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Full text of "Recueil des représentations faites à S.M.I. par les représentans & états des dix provinces des Pays-Bas autrichiens assembles, [édité par l'abbé de Feller.]"

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SEPTIEME 


RECUEIL. 


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AVIS. 

Ce  feptîeme  kecueil  &  les  précédens  fe  trouvent  à  Bruxelles, 
che^  Mr.  Lemaire  ,  Imprimeur  -  Libraire  ;  à  Courtray  ,  cke^ 
Mr.  Gambar ,  Libraire  ;  &  che^  tous  Us  principaux  Libraires 
des  Pays-Sas  Autrichiens,  fi'c.  &c. 


Iavisau  relieur. 


!-< 


Ce  feptierpe  Recueil  doit  commencer  par  l.i  feuille 
A  *f 'f  1"  ,  jiirques  &  y  coinpris  la  petite  Table.  On 
fera  fuivre  le  Faux  -  Titre  :  Suite  de  la  quatrième 
Partie  du  premier  Recueil^  &  la  fignature  1***, 
juiqu'à  la  fin,  avec  la  Table  des  Mati&res. 


QUATRIEME  PARTIE 

D   U* 

SECOND  RECUEIL. 

m  iHi.  Il  I     S 


k% 


>*iim-:. 


RECUEIL 

DES 

REPRÉSENTATIONS, 

PROTESTATIONS 

ET  RÉCLAMATIONS 

Z)  E  tous  les  Ordres  de  Citoyens ,  dans  les  Pays-Bas 
Catholiques  ;  au  fujct  des  Infractions  faites  à  la 
Conftitution ,  les  Privilèges  ,  Coutumes  &  Ufages  de 
la  Nation ,  &  des  Provinces  refpeclives. 

On  y  a  joint  la  Joyeuse  Entrée,  avec  Tes 

Additions,  &c. 


Il  y   il   roH.rta.nt  une   chofe   que   Von  peut   queljj'.efvis   oppofer   a. 

la   volonté    du    Prince  ;   t'e/i    Ij.    Religion.    LiS   Leix    de  la, 

Religion   font     d'un    précepte    fiipérieur  ,    parce    qu'' elles    font 

données  fur  la   tète  du  Prince    comme  fur  celle   des   Sujets, 

MONTESQ.  Efprit  des  Loix  ,  L.   III  ,   c.   X. 


'4^ 


De    l'  I  m  p  r  I  m  e  r  I  e    des    Nation  s. 


M.    Dec.    L  X  X  X  V  I  [. 


-t. 7 


V 


^    OCT  25  1968     ^ 


(7) 


REMONTRANCES  de^  rUniverfitc 
de  Lo'uvain ,  à  Sa  Majeflé  U Empereur 
&  Roi  ^  &c,  6'c.  &c,   (^) 


SIRE, 


V< 


OTRE  Université  de  Louvain  n'a  été  principale- 
ment fondée  que  pour  lervir  de  boulevard  &  de 
foutien  à  la  piété  ôc  à  la  foi  Catholique  (h)  :  ceux  qui 
la  compofent,  font  chargés  par  état,  &  par  les  ordres, 
les  plus  exprès  ,  émanés  du  Trône  ,  de  l'Inftruclion 
littéraire  &:  chrétienne  de  toute  la  jeunefie  du 
Pays  (cr).  Former  cette  jeuneffe  à  la  fcience.&  à  la 
vertu  ,  éloigner  d'elle  tout  ce  qui  eft  capable  de  la 
pervertir,  tels  ont  été  toujours  les  devoirs  facrés  de 
fes  Inftituteurs ,  &  la  partie  la  plus  efientielle  de  leurs 
fondions. 

Fidelle  à  Dieu  &  à  fon  devoir  ,  TUniverfité  op- 
poia  conilaniment  un  digue  impénétrable  à  toutes  les 
néréfies ,  particulièrement  à  celles  ,  qui  depuis  le 
malheureux  fiecle  de  Luther  &  de  Calvin  ,  ont  dé- 
folé  l'Eglife  ,  &  màs  l'Etat  à  deux  doigts  de  fa  perte. 
L'Univcrlité  écarta  touiours  fort  loin  de  la  jeunefl'ff 
l'eiprit  con-tagieux  des  difputes  en  matière  de  Rcli- 


(a)  Lz  date  manque  au  manulcrit  de  cette  Pièce;  mais 
il  parole  par  tout  fon   contenu,  qu'elle  eft  de  l'an  1782. 

{b)  Tous  les  Diplômes  &  autres  rrioauniens,  concernsnt 
l'érection  ■  de  l'Univerfité ,  prouvent  cette  aiicrtion.  On  iss 
trouve  raflemblés  dans  le  Livre  impriitîé  fous  le  titre  de 
Privllepa  Acad.  Lovan.  6'c.  Lov.  17^2  in-Ato. 

(c)  On  peut  voir  entre  autres  ,  k  célèbre  Règlement  de 
la  vinte  de  l'Univerfité  des  Sét-cniirimes  Princes  Albert  & 
irabellç^,  dci'an  1617,  iupiœmio  &.  ailleurs. 

A    A 


C8  ) 

giori',  Se  tout  ce  qui  pouvoit  fervlr  le  moins  du  raoïulc 
a  corrompre  les  mœurs  ,  ou  altérer  la  pureté  de  fa 
Doftrine. 

Sa  fermeté  à  cet  égard  ,  le  vrai  2ele ,  la  piété  ,  le 
déiinrérelTcment,  &  enfin  le  courage  héroïque  de  nos 
ancêcres ,  fe  trouvent  confignés  à  chaque  page  de  nos 
fafre? ,  comme  dans  toutes  les  hiftoires  de  ce  tems 
défaftreux  ,  dont  la  Belgique  malheureufcment  garde 
un  il  profond  fouvenir  ,  &  qui  ont  fouîlrait  fept  flo- 
riflantes  Provinces  à  leur  légitime  Souverain.  Tout 
cela  a  été  reconnu  enfin  en  plus  d'une  occafion  par 
nos  Souverains  mêmes  ,  les  auguftes  &  pieux  Pré- 
déceiïeurs  de  Votre  Majeflé  ,  qui  attribuèrent  haute- 
ment à  rUniverfité  ,  non -feulement  la  confervation 
de  la  Foi  orthodoxe  dans  ces  Provinces ,  mais  en- 
core celle  de  l'Etat,  &  la  fidélité  des  Sujets  à  l'au- 
torité légitime  (a^. 

Animée  ainfi  par  l'hifloire  du  palTé  &  par  de  fi 
beaux  exemples ,  l'Univerfité  de  Louvain  ne  peut  en 
ce  moment,  que  fe  ietter  aux  pieds  de  \otre  Majefté, 
à  la  vue  des  dangers  ,  auxquels  TEdit  fur  la  Tolérance 
va  expofer  tout  ce  qu'elle  a  eu  iufqu'ici  de  plus  cher  ! 
Elle  ofe  ,  Sire  ,  vous  fupplier  d'éloigner  ces  maux  & 
ces  dangers  ,  dont  la  crainte  nous  pénètre  ,  de  les 
éloigner  de  cette  ieuneffe  nombreufe  &  brillante  ,  la 
fleur,  refpérance,  &c  le  renouvellement  de  la  Patrie; 
&  de  quelle  Patrie ,  Sire  !  du  Pays  le  plus  florilîant 
peut-être  de  vos  vaftes  dominations. 

L'expérience  nous  apprend ,  que  jamais  Théréfie 
n'a  pu  être  tolérée  dans  un  Pays  où  la  Religion  Ca- 
tholique eft  la  feule  Religion  dominante,  fans  exci- 
ter tôt  ou  tard  les  troubles  les  plus  funeftes  ;  car, 
ou  la  Tolérence  civile  y  entraînera  la  Tolérap.ce 
Eccléfiaftique  &:Religieufe  (  &  en  ce  cas  la  Foi  efl 


(a^  On  peut  voir  à  ce  fu;et  A^icol.  VcrnuUl  Academ» 
Lov.  lé,  I  cap.  4.  Se  fur  tout  lib,  7.  cap.  ij,  &  dans  l'E- 
pitre  dédicat. 


perdue  )  (a)  ,  ou  elle  fera  le  germe  des  clUTenîions  , 
des  haines  Se  c!e  la  fureur  interminables  des  difputes  (/>). 
Ces  diffentions,  ces  haines,  ces  difoutes ,  font 
la  fuite  naturelle  de  la  diverfité  des  Dogmes  entre 
des  Concitoyens ,  Se  elles  ne  peuvent  manquer  d'être 
portées  au  comble  ,  lorfqu'une  de  ces  Religions ,  qu'on 
îiippofe  être  la  dominante,  condamne  les  Seftateurs 
des  autres  à  la  privation  de  tous  les  biens  &  de  tou- 
tes les  récompenfes  d'une  vie  à  venir  ,  &  les  regarde 
même  en  général  comme  des  viâ:ime3  dévouées  à 
toute  l'horreur  d'un  fupplice  éternel  :  or  c'eft  pré- 
cifément  ce  que  fait  &  doit  faire  la  Religion  Ca- 
tholique à  l'égard  de  toutes  les  Se£les  hérétiques  fans 
diftindion  ,  puifque  Jefus-Chrift  l'a  fait  lui-même ,  &: 
c'eft  ce  qu'elle  propofe  à  fes  enfans  comme  Dogme , 
&  comme  un  Article  eiTentiel  &  invariable  de  leur 
croyance    (f)  ;  Iç   moyen  après  cela,   que  les  Héré] 


(j)  La  profeiTion  de  Foi  de  Fie  IV,  porte  exprefTéinent: 
Hancvcrarn  catholicam  FiJerti  ^  extra  quant  ncrno  jhlvus  efje  fotcQ:. 
La  Tolérance  Ecciéfiaftiqne  &  Reiigicufe  où.  clcnc  incompa- 
tible avec  notre  Foi. 

ik)  Les  troubles  des  Pays-Bas  foiis  le  Règne  de  Phiiippe 
II  ,  Ceux  de  la  France  iufqu  au  Règne  de  Louis  XIV  &c. 
ce  qui  eft  arrivé  en  Bohême  du  tems  &  fous  la  conduite 
îougueufe  d'un  Ziska,  enWeftphalie  f()i;s  celle  d'un  Jean  de 
Leyde ,  en  Hongrie  &  dans  d'autres  Etats  Catholiques  en. diffé- 
rents tems  ;  tout  cela  prouve  alfez  notre  aOertion. 

k)  Voyez  la  Note  {a)  ci-deiTus  &  le  Cathechifme  de  l'Ar- 
clievèché  de  Malines  &  des  autres  Diocefes  de  la  même  Pro- 
vince, leçon  3, 

On  connoit  aiTe?.  racharnement  des  Hérétiques,  &  fur- 
toiit  du  parti  Fhllofophiile  contre  TEglife  Catholique  au  fu- 
jct  de  ce  Dogme,  qu'ils  appellent  cruel  &  barbare;  mais 
fi  Jefus-Chrlft  l'a  enleigné  lui-même  Ci)^'  '^*  Apôtres  l'eu: 
prêché  (2)  &  fi   l'Egiiie  n'a  fait  que  le  répéter  d'après  eux  , 


a)    Marc.   16,    i'.    16.  Ma::h.  i3  ,   i>.    17.    —  Joan.   3 ,  y.    1%. 
(i)  G-Uc.    j  ,  jr.  20.  21.  —  ad  Tu.  3  ,   ^.  10.  n,  &c. 


C'O) 

t'iques  puiffent  vivre  long-tems  en  paix  avec  ceut  dont 
ils  fe  croient  regardés  comme  féparés ,  non  -  feulement 
pendant  cette  vie  ,  mais  pendant  réternitc  (^). 

en  le  propofant  à  la  croyance  des  Fidèles  ;  qui  mérite  le 
mieux  le  nom  de  cruel  &  de  barbare ,  ou  le  feclaire ,  &  le 
prétendu  Philofophe  ,  qui  à  force  de  clameurs  étourdiffent 
le  monde  fur  la  crainte  falutaire  de  fe  perdre  ;  ou  le  Catho- 
lique qui  lui  anaonce  une  vérité  rigide  ,  fi  on  veut ,  mais 
néceflaiie  pour  affurer  fon  falut  ?  Aufurpli:s,  il  y  a  long- 
tems  que  tous  ces  vains  fophifmes  &  ces  déclamations  éter- 
nelles &  fcandaleufes  ont  été  réfutes  ,  pulvérifés  même ,  par 
nos  Apologilles.  Les  Nicole  (i)  les  Thomaffm  (a)  les  Papin 
(31  les  Bergier  (  4  )  les  Nonotte  (  ^  )  le  favant  Evèque  du 
Puy  (maintenant  Archevêque  de  Vienne  en  Provence  (6), 
d'autres  en  grand  nombre  ,  ne  lailTent  rien  à  défirer  à  ce  {ii]et. 
Il  eft  néanmoins  à  remarquer ,  que  quoique  ce  foit  un  Do^me 
parmi  nous,  que  hors  de  l'EgUie  point  de  falut ,  nous  ne  difons 
cependant  à  p.ucun  Seclaire  en  particulier  :  Fous  fere^  damné  : 
Nous  ne  nions  pas  qis'il  foit  abfolument  poffible ,  que 
des  Hérétiques ,  qui  font  baptifés  &  qui  croient  en  Jefus- 
Chrift ,  puiiTcni;  fe  fauver  à  la  faveur  d'une  giande  inno- 
cence des  mœurs  accompagnée  d'une  bonne  foi,  &  d'une 
ignorance  invincible:  c'eft  que  dans  cette  fuppofit.on  ils  ne 
cefient  pas  encore  d'être  enfans  de  TEglife  à  laquelle  la 
difpoution  de  leur  cœur  &  le  baptême  ,  qu'ils  ont  reçu ,  les 
tient  toujours  attachés.  Au  refîe  ce  cas  naturellement  fort  rare 
parmi  les  adultes ,  ne  forme  pas  une  exception  bien  pro- 
pre à  appaifer  les  Hérétiques  fur  le  Dogme  dont  il  s'agit , 
ri  à  dimiuuer  fort  la    haine  qu'ils  lui  ont  vouée. 

{a]  C'eft  de  qi'.oi  le  fameux  Miniftre  Jurieu  Auteur  infinî- 
mçnt  confidéré  parmi  les  P.éformés,  ne  fait  aucune  difficulté 
de  convenir.  Après  avoir  parlé  de  la  paix  dans  les  Etats,  8c 
fis  la  concorde  entre  les   Citoyens,  qu'on  fe  promet  de  la 


(1)  De  l'unité  de  PEglife  chap.    X.  &:c. 

(2)  Traité  de    l'unité   de  l'EgiiTe-  Paris  1686. 

(î)  Recueil   des  Ouvrages  de  M.  Papin.  Paris  1723  J-vo.  Tit.  Ij 
^,    I   &:   fuiv. 

(4)  Le  Déifmc  refuté  par  iui-même  Lett.  $.  &  ailleurs. 

(5)  Didioii.  Philofophique  de  la  Religiot»  ,  Art.   Tolérance. 

(â)  inUcudion  Paftùrale  fut  la  prttcndue  P.iilofopliie  de*  Incrc- 
«S'.ile^  modernes ,  tome  2^  cbap.  lo 


D'un  autre  côté ,  comment  Ce  feroit-il  que  c!e  xrms. 
&  zélés  Catholique?  pourroient  entendre  fans  ef- 
froi ,  &:  fans  un  faififfement  mêlé  d'horreur  &  d'indi- 
gnation, les  horribles  blafphêmes  &:  les  calomnies^ 
atroces  que  les  Hérériques ,  les  Calviniftes  fur-tout, 
vomifTent  continuellement  contre  les  plus  auguftes 
èc  les  plus  redoutables  de  nos  Myfteres  !  Comment 
pourroient-ils  entendre  de  fang_  froid  prononcer  à  tout 
propos  le  nom  odieux  &  infâme  d'Ante-Chrift  & 
de  fils  de  perdition  ,  que  ces  Set^aires  prodiguent , 
fans  honte  6c  fans  retenue  ,  au  Chef  vifible  de  i'E- 
glife ,  que  nous  appelions  notre  Père  (a)  1  Comment 
pourroient-ils  gnfin  fouffrir  toujours  en  paix  ,  qu'on 
pouffe  la  témérité  jufqu'à  ofer  taxer  leur  Culte  d'ido- 
lâtrie ,  éc  de  tout  ce  que  la  fuperftition  a  marnais  en- 
fanté d'odieux  (h)  !  Nous  en  corxluons ,  Sire ,  que 
des  Religions  fi  oppofées  &:  fi  incompatibles  dans  un 
Etat,  llir-tout  lorlqu'elles  participent  toutes  deux  aux 


Tolérance  civile,  il  ajoute,  „  Que  pour  en  venir  à  cette  paix, 
„  il  faut  encore  établir,  qu'en  ei\  fauv:en  tpr.tes  Religions. 
„  J'avoue, /^ou-yài^-i/,  qu'avec  une  telle  Théologie,  on  pour- 
„  toit  fort  bien  nourrir  la  paix  entre  les  dlveries  Religions  r 
„  mais  tandis  que  le  Papille  me  regardera  ccir.ir.c  r.n  cam- 
„  né,  &  que  je  regarderai  le  Mahoir.éran  comme  un  réprou- 
„  vé,  &  ie  Socinlen  comme  hors  du  Chriftianifme,  il  iera 
„  impofrible  de  nourrir  la  pnix  entre  nous*  car  nou5  ne  fau^ 
„  rions  aimer,  foutfrir,  ni  tolérer  ceiix  qui  nous  damnent. 
„  Nos  Mefneiirs  lentent  bien  cela;  c'ert  pourquoi  très  ailtt- 
„  rément  leur,  but  eft  de  nous  porter  à  l'indiiTérence  des  Re- 
„  ligions ,  fans  laquelle  leur  Tolérance  civile  ne  fei-viroit  de  rien 
^  du  tout  à  la  paix  de  la  Société.  Lstt.  de  furïeu.  Lat.  S.  p.  //<;. 

(a)  Voyez  la  prière  ce  Dimancl'.e,  après  'a  prcôication, 
imprimée  avec  les  Bibles  de  Dordrecht.  La  ConfofTion  Belgi- 
que, §.  36.  La  Préface  qui  fe  trouve  à  la  tète  du  Synode 
de  Dordrecht  Les  ouvrages  de  Luther,  des  Flaccus  llly- 
ricus  &c.  en  cent  endroits. 

•ybj  Cathéchirme  d'Heidelberg ,  approuvé  dans  le  Syno'-ie 
de  Dordrecht ,  Home.  Dcr,j.:i^i.  R:cueiî  des  Acres  5c  Nîén'o'reî. 
du  Clergé  de  France,  l^aris,  1768,  tome  i.  pag.  35.  oi  iulv. 


(  II) 

emplois  Se  à  radminiftration  publique,  font  des  ar- 
mées toujours  en  préfence ,  &  toujours  prêtes  à  s'af- 
faiiir  les  uns  &:  les  autres  (a). 

Peut-être  nous  objedera-t-on  que  l'expérience  eft 
contraire  à  ce  raifonnement  :  que  l'exemple  de  la 
Hollande  ,  de  l'Angleterre ,  de  la  SuiiTe ,  &  enfin  d'au- 
tres Pays  Proteftans,  prouve  affez ,  que  les  difréren- 
tes  Sedes  ,  fans  en  excepter  la  Religion  Catholique , 
peuvent  fe  fouffrir  mutuellement  &  fe  trouver  en- 
iemble,  fous  un  même  Gouvernement,  fans  en  trou- 
bler l'harmonie  ^  en  défunir   les  Sujets  entre  eux. 

Mais  (  &:  c'eft  à  quoi  il  faut  prendre  garde  ) 
dans  toutes  ces  contrées  ,  ce  n'eft  pas  notre  fainte 
Religion  ,  c'eft  une  Sefte  hérétique  qui  tient  le  ti- 
îiion  du  Gouvernement  ,  &  qui  forme  la  Religion 
dominante  de  l'Etat  :  &:  dès-lors  la  différence  eft 
trop  palpable  ,  pour  que  des  efprits  juiles  êsi  attentifs 
puiffent  s'y  méprendre. 

Les  Seftes ,  quelqu'oppofées  qu'elles  foient  entre  elles, 
6>c  fur-tout  avec  la  Pveligion  Catholique ,  ne  s'entre- 
condamnent  cependant  plus  abfolument.  Elles  difent, 
elles  croient ,  que  pourvu  qu'on  foit  d'accord  fur  les 
Articles  ,  qu'il  leur  plaît  ,  d'appeller  fondamentaux , 
toutes  les  Religions  font  bonnes  jufqu'à  un  certain 
pomt ,  &  que  du  moins  il  n'y  en  a  aucune ,  à  qui 
le  Ciel  foit  fermé  {h). 

Avec  cette  manière  de  penfer  &  d'envifager  les 
chofes ,  il    n'eft    pas  furprenant  ,  qu'on  puiffe  vivre 


iû)  On  "voit  aïïez ,  qse  c'efl  du  faic  S:  non  du  droit,  que 
nous  parions  ici  ;  la  Religion  nous  ordonne  d'aimer  tous  les 
hommes  fans  exceprion,  même  nos  plus  grands  ennemis, 
ïk  les  plus  grands  pécheurs  :  ello  l'c  permet  donc  de  hai'r  per- 
fonne;  mais  en  même  tems  elle  permet,  elle  ordonne  de  haïr 
les  vices,  &  fur-tout  i'iiércfie.  O^tte  difiiaftlon  eli  très-vraie 
^'L  très-néce.Taire  ;  malheurcuiement  la  folbleiTe  harn  aine  eft 
gr.tTde ,  &  rexpérieace  prouve  qu'on  ne  la  fait  pas  toujours. 

ib)  Mémoires  de  i'Eglife  ,  par  M.,  de  la  Pvoque.  Paris  ^ 
1C93  ,  in-^to.  llv.  4.  pag.  46S  &  (iilv. 


€11  paix  avec  Tes  Concitoyens  :  les  diiïenîion.ç  cîî 
matière  de  Religion ,  fous  ce  point  ce  vue ,  ne  font 
plus  ,  à  proprement  parler  ,  que  des  difputes  d'EccIe  , 
des  opinions  fans  confcquence  ,  &  très-conîpatibks 
entin  avec  le  maintien  du  bon  ordre  ck  de  la  tran- 
quillité publique. 

Il  faut  cependant  que  l'enthoufiarme  ne  s'en  môle 
pas ,  &c  que  les  têtes  ne  s'échauffent  pas  trop.  Sans 
ctre  obligé  de  feuilleter  les  liiftoires  des  teins  plus 
éloignés,  ce  qui  eu  arrivé  depuis  peu  à  Flefiingen, 
en  Ecoffe  ,  fur-tout  en  Angleterre  ,  ious  la  'conduitt 
d'un  Gordon  ,  fait  bien  voir  ,  qu'à  un  certain  point 
d'elfervefcence*,  il  n'y  a  de  fécurité  nulle  part. 

On  nous  demandera  peut-être  ici ,  comment  il  fe 
fait ,  que  les  Catholiques  foient  du  moins  laifiés  en 
repos  ,  &  qu'ils  y  lalfient  les  Hérétiques  à  leur  tour, 
dans  les  Pays  qu'on  vient  de  nommer  ;  ceux  qui  ne 
peuvent  en  aucune  manière  ni  en  aucun  tems  traliir 
ce  dogme  exclulif  de  leur  Religion. 

La  réponfe  eft  faite  :  d'abord  on  vient  de  voir  parf 
l'exemple  de  ce  qui  eu  arrivé  fous  nos  ^-eux  en  An- 
gleterre &  ailleurs  ,  que  ce  repos  n'eft  déjà  pas  trop 
alTuré  :  mais  quand  il  le  feroit  davantage  qu'il  ne  l'cfl 
réellement  ,  la  chofe  n'auroit  encore  rien  de  furpre- 
nant ,  ni  rien  d'applicable  aux  Pays  ,  où  la  Religion 
Catholique  domine  avec  la  liberté  entière ,  qui  lui  eft 
due  de  Droit  divin ,  pour  tout  ce  qui  concerne  l'exer- 
cice public  de  l'on  culte.  >j 

C'cft  que  dans  les  Pays ,  o«  pour  le  malheur  des 
Peuples  &  des  Souverains,  elle  n'eft  pas  la  Religion 
du  Prince  &  de  l'Etat;  c'eft-à-dire  ,  où  elle  n'eft 
pas  dominante  ,  les  Fidèles  5c:  leurs  Miniftres  font 
tenus  dans  un  abaiffement  &  dans  une  fujetion  con- 
tinuelle :  point  de  culte  publique  ,  nulle  apparence 
extérieure  de  K.eligion  ne  leur  eft  permife  ;  nul  moyen 
de  la  défendre  ou  de  la  propager;  il  leur  eft  détendu  , 
fous  les  peines  les  plus  grieves ,  de  travailler  en  pu- 
blic ou  en  fecret  à  la  converfion  de  qui  que  ce  puifTe 
être  :  ils  font  exclus  fans  ménagement  Se  iàns  excep- 


{«4> 

tjon  ^e  tout  Emploi  Civil  ou  Eccl^fiaftique ,  ■&  Ae 
tout  ce  qui  a  le  mouiclré  rapport  avec  l'Adminiflration 
publique.  En  un  mot,  les  Loix  du  Pays  moulées  fur 
l'ciprit  de  la  Seéle  dominante ,  leur  ferment  abfolumant 
la  bouche  pour  combattre  l'erreur ,  ou  pour  foutenir 
la  vérité. 

Il  en  eft ,  &:  il  doit ,  fans  doute  en  être  tout  au- 
trement dans  les  Etats  Catholiques  ,  où ,  grâce  à  la 
divine  Providence  &  à  la  foi  du  Souverain ,  la  vé- 
l'ité  n'eft  pas  encore  captive  ,  &  rie  fauroit  l'être  à 
ce  point,  tant  qu'on   ne  voudra  pas  l'abjurer. 

Dans  ces  Etats,  où  les  Miniftres  de  la  vraie  Re- 
ligion &:  de  la  îainte  Dodrine  ont ,  &;  doivent  avoir 
nécefTairement  la  liberté  de  marcher  tête  levée  ,  de 
montrer  l'appareil  de  leur  minillere  ,  &  d'annoncer 
en  public  au  Peuple  aflemblé  autour  d'eux  dans  les 
Temples  du  Seigneur,  les  vérités  immuables  de  l'E- 
vangile ;  où  il  leur  eil  permis  ,  où  il  efl  un  de  leurs 
pi'emiers  devoirs,  de  crier  tout  haut,  Cave.u  a  jer-^ 
mcnto  :  dans  ces  Etats ,  Sire ,  s'il  y  a  encore  de  la 
Religion  parmi  le  Peuple,  s'il  y  a  de  vrais  Catho- 
liques (  &  certainement  il  y  en  a  au  Pays-Bas  )  il  y 
aura  de  l'oppo/ltion  entre  eux  &  les  prétendus  Ré- 
formés; &  cette  ôppofition  eft  de  nature  à  exciter 
des  troubles.  Parmi  le  Vulgaire  fouvent  on  commence 
par  difputer ,  on  finit  par  fe  battre.  Le  Peuple  eft 
toujours  Peuple ,  &  n*eft  pas  en  tout  tems  maître  du 
mouvement  de  fon  zèle. 

Qu'il  nous  foit  permi'? ,  Sire,  d'ajouter  ici  une  ob- 
iervation  particulière.  Parmi  les  différentes  Seftes  , 
que  Votre  Majedé  s'efi  propofé  de  tolérer  dans  fes 
Etats ,  le  Calvjnifme  n'efï  pas  feulement  le  plus  incom- 
patible avec  la  Ca:holicité  ,  mais  avec  les  droits  du 
Trône  même ,  &  le  Gouvernement  d'un  feul.  Cette 
Seéte  ne  refpire  que  l'indépendance  (a) ,  elle  ne  recou- 


('a.^  „  Quand  la  F-ligion  chrérierme  (  dit  le  Prcf.  Montef- 
„  (juleu^  £Jpr.  des  Loix ,  liv.  24.  c.  5.  )  toufi'iit ,  U  y  a  deux 


r  15) 

noît  ni  auforité  ni  Hiérarchie  ;  &:  on  Ta  vu  plus 
d'une  fois  renverfer ,  avec  les  autels  ,  le  Gouverne- 
ment civil  qu'elle  tiouva  établi.  Nous  en  avons  fait 
la  trifle  expérience  fous  le  Roi  Philippe  II,  ôc  le 
cœur  faigne  encore,  quand  nous  lifons  les  fcenes 
affrcufes,  que  le  Calvinifme  donna  pour  lors  dans  ce 
Pays.  L'Angleterre  ,  la  France ,  le  Nouveau  Monde 
ont  eu  auffi  les  leurs,  &  on  rapporte  que  Jacques  I, 
Roi  d'Angleterre  ,  qui  dans  ce  moment-là  fembloit 
lire  dans  l'avenir  6^  prévoir  le  fort  infortuné  de  fon 
fucceffeur  ,  avoit  coutume  de  dire ,  que  point  d'Evé- 
qiies ,  point  de  Hoi  ;  maxime  qui  peut-être  n'eft  pas 
aifez  connue  ni  méditée  aujourd'hui. 

Nous  efpérons  enfin ,  que  la  bonté  paternelle  de 
Votre  Majefté  fe  laiffera  toucher  à  la  vue  de  nos 
craintes.  Nos  gémifîemens,  nos  humbles  mais  fer- 
ventes prières ,  réunies  aux  Remontrances  refpeftueufes 
des  Evêques,  des  Villes,  des  Communautés,  &  enfin 
de  tous  les  ordres  de  l'Etat ,  empêcheront  que  Votre 
Majefté  n'y  étende  leé  effets  de  Tolérance  civile,  aulîi 
loin  fur-tout  qu'elle  l'avoit  projette  ;  &:  le  meilleur 
de  tous  les  Souverains  ne  permettra  pas ,  que  nos 
Contrées  heureufes  &  tranquilles  voient  renaître  aw 
milieu  d'elles  le  germe  des  diffentions,  qui  leur  ont 
été  fi  funeftes ,  &  qu'une  P^ehgion  fainte,  qui  y  eft 


„  fiecles ,  ce  malheureux  partage ,  qui  la  divifa  en  Cathollqi:e 
„  &  en  Proteftante  ,  les  Peuples  du  Nord  embrafferent  la 
„  Piotcftantc.  &  ceux  du  Midi  gardèrent  la  Catho.ique:  ceft 
,,,  que  les  Peuples  du  No  d  ont  &  auront  toujours  un  ejfiù 
„  d'indépendance  &  de  liberté  que  n'ont  pas  les  Peuples  dv\ 
3j  Midi,  &  qu'une  Religion,  qui  n'a  pas  de  Chef  vifible, 
„  convient  mieux  à  l'indépendance  du  climat ,  que  celle  qui 
.,,  en  a  un.  "Nous  n'avons  garde  d'adopter  l'influence  des  cli- 
anats;  c'eft  le  fyftême  le  plus  faux  que  l'efprit  humain  ait  pu 
^funter,  abftrailion  même  fàre  de  la  Religion  :  mais  nous 
nous  fervoo*  4)]  t^xte,  11  éj^ablit  biçp  les  principes  du  C?il-- 
Kinjfme. 


(  i6) 

feule  révérée  depuis  tant  de  fiecles ,  vienne  à  fouffi-îr 
de  la  contagion  des  feftes. 

Mais  dût-on  avoir  le  malheur  de  voir  pénétrer  les 
Seftes  dans  l'étendue  de  vos  Provinces  Beigiques,  du 
moins  ,  Sire  ,  ne  permettez  pas ,  que  ce^  foit  dans  votre 
Univerfité  de  Louvain ,  la  feule  que  vous  ayez  dans 
cette  belle  Contré-\  Confervez  à  la  Religion  cette 
refTfturce  tout  entière  ;  permettez  de  tirer  un  cordon 
ferré  au  tour  de  la  cité  privilégiée,  &  qu'aucun  feftaire 
ne  foit  en  droit  de  le  franchir.  Tel  eft  l'objet  par- 
ticulier de  nos  très-humbles  &  tres-refpedueufes  Re- 
montrances ;  &  notre  confiance  eft  fondée  fur  des 
raifons ,  qui  nous  paroiïïent  de  la  plus  grande  force , 
&:  que  nous  ne  craignons  pas  de  porter  à  la  confidé- 
ration  de  Votre  Majefté. 

Nous  l'avons  déjà  obfervé,  l'Univerfité  de  Lou- 
vain eft  la  feule  Ecole  publique  de  tous  les  Pays-Bas, 
6^:  môme  des  Pays  voilîns.  La  jeuneiTe  nombreufe  , 
qui  forme  le  corps  de  fes  élevés,  eft  deftinée  à  rem- 
plir un  jour  la  plupart  des  Emplois  Civils  &:  Ecclé- 
liaftiques  du  Pays.  Quel  dommage,  quel  tort  à  jamais 
irréparable  pour  la  Religion ,  fi  cette  jeunefle  venoit 
à  fe  corron.ipre  !  fi  au  lieu  d'être  am  jour  les  Défen- 
feurs  de  la  Foi  antique ,  qu'ils  ont  héritée  de  leurs 
pères,  &de  cette  Religion  fainte  qu'ils  ont  fucée  avec 
le  lait,  ils  parvenoient  à  en  être  de  vils  apoftats  ! 

La  plupart  des  jeunes  gens  fe  rendent  à  l'Univer- 
fité depuis  l'âge  de  quatorze  jufqu'à  vingt-cinq  ans. 
C'eft  l'âge  des  paftions ,  &  de  cette  mobilité  de  ca- 
raftere  ,  qui  n'oppofe  qu'une  foible  réfiftance  aux 
impreflions  étrangères  ,  fur-tout  quand  celles-ci  ont 
le  charme  de  la  nouveauté  &  préfentent  l'amorce  d'une 
plus  grande  hberté,  ou  plutôt  d'une  plus  grande  licence. 
Que  n'aurons  -  nous  donc  pas  à  craindre  de  tout  ce 
qu'ils  verront  ,  de  tout  x:e  qu'ils  entendront  autour 
d'eux  ?  fi  des  Inftituteùrs ,  des  Profefteurs  publics  , 
on  des  Dofteurs  viennent  à  être  imlîus  de  maximes 
oppofées  aux  Dogmes  Catholiques  ;  S:  ce  que  l'on 
doit  envifager  comme  le  côté  le  plijs  dangereux  des 

Se6les 


(  '7  ) 

S.cles  Se  des  Se6^aires,  û  jamais  les  maîtres  fe  laiffent 
gr.gner  à  cet  efprit  d'indépendance  ,  qui  refiife  de 
croire,  ce  que  notre  foible  raifon  n'approuve  pas; 
n'eft-il  pas  à  craindre  que  leurs  Diiciples  participe- 
mat  plus  ou  moins  au  même  elprit  &  aux  mêmes 
ézaremens  ?  Des  hommes  faits ,  qui  voient  leurs  voi- 
sins impunément  n'oblerver  ni  abrtinence ,  ni  Fêtes  , 
qui  les  voient  fe  moquer  de  la  Confeffion  ,  de  la 
Mefîc  6^  des  cenfures  de  TEglik ,  doivent  être  bien 
sfrermis  par  la  grâce ,  pour  ne  pas  être  ébranlés  quei- 
qiiefois  par  l'exemple.  Quefera-ce  d'une  jeuneiTe  foible 
Çiirréfolue,  aujourd'hui  fur-tout,  que  nos  Philolb- 
phes,  que  nos  libertins  ont  ébranlé  les  fondemens  de 
la  foi  ;  que  les  âmes  tiedes  &  pareffeufes  traînent  im- 
patiemment le  joug  de  la  Religion  :  hidGclU  juga 
collo  trahcntes.  Horat.  lib.  3.  od.  3  ,  &é  qu'ils  n'at- 
tendent peut-être  que  le  moment  de  le  fecouer  ? 

Rien  n'eft  fi  facile  à  féduire  que  la  jeuneffe  ,  elle 
ouvre  le  flanc  aux  coups  qu'on  s'apprête  à  lui  porter. 
L'expérience  l'a  fait  voir  de  tout  tems.  Le  Roi  Phi- 
lippe II ,  en  étoit  fi  perfuadé  ,  c\v.e  voyant  les  Pays 
voi(ins  du  nôtre ,  la  France  fur-tout ,  infcftés  du  vc- 
n m  dangereux  des  héréiies,  il  aima  mieux  fonder  ex- 

Bès  &:  à  grand  fraix  une  nouvelle  Univerfité  à 
ouay  ,  que  de  fouffrir  plus  long-tems ,  que  les  pa- 
rer«  expofaffent  leurs  enfans  aux  dangers  de  la  fé- 
dufiion  ,  en  les  envoyant  faire  leur  cours  d'Etudes 
d.ins  des  Dniverfités  étrangères  où  la  contagion  s'é- 
toit  dé]a  répandue. 

C'eft  le  fameux  Joachim  Hopper ,  Confeiller  &:  Gar- 
de-des-Scéaux  du  Roi  Philippe,  qui  nous  apprend 
ces  cifconflances  &:  ces  motifs  {a)  ;  ils  font  d'ailleurs 
énoncés  d'une  manière  bien  cl.iire  &  bie-;  précife 
dans  le  Diplôme  d'ére6lion  ce  la  mên.e  Univerfité. 
Voici  ce,  qu'on  y  trouve  «  :  Quôd  cùm  P».egio  in- 


C  û  )  Hoynck  Van   l'anendrecht ,  AnakB.  Bd^,  tom.  s. 
part.  2  y  pas,  20  ^  21, 

B  ttt 


(  >8  ) 

»  ferioris  Germanise  ipfîus  Phllippi  Régis  diclioni 
»  hereditario  ]ure  lubjeéia ,  omni  ferè  ex  parte  à 
»  Popuiis  haereticis  atque  fchifmaticis  cinfta  6»::  ob- 
»  ftiTa  eflet,  &  propter  eorum  infidias  peftiferafqiie 
»  doctrinas  Cadiolica  illic  Fides ,  &  aniniarum  Ik- 
»  lus  maximo  in  dircrimine  verfaretur  :  tam  gravi- 
»  ter  periclitanti  in  illis  partibus  fidei  orthodoxa;  & 
V  animarum  faluti  aptiffimum  elle  remedium  duxerat, 
»  li  in  dicla  Regione ,  quae  à  tôt  tantii'que  Popuiis 
»  &:  gentibus  incolebitur ,  pra^ter  illam  celtberri- 
»  mam  ac  famoram  Univeriitatem  fludii  generalis 
>i  Lovanienlem  ,  alia  quoque  fimilis  Uuiverlitas  ftudii 
»  generalis  erigeretur  Ça).  « 

Le  célèbre  Boéce ,  qui  fut  lire  de  l'Uni verfi té  de 
Louvain  ,  pour  ttre  le  premier  ProfeiTeur  en  Droit 
dans  cette  Univerfité  naifTante  ,  qui  a  tant  loué  le 
R*oi  Philippe,  de  l'avoir,  érigée  ,  ck  qui  confirme 
dé  plus  en  plus  ce  qu'on  vient  de  dire  touchant  les 
grands  modfs.  de  .cette  éreâ:ion  (/•)  ;  les  juftifie  en 
même  tems  'd'uae  manière  bièh  feniible  6c  bien  pro- 
pre à  faire  impreluon  par  ion  propre  exemple  ,  & 
par  le  récit  de  ce  qui  lui  étoit, arrivé  perronnelleintiit. 
dans  le  tems  qvV.il , étoit  allé  étudier  le^  Belles  Lettres 
fous  des  maîtres  '  &  dans  la  fociété  jjl^^  cUfqiplcs  cor- . 

rompus  ft)..  (',.;;)V  af;  ii'.V; 

.  Au  relie ,  Sire  5  ce  n'efl:  pas  Boéce ,' ce  n'eft  pasr 
Philippe  II  Teuls  V "qui  penferent  ainli  :  tous  nos  Sou-, 
verains  depuis  Gharlemagne  jufqu'à  no5  jours,  eurent 
les  mêmes vue^  &:  les  mêmes  principes.,  oc  ils  agirent 
conftamment  d'après-  les  mêmes  .règles..- Par-tout  le 
même  efprit,  par- tout  les  mêmes  ioins  &:  les  mêmes 
attentions  pour  éloigner  loin  de  leurs  Sujets  la  con- 
tagion de  l'erreur  &  l'attrait  de  la  nouveauté  en  ma- 


(.2)  Mirai  Optra  d'iplom.  tom.  i.  cjp.  ii6. 
t  b)    In    orat.  funch.    nomine    Univerjluûs  Duacena    dïHA 
Pk'Uppo  I] ,  per  Boctium  Eponeni.        ■ 

{c)  In  prcf.  jynui^mat,  j,nùquït,  Ecdef.  pa^-  _j ,  ^, 


(  »9  ) 

tiere  de  Religion  ;  mais  fur-tout  pour  éloigner  cette 
pefte  des  Ecoles  deftinées  à  l'inflruéiion  de  la  JeunelTe. 

Pour  ce  qui  regarde  l'Univerlîîé  de  Louvain  eu 
particulier ,  on  peut  voir  une  file  d'Edits ,  de  Ré- 
gleinens ,  de  confultations ,  de  Lettres  ,  Edites  de 
la  part  des  Souverains,  tendans  tous  au  même  but 
&  dirigés  par  le  même  zèle  ,  depuis  le  Duc  Jean  IV  , 
qui  tilt  notre  Fondateur,  iulqu'à  l'Impératrice  Au- 
gufte  &  Religieufe  qui  laiffa  le  Trône  &  le  Dladé- 
à   Votre  Majefté  (^a). 

L'Univerfité  de  fon  côté  n'eut  en  aucun  tems  rien 
plus  à  cœur  ,  que  d'obéir  le  plus  ponftuellement  à 
des  Réglemens  auffi  fages  ,  faits  pour  la  gloire  du 
Très-Haut  &  pour  fa  propre  profpérité.  Elle  fit  plus  ; 
elle  porta  elle-même  ,  en  diffirens  tems ,  félon  l'exi- 
gence des  cas  &:  la  nature  des  circonftance*:  .,  un  grand 
nombre  de  Réglemens  de  Difclpline  £v  de  Poli- 
ce (  b.)  ,  qui  furent  tous  moulés  f.ir  l'efprit  &:  les 
intentions  connues  du  Souverain  ;  &  elle  les  fit  conf- 
tamment  exécuter ,  &c  à  la  lettre ,  avec  la  dernière 
pondualité. 

Ce  fut  ainfi  que  dès  l'an  1545  (c)  ,  c'eft-à-dire  , 
dès  la  première  époque  des  hérefies  naiffantes  de  Lu- 
ther &  de  Calvin  ,  elle  fit  ce  fl:atut  falutaire  toujours 
obfervé  depuis ,  confirmé  en  1557  6>c   1579  (^)  ,  fo- 


(a)  Nos  Aftes  font  remplis  de  ces  pièces:  on  en  trouve 

Î>lufieurs  auffi  dans  la  coUeftior'  dfs  Placards  ou  Edi:s  pour 
e  Brabant  8c  pour  la  Flandre  ;  les  bornes ,  qu'on  s'efl  pref- 
crit  dans  ces  très-h'jmbles  Remontr.;nces,  ne  permettent  pas 
de  les  inférer  ici,  mais  la  chofe  eft  bien  certaine. 

(b)  Tous  ces  Réglemens  fe  trouvent  dans  nos  Actes;  il  ne 
feroit  paspoifible  oe  leur  donner  une  place  ici,  fans  devenir 
extrêmement  diffus  :  mais  nous  fommes  prêts  à  les  pro- 
duire à  tout  inftant. 

(c)  VaL  Andrex  Fafli  Acai.  Lov.  16 jo,  \n-/i,to.  pa^.  j62. 
(^d)    Vernulei  Acad.  Lov. Le  Règlement  de  1579,  fe 

trouve  im'^jrimé  tout  au  long  à  la  tête  des  Lettres  d'imma» 
triculation,  qu'on  délivre  à  chaque  Ecolier, 

B  % 


(    10   ) 

iemnellemeat  approuvé  &:  renouvelle  en  1617  parr 
les  Art.  I  ,  2  ,  76  &  m  du  céltbre  Règlement  de 
la  viilte  des  Séréiiiffimes  Princes  Albert  &  Ilabelle  , 
èc  dont  on  s'efi:  fi  bien  trouvé  juiqu'ici ,  qui  exclut 
formellement  de  toute  profefTion  publique ,  ou  privée 
dans  l'Uni  ver  (i  té  ,  ainfi  que  du  droit  d'y  être  reçus  , 
comme  Ecoliers ,  tous  ceux  qui  refuierolent  d'abjurer 
les  héréiies ,  6c  de  prêter  le  ferment  de  catholici'ié. 
L'Univerllté  a  toujours  été  fi  terme  dans  ce  prin- 
cipe ,  qu'aidée  &  Ibutenue  de  fes  auguftes  Maîtres , 
elle  auroit  préféré  de  tout  facrifier ,  plurô'.  que  d'ad- 
mettre dans  fon  fein  une  feule  perfonne,  de  quelque 
rang  qu'elle  pût  être  ,  dont  elle  n'auroit  pas  été 
àiTurée  ,  qu'elle  apportoit  la  plus  fiine  Doi^lrine  : 
On  l'a  vue  refufer  ainfi  un  Eraime  (a)  un  Jufte-Lip- 


(fl)  Erafme.  dans  une  Lettre  qu'il  écrivit  à  George  Haloin 
le  29  Août  1517,  Si.  qu'on  trouve  clans  la  dernière  colledion 
de  fes  Ouvrages  .tom.  3  ,  part.  1.  Eplr.  264 ,  s'énonce  de 
cette  manière  :  Totus,  hoc  efi  cum  blbliothcca  Lovanium  cornini- 
frari  :  cum  Th:o!ogis  alùjfima  pax ,  ai<^u:  adeb  necej/îtudo .... 
Dejîinant  me  in  Juum  orciinem  coovtare  &c.  Il  confie  cependant 
par  les  Archives  de  la  Faculté  de  Théologie,  qu'il  n'a  pu 
parvenir  à  y  être  aggrégé:  indubitiblement  par  la  feule  rai- 
Ion  ,  qu'il  étoit  fufpeâ;  de  nouveauté.  Il  s'en  plaint  :  ''ez  ou- 
veneii»3nt  dans  fa  Lettre  du  y  Juillet  IT21,  aJ  liîch^rd.  Pa.- 
.€<ium  ;  &  dans  celle  ad  Petrum  B.rblrlum  de  la  même  an- 
née, ièii.  Eplt.  583,  &  587.  Au  relie,  l'Univerfité  deLou- 
vain  n'efl  pas  la  feule,  à  qui  la  Dcftiiae  d'Erairae  ait  pa- 
j-u  fufpefle.  La  Faculté  de  Théologie  de  Paris  cenfura  pu- 
bliquement, en  15  31,  un  grand  nonîbre  de  propofiuons  ex- 
traites de  fes  paraphrafes  fur  le  Nouvean  Teflument ,  '6l  de 
quelques  autres  de  fes  Ouvrages.  Ses  Colloques  fureur  éga- 
lement condamnés  par  la  So  bonne  eu  IÇ26  &  la  lecture  en 
■flit  défendue  dans  l'Uni vcrfité  en  15  28.  Il  efl  vrai  cepen- 
dant qu'Erî-nne  déclara  plus  d'une  fois  de  vouloir  fonmetrri 
tous  fes  fentimens  à  l'Eglife  ;  &  que  fe  trouvant  à  Bnfle  , 
peu  de  tems  avant  fa  Uiorc  ,  il  témoigna  im  grand  déftr 
i'en  fortir ,  pour  ne  pas  finir  fa  vie  dans  un  Pays ,  où  il 
étoit  -envii-onaé  d'Hérétiques.  Voyez  fa  Lettre  du   20  Jui» 


(  ^o 

fe  (a)  un  Blls  (A)  on  l'a  vue  fur  le  point  de  rejetter 
un  Marti'.i  Dorpius  (c)  on  l'a  vue  abandonner  un  Joiîe 
Velfin  (ci)  malgré  les  talens  éminens  qui  Ijvilloient  en 
eux  &:ma[g'é  le  grand  luitre,  qu'ils  dévoient  pro- 
curer à  nos  Ecoles.  On  a  vu  enfin  renvoyer  d'illuf- 
tres  Allemands  ,  des  Danois  ,  des  Polonois ,  des  An- 
glois ,  des  jeunes  Gens  d'autres  Pays  (c)  aufïi  diftin- 
gués  par  leur  nom  ,  que  propres  à  porter  au  loin  la 
réputation  de  l'Univerlité  ,  par  la  feule  raifon  qu'ils  ne 
faifoient  pas  proreffion  de  la   Foi  Catholique. 

Seroit-il  polfibie ,  Sire,  que  tant  de  Prirxes  ,  & 
tant  d'Hommes  célèbres,  qui  ont  fait  &  feront  à  ja- 
mais la  gloire  de  l'Univerfité  ,  fe  fuflent  trompés  tous  ,. 
pendant  le  laps  de  trois  ficclcs ,  fur   une   affaire  de 


1536,  à  Conrard  Gocleniiis  ,  ihhi  Epir.  1199;  ce  n'eft  donc 
pûS  ici  notre  intention  de  lui  co;uef1;er  ici  fa  Catholicité. 

(a)  Juûe  Lipfe  a  été  reçu  dans  rUniverfué,  &  ilyeilmort: 
Vi:ns  ce  n'a  été  qu'après  avoir  donné  des  preuves  non  équi- 
voques de  fon  changement ,  &  de  fa  foiimiffîon  entière  * 
la  Dodrine  de  l'Eglife,  daiis  laquelle  il  a  toujours  perfévéré 
depuis. 

f.h)  Louis  Bils,  Seigneur  de  Coppenfdamme  ,  célèbre  Ana- 
tomifte.  La  Lettre  que  l'Univerfiré  écrivit  à  fon  fujet  au  Marquis- 
dsCarafena,  Gouverneur  des  Pays-Bas,  îe  7  Mai  1664  ,  nor.9 
paroit  trop  remarquable  pour  ne  pas  la  joindre  ici.  On  la 
trouvera  ci-après yi^Z;  lit.  A- 

(c^  Cette  hiiloire  fe  trouve  tout  au  long   dans  les  Aélcs 
de  la   Faculté  de  Théologie ,  du  aS  .^aillée ,  du  4  Août  6c 
.du  3-0  Septembre  1520. 

(^)  Joffe  Velfin  Juftus  Velfuis  Dofteur  en  Médecine  trè« 
renommé  donna  da^s  les  erreurs  du  Proteiîantifme  ;  il  prit 
fagement  le  parti  de  fe  retirer  à  Louvain ,  &  de  ne  pas  at- 
tendre qu'on  y  exécutât  à  fa  chnrge  les  Décrets  portés  par 
rUniverfité  en  1545,  dont  il  a  été  fait  niention  plus  haurJ 
Voyez  fon  Art.  dans  le  Dlclionn.  de  Bayle,  &  dans  les 
Mémoires  pour  fervir  à  l'Hilloire  litt.  des  Pays-Bas  par  J, 
■N.  Paquot  Lov.  ij6j. 

{C)  Voyez  fa  Lettre  fub  lia.  A.  &  VernuUi  Acud.  Lov, , . , 
Nos  Ailes  d'ailleurs  en  font  pleinement  foi, 

Bj. 


(  2i  ) 

cette  îiîiportaiice  ?  Se  pourroit-il,  que  croyant  avancer 
le  bien  public  ,^ils  n'auroient  fait  que  le  reculer?  Pour- 
roit-on  s'imagi;\er  enfin ,  que  dans  le  tems ,  qu'on  les 
a  cru  remplis  d'un  faint  &  véritable  zèle  pour  l'hon- 
neur de  Dieu  Se  l'avancement  de  la  Religion  ,  ils  n'au- 
roient été  que  des  Entlioufiaftes  &  clés  VilioAnaires  ? 
Non ,  il  en  coûteroit  trop  au  cœur  fenf.bîe  &  géné- 
reux de  Votre  Maïeuc  ,  de  prononcer  aufîi  durement 
fur  tant  de  pcrfonnageî  vertueux  ,  ainii  qiie  fur  les 
Princes  Tes  Prédécefieurs  :  il  en  coûteroit  trop  à  nous 
aiiili,  de  dégrader  ainfi  la  mémoire  de  ceux,  qui  nous 
ont  comblé  de  bienfaits ,  qui  nous  ont  laifîe  leurs  lu- 
mières dans  des  Ecrits  qui  paffercnt  à  la  pofterité  la 
plus  reculée  ^  &C  de  qui  enfin ,  nous  tenons  en  tout 
6i  par-tout,  notre  état  &:  notre  exiftence. 

Mais ,  dira-t-on,  les  circonftances  peuvent  changer  , 
ce  qui  fut  utile  au  Public  dans  un  tems ,  peut  ceffer 
de  l'être  dans  un  autre.  Les  chofes  humaines  font 
lujettes  \  des  viciffitudes  ,  qui  ne  permettent  guère 
à  un  Legiflateur ,  quelque  fage ,  quelque  prévoyant , 
qu'il  foit,  de  porter  une  Loi,  qu'il  ne  pût  jamais  être 
queftion  de  réformer  :  oui ,  Sire ,  les  chofes  humaines 
font  lujettes  à  ces  viciffitudes ,  puifque  l'homme  qui 
les  fait  naître  ,  y  eft  lui-même  foumis  :  mais  la  Reli* 
gion  ne  l'efl  pas  ;  elle  eil:  immuable  dans  fon  effence , 
comm.e  fon  divin  Auteur  :  elle  le  fera  toujours  (  puif- 
que Dieu  ne  peut  faillir)  jufqa'à  la  conibmmation  des 
iiecles  :  &c  c'elr  ainfi , 'que  tout  ce  qui  foutient  cette 
Religion ,  tout  ce  qui ,  de  la  part  des  hommes  miême , 
tend  à  ihn.  avancement,  devroit  l'être  également. 

Les  nouveautés  d'ailleiu'S ,  font  toujours  fufpeftes  au 
fage  ;  elle  font  fouvent  fune/les  à  la  République.  Il  y 
a  grand  doute  (difoit  Montagne  (^))  s'il  peut  fe  trou- 
;ver  auffi  évident  profit  au  changement  d'une  Loi  re- 
çue ,  telle  qu'elle  foit,  qu'il  y  a  de  mal  à  la  remuer. 
C'efl  aînfi  que  penfoient  les    Philofophes    de  l'anti- 


tf— r'iin.'ji  ■#Wi>^i;  m 


4*)  Liv.  I,  p.  162» 


(  ^î  ) 

qiiité  :  Platon  (a)  ne  croyoit  pas  que  l'on  pût  changer 
h  miilique  ,  fans  altérer  la  conftitution  de  l'Etat.  C'cil: 
pouiier  les  chofes  trop  loin  ,  nous  l'avouons  :  mais 
de  quel  œil  lui  oc  fes  femblables  auroient  -  ils  vu  la 
moindre  altération  dans  les  chofes  ,  qui  intéreffent  une 
Religion  juftement  reconnue  pour  la  feule  véritable? 
Enfin ,  nous  ne  hnirions  pas  ,  ii  nous  nous  livrions  à  la 
confiance  d'accumuler  ici  la  foule  des  obfervations  qui 
fe  préfentent  à  notre  efprit.  Nous  finirons  pourtant  , 
Sire  ,  après  nous  être  de  nouveau  jetés  aux  pieds  de 
V.  M.,  la  fuppliant  le  plus  humblement  &  inftamment 
de  daigner  avoir  un  favorable  égard  pour  les  refpeftueu- 
fes  R-cmontrances  de  fon  Univerfité ,  de  calmer  fes 
alarmes  ,  &  d'empêcher  qu'une  Loi ,  qui  enheindroit 
nos  fcrmens  (b)  ,  &  porteroit  atteinte  à  notre  ancienne 
&  perpétuelle  Conftitution ,  qui  jetteroit  le  trouble , 
enfin,  parmi  nos  Profeffeurs  &:  nos  Elevesj,  puilTe 
y  avoir  fon  exécution.  " 
C'eft  la  grâce  &:c. 

D  E   VOTRE   MAJESTÉ, 

Les  très-humbles  Si  très-foumis 
ferviîeurs  &■:  fui  ers ,  les  Refteurs 
&  autres  de  l'Univerfité  de  Lou- 
vain. 

Erat  Jignatum  Af.  /. , 
Van-Gobbelsckroy  , 
comme  Recéeur  actuel. 

Hic  habehamr  Par  Ordonnance  ,   Signatum  :   P.   H. 
HeNDRICK,  Secret. 


(a)  Liv.  4.  des  Lcix. 

(b)  La  prcfejTion  de  Foi  de  Pie  IV ,  que  nous  avons  tows 
jurée ,  porte  expreffément  :  Hanc  veram  CathoUcam  fidcm ,  ex- 
tra quum  nmo  jalvus  ejp  potefi.. .  eamJem  imegiam  &  inviola- 
tam  ,  ufquc  ad  extrsmum  vita  Jpiritum ,  confianhjjîmè  ,  Deo  ju^ 
•vante,  à  mtis  fubditls  ,vel  illis ,  quorum  curdad  me  in  munere  me» 
fpeftahh,  tencri  ,  docerl  &  predicari,  quantum  in  me  erlt ,  cura- 
tknim.  Après  quoi  fuit  le  Serinent. 

»4 


(M) 

(A)  ExcELLENTissiME  Domine, 

XNCREDlBlLEefl:  quàm  «ratanter  &  qiio  applaufu 
ab  Acaciemiis  noflris  ,  exceptum  fit  irainus  illud  quin- 
que  cadaverum  ,  quod  tua  munihcentia  6c  te  procurante 
lifibus  medicorum  noftrorum  deftinatum  eft,  &  cum 
illis  hoc  fît  fingulare,  quod  condita  aetatem ,  quin  imo 
&:  aDternitatem  latura  ibnt ,  toto  illo  ,  quo  hœc  dura- 
bunt ,  tempore  tui  memorla  apud  nos  vigebit ,  ut  qui 
in  ils  tibi  fixeris  Monuinentum.  Sed  &  iftud  beneficio 
accedit ,  quod  Anatomicus ,  qui  ea  corpora  condivit , 
dicatur  docuiff;  Profeilores  noftros,  artem  veteribus 
ignotam ,  ut  fine  miflione  Sanguinis  cadavera  recen- 
tia ,  imo  &:  animalia  viva  in  partes  difiecentur ,  quo 
invento,  velut  novus  quidam  Elbulapius ,  multa  in  cor- 
poribus  humanis  profectura,  &  fcientia;  quae  iîla  cu- 
rât ,  opportuna  producat  :  illud  nihilomninus  in  authore 
difplicet,  quod  alienam  aneftraReligionem  profiteatur  , 
quodque  iMvis  legibus  Academicis ,  is  apud  nos  tolerari 
non  poterit  :  habent  illse  a  prima  ereclione,  ut  or- 
thodoxi  foli  in  ca  profiteantur  ,  &:  difcant ,  quas  oppor- 
tuna fuerint  oppugnandis  illis ,  qui  a  vera  fide  defcive- 
runt.  Idem  perpétue  ufu  receptum,  &  per  ScrenifTimos 
Principes  Albertum  &  liabellam  ,  in  vïf.taûonc  com- 
probatum  ,  ut  nemo  apud  nos  Academiœ  matriculae 
mferatur,  nili  qui  profcirionem  fîdei  Catholicse ,  juxta 
BuUam  Pii  IV  ,  Pontiiîcis ,  publiée  &  folemniter  emi- 
ferit  :  quod  adeo  ilriftô  obfervatur ,  cùm  enim  anno 
1642,  ad  civitatem  Lovanienlem  ,  très  Dani  nobiles, 
iique  Lutherani  adveniffent,  nequidem  per  commen- 
datitlas  Régis  fui ,  ab  aula  Regia  obtinere  poruerint, 
tit  in  Academia  permanerent.  Speranres ,  quod  pro  eo 
quo  es  &  quem  oflendifti ,  in  nos  afFeftu  atque  in  Ca- 
tholicam  Religionem  zelo,  idem  prsEftabi^:,  non  parie:  is 
inter  nos  vivere  ,  qui  alieni  funt  ab  ea  Religione ,  quam 
ab  incunabulis  cdofti ,  etiam  fanguine  noftro  tueri  fiimus 
parati.  Accedit  hoc  ad  cumulum  glorix  tUcC ,  uî  te  non 


tantiîm  benefaclorem  nofirum  ,  led  6<:  fidei  Catholicafr 
propugnatorem  colère  &  revereri  tenea-  mur  &c. 
Inicriiis  habebatur, 

Huinilli    fervi   Reftor    & 
Univerfitas  ftudii  genera- 
lis ,  oppidi  Lovanienfis. 
Hac  fcptlma  Mail  i6'6'/\. 

Supgrcriptio  erat  Excellentifîîmo  Domino ,  Domino 
Marchioni  de  Carai'ena  Belgii  &  Burgundiae  Gu- 
bernaîori  &c. 

REMONTRANCE  des  Etats  de  Flandre  à 
Leurs  Alitjjes  Royales^  au  fujet  des  Remontrances 
du  Chapitre  de  la  Métropole  de  Ma  ('mes. 

Madame,  Monseigneur! 

XjES  Prévôt,  Doyen,  &:  Chapitre  cela  Métropole 
ce  Malines,  nous  ont  adrefié  une  Requête  en  date 
du  26  de  Juin  dernier  ('■)  ,  que  nous  prenons  la  ref- 
peélueufe  confiance  de  joindre  ici ,'  par  laquelle  ils 
demandent  notre  interceiïion  en  qualité  d'Eglitc-Mere 
de  Flandre,  pour  faire  pafler  à  Vos  AlteiTes  Royales 
leur  réclamation  contre  les  intraftions  graves  & 
multipliées  faites  à  leurs  Droits,  Franchifes  &:  Pré- 
Togatives ,  &  les  fupplier  très-refpectueufement  de  le.<; 
tranfmettrc  à  Sa  Majefté  l'Empereur  &  Roi ,  pour 
qu'il  daigne  leur  en  accorder  la  réintégration  &  re- 
drefîement  complet. 

Ils  réclament  également  avec  autant  d'empreife- 
ment  que  d'amour  pour  leur  Chef,  le  retour  de  fon 
Eminence  le  Cardinal- Archevêque  &  de  i'Archi- 
Prêtre  Huleu ,  dans  leur  Diocele ,  comme  le  trou- 
peau qui  cherche  de  toute  part  ion  Palpeur. 

Nous   croirions  afi'ûiblir    les    caufes  hi  motifs  qui 


C*)   Fo^t^  tcHi,  5.  Part.  Eccléfiaft.  pag.  7. 


(  lO 

les  ont  portés  à  donner  leurs  très-humbles  Remon- 
trances à  Vos  Altefles  Royales  ,  fî  nous  entreprenions 
d'ajouter  quelque  choie  à  leur  plainte. 

V  e  Chapitre  cftimable  ,  par  la  Conftitution  ,  comme- 
par  4es  Membres  qui  le  compolent ,  mérite  à  tous 
égards  la  coniîdération  &  la  bienveillance  de  Vos 
AltelTes  Royales. 

Convaincus  de  leur  attachement ,  de  leur  zèle , 
&;  de  leur  amour  pour  tout  ce  qui  peut  contribuer 
à  l'accroiflement  de  la  Religion,  nous  iupplions  en 
très-profond  refpeélVos  AlteiTes  royales,  i®.  défaire 
parvenir  au  pied  du  Trône  leurs  jufles  réclamadons , 
&  de  les  appuyer  de  leur  puiûante  &  Royale  protec- 
tion, pour  obtenir  le  redreflement  complet  de  tou- 
tes les  infracl:ions  quelconques  qui  ont  été  faites  à 
leurs  Droits ,  Franchifes ,  &  Prérogatives  ;  comme 
il  a  été  fait  pour  tous  les  autres  Corps. 

2^  De  demander  &  d'iniifter  avec  cette  bonté  fi 
naturelle  à  Vos  AltefTes  Royales ,  le  prompt  retour  de 
Son  Eminence  le  Cardinal-Archevêque  de  Malines 
dans  fon  Diocefe  ,  &  de  rapptller  prompteraent  de 
fon  exil  rArchi-Prêtre  Huleu. 

Enfin,  nous  fupplions  Vos  AlteiTes  Royales  d'ac- 
corder à  ce  Chapitre  les  mêmes  Décrets  qu'il  leur 
a  plu  de  faire  émaner  pour  tous  les  autres  Corps 
&  Etats  de  ce  Pa5's ,  pour  le  redrefTement  aux  in- 
fractions de  leurs  Droits  ,  Franchifes  ,  &  Préroga- 
tives,  efijérant  que  Vos  AltefTes  Royales  feront  toute 
l'attention  poinble  à  notre  interceiiîon ,  pour  des  ob- 
jets fî  intérefiants  à  la  Religion ,  &:  à  la  confervation 
de  nos  Loix  fondam.entales. 

Nous  avons  l'honneur  d'être  avec  le  plus  profond 
refpefl: , 

Madame,  Monseigneur, 
Z>E  Fos  Altesses  P^oyâles, 
Les  tns-humMes  &  très-obcijfams  Serviteurs  ^ 
Les   Etats   de  Flandre, 

De  notre  AjfanbUz.  G  and  le  4  Juillet  1787. 

Far  Ordonnance  ,  Jignc  F.  D.  »'  Ho  OP, 


(  ^7) 

DISCOURS  adnjjc  a  Monjeigneur  d'Ji^iuville 
d:  MilLincourt  ,  Evéque  £Amyclcs  ,  Sii-^ragant 
de  Cambrai  &c.  6'c.  donnant  la  Conjirmadon 
en  La   Ville  de  Mons ,  /e   24  Juillet   1787. 


B 


Monseigneur, 


É  N I  Toit  celui  qui  vient  au  nom  du  Dieu  de 
nos  Pères 5  difoient  autrefois  les  enfans  des  Hébreux, 
dans  les  tranfports  de  la'  plus  vive  alégrefle  :  ne 
pourrois-^e  pas  faire  ici  l'application  de  ce  même 
texte  à  votre  entrée  dans  nos  murs  ?  Béni  foit  celui 
qui  vient  au  nom  du  Seigneur,  qui  le  reprcfente  fi 
fainteraent  &  par  les  fonctions  de  fon  miniftere ,  & 
par  la  régularité  de  fes  mœurs  &  par  les  travaux 
Apoftoliques  !  Béni  fcit  celui  qià  vient  au  nom  du 
Dieu ,  qui  nous  protège  ii  manir'eileip.ent  d'un  regard 
de  fa  bonté  ,  dans  la  fecoufife  terrible ,  qui  agite  ce 
notre  R-eligion  &  notre  Liberté  ! 

Dans  quelles  circonftances  ,  Monfeigneur  ,  pour- 
riez-vous  lamais  paroître  plus  à  propos  au  milieu  de 
nous  ?  dans  quel  autre  tcms  votre  préfence  nous 
feroit-elle  plv.s  agréable  ?  fi  jamais  la  vue  d'un  Pafteur 
chéri  a  rempli  de  joie  {es  ouailles,  c'eft  fans  doute, 
lorfque ,  après  avoir  effuyé  loin  de  lui  ,  les  efforts 
multipliés  d'une  tempête  défaftreufe  ;  leurs  yeux  le 
rencontrent  en  miême  tems  que  le  calme  renaît.  C'eft 
alors  qu'avec  le  plus  tendr-e  empreffement ,  on  court 
à  fa  rencontre  ,  pour  fe  réjouir  avec  lui.  Avec  quel 
ardeur  ne  lui  peint-on  pas  les  tnftes  dangers  auxquels 
on  vient  d'échapper  !  quelle  douce  conlblation  n°é- 
prouve-t-oîl  pas  à  lui  raconter  comment  on  a  fouftrait 
la  tête  à  la  foudre  menaçante  !  Qu'il  eft  délicieux 
pour  nous ,  Monfeigneur  ,  de  pouvoir  dépofer  dans 
votre  fein  le  fu]et  des  juPtes  craintes ,  qui  nous  ont 
alarmés  depuis  quelque  tems  ]  Vous  avez  partagé  n®s 


(  ^8  ) 

■inquiétudes  ,  vous  avez  gémi  fur  notre  fituatlon  ,  vos 
enirailks  fe  font  émues,  à  la  vue  de  tant  de  périls 
qui  nous  menacoient  ;  vous  avez  éievé  avec  nous 
vos  yeux  vers  le  Ciel ,  pour  le  conjurer  de  jctter  fur 
nos  Régions  un  regard  de  pitié.  Nous  ne  doutons 
pas  que  vous  ne  voyez  auiourd'hui  avec  joie  ,  qu'il 
a  entendu  nos  foupirs ,  qu'il  a  difperfé  les  Artifans  de 
nos  maux  ,  qu'il  fait  enfin  briller  au  grand  jour  fa 
Juflice  &  fa  Pu^f^ance  fuprême. 

Lcrfqu'à  la  voix  du  Souverain ,  l'on  vit  tomber 
toutes  les  fortifications  de  nos  Villes...  croyoit-il  peut- 
être  que  le  feul  courage  des  Belges  fût  dans  leurs 
murailles  ?  Croyoit-il  qx^t  déchus  de  leur  ancienne 
valeur  ,  qui  faifoit  dire  à  J.  Céfar  ,  que  de  tous  les 
Peuples  des  Gaules  les  Belges  font  les  plus  courageux  , 
les  plus  redoutables  ;  croyoit  -  il  que  ne  connoiffant 
plus  l'honneur ,  ils  n'auroient  pas  la  force  d'efi'aj'er 
leurs  bras ,  pour  foutenir  leur  liberté  ? . .  .  Lorfqu'oii 
vit  nos  forterefîes  fe  détruire  ,  tout  le  monde  s'é- 
cria unanimement  :  Vienne  a  des  deffeins  ,  Vienne 
nous  prépara  des  chaînes  !  ce  prcfleiitiment  général 
ne  s'efl  malheureufemcnt  que  trop  vérifié.  Perfonne 
cependant  n'auroit  ofé  s'oppofer  à  la  volonté  de  celui 
qui  i'ordonnoit  ,  le  moment  n'en  étoit  pas  encore 
venu. 

Inceffamment  après ,  les  entreprlfes  attentatoires  à 
notre  liberté  fe  fuccéderent  fans  mefure  ,  on  frappa 
coups  far  coups.  Nous  avons  vu  les  Cloîtres  brifés  , 
les  P».eligieux  des  deux  fexcs  bannis  ,  chafics  de  leurs 
Maifons  ,  leurs  Biens  devenir  la  proie  de  dépréda- 
teurs autorifés  ,  leurs  1  emplcs  dépouillés ,  détruits  , 
les  Ornemens  des  Autels  convertis  en  toutes  iortcs 
d'ufages  ,  les  Statues  des  Saints,  leurs  Reliques  en- 
levées ,  arrachées  de  nos  Eglifes  :  nous  avons  vu  ces 
maux  fans  pouvoir  y  parer ,  réduits  à  en  gémir  amè- 
rement dans  le  fecrct  de  nos  cœurs  ,  jufqu'à  ce  qu'il 
plairoit  au  Tout  -  Puiflant  de  nous  venir  confolcr. 
Nous  avons  vu  ,  fpour  ainfi  dire,  lesMéforcr«is  fcan- 
daleux  du  XMe.  fiecle  fe  rc-nouvcUcr  dans  ces  iours 


(  19  ) 

de  défolation.  Nous  n'avions  plus  à  craindre  l'Inqul- 
iition  ,  il  ell  vrai ,  parce  qu'au  lieu  que  Philippe  II 
dilbit  alors  :  la  tolhanu  mt  rcndrcit  irifiddc  à  nus 
fermeras  :  Joibph  11  venoit  de  la  permettre  ,  de  la 
protéger  ;  nous  ne  redoutions  plus  ce  Tribunal  ;  mais 
il  s'en  élevoit  un  autre  ,  qui  n'auroit  été  qu'une 
Inquilitron  civile  ,  Tintendance.  Les  revenus  des  Ab- 
bayes, que  l'on  fupprimoiî,  n'étoient  plus  pour  doter 
de  nouveaux  Evêchés  ;  mais  pour  s'engouffrer  dans 
la  CaiiTe  de  Religion.  On  ne  s'efïbrcoit  plus  de  faire 
admettre  le  Concile  de  Trente ,  il  étoit  reçu ,  fuivi  ; 
mais  on  vouloit  l'anéantir  par  des  Edits.  Toute  com- 
munication avec  Rome  étoit  interdite  ,  on  avoiî  dé- 
fendu aux  enfans  de  recourir  à  leur  père.  Ces  Edits 
menacoient  de  faire  tomber  les  clets  des  mains  du 
Souverain  Pontife  ,  d'enchaîner  le  Spirituel  fous  le 
jOug  du  fceptre.  A  la  faveur  de  ces  Edits,  l'impiété, 
l'irréligion  levoient  la  tcte,  triomphoient  impunémen*", 
èf  ne  faifoient  qu'enhardir  le  blafphéme.  Vos  Prcties, 
ô  mon  Dieu  !  étoient  tombés  dans  le  mépris  le  plu* 
marqué,  votre  Culte  tourné  en  dérifion,  vo:;  Sacre- 
mens  méprifés  ,  vos  A4yiteres  infultés ,  votre  Peuple 
devenu  le  jouet  de  fes  perfides  ennemis ,  de  façon 
qu'il  pouvoit  dire  avec  David  :  Dais  vcncrunt  Gsnîcs. 
in  htzndïtaum  tuam  :  Grand  Dieu  les  Nations  font 
entrées  dans  votre  héritage  :  ellesont  profané  leTemple 
où  réfîde  Votre  Sainteté  redoutable  :  elles  ont  fait 
de  Jérufalem  des  monceaux  des  ruines  ! . . .  Mais  nous 
nous  femmes  fouvenus  que  notre  Dieu  ell  encore  le 
Dieu  de  vengeances  ;  qu'entre  (ts  mains  repofe  le 
glaive  de  la  juftice;  qu'il  ne  lailTe  élever  aux  hommes 
l'édifice  de  leur  orgueil  ,  que  pour  le  renverfer  avec 
plus  d'éclat  ;  nous  nous  en  fommes  fouvenus ,  nous 
avons  mis  en  lui  notre  confiance,  &  nous  ne  lérors 
pas  trompés ,  mais  nous  n'étions  pas  encore  au  terme 
de  nos  alarmes. 

Des  Prêtres ,  le  dirai-je  ?  que  ne  puis-je  l'enfeve- 
lir  dans  les  ombres  d'un  éternel  oubli!  des  Prêtres, 
l'opprob.e  du  fîiçré  ÎVlirdlIçre  ,  chargés   du  pouvoir 


(  30  ) 

exécutif ,  étoient  venus  fcandaleufement  fans  Bré- 
viaire ,  Tans  Habi-t;  Clérical  ',  lans  Science ,  n'apportant 
avec  eux  que  la  morgue  allemande  &  les  ordres  ar- 
bitraires du  Souverain  ;  ils  étoient  venus  faire  preuve 
de  jeur  miiTion ,  en  détruifant,  au  lieu  d'édifier.  A-î- 
on  jamais  vu  d'une  manière  plus  î1.-appante  ,  la  dif- 
tance  qui  exifte  entre  les  bons  Pafteurs  &  les  Merce- 
naires ?  Quelle  cfl:  énorme!  Vous  ,  Monfeigneur ,  conG 
tamment  attaché  à  remplir  dignement  les  îaborieufe^ 
foQci:ions  de  rApofîolat  ,  dont  vous  êtes  chargé  , 
vous  iall:ruifez  par  vos  exemples  ,  vous  attirez  par 
vos  vertus ,  vous  répandez  la  bonne  odeur  de  Jefus- 
Chrift ,  en  femant  par-tout  fa  parole  ;  vous  parcou- 
rez votre  Diocefe ,  pour  diftribuer  l'a  grâce  ,  pour 
fortifier  les  tendres  agneaux ,  l'efpérance  du  bercail 
dans  la  génération  future  :  vous  donnez  de  iaints 
Mmifties  aux  Autels ,  de  vigilans  Pafteurs  aux  trou- 
peaux ,  vous  vous  faites  tout  à  tous.  Il  n'en  eft  pas 
de  même  de  ces  Etrangers  accourus  du  bout  de  la 
Germanie  dans  nos  Contrées  ,  ils  ont  cherché  à  s'in- 
troduire fous  l'habit  de  Berger  bienfaifant  ;  mais  bien- 
tôt on  s'apperçut  qu'ils  n'étoient  que  des  loups  vo- 
races.  Aux  premiers  fons  de  leur  voix  ,  le  troupeau 
s'effarouche  &  refufe  de  prendre  la  nourriture  que 
leurs  mains  perfides  lui  piéparoient.  lis  appellent  à 
leur  fecours  la  force  6i  la  contrainte.  Déjà  pour  mieux 
érayer  leur  entreprife  ,  le  Gouveruv^ment ,  dont  un 
Miniilre  odieux  tenoit  les  rênes  d'une  main  abfolue  , 
avoit  indignement  dégradé  les  Fi//z  de  Felde  &  les 
Soutiens  de  la  bonne  caufe  ;  déia  fous  les  prétextes 
vains  &  mfidieux  on  nous  avoit  privés  de  la  colonne 
inébranlable  de  l'Eglife ,  en  appelîant  à  Vienne  le 
Cardinal  de  Malines.  Déjà  s'élevoit  à  grands  fraix  , 
ibus  le  nom  de  Séminaire-Général ,  le  vafre  édifice  , 
où,  pour  répandre  plus  aifément  &avcc  plus  de  fuccès 
la  Do61:rine-  peftilentielle  qu'on  vouloit  introduire  , 
devoir  fe  raffembler  pêle-mêle  la  jevuieife  de  tous  les 
^.       >  Diocefes  du   Pays.    Une  partie  refu'a    conftamment 

Aq  s'y  rendre.   D'autres  attirés  par  l'appât  des  plus 


(  ?■  ) 

belles  promeffes ,  y  entrèrent ,  mais  en  fortirent  prc^ 
que  auffi-tôt  en  fecouant  la  poufuere  cle  leurs  pitds. 
Les  Religieux,  ô  vaine  prudence  du  iîecle  !  avoient 
quitté  rhabit  de  leur  Ordre ,  pour  prendre  l'uniforme 
du  séminaire.  Les  feuls  Pères  Capucins ,  par  une  fer- 
meté intrépide,  louable  &:  digne  des  liecles  paiïés^ 
avoient  .vigourerfement  réfifcé  :  deux  de  leurs  Chefs 
venoient  d'en  être  dégradés  ,  proicrits ,  exilés.  Le 
digne  Evcque  de  Namur,  pour  avoir  éiudé  l'ordre 
réitéré  d'envoyer  à  Louvain  fes  jeunes  Théologiens , 
avoir  cffuyé  le  même  outrage.  Rien  n'auroit  pu  ré- 
fifler  à  ce  torrent  impétueux ,  fi  Dieu  ,  qui  fe  piaït  à 
confondre  les  forts  par  les  foibies  ,  n'étoit  venu  au 
fecours  de  fon  Peuple  à  l'inftant  or  il  alloit  fuccom- 
ber  fous  les  coups  redoublés  du  pouvoir. 

Jufqu'ici  les  entreprifes  détachées ,  les  in  fuites  par- 
ticulières faites  à  tout  ce  qui  tient  à  la  Religion ,  n"a- 
voient  été  que  des  eflais.  Ces  téméraires  Architectes 
d'une  nouvelle  tour  de  Babel  ,  qu'ils  vouloient  éle- 
ver contre  l'Eglife  ,  méditoient  dans  la  profondeur 
de  leurs  vues  une  entreprife  digne  d'eux ,  qui ,  en  ren- 
dant leurs  noms  immortels  ,  eût  changé  la  face  de 
toute  l'Eglife  Belgique.  Ils  méditoient  ,  les  infenfcs  ! 
d'exterminer  dans  le  même  pur  ,  &  ce  jour  n'étoit 
plus  éloigné,  toutes  les  maifons  confàcrées  à  l'Eter- 
nel ,  Monafteres  &  Couvens.  L'irréligion  fe  feroit 
affife  fur  leurs  débris,  &:  d'un  ris  moqueur,  le  blas- 
phème fur  les  lèvres  ,  elle  auroit  infulté  à  ces  mor-- 
tels  vertueux ,  qui  vivent  aujourd'hui  dans  l'obfcurité 
du  Cloître  ,  &  qui  dans  la  kiite ,  rodant  à  l'entour  de 
leurs  afyles  détruits ,  auroient  traîné  les  refies  d'une 
vie  miférable ,  dans  les  larmes  &  les  foupirs. 

Oui  ,  Monfeigjieur  ,  peu  s'en  eft  fallu  que  vous 
n'ayez  plus  marché  que  ilir  des  ruines ,  que  fur  des 
décombres  de  ces  faintes  demeures.  Le  jour  étoit  mar- 
qué pour  leur  deftru6tion  totale  ;  mais  le  doigt  invi- 
lible  ,  qui  traça  fur  les  fables  les  bornes  aux  mers  , 
qui  fufpendit  le  foleil  au  firmament ,  qui  fait  fouffler 
les  veiits_  à  fon  gré  ,  qui  d'un  figne  appaife  les  tera- 


pète ,  le  doigt  du  Seigneur  en  avoir  difpofé  autre- 
ment. Et  dans  ces  circonftances  fâcheufes ,  où  nous 
étions  réduits  à  dévorer  en  fecret  nos  inquiétudes  6>c 
nos  chagrins  ;  dans  ces  jours  d'alarmes ,  où  la  vio- 
lence alloit  nous  arracher  à  nos  retraites  ;  dans  le 
juonient  où  l'on  ne  paroiffoit  plus  attendre  que  le 
lignai  de  la  dévaftation  ;  Dieu  qui  Te  rit  des  vains 
projets  des  hommes ,  qui  d'un  fouffle  difïipe  leurs  au- 
dacieux complots.  Dieu  ,  du  haut  de  ion  trône  , 
avoit  confondu  les  vaftes  plans  de  ces  orgueilleux 
Mortels  ,  renverfé  toutes  les  mcliires  ,  changé  la  face 
des  chofes.  Tous  ces  Miniilres  d'iniquité ,  obftinés  à 
notre  perte  ,  avoient  difparu  ;  ils  s'étoient  enfuis  , 
pour  cacher  leur  opprobre  ;  la  honte  &  le  mépris 
ont  flétri  leur  ouvrage ,  &  fe  font  par-tout  attachés 
à  leurs  pas ,  femblables  à  l'impie  ,  dont  le  Roi  Pro- 
phète a  dit  :  f^idi  impium  fiipcrcxaltatiim ,  &  cleva- 
tum  jîcut  cedrus  Libanï  ;  &  tranjîvi  &  ecce  non  erat  : 
Pf.  36  :  J'ai  vu  l'impie  honore  6>C  élevé  aufli  haut 
que  les  cèdres  du  Liban  ;  je  n'ai  fait  que  pafTer  & 
il  n'étoit  déjà  plus.  Tels  ces  Fabricateurs  de  fyftê- 
ïîies ,  ces  Ouvriers  du  menfonge  n'ont  fait  que  paroî- 
tre  ,  &  font  rentrés  dans  le  néant.  Le  foleil  a  diffipé 
les  ténèbres  ,  les  noirs  nuages  ,  qui  du  bout  de  la 
Germanie  étoient  venus  fondre  fur  nos,  tranquilles 
Régions,  viennent  d'être  difperfés  en  un  clin- d'œil. 
Heureux  fi  les  fureurs  des  aquilons  ne  les  repouffent 
plus  fur  nos  têtes  ! 

Mille  aitions  de  grâces  au  fouverain  Arbitre  de 
l'Univers  ,  qui  nous  a  fi  vihblement  protégés  de  fon 
bras  puiiTant  i  mille  reconnoifiances  à  ceux ,  dont  il 
a  voulu  fe  fervir  pour  opérer  cet  heureux  change- 
ment, cette  réfurreclion  ,  pour  aim'î  m'exprimer,  de 
nstre  Liberté  &  de  notre  Rehgion.  L'eût-on  cru  que 
l'on  pût  revenir  de  fi  loin  ?  en  voyant  la  marche 
des  chofes  ,  eût-on  put  s'imaginer  qu'il  fe  feroit 
trouvé  des  gens  affez  zélés  ,  affez  courageux  ,  affez 
fermes ,  pour  mettre  la  main  au  devant  des  projets 
de  Céi'ar  &:  rarrêter  au  milieu  de  fa  courte  ?  Le  Ciel , 

le 


(33) 

le  Ciel  a  infplré  ces  grandes  Ames ,  ^^  leur  a  donné 
ce  courage  vainqueur  de  tous  les  obftacles.  Oui ,  Mon- 
feigneur ,  nous  avons  la  douce  &:  dëlîcieufe  confolation 
de  poiléder  encore,  au  milieu  de  nos  Provinces  ,  diS 
hommes  dont  les  mœurs  &c  la  religion  font  à  tou  e 
épreuve.  Nous  avons  des  Citoyens  intègres  ,  des  Sei- 
gneurs non  moins  grands  par  leur  attachement  aux  bons 
principes ,  que  par  les  titres  rfe  leur  naillance,  qui,  dans 
le  moment ,  où  nous  tremblions  pour  nos  Tsmples  , 
n'ont  pas  craint  de  Ibutenir  l'Autel  de  la  mêm.e  main  , 
dont  ils  défendent  les  Loix ,  les  Droits  ,  les  Privilè- 
ges du  Pays.  Nous  avons  de  ces  hommes  reipecla- 
bles ,  que  la  Nation  regarde  comme  les  Pères  &  les 
Sauveurs  de  la  Patrie ,  &  dont  le  fouvenir  nous  fera 
éternellement  précieux  ;  mais  pourquoi  ne  nomme- 
rai-je  pas  ici  ceS' intrépides  Défenfeurs  de  la  Liberté? 
pourquoi  ne  pas  citer  ici  les  Limmiuk^kc ,  les  Van 
dcr  Noot  ,  les  d'Are/nberg  Se  tous  ces  Membre^  va- 
leureux qui  compoiént  nos  Etats  .■'  Voilà  ,  Monfei- 
gneur ,  les  dignes  objets  de  notre  julie  reconnoiffance  , 
voilà  ceux  qui  ont  repoufTi  les  chaînes  ,  au  bruit  del- 
quelles  nous  avions  frémi.  Noms  bénis  à  iamais  !  im- 
primez-les dans  votre  Ibuvenir  ces  noius  immortels  ; 
à  votre  re*:our  dires  à  ces  Peuples  heureux ,  qui  vi- 
vent fous  l'Empire  des  Lys  ,  dites  leur  que ,  îur  les 
bords  de  Tabyme ,  nous  avons  trouvé  dans  ces  hom- 
mes à  jamais  mémorables  &  l'appui  de  la  Rehgion 
ê"!  le  Soutien  des  Loix.  Souvenez-vous  de  ces  noms 
il  chers  à  votre  troupeau  :  Souvenez-vous  fur- tout 
de  celui ,  dont  la  main  bienfaifante  vient  de  nourrir 
tant  de  milliers  de  Pauvres  ;  &j  chaque  fois  que  fur 
l'Autel ,  vous  immolerez  l'Agneau  fans  tache ,  qui  de 
fon  fang  a  cimenté  notre  Religion ,  n'oubliez  pas  de 
l'interélTer  pour  eux  &  de  demander  à  Dieu  la  force 
&c  la  fenneté  qui  leur  font  néceffaires  ,  pour  ache- 
ver ce  qu'ils  ont  fi  heureufement  commencé. 


cftt 


C  54  ) 

P^EQUÊTE  de  Mr.  LemEORY  ,  ci-devant  Prieur  de 
Hou-^ali^c  &  Députe  de  fEtat  Eccléfiaflique  de  la 
Province  de  Luxembourg,  à  Mgrs.  Us  Trois  Etats 
du  Pays. 


A 


M  E  s  s  E  I  G  N  E  U  R  s  ! 


SSEMBLÉS  pour  réclamer  contre  les  atteintes 
données  aux  Conftitutions  du  Pays ,  vous  recherchez 
avec  zèle  ,  &  l'on  vous  expoie  avec  confiance  les 
difFérens  chefs  d'entreprifes  &  de  léiions  faites  con- 
•tre  les  Privilèges  &  les  Propriétés  des  Corps  &:  àts 
individus  de  cette  Province, 

Qui  a  plus  de  droit  que  moi,  Mgrs.,  à  vous  faire 
parvenir  mes  juftes  réclamations?  Je  vois  d'ici,  en 
idée,  la  place  que  j'occupois  laciis  parmi  vous.  J'étois 
im  des  Membres  de  votre  Afiemblce  ;  &  vous  devez 
vous  rappeller  qu'au  moment  de  la  liippreflion  de 
;iotre  Prieuré  de  Houffalize ,  i'exerçois  la  Dépura- 
tion au  nom  de  l'Etat  Ecclenailique,  5c  à  la  fatis- 
fa6lion  générale  du  Corps. 

Depuis  cette  fatale  époque ,  à  quoi  mes  Conireres 
&  moi  n'avons-nous  pas  été  réièrvés.^  On  nous  a 
dépouillés  de  notre  Etat ,  de  notre  exiftence  légale  , 
de  nos  titres  ,  de  nos  propriétés,  &  de  nos  Droits 
de  Citoyens.  On  nous  a  réduits  à  tramer  une  vie 
îfolée  ,  inutile ,  ignoble ,  contre  le  vœu  de  la  Reli- 
gion ,  les  difpofitions  des  Fondateurs ,  les  Ocirois  des 
Soviverains ,  &  le  cri  de  l'humanité.  Notre  demeure  a 
çté  abondonnée  à  la  déprédation  ,  à  un  ]:ouieverfe- 
m^vii  général;  tout  y  a  été  changé,  dévafté ,  &  dan? 
cette  deftruâ;ion  on,  ne  reconnoît  plu?  le  fejOur.de 
la  piété ,  de  l'étude  ,  de  la  paix  &  de  ia  régularité. 
Les  pauvres ,  les  malades  des  environs  ne  retrouvent 
plus  cette  charitable  habitation ,  où  ils  vcnoient  de- 
mander ,  &r  d'où  ils  étoieut  aifurés  de  remporter  de« 


(35) 
iecours  de  toute  efpece.  Les  Peuples  voudroient  en 
Vdin  fatisfaire  leur  piété  dans  des  folemnités  qui  ont 
difparu  ;  les  refiources  du  Saint  Miniltere  pour  la  fré- 
quentation des  Sacreniens,  pour  le  pain  de  la  divine 
parole  ,  &  pour  les  exercices  publics  de  la  Religion , 
ne  fubfiftent  plus.  On  cherche  Houffalize  dans  Houf- 
falize  même  :  tant  il  eft  changé  depuis  notre  expullion. 

Au  moment  qi;e  ]e  trace  ces  lignes  ,  Melleigneurs , 
on  me  communique  la  Dépêche  de  L.  A.  R.  en  date 
du  2  de  Juillet  1787.  J  y  vois  que  toutes  les  intrac- 
tions ceffent ,  &  que  tout  doit  erre  rétabh  dans  Ton 
premier  état.  J'ai  donc  droit  à  la  même  faveur,  c^-:  ce 
feroit  faire  iniure  à  votre  équité  ,  à  votre  religion 
&  à  votre  zèle  pour  le  bien  de  la  Patrie  ,  fi  ]e  Ibup- 
connois ,  Meffeigneurs  ,  ou  que  vous  ne  me  rappel- 
lerez pas  pour  reprendre  ma  Séance  parmi  vous ,  011 
que  vous  ne  vous  intérelTerez  pas  vivement  au  réta- 
bliffement  de  notre  Prieuré ,  fur  le  pied  qu'il  étoit 
avant  ces  triftes  changemens. 

S'il  y  a  des  plans  &:  des  projets  à  former  pour 
cela,  dans  l'état  de  dégradation  où  fe  trouve  actuel- 
lement notre  Monaftere  &  ce  qui  en  dépend,  je  me 
flatte  que  vous  voudrez  bien  me  les  communiquer  , 
6c  aux  indi\adus  de  notre  Communauté  ,  dont  ie 
fuis  ici  l'organe  ;  perfonne  n'étant  plus  à  même  que 
nous  de  lever  tous  les  inconvéniens  &  les  obilacles 
qu'on  pourroit  oppofer  à  notre  rétabhïïeirient. 

J'attends  avec  confiance  le  favorable  réfultat  de 
-•cette  Remontrance  ,  &c. 

C'eft  la  grâce,  &c. 


%,,„^ 


C  1 


(30 

Re  dV E  T  E  des  Religieufes  fupprimées  de.  Jéricho  , 
aux  bennes  gens  des  neuf  Nations  de  cette  Fille  de 
Bruxelles^  du  i^  Mai  l'y 8 y  {a). 

Bons  et  Respectables  Citoyens, 

i-j  E  S  Dames  Religieufes  Se  Sœiirs-Converfes  du  Mo 
naftere  de  Jéricho ,  dans  cette  Ville  de  Bruxelles  ,  ayant 
été  expuliées  dans  l'année  1783  ,  privées  de  leurs  biens , 
revenus  ,  &  pofieffions ,  ainfi  que  des  penfions  ,  ou 
rentes-viagères ,  qui  leur  avoient  été  refpcftivement 
aflîgnées  par  leurs  parens  ou  amis  ;  ayant  porté  au 
Confeil-Fiical ,  des  plaintes  intr^t^tueures  contre  de 
telles  entreprifes;  ayant  appris,  que  d'autres  Religieu- 
fes ,  qui  ont  fubi  le  même  fort ,  ont  également  pré* 
fentes  fans  fuceès  leurs  juftes  plaintes ,  par  des  Mé- 
moires adrefies  à  Sa  Majefté  ;  ces  Religieufes  n'ont 
eu  d'autre  confoîation ,  que  celle  d'efpérer  que  par  la 
continuité  de  leurs  prières ,  par  une  humble  réfigna- 
tion,  6c  par  l'accompliilement  non  interrompu  de  leurs 
devoirs  de  B.eligion ,  autant  que  cela  peut  îë  faire  au 
milieu  du  Siècle,  elles  obtiendroient  du  Ciel,  un  Pro- 
tefteur  dont  rinierceffion  les  feroit  rétablir  dans  leur 
état ,  &  dans  leurs  propriétés. 

Dans  la  conjonfture  actuelle ,  où  le  peuple  de  Bra- 
bant  commence  à  éprouver  de  la  confoîation,  après 
avoir  eu  le  chagrin  de  fe  voir  enlever  la  plupart  de 


(â)  Nous  arrêtons  ici ,  la  publication  des  pièces  de  la  même 
nature,  préfentccs  :.a  Gouvernement ,  ou  à  différentes  corpo- 
rations, au  nom  d'une  multltiïde  de  maifons  Religieufes.  On 
a  vu,  dans  les  Ripvcfenuùons  des  EtJts  de  Flandres,  combien 
de  ces  demandes  s'étoient  faites  dans  les  feules  Ville  de  Gand 
&  de  Bruges  (4e.  vol.  Part.  civ.  p.  120.  —-Autres  Ibid,  p. 
211.  Part.  £ccl.) 


