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Full text of "Revue archéologique"

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REVUE 


ARCHEOLOGIQUE 


JUILLET    A    DÉCEMBRE    1882 


IMl'IUMEIUI-      PILI.KT     KT     DIMOULIN 

m  h    DIS  GRANDS- AIKUSTIN!^,    •'>,    A    l'AUlS. 


U  E  VUE 


AHCllÉOLOljKlUE 

ou    IlliCUHIL 

DE  DOCUMENTS  ET   DE   MÉMOIRES 

nB LA  TIFS 

A  L'HTIDE  DES  MO.MMENTS,  A  LA  MlllS«ATIQlli  ET  A  I.A  IMIILOLOUIE 

DE    l'antiquité    et    DU    MOVEN    AGE 
l'UBLIIÏS     PAK    LES    PIUNCIPAUX     AUCllÉOLOGUEiS 

Flt*NÇAlS    ET    ET  U  ANGERS 

et    accompagné» 

DE     PLANCHES    GIIAVÉES     d'aI'UÉS     LES     MONUMENTS    OHIGINAUX 


NOUVELLE    SERIE 

VINGT-TUOISIÈME    ANNÉE.  -  (j  L"  A  U  A  N  T  E- (J  L' ATIl  lÈ  M  E    VOLUME 


PARIS 

IJURlilAUX    1)1-:    LA  REVUE    ARCHÉOLOGIQUE 

LIBRAIRIE    ACADÉMIQUE    DIDIER    ET    C 

35,   QDAI    DES    ACGLSTINS,    3o 

1  S  S  2 
Droits  de  traduction  et   de   rcproductiuo  réiervès. 


c 


CAllTK    MONTRANT  LA  DISTUiniTION 

DES 

PRINCIPAUX  DOLMENS  DIULANDK 

AVEC    DES   RESlAnuUKS 

SUU  LES  MO.NL'MF.NTS  FUNÉRAIRES  Pr.ÉHISTORIQUES  DE  CE  l'AVS 
RT    UNE    LISTE    DE   CES    MU.M-.ME.N TS. 


Sir  Samuel  Ferguson  a  exprimé  celle  idée,  qu'une  carte  dressée 
pour  montrer  la  di^lribution  des  principaux  dolmens,  cercles  de 
pierres  et  tumulus  d'Irlande  décrits  jusqu'à  ce  jour,  serait  un  ser- 
vice rendu  aux  savants  de  l'Angleterre  et  du  continent  qui  ont  con- 
sacré leurs  reciierclies  à  celte  branche  spéciale  de  l'archéologie. 
L'espoir  qui  a  fait  entreprendre  ce  travail  s'est  trouvé  réalisé,  grâce 
à  l'obligeance  de  M.Alexandre  Bertrand,  qui  a  bien  voulu  offrir  aux 
présentes  notes  l'hospilalilé  de  la  Beiiie  (irclu'olo;/iqur. 

Une  circonstance  avait  rendu  possible  l'exécution  de  cette  œuvre: 
c'est  que,  conjoinlemcnt  avec  quelques  membres  de  la  Société  litté- 
raire du  Lddii's  Collège  de  Dublin,  nous  avions  dressé  un  catalogue 
descriptif  de  deux  cent  quatre-vingt-trois  monuments  préhisto- 
riques, d'après  les  lettres  manuscrites  des  ofliciers  de  la  carte  d'état - 
major,  et  aussi  d'après  les  publications  des  diverses  sociétés  savan- 
tes de  l'Irlande.  Le  lecteur  est  prié,  pourtant,  de  bien  se  souvenir 
que  cette  carte  indique  seulement  les  monuments  déjà  examinés  et 
décrits  dans  les  lettres  et  les  publications  citées  plus  haut,  et  qu'on 
ne  la  donne  pas  comme  contenant  tous  ceux  qui  existent  encore,  ni 
même  tous  ceux  qui  sont  marqués  sur  les  cartes  de  six  pouces  de 
l'étal-major.  Moins  satisfaisante  que  ne  le  serait  une  carte  plus 

J'iillrt.  XLIV.    1 


4^  Q  y'/  JT 


*2  lu  M  I    Aii(.iii:(ii.(i*;inL  !.. 

compliMo,  illi>  a  ilu  moins  ccl  avantage,  que  les  luoniimonls  tiu'cllo 
si^nak'  sont  sùiiMnciil  les  iruvrcs  du  travail  de  l'iioiume,  cl  mm  dos 
;UiénoinèiU'S  uaturds,  i)uis(ju'i!l  l'iiulicalion  du  silo  nous  pouvons 
ajouter  la  taille,  la  fornu',  h  iialurc  do  chacun  d'eux,  les  traditions 
quis*y  rallaclient,  et,  quand  il  y  a  liou,  le  rôsultat  dos  fouilles  pra- 
liquèes. 

En  ce  qui  concerne  la  distribution  des  dolmens  sur  la  .-surface  de 
la  Franco,  M.  Bertrand  fait  cetio  romanino  :  o  Los  po[)ulations  ijui 
ont  èk'vo  los  dtdnions  doivonl  avoir  ronionlé  les  lloiivcs  sur  dos  ra- 
deaux ou  des  barques,  ou  suivi  leurs  rives  et  ponétré  dans  l'inté- 
rieur des  vallées  qu'elles  caractérisent.  Les  dolmens  sont  au  moins 
di>tril)uos  sur  la  suiface  du  sol  comme  ^i  los  choses  s'étaient  pas- 
sées ainsi.  »  Suivant  cette  observation,  nous  avons  formé  une 
table  qui  montre  la  distribution  de  ces  monuments  dans  los  bassins 
dos  llouvos  de  l'Irlande,  et  aussi  sur  la  côte  et  dans  les  districts 
montagneux.  Mais  nous  devons  rappeler  de  nouveau  au  lecteur  tiue 
los  nombres  ici  donnés  ne  représentent  pas  tous  les  dolmens  mar- 
qués sur  los  caries  de  l'élat-major.  Elh  s  comprennent  seulement 
ceux  (jui  ont  été  examinés  et  décrits  avec  plus  ou  moins  de 
détail. 

DISTRIBUTION  DES  DOLMENS  DANS  LES  BASSINS 
DES  FLEUVES  D'IIlLANDE. 

Bafîin  du  Pann  Cl  (lu  noo IS  ii  onumenls 

—  de  riùne -^  — 

—  de  Id  Koyle -  — 

—  du  Moy '»  — 

—  du  Shaiwioii ■'»'•  — 

—  riu  (iiilway If  — 

—  de  la  Itiiync I- 

—  de  la  Lilïï'v I  ' 

—  du  IJurrow --  — 

—  du  Slanoy <<>  — 

—  du  ItlackwalM •'  — 

—  Je  la  l-calf -i  — 

-     tleliil.ei' ^  — 

DISIIllliUIiON  DUS  DOLMEN^  SUU  l.\  (.OIE. 

Côic  iiurd  «r.Vi.liini f'  iiujiinincMl 

—     CaldAullJUl '  — 


CAllTE    Ui:S    IMUNCU'AUX    DULMII.NS    I)  lIll.WDi:. 

Côlû  est  (Je  Down i't  iiioimnieiil!' 

—  est  de  F.oulli .  ii  — 

—  est  de  l)iil)li(i 12  — 

—  est  de  Wicklow 7  — 

—  est  et  siul  do  \Vc!\fui  il.. . .  : 3  — 

—  sud  de  Walcrlbi'l 7  — 

—  sud  de  Cork .'»  — 

— •    ouest  de  Ken  y ;i  — 

—  ouest  de  Clai  o G  — 

— ■    ouest  de  (îalway 0  — 

—  oueit  et  nord  de  Mayo il  — 

Sur  la  baie  Sligo,  le  groupe  Cinowmore. .  I  groupe 

Donegal,  groupe  de  Glen  Malin 1  — 


DISTRIBUTION  DES  DOLMENS  DANS  LES  DISTRICTS 
MONTAGNEUX.  ] 

Aiilrim.  —  Monts  Knocklaydet  Cushendall  8  monuments. 

Londondeny. —  Monts  Sperrin 2  — 

Anlrim.  —  Monts  Slcmisli,  Davis  et  Crew..  U  — 

Down.  —  Monts  .Mournc fi  — 

Dublin. — Montagnes  de  Dulilin S  — 

Wicklow.  —  Montagnes  de  Wicklow 18  — 

Walcrfoid.  —  Monts   Coomeragli,  Ivnock- 

mealdowQ  et  Cool 7  — 

Tippeiary. — Slieve  Felini  et  monts  Kec- 

per '.}  — 

Chue.  —  Monts  Inchiquin I .'i  — 

Galway,  Mayo.  —  Monts  Conncniara 7  — 

Donegal.  —  Slieve  League.  Glen  Culunibki'.l 

1  groupe  de Il  — 

La  distribution  dans  les  provinces  d'Irlande  des  monuments  funé- 
raires examinés  jusriu'à  présent  peut  être  établie  ainsi  : 

Dans  le  Leinsler,  il  y  a  soixante-di.i-neuf  monuments,  donlvingt- 
huit  dolmens,  ciiiquanle  et  une  tombes  ou  ki^ilrains,  et  quahi' 
cairns  ;  les  dolmens  sont  quelquefois,  et  quehiuefois  ne  sont  pas,  ac- 
compagnés de  cercles  de  pierres. 

Dans  l'Ulster,  il  y  a  quarante-quatre  monuments,  dont  trente-sci.l 
sont  des  dolmens,  et  sept  des  cairns  ou  tumulus. 

En  Connaught,  il  y  a  quatre-vingt-dix  monuments,  dont  trente- 
huit  dolmens  dispersés  par  toute  la  province,  et  le  groupe  du  champ 


.\  UKVIK    AllCIlKDl.OtiPjLK. 

de  bataille  du  Moylura  soptenlrional  ou  du  Carrowmori\  où  Ion  a 
découverl  soixanle-deux  inonumciils  :  quatorze  sont  des  dolmens 
isolt'S.  et  Irente-neuf  des  (hdnieiis  entourés  de  eeirles. 

Kn  Munsier,  on  eoniple  einiiuanU-ileux  monuments,  dont  Irenle- 
cinq  dolmens,  iiuatorze  cercles  et  trois  cairn^. 

Il  y  a  une  dilTér.-nee  ninniuée  dans  l'aspect  gî'néral  de  ces  monu- 
ments, ^mesure  que  nous  avançons  vers  l'ouest.  (lcu\  des  provinces 
de  l'est  sont  de  taille  beaucoup  plus  grande  que  ceux  de  l'ouest. 
Ainsi,  en  Leinsler,  la  pierre  supérieure  du  cromlech  varie  en  lon- 
gueur de  vingt-neuf  à  dix-liuit  pitds,  et  le  poids  moyen  en  est  de 
cent  dix  tonnes  ;  en  Ulster,  la  pierre  supérieure  d'un  dolmen  est 
longue  de  vingt-cinq  pieds;  la  longueur  moyenne  des  cromlechs 
d'L'Isler  est  de  neuf  à  dix  pieds. 

En  Connaught,  la  longueur  moyenne  de  la  pierre  supérieure  est  de 
buità  dix  pieds;  dans  un  cas,  à  Lough  (iara,  elleestdequinze pieds. 

En  Munster,  la  pierre  supérieure  varie  de  six  à  dix-sept  pieds  en 
longueur,  la  moyenne  est  de  quatorze  à  sept  pieds. 

Les  cercles  de  pierres,  en  Connaught,  varient  de  cent  cinquante 
à  quarante  pieds  en  diamèlre,  ceux  de  Munster  de  cent  soixante  à 
irenle-cinq.  D'après  les  observations  incomplètes  qui  ont  été  faites 
jusqu'ici,  il  semble  (lue  les  dolmens  d'Irlande  se  rencontrent  par 
groupe^.  Ainsi  en  Leinsler  on  trouve  un  groupe  de  douze,  dans  le 
district  de  Dublin;  onze,  dans  un  groupe,  à  Kilkenny;  vingt-deux 
en  Wicklow,  vingt  en  Anlriin,  quinze  en  Down,  soixanle-dix-sept  en 
Sligo,  huit  en  Limeriek,  douze  en  Clare,  et  douze  en  Waterford.  Ce- 
pendant, tant  que  la  situation  de  tous  ces  monuments  n'aura  pas  été 
déterminée  d'une  manière  précise,  il  serait  prématuré  de  tirer  au- 
cune conclusion  de  ce  groupement.  Nous  avons  obtenu  des  ren- 
seignements plus  ou  moins  complets  sur  le  résultat  des  fouilles  faites 
dans  vingt-trois  dolmens  ou  cromlechs,  (juatorze  kistvaens  ou  tom- 
bes, et  douze  tumulus. 

Les  dolmens  en  question  sont  situés  en  Ulster,  en  Connaught  et 
en  Munster.  Ce  sont  les  suivants  : 

Ceanorlh's  wa's,  dans  le  comté  d'Antrim',  et  le  K'empe  Slone-,  le 
Cloughmore^  Legananny ',   Mallynalialty     et  Taraba  dans  le  comté 


1 .  Mar'jué  *ur  lu  cartc.IUlooiiaricli. 

2.  —  Ncwlowiioni». 

3.  —  (;ii)iidii(T. 

l,,  —  l'n'*)»  (lastlcW' llnn. 

i.  —  Drumbo. 


cviiïK  i)i:s  l'iu.Ncii'AUX  I)OI,mi:ns  d  iiu.\M)i:.  .» 

de  Dowii  ;  Lougtircy  dans  le  comté  do  Tyro;ic,  et  Castle  I.noiis  d.uis 
le  rointôde  Cork. 

Oïl  dit  (ju'nii  cil  a  ouvert  i|iiinzc  lï  (^irrowiiioïc  d  iiis  It;  coinli';  de 
Sligo,  et  un  dans  le  i*;irk  a  \\('sl[ioil,  mArne  comté. 

On  a  trouvé  des  ossements  sous  tous  les  dolmens,  mais  des  urnes 
ne  se  sont  rencontrées  que  quatre  fois,  à  Loughrey,  Cloui,'limore, 
Legananny  et  Castle  Lyons.  On  a  trouvé  des  télés  de  Iléclics  en  si- 
lex  àCloughmore  et  à  liallynahatty  ;  et  aussi  des  haches  de  pierre 
en  cette  (lerriicre  localité  ;  des  pierres  de  fronde  dans  cette  tombe 
de  Ballynahatly  et  ilans  le  dolmen  de  Westporl;  un  anneau 
d'écaillé  dans  le  dolmen  de  Uundrum,  et  des  anneaux  de  jais  à  lial- 
lynahally,  avec  une  curieuse  pierre  noire,  pourvue  d'une  protubé- 
rance à  chaque  extrémité. 

Quoique  l'existence  d'une  enceinte  ou  chambre  murée  pour  con- 
tenir la  sépulture  ne  soit  pas  signalée  dans  les  fouilles  de  la  plupart 
de  ces  monuments,  cependant  on  a  dû  en  construire,  pour  proléger 
les  vases,  toutes  les  fois  qu'on  a  enterré  avec  des  urnes.  A  Clough- 
more,  dans  le  Down,  les  urnes  se  trouvaient  dans  une  chambre 
formée  de  trois  pierres,  et  qui  mesurait  huit  pieds  de  long  sur  trois 
de  haut  et  trois  de  large. 

Une  chambre  semblable  fut  aussi  observée  dans  le  dolmen  de 
Castle  Lyons,  comté  de  Cork;  mais  cette  circonstance  n'est  pas  con- 
stante, comme  nous  l'apprenons  du  rapport  de  Gabriel  Bér.inger, 
écrit  au  dos  d'un  croquis  qu'il  ht,  en  assistant  à  rouverturedu  dol- 
men, l'an  1795. 

«  Les  soutiens  étaient  à  peine  visibles,  à  cause  du  sable  et  de  la 
terre  qui  les  entouraient,  jusqu'à  ce  qu'on  eût  enlevé  la  pierre  du 
haut;  de  soi'te  qu'on  ne  put  prendre  l'aspect  du  monument.  A  l'in- 
térieur, on  tiouva  les  osbiûlés  d'un  cadavre  humain  et  lamâchoiie 
d'un  animal  armé  de  crocs;  et  prés  des  ossements  du  crâne,  une  balle 
de  marbre  blanc,  peut-être  la  halle  de  fronde  (jui  a  tué  cet  homme. 
P(/.s'  di'  cercueil  ni  d'cnceiit(<\  seulomenl  drs  pierres  délacitres  ou  des 
ciiillûurjuiichant  le  sol,  dans  u)i  ijrand  désordre.  » 

Les  kistvaens  ou  tombes  païennes  ([ui  ont  été  l'objet  de  fouilles  se 
trouvent  à  Ballintoy  en  Antrim;  à  Templecarn  en  Donegal;  à 
Mont-Sleward  ou  Grey  Abbey  dans  le  Down;  à  Drumnakilly,  Tully- 
druid  et  Loughrey  en  Tyrone;  près  du  cimetière  de  Carrowmore ', 
en  Sligo;  à  Bally  Mac  William-  dans  le  King's  County;  a  Barretls- 

1.  Knonknarea  sur  la  carte. 

2.  Pri'S  Crotrlian. 


0  iii-.vn-   vnr.iii-oLor.ioiT.. 

lown,  tl.inOo  WoMmo;itli;:iSliovcl\i(-ll.i  '  en  ^Vt'\fû^l;  à  Kilhiido, 
Molelia  li  Dimlnviii  en  Wicklow;  el  à  Fort  Klna°-  en  Limorick.Diiiis 
(liiolques  cas,  coiiiino  ù  Cai  rowmore,  Tcmplccarn  el  Loui;lir(?y,  ces 
loinlit's  sonl  tout  prôs  de  ilolinens,  (luoiiuVlles  ne  soient  pas  au- 
dessous.  On  Y  trouve  gênèralcmcnl  deux  sépultures.  Il  arrive  quel- 
quefois que  ces  lombes  forment  des  groupes,  comme  à  Monl-Stcward, 
où  Ion  a  irouvê  dix-sept  kisls  cnseudjle,  avec  une  urne  d'argilo 
dans  chacun;  la  plus  grande  urne  était  dans  le  kist  du  ceiilre.  l'^n 
ouvrant  les  lombes  trouvées  dans  une  carrière  de  pierre  calcaire,  à 
llallinloy,  ou  a  découvert,  à  deux  pieds  au-dessous  du  sol,  six  urnes 
d'argile  non  cuite  et  de  travail  giossier.  (Jualre  se  trouvaient  h 
liart,  cl  renversées.  Ci  m]  urnes  renversées  sur  des  os  calcinés  ont 
été  trouvées  à  Drumnakilly;  elles  étaient  sur  deux  rangs  superpo- 
sés, enfoncées  à  huit  picis  dans  le  sabh>.  Une  urne  d'argile  conte- 
nant des  cendres  se  trouvait  dans  la  tombe,  ù  côté  des  fragments  du 
squelette  d"un  homme  de  grande  taille  dont  la  mâchoire  inférieure 
était  d'une  telle  dimension  qu'elle  faisait  plus  que  couvrir  les  mâ- 
choires de  l'ouvrier  présent  qui  avait  la  plus  grosse  télé. 

A  Darretlslown,  dans  le  Weslmeath,  on  a  ouvert  deux  petites 
chambres  de  pierre  dont  chacune  contenait  un  squelelle,  l'un  i\  télc 
ronde,  l'autre  à  tète  allongée.  Les  dents  de  ces  crânes,  comme  de 
ceux  qui  ont  été  trouvés  à  Bally  Mac  William,  étaient  usées  comme 
par  l'habitude  de  manger  des  aliments  durs;  ;i  côté  l'on  voyait  une 
défense  de  sanglier,  avec  une  urne  non  polie  el  grossièrement  or- 
nementée. On  rapporte  que  des  silex  travaillés  en  tôles  de  flèches 
ont  été  découverts  dans  un  kist  prés  du  dolmen  de  Lougluey,  avec 
un  débris  d'urne. 

Les  tumulus  qui  ont  été  ouverts,  en  Irlande,  sonl  ceux  qui  suivent  : 
New  Grange;  Knowlli  et  Dowlli,  sur  la  Boyne;  Slieve  na  Calliglie^' 
dans  le  comté  de  Meatli  ;  le  Mound  of  Ash  dans  le  Loutli  el  le  Ilill 
of  Ualh  prés  de  Drogheda  (Loutli);  Loughanmoro  en  Antrim;  Tul- 
Iv.lruid,  Dungannon  et  Trillick  dans  le  comté  de  Tyrone,  Shallee 
clKilnamona'  dans  le  comté  de  Claie;  et  le  (^arn  iMciMiain  L'isge, 
«  petite  eau  »,  en  Sligo.  Comme  les  tumulus  sur  la  iioyne  et  ;\ 
Slieve  n;i  Callighe  ont  été  déjà  présentés  au  public  ',  et  coiiiiiic  les 

1.  Sur  la  carlf.  Wliitociiurcii. 

2.  —  Mungret. 

3.  —  I-'  iig  Crcw. 
[^^            —            lfu-.lii<|iiiii. 

0.  Voir  Samuel  rcrKiison.  /,(•*  monuments  mér/alilliiqucs  (h  tiiui  jitn/^.  Irad. 
franc.,  par  rniibé  liaii.ard,  p.  1h7  et  Biiiv. 


CAR'iT.  nr:^  I'Hinhipaux  noLMr.vs  niiii.wix:.  7 

r('".siill:il>  ilc  CN  fonillo^  sont  hicti  cfinnus,  nous  poiivnri>  pnsscr  à 
d';uili'('s  (1(!  iiioiridri'  imiioiliiiicc. 

Des  (races  de  sépiilliiics  avec  des  urnes  ont  rté  découvertes  dans 
tous  ces  tuniuliis.  De  cent  cinquante  à  deuxcentsurnesontétéexliu- 
mées  des  tombes  qu'on  a  ouvertes  sur  la  colline  de  Ralh  prùs  de  Dro- 
glieda  ;  toutes  étaient  remplies  d'ossements  brilles.  On  y  a  trouvé 
aussi  une  tôte  de  llèclie  en  silex  et  une  épingle  en  os.  Quelquefois, 
comme  à  Louglianmorc,  les  urnes  sont  renversée?,  et  il  y  a  des 
cendres  dessous;  la  plus  grande  urne  est  au  ccnire,  les  plus  petites 
disposées  tout  autour.  On  représente  comme  bieVi  ornementées  et 
très  belles  de  forme  les  urnes  qui  ont  été  découvertes  au  «  Carn  de 
la  petite  eau  »,  à  Clare  et  à  Trillick,  dans  le  Tyrone.  Dans  le  pre- 
mier cas  la  forme  de  l'urne  était  particulière,  ayant  quatre  protubé- 
rances aux  anses;  elle  était  au  milieu  d'une  terre  noire  et  pou- 
dreuse, dans  une  petite  chambre  carrée,  sous  deux  dalles  qui 
mesuraient  trois  pieds  six  de  large  sur  deux  pieds  quatre  de  haut. 
Les  murs  de  cette  chambre  étaient  bâtis  de  petites  pierres.  Des  os, 
les  vertèbres  d'un  mammifère,  et  des  silex,  étaient  tout  ce  qui  accom- 
pagnait cette  urne,  et  l'autre  belle  urne  trouvée  à  Trillick. 

L'urne  était  quelquefois  placée  sur  le  giron  du  défunt  :  ainsi, 
dans  une  tombe  sous  un  tumulus,  à  TuUydruid,  on  découvrit  un 
squelette  humain  assis  et  tenant  une  urne.  A  Dysarl,  dans  le  comté 
de  Westmeath,  on  fouilla  un  tumulus  de  forme  irrégulière;  on 
trouva  d'abord  une  tombe  avec  un  parquet  dallé  sur  lequel  il  y 
avait  des  traces  évidentes  de  feu,  un  amas  d'ossements  humains 
calcinés,  et  de  l'argile;  puis  les  explorateurs  arrivéïent  à  un  kist- 
vaen  composé  de  dalles  de  grès,  irrégulières,  posées  debout,  et 
recouvertes  par  une  seconde  dalle  formant  toit.  Cette  chambre  était 
occupée  par  un  squtdetle  humain  assis  la  face  vers  le  nord-est,  et 
une  urne  d'argile  cuite  dans  son  giron.  La  forme  de  son  crâne  mon- 
trait qu'il  appartenait  à  une  race  à  tôle  allongée;  et  le  squelette  était 
en  parfait  étal  de  conservation.  Trois  dents  d'un  animal,  une  petite, 
une  grande  et  une  dent  molaire,  furent  aussi  trouvées,  et  dans 
une  troisième  chambre,  à  l'est  de  celle-ci,  parut  un  second  squelette. 

Des  tètes  de  flèches  en  silex,  des  épingles  en  os,  des  colliers  de  co- 
quillages sont,  ici  comme  ailleurs,  l'accompagnement  ordinaire  de 
ces  urnes.  Ainsi,  en  ouvrant  lelumulus  de  Knockmaridhe,  dans  le 
Phœnix  Park  (Dublin),  des  coquilles  et  une  libre  végétale,  proba- 
blement la  corde  avec  laquelle  avaient  été  enfilées  ces  coquilles, 
furent  trouvées  sous  les  crânes  des  deux  squelettes  enterrés  en  ce 
lieu.  Il  y  avait  dans  la  même  tombe  un  os  de  chien,  quatre  urnes 


H  nEVUF.    AllCIU'OI.OC.IOL'K. 

renipIio>  <1<' ccniins  (rossomenls,  une  l'wvw  \\pyrh\  une  li^ic  de 
ni'clic  (Ml  silex,  l'I  une  »'|un{,'le  en  os.  Les  corps  ;iv;uenl  été  posés  du 
iioril  :iu  sud,  et  ces  stiuelelles  élaieiil  ployés  :  dénis  presque  eoin- 
plèles;  les  molaires  usées.  On  ciic  louieluis  deux  cas  exceplionnels, 
Tun  il  Tvrone  el  l'autre  à  Slii^'o,  (Ui  l'on  a  découvert  des  objets  lù- 
nioii;nan(  d'une  civilisation  plus  avancée.  C'est  du  moins  ce 
qu'on  a  dit;  mais,  malheureusement,  il  n'existe  aucun  lécit  détaillé 
sur  CCS  trouvailles. 

