extra-
neus. ( Ibld. t. 5. /'jg. i6ôy. )
(i-fj Quod in magnà damnatlone fint , qui Monafteria
(59)
Si les Nîoines ( ce font les exprefllions du Concile*
fie Tliionville , en 844 ) le conduilent d'une ma-
nière peu honorable à la Religion , il faut les ré-
former ; mais à Dieu ne plaife qu'on détruife l'Ordre
Religieux , à caufe des raéchans qui s'y rencon-
trent (a).
Le Concile de Meaux de 845 , repréfentoit aux
Princes qu'ils étoient eux-mêmes intérefles à empêcher
la ruine des Maifons Religieuies, parce qu'ils dévoient
faire accomplir la pieufe intention des Fondateurs , &
qu'en foufFrant la deftruction de ces Lieux faints, ils
s'expoferoient à la vengeance que demanderoient à
Dieu ces Fondateurs (/•). Celui de Pavie, de l'an 850,
avertiffoit les glorieux Empereurs , que les Fondateurs
ayant mis fous leur proteftion les Monafleres qu'ils
avoient érigés , la Puiflance Souveraine , qui loin de
les défendre, fe porteroità les fupprimer, dtvcit d'au-
tant plus craindre le jugemient de Dieu , qu'il n'y a
point ici bas de Tribunal qui puiffe la juger, (c)
Les Evéques des Pays-Bas n'ont garde de vouloir
établir le parallèle le plus léger entre lôs Edits de 1771
communia faciunt habifacula, quoriam proprer calamitatem ,
qure pro peccatis ncftriâ , in Eccleilis fada efî , fi-brcptse
funt. .. qucsdam venerabiles Doimis , & fa^ia fr.n: communia
dlverforia. ( ItiJ. tom. 7. pag. 6oj. )
(j) Propter pravorum nequiriam , Ordo Re!'igior.ii; , &
Loca facratiffima eis , qiùbus lic'tum non eft , ccmmittan-
tur. ( Ihid tom. 7. )
ib) Providendum efl: Réglas Ma-eftati. . . Ut Ibidem Rcbgio
«bfcrvarettir. . . Qiialiter veta ndeb.iim inconculTa peimaneant ,
ne voces eorum contra fe ante Deum clamantes,., ccndem-
nabiles fentiat. (Ibïd. t. 7. pi:s;. iSp. )
(C) Suggerendum efi: beatilbmis Imperatoribus quia.. . . &
il... impugnatcres (.fFicUinuir , qui praepugnaie c'ebv.ctTint ,
cavendum fumir^opere Principibv.s , ut qui a nemine nunc
judicaptur, ne in futrro pîdicio gravit s judicentur.. . Nos qui
debjtoies fumus ut fidcliier annuntiemus , idcl-c6 fidclîLtr
fuggérimus , quod filere non audemus. ( Ji.-i. t. 8, pag. 6j, >
( 6o )
& 1771 , 5c les Loix facrileges de pluHeurs Princes
fur Cet objet pour détruire l'Etat Religieux. Ils fe fe-
ront toujours un devoir de rendre l'hommage le plus
authentique à la piété de V. M. I. , à fon attache-
ment pour l'Eghfe & pour la Religion. Mais c'eft l'in-
time conviclion où ils font , que Dieu a gravé profon-
dément ces pieux lentimens dans le cœur de Votre
Majefté , qui leur infpive la confiance de lui faire ap-
percevoir le danger des deux Edits , qui , contre fon
intention connue, &" fans doute contre celle des per-
fonnes qui ont rédigé les deux nouvelles Loix , con-
duiroient l'Etat Monafcique à un dépériiTement infen-
/ible , à une mort lente , dont il ne fe releveroit pas.
L'Edit du 13 Mai 177 1, paroît avoir eu un objet
intérelf^iut , pour le bien de la Religion & de VEtat;
il a été deftuié à rendre Vadmijjîon k C Etat Re-
ligieux entièrement gratuite ; à faire revivre fur ce point
important de la Difcipllne régulière , les difpofitions
des faints Canons ; à faire ufage des moyens les plus
propres à les faire refpecier & objerver ^ & à profcrire
& prévenir tousles fubterfuges , tous les prétextes pal-
liés par lefquels ont efl: parvenu à éluder leur fainte
rigueur
LE dit a 73 Articles.
Le premier défend indiftin6lement à toutes les Com-
munautés Religieufes , d'exiger &c même de recevoir
quelque fomme que ce foit en argent , ou en valeur
à titre de Dot , Habillement , Don, Penfion , de No-
viciat ou autre titre Se prétexte que ce puiffe être ,
pour la réception ou admiffion des Religieux &: Re-
ligieufes.
Le ime. Article déclare nulles toutes ftipulations,
ou conventions qui fe feroient à ce iujet direélement
ou indireftement , verbalement ou par écrit.
Le 3 me. Pour empêcher tout prétexte d'éluder la
Loi, & fpécialement celui de la libéralité &; de l'au-
mône, interdit la faculté de faire des dons &: legs,
foit aux Maifons , foit aux perfonnes Religieufes.
( 6I )
Le4me. prononce une amende égale au don Se legs,
ou à ce qui aura été ftipulé pour l'ingreffion en Re-
ligion , quand même la convention n'tût point été
elFeâ:uée , tant contre les Communautés qui auroient
reçu , que contre ceux qui auroient donne ou contri-
bué au payement.
Le çme. autorifc tous les Parens à réclamer
pendant 30 ans les dons & dots faits aux Monafteres
»i)u à leurs membres.
Par le 6me. l'amende & la confifcation font re-
mifes à ceux qui répeteroient eux-mêmes , ou dénon-
ceroient à la Juftice leurs propres conventions ou li-
béralités.
Le yme. en étendant la même peine aux Nîonal^
teres des Mendians , veut que les amendes qu'ils au-
roient encourues , foient payées par les Syndics de
ces Ordres, ou que ces Monafieres ibient privés de
la quête pendant fïx mois.
Pour parvenir plus lurement à l'exécution de ces
difpofitions rigoureufes , l'Article 8 'enjoint aux Su-
périeurs & Supérieures des Communautés Régulières,
d'avertir les Officiers Fifcaux (un mois avant la Pro-
feffion ) du nom du Novice , ainfî que de fes Père
& Mère ou Tuteur , &: du lieu de Ta naiiîance , à
peine de 200 écus d'amende.
L'Article 9 permet néanmoins aux Maifons R-eli-
gieufes d'exiger des Novices qui quitteront l'Etat Re-
ligieux, une penfion de 300 florins, pour nourriture,
habillement & autres dépenlés de toute efpece.
L'Article 10 dépouille de la jouiflance de leurs
biens , tous ceux qui entreront au Noviciat , fauf à
les reprendre , s'ils renoncent à l'Etat Monaftiqi^e ,
mais fans pouvoir répéter les fruits perçus pendant
cet intervalle.
L'Article 1 1 j voulant extirper l'abus des penfîons
illimitées au profit des Reliaieux ou Religieufes , les
réduit à la fomme de 50 florins, à peine de la con-
fifcation de la rente ou penfion au profit des Pau-
vres , 5c d'une amende de laoo flor. contre les Corn-
C 61 )
îîiunautés , Si d'une pareille amende conntre les Pè-
res , Mères , Tuteurs & tous autres.
L'Article 12 défend aux Religieux qui font en
congrégation , d'envoyer les Sujets Nationaux faire
leur Noviciat clans des Mailbns fuuées hors les Terres
& Pays de l'obéiffaiice de l'Imperatrice-Reine , à
peuie de looo écus d'amende payables folidairement
l>ar toutes les maifons de rC3rdre , & de pareille
peine contre les Pères , Mères ou Tuteurs , & même
d'interdiction perpétuelle à ces Novices de rentrer
fous la domination dans une Maifon de l'Ordre ; fi
le Novice eit d'un Ordre mendiant , le Couvent feia
privé de ia quête pendant fix mois.
Enfin l'Art. 13 déclare que les contraventions aux
dirpohtions précédentes ne pourront être couvertes
par tonte prefcriprion au-defTous de 30 ans.
Le fécond Edit a enchéri fur des Réglemens déjà
fi rigoureux.
Le premier Article a réduit à 150 florins la pen-
fîon des Novices qui fortent des Maifons P>.eligieufes.
Le fécond a défendu de donner à aucune Com-
munauté Régulière le capital de la rente ou penfion
viagère de 50 florins, permife en faveur des Reli-
gieux &. Religieufes, à peine de connfcation du ca-
pital au profit des pauvres , &: d'une amende dé pa-
reille fomme , tant contre le Couvent , que contre
les Parens.
Le 3 me. a ordonné que les Couvens devant fournir
toutes les chofes néceifaires à leurs Religieux, les
Supérieurs ne pourroient retenir ni faire tourner au
profit de la Communauté , aucune portion de la
penfion de 50 florin^; , dont chaque Religieux ou Px^e-
iigieufe jouira pour la totalité , fous la direction néan-
moins de fes Supérieurs.
Par l'Article 4, il a été défendu d'admettre les
Novices à Profeliion avant l'âge de 15 ans accom-
plis , à peine de 4000 florins d'amende , d'expulhon
perpétuelle des Supérieurs des Etats de l'Impératrice,
iU de dépofitjon <^'es Supérieurs , avec inhabiUté de
( «3 )
pouvoir ]<im;iis occuper aucun emploi ou office dans
l'Ordre , pour la première contravention ; & en cas
de récidive, à peine en outre de la ilîpprellion en-
tière du Monaflere.
L'Article 5 , dans la vue d'aflurer Texécution' dn
précédent , a enjoint aux Supérieurs d'envoyer , un
mois avant la Profellion , l'extrait bapriftaire de chaqu-e
Novice duemeut légaiifé , aux Conseillers Filcaux ,
à peine de 200 écus d'amende.
Ce tableau pourra-t-il ne pas faire fur le cœur de
de V. M. rimpreffion qu'il a gravé dans celui des
Evêques des Pays-Bas ?
Nous ne pouvons qu'applaudir aux difpoiîtions de
l'Edit du 13 Mai 1771 , qui profci"ivcnt les exactions
de Dots, les Stipulations pour l'Ingrcilion en Reli-
gion. Parfaitement conformes à l'erprit de l'Eglife ,
ces difpofitions ne font que Texprcffion fidelle des
Conftituîions canoniques.
Mais qu'il nous foit permis de faire obferver à V.
M. combien de Réglemens étrangers a cet objet
préfentent les deux Edits. L'âge des vœux reculés
à i"; ans; l'Interdiction aux Communautés Rcligieu-
fes de recevoir des libéralités volontaires , à celles
qui peuvent en avoir befoin , à vos fujets eux-mê-
mes ; l'Interdiction de faire l'aumône à des Lieux
faints ; ne permettre une peniion pour le Noviciat ,
que dans le cas où les Novices renonceroient à la
vocation Religieufe ; ces mêmes Novices punis, par
la perte de leurs revenus pendant leur féjour au Novi-
ciat, fans qu'ils aient droit d'exiger un compte de l'em
ploi qu'on en a fait pendant leur demeure dans les
Monafteres , quand même ils retournernient dans le
fiecle ; la jouifTance exclufive de la penfion accordée
aux Religieux qui les rendroit Propriétaires , fi con-
traire au vœu de pauvreté. Les peines fi multipliées,
fi effrayantes , ■ fi peu convenables en parlant à des
Religieux , qu'on lit cependant à chaque Règlement
que contiennent les deux Edits , & qui ne peuvent
(64) ^ ^ ■
qii'inrplrer ou du mépris ou du dégoût pour un état
iaint en lui-même.
L'exaction des Dots eft un abus , p?.rce qu'elle
tend à faire admettre cà Profeirion , fous l'appas d'un
profit temporel , des Sujets qui ne font polnt^ appelles
à la vie Religieufe ; parce qu'elle infefte de pactes
hmoniaques, un eni^agement facré qui ne doit avoir
que la Religon pour principes , & le ialut éternel pour
terme. Mais la profcription de cet abiLs , dont l'ob-
jet , fui van t l'efprit de l'Eglife , eft de maintenir la
pureté de la vie Religieufe , peut avoir pour motif
une politique purement féculiere , & le funefte deflein
de préparer l'extmction des Monafteres médiocre-
ment dotés , & d'enlever à fous les moyens d'admet-
tre plus des Sujets qu'ils n'en peuvent entretenir ,
quelle que fût la vocation de ces fuiets furnuméraires.
Autant le zèle qui arme la main du Protedeur des rè-
gles canoniqvics, pour corriger ce qu'elles condamnent ,
eft-il digne de rcfpect Se de louanges , autant le but inf-
piré par la politique, d'affoiblir, d'énerver l'Etat Re-
ligieux , doit-il faire verfer des larmes aux Evêques ,
à qui le falut des âmes eft confié.
Nous ne le difor.s qu'avec la plus vive douleur ;
tout fait craindre que l'efprit de réforme ait eu moins
de part à la confe61:ion des deux Edits , que l'efprit
de deftruftion. Si l'on ne vouloit que remédier à
l'abus des dots , il étoit facile de prendre des pré-
cautions pour le déraciner. Tant d'autres difpoiitions
qui n'ont aucun rapport à cet objet , n'annoncent que
trop qu'on a eu des vues ultérieures.
L'intérêt de la réforme n'exigeoit pas fans doute ,
qu'on fixât les Profeftions à un âge qui les rendra
néceftairement plus rares & plus difficiles. Il n'exi-
geoit pas qu'on mît tous les Monafteres dans la pro-
hibition d'accepter les libéralités des fidèles, & que
pour en arrêter plus fûrement la fburce , on fournît
à des peines les mains charitables qui fe porteroient
à les fecourir. L'intérêt de la réforme ne demandroit
pas
( «5 )
pas qu'on fermât pour ainfi dire , ou qu*on rétreftit
du moins les avenues des Maifons Religieufes paf
les dures conditions qui font impolées à ceux qui
concevroient le pieux projet de Te confacrer à Dieu ,
6c d'éprouver leur vocation pour cet état de perfcc-^
tion. Il ne demandoit pas qu'on ajoutât à ces pré-
cautions afFeftées des détenles intimidantes , des mé-*
naces de délation -, des amendes , des difpQfitions ou
bannifTement des Supérieurs ou Supérieures Réguliè-
res , la deftruftion même des Monafteres.
Quand ces Loix n'auroient d'autres dangers qm
celui d'infpirer au Peuple, iinon de l'averfion & du
mépris , du moins du dégoût & de l'indifférence
pour l'Etat Religieux , c'en leroit aflfez pour engager
Votre Majefté à les révoquer. Par cette feule im-
preflion , ils feroient peu dignes de votre piété , ils
ne pourroient qu'attrifter TEglife , en éloignant les
fidèles des afyles qu'elle leur é ouverts pour les met-
tre à l'abri des tentariorjs du rttonde.
Or, non -feulement les Edits produifent cette fu-
nefle imprefîion , par le filence qu'on y garde fur
les avantages de l'Etat Religieux , parce que rien n'y
infpire le refpe(5l qu'il mérite ; parce que le peu de
cas qu'on paroit en faire , frappe vivement les ef-
prits , fur-tout dans un tems où l'incrédulité &c l'ir-
réligion font de il rapides & de ii malheureux prc
grès •, mais c'eft l'effet naturel & néceffaire des Or-
donnances que renferment les Edits. Ils accumulent
en.traves far entra'î'es pour embarraffer l'accès des
Maifons Religieufes. Ils en alarment & fatiguent les
Membres , 6c fur-tout les Supérieurs. Ils prononcent
dans un cas leur deflrudion irrévocable , Se fur le
champ. Si ces Edits avoient Ueu, leur exécution,
femblable à un poifon lent , ne tarderoit pas à ren-
dre les Monaileres déferts.
Il efi fans doute de notre Miniftere de faire à
Votre Majefté les plus refpeélueufes , mais les plus
fortes Repréfentations fur des Edits fi vifiblement
furpris à la bonté de votre cœur. Nous nous ren-
£ttt
( 66 )
tirions fourds à la voix de la Religion , fi nous étions
inlenlibles au coup que ces Loix portent à l'Etat Re-
ligieux , & nous ne pourrions reiîer dans le filence ,
à la vue des maux qui en doivent être la fuite, fans
trahir nos devoirs , & le cri de notre confcience.
Nous ne ferons donc que marcher (iir les traces de
nos pères , & imiter leur zèle , en empruntant les ex-
preffions du Concile de Pavie , en rappellant à Votre
Majeflé ce que ce Concile difoit aux glorieux Empe-
reurs : Les Monafteres font fous la proteftion des
Princes, & fi, au. lieu d'en être les Défcnfeurs &
la fauve-garde , ils s'en rendent les deftrudeurs , ils
doivent craindre d'être févérement juges au Tribunal
du Tout-Puiflant. Pour nous , de qui la fidélité de-
mande que nous les avertiffions , nous leur fuggé-
rons humblement ce que nous n'oferions leur taire :
Nos verb , qui dcbltorcs jumiis , ut jiddita annuntic^
mus , idcirco fidclitcr fuggerimus , quod Jîkre non
audemus. ^«•,
Mais indépendamment de 'ces premières obferva-
tions , qui réfultent du fyftême général des deux Edits ,
qu'il nous foit permis d'entrer dans quelque détail fur
leurs difpofitions particulières.
I®. L'Article 4 de l'Edit de 1771 , défend à tous
Supérieurs Réguliers de l'un & de l'autre fexe , d'ad-
mettre les Novices à la Profeffion avant l'âge de
0.5 ans; & cette défenfe cft accompagnée de menaces
tfui montrent l'intérêt qu'on met à fon exécution.
Il n'eft pas befoin de chercher le motif de ce Ré-
glement , s'il a eu pour objet d'enlever aux Monaf-
teres un grand nombre de Sujets , qui , en les renou-
veliant, perpétueroient leur exiftence. Mais en écar-
tant ce m.otif, que la Religion ne pourra jamais avouer,
quel prétexte raifonnable feroit capable de le jufii-
fier ? Auroit-on craint que des engagemens pris trop
légérem.ent dans les Cloîtres, n'excitaiîent enfuite le
regret & le repentir , & auroit-on prétendu , en re-
culant les vœux à un âge plus mûr , prévenir les
facrifîces forcés, indifcrets, précipités?
(67)
On n'avolt pas cette appréhenfîon dans le.<; fiecles
les plus éclairés de l'Eglilé. On voit par le Chap. y
de la Règle de Saint Bafile, que ce Saint Dofteur ,
aflimilant l'engagement de la Profeffion Religieufe
à celui du Mariage , regardoit l'âge requis par les
Loix pour ce dernier engagement , comme la règle
de l'autre. Dans la Lettre à Amphiloque , Saint Ba-
file fixe de 15 à 17 ans l'âge où l'on pouvoit ad-
mettre les Filles dans les Monaftercs. Saint Chriibl-
tome fuppofe , dans Ton Apologie pour l'Etat Monas-
tique , que l'entrée des Monafteres étoit ouverte aus
jeunes gens ; puilque c'eft aux pères qui détournoient
leurs enfans de la vie Religieulé , qu'il adrefle les
éloquens reproches. Saint Grégoire -le -Grand n'exi-
gea pas plus de 18 ans pour les Monafteres d'Angle-
terre. Si la Règle de Saint Benoît ne détermine au-
cun âge précis , c'eft parce que , la capacité des jeu-
nes gens étant plus ou moins tardive , on croyoit
devoir laiffer aux maîtres de la vie Spirituelle , le
difcernement de ceux qui étoient propres à la dis-
cipline Monaftique. Dans la fuite, le dixième Concile
de Tolède permit de recevoir les Religieux à 14 ans.
Les Ordres de Cluny &; de Cîteaux turent autoriles
par les Papes à recevoir les Sujets à 15 ans. Enfin,
l'âge des vœux a été fixé par le Concile de Trente
à l'âge de 16 ans ; Son Décret , précédé du plus Sé-
rieux examen , & dreiSé avec la plus grande matu-
rité , a formé la Loi générale de l'Eglife ; il a été
reSpefté &: Suivi dans tous les Etats Catholiques.
En France méme^ où l'Ordonnance d'Orléans avoit
placé les vœux à 25 ans , on Se hâta de changer
cet ufage pour Se conformer au Décret du Concile
de Trente. Et l'Ordonnance de Blois , publiée par
Henri lîl , Sur le vœu des Etats dé ce Royaume , fixa
l'âge dés vœux à 15 ans.
Quelles raifons anez puifTantes pourroient aujour-
d'hui faire déroger à une DiScipHne fi Sage & uni-
verSelle } En eft-il aucune qui n'ait été pelée & ju-
gée inSuffiSante par les P. P. du Concile de Trente ?
E z
i68)
L'indlfcrétlon des engagemens dans l'Etat Religieux ,
n'étoit pas moins à craindre alors que dans notre
iieele. Les jewnes gens n'étoient pas plus formés à
rage de i6 ans : le facrifice de leur liberté étoit
fufceptible des mêmes inconvéniens qu'on peut taire
valoir aujourd^liui.
Que Votre Majellé daigne donner quetqu'attention-
aux vues importantes qui avoient dirigé la pratique
de l'Eglife , depuis tant de fiecles , ik qui ont été
les foiides fondemens du Décret du Concile de
Trente.
Il eft du fouverain domaine que Dieu s'eft ré-
fervé fur les hommes, de dil'pofer de l'Etat qu'ils doi-
vent embraiTer , &i d'accomplir les defTeins de fa Pro-
vidence par la Profellion à laquelle il fe confacrent.
Or c'eil: par la vocation qu'il infpire aux jeunes gens ,
qu'il difpofe pour l'ordinaire de leur entrée dans l'E-
tat Eccléilaftique ou dans la vie Religieufe , Se c'efi
à l'Eglife , ou à ceux de fes Minières qu'elle en Â
chargé , qu'il appartient de juger de la fincérité de
cette vocation. Des Edits qui prohibent les vœux
avant l'âge de 25 , ne femblent-ils pas dil'puter à
Dieu ce domaine fouverain , ou lui donner des bor-
nes , en en>péchant les jeunes gens de fuivre la voix
de Dieu , qui les appelle à fon lervice }
Les Loix qui ont interdit aux Mineurs la difpofi-
tion de leurs biens patrimoniaux , n'ont pas mis les
mêmes entraves à Tulage de leur liberté , parce que
c'eft un bien qu'ils ne tiennent que de l'Auteur de la
nature. Pourquoi leur enlever le droit de la régler,
de la captiver , même lorfqu'ils ont îie\i d'appréhen-
der d'en faire un mauvais ufage dans le fiecle ? Dès
qu'ils commencent à devenir pécheurs ^ à concevoir
la grandeur des engagemens qu'ils ont voués dans
leur Baptême, ils doivent avoir la faculté de prendre
des mefures efficaces, ou pour recouvrer leur inno-
cence , ou pour la conferver , en s'éloignant des ten-
tations du fiecle.
Dans quelles incertitudes , dans quels embayias n«
( 69 )
;ette-t-on les jeunes Pérfonnes de l'un ^ de l'autrfe
fexe , qui Te croyent appelles à la vie de retraite &c
de pénitence , ii l'on tarde les Protellions julqu'à
25 ans? A quels dangers n'expole-t-on pas ceux que
ce retard obligera malgré eux de refter dans le tu-
multe du monde , oii les occaiions de pécher lont
incomparablement plus fréquentes que dans les Mo-
nalteres ? Combien fe rt?ndront inndeles à kur pre-
mière vocation? combien Te perdront dans le iiecle ,
qui auroient é\'ité le naufrage dans les Maiions Reli-
gieul'es ? Le Sage déclare heureux ceux qui portent
Le joug du Seigneur des V enfance j &C 11e met - on
pas obftacle à ce bonheur , pour beaucoup de jeunes
gens, en ne leur laiil^mt la liberté de taire des vccux
qu'à ic ans ?
Quand on eft perfuadé que la vie Religieule eft
un état dp perfedion , parce qu'elle conlifte dans la
pratique des conl'eils évani,éliques , & que cette ol>-
lervance li précieufe à l'Ëglire n'a prefque plus lieu
que dans les Cloîtres , on n'eft pas tenté d'en rendre
l'accès inacceflible , on doit plutôt favoriler le facri-
hcQ de ceux que la piété y conduit. Or l'expérience
prouve que les meilleurs Religieux font ceux qui fe
Tont confacrés de bonne heure aux exercices de la
Difcjpline régulière. Il faut être jeune pour fe plier
au ]oug de l'obéifTance , & acquérir l'habitude des
obfervances monaftiques. Il efl difficile , après 15 ans ,
de fe former aux vertus de cet état ; ou eft peu pro-
pre aux connoiffances néceflaires pour remplir les obli-
gations monaftiques , fur-tout li on a contracté dans Ife
iiecle des habitudes vicieufes , fortifiées par leb années.
Combien d'ailleurs n'eft-il pas rare qu'on attende
à UQ âge fi avancé pour faire le choix d'un état ,
pour embrafter un genre d'occupation ? Les jeunes
gens qui auroient du goût pour la vie monaftique ,
perdront patience &: ne perfévérerorit pas. Les parens
feront les premiers à les détourner d'un état qu'il
t.iudra poftuler fi long-tems. Ils craindront de leur
voir perdre , dans l'airente d'un engaeement incer-
E 3
( 70 )
tein,'des années précieufes pour fe préparer aux dif-
ferens emplois de la vie civile. Beaucoup même n'au-
ront pas les tacultés nëceiraires peur les taire étudier
&: lubfifter fans travail pendant un fi long intervalle.
C'eft au furplus priver les familles nombreules de
cetie reiTource honnête pour placer leurs enfans.
Pourquoi les enfans qui fe marient avant 25 ans,
i'ous l'autorité de leurs parens , ne pourroient-iis pa.s
également, fous la même autorité, fe dévouer à la
Religion } Le mariage n'ell pas un engagement moins
jndifl'oluble que celui de la Profeffion Religieufe :
il a des fuites pour le moins auifi importantes pour
l'Etat, & il n'a pas l'avantage d'être précédé d'une
année de probation. La même Loi qui reftreint la li-
berté des eitans pour les engagemens religieux , prive
<iu même coup les parens d'une 'partie de l'auto-
rité qu'ils tiennent des Loix ôi de la nature pour
difpoiér de leurs enfans. Maître de les engager par
des établiiïeinens humains , les parens n'auroient-ils
les mains liées que pour les offrir à Dieu & les con-
facrer à fon fervice }
Tels font les principaux motifs qui ont décidé les
Pères du Concile de Trente. Ce n'eft pas qu'ils igno-
ralTefit les raifons qu'on pourroit oppofer à ce que
la Prôfeiîion Religieufe fe ht à 16 ans. Pi s favoient
que la fixation de cet âge pourroit occafionner des
engagemens précipités. Mais touchés avec raifon des
.inconvéniens beaucoup plus con'idérables qui au-
Toient réfulté du retardement de l'âge des vœux, ils
©nt fait un Décret folemnel que tous les Princes Ca-
tholiques ont adopté. C'efl: ce Décret dont les E'. êques
dis Pays-Bas réclament l'autorité. Les motifs qui l'ont
dicté, n'ont rien perdu de leur force par l'exécution
de deux fiecles dont le Décret a été fuivi , & fi les
Religieux qui vivent fous la Domination des Princes
Inlideles, jouiflent librement de la faculté d'engager
les Sujets qui^ont atteint l'âge prefcrit par les faints
Canons, auroit-on pu prévoir que, dans un Empire
Catholique , cette liberté leur feroit enlevée ?
( 7« )
L'Edit de 1771 défend indiftlnélement à toutes les
Communautés Religieufes, non-feulement d'exiger
quelque fonime que ce foit en argent ou en valeur ,
à titre de dot, d'habillement, de Penfion, de Novi-
ciat , ou tout autre titre pour l'admiflion en Reli-
gion, mais même de recevoir ce qui feroit offert
gratuitement , & afin d'ôter tout prétexte de fraude
il déclare, les maifons & les perfonnes Religieufes
incapables de toute efpece de dons & legs.
Si le but de ces défenles n'a pas été d'annoncer un
projet formé, d'éteindre les Maifons Religieufes , com-
ment a-t-on pu confondre les fecours que ces Mailbns
peuvent recevoir de la piété des Fidèles , avec l'exac-
tion des dots pour l'émifïîon des vœux, & conclure
de la néceflité de réprimer les flipulations fimoniaques ,
celle d'interdire aux Communautés Régulières toute
capacité de recevoir. A s'en tenir aux termes de l'E-
dit de 1771 , c'eft l'obfervation des faints Canons,
qu'on s'ef^ propofé de rétablir , c'efl comme protec-,
teurs de la difcipline , & chargé à ce titre de la main-
tenir , qu 'on a choifî Us moyens les plus propres à la
faire rej p celer ^ en rejettant indijlinclemeyit tous les Jub^
terfuges ^ qui avoient fervi k l'éluder. Il doit donc y
avoir un rapport naturel entre l'abus qu'on a cherché
à déraciner , &: les remèdes qu'on a employés pour
y parvenir.
Mais quoique l'Eglife ait dans tous les tems con-
damné l'exaélion des dots , elle a fu diflinguer ce que
l'avarice exige de ce que la piété offre ; elle a ré-
prouvé l'une , &: elle n'a eu garde de blâmer l'autre.
St. Auguftin , dans la Règle qu'il a dreifé pour les
Religieufes , recommande d'admettre églement les pau-
vres & les riches , fî elies ont le goût des vraies richefTes
qui lont celles de la vertu. Mais bien loin de défa-
prouver que les filles riches ou leurs parens offrent
des préfens aux Monafleres , il fuppofa qu'on y pou-
voir recevoir leurs libéralités , puifqu'il avertit les
Religieufes qui jouilïent de quelque bien dans le fiecle ,
de tenir à honneur de l'avoir rendu commun y en
E4
( Il )
çr-traint dans l'Etat Religieux ôi de ne point fe glo-
rifier d'avoir contribué à la vie & à la fubfiftance
commune de la Maifon, en donnant quelque por-
tion de ce qu'elles pofledoient (<:).
La Règle de St. Benoît eil: plus exprefTe encore.
Après avoir fait promettre aux parens qui prëfen-
toient leurs enfants à l'Etat Religieux , de ne leur
jamais rien donner , ni par eux-mêmes , ni par des
perfonnes interpofées , elle ajoute que , fi néanmoins
ils défirent faire quelques aumônes par reconnoiffance,
c'eft au Monaftere que leurs libéralités doivent être
faites. ( Ckap. 59. )
Gratieii examinant s'il eft permis de demander quel-
que ç ho fe pour l'entrée en Religion, prouve par la
conduite d'Anne , qui fit des préfens aux Prêtres
en leur offrant fon fils Samuel , qu'il n'efi: pas per-
mis d'exiger , mais qu'on peut recevoir des libéra-
lités volontaires , le premier étant défendu , &c le
fécond étant légitime {b).
On trouve la même Doctrine , dans Pierre , Chan-
tre de l'Eglife de Paris (c) , dans St. Thomas {d) ,
St. Bonaventure (e), Denis le Chartreux (/) & elle
eft conforme à la décifion des Papes Innocent Ilî
.(^) & Urbain V (A) : les Auteurs les plus rigides fe
contentçnt d'ajouter avec Van Efpen , que les Re-
ligieux ne doivent ni exciter, ni rechercher les li-
béralités des Novices ou de leurs parens, ni même
■ -'.-(d) Epift. 211.
• "^ ' Ce) Non permittitur aliquid exigere , fed fponte oblata fuf^
d'pere , quia illud damnabile eft , hoc veto minimes Cauf. i ,
■pa^. 2.
ic) In verbo abbreviato, cap. 38.
(û^ 1%. q. 100, Art. 3.
U) Apologie de fon Ordre , p. 18.
(/) L. I , de la Simonie Art. 1 2.
fg) Illud tamen gratanter recipi poterit quod fuerit fin«
ï^xarione gratis cblatum. L. <. Lit, ? de jlmonia. C^p. 30.
(h) Ibid. Cap. 1.
(73 )
les recevoir avec un efprit mercenaire (<z) , mais bien
éloignés d'alîimiler aux dots exigées , les préfens
offerts par la piété , & la reconnoiiîance , & de les
Ibumettre à la même profcription , ils s'élèvent au
contraire contre l'iniurtice &: l'avarice des parens
riches, pour qui la réception gratuite dans les Monafleres
eft un moyen d'augmenter la fortune des enfans qu'ils
deftinent au fiecle. Van Ei'pen leur apprend que le
bien des Monafteres étant le Patrimoine des pauvres ,
ils ne doivent pas faire confommer par leurs enfans
une portion de ce Patrimoine , quia ipjonim proies
loca paupcrujH occupant (b) , &: que {i c'efl: un de-
voir de charité pour les fidèles d'aider par leurs au-
mônes , ceux qui ont le courage de renoncer au mon-
de , &: de s'enferm«r dans les Monafteres , il eft
d'une juftice étroite pour les parens riches d'appli-
quer leurs aumônes aux Maifons ou Congrégations
qui ont rec^u leurs enfans (c) , il n'en excepte que le
cas où le Monaftere feroit affez riche pour n'avoir aucun
belbin.
Si le Rédaéleur des Edits eût connu ces vérités ,
& que les règles de l'Eglife, dont il vouloit procu-
rer l'exacle obfervation , enflent préfidé aux difpo-
fitions qu'il écrivoit , il n'auroit pas mis c'ans la mê-
me clafle les ftipulations illicites , & les témoignages
de reconnoifîance. Il n'auroit pas regardé les libé-
ralités volontaires offertes par les parens , 6c accep-
tées par les Religieux , comme des fubterfiiges , pro-
pres à éluder la Loi , comme des lunonies palliées.
N'eût-il pas appréhendé au contraire de réduire les
parents à l'impoflibilité de remplir un devoir de juf-
tice ? Il fe feroit encore moins permis d'en détourner,
par des menaces , ceux qui auroient eu la volonté
de s'en acquitter.
(,î) Differt. Canon, de vitlo fimonise P. 2, Cap. 5 , S. j.
. {b) Ibid. %. 4.
(c) Ipfa juffitia exigit ut bi eleemcflnam factant Congrega-
tioni cui filius eorum jam incorporatu5 ell, ibid 1.
( 74 )
Les Ecîlts ne fe contentent pas d'intert^ire tontes
libéralités pour la réception des Religieux & Religieu-
ses, ils mettent tous les Monaftsres indiftinétement
cL^ns l'abfolue prohibition de recevoir aucuns dons
& legs de qui que ce i'oit , & dans quelques circons-
tances qu'ils puiilent i'e trouver ; ils détendent mê-
me de leur donner le capital des foibles Penfions
viagères qu'ils permettent aux parens de laifiér aux
Religieux.
Ainfî , que des Monafteres n'aient des revenus
que pour l'entretien de peu de Sujets , leur nombre
ne pourra jamais augmenter, quelque foit l'emprsf^
fement d'un furnuméraire pour s'y confacrer à Dieu ,
quelques infiances qu'il tafle , quelque marque de
vocation qu'il montre, en offrant une penfion pour
fa fubfiftance , que le Couvent eft incapable de four-
nir ; fon facrifice fera impoflible; le Monaftere feroit
criminel , s'il avoit la condefcendauce d'ouvrir Ces
portes ', le fujet feroit lui-même coupable & puni
pour avoir ofé fuivre l'attrait de fa piété & donner
de quoi fournir a fa fubfiftance.
Que les Communautés Religieufes éprouvent des
pertes , qu'elles foient ravagées par les guerres , frap-
pées du feu du Ciel , toutes les refTources leur font
enlevées , ils n'ont aucun fecours à efpérer , les ibu-
lagemens qui leur feroient préfentés , les aum.ônes
qu'on leur feroit, feroient autant de délits puniffa-
bîes que la judice pourroit pourfuivre pendant 30
ans , & qui expoferoient à la même fiétriffure & les
Communautés qui auroient reçus, & les mains cha-
ritables qui fe feroient ouvertes pour les fecou.rir
Les Evêques des Pays-Bas s'al^ftiendroiit de feire
aucunes réflexions fur de telles difpofitions , dont ils
apperçoivent toutes les conféquences ; & malgré toute
la vivacité du fentiment qui les pénètre , ils fe font
un devoir de le renfermer en eux-mêmes , pour s'en
rapporter uniquement à la fenfibilité du cœur ma-
ternel de V. M. qui ne rcfufera pas pour les pauvres
Monafteres des Pays-Bas , de leur permettre de re-
( 70
cevolr les mêmes fecours qu'elle vient de permettre
pour ceux établis dans les Pays héréditaires d'Al-
lemagne.
L'Art. 9, de l'Edit de 1771 , ne laiffe aux Mo-
nafteres la liberté de prendre des Penlions pour les
Novices, que dans le jlul cas , où ces Novices quit-
teroient le Noviciat. Cependant ces Pcniions , ( lur-
tout le prix étant fixé à une lomme allez modique,
réduite depuis à moitié par l'Article 1 de TEdit de 1772, )
ijc fauroient être une voie indirefte d'exiger des Dots
&; de faire dépendre la Profeflîon Religieufe de pac-
tions honteufes. Le Concile de Trente , en défen-
dant aux Religieux dcî recevoir quoi que ce foit des
Novices ou de leurs Parens avant l'émiiîîon des
vœux , en excepte expreilément le vêtement & la
nourriture : Excepta vïcîu & vejiitu novitii vel novit'uB
illius temporis quo in probationc ejl (a). Les Edits
condamnent donc ce que ce Concile approuve.
L'Art. 10 du premier Edit foumet aux liens d'une
efpece d'interdiction les peribnnes de l'un ou de l'au-
tre fexe qui entrent dans les Maifons Religieufes , pour
éprouver leur vocation; il les dépouille, à l'inftant
de leur entrée , de la jouillance des biens qui leur
appartiennent , ou qui peuvent leur échcoir avant la
Profeffion. Cette jouiffance eft transférée fur le champ
à la famille , & s'il leur efl permis de fe faire réin-
tégrer dans leurs Droits , cii quittant l'Etat Religieux
avant la Profejfwn^ c'efl fous la condition qu'ils ne
pourront répéter les fruits perçus pendant l'intervalle
de leur Noviciat.
Eft-ce pour dégoûter de l'Etat Religieux qu'on a
privé de leurs revenus tous ceux qui feroient tentés
de l'embrafler , & qu'en même tenis on leur a en-
levé toute efpérance de rentrer dans la jouiflance
des fruits échus pendant leur épreuve , s'ils viennent
à fortir du Noviciat } Il eft difficile de trouver d'au-
(4^ Seff, 25. Cap. 16. de Reg^iilar.
(7S)
tre intéî'êi: & d'autre motif à cette dirpolition. Mais
fans invoquer ici l'autorité des Loix , qui affurent les
fruits aux propriétaires des fonds, & qui ne permet-
tent de dépouiller les Citoyens de l'adminifiratioi:
& de la }ouiffancc de leurs biens, que dans le ca<;
de Droit , nons ne pouvons nous difpenler de faire
obferver à V. M. , que cette peine n'a point lieu
contre les jeimes gens de l'un & de l'autre fexe,
que leur mauvaife conduite fait renfermer dans des
lieux de pénitence. Ils y font nourris & entretenus
lur leurs biens , &: quand la liberté leur eft rendue ,
leurs Tuteurs ou Curateurs font chargés du renfeigne-
ment des fruits. Les Novices , traités avec moins de
ménagement, ne peuvent ni payer leurs penfions ,
tant qu'ils demeurent dans le Noviciat , ni le faire
rendre compte de leurs revenus , lorfqu'ils en for-
tent. Quel contraire ! Les perfonnes que la piété con-
duit dans les Monaileres , ont un iort plus rigou-
reux , que celle* que leurs défordies obligent d'en-
iermer !
On ne fauroit ne pas être effi-ayé de la multipli-
cité & de "la rigueur des pemes dont font accom-
pagnées toutes les difpofîtions des deux Edits. Le
Rédafteur des Edits ne s'eft pas fouvenu qu'il n'eft
pas de la Majefté du Trône , que le Souverain ne
parle qu'en menaçant dans les Réglemens qu'il publie,
Eft-il convenable que dans des Ordonnances géné-
■fàles,ilne prévoie que des prévaricateurs , que la
■terreur feule peut retenir & foumettre.^
Que l'intimation de la vengeance p\ihlique foit
employée, quand des Loix enfreintes obligent de les
renouveller, ou lorfque des abus dangereux & com-
muns , exigent qu'on leur oppofe de fortes digues :
rien n'eft plus fage. C'eft pour ce cas que l'appareil
du glaive eft réfervé. Mais prit-on jamais ces pré-
cautions dans les Loix nouvelles , & dans des Loix
deftinées à régler la Police des Monafteres ? Quelle
idée fe forme-t-on des Religieux ? Quelle idée en inf
pire-t-on au Public , en les traitant comme des en-
^ 77 ) ^
durcis dont rindocilité ne peut être réprimée que par
(Jjs remèdes extrêmes ?
Nous ne retracerons pas fous les yeux cle Votre
Majefté le détail des peines qui terminent chaque Ar-
ticle des deux Edits. Mais nous manquerions à notre
'iiiniftere ^ fi noUs nous dillimulions Tinjuilice de
-.iciques unes de ces peines , que le Droit naturel &
OC le Droit divin réprouvent également.
C'efi un principe de l'un ce de l'autre Droit que
l'innocent ne doit point être puni pour le coupable.
Cependant l'Article 12 du premier Edit prononce une
amende folidaire contre toutes les Mailons du même
Ordre , fi l'une d'elles envoie des Su]ets faire leur
Noviciat dans un Royaume étranger. Les Parens ou
Tuteurs des Novices , qui peuvent l'ignorer ou n'y
avoir aucune part, {ont eu\- mêmes aflujettis à la
même amende.
Par l'Article 5 du fécond Edit , les Monafteres
qui adniettroient à la Profeflion avant l'âge de 25 ans ,
font condamnés à une amende de 4000 iiorins , les
Supérieurs font bannis ; & fi c'efl dans un Couvent
de Filles , la Supérieure eft dépofée , transférée dans
Une autre Maifon , déclarée incapable de remplir
aucun Emploi dans l'Ordre ; &: comme fi ces peines
euffent été trop légères pour un tel crime , il eft or-
donné qu'en cas de récidive , le Monaftere fera
fupprimé à perpétuité, & que les Religieux ou Re-
ligieufes feront transférés dans d'autres Maifons du
même Ordre. Que Votre Majefié daigne examiner
devant Dieu , s'il efl; conforme à l'équité , que le
Monaftere fouffre de la faute des Supérieurs qui le
gouvernent , que les Fondateurs fruftrés de leurs pieufes
intentions , partagent la peine du délit , &: que l'Eelife
perde un Etabliffemeut confacré , au Culte de la Re-='
ligion.
Les Loix de l'Èglife ne permettent de fupprimer
les Maifons Religieufes que pour caufe de néceifité
ou d'une évidente utilité. Le Concile de Trente at
confirmé &c renouvelle le Décret du Concile gé-
(78),
nérAe de Confiance qui Tavoit ainfi réglé , & lorfcjue
la fuppreffion fe prononce par voie dé peine, elle ne
p«iut être méritée que par les plus grands crimes.
6^^ L'Art. 3 de l'Edit de 1772 , interprétant l'Art. 1 1
de l'hdit de 1771 , ordonne que tout Monaftere étant
tenu de nourrir & entretenir fes Membres , les Supé-
rieurs ou Supérieures ne pourront rien retenir fur la
Penfion des Religieux ou Religieules , ni en appli-
quer la moindre portion au profit de la Communau-
té , fous quelque prétexte que ce foit , oc que cha-
que Religieux ou Religieufe en Jouira pour ia tota-
litî , fous la direftion néanmoins de fes Supérieurs.
Il eût été difficile de porter les précautions plus
loin pour empêcher les Monafteres d'augmenter leurs
revenus. On n'a pas cru que ce tût allez de réduire
les Penlions des Religieux & Religieufes des Pays-
Bas , à la fomme de 50 florins, pendant qu'elles font
beaucoup plus con/iderables dans le furplus des Etats
de Votre Majelté ; on a même appréhendé que les
Maifons Régulières ne s'approprialTent quelque por-
tion de ces Penlions fi modiques. La jouilfance en
efl affe'51:ée primativement aux Religieux particuliers ,
& il eft défendu , fous peine d'une amende de mille
écus , d'en appliquer quoi que ce foit au profit de la
Communauté. Mais on n'a pas fait attention que ré
ferver aux Religieux la jouiilance de leurs Penfions ,
c'étoit porter atteinte au vœu de pauvreté , ou du
moins inviter les Religieux à violer cet engagement
fondamental de l'Inflitut Monaftique.
La défappropriation a toujours été une des plus ef-
fentielles obligations des Religieux. Elle appartient à
la fubflance de leurs engagemens , & long-tems avant
rétabliflement des vœux folemnels , elle croit regar-
dée comme une vertu efientielle de l'Etat Monaili-
que {a). La vie Monaftique conlifte en effet dans la
{a) Eifentia vltae Religlofce in tribus illls virtiutbus, obe-
Jientiâ , paupertate, caltitate, ab omnibus hujus teniporis
(79)
pratique des confeils évangéliques , 6c fuivant Jefus-
Chrift même , l'al^clication volontaire eu l'un des
principaux ; Si vis pcrficlus ejfe , vade & vende ofnnia
qua. hiibcs. La vie Monaftique doit retracer la con-
duite des premiers Fidèles de l'Eglife de Jcrufaiem ,
parmi lefquels tout étoit en commun : Erant illis
omnia commimia , nul ne poffédant quelque chofe^
comme lui étant propre : '!Scc quifquam eonim qiia
pc(jukbat ^ aliquid fiinin &jfc diccbat (a). Les premiers
Chrétiens vendoient leurs biens , &: en metioient le
prix aux pieds des Apôtres , afin que les deniers ïuî-
fent diftribués à chacun fuivant leurs befoins ; Divi-
dcbanir autcm JïîiguUs prout aiique opus crat.
C'efl à cet exemple que les Saints Dofteurs SsC Ie>
Conciles ont toujours rappelle les Religieux , comme
à un modèle , dont il ne leur étoit pas permis de
s'écarter.
Le Concile d'Orléans , de Tan 511, défend de rien
biffer en propre aux Religieux , parce que tout ce
qu'ils peuvent ac({uérir doit être employé au profit
du Monaftere (b).
Un autre Concile tenu en France en 615 , leur
interdit tout pécule , parce que tout doit être mis
dans la maffe commune , pour être diilribué félon
l'ordre des Supérieurs, (c) Le Concile de Cologne
de l'an 1260, décide que le Religieux ne peut pof-
féder quoi que ce foit fans la permiffion de fon Su-
périeur, {d) Le Concile de Trente exclut tout pré-
Religiofis conftituitur. Idem fiebat ab antiquls : nam Au,
guftinus & Eafilius fiC loquntur, {^Bdlarm, ^e Monachis, cap. /.)
(j) Aft. 4. ^. 32.
(i) Omnia quse acqiilfierit Monachus ab Abbatibus au-
ferantur fecundum Regulam, Monafterlo profutura. ( Can. /p.
Ldhh. tom. 4; pa§. 1408. )
(c) Peculare nullum habeant, fed fint eis omnia commu-
nia , ficut Abbatis vel prcepofiti difpenfatio jufta perpende-
rit. ( Can. 4. ibid. pag. 16^6. )
(ji) Statuimus quod Mpnachi proprium non habeant ^
texte capable d'excufet le vice de propriété , eii in-
terdifant aux Religieux la faculté même de pofledcf
ail nom du Monaftere, &: en leur ordonnant de tout
rapporter à la mafle commune, {a)
Quelque chofe qu'acquière un Religieux , ou par
fon induftrie , ou par des libéralités volontaires , le
Concile de Cambray , de l'an 1565 , l'oblige de le re-
mettre furje champ au Supérieur , pour qu'il en dif-
pofe comme d'un bien commun, {f) Le Concile de Mali-
nes, de 1570 , ne veut pas que les Religieux touchent
leurs Pensions , même dans la vue de faire de bonnes
œuvres, parce qu'elles doivent fervir à l'utilité com^
mune cki Couvent, (t)
Ces difpofltions ne l'ont au furplus que l'expref-
fion fidelle de ce qu'on lit dans toutes les Règles'
Monaltiques.
Une des premières in{l:ruâ;ions que Caffieft donne
aux Religieux , c'eft qu'ils ne peuvent rien poiïeder ,
parce qu'ils font voués à une abdication pleine &
fans réferve. {d}
Saint Bafilfe difoît à (qs Religieux , que toute pro-
fecunclum quod régula eoriim prascipit , nifi quod Abbas
dccierit vel permifcrit ( Can. ^, ibid. t. 2. pn^. 7^3.)
(<î) Nemini Regularium liceat bona mobilia vel immobi-
lia cnjalcunique qualitatls hierint , etiam quovis modo ab
fis acquifita , tamquatTi propria aut etîain noinine coiiventûs
pofûJère vcl tenùrc , fcd ftatim ea fuperiofi tradantur , con-
venniiquc incorporcntur. i^SeJf. 2j. de Regular. Cap. 2.)
(i) Onînis pecuiiia vel les quam Monachus vel Monlalls
acquifere , fiVe labore , five iiidufiria , five amicorum libe-
raîitate , feu dcnique qiialibet alla occafione polfit, fiiperiori
inox tiadatur, tta ut ad muum ejus tanquam tes communis
împendatur. ( De Monafl. Cap. 10. )
(c) Penfiones vitales àut reditus perpétues nuUi permittan-
tur recipsie , etiamh in ufus pios coiiverrcre velinr , fcd
omnla in coninumem uiuili convertantur. [de Repil. Cap. 1. >
(d) Qui convertitur praî omnibus crudiri débet ut nihil
ei peculiare liceat poiîidere , fed,.. fs nudatum ex omnï
parte cognofcat. (_I'.<:g. Cup. 27.) ^ ^
priéte
( §1 )
priété eft incompatible avec leur état (.2) , & que
s'ils avoient quelque chofe en propre , ils ne mar-
cherolent plus lur les traces des premiers Chré-
tiens. (/')
C'eft le premier précepte que Saint Auguftin pro-
pore aux Religieufes dans l'a Règle : N'ayez rien en
propre , oc que tout Toit commun parmi vous , comme
chez les premiers Fidèles (c). Le Saint Dofteur en
conclut , que tout ce.que reçoit une Religieufe , quand
ce feroit même des vctemens , doit être detUné par
la Supérieure à celles des Sœurs qui en ont le plus
de belbin {a).
La Règle de Saint Benoît tire la même conféquence
de la communauté des biens qui doit être invio-
lable dans les Monafteres. Le Religieux , loin de
garder, ne peut pas même recevoir, fans l'agrément
du Supérieur , ce que les parens peuvent lui en-
voyer ; il faut que le Supérieur foit maître enfuite
<l'en difpofer : Si Saint Benoît ne veut pas que le
Religieux fe chagrine de l'emploi que l'Abbé en fe-
roit au profit d'un autre , de peur qu'il ne fuccombe
aux fuggefhons du Tentateur (s;).
(a) Si quis proprium efle dicit , abfque dubio alienum fe
facit ab eleclis Dei. ( Regul. bmlor. Cap. 27. )
{b , Nuinquid conveniataUquiJ proprium habere in focietate
fratrum ? Hoc contrarium efl teiiimonio , quod refertur de
lis qui crediderunt, in qiiibus fcriptum eiT; : nec quaquam
eorum quœ polTidebat , aiiquid fuum efTe dlcebat. ; Ib'id.
Cap. 8s. )
(c) Hase funt quse ut obfervetis prscipimus.. primum...
non dicat'is aiiquid proprium , fad f:nt vobis omnia co m-
inunia... fie enim legillis in acTibus Aportolcrum {Ep. 2; t. n, j. j
id) Sit in poteftate prspofiturae ut in commune reda6tum,
cui neceffarium iuerit , prsbeatur. {îbid. n. 12.)
* (0 Quod fi etlam a Parentibus ei qulcquam di'eftum
fuerit, non prsfumat fufcipere ilhid , nifi priiis indicatum
fucrit Abbati. Quod fi jufferit fufcipi , in Abbatis fit potel-
tate , cui i'iud jubeat dari. Et non contriftetur frater cui
forte diretftum fuerit, ut non detur occafio didjolo. ( Cap.j^.')
F t1t
^ ^ (Si)
On ne connoîtroit ni la nature , ni l'étendue du
vœu de pauvreté , fi l'on regardoit ces Réglemens
comme fufceptibles de reilri(5lion , ou fujets à la
révolution des tems. Ils appartiennent à l'effence du
vœu. Le renoncement du Religieux étant abiblu &
fans réferve , il manque à Ion engagement dès qu'il
jouit de quelque chofe comme lui étant propre , &
toute coutume contraire qui s'introduiroit dans les
Maiions Religieuies , loin de pouvoir être excufée , ne
feroit qu'un abus qu'il faudroit fe hâter de réprimer.
C'eft pourquoi le Pape Clément VIII déclare dans la
Bulle NuUius omnino puhlïù , pour la réforme des
Monafteres , que le Religieux ne peut Te dilpenfer
de mettre entre les mains de fon Supérieur tout ce
qu'il reçoit , fans en excepter même les préiens de fa
famille , afin que placé dans le dépôt commun , il
ferve à pourvoir aux difFérens befoins des Membres
de la Communauté. La défappropriation doit être fi
générale dans les R.eligieux , que le même Pape leur
recommande d'éviter l'efprit de propriété , jufques
dans l'ufage. des chofes les plus nécelTaires {a), La
Bulle de Clément VIII a été confirmée par Urbain VIIÏ
dans fa Bulle Sacra Con^rto^atio^ & par Innocent XII ,
dans un Décret du lô Juillet 1695 ; le feu Pape
Bénsit XIV la rappelle & y renvoie dans fon favant
Traité des Synodes (/>).
Il y a donc dans la tradition de l'Eglife une uni-
formité parfaite fur ce point important de la Difci-
pline régulière. Tout doit être commun dans les
fa) Etiain fi fubfidia confangiiineorum , omnia fîatim
Superiori tradantur & Conventui Incorporentur... quo com-
iDiinis inde vittus & veftitus omnibus fuppeditari poflit ; ne
eorum qu3e ad neceiruatem concéda erunt , ullus qiiidqaarrt
poffideat , lit pro])rium , neque uî proprio utatur. ( Van Efpen,
DiJJert. Canon, de v'ttio pecul. p. 1. cap. 1. h£l. 10. )
(b Gonfonant Clementis Vlll & InnocentisXIl Romano-
îum Pontificum conftiuuiones. ( De Synodo l, 1, cap. /;?, n. 12, )
( S] )
^îonafteres , parce que le Religieux qui a tout abdi-
qué, ne peut rien polléder qui ne ibit que pour lui;
or , une chofe ceiTe d'être commune , dès que la
jouilFance en eil tellement afieclée à un particulier,
que tout autre einploi en eil prohil>é.