(37) 

Ces  Droits  ^  Privilèges  conftitutionnels ,  elles  font  clans 
la  terme  confiance ,  qu'elles  auront  déformais  le  Protec- 
teur fi  vivement  defiré ,  &;  qu'elles  recevront  bientôt  le 
prix  de  leur  confl:ante  efpérance  en  Dieu ,  en  recou- 
vrant ,  pour  fon  honneur  &  fa  gloire  ,  l'état  Religieux 
qu'elles  avoient  embraifé  à  jamais ,  en  continuant  à 
vivre  en  conformité  de  leurs  vœux ,  &  fuivant  les  obli- 
gations monafliques  de  leur  Maifon  ,  hors  de  laquelle 
(  c'efi:  à  dire  hors  de  leur  Communauté  ipirituelle  , 
&;  indifi~oluble  )  ,  elles  n'ont  pas  un  inftant  de  vérita- 
ble repos  à  attendre. 

Les  démonftrations  publiques  leur  apprennent  afifez 
qui  eft  ce  Protecteur  :  Eh  I  ;qui  pourroit-ce  être  que  le 
Peuple  ,  dont  la  voix,  regardée  comme  celle  de  Dieu 
même  ,  doit  en  avoir  aufîî  la  force  &  les  effets  ? 

Elles  ne  peuvent  donc  s'emipêcher  de  croire  que  leurs 
vœux  font  accomplis. 

Hommes  edimables,  dignes  à  jamais  des  plus  grands 
éloges  !  c'efi:  par  votre  bienfaifant  miniftere ,  que  l'on 
peut  porter  à  ce  défsnfeur  incorruptible  fes  juftes  plain- 
tes. Daignez  aujourd'hui  recevoir  les  nôtres  ,  pour  l'a- 
mour &  pour  la  gloire  de  Dieu  tout-puilTant  !  apprenez 
à  la  Nation ,  que  les  Religieufes  de  Jericho  ,  ont 
été  établies  à  Tercluyfen  ,  le  jour  de  Saint  Laurent , 
l'an  1399  ;  que  leur  Maifon  ayant  été  incendiée  dans 
le  mois  d'Avril  1456,  Philippe  &  IJabel'e  ^  Ducs  de 
Brabant ,  leur  ont  donné  le  Couvent  de  Jéricho ,  dont 
elles  ont  pris  polTefllion  le  7  Septembre  fuivant ,  dont 
l«s  lettres  leur  ont  été  octroyées  le  9  Février  1457, 
&  approuvées  par  le  Pape  Caiixte ,  le  26  Avril  de  la 
même  année ,  comme  il  fe  voit  dans  la  Brabantia  il- 
lujlrata. 

Dites  à  cette  Nation  (  Dieu  vous  en  récorapenfera  ) 
qu'indépendamment  de  ces  titres ,  leur  pofi^eflTion  a  été 
confirmée  par  toutes  les  inaugurations  ,  ou  Joycujcs 
Entrées ,  &c ,  en  dernier  lieu ,  par ,  &  au  nom  de  Sa 
Majefté  ;  que  néanmoins,  on  leur  a  enlevé  cette  pof- 
feflTion  également  au  nom  de  Sa  Majefiié.  Paflez  fous 
filence  ,  toutefois  les  maux  fans  nombre ,  qu'elles  ont 

C3 


(  38  ) 
ciTuyés  par  rapport  à  la  modicité  de  la  penfion  à  la- 
quelle o.i  les  a  bornées  ,  foit  qu'elles  jouiffent  de  la 
fanté ,  ou  qu'elles  foient  malades  :  tout  cela ,  aind 
qu'pne  infinité  d'autres  malheurs  ,  font  des  chofes  paf- 
fées ,  &  fans  remède  ;  d'ailleurs  la  Providence  ne  les 
a  jamais  abandonnées.  Dites  feulement  à  cette  Nation, 
à  laquelle  vous  êtes  fi  chers,  que  de  tous  les  maux 
de  toutes  les  calamités  ,  de  tous  les  chagrins  ,  auxquels 
l'homme  eft  ailuietti  dans  ce  Monde  ,  le  pire  feroit, 
pour  elles ,  de  n'être  point  rétablies  dans  leur  ancien 
état,  de  ne  pouvoir  reprendre  les  devoirs,  &  les  rè- 
gles de  leur  Conftitution;  affurez-la,  nous  vous  en 
fupplions ,  que  nous  n'avons  pas  d'autres  defirs ,  que 
cehii  de  nous  retrouver  dans  notre  premier  état ,  avec 
la  décence  reqiiife. 

Nous  ne  doutons  point ,  Hommes  refpeflables , 
que  vous  ne  daigniez  expofer  iincérement ,  &  avec 
énergie  ,  nos  chagrins  inexprimables ,  &  nos  juftes 
plaintes  à  l'AiTemblée  générale  des  Seigneurs  Etats 
de  Brabant^  intercéder  pour  nous  auprès  d'eux  ,  ôc 
les  aiïïirer  que  jamais  nous  ne  cefferons  de  prier  le 
Ciel ,  pour  qu'il  veuille  accorder  au  Peuple ,  &  à 
tous  fes '  Repréfentans,  une  paix  confiante,  &  un 
bonheur   fans  réferve ,  pour  le  corps  OC  pour  l'ame. 

C'eft  dans  cette  ferme  confiance  ,  que  nous  avons 
foufcrit  la  procuration  ci-]ointe ,  &:  que  la  fouffignée 
fe  déclare  ,  en  toute   humilité  , 

Bons  et  respectables  Citoyens, 

Votre  très-humble  ■&;  très-obéiiTiinte 
Servante  Dame  E.  J.  f^ERBRUGG- 
11  EN  Frkure  de  JeRICHO. 

à  Bruxelles  le  zS  Mai  lySy. 

Les  Religieufes  fouffignées  du  Monaflere  de  Jèri- 
eho  ,  à  Bruxelles  déclarent  que  leur  intention  &  leur 
volonté  eO:  d'être  réintégrées  dans  leur  Poffeffion , 
de  dcraeurcT  en  Communauté,   comme  Religieufes, 


(  39  ) 
dans  îe   Monaftere  fuklit  ;    fuppliant ,  Je  auîoriiant , 
en  confëquence  ,  leur  Supérieure  Madame  Elijaheth 
Ferbruvyhen  ,  paur  taire  tout  ce  qui  Icra   convenable 
à  cet  effet. 

Fait  h   ic)  Mai  lySj. 

CF.  Crokacrt.  M.  F.  Fajîcnckds.  C.  rrankcn. 
E.  Boerrcmans.  L.  Bcrnacrts,  M.  A.  Vcr- 
licyliweghcn.  A,  C.  Godtfurneau.  C\  A.  Dc^y 
cor.  E.  A.  De  La  Rocca.  M.  C.  Furcndcth^ 
B.  Ds.  Bouk.  M.  A.  Fajidcr  liGôvcn.  C. 
Aî.  Vandcn  Dricfiche.  J .  M.  Ons.  J.  van 
Eejbcck.  A,  fan  Langcnhoven,  "  A.  De 
Prince.  J.  Mcrtcns.  A.  Fctuns.  C.  Gicnps. 
*|*  marque  dz  Afarie  De  Roe.  J.  Vandcn  Bor- 
re.  E.  De  Nys.  A.  VeUcmans.  C.  Paridons, 
M.  A.  Jaiijj'ins.  J.  C.  Heurs.  M.  A.  Peaers, 
M.  S.  Fander  Elfr. 


Lettre    de   CEviqut  de  Brlnn    au  Souverain 
Pomije  Pie  FI. 

Beatissime  Pater  ,     Très-Saint  Père. 


O  USTULIT  Au^uftif- 
Jimus  terres  Princeps  nojîer 
mea  in  Diacefi  tria  re^u- 
larium  Monajieria  ,  unum 
Carthujîanorum  ,  altetum 
monialium  ordinisS.  Fran- 
cifci  diclarum  ,  Francif- 
canarum  ,  tertium  monia- 
lium ordinis  SancLe  Clara. 

Optio   quidem   Carthu- 
Jianis  relicla  fuit ,  vel  extra 

urras  Aupiasas  ad  aliam     treufe  hors  àc^  Etats  ce 

C4 


X-j'Empereur  notre 
Souverain  ,  a  fupprimé 
dans  mon  Diocefe  trois 
Couvens  ,  l'un  de  Char- 
treux ,  l'autre  de  Reli- 
gieufes  dites  Francifcaines, 
le  troifieme  de  Religieufes 
de  l'Ordre  de  Ste.  Claire, 


On  a  laiffe  le  choix  aux 
Chartreux  ou  de  le  te- 
tirer  dans  une  autre  Char- 


Carthujîam   migrare  ,   vel  la  Mailon  d'Autriche  ,  oti 

intra  cas  aliud  Religiofo-  cl'embrafTer  un  autre  Inl- 

rum   infuutum  amp/.ai ,  titut    d'Ordre     Religieux 

vel  ad  ftatum    fctculartm  ^^^^,  ^^^  ^^'^^.^  ^f  ^^  ^a- 

tr^Tf^r/ .    r,A  «r/rr,^  . . c.  1^110,  OU  enfin  dc  rentrer 

tranirc  :    Icd  primo  calu  i        ,,r-       c  >     ^■ 

,  ,•'      •   r                   n  dans  1  ttat  becr.lier:  mais 

le  lu  m    iplis   appiomi  um  ;        ,                                 „ 

^  n     •     ■                 , ,          V  ^^^'^  ^^  premier  cas  on  ne 

cjl  viaticum  ,  nulla.  vero  jg^^  promet  qu'un  fimple 

ulunor  Vax  jufl'.ntano  ,  viatique  &  point  de  pen- 

cafu    aluro    pro     annua  fîon  alimentaire  ;  dans  le 

unius  fujîcntûtione  dcfig-  deuxième    cas  ,   on  a  af- 

nati   junt  200  nojîii  jlo-  figné    deux    cents   florins 


reni  ,  adjlatum  autem  Jcc- 
cnlarem  tïanjituri  ,  pcn- 
Jione  annuâ  ^00  jlorcno- 
rum  gaudèbunt. 


Par  fcre  optio  data  fuit 
Monialibus  ,    hoc    ttïam 


de  notre  mounoie  pour 
la  penlion  annuelle  de 
chaque  individu;  &  ceux 
qui  embrafferont  TEtat  Sé- 
culier jouiront  d'une  pen- 
fion  annuelle  de  300  flo- 
rins. 

On   a  prefque  fait   les 
mêmes   ofnes    aux   Reli- 


addito  :  quod  iftœ  facida-     gleufes  :  on  y  a  ajouté  , 

qu'elles  poi-voient  fe  choi- 

fir  une  M-ii^on   Séculière 


rem  aliqunm  Domum  ,fibi     ^^'^'^-^  poi-voient  fe  choi- 


eligere  pojjint ,  in  qua  fub 
direcîionc  cujufJam  f^ecu- 
laris  prcfbyt&ri  &  penjinm 
jlbi  ajjig^nandâ  communi- 
ter  vivant. 

Facla  diclorum  Monaf- 
ieriorum  abrogatione  Z?c- 
cntum  Aulicum  medianrc 
Provïncîce  gubsrnin  mihi 
communicatum  fuit  ^  quo 
reguiares  ut  nu  fq  ne  fexus 
(  non  tuntuni  illorum  Mo- 
na(ii.rioTum  ,  qua  de  jaclo 


où  ,  fous  la  direction  d'un 
Prêtre  Séculier,  elles  pour- 
roient  vivre  en  commu- 
nauté avec  la  penfîon  qui 
doit  le'T  être  afîignée. 

Après  la  fupprelTon  de 
ces  Couvens  ,  le  Gou- 
verneur de  la  Province 
m'a  intimé  une  Ordon- 
nance de  Sa  Mp.jeft:é,  par 
laquelle  les  Religieux  5c 
Reiigieures,  non-iéulement 
des  Couvens  Supprimés  , 
mais  tous  ceux  indiflinéle- 
fublata  junt ,  fid  indif-    ment ,  qui  délirent  d'être 


(4 

crlminat'im  :  )  qui  a  vous 
fuis  folvï  cupiunt^  jubcn- 
tw  ad  proprlos  j'uoi  Epif- 
copos  dïrigi ,  &  apud  hos 
dejidaat.im  Dijpuifatïo- 
mm  cvinctTi. 

Non  adeo  multis  pojl 
diebus  monitus  fum  a  Ke- 
giis  Commijfariis  ,  in  nego- 
tïofubLatorum  Monajhrïo- 
Tum  ccnjiitutis  ,  ut  dlcm 
indien  rt  m  ,  quâ  f^cularim 
futi  fucrint  CaTihufiani. 

Tandem  ipjl  P.  P.  Car- 
thufîaniprues  fuas ,  quibus 
ad  fiaium  prefhytcrcrum 
fscularium  transjtrri  ro- 
gant ,  rclpfa  mihi  porrexe- 
runt ,  quarumJimiUi  tum  a 
Carthufiunis  laicis  ^  tum  a 
fupra  mcmoratis  rnonïali~ 
bus  quajî  in  horas  expcclo. 

Uis  nrum  adjunclis 
coarclatus  confidtrabam  , 
IX  paru  una ,  fort-fflmum 
tjji  prof:{Jionis  RciLolofa 
f^inculum ,  hujufquc  fo- 
lutionem  fcdi  jipofioUces, 
rcfsrvatam  ,  altéra  ex  parte 
regulares  illos ,  quibus  fu- 
premi  Principis  authori- 
laie  ,  jam  jam  interdicium 
eji  in  terris  aujlriacis  more 
Carthujianorum  vivere  , 
ebpingi  non  pejje ,  Jîvi 


I   ) 

délivrés  de  leurs  vœux  , 
doivent  s'adreffer  à  leurs 
propres  Evéques  pour  en 
obtenir  la  Difpenfe. 


Peu  de  jours  après  je 
fias  avertis  par  les  Com- 
mifLires  Royaux ,  Dépu- 
tés pour  les  affaires  des 
Couvens  lupprimés  ,  de 
défigner  le  jour  que  les 
Chartreux  avoient  été  fé- 
culirifés. 

Enfin  les  Pères  Char- 
treux me  préfenterent  eux- 
mêmes  des  Suppliques  par 
lesquelles  ils  demandoient 
de  pafler  à  l'Etat  de  Prê- 
tres Séculiers  :  j'attens 
de  mom.ent  à  autre  de 
Temblables  Suppliques  des 
Chartreux  laïques  &  des 
prédites  Religieufes. 

Embarrafle  dans  ces  cir- 
conftaîices,  j'ai  conlidéré 
cC\i.n  côté ,  que  la  Protel- 
iion  Religieufe  étoit  un  lien 
très-fort  ,  &C  que  la  Dll- 
penfe  des  vœux  des  Reli- 
gieux étoit  réfervée  au  S. 
Siège  ;  d'un  autre  côté  , 
j'ai  confidéré  que  les  Re- 
ligieux à  qui  Sa  Majellé 
de  Ton  autorité  a  défendu 
de  vivre  conformément  à 
la  règle  des  Chartreux 
dans   toute   l'éteudaî'  de 


ut  alurius  ordinls  Injli-     fes   Etats  ,  ne  pouvoient 


tutum  projiuantur  ,  Jivi 
ut  fuum  ,  quod  profiffi 
funt ,  profcquendl  gratid 
ad  terras  exteras  migrent^ 
cum  inccrtitudinc  prafcr- 
tirn ,  niim  ibi  recipiendi 
fine  ,  &  nifi  rtcïpïantur  ^ 
cum  perlculo  niccjjariœ. 
vïta  fufltmatïonis  amit- 
Und(Z.  Implorato  igiiur 
divïno  Luinlne ,  aliis  viris 
probis  y  &  doclis  conjul' 
tis ,  ïn  divina  Clerneritia  6' 
tacito  Sanciitatis  vcjlrj: 
confcnju  confijus^  ijludcgi. , 
ux  nutlatcnus  via  difpcn- 
Jationis  ,  fcd  Jimplicis 
declarationis  pjocederem  ; 
declaravi  nempe  :  quod 
{"jEpedifti  Carthufiani  ex 
caufis  mox  adductis ,  ab 
oblervandls  Ordinis  fui 
ftatutis  liberi  (int  ,  &  ad 
ftatum  presbyterorum  fas- 
cularium  tranfire,  inque  eo 
iub  obedientia  ordlnarii  , 
rémanente  Voto  caftita- 
tls  ,  &  fervato  ,  quantum 
in  diâ:o  ftatu  feculari  po- 
teft  fieri,  voto  paupertatis , 
fuperflua  prsefertim  in  pau- 
peres ,  aut  alias  pias  eau- 
fas  impendendo  ,  vivere 
poflînt.  Adjccia  adhorta- 
tïone. ,  ut  mimons  aritpti 


ctre  contraints  d'embraiTer 
rinftitnt  d'un  autre  Or- 
dre ,  ou  de  Te  tranfporter 
dans  les  Pays  étangers  pour 
continuer  à  vivre  fous  la 
règle  qu'ils  avoient  pro- 
feffée ,  fur-tout  avec  l'in- 
certitude s'ils  y  feroient 
reclus ,  &  avec  le  danger , 
en  cas  qu'ils  n'y  foient 
pas  reclus  ,  de  perdre  la 
penlion  néceflaire  à  leur 
fuftentation.  C'eft  pour- 
quoi après  avoir  imploré 
les  lumières  du  Ciel ,  & 
confulré  des  hommes  de 
probité  &  verfés  dans  les 
Sciences,  me  confiant  dans 
la  divine  Clémence  ÔC 
dans  le  confentement  ta- 
cite de  Votre  Sainteté , 
j'ai  procédé  par  voie  de 
fimple  déclaration  &:  nul- 
lement de  Difpenfe  ;  j'ai 
donc  déclaré  que  Us  pré- 
dits Chartreux  pour  Its  raï- 
Jons  alléguées  étoient  Li- 
bérés de  Cobfervancc  des 
Statuts  de  leurOrdre^  quils 
pouvoient  pajjer  à  l'Etat 
de  Prêtre  Séculier ,  &  y 
vivre  fous  fobéijfartce  de 
C ordinaire  ,  en  gardant  le 
vœu  de  chajleté ,  dans  toute 
fon  étendue  ,  &  celui  de 
pauvreté  autant  quil  eflpof- 
Jible  dans  l'Etat  Séculier  y 
en    donnant  leur  fuperjlu 


(43  ) 
prîmî  propofitî  fui  a  con-     aux  Pauvres  ,  ou  en  Vcm~ 


poti 

um  pro^rcdi  conundant. 


HumïVùmt  jam  fup- 
plico  ,  dignetur   Saîicîiias 

vejlra  hanc  circa  Cartliu- 
jianos  pnsbyteros  a  me 
jam  fr.cîam  ,  &  tam  circa 

Canhujianos  Laicos^  quam 
fubtatorum      Alonajierio- 

rûm  mor.iaUs  Jimititer  fil- 


nant  de  leur  premier  état , 
ils  ne  le  rclâchafTent  point 
de  leur  i'ainre  ferveur  , 
mais  plutôt  qu'ils  redou- 
blaffent  leurs  efforts  pour 
marcher  de  vertu  en  vertu. 
Je  fiipplie  maintenant 
Votre  Sainteté  ,  qu'elle 
daigne  ratifier  &j;  confir- 
mer la  Déclaration  que 
j'ai  faite  en  faveur  des 
Chartreux  Prêtres  ,  & 
celle  que  je  médite  de 
faire  tant  pour  les  Char- 
treux laïques  que  pour  les 


ciendam    Dèclaraûonem,  Religieufes  dont  les  Cou- 

ratam    kabere    ac    confir'  vens  font  fupprimés, 
man. 

Porro  in  cafus  futuros  ,  Pour  les  cas  futurs ,  fi  par 

fi    vel   plura    regularium  exemple  plufieurs  Monaf- 

Monafieria   &    convenus  teres  ou  Couvens  vendent 


deinccps  authoritate  Pria- 
cipis  urra  tolhrcntur  ,  vd 
fi  regularium  aliqui ,  quo- 
rum Monajïcria  in  terris 
Auftriacis  etiam  in  futu- 
rum  fubfiflcnt ,  conjormi- 
ter  Décréta  regio  fupra 
memorato ,  fingulatim  pro 
folutione  Votorum  Reli- 
gio forum  apud  me  infia- 
rent ,  vel  fi  nonnulh  il- 
lorum  ,  fin  earum  ,  quO" 


à  être  fupprimés  par  l'au- 
torité du  Souverain  ,  ou 
fi  quelques  Religieux  dont 
les  Monalteres  pourroient 
exifter  dans  les  Terres  de 
la  Domination  Autrichien- 
ne ,  venoient  à  folliciter 
auprès  de  moi ,  confor- 
mément à  rOidonnance 
Royale  ,  dont  j'ai  fait 
mention  ,  la  diiTolution  de 
leurs  vœux  ;  ou  fi  enfin 
quelqu'uns  de  ceux  ou  celles 


(44) 


rum  Monajlerîa,  jamjam 
fublata  funz  ,  difpcnfa- 
tïoncm  in  voto  caji'uatis , 
&  paupcrtatis ,  vdfalum 
Ucentiam  condcndl  Tejla-' 
mcma  a  me  peter enc^  pw 
kis  &  ejusmodi  cafibus  , 
yel  miki  necejfarias  ,  & 
opportunas  facuUates  a 
Sancl'udU  vejha  providl 
concedi ,  vel  de  alio  ne- 
cejjario  ,  &  opportiino 
remedlo  profpici  Jupplici- 
ter  rogo^  qui  hum'di ,  &  Jin- 
ceropedum  ojculo  gratiam 
&  benediclionem  Apoflo' 
licam  implorans  ,  pcrfc' 
vero, 

Sakctitatis  Vestrm 

Humillimus  6c  Obedien- 
tiflimus  films ,  &  crea- 
tura  M  A  T  H  I  A  S 
Franciscus,  Epifco' 
pus  Brunenfis, 

Brun£  ,  die  zda,  Martii 


dont  les  Couvens  viennent 
d'être  Tupprimés  ,  s'adref- 
Toient  à  moi  pour  obtenir 
la  Dirpeufe  du  vœu  de 
chafteté  hi  de  pauvreté , 
ou  au  moins  la  faculté 
de  faire  des  teftamens , 
pour  ces  cas  &  autres 
femblables,  ;e  fupplie  très- 
humblement  Votre  Sain- 
teté de  m'accorder  les 
pouvoirs  néceffaires  & 
convenables ,  ou  d'y  pour- 
voir par  un  autre  remède 
néceffaire  &  opportun. 
Quoi  faifant ,  je  demande 
votre  Bénédiftion  Apof- 
tolique  en  baifant  bumble- 
ment  vos  pieds  &  je  fuis. 

De  Votre  Sainteté, 

Votre  très-humble  &: 
très  -  ObéiiTant  Fils 
Mathias  -  Fran- 
ç  O  I  s  ,  Evéque  de 
Brinn. 


B  RIN  N  ,  le    2 


Mars 


(45  ) 


Plus  P.  VI  Vener. 
Frat.  Mathiae  Brunen- 
fium  Epifcopo. 


V  EN.      F  R  A  T  E  R  ^ 
S  A  L  U  T  E  M  ^   &C. 

J-j  X  Lïttcns  quas  G'^ . 
non.  Mardi  ac  iterum  3*. 
7ion.  Aprilis  ad  nos  dc- 
dijii  gravem  mœroris  cau^ 
fam  acccpimus.  Dolcnda 
qiùdim  rcs  ejl  quœ  non- 
nullos  Rcgular'mm  Ordi- 
nes  ,  hue  illucqiie  fubmo- 
\tt  ,  ac  Viras  Rcligiojbs 
facrufque  Virgines  dejicit 
à  MonaJIcriis  ;  fed  nimis 
te  propcrajft  arbitramur  , 
eâ  dcclaratione  qua  Dïo- 
michjs  Carthujïanos  tuâ  in 
Diœceji  ^Jîatim  à  proprds 
Lcgihus  S^tatutijque  iiberos 
foiutofquc  renuntiat  ,  ut 
conditionem  Jlatumque 
Preshyterorum  Jkciilarium 
illicb  inirc  vaUant.  Cenc- 
ralis  kœc  namque  DccLi- 
ratio  qu(Z  infcid  prorfus 
Scde  Apojlolicd,  tibi,  Ven. 
Fratcr  ,  opportuna  malis 
vija  cjl^  nobis  ciim  intcm- 
pefîiva  tum  pcriculis  plcna 
vidctur,  Curandum  impri- 


Bref  du  Souverain 
Pomifi  Pie  VI^ 
Pape  ,  à  notre  vénéra^ 
bit  Fnrt  Mathias  , 
Evêqui  de  Brinn. 

VÉNÉRABLE  Fre- 

RE,  Salut  ,  ôcc. 

E  S  Lettres  qne  vous 
nous  avez  adreiTées  en 
date  du  2  Mars  &  du  3 
d'Avril ,  nous  ont  eau  Té 
la  plus  vive  douleur ,  car 
c'eft  un  fpeélacle  bien 
affligeant  de  voir  dirperfer 
décote  &  d'autres  difîerens 
Ordres  P».éguliers  ,  &  ex- 
pulfer  de  leurs  Monafleres 
des  Vierges  qui  s'y  font 
conlacrées  à  Dieu.  Mais 
nous  femmes  d'avis  que 
vous  vous  êtes  trop  pré- 
cipité en,  déclarant  que  les 
Chartreux  fupprimés  dans 
votre  Diocefe  ,  font  en- 
tièrement libres  &  exempts 
de  la  pratique  de  leurs 
Règles  ce  de  leurs  Statuts , 
&c  qu'ils  peuvent  dès  ce 
moment  fe  ranger  dans  la 
ClalTe  des  Précres  Sécu- 
liers. En  effet ,  Vénérable 
Frère ,  cette  Déclaration  , 
en  termes  fi  généraux  , 
que  vous  avez  faite  à  l'infu 
du  Siège  Apoftoiique,  §C 


(  4<^  ^ 
mis  cjî  ut  oinncs  in  voca-     que    vous   avez    imaginée 
tione  (uâpcrmaiieant^  idcb-     être  propre  à  remédier  aux 
que  in  aiiâ  vd  proprii  vd     maux  préfens ,  nous  paroît 
alterlus  injUtial  Monafi:-     au  contraire  faite  à  con- 


riafefc  rccipiant^  ubï  Kota 
folcmnia  quibus  vitarn  D&o 
conf:crârunt ,  nù  nclïqiu 
perfolviznt.  Nulla  rerum  ku- 
tnanarum  ratio  ,  qiuiui  te 
in  Monachorum  cauja  prce 
ocul'is  habuijjc  fciibis  ,  f'ed 
nnà  Confcientiœ  &  SaLutis 
cura  hcibcnda  cfî.  Hacfaiii 


tretems  &:  fujette  à  beau- 
coup de  dangers.  Il  faut, 
avant  tout,  employer  les 
moyens  les  plus  efficaces 
pour  que  tous  perfiftent 
dans  leur  vocation.  C'efl: 
pourquoi  ils  doivent  fe  re- 
tirer dans  d'autres  Monaf- 
teres ,  foit  de  leur  Inftitut , 


nojîris  vcrbis  dicito  Us ,  ad    foit  d'un  autre  Ordre  ,  où 
quos  peninct ,  cofqm  cou-     ils    pratiqueront   parfaite- 


jirma  ,  (l  a  propojlto  dcdl 
narc  cognofcas.  Ai  ji  forte, 
cuïp'tam  acddat  quod recep- 
toremjibi  mqiuat  irzvcnire , 
in  hoc    tantum  infortunio 


ment  les  obligations  atta- 
chées aux  Vœux  folem- 
nels  par  lefquek  ils  fe  font 
confacrés  à  Dieu.  Il  ne  faut 
ici  avoir   aucun    égard    à 


Jinimus ,  pojje  'eiim  tamdiu     quelque   intérêt    temporel 
injlaïuPresbytzriSacula-     que  ce  puifTe-être  :  (  & 


ris  pcrniamre  quamdiii  ita 
vivcrc  folâ  jucefjîtatc  coge- 
nir.  Sed  quijque  dibet  ver- 
Jari  in  Saculo  memor  voca- 
tionis  fax  ,  ejufqae  tcnax 
DifapUntz  &  VitiZ  E.cg':- 
laris  oui  fe  pridzm  adjcrip- 
Jerit ,    J^oîa  folemnia  quce 


c'eft  cependant  ce  que 
vous  avez  eu  en  vue  dans 
l'affaire  de  ces  Religieux , 
comme  vous  en  faites  vous- 
même  l'aveu  ;  )  mais  il 
fiut  envifager  uniquement 
le  repos  de  leur  confcience 
&  la  fureté  de  leur  falut 


femper firma  fempcrque  im-  •éternel.  Voilà  ce  que  vous 

motcL  pzrmanùunt  dïltgui-  •  déclarerez  de  notre  part  à 

tzr  cujlodiat  &ferv:t.  Sacri-  ceux  à  qui  il  appartient  ; 

hgnim  profccio  ejfet  fi  quïd  Si  vous  en  connoiflez  qui 

a  purijjîmâ  €ajîitatis  obli-  chancellent  dans  leur  voca- 

gatiom  ditraherr.tur.  Studio  tion ,  &  qui  s'en  écartent , 

ctiampaiiptrtatïs^quamiim  ayez  foin  de  les  fouîenir 

pro novd  Vivendi  r.itionc  [as  &  de  les  raiTurer.  Cepen- 

erit,  omnes  addicii  fint  ^  ut  dant  s'il  arrivoit  que  quel- 


.  (  47  ) 
fallaci  ternjîr'atm  cupidl-  qu'un  ne  put  trouver  d^a- 
tau  immumm  Utumauc  fyle ,  ce  n'eil:  que  clans  ce 
aiiimumprafifcrant'yOhc-  cas  malheureux  que  nous 
dicntiam  quoqiii  prajhnt  lui  permettons  de  vivre 
Epijcopo  &  Jub  vejlc  ah-  dans  l'Etat  de  Prêtre  Sécu- 
quod  Jignum  gérant  regu-  lier ,  pour  aufli  long-tems 
larisprofiJ/ionis,ne  ex /iJc  qu'il  y  lera  torcé  par  la 
revcrà  exiijfc  videantur.  leale  néceflité  ;  &  alors  il 
Hahs  itaquc  Jentcntiam  devra  vivre  dans  le  Siècle 
nojlram  ad  quant  conjilia.  ians  perdre  le  fouvenir  de 
omnia  componcre  acbss.  (a.  vocation  ,  &  obier  ver 
Hi/zc  ficlU  intclligcs  nos  conftamîr.ent  la  Difcipline 
minime  lis ajjcntin^  qui  dif-  Se  les  Obligations  de  la 
penfationem  a  vous  JoUm-     vie   Régulière   qu'il  avoir 

embrafle'e ,  gardant  fidè- 
lement fes  \  ceux  foîem- 
nels ,  qui  demeurent  &  qui 
demeureront  dans  toute 
lewr  force.  Et  certainement 
le  moindre  manquement 
en  matière  de  cha{l:eté , 
feroit  un  facrilége.  Tous 
auffi  devront  s'attacher 
autant  qu'il  leur  lera  pof- 
£ble,  dans  leur  nouveau 
genre  de  vie ,  à  pratiquer 


mbus  pojiulant  ^  ut  cania- 
les  nuptias  contrahant ,  y  cl 
condcre  vahant  tejîamznta. 
Cave  igitur  ne  difpenfatio 
hiijxtfmodi  qua  décor  ^pul- 
chritudo  domûs  Dci  poilue- 
rttur  ^  andiri  contingat  in 
Ecclijlâ.  Neque  tu  potes 
jure  ordlnario  concedere  , 
ut  recie  cogitas  ,  neque  nos 
tibi  ejus  tnbuenda  jus  po- 
tcjiatemve  ddegamus. 

le  Vœu  de  pauvreté ,  en 
conferv'ant  leur  cœur  libre  &:  dégasé  de  toutes  affec- 
tions aux  biens  trompeurs  ec  périfTables  de  la  Terre. 
Pour  ce  qui  eft  de  l'Obéiffance ,  ils  devront  la  ren- 
dre à  leur  Evêque ,  hi  fous  leur  habit ,  ils  porteront 
une  marque  dinflinetive  de  l'Ordre  dans  lequel  ils 
ont  profeifés ,  afin  qu'ils  ne  paroifTent  pas  l'avoir 
réellement  abandonné.  Tels  font,  Vénérable  Frère, 
nos  vrais' fentimens  fur  lèfquels  vous  devez  régler 
toutes  vos  démarches  ;  Se  delà  ,  il  vous  efl  ailé  de 
comprendre  que  nous  ne  fommes  nullement  d'iaten- 
tion  d'accorder  la  difpenfe  de  leurs  Vœux  à  ceux  qui 
la  demandent ,  ou  pour  embraffer  l'état  de  Mariage  , 


(4^) 
ou  ponr  faire  des  difpofitions  teflàmentaires.  Prenez 
donc  garde  qu'on  n'er.temîe  jamais  parler  dans  TE- 
glif'e  cle  pareiiie.s  Dirpsufes,  qui  terniroient  le  luftre 
&:  la  beauté  de  la  Maifon  de  Dieu.  Vous  fentez  affez 
te  vous  en  convenez  que  vous  ne  pouvez  ,  de  votre 
autorité ,  accorder  ces  fortes  de  Dilpenfes  ,  &  nous 
ne  vous  donnons  à  cet  effet  aucun  pouvoir. 

Itaqiu  cjîo  mernor  facer-  C'eft  pourquoi ,  fouve- 
dotil  vu ^  &  rnacih  an'uno  ut  nez- vous  du  facré  Carac- 
affiduis  Deum  prccibiis  va-  tere  dont  vous  êtes  déco- 
lidani  nohis  opcm  impctrarc  ré  ,  &  armez-vous  d'un 
concris.  Opdmd  hâc  fpz  ,  nouveau  zèle,  afin  que  par 
t'ibï  ,  l'^cn.  FïCLtcr  ^  atquc  vos  prières  redoublées  , 
ovihus  Jzdei  tua  creditis  vous  nous  obteniez  du 
Apoliolicam  Bcnediclionern  Seigneur  des  fecours  puii- 
pcrmancntcr  impertimur.         fans,  C'eft  dans  cette  ef- 

pérance ,  Vénérable  Frère , 
que  nous  vous  donnons  &  aux  Ouailles  confiées  à  vos 
foins  notre  Bénédiftion  Apoftolique, 

Datis  Videbona  prïdic  Donné  à  Vienne  le  il 

idus    Apr'dis     lySl  Avril  1782 ,  la  hui- 

P ontificatus    nojlri,  tieme  année  de  no- 

Anno  8v<9.  tre  Pontificat. 

COPIE  (Tune  Lettre  &  cCun  Mémoire  préfenté 
à  Sa  Majejlé  ^Impératrice  Douairière  &  Reine 
Apojîolique  ,  par  les  Evêques  des  Pays-Bas  ,  co/z- 
ternant  CEtat  Religieux^  tan  lyy^. 

Madame, 

J-JES  Evêques  des  Pays-Bas  ont  l'honneur  d'adreïïer 
à  Votre  Majefté  de  très-refpeftiieufes  Répréfentations 
fur  les  Edits  du  13  Mai  1771  ,  &  du  iS  Aril  1772.. 
Les  fentiineiu  de  piété  dont  Votre  Majefiié  eft  pé- 
nétrée ,  leur  infpire   la  plus   vive   confiance  ,   que 

vous 


(  49  )^ 
vous  entendrez  avec  autant  d'attention  que  de  bonté 
des  Evcques  qui  n'ont  d'autres  intérêts  que  ceux  de 
la  Religion  &  de  votre  Gloire. 

L'objet  des  deux  Edits  dont  nous  prenons  la  li- 
berté de  porter  nos  plaintes  à  Votre  Majefté  ,  concerne 
trop  direiflemcnt  leur  miniftere  ,  pour  qu'il  leur  loit 
permis  de  s'en  diflimuler  les  l'uites  &  de  le  taire  iur 
leurs  difpofitions  :  &:  dans  quelle  occalion  une  Au- 
gufte  Princeffe  ,  encore  plus  recommandable  par  fes 
vertus ,  que  par  l'éminence  de  Ion  rang  ,  écouteroit- 
elle  des  Ev«3ques ,  fi  elle  refuibit  de  les  entendre  , 
de  prendre  par  elle-même  connoiffance  de  leurs  mo- 
tifs ,  &  de  les  pefer  avec  maturité ,  fur  une  matière 
qui  tient  de  fi  près  au  Gouvernem.ent  de  TEglife, 
dont  ils  font  refponfables  à  Jefus-Chrift  qui  le  leur  a 
confié  ? 

Les  Monafteres  font  par  leur  nature  des  Etal^liffe- 
mens  Eccléliaftiques,  foumis  à  Tinfpedion  des  Evcques. 
C'eft  à  FEglifc  qu'ils  doivent  leur  éredhon  primitive, 
c'eft  elle  qui  dans  tous  les  tems  a  réglé  leur  police  , 
&  leur  deftination  eft  toute  de  fon  reflbrt  ,  puifque 
ce  font  des  Maifons  de  retraite  deftinées  aux  Fidèles 
qui  défirent  de  fe  vouer  à  la  perfeâ:ion  &:  à  la  pra- 
tique des  confeils  évangeliques. 

Votre  Majefié  verra  dans  les  très-humbles  Repré- 
fentations  que  nous  avons  l'honneur  de  lui  adrefier 
ce  que  les  faints  Dofteurs  &  les  Conciles  ont  penfé 
uniformément  fur  l'importance  de  ces  Etabhfi^emens 
précieux  à  la  Religion  ,  fur  la  nécefiîté  de  les  con- 
ferver,  &:  d'y  entretenir  ou  d'y  rappeller,  par  de  fages 
&  de  folides  réformes,  l'ordre,  la  difcipline  &  i'efprit 
de  régularité. 

Si  les  deux  Edits  de  177 1  &  1771  n'étoient  defiinés 
qu'à  réprimer  les,  abus  qui  ont  pu  s'introduire  dans 
les  Cloîtres  ,  nous  nous  ferions  un  devoir  d'applaudir 
à  un  but  fi  louable  ;  &  fi  nous  avions  été  confultés 
fur  ces  objets  qui  intérefient  fi  direftement  notre  laint 
Miniftere  ,  ce  témoignage  de  la  confiance  de  Votre 
Majefté ,  que  nous  efpérons  de  mériter  toujours ,  nous 

D  ttt 


aurolt  procuré  la  confolation  de  coopéerer  à  des 
vues  il  clignes  de  fa  Religion  ,  &  de  lui  propoler 
les  moyens  les  plus  fûrs  &:  les  plus  efficaces  pour 
les  reiTîpllr. 

Mais ,  quoique  les  Edits  s'annoncent  fous  des  aufpices 
fi  favorables ,  nous  ne  craignons  point  de  dire  qu'en 
y  cherchant  ce  qu'ils  annoncjoient  ,  nos  efpérances 
ont  été  trompées  ;  &  qu'au  heu  d'y  trouver  des  Ré- 
glemens  tendant  à  la  réforme ,  nous  n'y  avons  apperçu 
que  des  projets  de  deilrudion  qui  porteroient  le 
coup  le  plus  funefte  à  l'Inftitut  Monaftique. 

Nous  favons  que  rien  ne  fut  plus  éloigné  de  vos 
intentions,  &  que  votre  rcfpefi:  pour  la  Religion,  que 
votre  amour  pour  TEghfe  vous  font  voir  dans  Tétat  Re- 
ligieux ce  qu'il  eft  en  effet ,  un  état  faint  par  lui- 
même  qui  doit  perpétuer  dans  l'Eglife  la  vie  des 
premiers  Chrétiens ,  &:  qui  eft  un  port  de  falut  pour 
beaucoup  d'ames  qui  fe  perdroient  dans  le  tinnulte 
du  fiecle. 

Cette  idée  eft  celle  qu'on  s'en  eft  formée  de  l'o- 
rigine des  Màiibns  Rehgieufes  ,  &  qui  s'eft  perpétuée 
jufqu'à  nous  par  une  tradition  confiante  depuis  14 
fiecles.  On  en  a  toujours  conclu  qu'il  ne  falloit  pas 
détruire  ces  Maifons  Privilégiées  ,  parce  qu'elles 
croient  trop  utiles  pour  les  renverfer ,  &  que ,  parce 
que  les  avantages  -  qu'on  en  attend  ,  étoient  attachés 
à  la  régularité ,  il  falloit  la  maintenir  dans  ceux  qui 
l'avoient  confervée  ,  ou  la  rétablir  dans  ceux  où  elle 
étoit  affoiblie. 

Mais  rien  ne  feroit  plus  contraire  à  cet  intérêt  ef 
fentiel  que  la  ruine  de  l'inftitut  Religieux  ,  &:  tout 
projet  qui  tend  à  la  fappreffion,  ne  fauroit  être  que 
contraire  au  bien  de  la  R.eligioii  6^  au  vœu  de 
l'Eghlé. 

Oui,  Madame,,  nous  le  difons  avec  douleur,  il 
n'y  a  pas  lin  feul  Article  dans  les  deux  Edits  ,  qui 
ne  nous  paroifTe  menacer  l'état  R.eligieux  d'une  perte 
affurée.  L'exécution  de  ces  Loix  fenneroit  l'entrée 
des  Monafteres  ;  elle  dégoûteroi!:  ceux  de  vos  Sujets 


(  5'  )       . 

qui  fe  fentiroient  portés  à  s'y  retirer ,  fî  même  elle 
n'infpiroit  pas  du  mépris  &:  de  Taverfion  pour  un 
érat  qui  a  formé  tant  de  Saints ,  &:  la  décadence  des 
Monafteres  bientôt  abandonnés ,  feroit  dans  peu  lui- 
vie  de  leur  ruine  abiblue. 

Nous  olbns  affurer  Votre  Majefté  qu'elle  en  fera 
elle-niême  convaincue,  û  elle  daigne  fau'e  lire  nos 
très-humbles  Repréfentations ,  tant  les  preuves  que 
nous  en  avons  mis  fous  les  yeux  de  Votre  Majefté 
lont  fenfibles,   multipliées  &  frappantes. 

L'extinftion  de  l'Inftitut  Monaftique  eft  le  cen- 
tre ,  ou  le  terme  commun  auquel  aboutit  le  fyftéme 
général  des  deux  Edits.  C'eft  ce  qui  nous  allarme  , 
&  ce  qui  touchera  fans  doute  votre  piété  &:  la 
bonté  de  votre  cœur.  Les  deux  Edits  ont  encore 
l'inconvénient  de  porter  atteinte  dans  leurs  Régle- 
mens  particuliers  ,  aux  Décrets  des  Conciles ,  aux 
Loix  fondamentales  de  la  vie  Religieufe ,  principale- 
ment fur  l'étendue  du  vœu  de  pauvreté,  &:  fur  les 
devoirs  qu'exige  le  renoncement  ,  auxquels  les  Re- 
ligieux s'engagent. 

On  ne  fauroit  leur  laiiTer  la  liberté  de  toucher 
leurs  penfions ,  &  d'en  difpofer,  fans  les  rendre  pro- 
priétaires ,  ou  fans  les  inviter  à  le  devenir. 

C'eft  l'effet  nécefl'aire  que  produiroit  l'Edit  de  1772  , 
Se  les  Loix  de  la  confcience  ne  permettent  jamais 
aux  Religieux  d'ufer  de  la   liberté  qu'il  leur  accorde. 

Nous  fommes  avec  le  plus  profond  refpeél, 
M  A  D  A  M  E  , 

DE    F0TE.E  MAJESTE^ 

Les  très-humbles  &:  très-obéif- 
fants  ferviteurs  &  Suiets. 
Etait  Jigncs ,  f  Jean-Henri  Archevêque  de 
Maiines.  J.  R.  Evêquc  de.  Bru- 
gi$.  M.  G.  EvêquiS  d'Anvers, 
•}•  Félix  Evéque  d'Iprcs.  M.  J. 
Evéque  de  liuremonde.  G  G, 
Eveque  de  Gand.  F.  Evêqut 
de  Namur^ 

D  1 


(50 


MÉMOIRE  préfcnté  par  les  Evêques  des  Pays-Bas 

à  Sa  Majtjîé  i' Impératrice- Heine   Douairière, 


•ES  Evéques  à^s  Paj's-Bas  viennent  avec  la  con- 
fiance la  plus  refpeclueufe,  expofer  à  Votre  Maiefté 
leurs  allarmes  les  plus  vives  ,  celles  que  leur  caufent 
les  clifjjofitions  des  deux  Edits  publiés  de  votre  au- 
torité les  i"?  Mai  1771,  Se  18  Avril  1772,  concer- 
nant l'Erat  Reûgieiix. 

Ces  dei;x  Loix  paroiiTent  avoir  eu  pour  objet  de 
rétablir  dans  les  Monafteres  l'exaftitude  de  la  difci- 
pline  régulière,  en  réprimant  des  abus  propres  à  y 
cailler  le  reiâchement  ;  &  des  Evêques  occupés  de 
leur  niiniilere ,  ne  fauroient  qu'applaudir  à  des  vues 
fi  fage<:  en  elles-mêmes,  fi  dignes  de  la  piété  d'une 
augulie  PrincelTe  qui  m.et  fa  gloire  à  faire  fleurir  la, 
Rtlgion  dans  fes  Etats  :  mais  quelle  n'a  pas  été  leur 
cinfternation  ,"  lorfqu'en  lifant  avec  attention  les  deux 
Edits ,  lorfqu'en  comparant  leur  difpofirif  avec  les 
motifs  énoncés  dans  les  préambules ,  ils  ont  eu  la 
douleur  de  voir ,  que  ceux-ci  plus  apparens  que  réels , 
annonçoient  une  réforme ,  mais  que  l'effef  des  régle- 
mens  feroit  infailliblement  de  porter  à  i'iitat  Reli- 
gieux un  coup  tunefte ,  qui  produiroit ,  quoique  peut- 
être  par  des  effets  lents  &:  progreififs,  la  ruine  totale 
des   Monafi:eres. 

Les  deux  Edits  peuvent  être  confidérés  dans  leur 
généralité  ,  &  dans  l'enfemble  de  leur  iyftême ,  ou 
dans  les  difpofitions  particulières  qu'ils  renferment. 
Sou<:  ce  dernier  point  de  vue,  ils  préfentent  parmi 
qiielqies  réçjlemens  utiles ,  des  articles  qu'on  ne 
conciliera  jamai.,  avec  les  Loix  fondamentales  de  l'Inf- 
titut  Religieux  ;  fous  le  premier  afpeéf ,  beaucoup 
plus  important,  ils  paroif^'ent  menacer  l'Ordre  Re- 
ligieux d'une  chute  alTurée. 

Mais  qu'il  nous  foit  permis ,  avant  de  développer 


(53) 
Ibus  les  yeux  de  V.  M.  ce  double  fujet  de  nos  juftes 
inquiétudes,  de  lui  rappeller  les  idées  primitives  qu'on 
s'eft  formées  de  l'Etat  Religieux,  l'intérêt  que  rÉglile 
a  pris  à  fa  confervation  ,  6>c  les  avantages  que  la  Re- 
ligion a  droit  d'en  attendre. 

L'Etat  Religieux  doit  fa  naiiTance  aux  premiers 
fîecles  de  l'Egllfe ,  &  comme  l'ont  remarqué  les  Ecri- 
vains les  plus  favans,  c'efl  dans  les  iiecles  les  plus  faints 
&  les  plus  éclairé?  qu'il  a  commencé  ,  6c  qu'il  s'eft 
étendu  avec  des  progrès  qui  rendent  à  jamais  ces  iiecles 
les  plus  dlftlngués  dans  les  faftes  de  l'Egllfe. 

L'Etat  Religieux  eut  le  double  avantage  ,  de  pro- 
curer un  afyie  aux  innocens ,  6^  aux  pécheurs  touchés 
d<;  Dieu,  une  retraice,  où  ils  puilcnt  fe  livrer  aux 
exercices  de  la  pénitence.  Tous ,  ou  prefque  tous 
ceux  qui  avoient  un  délïr  fincere  de  fe  fauverjOU 
qui  fe  fentolent  appelles  à  embraiTer  la  voie  des  con- 
feils  évangellques ,  s'enfermoient  dans  les  Monafte- 
res ,  parce  que  le  falut  y  étolt  plus  facile ,  qu'on  y 
étoit  foutenu  par  l'exemple ,  &  qu'à  l'abri  des  ten- 
tations auxquelles  expofe  la  corruption  du  fîecle  ,  on 
yjvivoit  fous  l'empire  d'une  règle  qui  dirigeant  toutes 
les  aftions ,  ne  laifioit  aucun  vuide  dans  la  journée. 

Il  n'efi:  donc  pas  furprenant ,  que  l'Egllfe  ait  pris  le 
plus  vif  intérêt  à  la  confervation  d'un  Etat  qui  lui 
étoit  fi  précieux  ;  qui  rendant  la  pratique  des  confells 
plus  commune  &  plus  facile ,  faifoit  revivre  dans  les 
Provinces  chrétiennes ,  le  beau  modèle  des  Fidèles  de 
Jerufalem  ;  qui  expofolt  aux  yeux  de  tous  les  peuples  des 
Pénitens  publics ,  tous  occupés  à  appalfer  la  colère  di- 
vine ,  &c  à  attirer  les  bénédicllons  célei-les.  Des  Chré- 
tiens parfaits  dont  la  conduite  édifiante ,  en  prouvant 
d'une  manière  fenfible  la  fainteté  de  l'Egllfe  &  la  vé- 
rité delà  Religion  chrétienne,  apprenoit  aux  Fidèles  que 
la  Foi  évangélique ,  loin  d'être  impraticable  dans  fes 
préceptes ,  a  la  puiflance  de  rendre  les  hommes  étran- 
gers à  la  terre,  &:  des  êtres  ici-bas ,  citoyens  du  Ciel. 

Non-feulement  les  Monafteres  étoient  des  Malfons 
de  falut,  pour  un  grand  nombre  de  perfonnes  qui  s'y 


(  54  ) 

t^evouoicnt  aux  travaux  d'une  vie  pénitente;  il';  devin- 
rent une  fource  de  bénédiclions  par  l'exemple  ,  les 
prières  &  les  bonnes  œuvres  des  Religieux  qu'ils  rena 
fermoient. 

En  travaillant  à  leur  propre  fanftification ,  les  Reli- 
gieux n'oublioient  point  les  befoins  de  leurs  frères ,  ils 
mettoient  au  contraire  au  nombre  de  leurs  plus  ei- 
lentielles  obligations  ,  celles  de  fléchir  la  Juftice  divine, 
d'implorer  fa  miféricorde  ,  de  lever  des  m.ains  pure? 
au  Ciel ,  pour  attirer  la  bénédiction  de  Dieu ,  fur  les 
travaux  des  Payeurs  ,  &  acquitter  pour  le  commun 
des  Fidèles  engagés  dans  le  iiecle  ,  &  trop  partagés 
par  les  foins  ôi  les  occupations  extérieurs  ,  le  tribut  des 
louanges  dû  à  la  Majefté  Suprême.  C'efl  pourquoi 
Saint  Bernard  difoit  aux  Moines  de  Clairvaux,  qu'ils 
étoient  entrés  dans  le  Cloître  pour  répandre  des  lar- 
mes continuelles  fur  leurs  péchés  &  fur  ceux  du  peu- 
ple, ia)  ^ 

Pour  peu  qu'on  ait  de  connoiflance  de  i'Hiftoire , 
on  fait  quels  fecoiirs  TEglife  a  retirés  des  Monaderes  , 
foit  par  les  Minières  évangeliques  qu'elle  y  trouvoit, 
foit  parleur  zèle  à  défendre  la  Foi  contre  fes  ennemis. 
Ceft  dans  la  iblitude  des  Cloîtres  qu'ont  été  formés 
tant  de  faints  Evêques  ,  qui  ont  été  la  lumière  de  leur 
Siècle.  »  Et  il  étoit  ordinaire  de  prendre  les  plus  faints  , 
»  d'entre  les  Moines ,  pour  en  faire  des  Prêtres  6v  des 
»  Clercs;  c'étoit  un  tonds  où  les  Evoques  étoient  af- 
»  furés  de  trouver  d'excellents  fujets  ,  &  les  Abbés 
»  préferoient  volontiers  l'utilité  générale  de  l'Eglife ,  à 
»  l'avantage  de  leur  Communauté,  (b) 

Il  feroit  trop  long  de  rapporter  les  combats  que  les 
Religieux  ont  foutenus  pour  la  défenfe  de  l'Egliie  ,  6c 
pour  fa  Doctrine  ,  combats  qui  leur  ont  tait  donner 
par  Saint  Jérôme ,  le  glorieux  titre  de  colonne  de  l'E- 


(4)  In  hoc  enim   Monafterlo  intramus  ,  ut  peccata    noflra 
&  populi  defleamus.  Ep.  445, 
(b)  Fkury  z.  Difcours,  n.  3. 


gîlle  (u) ,  &:  qui  les  a  fait  appeller  par  Saint  Grégoire 
de  Naziance,  le  rempart  cie  la  Foi,  &  le  ibutien  de 
VUnivers  (/^).  On  lait  que  lorfque  le  flambeau  de  la 
Foi  commença  à  s'éteindre  dans  l'Orient ,  l'Ordre  de 
Saint  Benoît  procura  une  nouvelle  fécondité  à  l'E- 
gliie  ,  par  ks  Miffions  en  Angleterre  &:  dans  tout  le 
Nord;  &:  c'eft  encore  principalement  aux  travaux  des 
Religieux,  que,  lorfque  les  dernières  hérélies  dévai- 
Toient  tant  d'Etats  Catholiques ,  la  découverte  de  l'A- 
mérique ayant  ouvert  un  champ  immenfe  à  la  prédi- 
cation de  l'Evangile  ,  ces  nouvelles  Contrées  durent 
leur  vocation  à  la  Foi  de  Jefus-Chrift.  (c) 

Mais  rien  n'eft  plus  propre  à  nous  faire  refpefler 
rinftitutMonaftique,  que  l'acharnement  des  Hérétiques 
pour  le  décrier  ,  &  le  zèle  confiant  des  faints  Doéleurs 
&:  ds;s  autres  Eccléfiaftiques  pour  repouffer  leurs  in- 
ventives. 

Les  Ariens  ,  les  Manichéens ,  les  Donatiftes  ,  fu- 
rent les  ennemis  les  plus  déclarés  de  l'Etat  Monaf- 
tique  :  St.  Augullin  en  prit  hautement  la  défenfe  dans 
fon  Traité  des  Mœurs  de  fEgli/è.  Tels  ont  été  dans 
le  15™=.  Iiecle  >Viclef  &c  fes  acil  é.cns  ,  &:  dans  les 
fiecles  fuivans  les  prétendus  Réformés ,  contre  lef- 
quels  nos  Controveriiftes ,  chargés  de  la  défenfe  de 
l'Eglife ,  {e  font  fait  un  devoir  de  repouiîer  leurs 
calomnies.  C'eft  en  particulier  l'objet  du  Traité  que 
le  favant  tk  pieux  Cardinal  Belbrnîin  a  publié  fur  les 
Moines. 

De  tout  tems  l'Etat  Religieux  trouva  auffi  des  Ad- 
verfaires  parmi  les  gens  du  fiecle  peu  inflruits  des 
vérités ,  ou  peu  pénétrés  des  fentimens  de  R^eligion, 
qui  plus  occupés  d'une  politique  toute  mondaine,  ont 
déclamé  contre  l'Etat  R-cligieux  ou  infpiré  contre 
hfi  de  funeftcs  préventions. 


(a)  EpiP.  Sô. 

(t)  SubfiUium  Fidel ,  plebis  laus ,  &  bafis  orbis  Admjv.uor. 
Carm.  pro  Monachls. 

•c)  ThoiiKiiTin.  D'ifàpL  Eccl.  T«m,  1.  pa^c  1464. 

i)  4 


C  56) 

En  592.5  clés  CoLirtifans  qui  faifoient  moins  de  cas 
de  la  gloire  de  l'Eglife  que  de  la  profpérité  tempo- 
relle de  TEtat,  ayant  eng.igé  l'Empereur  Maurice  à 
publier  une  Loi  qui  interclifoit  aux  Militaires  la  li- 
berté d'exnbrafTer  la  vie  monaftique ,  St.  Grégoire- 
le-Grand  ne  put  voir  qu'avec  la  plus  profonde  dou- 
leur que  l'entrée  du  Monaftere  fût  fermée  aux  Of- 
ficiers &  aux  Soldats  ,  &  qu'une  Loi  publique  les 
privât  d'un  moyen  fi  utile  de  réparer  par  la  Péni- 
tence les  défordres  û  communs  dans  la  profeffion 
des  armes.  11  écrivit  à  l'Empereur  pour  lui  faire  fen- 
tir  le  danger  de  la  nouvelle  Loi ,  &  perfuadé  qu'elle 
intéreiToit  fon  falut ,  il  le  conjura  de  ne  pas  obfcur- 
cir  devant  Dieu  par  cette  démarche,  tant  de  lar- 
mes que  ce  Prince  avoit  répandues  ,  tant  de  prières , 
de  jeûnes  &:  d'aumônes  que  fa  piété  lui  avoit  fait 
f.iire. 

Peut-être  pourroit-on  penfer ,  en  voyant  l'intérêt 
que  les  plus  grandes  lumières  de  l'Eglife  ont  pris  à 
l'Etat  Monafiique ,  que  tous  les  Religieux  dans  la 
première  ferveur  de  leur  établiflement  ,  couroient 
d'un  pas  égal  la  carrière  dans  laquelle  ils  étoient  en- 
tjés.  Mais  nous  apprenons  des  Saints  Pères  qu'il  y 
avoit  dès- lors  des  Religieux  non- feulement  foibles  ik 
imparfaits ,  mais  dont  la  conduite  déshonoroit  la 
profelîion  Monaftique. 

St.  Auguftin  écrivoit  à  fon  Clergé  que  ,  s'il  y  avoit 
peu  de  Chrétiens  plus  parfaits  que  ceux  <]ui  avoient 
efficacement  travaillé  dans  les  Monafleres  à  la  ré- 
forme de  leurs  mœurs ,  il  connoilToit  peu  de  Sujets 
plus  conompus  que  les  Moines  qui  dans  le  Cloître 
avoient  dégénéré  de  leur  vocation  (rt).  Frappé  des 
iViiies  fâcheufes  de  ce  défordre ,  il  fe  croyoit  obligé 
de  prémunir  fon  Peuple  contre  le  fcandale  qui  en  ré- 


'  (a)  Difficillimè  fura  expertiis  meliores  quàm  qui  in  Monaf- 
tcrio  pr(  feceriint  ;  ita  non  fum  expertus  pejores  quam  qui  in 
Monafieriis  cecidcrunt.  £f.  yS, 


(57) 
^ultoît,  &    de  l'avertir  que  la  dépravation  des  mé- 
dians  Religieux  ne   devoit  pas  taire    plus  d'imprei- 
iion  lur  les  el'prits  ,  que  l'exemple  des  m.auvais  Ecclé- 
fiaftiques   &c  des  mauvais  Chrétiens. 

Mais  au  lieu  d'en  conclure  qu'il  falloit  les  aban- 
donner à  leur  malheureux  ibrt ,  nos  Pères  n'en  mon- 
troient  que  plus  de  zèle  pour  rappeller  les  Religieux 
à  une  exaéle  difcipline  ,  &  en  cela  on  peut  dire  qu'ils 
fe  font  conformés  aux  vues  de  la  Providence  ,  puif- 
qu'elle  a  fufcité  en  difFérens  tems  des  hommes  évan- 
geliques  qui ,  pénétrés  de  l'efprit  des  premiers  Fon- 
dateurs de  rinltitut  Monaftique,  y  ont  reffufcité  la  fer- 
veur de  fon  premier  âge.  Que  (î  fur  la  première 
décadence  de  la  vie  régulière ,  ont  eût  pris  le  parti 
défefpéré  de  fupprimer  l'Ordre  Monaftique ,  l'Eglife 
eût  été  privée  des  abondantes  bénédiftions  qui  ont 
été  la  faite  &  des  grandes  réformes  telles  que  celles 
de  Cluny  &  de  Cîteaux ,  &  de  l'éreftion  des  nou- 
veaux Ordres. 

C'efi:  parce  qu'on  n*a  jamais  varié  dans  ces  fenti- 
mens,  que  le  Concile  de  Trente  a  ordonné  de  rétablir 
la  régularité  dans  les  Maifons  conventuelles  où  elle 
étoit  tombée  ,  8c  de  la  fortifier  avec  foin  dans  les 
lieux  où  elle  s'étoit  heureufement  maintenue  (a).  Le 
motif  du  Concile  efl  tiré  des  importans  avantages 
que  la  Religion  retire  des  Monafleres  pieux  &:  réglés  : 
Qiion'ia'n  non  ignorât  fancia  Synndus  ,  quantum  ex 
MonaJUnis  pie  injîitutis ,  &  récit  adminijlratis  in  Ec- 
clijïd  Dit  fplcndoris  atque  iitil'itatis  oriatur.  Ce  motif 
avoit  été  celurdu  Concile  d'Auiun  de  l'an  670.  C'eft 
celui  qui  fe  trouve  rappelle  dans  les  Conciles  pofté- 
rieurs.  Le  Concile  de  Cologne  de  1451  penfoit  que 
c'étoit  contribuer  à  l'honneur  de  Dieu ,  au  falut  des 
âmes  &  au  bonheur  du  Peuple ,  que  de  travailler  à 
taire  obfer\'^er  aux  Perfonnes  Religieufes  la  règle  à 
laquelle  elles    s'étoient  vouées  {h).   Le    Concile  de 

(>z)  Seflf,  25.  Conc.  Labb.  tooi.   14.  pag.  896. 
Kb^  Ibid.  tom.  13.  p.  1381. 


(5n 

Malines  Je  i -570,  en  renouvellant  îe  Décret  du  Con- 
çue de  Trente  ,  fondoit  la  nccelî:té  de  réformer  les 
Moiiaileres  ,  lut  ce  que  ceux  qui  ibnt  hien  réglés  , 
font  pour  le  Peuple  Chrétien,  ce  que  les  Citadelles 
fortifiées  font  dans  un  Pays  expofé  aux  incurfions  de 
l'ennemi  (a). 

Quand  oa  connoit  l'Infcitut  MonaiHque ,  Ton  objet, 
fa  fin  ,  les  importans  fervices  qu'il  a  rendus  à  l'Eglife , 
&  qu'il  lui  rendra  touiours ,  quand  on  veillera  à  en 
coni'erver  l'efprit  dans  les  Ordres  Religieux  ,  on  ne 
pourra  qu'être  alarmé  de  tout  projet  qui  îendroit  à  pri- 
ver la  Religion  d'un  Etr^blilTement  fi  faint  en  lui-même 
&  fi  précieux  à  l'Eglife  ,  dont  il  fait  un  des  princi- 
paux ornemens. 

Dès  le  y,  fiecle  ,  le  Concile  général  aïïemMé 
à  Chalcedoine  ,  avoit  défendu  ,  fous  peine  d'être  traité 
comme  violateur  des  fairxts  Canons ,  de  changer  en 
habitations  féculieres  ,  les  Monafteres  légitimement 
érigés.  La  Loi  portée  par  ce  Concile,  rappellée  en  789  , 
dans  le  Concile  d'Aix-la-Chapelle,  &  renouvellée 
par  celui  de  Conftantinople  de  l'an  370 ,  a  été  in- 
i'erée  dans  le  Corps  de  Droit  (^). 

Le  Concile  de  Seviîle  de  619  ,  en  ordonnant  que 
le5  Monaileres  fuïïent  maintenus  dans  une  mviolable 
fl:..biliîé  ,  déclara  étranger  au  Royaume  ele  Dieu 
quiconque  entreprendroit  de  les  renverfcr  (t).  Le 
lécond  Concile  de  Nicée ,  en  787 ,  regarcloit  la  del- 
truclion  de  ces  Maifons  vénérahles  ^  commme  un  fléau 
attiré  par  les  péchés  des  Peuples  (_d). 


(a)  Monafteria  rcflè  inftituta ,  id  funt  in  Populo  Chrif-i 
tiano ,  quoJ  arces  mnitJin  pnefidio  bene  infiruoii  in  regione 
hyitiuin  incurfior.ibus  expcfità.  (  Tit.  de  regiJ.  ) 

(^)  Cor.c.  Labb.  t.  4.  pag.  778. 

(cj  Si  quis...  qi'.odiibet  Monailerium  aut  vi  cupidiratis 
fucViandum ,  av.t  riiriuktiône  aliquà  frauôii  conveilendum 
tcr.taverit  ,  anarhenia  cftectus  nianeat  à  Regno  Dei  extra- 
neus.  (  Ibld.  t.  5.  /'jg.  i6ôy.  ) 

(i-fj  Quod   in  magnà  damnatlone  fint  ,    qui    Monafteria 


(59) 

Si  les  Nîoines  (  ce  font  les  exprefllions  du  Concile* 
fie  Tliionville  ,  en  844  )  le  conduilent  d'une  ma- 
nière peu  honorable  à  la  Religion  ,  il  faut  les  ré- 
former ;  mais  à  Dieu  ne  plaife  qu'on  détruife  l'Ordre 
Religieux  ,  à  caufe  des  raéchans  qui  s'y  rencon- 
trent (a). 

Le  Concile  de  Meaux  de  845  ,  repréfentoit  aux 
Princes  qu'ils  étoient  eux-mêmes  intérefles  à  empêcher 
la  ruine  des  Maifons  Religieuies,  parce  qu'ils  dévoient 
faire  accomplir  la  pieufe  intention  des  Fondateurs  ,  & 
qu'en  foufFrant  la  deftruction  de  ces  Lieux  faints,  ils 
s'expoferoient  à  la  vengeance  que  demanderoient  à 
Dieu  ces  Fondateurs  (/•).  Celui  de  Pavie,  de  l'an  850, 
avertiffoit  les  glorieux  Empereurs  ,  que  les  Fondateurs 
ayant  mis  fous  leur  proteftion  les  Monafleres  qu'ils 
avoient  érigés ,  la  Puiflance  Souveraine ,  qui  loin  de 
les  défendre,  fe  porteroità  les  fupprimer,  dtvcit  d'au- 
tant plus  craindre  le  jugemient  de  Dieu  ,  qu'il  n'y  a 
point  ici  bas  de  Tribunal  qui  puiffe  la  juger,  (c) 

Les  Evéques  des  Pays-Bas  n'ont  garde  de  vouloir 
établir  le  parallèle  le  plus  léger  entre  lôs  Edits  de  1771 


communia  faciunt  habifacula,  quoriam  proprer  calamitatem  , 
qure  pro  peccatis  ncftriâ  ,  in  Eccleilis  fada  efî ,  fi-brcptse 
funt. ..  qucsdam  venerabiles  Doimis ,  &  fa^ia  fr.n:  communia 
dlverforia.  (  ItiJ.  tom.  7.  pag.  6oj.  ) 

(j)  Propter  pravorum  nequiriam ,  Ordo  Re!'igior.ii;  ,  & 
Loca  facratiffima  eis  ,  qiùbus  lic'tum  non  eft ,  ccmmittan- 
tur.  (  Ihid  tom.  7.  ) 

ib)  Providendum  efl:  Réglas  Ma-eftati. . .  Ut  Ibidem  Rcbgio 
«bfcrvarettir. . .  Qiialiter  veta  ndeb.iim  inconculTa  peimaneant , 
ne  voces  eorum  contra  fe  ante  Deum  clamantes,.,  ccndem- 
nabiles  fentiat.   (Ibïd.  t.  7.  pi:s;.  iSp.  ) 

(C)  Suggerendum  efi:  beatilbmis  Imperatoribus  quia.. . .  & 
il...  impugnatcres  (.fFicUinuir  ,  qui  praepugnaie  c'ebv.ctTint  , 
cavendum  fumir^opere  Principibv.s  ,  ut  qui  a  nemine  nunc 
judicaptur,  ne  in  futrro  pîdicio  gravit  s  judicentur.. .  Nos  qui 
debjtoies  fumus  ut  fidcliier  annuntiemus  ,  idcl-c6  fidclîLtr 
fuggérimus  ,  quod  filere  non  audemus.  (  Ji.-i.  t.  8,  pag.  6j,  > 


(  6o  ) 
&  1771  ,  5c  les  Loix  facrileges  de  pluHeurs  Princes 
fur  Cet  objet  pour  détruire  l'Etat  Religieux.  Ils  fe  fe- 
ront toujours  un  devoir  de  rendre  l'hommage  le  plus 
authentique  à  la  piété  de  V.  M.  I. ,  à  fon  attache- 
ment pour  l'Eghfe  &  pour  la  Religion.  Mais  c'eft  l'in- 
time conviclion  où  ils  font ,  que  Dieu  a  gravé  profon- 
dément ces  pieux  lentimens  dans  le  cœur  de  Votre 
Majefté  ,  qui  leur  infpive  la  confiance  de  lui  faire  ap- 
percevoir  le  danger  des  deux  Edits ,  qui  ,  contre  fon 
intention  connue,  &"  fans  doute  contre  celle  des  per- 
fonnes  qui  ont  rédigé  les  deux  nouvelles  Loix ,  con- 
duiroient  l'Etat  Monafcique  à  un  dépériiTement  infen- 
/ible ,  à  une  mort  lente ,  dont  il  ne  fe  releveroit  pas. 
L'Edit  du  13  Mai  177 1,  paroît  avoir  eu  un  objet 
intérelf^iut ,  pour  le  bien  de  la  Religion  &  de  VEtat; 
il  a  été  deftuié  à  rendre  Vadmijjîon  k  C Etat  Re- 
ligieux entièrement  gratuite  ;  à  faire  revivre  fur  ce  point 
important  de  la  Difcipllne  régulière  ,  les  difpofitions 
des  faints  Canons  ;  à  faire  ufage  des  moyens  les  plus 
propres  à  les  faire  refpecier  &  objerver  ^  &  à  profcrire 
&  prévenir  tousles  fubterfuges  ,  tous  les  prétextes  pal- 
liés par  lefquels  ont  efl:  parvenu  à  éluder  leur  fainte 
rigueur 

LE  dit  a  73  Articles. 

Le  premier  défend  indiftin6lement  à  toutes  les  Com- 
munautés Religieufes ,  d'exiger  &c  même  de  recevoir 
quelque  fomme  que  ce  foit  en  argent ,  ou  en  valeur 
à  titre  de  Dot ,  Habillement ,  Don,  Penfion  ,  de  No- 
viciat ou  autre  titre  Se  prétexte  que  ce  puiffe  être , 
pour  la  réception  ou  admiffion  des  Religieux  &:  Re- 
ligieufes. 

Le  ime.  Article  déclare  nulles  toutes  ftipulations, 
ou  conventions  qui  fe  feroient  à  ce  iujet  direélement 
ou  indireftement  ,  verbalement  ou  par  écrit. 

Le  3 me.  Pour  empêcher  tout  prétexte  d'éluder  la 
Loi,  &  fpécialement  celui  de  la  libéralité  &;  de  l'au- 
mône, interdit  la  faculté  de  faire  des  dons  &:  legs, 
foit  aux  Maifons ,  foit  aux  perfonnes  Religieufes. 


(  6I  ) 

Le4me.  prononce  une  amende  égale  au  don  Se  legs, 
ou  à  ce  qui  aura  été  ftipulé  pour  l'ingreffion  en  Re- 
ligion ,  quand  même  la  convention  n'tût  point  été 
elFeâ:uée  ,  tant  contre  les  Communautés  qui  auroient 
reçu ,  que  contre  ceux  qui  auroient  donne  ou  contri- 
bué au   payement. 

Le  çme.  autorifc  tous  les  Parens  à  réclamer 
pendant  30  ans  les  dons  &  dots  faits  aux  Monafteres 
»i)u  à  leurs  membres. 

Par  le  6me.  l'amende  &  la  confifcation  font  re- 
mifes  à  ceux  qui  répeteroient  eux-mêmes ,  ou  dénon- 
ceroient  à  la  Juftice  leurs  propres  conventions  ou  li- 
béralités. 

Le  yme.  en  étendant  la  même  peine  aux  Nîonal^ 
teres  des  Mendians  ,  veut  que  les  amendes  qu'ils  au- 
roient encourues  ,  foient  payées  par  les  Syndics  de 
ces  Ordres,  ou  que  ces  Monafieres  ibient  privés  de 
la  quête  pendant  fïx  mois. 

Pour  parvenir  plus  lurement  à  l'exécution  de  ces 
difpofitions  rigoureufes  ,  l'Article  8  'enjoint  aux  Su- 
périeurs &  Supérieures  des  Communautés  Régulières, 
d'avertir  les  Officiers  Fifcaux  (un  mois  avant  la  Pro- 
feffion  )  du  nom  du  Novice ,  ainfî  que  de  fes  Père 
&  Mère  ou  Tuteur ,  &:  du  lieu  de  Ta  naiiîance  ,  à 
peine  de  200  écus  d'amende. 

L'Article  9  permet  néanmoins  aux  Maifons  R-eli- 
gieufes  d'exiger  des  Novices  qui  quitteront  l'Etat  Re- 
ligieux,  une  penfion  de  300  florins,  pour  nourriture, 
habillement  &  autres  dépenlés  de  toute  efpece. 

L'Article  10  dépouille  de  la  jouiflance  de  leurs 
biens  ,  tous  ceux  qui  entreront  au  Noviciat  ,  fauf  à 
les  reprendre  ,  s'ils  renoncent  à  l'Etat  Monaftiqi^e , 
mais  fans  pouvoir  répéter  les  fruits  perçus  pendant 
cet  intervalle. 

L'Article  1 1  j  voulant  extirper  l'abus  des  penfîons 
illimitées  au  profit  des  Reliaieux  ou  Religieufes  ,  les 
réduit  à  la  fomme  de  50  florins,  à  peine  de  la  con- 
fifcation  de  la  rente  ou  penfion  au  profit  des  Pau- 
vres ,  5c  d'une  amende  de  laoo  flor.  contre  les  Corn- 


C  61  ) 
îîiunautés ,  Si  d'une  pareille  amende  conntre  les  Pè- 
res ,  Mères ,  Tuteurs  &  tous  autres. 

L'Article  12  défend  aux  Religieux  qui  font  en 
congrégation ,  d'envoyer  les  Sujets  Nationaux  faire 
leur  Noviciat  clans  des  Mailbns  fuuées  hors  les  Terres 
&  Pays  de  l'obéiffaiice  de  l'Imperatrice-Reine ,  à 
peuie  de  looo  écus  d'amende  payables  folidairement 
l>ar  toutes  les  maifons  de  rC3rdre  ,  &  de  pareille 
peine  contre  les  Pères ,  Mères  ou  Tuteurs ,  &  même 
d'interdiction  perpétuelle  à  ces  Novices  de  rentrer 
fous  la  domination  dans  une  Maifon  de  l'Ordre  ;  fi 
le  Novice  eit  d'un  Ordre  mendiant ,  le  Couvent  feia 
privé  de  ia  quête  pendant  fix  mois. 

Enfin  l'Art.  13  déclare  que  les  contraventions  aux 
dirpohtions  précédentes  ne  pourront  être  couvertes 
par  tonte  prefcriprion  au-defTous  de  30  ans. 

Le  fécond  Edit  a  enchéri  fur  des  Réglemens  déjà 
fi  rigoureux. 

Le  premier  Article  a  réduit  à  150  florins  la  pen- 
fîon  des  Novices  qui  fortent  des  Maifons  P>.eligieufes. 

Le  fécond  a  défendu  de  donner  à  aucune  Com- 
munauté Régulière  le  capital  de  la  rente  ou  penfion 
viagère  de  50  florins,  permife  en  faveur  des  Reli- 
gieux &.  Religieufes,  à  peine  de  connfcation  du  ca- 
pital au  profit  des  pauvres  ,  &:  d'une  amende  dé  pa- 
reille fomme  ,  tant  contre  le  Couvent ,  que  contre 
les  Parens. 

Le  3  me.  a  ordonné  que  les  Couvens  devant  fournir 
toutes  les  chofes  néceifaires  à  leurs  Religieux,  les 
Supérieurs  ne  pourroient  retenir  ni  faire  tourner  au 
profit  de  la  Communauté  ,  aucune  portion  de  la 
penfion  de  50  florin^; ,  dont  chaque  Religieux  ou  Px^e- 
iigieufe  jouira  pour  la  totalité ,  fous  la  direction  néan- 
moins de  fes  Supérieurs. 

Par  l'Article  4,  il  a  été  défendu  d'admettre  les 
Novices  à  Profeliion  avant  l'âge  de  15  ans  accom- 
plis ,  à  peine  de  4000  florins  d'amende  ,  d'expulhon 
perpétuelle  des  Supérieurs  des  Etats  de  l'Impératrice, 
iU  de  dépofitjon  <^'es  Supérieurs ,  avec  inhabiUté  de 


(  «3  ) 

pouvoir  ]<im;iis  occuper  aucun  emploi  ou  office  dans 
l'Ordre ,  pour  la  première  contravention  ;  &  en  cas 
de  récidive,  à  peine  en  outre  de  la  ilîpprellion  en- 
tière du  Monaflere. 

L'Article  5  ,  dans  la  vue  d'aflurer  Texécution'  dn 
précédent ,  a  enjoint  aux  Supérieurs  d'envoyer  ,  un 
mois  avant  la  Profellion ,  l'extrait  bapriftaire  de  chaqu-e 
Novice  duemeut  légaiifé ,  aux  Conseillers  Filcaux  , 
à  peine  de  200  écus  d'amende. 

Ce  tableau  pourra-t-il  ne  pas  faire  fur  le  cœur  de 
de  V.  M.  rimpreffion  qu'il  a  gravé  dans  celui  des 
Evêques  des  Pays-Bas  ? 

Nous  ne  pouvons  qu'applaudir  aux  difpoiîtions  de 
l'Edit  du  13  Mai  1771  ,  qui  profci"ivcnt  les  exactions 
de  Dots,  les  Stipulations  pour  l'Ingrcilion  en  Reli- 
gion. Parfaitement  conformes  à  l'erprit  de  l'Eglife , 
ces  difpofitions  ne  font  que  Texprcffion  fidelle  des 
Conftituîions  canoniques. 

Mais  qu'il  nous  foit  permis  de  faire  obferver  à  V. 
M.  combien  de  Réglemens  étrangers  a  cet  objet 
préfentent  les  deux  Edits.  L'âge  des  vœux  reculés 
à  i";  ans;  l'Interdiction  aux  Communautés  Rcligieu- 
fes  de  recevoir  des  libéralités  volontaires ,  à  celles 
qui  peuvent  en  avoir  befoin  ,  à  vos  fujets  eux-mê- 
mes ;  l'Interdiction  de  faire  l'aumône  à  des  Lieux 
faints  ;  ne  permettre  une  peniion  pour  le  Noviciat , 
que  dans  le  cas  où  les  Novices  renonceroient  à  la 
vocation  Religieufe  ;  ces  mêmes  Novices  punis,  par 
la  perte  de  leurs  revenus  pendant  leur  féjour  au  Novi- 
ciat,  fans  qu'ils  aient  droit  d'exiger  un  compte  de  l'em 
ploi  qu'on  en  a  fait  pendant  leur  demeure  dans  les 
Monafteres  ,  quand  même  ils  retournernient  dans  le 
fiecle  ;  la  jouifTance  exclufive  de  la  penfion  accordée 
aux  Religieux  qui  les  rendroit  Propriétaires ,  fi  con- 
traire au  vœu  de  pauvreté.  Les  peines  fi  multipliées, 
fi  effrayantes ,  ■  fi  peu  convenables  en  parlant  à  des 
Religieux  ,  qu'on  lit  cependant  à  chaque  Règlement 
que  contiennent  les  deux  Edits  ,  &  qui  ne  peuvent 


(64)       ^     ^      ■ 
qii'inrplrer  ou  du  mépris  ou  du  dégoût  pour  un  état 
iaint  en  lui-même. 

L'exaction  des  Dots  eft  un  abus  ,  p?.rce  qu'elle 
tend  à  faire  admettre  cà  Profeirion ,  fous  l'appas  d'un 
profit  temporel ,  des  Sujets  qui  ne  font  polnt^  appelles 
à  la  vie  Religieufe  ;  parce  qu'elle  infefte  de  pactes 
hmoniaques,  un  eni^agement  facré  qui  ne  doit  avoir 
que  la  Religon  pour  principes  ,  &  le  ialut  éternel  pour 
terme.  Mais  la  profcription  de  cet  abiLs ,  dont  l'ob- 
jet ,  fui  van  t  l'efprit  de  l'Eglife ,  eft  de  maintenir  la 
pureté  de  la  vie  Religieufe  ,  peut  avoir  pour  motif 
une  politique  purement  féculiere ,  &  le  funefte  deflein 
de  préparer  l'extmction  des  Monafteres  médiocre- 
ment dotés ,  &  d'enlever  à  fous  les  moyens  d'admet- 
tre plus  des  Sujets  qu'ils  n'en  peuvent  entretenir , 
quelle  que  fût  la  vocation  de  ces  fuiets  furnuméraires. 
Autant  le  zèle  qui  arme  la  main  du  Protedeur  des  rè- 
gles canoniqvics,  pour  corriger  ce  qu'elles  condamnent , 
eft-il  digne  de  rcfpect  Se  de  louanges ,  autant  le  but  inf- 
piré  par  la  politique,  d'affoiblir,  d'énerver  l'Etat  Re- 
ligieux ,  doit-il  faire  verfer  des  larmes  aux  Evêques  , 
à  qui  le  falut  des  âmes  eft  confié. 

Nous  ne  le  difor.s  qu'avec  la  plus  vive  douleur  ; 
tout  fait  craindre  que  l'efprit  de  réforme  ait  eu  moins 
de  part  à  la  confe61:ion  des  deux  Edits ,  que  l'efprit 
de  deftruftion.  Si  l'on  ne  vouloit  que  remédier  à 
l'abus  des  dots ,  il  étoit  facile  de  prendre  des  pré- 
cautions pour  le  déraciner.  Tant  d'autres  difpoiitions 
qui  n'ont  aucun  rapport  à  cet  objet ,  n'annoncent  que 
trop  qu'on  a  eu  des  vues  ultérieures. 

L'intérêt  de  la  réforme  n'exigeoit  pas  fans  doute , 
qu'on  fixât  les  Profeftions  à  un  âge  qui  les  rendra 
néceftairement  plus  rares  &  plus  difficiles.  Il  n'exi- 
geoit pas  qu'on  mît  tous  les  Monafteres  dans  la  pro- 
hibition d'accepter  les  libéralités  des  fidèles,  &  que 
pour  en  arrêter  plus  fûrement  la  fburce  ,  on  fournît 
à  des  peines  les  mains  charitables  qui  fe  porteroient 
à  les  fecourir.  L'intérêt  de  la  réforme  ne  demandroit 

pas 


(  «5  ) 

pas  qu'on  fermât  pour  ainfi  dire ,  ou  qu*on  rétreftit 
du  moins  les  avenues  des  Maifons  Religieufes  paf 
les  dures  conditions  qui  font  impolées  à  ceux  qui 
concevroient  le  pieux  projet  de  Te  confacrer  à  Dieu , 
6c  d'éprouver  leur  vocation  pour  cet  état  de  perfcc-^ 
tion.  Il  ne  demandoit  pas  qu'on  ajoutât  à  ces  pré- 
cautions afFeftées  des  détenles  intimidantes ,  des  mé-* 
naces  de  délation  -,  des  amendes ,  des  difpQfitions  ou 
bannifTement  des  Supérieurs  ou  Supérieures  Réguliè- 
res ,  la  deftruftion  même  des  Monafteres. 

Quand  ces  Loix  n'auroient  d'autres  dangers  qm 
celui  d'infpirer  au  Peuple,  iinon  de  l'averfion  &  du 
mépris  ,  du  moins  du  dégoût  &  de  l'indifférence 
pour  l'Etat  Religieux  ,  c'en  leroit  aflfez  pour  engager 
Votre  Majefté  à  les  révoquer.  Par  cette  feule  im- 
preflion  ,  ils  feroient  peu  dignes  de  votre  piété ,  ils 
ne  pourroient  qu'attrifter  TEglife ,  en  éloignant  les 
fidèles  des  afyles  qu'elle  leur  é  ouverts  pour  les  met- 
tre à  l'abri  des  tentariorjs  du  rttonde. 

Or,  non -feulement  les  Edits  produifent  cette  fu- 
nefle  imprefîion ,  par  le  filence  qu'on  y  garde  fur 
les  avantages  de  l'Etat  Religieux ,  parce  que  rien  n'y 
infpire  le  refpe(5l  qu'il  mérite  ;  parce  que  le  peu  de 
cas  qu'on  paroit  en  faire  ,  frappe  vivement  les  ef- 
prits ,  fur-tout  dans  un  tems  où  l'incrédulité  &c  l'ir- 
réligion font  de  il  rapides  &  de  ii  malheureux  prc 
grès  •,  mais  c'eft  l'effet  naturel  &  néceffaire  des  Or- 
donnances que  renferment  les  Edits.  Ils  accumulent 
en.traves  far  entra'î'es  pour  embarraffer  l'accès  des 
Maifons  Religieufes.  Ils  en  alarment  &  fatiguent  les 
Membres ,  6c  fur-tout  les  Supérieurs.  Ils  prononcent 
dans  un  cas  leur  deflrudion  irrévocable  ,  Se  fur  le 
champ.  Si  ces  Edits  avoient  Ueu,  leur  exécution, 
femblable  à  un  poifon  lent ,  ne  tarderoit  pas  à  ren- 
dre les  Monaileres  déferts. 

Il  efi  fans  doute  de  notre  Miniftere  de  faire  à 
Votre  Majefté  les  plus  refpeélueufes ,  mais  les  plus 
fortes  Repréfentations  fur  des  Edits  fi  vifiblement 
furpris  à  la  bonté  de  votre  cœur.    Nous  nous  ren- 

£ttt 


(  66  ) 
tirions  fourds  à  la  voix  de  la  Religion ,  fi  nous  étions 
inlenlibles  au  coup  que  ces  Loix  portent  à  l'Etat  Re- 
ligieux ,  &  nous  ne  pourrions  reiîer  dans  le  filence , 
à  la  vue  des  maux  qui  en  doivent  être  la  fuite,  fans 
trahir  nos  devoirs  ,  &  le  cri  de  notre  confcience. 
Nous  ne  ferons  donc  que  marcher  (iir  les  traces  de 
nos  pères ,  &  imiter  leur  zèle ,  en  empruntant  les  ex- 
preffions  du  Concile  de  Pavie ,  en  rappellant  à  Votre 
Majeflé  ce  que  ce  Concile  difoit  aux  glorieux  Empe- 
reurs :  Les  Monafteres  font  fous  la  proteftion  des 
Princes,  &  fi,  au. lieu  d'en  être  les  Défcnfeurs  & 
la  fauve-garde  ,  ils  s'en  rendent  les  deftrudeurs  ,  ils 
doivent  craindre  d'être  févérement  juges  au  Tribunal 
du  Tout-Puiflant.  Pour  nous  ,  de  qui  la  fidélité  de- 
mande que  nous  les  avertiffions  ,  nous  leur  fuggé- 
rons  humblement  ce  que  nous  n'oferions  leur  taire  : 
Nos  verb  ,  qui  dcbltorcs  jumiis  ,  ut  jiddita  annuntic^ 
mus ,  idcirco  fidclitcr  fuggerimus  ,  quod  Jîkre  non 
audemus.  ^«•, 

Mais  indépendamment  de 'ces  premières  obferva- 
tions  ,  qui  réfultent  du  fyftême  général  des  deux  Edits  , 
qu'il  nous  foit  permis  d'entrer  dans  quelque  détail  fur 
leurs  difpofitions  particulières. 

I®.  L'Article  4  de  l'Edit  de  1771  ,  défend  à  tous 
Supérieurs  Réguliers  de  l'un  &  de  l'autre  fexe ,  d'ad- 
mettre les  Novices  à  la  Profeffion  avant  l'âge  de 
0.5  ans;  &  cette  défenfe  cft  accompagnée  de  menaces 
tfui  montrent  l'intérêt  qu'on  met  à  fon  exécution. 

Il  n'eft  pas  befoin  de  chercher  le  motif  de  ce  Ré- 
glement ,  s'il  a  eu  pour  objet  d'enlever  aux  Monaf- 
teres  un  grand  nombre  de  Sujets ,  qui ,  en  les  renou- 
veliant,  perpétueroient  leur  exiftence.  Mais  en  écar- 
tant ce  m.otif,  que  la  Religion  ne  pourra  jamais  avouer, 
quel  prétexte  raifonnable  feroit  capable  de  le  jufii- 
fier  ?  Auroit-on  craint  que  des  engagemens  pris  trop 
légérem.ent  dans  les  Cloîtres,  n'excitaiîent  enfuite  le 
regret  &  le  repentir ,  &  auroit-on  prétendu ,  en  re- 
culant les  vœux  à  un  âge  plus  mûr ,  prévenir  les 
facrifîces  forcés,  indifcrets,  précipités? 


(67) 

On  n'avolt  pas  cette  appréhenfîon  dans  le.<;  fiecles 
les  plus  éclairés  de  l'Eglilé.  On  voit  par  le  Chap.  y 
de  la  Règle  de  Saint  Bafile,  que  ce  Saint  Dofteur , 
aflimilant  l'engagement  de  la  Profeffion  Religieufe 
à  celui  du  Mariage  ,  regardoit  l'âge  requis  par  les 
Loix  pour  ce  dernier  engagement  ,  comme  la  règle 
de  l'autre.  Dans  la  Lettre  à  Amphiloque  ,  Saint  Ba- 
file fixe  de  15  à  17  ans  l'âge  où  l'on  pouvoit  ad- 
mettre les  Filles  dans  les  Monaftercs.  Saint  Chriibl- 
tome  fuppofe ,  dans  Ton  Apologie  pour  l'Etat  Monas- 
tique ,  que  l'entrée  des  Monafteres  étoit  ouverte  aus 
jeunes  gens  ;  puilque  c'eft  aux  pères  qui  détournoient 
leurs  enfans  de  la  vie  Religieulé  ,  qu'il  adrefle  les 
éloquens  reproches.  Saint  Grégoire -le -Grand  n'exi- 
gea pas  plus  de  18  ans  pour  les  Monafteres  d'Angle- 
terre. Si  la  Règle  de  Saint  Benoît  ne  détermine  au- 
cun âge  précis ,  c'eft  parce  que  ,  la  capacité  des  jeu- 
nes gens  étant  plus  ou  moins  tardive  ,  on  croyoit 
devoir  laiffer  aux  maîtres  de  la  vie  Spirituelle  ,  le 
difcernement  de  ceux  qui  étoient  propres  à  la  dis- 
cipline Monaftique.  Dans  la  fuite,  le  dixième  Concile 
de  Tolède  permit  de  recevoir  les  Religieux  à  14  ans. 
Les  Ordres  de  Cluny  &;  de  Cîteaux  turent  autoriles 
par  les  Papes  à  recevoir  les  Sujets  à  15  ans.  Enfin, 
l'âge  des  vœux  a  été  fixé  par  le  Concile  de  Trente 
à  l'âge  de  16  ans  ;  Son  Décret ,  précédé  du  plus  Sé- 
rieux examen  ,  &  dreiSé  avec  la  plus  grande  matu- 
rité ,  a  formé  la  Loi  générale  de  l'Eglife  ;  il  a  été 
reSpefté  &:  Suivi  dans  tous  les  Etats  Catholiques. 

En  France  méme^  où  l'Ordonnance  d'Orléans  avoit 
placé  les  vœux  à  25  ans ,  on  Se  hâta  de  changer 
cet  ufage  pour  Se  conformer  au  Décret  du  Concile 
de  Trente.  Et  l'Ordonnance  de  Blois  ,  publiée  par 
Henri  lîl ,  Sur  le  vœu  des  Etats  dé  ce  Royaume ,  fixa 
l'âge  dés  vœux  à  15  ans. 

Quelles  raifons  anez  puifTantes  pourroient  aujour- 
d'hui faire  déroger  à  une  DiScipHne  fi  Sage  &  uni- 
verSelle  }  En  eft-il  aucune  qui  n'ait  été  pelée  &  ju- 
gée inSuffiSante  par  les  P.  P.  du  Concile  de  Trente  ? 

E  z 


i68) 
L'indlfcrétlon  des  engagemens  dans  l'Etat  Religieux , 
n'étoit  pas  moins  à  craindre  alors  que  dans  notre 
iieele.  Les  jewnes  gens  n'étoient  pas  plus  formés  à 
rage  de  i6  ans  :  le  facrifice  de  leur  liberté  étoit 
fufceptible  des  mêmes  inconvéniens  qu'on  peut  taire 
valoir  aujourd^liui. 

Que  Votre  Majellé  daigne  donner  quetqu'attention- 
aux  vues  importantes  qui  avoient  dirigé  la  pratique 
de  l'Eglife ,  depuis  tant  de  fiecles ,  ik  qui  ont  été 
les  foiides  fondemens  du  Décret  du  Concile  de 
Trente. 

Il  eft  du  fouverain  domaine  que  Dieu  s'eft  ré- 
fervé  fur  les  hommes,  de  dil'pofer  de  l'Etat  qu'ils  doi- 
vent embraiTer ,  &i  d'accomplir  les  defTeins  de  fa  Pro- 
vidence par  la  Profellion  à  laquelle  il  fe  confacrent. 
Or  c'eil:  par  la  vocation  qu'il  infpire  aux  jeunes  gens , 
qu'il  difpofe  pour  l'ordinaire  de  leur  entrée  dans  l'E- 
tat Eccléilaftique  ou  dans  la  vie  Religieufe ,  Se  c'efi 
à  l'Eglife  ,  ou  à  ceux  de  fes  Minières  qu'elle  en  Â 
chargé  ,  qu'il  appartient  de  juger  de  la  fincérité  de 
cette  vocation.  Des  Edits  qui  prohibent  les  vœux 
avant  l'âge  de  25  ,  ne  femblent-ils  pas  dil'puter  à 
Dieu  ce  domaine  fouverain  ,  ou  lui  donner  des  bor- 
nes ,  en  en>péchant  les  jeunes  gens  de  fuivre  la  voix 
de  Dieu  ,  qui  les  appelle  à  fon  lervice } 

Les  Loix  qui  ont  interdit  aux  Mineurs  la  difpofi- 
tion  de  leurs  biens  patrimoniaux  ,  n'ont  pas  mis  les 
mêmes  entraves  à  Tulage  de  leur  liberté ,  parce  que 
c'eft  un  bien  qu'ils  ne  tiennent  que  de  l'Auteur  de  la 
nature.  Pourquoi  leur  enlever  le  droit  de  la  régler, 
de  la  captiver ,  même  lorfqu'ils  ont  îie\i  d'appréhen- 
der d'en  faire  un  mauvais  ufage  dans  le  fiecle  ?  Dès 
qu'ils  commencent  à  devenir  pécheurs  ^  à  concevoir 
la  grandeur  des  engagemens  qu'ils  ont  voués  dans 
leur  Baptême,  ils  doivent  avoir  la  faculté  de  prendre 
des  mefures  efficaces,  ou  pour  recouvrer  leur  inno- 
cence ,  ou  pour  la  conferver ,  en  s'éloignant  des  ten- 
tations du  fiecle. 