Le  docteur  l'elrie,  écrivanl  à  sir  Thomas  Larcoin  en  l'année  1837, 
décrit  un  cercle  de  pierres,  un  ratli  ',  et  un  tumulus  à  Dungannon 
en  ïyrone,  où,  dit-il,  se  trouvèrent  de  belles  armes,  épées  el  lances, 
en  bronze,  avec  des  libules  de  cuivre  ou  de  bronze,  d'un  beau 
travail,  et  une  quantité  de  grains  de  verre  opaques;  de  même,  dans 
un  lumulus  prés  de  Halhcarrick  (comté  de  SliL,'o),  ouvert  par  M.  Ro- 
ger AValker,  on  a  trouvé  une  tétiérc  de  bronze  dans  un  kist  conte- 
nant six  squelettes.  Les  ossements,  ici,  n'avaient  pa?  éic  brilles  cl 
pl.icés  dans  des  urnes,  mais  mis  en  monceaux,  avec  de  petites  co- 
quilles et  des  os  d'animaux.  La  bosselle  au  bout  de  celte  têtière 
élait  de  jais  et  d'émail  champlevè.  De  pareils  objets  en  bronze 
n'ont  jamais  été  trouvés  sous  aucun  dolmen  ou  cromlech  en  Ir- 
lande. 

Les  constructeurs  de  dolmens  semblent  n'avoir  pas  été  plus  loin 
que  ce  point  :  savoir  dresser  des  monuments  mégalithiques,  avec 
des  pierres  d'un  grand  poids;  former,  polir  et  aiguiser  des  armes 
aides  ustensiles  de  silex  el  de  pierre.  Le  l'ait  (lu'il.M'ratiquaient  des 
rite?  funéraires  dans  des  tondies  d'une  grandeur  imposante,  la  cré- 
mation et  quelquefois  la  sépulture  dans  des  urnes,  atteste  uu  étal 
religieux  relativement  avancé;  l'élevage  d'animaux  domesticpies  et 
la  culture  des  céréales  sont  leurs  premiers  symptômes  de  civilisa- 
tion. Mais  en  Irlande,  il  est  difficile  d'établir  iiu'aucune  sciilpiure, 
queliiue  grossière  qu'elle  fût,  ou  qu'aucun  essai  d'oinemenl  ail  été 
tenté  par  les  constructeurs  de  dolmens,  il  est  imitossible  de  dire  si 
les  signes  qu'on  y  a  trouvés  quelquefois  ne  sont  pas  l'œuvre  d'une 
épO(iue  [dus  récente. 

Les  seuls  dolmens  qu'on  mentioune  comme  ponant  ces  marques 
sont  ceux  d'Aghade  en  Carlow,  d'IIarold.slown  ei  fie  Killiney  en  l>ii- 
lilin,  de  Lennan  en  Monaghan,  et  de  Castlederg  en  Tvrone.  A 
Agliade,  les  supports  de  la  iiierre  ipii  sert  de  toit  sont  rayés  depuis 
le  haut  jusqu'à  la  moitié  .le  la  liaiileur;  ou  voit  des  lignes  sembla- 

I,  Encfiiilc  un  tenr. 


(VMlTK    DKS    l'IlINCII'MIX    1)01. Ml. NS    II  lIll.WliK,  U 

l)los,  cl  aus'^i  ('ivideinmcnt  ;ii  liliiicllcs,  sur  la  pierre  siipr-n'oiuc  ilu 
(lolincii  (l(^  ll.ii'oldslown.  —  iJcs  raimires  arliliciclles,  (|ii'on  a  pri- 
ses à  tort  pour  une  inscription  oganiique,  sont  encore  visibles  sur 
les  dolmens  de  Lennan  en  Monaglian,  et  de  Gastlederg  en  Tyrone. 
Elles  consislenl  en  une  série  (](!  lignes  di'oites,  cjui  si/nihlenl  èir(i 
simplement  les  traces  d'un  outil,  laites  au  hasard,  et  elles  ne  sont 
pas  nécessairement  du  môme  âge  que  le  monument.  La  pierre  a  été 
grattée,  comme  le  pilier  de  Loulh,  qui  porto  une  inscription  cliré- 
tieruje  datant  seulement  du  ix'"  siècle,  et  même  probablement  [)os- 
lérieure.  Le  docteur  Petiie,  dans  une  letlre  ù  un  ami,  dit  qu'on  a 
observé  sur  un  dolmen,  à  Killiney,  certains  signes  qu'on  avait  jiris 
à  tort  pour  le  soleil  et  la  lune  ;  mais,  en  tout  cas  ,  ils  ont  diiparu 
depuis. 

Le  seul  tombeau  païen  ou  kistvaon  sculpté  de  notre  listii  est 
celui  de  Clover  llill,  dans  le  comté  de  Sligo,  déjà  décrit  par  M.  Ja- 
mes Ferguson,  dans  ses  Rudr  Stonc  monuments,  p.  223,  où  il  dit 
que  le  caractère  de  ces  incisions  est  intermédiaire  enire  les  sculp- 
tures de  TelUoAvn  et  celles  de  Newgrange.  Les  tumulas  ou  cairns 
où  apparaissent  des  traces  indéniables  de  décoration  ou  de  signes 
sculptés  sont  ceux  de  Dowth,  Newgrange,  TelUown  et  Halhkenny. 
Parmi  ces  ligures,  il  y  a  des  coupes  et  des  cercles,  des  groupes  de 
cercles  concentriques,  des  spirales,  des  demi-lunes,  des  zigzags,  des 
lignes  droites,  des  lenons,  des  demi-cercles,  des  losanges,  des  rliom- 
bes,  des  points,  des  étoiles,  et  des  dessins  qui  ressemblent  à  une 
feuille  avec  sa  tige  et  ses  fibres.  Ces  sculptures  s'obtiennent  par  le 
ciseau  et  le  grattage,  mais  le  plus  souvent  à  l'aide  du  poinçon  ou 
du  pic.  M.  Du  Noyer  et  M.  Conwell  étaient  d'avis  que  les  sculptures 
du  cairn  de  Hatbkenny  ont  été  faites  avec  quelque  outil  en  mé- 
tal. 

Quanta  l'histoire  ou  à  ce  qu'on  appelle  la  légende  historique  qui 
se  rattache  à  ces  monuments,  il  n'y  en  a  pas,  naturellement.  Mais  il 
pourrait  êtrebon  de  recueillir  toutes  les  superstitions  et  les  contes 
de  fées  qui  s'y  rapportent,  dans  toute  l'Europe  ;  car  il  est  possible 
que  la  mythologie  comparée  jette  quelque  lueur  sur  leur  origine 
En  Irlande,  les  traditions  relatives  à  ces  monuments  peuvent  se  di- 
viser ainsi  : 

1.  Ce  sont  des  tombes  d'hommes  tués  sur  des  champs  de  ba- 
taille. 

2.  Les  dolmens  isolés  sont  des  tombes  de  héros. 

3.  Ce  sont  des  tombes  de  géants. 


(Il  lUviF.  Anr.iiKOLor.iouK. 

'i.  Ils  mnr.iuoiU  li  Minlio  (l'un>'  vaclK^  niYlliiiiii(\  la  Glas  (lavliii. 
îi.  Ils  mnrciucMit  I.i  lomltc  d'un  chasseur  sauva^^'. 
G.  Ilsiuaiiiuonl  la  tombe  il'uu  IcvriiT. 

7.  Les  ci'iYles  sont  des  joueurs  de  cornemuse  féeiiiiuts  changés 

en  pierres. 

8.  Les  groupes  de  lumulus  sont  des  cimetières  royaux. 

La  légende  la  plus  répandue  au  sujet  des  cromlechs  d'Irlande, 
surtout  de  ceux  de  Galway,  est  celle  des  amants  Diarmid  et  Grania, 
qui,  fuyant  devant  la  face  du  Vengeur,  reposaient  dansdes  huttes  cl 
des  cavernes,  sur  des  lits  de  fougère  cl  de  mousse,  ou  dans  des 
chambres,  sous  le  toit  des  cromlechs  ^ 

L'hisloirc  de  la  mort  et  de  l'enterrement  du  chien  favori  d'un 
clinsseur  sauvage  est  rattachée  aux  cromlechs  de  liallvbr:irk  et  de 
Mo\acorab,  dans  les  comtés  de  Dublin  et  de  "NVicklow.  Un  dit  aussi 
iju'iin  chasseur  sauvage  est  condamné  à  galoper  la  nuit  tout  autour 
du  tumulus  de  Slieve  Kiella  dans  le  comté  de  AVexford,  jusiiu'à  ce 
(jue  lui  et  son  cheval  disparaissent  dans  le  cairn.  Cette  légende  se 
laconte  aussi  du  cairn  de  Clonlinlough  dans  le  Kiiig's  Counly  :  on 
Ta^ipelle  de  dillérenls  noms,  tels  que  Leacht  na  Marbh  ou  le  Lil 
des  Morts,  la  Pierre  des  Fées,  la  Pierre  du  Cavalier.  Dans  d'autres 
endroits,  on  rattache  ces  monuments  i\  la  légende  des  joueurs  de 
cornemuse  des  fées,  probablement  les  mêmes  ôtres  surnaturels  qui 
paraissent  dans  le  poème  de  sir  Samuel  Ferguson,  Conary  : 


Vêtus  de  manteaux  rouges,  avec  une  coiffure  rouge, 

Ils  n'avaient  pas  d'i^pée,  ils  ne  porlaienl  ni  lance  ni  bouclier, 

Mais  chaque  homme  sur  son  genou  tenait  une  cornemuse, 

Avoouncciianlerellcornécdejoyaux  qui  brillaicnlà  chaque  mouvement, 

l'A  une  embouchure  prûte  à  recevoir  le  vent. 

Le  .-uul  les  iiuniiiios  lies  sidhs  :  les  Irupiier, 
C'est  frapper  une  ombre.  Si  ce  sont  eux, 
K\ile  leur  attaque  ;  car  j'ai  entendu  dire  aussi 
(Ju'au  premier  son  de  c-es  cornemuses  enchantées, 
Il  n'est  corbeau  ni  cormoran  au  loin  sur  les  côtes 
Oui  n'accoure  se  gorger  de  chair  Immaine. 
«  Oui,  roi  puissant,  dit  l'un, 


1.  Voir  Tran^adi'im  nf  Ih';   Ousianic  sorieftj,  toI.  U\,  p.   1R5;    O/d   Cr/lic  Ho- 
r„«/,<v,,  p.  2:..  Joyce;  /.'/'/v  l'ftfie  wesleni  Gaely  p.  57,  sir  S.  Ferguson. 


CARïr.    DF.S    l'ni.NCIl'AL'X    DOLMT-NS    I)"llll.  \M)i: .  Il 

1,'air  que  je  joue,  vous  vous  en  souviendrez  longtemps.  » 
Kl  il  mil  l'cmljoucliureà  ses  lèvres.  Soudain, 
Il  sembla  que  la  lerre  et  le  ciel  no  fussent  que  dos  ïons, 
i^t  que  chaque  son  fût  un  cri  de  guerre  qui  rend  fori, 
Uni  pi'nèlre  le  cœur  et  la  lûle  de  l'ardeur  du  combat, 
l'A  slinmle  tous  les  bras  au\  expluils  belliqueux. 


Les  Pierres  des  Joueurs  de  cornemuse  l'Pipcr's  Stones^  à  Wicklow, 
sont  un  beau  cercle  de  piliers,  au  bord  de  la  rivière  du  Potier.  Un 
cromlech  se  trouve  sur  la  Colline  du  Flùteur  (Piper's  Hill),  en  f.icc 
d'Ardnaree,  en  Mayo.  Un  cromlccli  du  King's  Coiinly  est,  dit-on,  la 
tombe  de  Kerr,  peul-ôlre  Kiardlia,  l'auctHrc  d'0'Kiai-y,  ancien  lord 
de  Garbury.  Un  cromlech  au  haut  de  l'Usuagii  Hill,  eu  Westmealli, 
est  appelé  Cal-Uisnigh,  et  chez  Kealing  Ail-na-Miix-ann,  c'cst-à-ilire 
le  rocher  des  divisions,  parce  qu'ici  cinq  provinces  se  touchenl.  Se- 
lon Giraldus  Cambrensis,  un  des  premiers  colons  de  l'Irlande  divisa 
en  ce  lieu  le  pays  en  cinq  parties  égales,  aussi  appcla-t-on  cet  en- 
droit le  cœur  de  l'Irlande. 

V.  Tlachtga  Ban  est  le  nom  d'un  beau  cromlech  en  Anlrim,  et 
Thichtga,  maintenant  Hill  of  AVard,  eu  Mcitli,  est  un  endioit  où  la 
fùle  du  Samhuin  est  toujours  célébrée  le  premier  novembre. — Geof- 
froy de  Monmoulh  raconte  la  légende  de  l'enlèvement  d'Irlande 
des  pierres  de  Stonehenge  ;  et  il  est  suivi  par  GiraMus  Cambrensis, 
qui  les  nomme  la  Danse  des  géanls.  (Voy.  Geolïrov,  Hiat.  Biil.,  li- 
vre YIII,  ch.  X,  XII.;  Topogr.  Hib.,  vol.  II,  ch.  xviii;  Ware,  //^s^ 
//«&.,  XXIV,  103.) 

Le  cairn  de  Sliabh  Bealha,  sur  le  sommet  de  la  montagne  ainsi  ap- 
pelée, en  Fermanagh,  tire  son  nom  d'un  héros  mythologique  Bith, 
dont  la  mort  est  rapportée  au  commencement  des  Annales  d'Irlande. 
Ce  nom  signifie  Montagne  de  Billi,  à  présenl  Slieve  Bàhà:  c'est  une 
longue  chaîne  qui  s'étend  jusqu'à  Tyrone.  (Voy.  Leabhar  Gahhahi, 
O'Clery;  Kealing,  Uht.  of  Irelawl,  Haliday"s  edit.,  pp.  15i->,  154: 
a  de  Bill  est  tiré  le  nom  de  Slieve  Baba»;  O'Flaherty,  (^ijfl'jin, 
parties,  ch.  i;  Ann.  des  Quatre  Maîtres,  an  du  monde  2242  :  aBilh 
mourut  à  Sliabh  Beatlia  et  il  donna  son  nom  ;\  cette  montagne.  ») 

Tumulus  de  OIJ  Croghan,  King'.s  Counly,  baronie  de  Philips- 
town,  paroisse  de  Croghan.  Le  tumulus  ou  rath  qui  est  au  haut  de  la 
colline  de  Croghan  est,  dit-on,  un  monument  sépulcral;  dans  un 
poème  appelé  Laoidh  na  Leacht,  le  poème  dos  monuments,  on  le 
donne  comme  étant  la  tombe  de  Congal. 

La  colline  tire  son  nom,  Croghan  Bri  Eilè  (colline  d'Eilé),  d'Eilc, 


li  m: VI  T.  Aiw'.iiKoi.iMMurR. 

lille  il'Korliniilli  Foidlilench  et  sreur  dn  M.u'V,  rrinc  ilii  ('.oiin;ni|^lil 
au  I"  sik'li?. 

Dniis  \c  liviv  lit"  Lccnii.  fol.  17.'»,  p,  r/,  col.  b,  nous  lisons  :  \a^  roi 
Eoi  liy  Kciji'arli  avait  iino  lillc  noinnii'O  Kilf,  d'oii  le  nom  de  \U\ 
Eile,  en  Leinster.  Klle  fut  la  feiuine  de  rerj,'al,  lils  de  Maj^aeli.  — 
Au  l»:is  du  CroL:han  il  y  a  liois  puits,  ouiliragés  par  deux  beaux 
frèms. 

.\u-ilo!à  du  I.cinsler  Carbuiv  aux  faraudes  plaines 

K>t  O'Kcary,  dont  les  épres  ont  la  lame  rongio, 

l'A  par  qui  furent  allumées  des  batailles  uuluur  du  (Iro^'lian. 

Une  allée  couverte  formée  de  quatorze  pierres  levées  et  de  trois 
pierres  faisant  toit  se  trouve  sur  une  colline  du  comté  de  Limerick, 
qui  prend  son  nom,  Dun-trylengue  ou  Dun-tri-liag,  le  fort  des  trois 
pierres,  de  ce  monument  et  d'un  fort  qui  était  à  côté.  Dans  le  livre 
de  Lismore,  fol.  ii)\),  il  est  dit  que  Cormac  Cas  mourut  iei,  et  fut 
enterré,  cl  qu'il  avait  fondé  en  ce  lieu  un  fort.  «  (^orrnac  Cas  (roi 
de  .Munster),  fils  d'Uilioll  Olum',  petit-fils d'Owen  .More, combattit  à 
Knocksouna  (prés  de  Kilmallock)  contre  le  roi  d'Ulster,  qu'il  tua; 
et  Cormac  fut  blessé  à  la  lèle,  de  sorte  qu'il  fut  trois  ans  à  se  soi- 
gner. .\lors  il  construisit  un  bon  dun,  ayant  au  centre  une  brlle 
source  d'eau  claire,  et  une  grande  maison  royale  fut  bâtie  sur  le 
puits,  et  trois  piliers  de  pierre  furent  placés  autour,  et  sur  ces  pi- 
liers était  le  lit  du  roi,  de  sorte  que  sa  léte  était  au  milieu  entre  les 
trois  piliers.  El  l'un  de  ses  serviteurs  se  tenait  constamment  auprès 
de  lui  avec  une  coupe,  versant  l'eau  du  puits  sur  sa  léte.  11  mourut 
ensuite  en  ce  lieu,  et  fut  enterré  dans  une  caverne  à  l'inlérienr  du 
dun,  et  de  là  est  venu  le  nom  de  la  place,  IJun-tri-liag,  le  fort  des 
trois  piliers.  » 

Cormac  Cas  était  l'ancêtre  des  O'Brien  de  Tiioinond,  et  de  toute 
la  tribu  Dalcas^ienne.  Il  vivait  vers  la  fin  du  second  siècle  de  l'ère 
cbrèticnne.  Un  dit  cjue  sa  première  femme  fut  Samliin,  fille  de  Kinn 
mac  Cumliail,  et  sa  seconde  Oriund,  fille  du  roi  de  Locblin.  Cormac 
i"ul,  dit-on,  un  prince  vaillant,  saj^e  et  libéral,  et  était  regardé  comme 
l'un  de.s  grands  guerriers  «leson  temps,  btrsiju'd  liérita  du  royaume 
de  son  père.  Il  fut  le  premier  qui  régla  les  redevances  et  tributs  de 
Munster,  de  telle  sorte  que  les  sujets  ne   pussent  être  pressurés,  ni 

1.  Voy.  O'Donovan,  Sup/ilémcnt  au  ilii.liunnaire  irlmuliiix  d'O'Hcilly,  au  mot 
Itun. 


CAiiiK  iti:s  |'UIm:ii'\('\   ixm.mkns  diulandi;.  \',l 

le  roi  liustii'  de  srs  dioils.  il  s(;  lil  donner  des  otages  de  Tile  de  Hrc- 
layne,  à  ircnlc  difTércnles  reprises  '. 

J.e  champ  de  linlaillenù  Sinrn,  fils  de  Nevoy  (Neimliidh),  péril  de 
la  main  de  Conaini^,  (ils  di;  Fa('i)liar,  dans  la  dcinièri!  lulleenln;  les 
Némédiens  el  les  Fomoriens,  a  élé  identifié  avec  "la  plainede  lait», 
Lnijâ  o\\  Loi f  on  Ijiclit-mhaf/h,  oh  l'on  \ù\l  encore  nn  beau  dolmrn. 
C'est  à  Murioiigli  Hay,  C(Me  nord  d'Anlrim. 

Les  cercles  de  pierres,  cnirns  et  dolmens  qui  couvrent  les  plai- 
nes du  Moytura  septentrional  et  méridional  sont  regardés  comme 
indji|uant  les  champs  de  bataille  où  eurent  lieu  les  dernières  luttes 
entre  les  races  des  Firbolg  et  des  Tuatha  dé  Danann.  Il  est  certain 
qu'à  chaque  fouille  qu'on  a  pratiquée  dans  le  champ  de  bataille  du 
Moytura  septentrional  on  a  trouvé  des  cadavres  enterrés. 

Le  champ  de  bataille  d'Ollarba,  à  Larnc,  où  Fothadh  Airglheach, 
roi  d'Irlande,  fut  tué  par  Cailte,  fils  adoptif  de  Finn  mac  Cumhail, 
en  285,  est  marqué  par  le  monument  de  Carndoo,  dans  la  circons- 
cription de  Headwood,  sur  la  roule  de  Larne  à  lîallymena.  Dans  l'an- 
cien récit  conservé  dans  le  Leabliitr  lui  Huidrr,  Cailte  dit  :  La  pierre 
ronde  avec  laquelle  j'ai  fait  ce  coup  sera  trouvée  à  peu  de  distance 
à  l'est.  Il  y  a  une  cellule  de  pierre  autour  de  lui  dans  la  terre.  Là 
sont  ses  deux  anneaux  d'argent  et  ses  deux  bracelets,  et  son  collier 
d'argent  sur  sa  poitrine;  et  il  y  a  un  pilier  de  pierre  à  son  carn,  et 
une  inscription ogamiquc  aubout  du  pilierqui  esldansla  terre.  Voici 
ce  qu'elle  dit  : 

Eochaid  Airgthech  est  ici. 

O'Donovan,  de  son  cùlé,  émet  l'idée  que  le  cercle  de  pierres  de 
(Carndoo  marque  l'endroit  où  Tuathal  Teachtmar  fut  tué,  l'an  IGO, 
par  Mal,  roi  de  l'Ulster. 

Feart  Echtra.  Comté  de  Mayo.  Gallon.  Toormore-Kilmore. 

Un  kislvaen,  dont  une  partie  subsiste  encore  prés  de  l'église  de 
Kilmore,  marque  la  tombe  d'Echlra,  dont  l'enterrement  au  gué  appelé 
Ath  Echtra  est  mentionné  dans  la  vie  tripartile  de  saint  PatriC'", 
pp.  137,  lil.  Il  se  compose  de  grandes  pierres  droites,  11  ne  reste  plus 
que  lecôié  est.  La  pierre  qui  formait  le  toit  a  été  enlevée.  Cette  tombe 
se  trouve  en  face  de  l'ancienne  église  de  Kilmore  à  droite  de  la  roule 
de  Hallina  à  l'église.  Echtra  était  l'épouse  d'Eocliaid  Breac,  fils  de 
Dalhi,  ou,  comme  il  est  appelé  ici,  Nathi.  Voici  le  passage  où  il  est 
question  de  cette  tombe  Cp.  426)  :  «Et  il  (Patrice)  baptisa  Eochaid, 

1.  Voy.  Connellan,  Ed.  des  Annales  des  ijualre  Maîtres  pign  172,  note  Vind.  Anii'j. 
of  Ircl.  lOi,  5;  0(/;j>jia,  A.  D.  257. 


14  llKVLi:  AIU'.IIKOLOGUJIK. 

fils  de  Nallii,  lils  île  Fiachra,  cl  ressuscita  sa  fonimo  Kchira  à  Alli- 
Kchlra,  le  pclil  cours  d'eau  aux  portes  mûmes  d'till-mor.  Kt  la 
tombe  d'Eclilra  e>l  sur  le  bord  du  gué.  C'est  pour  eux  un  signe  do 
ronuaissance  de  leur  histoire  (jue  de  se  rappeler  celte  tombe.  Il 
(Patrice)  envoya  PêvOque  Olcan  bùlir  là  où  est  réi,'lise  aujour- 
d'hui. »  M.  lK'nnc>sy  ajoute  en  note  (juc  l'édition  laiim;  de  (^ol- 
gan  appelle  ce  monument  Fe:ut  Kclilra,  (jui  a  la  même  siguili- 
calion,  et  la  tombe  se  voit  encore  dans  un  champ  (jui  se  trouve  à  peu 
de  distance  à  l'est  de  la  vieille  èfh^c  de  Kihnore-Moy  et  presque  en. 
face  d'un  puits  sacré  appelé  ToberPalrick.  Nouvelle  ligne  Clochtogal, 
sur  le  bord  de  la  rivière  Moy(SalSrotha  Dergi,dansla  circonscription 
de  Knocklcliaugh,  paroisse  de  B;illina,  baronie  de  Moy,  comté  de 
Mayo.  Quelques  antiijuaires,  suivant  une  idée  de  feu  M.  le  docteur 
O'Donovan,  ont  été  tentés  d'identilier  le  dolmen  de  Clochtogall, 
sur  le  Pipers'llill,  présde  Ballina,  avec  le  Ard  na  maol  mentionné 
par  M:.c  Firbis  comme  faisant  faceù  Ardnaree  (Ard  na  riogh),  colline 
d'exécution,  où  l'on  suppose  qu'au  vi°  siècle  quatre  ccclésiasti(|ucs 
furent  pendus.  Ue  leurs  noms,  précédés  du  mot  mk/o/ (tonsuré,  chauve), 
viendrait  Ard  na  maol  qui  désigne  une  colline  du  voisinage.  L'idée 
d'un  dolmen  élevé  au  vi"  siècle  par  un  païen  sur  les  corps  de  quatre 
prêtres  chrétiens  oITre  beaucoup  d'atlniit  aux  auteurs  qui  voudraient 
faire  descendre  la  date  de  ces  monuments  jusqu'à  une  époque  relative- 
ment moderne.  Il  devient  donc  nécessaire  d'examiner  le  fondement  de 
celte  hypothèse  du  docteur  O'Uonovan.  Voici  le  récit  de  l'exéculiou 
de  CCS  quatre  ecclésiastiques  : 

Maelcroin,  Maelseaiiaigh,  Maeldalua  et  Maeldroraid  étaient  les 
frères  de  lait  de  Guary,  (jui,  comme  son  frère  propre  Kellacii,  était 
filsd'iJwen  Ik*!,  roi  du  Connauglit,  tué  à  la  bataille  de  Sligo,  A.  D. 
î'y'M.  Owcn  eut  pour  successeur  Guary  Aine,  [)arce  ijue  Kellach,  qui 
avait  à  la  souveraineté  des  droits  supérieuts  aux  siens,  s'était  fait 
prêtre  cl  était  devenu  évéque  de  Kilmore.  Guary,  toujours  jaloux  de 
Kellach,  excita  ses  quatre  frères  de  lait.  Groin,  Seanaigh,  l);ilua  et 
Deordaidh  (dont  chacun  mettait  Mael  devant  son  non»),  à  assassiner 
Kellach;  ils  le  tuèrent  par  trahison  à  l'endroit  ap|telé  Ard-an-phen- 
nea.lha.  Alors  Gucongilt,  frèn;  de  lait  de  Kellach,  tua  les  nieur- 
Iriers  pour  se  venger  de  leur  fratricide.  Il  les  pendit  à  Sal  Sroilia 
Dorg,  ancien  nom  de  la  rivière  Moy,  «  et  c'est  [jounpioi  la  colline 
qui  domine  le  Moy  fui  ap[)elèe  Ard-n  i-riogh,  collinede  l'exécution.  » 

Dans  la  copie  manuscrite  du  l)innseanchusconscrvé(.' dans  le  livre 
de  Lecan,  fol.  li'd),  Ard-na-righ,  mainteuanl  Ardnaree, est  mention- 
née en  CCS  termes  : 


CAUii;  i(i;s  i-Hi.\(;ii'AU\  doi.mk.ns  u'iiilamh:.  itSt 

((  Aiiliiarco  aux  deux  criminels,  r.omine  l'appellent  ordinairement 
les  Irlandais.  KL  ici,  selon  la  coutume  du  barde,  une  pieire  fui  dies- 
sée.  » 

Mac  Firbis,  écrivant  au  wii"  siècle,  affirme  qu'il  y  a  un  en  iroil  ap- 
pelé Ardna-mael  à  cùlé  de  l.i  rivière  Moy,  en  face  d'Anlnaree.  Ce 
nom  cependant  est  oublié  depuis  m  longtemps,  qu'aucun  naiif  du 
district  ne  peut  inditjuer  de  lieu  ainsi  appelé;  et  Cloglitogal  n'e.t 
pas  en  face  d'Ai-dnaice,  mais  à  (|ueli|ue  distance  au  sml. 