Que Votre Majefté daigne rapprocher ces principes
înunuables de la dilpoiltion de l'Art. 3 de l'Edit du
10 Avril 1771. La contrariété efl iTcp évidente pour
que votre piété n'en i'oit point alarmée. L'Edit dé-
tend aux Supérieurs de retenir la moindre chofe des
penlions des Religieux ou Religieuies , Si û'en faire
tourner une partie quelconque au profit de la Com-
munauté. Or les faints Canons.veulent que les deniers
qui proviennent des Penfions foient dépofés dans le
coffre com.mun. L'Edit atfefte aux Religieux la jouif-
fance de la totalité de leurs Penfions. Les faints
Dofteurs décident qu'elles doivent être diftribuées
par les Supérieurs à proportion des befoins les plus
preiTans , & la règle que les Religieux ont vouée ,
leur iiiterdit non-feulement toute plainte , tout mur-
mure., mais toute peine intérieure fur cette diftribu-
tion. A quels dangers n'eft-ce pas expofer les Religieux
que de les autorifer à toucher leurs Penfions, à en
jouir , à en difpofer ? Dans quels embarras ne jette-t-
on pas les Supérieurs que leur devoir oblige de faire
exécuter le vceu de pauvreté •, à quelle fâeheufe extré-
mité ne réduit-on pas même les Evéques, à qui leur
miniftere impofe la Loi d'avertir les P«-eiigieux qu'ils ne
pourroient, fans intéreffer leur confeience &: com-
promettre leur falut éternel , profiter du funeilc a.van-
tuge qui leur eft accordé par la nouvelle Loi?
L'Edit, à la vérité, affujettit les Religieux à n'ufer
de leurs Penfions que fous la direction de leurs
Supérieurs. Mais en efl-ce aflez pour prévenir le vice
de propriété .'' Ils feront gênés dans î'em.ploi des de-
niers 'qu'ils pofiéderont. Il ne leur fera pas libre de
les diflîper , de s'en fervir pour de vaines trivolités.
En feront-ils moins propriétaires \ en auront-ils moins
la jouiflance Ôc la difpofition de leurs revenus ? S'ils
F X
( ^4 )
îe deftinent à quelque chofe d'utile &: de raifonnp.blè ,
les Supérieurs leront dans la néceffité d'y confentir :
or c'fcft la faculté même de toucher leurs Penfions ,
& d'en difpofer , que les Conciles condamnent dans
les Religieux , parce qu'elle ne lauroit compatir
avec le vœu de pauvreté. DuiTent - ils les conla-
crer aux œuvres les plus pieufes , cette deftination ,
lî louable en elle-rncme , ne léroit pas capable de
les excufer , ni de raffurer leur confcience. En 1648
& 1726 , une Univerfité célèbre conMtée fur cette
matière importante , n'héfita pas à réprouver l'ufage
qui laiiïbit aux Religieux la jouilTance de leurs Pen-
fions , fur le principe , que fuivant les Loix Cano-
niques , elles doivent être confondues dans les revenus
du Monaftere {a).
Nous ne fommes point furpris que les perfonnes
féculieres ignorent ces vérités , qu'elles ne font point
obligées de favoir ; mais qu'il nous foit permis de
rcpréfenter refpeclueufeirient à V. M. que ce ne font
point elles , ou du moins que ce ne font point elles
feules qu'il faut confulter fur des objets qui touchent fi
direftement les liens de la confcience & la difcipline
i'itérieure des Communautés Rèligieufes. J. C. a éta-
bli dans fou Egîife des Miniures , à qui il en a con-
fié radminiftration. Il leur a promis fon aififlance ,
en leur communiquant fon autorité. On ne fuit point
l'ordre de Dieu , & par conféquent on s'expofe à
s'égarer , lorfqu'en liégîigeant cette Infritution divine ,
on veut régler ce qui concerne la Religion , indé-
pendamment des Evêques qui par état font chargés
du Gouvernement de l'Eglife. {b)
Nous favons que les Souverains font les Proteéleurs
(<2) Ces confukatlons fe trouvent à la fin d\ipe DiiVcrraîion
fur la pauvreté Religieufe , inipriinée à Paih chez Babud,
en 1728,
(b) Quos pofuit _ Eplfcopos regere Ecclefiam Dei. Aft,
Cap, 20,
( «5 )
de l'Egîife S: de Tes Canons ; nous honorons dans îa
Sacrée Pcrfbune de Votre Maiedé cet augufte titre
&: les droits qui y font attaché ? Nous nous ferons
touiours une gloire de reconnoître , avec Saint Au-
guftin , que les Rois doivent fervir Dieu en Rois ,
& qu'ils s'acquittent de ce devoir en faifant pour fon
fervice ce que les Rois feuls peuvent ùïre {a). Mais
nous favons en mérne-tems que le Proteéleur n'elî
que TEvéque extérieur , que Dieu n'a point établi
les deux Pui/Tances pour qu'elles fuffent oppofées ;
& que félon i'expreffion d'Ives de Chartres , {{ l'heu-
reux Gouvernement & le bonheur de l'Eglife réful-
tent de leur concert , leur défunion menace les Inf*
tîtutions les plus fages d'une ruine prochaine (h).
Les deux Edits qui excitent notre réclamation ,
confirment ce que l'expérience avoit déjà li fouvent
juftifié : que ii les Evêques euffent été confulté , que fi
le projet des Loix nouvelles leur eût été coînmuni-
que , nous ne ferions pas dans la trifte néceffité de
porter aux pieds du Trône nos plaintes trop fondées,
de déférer à. Votre Majefté elle-même le danger de
tant de difpofitions qui alarment la piété.
Les Evéques euffent prévenu la publication des
Edits, en faifant fur leurs projets les obiérvations que
nous venons de développer fur les différens articles
de ces Loix. Ils auroient mis fous les yeux de Votre
Maiefté les maximes des Saints Docteurs , les Décrets
des Conciles , les règles de h Difcipline , &: par elles
le vœu &c l'efprit de l'EgliJe. Votre Majefté eût été
convaincue que, fous le fpécieux prétexte de corri-
(a) In hoc fervient Domino Reges, in qi'antum Tiint Re-
ges , cum ea faciunt ad ferviendiim illi , quse non poilunt
facere nifi Regcs. ( Ev. iç^. n. ip '^.
(h Cùm Regnum oc Sacerdotes inter Te conveniunt, bene
regiair mundus, floret & fruiti'erat Ecdcfia: cùm vero inter
fe dilcordant non tantum parva; res non crefcunt, fed etiam
inagii» res miferabiiiîer dilabuntur, {^£f, 46 .
F3
( «o
ger des abus réels , on pouffoit cî*une part la févérité
au-delà des bornes fixées par nos Pères , & que de
l'autre, on autorifoit des pratiques que le relâche-
ment a voulu introduire , & que la pureté de la mo-
rale Evangélique n'a jamais permis de tolérer.
Mais ce que les ÉvéquQS euifent eu le plus à
cœur de faire appercevoir à V. M. , c'eft l'affligeant
^jréfage que fait naître le coup-d'œil général des
deux Edits ; c'eft h fanefle tentativede préparer par une
décadence progreffive , la chute de l'Etat Monafti-
que ; c'efl l'art avec lequel on a réuni tout les
moyens propres à le conduire à* fa mine.
Votre Majefté Impériale eût appris des Evêques
que rinftitut Monaftique eft faint en lui-même, parce
qu'il confaere à la pratique des Confeils les enfens
de l'Eglife qui ont un défir iincere de parvenir à la
perfection ; qu'au jugement de Saints Pères la vie
Religieufe eft une imitation de celles des Apôtres &:
de J. C. rnême {a) ; que les Moines » ont trouvé
» dans les premiers Chrétiens. . , dans Saint Jean-
9> Baptifte. .. dans les anciens Prophètes, un modèle
» admirable de vertus , qu'ils ont excellemment pra-
w tiquées. (t») «
Les imporrans fervices que les Monafteres ont
rendus à l'Eglife , & le jugement uniforme qu'elle a
porté depuis plus de dou'ze fiecles fur la fainteté de
leur inftitution , eût difpenfé les Evoques de com-
battre les iniufles préventions que l'incrédulité , ou
l'indifférence pour la Religion , infpirent à tant de
perfonnes , &: (ur-tout à celles qui inftruites dans la
fagelTe du iiecle, ne fe piquent que d'une politique
mondaine.
Les Evéques n'euflent point difîimuié à V, M. les
progrès que le relâchement a fait dans les Cloîtres.
(c) Monachi genus vivendi Apoftolorum ac Domini imi-
tantur. ( S. BaJIl. Conflit. Cap. 2.)
(J>) Thoinulfin. Difcipl. de l'Eglife, (T. i, p, 1422.)
C 57 )
En avouant Tes abus déplorables qui y régnent , ils
auraient dit, avec le iavaut Pierre d'AïUi, Evéque de
Cambray , que c'eft par la réforme , 6c non par la
deftruclion qu'il taut y remédier , à l'exemple des
médecins , dont la fonction n'eft pas de faire périr
les malades, mais de guérir leurs infirmités (^).
Ils auroient eu la confiance d'aflurer à V. M.
que le mal n'eft pas au point où on i'e plaît de le
porter; qu'il eft encore des Monafteres qui font les
afyles de l'innocence, où la pureté des mœurs, la
pauvreté de l'efprit &: du cœur iê confervent , où les
Keligieux & Religieufes joignent à la régularité &:
aux faintes rigueurs de la pénitence , un zèle brûlant
pour la gloire de Dieu ; où ces âmes pieufes occu-
pées de chanter les louanges de Dieu , &: alTociées
au miniftere des Anges , élèvent , comme Moïfe ,
des mains pures vers le Ciel , pour détourner les
fléaux de la colère de Dieu, appaifer fa Juftice , &:
attirer fur les Peuples &: fur ceux qui les gouver-
nent, les Bénédidions du Ciel.
Les Evêques auroient repréfenté à V. M. qu'in-
dépendamment de ces avantages, que le libertin peut
xnéprifer, mais qui feront toujours précieuji aux yeux
de quiconque ayant de la Foi &: tbrmé à l'école
de l'Evangile , connoit tout le mérite de la prière ,
6c croit avec le Prophète Roi , que fi le Seigneur
ne garde lui-mérne la Ville, c'eft en vain que veille
celui qui eft prépolé pour la garder. Ils auroient re-
préfenté à Votre xM:ijefté qu'il eft encore de l'intérêt
de la Religion & de l'Etat de perpétuer les Monaf-
teres , & d'y .faire refleurir la lumière èc la vertu.
Ce font le Monafteres qui fourniftent au Clergé
Séculier des Troupes auxiliaires toujours prêtes à les
(a^ Vitium vel abufus cortigi débet , & non ftatus deftrui ,
vel fuis dcbitis juribus defraudari, ficut boni Medici of?îcium
eft ab Infirmo morbuni tollere , 6c non infirnium corpus del-
truere. (^De Reform, Ecd. Cap, de Reform. capiùs, p. 8i. )
F4
(S2)
aider dans le pénible Minlftere des for.(ft"ions pa(l<v
raies. Dans les Villes, les Religieux procureur de
iavans & de zélés Prédicateurs. Dans les campagnes ,
ils fuppléent les Curés malades ou infirmes , leur
charité procure aux habitans , ou la liberté de conl-
cience néceflaire à plufieurs , ou les moyens de fa-
tisfaire leur piété par la participation des Sacremens,
principalement aux Fêtes iblemnelles.
C'eft dans les Ordres Religieux qu'on trouve le
plus grand nombre des Miffionnaires qui s'expatrient
pour aller porter le flambeau de la Foi dans les con-
trées infidelles ,. & qui y annoncent l'Evangile au ril-
que des perlécutions &c de la perte même de leur vie.
Les Couvens font des afyles pour les Orphelins ,
dont les Tuteurs feroient fouvent fort embarralTés ,
s'ils n'avoient pas cette reflburce, Combien de fa-
milles feroient dans Tembarras pour l'éducation des
jeunes Filles , fans le fecours des Communautés Re-
ligieufes , où on trouve des Maîtreffes fpécialement
chargées de les inflruire à lire , à écrire &: à parler
différentes Langues, de leur apprendre ou de les
perfeélionner dans les différens ouvrages propres à
leur état & à leur fexe , & fur-tout de les former
dans les fentimens de Religion qui font les fonde-
mens folides d'une éducation chrétienne.'* Les Royau-
mes ravagés par les dernières héréfies , fentent &
regrettent eux-mêmes la perte des Monafteres pour
l'éducation de la Jeuneffe.
C'efl enfin aux Religieux à qui le Public eu rede-
vable du commun enfeignem.ent de la Langue latine;
emploi également difficile & important, qui demande
«les taiens &" de l'expérience, auquel l'obéiiTance af-
fujettit autant de Religieux , qu'il en eft befoin , &
les attache par les liens du devoir & de la conf-
cience.
Nous ofons nous fîntter que ces Repréfentations ,
qui euffer.t 'nfniiablement touché Votre Majefté , s'il
eût été poffible aux £vêques de les lui adrelTer avant
la promulgation des deux Edits , ne feront pas moins
( 89 )
d'imprcfilon dir rcfprit & le cœur de \''otTe î^îaiefté ,
depuis leur publication. Les motifs puiirans qu'ils au-
roient employé , n'ont rien perdu de leur force par
cette circonftance. Ils font diftés par la Religion. Ils
ont pour objet le lalut des âmes & le bien public.
Des Evêques ne pourroient être infenfibles à de fi
grands intérêts ; &: fi conformément à la parole de
Jefus - Chrift , ils .ont lieu d'efpérer Ton affiflance ,
lorfque pour fon fervice & celui de fon Eglife , ils
font obligés de recourir aux Puiffances de la terre ,
quel droit n'ont- ils pas d'attendre un accueil favo-
rable , en adrefiant leurs prières à une Augufte Prin-
cefie, qui fait moins de cas des ornemens qui envi-
ronnent le Trône , que de l'éclat que lui donnent:
l'équité , la grandeur d'ame , la vertu.
Etaient Jîgnés ^ f Je AN Henry, Jrch. de. Malines,
J. R. Evêquc de Bruges.
H. G. Evêque d'Anvers.
F. Eve que d^Yprcs.
H. J. Evéquc de Ruremoîide,
G. G. Evcquc de G and.
F. Evêque de Namur.
MÉMOIRE prèfcnté le 8 Janvier if^j y pour
M. J. Janssens , Curé de la Ville de Wun , dans
la Guildre Autrichienne , relatif à la Requête de
M. le Confeiller & Mambour de Rurcrnonde.ÇTraduii
du Flamand, )
J— 1 'Intimé ayant eu communication en Copie au-
thentique de ladite Requête , &: fe réglant fur FOruon-
n;nce enfuivie , en date du 15 Déoemb.e I7'^6' , a
riionneur de dire :
Qu'aucune autre raifon que le cri de iu confclsnce ,
(9°)
ne Ta empêché pendant quelque tems de publier l'E-
dit de S. iM. I. & R. du i6 Odobre 1786, portant
éreftion du Séminaire-Général dans l'Univerfité de Lou-
vain , parce qu'il n'avoit aucune afTurance , que les
Evéqueç auroient une pleine impeftion fur les Livres
& la Doélrine , ainii que fur les Règles de Difcipline
& de Aîœurs , à obîtrver dans ledit Séminaire ; inf-
pedlion qui appartient inconttftablement aux Evêques^
comme le- prouve non - feulement l'Ecriture - Sainte ,
mais l'ufage confiant toujours obfervc dans l'Eglife ,
dès les premiers iiecles.
L'Eglife d'Alexandrie nous en oirre une preuve re-
marquable dans réledion, & cnfuite dans la dépo-
lition faite par le Patrigrche Dérnéirius de la perfonne
d'Origene , en qualité de Catéchifte de l'Ecole érigée
en cette Ville par Srint-Marc , comme le reconnoît
lui-même Elie JJup'in Bihliotheca Ecclejiajîica^ Tom. 1.
in vita Paut&ni.
De même Saint- Auguftin , Evêquc d'Hypone , ayant
érigé une Ecole pour tous les Eccléfialliques de fon
Diocefe , ne confiroit les Ordres facrés qu'à ceux qui
avoient été infiruits & fermés dans cette Eceie. C'eft
ce qu'attefte PGJjîdius dans la vie de ce Saint, Ch. IL
Le iiom même de Caré:hijîes , que l'antiquité donnoit
aux Maîtres qui enfeignoient dans ces Ecoles , en four-
nit auffi une preuve.
De même l'Apôtre Saint Paul dit : » Comment fe
« chargeront-ils du Miniflere de la parole , s'ils ne re-
» çoivent la Million » Quomodo vcrb prœdicabunt^ nijl
mïttantur ? Le pouvoir de donner cette MiJJîon eft
inconteftablement un droit qui appartient exclufive-
ment aux Evéques , droit reconnu par tous \ts Ca-
thoHques. Eî l'Apôtre ajoute , qu'on ne doit pas or-
donner des Néophytes , non Ncophytum.
Les Evêques pourront-ils fatisfaire aux devoirs que
leur impofe le iacré Miniftere dont ils font revêtus ,
s'ils n'ont une entière infpeâ:ion fur la Doélrine qu'on
enfeigne au Clergé de leur Diocefe?
Les Evêques ont d'autant plus de droit à cette inf-
C9I)
pedion, que dans tous les (iecles de l'Eglife, ils ont
tou jours été reconnus par tous les Catholiques , comme
les leuîs Juges des controverfes qui concernent la For
ou les règles des Mœurs.
Auffi-tôt donc,, que l'Intimé a été informé avec
certitude que l'inCpeclion &: la furintendance dudit
Séminaire-Général avoient été accordées aux Evê-
ques , oc qu'ainiî il a été dérivré du fcrupule fondé
de confcience qui le tourmentoic , il n'a plus balancé
un moment de publier le fufdit Placard : c'eft ce qu'il
a fait le 17 Décembre 1786.
Il avoit cependant des informations certaines , qu'ur»
très-grand nombre de Curés , tant du Brabant que de
la Flandre , n'avoient pas encore jufqi-'ici publié ce
Placard , Se qu'ils n'avoient pas été moleilés ni atta-
qués en Juftice à ce fujet.
Ainfi ce n'a pas été par un pur entêtement , mais
uniquement par la crainte juite & fondée de blefler
fa confcience , qu'il a différé quelque tems cette pu-
blication.
Il croit donc avec raifon , n'avoir rien à fe repro-
cher à cet égard , d'autant moiiiS que Sa Majefté
elle-même a depuis quelque tems accordé la liberté
de Religion & de confcience dans les Pays-Bas aux
Luthériens , Calviniftes & autres Sectes , tandis que
la Religion Catholique & la liberté de confcience
contorme à cette Religion étoient les feules qui au-
paravant fuffent établies dans le même Pays. L'Inti-
mé auroit donc , en pubhant ce Placard , tandis
que ce fcrupule raifonnable {iibiiiloit , non-feulement
grièvement péché , mais auroit paiTé pour le plus lâ-
che des hommes. Car fi l'Empereur Confiance Chlore,
quoique Payen', a chafié de ia Cour tous ceux de
fes Courtifans , qui par crainte de la mort dont il
menaçoit les Catholiques , avoient renoncé à leur
Foi, Sî apoftaiié contre la conviction de leur con-
fcience , s'il les a, dis-je, chaiTés comm.e des lâches ,
comme des hommes en qui il ne pouvoir avoir au-
cune confiance 6l capables de toute forte de for-
'(90
raits , 5: {i au contraire il a loué & élevé aux hon-
neurs ceux d'entre eux , qu'aucunes menaces ne pu-
rent forcer^ à abjurer leur Religion , en obéifTant à
r£clit de l'Empereur , &: qui montrèrent ruSx , que
nen au monde ne pourroit leur faire violer leurs
devoirs; l'Intimé qui, en fa qualité de Curé, gÛ chargé
de rinftruftion des Fidèles confiés à fes foins , eflmie
que fa conduite par rapport au fu(dit Placard, mé-
rite plutôt des éloges que le blâme , d'après les rai-
fons qu'il vient d'expofer.
S'appuyant fur tous ces motifs, l'Intimé penfe
s'erre fufïïfamment judifié , oc qu'ainfi tout
procès ultérieur & toute condanmation en
l'amende , & dans les frais de la procédure ,
viendront à ceffer.
Implorant, Sec. &c.
Copie de r Ordonnance du Confeil Souverain dt
Ruremonde , fulvie fur U Alemcire de J Janfjens ,
Intimé.^ préjlntc le {|^ Janvier i^Sj. ('Traduction
du Flamande)
La Cour ayant vu la Requête du Confeiller &
Ma;nc>nur du Confeil de Sa Majefté , hier exhibée ,
& ayant de nouveau entendu les raifons pour lef-
quelles il regarde comme entièrement inadmiflibles
les excufes de l'Intimé, contenues dans fondit Mé-
moire , pour fe juftiner d'avoir différé fi long-tems
& avec tant d'opiniâtreté la publication de l'Edit de
Sa Majefié du i6 Octobre 1786, touchant l'éreftion
du Séminaire-Général pour les Etudians en Théolo-
gie, ladite Cour condamne l'Intimé dans une amende
de vingt-cinq florins de Brabant , argent de change ,
au p'otit des Exploits : & de plus elle trouve les
principes expofés dans ledit Mémoire non moins faux
( 90
^qire dangereux , 5c qu'un Curé qui a la témérité d'a-
vancer,fous les yeux mêmes de Ton Juge, de telles
maxim.es , i'e déclare ouvertement l'ennemi de l'Etat
6c de l'Ordre piiblic , &: que comme tel il cft In-
digne d'exercer les ronflions pailorales ; en conlé-
qrence , interdit l'Intimé de toutes les tbnfticns de
Curé ; & fera TEvêque du Diocefe requis d'établir in-
cefiamment un Déierviteur pour la Cure de AVeert:
en outre la Cour met en lequeftre le tem.porel de k
même Cure , & commet pour l'adminiilrer fous dû
ialaire le Notaire Dionlfii, réiident en la Ville de
Weert , avec charge d'en rendre en fon temis un
compte exacl & pertinent pardevant CommifTaire
de la Cour , défend en conféquence à tous ceux
qu'il peut appartenir , de faire aucun payement des
^revenus de ladite Cure à d'autres qu'au fufdit Admi-
niilrateur 8c Séqueftre , fous peine d'être tenu de
payer derechef : lequel Séqueftre payera des deniers
provenans defdits revenus ; premièrement , la rétri-
bution à afligner au Déferviteur , Se en fécond lieu
une fomme de loo florins de Brabant , argent de
change, accordée par cette à i'Intimé , pour lui fervâr
de PePifion alimentaire , avec inioncllon très-expreiTe
audit Intimé non-feulement de s'abftenir abfoîum.ent,
auffi-tôt après l'iniinuation de cette , de toutes fonc-
tions paftorales , comme dit eft , mais encore de fe
garder d'avancer , foit dans des difcours , toit autre-
ment , des m.aximes fanatiques fem.blables à celles
qui fe trouvent dans fondit Mémoire , fous peine de
privation de fadite Penfion alimentaire , de féqueftra-
tion de fa Perfonne ou autres remiedes convenables ,
6c d'être puni arbitrairement félon l'exigence du ca?;
condamne l'Intimé aux frais du procès, montant à
la fomme de foixante-quatre florins quatorze fols de
change argent de Brabant; £c fera cette inceflam-
me^tinfmuee d'office fous un double authentique fufdit
audit Intimé , ainfl qu'au Séqueftre ; 6c de plus , pour-
que chacun en ait connoiilance , affiché fur la porte
r 94 )
de VEgllfe Parolffiale de "Weert , comme aufïi à la
breteque de la Mailbn-de-Ville dudit lieu.
Aclum inde. CanccUerye binncn Ruremonde dm
2.G Januani lySj , was gcparaplucrd L U t-
GENS , ondcr Jlond ter ordïnantic van Hovc ,
was geùcekcnt F. B. van dcr Henne, ondcr
jlond accordccrt by my , was gctcekeni F. B.
van dcr Henne.
PhILIPPUS DamianU s , &c. &c, Rcvtrcndo
Domino J, Janjfens Paftori W'crthenji nojira Dia^
cejis ^ falutem in Domino.
Exhibitum 8c communicatum nobis fuit Decretnm
fupremae Curiae hujus Ducatûs 26a hujus contra te
latum; que tanquam refradarius Mandatis Principis
muiftaris , ac furdnens lenfa & principla ftatuî &
bono publico nociva , totus hoflis declararis , publiée
tanquam talis per aflixionem diéli Decreti denun-
tiandus , ulteriùs omnibus Paftoratûs tui reditibus eo-
rumque adminiflratione privaris , relictis tibi pro
fliftentatione tua ducentis florenis noftroe cambialis
Brabandae , hinc ob bas aliafque rationes animum
noftrum moventes , te ab' omni funclione Officii
Prtftoralis provifionaliter iufpendendum duximus , &
per praef'entes furpenilim declaramus , idque donec
aliter declaraverim.us.
Datum Rurcmondas in Palatio noftro Epifcopali,
hac 30 Jan. 1787.
Epifcopus P^uremundenfis (a). De Mandato IllujI.
ac Reverendijjimi Domini mei.
TheUNISSEN Secret.
(j) Il n'eft pas pofRble de concevoir que M. l'Evêque
de Rurtmonde ait donné un pareil Décret contre un Padeur
(95 )
COPIE, £unc Lettre de M. U Secrétaire,
Révérende Domine Pastor,
Ingrati certè nuntii Communicator eïïe debeo , nuntii
decretae contra vos fufpenfioms ab Officio Paftorali ;
nec enim IlluftriiTimus niiî vifa Decreti Copia , quod
luprema Curia htijus Ducatiis ad valvas Ecclefis
Verrîienfis affigi vcluit , in quo publicè tanquam
hortis ftatûs & boni publici cenuntiaris , ad illud ex-
tremi deduc^us eft. Humilis lubmilno veflra & recurfus
ad diclam Curiam vel gubemium pro pœnae mitiga-
tione , nurnquid foliun fvipereft remedium ? nulhim
aliuvl , quvîntùm ego judicio , illudque effeftum optatum
habiturum licet prasfagire. Maneo intérim plurimo
cultu &;c.
Runmunia hac 2,0 Jan. 'iSy.
Theunissen Secret,
Lfs tris - bonnes raifons du rejpe^able
Pajleur , qui nont eu aucun fuccès dans le
moment , ont eu leur plein ejfet quand les
circonflances ont favonfé la vérité 6' la
juflice. Voici ce quon lit dans une Lettre
de IV e en y en date du <^ Juin 1787.
Maxima res effe<^ , viri : timor omnis abefto.
JE N. XI. 24.
» Il eft donc arrivé , l'heureux moment , qui nous
▼srtueux qui n'avoit açl que félon les lumières de la con-
fc'.ence & de la vraie Théologie, fans s'jppofer qu'il s'étoit
la lié détourner un moment de fes propres principes par
Te- prit de terreur, qui à cette époque avoit fubjugué prefque
t9us les efpriis.
(96)
confole d'une longue fervitude , d'une dure îk humi-
liante opprefïion. Tous nos maux ont difparu en un
feul jour!... L'Eglife de Dieu fembloit menacée de
la plus cruelle comme de la plus lubtile perfécution -,
des artifices & des ftratagêmes aufli puiflans & def-
truftifs dans leurs effets , que fourds & uns dans leur
marche , fembloient faire des ravages irréparables ,
rompre &: anéantir l'union Catholique , &: éteindre
parmi nous le flambeau de la Religion : lorique tout-
â-coup celui qui d'un clin-d'œil réforme la face des
Empires , fe lérvit des démarches d'une Nation al-
tiere & généreufe , pour arrêter le torrent qui em-
portoit déjà les plus belles , pofTeffions de l'Eghfe,
comme les plus précieux Droits de l'Etat... La Cité
de Sion reprend fon éclat , une fplendeur nouvelle
embeUit fes murs , on célèbre des feiVms dans toutes
les rues de jérufalem, Fer vicos ejus allduia canta-
bitur. (Tob. XIII. 21.^ «
» Vous favez, Monfieur, quelle profonde douleur
nous a caufé la Sentence du 26 Janvier de l'année
courante , qui déclaroit notre digne Curé indigne
d'exercer les Fondions Pafl:orale.v , féquellrant l'on
temporel en lui afïignant une penfion alimentaire de
2,00 fl. Vous favez auiTi que ce Pafieur fut fufpendu
de toutes fes fondions par fon Supérieur Eccléliafti-
que , & que la Sentence de la Cour de Ruremonde
fut affichée à- la Maifon-de-Ville , & même à la porte
de la propre Eglife du Curé. Quelle conflcrnation ,
quelle douleur, pour des âmes Chrétiennes, pour des
ouailles tendrement attachées à leur fpirituel! Quel
fcandale dans l'Eghfe de Dieu ! . . . Or , voici com-
ment nous venons d'être dédommagés de notre
défolation & de la prefTe où fe trouvoient nos
coeurs depuis quatre mois. Le 26 Mai , notre Curé
reçut de la Cour de Bruxelles une Lettre avec deux
incliifes, dont l'une à l'adrefTe de Mgr. l'Evêque , &
l'autre à celle de M. le Mambour du Confeil de
Ruremonde. Aufïi-tôt le Curé fe rendit dans ladite
Ville, 6c quoiqu'il y arrivât le jour de Pentecôte, le
valet
(97)
vatet àe îa Conr fut fur le champ expédié pout
NVeert, pour annoncer au déferviteur que (es fonc-
tions venoient à cefler. Ce valet arriva ici , le même
jour , vers 4 heures & demie de l'après-midi. Cet
événement répandit un contentement iiuiverfel dans
toute la Ville. Les trois Corps de la Bourgeoise fous
les armes, tambour battant , drapeaux déployés, allè-
rent à la rencontre deThomme Apoftolique. Le Clergé
en fit de même. CJne mulique lonore égaya la mar-
che. Enfin à quelque diftance de la Ville on trouva
îe bien-aimé Curé, Chacun s'emprefTa de le féliciter
& de rembralTer. On rentra en Ville , au Ion de tou-
tes les cloches. Le concours du Peuple étoit immenfe.
Les rues devinrent trop étroites. Des acclamations
&: des cris d'alégrefle tirent retentir tous les coins
de la ville : ^ive le Faveur Janjfen^ ! Fïvc notre, bon
Père! Vive l'homme Àpoftoliquc! Le cortège arrive
enfin à la porte de l'Eglife paroiifiale ,
Et tandem îati nota advertuntur arenx.
J£.s, V. 34.
Le Curé entre dans la Maifon du Seigneur, dont la
iplehdeur lui tient (1 fort à cœuf :
Adfumus , 6» porîus delati intramus arnicas.
Ib. 57.
Là , tranfporté d'une falnte joie , il fe profterne au
pied du grand-autel, &c plein de reconnoifîance il y
adore les deffeins de la Providence qui fait conlbler,
quand il en eft tems , ceux qui fouffrent pour l'hon-
neur de l'Eglife. Oh 1 fi dans ce moment on avoit
pu voir tous les mouvemens de fon cœur , quel
raviffant tableau ne feroit-on pas des diverfes affec-
tions qui s'y font rencontrées ! On s'imagine bien
qu'il aura dit avec Salomon : Domine Deus Ifraél ^
non c/f Jîmilis lui. . . Qui cujlodis paciurn & mife-
rlcordiam J'ervis tui.i^ qui ambulant coram te in toto
corde fuo.,. Benediclus Dcminus qui dédit requiem
populo fuo (III Reg. VIII, 13. 56). Dans le même
G ttt
^ems , une foule innombrable adreffa au Ciel des re^
mercîmens bien finceres pour un bienfait fi éclatant.
Hl autem Domïnitm bcnedicebant , qiùa mamijicabat lo-
cum fuiim\ & umplum q:iod paulo antc timoré, .. crat
plénum , apparent: omnipotente Domino , gaudio &
/aùtia ïmplMan ejî (IIMach. III. 30). Entretems les
Corps de la Bougeoifie firent une triple décharcre, &
finalement M. le Curé fut reconduit dans la de-
meure. i<
» Le lendemain , on chanta en adlion de grâces
ime Gand-Meffe fuivie du Te Deum , au fon des Clo-
ches. La vafte Egiife Paroiffiale étoit remplie de
monde. Vendredi i de ce mois, la Cour de Rure-
monde donna des ordres pour faire afficher à la porte
ée l'Eglife Paroiffiale, ainfi qu'à ^a Mailon de Ville,
l'ordre révocatoire de la difgrace du Curé. S'il fal-
loit entrer dans tous les détails de nos réjouiiTances ,
Antt diem cUu/o cfimponet P'efper Olympo.
» Je fuis , 6cc,
V. .H. Serv.
Mathias Kr**.
(99)
Quoicii/E cette Répréfentation regarde d'i-
récif ment une Solemnicé particulière^ elle
renferme des Obfervaùons générales fur
VEdit relatif aux Procejjions ^ & par-là ^
devient d'urrintérêt ajj'e^ étendu pour troU'
ver place dans ce Recueil,
RKPRkSElfTATIOH dts Etats du P^ys & Duché,
di Luxembourg , à Leurs Altcjfss Royaits , taudiant
Us deux Pr9cs£i0ni, de Iê. Stlemniû dé Notre-Dame^
Fuirons de La Province.
Madame, Monseicnevr,
R
EMONTRENT en très-profond refpeft les Etats ou
pays Duché de Luxembourg 6i Comté de Chiny,
■que S. M. voulant faire ceffer les abus des Proceffions
ta des Jubilés , elle a fait publier l'Ordonnance du
10 Mai dernier ci-jointe fub N». i". dont l'Article
premier flatuc qH'outre les Rogations ordinaires, il ne
pourra y avoir dans chaque Paroilîc que deux Pro-
cefSons par an , dont l'une au jour de la Fête-Dieu ,
& l'autre à quelque autre jour de fête , à défigncr par
l'ordinaire , 5c qu'il ne fe fera aucune Proceliion le
jour de Dimanche , pour ne point déranger le fervice
paroifîiale — l'Article 2 ajoutant que l'on ne pourra plus
porter de Statues ni d'Images quelconques, non plus
que des enfeignes de Métiers , vêtemens extraordi-
naires , ou autres bigarurres femblables dans les Pro-
ceffions , ni d« les faire accompagner d'aucune mu-
fîque.
Les Remontrans reconnoifTent avec d'autant plus de
G 2
( 100 )
confiance que l'Intention de leur Augufte Souverain <
a été de rapprocher cette pnrtie du Culte divin des
règles de la difcipline Ecclciiaftique établie par dif-
ferens Conciles provinciaux , que ce n'eft que fovjs
l'appui de ces Décrets canoniques , qu'ils efperent ob-
tenir de la piété de Vos Altefîes Royales , la coniér-
vation d'une folemnité rciigieul'e , qui ititérefTe iî fpé-
cialement cette Ville capitale , &. toute cette Pro-
vince de Luxembourg.
Il y a près de cette même Ville au Couchant , une
Chapelle de Notre-Dame , célèbre par la dévotion
des Fidèles qui y viennent de toutes parts, pour révé-
rer rimage miraculeufe de la Sainte Vierge, Tous le
litre de Conlolatrice des Affligés : les premières pier-
res de fa co):rrru6"t!on en furent pofées l'an 1615 , par
le Comte de Berlaymont, Gouverneur de la Ville &c
de cette Province , les Comtes d'Egmondt & de Man-
derfcheidt , les Abbés de Saint Maximin & de Munf-
ter , en préfence de la Noblefie , des Confeillers , des
Echevins de la Ville, & d'une grande multitude de
peuple. . • . ,^ , .
Cet Edifice pieux ne iùt achevé qu'en 161 j , mais
il ne le tut pas plutôt , que l'on vit s'y opérer des
miracles par l'intercefTion de l'Augufte Confolatrice :
miracles examinés , avérés & approuvés par l'ordi-
naire ; le nombre m.éme en devint fi grand 6i les
eft'ets d'une proteélion divine dont ce Pays n'avoît
cefié d'être favorifé dans les années de calamité ,
furent ii notoires & admirables, qu'ils déterminèrent
le Prince de Chimay & le Confeil de cette Pro-
vince , dont il étoit Chef en fa qualité de Gouverneur ,
à choifu- pour eux & leurs Succeffeurs notre Dame
de Confolation pour Patronne perpétuelle de cette
Ville de Luxembovirg : l'A'fle en fût dreflé le
%j Seprembre de l'année 1666; les Magiitrats de
la Vilie firent la méjne chofe le 5 Oéïobre de la
même année : le Doyen au nom de tout le Clergé
de la Ville dreffa fjr le même fujet un A.cle qui eft
gardé parmi le« Aâ:es capiîulaires , 6c il fût envoyé
( lOI )
•les cbple's de ces Actes à i'Evêque d'Azot , pour
'lu'il les ratifiât comme Suffragant & Vicalre-Gene-
al de l'Archevôque de Trêves, ce qu'il lit par Ion"
Décret du 26 Mai de l'année 1668 , dans kquel il
qualïHe la Chapelle de miracuîeuie, &: ordonna qu'on
pourfuivît à Rome la confirmation de cette Election:
d quoi on s'empreffa de latiskire , en raifant pré-
jèp.ter les mêmes A6tes aux Cardinaux de la Con-
grégation des R-ites : le rapport en fût fait par le
Cardinal Celli, enfijite duquel & après que le tout
eut été bien examiné , la Congrégation pronoiiqa
qu'il conftoit fuffifamment que la Ville de Luxem-
bourg avoit légitimement élu notre Dame de Conlo-
laiion pour fa Patronne , approuva &: confirma ceitc
Election , déclarant en outre qu'on pouvoit remire
à cette fainte Patronne tous les honneurs qu'on rtnd
aux autres Patrons légitimement élus , &; faire à fcfn
égard tout ce qui fe pratique de droit &: de coutume
envers eux : le Décret en a été expédié le 14 No-
vembre de la même année 1668, figné & fcellé par
le Cardinal Giiietti.
Les merveilles qui continuoient à s'opérer (h'.^s
la famte Chapelle , produifirent une deuxième épo-
que à fon hiftoire ; car non-feulement toutes les Vil-
les, mais encore toutes les ParcilTes du Duché de
Luxembourg & du Comté de Chiny voulurent imiter
la Capitale , & excitées par une fainte émulution ,
choifirent chacune la Patronne commune , ainfi que
cette Capitale l'avoit fait onze ans auparavant : la
réfolution en tut prife le 6 Octobre de l'année 1677 ,
par les trois Etats de la Province 6è l'exécution en
fut commife à leurs Députés , auxqui;îs toutes les
Villes de la Province , envoyèrent leurs AS.es d'E-
leétion en parchemin , fignés par le Greffier & munis
du Scel de chacune, dont la teneur eft tranfcrite
dans la Copie ci-iointe fuh nv.mcvo i**. les Doyens
Ruraux s'empreiferent d'en faire autant de la part
de toutes les Paroiffes de cette même Province , fu;-
G3
( 102 >
vant leur Ac^e du mois d'Odobre de 167S, ci-joint'
fiit r.umv.ro 'y.
Les ménies Députés s'adrefferent en conféquence,
pour obtenir b confirmation de cette Election , non-
feulement à l'Archevêque de Trêves & à l'Evcque
de Liège , qui la confirmèrent par leurs Décrets du
4 Juin 1678 , & du 6 Février 1679 •• ci-joints lub Nhs.
4°. & 5*^. mai« encore aux Cardinaux de la Con-
grégation des Rites à Rome , qui en firent dépê-
cher leur Décret de confirmation en date du 6 Mai
1679 , ci-joint en copie fub Nro. 6**.
L'on confommr! l'œuvre d'un dévouement Ç\. unanime
le le. de Juillet, jour de Dimanche de l'année 1679 ;
l'Evêque d'Hierapolis , SufFragant de Trêves a la tête
du Clergé, le Prince de Chimay avec tous les Officiers
du premier Ordre , le Confeil Provincial du Roi ,
les Juges de la Ville accompagnés des Députés des
dix-huit Villes de la Province , lé rendirent à TEglife
pour lors du -Collège des Jéfuites où la Ste. Statue
étoit placée , fur un Autel qui lui a voit été préparé ;
î'Evêque y célébra pontificalement la Grand'Mefîc ;
il y eût Sermon , que l'Orateur termina en lifant les
Lettres de Confirmation obtenues à Rome , Se pro-
nonçant la formule d'éleflion au nom de toutes les
Villes &: de toutes les ParoifTes du Duché de Luxem-
bourg & du Comté de Ch':ny dont la teneur efl
jointe fab n°. 7. Après les Vêpres du même jour on
reporta la Ste. Statue dans fa Chapelle en une Pro-
ceiHiôn formée de tous les Ordres tant Eccléiiaftiques
nue Laïcs , dans laquelle l'Evêque Suffragant ci-defTus
nommé porta le Saint Sacrement.
Qts hommages ainfi rendus à la Ste. Vierge de-
\inrent pour les années fuivantes l'établlffemcnt d'une
Solemnité qui les renouvelle religieufement. Le Samedi
l'après-midi avant le quatrième Dimanche d'après
Pâques, la Sre. Image fe porte en une fimple Procefïion
en cette Ville dans TEgiife du ci-devant Collège des
Jéfaires 6^ aujourd'hui Paroifîiale de St. Nicolas &c
( I03 )
Stc. Thérefe ; Ta ChapeUe étant un Bâtiment trop petit,
pour contenir la multitude des Perlonries que la dé-
votion y appelle pendant TOclave de ce^te Solcmnité ,
il a fallu néceiïairement en placer le Siège dans cette
Eglife qui , quoiqu'affez vafte , ne t'uffit pas encore
pour contenir le Peuple qui s'y préfente , particuliè-
rement les jours des deux Dimanches de l'Odave.
Cette Proceirion ne corififte que dans la cérémonie
la plus fimple : les Ecoliers du Collège Royal con-
duits par leups Régens &: leurs Profelleurs,, marchent
les premiers , dont deux Chœurs chantent les Litanies
de la Sainte Vierge 6>c les autres prient haut le Cha-
pelet , fuivent les Bourgeois & autres Perfonnes nui
s'y joignent qui prient de même, &c après eux les
Maîtres II affiftans Confrères des treize Métiers de la
Ville qui porteat des torches allumées , &: enfin le
Clergé de la ParoilTe qui précède la, Ste. Image qui
eft portée fous un Dais par quatre Prêtres &: le Dais
par quatre Bourgeois Notables ; le Peuple de l'un Se
de l'autre fexe fuit.
La Proceflîon étant arrivée à l'Eglife , les Prêtres
p]a:ent ïkmgi de la Ste. Patronne fur l'Autel qui lui
eft préparé au milieu de cette Eglife &: qui eft orné
des Préfens précieux faits en différens tems à la Ste.
Chapelle par des Pcrfoimes les plus illuflres &: même
du premier rang : cette cérémonie s'achève par les
Litanies de la Ste. Vierge que l'on chante au Chœur.
Le lendemain les Préfidens 6>t Gens du Confeil de
Sa Maieité dans cette Province &: les Jufticiers &C
Echevins de cette Ville fe rendent à la même Eelife ,
pour y affilier à la GrancrMelTe , qui y eft célébrée
par un des Prélats des Etats & quele[uefois par l'E-
vêque-Suffragant de Trêves , quand l'occafion s'en
préfente : il s'y prononce un Sermon relatif à la
célébrité du jour, après lequel , l'Orateur renouvelle
l'afte d'éleftion au nom. de toutes les Villes & de
toutes les Paroiiies de cette Province , fuivant la for-
mule ci-deffus produits fub n*. 7^.
L'Eglife ne fe defcraplit pas pendant toute la fe-
G4
( 104 )
maine; cependant c*eft le Samedi &: le lendemain
Dimanche de l'Odtave que la grande afRuence de
Peuple fe fait principalement remarquer. De toutes
parts de cette Province y du Pays de Trêves , de la
Lorraine &: de troi-; Evéchés il vient une foule innom-
brable de Fidèles implorer Tinterceffion de la Sainte
Vierge dans leurs affligions , &: pour rendre leurs
prières plus efficaces, ils ont recours aux Saints Sacre-
ments de Pénitence & d'Euchariftie : toutes les Egli-
fes de la Ville font remplies de ces Pénitens , &
parce qu'il y auroit fallu une Eglife immenfe pour
les contenir , le Souverain Pontife leur a donné cette
liberté , pour gagner les indulgences attachées à cette
dévotion , moyennant qu'ils vilitaiTent dans le jour
la Sainte Image & qu'ils priaiTent pour les fins or-
dinaires de TEelife.
Il fe fait, ce Dimanche cinquième d'après Pâques,
la Proceffion Solemnelle dans laquelle on reporte la
Sainte Statue à fa Chapelle : cette Proceffion com-
mence vers les deux heures de l'après midi dans
l'ordre fui van t.
i*'. Les eni^ns de l'Hôpital des Orphelins , précédés
de leur croix & accompagnés du Prêtre leur Direc-
teur , priant haut le chapelet.
1°. Les Ecoliers du Collège Royal conduits par
leurs Régents &: Profeffieurs chantant en Chœur &
priant , comme à la première Proceffion.
3". Les jeunes hommes de la Ville priant égale-
ment haut.
4^. Les hommes mariés de la Ville Se de la Cam-
pagne qui s'y joignent, pratiquent la même dévotion.
"j". Les maîtres des difFérens métiers de la Ville
portant chacun un flambeau.
6^*. Tout le Clergé régulier & féculier de la Ville
chantant les Litanies de la Sainte Vierge.
7^. Douze jeunes enfans du fexe en robes blan-
ches garnies de bleu portant chacune un cierge blanc,
S^. Quatre Eccléfiaftiques en chappes qui font les
fonélions de Chantres.
( IC5 )
9°. La Statue mlraculeuie de l'augufte Ccmfoîa-
trice portée par quatre Prêtres , fous un Dais porté
par quatre jeunes hommes de la Ville que quatre prê-
tres accompagnent portant des flambeaux blancs.
lo^. Les treize maîtres des Corps de métiers de 1?.
Ville avec les fiambeau'-: de leurs Corps.
11^. Les fergens du Magillrat de la Ville avec
leurs hallebardes. -
12. Un Chœur d'Acolytes avec leurs encenfoirs,
des fleurs &: verdures qu'ils répandent devant le
Saint Sacrement.
13^. Les huiflîers du Confeil tenant chacun fon
bâton Royal ea main.
14**. Les Juges du magiflrat de la Ville portant des
flambeaux.
15°. Le très Saint Sacrement porté par un des
Abbés de la Province fous un Dais porté par les
plus refpeftables bourgeois de la Ville.
16*^. Les Préfidens , les Confeillers &: le Greflîer
du Confeil aujourd'hui Souverain de Sa Majefté ayant
.chacun un flambeau blanc.
17*^. Une compagnie de Grenadiers de la Gar-
nifon.
18**. Une multitude de peuple difant haut le cha-
pelet.
Tel efl: le récit fidèle d'une Solemnité qui a tou-
jours été chaque année jufqu'à préfent la m^'me : même
concors de peuple aufll prodigieux qu'édifiant, même
ardeur pour s'approcher des Saints Sacrements , même
confiance dans la puilTante interceflion de la Sainte
Patronne, même modefl:ie & même fimplicité dans
l'ordre , & la marche de ces deux ProceflSons : pas
d'adions; pas de vetemens extraordinaires, rien en-
fin, qui.fe reffentit des jeux & de la frivohté du
fiecle.
Or , c'efl: ainfi , que la difcipline Eccléfiafl:ique 5<:
Religieufe prefcrit , que les Proceflions fe faflent :
l'pn citera à ce fujet d'autant plus volontiers le Çon-
(io6)
cilé de Cologne de Pan 1549 titre 12 (*), qu'il TeiVible
qu'il ne ibit pas poilible de tranicrire rien de plus
iage Si de plus propre pour canoniler le culte que
l'on rend à la Sainte Patronne, dans les deux Procei-
lions ci - deflus décrites : tout y eÛ rendu ii éncrgi-
quement dans ce tife , que ce iëroit diminuer le mérite
du paiTage ^ quoi qu'ailez prolixe , que d'en retrancher
quelque choie : en voici les termes — Nihil prope tam
Sduclum eji ^ quod /cecularium homlnum vanitas non
trahut in abujum. EccUJia de thefauro corporis Chljli
exf'ultans circumfcrt Ic/igis Proceljionibus extra, Jacrus
ctiis Hojliani ïLlam faliuanm : vïddïut fimul repmf';^-
tujis lùniris Chrijîi hijlorïcun : qui dum quétrcrct falii-
tem najiram , in mcdio populi vajatus ej^ , & iiniv^rja/n
judaam eircumambuluvit , douns ^ & açiotos fanansy
Dijcipulis comitantibiis _, quamobrcm & jcuiclorum n-
liquias ^ & imagines corum qui vcjligia ejus fccudfunty
jimul circumferimus , (ignificantes illos nunc cum ipj'o
regnare & iriumpharc m calis. Qjice. memorana débet
piis ejfe jucunda & Itzta. Vcrum hue jizcularis (lulto-
rum liominum vanitas irrepjît^ & adhibentur ctiam Ludi
profanï & fcurrilcs magno jlrepitu , ac quajî ad Bdlum
procidendum effet tynipana puljantur : & otiojd Jpec-
tacuhi eduntur , rébus IjUs non congnicntia , quitus
populus deleclatus y a rébus quA FroceJJione aguntur ^
avocatur. Mandamus idcirco , ut juxi^ Cafartic Ala-
jcj^atis rtformationem , quldquid non valet ad devotio-
■nem cxcitandam , a procîjjionihus removeatur : fed Jînt
Procejjîones compofice. , graves & mediftx : abjait ri-
jus , joci & confabulaîïones : & creiu homincs , aut
J'uaviter corde & voce moâukntur : hec bsaia Virginis^
aut alunus cujuslibet funcîi , plures , quàm imago tma
uniuscujufque circumfcratur : ne videa?nur magnas
& parvas , cultas & incultas Jîaiuas infpicere & non
*) Analife des Conci'es généraux & parriculicrs , par Ip
P. Rkkard, part. 2. T. 4 verb. Proceffion,
X io'7 >
furfum mente în cœlum erccid rem Jî'^mficatam potins
cogitare. At ubï popuhis vanus nolutrit abufnm hune
eorrigcn, & infolcraiam prohihere , mandawus & piet-''
cipimus facerdotibîis & clèro ne talibus PrGceJJionibus
mterjînt ^ ubi iram Dd ^ non vcro mlfcricoidiam In
nos provocamus.
On ne peut reprocher aux deux Proceffions , dont
il s'agit aucun de ces abus que ce Concile condamne ,
elles renferment au contraire , tout le mérite qui doit
les carailerifer : le bel Ordre y règne ; elles font
pleines de dignité ôc de modeftie , Ton y prie & l'on
y chante, ////2^ compojîia ^ graves & tnodejict.
Si l'Ordonnance de Sa Majefié n'avoit pas défendu
de porter dans les Procédons des Statues & àzs Ima-
ges , il fembleroit qu'elle n'eut que renouvelle le Dé-
cret du Concile de Cologne , ou plutôt ainfi qu'il l'a-
norice , une réformation émanée fur cette matière,
d'un des auguftes Prédéceileurs de Sa Majefté. Man-
damus idcirco , ut juxta. Cafarea Majcfîutis reformatlo-
jicju quidquid , &c.
Or , comme cette même Ordonnance défend en
outre de faire dans chaque ParoilTe plus de deux Pro-
ceffions par an , dont l'une au jour de h Fête Dieu,
6i l'autre à quelque jour de fête à défigrxr par l'or-
dinaire , & qu'enfin il ne peut fe faire aucune Procef-
fion le jour de Dimanche , pour ne point déranger
le fervice Paroiilial , les vœux à&^ Etats font d'obtenir
de Vos AltelTes Royales la difpenfe nécefiaire, pour
continuer la folemnité du Culte de leur Sainte Pa-
tronne , ainfi qu'il en a été fait une dcfcription ci-deffus ;
favoir : dans deux Proceffions , dont l'une le Samedi
avant le quatrième Dijnanche après Pâques, dans la-
quelle :pn ne porte en Ville que la Sainte Image, &
l'autre le cinquième Dimanche après Vêpres, où l'on
porte en outre le Saint Sacrement de l'Autel.
L'on vient de remarquer que la coutume de por-
ter les Images à^s Saints dans les Pfoceiîions où le
Saint Sacrement eft également porté , ne doit l'on
origine qu'à la coniparaifon uuffi jufte que pieufe ,
( io8 )
que le Concile de Cologne en tait avec fous îcs tra-
vaux que Jefus-Chrift accompagné de fes Dilciples a
endurés dans la Judée , pour enltigner aux homme-î
fa lainte ê»r falutaire Doélrine : Qui dum quarcvît
Jalutcm nojzmm , in mcdw Popidi verfutus efi , uni-
verfa/n JiuLzam cinumaïubulavit doccns , & a^rotos
finans , Difcipuiis comitantilus : quainobrcm & Save-
torurn Rcliquias & Imagines iorum qui vsfiig'a gui
Jccud funt , Jimul circumfcrimus , Jigmficantis lUos
nunc cum ipjo regnarc & trium phare m Cœiis,
Si donc en conformité de l'intention de l'un des
Prédéceffeurs de Sa Ma]eil:c au Trône impérial , ce
Concile a permis qu'il tût porte dans les Prcccffion»
des Images de la Sainte Vierge îk des autres ; pourvu
qu'il n'y en eût qu'une de chacun : Nec Bcam Vir-
ginis , aut altcrius cujujUha Sancu , plures quàm
Imago una imiufcujuj'qiu cïrcumjciatur : Il paroit
cfue cette décilion Eccléhaftique ell d'autant mieux
invoquée ici , qu'elle le trouve confirmée par beau-
coup d'autres de différens Dloceles.
L'Auteur ci-deffus cité , rapporte ibidem un autre
paffage du Concile d'Aix de l'an IV^5, tit. de Pro-
ujjionihus , qui il:aîue que les Saintes Images & ks
Bannières du Clergé ne foient pas portées par des
Laïques , tînon au défaut de Clerc : Sacras Imagines ,
vexi/lave Clcri , ne Laicns homo in Proafjîonc pcffi-
rat , iibi CUricus qiùfquam cji , qui hoc munus prctf-
tan po(jit.
Van Efpen tranfcrlt en fon Jus EccUfiapicnin univer-
Jum Part. \a. tit. i6', de cura Epifcopali N. 13. Un
paiïage du Synode de Mali nés /'^zr/. Q..Tit. 14. Cap. 1
6' -3 , qui permet que l'on porte dans "les Procetlions
les SaitUes images , moyennant que leurs parures
foient décentes : Ei quœ ad Gmamimiun jupplica-
tionum proponuniur ^ cjujmodi fint , qux ociilcs fpec-
îandmn non oftendant... Numquam ctiam Rcliqui<z
vd Imagines in Procefjlonibus dcfcrantur , niji per
CUricos Sacris iniàaios.
Ce célèbre Caiioniile, que l'on n'accusera certaine-
( I09 )
ment pas de relscliement dans fa Do61rine ^ dit ail
nomjjre fuivant qu'il n'3/ a rien qui ctfenfe la Dilbi-
pline R.elig!eule, de porter les Images &: les Pveli-
ques des Saints dans la même Proceffion, où Ton
porte le Saint Sacrement : Licet fer fe inordmatum
non fit , imagines aut Reliquias SanÙorum unâ cum
vcncrahili Sacramcnto in ProceUlonihus circumfcm ;
fi'j^n'ip.canus , ut ait Synodus Colonunfis anno '549,
illos nunc cum ipfa rcgnarc & tmmphare in Cœlis ,
^ui vcjligia cjus hic in unis fccuti junt. Cependant ,
ajoute-t-il , fi l'Evéque remarquoit que ce \:\\t au pré-
judice de l'Adoration Perpétuelle due au Saint Sa-
wement , il pourroit interdire cette coutume.