Dans  quelles  incertitudes ,  dans  quels  embayias  n« 


(  69  ) 

;ette-t-on  les  jeunes  Pérfonnes  de  l'un  ^  de  l'autrfe 
fexe ,  qui  Te  croyent  appelles  à  la  vie  de  retraite  &c 
de  pénitence  ,  ii  l'on  tarde  les  Protellions  julqu'à 
25  ans?  A  quels  dangers  n'expole-t-on  pas  ceux  que 
ce  retard  obligera  malgré  eux  de  refter  dans  le  tu- 
multe du  monde  ,  oii  les  occaiions  de  pécher  lont 
incomparablement  plus  fréquentes  que  dans  les  Mo- 
nalteres  ?  Combien  fe  rt?ndront  inndeles  à  kur  pre- 
mière vocation?  combien  Te  perdront  dans  le  iiecle , 
qui  auroient  é\'ité  le  naufrage  dans  les  Maiions  Reli- 
gieul'es  ?  Le  Sage  déclare  heureux  ceux  qui  portent 
Le  joug  du  Seigneur  des  V enfance  j  &C  11e  met  -  on 
pas  obftacle  à  ce  bonheur ,  pour  beaucoup  de  jeunes 
gens,  en  ne  leur  laiil^mt  la  liberté  de  taire  des  vccux 
qu'à  ic   ans  ? 

Quand  on  eft  perfuadé  que  la  vie  Religieule  eft 
un  état  dp  perfedion ,  parce  qu'elle  conlifte  dans  la 
pratique  des  conl'eils  évani,éliques  ,  &  que  cette  ol>- 
lervance  li  précieufe  à  l'Ëglire  n'a  prefque  plus  lieu 
que  dans  les  Cloîtres  ,  on  n'eft  pas  tenté  d'en  rendre 
l'accès  inacceflible ,  on  doit  plutôt  favoriler  le  facri- 
hcQ  de  ceux  que  la  piété  y  conduit.  Or  l'expérience 
prouve  que  les  meilleurs  Religieux  font  ceux  qui  fe 
Tont  confacrés  de  bonne  heure  aux  exercices  de  la 
Difcjpline  régulière.  Il  faut  être  jeune  pour  fe  plier 
au  ]oug  de  l'obéifTance  ,  &  acquérir  l'habitude  des 
obfervances  monaftiques.  Il  efl  difficile  ,  après  15  ans , 
de  fe  former  aux  vertus  de  cet  état  ;  ou  eft  peu  pro- 
pre aux  connoiffances  néceflaires  pour  remplir  les  obli- 
gations monaftiques  ,  fur-tout  li  on  a  contracté  dans  Ife 
iiecle  des  habitudes  vicieufes  ,  fortifiées  par  leb  années. 

Combien  d'ailleurs  n'eft-il  pas  rare  qu'on  attende 
à  UQ  âge  fi  avancé  pour  faire  le  choix  d'un  état  , 
pour  embrafter  un  genre  d'occupation  ?  Les  jeunes 
gens  qui  auroient  du  goût  pour  la  vie  monaftique , 
perdront  patience  &:  ne  perfévérerorit  pas.  Les  parens 
feront  les  premiers  à  les  détourner  d'un  état  qu'il 
t.iudra  poftuler  fi  long-tems.  Ils  craindront  de  leur 
voir  perdre  ,  dans  l'airente  d'un   engaeement  incer- 

E  3 


(  70  ) 

tein,'des  années  précieufes  pour  fe  préparer  aux  dif- 
ferens  emplois  de  la  vie  civile.  Beaucoup  même  n'au- 
ront pas  les  tacultés  nëceiraires  peur  les  taire  étudier 
&:  lubfifter  fans  travail  pendant  un  fi  long  intervalle. 

C'eft  au  furplus  priver  les  familles  nombreules  de 
cetie  reiTource  honnête  pour  placer  leurs  enfans. 
Pourquoi  les  enfans  qui  fe  marient  avant  25  ans, 
i'ous  l'autorité  de  leurs  parens ,  ne  pourroient-iis  pa.s 
également,  fous  la  même  autorité,  fe  dévouer  à  la 
Religion  }  Le  mariage  n'ell  pas  un  engagement  moins 
jndifl'oluble  que  celui  de  la  Profeffion  Religieufe  : 
il  a  des  fuites  pour  le  moins  auifi  importantes  pour 
l'Etat,  &  il  n'a  pas  l'avantage  d'être  précédé  d'une 
année  de  probation.  La  même  Loi  qui  reftreint  la  li- 
berté des  eitans  pour  les  engagemens  religieux ,  prive 
<iu  même  coup  les  parens  d'une  'partie  de  l'auto- 
rité qu'ils  tiennent  des  Loix  ôi  de  la  nature  pour 
difpoiér  de  leurs  enfans.  Maître  de  les  engager  par 
des  établiiïeinens  humains  ,  les  parens  n'auroient-ils 
les  mains  liées  que  pour  les  offrir  à  Dieu  &  les  con- 
facrer  à  fon  fervice  } 

Tels  font  les  principaux  motifs  qui  ont  décidé  les 
Pères  du  Concile  de  Trente.  Ce  n'eft  pas  qu'ils  igno- 
ralTefit  les  raifons  qu'on  pourroit  oppofer  à  ce  que 
la  Prôfeiîion  Religieufe  fe  ht  à  16  ans.  Pi  s  favoient 
que  la  fixation  de  cet  âge  pourroit  occafionner  des 
engagemens  précipités.  Mais  touchés  avec  raifon  des 
.inconvéniens  beaucoup  plus  con'idérables  qui  au- 
Toient  réfulté  du  retardement  de  l'âge  des  vœux,  ils 
©nt  fait  un  Décret  folemnel  que  tous  les  Princes  Ca- 
tholiques ont  adopté.  C'efl:  ce  Décret  dont  les  E'.  êques 
dis  Pays-Bas  réclament  l'autorité.  Les  motifs  qui  l'ont 
dicté,  n'ont  rien  perdu  de  leur  force  par  l'exécution 
de  deux  fiecles  dont  le  Décret  a  été  fuivi ,  &  fi  les 
Religieux  qui  vivent  fous  la  Domination  des  Princes 
Inlideles,  jouiflent  librement  de  la  faculté  d'engager 
les  Sujets  qui^ont  atteint  l'âge  prefcrit  par  les  faints 
Canons,  auroit-on  pu  prévoir  que,  dans  un  Empire 
Catholique  ,  cette  liberté  leur  feroit  enlevée  ? 


(  7«  ) 

L'Edit  de  1771  défend  indiftlnélement  à  toutes  les 
Communautés  Religieufes,  non-feulement  d'exiger 
quelque  fonime  que  ce  foit  en  argent  ou  en  valeur , 
à  titre  de  dot,  d'habillement,  de  Penfion,  de  Novi- 
ciat ,  ou  tout  autre  titre  pour  l'admiflion  en  Reli- 
gion, mais  même  de  recevoir  ce  qui  feroit  offert 
gratuitement ,  &  afin  d'ôter  tout  prétexte  de  fraude 
il  déclare,  les  maifons  &  les  perfonnes  Religieufes 
incapables  de  toute  efpece  de  dons  &  legs. 

Si  le  but  de  ces  défenles  n'a  pas  été  d'annoncer  un 
projet  formé,  d'éteindre  les  Maifons  Religieufes ,  com- 
ment a-t-on  pu  confondre  les  fecours  que  ces  Mailbns 
peuvent  recevoir  de  la  piété  des  Fidèles ,  avec  l'exac- 
tion des  dots  pour  l'émifïîon  des  vœux,  &  conclure 
de  la  néceflité  de  réprimer  les  flipulations  fimoniaques  , 
celle  d'interdire  aux  Communautés  Régulières  toute 
capacité  de  recevoir.  A  s'en  tenir  aux  termes  de  l'E- 
dit  de  1771  ,  c'eft  l'obfervation  des  faints  Canons, 
qu'on  s'ef^  propofé  de  rétablir ,  c'efl  comme  protec-, 
teurs  de  la  difcipline  ,  &  chargé  à  ce  titre  de  la  main- 
tenir ,  qu  'on  a  choifî  Us  moyens  les  plus  propres  à  la 
faire  rej p celer  ^  en  rejettant  indijlinclemeyit  tous  les  Jub^ 
terfuges  ^  qui  avoient  fervi  k  l'éluder.  Il  doit  donc  y 
avoir  un  rapport  naturel  entre  l'abus  qu'on  a  cherché 
à  déraciner ,  &:  les  remèdes  qu'on  a  employés  pour 
y  parvenir. 

Mais  quoique  l'Eglife  ait  dans  tous  les  tems  con- 
damné l'exaélion  des  dots  ,  elle  a  fu  diflinguer  ce  que 
l'avarice  exige  de  ce  que  la  piété  offre  ;  elle  a  ré- 
prouvé l'une  ,  &:  elle  n'a  eu  garde  de  blâmer  l'autre. 

St.  Auguftin  ,  dans  la  Règle  qu'il  a  dreifé  pour  les 
Religieufes  ,  recommande  d'admettre  églement  les  pau- 
vres &  les  riches ,  fî  elies  ont  le  goût  des  vraies  richefTes 
qui  lont  celles  de  la  vertu.  Mais  bien  loin  de  défa- 
prouver  que  les  filles  riches  ou  leurs  parens  offrent 
des  préfens  aux  Monafleres ,  il  fuppofa  qu'on  y  pou- 
voir recevoir  leurs  libéralités  ,  puifqu'il  avertit  les 
Religieufes  qui  jouilïent  de  quelque  bien  dans  le  fiecle  , 
de  tenir  à  honneur  de   l'avoir  rendu   commun  y  en 

E4 


(  Il  ) 

çr-traint  dans  l'Etat  Religieux  ôi  de  ne  point  fe  glo- 
rifier d'avoir  contribué  à  la  vie  &  à  la  fubfiftance 
commune  de  la  Maifon,  en  donnant  quelque  por- 
tion de  ce  qu'elles  pofledoient  (<:). 

La  Règle  de  St.  Benoît  eil:  plus  exprefTe  encore. 
Après  avoir  fait  promettre  aux  parens  qui  prëfen- 
toient  leurs  enfants  à  l'Etat  Religieux  ,  de  ne  leur 
jamais  rien  donner  ,  ni  par  eux-mêmes  ,  ni  par  des 
perfonnes  interpofées ,  elle  ajoute  que  ,  fi  néanmoins 
ils  défirent  faire  quelques  aumônes  par  reconnoiffance, 
c'eft  au  Monaftere  que  leurs  libéralités  doivent  être 
faites.  (  Ckap.  59.  ) 

Gratieii  examinant  s'il  eft  permis  de  demander  quel- 
que ç  ho  fe  pour  l'entrée  en  Religion,  prouve  par  la 
conduite  d'Anne  ,  qui  fit  des  préfens  aux  Prêtres 
en  leur  offrant  fon  fils  Samuel ,  qu'il  n'efi:  pas  per- 
mis d'exiger ,  mais  qu'on  peut  recevoir  des  libéra- 
lités volontaires  ,  le  premier  étant  défendu ,  &c  le 
fécond  étant  légitime  {b). 

On  trouve  la  même  Doctrine ,  dans  Pierre  ,  Chan- 
tre de  l'Eglife  de  Paris  (c)  ,  dans  St.  Thomas  {d) , 
St.  Bonaventure  (e),  Denis  le  Chartreux  (/)  &  elle 
eft  conforme  à  la  décifion  des  Papes  Innocent  Ilî 
.(^)  &  Urbain  V  (A)  :  les  Auteurs  les  plus  rigides  fe 
contentçnt  d'ajouter  avec  Van  Efpen  ,  que  les  Re- 
ligieux ne  doivent  ni  exciter,  ni  rechercher  les  li- 
béralités  des  Novices  ou  de  leurs  parens,  ni   même 


■ -'.-(d)  Epift.  211. 

•  "^  '  Ce)  Non  permittitur  aliquid  exigere ,  fed  fponte  oblata  fuf^ 
d'pere ,  quia  illud  damnabile  eft ,  hoc  veto  minimes  Cauf.  i , 
■pa^.  2. 

ic)  In  verbo  abbreviato,  cap.  38. 

(û^  1%.  q.  100,  Art.  3. 

U)  Apologie  de  fon  Ordre  ,  p.  18. 

(/)  L.  I ,  de  la  Simonie  Art.  1 2. 

fg)  Illud   tamen  gratanter   recipi  poterit  quod  fuerit  fin« 
ï^xarione   gratis    cblatum.  L.   <.  Lit,   ?  de  jlmonia.   C^p.  30. 

(h)  Ibid.  Cap.  1. 


(73  ) 

les  recevoir  avec  un  efprit  mercenaire  (<z) ,  mais  bien 
éloignés    d'alîimiler   aux    dots    exigées ,    les   préfens 
offerts  par  la  piété ,  &  la  reconnoiiîance ,  &  de  les 
Ibumettre  à  la  même   profcription  ,  ils  s'élèvent  au 
contraire   contre    l'iniurtice    &:   l'avarice  des    parens 
riches,  pour  qui  la  réception  gratuite  dans  les  Monafleres 
eft  un  moyen  d'augmenter  la  fortune  des  enfans  qu'ils 
deftinent  au  fiecle.  Van  Ei'pen   leur  apprend   que  le 
bien  des  Monafteres  étant  le  Patrimoine  des  pauvres , 
ils  ne  doivent  pas  faire  confommer  par  leurs  enfans 
une    portion  de  ce  Patrimoine ,  quia  ipjonim  proies 
loca  paupcrujH   occupant  (b) ,   &:  que  {i  c'efl:  un  de- 
voir de  charité  pour  les  fidèles  d'aider  par  leurs  au- 
mônes ,  ceux  qui  ont  le  courage  de  renoncer  au  mon- 
de ,   &:    de   s'enferm«r  dans  les    Monafteres ,   il  eft 
d'une  juftice  étroite  pour    les  parens   riches  d'appli- 
quer  leurs   aumônes  aux  Maifons  ou  Congrégations 
qui  ont  rec^u  leurs  enfans  (c) ,  il  n'en  excepte  que  le 
cas  où  le  Monaftere  feroit  affez  riche  pour  n'avoir  aucun 
belbin. 

Si  le  Rédaéleur  des  Edits  eût  connu  ces  vérités , 
&  que  les  règles  de  l'Eglife,  dont  il  vouloit  procu- 
rer l'exacle  obfervation ,  enflent  préfidé  aux  difpo- 
fitions  qu'il  écrivoit ,  il  n'auroit  pas  mis  c'ans  la  mê- 
me clafle  les  ftipulations  illicites  ,  &  les  témoignages 
de  reconnoifîance.  Il  n'auroit  pas  regardé  les  libé- 
ralités volontaires  offertes  par  les  parens ,  6c  accep- 
tées par  les  Religieux  ,  comme  des  fubterfiiges ,  pro- 
pres à  éluder  la  Loi ,  comme  des  lunonies  palliées. 
N'eût-il  pas  appréhendé  au  contraire  de  réduire  les 
parents  à  l'impoflibilité  de  remplir  un  devoir  de  juf- 
tice ?  Il  fe  feroit  encore  moins  permis  d'en  détourner, 
par  des  menaces  ,  ceux  qui  auroient  eu  la  volonté 
de  s'en  acquitter. 


(,î)  Differt.  Canon,  de  vitlo  fimonise  P.  2,  Cap.  5 ,  S.  j. 
.    {b)  Ibid.  %.  4. 

(c)  Ipfa  juffitia  exigit  ut  bi  eleemcflnam  factant  Congrega- 
tioni  cui  filius  eorum  jam  incorporatu5  ell,  ibid  1. 


(  74  ) 

Les  Ecîlts  ne  fe  contentent  pas  d'intert^ire  tontes 
libéralités  pour  la  réception  des  Religieux  &  Religieu- 
ses, ils  mettent  tous  les  Monaftsres  indiftinétement 
cL^ns  l'abfolue  prohibition  de  recevoir  aucuns  dons 
&  legs  de  qui  que  ce  i'oit  ,  &  dans  quelques  circons- 
tances qu'ils  puiilent  i'e  trouver  ;  ils  détendent  mê- 
me de  leur  donner  le  capital  des  foibles  Penfions 
viagères  qu'ils  permettent  aux  parens  de  laifiér  aux 
Religieux. 

Ainfî ,  que  des  Monafteres  n'aient  des  revenus 
que  pour  l'entretien  de  peu  de  Sujets ,  leur  nombre 
ne  pourra  jamais  augmenter,  quelque  foit  l'emprsf^ 
fement  d'un  furnuméraire  pour  s'y  confacrer  à  Dieu  , 
quelques  infiances  qu'il  tafle  ,  quelque  marque  de 
vocation  qu'il  montre,  en  offrant  une  penfion  pour 
fa  fubfiftance  ,  que  le  Couvent  eft  incapable  de  four- 
nir ;  fon  facrifice  fera  impoflible;  le  Monaftere  feroit 
criminel  ,  s'il  avoit  la  condefcendauce  d'ouvrir  Ces 
portes  ',  le  fujet  feroit  lui-même  coupable  &  puni 
pour  avoir  ofé  fuivre  l'attrait  de  fa  piété  &  donner 
de  quoi  fournir  a  fa  fubfiftance. 

Que  les  Communautés  Religieufes  éprouvent  des 
pertes  ,  qu'elles  foient  ravagées  par  les  guerres ,  frap- 
pées du  feu  du  Ciel ,  toutes  les  refTources  leur  font 
enlevées ,  ils  n'ont  aucun  fecours  à  efpérer ,  les  ibu- 
lagemens  qui  leur  feroient  préfentés ,  les  aum.ônes 
qu'on  leur  feroit,  feroient  autant  de  délits  puniffa- 
bîes  que  la  judice  pourroit  pourfuivre  pendant  30 
ans  ,  &  qui  expoferoient  à  la  même  fiétriffure  &  les 
Communautés  qui  auroient  reçus,  &  les  mains  cha- 
ritables qui  fe  feroient  ouvertes  pour  les  fecou.rir 

Les  Evêques  des  Pays-Bas  s'al^ftiendroiit  de  feire 
aucunes  réflexions  fur  de  telles  difpofitions  ,  dont  ils 
apperçoivent  toutes  les  conféquences  ;  &  malgré  toute 
la  vivacité  du  fentiment  qui  les  pénètre ,  ils  fe  font 
un  devoir  de  le  renfermer  en  eux-mêmes ,  pour  s'en 
rapporter  uniquement  à  la  fenfibilité  du  cœur  ma- 
ternel de  V.  M.  qui  ne  rcfufera  pas  pour  les  pauvres 
Monafteres  des  Pays-Bas ,  de  leur  permettre  de  re- 


(  70 

cevolr  les  mêmes  fecours  qu'elle  vient  de  permettre 
pour  ceux  établis  dans  les  Pays  héréditaires  d'Al- 
lemagne. 

L'Art.  9,  de  l'Edit  de  1771  ,  ne  laiffe  aux  Mo- 
nafteres  la  liberté  de  prendre  des  Penlions  pour  les 
Novices,  que  dans  le  jlul  cas ,  où  ces  Novices  quit- 
teroient  le  Noviciat.  Cependant  ces  Pcniions  ,  (  lur- 
tout  le  prix  étant  fixé  à  une  lomme  allez  modique, 
réduite  depuis  à  moitié  par  l'Article  1  de  TEdit  de  1772,  ) 
ijc  fauroient  être  une  voie  indirefte  d'exiger  des  Dots 
&;  de  faire  dépendre  la  Profeflîon  Religieufe  de  pac- 
tions  honteufes.  Le  Concile  de  Trente  ,  en  défen- 
dant aux  Religieux  dcî  recevoir  quoi  que  ce  foit  des 
Novices  ou  de  leurs  Parens  avant  l'émiiîîon  des 
vœux  ,  en  excepte  expreilément  le  vêtement  &  la 
nourriture  :  Excepta  vïcîu  &  vejiitu  novitii  vel novit'uB 
illius  temporis  quo  in  probationc  ejl  (a).  Les  Edits 
condamnent  donc  ce  que  ce  Concile  approuve. 

L'Art.  10  du  premier  Edit  foumet  aux  liens  d'une 
efpece  d'interdiction  les  peribnnes  de  l'un  ou  de  l'au- 
tre fexe  qui  entrent  dans  les  Maifons  Religieufes  ,  pour 
éprouver  leur  vocation;  il  les  dépouille,  à  l'inftant 
de  leur  entrée ,  de  la  jouillance  des  biens  qui  leur 
appartiennent ,  ou  qui  peuvent  leur  échcoir  avant  la 
Profeffion.  Cette  jouiffance  eft  transférée  fur  le  champ 
à  la  famille  ,  &  s'il  leur  efl  permis  de  fe  faire  réin- 
tégrer dans  leurs  Droits  ,  cii  quittant  l'Etat  Religieux 
avant  la  Profejfwn^  c'efl  fous  la  condition  qu'ils  ne 
pourront  répéter  les  fruits  perçus  pendant  l'intervalle 
de  leur  Noviciat. 

Eft-ce  pour  dégoûter  de  l'Etat  Religieux  qu'on  a 
privé  de  leurs  revenus  tous  ceux  qui  feroient  tentés 
de  l'embrafler  ,  &  qu'en  même  tenis  on  leur  a  en- 
levé toute  efpérance  de  rentrer  dans  la  jouiflance 
des  fruits  échus  pendant  leur  épreuve ,  s'ils  viennent 
à  fortir  du  Noviciat  }  Il  eft  difficile  de  trouver  d'au- 


(4^  Seff,  25.  Cap.  16.  de  Reg^iilar. 


(7S) 

tre  intéî'êi:  &  d'autre  motif  à  cette  dirpolition.  Mais 
fans  invoquer  ici  l'autorité  des  Loix  ,  qui  affurent  les 
fruits  aux  propriétaires  des  fonds,  &  qui  ne  permet- 
tent de  dépouiller  les  Citoyens  de  l'adminifiratioi: 
&  de  la  }ouiffancc  de  leurs  biens,  que  dans  le  ca<; 
de  Droit ,  nons  ne  pouvons  nous  difpenler  de  faire 
obferver  à  V.  M.  ,  que  cette  peine  n'a  point  lieu 
contre  les  jeimes  gens  de  l'un  &  de  l'autre  fexe, 
que  leur  mauvaife  conduite  fait  renfermer  dans  des 
lieux  de  pénitence.  Ils  y  font  nourris  &  entretenus 
lur  leurs  biens ,  &:  quand  la  liberté  leur  eft  rendue , 
leurs  Tuteurs  ou  Curateurs  font  chargés  du  renfeigne- 
ment  des  fruits.  Les  Novices  ,  traités  avec  moins  de 
ménagement,  ne  peuvent  ni  payer  leurs  penfions  , 
tant  qu'ils  demeurent  dans  le  Noviciat ,  ni  le  faire 
rendre  compte  de  leurs  revenus  ,  lorfqu'ils  en  for- 
tent.  Quel  contraire  !  Les  perfonnes  que  la  piété  con- 
duit dans  les  Monaileres  ,  ont  un  iort  plus  rigou- 
reux ,  que  celle*  que  leurs  défordies  obligent  d'en- 
iermer  ! 

On  ne  fauroit  ne  pas  être  effi-ayé  de  la  multipli- 
cité &  de  "la  rigueur  des  pemes  dont  font  accom- 
pagnées toutes  les  difpofîtions  des  deux  Edits.  Le 
Rédafteur  des  Edits  ne  s'eft  pas  fouvenu  qu'il  n'eft 
pas  de  la  Majefté  du  Trône ,  que  le  Souverain  ne 
parle  qu'en  menaçant  dans  les  Réglemens  qu'il  publie, 
Eft-il  convenable  que  dans  des  Ordonnances  géné- 
■fàles,ilne  prévoie  que  des  prévaricateurs  ,  que  la 
■terreur  feule  peut  retenir  &  foumettre.^ 

Que  l'intimation  de  la  vengeance  p\ihlique  foit 
employée,  quand  des  Loix  enfreintes  obligent  de  les 
renouveller,  ou  lorfque  des  abus  dangereux  &  com- 
muns ,  exigent  qu'on  leur  oppofe  de  fortes  digues  : 
rien  n'eft  plus  fage.  C'eft  pour  ce  cas  que  l'appareil 
du  glaive  eft  réfervé.  Mais  prit-on  jamais  ces  pré- 
cautions dans  les  Loix  nouvelles  ,  &  dans  des  Loix 
deftinées  à  régler  la  Police  des  Monafteres  ?  Quelle 
idée  fe  forme-t-on  des  Religieux  ?  Quelle  idée  en  inf 
pire-t-on  au  Public  ,  en  les  traitant  comme  des  en- 


^  77  )    ^ 

durcis  dont  rindocilité  ne  peut  être  réprimée  que  par 
(Jjs  remèdes  extrêmes  ? 

Nous  ne  retracerons  pas  fous  les  yeux  cle  Votre 
Majefté  le  détail  des  peines  qui  terminent  chaque  Ar- 
ticle des  deux  Edits.  Mais  nous  manquerions  à  notre 
'iiiniftere  ^  fi  noUs  nous  dillimulions  Tinjuilice  de 
-.iciques  unes  de  ces  peines ,  que  le  Droit  naturel  & 
OC  le  Droit  divin  réprouvent  également. 

C'efi  un  principe  de  l'un  ce  de  l'autre  Droit  que 
l'innocent  ne  doit  point  être  puni  pour  le  coupable. 
Cependant  l'Article  12  du  premier  Edit  prononce  une 
amende  folidaire  contre  toutes  les  Mailons  du  même 
Ordre  ,  fi  l'une  d'elles  envoie  des  Su]ets  faire  leur 
Noviciat  dans  un  Royaume  étranger.  Les  Parens  ou 
Tuteurs  des  Novices ,  qui  peuvent  l'ignorer  ou  n'y 
avoir  aucune  part,  {ont  eu\- mêmes  aflujettis  à  la 
même  amende. 

Par  l'Article  5  du  fécond  Edit  ,  les  Monafteres 
qui  adniettroient  à  la  Profeflion  avant  l'âge  de  25  ans  , 
font  condamnés  à  une  amende  de  4000  iiorins ,  les 
Supérieurs  font  bannis  ;  &  fi  c'efl  dans  un  Couvent 
de  Filles ,  la  Supérieure  eft  dépofée ,  transférée  dans 
Une  autre  Maifon  ,  déclarée  incapable  de  remplir 
aucun  Emploi  dans  l'Ordre  ;  &:  comme  fi  ces  peines 
euffent  été  trop  légères  pour  un  tel  crime  ,  il  eft  or- 
donné qu'en  cas  de  récidive  ,  le  Monaftere  fera 
fupprimé  à  perpétuité,  &  que  les  Religieux  ou  Re- 
ligieufes  feront  transférés  dans  d'autres  Maifons  du 
même  Ordre.  Que  Votre  Majefié  daigne  examiner 
devant  Dieu  ,  s'il  efl;  conforme  à  l'équité  ,  que  le 
Monaftere  fouffre  de  la  faute  des  Supérieurs  qui  le 
gouvernent ,  que  les  Fondateurs  fruftrés  de  leurs  pieufes 
intentions  ,  partagent  la  peine  du  délit ,  &:  que  l'Eelife 
perde  un  Etabliffemeut  confacré ,  au  Culte  de  la  Re-=' 
ligion. 

Les  Loix  de  l'Èglife  ne  permettent  de  fupprimer 
les  Maifons  Religieufes  que  pour  caufe  de  néceifité 
ou  d'une  évidente  utilité.  Le  Concile  de  Trente  at 
confirmé  &c  renouvelle  le   Décret  du  Concile   gé- 


(78), 
nérAe  de  Confiance  qui  Tavoit  ainfi  réglé ,  &  lorfcjue 
la  fuppreffion  fe  prononce  par  voie  dé  peine,  elle  ne 
p«iut  être  méritée  que  par  les  plus  grands  crimes. 

6^^  L'Art.  3  de  l'Edit  de  1772 ,  interprétant  l'Art.  1 1 
de  l'hdit  de  1771 ,  ordonne  que  tout  Monaftere  étant 
tenu  de  nourrir  &  entretenir  fes  Membres ,  les  Supé- 
rieurs ou  Supérieures  ne  pourront  rien  retenir  fur  la 
Penfion  des  Religieux  ou  Religieules  ,  ni  en  appli- 
quer la  moindre  portion  au  profit  de  la  Communau- 
té ,  fous  quelque  prétexte  que  ce  foit  ,  oc  que  cha- 
que Religieux  ou  Religieufe  en  Jouira  pour  ia  tota- 
litî ,  fous  la  direftion  néanmoins  de  fes  Supérieurs. 

Il  eût  été  difficile  de  porter  les  précautions  plus 
loin  pour  empêcher  les  Monafteres  d'augmenter  leurs 
revenus.  On  n'a  pas  cru  que  ce  tût  allez  de  réduire 
les  Penlions  des  Religieux  &  Religieufes  des  Pays- 
Bas ,  à  la  fomme  de  50  florins,  pendant  qu'elles  font 
beaucoup  plus  con/iderables  dans  le  furplus  des  Etats 
de  Votre  Majelté  ;  on  a  même  appréhendé  que  les 
Maifons  Régulières  ne  s'approprialTent  quelque  por- 
tion de  ces  Penlions  fi  modiques.  La  jouilfance  en 
efl  affe'51:ée  primativement  aux  Religieux  particuliers , 
&  il  eft  défendu ,  fous  peine  d'une  amende  de  mille 
écus ,  d'en  appliquer  quoi  que  ce  foit  au  profit  de  la 
Communauté.  Mais  on  n'a  pas  fait  attention  que  ré 
ferver  aux  Religieux  la  jouiilance  de  leurs  Penfions , 
c'étoit  porter  atteinte  au  vœu  de  pauvreté  ,  ou  du 
moins  inviter  les  Religieux  à  violer  cet  engagement 
fondamental  de  l'Inflitut  Monaftique. 

La  défappropriation  a  toujours  été  une  des  plus  ef- 
fentielles  obligations  des  Religieux.  Elle  appartient  à 
la  fubflance  de  leurs  engagemens ,  &  long-tems  avant 
rétabliflement  des  vœux  folemnels  ,  elle  croit  regar- 
dée comme  une  vertu  efientielle  de  l'Etat  Monaili- 
que  {a).  La  vie  Monaftique  conlifte  en  effet  dans  la 


{a)  Eifentia  vltae  Religlofce  in  tribus  illls  virtiutbus,  obe- 
Jientiâ ,  paupertate,  caltitate,   ab  omnibus  hujus  teniporis 


(79) 

pratique  des  confeils  évangéliques ,  6c  fuivant  Jefus- 
Chrift  même  ,  l'al^clication  volontaire  eu  l'un  des 
principaux  ;  Si  vis  pcrficlus  ejfe  ,  vade  &  vende  ofnnia 
qua.  hiibcs.  La  vie  Monaftique  doit  retracer  la  con- 
duite des  premiers  Fidèles  de  l'Eglife  de  Jcrufaiem  , 
parmi  lefquels  tout  étoit  en  commun  :  Erant  illis 
omnia  commimia  ,  nul  ne  poffédant  quelque  chofe^ 
comme  lui  étant  propre  :  '!Scc  quifquam  eonim  qiia 
pc(jukbat  ^  aliquid  fiinin  &jfc  diccbat  (a).  Les  premiers 
Chrétiens  vendoient  leurs  biens ,  &:  en  metioient  le 
prix  aux  pieds  des  Apôtres ,  afin  que  les  deniers  ïuî- 
fent  diftribués  à  chacun  fuivant  leurs  befoins  ;  Divi- 
dcbanir  autcm  JïîiguUs  prout  aiique  opus  crat. 

C'efl  à  cet  exemple  que  les  Saints  Dofteurs  SsC  Ie> 
Conciles  ont  toujours  rappelle  les  Religieux  ,  comme 
à  un  modèle ,  dont  il  ne  leur  étoit  pas  permis  de 
s'écarter. 

Le  Concile  d'Orléans ,  de  Tan  511,  défend  de  rien 
biffer  en  propre  aux  Religieux ,  parce  que  tout  ce 
qu'ils  peuvent  ac({uérir  doit  être  employé  au  profit 
du  Monaftere  (b). 

Un  autre  Concile  tenu  en  France  en  615  ,  leur 
interdit  tout  pécule  ,  parce  que  tout  doit  être  mis 
dans  la  maffe  commune  ,  pour  être  diilribué  félon 
l'ordre  des  Supérieurs,  (c)  Le  Concile  de  Cologne 
de  l'an  1260,  décide  que  le  Religieux  ne  peut  pof- 
féder  quoi  que  ce  foit  fans  la  permiffion  de  fon  Su- 
périeur, {d)  Le  Concile  de  Trente  exclut  tout  pré- 


Religiofis  conftituitur.  Idem  fiebat  ab  antiquls  :  nam  Au, 
guftinus  &  Eafilius  fiC  loquntur,  {^Bdlarm,  ^e  Monachis,  cap.  /.) 

(j)  Aft.  4.  ^.  32. 

(i)  Omnia  quse  acqiilfierit  Monachus  ab  Abbatibus  au- 
ferantur  fecundum  Regulam,  Monafterlo  profutura.  (  Can.  /p. 
Ldhh.  tom.  4;  pa§.  1408.  ) 

(c)  Peculare  nullum  habeant,  fed  fint  eis  omnia  commu- 
nia ,  ficut  Abbatis  vel  prcepofiti  difpenfatio  jufta  perpende- 
rit.  (  Can.  4.  ibid.  pag.  16^6.  ) 

(ji)  Statuimus  quod  Mpnachi  proprium  non  habeant  ^ 


texte  capable  d'excufet  le  vice  de  propriété ,  eii  in- 
terdifant  aux  Religieux  la  faculté  même  de  pofledcf 
ail  nom  du  Monaftere,  &:  en  leur  ordonnant  de  tout 
rapporter  à  la  mafle  commune,  {a) 

Quelque  chofe  qu'acquière  un  Religieux  ,  ou  par 
fon  induftrie ,  ou  par  des  libéralités  volontaires ,  le 
Concile  de  Cambray ,  de  l'an  1565  ,  l'oblige  de  le  re- 
mettre furje  champ  au  Supérieur  ,  pour  qu'il  en  dif- 
pofe  comme  d'un  bien  commun,  {f)  Le  Concile  de  Mali- 
nes,  de  1570  ,  ne  veut  pas  que  les  Religieux  touchent 
leurs  Pensions ,  même  dans  la  vue  de  faire  de  bonnes 
œuvres,  parce  qu'elles  doivent  fervir  à  l'utilité  com^ 
mune  cki  Couvent,  (t) 

Ces  difpofltions  ne  l'ont  au  furplus  que  l'expref- 
fion  fidelle  de  ce  qu'on  lit  dans  toutes  les  Règles' 
Monaltiques. 

Une  des  premières  in{l:ruâ;ions  que  Caffieft  donne 
aux  Religieux ,  c'eft  qu'ils  ne  peuvent  rien  poiïeder , 
parce  qu'ils  font  voués  à  une  abdication  pleine  & 
fans  réferve.  {d} 

Saint  Bafilfe  difoît  à  (qs  Religieux ,  que  toute  pro- 


fecunclum  quod  régula  eoriim  prascipit ,  nifi  quod  Abbas 
dccierit  vel  permifcrit  (  Can.  ^,   ibid.  t.  2.  pn^.  7^3.) 

(<î)  Nemini  Regularium  liceat  bona  mobilia  vel  immobi- 
lia  cnjalcunique  qualitatls  hierint  ,  etiam  quovis  modo  ab 
fis  acquifita ,  tamquatTi  propria  aut  etîain  noinine  coiiventûs 
pofûJère  vcl  tenùrc  ,  fcd  ftatim  ea  fuperiofi  tradantur  ,  con- 
venniiquc  incorporcntur.  i^SeJf.  2j.  de  Regular.   Cap.  2.) 

(i)  Onînis  pecuiiia  vel  les  quam  Monachus  vel  Monlalls 
acquifere  ,  fiVe  labore ,  five  iiidufiria ,  five  amicorum  libe- 
raîitate ,  feu  dcnique  qiialibet  alla  occafione  polfit,  fiiperiori 
inox  tiadatur,  tta  ut  ad  muum  ejus  tanquam  tes  communis 
împendatur.  (  De  Monafl.   Cap.  10.  ) 

(c)  Penfiones  vitales  àut  reditus  perpétues  nuUi  permittan- 
tur  recipsie  ,  etiamh  in  ufus  pios  coiiverrcre  velinr  ,  fcd 
omnla  in  coninumem  uiuili  convertantur.  [de  Repil.  Cap.  1.  > 

(d)  Qui  convertitur  praî  omnibus  crudiri  débet  ut  nihil 
ei  peculiare  liceat  poiîidere  ,  fed,..  fs  nudatum  ex  omnï 
parte  cognofcat.  (_I'.<:g.  Cup.  27.)  ^   ^ 

priéte 


(  §1  ) 

priété  eft  incompatible  avec  leur  état  (.2) ,  &  que 
s'ils  avoient  quelque  chofe  en  propre  ,  ils  ne  mar- 
cherolent  plus  lur  les  traces  des  premiers  Chré- 
tiens. (/') 

C'eft  le  premier  précepte  que  Saint  Auguftin  pro- 
pore aux  Religieufes  dans  l'a  Règle  :  N'ayez  rien  en 
propre  ,  oc  que  tout  Toit  commun  parmi  vous ,  comme 
chez  les  premiers  Fidèles  (c).  Le  Saint  Dofteur  en 
conclut ,  que  tout  ce.que  reçoit  une  Religieufe  ,  quand 
ce  feroit  même  des  vctemens  ,  doit  être  detUné  par 
la  Supérieure  à  celles  des  Sœurs  qui  en  ont  le  plus 
de  belbin  {a). 

La  Règle  de  Saint  Benoît  tire  la  même  conféquence 
de  la  communauté  des  biens  qui  doit  être  invio- 
lable dans  les  Monafteres.  Le  Religieux  ,  loin  de 
garder,  ne  peut  pas  même  recevoir,  fans  l'agrément 
du  Supérieur  ,  ce  que  les  parens  peuvent  lui  en- 
voyer ;  il  faut  que  le  Supérieur  foit  maître  enfuite 
<l'en  difpofer  :  Si  Saint  Benoît  ne  veut  pas  que  le 
Religieux  fe  chagrine  de  l'emploi  que  l'Abbé  en  fe- 
roit  au  profit  d'un  autre ,  de  peur  qu'il  ne  fuccombe 
aux  fuggefhons  du  Tentateur  (s;). 

(a)  Si  quis  proprium  efle  dicit ,  abfque  dubio  alienum  fe 
facit  ab  eleclis  Dei.  (  Regul.  bmlor.  Cap.  27.  ) 

{b ,  Nuinquid  conveniataUquiJ  proprium  habere  in  focietate 
fratrum  ?  Hoc  contrarium  efl  teiiimonio  ,  quod  refertur  de 
lis  qui  crediderunt,  in  qiiibus  fcriptum  eiT;  :  nec  quaquam 
eorum  quœ  polTidebat ,  aiiquid  fuum  efTe  dlcebat.  ;  Ib'id. 
Cap.  8s.  ) 

(c)  Hase  funt  quse  ut  obfervetis  prscipimus..  primum... 
non  dicat'is  aiiquid  proprium  ,  fad  f:nt  vobis  omnia  co  m- 
inunia...  fie  enim  legillis  in  acTibus  Aportolcrum  {Ep.  2; t.  n,  j.  j 

id)  Sit  in  poteftate  prspofiturae  ut  in  commune  reda6tum, 
cui  neceffarium  iuerit ,  prsbeatur.  {îbid.  n.  12.) 
*  (0  Quod  fi  etlam  a  Parentibus  ei  qulcquam  di'eftum 
fuerit,  non  prsfumat  fufcipere  ilhid  ,  nifi  priiis  indicatum 
fucrit  Abbati.  Quod  fi  jufferit  fufcipi ,  in  Abbatis  fit  potel- 
tate  ,  cui  i'iud  jubeat  dari.  Et  non  contriftetur  frater  cui 
forte  diretftum  fuerit,  ut  non  detur  occafio  didjolo.  (  Cap.j^.') 

F  t1t 


^    ^    (Si) 

On  ne  connoîtroit  ni  la  nature ,  ni  l'étendue  du 
vœu  de  pauvreté  ,  fi  l'on  regardoit  ces  Réglemens 
comme  fufceptibles  de  reilri(5lion  ,  ou  fujets  à  la 
révolution  des  tems.  Ils  appartiennent  à  l'effence  du 
vœu.  Le  renoncement  du  Religieux  étant  abiblu  & 
fans  réferve ,  il  manque  à  Ion  engagement  dès  qu'il 
jouit  de  quelque  chofe  comme  lui  étant  propre  ,  & 
toute  coutume  contraire  qui  s'introduiroit  dans  les 
Maiions  Religieuies ,  loin  de  pouvoir  être  excufée  ,  ne 
feroit  qu'un  abus  qu'il  faudroit  fe  hâter  de  réprimer. 

C'eft  pourquoi  le  Pape  Clément  VIII  déclare  dans  la 
Bulle  NuUius  omnino  puhlïù  ,  pour  la  réforme  des 
Monafteres  ,  que  le  Religieux  ne  peut  Te  dilpenfer 
de  mettre  entre  les  mains  de  fon  Supérieur  tout  ce 
qu'il  reçoit ,  fans  en  excepter  même  les  préiens  de  fa 
famille  ,  afin  que  placé  dans  le  dépôt  commun  ,  il 
ferve  à  pourvoir  aux  difFérens  befoins  des  Membres 
de  la  Communauté.  La  défappropriation  doit  être  fi 
générale  dans  les  R.eligieux ,  que  le  même  Pape  leur 
recommande  d'éviter  l'efprit  de  propriété ,  jufques 
dans  l'ufage.  des  chofes  les  plus  nécelTaires  {a),  La 
Bulle  de  Clément  VIII  a  été  confirmée  par  Urbain  VIIÏ 
dans  fa  Bulle  Sacra  Con^rto^atio^  &  par  Innocent  XII , 
dans  un  Décret  du  lô  Juillet  1695  ;  le  feu  Pape 
Bénsit  XIV  la  rappelle  &  y  renvoie  dans  fon  favant 
Traité  des  Synodes  (/>). 

Il  y  a  donc  dans  la  tradition  de  l'Eglife  une  uni- 
formité parfaite  fur  ce  point  important  de  la  Difci- 
pline    régulière.    Tout  doit   être    commun    dans   les 


fa)  Etiain  fi  fubfidia  confangiiineorum  ,  omnia  fîatim 
Superiori  tradantur  &  Conventui  Incorporentur...  quo  com- 
iDiinis  inde  vittus  &  veftitus  omnibus  fuppeditari  poflit  ;  ne 
eorum  qu3e  ad  neceiruatem  concéda  erunt ,  ullus  qiiidqaarrt 
poffideat ,  lit  pro])rium ,  neque  uî  proprio  utatur.  (  Van  Efpen, 
DiJJert.    Canon,  de  v'ttio  pecul.  p.    1.  cap.  1.  h£l.  10.  ) 

(b  Gonfonant  Clementis  Vlll  &  InnocentisXIl  Romano- 
îum  Pontificum  conftiuuiones.  (  De  Synodo  l,  1,  cap.  /;?,  n.  12,  ) 


(  S]  ) 

^îonafteres ,  parce  que  le  Religieux  qui  a  tout  abdi- 
qué, ne  peut  rien  polléder  qui  ne  ibit  que  pour  lui; 
or  ,  une  chofe  ceiTe  d'être  commune  ,  dès  que  la 
jouilFance  en  eil  tellement  afieclée  à  un  particulier, 
que  tout  autre  einploi  en  eil  prohil>é. 

Que  Votre  Majefté  daigne  rapprocher  ces  principes 
înunuables  de  la  dilpoiltion  de  l'Art.  3  de  l'Edit  du 
10  Avril  1771.  La  contrariété  efl  iTcp  évidente  pour 
que  votre  piété  n'en  i'oit  point  alarmée.  L'Edit  dé- 
tend aux  Supérieurs  de  retenir  la  moindre  chofe  des 
penlions  des  Religieux  ou  Religieuies ,  Si  û'en  faire 
tourner  une  partie  quelconque  au  profit  de  la  Com- 
munauté. Or  les  faints  Canons.veulent  que  les  deniers 
qui  proviennent  des  Penfions  foient  dépofés  dans  le 
coffre  com.mun.  L'Edit  atfefte  aux  Religieux  la  jouif- 
fance  de  la  totalité  de  leurs  Penfions.  Les  faints 
Dofteurs  décident  qu'elles  doivent  être  diftribuées 
par  les  Supérieurs  à  proportion  des  befoins  les  plus 
preiTans  ,  &  la  règle  que  les  Religieux  ont  vouée  , 
leur  iiiterdit  non-feulement  toute  plainte ,  tout  mur- 
mure., mais  toute  peine  intérieure  fur  cette  diftribu- 
tion.  A  quels  dangers  n'eft-ce  pas  expofer  les  Religieux 
que  de  les  autorifer  à  toucher  leurs  Penfions,  à  en 
jouir  ,  à  en  difpofer  ?  Dans  quels  embarras  ne  jette-t- 
on pas  les  Supérieurs  que  leur  devoir  oblige  de  faire 
exécuter  le  vceu  de  pauvreté  •,  à  quelle  fâeheufe  extré- 
mité ne  réduit-on  pas  même  les  Evéques,  à  qui  leur 
miniftere  impofe  la  Loi  d'avertir  les  P«-eiigieux  qu'ils  ne 
pourroient,  fans  intéreffer  leur  confeience  &:  com- 
promettre leur  falut  éternel ,  profiter  du  funeilc  a.van- 
tuge  qui  leur  eft  accordé  par  la  nouvelle  Loi? 

L'Edit,  à  la  vérité,  affujettit  les  Religieux  à  n'ufer 
de  leurs  Penfions  que  fous  la  direction  de  leurs 
Supérieurs.  Mais  en  efl-ce  aflez  pour  prévenir  le  vice 
de  propriété .''  Ils  feront  gênés  dans  î'em.ploi  des  de- 
niers 'qu'ils  pofiéderont.  Il  ne  leur  fera  pas  libre  de 
les  diflîper ,  de  s'en  fervir  pour  de  vaines  trivolités. 
En  feront-ils  moins  propriétaires  \  en  auront-ils  moins 
la  jouiflance  Ôc  la  difpofition  de  leurs  revenus  ?  S'ils 

F  X 


(  ^4  ) 
îe  deftinent  à  quelque  chofe  d'utile  &:  de  raifonnp.blè , 
les  Supérieurs  leront  dans  la  néceffité  d'y  confentir  : 
or  c'fcft  la  faculté  même  de  toucher  leurs  Penfions , 
&  d'en  difpofer ,  que  les  Conciles  condamnent  dans 
les  Religieux  ,  parce  qu'elle  ne  lauroit  compatir 
avec  le  vœu  de  pauvreté.  DuiTent  -  ils  les  conla- 
crer  aux  œuvres  les  plus  pieufes  ,  cette  deftination , 
lî  louable  en  elle-rncme  ,  ne  léroit  pas  capable  de 
les  excufer  ,  ni  de  raffurer  leur  confcience.  En  1648 
&  1726 ,  une  Univerfité  célèbre  conMtée  fur  cette 
matière  importante ,  n'héfita  pas  à  réprouver  l'ufage 
qui  laiiïbit  aux  Religieux  la  jouilTance  de  leurs  Pen- 
fions ,  fur  le  principe  ,  que  fuivant  les  Loix  Cano- 
niques ,  elles  doivent  être  confondues  dans  les  revenus 
du  Monaftere  {a). 

Nous  ne  fommes  point  furpris  que  les  perfonnes 
féculieres  ignorent  ces  vérités ,  qu'elles  ne  font  point 
obligées  de  favoir  ;  mais  qu'il  nous  foit  permis  de 
rcpréfenter  refpeclueufeirient  à  V.  M.  que  ce  ne  font 
point  elles ,  ou  du  moins  que  ce  ne  font  point  elles 
feules  qu'il  faut  confulter  fur  des  objets  qui  touchent  fi 
direftement  les  liens  de  la  confcience  &  la  difcipline 
i'itérieure  des  Communautés  Rèligieufes.  J.  C.  a  éta- 
bli dans  fou  Egîife  des  Miniures ,  à  qui  il  en  a  con- 
fié radminiftration.  Il  leur  a  promis  fon  aififlance , 
en  leur  communiquant  fon  autorité.  On  ne  fuit  point 
l'ordre  de  Dieu  ,  &  par  conféquent  on  s'expofe  à 
s'égarer ,  lorfqu'en  liégîigeant  cette  Infritution  divine , 
on  veut  régler  ce  qui  concerne  la  Religion  ,  indé- 
pendamment des  Evêques  qui  par  état  font  chargés 
du  Gouvernement  de   l'Eglife.  {b) 

Nous  favons  que  les  Souverains  font  les  Proteéleurs 


(<2)  Ces  confukatlons  fe  trouvent  à  la  fin  d\ipe  DiiVcrraîion 
fur  la  pauvreté  Religieufe  ,  inipriinée  à  Paih  chez  Babud, 
en  1728, 

(b)  Quos  pofuit  _  Eplfcopos  regere  Ecclefiam  Dei.  Aft, 
Cap,   20, 


(  «5   ) 

de  l'Egîife  S:  de  Tes  Canons  ;  nous  honorons  dans  îa 
Sacrée  Pcrfbune  de  Votre  Maiedé  cet  augufte  titre 
&:  les  droits  qui  y  font  attaché  ?  Nous  nous  ferons 
touiours  une  gloire  de  reconnoître ,  avec  Saint  Au- 
guftin  ,  que  les  Rois  doivent  fervir  Dieu  en  Rois , 
&  qu'ils  s'acquittent  de  ce  devoir  en  faifant  pour  fon 
fervice  ce  que  les  Rois  feuls  peuvent  ùïre  {a).  Mais 
nous  favons  en  mérne-tems  que  le  Proteéleur  n'elî 
que  TEvéque  extérieur  ,  que  Dieu  n'a  point  établi 
les  deux  Pui/Tances  pour  qu'elles  fuffent  oppofées  ; 
&  que  félon  i'expreffion  d'Ives  de  Chartres ,  {{  l'heu- 
reux Gouvernement  &  le  bonheur  de  l'Eglife  réful- 
tent  de  leur  concert ,  leur  défunion  menace  les  Inf* 
tîtutions  les  plus    fages  d'une  ruine  prochaine  (h). 

Les  deux  Edits  qui  excitent  notre  réclamation , 
confirment  ce  que  l'expérience  avoit  déjà  li  fouvent 
juftifié  :  que  ii  les  Evêques  euffent  été  confulté  ,  que  fi 
le  projet  des  Loix  nouvelles  leur  eût  été  coînmuni- 
que  ,  nous  ne  ferions  pas  dans  la  trifte  néceffité  de 
porter  aux  pieds  du  Trône  nos  plaintes  trop  fondées, 
de  déférer  à.  Votre  Majefté  elle-même  le  danger  de 
tant  de  difpofitions  qui  alarment  la  piété. 

Les  Evéques  euffent  prévenu  la  publication  des 
Edits,  en  faifant  fur  leurs  projets  les  obiérvations  que 
nous  venons  de  développer  fur  les  différens  articles 
de  ces  Loix.  Ils  auroient  mis  fous  les  yeux  de  Votre 
Maiefté  les  maximes  des  Saints  Docteurs ,  les  Décrets 
des  Conciles ,  les  règles  de  h  Difcipline ,  &:  par  elles 
le  vœu  &c  l'efprit  de  l'EgliJe.  Votre  Majefté  eût  été 
convaincue  que,  fous  le  fpécieux  prétexte  de    corri- 


(a)  In  hoc  fervient  Domino  Reges,  in  qi'antum  Tiint  Re- 
ges  ,  cum  ea  faciunt  ad  ferviendiim  illi ,  quse  non  poilunt 
facere  nifi  Regcs.  (  Ev.  iç^.  n.  ip  '^. 

(h  Cùm  Regnum  oc  Sacerdotes  inter  Te  conveniunt,  bene 
regiair  mundus,  floret  &  fruiti'erat  Ecdcfia:  cùm  vero  inter 
fe  dilcordant  non  tantum  parva;  res  non  crefcunt,  fed  etiam 
inagii»  res  miferabiiiîer  dilabuntur,  {^£f,  46  . 

F3 


(  «o 

ger  des  abus  réels ,  on  pouffoit  cî*une  part  la  févérité 
au-delà  des  bornes  fixées  par  nos  Pères ,  &  que  de 
l'autre,  on  autorifoit  des  pratiques  que  le  relâche- 
ment a  voulu  introduire ,  &  que  la  pureté  de  la  mo- 
rale Evangélique  n'a  jamais  permis  de  tolérer. 

Mais  ce  que  les  ÉvéquQS  euifent  eu  le  plus  à 
cœur  de  faire  appercevoir  à  V.  M. ,  c'eft  l'affligeant 
^jréfage  que  fait  naître  le  coup-d'œil  général  des 
deux  Edits  ;  c'eft  h  fanefle  tentativede  préparer  par  une 
décadence  progreffive ,  la  chute  de  l'Etat  Monafti- 
que  ;  c'efl  l'art  avec  lequel  on  a  réuni  tout  les 
moyens  propres  à  le  conduire  à*  fa  mine. 

Votre  Majefté  Impériale  eût  appris  des  Evêques 
que  rinftitut  Monaftique  eft  faint  en  lui-même,  parce 
qu'il  confaere  à  la  pratique  des  Confeils  les  enfens 
de  l'Eglife  qui  ont  un  défir  iincere  de  parvenir  à  la 
perfection  ;  qu'au  jugement  de  Saints  Pères  la  vie 
Religieufe  eft  une  imitation  de  celles  des  Apôtres  &: 
de  J.  C.  rnême  {a)  ;  que  les  Moines  »  ont  trouvé 
»  dans  les  premiers  Chrétiens. . ,  dans  Saint  Jean- 
9>  Baptifte.  ..  dans  les  anciens  Prophètes,  un  modèle 
»  admirable  de  vertus ,  qu'ils  ont  excellemment  pra- 
w  tiquées.  (t»)  « 

Les  imporrans  fervices  que  les  Monafteres  ont 
rendus  à  l'Eglife  ,  &  le  jugement  uniforme  qu'elle  a 
porté  depuis  plus  de  dou'ze  fiecles  fur  la  fainteté  de 
leur  inftitution  ,  eût  difpenfé  les  Evoques  de  com- 
battre les  iniufles  préventions  que  l'incrédulité  ,  ou 
l'indifférence  pour  la  Religion  ,  infpirent  à  tant  de 
perfonnes ,  &:  (ur-tout  à  celles  qui  inftruites  dans  la 
fagelTe  du  iiecle,  ne  fe  piquent  que  d'une  politique 
mondaine. 

Les  Evéques  n'euflent  point  difîimuié  à  V,  M.  les 
progrès  que  le  relâchement  a  fait  dans  les  Cloîtres. 


(c)  Monachi  genus  vivendi  Apoftolorum  ac  Domini  imi- 
tantur.   (  S.  BaJIl.  Conflit.  Cap.  2.) 

(J>)  Thoinulfin.  Difcipl.  de  l'Eglife,  (T.  i,  p,  1422.) 


C  57  ) 
En  avouant  Tes  abus  déplorables  qui  y  régnent ,  ils 
auraient  dit,  avec  le  iavaut  Pierre  d'AïUi,  Evéque  de 
Cambray ,  que  c'eft  par  la  réforme ,  6c  non  par  la 
deftruclion  qu'il  taut  y  remédier  ,  à  l'exemple  des 
médecins ,  dont  la  fonction  n'eft  pas  de  faire  périr 
les  malades,  mais  de  guérir  leurs  infirmités  (^). 

Ils  auroient  eu  la  confiance  d'aflurer  à  V.  M. 
que  le  mal  n'eft  pas  au  point  où  on  i'e  plaît  de  le 
porter;  qu'il  eft  encore  des  Monafteres  qui  font  les 
afyles  de  l'innocence,  où  la  pureté  des  mœurs,  la 
pauvreté  de  l'efprit  &:  du  cœur  iê  confervent ,  où  les 
Keligieux  &  Religieufes  joignent  à  la  régularité  &: 
aux  faintes  rigueurs  de  la  pénitence ,  un  zèle  brûlant 
pour  la  gloire  de  Dieu  ;  où  ces  âmes  pieufes  occu- 
pées de  chanter  les  louanges  de  Dieu ,  &:  alTociées 
au  miniftere  des  Anges ,  élèvent ,  comme  Moïfe  , 
des  mains  pures  vers  le  Ciel ,  pour  détourner  les 
fléaux  de  la  colère  de  Dieu,  appaifer  fa  Juftice  ,  &: 
attirer  fur  les  Peuples  &:  fur  ceux  qui  les  gouver- 
nent, les  Bénédidions  du  Ciel. 

Les  Evêques  auroient  repréfenté  à  V.  M.  qu'in- 
dépendamment de  ces  avantages,  que  le  libertin  peut 
xnéprifer,  mais  qui  feront  toujours  précieuji  aux  yeux 
de  quiconque  ayant  de  la  Foi  &:  tbrmé  à  l'école 
de  l'Evangile  ,  connoit  tout  le  mérite  de  la  prière  , 
6c  croit  avec  le  Prophète  Roi ,  que  fi  le  Seigneur 
ne  garde  lui-mérne  la  Ville,  c'eft  en  vain  que  veille 
celui  qui  eft  prépolé  pour  la  garder.  Ils  auroient  re- 
préfenté à  Votre  xM:ijefté  qu'il  eft  encore  de  l'intérêt 
de  la  Religion  &  de  l'Etat  de  perpétuer  les  Monaf- 
teres ,  &  d'y  .faire  refleurir  la  lumière  èc  la  vertu. 

Ce  font  le  Monafteres  qui  fourniftent  au  Clergé 
Séculier  des  Troupes  auxiliaires  toujours  prêtes  à  les 


(a^  Vitium  vel  abufus  cortigi  débet ,  &  non  ftatus  deftrui , 
vel  fuis  dcbitis  juribus  defraudari,  ficut  boni  Medici  of?îcium 
eft  ab  Infirmo  morbuni  tollere ,  6c  non  infirnium  corpus  del- 
truere.  (^De  Reform,  Ecd.  Cap,  de  Reform.  capiùs,  p.  8i.  ) 

F4 


(S2) 

aider  dans  le  pénible  Minlftere  des  for.(ft"ions  pa(l<v 
raies.  Dans  les  Villes,  les  Religieux  procureur  de 
iavans  &  de  zélés  Prédicateurs.  Dans  les  campagnes  , 
ils  fuppléent  les  Curés  malades  ou  infirmes  ,  leur 
charité  procure  aux  habitans ,  ou  la  liberté  de  conl- 
cience  néceflaire  à  plufieurs ,  ou  les  moyens  de  fa- 
tisfaire  leur  piété  par  la  participation  des  Sacremens, 
principalement  aux  Fêtes  iblemnelles. 

C'eft  dans  les  Ordres  Religieux  qu'on  trouve  le 
plus  grand  nombre  des  Miffionnaires  qui  s'expatrient 
pour  aller  porter  le  flambeau  de  la  Foi  dans  les  con- 
trées infidelles  ,.  &  qui  y  annoncent  l'Evangile  au  ril- 
que  des  perlécutions  &c  de  la  perte  même  de  leur  vie. 

Les  Couvens  font  des  afyles  pour  les  Orphelins , 
dont  les  Tuteurs  feroient  fouvent  fort  embarralTés  , 
s'ils  n'avoient  pas  cette  reflburce,  Combien  de  fa- 
milles feroient  dans  Tembarras  pour  l'éducation  des 
jeunes  Filles ,  fans  le  fecours  des  Communautés  Re- 
ligieufes ,  où  on  trouve  des  Maîtreffes  fpécialement 
chargées  de  les  inflruire  à  lire  ,  à  écrire  &:  à  parler 
différentes  Langues,  de  leur  apprendre  ou  de  les 
perfeélionner  dans  les  différens  ouvrages  propres  à 
leur  état  &  à  leur  fexe  ,  &  fur-tout  de  les  former 
dans  les  fentimens  de  Religion  qui  font  les  fonde- 
mens  folides  d'une  éducation  chrétienne.'*  Les  Royau- 
mes ravagés  par  les  dernières  héréfies ,  fentent  & 
regrettent  eux-mêmes  la  perte  des  Monafteres  pour 
l'éducation  de  la  Jeuneffe. 

C'efl  enfin  aux  Religieux  à  qui  le  Public  eu  rede- 
vable du  commun  enfeignem.ent  de  la  Langue  latine; 
emploi  également  difficile  &  important,  qui  demande 
«les  taiens  &"  de  l'expérience,  auquel  l'obéiiTance  af- 
fujettit  autant  de  Religieux ,  qu'il  en  eft  befoin  ,  & 
les  attache  par  les  liens  du  devoir  &  de  la  conf- 
cience. 

Nous  ofons  nous  fîntter  que  ces  Repréfentations , 
qui  euffer.t  'nfniiablement  touché  Votre  Majefté ,  s'il 
eût  été  poffible  aux  £vêques  de  les  lui  adrelTer  avant 
la  promulgation  des  deux  Edits ,  ne  feront  pas  moins 


(  89  ) 

d'imprcfilon  dir  rcfprit  &  le  cœur  de  \''otTe  î^îaiefté  , 
depuis  leur  publication.  Les  motifs  puiirans  qu'ils  au- 
roient  employé ,  n'ont  rien  perdu  de  leur  force  par 
cette  circonftance.  Ils  font  diftés  par  la  Religion.  Ils 
ont  pour  objet  le  lalut  des  âmes  &  le  bien  public. 
Des  Evêques  ne  pourroient  être  infenfibles  à  de  fi 
grands  intérêts  ;  &:  fi  conformément  à  la  parole  de 
Jefus  -  Chrift  ,  ils  .ont  lieu  d'efpérer  Ton  affiflance  , 
lorfque  pour  fon  fervice  &  celui  de  fon  Eglife  ,  ils 
font  obligés  de  recourir  aux  Puiffances  de  la  terre , 
quel  droit  n'ont- ils  pas  d'attendre  un  accueil  favo- 
rable ,  en  adrefiant  leurs  prières  à  une  Augufte  Prin- 
cefie,  qui  fait  moins  de  cas  des  ornemens  qui  envi- 
ronnent le  Trône ,  que  de  l'éclat  que  lui  donnent: 
l'équité  ,  la  grandeur  d'ame ,  la  vertu. 

Etaient  Jîgnés  ^  f  Je  AN  Henry,  Jrch.  de.  Malines, 
J.  R.  Evêquc  de  Bruges. 
H.  G.  Evêque  d'Anvers. 

F.  Eve  que  d^Yprcs. 

H.  J.  Evéquc  de  Ruremoîide, 

G.  G.  Evcquc  de  G  and. 
F.  Evêque   de    Namur. 

MÉMOIRE  prèfcnté  le  8  Janvier  if^j  y  pour 
M.  J.  Janssens  ,  Curé  de  la  Ville  de  Wun ,  dans 
la  Guildre  Autrichienne ,  relatif  à  la  Requête  de 
M.  le  Confeiller  &  Mambour de Rurcrnonde.ÇTraduii 
du  Flamand,  ) 

J— 1  'Intimé  ayant  eu  communication  en  Copie  au- 
thentique de  ladite  Requête ,  &:  fe  réglant  fur  FOruon- 
n;nce  enfuivie ,  en  date  du  15  Déoemb.e  I7'^6' ,  a 
riionneur  de  dire  : 

Qu'aucune  autre  raifon  que  le  cri  de  iu  confclsnce , 


(9°) 

ne  Ta  empêché  pendant  quelque  tems  de  publier  l'E- 
dit  de  S.  iM.  I.  &  R.  du  i6  Odobre  1786,  portant 
éreftion  du  Séminaire-Général  dans  l'Univerfité  de  Lou- 
vain  ,  parce  qu'il  n'avoit  aucune  afTurance  ,  que  les 
Evéqueç  auroient  une  pleine  impeftion  fur  les  Livres 
&  la  Doélrine ,  ainii  que  fur  les  Règles  de  Difcipline 
&  de  Aîœurs ,  à  obîtrver  dans  ledit  Séminaire  ;  inf- 
pedlion  qui  appartient  inconttftablement  aux  Evêques^ 
comme  le-  prouve  non  -  feulement  l'Ecriture  -  Sainte , 
mais  l'ufage  confiant  toujours  obfervc  dans  l'Eglife , 
dès  les  premiers  iiecles. 

L'Eglife  d'Alexandrie  nous  en  oirre  une  preuve  re- 
marquable dans  réledion,  &  cnfuite  dans  la  dépo- 
lition  faite  par  le  Patrigrche  Dérnéirius  de  la  perfonne 
d'Origene  ,  en  qualité  de  Catéchifte  de  l'Ecole  érigée 
en  cette  Ville  par  Srint-Marc ,  comme  le  reconnoît 
lui-même  Elie  JJup'in  Bihliotheca  Ecclejiajîica^  Tom.  1. 
in  vita  Paut&ni. 

De  même  Saint- Auguftin ,  Evêquc  d'Hypone ,  ayant 
érigé  une  Ecole  pour  tous  les  Eccléfialliques  de  fon 
Diocefe ,  ne  confiroit  les  Ordres  facrés  qu'à  ceux  qui 
avoient  été  infiruits  &  fermés  dans  cette  Eceie.  C'eft 
ce  qu'attefte  PGJjîdius  dans  la  vie  de  ce  Saint,  Ch.  IL 
Le  iiom  même  de  Caré:hijîes ,  que  l'antiquité  donnoit 
aux  Maîtres  qui  enfeignoient  dans  ces  Ecoles ,  en  four- 
nit auffi  une  preuve. 

De  même  l'Apôtre  Saint  Paul  dit  :  »  Comment  fe 
«  chargeront-ils  du  Miniflere  de  la  parole  ,  s'ils  ne  re- 
»  çoivent  la  Million  »  Quomodo  vcrb  prœdicabunt^  nijl 
mïttantur  ?  Le  pouvoir  de  donner  cette  MiJJîon  eft 
inconteftablement  un  droit  qui  appartient  exclufive- 
ment  aux  Evéques  ,  droit  reconnu  par  tous  \ts  Ca- 
thoHques.  Eî  l'Apôtre  ajoute ,  qu'on  ne  doit  pas  or- 
donner des  Néophytes  ,  non  Ncophytum. 

Les  Evêques  pourront-ils  fatisfaire  aux  devoirs  que 
leur  impofe  le  iacré  Miniftere  dont  ils  font  revêtus  , 
s'ils  n'ont  une  entière  infpeâ:ion  fur  la  Doélrine  qu'on 
enfeigne  au  Clergé  de  leur  Diocefe? 

Les  Evêques  ont  d'autant  plus  de  droit  à  cette  inf- 


C9I) 

pedion,  que  dans  tous  les  (iecles  de  l'Eglife,  ils  ont 
tou jours  été  reconnus  par  tous  les  Catholiques ,  comme 
les  leuîs  Juges  des  controverfes  qui  concernent  la  For 
ou  les  règles  des  Mœurs. 

Auffi-tôt  donc,,  que  l'Intimé  a  été  informé  avec 
certitude  que  l'inCpeclion  &:  la  furintendance  dudit 
Séminaire-Général  avoient  été  accordées  aux  Evê- 
ques ,  oc  qu'ainiî  il  a  été  dérivré  du  fcrupule  fondé 
de  confcience  qui  le  tourmentoic ,  il  n'a  plus  balancé 
un  moment  de  publier  le  fufdit  Placard  :  c'eft  ce  qu'il 
a  fait  le  17  Décembre  1786. 

Il  avoit  cependant  des  informations  certaines  ,  qu'ur» 
très-grand  nombre  de  Curés  ,  tant  du  Brabant  que  de 
la  Flandre  ,  n'avoient  pas  encore  jufqi-'ici  publié  ce 
Placard ,  Se  qu'ils  n'avoient  pas  été  moleilés  ni  atta- 
qués en  Juftice  à  ce  fujet. 

Ainfi  ce  n'a  pas  été  par  un  pur  entêtement ,  mais 
uniquement  par  la  crainte  juite  &  fondée  de  blefler 
fa  confcience  ,  qu'il  a  différé  quelque  tems  cette  pu- 
blication. 

Il  croit  donc  avec  raifon ,  n'avoir  rien  à  fe  repro- 
cher à  cet  égard ,  d'autant  moiiiS  que  Sa  Majefté 
elle-même  a  depuis  quelque  tems  accordé  la  liberté 
de  Religion  &  de  confcience  dans  les  Pays-Bas  aux 
Luthériens  ,  Calviniftes  &  autres  Sectes  ,  tandis  que 
la  Religion  Catholique  &  la  liberté  de  confcience 
contorme  à  cette  Religion  étoient  les  feules  qui  au- 
paravant fuffent  établies  dans  le  même  Pays.  L'Inti- 
mé auroit  donc  ,  en  pubhant  ce  Placard  ,  tandis 
que  ce  fcrupule  raifonnable  {iibiiiloit ,  non-feulement 
grièvement  péché  ,  mais  auroit  paiTé  pour  le  plus  lâ- 
che des  hommes.  Car  fi  l'Empereur  Confiance  Chlore, 
quoique  Payen',  a  chafié  de  ia  Cour  tous  ceux  de 
fes  Courtifans  ,  qui  par  crainte  de  la  mort  dont  il 
menaçoit  les  Catholiques  ,  avoient  renoncé  à  leur 
Foi,  Sî  apoftaiié  contre  la  conviction  de  leur  con- 
fcience ,  s'il  les  a,  dis-je,  chaiTés  comm.e  des  lâches  , 
comme  des  hommes  en  qui  il  ne  pouvoir  avoir  au- 
cune confiance  6l  capables  de  toute   forte  de  for- 


'(90 

raits ,  5:  {i  au  contraire  il  a  loué  &  élevé  aux  hon- 
neurs ceux  d'entre  eux  ,  qu'aucunes  menaces  ne  pu- 
rent forcer^  à  abjurer  leur  Religion  ,  en  obéifTant  à 
r£clit  de  l'Empereur  ,  &:  qui  montrèrent  ruSx  ,  que 
nen  au  monde  ne  pourroit  leur  faire  violer  leurs 
devoirs;  l'Intimé  qui,  en  fa  qualité  de  Curé,  gÛ  chargé 
de  rinftruftion  des  Fidèles  confiés  à  fes  foins ,  eflmie 
que  fa  conduite  par  rapport  au  fu(dit  Placard,  mé- 
rite plutôt  des  éloges  que  le  blâme ,  d'après  les  rai- 
fons  qu'il  vient  d'expofer. 

S'appuyant  fur  tous  ces  motifs,  l'Intimé  penfe 
s'erre  fufïïfamment  judifié  ,  oc  qu'ainfi  tout 
procès  ultérieur  &  toute  condanmation  en 
l'amende ,  &  dans  les  frais  de  la  procédure , 
viendront  à  ceffer. 

Implorant,  Sec.  &c. 


Copie  de  r Ordonnance  du  Confeil  Souverain  dt 
Ruremonde  ,  fulvie  fur  U  Alemcire  de  J  Janfjens  , 
Intimé.^  préjlntc  le  {|^  Janvier  i^Sj.  ('Traduction 
du  Flamande) 

La  Cour  ayant  vu  la  Requête  du  Confeiller  & 
Ma;nc>nur  du  Confeil  de  Sa  Majefté  ,  hier  exhibée , 
&  ayant  de  nouveau  entendu  les  raifons  pour  lef- 
quelles  il  regarde  comme  entièrement  inadmiflibles 
les  excufes  de  l'Intimé,  contenues  dans  fondit  Mé- 
moire ,  pour  fe  juftiner  d'avoir  différé  fi  long-tems 
&  avec  tant  d'opiniâtreté  la  publication  de  l'Edit  de 
Sa  Majefié  du  i6  Octobre  1786,  touchant  l'éreftion 
du  Séminaire-Général  pour  les  Etudians  en  Théolo- 
gie, ladite  Cour  condamne  l'Intimé  dans  une  amende 
de  vingt-cinq  florins  de  Brabant ,  argent  de  change , 
au  p'otit  des  Exploits  :  &  de  plus  elle  trouve  les 
principes  expofés  dans  ledit  Mémoire  non  moins  faux 


(  90 

^qire  dangereux ,  5c  qu'un  Curé  qui  a  la  témérité  d'a- 
vancer,fous  les  yeux  mêmes  de  Ton  Juge,  de  telles 
maxim.es  ,  i'e  déclare  ouvertement  l'ennemi  de  l'Etat 
6c  de  l'Ordre  piiblic  ,  &:  que  comme  tel  il  cft  In- 
digne d'exercer  les  ronflions  pailorales  ;  en  conlé- 
qrence ,  interdit  l'Intimé  de  toutes  les  tbnfticns  de 
Curé  ;  &  fera  TEvêque  du  Diocefe  requis  d'établir  in- 
cefiamment  un  Déierviteur  pour  la  Cure  de  AVeert: 
en  outre  la  Cour  met  en  lequeftre  le  tem.porel  de  k 
même  Cure  ,  &  commet  pour  l'adminiilrer  fous  dû 
ialaire  le  Notaire  Dionlfii,  réiident  en  la  Ville  de 
Weert  ,  avec  charge  d'en  rendre  en  fon  temis  un 
compte  exacl  &  pertinent  pardevant  CommifTaire 
de  la  Cour  ,  défend  en  conféquence  à  tous  ceux 
qu'il  peut  appartenir ,  de  faire  aucun  payement  des 
^revenus  de  ladite  Cure  à  d'autres  qu'au  fufdit  Admi- 
niilrateur  8c  Séqueftre  ,  fous  peine  d'être  tenu  de 
payer  derechef  :  lequel  Séqueftre  payera  des  deniers 
provenans  defdits  revenus  ;  premièrement ,  la  rétri- 
bution à  afligner  au  Déferviteur ,  Se  en  fécond  lieu 
une  fomme  de  loo  florins  de  Brabant ,  argent  de 
change,  accordée  par  cette  à  i'Intimé  ,  pour  lui  fervâr 
de  PePifion  alimentaire  ,  avec  inioncllon  très-expreiTe 
audit  Intimé  non-feulement  de  s'abftenir  abfoîum.ent, 
auffi-tôt  après  l'iniinuation  de  cette  ,  de  toutes  fonc- 
tions paftorales  ,  comme  dit  eft  ,  mais  encore  de  fe 
garder  d'avancer ,  foit  dans  des  difcours ,  toit  autre- 
ment ,  des  m.aximes  fanatiques  fem.blables  à  celles 
qui  fe  trouvent  dans  fondit  Mémoire ,  fous  peine  de 
privation  de  fadite  Penfion  alimentaire  ,  de  féqueftra- 
tion  de  fa  Perfonne  ou  autres  remiedes  convenables  , 
6c  d'être  puni  arbitrairement  félon  l'exigence  du  ca?; 
condamne  l'Intimé  aux  frais  du  procès,  montant  à 
la  fomme  de  foixante-quatre  florins  quatorze  fols  de 
change  argent  de  Brabant;  £c  fera  cette  inceflam- 
me^tinfmuee  d'office  fous  un  double  authentique  fufdit 
audit  Intimé ,  ainfl  qu'au  Séqueftre  ;  6c  de  plus  ,  pour- 
que  chacun  en  ait  connoiilance ,  affiché  fur  la  porte 


r  94  ) 

de  VEgllfe  Parolffiale  de  "Weert ,  comme  aufïi  à  la 
breteque  de  la  Mailbn-de-Ville  dudit  lieu. 

Aclum  inde.  CanccUerye  binncn  Ruremonde  dm 
2.G  Januani  lySj ,  was  gcparaplucrd  L  U  t- 
GENS  ,  ondcr  Jlond  ter  ordïnantic  van  Hovc , 
was  geùcekcnt  F.  B.  van  dcr  Henne,  ondcr 
jlond  accordccrt  by  my  ,  was  gctcekeni  F.  B. 
van  dcr  Henne. 


PhILIPPUS  DamianU s  ,  &c.  &c,  Rcvtrcndo 
Domino  J,  Janjfens  Paftori  W'crthenji  nojira  Dia^ 
cejis  ^  falutem  in  Domino. 

Exhibitum  8c  communicatum  nobis  fuit  Decretnm 
fupremae  Curiae  hujus  Ducatûs  26a  hujus  contra  te 
latum;  que  tanquam  refradarius  Mandatis  Principis 
muiftaris  ,  ac  furdnens  lenfa  &  principla  ftatuî  & 
bono  publico  nociva  ,  totus  hoflis  declararis  ,  publiée 
tanquam  talis  per  aflixionem  diéli  Decreti  denun- 
tiandus ,  ulteriùs  omnibus  Paftoratûs  tui  reditibus  eo- 
rumque  adminiflratione  privaris  ,  relictis  tibi  pro 
fliftentatione  tua  ducentis  florenis  noftroe  cambialis 
Brabandae  ,  hinc  ob  bas  aliafque  rationes  animum 
noftrum  moventes  ,  te  ab'  omni  funclione  Officii 
Prtftoralis  provifionaliter  iufpendendum  duximus  ,  & 
per  praef'entes  furpenilim  declaramus  ,  idque  donec 
aliter  declaraverim.us. 

Datum  Rurcmondas  in  Palatio  noftro  Epifcopali, 
hac  30  Jan.  1787. 

Epifcopus  P^uremundenfis  (a).  De  Mandato  IllujI. 
ac  Reverendijjimi  Domini  mei. 

TheUNISSEN   Secret. 


(j)  Il  n'eft  pas  pofRble  de  concevoir   que  M.   l'Evêque 
de  Rurtmonde  ait  donné  un  pareil  Décret  contre  un  Padeur 


(95  ) 


COPIE,  £unc  Lettre  de  M.  U  Secrétaire, 
Révérende  Domine  Pastor, 

Ingrati  certè  nuntii  Communicator  eïïe  debeo  ,  nuntii 
decretae  contra  vos  fufpenfioms  ab  Officio  Paftorali  ; 
nec  enim  IlluftriiTimus  niiî  vifa  Decreti  Copia ,  quod 
luprema  Curia  htijus  Ducatiis  ad  valvas  Ecclefis 
Verrîienfis  affigi  vcluit  ,  in  quo  publicè  tanquam 
hortis  ftatûs  &  boni  publici  cenuntiaris ,  ad  illud  ex- 
tremi  deduc^us  eft.  Humilis  lubmilno  veflra  &  recurfus 
ad  diclam  Curiam  vel  gubemium  pro  pœnae  mitiga- 
tione  ,  nurnquid  foliun  fvipereft  remedium  ?  nulhim 
aliuvl ,  quvîntùm  ego  judicio  ,  illudque  effeftum  optatum 
habiturum  licet  prasfagire.  Maneo  intérim  plurimo 
cultu  &;c. 

Runmunia  hac  2,0  Jan.   'iSy. 

Theunissen  Secret, 


Lfs  tris  -  bonnes  raifons  du  rejpe^able 
Pajleur ,  qui  nont  eu  aucun  fuccès  dans  le 
moment ,  ont  eu  leur  plein  ejfet  quand  les 
circonflances  ont  favonfé  la  vérité  6'  la 
juflice.  Voici  ce  quon  lit  dans  une  Lettre 
de  IV e en  y  en  date  du  <^  Juin  1787. 

Maxima  res  effe<^ ,  viri  :  timor  omnis  abefto. 
JE  N.  XI.  24. 

»  Il  eft  donc  arrivé ,  l'heureux  moment ,  qui  nous 


▼srtueux  qui  n'avoit  açl  que  félon  les  lumières  de  la  con- 
fc'.ence  &  de  la  vraie  Théologie,  fans  s'jppofer  qu'il  s'étoit 
la  lié  détourner  un  moment  de  fes  propres  principes  par 
Te- prit  de  terreur,  qui  à  cette  époque  avoit  fubjugué  prefque 
t9us  les  efpriis. 


(96) 

confole  d'une  longue  fervitude ,  d'une  dure  îk  humi- 
liante opprefïion.  Tous  nos  maux  ont  difparu  en  un 
feul  jour!...  L'Eglife  de  Dieu  fembloit  menacée  de 
la  plus  cruelle  comme  de  la  plus  lubtile  perfécution -, 
des  artifices  &  des  ftratagêmes  aufli  puiflans  &  def- 
truftifs  dans  leurs  effets  ,  que  fourds  &  uns  dans  leur 
marche  ,  fembloient  faire  des  ravages  irréparables , 
rompre  &:  anéantir  l'union  Catholique  ,  &:  éteindre 
parmi  nous  le  flambeau  de  la  Religion  :  lorique  tout- 
â-coup  celui  qui  d'un  clin-d'œil  réforme  la  face  des 
Empires  ,  fe  lérvit  des  démarches  d'une  Nation  al- 
tiere  &  généreufe  ,  pour  arrêter  le  torrent  qui  em- 
portoit  déjà  les  plus  belles  ,  pofTeffions  de  l'Eghfe, 
comme  les  plus  précieux  Droits  de  l'Etat...  La  Cité 
de  Sion  reprend  fon  éclat ,  une  fplendeur  nouvelle 
embeUit  fes  murs ,  on  célèbre  des  feiVms  dans  toutes 
les  rues  de  jérufalem,  Fer  vicos  ejus  allduia  canta- 
bitur.  (Tob.  XIII.  21.^  « 

»  Vous  favez,  Monfieur,  quelle  profonde  douleur 
nous  a  caufé  la  Sentence  du  26  Janvier  de  l'année 
courante  ,  qui  déclaroit  notre  digne  Curé  indigne 
d'exercer  les  Fondions  Pafl:orale.v  ,  féquellrant  l'on 
temporel  en  lui  afïignant  une  penfion  alimentaire  de 
2,00  fl.  Vous  favez  auiTi  que  ce  Pafieur  fut  fufpendu 
de  toutes  fes  fondions  par  fon  Supérieur  Eccléliafti- 
que ,  &  que  la  Sentence  de  la  Cour  de  Ruremonde 
fut  affichée  à-  la  Maifon-de-Ville ,  &  même  à  la  porte 
de  la  propre  Eglife  du  Curé.  Quelle  conflcrnation , 
quelle  douleur,  pour  des  âmes  Chrétiennes,  pour  des 
ouailles  tendrement  attachées  à  leur  fpirituel!  Quel 
fcandale  dans  l'Eghfe  de  Dieu  ! . . .  Or ,  voici  com- 
ment nous  venons  d'être  dédommagés  de  notre 
défolation  &  de  la  prefTe  où  fe  trouvoient  nos 
coeurs  depuis  quatre  mois.  Le  26  Mai  ,  notre  Curé 
reçut  de  la  Cour  de  Bruxelles  une  Lettre  avec  deux 
incliifes,  dont  l'une  à  l'adrefTe  de  Mgr.  l'Evêque  ,  & 
l'autre  à  celle  de  M.  le  Mambour  du  Confeil  de 
Ruremonde.  Aufïi-tôt  le  Curé  fe  rendit  dans  ladite 
Ville,  6c  quoiqu'il  y  arrivât  le  jour  de  Pentecôte,  le 

valet 


(97) 

vatet  àe  îa  Conr  fut  fur  le  champ  expédié  pout 
NVeert,  pour  annoncer  au  déferviteur  que  (es  fonc- 
tions venoient  à  cefler.  Ce  valet  arriva  ici ,  le  même 
jour  ,  vers  4  heures  &  demie  de  l'après-midi.  Cet 
événement  répandit  un  contentement  iiuiverfel  dans 
toute  la  Ville.  Les  trois  Corps  de  la  Bourgeoise  fous 
les  armes,  tambour  battant ,  drapeaux  déployés,  allè- 
rent à  la  rencontre  deThomme  Apoftolique.  Le  Clergé 
en  fit  de  même.  CJne  mulique  lonore  égaya  la  mar- 
che. Enfin  à  quelque  diftance  de  la  Ville  on  trouva 
îe  bien-aimé  Curé,  Chacun  s'emprefTa  de  le  féliciter 
&  de  rembralTer.  On  rentra  en  Ville ,  au  Ion  de  tou- 
tes les  cloches.  Le  concours  du  Peuple  étoit  immenfe. 
Les  rues  devinrent  trop  étroites.  Des  acclamations 
&:  des  cris  d'alégrefle  tirent  retentir  tous  les  coins 
de  la  ville  :  ^ive  le  Faveur  Janjfen^  !  Fïvc  notre,  bon 
Père!  Vive  l'homme  Àpoftoliquc!  Le  cortège  arrive 
enfin  à  la  porte  de  l'Eglife  paroiifiale , 

Et  tandem  îati  nota  advertuntur  arenx. 
J£.s,  V.  34. 

Le  Curé  entre  dans  la  Maifon  du  Seigneur,  dont  la 
iplehdeur  lui  tient  (1  fort  à  cœuf  : 

Adfumus ,  6»  porîus  delati  intramus  arnicas. 

Ib.  57. 

Là ,  tranfporté  d'une  falnte  joie ,  il  fe  profterne  au 
pied  du  grand-autel,  &c  plein  de  reconnoifîance  il  y 
adore  les  deffeins  de  la  Providence  qui  fait  conlbler, 
quand  il  en  eft  tems ,  ceux  qui  fouffrent  pour  l'hon- 
neur de  l'Eglife.  Oh  1  fi  dans  ce  moment  on  avoit 
pu  voir  tous  les  mouvemens  de  fon  cœur  ,  quel 
raviffant  tableau  ne  feroit-on  pas  des  diverfes  affec- 
tions qui  s'y  font  rencontrées  !  On  s'imagine  bien 
qu'il  aura  dit  avec  Salomon  :  Domine  Deus  Ifraél  ^ 
non  c/f  Jîmilis  lui. . .  Qui  cujlodis  paciurn  &  mife- 
rlcordiam  J'ervis  tui.i^  qui  ambulant  coram  te  in  toto 
corde  fuo.,.  Benediclus  Dcminus  qui  dédit  requiem 
populo  fuo  (III  Reg.  VIII,  13.  56).  Dans  le  même 

G  ttt 


^ems ,  une  foule  innombrable  adreffa  au  Ciel  des  re^ 
mercîmens  bien  finceres  pour  un  bienfait  fi  éclatant. 
Hl  autem  Domïnitm  bcnedicebant ,  qiùa  mamijicabat  lo- 
cum  fuiim\  &  umplum  q:iod paulo  antc  timoré, ..  crat 
plénum ,  apparent:  omnipotente  Domino  ,  gaudio  & 
/aùtia  ïmplMan  ejî  (IIMach.  III.  30).  Entretems  les 
Corps  de  la  Bougeoifie  firent  une  triple  décharcre,  & 
finalement  M.  le  Curé  fut  reconduit  dans  la  de- 
meure. i< 

»  Le  lendemain  ,  on  chanta  en  adlion  de  grâces 
ime  Gand-Meffe  fuivie  du  Te  Deum ,  au  fon  des  Clo- 
ches. La  vafte  Egiife  Paroiffiale  étoit  remplie  de 
monde.  Vendredi  i  de  ce  mois,  la  Cour  de  Rure- 
monde  donna  des  ordres  pour  faire  afficher  à  la  porte 
ée  l'Eglife  Paroiffiale,  ainfi  qu'à  ^a  Mailon  de  Ville, 
l'ordre  révocatoire  de  la  difgrace  du  Curé.  S'il  fal- 
loit  entrer  dans  tous  les  détails  de  nos  réjouiiTances , 

Antt  diem  cUu/o  cfimponet  P'efper  Olympo. 


»  Je  fuis  ,  6cc, 


V.      .H.  Serv. 
Mathias  Kr**. 


(99) 

Quoicii/E  cette  Répréfentation  regarde  d'i- 
récif  ment  une  Solemnicé  particulière^  elle 
renferme  des  Obfervaùons  générales  fur 
VEdit  relatif  aux  Procejjions  ^  &  par-là  ^ 
devient  d'urrintérêt  ajj'e^  étendu  pour  troU' 
ver  place  dans  ce  Recueil, 

RKPRkSElfTATIOH  dts  Etats  du  P^ys  &  Duché, 
di  Luxembourg  ,  à  Leurs  Altcjfss  Royaits  ,  taudiant 
Us  deux  Pr9cs£i0ni,  de  Iê.  Stlemniû  dé  Notre-Dame^ 
Fuirons  de  La  Province. 


Madame,  Monseicnevr, 


R 


EMONTRENT  en  très-profond  refpeft  les  Etats  ou 
pays  Duché  de  Luxembourg  6i  Comté  de  Chiny, 
■que  S.  M.  voulant  faire  ceffer  les  abus  des  Proceffions 
ta  des  Jubilés ,  elle  a  fait  publier  l'Ordonnance  du 
10  Mai  dernier  ci-jointe  fub  N».  i".  dont  l'Article 
premier  flatuc  qH'outre  les  Rogations  ordinaires,  il  ne 
pourra  y  avoir  dans  chaque  Paroilîc  que  deux  Pro- 
cefSons  par  an ,  dont  l'une  au  jour  de  la  Fête-Dieu , 
&  l'autre  à  quelque  autre  jour  de  fête ,  à  défigncr  par 
l'ordinaire ,  5c  qu'il  ne  fe  fera  aucune  Proceliion  le 
jour  de  Dimanche ,  pour  ne  point  déranger  le  fervice 
paroifîiale  —  l'Article  2  ajoutant  que  l'on  ne  pourra  plus 
porter  de  Statues  ni  d'Images  quelconques,  non  plus 
que  des  enfeignes  de  Métiers ,  vêtemens  extraordi- 
naires ,  ou  autres  bigarurres  femblables  dans  les  Pro- 
ceffions ,  ni  d«  les  faire  accompagner  d'aucune  mu- 
fîque. 

Les  Remontrans  reconnoifTent  avec  d'autant  plus  de 

G  2 


(    100   ) 

confiance  que  l'Intention  de  leur  Augufte  Souverain  < 
a  été  de  rapprocher  cette  pnrtie  du  Culte  divin  des 
règles  de  la  difcipline  Ecclciiaftique  établie  par  dif- 
ferens  Conciles  provinciaux  ,  que  ce  n'eft  que  fovjs 
l'appui  de  ces  Décrets  canoniques ,  qu'ils  efperent  ob- 
tenir de  la  piété  de  Vos  Altefîes  Royales ,  la  coniér- 
vation  d'une  folemnité  rciigieul'e ,  qui  ititérefTe  iî  fpé- 
cialement  cette  Ville  capitale  ,  &.  toute  cette  Pro- 
vince de  Luxembourg. 

Il  y  a  près  de  cette  même  Ville  au  Couchant ,  une 
Chapelle  de  Notre-Dame  ,  célèbre  par  la  dévotion 
des  Fidèles  qui  y  viennent  de  toutes  parts,  pour  révé- 
rer rimage  miraculeufe  de  la  Sainte  Vierge,  Tous  le 
litre  de  Conlolatrice  des  Affligés  :  les  premières  pier- 
res de  fa  co):rrru6"t!on  en  furent  pofées  l'an  1615  ,  par 
le  Comte  de  Berlaymont,  Gouverneur  de  la  Ville  &c 
de  cette  Province  ,  les  Comtes  d'Egmondt  &  de  Man- 
derfcheidt ,  les  Abbés  de  Saint  Maximin  &  de  Munf- 
ter ,  en  préfence  de  la  Noblefie  ,  des  Confeillers  ,  des 
Echevins  de  la  Ville,  &  d'une  grande  multitude  de 
peuple.      .       •  .  ,^  ,  . 

Cet  Edifice  pieux  ne  iùt  achevé  qu'en  161  j ,  mais 
il  ne  le  tut  pas  plutôt ,  que  l'on  vit  s'y  opérer  des 
miracles  par  l'intercefTion  de  l'Augufte  Confolatrice  : 
miracles  examinés  ,  avérés  &  approuvés  par  l'ordi- 
naire ;  le  nombre  m.éme  en  devint  fi  grand  6i  les 
eft'ets  d'une  proteélion  divine  dont  ce  Pays  n'avoît 
cefié  d'être  favorifé  dans  les  années  de  calamité , 
furent  ii  notoires  &  admirables,  qu'ils  déterminèrent 
le  Prince  de  Chimay  &  le  Confeil  de  cette  Pro- 
vince ,  dont  il  étoit  Chef  en  fa  qualité  de  Gouverneur , 
à  choifu-  pour  eux  &  leurs  Succeffeurs  notre  Dame 
de  Confolation  pour  Patronne  perpétuelle  de  cette 
Ville  de  Luxembovirg  :  l'A'fle  en  fût  dreflé  le 
%j  Seprembre  de  l'année  1666;  les  Magiitrats  de 
la  Vilie  firent  la  méjne  chofe  le  5  Oéïobre  de  la 
même  année  :  le  Doyen  au  nom  de  tout  le  Clergé 
de  la  Ville  dreffa  fjr  le  même  fujet  un  A.cle  qui  eft 
gardé  parmi  le«  Aâ:es  capiîulaires ,  6c  il   fût  envoyé 


(    lOI    ) 

•les  cbple's  de  ces  Actes  à  i'Evêque  d'Azot ,  pour 
'lu'il  les  ratifiât  comme  Suffragant  &  Vicalre-Gene- 
al  de  l'Archevôque  de  Trêves,  ce  qu'il  lit  par  Ion" 
Décret  du  26  Mai  de  l'année  1668  ,  dans  kquel  il 
qualïHe  la  Chapelle  de  miracuîeuie,  &:  ordonna  qu'on 
pourfuivît  à  Rome  la  confirmation  de  cette  Election: 
d  quoi  on  s'empreffa  de  latiskire  ,  en  raifant  pré- 
jèp.ter  les  mêmes  A6tes  aux  Cardinaux  de  la  Con- 
grégation des  R-ites  :  le  rapport  en  fût  fait  par  le 
Cardinal  Celli,  enfijite  duquel  &  après  que  le  tout 
eut  été  bien  examiné ,  la  Congrégation  pronoiiqa 
qu'il  conftoit  fuffifamment  que  la  Ville  de  Luxem- 
bourg avoit  légitimement  élu  notre  Dame  de  Conlo- 
laiion  pour  fa  Patronne  ,  approuva  &:  confirma  ceitc 
Election  ,  déclarant  en  outre  qu'on  pouvoit  remire 
à  cette  fainte  Patronne  tous  les  honneurs  qu'on  rtnd 
aux  autres  Patrons  légitimement  élus  ,  &;  faire  à  fcfn 
égard  tout  ce  qui  fe  pratique  de  droit  &:  de  coutume 
envers  eux  :  le  Décret  en  a  été  expédié  le  14  No- 
vembre de  la  même  année  1668,  figné  &  fcellé  par 
le  Cardinal  Giiietti. 