C'est  néanmoins  d'après  un  lémuignage  aussi  insuftisant  que  le 
docteur  O'Donovan  '  idcnlilie  le  dolmen  de  Cloglitogal  sur  Pipers' 
llill  avec  l'Ard  na  mael  de  ]Uac  Firbis;  il  croit  iju'après  l'exécution 
les  corps  des  quatre  Maeis  furent  portés  de  l'autre  cùté  de  l'eau  et  en- 
terrés sous  le  dolmen.  11  n'est  pas  exact  quand  il  affirme  que  le 
monument  est  appelé  Leaclit  na  Mael  dans  le  Dinnsencbus,  et  que  ce 
document  lui  attribue  une  situation  élevée.  Aucun  d»  ssavants  irlan- 
dais qui  ont  bien  voulu  nous  aider  dans  celle  recherche  n'a  trouvé 
rien  de  tel  dans  le  manusciit  original.  Si  le  nom  [irimitif  de  ce  crom- 
lech était  Leaclit  na  mael  pouniuoi  est-il  appelé  Cloghtogall,  qui  si- 
gnitie  pierre  de  la  garde?  et  si  la  colline  sur  laquelle  il  se  trouve 
était  Ard  na  mael,  pourquoi  est-elle  appelée  Piper's  Hill,  colline  des 
joueurs  de  cornemuse,  nom  tjui  semblerait  la  rattachera  une  légende 
féerique  commune  à  beaucoup  de  dolmens  irlandais,  comme  nous 
l'avons  déjà  montré  ? 

L'opinion  d'après  laquelle  l'enterrement  sous  les  dolmens  était  en- 
core prati(]ué  en  Irlande  à  l'époque  des  premiers  missionnaires  chré- 
tiens ne  semble  appuyée,  d'ailleurs,  par  aucun  témoignage.  Dans  la 
Vie  de  saint  Patrice  nous  lisons  une  anccdocte  qui  paraît  prouver 
qu'on  ignorait  alors,  comme  à  présent,  l'histoire  de  ces  monuments. 
Nous  y  voyons  que  les  pierres  formant  un  cercle  dans  le  comté  de 
Cavan  prés  de  Ballymagauran  furent  dénoncées  comme  étant  de> 
idoles,  par  saint  Patrice.  «Flquandil  vit  les  idoles  des  eaux  appelées 
Gulhard,  il  éleva  la  voix  en  haut-.  » 

De  plus,  la  tombe  d'Echtra,  dont  il  a  été  déjà  question,  ne  ressem- 
ble pas  i\  un  cromlech.  C'est  un  espace  enclos  par  des  pierres  droites  ; 
elles  restes  du  iiionaslôredeSIvellig  Michbcl,  devant  la  cote  de  Kerry, 
nous  apprennent  que  la  pratiijue  de  la  primitive  église  d'Irlande 
était  de  faire  les  u  lits  pour  les  morts  »  dans  un  espace  oblong  el  ver- 


1.  Voy.  O'Donovan,  Trihesnnd  Customs  of  Ihe  Ily  Fùicfirach,  page  3!i,  note. 

2.  \'oy.'ïodii,  Life  ofsitiut  l'utri.k,  [ip.  127,  'lUi,  et  Luuigau,  Ce;/.,  Iliit.  vol.  I, 
d.  229,  239. 


\(\  IIKMI.     MlCIIKOl.CKilyUK. 

iloyant,  (|Uon  foiniail  nu  iikacii  île  |iili»M-s  scnts  les  uns  pièsdes  au- 
tres; chaque  pierre  élail  manniée  du  signe  de  la  foi. 

Nous  (levons  ni.unleuant  arnMer  ici  ces  notes  sur  les  dulmens  de 
l'Irlande,  que  l'on  prendra  seulement,  nous  l'espérons,  pour  une 
conipilalion  d'après  les  n  inaniues  des  anti(|uairesel  des  olliciers  de 
la  earle  d'êlal-major  d'Irlande  sur  une  .seule  elasse  de  monuments. 

Nous  n'avons  point  la  prrlention  de  présenter  au  publie  un  tra- 
vail eomplel.  Si  nous  avons  montré  quel  vaste  eliamp  d'investigation 
est  ouvert  on  Irlande,  noire  but  .seia  atteint. 

MAIUlAnr.T    STOKKS. 
Traduit  par  ft  M  1  L  !•    E  R  N  A  L' I.T. 


1  N  ij  i:  X 

1)|-.S      MO.NL'Mr.  NTS      M  KO  A  I,  IT  H  I  Ol' KS      n'illt,  ANPK 


LOCALITÉS.                   NOM  DU    MONUMENT.  QIALIFICATION.  COMTE. 

Agliaboy ^Lcaclit  na  m-ban  ?).  Dolmen    and    pillar 

stoncs Monagiian. 

Aghadc Ilolcstone,   Clocli    a  Dolmen  and  four  iip. 

Phoill rights Carlow. 

Annadown Gianfs  Gravo  .       .     Dolmen Down. 

Ardnaree.  ...     C.loglioyie'Giani's  Ta- 
ble  Dolmen Mayo. 

Ardnaree l'iper's  Hill Dolmen Mayo. 

IJallina f^arl  Hchtrn.    .    .    .     Ci-t Mayo. 

iJallintobcr Cot-aula Dolmen Mayo. 

Hallintoy Mount  Driiiil.    .        .     Dolmen Aniritn. 

Ijalliiitoy Giants  Graves.    .    .     CisL" Ai'trim. 

liallon.   ....     Cloglian      na     mar- 
blian  (slonc  of  llic 

Dcad.) ('.istscontainingurns.  Carlow. 

Uallymagorry.  .  (iiani'H  Grave  'ilnlly 

magrorty)..    .             Dolmen Londondorry. 

Ijallymaiicanlnn.        .     (;ianfs  (irav.-   .        .      Dolmen Loutli. 

Ballynakill,  n"  1 .    .     Ued  of   Diarmid  and 

Grania Dolmen Galway. 


cMiiK  i)i:s  i'iiiN<:ii'Aii\  hdi.MKNS  I»  iiii.witi: 


17 


I.OCALITKS. 

UullyiKikai,   u"  2 
IJallyn:iscorny   . 


Castleliackct  .    . 

Casllelyons.-  .    . 
Casllemary.   .    . 

Castlewellao,  n»  1 
Castlewellao,  n*  -2 
Cleggan  .... 


NOM   1)1'  MONUMENT. 

Ued  of  Diariiiid  uiul 

(iraiiia 

'Ilic  Li-liaii 


Baltinglass Monument  in  Park. 

Buolick Gortoen  ,       GianlV 

Grave 

Calry Cairn  of  Calry.    .    . 

Carrick Cove  sloncs  of  Clog- 

linylc 

Camp Grave  on  Caliir  Con- 

rcc 

Carlow,  n"  1 .  .  .  .  Brownc's  Hill.  .  .  . 
Carlow,  n"  2.  .  .  .  Near  Browne's  Hill. 
Carlow,  n"  ,3.    .    .    .     Near  Brownc's  Hill. 

Carn Giant's  Grave.  .    .    . 

Carn Giant's  Grave  St  Mo- 

guè's 

Knockma,Cûrn  Ceas- 

racli 

Curraljelia  stoncs.    .. 
Cots  rock    or  Carrig 

Cotta 

Sliddery  ford.  .  .  . 
Slieve  na  Boiltrough. 
Bed  of   Diarmid  and 

Grania 

Clomanty Clomanty  Cairn.   .    . 

ClondnlT Clocii  more  or  Finn's 

finger  

Clones Calliagli'Hag's  Grave. 

Cloncgam,  n"  1 .       .     Giant's  Grave  .    .    . 

Clonegam,  n»  :i     .    .     Porllaw 

Cloulinlougli  ....     Leac     na    inarblian, 

Stone  of  tlic  Dead 

or  tlie  Horseman's 

stone 

Clonmore Brce  Hill 

Cong Caillccli  dubli.    .    .    . 

Connor,  n»  1 .  .  •  Druids  altar.  .  .  . 
Conuor,  n»  i.    .    •    .     Dunanioy   or  Moya- 

dam 

Cork Druid's     altar    near 

Knockboy  .... 
Crecvy l'"all       na       gdocca 

Breacca 

Croglian Moat  of  OldCroghan. 

CuldafT Giant's  Grave    .    .    . 


c}UAi.iric\rioN. 

Dolmen 

Dolmen  and  stone  ci  r- 

clc 

Dolmen  and  graves. 


Dolmen 
'l'umuluï 


•  OMT^.. 

Galway. 

Dui>lin. 
Wicklow. 

Watcrpord. 
Wicklow. 


l'olmen Londondcrry. 


Stone  wiili  ogliaui. 

Dolmen 

Dolmen 

Dolmen 

Dolmen 


Cist  and  cairn.       .    . 

Cairn 

Stone    circle.    .    .    . 


Dolmen. 
Dolmen. 
Dolmen. 


Dolmen 

Ratli  and  Circle, 


Dolmen. 
Dolmen. 
Dolmen. 
Cist.    . 


Dolmen  and  Cairn     . 

Dolmen 

Stone    Circle.    .    .    . 

Dolmen 

Dolmen  and  Stone  Cir- 
cle  

PillarStoncs'  Ogliara. 


Kerry. 

Carlow. 

Carlow. 

Carlow. 

Donegal. 

Wexford. 

Galway. 
Cork. 

Cork. 

Down. 

Down. 

Galway. 

Kilkenny. 

Down. 

Monaglian. 
W'aterford. 
Waterford. 


Wexford. 

Mayo. 

.Antrim. 


Stone   Circle    tonibs 

aud  rail 

Tumulus 

Dolmcu  with  avenue. 
M.IV 


Antrim. 
Cork. 


Mayo. 
King's  Co 
Donegal. 


18 


11I.VI  i;    MICIIKOLOGIQUE. 


Curragh 
Dalkey.  ■ 

Davidsiown. 

Dcrryvullan. 

Donard.  . 

Doncgopc. 

Doon,  n"^»  I,  2,  T. 
Doon,  n"*  ^i  et  5. 
DooD,  n°»  1  et  2. 
DooDfoeny 

DoNMipairiik 
Dowlli. 
Douce  . 

Droplicd'. 

Drunibo 

Druiubo. 

Dundruin. 
Duiidruin. 
Dung:innon. 


Dunganstowii. 


Dungivcn. 

Dunlaviu 

Uysart.  ... 
Drumgoolaiu'. 

Uroinard 

Ennibktrry,  n"  1. 


Enni»kcrry,   n*  2     . 
Fauglianvalc 

Faugliart. 

Fiddowii 

Furts  aiiU  Cruuikcli. 

Gara  (Cogli,. 


NOM    m   MO.MMIM. 

Giant's  Gra\e    .    .    . 
Druid's  altar.    .    .   . 

ll.nlie  of  Killi'onC>r- 
maic 

Tawney  roapli  rii.tiit's 
graves 

Cairn  on  Chnrcli 
Mountain 

Tho  Cairn 

Foilycleary. 

Foilycleary 

Koilmalionmoro.    .    . 

Dun  fecny  tlieGinut's 

fort 

Louglimony 

Cloclilia 

Cairiis  of  .M.mliT  and 
Douce 

ilill  of  Hatli. 

Ballynaliatty.    .   .   . 

Giants  ring' Bullyles- 
san 

tiianl's  Grave. 

Sliddery  ford.    . 

Sliddtry  ford.   .    .    . 


Gaslleiimon    slones. 
Glen   of  ihfî   Potiers 

river 

Caugli  ilill 

Graves 

,MoundofDy.sart. 
Lcpananny. 
Clocliglas.   .... 
Gianl'.sGiave'  Barna- 

silldge 

Bally    Uru^'h. 
Glasocuoran   ... 


gUAI.ll  ICMIOW. 

Dolmen 

Dolmen    and     Stoiie 
Circle 


(Icmetery 

l'illar  Slones,  Cisls. 

Tumuliis. 

Stone  Circle  and  Tu- 

nuihis 

3   Dolmen*. 
3  Dolmen. 
3  Dolmen. 


DoInuMi. 
Dolmen.  . 
Tumulus.   . 

Tuniuli. 
Tumulus. 

Dolmen 

Djlmcn    .Tiid     Sinnc 

Circle 
Dolmen. 

Dolmen 

Tumu'.us   and    Siono 

Circle.     ... 


COHIK. 

Rildarc. 
Dublin. 

Kildaie. 
Ferman.Tgli. 

\\.cklL.W. 

Antrim. 
I.iini  rick. 
Liineiick. 
Liinerick. 

.Mayo. 
Down. 
.Mcatii. 

\\  icklow. 

Loulli. 

Dowu. 

Down. 
Down. 
Down. 


Gianl's  Grave.   . 
Carrig   na    Gag.   .   . 
Lougli    (iur,   Bcd   of 

Diurmid  and  Grailla 
Diarn.idaiid  Graniu'.s 

l).-d  .    . 


Dolmeo. .   . 
Sione   Circli' 
Kifetvaen. 
Tumulus. 

Dolmen. 

Dolmen 

Dolmen,  Stoie   Cir- 
cle  

Diiliiirn 

Diiliiicn  and  Stone  Cir- 
clu 

Dolmen 

Dolmen 

Dolmens  aodralli!)     . 


Dulmt  n 


Tyrone. 


Wicklow. 

I.ondonderry, 

Wicklow. 

Wcstmcatli. 

Down. 

Sligo. 

Wicklow. 
Wickluw. 


Londonderry. 
Loulh. 
Kilkcnny. 
I.imerick. 


ItOi>common. 


C.VUIK    I)i;S    l'HINClPAUX    DOLMK.NS    I)  im.A.NDE, 


l:i 


LOr.  ALlTIb. 


NOM  1)0    MOSUMK.NT. 


QUALIFICATION. 


Galbally Duiitryleagi.»,    Dinr- 

mid  and  Giaiiia's 
bed 

Gaulticrc,  n"  1 .    .    .     Bullindtul 

Guuliiero,  ii"  2.  .  .  Lisn;iskill ,  (liioc  a 
Tilialluij; 

Glaiiworiii  .  .  .  Li';ib;i(;.iillighe-IIags- 
bcd 

Glencasilc  .    .     Dun   Doiiiall.    .    .    . 

lllencoliimlikill''       .     Giant's  Graves  .    .    . 
Gleneask Finii  Mac  Cool's  Gri  1- 

dle 

Glengar Cairn  ofGlengar.  .    . 

GreyAbbiv.       .       .     Moiint  Steward.    .    . 

Hazlewooil Leaclit  cou  mie  Ruis. 

Hazlewood.    .  .     Druid's  altar.    .    .    . 

Hollywood Pipcr's  stoncs.   .    .    . 

Hollywood,  n"  •_'     .    .     Atlidgn-any    .... 
Holiywofui,  11"  :i.    .    .     Druid's  altar.    .    .    . 

Howth TlieCromlccli.   .    .    . 

Incl.iquin Bed  of  Diarinid  and 

Grania 

Inchiquiii,  n"  2.    .    .     Shallcc 

luaghbridgL' Bed  of  Diarniid  and 

Grania 

Inlshccr  .....     Bed  of  Diarinid  and 

Grania  (Moliar) .    . 

Iiiisheer,  n"  2.   .    .    .     Coorougb 

Inishinain Bockan,  Druid's  circlc 

IslandMagec.    .    .    .     Callyumpages  Giant's 

Grave 

Kells Headfort 

Killcommon Duu  Carton 

Killcullun Tcmbof  AnghusOsrc- 

tlia 

Kilfenora Balle     cinn      marga 

market  town.   .   . 
Kilfenora. Diarmid  and  Granias 

bed 

Kilgobbin Greybound'a       bed, 

Giant's  grave,  Bally 

brack  

Kilkcel Giant's  Grave   .    .    . 

Killea Carrig  a  dhirrlia.    . 

Killeany Diarmid  and  Grania's 

bed 

Kilmageuny  ....     Lcac  an  scail.   .    .   . 


Dolmen. 
Dolmen. 

Diilinen. 


Dolmen 

l'illar  Stone,  n"  2 
Square  enclosurc 
Six    dolmens.    . 


I.imerirk. 
Wateiforil. 

Watcrford. 

Cork. 
.Mayo. 

Doncgal. 


Dolmen Sligo. 

Dolmen Sligo. 

Dolmen Sligo. 

Stone    Circlo.    .    .    .  Sligo. 

Dolmen Sligo. 

Stone   Circlc.       .    .  Wickluw. 

Stono    Circlc.    .       .  Wicklow, 

Dolmen Wicklow. 

Dolmen Dubliii. 

Dolmen Clarc. 

Cairn Clare. 

Dolmen Clan'. 

Cairn  and  Dolmen.    .  Galway. 

Dolmen Galway. 

Stone   Circlc.        .    .  Mayo. 

Dolmen Antrim. 

Dolmen. Meaili. 

Dolmen Mayo. 

Tumulus Kildare. 

Dolmen Clare. 

Dolmen Clare. 


Dolmen Dublin. 

Dolmen Down. 

Stone  Circli'  ....     Waterford. 


Dolmen. 
Dolmen. 


Galway. 
Kiikci.ny. 


J(> 


HKVUK    AHCIIK0LO(.|ijr|-. 


ton  1.11  fS. 

kilmnii)  . 

kilmurr>. 
Kilnab»»y,  n"  I 
Kilnaboy,  n  '  '-' 
Kilnaboy,  ii"  :i 
Kiln»U>y,  n"  h 

Kilnaboy,  i>"  :> 

Kilnaboy,  n»  0 

Kilranelapli 
Kilroiiaii. 

Kilruddory. 
Kilsliannig: 


Kiltifrnan  . 
Kilwaugliicr 

Knockadruin 
Kippure  .    . 
Kiiockainy,  n"  1 

Kiiockainy,  ii"  2 
Koocklaul 
Knockaarea  .    . 


Knockroe  .  ■ 
Kiiockioplier  .    . 

Knocktoplicr 

Knowth  ... 
Loui;licr(;w.  . 
Lougli  Hcc,  n»  1 

Loiiph  Hcc,  II"  ? 

Lough  Uey 

I^linrl. 

I^iilli 
i. outil 


NOU  m    UOMUKNT. 

InisoWl'ii,  Ballinclial- 

la. 

Firbanc    n  (llioircp. 
IJ.illypaiincr, 
Ucabliamn. 
Cianl's  j^raM- 
Colpcn    or  Comment 

norlli 

Kiiow  na  glaise  llill 

of  llio  Cow. 
i.caba  na  glaise  BccI 

of  llic  (low. 
kilraiiolapli    ... 
Druids   Aitar,   Crai- 
gne Nacloch   .    . 
Dcerpark  (cairns 
lied  of  Dianuid   and 

Grauia,  lUvcenp 
Callybetagli. 
Carudoo,  Boicy  liou- 

scs 

Diarmid's  bed   .    .    . 
Druid's  allar. 
(Jiant's  Grave  IJally- 

napalliagh  ... 
Kiioïkadooii  ... 
Gianl's grave  at  Layd 
Carrowiiiore,     Norlh 

Moytura 


Ballyglass 

Giaiil's   grave,  Bally 

lowra 

Bed   of  Diaiiuid  and 

(irania 

Kiiowih 

Sliabh     na     Calliglio 
Bed  of  Diarmid   and 

Graine 

Monument  on  l.ouglt 

Hee    liell.  .    . 

(liants   grave   Désert 

créât 


i.il  Al  IHi  ATION. 

(OUI 

Sione  Cirrl<' 

.Mayo. 

Dolmen 

(■.kiway 

DolllKM). 

.      Clarc. 

Doliii'  II. 

Clare. 

Il<>liii''n. 

.     Clare. 

Dolmen. 

Clare. 

Dolmen. 

.     Clarr. 

Slone  cil 

rcle 

Wicklow. 

Dolmen 

r.oscommion 

Two  niounds 

Wirkinv. 

Lpright 

slones.    . 

.     Cork. 

Dolmen 

.     Dublin. 

Dolmen 

.\iitrim. 

Dolmen 

(;al\vay. 

Dolmen 

\N  ickitw. 

Holmen 

Limorirk. 

Cairn  . 

l.imerick. 

Dolmen 

Antriiii. 

68  dolmens  and  cir- 

cles Sliço. 

Dolmen  stone  circle.  Mayo. 

Dolmtn  .    .  Kilkeiiny. 


lied  of  Diurmid  and 

(irania • 

Greeiimount  • 

.Muund  of  At')  - 


S(one  circle 

Kilkiiiny 

Tumulus. 

Mcatli. 

Tumulus.   . 

M.';i!li. 

Dolmen  .    . 

Galway. 

Siono  circli 

Gahvay. 

Dolmen     and 

kist- 

vai'ii.           . 

'lyrone. 

Dolin*-ns    and 

>loiie 

circle  .    . 

Kl rry. 

Tumulus 

I.diiili. 

Tumulus. 

Luiitli. 

I.OCAI.ITKS. 

Macrooiii. 
Marl)lu  llil 
M;Uilicwst()iiii 

Meala^'li  Hiver 

Middieton  .    . 
Moiiasicrboicu  . 

Moiiastcrcii:i<;li 
Moiiiisici-'jiiai^li 
Moydow  .    . 
Mungrct.    . 

New  Grange.    . 
Newry 


Newtowa  Ards 

Ouglitmama  . 

Pliœiiin    Park 

Powersconrt  . 

Powerscourt  . 

Powerscourt  . 

Ratbconrotli  . 

Hathcroghan  . 
HatliTran.   . 

Rallif;orniack. 
Rath  Kenny  . 

Ratlivilly.  . 


cvnTK  r)!'."^  l'iiiNcir'vrx 


NOM   IK    MONtMK\T. 

Lissacressig  .  . 
(iianl's  CravcH 
Leaba  'l'IiOinais  mac 

(luba 

lied   of  dianiiid  aiul 

Gi'a:iia 

Kilacloyne 

(la  l  I  i  auli  I)i  i  ra's 

llouse 

(;raiif;o 

(jraii^i; 

Giant's  Grave  .    .    . 
Calierctlian  ,    fort 

Etna 

New  Grange  .... 
Carnbane     'llacligia 

Ban 

Kcmpe  stone,  Bally- 

clogh  togall  Grcon 

graves 

Bcd  of  Diarniid    and 

Grania 

Cnockmaridhf,    Ma- 

riiicr's  bill.    .    .    . 
Ros  a  Trepeil.Tony- 

garbh  

Donchadh  dearg,Glas- 

konny  

Annacrivey,Carricka 

spinkeen  

Cat's   stonc,   llill   of 

Uisneach 

Oenach  na  cruacliaa 


Giant's  graves  . 
Liitle    Hazil    cairn. 

Carnan  Cuill.    .    . 
AcaiinBridge,Druid's 

Altar  ...... 


Raloo Raloo  . 


Rossnarce  . 
Rostrevor  . 
Rui-h  .  .  . 
Seskinan.  . 
Sliaoganagii 


lîroad  Boyne.  .  .  . 
Giant's  grave.  .  .  ■ 
Knocklea,Giants  llill 
Tooreen  NVe"^!  .  .  . 
Druids  altar.    .    .    . 


ii(ii.Mr''.s  I)  im.wnr:. 

Ml  Al.ll  ir\TIO\.  COMlt. 

Dolinnii Cork. 

Dolnii'ii  and  H  graves.  Galway. 

DoiniiM)  .  Waterford, 

Dolmen  Cork. 

Stom    ciriir  Cork. 

|)i)luieii  .    .  I.Diiiii. 

Siooi;  circle  .    .  Limerick. 

Dolmen  and  iiii'|t>.  Limerick. 

Dolmen  .    .  I.on<:ford. 

Graves,   3  cisis.    .    .  I.imerick. 

Tumulus  and  cirrl,''.  .Meatii. 

Dolmen Armagli. 

Dolmen Down. 

Dolmen Clare. 

Tiiinnlus Dublin. 

Graves Wicklow. 

Dolmen Wicklow. 

2  cairus Wicklow. 

Dolmen W.  Meatli. 

Royal  cemetery.   .    . 
Stone  circles  and  dol- 
mens    Mayo. 