Il paffe enl'uite au quatrième Concile de Milan ,
part. 2. ca.p. 4 , au Synode de Namur de Tan 1639,
qui ne permettent pas de porter des P.eliques Se des
images avec le Saint Sacrement , & de-là au Concile
de Cologne de l'an 165 1 , qui le défend auiTi , à
moins qu'une coutume pieufe & fort répandue ne
l'exige autrement , de laquelle il eft réfervé à l'Ar-
chevêque , à fon Vicaire-Général , ou aux Doyens
Ruraux de coiinoifre , pour s'aiTurer li la vraie Se
fincere piété en eft le foutien : Sïfi. pia multorum
locorum confuctudo aliud pcfiuUt , de qua. tamen con-
fuetudinc inte^rum tr'iî nobis , nojîrovc in fpiritiiali-
bus yicario-Gemrali feu dccanis ruraUbus cognojccre ^
an cum pietatc vcra & yt-fuafa ccnfijlat.
Enhn l'Auteur termine cette queftion en remarquant
que quoi qu'il n'y ait rien que de bien dans la cou-
timie de porter les Saintes Images avec le Saint Sacre-
ment : coutume à laquelle ledit Ccwicile de Cologne
fe rapporte , il n'eil cependant pas moins de la com-
pétence de l'Evêque de juger , ù cette coutume eft
exempte de tout abus. Hinc patu dicium Jrch'icpif-
copum defiderajfc quidem ut juxtâ S. Caroli prafcriptum
cum vemrabiLl Sacramcnto Sariclomm ' Imagines noii
circumfcrantiLr ., aliquid tamtn ccnfuctudini in rt de fe
Mvnime inordinatâ dctulijfe ; ita tamtn vt fihi inte<jru!n
ejfe declaravcrit , Judicare , num hic & nunc conjuc'
( nô )
tudo illd Vèraf77 populi divotiomm non impedlat , ntc
cjus ergiX S anUiffimurn Sacramintum rtvtrentiam podus
diminuât quùm promovcat.
Comme l'on doit être convaincu qu'il n'cft défendu
de porter dans les Proccfiions des Statues 6c des Ima-
ges que dans la vue de faire celler les afeus qui peu-
vent en réllilter , l'on doit être également perfuadé
que là où le mal n'exifte pas &: où il n'efl: pas à crain-
dre , Sa Maiefté eil pieufement difpofée à maintenir
la coutume d'un culte aufïï précieux qu'édifiant, non
feulement pour tous les habitans de cette Province ,
mais encore pour tous ceux des Provinces voifines qui
s'empreflTent à y participer.
Il y a plus de cent ans que les Etats , au nom de
toutes les Villes , & Paroiltes de ce Pays , ont voué
ces hommages à la Sainte CoHlblatrice des Affligés ;
& il y a auffi plus de cent ans que tous ces fidèles
clients n'ont pas cefîe de recevoir par l'interccffion de
leur augufte Patronne , dans les tems durs &c les ca-
lamités publiques , le foulagement qu'ils réclamoient ;
les Particuliers de tout diftriél & de toute contrée
ont également rcfTenti les effets de fa puilfante mé-
diation dans leurs peines ôc miferes privées & fe-
eretes.
Ce culte n'a jamais varié dans fes cérémonies,
chaque année a toujours préfenté le même ordre &
la même dévotion pendant l'Oélave &c dans les Pro-
ceffions conftamment épurées & dégagées de toute
pratique contraire aux Décrets Eccléfiaftiques ci-deffus
cités , & le tout a toujours été tellement approuvé
par le fait même des Suffragants du Diocefe de
Trêves , que l'on ne croit pas que depuis 1679 r
époque de l'établiiTement de cette Solemnité, il en.
ait été un qui n'y eut affiflé , tant en y célébrant
pontificalement , qu'en portant à la Proceiïïon le
Saint Sacrement; ou pourroit même en citer qui fe
font acquittés pluficurs fois de ces fondions ; l'on ea
a vu de nos jours la preuve dans la perfonne de
i'illuftre M. de Kontheim, ^ à peine M. l'Evêquc
( III )
ti^Afcalon , fon coadjuteur , hit-il ^levé a cette 61-'
gnité qu'il commença à lu ivre un fi bel exemple ôé
il propre à rendre en même tems un témoignage
éclatdnt de la pureté du Culte dont l'on honore dans
cette occafion la Sainte Confolatrice.
Si d'un autre côté l'on obrerve que la dernière
de ces deux Proceflïons fe fait un Dimanche ôi que
l'Ordonnance de Sa Majcftc ne le détend , comm«
il a déjà été rem.arqué ci-defïus , que par le m.otit
de ne pas déranger rOfiîce divin, l'on doit aiiffi trou-^
ver que cet empêchement f* levé par lui-même,
dès que l'on fe rarpelîe que cette Proceffion ne le
fait qu'après les Vêpres du cinquième Dimanche après.
Pâques ; ainfi qu'il a déjà été dit.
De tout ce que l'on vient d'expofcr , il réfulte
donc que ce n'cft pas d'une cérém.onie pieufe éta-
blie par une Paroiffe particulière dont il s'agit ; mais
bien d'un Culte voué fclemnellem-ent à la Sainte Vierge
par tous les Ordres Se par tous les Habitans d'une
vafte Province : d'un Culte approuvé S: confirmé
par l'autorité de l'Eglife & continue jufqu'à préfent ;
d'un Culte enfin (imale , pure &î fans tache , auquel
les habitans des P ovi.nces voifines font venus s'af-
locier avec ardeur, & dès-lors en s'arrêtant à cette
l'eule confidération &: fans égard aux avantages temi-
porels que cette Ville de Luxembourg reçoit annuel-
lement de ce concours prodigieux de Peuple dont
l'expofé nuiroit à la pureté du motif qui anime les
Etats ; il ne paro'it pas que l'on piîilTe fe refufer
d'en conclure que s'i cxifte un cas qui mérite une
difpenfe de l'Ordonnance , c'efl: certainement celui
que l'on vient de repréfenter; fur-tout, que l'on n'a
aucun lieu de douter que cette grâce ne foit accueil-
lie prT l'ordinaire avec une pieufe alégrefle, n'ayant
encore pas jufqu'à préfent defigné le jour à la Pa-
roiffe de Saint Nicolas & de Sainte Thercfe de
cette Ville pour la deuxième Proccflion permife par
■ TArticle I de la même Ordonnance.
A ces cauf^s les £tats avec tous lois haJ»;tans dt
( iiO
cette Province , avec ceux de fes Frontières , Se par*
ticuliérement avec tous les pauvres affligés qui fe
trouvent parmi les uns &: les autres , fe profternent
devant Vos AltefTes Royales , ^ les fupplient avec
la plus refpeclueufe inftance & foumlfiion de main-
tenir la Solemnité de notre Dame de Confolatiou
dans le même état qu'elle a toujours été célébrée
jufqu'à préi'ent par deux Proceflions &C une Octave ,
ainfi qu'il eft expofé par la préfente , en difpenfant
pour autant de l'Ordonnance de Sa Majefté du lo
Mai 1786 , & permettant au furplus aux Supplians
de faire connoitre au Public cette grâce qu'ils efperent
avec une entière confiance obtenir de la fainte piété
de Vos AltefTes Royales. Fait à Luxembourg le 8
Décembre 1786.
Etaient Jignés , "Willibrord , Abbé de St. Maximin ,
Jean , Abké. de Miwjlcr , Emmanuel , Abbé
d'Echternach , Soleuvre , le Baron du Prel ,
M. L. Jos Comte de Berlo Suys , le Baron
de Zitzwitz , Comte de Bryas , Seyl , de la
Mock , Foncin , Didier , Clees , U Chevalier
delaBevill/deBlier,.T. C.DeWaldt, Huart ,
N. H. Chapelle , F. Henri , H. de xMufiel ,
\rattet , F. A. Merjay.
TRADUCTIO N d'une Lettre de N, S. P. U
Pape Pie VI ^ à. t Empereur & Roi JosEPH II y
fur l'ufurpation des Biens Eccléjlajliques.
— ROFITANT de la liberté, qu'il a plu à Votre
Maiefté de nous accorder fi gracieufement , de nous
adreiler directement à elle , pour lui faire part de
nos fentimens par rapport à l'intention où elle feroit
de ftatuer dans fes Etats , fur des chofes qui nous
paroitroient contraires aux bonnes règles &: aux an-
ciens ufages , &: préjudiciables à la Religion, dans
ce
(«M)
ce moment où il eft parvenu à nos oreilles , que
Votre Majefté penfe à priver les Eccléfiaftiques &
les Egliles des biens , qui forment leur patrimoine ,
pour les réduire à l'état de fîmples penfionnés, nous
croyons devoir lui repréfenter , que fi elle effeduoit
un pareil projet , il en réfulteroit pour TEglife une
cruelle léfion, &: pour les Fidèles une fcandale irré-
parable.
II n'eft point de notre miniftere de nous mêler des
affaires pol'tiques &: économiques de l'intérieur des
Etats de Votre Majeflé. Nous ne le céderions ce-
pendant à qui que ce foit des plus affectionnés à fes
véritables intérêts , pour lui confeiller ce qui pourroit
lui procurer de légitimes & honorables avantages.
Mais pour nous renfermer dans notre miniftere , nous
nous abfliendrons de toute réflexion Tur le dépérif-
fcment &c le moins de rapport des Biens Eccléfiaftiques
confiés à l'Adminifiiration des Séculiers non-proprié-
taires ; fur l'infraftion des Traités entre vos Prédé-
ceffeurs & diverfes Provinces ; fur le dommage qu'en
éprouveroit la Conititution de l'Etat; fur la violation
des difpofitions des pieux donateurs & fur le droit
qu'auroient leurs héritiers de les revendiquer. Perfuadés
que toutes ces conféquences n'auront point échappé
à la perfpicacité de Votre Mai. Nous nous bornerons
fimplement , pour ne rien difcuter d'étranger à notre
miniftere , à lui repréfenter ce qui ell du devoir de
ce même miniftere , aufili bien que de notre con-
fcience.
En conféquence , nous difons à Votre Majefté que
dépouiller les Eccléfiaftiques & les Egllfes ces biens
temporels , qui leur ont été affeétés , eft en fait de
Doftrine Catholique , un attentat manifefte condamné
par les Conciles , réprouvé par les faints Pères , &
qualifiée par les plus refpeftables &: recommandables
Ecrivains , de Doftrine perverfe & de dogme impie.
En effet , pour faire adopter à un Souverain de
pareilles maximes , il faut avoir recours aux faux
enfeignemeni» des Vaudois , de Mt^icleiiftes , des Huf-
Httt
(114)
iides Se de tous ceux qui , après eux , ont foutenu les
mêmes opinions par un efprit trop commun dans ce
liec.e , de dépravation, d'idées les plus faiutes &c les
plus refpefté^s.
Nous nou. contenterons , pour ne point fatiguer
V. M. , de rapporter parmi une infinité de citations ,
ctlie qji de tout tems a été appliquée à ceux, qui
ont tcn é de s'emparer des biens des Eglifes : Rei funt
âiimnation'is Ananïct & Saphirts , & oportct ejujmodi
traiere fantanc ut jpïrïtus falviis jît.
Nous nous contenterons de tranfcrire ce qu'écrivoit
au XII fiecle le Prêtre Jean à un Prince , qui pré--
tendoit pouvoir dil^poTer des Biens Eccléfiaftiques. Ce
Patriarche d'Antioche , quoique fchifmatique , ne crut
pas devoir le taire l'ur cette erreur de ce Prince. Toi 1
llii écrivoit il , » qui n'eft qu'un homme corruptible
» & mortel , & d'une vie de peu de durée , comment
» ofes-tu donner à un autre ce qui ne t'appartient
» pas ? Si tu prétends donner ce qui eft à toi , en
>> t'imaginant que les biens de Dieu font les tiens ,
» tu te fais égal à Dieu. Quel homme de bon fens
« qualifiera donc cet a6le du nom de précaution } Il
» la qialifiera plutôt de tranfgreffion - de défobéiifance
» extrêm.e &: d'inquiétude perverfe. Comment celui ,
» qui profane les chofes queîcoi.ques confacrées à Dieu
» le Roi céleftc, peut-il être un vrai Chrétien, &
» fe croire tel ? «
Nous favons que les Adverfaires de notre Religion,
pour foutenir leurs erreurs , s'étaient de divers paf-
<'ages des Saintes Ecritures , qu'ils interprètent félon
If ur vue ; mais fans entrer dans un examen particulier
tie ces interprétations perverties Se intéreffées , nous
îie voulons que demander à Votre Majefté fi elle
p.dmettroit pour interprétation claire & décifive , celle
qu'on lui feroit de quelqT.jes paiTages de l'Ecriture ,
qui paroitroient exprimer qu'il ne peut exifter dans ce
inonde d'autorité fupreme &: de fouveraineté , hi
nn'en conféquence on pourroit la dépouiller de la
iianae pour le falut de fon ajue } Nous fommes per-
( t'î )
fuadés , que Votre Majefté regarderoit ces paffages
comme mal interprétés , 6>c nous lui avouerions , qu'en
les confidérant de la forte elle penleroit comme
nous. Or , la même chofe peut fe dire dans le cas ,
où des ennemis fecrets de l'Eglife , des Hérétiques ,
des Catholiques en apparence , de faux maîtres , des
flatteurs de Princes , leur accordent , en vertu de
quelques paflages mal interprétés de l'Ecriture , le droit
de pouvoir priver l'Eglife & fes Miniftres de la pof-
feffion de leurs biens.
Cependant , ils favent tous que les Lévites d'Ifraël
poiTédoient de vaftes territoires , des cités entières ,
& que tous ces biens étoient inaliénables , comme
confacrés & appartenant au Sacerdoce. Pourquoi
donc ne pas concilier les livres du Lévitique , des
Nombres , des Rois , des Paralipomenes , avec les
cxpreflions qui paroiflent quelquefois contradiéloires
à ceux qui ne favent pas mieux ? Pourquoi n'en
feroit-on pas de même des paifages du Nouveau-
Teftament & des aéles des Apôtres , comme l'ont
fait les Pères de l'Eglife , pour ne pas donner té-
mérairement dans une héréfie manifeilie , en taxant
de contradidion les Livres faints diftés par la SagefTe
divine .''
En faifant ces obfervations , nous femmes bien
éloignés de penfer que Votre Majefté veuille fuivre
l'exemple des feuls Princes Proteftans léparés de notre
Communion , &: qu'elle ait une vraie intention de
rabaifter l'Eglife au niveau de fimples particuliers , &
de cendre la condition de cette Mère commune, pire
que celles des fimples familles , dont il n'eft point
de Souverain , qui -ne^ fente la conféquence de ref-
pefter les propriétés.
Notre unique but eft de lui faire entendre en peu
de mots , ce que les penfeurs modernes fe feront bien
gardés de foumettre à la droiture de fon jugement.
Nous ne nous diflimulerons pas que parmi les Ecclé-
fiaftiques , il s'en trouvera toujours malheureufement
qui feront des biens , dont ils auront la jouiiîance ,
H z
(iiS)
un ufage peu convenable &: peu mefuré : mais de cet
inconvénient &c de ces abus particuliers , il ne s'en-
fuit pas un droit , une autorité pour dépouiller ceux
qui en font un ufage conforme aux faintes Ordon-
nances , & pour enlever à la généralité , au détri-^
ment de l'Eglife &: des Eccléfiaftiques aétuels , &
fliturs , des biens qui ne leur ont été accordés ,
que pour être tranfmis fans fin à des fuccelTeurs à
perpétuité.
Dans les entretiens familiers , que nous avons eu
avec Votre Majefté, pendant notre fé^our auprèsd'elle,
nous ne traitâmes cette matière , que relativement au
fequeftre particulier & momentané. Nous n'avons
pas oublié , que nous oppofâmes à ce lui et à Votre
Majefté des raifons qui parurent l'avoir déterminée
à fe défifter de fon projet. Si Votre Majefté nous
eût propofé le doute d'une privation générale &î illi-
mitée , pour faire paiTer l'Adminiftration des Biens
de l'Eglife aux Séculiers , nous n'euffions pas manqué
de raifons fortes &£ frappantes , qui fûrement l'eullent
détourné d'un' tel proiet.
Ce que nous ne pûmes faire alors , faute d'avoir
été Inftruits des fentimens de Votre Majeflé , nous
le faifons par la préfente. Si elle ne produit pas l'effet,
que peut-être nous euffions opéré de vive voix,
elle prouvera au moins à l'Univers Catholique , que
Votre Majefté n'a pas tenu grand compte de nos
Repréfentations , ou qu'elle les a bientôt oubliées ,
puifque dans l'innovation qu'elle fe propofe, on ne
peut voir que le renverfement des maximes catho-
liques qu'elle nous demanda de lui rappeller.
Nous prions de tout notre cœur le Seigneur , que
l'on voie toiijours briller dans le Gouvernement aélif
de Votre Majefté , les proteftations d'un ftncere atta-
chement à la pureté de la Religion , & que des
faits contraires ne laiflent aucun doute fur leur fin-
cériié.
' Nous nous femmes fervis pour la préfente , d'une
autre main que de la nôtre , afin de n^ pas fatiguer
C «»7)
la vue de Votre Majefté par notre écriture moins
coulante &: moins facile à lire. Nous vous cmbraffons
jjdans la plénitude de notre afFedion , & vous donnonç
notre bénédidion paternelle &: apoftolique.
Votre très-affe6lionné Père en
Dieu &: Ami.
Etoit fignc Pie VI, Pape.
Donné à Rome , à Sainte Marie Majeure , le 3
d'A.oût de l'an 1781 , &: de notre Pontificat le
VII.
Oest ici le Bref dont il ejl parlé à la
p. 12.6. 6e. vol.' F, E. dans lequel le Pontife
je plaint , que les -volontés de l'Empereur
relativement aux Articles arrêtés aux
Concile de Vienne , aient été Ji mal
exécutées. Cette Fiece nous ejl parvenue
trop tard pour être placée dans lendroic
où elle fe rapportoit,
EXEMPLUM Litterarum LETTRE du Souverain
JpoftoUcarumadEmi^ p^^^-j-^ ^ Monfcï^neur
mm (Jimum Architpïf- ^ , ,^.,
copum Mcdiolantnjan. l^-rchcvcquc de Milan.
Plus Papa VI. Pie VI.
JLx ILEÇT E Fïli nojlcr J\. Notre cher Fils falut,
faluum & Apoflolicam Nous vous donnons notre
bcncdïcliomm. Catum pro- Bénédiftion Apollolique.
jcclo nobis erat ; diUcic Nous étions perfuadés d'a-
fiUnoJlir,protuainApof- vance , vu le refpecl que
C >>8)
tolicamfedem oh/ervantia , vous avez toniours porte
ac intima nobifcujn coji-
jimcïwru , proque ca par-
ti , quam in Ecchjia me-
ritb tantaquc cum hiude
fuflines , tuis te ad Dcum
cnixis votis fui{jc profecu-
turiun ïur nojlrum vindo-
homnfs. , iifquc gravijjlniis
rcbus , pro qiùbus lubora-
bamus , optimos fucccjjus
prccatiirum. Sed cum pra-
clanim hiijufmodi animwn
tuis jam Literis nobis tam
perfpiciie declaravcris , in
q:dbiis de nojîra iiicolu-
mitate , redituque Jiudio-
fijjiml gratularis , vehemcn-
ter jucimdum nobis accep-
tumqiLt , profitcri hoc of-
jicium tuiim , • ac plurimas
etiam gr.xtias tibi idcirco
perfoivere. Id quidem per-
au fiege Apoftollque , &c
l'attachement que vous
avez toujours eu pour nous>
&: la haute dignité que
vous occupez dans l'E-
glile avec tant de gloire ,
que vous présenteriez au
Seigneur vos ferventes
prières pour la profpérité
de notre voyage à Vien-
ne , & pour le fuccès des
graves objets de nctre né-
gociatien. En conféquence
de votre Lettre , par la-
quelle vous mettez vos
excellentes intentions en
plein jour, en nous féli-
citant de notre fanté &
de notre heureux retour ,
nous avons un grand plai-
iîr à reconnoître formel-
lement votre officieufe
iibcnter hifce nojlris prctf- conduite , & à vous en
tamiis^ unaquc tccîim com faire beaucoup de remer-
miinicamus , dilcch Fili
no fier, non exiguos nobis
jam conjlare , ejus itincris,
Idborij'qiu fructus , praic-
reàquc optima nos volun-
tatis Cafarls indicïa re-
portage.
ciemens. C'eft ce que nous -
faifons par les préfentes ,
& nous vous communi-
quons en m.ême - tems ,
comme à notre cher Fils,
que nous fom.mes déjà
convamcus que notre
voyage & nos démarches
n'ont pas été infruftueufes, & qu'il nous confte en ou-
tre, des bonnes difpofition de S. M. I.
Utinam fpcs hœ nojîra , Le Ciel veullie que nos
ità rates, impojleràm fuit , efpérances foient ii bien
ut nihil aniplius quod an- fondées & ii durables ,
gori nobis ejfc pojjîtfuper- que nous n'apprenions ja-
( "9 )
Vcnijje audîamus. Kon dif- mais qu'il foit furvenu
f.mulamus tam:n ex ïis rc- quelque difporition abr-
bus ^ qutz prafirtim ijiinc mante. Avec tout cela,
enunciantur , vïdcrc nos , nous ne pouvons pas dif-
ac va.ldc doUre Cafaris ,
mandata ex minijirorum
arhitrio alla , quam ipfe
vclit , inurpretatione , ac
etiam executione exajpe^
rari , quce ut tu prajcns ,
videnfque dejles , ita non
mediocrem afftrunt anima
nojirofoUlc'nudincm , quod-
fimuler , que d'après le
bruit qui court dans la Ca-
pitale de l'Autriche , nous
jugeons , non fans une ex-
trême douleur , que les or-
dres de l'Empereur de-
viennent défavorables par
l'interprétaton arbitraire
que leur donnent les Mi-
quc pojfumus ad Dzï ck- nillres , & n^ir la Imiilre
mmtiamconvzrtïmur ^eum- exécution qu'ils en font.
que ohfecramus ^utfufcepta Vous devez en «être péné-
pro ejus gloria conjUia
nojlra optîmos ab eo , ut
jam progrejfus habuerunt,
ità etiam exitus confcquan-
tur ; ac Jingularis. In te
paterntz Charltatïs pignus
Apojlolïcam Bencdiuioncm
tibi^ dilccieFlli nofia\, tuœ~
quœ fidei concrcditis ovihis
peramauier impcrtimur. Da-
tum Romcz apud S. Ma-
riam Majorcm Jub annulo
Pifcatons dit Xril Ju-
in lySx^Pon-tûs.Nri.anno
Oclavo.
Benedictus Stay.
tré de douleur, à la vue
des maux qui en réfultent,
& que vous avez fous les
yeux. Quant à nous , c'ell
pour nous un grand fujet
d'inquiétudes : tout ce qiii
nous refte à faire , c'eft
de nous adreffer à la Mi-
féricorde divine , & de
prier le Seigneur de bénir
nos enîreprifes que nous
avons faites pour fa gloire,
5c qui attendent une iffue
heureufe de la part du
Ciel , c'ont elles avoient
déjà été bénies dans leurs
premiers progrès. Nous vous donnons , cher Fils , en
gage de notre amour paternel , notre Bénédiction
apoftolique-, ainfi qu'aux ouailles qui vous font con-
fiées. Donné à Rome, à Ste. ^!arie Majeure, fous
l'anneau du Pécheur, le 17 Juillet 1782. La 8c. an-^
née de notre PontifiCat.
SiiiTic Benoit Stay,
( iio )
FAUTES A CORRIGER.
Ç
4_J IXItMF. Volume, Partie EccUfiaJîique , pag. 260, lig. ^0 ^
Riczinget , ïij'e^ Ricxinger.
Pag. 277 , lig. 7 , celles , lif. les lettres.
Pag. 282 , lig. 3 de la note (c^ , les bois, lif. le boit.
Pag. 26'4 , li/f. la de la nott {b) , VeJJenitel , lif. efjentieî.
Pag. 28S , lig, 4 de la note , pour en faire un compliment, li/". pout
faire un compliment.
Si ton n*i pas inféré la Dépêche de L. A. R. adrejfée à la
Province de Gueldrcs , pour rétablir tout fur l'ancien pied; cejl
qu'elle eft parfaitement conforme à celle tf« 30 Mai 1787, adref
fée aux Etats de Brabant.
Nous avons reçu la Lettre de Tournay , par laquelle
on nous avertit que les Curés du Dïoceje nont pas
préfenté la Repréfentation far la ledure des Placards
en Chaire, quon lit dans le 4e. volume des Repré-
fentations , /7d^. 124. Nous avons tout bonnement pu-
blic la Pièce .y fous le titre quelle portoit dans le ma-
nufcrit qui nous a été envoyé ; nous avons été d'au-
tant moins en garde contre f erreur que ladite Pièce
ne conteîioit rien qui ne fait digne du \ele 6* de La
piété des Pafleurs Chrétiens.
III
TABLE
DES
MAT I E R E s.
R
EMONTRANCES de P Unïverjité de Louvain , à S.i
y Majejk l'Empereur & Roi y &c. &c. &c, Pag. • 7
Remontrances des Etats de Flandres , à Leurs Altfjjes Royales ,
AU fujet des Remoat-ances dt la Métropole di Malinef ^ du'4
\Judla. ly^j. -. - ■'.:-" ' ^5
D'ifcours adrejjé à Mgr. d'AÏ^uevilU de Mîll.in court , Evêque
^ d'Awycies y Sujfra^ant de dfmbrtii ,■ &>c. &c., donnant U Con>-
^firmaiion en U Faille de MonSy le. i4 -Juillet jjSj, •- ,-2.7
Requête de AI. Lembcry , ci-devant Prieur de Houffalife , &
Député de FEtût Eccléjîaflique de U Province de Luxembourg ,
à M§rs. Ls Trois- Etats du Pays^ &c. 34
Requête des Religieufes fupprimees de Jéricho , aux Bonnes- Gens
des Neuf J\"ations de la Fille de Bruxelles , du 7.S Mai
1787. 36
Lettre de V Evêque de Brlnn, au Souverain Font'fe Pie VI,
du 1 Mars 1782. 39
£ref du Souverain Pontife Pie VI, Pape, à VEvêjîie de
Brinn, du iz Avril 1782. 45
Copie d'une Lettre & d'un Mémoire préfentés à Sa Al.ijefté l'Im-
pératr'cc Dou/iriere & Reine Apopolique , p^r Us Evêques des
Pays-Bas , concernant l'Etat Rel'gieux , l'an 177^. 48
Mémoire préfenté le 8 Janvier 1787, pour M. J. Janjfens , Curé
de U Ville de ïVeert , dans la Gueldre Autrichienne, relatf
à U Requête de M. le Confeiller & Mambour de Ruremondc ,
1 ttt
iix TABLE.
Copi^ de rOrddânance du Confeil Souverain de Ruremondel
fuivie fur le Mémoire prétêdent , 6»ç. ^%
Ittue de Mgr, l'Eviquc de Ruremonde , à Ai. Janjfens , &£,
94
Copie d'une heure de M. le Secrétaire de Mgr. rEvêque de Rure-
monde, à M. Janjfens^ fi'C. 95
Extrait d'une Lettre, datée de Weert , du '^ Juin 1787, relative
aux affaires concernant Af. Janjfens , &c. ibid,
Repréfeitation des Etats du Pays & Duché de Luxembourg ^ à
Leurs Altejfes Royales , touchant les deux ProceJJîons de là
SoUmnité de Notre-Dame , Patrone de la Province , du S
Décembre 1786. 95^
TraduSion d'une Lettre de N. S. P. le Pape Pie VI , à l'Em-
pereur & Roi Joseph II, fur tufarpation des Biens Ecclé-
fiafliques , le 3 Août 1782. II3^
Lettre du Souverain Pontife à Mgr. V Archevêque de Milan , du
17 Juillet 1782. (Latine & Françoife.) 117;
115
SUITE
DE LA
QUATRIEiAIE PARTIE
D U
T. RECUEIL.
;^
$' ■'•. V
<^^.S.
î '^î i
Tjf^l^^Z-.î-
. axzjminaa^-- js»«w*seMn.:.«wMcMBiGBi&':
{ 119)
MÉMOIRE fur les Droits du Peuple
Brabançon £' les atteintes y portées au
nom de Sa Majefîé C Empereur is Roi\
depuis quelques années ; préfenté à rAj-
/emblée générale des Etats de ladite
Province , par Monfieur H, C\ N,
VanderNoot, Avocat au Confeil
Souverain de Brabant , le z^ Avril 1787*
A MejUcigneurs Us Etats de la Province de Brabant»
M ES SEIGNEURS,
,UELQUES Syndics des Nations de ceffe
Ville de Bruxelles rv.t vinrent confulter fur un Mé-
moire , qu'ils avoient fait faire, touchant les plain-
tes , que lefdites Na ions eftiment d'avoir par rap-
port aux infraâions ùq^ Privilèges & Loix fonda-
mentales de cette Province , & me demandèrent
d'en faire un deuxième, pour renforcer le premier;
je leur répondis, que j'étois content, pourvu que
les Nations me donnaffent une commiffion ; & l'un
& l'autre d'eux vinrent médire, qu'ils s'occupoient
à faire délivrer la fufdite commiffion. Ce non-obftant
la commiffion n'a pas paru jufqu'à ce jour 16 Avril
1787 ; & ils m'ont mis dans le cas de laiffier écou-
ler le terns néceffiaire pour traiter à fond un objet
de la dernière importance.
Jç fuis informé , Meffieigneurs , que le premier
Mémoire vous eft remis, pour en être fait leflure,
pendant votre Alfemblée générale ; mais craignant
que ce Mémoire ne vous parût pas quelquefois affiex
I ***
. . ( >3o )
démontrer les infraélion'; , dont lefdites Nations vous
ont voulu taire leurs juftes plaintes, j'eftime que,
iuivant le 41e Aiticle de la Joycufé Entrée de notre
Duc de Brabant du 17 Juillet lyfti, je puis libre-
ment vous propoler les griets , fans encourir aucune
indignation ou diigrace de Sa Majefté ou de quel-
que autre.
J'eftime de plus , que le devoir de tout bon Sujet
l'oblige de le faire. C'eft dans ces vues que je prends
la rerpeéiueufe liberté , Mefieigneurs , de vous ex-
poferruccinftement mes plaintes Tur le renverfement
de la Conftitution fondamentale de cette Province.
Si ces Syndics n'avoient pas abule de mon tems ,
j'aurois pu entrer dans un détail plus circondancié ;
mais néanmoins j'elpere , que vos lumières fupplée-
ront à mon zèle, & j'ofe efpércr aufïi , que vous
ferez convaincus de ma fidélité à mon Prince &c
Souverain , de mon dévouement à Ion fervice , £>c
de mon amour pour la Patrie.
Il me refte de vous aflTurer , Mefleigneurs , que
la fatyre & la calomnie n'entrent pas dans mes vues;
mais permettez-moi d'obferver avec l'Orateur Et-
chyne , ce fameux rival de Démofthenes , qu'il eft
ibuvent des procédés & des aâions, dont on ne
peut parler, qu'on ne peut n:éme défigner , fans fefer-
vir malgré foi d'expreffions un peu dures ; ce ne
font point alors les mots qui exagèrent la chofe ,
c'eft la chofe qui force les mots.
Feu le Comte de Neny , dans l'Introdudion de
Ces Mémoires Hljloriques & Politiques des Pays- Bas ,
obferve très- judicieulement, que l'hiftoire d'un Pays
eft fi efiTentieliement liée avec fa Conftitution poli-
tique , qu'il n'eft pas pofiîble de féparer ces deux
objets. Cette vérité eft inconteftable, dit-il , fur-
tout par rapport aux Pays-Bas ; de forte qu'il faut
xiéceiTairement , avant de traiter de la Conftitution,
( 131 )
rapporter un précis de rf>n hlftolre; mon fujet ne
me permet pas de recourir à ces Princes , dont les
généalogies n'en font pas moins rapportées dans le
Trélor des Privilèges de la Ville de Bruxelles, con-
nu fous le nom de Luy (hr van Brabant ; parce qu'ils
Tentent trop la fable : je me bornerai à l'époque
à - peu - près avant que les ilomains en firent la
conquête.
Les contrées connues aujourd'hui fous le nom
des Pays - Bas , étoienî nommées Bd^iuni par les
Romains.
Et avant l'arrivée des R,omains dans les Gaules ,
cette vafte région étoit compofée de plufieurs petits
Etats; tels que ceux des Aduatlquts ^ des Grudiens ,
des Ambivarkis , qui habitoient à -peu -pies le
Brabant moderne ; des Remois , des Ncrviens , &
d'autres.
Dans ces contrées , les Nobles & les principaux
Citoyens tenoient les rênes de la Police. La plupart
des Républiques Gauloifes avoient un Gouvernement
Ariftocratique , comme Str a B O N l'a remarqué :
on y crèoit annuellement un Magtftrat , avec plein-
pouvoir de régler toutes les affaires publiques ; en
tems de guerre le peuple choiiiffoit un Capitaine-
Général pour la conduite des armées.
Cependant quelques-unes de ces Républiques étoient
gouvernées par àts Princes ou de petits Rois élec-
tifs. Voyez DE VadderE de V Origine des Ducs
de Brabant Chap. i. N. !.
Les Belges formoient dès-lors un peuple nom-
breux , & Jules-Céfar les reconnoiffoit pour les plus
vaillans des Gaulois : korum omnium fortijjlmi funt
Belgx , dit - il , au premier livre de fes Commen-
taires de la Guerre des Gaules ; auffi les diftinguoit-
il des autres; il ne les chargeoit pas d'impoftions
nouvelles : au contraire , il tâchoit de fe les atta-»
I 2
( 13^ )
cher, fuîvant Jufte-Lipfe : ad Cemm. Cafar. Uh. g-
dc Bel. Gall.
Tacite , qui en parle dans Tes Annales , dit , qae
les Romains traitoient les Belges d'affociés & de
frere"^ ; honneur qu'ils n'accordoient à perfonne ,
qu'après une longue fuite de fervices : ils les efti-
nioiont au point , qu'ils les admettoient pour gardes
de corps à l'exclufion des autres Nations.
Jules-Céfar a eu l'expe'rience , que les Belges lui
oppoferent la réfiftance la plus opiniâtre & la plus
glorieuie; & il ne dut les avantages, qu'il remporta
fur eux , qu'à rexxellence de la difcipline militaire
de les légions Romaines.
Suivant le rapport de DE Vaddere loco cit.
Ambiorix en haranguant Céfar, lui dit, que le peu-
ple avoit autant de pouvoir fur fa perfonne, qu'il
en avoit lui-même fur le peuple : ce qui veut dire,
qu'il n'étoit pas parvenu à la dignité Royale par
fucceflîon , mais par fon mérite , & par la faveur
du peuple qu'il gouvernoit; de même que les Prin-
ces, 5s: les petits Rois des autres diftrifts de la Gaule
Belgique.
Cette partie des Gaules ne fut pas plutôt réduite
fous robéiffance des Romains, qu'elle commença,
comme la Celtique & l'Aquitaine , à regretter fon
ancienne liberté : déjà plufieurs ville« confpiroient
au foulevement & follicitoient le fecours de leurs
alliés , qui leur prêtèrent fi promptement la main ,
que l'armée Romaine , quoique toute couverte de
lauriers , n'eut pas le loifir de refpiier un moment :
elle fut forcée de fortir de fes quartiers d'hiver pour
acheté; plus chèrement fon repos par une nouvelle
effufion de' fang , & pour étouffer ainfi l'incendie,
qui s'allumoit , tandis que Rome reluifoit de feux
de joie.
Les Romains furent obligés de bâtir des forts , &
( 133 )
d'entretenir de greffes garnifons , afin d'empêcher
les foulevemens , que la dureté des commandemens
& l'amour de la liberté rendoient fort fréquens.
La mérnnce , la jaloufie , & l'ambition ayant
gagné chez les Romains , les guerres inteftines en
font provenues ; de - là le renverfement de cette
Monarchie fioridante : des débris de l'Empire Ro-
main il fe forma prefque par -tout de petites Sou-
verainetés ; une partie des Pays-Bas réunie avec la
Lorraine forma , pendant iong-tems , fous le nom
d'Auftrafie, un Etat conlîdérabie , qui fut enfin in-
corporé au Royaume de Franca , auquel Charlema-
gne ajouta la plus grande partie de l'Europe.
La Maiion de Charlemagne étant par la difcorde
tombée en décadence, le Officiers de \\ Couronne
& les grands Seigneurs profitèrent de la foibîeffe des
Princes régnans , pour rendre leurs Gouvernemens hé-
réditaires dans leurs fan^iiles , ou pour fe les appro-
prier. Les Provinces des Pavs-Bas efTuyerent par- là
différentes grandes révolutions; elles étoient fouvent
féparées les unes des autres.
Ces révolutions & ces guerres , outre l'effufion de
fang , occafîonnerent des frais immenfes, dont le peu-
ple a foutenu & lùpporté le fardeau.
Il efl: certain, que la plupart de ces Princes étoient
redevables de leur fouveraineté au peuple, qui veil-
lant toujours à la confervation de la liberté publique ,
n£ leur laiffa qu'un commandement prefque précaire:
ils dévoient fe contenter de quelques terres qu'on
leur avoit aflignées en domaine, & de quelques fub-
fides affez légers : il falloir faire la convocation des
Etats pour prendre leur avis , dans les affaires d'im-
portance, & l'on ne pouvoir, fans le confentement
defdits Etats, ni impofer aucuns fubfides, ni changer
la for mi du Gouvcrfumint , quel qu'il pût être , ni
I 3
(134)
feulement augmenter ni diminuer le prix des mon-
noies. (^Supplément de Buikens ^ tom. x.)
Un autre ( BaJnagCy annales des Provinces-Unies ,
tom. i. ) dit , que, lorsque pluiieurs Provinces étoient
réunies ious l'autorité d'un même Chef, comme cela
arriva fous les Ducs de Bourgogne, & dans la Mai-
son d'Autriche , elles ne laiflerent pas de conferver
l'ancienne forn-.e de leur Gouverneipent.
J'ai déjà ci-devant obfervé , quelle étoit cette an-
cienne forme de leur Gouvernement ; néanmoins je
rapporterai ce que Bafnagc en dit.
La NoblefTe, continue- 1 -il lac. cit., & le peuple
coinpoloient les Etats de chaque Province ; ils ré-
gloient les fomnies qu*o!i dtvoit fournir au Souve-
rain , & prenoient leur réfoîution fur les affaires
importantes & générales. La Nobleffe avoit la plus ^
principale di'edlion de ces affemblées politiques, mais '
le peuple , qui vei'loit pour la conferVation de fes
Privilèges", y donnoit aufîi fa voix; &: ce partage
d'autorité rendoit le Gouvernement moins defpotique
ôi plus doux.
Mefieigneurs , permettez - moi de vous obferver ,
que Bajnage n'a pas parlé de l'Etat Eccléfiaflique ,
parce que fes Annales concernent les fept. Provinces-
Unies, & fur - tout parce qu'elles font dédiées aux
Conreillers-Députés des Etas de Hollande & de AVeft-
Frife.
Il n'eft pas inoins vrai que l'Etat Eccléfiaflique ,
depuis plufieurs fiecles , fait Membre & l'Etat pri-
maire des trois Etats de cette Province ; les Joyeufes
Entrées des Ducs de Brabant en font foi.
Le tems eft trop court pour entrer dans le détail
circonftancié des motifs qui ont donné lieu aux Joyeu-
fes Entrées reTpeftives , ainfi que des circonftances
qui y ont occafionné des changemens fucceflifs. Jfi
me bornerai à obferver , que le Teflament de Henri III,
Duc de Lothler & de Brabant , en à^ie de , i i^o «
ell la fource & la bafe des Joyeufes Entrées ;
Et que les ra-fons qui ont engagé les Princes à
les accorder , ont été la valeur , rattachement & la
libéralité , qne les Brabançons de tous tems , ont eus
enver> leur Prince y plus que tous les autres Belges ;
au point même , que leurs Princes Te font tait gloire,
& même un devoir de paffer avec eux des acles pu-
blics , par lefquels ils les reconnoidem publiquement.
Les annales de cette Province 6c les hiftoriens les
rapportent.
Quoique les circonftances des tems ayént donné
lieu fuccefiivement à quelques changemens de quel-
ques articles des Joynifes Entrées , il n'eft pas moins
vrai , que ces changemens ont été faits non par rap-
port au démérite des Brabançons , mais par rapport
à d'autres objets.
Les Joyeujes Entrées contenoient au tems jadis
pluiieurs points & articles très-confidérables, comme
fe voit d'iceîles jurques-à celles de Charles V de
1514 : mais les dix-lept Provinces étant fucceffive-
ment parvenues à un , & le même Prince , il fe
trouva qu'on ne pouvoir les laiRer fubfifter dans
leur ancienne étendue, fans troubler l'harmonie du
Gouvernement général , ce qui donna lieu à des con-
férences entre les Minières de l'Empereur , &: les
Etats de Brabant , lefquels dans ces conférences
font convenus des changement néceflaires , dont
afte formel a été drefTé , & fait, &c la féconda
inauguration de Charles V avec Philippe 11 Ion
fils , comme Prince fuccefîif, du 5 Juillet 1549,
a été changée fuivant cet aéle. Voyez le premier
volume des Flac. de Brab. fol 1^2.
Depuis ce changement, les Joyeufes Entrées 011
Inaugurations de Brabant le font faites fur le même
I4
pied, fauf quelques changemens légers de quelques
termes , qui fe font faits du gré & confentemeni
des Etats de Brabant.
. Il eft conftant , & toutes les Jeyeufes Entrées
en font foi , que , de tout tcms que les Joyeufcs
Entrées exigent, jufques même celles de notre Duc
régnant Sa Majefté l'Empereur & Roi Jofeph II ,
elles forment, ou font un contrat fynallagmatique ,
entre le Duc de Brabant, & le Peuple Brabançon.
Je dis, entre le Duc & le peuple; parce que
vous, Mefleigneurs , en contraétanr avec le Duc,
vous contrariez au nom , & comme repréfentant
tout le Peuple : l'Etat Eccléliaftique les Ecc^étiafti-
ques tant Séculiers que Réguliers , l'Etat Noble tout
les Nobles, & le tiers -Etat les autres ctaffes des
habitans : ainfi enfemble vous reoréfentez tout le
Peuple du Brabant.
Conféqueminent il eft vrai de dire, que le Duc
n'a pas feulement contrarié avec les Etats, ou quel-
que Corps du Brabant, mais avec le Peuple du
Brabant.
J'obferve aufii , qu'il confie , par lefdites Joyeufes
Entrées , qu'elles rie contiennent rien qui foit con-
traire aux bonnes mœurs, ni rien d'oppofé à la
Souveraineté; mais au contraire, qu'elles contien-
nent feulement ce qu'un bon Prince doit à fon
Peuple : elles ont Téquité pour principe , & la iuf-
tice pour bafe, qui feules ibnt les fondemens les pius
lolides de la durée des Royaumes, font la paix &c
la tranquillité des familles, la félicité du Peuple, le
foutien du Trône, ôc la gloire du Prince : Jujîitid,
dit -le plus fages des Ko\s , firmabitur folium j per
me Reges régnant , Principes imp^rant , 6* conditores
legum jufia decernunt,
Deforte que le Duc de Brabant, abflraftion faite
du ferment qu'il a fait fur l'acconipliiTement , ou
( 137 )
i obrervation de fes engagemens , repris au contrat
<îe les Joyeufcs Entrées , e(t tenu cla les remplir (cru-
puleufement , & avec toute l'exaftîtude pofïible :
Q^uid enim tam congruum fidci humancz , quàm ta ,
qucc inter eos placuerura , Jervare ? L. i. ff. de pacî,
C'eft auffi la dcdrine commune des Jurifconlul-
Xes , que le Prince , en vertu d'un contrat , eft
obligé de remplir les engagemens comme tout par-
ticulier : Gait. lïb. 2. praci. obfcrvat, 5 5 » 6* ai'ù
ah ipfo citât.
Brunneman , commtni. ad pandecî, ad l. "^ !• ff»
de Ugib. enleigne même NN. ^ 6- 6 , que penbnne
dans ce monde n'eft plus obligé à remplir Tes en-
gagemens que les Princes : & il conclut N. 7, di-
lant : Ex quo colllgitur , privilégia a Principe jlve,
fuhdiiis Jive non fubdltis pcr modum contracîâs ,
vel oh bene mérita data, revocari a Principe non
poffe , cum Princeps ex contracîu obligetur.
De plus , la loi 4 au cod. de Icgib. eft décifive à
cet égard : Digna vox ejî ( porte - t - elle ) Majep.utc
TcgnsLntis , legibus alligatum fe Principem prcfiteri :
adio de aucîorit-'Jte jiiris nofira pendet aucioritas : &
rêvera majus Imperio ejî , jubriiittere legibus Principa-
tum , & oraculo priefentis eaicii , quod ncbis licere
non patimur , aliis indicamus.
Nihil tamen ta.m proprium imperii e(l , quam U'
gibus vivere , dit la Loi \. cod. de tdia;;ientis , à l'é-
gard de l'îirîipereur même.
D'ailleurs perfonne ne peut ignorer , combien il
eft eflentiel , qu'un Fnnce remplilTe les engagement :
Régis ad exirnplum totus componitur orbis. Le Peu-
ple ayant l'expérience , que le Prince n'efl pas fidèle
à Tes engagemens , fe modelant fur lui , manque aufli
à Tes conventions, non-feulement à l'égard du Prince ,
mais à ré,q;3.rd de tous ceux avec oui il contrafte ^
tant les collègues ou regnicoJes , que les Etrangers.
Ce vice , ou manquement de bonne foi , produit
Il me'fi.mce, non - leiiieinerit entre les habitans du
incine Pays , mais auffi à l'ég^ird de tous les Etran-
gers ; d'où réfulte un déibrdre général, & la deftruc-
tjOîi du comn)eice.
En outre, le défaut d'accompliffement des enga-
gemens du Prince vis-à-vis de fon peuple , fait que
généraletnent tout autre , qui efl dans le cas de de-
voir contrafter avec lui, tant Pilnces Souverains,
que tout autre Etranger, s'en méfie, & évite, au-
tant q-je poffible , les occafions de contra<5l£r avec
lai ; ce qui produit des eff;;ts très-nuifibles , & même
funeftes au Peuple.
Il eft donc évident , que le Duc de Brabant ré-
gnant a contrarié avec Ton peuple , 5c qu'il eft obligé
cle remplir fes engagemens : je n'entreprendrai pas
èe détailler quels font, les engagemens auxquels il s'eft
obligé ; le tems me manque pour faire ce détail. D'ail-
ieurs , MefTeigneurs, vous, qui avez contracté au nom ,
& comme repréfentant le Peuple, les connoiifez au
moins autîi bien que moi ; & fes eng<igemens font
connus non-feulement aux Brabançons, mais à toute
I Europe : les Joyeiijes Entrées lont trop publiques
pour qu'elles puillent être ignorées dans aucun recoin
de l'Europe.
Je n'entreprendrai pas non plus de donner un
détail exafl & précis de tous les points qu'il a man-
qué d'obierver : ce détail demande trop de tems :
j'euime, qu'il fuffira de rapporter les principaux ob-
jets pour éiahîir le bouleverfement & l'anéantiffement
de la Conflltution fondamentale de cette Province ,
que nos ancêtres ont acquife légitimement au prix de
leurs biens, & de leur fang; & dont, à leur exem-
ple , nous avons mérité la confervation , & la durée ,
pour la faire fuivre à nos fuccefTeurs.
Quoique je ne me propofe pas d'entrer dans un
(139)
flitail particulier des infraélions faites vis-à-vis ou à
Icgard des Eccléfiaftiques de cette Province (ce que
les Philoi'ophiftes ne manqueroient pas de traiter de
fanatifmc ) , j'eftime» que je dois r.t'celTairement trai-
tcfr de l'Edit concernant la lupprelîion de plufieurs
Couvens prétendus inutiles dans les Pays-Bas, donné
en cette ville le 17 Mars 1785 ; paice qu'il eft une
<!es- premières pierres d'achoppement de toutes les
Intraftions faites à Tes engagemens , depuis fon avè-
nement au Trône.
Permettez - moi , Meflsigneurs , qu'avant d'en-
tier dans cette difcuffion , je fade une protefta-
tion , que mon cœur me dicle : conféquemment je
vous dis , que j'ai un attachement & un dévoue-
ment pour mon Souverain autant que le plus fidèle
des Sujets puifTe avoir , que je facrifierois & mon
bien &C mon fang pour lui , & que je fuis convain-
cu , que ce qvi'il fait , n'eft pas en vue de nous ôter
nos Droits Se Privilèges ; mais que la religion eft
lurpriC^ , & qu'elle l'a pu êtte , vu les circouflances
cop.courantes , que je détaillerai dans la fuite.
Revenant au iurdit Edit de l'Empereur du 17
Mnrs 17^5 , j'obferve , qu'il a pour titre, Edit de
C Empereur concernant la juppnjjion de plufieurs Cou-
vens inutiles dans les Pizys- Bas. Souvenez - vous ,
Meffeigneurs , que je parle uniquem.ent pour le Bra-
bant , oii j'ai le bonheur d'érre né , 6^ que je ne
traite pas des autres Provinces des Pays-Bas.
Qu'il me foit permis de demander , où &C par
quels moyens il a coiîfté à Sa Majcfté, qu'il y avo'.t
des Couvens inuriies à \z Religion & à l'Etat dans
la Province de Brabant }
Perfonne ne me pourra réfoudre cette demande :
j'en fuis certain, comme de l'exiitence de Dieu. Au
contraire , il y a ces moyens qui établilTent leur
utilité pour la Religion ôc l'Etat.
( 140 )
Il eft notoire d'après notre Droit Provincial ,
qu'aucun Couvent, Communauté &c. , ne peut fe
fonder , ou établir dans le Brabant , fans Lettres d'Oc-
trpi du Prince.
Et l'on ne peut pas fupporer , fans faire ofFenfe
CA\ injure aux PrédécefTeurs du Prince , qu'il n'ait
pas confié de l'utilité & à la 'Religion & à l'Etat
de ceux des Couvens fupprimés , lorfqu'ils ont été
fondés & érigés.
Conréqueir.mcnt on doit admettre & tenir, que
cette utilité cominue, du moins ju'qu'au tems que
le contraire n'eft pas conftaté.
Le contraire n'a pas été conftaté à l'époque de
la luppredion ; elle ti'a pas de ternies habiles à pou-
voir fuppofer une démonftration ou une preuve d'in-
utilité.
Cette prétendue inutilité eft un fait, un fait qui
touchoit direftement les Couvens fupprimés ôc in-
direftement les" Etats de cette Province.
Il concernoit direftement les Couvens fupprimés ,
puifque leur exiftence en dépendoit ; il concernoit
indireftement les Etats, parce que chaque Couvent
fupprimé , & même chaque individu de chaque
Couvent formoit un être ou un individu des Etats,
comm.e tout auire , depuis le premier jufqu'au der-
nier , depuis le plus riche jufqu'au plus pauvre ; con-
fêquemment chaque individu des Couvens fuppri-
més formoit , & étoit un fujet de la Province de
Brabant.
Petfonnene me peut ccntefler cette vérité. Confé-
quem.ment ne peut on me contefter pareillement qu'ils
étoient compris dans la difpofition du premier Ar-
ticle de la Joyeufe Entrée de Sa Majeflé.
Je fuis informé que quelques mal-intentionnés,
& anti-Moines, pour éluder cet Article, fe bornè-
rent uniquement aux Couvens qui exiftoient à la
( I40
conceffion primitive dudit Article : mais Targument
éloche à tous égards.
Il eft cerrain , que , depuis la concefTion primi-
tive de cet Article , plusieurs Couvens font érigés
dans cette Province; mais 11 n'eft pas moins certain,
que tous ceux , fondés & érigés depuis , ont été
compris rucceffivejnent dans l'Article de chaque ref-
peélive Joyeuji Entrée.
Le Prince , en ocftroyant leur fondation & érec-
tion , ne leur a pas fans doute oftroyé ou donné
une exiftence précaire ou momentanée ; mais au
contraire une exiftence folide , durable , £>c pareille
à celle des Couvens déjà exiftans.
D'ailleurs en leur accordant les différentes per-
millions ou oftrois pour acquérir des biens in.meu-
bles , on leur a pareillement accordé une exigence
pareille.
Feue Marie-Thérefe , l'Impératrice Reine , notre
Duchcfle de Brabant, dont la mémoire fera en bé-
nédiclion jufqu'à la confommation des (iecles , par
fon Edit concernant l'acquilîtion des biens immeu-
bles par les Gens de main-morte, n'a fait aucune
diftiniftion entre aucuns Couvens.
Mais elle y a compris généralement tous ceux
qui exiftoient : elle s'explique dans ces termes : » Nous
connoiiTons toute la faveur que méritent des Eta-
bliffemens, qui n'ont pour objet que le fervice de
Dieu , l'inftru^^ion des Fidèles , &. le foulagernent
des Pauvres, &î nous employons toujours volontiers
nos foins , pour la confervation des pofTeffions lé-
gitimes de ceux qui ont été formés par les motifs
de l'utilité publique , & conformément aux Loix &c.«
Vol. 8 des F lac. de Brab. fol. il.
O tempora ! ô mores ! Cette vertueufe PrinceiTe
reconnoît l'utilité ou la faveur que méritent des
Etabliffemens qui n'ont pour objet que le lervice de
( 14^- )
Dieu, rinftriK^Ion des Fidèles , & le foulagement
des Pauvres :
Et des mal - intentionnés ofent prétexter que les
Couvens fondés &: érigés depuis la conceffion pri-
mitive du 1er. Art. des Joyeufes Entrées , n'y font pas
compris , quoique leur EtabliflTement tende à l'objet
que feue Sa Majefié l'Impératrice & Reine recon-
noifToit mériter fa faveur?
Si la foluion propofée au fufdit prétexte , oppofé
au fufdit I er. Art. , ne fuiTifoit pas , on poiirroit encore
y ajouter que l'Article ii ed dans les mêmes termes
des Joyeujes Entrées précédentes , 6>c que fi le Duc
de Brabant, fous cette énonciation , n'a pas voulu
comprendre généralement tous les Couvens, & les
Individus d'iceux , iî eut dû s'expliquer plus clai-
rement , & qu'au défaut de cette explication plus
claire , l'Article doit être entendu contre lui : ^rg.
39, J^ de Paciis.
La fuppreffion de ces Couvens ayant eu lieu , il
n'eft plus de termes habiles à conftater cette pré-
tendue inutilité : cette funpreflion a effeftué l'anéan-
tiffement àes, Corps que ces Couvens ont formés ;
6c cet anéantiflement doit être affimiîé à la mort
naturelle d'une perfonne qui ne laifTe aucun héritier,
ou repréfentant.
Et quand même cette preuve pourroit encore fe
faire, il ne léroir pas moins vrai que la fupprefîion
a été faite directement contre le fufdit Art. 1 de
ladite Joycufe Entrée.
^u'on ne m'oppofe pas que la fuppreffion a été faite
en vertu d'un Placard revêtu du vifa^àu Confeil de
Brabant. J'ai à y répondre que la fuppreffion , à
l'effet de la deftruêlion ou de l'anéantiffement d'un
Corps , relativement à chaque Couvent fupprimé ,
doit être envifagée tant à l'égard defdits Couvens
qu'à l'égard des Etats, comme la mort d'un Citoyen.