Les  merveilles  qui  continuoient  à  s'opérer  (h'.^s 
la  famte  Chapelle ,  produifirent  une  deuxième  épo- 
que à  fon  hiftoire  ;  car  non-feulement  toutes  les  Vil- 
les, mais  encore  toutes  les  ParcilTes  du  Duché  de 
Luxembourg  &  du  Comté  de  Chiny  voulurent  imiter 
la  Capitale ,  &  excitées  par  une  fainte  émulution  , 
choifirent  chacune  la  Patronne  commune  ,  ainfi  que 
cette  Capitale  l'avoit  fait  onze  ans  auparavant  :  la 
réfolution  en  tut  prife  le  6  Octobre  de  l'année  1677  , 
par  les  trois  Etats  de  la  Province  6è  l'exécution  en 
fut  commife  à  leurs  Députés ,  auxqui;îs  toutes  les 
Villes  de  la  Province  ,  envoyèrent  leurs  AS.es  d'E- 
leétion  en  parchemin ,  fignés  par  le  Greffier  &  munis 
du  Scel  de  chacune,  dont  la  teneur  eft  tranfcrite 
dans  la  Copie  ci-iointe  fuh  nv.mcvo  i**.  les  Doyens 
Ruraux  s'empreiferent  d'en  faire  autant  de  la  part 
de  toutes  les  Paroiffes  de  cette  même  Province ,  fu;- 

G3 


(    102   > 

vant  leur  Ac^e  du  mois  d'Odobre  de  167S,  ci-joint' 
fiit  r.umv.ro  'y. 

Les  ménies  Députés  s'adrefferent  en  conféquence, 
pour  obtenir  b  confirmation  de  cette  Election  ,  non- 
feulement  à  l'Archevêque  de  Trêves  &  à  l'Evcque 
de  Liège  ,  qui  la  confirmèrent  par  leurs  Décrets  du 
4  Juin  1678  ,  &  du  6  Février  1679  ••  ci-joints  lub  Nhs. 
4°.  &  5*^.  mai«  encore  aux  Cardinaux  de  la  Con- 
grégation des  Rites  à  Rome  ,  qui  en  firent  dépê- 
cher leur  Décret  de  confirmation  en  date  du  6  Mai 
1679 ,  ci-joint  en  copie  fub  Nro.  6**. 

L'on  confommr!  l'œuvre  d'un  dévouement  Ç\.  unanime 
le  le.  de  Juillet,  jour  de  Dimanche  de  l'année  1679  ; 
l'Evêque  d'Hierapolis ,  SufFragant  de  Trêves  a  la  tête 
du  Clergé,  le  Prince  de  Chimay  avec  tous  les  Officiers 
du  premier  Ordre  ,  le  Confeil  Provincial  du  Roi , 
les  Juges  de  la  Ville  accompagnés  des  Députés  des 
dix-huit  Villes  de  la  Province ,  lé  rendirent  à  TEglife 
pour  lors  du  -Collège  des  Jéfuites  où  la  Ste.  Statue 
étoit  placée ,  fur  un  Autel  qui  lui  a  voit  été  préparé  ; 
î'Evêque  y  célébra  pontificalement  la  Grand'Mefîc  ; 
il  y  eût  Sermon  ,  que  l'Orateur  termina  en  lifant  les 
Lettres  de  Confirmation  obtenues  à  Rome ,  Se  pro- 
nonçant la  formule  d'éleflion  au  nom  de  toutes  les 
Villes  &:  de  toutes  les  ParoifTes  du  Duché  de  Luxem- 
bourg &  du  Comté  de  Ch':ny  dont  la  teneur  efl 
jointe  fab  n°.  7.  Après  les  Vêpres  du  même  jour  on 
reporta  la  Ste.  Statue  dans  fa  Chapelle  en  une  Pro- 
ceiHiôn  formée  de  tous  les  Ordres  tant  Eccléiiaftiques 
nue  Laïcs ,  dans  laquelle  l'Evêque  Suffragant  ci-defTus 
nommé  porta  le  Saint  Sacrement. 

Qts  hommages  ainfi  rendus  à  la  Ste.  Vierge  de- 
\inrent  pour  les  années  fuivantes  l'établlffemcnt  d'une 
Solemnité  qui  les  renouvelle  religieufement.  Le  Samedi 
l'après-midi  avant  le  quatrième  Dimanche  d'après 
Pâques,  la  Sre.  Image  fe  porte  en  une  fimple  Procefïion 
en  cette  Ville  dans  TEgiife  du  ci-devant  Collège  des 
Jéfaires  6^  aujourd'hui  Paroifîiale  de  St.  Nicolas  &c 


(  I03  ) 

Stc.  Thérefe  ;  Ta  ChapeUe  étant  un  Bâtiment  trop  petit, 
pour  contenir  la  multitude  des  Perlonries  que  la  dé- 
votion  y  appelle  pendant  TOclave  de  ce^te  Solcmnité  , 
il  a  fallu  néceiïairement  en  placer  le  Siège  dans  cette 
Eglife  qui  ,  quoiqu'affez  vafte  ,  ne  t'uffit  pas  encore 
pour  contenir  le  Peuple  qui  s'y  préfente ,  particuliè- 
rement  les  jours  des  deux   Dimanches  de  l'Odave. 

Cette  Proceirion  ne  corififte  que  dans  la  cérémonie 
la  plus  fimple  :  les  Ecoliers  du  Collège  Royal  con- 
duits par  leups  Régens  &:  leurs  Profelleurs,,  marchent 
les  premiers  ,  dont  deux  Chœurs  chantent  les  Litanies 
de  la  Sainte  Vierge  6>c  les  autres  prient  haut  le  Cha- 
pelet ,  fuivent  les  Bourgeois  &  autres  Perfonnes  nui 
s'y  joignent  qui  prient  de  même,  &c  après  eux  les 
Maîtres  II  affiftans  Confrères  des  treize  Métiers  de  la 
Ville  qui  porteat  des  torches  allumées  ,  &:  enfin  le 
Clergé  de  la  ParoilTe  qui  précède  la,  Ste.  Image  qui 
eft  portée  fous  un  Dais  par  quatre  Prêtres  &:  le  Dais 
par  quatre  Bourgeois  Notables  ;  le  Peuple  de  l'un  Se 
de  l'autre  fexe  fuit. 

La  Proceflîon  étant  arrivée  à  l'Eglife  ,  les  Prêtres 
p]a:ent  ïkmgi  de  la  Ste.  Patronne  fur  l'Autel  qui  lui 
eft  préparé  au  milieu  de  cette  Eglife  &:  qui  eft  orné 
des  Préfens  précieux  faits  en  différens  tems  à  la  Ste. 
Chapelle  par  des  Pcrfoimes  les  plus  illuflres  &:  même 
du  premier  rang  :  cette  cérémonie  s'achève  par  les 
Litanies  de  la  Ste.  Vierge  que  l'on  chante  au  Chœur. 

Le  lendemain  les  Préfidens  6>t  Gens  du  Confeil  de 
Sa  Maieité  dans  cette  Province  &:  les  Jufticiers  &C 
Echevins  de  cette  Ville  fe  rendent  à  la  même  Eelife , 
pour  y  affilier  à  la  GrancrMelTe ,  qui  y  eft  célébrée 
par  un  des  Prélats  des  Etats  &  quele[uefois  par  l'E- 
vêque-Suffragant  de  Trêves  ,  quand  l'occafion  s'en 
préfente  :  il  s'y  prononce  un  Sermon  relatif  à  la 
célébrité  du  jour,  après  lequel ,  l'Orateur  renouvelle 
l'afte  d'éleftion  au  nom.  de  toutes  les  Villes  &  de 
toutes  les  Paroiiies  de  cette  Province ,  fuivant  la  for- 
mule ci-deffus  produits  fub  n*.  7^. 

L'Eglife  ne  fe  defcraplit  pas  pendant  toute  la   fe- 

G4 


(  104  ) 
maine;  cependant  c*eft  le  Samedi  &:  le  lendemain 
Dimanche  de  l'Odtave  que  la  grande  afRuence  de 
Peuple  fe  fait  principalement  remarquer.  De  toutes 
parts  de  cette  Province  y  du  Pays  de  Trêves ,  de  la 
Lorraine  &:  de  troi-;  Evéchés  il  vient  une  foule  innom- 
brable de  Fidèles  implorer  Tinterceffion  de  la  Sainte 
Vierge  dans  leurs  affligions  ,  &:  pour  rendre  leurs 
prières  plus  efficaces,  ils  ont  recours  aux  Saints  Sacre- 
ments de  Pénitence  &  d'Euchariftie  :  toutes  les  Egli- 
fes  de  la  Ville  font  remplies  de  ces  Pénitens ,  & 
parce  qu'il  y  auroit  fallu  une  Eglife  immenfe  pour 
les  contenir ,  le  Souverain  Pontife  leur  a  donné  cette 
liberté  ,  pour  gagner  les  indulgences  attachées  à  cette 
dévotion  ,  moyennant  qu'ils  vilitaiTent  dans  le  jour 
la  Sainte  Image  &  qu'ils  priaiTent  pour  les  fins  or- 
dinaires de    TEelife. 

Il  fe  fait,  ce  Dimanche  cinquième  d'après  Pâques, 
la  Proceffion  Solemnelle  dans  laquelle  on  reporte  la 
Sainte  Statue  à  fa  Chapelle  :  cette  Proceffion  com- 
mence vers  les  deux  heures  de  l'après  midi  dans 
l'ordre  fui  van  t. 

i*'.  Les  eni^ns  de  l'Hôpital  des  Orphelins ,  précédés 
de  leur  croix  &  accompagnés  du  Prêtre  leur  Direc- 
teur ,   priant  haut  le  chapelet. 

1°.  Les  Ecoliers  du  Collège  Royal  conduits  par 
leurs  Régents  &:  Profeffieurs  chantant  en  Chœur  & 
priant ,   comme  à  la  première  Proceffion. 

3".  Les  jeunes  hommes  de  la  Ville  priant  égale- 
ment haut. 

4^.  Les  hommes  mariés  de  la  Ville  Se  de  la  Cam- 
pagne qui  s'y  joignent,  pratiquent  la  même  dévotion. 

"j".  Les  maîtres  des  difFérens  métiers  de  la  Ville 
portant  chacun  un  flambeau. 

6^*.  Tout  le  Clergé  régulier  &  féculier  de  la  Ville 
chantant  les  Litanies  de  la  Sainte  Vierge. 

7^.  Douze  jeunes  enfans  du  fexe  en  robes  blan- 
ches garnies  de  bleu  portant  chacune  un  cierge  blanc, 

S^.  Quatre  Eccléfiaftiques  en  chappes  qui  font  les 
fonélions  de  Chantres. 


(  IC5  ) 

9°.  La  Statue  mlraculeuie  de  l'augufte  Ccmfoîa- 
trice  portée  par  quatre  Prêtres ,  fous  un  Dais  porté 
par  quatre  jeunes  hommes  de  la  Ville  que  quatre  prê- 
tres accompagnent  portant  des  flambeaux  blancs. 

lo^.  Les  treize  maîtres  des  Corps  de  métiers  de  1?. 
Ville  avec  les  fiambeau'-:  de  leurs  Corps. 

11^.  Les  fergens  du  Magillrat  de  la  Ville  avec 
leurs  hallebardes.  - 

12.  Un  Chœur  d'Acolytes  avec  leurs  encenfoirs, 
des  fleurs  &:  verdures  qu'ils  répandent  devant  le 
Saint  Sacrement. 

13^.  Les  huiflîers  du  Confeil  tenant  chacun  fon 
bâton  Royal  ea  main. 

14**.  Les  Juges  du  magiflrat  de  la  Ville  portant  des 
flambeaux. 

15°.  Le  très  Saint  Sacrement  porté  par  un  des 
Abbés  de  la  Province  fous  un  Dais  porté  par  les 
plus   refpeftables  bourgeois  de  la  Ville. 

16*^.  Les  Préfidens ,  les  Confeillers  &:  le  Greflîer 
du  Confeil  aujourd'hui  Souverain  de  Sa  Majefté  ayant 
.chacun  un  flambeau  blanc. 

17*^.  Une  compagnie  de  Grenadiers  de  la  Gar- 
nifon. 

18**.  Une  multitude  de  peuple  difant  haut  le  cha- 
pelet. 

Tel  efl:  le  récit  fidèle  d'une  Solemnité  qui  a  tou- 
jours été  chaque  année  jufqu'à  préfent  la  m^'me  :  même 
concors  de  peuple  aufll  prodigieux  qu'édifiant,  même 
ardeur  pour  s'approcher  des  Saints  Sacrements  ,  même 
confiance  dans  la  puilTante  interceflion  de  la  Sainte 
Patronne,  même  modefl:ie  &  même  fimplicité  dans 
l'ordre ,  &  la  marche  de  ces  deux  ProceflSons  :  pas 
d'adions;  pas  de  vetemens  extraordinaires,  rien  en- 
fin, qui.fe  reffentit  des  jeux  &  de  la  frivohté  du 
fiecle. 

Or ,  c'efl:  ainfi  ,  que  la  difcipline  Eccléfiafl:ique  5<: 
Religieufe  prefcrit  ,  que  les  Proceflions  fe  faflent  : 
l'pn  citera  à  ce  fujet  d'autant  plus  volontiers  le  Çon- 


(io6) 

cilé  de  Cologne  de  Pan  1549  titre  12  (*),  qu'il  TeiVible 
qu'il  ne   ibit   pas  poilible  de  tranicrire    rien  de  plus 
iage  Si  de  plus  propre  pour  canoniler  le  culte   que 
l'on  rend  à  la  Sainte  Patronne,  dans  les  deux  Procei- 
lions  ci  -  deflus  décrites  :  tout  y  eÛ  rendu  ii  éncrgi- 
quement  dans  ce  tife  ,  que  ce  iëroit  diminuer  le  mérite 
du  paiTage  ^  quoi  qu'ailez  prolixe  ,  que  d'en  retrancher 
quelque  choie  :  en  voici  les  termes —  Nihil  prope  tam 
Sduclum  eji  ^  quod  /cecularium  homlnum  vanitas  non 
trahut  in  abujum.  EccUJia  de  thefauro  corporis   Chljli 
exf'ultans  circumfcrt  Ic/igis  Proceljionibus  extra,  Jacrus 
ctiis  Hojliani  ïLlam  faliuanm  :  vïddïut  fimul  repmf';^- 
tujis  lùniris  Chrijîi  hijlorïcun  :  qui  dum  quétrcrct  falii- 
tem  najiram  ,  in  mcdio  populi  vajatus  ej^ ,  &  iiniv^rja/n 
judaam  eircumambuluvit ,  douns  ^  &  açiotos  fanansy 
Dijcipulis  comitantibiis  _,  quamobrcm   &  jcuiclorum  n- 
liquias  ^  &  imagines  corum  qui  vcjligia  ejus  fccudfunty 
jimul  circumferimus  ,  (ignificantes  illos  nunc  cum  ipj'o 
regnare    &  iriumpharc  m  calis.  Qjice.  memorana   débet 
piis  ejfe  jucunda  &  Itzta.  Vcrum  hue  jizcularis  (lulto- 
rum  liominum  vanitas  irrepjît^  &  adhibentur  ctiam  Ludi 
profanï  &  fcurrilcs  magno  jlrepitu ,  ac  quajî  ad  Bdlum 
procidendum  effet  tynipana  puljantur  :  &  otiojd  Jpec- 
tacuhi  eduntur ,   rébus  IjUs  non    congnicntia  ,  quitus 
populus  deleclatus  y  a   rébus  quA  FroceJJione  aguntur ^ 
avocatur.   Mandamus  idcirco ,  ut  juxi^  Cafartic  Ala- 
jcj^atis  rtformationem  ,  quldquid  non  valet  ad  devotio- 
■nem  cxcitandam ,  a  procîjjionihus  removeatur  :  fed  Jînt 
Procejjîones  compofice. ,  graves  &  mediftx  :  abjait  ri- 
jus  ,  joci  &  confabulaîïones  :  &  creiu  homincs ,  aut 
J'uaviter  corde  &  voce  moâukntur  :  hec  bsaia  Virginis^ 
aut  alunus  cujuslibet  funcîi ,  plures ,  quàm  imago  tma 
uniuscujufque    circumfcratur    :    ne    videa?nur   magnas 
&  parvas  ,   cultas  &  incultas  Jîaiuas  infpicere  &  non 


*)  Analife  des  Conci'es  généraux  &  parriculicrs ,  par  Ip 
P.  Rkkard,  part.  2.  T.  4  verb.  Proceffion, 


X  io'7  > 
furfum  mente  în  cœlum  erccid  rem  Jî'^mficatam  potins 
cogitare.  At  ubï  popuhis  vanus  nolutrit  abufnm  hune 
eorrigcn,  &  infolcraiam  prohihere  ,  mandawus  &  piet-'' 
cipimus  facerdotibîis  &  clèro  ne  talibus  PrGceJJionibus 
mterjînt  ^  ubi  iram  Dd  ^  non  vcro  mlfcricoidiam  In 
nos  provocamus. 

On  ne  peut  reprocher  aux  deux  Proceffions  ,  dont 
il  s'agit  aucun  de  ces  abus  que  ce  Concile  condamne , 
elles  renferment  au  contraire ,  tout  le  mérite  qui  doit 
les  carailerifer  :  le  bel  Ordre  y  règne  ;  elles  font 
pleines  de  dignité  ôc  de  modeftie ,  Ton  y  prie  &  l'on 
y  chante, ////2^  compojîia  ^  graves  &  tnodejict. 

Si  l'Ordonnance  de  Sa  Majefié  n'avoit  pas  défendu 
de  porter  dans  les  Procédons  des  Statues  &  àzs  Ima- 
ges ,  il  fembleroit  qu'elle  n'eut  que  renouvelle  le  Dé- 
cret du  Concile  de  Cologne ,  ou  plutôt  ainfi  qu'il  l'a- 
norice  ,  une  réformation  émanée  fur  cette  matière, 
d'un  des  auguftes  Prédéceileurs  de  Sa  Majefté.  Man- 
damus  idcirco  ,  ut  juxta.  Cafarea  Majcfîutis  reformatlo- 
jicju  quidquid  ,  &c. 

Or ,  comme  cette  même  Ordonnance  défend  en 
outre  de  faire  dans  chaque  ParoilTe  plus  de  deux  Pro- 
ceffions  par  an  ,  dont  l'une  au  jour  de  h  Fête  Dieu, 
6i  l'autre  à  quelque  jour  de  fête  à  défigrxr  par  l'or- 
dinaire ,  &  qu'enfin  il  ne  peut  fe  faire  aucune  Procef- 
fion  le  jour  de  Dimanche  ,  pour  ne  point  déranger 
le  fervice  Paroiilial ,  les  vœux  à&^  Etats  font  d'obtenir 
de  Vos  AltelTes  Royales  la  difpenfe  nécefiaire,  pour 
continuer  la  folemnité  du  Culte  de  leur  Sainte  Pa- 
tronne ,  ainfi  qu'il  en  a  été  fait  une  dcfcription  ci-deffus  ; 
favoir  :  dans  deux  Proceffions  ,  dont  l'une  le  Samedi 
avant  le  quatrième  Dijnanche  après  Pâques,  dans  la- 
quelle :pn  ne  porte  en  Ville  que  la  Sainte  Image,  & 
l'autre  le  cinquième  Dimanche  après  Vêpres,  où  l'on 
porte  en  outre  le  Saint  Sacrement  de  l'Autel. 

L'on  vient  de  remarquer  que  la  coutume  de  por- 
ter les  Images  à^s  Saints  dans  les  Pfoceiîions  où  le 
Saint  Sacrement  eft  également  porté ,  ne  doit  l'on 
origine  qu'à  la  coniparaifon  uuffi  jufte   que  pieufe , 


(  io8  ) 

que  le  Concile  de  Cologne  en  tait  avec  fous  îcs  tra- 
vaux que  Jefus-Chrift  accompagné  de  fes  Dilciples  a 
endurés  dans  la  Judée  ,  pour  enltigner  aux  homme-î 
fa  lainte  ê»r  falutaire  Doélrine  :  Qui  dum  quarcvît 
Jalutcm  nojzmm  ,  in  mcdw  Popidi  verfutus  efi ,  uni- 
verfa/n  JiuLzam  cinumaïubulavit  doccns  ,  &  a^rotos 
finans  ,  Difcipuiis  comitantilus  :  quainobrcm  &  Save- 
torurn  Rcliquias  &  Imagines  iorum  qui  vsfiig'a  gui 
Jccud  funt  ,  Jimul  circumfcrimus  ,  Jigmficantis  lUos 
nunc  cum  ipjo  regnarc  &  trium phare  m  Cœiis, 

Si  donc  en  conformité  de  l'intention  de  l'un  des 
Prédéceffeurs  de  Sa  Ma]eil:c  au  Trône  impérial  ,  ce 
Concile  a  permis  qu'il  tût  porte  dans  les  Prcccffion» 
des  Images  de  la  Sainte  Vierge  îk  des  autres  ;  pourvu 
qu'il  n'y  en  eût  qu'une  de  chacun  :  Nec  Bcam  Vir- 
ginis  ,  aut  altcrius  cujujUha  Sancu  ,  plures  quàm 
Imago  una  imiufcujuj'qiu  cïrcumjciatur  :  Il  paroit 
cfue  cette  décilion  Eccléhaftique  ell  d'autant  mieux 
invoquée  ici ,  qu'elle  le  trouve  confirmée  par  beau- 
coup d'autres  de  différens  Dloceles. 

L'Auteur  ci-deffus  cité ,  rapporte  ibidem  un  autre 
paffage  du  Concile  d'Aix  de  l'an  IV^5,  tit.  de  Pro- 
ujjionihus  ,  qui  il:aîue  que  les  Saintes  Images  &  ks 
Bannières  du  Clergé  ne  foient  pas  portées  par  des 
Laïques ,  tînon  au  défaut  de  Clerc  :  Sacras  Imagines  , 
vexi/lave  Clcri ,  ne  Laicns  homo  in  Proafjîonc  pcffi- 
rat ,  iibi  CUricus  qiùfquam  cji  ,  qui  hoc  munus  prctf- 
tan  po(jit. 

Van  Efpen  tranfcrlt  en  fon  Jus  EccUfiapicnin  univer- 
Jum  Part.  \a.  tit.  i6',  de  cura  Epifcopali  N.  13.  Un 
paiïage  du  Synode  de  Mali  nés /'^zr/.  Q..Tit.  14.  Cap.  1 
6'  -3 ,  qui  permet  que  l'on  porte  dans  "les  Procetlions 
les  SaitUes  images  ,  moyennant  que  leurs  parures 
foient  décentes  :  Ei  quœ  ad  Gmamimiun  jupplica- 
tionum  proponuniur  ^  cjujmodi  fint ,  qux  ociilcs  fpec- 
îandmn  non  oftendant...  Numquam  ctiam  Rcliqui<z 
vd  Imagines  in  Procefjlonibus  dcfcrantur  ,  niji  per 
CUricos  Sacris    iniàaios. 

Ce  célèbre  Caiioniile,  que  l'on  n'accusera  certaine- 


(  I09  ) 
ment  pas  de  relscliement  dans  fa  Do61rine  ^  dit  ail 
nomjjre  fuivant  qu'il  n'3/  a  rien  qui  ctfenfe  la  Dilbi- 
pline  R.elig!eule,  de  porter  les  Images  &:  les  Pveli- 
ques  des  Saints  dans  la  même  Proceffion,  où  Ton 
porte  le  Saint  Sacrement  :  Licet  fer  fe  inordmatum 
non  fit ,  imagines  aut  Reliquias  SanÙorum  unâ  cum 
vcncrahili  Sacramcnto  in  ProceUlonihus  circumfcm  ; 
fi'j^n'ip.canus ,  ut  ait  Synodus  Colonunfis  anno  '549, 
illos  nunc  cum  ipfa  rcgnarc  &  tmmphare  in  Cœlis , 
^ui  vcjligia  cjus  hic  in  unis  fccuti  junt.  Cependant  , 
ajoute-t-il ,  fi  l'Evéque  remarquoit  que  ce  \:\\t  au  pré- 
judice de  l'Adoration  Perpétuelle  due  au  Saint  Sa- 
wement ,  il  pourroit  interdire  cette  coutume. 

Il  paffe  enl'uite  au  quatrième  Concile  de  Milan  , 
part.  2.  ca.p.  4  ,  au  Synode  de  Namur  de  Tan  1639, 
qui  ne  permettent  pas  de  porter  des  P.eliques  Se  des 
images  avec  le  Saint  Sacrement ,  &  de-là  au  Concile 
de  Cologne  de  l'an  165 1  ,  qui  le  défend  auiTi ,  à 
moins  qu'une  coutume  pieufe  &  fort  répandue  ne 
l'exige  autrement  ,  de  laquelle  il  eft  réfervé  à  l'Ar- 
chevêque ,  à  fon  Vicaire-Général ,  ou  aux  Doyens 
Ruraux  de  coiinoifre  ,  pour  s'aiTurer  li  la  vraie  Se 
fincere  piété  en  eft  le  foutien  :  Sïfi.  pia  multorum 
locorum  confuctudo  aliud  pcfiuUt ,  de  qua.  tamen  con- 
fuetudinc  inte^rum  tr'iî  nobis  ,  nojîrovc  in  fpiritiiali- 
bus  yicario-Gemrali  feu  dccanis  ruraUbus  cognojccre  ^ 
an  cum  pietatc  vcra  &  yt-fuafa  ccnfijlat. 

Enhn  l'Auteur  termine  cette  queftion  en  remarquant 
que  quoi  qu'il  n'y  ait  rien  que  de  bien  dans  la  cou- 
timie  de  porter  les  Saintes  Images  avec  le  Saint  Sacre- 
ment :  coutume  à  laquelle  ledit  Ccwicile  de  Cologne 
fe  rapporte ,  il  n'eil  cependant  pas  moins  de  la  com- 
pétence de  l'Evêque  de  juger  ,  ù  cette  coutume  eft 
exempte  de  tout  abus.  Hinc  patu  dicium  Jrch'icpif- 
copum  defiderajfc  quidem  ut  juxtâ  S.  Caroli  prafcriptum 
cum  vemrabiLl  Sacramcnto  Sariclomm  '  Imagines  noii 
circumfcrantiLr .,  aliquid  tamtn  ccnfuctudini  in  rt  de  fe 
Mvnime  inordinatâ  dctulijfe  ;  ita  tamtn  vt  fihi  inte<jru!n 
ejfe  declaravcrit ,  Judicare ,  num  hic  &  nunc  conjuc' 


(  nô  ) 

tudo  illd  Vèraf77  populi  divotiomm  non  impedlat ,  ntc 
cjus  ergiX  S anUiffimurn  Sacramintum  rtvtrentiam  podus 
diminuât  quùm  promovcat. 

Comme  l'on  doit  être  convaincu  qu'il  n'cft  défendu 
de  porter  dans  les  Proccfiions  des  Statues  6c  des  Ima- 
ges que  dans  la  vue  de  faire  celler  les  afeus  qui  peu- 
vent en  réllilter  ,  l'on  doit  être  également  perfuadé 
que  là  où  le  mal  n'exifte  pas  &:  où  il  n'efl:  pas  à  crain- 
dre ,  Sa  Maiefté  eil  pieufement  difpofée  à  maintenir 
la  coutume  d'un  culte  aufïï  précieux  qu'édifiant,  non 
feulement  pour  tous  les  habitans  de  cette  Province  , 
mais  encore  pour  tous  ceux  des  Provinces  voifines  qui 
s'empreflTent  à  y  participer. 

Il  y  a  plus  de  cent  ans  que  les  Etats ,  au  nom  de 
toutes  les  Villes  ,  &  Paroiltes  de  ce  Pays ,  ont  voué 
ces  hommages  à  la  Sainte  CoHlblatrice  des  Affligés  ; 
&  il  y  a  auffi  plus  de  cent  ans  que  tous  ces  fidèles 
clients  n'ont  pas  cefîe  de  recevoir  par  l'interccffion  de 
leur  augufte  Patronne ,  dans  les  tems  durs  &c  les  ca- 
lamités publiques ,  le  foulagement  qu'ils  réclamoient  ; 
les  Particuliers  de  tout  diftriél  &  de  toute  contrée 
ont  également  rcfTenti  les  effets  de  fa  puilfante  mé- 
diation dans  leurs  peines  ôc  miferes  privées  &  fe- 
eretes. 

Ce  culte  n'a  jamais  varié  dans  fes  cérémonies, 
chaque  année  a  toujours  préfenté  le  même  ordre  & 
la  même  dévotion  pendant  l'Oélave  &c  dans  les  Pro- 
ceffions  conftamment  épurées  &  dégagées  de  toute 
pratique  contraire  aux  Décrets  Eccléfiaftiques  ci-deffus 
cités ,  &  le  tout  a  toujours  été  tellement  approuvé 
par  le  fait  même  des  Suffragants  du  Diocefe  de 
Trêves  ,  que  l'on  ne  croit  pas  que  depuis  1679  r 
époque  de  l'établiiTement  de  cette  Solemnité,  il  en. 
ait  été  un  qui  n'y  eut  affiflé  ,  tant  en  y  célébrant 
pontificalement  ,  qu'en  portant  à  la  Proceiïïon  le 
Saint  Sacrement;  ou  pourroit  même  en  citer  qui  fe 
font  acquittés  pluficurs  fois  de  ces  fondions  ;  l'on  ea 
a  vu  de  nos  jours  la  preuve  dans  la  perfonne  de 
i'illuftre  M.   de  Kontheim,  ^  à  peine  M.  l'Evêquc 


(  III  ) 

ti^Afcalon ,  fon  coadjuteur  ,  hit-il  ^levé  a  cette  61-' 
gnité  qu'il  commença  à  lu  ivre  un  fi  bel  exemple  ôé 
il  propre  à  rendre  en  même  tems  un  témoignage 
éclatdnt  de  la  pureté  du  Culte  dont  l'on  honore  dans 
cette  occafion  la  Sainte  Confolatrice. 

Si  d'un  autre  côté  l'on  obrerve  que  la  dernière 
de  ces  deux  Proceflïons  fe  fait  un  Dimanche  ôi  que 
l'Ordonnance  de  Sa  Majcftc  ne  le  détend ,  comm« 
il  a  déjà  été  rem.arqué  ci-defïus ,  que  par  le  m.otit 
de  ne  pas  déranger  rOfiîce  divin,  l'on  doit  aiiffi  trou-^ 
ver  que  cet  empêchement  f*  levé  par  lui-même, 
dès  que  l'on  fe  rarpelîe  que  cette  Proceffion  ne  le 
fait  qu'après  les  Vêpres  du  cinquième  Dimanche  après. 
Pâques  ;  ainfi  qu'il  a  déjà  été  dit. 

De  tout  ce  que  l'on  vient  d'expofcr  ,  il  réfulte 
donc  que  ce  n'cft  pas  d'une  cérém.onie  pieufe  éta- 
blie par  une  Paroiffe  particulière  dont  il  s'agit  ;  mais 
bien  d'un  Culte  voué  fclemnellem-ent  à  la  Sainte  Vierge 
par  tous  les  Ordres  Se  par  tous  les  Habitans  d'une 
vafte  Province  :  d'un  Culte  approuvé  S:  confirmé 
par  l'autorité  de  l'Eglife  &  continue  jufqu'à  préfent  ; 
d'un  Culte  enfin  (imale ,  pure  &î  fans  tache ,  auquel 
les  habitans  des  P  ovi.nces  voifines  font  venus  s'af- 
locier  avec  ardeur,  &  dès-lors  en  s'arrêtant  à  cette 
l'eule  confidération  &:  fans  égard  aux  avantages  temi- 
porels  que  cette  Ville  de  Luxembourg  reçoit  annuel- 
lement  de  ce  concours  prodigieux  de  Peuple  dont 
l'expofé  nuiroit  à  la  pureté  du  motif  qui  anime  les 
Etats  ;  il  ne  paro'it  pas  que  l'on  piîilTe  fe  refufer 
d'en  conclure  que  s'i  cxifte  un  cas  qui  mérite  une 
difpenfe  de  l'Ordonnance  ,  c'efl:  certainement  celui 
que  l'on  vient  de  repréfenter;  fur-tout,  que  l'on  n'a 
aucun  lieu  de  douter  que  cette  grâce  ne  foit  accueil- 
lie prT  l'ordinaire  avec  une  pieufe  alégrefle,  n'ayant 
encore  pas  jufqu'à  préfent  defigné  le  jour  à  la  Pa- 
roiffe de  Saint  Nicolas  &  de  Sainte  Thercfe  de 
cette  Ville  pour  la  deuxième  Proccflion  permife  par 
■  TArticle  I  de  la  même  Ordonnance. 

A  ces  cauf^s  les   £tats  avec  tous  lois  haJ»;tans  dt 


(  iiO 

cette  Province ,  avec  ceux  de  fes  Frontières ,  Se  par* 
ticuliérement  avec  tous  les  pauvres  affligés  qui  fe 
trouvent  parmi  les  uns  &:  les  autres ,  fe  profternent 
devant  Vos  AltefTes  Royales  ,  ^  les  fupplient  avec 
la  plus  refpeclueufe  inftance  &  foumlfiion  de  main- 
tenir la  Solemnité  de  notre  Dame  de  Confolatiou 
dans  le  même  état  qu'elle  a  toujours  été  célébrée 
jufqu'à  préi'ent  par  deux  Proceflions  &C  une  Octave  , 
ainfi  qu'il  eft  expofé  par  la  préfente  ,  en  difpenfant 
pour  autant  de  l'Ordonnance  de  Sa  Majefté  du  lo 
Mai  1786 ,  &  permettant  au  furplus  aux  Supplians 
de  faire  connoitre  au  Public  cette  grâce  qu'ils  efperent 
avec  une  entière  confiance  obtenir  de  la  fainte  piété 
de  Vos  AltefTes  Royales.  Fait  à  Luxembourg  le  8 
Décembre  1786. 

Etaient  Jignés ,  "Willibrord ,  Abbé  de  St.  Maximin  , 
Jean  ,  Abké.  de  Miwjlcr ,  Emmanuel  ,  Abbé 
d'Echternach  ,  Soleuvre  ,  le  Baron  du  Prel  , 
M.  L.  Jos  Comte  de  Berlo  Suys  ,  le  Baron 
de  Zitzwitz  ,  Comte  de  Bryas  ,  Seyl  ,  de  la 
Mock ,  Foncin  ,  Didier  ,  Clees ,  U  Chevalier 
delaBevill/deBlier,.T.  C.DeWaldt,  Huart , 
N.  H.  Chapelle ,  F.  Henri  ,  H.  de  xMufiel , 
\rattet ,  F.  A.  Merjay. 

TRADUCTIO  N  d'une  Lettre  de  N,  S.  P.  U 
Pape  Pie  VI  ^  à.  t Empereur  &  Roi  JosEPH  II  y 
fur  l'ufurpation  des  Biens  Eccléjlajliques. 


—  ROFITANT  de  la  liberté,  qu'il  a  plu  à  Votre 
Maiefté  de  nous  accorder  fi  gracieufement ,  de  nous 
adreiler  directement  à  elle  ,  pour  lui  faire  part  de 
nos  fentimens  par  rapport  à  l'intention  où  elle  feroit 
de  ftatuer  dans  fes  Etats ,  fur  des  chofes  qui  nous 
paroitroient  contraires  aux  bonnes  règles  &:  aux  an- 
ciens ufages ,  &:  préjudiciables  à  la  Religion,  dans 

ce 


(«M) 

ce  moment  où  il  eft  parvenu  à  nos  oreilles  ,  que 
Votre  Majefté  penfe  à  priver  les  Eccléfiaftiques  & 
les  Egliles  des  biens ,  qui  forment  leur  patrimoine , 
pour  les  réduire  à  l'état  de  fîmples  penfionnés,  nous 
croyons  devoir  lui  repréfenter  ,  que  fi  elle  effeduoit 
un  pareil  projet  ,  il  en  réfulteroit  pour  TEglife  une 
cruelle  léfion,  &:  pour  les  Fidèles  une  fcandale  irré- 
parable. 

II  n'eft  point  de  notre  miniftere  de  nous  mêler  des 
affaires  pol'tiques  &:  économiques  de  l'intérieur  des 
Etats  de  Votre  Majeflé.  Nous  ne  le  céderions  ce- 
pendant à  qui  que  ce  foit  des  plus  affectionnés  à  fes 
véritables  intérêts  ,  pour  lui  confeiller  ce  qui  pourroit 
lui  procurer  de  légitimes  &  honorables  avantages. 
Mais  pour  nous  renfermer  dans  notre  miniftere  ,  nous 
nous  abfliendrons  de  toute  réflexion  Tur  le  dépérif- 
fcment  &c  le  moins  de  rapport  des  Biens  Eccléfiaftiques 
confiés  à  l'Adminifiiration  des  Séculiers  non-proprié- 
taires ;  fur  l'infraftion  des  Traités  entre  vos  Prédé- 
ceffeurs  &  diverfes  Provinces  ;  fur  le  dommage  qu'en 
éprouveroit  la  Conititution  de  l'Etat;  fur  la  violation 
des  difpofitions  des  pieux  donateurs  &  fur  le  droit 
qu'auroient  leurs  héritiers  de  les  revendiquer.  Perfuadés 
que  toutes  ces  conféquences  n'auront  point  échappé 
à  la  perfpicacité  de  Votre  Mai.  Nous  nous  bornerons 
fimplement ,  pour  ne  rien  difcuter  d'étranger  à  notre 
miniftere  ,  à  lui  repréfenter  ce  qui  ell  du  devoir  de 
ce  même  miniftere  ,  aufili  bien  que  de  notre  con- 
fcience. 

En  conféquence ,  nous  difons  à  Votre  Majefté  que 
dépouiller  les  Eccléfiaftiques  &  les  Egllfes  ces  biens 
temporels ,  qui  leur  ont  été  affeétés  ,  eft  en  fait  de 
Doftrine  Catholique ,  un  attentat  manifefte  condamné 
par  les  Conciles ,  réprouvé  par  les  faints  Pères  ,  & 
qualifiée  par  les  plus  refpeftables  &:  recommandables 
Ecrivains  ,  de  Doftrine  perverfe  &  de  dogme  impie. 

En  effet ,  pour  faire  adopter  à  un  Souverain  de 
pareilles  maximes ,  il  faut  avoir  recours  aux  faux 
enfeignemeni»  des  Vaudois ,  de  Mt^icleiiftes  ,  des  Huf- 

Httt 


(114) 

iides  Se  de  tous  ceux  qui ,  après  eux ,  ont  foutenu  les 
mêmes  opinions  par  un  efprit  trop  commun  dans  ce 
liec.e  ,  de  dépravation,  d'idées  les  plus  faiutes  &c  les 
plus  refpefté^s. 

Nous  nou.  contenterons  ,  pour  ne  point  fatiguer 
V.  M. ,  de  rapporter  parmi  une  infinité  de  citations  , 
ctlie  qji  de  tout  tems  a  été  appliquée  à  ceux,  qui 
ont  tcn  é  de  s'emparer  des  biens  des  Eglifes  :  Rei  funt 
âiimnation'is  Ananïct  &  Saphirts  ,  &  oportct  ejujmodi 
traiere  fantanc  ut  jpïrïtus  falviis  jît. 

Nous  nous  contenterons  de  tranfcrire  ce  qu'écrivoit 
au  XII  fiecle  le  Prêtre  Jean  à  un  Prince  ,  qui  pré-- 
tendoit  pouvoir  dil^poTer  des  Biens  Eccléfiaftiques.  Ce 
Patriarche  d'Antioche  ,  quoique  fchifmatique ,  ne  crut 
pas  devoir  le  taire  l'ur  cette  erreur  de  ce  Prince.  Toi  1 
llii  écrivoit  il ,  »  qui  n'eft  qu'un  homme  corruptible 
»  &  mortel ,  &  d'une  vie  de  peu  de  durée  ,  comment 
»  ofes-tu  donner  à  un  autre  ce  qui  ne  t'appartient 
»  pas  ?  Si  tu  prétends  donner  ce  qui  eft  à  toi ,  en 
>>  t'imaginant  que  les  biens  de  Dieu  font  les  tiens  , 
»  tu  te  fais  égal  à  Dieu.  Quel  homme  de  bon  fens 
«  qualifiera  donc  cet  a6le  du  nom  de  précaution  }  Il 
»  la  qialifiera  plutôt  de  tranfgreffion  -  de  défobéiifance 
»  extrêm.e  &:  d'inquiétude  perverfe.  Comment  celui , 
»  qui  profane  les  chofes  queîcoi.ques  confacrées  à  Dieu 
»  le  Roi  céleftc,  peut-il  être  un  vrai  Chrétien,  & 
»  fe  croire  tel  ?  « 

Nous  favons  que  les  Adverfaires  de  notre  Religion, 
pour  foutenir  leurs  erreurs  ,  s'étaient  de  divers  paf- 
<'ages  des  Saintes  Ecritures  ,  qu'ils  interprètent  félon 
If  ur  vue  ;  mais  fans  entrer  dans  un  examen  particulier 
tie  ces  interprétations  perverties  Se  intéreffées  ,  nous 
îie  voulons  que  demander  à  Votre  Majefté  fi  elle 
p.dmettroit  pour  interprétation  claire  &  décifive ,  celle 
qu'on  lui  feroit  de  quelqT.jes  paiTages  de  l'Ecriture , 
qui  paroitroient  exprimer  qu'il  ne  peut  exifter  dans  ce 
inonde  d'autorité  fupreme  &:  de  fouveraineté  ,  hi 
nn'en  conféquence  on  pourroit  la  dépouiller  de  la 
iianae  pour  le  falut  de  fon  ajue  }   Nous  fommes  per- 


(  t'î  ) 

fuadés  ,  que  Votre  Majefté  regarderoit  ces  paffages 
comme  mal  interprétés ,  6>c  nous  lui  avouerions ,  qu'en 
les  confidérant  de  la  forte  elle  penleroit  comme 
nous.  Or ,  la  même  chofe  peut  fe  dire  dans  le  cas  , 
où  des  ennemis  fecrets  de  l'Eglife  ,  des  Hérétiques  , 
des  Catholiques  en  apparence  ,  de  faux  maîtres  ,  des 
flatteurs  de  Princes ,  leur  accordent  ,  en  vertu  de 
quelques  paflages  mal  interprétés  de  l'Ecriture ,  le  droit 
de  pouvoir  priver  l'Eglife  &  fes  Miniftres  de  la  pof- 
feffion  de  leurs  biens. 

Cependant ,  ils  favent  tous  que  les  Lévites  d'Ifraël 
poiTédoient  de  vaftes  territoires ,  des  cités  entières  , 
&  que  tous  ces  biens  étoient  inaliénables  ,  comme 
confacrés  &  appartenant  au  Sacerdoce.  Pourquoi 
donc  ne  pas  concilier  les  livres  du  Lévitique  ,  des 
Nombres ,  des  Rois  ,  des  Paralipomenes  ,  avec  les 
cxpreflions  qui  paroiflent  quelquefois  contradiéloires 
à  ceux  qui  ne  favent  pas  mieux  ?  Pourquoi  n'en 
feroit-on  pas  de  même  des  paifages  du  Nouveau- 
Teftament  &  des  aéles  des  Apôtres  ,  comme  l'ont 
fait  les  Pères  de  l'Eglife  ,  pour  ne  pas  donner  té- 
mérairement dans  une  héréfie  manifeilie  ,  en  taxant 
de  contradidion  les  Livres  faints  diftés  par  la  SagefTe 
divine  .'' 

En  faifant  ces  obfervations  ,  nous  femmes  bien 
éloignés  de  penfer  que  Votre  Majefté  veuille  fuivre 
l'exemple  des  feuls  Princes  Proteftans  léparés  de  notre 
Communion  ,  &:  qu'elle  ait  une  vraie  intention  de 
rabaifter  l'Eglife  au  niveau  de  fimples  particuliers ,  & 
de  cendre  la  condition  de  cette  Mère  commune,  pire 
que  celles  des  fimples  familles  ,  dont  il  n'eft  point 
de  Souverain ,  qui  -ne^  fente  la  conféquence  de  ref- 
pefter  les  propriétés. 

Notre  unique  but  eft  de  lui  faire  entendre  en  peu 
de  mots  ,  ce  que  les  penfeurs  modernes  fe  feront  bien 
gardés  de  foumettre  à  la  droiture  de  fon  jugement. 
Nous  ne  nous  diflimulerons  pas  que  parmi  les  Ecclé- 
fiaftiques  ,  il  s'en  trouvera  toujours  malheureufement 
qui  feront  des  biens ,  dont  ils  auront  la  jouiiîance  , 

H  z 


(iiS) 

un  ufage  peu  convenable  &:  peu  mefuré  :  mais  de  cet 
inconvénient  &c  de  ces  abus  particuliers ,  il  ne  s'en- 
fuit pas  un  droit ,  une  autorité  pour  dépouiller  ceux 
qui  en  font  un  ufage  conforme  aux  faintes  Ordon- 
nances ,  &  pour  enlever  à  la  généralité ,  au  détri-^ 
ment  de  l'Eglife  &:  des  Eccléfiaftiques  aétuels  ,  & 
fliturs  ,  des  biens  qui  ne  leur  ont  été  accordés  , 
que  pour  être  tranfmis  fans  fin  à  des  fuccelTeurs  à 
perpétuité. 

Dans  les  entretiens  familiers ,  que  nous  avons  eu 
avec  Votre  Majefté,  pendant  notre  fé^our  auprèsd'elle, 
nous  ne  traitâmes  cette  matière ,  que  relativement  au 
fequeftre  particulier  &  momentané.  Nous  n'avons 
pas  oublié  ,  que  nous  oppofâmes  à  ce  lui  et  à  Votre 
Majefté  des  raifons  qui  parurent  l'avoir  déterminée 
à  fe  défifter  de  fon  projet.  Si  Votre  Majefté  nous 
eût  propofé  le  doute  d'une  privation  générale  &î  illi- 
mitée ,  pour  faire  paiTer  l'Adminiftration  des  Biens 
de  l'Eglife  aux  Séculiers ,  nous  n'euffions  pas  manqué 
de  raifons  fortes  &£  frappantes  ,  qui  fûrement  l'eullent 
détourné  d'un'  tel  proiet. 

Ce  que  nous  ne  pûmes  faire  alors  ,  faute  d'avoir 
été  Inftruits  des  fentimens  de  Votre  Majeflé ,  nous 
le  faifons  par  la  préfente.  Si  elle  ne  produit  pas  l'effet, 
que  peut-être  nous  euffions  opéré  de  vive  voix, 
elle  prouvera  au  moins  à  l'Univers  Catholique ,  que 
Votre  Majefté  n'a  pas  tenu  grand  compte  de  nos 
Repréfentations  ,  ou  qu'elle  les  a  bientôt  oubliées  , 
puifque  dans  l'innovation  qu'elle  fe  propofe,  on  ne 
peut  voir  que  le  renverfement  des  maximes  catho- 
liques qu'elle  nous  demanda  de  lui  rappeller. 

Nous  prions  de  tout  notre  cœur  le  Seigneur ,  que 
l'on  voie  toiijours  briller  dans  le  Gouvernement  aélif 
de  Votre  Majefté ,  les  proteftations  d'un  ftncere  atta- 
chement à  la  pureté  de  la  Religion  ,  &  que  des 
faits  contraires  ne  laiflent  aucun  doute  fur  leur  fin- 
cériié. 

'  Nous  nous  femmes  fervis  pour  la  préfente ,  d'une 
autre  main  que  de  la  nôtre  ,  afin  de  n^  pas  fatiguer 


C  «»7) 

la  vue  de  Votre  Majefté  par  notre  écriture  moins 
coulante  &:  moins  facile  à  lire.  Nous  vous  cmbraffons 
jjdans  la  plénitude  de  notre  afFedion ,  &  vous  donnonç 
notre  bénédidion  paternelle  &:  apoftolique. 

Votre  très-affe6lionné  Père  en 
Dieu  &:  Ami. 

Etoit  fignc  Pie  VI,  Pape. 

Donné  à  Rome  ,  à  Sainte  Marie  Majeure ,  le  3 
d'A.oût  de  l'an  1781  ,  &:  de  notre  Pontificat  le 
VII. 

Oest  ici  le  Bref  dont  il  ejl  parlé  à  la 
p.  12.6.  6e.  vol.' F,  E.  dans  lequel  le  Pontife 
je  plaint ,  que  les  -volontés  de  l'Empereur 
relativement  aux  Articles  arrêtés  aux 
Concile  de  Vienne  ,  aient  été  Ji  mal 
exécutées.  Cette  Fiece  nous  ejl  parvenue 
trop  tard  pour  être  placée  dans  lendroic 
où  elle  fe  rapportoit, 

EXEMPLUM  Litterarum  LETTRE  du  Souverain 

JpoftoUcarumadEmi^  p^^^-j-^  ^  Monfcï^neur 

mm  (Jimum  Architpïf-  ^         ,    ,^., 

copum  Mcdiolantnjan.  l^-rchcvcquc  de  Milan. 

Plus  Papa  VI.  Pie   VI. 

JLx  ILEÇT E  Fïli  nojlcr  J\. Notre  cher  Fils  falut, 

faluum     &     Apoflolicam  Nous  vous  donnons  notre 

bcncdïcliomm.  Catum  pro-  Bénédiftion   Apollolique. 

jcclo   nobis   erat  ;    diUcic  Nous  étions  perfuadés  d'a- 

fiUnoJlir,protuainApof-  vance  ,  vu  le  refpecl  que 


C  >>8) 

tolicamfedem  oh/ervantia ,     vous  avez  toniours  porte 


ac  intima  nobifcujn  coji- 
jimcïwru  ,  proque  ca  par- 
ti ,  quam  in  Ecchjia  me- 
ritb  tantaquc  cum  hiude 
fuflines  ,  tuis  te  ad  Dcum 
cnixis  votis  fui{jc  profecu- 
turiun  ïur  nojlrum  vindo- 
homnfs. ,  iifquc  gravijjlniis 
rcbus  ,  pro  qiùbus  lubora- 
bamus  ,  optimos  fucccjjus 
prccatiirum.  Sed  cum  pra- 
clanim  hiijufmodi  animwn 
tuis  jam  Literis  nobis  tam 
perfpiciie  declaravcris ,  in 
q:dbiis  de  nojîra  iiicolu- 
mitate  ,  redituque  Jiudio- 
fijjiml  gratularis ,  vehemcn- 
ter  jucimdum  nobis  accep- 
tumqiLt ,  profitcri  hoc  of- 
jicium  tuiim  ,  •  ac  plurimas 
etiam  gr.xtias  tibi  idcirco 
perfoivere.  Id  quidem  per- 


au  fiege  Apoftollque ,  &c 
l'attachement  que  vous 
avez  toujours  eu  pour  nous> 
&:  la  haute  dignité  que 
vous  occupez  dans  l'E- 
glile  avec  tant  de  gloire  , 
que  vous  présenteriez  au 
Seigneur  vos  ferventes 
prières  pour  la  profpérité 
de  notre  voyage  à  Vien- 
ne ,  &  pour  le  fuccès  des 
graves  objets  de  nctre  né- 
gociatien.  En  conféquence 
de  votre  Lettre ,  par  la- 
quelle vous  mettez  vos 
excellentes  intentions  en 
plein  jour,  en  nous  féli- 
citant de  notre  fanté  & 
de  notre  heureux  retour , 
nous  avons  un  grand  plai- 
iîr  à  reconnoître  formel- 
lement    votre     officieufe 


iibcnter  hifce  nojlris  prctf-     conduite  ,  &  à  vous  en 
tamiis^  unaquc  tccîim  com      faire  beaucoup  de  remer- 


miinicamus  ,  dilcch  Fili 
no  fier,  non  exiguos  nobis 
jam  conjlare  ,  ejus  itincris, 
Idborij'qiu  fructus  ,  praic- 
reàquc  optima  nos  volun- 
tatis  Cafarls  indicïa  re- 
portage. 


ciemens.  C'eft  ce  que  nous - 
faifons  par  les  préfentes  , 
&  nous  vous  communi- 
quons en  m.ême  -  tems  , 
comme  à  notre  cher  Fils, 
que    nous    fom.mes    déjà 


convamcus  que  notre 
voyage  &  nos  démarches 
n'ont  pas  été  infruftueufes,  &  qu'il  nous  confte  en  ou- 
tre, des  bonnes  difpofition  de  S.  M.  I. 

Utinam  fpcs  hœ  nojîra ,  Le  Ciel  veullie  que  nos 
ità  rates,  impojleràm  fuit ,  efpérances  foient  ii  bien 
ut  nihil  aniplius  quod  an-  fondées  &  ii  durables  , 
gori  nobis  ejfc  pojjîtfuper-     que  nous  n'apprenions  ja- 


(  "9  ) 

Vcnijje  audîamus.  Kon  dif-  mais  qu'il  foit  furvenu 
f.mulamus  tam:n  ex  ïis  rc-  quelque  difporition  abr- 
bus ^  qutz  prafirtim  ijiinc  mante.  Avec  tout  cela, 
enunciantur ,  vïdcrc  nos  ,     nous  ne  pouvons  pas  dif- 


ac  va.ldc  doUre  Cafaris  , 
mandata  ex  minijirorum 
arhitrio  alla  ,  quam  ipfe 
vclit ,  inurpretatione  ,  ac 
etiam  executione  exajpe^ 
rari ,  quce  ut  tu  prajcns , 
videnfque  dejles  ,  ita  non 
mediocrem  afftrunt  anima 
nojirofoUlc'nudincm ,  quod- 


fimuler  ,  que  d'après  le 
bruit  qui  court  dans  la  Ca- 
pitale de  l'Autriche ,  nous 
jugeons ,  non  fans  une  ex- 
trême douleur ,  que  les  or- 
dres de  l'Empereur  de- 
viennent défavorables  par 
l'interprétaton  arbitraire 
que  leur  donnent  les  Mi- 


quc  pojfumus  ad  Dzï  ck-  nillres ,  &  n^ir  la  Imiilre 
mmtiamconvzrtïmur ^eum-  exécution  qu'ils  en  font. 
que  ohfecramus  ^utfufcepta     Vous  devez  en  «être  péné- 


pro  ejus  gloria  conjUia 
nojlra  optîmos  ab  eo  ,  ut 
jam  progrejfus  habuerunt, 
ità  etiam  exitus  confcquan- 
tur  ;  ac  Jingularis.  In  te 
paterntz  Charltatïs  pignus 
Apojlolïcam  Bencdiuioncm 
tibi^  dilccieFlli  nofia\,  tuœ~ 
quœ  fidei  concrcditis  ovihis 
peramauier  impcrtimur.  Da- 
tum  Romcz  apud  S.  Ma- 
riam  Majorcm  Jub  annulo 
Pifcatons  dit  Xril  Ju- 
in lySx^Pon-tûs.Nri.anno 
Oclavo. 

Benedictus  Stay. 


tré  de  douleur,  à  la  vue 
des  maux  qui  en  réfultent, 
&  que  vous  avez  fous  les 
yeux.  Quant  à  nous ,  c'ell 
pour  nous  un  grand  fujet 
d'inquiétudes  :  tout  ce  qiii 
nous  refte  à  faire ,  c'eft 
de  nous  adreffer  à  la  Mi- 
féricorde  divine  ,  &  de 
prier  le  Seigneur  de  bénir 
nos  enîreprifes  que  nous 
avons  faites  pour  fa  gloire, 
5c  qui  attendent  une  iffue 
heureufe  de  la  part  du 
Ciel ,  c'ont  elles  avoient 
déjà  été  bénies  dans  leurs 


premiers  progrès.  Nous  vous  donnons ,  cher  Fils ,  en 
gage  de  notre  amour  paternel  ,  notre  Bénédiction 
apoftolique-,  ainfi  qu'aux  ouailles  qui  vous  font  con- 
fiées. Donné  à  Rome,  à  Ste.  ^!arie  Majeure,  fous 
l'anneau  du  Pécheur,  le  17  Juillet  1782.  La  8c.  an-^ 


née  de  notre  PontifiCat. 


SiiiTic  Benoit  Stay, 


(  iio  ) 


FAUTES     A    CORRIGER. 
Ç 

4_J  IXItMF.  Volume,  Partie  EccUfiaJîique ,  pag.  260,  lig.  ^0  ^ 

Riczinget  ,  ïij'e^  Ricxinger. 
Pag.  277  ,    lig.   7  ,    celles ,  lif.  les  lettres. 
Pag.  282  ,  lig.  3  de  la  note  (c^  ,  les  bois,  lif.  le  boit. 
Pag.  26'4  ,    li/f.    la   de  la   nott  {b)  ,  VeJJenitel ,  lif.  efjentieî. 
Pag.  28S  ,  lig,  4  de  la  note  ,  pour  en  faire  un  compliment,  li/".  pout 

faire   un  compliment. 


Si  ton  n*i  pas  inféré  la  Dépêche  de  L.  A.  R.  adrejfée  à  la 
Province  de  Gueldrcs ,  pour  rétablir  tout  fur  l'ancien  pied;  cejl 
qu'elle  eft  parfaitement  conforme  à  celle  tf«  30  Mai  1787,  adref 
fée  aux  Etats  de  Brabant. 


Nous  avons  reçu  la  Lettre  de  Tournay ,  par  laquelle 
on  nous  avertit  que  les  Curés  du  Dïoceje  nont  pas 
préfenté  la  Repréfentation  far  la  ledure  des  Placards 
en  Chaire,  quon  lit  dans  le  4e.  volume  des  Repré- 
fentations  , /7d^.  124.  Nous  avons  tout  bonnement  pu- 
blic la  Pièce  .y  fous  le  titre  quelle  portoit  dans  le  ma- 
nufcrit  qui  nous  a  été  envoyé  ;  nous  avons  été  d'au- 
tant moins  en  garde  contre  f erreur  que  ladite  Pièce 
ne  conteîioit  rien  qui  ne  fait  digne  du  \ele  6*  de  La 
piété  des  Pafleurs  Chrétiens. 


III 


TABLE 

DES 
MAT    I     E     R    E    s. 


R 


EMONTRANCES    de  P  Unïverjité  de   Louvain  ,   à  S.i 
y  Majejk  l'Empereur  &  Roi  y  &c.  &c.  &c,  Pag.       •  7 

Remontrances  des  Etats  de  Flandres ,  à  Leurs  Altfjjes  Royales , 

AU  fujet  des  Remoat-ances  dt  la  Métropole  di  Malinef  ^  du'4 

\Judla.  ly^j.  -.      -  ■'.:-"  '    ^5 

D'ifcours  adrejjé  à  Mgr.  d'AÏ^uevilU  de  Mîll.in court ,  Evêque 
^  d'Awycies  y  Sujfra^ant  de  dfmbrtii  ,■  &>c.  &c.,  donnant  U  Con>- 
^firmaiion  en  U   Faille  de  MonSy  le. i4 -Juillet  jjSj,    •-    ,-2.7 

Requête  de  AI.  Lembcry  ,  ci-devant  Prieur  de  Houffalife  ,  & 
Député  de  FEtût  Eccléjîaflique  de  U  Province  de  Luxembourg , 
à  M§rs.   Ls  Trois- Etats  du  Pays^  &c.  34 

Requête  des  Religieufes  fupprimees  de  Jéricho ,  aux  Bonnes- Gens 
des  Neuf  J\"ations  de  la  Fille  de  Bruxelles  ,  du  7.S  Mai 
1787.  36 

Lettre  de  V Evêque  de  Brlnn,  au  Souverain  Font'fe  Pie  VI, 
du  1  Mars  1782.  39 

£ref  du  Souverain  Pontife  Pie  VI,  Pape,  à  VEvêjîie  de 
Brinn,  du  iz  Avril   1782.  45 

Copie  d'une  Lettre  &  d'un  Mémoire  préfentés  à  Sa  Al.ijefté  l'Im- 
pératr'cc  Dou/iriere  &  Reine  Apopolique ,  p^r  Us  Evêques  des 
Pays-Bas  ,  concernant  l'Etat   Rel'gieux ,  l'an  177^.  48 

Mémoire  préfenté  le  8  Janvier  1787,  pour  M.  J.  Janjfens ,  Curé 
de  U  Ville  de  ïVeert ,  dans  la  Gueldre  Autrichienne,  relatf 
à  U  Requête  de  M.  le  Confeiller  &  Mambour  de  Ruremondc , 

1  ttt 


iix  TABLE. 

Copi^  de  rOrddânance  du    Confeil   Souverain   de   Ruremondel 

fuivie  fur  le  Mémoire  prétêdent ,  6»ç.  ^% 

Ittue  de  Mgr,  l'Eviquc   de  Ruremonde  ,  à  Ai.  Janjfens  ,  &£, 

94 

Copie  d'une  heure  de  M.  le  Secrétaire  de  Mgr.  rEvêque  de  Rure- 
monde,  à  M.  Janjfens^  fi'C.  95 

Extrait  d'une  Lettre,  datée  de  Weert ,  du  '^  Juin  1787,  relative 
aux  affaires  concernant  Af.  Janjfens ,  &c.  ibid, 

Repréfeitation  des  Etats  du  Pays  &  Duché  de  Luxembourg  ^  à 
Leurs  Altejfes  Royales  ,  touchant  les  deux  ProceJJîons  de  là 
SoUmnité  de  Notre-Dame  ,  Patrone  de  la  Province  ,  du  S 
Décembre  1786.  95^ 

TraduSion  d'une  Lettre  de  N.  S.  P.  le  Pape  Pie  VI ,  à  l'Em- 
pereur &  Roi  Joseph  II,  fur  tufarpation  des  Biens  Ecclé- 
fiafliques  ,  le  3  Août  1782.  II3^ 

Lettre  du  Souverain  Pontife  à  Mgr.  V Archevêque  de  Milan  ,  du 
17  Juillet  1782.  (Latine  &  Françoife.)  117; 


115 


SUITE 

DE     LA 

QUATRIEiAIE   PARTIE 

D    U 

T.  RECUEIL. 


;^ 


$'  ■'•.       V 


<^^.S. 


î  '^î  i 


Tjf^l^^Z-.î- 


.  axzjminaa^--  js»«w*seMn.:.«wMcMBiGBi&': 


{  119) 

MÉMOIRE  fur  les  Droits  du  Peuple 
Brabançon  £'  les  atteintes  y  portées  au 
nom  de  Sa  Majefîé  C Empereur  is  Roi\ 
depuis  quelques  années  ;  préfenté  à  rAj- 
/emblée  générale  des  Etats  de  ladite 
Province  ,  par  Monfieur  H,  C\  N, 
VanderNoot,  Avocat  au  Confeil 
Souverain  de  Brabant ,  le  z^  Avril  1787* 

A  MejUcigneurs  Us  Etats  de  la  Province  de  Brabant» 
M  ES  SEIGNEURS, 


,UELQUES  Syndics  des  Nations  de  ceffe 
Ville  de  Bruxelles  rv.t  vinrent  confulter  fur  un  Mé- 
moire ,  qu'ils  avoient  fait  faire,  touchant  les  plain- 
tes ,  que  lefdites  Na  ions  eftiment  d'avoir  par  rap- 
port aux  infraâions  ùq^  Privilèges  &  Loix  fonda- 
mentales de  cette  Province ,  &  me  demandèrent 
d'en  faire  un  deuxième,  pour  renforcer  le  premier; 
je  leur  répondis,  que  j'étois  content,  pourvu  que 
les  Nations  me  donnaffent  une  commiffion  ;  &  l'un 
&  l'autre  d'eux  vinrent  médire,  qu'ils  s'occupoient 
à  faire  délivrer  la  fufdite  commiffion.  Ce  non-obftant 
la  commiffion  n'a  pas  paru  jufqu'à  ce  jour  16  Avril 
1787  ;  &  ils  m'ont  mis  dans  le  cas  de  laiffier  écou- 
ler le  terns  néceffiaire  pour  traiter  à  fond  un  objet 
de  la  dernière  importance. 

Jç  fuis  informé ,  Meffieigneurs ,  que  le  premier 
Mémoire  vous  eft  remis,  pour  en  être  fait  leflure, 
pendant  votre  Alfemblée  générale  ;  mais  craignant 
que  ce  Mémoire  ne  vous  parût  pas  quelquefois  affiex 

I  *** 


.  .        (  >3o  ) 

démontrer  les  infraélion'; ,  dont  lefdites  Nations  vous 
ont  voulu  taire  leurs  juftes  plaintes,  j'eftime  que, 
iuivant  le  41e  Aiticle  de  la  Joycufé  Entrée  de  notre 
Duc  de  Brabant  du  17  Juillet  lyfti,  je  puis  libre- 
ment vous  propoler  les  griets ,  fans  encourir  aucune 
indignation  ou  diigrace  de  Sa  Majefté  ou  de  quel- 
que autre. 

J'eftime  de  plus ,  que  le  devoir  de  tout  bon  Sujet 
l'oblige  de  le  faire.  C'eft  dans  ces  vues  que  je  prends 
la  rerpeéiueufe  liberté  ,  Mefieigneurs  ,  de  vous  ex- 
poferruccinftement  mes  plaintes  Tur  le  renverfement 
de    la  Conftitution  fondamentale  de  cette  Province. 

Si  ces  Syndics  n'avoient  pas  abule  de  mon  tems , 
j'aurois  pu  entrer  dans  un  détail  plus  circondancié  ; 
mais  néanmoins  j'elpere ,  que  vos  lumières  fupplée- 
ront  à  mon  zèle,  &  j'ofe  efpércr  aufïi ,  que  vous 
ferez  convaincus  de  ma  fidélité  à  mon  Prince  &c 
Souverain ,  de  mon  dévouement  à  Ion  fervice  ,  £>c 
de  mon  amour  pour  la  Patrie. 

Il  me  refte  de  vous  aflTurer ,  Mefleigneurs ,  que 
la  fatyre  &  la  calomnie  n'entrent  pas  dans  mes  vues; 
mais  permettez-moi  d'obferver  avec  l'Orateur  Et- 
chyne  ,  ce  fameux  rival  de  Démofthenes ,  qu'il  eft 
ibuvent  des  procédés  &  des  aâions,  dont  on  ne 
peut  parler,  qu'on  ne  peut  n:éme  défigner ,  fans  fefer- 
vir  malgré  foi  d'expreffions  un  peu  dures  ;  ce  ne 
font  point  alors  les  mots  qui  exagèrent  la  chofe  , 
c'eft  la  chofe  qui  force  les  mots. 

Feu  le  Comte  de  Neny  ,  dans  l'Introdudion  de 
Ces  Mémoires  Hljloriques  &  Politiques  des  Pays-  Bas , 
obferve  très- judicieulement,  que  l'hiftoire  d'un  Pays 
eft  fi  efiTentieliement  liée  avec  fa  Conftitution  poli- 
tique ,  qu'il  n'eft  pas  pofiîble  de  féparer  ces  deux 
objets.  Cette  vérité  eft  inconteftable,  dit-il ,  fur- 
tout  par  rapport  aux  Pays-Bas  ;  de  forte  qu'il  faut 
xiéceiTairement ,  avant  de  traiter  de  la  Conftitution, 


(  131  ) 
rapporter  un  précis  de  rf>n  hlftolre;  mon  fujet  ne 
me  permet  pas  de  recourir  à  ces  Princes  ,  dont  les 
généalogies  n'en  font  pas  moins  rapportées  dans  le 
Trélor  des  Privilèges  de  la  Ville  de  Bruxelles,  con- 
nu fous  le  nom  de  Luy  (hr  van  Brabant  ;  parce  qu'ils 
Tentent  trop  la  fable  :  je  me  bornerai  à  l'époque 
à  -  peu  -  près  avant  que  les  ilomains  en  firent  la 
conquête. 

Les  contrées  connues  aujourd'hui  fous  le  nom 
des  Pays  -  Bas  ,  étoienî  nommées  Bd^iuni  par  les 
Romains. 

Et  avant  l'arrivée  des  R,omains  dans  les  Gaules , 
cette  vafte  région  étoit  compofée  de  plufieurs  petits 
Etats;  tels  que  ceux  des  Aduatlquts  ^  des  Grudiens  , 
des  Ambivarkis  ,  qui  habitoient  à -peu -pies  le 
Brabant  moderne  ;  des  Remois ,  des  Ncrviens  ,  & 
d'autres. 

Dans  ces  contrées  ,  les  Nobles  &  les  principaux 
Citoyens  tenoient  les  rênes  de  la  Police.  La  plupart 
des  Républiques  Gauloifes  avoient  un  Gouvernement 
Ariftocratique  ,  comme  Str  a  B  O  N  l'a  remarqué  : 
on  y  crèoit  annuellement  un  Magtftrat ,  avec  plein- 
pouvoir  de  régler  toutes  les  affaires  publiques  ;  en 
tems  de  guerre  le  peuple  choiiiffoit  un  Capitaine- 
Général  pour  la  conduite  des  armées. 

Cependant  quelques-unes  de  ces  Républiques  étoient 
gouvernées  par  àts  Princes  ou  de  petits  Rois  élec- 
tifs. Voyez  DE  VadderE  de  V Origine  des  Ducs 
de  Brabant  Chap.    i.  N.   !. 

Les  Belges  formoient  dès-lors  un  peuple  nom- 
breux ,  &  Jules-Céfar  les  reconnoiffoit  pour  les  plus 
vaillans  des  Gaulois  :  korum  omnium  fortijjlmi  funt 
Belgx  ,  dit  -  il  ,  au  premier  livre  de  fes  Commen- 
taires de  la  Guerre  des  Gaules  ;  auffi  les  diftinguoit- 
il  des  autres;  il  ne  les  chargeoit  pas  d'impoftions 
nouvelles  :  au  contraire ,   il  tâchoit  de  fe  les  atta-» 

I   2 


(  13^  ) 

cher,  fuîvant  Jufte-Lipfe  :  ad  Cemm.  Cafar.  Uh.  g- 
dc  Bel.    Gall. 

Tacite  ,  qui  en  parle  dans  Tes  Annales ,  dit ,  qae 
les  Romains  traitoient  les  Belges  d'affociés  &  de 
frere"^  ;  honneur  qu'ils  n'accordoient  à  perfonne  , 
qu'après  une  longue  fuite  de  fervices  :  ils  les  efti- 
nioiont  au  point ,  qu'ils  les  admettoient  pour  gardes 
de  corps  à  l'exclufion  des  autres  Nations. 

Jules-Céfar  a  eu  l'expe'rience  ,  que  les  Belges  lui 
oppoferent  la  réfiftance  la  plus  opiniâtre  &  la  plus 
glorieuie;  &  il  ne  dut  les  avantages,  qu'il  remporta 
fur  eux  ,  qu'à  rexxellence  de  la  difcipline  militaire 
de  les  légions  Romaines. 

Suivant  le  rapport  de  DE  Vaddere  loco  cit. 
Ambiorix  en  haranguant  Céfar,  lui  dit,  que  le  peu- 
ple avoit  autant  de  pouvoir  fur  fa  perfonne,  qu'il 
en  avoit  lui-même  fur  le  peuple  :  ce  qui  veut  dire, 
qu'il  n'étoit  pas  parvenu  à  la  dignité  Royale  par 
fucceflîon  ,  mais  par  fon  mérite  ,  &  par  la  faveur 
du  peuple  qu'il  gouvernoit;  de  même  que  les  Prin- 
ces, 5s:  les  petits  Rois  des  autres  diftrifts  de  la  Gaule 
Belgique. 

Cette  partie  des  Gaules  ne  fut  pas  plutôt  réduite 
fous  robéiffance  des  Romains,  qu'elle  commença, 
comme  la  Celtique  &  l'Aquitaine ,  à  regretter  fon 
ancienne  liberté  :  déjà  plufieurs  ville«  confpiroient 
au  foulevement  &  follicitoient  le  fecours  de  leurs 
alliés ,  qui  leur  prêtèrent  fi  promptement  la  main , 
que  l'armée  Romaine ,  quoique  toute  couverte  de 
lauriers  ,  n'eut  pas  le  loifir  de  refpiier  un  moment  : 
elle  fut  forcée  de  fortir  de  fes  quartiers  d'hiver  pour 
acheté;  plus  chèrement  fon  repos  par  une  nouvelle 
effufion  de'  fang ,  &  pour  étouffer  ainfi  l'incendie, 
qui  s'allumoit  ,  tandis  que  Rome  reluifoit  de  feux 
de  joie. 

Les  Romains  furent  obligés  de  bâtir  des  forts ,  & 


(  133  ) 
d'entretenir  de  greffes    garnifons  ,   afin  d'empêcher 
les  foulevemens ,  que  la  dureté  des  commandemens 
&  l'amour  de  la  liberté  rendoient  fort  fréquens. 

La  mérnnce  ,  la  jaloufie ,  &  l'ambition  ayant 
gagné  chez  les  Romains ,  les  guerres  inteftines  en 
font  provenues  ;  de  -  là  le  renverfement  de  cette 
Monarchie  fioridante  :  des  débris  de  l'Empire  Ro- 
main il  fe  forma  prefque  par -tout  de  petites  Sou- 
verainetés ;  une  partie  des  Pays-Bas  réunie  avec  la 
Lorraine  forma ,  pendant  iong-tems  ,  fous  le  nom 
d'Auftrafie,  un  Etat  conlîdérabie  ,  qui  fut  enfin  in- 
corporé au  Royaume  de  Franca  ,  auquel  Charlema- 
gne  ajouta  la  plus  grande  partie  de  l'Europe. 

La  Maiion  de  Charlemagne  étant  par  la  difcorde 
tombée  en  décadence,  le  Officiers  de  \\  Couronne 
&  les  grands  Seigneurs  profitèrent  de  la  foibîeffe  des 
Princes  régnans ,  pour  rendre  leurs  Gouvernemens  hé- 
réditaires dans  leurs  fan^iiles ,  ou  pour  fe  les  appro- 
prier. Les  Provinces  des  Pavs-Bas  efTuyerent  par- là 
différentes  grandes  révolutions;  elles  étoient  fouvent 
féparées  les  unes  des  autres. 

Ces  révolutions  &  ces  guerres ,  outre  l'effufion  de 
fang  ,  occafîonnerent  des  frais  immenfes,  dont  le  peu- 
ple a  foutenu  &  lùpporté  le  fardeau. 

Il  efl:  certain,  que  la  plupart  de  ces  Princes  étoient 
redevables  de  leur  fouveraineté  au  peuple,  qui  veil- 
lant toujours  à  la  confervation  de  la  liberté  publique  , 
n£  leur  laiffa  qu'un  commandement  prefque  précaire: 
ils  dévoient  fe  contenter  de  quelques  terres  qu'on 
leur  avoit  aflignées  en  domaine,  &  de  quelques  fub- 
fides  affez  légers  :  il  falloir  faire  la  convocation  des 
Etats  pour  prendre  leur  avis ,  dans  les  affaires  d'im- 
portance,  &  l'on  ne  pouvoir,  fans  le  confentement 
defdits  Etats,  ni  impofer  aucuns  fubfides,  ni  changer 
la  for  mi  du  Gouvcrfumint ,  quel  qu'il  pût  être  ,  ni 

I  3 


(134) 
feulement  augmenter  ni  diminuer  le  prix  des  mon- 
noies.  (^Supplément  de  Buikens  ^  tom.  x.) 

Un  autre  (  BaJnagCy  annales  des  Provinces-Unies , 
tom.  i.  )  dit ,  que,  lorsque  pluiieurs  Provinces  étoient 
réunies  ious  l'autorité  d'un  même  Chef,  comme  cela 
arriva  fous  les  Ducs  de  Bourgogne,  &  dans  la  Mai- 
son d'Autriche  ,  elles  ne  laiflerent  pas  de  conferver 
l'ancienne  forn-.e  de  leur  Gouverneipent. 

J'ai  déjà  ci-devant  obfervé ,  quelle  étoit  cette  an- 
cienne forme  de  leur  Gouvernement  ;  néanmoins  je 
rapporterai  ce  que  Bafnagc  en  dit. 

La  NoblefTe,  continue- 1 -il  lac.  cit.,  &  le  peuple 
coinpoloient  les  Etats  de  chaque  Province  ;  ils  ré- 
gloient  les  fomnies  qu*o!i  dtvoit  fournir  au  Souve- 
rain ,  &  prenoient  leur  réfoîution  fur  les  affaires 
importantes  &  générales.  La  Nobleffe  avoit  la  plus  ^ 
principale  di'edlion  de  ces  affemblées  politiques,  mais  ' 
le  peuple  ,  qui  vei'loit  pour  la  conferVation  de  fes 
Privilèges",  y  donnoit  aufîi  fa  voix;  &:  ce  partage 
d'autorité  rendoit  le  Gouvernement  moins  defpotique 
ôi  plus  doux. 

Mefieigneurs  ,  permettez  -  moi  de  vous  obferver  , 
que  Bajnage  n'a  pas  parlé  de  l'Etat  Eccléfiaflique  , 
parce  que  fes  Annales  concernent  les  fept.  Provinces- 
Unies,  &  fur  -  tout  parce  qu'elles  font  dédiées  aux 
Conreillers-Députés  des  Etas  de  Hollande  &  de  AVeft- 
Frife. 

Il  n'eft  pas  inoins  vrai  que  l'Etat  Eccléfiaflique  , 
depuis  plufieurs  fiecles  ,  fait  Membre  &  l'Etat  pri- 
maire des  trois  Etats  de  cette  Province  ;  les  Joyeufes 
Entrées  des  Ducs  de  Brabant  en  font  foi. 

Le  tems  eft  trop  court  pour  entrer  dans  le  détail 
circonftancié  des  motifs  qui  ont  donné  lieu  aux  Joyeu- 
fes Entrées  reTpeftives ,  ainfi  que  des  circonftances 
qui  y  ont  occafionné  des  changemens  fucceflifs.  Jfi 


me  bornerai  à  obferver ,  que  le  Teflament  de  Henri  III, 
Duc  de  Lothler  &  de  Brabant ,  en  à^ie  de  ,    i  i^o  « 

ell  la  fource  &   la  bafe  des  Joyeufes  Entrées  ; 

Et  que  les  ra-fons  qui  ont  engagé  les  Princes  à 
les  accorder ,  ont  été  la  valeur  ,  rattachement  &  la 
libéralité ,  qne  les  Brabançons  de  tous  tems ,  ont  eus 
enver>  leur  Prince  y  plus  que  tous  les  autres  Belges  ; 
au  point  même  ,  que  leurs  Princes  Te  font  tait  gloire, 
&  même  un  devoir  de  paffer  avec  eux  des  acles  pu- 
blics ,  par  lefquels  ils  les  reconnoidem  publiquement. 
Les  annales  de  cette  Province  6c  les  hiftoriens  les 
rapportent. 

Quoique  les  circonftances  des  tems  ayént  donné 
lieu  fuccefiivement  à  quelques  changemens  de  quel- 
ques articles  des  Joynifes  Entrées  ,  il  n'eft  pas  moins 
vrai ,  que  ces  changemens  ont  été  faits  non  par  rap- 
port au  démérite  des  Brabançons  ,  mais  par  rapport 
à  d'autres  objets. 

Les  Joyeujes  Entrées  contenoient  au  tems  jadis 
pluiieurs  points  &  articles  très-confidérables,  comme 
fe  voit  d'iceîles  jurques-à  celles  de  Charles  V  de 
1514  :  mais  les  dix-lept  Provinces  étant  fucceffive- 
ment  parvenues  à  un  ,  &  le  même  Prince ,  il  fe 
trouva  qu'on  ne  pouvoir  les  laiRer  fubfifter  dans 
leur  ancienne  étendue,  fans  troubler  l'harmonie  du 
Gouvernement  général ,  ce  qui  donna  lieu  à  des  con- 
férences entre  les  Minières  de  l'Empereur ,  &:  les 
Etats  de  Brabant  ,  lefquels  dans  ces  conférences 
font  convenus  des  changement  néceflaires  ,  dont 
afte  formel  a  été  drefTé ,  &  fait,  &c  la  féconda 
inauguration  de  Charles  V  avec  Philippe  11  Ion 
fils  ,  comme  Prince  fuccefîif,  du  5  Juillet  1549, 
a  été  changée  fuivant  cet  aéle.  Voyez  le  premier 
volume  des  Flac.  de  Brab.  fol   1^2. 

Depuis  ce   changement,  les  Joyeufes  Entrées  011 
Inaugurations  de  Brabant  le  font  faites  fur  le  même 

I4 


pied,  fauf  quelques  changemens  légers  de  quelques 
termes ,  qui  fe  font  faits  du  gré  &  confentemeni 
des  Etats  de  Brabant. 

.  Il  eft  conftant ,  &  toutes  les  Jeyeufes  Entrées 
en  font  foi ,  que  ,  de  tout  tcms  que  les  Joyeufcs 
Entrées  exigent,  jufques  même  celles  de  notre  Duc 
régnant  Sa  Majefté  l'Empereur  &  Roi  Jofeph  II , 
elles  forment,  ou  font  un  contrat  fynallagmatique , 
entre  le  Duc  de  Brabant,  &  le  Peuple  Brabançon. 

Je  dis,  entre  le  Duc  &  le  peuple;  parce  que 
vous,  Mefleigneurs ,  en  contraétanr  avec  le  Duc, 
vous  contrariez  au  nom  ,  &  comme  repréfentant 
tout  le  Peuple  :  l'Etat  Eccléliaftique  les  Ecc^étiafti- 
ques  tant  Séculiers  que  Réguliers  ,  l'Etat  Noble  tout 
les  Nobles,  &  le  tiers -Etat  les  autres  ctaffes  des 
habitans  :  ainfi  enfemble  vous  reoréfentez  tout  le 
Peuple  du  Brabant. 

Conféqueminent  il  eft  vrai  de  dire,  que  le  Duc 
n'a  pas  feulement  contrarié  avec  les  Etats,  ou  quel- 
que Corps  du  Brabant,  mais  avec  le  Peuple  du 
Brabant. 

J'obferve  aufii ,  qu'il  confie ,  par  lefdites  Joyeufes 
Entrées  ,  qu'elles  rie  contiennent  rien  qui  foit  con- 
traire aux  bonnes  mœurs,  ni  rien  d'oppofé  à  la 
Souveraineté;  mais  au  contraire,  qu'elles  contien- 
nent feulement  ce  qu'un  bon  Prince  doit  à  fon 
Peuple  :  elles  ont  Téquité  pour  principe  ,  &  la  iuf- 
tice  pour  bafe,  qui  feules  ibnt  les  fondemens  les  pius 
lolides  de  la  durée  des  Royaumes,  font  la  paix  &c 
la  tranquillité  des  familles,  la  félicité  du  Peuple,  le 
foutien  du  Trône,  ôc  la  gloire  du  Prince  :  Jujîitid, 
dit -le  plus  fages  des  Ko\s ,  firmabitur  folium  j  per 
me  Reges  régnant ,  Principes  imp^rant ,  6*  conditores 
legum  jufia  decernunt, 

Deforte  que  le  Duc  de  Brabant,  abflraftion  faite 
du  ferment  qu'il  a  fait  fur   l'acconipliiTement ,  ou 


(  137  ) 

i  obrervation  de  fes  engagemens ,  repris  au  contrat 
<îe  les  Joyeufcs  Entrées  ,  e(t  tenu  cla  les  remplir  (cru- 
puleufement ,  &  avec  toute  l'exaftîtude  pofïible  : 
Q^uid  enim  tam  congruum  fidci  humancz  ,  quàm  ta , 
qucc  inter  eos  placuerura  ,  Jervare  ?  L.    i.  ff.  de  pacî, 

C'eft  auffi  la  dcdrine  commune  des  Jurifconlul- 
Xes ,  que  le  Prince ,  en  vertu  d'un  contrat ,  eft 
obligé  de  remplir  les  engagemens  comme  tout  par- 
ticulier :  Gait.  lïb.  2.  praci.  obfcrvat,  5  5  »  6*  ai'ù 
ah  ipfo  citât. 

Brunneman  ,  commtni.  ad  pandecî,  ad  l.  "^  !•  ff» 
de  Ugib.  enleigne  même  NN.  ^  6-  6  ,  que  penbnne 
dans  ce  monde  n'eft  plus  obligé  à  remplir  Tes  en- 
gagemens que  les  Princes  :  &  il  conclut  N.  7,  di- 
lant  :  Ex  quo  colllgitur  ,  privilégia  a  Principe  jlve, 
fuhdiiis  Jive  non  fubdltis  pcr  modum  contracîâs , 
vel  oh  bene  mérita  data,  revocari  a  Principe  non 
poffe  ,  cum  Princeps  ex  contracîu  obligetur. 

De  plus  ,  la  loi  4  au  cod.  de  Icgib.  eft  décifive  à 
cet  égard  :  Digna  vox  ejî  (  porte  -  t  -  elle  )  Majep.utc 
TcgnsLntis  ,  legibus  alligatum  fe  Principem  prcfiteri  : 
adio  de  aucîorit-'Jte  jiiris  nofira  pendet  aucioritas  :  & 
rêvera  majus  Imperio  ejî  ,  jubriiittere  legibus  Principa- 
tum  ,  &  oraculo  priefentis  eaicii  ,  quod  ncbis  licere 
non  patimur ,  aliis  indicamus. 

Nihil  tamen  ta.m  proprium  imperii  e(l ,  quam  U' 
gibus  vivere  ,  dit  la  Loi  \.  cod.  de  tdia;;ientis ,  à  l'é- 
gard de  l'îirîipereur  même. 

D'ailleurs  perfonne  ne  peut  ignorer ,  combien  il 
eft  eflentiel ,  qu'un  Fnnce  remplilTe  les  engagement  : 
Régis  ad  exirnplum  totus  componitur  orbis.  Le  Peu- 
ple ayant  l'expérience ,  que  le  Prince  n'efl  pas  fidèle 
à  Tes  engagemens ,  fe  modelant  fur  lui ,  manque  aufli 
à  Tes  conventions,  non-feulement  à  l'égard  du  Prince  , 
mais  à  ré,q;3.rd  de  tous  ceux  avec  oui  il  contrafte  ^ 
tant  les  collègues  ou  regnicoJes ,  que  les  Etrangers. 


Ce  vice  ,  ou  manquement  de  bonne  foi  ,  produit 
Il  me'fi.mce,  non  -  leiiieinerit  entre  les  habitans  du 
incine  Pays ,  mais  auffi  à  l'ég^ird  de  tous  les  Etran- 
gers ;  d'où  réfulte  un  déibrdre  général,  &  la  deftruc- 
tjOîi   du  comn)eice. 

En  outre,  le  défaut  d'accompliffement  des  enga- 
gemens  du  Prince  vis-à-vis  de  fon  peuple  ,  fait  que 
généraletnent  tout  autre  ,  qui  efl  dans  le  cas  de  de- 
voir contrafter  avec  lui,  tant  Pilnces  Souverains, 
que  tout  autre  Etranger,  s'en  méfie,  &  évite,  au- 
tant q-je  poffible  ,  les  occafions  de  contra<5l£r  avec 
lai  ;  ce  qui  produit  des  eff;;ts  très-nuifibles ,  &  même 
funeftes  au  Peuple. 

Il  eft  donc  évident  ,  que  le  Duc  de  Brabant  ré- 
gnant a  contrarié  avec  Ton  peuple  ,  5c  qu'il  eft  obligé 
cle  remplir  fes  engagemens  :  je  n'entreprendrai  pas 
èe  détailler  quels  font,  les  engagemens  auxquels  il  s'eft 
obligé  ;  le  tems  me  manque  pour  faire  ce  détail.  D'ail- 
ieurs ,  MefTeigneurs,  vous,  qui  avez  contracté  au  nom  , 
&  comme  repréfentant  le  Peuple,  les  connoiifez  au 
moins  autîi  bien  que  moi  ;  &  fes  eng<igemens  font 
connus  non-feulement  aux  Brabançons,  mais  à  toute 
I  Europe  :  les  Joyeiijes  Entrées  lont  trop  publiques 
pour  qu'elles  puillent  être  ignorées  dans  aucun  recoin 
de  l'Europe. 

Je  n'entreprendrai  pas  non  plus  de  donner  un 
détail  exafl  &  précis  de  tous  les  points  qu'il  a  man- 
qué d'obierver  :  ce  détail  demande  trop  de  tems  : 
j'euime,  qu'il  fuffira  de  rapporter  les  principaux  ob- 
jets pour  éiahîir  le  bouleverfement  &  l'anéantiffement 
de  la  Conflltution  fondamentale  de  cette  Province  , 
que  nos  ancêtres  ont  acquife  légitimement  au  prix  de 
leurs  biens,  &  de  leur  fang;  &  dont,  à  leur  exem- 
ple ,  nous  avons  mérité  la  confervation  ,  &  la  durée  , 
pour  la  faire  fuivre  à  nos  fuccefTeurs. 

Quoique  je  ne  me  propofe  pas  d'entrer  dans  un 


(139) 
flitail  particulier  des  infraélions  faites  vis-à-vis  ou  à 
Icgard  des  Eccléfiaftiques  de  cette  Province  (ce  que 
les  Philoi'ophiftes  ne  manqueroient  pas  de  traiter  de 
fanatifmc  )  ,  j'eftime»  que  je  dois  r.t'celTairement  trai- 
tcfr  de  l'Edit  concernant  la  lupprelîion  de  plufieurs 
Couvens  prétendus  inutiles  dans  les  Pays-Bas,  donné 
en  cette  ville  le  17  Mars  1785  ;  paice  qu'il  eft  une 
<!es-  premières  pierres  d'achoppement  de  toutes  les 
Intraftions  faites  à  Tes  engagemens ,  depuis  fon  avè- 
nement au  Trône. 

Permettez  -  moi  ,  Meflsigneurs  ,  qu'avant  d'en- 
tier dans  cette  difcuffion  ,  je  fade  une  protefta- 
tion ,  que  mon  cœur  me  dicle  :  conféquemment  je 
vous  dis ,  que  j'ai  un  attachement  &  un  dévoue- 
ment pour  mon  Souverain  autant  que  le  plus  fidèle 
des  Sujets  puifTe  avoir ,  que  je  facrifierois  &  mon 
bien  &C  mon  fang  pour  lui  ,  &  que  je  fuis  convain- 
cu ,  que  ce  qvi'il  fait  ,  n'eft  pas  en  vue  de  nous  ôter 
nos  Droits  Se  Privilèges  ;  mais  que  la  religion  eft 
lurpriC^  ,  &  qu'elle  l'a  pu  êtte  ,  vu  les  circouflances 
cop.courantes ,  que  je  détaillerai  dans  la  fuite. 

Revenant  au  iurdit  Edit  de  l'Empereur  du  17 
Mnrs  17^5  ,  j'obferve ,  qu'il  a  pour  titre,  Edit  de 
C Empereur  concernant  la  juppnjjion  de  plufieurs  Cou- 
vens  inutiles  dans  les  Pizys-  Bas.  Souvenez  -  vous  , 
Meffeigneurs ,  que  je  parle  uniquem.ent  pour  le  Bra- 
bant ,  oii  j'ai  le  bonheur  d'érre  né  ,  6^  que  je  ne 
traite  pas  des  autres  Provinces  des  Pays-Bas. 

Qu'il  me  foit  permis  de  demander  ,  où  &C  par 
quels  moyens  il  a  coiîfté  à  Sa  Majcfté,  qu'il  y  avo'.t 
des  Couvens  inuriies  à  \z  Religion  &  à  l'Etat  dans 
la  Province  de  Brabant  } 

Perfonne  ne  me  pourra  réfoudre  cette  demande  : 
j'en  fuis  certain,  comme  de  l'exiitence  de  Dieu.  Au 
contraire  ,  il  y  a  ces  moyens  qui  établilTent  leur 
utilité  pour  la  Religion  ôc  l'Etat. 


(  140  ) 

Il  eft  notoire  d'après  notre  Droit  Provincial  , 
qu'aucun  Couvent,  Communauté  &c.  ,  ne  peut  fe 
fonder ,  ou  établir  dans  le  Brabant ,  fans  Lettres  d'Oc- 
trpi  du  Prince. 

Et  l'on  ne  peut  pas  fupporer ,  fans  faire  ofFenfe 
CA\  injure  aux  PrédécefTeurs  du  Prince ,  qu'il  n'ait 
pas  confié  de  l'utilité  &  à  la  'Religion  &  à  l'Etat 
de  ceux  des  Couvens  fupprimés ,  lorfqu'ils  ont  été 
fondés  &  érigés. 

Conréqueir.mcnt  on  doit  admettre  &  tenir,  que 
cette  utilité  cominue,  du  moins  ju'qu'au  tems  que 
le  contraire  n'eft  pas  conftaté. 

Le  contraire  n'a  pas  été  conftaté  à  l'époque  de 
la  luppredion  ;  elle  ti'a  pas  de  ternies  habiles  à  pou- 
voir fuppofer  une  démonftration  ou  une  preuve  d'in- 
utilité. 

Cette  prétendue  inutilité  eft  un  fait,  un  fait  qui 
touchoit  direftement  les  Couvens  fupprimés  ôc  in- 
direftement  les"  Etats  de  cette  Province. 

Il  concernoit  direftement  les  Couvens  fupprimés , 
puifque  leur  exiftence  en  dépendoit  ;  il  concernoit 
indireftement  les  Etats,  parce  que  chaque  Couvent 
fupprimé  ,  &  même  chaque  individu  de  chaque 
Couvent  formoit  un  être  ou  un  individu  des  Etats, 
comm.e  tout  auire  ,  depuis  le  premier  jufqu'au  der- 
nier ,  depuis  le  plus  riche  jufqu'au  plus  pauvre  ;  con- 
fêquemment  chaque  individu  des  Couvens  fuppri- 
més formoit ,  &  étoit  un  fujet  de  la  Province  de 
Brabant. 

Petfonnene  me  peut  ccntefler  cette  vérité.  Confé- 
quem.ment  ne  peut  on  me  contefter  pareillement  qu'ils 
étoient  compris  dans  la  difpofition  du  premier  Ar- 
ticle de  la  Joyeufe  Entrée  de  Sa  Majeflé. 

Je  fuis  informé  que  quelques  mal-intentionnés, 
&  anti-Moines,  pour  éluder  cet  Article,  fe  bornè- 
rent uniquement  aux  Couvens  qui  exiftoient  à  la 


(  I40 
conceffion  primitive  dudit  Article  :  mais  Targument 
éloche  à  tous  égards. 

Il  eft  cerrain  ,  que  ,  depuis  la  concefTion  primi- 
tive de  cet  Article  ,  plusieurs  Couvens  font  érigés 
dans  cette  Province;  mais  11  n'eft  pas  moins  certain, 
que  tous  ceux  ,  fondés  &  érigés  depuis  ,  ont  été 
compris  rucceffivejnent  dans  l'Article  de  chaque  ref- 
peélive  Joyeuji  Entrée. 

Le  Prince ,  en  ocftroyant  leur  fondation  &  érec- 
tion ,  ne  leur  a  pas  fans  doute  oftroyé  ou  donné 
une  exiftence  précaire  ou  momentanée  ;  mais  au 
contraire  une  exiftence  folide ,  durable  ,  £>c  pareille 
à  celle  des  Couvens  déjà  exiftans. 

D'ailleurs  en  leur  accordant  les  différentes  per- 
millions  ou  oftrois  pour  acquérir  des  biens  in.meu- 
bles ,  on  leur  a  pareillement  accordé  une  exigence 
pareille. 

Feue  Marie-Thérefe  ,  l'Impératrice  Reine  ,  notre 
Duchcfle  de  Brabant,  dont  la  mémoire  fera  en  bé- 
nédiclion  jufqu'à  la  confommation  des  (iecles  ,  par 
fon  Edit  concernant  l'acquilîtion  des  biens  immeu- 
bles par  les  Gens  de  main-morte,  n'a  fait  aucune 
diftiniftion  entre  aucuns  Couvens. 