2  dolmens Wateiford. 

Dolmen Meatli. 

Dolmen,  Stone  mar- 

kings Carlow, 

Dolmen    and     pillar 

siones.    .  .  Antiim. 

Tiimii'us.   .  M'a'li. 

Dolmen  .    .  Down. 

TtimuliK.    .  Dublin. 

Dolmen Watrrford. 

Dolmen Dublin. 


21 


nr.vt  r  Anr.Héoi.doioun. 


mCMIÎK. 

NOM  M    MOM  Ml  \T. 

i.iUAI  11  ICATIDV. 

COMtl 

Slianiil    . 

'rmnrkill.i  . 

Dolmoi)  . 

I.imiric  k. 

Shillelapli 

I.caba  naTaiRo. 

(Iravp  .    . 

Wirklow. 

Slie?e  Boa(;h 

Carn  inor  ... 

Cairn  .    . 

F(>rman:igli 

Slicvc  na  cridJk-  . 

Giant's  graves .    .    . 

Dolmen 

Diwn. 

Suparloar  .    . 

(iiant'.s  grave.   .    .    . 

Cairns. 

Wickbw. 

Tallaghl.    . 

MoiinlVoii»s,Druiil*s 

nllar 

Dolmen 

Dublin, 

Tanrcpo 

Trao   Ciicliulliii. 

Dolmen 

Sligo. 

Tara    .    . 

Tara  llill 

Tiininli    and  railis  . 

Mealli. 

Toormore   . 

Tlic  Altar 

Dolmen   .    . 

Cork. 

Ti-mplcpitrick  . 

Bally     carn    Grania. 

Dolmen  . 

Antrim. 

Tramorc 

Kr.ockccn   .... 

Dolmen 

Walerford. 

Trillick 

Oani 

Tumuhis      \\iili      8 

cbambcr.s   .... 

'lyrone. 

Tubbrid .            . 

r.alicen 

Dolmiri 

Kilk'iiny. 

Tullahopo   . 

(  liant  "s  grave. 

Dolmen 

Tyrone. 

Tullycorbct    . 

Loniian 

Dolmen,  stoiie  niur- 

kinçs 

Monnghan. 

rppfrchurcli. 

Toampiill    l'aclitair, 

Cnopc  carra  Cliiiailo. 

Holmen 

I.imeiifk. 

Urncy  . 

IVuid'.s  aliar,  Castle 

Dcr? 

Dolmen 

Tyrone. 

Wostport    . 

Caliernamart 

Dolmen  aiul  cncle 

Mayo. 

Whiiecliiircl). 

BiillyheiKbury 

Dolmen  . 

Kilkenny. 

Whittcliurcli. 

Killonery 

Dolmen  . 

Kilkcnny. 

Wliitechurcli.   . 

.     Sliovp    Kiclla    corn- 

mons 

Tumulus,   . 

W  oxford. 

1 NSCR I PT 1 0  N    l>'  Il  A  S l' A  n  ]\  K N 


Tous  los  ('piprapliislos  ronnnisscnt  la  famruse  inscription  d'ilas- 
parrcn.  Kllc  se  voit  anjouid'lmi  encasirôn  dans  le  tympan  de  l'église. 
Hasparrcn  est  un  elief-lieu  de  canton  de  l'arrondissement  de  Bayonnc, 
situé  à  vingt  kilomètres  au  S.-E.  de  celte  ville  (Basses-Pyrénées). 
(Vesl  dans  ce  lieu  même  qu'elle  a  été  troifvée  en  KiOO. 

Le  texte  en  fut  communiqué  au  Journal  (h'  Trcroux,  par  le  cha- 
noine Veillet,  en  octobre  1703  (n"  173). 

Il  a  été  puldié  depuis  lors  par  Mazure,  dans  son  Histoire  du  Béarn, 
p.  4.'i.'J;  par  M.  de  Lagarde,  Voyaçje  au  pays  basque,  p.  fil,  IS.'UJ;  par 
M.  II.  Pnydenot,  de  Hayonne  {Rnne  de  uumismal\(iue  et  d'archéo- 
logie, IST'ài;  par  M.  François  de  Saint-Maur,  l-^piçimphie  des  Ba^^ses- 
Vyrcnêes  (dans  les  Mémoires  du  Congrès  scientipqne  de  France, 
XXXIX"  session  tenue  à  Pau),  avec  une  explication  tout  à  fait 
inadmissible. 

M.  L.  Renier,  dans  la  séance  ordinaire  de  l'Académie  des  inscrip- 
tions cl  belles-lettres  du  M  novembre  \S10,  avait  eu  l'occasion  de 
l'expliquer  (voir  Comptes  rendus  des  séances,  1870,  p.  31o).  Notre 
savant  maître  a  publié  de  nouveau  le  texte  dans  une  note,  Corres- 
pondance de  Borghesi  {(Eurres  compL,  édit.  de  Paris,  t.  Vllt, 
p.  ui3-:ii4). 

Je  l'ai  publié  moi-même,  d'après  M.  Renier,  et  j'ai  reproduit  ses 
explications  verbales  et  écrites  {Géogr.  Itist.  et  admin.  de  la  Gaule 
romaine,  t.  II,  p.  300-361,  note). 

A  la  séance  de  l'Académie  mentionnée  plus  haut,  un  membre  avait 
élevé  quelque  doute,  non  sur  l'aulhenlicité  de  l'inscription  d'Has- 
parren,  mais  sur  l'attribution  des  caractères  au  i''  siècle  de  notre 
ère.  Ce  membre,  qui  n'est  pas  nommé  dans  le  compte  rendu,  élai 
M.  de  Longpérier.  Il  avait  eu  l'estampage  sous  les  yeux  et  il  avait 
remarqué  que  la  forme  des  lettres,  dans  la  dernière  ligne  surtout, 
n'accusait  certainement  pas  lei*"'  siècle,  mais  appartenait  fi  une  épo- 
que beaucoup  plus  basse. 


21  nrvn    Mirm^ni.or.iorF. 

Ayant  eu  lorrnsion,  à  ninii  loiir,  «le  iiroc(Mip(M'  do  nouvcnii  de 
fcllo  inscriplion  lust(>ii«iuc',  le-;  tdtjcrlioiis  ilc  M.  do  L<)n!,'|i(''iit'r  nie 
sont  revLMiuos  on  niôiiioire,  el  M.  Sacazi'  a  Itii'i»  voulu  iiiCiivoy.M-  im 
rslampagc  pris  tout  lércmmoiit.  pu-  liii-môiiu',  à  llasparren;  c'est 
untM-(Vlucli(>n  di'  ret  ostanipa{,'('  (iiif  iio\is  publions  (pi.  XII): 

On  se  convainera  sans  peine  (|ue  les  caraetères  de  toute  l'inscrip- 
tion ne  sauraient  tHrc  dui'^  ni  du  ir,  ni  du  m'  siècle.  C'est ùvidem- 
menl  au  iV  siècle  que  ce  monument  a  été  i,'ravè. 

Ln  forme  '^vC'\o.  des  A,  dont  la  plu[iart  ne  sont  pas  barrés,  celle 
des  C,  des  G,  des  D,  des  E,  des  M,  des  O  allongés,  el  surtout  celle 
des  Q  el  des  R,  révèlent  une  origine  postérieure  même  à  Constan- 
tin. 

D'autre  part,  ces  vers  peuvenl  sembler  assez  étrange^;  dans  un  ttxlf 
destiné  i\  perpétuer  le  souvenir  d'un  fait  aussi  considérable  que  le. 
voyage  entrepris  par  un  .\quilain  au  temps  d'Auguste,  après  l'an  21 
avant  notre  ère,  c'est-à-dire  après  le  partage  de  la  Gaule  en  provinces, 
voyage  accompli  dans  le  but  d'obtenir  de  l'empereur,  à  Rome,  (lue 
les  »o«/" /*e»/'/r.s  compris,  avec  les  (jualorze  peuples  gaulois  situés 
entre  Loire  elGaronne,  dans  la  province  d'A(iuitaine,  continueraient 
à  former  une  division  ellinograpbiciue  distincte,  rappelant  leur 
origine  ibéiienne;  celle  mission  menée  à  bien  par  un  magistral 
municipal  d'une  de  ces  neuf  cités,  lequel  était  en  même  temps  mwjis- 
ler  de  son  pdijn^,  était  un  fait  fort  intéressant.  Vérus  (car  nous  n'a- 
vons malbeureusemeni  que  son  cognomen,  les  exigences  du  vers 
n'ayant  pas  permis  sans  doute  de  faire  connaître  son  ijentilicium) 
obtint  la  seule  cbose  «lu'il  pût  demander  à  l'empereur  pour  ses  com- 
patriotes :  une  di>linclion  nominale  (jui  empécliàl  de  les  confondre 
avec  les  Gaulois,  compris  dans  la  même  division  provinciale  de  l'em- 
pire, attendu  qu'ils  en  dilTéraicnt  complètement,  non  seulement  par 
la  langue,  dit  Sliabon,  mais  par  le  type  pb\>i(iue,  oO  r^  y^iÔttt,  aôvov 
aXÀi  xai  Tou  cwaaffiv  (IV,  I,  1). 

Kl  celle  concession  obtenue  fut  assez  signidcalive  pour  (pi'elle  se 
perpétuai,  dans  l'usige,  pendant  plus  de  (lualre  siècles,  puisque  le 
nom  de  Noinupopitlmia  (|ue  nous  retrouvons  dans  la  Notice  des  pro- 
vinces rappelle  les  ;/orr;/j /(o/Hf//,  bien  (pi'il  n'y  eiU  plus  alors  neuf 
mais  douze  cités,  (|ui  foniiérenl  douze  diocèses  au  moyen  âge. 

On  peut  donc  s'étonner  (|u'un  fait  aussi  im[toilanl  pour  tous  les 
habitanlsdc  rA(piit:iiin!  ait  é|è  consigné,  i"  d'abord  en  ver.-  el  en 
vers  faux,  dans  une  latinité  incorrecte,  au  teinp^  d'Auguste!  C'était 
un  étranger,  dira-l-on  ;  mais  Vérus  était  allé  à  Home,  et,  dans  un  texte 
presque  oUicicI,  il  étiit  facile  d'obtenir  uik;  langue  plus  régulière. 


IN'^CIllI'TKlN    1)  Il  \sr'.\lllti:N.  Jit 

2"  On  pnul  .•('•tonner  en  outre  que  n-  texte,  ^M'.ivé  sur  «  un  .miel  » 
élevé  au  6'entMS  d'IIa.sparren,  nous  piiviciiiie  suc  um.'  plaqueUe  de 
si  [letite  (iiiiieiisioii;  car  rinsciiplioii  ira  (pie  ()"',4.*>  de  lonj,'  sur  O^j.'JO 
de  laiL;e,  et  loule  la  pieiie  ne  mesure  (pie  0"',7;i  de  loni,';  e'esl  hien 
peu  iiionumenlal. 

:{'  Si  on  lit  avec  attention  les  (|uatre  veis  (pii  la  composent,  on 
y  remarque  les  plus  i5M'aves  incorrections. 

Flaincn  itoiii  diinivir,  quapslor  piigiquo  magislcr, 
Verus  ad  .Xiigustiim  Icgiito  muncre  fuiictus, 
l'io  novein  opliiiuit  popiilis  .'^cjuiigere  Gallos  ; 
Urbe  rcdux,  Geiiio  pagi  liane  dedicat  aram  V 

Nous  sommes  donc  en  présence  d'un  texte  en  vers  incorrects, 
gravés,  sur  une  phupielte  de  O^jT^  de  haut,  dans  une  forme  de  lel- 
Ires  qui  appartient  au  IV  siècle,  et  cela  pour  perpétuer  le  souvinir 
Historique  le  plus  important  de  l'Aquitaine  au  i"  siècle.  Que  con- 
clure de  ce  qui  précède? 

D'autre  part,  l'inscription  n'est  certainement  pas  moderne  ;  la  même 
forme  des  caractères  qui  nous  empêche  de  l'attribuer  au  temps  d'Au- 
guste nous  interditde  lafaire  descendre  plus  bas (jue Théodose.  Ce  ne 
peut  donc  être  l'œuvre  d'un  faussaire,  et  cela  pour  d'autres  raisons 
encore  :  rinscri[)lion  est  connue  depuis  16G0.  Ce  sérail  donc  avant 
celte  date  qu'on  l'aurait  fabriquée;  on  aimait  assez  à  produire  ces 
textes  historiques  supposés  au  xvr  siècle,  au  temps  du  fameux  I^igo- 
rio,  elà  les  écrire  en  vers;  mais  on  savait  mieux  le  latin  et  surtout 
on  l'écrivait  plus  correctement  à  celle  époque;  en  revanche  on  pou- 
vait ignorer  alors  l'ordre  des  magisîratures  municipales  romaines  et 
le  litre  que  portait  le  premier  personnage  d'un  jhujhs.  On  doit  remar- 
quer que  cette  partie  de  l'inscripliou  est  irréprochable.  Vérus  a  été 
maijistcr  de  son  imgux  ^celui  d'Ilasparren,  sans  doute,  dont  le  nom 
ancien  nous  est  inconnu).  Il  a  été  en  outre  quacstor,  duiimvinii/hiinen 
de  la  cité  :  celle  cité  est  y/MrovOloron)  o\iAqu(ieTarbellicai'(Da\),cvir 
l.apunlnm  (Rayonne;,  (jui  est  la  ville  la  plus  rapprochée,  n'était  pas 
alors  chel-lieu  de  cité,  les  deux  seules  cités  dont  les  chefs-lieux  soient 
voisins  d'Hasparren  étant  celle  des  Tarbelli  et  celle  des  Ilitrouensrs, 
qui  étaient  certainement  tous  deux  au  nombre  des  neuf  peuples  du 

1.  On  voit  que  le  second  vers  renferme  un  solécisme  qu'il  était  facile  d'éviter 
[!egn(o  pour  legnti),  la  quantité  étant  la  mOme;  «  Pro  novem  »  ne  peut  commencrr 
un  vers;  on  n'a  pas  élidé  la  deuxième  syllabe  de  novem,  qu'on  a  faite  brive.  L'éli- 
sion  de  la  seconde  syllabe  de  uayi  devant  hune  n'est  pas  faite  non  plus. 


-•>  nrvLP.  Anciii.oi.ociorr,. 

(«Miips  d'Au^Mislt'.  Aiii<i  lo  snronlnro  Hpnrr  t>n  hMi'  cl  Irs  ;iiilio>  in.i- 
}îislrali)ros  ;•  leur  nnR  C.l;»ns  l'onlrft  inverso)  ;  c'est  pnrfniU'mcnl 
rorrofl. 

Or,  si  le  toxic  d'IIasparron  n'est  pas  l'œuvre  d'un  faiissnireà  l'épo- 
(juc  moderne  qui  a  prëcùdé  1G60;  si,  d'aulre  pari,  il  n'est  pas  pos- 
sible de  le  considérer  roniinc  (Mant  du  temps  (l'Auiriisle  ni  môme 
du  temps  des  Anlnnins;  si  la  forme  des  lettres,  enlin,a(Tuse  le  milieu 
ou  la  fin  du  iv'  siècle;  on  se  demande  (jucl  inlùrùl  on  pouvait  avoir 
alors  à  supposer  le  nom  de  Vériis.  h  simuler  ce  voyaj,'e  à  Home,  et  la 
concession  faite  par  l'empereur  Aii.îusie  ;  à  rappeler,  enlin,  (hs  faits 
antéiieurs  de  quatre cenl-^ans,  à  une  époipie  où  les  Noreinpopuli  for- 
maient précisément  une  province  à  parijlepuis  Dioclétien.  (Voir  la  liste 
de  Vérone,  .Mommseii,  \X{V.\,  Abhnii'lltniijen  (1er  Kocn.  M.dil  iler  W'is- 
.sy//.Nr/».cM/fc;7*/<IS(r_>,  p.yiiî.CI.  Irad.  enfr.,  Kcr.nnlirul..  déc.  l.SOO, 
t.  XIV  de  la  nouvelle  série,  p.  II'.IO.) 

Il  paraît  inliniment  probable,  en  conséquence,  que  les  faits  rappor- 
tés dans  l'inscription  d'Ilasparren  n'ont  pas  été  inventés,  que  l'A- 
(juitaine  obtint  sous  Auguste  non  pas  l'autonomie  assurément,  mais 
un  nom  officiel  tiré  desneufpeuples  dugroupe  ibérien  situé  au  nord 
des  Pyrénées  ;  car  son  ancien  nom  d'Ai|uitaine  venait  de  recevoir 
une  extension  politique  blessante  pour  l'orgueil  national.  Il  me  pa- 
rait très  probable  ()ue,  déjà  au  temps  d'Auguste,  elle  dut  recevoir  ce 
nom  de  Xorempoiiulaud  qu'elle  a  conservé  jusqu'au  moyen  ûge,  bien 
(jue  ce  nombre  de  neuf  peuples  ou  neuf  cités  se  soit  accru  dans  la 
suite  et  ait  été,  dans  les  mêmes  limites,  porté  à  douze.  Voilà  ce  qu'il 
faut  retenir  de  l'inscription  ;  le  reste  importe  peu.  Mais  comment 
expliquer  que  les  lettres  soient  du  iv""  siècle?  L'autel  ou  le  monu- 
ment aura  été  détruit  ou  aura  disparu  au  iv  siècle  par  une  cause 
(juelconcjue,  et  on  aura  jugé  à  propos  d'en  reproduire,  sinon  les  ter- 
nies exacts,  du  moins  le  sens  et  les  expressions  princi[iales.  Le  nom 
de  Vérus  eises  titres  sont  bien  du  temps  d'Auguste.  Cc\u\  de  pamni 
témoignerait  d'une  éjioque  déjà  avancée  du  régne  d'Auguste,  car 
c'est  évidemment  ici  un  flamcn  civitatis,  c'est-ù-dire  un  flainen  Au- 
(lusti;  or  les  flamines  de  cités  ne  datent  pas  du  commencement  du 
régne  ;  mais  il  n'est  pas  nécessaire  de  supposer  (ju'Auguste  fût  dirus: 
puisque,  dans  toutes  les  cités  de  l'empire,  aussi  bien  (jue  dans  les 
ca[)itales  de  provinces  où  le  culte  de  Uome  et  d'Auguste  était  établi, 
comme  à  Lyon,  c'est  la  j)ersoniiilic;itioii  vivante  du  clief  de  THlat,  par 
ronséqui  ni  c'est  l'empereur  vivant,  (juel  qu'il  fût,  (jui  est  l'objet  du 
culte,  et  non  pas,  comme  à  Home,  certains  empereurs  morts  et  divi- 
nisés, objet  du  ruife  des  smhihs  (iiiiiuutnlrs   Or  celle  inscription  du 


i.\«;r,(in'TioN  n'nA'^pAnnrv.  27 

i"siè('lo,  (lispnriifî  corlainomont,  et  (|iii  ronslilinit  un  soiivniir  si 
inlrrpssnnt  p^iirla  NovewpnjnilDnii  ;iii  iv'  sirclc,  piiisfiuVIIc  niipcl.-iii 
roiifîiiio  (ic  son  nom  cl  ;iv;iil  lurparr  loiif,'l(Miijis  (r.iv.incel;!  crralion 
nu^inc  (Ii3  la  province,  dédoiihlemenl  de  l'Aquitaine  d'Aufjusle,  on 
dut  la  reproduire  dans  un  monument  nouveau,  copie  plus  ou  moins 
lidi'ic  de  celui  (|ui  avait  dispiru  :  on  dul  faire,  enlin,  à  ll.:s|taiien, 
au  iv  siècle,  cl  peut-èlre  reproduire  ailleurs  d  ins  la  nouvelle  ju-o- 
vince,  cet  ancien  tilre  historique  de  ses  origines,  comme  on  lit  à 
Rome  m/^me  pour  l'inscription  de  la  colonne  Duillienne,  jtour  le 
cliani  des  frères  Arvales  et  pour  tant  d'autres  monuments  liisl<.ii(|ues 
détruits  et  refaits  dans  les  bas  temps  de  l'Kmpire. 

E.    Dl-;SJAni)INS. 


mmxnaii:   iior, 


AUX  TYPES   DEM  PO  RI  ES 


Têle  (le  femme  à  droite,  los  cliovcux  relevés  el  ornés  de  feuilles  de 
roseau,  entourée  de  trois  poissons,  [irob,d)lement  des  (i;iupliins 
ma!  dessinés. 

IV.  Pégase  s'envolant  adroite;  au-dessous,  EMPIO 


Fabrique  barbare. 

Or.  Di.imétr.',  JO  inilliméires.  l^)ids.  H  ;:r.  S(>. 
I!\('iii(ilaii('  (le  cofisci'valion  médiocre  et  troué,  de   la   (•(dieclion 
de  M.  (iarlos  Auban  à  Madrid.    Provenance'  inconnue  '. 

I/émis.'ion  tics  moimnii's  d'.ir-'ciil  dl^iii|M)i  uîs  cl  lU;  Uiiod.i  a  exercé 
une  grande  induencc  pendant  les  m"  el  iv  siècles  avnii  l'ère  cliré- 
lienne,  non  seidemenl  dans  le  monnayage  de  la  région  catalane, 
dans  latiuelle  éiaienl  situés  ces  diiix  (-(doiiies  grec  pie-,  mais  aussi 
dans  celui  du  midi  el  de  Toiirsi  d  '  la  (iaulc. 

(>elle  inllnciiic  csl  dcmonliéc  par  les  iiiinilni'ii^^i's  inniinaicségale- 
mcnld'ar/ciit  (|ui,  avec  plus  ou  moins  de  lidéliléct  degoill  ai  tisliipie, 
imilonl  les  beilesdracbmesd'EmporieseldelUKida  avant  au  dioil  une 

1.  Voyez  mon  ârtic!»-  d.ins  la  Hevitln  di:  Ciniciiis  Itistoncas,  HarceloiiB,  t.  il, 
p.  530. 


MoN.wii;  I)  (III  M\    n  iM.s  I)  i;\ii'{ii(ii:s.  iJ'i 

ItMedn  femme,  couronnée  d'épis  on  de  fenilles  de  roscnii,  ctiinrlfiiK;- 
fois  (inloiiiée  de  Irois  (lanpliins;;ui  revers  un  cheval  dehoul, couronné 
par  la  Victoire,  un  l*éi,Mse  les  ailes  déployées  ou  une;  rose  ouverte; 
leur  i)oids  est  à  peu  près  le  même  que  celui  de  leurs  modèles  cl 
descend  peu  à  peu  ;\  mesure  qu'elles  s'en  séparent  par  la  dislance  du 
tem|ts  écoulé,  et  la  dilïérence  dans  la  perfection  du  travail  et  dans 
la  pureté  du  métal  employé. 

Il  faut  diviser  ces  iiiiilalions  en  deux  classes:  Iescspaf,'noIes  et  les 
gauloises. 

Les  imitation.:  frappées  en  Espagne  se  trouvent  presque  exclusive- 
ment en  Catalogne  et  présentent  une  fabrique  en  général  bonne,  qucl- 
(luel'ois  même  assez  belle,  qui,  même  dans  ses  jiroduils  plus  négli- 
gés, témoigne  d'un  certain  art  qui  rappelle  les  originaux  grecs;  le 
type  du  revers  est  un  Pégase  avec  la  léte  formée  par  un  petit  amour 
accroupi  et  au-dessous  une  légende  ibérique  en  lettres  tiés  petites, 
gravées  au  trait  tin  par  des  mains  d'artistes  qui  connaissaient  sans 
doute  le  sens  de  ces  épigraphes,  puisqu'il  y  en  a  quelques  légendes 
qui  sont  répétées  sans  aucune  variation  dans  leurs  caractères  sur  dif- 
férenls  coins,  d'aulres(iui  sontdéjaconnues  ailleurs.  Bien  plus  rares 
sont  les  imitations  des  di acbaies  de  Rlioda  ;  leurs  légendes  ibériques 
se  lisent  gravées  devant  la  tète  du  droit,  de  même  que  sur  leurs 
modèles.  Les  imitations  frappées  dans  la  Gaule  ne  se  rencontrent  pres- 
que qu'en  Fiance;  elles  présentent  une  fabrique  beaucoup  jilus  gros- 
sière, et  la  reproduction  de  leurs  originaux  est  bien  moins  exacte  ;  les 
types  préférés  sontcelui  du  cheval  debout  couronné  par  la  Victoire  et, 
plus  souvent  encore,  celui  de  la  rose  ouverte;  la  légende  manque 
presque  toujours,  et,  quand  elle  y  est,  elle  se  limite  à  constituer  une 
copie  barbare  de  l'épigi-aphe  grecque,  que  le  graveur  voyait  sur  son 
modèle,  mais  (lu'il  ne  savait  dècbilTier  ni  remplacer  par  une  autre 
inscription  éijuivalente  et  propre  à  sa  langue  et  à  sa  patrie. 

Jus(iu'à  présent  l'on  no  connaissait  guère  de  ces  imitations  ni  de 
leurs  modèles  que  des  pièces  d'argent  d'un  poids  variant  entre  5  et 
•4  grammes,  et  quoique  je  croie  avoir  suffisamment  prouvé  '  que  le 
poids  de  ces  pièces  était  celui  du  système  d'or  que  les  Carthaginois 
avaient  apporté  de  Tile  de  Sicile,  nous  ne  connaissons  pas  d'aulres 
pièces  plus  grandes  ou  plus  petites,  appartenant  à  ce  môme  système, 
(pie  celles  frappées  à  Cartilage,  Ebusus  et  Gadès  en  argeni,  et  à  Car- 
tilage seulement  en  or. 


(t)  Mémorial  numisuialico  cspaiiol,  Barceloua,  t.  IV,  p.  I28  à  1^7. 


.10  m  vit;  AUciiKiii.iKiiyrK. 

On  (Uni  ilonc  alliiluitr  im  i:r;inii  inlritH  h  la  liduvaillo  do  la  iiioii- 
naie  on  or  dont  le  croquis  et  la  dfscriiilioii  m'  liouveiil  en  [«Me  de 
celle  noie. 