C 143 )
Or il eft notoire que ni le Confeil de Brabant ni
un Juge quelconque ne peut condamner à mort ni
opérer l'anéantiiTement de quelque Corps ou Indi-
vidu , parte inaudita,
Conléquemment , avant de pafTer à h publication
de cet Edit , il devoit indirpenlablemenr ouir & lefdlts
Couvens &C même les Etats , ce qu'il n'a pis fait ,
comme vous , Mefleigneurs , & le Peuple en êtes
convaincus ; & comme d'ailleurs il confie par la
teneur de rEdit-même.
En outre les termes généraux de plufiturs Cou\tn.%
inutiles repris audit Edit, donnoient matière à ne pas
l'admettre ; ces termes généraux font d'une plus
dangereule conféquence , que fi l'on propofoit uij
Edit par lequel on voudroit bannir du Brabant tous
les Sujets qu'on prétendroit envilager comme inu-
tiles : parce que dans le cas fuppolé ces prérendus
Sujets inuriles retiendroient la vie 6i la liberté de
Ce retirer où bon leur feinblcroit ; & que de plus
on ne les banniroir pas fans les entendre , &: fans
lenr laifTer la faculté de prouver , qu'ils font utiles à
quelque égard ; au moyen de quoi l'Edit feroit fans
effet vis-à-vis d'eux.
Mais rien de tout cela n'a eu lieu dans le fufdit
Edit de fuppreffion. Et qui plu^ eft , j'eftime que
le point le plus eiTentiellement requis eft ut Jît jujia ;
& je défie qui que ce foit de prouver, que la Juf-
tice de cet Ed.t fubfifte : d'où il reluire, fuivant
le fentiment commun des Doé^eurs , qu'il ne peut
avoir force de Loi.
Cependant il a paffé au Confeil de Brabant : mais
par quels moyens & de quelle façon , je l'ignore ;
ce que je fais, c'eft qu'il a eu toute la peine d'a-
voir la pluralité des voix : mais malgré cette plu-
ralité, vous êtes trop éclairés, & trop inftruits des
circonflanccs , Meffeigneurs , pour ne pas feniir ,
i ( 144 )
tnême être convaincus , que cet Edit ne peut obli-
ger, ni avoir force de loi.
L'Edit cop.cernant la fuppreffion des Confrairies,
du 8 Avril 1786 , eft à peu-près de la même trempe.
Il déclare , Art. i , toutes les Confrairies érigées
dans les Eglifes & Chapelles quelconques , éteintes
6c fupprimées,
Quc'ind on obferve que ces Confrairies ont été
érigées & fondées fuivant les maximes & la jurif-
prudence de notre Province , par Odroi , même
avec préalable avis du Fiic , on eft convaincu qu'el-
les avoient une exifience légale , qui ne leur pou-
voit être ôtée fans leur contentement, ou du moins
fans préalablement les avoir ouïs.
Une telle difpofition approche du defpotlfme.
C'efî à-peu-près comme fi l'on portoit une loi , que
tout homme non-marié , 6c en âge de porter les
armes, eft foldat , & doit fervir le Prince; ou que
toute homme doit embrafier telle profeiîion qu'on
lui preicrira.
Toute la différence qu'il y a dans le cas du
fufdit Edit & le cas fuppofé, c'eft, que dans le
premier on a fait la fimagrée de lui prêter le Fifo.
du Confeil ce Brabant. Sur quoi je me réfère à ce
que j'ai obfervé ci-deifus concernant le Fifo, de TE-
dit portant la lupprefiîon des Couvens.
Je ferai une réflexion ultérieure relativement à
l'Edit de la fuppreffion des Confrairies , qui quoi-
qu'elle ne fe trouve pas dans fon contenu , n'en eft pas
moins fenfible par les circonftances qu'on voit arriver.
Il eft connu que généralement à ces Confrairies
font attachées àcs Indulgences , plufieurs même ac-
cordées par le Pape de Rome ; de forte qu'en fup-
primant les Confrairies, on anéantit aufîî ces In-
dulgences : au moyen de quoi s'efiedue le grand
but , l'abUraélion du Souverain Pontife.
Quoiqu'il
( M5 ) ^ ^
Quoiqu'il ne fe trouvât aucun Séminaire dans no-
tre Province de Brabant , l'Edit concernant rétablii-
fement du Séminaire-Général dans iXJnlverfité de
Louvain, porfe infraftion aux Privilèges Brabançons.
En premier lieu, l'Art. I porte, quant au Clergé
Séculier , qu'ils feront réunis , à dater du mois de
Novembre ij'66 , dans ledit Séminaire-Général à
Louvain , pour y être élevés uniformément , dans
une parfaite uniformité d'inftru6ïion & de morale,
& faire le cours de Théologie dans les Ecoles publi-
ques • de l'Univerfité : qu'on ne pourra dorénavant
admettre aux Ordres majeurs aucun de nos fujets ,
à moins qu'il n'ait achevé fon cours de cinq an-
nées dans le Séminaire-Général : en conféquence les
Séminaires Epifcopaux feront fuppriméj & convertis
en Presbytères , dans lefquels les Elevés Séculiers
du Séminaire-Général, après avoir achevé leurdit
cours , fe retireront , pour y pratiquer , fous le veux
4e leur Evêque , les différens exercices & fondions
Eccléfiaftiques convenables , pour les rendre plus
propres à la cure d'ames.
Je n'ai pas fait mention du texte concernant le
Séminaire filial à Luxembourg , parce que les Bra-
bançons ne font pas dans le cas d'y aller.
Je commence à demander , de quel droit on fup-
prime les Séminaires Epifcopaux , ou celui d'Anvers
qui eft l'unique en Brabant? Ce Séminaire a été
érigé légalement. Il a donc droit d'exifter ; & les
Diocéfams d'Anvers ont le droit légalement acquis
d'y étudier la Théologie,
De quel droit peut-on obliger ceux qui font ap-
pelles à l'Etat de Prêtrife , ( Séculiers s'entend ) de
faire un cours de cinq ans de Théologie dans l'U-
niverfité de Louvain, & d'y demeurer cinq ans dans
le Séminaire- Général , & puis de fe retirer dans
les anciens Séminaires Epifcopaux ? Le Concile de
( 146)
Trente reçu & publié en Brabant en due formel
ne prelcrit rien de tout c^rla.
C'eft aux Evéques à veiiler à la conduire de ceux
qui afpirent & fe prélentent aux Ordres. C'tft à eux
& à leurs Examinateurs de juger s'ils en font capables ,
mais nullement au Souverain du à fes employés.
Ce font les Evêques &C leurs Exaniinattrurs qui
font rerponfables , & leur conlcier'ce qui eft char-
gées des admifiîons aux Ordres. C\-ft à eux de ju-
ger, quels cours de Théologie le-. Candidats doivent
faire : c'eft au St. Sieçe ou aux Evêques ( (elon les
difterens cas) de dilpen'er îur 1 âge des Candid;its
pour Tadmiflion aux Ordres refpedifs ; peribnne ne
peut le contefter. Donc , il leur appattient auffi de
droit, d'admettre à la Piétrife, félon la capacité du
Candidat, eût-il (eu emenî fait un cours de Théo-
logie de deux , trois , ou quatre ans.
De quel droit veut- on, peut-on obliger une Per-
fonne qui alpire uniquement à la Hrécrpe, de fe re-
tirer dans les anciens Séminaires Epi copaux pour y
pratiquer les différens exercices & fondions Ecclé-
fiaftiques , afin de la rendre plus prop e à la cure
d'ames ? II n'en eft pas ; & l'exécution en feroit
même contraire à la liberté naturelle , qui {.Aiffe à
un chacun la faculté d'embralTer tel état auquel il
fe fent appelle.
Cette Ordonnance équipolle à celle par où l'on
voudroit obliger quelqu'un d'époufer la Perfonne
déterminée ^ que la Loi ou l'Ordonnance nomme-
roit ou prefcriroit.
Tout le monde fent non-feuîement le ridicule,
mais l'injuftice d'une telle Loi ; on doit donc aufti
fentir rinjuftice du texte que j'analyfc.
Quant au Clergé Régulier , il eft à remarquer
que, fuiivant la dirpo^tion du texte , ceux qui (e
deftineront ci -après à un Ordre Religieux, feront
C 147 )
îéunîs dans ce Séminaire-Général ; & qu*on n'en
pourra dorénavant admettre aux Ordres majeurs au-
cun , à moins qu'il n'ait achevé Ton cours de ciiiq
années dans ledit Séminaire ; & que les Elevés dtt
Clergé Régulier , perfiftant dans leur vocation , re-
tourneront dans l'Ordre où ils avoient été admis.
Il faut auffi , à Fégard du Clergé Régulier , com-
biner la difpofîtion du 7e. Art. , fuivant laquelle tous
lea Ecoliers dudit Séminaire feront uniformément
\'êtus en foutane noire , manteau court , dont le
coUet fera de couleur violette, ainfi que le ruban
ou bordure de devant du manteau. En outre , fui-
vant la difpofition du fufdit ler. Art. , l'enfeignement
de la Théologie , ainfî que de la Philofophie , eft
fupprimé du i Novembre 1786 dans tous les Cou-
vens , Monafteres , Congrégations , & autres endroits
ou fondations , dans lefquels cet enfeignement fe
pratiquoit.
Il eft palpable , que ces difpofîtions tendent di-
reftement à la deflruélion du Clergé Régulier; cha-"
cun devra habiter cinq an5 le Séminaire avant d'ê-
tre admis aux Ordres majeurs , &: il devra préala-
blement avoir achevé (on cours de Philofophie ; il
ne pourra aufli être admis dans l'Ordre ou Maifon
Religieufe pour commencer fon noviciat , qu'après
avoir achevé le cours du Séminaire.
Je demande à préfent , quel Supérieur d'Ordre
recevra un Afpirant pour commencer fon noviciat
après avoir achevé les cours de Philofophie &c du
Séminaire? L'Afpirant aura à -peu -près trente ans,
quand il commencera fon noviciat ; il aura l'efprit
formé , &: ne fe prêtera plus à recevoir les împref-
iions que l'Etat Régulier exige.
Quel eft l'Afpirant qui , après avoir pafle tous ces
degrés d'études ., retournera encore à quelque Ordrer
Régulier, fur-tout s'il a quelque bonne perlpeftive à
( 14^ )
âiteadie par la ft-périorité de fon efprit ou de fe$
talens ? C'eft donc à dire qu'on deftine uniquement
le rebut pour ie Clerçé Régulier.
De p'us , quelle afTurance donneront les non-
JTicyennés aux Ordinaires ou Evêques pour être
admis aux Ordres majeurs. Bref, il eft certain que
ces difpofitions tendent à la deftruftion du Clergé
Régulier , dont la fuite infaillible fera uniquement
a.vantageufe au Fifc, qui emportera tous leurs fonds,
comme biens vacaris.
Il faut en outre remarquer encore, que toutes les
Waifons & Couvens du Clergé Régulier font fondés
légalement , ou ont été admis avec le confentement
du peuple , & que fuivant ledit premier Art. de la
J oy tu fc Entrée^ le Duc s'eft folemnellement engagé,
qu'il ne leur ftra , laï^tra ni foufrira être fait en
^açon quelconque aucune force ou volonté.
Ces difpofitions emportent manifefîement une force
ouverte. On fupprime non-feulement leur enfeigne-
ment de Philofophie & Théologie , mais on les force
direftement contre leur Inftitution & les Canons du
Concile de Trente, ici reçu & publié, de fe retirer
au fufdit Séminaire. La fuite qu'elles ont entraînée,
cft une force encore plus ouverte.
On avoit envoyé au Vifiteur Général de l'Ordre
des Capucins un Ecrit intitulé I'EmpeREUR et
Roi, daté de Bruxelles le 19 Janvier 1787 , pa-
raphé KuLB. vt. figné par Ord. de Sa MajeAé F. H.
DEREUL,par lequel on lui mandoit , que» comme
» il convenoit que les jeunes Théologiens de fon
» Ordre qui fréquentent les leçons de Théologie de
» rUnîverfité de Louvain , ou celles établies au Sé-
» minaire-Filial de Luxembourg , foient difpenfés de
w tous les points de la règle qui pourroit les obliger
» au chant , & à U fréquentation du chœur , loit
» pendant la nuit ou pendant les heures de leçons
I
(149)
^ & d'études, nous vous (AiCons la préfentc por*f
* vous ordonner de les difpenrer pour les rems de
»» leurs études , & de leur prefcrire telles autres
» pratiques de piété, compatibles avec votre Règle,
» fans nuire à l'application & à la fanté des Ecoliers
»> en Théologie , d'autant qu'ils doivent être confi-
» dérés 6c traités, (ur le même pied que les Elevés
>* du Séminaire-Général établi à Louvain , & du
» Séminaire- Filial &c. «. Ce Père Vifireur a donc
propofé par écrit le j^ Février au Gouvernement-^
Général les motifs ou^il avoit pour ne pouvoir ac-
quiefcer à ce qu'on lui prefcrivoit. Le 3 Mars enfuite,
ce même Père Vif.tcur reçut un autre écrit, daté
du zj Février 1787 , intitulé, paraphé & figné
comme le précédent , par lequel on lui mande,
y> qu'ayant réfolu de f^ire entrer inceiïamment dans
>* le Séminaire- Général à Louvain , fk refpeclive-
» nient dans le Séminaire-Filial à Luxembourg, tous
» les Réguliers étudiant en Théologie, &: ayant déjà
» donné nos ordres en conféquence aux Reftcurs
» c'r ces Sém.inaires , nous vous faifons la préfente
yy pour vous faire connoître nos intentions à cefu-
» jet, & pour vous ordonner de vous y conformer
» fans délai. «
Je vous prie, Mefieigneurs, de faire attention que
c'eft le î Mars que ce Père Vifiteur a reçu le fuldit
fécond écrit.
Il eft facile à fentir que ce Vifiteur , ainfi que les
autres Pères dévoient fe trouver dans une extrême
perplexité , même hors d'état de fatisfaire au con-
tenu dudit écrit, eût- il même été une Ordonnance
portée fuivant nos Loix fondamentales.
Cependant nos Séréniffimes Lieutenans- Gouver-
neurs &c Capitaines-Généraux des Pays-Bas ont,
le même jour 3 Mars, adrelfé un écrit aux Con-
feillers-FHcaux de Brabaiit , par lequel ils les char-
( MO )
gent de mander devant eux le Vifiteur Général des
Capucins avec fon Vic€- Vifiteur , pour leur faire
connoître que , fur le rapport qui leur a été fait de
ia réponfe du 17 Février dernier à la Dépêche,
qui lui a été adreffée le 19e. jour , concernant les
Pveligieux de fon Ordre qui n'ont pas achevé leurs
cours de Théologie, ils ont trouvé bon, rie dejTi-
tiur ledit Vifiteur -G ènlr (il de fa place ^ & de le dé"
clarer à jamais inhabile à toute f'upériorité dans fon
Ordre , lui ordonnant de fe retirer d'abord dans un
Couvent à la campagne , que lui aflîgnera le Vice-
Vifireur, & dont il vous informera, pour y vivre
en Jim pie Religieux.
lU chargent en mémetems lej'Confeillers-Fifcaux
de Brabant d'intimer audit Vice- Vifiteur , qu'il faffe
ceifer fur le champ tout enfeignement dans les Cou-
vens de Ton Ordre , 6c qu'il ait à envoyer dans
l'efpace de huit joers , au plus tard, au Séminaire-
Général de Louvain , ou au Séminaire-Filial de
Luxembourg refpedivement , tous les Religieux ,
qui n'ont pas encore fini leurs Etudes de Théolo-
gie , fous peine de défobéifiTance , & d'être traité
comme réfraftaire aux Ordres de Sa Majefté.
Ce Décret eft paraphé par le même Paraphant
dont les fufdits deux écrits font paraphés , de forte
que l'Auteur de ce Décret eft facile à connaître.
Mais qu'importe qui en eft l'Auteur? Il eft évident
que ce Décret eft un attentat manifefte aux Con(-
titutions fondamentales de cette Province,
II eft à remarquer , que cet écrit étant adrefi^é aux
Confeillers Fifcaux de Brabant , fon exécution con-
cernoit des habitans de Brabant ; 6c la fuite en conf-
tatera davantage la vérité.
Le i2 dudit mois de Mars, ledit Perc Vifiteur
reçut ordre des Confeiilers-Fifcaux de Brabant de
comparoître le lendemain 13 dite, chez les Con-
( I50
feil'ers-Fifcaux c!e Brabant , où il fe rendit accom-
pagné du Fere Agent de l'Ordre ; étant donc com-
paru devant Icldits Conleillers-Fircaux , on lui pré-
îut le ùii'dit Décret : li lefture étant faite , lefdits
Ct^nifciliers-Fiicaux drefTerent un Procès- verbal ; Se
à leur demande faire audit Père Vifîteur , s*il l'accep-
toit , celui-ci répondit , qu'il le foumettoit aux or-
dres de fa retraite.
Ce Père Vifiteur s'efl: retiré dans leur Couvent
Ae Tervuren; mais quoiqu'il n'^ir pas accepté , ni i
foufcrit à la peine infamante de deftitution , le Gou-
vernement-Général ne l'a pas moins tenu comme
dégradé, & inhabile,
Puifquele n dite Mar«, le Père Agent de l'Ordre,
& le Père Godefroid d'AIofl: étant demandés de fe
rendre chez le Conteiller Procureur-Général de Bra-
bant , & s'y étant rendus , on leur prélut une Let-
tre de fon Excellence le Miniftre, adreflee aux Co-n-
feiUers-Fifcaux de Brabant, dat^e du 19 dite , con-
çue dans ces ternies : *► Sur le compte rendu à Leurs
» AltefTes Royales de votre rapport du ij de ce
» mois , je vous fait la prétente pour vous dire que
» le Vice-Vifireur clés Capucins étant malade, &
w réfident à Tournai , vous ayez à intimer d'abord
» au fécond Vice- Vifiteur, l'ordre conrenu dans la
» Dépêche qui vous a été adreflee en date du j de
» ce mois ; en lui enjoignant d'en exécuter d'abord
» la teneur, & de vous en faire confier endéans
» 24 heures , fous peine de défobéifTance 6: d'écre
♦> traité comme réhvdAire aux ordres de Sa Ma-
» jefté «. Ce refpeftdble Père Godefroid d'Aloft ,
fans s'arrêter à ce que Sa Majefté n'avoit pas le
pouvoir en Brabant de donner des ordres , du mo-
ment qu'ils contrevenoient à fes Joyeufes Entrées , X
Se que perfonne ne devoir lui obéir en ce cas ( Art.
59 d'icelles } ; le 2t dite Mars, il rem-t par écrit
K4
( 150
aux Confeillefs-Fircaux de Brabant les raifons pour
lerquelles (a confcience ne lui permettoit pas de
remplir ce qu'on avoit voulu enjoindre au Père
Vifiteur-Général.
Et le jo dito Mars on annonça audit Père Go-
defroid d'Aloft, qu'il eût à comparoitre à midi de-
vant le Confeiller- Procureur-Général , ou étant com-
paru , les Confeillers-Fifcaux lui prélurent le Décret
porté à fa charge par nos Séréniffimes Lieutenans-
Gouverneurs &: Capitaines-Généraux des Pays-Bas,
leur adreffé portant, » Chers & bien- Ames. Sur
» le compte qui nous a été rendu de l'écrit témé-
^> faire &c fanatique, que le Fere Godefroid d'Aloft,
M fécond Confulteur des Capucins, vous a remis,
»» le 11 de ce mois, pour juftifier fon refus d'obéir
» à l'ordre que vous lui avez intimé de la part du
» Gouvernement d'envoyer au Séminaire-Général
^> de Louvain les Clercs Capucins qui n'ont pas
w encore achevé l'étude de la Théologie > nous
M vous chargeons de iîgnifîer à la réception de cette
M audit Père Godefroid d'Aloft l'ordre de fe retirer
» dans vingt-quatre heures de cette Ville, & dsns
>* trois jours de terres de la domination de Sa Ma-
i> jefté , avec défenfe d'y rentrer, fous peins d'être
» appréhendé & traité comme vngabond «. (*)
Mefteigneurs , le récit que je viens de faire eft vrai ;
j'ai vu toutes les copies des a«Eles; & fi vous voulez
vous en convaincre davantage , le Père Antoine de
Louvain , Agent de l'Ordre , vous le vérifiera.
De plus, j'ai examiné toute la marche de cette hif-
toire , & je la trouve dépourvue & deftituée des forma-
lités prefcrites par nos Conftitufions fondamentales.
De forte que c'eft à jufte titre , que j'^ii dit ci-
defîus que le fufdit Edit entraînoit une force ou
(*) Voyez tom. 2. Part. Eccléfiaft. p. ao8.
( Î53 )
volonté; car ledit rere Godefroid d'AIofl:, confor-
mément à la difpofuion du 42e. Art. de la Joyeufc
Entrée , a pu en particulier dire & déclarer fou
grief, fans pour ce encourir aucune indignation ou
difgrace de Sa Majefté , ou de quelque autre; ni
pour ce être mal vu de Sa iVîajeflé en aucune fa-
çon : fon Alteflc Royale Albert Duc de Saxe-Tef-
chen a même promis , au nom de Sa Majefté , de
s^en prendre au corps & bien de celui , ou ceux qui
ce feront,
C'eft cependant Sadite Altefîe Royale , conjointe-
ment avec fon Augufte Epoufe Madame Royale
l'Archiducheflc Marie-Chriftine, qui ont figné le fuf-
dit Décret à charge dudit Père Godefroid d'Aloft.
Je tremble, &: le fang fe glace dans mes veines,
quand je penfe à quoi nous fommes expofés : per-
fonne n'eft plus fur de fon état civil. L'expérience
nous en a donné récemment un exemple effrayant
dans la perfonne du Sr. de Honot, habitant de
cette Ville , dont je parlerai ci-après.
L'Article 5 du mêir.e Edit concernant l'établifiTe-
ment du Séminaire Général fournit encore matière
pour en conftater l'injufîice. Mais le tems trop court
m'oblige de paifer à quelques obfervations fur le
Diplômi de C Empereur portant éiablijfement £unt
nouvelle forme de Gouvcrm-ment général des Pays-
Bas f du I Janvier 1787.
Il femble au premier coup-d'œil, du titre de ce
Diplôme , qu'il ne concerne aucunement la Pro-
vince de Brabant , ni fa Conftitution fondamentale r
néanmoins en l'examinant , on eft convaincu qu'il
la bleffe eifentiellement.
Le fixieme Art. porte que , » Pour faciliter la di-
»> redion des affaires du Gouvernement généra!|, &
» lui procurer en tout tems des notions affurées
» tur tout ce qui peut intéreller l'ordre public , ôc
( 154 )
>v le bien des Peuples coiifiés à (a foins, nous
» avons réloiu de divifer nos Provinces des Pays-
» B<is en neuf Cercles , & d'établir fous fe<; Oidres,
» dans chacun de ces Cercles , un In'endant 6c
» plufieuîs Commi flaires , lur le pied que le Gou-
» vernement fera connoître par une Ordonnance
» à émaner de notre part , félon laquelle , ainfi
» que Ifclon les inilruclions , & les ordres qu'ils re-
M cevront du Gouvernement , ces Inrendans &
» Commiflaires fe régleront dans l'exercice de leurs
» Cha'-ges «.
Cetre Ordonnance à émaner par ledit Article ,
eft donc émanée îe ii Mars 17^57, fous le titre
6.''Edit de r Empereur portant kablijfcmtnt des Irittn-^
dancis des Cercles aux Pays-Bas ; &: elle conftate
que l'on a furpri»; la re'igion de notre Souverain
Sa Majefté l'Empereur & Roi.
Il ne peur .Ignorer & encore moins difconvenir ,
qu'il a contrafté avec le Peuple Brabançon repré-
fenté par les trois Etats , au jour de fon Inaugura-
tion , le 17 Juillet 1781. L'ade qui en a été fait
& dépêché, paraphé, figné , contrefîgné, & fceîlé
du grand fcel de feue l'hrpérntrice- Reine , dont
on fe fervoit encore alors en Brabant , & les Let-
tres originales de Mandement irrévocable & procu-
ration fpé.iale de Sa Majeflé l'Empereur & Roi ,
données & paflTées à Vienne le z Mars 17^1 fur
cet Article, & le Duc de S-Hxe-Tefchen exiflant,
le confiaient, ainfi que les copies imprimées, ré-
pandues non -feulement dans les Pays-Bas, en
France, ?:ic,^ mnis dans toute l'Europe.
Certe même Ordonnance, ou Edit , eft fi diamé-
tralement oppofée aux engagemens que Sa Majeflé
a pris, & a promis fous ferment de remplir & d'ob-
ferver visa vis le Peuple Biabançon , que le Con-
feil de Brabant n'a pu lui accorder le Vifa ni ia
( M5).
Sceller ou fîgner : faute de quoi nul Edit en Brabant
ne peut avoir le moindre efFer , ou force , ou exé-
cution : JrtïcU 46* ^ de la Joyeiife Entrée.
Ladite Ordonnance eft auffi diamétralement oppo-
fée au ler. Article de la Joyeujï Entrée^ puifque Sa
Majeflé ou Son Altefle Royale, en vertu du Man-
dement fpécial & -procuration irrévocable, & plein-
pouvoir ci-defîu5 réclamé , a convenu , & s'eft engagé
enir'aurres , » qu'il ne leur fera , laifTera , ni (buffrira
» être fait , en façon quelconque, aucune force ou vo-
» lonté; & qu'il ne les traitera, ni laiffera traiter hors
» de Droit & de Sentence :ains les traitera &fera traiter
» tous les Prélats , Maifons-Dieu, Barons , Nobles 5^
» bonnes Gewh & Suiets de fes Villes, Franchiles &Fay<>
» de Brabant, £c d'Outremeufe, en toute chofes, par
w Droit & Sentence , fuivant les Droits des Villes Se
» Bancs , où il appartiendra , &c devra être fait. «
Il s'eft en outre obligé par le 5 e Art. entre aatres
que » Sadite Majefté , fon Gouverneur, ou Gou-
» vernante Générale fera traiter toutes les affaires
♦> dudit Pays & inhabitans d'icelui , concernant la
» juftice, & ce qui en dépend, foit des Provifions
» ordinaires de Juftice ou Statuts, Placards, Edits ,
» Ordonnances , Commandemens , ou autrement ,
>> par conieil &J avis d'icelui & dudit Confeil Bra-
» bançon , fans en ce , leur pouvoir être fait , par
» quelqu'un, aucun empêchement ou trouble, ni
>» qu'ils feront touchant ce , fournis aux Ordonnan-
» ces de quelqu'un , iinon de Sadite Majefté , ou
» fon Gouverneur , ou Gouvernante-Générale.
De plus , dans l'Article <^^ , Sadite Alteffe Royale
s'eft obligée » & a promis de bonne foi & juré
» perfonnellement fur les faints Evangiles, pour Sa-
» dite Majefté , fes hoirs & fuccefteurs , à tou? gé-
n néralement Prélats , Maifons-Dieu , Monafteres ,
» Barons , Chevaliers , Villes & Franchifes , 6c
» tous fujets (îe Sadite Majefté , f-c bonnes Gens
» de Tes Pays de Brabant & d'Outremeufc , leurs
>» hoirs (k fucceiïeurs , de les tenir dorefnavant tous
** en général (lavoir , les Privilèges) fermes 6<C
» fiables a toujours, & de ne iamais y contrevenir,
» ni foufFrir qu'y foit contrevenu en aucune ma-
» niere; & s'il airivoit, que Sadire Majefté , Tes
» hoirs & fuccefleurs vinffent , allaffent, ou fiffent
» à rencontre , par eux , ou par quelqu'un d'autre , en
» tout, ou en partie, en quelle manière que ce
» foit, nous en ce cas, conlentons & accordons
w auxdits Prélats, Barons, Chevaliers, Villes, Fran-
» chifes , & à tous autres nofdits Sujets, qu'ils ne ie-
» ront tenus de faire aucun fervice à Sadite Ma-
» jefté., Tes hoirs , ou fuccelTeurs , ni d'être obéil-
» fans en aucune chofe de fon befoin , que Sadite
» Majeflé pourroit ou voudroit requérir d'eux ,
>» julques à ce qu'elle leur aura réparé , redrefTé, &
» entièrement défifté & renoncé à l'emprife ci-del-
» fus mentionnée.
» Par-deffus ce ("porte la fuite du fufdit Art. 59)
» Nous , au Nom de Sadite Majefté , voulons , dé-
» cernons & déclarons que tous Cfficlcrs établis au
» contraire de cette fa Joyeu(e Entrée , feront incon"
» tinent defîitués , & que pareillement , tout ce qui
» (îici en avant , pourroit être attente au contraire
>* de ce que deffus ; ne, Jera^ ni pourra à f avenir être
» d'aucune valeur &c, «.
D'après la citation ci-devant faite de la fubftance
de quelques Articles de la Joyeufe Entrée , il eft
évident , que l'émanation du Dip^rne du premier
Janvier Î787 , portant Etablijjement £une nouvelle
forme pour le Gouvernernent'Glnèral du Pays-Bas ^
ert contraire à ladite Joyeufe Entrée , tant du chef
qu'il n'eft pas revêtu du Vifa & de la Signature du
Confeil de Brabant , ainH que du Scel de Brabant ;
( M7 )
que parce que fuivant les Articles réclamés Si. cités
de la Joyeufe Entrée , il n'eft pas dans le pouvoir da
Duc de Brabant Sa Majefté l'Empereur & Roi de
créer ou établir de nouveaux Emplois , contraires
à ceux établis par la Joyeufe Entrée.
Coniéqueinment il n'eft pas dans fon pouvoir
d'étjblir ni des Cercles , ni des Intendans , ni des
Commiffaires dans le Brabant : Se par une coni'é-
quence ultérieure , les Cercles de Bruxelles îk d'An-
vers , énoncés par l'Edit du 1 1 Mars , & tout ce qui
y eft relatif, n'eft d'aucune valeur ; Texprcffion defdits
Articles de la Joyeufe Entrée eft claire & décifive à
cet égard.
D'ailleurs ce même Edit du ii Mars eft auiS
défeftueux du chef" des formalités , puiiqu'il eft
pareillement dépourvu du Vifa & de la fignature du
Confeil de Brabant , alnft que du icel Brabançon.
Retournant au Diplôme du premier Janvier 17^7 a
je trouve que , fuivant la difpofition propofée Art. 6,
dans chacun de ces Cercles il y aura un Intendant
& plufieurs CommiiTaires fur le pied que le Gou-
vernement fera connoître , par une Ordonnance à
émaner de la part de l'Empereur & Roi.
Je trouve , fuivant le même Art. ô , que ces
Intendans & Commiffaires fe régleront dans l'exercice
de leur charge , i^. félon cette Ordonnance du Gou-
vernement , & 1®* félon les Inftru£tions & les Ordres
qu'ils recevront du Gouvernemeiit.
Je trouve encore que , fuivant l'Ordonnance annon-
cée par le Diplôme, celle du 12 Mars 4787, Art, 5
» L'aftivrté & lafurvelllance des Intendans s'étendra ,
» fans exception ^ fur tout ce qui a tiait à l'Admi-
» nlftratlon publique , politique, & économique :
» en conféquence tous les OfHciers des Seigneuries,
» fous les Magifirati , & autres Adminiflratcurs ou
r» Réglffeurs des biens & deniers publics ( vous-mêmes
» donc auffi , Meffeignews I ) tous les Officiers,
w Employés & Receveurs de nos Domaines & Fi-
w nances ; ceux du fond de Religion, a in Ji que ceux
*> des Provinces {donc vus ConfeiLlers- Receveurs ati'Jî^ )
» Villes & Communautés, leur (ont fubordonnés,
» &c devront leur donner, en tout tems, infpeftion
» & communication de leurs regiftres , protocoles,
M & autres aftes , ainfi que tous les renl'eignemens
» & éclaircifTemens relatifs aux objets de leur gef-
» tien «.
Voilà ce qu'on veut bien révéler au Public , en
attendant que ces Intendances foient établies 6c in-
troduites.
Mais fî l'on pouvoit parvenir à les établir & les
affermir ( dont Dieu nous préferve ! ) , alors , les
Inftruélions & les Ordres qu'ils recevront , fuivant
l'Art. 6 du fufdit Diplôme du i Janvier 1787 , en
feroient fentir le'; funeftes effets.
L'Art. 6 de l'Edit du 11 Mars 1787 , eft le ga-
rant de ce que j'en préfage : il ordonne » à tous
» les Sujets , fans diflindion , d'obéir promptement
» à tous les ordres qui feront expédiés par les
» Intendances, comme s'ils étoient émanés de Nous,
» quand même ils paroîtroient excéder les bornes
» de leur autorité , fauf le recours au Gouvernoment-
« Général, qui fera toujours libre à ceux qui pour»
» roient fe croire léfés.
Je frémis, quand je vois de quoi nous fommss
tous menacés , du defpotifme le plus abiolu I V^ous
Brabançons , qui , à la gloire des Pays-Bas , avez le
bonheur de vivre fous votre Conftitution Brabaa-
çonne, vous la perdriez! Vous, dont les Fafîes ,
& les Annales vantent la bravoure, la valeur, l'at-
tachement pour votre Prince & l'amour pour la
Patrie , vous flétririez l'éclat de la gloire que vos
ancêtres ont fi vaillamment acquife ! Tremblez : leurs
( 159 )
înânes vous le reprocheroient ; Sr la pnflerîté Bra-
bançonne rv>ugirolt juiqu'à \a Confoniii.ation des
fiecles d'étte clelctndue de vouç. Mais que dis je?
Vous avez un Souverain équitable & jufle , qui ne
refpire que pour votre bonheur: ofez-lui defiîUer
les yeux ; les envieux ont falciné le Mon?rque.
Pardon, MciTeigneurj. ; je m'écarte; niais ratta-
chement pour mon Prince , & l'àn-iour de ma Pa-
trie m'entraînent. Ah ! que je voudrois pouvoir vcus
diffiinuier , combien dans It Diplôme du le^. Janvier
lySy , portant etablï[\smtnt d'une now- dit foi nu pour
h Gouvernement Général des Pays- Ras, le contenu
*du 7e, Art. vous eft In'uriei^x , vu qu'il dit o.:ver^
tement , que votre forme d'Admin^ftrarion ti\ à la
furcharge du Peuple. Cette injure , qui ne peur ve-
nir du Prince , n'eft qu'une infiigaMon de l'envie.
Tous les Ducs de Brabant ont eu rexpérience,
que cette Province, dans toutes Ici occafions , leur
a . fourni des foriunes incroyab'es : les Annales &
les Joymfes Entrées mêmes l'attcflent ; &C ce non-
obftanr, la P<ovince ou le Pays elr riche: c'eft ce
qui nous a Tufcité des envieux. Si cependant le
Peuple eût été furchsrgé par i'Adminiftrarion , ("oit
provinciale , fbit quelconque , la Province ou !e
Pays ne feroit pas fi florifTant , ni fi richt- qu'il Teft.
Ce n'eft pas cette prétendue furcharge qui a don-
né lieu à cet Article ; c'eft un prétexte qu'on prend
pour s'arroger î'Admin'ilraîion , & l'Article 8 le vé-
rifie , puifqu'il pre/crit que le Collège aftuel des
Députés des Etats viendra à ceHer avec le dernier
du mois d'06lobre de cette année , & refiera fup-
primé.
La dlfpofition de l'Arîicîe 9 confirme mon arer-
tion , puifqu'il v efl dir , qu' « Au lieu He ce Col-
» lege les Etafs de Brabint choifiront parmi ceux de
» leurs Membres , qui feront préalabiement recon-
C i<^o )
w nus capables par le Gouvernement, un Député,
M qui iera agrégé au Confeil du Gouvernement ,
» où il aura le titre, le rang & les gages de Con-
» i'eiller , 6c où il rapportera immédiatement tous
» les objets des Finances de fa Province , & autres,
» que le Préfideat jiigera à propos de lui confier.
En premier lieu , il eft à remarquer par rapport
à ce 9e Art. , que les Etats de Brabant font au nom-
bre de trois, qui ont chaque leurs Députés: fuivant
cedit Art. ils n'en auront qu'un , qu'ils choifiront
parmi ceux de leurs MejnbrcN ; conféquemment ces
trois Etats doivent enfemble choifir un Député qui
cft Membre de ces trois Etats.
Les Etats Eccléfiaftique & Noble ne font pas û
nombreux; mais le Tiers- ttat eu différemment
compofé : il neû pas repréfenté par les Magiftrats
des trois Chefs- Villes.
Louvain a quatre Membres: le Magiftrat , qui eft
le premier ; le deuxième ceux du Confeil ; le troi-
fiemc ceux de la Décanie , &c le quatrième les Chefs-
Doyens , dits Overdekens.
Bruxelles en a trois : le Magiftrat , qui efl le pre-
mier , le fécond le large Confeil ; & les neuf Nations
compofées des Doyens des Corps des Métiers font le
troifieme.
Anvers a quatre membres : les Bourguemaîtres &
Echevins en fervice a6luel forment le premier ; les
anciens Echevins le deuxième ; les Quartier-maîtres
dits Wyckmeejlers le troifieme ; & les trois Chef-Na-
tions des Bateliers , des Merciers & ^lQs Drapiers ,
fous lefquels tous les Métiers font compris , forment
le quatrième.
Tous ces Membres refpedifs àes trois Chef-Villes
font le Tiers-Etat de Brabant; conféquemment forment
en concurrence avec les Etats Eccléfiafîique & Noble,
les Etats de Brabant, Chaque individu de ces Mem-
bres
( i6i )
bres cft Membre des Etats , même iufqu'au Doyen
du Corps de Métier des Savetiers : ainfi donc jufqu'au
Savetier, félon la difpofition duditAit.9, a droit de
prétendre à la députation, puifqu'il efl vrai de dire,
qu'il eft Membre des Etati. ^
Chaque des trois Etats a Tes Députés ; de quel Etat
lera celui que l'Article prefcrit ? C'eft-ce qu'il n'a pu
lietinir ; car en n'admettant qu'un Député pour les trois
Etats , il faut nécclTairenient que deux Etats fo.ent
dépourvus du leur.
Il eft cependant notoire , que les trois Etats ont
des objets refpedtivement indépendans les uns des au-
tres , 6c foiivent des intérêts contraires. Comment
donc ces diflfércns objets feront-ils traités & furveiliés
par. les Etats, qui feroient dépourvus de Députés?
De plus, les Etats ont plufieurs emplois à confé-
rer parleurs Députés : comment la collation s'en fera-
t-elle , quand il n'y aura qu'un feul Député ?
Taflant à préfent au choix, que l'Art. 9 prefcrit:
de quelle façon fe fera-t-ii ? comment fera-t on confier
de Id pluralité des voix après les trois ou fix anj^
que la députation durera, félon l'Art. 12? Voilà €«
qu'il m'efl impoffible de concevoir. • :
Mais fuppofez que cela foit poflible, l'Art. 9 prefcrit
encore , que cet Elu doit être préalablement reconnu
capable par le Gouvernement : celte capacité fera fi
difficile à trouver au gré du Gouvernement, qu'elle
ne le trouvera jamais ; & la coniéquence en fera , que ,
comme le bien public de la Province 6c des fujets
exige , que l'Adminiftration provinciale ne foit pas dé-
pourvue d'un Adminiftrateur capable , le Gouverne-
ment en dénommera un ad inurim ou provifionnel-
lement , pour dorer la pilule. Certe provifion fera
continuée fuivant les çirconfîances du teins ; fi elles
deviennent tant-foit-peu favorables , on en établira
un indéterminément.
L ***
( i6i )
Si Von avale la pilule , adieu , Députatlon ! adieu ,
Etat*! adieu tout !
Revenant à un autre objet du même Art. 9 : que
ce Député agrégé au Confeil du Gouvernement, y
aura le titre, le rang, & les gages de Confeiller ;
je commencerai par demander à charge de qui ces
gages lui feront-ils payés? C'eft-ce que l'Article n'ex-
plique pas. Conféquemment il faut fuppofer, que ce
iera à charge des Domaines; c'eft une générohté qui
donne à penfer : les penfées font libres ; mais je ne
puis les confier au papier. Je puis néanmoins dire ,
que ce Député eft au fervice, & aux gages du Prince ;
& j'edime , qu'il eft incompatible d'être Membre de
l'Etat ôc d'être en même-tems au fervice &c gages du
Prince : les intérêts de celui-ci font trop diamétrale-
ment oppofés à ceux des Etat?.
Finalement, ce même Article 9 porte encore, que
ce Député-Çonfeiller ( à gages) au Confeil- Général
des Pays-Bas y rapportera immédiaterwenr tous les
objets des Finances de fa Province. Ce terme immé'
diatemtnt donne quafi à entendre, qu'il lui feroit dé-
fendu d'en faire rapport aux Etats ; il eft cependant
notoire, que les Députés, à chaque Aflemblée gé-
néraie font rapport au Corps aflemblé des affaires fur-
venues , qui paftent les fins de la dépuration , depuis
l'Aflemblée précédente , & qu'alors les Etats pren-
nent à&% réfolutions en conféquence , dont l'exécu-
tion eft confiée foit aux Députés feuls , foit conjoin-
tement avec les Commiffaires, que les Etats ont trouvé
à propos de dénommer , pendant leur Affemblée gé-
nérale.
En outre il eft auffi notoire , que les Députés
par eux-mêmes n'ont aucun pouvoir , concernant
des objets , qui paftent ceux qui font circonfcrits
dans les bornes de la dépuration. Comment fera-
t-il donc poffible audit Député de rapporter' immé-
( 1^3 )
diatement audit Confeil tous les objets des finances
de fa Province ?
Il eft prefcrit , Article ii du môme Diplôme,-
que les Etats éliront un Secrétaire. Prefque toutes
les réflexions que j'ai faites cl deffus, par rapport à la
l^ço^ de choifir un Député, Tonl adoptables à l'élec-
tion d'un Secrétaire-: ainfi il iuffira de m'y rapporter.
La fin de l'Article lo du jmcine Diplôme m'oblige
à faire des réflexions relativement à la diïpofition
d'icelle. Il y eft dit, que les Etats de Giieldres , &£
de Mallnes auront à commettre le foin de leurs at-
'faires au Député de Brabant.
Il faut obferver , que je parle dans la fuppofi-
tion que le Diplôme ait lieu , ou folt exécuté.
Dans cette fuppofîtion , néanmoins faufle , on
doit convenir, que le Député de Brabant aura de
la befogne, autant qu'il pourra fupporter ; de plus
qu'il n'a aucune notion des affaires des Provinces
de Gueidre & Mallnes , & puis , que la première
des deux eft trop éloignée de Bruxelles.
Cela étant, qui eft celui qui voudra fe chirger
des affaires d'autrui ; je dis defdites deux Provinces?
Culpa cnim tj2 immifcerc fc ni ad Je non pcrtincnti
1. î6. ft.de R. j.
D'ailleurs i'uppofons qu'il eût le pouvoir & l'au-
toriré vis-à-vis de ceux de Gueidre 6^ de Malines,
à l'effet de la difpofitlon fufdite, l'a-t-il à l'efFet de
pouvoir obliger ou contraindre le Député du Bra-
bant d'accepter ce foin ? Je réponds Se conclus,
qu'il ne l'a que par !e defpotifme.
' Enfin pour corollaire de cedit Diplôme, il eft
à réfléchir qu'il n'eft revêtu d'aucune formalité Bra-
bançonne, fi abrolument & effentiellement requife,
pour qu'un Diplôme , Edit ou Placard ait force de
Loi: il ne porte ni le Fija , ni la lignaiure, ni le
Scel Brabançon.
L 2
(1^4)
Et ce qui carsi^^érife en outre le derporifme le
plus' abfolu , c'eft que, malgré qu'il foit dépour%'U
Je ces formalités , on en a fait faire une prétendue
publication partout en Brabant.
J'eftime que j'ai démontré fuffifamment la nulle
valeur de ce mêine Diplôme, conféquemment je
lecournerai encore à l'Edit portant étabiifTement des
intendances des Cercles aux Pays-Bas, du i x Mars
s 787 , quant aux Articles que je n'ai pas encore
touchés.
Le préambule de l'Article 9 de cet Edit porte:**
>> Comme cependant la protcdion des Sujets ôc Ha-
» bitans du Pays, tant pour leurs perfonnes, que
»> pour leurs poffeffions , contre toute violence &c
» voie de fait , eft un des devoirs les plus eflen-
» îlels du Gouvernement politique «.
Ce raifonnement ou préambule, pris dans un fens
abftrait de la • difpofition qui le fuit , eft très-vrai ,
& Julie f mais dans le l'ens dans lequel il eft pris,
Se comme on le doit néceftairement prer.dre , en-
fuite de la difpofition qui fuit , il eft controuvé , il
eft paradoxe.
Ladite difpofition porte : » Nous attribuons aux
w Intendances le pouvoir & l'autorité de décerner,
y> & de mettre en exécution le provifoire momentané ,
» ou le poiTefibire fommariflîme , dans tous les cas
» où quelqu'un feroit violemment 6c de fait troublé
» dans fa poftefîion , voulant que ce qui aura été
» prononcé & ordonné, à cet égard, par les Inten-
» dances , tienne lieu , jufqu'à ce qu'il en ait été au-
» trement difpofé , foit au pcfteffoire , ou au pétitoîre ,
» par le Juge compétent.
C'eft une vérité inconteftabîe , que la proteélion
des fujets & habitans, tant pour leurs perfonnes, que
pour leurs poiTtinons , contre toute violence Se voie
de fait , appartient au Gouvernement politique , à i'ef-
fet de prévenir , que les violences Si voies de fait
ne fe faiïent , & que les tranfgrefî'eurs foient cor-
rigés ou punis , félon l'exigence des cas.
Mais il eft controuvé qu'il appartiendroit au Gou-
vernement politique , à tel effet, que celui qui a
effuyé quelque violence ou voie de fait , folt remis
dans fa pofleflîon ^ comme il fut avant la violence
faite. Ce devoir appartient au Tribunal de Juftice ,
& c'eft le Confeil de Brabant, à qui cette Judicature ,
pour tout le Brabant , à i'exclufion de tous autres
Tribunaux , appartient.
De plus ce Art. lo forme le contrafte le plus for-
mel avec la di'pofition du 8e. Art. du même Edit ,
qui porte, » Nous exceptons abfolument des pouvoirs
» &: de l'autorité des Intendances tout ce qui con-
» cerne la Juftice purement contentieufe.
Car il n'eft pas poffibie de fuppoler , & même il
ne peut pas tomber fous le {ens,que, dans une vio-
lence faite, ou dans quelque voie de fait, il ne fe
rencontre pas qvielque conteftation , ou quelque ma-
tière contentieufe.
Cela étant , l'objet , félon le 8e Art. , efl: abfolument
fouftrait aux pouvoirs & à l'avHoriîé des Intendances.
En outre . le polTeffoire fommariffime n'eft pas connu
en Brabant , il eft même de trop dangereufe confé-
quence , comme on fentira par l'exemple , qui peut
arriver , ôc que je propoferai.
Un homnie féduit & emmené une femme mariée,
ou une jeune fille ; il fe retire dans l'un ou l'autre
endroit , s'y fixe pour un certain tems. Le mari ou
le père vient par hafard dans cet endroit , & ren-
contre, fgit le mari fon époufe , ou le père fa fille
mineure , fe promenant , au br.is du fédu6leur ; le
mari ou le père agité par un jufte refTentiment , ar-
rache en courroux fon époufe ou fa fille du bras de
fon féduâ:eur ; celui-ci fe demene , il crie à toute force ;
L3
{i66)
Monfieiir l'Intendant furvient , les entend : 1! y trouve
un prérendu trouble ou voie de fait, & il prononce,
que le prétendu troublé 6c la femme ou fille refie-
ront enfemble. Le mari ou le père veut prendre (on
recours au Juge compétent, mais entre-tems le ra-
vifTeur eft parti avec fa proie , &c le mari ou le père
en eft encore pour Tes fraix. Vraiment c'eft une Jurif-
prudence pareille à la Coutume de Lovris , où le
battu paie l'amende.
Et le plus extraordinaire de tout, c'eft que malgré
la reconnoiflance qu'on y fait, que la protection àes
Sujets & Habitans du Pays eft un de5 devoirs les
plus eftenriels du Gouvernement politique , on com-
met trouble fur trouble, fous prétexte de vouloir le
prévenir.
Le lie. Art. en fait la preuve; puifque l'on y pré-
tend de (upprimer les charges de Grands - Baillis ,
Chefs - Mayeurs , qui néanmoins font admis par la
Joyeufe- Entrée ^ Art. 37.
Enfin , je le répète encore , ce même Edit n'étant
p5$ revêtu des formalités Brabançonnes , eft de nulle
valeur : Forma enim dat ejje rei.
Paftant à l'autre Diplôme , portant établiftement
des nouveaux Tribunaux de Juftice aux Pays - Bas,
de la même date, 1 Janvier 17^7.
Pour éviter la répétition de ce que j'ai dit ci-defTus ,
par rapport aux formalités , dont un Diplôme , Pla-
card , ou Edit doit être revêtu , & comme il doit
erre fait, pour avoir quelque effet ou exécution, je
me bornerai à dire , que ce même Diplôme en eft
deftitué à tous égards. »
J'oblerve encore , que le titre ne quadre pas avec
fa difpofition , vu que le titre porte feulement éta-
b!iftem.ent des nouveaux Tribunaux de Juftice aux
P;^y"^-Bas , & que fa difpofition , en outre , porte fup-
preffion de tous les Confcils aftuels de Juftice ; il
C 167 )
porte encore également iiipprefiîon de toutes les Juf-
tlces Seigneuriales; enfin il porte iuppreflîon, à l'ex-
ception des feules Juftices Milifaires , de tous autres
Tribunaux, Corps &f Cours de Juftices, qui fubfiftent
dans les Pays-Bas, ainfi que des Tribunaux Eccîé-
fiaftiques, & de ceux de i'Univerfité de Louvain ,
Art. 3 , 4 , 8 & 9.
Commençant par le Confei! de Brabant , j'eftime,
qu'il fera convenable de rapporter ion origine , I;i
manière dont il a été érigé; bref, un précis Uîccinél
dudit Confeil.
Les Hiftoriens ne font pas d'accord fur l'époque
de (on origine. Les uns veu'enr la fixer au tems de
Godefroid- le- Barbu , mort l'an 1140, & enterré
dins l'Eglife de l'Abbaye d'Afflighem.
Les autres la fixent au règne du Duc Jean II ,
6t donnent l'on origine à la Chartre de Cortenbergh,
du mois de Septembre , Mercredi avant la S. Ba-
von 13 II.
Je n'approfondirai pas cette quefiion ; vu , en
premier lieu, que le tems qui me refte eft trop court,
vu en fécond lieu , que la féconde opinion me
paraît la plus probable ; & vu en troifieme lieu ,
qu'elle eft plus que (uffilants pour établir ma thefe.
Cette fameufe Chartre fe trouve au premier vol.
des Plac. de Brab' fol, \12.
Jean II fit donc une convocation générale de Tes
Barons, Chevaliers, VafTrUix , Villes & Franchifes,
6c il fit dreflTer cette fameufe Chartre , connue fous le
nona de Cortenberg , du nom du lieu où elle fut
donnée, qui étoit le lieu de la réfidence du Duc &C
de fa Cour ; il eft étonnant de voir le grand nombre
de Nobles qui y ont intervenu.
Par cette Chartre , le Duc , entre plufieurs autres
points concernant l'avantage de fon Pays , réitéra
la promeffe , tant de fois faite par (zs ancêtres , de
L 4
( i6-^ )
traiter toMS fes Sujets par Jugement & Juflice , St
à cette fin il réfolut rEtabllflement de ce Confeil :
auquel etret il ordonna » que lui & fes fuccefTevrs
^> de confeil commun ou avis de fon Pays , délig-
w neroient quatre des principaux Chevaliers , & trois
V perfonnes de Louvain , trois de Bruxelles , une
♦> d'Anvers , une de Bois-le-Duc , une de Tiriemont
>♦ & une de Leeuwe , que ces quatorze perfonnes ,
» de trois en trois femaines, s'aflembleroient en la
» Salie de Cortenberg ; qu'elles ordonnemient ce
» qu'elles trouveroient , en équité , convenir pour
» le repos & le plus grand bien du Pays , & enfin ,
i> que les Sentences & Ordonnances feroient ftables ,
» fermes & inaltérables «.
Il y eft auffi pourvu , ce quelle façon , en cas de
mort de l'une ou de l'autre defdites perfonnes, elles
devroient être remplacées.
Il eft de plus ordonné & ftatué , que lefdifs Che-
valiers & Perfonnes élues jureroient fur les 'laints
Evangiles, de conferver le Duc , & tous fe^ VafTaux
de Brabant en leur Droit , ôc d'adminiftrer la Juftice
le mieux qu'ils pourroient.
Voilà donc cette fameufe Chartre de Cortenberg ,
dont il eft tanf parlé dans les anciens a61cs , 5î dont
les Etats de ce Pays ont été fi jaloux , qu'ils en
ont demandé à plufieurs reprifes une confirmation
fcécifique de leur Prince. Vovez Euthcns , tom. 2 ,
iiv. 7 , § 1 ; il y dit tor.t ce que je rapporte.
Il dit encore, loc. cit. fol. 3^9, & feq. qu'en
Tan 1572-^. le Duc ^yencefl^s de Bohême ôt Ton
époufe la Duchefîe Jeanne, fii'c du Duc Jean III ,
firent une convocation générale des Etats à Corten-
berg , où , après plufieurs conférences, &: à l'inftance
ces mêmes Etats , fiuent couchés plufieurs Articles
touchant l'antorité du Confeil , & l'obfervation de
îa Chartre de Cortenberg; entre autres, que totrs
( 1(^9)
ceux qui pour lors ou dans la fuite gouverneroient I*
Confeil , {croient (bus la garde 6c protedion fingu-
liere du Prince , de même que tous ceux qui ie
rendroient à Cortenberg , pour y pourfuivre leur
droit : que fi quelqu'un ofoit contrevenir , il feroit
châtie d'une manière qui ferviroit d'exemple à tout
autre , Se que tous ceux du Confeil , ainfi que tous
les principaux Officiers de Brabant feroicnt obligés
de promettre par ferment , à prêter entre les mains
du Prince, ou de deux Confeillers, d'obTerver , &
de faire obferver, de point en point, laChartre de
Cortenberg, & la Chartre ^yallone.
Oie finalement il fut ftatué , que tous Juges , 5c
Officiers de Brabant auroient à obéir aux ordres du-
dit Confeil, dans les alïaires qui le regardent, à
peine d'être tenus pour délobéiiTans, 5c d'encourir
les peines comminées par ladite Chartre de Corten-
berg : il y rapporte même les Articles en langue
originale.
D'après ce que je viens de rapporter , il eft évi-
dent, que le Conseil avoit le maniement auffi bien de
la Police que de la Juflice , & qu'il n'avoit pas d'awtre
Chef que le Duc même, fauf, qu'en certaines occu-
rences, îorfqu'il étoit nécefTaire , le Sénéchal de Bra-
bant y préfidcit en fon nom. Mais le Duc AVenccflas
étant mort, l'an i3?^4 , la DucheiTe Jeanne ne
pouvant plus vaquer aux affaires du Confeil , tant
à raifon de la guerre de Gueldre , que par d'autres
embarras , elle inftitua un Chef perpétuel de fon
Confeil , qu'elle qualifia de Chancelier.