Mais  elle  y  a  compris  généralement  tous  ceux 
qui  exiftoient  :  elle  s'explique  dans  ces  termes  :  »  Nous 
connoiiTons  toute  la  faveur  que  méritent  des  Eta- 
bliffemens,  qui  n'ont  pour  objet  que  le  fervice  de 
Dieu  ,  l'inftru^^ion  des  Fidèles  ,  &.  le  foulagernent 
des  Pauvres,  &î  nous  employons  toujours  volontiers 
nos  foins  ,  pour  la  confervation  des  pofTeffions  lé- 
gitimes de  ceux  qui  ont  été  formés  par  les  motifs 
de  l'utilité  publique  ,  &  conformément  aux  Loix  &c.« 
Vol.  8  des  F  lac.  de  Brab.  fol.    il. 

O  tempora  !  ô  mores  !  Cette  vertueufe  PrinceiTe 
reconnoît  l'utilité  ou  la  faveur  que  méritent  des 
Etabliffemens  qui  n'ont  pour  objet  que  le  lervice  de 


(  14^-  ) 
Dieu,  rinftriK^Ion  des  Fidèles ,  &  le  foulagement 
des  Pauvres  : 

Et  des  mal  -  intentionnés  ofent  prétexter  que  les 
Couvens  fondés  &:  érigés  depuis  la  conceffion  pri- 
mitive du  1er.  Art.  des  Joyeufes  Entrées ,  n'y  font  pas 
compris ,  quoique  leur  EtabliflTement  tende  à  l'objet 
que  feue  Sa  Majefié  l'Impératrice  &  Reine  recon- 
noifToit  mériter  fa  faveur? 

Si  la  foluion  propofée  au  fufdit  prétexte ,  oppofé 
au  fufdit  I  er.  Art. ,  ne  fuiTifoit  pas ,  on  poiirroit  encore 
y  ajouter  que  l'Article  ii  ed  dans  les  mêmes  termes 
des  Joyeujes  Entrées  précédentes  ,  6>c  que  fi  le  Duc 
de  Brabant,  fous  cette  énonciation ,  n'a  pas  voulu 
comprendre  généralement  tous  les  Couvens,  &  les 
Individus  d'iceux  ,  iî  eut  dû  s'expliquer  plus  clai- 
rement ,  &  qu'au  défaut  de  cette  explication  plus 
claire  ,  l'Article  doit  être  entendu  contre  lui  :  ^rg. 
39,  J^  de  Paciis. 

La  fuppreffion  de  ces  Couvens  ayant  eu  lieu  ,  il 
n'eft  plus  de  termes  habiles  à  conftater  cette  pré- 
tendue inutilité  :  cette  funpreflion  a  effeftué  l'anéan- 
tiffement  àes,  Corps  que  ces  Couvens  ont  formés  ; 
6c  cet  anéantiflement  doit  être  affimiîé  à  la  mort 
naturelle  d'une  perfonne  qui  ne  laifTe  aucun  héritier, 
ou  repréfentant. 

Et  quand  même  cette  preuve  pourroit  encore  fe 
faire,  il  ne  léroir  pas  moins  vrai  que  la  fupprefîion 
a  été  faite  directement  contre  le  fufdit  Art.  1  de 
ladite  Joycufe  Entrée. 

^u'on  ne  m'oppofe  pas  que  la  fuppreffion  a  été  faite 
en  vertu  d'un  Placard  revêtu  du  vifa^àu  Confeil  de 
Brabant.  J'ai  à  y  répondre  que  la  fuppreffion  ,  à 
l'effet  de  la  deftruêlion  ou  de  l'anéantiffement  d'un 
Corps  ,  relativement  à  chaque  Couvent  fupprimé  , 
doit  être  envifagée  tant  à  l'égard  defdits  Couvens 
qu'à  l'égard  des  Etats,  comme  la  mort  d'un  Citoyen. 


C  143  ) 

Or  il  eft  notoire  que  ni  le  Confeil  de  Brabant  ni 
un  Juge  quelconque  ne  peut  condamner  à  mort  ni 
opérer  l'anéantiiTement  de  quelque  Corps  ou  Indi- 
vidu ,  parte  inaudita, 

Conléquemment ,  avant  de  pafTer  à  h  publication 
de  cet  Edit ,  il  devoit  indirpenlablemenr  ouir  &  lefdlts 
Couvens  &C  même  les  Etats  ,  ce  qu'il  n'a  pis  fait , 
comme  vous  ,  Mefleigneurs  ,  &  le  Peuple  en  êtes 
convaincus  ;  &  comme  d'ailleurs  il  confie  par  la 
teneur  de  rEdit-même. 

En  outre  les  termes  généraux  de  plufiturs  Cou\tn.% 
inutiles  repris  audit  Edit,  donnoient  matière  à  ne  pas 
l'admettre  ;  ces  termes  généraux  font  d'une  plus 
dangereule  conféquence  ,  que  fi  l'on  propofoit  uij 
Edit  par  lequel  on  voudroit  bannir  du  Brabant  tous 
les  Sujets  qu'on  prétendroit  envilager  comme  inu- 
tiles :  parce  que  dans  le  cas  fuppolé  ces  prérendus 
Sujets  inuriles  retiendroient  la  vie  6i  la  liberté  de 
Ce  retirer  où  bon  leur  feinblcroit  ;  &  que  de  plus 
on  ne  les  banniroir  pas  fans  les  entendre  ,  &:  fans 
lenr  laifTer  la  faculté  de  prouver ,  qu'ils  font  utiles  à 
quelque  égard  ;  au  moyen  de  quoi  l'Edit  feroit  fans 
effet   vis-à-vis  d'eux. 

Mais  rien  de  tout  cela  n'a  eu  lieu  dans  le  fufdit 
Edit  de  fuppreffion.  Et  qui  plu^  eft ,  j'eftime  que 
le  point  le  plus  eiTentiellement  requis  eft  ut  Jît  jujia  ; 
&  je  défie  qui  que  ce  foit  de  prouver,  que  la  Juf- 
tice  de  cet  Ed.t  fubfifte  :  d'où  il  reluire,  fuivant 
le  fentiment  commun  des  Doé^eurs  ,  qu'il  ne  peut 
avoir  force  de  Loi. 

Cependant  il  a  paffé  au  Confeil  de  Brabant  :  mais 
par  quels  moyens  &  de  quelle  façon  ,  je  l'ignore  ; 
ce  que  je  fais,  c'eft  qu'il  a  eu  toute  la  peine  d'a- 
voir la  pluralité  des  voix  :  mais  malgré  cette  plu- 
ralité, vous  êtes  trop  éclairés,  &  trop  inftruits  des 
circonflanccs ,  Meffeigneurs ,  pour    ne   pas   feniir , 


i  (  144  ) 

tnême  être  convaincus ,  que  cet  Edit  ne  peut  obli- 
ger, ni  avoir  force  de  loi. 

L'Edit  cop.cernant  la  fuppreffion  des  Confrairies, 
du  8  Avril  1786  ,  eft  à  peu-près  de  la  même  trempe. 
Il  déclare ,  Art.  i  ,  toutes  les  Confrairies  érigées 
dans  les  Eglifes  &  Chapelles  quelconques ,  éteintes 
6c  fupprimées, 

Quc'ind  on  obferve  que  ces  Confrairies  ont  été 
érigées  &  fondées  fuivant  les  maximes  &  la  jurif- 
prudence  de  notre  Province  ,  par  Odroi  ,  même 
avec  préalable  avis  du  Fiic ,  on  eft  convaincu  qu'el- 
les avoient  une  exifience  légale ,  qui  ne  leur  pou- 
voit  être  ôtée  fans  leur  contentement,  ou  du  moins 
fans  préalablement  les  avoir  ouïs. 

Une  telle  difpofition  approche  du  defpotlfme. 
C'efî  à-peu-près  comme  fi  l'on  portoit  une  loi  ,  que 
tout  homme  non-marié ,  6c  en  âge  de  porter  les 
armes,  eft  foldat ,  &  doit  fervir  le  Prince;  ou  que 
toute  homme  doit  embrafier  telle  profeiîion  qu'on 
lui  preicrira. 

Toute  la  différence  qu'il  y  a  dans  le  cas  du 
fufdit  Edit  &  le  cas  fuppofé,  c'eft,  que  dans  le 
premier  on  a  fait  la  fimagrée  de  lui  prêter  le  Fifo. 
du  Confeil  ce  Brabant.  Sur  quoi  je  me  réfère  à  ce 
que  j'ai  obfervé  ci-deifus  concernant  le  Fifo,  de  TE- 
dit  portant  la  lupprefiîon  des  Couvens. 

Je  ferai  une  réflexion  ultérieure  relativement  à 
l'Edit  de  la  fuppreffion  des  Confrairies ,  qui  quoi- 
qu'elle ne  fe  trouve  pas  dans  fon  contenu  ,  n'en  eft  pas 
moins  fenfible  par  les  circonftances  qu'on  voit  arriver. 

Il  eft  connu  que  généralement  à  ces  Confrairies 
font  attachées  àcs  Indulgences ,  plufieurs  même  ac- 
cordées par  le  Pape  de  Rome  ;  de  forte  qu'en  fup- 
primant  les  Confrairies,  on  anéantit  aufîî  ces  In- 
dulgences :  au  moyen  de  quoi  s'efiedue  le  grand 
but ,  l'abUraélion  du  Souverain  Pontife. 

Quoiqu'il 


(  M5  )        ^        ^ 

Quoiqu'il  ne  fe  trouvât  aucun  Séminaire  dans  no- 
tre Province  de  Brabant ,  l'Edit  concernant  rétablii- 
fement  du  Séminaire-Général  dans  iXJnlverfité  de 
Louvain,  porfe  infraftion  aux  Privilèges  Brabançons. 
En  premier  lieu,  l'Art.  I  porte,  quant  au  Clergé 
Séculier ,  qu'ils  feront  réunis ,  à  dater  du  mois  de 
Novembre  ij'66 ,  dans  ledit  Séminaire-Général  à 
Louvain  ,  pour  y  être  élevés  uniformément  ,  dans 
une  parfaite  uniformité  d'inftru6ïion  &  de  morale, 
&  faire  le  cours  de  Théologie  dans  les  Ecoles  publi- 
ques •  de  l'Univerfité  :  qu'on  ne  pourra  dorénavant 
admettre  aux  Ordres  majeurs  aucun  de  nos  fujets , 
à  moins  qu'il  n'ait  achevé  fon  cours  de  cinq  an- 
nées dans  le  Séminaire-Général  :  en  conféquence  les 
Séminaires  Epifcopaux  feront  fuppriméj  &  convertis 
en  Presbytères  ,  dans  lefquels  les  Elevés  Séculiers 
du  Séminaire-Général,  après  avoir  achevé  leurdit 
cours ,  fe  retireront ,  pour  y  pratiquer ,  fous  le  veux 
4e  leur  Evêque  ,  les  différens  exercices  &  fondions 
Eccléfiaftiques  convenables  ,  pour  les  rendre  plus 
propres  à  la  cure  d'ames. 

Je  n'ai  pas  fait  mention  du  texte  concernant  le 
Séminaire  filial  à  Luxembourg  ,  parce  que  les  Bra- 
bançons ne  font  pas  dans  le  cas  d'y  aller. 

Je  commence  à  demander ,  de  quel  droit  on  fup- 
prime  les  Séminaires  Epifcopaux  ,  ou  celui  d'Anvers 
qui  eft  l'unique  en  Brabant?  Ce  Séminaire  a  été 
érigé  légalement.  Il  a  donc  droit  d'exifter  ;  &  les 
Diocéfams  d'Anvers  ont  le  droit  légalement  acquis 
d'y  étudier  la  Théologie, 

De  quel  droit  peut-on  obliger  ceux  qui  font  ap- 
pelles à  l'Etat  de  Prêtrife ,  (  Séculiers  s'entend  )  de 
faire  un  cours  de  cinq  ans  de  Théologie  dans  l'U- 
niverfité de  Louvain,  &  d'y  demeurer  cinq  ans  dans 
le  Séminaire- Général  ,  &  puis  de  fe  retirer  dans 
les  anciens  Séminaires  Epifcopaux  ?  Le  Concile  de 


(  146) 
Trente  reçu  &  publié   en    Brabant  en   due  formel 
ne  prelcrit  rien  de  tout  c^rla. 

C'eft  aux  Evéques  à  veiiler  à  la  conduire  de  ceux 
qui  afpirent  &  fe  prélentent  aux  Ordres.  C'tft  à  eux 
&  à  leurs  Examinateurs  de  juger  s'ils  en  font  capables  , 
mais  nullement  au  Souverain   du  à  fes  employés. 

Ce  font  les  Evêques  &C  leurs  Exaniinattrurs  qui 
font  rerponfables ,  &  leur  conlcier'ce  qui  eft  char- 
gées des  admifiîons  aux  Ordres.  C\-ft  à  eux  de  ju- 
ger,  quels  cours  de  Théologie  le-.  Candidats  doivent 
faire  :  c'eft  au  St.  Sieçe  ou  aux  Evêques  (  (elon  les 
difterens  cas)  de  dilpen'er  îur  1  âge  des  Candid;its 
pour  Tadmiflion  aux  Ordres  refpedifs  ;  peribnne  ne 
peut  le  contefter.  Donc  ,  il  leur  appattient  auffi  de 
droit,  d'admettre  à  la  Piétrife,  félon  la  capacité  du 
Candidat,  eût-il  (eu  emenî  fait  un  cours  de  Théo- 
logie de  deux  ,  trois ,  ou  quatre  ans. 

De  quel  droit  veut- on,  peut-on  obliger  une  Per- 
fonne  qui  alpire  uniquement  à  la  Hrécrpe,  de  fe  re- 
tirer dans  les  anciens  Séminaires  Epi  copaux  pour  y 
pratiquer  les  différens  exercices  &  fondions  Ecclé- 
fiaftiques ,  afin  de  la  rendre  plus  prop  e  à  la  cure 
d'ames  ?  II  n'en  eft  pas  ;  &  l'exécution  en  feroit 
même  contraire  à  la  liberté  naturelle  ,  qui  {.Aiffe  à 
un  chacun  la  faculté  d'embralTer  tel  état  auquel  il 
fe  fent  appelle. 

Cette  Ordonnance  équipolle  à  celle  par  où  l'on 
voudroit  obliger  quelqu'un  d'époufer  la  Perfonne 
déterminée  ^  que  la  Loi  ou  l'Ordonnance  nomme- 
roit  ou  prefcriroit. 

Tout  le  monde  fent  non-feuîement  le  ridicule, 
mais  l'injuftice  d'une  telle  Loi  ;  on  doit  donc  aufti 
fentir  rinjuftice  du  texte   que  j'analyfc. 

Quant  au  Clergé  Régulier  ,  il  eft  à  remarquer 
que,  fuiivant  la  dirpo^tion  du  texte  ,  ceux  qui  (e 
deftineront   ci -après  à  un  Ordre  Religieux,  feront 


C  147  ) 

îéunîs  dans  ce  Séminaire-Général  ;  &  qu*on  n'en 
pourra  dorénavant  admettre  aux  Ordres  majeurs  au- 
cun ,  à  moins  qu'il  n'ait  achevé  Ton  cours  de  ciiiq 
années  dans  ledit  Séminaire  ;  &  que  les  Elevés  dtt 
Clergé  Régulier ,  perfiftant  dans  leur  vocation  ,  re- 
tourneront dans  l'Ordre  où  ils  avoient  été  admis. 
Il  faut  auffi ,  à  Fégard  du  Clergé  Régulier ,  com- 
biner la  difpofîtion  du  7e.  Art. ,  fuivant  laquelle  tous 
lea  Ecoliers  dudit  Séminaire  feront  uniformément 
\'êtus  en  foutane  noire ,  manteau  court ,  dont  le 
coUet  fera  de  couleur  violette,  ainfi  que  le  ruban 
ou  bordure  de  devant  du  manteau.  En  outre ,  fui- 
vant la  difpofition  du  fufdit  ler.  Art. ,  l'enfeignement 
de  la  Théologie  ,  ainfî  que  de  la  Philofophie ,  eft 
fupprimé  du  i  Novembre  1786  dans  tous  les  Cou- 
vens ,  Monafteres ,  Congrégations  ,  &  autres  endroits 
ou  fondations  ,  dans  lefquels  cet  enfeignement  fe 
pratiquoit. 

Il  eft  palpable  ,  que  ces  difpofîtions  tendent  di- 
reftement  à  la  deflruélion  du  Clergé  Régulier;  cha-" 
cun  devra  habiter  cinq  an5  le  Séminaire  avant  d'ê- 
tre admis  aux  Ordres  majeurs  ,  &:  il  devra  préala- 
blement avoir  achevé  (on  cours  de  Philofophie  ;  il 
ne  pourra  aufli  être  admis  dans  l'Ordre  ou  Maifon 
Religieufe  pour  commencer  fon  noviciat ,  qu'après 
avoir  achevé  le  cours  du  Séminaire. 

Je  demande  à  préfent  ,  quel  Supérieur  d'Ordre 
recevra  un  Afpirant  pour  commencer  fon  noviciat 
après  avoir  achevé  les  cours  de  Philofophie  &c  du 
Séminaire?  L'Afpirant  aura  à -peu -près  trente  ans, 
quand  il  commencera  fon  noviciat  ;  il  aura  l'efprit 
formé  ,  &:  ne  fe  prêtera  plus  à  recevoir  les  împref- 
iions  que  l'Etat  Régulier  exige. 

Quel  eft  l'Afpirant  qui ,  après  avoir  pafle  tous  ces 
degrés  d'études .,  retournera  encore  à  quelque  Ordrer 
Régulier,  fur-tout  s'il  a  quelque  bonne  perlpeftive  à 


(  14^  ) 
âiteadie  par  la    ft-périorité  de   fon  efprit  ou  de  fe$ 
talens  ?  C'eft  donc  à  dire  qu'on  deftine  uniquement 
le  rebut  pour  ie  Clerçé  Régulier. 

De  p'us  ,  quelle  afTurance  donneront  les  non- 
JTicyennés  aux  Ordinaires  ou  Evêques  pour  être 
admis  aux  Ordres  majeurs.  Bref,  il  eft  certain  que 
ces  difpofitions  tendent  à  la  deftruftion  du  Clergé 
Régulier ,  dont  la  fuite  infaillible  fera  uniquement 
a.vantageufe  au  Fifc,  qui  emportera  tous  leurs  fonds, 
comme  biens  vacaris. 

Il  faut  en  outre  remarquer  encore,  que  toutes  les 
Waifons  &  Couvens  du  Clergé  Régulier  font  fondés 
légalement ,  ou  ont  été  admis  avec  le  confentement 
du  peuple  ,  &  que  fuivant  ledit  premier  Art.  de  la 
J oy tu fc  Entrée^  le  Duc  s'eft  folemnellement  engagé, 
qu'il  ne  leur  ftra  ,  laï^tra  ni  foufrira  être  fait  en 
^açon  quelconque  aucune  force  ou  volonté. 

Ces  difpofitions  emportent  manifefîement  une  force 
ouverte.  On  fupprime  non-feulement  leur  enfeigne- 
ment  de  Philofophie  &  Théologie ,  mais  on  les  force 
direftement  contre  leur  Inftitution  &  les  Canons  du 
Concile  de  Trente,  ici  reçu  &  publié,  de  fe  retirer 
au  fufdit  Séminaire.  La  fuite  qu'elles  ont  entraînée, 
cft  une  force  encore  plus  ouverte. 

On  avoit  envoyé  au  Vifiteur  Général  de  l'Ordre 
des  Capucins  un  Ecrit  intitulé  I'EmpeREUR  et 
Roi,  daté  de  Bruxelles  le  19  Janvier  1787  ,  pa- 
raphé KuLB.  vt.  figné  par  Ord.  de  Sa  MajeAé  F.  H. 
DEREUL,par  lequel  on  lui  mandoit ,  que»  comme 
»  il  convenoit  que  les  jeunes  Théologiens  de  fon 
»  Ordre  qui  fréquentent  les  leçons  de  Théologie  de 
»  rUnîverfité  de  Louvain  ,  ou  celles  établies  au  Sé- 
»  minaire-Filial  de  Luxembourg  ,  foient  difpenfés  de 
w  tous  les  points  de  la  règle  qui  pourroit  les  obliger 
»  au  chant ,  &  à  U  fréquentation  du  chœur  ,  loit 
»  pendant  la  nuit  ou  pendant  les  heures  de  leçons 


I 


(149) 

^  &  d'études,  nous  vous  (AiCons  la  préfentc  por*f 
*  vous  ordonner  de  les  difpenrer  pour  les  rems  de 
»»  leurs  études  ,  &  de  leur  prefcrire  telles  autres 
»  pratiques  de  piété,  compatibles  avec  votre  Règle, 
»  fans  nuire  à  l'application  &  à  la  fanté  des  Ecoliers 
»>  en  Théologie ,  d'autant  qu'ils  doivent  être  confi- 
»  dérés  6c  traités, (ur  le  même  pied  que  les  Elevés 
>*  du  Séminaire-Général  établi  à  Louvain  ,  &  du 
»  Séminaire- Filial  &c.  «.  Ce  Père  Vifireur  a  donc 
propofé  par  écrit  le  j^  Février  au  Gouvernement-^ 
Général  les  motifs  ou^il  avoit  pour  ne  pouvoir  ac- 
quiefcer  à  ce  qu'on  lui  prefcrivoit.  Le  3  Mars  enfuite, 
ce  même  Père  Vif.tcur  reçut  un  autre  écrit,  daté 
du  zj  Février  1787  ,  intitulé,  paraphé  &  figné 
comme  le  précédent  ,  par  lequel  on  lui  mande, 
y>  qu'ayant  réfolu  de  f^ire  entrer  inceiïamment  dans 
>*  le  Séminaire- Général  à  Louvain  ,  fk  refpeclive- 
»  nient  dans  le  Séminaire-Filial  à  Luxembourg,  tous 
»  les  Réguliers  étudiant  en  Théologie,  &:  ayant  déjà 
»  donné  nos  ordres  en  conféquence  aux  Reftcurs 
»  c'r  ces  Sém.inaires ,  nous  vous  faifons  la  préfente 
yy  pour  vous  faire  connoître  nos  intentions  à  cefu- 
»  jet,  &  pour  vous  ordonner  de  vous  y  conformer 
»  fans  délai.   « 

Je  vous  prie,  Mefieigneurs,  de  faire  attention  que 
c'eft  le  î  Mars  que  ce  Père  Vifiteur  a  reçu  le  fuldit 
fécond  écrit. 

Il  eft  facile  à  fentir  que  ce  Vifiteur  ,  ainfi  que  les 
autres  Pères  dévoient  fe  trouver  dans  une  extrême 
perplexité ,  même  hors  d'état  de  fatisfaire  au  con- 
tenu dudit  écrit,  eût- il  même  été  une  Ordonnance 
portée  fuivant  nos  Loix  fondamentales. 

Cependant  nos  Séréniffimes  Lieutenans- Gouver- 
neurs &c  Capitaines-Généraux  des  Pays-Bas  ont, 
le  même  jour  3  Mars,  adrelfé  un  écrit  aux  Con- 
feillers-FHcaux  de  Brabaiit ,  par  lequel  ils  les  char- 


(  MO  ) 

gent  de  mander  devant  eux  le  Vifiteur  Général  des 
Capucins  avec  fon  Vic€- Vifiteur  ,  pour  leur  faire 
connoître  que  ,  fur  le  rapport  qui  leur  a  été  fait  de 
ia  réponfe  du  17  Février  dernier  à  la  Dépêche, 
qui  lui  a  été  adreffée  le  19e.  jour ,  concernant  les 
Pveligieux  de  fon  Ordre  qui  n'ont  pas  achevé  leurs 
cours  de  Théologie,  ils  ont  trouvé  bon,  rie  dejTi- 
tiur  ledit  Vifiteur -G  ènlr  (il  de  fa  place  ^  &  de  le  dé" 
clarer  à  jamais  inhabile  à  toute  f'upériorité  dans  fon 
Ordre ,  lui  ordonnant  de  fe  retirer  d'abord  dans  un 
Couvent  à  la  campagne ,  que  lui  aflîgnera  le  Vice- 
Vifireur,  &  dont  il  vous  informera,  pour  y  vivre 
en  Jim  pie  Religieux. 

lU  chargent  en  mémetems  lej'Confeillers-Fifcaux 
de  Brabant  d'intimer  audit  Vice- Vifiteur ,  qu'il  faffe 
ceifer  fur  le  champ  tout  enfeignement  dans  les  Cou- 
vens  de  Ton  Ordre ,  6c  qu'il  ait  à  envoyer  dans 
l'efpace  de  huit  joers  ,  au  plus  tard,  au  Séminaire- 
Général  de  Louvain  ,  ou  au  Séminaire-Filial  de 
Luxembourg  refpedivement  ,  tous  les  Religieux  , 
qui  n'ont  pas  encore  fini  leurs  Etudes  de  Théolo- 
gie ,  fous  peine  de  défobéifiTance ,  &  d'être  traité 
comme  réfraftaire  aux  Ordres  de  Sa  Majefté. 

Ce  Décret  eft  paraphé  par  le  même  Paraphant 
dont  les  fufdits  deux  écrits  font  paraphés  ,  de  forte 
que  l'Auteur  de  ce  Décret  eft  facile  à  connaître. 
Mais  qu'importe  qui  en  eft  l'Auteur?  Il  eft  évident 
que  ce  Décret  eft  un  attentat  manifefte  aux  Con(- 
titutions  fondamentales  de  cette  Province, 

II  eft  à  remarquer  ,  que  cet  écrit  étant  adrefi^é  aux 
Confeillers  Fifcaux  de  Brabant  ,  fon  exécution  con- 
cernoit  des  habitans  de  Brabant  ;  6c  la  fuite  en  conf- 
tatera  davantage  la  vérité. 

Le  i2  dudit  mois  de  Mars,  ledit  Perc  Vifiteur 
reçut  ordre  des  Confeiilers-Fifcaux  de  Brabant  de 
comparoître  le  lendemain    13   dite,    chez  les  Con- 


(  I50 

feil'ers-Fifcaux  c!e  Brabant ,  où  il  fe  rendit  accom- 
pagné du  Fere  Agent  de  l'Ordre  ;  étant  donc  com- 
paru devant  Icldits  Conleillers-Fircaux  ,  on  lui  pré- 
îut  le  ùii'dit  Décret  :  li  lefture  étant  faite  ,  lefdits 
Ct^nifciliers-Fiicaux  drefTerent  un  Procès- verbal  ;  Se 
à  leur  demande  faire  audit  Père  Vifîteur ,  s*il  l'accep- 
toit  ,  celui-ci  répondit  ,  qu'il  le  foumettoit  aux  or- 
dres de  fa  retraite. 

Ce  Père   Vifiteur  s'efl:    retiré  dans  leur    Couvent 
Ae  Tervuren;  mais  quoiqu'il    n'^ir   pas  accepté  ,  ni  i 

foufcrit  à  la  peine  infamante  de  deftitution  ,  le  Gou- 
vernement-Général ne  l'a  pas  moins  tenu  comme 
dégradé,  &  inhabile, 

Puifquele  n  dite  Mar«,  le  Père  Agent  de  l'Ordre, 
&  le  Père  Godefroid  d'AIofl:  étant  demandés  de  fe 
rendre  chez  le  Conteiller  Procureur-Général  de  Bra- 
bant ,  &  s'y  étant  rendus ,  on  leur  prélut  une  Let- 
tre de  fon  Excellence  le  Miniftre,  adreflee  aux  Co-n- 
feiUers-Fifcaux  de  Brabant,  dat^e  du  19  dite ,  con- 
çue dans  ces  ternies  :  *►  Sur  le  compte  rendu  à  Leurs 
»  AltefTes  Royales  de  votre  rapport  du  ij  de  ce 
»  mois ,  je  vous  fait  la  prétente  pour  vous  dire  que 
»  le  Vice-Vifireur  clés  Capucins  étant  malade,  & 
w  réfident  à  Tournai  ,  vous  ayez  à  intimer  d'abord 
»  au  fécond  Vice- Vifiteur,  l'ordre  conrenu  dans  la 
»  Dépêche  qui  vous  a  été  adreflee  en  date  du  j  de 
»  ce  mois  ;  en  lui  enjoignant  d'en  exécuter  d'abord 
»  la  teneur,  &  de  vous  en  faire  confier  endéans 
»  24  heures ,  fous  peine  de  défobéifTance  6:  d'écre 
♦>  traité  comme  réhvdAire  aux  ordres  de  Sa  Ma- 
»  jefté  «.  Ce  refpeftdble  Père  Godefroid  d'Aloft  , 
fans  s'arrêter  à  ce  que  Sa  Majefté  n'avoit  pas  le 
pouvoir  en  Brabant  de  donner  des  ordres ,  du  mo- 
ment qu'ils  contrevenoient  à  fes  Joyeufes  Entrées ,  X 
Se  que  perfonne  ne  devoir  lui  obéir  en  ce  cas  (  Art. 
59  d'icelles }  ;  le  2t  dite    Mars,  il  rem-t  par  écrit 

K4 


(  150 

aux  Confeillefs-Fircaux  de  Brabant  les  raifons  pour 
lerquelles  (a  confcience  ne  lui  permettoit  pas  de 
remplir  ce  qu'on  avoit  voulu  enjoindre  au  Père 
Vifiteur-Général. 

Et  le  jo  dito  Mars  on  annonça  audit  Père  Go- 
defroid  d'Aloft,  qu'il  eût  à  comparoitre  à  midi  de- 
vant le  Confeiller- Procureur-Général ,  ou  étant  com- 
paru ,  les  Confeillers-Fifcaux  lui  prélurent  le  Décret 
porté  à  fa  charge  par  nos  Séréniffimes  Lieutenans- 
Gouverneurs  &:  Capitaines-Généraux  des  Pays-Bas, 
leur  adreffé  portant,  »  Chers  &  bien- Ames.  Sur 
»  le  compte  qui  nous  a  été  rendu  de  l'écrit  témé- 
^>  faire  &c  fanatique,  que  le  Fere  Godefroid  d'Aloft, 
M  fécond  Confulteur  des  Capucins,  vous  a  remis, 
»»  le  11  de  ce  mois,  pour  juftifier  fon  refus  d'obéir 
»  à  l'ordre  que  vous  lui  avez  intimé  de  la  part  du 
»  Gouvernement  d'envoyer  au  Séminaire-Général 
^>  de  Louvain  les  Clercs  Capucins  qui  n'ont  pas 
w  encore  achevé  l'étude  de  la  Théologie  >  nous 
M  vous  chargeons  de  iîgnifîer  à  la  réception  de  cette 
M  audit  Père  Godefroid  d'Aloft  l'ordre  de  fe  retirer 
»  dans  vingt-quatre  heures  de  cette  Ville,  &  dsns 
>*  trois  jours  de  terres  de  la  domination  de  Sa  Ma- 
i>  jefté  ,  avec  défenfe  d'y  rentrer,  fous  peins  d'être 
»  appréhendé  &  traité  comme  vngabond  «.  (*) 

Mefteigneurs  ,  le  récit  que  je  viens  de  faire  eft  vrai  ; 
j'ai  vu  toutes  les  copies  des  a«Eles;  &  fi  vous  voulez 
vous  en  convaincre  davantage  ,  le  Père  Antoine  de 
Louvain  ,  Agent  de  l'Ordre  ,  vous  le  vérifiera. 

De  plus,  j'ai  examiné  toute  la  marche  de  cette  hif- 
toire ,  &  je  la  trouve  dépourvue  &  deftituée  des  forma- 
lités prefcrites  par  nos  Conftitufions  fondamentales. 

De  forte  que  c'eft  à  jufte  titre ,  que  j'^ii  dit  ci- 
defîus    que   le   fufdit  Edit    entraînoit  une  force  ou 

(*)  Voyez  tom.  2.  Part.  Eccléfiaft.  p.  ao8. 


(  Î53  ) 
volonté;  car  ledit  rere  Godefroid  d'AIofl:,  confor- 
mément à  la  difpofuion  du  42e.  Art.  de  la  Joyeufc 
Entrée ,  a  pu  en  particulier  dire  &  déclarer  fou 
grief,  fans  pour  ce  encourir  aucune  indignation  ou 
difgrace  de  Sa  Majefté ,  ou  de  quelque  autre;  ni 
pour  ce  être  mal  vu  de  Sa  iVîajeflé  en  aucune  fa- 
çon :  fon  Alteflc  Royale  Albert  Duc  de  Saxe-Tef- 
chen  a  même  promis ,  au  nom  de  Sa  Majefté  ,  de 
s^en  prendre  au  corps  &  bien  de  celui  ,  ou  ceux  qui 
ce  feront, 

C'eft  cependant  Sadite  Altefîe  Royale ,  conjointe- 
ment avec  fon  Augufte  Epoufe  Madame  Royale 
l'Archiducheflc  Marie-Chriftine,  qui  ont  figné  le  fuf- 
dit  Décret  à  charge  dudit  Père  Godefroid  d'Aloft. 

Je  tremble,  &:  le  fang  fe  glace  dans  mes  veines, 
quand  je  penfe  à  quoi  nous  fommes  expofés  :  per- 
fonne  n'eft  plus  fur  de  fon  état  civil.  L'expérience 
nous  en  a  donné  récemment  un  exemple  effrayant 
dans  la  perfonne  du  Sr.  de  Honot,  habitant  de 
cette  Ville  ,  dont  je  parlerai  ci-après. 

L'Article  5  du  mêir.e  Edit  concernant  l'établifiTe- 
ment  du  Séminaire  Général  fournit  encore  matière 
pour  en  conftater  l'injufîice.  Mais  le  tems  trop  court 
m'oblige  de  paifer  à  quelques  obfervations  fur  le 
Diplômi  de  C Empereur  portant  éiablijfement  £unt 
nouvelle  forme  de  Gouvcrm-ment  général  des  Pays- 
Bas  f  du    I  Janvier   1787. 

Il  femble  au  premier  coup-d'œil,  du  titre  de  ce 
Diplôme  ,  qu'il  ne  concerne  aucunement  la  Pro- 
vince de  Brabant ,  ni  fa  Conftitution  fondamentale  r 
néanmoins  en  l'examinant ,  on  eft  convaincu  qu'il 
la  bleffe  eifentiellement. 

Le  fixieme  Art.  porte  que  ,  »  Pour  faciliter  la  di- 
»>  redion  des  affaires  du  Gouvernement  généra!|,  & 
»  lui  procurer  en  tout  tems  des  notions  affurées 
»  tur  tout  ce  qui  peut  intéreller  l'ordre  public ,  ôc 


(  154  ) 
>v  le  bien  des  Peuples  coiifiés  à  (a  foins,  nous 
»  avons  réloiu  de  divifer  nos  Provinces  des  Pays- 
»  B<is  en  neuf  Cercles  ,  &  d'établir  fous  fe<;  Oidres, 
»  dans  chacun  de  ces  Cercles ,  un  In'endant  6c 
»  plufieuîs  Commi flaires ,  lur  le  pied  que  le  Gou- 
»  vernement  fera  connoître  par  une  Ordonnance 
»  à  émaner  de  notre  part ,  félon  laquelle ,  ainfi 
»  que  Ifclon  les  inilruclions ,  &  les  ordres  qu'ils  re- 
M  cevront  du  Gouvernement  ,  ces  Inrendans  & 
»  Commiflaires  fe  régleront  dans  l'exercice  de  leurs 
»  Cha'-ges  «. 

Cetre  Ordonnance  à  émaner  par  ledit  Article , 
eft  donc  émanée  îe  ii  Mars  17^57,  fous  le  titre 
6.''Edit  de  r Empereur  portant  kablijfcmtnt  des  Irittn-^ 
dancis  des  Cercles  aux  Pays-Bas  ;  &:  elle  conftate 
que  l'on  a  furpri»;  la  re'igion  de  notre  Souverain 
Sa  Majefté  l'Empereur  &  Roi. 

Il  ne  peur  .Ignorer  &  encore  moins  difconvenir  , 
qu'il  a  contrafté  avec  le  Peuple  Brabançon  repré- 
fenté  par  les  trois  Etats  ,  au  jour  de  fon  Inaugura- 
tion ,  le  17  Juillet  1781.  L'ade  qui  en  a  été  fait 
&  dépêché,  paraphé,  figné ,  contrefîgné,  &  fceîlé 
du  grand  fcel  de  feue  l'hrpérntrice- Reine  ,  dont 
on  fe  fervoit  encore  alors  en  Brabant ,  &  les  Let- 
tres originales  de  Mandement  irrévocable  &  procu- 
ration fpé.iale  de  Sa  Majeflé  l'Empereur  &  Roi , 
données  &  paflTées  à  Vienne  le  z  Mars  17^1  fur 
cet  Article,  &  le  Duc  de  S-Hxe-Tefchen  exiflant, 
le  confiaient,  ainfi  que  les  copies  imprimées,  ré- 
pandues non -feulement  dans  les  Pays-Bas,  en 
France,  ?:ic,^  mnis  dans  toute  l'Europe. 

Certe  même  Ordonnance,  ou  Edit ,  eft  fi  diamé- 
tralement oppofée  aux  engagemens  que  Sa  Majeflé 
a  pris,  &  a  promis  fous  ferment  de  remplir  &  d'ob- 
ferver  visa  vis  le  Peuple  Biabançon  ,  que  le  Con- 
feil  de  Brabant   n'a  pu    lui  accorder  le   Vifa  ni    ia 


(  M5). 

Sceller  ou  fîgner  :  faute  de  quoi  nul  Edit  en  Brabant 
ne  peut  avoir  le  moindre  efFer ,  ou  force  ,  ou  exé- 
cution :  JrtïcU  46*   ^  de  la  Joyeiife  Entrée. 

Ladite  Ordonnance  eft  auffi  diamétralement  oppo- 
fée  au  ler.  Article  de  la  Joyeujï  Entrée^  puifque  Sa 
Majeflé  ou  Son  Altefle  Royale,  en  vertu  du  Man- 
dement fpécial  &  -procuration  irrévocable,  &  plein- 
pouvoir  ci-defîu5  réclamé  ,  a  convenu  ,  &  s'eft  engagé 
enir'aurres  ,  »  qu'il  ne  leur  fera  ,  laifTera  ,  ni  (buffrira 
»  être  fait ,  en  façon  quelconque,  aucune  force  ou  vo- 
»  lonté;  &  qu'il  ne  les  traitera,  ni  laiffera  traiter  hors 
»  de  Droit  &  de  Sentence  :ains  les  traitera  &fera  traiter 
»  tous  les  Prélats  ,  Maifons-Dieu,  Barons ,  Nobles  5^ 
»  bonnes  Gewh  &  Suiets  de  fes Villes, Franchiles  &Fay<> 
»  de  Brabant,  £c  d'Outremeufe,  en  toute  chofes,  par 
w  Droit  &  Sentence  ,  fuivant  les  Droits  des  Villes  Se 
»  Bancs ,   où   il  appartiendra ,  &c   devra  être  fait.  « 

Il  s'eft  en  outre  obligé  par  le  5  e  Art.  entre  aatres 
que  »  Sadite  Majefté  ,  fon  Gouverneur,  ou  Gou- 
»  vernante  Générale  fera  traiter  toutes  les  affaires 
♦>  dudit  Pays  &  inhabitans  d'icelui ,  concernant  la 
»  juftice,  &  ce  qui  en  dépend,  foit  des  Provifions 
»  ordinaires  de  Juftice  ou  Statuts,  Placards,  Edits , 
»  Ordonnances  ,  Commandemens  ,  ou  autrement , 
>>  par  conieil  &J  avis  d'icelui  &  dudit  Confeil  Bra- 
»  bançon  ,  fans  en  ce  ,  leur  pouvoir  être  fait ,  par 
»  quelqu'un,  aucun  empêchement  ou  trouble,  ni 
>»  qu'ils  feront  touchant  ce  ,  fournis  aux  Ordonnan- 
»  ces  de  quelqu'un  ,  iinon  de  Sadite  Majefté ,  ou 
»  fon  Gouverneur ,  ou  Gouvernante-Générale. 

De  plus ,  dans  l'Article  <^^  ,  Sadite  Alteffe  Royale 
s'eft  obligée  »  &  a  promis  de  bonne  foi  &  juré 
»  perfonnellement  fur  les  faints  Evangiles,  pour  Sa- 
»  dite  Majefté  ,  fes  hoirs  &  fuccefteurs  ,  à  tou?  gé- 
n  néralement  Prélats  ,  Maifons-Dieu  ,  Monafteres , 
»  Barons  ,    Chevaliers  ,   Villes   &  Franchifes  ,   6c 


»  tous  fujets  (îe  Sadite  Majefté ,  f-c  bonnes  Gens 
»  de  Tes  Pays  de  Brabant  &  d'Outremeufc  ,  leurs 
>»  hoirs  (k  fucceiïeurs ,  de  les  tenir  dorefnavant  tous 
**  en  général  (lavoir  ,  les  Privilèges)  fermes  6<C 
»  fiables  a  toujours,  &  de  ne  iamais  y  contrevenir, 
»  ni  foufFrir  qu'y  foit  contrevenu  en  aucune  ma- 
»  niere;  &  s'il  airivoit,  que  Sadire  Majefté ,  Tes 
»  hoirs  &  fuccefleurs  vinffent ,  allaffent,  ou  fiffent 
»  à  rencontre  ,  par  eux  ,  ou  par  quelqu'un  d'autre  ,  en 
»  tout,  ou  en   partie,   en  quelle    manière   que  ce 

»  foit,  nous  en  ce  cas,  conlentons  &  accordons 

w  auxdits  Prélats,  Barons,  Chevaliers,  Villes,  Fran- 
»  chifes ,  &  à  tous  autres  nofdits  Sujets,  qu'ils  ne  ie- 
»  ront  tenus  de  faire  aucun  fervice  à  Sadite  Ma- 
»  jefté.,  Tes  hoirs  ,  ou  fuccelTeurs  ,  ni  d'être  obéil- 
»  fans  en  aucune  chofe  de  fon  befoin  ,  que  Sadite 
»  Majeflé  pourroit  ou  voudroit  requérir  d'eux  , 
>»  julques  à  ce  qu'elle  leur  aura  réparé  ,  redrefTé,  & 
»  entièrement  défifté  &  renoncé  à  l'emprife  ci-del- 
»  fus  mentionnée. 

»  Par-deffus  ce  ("porte  la  fuite  du  fufdit  Art.  59) 
»  Nous ,  au  Nom  de  Sadite  Majefté  ,  voulons ,  dé- 
»  cernons  &  déclarons  que  tous  Cfficlcrs  établis  au 
»  contraire  de  cette  fa  Joyeu(e  Entrée ,  feront  incon" 
»  tinent  defîitués  ,  &  que  pareillement ,  tout  ce  qui 
»  (îici  en  avant  ,  pourroit  être  attente  au  contraire 
>*  de  ce  que  deffus  ;  ne,  Jera^  ni  pourra  à  f  avenir  être 
»  d'aucune  valeur  &c,  «. 

D'après  la  citation  ci-devant  faite  de  la  fubftance 
de  quelques  Articles  de  la  Joyeufe  Entrée  ,  il  eft 
évident  ,  que  l'émanation  du  Dip^rne  du  premier 
Janvier  Î787  ,  portant  Etablijjement  £une  nouvelle 
forme  pour  le  Gouvernernent'Glnèral  du  Pays-Bas ^ 
ert  contraire  à  ladite  Joyeufe  Entrée  ,  tant  du  chef 
qu'il  n'eft  pas  revêtu  du  Vifa  &  de  la  Signature  du 
Confeil  de  Brabant ,  ainH  que  du  Scel  de  Brabant  ; 


(  M7  ) 

que  parce  que  fuivant  les  Articles  réclamés  Si.  cités 
de  la  Joyeufe  Entrée  ,  il  n'eft  pas  dans  le  pouvoir  da 
Duc  de  Brabant  Sa  Majefté  l'Empereur  &  Roi  de 
créer  ou  établir  de  nouveaux  Emplois  ,  contraires 
à  ceux  établis  par  la  Joyeufe  Entrée. 

Coniéqueinment  il  n'eft  pas  dans  fon  pouvoir 
d'étjblir  ni  des  Cercles  ,  ni  des  Intendans  ,  ni  des 
Commiffaires  dans  le  Brabant  :  Se  par  une  coni'é- 
quence  ultérieure  ,  les  Cercles  de  Bruxelles  îk  d'An- 
vers ,  énoncés  par  l'Edit  du  1 1  Mars  ,  &  tout  ce  qui 
y  eft  relatif,  n'eft  d'aucune  valeur  ;  Texprcffion  defdits 
Articles  de  la  Joyeufe  Entrée  eft  claire  &  décifive  à 
cet  égard. 

D'ailleurs  ce  même  Edit  du  ii  Mars  eft  auiS 
défeftueux  du  chef"  des  formalités  ,  puiiqu'il  eft 
pareillement  dépourvu  du  Vifa  &  de  la  fignature  du 
Confeil  de  Brabant ,  alnft  que  du  icel  Brabançon. 

Retournant  au  Diplôme  du  premier  Janvier  17^7  a 
je  trouve  que  ,  fuivant  la  difpofition  propofée  Art.  6, 
dans  chacun  de  ces  Cercles  il  y  aura  un  Intendant 
&  plufieurs  CommiiTaires  fur  le  pied  que  le  Gou- 
vernement fera  connoître  ,  par  une  Ordonnance  à 
émaner  de  la  part  de  l'Empereur  &  Roi. 

Je  trouve  ,  fuivant  le  même  Art.  ô  ,  que  ces 
Intendans  &  Commiffaires  fe  régleront  dans  l'exercice 
de  leur  charge  ,  i^.  félon  cette  Ordonnance  du  Gou- 
vernement ,  &  1®*  félon  les  Inftru£tions  &  les  Ordres 
qu'ils  recevront  du   Gouvernemeiit. 

Je  trouve  encore  que ,  fuivant  l'Ordonnance  annon- 
cée par  le  Diplôme,  celle  du  12  Mars  4787,  Art,  5 
»  L'aftivrté  &  lafurvelllance  des  Intendans  s'étendra  , 
»  fans  exception  ^  fur  tout  ce  qui  a  tiait  à  l'Admi- 
»  nlftratlon  publique  ,  politique,  &  économique  : 
»  en  conféquence  tous  les  OfHciers  des  Seigneuries, 
»  fous  les  Magifirati  ,  &  autres  Adminiflratcurs  ou 
r»  Réglffeurs  des  biens  &  deniers  publics  (  vous-mêmes 


»  donc  auffi  ,  Meffeignews  I  )  tous  les  Officiers, 
w  Employés  &  Receveurs  de  nos  Domaines  &  Fi- 
w  nances  ;  ceux  du  fond  de  Religion,  a  in Ji  que  ceux 
*>  des  Provinces  {donc  vus  ConfeiLlers- Receveurs  ati'Jî^  ) 
»  Villes  &  Communautés,  leur  (ont  fubordonnés, 
»  &c  devront  leur  donner,  en  tout  tems,  infpeftion 
»  &  communication  de  leurs  regiftres ,  protocoles, 
M  &  autres  aftes  ,  ainfi  que  tous  les  renl'eignemens 
»  &  éclaircifTemens  relatifs  aux  objets  de  leur  gef- 
»  tien  «. 

Voilà  ce  qu'on  veut  bien  révéler  au  Public ,  en 
attendant  que  ces  Intendances  foient  établies  6c  in- 
troduites. 

Mais  fî  l'on  pouvoit  parvenir  à  les  établir  &  les 
affermir  (  dont  Dieu  nous  préferve  !  )  ,  alors  ,  les 
Inftruélions  &  les  Ordres  qu'ils  recevront ,  fuivant 
l'Art.  6  du  fufdit  Diplôme  du  i  Janvier  1787  ,  en 
feroient  fentir  le';  funeftes  effets. 

L'Art.  6  de  l'Edit  du  11  Mars  1787  ,  eft  le  ga- 
rant de  ce  que  j'en  préfage  :  il  ordonne  »  à  tous 
»  les  Sujets  ,  fans  diflindion  ,  d'obéir  promptement 
»  à  tous  les  ordres  qui  feront  expédiés  par  les 
»  Intendances,  comme  s'ils  étoient  émanés  de  Nous, 
»  quand  même  ils  paroîtroient  excéder  les  bornes 
»  de  leur  autorité  ,  fauf  le  recours  au  Gouvernoment- 
«  Général,  qui  fera  toujours  libre  à  ceux  qui  pour» 
»  roient  fe  croire  léfés. 

Je  frémis,  quand  je  vois  de  quoi  nous  fommss 
tous  menacés ,  du  defpotifme  le  plus  abiolu  I  V^ous 
Brabançons  ,  qui ,  à  la  gloire  des  Pays-Bas  ,  avez  le 
bonheur  de  vivre  fous  votre  Conftitution  Brabaa- 
çonne,  vous  la  perdriez!  Vous,  dont  les  Fafîes , 
&  les  Annales  vantent  la  bravoure,  la  valeur,  l'at- 
tachement pour  votre  Prince  &  l'amour  pour  la 
Patrie ,  vous  flétririez  l'éclat  de  la  gloire  que  vos 
ancêtres  ont  fi  vaillamment  acquife  !  Tremblez  :  leurs 


(  159  ) 

înânes  vous  le  reprocheroient  ;  Sr  la  pnflerîté  Bra- 
bançonne rv>ugirolt  juiqu'à  \a  Confoniii.ation  des 
fiecles  d'étte  clelctndue  de  vouç.  Mais  que  dis  je? 
Vous  avez  un  Souverain  équitable  &  jufle  ,  qui  ne 
refpire  que  pour  votre  bonheur:  ofez-lui  defiîUer 
les  yeux  ;  les    envieux  ont  falciné  le  Mon?rque. 

Pardon,  MciTeigneurj.  ;  je  m'écarte;  niais  ratta- 
chement pour  mon  Prince  ,  &  l'àn-iour  de  ma  Pa- 
trie m'entraînent.  Ah  !  que  je  voudrois  pouvoir  vcus 
diffiinuier  ,  combien  dans  It  Diplôme  du  le^.  Janvier 
lySy  ,  portant  etablï[\smtnt  d'une  now-  dit  foi  nu  pour 
h  Gouvernement  Général  des  Pays- Ras,  le  contenu 
*du  7e,  Art.  vous  eft  In'uriei^x  ,  vu  qu'il  dit  o.:ver^ 
tement  ,  que  votre  forme  d'Admin^ftrarion  ti\  à  la 
furcharge  du  Peuple.  Cette  injure  ,  qui  ne  peur  ve- 
nir du  Prince  ,  n'eft  qu'une  infiigaMon  de   l'envie. 

Tous  les  Ducs  de  Brabant  ont  eu  rexpérience, 
que  cette  Province,  dans  toutes  Ici  occafions  ,  leur 
a  .  fourni  des  foriunes  incroyab'es  :  les  Annales  & 
les  Joymfes  Entrées  mêmes  l'attcflent  ;  &C  ce  non- 
obftanr,  la  P<ovince  ou  le  Pays  elr  riche:  c'eft  ce 
qui  nous  a  Tufcité  des  envieux.  Si  cependant  le 
Peuple  eût  été  furchsrgé  par  i'Adminiftrarion  ,  ("oit 
provinciale ,  fbit  quelconque ,  la  Province  ou  !e 
Pays  ne  feroit  pas  fi  florifTant ,  ni  fi  richt-  qu'il  Teft. 

Ce  n'eft  pas  cette  prétendue  furcharge  qui  a  don- 
né lieu  à  cet  Article  ;  c'eft  un  prétexte  qu'on  prend 
pour  s'arroger  î'Admin'ilraîion  ,  &  l'Article  8  le  vé- 
rifie ,  puifqu'il  pre/crit  que  le  Collège  aftuel  des 
Députés  des  Etats  viendra  à  ceHer  avec  le  dernier 
du  mois  d'06lobre  de  cette  année ,  &  refiera  fup- 
primé. 

La  dlfpofition  de  l'Arîicîe  9  confirme  mon  arer- 
tion  ,  puifqu'il  v  efl  dir ,  qu'  «  Au  lieu  He  ce  Col- 
»  lege  les  Etafs  de  Brabint  choifiront  parmi  ceux  de 
»  leurs   Membres ,  qui   feront  préalabiement  recon- 


C  i<^o  ) 
w  nus  capables  par  le  Gouvernement,  un  Député, 
M  qui  iera  agrégé  au  Confeil  du  Gouvernement  , 
»  où  il  aura  le  titre,  le  rang  &  les  gages  de  Con- 
»  i'eiller ,  6c  où  il  rapportera  immédiatement  tous 
»  les  objets  des  Finances  de  fa  Province  ,  &  autres, 
»  que  le    Préfideat  jiigera  à    propos  de  lui  confier. 

En  premier  lieu  ,  il  eft  à  remarquer  par  rapport 
à  ce  9e  Art. ,  que  les  Etats  de  Brabant  font  au  nom- 
bre de  trois,  qui  ont  chaque  leurs  Députés:  fuivant 
cedit  Art.  ils  n'en  auront  qu'un ,  qu'ils  choifiront 
parmi  ceux  de  leurs  MejnbrcN  ;  conféquemment  ces 
trois  Etats  doivent  enfemble  choifir  un  Député  qui 
cft  Membre  de    ces  trois  Etats. 

Les  Etats  Eccléfiaftique  &  Noble  ne  font  pas  û 
nombreux;  mais  le  Tiers-  ttat  eu  différemment 
compofé  :  il  neû  pas  repréfenté  par  les  Magiftrats 
des  trois  Chefs- Villes. 

Louvain  a  quatre  Membres:  le  Magiftrat ,  qui  eft 
le  premier  ;  le  deuxième  ceux  du  Confeil  ;  le  troi- 
fiemc  ceux  de  la  Décanie  ,  &c  le  quatrième  les  Chefs- 
Doyens  ,  dits  Overdekens. 

Bruxelles  en  a  trois  :  le  Magiftrat ,  qui  efl  le  pre- 
mier ,  le  fécond  le  large  Confeil  ;  &  les  neuf  Nations 
compofées  des  Doyens  des  Corps  des  Métiers  font  le 
troifieme. 

Anvers  a  quatre  membres  :  les  Bourguemaîtres  & 
Echevins  en  fervice  a6luel  forment  le  premier  ;  les 
anciens  Echevins  le  deuxième  ;  les  Quartier-maîtres 
dits  Wyckmeejlers  le  troifieme  ;  &  les  trois  Chef-Na- 
tions des  Bateliers ,  des  Merciers  &  ^lQs  Drapiers , 
fous  lefquels  tous  les  Métiers  font  compris ,  forment 
le  quatrième. 

Tous  ces  Membres  refpedifs  àes  trois  Chef-Villes 
font  le  Tiers-Etat  de  Brabant;  conféquemment  forment 
en  concurrence  avec  les  Etats  Eccléfiafîique  &  Noble, 
les  Etats  de  Brabant,  Chaque  individu  de  ces  Mem- 
bres 


(  i6i  ) 
bres  cft  Membre  des  Etats  ,  même  iufqu'au  Doyen 
du  Corps  de  Métier  des  Savetiers  :  ainfi  donc  jufqu'au 
Savetier,  félon  la  difpofition  duditAit.9,  a  droit  de 
prétendre  à  la  députation,  puifqu'il  efl  vrai  de  dire, 
qu'il  eft   Membre  des  Etati.  ^ 

Chaque  des  trois  Etats  a  Tes  Députés  ;  de  quel  Etat 
lera  celui  que  l'Article  prefcrit  ?  C'eft-ce  qu'il  n'a  pu 
lietinir  ;  car  en  n'admettant  qu'un  Député  pour  les  trois 
Etats  ,  il  faut  nécclTairenient  que  deux  Etats  fo.ent 
dépourvus  du  leur. 

Il  eft  cependant  notoire  ,  que  les  trois  Etats  ont 
des  objets  refpedtivement  indépendans  les  uns  des  au- 
tres ,  6c  foiivent  des  intérêts  contraires.  Comment 
donc  ces  diflfércns  objets  feront-ils  traités  &  furveiliés 
par. les  Etats,  qui  feroient  dépourvus  de  Députés? 

De  plus,  les  Etats  ont  plufieurs  emplois  à  confé- 
rer parleurs  Députés  :  comment  la  collation  s'en  fera- 
t-elle  ,  quand  il  n'y  aura  qu'un  feul  Député  ? 

Taflant  à  préfent  au  choix,  que  l'Art.  9  prefcrit: 
de  quelle  façon  fe  fera-t-ii  ?  comment  fera-t  on  confier 
de  Id  pluralité  des  voix  après  les  trois  ou  fix  anj^ 
que  la  députation  durera,  félon  l'Art.  12?  Voilà  €« 
qu'il  m'efl  impoffible  de  concevoir.  •    : 

Mais  fuppofez  que  cela  foit  poflible,  l'Art.  9  prefcrit 
encore  ,  que  cet  Elu  doit  être  préalablement  reconnu 
capable  par  le  Gouvernement  :  celte  capacité  fera  fi 
difficile  à  trouver  au  gré  du  Gouvernement,  qu'elle 
ne  le  trouvera  jamais  ;  &  la  coniéquence  en  fera ,  que , 
comme  le  bien  public  de  la  Province  6c  des  fujets 
exige  ,  que  l'Adminiftration  provinciale  ne  foit  pas  dé- 
pourvue d'un  Adminiftrateur  capable ,  le  Gouverne- 
ment en  dénommera  un  ad  inurim  ou  provifionnel- 
lement  ,  pour  dorer  la  pilule.  Certe  provifion  fera 
continuée  fuivant  les  çirconfîances  du  teins  ;  fi  elles 
deviennent  tant-foit-peu  favorables  ,  on  en  établira 
un  indéterminément. 

L  *** 


(  i6i  ) 

Si  Von  avale  la  pilule  ,  adieu  ,  Députatlon  !  adieu  , 
Etat*!  adieu  tout  ! 

Revenant  à  un  autre  objet  du  même  Art.  9  :  que 
ce  Député  agrégé  au  Confeil  du  Gouvernement,  y 
aura  le  titre,  le  rang,  &  les  gages  de  Confeiller  ; 
je  commencerai  par  demander  à  charge  de  qui  ces 
gages  lui  feront-ils  payés?  C'eft-ce  que  l'Article  n'ex- 
plique pas.  Conféquemment  il  faut  fuppofer,  que  ce 
iera  à  charge  des  Domaines;  c'eft  une  générohté  qui 
donne  à  penfer  :  les  penfées  font  libres  ;  mais  je  ne 
puis  les  confier  au  papier.  Je  puis  néanmoins  dire  , 
que  ce  Député  eft  au  fervice,  &  aux  gages  du  Prince  ; 
&  j'edime  ,  qu'il  eft  incompatible  d'être  Membre  de 
l'Etat  ôc  d'être  en  même-tems  au  fervice  &c  gages  du 
Prince  :  les  intérêts  de  celui-ci  font  trop  diamétrale- 
ment oppofés  à  ceux  des  Etat?. 

Finalement,  ce  même  Article  9  porte  encore,  que 
ce  Député-Çonfeiller  (  à  gages)  au  Confeil- Général 
des  Pays-Bas  y  rapportera  immédiaterwenr  tous  les 
objets  des  Finances  de  fa  Province.  Ce  terme  immé' 
diatemtnt  donne  quafi  à  entendre,  qu'il  lui  feroit  dé- 
fendu d'en  faire  rapport  aux  Etats  ;  il  eft  cependant 
notoire,  que  les  Députés,  à  chaque  Aflemblée  gé- 
néraie  font  rapport  au  Corps  aflemblé  des  affaires  fur- 
venues  ,  qui  paftent  les  fins  de  la  dépuration  ,  depuis 
l'Aflemblée  précédente ,  &  qu'alors  les  Etats  pren- 
nent à&%  réfolutions  en  conféquence ,  dont  l'exécu- 
tion eft  confiée  foit  aux  Députés  feuls ,  foit  conjoin- 
tement avec  les  Commiffaires,  que  les  Etats  ont  trouvé 
à  propos  de  dénommer ,  pendant  leur  Affemblée  gé- 
nérale. 

En  outre  il  eft  auffi  notoire  ,  que  les  Députés 
par  eux-mêmes  n'ont  aucun  pouvoir ,  concernant 
des  objets ,  qui  paftent  ceux  qui  font  circonfcrits 
dans  les  bornes  de  la  dépuration.  Comment  fera- 
t-il  donc  poffible  audit  Député  de  rapporter' immé- 


(  1^3  ) 

diatement  audit   Confeil  tous  les  objets  des  finances 
de   fa  Province  ? 

Il  eft  prefcrit ,  Article  ii  du  môme  Diplôme,- 
que  les  Etats  éliront  un  Secrétaire.  Prefque  toutes 
les  réflexions  que  j'ai  faites  cl  deffus,  par  rapport  à  la 
l^ço^  de  choifir  un  Député,  Tonl  adoptables  à  l'élec- 
tion d'un  Secrétaire-:  ainfi  il  iuffira  de  m'y  rapporter. 

La  fin  de  l'Article  lo  du  jmcine  Diplôme  m'oblige 

à  faire    des  réflexions   relativement  à  la    diïpofition 

d'icelle.  Il  y  eft  dit,  que  les  Etats  de  Giieldres ,  &£ 

de  Mallnes  auront  à  commettre  le  foin  de  leurs  at- 

'faires  au  Député  de  Brabant. 

Il  faut  obferver ,  que  je  parle  dans  la  fuppofi- 
tion  que  le  Diplôme  ait  lieu  ,  ou  folt  exécuté. 

Dans  cette  fuppofîtion  ,  néanmoins  faufle ,  on 
doit  convenir,  que  le  Député  de  Brabant  aura  de 
la  befogne,  autant  qu'il  pourra  fupporter  ;  de  plus 
qu'il  n'a  aucune  notion  des  affaires  des  Provinces 
de  Gueidre  &  Mallnes ,  &  puis  ,  que  la  première 
des  deux  eft  trop  éloignée  de  Bruxelles. 

Cela  étant,  qui  eft  celui  qui  voudra  fe  chirger 
des  affaires  d'autrui  ;  je  dis  defdites  deux  Provinces? 
Culpa  cnim  tj2  immifcerc  fc  ni  ad  Je  non  pcrtincnti 
1.  î6.  ft.de  R.  j. 

D'ailleurs  i'uppofons  qu'il  eût  le  pouvoir  &  l'au- 
toriré  vis-à-vis  de  ceux  de  Gueidre  6^  de  Malines, 
à  l'effet  de  la  difpofitlon  fufdite,  l'a-t-il  à  l'efFet  de 
pouvoir  obliger  ou  contraindre  le  Député  du  Bra- 
bant d'accepter  ce  foin  ?  Je  réponds  Se  conclus, 
qu'il  ne  l'a  que  par  !e  defpotifme. 
'  Enfin  pour  corollaire  de  cedit  Diplôme,  il  eft 
à  réfléchir  qu'il  n'eft  revêtu  d'aucune  formalité  Bra- 
bançonne, fi  abrolument  &  effentiellement  requife, 
pour  qu'un  Diplôme  ,  Edit  ou  Placard  ait  force  de 
Loi:  il  ne  porte  ni  le  Fija  ,  ni  la  lignaiure,  ni  le 
Scel  Brabançon. 

L  2 


(1^4) 

Et  ce  qui  carsi^^érife  en  outre  le  derporifme  le 
plus' abfolu  ,  c'eft  que,  malgré  qu'il  foit  dépour%'U 
Je  ces  formalités ,  on  en  a  fait  faire  une  prétendue 
publication  partout  en  Brabant. 

J'eftime  que  j'ai  démontré  fuffifamment  la  nulle 
valeur  de  ce  mêine  Diplôme,  conféquemment  je 
lecournerai  encore  à  l'Edit  portant  étabiifTement  des 
intendances  des  Cercles  aux  Pays-Bas,  du  i  x  Mars 
s  787  ,  quant  aux  Articles  que  je  n'ai  pas  encore 
touchés. 

Le  préambule  de  l'Article  9  de  cet  Edit  porte:** 
>>  Comme  cependant  la  protcdion  des  Sujets  ôc  Ha- 
»  bitans  du  Pays,  tant  pour  leurs  perfonnes,  que 
»>  pour  leurs  poffeffions ,  contre  toute  violence  &c 
»  voie  de  fait ,  eft  un  des  devoirs  les  plus  eflen- 
»  îlels  du  Gouvernement  politique  «. 

Ce  raifonnement  ou  préambule,  pris  dans  un  fens 
abftrait  de  la  •  difpofition  qui  le  fuit ,  eft  très-vrai , 
&  Julie f  mais  dans  le  l'ens  dans  lequel  il  eft  pris, 
Se  comme  on  le  doit  néceftairement  prer.dre  ,  en- 
fuite  de  la  difpofition  qui  fuit ,  il  eft  controuvé ,  il 
eft  paradoxe. 

Ladite  difpofition  porte  :  »  Nous  attribuons  aux 
w  Intendances  le  pouvoir  &  l'autorité  de  décerner, 
y>  &  de  mettre  en  exécution  le  provifoire  momentané , 
»  ou  le  poiTefibire  fommariflîme  ,  dans  tous  les  cas 
»  où  quelqu'un  feroit  violemment  6c  de  fait  troublé 
»  dans  fa  poftefîion ,  voulant  que  ce  qui  aura  été 
»  prononcé  &  ordonné,  à  cet  égard,  par  les  Inten- 
»  dances ,  tienne  lieu  ,  jufqu'à  ce  qu'il  en  ait  été  au- 
»  trement  difpofé ,  foit  au  pcfteffoire ,  ou  au  pétitoîre , 
»  par  le  Juge  compétent. 

C'eft  une  vérité  inconteftabîe  ,  que  la  proteélion 
des  fujets  &  habitans,  tant  pour  leurs  perfonnes,  que 
pour  leurs  poiTtinons  ,  contre  toute  violence  Se  voie 
de  fait ,  appartient  au  Gouvernement  politique ,  à  i'ef- 


fet  de  prévenir ,  que  les  violences  Si  voies  de  fait 
ne  fe  faiïent  ,  &  que  les  tranfgrefî'eurs  foient  cor- 
rigés ou  punis ,  félon  l'exigence  des  cas. 

Mais  il  eft  controuvé  qu'il  appartiendroit  au  Gou- 
vernement politique  ,  à  tel  effet,  que  celui  qui  a 
effuyé  quelque  violence  ou  voie  de  fait ,  folt  remis 
dans  fa  pofleflîon  ^  comme  il  fut  avant  la  violence 
faite.  Ce  devoir  appartient  au  Tribunal  de  Juftice  , 
&  c'eft  le  Confeil  de  Brabant,  à  qui  cette  Judicature  , 
pour  tout  le  Brabant ,  à  i'exclufion  de  tous  autres 
Tribunaux ,  appartient. 

De  plus  ce  Art.  lo  forme  le  contrafte  le  plus  for- 
mel avec  la  di'pofition  du  8e.  Art.  du  même  Edit , 
qui  porte,  »  Nous  exceptons  abfolument  des  pouvoirs 
»  &:  de  l'autorité  des  Intendances  tout  ce  qui  con- 
»  cerne  la  Juftice  purement  contentieufe. 

Car  il  n'eft  pas  poffibie  de  fuppoler ,  &  même  il 
ne  peut  pas  tomber  fous  le  {ens,que,  dans  une  vio- 
lence faite,  ou  dans  quelque  voie  de  fait,  il  ne  fe 
rencontre  pas  qvielque  conteftation ,  ou  quelque  ma- 
tière contentieufe. 

Cela  étant ,  l'objet ,  félon  le  8e  Art. ,  efl:  abfolument 
fouftrait  aux  pouvoirs  &  à  l'avHoriîé  des  Intendances. 
En  outre .  le  polTeffoire  fommariffime  n'eft  pas  connu 
en  Brabant ,  il  eft  même  de  trop  dangereufe  confé- 
quence  ,  comme  on  fentira  par  l'exemple  ,  qui  peut 
arriver ,  ôc  que  je  propoferai. 

Un  homnie  féduit  &  emmené  une  femme  mariée, 
ou  une  jeune  fille  ;  il  fe  retire  dans  l'un  ou  l'autre 
endroit ,  s'y  fixe  pour  un  certain  tems.  Le  mari  ou 
le  père  vient  par  hafard  dans  cet  endroit  ,  &  ren- 
contre, fgit  le  mari  fon  époufe  ,  ou  le  père  fa  fille 
mineure  ,  fe  promenant  ,  au  br.is  du  fédu6leur  ;  le 
mari  ou  le  père  agité  par  un  jufte  refTentiment ,  ar- 
rache en  courroux  fon  époufe  ou  fa  fille  du  bras  de 
fon  féduâ:eur  ;  celui-ci  fe  demene ,  il  crie  à  toute  force  ; 

L3 


{i66) 
Monfieiir  l'Intendant  furvient ,  les  entend  :  1!  y  trouve 
un  prérendu  trouble  ou  voie  de  fait,  &  il  prononce, 
que  le  prétendu  troublé  6c  la  femme  ou  fille  refie- 
ront  enfemble.  Le  mari  ou  le  père  veut  prendre  (on 
recours  au  Juge  compétent,  mais  entre-tems  le  ra- 
vifTeur  eft  parti  avec  fa  proie ,  &c  le  mari  ou  le  père 
en  eft  encore  pour  Tes  fraix.  Vraiment  c'eft  une  Jurif- 
prudence  pareille  à  la  Coutume  de  Lovris ,  où  le 
battu  paie  l'amende. 

Et  le  plus  extraordinaire  de  tout,  c'eft  que  malgré 
la  reconnoiflance  qu'on  y  fait,  que  la  protection  àes 
Sujets  &  Habitans  du  Pays  eft  un  de5  devoirs  les 
plus  eftenriels  du  Gouvernement  politique  ,  on  com- 
met trouble  fur  trouble,  fous  prétexte  de  vouloir  le 
prévenir. 

Le  lie.  Art.  en  fait  la  preuve;  puifque  l'on  y  pré- 
tend de  (upprimer  les  charges  de  Grands  -  Baillis , 
Chefs  -  Mayeurs  ,  qui  néanmoins  font  admis  par  la 
Joyeufe-  Entrée  ^  Art.  37. 

Enfin  ,  je  le  répète  encore  ,  ce  même  Edit  n'étant 
p5$  revêtu  des  formalités  Brabançonnes ,  eft  de  nulle 
valeur  :  Forma  enim  dat  ejje  rei. 

Paftant  à  l'autre  Diplôme ,  portant  établiftement 
des  nouveaux  Tribunaux  de  Juftice  aux  Pays  -  Bas, 
de  la  même  date,  1  Janvier  17^7. 

Pour  éviter  la  répétition  de  ce  que  j'ai  dit  ci-defTus , 
par  rapport  aux  formalités ,  dont  un  Diplôme ,  Pla- 
card ,  ou  Edit  doit  être  revêtu  ,  &  comme  il  doit 
erre  fait,  pour  avoir  quelque  effet  ou  exécution,  je 
me  bornerai  à  dire  ,  que  ce  même  Diplôme  en  eft 
deftitué  à  tous  égards.    » 

J'oblerve  encore  ,  que  le  titre  ne  quadre  pas  avec 
fa  difpofition ,  vu  que  le  titre  porte  feulement  éta- 
b!iftem.ent  des  nouveaux  Tribunaux  de  Juftice  aux 
P;^y"^-Bas ,  &  que  fa  difpofition  ,  en  outre  ,  porte  fup- 
preffion  de  tous  les  Confcils  aftuels  de  Juftice  ;  il 


C  167  ) 
porte  encore  également  iiipprefiîon  de  toutes  les  Juf- 
tlces  Seigneuriales;  enfin  il  porte  iuppreflîon,  à  l'ex- 
ception des  feules  Juftices  Milifaires  ,  de  tous  autres 
Tribunaux,  Corps  &f  Cours  de  Juftices,  qui  fubfiftent 
dans  les  Pays-Bas,  ainfi  que  des  Tribunaux  Eccîé- 
fiaftiques,  &  de  ceux  de  i'Univerfité  de  Louvain  , 
Art.  3  ,  4 ,  8  &  9. 

Commençant  par  le  Confei!  de  Brabant ,  j'eftime, 
qu'il  fera  convenable  de  rapporter  ion  origine ,  I;i 
manière  dont  il  a  été  érigé;  bref,  un  précis  Uîccinél 
dudit  Confeil. 

Les  Hiftoriens  ne  font  pas  d'accord  fur  l'époque 
de  (on  origine.  Les  uns  veu'enr  la  fixer  au  tems  de 
Godefroid- le- Barbu  ,  mort  l'an  1140,  &  enterré 
dins  l'Eglife  de  l'Abbaye  d'Afflighem. 

Les  autres  la  fixent  au  règne  du  Duc  Jean  II , 
6t  donnent  l'on  origine  à  la  Chartre  de  Cortenbergh, 
du  mois  de  Septembre  ,  Mercredi  avant  la  S.  Ba- 
von   13  II. 

Je  n'approfondirai  pas  cette  quefiion  ;  vu  ,  en 
premier  lieu,  que  le  tems  qui  me  refte  eft  trop  court, 
vu  en  fécond  lieu  ,  que  la  féconde  opinion  me 
paraît  la  plus  probable  ;  &  vu  en  troifieme  lieu  , 
qu'elle  eft  plus  que  (uffilants  pour  établir  ma  thefe. 

Cette  fameufe  Chartre  fe  trouve  au  premier  vol. 
des  Plac.  de  Brab'  fol,   \12. 

Jean  II  fit  donc  une  convocation  générale  de  Tes 
Barons,  Chevaliers,  VafTrUix  ,  Villes  &  Franchifes, 
6c  il  fit  dreflTer  cette  fameufe  Chartre ,  connue  fous  le 
nona  de  Cortenberg  ,  du  nom  du  lieu  où  elle  fut 
donnée,  qui  étoit  le  lieu  de  la  réfidence  du  Duc  &C 
de  fa  Cour  ;  il  eft  étonnant  de  voir  le  grand  nombre 
de  Nobles  qui  y  ont  intervenu. 

Par  cette  Chartre ,  le  Duc  ,  entre  plufieurs  autres 
points  concernant  l'avantage  de  fon  Pays ,  réitéra 
la  promeffe ,  tant  de  fois  faite  par  (zs  ancêtres ,  de 

L  4 


(  i6-^  ) 
traiter  toMS  fes  Sujets  par  Jugement   &  Juflice  ,  St 
à  cette  fin  il   réfolut  rEtabllflement  de  ce  Confeil  : 
auquel  etret  il  ordonna  »    que  lui  &  fes  fuccefTevrs 
^>  de  confeil  commun  ou  avis  de  fon  Pays ,  délig- 
w  neroient  quatre  des  principaux  Chevaliers ,  &  trois 
V  perfonnes  de   Louvain  ,    trois  de   Bruxelles  ,  une 
♦>  d'Anvers  ,  une  de  Bois-le-Duc  ,  une  de  Tiriemont 
>♦  &  une  de  Leeuwe  ,  que  ces  quatorze  perfonnes , 
»  de  trois  en  trois  femaines,  s'aflembleroient  en  la 
»  Salie  de  Cortenberg  ;    qu'elles  ordonnemient  ce 
»  qu'elles  trouveroient  ,    en  équité  ,  convenir  pour 
»  le  repos  &  le  plus  grand  bien  du  Pays  ,  &  enfin  , 
i>  que  les  Sentences  &  Ordonnances  feroient  ftables , 
»  fermes  &  inaltérables  «. 

Il  y  eft  auffi  pourvu  ,  ce  quelle  façon ,  en  cas  de 
mort  de  l'une  ou  de  l'autre  defdites  perfonnes,  elles 
devroient  être  remplacées. 

Il  eft  de  plus  ordonné  &  ftatué ,  que  lefdifs  Che- 
valiers &  Perfonnes  élues  jureroient  fur  les  'laints 
Evangiles,  de  conferver  le  Duc  ,  &  tous  fe^  VafTaux 
de  Brabant  en  leur  Droit ,  ôc  d'adminiftrer  la  Juftice 
le  mieux  qu'ils  pourroient. 

Voilà  donc  cette  fameufe  Chartre  de  Cortenberg  , 
dont  il  eft  tanf  parlé  dans  les  anciens  a61cs ,  5î  dont 
les  Etats  de  ce  Pays  ont  été  fi  jaloux  ,  qu'ils  en 
ont  demandé  à  plufieurs  reprifes  une  confirmation 
fcécifique  de  leur  Prince.  Vovez  Euthcns ,  tom.  2  , 
iiv.  7  ,  §  1  ;  il  y  dit  tor.t  ce  que  je  rapporte. 

Il  dit  encore,  loc.  cit.  fol.  3^9,  &  feq.  qu'en 
Tan  1572-^.  le  Duc  ^yencefl^s  de  Bohême  ôt  Ton 
époufe  la  Duchefîe  Jeanne,  fii'c  du  Duc  Jean  III , 
firent  une  convocation  générale  des  Etats  à  Corten- 
berg ,  où  ,  après  plufieurs  conférences,  &:  à  l'inftance 
ces  mêmes  Etats  ,  fiuent  couchés  plufieurs  Articles 
touchant  l'antorité  du  Confeil ,  &  l'obfervation  de 
îa  Chartre   de  Cortenberg;  entre  autres,  que  totrs 


(  1(^9) 
ceux  qui  pour  lors  ou  dans  la  fuite  gouverneroient  I* 
Confeil ,  {croient  (bus  la  garde  6c  protedion  fingu- 
liere  du   Prince  ,  de    même   que  tous    ceux  qui   ie 
rendroient  à   Cortenberg ,    pour   y    pourfuivre   leur 
droit  :  que  fi  quelqu'un  ofoit  contrevenir ,  il  feroit 
châtie  d'une  manière  qui  ferviroit  d'exemple  à  tout 
autre ,  Se  que  tous  ceux  du  Confeil ,  ainfi  que  tous 
les  principaux  Officiers  de  Brabant  feroicnt   obligés 
de  promettre  par  ferment ,  à  prêter  entre  les  mains 
du  Prince,  ou  de  deux  Confeillers,  d'obTerver  ,  & 
de  faire  obferver,  de  point  en  point,  laChartre  de 
Cortenberg,  &  la  Chartre  ^yallone. 

Oie  finalement  il  fut  ftatué ,  que  tous  Juges ,  5c 
Officiers  de  Brabant  auroient  à  obéir  aux  ordres  du- 
dit  Confeil,  dans  les  alïaires  qui  le  regardent,  à 
peine  d'être  tenus  pour  délobéiiTans,  5c  d'encourir 
les  peines  comminées  par  ladite  Chartre  de  Corten- 
berg :  il  y  rapporte  même  les  Articles  en  langue 
originale. 

D'après  ce  que  je  viens  de  rapporter ,  il  eft  évi- 
dent, que  le  Conseil  avoit  le  maniement  auffi  bien  de 
la  Police  que  de  la  Juflice ,  &  qu'il  n'avoit  pas  d'awtre 
Chef  que  le  Duc  même,  fauf,  qu'en  certaines  occu- 
rences,  îorfqu'il  étoit  nécefTaire ,  le  Sénéchal  de  Bra- 
bant y  préfidcit  en  fon  nom.  Mais  le  Duc  AVenccflas 
étant  mort,  l'an  i3?^4  ,  la  DucheiTe  Jeanne  ne 
pouvant  plus  vaquer  aux  affaires  du  Confeil  ,  tant 
à  raifon  de  la  guerre  de  Gueldre ,  que  par  d'autres 
embarras ,  elle  inftitua  un  Chef  perpétuel  de  fon 
Confeil ,  qu'elle  qualifia  de  Chancelier. 

Le  même  Euikens  loc.  cit.  €.  2  ,  rapnorte  en- 
cote  ,  que  le  Duc  Antoine,  par  l'Article  IV  de  fa 
Joyeufe  Entrée  du  si?  Décembre  1404,  avoic  pa- 
reillement promis  de  n'admettre  dans  fon  Confeil  que 
des  perfonnes  de  légitime  mariage,  né«s -de  poiTel- 
fionécs  en   Brabant ,  &:  que  ceae  promefie  fut  le- 


C  170  ) 
nouvelîée  par   la  Joytufe  Entrée  de    Jean  IV  ,   en 
date   du    i}   Janvier   141 J. 

Et  que  ce  Jean  IV  époufa,  en  1418  ,  la  fameufe 
Jaqueliiie  de  Bavière,  Comteffe  de  Hollande,  de 
Zélande ,  &  de  Hainaut ,  &  qu'avant  que  de  partir 
pour  la  Zélande  l'an  1410,  il  voulut  changer  (on 
Miniftere  &  fa  Cour,  comme  il  avoit  changé  celle 
de  la  Duchefle  (on  époufe  ,  qu'il  fit  aulTi  quelque 
réforme  en  fon  Conlei' ,  &  nomma  pour  Conieil- 
1ers  Jean  de  Grimberghe ,  fire  d'Aflfche ,  Jean  de 
Grimberghe  ,  fon  fils  aine,  Maître  Jean  Bont,  Cha- 
noine de  Sainte  Gudule  à  Bruxelles ,  Nicolas  van 
Werve  ,  Bernard  Utenenge,  fils  unique  d'Annekin 
Renier  Noyts,  Jean  de  HufHe ,  Nicolas  de  Colen- 
foene ,  (  lequel  il  fit ,  peu  de  tems  après  ,  Garde 
des  fceaux  }  Guillaume  Bont,  &  Rutger  de  Tele- 
gen  Secrétaire;  &  que  par  a61:e  du  26  Avril  11  or- 
donna ce  Confeil  tant  pour  le  Gouvernement  du 
Pays ,  que  pour  l'Adminiftration  fouveraine  de  la 
Juftice  ;  mais  que  U  difcorde,  qui  furvint  entre  le 
Duc  &  la  Duchefle  ,  de  même  qucntn  U  Duc  6* 
lis  Etats  ^  y  caufa  \\n  entier  changement  :  que  les 
Etats  mécontens  du  mauvais  gouvernement  de  leur 
Prince,  fe  joignirent  à  la  Duchefle,  &  appellerent 
même  à  leur  fecours  le  Comte  de  S.  Fol,  frère  du 
Duc,  lequel  ils  conftituerent  Ruart  ou  Régent,  & 
Gouverneur- Général  de  Brabant  :  qu'ils  caflerent 
aufli,  fous  fon  autorité,  par  aftedu  u  Septembre, 
le  Miniftere  &  les  prédits  Confeillers ,  commis  par 
le  Duc,  &  couftltuerent  en  leur  place  l'Abbé  d'Af- 
iiighem  Chancelier,  Jean  de  Cuvck,  fire  l'Hoogf- 
rraeten  ,  Corneille  de  Gavre  dit  de  Liedekerke, 
lire  de  Lens,  Thierry  de  Merthem ,  fire  de  Boxtel , 
Renier  de  B;uucrle:n  dit  de  Berges,  fire  de  Geele, 
Merxem  ^iz.  Amman  de  Cortenberg ,  dofteur  es 
Loix  &  Doyen  de   S.  Douât  à  Bruges ,  Williaume 


(  171  ) 
(^(^  Gandjfire  de  Meerwyck  ,  Everard  TSerclaes^ 
Nicolas  van  de  ^Verve  ,  Ôc  Gérard  de  Gemert. 
•  Que  ces  troubles  ne  durèrent  que  jufqu'au  mois 
de  Mai  1421,  lorfque  le  Duc,  le  Ruart ,  les  No- 
bles ,  6v  les  Députés  des  Villes  de  Brabant  f'e  trou- 
vant en  une  Aiïemblée  générale ,  a{riî{née  dans  la 
Ville  de  Louvain,  il  y  fut  traité  d'un  accommode- 
ment entre  le  Duc,&  les  Etats,  par  lequel  le  Duc 
confenrit  &  s'engagea  à  une  nouvelle  &  meilleure 
forme  de  Gouvernement ,  &:  ainfi  il  fut  derechef 
rétabli  dans  toute  fon  autorité  ,  &  Ton  frère  fe  dé- 
porta du  nom  &c  de  la  qualité  de  Ruart. 

L'Auteur  poorfuivant  fondit  paragraphe,  rapporte, 
que  ce  traité  d'accommodement  procura  un  nouveau 
luftre  au  Confeil  de  Brabant ,  &  augmenta  de  beau- 
coup fon  autorité;  puifqu'il  y  fut  ftipulé  &  promis, 
que ,  fans  l'avis  &  confentement  de  trois  ou  quatre 
de  ce  Confeil  ,  il  ne  feroit  permis  au  Prince  d'a- 
liéner aucune  Ville,  Pays,  Château,  ou  autre  Do- 
maine ,  ni  d'entreprendre  aucune  guerre  ,  ou  de  faire 
aucun  traité  ou  alliance ,  pas  même  de  faire  grâce 
de  crime ,  à  qui  que  ce  fut  :  que  deux  du  Confeil 
commertroient  tous  les  Officiers  de  la  Cour  du 
Prince,  &  cela  au  moindre  nombre  que  faire  fe 
pourroit,  &  de  telle  manière,  qu'il  ne  fût  pas  né- 
ceflaire  de  changer  de  tems  en  tems  l'état  de  fa 
maifon;  que  le  Prince  &  le  Confeil  commetti'oient 
dans  les  Villes  &  Plat-Pays  les  Officiers  les  plus 
capables,  qu'ils  pourroient  trouver,  &  qu'il  ne  fe- 
roit pas  permis  au  Prince  de  les  defîituer  ,  fans  le 
confentement  de  fon  Confeil;  qu'aucuns  ne  feront 
admis  au  fervice  du  Prince,  finon  les  Nobles  de 
Brabant,  ou  tels  autres  que  le  Confeil  en  jugeroit 
dignes,  foit  par  leur  naiffance  ,  foit  par  quelques 
faits  remarquables  ;  qu'aucun  du  Confeil  ne  rece- 
vroit   de  l'argent  de    perfonne  ,   mais  que  l'argent 


(I/O 

qui  devrolt  leur  être  payé  feroit  remis  au  garde  âa 
regître  des  Fiefs ,  qui  en  p^yeroit  les  vacations  du 
Confeil  ,  lorfqu'il  s'occuperoit  pour  le  fervice  du 
Prince  ou  du  Pays,  &  que  le  refte  feroit  employé 
aux  menus  plaiiirs  du  Prince. 

Que  le  Conf'eil  comme  troit  à  la  garde  dudit  re- 
g>tre  des  Fiefs  une  perfonn^  notable ,  qui  fût  le 
vallon  &  le  flamand ,  que  nul  Prêtre  (  à  la  réferve 
des  Abbés  de  Brribant  ;  ne  pourroit  être  admis  à 
TEtat  de  Confeil  ou  Secrétaire  :  enfin  qu'aucune 
perlonne,  qui  ne  fût  du  Confeil,  ne  pourroit  être 
commife  à  l'inftruftion  ou  décifion  de  quelque  af- 
faire ,  finon  du  confentement  du  Confeil,  &  que 
û  le  Prince  venoit  à  faire  le  contraire,  la  correftion 
en  appartiendroit  au  même  Confeil. 

Cette  Chartre  ,  que  Ton  nomme  le  nouveau  Gou- 
vernement du  Duc  Jean  IV  ,  fut  fignée  par  le 
même  Duc  5c  par  tous  les  Nobles  ,  &  les  Députés 
des  Villes,  §^  Franchifes  de  Brabant,  dont  les  noms 
font  aufil  rapportés  par  Divttus  in  nbi.  ad ann.  i/^riy 
&  Butkens  rapporte  les  Articles  de  la  même  Chartre 
en  largue  originale.  Une  partie  des  Articles  de  la 
même  Chartre  fut  confirmée  par  la  Joyeufe  Entrée 
de  Philippe  I  (  frère  du  Duc  Jean  IV  ,  mort  fans 
hoirs  )  Articles  5  ,  6  ,  &  7  :  il  fut  ftipulé  de  plus, 
que  le  Prince  ne  pourroit  établir  ni  deftituer  le 
DrofTard  ni  le  receveur  de  Brabant  fans  l'avis ,  & 
r approbation  du  Confeil  ^  ou  du  moins  de  fix  Con- 
feillers  qui  en  figneroient  les  Lettres,  comme  auflî 
que  le  Prince  r;e  pourroit  établir  pour  Chancelier 
finon  une  perfonne  qui  fût  le  latin  ,  le  flamand  5c 
le  "wallon,  &  cela  par  avis  des  autres  Confeillers, 
eu  du  moins  de  fix  d'eux,  qui  aflîirmeroient  fous 
ferment ,  que  celui  qui  feroit  préfenté  pour  Chan- 
celier ,  auroit  les  qualités  requifes  pour  fervlr  uti- 
kment  le   Prince,   &  fon  Pays;  ôi  que   le   même 


(  173) 
Chancelier  fcroit  enfuite  le  krment  en  préfence  du 
Prince  Se  des  Etats  de  Brabant. 

Butkens  rapporte  les  Articles  qu'il  en  cite,  mais 
cette  même  Joycuj'i  Entrée  le  trouve  dans  le  pre- 
mier vol.  des  Place,  de  Brab.  fol.    145  &  fuiv, 

Philippe  l  ne  Turvécut  que  fort  peu  de  tems  après, 
«tant  mort  le  4  Août  1430.  Il  eft  enterré  à  Tervueren. 
Sa  mort  étant  devenue  publique  ,  dit  Buikens  ,  hc. 
cit.    §.    5 ,   le   Duc   de    Bourgogne   Philippe ,    lur-' 
nommé  le  Bon  ,  &  Marguerite  de  Bourgogne  veuve 
de  Guillaum.e  Comte  de  Hainaut  &  de   Hollande^ 
s'entredifputerent  (a  fucceffion   :   l'un  &  l'autre  en- 
voyèrent leurs    Ambafîadeurs   pour    remontrer   leur 
Droit  aux  Etats,  qui  fe  tenoient  toujours  aflembiés 
à  Louvain ,    &  qui  enfin    fe  déclarèrent  en    faveur 
de  Philippe.  Mais  avant  que  de  le  reconnoître  pour 
Duc,    ils   traitèrent   avec    (&s    AmbafTadeurs  ,    tou- 
chant la  forme  du  Gouvernement  qu'il  feroit  obligé 
de  tenir,  &  fur  les  Droits,  Libertés  &  Privilèges» 
qu'ils  demandoient    qu'ils   leur    fuffent  accordés    & 
confirmés  par  ferment  folemnel. 

La  principale  partie  de  ce  Traité  rouloit  fur  le  pou- 
voir &C  fur  l'autorité  du  Confeil.  Ce  Duc  ayant  dif- 
férentes Provinces  ,  on  jugeoit  ,  que  fes  affaires  ne 
lui  permettroient  pas  d'être  toujours  dans  le  Brabant  : 
on  voulut  donc  s'affurer  ,  qu'en  l'un  ou  l'autre  cas 
de  préfence  ou  d'abfence ,  le  Pays  ne  fût  gouverné 
que  par  le  miniftere  Brabançon  :  c'eft  ce  qu'on  voit 
à  toute  évidence  par  l'aéle  de  la  Joyeufc  Entrée  de 
ce  Duc  du  5  Octobre  1430.  il  fe  trouve  au  ler  vol. 
des  Place,  de  Brab.   1^1   &  feq. 

Il  y  fut  ftipulé,  que  le  Prince  fera  obligé  de  pren- 
dre le  titre  &c  les  armes  de  Lothier  ,  de  Brabant , 
de  Limbourg,  &  du  Marquifat  du  Su  Empire.  Q^\ie 
ce  titre ,  ces  armes  devront  être  gravés  fur  le  fcel 
<du  Brabant ,  qui  fera  toujours  diflingué  de  celui  des 


(174  ) 
autres  Provinces  ;  que  ce  fce!  ne  fortira  point  'du 
Pays  ;  que  toutes  les  Dépêches  qui  regardent  lefdites 
quatre  Provinces,  &  le  Pays  d'Outremeufe,  &  nul- 
les autres ,  en  feront  fcellés  par  un  Secrétaire  dé- 
puté aux  affaires  Brabançonnes  ,  &  fouffignées  par 
quatre  Confeillers  du  Confeil  de  Brabant  ;  que  ce 
Conlell  fera  comporé  de  fept  peribnnes  des  plus 
dignes  &  des  plus  capables  ;  du  nombre  derquelies 
4era le  Chancelier,  natif  de  Brabant,  fâchant  les  trois 
langues;  que  des  (ix  autres,  quatre  devront  cire 
Brabançons ,  ou  polTéder  Baronnie  en  Brabant  ;  6c 
quant  aux  deux  autres  reftans,  ils  feront  tels  que 
le  Prince  voudra  les  choifir  ;  pourvu  qu'ils  fâchent 
le  flamand ,  que  le  Prince  étant  au  Pays ,  il  devra 
faire  traiter  par  ce  Confeil  toutes  les  affaires  con- 
cernant lefdites  Provinces ,  &  qu'à  ce  fujet  ce  Con- 
feil fuivra  toujours  le  Prince,  &  fe  tiendra  dans  l'en- 
droit où  il  réfide  ;  mais  que  le  Prince  fortant  du 
Pays ,  il  le  placera  en  Brabant ,  dans  quelque  lieu 
commode,  où  il  lui  confiera  le  Gouvernement-Gé- 
néral des  mêmes  Provinces. 

Que  le  Prince  ne  pourra  établir  ni  deflituer  aucun 
Officier ,  non  plus  que  remettre  aucune  amende  ou 
forfaiture  ,  fans  l'avis  &  l'approbation  du  Confeil , 
ou  de  quatre  Confeillers,  au  moins  (qui,  attendu 
le  nombre  de  fept ,  faifoient  la  pluralité),  fauf  l'Etat 
de  Droffard ,  &  celui  de  Receveur  Général  de  Bra- 
bant ,  pour  lefquels  il  faut  l'approbation  de  fix 
Confeillers. 

Que  le  Chancelier  devra  être  choifi  du  corps  du 
Concil,  &  cela  par  l'avis  de  fix  autres  Confeillers, 
-qui  affirmeront  fous  ferment ,  qu'ils  le  croient  ca- 
pable &  utile  au  fervice  du  Prince ,  &  à  celui  du 
Pays.  Art.  4,  5,8,  ]6  ,  53  ,  &  54  de  la  même 
Joycufc  Entrée. 

Le  tems  ne  me  permet  pas  de  fuivre  le  fil  ou  la 


C  175  ) 

fuite  des  Ducs  fucccflifs,  &  j'eftime ,  qu'il  fuiSra  de 
remarquer  ,  que  ces  Articles  cUns  leurs  Joycufcs 
Entrées^  julques  dans  celle  du  Duc  régnant,  ont 
été  foigneufement  répétés  :  fur -tout  que  toutes  les 
nffaires  àzs  Provinces  de  Lothier ,  de  Brabant ,  ce 
Lunbourg  ,  du  Marquifat  du  St.  Empire,  &  des  au- 
tres Pays  annexés  ,  feront  traitées  uniquement  & 
fouverainement  pardevant  le  Confeil  de  Brabant  , 
&c  que  ce  Confeil  ne  fera  aux  ordres  de  perfonne  , 
fînon  du  Prince  même,  &  de  fon  Gouverneuf  & 
Capitaine  -  Général,  f'oye^  V Ati.  5  dt  la  Joyeufe 
Entrée  de.  Sa  Majcjlc  du  ly  Juillet   ijSr. 