Cet  exemplaire,  uni(iiie  à  notre  avis,  est  assez  usé  et  cii  outre 
inulik'  par  le  Irou  qui  le  traverse;  il  devait  peser,  quand  il  lut 
frappi\  plus  de  î»  irramiues.  Aujourd'hui  encore  son  poids  dépasse 
non  sculenicnl  celui  de  toutes  monnaies  d'or  gauloises, mais  aufsi  le 
poids  normal  de  la  drachme  altiiiue,  H  gr.  7."l,  que  les  stalèrcs 
gaulois  lâchaient  d'allcindre,  quoique  en  réalilé  ils  soieni  restés 
presque  toujours  entre  s  cl  7  },'rammes. 

D'aucune  façon  celle  monnaie  ne  doit  èlreconsidiive  comiin-  frap- 
pée en  Espagne. 

.    ZOUKL    DL;    ZANGllUMZ. 


u  N  I-: 


INSCUIPTION    lin:UlEMiNE 


Dans  les  papiers  de  Laiizi,  conservés  nux  arcliives  de  la  Galerie 
Royale  de  Florence,  se  trouve  une  lellre  ù  lui  adressée  racontant  la 
découverte  d'une  palère  d'argent  antique,  faite  dans  une  tombe,  au 
Las  de  Montiego  en  Ombrie,  à  qualie  milles  de  distance  d'Urbania, 
l'antifiue  Urbinum  Metaurensc.  Celte  palèie,  (jui  a  sans  doute  passé 
par  le  creuset  du  fondeur,  car  on  ne  la  relrouvc  dans  aucune  col- 
lection, portait  une  triple  inscription  gravée  assez  légèrement  au 
burin,  dont  la  copie  est  donnée  dans  la  lettre  avec  un  soin  et  une 
lidélité  remarquables.  M.  Gamurrini  l'a  publiée  dans  son  Appendice 
al  Corpus  inscriplionuin  ilalicarum  l'd  ai  snoi  Supiileineiid  di  Ario- 
danle  Fabiclti,  p.  G  et  pi.  I,  n"  -Jl,  en  la  donnant  poui-  ombrienne. 
Dans  les  additions  et  corrections  du  même  ouvrage  (p.  88),  un 
scrupule  l'a  pris  à  juste  litre  sur  celte  attribution  ;  il  se  demande  si 
la  triple  inscription  n'est  pas  punique,  le  lieu  de  la  découverte  de 
la  palère  se  trouvant  sur  le  terrain  môme  de  la  fameuse  bataille  du 
Mélaure,  où  IIa>drubal,  le  frère  d'IIannibal,  périt  avec  son  armée. 

Dans  la  réalité,  les  inscriptions  ou  l'inscription  en  trois  parties 
de  la  patère  d'argent  de  Monliego  ne  sont  ni  ombriennes  ni  puni- 
ques. Elles  sont  incontestablement  ibériennes,  et  elles  nous  otTrent 
même  le  type  précis  d'écriture  des  légendes  monétaires  de  la  région 
qui  c(miprend  les  districts  de  Carthago  Nova,  d'Acci  et  de  Castulo, 
à  l'époque  qui  suit  immédiatement  la  seconde  guerre  punique. 

Il  suilit  pour  le  montrer  de  reproduire  la  triple  inscription  : 

A.  —  Sur  le  bord  du  vase  : 

AI$/<^A^^/^</^ABtC 


Ii2  RKVUK   .MlCIIKoi.di.lurK. 

H.  —  A  rmlt'ritMir.  sur  l.i  },miic1u'  du  spci-talfur  : 
("..  —  A  l'iiUrriiMir,  sur  l.i  ili-oile  : 

On  sait  comliion  jusi]u'ici  sont  rares  It^s  nmiuiinoiils  cl(>  l't'pipra- 
jiliic  iliôrienne,  en  dehors  de  la  nuinisinali(jue,  et  coudiieii  le  dé- 
cliifTremenl  jnômeen  est  encore  douteux  cl  peu  avancé.  Je  ne  pré- 
tends pas,  dans  cet  élat  des  éludes,  ;i  autre  chose  (jue  signaler  à 
ralleniiun  de  ceux  ijui  s'occupent  de  senihlalile  matière  les  inscrij - 
lions  de  la  patère  de  Monlicgo,  sans  en  tenter  nue  interprétation, 
ni  même  une  lecture. 

Je  me  bornerai  à  remaniuer  que,  si  l'on  adopte  l'alphabet  de 
M.  Zobel  de  Zangroniz,  le  dernier  et  jusqu'ici  le  plus  satisfaisant 
(jui  ait  été  donné,  on  aura  les  transcriptions  : 

A.    —  d.  I.   ^.   i.  1.(1.  I.  r.  i.  I.r.  i.  1,(1.   h.  h. 

lî.  —  /.  ■*.  i.^.  s'.  h(i.  a.  :'.  i. 
('..  —  r.  :'.  e.  r.  r'.  s\ 

Les  inscriptions  de  la  patère  do  iMontiego  étant  ainsi .  reconnues 
pour  ibéricnnes,  point  de  doute  possilde  que  la  tombe  où  l'on 
trouva  ce  vase  de  métal  ne  fut  celle  de  l'un  de?  oHiciers  de  l'armée 
il'llisdrubal,  car  nous  savons  par  les  écrivains  anciens  que  celte 
armée  se  composait  princip.demeiit  d'Kspagnols  et  ilc  (iaulois. 

rnA.\(;ois  lk.nokm wr. 


LAOCOON  ET  LE  GROUPE  KATIIÉNÂ 

A  LA  FUISE  DE  PERGAME 


I 

PEUGAME  A  VOL  D'OISEAU. 

Les  ruines  de  l'acropole  de  Pergame,  en  Asie  Mineure,  couron- 
nent une  haute  colline,  située  à  cinq  lieues  du  petit  port  de  Dikeli, 
et  frangt'e  à  l'ouest  par  le  Sélinos,  ù  l'est  par  le  Kùlios,  deux  llcu- 
vesqui  l'enveloppent  de  leurs  méandres  et  semblent  vouloir  séparer 
de  la  phiine,  où  s'agite  la  vie  moderne,  la  résidence  aujourd'hui  si- 
lencieuse et  déserte  des  anciens  rois  Attales. 

La  ville  actuelle  de  Bi'rgdtna  s' élendâu  pied  et  au  sud-ouest  de  cette 
montagne,  dont  les  lianes  s'abaissent  en  penle  douce  de  ce  côté,  tan- 
dis qu'ils  tombent  presque  à  pic  au  nord  et  à  l'est  dans  les  eaux  du 
Kétios. 

La  citadelle  de  Pergauie  a  Ole  l'objet  de  deux  expéditions  scien- 
tiliques  ducs  à  l'initiative  de  M.  Charles  Humann. 

La  première,  commencée  eu  1878  et  terminée  au  printemps  1880, 
amena  la  découverte  des  fondations  de  l'autel  de  Zeus,  orné  de  celte 
frise  énorme  qui  représente  la  Gigantomachie  ou  le  combat  des 
dieux  et  des  géants. 

Quatre-viftgl-dix-sept  grandes  plaques  de  marbre  ou  bas-reliefs 
de  cette  frise  ont  été  retrouvés  dans  la  première  expédition.  I„i 
hauteur  de  ces  moiiumenls  esl  de  2"',;30  el  ils  forment  une  lon- 
gueur totale  de  i;{')  mètres.  Ils  occupent  aujourd'hui  une  partie  de 
la  rotonde  et  toute  l'ancienne  salle  assyrienne  du  Musée  de  Berlin. 

ALIV.  —  3 


:\t  ll<  \  l  i:    Mil  IIKdl.iM.lnl  K. 

Lcsdi'iails  de  celle  |»remii'»iv  cimpatîno  sont  suffisiiimiieiil  connus, 
en  sorte  i|u'il  o>\.  innlile  île  ••.•venir  ici  sur  ce  (|iie  djiulres  ont  iléjà 
ilil.  Mais  nous  avons  sous  les  yeu\  les  plans  de  la  dernièfi.^  expëili- 
tion,  commencée  au  mois  d'aoïU  1S8(>  et  terminée  à  la  lin  d'oclobro 
18SI.  C,oml>inés  a\ec  les  résultats  des  fouilles  précédentes,  ccf<  nou- 
veaux dociimenls  nous  permellroiil  de  tracer'  pour  la  première  fois 
la  silhouette  de  Per^amctidle  (juVIle  se  dressait  imi)Osante  au  temps 
de  sa  plus  jrrande  sjdendeur. 

Un  chemin  (pii  longe  en  zit^zai,'  le  liane  sud-csl  ih'  la  monlagiuî 
conduit  de  la  ville  moderne  de  Hergama  à  la  première  enceinte  des 
fortilicalions.  C'est  le  point  le  plus  has  de  l'ancienne  acropole. 

Là  s'élevait  autrefois  un  gymnase  romain,  dont  on  a  retiouvé  dix 
colonnes  en  mnrhre  bleuâtre  et  de  style  romano-roiintliien. 

Plus  haut,  c'est-à-dire  à  -2^\2  iiiMîcs  au-dessus  de  la  mer,  nous 
rencontrons  un  f,TOs  mur  li\/..iMiin.  Sa  largeur  est  de  A  à  G  métrés 
sur  une  hauleur  de  ."{  mélres  seulement  au-dessus  du  sol. 

Ce  mura  élé  consiruil  avec  des  colonnes  et  des  has- reliefs  de  la 
fri.>e  du  grand  autel  de  Zeus  et  il  traverse  en  ligne  hriséc  loiil  le 
dos  liela  c(dline.  I.e  moilier  (jui  recouvrait  ces  précieux  fragments 
a  élé  fahii(iué  avec  de  la  chaux  tirée  des  marbres  anluiues.  La  dii- 
relé  exceptionnelle  de  ces  matériaux  a  seule  pu  con^^erver,  ajjrés 
tant  de  siècles,  celle  frise,  la  idus  grande  de  toutes  celles  ((ui  sont 
parvenues  de  l'antiiiuiic  jusiiu'à  nous,  et  dont  le  style  doit  faire 
l'objet  de  notre  étude. 

Si  nous  nous  reportons  à  une  époiiue  où  le  murbyzanlin  n'avait 
pas  encore  englouti  dans  ses  lianes  les  richesses  de  l'acropole,  un 
voyageur  du  monde  ancien,  arrivé  à  li  hauteur  île  cette  construc- 
tion, eùl  apert^u  au  premier  plan  une  large  esplanade,  ouverte  à 
rouesl  et  dominant  la  plaine  et  la  mer.  Au  centre  de  celle  icrrasse 
l'autel  de  Zeus,  avec  sa  base  massive  et  sa  frise  longue  di'  iOd  pieds 
sur  une  haut'iur  de  2°',:{(),  eût  d'abord  attiré  scn  regards  et,  plein  de 
véqéralion  pour  celte  œuvre  colossale,  il  eût  peiil-éire  songé  au 
mol  d'IIésiode  :  U  Aiô;  àp/tôaeOa,  et  murmuré  i|Ut  |,|ue  hymne  en 
l'honneur  île  l'olympien. 

Si,  après  avoir  leriiiiué  sa  contemplalion  pieuse,  il  se  fi"il  ensuile 

1.  Nou*  le  faiKons  pour  rfinrltro  dans  jour  rudrc  les  cliprH-il'dMivrc  doiil  nous  vou- 
lona  nous  occiifur  Pl  pour  Aire  ngréubie  aux  licteur»  de  la  Itriur  nrrMotDfjufue  qui 
n'diiraicDl  pas  le  loisir  de  feuilleter  le»  vohunc»  ptibliOs  pur  l'Académie  royale  da 
Berlin. 


i,R  LAOCOON  i:r  i.K  r.noui'E  dathkna. 


3.1 


tourné  vers  le  nord,  son  (ril  en  s'élevant  n'tnU  cnlrcvu  qu'une 
succession  de  nioninnenls,  do  porlinues,  de  leniples  éf,'ren;uïl  à 
perle  de  vue  d.ins  l'air  hicu  leuis  [irrislvles  de  marbre  bhnr. 


f\'"y 


.5 


,r^=^ 


T^-: 


^^fe^ 


L'auiel  de  Zeus  à  Pergamc. 

D  ins  ce  panorama  ainsi  déroulé  on  aperçoit  sur  une  première  es- 
planade la  place  publique  louî  élincelanle  de  groupes  de  combat- 
tants d'airain  cl  de  marbre,  monuments  élevés  en  souvenir  des  vic- 
toires d'Attale  I"  et  d'Eumcnès  II  sur  les  Gaulois  et  sur  Antiocbos 
Iliérax '.  tout  animée  de  statues  de  dieux,  de  rois,  de  reines,  de 


t.  Plures  arlifices  feceie  Atta/i  et  Eumenis  ntlvcrsus  Gnlio^  praitin,  Isigonu^^ 
PhyromadittSy  Stratnnicus,  Aitliyonus  (Pline,  XXXIV,  894).  En  comparant  avec 
ce  pas-agc  de  Pliiiu  nue  inscri|iiion  trouvée  \  Pergame  on  1879  cl  publiée  par 
M.  Conze  (cf.  Die  Enjeùn'Sie  der  Ausyrnljunyen  zu  Pergnmon,\,  p.  8^,  ISSO), 
on  ne  peut  douter  de  l'existence  de  ces  groupes  sur  la  place  publique  de  Pergame. 
Les  récentes  fouilles  de  18S0-1881  ont  fait  trouver  les  bases  et  les  inscriptions  de 
ces  monuments  sur  la  place  que  j'indique,  devant  le  portique  d'Atliéna  Polias.  Les 
traces  laissées  sur  queUiues  bases  montrent  que  les  statues  quelles  supportaient 
étaient  d'airain.  Ceci  est  d'accord  avec  le  fait  que  IMine  parle  de  ces  chefs-d'œuvre 
de  l'ergame  dans  son  livre  sur  les  artistes  qui  travaillaient  l'airain.  On  sait  qu'At- 
tale  pf  avait  envoyé  à  Athènes  des  groupes  représentant  sa  victoire  sur  les  Gaulois, 
et  celles  des  dieux  sur  les  géants,  des  Athéniens  sur  les  amazones  et  sur  les  Perses  à 
Marathon.  Ces  groupes  étaient  sans  doute  des  répliques  do  ceux  de  Pergame.  Brunn 
a  démontré  qu'une  série  de  statues  prises  autrefois  pour  des  gladiateurs  (ainsi  le 
gladiateur  mourant  du  Capiiole,  le  groupe  des  (jauluis  de  la  villa  Ludovisi,  différen- 


'M\  HK.VL'K    AlU.lIKOl.Oliigi  K. 

pnMrvssfS.  (l'alliliMos  (M  d'amazoïu's,  ri  lionli'o  ;ni  nord  et  à  l'est 
par  lo  gracieux  |inriii|iie  d'Atliéua  Polias, '  iloiil  la  K'"»'»'''*'  siipê- 
rit'ure  inonln»  «Miiif  ses  colonnes  ioniques  uiu'  haliisliadede  iiidilire 
orniV  do  Iropln-cs  d'ainics  en  ndicf -.  A  Kanclic,  le  sancluaire  d'A- 
lluMia  Pidias  h'iiniiic  1 1  plafc,  ol  plus  haut,  dans  le  fund.  sur  une 
troisii''ine  lfiia>si',  rAii^:usi(Miin  suspend  à  l'horizon,  ciMnine  une 
draperie,  si's  ^Mandes  colonnes  rcirinlhiennj's. 

Mais  ce  n'est  pas  le  dernier  éta^e  de  cel  escalier  de  i^i-anls.  Une 
quatrième  esplanade  s'enlève  à  .'{1)8  mètres  au-Jessus  de  li  nn-r.  Là, 
sur  la  dernière  somniilè,  ;\  la  Innil.*  extrême  du  terrain,  se  dresse 
encore,  comme  un  dèli  jeté  à  l'espace,  le  leuiple  de  Jiilnt  '  surplom- 
bant le  précipice  (|ui  sahîme  à  ses  pieds  dans  les  eaux  du  Kèlios. 

Aujourd'hui  il  nVne  sur  ce  point  èlevè,  (roù  l'on  aperçoit  les 
contours  durs  (|ue  les  forêts  de  pins  du  mont  Tfmmis  dessinent  au 
loin  >ur  le  ciel,  un  silence  imposant,  un  calme  iilvllhiue,  et  le 
peuple  a  appelé  cel  emidacemenl  :  le  Jnrdin  de  la  lleiiic. 

Telle  était  cette  Pergame,  oubliée  pendant  lanl  de  siècles  sur  sa 
montagne  solitaire,  el  (jue  les  récentes  fouilles  des  Allemands  nous 
ont  permis  de  restaurer  dans  ses  grandes  lignes.  Les  travaux  ijui 
ont  remué  celte  terre  anlitjue  de  187*.)  à  1881  ont  employé  une  ar- 
mée d'ouvriers  (jui  s'est  élevée  parfois  justiu'à  cent  vingt  bouinu's. 

Le  lerrain  sur  lequel  ils  ont  opéré  s'étend  du  temple  de  Julia 
jusqu'au  mur  byzantin  el  comprend  un  espace  de  7o,()J{)  nuHres 
carrés,  dont  la  moitié  environ  a  été  profondément  fouillée  dans  tous 
les  sens. 

Les  résultats  de  la  seconde  expédition  oui  été  moins  brillants  que 
les  succès  de  la  première.  Celte  seconde  cam[iagne  a  amené  surtout 
la  découverte  des  fondations  de  ce  temple  d'Alhéna  Polias  dont  j''ai 
jiarlè  plus  haut,  de  la  place  pubiiiiue,  de    l'.'K  inscriptions  donl 

tp»  fitalufs  do.  Paris  (voyez  Ciaric,  }tus.  (ht  xciii/.t.,  pi.  l'HO,  810  A.  838  8,858,  859, 
868,  871,  872,, de  Napics  i.Mus.  lim-hon.,  Vl.lav.  7,  n"  2/4),  d«  Wiiisp,  soiil  desdau- 
luis  dfHacln^»  «les  groupes  d'Altalu  1"  (llriinD,  Anfina/ogiscfif  /eiltuig,  180<.i,  p.  17). 

1.  i>.  porii^iue  a  éié  restauré  par  M.  Hohii,  d'apn-s  IcsTniK'"''"'»  fl  '•'•'»  fondations 
trouvC-ft  a  l'erKanic  en  1881  (voyez  Du:  llnji-hni^se  tler  Aus;/ra6unijen  zit  /'.,  Il, 
p.31y. 

2.  Un  i^rand  nombre  de  ces  tropla'is  onl  l'ir  n'trmivt's  rn  IKSl.  Une  pliototvpio 
qui  ornf  l'ouvrajje  que  ji;  viens  de  citer  peut  en  donner  une  idée. 

.3.  Fille  d'AuKUftte.  Kn  187U,on  a  nirouNé  dans  un  mur  l'architrave  do  ce  temple 
portant  les  K^ies  de  soixante-tii  colonnes  doriqui-s,  de  O'n.OJ  do  diani^ini  el  à  vingt 
cannelure.1.  Une  inscripiion  donl  l'iuiprcssioti  s'étail  consrrvée  dans  le  ujoitirr  a 
permis  4  M.  LolliuK  d'y  recuunalire  l'arclairave  du  lemple  de  Juiiu. 


1,1'  r.vocooN  F.T  i.F.  ciKiri'i:  ii'Arm'.w.  37 

quoliiiiis-unos  in(li(|uont  ijiK^U  claiont  li's  t,'rnii|H'>  ilo  slaliios  ol  les 
monumcril.;  dont  ell(!  clait  ornée,  cntin  du  gnnd  [)ortii|iie  f[ui  In 
bordait  au  nord  et  i\  l'est.  Les  fr.i{(menls  de  celte  constrnclinu  ouf 
èU\  relroiivi's  en  assez  f^rand  nonilire  poui-  jx-riiiellr*!  de  la  resiau- 
rei' en(i(''renieril.  Nous  siL,Miai()iis  à  ralleiilioii  des  ér;jdits  les  has- 
reiiefs  de  la  haliislradc^  (|iii  oiiiaietil  la  {galerie  supérieure  de  ce 
porliijiie.  Lee  deriiiéics  fouilles  oui.  uns  à  jour  virii^t  plaipies  de 
marhic  appartenant  à  ('(^lli!  baluslraiN;  et  représenlanl  dr.s  trophées 
d'armes.  Il  y  a  là  tout  un  arsenal  ipii  pourra  servii- ;\  l'élude  des 
enp:ins  de  gueri'c  dans  raiilii|uité. 

Parmi  les  enriosilés  les  plus  intéressantes  de  la  dernière  expédi- 
tion il  l'aut  signaler  une  statue  colossale  d'Atliéna  liaulc;  de  S^jOO, 
mais  malheureusement  mutilée.  Sa  pose  reproduit  exactement 
celle  de  l'AHnna  récemment  exhumée  du  Varvakéion  à  Athènes 
et  qui  avait  été  la  cause  de  ce  télégramme  bellii]ueux'  dont  tous 
les  archéologues  d'Europe  ont  sans  doute  gardé  le  souvenir. 

La  statue  trouvée  à  Pergamc  est  donc  la  troisième  répli(iue  de 
l'Alhéna  l'arthénos  de  Phidias,  et  elle  confirme  une  fois  de  plus  la 
belle  découverte  de  Lenormant,  dont  l'œil  exercé  sut  reconnailre 
sous  l'ébauche  pres(jue  infoi'me  conservéL'  au  temple  de  Thésée  tous 
les  (rails  du  chef-d'œuvre  de  Phidias. 

En  effet,  ces  répliques  qui  apparaissent  successivement,  comme 
pourfaii'e  lapieuve  de  l'hypothèse  avancée  par  Lenormant,  atles- 
lenl  la  haute  valeur  de  l'original  qui  leur  scivait  de  modèle. 

Nous  laissons  de  côté  un  grand  nombre  de  statuettes,  de  frag- 
ments appartenant  aux  groupes  qui  ornaient  la  place  publique,  et 
nous  terminons  celle  revue  rapide  en  mentionnant  la  découverte 
d'une  Giiimitomachie  plus  petite  que  celle  qui  avait  été  exhumée 
de  1870  à  18S0. 

Les  deux  fragments  retrouvés  de  cette  petite  fri?e,  haute  seule- 
ment de  0'",S8  et  dont  la  destination  est  inconnue,  repré^entenl 
Zeus  el  Aihéna  dans  une  pose  absolument  ideiilii|ue  à  celle  (ju'ils 
ont  sur  les  grands  reliefs. 


1.  Le  31  décembre  1881,  le  maire  d'Athènes,  M.  D.  Soutzo,  lançait  lad 'pèche  sui- 
Tarite  :  «  Annonçons  iieureuse  nouvelle  :  au  moment  où  toute  la  (Irèce  est  sous  les 
armes,  venons  de  trouver  statue  magnifique  et  complète,  chof-d  œuvre  de  Phidias, 
Minerve  victorieuse.  Prévenez  archéologues.  «  On  se  rappelle  qu'il  s'agissait  d'une 
réplique  de  l'Atliéna  Parthénos,  d'une  statuette  haute  de  Q^fiô  seulement,  mais 
d'une  grande  finesse  d'exécution. 


:IS  nKviK  Anr.iii-oi.oc.iQri:. 

('.ftltMlt^rouvorlc  ronrinnc  l,i  liante  iiniiorlan»'»»  '  (pic  nous  .wions 
iloiuK'»'  à  ces  }jrt>u|M'>  dans  la  i^'iamli'  frise,  |iiiisi|iril  appaialt  iiiaiii- 
liiianl  ijirils  Servaient  tic  mode''  es  déjà  dans  ranliipiilc,  à  l'erj^'aine 
même,  qui  cependant  n»'  dcvairpas^^lrc  pauvie  en  orijjinaux  dignes 
d'cMre  copiés. 

Comme  on  le  voit,  c'est  tout  un  mnnile  d'anliquilcs  (jue  la  vieille 
terre  de  l'ergame  vient  de  rendre  aux  vivants.  Nous  croyons  (pie 
les  sculptures  de  la  frise  du  f,Man(l  aulel  de  Zens  sdiit  destinées  h 
compléter  et  à  modifier  la  connaissance  (pic  nous  avions  du  style 
grec  ;\  l'épotpie  des  successeurs  d'Alexandre. 

l'Iusieurs  représentants  de  cette  période  (jui  s'étend  de  iiOU  à  42 
avant  notre  ère  sont  connus  de  tous.  Ce  sont,  pour  ne  nommer  ciue 
les  principaux,  le  groupe  des  guerriers  gaulois  de  la  villa  Ludovisi, 
le  (iaiiluis  mourant  du  Capitole  ',  TApollon  du  Htdvédérc,  l'Xrlémis 
de  Versailles,  le  groupe  du  Laocoon  cl  le  groupe  dit  du  Taureau 
Farnésc. 

Mais,  en  archéologie,  comme  dans  tous  les  domaines  scientifiques, 
il  est  bon  de  s'élever  des  objets  les  mieux  connus  à  ceux  qui  le  sont 
moins. 

C'e>t  donc  le  groupe  du  Laocoon  (pii  sera  le  point  de  départ  de 
nos  recherches.  Ce  clicf-d'œuvre  a  été  l'objet  de  nos  préoccupations 
longtemps  avant  ces  fouilles  de  Pergame.  (jui  nous  fcMout découvrir 
peut-être  sa  véritable  origine.  Nous  voulons  résumer  d'abord  les 
spéculations  des  philosophes,  des  artistes,  des  hi>toriens  auxquelles 
il  a  servi  de  thème,  et  l'éclairer  ensuite  de  la  lumière  nouvelle  qui 
nous  vient  éclatante  des  rives  de  l'Asie  Mineure. 

Nous  dirons  donc  adieu  pour  (juchiues  instants  à  l'antique  rési- 


1 .  Voyez  ma  précédente  lirocliurc  :  Li  frise  ilc  l'err/ame  et  le  groujn-  du  Laocoon; 
Geni-ve,  1881  clii-z  Julien  fntL-res,  éditeurs).  J'ajoute  <|iiela  date  (piej'uvais  adoptée 
pour  l'époque  à  luqueiii;  il  taut  lixer  la  création  de  cette  (cuvre,  soit  le  rèjriie  d"liu- 
uièDcs  11  (197  à  lO'J  av.  J. -<;.),  u  été  égaieinenl  contirinée  par  les  récents  Ira- 
vaux. 