Le même Euikens loc. cit. €. 2 , rapnorte en-
cote , que le Duc Antoine, par l'Article IV de fa
Joyeufe Entrée du si? Décembre 1404, avoic pa-
reillement promis de n'admettre dans fon Confeil que
des perfonnes de légitime mariage, né«s -de poiTel-
fionécs en Brabant , &: que ceae promefie fut le-
C 170 )
nouvelîée par la Joytufe Entrée de Jean IV , en
date du i} Janvier 141 J.
Et que ce Jean IV époufa, en 1418 , la fameufe
Jaqueliiie de Bavière, Comteffe de Hollande, de
Zélande , & de Hainaut , & qu'avant que de partir
pour la Zélande l'an 1410, il voulut changer (on
Miniftere & fa Cour, comme il avoit changé celle
de la Duchefle (on époufe , qu'il fit aulTi quelque
réforme en fon Conlei' , & nomma pour Conieil-
1ers Jean de Grimberghe , fire d'Aflfche , Jean de
Grimberghe , fon fils aine, Maître Jean Bont, Cha-
noine de Sainte Gudule à Bruxelles , Nicolas van
Werve , Bernard Utenenge, fils unique d'Annekin
Renier Noyts, Jean de HufHe , Nicolas de Colen-
foene , ( lequel il fit , peu de tems après , Garde
des fceaux } Guillaume Bont, & Rutger de Tele-
gen Secrétaire; & que par a61:e du 26 Avril 11 or-
donna ce Confeil tant pour le Gouvernement du
Pays , que pour l'Adminiftration fouveraine de la
Juftice ; mais que U difcorde, qui furvint entre le
Duc & la Duchefle , de même qucntn U Duc 6*
lis Etats ^ y caufa \\n entier changement : que les
Etats mécontens du mauvais gouvernement de leur
Prince, fe joignirent à la Duchefle, & appellerent
même à leur fecours le Comte de S. Fol, frère du
Duc, lequel ils conftituerent Ruart ou Régent, &
Gouverneur- Général de Brabant : qu'ils caflerent
aufli, fous fon autorité, par aftedu u Septembre,
le Miniftere & les prédits Confeillers , commis par
le Duc, & couftltuerent en leur place l'Abbé d'Af-
iiighem Chancelier, Jean de Cuvck, fire l'Hoogf-
rraeten , Corneille de Gavre dit de Liedekerke,
lire de Lens, Thierry de Merthem , fire de Boxtel ,
Renier de B;uucrle:n dit de Berges, fire de Geele,
Merxem ^iz. Amman de Cortenberg , dofteur es
Loix & Doyen de S. Douât à Bruges , Williaume
( 171 )
(^(^ Gandjfire de Meerwyck , Everard TSerclaes^
Nicolas van de ^Verve , Ôc Gérard de Gemert.
• Que ces troubles ne durèrent que jufqu'au mois
de Mai 1421, lorfque le Duc, le Ruart , les No-
bles , 6v les Députés des Villes de Brabant f'e trou-
vant en une Aiïemblée générale , a{riî{née dans la
Ville de Louvain, il y fut traité d'un accommode-
ment entre le Duc,& les Etats, par lequel le Duc
confenrit & s'engagea à une nouvelle & meilleure
forme de Gouvernement , &: ainfi il fut derechef
rétabli dans toute fon autorité , & Ton frère fe dé-
porta du nom &c de la qualité de Ruart.
L'Auteur poorfuivant fondit paragraphe, rapporte,
que ce traité d'accommodement procura un nouveau
luftre au Confeil de Brabant , & augmenta de beau-
coup fon autorité; puifqu'il y fut ftipulé & promis,
que , fans l'avis & confentement de trois ou quatre
de ce Confeil , il ne feroit permis au Prince d'a-
liéner aucune Ville, Pays, Château, ou autre Do-
maine , ni d'entreprendre aucune guerre , ou de faire
aucun traité ou alliance , pas même de faire grâce
de crime , à qui que ce fut : que deux du Confeil
commertroient tous les Officiers de la Cour du
Prince, & cela au moindre nombre que faire fe
pourroit, & de telle manière, qu'il ne fût pas né-
ceflaire de changer de tems en tems l'état de fa
maifon; que le Prince & le Confeil commetti'oient
dans les Villes & Plat-Pays les Officiers les plus
capables, qu'ils pourroient trouver, & qu'il ne fe-
roit pas permis au Prince de les defîituer , fans le
confentement de fon Confeil; qu'aucuns ne feront
admis au fervice du Prince, finon les Nobles de
Brabant, ou tels autres que le Confeil en jugeroit
dignes, foit par leur naiffance , foit par quelques
faits remarquables ; qu'aucun du Confeil ne rece-
vroit de l'argent de perfonne , mais que l'argent
(I/O
qui devrolt leur être payé feroit remis au garde âa
regître des Fiefs , qui en p^yeroit les vacations du
Confeil , lorfqu'il s'occuperoit pour le fervice du
Prince ou du Pays, & que le refte feroit employé
aux menus plaiiirs du Prince.
Que le Conf'eil comme troit à la garde dudit re-
g>tre des Fiefs une perfonn^ notable , qui fût le
vallon & le flamand , que nul Prêtre ( à la réferve
des Abbés de Brribant ; ne pourroit être admis à
TEtat de Confeil ou Secrétaire : enfin qu'aucune
perlonne, qui ne fût du Confeil, ne pourroit être
commife à l'inftruftion ou décifion de quelque af-
faire , finon du confentement du Confeil, & que
û le Prince venoit à faire le contraire, la correftion
en appartiendroit au même Confeil.
Cette Chartre , que Ton nomme le nouveau Gou-
vernement du Duc Jean IV , fut fignée par le
même Duc 5c par tous les Nobles , & les Députés
des Villes, §^ Franchifes de Brabant, dont les noms
font aufil rapportés par Divttus in nbi. ad ann. i/^riy
& Butkens rapporte les Articles de la même Chartre
en largue originale. Une partie des Articles de la
même Chartre fut confirmée par la Joyeufe Entrée
de Philippe I ( frère du Duc Jean IV , mort fans
hoirs ) Articles 5 , 6 , & 7 : il fut ftipulé de plus,
que le Prince ne pourroit établir ni deftituer le
DrofTard ni le receveur de Brabant fans l'avis , &
r approbation du Confeil ^ ou du moins de fix Con-
feillers qui en figneroient les Lettres, comme auflî
que le Prince r;e pourroit établir pour Chancelier
finon une perfonne qui fût le latin , le flamand 5c
le "wallon, & cela par avis des autres Confeillers,
eu du moins de fix d'eux, qui aflîirmeroient fous
ferment , que celui qui feroit préfenté pour Chan-
celier , auroit les qualités requifes pour fervlr uti-
kment le Prince, & fon Pays; ôi que le même
( 173)
Chancelier fcroit enfuite le krment en préfence du
Prince Se des Etats de Brabant.
Butkens rapporte les Articles qu'il en cite, mais
cette même Joycuj'i Entrée le trouve dans le pre-
mier vol. des Place, de Brab. fol. 145 & fuiv,
Philippe l ne Turvécut que fort peu de tems après,
«tant mort le 4 Août 1430. Il eft enterré à Tervueren.
Sa mort étant devenue publique , dit Buikens , hc.
cit. §. 5 , le Duc de Bourgogne Philippe , lur-'
nommé le Bon , & Marguerite de Bourgogne veuve
de Guillaum.e Comte de Hainaut & de Hollande^
s'entredifputerent (a fucceffion : l'un & l'autre en-
voyèrent leurs Ambafîadeurs pour remontrer leur
Droit aux Etats, qui fe tenoient toujours aflembiés
à Louvain , & qui enfin fe déclarèrent en faveur
de Philippe. Mais avant que de le reconnoître pour
Duc, ils traitèrent avec (&s AmbafTadeurs , tou-
chant la forme du Gouvernement qu'il feroit obligé
de tenir, & fur les Droits, Libertés & Privilèges»
qu'ils demandoient qu'ils leur fuffent accordés &
confirmés par ferment folemnel.
La principale partie de ce Traité rouloit fur le pou-
voir &C fur l'autorité du Confeil. Ce Duc ayant dif-
férentes Provinces , on jugeoit , que fes affaires ne
lui permettroient pas d'être toujours dans le Brabant :
on voulut donc s'affurer , qu'en l'un ou l'autre cas
de préfence ou d'abfence , le Pays ne fût gouverné
que par le miniftere Brabançon : c'eft ce qu'on voit
à toute évidence par l'aéle de la Joyeufc Entrée de
ce Duc du 5 Octobre 1430. il fe trouve au ler vol.
des Place, de Brab. 1^1 & feq.
Il y fut ftipulé, que le Prince fera obligé de pren-
dre le titre &c les armes de Lothier , de Brabant ,
de Limbourg, & du Marquifat du Su Empire. Q^\ie
ce titre , ces armes devront être gravés fur le fcel
<du Brabant , qui fera toujours diflingué de celui des
(174 )
autres Provinces ; que ce fce! ne fortira point 'du
Pays ; que toutes les Dépêches qui regardent lefdites
quatre Provinces, & le Pays d'Outremeufe, & nul-
les autres , en feront fcellés par un Secrétaire dé-
puté aux affaires Brabançonnes , & fouffignées par
quatre Confeillers du Confeil de Brabant ; que ce
Conlell fera comporé de fept peribnnes des plus
dignes & des plus capables ; du nombre derquelies
4era le Chancelier, natif de Brabant, fâchant les trois
langues; que des (ix autres, quatre devront cire
Brabançons , ou polTéder Baronnie en Brabant ; 6c
quant aux deux autres reftans, ils feront tels que
le Prince voudra les choifir ; pourvu qu'ils fâchent
le flamand , que le Prince étant au Pays , il devra
faire traiter par ce Confeil toutes les affaires con-
cernant lefdites Provinces , & qu'à ce fujet ce Con-
feil fuivra toujours le Prince, & fe tiendra dans l'en-
droit où il réfide ; mais que le Prince fortant du
Pays , il le placera en Brabant , dans quelque lieu
commode, où il lui confiera le Gouvernement-Gé-
néral des mêmes Provinces.
Que le Prince ne pourra établir ni deflituer aucun
Officier , non plus que remettre aucune amende ou
forfaiture , fans l'avis & l'approbation du Confeil ,
ou de quatre Confeillers, au moins (qui, attendu
le nombre de fept , faifoient la pluralité), fauf l'Etat
de Droffard , & celui de Receveur Général de Bra-
bant , pour lefquels il faut l'approbation de fix
Confeillers.
Que le Chancelier devra être choifi du corps du
Concil, & cela par l'avis de fix autres Confeillers,
-qui affirmeront fous ferment , qu'ils le croient ca-
pable & utile au fervice du Prince , & à celui du
Pays. Art. 4, 5,8, ]6 , 53 , & 54 de la même
Joycufc Entrée.
Le tems ne me permet pas de fuivre le fil ou la
C 175 )
fuite des Ducs fucccflifs, & j'eftime , qu'il fuiSra de
remarquer , que ces Articles cUns leurs Joycufcs
Entrées^ julques dans celle du Duc régnant, ont
été foigneufement répétés : fur -tout que toutes les
nffaires àzs Provinces de Lothier , de Brabant , ce
Lunbourg , du Marquifat du St. Empire, & des au-
tres Pays annexés , feront traitées uniquement &
fouverainement pardevant le Confeil de Brabant ,
&c que ce Confeil ne fera aux ordres de perfonne ,
fînon du Prince même, & de fon Gouverneuf &
Capitaine - Général, f'oye^ V Ati. 5 dt la Joyeufe
Entrée de. Sa Majcjlc du ly Juillet ijSr.
Il eft même certain que perfonne , hors fadlte
Majefté , & Leurs Akeffes Royales , les Lieutenans
Gouverneurs - Capitaines Généraux , ni le Confeil
Privé , ni le Miniftre Plénipotentiaire , ni même le
Gouvernement Général , n'ont aucuti ordre à don*
ner au Confeil Souverain de Brabant.
Les termes dudit 5e. Art. du Pacle , ou Traité
fait entre le Prince 6: les Etats repréfentant le Peuple ,
font à cet égard évidens & décififs. D'où l'on doit
conclure , que ce Confeil n'eft pas feulement un
Confeil de Juftice, mais auffi un Confeil de Gou-
VMneneent.
L'autorité du Confeil de Brabant furpaiTe même
celle du Grand-Confeil féant à Malines ; il a devers
foi la Chancellerie : fon Chancelier en eft le Garce
des Sceaux perpétuel : toutes les Dépêches en Bra-
bant , & aux Pays y unis & annexés , ou en dé-
pendans , doivent être fcellées de ce Sceau par-
ticulier ; faute de quoi , elles n'ont aucune exé-
cution.
Ce Confeil aceordolt grâce de .mort , rappel de
ban , lettres de répit ou attermination , de fureté de
corps , de ceffion de biens , d'adjonétion à l'office ,
pendant la yle de l'Officier, de iupplément d'âge &c.;
( I7M
& à cet égard il étoit en paralelle avec le Confeil-
Prlvé.
Il eft vrai , que fouvent on a voulu lui contefter
ces Prérogatives ; mais alors les Chanceliers , per-
ibnnes de naiïïance & de mérite , ont toujours fu
écarter les pitges qu'on lui tendort. Ce n'eft que
pendant ce fiede que l'intrigue , habilement menée ,
a pu parvenir à les fins , en établifTant des Chan-
celiers , (i je puis le dire , de balle extraction , qui
ont laifTé priver le Confeil de l'es Prérogatives, &
înfenfiblement faper Tes fondemens , au point que,
d'un trait de plume , on le veut aujourd'hui lup-
primer : témoin le 3e. Art. du prétendu Diplôme
portant Etablïjjîmtnt des nouveaux Tribunaux de
Juflicc^ du piemier Janvier lySj.
Mais grâces à la valeur , à la bravoure , à la pru-
dence , & à l'attachement de nos ancêtres pour le
Prince ! grâces à leur amour pour la Patrie ! ils ont
cimenté le^; fondemens du Confeil de Brabant d'un
moellon fi iblide & fi inébranlable, que ni fape ni
pic ne peuvent lui porter coup. Les Articles 4,5,
6, & 7, du Traité fait entre le Prince régnant &
le Peuple , le 17 Juillet 17^1 , connu fous le nom
de Joyeufe Entrée , lont les garans de fa confei^-
tion & de fa durée.
Le Confeil de Brabant , indépendamment du fufdit
Traité entre le Prince & le Peuple , a encore un
autre appui , qui doit en écarter la fupprefTion , &
qu'on a eu foin de laifTer ignorer au Prince.
L'Empereur Charles IV accorda en I349 à Jean lll.
Duc de Brabant , le fameux Privilège par forme
d*£dit perpétuel , nommé la Bulle d'Or Erabaminc ,
par laquelle il efl interdit à tous Princes EcciéfialHques
& Séculiers, Juges & Tribunaux de l'Empire d'exercer
aucune Jurifdidion fur les Habitans des Duchés de
Brabant , de Limbourg & de leurs dépendances ,
de
( 177 )
de les citer, évoquer ou arrêter en leur perfonne ^
ou bien,». , dans quelques afFoires que ce puiflTe être ,
criminelle*: , réelles ou perfonnelles.
Cette B'jlle fut confirmée par l'Empereur Sigif-
mond en 1414, & par l'Empereur MaximiHen en
i^iz , alnfi que par l'Empereur Charles V le 5
Juillet 15^0. Cette dernière confirmation fut donnée
de l'avis des Etats de l'Empire, & Charles V commit
l'exécunon de cette Bulle au Confeil de Brabant,
qu'il conilitua à cet effet Pûcairc Impérial avec au-
torité de procéder contre tous Contrevenans, Princes
ou Membres de l'Empire , Séculiers , ou tccléfiaf-
tiques, de quelque rang eu condition qu'ils puflenc
être , comme contre des rebelles ; 6>c de les con-
damner à une amende de deux cents marcs d'or ,
applicables pour une moitié au Fifc Impérial , &
pour l'autre au Duc de Brabant ; & de les priver
de leurs Droits , Rangs , Honneurs & Dignités ,
même de les mettre au ban de l'Empire : ordonnant
bien exprefîement , que tout ce que le Confeil de
Brabant fera & décernera dans celte matière , aurd
la même force & vigueur , comme «.'il eût été fait
& décerné par l'Empereur même.
Butkens tom. 2 loc. cit. §. 5 , rapporte que le
Confeil de Brabant , en vertu de ces concevons ,
a toujours ufé de l'autorité de Vicaire Impérial^ &C
de juge délégué dans l'Empire : qu'en cette qualité
il a pris fouvent connoifTance , hi porté même des
Décrets contre des Princes du premier Ordre. Haraeus
rapporte, dit-il» qu'en l'an 14^7? le Duc de Ju-
liers fut cité pour les violences par lui exercées
contre quelques Citoyens de la Ville de Dieft , qu'il
avoit fait condamner à mort.
Cette Bulle n'a pas été accordée imiquement en fa-
veur du Duc de Brabant , mais auffi des Braban-
çons &i. Limbourgeois \ Se de plus fon exécution a été
( 173 )
donnée Si commife taxativemer,t au Confcil de Bra-
bant par la confirmation de Charles V , du 3 Juil-
let 1 550.
De lorte que fi le Confeil de Brabant étoit Tup-
primé, cette exécution crouleroit d'elie-inéme, ainfi
que la moitié de l'amende de deux cents marcs d*or
que ladite confirmation de Charles V applique au
Duc de Brabant : & par conféquent les Brabançons
feroient indiredement prives du bénéfice de la Bulle
d'Or.
Il eA fenfible, que tous les Ducs de Brabant fu-
turs ne feront pas Empereur Romain , & Duc de Bra-
bant à îa fois ; ainfi que de ce chef la fuppreHion
du Confeil de Brabant feroit à l'avenir préjudi-
ciable tk au Duc & aux Brabançons.
Revenant au fufdit prétendu Diplôme, il eu. en-
core vrai de dire, que, fuivant le 9me. art., on a
voulu fupprimer , à l'exception des feules Jufiices
jmilitaires , tous les autres Tribunaux , Corps 5c
Cours de Juflice àes Pays-Bas, & conféquemment
aufli les Bines de Santhoven & d'Uccle.
Le Duc Régnant s'efl: formellement engagé arf.
40 de fon paéle ou traité, fait fous ferment le 17
Juillet 1781 avec fon peuple repréfenté par les
Etais , qu'il les tiendra (ces Bancs) en état tels qu'i's
étoieut lors, & comme il appartient, fes Eche-
vins d'Uccle tenant leur réfidence en la Ville de
Bruxelles.
Ayant parlé en particulier du Confeil de Brabant ,
des Bancs de Santhoven ^ d'Uccle , dont il eft ex-
preiTément fait mention dans les Joyeufis Entrées^
3e ne parlerai qu'en général des autres Cours de
Juftice , parce que la préteadue lupprellion n'eft
anlTî portée qu'en général par le fufdit Diplôme ,
fauf cependant qu'à l'égard des Juftices Seigneuriales
il en e(l fait un article féparé : aina je propoferai
( ^7^ )
mes. raifons fur ces deux points. Je commence par
les trois Chefs-Villes.
Les Ducs de Brabant, dit Butkcns tom. 2 Uv. 8,
ont de tout teins confié, & commis la Police, con-
duite , & Gouvernement des Villes de leurs Pays
aux Magiftrats , qui étoient étaWiî à cet effet.
La charge d'Echeyin eft fort ancienne , &c a ea
félon toute apparence fon origine en France, puifcjue
nous liions aux Capitulaires de Charlemagne ( qui
font les plus anciennes Loix des François .1 qu'il
commandoit à fes CommilTaires d'élire des Echevins ,
des Avocats, & des Notaires, ut M'iffi nojtrl Sca^
binos , Advocatos , & Notarios PER SlNGULA
LOC A eligant ; 6c il y a plus de huit cents ans que
cela fe pratique.
Lefdits Magiflrats ont de tems immémorial joui
d'une telle autorité en Brabant , que devant leurs
Lchevins font comparus le plus notables Seigneurs
de ce Pays-Bas & de divers autres Provinces &
Royaumes, pour y pafTer le« contrats de leurs ma-
riages, teftaniens, partages & autres atfles de Juflice.
La forme d'élire les Echevins eu. prefcrice par
JUSTINIEN in authcnticis ; & il efl trcs-nécef-
faire qu'on choififfc des perfonnes de confidération ,
qui aient les conditions fuivantes : premièrement ,
qu'ils foient natifs de la même Ville, & non étran-
gers ; parce que ceux qui ne iont pas natifs de la
même Ville , ou qui n'y font domiciliés que depuis
quelques années , ne peuvent jamais être fi propres
au Gouvernement & maniement des affaires d'icelle
que les originaires ; d'autant plus que pour l'ordi-
naire un étranger n'eft jamais C\ agréable aux ha-
biîans 6>c bourgeois que leur concitoyen , qui a na-
turellement plus d'affeâiion pour la confervation de
la Vilie ; joint aufli que par la difpofuion civile ,
extrantï facile ad regni arcana non fum admitundu
M 2
( i8o )
Quant au Magiftrat de Louvain , il dit que (es
fept Echevins é(oient anciennement des fept Ligna-
ges Patriciens & Nobles ; mais que différentes dif-
cuffions étant furvenues , elles turent afîbupies moyen-
nant un arrangement que firent le Duc Wencelin
& la Duchefle Jeanne , par forme de Concordat &
d'Edit perpétuel, en date du 8 Septembre 1378;
que delà en avant fero'nnt déjîgnés tous les ans par
le prince quatre Echevins des Lignages privilégiés &
trois de la Commune , & avec iceux onT^e Confeillers
defdits Lignages^ hors dcfquels Jeroit choiji un Bourg"
Mellre , &c. ; avec pluiieurs autres points , dont
ils dépêchèrent leurs Lettres , qu'on nomme la Char-
te de Règlement de Louvain.
Quant à cette Ville de Bruxelles, il dit que les
fept Echevins ( qui forment l'Echevinage ) ont été
de tems immémorial élus dans les fept Familles Pa-
triciennes i nobles & privilégiées ; enforte que per-
fonne n'eft admis à l'emploi d'Echevin ou de Ma-
gifirat , s'il n'eft iffii d'une defdites familles.
Ce Privilège eft fi notoire , & fi conftamment ob-
fervé jufqu'à ce jour, que perfonne de la Ville n'en
doute.
Butkens rapporte une lifte des Magiftrats de cet-
te Ville, qu'il commence feulement à l'an 1539.
Mais il avoue que leur origine eft plus ancienne ^
& il s'exciife de ne commencer fa lifte qu'à la fuf-
dite époque, par la raifon qu'autrement il ne l'au-
roit pu donner fuivie & fans lacune.
Il fe trouve néanmoins dans le Tréfor das Privi-
lèges de Bruxelles , dit den Luyjîer van Brabanty
une Charte du Duc Henri I , en date deux jours avant
le Dimanche des Rameaux 1134, qui porte, qu'on
fera le choix Echevinal à Bruxelles huit jours avant
la St. Jean ; preuve évidente , qu'alors il y avoit
des Echevins à Bruxelles,
( .8. )
Quant aux Echevins de la Ville d'Anvers , Bue-
kens rapporte, que dès l'aa 1130, ils étoient au
nombre de douze, qui furent augmentés dans la
fuite jufqu'à feize , & qu'alors ils étoient au nom-
bre de dix- huit.
Quant aux Echevins des autres Villes, peut-on
douter qu'elles n'en aient eus ? Je trouve même
une Charte , extraire de celles de Brabant , rappor-
tée par Butkens aux preuves du Livre 4 , foL 46 ,
de Henri I Duc de Brabant, en date de iit;2 ,
par laquelle , entre autres , il oélroya , que tous les
Bourgeois de Vilvorde ne leront traités par juilice
qu'en leur Ville , & pardevant leurs Echevins.
Sur quoi il faut remarquer, qu'à cette époque les
Cours des Echevins exiftoient déjà, puifque le Duc.
ne les établiffoit pas , mais qu'au contraire il fta-
tuoit, que les Bourgeois de Vilvorde devroient être
traités dans leurdite Ville pardevant leurs Echevins.
11 eft encore à remarquer , que puifque Vilvorde ,
qui n'a jamais été une des Chef-Villes du Brabant,
avoit déjà des Echevins , il efl moralement fur , que
les Chef- Villes en avoient auflî.
Butkens rapporte loco cit. que dans la Ville de
Bois-le-Duc , Godefroid Duc de Brabant en établit
cinq en 1584.
Dailleurs il eft palpable , d'après robfervatiori de
Butkens ci-deffus rapportée, que chaque Ville ôc
Franchife a eu fes Echevins dès l'jnftant qu'elle a
été érigée ; & cela devient indubitable , lorfqu'on
obferve que dans les Joyeufes Entrées des Ducs de
Brabant , depuis des fiecles & des fiec'es , il a été
(lipulé & convenu , comme il l'eft par l'Art, i de
celle du Duc régnant du 17 Juillet 1781 , qu'il les
traitera & fera traiter tous les Prélats, Maiions-Dieu,
Barons, Nobles & bonnes Gens, & Sujets de (qs
Villes, Eranchifes, & Pays de Brabant, & d'Ou-
M î
tre-Meufe en toutes chofes par droit & fenfence i
Julvant le droit des Villes & Bancs , où il appai'
tiendra & devra être fuit.
Quafit à la fuppreiîion des Juftices Seigneuriales,
il faut obferver , que de celles-ci la plus grande
partie a été vendue par le Prince, ou de l'a part,
aux pofiefTeurs d'icelies , ou à leurs auteurs , & que
quelques-unes de la part du Prince ont été enga-
gées aux poflefieurs , ou à leurs auteurs , & que les
Bcquéreurs en les acquérant, ont eu ces JuTùces en
vue pour régler leur prix d'achat Ça').
De plus que les pofîeireurs à chaque changement,
foit par fuccefllon , donation ou ach?it , en ont dû
taire le relief , & payer les droits , &r même à l'a-
venir en devront faire le relief & payer les droits ;
quand, même, dans la fuppofition du Diplôme, ils
en feroient privés; car le f^iifeur <]udit Diplôine n'y
a nulle-part.rien difpofé relativement à la ceffation
de ces reliefs.
(a) Dans le Diplôme du 22 Oilobre 1626, qui renferme
les condiîiorjs de la vente d'un très-grand nombre de Seig-
neuries de Brabant Cv de Limbourg , on Ht art. X. » Item,
„ es Viiiages tk Seigneuries où de toute ancienneté il y
„ a eu Banc & Juftices, composez deMayeur &. Eciievins,
„ lei'dits Bancs & Juftlces demeureront en même état qu'ils
„ ont été jufques à préfent, & iront à rcffort , Loi & Ap-
„ pel aux Co'-.rs & Confeils qu'il appartiendra , comme
„ autres Juftices hames y fituées , & pourront les Ache-
„ teurs établir & renouveller les OfBciers , &c. art. XI.
„ Mais là cil il n'y a point pour le préfenr , Icfdits Ache-
5, teurs en pourront établir & ériger de nouveaux , comme
., auiîi ériger figne patibulaire, carquant, plllory , & antres
,, marques deJuflice & JurifdiC'Lîon hautaine, &. y mettre
„ tel Mayeur , Echevins &• autres Officiers capables , qu'ils
;, trouveront convenir, pour faire Droit, & prendre con-
„ noiflance de tovues, tant caufes cviff;inelles que civiles, &
,, au furplus , exercer toute telle JuAlce qu'appariiendra aux
„ Seigneuri^îs hautes , Moyennes Se b:iiTes en Erabant. "
( •»? )
Il n'a pas même W\(fé entrevoir, que fori inten"»"
tîon feroit telle. Les circonrtances & la façon dont
on agit , ne permetrent pas de fe flatter qu'on les
fera ceflfer , ni qn'on en indemnifera !a perte ; car
l'expérience jurqu'ici a conftaté , que le Datif efî
au néant , &; {'Ablatif à fà place.
Rien n'ed fi contraire à la bonne foi que de vou-
loir reprendre ce que vous avez vendu , & le droit
porte qu'il faut repouffer certe demande: Querrz cnim de
cvi&ione tenet aciio ^ eumdtm egîntim rcpcllit exapiio.
En outre , rede a voir , Meffeigneurs , ii cette
fuppreflïon des Juftices n'efl pas une rufe pour fa-
per infenfiblcment, métne anéantir l'Etat Noble dé
cette Province, comme celle de ne pas conférer les
IVélatures vacantes en eft une pour anéantir i'Etac
Eccîénaftique , envahir les biens des Abbayes,' &c
devenir ainfi feuî maître abfolu.
l! vous eft connu , Meffeigneurs , qu'aucun ne
peut être reçu Membre de l'Etat Noble , fans qu'il
ait une Terre titrée , ayant haute Juftice , dont il ti\
en droit de porter le titre honorifique: l'Art. 4 des
Inflru£lions pour la direéiion dts preuves à faire le
conflate.
Refle à voir fi par la fuite , dans !c cas qu'on
admît ladite fupprefiîon , on ne voudra pas difpu-
ter aux Seigneurs le droit de Hsute- Juftice , & en
conclure qu'ils fout dépourvus de la qualité requife
pour être admis à l'Etat Noble.
Ainû la prudence autant que l'équité exigent
qu'on n'admette pas ladite fuppreffion projetteè :
on peut , & on doit s'y oppofer.
Ce prétendu Diplôme bleffe le droit de tous le*
h.ibirans de cette Province, & il ed contraire à la
Confiirution fondamentale ; il n'efl fait , ni porté jl
l'intervention du Confeil de Brabant, comme il îc
devroit être, félon que j'ai remarqué ci-devànt; &
M 4
C i?4 )
qui pluseft, il porte même la fuppreflîon Scranéan-
tiiTement de ce mêrne Conlei!.
Ce Diplôme porte la deftrudion du Paé^e ou con-
vention , que le Duc régnant a fait & a dû faire
pour que nous le reconnuffii^ns pour notre Prince:
on voit même, qu'il y eft dit, Article :o , que
tous Juges fans exception prêteront ferment à leur
admiffion fur Toblervation exaélc du nouveau Rè-
glement de la Procédure Civile , & des lnfiru6tion$
y relatives.
C'eft l'unique ferment qui leur eft enjoint , &
du moment qu'ils l'ont prêté , tout eft dit ; fuivant
la difpofition dudit Diplôme , ils entient en aéli-
vité , fans qu'ils doivent prêter aucun autre fer-
ment.
Cependant , fuivant la Joysuft Entrée , tout Juge en
Brabant doit jurer l'obfervation d'iceîîe > Art. lo;
le Prince eft convenu avec le Peuple de le faire
obferver , &c. il l'a promis même fous ferment,
Confsquemment ledit Diplôme eft diainéiralement
oppofé à fon contrat, à fa piomciïe & à fon fer-
ment. Que peut-on , ou que doit- on attendre de
celui qui contrevient à fa parole donoée , à fon con-
trat, à la bonne foi , & même à ion ferment?
Jugez-en , MciTelgneurs ; un chacun penfe à cet
égard , comme 11 !e fent , je me contenterai de vous
laifter purtei votre jugement : perfonne que le Tout-
Puiffant ne ccnnoîtra le mien ; il doit nse fuffirc
de voii-^ l'avoir fait remarquer.
Je (lois cependant dire quelcue chofe relat've-
ment au nouveau Règlement de la Procéduie civile,
dont les Juges doivent jurer l'ob'^ervation exafte ;
c'eft , que ce Réç^lement contient^ des erreurs , des
contradiélions , même des abfurdirés telles , qu'on
feroit bien d'en envoyer l'Auteur à CFcole. Ce Rè-
glement , dont l'exécution eft impoffible , & qu'on
( '85 )
propofe pour le bien public , prépare le malheur
du Pays <k la ruine de bien des faoïiîles. Je ne fuis
ni Monarque ni Légiilateur ; mais s'il ctoit poiîible,
que mon nom pût paroitre à la tête d'un tel ou-
vrage, je ne le fouffrirois pas > parce que je fuis cer-
tain , que je leroi' bafoué tant des Juriicon^ultes ,
que des Praticiens mciiie les plus médiocres.
Je conclus donc pour les railons ci- devant détail-
lées , y jointe la dilpcfition du 7e. Art. de ia fé-
conde Lettre additionnelle du Duc Philippe-Ie bon ,
en date du j.^ Novembre !4S7 » qu'il a pareillement
promis, & juré d'obferver : que cedit Diplôme n'eft
pas admiflîble , qu'on ne doit pas y acquieicer , com-
me étant non-feulement contraire,- aux Conftitutions
foodamentales de cette Province , mais comme por-
tant la deflruftion & l'anéantidement d'icelles ,
piiiiqu'il nous fait force & volonté.
Il me refte encore à traiter d'ui: objet de la plus
grande importance ; des Abbayes qu'on laiflfe dé-
pourvues reipedivement d'Abbés & d'Abbtfles, ce
qui eft pareillement contraire à la Joyeuje Entrée,
Qjant à ce point , il faut obferver d'abord , qu'au-
cune Abbaye, Prieuré, Maifon-Dieu , ou Couvent
n'exifte en Brabant fans préalables Lettres d'06lroi , &
de l'agrément des Villes : en fécond lieu , que tous
généralement ont obtenu des Lettres ^ amsnifation ;
ainfi que tous , conjentïentïhus Principe & Populo ,
(ont admis dans la Province, y vivent au rang des
Sujets, ôc forment une partie de l'Etat : enfin que
chaque Abbave conflitue un corps , dont l'Abbé ou
l'Abbefle eft le Chef. Or il eft de toute évidence,
qu'un corps naturel fans tête ne peut fubiîfter , ôc
il en eft de même de ces corps allégoriques.
Les Abbayes fans Abbés fr-ufFrent une dégrada-
tion continuelle , tant par rapport au fpirituel , que
par rapport au temporel ', deforte que fi on ne les
( »S6 )
Tuppriine pas abfoliîment , comme on a tenté ce
fupprimer le Confeii'de Brabant , & toutes les Cours
de Jiiftice , elies s'anéantiront infenlible-ment d'elles-
mêmes : car n'ayant pas respectivement d'Abbé ou
<!'Abbe(T£ , perfonne ne fe présentera pour y être
admis ; mr.is ne recevant pas de Novices , il n'y
aura pics de jeunes Profès : ainfi le corps s'étein-
dra , & par une coniequence inévitable , Tes fonds
devenus des biens vacans , feront dévolus au Fifc ;
& nous n'aurons plus de Corps Eccléfiafiique- Ré-
gulier.
Ces obfervations faites , je vous prie , MelTeigneurs ,
cTe faire attention aux premier & cinquantefeptieme
Articles de la Joyeufe Entrée, du ly Juillet 1781.
Le premier porte entre autres , que Sa Majefié
leur fera bon , équitable & fidèle Seigneur , & qu'il
ne leur fera , laiflera , ni foufFrira être fait en fciçori
quelconque aucune force, ou volonté &c. , le 57e.,
que dorénavant on ne pourra en maniera quelconque
donner , faire ou laiïTer donner dans ledit Pays de
Brabant aucunes Abbayes , Prélatures , ni dignités en
Commande &c.
Peut-on dire qu'en eu bon , équitable 5; fidèle ,
quand on ne rend pas à chacun ce qui lui ei\ dû <,
& ce qui lui appartient ? La négative efl: évidentip
Jîme ; ciT c^eii contrevenir manifedement au troifieme
précepte de Droit , jus fuum cuique trihuere. Or, c'eft
wn droit qui appartient aux Abbaye*, qu'elles aient
refpeftlyeraent leur Abbé ou AbbefTe.
Peut-on auffi dire, qu'on ne fait, ne laifTe faire,
ou qu'on ne fouffre pas être fait en façon quelcon-
que aucune force, ou volonté , quand on fiit tort à
lin tiers , qui n'y a aucune part , 6c ne peut l'em-
pé:her? On doit fans héfirer admettre la négative;
car c'eft contrevenir au deuxième précepte de Droit ,
altèrum non 'x'din , q^â concerne la Société politl-
( iS; )
crue, & qui nous ordonne de ne faire aucun préju-
dice à qui que ce foit.
Ce précepte puremeut relatif à autrui , nous cLlige
à le traiter comme nous voulons être traités nous-
mêmes , ce qui forme le bon Citoyen ; & il n'tft
pas jufte que l'on foufiVe du tait d'autrui , lorfqiie
'on n'y a point de part.
Les Abbaves refpeif^ivement dépourvues d'Abbé
& d'Abbeiîe n'y ont aucune part : le choix tCi fait;
les Coinmiiraires font pavés , Se tout ce qui eft re-
quis pour obtenir un Abbé, efî achevé : il dépend
uniquement du Prince de les nommer, &: il ne le
fait pas. La conlequence eft jufte qu'il fait, ou laiïïe
faire fores & volontî.
Il fait môm.e pis, que ce à quoi il s'eft engagé,
audit Art. ^7, cii ne donner ^ faire on la'iffcr donner
CCS Ahbayis en commence : car en ne nommant ni
Abbés ni AbbeiTes , U fait que les Abbayes dépériront,
dont à la fui'e i! pourra s'approprier tous les biens,
au lieu que les Abbés Commendataires en ")ouiroient
d'une partie , & ne manqucroient pas de travailler à
en conferverl'exiftence; 5<: peut- être y reu(iiroient-ils.
Entre bien d'autres objets de plaintes , qui me ref-
tent encore, je traiterai par préférence ce ce qui tou-
ctîe îe plus direftement l'état des Citoyen^ ; tel eic
l'enlèvement du iieur de Hondt , Habitant de cette
Ville.
11 m'eft impofîîble de fixer l'époque de cette en-
lèvement , mais l'époque n'y fait rien , il fufEt que
le fait foit vrai , notoire.
La caufe en eft incornue ; on fait feukment par-
la voix publique , qu'on le croit impliqué ï^ans l'af-
faire , dont le Général Legisfcldt , prifonnier à Vienne,
eft accufé.
Quoi qu';l en puifTe être , il eft conftant qu'on Ta
furpris, enlevé, mal^-ré toutes les réclamations des
( iS8 )
ï^nviîffges du Pays, qu'il a pu faire; &c qu'on Ta
nuitamment & furtivement tranfporté à Vienne , les
fers aux pieds & aux mains.
Sa malheureufe Epoufe , dont la trifte fîtuation
déchire le cœur de tout homme fenfîbie , implore
votre fecours , MefTeigneurs , éontre la violation la
plus outrageufe du droit des Gens , des Privilèges de
cette Ville, & même de la Conftitution fondamen-
tale de cette Province.
Je n'entrerai pas dans la Queftion , s'il eft cou-
pable ou innocent , parce que cela ne fait rien à l'af-
faire ; je dirai feulement que dans la fuppofition
gratuite qu'il fût criminel , l'attentat n'en fubfîfte pas
moins.
Je ne puis cependant omettre de remarquer qu'il
ii'étoit pas convaincu , puifqu'il n'avoit pas été en-
tendu par fon Juge compétent : & je dois obrerver
aufîi, que fuivant les maximes de Droit , il doit être
cenfé innocent : Qui/que prcefumitur bonus , donec
probctur malus , & Jî accufare fufficiat , quis inno^
cens erit ^
Dans ces circonftances , l'attentat eft plus outra-
geant à fon égard , & il eft affreux pour fon Epoufe :
dans quelle cruelle fituation doit-elle fe trouver , fé-
parée à trois cens lieues de fon mari? Quelles agi-
tations fon cœur ne doit -il pas effuyer ? Quel hor-
rible tableau doit (e préfenter continuellement à fon
imagination ! Elle voit fon Epoux courbé fous le
poids de fes chaînes dans un cachot obfcur & infeâ,
ne recevoir pour toute nourriture que du pain &
de l'eau : elle le voit à tout moment frémir de
crainte de devenir la vi6lime de fes accufateurs, &
d'être enchaîné avec des forçats , dont le fort eft
cent fois plus cruel que la mort. Elle le voit qui lui
tend les bras, pour la confoler, malgré les angoifles
dont fon cœur eft déchiré; il femble lui dire :» Chère,
C i89 >
»» maïs trop malheureufe Epoufe , votre fituation eft
» encore plus déplorable & plus touchante que la
» mienne ; je luccomberai à mes maux ; vous me
» furvivrez , mais veuve d'un homme qu'on croira
» coupable, malgré fon innocence, tâchez que votre
*> ame (uive la mienne, vos maux cefferont , &C
» nous aurons le bonheur de voir paroître devant
» le grand Juge, le Juge des Minières 6î des Rois,
» ceux qui nous caufent tant de maux , & leur in-
» juftice fera confondue ; ils reconnoîtront enfin
» combien les jugemens de Dieu (ont différens des
» leurs. «
Il eft notoire , que le Sr. de Hondt eft depuis
nombre d'années fixement domicilié dans cette Ville,
qu'il y poffede des biens -fonds, & qu'il y a tou-
jours joui d'une réputation à l'abri des reproches ;
que par conféquent il y a acquis le droit de Citoyen,
quoiqu'il ne Teroit pas Bourgeois , ce que j'ignore :
mais il fuffit d'être Habitant pour jouir de tous les
droits, ^ue la Coutume de la Ville accorde aux
Bourgeois , hors ceux qui rendent habiles à entrer
dans quelque Corps de Métier : ^rt, 225 eies Cou-
tum. de Brux. *
Il convient de remarquer ce que la Coutume de
cette Ville porte & ordonne à cet égard, i ^. Art. 4a ,
les Bourguemaîtres , Echevins & Confeiîlans font
Juges ordinaires , ayant connoiffance fur les Bour-
geois dans la Ville & fa Franchife , ôc fur ceux
du Pays de Brabant , hors les Villes libres, auffi fur
ta Habitans de la Ville , non privilégiés , en caufes
criminelles, civiles, perfonnelles , & réelles &c.
z°. Art. 64. Il n'eft pas permis à l'Amman ni à
fon Lieutenant , ni aux Sergens jurés d'appréhender
aucuns Bourgeois , inhabitans de la Ville , pour caufes
criminelles , fans due information , ni aufli pour
caufes civiles &c.
( ipo )
5®. Art. 113. Les Bourgeois internes & externes
font fujeis au Magiilrat de cette Ville en matière
criminelle , & de biens meubles , de dettes , amendes ,
& a(R:ions perfonnelles , comme à leur Juge ordinaire;
la Judicature duquel ils ne peuvent décliner &:c.
4^*. An. 214. Les Bourgeois de Bruxelles ne
peuvent être traités hors de droit , ni être arrêtés
dans la Ville ou fa Franchi'e , pour cauîes civiles ,
léelles, amendes, ou aftlons perlonnclles ;.,.. & en
caufes criminelles , ne peuvent être appréhendés fans
préalable information.
D'après ces Articles , il eft évident , que fuivanî
le Droit municipal , le Sr. de Hondt n'a pu être
appréhendé & tranfporté à Vienne , fans commettre
un attentat contre ce Droit. Le Magiftrat de cetre
Ville eft Ion Juge naturel & compétent ; au point
même , qu'il ne peut pas proroger la Jurifdlftion.
De plus , il n'y avoir ni informations prépara-
toires , ni décret de prife de corps à fa charge ;
j'entends , Informations prifes par celui nui eft ici
dans la Ville le Prépofé public , ou TOfRcier de
Juilice, 5^ -un Décret de fon Juge compétent.
Qu'on n'oppofe ; pas qu'il y avoir des informa-
tions prifes par un autre Accufareur, & un Décret
porté à fa ch.arge par un autre Tribunal. Cet Accu-
jateur, ce Tribunal , n'avolent aucune Jurifciétion
fur lui. Tout eft donc nul, fuivant le droit, 6c le
fentiment univerfel de tous les Criminaliftes.
Et quand même, abftra£l:lon faite de cettç Jurif-
prudence certaine, on voudroit oppofer qu'il exiftoit
un Décret valable de prife de coips à fa charge,
ion enlèvement & tranfport à Vienne n'en font pas
moins un atter.tat à la Conflitution tondamentale ^
& au Pacle que le Duc régnant a fait.
L'Art. 17 de fa Joyeufc Entrée porte exprefie-
menr, » Que fi quelque perfonne eft appréhendée
l
( '91 )
» dans le Pays de Brabant &c d'Oufremeufe de Sa-
» dite Majeitë , qu'il ne la fera mener, ni laiffera
» mener Prifonniere hors desdits Pays.
De Hondt a été appréhensSé dans cette Ville même
de Bruxelles par des pièges abominables qu'on lui a
tendus , & d'une façon diamétralement oppofée à
la bonne foi; on l'a lié, garroté, transporté à Vienne,
par ordre de Sa Majefté , à ce qu'on lui difoit.
Cette appréhenfion & tranfport faits par ordre de
Sa Msjefté, font des attentats & des allions de
force ouverte les plus cara^leriiées.
Cependant Sa Majefté l'Empereur, par fon Pafle
d'Inauguration, Art. I, a formellement ftipulé&C juré,
qu'il ne leur fera, laiffera , ni (ouffriia être fait,
en façon quelconque, aucuiîe force ou volonté.
Combinez à préfent l'appréhenfion & le tranfport
de De Hondt à Vienne avec la ftipulation reprife
audit Article. Q^el contfafle ! Ne diroit-on pas
qu'il n'a fait ce Pa£\e qu'avec le defieiii de ne pas
s'y tenir ; ou du moins de ne le fuivre qu'en ce
qu'il lui plairoit ? C'efî néanmoins une Jurifprudence
univerfelle , adoptée mém.e entre 1-es Nations les
moins policées , que toute CONVENTION FAITE
OULIGE.
J'ai appris qu'on vouloit légitimer cet attentat ,-
par la raifon que De Hondt avoir eu la qualité d'jnf-
pefteu-- des vivres ; mais ce prétexte efl plus fpécieuj:
que folide. De Hondt n'a jamais été engagé comme
militaire ; il n'a prêté aucun ferment : enfm , il
n'a traité que pour la livraifon des fourrages aux
troupes.
11 faut encore remarquer , que cette entrcprife
n'a été faite que pour la Guerre, que Sa Majeflé vou-
loit pourfuivre en qualité de Duc de Brabant contre
la République d'Hollande, pour l'ouverture de i'fcl-
eauti d'où il refaite, i". que De Hondt a contracté
( '92 )
ici en Brabant , i*. qu'il a contrarié relativement au
Duché de Brabatit.
Du premier réfultat il s'enfuit , que s'il eft cou-
pable de quelque crime, fon procès doit abrolu-
ment être inftruit en Brabant , &c que c'eft en Bra-
bant qu'il devroit fbbir la peine , à laquelle il pour-
roit être condamné: parce qu'il eft certnin , fuivant
la Jurisprudence criminelle , quod rationt domïciL'ù
accufatus de crimir.c fortiatur forum comptuns , de
même que rationc Locï ^ uhï crimtn perpetiatum eft:
car ubi te capio , ibi te pnnio. Dans les avions per-
fonnelles &c civiles , le domicile , &t l'endroit où le
contrat s'eft pafîe, donnent auffi \e forum ou la com-
pétence à l'égard du Juge envers celui , qui doit
être aftionné.
Il fuit du fécond réfultat , qu'ayant contrafté eti
Brabant, & par rapport à cette Province, il ne peut
être aftionné, ni tranfporté hors du Brabant, encore
moins dans l'Empire; la Bulle d'Or Brabanrine ,
dont l'Empereur , comme Chef de l'Empire , doit
maintenir l'exécution, eft décifive à cet égard , com-
me je l'ai démontré ci-devant en traitant de la
fuppreflion du Confeil de Brabant.
En outre , on peut encore oppofer à cet enlè-
vement & tranfport de force le 2 4me. Jrt. de la
Joyeufe Entrée, qui porte , » Que Sa Majefté ne
» fouffrira, qu'aucun de fondit Pays pourra arrêter,
» inquiéter, ni adjourner un autre, hors le Pays,
» fi ce n'eft qu'il feroit fugitif, fans fupercherie de
» quelques chofes, telles qu'elles fuffent. de même,
» ceux de fefdits fujets , qui provoqueroient un
» autre hors le Pays, le feroient provoquer, ou ap-
w peller, qu'ils fourferont deux cents marcs d Or ,
» ou feront autrement corrigés , à l'arbitrage , ,&
y modération de ceux de fondit Confeil de Brabant «.
Suivant cette article, le Duc veut affranchir tous
ceux
ceux de fon Pays d'être arrêtés , inquiétés , ou
ajournés hors dudit Pays , par les habitans d'icelui.
Et il fait prendre, & transporter de HoxNDT dans
un cachot, & il le retient prilonnier à Vienne!
C'eft vraiment pis qu'arrêter & inquiéter ; aufîî
eft-il abfolument néceflaire , Meffe-gneurs , que vous
le fouteniez , & le fafliez reproduire dans le Bra-
bant, pour y être fon procès fait & partait, s'il y
a matière, pardevant fon Juge compétent, jufqu'à
la Sentence définitive; ôc s'il eft innocent, le ré-
tablir dans fon état, avec dédomiragen-ent de toutes
pertes & dommages fouffetts; & s'il eft coupable,
le punir fuivant la difpofition de nos Loix.
Si l'on ne le réclame pas, cet exemple tirera à
conféquence , & perfonne ne fera plus fur de foii
état civil. On nous pourra tous enlever & tranf-
porter , l'un devant & l'autre après.
Mais il efl: tems que je finifTe : car fi je devois
détailler toutes les infradions &c atteintes faites oc
portées à nos Privilèges , & à la Conftitution fon-
damentale de cette Province , il me faudroit écrire
des volumes. Je crois en avoir dit allez pour vous
démontrer, Mefleigneurs , que la conflitution fonda-
mentale du Pays eft violée , malgré que le Duc
régnant , par ia Joyeufc Entrée , ait fi foiemnel-
lement prom.is , & fe foit obligé fous ferment de
la garder & remplir exaélem.enr.
Mais puifqu'il ne remplit pas fes engagemens ,
permettez-moi de vous rappeller, que par le 59me.
Art. Son Alrefle » Albert , Prince Roval de Pologne
» & de Llthuanie , Duc de Saxe-Tefchen &c. a au
» nom de Sa Majefté promis de bonne foi & juré
» perfonnellement , fur les faints Evangiles , pour
» Sadlte Majefté, fes Hoirs &c SucceiTeurs , à tous
» généralement, Prélats, Maifons-Dieu, Monafleres,
iy Barons, Chevahers, Villes & Franc hifes, & tous
( ^94 )
>> Sujets (îe Sadite M;jjefté & bonnes Gens de Tes
» Pays de Brabant & d'Outremeuie , leurs Hoirs
» & SuccefTeurs, de les tenir dorénavant tous en gé-
y> néral fermes & ftables à toujours , & de ne ja-
» mais y contrevenir , ni fouftrir qu'il y foit con-
» trevenu en aucune manière; te s'il arrivoit, que
» Sadite Majefté , fes Hoirs & Succefleuts vinflent,
» allaient , ou fiffent à l'encontre , par eux , ou
» par quelqu'un d'autre, en tout, ou en partie, en
» quelle manière que ce foit, en ce cas, il conjcnt
» & accorde au nom de Sa Majefté, auxdits Prélats,
» Barons , Chevaliers , Villes, Franchiles , & à tous
» autres fefdits Sujets , qu'ils ne feront tenus de faire
» aucun fervice à àadite Majefté , fes Hoirs ou Suc-
» cefTeurs , ni d'être obéiftans en aucunes chofes de
» {on befoin , & que Sadite Majefté powrroit ou
» voudroit requérir d'eux, jufques à ce qu'elle leur
» aura réparé, redrefle , & entièrement défifté ÔC
» renoncé à l'emprife ci-deftus mentionnée «
C'eft d'après cette ftipulation & fon acceptation ,
& fous ces conditions , Mefieigîieurs , que Vous ,
repréfentant le Peuple de Brabant , avez promis que
vous ferez en tout bons & obéiffans à Sadite Ma-
jefté , comme des bons & fidèles Sujets le doivent
être à leur îéglcime & véritable Piince.
Cette ftipulation & acceptation eft une condition
Jlnc qua non ; conféquemmcnt , félon (a propre fti-
pulation , vous êtes fondé à en faire uUige comme
ont fait vos devanciers SsC ancêtres , les Etats de
Brab?nt , envers le Duc Jean IV , qui n'avoir fait
que quelque réforme au Confeil de Brabant, comme
je i'ai démontré ci-devant.
Vous êtes, Mefteigneurs , à leur place , vous avez
les mêmes droits : & le même fang Brabançon coule
dans vos veines. Mais la voie la plus douce eft tou-
jours la meilleure. Je fais que vous avez eu recours
(195)
à Leurs Alrefie« Ro5'ales , mais fans fuccès : je m'é-
tois pourtant attendu que votre démarche auroit eu
<juelque effet , fur-tout confidérant que s'étant fait
Brahantifcr y il y avoit lieu d'efpéier qu'elles au-
Toient pris à cœur les Loix fondamentales Brabari'
çonnes : mais quantum ejl in rcbus ïnane!
Enfin je tiens fermement que Sa Majefi^c n'efl:
point informée au julle de ce qu'on prétend exécu-
ter ici fous l'appui de fes ordres , & par l'abus de
fon autorité. On n'aura pas manqué de lui faire
part de ce que- des principaux Employés Brabançons
avoient accepté de nouveaux Emplois , qui entraî-
nent la deftruftion du Confeii de Brabant ; accep-
tation qui les rend indignes du nom Brabançon &
qui doit les faire conGdérer comme traître* à la Pa-
trie , &: à leur ferment qu'ils ont faufle. Ces ac-
ceptations , dont on aura informé le Monarque ,
l'auront induit en erreur ; elles l'auront autoriie à
croire qu'on exécuteroit ici tout ce que l'on vou-
droit. Je penfe donc qu'il importe hautemei.r , Mef-
feigneutN, qne vous députiez quelques Membres de
vorre Corps vers la Perfonne Sacrée de Sa Majefté ,
pour l'informer au jufte des attentats qu'on commet
ici fous fon nom.
Et qu'on ne m'oppofe pas que pour cela il fau-
droit une permiilion du Gouvernement ; c'eft une
erreur. Vous avez con^radlé avec le Prince; il doit
vous être libre de vous expliquer vis-à-vis de celui
avec qui vous avez contra(5lé : ce feroit autre chofe,
fî vous alliez comme Repréientans de quelque Corps,
Peut-être préferrez- vous de les envoyer vers S. M.
Très Chrétienne , pour iinplorer fes bons offices &
fa Royale Protedion auprès de S. M. l'Empe-eur
& Roi. Au reftc , Meffeigneurs, je m'en rappoire à
votre fagaclté , fur laquelle je compre ; &'j'e{pere
qu'à l'exemple de vos glorieux Ancêtres, vous pri-
N i
( 195 )
ierverez la Province du coup fatal dont elle ef^
menacée , 5c que vous foutiendrez de tout votre pou»
voir Ton ancien luftre & Ts liberté. Je vous pro-
tefte , Mefieigneurs , que ce que je fais , n*eft que
dans la vue de remplir les devoirs d'un bon Citoven :
ce que je fais , je le dois , &c par attachement ponr
mon Prince , & par amour pour ma Patrie.