Il  eft  même  certain  que  perfonne  ,  hors  fadlte 
Majefté ,  &  Leurs  Akeffes  Royales ,  les  Lieutenans 
Gouverneurs  -  Capitaines  Généraux  ,  ni  le  Confeil 
Privé ,  ni  le  Miniftre  Plénipotentiaire ,  ni  même  le 
Gouvernement  Général  ,  n'ont  aucuti  ordre  à  don* 
ner  au  Confeil  Souverain  de  Brabant. 

Les  termes  dudit  5e.  Art.  du  Pacle  ,  ou  Traité 
fait  entre  le  Prince  6:  les  Etats  repréfentant  le  Peuple , 
font  à  cet  égard  évidens  &  décififs.  D'où  l'on  doit 
conclure  ,  que  ce  Confeil  n'eft  pas  feulement  un 
Confeil  de  Juftice,  mais  auffi  un  Confeil  de  Gou- 
VMneneent. 

L'autorité  du  Confeil  de  Brabant  furpaiTe  même 
celle  du  Grand-Confeil  féant  à  Malines  ;  il  a  devers 
foi  la  Chancellerie  :  fon  Chancelier  en  eft  le  Garce 
des  Sceaux  perpétuel  :  toutes  les  Dépêches  en  Bra- 
bant ,  &  aux  Pays  y  unis  &  annexés ,  ou  en  dé- 
pendans ,  doivent  être  fcellées  de  ce  Sceau  par- 
ticulier ;  faute  de  quoi ,  elles  n'ont  aucune  exé- 
cution. 

Ce  Confeil  aceordolt  grâce  de  .mort ,  rappel  de 
ban  ,  lettres  de  répit  ou  attermination ,  de  fureté  de 
corps ,  de  ceffion  de  biens  ,  d'adjonétion  à  l'office  , 
pendant  la  yle  de  l'Officier,  de  iupplément  d'âge  &c.; 


(  I7M 
&  à  cet  égard  il  étoit  en  paralelle  avec  le  Confeil- 
Prlvé. 

Il  eft  vrai ,  que  fouvent  on  a  voulu  lui  contefter 
ces  Prérogatives  ;  mais  alors  les  Chanceliers  ,  per- 
ibnnes  de  naiïïance  &  de  mérite  ,  ont  toujours  fu 
écarter  les  pitges  qu'on  lui  tendort.  Ce  n'eft  que 
pendant  ce  fiede  que  l'intrigue  ,  habilement  menée  , 
a  pu  parvenir  à  les  fins ,  en  établifTant  des  Chan- 
celiers ,  (i  je  puis  le  dire  ,  de  balle  extraction  ,  qui 
ont  laifTé  priver  le  Confeil  de  l'es  Prérogatives,  & 
înfenfiblement  faper  Tes  fondemens  ,  au  point  que, 
d'un  trait  de  plume ,  on  le  veut  aujourd'hui  lup- 
primer  :  témoin  le  3e.  Art.  du  prétendu  Diplôme 
portant  Etablïjjîmtnt  des  nouveaux  Tribunaux  de 
Juflicc^   du  piemier  Janvier    lySj. 

Mais  grâces  à  la  valeur ,  à  la  bravoure  ,  à  la  pru- 
dence ,  &  à  l'attachement  de  nos  ancêtres  pour  le 
Prince  !  grâces  à  leur  amour  pour  la  Patrie  !  ils  ont 
cimenté  le^;  fondemens  du  Confeil  de  Brabant  d'un 
moellon  fi  iblide  &  fi  inébranlable,  que  ni  fape  ni 
pic  ne  peuvent  lui  porter  coup.  Les  Articles  4,5, 
6,  &  7,  du  Traité  fait  entre  le  Prince  régnant  & 
le  Peuple  ,  le  17  Juillet  17^1  ,  connu  fous  le  nom 
de  Joyeufe  Entrée ,  lont  les  garans  de  fa  confei^- 
tion  &  de  fa  durée. 

Le  Confeil  de  Brabant ,  indépendamment  du  fufdit 
Traité  entre  le  Prince  &  le  Peuple  ,  a  encore  un 
autre  appui ,  qui  doit  en  écarter  la  fupprefTion  ,  & 
qu'on  a  eu  foin  de  laifTer  ignorer  au  Prince. 

L'Empereur  Charles  IV  accorda  en  I349  à  Jean  lll. 
Duc  de  Brabant  ,  le  fameux  Privilège  par  forme 
d*£dit  perpétuel ,  nommé  la  Bulle  d'Or  Erabaminc  , 
par  laquelle  il  efl  interdit  à  tous  Princes  EcciéfialHques 
&  Séculiers,  Juges  &  Tribunaux  de  l'Empire  d'exercer 
aucune  Jurifdidion  fur  les  Habitans  des  Duchés  de 
Brabant ,  de   Limbourg   &  de   leurs  dépendances , 

de 


(  177  ) 

de  les  citer,  évoquer  ou  arrêter  en  leur  perfonne  ^ 
ou  bien,».  ,  dans  quelques  afFoires  que  ce  puiflTe  être  , 
criminelle*: ,  réelles   ou  perfonnelles. 

Cette  B'jlle  fut  confirmée  par  l'Empereur  Sigif- 
mond  en  1414,  &  par  l'Empereur  MaximiHen  en 
i^iz  ,  alnfi  que  par  l'Empereur  Charles  V  le  5 
Juillet  15^0.  Cette  dernière  confirmation  fut  donnée 
de  l'avis  des  Etats  de  l'Empire,  &  Charles  V  commit 
l'exécunon  de  cette  Bulle  au  Confeil  de  Brabant, 
qu'il  conilitua  à  cet  effet  Pûcairc  Impérial  avec  au- 
torité de  procéder  contre  tous  Contrevenans,  Princes 
ou  Membres  de  l'Empire  ,  Séculiers ,  ou  tccléfiaf- 
tiques,  de  quelque  rang  eu  condition  qu'ils  puflenc 
être  ,  comme  contre  des  rebelles  ;  6>c  de  les  con- 
damner à  une  amende  de  deux  cents  marcs  d'or  , 
applicables  pour  une  moitié  au  Fifc  Impérial  ,  & 
pour  l'autre  au  Duc  de  Brabant  ;  &  de  les  priver 
de  leurs  Droits ,  Rangs  ,  Honneurs  &  Dignités , 
même  de  les  mettre  au  ban  de  l'Empire  :  ordonnant 
bien  exprefîement  ,  que  tout  ce  que  le  Confeil  de 
Brabant  fera  &  décernera  dans  celte  matière  ,  aurd 
la  même  force  &  vigueur  ,  comme  «.'il  eût  été  fait 
&  décerné  par  l'Empereur  même. 

Butkens  tom.  2  loc.  cit.  §.  5  ,  rapporte  que  le 
Confeil  de  Brabant  ,  en  vertu  de  ces  concevons  , 
a  toujours  ufé  de  l'autorité  de  Vicaire  Impérial^  &C 
de  juge  délégué  dans  l'Empire  :  qu'en  cette  qualité 
il  a  pris  fouvent  connoifTance ,  hi  porté  même  des 
Décrets  contre  des  Princes  du  premier  Ordre.  Haraeus 
rapporte,  dit-il»  qu'en  l'an  14^7?  le  Duc  de  Ju- 
liers  fut  cité  pour  les  violences  par  lui  exercées 
contre  quelques  Citoyens  de  la  Ville  de  Dieft ,  qu'il 
avoit  fait  condamner  à  mort. 

Cette  Bulle  n'a  pas  été  accordée  imiquement  en  fa- 
veur du  Duc  de  Brabant  ,  mais  auffi  des  Braban- 
çons &i.  Limbourgeois  \  Se  de  plus  fon  exécution  a  été 


(  173  ) 

donnée  Si  commife  taxativemer,t  au  Confcil  de  Bra- 
bant  par  la  confirmation  de  Charles  V  ,  du  3  Juil- 
let 1 550. 

De  lorte  que  fi  le  Confeil  de  Brabant  étoit  Tup- 
primé,  cette  exécution  crouleroit  d'elie-inéme,  ainfi 
que  la  moitié  de  l'amende  de  deux  cents  marcs  d*or 
que  ladite  confirmation  de  Charles  V  applique  au 
Duc  de  Brabant  :  &  par  conféquent  les  Brabançons 
feroient  indiredement  prives  du  bénéfice  de  la  Bulle 
d'Or. 

Il  eA  fenfible,  que  tous  les  Ducs  de  Brabant  fu- 
turs ne  feront  pas  Empereur  Romain  ,  &  Duc  de  Bra- 
bant à  îa  fois  ;  ainfi  que  de  ce  chef  la  fuppreHion 
du  Confeil  de  Brabant  feroit  à  l'avenir  préjudi- 
ciable tk  au  Duc  &  aux  Brabançons. 

Revenant  au  fufdit  prétendu  Diplôme,  il  eu.  en- 
core vrai  de  dire,  que,  fuivant  le  9me.  art.,  on  a 
voulu  fupprimer  ,  à  l'exception  des  feules  Jufiices 
jmilitaires  ,  tous  les  autres  Tribunaux ,  Corps  5c 
Cours  de  Juflice  àes  Pays-Bas,  &  conféquemment 
aufli  les  Bines  de  Santhoven  &  d'Uccle. 

Le  Duc  Régnant  s'efl:  formellement  engagé  arf. 
40  de  fon  paéle  ou  traité,  fait  fous  ferment  le  17 
Juillet  1781  avec  fon  peuple  repréfenté  par  les 
Etais ,  qu'il  les  tiendra  (ces  Bancs)  en  état  tels  qu'i's 
étoieut  lors,  &  comme  il  appartient,  fes  Eche- 
vins  d'Uccle  tenant  leur  réfidence  en  la  Ville  de 
Bruxelles. 

Ayant  parlé  en  particulier  du  Confeil  de  Brabant , 
des  Bancs  de  Santhoven  ^  d'Uccle  ,  dont  il  eft  ex- 
preiTément  fait  mention  dans  les  Joyeufis  Entrées^ 
3e  ne  parlerai  qu'en  général  des  autres  Cours  de 
Juftice  ,  parce  que  la  préteadue  lupprellion  n'eft 
anlTî  portée  qu'en  général  par  le  fufdit  Diplôme  , 
fauf  cependant  qu'à  l'égard  des  Juftices  Seigneuriales 
il  en  e(l  fait  un  article  féparé  :  aina  je  propoferai 


(  ^7^  ) 

mes.  raifons  fur  ces  deux  points.  Je  commence  par 
les  trois  Chefs-Villes. 

Les  Ducs  de  Brabant,  dit  Butkcns  tom.  2  Uv.  8, 
ont  de  tout  teins  confié,  &  commis  la  Police,  con- 
duite ,  &  Gouvernement  des  Villes  de  leurs  Pays 
aux  Magiftrats ,  qui  étoient  étaWiî  à  cet  effet. 

La  charge  d'Echeyin  eft  fort  ancienne  ,  &c  a  ea 
félon  toute  apparence  fon  origine  en  France,  puifcjue 
nous  liions  aux  Capitulaires  de  Charlemagne  (  qui 
font  les  plus  anciennes  Loix  des  François  .1  qu'il 
commandoit  à  fes  CommilTaires  d'élire  des  Echevins , 
des  Avocats,  &  des  Notaires,  ut  M'iffi  nojtrl  Sca^ 
binos  ,  Advocatos  ,  &  Notarios  PER  SlNGULA 
LOC  A  eligant ;  6c  il  y  a  plus  de  huit  cents  ans  que 
cela   fe  pratique. 

Lefdits  Magiflrats  ont  de  tems  immémorial  joui 
d'une  telle  autorité  en  Brabant  ,  que  devant  leurs 
Lchevins  font  comparus  le  plus  notables  Seigneurs 
de  ce  Pays-Bas  &  de  divers  autres  Provinces  & 
Royaumes,  pour  y  pafTer  le«  contrats  de  leurs  ma- 
riages, teftaniens,  partages  &  autres  atfles  de  Juflice. 

La  forme  d'élire  les  Echevins  eu.  prefcrice  par 
JUSTINIEN  in  authcnticis  ;  &  il  efl  trcs-nécef- 
faire  qu'on  choififfc  des  perfonnes  de  confidération , 
qui  aient  les  conditions  fuivantes  :  premièrement , 
qu'ils  foient  natifs  de  la  même  Ville,  &  non  étran- 
gers ;  parce  que  ceux  qui  ne  iont  pas  natifs  de  la 
même  Ville ,  ou  qui  n'y  font  domiciliés  que  depuis 
quelques  années ,  ne  peuvent  jamais  être  fi  propres 
au  Gouvernement  &  maniement  des  affaires  d'icelle 
que  les  originaires  ;  d'autant  plus  que  pour  l'ordi- 
naire un  étranger  n'eft  jamais  C\  agréable  aux  ha- 
biîans  6>c  bourgeois  que  leur  concitoyen  ,  qui  a  na- 
turellement plus  d'affeâiion  pour  la  confervation  de 
la  Vilie  ;  joint  aufli  que  par  la  difpofuion  civile , 
extrantï  facile  ad  regni  arcana  non  fum  admitundu 

M  2 


(  i8o  ) 

Quant  au  Magiftrat  de  Louvain  ,  il  dit  que  (es 
fept  Echevins  é(oient  anciennement  des  fept  Ligna- 
ges Patriciens  &  Nobles  ;  mais  que  différentes  dif- 
cuffions  étant  furvenues ,  elles  turent  afîbupies  moyen- 
nant un  arrangement  que  firent  le  Duc  Wencelin 
&  la  Duchefle  Jeanne ,  par  forme  de  Concordat  & 
d'Edit  perpétuel,  en  date  du  8  Septembre  1378; 
que  delà  en  avant  fero'nnt  déjîgnés  tous  les  ans  par 
le  prince  quatre  Echevins  des  Lignages  privilégiés  & 
trois  de  la  Commune  ,  &  avec  iceux  onT^e  Confeillers 
defdits  Lignages^  hors  dcfquels  Jeroit  choiji  un  Bourg" 
Mellre  ,  &c.  ;  avec  pluiieurs  autres  points  ,  dont 
ils  dépêchèrent  leurs  Lettres  ,  qu'on  nomme  la  Char- 
te de  Règlement  de  Louvain. 

Quant  à  cette  Ville  de  Bruxelles,  il  dit  que  les 
fept  Echevins  (  qui  forment  l'Echevinage  )  ont  été 
de  tems  immémorial  élus  dans  les  fept  Familles  Pa- 
triciennes i  nobles  &  privilégiées  ;  enforte  que  per- 
fonne  n'eft  admis  à  l'emploi  d'Echevin  ou  de  Ma- 
gifirat ,  s'il  n'eft  iffii  d'une  defdites  familles. 

Ce  Privilège  eft  fi  notoire  ,  &  fi  conftamment  ob- 
fervé  jufqu'à  ce  jour,  que  perfonne  de  la  Ville  n'en 
doute. 

Butkens  rapporte  une  lifte  des  Magiftrats  de  cet- 
te Ville,  qu'il  commence  feulement  à  l'an  1539. 
Mais  il  avoue  que  leur  origine  eft  plus  ancienne  ^ 
&  il  s'exciife  de  ne  commencer  fa  lifte  qu'à  la  fuf- 
dite  époque,  par  la  raifon  qu'autrement  il  ne  l'au- 
roit  pu  donner  fuivie  &  fans  lacune. 

Il  fe  trouve  néanmoins  dans  le  Tréfor  das  Privi- 
lèges de  Bruxelles  ,  dit  den  Luyjîer  van  Brabanty 
une  Charte  du  Duc  Henri  I ,  en  date  deux  jours  avant 
le  Dimanche  des  Rameaux  1134,  qui  porte,  qu'on 
fera  le  choix  Echevinal  à  Bruxelles  huit  jours  avant 
la  St.  Jean  ;  preuve  évidente ,  qu'alors  il  y  avoit 
des  Echevins  à  Bruxelles, 


(  .8.  ) 

Quant  aux  Echevins  de  la  Ville  d'Anvers ,  Bue- 
kens  rapporte,  que  dès  l'aa  1130,  ils  étoient  au 
nombre  de  douze,  qui  furent  augmentés  dans  la 
fuite  jufqu'à  feize  ,  &  qu'alors  ils  étoient  au  nom- 
bre de  dix- huit. 

Quant  aux  Echevins  des  autres  Villes,  peut-on 
douter  qu'elles  n'en  aient  eus  ?  Je  trouve  même 
une  Charte  ,  extraire  de  celles  de  Brabant  ,  rappor- 
tée par  Butkens  aux  preuves  du  Livre  4  ,  foL  46  , 
de  Henri  I  Duc  de  Brabant,  en  date  de  iit;2  , 
par  laquelle ,  entre  autres ,  il  oélroya  ,  que  tous  les 
Bourgeois  de  Vilvorde  ne  leront  traités  par  juilice 
qu'en   leur  Ville  ,  &  pardevant  leurs   Echevins. 

Sur  quoi  il  faut  remarquer,  qu'à  cette  époque  les 
Cours  des  Echevins  exiftoient  déjà,  puifque  le  Duc. 
ne  les  établiffoit  pas ,  mais  qu'au  contraire  il  fta- 
tuoit,  que  les  Bourgeois  de  Vilvorde  devroient  être 
traités  dans  leurdite  Ville  pardevant  leurs  Echevins. 

11  eft  encore  à  remarquer ,  que  puifque  Vilvorde  , 
qui  n'a  jamais  été  une  des  Chef-Villes  du  Brabant, 
avoit  déjà  des  Echevins ,  il  efl  moralement  fur ,  que 
les  Chef- Villes  en  avoient  auflî. 

Butkens  rapporte  loco  cit.  que  dans  la  Ville  de 
Bois-le-Duc  ,  Godefroid  Duc  de  Brabant  en  établit 
cinq  en    1584. 

Dailleurs  il  eft  palpable  ,  d'après  robfervatiori  de 
Butkens  ci-deffus  rapportée,  que  chaque  Ville  ôc 
Franchife  a  eu  fes  Echevins  dès  l'jnftant  qu'elle  a 
été  érigée  ;  &  cela  devient  indubitable  ,  lorfqu'on 
obferve  que  dans  les  Joyeufes  Entrées  des  Ducs  de 
Brabant ,  depuis  des  fiecles  &  des  fiec'es  ,  il  a  été 
(lipulé  &  convenu  ,  comme  il  l'eft  par  l'Art,  i  de 
celle  du  Duc  régnant  du  17  Juillet  1781  ,  qu'il  les 
traitera  &  fera  traiter  tous  les  Prélats,  Maiions-Dieu, 
Barons,  Nobles  &  bonnes  Gens,  &  Sujets  de  (qs 
Villes,  Eranchifes,  &  Pays   de  Brabant,  &  d'Ou- 

M  î 


tre-Meufe  en  toutes  chofes  par  droit  &  fenfence  i 
Julvant  le  droit  des  Villes  &  Bancs  ,  où  il  appai' 
tiendra  &  devra  être  fuit. 

Quafit  à  la  fuppreiîion  des  Juftices  Seigneuriales, 
il  faut  obferver ,  que  de  celles-ci  la  plus  grande 
partie  a  été  vendue  par  le  Prince,  ou  de  l'a  part, 
aux  pofiefTeurs  d'icelies ,  ou  à  leurs  auteurs  ,  &  que 
quelques-unes  de  la  part  du  Prince  ont  été  enga- 
gées aux  poflefieurs  ,  ou  à  leurs  auteurs  ,  &  que  les 
Bcquéreurs  en  les  acquérant,  ont  eu  ces  JuTùces  en 
vue  pour  régler  leur  prix  d'achat  Ça'). 

De  plus  que  les  pofîeireurs  à  chaque  changement, 
foit  par  fuccefllon ,  donation  ou  ach?it  ,  en  ont  dû 
taire  le  relief  ,  &  payer  les  droits ,  &r  même  à  l'a- 
venir en  devront  faire  le  relief  &  payer  les  droits  ; 
quand, même,  dans  la  fuppofition  du  Diplôme,  ils 
en  feroient  privés;  car  le  f^iifeur  <]udit  Diplôine  n'y 
a  nulle-part.rien  difpofé  relativement  à  la  ceffation 
de  ces  reliefs. 


(a)  Dans  le  Diplôme  du  22  Oilobre  1626,  qui  renferme 
les  condiîiorjs  de  la  vente  d'un  très-grand  nombre  de  Seig- 
neuries de  Brabant  Cv  de  Limbourg ,  on  Ht  art.  X.  »  Item, 
„  es  Viiiages  tk  Seigneuries  où  de  toute  ancienneté  il  y 
„  a  eu  Banc  &  Juftices,  composez  deMayeur  &.  Eciievins, 
„  lei'dits  Bancs  &  Juftlces  demeureront  en  même  état  qu'ils 
„  ont  été  jufques  à  préfent,  &  iront  à  rcffort ,  Loi  &  Ap- 
„  pel  aux  Co'-.rs  &  Confeils  qu'il  appartiendra  ,  comme 
„  autres  Juftices  hames  y  fituées ,  &  pourront  les  Ache- 
„  teurs  établir  &  renouveller  les  OfBciers  ,  &c.  art.  XI. 
„  Mais  là  cil  il  n'y  a  point  pour  le  préfenr ,  Icfdits  Ache- 
5,  teurs  en  pourront  établir  &  ériger  de  nouveaux ,  comme 
.,  auiîi  ériger  figne  patibulaire,  carquant,  plllory ,  &  antres 
,,  marques  deJuflice  &  JurifdiC'Lîon  hautaine,  &.  y  mettre 
„  tel  Mayeur ,  Echevins  &•  autres  Officiers  capables ,  qu'ils 
;,  trouveront  convenir,  pour  faire  Droit,  &  prendre  con- 
„  noiflance  de  tovues,  tant  caufes  cviff;inelles  que  civiles,  & 
,,  au  furplus ,  exercer  toute  telle  JuAlce  qu'appariiendra  aux 
„  Seigneuri^îs  hautes ,  Moyennes  Se  b:iiTes  en  Erabant.  " 


(  •»?  ) 

Il  n'a  pas  même  W\(fé  entrevoir,  que  fori  inten"»" 
tîon  feroit  telle.  Les  circonrtances  &  la  façon  dont 
on  agit ,  ne  permetrent  pas  de  fe  flatter  qu'on  les 
fera  ceflfer ,  ni  qn'on  en  indemnifera  !a  perte  ;  car 
l'expérience  jurqu'ici  a  conftaté ,  que  le  Datif  efî 
au  néant ,  &;  {'Ablatif  à  fà  place. 

Rien  n'ed  fi  contraire  à  la  bonne  foi  que  de  vou- 
loir reprendre  ce  que  vous  avez  vendu  ,  &  le  droit 
porte  qu'il  faut  repouffer  certe  demande:  Querrz  cnim  de 
cvi&ione  tenet  aciio  ^  eumdtm  egîntim  rcpcllit  exapiio. 

En  outre ,  rede  a  voir  ,  Meffeigneurs ,  ii  cette 
fuppreflïon  des  Juftices  n'efl  pas  une  rufe  pour  fa- 
per  infenfiblcment,  métne  anéantir  l'Etat  Noble  dé 
cette  Province,  comme  celle  de  ne  pas  conférer  les 
IVélatures  vacantes  en  eft  une  pour  anéantir  i'Etac 
Eccîénaftique ,  envahir  les  biens  des  Abbayes,'  &c 
devenir  ainfi  feuî  maître  abfolu. 

l!  vous  eft  connu  ,  Meffeigneurs ,  qu'aucun  ne 
peut  être  reçu  Membre  de  l'Etat  Noble ,  fans  qu'il 
ait  une  Terre  titrée  ,  ayant  haute  Juftice  ,  dont  il  ti\ 
en  droit  de  porter  le  titre  honorifique:  l'Art.  4  des 
Inflru£lions  pour  la  direéiion  dts  preuves  à  faire  le 
conflate. 

Refle  à  voir  fi  par  la  fuite  ,  dans  !c  cas  qu'on 
admît  ladite  fupprefiîon  ,  on  ne  voudra  pas  difpu- 
ter  aux  Seigneurs  le  droit  de  Hsute- Juftice ,  &  en 
conclure  qu'ils  fout  dépourvus  de  la  qualité  requife 
pour  être  admis  à  l'Etat  Noble. 

Ainû  la  prudence  autant  que  l'équité  exigent 
qu'on  n'admette  pas  ladite  fuppreffion  projetteè  : 
on  peut ,  &  on  doit  s'y  oppofer. 

Ce  prétendu  Diplôme  bleffe  le  droit  de  tous  le* 
h.ibirans  de  cette  Province,  &  il  ed  contraire  à  la 
Confiirution  fondamentale  ;  il  n'efl  fait ,  ni  porté  jl 
l'intervention  du  Confeil  de  Brabant,  comme  il  îc 
devroit  être,  félon  que  j'ai  remarqué  ci-devànt;  & 

M  4 


C  i?4  ) 

qui  pluseft,  il  porte  même  la  fuppreflîon  Scranéan- 
tiiTement  de  ce  mêrne  Conlei!. 

Ce  Diplôme  porte  la  deftrudion  du  Paé^e  ou  con- 
vention ,  que  le  Duc  régnant  a  fait  &  a  dû  faire 
pour  que  nous  le  reconnuffii^ns  pour  notre  Prince: 
on  voit  même,  qu'il  y  eft  dit,  Article  :o  ,  que 
tous  Juges  fans  exception  prêteront  ferment  à  leur 
admiffion  fur  Toblervation  exaélc  du  nouveau  Rè- 
glement de  la  Procédure  Civile  ,  &  des  lnfiru6tion$ 
y  relatives. 

C'eft  l'unique  ferment  qui  leur  eft  enjoint  ,  & 
du  moment  qu'ils  l'ont  prêté  ,  tout  eft  dit  ;  fuivant 
la  difpofition  dudit  Diplôme  ,  ils  entient  en  aéli- 
vité ,  fans  qu'ils  doivent  prêter  aucun  autre  fer- 
ment. 

Cependant ,  fuivant  la  Joysuft  Entrée  ,  tout  Juge  en 
Brabant  doit  jurer  l'obfervation  d'iceîîe  >  Art.  lo; 
le  Prince  eft  convenu  avec  le  Peuple  de  le  faire 
obferver  ,  &c.  il  l'a  promis  même  fous  ferment, 

Confsquemment  ledit  Diplôme  eft  diainéiralement 
oppofé  à  fon  contrat,  à  fa  piomciïe  &  à  fon  fer- 
ment. Que  peut-on  ,  ou  que  doit- on  attendre  de 
celui  qui  contrevient  à  fa  parole  donoée  ,  à  fon  con- 
trat,  à  la  bonne  foi  ,  &  même  à  ion  ferment? 

Jugez-en  ,  MciTelgneurs  ;  un  chacun  penfe  à  cet 
égard  ,  comme  11  !e  fent ,  je  me  contenterai  de  vous 
laifter  purtei  votre  jugement  :  perfonne  que  le  Tout- 
Puiffant  ne  ccnnoîtra  le  mien  ;  il  doit  nse  fuffirc 
de  voii-^  l'avoir  fait  remarquer. 

Je  (lois  cependant  dire  quelcue  chofe  relat've- 
ment  au  nouveau  Règlement  de  la  Procéduie  civile, 
dont  les  Juges  doivent  jurer  l'ob'^ervation  exafte  ; 
c'eft  ,  que  ce  Réç^lement  contient^  des  erreurs ,  des 
contradiélions  ,  même  des  abfurdirés  telles  ,  qu'on 
feroit  bien  d'en  envoyer  l'Auteur  à  CFcole.  Ce  Rè- 
glement ,  dont  l'exécution  eft  impoffible  ,  &  qu'on 


(  '85  ) 

propofe  pour  le  bien  public  ,  prépare  le  malheur 
du  Pays  <k  la  ruine  de  bien  des  faoïiîles.  Je  ne  fuis 
ni  Monarque  ni  Légiilateur  ;  mais  s'il  ctoit  poiîible, 
que  mon  nom  pût  paroitre  à  la  tête  d'un  tel  ou- 
vrage,  je  ne  le  fouffrirois  pas  >  parce  que  je  fuis  cer- 
tain ,  que  je  leroi'  bafoué  tant  des  Juriicon^ultes  , 
que  des  Praticiens  mciiie  les  plus  médiocres. 

Je  conclus  donc  pour  les  railons  ci- devant  détail- 
lées ,  y  jointe  la  dilpcfition  du  7e.  Art.  de  ia  fé- 
conde Lettre  additionnelle  du  Duc  Philippe-Ie  bon  , 
en  date  du  j.^  Novembre  !4S7  »  qu'il  a  pareillement 
promis,  &  juré  d'obferver  :  que  cedit  Diplôme  n'eft 
pas  admiflîble  ,  qu'on  ne  doit  pas  y  acquieicer ,  com- 
me étant  non-feulement  contraire,-  aux  Conftitutions 
foodamentales  de  cette  Province ,  mais  comme  por- 
tant la  deflruftion  &  l'anéantidement  d'icelles  , 
piiiiqu'il  nous  fait  force  &  volonté. 

Il  me  refte  encore  à  traiter  d'ui:  objet  de  la  plus 
grande  importance  ;  des  Abbayes  qu'on  laiflfe  dé- 
pourvues reipedivement  d'Abbés  &  d'Abbtfles,  ce 
qui  eft    pareillement  contraire   à   la  Joyeuje   Entrée, 

Qjant  à  ce  point  ,  il  faut  obferver  d'abord  ,  qu'au- 
cune Abbaye,  Prieuré,  Maifon-Dieu  ,  ou  Couvent 
n'exifte  en  Brabant  fans  préalables  Lettres  d'06lroi ,  & 
de  l'agrément  des  Villes  :  en  fécond  lieu  ,  que  tous 
généralement  ont  obtenu  des  Lettres  ^ amsnifation  ; 
ainfi  que  tous  ,  conjentïentïhus  Principe  &  Populo  , 
(ont  admis  dans  la  Province,  y  vivent  au  rang  des 
Sujets,  ôc  forment  une  partie  de  l'Etat  :  enfin  que 
chaque  Abbave  conflitue  un  corps ,  dont  l'Abbé  ou 
l'Abbefle  eft  le  Chef.  Or  il  eft  de  toute  évidence, 
qu'un  corps  naturel  fans  tête  ne  peut  fubiîfter ,  ôc 
il  en  eft  de  même  de  ces  corps  allégoriques. 

Les  Abbayes  fans  Abbés  fr-ufFrent  une  dégrada- 
tion continuelle  ,  tant  par  rapport  au  fpirituel ,  que 
par  rapport  au  temporel  ',  deforte  que  fi   on  ne  les 


(  »S6  ) 

Tuppriine  pas  abfoliîment  ,  comme  on  a  tenté  ce 
fupprimer  le  Confeii'de  Brabant ,  &  toutes  les  Cours 
de  Jiiftice  ,  elies  s'anéantiront  infenlible-ment  d'elles- 
mêmes  :  car  n'ayant  pas  respectivement  d'Abbé  ou 
<!'Abbe(T£  ,  perfonne  ne  fe  présentera  pour  y  être 
admis  ;  mr.is  ne  recevant  pas  de  Novices ,  il  n'y 
aura  pics  de  jeunes  Profès  :  ainfi  le  corps  s'étein- 
dra ,  &  par  une  coniequence  inévitable  ,  Tes  fonds 
devenus  des  biens  vacans ,  feront  dévolus  au  Fifc  ; 
&  nous  n'aurons  plus  de  Corps  Eccléfiafiique- Ré- 
gulier. 

Ces  obfervations  faites ,  je  vous  prie  ,  MelTeigneurs  , 
cTe  faire  attention  aux  premier  &  cinquantefeptieme 
Articles  de  la  Joyeufe  Entrée,  du  ly  Juillet  1781. 
Le  premier  porte  entre  autres  ,  que  Sa  Majefié 
leur  fera  bon  ,  équitable  &  fidèle  Seigneur  ,  &  qu'il 
ne  leur  fera  ,  laiflera  ,  ni  foufFrira  être  fait  en  fciçori 
quelconque  aucune  force,  ou  volonté  &c. ,  le  57e., 
que  dorénavant  on  ne  pourra  en  maniera  quelconque 
donner  ,  faire  ou  laiïTer  donner  dans  ledit  Pays  de 
Brabant  aucunes  Abbayes ,  Prélatures ,  ni  dignités  en 
Commande  &c. 

Peut-on  dire  qu'en  eu  bon  ,  équitable  5;  fidèle  , 
quand  on  ne  rend  pas  à  chacun  ce  qui  lui  ei\  dû  <, 
&  ce  qui  lui  appartient  ?  La  négative  efl:  évidentip 
Jîme ;  ciT  c^eii  contrevenir  manifedement  au  troifieme 
précepte  de  Droit ,  jus  fuum  cuique  trihuere.  Or,  c'eft 
wn  droit  qui  appartient  aux  Abbaye*,  qu'elles  aient 
refpeftlyeraent  leur  Abbé  ou  AbbefTe. 

Peut-on  auffi  dire,  qu'on  ne  fait,  ne  laifTe  faire, 
ou  qu'on  ne  fouffre  pas  être  fait  en  façon  quelcon- 
que aucune  force,  ou  volonté ,  quand  on  fiit  tort  à 
lin  tiers  ,  qui  n'y  a  aucune  part ,  6c  ne  peut  l'em- 
pé:her?  On  doit  fans  héfirer  admettre  la  négative; 
car  c'eft  contrevenir  au  deuxième  précepte  de  Droit , 
altèrum  non  'x'din  ,  q^â  concerne  la  Société  politl- 


(  iS;  ) 

crue,  &  qui  nous  ordonne  de  ne  faire  aucun  préju- 
dice à  qui  que  ce  foit. 

Ce  précepte  puremeut  relatif  à  autrui ,  nous  cLlige 
à  le  traiter  comme  nous  voulons  être  traités  nous- 
mêmes  ,  ce  qui  forme  le  bon  Citoyen  ;  &  il  n'tft 
pas  jufte  que  l'on  foufiVe  du  tait  d'autrui ,  lorfqiie 
'on  n'y  a  point  de  part. 

Les  Abbaves  refpeif^ivement  dépourvues  d'Abbé 
&  d'Abbeiîe  n'y  ont  aucune  part  :  le  choix  tCi  fait; 
les  Coinmiiraires  font  pavés ,  Se  tout  ce  qui  eft  re- 
quis pour  obtenir  un  Abbé,  efî  achevé  :  il  dépend 
uniquement  du  Prince  de  les  nommer,  &:  il  ne  le 
fait  pas.  La  conlequence  eft  jufte  qu'il  fait,  ou  laiïïe 
faire  fores  &  volontî. 

Il  fait  môm.e  pis,  que  ce  à  quoi  il  s'eft  engagé, 
audit  Art.  ^7,  cii  ne  donner  ^  faire  on  la'iffcr  donner 
CCS  Ahbayis  en  commence  :  car  en  ne  nommant  ni 
Abbés  ni  AbbeiTes ,  U  fait  que  les  Abbayes  dépériront, 
dont  à  la  fui'e  i!  pourra  s'approprier  tous  les  biens, 
au  lieu  que  les  Abbés  Commendataires  en  ")ouiroient 
d'une  partie  ,  &  ne  manqucroient  pas  de  travailler  à 
en  conferverl'exiftence;  5<:  peut- être  y  reu(iiroient-ils. 

Entre  bien  d'autres  objets  de  plaintes ,  qui  me  ref- 
tent  encore,  je  traiterai  par  préférence  ce  ce  qui  tou- 
ctîe  îe  plus  direftement  l'état  des  Citoyen^  ;  tel  eic 
l'enlèvement  du  iieur  de  Hondt ,  Habitant  de  cette 
Ville. 

11  m'eft  impofîîble  de  fixer  l'époque  de  cette  en- 
lèvement ,  mais  l'époque  n'y  fait  rien  ,  il  fufEt  que 
le  fait  foit  vrai ,  notoire. 

La  caufe  en  eft  incornue  ;  on  fait  feukment  par- 
la voix  publique  ,  qu'on  le  croit  impliqué  ï^ans  l'af- 
faire ,  dont  le  Général  Legisfcldt ,  prifonnier  à  Vienne, 
eft  accufé. 

Quoi  qu';l  en  puifTe  être  ,  il  eft  conftant  qu'on  Ta 
furpris,  enlevé,  mal^-ré  toutes  les  réclamations  des 


(  iS8  ) 

ï^nviîffges  du  Pays,  qu'il  a  pu  faire;  &c  qu'on  Ta 
nuitamment  &  furtivement  tranfporté  à  Vienne ,  les 
fers  aux  pieds  &  aux  mains. 

Sa  malheureufe  Epoufe  ,  dont  la  trifte  fîtuation 
déchire  le  cœur  de  tout  homme  fenfîbie ,  implore 
votre  fecours  ,  MefTeigneurs  ,  éontre  la  violation  la 
plus  outrageufe  du  droit  des  Gens  ,  des  Privilèges  de 
cette  Ville,  &  même  de  la  Conftitution  fondamen- 
tale de  cette  Province. 

Je  n'entrerai  pas  dans  la  Queftion ,  s'il  eft  cou- 
pable ou  innocent ,  parce  que  cela  ne  fait  rien  à  l'af- 
faire ;  je  dirai  feulement  que  dans  la  fuppofition 
gratuite  qu'il  fût  criminel ,  l'attentat  n'en  fubfîfte  pas 
moins. 

Je  ne  puis  cependant  omettre  de  remarquer  qu'il 
ii'étoit  pas  convaincu  ,  puifqu'il  n'avoit  pas  été  en- 
tendu par  fon  Juge  compétent  :  &  je  dois  obrerver 
aufîi,  que  fuivant  les  maximes  de  Droit ,  il  doit  être 
cenfé  innocent  :  Qui/que  prcefumitur  bonus  ,  donec 
probctur  malus  ,  &  Jî  accufare  fufficiat  ,  quis  inno^ 
cens  erit  ^ 

Dans  ces  circonftances  ,  l'attentat  eft  plus  outra- 
geant à  fon  égard  ,  &  il  eft  affreux  pour  fon  Epoufe  : 
dans  quelle  cruelle  fituation  doit-elle  fe  trouver  ,  fé- 
parée  à  trois  cens  lieues  de  fon  mari?  Quelles  agi- 
tations fon  cœur  ne  doit -il  pas  effuyer  ?  Quel  hor- 
rible tableau  doit  (e  préfenter  continuellement  à  fon 
imagination  !  Elle  voit  fon  Epoux  courbé  fous  le 
poids  de  fes  chaînes  dans  un  cachot  obfcur  &  infeâ, 
ne  recevoir  pour  toute  nourriture  que  du  pain  & 
de  l'eau  :  elle  le  voit  à  tout  moment  frémir  de 
crainte  de  devenir  la  vi6lime  de  fes  accufateurs,  & 
d'être  enchaîné  avec  des  forçats ,  dont  le  fort  eft 
cent  fois  plus  cruel  que  la  mort.  Elle  le  voit  qui  lui 
tend  les  bras,  pour  la  confoler,  malgré  les  angoifles 
dont  fon  cœur  eft  déchiré;  il  femble  lui  dire  :»  Chère, 


C  i89  > 

»»  maïs  trop  malheureufe  Epoufe ,  votre  fituation  eft 
»  encore  plus  déplorable  &  plus  touchante  que  la 
»  mienne  ;  je  luccomberai  à  mes  maux  ;  vous  me 
»  furvivrez  ,  mais  veuve  d'un  homme  qu'on  croira 
»  coupable,  malgré  fon  innocence,  tâchez  que  votre 
*>  ame  (uive  la  mienne,  vos  maux  cefferont ,  &C 
»  nous  aurons  le  bonheur  de  voir  paroître  devant 
»  le  grand  Juge,  le  Juge  des  Minières  6î  des  Rois, 
»  ceux  qui  nous  caufent  tant  de  maux  ,  &  leur  in- 
»  juftice  fera  confondue  ;  ils  reconnoîtront  enfin 
»  combien  les  jugemens  de  Dieu  (ont  différens  des 
»   leurs.  « 

Il  eft  notoire ,  que  le  Sr.  de  Hondt  eft  depuis 
nombre  d'années  fixement  domicilié  dans  cette  Ville, 
qu'il  y  poffede  des  biens -fonds,  &  qu'il  y  a  tou- 
jours joui  d'une  réputation  à  l'abri  des  reproches  ; 
que  par  conféquent  il  y  a  acquis  le  droit  de  Citoyen, 
quoiqu'il  ne  Teroit  pas  Bourgeois ,  ce  que  j'ignore  : 
mais  il  fuffit  d'être  Habitant  pour  jouir  de  tous  les 
droits,  ^ue  la  Coutume  de  la  Ville  accorde  aux 
Bourgeois ,  hors  ceux  qui  rendent  habiles  à  entrer 
dans  quelque  Corps  de  Métier  :  ^rt,  225  eies  Cou- 
tum.  de  Brux.  * 

Il  convient  de  remarquer  ce  que  la  Coutume  de 
cette  Ville  porte  &  ordonne  à  cet  égard,  i  ^.  Art.  4a  , 
les  Bourguemaîtres  ,  Echevins  &  Confeiîlans  font 
Juges  ordinaires ,  ayant  connoiffance  fur  les  Bour- 
geois dans  la  Ville  &  fa  Franchife ,  ôc  fur  ceux 
du  Pays  de  Brabant ,  hors  les  Villes  libres,  auffi  fur 
ta  Habitans  de  la  Ville ,  non  privilégiés ,  en  caufes 
criminelles,  civiles,  perfonnelles ,  &  réelles  &c. 

z°.  Art.  64.  Il  n'eft  pas  permis  à  l'Amman  ni  à 
fon  Lieutenant ,  ni  aux  Sergens  jurés  d'appréhender 
aucuns  Bourgeois  ,  inhabitans  de  la  Ville  ,  pour  caufes 
criminelles  ,  fans  due  information  ,  ni  aufli  pour 
caufes  civiles  &c. 


(  ipo  ) 

5®.  Art.  113.  Les  Bourgeois  internes  &  externes 
font  fujeis  au  Magiilrat  de  cette  Ville  en  matière 
criminelle ,  &  de  biens  meubles ,  de  dettes ,  amendes  , 
&  a(R:ions  perfonnelles ,  comme  à  leur  Juge  ordinaire; 
la  Judicature  duquel  ils  ne  peuvent  décliner  &:c. 

4^*.  An.  214.  Les  Bourgeois  de  Bruxelles  ne 
peuvent  être  traités  hors  de  droit ,  ni  être  arrêtés 
dans  la  Ville  ou  fa  Franchi'e  ,  pour  cauîes  civiles  , 
léelles,  amendes,  ou  aftlons  perlonnclles  ;.,..  &  en 
caufes  criminelles ,  ne  peuvent  être  appréhendés  fans 
préalable  information. 

D'après  ces  Articles  ,  il  eft  évident ,  que  fuivanî 
le  Droit  municipal  ,  le  Sr.  de  Hondt  n'a  pu  être 
appréhendé  &  tranfporté  à  Vienne ,  fans  commettre 
un  attentat  contre  ce  Droit.  Le  Magiftrat  de  cetre 
Ville  eft  Ion  Juge  naturel  &  compétent  ;  au  point 
même ,  qu'il  ne  peut  pas  proroger  la  Jurifdlftion. 

De  plus ,  il  n'y  avoir  ni  informations  prépara- 
toires ,  ni  décret  de  prife  de  corps  à  fa  charge  ; 
j'entends ,  Informations  prifes  par  celui  nui  eft  ici 
dans  la  Ville  le  Prépofé  public ,  ou  TOfRcier  de 
Juilice,  5^   -un  Décret  de  fon  Juge  compétent. 

Qu'on  n'oppofe  ;  pas  qu'il  y  avoir  des  informa- 
tions prifes  par  un  autre  Accufareur,  &  un  Décret 
porté  à  fa  ch.arge  par  un  autre  Tribunal.  Cet  Accu- 
jateur,  ce  Tribunal ,  n'avolent  aucune  Jurifciétion 
fur  lui.  Tout  eft  donc  nul,  fuivant  le  droit,  6c  le 
fentiment    univerfel  de    tous    les  Criminaliftes. 

Et  quand  même,  abftra£l:lon  faite  de  cettç  Jurif- 
prudence  certaine,  on  voudroit  oppofer  qu'il  exiftoit 
un  Décret  valable  de  prife  de  coips  à  fa  charge, 
ion  enlèvement  &  tranfport  à  Vienne  n'en  font  pas 
moins  un  atter.tat  à  la  Conflitution  tondamentale  ^ 
&  au  Pacle  que  le  Duc  régnant  a  fait. 

L'Art.  17  de  fa  Joyeufc  Entrée  porte  exprefie- 
menr,  »  Que  fi  quelque  perfonne   eft  appréhendée 


l 


(  '91  ) 

»  dans  le  Pays  de  Brabant  &c  d'Oufremeufe  de  Sa- 
»  dite  Majeitë  ,  qu'il  ne  la  fera  mener,  ni  laiffera 
»  mener  Prifonniere  hors  desdits  Pays. 

De  Hondt  a  été  appréhensSé  dans  cette  Ville  même 
de  Bruxelles  par  des  pièges  abominables  qu'on  lui  a 
tendus ,  &  d'une  façon  diamétralement  oppofée  à 
la  bonne  foi;  on  l'a  lié,  garroté,  transporté  à  Vienne, 
par  ordre  de  Sa  Majefté ,  à  ce  qu'on  lui  difoit. 

Cette  appréhenfion  &  tranfport  faits  par  ordre  de 
Sa  Msjefté,  font  des  attentats  &  des  allions  de 
force  ouverte    les  plus  cara^leriiées. 

Cependant  Sa  Majefté  l'Empereur,  par  fon  Pafle 
d'Inauguration,  Art.  I,  a  formellement  ftipulé&C  juré, 
qu'il  ne  leur  fera,  laiffera ,  ni  (ouffriia  être  fait, 
en  façon  quelconque,  aucuiîe  force  ou  volonté. 

Combinez  à  préfent  l'appréhenfion  &  le  tranfport 
de  De  Hondt  à  Vienne  avec  la  ftipulation  reprife 
audit  Article.  Q^el  contfafle  !  Ne  diroit-on  pas 
qu'il  n'a  fait  ce  Pa£\e  qu'avec  le  defieiii  de  ne  pas 
s'y  tenir  ;  ou  du  moins  de  ne  le  fuivre  qu'en  ce 
qu'il  lui  plairoit  ?  C'efî  néanmoins  une  Jurifprudence 
univerfelle ,  adoptée  mém.e  entre  1-es  Nations  les 
moins  policées ,  que  toute  CONVENTION  FAITE 
OULIGE. 

J'ai  appris  qu'on  vouloit  légitimer  cet  attentat  ,- 
par  la  raifon  que  De  Hondt  avoir  eu  la  qualité  d'jnf- 
pefteu--  des  vivres  ;  mais  ce  prétexte  efl  plus  fpécieuj: 
que  folide.  De  Hondt  n'a  jamais  été  engagé  comme 
militaire  ;  il  n'a  prêté  aucun  ferment  :  enfm  ,  il 
n'a  traité  que  pour  la  livraifon  des  fourrages  aux 
troupes. 

11  faut  encore  remarquer  ,  que  cette  entrcprife 
n'a  été  faite  que  pour  la  Guerre,  que  Sa  Majeflé  vou- 
loit pourfuivre  en  qualité  de  Duc  de  Brabant  contre 
la  République  d'Hollande,  pour  l'ouverture  de  i'fcl- 
eauti  d'où  il  refaite,  i".  que  De  Hondt  a  contracté 


(  '92  ) 

ici  en  Brabant ,  i*.  qu'il  a  contrarié  relativement  au 
Duché  de  Brabatit. 

Du  premier  réfultat  il  s'enfuit ,  que  s'il  eft  cou- 
pable de  quelque  crime,  fon  procès  doit  abrolu- 
ment  être  inftruit  en  Brabant  ,  &c  que  c'eft  en  Bra- 
bant  qu'il  devroit  fbbir  la  peine  ,  à  laquelle  il  pour- 
roit  être  condamné:  parce  qu'il  eft  certnin  ,  fuivant 
la  Jurisprudence  criminelle ,  quod  rationt  domïciL'ù 
accufatus  de  crimir.c  fortiatur  forum  comptuns ,  de 
même  que  rationc  Locï  ^  uhï  crimtn  perpetiatum  eft: 
car  ubi  te  capio  ,  ibi  te  pnnio.  Dans  les  avions  per- 
fonnelles  &c  civiles  ,  le  domicile ,  &t  l'endroit  où  le 
contrat  s'eft  pafîe,  donnent  auffi  \e  forum  ou  la  com- 
pétence à  l'égard  du  Juge  envers  celui ,  qui  doit 
être  aftionné. 

Il  fuit  du  fécond  réfultat ,  qu'ayant  contrafté  eti 
Brabant,  &  par  rapport  à  cette  Province,  il  ne  peut 
être  aftionné,  ni  tranfporté  hors  du  Brabant,  encore 
moins  dans  l'Empire;  la  Bulle  d'Or  Brabanrine , 
dont  l'Empereur ,  comme  Chef  de  l'Empire  ,  doit 
maintenir  l'exécution,  eft  décifive  à  cet  égard  ,  com- 
me je  l'ai  démontré  ci-devant  en  traitant  de  la 
fuppreflion  du  Confeil  de  Brabant. 

En  outre  ,  on  peut  encore  oppofer  à  cet  enlè- 
vement &  tranfport  de  force  le  2  4me.  Jrt.  de  la 
Joyeufe  Entrée,  qui  porte  ,  »  Que  Sa  Majefté  ne 
»  fouffrira,  qu'aucun  de  fondit  Pays  pourra  arrêter, 
»  inquiéter,  ni  adjourner  un  autre,  hors  le  Pays, 
»  fi  ce  n'eft  qu'il  feroit  fugitif,  fans  fupercherie  de 
»  quelques  chofes,  telles  qu'elles  fuffent.  de  même, 
»  ceux  de  fefdits  fujets ,  qui  provoqueroient  un 
»  autre  hors  le  Pays,  le  feroient  provoquer,  ou  ap- 
w  peller,  qu'ils  fourferont  deux  cents  marcs  d  Or , 
»  ou  feront  autrement  corrigés  ,  à  l'arbitrage  ,  ,& 
y  modération  de  ceux  de  fondit  Confeil  de  Brabant  «. 

Suivant  cette  article,  le  Duc  veut  affranchir  tous 

ceux 


ceux  de  fon  Pays  d'être  arrêtés  ,  inquiétés  ,  ou 
ajournés  hors  dudit  Pays ,  par  les  habitans  d'icelui. 
Et  il  fait  prendre,  &  transporter  de  HoxNDT  dans 
un  cachot,  &  il  le  retient  prilonnier  à  Vienne! 

C'eft  vraiment  pis  qu'arrêter  &  inquiéter  ;  aufîî 
eft-il  abfolument  néceflaire  ,  Meffe-gneurs ,  que  vous 
le  fouteniez  ,  &  le  fafliez  reproduire  dans  le  Bra- 
bant,  pour  y  être  fon  procès  fait  &  partait,  s'il  y 
a  matière,  pardevant  fon  Juge  compétent,  jufqu'à 
la  Sentence  définitive;  ôc  s'il  eft  innocent,  le  ré- 
tablir dans  fon  état,  avec  dédomiragen-ent  de  toutes 
pertes  &  dommages  fouffetts;  &  s'il  eft  coupable, 
le  punir  fuivant  la  difpofition  de  nos  Loix. 

Si  l'on  ne  le  réclame  pas,  cet  exemple  tirera  à 
conféquence ,  &  perfonne  ne  fera  plus  fur  de  foii 
état  civil.  On  nous  pourra  tous  enlever  &  tranf- 
porter  ,  l'un  devant  &  l'autre  après. 

Mais  il  efl:  tems  que  je  finifTe  :  car  fi  je  devois 
détailler  toutes  les  infradions  &c  atteintes  faites  oc 
portées  à  nos  Privilèges ,  &  à  la  Conftitution  fon- 
damentale de  cette  Province ,  il  me  faudroit  écrire 
des  volumes.  Je  crois  en  avoir  dit  allez  pour  vous 
démontrer,  Mefleigneurs  ,  que  la  conflitution  fonda- 
mentale du  Pays  eft  violée  ,  malgré  que  le  Duc 
régnant  ,  par  ia  Joyeufc  Entrée  ,  ait  fi  foiemnel- 
lement  prom.is ,  &  fe  foit  obligé  fous  ferment  de 
la  garder  &  remplir  exaélem.enr. 

Mais  puifqu'il  ne  remplit  pas  fes  engagemens , 
permettez-moi  de  vous  rappeller,  que  par  le  59me. 
Art.  Son  Alrefle  »  Albert ,  Prince  Roval  de  Pologne 
»  &  de  Llthuanie  ,  Duc  de  Saxe-Tefchen  &c.  a  au 
»  nom  de  Sa  Majefté  promis  de  bonne  foi  &  juré 
»  perfonnellement  ,  fur  les  faints  Evangiles  ,  pour 
»  Sadlte  Majefté,  fes  Hoirs  &c  SucceiTeurs  ,  à  tous 
»  généralement,  Prélats,  Maifons-Dieu,  Monafleres, 
iy  Barons,  Chevahers,  Villes  &  Franc hifes,  &  tous 


(  ^94  ) 

>>  Sujets  (îe  Sadite  M;jjefté  &  bonnes  Gens  de  Tes 
»  Pays  de  Brabant  &  d'Outremeuie  ,  leurs  Hoirs 
»  &  SuccefTeurs,  de  les  tenir  dorénavant  tous  en  gé- 
y>  néral  fermes  &  ftables  à  toujours ,  &  de  ne  ja- 
»  mais  y  contrevenir  ,  ni  fouftrir  qu'il  y  foit  con- 
»  trevenu  en  aucune  manière;  te  s'il  arrivoit,  que 
»  Sadite  Majefté  ,  fes  Hoirs  &  Succefleuts  vinflent, 
»  allaient ,  ou  fiffent  à  l'encontre ,  par  eux ,  ou 
»  par  quelqu'un  d'autre,  en  tout,  ou  en  partie,  en 
»  quelle  manière  que  ce  foit,  en  ce  cas,  il  conjcnt 
»  &  accorde  au  nom  de  Sa  Majefté,  auxdits  Prélats, 
»  Barons  ,  Chevaliers ,  Villes,  Franchiles ,  &  à  tous 
»  autres  fefdits  Sujets  ,  qu'ils  ne  feront  tenus  de  faire 
»  aucun  fervice  à  àadite  Majefté ,  fes  Hoirs  ou  Suc- 
»  cefTeurs  ,  ni  d'être  obéiftans  en  aucunes  chofes  de 
»  {on  befoin  ,  &  que  Sadite  Majefté  powrroit  ou 
»  voudroit  requérir  d'eux,  jufques  à  ce  qu'elle  leur 
»  aura  réparé,  redrefle  ,  &  entièrement  défifté  ÔC 
»  renoncé  à  l'emprife  ci-deftus  mentionnée  « 

C'eft  d'après  cette  ftipulation  &  fon  acceptation  , 
&  fous  ces  conditions  ,  Mefieigîieurs  ,  que  Vous , 
repréfentant  le  Peuple  de  Brabant ,  avez  promis  que 
vous  ferez  en  tout  bons  &  obéiffans  à  Sadite  Ma- 
jefté ,  comme  des  bons  &  fidèles  Sujets  le  doivent 
être  à  leur  îéglcime  &  véritable  Piince. 

Cette  ftipulation  &  acceptation  eft  une  condition 
Jlnc  qua  non  ;  conféquemmcnt ,  félon  (a  propre  fti- 
pulation ,  vous  êtes  fondé  à  en  faire  uUige  comme 
ont  fait  vos  devanciers  SsC  ancêtres ,  les  Etats  de 
Brab?nt ,  envers  le  Duc  Jean  IV  ,  qui  n'avoir  fait 
que  quelque  réforme  au  Confeil  de  Brabant,  comme 
je  i'ai  démontré  ci-devant. 

Vous  êtes,  Mefteigneurs ,  à  leur  place ,  vous  avez 
les  mêmes  droits  :  &  le  même  fang  Brabançon  coule 
dans  vos  veines.  Mais  la  voie  la  plus  douce  eft  tou- 
jours la  meilleure.  Je  fais  que  vous  avez  eu  recours 


(195) 

à  Leurs  Alrefie«  Ro5'ales ,  mais  fans  fuccès  :  je  m'é- 
tois  pourtant  attendu  que  votre  démarche  auroit  eu 
<juelque  effet ,  fur-tout  confidérant  que  s'étant  fait 
Brahantifcr  y  il  y  avoit  lieu  d'efpéier  qu'elles  au- 
Toient  pris  à  cœur  les  Loix  fondamentales  Brabari' 
çonnes  :  mais  quantum  ejl  in  rcbus  ïnane! 

Enfin  je  tiens  fermement  que  Sa  Majefi^c  n'efl: 
point  informée  au  julle  de  ce  qu'on  prétend  exécu- 
ter ici  fous  l'appui  de  fes  ordres  ,  &  par  l'abus  de 
fon  autorité.  On  n'aura  pas  manqué  de  lui  faire 
part  de  ce  que- des  principaux  Employés  Brabançons 
avoient  accepté  de  nouveaux  Emplois ,  qui  entraî- 
nent la  deftruftion  du  Confeii  de  Brabant  ;  accep- 
tation qui  les  rend  indignes  du  nom  Brabançon  & 
qui  doit  les  faire  conGdérer  comme  traître*  à  la  Pa- 
trie ,  &:  à  leur  ferment  qu'ils  ont  faufle.  Ces  ac- 
ceptations ,  dont  on  aura  informé  le  Monarque , 
l'auront  induit  en  erreur  ;  elles  l'auront  autoriie  à 
croire  qu'on  exécuteroit  ici  tout  ce  que  l'on  vou- 
droit.  Je  penfe  donc  qu'il  importe  hautemei.r ,  Mef- 
feigneutN,  qne  vous  députiez  quelques  Membres  de 
vorre  Corps  vers  la  Perfonne  Sacrée  de  Sa  Majefté  , 
pour  l'informer  au  jufte  des  attentats  qu'on  commet 
ici  fous  fon  nom. 

Et  qu'on  ne  m'oppofe  pas  que  pour  cela  il  fau- 
droit  une  permiilion  du  Gouvernement  ;  c'eft  une 
erreur.  Vous  avez  con^radlé  avec  le  Prince;  il  doit 
vous  être  libre  de  vous  expliquer  vis-à-vis  de  celui 
avec  qui  vous  avez  contra(5lé  :  ce  feroit  autre  chofe, 
fî  vous  alliez  comme  Repréientans  de  quelque  Corps, 
Peut-être  préferrez- vous  de  les  envoyer  vers  S.  M. 
Très  Chrétienne  ,  pour  iinplorer  fes  bons  offices  & 
fa  Royale  Protedion  auprès  de  S.  M.  l'Empe-eur 
&  Roi.  Au  reftc  ,  Meffeigneurs,  je  m'en  rappoire  à 
votre  fagaclté ,  fur  laquelle  je  compre  ;  &'j'e{pere 
qu'à  l'exemple  de  vos  glorieux  Ancêtres,  vous  pri- 

N  i 


(  195  ) 

ierverez  la  Province  du  coup  fatal  dont  elle  ef^ 
menacée  ,  5c  que  vous  foutiendrez  de  tout  votre  pou» 
voir  Ton  ancien  luftre  &  Ts  liberté.  Je  vous  pro- 
tefte ,  Mefieigneurs  ,  que  ce  que  je  fais ,  n*eft  que 
dans  la  vue  de  remplir  les  devoirs  d'un  bon  Citoven  : 
ce  que  je  fais ,  je  le  dois ,  &c  par  attachement  ponr 
mon  Prince  ,  &  par  amour  pour  ma  Patrie. 

■  C'efl:  dans  ces  fentimens  que  j'ai  l'honneur   d'être 
avec  le  plus  profond  refpeft  , 

Me  s  S E I  G NEUR s , 

Votre  très-humble  S:  trè;-obéiffant 
Serviteur,  H.  C.  N.  Vander 
Ngot  jun. 

Bruxelles^  ce  23  Avril  1787. 


u 


OBSERVATION. 


N  vrai  &:  zélé  Patriote  ,  ayant  lu  avec  plaifir 
le  Mémoire  judicieux  de  l'Illuflre  Henry  vander  Noot , 
contenant  les  Droits  du  Peuple  Brabançon  &  les 
atteintes  y  portées  depuis  quelques  années  au  nom 
de  Sa  Majefté  l'Empereur  &  Roi ,  obf'erve ,  que  ce 
Mémoire  n'eft  rédigé  &  mis  au  jour ,  que  pour 
qu'à  l'avenir  les  bonnes  Gens  du  Pays  &  Duché 
de  Brabant ,  mis  au  fait  de  leurs  Droits  &  Privilè- 
ges,  piiiiTent  en  tout  tems  en  écarter  toute  atteinte 
&  infraction  ultérieure.  Il  obferve  entr'autre  avec 
l'illullre  Auteur  qu'autrefois  on  a  fouvent  voulu 
contefier  les  Prérogatives  du  Confei!  Souverain  de 
Brabant,  mais  nu'r.îors  des  Chanceliers,  perfonnes 
de  nsilïance  &:  de  mérife  ,  ont  toujours  fu  écarter 
ie«  pièges  qu'on  lui  tendoi:,  &  que  ce  n'ert  qi:e 
jj^ndant   ce  liecle-ci  qu'on  a  pu  parvenir  à  la  fin 


(  »97  ) 

^u'on  s*ctoit  propofée ,  en  établiiïânt  des  Char.cc- 
iierf  de  bafle  extraftlon  ,  qui  onr  laiffé  dépouiller 
le  Confeil  de  (es  prérogatives  ,  comme  entr'autres 
feu  le  ChinceWer  Strcithagen  ,  qui  à  (on  avènement  à 
cette  Dignitç  j  aquiefça  à  l'abandon  de  quantité  d'Oc- 
trois ,  grâces  &c.  donf  ledit  Confeil  avoit  conftarn- 
ment  joui  jufqu'en  1764,  époque  de  ("on  avène- 
ment à  la  même  Dignité;  6f  ces  Oftrois,  grâ- 
ces &c.  iont  repris  dans  la  Dépêche  en  date  ç 
Avril  de  la  même  année ,  adredée  au  Conl'eil  Sou- 
verain de  Brabant  le  11  dudit  mois,  &  dont  on 
croit  devoir  transmettre  la  teneur  au  Public  pour 
(on  informatioTi. 


€bàRLES-Jlex^XJDRE  y  Duc  de  Lorrain  i&  de 
Bar  y  Lieutenant^  Gouverneur  &  Capiiàinè-Gé- 
riérji  de  Pays-Bas,  &c.  &c. 


A 


YANT  trouvé  corvenable  de  porter  à  la  con- 
noifiance  de  Sa  Miijijîî  les  diverfes  Repréfentations 
contenant  les  raifons  &;  motifs  fous  l'appui  defqueU 
vous  fouîenez  être  en  droit  d'accorder  dans  l'étendue 
4e  la  Pro.vinc£. de  Brabant  généralement  toutes  efpe- 
ces  d'Oclrois  de  Juftice ,  de  grâces  &  autres,  elle 
a  bien  voulu  nous  faire  connoitre ,  que  la  concef- 
fioa  dei  Oé^rois  ,  étant  un  attribut  ini'éparable  de  la 
Souveraineté,  vous  n'avez  pu  en  accorder  que  fous 
ion  bon  plaifir,  &  aufii  long-tems  qu'elle  a  bien 
voulu  vous  permettre  l'exercice  de  cette  autorité; 
qu'en  coniequence  elle  a  jugé  à  propos  de  (e  ré- 
ferver  ou  à  fon  Gouvernement  Général  des  Pay*- 
Bas,  &  de  vous  interdire  la  difpenfation  des  06troii 
fuivans ,  à  peine  de  nullité. 

1^.    Lettres    de   n-ituralité   ^  d'habi'ité   à    l'cgircl 
ÀQ  tous  Etrangers  non  fujets  de  Sa  Majejfé, 

N  3 


(  ,98  ) 

1^.  Lettres  de  légitimation. 

30.  Lettres  d'amortiflement  pour  Gens  de  main- 
mo'ta. 

4'<.  Pour  récibîiflernent  de  nouvelles  Fabriques. 

^*^.  Pour  la  recherche  des   Minéraux. 

6^.  Pour  Moulins  à  Eau  &  à  Vent. 

7®.  Pour  l'établifTeiDent  des  Voitures  publiques. 

H°.  Pour  la  conftru^lion  &  entretien  des  Chauf- 
fées &  excavation  on  approfondiiTemtnt  de  Canaux 
ou  Rivières,  lorfque  ces  ouvrages  doivent  fe  taire 
hors  du  Diftriâ:  ou  de  la  Banlieue  d'une  Ville, 
Bourg   ou  Village. 

ç**,  Oélrois  pour  la  conftruclion  de  nouvelles 
Eclufes  &  Tenues  d'Eau. 

ïo".  Pour  diguer  les  Terres  inondées. 

1  ïî".  Pour  fournir  aux  Aides  &  Subfîdes  avec  tout 
ce  qui  y  a  du  rapport. 

11^.  Ceux  qui  regardent  les  Droits  Domaniaux 
ou  Régaliens,  Papier  Timbré,  Tonlieue,  Acciies  , 
3Ç)roits  &  Importions  fur  les  Denrées  ou  Marchan- 
difes  &  choies  lembltibles,  foit  que  leur  perception 
ait  été  accordée  aux  Adniiniftracions  à  titre  d'enga- 
gere  ou  autre  quelconque. 

ij*?^;Ceux  par  leiqueis  il  s*agiroiî  d'augmentef 
une  Impofition  éép  établie. 

4°.  Ceux  qui  tendent  à  acquitter  les  dettes  con- 
traélées  pour  quelqu'une  des  caufes  fufdifeç. 

ly^.  Le  Placet  des  Bulies- Apoftoîiques  oour  di- 
gnités Eccléliaftiques  &  pour  les  difpo/itions  &* 
commiffions  des  Supérieurs  Eccléfiaftiques  étrangers, 

i6*-\  Lettres  de  réiniffion,  d'abolition  ,  d'iujpofi»^ 
tion ,  de  lilence  ,  rappel  de  Ban,  Sauve-gai  de  ou 
Saur  conduit  pour  les  Bannis,  Criminels,  Fugitifs, 
condamnée  à  peine  afRiclive,  &  autres  grâces  fem- 
bîables. 

i7*^.  Pour  Foire  franche. 


(  199  ) 

i8^.  Pour  Marché  hebdomadaire. 

l()^.  Quant  aux  Oélrois  pour  imprimer,  on  Te 
conformera  à  la  Dépêche  de  Son  Altcjji  Royale 
du  27  Juillet  1763. 

20^.  Oclrois  pour  vendre  ,  aliéner  ou  changer 
aux  Etrangers  les  biens  fitués  fous  la  Frontière. 

21^.  Lettres   de  Si^nijicamus. 

En  vous  notifiant  cette  difpofition  d'après  les  Or- 
dres exprès  de  Sa  MajcjU  ,  nous  vous  prévenons  , 
que,  par  provifion  &  jufqu'à  autre  Ordre,  vous 
pourrez  continuer  d'accorder  en  la  manière  accou- 
tumée les  autres  Octrois  non  compris  dans  la  ré- 
(erve  ci-deffus  ,  &  au  lurpius  qu'il  ne  fera  rien 
changé  ni  innové  fur  le  fait  des  Oftrois  en  géné- 
ral quant  au  Scel  ni  quant  à  la  Signature.  A  tant. 
Chers  &  Bien-Amés  ,  Dieu  vous  ait  en  fa  fainte 
Garde.  De  Bruxelles  le  5  Avril  1764,  étoit  Para- 
phé, Ne.  Vt.  Signé,  Char.les  de  Lorraine  :  Se 
plus  bas  contrefigné ,  Di  Rcuu 

UIPLOME  par  lequel  les  rênes  du  Gou- 
vernement des  Pays-Bas  font  m'ijes  par 
intérim  entre  les  mains  de  Mr»  le  Comte 
de  Muray, 


J 


OSEPH  ,  ê<c.  Ayant  trouvé  bon  de  rappeller  près 
de  notre  Personne  Impériale  &  Royale  ,  pour  un 
certain  tems ,  Leurs  Altefles  R.ovales  &  notre  très- 
cher  Se  féal  Louis  Comte  de  Barbiano  de  Belgio- 
jofo,  notre  Miniftre  Plénipotentiaire  dans  les  Pro- 
vinces Belgiques  fous  les  ordres  des  Séréniffimes 
Gouverneurs-Généraux;  l'attention  que  nous  faifons 
à  tout  ce  qui  peut  intéreiTer  le  bien  -  être  de  nos 
bons  &  fidèles  Sujets  Belgiques ,  nous  porte  à  prendre 

N4 


(    200   ) 

tlès-à-préfent  les   précautions  néceffaires  pour  pré- 
venir &  empêcher  les  fuites  préjudiciables,  auxquelles 
rofdites  Provinces  Belgiques  pourroient  être  expolées 
pendant  Tabrence  de  Leurs  Alteffes  Royales  &  du 
Miniftre  Plénipotentiaire,  fi  nous  n'avions  pas  pourvu 
à  leur  AdminiRration  par  le  choix  d'une  perfonne  , 
qui  fe  trouvant  fur  les  lieux,  ait  en  même  tems  les 
qualités  requifes  pour  prendre  provifionnellement  les 
rênes  du  Gouvernement- Général  de  ces  Provinces. 
A  ces  caules  ,  par  la  confiance  que  nous  avons  en 
notre  très- cher   &  féal  jofeph  Comte  de  Murray  , 
Baron  de  Me'gun  ,  notre  Chambellan  aéluei ,  Che- 
valier de  notre  Ordre  militaire  de  Marie-Thérefe , 
Confeilier  d'Etat  intime  aâiuel ,  Lieutenant-Général, 
Colonel  propriétaire  d'un  Régiment  d'infanterie  ,  &c 
notre  Général-Commandant  des  armes  aux  Pays-Bas  , 
èz  fur  la  connoifïance  que  nous  avons  de  fon  zèle , 
de  fa  prudence  &  de  fon  expérience;  favoir  faifons, 
que  ce  que  de'fTus  confidéré  ëc  faifant  une  attention 
particulière  aux  fervices  diftingués  qu'il  nous  a  déjà 
rendus,  &  à  ceux  qu'il  continue  de  nous  rendre  à 
notre  entière  fatisfadion  ,  nous  l'avons  créé  ,  infiitué 
6si  établi,  le  créons,  inflituons  &:  érabliffons  p?ir  les 
préfentes  notre   Lieutenant  ,    Gouverneur  &:  Capi- 
taine-Général par  intérim  &  pendant  l'abfénce  de 
ïeurfdites  Aiteffes  Royales  aux  Pays  Bas.  A  quel  eCÎQt 
nous  avons  donné  &  donnons  audit  Comte  Jofeph 
de  Murray,  plein-pouvoir  &  autorité  de  gouverner 
-nos  Provinces  Belgique^ ,  de  vaquer  à  toutes  les  af- 
faires qui  y  furviendront ,  de  mainreiilr  nos  Vaffaux 
&  Sujets  DANS  î>!OTRE  SAINTE  ReLIGKJN  CATHO- 
LIQUE, Apostolique  et  Romaine;  de  faire  ob- 
ferver  la  Juflice  par  tous  nos  Confeils  ,  Jufticiers  & 
'Officiers,  tous  &   chacun   en  leur  RefTort  &  Jurif- 
diction  ;  de  pourvoir  &  faire  pourvoir  &  difpofer  , 
comme  il  appartiendra  fur  k-s  requêtes,  plaintes  ôç 


(  lor  ) 

recours  de  nos  Sujets  ;  de  taire  afîembîer  devers 
lui,  ou  ailleurs  où  bon  lui  femblera,  &  autant  ce 
fols  qu'il  voudra  ,  les  Chevaliers  de  l'Ordre  de  la 
Toifon  d'Or  ,  notre  Confeil  du  Gouvernement- 
C/énéral ,  &c  tous  autres  nos  ConieiU  par  nous  or- 
donnés &C  à  ordonner  ;  d'y  faire  propoî'er  6£  mettre 
en  délibération  toutes  les  matières  &  affaires  qui  lui 
furviendronr  ;  de  prendre  fur  leurs  opinions  &  avis 
telles  concluions  &c  réfolutions  qu'il  apparnendra , 
&  de  les  faire  mettre  à  exécution  ;  d'avoir  la  Turin- 
tendance,  tant  de  ce  qui  concerne  la  Juftice  &  les 
Finances,  qsi.e  fur  nos  Troupes  de  terre  6s:  de  mer> 
ôc  fur  les  Gouverneurs  de  nos  Provipices  &  Villes, 
&  fur  tous  autres  Officiers ,  tant  généraux  que  par- 
ticuliers de  Juftice  &  de  Recette  dans  toute  l'étendue 
de  notre  domination  aux  Fays-B^s  ;  de  faire  émaner 
&  publier  toutes  fortes  d'Edits ,  Statuts ,  Ordonnances 
qu'il  trouvera  convenir  au  bien  ,  utilité  ,  commodité 
&  bonne  police  de  nofdits  Pays  &  Sujets  ;  de  con- 
férer toutes  Charges ,  Dignités  ,  Emplois ,  Offices 
&  Bénéfices  de  notre  difpoHtion  ,  qui  viendront  à 
vaquer  ;  d'accorder  5t  oftrover  grâce  ,  rémiffion  , 
abolition  ,  pardon  &c  rappel  de  banniiTement  à  tous 
criminels  &  malfaiteurs  ;  de  faire  convoquer  &  a<- 
fembler  les  Etats  de  nos  Provinces  refpeCtives  des 
Pays-Bas,  lorfque  bon  lui  femblera,  pour  y  faire 
propofer  telles  affaires  que  notre  Royal  fervice  & 
le  bien-être  de  nofdites  Provinces  pourront  exiger; 
de  figner  de  notre  nom  &  fceller  de  nos  Sceaux  , 
toutes  Provilions  &  Let'res-parentes  qu'il  aura  trouvé 
bcn  d'accorder  ;  quant  aux  Lettres  clofes  ,  nous 
voulons  &  ordonnons  ,  que  la  Dépêche  s'en  faffe 
dorénavant  fous  notre  Nom  Royal ,  qu'elles  foient: 
iignées  par  lui,  &  par  celui  de  nos  Secrétaires,  au- 
quel il  en  aura  commandé  l'expédition  ;  &  voulons 
que  ces  Let;res  Se  Provifions,  ainfi  dépâ.hée^  ,  ayent 


(    202    ) 

la  même  force,  valeur  &  effet,  que  (î  Nous-mêmes 
les  euffions  fignées  ;  avons  enfin  autorifé  &  autorifons 
ledit  Comfe  Joleph  de  Murray  ,  à  faire  ,  ordonner  , 
commander  &  faire  exécuter  tout  ce  qu'il  verra  être 
à  l'avantage  &  à  l'iionnear  de  notre  Royal  fervite, 
&  à  la  conlervation  de  nos  Droits,  Haareurs  ,  Sei- 
gneuries ,  Autorité  &  Prééminence ,  de  même  qu'au 
bonheur  &  à  la  tranquillité  de  nofdits  Pays  ÔC  Sujets, 
tout  alnfî  ,  &  en  la  forme  &  manière  que  nous 
ferions  &  pourrions  faire  ,  fî  nous  y  étions  en  per- 
Tonne  ;  fuppléant  à  cet  tf^t^i  par  ces  préfentes  à  tout 
ce  que  pourroit  réquérir  ou  e>:iger  mandement  plus 
ample  ;  &:  promettant  en  fol  &  parole  d'Empereur 
&c  Roi ,  d'avoir  pour  agréable  ,  ferme  &  flable  ,  & 
d'obferver  inviolabîement  tout  ce  qui  aura  été  fait , 
convenu  &  conclu  ,  accordé  &  exécuté  par  ledit 
Comte  Jofeph  de  Murray  ,  en  conféquence  defdites 
prélentes,  fans  jamais  faire,  dire  ni  aller  ,  ni  foufFrir 
être  fait ,  dit ,  ni  allé  au  contraire ,  le  tout  fur  le 
pied  qu'en  ont  ufé  &  pu  ufer  les  autres  Lieutenans, 
Gouverneurs  &  Capitaines-Généraux  ,  par  intérim, 
&  d'après  les  inftruéVions  aftueiles  de  notre  Gou- 
vernement-Général ,  &  celles  que  nous  jugerons  à 
propos  de  lui  donner  dans  la  fuite.  Donnons  en 
mandement  aux  Chevaliers  de  l'Ordre  de  la  Toifon 
d'Or,  nos  Conf'eillers  d'Etat,  &  à  notre  Conl'eil  du 
Gouvernement-Général,  &  à  tous  autres  Conl'eils  , 
à  tous  Gouverneurs,  Capitaines,  Jufticiers,  Ofïiciers , 
Valfaux  &:  Sujets,  que  ce  pourroit  regarder  &  tou- 
clier ,  qu'ils  ayent  à  reconnoure  ledit  JoTeph  Comte 
de  Murray  pour  notre  Lieutenant ,  Gouverneur  &c 
Capitaine  Général  par  intérim  de  nos  Provinces  de» 
Pays-Bas,  &  comme  tel,  &  repréfentant  notre  Per- 
fonne  Royale,  ils  lui  faiTent ,  portent  &  rendent 
tout  honneur,  refpeft  &  obéiffance  ,  comme  à  Nous- 
mêmes;  qu'ils  l'aident  oc  l'alîiftent  de  leurs  conféils 


&  lumières,  de  tout  leur  pouvoir,  en  tout  ce  qui 
concerne  les  aflfaires  du  Gouvernement- Général  , 
autant  de  fois  qu'ils  en  feront  par  lui  requis ,  & 
qu'enfin  ils  le  faiîent  &  laiiTent  pleinement  jouir  & 
uier  du  Gouvernement- Général  que  nous  lui  con- 
fions de  nos  Provinces  Belgiqnes ,  cefifant  tous  con- 
tredits &  empêchemens  au  contraire;  car  alnfi  nous 
plait-il  :  voulons  qu'au  vidimus  des  préfentes  ou  à  la 
copie  coliationnée  &  (ignée  par  un  de  nos  Secré- 
taires ,  foit  ajouté  foi  comme  à  l'original  ;  en  té- 
moignage de  quoi  nous  avons  figné  les  préfentes , 
&  nous  y  avons  fait  mettre  notre  grand  Scel.  Donné 
à  Vienne,  !e  ^  Juillet  ^'J^'J.  Etait  paraphé  K.  R.  vt. 
fip^é  :  JOSEPH,  Plus  bas  itoit  :  par  l'Empereur  & 
Roi ,  étoit  figné  :  A.  G.  de  Lederer. 

Petite  Pièce  remarquable  par  des 
Anecdotes  patriotiques  que  bien  des  per~ 
fonnes   ignorent, 

LES  BRABANÇONS  DE  ZUMJUNGEN. 


D 


ANS  un  tems  où  le  Patrotifme  zélé,  dont  les 
braves  Belges  font  animés,  attire  fur  nous  les  regards 
de  toute  l'Europe,  on  fera  charmé  peut  erre  de  con- 
noître ,  qu'il  e\ifîe  loin  de  nous  des  Citoyens  de 
Bruxelles,  à  qui  la  valeur  mérita  ce  glorieux  titre* 
On  pourra  voir  en  méme-tems ,  que  nos  Ancêtres 
furent  récompenfer  de  la  manière  la  plus  fîatteufe 
des  hommes  courageux,  qui  bravèrent  la  mort  pour 
défendre  notre  Ville  ,  &  qui  au  prix  de  leur  fang 
en  f^uverenr  les  habi*ans.  Ne  méritons  point  le  re- 
proche d'enfevelir  dans  un  oubli  ingrat    des  aclions 


(  104  )     ^ 

dont  l'éclat  fut  fatal  à  nos  ennetTiis;  ayons  la  bonne 
toi  de  reconnoître  que  jadis  Bruxelles  dut  Ton  falut 
à  des  M'I.taires,  qui  unifiant  l'intérêt  du  Prince  avec 
celui  de  l'es  Sujets,  combattirent  glorieufcment  pour 
iiotre  Fatiie.   Voici  le  fait. 

En  170S  la  Ville  de  Bruxelles  fut  afliégée  par 
rEleâeur  de  Bavière.  Monlîeur  Pafchal  en  étoit 
Gouverneur,  &  Monfieur  Wrangd  commandoit  la 
garnifon.  Le  fiege  étant  vivement  preffé  &  la  crife 
très- alarmante ,  on  tint  un  Confeil  pour  décider,  ii 
le  chen-.in  couvert  de  Scharbeck ,  qui  dans  ce  mo- 
ment étoit  de  la  dernière  importance  ,  feroit  aban- 
donné:, avant  de  prendre  une  réfolucion  dans  des 
ci'confîances  ayffi  critiques  ,  on  demanda  l'avis  du 
Licutenant-^  Général  Robert  Murray ,  malade  alors 
«îa-ns  la  Ville  de  Bruxelles.  Son  avis  fut  digne  de 
<t>a  courage.  11  prétendit  qu'il  falloit  foutenir  le  che- 
min couvert ,  6sC  s'en  chargea  lui-même  quoiqu'acca- 
hlé  par  une  maladie  douloureufe.  Transporté  dans 
Fendrolt  ouvert  aux  coups  de  l'ennemi ,  il  ne  ba- 
lança point  d'expoier  Tes  jours ,  pour  défendre  les 
Habitants  de  Bruxelles  du  maffacre  &  du  pillage 
«doat  llsetoient  menacés;  fécondé  par  la  bravoure  de 
tes  foidats ,  entre  autre  d'une  partie  du  Régiment  de 
ZuTîîjungen ,  il  refta  en  poffeffion  du  chemin  cou- 
-ert  ;  le  Prince  Eugène  eut  le  tems  de  quitter  le 
i:-c2^G  de  Lille  pour  pafîer  l'Eicaut  à  Audenarde,  & 
ie  leTidemain  l'Elecleur  fut  contraint  de  lever  le 
iîesje  de  Bruxelles.  Les  récompenfes  fuivirent  de 
près  le  mérite.  Le  Général  Robert  Munay  {*)  reçut 


(a)  Robert  Munay  pafTa  la  Mer  avec  Guillaume  Roi  d'An- 
gleterre, en  qualité  de  Li'utenaiit-Colonel  des  Gardes  Ecof- 
ioiftr;.  Peu  de  tems  après  li  fr:t  fait  Colonel-Propriétaire  d'un 
l"i.è?;mtnr  EcolTois  au  îervice  cia  L.  H.  P,  I'  mourut  Gouverneur 
rf.-i  ToOTna-i ,  Si  laiiîa  nn  fih  héritier  de  fes  vertus ,  qrà  marchant 


des  remerdmens  flatteurs  de  la  part  des  Etats-Cé- 
nérsux,  &  une  Lettre  de  remercîment  de  la  maia 
du  Roi  d'Efpigne ,  envoyée  par  un  courier  de  Bar- 
celone ;  diftinftion  fort  extraordinaire  dans  ce  tems- 
là.  Le  régiment  de  Zurvjunçen  eut  le  droit  de  Bour- 
gtoifïe;  il  porte  aujourd'hui  le  nom  de  Kauniî7^-Riî~- 
ttrg ,  &  fe  trouve  en  garnifon  en  Allemagne. 

Par  un  Ciieycn  de  BruxdUs» 


AVIS  AUX  BELGES. 

Res  ac  penculum  commune  coegît  ^  quoi 
quifque  foffit  in  re  trépida  Frc^fidii  hi 
médium  conferre.  Difcours  de  Camille 
aux  Ardeates.   Tit,  Liw  Dec.  i.  Lib.  5, 


A  Majefté  l'Empereur  &  Roi ,  demande  aux 
Provinces  Belgiques  qu'eUes  envoient  leurs  Dépu- 
tés à  Vienne  pour  convenir  &  s'accommoder  en- 
femble.  Convient-il  que  les  Provinces  y  envoyent 
leurs  Députés  ou  non  ?  Voilà  une  réfolution  terri- 
ble ,  d'où  dépend  la  guerre  ou  la  paix  ,  le  ialut  ou 


fur  les  traces  de  fon  Père,  eft  aujourd'hui  décoré  des  titres 
les  plus  honorables  ,  &  exerce  la  cii-rge  importante  de  Com- 
raandanr-Général  des  Pays-Bas  Aunich-.ens.  Le  départ  de 
Leurs  AlteîTes  Royales  &  du  Minl/lre,  a  forirjii  à  Sa  Ma; 
]ePic  l'Empereur  une  occafion  de  témoigner  hautement  la 
confiance  qu'elle  a  mife  en  ce  Général ,  en  le  chargeant  aJ 
intcrim  du  Gouvernement  des  Pays-Bas.  Nous  avons  tout 
lieu  d'efpérer ,  que  u  ie  Fera  né  Ecojfois  a  faiivé  jadis  la  Ca- 
pitale du  Brabant  par  fa  valciir,  le  h!>  né  Bdge  faura  main- 
ter.ir  h  tran':juillité  &  contribuer  à  la  félicite  pubiique  par 
fa  modératie»  &  par  fa  prudence. 


(  io6) 

la  défolation  des  Provinces ,  la  vie  ou  la  mort  des 
Sujets.  La  choie  eft  donc  affez  conféquente  pour 
que  tout  bon  Citoyen  ,  tout  homme  qui  a  quelque 
expérience  dans  les  affaires ,  foit  autorifé  à  commu- 
niquer au  Public  ce  qu'il  croit  être  utile  aux  cir- 
conftances.  Voilà  franchement  ce  que  je  penfe  & 
les  raifons  fur  lefquelles  s'appuie  ma  penfée.  Si  je 
puis  être  utile  au  Pays ,  je  me  croirai  heureux  pour 
la  vie;  fi  j'ai  le  malheur  de  ne  pas  l'être,  ma  vo- 
lonté eft  bonne,  &  c'eft  ma  récompenfe  ,  mon  avis 
îie  fera  mal  à  perfonne. 

Je  crois  donc  (  fauf  meilleur  avis  )  qu'il  eft  de 
l'intérêt  du  Peuple  5c  des  Provinces  que  les  Dé- 
putés aillent  à  Vienne,   en  voici  quatre  raifons: 

lo.  11  eft  aufîi  clair  que  le  jour  ,  que  Sa  Majefté 
fe  troave  dans  un  mauvais  pas,  qu'elle  le  fent,  & 
qu'elle  ne  cherche  qu'uh  moyen  honnête  de  s'en 
tirer  ;  la  preuve  de  ceci  réfulte  évidemment  de  fa 
Lettre  du  3  Juillet  1787,  où  Sa  Majefté  réduite  à 
des  lieux  communs ,  eft  contrainte  de  fe  rejetter  fur 
fes  internions  qu'elle  foutient  avoir  toujours  été  juftes , 
bienfaifantes ,  équitables.  Or  ,  nos  Députés  prouve- 
ront à  Sa  Majefté  que  fes  volontés  n'ont  pas  été 
exécutées  ,  ils  diront  que  notre  réfiftance  étoit  pour 
demander  l'exécution  des  volontés  de  Sa  Majefté  ; 
ils  ajouteront  que ,  fi  l'amour  de  la  liberté  noiis  a 
porté  à  quelque  audace,  quelque  force  dans  nos 
Repréfentations  ,  ils  en  viennent  faire  (oumiflion  ,  & 
que  ce  n'en  eft  qu'une  plus  grande  preuve  de  fidé- 
lité &  d'srtachement  au  Souverain  &c.  ht  voilà  le 
moyen  honnête  que  Sa  Majefté  attend  pour  fortir 
du  mauvais  pas  où  elle  fc  trouve.  C'efl  peut-être 
le  plus  court  &  l'unique  moyen  de  réconciliation. 
Ceux  qui  croient  que ,  parce  que  nous  ne  fommes 
pas  rebelles  ,  nous  ne  devons  pas  faire  de  foumif- 
fion,  ne  connoiflient  pas  la  Politique  des  Cours,  ni 


(  se;  ) 
le  cœur  des  Rois.  Qu'ils  fe  reflbiivjennent  de  ces 
trois    vérités  qui  font  ar.fK   anciennes  que    les  vices 
de  l'homme,  i  ^  .  Celui  qui  a  oifenTÔ  ,  ne  pardonne 
jamais  le  premier.  2  ^  .  Les  Rois  n'ont    jamais  tort, 
j^.  Les  Sujets  doivent  payer  les  taures  des  Princes. 
Q^uidciuid  délirant  Reçues  pUcluntur  Archivi.  Korar. 
iv>.  Jufqu'aujourd'hui  tout   ce  qui  a  été    fait  peut 
être  imputé  au  Miniflere  &  à  un  abus  de  l'autorité 
Souveraine ,  tout  peut  s'imputer  au  Miniftre  ,  &  ce 
fera  juftement  là  le   refuge  de  Sa   Majefté.  Toutes 
nos  Réclamations   font  connues  de  l'Univers.  L'U- 
nivers eft  notre  Juge ,  l'Univers  nous  donne  droit. 
Nous  pouvons  juiqu'ici  paroïtre  n'avoir    réiiilé  qu'au 
Miniftre  qui  abuloit  de  l'autorité  du  Souverain  ;  mais 
fi  nous  allons  refufer  à  Sa    Majefté  Tunique  cbofe 
qu'elle  nous  demande  en  fon  propre  &  privé   Nom, 
&  pour   notre  réconciliation  avec  eHe,  nous  man- 
quons.  Sa  Majefté    peut  nous  acculer  d'une  faute, 
&  toutes  les  Nations  nous  en  peuvent  rendre  cou- 
pables :  d"où  je  conclus  qu'il    faut  envoyer  nos  Dé- 
putés à    Vienne   pour   prouver  à  tout  l'Univers  que 
nous   avons  été    fournis   jufqu'au  dernier    moment, 
jufqu'à  ce  qu'on  nous  a  mis  le  couteau  fur  la  gor- 
ge ,  &  qu'ils   nous  a  fallu  nous  relever  pour  ne  pas 
être  mutilé. 

3*^.  Nous  ne  ccnnoiftbns  pas  S.  M.  Ses  inten- 
tions font- elles  ju  1res  ?  Sont -elles  iniques  .*  Con- 
noît  -  elle  les  Décrets  oppreftifs  contre  lei'quels 
nous  réclamons  ?  Lit  -  elle  nos  Repréfentations  ? 
Les  reçoit  elle  telles  que  nous  les  failons  ?  Nos  en- 
nemis nous  reprélentent-ils  tels  que  nous  fommes  ? 
Nous  n'en  favons  rien.  Comment  le  favoir?  En  lui 
envoyant  des  gens  qui  ne  [oient  pas  traîtres ,  des 
elprits  pénétrans  pour  la  fonder,  des  hommes  favans 
pour  i'inftruire  ,  de  vrais  Patriotes  pour  nous  dé- 
fendre ,  des  cœurs  généreux  pour  faire  valoir  nos 


(  108  ^ 

Droits.  Il  convient  donc  d'envoyer  des  Députés  à 
Vienne ,  pour  que  fi,  S.  M.  eft  jufle  ,  on  i'inftruife: 
fi  elle  ne  l'eft  pas ,  on  la  connoifle. 

4°.  Les  grandes  affaires  fe  traitent  toujours  mieux 
de  près  que  de  loin  ,  par  voix  que  par  Lettres  , 
avec  les  Maîtres  qa'avec  les  Sujets  ;  fi  S.  M.  eft 
offenfée ,  nous  pouvons  par  ce  juftes  raifons  l'adou- 
cir :  dans  le  Miniftere  à  Vienne  nous  avons  des 
cœurs  dévoués;  fi  nos  Députés  y  vont,  ces  cœurs 
dévoués  Te  joindront  à  nous ,  parleront  pour  nous , 
fe  déclareront  pour  nous  ,  &c  avec  nous  travail- 
leront tou]ours  à  porter  l'efprit  du  Souverain  aux 
partis  les  plus. doux  &  les  plus  humains  :  fi  nos  Dé- 
putés ,  méprifant  l'ordre  exprès  de  S.  M. ,  ne  s'y 
rendent  pas ,  ces  cœurs  dévoués  fe  tairont ,  n'ofe- 
ront  prendre  notre  parti ,  &C  par  leur  filence  feront 
cenfés  accéder  à  l'avis  de  nos  ennemis ,  qui  ne  man- 
queront pas  de  fe  prévaloir  de  notre  abfence  ,  & 
d'envenimer  .les  plaies  dont  ils  nous  ont  couverts 
jufqu'aujourd'hui.  il  convient  donc  d'envoyer  nos 
Députés  à  Vienne  pour  conferver  les  cœurs  dévoués 
que  nous  avons  encore  à  la  Cour ,  &  fi  nous  n'en 
avons  pas,  pour  tâcher  d'en  faire.  Je  fais  qu'on  rai» 
{binne  tout  autrement,  &  qu'il  y  a  mille  raifons  con- 
tre. Mais  quel  eft  le  meilleur  parti  pour  l'intérêt  6c 
l'honneur  de  la  Nation?.., 

Mais ,  dit-on  :  quels  Députés  peut-on  envoyer  ? 
Quant  à  leurs  qualités  perfonnelles ,  ils  ne  doivent 
pas  feulement  être  exempts  de  crime  de  trahifon 
envers  la  Patrie,  mais  même  exempts  de  foupçon  ; 
en  outre  il  eft  néceftaire  qu'ils  foient  tels  que  je  les 
ai  dépeints  dans  ma  3nie.  raifon.  Quel  doit  être 
leur  pouvoir?  Aucun;  ils  font  donc  inutiles?  Non, 
il  faut  aller jà  Vienne  pour  obéir,  &  non  pour  être 
Jugé.  Ils  doivent  porter  aux  pieds  du  Trône  nos 
Conftiîutions,  la  Joyeufe  Entrée  ^  enfuile  les  Décrets 

miniftériels 


C  ^09  ) 

miniftériels  tels  qu'ils  font  émanés  pour  y  porter 
atteinte,  &  enfin  les  réclamations  de  toutes  les  Pro- 
vinces pour  loutenir  nos  Droits.  S.  M.  commencera 
par  s'emporter ,  crier ,  menacer  ,  pour  déconcerter 
nos  Députés,  les  confondre,  les  faire  taire;  ils 
doivent  avoir  l'efprit  afTez  fouple  pour  la  laifler  dire, 
afiez  humble  pour  ne  pas  l'irriter  ,  mais  auiîi  affez 
préient  pour  ne  pas  s'intimider,  &  afTez  fort,  afTez 
inftruit ,  afTez  p'-éj)aré  pour  lui  répondre. 