1.  Certains  Voyages  en  Italie,  dus  aux  première»  plumes  de  France,  appellent 
eocorc  ce  chef-d'œuvre  le  Gladiateur  mourant.  C'est  bans  doute  par  respect  pour 
l^rd  Ilyron  <|ui  l'a  cliunté  sous  ce  nom-là.  Mais  il  serait  tem|)s  de  voir  dispiraltro 
de  notre  liilérulurc  ces  erreurs  qui  la  déparent  et  qui  fini  snurirele.*  étrangers  que 
leurs  (jlude»  ont  conduit  à  (iiTord,  S  lli-rlin  ou  à  Doun.  iJ'aillenrs  la  vérité  est  su- 
périeure àla  Action.  Le  Gaulois  mourant  du  (Capitule  est  le  Traire  uliié  di;  lti>land, 
mon  à  Honccveaux.  C'est  la  représentation  urecquf  d'un  de  ces  licrs  gaulois  qui 
firent  trembler  l'Italie,  la  Grèce  cl  l'Asie  Mineure,  1!0U  uns  av.  J.-(;.  (Juelle  pagî 
pour  un  auteur  français  ! 


i,i:  i,\r»rn()\  r.r  i  i:  (Wkh  ci,  ii'\iiir\\.  39 

<l('iici'  (l(K  rois  Atl.'iliN   et  mms  nous    (■iiilririiiii'nui^  :i    hikdi   (lour 
(•('ll(ï  île  lie  IUkmIcs  i|iii  lui  l.i  piliic  t\r>.  .iiilcms  «lu  l,;i()C(i(>ii. 


Il 


Li;  [.\OC0O\  DU  VATICAN  EST-IL  UNK  COI'IK  OU  INK 

Œuvni-:  oiUGiNALi; .' 

L(j  t,Muii[)i'  ilu  L;iO(;()on,  nclui-ilciiicnt  ;iu  Valicaii,  a  été  Lroiivr  cii 
iriOd,  snus  le  ponlilical  (1(3  Jules  II,  à  Homo,  sur  le  mont  Esqiiiliii, 
dans  l(!s  ruines  du  i)alaisde  Tilus  conli,i,ni  à  ses  thornii'S. 

Voilà  tout  ce  (jue  nous  savons  de  certain  >urrori,t,nne  de  ce  groupe 
si  renommé.  Aucun  poète,  aucun  critiiiue,  aucun  historien  de  l'an- 
ti(iuit(!'  ne  nous  donne  quelipie  renseii^rncment  sur  celte  œuvre,  à 
l'exceplion  de  IMine  dans  son  WW!"^  livre  (sccl.  1,  p.  730). 

Ce  (|ui  doit  le  plus  nous  frapper,  c'est  peut-ôlre  cette  indilTércnce 
de  la  critique  ancienne  pour  une  (puvi-e  pareille.  De  tous  ces  écrits 
des  Grecs  et  des  Romains,  quatre  lignes  de  IMinc  seulement  sont 
consacrées  h  tirer  de  l'oubli  les  noms  des  sculpteurs  du  Laocoon.  L'o- 
riginal avait  été  enlevé  de  Rhodes  pour  être  transpoité  à  Rome. 
Mais  cette  ville  était  devenue,  sous  les  empereurs,  comme  un  enlre- 
pôt  de  chefs-d'œuvre  ramassés  aux  quatre  coins  du  monde;  au 
milieu  tl'un  pareil  entassement  les  plus  belles  œuvres  devaient 
passer  souvent  inaperçues.  La  satiété  produisait  l'indilTérence;  en- 
lin,  comme  le  dit  Pline,  les  Romains  avaient  bien  d'autres  préoccu- 
pations. 

Pline  fait  cette  réflexion  à  propos  de  la  Vénus  de  Scopas  qu'on 
voyait  à  Rome  dans  le  temple  de  Mars:  «  Elle  est,  dit-il,  digne  d'il- 
lustrer toute  autre  ville.  Mais  à  Rome  elle  est  écrasée  par  la  gran- 
deur des  œuvres  qui  Tentourent,  et  le  surcroît  des  charges  et  des 
affaires  détourne  les  citoyens  de  la  contemplation  des  chefs-d'œu- 
vre. En  clïet,  une  telle  admiration  demande  des  hommes  de  loisir 
et  il  lui  faut  le  plus  grand  silence  autour  d'elle.  » 

Nous  devons  donc  nous  contenter  des  quelques  lignes  de  Pline 
dont  voici  le  texte  •  :  «  Le  Laocoon  et  ses  enfants  et  les  merveilleux 
enlacements  des  serpents  ont  été  faits  de  consilii  m'iitcntia,  d'un  seul 


1.  «Ex  uno  lapide  oum  et  liberos  draconuniquc  mirabilcs  noxus  de  comi/ii  sen- 
teiitio  fecere  àummi  artifices,  .Agesander  et  Polvdoros  et  Atlianodoros  Rliodii   >» 


40  nKvrr.  Am m'oLociorK. 

bloc  de  inarbrr,  par  les  plus  grands  arlisles,  Ag/^sandre,.Polydore  el 
Atlianodore  de  Hliodis,  »> 

Celle  premit're  nolii'i-  esl  tn's  reilainenicnl  l'iionèe  en  co  (|iii 
concerne  l'exemplaire  du  Valiran,  Bien  loin  d'("^lre  d'un  seul  hloc 
de  niarlire,  le  groupe  du  Valu-an  e-^l  composé  de  plusieurs  morceaux. 
Michel-Ange  vu  r.  coiinaissail  trois,  Kapliaël  ciinj,  Pelii-Hadel  six, 
et  le*  arcliêologues  aduielleiit  tous  aujounTliiii  ipie  je  Laoconn  esl, 
en  effet,  fitrmt''  de  six  partie^  dilTércnles. 

Cel  argument  était  le  jtliis  imporlaiil  de  lnus  ceux  (pi'on  év()(|uail 
avant  la  déeouverte  de  Pcrgame  contre  roriginalilé  du  groupe  du 
Vatican.  Cependant  il  n'était  pas  absoluinenl  concluant'.  Les  mor- 
ceaux dont  le  Laocoon  est  composé  sont  réunis  avec  tant  d'art  qu'il 
est  diflicile  de  reconnaître  leurs  points  de  contact.  On  supjiosait 
donc  cjue  Pline  avait  pris  l'apparence  pour  la  réalité,  ou  (|u'enlrainé 
par  le  ton  de  déclamation  (]ue  respirent  les  lignes  de  cel  auteur  il 
avait  osé  dire  (pie  le  clief-d'ceuvre  de  Rliodes  était  taillé  dans  un 
seul  bloc  de  marbre    b.en  qu'il  ne  le  fût  pas. 

On  a  encore  invoqué  contre  l'originalitédii  monument  du  Vatican 
le  fait  que  ce  groupe  n'a  pas  été  exhumé  de  l'emlioil  où  l*line  nous 
dit  (ju'onle  voyait  de  son  lemiis. 

l)'aprés  Pline,  le  groupe  se  trouvait  dans  le  palais  de  l'empert-ur 
Titus  sur  IKsijiiilin,  tandis  ipic,  selon  une  légende  souvent  ré[iétùe, 
le  groupe  du  Vatican  aui;iit  clc  trouvé  dans  les  thermes  de  cet  em- 
pereur. 

On  va  môme  jusqu'à  montrer  aux  vovageuis  crédides  la  (•h:imbr(^ 
el  la  niche  où  le  groupe  du  Laocoon  a  dû  se  voir  autrefois.  Les  in- 
venteurs de  ce  petit  conte  n'ont  pas  remarqué  (pie  la  niche  dont  il 
s'agit  t'st  beaucoup  truj)  [)elite  et  n'a  jamais  pu  contenir  b;  chef- 
d'œuvre  du  Vatican.  D'autres  écrivains  contempoiains  de  la  décou- 
verte du  Laocoon  disent  (|u'il  a  été  trouvé  dans  les  ruines  mêmes 
(\i\  palais  (Je  Titus,  et  c'est  aussi  cet  'jinplacemeni  (pii  parait  le  plus 
probable. 

Ceux  (pii  nient  l'oiiginalilé  du  groupe  du  Vatican  (Uil  dit  encore 
(pic  ce  monument  ne  porle   pas  d'insiription.    Les   grands   arlisles 


1.  Nous  citons  loim  c<'R  nnciorm  nrpuinrnt»  pour  dc^montriT  rinccriiludo  où  l'on 
était  Jusqu'à  prd'M-nt  au  siijia  de  l'originalité  du  Kroii|><;  du  Vaiican.ui  l'importance 
de  la  comp.ir«iv)n  de  c»'tiH  tniivro  avic  lu  frist;  de  l'i-rgami',  ^ui  n-nl  cette  origina- 
lité d<;  plu»  en  plu»  doulcuRf.  (Voyer  plu»  bas  p.  45.) 


LR    I.AOCOON    F.T    I.R    r.[tf)rPK    I>'\Tlirv\.  41 

grecs  .'ivait'iil  l.i  rfiiiliiiiic  de  sii^iin-  Ifturs  stntiics  ilc  Iciii-  iinni,  et  il 
piMil  [>;ii;iiln' (ixlr.iordin.iiic  ([ik;  les  coiiiiiosilciiis  d'iinc  rcuvic  aussi 
iinpoilaiilr  (|iHî  lo  Laocooii  aient  ii(\L,MiL,'é  roltc  loi-iiialilé  dcsliti/'o  a 
les  sauver  de  l'onlili. 

La  cnrmaissaiice  iiiiparfaile  (|up  l'on  avait  do  ré[ii!jrapliie  a  élé  la 
cause  (le  plus  d'unt;  eiccMii"  dans  les  cecherciies  (pii  ont  élé  faites  au 
xviii"  sié('le  sur  lesauleurs  du  Laocoon.  Winckclnimn  ayant  irouvé 
sur  un  vase  découvnrt  par-  le  carilinal  Alexandre  Alhmi  en  1717 
l'insciiplion  suivantes  : 

AOANOACOPOI    ArHIANAPOY 
POAIOl     EnOIHIE 

il  en  ronclut  avec  l'aison  qu(;  cel  Allianodore  que  Pline  met  au 
nombre  des  auteurs  du  Laocoon  était  le  (ils  d'Agésandic.  Celaient 
donc  le  père  et  le  lils  qui  avaient  Iravadlé  au  groui)e  ilu  Laocoon,  et 
Polydore  faisait  sans  doute  aussi  partie  de  la  même  famille.  Mais 
Les^ing  fit  remarquer  (|ue  la  forme  donnée  à  l'inscription  «lu  vase 
mentionné  par  Winckelmann  ne  pouvait  pas  remonter  au-delà  de 
l'époque  d'Auguste'.  Il  résultait  de  celte  observation  qu'Agésandre 
et  ses  fils  avaient  vécu  sous  les  empereurs,  peut-être  môme  sous 
Titus,  et  que  le  groupe  du  Laocoon  avait  été  créé  a  une  époque 
beaucoup  plus  récenie  que  cel'e  indiqu^'-e  par  Winckelmann. 

Mais  on  sait  maintenant  (jue  rien  n'est  plus  commun  que  des  ins- 
criptions sur  vases  copiées  par  des  artistes  plus  modernes. 

Les  sculpteurs  de  la  décadence  ne  se  contentaient  pas  d'imiter 
l'œuvre  des  maîtres,  ils  copiaient  aussi  servilement  l'inscription,  seu- 
lement il  leur  arrivait  alors  de  commettre  des  erreurs  dans  le 
genre  de  celli.'  (ju'a  signalée  Lessing  et  qui  inilii|nent  l'esprit  de 
leur  temps. 

Celle  inscription  de  Winckelmann  ainsi  que  trois  autres  analo- 
gues se  trouvent  étie  des  copies  dues  à  l'époijuc  des  empeieurs,  et 
ne  sauraient  rien  nous  apprendi'e  sur  la  date  à  iaiiuelle  le  Laocoon  a 
élé  sculpté. 

Plus  iinporlanle  est  une  inscription  trouvée  à  Rhodes  sur  le  pié- 
destal d'une  statue  élevée  à  Allianodore,  llls  d'Agé>andre,  pour  les 
services  rendus  à  la  patrie  et  à  la  religion. 


\.  Selon  Lessins;,  les  artistes  grecs  jusqu'à  Tépoque  de  Lysippe  auraieut  employ<^ 
la  forme  plus  modeste  £::otït  (faciebtit)  et  non  pas  iT^a^r^nz  [fecit). 


•i-  ii!'Vi  F.  Anr.iir(»i.in;ion :. 

('iMlo  iiiiîrriplion  di'  lUiodis  nVst  pas  nue  coiiic,  v'o^l  un  iÎoimi- 
nirni  pivcioux,  Innjvt'  d.insla  patrii»  ui("^mc  di;  nos  sculptoiirs,('i(|iii 
nous  indique  qu'Atlnnodoir  rliil  Idcn  le  fils  d'Aj(''>nndn'  cl  i\\\o 
(h's  troiN  ai  lislos  nicntinniii's  par  Pline  ('*i'lail  sans  doiili'  Alliaiia- 
(lore  qui  avait  Ip  plus  de  renoininèe,  puisqu'on  avait  élevé  une  sla- 
lue  en  son  honneur. 

Tout  cela  ne  nous  explique  pas  pourquoi  le  f,Moupe  du  Vatican 
ne  porte  jtas  linMriplion,  ti^-nature  liabiluelle  des  artistes  grers. 

Il  est  à  eroire  que  le  ijioupe  du  Laoroon  a  été  eoin|»osé  long- 
temps avant  le  rè},'ne  de  Titus,  qu'il  était  ;\  Hliodes  et  (|ue  l'inserip- 
lion  s'y  lisait  sur  un  piédesial  que  les  Komains  ne  jufj'ùreiit  pas 
nécessaire  d'empoi  tei-.  Le  poids  et  le  peu  d'intérêt  d'un  pareil  nior- 
reau  de  inarhre  suflisent  pour  expliijuer  comment  on  put  enlever 
1.'  rhef-d'tpuvre  sans  prendre  avec  lui  le  piédestal.  Celte  hypothèse 
cxpliiiue  aussi  pourquoi  les  noms  des  artistes  du  Laocoon  étaient, 
comme  le  dit  l'Iine,  moins  renùinmés  (juc  d'autres.  Ces  noms 
étaient  restés  à  Rhodes  avec  le  piédestal  et  n'étaient  connus  à  Flome 
que  des  initiés  aux  choses  de  l'art. 

Un  quatrième  cl  dernier  argument  dont  on  s'est  servi  pour  étahlir 
(jue  le  chef-d'œuvre  du  Vatican  n'est  pas  l'original  est  qu'il  existe 
des  copies  fragmentées  du  groupe.  On  a  dit  que  telle  de  ces  copies 
était  meilleure  (lue  INeuvre  originale  du  Vatican.  Tel  fragment  pa- 
raît supérieur  à  la  parlie  qui  lui  correspond  dans  le  groupe  de  Home. 
Mais  on  n'ajamais  prouvé  (jue  cette  prétendue  supériorité  existât 
réellement.  Les  copies  du  groupe  du  Laocoon  appartiennent  géné- 
ralement h  une  époijue  beaucoup  plus  récente  que  l'exemplaire  du 
Vatican  et  quehjues-unes  même  ne  remontent  pas  au-delà  du  xvi" 
siècle.  Nous  possédons  à  Genève  la  tète  du  lils  aiiié  qui  est  à  gau- 
che du  Laocoon  '.  Celte,  télé,  exécutée  en  marhre  grec,  a  été  trouvée 
à  Home  et  acquise  des  héritiers  du  sculpteur  Tcnerani,  (]ui  la  tenait 
en  grande  estime.  Toutes  ces  copies  ne  sont  pas  d'une  valeur  assez 
considérable  pour  établir  (|ue  le  groupe  du  Vatican  ne  soit  pas  l'ori- 
ginal. 

Ainsi,  aucun  de  ces  arguments  ipie  nous  venon>  d'éiiumérer  n'a 
force  de  loi,  et  nous  pourrions  alliniier  (|ue  b;  groupe  du  Vatican 
est  biirn  le  monument  mi^.me  sorti  des  malus  d'A^jésanilrc;  el  de  ses 
lils  Athanodore  et  l'olydore  de  llhodes,  si  la  fiise  du  l'ergame  n'é- 
tait venue  ajiporter  une  nouvelle  lumière  sur  ce  point.  La  supèrio- 
lilè  avec  laquelle  les  serpents  sont  traités  ilans  toute   cette  frise, 

1.  (.  <vi  i-  II"  i.îii  (|,i  m  I*'"'  I"<'1  à  fjcm'-vo. 


r.i:  lAocoiiN  ir  i.i;  ciidii'i;  h'miii'.nv.  4.'l 

(M  siiiloul  (I.iiis  It!  },M-ou|i('  d'Allirna,  le  soin  de  (oiis  les  détails, 
réliide  de  la  nature  diMics  reptiles  (jui  se  révèle  dans  la  niani?Me 
dont  leurs  (Milareinenls,  leurs  liHes,  leurs  êeaillcs,  leurs  yeux,  ont 
éié  reiiilus,  —  tandis  que  les  serpents  du  Laoeoon  ont  ijuehiui'  clio-e 
d'informe,  do  lourd,  ou  peul-ôtre  même  iVinaclievr,  —  n-inblenl  dé- 
montrer d'une  faeon  presijue  évidente  (pic  le  groupe  du  Vatican 
n'(>sl  pas  l'oriiTinai,  mais  seulement  une  copie  romaine  de  l'œuvre 
des  artistes  <,necs'.  Cette  liyj)otliése  n'empêche  pas  d'ailleurs  d'ad- 
mettre (|ue  roi'ii,Mnal.  comiiosé  peut-être  d'un  seul  hloc  de  marbre, 
eomnie  le  dit  IMiiie.  ait  été  transporté  à  Komc  sans  son  piédestal, 
resté  à  IUkuIcs  s;ins  doute  avec  l'insci'iplion  dont  nous  avons  jiarlé. 
Alais  le  groupe  du  Vatican  n'est  pas  cette  œuvre  oiiginale. 

1.  Notro  prochain  article  sera  accompagné  de  deux  planches  repr<''Sfntant  le 
gronpe  d'Athi'na  ot  celui  du  l^ancoon,  en  sont-  (pi'il  sera  facile  aux  lecteurs  de  la 
Heme  de  constater  ces  dilTérences. 

ADHIliN    WAGNOiN. 

{La  i^tiUc  prochniiirmrnt.) 


1/1 M  MOI!  TV  un:  i)i:  lami: 

r.llKZ   LKS  PKIM'LI'S  SIIMUIOCES 


On  a  pendnnl  lon.slpnips  disent»!  la  queslion  de  savoir  si  les  pou- 
pies  stMiiitiijiies  croyaient  ou  non  à  la  survivance  de  l'ilin»'  aprcXs  la 
mort  lin  corps.  Plusieurs  savants  moItTUcs  se  sont  prononcés  dans 
K' sens  négatif,  s'appiiyanl  surtout  sur  cette  con-idéralion  (pie  les 
écrits  hébreux  antérieurs  à  la  captivité  de  Baliylone  ne  font  aucune 
mention  d'une  pareille  croyance.  D'après  ces  savants,  le  mot  liélireu 
scliéôL  (ju'on  traduit  ordinaiccnient  par  Haies  ou  Ktifer,  nedésii^Mie- 
rait  autre  chose  que  le  toniheau  niénie  où  le  corps  est  dé[iosé.  D'après 
ces  savants  encore,  la  locution  héhraï  |ue:  «il  fut  réuni  à  se<  parents»  : 
ou,  «il  fut  réuni  à  son  peu|ile»,  qui  exprime  que  l'individu  est 
passé  de  la  vie  à  la  mort,  celte  locution  reviendrait  seulement  ;\  dire 
(|ue  l'homme  est  mort  comme  ses  ancêtres.  On  a  encore  invoqué  cet 
autre  f.iil,  (|ue  hs  termes  sémili'iues  pour  âme,  savoir  :  napfipsrli  et 
ruh,  déslirneiit  proprement  \o.  souffle,  l'air  mis  en  mouvement  par  la 
respiration'.  D.uis  un  tnvail  ;ur  l'inscrip'ion  d'Kschmoun-azar  que 
j'ai  lu  à  IWrailémie  des  inscriplions  et  lieUes-leltres  eu  1H7'2,  j';ii  si- 
gnalé pour  la  première  fois  queh^ues  passages  phéniciens  laisaiit  al- 
lusion à  l'imiiiortaliié  de  l'Ame  el  de  plus  à  la  récompense  des  justes 
après  la  mort-.  Cette  proposition,  qui  se  fondait  sur  une  inierpréta- 
lion  piireiiienl  piiihilogique  desdils  p;iFsa},'es,  a  été  l'ohjet  de  vives 
contestations.  Diin  côté,  des  r;ii<oiis  lin}:uisli>iiies  (pii  ne  permet- 
taient pas  de  tiansi^'er;  d«!  l'autre,  raiiloritèdes  consnléialions  plii- 
losoplii(jues  (•(Misacrées  par  Tlicole.  On  aurait  [»u  disculer  em  ore  très 
longtemps,  (|uand,  pour  la  satisfaction  fit?  tniis,    la   lumière   com- 

1.  On  sait  quG  les  torinr»  prcc  et  l.iliri  'J/v//.  fi  niiimn  siRiiiflcnl  aussi  au  propro 
«  p-spiralion  »  el  ■  •oiiffl'^  »  ;   cota  nn  les  a  cependant  paH  rrnpôclK^  de  prendre  dans 

a  ftuitn  un  «eiiit  sb^lroil  cl  iinmat(;riel. 

2.  fiétanrjes  d'rpiijiaphie  et  Wnirlti-ulngie  sémilif/urs,  p.  30-33,  I^i0-ltl3. 


L'iMMdHiAl.lTK    DK    i/aAIK    CIII.Z    I.KS    l'iai'LKS    sr;MHIOLF..S.  A'} 

meiiça  à  venir  d'une  autre  contrée  sémiliciuc,  de  l'Assyrie.  Parmi  les 
lableltes  en  hM'n;  cuite  de  la  l)ibliollu''que  (l'Assoiirl).ini|ial  (|ui  sont 
conservées  au  Musée  ljrilaniii(|tie,  (jeor^;»;  Sinilli  découvrit  (,*n  1H73 
un  doruinenl  inytholo^Mijue  (jui  raconle  la  descente  de  la  déesse  As- 
larlé  [Isclilarit]  aux  enfers  pour  y  chercher  son  amant  Toumou/,  ou 
Tamniouz  (Adonis).  C'était  la  première  description  .luthcntifjut',  faite 
par  les  Sémites  eux-niénies,  de  la  conliijuralion  de  l'Il  idés  comme 
aussi  de  la  manière  d'être  des  morts  qui  l'habitent. 

Sur  le  premier  point,  on  voit  que  les  Assyriens  se  représentaient 
riladés  comme  un  édilice  immense,  situé  au  centre  de  la  terri;  et 
limité  de  toutes  parts  par  les  eaux  bourbeuses  de  l'océan,  qui  recèle 
les  fondements  de  la  terre,  gardés  par  des  génies  {Anouni,.  Le  pays 
des  morts  porte  le  nom  de  «  pays  où  l'on  ne  voit  rien  »  {nuit  lu  tui- 
intiri),  ce  qui  coïncide  avec  le  sens  du  terme  grec  ao-/;ç.  Une  autre  ilé- 
omination  estcellede  «paysd'oii  l'on  ne  revient  pas(maf  la  layarti). 
Le  gouvernement  de  ce  monde  des  ténèbres  éternelles  est  entre  le 
mains  de  iYe?/7/'//,  dieu  de  la  gueire,  et  de  son  épouse  Allât,  S(eu 
d'Astarlé.  La  maison  est  entourée  de  sept  puissantes  murailles.  Dans 
chacune  de  ces  murailles  est  praliijuée  une  porte  urnque,  hiqueile  se 
ferme  au  verrou  dés  (pie  le  nouveau  venu  y  est  entre,  et  est  gardée 
par  un  portier  incorruptible.  Les  morts  sont  dits  se  nourrir  de  pous- 
sière et  de  boue.  Il  s'agit  ici  du  commun  des  humains,  car  on  verra 
dans  la  suite  qu'une  exce[tlion  est  faite  en  faveur  des  justes.  Ce  qui 
dislingue  suiloul  les  morts  des  vivants,  c'est  que  les  premiers  sont 
pourvus  d'une  tunique  ailée,  qui  les  rend  capables  de  se  mouvoir 
avec  une  grande  rapidité.  Nous  faisons  suivre  ici  un  passage  ins- 
tructif qui  contient  toutes  ces  données;  c'est  Astarlé  qui  parle  : 

[Vers  la  maison]  laisse-moi  retourner, 

à  côté  de  moi, 

[Vers  la  maijson  qu'habile  Irkalla, 

[El]  dont  le  soir  n'a  point  de  malin, 

[Vers  le  pays]  d'où  il  n'y  a  pas  de  retour, 

[Dont  les  habitants],  privés  de  lumiiTe, 

[Ont  la  puussière]  pour  nourriture,  la  boue  pour  aliment. 

Une  tunique  à  ailes  [pour  vetejmenl, 

[Ne  voient  point  le  jour],  sont  assis  dans  les  téuùbres. 

[Dans  la  maison]  où  je  veux  entrer, 

1  Demeurent]  les  (anciens)  possesseurs  de  couronnes, 

[Les  p(.a\ leurs  de  couronnes  qui  dominaient  la  terre  aux  temps 

anliijues. 
Dont  Anuu  et  IJel  ont  perpélué  les  nouis  et  la  mémoire. 


.\{]  nEVur.  AHi.nKoi.or.iHiT., 

I,;\  aussi  ont  ùlé  consoliJés  les  fotiJemciils  de  la  lorre,  là  cunilucnl 

li>s  eaux  1  ui>saules. 
Dans  la  mai.-on  <lo  poussière  oi^  je  vcuv  eulrer, 
Donifuroiil  Icsoipuour  ot  le  noble; 
PiMutnircut  le  roi  cl  l'iioinmc  puissant  ; 
Memcureut  les  gardiens  tic  l'ablmc  tics  grands  dieux; 
Demeure  Eima,  demeure  ^rl•  i. 