■ C'efl: dans ces fentimens que j'ai l'honneur d'être
avec le plus profond refpeft ,
Me s S E I G NEUR s ,
Votre très-humble S: trè;-obéiffant
Serviteur, H. C. N. Vander
Ngot jun.
Bruxelles^ ce 23 Avril 1787.
u
OBSERVATION.
N vrai &: zélé Patriote , ayant lu avec plaifir
le Mémoire judicieux de l'Illuflre Henry vander Noot ,
contenant les Droits du Peuple Brabançon & les
atteintes y portées depuis quelques années au nom
de Sa Majefté l'Empereur & Roi , obf'erve , que ce
Mémoire n'eft rédigé & mis au jour , que pour
qu'à l'avenir les bonnes Gens du Pays & Duché
de Brabant , mis au fait de leurs Droits & Privilè-
ges, piiiiTent en tout tems en écarter toute atteinte
& infraction ultérieure. Il obferve entr'autre avec
l'illullre Auteur qu'autrefois on a fouvent voulu
contefier les Prérogatives du Confei! Souverain de
Brabant, mais nu'r.îors des Chanceliers, perfonnes
de nsilïance &: de mérife , ont toujours fu écarter
ie« pièges qu'on lui tendoi:, & que ce n'ert qi:e
jj^ndant ce liecle-ci qu'on a pu parvenir à la fin
( »97 )
^u'on s*ctoit propofée , en établiiïânt des Char.cc-
iierf de bafle extraftlon , qui onr laiffé dépouiller
le Confeil de (es prérogatives , comme entr'autres
feu le ChinceWer Strcithagen , qui à (on avènement à
cette Dignitç j aquiefça à l'abandon de quantité d'Oc-
trois , grâces &c. donf ledit Confeil avoit conftarn-
ment joui jufqu'en 1764, époque de ("on avène-
ment à la même Dignité; 6f ces Oftrois, grâ-
ces &c. iont repris dans la Dépêche en date ç
Avril de la même année , adredée au Conl'eil Sou-
verain de Brabant le 11 dudit mois, & dont on
croit devoir transmettre la teneur au Public pour
(on informatioTi.
€bàRLES-Jlex^XJDRE y Duc de Lorrain i& de
Bar y Lieutenant^ Gouverneur & Capiiàinè-Gé-
riérji de Pays-Bas, &c. &c.
A
YANT trouvé corvenable de porter à la con-
noifiance de Sa Miijijîî les diverfes Repréfentations
contenant les raifons &; motifs fous l'appui defqueU
vous fouîenez être en droit d'accorder dans l'étendue
4e la Pro.vinc£. de Brabant généralement toutes efpe-
ces d'Oclrois de Juftice , de grâces & autres, elle
a bien voulu nous faire connoitre , que la concef-
fioa dei Oé^rois , étant un attribut ini'éparable de la
Souveraineté, vous n'avez pu en accorder que fous
ion bon plaifir, & aufii long-tems qu'elle a bien
voulu vous permettre l'exercice de cette autorité;
qu'en coniequence elle a jugé à propos de (e ré-
ferver ou à fon Gouvernement Général des Pay*-
Bas, & de vous interdire la difpenfation des 06troii
fuivans , à peine de nullité.
1^. Lettres de n-ituralité ^ d'habi'ité à l'cgircl
ÀQ tous Etrangers non fujets de Sa Majejfé,
N 3
( ,98 )
1^. Lettres de légitimation.
30. Lettres d'amortiflement pour Gens de main-
mo'ta.
4'<. Pour récibîiflernent de nouvelles Fabriques.
^*^. Pour la recherche des Minéraux.
6^. Pour Moulins à Eau & à Vent.
7®. Pour l'établifTeiDent des Voitures publiques.
H°. Pour la conftru^lion & entretien des Chauf-
fées & excavation on approfondiiTemtnt de Canaux
ou Rivières, lorfque ces ouvrages doivent fe taire
hors du Diftriâ: ou de la Banlieue d'une Ville,
Bourg ou Village.
ç**, Oélrois pour la conftruclion de nouvelles
Eclufes & Tenues d'Eau.
ïo". Pour diguer les Terres inondées.
1 ïî". Pour fournir aux Aides & Subfîdes avec tout
ce qui y a du rapport.
11^. Ceux qui regardent les Droits Domaniaux
ou Régaliens, Papier Timbré, Tonlieue, Acciies ,
3Ç)roits & Importions fur les Denrées ou Marchan-
difes & choies lembltibles, foit que leur perception
ait été accordée aux Adniiniftracions à titre d'enga-
gere ou autre quelconque.
ij*?^;Ceux par leiqueis il s*agiroiî d'augmentef
une Impofition éép établie.
4°. Ceux qui tendent à acquitter les dettes con-
traélées pour quelqu'une des caufes fufdifeç.
ly^. Le Placet des Bulies- Apoftoîiques oour di-
gnités Eccléliaftiques & pour les difpo/itions &*
commiffions des Supérieurs Eccléfiaftiques étrangers,
i6*-\ Lettres de réiniffion, d'abolition , d'iujpofi»^
tion , de lilence , rappel de Ban, Sauve-gai de ou
Saur conduit pour les Bannis, Criminels, Fugitifs,
condamnée à peine afRiclive, & autres grâces fem-
bîables.
i7*^. Pour Foire franche.
( 199 )
i8^. Pour Marché hebdomadaire.
l()^. Quant aux Oélrois pour imprimer, on Te
conformera à la Dépêche de Son Altcjji Royale
du 27 Juillet 1763.
20^. Oclrois pour vendre , aliéner ou changer
aux Etrangers les biens fitués fous la Frontière.
21^. Lettres de Si^nijicamus.
En vous notifiant cette difpofition d'après les Or-
dres exprès de Sa MajcjU , nous vous prévenons ,
que, par provifion & jufqu'à autre Ordre, vous
pourrez continuer d'accorder en la manière accou-
tumée les autres Octrois non compris dans la ré-
(erve ci-deffus , & au lurpius qu'il ne fera rien
changé ni innové fur le fait des Oftrois en géné-
ral quant au Scel ni quant à la Signature. A tant.
Chers & Bien-Amés , Dieu vous ait en fa fainte
Garde. De Bruxelles le 5 Avril 1764, étoit Para-
phé, Ne. Vt. Signé, Char.les de Lorraine : Se
plus bas contrefigné , Di Rcuu
UIPLOME par lequel les rênes du Gou-
vernement des Pays-Bas font m'ijes par
intérim entre les mains de Mr» le Comte
de Muray,
J
OSEPH , ê<c. Ayant trouvé bon de rappeller près
de notre Personne Impériale & Royale , pour un
certain tems , Leurs Altefles R.ovales & notre très-
cher Se féal Louis Comte de Barbiano de Belgio-
jofo, notre Miniftre Plénipotentiaire dans les Pro-
vinces Belgiques fous les ordres des Séréniffimes
Gouverneurs-Généraux; l'attention que nous faifons
à tout ce qui peut intéreiTer le bien - être de nos
bons & fidèles Sujets Belgiques , nous porte à prendre
N4
( 200 )
tlès-à-préfent les précautions néceffaires pour pré-
venir & empêcher les fuites préjudiciables, auxquelles
rofdites Provinces Belgiques pourroient être expolées
pendant Tabrence de Leurs Alteffes Royales & du
Miniftre Plénipotentiaire, fi nous n'avions pas pourvu
à leur AdminiRration par le choix d'une perfonne ,
qui fe trouvant fur les lieux, ait en même tems les
qualités requifes pour prendre provifionnellement les
rênes du Gouvernement- Général de ces Provinces.
A ces caules , par la confiance que nous avons en
notre très- cher & féal jofeph Comte de Murray ,
Baron de Me'gun , notre Chambellan aéluei , Che-
valier de notre Ordre militaire de Marie-Thérefe ,
Confeilier d'Etat intime aâiuel , Lieutenant-Général,
Colonel propriétaire d'un Régiment d'infanterie , &c
notre Général-Commandant des armes aux Pays-Bas ,
èz fur la connoifïance que nous avons de fon zèle ,
de fa prudence & de fon expérience; favoir faifons,
que ce que de'fTus confidéré ëc faifant une attention
particulière aux fervices diftingués qu'il nous a déjà
rendus, & à ceux qu'il continue de nous rendre à
notre entière fatisfadion , nous l'avons créé , infiitué
6si établi, le créons, inflituons &: érabliffons p?ir les
préfentes notre Lieutenant , Gouverneur &: Capi-
taine-Général par intérim & pendant l'abfénce de
ïeurfdites Aiteffes Royales aux Pays Bas. A quel eCÎQt
nous avons donné & donnons audit Comte Jofeph
de Murray, plein-pouvoir & autorité de gouverner
-nos Provinces Belgique^ , de vaquer à toutes les af-
faires qui y furviendront , de mainreiilr nos Vaffaux
& Sujets DANS î>!OTRE SAINTE ReLIGKJN CATHO-
LIQUE, Apostolique et Romaine; de faire ob-
ferver la Juflice par tous nos Confeils , Jufticiers &
'Officiers, tous & chacun en leur RefTort & Jurif-
diction ; de pourvoir & faire pourvoir & difpofer ,
comme il appartiendra fur k-s requêtes, plaintes ôç
( lor )
recours de nos Sujets ; de taire afîembîer devers
lui, ou ailleurs où bon lui femblera, & autant ce
fols qu'il voudra , les Chevaliers de l'Ordre de la
Toifon d'Or , notre Confeil du Gouvernement-
C/énéral , &c tous autres nos ConieiU par nous or-
donnés &C à ordonner ; d'y faire propoî'er 6£ mettre
en délibération toutes les matières & affaires qui lui
furviendronr ; de prendre fur leurs opinions & avis
telles concluions &c réfolutions qu'il apparnendra ,
& de les faire mettre à exécution ; d'avoir la Turin-
tendance, tant de ce qui concerne la Juftice & les
Finances, qsi.e fur nos Troupes de terre 6s: de mer>
ôc fur les Gouverneurs de nos Provipices & Villes,
& fur tous autres Officiers , tant généraux que par-
ticuliers de Juftice & de Recette dans toute l'étendue
de notre domination aux Fays-B^s ; de faire émaner
& publier toutes fortes d'Edits , Statuts , Ordonnances
qu'il trouvera convenir au bien , utilité , commodité
& bonne police de nofdits Pays & Sujets ; de con-
férer toutes Charges , Dignités , Emplois , Offices
& Bénéfices de notre difpoHtion , qui viendront à
vaquer ; d'accorder 5t oftrover grâce , rémiffion ,
abolition , pardon &c rappel de banniiTement à tous
criminels & malfaiteurs ; de faire convoquer & a<-
fembler les Etats de nos Provinces refpeCtives des
Pays-Bas, lorfque bon lui femblera, pour y faire
propofer telles affaires que notre Royal fervice &
le bien-être de nofdites Provinces pourront exiger;
de figner de notre nom & fceller de nos Sceaux ,
toutes Provilions & Let'res-parentes qu'il aura trouvé
bcn d'accorder ; quant aux Lettres clofes , nous
voulons & ordonnons , que la Dépêche s'en faffe
dorénavant fous notre Nom Royal , qu'elles foient:
iignées par lui, & par celui de nos Secrétaires, au-
quel il en aura commandé l'expédition ; & voulons
que ces Let;res Se Provifions, ainfi dépâ.hée^ , ayent
( 202 )
la même force, valeur & effet, que (î Nous-mêmes
les euffions fignées ; avons enfin autorifé & autorifons
ledit Comfe Joleph de Murray , à faire , ordonner ,
commander & faire exécuter tout ce qu'il verra être
à l'avantage & à l'iionnear de notre Royal fervite,
& à la conlervation de nos Droits, Haareurs , Sei-
gneuries , Autorité & Prééminence , de même qu'au
bonheur & à la tranquillité de nofdits Pays ÔC Sujets,
tout alnfî , & en la forme & manière que nous
ferions & pourrions faire , fî nous y étions en per-
Tonne ; fuppléant à cet tf^t^i par ces préfentes à tout
ce que pourroit réquérir ou e>:iger mandement plus
ample ; &: promettant en fol & parole d'Empereur
&c Roi , d'avoir pour agréable , ferme & flable , &
d'obferver inviolabîement tout ce qui aura été fait ,
convenu & conclu , accordé & exécuté par ledit
Comte Jofeph de Murray , en conféquence defdites
prélentes, fans jamais faire, dire ni aller , ni foufFrir
être fait , dit , ni allé au contraire , le tout fur le
pied qu'en ont ufé & pu ufer les autres Lieutenans,
Gouverneurs & Capitaines-Généraux , par intérim,
& d'après les inftruéVions aftueiles de notre Gou-
vernement-Général , & celles que nous jugerons à
propos de lui donner dans la fuite. Donnons en
mandement aux Chevaliers de l'Ordre de la Toifon
d'Or, nos Conf'eillers d'Etat, & à notre Conl'eil du
Gouvernement-Général, & à tous autres Conl'eils ,
à tous Gouverneurs, Capitaines, Jufticiers, Ofïiciers ,
Valfaux &: Sujets, que ce pourroit regarder & tou-
clier , qu'ils ayent à reconnoure ledit JoTeph Comte
de Murray pour notre Lieutenant , Gouverneur &c
Capitaine Général par intérim de nos Provinces de»
Pays-Bas, & comme tel, & repréfentant notre Per-
fonne Royale, ils lui faiTent , portent & rendent
tout honneur, refpeft & obéiffance , comme à Nous-
mêmes; qu'ils l'aident oc l'alîiftent de leurs conféils
& lumières, de tout leur pouvoir, en tout ce qui
concerne les aflfaires du Gouvernement- Général ,
autant de fois qu'ils en feront par lui requis , &
qu'enfin ils le faiîent & laiiTent pleinement jouir &
uier du Gouvernement- Général que nous lui con-
fions de nos Provinces Belgiqnes , cefifant tous con-
tredits & empêchemens au contraire; car alnfi nous
plait-il : voulons qu'au vidimus des préfentes ou à la
copie coliationnée & (ignée par un de nos Secré-
taires , foit ajouté foi comme à l'original ; en té-
moignage de quoi nous avons figné les préfentes ,
& nous y avons fait mettre notre grand Scel. Donné
à Vienne, !e ^ Juillet ^'J^'J. Etait paraphé K. R. vt.
fip^é : JOSEPH, Plus bas itoit : par l'Empereur &
Roi , étoit figné : A. G. de Lederer.
Petite Pièce remarquable par des
Anecdotes patriotiques que bien des per~
fonnes ignorent,
LES BRABANÇONS DE ZUMJUNGEN.
D
ANS un tems où le Patrotifme zélé, dont les
braves Belges font animés, attire fur nous les regards
de toute l'Europe, on fera charmé peut erre de con-
noître , qu'il e\ifîe loin de nous des Citoyens de
Bruxelles, à qui la valeur mérita ce glorieux titre*
On pourra voir en méme-tems , que nos Ancêtres
furent récompenfer de la manière la plus fîatteufe
des hommes courageux, qui bravèrent la mort pour
défendre notre Ville , & qui au prix de leur fang
en f^uverenr les habi*ans. Ne méritons point le re-
proche d'enfevelir dans un oubli ingrat des aclions
( 104 ) ^
dont l'éclat fut fatal à nos ennetTiis; ayons la bonne
toi de reconnoître que jadis Bruxelles dut Ton falut
à des M'I.taires, qui unifiant l'intérêt du Prince avec
celui de l'es Sujets, combattirent glorieufcment pour
iiotre Fatiie. Voici le fait.
En 170S la Ville de Bruxelles fut afliégée par
rEleâeur de Bavière. Monlîeur Pafchal en étoit
Gouverneur, & Monfieur Wrangd commandoit la
garnifon. Le fiege étant vivement preffé & la crife
très- alarmante , on tint un Confeil pour décider, ii
le chen-.in couvert de Scharbeck , qui dans ce mo-
ment étoit de la dernière importance , feroit aban-
donné:, avant de prendre une réfolucion dans des
ci'confîances ayffi critiques , on demanda l'avis du
Licutenant-^ Général Robert Murray , malade alors
«îa-ns la Ville de Bruxelles. Son avis fut digne de
<t>a courage. 11 prétendit qu'il falloit foutenir le che-
min couvert , 6sC s'en chargea lui-même quoiqu'acca-
hlé par une maladie douloureufe. Transporté dans
Fendrolt ouvert aux coups de l'ennemi , il ne ba-
lança point d'expoier Tes jours , pour défendre les
Habitants de Bruxelles du maffacre & du pillage
«doat llsetoient menacés; fécondé par la bravoure de
tes foidats , entre autre d'une partie du Régiment de
ZuTîîjungen , il refta en poffeffion du chemin cou-
-ert ; le Prince Eugène eut le tems de quitter le
i:-c2^G de Lille pour pafîer l'Eicaut à Audenarde, &
ie leTidemain l'Elecleur fut contraint de lever le
iîesje de Bruxelles. Les récompenfes fuivirent de
près le mérite. Le Général Robert Munay {*) reçut
(a) Robert Munay pafTa la Mer avec Guillaume Roi d'An-
gleterre, en qualité de Li'utenaiit-Colonel des Gardes Ecof-
ioiftr;. Peu de tems après li fr:t fait Colonel-Propriétaire d'un
l"i.è?;mtnr EcolTois au îervice cia L. H. P, I' mourut Gouverneur
rf.-i ToOTna-i , Si laiiîa nn fih héritier de fes vertus , qrà marchant
des remerdmens flatteurs de la part des Etats-Cé-
nérsux, & une Lettre de remercîment de la maia
du Roi d'Efpigne , envoyée par un courier de Bar-
celone ; diftinftion fort extraordinaire dans ce tems-
là. Le régiment de Zurvjunçen eut le droit de Bour-
gtoifïe; il porte aujourd'hui le nom de Kauniî7^-Riî~-
ttrg , & fe trouve en garnifon en Allemagne.
Par un Ciieycn de BruxdUs»
AVIS AUX BELGES.
Res ac penculum commune coegît ^ quoi
quifque foffit in re trépida Frc^fidii hi
médium conferre. Difcours de Camille
aux Ardeates. Tit, Liw Dec. i. Lib. 5,
A Majefté l'Empereur & Roi , demande aux
Provinces Belgiques qu'eUes envoient leurs Dépu-
tés à Vienne pour convenir & s'accommoder en-
femble. Convient-il que les Provinces y envoyent
leurs Députés ou non ? Voilà une réfolution terri-
ble , d'où dépend la guerre ou la paix , le ialut ou
fur les traces de fon Père, eft aujourd'hui décoré des titres
les plus honorables , & exerce la cii-rge importante de Com-
raandanr-Général des Pays-Bas Aunich-.ens. Le départ de
Leurs AlteîTes Royales & du Minl/lre, a forirjii à Sa Ma;
]ePic l'Empereur une occafion de témoigner hautement la
confiance qu'elle a mife en ce Général , en le chargeant aJ
intcrim du Gouvernement des Pays-Bas. Nous avons tout
lieu d'efpérer , que u ie Fera né Ecojfois a faiivé jadis la Ca-
pitale du Brabant par fa valciir, le h!> né Bdge faura main-
ter.ir h tran':juillité & contribuer à la félicite pubiique par
fa modératie» & par fa prudence.
( io6)
la défolation des Provinces , la vie ou la mort des
Sujets. La choie eft donc affez conféquente pour
que tout bon Citoyen , tout homme qui a quelque
expérience dans les affaires , foit autorifé à commu-
niquer au Public ce qu'il croit être utile aux cir-
conftances. Voilà franchement ce que je penfe &
les raifons fur lefquelles s'appuie ma penfée. Si je
puis être utile au Pays , je me croirai heureux pour
la vie; fi j'ai le malheur de ne pas l'être, ma vo-
lonté eft bonne, & c'eft ma récompenfe , mon avis
îie fera mal à perfonne.
Je crois donc ( fauf meilleur avis ) qu'il eft de
l'intérêt du Peuple 5c des Provinces que les Dé-
putés aillent à Vienne, en voici quatre raifons:
lo. 11 eft aufîi clair que le jour , que Sa Majefté
fe troave dans un mauvais pas, qu'elle le fent, &
qu'elle ne cherche qu'uh moyen honnête de s'en
tirer ; la preuve de ceci réfulte évidemment de fa
Lettre du 3 Juillet 1787, où Sa Majefté réduite à
des lieux communs , eft contrainte de fe rejetter fur
fes internions qu'elle foutient avoir toujours été juftes ,
bienfaifantes , équitables. Or , nos Députés prouve-
ront à Sa Majefté que fes volontés n'ont pas été
exécutées , ils diront que notre réfiftance étoit pour
demander l'exécution des volontés de Sa Majefté ;
ils ajouteront que , fi l'amour de la liberté noiis a
porté à quelque audace, quelque force dans nos
Repréfentations , ils en viennent faire (oumiflion , &
que ce n'en eft qu'une plus grande preuve de fidé-
lité & d'srtachement au Souverain &c. ht voilà le
moyen honnête que Sa Majefté attend pour fortir
du mauvais pas où elle fc trouve. C'efl peut-être
le plus court & l'unique moyen de réconciliation.
Ceux qui croient que , parce que nous ne fommes
pas rebelles , nous ne devons pas faire de foumif-
fion, ne connoiflient pas la Politique des Cours, ni
( se; )
le cœur des Rois. Qu'ils fe reflbiivjennent de ces
trois vérités qui font ar.fK anciennes que les vices
de l'homme, i ^ . Celui qui a oifenTÔ , ne pardonne
jamais le premier. 2 ^ . Les Rois n'ont jamais tort,
j^. Les Sujets doivent payer les taures des Princes.
Q^uidciuid délirant Reçues pUcluntur Archivi. Korar.
iv>. Jufqu'aujourd'hui tout ce qui a été fait peut
être imputé au Miniflere & à un abus de l'autorité
Souveraine , tout peut s'imputer au Miniftre , & ce
fera juftement là le refuge de Sa Majefté. Toutes
nos Réclamations font connues de l'Univers. L'U-
nivers eft notre Juge , l'Univers nous donne droit.
Nous pouvons juiqu'ici paroïtre n'avoir réiiilé qu'au
Miniftre qui abuloit de l'autorité du Souverain ; mais
fi nous allons refufer à Sa Majefté Tunique cbofe
qu'elle nous demande en fon propre & privé Nom,
& pour notre réconciliation avec eHe, nous man-
quons. Sa Majefté peut nous acculer d'une faute,
& toutes les Nations nous en peuvent rendre cou-
pables : d"où je conclus qu'il faut envoyer nos Dé-
putés à Vienne pour prouver à tout l'Univers que
nous avons été fournis jufqu'au dernier moment,
jufqu'à ce qu'on nous a mis le couteau fur la gor-
ge , & qu'ils nous a fallu nous relever pour ne pas
être mutilé.
3*^. Nous ne ccnnoiftbns pas S. M. Ses inten-
tions font- elles ju 1res ? Sont -elles iniques .* Con-
noît - elle les Décrets oppreftifs contre lei'quels
nous réclamons ? Lit - elle nos Repréfentations ?
Les reçoit elle telles que nous les failons ? Nos en-
nemis nous reprélentent-ils tels que nous fommes ?
Nous n'en favons rien. Comment le favoir? En lui
envoyant des gens qui ne [oient pas traîtres , des
elprits pénétrans pour la fonder, des hommes favans
pour i'inftruire , de vrais Patriotes pour nous dé-
fendre , des cœurs généreux pour faire valoir nos
( 108 ^
Droits. Il convient donc d'envoyer des Députés à
Vienne , pour que fi, S. M. eft jufle , on i'inftruife:
fi elle ne l'eft pas , on la connoifle.
4°. Les grandes affaires fe traitent toujours mieux
de près que de loin , par voix que par Lettres ,
avec les Maîtres qa'avec les Sujets ; fi S. M. eft
offenfée , nous pouvons par ce juftes raifons l'adou-
cir : dans le Miniftere à Vienne nous avons des
cœurs dévoués; fi nos Députés y vont, ces cœurs
dévoués Te joindront à nous , parleront pour nous ,
fe déclareront pour nous , &c avec nous travail-
leront tou]ours à porter l'efprit du Souverain aux
partis les plus. doux & les plus humains : fi nos Dé-
putés , méprifant l'ordre exprès de S. M. , ne s'y
rendent pas , ces cœurs dévoués fe tairont , n'ofe-
ront prendre notre parti , &C par leur filence feront
cenfés accéder à l'avis de nos ennemis , qui ne man-
queront pas de fe prévaloir de notre abfence , &
d'envenimer .les plaies dont ils nous ont couverts
jufqu'aujourd'hui. il convient donc d'envoyer nos
Députés à Vienne pour conferver les cœurs dévoués
que nous avons encore à la Cour , & fi nous n'en
avons pas, pour tâcher d'en faire. Je fais qu'on rai»
{binne tout autrement, & qu'il y a mille raifons con-
tre. Mais quel eft le meilleur parti pour l'intérêt 6c
l'honneur de la Nation?..,
Mais , dit-on : quels Députés peut-on envoyer ?
Quant à leurs qualités perfonnelles , ils ne doivent
pas feulement être exempts de crime de trahifon
envers la Patrie, mais même exempts de foupçon ;
en outre il eft néceftaire qu'ils foient tels que je les
ai dépeints dans ma 3nie. raifon. Quel doit être
leur pouvoir? Aucun; ils font donc inutiles? Non,
il faut aller jà Vienne pour obéir, & non pour être
Jugé. Ils doivent porter aux pieds du Trône nos
Conftiîutions, la Joyeufe Entrée ^ enfuile les Décrets
miniftériels
C ^09 )
miniftériels tels qu'ils font émanés pour y porter
atteinte, & enfin les réclamations de toutes les Pro-
vinces pour loutenir nos Droits. S. M. commencera
par s'emporter , crier , menacer , pour déconcerter
nos Députés, les confondre, les faire taire; ils
doivent avoir l'efprit afTez fouple pour la laifler dire,
afiez humble pour ne pas l'irriter , mais auiîi affez
préient pour ne pas s'intimider, & afTez fort, afTez
inftruit , afTez p'-éj)aré pour lui répondre.
L, A. R. ne peuvent partir avant nos Députés, ou
au moins elles doivent favoir que nos Dépurés par-
tiront : une prière générale dans toutes les Eglifes
devroit aufïî accompagner leur départ. Si mon avis
n'eft pas jugé bon , je l'efface. Mais tant pis pour
nous ; je fouhaite feulement que quelqu'un puifTc
le faire connoître à tems à ceux qui peuvent l'em-
ployer. L'oblcurité de l'Ecrivain lui refufe le pou-
voir de communiquer fon ouvrage par lui-même
au Public.
Q
***
( 110 )
LETTFvE de Meffeigneurs les Etats de
Erahant à Jojepk 11^ en reponfe à la
Lettre de Sa Majejié ^ datée du 3 Ju'il^
let ly^j (^).
SIRE,
ONS avons reçu avec le plus profond refpeft ,
avec la plus parfaite rouailffion , la Dépêche que
votre S-îCrée Majefté a cbiigné nous adrelTer le 3
de ce mois , (bus votre Seing auguile : les fenti-
lîiens que votre déclaration, Sire, a excités, n'ont
pas été ceux d'une joie aufïi pure, que pouvoir Je
préfacer notre attachement à l'obéifTance , & notre
zèle ardent pour vos intérêts. Si, d'un côté, Sire,
ie récit àes thaux pub'ics, fi nos p'aintes fur les
infractions faites à des Loix intaftes depuis iîx
cens ans , ont touché votre fenfibiliré ainfî que vo-
tre juftice , d'un autre côté, votre Majefté laiiTe en-
trevoir des doutes douloureux pour la Nation , fur
la nature des motifs qui ont dirigé l'oppofition des
Etats des Provinces Belgiques , pour le maintien des
juftes Droits fi chers à patrie.
Non , Sire , le cœur de vos Sujets n'a pas erré
un feul inftant; leur tendre confiance, leurs hom-
( a) Le projet de Réponfe que Ton a vu circuler, en date
<!u 2.4 Juillet, qui c(jmmence ainfi : Par la lettre , &c. & que
l'on volt toîii. VI. P;irt. Civ. pa^. 103 , n'a point été réalifé.
C'eft ici la véritable Réponfe des Etafs , & nous en garantif-
fons l'authenticité. Des circonihuiccs imprévues onr obligé
les Etats à la rendre publique avant l'arrivée deâ. Députés
à Vienne.
mages s'élèvent fans ceffe , Sj: dans toutes les heures
du jour , vers Vdtre Majefté.
L'impreffion opérée par le nouveau fyftême ,
n'a été ni intpirée m excitée par vos Etats ; c'ell
celle , daignez , Sire , en être convaincu , qu'ont
éprouvée & toute la Nation , & tous les individus
agités de la plus violente inquiétude ^ à la vue
d'un fyftéme , dont aucune conféquence n'a échappé
dans tous (es détails funeftes & terribles ; car c'eft
ici que tous les Citoyens , ceux tneines des derniè-
res clafles , connoiffent leurs Droits, qu'ils les ché-
riiïent , qu'ils en t'ont l'objet de leurs entretiens, de
leurs penfées , qu'ils y attachent l'idée de la fureté,
de la liberté, du bien , du falut public Se particulier.
Si dans les transfaâ;ions ordinaires , lorfqu'il n'eft
pas quedion de l'elfence de ces Droits façrés , la
Nation fe réfère aifément à (ts Reprcfentans ; dans
celle-ci tout concours , tout confentement de la
part des Etats contre le vœu général , contre le
cri de la probité , eût été non- feulement Infruftueux,
mais il eût produit des embrafemens & de longues
calamités. Eh ! plût à Dieu que vous euffiez été
témoin , Sire , des peines , des foins infinis que
tous les Ordres des Etats fe font donnés pour cal-
mer, adoucir, perfuader par-tout une multitude in-
nombrable , réclamant contre la violation de la foi
publique, oppofant la légnlité de (es^ craintes; c'eft
alors que Votre Majefté eût reconnu que fon Peu-
ple a été lauvé.
La principale inftruftion que nous donnons aux
Députés , qui avec ceux des autres Provinces font
chargés de fe mettre aux pieds du Trône , c'eft
d'affurer , Sire, Votre Majefté, de notre amour, de
nos hommages aufli fournis qu'affcftueux , de notre
zele inaltérable & ftncere pour votre fervice ; de
demander, de recevoir de Votre M^'efté rexpreftion
O ^
( îïi )
précieufe de votre bonté , de votre tcndrelTe pa-
ternelle,
C'eft de votre bonté que nous attendons , Sire ,
que vous diffiperex les maux qu'entretient encore la
terreur du Ivftéme ; déjà la piété fir.cere ^ l'attache-
ment au culte , à cette Religion qui eft le plus ferme
appui du Trône , font malheureufement trop affoi-
blis par une fuite foutenue d'Ordonnances fur la
Difcipline Ecclé/iaftique , par le peu de relpeft pour
les anciennes maximes reilgicufes confacrées dans
l'opinion des Peuples ; déjà les propriétés font avi-
lies dans les échanges , le commerce fe détourne , 5c
ce qui en refîe eft languiiTant ; le numéraire devient
rare à niefure qu'il pafte à l'étranger , les fortunes
fe convertifTent dans les porte- feui Iles ; l'Artifan , le-
Laboureur font prêts à porter ailleurs leurs bras ÔC
leur induftrie , fûrs de jouir du Gouvernement mo-
déré , dont tous les climats voifins offrent les at-
traits ; tandis que les troubles qui défoîent la Hol-
lande eulTent amené ici une quantité étonnante de
Sujets &: de capitaux utiles , fans l'étrange fatalité
du fyftême.
Daignez , Sire , arrêter la fource de fi grands
malheurs; il fuffira (& c'eft le moyen aufli jufte
qu'unique) que Votre Majefté déclare que les Conf-
titutions , Droits & Privilèges des Province*; Belgi-
ques en général & en particulier , feront rc'igieufe-
inent obfervés , qu'en conféquence les deux Diplô-
mes il évidemment furpris à votre religion , Sire ,
viennent à cefîer , que toutes les infraélions faites
ultérieurement à ces Conftitutions , Droits & Privi-
lèges, feiont redreffées le plutôt poflible.
Depuis combien d^ rems , par combien de Re-
montrances humbles & (oumifes nous a -ons récla-
mé, Si-e, contre ces infraâions , expofé & détaillé
nos plaintes !
(in)
Combien de fols vos fidèles Efats , Sire , fe font
plaints de ce qu'on ne nommoit point aux Abbayes
vacantes, malgré les titres & les concordats les plus
authentiques; de ce que fur le prélude d'un Edit
nul & captieux pour la fuppreffion des Couvens ar-
bitrairement prétendus inutiles , on vouloir établir
la poflîbilité d'une fuppreffion totale ou partielle des
EtabliiTemens Eccléfiaftiques ou pieux quelconques,
autrement qu'en gardant l'ordre de Droit ; que par
-un fyftême fi oppofé au Droit de la propriété , la
Nation devoit tôt ou tard voir engloutir êc dévo-
rer fa plus pure fubfiance.
Avec quelles inftances nous avons fapplié , Sire ,
comme nous fiipplions encore très-humblement Vo-
tre Majefté , de recirer le Diplôme fur l'EtablifTement
des nouveaux Tribunaux , par la raifon feule qu'il
efl: deftruftif de nos Droits les plus évidens & les
plus précieux ; nous ne dirons donc pas que ces
Tribunaux com.binés avec \a. nouvelle manière de
plaider, ne îaifToient plus qu'un f^întôm.e de Juftice ,
une manière de juger prévôtale , imp- flîble à pra-
tiquer dans un Pays où les propriétés ibnt infiniment
partagées , où le3 conteftations judiciaires doivent
être néceifairement fréquentes , ibuvent de légère
importance , & devant être afloupies fur les litux ,
fouvent d'un intérêt fi grand , qu'elles réveillent
toute l'attention publique : c'eft alors que les par-
ties , que la Nation entière , ont le droit d'exiger
qu'on écarte tout voile qui pourroit cacher la mar-
che fecrete des Délibérations de la Juflice ; cette
marche peut être lente , mais fur-tout elle doit
être fûre.
Dans la nouvelle procédure , Sire , tout alloit fe
palfer fous le plus impénétrable fecret , les Juges ,
d'autant plus à redou cr , n'étoient qu'en tiès-peiif
( ^14 )
nombre , le Préndenc abiolu , le Rapporteur încon-
nu ; il ne s'agiiToit pas de juger bien, mais de juger
vite : comme fi la Nation devolt être toujours dans
l'état de guerre , fous la Loi martiale.
Les Magiflrats perdoient toute idée de l'honneur,
en proie à des délations lourdes , mais ordonnées par
la Loi , ne recevant plus que la vile impreflîon de
la crainte ; d'ailleurs ambulatoires & deftituables à
volonté , ils re/Tembloient plutôt aux Centurions
d'une troupe de guerre qu'aux Miniftres auguftes de
la Juftlce.
Mais , Sire , cette Juflice fi défigurée , fi mécon-
noilfable, étoit encore reléguée aux objets contentieux
entre pa;^îies privées; la partie publique, les Inten-
dans , les Commifiaires , les Délégués ne dévoient
garder aucune mefure , ils étoient au-defius des Tri-
bunaux de Jufiice abarardis ; ils commandoient &c ils
dévoient erre obéis ; la force exécutrice & la puif-
fance îégiflative réfidoient dans un leul Conlell , &c
ce Conîéil dans une feule Perfonne ; ainfi l'homme
réparé de l'homme , l'individu ifolé , fans fecours , fans
appui, fans voifiuage, étoient toujours trembians de-
vant l'Intendance & (es Agens ; les ordres partolent
d'un pouvoir fi monftrueufement réuni , & venoient
frapper tour à-tour les Citoyens comme un coup de
toudre ; ce n'étoit plus une Société civile , c'étoient
des hom.mes , ou plutôt des cadavres livrés à la ter-
reur, ne marchant plus que parmi les craintes &c à
travers les ombres de la mort.
Sous un tel régime , Sire, vos Provinces Belgiqnes
eufient été réduites bientôt en un vafte déiért ; l'in-
duftrie, l'opulence eufient fui loin d'un climat fune{}e,
où rhommc n'eût pu compter ni fur le fruit de (zs
îravaux , ni fur la liberté de ion individu.
Ici , Sire , les ho:nmes ne doivent , ne peuvent être
C ^15 )
bien gouvernés que fur les lieux , que par le moyen
des corporations; il faut que les Loix , que les Or-
dres quelconques paffent par cette épreuve utile , pour
inlpirer la confiaHce : ce n'eft qu'alors que les fujets
obéiiïent avec alégrelTe , parce que l'ip.liuence de ces
corporations ell infiniment plus douce , plus l'aî^e , plus
réfléchie, plus fuivie ; parce qu'enfin c'eft le droit de
la patrie, judifié- par tant de Siècles de profpérité Sc
-d'opulence.
Jugez donc , Sire , à quel point on a furpris votre
bonté & votre religion , comme fi l'art , le grand
art de gouverner étoit tout-à-coup devenu facile ou
nouveau ; comme (i les grands exemples fuffent inu-
tiles à la fagelTe, &: que Tetprit humain dût fe ré-
plier fur fes premières notions, & rejeter toutes celles
dont la fphere de fes connoiffances s'efi: accrue de-
puis le commencement des Empires ; jugez , Sire ,
jufqu'où conduifent l'ignorance & la foif aveugle de
dominer aux dépens des intérêts &: de la gloire du
Maître.
Sire , nous l'avons déjà dit , s'il y a des abus à
corriger, faut- il qu'on ait ^fuggéré à Votre Majefté ,
le moyen même qui les confacre , qui de plus en plus
les augmente invinciblement &C à jamais ; oui rédiiife
en folitude des Provinces floriffantes & fertiles ; d ail-
leurs , les abus ne tiennent par aucun endroit à Tob-
fervance de nos Privileg^is ni de nos Loix , ils ne fc
font multipliés qu'à mefure qu'on les a néglgés , ou
plutôt ignorés. Si l'on avoit fait obferver des Ordon-
nances admirables fur la procédure , (i l'on avoit mis
à la tête des Tribunaux , des perfonnes uniquenient
animées , confumées du zèle de la Juftice, capables
des fondions mâles & vigoureufes qu'elle exige , fi
en cela la faveur avoit moins exercé fon influence ,
Votre Majeflé eût vu évanouir les plaintes des plai-
deurs.
G 4
( ii6)
Daignez donc, Sire, daignez hâter les confola-
tions de votre peuple ; que Votre Majefté veuille ac-
corder une déclaration gracieufè , iur rinrégrité de nos
Loix fondamentales , (ur la ceflation ^ce qui eft une
Alite néceffaire ) des intraftions qu'elle^ ont ;oufîertes ,
fur- tout par les deux Diplômes du premier Janvier
de cette année.
Veuillez encore. Sire , fi les hauts foins de votre
Monarchie ne permettent pas à Votre Majcfîé de ve-
nir parmi nous ^ munir Leurs Alteffes Roy^fles, nos
Sérénifîimes Gouverneurs-Généraux, des pleins-pou-
voirs, pour terminer avec les Etats dans différentes
Provinces, les objets ultérieurs, qui tiennent à nos
Conftituîions ; fur lefqueîs la nature de notre mandat
ne nous permet point d'autori'ér en rien les Dé-
putés qui portent nos hommages au Tiône de Votre
Majefté; mais bien plutôt, venez, Sire, rempliffez
votre promelTe auffi douce qu'augufte de vous trouver
encore au milieu de vos Sujets , au milieu de vos
Enfans; venez recueillir des bénédiftioni, fans nombre,
ibyez le témoin de l'émotion d'un peuple fenfible à la
vue de fon Souverain, de fon Père, les cœurs vont
s'élancer fur votre pafTage, (k vous verrez vos Sujets ,
Sire, pleurer à vos genoux des larmes de joie & de
tendrefle; c'eft alors, Sue, que Votre Majefté verra
s'appbnir devant elle , fsns peine , les moyens d'aug-
menter , de perpéfuer la félicité de vos Sujets, ôc
que vous ferez inftruit, Sire, fur les lieux , par l'é-
vidence même des chofes.
Puifte Votre Sacrée Majefté recevoir l'offrande pure
de nos cœurs, de nos biens, de notre fang; puifte
l'Etre-Supréme, vous combler de tous les dons , qu'il
diïpenfe à fon gré; puifte votre Nom , Sire, refter à
jamais placé à côté de l'immortalité , grand dans la
paix 6>c dans la guerre.
Nous fommines avec un très - profond rerpefl: &
toute la foumifiion pofTible ,
SIRE,
De votre facrée Majeflé Impériale &
Royale Apoftolique ,
Les très humbles , très-obéif-
fans & très - fidèles fervi-
teurs, Sujets & Vaflaux, les
Prélats , Nobles & Dépu-
tés des Chef- Villes, repré-
fetitant les Etats de votre
Pays & Duché de Brabant.
Par Ordonnance , DE C O C K.
De notre AjJivikUe. oénèraLe tenue
à BtuxcUes U 2^ JuiUet ^ySy,
Noms & qualités des Meffieiirs de diffé-
rentes Provinces qui ont comparu à VAf-
femblèe générale des Etats de Brabant
en Juillet iJ^J.
-BRABANT
Etat E celé fia Clique.
Monfeigneur l'Evêque d'Anvers.
Mr. le Rév, Abbé de \ llerbeeck. ■> j^, , ^^ ,
Mr. le Rév. Abbé de Griinberghe. 3
Etat Noble.
Mr. le Comte de Spangen.
Mr. le Baron de Gentinnes. . «7 t^i i j'-, .
.« , n i->vx X Députés AckL^ls^
Mr. le Baron d nove J, •^
( IIS)
Tiers - Etat.
Louvain.
Mr. de Beeckman, Bourgmeftre.
Mr. Reniers , Confeiller-Penfionnaire.
Bruxelles.
Mr. de Locquenghien , Bourgmeftre.
Mr. de Vieufart , premier Echevin.
Mr. Vanlchelle, Confellier-Penfionnaire.
Anvers.
Mr..' Délia Faille, Bourgmeftre.
L I M B O U R G.
Eiat Eccléjîajlique.
Mr. le Révérend Abbé de Rolduc.
Etat Noble.
Mr. le Baron de Loe Imfteradt , Député ordmaire.
Mr. le Comte de Hoen Neuf-Château.
Tiers- Etat.
Mr. Dodemonti
Mr. le Gros, Confeiller-Penfionnaire des Etats.
Mr.de Limpens, Confeiller-Penfionnaire externe.
LUXEMBOURG.
Etat Noble.
Mr. le Comte de Berlo Suys , Député ordinaire, &
Préiident de la Députation extraordinaire.
Etat EccUjîaJiique.
Mr. le Révérend Abbé d'Echternach , Député or-
dinaire.
Etat Noble.
Mr. le Baron de la Barre.
Tiers-Etat.
Mr. Foncin , Mayeur Royal à Vlrton.
Mr. Didier, Echevin d'Àrlon, Député ordinaire.
Mr. Roiîignon , Confeilier-Penfionnaire des Etats.
( 119
G U E L D R E.
Mr. Syben , Confeiller Penfionnaire des Etats.
FLANDRE.
Mr. le Comte d'Affenede, pour la Châtellenie du
Vieux-Bourg.
Mr. d'Afper Haut-Pointre , de la Châtellenie d'Au-
denarde.
Mr. Defmet , Bailli du Pays de Gaveren.
Mr. Raepfaet , Greffier de la Châtellenie d'Audenardc.
H A Y N A U T.
Etat EccUfiajlique.
Mr. le Révérend Abbé de St. Ghiflain.
Mr. Recq , Chanoine de Leuze.
Etat Noble.
Mr. le Marquis Du Chafteler Moulbais , Député
aftue!.
Mr. le Chevalier Colins- de-Ham.
Tiers -Etat,
Mr. Auquier, Echevin de la Ville de Mon*;.
Mr. de Hamalt , Confeiller-Penfïonnaire de Mens.
N A M U R.
Etat Ecccéfiajîlque.
Mr. le Révérend Abbé de Waulfort , Député a6luel.
Etat NobU.
Mr. le Baron de Neverlé , Seigneur de Beaulet ,
Député aéluel.
/ Tiers - Etat.
Mr. Limmelette , Echevin de Namur.
Mr. Petit-Jean , Confeiller-Penfionnairc & Greffier
i.t% Etats.
1 O U R N A I.
Mr. Vander Gracht , Mayeur.
Mr. de la Cazerle , Juré,
Mr. Herfecap , Confeliler-Penfionnaire.
TOURNESIS.
Mr. le Comte de Vanderdilfr, Doyen du Chapitre.
Mr. Defourdeau , de l'Etat Noble.
Mr. Macau , Confeiller Penfionnaire des Etats.
M A L I N E S.
Mr. le Baron de Snoy , Commune-Maître.
Mr. de Brouwer, premier Echevln.
Mr. de Quertemont, Confeiller-Penfionnaire.
Mr. de Cock , Secrétaire de la Ville.
Mr. d'Ancré, Député du Confeil-Large.
Mr. Van Kiel , Député du Confcil- Large.
W ES TF L A N D R E.
Mr. le Révérend Abbé de "Wormezeele.
Mr. Aernout , Chanoine de la Cathédrale d'Ypres.
Mr. Michel , Doyen de Ste. Walburge à Furnes.
Mr. Vanderftichele de Maubus , premier Echevln
d'Ipres.
Mr. Delimon , Echevln de la Salle & Châtellenie
d'Ypres.
Mr. i. F. Marrannes , premier Confeiller-Penfionnaire
à Furnes.
DÉPUTÉS POUR VIENNE.
B R A B A N T.
Du Clergé.
Mr. le Rjévérend Abbé de Grimberghe.
( 111 )
De l'Etat Noble,
Mr. le Comte de Limmingen.
Du Tiers -Eue,
Mr. Beeckmann de Vieufart.
DÉPUTÉS DE Flandres.
Du Clergé.
Mr. de Grave , Chantre de la Cathédrale.
De l'Etat Noble,
Mr. le Comte de Vilain XIV.
Du Tiers- Etat.
Mr. le Comte d'Affenede , de la Châtellenîe du
Vieux - Bourg.
Mr. Rohaert , Penfionnaire de Gand.
Députés du Hainaut.
Du Clergé,
Mr. l'Abbé de St. Ghiflain.
De rEtae Noble.
Mr. Le Chevalier Colins-de-Ham.
Du Tiers - Etat.
Mr. Petit , Avocat de la Ville de Mons.
DÉPUTÉS DE Luxembourg.
Mr. le Révérend Abbé d'Echternach.
Mr. de Pfortzenheim , de TErat Noble.
Mr. Didier , Echevin d'Arion , de la part du Tiers-
Etat.
Mr. Roflîgno», Confeiller-Penfionnalre des Etats,
DÉPUTÉS DE MaLINES.
Mr. de Quertemont , Confeiller-Penfionnaire.
Mr. le Baron de Snoy , Commune-Maître.
Mr. d'Ancré , Député du Confeil-Large.
( 2.22 )
DÉPUTÉS DE Tournât,
Mr. Vander Gracht , Mayeur.
Mr. d'Angys.
Mr. Delvigne.
DÉPUTES DU TOURNESIS.
Mr. le Chanoine d'Erneu.
Mr. Sonrdeau.
Mr. Vanderaeden.
DÉPUTÉS DE LA ^^ E S T-F L A N D R E.
Mr. Félix- Jean -Ignace Struye , Abbé de Worme-
zeele.
Mr. Vandeiftichele , Echevin d'Ypres.
Mr. Delimont.
DÉPUTÉS DE NaMUR.
Mr. Grégoire Thibault , Abbé de "Wanlfort , Député
a<ftue!.
Mr. le Baron Vande Straat.
Mr. de la Motte de Montigni , Echevin.
DÉPUTÉS DE LiMBOURG,
Mr. le Révérend Abbé de Rolduc.
Mr. le Comte de Hoen Neu-Château.
Mr. Dodemont, de la part du Tiers-Etat.
G U E L U R E.
S'eft joint à ceux du Brabant.
À:>
( 213 )
Précis de la Copie du Protocole tenu
à r Hôtel de -Ville de Bruxelles , le i8
Juillet 17S7 , dans rjjfeniblée des Sei-
gneurs Députés des Provinces de Lim-
bourgs de Luxembourg^ de Flandre ^ de
Hainaut ^ de Namur^ de Tournay ^ du
Tourné fis , 6" de Malines ; conféquem-
ment de toutes les Provinces des Pays-
Bas Autrichiens , à V exception de celle
de Gueldre^ laquelle a déclaré par mil-
five quelle fe conformerait à la Délibé-
ration des autres Provinces,
I
L a été délibéré qu'on déféreroit à la Lettre de
Sa Majefté l'Empereur , datée de "Vienne le 3 de Juil-
let , & qu'on enverroit incelTainment des Députés
à Vienne.
Ceux qui feront députés de la part du Brabant ,
doivent faire aux Etats de cette Province le ferment
ci delTous , du 30 Décembre 17» 5.
EXTRAIT du Regifn des Réfoludons de Mef-
feioneurs Us Trois-Etats de Brabant , & de leurs
Députéi , où l'on trouve ce qui fuit :
» Je promets & jure que dans ma Commi£îon &
Députation à la Cour de Vienne , auprès de Sa
Ma/ejîé Impériale & Royale , fimployerai tout U
:^ele & toute la dilisence pofjîble pour procurer U
hien-itre de la Province de Brabant ; & que pendant
sgut U tems de cette Députation ^ Commiffion , ji
( ^M )
ne ferai ni direclemem ni indirectement aucune de-
mande , ne formerai nulle prétentioij , ne pourjuivrai
nulle affaire concernant les intérêts particuliers , de
moi , de ma famille , ou de mes amis , de quelque
chef , ou fous quelque prétexte que ce puiffe être,
Ainfi Dieu m'aide , &c. «
Note pour les diferens Etats des Provinces des
Pays-Bas.
ZjOiî Excellence le Gouverneur & Capitaine- Gé-
néral croît ne pouvoir pas diifimuler aux Etaf; que
Sa Majefté n'a point été fatisfaite de la Déjéche
qui leur a été adreflee ie i8 Juil'et, en ce qu'elle
porte fur des motifs qui annonçoient de la part de
la multitude des impreffions contraires à la confiance
que Sa M^ijefté attendoit de la part de toutes les
clafies de Tes Sujets» tandis que d*ai!!eursen pouvant
faire naître des idées contraires à la Dignité Souve-
raine , elles croifoient des meîurcf que pouvoient de-
mander d'autres circonftances publiques ou particu-
lières , qui feroient furvenues dan« l'intervalle.
Sa Majefté s'attend que ces circonf^inces exigeant
à préfent une concentration des troupes , les Etats
ainfi que la Nation n'en prendront point une défiance
déplacée, & que la confiance générale, moins encore
le calme , n'en feront pas altérés.
Sa Majcfté a expreflTément autorifé Son Excellence
à vous aflfurer que cette concentration ou difloca-
tion des troupes, n'a pour objet ni de porter attemte
à la Conftitution du Pays , ni d'entraîner des démar-
ches qui y feroient contraires.
Les Etats & toute la Nation fentiront fans doute
que ne ^ifant rien de contraire à la Conditution
par
( iM )
pnj cette concentration , toute inquiétude ou dé-
fîance à ce fujet , & plus encore les embarras , s'il
en ("urvenoit à cette occaiion . fcroient juftemenc
douter Sa Majefté de la vérité des affinions que les
Etats ont faites de leur fidélité & de leur attache-
ment, tandis qu'elle a déjà annoncé, comme elle
l'annonce encore par fa lettre du oi Juillet, l'in-
tention de traiter paternellenienî avec eux fur les
objets qui intérefTent le bien général , conformémenc
à la Dépêche adreffée aux Etats de Brabant Id
3 Juillet; & d'autant plus qva ce feroir réelle-
mePit un icandale pour toute l't,urope, fi tiiême après
les bontés que Sa Majeilé a déjà annoncées , fes
Sujets pouvoient feulement avoir l'idée de tenir dans
une entière inaftion fes troupes, comme fi elles
étoient au fervice de quelque Grince étranger & en
fimple quartier de pafi;-:2c.
La conduite de la Nation à l'égard de la con-
centration dont il s'agit , étant d'ailleurs regardée
par Sa Majefté comme la pierre de touche de la
confiance & de la fidélité, Sa Majefié a en même
tems fait connoître à ion Excellence, que, felort
que la conduite qu'e'le s'affure que la Nation tiendra,
lui donnera plein appaifement, les troupes Alteman"
des défignées pour les Fays-Bas ne dépifferont point
les frontières de fes Etats héréditaire?, excepté le
régiment de Bender , que Sa Majc^fté juge pour des
ralfons particulières , de fervice nécefT.iite à Luxetn-
bourg. Fait à Bruxelles, le 5 Août ly^j. Sh^né le
Comte De Murray.
Pour Copie y De Cock,
( zi6 )
Requête des 'Syndics des Nations de Bruxelles ,
à Meffci^neurs les Etats en leur Ajj^mblit - Gc^
néraU»
JLl
fES Syndics des Nations cle csxxe Ville , conf-
iiiues comme par leurs Remontrances précéden-
tes , fc trouvent forcés de prévenir vos Seigneuries
Révérendlffimes & IlUiftrifiîmes , qu'ils ne rencon-
trent dans le Peuple aucun fentiment d'infidélité
ou de déloyauté à l'égard ou vis-à-vis de Sa Ma-
jefté : le fujet des alarmes & de confternation , donr
le Peuple généralement eft agité, eft, qu'il expé-
rimente continuellement que des gens mal- intention-
nés fomentent difFérens fujets de craintes & occa-
sions de défiance ; ils s'avancent même de faire
ientir , que .les portions àes troupes ne font pas
un cordon qu'elles vont faire , mais font tellement
dirigées , que les Villes principales du Brahant ,
fur-tout cette Ville, feront bloquées.
Ils débitent en outre , que la dépoiition des troupes
étant faite , il arrivera ici au Pays , encore un corps
de cinquante mille hommes ; les Remontrans igno-
rent ce qu'il en efl, mais on rapporte néanmoins,
que le Gouvernement eft occupé de traiter avec
difFérens Entreprenneurs, relativement aux vivres 6c
munitions nécefTaires à ce fujet.
Ces objets divulgés par les mal-intentionnés, ont
jeté des alarmes dans le plus grand nombre du
F'eupla , non-feulement des Villes principales de
cette Province , mais généralement des Villages &
Provinces voifines ; que tes Remontrans craignent
avec ràiion , que le mouvement des troupes occa-
fionnera une émotion générale ; ils font déjà aiïtt-
( ii7 )
fés , que grand nombre des perfonnes bien moyen*
nées »au premier mouvement des Troupes quitteront à.
jamais les Provinces ; taudis cependant qu'ils font in-
tormés , que fi le calme renaifioit dans ce Pays,
plufieurs familles Hollaftdoifes , dtgoûtées des trou-
bles qui agitent leur patrie , ne manqueroient pas
de venir s'établir chez nous.
Le devoir des remontrans les oblige d'informer
vos Seigneuries Révérendifiîmes & Illuilriffimes, de
ces craintes & de ces alarmes du Peuple , afin
qu'elles les faiTent parvenir à la connoifiance de Ton
Excellence le Gouverneur & Capitaine- Général , pour
qu'elle daigne prendre des melures convenables pour
éviter la cataftrophe funefte dont ces Provinces font
menacées.
C'eft l'objet de leur très-humble recours vers
vos Seigneuries Kévérendiflîmes & Uiui^riflimes.