L,  A.  R.  ne  peuvent  partir  avant  nos  Députés,  ou 
au  moins  elles  doivent  favoir  que  nos  Dépurés  par- 
tiront :  une  prière  générale  dans  toutes  les  Eglifes 
devroit  aufïî  accompagner  leur  départ.  Si  mon  avis 
n'eft  pas  jugé  bon  ,  je  l'efface.  Mais  tant  pis  pour 
nous  ;  je  fouhaite  feulement  que  quelqu'un  puifTc 
le  faire  connoître  à  tems  à  ceux  qui  peuvent  l'em- 
ployer. L'oblcurité  de  l'Ecrivain  lui  refufe  le  pou- 
voir de  communiquer  fon  ouvrage  par  lui-même 
au  Public. 


Q 


*** 


(   110  ) 

LETTFvE  de  Meffeigneurs  les  Etats  de 
Erahant  à  Jojepk  11^  en  reponfe  à  la 
Lettre  de  Sa  Majejié ^  datée  du  3  Ju'il^ 
let  ly^j  (^). 

SIRE, 

ONS  avons  reçu  avec  le  plus  profond  refpeft , 
avec  la  plus  parfaite  rouailffion  ,  la  Dépêche  que 
votre  S-îCrée  Majefté  a  cbiigné  nous  adrelTer  le  3 
de  ce  mois  ,  (bus  votre  Seing  auguile  :  les  fenti- 
lîiens  que  votre  déclaration,  Sire,  a  excités,  n'ont 
pas  été  ceux  d'une  joie  aufïi  pure,  que  pouvoir  Je 
préfacer  notre  attachement  à  l'obéifTance  ,  &  notre 
zèle  ardent  pour  vos  intérêts.  Si,  d'un  côté,  Sire, 
ie  récit  àes  thaux  pub'ics,  fi  nos  p'aintes  fur  les 
infractions  faites  à  des  Loix  intaftes  depuis  iîx 
cens  ans  ,  ont  touché  votre  fenfibiliré  ainfî  que  vo- 
tre juftice ,  d'un  autre  côté,  votre  Majefté  laiiTe  en- 
trevoir des  doutes  douloureux  pour  la  Nation  ,  fur 
la  nature  des  motifs  qui  ont  dirigé  l'oppofition  des 
Etats  des  Provinces  Belgiques ,  pour  le  maintien  des 
juftes  Droits  fi  chers  à  patrie. 

Non  ,  Sire ,  le  cœur  de  vos  Sujets  n'a  pas   erré 
un  feul  inftant;    leur  tendre   confiance,  leurs  hom- 


( a)  Le  projet  de  Réponfe  que  Ton  a  vu  circuler,  en  date 
<!u  2.4  Juillet,  qui  c(jmmence  ainfi  :  Par  la  lettre ,  &c.  &  que 
l'on  volt  toîii.  VI.  P;irt.  Civ.  pa^.  103  ,  n'a  point  été  réalifé. 
C'eft  ici  la  véritable  Réponfe  des  Etafs ,  &  nous  en  garantif- 
fons  l'authenticité.  Des  circonihuiccs  imprévues  onr  obligé 
les  Etats  à  la  rendre  publique  avant  l'arrivée  deâ.  Députés 
à  Vienne. 


mages  s'élèvent  fans  ceffe ,  Sj:  dans  toutes  les  heures 
du  jour  ,  vers  Vdtre  Majefté. 

L'impreffion  opérée  par  le  nouveau  fyftême  , 
n'a  été  ni  intpirée  m  excitée  par  vos  Etats  ;  c'ell 
celle ,  daignez ,  Sire  ,  en  être  convaincu  ,  qu'ont 
éprouvée  &  toute  la  Nation  ,  &  tous  les  individus 
agités  de  la  plus  violente  inquiétude  ^  à  la  vue 
d'un  fyftéme  ,  dont  aucune  conféquence  n'a  échappé 
dans  tous  (es  détails  funeftes  &  terribles  ;  car  c'eft 
ici  que  tous  les  Citoyens ,  ceux  tneines  des  derniè- 
res clafles ,  connoiffent  leurs  Droits,  qu'ils  les  ché- 
riiïent ,  qu'ils  en  t'ont  l'objet  de  leurs  entretiens,  de 
leurs  penfées ,  qu'ils  y  attachent  l'idée  de  la  fureté, 
de  la  liberté,  du  bien  ,  du  falut  public  Se  particulier. 

Si  dans  les  transfaâ;ions  ordinaires  ,  lorfqu'il  n'eft 
pas  quedion  de  l'elfence  de  ces  Droits  façrés ,  la 
Nation  fe  réfère  aifément  à  (ts  Reprcfentans  ;  dans 
celle-ci  tout  concours  ,  tout  confentement  de  la 
part  des  Etats  contre  le  vœu  général  ,  contre  le 
cri  de  la  probité  ,  eût  été  non- feulement  Infruftueux, 
mais  il  eût  produit  des  embrafemens  &  de  longues 
calamités.  Eh  !  plût  à  Dieu  que  vous  euffiez  été 
témoin  ,  Sire  ,  des  peines ,  des  foins  infinis  que 
tous  les  Ordres  des  Etats  fe  font  donnés  pour  cal- 
mer,  adoucir,  perfuader  par-tout  une  multitude  in- 
nombrable ,  réclamant  contre  la  violation  de  la  foi 
publique,  oppofant  la  légnlité  de  (es^  craintes;  c'eft 
alors  que  Votre  Majefté  eût  reconnu  que  fon  Peu- 
ple a  été  lauvé. 

La  principale  inftruftion  que  nous  donnons  aux 
Députés ,  qui  avec  ceux  des  autres  Provinces  font 
chargés  de  fe  mettre  aux  pieds  du  Trône ,  c'eft 
d'affurer ,  Sire,  Votre  Majefté,  de  notre  amour,  de 
nos  hommages  aufli  fournis  qu'affcftueux  ,  de  notre 
zele  inaltérable  &  ftncere  pour  votre  fervice  ;  de 
demander,  de  recevoir  de  Votre  M^'efté  rexpreftion 

O  ^ 


(  îïi  ) 

précieufe   de  votre  bonté  ,  de    votre  tcndrelTe  pa- 
ternelle, 

C'eft  de  votre  bonté  que  nous  attendons ,  Sire  , 
que  vous  diffiperex  les  maux  qu'entretient  encore  la 
terreur  du  Ivftéme  ;  déjà  la  piété  fir.cere  ^  l'attache- 
ment au  culte  ,  à  cette  Religion  qui  eft  le  plus  ferme 
appui  du  Trône ,  font  malheureufement  trop  affoi- 
blis  par  une  fuite  foutenue  d'Ordonnances  fur  la 
Difcipline  Ecclé/iaftique ,  par  le  peu  de  relpeft  pour 
les  anciennes  maximes  reilgicufes  confacrées  dans 
l'opinion  des  Peuples  ;  déjà  les  propriétés  font  avi- 
lies dans  les  échanges  ,  le  commerce  fe  détourne  ,  5c 
ce  qui  en  refîe  eft  languiiTant  ;  le  numéraire  devient 
rare  à  niefure  qu'il  pafte  à  l'étranger ,  les  fortunes 
fe  convertifTent  dans  les  porte- feui Iles  ;  l'Artifan ,  le- 
Laboureur  font  prêts  à  porter  ailleurs  leurs  bras  ÔC 
leur  induftrie  ,  fûrs  de  jouir  du  Gouvernement  mo- 
déré ,  dont  tous  les  climats  voifins  offrent  les  at- 
traits ;  tandis  que  les  troubles  qui  défoîent  la  Hol- 
lande eulTent  amené  ici  une  quantité  étonnante  de 
Sujets  &:  de  capitaux  utiles ,  fans  l'étrange  fatalité 
du  fyftême. 

Daignez  ,  Sire ,  arrêter  la  fource  de  fi  grands 
malheurs;  il  fuffira  (&  c'eft  le  moyen  aufli  jufte 
qu'unique)  que  Votre  Majefté  déclare  que  les  Conf- 
titutions ,  Droits  &  Privilèges  des  Province*;  Belgi- 
ques  en  général  &  en  particulier ,  feront  rc'igieufe- 
inent  obfervés  ,  qu'en  conféquence  les  deux  Diplô- 
mes il  évidemment  furpris  à  votre  religion  ,  Sire  , 
viennent  à  cefîer  ,  que  toutes  les  infraélions  faites 
ultérieurement  à  ces  Conftitutions  ,  Droits  &  Privi- 
lèges,  feiont  redreffées  le  plutôt  poflible. 

Depuis  combien  d^  rems ,  par  combien  de  Re- 
montrances humbles  &  (oumifes  nous  a -ons  récla- 
mé, Si-e,  contre  ces  infraâions ,  expofé  &  détaillé 
nos  plaintes  ! 


(in) 

Combien  de  fols  vos  fidèles  Efats  ,  Sire ,  fe  font 
plaints  de  ce  qu'on  ne  nommoit  point  aux  Abbayes 
vacantes,  malgré  les  titres  &  les  concordats  les  plus 
authentiques;  de  ce  que  fur  le  prélude  d'un  Edit 
nul  &  captieux  pour  la  fuppreffion  des  Couvens  ar- 
bitrairement prétendus  inutiles  ,  on  vouloir  établir 
la  poflîbilité  d'une  fuppreffion  totale  ou  partielle  des 
EtabliiTemens  Eccléfiaftiques  ou  pieux  quelconques, 
autrement  qu'en  gardant  l'ordre  de  Droit  ;  que  par 
-un  fyftême  fi  oppofé  au  Droit  de  la  propriété  ,  la 
Nation  devoit  tôt  ou  tard  voir  engloutir  êc  dévo- 
rer fa  plus  pure  fubfiance. 

Avec  quelles  inftances  nous  avons  fapplié  ,  Sire , 
comme  nous  fiipplions  encore  très-humblement  Vo- 
tre Majefté  ,  de  recirer  le  Diplôme  fur  l'EtablifTement 
des  nouveaux  Tribunaux  ,  par  la  raifon  feule  qu'il 
efl:  deftruftif  de  nos  Droits  les  plus  évidens  &  les 
plus  précieux  ;  nous  ne  dirons  donc  pas  que  ces 
Tribunaux  com.binés  avec  \a.  nouvelle  manière  de 
plaider,  ne  îaifToient  plus  qu'un  f^întôm.e  de  Juftice , 
une  manière  de  juger  prévôtale  ,  imp-  flîble  à  pra- 
tiquer dans  un  Pays  où  les  propriétés  ibnt  infiniment 
partagées ,  où  le3  conteftations  judiciaires  doivent 
être  néceifairement  fréquentes  ,  ibuvent  de  légère 
importance  ,  &  devant  être  afloupies  fur  les  litux  , 
fouvent  d'un  intérêt  fi  grand  ,  qu'elles  réveillent 
toute  l'attention  publique  :  c'eft  alors  que  les  par- 
ties ,  que  la  Nation  entière  ,  ont  le  droit  d'exiger 
qu'on  écarte  tout  voile  qui  pourroit  cacher  la  mar- 
che fecrete  des  Délibérations  de  la  Juflice  ;  cette 
marche  peut  être  lente  ,  mais  fur-tout  elle  doit 
être  fûre. 

Dans  la  nouvelle  procédure ,  Sire  ,  tout  alloit  fe 
palfer  fous  le  plus  impénétrable  fecret ,  les  Juges  , 
d'autant  plus  à  redou  cr ,  n'étoient  qu'en  tiès-peiif 


(  ^14  ) 
nombre ,  le   Préndenc  abiolu  ,  le  Rapporteur  încon- 
nu  ;  il  ne  s'agiiToit  pas  de  juger  bien,  mais  de  juger 
vite  :  comme  fi  la  Nation  devolt  être  toujours  dans 
l'état  de  guerre ,  fous  la  Loi   martiale. 

Les  Magiflrats  perdoient  toute  idée  de  l'honneur, 
en  proie  à  des  délations  lourdes  ,  mais  ordonnées  par 
la  Loi  ,  ne  recevant  plus  que  la  vile  impreflîon  de 
la  crainte  ;  d'ailleurs  ambulatoires  &  deftituables  à 
volonté  ,  ils  re/Tembloient  plutôt  aux  Centurions 
d'une  troupe  de  guerre  qu'aux  Miniftres  auguftes  de 
la  Juftlce. 

Mais ,  Sire  ,  cette  Juflice  fi  défigurée ,  fi  mécon- 
noilfable,  étoit  encore  reléguée  aux  objets  contentieux 
entre  pa;^îies  privées;  la  partie  publique,  les  Inten- 
dans  ,  les  Commifiaires  ,  les  Délégués  ne  dévoient 
garder  aucune  mefure ,  ils  étoient  au-defius  des  Tri- 
bunaux de  Jufiice  abarardis  ;  ils  commandoient  &c  ils 
dévoient  erre  obéis  ;  la  force  exécutrice  &  la  puif- 
fance  îégiflative  réfidoient  dans  un  leul  Conlell ,  &c 
ce  Conîéil  dans  une  feule  Perfonne  ;  ainfi  l'homme 
réparé  de  l'homme  ,  l'individu  ifolé  ,  fans  fecours  ,  fans 
appui,  fans  voifiuage,  étoient  toujours  trembians  de- 
vant l'Intendance  &  (es  Agens  ;  les  ordres  partolent 
d'un  pouvoir  fi  monftrueufement  réuni ,  &  venoient 
frapper  tour  à-tour  les  Citoyens  comme  un  coup  de 
toudre  ;  ce  n'étoit  plus  une  Société  civile ,  c'étoient 
des  hom.mes ,  ou  plutôt  des  cadavres  livrés  à  la  ter- 
reur,  ne  marchant  plus  que  parmi  les  craintes  &c  à 
travers  les  ombres  de   la  mort. 

Sous  un  tel  régime  ,  Sire,  vos  Provinces  Belgiqnes 
eufient  été  réduites  bientôt  en  un  vafte  déiért  ;  l'in- 
duftrie,  l'opulence  eufient  fui  loin  d'un  climat  fune{}e, 
où  rhommc  n'eût  pu  compter  ni  fur  le  fruit  de  (zs 
îravaux  ,  ni  fur  la  liberté  de  ion  individu. 

Ici ,  Sire  ,  les  ho:nmes  ne  doivent ,  ne  peuvent  être 


C  ^15  ) 

bien  gouvernés  que  fur  les  lieux ,  que  par  le  moyen 
des  corporations;  il  faut  que  les  Loix ,  que  les  Or- 
dres quelconques  paffent  par  cette  épreuve  utile  ,  pour 
inlpirer  la  confiaHce  :  ce  n'eft  qu'alors  que  les  fujets 
obéiiïent  avec  alégrelTe ,  parce  que  l'ip.liuence  de  ces 
corporations  ell  infiniment  plus  douce  ,  plus  l'aî^e  ,  plus 
réfléchie,  plus  fuivie  ;  parce  qu'enfin  c'eft  le  droit  de 
la  patrie,  judifié-  par  tant  de  Siècles  de  profpérité  Sc 
-d'opulence. 

Jugez  donc  ,  Sire  ,  à  quel  point  on  a  furpris  votre 
bonté  &  votre  religion ,  comme  fi  l'art ,  le  grand 
art  de  gouverner  étoit  tout-à-coup  devenu  facile  ou 
nouveau  ;  comme  (i  les  grands  exemples  fuffent  inu- 
tiles à  la  fagelTe,  &:  que  Tetprit  humain  dût  fe  ré- 
plier fur  fes  premières  notions,  &  rejeter  toutes  celles 
dont  la  fphere  de  fes  connoiffances  s'efi:  accrue  de- 
puis le  commencement  des  Empires  ;  jugez ,  Sire  , 
jufqu'où  conduifent  l'ignorance  &  la  foif  aveugle  de 
dominer  aux  dépens  des  intérêts  &:  de  la  gloire  du 
Maître. 

Sire  ,  nous  l'avons  déjà  dit ,  s'il  y  a  des  abus  à 
corriger,  faut- il  qu'on  ait  ^fuggéré  à  Votre  Majefté , 
le  moyen  même  qui  les  confacre  ,  qui  de  plus  en  plus 
les  augmente  invinciblement  &C  à  jamais  ;  oui  rédiiife 
en  folitude  des  Provinces  floriffantes  &  fertiles  ;  d  ail- 
leurs ,  les  abus  ne  tiennent  par  aucun  endroit  à  Tob- 
fervance  de  nos  Privileg^is  ni  de  nos  Loix  ,  ils  ne  fc 
font  multipliés  qu'à  mefure  qu'on  les  a  néglgés ,  ou 
plutôt  ignorés.  Si  l'on  avoit  fait  obferver  des  Ordon- 
nances admirables  fur  la  procédure  ,  (i  l'on  avoit  mis 
à  la  tête  des  Tribunaux ,  des  perfonnes  uniquenient 
animées  ,  confumées  du  zèle  de  la  Juftice,  capables 
des  fondions  mâles  &  vigoureufes  qu'elle  exige ,  fi 
en  cela  la  faveur  avoit  moins  exercé  fon  influence  , 
Votre  Majeflé  eût  vu  évanouir  les  plaintes  des  plai- 
deurs. 

G  4 


(  ii6) 

Daignez  donc,  Sire,  daignez  hâter  les  confola- 
tions  de  votre  peuple  ;  que  Votre  Majefté  veuille  ac- 
corder une  déclaration  gracieufè  ,  iur  rinrégrité  de  nos 
Loix  fondamentales ,  (ur  la  ceflation  ^ce  qui  eft  une 
Alite  néceffaire  )  des  intraftions  qu'elle^  ont  ;oufîertes , 
fur- tout  par  les  deux  Diplômes  du  premier  Janvier 
de  cette  année. 

Veuillez  encore.  Sire  ,  fi  les  hauts  foins  de  votre 
Monarchie  ne  permettent  pas  à  Votre  Majcfîé  de  ve- 
nir parmi  nous  ^  munir  Leurs  Alteffes  Roy^fles,  nos 
Sérénifîimes  Gouverneurs-Généraux,  des  pleins-pou- 
voirs, pour  terminer  avec  les  Etats  dans  différentes 
Provinces,  les  objets  ultérieurs,  qui  tiennent  à  nos 
Conftituîions  ;  fur  lefqueîs  la  nature  de  notre  mandat 
ne  nous  permet  point  d'autori'ér  en  rien  les  Dé- 
putés qui  portent  nos  hommages  au  Tiône  de  Votre 
Majefté;  mais  bien  plutôt,  venez,  Sire,  rempliffez 
votre  promelTe  auffi  douce  qu'augufte  de  vous  trouver 
encore  au  milieu  de  vos  Sujets ,  au  milieu  de  vos 
Enfans;  venez  recueillir  des  bénédiftioni,  fans  nombre, 
ibyez  le  témoin  de  l'émotion  d'un  peuple  fenfible  à  la 
vue  de  fon  Souverain,  de  fon  Père,  les  cœurs  vont 
s'élancer  fur  votre  pafTage,  (k  vous  verrez  vos  Sujets  , 
Sire,  pleurer  à  vos  genoux  des  larmes  de  joie  &  de 
tendrefle;  c'eft  alors,  Sue,  que  Votre  Majefté  verra 
s'appbnir  devant  elle  ,  fsns  peine  ,  les  moyens  d'aug- 
menter ,  de  perpéfuer  la  félicité  de  vos  Sujets,  ôc 
que  vous  ferez  inftruit,  Sire,  fur  les  lieux ,  par  l'é- 
vidence même  des  chofes. 

Puifte  Votre  Sacrée  Majefté  recevoir  l'offrande  pure 
de  nos  cœurs,  de  nos  biens,  de  notre  fang;  puifte 
l'Etre-Supréme,  vous  combler  de  tous  les  dons  ,  qu'il 
diïpenfe  à  fon  gré;  puifte  votre  Nom  ,  Sire,  refter  à 
jamais  placé  à  côté  de  l'immortalité ,  grand  dans  la 
paix  6>c  dans  la  guerre. 


Nous  fommines  avec  un  très  -  profond  rerpefl:  & 
toute  la  foumifiion  pofTible  , 

SIRE, 

De  votre  facrée  Majeflé  Impériale  & 
Royale  Apoftolique  , 

Les  très  humbles ,  très-obéif- 
fans  &  très  -  fidèles  fervi- 
teurs,  Sujets  &  Vaflaux,  les 
Prélats ,  Nobles  &  Dépu- 
tés des  Chef- Villes,  repré- 
fetitant  les  Etats  de  votre 
Pays  &  Duché  de  Brabant. 

Par   Ordonnance  ,    DE    C  O C K. 

De  notre  AjJivikUe.  oénèraLe  tenue 
à  BtuxcUes  U  2^  JuiUet  ^ySy, 

Noms  &  qualités  des  Meffieiirs  de  diffé- 
rentes Provinces  qui  ont  comparu  à  VAf- 
femblèe  générale  des    Etats  de   Brabant 
en  Juillet  iJ^J. 

-BRABANT 

Etat  E  celé  fia  Clique. 
Monfeigneur  l'Evêque  d'Anvers. 
Mr.  le  Rév,  Abbé  de  \  llerbeeck.  ■>    j^,       ,  ^^    , 
Mr.  le  Rév.  Abbé  de  Griinberghe.  3 

Etat  Noble. 

Mr.  le  Comte  de  Spangen. 

Mr.  le  Baron  de  Gentinnes.     .     «7   t^i       i     j'-,    . 
.«     ,    n          i->vx  X  Députés  AckL^ls^ 

Mr.  le  Baron  d  nove J,      •^ 


(  IIS) 

Tiers  -  Etat. 

Louvain. 
Mr.  de  Beeckman,  Bourgmeftre. 
Mr.  Reniers ,  Confeiller-Penfionnaire. 

Bruxelles. 
Mr.  de  Locquenghien  ,  Bourgmeftre. 
Mr.  de  Vieufart ,  premier  Echevin. 
Mr.  Vanlchelle,  Confellier-Penfionnaire. 

Anvers. 
Mr..' Délia  Faille,  Bourgmeftre. 

L  I  M  B  O  U  R  G. 

Eiat  Eccléjîajlique. 
Mr.  le  Révérend  Abbé  de  Rolduc. 

Etat  Noble. 
Mr.  le  Baron  de  Loe  Imfteradt ,  Député  ordmaire. 
Mr.  le  Comte  de  Hoen  Neuf-Château. 

Tiers- Etat. 
Mr.  Dodemonti 

Mr.  le  Gros,  Confeiller-Penfionnaire  des  Etats. 
Mr.de  Limpens,  Confeiller-Penfionnaire  externe. 

LUXEMBOURG. 

Etat  Noble. 
Mr.  le  Comte  de  Berlo  Suys  ,  Député  ordinaire,  & 
Préiident  de  la  Députation  extraordinaire. 
Etat  EccUjîaJiique. 
Mr.  le  Révérend  Abbé  d'Echternach  ,  Député   or- 
dinaire. 

Etat  Noble. 
Mr.  le  Baron  de  la  Barre. 

Tiers-Etat. 
Mr.  Foncin ,  Mayeur  Royal  à  Vlrton. 
Mr.  Didier,  Echevin  d'Àrlon,  Député  ordinaire. 
Mr.  Roiîignon  ,  Confeilier-Penfionnaire  des  Etats. 


(  119 
G  U  E  L  D  R  E. 
Mr.  Syben ,  Confeiller  Penfionnaire  des  Etats. 

FLANDRE. 

Mr.  le  Comte  d'Affenede,  pour  la  Châtellenie  du 

Vieux-Bourg. 
Mr.  d'Afper  Haut-Pointre  ,  de  la  Châtellenie  d'Au- 

denarde. 
Mr.  Defmet ,  Bailli  du  Pays  de  Gaveren. 
Mr.  Raepfaet ,  Greffier  de  la  Châtellenie  d'Audenardc. 

H  A  Y  N  A  U  T. 

Etat  EccUfiajlique. 
Mr.  le  Révérend  Abbé  de  St.  Ghiflain. 
Mr.  Recq ,  Chanoine  de  Leuze. 
Etat   Noble. 
Mr.  le   Marquis    Du  Chafteler   Moulbais  ,  Député 

aftue!. 
Mr.  le  Chevalier  Colins- de-Ham. 

Tiers -Etat, 
Mr.  Auquier,  Echevin  de  la  Ville  de  Mon*;. 
Mr.  de  Hamalt  ,   Confeiller-Penfïonnaire  de  Mens. 

N  A  M  U  R. 

Etat  Ecccéfiajîlque. 
Mr.  le  Révérend  Abbé  de  Waulfort ,  Député  a6luel. 

Etat  NobU. 
Mr.  le   Baron   de  Neverlé  ,    Seigneur  de   Beaulet , 
Député  aéluel. 

/  Tiers  -  Etat. 

Mr.  Limmelette  ,  Echevin  de  Namur. 

Mr.  Petit-Jean  ,  Confeiller-Penfionnairc   &  Greffier 
i.t%  Etats. 


1  O  U  R  N  A  I. 

Mr.  Vander  Gracht ,  Mayeur. 

Mr.  de  la  Cazerle ,  Juré, 

Mr.  Herfecap ,  Confeliler-Penfionnaire. 

TOURNESIS. 

Mr.  le  Comte  de  Vanderdilfr,  Doyen  du  Chapitre. 

Mr.  Defourdeau ,  de  l'Etat  Noble. 

Mr.  Macau ,  Confeiller  Penfionnaire  des  Etats. 

M  A  L  I  N  E  S. 

Mr.  le  Baron  de  Snoy  ,  Commune-Maître. 

Mr.  de  Brouwer,  premier  Echevln. 

Mr.  de  Quertemont,  Confeiller-Penfionnaire. 

Mr.  de  Cock  ,  Secrétaire  de  la  Ville. 

Mr.  d'Ancré,  Député  du  Confeil-Large. 

Mr.  Van  Kiel ,  Député  du  Confcil- Large. 

W  ES  TF  L  A  N  D  R  E. 

Mr.  le  Révérend  Abbé  de  "Wormezeele. 
Mr.  Aernout ,  Chanoine  de  la  Cathédrale  d'Ypres. 
Mr.  Michel  ,  Doyen  de  Ste.  Walburge  à  Furnes. 
Mr.  Vanderftichele   de   Maubus ,    premier    Echevln 

d'Ipres. 
Mr.  Delimon  ,  Echevln  de  la  Salle  &  Châtellenie 

d'Ypres. 
Mr.  i.  F.  Marrannes  ,  premier  Confeiller-Penfionnaire 

à  Furnes. 

DÉPUTÉS  POUR    VIENNE. 

B    R    A    B    A    N    T. 

Du   Clergé. 
Mr.  le  Rjévérend  Abbé  de  Grimberghe. 


(  111  ) 

De  l'Etat  Noble, 
Mr.  le  Comte  de  Limmingen. 

Du  Tiers -Eue, 
Mr.  Beeckmann  de  Vieufart. 

DÉPUTÉS  DE  Flandres. 

Du  Clergé. 
Mr.  de  Grave ,  Chantre  de  la  Cathédrale. 

De  l'Etat  Noble, 
Mr.  le  Comte  de  Vilain  XIV. 

Du   Tiers-  Etat. 
Mr.  le   Comte   d'Affenede ,   de   la  Châtellenîe   du 

Vieux  -  Bourg. 
Mr.  Rohaert ,  Penfionnaire  de  Gand. 

Députés    du   Hainaut. 

Du  Clergé, 
Mr.  l'Abbé  de  St.  Ghiflain. 

De  rEtae  Noble. 
Mr.  Le  Chevalier  Colins-de-Ham. 
Du    Tiers  -  Etat. 
Mr.  Petit ,  Avocat  de  la  Ville  de  Mons. 

DÉPUTÉS    DE   Luxembourg. 

Mr.  le  Révérend  Abbé  d'Echternach. 
Mr.  de  Pfortzenheim  ,  de  TErat  Noble. 
Mr.  Didier ,  Echevin  d'Arion ,  de  la  part  du  Tiers- 
Etat. 
Mr.  Roflîgno»,  Confeiller-Penfionnalre  des  Etats, 

DÉPUTÉS      DE      MaLINES. 

Mr.  de  Quertemont  ,  Confeiller-Penfionnaire. 
Mr.  le  Baron  de  Snoy  ,  Commune-Maître. 
Mr.  d'Ancré  ,  Député  du  Confeil-Large. 


(    2.22   ) 

DÉPUTÉS    DE    Tournât, 

Mr.  Vander  Gracht ,  Mayeur. 
Mr.  d'Angys. 
Mr.  Delvigne. 

DÉPUTES      DU     TOURNESIS. 

Mr.  le  Chanoine  d'Erneu. 
Mr.  Sonrdeau. 
Mr.  Vanderaeden. 

DÉPUTÉS     DE     LA    ^^  E  S  T-F  L  A  N  D  R  E. 

Mr.  Félix- Jean -Ignace  Struye  ,  Abbé  de  Worme- 

zeele. 
Mr.  Vandeiftichele  ,  Echevin  d'Ypres. 
Mr.  Delimont. 

DÉPUTÉS      DE      NaMUR. 

Mr.  Grégoire  Thibault ,  Abbé  de  "Wanlfort ,  Député 

a<ftue!. 
Mr.  le  Baron  Vande  Straat. 
Mr.  de  la  Motte  de  Montigni ,  Echevin. 

DÉPUTÉS      DE      LiMBOURG, 

Mr.  le  Révérend  Abbé  de  Rolduc. 
Mr.  le  Comte  de  Hoen  Neu-Château. 
Mr.  Dodemont,  de  la  part  du  Tiers-Etat. 

G    U    E    L    U    R    E. 

S'eft  joint  à  ceux  du  Brabant. 


À:> 


(  213  ) 

Précis  de  la  Copie  du  Protocole  tenu 
à  r  Hôtel  de -Ville  de  Bruxelles  ,  le  i8 
Juillet  17S7  ,  dans  rjjfeniblée  des  Sei- 
gneurs  Députés  des  Provinces  de  Lim- 
bourgs  de  Luxembourg^  de  Flandre  ^  de 
Hainaut  ^  de  Namur^  de  Tournay  ^  du 
Tourné  fis  ,  6"  de  Malines  ;  conféquem- 
ment  de  toutes  les  Provinces  des  Pays- 
Bas  Autrichiens  ,  à  V exception  de  celle 
de  Gueldre^  laquelle  a  déclaré  par  mil- 
five  quelle  fe  conformerait  à  la  Délibé- 
ration  des  autres  Provinces, 


I 


L  a  été  délibéré  qu'on  déféreroit  à  la  Lettre  de 
Sa  Majefté  l'Empereur  ,  datée  de  "Vienne  le  3  de  Juil- 
let ,  &  qu'on  enverroit  incelTainment  des  Députés 
à  Vienne. 

Ceux  qui  feront  députés  de  la  part  du  Brabant , 
doivent  faire  aux  Etats  de  cette  Province  le  ferment 
ci  delTous ,  du  30  Décembre  17»  5. 


EXTRAIT  du  Regifn  des  Réfoludons  de  Mef- 
feioneurs  Us  Trois-Etats  de  Brabant ,  &  de  leurs 
Députéi ,  où  l'on  trouve  ce  qui  fuit  : 

»  Je  promets  &  jure  que  dans  ma  Commi£îon  & 
Députation  à  la  Cour  de  Vienne  ,  auprès  de  Sa 
Ma/ejîé  Impériale  &  Royale  ,  fimployerai  tout  U 
:^ele  &  toute  la  dilisence  pofjîble  pour  procurer  U 
hien-itre  de  la  Province  de  Brabant  ;  &  que  pendant 
sgut  U  tems  de  cette  Députation  ^  Commiffion ,  ji 


(  ^M  ) 

ne  ferai  ni  direclemem  ni  indirectement  aucune  de- 
mande ,  ne  formerai  nulle  prétentioij  ,  ne  pourjuivrai 
nulle  affaire  concernant  les  intérêts  particuliers  ,  de 
moi ,  de  ma  famille  ,  ou  de  mes  amis  ,  de  quelque 
chef ,  ou  fous  quelque  prétexte  que  ce  puiffe  être, 
Ainfi  Dieu  m'aide ,  &c.  « 

Note  pour   les   diferens    Etats   des   Provinces   des 
Pays-Bas. 

ZjOiî  Excellence  le  Gouverneur  &  Capitaine- Gé- 
néral croît  ne  pouvoir  pas  diifimuler  aux  Etaf;  que 
Sa  Majefté  n'a  point  été  fatisfaite  de  la  Déjéche 
qui  leur  a  été  adreflee  ie  i8  Juil'et,  en  ce  qu'elle 
porte  fur  des  motifs  qui  annonçoient  de  la  part  de 
la  multitude  des  impreffions  contraires  à  la  confiance 
que  Sa  M^ijefté  attendoit  de  la  part  de  toutes  les 
clafies  de  Tes  Sujets»  tandis  que  d*ai!!eursen  pouvant 
faire  naître  des  idées  contraires  à  la  Dignité  Souve- 
raine ,  elles  croifoient  des  meîurcf  que  pouvoient  de- 
mander d'autres  circonftances  publiques  ou  particu- 
lières ,  qui  feroient  furvenues  dan«  l'intervalle. 

Sa  Majefté  s'attend  que  ces  circonf^inces  exigeant 
à  préfent  une  concentration  des  troupes ,  les  Etats 
ainfi  que  la  Nation  n'en  prendront  point  une  défiance 
déplacée,  &  que  la  confiance  générale,  moins  encore 
le  calme  ,  n'en  feront  pas  altérés. 

Sa  Majcfté  a  expreflTément  autorifé  Son  Excellence 
à  vous  aflfurer  que  cette  concentration  ou  difloca- 
tion  des  troupes,  n'a  pour  objet  ni  de  porter  attemte 
à  la  Conftitution  du  Pays ,  ni  d'entraîner  des  démar- 
ches qui  y  feroient   contraires. 

Les  Etats  &  toute  la  Nation  fentiront  fans  doute 
que  ne    ^ifant  rien  de   contraire   à  la  Conditution 

par 


(  iM  ) 

pnj  cette  concentration ,  toute  inquiétude  ou  dé- 
fîance  à  ce  fujet ,  &  plus  encore  les  embarras ,  s'il 
en  ("urvenoit  à  cette  occaiion .  fcroient  juftemenc 
douter  Sa  Majefté  de  la  vérité  des  affinions  que  les 
Etats  ont  faites  de  leur  fidélité  &  de  leur  attache- 
ment, tandis  qu'elle  a  déjà  annoncé,  comme  elle 
l'annonce  encore  par  fa  lettre  du  oi  Juillet,  l'in- 
tention de  traiter  paternellenienî  avec  eux  fur  les 
objets  qui  intérefTent  le  bien  général ,  conformémenc 
à  la  Dépêche  adreffée  aux  Etats  de  Brabant  Id 
3  Juillet;  &  d'autant  plus  qva  ce  feroir  réelle- 
mePit  un  icandale  pour  toute  l't,urope,  fi  tiiême  après 
les  bontés  que  Sa  Majeilé  a  déjà  annoncées  ,  fes 
Sujets  pouvoient  feulement  avoir  l'idée  de  tenir  dans 
une  entière  inaftion  fes  troupes,  comme  fi  elles 
étoient  au  fervice  de  quelque  Grince  étranger  &  en 
fimple  quartier    de  pafi;-:2c. 

La  conduite  de  la  Nation  à  l'égard  de  la  con- 
centration dont  il  s'agit  ,  étant  d'ailleurs  regardée 
par  Sa  Majefté  comme  la  pierre  de  touche  de  la 
confiance  &  de  la  fidélité,  Sa  Majefié  a  en  même 
tems  fait  connoître  à  ion  Excellence,  que,  felort 
que  la  conduite  qu'e'le  s'affure  que  la  Nation  tiendra, 
lui  donnera  plein  appaifement,  les  troupes  Alteman" 
des  défignées  pour  les  Fays-Bas  ne  dépifferont  point 
les  frontières  de  fes  Etats  héréditaire?,  excepté  le 
régiment  de  Bender ,  que  Sa  Majc^fté  juge  pour  des 
ralfons  particulières ,  de  fervice  nécefT.iite  à  Luxetn- 
bourg.  Fait  à  Bruxelles,  le  5  Août  ly^j.  Sh^né  le 
Comte  De  Murray. 

Pour  Copie  y  De  Cock, 


(  zi6  ) 

Requête  des  'Syndics  des  Nations  de  Bruxelles  , 
à  Meffci^neurs  les  Etats  en  leur  Ajj^mblit  -  Gc^ 
néraU» 


JLl 


fES  Syndics  des  Nations  cle  csxxe  Ville  ,  conf- 
iiiues  comme  par  leurs  Remontrances  précéden- 
tes ,  fc  trouvent  forcés  de  prévenir  vos  Seigneuries 
Révérendlffimes  &  IlUiftrifiîmes  ,  qu'ils  ne  rencon- 
trent dans  le  Peuple  aucun  fentiment  d'infidélité 
ou  de  déloyauté  à  l'égard  ou  vis-à-vis  de  Sa  Ma- 
jefté  :  le  fujet  des  alarmes  &  de  confternation ,  donr 
le  Peuple  généralement  eft  agité,  eft,  qu'il  expé- 
rimente continuellement  que  des  gens  mal- intention- 
nés fomentent  difFérens  fujets  de  craintes  &  occa- 
sions de  défiance  ;  ils  s'avancent  même  de  faire 
ientir ,  que  .les  portions  àes  troupes  ne  font  pas 
un  cordon  qu'elles  vont  faire  ,  mais  font  tellement 
dirigées  ,  que  les  Villes  principales  du  Brahant  , 
fur-tout  cette  Ville,  feront  bloquées. 

Ils  débitent  en  outre  ,  que  la  dépoiition  des  troupes 
étant  faite  ,  il  arrivera  ici  au  Pays  ,  encore  un  corps 
de  cinquante  mille  hommes  ;  les  Remontrans  igno- 
rent ce  qu'il  en  efl,  mais  on  rapporte  néanmoins, 
que  le  Gouvernement  eft  occupé  de  traiter  avec 
difFérens  Entreprenneurs,  relativement  aux  vivres  6c 
munitions  nécefTaires  à  ce  fujet. 

Ces  objets  divulgés  par  les  mal-intentionnés,  ont 
jeté  des  alarmes  dans  le  plus  grand  nombre  du 
F'eupla  ,  non-feulement  des  Villes  principales  de 
cette  Province  ,  mais  généralement  des  Villages  & 
Provinces  voifines  ;  que  tes  Remontrans  craignent 
avec  ràiion  ,  que  le  mouvement  des  troupes  occa- 
fionnera  une  émotion  générale  ;  ils  font  déjà  aiïtt- 


(  ii7  ) 
fés ,  que  grand  nombre  des  perfonnes  bien  moyen* 
nées  »au  premier  mouvement  des  Troupes  quitteront  à. 
jamais  les  Provinces  ;  taudis  cependant  qu'ils  font  in- 
tormés ,  que  fi  le  calme  renaifioit  dans  ce  Pays, 
plufieurs  familles  Hollaftdoifes ,  dtgoûtées  des  trou- 
bles qui  agitent  leur  patrie  ,  ne  manqueroient  pas 
de  venir  s'établir  chez  nous. 

Le  devoir  des  remontrans  les  oblige  d'informer 
vos  Seigneuries  Révérendifiîmes  &  Illuilriffimes,  de 
ces  craintes  &  de  ces  alarmes  du  Peuple  ,  afin 
qu'elles  les  faiTent  parvenir  à  la  connoifiance  de  Ton 
Excellence  le  Gouverneur  &  Capitaine- Général  ,  pour 
qu'elle  daigne  prendre  des  melures  convenables  pour 
éviter  la  cataftrophe  funefte  dont  ces  Provinces  font 
menacées. 

C'eft  l'objet  de  leur  très-humble  recours  vers 
vos  Seigneuries  Kévérendiflîmes  &  Uiui^riflimes. 

Les  fuppliant  très-humblement  de  vouloir  join- 
dre leurs  inftances  à  celles  du  Peuple  :  plus  bas  étoit, 
c'eft  la  grâce  ;  étoient  (ignés ,  A,  Vandcr  Stricht  , 
Jean  Jofeph  Sagermans ,  H.  De  Puyt ,  P,  J.  C.  Bceck- 
man  ,  E.  Adan  ,  J.  B.  Van  Lack  ,  Jf  C.  Schrucrs  , 
G.  Ferfteylcn  loco  Van  Campcnhout  abfent ,  &  J, 
B.  Vandcn  Sande, 

Bruxelles,  7  Août  1787. 


Relation  de  ce  qui  sejl  pajfè  à  f  Audience 
de  Son  Excellence  le  Comte  de  MurraY  ,  du  7 
Août  17^7. 

i  J  ES  Seigneurs  de  l'AfTemblée- Générale  des  Trois- 
ttats  de  Brabant ,  s'étant  rendus  à  l'Audience  de 
Son  Excellence  ,  lui  ont  déclaré  qu'ils  avoient  prévu 
6c  fait  connoître  par  leur  dernière  repréfentaiion , 

P  2 


(    12?    ) 

i^ne  la  tranfpofition  ou  qiflocation  des  Troupes  pro-» 
duiroit  ui»  mauvais  effet  (ur  l'efprit  da  Peuple;  qu'ef- 
feéliveinent  les  Syndics  des  Nations  de  Bruxelles  , 
tant  pouf  eux  que  coiTinie  conftitués  par  les  Mem* 
bres  des  àeux  autres  Chefi-Vi'les  ,  venoient  de  pré- 
fenter  à  l'inflanr  iriême  à  l'Afrernblée-Générale  êç$ 
Seigneurs  Etats  de  Brabanr ,  une  Requête,  par  la- 
quelle ils  JTianireftoieiit  d'une  manière  énergique , 
lei  grandes  alarmes  du  l'euple,  caulées  par  la  ré- 
foluîion  de  déplacer  les  troiipes ,  en  requérant  qu'il 
y  fût  pourvu  de  façon  à  faire  renaître  de  fuite  la 
confiance  propre  à  éloigner  tous  les  événemens  fâ- 
cheux» 

Cette  Requête  fut  lue  à  S  Fx.  &  leurs  Seigneu- 
ries iniifterent  le  plus  fortesnetît  &  le  plus  vivement 
poffible  fur  la  nécfrffité  d'y  pourvoir  par  un  moyen 
efficace-  Après  que  S.  Ex.  eut  afluré  Leurs  Seigneu- 
ries qu'elle.  co!»rentlroit  à  tout  ce  qui  feroit  en 
fon  pouvoir  ,  fans  furpafier  les  ordres  exprès  de 
r^mpereur,  elle  dit  que,  pour  donner  une  même 
preuve  de  confi.mce  aux  Syndics  de  Bruxelles  &c 
Conftitués  dé  Louvain  ,  elle  défiroit  également  de 
leur  parler,  fur  quoi  quelques  Seigneurs  fortirent , 
afin  d'appeller  îefdits  Syndics  (>:  Conftitués  à  l'Au- 
dience de  S.  Ex.  Fendant  cet  intervalle,  Leurs  Sei- 
gneuries prièrent  encore  très-inffamment  Son  Excel- 
lence ,  de  faire  réellement  tout  ce  qui  étoit  e!»  Ton 
pouvoir,  afin  d'affermir  la  confiance  du  Peuple. 

Les  Syndics  de  Bruxelles,  ainfi  que  les  Commif» 
faites  ,de  Louvain  étant  arrivés  à  l'Audience  ,  dé- 
clarèrent ouvertement  à  S.  Ex.  les  fujets  de  défiance 
qyie  la  Nation  croyoii  avoir  dans  la  diiîocation  des 
Troupes, 

Son  txce'lence  écouta  le  tout  avec  coi.  plaifance 
6c  cifFabiliié,  Si  fit  faire  le6hire  de- la  Leirie  de  Sa 
Majtiîé  l'Empereur  j  contenant  en  original  ks  ordres 


(    12.0    ) 

pour  le  déplacement  des  Troupes  àsns  les  circon/- 
îances  publiques  qui  étoient  furvenues  ,  &  alTurant 
que  ce  déplacement  De  le  tailoit  pas  pour  porter  di- 
recleir.ent  ou  indiredlement  quelques  préjudices  aux 
Loiv  foîidamentales  du  Pays ,  qu'au  concraire  le  dé- 
placement devoit  s'effccluer  en  plein  jour  ,  &  après 
qu'il  en  eut  été  donné  amicalement  part,  quelques 
jours  auparavant,  aux  Etats  reipeflits. 

Cette  lecture  iut  fr4ite  en  préience  de  M.  le  Vice- 
Préfident  Crumpipen  ,  &  de  M.  le  Comedier  Cor- 
net de  Grez. 

S.  Ex.  ailura  alors  à  tous  les  Membres  de  l'Etat 
qui  étorent  préicns ,  que  les  Troupes  qui  fcro'ent 
déplacées,  ne  ferviroient  ni  ne  feroinr  en  auccfne 
3:ianiere  employées  à  caufer  à  qui  que  ce  Yoit  le 
moindre  trouble  ou  le  moindre  doinm^ge  ,  non 
plus  qu'à  aucun  projet  de  porter  en  quelque  façon 
que  ce  puide  être  la  moindre  arreinte  aux  Loix  eonf- 
titutionnelles  du  Pays;  que  Sa  Majefté  déclarcit. 
elle-même  dans  la  Lettre  ,  qu'aucune  des  Troupes 
Allemandes  ne  deicendroi:  vers  ces  Pays,  (î  à  l'oc- 
cafion  de  ce  déplacement  néceffaire  de  :  Troupes  , 
on  dcnnoir  pleine  fati.'.faction  à  Sa  Majefté ,  ainfi 
qu'on  étoii  obligé  4e  le  taire  envers  Ton  Souverain 
légifime.  ■  •  -  ^  „    . 

Qu'entre- tems  la  bourgeoifïe  pouvoit  continuer  de 
veiller  à  i'obîervation  de  la  police  iur  le  pied  qu'elle 
le  faiToit  actuellement. 

S.  Ex.  a  dit  de  plus,  que  Sa  Majefîé  l'ayant  laiffé 
à,  fa  difpofition ,  il  n'étoit  pas  queftion  de  p'acer 
des  Troupes  à  Louvain  ,  mais  bien  peut-être  à  Sa- 
venthem,  à.  Erps  ou   dans  Tes  environs. 

Qu'il  n'entroit   pas   non    plus   dans   la   difpofition. 
de  S.  Ex.  de  placer  des  Troupes  à  Bruxelles  ,  mais 
qu'elles  camperoient  ou  ferolent  cantonnées  au-deiTus 
de  Schaerbeeck  ou  vers  cqs  endreits. 

P  ^, 


(  130  ) 
De  tout  quoi  S.  Ex.  a  donné  fa  parole  d'hon- 
neur ,  requérant  moyennant  ce ,  que  chacun  voulût 
s'entendre  &  coopérer  à  la  confervation  du  bon 
ordre  &:  de  l'obéiflance  dxie  à  S'a  Majefté;  ce  qui 
fur  ainfi  promis  par  tous  les  Membres,  en  remer- 
ciant S,  Ex.  de  l'Audience  qu'elle  avoit  accordée. 

£toit  Jigné  DE  C  o  c  K, 

REPRÉSENT  A  J  IONS  des  Etats 
de  Flandre  ,  a  Sa  Majefté  V Empereur 
&  Roi^  du  zy  Juillet  1787. 

S  I  R  É, 


S 


I  parmi  les  alTurances  que  Votre  Majefié  nous' 
a  daigné  donner  en  dernier  lieu  ,  qu'elle  confervera 
nos  Droits  ,  Conftitutions  ,  Us  &  Coutumes  ,  là' 
Nation  n'avoit  pas  cru  s'appercevoir  que  l'on  a' 
infpiré  à  Votre  Majefté  des  foupçons  injuftes  fur  les 
fentimens  c\çs  Provinces  Beigiques  ;  il  eft  fur  que 
déjà  le  calme  le  plus  profond  regneroit  parmi  le 
Peuple.  Sa  confiance  &  fon  efpoir  cependant  repofent 
encore  fur  la  Juftice  de  Votre  Majefté  ,  5^  plût  à 
Dieu ,  que  les  manèges  fecrets  &  les  faux  rapports 
ne  l'euftent  jamais  arrêtée  ou  furprife.  Nous  croyons 
préfentement ,  Sire  ,  afiez  connoître  nos  ennemis  , 
ou  plutôt  ceux  de  votre  gloire  ;  mais  de  tous  les 
traits,  qu'ils  nous  ont  lancés,  celui  qui  nous  eft  le 
plus  fenfible  ,  &  qui  nous  a  d'autant  plus  b!efte  , 
qu'il  a  été  caché  £c  non  prévu  ,  c'eft  le  doute  qu'ils 
ont  trouvé  moyen  de  jetter  fur  notre  attachement 
inviolable  à  votre  Augufte  Perfonnc  ,  &  fur  noire 
Loyauté  ;  auffi  dès  que  nous  en  avons  été  informé  , 
Sire  ,  (  &  ce  n'a  été  que  prefque  dans  le  jour  même 


(  i3i  ) 
©ù  nous  délibérâmes  fur  l'objet  de  la  Députatiort 
qui  devoir  fe  rendre  au  pied  du  Trône  )  nous  n'avons 
pas  héfité  un  moment ,  à  l'exemple  des  autres  Pro- 
vinces Be'giques ,  de  charger  nos  Députés  principa- 
lement d'offrir  à  Votre  Majcfté  ,  nos  trcs-finceres 
hommages ,  &  les  afTurances  les  plus  pofirivts  Se  les 
moins  équivoques  de  notre  fidélité  6c  de  celle  du 
Peuple  flamand. 

Etonnés  encore  ,  Sire  ,  en  ce  moment  de  nous 
trouver  dans  le  cas  de  devoir  détruire  des  doutes  5î 
des  impreiîîons  {îiilftres,  qui  n'ont  jamais  tlétri  nos 
âmes,  nous  craignons  de  ne  pas  en  dire  aflfez ,  lors 
même  que  nous  proreftons  devant  Dieu  ,  devant 
Votre  Majeflé  ,  fk  devant  toute  la  terre  ,  que  nous 
fommes  encore  prêts  à  verfer  notre  fang  ,  &  à  (a- 
crifier   nos  biens  pour  votre  gloire. 

Sire,  vos  Flamands  vous  font  fidèles,  &c  vous  Is 
feront  toujours ,  l'oppofiîion  qu'ils  forment  contre  le 
nouveau  Tyftéme  que  l'on  fe  propofoit  d'introduire 
dans  le  Pays  Bas ,  n'eft  pas  une  marque  de  déloyauté , 
comme  un  Roi  n'e(^  jamais  plus  Grand  ,  que  lorsqu'il 
défère  aux  juftes  réclamations  de  Ion  Peuple;  de 
même  la  fidélité  des  Sujets  ne  brille  jamais  dans  un 
plus  beau  jour  ,  que  lorfqu'ils  ont  le  courage  d'an- 
noncer aux  Rois  la  vérité,  qu'ils  aiment  tous,  mais 
qui  doit  franchir  des  écuaiis  infinis,  avant  de  par- 
venir au  Trône. 

Le  motif  donc ,  Sire  ,  de  nos  réclamations  dérive 
d'une  foUrce  pure;  ce  font  vos  intérêts,  Sire,  ce 
font  ceux  de  votre  Peuple,  qui  noas  ont  dirigés; 
nous  vivons  fous  ces  mêmes  Loix  cimentées  par  le 
ferment  du  Monarque  ,  (ous  lelquelles  nos  Pères  ont 
vécu  heureux  :  il  y  a  eu  peu  de  guerres  en  Europe  , 
dont  les  Pays-Bas  n'aient  été  le  berceau  ou  le  théâtre;' 
mais  à  peine  dévaflés  par  les  fléaux  ,  qui  accom- 
ptigncnt  conftammeiit   Içs   armées  ,    l'on  a   vu  ces 

P4 


(  ^r-  > 

Prrivinces  reprendre  immédlarement  !eur  antique  pro- 
priété ,  &  ce  n'eft  qu'à  la  bonté  de  nos  Loix ,  que 
nous  devons  ces  avantages  ,  dont  un  Pavs  iouinis 
à  un  Gouvernement  moins  doux  ne  peut  pas  le 
vanter. 

Le  nouveau  fydéme ,  Sire  ,  les  renverfoi:  toutes , 
au  lieu  de  (oumettre  les  opérations  du  pouvoir  lé- 
giflatif  &  exécutif  à  l'examen  refléchi  des  Maglftrat? 
&  des  Corporations.  Ces  deux  pouvoirs  auffi  inté- 
telTans  pour  la  (Cireté  du  Monarque  que  pour  le 
bien-être  des  Peuples ,  étoient  concentrés  dans  deux 
perfonnes  ;  le  Minière,  qui  dominoit  fur  le  Confeil 
Koyal  ,  &  rintendr^nt,  qui  en  exécutoit  aufïi  aveu- 
glément qu'arbitrairement  les  ordres. 

Une  telle  organifation  \-)t^M  être  convenable  dans 
un  Pays  ,  où  les  Peuples  gémiifent  encore  fous  une 
efpece  de  joug  de  rari{locr;jtie  féodale  ;  c'eft  un 
pouvoir  intermédiaire  entre  le  Seigneur  &  le  Vaifal  ^ 
où  pUitôt  l'efclave  ,  peut-être  eftce  même  un  bienfait. 

Mais  dans  des  Provinces  civilifées  depuis  tant  de 
fiec-es  ,  où  le  Peuple  eft  induftrieux  ,  laborieux , 
commerçant ,  où  des  Corporations  établies  par  la 
CcnAitutiOu  pour  éclairer  le  Gouvernement  fur  (es 
vrais  intérêts ,  &  pour  garder  les  Droits  du  Peuple  , 
empêchent  conftamment  qu'aucun  Sujet  ne  Toit  traité 
autrement  que  par  Juftice  &  Sentence,  devant  fou 
Juge  naturel  ;  toute  Loi ,  qui  attribue  le  pouvoir 
exécutif  à  un  feul  ,  efl  une  Loi  qui  doit  anéantir  le 
bonheur  des  Peuples  5c  entraîner  avec  elle  la  ruine 
de  l'Etat. 

C'eft  ce  qui  feroit  arrivé  infailliblement ,  Sire  , 
dans  ces  Provinces ,  où  ,  malgré  ce  que  Ton  en  ait 
pu  dire  à  Votre  Majefté  ,  ch.ique  individu  connolt 
fes  Droits  publics  &  municipaux  ,  il  s'en  repofe  à 
îa  vérité  quant  à  la  Direâiion  &:  l'Adminiliration  fur 
à^i  Corporations   forniéçs   de   Concitoyens  ,    parte 


que  ceux-ci  font  guidés  par  les  mérries  intérêt'; ,  Se 
de  pins  liés  par  un  (eraient  à  \à  Patrie.  De- là 
vienr  auffi,  que  la  perfuanon  a  plus  d'empire  fur  ce 
Peuple  que  le  commaiideîrient  ,  &  que  lorfqu'il 
fuir  la  Loi ,  il  la  luit  moins  parce  qvt'elle  eft  Loi , 
que  parce  qu'il  la  confidere  pour  un  effet  du  zèle 
de  Tes  Repréientans  &  de  la  bonté  de  les  Maîtres; 
mais  lorlque  la  '  Conftitution  eft  ouvertement  atta- 
quée, &  que  le  Peuple  i"e  ruine,  ce  n'eft  pas,  { com- 
me l'on  a  peut-être  infinué  à  Votre  Majefté  )  à 
des  inftigations  de  c^^s  Corporarions ,  qu'il  faut  at- 
tribuer cette  etTerveicence  ,  c'eft  uniquement  parce 
que  le  Peuple  fent  que  la  Baie  de  Ion  bonheur  eft 
ébranlée  ,  il  en  juqe  par  lui-même. 

Ces  momens  de  fermentation  ont  fourni  eux- 
mêmes  la  preuve  la  plus  complète  de  la  fageiîe  de 
la  Conftitution ,  qui  a  placé  le  pouvoir  dans  des 
compagnies  ;  fi  un  feul  en  .eût  été  revoru ,  le  Pavs 
eut  été  perdu  ,  Sire  ;  comme  le  dé(ei';>oir  à  la  vue 
du  nouveau  fvftéme  étoit  à  fon  c«mb!e  ,  les  uns 
euftent  égorgé  les  autres  ,  tous  les  fléaux  à  la  fois 
eiiHent  exercé  leuî^s  rav?ges  ;  les  Corporations ,  la 
uiodération  &  la  Ugeïïe  de  Leurs  Altelles  Royales 
ont  tout  (auvé. 

Et  certes  ,  fi  les  Pays  de  l'Europe  ,  qui  ne  nous 
ofiVent  que  des  efpeces  de  déferts  6-i  annoncent  par- 
tout la  pauvreté  &:  la  mifere  ,  nous  fournifîent  à 
tout  moiriCnt  des  exemples  de  Juge-:  prévaricater.rs, 
ou  d'Adininiftrateurs  concuftionnaires  &  Intîde'es, 
tandis  quM  feroit  prefqu'împoftlble  d'en  trouver  un 
feul  exemple  dans  nos  Provinces  floriflantes  ,  il.  eft 
de  la  dernière  évidence  ,  que  là  ce  mal  eft  inévita- 
bîe ,  parce  que  le  pouvoir  exécutif  eft  confié  à  un 
feul,  &  que  cet  abus  ne  fauroit  fe  rencontrer  ici, 
puiCque  ce  pouvoir  réfide  dans  des  corporations  trop 
difficiles  à  corroiripre. 


(  2-34  ) 

Telle  eft  notre  Conftitution,  dont  tout  le  monde 
admire  la  ("ageffe  ;  dans  un  Pays  riche  ,  &  qui  au- 
roit  offert  trop  d'appas  à  la  foif  de  l'Or,  elle  a  pla- 
cé le  dépôt  de  l'Adminiftration  d^ns  des  Compag- 
nies ,  dans  un  Pays  environné  de  Gouvernemens  li- 
bres 64  modérés  ,  elle  a  établi  un  Gouvernement 
doux  ,  elle  a  écarté  l'arbitraire  pour  y  fixer  rînduf- 
trie  Oc  les  Arts  ;  mais  ,  Sire  ,  déjà  ils  commencèrent 
a  dilparoître  d'une  manière  lénlible  &  alarmante  , 
encore  quelques  années  ,  6i  vous  y  eufficz  trouve 
un  déferr. 

CeuGent  été  là  ,  Sire  ,  les  fuites  du  nouveau 
fyftême  ,  quant  à  la  partie  de  TAdminidration  : 
il  en  étoit  de  mcme,  Sire,  quant  a  la  partie  de  la 
Juftice. 

Au  lieu  de  ces  Compagnies  permanentes ,  indé- 
pendantes &  refpeftables ,  chargées  par  devoir  6c 
par  honneur  de  prononcer  entre  le  riche  &  le  pau- 
vre (ur  la  vie'  &  la  fortune  des  Citoyens ,  l'on  vit 
s'élever  des  Tribunaux  ,  compofés  de  Membres  âtf" 
tituables  à  volonté  ,  anibuiatoires  Se  dépendans  , 
dont  les  opérations  étoient  couvertes ,  du  voile  du 
myftere  ,  les  direélions  pretoient  à  àes  furprifes  con- 
tinuelles ,  &  les  opinions  dans  plus  d'une  matière 
étoient   enchîiînées. 

Soumis  à  des  Inftruclions  &  à  des  Codes ,  qui 
n'avoient  pas  \a.  moindre  analogie  avec  nos  Loix 
anciennes ,  avec  nos  mœurs  &  avec  notre  Com- 
merce ;  qui  en  déceloient  même  l'ignorance  la  plus 
profonde  ,  le  premier  effet  de  leurs  travaux  produi- 
iit  une  ftagnation  générale  dans  toutes  les  affaires 
du  Pays  ;  le  fécond  devoir  en  confommer  la  ruine. 

A  la  vue  de  tant  de  maux  ,  dont  il  dépendoit  de 
votre  bonté  d'arrêter  les  ravages,  aurions-nous  été 
ficleies  Sujets  ,  Sire  ,  fi  par  un  fiience  coupable  ,  nous 
euliions  trahi  vos  iwtéréts  &  ceux  de  votre  Peuple? 


(  M5  ) 

Non,  Sire,  vous  nous  euffiez  blâmés  &  la  pofléritê 
inconnue  eut  condamné  notre  indifférence. 

Nous  ajouterons ,  Sire ,  au  tableau  de  tant  de  dé- 
Taflres ,  les  plaies  que  recevoit  lans  celle  la  Religion 
dans  toutes  (es  parties ,  fous  prétexte  d'en  réformer 
la  difcipline,  on  en  altéroit  contre  vos  intentions 
les  Dogmes  ;  fous  prétexte  de  corriger  Us  mœurs 
du  Clergé ,  dont  la  conduite  &  h  fcience  confon- 
doient  celles  de  ces  nouvelles  inftiturions ,  on  le 
calomnioit,  on  l'avilifToit ,  on  !e  perfécutoit  ,  pour 
étouffer  ies  réclamations  contre  les  nouvelles  maxi- 
mes ;  finalement  fous  prétexte  d'ériger  à  rhumanité 
fouffrante ,  des  établliTemens  pieux,  l'on  fupprimoit 
arbitrairement  les  Couvens,  &  au  lieu  de  tavoriler 
la  Population  dans  ce  Pays ,  ainfi  qu'on  fe  le  propo- 
foit ,  l'on  ach^voit  de  l'arrêter  6i  de  détruire  l'A- 
griculture. 

Car ,  Sire ,  il  peut  être  bon  de  prévenir  ou  de 
pourvoir  à  la  multiplicité  des  Couvens  &  des  éta- 
bliffemens  Eccléfiaftiques  dans  un  Pays  d'une  Popu- 
lation moyenne  ;  mais  il  n'en  eft  pas  de  n.iSme  pour 
Kn  Pays  où  la  population  fe  trouve  fur  un  pied 
comme  ici. 

Tout  le  monde  ne  peut  pas  devenir  Jujcifconfulte, 
Négociant,  Laboureur  ou  Soldat;  toutes  les  incli- 
nations ne  font  pas  les  mêmes ,  Se  tout  Père  de  fa- 
mille ne  peut  pas  marier  tous  fes  enfans,  il  faut  donc 
néceffairement  d'autres  reffources  ;  mais  fi  ces  ref- 
fources  font  fupprimées ,  'les  Mariages  n'offient  plus 
qu'un  avenir  inquiétant  ,  l'on  décline  ces  nœuds 
facrés ,  pour  y  fubftitcer  un  débordement  de  mœurs , 
&  la  Population  en  fouffre  ,  la  nôtre  furpaffoit  celle 
de  tous  ies  Etats  de  l'Europe ,  malgré  le  nombre  de 
Couvens ,  qu'il  s'y  trouvoit. 

Les  Biens  de  ces  Couvens  fe  louent  pubiiqne- 
ment  &  au  plus  offrant ,  il  n'eft   pas  bien  pofîîble 


(  2-36  ) 
de  le  (dite  d'une  autre  manière,  tnais.le  befpîri,  mm? 
la  jaloLiiîe  les  portent  à  un  pilx  infini;  par-là  on 
empêche  le  pauvre  Laboureur  de  fe  procurer  quel- 
que petite  reiïource  pour  fa  famille  ou  de  mettre 
«•quelque  choie  en  réierve  pour  fes  vieux  jours  ;  il 
tiiï  né  pauvre ,  il  doit  mourir  d^ns  h  mifere  ,  dan^ 
l'abandon;  &  qaand  même  on  tût  dû  convertir  les 
tonds  des  Couveni  Iwpprimés  en  établidemens  pour 
rhu!nanit4é  l'ouffrante  ;  pour  un  pauvre  de^  Vules, 
qui  y  anroit  trouvé  des  lecou'rs  &C  des  cpnfolations 
on  auroit  fait  &:  l'on  a  déjà  fait  cent  maihe^^reux 
diifis  les  Campagnes. 

Telle  efl ,  Sire,  refqu'iflfe  du  tableau  général  des 
maux  ,  auxquels  le  nouveau  Tvitcine  alioit  iivierees 
belles  Provinces;  tel  eft  , l'effet  d'un  fyfléme,  .dans 
îs.^q:!el  la  Loi  de  la  propriété  eu.  méconnue  &  les 
Inftitutions  les  plu?  '^^g^î ,  le",  plus  facrees  6i;  les. plus 
antiques»  d'uri.Peapleibfrt  comptées  pour  rien,;  vous 
jugerez-,  Sire  ,  par  vous -iriême  ,  combien  les  effets 
fui:eiles  doivent  en  être  ék-.iclus  &  varies  ,  combien 
en  rn«me  tems  il  (eroit  impoffible  ,.  que  trois  QU:qna- 
tre  per.i'onnes  ,  quelque  fupérioiiié  de  lumières  qu'on, 
leur  fuppoie,  puiiTent  ctre  capables  de  les  détailler 
tous  à  Votre"  Ma'jefté  heaucQOp  moins  les^difcutèr  ; 
&  combien  ea  même-tcms  11  efi  important  pour 
votre  fervice  &  le  bien  de  vos  Peuples  ,  que  Votre 
M^jedé ,  daigne  les  vérifier  fur  les  lieux,  en  per- 
ibnne  ,  fi  les  intérêts  de  la  Monarchie  le  permet- 
Tenr,  ou  s'ils  ne  le  permettent  pas ,  qu'elle  daigne 
à  ce  autQriier  Leurs  Aheffes  Royales ,  dont  nous 
admirons  également  la  prudence. 

C'eft  là.  Sire,  encore  une  Loi  diftée  par  la  fa- 
p^eiïe  de  vos  auçufles  Prédécefieurs  &  le  confeil  de 
nos  ancêtres,  convaincus,  qu'il  étoit  im.pOiTîble ,  dç 
traiter  des  intérêts  aufîî  grands  ,' ailleurs  que  dans 
le  Pavs  mênae. 


C^37  ) 
Vorre  Majefté  vefi'a  alors  ,  que  l'on  a  Tupporé 
des  abus  là  où  il  n'y.  en  avoit  pas;  que  ceux  que 
l'on  V  pourroit  rencontrer  ne  dérivent  pas  de  la 
Confiitution  ,  que  les  uus  doirent  être  attribu.és  à 
la  trop  grande  inliuence  du  Gouvernement  dans  la 
Collation  des  Emj)!ois ,  par  rapport  auxquels  on  né- 
glige les  qualités-  6c  les  précautions  ,  que  la  Coni- 
tituîion  elle-même  prefcrit,  que  les  autres  (ont  de 
la  nature  de  ceux  qui  font  inléparables  de  l'ouvraîîc 
àes  hommes,  dont  la  in.dn  ne  pr-€Kiuit  rien  de  par- 
fait ,  &  vous  ferez  convaiicu  de  plus  ,  Sire  ,  qu'à 
ces  commua-  al-us ,  le  nouvX\HU  fyfléme  alloit  îubf- 
tituer  des  vrais  défafires. 

Hâtez  donc  ,  Sire  ,  ce  moment  de.  confolation 
pour  vos  Provinces  éplorées  :  tenez,  venez,  Sire 
tar:r  la  fource  de  nos  maux  &  calmer  nos  inquiétu- 
des î  vous  n'y  recucU'erez  pas  feuiemeut  les  hom» 
mages  les  plus  purs  de  vos  Sujets ,  mais  Vous  y  éta- 
Wirc?;  en  tnême  terns  un  féjour  de  paix  pour  cics 
voifîns  induftrieux  ,  que  des  divifions  inteftines  for- 
cent, à  venir  chercher  un.  afyle  dans  vos  Provinces 
Belgiques  :  ils  s'y  fixeront ,  Sire  ,  ils  y  apporteront 
leur  induftrie  avec  leurs  tréfors  ,  fi  le  calme  de  notre 
Pays  peut  précéder  celui   <.\t   leur  Patrie. 

Vous  avez  daigné  -,  Sire ,  déjà  déclarer  que  votre 
inte:.tioîi  invariable  étoit  de  conferver  nos  Droits  , 
nos  Conftitutions  &  nos  Ufages  ;  mais,  Sire,  cette 
déclaration  gracieufe  eCt  accornpr,gnée  d'espreflions 
qui  ne  diflipent  pas  tout-à-fait  nos  alarmes;  elle  eft 
incapable  de  produire  tous  les  bons  effets  que  Vo- 
tre Majeflé  s'en  eft  promis  ;  il  n'y  a  qu'une  décla- 
ration limple  &  précife  ,  Sire  ,  qui  puiffe  faire  renaî- 
tre le  calme  &:  la  confiance  parmi  vos  Provinces, 
&  la  fureté  qu'exigent  les  étrangers  qui  délirent  de 
s'y  fixer  ;  il  conviendroit ,  Sire  ,  que  cette  déclara- 
tion  portât  ,  que  noi  Droits   feront  inviolablement 


(238) 
confervés;  que  le  nouveau  fyftérr.e  ne  fe  reproduira 
en  aucun  tems ,  &  que  Votre  Majefté  daignera  re- 
chercher &  corriger  les  abus  qu'il  pourroit  y  avoir, 
de  concert  avec  ies  Etats  ,  d'après  les  Loix  fonda- 
mentales ;  vous  conrommerez  ,  Sire  ,  ce  grand  ou- 
vrage ,  digne  de  vous  &c  de  la  gloire  de  votre  Rcgne  , 
nous  Tommes  prêts  à  facrifîer  nos  vies  &  nos  for- 
tunes pour  l'illuflrer. 

Nous  Tommes  avec  le  plus  profond  te(pQ^, 
SIRE, 
DE  FOTRE  SACRÉE  MA  JETÉ, 

Les  plus  humbles  ,  les  plus  obcïffans  & 
trcs-fidclcs  Sujets  , 

LES  ETATS  DE  FLANDRE, 

SigrU ,  F.  D.  D'HOOP. 

De  notre  AJjemhlU.^à  Gand  ce  i-j  Juillet  1787. 

RfquÉte préfentée  à  Mejfeïgneurs  les  Etats 
de  Brabant  le  19  Juin  ijSj  ^  par  les  Chefs 
de  la  Bourgeoïfie  (S*  les  Maîtres-de-Quar-* 
tiers  (^  Hoofd  mannen  der  Poorterye 
ende  Wyk-meefters  )  fa'ifant  le  fécond 
des  trois  Membres  de  la  Ville  di  Anvers, 
(^traduction  du  Flamand,^ 

Messeigneurs, 

xS  OUS  Chefs  de  la  Bourgeoise  &  Maîtres-de -Quar- 
tiers ,  reprëfentant  le  fécond  des  trois  Membres  de 
la  Ville  d'Anvers  ,  avons  l'honneur  de  nous  préfenter 
une  féconde  fois ,  avec  un  très- profond  reipeél  de- 
vant   Vos   Seigneuries  Révérendiiîimes    ôc  llluftrif- 


(  ^39  ) 
/îmes,  corr.ine  nous  l'avons  déjà  fait  lors  cîa  l'ouver- 
ture de  vos  reTpeftables  AiTemblées,  &  d'unir  notre 
voix  à  toutes  les  remontrances  ^que  vous  avez  déjà 
faite»; ,  &  que  vous  continuez*  encore  de  faire  à  Leurs 
Alteifes  Royies  avec  un  zcle  infatigable,  &  un  cou- 
rage au-deffus  de  tout  éloge  ,  pour  la  coniervation 
des  Privilèges  accordés  à  ce  Pays  par  la  Joycuje  En- 
trée  ^  pour  le  maintien  du  Conleil  Souverain  de  Bra- 
hantjôi  fur  tout  pour  la  fupprelïîon  des  Intendances. 

Les  devoirs  que  nous  impofe  la  qualité  de  pro- 
tefleurs  du  Peuple,  nous  a  excités  la  première  fois, 
&c  nous  oblige  encore  aujourd'hui,  à  faifir  le  mo- 
ment favorable  ,  de  défendre  les  intérêts  des  Ci- 
toyens, devant  de  tendres  pères  de  la  Patrie,  &c  de 
leur  faire  de  rerpeftueufes  remontrances  ,  qui  ont 
pour  objet  ,  le  (bulagement ,  le  bonheur  &  la  prof- 
périté  du  Peuple,  qui  gémit  depuis  trop  long-tems, 
lous  le  poids  de  la  mil'ere. 

Cette  mifere  a  fa  fource  dans  la  ciierté  du  Pain, 
du  Beurre,  du  Bétail,  du  Sel,  de  l'Huile,  &c.  en 
im  mot  ,  le  Peuple  eft  dans  la  difette  des  chofes  de 
première  nécefiité. 

L'Artifan  ("e  plaint  avec  juftice,  qu'il  peut  à  peine 
gagner  fuffiamment  de  Pain  pour  la  femme  &  Tes 
cnfans.  Les  plaintes  du  Bourgeois  font  également  fon- 
dées. Il  éft  tems,il  efl  jufle  que  l'on  prenne  encon- 
(idération  leurs  doléances. 

Cependant  nous  laifTons  à  votre  fagefle  &  à  votre 
prudence  à  juger  ,  s'il  convient  de  faire  des  repré- 
fentations  à  L.  A.  R. ,  pour  défendre  ou  reftreindre 
la  (ortie  du  Grain,  du  Beurre,  du  Bétail,  &c.  Et 
nous  vous  abandonnons  auffi  le  choix  des  moyens  , 
qui  vous  paroitront  les  plus  convenables  pour  faire 
cefTer  les  juftes  plaintes  du  Peuple. 

Ah  !  fi  après  de  fi  longs  gémiflemens ,  nous  pou- 
vions,  Mefleigneurs ,  vous  engagera  faire  tous  vos 


(  ^-AO  ) 
efïorts ,  pour  obtenir  en  faveur  du  petit  Peuple ,  U 
libre  entrée,  comme  ci- devant  du  Hareng  de  Hoi- 
lairde  ;  par  cet  Article  ieul ,  mille  &  mille  individus 
reprendroient  une  nou\ielle  vie.  En  effet,  quel  nom- 
bre mcroyable  de  perronne<;  n'y  avoit  -  il  pas  qui 
vivoient  ioir  en  fumant  le  Hareng,  (oit  en  le  débi- 
tani  ?  Le  pauvre  Artiian  avoit  pour  moins  d'un  fol 
deux  bons  Harctjgs ,  qui  lui  luffii'oient  pour.un  repas: 
le  refte  du  faîaire  de  fa  Jou-née  ,  il  pou  voit  le  réfer- 
ver  pour  la  fubliftance  de  (it  femme  &  de  fes  en- 
fans  ,  ou  poLi;-  d'  utres  nécefïité^.  Maintenant  hors 
d*état  d'acheter  de  la  Viande",  à  caufe  de  1;  cherté, 
il  peut  à  peine  fe  procurer  fuffifaniment  de  Pain  : 
un  mauvais  Hareng  d'Odende  ,  eft  en  effet ,  trop  cher 
pour  lui,  il  Teft  même  pour  le  Bourgeois  aifé.  W\n 
&c  l'autre  fe  piaignerit  d'être  obligés  de  tirer  le  Ha- 
reng d'Oftende  ;  ce  qui  peut  être  un  avantage  pour 
la  Flandre  ,  .mais,  efi  en  méme-tems ,  un  malheur 
ôc  une  opprelîîon  pour  le  Peuple  du  Brabanr. 

Nous  n'ignorons  pas  ,  Mefleii^neurs  ,  que  la  Ville 
d'Oftende  a  obtenu  par  un  Oftroi  de  Sa  Majcfté  , 
le  Privilège  exclufit  de  faire  entrer  cette  denrée  dans 
nos  Provinces. 

Mais,  jugez,  fi  l'équité  permet  d'accorder  à  un?:: 
Ville  des  Pnviltges,  qui  cauiént  la  ruine  d'un  nom- 
bre infini  de  Citoyens- 

Jugez  ,  fi  cela  peut  fe  concilier  avec  la  Joyeufc 
Entrée^  qui  défend  bien  exprefîément  d'accorder  des 
Privilèges  ou  exemptions ,  qui  puifient  en  aucune 
manière  être  ptéjudiciables  aux  habitans  du  Brabanr. 
Telle  eft  la  difpofition  dti  4^e.  Article  de  ladite  Joyeufe 
Entrée. 

Nous  n'avons  pas ,  il  eft  vrai  ,  des  raifons  au/îî 
fortes  de  nous  plaindre  relativement  à  la  Morue  d'Of- 
tende  ,  que  par  rapport  au  Hareng  ,  (i  noiis  n'envl- 
fageons  que   l'avantage  feul  du    petit  Peuple.  Mais 

comme 


(  MI  ) 

comme  notre  foilicitude  embraffe  aufli  les  intérêts  de 
tous  les  Citoyens  ,  nous  avons  cru  qu'il  étoit  de 
norre  devoir,  comme  Protecteurs  du  Peuple  en  gé- 
néral ,  de  vous  faire  fur  cet  Article  de  rerpeftucufes 
remontrance^. 

Oui,  Mefleigneurs,  vous  devez  en  être  perfucdés, 
&c  c'eft  un  fait  conrtant ,  que  dans  notre  Ville ,  qui 
renferme  tant  de  milliers  d'habitans ,  nous  avons  à 
peine  reçu  d'Oftendeen  une  année  autant  de  tonnes 
de  Morues ,  que  nous  en  recevions  ordinairement  en 
un  mois  avant  cet  oftroi  oppreffif  &:  ruineux. 

Le  préjudice  que  ce  Privilège  exctufit  a  caufé  à 
ceux  qui  font  le  commerce  du  PoifTon  ,  &  la  dé- 
treffe  où  il  a  jeté  notre  Bourgeoise  ,  font  trop  con- 
nus  pour  s'arrêter  ici  à  le  démontrer  plus    au  long. 

Nous  ne  pouvons  cependant  nous  empêcher  de 
faire  cette  obfervation  :  ou  la  Ville  d'Oftende  n'a  pas 
été  en  état  de  nous  fournir  fuffifamment  de  Morue, 
ou  elle  nous  a  de  dcflein  prémédité ,  laifîe  en  di- 
ferte  de  ce  PoiflTon  ,  pour  nous  Forcer  à  acheter  à  un 
prix  exclufif  de  mauvaile  Morue  ,  parce  qu'il  étoit 
défendu  d'en  importer  de  bonne  qualité  de  Hollande. 

Nous  vous  repréfentons  aufli ,  Meffeigneurs  ,  que 
c'efl:  un  grand  préjudice  pour  la  Nation,  que  la  jcu- 
nefife  qui  fe  fent  appellée  à  l'état  Religieux,  foit  en- 
travée &  arrêtée  dans  la  vocation,  par  l'^dit  du  tS 
Avril  1-72,  donné  par  notre  gracieufe  Souveraine 
M^rie-Thérefe  de  glorieufe  mémoire  ,  par  lequel 
l'émiffion  des  vœux  folemnels  de  Religion,  qui  étoit 
permiîe  à  l'âge  de  i6  ans ,  fuivant  îe  Concile  deTrente  , 
eft  défendue  avant  celui  de  25  ans. 

L'etfet  que  cet  Edit  produit  ,  c'eft  qu'un  petit 
nombre  de  jeunes  gens  embraflent  l'état  Keligitux. 
D'où  il  s'eni'uit,  que  plufieurs  familles  doivent  à  la 
fin  tomber  dans  une  décadence  totale,  pu  (que  cha- 
que entant  prenant  une  part  dans  la  lùccefli:::  de  Tes 


(  H^  ) 

parens,  la  famille  ne  peut  plus  fe  foufenir  dans  Ton 
premier  état  de  fortune  Se  d'aifance  ;  &  lorfque  les 
enfans  qui  kiccedent  font  en  grand  nombre,  la  part 
de  chacun  d'eux  eft  fi  modique ,  qu'ils  ne  peuvent 
entreprendre  un  commerce  d'une  certaine  étendue,  ce 
que  toutes  fois  ils  auroient  pu  faire  ,  fi  quelques-uns  de 
leurs  frères  ou  fœurs  ,  avoient  eu  la  liberté  de  fuivre 
l'inclination  qui  les  appelloit  à  l'état  Eccléfiafiique. 

Nous  favons  bien,  Mefîeigneurs,  que  Sa  Majefté 
ne  défend  point  par  cet  Edit  la  vie  Religieufe  : 
mais  nous  favons  auflîî ,  &  l'expérience  nous  l'a  ap- 
pris ,  que  les  fuites  funeftes  qu'a  entrainé  cette  dif- 
pofition  qui  recule  jufqu'à  l'âge  de  25  ans  rép«.)que 
de  l'émiffion  des  vœux ,  ont  été  que  le  nombre  des 
familles  eft  diminué,  &  que  les  jeunes  gens,  après 
avoir  à  peine  achevé  le  cours  de  leurs  études,  fe  li- 
vrant audéfordre,  deviennent  un  fardeau  onéreux  pour 
la  fociété  ,  au  lieu  qu'ils  auroient  pu  être  utiles  à  l'Etat 
6c  à  l'Eglife  ,  s'ils  euffent  été  de  meilleure  heure  mis  à 
l'abri  de  la  fédudion  &  de  la  corruption  des  mœurs. 

Ajoutons  à  cela  que  les  fciences  qui  contribuent 
tant  à  la  gloire  &:  à  la  fplendeur  d'une  Nation,  & 
qui  font  pour  ainfi  dire  la  bafe  &  le  fondement  de 
la  félicité  publique ,  font  tombées  dans  un  état  de 
mépris  &  de  langueur ,  ou  plutôt  font  menacées 
d'une  entière  extindion.  En  effet,  les  Parens  dont 
les  enfdns  montrent  d'heureufes  difpofitions  pour  les 
fciences ,  voyant  que  la  carrière  des  études  ne  pré- 
fente point  une  heureufe  iflue  ,  ce  qui  pour  un 
grand  nombre  eft  l'état  Eccléfir-ftique  ,  n'y  font  point 
entrer  leurs  enfans,  d'abord  parce  qu'ils  fe  trouvent 
dans  rimpoflibilité  de  les  entretenir  jufqu'à  l'âge  de  25 
ans  ,  &  enfuite  parce  qu'ils  appréhendent  avec  rai- 
fon  ,  qu'après  avoir  achevé  leurs  études ,  féduits  dans 
un  âge  fi  avancé  par  la  corruption  du  fiecle ,  ils 
n'ayent  plus  de  goût  pour  l'état  Eccléfiaftique. 


(  MO  ^ 
Cet  Edlt  prive  donc  d'un  état  honnête  pîufieurs 
individus ,  qui  auroicnt  pu  rendre  des  fervices  ef- 
fentiels,  comme  ceux  qui  autrefois,  quoique  fortls 
de  la  moindre  clalTe  de  la  Bourgeoifie ,  font  parve- 
nus aux  plus  éminentes  dignités,  foit  de  l'état  foit 
de  l'Eglii'e  ;  &c  ainfî  pîufieurs  Pères  de  famille  (e 
voyent  forcés  d'enlevelir ,  pour  ainfi  dire,  les  ta- 
lens  &  le  génie  de  leurs  enfans  fous  l'enclume  &c 
le  marteau  d'un  Métier  fervil. 

Telles  font  les  obfervations  que  notre  devoir  nous 
a  didées ,  &  que  la  Religion  du  Serment  que  nous 
avons  prêté  &  que  nous  voulons  remplir ,  ne  nous 
a  pas  permis  de  paffer  fous  filence. 

Nous  croyons  avoir  rempli  l'obligation  que  nous 
impofoit  la  qualité  de  défenfeurs  du  Peuple  ,  & 
nous  vous  fupplions  ini^arument  ,  Meffeigneurs ,  de 
daigner  appuyer  avec  cette  follicitude  paternelle  ,  donc 
vous  avez  donné  tant  de  preuves  ,  cette  effufion 
de  nos  fentimens  pour  Ifc  bonheur  public,  qui  a 
été  jufqu'ici  l'objet  de  vos  plus  prelTantes  démar- 
ches. Nous  vous  fupplions  aufîi  de  continuer  fanç 
interruption,  des  Aflemblées  fi  refpediables ,  jufqu'à 
ce  que  toutes  les  infraâiions  faites  tant  à  la  Joyeufi 
Entrée^  qu'aux  autres  Droits,  Libertés,  Privilèges, 
Chartres^  Coutumes  ,  Uiages  &  autres  Droits,  tant 
publics  que  particuliers  foyent  entièrement  redreilées. 

C'eft  la  grâce,  &c. 

Eto'unî  fignès  ,  P.  A,  Van  dcn  Bergen.  J.  E, 
C.  Grigis.  N.  Jof.  Hcny,  C,  M.  N.  Nan-. 
tenil  fenior.  7,  Huybrcchts.  J.  Alies,  /, 
B.  Gome^.  N.  De  Manne^,  F.  C.  J.  Lar~ 
roie.  Denis  Corner.  Jof,  Herni.  Bogaeris,  P. 
Jof.  Potteau.  C.  J.  Dehaen.  J,  Van  Bcrc- 
kelaer.  F.  D.  De  U'inter. 
De  notre  Aiïemblé<?,  le  13  Juin  1787. 


(  144  ) 


LETTR  E  d'un  Patriote ^  fur  la  meilleure 
Admïnijlrat'ion  de  la  Police  dans  les 
Provinces  Belgiques. 

m  i  F  s  défordres  inféparables  des  tems  de  trou- 
bles &  de  diiïenfions  publiques  méritent  de  fixer  l'at- 
tention ,  fur-tout  des  perfonnes ,  qui  par  état  &  par 
les  fonélions  de  leur  Emploi  ,  (ont  fpécialement 
chargées  de  veiller  au  maintien  &c  à  la  confervation 
du  bon  ordre  &  de  la  fureté   publique. 

M.  le  Comte  VanderStegen  &  de  Bouireval,Grand- 
Séuéchal  ou  Droflard  en  chef  du  Pays  &  Duché  de 
Brabant,  animé  d'un  zèle  vraiment  Patriotique,  pour 
prévenir  ces  délordres ,  éloigner  de  ces  Provinces 
route  efpece  de  faâieux  ,  de  turbulens ,  de  gens  fans 
aveu  &  autres  perfonnes  fufpectes  qui  dans  de  fem- 
blables  circonftances  font  les  boute-feux  qui  fomen- 
tent,  excitent  &  propagent  les  émeutes  fous  le  pré- 
texte de  la  défenfe  de  la  caiife  commune  ,  &  cela 
dans  l'efpérance  d'exercer  leur  brigandage  avec  im- 
punité,  confondus  dans  le  grand  nombre,  offre  d'é- 
tablir les  moyens  infaillibles  d'extirper  dans  ces  Pro- 
vinces le  brigandage  jufques  dans  fes  racines  ;  avec 
impofîîbilité  à  toutes  perfonnes  criminelles  &  autres 
fans  aveu  de  s'y  réproduire  dans  aucun  tems  &  (ous 
aucune  forme. 

Ces  moyeris  qui  n'ont  jamais  été  imaginés,  (im- 
pies dans  leur  exécution ,  économes  dans  leur  em- 
ploi ,  font  le  fruit  de  40  ans  d'étude  &  d'^ipplicatioii 
dans  cette  partie  efîenti^lle  de  l'Adminiflration  gé- 
nérale  ,  dont  par  état  il  a  fait  l'objer  de  fes  médita- 
tions. 

11  feroit  au  comble  de  fes  dcfirs ,  lî  dans  les  cir- 


C  M5) 
conilances  actuelles ,  il  pouvoir  donner  à  Tes  Conci- 
toyens ce  témoignyge  de  Ion  amour  pour  Tordre  pu- 
blic ,  affuré  qu'il  eft  de  l'efficacité  de  (es  movens  : 
efficacité  qu'il  offre  de  démontrer  avant  de  les  em- 
ployer. 

Sans  entrer  dans  le  détail  des  avantages  innombra- 
bles que  procureroicnt  ces  moyens  mis  en  exécu- 
tion ,  nous  nous  contenterons  d'en  indiquer  quel- 
ques-uns. 

D*accord  avec  l'autorité  fuprême  ,  le  DrofTard  de 
Brabant  tait  revivre  ,  au  fouiagement  des  Peuples  , 
tous  les  Edits ,  Placards  Sr  Réglemens  qui  ont  été 
promulgués  depuis  des  fiecles ,  pour  le  maintien  du 
bon  ordre  &i  de  la  ("ûreté  publique  ,  en  en  rendant 
l'inexécution  prefqu'impoffible. 

11  vient  au  fecours  des  Peuples  du  Plat-Pays,  par 
la  fuppreffion  entière  d'une  corvée  onéreufe,  péni- 
ble 5l  illufoire  :  Les  Patrouilles  payfannes. 

Il  reftitue  des  milliers  de  bra,<;  aux  campagnes ,  & 
rend  par-là  une  énergie  précieufe  à  l'Agriculture. 

Il  élevé  une  Barri-ere  infurmontable  contre  la  fraude 
&  la  contrebande  qui  infeftent  ces  Provinces. 

Il  éloigne  à  iamais  de  ces  Pays  les  vagabonds  , 
gens  (ans  aveu  &  autres  femblables  ,  à  qui  il  feroic 
impoffible,  par  le  moyen  de  Ton  cordon  ,  de  s'y  in- 
troduire. 

Il  (urveille,  avec  une  attention  toujours  aélive  , 
les  mal-inteûtionnés  dont  aucun  mouvement  ne  peut 
échapper. 

11  prévient  enfin  le  défordre  &  le  crime,  S:  afTitre 
aux  Citoyens  de  tous  les  ordres  ,  dans  les  Villes  &c 
au  Plat- Pays,  la  tranquillité  la  plus  imperturbable 
dans  leurs  oerfonnes  (k  dans  leurs  biens;  ce  qui  ne 
peut  s'effcftuer  qu'en  augmentant  la  CcKiipagnie. 

Tels  font  entr'autres ,  quelques-uns  des  avantages 
que  préfentefon  projet;  touteslcs  parties  en  font  tel- 

Q  3 


(  i4<5  ) 
iemeiit  combinées  &c  confolidées  par  des  Réglemens 
i'agement  médirez ,  &  par  une  tadique  unique  &  par- 
ticulière à  ce  projet  d'arrangement  ,  qu'il  ieroit  dif- 
ficile de  le  trouver  en  défaut. 

Il  conlîfte  à  établir  une  Maréchauflee  uniforme  , 
fiffii.ante,  toujours  en  activité  &  fi  heureufement  dif- 
tribuée  à  diftatîces  égales  au  Plat-Pays  &  dans  tou- 
tes les  Provinces,  qu'elle  furveille  à  la  fois  toutes  les 
parties  du  fervice  :  de  manière  que  par  une  corref- 
pondance  journalière  &  non  interrompue,  de  la  ca- 
pitale comme  du  centre  ,  les  o^rdres  s'expédient  tans 
celTe  avec  une  rapidité  étonnante  jufqu'ajx  extrémi- 
tés des  Provinces  ,  &  les  rapports  en  arrivent  avec 
la  même  rapidité. 

Cette  correfpondance  invariable  n'eft  due  qu'à  la 
diftribution  combinée  des  Archers  flarionnaires  ,  pla- 
cés à  trois  quarts  de  lieue  les  uns  des  autres  .  dont 
les  forxfVions  font  de  parcourir  tous  les  jours  &  en 
tous  fens ,  le  qùarré  qui  eft  commis  à  leur  carde , 
pour  enfuite  faire  leur  rapport  à  leur  bas  Officier  , 
fïné  au  centre  de  la  brigade  compolée  de  huit  Ar- 
chers. 

Les  rapport?  font  remis  à  jour  fixé  à  des  Cava- 
liers porte-  caflettes,  fiationnés  de  4  en  4  lieues,  oa- 
puis  la  capit^iîe  juiqiraux  extrémités  des  Provinces  , 
dont  les  fondions  font  de  parcourir ,  en  rétrogra- 
dant ,  les  routes  qui  leur  font  indiquées ,  pour ,  de 
pofte  en  pofte,  faire  parvenir  ces  rapports  à  leur  dtC' 
tinaîion. 

Voilà  en  deux  mots ,  tous  les  détails  de  ces  moyens 
afiirrés,  fimples  à  la  vérité,  mais  par  leur  {implicite 
même  recommandablcs.  Us  femblent  une  méchaiii- 
que  dont  toutes  les  pa-fies  font  en  mouvement  con- 
tinuel par  la  combinaison  de  la  correfpondance.  Us 
font  l'effet  d'un  filet  tendu  fur  toutes  les  Provinces 
à  la  fois  y   pour  en  fermer  l'entrée  à  tout  ce  qui 


pourrolt  en  troubler  l'ordre  6>c  la  tranquillité  ,  & 
y  furprendre  immanquablement  tout  ce  qui  y  fe- 
roit  déjà. 

Le  mendiant  profcrit  par  les  Edits ,  le  routeur  fans 
aveu,  le  déferteur ,  le  contrebandier,  le  brigand,  le 
banqueroutier  fugitif,  le  raviffeur,  le  voleur,  Stc.  ne 
trouvent  plus  de  retraite  qui  ne  foit  fous  les  yeux  de 
quelque  ftationnaire  ;  &  s'il  eft  alTez  heureux  pour 
échapper  d'une  maille ,  il  eft  fur  qu'il  fera  pris  dans 
une  autre. 

Tel  eft  enfin  ce  Plan  ,  qu^^il  peut  erre  confidêré  à 
bon  droit ,  comme  le  bouclier  du  Citoyen  &  du  Voya- 
geur ,  le  garant  des  propiétés ,  l'œil  toujours  ouvert 
«Je  la  Police  ,  &  l'objet  long-tems  dëfiré  des  habirans 
de  la  campagne  ,  qui  n'afpirent  qu'à  la  fupprtffion 
de  leurs  Patrouilles  pour  y  voir  fubftituer  celles  in- 
diquées. 

Pour  y  parvenir  ,  l'Auteur  vient  de  faire  remet- 
tre aux  Seigneurs  Etats  afTeir.blés  un  Mémoire  rela- 
tif à  Ton  projet.  Tout  fait  pré'umer  qu'il  fera  favo- 
rablement accueilli ,  5c  qu'il  recevra  enfin  une  fandion 
qui  mettra  le  comble  à  notre  reconnoifTance  pour  le 
patriotifme  généreux  dont  Meffeigneurs  les  Etats  Unis 
de  ces  Provinces  nous  ont  donné  dans  tous  les  teins, 
&  nous  donnent  encore  tous  les  jours,  depuis  trois 
mois ,  àcs  preuves  Ci  ptécieufes. 


Q4 


(  mS  ) 

Lettre  de  remerciment  à  Mrs.  les  No- 
tables des  Communes  de  la  Ville  de  Gand^ 
demandant  par  leur  repréfentatïon  du  J 
Juillet  1787  ,  le  changement  du  Magïf- 
trat  y  pour  le  compofer  exclnfivement  de 
bons  Patriotes  y  du  xo  Juillet  1787. 