P.iniii  les  idées  qui  sont  énoncées  plus  ou  moins  iniplieilcmenl 
dans  les  autres  i)arlies  du  poènio  dont  il  s'agit,  je  signalerai  seu- 
lement les  plus  reinaniuables.  Une  loi  rigoureuse  de  l'IIadés  pres- 
crit au  portier  de  dépouiller  «le  leurs  vêlements  tous  ceux  qui  y 
entrent.  A*^tarlé  elle-uiéme  dut  s'y  souuictlie,  sous  peine  de  se  voir 
refuser  l'entrée,  cl  le  mythe  se  complaîl  à  déci  ire  les  hijoux  et  les  vê- 
tements intimes  dont  elle  dut  se  défaire  sucessivemenl  à  chacune 
des  se[il  portes  avant  de  l«  s  franchir.  F'assé  la  drrniéie  p(Ute,  la 
déesse  est  assaillie  par  d'alTroux  maux,  aux  yeux,  aux  n  in-j,  aux 
pieds,  au  cœur  et  à  la  léle,  maux  qui  la  font  lomlier  inaniuiée  surle 
sol.  C'eslque  les  génies  des  maladies  habitent  l'aiiîme,  d'où  ils  sor- 
tent de  temps  en  temps  pour  frapper  Us  hommes  abandonnés  de 
leurs  divinités  prolectrii'es -.  Quelquefois  ce  sont  les  moi  ts  (jui  sor- 
tent de  riiadès  pour  dévoier  les  vivant^  (a/.///  Iidllliiiti'i.  dépendant, 
malgré  l'extrême  rigueur  des  lois  de  l'Hadés,  la  mort  n'est  pas  abso- 
lument irrévocable  et  le  cas  de  résurrection  exc(q)lionnelle  est 
prévu.  La  manière  dont  les  choses  se  passent  dans  une  pareille 
occurrence  nous  est  relatée  dans  le  même  récit,  nii.nid  les  dieux, 
crai^'uant  le  déjiéri>seinent  du  iiKtnile  par  suite  de  Tabsence  d'.Xs- 
t;iité,  résolurent  de  rappeler  celhvci  à  la  vie,  ils  imposèrent  loul 
d'abord  leur  volonté  à  la  déesse  de  l'endroit.  Forcée  de  céder.  Allât 
chargea  Naïutar,  le  dieu  de  la  mort,  son  lils  et  ministre,  d'exécuter 
cet  ordre.  .Namtarse  reniiil  dans  un  palais  m_\stéi  ieux  qui  esl  nommé 
«  palais  de  la  vérité»  (A'/i<// A'/n<)»  K"o"'» 'Anoun  (|ui  le  surveillait 
par  le  présent  d'un  lr»Vie  d'or,  et  y  puisa  l'eau  de  la  vie,  avec  laquelle 
il  aspergea  Aslailé.  La  dé('»se  reprit  ses  ^('ns  etipiilla  lliadés,  après 
qu'on  lui  <  ut  restitué  .ses  vêlements  et  ses  paiures  dans  l'ordre  in- 
verse de  celui  dans  lei|Uel  on  les  lui  avait  enlevés. 

D'autres  textes  nous  apprennent  i|U(;  l'enlrèe  de  l'ILidès  est  siiuèi- 
au  bas  de  la  montagne  du  Nonl,  dont  le  sommet  est  habité  par  les 


I.  V'lir  le  l('\tu  ùiiUh  la  lltvur  i/n  clmlc-,  juivi.s,  \\"  0,  p.   17'.»,  note  I, 
?.  W.  A.  I.,  IV,  JO,  rc<:lu,  col.  1,  1,    tbutcin   a,  red»,  tul.  1. 


i.'iMMoin  Ai.in.  m;  i/amk  cm/  i.i.s  na  i'i,i:s  si'Mirini  i;s.         i7 

dioiix.  (]cl  olympe  assyrien  porte  le  lilre  de  Scliad  mulnli,  <(.Moiii,i- 
giie  des  p.iys»,  ou  Ilurisrli  KaUima  (écrit  eu  liiérati(jue/i*//-.y'/y-M//- 
ma),  «  Monlaf^iie  de  l'univers  ».  Sou  souiniet  louciie  le  ciel,  laiidjs 
que  ses  racines  ploui^a-ut  dans  l'océan  infernal.  Elle  se  compose  de 
m6\A\  prccieiix,  nolammen!,  d'or.  Son  nom  propre,  Scliad  Arali^  si- 
gnilie  «  iMonta<,Mie  des  morts  »,  faisant  allusion  au  passage  (ju'elle 
livre  aux  moris  pour  entrer  dans  i'Iladès. 

Mais  que  devient  l'inilividii  déposé  dans  le  toiuheau  ?  Un  curieux 
passage  d'Assourhanipal  nous  l'api)rend  d'une  façon  indirecte  mais 
d'une  intière  cerlilude.  Après  la  mort  se  dégage  du  corps  le  prin- 
cipe vilal  et  indestruclible,  l'esprit  incorporel,  ap|iclé  en  assyrien 
ékimmou  ou  étjimmoii.  C'est  ;\  peu  près  le  Lare  des  Itomains.  L'èkini 
lialiile  le  niniiunient  funéraire  et  re|)Ose  sur  le  gîle  (j^//'//?/)  du  mort. 
Ouand  il  est  iiii-n  traité  par  les  enl'anls  du  défunt,  il  devient  leur  pro- 
tecteur; dans  le  cas  conlraii-e,  il  devient  malfaisant  et  les  accable  de 
maux.  Le  plus  grand  malluMir  (|ui  puisse  arriver  à  r.liomme,  (;'e>t 
d'élre  privé  de  sépulture.  Dans  un  tel  cas,  son  ckiin,  privé  de  gile 
et  lie  lihations funéraires,  mène  utie  existence  errante  et  malheureuse 
et  est  exposé  à  toutes  les  misères  de  la  part  de  ses  semblables,  (jui  le 
repoussent  sans  pitié. 

Eidin,  un  passage  récemment  copié  nous  fournit  d'intéressantes 
indications  sur  ce  qu'on  peut  appeler  la  vie  sociale  et  familière  des 
gueriicrs  morts  sur  le  champ  de  la  bataille.  Les  guerriers  d'Assour 
participent  naturellement  au  sort  des  justes.  Ils  entrent  dans  l'Hadés 
dans  l'état  où  ils  se  trouvaient  au  moment  de  leur  mort.  Mais,  aussi- 
tôt, ils  sont  mis  sur  un  lit  commode  et  ils  sont  entourés  de  leurs  [la- 
rents.  Leurs  pères  et  mères  soutiennent  leur  tête  qiie  le  glaive  de  l'en- 
nemi avait  séparée  du  corps,  et  leurs  feinuîes  se  tiennent  à  côté  d'eux 
et  les  soignent  avec  zèle  et  tendresse,  llssonl  rafiaîcliis  par  l'eau  inire 
de  la  vie  ipii  réiabiit  leurs  forces.  Le  passage  au(juel  je  fais  allusion 
figure  sur  la  fin  de  la  XII*  tablette,  G»  colonne,  de  la  grande  épopée 
de  IZ-TIIV-BAH.  Ce  héros  prend  la  résolution  de  descendre  au  pa\s 
des  nions  alin  de  revoir  son  ami  laoubani,  tué  par  les  machinations 
d'Aslarté.  Il  s'encourage  lui-même  à  faire  cette  tentative  téméiaire 
en  énonçant  d'avance  les  choses  mystérieuses  qu'il  aura  l'occasion 
de  voir  dans  le  monde  souteirain  : 

I>i(t  ma  (il  zalilitiJ, 
Mr  Z'iliiiti  isrluiti 
Scha  ina  tahazi  dika 
Tumuv  atamar 


48  luiviK   \iu:iii;()i,(M,ioLK. 

Àftusrhn  ù  uiniwisrhii  tiaifijOilsu   mischu 
r  iti'Sclutlsu  iri'i  inuhhi  sr.lni  i::(/: 
Sc/i'i  schnlnmtn^ihu  iiui  n-ri  nudùt 
Tatnur  (idinun' 

KkimVKisrhu  ma  irçitim  til  zulil 
ik'ha  ckinwuischu  scliahta  la  ischu 
Tamur  atutmir. 

Co  (jui  signilk'  itirs(iue  lillûralenu'iit  : 

<i  (^oucbt'  Mir  le  lit  rnuèl-re 

(Kt)  buvant  l'eau  pure, 

(l.e  guerrier)  lui^  dans  la  bataille, 

Voir  je  (le)  verrai. — 

Son  père  et  sa  mère  souleuaiil  sa  U'-[o, 

L(  sa  reuime  se  peinliant  au-dessus  de  lui, 

(Le  guerrier)  dont  le  corps  repose  sur  le  cliaini»  de  bataille, 

Voir  je  (le)  vcrnii.  — 

(L'bouum)  dont  l'ékini  n'est  pas  couclu^  dans  la  terre, 

(l/boiunie)  dont  l'ékin»  ett  privé  de  demeure, 

Voir  je  Je)  verrai.  » 


Après  avoir  recouvré  toutes  leurs  facultés,  les  justes  sont  invités  à 
un  nia^Miili(iue  festin,  où  ils  se  iléleclenl  d'une  nourriture  exquise 
qu'on  leur  sert  dans  lies  disques  (Je  métal  pur.  Un  chant  religieux, 
dont  il  nous  reste  deux  frai,Mnents,  célèbre,  ainsi  (|u'il  suit,  la  féli- 
cité du  juste  prenant  part  au  repas  des  dieux  et  devenu  dieu  lui- 
même. 

Lave  les  mains,  purifie  les  mains; 

Les  dieux  tes  aînesse  laveront  les  mains,  se  purifieront  Icsinaitis; 

Mange  la  nourrituie  pure  dans  des  disques  purs, 

Hois  l'cdu  }iurc  d ms  des  va^-es  purs; 

l'rcipare-loi  a  jouir  de  la  paix  du  juste  ! 


()n  y  u  apporté  l'eau  yurc. 

Anal,  lu  grande  épouse  d'Atiou, 

T'a  UMiu  dans  ses  bra.s  sarrés  ; 

iaiiu  l'a  transféré  dans  un  heu  de  sainteté; 

Il  l'a  transféré  dans  un  lieu  de  sainteté  ; 

Il  t'a  lianïféré  de  ses  mnins  sueiées; 

Il  l'a  transféré  au  milieu  de  miel  et  de  graisse; 


i/iMMOP,TAi.iTK  r)i'.  [.'\\\\:  i:iiK/  r.i:s  friii'Lrs  sk.mitiouf.s.        i'.) 

Il  a  viTSi'"  dans  la  lioiiclii'  \'o,m  maj^ifuic, 
VA  la  vertu  de  l'eau  l'a  ouvert  la  Itonclie  '. 


M;ilgn'!  le  (IrHiul  (l'ini  témoignngc  ronin'i,  la  plus  Irj^rro  rédfxion 
suftlt  itour  so  j)(Msu;ulor  que  le  lieu  de  délict's  réservé  aux  justes  ne 
peut  être  l'ILidés  coiuniun,  plongé  dans  les  ténéljres  cl  entouré  d'une 
atmosphère  morlelle,  mais  un  lieu  séparé,  bien  que  communiquant 
avec  lui,  ouvert  à  la  lumière  du  jour  et  ?itué  au  voisinage  de  l'O- 
lympe, d'où  il  peut  facilement  être  ahordé  par  les  dieux.  A  l'opposé 
de  ce  «  lieu  de  sainteté  »  où  les  dieux  mêmes  sont  aux  petits  soins 
pour  leurs  amis  luimains,  l'iladès  est  appelé  hil  rdi,  «  maison  de  so- 
litude »,  parce  que,  par  suite  de  la  vie  de  privation  qu'on  y  mène, 
chacun  ne  pense  qu'à  soi  et  ne  se  soucie  guère  de  soulager  le  mal 
des  autres.  Par  consèi|uent,  pas  de  réunion  de  faïuille,  pas  de  vie  en 
société.  Le  paradis  haidlé  par  les  justes  semble  donc  se  trouver  sur 
une  autre  pente  de  la  montagne  du  Nord,  qui  communique  directe- 
ment avec  l'Olympe. 

L'idée  d'une  récompense  particulière  pour  les  justes  a  d'ordi- 
naire pour  corollaire  celle  de  peines  particulières  peur  les  pé- 
cheurs et  les  criminels.  Mais,  malgré  la  connexité  logique  de  ces 
conceptions,  on  ne  peut  pas  affirmer  que  la  dernière  ait  réellement 
fait  partie  des  croyances  eschatologiques  des  Assyriens,  attendu  que 
les  textes  connus  n'en  parlent  point.  En  revanche,  nous  sommes 
mieux  renseignés  sur  la  croyance  à  la  résurrection  des  morts.  Le 
dieu  3/of7/o»/.- et  son  épouse  Çarpanit  portent  très  souvent  le  litre 
de  «  celui»  ou  «celle  qui  fait  revivre  les  morts»  {muballith  ou  inu- 
ballithat  mlli ou  niitiiti). Lsimèmei'iiiihHc  est  aussi  parfois  donnée  à 
d'autres  divinités,  surtout  à  Ischtarit.  Quand  et  dans  quelles  condi- 
tions cet  événement  aura  lieu,  c'est  ce  que  nous  ignorerons  encore 
jusqu'à  la  découverte  de  documents  relatifs  à  cette  matière. 

Des  Assyriens,  nous  passons  chez  les  Hébreux,  le  seul  peuple  sé- 


1.  Qatika  niisi  qatika  ubbib  —  AN-MESCII  taliinukaqatiscliunu  limsû  qatischunu 
lùbbibu  —  ASCH  pàsschuri  KV  akalu  KV  akul  —  ASCtl  DVK-ti  SCHI  KAK  KV- 
tim  A-MESCH  KV-ME8CH  schiti  —  ana  sdiuirmi]  GAL-VN  TVI\  A.\-sc!iù  lu 
uzùnka  (R.,  IV,  13,  52-01). 

MO  KV-AIESCri  Kiribscha  ubli  —  AN-iM\-MVK  MVK  GAL  çclia  A\-Ana  — 
ASCH  SCHV-II-schii  KV-MESCH  ugannik?.  —  AN-EA  DISCH  ascbar  tclilii  itpalka 
—  DlSCIl  aschar  telilii  itpalka  —  SCIIV  PAIi-PAi;-GA-lM-MA-RA-A.VDV-MA  — 
ASCH  discbpo  himeiu  itpalka  —  Mù  cliipti  DISCH  pika  iUdi  —  Pika  ASCH  ischib- 
biUi  ipti  {Ibidem,  25,  34-50). 

XLIV.  —1 


5(1  HKvn-  M»  :iiK(ii.(ir.iorK. 

milii|UO  oc'i-iili'ni;il  tiiii  luuis  ;iit  laissi'"  une  litliTotmo  aiiciciiiu'. 
Mais  ci'llo  lillt'ralurr,  ('laiU  l'expression  île  Tt-iole  iiioiiolliéisle  ou 
piopluMiiiue,  cjui  comliailail  l'ancienne  religion  polylluislc  d'braël, 
eelle  lilléialure,  n»niine  loule  tinivre  de  poir'iui.iue.  ne  doitiMre  uli- 
liséi"  (|u'avee  piveaulitm  el  discernenienl.  I.a  plus  jurande  erreur  i|ue 
l'on  puisse  commellre  à  cet  égard, ce  serait  de  consiiérer  les  opinions 
énomêes  dans  ces  éci ils  comme  l'image  des  croyances  populaires  et 
nalionah's.  Les  conceptions  vraiment  nationales  il'lsrai'l  ne  sont 
pas  celles  que  les  propliètes  soutiennent,  mais  celles  nu'ils  combat- 
lent.  L'on  peut  dire  (jue  plus  une  croyance  ou  une  pralique  était  rù- 
pmuvée  i»ar  les  prophètes  el  les  législateurs  bibliques,  plus  elle  était 
enracinée  dans  l'esprit  du  peuple  hébreu.  Faute  de  rt'coniialtre  cette 
vérité  élémentaire,  la  plupart  des  savants  se  sont  condamnés  à  voir 
sous  un  faux  jour  l'hisloii-e  religieuse  d'Israi-l.  C'était  commettre 
une  erreur  du  genre  de  celles  (jue  commettrait  celui  (jui  attribuerait 
à  l'Kglise  apostoliiiue  les  idées  de  saint  Paul.  Ur  l'existence  du  cuite 
des  morts  parmi  les  Israélites  et  de  l'habitude  de  leur  oITrir  des 
oITrandes  est  attestée  par  la  formule  confessionnelle  (jue  le  législa- 
teur jéhovistc  prescrit  à  ses  adeptes  apportant  des  offrandes  à 
Dieu. 

Je  n'ai  pas  mant;é  de  ce  (produit)  pendant  que  j'étais  eu  deuil,  je 
n'en  ai  rien  enlevé  pendant  que  j'C'lais  impur  el  je  n'en  ai  rien 
oiïorl  aux  morts  '. 

Faire  des  ofTrandes  de  nourriture  aux  morts  implique  la  croyance 
qu'ils  peuvent  en  jouir  et  qu'ils  sont  capables  de  rendre  ser- 
vice à  ceux  qui  ont  su  gagner  leur  faveur.  On  croyait  donc 
que  la  njori  ne  niellait  pas  lin  à  l'existence  de  l'homme,  nuiis 
que  son  ombre  ou,  pour  parler  comme  les  Assyriens,  son  vkini, 
conlin.uail  à  vivre  et  il  s'intéresser  aux  vivants.  11  y  a  plus,  on  lui 
supposait  la  connaissance  de  l'avenir  el  on  le  consultait  dans  les  cas 
didicilesafin  de  savoir  comment  ils  liniraieni.La  grande  sévérité  avec 
bniuelle  la  loi  mosai(|ue  réprime  les  diverses  opérations  de  nécro- 
mancie ou  nécynmaïuie  dit  assez  combien  ces  pralii|ues  étaient 
répandues  chez  les  Hébreux.  On  connaît  l'histoire  de  la  pNlhonisse 
d  Kn-Dor  (jui  évoque  l'ombre  de  Samuel  pour  qu'elle  réponde  à  la 
question  de  Saul,  anxieux  de  connallre  h  l'avance  l'issue  de  la 
guerre  avec   les  riiilislins.  Samuel  ajq'arnl  à  h  ma;jicienne  dans 

1.  Ihutérononic,  \\U,  I  i. 


L'iMMOinALin':  Dr:  l'amf.  eut;/.  i,i:s  piaTLKs  skmitioL'KS.       51 

riiabillement  qu'il  portait  de  son  vivant  ;  c'est  conforme  à  ce  que  nous 
avons  vu  plus  hnut  h  propos  d'Aslarlé  ressuscilée.  Samuel  n'aj,'!!  pas 
aairt'iiu'nl  iin'il  ii'oûla^'i  do  son  vivant.  U'ahord,  il  se  plaint  de  ce 
qu'on  l'a  forcé  de  remonter  sur  celte  terre;  puis  adouci  par  le^  paro- 
les liumi)Ies  de  Saiil,  il  lui  prédit  sa  mort  et  celle  de  ses  Ills  sur  le 
champ  de  bataille.  Les  termes  :  «  demain,  toi  et  tes  fils  vous  serez 
avec  moi»  (màlidr  attd  uhdneka  'immi)^  par  lesquels  il  lui  annonce 
ce  funeste  événement,  ces  termes  impliquent  la  croyance  à  la  réu- 
nion de  tous  les  moils  dans  un  seul  lieu,  Icscfti.'ol.  Cela  fait  claire- 
ment voir  que  la  locution  «  il  fut  réuni  à  son  peuple»  ou  «ù  ses 
pères»,  précédemment  citée,  fait  allusion  à  la  vie  de  l'Hadés  et  non 
pr.s  à  la  sépulture.  Job,  maudissant  le  jour  de  sa  naissance  et  désirant 
qu'il  fût  mort  aussitôt  que  né,  fait  une  description  enthousiaste  du 
schéôl,  description  qui  rappelle  plus  d'un  Irait  du  poème  assyrien  que 
nous  avons  cité  plus  haut  : 

Ah!  pourquoi  ne  suis-je  pas  mort  étant  dans  le  sein  de  ma  raéro, 
Pourquoi  ne  suis-je  pas  trépassé  au  moment  de  soitir  de  ses 

tlaiics, 
Pourquoi  ses  genoux  se  bont-ils  avancés  pour  me  recevoir, 
Pourquoi  ses  seins  m'ont-ils  nourri  de  leur  lait? 
J'aurais  été  déjà  couché,  jouissant  du  repos; 
j'aurais  dormi  et  je  me  serais  senti  soulagé; 
J'.iurais  été  avec  les  rois  et  les  conseillers  de  la  terre, 
Uni  reconstruisent  les  villes  ruinées  atin  de  leur  donner  leur 

nom; 
Avec  les  princes  qui  possèdent  de  l'or. 
Qui  remplissent  leurs  maisons  d'argent. 
(Uue  dis-je?  Ah!  si  j'étais  seulement  comme  un  fœtus  que  l'on 

enfouit, 
Comme  des  morts-nés  qui  n'ont  pas  vu  le  jour  1) 
Là  (dans  l'Iladés)  les  malfaiteurs  cessent  leurs  exploits  turbulents  ; 
Là  se  reposent  ceux  dont  les  forces  sont  à  bout. 
Les  prisonniers  y  sont  à  l'abri  de  toute  crainte  ; 
ils  n'entendent  plus  la  voix  du  policier. 
Petits  et  grands  y  sont  (ensemble);  (là)  l'esclave  se  voit  délivré  de 

son  maître'. 

Les  Hébreu.x  croyaient  également  que  le  schéôl  était  situé  à  la  base 
de  la  montagne  du  Nord,  habitée  par  le  Très-Haut.  Les  auteurs  mo- 

1.  Job,  III,  11-19. 


riï  iiRvrr.  .vnr.iiKoi.or.iorF. 

nollirislt's  l'ux-nu^mtsoru  rcs|it'(Méc('ll(M'roynnri\  iiiiisijiit'ponr  cxiui- 
mor  la  saintotr  «lu  inoni  Stoii,  siii- lequel  est  coiislriiil  le  tcinplf,  ils  lui 
(lonmMH  le  lilre  de  «  Monla^jiu'  «lu  non!  »,  c'csl-.i-dirc  monlagne  di- 
vine ou  olympieiine '.  Il  y  a  plus,  les  liébreux  senibleul  avoir  envi- 
sa^îé  le  mont  Sion  eoiunie  figuranl  en  pelil  l'imuirnse  -(  nioiila^'ne  do 
lunivers  n  de  la  mUlioloprie  sùniitiiiue.  PcMidanl  que  le  sommcl  du 
Sion  était  oerupé  par  le  sanctuaire  de  Jéliova,  ses  lianes  recelaient 
les  niiiusolées  des  rois  et  des  noldes,  tandis  qu";\  ses  pieds,  dans  la 
profonde  vallée  de  Cidron,  s'étendaient  les  tombeaux  communs  du 
peujde.  Une  partie  de  cette  vallée,  nommée  «vallée  des  lils  de 
Ilinnôm  »  {(jr  bnic  Jliniiôm),  était  le  tliéâlre  des  sacriliees  d'enfants, 
voués  aux  divinités  infernales.  Ce  n'est  pas  par  basard  (pi'ellcait 
donné  plus  tard  son  nom  ;\  la  Gébenne,  c'est-à-dire  h  l'IIadés  rabbi- 
nique  et  cbrélien,  m;iis  par  cette  raison  que,  conformément  à  la 
tradition,  ladite  vallée  servait  d'entrée  au  monde  souterrain-.  La  res- 
semblance en  est  d'autant  plus  frappante  que, d'après  une  autre  tra- 
dition, le  centre  du  saint  des  saints  était  occupé  par  une  pierre  qui 
formait  le  couvercle  de  l'abîuie-'';  or  de  nombreux  passages  attes- 
tent que  le  scbéôl  est  situé  au-dessous  de  l'abîme  *. 

Les  autres  énonciations  des  écrits  bébraùjues  relatives  au  scbéôl 
sont  aussi  conformes  à  celles  des  Assyriens.  On  le  dépeint  comme 
un  pays  de  ténèbres,  et  la  voie  qui  y  mène  comme  une  voie  sans  re- 
tour {onih  lo  lischi'ih).  Il  est  fait  mention  des  portes  du  scbéôl  ;  ceux 
qui  y  entrent  soulTrenl  d'atroces  douleurs  {lieblr  sche6l,  mrrilrr 
sclicôl).  Quand  un  grand  conquérant  descend  au  scbéôl,  les  mânes 
;Uefaim)  des  rois  s.'  lèvent  de  leur  gîie  pour  voir  si  c'est  bien  celui 
qui  avait  fait  trembler  le  monde,  et,  s'élant  assurés  de  son  identité, 
lisse  donnent  le  plaisir  de  le  railler'. 

Le  pieux  Hébreu  espérait  éebapper  au  scbéôl  soit  en  montant  au 
eiel  de  son  vivant,  il  l'instar  d'ilénoeli  et  d'Klie,  soit  en  étant  ac- 
cueilli dans  la  présence  de  Dieu  après  un  court  séjour  dans  l'Hadés. 
Le  juste,  assis  à  la  droite  de  Jébova,  jouit  de  délices  éternelles. 

Certes,  lu  ne  laisseras  pas  mon  flmc  (en  proie)  au  schcAl, 
Tu  ne  permettras  point  que  ton  adorateur  voie  la  fosse  aucan- 
tissanle; 

1.  punîmes,  XLVIII,  3. 