Les fuppliant très-humblement de vouloir join-
dre leurs inftances à celles du Peuple : plus bas étoit,
c'eft la grâce ; étoient (ignés , A, Vandcr Stricht ,
Jean Jofeph Sagermans , H. De Puyt , P, J. C. Bceck-
man , E. Adan , J. B. Van Lack , Jf C. Schrucrs ,
G. Ferfteylcn loco Van Campcnhout abfent , & J,
B. Vandcn Sande,
Bruxelles, 7 Août 1787.
Relation de ce qui sejl pajfè à f Audience
de Son Excellence le Comte de MurraY , du 7
Août 17^7.
i J ES Seigneurs de l'AfTemblée- Générale des Trois-
ttats de Brabant , s'étant rendus à l'Audience de
Son Excellence , lui ont déclaré qu'ils avoient prévu
6c fait connoître par leur dernière repréfentaiion ,
P 2
( 12? )
i^ne la tranfpofition ou qiflocation des Troupes pro-»
duiroit ui» mauvais effet (ur l'efprit da Peuple; qu'ef-
feéliveinent les Syndics des Nations de Bruxelles ,
tant pouf eux que coiTinie conftitués par les Mem*
bres des àeux autres Chefi-Vi'les , venoient de pré-
fenter à l'inflanr iriême à l'Afrernblée-Générale êç$
Seigneurs Etats de Brabanr , une Requête, par la-
quelle ils JTianireftoieiit d'une manière énergique ,
lei grandes alarmes du l'euple, caulées par la ré-
foluîion de déplacer les troiipes , en requérant qu'il
y fût pourvu de façon à faire renaître de fuite la
confiance propre à éloigner tous les événemens fâ-
cheux»
Cette Requête fut lue à S Fx. & leurs Seigneu-
ries iniifterent le plus fortesnetît & le plus vivement
poffible fur la nécfrffité d'y pourvoir par un moyen
efficace- Après que S. Ex. eut afluré Leurs Seigneu-
ries qu'elle. co!»rentlroit à tout ce qui feroit en
fon pouvoir , fans furpafier les ordres exprès de
r^mpereur, elle dit que, pour donner une même
preuve de confi.mce aux Syndics de Bruxelles &c
Conftitués dé Louvain , elle défiroit également de
leur parler, fur quoi quelques Seigneurs fortirent ,
afin d'appeller îefdits Syndics (>: Conftitués à l'Au-
dience de S. Ex. Fendant cet intervalle, Leurs Sei-
gneuries prièrent encore très-inffamment Son Excel-
lence , de faire réellement tout ce qui étoit e!» Ton
pouvoir, afin d'affermir la confiance du Peuple.
Les Syndics de Bruxelles, ainfi que les Commif»
faites ,de Louvain étant arrivés à l'Audience , dé-
clarèrent ouvertement à S. Ex. les fujets de défiance
qyie la Nation croyoii avoir dans la diiîocation des
Troupes,
Son txce'lence écouta le tout avec coi. plaifance
6c cifFabiliié, Si fit faire le6hire de- la Leirie de Sa
Majtiîé l'Empereur j contenant en original ks ordres
( 12.0 )
pour le déplacement des Troupes àsns les circon/-
îances publiques qui étoient furvenues , & alTurant
que ce déplacement De le tailoit pas pour porter di-
recleir.ent ou indiredlement quelques préjudices aux
Loiv foîidamentales du Pays , qu'au concraire le dé-
placement devoit s'effccluer en plein jour , & après
qu'il en eut été donné amicalement part, quelques
jours auparavant, aux Etats reipeflits.
Cette lecture iut fr4ite en préience de M. le Vice-
Préfident Crumpipen , & de M. le Comedier Cor-
net de Grez.
S. Ex. ailura alors à tous les Membres de l'Etat
qui étorent préicns , que les Troupes qui fcro'ent
déplacées, ne ferviroient ni ne feroinr en auccfne
3:ianiere employées à caufer à qui que ce Yoit le
moindre trouble ou le moindre doinm^ge , non
plus qu'à aucun projet de porter en quelque façon
que ce puide être la moindre arreinte aux Loix eonf-
titutionnelles du Pays; que Sa Majefté déclarcit.
elle-même dans la Lettre , qu'aucune des Troupes
Allemandes ne deicendroi: vers ces Pays, (î à l'oc-
cafion de ce déplacement néceffaire de : Troupes ,
on dcnnoir pleine fati.'.faction à Sa Majefté , ainfi
qu'on étoii obligé 4e le taire envers Ton Souverain
légifime. ■ • - ^ „ .
Qu'entre- tems la bourgeoifïe pouvoit continuer de
veiller à i'obîervation de la police iur le pied qu'elle
le faiToit actuellement.
S. Ex. a dit de plus, que Sa Majefîé l'ayant laiffé
à, fa difpofition , il n'étoit pas queftion de p'acer
des Troupes à Louvain , mais bien peut-être à Sa-
venthem, à. Erps ou dans Tes environs.
Qu'il n'entroit pas non plus dans la difpofition.
de S. Ex. de placer des Troupes à Bruxelles , mais
qu'elles camperoient ou ferolent cantonnées au-deiTus
de Schaerbeeck ou vers cqs endreits.
P ^,
( 130 )
De tout quoi S. Ex. a donné fa parole d'hon-
neur , requérant moyennant ce , que chacun voulût
s'entendre & coopérer à la confervation du bon
ordre &: de l'obéiflance dxie à S'a Majefté; ce qui
fur ainfi promis par tous les Membres, en remer-
ciant S, Ex. de l'Audience qu'elle avoit accordée.
£toit Jigné DE C o c K,
REPRÉSENT A J IONS des Etats
de Flandre , a Sa Majefté V Empereur
& Roi^ du zy Juillet 1787.
S I R É,
S
I parmi les alTurances que Votre Majefié nous'
a daigné donner en dernier lieu , qu'elle confervera
nos Droits , Conftitutions , Us & Coutumes , là'
Nation n'avoit pas cru s'appercevoir que l'on a'
infpiré à Votre Majefté des foupçons injuftes fur les
fentimens c\çs Provinces Beigiques ; il eft fur que
déjà le calme le plus profond regneroit parmi le
Peuple. Sa confiance & fon efpoir cependant repofent
encore fur la Juftice de Votre Majefté , 5^ plût à
Dieu , que les manèges fecrets & les faux rapports
ne l'euftent jamais arrêtée ou furprife. Nous croyons
préfentement , Sire , afiez connoître nos ennemis ,
ou plutôt ceux de votre gloire ; mais de tous les
traits, qu'ils nous ont lancés, celui qui nous eft le
plus fenfible , & qui nous a d'autant plus b!efte ,
qu'il a été caché £c non prévu , c'eft le doute qu'ils
ont trouvé moyen de jetter fur notre attachement
inviolable à votre Augufte Perfonnc , & fur noire
Loyauté ; auffi dès que nous en avons été informé ,
Sire , ( & ce n'a été que prefque dans le jour même
( i3i )
©ù nous délibérâmes fur l'objet de la Députatiort
qui devoir fe rendre au pied du Trône ) nous n'avons
pas héfité un moment , à l'exemple des autres Pro-
vinces Be'giques , de charger nos Députés principa-
lement d'offrir à Votre Majcfté , nos trcs-finceres
hommages , & les afTurances les plus pofirivts Se les
moins équivoques de notre fidélité 6c de celle du
Peuple flamand.
Etonnés encore , Sire , en ce moment de nous
trouver dans le cas de devoir détruire des doutes 5î
des impreiîîons {îiilftres, qui n'ont jamais tlétri nos
âmes, nous craignons de ne pas en dire aflfez , lors
même que nous proreftons devant Dieu , devant
Votre Majeflé , fk devant toute la terre , que nous
fommes encore prêts à verfer notre fang , & à (a-
crifier nos biens pour votre gloire.
Sire, vos Flamands vous font fidèles, &c vous Is
feront toujours , l'oppofiîion qu'ils forment contre le
nouveau Tyftéme que l'on fe propofoit d'introduire
dans le Pays Bas , n'eft pas une marque de déloyauté ,
comme un Roi n'e(^ jamais plus Grand , que lorsqu'il
défère aux juftes réclamations de Ion Peuple; de
même la fidélité des Sujets ne brille jamais dans un
plus beau jour , que lorfqu'ils ont le courage d'an-
noncer aux Rois la vérité, qu'ils aiment tous, mais
qui doit franchir des écuaiis infinis, avant de par-
venir au Trône.
Le motif donc , Sire , de nos réclamations dérive
d'une foUrce pure; ce font vos intérêts, Sire, ce
font ceux de votre Peuple, qui noas ont dirigés;
nous vivons fous ces mêmes Loix cimentées par le
ferment du Monarque , (ous lelquelles nos Pères ont
vécu heureux : il y a eu peu de guerres en Europe ,
dont les Pays-Bas n'aient été le berceau ou le théâtre;'
mais à peine dévaflés par les fléaux , qui accom-
ptigncnt conftammeiit Içs armées , l'on a vu ces
P4
( ^r- >
Prrivinces reprendre immédlarement !eur antique pro-
priété , & ce n'eft qu'à la bonté de nos Loix , que
nous devons ces avantages , dont un Pavs iouinis
à un Gouvernement moins doux ne peut pas le
vanter.
Le nouveau fydéme , Sire , les renverfoi: toutes ,
au lieu de (oumettre les opérations du pouvoir lé-
giflatif & exécutif à l'examen refléchi des Maglftrat?
& des Corporations. Ces deux pouvoirs auffi inté-
telTans pour la (Cireté du Monarque que pour le
bien-être des Peuples , étoient concentrés dans deux
perfonnes ; le Minière, qui dominoit fur le Confeil
Koyal , & rintendr^nt, qui en exécutoit aufïi aveu-
glément qu'arbitrairement les ordres.
Une telle organifation \-)t^M être convenable dans
un Pays , où les Peuples gémiifent encore fous une
efpece de joug de rari{locr;jtie féodale ; c'eft un
pouvoir intermédiaire entre le Seigneur & le Vaifal ^
où pUitôt l'efclave , peut-être eftce même un bienfait.
Mais dans des Provinces civilifées depuis tant de
fiec-es , où le Peuple eft induftrieux , laborieux ,
commerçant , où des Corporations établies par la
CcnAitutiOu pour éclairer le Gouvernement fur (es
vrais intérêts , & pour garder les Droits du Peuple ,
empêchent conftamment qu'aucun Sujet ne Toit traité
autrement que par Juftice & Sentence, devant fou
Juge naturel ; toute Loi , qui attribue le pouvoir
exécutif à un feul , efl une Loi qui doit anéantir le
bonheur des Peuples 5c entraîner avec elle la ruine
de l'Etat.
C'eft ce qui feroit arrivé infailliblement , Sire ,
dans ces Provinces , où , malgré ce que Ton en ait
pu dire à Votre Majefté , ch.ique individu connolt
fes Droits publics & municipaux , il s'en repofe à
îa vérité quant à la Direâiion &: l'Adminiliration fur
à^i Corporations forniéçs de Concitoyens , parte
que ceux-ci font guidés par les mérries intérêt'; , Se
de pins liés par un (eraient à \à Patrie. De- là
vienr auffi, que la perfuanon a plus d'empire fur ce
Peuple que le commaiideîrient , & que lorfqu'il
fuir la Loi , il la luit moins parce qvt'elle eft Loi ,
que parce qu'il la confidere pour un effet du zèle
de Tes Repréientans & de la bonté de les Maîtres;
mais lorlque la ' Conftitution eft ouvertement atta-
quée, & que le Peuple i"e ruine, ce n'eft pas, { com-
me l'on a peut-être infinué à Votre Majefté ) à
des inftigations de c^^s Corporarions , qu'il faut at-
tribuer cette etTerveicence , c'eft uniquement parce
que le Peuple fent que la Baie de Ion bonheur eft
ébranlée , il en juqe par lui-même.
Ces momens de fermentation ont fourni eux-
mêmes la preuve la plus complète de la fageiîe de
la Conftitution , qui a placé le pouvoir dans des
compagnies ; fi un feul en .eût été revoru , le Pavs
eut été perdu , Sire ; comme le dé(ei';>oir à la vue
du nouveau fvftéme étoit à fon c«mb!e , les uns
euftent égorgé les autres , tous les fléaux à la fois
eiiHent exercé leuî^s rav?ges ; les Corporations , la
uiodération & la Ugeïïe de Leurs Altelles Royales
ont tout (auvé.
Et certes , fi les Pays de l'Europe , qui ne nous
ofiVent que des efpeces de déferts 6-i annoncent par-
tout la pauvreté &: la mifere , nous fournifîent à
tout moiriCnt des exemples de Juge-: prévaricater.rs,
ou d'Adininiftrateurs concuftionnaires & Intîde'es,
tandis quM feroit prefqu'împoftlble d'en trouver un
feul exemple dans nos Provinces floriflantes , il. eft
de la dernière évidence , que là ce mal eft inévita-
bîe , parce que le pouvoir exécutif eft confié à un
feul, & que cet abus ne fauroit fe rencontrer ici,
puiCque ce pouvoir réfide dans des corporations trop
difficiles à corroiripre.
( 2-34 )
Telle eft notre Conftitution, dont tout le monde
admire la ("ageffe ; dans un Pays riche , & qui au-
roit offert trop d'appas à la foif de l'Or, elle a pla-
cé le dépôt de l'Adminiftration d^ns des Compag-
nies , dans un Pays environné de Gouvernemens li-
bres 64 modérés , elle a établi un Gouvernement
doux , elle a écarté l'arbitraire pour y fixer rînduf-
trie Oc les Arts ; mais , Sire , déjà ils commencèrent
a dilparoître d'une manière lénlible & alarmante ,
encore quelques années , 6i vous y eufficz trouve
un déferr.
CeuGent été là , Sire , les fuites du nouveau
fyftême , quant à la partie de TAdminidration :
il en étoit de mcme, Sire, quant a la partie de la
Juftice.
Au lieu de ces Compagnies permanentes , indé-
pendantes & refpeftables , chargées par devoir 6c
par honneur de prononcer entre le riche & le pau-
vre (ur la vie' & la fortune des Citoyens , l'on vit
s'élever des Tribunaux , compofés de Membres âtf"
tituables à volonté , anibuiatoires Se dépendans ,
dont les opérations étoient couvertes , du voile du
myftere , les direélions pretoient à àes furprifes con-
tinuelles , & les opinions dans plus d'une matière
étoient enchîiînées.
Soumis à des Inftruclions & à des Codes , qui
n'avoient pas \a. moindre analogie avec nos Loix
anciennes , avec nos mœurs & avec notre Com-
merce ; qui en déceloient même l'ignorance la plus
profonde , le premier effet de leurs travaux produi-
iit une ftagnation générale dans toutes les affaires
du Pays ; le fécond devoir en confommer la ruine.
A la vue de tant de maux , dont il dépendoit de
votre bonté d'arrêter les ravages, aurions-nous été
ficleies Sujets , Sire , fi par un fiience coupable , nous
euliions trahi vos iwtéréts & ceux de votre Peuple?
( M5 )
Non, Sire, vous nous euffiez blâmés & la pofléritê
inconnue eut condamné notre indifférence.
Nous ajouterons , Sire , au tableau de tant de dé-
Taflres , les plaies que recevoit lans celle la Religion
dans toutes (es parties , fous prétexte d'en réformer
la difcipline, on en altéroit contre vos intentions
les Dogmes ; fous prétexte de corriger Us mœurs
du Clergé , dont la conduite & h fcience confon-
doient celles de ces nouvelles inftiturions , on le
calomnioit, on l'avilifToit , on !e perfécutoit , pour
étouffer ies réclamations contre les nouvelles maxi-
mes ; finalement fous prétexte d'ériger à rhumanité
fouffrante , des établliTemens pieux, l'on fupprimoit
arbitrairement les Couvens, & au lieu de tavoriler
la Population dans ce Pays , ainfi qu'on fe le propo-
foit , l'on ach^voit de l'arrêter 6i de détruire l'A-
griculture.
Car , Sire , il peut être bon de prévenir ou de
pourvoir à la multiplicité des Couvens & des éta-
bliffemens Eccléfiaftiques dans un Pays d'une Popu-
lation moyenne ; mais il n'en eft pas de n.iSme pour
Kn Pays où la population fe trouve fur un pied
comme ici.
Tout le monde ne peut pas devenir Jujcifconfulte,
Négociant, Laboureur ou Soldat; toutes les incli-
nations ne font pas les mêmes , Se tout Père de fa-
mille ne peut pas marier tous fes enfans, il faut donc
néceffairement d'autres reffources ; mais fi ces ref-
fources font fupprimées , 'les Mariages n'offient plus
qu'un avenir inquiétant , l'on décline ces nœuds
facrés , pour y fubftitcer un débordement de mœurs ,
& la Population en fouffre , la nôtre furpaffoit celle
de tous ies Etats de l'Europe , malgré le nombre de
Couvens , qu'il s'y trouvoit.
Les Biens de ces Couvens fe louent pubiiqne-
ment & au plus offrant , il n'eft pas bien pofîîble
( 2-36 )
de le (dite d'une autre manière, tnais.le befpîri, mm?
la jaloLiiîe les portent à un pilx infini; par-là on
empêche le pauvre Laboureur de fe procurer quel-
que petite reiïource pour fa famille ou de mettre
«•quelque choie en réierve pour fes vieux jours ; il
tiiï né pauvre , il doit mourir d^ns h mifere , dan^
l'abandon; & qaand même on tût dû convertir les
tonds des Couveni Iwpprimés en établidemens pour
rhu!nanit4é l'ouffrante ; pour un pauvre de^ Vules,
qui y anroit trouvé des lecou'rs &C des cpnfolations
on auroit fait &: l'on a déjà fait cent maihe^^reux
diifis les Campagnes.
Telle efl , Sire, refqu'iflfe du tableau général des
maux , auxquels le nouveau Tvitcine alioit iivierees
belles Provinces; tel eft , l'effet d'un fyfléme, .dans
îs.^q:!el la Loi de la propriété eu. méconnue & les
Inftitutions les plu? '^^g^î , le", plus facrees 6i; les. plus
antiques» d'uri.Peapleibfrt comptées pour rien,; vous
jugerez-, Sire , par vous -iriême , combien les effets
fui:eiles doivent en être ék-.iclus & varies , combien
en rn«me tems il (eroit impoffible ,. que trois QU:qna-
tre per.i'onnes , quelque fupérioiiié de lumières qu'on,
leur fuppoie, puiiTent ctre capables de les détailler
tous à Votre" Ma'jefté heaucQOp moins les^difcutèr ;
& combien ea même-tcms 11 efi important pour
votre fervice & le bien de vos Peuples , que Votre
M^jedé , daigne les vérifier fur les lieux, en per-
ibnne , fi les intérêts de la Monarchie le permet-
Tenr, ou s'ils ne le permettent pas , qu'elle daigne
à ce autQriier Leurs Aheffes Royales , dont nous
admirons également la prudence.
C'eft là. Sire, encore une Loi diftée par la fa-
p^eiïe de vos auçufles Prédécefieurs & le confeil de
nos ancêtres, convaincus, qu'il étoit im.pOiTîble , dç
traiter des intérêts aufîî grands ,' ailleurs que dans
le Pavs mênae.
C^37 )
Vorre Majefté vefi'a alors , que l'on a Tupporé
des abus là où il n'y. en avoit pas; que ceux que
l'on V pourroit rencontrer ne dérivent pas de la
Confiitution , que les uus doirent être attribu.és à
la trop grande inliuence du Gouvernement dans la
Collation des Emj)!ois , par rapport auxquels on né-
glige les qualités- 6c les précautions , que la Coni-
tituîion elle-même prefcrit, que les autres (ont de
la nature de ceux qui font inléparables de l'ouvraîîc
àes hommes, dont la in.dn ne pr-€Kiuit rien de par-
fait , & vous ferez convaiicu de plus , Sire , qu'à
ces commua- al-us , le nouvX\HU fyfléme alloit îubf-
tituer des vrais défafires.
Hâtez donc , Sire , ce moment de. confolation
pour vos Provinces éplorées : tenez, venez, Sire
tar:r la fource de nos maux & calmer nos inquiétu-
des î vous n'y recucU'erez pas feuiemeut les hom»
mages les plus purs de vos Sujets , mais Vous y éta-
Wirc?; en tnême terns un féjour de paix pour cics
voifîns induftrieux , que des divifions inteftines for-
cent, à venir chercher un. afyle dans vos Provinces
Belgiques : ils s'y fixeront , Sire , ils y apporteront
leur induftrie avec leurs tréfors , fi le calme de notre
Pays peut précéder celui <.\t leur Patrie.
Vous avez daigné -, Sire , déjà déclarer que votre
inte:.tioîi invariable étoit de conferver nos Droits ,
nos Conftitutions & nos Ufages ; mais, Sire, cette
déclaration gracieufe eCt accornpr,gnée d'espreflions
qui ne diflipent pas tout-à-fait nos alarmes; elle eft
incapable de produire tous les bons effets que Vo-
tre Majeflé s'en eft promis ; il n'y a qu'une décla-
ration limple & précife , Sire , qui puiffe faire renaî-
tre le calme &: la confiance parmi vos Provinces,
& la fureté qu'exigent les étrangers qui délirent de
s'y fixer ; il conviendroit , Sire , que cette déclara-
tion portât , que noi Droits feront inviolablement
(238)
confervés; que le nouveau fyftérr.e ne fe reproduira
en aucun tems , & que Votre Majefté daignera re-
chercher & corriger les abus qu'il pourroit y avoir,
de concert avec ies Etats , d'après les Loix fonda-
mentales ; vous conrommerez , Sire , ce grand ou-
vrage , digne de vous &c de la gloire de votre Rcgne ,
nous Tommes prêts à facrifîer nos vies & nos for-
tunes pour l'illuflrer.
Nous Tommes avec le plus profond te(pQ^,
SIRE,
DE FOTRE SACRÉE MA JETÉ,
Les plus humbles , les plus obcïffans &
trcs-fidclcs Sujets ,
LES ETATS DE FLANDRE,
SigrU , F. D. D'HOOP.
De notre AJjemhlU.^à Gand ce i-j Juillet 1787.
RfquÉte préfentée à Mejfeïgneurs les Etats
de Brabant le 19 Juin ijSj ^ par les Chefs
de la Bourgeoïfie (S* les Maîtres-de-Quar-*
tiers (^ Hoofd mannen der Poorterye
ende Wyk-meefters ) fa'ifant le fécond
des trois Membres de la Ville di Anvers,
(^traduction du Flamand,^
Messeigneurs,
xS OUS Chefs de la Bourgeoise & Maîtres-de -Quar-
tiers , reprëfentant le fécond des trois Membres de
la Ville d'Anvers , avons l'honneur de nous préfenter
une féconde fois , avec un très- profond reipeél de-
vant Vos Seigneuries Révérendiiîimes ôc llluftrif-
( ^39 )
/îmes, corr.ine nous l'avons déjà fait lors cîa l'ouver-
ture de vos reTpeftables AiTemblées, & d'unir notre
voix à toutes les remontrances ^que vous avez déjà
faite»; , & que vous continuez* encore de faire à Leurs
Alteifes Royies avec un zcle infatigable, & un cou-
rage au-deffus de tout éloge , pour la coniervation
des Privilèges accordés à ce Pays par la Joycuje En-
trée ^ pour le maintien du Conleil Souverain de Bra-
hantjôi fur tout pour la fupprelïîon des Intendances.
Les devoirs que nous impofe la qualité de pro-
tefleurs du Peuple, nous a excités la première fois,
&c nous oblige encore aujourd'hui, à faifir le mo-
ment favorable , de défendre les intérêts des Ci-
toyens, devant de tendres pères de la Patrie, &c de
leur faire de rerpeftueufes remontrances , qui ont
pour objet , le (bulagement , le bonheur & la prof-
périté du Peuple, qui gémit depuis trop long-tems,
lous le poids de la mil'ere.
Cette mifere a fa fource dans la ciierté du Pain,
du Beurre, du Bétail, du Sel, de l'Huile, &c. en
im mot , le Peuple eft dans la difette des chofes de
première nécefiité.
L'Artifan ("e plaint avec juftice, qu'il peut à peine
gagner fuffiamment de Pain pour la femme & Tes
cnfans. Les plaintes du Bourgeois font également fon-
dées. Il éft tems,il efl jufle que l'on prenne encon-
(idération leurs doléances.
Cependant nous laifTons à votre fagefle & à votre
prudence à juger , s'il convient de faire des repré-
fentations à L. A. R. , pour défendre ou reftreindre
la (ortie du Grain, du Beurre, du Bétail, &c. Et
nous vous abandonnons auffi le choix des moyens ,
qui vous paroitront les plus convenables pour faire
cefTer les juftes plaintes du Peuple.
Ah ! fi après de fi longs gémiflemens , nous pou-
vions, Mefleigneurs , vous engagera faire tous vos
( ^-AO )
efïorts , pour obtenir en faveur du petit Peuple , U
libre entrée, comme ci- devant du Hareng de Hoi-
lairde ; par cet Article ieul , mille & mille individus
reprendroient une nou\ielle vie. En effet, quel nom-
bre mcroyable de perronne<; n'y avoit - il pas qui
vivoient ioir en fumant le Hareng, (oit en le débi-
tani ? Le pauvre Artiian avoit pour moins d'un fol
deux bons Harctjgs , qui lui luffii'oient pour.un repas:
le refte du faîaire de fa Jou-née , il pou voit le réfer-
ver pour la fubliftance de (it femme & de fes en-
fans , ou poLi;- d' utres nécefïité^. Maintenant hors
d*état d'acheter de la Viande", à caufe de 1; cherté,
il peut à peine fe procurer fuffifaniment de Pain :
un mauvais Hareng d'Odende , eft en effet , trop cher
pour lui, il Teft même pour le Bourgeois aifé. W\n
&c l'autre fe piaignerit d'être obligés de tirer le Ha-
reng d'Oftende ; ce qui peut être un avantage pour
la Flandre , .mais, efi en méme-tems , un malheur
ôc une opprelîîon pour le Peuple du Brabanr.
Nous n'ignorons pas , Mefleii^neurs , que la Ville
d'Oftende a obtenu par un Oftroi de Sa Majcfté ,
le Privilège exclufit de faire entrer cette denrée dans
nos Provinces.
Mais, jugez, fi l'équité permet d'accorder à un?::
Ville des Pnviltges, qui cauiént la ruine d'un nom-
bre infini de Citoyens-
Jugez , fi cela peut fe concilier avec la Joyeufc
Entrée^ qui défend bien exprefîément d'accorder des
Privilèges ou exemptions , qui puifient en aucune
manière être ptéjudiciables aux habitans du Brabanr.
Telle eft la difpofition dti 4^e. Article de ladite Joyeufe
Entrée.
Nous n'avons pas , il eft vrai , des raifons au/îî
fortes de nous plaindre relativement à la Morue d'Of-
tende , que par rapport au Hareng , (i noiis n'envl-
fageons que l'avantage feul du petit Peuple. Mais
comme
( MI )
comme notre foilicitude embraffe aufli les intérêts de
tous les Citoyens , nous avons cru qu'il étoit de
norre devoir, comme Protecteurs du Peuple en gé-
néral , de vous faire fur cet Article de rerpeftucufes
remontrance^.
Oui, Mefleigneurs, vous devez en être perfucdés,
&c c'eft un fait conrtant , que dans notre Ville , qui
renferme tant de milliers d'habitans , nous avons à
peine reçu d'Oftendeen une année autant de tonnes
de Morues , que nous en recevions ordinairement en
un mois avant cet oftroi oppreffif &: ruineux.
Le préjudice que ce Privilège exctufit a caufé à
ceux qui font le commerce du PoifTon , & la dé-
treffe où il a jeté notre Bourgeoise , font trop con-
nus pour s'arrêter ici à le démontrer plus au long.
Nous ne pouvons cependant nous empêcher de
faire cette obfervation : ou la Ville d'Oftende n'a pas
été en état de nous fournir fuffifamment de Morue,
ou elle nous a de dcflein prémédité , laifîe en di-
ferte de ce PoiflTon , pour nous Forcer à acheter à un
prix exclufif de mauvaile Morue , parce qu'il étoit
défendu d'en importer de bonne qualité de Hollande.
Nous vous repréfentons aufli , Meffeigneurs , que
c'efl: un grand préjudice pour la Nation, que la jcu-
nefife qui fe fent appellée à l'état Religieux, foit en-
travée & arrêtée dans la vocation, par l'^dit du tS
Avril 1-72, donné par notre gracieufe Souveraine
M^rie-Thérefe de glorieufe mémoire , par lequel
l'émiffion des vœux folemnels de Religion, qui étoit
permiîe à l'âge de i6 ans , fuivant îe Concile deTrente ,
eft défendue avant celui de 25 ans.
L'etfet que cet Edit produit , c'eft qu'un petit
nombre de jeunes gens embraflent l'état Keligitux.
D'où il s'eni'uit, que plufieurs familles doivent à la
fin tomber dans une décadence totale, pu (que cha-
que entant prenant une part dans la lùccefli::: de Tes
( H^ )
parens, la famille ne peut plus fe foufenir dans Ton
premier état de fortune Se d'aifance ; & lorfque les
enfans qui kiccedent font en grand nombre, la part
de chacun d'eux eft fi modique , qu'ils ne peuvent
entreprendre un commerce d'une certaine étendue, ce
que toutes fois ils auroient pu faire , fi quelques-uns de
leurs frères ou fœurs , avoient eu la liberté de fuivre
l'inclination qui les appelloit à l'état Eccléfiafiique.
Nous favons bien, Mefîeigneurs, que Sa Majefté
ne défend point par cet Edit la vie Religieufe :
mais nous favons auflîî , & l'expérience nous l'a ap-
pris , que les fuites funeftes qu'a entrainé cette dif-
pofition qui recule jufqu'à l'âge de 25 ans rép«.)que
de l'émiffion des vœux , ont été que le nombre des
familles eft diminué, & que les jeunes gens, après
avoir à peine achevé le cours de leurs études, fe li-
vrant audéfordre, deviennent un fardeau onéreux pour
la fociété , au lieu qu'ils auroient pu être utiles à l'Etat
6c à l'Eglife , s'ils euffent été de meilleure heure mis à
l'abri de la fédudion & de la corruption des mœurs.
Ajoutons à cela que les fciences qui contribuent
tant à la gloire &: à la fplendeur d'une Nation, &
qui font pour ainfi dire la bafe & le fondement de
la félicité publique , font tombées dans un état de
mépris & de langueur , ou plutôt font menacées
d'une entière extindion. En effet, les Parens dont
les enfdns montrent d'heureufes difpofitions pour les
fciences , voyant que la carrière des études ne pré-
fente point une heureufe iflue , ce qui pour un
grand nombre eft l'état Eccléfir-ftique , n'y font point
entrer leurs enfans, d'abord parce qu'ils fe trouvent
dans rimpoflibilité de les entretenir jufqu'à l'âge de 25
ans , & enfuite parce qu'ils appréhendent avec rai-
fon , qu'après avoir achevé leurs études , féduits dans
un âge fi avancé par la corruption du fiecle , ils
n'ayent plus de goût pour l'état Eccléfiaftique.
( MO ^
Cet Edlt prive donc d'un état honnête pîufieurs
individus , qui auroicnt pu rendre des fervices ef-
fentiels, comme ceux qui autrefois, quoique fortls
de la moindre clalTe de la Bourgeoifie , font parve-
nus aux plus éminentes dignités, foit de l'état foit
de l'Eglii'e ; &c ainfî pîufieurs Pères de famille (e
voyent forcés d'enlevelir , pour ainfi dire, les ta-
lens & le génie de leurs enfans fous l'enclume &c
le marteau d'un Métier fervil.
Telles font les obfervations que notre devoir nous
a didées , & que la Religion du Serment que nous
avons prêté & que nous voulons remplir , ne nous
a pas permis de paffer fous filence.
Nous croyons avoir rempli l'obligation que nous
impofoit la qualité de défenfeurs du Peuple , &
nous vous fupplions ini^arument , Meffeigneurs , de
daigner appuyer avec cette follicitude paternelle , donc
vous avez donné tant de preuves , cette effufion
de nos fentimens pour Ifc bonheur public, qui a
été jufqu'ici l'objet de vos plus prelTantes démar-
ches. Nous vous fupplions aufîi de continuer fanç
interruption, des Aflemblées fi refpediables , jufqu'à
ce que toutes les infraâiions faites tant à la Joyeufi
Entrée^ qu'aux autres Droits, Libertés, Privilèges,
Chartres^ Coutumes , Uiages & autres Droits, tant
publics que particuliers foyent entièrement redreilées.
C'eft la grâce, &c.
Eto'unî fignès , P. A, Van dcn Bergen. J. E,
C. Grigis. N. Jof. Hcny, C, M. N. Nan-.
tenil fenior. 7, Huybrcchts. J. Alies, /,
B. Gome^. N. De Manne^, F. C. J. Lar~
roie. Denis Corner. Jof, Herni. Bogaeris, P.
Jof. Potteau. C. J. Dehaen. J, Van Bcrc-
kelaer. F. D. De U'inter.
De notre Aiïemblé<?, le 13 Juin 1787.
( 144 )
LETTR E d'un Patriote ^ fur la meilleure
Admïnijlrat'ion de la Police dans les
Provinces Belgiques.
m i F s défordres inféparables des tems de trou-
bles & de diiïenfions publiques méritent de fixer l'at-
tention , fur-tout des perfonnes , qui par état & par
les fonélions de leur Emploi , (ont fpécialement
chargées de veiller au maintien &c à la confervation
du bon ordre & de la fureté publique.
M. le Comte VanderStegen & de Bouireval,Grand-
Séuéchal ou Droflard en chef du Pays & Duché de
Brabant, animé d'un zèle vraiment Patriotique, pour
prévenir ces délordres , éloigner de ces Provinces
route efpece de faâieux , de turbulens , de gens fans
aveu & autres perfonnes fufpectes qui dans de fem-
blables circonftances font les boute-feux qui fomen-
tent, excitent & propagent les émeutes fous le pré-
texte de la défenfe de la caiife commune , & cela
dans l'efpérance d'exercer leur brigandage avec im-
punité, confondus dans le grand nombre, offre d'é-
tablir les moyens infaillibles d'extirper dans ces Pro-
vinces le brigandage jufques dans fes racines ; avec
impofîîbilité à toutes perfonnes criminelles & autres
fans aveu de s'y réproduire dans aucun tems & (ous
aucune forme.
Ces moyeris qui n'ont jamais été imaginés, (im-
pies dans leur exécution , économes dans leur em-
ploi , font le fruit de 40 ans d'étude & d'^ipplicatioii
dans cette partie efîenti^lle de l'Adminiflration gé-
nérale , dont par état il a fait l'objer de fes médita-
tions.
11 feroit au comble de fes dcfirs , lî dans les cir-
C M5)
conilances actuelles , il pouvoir donner à Tes Conci-
toyens ce témoignyge de Ion amour pour Tordre pu-
blic , affuré qu'il eft de l'efficacité de (es movens :
efficacité qu'il offre de démontrer avant de les em-
ployer.
Sans entrer dans le détail des avantages innombra-
bles que procureroicnt ces moyens mis en exécu-
tion , nous nous contenterons d'en indiquer quel-
ques-uns.
D*accord avec l'autorité fuprême , le DrofTard de
Brabant tait revivre , au fouiagement des Peuples ,
tous les Edits , Placards Sr Réglemens qui ont été
promulgués depuis des fiecles , pour le maintien du
bon ordre &i de la ("ûreté publique , en en rendant
l'inexécution prefqu'impoffible.
11 vient au fecours des Peuples du Plat-Pays, par
la fuppreffion entière d'une corvée onéreufe, péni-
ble 5l illufoire : Les Patrouilles payfannes.
Il reftitue des milliers de bra,<; aux campagnes , &
rend par-là une énergie précieufe à l'Agriculture.
Il élevé une Barri-ere infurmontable contre la fraude
& la contrebande qui infeftent ces Provinces.
Il éloigne à iamais de ces Pays les vagabonds ,
gens (ans aveu & autres femblables , à qui il feroic
impoffible, par le moyen de Ton cordon , de s'y in-
troduire.
Il (urveille, avec une attention toujours aélive ,
les mal-inteûtionnés dont aucun mouvement ne peut
échapper.
11 prévient enfin le défordre & le crime, S: afTitre
aux Citoyens de tous les ordres , dans les Villes &c
au Plat- Pays, la tranquillité la plus imperturbable
dans leurs oerfonnes (k dans leurs biens; ce qui ne
peut s'effcftuer qu'en augmentant la CcKiipagnie.
Tels font entr'autres , quelques-uns des avantages
que préfentefon projet; touteslcs parties en font tel-
Q 3
( i4<5 )
iemeiit combinées &c confolidées par des Réglemens
i'agement médirez , & par une tadique unique & par-
ticulière à ce projet d'arrangement , qu'il ieroit dif-
ficile de le trouver en défaut.
Il conlîfte à établir une Maréchauflee uniforme ,
fiffii.ante, toujours en activité & fi heureufement dif-
tribuée à diftatîces égales au Plat-Pays & dans tou-
tes les Provinces, qu'elle furveille à la fois toutes les
parties du fervice : de manière que par une corref-
pondance journalière & non interrompue, de la ca-
pitale comme du centre , les o^rdres s'expédient tans
celTe avec une rapidité étonnante jufqu'ajx extrémi-
tés des Provinces , & les rapports en arrivent avec
la même rapidité.
Cette correfpondance invariable n'eft due qu'à la
diftribution combinée des Archers flarionnaires , pla-
cés à trois quarts de lieue les uns des autres . dont
les forxfVions font de parcourir tous les jours & en
tous fens , le qùarré qui eft commis à leur carde ,
pour enfuite faire leur rapport à leur bas Officier ,
fïné au centre de la brigade compolée de huit Ar-
chers.
Les rapport? font remis à jour fixé à des Cava-
liers porte- caflettes, fiationnés de 4 en 4 lieues, oa-
puis la capit^iîe juiqiraux extrémités des Provinces ,
dont les fondions font de parcourir , en rétrogra-
dant , les routes qui leur font indiquées , pour , de
pofte en pofte, faire parvenir ces rapports à leur dtC'
tinaîion.
Voilà en deux mots , tous les détails de ces moyens
afiirrés, fimples à la vérité, mais par leur {implicite
même recommandablcs. Us femblent une méchaiii-
que dont toutes les pa-fies font en mouvement con-
tinuel par la combinaison de la correfpondance. Us
font l'effet d'un filet tendu fur toutes les Provinces
à la fois y pour en fermer l'entrée à tout ce qui
pourrolt en troubler l'ordre 6>c la tranquillité , &
y furprendre immanquablement tout ce qui y fe-
roit déjà.
Le mendiant profcrit par les Edits , le routeur fans
aveu, le déferteur , le contrebandier, le brigand, le
banqueroutier fugitif, le raviffeur, le voleur, Stc. ne
trouvent plus de retraite qui ne foit fous les yeux de
quelque ftationnaire ; & s'il eft alTez heureux pour
échapper d'une maille , il eft fur qu'il fera pris dans
une autre.
Tel eft enfin ce Plan , qu^^il peut erre confidêré à
bon droit , comme le bouclier du Citoyen & du Voya-
geur , le garant des propiétés , l'œil toujours ouvert
«Je la Police , & l'objet long-tems dëfiré des habirans
de la campagne , qui n'afpirent qu'à la fupprtffion
de leurs Patrouilles pour y voir fubftituer celles in-
diquées.
Pour y parvenir , l'Auteur vient de faire remet-
tre aux Seigneurs Etats afTeir.blés un Mémoire rela-
tif à Ton projet. Tout fait pré'umer qu'il fera favo-
rablement accueilli , 5c qu'il recevra enfin une fandion
qui mettra le comble à notre reconnoifTance pour le
patriotifme généreux dont Meffeigneurs les Etats Unis
de ces Provinces nous ont donné dans tous les teins,
& nous donnent encore tous les jours, depuis trois
mois , àcs preuves Ci ptécieufes.
Q4
( mS )
Lettre de remerciment à Mrs. les No-
tables des Communes de la Ville de Gand^
demandant par leur repréfentatïon du J
Juillet 1787 , le changement du Magïf-
trat y pour le compofer exclnfivement de
bons Patriotes y du xo Juillet 1787.
Messieurs,
E
N admirant d'un côté le Patriotiffrje le plus pur
qui anime vos cœurs, je ne faurois me difpenfer de
voir avec la plus vive indignation , que de l'autre
côté , l'mtérêt le plus lordide & le plus mépri(able
domine cette elpece de gens , qu'une ambition de-
inefurée dévore , fans égard pour aucun principe,
parce qu'ils ont befoin d'un emploi pour exifter»
En louant, Meffieurs, votre 2eie pour le bien gé-
néral dans la demande que vous nous fîtes le 7 du
préfent mois , pour obtenir le changement du Ma-
glftrat , fuivant les Articles I 6c II de la ConceiTjon
Caroline de Gand , dont le but principal eft de ^o\xs
choifir un Repréfentant intègre, que le befoin de vi-
vre des émolumens de fon emploi ne dirige point ,
un honnne impartial 8>c jufte , que l'appât du gain
n'entraîne ni n'aveugle point, comme celui qui oc-
cupe scluelîement cette ]5lace , le ne puis m'empê-
cher de vous dire, que 3'ai été forcé de rougir de
honte , ou plutôt àz douleur , îorfque dans notre
féance fcabinale , j'ai entendu l'oppofition que firent
a vos jufles repréfentations quelques individus, qui
( 149 )
<3epuis cette aftlon non patriotique , ont perdu tout
le mérite qu'ils avoient à mes yeux.
L'homme intègre , celui dont l'ame eft pénétrée
des fentimens de juftice &C d'équité , n'a rien à rif-
quer dans ce chansement , parce cju'il eft intimement
convaincu que la caufe générale doit être préférée
dans tous les cas atout autre intétêt ; &c dans le cas
dont il s'agit ici , j'ai vu avec une fenfibilité bien
douloureufe , qu'il exidoit parmi nous de vils & de
très-vils efclaves.
Je Tuis , je l'avoue , le moindre de tous vos Ma-
giftrats , je fuis ce qu'on appelle un zéro dans l'Etat;
mais s'il étoit pofiib'e que j'eufTe mille têtes , toutes
aufli précieufes que celle du premier d'entre nous ,
je n'héfiterois pas à les dévouer toutes pour brifer
]qs chaînes d'une fervitude odieufe , pour rompre ,
dis-je , des chaînes que des traîtres , des cœurs bas
&: rampans ont déjà baifées , & qu'ils baiferont en-
core , dès que des récompenses précaires & momen-
tanées en doivent être le prix , & à ce vil prix ,
leur criminelle condefcendance les portera à prodi-
guer le rang & les plus beaux jours des Peuples au-
trefois f. fortunés de la Belgique.
Aiîri facra famés , quid non mortalia cogis
Pectora !
Maudite foif de r or, à quels excès n'entrair.cs-tu point
les mortels!
Oui , Meflîeurs , il exifle pour notre malheur, de
ces cœurs rampans , qui ne fe feroient aucun fcru-
pule de ■acrifier leur poftérité , leurs frères , un Peu-
ple entier , qui pour recevoir une gratification an-
nuelle de quelques milliers de florins , vendroient
leur propre famille , fans en excepter même leurs
enfans &c leurs femmes,
Quelle abomination, vous écrierez- vous ! Je l'ai
dit comme vous, & je n'aurois jamais pu me le
perfuader fi je n'en avois été le témoin oculaire. J'ai
lu fur le front de ces oppofans la crainte & la ter-
reur. Ils croyoient déjà toucher au moment fatal qui
devoit les priver de leurs appointemens ; car foyez
bien certains, Mefîieuri, que ce n'eft aucunement la
place qu'ils ambitionnent , mais les émolumens qu'ils
en retirent.
Pourront-ils alléguer pour excufe, que le change-
ment vifible qui s'opéra dans leur phyfioncniie pro-
venoit de l'efpece d'affront que vous leur fîtes en
nous propofant direftement de foUiciter notre def-
tru61ion , & que ce fut là l'unique fource de leur
mauvaife humeur.
Cette défaite ne pourra jamais être admife parmi
vous , Meffieurs ; vos yeux font plus pénérrans que
ceux de ces hommes intéreffés à ie maintenir dans
des emplois , fans lesquels ils mourroient de faim.
D'ailleurs étant accoutumés par un abus de leur charge
à dominer & à brufquer le Peuple ; ils fe verroient
avec le plus grand regret privés de ce qu'ils appel-
lent leurs Privilèges, comme fi s'en étoit un de mal-
iraiter un Peuple lx)n & docile, de l'entendre jeter
les hauts cris , lorfque par des manoeuvres reptiles
il fe voit conduire au bûcher, où il doit fe voir,
par un raffmementde cruauté, confumer à petit teu ;
<Sc fans doute qu'ils feroient déjà venus à bout de
leurs de/Teins fi le Lion Belgique n'eût pris le parti
d'abandonner fon écu{ron,pour s'élancer avec force
fur ces Ojfeaux de proie & retirer d'entre leurs grif-
fes des agneaux qu'ils étoient prêts à dévorer.
J'ai confidéré & je confidere encore votre de-
mande ; je la regarde comme une des plus fortes
preuves que vous puifiiez donner de votre fagacité
r-. (251 )
& tie votre furveillance pour l'intérêt commun^
Apres m'étre examiné moi-même avec attentiGn ,
je me fuis dit : ce ch?.ngemcnt n'influera en rien
l'ur mol, fi j'ai le bonheur de pouvoir être utile ou
nécelTaire à la Patrie.
Ne fuls-'ie d'aucune utilité ; je fuis donc indigne
de la place que j'occupe, ik. je ne puis en con-
fcience exercer plus long-tems un Emploi qu*on a
daigné me confier , parce qu'on m'avolt cru capable
de m'en acquitter ; il ne doit rien me coûter pour
l'abdiquer, parce que j'agis contre le véritable but:
de l'inftitutlon.
Suis-je utile au contraire , mais entrevois-je que
quelqu'autre l'efl: plus que moi ; ô ma chère &:
bien-alniée patrie , dès que je le connoitral , je m'em-
prefferai de te le prélenter moi-même , te priant
de vouloir bien me le prétérer. Je fuis un vrai Pa-
triote; chaque goutte de mon fang porte l'empreinte
de ton Lion : l'intérêt eft un monftre à mes yeux
dans le moment où il nous faut des hommes.
Rien de ce qui fera contraire au bien public ne
me réduira jamais. Votre propofitlon , Meffieurs ,
eft le miroir de la vérité , que vous exposâtes à
nos yeux , & où chaque bon Patriote pou voit fe
mirer, s'il n'avoir eu les yeux fafcinés. Cette forte
d'expofition n'a pu paroître un affront qu'aux yeux
des mercenaires qui n'ont en vue que des penfions,
au lieu d'être avides de procurer le bien-étre de
leurs Concitoyens.
Je n'ai dans aucun tems brigué ni follicité la
place lucrative de premier Echevin , place qui m'eût ,
à la vérité donné entrée aux Etats, mais où comme
un phantôme, je n'aurois eu qu'un Droit de Repré-
fentation : quant à la féconde place, qui confifte
à être brufque envers tout le inoiide , fe préfenter
( 15^ )
aux audiences , y recevoir le peuple d'un air hau-
tAin , je n'y afpirerai jamais , & encore moins à
celle de Direfteur des ouvrages, emploi qui femble
deftmé à des prépofés accoutumés à traiter leurs
femblables, comme s*ils étoient d'une efpece diffé-
rente de la leur.
Enfiti je n'ai jamais envié d'être à la tcte des
Publicains , pour avoir une penfion de mille florins,
prife fur la fubftance du Peuple , non plus que les
deux milie qu'on accorde à un oremier , à condi-
tion que j'aurois un caractère aufîî impitoyable que
l'eft celui qui en eft revêtu aujourd'hui, & qui
malheureufement eft trop connu pour en dire ici
un feul mot.
Je ne connois d'autre attachement que celui que
me difte le bonheur général des mes Concitoyens,
ainfi que celui que me prefcrit mon devoir. Je ne
défire uniquement qu'à coopérer, autant qu'il dé-
pendra de moi, à la tranquillité publique, à faire
adminiftrer la Juftice , comme elle doit l'être , aux
pauvres comme aux riches.
Si comme j'ofe m'en flatter , & comme l'exem-
ple de ceux de Namur me le fait efpérer votre de-
mande eft agréée par le Gouvernement , j'entrevois
que dans la crife oii nous nous trouvons, je ne peux
jamais être qu'un être fouffrapit , parce que je n'ai
qu'une voix très-foible dans toutes ces délibérations;
mais le Cœur! Ah] Meffieurs , fï tout le monde
avoit le mien , notre bonheur , notre exiftence li-
bre feroit certaine, ou ft malgré nous, le contraire
prévaloir , nous deviendrions des furies vengereffes
prêtes à brifcr le joug, fous lequel on prétend nous
courber.
Ne perdez point de vue le Peuple , vos familles,
vos enfans , la poftérité même ; prouvez-leur que
(M3)
"Vous en ctes les véritables Pères, & ne leur Coff-
riez que des exeinples qu'ils ne rougiiTent pas d'i-
miter,
ChoififTez nous des Chefs , dont les artères Sc
les veines foienr remplis de pat-ionlme , & non
de cette efpece d'hommes, qui changent de foyers
comme d'habits , & dont la maxime indifféren-
te eft :
^ Illa mlhi Patrla , non i;bi nafcor, fed ubi vefcor.
Ma Patrie n 'efl point U lieu où je fuis né , mais celui
où je trouve du pain.
Ah! Mefîieurs, puiffiez-vous inculquer aux com-
munes de cette Ville , qui jouiffent de Privilèges encore
plus étendus que ne font les vôtres, mais qui mal-
heureufement pour eux font aveuglés & privés des
mêmes fentimens , qui doivent vous immortalifer I
puiflîez-vous parvenir au point de foulager ce Peuple ,
en le forçant, par votre exemple, à demander le
changement du corps des deTpcres , dont la Magif-
trature eft compofée ; vous rendriez aux B * * ,
vos alliés , leurs Droits & Privilèges, &: vous auriez
en même tems le plaifir fenfible de voir dilparoître
& s'éclipfer de l'afTemblée générale de cette Pro-
vince , des perfonnages fufpefts par leur enthou-
fia(me , leur forte de vénération mal entendue, &
leur dévouernent pour le parti âes temporifeurs , dans
l'inftant fâcheux où le feu de la lédition menace
d'embrafer toutes les Provinces Belgiques.
Chercher à étouiffer le cri du fentiment &c de
l'humaniré, ajouter aux anxiétés d'un Peuple fouf-
frant à la vue, des horreurs dont il eft menacé, &
cela par refpoir honteux d'être revêtu d'un chétif em-
ploi ; c'cft ce qu'on peut nommer l'exécration S\
( ^S4 )
^abomination publique, &: temporifer d.tns un ino-
ment où la foudre menaçante eft prête à éclater &
à porter Tes ravages de toutes parts, tandis qu'elle
devroit être conduite par le fil de la raifon & de
l'expérience dans le puits de î'anéantifTement , c'eft
fans contredit , le plus grand crime de Leze-Maiedé
€\u\ pulfîe être commis envers l'htat , c'cfi: marcher
la tête baiflee pour la recevoir : & cependant nos
temporifeurs ne font pas femblant de concevoir cette
vérité , quoique les effets foient prêts à les rédaire
en poudre.
Je ne peuï mieux les comparer qu'aux Nègres , qui
baifent le bâton dont on s'eft fervi pour les rofTer ,
ou plutôt à ces animaux domeftiques qui fe traînent
fervilement à terre vers leur maître , pour obtenir
un morceau de pain noir, que bien fouvent il leur
refi-ife encore.
Courage , Meilleurs ; que votre démarche , que
l'exemple que vous donnerez , forme , s'il (e peut , des
âmes incorruptibles , que vos procédés loués à fi
jufte titre nous donnent enfin des Maglitrats éclairés
& s6lifs , de vrais Citoyens , qui fâchent connoître
le prix de la liberté. C'eft le feul , l'unique moyen
qui pourra concourir à Tencouragement du com-
merce , de Tagricuiture & de l'induftrie j c'eft la feule
& la vraie tentative qui pourra rendre à l'Etat fa
première fplendeur en faifanî également le bonixeur
de toutes les claffes de Citoyens ; c'eft , dis-je , ]>e
feul moyen de maintenir l'ordre & la paix , en f.ù-
fant fleurir tous ces objets , qui rendront au Souverain
6c au Trône fa grandeur primitive , & au Peuple
fon bien-être.
Si l'on dédaigne de vous écouter ; ne vou<; décou-
ragez point, redoublez vos efforts; il eft beau de
furmonter les obftacles qui fe préfentent. Si la mon-
(MO
tagne eft efcarpée , fongez que la gloire en fera plus
grande d'arriver jufqu'au fornmet. Ce n'efl qu'à fa
cime que vous pourrez efpérer de trouver la gloire
& le bonheur.
Je fuis ,
Messieurs,
P'otrî Compatriote.
C. L. J. B. F.
RE MON TP. AN CE S des Etats de
Brabant à FEmperdur o Roi.
SIRE,
L
E Comte de Murray , qu'il a plu à Votre Ma-
jefté de commettre au Gouvernement-Général par
intérim y nous avant fait connoitre qu'il déiîroit que
les Députés de notre part fe rendiffent chez Son
Excellence, il leur a communiqué vos intentions ,
Sire , au fujet de la Dépêche qui nous a été adre!-
fée le ib' Juillet pafTé , relativement aux déplace-
mens des Troupes ; nos Députés n'étant pas quali-
fiés à s'expliquer par eux-mêmes fur ce que le Comte
de Murray avoir à leur dire en vertu des ordres
de Votre Majefté , ils ont prié Son Excellence de
leur en donner le réfnltar par forme de note ,
ce qu'on a cru ]uûe d'accorder,-
Nous fupplions humbleîîient Votre Ma')ef}:é , d'être
convaincue, que nous n'avons pas follicité la Dé-
pêche dent il s'c^git , dans l'eiprit d'aucune rer.i-
tence ni d'aucune défiance quelconque qui eût pu
iroiK refter après que Votre Majefté, par fa gracieufe
Dépêche du 3 Juillet , nous avoit afiTures que votre
Intention n'éroit pas de renverfer en rien la Confti-
tution de vos Provinces Belgiques , que les vues de
Votre Majefté ne tendoient qu'au plus grand bien-
être & à la plus grande félicité de vos fidèles Su-
Jets ; fur quoi vous vouliez bien , Sire , vous enten-
dre avec vos Etats , d'après les Conftitutions fon-
damentales.
La Dépêche du 18 Juillet a été donnée pour cal-
mer les inquiétudes de toute la Nation , dans les
moment que l'émotion étoit extrême , & qu'elle
ctoit encore excitée par l'impreflion que cauioit le
rappel, quoique momentané, des Séréniflimes Gou-
verneurs-Généraux.
Sire , nous pouvons apprécier , fans exception ,
•tous les rapports qui peuvent être parvenus à V©-
ttre Majefté- (ur nos démarches; nous n'en redoutons
iuicun de quelque narure qu'il puiffe être ou de quel-
<^ue fource qu'il puifle venir; bien fûrs de notre in-
nocence , bien fûrs de ne nous être écartés en rien ,
de la foumlffion que nous devons à Votre Majefté,
comme à notre feul & légitime Prince.