Messieurs, 


E 


N  admirant  d'un  côté  le  Patriotiffrje  le  plus  pur 
qui  anime  vos  cœurs,  je  ne  faurois  me  difpenfer  de 
voir  avec  la  plus  vive  indignation  ,  que  de  l'autre 
côté ,  l'mtérêt  le  plus  lordide  &  le  plus  mépri(able 
domine  cette  elpece  de  gens  ,  qu'une  ambition  de- 
inefurée  dévore  ,  fans  égard  pour  aucun  principe, 
parce  qu'ils  ont  befoin  d'un  emploi  pour  exifter» 

En  louant,  Meffieurs,  votre  2eie  pour  le  bien  gé- 
néral dans  la  demande  que  vous  nous  fîtes  le  7  du 
préfent  mois  ,  pour  obtenir  le  changement  du  Ma- 
glftrat ,  fuivant  les  Articles  I  6c  II  de  la  ConceiTjon 
Caroline  de  Gand  ,  dont  le  but  principal  eft  de  ^o\xs 
choifir  un  Repréfentant  intègre,  que  le  befoin  de  vi- 
vre des  émolumens  de  fon  emploi  ne  dirige  point  , 
un  honnne  impartial  8>c  jufte  ,  que  l'appât  du  gain 
n'entraîne  ni  n'aveugle  point,  comme  celui  qui  oc- 
cupe scluelîement  cette  ]5lace ,  le  ne  puis  m'empê- 
cher  de  vous  dire,  que  3'ai  été  forcé  de  rougir  de 
honte ,  ou  plutôt  àz  douleur  ,  îorfque  dans  notre 
féance  fcabinale ,  j'ai  entendu  l'oppofition  que  firent 
a  vos  jufles  repréfentations  quelques  individus,  qui 


(  149  ) 
<3epuis  cette  aftlon  non  patriotique  ,  ont  perdu  tout 
le  mérite  qu'ils  avoient  à  mes  yeux. 

L'homme  intègre  ,  celui  dont  l'ame  eft  pénétrée 
des  fentimens  de  juftice  &C  d'équité  ,  n'a  rien  à  rif- 
quer  dans  ce  chansement ,  parce  cju'il  eft  intimement 
convaincu  que  la  caufe  générale  doit  être  préférée 
dans  tous  les  cas  atout  autre  intétêt  ;  &c  dans  le  cas 
dont  il  s'agit  ici  ,  j'ai  vu  avec  une  fenfibilité  bien 
douloureufe  ,  qu'il  exidoit  parmi  nous  de  vils  &  de 
très-vils  efclaves. 

Je  Tuis ,  je  l'avoue ,  le  moindre  de  tous  vos  Ma- 
giftrats ,  je  fuis  ce  qu'on  appelle  un  zéro  dans  l'Etat; 
mais  s'il  étoit  pofiib'e  que  j'eufTe  mille  têtes ,  toutes 
aufli  précieufes  que  celle  du  premier  d'entre  nous , 
je  n'héfiterois  pas  à  les  dévouer  toutes  pour  brifer 
]qs  chaînes  d'une  fervitude  odieufe  ,  pour  rompre  , 
dis-je ,  des  chaînes  que  des  traîtres ,  des  cœurs  bas 
&:  rampans  ont  déjà  baifées ,  &  qu'ils  baiferont  en- 
core ,  dès  que  des  récompenses  précaires  &  momen- 
tanées en  doivent  être  le  prix  ,  &  à  ce  vil  prix , 
leur  criminelle  condefcendance  les  portera  à  prodi- 
guer le  rang  &  les  plus  beaux  jours  des  Peuples  au- 
trefois f.  fortunés  de  la  Belgique. 

Aiîri  facra  famés ,  quid  non  mortalia  cogis 
Pectora  ! 

Maudite  foif  de  r or,  à  quels  excès  n'entrair.cs-tu  point 
les  mortels! 

Oui ,  Meflîeurs  ,  il  exifle  pour  notre  malheur,  de 
ces  cœurs  rampans ,  qui  ne  fe  feroient  aucun  fcru- 
pule  de  ■acrifier  leur  poftérité ,  leurs  frères ,  un  Peu- 
ple entier ,  qui  pour  recevoir  une  gratification  an- 
nuelle de  quelques  milliers  de  florins  ,  vendroient 
leur  propre  famille  ,  fans  en  excepter  même  leurs 
enfans  &c  leurs  femmes, 


Quelle  abomination,  vous  écrierez- vous  !  Je  l'ai 
dit  comme  vous,  &  je  n'aurois  jamais  pu  me  le 
perfuader  fi  je  n'en  avois  été  le  témoin  oculaire.  J'ai 
lu  fur  le  front  de  ces  oppofans  la  crainte  &  la  ter- 
reur. Ils  croyoient  déjà  toucher  au  moment  fatal  qui 
devoit  les  priver  de  leurs  appointemens  ;  car  foyez 
bien  certains,  Mefîieuri,  que  ce  n'eft  aucunement  la 
place  qu'ils  ambitionnent ,  mais  les  émolumens  qu'ils 
en  retirent. 

Pourront-ils  alléguer  pour  excufe,  que  le  change- 
ment vifible  qui  s'opéra  dans  leur  phyfioncniie  pro- 
venoit  de  l'efpece  d'affront  que  vous  leur  fîtes  en 
nous  propofant  direftement  de  foUiciter  notre  def- 
tru61ion ,  &  que  ce  fut  là  l'unique  fource  de  leur 
mauvaife  humeur. 

Cette  défaite  ne  pourra  jamais  être  admife  parmi 
vous  ,  Meffieurs  ;  vos  yeux  font  plus  pénérrans  que 
ceux  de  ces  hommes  intéreffés  à  ie  maintenir  dans 
des  emplois  ,  fans  lesquels  ils  mourroient  de  faim. 
D'ailleurs  étant  accoutumés  par  un  abus  de  leur  charge 
à  dominer  &  à  brufquer  le  Peuple  ;  ils  fe  verroient 
avec  le  plus  grand  regret  privés  de  ce  qu'ils  appel- 
lent leurs  Privilèges,  comme  fi  s'en  étoit  un  de  mal- 
iraiter  un  Peuple  lx)n  &  docile,  de  l'entendre  jeter 
les  hauts  cris ,  lorfque  par  des  manoeuvres  reptiles 
il  fe  voit  conduire  au  bûcher,  où  il  doit  fe  voir, 
par  un  raffmementde  cruauté,  confumer  à  petit  teu  ; 
<Sc  fans  doute  qu'ils  feroient  déjà  venus  à  bout  de 
leurs  de/Teins  fi  le  Lion  Belgique  n'eût  pris  le  parti 
d'abandonner  fon  écu{ron,pour  s'élancer  avec  force 
fur  ces  Ojfeaux  de  proie  &  retirer  d'entre  leurs  grif- 
fes des  agneaux  qu'ils  étoient  prêts  à  dévorer. 

J'ai  confidéré  &  je  confidere  encore  votre  de- 
mande ;  je  la  regarde  comme  une  des  plus  fortes 
preuves  que  vous  puifiiez  donner   de  votre  fagacité 


r-.  (251  ) 


&  tie  votre  furveillance  pour  l'intérêt  commun^ 
Apres  m'étre  examiné  moi-même  avec  attentiGn  , 
je  me  fuis  dit  :  ce  ch?.ngemcnt  n'influera  en  rien 
l'ur  mol,  fi  j'ai  le  bonheur  de  pouvoir  être  utile  ou 
nécelTaire  à  la  Patrie. 

Ne  fuls-'ie  d'aucune  utilité  ;  je  fuis  donc  indigne 
de  la  place  que  j'occupe,  ik.  je  ne  puis  en  con- 
fcience  exercer  plus  long-tems  un  Emploi  qu*on  a 
daigné  me  confier ,  parce  qu'on  m'avolt  cru  capable 
de  m'en  acquitter  ;  il  ne  doit  rien  me  coûter  pour 
l'abdiquer,  parce  que  j'agis  contre  le  véritable  but: 
de  l'inftitutlon. 

Suis-je  utile  au  contraire  ,  mais  entrevois-je  que 
quelqu'autre  l'efl:  plus  que  moi  ;  ô  ma  chère  &: 
bien-alniée  patrie  ,  dès  que  je  le  connoitral ,  je  m'em- 
prefferai  de  te  le  prélenter  moi-même  ,  te  priant 
de  vouloir  bien  me  le  prétérer.  Je  fuis  un  vrai  Pa- 
triote; chaque  goutte  de  mon  fang  porte  l'empreinte 
de  ton  Lion  :  l'intérêt  eft  un  monftre  à  mes  yeux 
dans  le  moment  où  il  nous  faut  des  hommes. 

Rien  de  ce  qui  fera  contraire  au  bien  public  ne 
me  réduira  jamais.  Votre  propofitlon  ,  Meffieurs  , 
eft  le  miroir  de  la  vérité  ,  que  vous  exposâtes  à 
nos  yeux  ,  &  où  chaque  bon  Patriote  pou  voit  fe 
mirer,  s'il  n'avoir  eu  les  yeux  fafcinés.  Cette  forte 
d'expofition  n'a  pu  paroître  un  affront  qu'aux  yeux 
des  mercenaires  qui  n'ont  en  vue  que  des  penfions, 
au  lieu  d'être  avides  de  procurer  le  bien-étre  de 
leurs  Concitoyens. 

Je  n'ai  dans  aucun  tems  brigué  ni  follicité  la 
place  lucrative  de  premier  Echevin  ,  place  qui  m'eût , 
à  la  vérité  donné  entrée  aux  Etats,  mais  où  comme 
un  phantôme,  je  n'aurois  eu  qu'un  Droit  de  Repré- 
fentation  :  quant  à  la  féconde  place,  qui  confifte 
à  être  brufque   envers  tout  le  inoiide ,  fe  préfenter 


(  15^  ) 
aux  audiences ,  y  recevoir  le  peuple  d'un  air  hau- 
tAin  ,  je  n'y  afpirerai  jamais ,  &  encore  moins  à 
celle  de  Direfteur  des  ouvrages,  emploi  qui  femble 
deftmé  à  des  prépofés  accoutumés  à  traiter  leurs 
femblables,  comme  s*ils  étoient  d'une  efpece  diffé- 
rente de  la   leur. 

Enfiti  je  n'ai  jamais  envié  d'être  à  la  tcte  des 
Publicains ,  pour  avoir  une  penfion  de  mille  florins, 
prife  fur  la  fubftance  du  Peuple ,  non  plus  que  les 
deux  milie  qu'on  accorde  à  un  oremier ,  à  condi- 
tion que  j'aurois  un  caractère  aufîî  impitoyable  que 
l'eft  celui  qui  en  eft  revêtu  aujourd'hui,  &  qui 
malheureufement  eft  trop  connu  pour  en  dire  ici 
un  feul  mot. 

Je  ne  connois  d'autre  attachement  que  celui  que 
me  difte  le  bonheur  général  des  mes  Concitoyens, 
ainfi  que  celui  que  me  prefcrit  mon  devoir.  Je  ne 
défire  uniquement  qu'à  coopérer,  autant  qu'il  dé- 
pendra de  moi,  à  la  tranquillité  publique,  à  faire 
adminiftrer  la  Juftice ,  comme  elle  doit  l'être  ,  aux 
pauvres  comme  aux  riches. 

Si  comme  j'ofe  m'en  flatter ,  &  comme  l'exem- 
ple de  ceux  de  Namur  me  le  fait  efpérer  votre  de- 
mande eft  agréée  par  le  Gouvernement ,  j'entrevois 
que  dans  la  crife  oii  nous  nous  trouvons,  je  ne  peux 
jamais  être  qu'un  être  fouffrapit ,  parce  que  je  n'ai 
qu'une  voix  très-foible  dans  toutes  ces  délibérations; 

mais  le  Cœur! Ah]  Meffieurs ,  fï  tout  le  monde 

avoit  le  mien ,  notre  bonheur ,  notre  exiftence  li- 
bre feroit  certaine,  ou  ft  malgré  nous,  le  contraire 
prévaloir  ,  nous  deviendrions  des  furies  vengereffes 
prêtes  à  brifcr  le  joug,  fous  lequel  on  prétend  nous 
courber. 

Ne  perdez  point  de  vue  le  Peuple  ,  vos  familles, 
vos   enfans ,  la   poftérité  même  ;  prouvez-leur  que 


(M3) 
"Vous  en  ctes  les  véritables  Pères,  &  ne  leur  Coff- 
riez que   des  exeinples  qu'ils  ne  rougiiTent   pas  d'i- 
miter, 

ChoififTez  nous  des  Chefs ,  dont  les  artères  Sc 
les  veines  foienr  remplis  de  pat-ionlme ,  &  non 
de  cette  efpece  d'hommes,  qui  changent  de  foyers 
comme  d'habits  ,  &  dont  la  maxime  indifféren- 
te eft  : 

^    Illa  mlhi  Patrla ,  non  i;bi  nafcor,  fed  ubi  vefcor. 

Ma  Patrie  n  'efl  point  U  lieu  où  je  fuis  né ,  mais  celui 
où  je  trouve  du  pain. 

Ah!  Mefîieurs,  puiffiez-vous  inculquer  aux  com- 
munes de  cette  Ville  ,  qui  jouiffent  de  Privilèges  encore 
plus  étendus  que  ne  font  les  vôtres,  mais  qui  mal- 
heureufement  pour  eux  font  aveuglés  &  privés  des 
mêmes  fentimens ,  qui  doivent  vous  immortalifer  I 
puiflîez-vous  parvenir  au  point  de  foulager  ce  Peuple  , 
en  le  forçant,  par  votre  exemple,  à  demander  le 
changement  du  corps  des  deTpcres  ,  dont  la  Magif- 
trature  eft  compofée  ;  vous  rendriez  aux  B  *  * , 
vos  alliés ,  leurs  Droits  &  Privilèges,  &:  vous  auriez 
en  même  tems  le  plaifir  fenfible  de  voir  dilparoître 
&  s'éclipfer  de  l'afTemblée  générale  de  cette  Pro- 
vince ,  des  perfonnages  fufpefts  par  leur  enthou- 
fia(me ,  leur  forte  de  vénération  mal  entendue,  & 
leur  dévouernent  pour  le  parti  âes  temporifeurs ,  dans 
l'inftant  fâcheux  où  le  feu  de  la  lédition  menace 
d'embrafer  toutes  les  Provinces   Belgiques. 

Chercher  à  étouiffer  le  cri  du  fentiment  &c  de 
l'humaniré,  ajouter  aux  anxiétés  d'un  Peuple  fouf- 
frant  à  la  vue,  des  horreurs  dont  il  eft  menacé,  & 
cela  par  refpoir  honteux  d'être  revêtu  d'un  chétif  em- 
ploi ;  c'cft  ce    qu'on    peut    nommer  l'exécration  S\ 


(  ^S4  ) 

^abomination  publique,  &:  temporifer  d.tns  un  ino- 
ment  où  la  foudre  menaçante  eft  prête  à  éclater  & 
à  porter  Tes  ravages  de  toutes  parts,  tandis  qu'elle 
devroit  être  conduite  par  le  fil  de  la  raifon  &  de 
l'expérience  dans  le  puits  de  î'anéantifTement  ,  c'eft 
fans  contredit ,  le  plus  grand  crime  de  Leze-Maiedé 
€\u\  pulfîe  être  commis  envers  l'htat ,  c'cfi:  marcher 
la  tête  baiflee  pour  la  recevoir  :  &  cependant  nos 
temporifeurs  ne  font  pas  femblant  de  concevoir  cette 
vérité  ,  quoique  les  effets  foient  prêts  à  les  rédaire 
en  poudre. 

Je  ne  peuï  mieux  les  comparer  qu'aux  Nègres  ,  qui 
baifent  le  bâton  dont  on  s'eft  fervi  pour  les  rofTer  , 
ou  plutôt  à  ces  animaux  domeftiques  qui  fe  traînent 
fervilement  à  terre  vers  leur  maître ,  pour  obtenir 
un  morceau  de  pain  noir,  que  bien  fouvent  il  leur 
refi-ife  encore. 

Courage  ,  Meilleurs  ;  que  votre  démarche  ,  que 
l'exemple  que  vous  donnerez  ,  forme  ,  s'il  (e  peut ,  des 
âmes  incorruptibles  ,  que  vos  procédés  loués  à  fi 
jufte  titre  nous  donnent  enfin  des  Maglitrats  éclairés 
&  s6lifs ,  de  vrais  Citoyens ,  qui  fâchent  connoître 
le  prix  de  la  liberté.  C'eft  le  feul ,  l'unique  moyen 
qui  pourra  concourir  à  Tencouragement  du  com- 
merce ,  de  Tagricuiture  &  de  l'induftrie  j  c'eft  la  feule 
&  la  vraie  tentative  qui  pourra  rendre  à  l'Etat  fa 
première  fplendeur  en  faifanî  également  le  bonixeur 
de  toutes  les  claffes  de  Citoyens  ;  c'eft ,  dis-je  ,  ]>e 
feul  moyen  de  maintenir  l'ordre  &  la  paix ,  en  f.ù- 
fant  fleurir  tous  ces  objets  ,  qui  rendront  au  Souverain 
6c  au  Trône  fa  grandeur  primitive  ,  &  au  Peuple 
fon  bien-être. 

Si  l'on  dédaigne  de  vous  écouter  ;  ne  vou<;  décou- 
ragez point,  redoublez  vos  efforts;  il  eft  beau  de 
furmonter  les  obftacles  qui  fe  préfentent.  Si  la  mon- 


(MO 

tagne  eft  efcarpée ,  fongez  que  la  gloire  en  fera  plus 
grande  d'arriver  jufqu'au  fornmet.  Ce  n'efl  qu'à  fa 
cime  que  vous  pourrez  efpérer  de  trouver  la  gloire 
&   le  bonheur. 


Je  fuis  , 

Messieurs, 


P'otrî  Compatriote. 
C.  L.  J.  B.  F. 


RE  MON  TP.  AN  CE  S  des  Etats  de 
Brabant  à  FEmperdur  o  Roi. 


SIRE, 


L 


E  Comte  de  Murray ,  qu'il  a  plu  à  Votre  Ma- 
jefté  de  commettre  au  Gouvernement-Général  par 
intérim  y  nous  avant  fait  connoitre  qu'il  déiîroit  que 
les  Députés  de  notre  part  fe  rendiffent  chez  Son 
Excellence,  il  leur  a  communiqué  vos  intentions  , 
Sire ,  au  fujet  de  la  Dépêche  qui  nous  a  été  adre!- 
fée  le  ib'  Juillet  pafTé  ,  relativement  aux  déplace- 
mens  des  Troupes  ;  nos  Députés  n'étant  pas  quali- 
fiés à  s'expliquer  par  eux-mêmes  fur  ce  que  le  Comte 
de  Murray  avoir  à  leur  dire  en  vertu  des  ordres 
de  Votre  Majefté ,  ils  ont  prié  Son  Excellence  de 
leur  en  donner  le  réfnltar  par  forme  de  note , 
ce  qu'on  a  cru  ]uûe  d'accorder,- 

Nous  fupplions  humbleîîient  Votre  Ma')ef}:é  ,  d'être 
convaincue,  que  nous  n'avons  pas  follicité  la  Dé- 
pêche dent  il  s'c^git ,  dans  l'eiprit  d'aucune  rer.i- 
tence  ni  d'aucune  défiance  quelconque  qui  eût  pu 
iroiK  refter  après  que  Votre  Majefté,  par  fa  gracieufe 


Dépêche  du  3  Juillet ,  nous  avoit  afiTures  que  votre 
Intention  n'éroit  pas  de  renverfer  en  rien  la  Confti- 
tution  de  vos  Provinces  Belgiques  ,  que  les  vues  de 
Votre  Majefté  ne  tendoient  qu'au  plus  grand  bien- 
être  &  à  la  plus  grande  félicité  de  vos  fidèles  Su- 
Jets  ;  fur  quoi  vous  vouliez  bien ,  Sire  ,  vous  enten- 
dre avec  vos  Etats ,  d'après  les  Conftitutions  fon- 
damentales. 

La  Dépêche  du  18  Juillet  a  été  donnée  pour  cal- 
mer les  inquiétudes  de  toute  la  Nation  ,  dans  les 
moment  que  l'émotion  étoit  extrême ,  &  qu'elle 
ctoit  encore  excitée  par  l'impreflion  que  cauioit  le 
rappel,  quoique  momentané,  des  Séréniflimes  Gou- 
verneurs-Généraux. 

Sire ,  nous  pouvons  apprécier ,  fans  exception  , 
•tous  les  rapports  qui  peuvent  être  parvenus  à  V©- 
ttre  Majefté- (ur  nos  démarches;  nous  n'en  redoutons 
iuicun  de  quelque  narure  qu'il  puiffe  être  ou  de  quel- 
<^ue  fource  qu'il  puifle  venir;  bien  fûrs  de  notre  in- 
nocence ,  bien  fûrs  de  ne  nous  être  écartés  en  rien  , 
de  la  foumlffion  que  nous  devons  à  Votre  Majefté, 
comme  à  notre  feul  &   légitime  Prince. 

Mais,  Sire,  fi  dans  les  tranfaftions  ordinaires  la 
Nation  fe  rapporte  aifément  à  fes  Repréfentan* , 
c'eft-à-dire,  aux  Etats,  il  eft  indubitable,  que  pour 
promouvoir  le  nouveau  fyftême  en  tout  ou  en  par- 
tie ,  norre  concours  non-leulement  n'eût  infpiré  au- 
cune confiance  à  ceux  dont  nous  fommes  obligés  de 
fuivre  le  vœu  univerfel ,  mais  que  ce  concours  eût 
caufé  les  plus  grands  malheurs. 

Ceux-là ,  Sire ,  qui  voudroient  prétendre  que  les 
Etats  ont  renfermé  ou  fu  reftreindre  le  vœu  général 
dans  cette  occurrence,  fe  trompent  eux-mêmes;  ils 
n'ont  pas  plus  la  connoiftance  de  nos  excellentes 
Loix  conftitutionnelles  que  du  caraflere  des  Habi- 
ta ns  , 


C  =57  ) 
tans ,  qui  tous   ^  dans  toutes   les  clafTes  font  éclai- 
rés (ur    les    principes   ii  {impies  de  la  Conflicution  , 
qui   alloit  étie  vifiblement   entamée ,  &   par  -  là  fa- 
crifiée. 

Comment  eft-il.  poffible ,  Sire  ,  qu'on  n'a't  pas 
(u  déir^eler  le  vrai  but  qui  a  Ci  bien  réuffi,  du  ieul 
parti  qui  reftoit  à  la  f^gefTe  dans  l'éloignenient  de 
Votre  Majerté,  d^ms  la  lecoufTe  violente,  qu'avec 
peine  il  a  été  polfible  de  conjurer  ?  Comment  quel- 
ques marques  ,  quelques  (igîies  extérieurs ,  ou  des 
démonftrationi  inHgîiifiantes ,  mais  exagérées  6c  (inif- 
tremens  prélentées,  peuvent-elîes;  prévaloir  mainte- 
nant &  après  coup  fur  la  nécefiîté  des  circonflan- 
ces  ,  s'il  eft  vrai ,  Sire ,  que  rotre  Peuple  a  été 
fauve? 

C'eft,  Sire,  cette  raifon,  à  qui  toute  Loi  doit  cé- 
der pour  le  moment,  qui  a  fait  que  Leurs  AhefTes 
Royales  n'ont  pas  fait  fcrupule  de  déclarer  que  les 
intraétions  laites  à  nos  Conftitutions  depuis  2CO  ans 
feroient  redrelTées  ,  piirce  qu'on  ne  pouvoit  donner 
à  la  Nation  que  ce  calmant  ,  d'autant  plus  indifte- 
rent  au  fond,  qu'il  revient  à  l'obfervation  des  Conf- 
ritutions ,  telles  que  Votre  Majefté  les  a  jurées  en 
1781  ,  fans  que  nous  ayons  jamais  eu  la  penfée  , 
comme  nous  ne  l'avons  pas  encore ,  de  rien  efpé- 
rer  ni  demander  au-delà  ,  ni  en  aucune  façon  de 
la  bonté  du  Souverain;  c'eft  ainli  que  nous  l'avons 
exprefTément  déclaré  dans  le  moment  que  les  Séré- 
nifîimes  Gouverneurs-Généraux  Oîit  accordé  la  Dé- 
claration du  30  Mai  :  c'eft  ainfi  que  Votre  Ma- 
jefté  l'a  entendu  par  la  Dépêche  du  3  Juillet,  à  ja- 
mais précieufe  pour  nous. 

Raflurés  pleinement  par  ce  que  le  Comte  de 
Murray  nous  fait  l'honneur  de  nous  dire  dans  la 
noce   qu'il  nous  a   communiquée ,    autant  que  par 

R  ^** 


(M»  ) 

notre  amour  pour  votre  augufte  Perfonnc  ,  nous 
ne  pouvons ,  Sire ,  qu'offrir  à  votre  Majefté  l'hom- 
mage de  la  plus  entière  confiance  fur  la  concentra- 
tion des  troupes  :  telle  eft  notre  façon  de  voir;  nous 
ne  manquerons  pas  ,  Sire  ,  d'employer  tous  les 
moyens  qui  font  en  notre  puiïïance  pour  commu- 
niquer cette  confiance,  dans  toute  fon  étendue,  à 
nos  Concitoyens, 

Mais  ,  Sire  ,  puifle-t-il  nous  être  permis  d'expo- 
fer  à  votre  tendreiTe  paternelle ,  qui  ne  (e  refufe  pas  au 
moindre  de  vos  Sujets ,  les  maux  que  nous  endu- 
rons !  puiiTe-til  nous  être  permis  d'embrafler  les  ge- 
noux non  d'un  R.oi ,  mais  d'un  Père  qui  nous  porte 
dans  Ton  fein  !  Si  jufqiî'ici  la  crainte  feule  du  fyftê- 
me  a  banni  le',  refies  du  coir.merce  ,  avili  les  pro- 
priétés, anéanti  l'induftrie ,  occafionné  une  langueur 
mortelle  dans  tout  l'entrecours  de  la  fociété  civile; 
fi  la  défiance  s'efl  eniparée  non  feulement  des  capi- 
talifles ,  mais  de  tous  les  individus,  dans  les  affaires 
les  plus  ordinaires  ;  (\  des  émigrations  fans  nombre 
ont  déjà  eu  lieu  par  l'effet  des  infinuations  étrangè- 
res ;  f.  d'autres  fongent  à  quitter  ces  climats  ,  que 
ne  fera-ce  point,  Sire,  lorfque  le  miliralre  fera  dans 
i'enceinte  de  vos  plus  riches  Vil'es,  ou  femblera  les 
menacer ,  tandis  que  la  fuite  de  ces  précautions , 
notcirement  fuperfîues ,  ne  peur  être  que  l'effet  des 
impulfions  toujours  plus  alarmantes  pour  la  con- 
fiance ,  &  pour  cette  Opinion ,  qui  eft  la  reine  du 
monde  ? 

Da'gnez ,  Sire  ,  daignez  hâter  la  confolation  de 
vos  fidèles  Sujets  ;  veuillez  de  votre  Trône  jetter 
un  regard  favorable  fur  nous  ,  fur  les  Députés  qui 
s'y  préfenteront  inceflamment  :  puiffent-ils,  Sire,  ren- 
dre a  Votre  Majefls,  la  pureté  de  notre  amour,  de 
notre  foumifîicn   inviolable ,  obtenir  enfin  de  votre 


(  »59  ) 

ftcrée  Majefté ,  la  déclaration  qui  doit   ramener  no- 
tre bonheur. 

Nous   fommes  avec   un  très-profond  refpeft, 

SIRE, 

De  votre  facréc  Ma jejlé  Impériale  &  Royale  Apof- 
toliquc , 

Les  très-humbles,  très-obéiiTans  &  très* 
fidèles  ferviteurs  ,  Sujets  &  Vaflfaux, 
Us  Prélats  ,  NobUs  &  Députés  des 
Chef- Pilles ,  rtpréfentant  Us  Etats 
de  votre  Pays  &  Duché  de  Brabant, 

Par  Ordonnance  ,  DE  C  O  C  K. 

J)e  notre  AjjembUe  générale  tenue  à  Bruxelles  U 
5  Août  17S7. 

Extrait  de  la  Galette  des  Pays-Bas  ,  du  3  1  Août. 
N^.    65. 

LETTRE    des    Etats    de    Brabant,    à 
S.  Exe.   Mgr.  le  Comte  de  Murray. 

E  S  Prélats  ,  Nobles  &  Députés  des  Chef- 
Villes  ,  repréfentant  les  trois  Etats  de  ce  Pays  & 
Duché  de  Brabant ,  croyent  de  leur  devoir ,  d'ex- 
pofer  à  Votre  Excellence ,  qu'ils  ont  vu  ,  avec  la 
plus  grande  furprife ,  &  avec  une  jufte  indignation , 
l'Article  inféré  au  Supplément  de  la  Ga:^etic  de  Co' 
logne  ,  du  7  Août   17^7  ,  dans  les  termes  fui  vans  : 

♦>  S'il  en  faut  croire  les  Feuilles  publiques  ,  les 
»  Etats  des  Pays  Bas  Autrichiens,  ont  écrit  au  Roi 
»  de  France  ,  pour  lui  demander  de  l'appui  ;  mais 
n  Sa  Majefté  très  *  Chrétienne  leur  a  fait  faire  par 

R  z 


(    î«0   ) 

»  fon  Mlniftre  des  Affaires  étrangères ,  la  Réponfe 
**  qui  fuit  :  M  Jjleurs  ,  U  Roi  mon  Maître  défapprouvc 
**  la  démarche  itlicite  que  vous  avc:^  faite  contre 
>*  votre  Souverain.  Sa  Majejîé  ne  doit  ni  ne  veut  Je 
>*  mêler  en  aucune  manière  des  okjeti  et Adminijlration 
*^  de  votre  Monarque.  Elle  ri  emploiera  jamais  Jes 
>>  Troupes  ,  pour  f.utenir  Vinjujlice ,  &  Elle  vous 
>*  fait  favoir  ,  qu  Elle  a  envoyé  votre  Mijjive  en 
>*  original  à  CEmpticur  [on  Allié ^  &  en  même-ienis 
>*  donné  des  ordres  à  ^o,ooo  hommes  de  fes  Troupes  ^ 
w  de  fc  mettre  en  etut  de  marcher^  à  la  première 
*>  réquiftion  de   Sa  Ma  je  fié  Impériale.  « 

»  Quoique  cette  Lettre  porte  toutes  les  empreintes 
de  fauffeté  pour  des  yeux  cîairvoyans ,  cependant 
les  Reniontrans ,  qui  Tentent  leur  honneur  &  leur 
loyauté  publiquement  inculpés,  ne  peuvent  fe  dif- 
penfer  de  protéger  le  plus  hautement  &  publique- 
ment contre  des  faits  auffi  atroces  que  calomnieux  , 
puifqu'il  eft  de  toute  vérité  ,  que  les  B.emontrans 
n'ont  jamais  écrit  au  Roi  de  France  ,  ni  reçu  aucune 
Lettre  ou  Piéponfe  de  la  part  de  Sa  Majefté  Très- 
Chrétienne  relativement  aux  affaires  présentes  ; 
qu'enfin  ,  il  ne  s'eft  jamais  rien  paiTé  qui  puilTe  en 
avoir  même  l'apparence  ,  ainfi  que  les  Remontrans 
peuvent  en  faire  confter  par  l'exhibition  des  Pro- 
tocoles de  leurs  Séances  ,  &  qu'ils  efperent  que 
Votre  Excellence  en  eft  d'ailleurs  fufîiramment  per- 
fuadée.  C'efl:  pourquoi  ,  ils  fuppl  ent  Votre  Excel- 
lence, de  recevoir  leur  défaveu  ,  &  leur  proteftation 
formelle  contre  les  faits  fufmentionnés  ,  rapportés 
dans  le  Supplément  de  la  Galette  de  Cologne  / 
qu'en  conlequence  ,  Votre  Excellence  veuille  or- 
donner ou  permettre  que  la  préfente  foit  inférée 
dans  la  Galette  des  Pays-  Bai  ^  avec  l'Apoftille  dé 
Votre  Excellence.  En  quoi  &C.  « 

Si^né  De  Cock:. 


(    25»    ) 

Copie  de  VApo^llle. 

s>  Son  Excellence  ayant  eu  rapport  du  confenu 
de  cette  Repréfentattlon  ,  a  permis ,  comme  elle 
permet  par  cette  ,  aux  Suppllans  ,  de  la  faire  inférer 
dans  la  Galette  des  Pays-Bas.  Fait  à  Bruxelles ,  le 
12  Août   i']'6-j.  Paraphe  Cr.  Vc. 

Signé   M  U  R  R  A  Y. 

Pour  Copie  DE   COCK. 

**  Il  efl:  incroyable  combien  de  menfonges  ,  d'in- 
poftures  ,  de  calomnies ,  de  contes  extravagans  & 
ridiculement  romanelques,  les  Feuilles  publiques,  &: 
de  petites  Brochures  clandeftines ,  ont  accumulés  de- 
puis quelque  tems  contre  les  Etats  &  le  Peuple  Bel- 
gique';, tandis  que  le  Gnzettier  de  Cologne  fabri(|ue 
ou  publie  des  Lettres  fibriquées  fous  le  nom  d'un 
grand  Monarque  (le  Roi  de  France),  contre  l'hon- 
neur de  cette  brave  Nation  ,  celui  du  Bas  -  Rhin  , 
fait  des  vœux  pour  qu'elle  foit  mafTaerée  en  corps, 
quoique  dans  un  de  Tes  derniers  Numéro  ^  il  fe  borne 
à  fouhaiter  le  maiTacre  des  Prêtres  5v  des  Religieux. 
L'abfurdité  de  ces  calomniateurs  publics  va  joîqu'à 
attribuer  au  Clergé  les  Réclamations  des  Beiges,  tan- 
dis qu'il  efl  de  notoriété  publique,  que  fans  la  vio- 
lation des  propriété-; ,  le  nouveau  fynême  fe  feroit 
confommé  fans  réiiibnce  ,  je  veux  dire  fans  réfif- 
tance  publique  6<:  efHcace.  Les  Remorr  ances  ée^ 
Evéques ,  de  TUniverfîté  de  Louvain  ,  &  de  quel- 
que Corps  que  ce  foit  ,  en  faveur  de  la  Religion  , 
étoient  mifes  au  rebut  6c  déjà  oubliées ,  lorfque  l'E- 
dit  des  Intendances  &  des  nouveaux  Tribunaux,  ré- 
veilla le  Lion  Be'eique  ,  profondément  endormi ,  hé- 
las !  fur  des  intércrs  plus  graves,  qui  autrefois  n'euf- 
fent  point  échappé  à  fa  vigilance ,  mais  qui  aujourd'hui , 


(    1^2    ) 

ne  font  plus  qu'un  objet  accidentel  5c  fëcondaire  (a), 
(^u*a  de  commun  la  Conftitution  de  l'h-glife  Catho- 
lique ,  avec  les  nouveaux  Tribun  ux  èx  le.  Inten- 
dans  ?  quel  intérêt  particulier  avoit  le  Clergé  à  s'y 
oppofer?  Les  âmes  chrétiennes  peuvent  bien  regarder 
comme  un  bienfait  de  la  Providence  ,  le  concours 
des  caufes  diverfes ,  qui  ont  produit  enfin  ce  cri 
perçant  dont  route  l'Jturope  a  retenti;  mais  elles  ne 
Savent  que  trop  qu'avant  cette  époque  ,  le  grand 
édifice  de  la  Catholicité  fe  démoliflToit  en  filence  , 
&:  qu'il  en  refloit  peu  de  choie  fur  pied ,  lorfque 
d'autres  intérêts  en  ont  arrêté  l'entière  deftruilion. 
D'où  viennent  donc  les  fureurs  de  tant  de  Gazet- 
tiers  &:  d'autres  barbouilleurs ,  contre  le  Clergé  Belge  , 
qui  n'a  fait  que  joindre  fa  voix  ,  toujours  humble  6c 
fuppliante  ,  à  celle  des  autres  clafîes  de  Citoyens?  ... 
D'où  vient  que  dans  un  tems  où  l'on  ne  parle  que 
de  Liberté  ,  de  Droit  naturel  &  d'égalité  ;  où  le 
defpotirme,  la  violence  &  l'arbitraire  lont    devenus 


(<i)  Il  faut  convenir  cependant  que  depuis  que  la  liberté 
des  Réclamations  a  eu  lieu ,  cet  Article  a  été  préfenté  avec 
toute  Timpreflion  de  fon  importance.  Les  Etats,  le  Confeil 
&  diverfes  Corporations  de  Flandie  fe  font  particuliéreinent 
diflingués  à  cet  égard .  &  c'efl  la  Province  où  les  intérêts  de 
la  Religion  ont  été  le  plus  fortement  &  le  plus  éloquemment 
appuyés.  Heureux  le  Peuple  foncièrement  penuadé  que  ce 
doit  être  ici  le  premier  objet  de  fa  follicitude,  &  en  quelque 
forte  le  garant  des  vœux  qu  il  forme  dans  d'autres  genres 
d'intêr':ts;  conformément  à  rinconteftable  cbfervation  qu'un 
Poète  Philofophe  &  Payen  a  fi  bien  exprimée  ,  il  y  a  i8 
fie  clés; 

Dis  te  minorem  quod  geris ,  imperas. 

Mine  omne  principiurn ,  hùc  refer  exitum.  j 

Dl  multii  nt'yLeŒi  dédire  \ 

Hefperia  mala  luftuofce. 

HOR.  L.  lILOd.6. 


(i«}  ) 

plus  que   jamais  l'objet  d'une  haine  générale ,  d'où 
vient ,  dis-je,  cette  fureur  outrageante  &  calomnieuie 
contre  une  courageule  &   verrueufe  Nation  ,  qui  ''c- 
clame  fa  Conftitution  &  des  fermens    réciproques  ? 
N'en  doutons  pas ,   c'eft  la  haine  du  Chriftianiinie  , 
la  haine  de  Dieu,  de  Ion  Culte  &  de  (es  Minières, 
jui  provoque  &  alimente  cette  manie  de  menfonges 
6c  dinjures  contre  la  Nation  qui  a  oié  élever  fa  voix 
in  faveur  de  ces  refpeftables  objets  ;  haine  qui  ho- 
nore l'EgJife  du  Dieu  vivant ,  autant  qu'elle  la  dif- 
'.ingue  &c  la  caraélérife   entre  toutes  les   Se*51es  qui 
ont  ofé  en  afficher  les  caractères.  Cela  eft  ii  vrai  , 
cjue  dans  la  Belgique  même  ,  de  prétendus  Patriotes  , 
ir.ais   dont  l'elprit  &  le  cœur  étoient  déjà  affervis  à 
la  corruption  dominante  ,  fe  font  recriés  contre  les 
Hemontrances  faites  par  les  Etats  en  faveur  de  la  Ke^ 
ligion.    Ils  ont  prétendu   qu'il   falloit  en   exclure  le? 
intéicts  &  l'envifager  comme  une  chofe  étrangère  aux 
plaintes  de  la  Nation  :  comme  fi  fans  cette  fandion 
de  tous  les  Droits  &  de  tous  les  Contrats ,  il  pou- 
voir y  avoir  quelque  chofe  de  (ûr  dans  les  Sermens , 
dans  les  Conventions  quelconques  ,  &  dans  les  Conj- 
titutions  des  Empires  î 


^ 

L  +  ^ 


R4 


(  i<^4  ) 

REPRESENTATION  du  ConfeU  de  Flan- 
dre ^  du  17  Novembre  1786,  fur  la- 
quelle efi  ftiïvi  le  Décret  du  ConfeU 
Privé  du  z  Décembre  1786,  quife  trouve 
au  4e.  voL  du  Recueil,  r.  102.  Q*) 

SIRE, 

Xl  y  a  déjà  quelque  tems ,  que  les  nouvelles  pu- 
bliques ,  ainfi  que  differens  arrangemens  ,  qu'on 
prend  fous  nos  yeux,  annoncent  un  fydiéme  de 
réfonne  générale  dans  l'Admlniilnfion  Eccléfiafti- 
que ,  Politique  &:  Civile  de  ces  Provinces. 

Un  projet  de  cette  nature  marque  fans  doute 
une  affiduité  étonnante  des  fcîins  ,  que  V.  M.  orend 
pour  le  Gouverneme:it  de  Tes  Peuples;  mais  tandis 
que  ces  vues  bienfritilantes  font  naître  en  nous  les 
ientimens  profonds  de  reconnoiiïance ,  nous  ne  pou- 
vons difTiniuIer,  que  bien  loin  que  quelqu'un  d'entre 
nous,  ou  de  votre  Peuple  ,  envifage  quelque  avan- 
tage réel  dans  ces  grandes  réformes,  elles  mettent  au 
contraire  le  cotr.ble  aux  inquiétudes  &  aux  alarmes 
de  votre  Peuple  ,  dont  nous  avons  déjà  informé 
V.  M.  par  nos  Remontrances  précédentes. 

Quiconque  a  connu  depuis  longues  années  l'état 
de  ce  Pays,  conviendra,  qu'il  ne  s'eft  jamais  trouvé 


{'^ )  On  n'a  pu  acquérir  cette  Pièce  qu'avec  des  lacunes 
&  des  incorre<5î:ions,  copiée  d'après  la  minute  dans  laquelle 
le  Rédafteur  (  M  le  Confeiller  de  Grave  )  avoir  omis  des 
pafTages  &  des  mots  qu'il  a  aioutès  en  la  tranfcrivpnt.  Nous 
n'avons  pas  cru  devoir  les  fuppléer,  pour  ne  pas  déroger  à 
iauihenticité  de  cet  écrit  important. 


(  s«;  ) 

dans  un  degré  de  profpérité  &  de  bonheur,  comme 
depuis  un  certain  tems  ,  foit  qu'on  l'envifage  du 
côté  de  la  Population  ,  de  l'Agriculture,  des  Fabri- 
ques ,  du  Commerce  ,  des  Art5  &  Sciences ,  foic 
du  côté  des  Mœurs,  de  la  Police  &  de  la  tran- 
quillité publique. 

Un  Etranger  eft  extaGé  en  parcourant  no?,  belle? 
Campagnes  ,  cultivées  comme  des  jardins  ,  -S:  peu- 
plées à  l'indar  des  Villes  :  les  bras  ne  manquent 
pas  ici  aux  terres  ;  mais  celles-ci  m.anquent  aux 
bras;  nos  Fabriques  de  Toiles  font  portées  à  leur 
dernière  perfection  ;  les  autres  prenneiit  des  accroi- 
femens  fuccefTifs ,  &c  ont  déjà  acquis  un  degré  de 
conliflance  inconnu  ci-devant. 

Parmi  l'aifance  que  ces  objets  apportent ,  &  au 
milieu  d'une  Population  immenfe  ,  qui  augmente 
tous  les  jours ,  on  voit  polir  les  Villes ,  civilifer  les 
Mœurs ,  cultiver  les  Arts  &  les  Sciences  ,  dim^nuer 
leà  Sources  de  la  Procédure  ;  une  vigilante  Police 
dans  les  Villes ,  ê«C  une  MaréchaufTée  bien  dirpofée 
au  Pîat-Pays ,  maintiennent  la  tranquillité  publique; 
la  maifcn  de  correftion  établie  dans  la  Capitale 
prévient  les  grands  crimes ,  en  arrêtant  le  mal  dans 
Ton  principe  ,  au  point ,  que  les  effrayantes  juftices  , 
par  les  potences  &  les  roues  ,  femblent  être  difpa- 
rues  :  en  un  mot  ,  on  vo't  régner  par-tout  une 
abondance,  une  activité  irinuftricu:e  ,  une  férénité, 
dont  on  n'avoit  pas  d'idée  depuis  long  tems  ,  6sc 
qui  annoncent  un  Peuple  heureux  fous  un  Gouver- 
nement doux. 

Quel  dommage  de  voir  cette  férénité  s'obfcurcir 
par  des  nuages  ,  qui  commencent  à  s'élever  fur 
nos  têtes  !  Psr  quelle  fatalité  peut-on  Ci  réfoudre  , 
au  milieu  d'un  calme  (i  heureux  ,  à  détruire  les 
fources  mêmes  ,  dont  notre  préfent  bonheur  dé- 
coule ?  Quel  homme  enfin ,  connoiiTant  notre  pofition  , 


(  266  ) 

ie  ferolt  attendu   à   ces   grands    changemens  ,    qui 
vont  donner  à  notre  Conftitution  politique  une  tonne 
toute  nouvelle  ?  Il  n'eft  pas  pofhble  de  n'être  pas 
ftupéfdit  à  la  vue  de   remèdes   i\   violens  :   car    fi 
c'eft  pour  les  appliquer  à  guérir  de  grands  maux  , 
on    conviendra  au   moins  ,   qu'il   devoit  être    bien 
conftaté  avant  tout ,   que  ces  prétendus  maux  exif- 
tent  :  nous  ne  doutons  pas  ,  que  c'eft- là  ce  qu'on 
fait  accroire  à  V.  M.  Des  perfonnes  ,  qui  par  leur 
pofition  éloignées  de  nous ,  ont  aifément  pu  Te  mé- 
prendre ,  &  qui  réellement  fe  font   trompées  dans 
les  faits,  ont  cru  ?ppercevolr  (\e^  défeétuofîtés  dans 
nos  Adminiftrations ,  êi  de  la  corruption  dans  nos 
Wœurs,  qui  n'exiftent  pas  :  de-là  ils  ont  pu  infpi- 
rer  à  V.  M.  des  idées   fi  défavantageufes  de  notre 
pofition  aduelle  ,  ce  qui  eft  un  de  ces  malheureux 
eflcts  pour  nos  Pays ,  de  (q  trouver  à  un  fi  grand 
éloignement  de  l'œil  de  leur  Souverain  ;  mais  le  ta- 
bleau que  nous   venons    de  tracer   de   l'état  de  ces 
Provinces  &:  des  Mœurs  de  Tes  Citoyens ,   tableau 
qui  eft  peint  d'après  nature  ,  eft  un  garant   fur   de 
la  réalité  du   fait   &  peut  raffurer  V.  M.  fur  toutes 
insinuations  de  différente  nature.  Si  ce  n'eft  pas  tant 
cette  confidération  ,   mais   bien  la  vue ,   l'eipoir   de 
tirer  de   plus   grands    avantages  des  nouveaux  Eta- 
blifiemens,  qui  ont  di(fté  la   réforme,  dans  ces  cas 
la  raifon  ,  ainfi  que  la  faine  politique  exigent ,  que 
ces  prétendus  avantages  foient  bien  précieux  ,  &  les 
règles  de  la   prudence  dictent ,  que  leur  fuccès  ne 
puiffe  en  aucun  cas  être  équivoque  :  car  il  eft  im- 
pofiîble  de  réalifer  de  grandes  réformes  fans  renver- 
ler  l'état    &  la  fortune    d'une  infinité   de  Familles, 
&  ce  feroit  la  chofe  la  plus  criante  que  d'expofer  le 
prix  de  tant  de   facrifices   aux    feuîs   coups   du    ha- 
iard  :  mais  comment  ,  fans  fe  faire  illufion,  pouvoir 
fe  promettre  une  certitude  décidée  d'un  pareil  fuccès? 


C  1^7  ) 

L'hiftoire  de  tous  les  tems  démontre  ,  que  les 
apparences  les  pîus  brillantes  font  troinpeuies,  6c 
qu'on  a  rarement  été  heureux  dans  l'exécution  (\es 
grands  plans  de  réforme  :  les  projets  d'amélioration 
eblouiffenr  les  yeux  ,  le  brillant  de  leur  éclat  fait 
JJlufion ,  il  empêche  l'œil  de  percer  bien  avant  dans 
i  avenir;  c'eft  communément  aux  dépens  d'une  trifte 
expérience ,  qu'on  parvient  à  être  détrompé  :  ce 
qu'il  y  a  de  déplorable  dans  ceci  ,  &  qui  eu  un 
des  contraftes  de  la  nature  humaine ,  c'eft  que  com- 
munément les  idées  de  réforme  prennent  aux  ca- 
ra(fleres  les  mieux  Niifans  ;  un  mal  quelconque  len- 
fjble  les  touche;  leur  défir  de  faire  du  bien  eft  éveillé 
par  la  moindre  apparence  favorable  ;  le  défaut  d'ex- 
périence les  empêche  de  voir ,  qu'il  eft  très-pofli- 
ble  de  faire  de  grand  mal  avec  les  meilleurs  inten- 
tions du  monde. 

Nous  ne  voulons  pas  dire ,  qu'il  n'exifte  pas  d'a- 
bus ,  bien  moins  ,  qu'il  n'y  auroit  pas  de  bonnes 
chofes  à  faire  pour  le  bonheur  du  Peuple  :  les  abus 
ont  été  de  tout  tems  le  partage  de  l'humaniré;  mais 
nous  favons ,  que  ceux  ,  qui  demandent  à  être  cor- 
rigés ,  ne  font  pas  de  nature  à  devoir  fubir  des 
opérations  violen^es.  V.  M.  peut  acquérir  des  no- 
tions (ûres  fur  l'efpece  de  ces  abus  ,  fur  les  moyens 
les  plus  propres  à  les  faire  cefTer ,  ainfi  que  fur  le 
genre  d'améliorations  à  faire  :  elle  n'a  pour  y  par- 
venir qu'à  entendre  (es  Sujets  Nationai>x  ,  les  Evo- 
ques ,  les  Etats ,  &  fpecialement  fes  difFérens  Confeils 
de  Provinces  :  nous  fomnies  à  même  de  pouvoir 
pleinement  fatisfaire  V^  M.  fur  ces  differens  points, 
6i  particulièrement  de  lui  préfenter  un  plan  d'amé- 
lioration conforme  aux  vœux  de  tout  le  Peuple , 
&  qui  ,  à  l'avantage  certain  de  produire  un  bien- 
ctre  public,  jo:ndroir  celui  de  ne  porter  du  préju- 
dice  à  perfonne.  C'eft  ainfi ,  Sire ,   qu'en   ont  ufé 


C  162  ) 

Tos  Ancêtres  :  ils  n'ont  fait  rien  d'important  en 
matière  de  Légiflation  civile  que  d'après  les  avis 
de  leurs  Officiers  de  Juftice.  Cet  exemple  mérite 
d'autant  plus  d'être  imité  dans  le  tems  préfent ,  que 

Votre  Majefté,  par  Ton  élolgnement  de  nos  climats  , 
Ôc  par  les  vaftes  occupations ,  n'eft  pas  à  portée  de 

connoître  par  elle-même  le  befoin  &  les  avanta- 
ges de  Ton   Peuple  Belgique. 

Ces  Pro^vinces  ont  eu  leurs  Souverains  réfidens 
chez  eux  jufqu'au  tems  rie  Philippe  Second  ,  Koi 
d'Efpagne  ;  les  Princes  de  U  Maifon  de  Bourgogne, 
Phiîippe-le  Bel ,  père  de  Charles  V,  &  ce  dernier, 
dont  la  mémoire  eft  encore  fi  chère  à  la  Patrie , 
ont  réfidé  aux  Pays-Bas;  ces  Princes,  quoique  ph'.cés 
au  milieu  de  leurs  Sujets  ,  ne  faifoient  rien  fans  l'in- 
fluence de  leur.s  Conleils  de  Provinces  ;  leur  Gou- 
vernement étoit  compacté  fur  le  génie  ,  fur  les  mœurs, 
fur  les  ufages  de  la  Nation  ;  les  tems  de  leurs  règnes 
ont  été,  au  rapport  de  nos  Annales,  le  (lecîe  d'or 
des  Provinces  Be'giques.  ^ 

Lorfque  Charles  V  parvint  au  Trône  ,  la  Flandre 
avoir  peu  de  Loix  ;  il  ne  crut  cependant  pas  de 
fa  fagefTe  ni  de  l'intérêt  de  Tes  Peuples  ,  de  les 
multiplier  beaucoup;  il  vit  ,  que  ce  n'eft  pas  la  mul- 
titude ,  mais  la  bonté  des  Loix  ,  qui  conflitue  l'ame 
d'un  bon  Gouvernement.  Le  Recueil  des  Loix  éma- 
nées fous  fon  règne  ,  qui  a  duré  près  de  cinquante 
ans,  ne  monte  pas  à  un  volume  auffi  gros  que  celui 
des  Loix  que  nous  avons  vu  émaner  depuis  cinq 
à  fix  ans.  Au  lieu  de  créer  un  Code  arbitraire ,  le 
Monarque  invitoit  Tes  Peuples  à  lui  préfenter  les 
Digedes  de  leurs  Coutumes,  Droits  &  Ufages  ,  pour 
leur  donner  une  exiftence  non  équivoque  par  fa 
San<fi:ion  fouveraine.  Cet  exemple  a  été  imité  par 
Tes  Succefieurs,  &  particulièrement  par  les  Archiducs 
Albert  &  Ifabelle. 


C  a<59  ) 
■  Comme  une  des  qualités  les  plus  efTentielIes  des 
loix  cft  leur  (lab-lité ,  pullque  rien  n'eft  plus  capable 
de  faire  perdre  le  refpeâ:  qu'on  leur  doit ,  que  des 
variations  fubites  &  des  interprétations  multipliées, 
te  Prince  eut  un  foin  extrême  de  les  faire  rédiger 
par  des  gens,  qui  à  la  maturité  du  jugement  &  à  la 
fuperiorité  des  lumières  ,  joignoient  les  fonds  d'une 
longue  expérience;  «uilî  quelle  majefté  ,  quelle  fa- 
gelTe  ,  quelle  prévoyance  clans  ces  Loix  admirables 
qu'elle  donna  aux  Peuples  Belgiques  ,  iur-tout  les  par- 
ties de  la  Police  Eccléfiaftique  &c  Civile ,  fur  la  puni- 
tion des  crimes  &  des  Cv^ntrats  ufuraires,  Tur  le  com- 
merce &:  la  Navigation  ?  Loix  ,  dit  un  homme  connu  , 
que  la  plupart  des  Nations  éclairées  ont  cherché  à 
imiter  ou  à  adapter  à  leur  ufages  ,  &  qui  fubfiftent 
encore  dans  toute  leur  force;  on  les  cite  avec  vé- 
nération ,  le  peuple  les  aime  ,  &  y  trouve  fon  bon- 
heur. 

Dans  le  cas  où  il  s'agifToit  de  faire  quelques  chan- 
gement notables,  opération  qu'il  eft  impoffible  de 
réal.i'er  fans  bleffer  le  droit  de  nombre  de  particu- 
liers ,  ce  Monarque  prit  une  voie  admirable,  pour 
prévenir  les  murmures ,  il  entendit  tous  ceux  qui  fe 
difoient  intéreffés  aux  changemens ,  &:  il  les  admit 
eux-mêines  dans  la  dilcuflion  des  moyens  pour  fixer» 
de  la  manière  la  plus  conforme  à  l'équité,  le  degré 
de  leur  préjudice;  nous  en  avons  eiur'autres  un  exem- 
ple dans  le  fameux  Concordat  de  Tan  i  ^  3  i ,  conclu 
<;ntre  le  Doyen  &c  les  Régens  de  la  Faculté  des  Arts 
de  rUniveriîté  de  Louvain  ,  &  les  Patrons  ou  Col- 
lateurs  Eccléfiaftiques  de  ce  Pays.  Ceux-ci  s'étant 
plaints  des  Privilèges  exce(iïfs  accordés  4  !a  Faculté  en 
fait  de  nominations  ,  le  Prince  fufpendit  l'exécution 
du  Privilège,  chargea  les  parties  de  s'entendre,  &:  l'on 
conclut  de  gré  à  gré ,  fous  fes  yeux  &  de  fon  aveu , 
Ifi  Concordat,  qui  a  fervi  de  bafc  aux  Privilèges  des 


(  170  ) 

nominations  de  la  Faculté  des  Arts  jufqu'aii  temps  de 
leur  anéantiffemenr. 

Un  autre  exemple  de  modération,  qui  caraélérife 
le  règne  de  ce  Monarque ,  fe  préfente  dans  le  Con- 
cordat ,  qu'il  a  conclu  lui-même  avec  l'Evêque  de 
Liège  pour  la  Difcipiine  Eccléfiaftique  dans  la  partie 
du  Brabant ,  qui  reflortiffoit  fous  le  même  Diocefer 
Les  arrangemens  pris  dans  ce  Traité  font  connus  fous 
le  nom  de  Concordata  Brabantix^  &  conftituent  une 
partie  principale  de  la  Légiftation  Eccléfiaftique  de  la 
même  Province. 

Lorfqu'après  les  troubles  de  Gand  ,  il  fut  trouvé 
«éceiTaire  de  bâtir  une  citadelle  dans  un  emplacement 
occupé  par  le  Monallere  de  S.  Bavon,  on  ne  procéda 
à  la  fupprefîion  de  cette  Communauté  qu'avec  des 
égards  fcrupuieux  pour  le  fort  des  membres;  on  chan- 
gea l'Abbaye  en  Chapitre  ,  aujourd'hui  Cathédrale  de 
S.  Bavon,  avec  les  formalités  de  Jufticerequifes. Cette 
voie  de  douceur  rendit  aux  fupprimés  leur  diflblution 
même  agréable. 

On  pouroit  citer  une  infinité  de  pareils  traits  dans 
la  vie  de  ce  Prince ,  qui  ont  rendu  fa  mémoire  fi 
chère  :  quelques-uris  font  confignés  dans  le  premier 
volume  des  Placards  de  Brabant  ;  auffi  les  Etats  du 
Pays,  dans  les  hommages  qu'ils  lui  rendirent ,  le  jour 
de  l'abdication  à  Bruxelles,  fouhaiterent  [fpécialément 
que  (on  fils  fût  l'imitateur  de  fa  clémence  ,  bénignité 
&  modération. 

Philippe  Second  fut  le  premier  qui  fixa  fa  réfidence 
à  Madrid,  à  300  lieues  d'ici;  ce  puiffant  Monarque , 
qui  n'avoit  vifité  qu'une  feule  fois  ces  Provinces ,  oc- 
cupé d'ailleurs  des  foins  d'une  vafte  Monarchie,  diA- 
perfée  dans  différentes  parties  du  monde ,  s'écarta  de 
la  conduite  des  fes  ancêtres,  &  fe  régla  fur  des  avis 
étrangers ,  diélés  par  un  elprit  de  prédileftion  pour  le 
Gouvernement ,  &  on  connoît  les  malheurs  qui  en 


(^71) 

ont  été  la  fuite.  Détrompé,  par  une  malheureufe  ex- 
périence ,  ce  Prince  gouverna  eiifuite  avec  afîez  de 
douceur,  &  établit  même  près  de  fa  Per(onne un con- 
leil  permanent  de  trois  Confeiners  nationaux,  que 
l'Empereur  charles  VI  a  rétabli  à  Vienne  en  1717, 
&  qui  a  fubfifté  jufqu'en  1757.  Les  Archiducs  Al- 
bert &irabelle,  &:  puis  les  Rois  d'tfpagne  Philippe 
ÏII,  Philippe  IV,  Charles  II,  l'Empereur  Charles  VI, 
&  Marie-Thére(e  votre  augufte  Mère,  dont  le  nom 
e(ï  fi  cher  aux  habitans  de  ce  Pays ,  ont  tous  marché 
fur  les  mêmes  traces. 

Nos  régii'tres  font  foi,  que  ce  Confeiî  a  influé  dans 
tous  les  cas  d'une  Légillation  importante  ,  qui  concer- 
noit  la  Province.  Cette  louable  coutume,  par  laquelle 
les  Princes  de  ce  Pays  fe  font  fait  une  Loi  de  pren- 
dre leurs  avis  de  leurs  Confeillers  nationaux,  a  été 
fi  condamment  obfervée  ,  qu'elle  a  pafTée  aux  yeux 
des  Légifles  du  Pays  comme  une  maxime  ,  qui  tient 
à  la  Conftirution  de  l'Etat.  Perfonne  ne(ï  plus  à  por- 
tée de  connoïtre  les  défauts  de  la  Légiflation  que  les 
Confeils  des  Provinces 

Tandis  que  nous  femmes  vivem.ent  affeclés  de  ces 

idées nous  recevons  l'Edit  du   18  Oiflobre  , 

qui  concerne  la  fuppreffion  des  Séminaires  Epifcopaux 
5i  la  fubftltution 

Le  premier  coup  frappe  fur  ces  pieux  &  falutaires 
EtablifTemens ,  qui  ont  fait  bénir  la  mémoire  des  Pè- 
tes du  Concile  de  Trente  (a')  ,  Se  qui  ont  été  reçus 
avec  tranlport  dans  toute  l'Europe  Catholique. 

On  fent  aifément  que  pour  parvenir  à  la  ruine  de 
ces  bons  EtablifTemens ,  &  pour  induire  V.  M.  aux 
prétendues  réformes,  qu'on  a  en  vue,  l'ori  doit  avoir 


fj)  Voyez  le  Concile  de  Trente,  fciT.  23.  ch.  18.  lesConci- 
îcs  nationaux  6cc.  &  nibfuc  \?.iz-Ei\)cn  èc  Ccurnycr  6a:. 


(  ^72  ) 
groffi  étrangement  à  Tes  yeux  les  maux  de  ces  Pro- 
vinces :  la  préFace  de  l'Edit  le  fait  affez  voir  :  on  y 
dépeint  les  mœurs  de  nos  habitans  comme  parvenues 
au  dernier  débordement.  Heureufemenr,  comme  nous 
avons  déjà  obfervé ,  cela  n'eft  pas  ;  nous  Tommes  obli- 
gés d'en  informer  V.  M.  mais  ce  qui  eft  d'autant  plus 
malheureux  &  affligeant  pour  la  Nation,  c'eft  que  ce 
prétendu  débordement  fert  de  prétexte  à  la  terrib'e 
révolution  ,  qui  va  la  dépouiller  de  fon  plus  grand 
bien,  en  dépoffedant  nonibre  de  perfonnes  d'un  état, 
qui  leur  appartient  par  une  jufte  récompenfe  de  leurs 
travaux  ,  &  dans  lequel  ils  avoient  droit  de  compter 
de  finir  tranquillement  leurs  jours;  qui  va  fruftrer  les 
parens  des  efpérances  qu'ils  s'étoient  formées  pour 
l'établilTement  de  leurs  familles,  &  déranger  une  in- 
finité de  gens ,  dont  la  fortune  tient  plus  ou  moins 
aux  Adminiftrations ,  qui  vont  fubir  la  réforme. 

Pour  donner  du  relief  au  nouvel  établiffement,  on 
prône  fur- tout  C uniformité  de  Doclriru  ^  quon  y  e/z- 
feignera.  Quant  à  cette  uniformité ,  Ton  pourroit  fe 
faire  les  demandes  fuivanres. 

Trouve-t-on  dans  nos  Séminaires  Epifcopaux  une 
diverfité  de  Doftrine?  Cette  diverfifé,  fi  elle  exifte, 
eft  elle  de  nature  grave?  a-t-e!Ie  du  rapport  à  quel- 
ques points  de  dogme  ou  de  controverfe  ?  a-t-elle 
jufqu'ici  produit  quelque  mal  ?  fait-elle  craindre  quel- 
-que  mal  pour  l'avenir  ?  Si  la  réponfe  à  ces  queftions 
pouvoir  être  douteufe  ,  &  fi  ce  doute  pouvoir  être 
de  conféquence  ,  il  eft  du  moins  certain  ,  qu'il  ne 
feroit  pas  plus  difficile  d'introduire  une  uniformité  de 
Dodrine  {a')  dans  le  petit  nombre  de  nos  Séminai- 


{a)  L'uniformité  de  Doftrine  eft  impofTible  dans  aucune 
fcience ,  elle  les  détruiroit  toutes.  L'unifonrà.é  Théologique 
tlt  parfaite  dans  toutes  les  matières  où  la  liberté  des  opinions 
n'a  pas  lieu.  Voyt^  le  3c  vol-.  Part.  Eccléf.  p.  82 

res 


C  ^75  ) 

res  diocéfains,  que  de  la  fixer  dans  les  deux  Séminai- 
res nouveaux,  éloignés  l'un  de  l'autre  d'une  quaran- 
taine de  lieues.  On  n'auroit  qu'à  charger  les  Evê- 
ques  d'agir  de  concert,  de  dreffer  de  commune  main 
une  inftruclion  pour  fervir  de  règle  à  tous  les  Pro- 
feffeurs  des  difFérens  Séminaires  ;  on  pourroit  même 
au  befoin  prendre  recours  à  un  Synode  national  , 
ainfi  qu'il  a  été  en  ufage  àès  la  naiflance  de  l'Eglife. 
Les  Synodes  de  Cambrai  &  de  Malincs ,  tenus  ibus 
les  aufpices  de  nos  Souverains,  publiés  par  leurs  or- 
dres ,  &  obfervés  jufqu'à  préfent ,  font  une  preuve 
manifefte ,  qu'on  peut  les  employer  avec  i'uccès  pour 
régler  la  difcipline  de  l'Eglife  Belgique. 

Quant  à  ce  qui  concerne  cette  claufule  que  d'étr© 
inftruit  ou  plus  éclairé ,  on  ne  peut  pas ,  fans  in- 
juftice  ,  accufer  notre  Clergé  d'ignorance. . . . 

Les  principes  de  la  Dodrine  &  de  la  Morale  font 
fuffifans  pour  remplir  avec  fuccès  les  devoirs  de  leur 
état  :  l'expérience  a  démontré  même ,  qu'ils  font 
communément  plus  propres  à  la  charge  d'ames,  que 
ceux  qui  poffedent  une  érudition. 

Les  Lovanifles ont  un  amour-propre,  qui 

donne  certaine  vanité  ,  laquelle  ne  s'accommode  guer 
res  avec  cet  efprit  d'humilité  ,  avec  un  amour  fi  pro- 
pre pour  la  paix  &  la  concorde,  qu'un  bon  Pafteur 

doit  prêcher cette  grande  érudition  met  trop  de 

diftance   entre  le  Pafteur  &  les  Fidèles vifiter 

les  pauvres,  donner  au  malade  le  courage  &  la  pa- 
tience nécefifaires 

Il  femble  du  premier  abord  réfulter  de  l'Edit,  que 
les  Evéques  n'ont  plus  de  pouvoir  d'enfeigner  ou  de 
faire  cnfcigner  la  Théologie  ,  ni  d'ordonner  d'autres 
que  ceux  que  les  Profeffeurs  Royaux  ont  trouvés 
capables;  mais  nous  avons  jugé,  combien  la  difpo- 
iition  feroit  frappante,  fi  l'Edit  de  voit  être  ainfi  en- 


(  174  ) 

tendu  :  ce  fcroit  peut-être  la  première  dans  le  mon- 
de Chrétien  .... 

Les  Evêques  font  ,  par  la  nature  de  l'Epifcopat , 
chargés  de  l'inftruftion  des  Fidèles  ,  &  leur  ôter 
cette  charge  ,  c'eft  détruire  leur  caraftere  , . .. .  c'eft 
vouloir  faire  rentrer  dans  la  clafTe  cominune  des 
Fidèles  ceux  ,  qui  font  établis  pour  les  gouverner . . . 

Delà  nous  avons  jugé,  qu'il  falloir  donner  un 
autre  feus  au  dit  Edit ,  iavoir  que  les  dirpofitions  y 
reprifes  n'auroient  lieu  pour  autant  ,  que  les  Evêques 
y  confentiroient .... 

Il  eft  fait  dans  l'Edit  une  fuppofîtlon  ,  que  les  Evê- 
ques accepteroient  avec  gratitude  le  nouvel  Eta- 
blilTemenr .... 

Ce  n'eft  que  par  ces  motifs ,  que  nous  avons  pu 
nous  réfoudre  à  publier  l'Edit  avant  de  faire  nos 
Repréientarions  au  Trône. 

La  furveillance  &  l'infpsftion  des  Ecoles  de  Théo- 
logie appartiennent  privativement  aux   Evêques.... 

Les  Papes  en  exerçant  ce  pouvoir  n'ont  pas  en- 
tendu   en  priver   les  Evêques  [a)  .  .  .   Circonftances 

(.7)  Diroit-on  bien  ce  que  les  Promoteurs  du  nouveau 
■fvfiênie  ,  les  Apologiftes  de  la  Babylone  des  Séminaires- 
Généraux  ,  oppofent  à  ces  obrervations  irréfragables  ?  Ils 
aA'ancent  férieufement  que  la  Théolopc  n'eft  pas  une  Science  , 
que  c'eft  un  enfemble  d'idées  vaines  &  de  mots  fans  objet, 
raïquel  il  eft  impoffible  de  déroger,  puilque  ce  n'oft  rien. 
Voilà  comme  la  Science  de  la  P».eligion  eft  naitée  par  l'Auteur 
de  ces  innovations funeftes ,  homme  d'un  nom  célèbre,  mais 
qui  ne  doit  pas  à  lui  fa  célébrité.  Si  la  Théologie  n'eft  pas 
ViTiQ  Science  pour  lui ,  comme  je  n'ai  pas  de  peine  à  le  croire, 
elle  a  été  la  Science  des  Paul ,  des  Polycarpc ,  des  Athanafe , 
des  Auguftin ,  des  Chryfoftôme  ,  des  Boffuct  &c.  ;  elle  eft 
encore  la  Science  de  tous  ceux  qui  pofîédent  à  tond  la  Doc- 
trine Chrétienne  &  qui  favent  repoufiér  les  traits  qu'on  lui 
lance  \  elle  eft  la  feule  Science  qei  intéreile  foncièrement  l'hom- 
ïTie,  en  lui  apprenant  fes  titres  à  l'imjnoriahté ,  &  les  moyens 


(ï75  ) 

particulière? ,  qui  ont  donné  lieu  à  réreclion  <îe 
la  Faculté  de  Théologie  dans  l'Univerfité  de  Lou- 
valn  .... 

Lorfqu'en  1416,  le  Pape  Martin  V ,  à  la  demande 
du  Duc  de  Brabant ,  inftitua  l'Univerfité  de  Lou- 
vain ,  le  grand  fciiifiTie  de  l'Occident  touchoit  à  fa 
fin  ,  la  paix  de  l'Eglile  étoit  fur  le  point  de  renaî- 
tre: c'efl:  pourquoi  le  St.  Père  ne  voulant  pas  don- 
ner de  fujet  de  mécontentement  aux  Eveques  , 
n'o6troya  que  les  Facultés  des  Arts,  des  Droits  Ca- 
noniques &  Civiles ,  &  de  la  Médecine  ,  &  refufa 
d'oftroyer  la  Faculté  de  Théologie ,  quoiqu'elle  fût 
demandé  également.  Quelques  années  après  ce  St. 
Père  étant  mort,  Eugène  IV,  ion  Succeifeur,  re- 
doutant le  Concile  de  Bâle, qu'il  avoit  été  comme  for- 
cé de  convoquer,  &  qu'il  étoit  rélblu  de  diiïoudre, 
inftitua  ,  à  la  demande  du  Duc  de  Brabant  &  de  la 
Ville  de  Louvain  ,  la  Faculté  de  Théologie  ,  vrai- 
fembîablement  pour  fe  préparer  un  appui  dans  VU- 
niverfiré  de  Louvain  ,  qui  fîguroit  déjà  en  Europe. 
II  ne  fut  pas  déçu   dans  (es  efpérances  ;    la  Faculté 


d'y  parvenir  ;  elle  efi:  la  feule  Science  qv\  dans  les  grandes 
conclurions  Toit  coriflap.te  &  uniforme ,  qui  n'admet  ni  fyf- 
tême ,  ni  variation  dans  tout  ce  qui  nous  importe  de  favoir. 
Dans  les  plus  grandes  obfcurités  ,  dans  l'explication  de  fss 
plus  profonds  mytl;cres ,  elle  poHede  une  fureté  &  précifion 
de  lang'ige ,  qui  ne  font  dans  aucune  autre  Science  ;  qui  ne 
laiîTe  à  l'erreur  aucune  échappatoire ,  aucun  moyen  de  tergi- 
verfatlon  &  de  déguifeir.ent.  11  eft  vrai  que  dans  des  fiecles 
barbares ,  la  Théologie  a  furchar^é  fa  doftrine  de  beaucoup 
de  queftions  inutiles  ;  mais  on  n'a  plus  ce  reproche  à  lui  faire , 
&  en  cela  même  elle  n'éro"t  point  aufiTi  repréhenfible  qu.e 
fes  Cenfeurs  le  prétendent.  Voyez  le  DiB.Hijîor.  Aulbtiurg. 
1781-17S4,  Art.  Ahselme,  Duns  ,  Hangest  ,  Suarez, 
Thomas  d'Aquin.  —  Cathic.  P/iihf.  n*.  419.  516. 


(  v«) 

de  Théologie  foutint  fortement  Ton  parti  dans  les 
querelles  avec  les  Pères  du  Concile  de  Bâle:  cette 
même  Faculté  ne  contribua  pas  peu  dans  la  (uite 
à  empêcher  dans  ces  Provinces  la  réception  de  la 
Pragmatique  Sanélion  de  Charles  Vif,  Roi  de  France  , 
digérée  d'après  les  Décrets  du  même  Concile  ,  qui 
donnoit  tant  d'ombrage  aux  Papes ,  &  que  Léon  X 
trouva  moyen  de  faire  abolir  par  (on  Concordat 
avec  François  I . . . . 

Une  autre  réflexion ....  fe  préfenfe  fous  un  af- 
peâ:  bien  alarmant  :  fi  nos  Evcques  acceptent  l'E- 
dit ,  tous  les  Ecoliers  en  Théologie  vont  être  af- 
femblés  dans  un  même  Edifice....  tout  le  dépôt 
de  la  Doftrine  &  de  la  Religion  fera  remis  entre 
ces  feules  mains .... 

Il  eft  dangereux  de  confier  tont  le  dépôt  de  la 
Foi  à  un  feul  Corps....  l'elprit  de  l'Hétérodoxie 
s'emparant  des  Profefîeurs,  le  poifon  palTera  d'abord 
parmi  tous  les  Ecoliers.  Ce  n'eft  pas  la  même  cho- 
fe  lorfque  l'enfeignement  de  la  Théologie  eu  par- 
tagé en  différentes  Ecoles  fous  l'infpeélion  des  Evê- 
ques.  Le  Bayanifme  n'a  pas  pp.fTé  les  murs  de  la 
Ville  de  Louvain ....  Le  calme  regnoit  dans  les 
Séminaires  (a)  .... 


(û)  Que  l'Augiifle  Sénat  avoir  bien  prévu  le  fâcheux  ave- 
nir qui  vérifia  incontinent  ces  fages  obfcrvations  !  w  Au  inilieu 
„  de  ces  ravages  (  difoit  un  Auteur  trois  ou  quatre  mois 
„  après  la  rédaction' de  ces  Remontrances)  nous  gardions 
„  encore  cette  foi  antique  qui  avoir  échappé  à  tant  de  ré- 
„  volations^  que  des  fedaires  fanatiques  &  fanguinaires  n'a- 
„  volent  pu  arracher  du  cœur  de  nos  Citoyens  ;  lorfqu'un 
,,  prG;et  qui  ne  peut  avoir  été  conçu  qu'à  la  fource  de  tou- 
„  tes  ténèbres  ,  rafTembla  ('ans  un  même  lieu  les  candidate 
„  du  faint  Miniftere ,  contre  la  Loi  exprefTe  du  Concile  de 
5,  Trente,  Tufage  de  l'Eglife  uriverfelle,  la  nature  même  Sc 


(  177  ) 

Au  terme  de  l'Art,  ç  de  l'Edit  toutes  les  Bour- 
f'es  &  Fondations  ("ont  transférées  au  profit  des  deux 
Séminaires  nouveaux  ;  ce  qui  eft  contraire  à  la  juftice, 
aux   volontés  préfomptives  des  Fondateurs .... 

Et  quant  à  l'ufage  répandu  aujourd'hui  de  chan- 
ger quelquefois  la  deftination  des  Fondations  ;  ces 
changemens  ne  peuvent  (e  commettre  fans  injuftice; 
un  Citoyen  ,  par  exemple  ,  de  Gand  ,  de  Bruges , 
D'Ypres,  pouroit  il  être  préfumé  porter  un  confen- 
tement  tacite  ,  que  cette  Fondation  foit  transférée 
dans  une  autre  Province  à  30  ou  40  lieues  de  fa 
Patrie  ?  . . . .  à  faire  perdre  au  Souverain  l'amour  & 
le  refpeft  &  la  confiance  de  fon  Peuple?....  c'eft 
le   manque    d'égards    pour    la    confervation  de    fes 

„  le  but  de  l'Inftitution  Sacerdotale.  On  vit  alors  arriver 
„  de  l'extrêmiré  de  la  Germanie,  des  hommes  conPxUS  par 
„  l'iniquité  de  leurs  principes ,  par  leur  attachement  à  une 
„  Sette  odieufe  ik  particulièrement  profcrite  dans  ce  Pays  , 
„  répandre  la  corruption  à  pleines  mains ,  fouffler  Thé  éro 
„  doxie  &  le  fchirme  dans  les  difcours  ,  dans  les  livres, 
„  dars  les  leçons  publiques,  &  faire  de  i'Ecole  de  la  Doc- 
„  trine  (ainte ,  l'Ecole  de  toutes  les  erreurs...  Pcntifes  du 
,,  Seigneur,  vous,  aux  (oins  defqueis  il  a  confié  l'Egli'e 
„  Belgique,  oîi  s'eft  per«.Iu  dans  ce  moment  cririque,  votre 
„  zèle  oc  votre  éloquence  ?  Comment  des  paroles  de  feu 
„  voiîs  ont -elles  manqué,  pour  réclamer  votre  plus  cher 
„  héiitage  ?  Plus  cruels  que  r Autruche  du  défen ,  avez-vous 
j,  pu  abandonner  ce  germe  précieux  fur  le  fable  brûlant  d'un 
„  rivaee  perfide?...  Mais(ô  Providence  qui  dtniiit  la  force 
„  par  la  foiblefie  ! .)  les  enfans  ont  condamné  la  fatuTe  pru- 
„  dence  des  pères.  L'ingénuité  &  l'innocence  ont  dévoilé 
„  l'impofture,  l'ont  combattue,  l'ont  confondue.  Satellites, 
„  priions  ,  menaces  ,  traitemens  durs  5c  flétrifîans ,  vous 
„  avez  couronné  cette  étonnante  réfiflance.  Mais ,  ô  ten- 
„  dreiie  paternelle,  qu'avez  vous  éprouvé  dans  ces  momens 
„  terribles  1  Pères  Chrétiens ,  hommes  généreux  &  fenfibles , 
„  dans  quelle  preffe  ont  été  vos  cœurs  durant  ces  barbares 
„  expéditions  !  " 


(  V8  ) 

Droits .  r. .  Nous  avons  vu  ci-devant  combien  Char- 
les V  eft  parvenu  à  faire  bénir  fa  mémoire  par  l'atten- 
tion particulière ,  qu'il  s'efl  donnée  conftamment 
à  radurer  (es  Sujets  fur  leurs  intérêts  &   propriétés. 

Nous  paffons  fur  d'autres  inconvéniens ,  qui  fe 
préfentent  dans  l'exécution  de  l'Edit ,  tels  que  font 
la  perte  que  la  Flandre  fera  dans  le  cas  de  faire 
par  l'exportation  des  deniers  des  Fondations ,  &  par 
les  gros  frais  auxquels  fes  habitans  feront  expofés 
pour  élever  leurs  enfans  à  l'Etat  Eccléfiaftique.  Tous 
ces  objets,  quolqu'aflez  notables  pour  mériter  l'at- 
tention d'un  bon  Prince,  femblent  di!paroître  devant 
ceux,  qu'on  a  traités  ci-devant.  Une  remarque  en- 
core à  faire ,  &  qui  n'eft  pas  à  méprifer  ;  c'efî  que 
ce  furcroît  de"  dépenfes,  la  longue  durée  du  cours 
de  Théologie  &  d'autres  confidérations  pourroient  ai- 
fément  caufer  dans  le  Pays  une  difette  de  Maîtres 
d'Eglifes  pour  la  charge  d'ames.  On  annonce  une 
multiplication  de  Paroiffes  :  mais  fi  le  dégoût  pour 
l'Etat  Eccléfiaftique ,  qu'on  commence  à  voir  pren- 
dre, fait  encore  quelques  progrès;  il  eft  à  craindre, 
que  même  celles  ,  qui  exiftent  aujourd'hui  ,  ne  devien- 
nent en  partie  déiertes. 

Voilà  ,  Sire  ,  les  confidétations  que  nous  avons 
cru  devoir  mettre  fous  les  yeux  de  Votre  Majefté  au 
fujet  &  à  l'occafion  de  l'Edit  des  Séminaires.  Nous 
n'avons  pas  moins  procédé  fans  délai  à  fa  publica- 
tion- Cette  prompte  déférence  eft  une  marque  cer- 
taine de  la  pureté  de  nos  intentions  :  notre  devoir  , 
&  notre  zèle  pour  le  bien  du  Royal  fervice  &  de 
Ja  Patrie  ont  di.^lé  no<  paroles,  qui  ne  font  dans  le 
fond  que  la  voix,  les  cris  &  les  vœux  du  Peuple 
en  général.  Si  nos  effcnts  font  aftez  heureux  que  de 
g;îgr,er  quelque  délai  dans  l'exécution  de  ces  grands 
plans  de  réforme    jufqu'à  ce  que   Votre  Majefté  ait 


C  ^7^  ) 

entendu  fes  bons  Sujets ,  les  Evêques ,  les  Etats  ; 
les  Officiers  de  Juftice ,  nous  ne  doutons  pas  de 
leurs  fuccès  ultérieurs. 

Que  fi  malheureufement  notre  voix  n'étoit  pas  écou- 
tée pour  le  préfent ,  &  que  les  fuites  ne  répondroient 
pas  aux  efpérances  ,  c'eft  alors  qu'en  compatifTant  avec 
la  Patrie  ,  notre  peine  ne  fera  pas  moindre  fur  les 
regrets  auxquels  le  bon  cœur  de  Votre  Màjefté  fera 
expofé  ;  nous  les  partageons  d'avance  :  car  nous 
fommes  intimement  perfuadés  des  vues  falutaires  de 
Votre  Majefté.  On  eft  pénétré  de  refpcft  &  ravi 
d'admiration  à  la  vue  de  cette  activité  laborieufe 
&  infatigable ,  que  Votre  Majefté  met  dans  les  foins 
de  fon  Empire  ,  à  la  vue  de  ces  courfes  &  fatigues 
continuelles,  qui  en  dérobant  prefque  le  rems  né- 
cefTaiie  au  repos  &  aux  befolns  de  la  vie ,  ne  laiffent 
rien    à    la  diiTipation. 

Nous  ne  pouvons  nous  difpenfer  de  rappeller 
enfin  à  Votre  Majefté  que  le  titre  ,  qui  a  porté  la 
Souveraineté  de  îa  Flandre  dans  l'augufte  Maifon 
d'Aurriche  n'a  rien  de  commun  avec  ceux  de  fes 
autres  vaftes  Etats  :  ce  titre  eft  un  pur  droit  de  fuc- 
ceftion  aux  anciens  Comtes  de  Flandre.  Le  fort  de 
fe  trouver  aujourd'hui  au  pouvoir  d'im  grand  Mo- 
narque ne  fauroit  altérer  fa  condition  :  la  réunion 
de  plufieurs  Couronnes  fur  une  même  tête  n'eft  pas 
un  moyen  légitime  pour  confondre  les  Droits  de 
leurs  différens  habitans.  Votre  Majefté  a  pris  des 
engagemens  particuliers  avec  it^  Sujets  de  Flandre, 
ils  lont  confacrés  par  le  ferment  foiemnel ,  qu'elle 
a  prêté  lors  de  fon  inauguration  entre  les  mains  des 
Repréfentans  du   Peuple. 

C'eft  cette  déclaration  folemnelle,  à  laquelle  nous 
appelions ,  qui  eft  le  palladum  de  nos  droits  &  de 
nos  libertés  ;   il  a  été  refpeété ,  Sire  ,  par  vos  An- 


(  ^8o) 

cêtrcs,  fauroît-on  douter,  qu*il  ne  le  Toit  également 
par  un  Prince  auffi  bienfaiiant  &c  aufîi  humain  que 
Joseph  II. 

Nous  fommes  avec  le  plus  profond  refpcft^ 
G  uni,  17  Novtmbn  1786. 

F  I  N. 


TABLE 

DES     MATIERES. 

iD  £RMEys  prêtes  à  l'Inauguration  de  S.  M.  Joseph  II , 

en  qualité  de   Comte  de   Huinaut ,  fplemn'ijéc  à  Muns  L  27 

Août  1781.  Pag.  7 

Réception   de   Sa  Majejlé  pour  le    Chapitre  de    Sainte-  IVaudru  , 

prononcée  par  la  Dame  Aînée.  ibid. 

Serment  de  Sa  Majefté  au  Chapitre  de  Sainte  -  Waudru,  8 

Serment  de  Sa  Majefté  aux   Etats  de  Hainaut.  n 

Serment  des  Etats  de  Hainaut.  lo 

Serment  de  Sa  Majejlé  au  Magifirat  de  Mans.  1  £ 

Serment  de  la  Paille  de  Mons.  12 

Extrait  de  la  Chartre  du  Pays  &  Comté  de  Hainaut ,  contenant  le 

Serment  que  prêtent  les  Confeillers  de  la  Noble  &  Soure.'-ainc 

Cour  de  Mons.  13 

Autre  Extrait  de  la  Chartre  de  Hainaut.  ibidr 

Dépêche   de  Leurs   Altefjes  Royales  ,    en   envoyant   au   Co::fc:l 

Souverain  de  Hainaut  un  Exemplaire  de  t Ecrit  rédigé  par  Sa 

Majejlé ,  pour  manifejler  Jes  vues  &  principes  ,  &c.  1 4 

Remontrances  du  Conj'eil   Souverain  de  Hainaut,  du  5   Février 

1 787 ,  au  fujet  du  nouveau  Règlement  de  la  Procédure  Civile.  1 Ç 

Réponfe  du  Gouvernement  aux  Remontrances  précédentes.  21 

Jirrêté  du  Confcil  de  Hainaut ,  envoyé  par  extrait  de  fes  Regijlres 

à  Leurs  AlteJJes  Royales ,  avec  la  Lettre  i envoi  qui  ejl  à  la 

fuite,  du  28  Avril  IJ^J.  22 

Lettre  des  Députés  des  Etats  au   Confeil  Souverain  de  Hainaut , 

du  "{O  Avril  1787.  24 

Remontrances  des  Magljlrats  &  du  Confeil  de  Ville  de  la  Ville 

de  Mons,  du<)  Mai  1787,  à  Leurs  Altcjfes  Royales.       26 

Dépêche  de  Leurs  Altejfes  Royales ,  du  7  Mai  1787  ,  adrijfée 

au  Confeil  Souverain  de  Hainaut ,  &  par  Copie  aux  Députéi 

des  Etats  dudit  Pays.  29 

Lettre  de  Remercîment  du  Confeil  de  Hainaut  à  L.  A.  R.         31 

Lettre  des  Préfident  &•  Gens  du  Confeil  Souverain  de  Hainaut., 

à  S.  A.  le  Duc  d'Aremberg ,  Grand- Bailli  du  Pays ,  &c.  &c,  3  2 

Compliment  fait  à  la  Cour  à  Mons ,  par  les  Avocats  en  corps , 

durant  la  Séance  du  matin  du  8  Alai    1787.  33 

Remerciment  des  Etats  de  Hainaut  à  Leurs  Alteffes  Royales ,  du 

7  Juin  lydj.  34 

T  **1 


a8i  TABLE. 

Arrêt  de  la  Noble  &  Souveraine  Cour  à  Morts  ^  prefcrivant  des 

précautions  pour  maintenir  la  tranquillité  &  le  bon  ordre  en  ce 

Pays  6*  Comté  de  Hainaut ,    rendu  enfuite  du  Reemljltoire  du 

Coii/eiller-  Avocat  de  Sa  MajeJIé ,  du  2%  Juin   1707.  3$ 

'^rrèt  de  la  Noble  &  Souveraine  Cour  à  Mons  ,  quiprofcrit  les 

feuilles  périodiques   ayant  pour  titre  :  Journal  -  Général  de 

l'Europe,  du  %y  Juin  1787.  39 

■Jtepréfentiiticn  des  Etats  de  Hainaut  à  Leurs  /îltejjes  Royales  ^ 

du  28  Juin  1787.  40 

'jiutre  Repréfentatien  des  mêmes  ,  du  5  Juillet   1787.  42' 

Lettre  des  Etats  du  Pays  &  Comté  de  Hainaut  à  Leurs  Alujfes 

Royales^  du  9  Juillet  1787.  44 

Repréfentation  des  Etats  du   Pays  &>  Comté  de  Hainaut ,  à  Sa 

Majejîé  l'Empereur  &•  Roi ,  du  9  Juillet  1787.  4$ 

^îémoire  des  Négocians  &  Armateurs  de  la  Pêcke  Nationale  de 

la  Ville  &  Port  de  Nleuport ,  préfenté  à  Mejfeigneurs  les  Etats 

de  Flandre,  k  19  Jiûn  1787,  ^1 

iJépcche  de  Leurs  Altejjes  Royales ,  du  24  Juin  1787.  83 

Autre  ^  du  ^ï  Juin  1787.  8ç 

Autre,  du  16  Juin  1787.  S8 

Autre,  du  17  Juin  1787.  90 

Copie  de  la  Lettre  du  Magiflrdt  d'Anvers ,  du  18  Juin  I787.    92 

Lettre  des  Etats  de  Brcbant  à  Leurs  Altejfi.s  Royales,  du  20 

Juin  1787.  9> 

flemontrances  des  Syndics  des  Nations  de  Bruxelles  ,  à  Mgrs.  les 

Etats  de  Brabant ,  du  9  Juillet  1787.  97 

'Littre  du  Prince  de  Kuunit^  ,  aux  Etats  de  Brabant ,  du  3  Juillet 

1787,  avec  la  Lettre  de  l'Empereur  &  Roi  fur  la  Repréfentation 

du  ix  Juin.  100 

'Jtcponfe  des  Etats  de  Brabant  à  la  Lettre  de  l'Empereur  &  Rat , 

du  4  Juillet  1787.  103 

dépêche  de  Leurs  AltcJJ'es  Royales  aux  Etats  de  Brabant ,  du 

14  Juitla  1787.  107 

^ut'-e  Dépêche  du  iS  Juillet,  adreffée  aux  mêmes.  no 

^cprc(enta::on  des  Bcurgmejires ,  Echevins  &  Confeil  de  la  Fille 

de  Bruges,  du  3  Juillet   1787.  lia 

^éireacle^  concernant  la  démolition  du  Bâtiment  nommé  Water- 

îialle ,  en  la,  Ville  de  Bruges ,  fous  la  direilion  du  Colonel  de 

Brou.  u( 

^  M.eure  des  Etats  de  Flandre  ,  à  Leurs  Alteffes  Royales  ,   du  4 

Juillet  1-^87,  129 

^Repréfentation  des  Armateurs  de  la  Pêche  Nationale ,  du  a  Juillet 

1787,  <l  Mgrs.  les  Etats  de  Brabant.  123 

\Mimcire  fur  lii  Dreàs  du  Peuple  Braban^oit ,  &  Us  atttimei  y 


TABLÉ. 


iSj 


portées  su  Nom  de  Sa  Majefié  l'Empereur  &>  Roi^  depuis  quel^ 
^Uis  années  ;  pré'ftnté  à  VAjfcmbUe  Générale  des  Etats  de 
Ladite  Province,  par  M.  H.  C.  N.  Vander  Noot ,  Avocat 
au  Confeil  Souverain  de   Brabant,  le  23   Avril  1787.        129 

Obfervat:on  d'un  rjlé  Patriote,  furie  Mémoire  précèdent  ^  &c.  196 

Diplcine  par  lequel  les  rênes  du  Gouvernement  des  Pays-Bas  font 
mis  par  intermi  entre  les  !;/iains  de  M.  le  Comte  de  Murrcy, 
du  3  Juillet   1787.  ■  199 

Les  Brabançons   de  Zumjunoen.  2C3 

Avis  aux  Belges ,  fur  l'envoi  des  Députés  i  Vienne  ,  &c   &c, 

205 

Lettre  de  Mejfeigneurs  ies  Etats  de  Brahani ,  dit  15  Juil'et  ijZj  ■, 
à  Jo  s  E  P  H  II ,  e:i  réponfe  à  la  Lettre  de  Sa  Majeflé ,  datée 
du  3  Juillet  1787.  110 

iioms  &  qualités  des  MeJJicurs  de  différentes  Provinces,  qui  ont 
comparu  à  l'AjfembUe  Générale  des  Etats  de  Brahant ,  en. 
Juillet  1787.  117 

Noms  de  Mejjkurs  les  Députés  pour  Vienne ,  de  différentes  Pro- 
vinces. 120 

Précis  de  la  Copie  du  Protocole  tenu  à  l'Hôtel-de- Ville  de  Bruxel- 
les ,  le  iS  Juillet  1787,  dans  l'AjfembUe  des  Seigneurs  Dé- 
putés des  Provinces  de  Limbourg ,  de  Luxembourg  ,  de  Flan- 
dre ,  de  Hainaut,  de  Tournai ,  du  Tournéfîs  ,  &  de  Malines  , 
conféquemment  de  toutes  les  Provinces  des  Pays-Bas  Autri- 
chiens y  à  l'exception  de  celle  de  Gueldre ,  laquelle  a  déclare 
par  mijjion  quelle  fe  confonneroit  à  la  Délibération  des  autres 
Provinces  ,  &c.  &c.  223 

Note  pour  les  différens  Etats  des  Provinces  des  Pays-Bas ,  en- 
voyée par  Mgr.  le  Comte  de  Munvy.  224 

Requête  des  Syndics  des  Nations  de  Bruxelles ,  à  Mgrs.  les 
Etats,  en  Itur  Affemblée  ,  du  7  Août  1787.  226 

Relation  de  ce  qui  s'ejl  pajfé  à  l'Audimce  de  Son  Excellence  le 
Comte  de  Murray ,  du  7  Août  1787.  227 

Repréfentations  des  Etats  de  Flandres ,  à  Sa  Majeflé  t Empereur 
&  Roi,  du  27  Juillet  17S7.  230 

Requête  préfentée  à  Mgrs.  le(  Etats  de  B'abant,  le  13  Juin  1787, 
par  les  Chefs  de  la  Bourgeoifi^ ,  &c.  Jaifant  le  fécond  des  trois 
Membres  de  la  Ville  d' Anvers,  €^c.  23? 

Lettre  d'un  Patriote ,  fur  la  meilleure  Adminiflration  de  la  Police 
dans  les  Provinces  Belgiques,  244 

Lettre  de  Remerciment  à  Mrs,  les  Notables  des  Communes  de  la 
Ville  de  G.md ,  demandant ,  par  leur  Repréfentition  du  27 
Juillet  1787,  le  changement  du  Magiflrat ,  pour  l:  compofer 
excluftvemtnt  de  bons  Pa^tmtes  ^  du  %Q  Juillet  1787.         24? 


284  TABLE. 

Remontrances  des  Etats  de  Brahant  à  l'Empereur  6^  Roi ,  du.  5 
Aoiit  1 787.  2  )[  5 

Lettre  des  Etats  de  Brabant^  à  S.  Exe.  Mgr.  le  Comte  Je 
Murray  ,  concernant  un  Article  inféré  dans  h  Gazette  de 
Cologne,  du  7  Août  1787,  N**.  65.  259 

Repréfentation  du  Confeil  de  Flandre^  du  XJ  Novembre  1786, 
fur  laquelle  efl  fuivi  le  Pécret  du  Confeil-Privé  ^  4f^  Z  Décem- 
bre 1786,  &c,  é-c.  '  264 


Fm  de  la  Table. 


BINDING  SECT.  hPR  2 


DH 
617 
M 
t. 7 


Netherlands   (Southern 
Provinces,   1581-1793) 
Recueil 


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