Mais, Sire, fi dans les tranfaftions ordinaires la
Nation fe rapporte aifément à fes Repréfentan* ,
c'eft-à-dire, aux Etats, il eft indubitable, que pour
promouvoir le nouveau fyftême en tout ou en par-
tie , norre concours non-leulement n'eût infpiré au-
cune confiance à ceux dont nous fommes obligés de
fuivre le vœu univerfel , mais que ce concours eût
caufé les plus grands malheurs.
Ceux-là , Sire , qui voudroient prétendre que les
Etats ont renfermé ou fu reftreindre le vœu général
dans cette occurrence, fe trompent eux-mêmes; ils
n'ont pas plus la connoiftance de nos excellentes
Loix conftitutionnelles que du caraflere des Habi-
ta ns ,
C =57 )
tans , qui tous ^ dans toutes les clafTes font éclai-
rés (ur les principes ii {impies de la Conflicution ,
qui alloit étie vifiblement entamée , & par - là fa-
crifiée.
Comment eft-il. poffible , Sire , qu'on n'a't pas
(u déir^eler le vrai but qui a Ci bien réuffi, du ieul
parti qui reftoit à la f^gefTe dans l'éloignenient de
Votre Majerté, d^ms la lecoufTe violente, qu'avec
peine il a été polfible de conjurer ? Comment quel-
ques marques , quelques (igîies extérieurs , ou des
démonftrationi inHgîiifiantes , mais exagérées 6c (inif-
tremens prélentées, peuvent-elîes; prévaloir mainte-
nant & après coup fur la nécefiîté des circonflan-
ces , s'il eft vrai , Sire , que rotre Peuple a été
fauve?
C'eft, Sire, cette raifon, à qui toute Loi doit cé-
der pour le moment, qui a fait que Leurs AhefTes
Royales n'ont pas fait fcrupule de déclarer que les
intraétions laites à nos Conftitutions depuis 2CO ans
feroient redrelTées , piirce qu'on ne pouvoit donner
à la Nation que ce calmant , d'autant plus indifte-
rent au fond, qu'il revient à l'obfervation des Conf-
ritutions , telles que Votre Majefté les a jurées en
1781 , fans que nous ayons jamais eu la penfée ,
comme nous ne l'avons pas encore , de rien efpé-
rer ni demander au-delà , ni en aucune façon de
la bonté du Souverain; c'eft ainli que nous l'avons
exprefTément déclaré dans le moment que les Séré-
nifîimes Gouverneurs-Généraux Oîit accordé la Dé-
claration du 30 Mai : c'eft ainfi que Votre Ma-
jefté l'a entendu par la Dépêche du 3 Juillet, à ja-
mais précieufe pour nous.
Raflurés pleinement par ce que le Comte de
Murray nous fait l'honneur de nous dire dans la
noce qu'il nous a communiquée , autant que par
R ^**
(M» )
notre amour pour votre augufte Perfonnc , nous
ne pouvons , Sire , qu'offrir à votre Majefté l'hom-
mage de la plus entière confiance fur la concentra-
tion des troupes : telle eft notre façon de voir; nous
ne manquerons pas , Sire , d'employer tous les
moyens qui font en notre puiïïance pour commu-
niquer cette confiance, dans toute fon étendue, à
nos Concitoyens,
Mais , Sire , puifle-t-il nous être permis d'expo-
fer à votre tendreiTe paternelle , qui ne (e refufe pas au
moindre de vos Sujets , les maux que nous endu-
rons ! puiiTe-til nous être permis d'embrafler les ge-
noux non d'un R.oi , mais d'un Père qui nous porte
dans Ton fein ! Si jufqiî'ici la crainte feule du fyftê-
me a banni le', refies du coir.merce , avili les pro-
priétés, anéanti l'induftrie , occafionné une langueur
mortelle dans tout l'entrecours de la fociété civile;
fi la défiance s'efl eniparée non feulement des capi-
talifles , mais de tous les individus, dans les affaires
les plus ordinaires ; (\ des émigrations fans nombre
ont déjà eu lieu par l'effet des infinuations étrangè-
res ; f. d'autres fongent à quitter ces climats , que
ne fera-ce point, Sire, lorfque le miliralre fera dans
i'enceinte de vos plus riches Vil'es, ou femblera les
menacer , tandis que la fuite de ces précautions ,
notcirement fuperfîues , ne peur être que l'effet des
impulfions toujours plus alarmantes pour la con-
fiance , & pour cette Opinion , qui eft la reine du
monde ?
Da'gnez , Sire , daignez hâter la confolation de
vos fidèles Sujets ; veuillez de votre Trône jetter
un regard favorable fur nous , fur les Députés qui
s'y préfenteront inceflamment : puiffent-ils, Sire, ren-
dre a Votre Majefls, la pureté de notre amour, de
notre foumifîicn inviolable , obtenir enfin de votre
( »59 )
ftcrée Majefté , la déclaration qui doit ramener no-
tre bonheur.
Nous fommes avec un très-profond refpeft,
SIRE,
De votre facréc Ma jejlé Impériale & Royale Apof-
toliquc ,
Les très-humbles, très-obéiiTans & très*
fidèles ferviteurs , Sujets & Vaflfaux,
Us Prélats , NobUs & Députés des
Chef- Pilles , rtpréfentant Us Etats
de votre Pays & Duché de Brabant,
Par Ordonnance , DE C O C K.
J)e notre AjjembUe générale tenue à Bruxelles U
5 Août 17S7.
Extrait de la Galette des Pays-Bas , du 3 1 Août.
N^. 65.
LETTRE des Etats de Brabant, à
S. Exe. Mgr. le Comte de Murray.
E S Prélats , Nobles & Députés des Chef-
Villes , repréfentant les trois Etats de ce Pays &
Duché de Brabant , croyent de leur devoir , d'ex-
pofer à Votre Excellence , qu'ils ont vu , avec la
plus grande furprife , & avec une jufte indignation ,
l'Article inféré au Supplément de la Ga:^etic de Co'
logne , du 7 Août 17^7 , dans les termes fui vans :
♦> S'il en faut croire les Feuilles publiques , les
» Etats des Pays Bas Autrichiens, ont écrit au Roi
» de France , pour lui demander de l'appui ; mais
n Sa Majefté très * Chrétienne leur a fait faire par
R z
( î«0 )
» fon Mlniftre des Affaires étrangères , la Réponfe
** qui fuit : M Jjleurs , U Roi mon Maître défapprouvc
** la démarche itlicite que vous avc:^ faite contre
>* votre Souverain. Sa Majejîé ne doit ni ne veut Je
>* mêler en aucune manière des okjeti et Adminijlration
*^ de votre Monarque. Elle ri emploiera jamais Jes
>> Troupes , pour f.utenir Vinjujlice , & Elle vous
>* fait favoir , qu Elle a envoyé votre Mijjive en
>* original à CEmpticur [on Allié ^ & en même-ienis
>* donné des ordres à ^o,ooo hommes de fes Troupes ^
w de fc mettre en etut de marcher^ à la première
*> réquiftion de Sa Ma je fié Impériale. «
» Quoique cette Lettre porte toutes les empreintes
de fauffeté pour des yeux cîairvoyans , cependant
les Reniontrans , qui Tentent leur honneur & leur
loyauté publiquement inculpés, ne peuvent fe dif-
penfer de protéger le plus hautement & publique-
ment contre des faits auffi atroces que calomnieux ,
puifqu'il eft de toute vérité , que les B.emontrans
n'ont jamais écrit au Roi de France , ni reçu aucune
Lettre ou Piéponfe de la part de Sa Majefté Très-
Chrétienne relativement aux affaires présentes ;
qu'enfin , il ne s'eft jamais rien paiTé qui puilTe en
avoir même l'apparence , ainfi que les Remontrans
peuvent en faire confter par l'exhibition des Pro-
tocoles de leurs Séances , & qu'ils efperent que
Votre Excellence en eft d'ailleurs fufîiramment per-
fuadée. C'efl: pourquoi , ils fuppl ent Votre Excel-
lence, de recevoir leur défaveu , & leur proteftation
formelle contre les faits fufmentionnés , rapportés
dans le Supplément de la Galette de Cologne /
qu'en conlequence , Votre Excellence veuille or-
donner ou permettre que la préfente foit inférée
dans la Galette des Pays- Bai ^ avec l'Apoftille dé
Votre Excellence. En quoi &C. «
Si^né De Cock:.
( 25» )
Copie de VApo^llle.
s> Son Excellence ayant eu rapport du confenu
de cette Repréfentattlon , a permis , comme elle
permet par cette , aux Suppllans , de la faire inférer
dans la Galette des Pays-Bas. Fait à Bruxelles , le
12 Août i']'6-j. Paraphe Cr. Vc.
Signé M U R R A Y.
Pour Copie DE COCK.
** Il efl: incroyable combien de menfonges , d'in-
poftures , de calomnies , de contes extravagans &
ridiculement romanelques, les Feuilles publiques, &:
de petites Brochures clandeftines , ont accumulés de-
puis quelque tems contre les Etats & le Peuple Bel-
gique';, tandis que le Gnzettier de Cologne fabri(|ue
ou publie des Lettres fibriquées fous le nom d'un
grand Monarque (le Roi de France), contre l'hon-
neur de cette brave Nation , celui du Bas - Rhin ,
fait des vœux pour qu'elle foit mafTaerée en corps,
quoique dans un de Tes derniers Numéro ^ il fe borne
à fouhaiter le maiTacre des Prêtres 5v des Religieux.
L'abfurdité de ces calomniateurs publics va joîqu'à
attribuer au Clergé les Réclamations des Beiges, tan-
dis qu'il efl de notoriété publique, que fans la vio-
lation des propriété-; , le nouveau fynême fe feroit
confommé fans réiiibnce , je veux dire fans réfif-
tance publique 6<: efHcace. Les Remorr ances ée^
Evéques , de TUniverfîté de Louvain , & de quel-
que Corps que ce foit , en faveur de la Religion ,
étoient mifes au rebut 6c déjà oubliées , lorfque l'E-
dit des Intendances & des nouveaux Tribunaux, ré-
veilla le Lion Be'eique , profondément endormi , hé-
las ! fur des intércrs plus graves, qui autrefois n'euf-
fent point échappé à fa vigilance , mais qui aujourd'hui ,
( 1^2 )
ne font plus qu'un objet accidentel 5c fëcondaire (a),
(^u*a de commun la Conftitution de l'h-glife Catho-
lique , avec les nouveaux Tribun ux èx le. Inten-
dans ? quel intérêt particulier avoit le Clergé à s'y
oppofer? Les âmes chrétiennes peuvent bien regarder
comme un bienfait de la Providence , le concours
des caufes diverfes , qui ont produit enfin ce cri
perçant dont route l'Jturope a retenti; mais elles ne
Savent que trop qu'avant cette époque , le grand
édifice de la Catholicité fe démoliflToit en filence ,
&: qu'il en refloit peu de choie fur pied , lorfque
d'autres intérêts en ont arrêté l'entière deftruilion.
D'où viennent donc les fureurs de tant de Gazet-
tiers &: d'autres barbouilleurs , contre le Clergé Belge ,
qui n'a fait que joindre fa voix , toujours humble 6c
fuppliante , à celle des autres clafîes de Citoyens? ...
D'où vient que dans un tems où l'on ne parle que
de Liberté , de Droit naturel & d'égalité ; où le
defpotirme, la violence & l'arbitraire lont devenus
(<i) Il faut convenir cependant que depuis que la liberté
des Réclamations a eu lieu , cet Article a été préfenté avec
toute Timpreflion de fon importance. Les Etats, le Confeil
& diverfes Corporations de Flandie fe font particuliéreinent
diflingués à cet égard . & c'efl la Province où les intérêts de
la Religion ont été le plus fortement & le plus éloquemment
appuyés. Heureux le Peuple foncièrement penuadé que ce
doit être ici le premier objet de fa follicitude, & en quelque
forte le garant des vœux qu il forme dans d'autres genres
d'intêr':ts; conformément à rinconteftable cbfervation qu'un
Poète Philofophe & Payen a fi bien exprimée , il y a i8
fie clés;
Dis te minorem quod geris , imperas.
Mine omne principiurn , hùc refer exitum. j
Dl multii nt'yLeŒi dédire \
Hefperia mala luftuofce.
HOR. L. lILOd.6.
(i«} )
plus que jamais l'objet d'une haine générale , d'où
vient , dis-je, cette fureur outrageante & calomnieuie
contre une courageule & verrueufe Nation , qui ''c-
clame fa Conftitution & des fermens réciproques ?
N'en doutons pas , c'eft la haine du Chriftianiinie ,
la haine de Dieu, de Ion Culte & de (es Minières,
jui provoque & alimente cette manie de menfonges
6c dinjures contre la Nation qui a oié élever fa voix
in faveur de ces refpeftables objets ; haine qui ho-
nore l'EgJife du Dieu vivant , autant qu'elle la dif-
'.ingue &c la caraélérife entre toutes les Se*51es qui
ont ofé en afficher les caractères. Cela eft ii vrai ,
cjue dans la Belgique même , de prétendus Patriotes ,
ir.ais dont l'elprit & le cœur étoient déjà affervis à
la corruption dominante , fe font recriés contre les
Hemontrances faites par les Etats en faveur de la Ke^
ligion. Ils ont prétendu qu'il falloit en exclure le?
intéicts & l'envifager comme une chofe étrangère aux
plaintes de la Nation : comme fi fans cette fandion
de tous les Droits & de tous les Contrats , il pou-
voir y avoir quelque chofe de (ûr dans les Sermens ,
dans les Conventions quelconques , & dans les Conj-
titutions des Empires î
^
L + ^
R4
( i<^4 )
REPRESENTATION du ConfeU de Flan-
dre ^ du 17 Novembre 1786, fur la-
quelle efi ftiïvi le Décret du ConfeU
Privé du z Décembre 1786, quife trouve
au 4e. voL du Recueil, r. 102. Q*)
SIRE,
Xl y a déjà quelque tems , que les nouvelles pu-
bliques , ainfi que differens arrangemens , qu'on
prend fous nos yeux, annoncent un fydiéme de
réfonne générale dans l'Admlniilnfion Eccléfiafti-
que , Politique &: Civile de ces Provinces.
Un projet de cette nature marque fans doute
une affiduité étonnante des fcîins , que V. M. orend
pour le Gouverneme:it de Tes Peuples; mais tandis
que ces vues bienfritilantes font naître en nous les
ientimens profonds de reconnoiiïance , nous ne pou-
vons difTiniuIer, que bien loin que quelqu'un d'entre
nous, ou de votre Peuple , envifage quelque avan-
tage réel dans ces grandes réformes, elles mettent au
contraire le cotr.ble aux inquiétudes & aux alarmes
de votre Peuple , dont nous avons déjà informé
V. M. par nos Remontrances précédentes.
Quiconque a connu depuis longues années l'état
de ce Pays, conviendra, qu'il ne s'eft jamais trouvé
{'^ ) On n'a pu acquérir cette Pièce qu'avec des lacunes
& des incorre<5î:ions, copiée d'après la minute dans laquelle
le Rédafteur ( M le Confeiller de Grave ) avoir omis des
pafTages & des mots qu'il a aioutès en la tranfcrivpnt. Nous
n'avons pas cru devoir les fuppléer, pour ne pas déroger à
iauihenticité de cet écrit important.
( s«; )
dans un degré de profpérité & de bonheur, comme
depuis un certain tems , foit qu'on l'envifage du
côté de la Population , de l'Agriculture, des Fabri-
ques , du Commerce , des Art5 & Sciences , foic
du côté des Mœurs, de la Police & de la tran-
quillité publique.
Un Etranger eft extaGé en parcourant no?, belle?
Campagnes , cultivées comme des jardins , -S: peu-
plées à l'indar des Villes : les bras ne manquent
pas ici aux terres ; mais celles-ci m.anquent aux
bras; nos Fabriques de Toiles font portées à leur
dernière perfection ; les autres prenneiit des accroi-
femens fuccefTifs , &c ont déjà acquis un degré de
conliflance inconnu ci-devant.
Parmi l'aifance que ces objets apportent , & au
milieu d'une Population immenfe , qui augmente
tous les jours , on voit polir les Villes , civilifer les
Mœurs , cultiver les Arts & les Sciences , dim^nuer
leà Sources de la Procédure ; une vigilante Police
dans les Villes , ê«C une MaréchaufTée bien dirpofée
au Pîat-Pays , maintiennent la tranquillité publique;
la maifcn de correftion établie dans la Capitale
prévient les grands crimes , en arrêtant le mal dans
Ton principe , au point , que les effrayantes juftices ,
par les potences & les roues , femblent être difpa-
rues : en un mot , on vo't régner par-tout une
abondance, une activité irinuftricu:e , une férénité,
dont on n'avoit pas d'idée depuis long tems , 6sc
qui annoncent un Peuple heureux fous un Gouver-
nement doux.
Quel dommage de voir cette férénité s'obfcurcir
par des nuages , qui commencent à s'élever fur
nos têtes ! Psr quelle fatalité peut-on Ci réfoudre ,
au milieu d'un calme (i heureux , à détruire les
fources mêmes , dont notre préfent bonheur dé-
coule ? Quel homme enfin , connoiiTant notre pofition ,
( 266 )
ie ferolt attendu à ces grands changemens , qui
vont donner à notre Conftitution politique une tonne
toute nouvelle ? Il n'eft pas pofhble de n'être pas
ftupéfdit à la vue de remèdes i\ violens : car fi
c'eft pour les appliquer à guérir de grands maux ,
on conviendra au moins , qu'il devoit être bien
conftaté avant tout , que ces prétendus maux exif-
tent : nous ne doutons pas , que c'eft- là ce qu'on
fait accroire à V. M. Des perfonnes , qui par leur
pofition éloignées de nous , ont aifément pu Te mé-
prendre , & qui réellement fe font trompées dans
les faits, ont cru ?ppercevolr (\e^ défeétuofîtés dans
nos Adminiftrations , êi de la corruption dans nos
Wœurs, qui n'exiftent pas : de-là ils ont pu infpi-
rer à V. M. des idées fi défavantageufes de notre
pofition aduelle , ce qui eft un de ces malheureux
eflcts pour nos Pays , de (q trouver à un fi grand
éloignement de l'œil de leur Souverain ; mais le ta-
bleau que nous venons de tracer de l'état de ces
Provinces &: des Mœurs de Tes Citoyens , tableau
qui eft peint d'après nature , eft un garant fur de
la réalité du fait & peut raffurer V. M. fur toutes
insinuations de différente nature. Si ce n'eft pas tant
cette confidération , mais bien la vue , l'eipoir de
tirer de plus grands avantages des nouveaux Eta-
blifiemens, qui ont di(fté la réforme, dans ces cas
la raifon , ainfi que la faine politique exigent , que
ces prétendus avantages foient bien précieux , & les
règles de la prudence dictent , que leur fuccès ne
puiffe en aucun cas être équivoque : car il eft im-
pofiîble de réalifer de grandes réformes fans renver-
ler l'état & la fortune d'une infinité de Familles,
& ce feroit la chofe la plus criante que d'expofer le
prix de tant de facrifices aux feuîs coups du ha-
iard : mais comment , fans fe faire illufion, pouvoir
fe promettre une certitude décidée d'un pareil fuccès?
C 1^7 )
L'hiftoire de tous les tems démontre , que les
apparences les pîus brillantes font troinpeuies, 6c
qu'on a rarement été heureux dans l'exécution (\es
grands plans de réforme : les projets d'amélioration
eblouiffenr les yeux , le brillant de leur éclat fait
JJlufion , il empêche l'œil de percer bien avant dans
i avenir; c'eft communément aux dépens d'une trifte
expérience , qu'on parvient à être détrompé : ce
qu'il y a de déplorable dans ceci , & qui eu un
des contraftes de la nature humaine , c'eft que com-
munément les idées de réforme prennent aux ca-
ra(fleres les mieux Niifans ; un mal quelconque len-
fjble les touche; leur défir de faire du bien eft éveillé
par la moindre apparence favorable ; le défaut d'ex-
périence les empêche de voir , qu'il eft très-pofli-
ble de faire de grand mal avec les meilleurs inten-
tions du monde.
Nous ne voulons pas dire , qu'il n'exifte pas d'a-
bus , bien moins , qu'il n'y auroit pas de bonnes
chofes à faire pour le bonheur du Peuple : les abus
ont été de tout tems le partage de l'humaniré; mais
nous favons , que ceux , qui demandent à être cor-
rigés , ne font pas de nature à devoir fubir des
opérations violen^es. V. M. peut acquérir des no-
tions (ûres fur l'efpece de ces abus , fur les moyens
les plus propres à les faire cefTer , ainfi que fur le
genre d'améliorations à faire : elle n'a pour y par-
venir qu'à entendre (es Sujets Nationai>x , les Evo-
ques , les Etats , & fpecialement fes difFérens Confeils
de Provinces : nous fomnies à même de pouvoir
pleinement fatisfaire V^ M. fur ces differens points,
6i particulièrement de lui préfenter un plan d'amé-
lioration conforme aux vœux de tout le Peuple ,
& qui , à l'avantage certain de produire un bien-
ctre public, jo:ndroir celui de ne porter du préju-
dice à perfonne. C'eft ainfi , Sire , qu'en ont ufé
C 162 )
Tos Ancêtres : ils n'ont fait rien d'important en
matière de Légiflation civile que d'après les avis
de leurs Officiers de Juftice. Cet exemple mérite
d'autant plus d'être imité dans le tems préfent , que
Votre Majefté, par Ton élolgnement de nos climats ,
Ôc par les vaftes occupations , n'eft pas à portée de
connoître par elle-même le befoin & les avanta-
ges de Ton Peuple Belgique.
Ces Pro^vinces ont eu leurs Souverains réfidens
chez eux jufqu'au tems rie Philippe Second , Koi
d'Efpagne ; les Princes de U Maifon de Bourgogne,
Phiîippe-le Bel , père de Charles V, & ce dernier,
dont la mémoire eft encore fi chère à la Patrie ,
ont réfidé aux Pays-Bas; ces Princes, quoique ph'.cés
au milieu de leurs Sujets , ne faifoient rien fans l'in-
fluence de leur.s Conleils de Provinces ; leur Gou-
vernement étoit compacté fur le génie , fur les mœurs,
fur les ufages de la Nation ; les tems de leurs règnes
ont été, au rapport de nos Annales, le (lecîe d'or
des Provinces Be'giques. ^
Lorfque Charles V parvint au Trône , la Flandre
avoir peu de Loix ; il ne crut cependant pas de
fa fagefTe ni de l'intérêt de Tes Peuples , de les
multiplier beaucoup; il vit , que ce n'eft pas la mul-
titude , mais la bonté des Loix , qui conflitue l'ame
d'un bon Gouvernement. Le Recueil des Loix éma-
nées fous fon règne , qui a duré près de cinquante
ans, ne monte pas à un volume auffi gros que celui
des Loix que nous avons vu émaner depuis cinq
à fix ans. Au lieu de créer un Code arbitraire , le
Monarque invitoit Tes Peuples à lui préfenter les
Digedes de leurs Coutumes, Droits & Ufages , pour
leur donner une exiftence non équivoque par fa
San<fi:ion fouveraine. Cet exemple a été imité par
Tes Succefieurs, & particulièrement par les Archiducs
Albert & Ifabelle.
C a<59 )
■ Comme une des qualités les plus efTentielIes des
loix cft leur (lab-lité , pullque rien n'eft plus capable
de faire perdre le refpeâ: qu'on leur doit , que des
variations fubites & des interprétations multipliées,
te Prince eut un foin extrême de les faire rédiger
par des gens, qui à la maturité du jugement & à la
fuperiorité des lumières , joignoient les fonds d'une
longue expérience; «uilî quelle majefté , quelle fa-
gelTe , quelle prévoyance clans ces Loix admirables
qu'elle donna aux Peuples Belgiques , iur-tout les par-
ties de la Police Eccléfiaftique &c Civile , fur la puni-
tion des crimes & des Cv^ntrats ufuraires, Tur le com-
merce &: la Navigation ? Loix , dit un homme connu ,
que la plupart des Nations éclairées ont cherché à
imiter ou à adapter à leur ufages , & qui fubfiftent
encore dans toute leur force; on les cite avec vé-
nération , le peuple les aime , & y trouve fon bon-
heur.
Dans le cas où il s'agifToit de faire quelques chan-
gement notables, opération qu'il eft impoffible de
réal.i'er fans bleffer le droit de nombre de particu-
liers , ce Monarque prit une voie admirable, pour
prévenir les murmures , il entendit tous ceux qui fe
difoient intéreffés aux changemens , &: il les admit
eux-mêines dans la dilcuflion des moyens pour fixer»
de la manière la plus conforme à l'équité, le degré
de leur préjudice; nous en avons eiur'autres un exem-
ple dans le fameux Concordat de Tan i ^ 3 i , conclu
<;ntre le Doyen &c les Régens de la Faculté des Arts
de rUniveriîté de Louvain , & les Patrons ou Col-
lateurs Eccléfiaftiques de ce Pays. Ceux-ci s'étant
plaints des Privilèges exce(iïfs accordés 4 !a Faculté en
fait de nominations , le Prince fufpendit l'exécution
du Privilège, chargea les parties de s'entendre, &: l'on
conclut de gré à gré , fous fes yeux & de fon aveu ,
Ifi Concordat, qui a fervi de bafc aux Privilèges des
( 170 )
nominations de la Faculté des Arts jufqu'aii temps de
leur anéantiffemenr.
Un autre exemple de modération, qui caraélérife
le règne de ce Monarque , fe préfente dans le Con-
cordat , qu'il a conclu lui-même avec l'Evêque de
Liège pour la Difcipiine Eccléfiaftique dans la partie
du Brabant , qui reflortiffoit fous le même Diocefer
Les arrangemens pris dans ce Traité font connus fous
le nom de Concordata Brabantix^ & conftituent une
partie principale de la Légiftation Eccléfiaftique de la
même Province.
Lorfqu'après les troubles de Gand , il fut trouvé
«éceiTaire de bâtir une citadelle dans un emplacement
occupé par le Monallere de S. Bavon, on ne procéda
à la fupprefîion de cette Communauté qu'avec des
égards fcrupuieux pour le fort des membres; on chan-
gea l'Abbaye en Chapitre , aujourd'hui Cathédrale de
S. Bavon, avec les formalités de Jufticerequifes. Cette
voie de douceur rendit aux fupprimés leur diflblution
même agréable.
On pouroit citer une infinité de pareils traits dans
la vie de ce Prince , qui ont rendu fa mémoire fi
chère : quelques-uris font confignés dans le premier
volume des Placards de Brabant ; auffi les Etats du
Pays, dans les hommages qu'ils lui rendirent , le jour
de l'abdication à Bruxelles, fouhaiterent [fpécialément
que (on fils fût l'imitateur de fa clémence , bénignité
& modération.
Philippe Second fut le premier qui fixa fa réfidence
à Madrid, à 300 lieues d'ici; ce puiffant Monarque ,
qui n'avoit vifité qu'une feule fois ces Provinces , oc-
cupé d'ailleurs des foins d'une vafte Monarchie, diA-
perfée dans différentes parties du monde , s'écarta de
la conduite des fes ancêtres, & fe régla fur des avis
étrangers , diélés par un elprit de prédileftion pour le
Gouvernement , & on connoît les malheurs qui en
(^71)
ont été la fuite. Détrompé, par une malheureufe ex-
périence , ce Prince gouverna eiifuite avec afîez de
douceur, & établit même près de fa Per(onne un con-
leil permanent de trois Confeiners nationaux, que
l'Empereur charles VI a rétabli à Vienne en 1717,
& qui a fubfifté jufqu'en 1757. Les Archiducs Al-
bert &irabelle, &: puis les Rois d'tfpagne Philippe
ÏII, Philippe IV, Charles II, l'Empereur Charles VI,
& Marie-Thére(e votre augufte Mère, dont le nom
e(ï fi cher aux habitans de ce Pays , ont tous marché
fur les mêmes traces.
Nos régii'tres font foi, que ce Confeiî a influé dans
tous les cas d'une Légillation importante , qui concer-
noit la Province. Cette louable coutume, par laquelle
les Princes de ce Pays fe font fait une Loi de pren-
dre leurs avis de leurs Confeillers nationaux, a été
fi condamment obfervée , qu'elle a pafTée aux yeux
des Légifles du Pays comme une maxime , qui tient
à la Conftirution de l'Etat. Perfonne ne(ï plus à por-
tée de connoïtre les défauts de la Légiflation que les
Confeils des Provinces
Tandis que nous femmes vivem.ent affeclés de ces
idées nous recevons l'Edit du 18 Oiflobre ,
qui concerne la fuppreffion des Séminaires Epifcopaux
5i la fubftltution
Le premier coup frappe fur ces pieux & falutaires
EtablifTemens , qui ont fait bénir la mémoire des Pè-
tes du Concile de Trente (a') , Se qui ont été reçus
avec tranlport dans toute l'Europe Catholique.
On fent aifément que pour parvenir à la ruine de
ces bons EtablifTemens , & pour induire V. M. aux
prétendues réformes, qu'on a en vue, l'ori doit avoir
fj) Voyez le Concile de Trente, fciT. 23. ch. 18. lesConci-
îcs nationaux 6cc. & nibfuc \?.iz-Ei\)cn èc Ccurnycr 6a:.
( ^72 )
groffi étrangement à Tes yeux les maux de ces Pro-
vinces : la préFace de l'Edit le fait affez voir : on y
dépeint les mœurs de nos habitans comme parvenues
au dernier débordement. Heureufemenr, comme nous
avons déjà obfervé , cela n'eft pas ; nous Tommes obli-
gés d'en informer V. M. mais ce qui eft d'autant plus
malheureux & affligeant pour la Nation, c'eft que ce
prétendu débordement fert de prétexte à la terrib'e
révolution , qui va la dépouiller de fon plus grand
bien, en dépoffedant nonibre de perfonnes d'un état,
qui leur appartient par une jufte récompenfe de leurs
travaux , & dans lequel ils avoient droit de compter
de finir tranquillement leurs jours; qui va fruftrer les
parens des efpérances qu'ils s'étoient formées pour
l'établilTement de leurs familles, & déranger une in-
finité de gens , dont la fortune tient plus ou moins
aux Adminiftrations , qui vont fubir la réforme.
Pour donner du relief au nouvel établiffement, on
prône fur- tout C uniformité de Doclriru ^ quon y e/z-
feignera. Quant à cette uniformité , Ton pourroit fe
faire les demandes fuivanres.
Trouve-t-on dans nos Séminaires Epifcopaux une
diverfité de Doftrine? Cette diverfifé, fi elle exifte,
eft elle de nature grave? a-t-e!Ie du rapport à quel-
ques points de dogme ou de controverfe ? a-t-elle
jufqu'ici produit quelque mal ? fait-elle craindre quel-
-que mal pour l'avenir ? Si la réponfe à ces queftions
pouvoir être douteufe , & fi ce doute pouvoir être
de conféquence , il eft du moins certain , qu'il ne
feroit pas plus difficile d'introduire une uniformité de
Dodrine {a') dans le petit nombre de nos Séminai-
{a) L'uniformité de Doftrine eft impofTible dans aucune
fcience , elle les détruiroit toutes. L'unifonrà.é Théologique
tlt parfaite dans toutes les matières où la liberté des opinions
n'a pas lieu. Voyt^ le 3c vol-. Part. Eccléf. p. 82
res
C ^75 )
res diocéfains, que de la fixer dans les deux Séminai-
res nouveaux, éloignés l'un de l'autre d'une quaran-
taine de lieues. On n'auroit qu'à charger les Evê-
ques d'agir de concert, de dreffer de commune main
une inftruclion pour fervir de règle à tous les Pro-
feffeurs des difFérens Séminaires ; on pourroit même
au befoin prendre recours à un Synode national ,
ainfi qu'il a été en ufage àès la naiflance de l'Eglife.
Les Synodes de Cambrai & de Malincs , tenus ibus
les aufpices de nos Souverains, publiés par leurs or-
dres , & obfervés jufqu'à préfent , font une preuve
manifefte , qu'on peut les employer avec i'uccès pour
régler la difcipline de l'Eglife Belgique.
Quant à ce qui concerne cette claufule que d'étr©
inftruit ou plus éclairé , on ne peut pas , fans in-
juftice , accufer notre Clergé d'ignorance. . . .
Les principes de la Dodrine & de la Morale font
fuffifans pour remplir avec fuccès les devoirs de leur
état : l'expérience a démontré même , qu'ils font
communément plus propres à la charge d'ames, que
ceux qui poffedent une érudition.
Les Lovanifles ont un amour-propre, qui
donne certaine vanité , laquelle ne s'accommode guer
res avec cet efprit d'humilité , avec un amour fi pro-
pre pour la paix & la concorde, qu'un bon Pafteur
doit prêcher cette grande érudition met trop de
diftance entre le Pafteur & les Fidèles vifiter
les pauvres, donner au malade le courage & la pa-
tience nécefifaires
Il femble du premier abord réfulter de l'Edit, que
les Evéques n'ont plus de pouvoir d'enfeigner ou de
faire cnfcigner la Théologie , ni d'ordonner d'autres
que ceux que les Profeffeurs Royaux ont trouvés
capables; mais nous avons jugé, combien la difpo-
iition feroit frappante, fi l'Edit de voit être ainfi en-
( 174 )
tendu : ce fcroit peut-être la première dans le mon-
de Chrétien ....
Les Evêques font , par la nature de l'Epifcopat ,
chargés de l'inftruftion des Fidèles , & leur ôter
cette charge , c'eft détruire leur caraftere , . .. . c'eft
vouloir faire rentrer dans la clafTe cominune des
Fidèles ceux , qui font établis pour les gouverner . . .
Delà nous avons jugé, qu'il falloir donner un
autre feus au dit Edit , iavoir que les dirpofitions y
reprifes n'auroient lieu pour autant , que les Evêques
y confentiroient ....
Il eft fait dans l'Edit une fuppofîtlon , que les Evê-
ques accepteroient avec gratitude le nouvel Eta-
blilTemenr ....
Ce n'eft que par ces motifs , que nous avons pu
nous réfoudre à publier l'Edit avant de faire nos
Repréientarions au Trône.
La furveillance & l'infpsftion des Ecoles de Théo-
logie appartiennent privativement aux Evêques....
Les Papes en exerçant ce pouvoir n'ont pas en-
tendu en priver les Evêques [a) . . . Circonftances
(.7) Diroit-on bien ce que les Promoteurs du nouveau
■fvfiênie , les Apologiftes de la Babylone des Séminaires-
Généraux , oppofent à ces obrervations irréfragables ? Ils
aA'ancent férieufement que la Théolopc n'eft pas une Science ,
que c'eft un enfemble d'idées vaines & de mots fans objet,
raïquel il eft impoffible de déroger, puilque ce n'oft rien.
Voilà comme la Science de la P».eligion eft naitée par l'Auteur
de ces innovations funeftes , homme d'un nom célèbre, mais
qui ne doit pas à lui fa célébrité. Si la Théologie n'eft pas
ViTiQ Science pour lui , comme je n'ai pas de peine à le croire,
elle a été la Science des Paul , des Polycarpc , des Athanafe ,
des Auguftin , des Chryfoftôme , des Boffuct &c. ; elle eft
encore la Science de tous ceux qui pofîédent à tond la Doc-
trine Chrétienne & qui favent repoufiér les traits qu'on lui
lance \ elle eft la feule Science qei intéreile foncièrement l'hom-
ïTie, en lui apprenant fes titres à l'imjnoriahté , & les moyens
(ï75 )
particulière? , qui ont donné lieu à réreclion <îe
la Faculté de Théologie dans l'Univerfité de Lou-
valn ....
Lorfqu'en 1416, le Pape Martin V , à la demande
du Duc de Brabant , inftitua l'Univerfité de Lou-
vain , le grand fciiifiTie de l'Occident touchoit à fa
fin , la paix de l'Eglile étoit fur le point de renaî-
tre: c'efl: pourquoi le St. Père ne voulant pas don-
ner de fujet de mécontentement aux Eveques ,
n'o6troya que les Facultés des Arts, des Droits Ca-
noniques & Civiles , & de la Médecine , & refufa
d'oftroyer la Faculté de Théologie , quoiqu'elle fût
demandé également. Quelques années après ce St.
Père étant mort, Eugène IV, ion Succeifeur, re-
doutant le Concile de Bâle, qu'il avoit été comme for-
cé de convoquer, & qu'il étoit rélblu de diiïoudre,
inftitua , à la demande du Duc de Brabant & de la
Ville de Louvain , la Faculté de Théologie , vrai-
fembîablement pour fe préparer un appui dans VU-
niverfiré de Louvain , qui fîguroit déjà en Europe.
II ne fut pas déçu dans (es efpérances ; la Faculté
d'y parvenir ; elle efi: la feule Science qv\ dans les grandes
conclurions Toit coriflap.te & uniforme , qui n'admet ni fyf-
tême , ni variation dans tout ce qui nous importe de favoir.
Dans les plus grandes obfcurités , dans l'explication de fss
plus profonds mytl;cres , elle poHede une fureté & précifion
de lang'ige , qui ne font dans aucune autre Science ; qui ne
laiîTe à l'erreur aucune échappatoire , aucun moyen de tergi-
verfatlon & de déguifeir.ent. 11 eft vrai que dans des fiecles
barbares , la Théologie a furchar^é fa doftrine de beaucoup
de queftions inutiles ; mais on n'a plus ce reproche à lui faire ,
& en cela même elle n'éro"t point aufiTi repréhenfible qu.e
fes Cenfeurs le prétendent. Voyez le DiB.Hijîor. Aulbtiurg.
1781-17S4, Art. Ahselme, Duns , Hangest , Suarez,
Thomas d'Aquin. — Cathic. P/iihf. n*. 419. 516.
( v«)
de Théologie foutint fortement Ton parti dans les
querelles avec les Pères du Concile de Bâle: cette
même Faculté ne contribua pas peu dans la (uite
à empêcher dans ces Provinces la réception de la
Pragmatique Sanélion de Charles Vif, Roi de France ,
digérée d'après les Décrets du même Concile , qui
donnoit tant d'ombrage aux Papes , & que Léon X
trouva moyen de faire abolir par (on Concordat
avec François I . . . .
Une autre réflexion .... fe préfenfe fous un af-
peâ: bien alarmant : fi nos Evcques acceptent l'E-
dit , tous les Ecoliers en Théologie vont être af-
femblés dans un même Edifice.... tout le dépôt
de la Doftrine & de la Religion fera remis entre
ces feules mains ....
Il eft dangereux de confier tont le dépôt de la
Foi à un feul Corps.... l'elprit de l'Hétérodoxie
s'emparant des Profefîeurs, le poifon palTera d'abord
parmi tous les Ecoliers. Ce n'eft pas la même cho-
fe lorfque l'enfeignement de la Théologie eu par-
tagé en différentes Ecoles fous l'infpeélion des Evê-
ques. Le Bayanifme n'a pas pp.fTé les murs de la
Ville de Louvain .... Le calme regnoit dans les
Séminaires (a) ....
(û) Que l'Augiifle Sénat avoir bien prévu le fâcheux ave-
nir qui vérifia incontinent ces fages obfcrvations ! w Au inilieu
„ de ces ravages ( difoit un Auteur trois ou quatre mois
„ après la rédaction' de ces Remontrances) nous gardions
„ encore cette foi antique qui avoir échappé à tant de ré-
„ volations^ que des fedaires fanatiques & fanguinaires n'a-
„ volent pu arracher du cœur de nos Citoyens ; lorfqu'un
,, prG;et qui ne peut avoir été conçu qu'à la fource de tou-
„ tes ténèbres , rafTembla ('ans un même lieu les candidate
„ du faint Miniftere , contre la Loi exprefTe du Concile de
5, Trente, Tufage de l'Eglife uriverfelle, la nature même Sc
( 177 )
Au terme de l'Art, ç de l'Edit toutes les Bour-
f'es & Fondations ("ont transférées au profit des deux
Séminaires nouveaux ; ce qui eft contraire à la juftice,
aux volontés préfomptives des Fondateurs ....
Et quant à l'ufage répandu aujourd'hui de chan-
ger quelquefois la deftination des Fondations ; ces
changemens ne peuvent (e commettre fans injuftice;
un Citoyen , par exemple , de Gand , de Bruges ,
D'Ypres, pouroit il être préfumé porter un confen-
tement tacite , que cette Fondation foit transférée
dans une autre Province à 30 ou 40 lieues de fa
Patrie ? . . . . à faire perdre au Souverain l'amour &
le refpeft & la confiance de fon Peuple?.... c'eft
le manque d'égards pour la confervation de fes
„ le but de l'Inftitution Sacerdotale. On vit alors arriver
„ de l'extrêmiré de la Germanie, des hommes conPxUS par
„ l'iniquité de leurs principes , par leur attachement à une
„ Sette odieufe ik particulièrement profcrite dans ce Pays ,
„ répandre la corruption à pleines mains , fouffler Thé éro
„ doxie & le fchirme dans les difcours , dans les livres,
„ dars les leçons publiques, & faire de i'Ecole de la Doc-
„ trine (ainte , l'Ecole de toutes les erreurs... Pcntifes du
,, Seigneur, vous, aux (oins defqueis il a confié l'Egli'e
„ Belgique, oîi s'eft per«.Iu dans ce moment cririque, votre
„ zèle oc votre éloquence ? Comment des paroles de feu
„ voiîs ont -elles manqué, pour réclamer votre plus cher
„ héiitage ? Plus cruels que r Autruche du défen , avez-vous
j, pu abandonner ce germe précieux fur le fable brûlant d'un
„ rivaee perfide?... Mais(ô Providence qui dtniiit la force
„ par la foiblefie ! .) les enfans ont condamné la fatuTe pru-
„ dence des pères. L'ingénuité & l'innocence ont dévoilé
„ l'impofture, l'ont combattue, l'ont confondue. Satellites,
„ priions , menaces , traitemens durs 5c flétrifîans , vous
„ avez couronné cette étonnante réfiflance. Mais , ô ten-
„ dreiie paternelle, qu'avez vous éprouvé dans ces momens
„ terribles 1 Pères Chrétiens , hommes généreux & fenfibles ,
„ dans quelle preffe ont été vos cœurs durant ces barbares
„ expéditions ! "
( V8 )
Droits . r. . Nous avons vu ci-devant combien Char-
les V eft parvenu à faire bénir fa mémoire par l'atten-
tion particulière , qu'il s'efl donnée conftamment
à radurer (es Sujets fur leurs intérêts & propriétés.
Nous paffons fur d'autres inconvéniens , qui fe
préfentent dans l'exécution de l'Edit , tels que font
la perte que la Flandre fera dans le cas de faire
par l'exportation des deniers des Fondations , & par
les gros frais auxquels fes habitans feront expofés
pour élever leurs enfans à l'Etat Eccléfiaftique. Tous
ces objets, quolqu'aflez notables pour mériter l'at-
tention d'un bon Prince, femblent di!paroître devant
ceux, qu'on a traités ci-devant. Une remarque en-
core à faire , & qui n'eft pas à méprifer ; c'efî que
ce furcroît de" dépenfes, la longue durée du cours
de Théologie & d'autres confidérations pourroient ai-
fément caufer dans le Pays une difette de Maîtres
d'Eglifes pour la charge d'ames. On annonce une
multiplication de Paroiffes : mais fi le dégoût pour
l'Etat Eccléfiaftique , qu'on commence à voir pren-
dre, fait encore quelques progrès; il eft à craindre,
que même celles , qui exiftent aujourd'hui , ne devien-
nent en partie déiertes.
Voilà , Sire , les confidétations que nous avons
cru devoir mettre fous les yeux de Votre Majefté au
fujet & à l'occafion de l'Edit des Séminaires. Nous
n'avons pas moins procédé fans délai à fa publica-
tion- Cette prompte déférence eft une marque cer-
taine de la pureté de nos intentions : notre devoir ,
& notre zèle pour le bien du Royal fervice & de
Ja Patrie ont di.^lé no< paroles, qui ne font dans le
fond que la voix, les cris & les vœux du Peuple
en général. Si nos effcnts font aftez heureux que de
g;îgr,er quelque délai dans l'exécution de ces grands
plans de réforme jufqu'à ce que Votre Majefté ait
C ^7^ )
entendu fes bons Sujets , les Evêques , les Etats ;
les Officiers de Juftice , nous ne doutons pas de
leurs fuccès ultérieurs.
Que fi malheureufement notre voix n'étoit pas écou-
tée pour le préfent , & que les fuites ne répondroient
pas aux efpérances , c'eft alors qu'en compatifTant avec
la Patrie , notre peine ne fera pas moindre fur les
regrets auxquels le bon cœur de Votre Màjefté fera
expofé ; nous les partageons d'avance : car nous
fommes intimement perfuadés des vues falutaires de
Votre Majefté. On eft pénétré de refpcft & ravi
d'admiration à la vue de cette activité laborieufe
& infatigable , que Votre Majefté met dans les foins
de fon Empire , à la vue de ces courfes & fatigues
continuelles, qui en dérobant prefque le rems né-
cefTaiie au repos & aux befolns de la vie , ne laiffent
rien à la diiTipation.
Nous ne pouvons nous difpenfer de rappeller
enfin à Votre Majefté que le titre , qui a porté la
Souveraineté de îa Flandre dans l'augufte Maifon
d'Aurriche n'a rien de commun avec ceux de fes
autres vaftes Etats : ce titre eft un pur droit de fuc-
ceftion aux anciens Comtes de Flandre. Le fort de
fe trouver aujourd'hui au pouvoir d'im grand Mo-
narque ne fauroit altérer fa condition : la réunion
de plufieurs Couronnes fur une même tête n'eft pas
un moyen légitime pour confondre les Droits de
leurs différens habitans. Votre Majefté a pris des
engagemens particuliers avec it^ Sujets de Flandre,
ils lont confacrés par le ferment foiemnel , qu'elle
a prêté lors de fon inauguration entre les mains des
Repréfentans du Peuple.
C'eft cette déclaration folemnelle, à laquelle nous
appelions , qui eft le palladum de nos droits & de
nos libertés ; il a été refpeété , Sire , par vos An-
( ^8o)
cêtrcs, fauroît-on douter, qu*il ne le Toit également
par un Prince auffi bienfaiiant &c aufîi humain que
Joseph II.
Nous fommes avec le plus profond refpcft^
G uni, 17 Novtmbn 1786.
F I N.
TABLE
DES MATIERES.
iD £RMEys prêtes à l'Inauguration de S. M. Joseph II ,
en qualité de Comte de Huinaut , fplemn'ijéc à Muns L 27
Août 1781. Pag. 7
Réception de Sa Majejlé pour le Chapitre de Sainte- IVaudru ,
prononcée par la Dame Aînée. ibid.
Serment de Sa Majefté au Chapitre de Sainte - Waudru, 8
Serment de Sa Majefté aux Etats de Hainaut. n
Serment des Etats de Hainaut. lo
Serment de Sa Majejlé au Magifirat de Mans. 1 £
Serment de la Paille de Mons. 12
Extrait de la Chartre du Pays & Comté de Hainaut , contenant le
Serment que prêtent les Confeillers de la Noble & Soure.'-ainc
Cour de Mons. 13
Autre Extrait de la Chartre de Hainaut. ibidr
Dépêche de Leurs Altefjes Royales , en envoyant au Co::fc:l
Souverain de Hainaut un Exemplaire de t Ecrit rédigé par Sa
Majejlé , pour manifejler Jes vues & principes , &c. 1 4
Remontrances du Conj'eil Souverain de Hainaut, du 5 Février
1 787 , au fujet du nouveau Règlement de la Procédure Civile. 1 Ç
Réponfe du Gouvernement aux Remontrances précédentes. 21
Jirrêté du Confcil de Hainaut , envoyé par extrait de fes Regijlres
à Leurs AlteJJes Royales , avec la Lettre i envoi qui ejl à la
fuite, du 28 Avril IJ^J. 22
Lettre des Députés des Etats au Confeil Souverain de Hainaut ,
du "{O Avril 1787. 24
Remontrances des Magljlrats & du Confeil de Ville de la Ville
de Mons, du<) Mai 1787, à Leurs Altcjfes Royales. 26
Dépêche de Leurs Altejfes Royales , du 7 Mai 1787 , adrijfée
au Confeil Souverain de Hainaut , & par Copie aux Députéi
des Etats dudit Pays. 29
Lettre de Remercîment du Confeil de Hainaut à L. A. R. 31
Lettre des Préfident &• Gens du Confeil Souverain de Hainaut.,
à S. A. le Duc d'Aremberg , Grand- Bailli du Pays , &c. &c, 3 2
Compliment fait à la Cour à Mons , par les Avocats en corps ,
durant la Séance du matin du 8 Alai 1787. 33
Remerciment des Etats de Hainaut à Leurs Alteffes Royales , du
7 Juin lydj. 34
T **1
a8i TABLE.
Arrêt de la Noble & Souveraine Cour à Morts ^ prefcrivant des
précautions pour maintenir la tranquillité & le bon ordre en ce
Pays 6* Comté de Hainaut , rendu enfuite du Reemljltoire du
Coii/eiller- Avocat de Sa MajeJIé , du 2% Juin 1707. 3$
'^rrèt de la Noble & Souveraine Cour à Mons , quiprofcrit les
feuilles périodiques ayant pour titre : Journal - Général de
l'Europe, du %y Juin 1787. 39
■Jtepréfentiiticn des Etats de Hainaut à Leurs /îltejjes Royales ^
du 28 Juin 1787. 40
'jiutre Repréfentatien des mêmes , du 5 Juillet 1787. 42'
Lettre des Etats du Pays & Comté de Hainaut à Leurs Alujfes
Royales^ du 9 Juillet 1787. 44
Repréfentation des Etats du Pays &> Comté de Hainaut , à Sa
Majejîé l'Empereur &• Roi , du 9 Juillet 1787. 4$
^îémoire des Négocians & Armateurs de la Pêcke Nationale de
la Ville & Port de Nleuport , préfenté à Mejfeigneurs les Etats
de Flandre, k 19 Jiûn 1787, ^1
iJépcche de Leurs Altejjes Royales , du 24 Juin 1787. 83
Autre ^ du ^ï Juin 1787. 8ç
Autre, du 16 Juin 1787. S8
Autre, du 17 Juin 1787. 90
Copie de la Lettre du Magiflrdt d'Anvers , du 18 Juin I787. 92
Lettre des Etats de Brcbant à Leurs Altejfi.s Royales, du 20
Juin 1787. 9>
flemontrances des Syndics des Nations de Bruxelles , à Mgrs. les
Etats de Brabant , du 9 Juillet 1787. 97
'Littre du Prince de Kuunit^ , aux Etats de Brabant , du 3 Juillet
1787, avec la Lettre de l'Empereur & Roi fur la Repréfentation
du ix Juin. 100
'Jtcponfe des Etats de Brabant à la Lettre de l'Empereur & Rat ,
du 4 Juillet 1787. 103
dépêche de Leurs AltcJJ'es Royales aux Etats de Brabant , du
14 Juitla 1787. 107
^ut'-e Dépêche du iS Juillet, adreffée aux mêmes. no
^cprc(enta::on des Bcurgmejires , Echevins & Confeil de la Fille
de Bruges, du 3 Juillet 1787. lia
^éireacle^ concernant la démolition du Bâtiment nommé Water-
îialle , en la, Ville de Bruges , fous la direilion du Colonel de
Brou. u(
^ M.eure des Etats de Flandre , à Leurs Alteffes Royales , du 4
Juillet 1-^87, 129
^Repréfentation des Armateurs de la Pêche Nationale , du a Juillet
1787, <l Mgrs. les Etats de Brabant. 123
\Mimcire fur lii Dreàs du Peuple Braban^oit , & Us atttimei y
TABLÉ.
iSj
portées su Nom de Sa Majefié l'Empereur &> Roi^ depuis quel^
^Uis années ; pré'ftnté à VAjfcmbUe Générale des Etats de
Ladite Province, par M. H. C. N. Vander Noot , Avocat
au Confeil Souverain de Brabant, le 23 Avril 1787. 129
Obfervat:on d'un rjlé Patriote, furie Mémoire précèdent ^ &c. 196
Diplcine par lequel les rênes du Gouvernement des Pays-Bas font
mis par intermi entre les !;/iains de M. le Comte de Murrcy,
du 3 Juillet 1787. ■ 199
Les Brabançons de Zumjunoen. 2C3
Avis aux Belges , fur l'envoi des Députés i Vienne , &c &c,
205
Lettre de Mejfeigneurs ies Etats de Brahani , dit 15 Juil'et ijZj ■,
à Jo s E P H II , e:i réponfe à la Lettre de Sa Majeflé , datée
du 3 Juillet 1787. 110
iioms & qualités des MeJJicurs de différentes Provinces, qui ont
comparu à l'AjfembUe Générale des Etats de Brahant , en.
Juillet 1787. 117
Noms de Mejjkurs les Députés pour Vienne , de différentes Pro-
vinces. 120
Précis de la Copie du Protocole tenu à l'Hôtel-de- Ville de Bruxel-
les , le iS Juillet 1787, dans l'AjfembUe des Seigneurs Dé-
putés des Provinces de Limbourg , de Luxembourg , de Flan-
dre , de Hainaut, de Tournai , du Tournéfîs , & de Malines ,
conféquemment de toutes les Provinces des Pays-Bas Autri-
chiens y à l'exception de celle de Gueldre , laquelle a déclare
par mijjion quelle fe confonneroit à la Délibération des autres
Provinces , &c. &c. 223
Note pour les différens Etats des Provinces des Pays-Bas , en-
voyée par Mgr. le Comte de Munvy. 224
Requête des Syndics des Nations de Bruxelles , à Mgrs. les
Etats, en Itur Affemblée , du 7 Août 1787. 226
Relation de ce qui s'ejl pajfé à l'Audimce de Son Excellence le
Comte de Murray , du 7 Août 1787. 227
Repréfentations des Etats de Flandres , à Sa Majeflé t Empereur
& Roi, du 27 Juillet 17S7. 230
Requête préfentée à Mgrs. le( Etats de B'abant, le 13 Juin 1787,
par les Chefs de la Bourgeoifi^ , &c. Jaifant le fécond des trois
Membres de la Ville d' Anvers, €^c. 23?
Lettre d'un Patriote , fur la meilleure Adminiflration de la Police
dans les Provinces Belgiques, 244
Lettre de Remerciment à Mrs, les Notables des Communes de la
Ville de G.md , demandant , par leur Repréfentition du 27
Juillet 1787, le changement du Magiflrat , pour l: compofer
excluftvemtnt de bons Pa^tmtes ^ du %Q Juillet 1787. 24?
284 TABLE.
Remontrances des Etats de Brahant à l'Empereur 6^ Roi , du. 5
Aoiit 1 787. 2 )[ 5
Lettre des Etats de Brabant^ à S. Exe. Mgr. le Comte Je
Murray , concernant un Article inféré dans h Gazette de
Cologne, du 7 Août 1787, N**. 65. 259
Repréfentation du Confeil de Flandre^ du XJ Novembre 1786,
fur laquelle efl fuivi le Pécret du Confeil-Privé ^ 4f^ Z Décem-
bre 1786, &c, é-c. ' 264
Fm de la Table.
BINDING SECT. hPR 2
DH
617
M
t. 7
Netherlands (Southern
Provinces, 1581-1793)
Recueil
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