2.  Tjilmud  (lo  iiabylono,  traité  Kiul/iti,  M.  VJ. 

3.  Ib'iltm,  lôrrid,  fol.  5. 

4.  Joh,  ,\XVI.  5. 

5.  Itmr,  XIV,  <j  ij. 


I,  iMMoriTM.rn:  ru:  i,  amf.  ciirz  U's  fm:  un  Lies  shmitiours.       .'i'I 

Tu  me  feras  corm.iilrt;  la  voie  qui  luèiu;  i  la  vie, 

A  ralxjntlancc  des  joies  «jtii  se  liuiivenl  en  la  piôscucL', 

Aux  délices  éleriielles  qui  suul  à  la  diuilc  '. 

Ia's  (loiiiins  (jiii  i)i(''i',(''il('iils()iii  dispersées  choz  les  historiens  et  les 
poêles,  tous  rigoureux  monothéistes,  aux(|uels  le  culte  des  morts, 
ainsi  que  les  prali((ucs  et  les  croyances  (jui  s'y  rapportaient,  étaient 
un(!  ahoininali  )n,  un  péché  mortel,  Ce  n'est  iju'à  de  rares  occasions 
et  par  échappée (pi'ils  parlentdu  schéôl  et  de  ses  hahitants;  encore 
cherchent-ils  à  siiirilualiser  les  expressions  et  à  les  transformer  en 
images  poéti(iues.  Néanmoins  la  l'orme  des  croyances  pDpiilaircs 
s'en  dégage  d'une  façon  lumineuse,  croyances  qui  se  montrent  iden- 
tiques avec  celles  (jue  professaient  les  As£-yro-Hjhyloniens  relative- 
ment au  sort  de  l'homme  après  sa  mort-. 

L'inscription  d'Eschmouii-azar  atteste  que  les  Phéniciens  avaient 
les  mêmes  croyances.  Ou  y  voit  d'une  part  que  celui  dont  le  cor|is 
reste  sans  sépulture  n'a  pas  de  gîte  auprès  des  mânes  (rciiliaim);  de 
l'autre,  que  lejusie  est  reçu  dans  les  deux  magninques  [achamna 
addiiiiu),  auprès  d'Astarté  [et  WsclUorel).  Celte  inscription  nous 
donne  même  le  mut  phénicien  pour  «immortalité»,  alinoul,  mot 
qui  se  trouve  également  en  hébreu. 

Une  élude  comparative  des  croyances  eschatologiques  chez  les 
Égyptiens  et  les  Grecs  aurait  donné  plus  d'intérêt  à  cette  note  ;  nous 
avons  résisté  à  la  tentation  de  la  faire,  parce  que  nous  la  croyons 
prématuiée.  Il  nous  suffit  d'avoir  démontré  que  la  conception  de 
l'immortalité  de  l'âme  faisait  partie  intégrante  de  la  religion  primi- 
tive des  Sémites,  religion  dont  les  documents  précédent  de  plu- 
sieurs siècles  les  chants  homériques  et  d'au  moins  mille  ans  les  ou- 
vrages de  Platon. 

J.    IIAL1';VV. 

1.  Pmuini's,  XVJ,  10,  11. 

2.  La  question  relative  à  la  conception  de  l'âme  et  de  sa  destinée,  d'après  le  inn- 
notliéisme  ptiniiiif,  n'étant  pas  de  l'ordre  des  croyances  populaires,  n'a  pas  ta 
place  ici  et  doit  éire  étudiée  séparénienl  comme  tout  autre  sy.-ième  pliilosopIii(|iic-. 


BULLl'/riN    MENSUEL 

I)  !•:    I.  •  A  r.  A  I)  r:  M  I  K     DES     I  N  S  C  W  I  I'  1'  I  (  )  N  > 


MOIS  nr.  .HiN, 


M.  (ielTroy,  direcicur  de  l'École  française  de  Rome,  fait  part  d'une  dt'- 
couvcrle  rrcente  fort  inlt^ressanlo.  l'n  disquo  do  marbre  sur  lequel  sont 
repii^^entt'es,  à  peiile  l'-chclle,  diverses  scC-ncs  du  l'otidicr  d'AiliilIc  décri- 
tes par  Homi'*re,  vient  d'CIre  trouvt^  à  Home.  Soixante-quinze  vers  d'Ho- 
mère pravi's.  en  caractères  microscopiques,  mais  cependant  très  lisibles, 
servent  d'explication  aux  scènes  reproduites,  ("es  vers  renftrmenf,  parait- 
il,  q\u'!ques  variantes.  C'est  quelque  chose  conmie  un  nouveau  manus- 
crit de  l'époque  des  Antonins.  Au  revers  du  disque,  on  lit  le  nom  de 
Thiodoros.  Ce  nom  ajoute  une  grande  valeur  au  disque.  On  sait  en  effet 
que  Tbcodoros,  Pline  nous  l'apprend,  était  un  artiste  célèbre,  auteur  d'une 
suite  de  tableaux,  peintures  ou  sculptures  relatifs  il  la  guerre  de  Troie. 
Theodorua  Krllum  ïHnnim  ■plurilxia  tabulis  pinxit.  Ces  œuvres  décoraient 
le  portique  de  Philippe,  ryuorf  ps/  Bomœin*rfnUppi  porticilius.  La  décou- 
verle  signalée  par  M.  Gcffroy  offre  donc  un  double  intérêt. 

M.  Miller  annonce  qu'il  a  découvert,  dans  un  manuscrit  où  personne 
ne  les  avait  encore  signalés,  des  fragments  inédits  d'Elitn.  Ces  fragments 
sont  empruntés  à  son  ouvrage  intitulé  :  IloixO-r,  îçTopi'ï,  recu;^il  composé 
en  partie  d'anecdotes  relatives  à  des  personnages  célèbres.  .M.  Miller 
cite  quelques-uns  de  ces  fragments  : 

{•  «  Le  fils  de  Fabius  ayant  dit  A  son  père  :  Attaquons  Annibal,  nous 
ne  perdrons  tout  au  plus  que  cont  hommes.  Vcux-lu  être  parmi  les  cent? 
lui  réjtondit  son  [lère.  •> 

2°  •  Voyant  une  petite  femme  très  belle,  Diogèno  dit:  C'e^t  1;\  ce  qu'on 
pput  appeler  un  demi-mnl  (((rrofts).  » 

3'  •  Voyant  une  jnune  fille  à  laquelle  on  apprenait  à  lire,  Diogène  dit  : 
C'est  une  épée  qu'on  aiguise.  » 

4»  «Socrat"  dsait  que  les  mères  paraissent  aimermiouv  leursfils  parce 
qu'ils  peuvent  leshecourir,  et  les  pères  leurs  lilles  parce  qu'elles  ont  be- 
soin de  leur  sccour.-,  etc.» 


!ui.i,i:tiv  MF.Nsurr,  uf.  i,  Ar,vni\iiF  urs  iv^ctui'Ti'iNs.  .(.» 

M.  Opporl  communiquf  lasiiilftdo  sos  Indiiclions  do  qiiolqup«-tins  dos 
loxtcs  chiildi'cns  faisant  partie  de  la  collcclion  des  antiquités  rapportées 
par  M.  de  Sarzec.  Deux  de  ces  loxt»îs  sont  gravés  sur  la  statue  d'un  prince 
qui,  d'aprc's  M.  OppcrI,  d'accoril  en  cela  avec  la  majoiiti';  des  assyrioio- 
gups,  aurait  porté  le  nom  de  Cioudc/i. 

M.  Aiibû  commence  la  lecture  d'un  niémoirc  inlihilé  :  Pnli/ructe  '/ans 
rUistoirn. 

Une  place  d'académicien  ordinaire  élait  vacante  par  suite  du  décès  de 
M.  fJuessard;  M.  Emile  Sénart  a  été  l'iu  dans  la  séance  du  :!.i  juin. 

ll-v. 


t^or,ir:rK  n.vtionai.l; 
DKS   AXTIOIIAIRI'S  DK    FRANGE 

iMiKbiDKNci:  i)i:  M.  (U:oi\(;i:s  ri.niurr 


SÉANCE    DU    5    JUILLET 


M.  le  vicomlo  Jacques  de  Hougt5  est  élu  membre  résidant. 

M.  (i.iillaume  lit  une  noie  de  M.  Caffiaux  sur  les  armes  impi'riales 
sculptées  sur  la  clef  de  voûte  d'une  salle  d'une  ancienne  poile  de  Valen- 
cienncs.  Dans  l'armoriai  du  hc^raul  de  (lueldre,  qui  est  de  lu  premiùro 
moilié  du  xiv«  siùcle,  l'aigle  impériale  éployée  n'a  qu'une  tiile.  Ici  elleiMi 
a  deux,  et  t'est  probablement  lA  un  iIcs  premieis  cxenifiles  de  ce  nou- 
veau type,  puisque  la  porte  a  été  conslruile  en  I3.")S.  Le  zèb  de  Valen- 
cicnncs  à  .-e  tenir  au  courant  des  modilications  de  l'écu  impérial  s'explique 
par  l'opiniaireté  avec  laquelle  elle  défendail  contre  les  prétentions  des 
comtes  de  ll.iinaut  son  litre  de  ville  imyjtridli,  qui  lui  assurait  une  cci- 
lainc  autonomie.  Kile  reconnaissait  ces  comtes  comme  mandalaires  de 
l'Kmpiie,  mais  point  connue  ses  seigneurs,  et  ne  ptinlait  pas  une  occa- 
sion d'affirmer  sa  situation  privilégiée  vis-à-vis  d'eux,  (l'est  une  querelle 
qui  dura  quatre  cents  ans,  jusqu'à  la  conquête  frunc.-aise,  et  qui  recom- 
mença un  momenl  en  ITiri  lorsijue  Valonciennes  eut  succombé  sous  les 
elTorls  de  la  coalition. 

sr:ANc:r.  du  12  jriu.KT 

M.  l'iysse  Hobert  lit  une  note  sur  une  commande  de  vitraux  pour  l'é- 
glise de  Loheac,  en  Itretugne,  faite  en  I4'j4,  par  Ttiomas  de  Hiou,urgen- 
lier  d'Anne  de  Hrela^nc,  i  un  peitjlre  verrier  de  Paris,  nommé  Amé 
Picrro.  (iesvilrauiL,  au  nombre  de  Ircize,  à  deux  meneaux,  devaient  repré- 
bcnter  «  7S  bi^toires  d(!  la  généalogie  dt;  Madame  Suincli;  Anne  »  ;  le  prix 
convenu,  pour  l'exécution  et  la  pose,  était  de  ijuu  livres  tournois. 


snciiVn:  n vnowi.r:  mis  anhi.hmiiks  dk  iiunci:.  'IT 

M.  Prosi  coiuiiiuiiique  lu  di'couvL'i te,  laite  au  Sablou,  près  do  Metz 
d'un  ('iiiHc(!  romain  oclo;^oiic  et  de  deux  cip[)es  di'diûs  à  uiu;  déesse  pi6- 
cédemmenl  inconnue,  Icovellauna. 

M.  lU'-run  do  Villefossc  sij^nalc;  la  Iroiivaillc  failo  par  M.  A.  l'aifics,  à 
Klieiiclicla  (()ro\incc  de  Donstanliiic),  d'un  plonib  jiorlant  la  léj^ende; 
Genio  Tu:<(lril(uwru[m),  u  Au  Génie  des  liaLilants  de  Tliysdrus  »  (au- 
jourd'hui Kl-Djem).  Il  inTorme  ensuite  la  société  que  des  travaux  sont  en 
cours  d'exécution  au  Louvre,  sous  la  direction  de  iM.  Kdmond  (Juillaunie, 
pour  placer  la  Victoire  de  Saniollirace,  montée  sur  la  proue  de  ga- 
lère qui  lui  servait  de  base,  en  haut  du  nouvel  escalier  de  M.  Lefuel.  IJes 
lettres  d'appareil  ont  été  découvertes  sur  les  blocs  dont  la  base  était 
composée. 

SÉANCE  DU  19  JUILLET 

M.  d'Arbois  de  Jubainville  signale  l'existence,  dans  le  nord  de  l'Irlande, 
de  loris  vitiillés  semblables  à  ceux  de  France  ou  d'Ecosse;  la  construction 
doit  vraisemblablement  en  être  attribuée  aux  Pietés,  liabilanls  primitifs 
de  l'Ecostc,  qui  ont  aussi  occupé  la  parlie  de  l'Irlande  où  ces  forts  se 
trouvent. 

M.  Scblumbergcr  communique  plusieurs  sceaux  inédits  de  fonclion- 
naiies  byzantins  {^Iratnjrs  ou  gouverneurs,  commercinires  ou  directeurs 
des  douanes)  du  thème  de  Khersoin.  Il  montre  également  i  la  société  plu- 
sieurs sceaux  de  fonctionnaires  de  la  Bulgarie.  Ce  dernier  pays,  recon- 
quis par  l'empereur  Basile,  ne  fut  pas  constitué  en  thème,  et  resta  une 
sorte  de  province  militaire,  administrée  par  des  ducs,  des  préteurs,  et  sur- 
fout des  provcditcurs  (ziovo-ziToù  tAgy,;  BouXyapi'a;),  sorte  de  conunissaires 
extraordinaires. 

M.  Courajod  lit,  au  nom  de  M.  Muntz,  une  note  sur  le  premier  archi- 
tecte du  palais  pontifical  d'Avignon.  Il  s'appelait  Pierre  Poisson  ou  Peys- 
son  (Magistcr  Petrus  Piscis  ou  Pei/ssû7iis)  et  était  de  Mirepoix.  Dans  les 
comptes  conservés  aux  archives  secrètes  du  Vatican,  on  trouve  plusieuis 
fois  son  nom  depuis  133."i,  l'année  qui  suivit  l'avènement  du  fondateur  de 
l'édifice,  de  Benoît  XII,  jusqu'en  1337;  il  dirigea  notamment  la  construc- 
tion de  la  chapelle  cl  de  la  tour  du  palais,  d'un  cabinet  de  travail  pour 
le  pape,  et  d'une  salle  d'audience. 

iM.  de  Villefûsse  lit,  au  nom  de  M.  Maxe-Verly,  une  note  sur  deux  ins- 
criptions fausses  attribuées  à  ^usium  (.Naix  en  Barrois). 

Le  Secr Claire, 

Signé:  U.    RAY  ET. 


NOUVELLES  ARC 1 1 ÉOLO( iT(Jl' ES 


KT    COHRKSPOXDANCK 


Villc-d'Avrny,  18  juillet  1882. 
A  11.  Alex.  Ikrtrand,  membre  de  l'Institut, 

•  Mon  cher  ami, 

«  Le  n"  de  juillcf-scplenibre  de  l'.l/inKa/;-?  (fp /(7  Soci>!tà  de  mimixn^ati- 
7»c,  qui  vient  lit'^lre  dislribin',  signale  la  découverte,  dans  les  travaux  de 
forlilications  de  la  ville  de  Langre?.  d'environ  3000  monnaies  {gauloises, 
en  bronze  couk^  ou  polin.  Celle  découverte  n'est  pas  sans  importance, 
puisqu'elle  permet  de  localiser  deux  séries  de  pièces  qui,  jusqu'à  ce 
jour,  avaient  élé  attribuées  aux  Éduens  et  aux  Tricasses.  Vous  savez  que 
la  présence  constante  et  en  nombre  de  monnaies  de  bronze  ou  de  cui- 
vre est  un  indice  assez  sûr  pour  la  connaissance  de  leur  provenance;  les 
monnaies  d'or  et  d'argent  circulaient  au  loin,  mais  celles  du  métal  le 
moins  précieux  ne  s'éloignaient  guère  du  pays  où  elles  avaient  été 
émises. 

•<  Tes  monnaies,  d'après  M.  Hadel-tiirardot,  formaient  deux  groupes  à 
peu  prés  égaux  en  nombre,  aux  types  tiravés  dans  les  planches  du  hlrtion- 
nnire  d'nnhéologie  celtique,  n"'  38  et  223.  Elles  ne  seront  pas  inutiles  pour 
étudier  le  monnayage  des  Lingons  4  l'époque  la  plus  rapprochée  de  la 
conquête;  il  semble  que,  chez  ce  peuple,  il  y  avait  un  procédé  de  fabri- 
cation par  le  coulage  que  l'on  retrouve  chez  les  Leuques  et  les  Eduens. 

•  Ces  deux  types,  d'après  M.  Hudel-Cirurdol,  se  trouvent  fréquemment 
dans  des  sépultures  du  pays  de  Langrcs,  associésà  des  monnaies  romaines 
des  Antonins  jusqu'à  (iomniode;  c'est  une  preuve  que  ces  pièces  servi- 
rent longtemps  de  monnaie  d'appoint  dans  lu  région  où  on  était  accou- 
tumé à  les  voir.  Mais  cet  ar<héoli)::ue  ajoute  que  ce  fait  contredit  l'obser- 
vation fuite  par  moi  quelque  pari,  d'upiès  laquelle  on  ne  trouverait  pas 
de  dépAls  monétaires  dans  les  sépulturct  gauloises,  (^ette  assertion  n'est 
pas  parfaitement  exacte. 

•  J'ai  dit  que  les  fouilles  pratiquées  dans  im  grand  nombre  de  sépui- 


NOUVELJ.RS   AnCHF'OLOr.IQUF.S.  li'J 

fures  vraiment  gauloises,  conlomporuincs  de  riiidépcndanco,  lellcs  que 
celles  de  la  Marne,  n'avaient  pas  fourni  de  monnaies  pauloiges  ;  j'en  lirais 
celte  const'quence,  que  ce  fait  permettait  de  placer  la  date  de  ces  srpul. 
tures  antérieurement  à  l'usage  de  la  monnaie  dans  la  (laulc,  et  voilà  tout. 
Aujourd'hui  j'ajoute  que,  dans  les  sûpullures  qui  remontent  à  l'i'poque  de 
la  conqu^^le,  les  faits  consiatés  ne  sont  pas  encore  assez  certains  ni  assez 
nombreux  pour  permettre  de  conclure.  Mais  je  n'ai  jamais  affirmé  ni  nié 
que,  pendant  la  période  romaine,  les  sépultures  aient  contenu  des  mon- 
naies; le  mélange  de  pièces  romaines  et  gauloises,  au  m' siècle  de  l'ùre 
chrétienne,  ne  peut  s'appliquer  ù  ce  que  j'ai  dif  pour  le  m"  siècle  avant 
Jésus-Ctirist. 

«  Tout  à  vous. 

o  Anatole  ue  HAninKLEMY.  » 

Kn  creusant  les  puits  de  fondalion  d'une  maison  qu'on  veut  éle- 
ver sur  un  terrain  dépondant  du  très  ancien  clos  Brnneau,  espace  com- 
pris entre  les  rues  des  Nnyors,  de  Joan-de-Boauvais  et  des  Carmes,  on  a 
trouvé  des  cintres  reposant  sur  dos  piles  de  neuf  mètres  de  profondeur,  et 
descendant  jusqu'aux  catacombes,  à  27  pieds  au-dessous  du  niveau  aciuel 
de  la  rue  Jean-de-Rcauvais.  Ces  ruines  sont  celles  de  l'ancien  collège  de 
Dormans,  dans  les  brilimenls  duquel  avait  été  transféré  le  collège  de  Li- 
sieux",  fondé  en  i2'M\  par  Gui  de  iiarcourt,  évéquo  de  Lisieux.  Au  fond  de 
quelques  puits,  M.  Toulouze,  qui  a  fait  du  Paris  ancien  sa  spécialité,  a  re* 
trouvé  le  sol  primilif  du  temps  gallo-romain,  et  il  a  mis  à  découvert,  avec 
des  fragments  de  verreries  et  de  poteries,  des  médailles  portant  les  unes 
la  louve  allaitant  Romulus  et  Rémus,  d'autres  l'effigie  d'Arcadius. 

[Journal  des  Défca/s,  juillet.) 

Nous  signalerons  et  nous  recommanderons  à  tous  ceux  qu'inté- 
resse l'histoire  de  la  sculpture  grecque  un  très  remarquable  article  de 
M.  H.  Brunn,  le  savant  professeur  de  Munich,  qui  a  paru  dan:>  le 
tome  VIK  de  la  Deutsche  Rundschau  (p.  188-205).  Il  a  pour  litre  :  D(r  Her- 
mès des  Praxitelcs,  et  il  est  consacré  tout  entier  à  l'étude  et  à  l'apprécia- 
tion de  la  célèbre  statue  découverte  par  les  Allemands  dans  le  temple  de 
Héra,  à  Olympie,  statue  dans  laquelle  un  texte  de  Pausanias  nous  auto- 
rise à  reconnaître  un  original  de  Praxitèle.  On  verra,  en  lisant  cette 
étude  tout  à  fait  digne  de  l'auteur  de  VHistoU'C  des  artistes  grecs,  par 
quelle  série  de  fines  observations  M.  Brunn  arrive  à  reconnaître  dans 
l'Hcimès  d'Olympie  une  œuvre  de  la  jeunesse  de  Praxitèle,  tandis  qu'il 
inclinerait  à  voir  un  original,  œuvre  du  même  maître  'în  pleine  posses- 
sion de  son  style  personnel,  dans  un  torse  de  satyre  qui,  trouvé  au  Pa- 
latin il  y  a  une  vingtaine  d'années,  appartient  aujourd'hui  au  Louvre  ;  il 
y  montre  la  maturité  d'un  génie  qui.  lorsque  le  sculpteur  travaillait  dans 
le  Péloponèse,  après  la  bataille  de  Leuctres,  ne  s'était  pas  encore  complè- 


(îO  mvuE  AHCHi%01.or.iouR. 

lotiiiMit  .liïraïu'hi  ilo  quelque  tiinidilc  el  ilo  l'iniitalion  des  inuarirs  ullerls 

par  la  géiiéralion  juécéiloule.  *j-  •*• 

A  i.oiidrt'N  le  lîiilisl»  Musmim  \ieiil  do  lain-  racquisilion  d'ciisi- 

ron  300  tablettes  ol  inscriptions  provenant  delà  Hibylonie,  priniipalc- 
menl  de  Teli-oli,  le  Zi-gul  des  anciens.  I.cs  talileltos  sont  pour  la  plu- 
part en  nr^-'ile  non  cuite,  cl  surtout  de  l'espùce  dite  .<  usuelle  »  eniplovi^e. 
pour  la  conclusion  de  contrats,  l'acquisition  ou  la  vente  des  terres,  les 
calculs  astronomiques  et  matliéinatiques,  les  augures,  etc.  l'iicylindie  en 
pierre  calcaire,  dans  un  fort  bel  étal  de  conservation,  contient  une  ins- 
cription accadionne  d'Arid-Ka,  lîls  de-  Kudur-Maduk,  roi  de  Itabylone 
(\ers  1300  avant  J.-C).  t^'esl  une  dédicace  à  la  déesse  Ishtar,  qui  u  sauvé 
la  vie  du  prince  ainsi  que  celle  de  son  père. 

On  remarque  encore  une  tablette  magique  portant  une  dédicace  au 
dieu  Ninip  par  Ur  ilalac,  roi  de  Zirgul,  el  une  tablette  avec  une  copie  du 
document  original  qui  a  servi  à  établir  la  célèbre  bisloire  synchronique 
de  la  Syrie  et  de  la  liabylonie  et  qui  date  du  temps  de  Cyrus  (l\'iS  avant 
J.-C).  Cette  tablette  renferme  l'iiisloire  de  lîabylone  à  l'état  de  fragments 
depuis  environ  le  xn"  jusqu'au  i.v"  siècle  avant  notre  ère.  C'est  la  pièce 
la  plus  cuiieusede  la  collection  que  vient  d'acbetcr  le  IJrilish  .Muséum. 

{Journal  des  Débats.) 

On  vient  de  trouver  ;\  Rome  un  important  fragment  de  disque  de 

marbre  représenlaiil,  par  des  figures  de  très  petite  dimension,  la  descrip- 
tion bomérique  du  bouclier  d'Acbille.  Suixanle-quiuze  vers  d'Homere  y 
sont  joints  en  caractères  microscopiques,  mais  parfaitement  lisibles.  Ils 
ollVent,  dit-on,  quelques  variantes;  c'est  do'nc  quelque  chose  conmie  un 
nouveau  manuscrit  de  l'époque  des  Antonins.  Au  revers  du  disque  est 
gravé  le  nom  de  Théodoros,  sans  doute  l'artiste.  Pline  dit  qu'un  Théodo- 
ros  peignit  la  guerre  d'ilion  sur  nombre  de  tables  conservées  sous  le 
portique  de  Philippe.  Théodoros  élail-il  aussi  sculpteur '.'  Uut^lques  per- 
sonnes le  croient.  Le  fragment  qu'on  vient  de  découvrir  aurait  ainsi  des 
relations  avec  les  tables  iliaques.  {Juurnal  des  Débats.) 

M.  Uul.iou,  professeur  à  la  faculté  des  lettres  de  Menues,  va  pu- 
blier un  Exposé  des  institutions  de  la  (irvcc  atitiiiuc,  conforme  au  i)ro- 
gramme  de  la  licence  es  lettres.  Ce  lésumé  est  puisé  aux  sources  les  plus 
réccnlcs  et  foimera  un  volume. 


P.IBLIOCxPiAPIIÎE 


Étude  sur  les  Celtes  et  les  Gaulois  '•/  rec/icr<:/ie  (frs  /ini/ilrs  „,i>,^ni 
iil)/)iii  trnn/il  ii  la  ifi'r  i,;/liifiii;  ou  ,)  ,;jl/>;  des  S'-i/t/ii:\^  par  P,  L.  Lrmiéiik, 
(Coiii|irfs  rendus  cl  Mi'iiioirrs  de  la  Société  d'émulation  des  Côlcs-du-Nord 
tome  XVIli,  1B81.)  In-8*  de  618  pages. 

Parli  d'une  idéejuste,  de  nature  à  lui  faire  honneur,  bien  qu'il  ail  le 
tort  d'en  réclatner  Pexclusive  propriété  (quelle  est  l'idée  hi.-torique  dont 
personne  ail  le  droit  de  réclamer  la  propriété  exclusive).  M.  P.  L.  Le- 
niiéro,  en  exagérant  ot  étendant  outre  mesure  les  conséquences  de  ses 
piemières  et  s^agaces  observations,  donne  aujourd'hui  au  public,  après 
vingt  ans  de  recherches,  une  œuvre,  nous  avons  le  regret  de  le  dire,  obs- 
cure et  mal  digérée,  dans  laquelle  les  lumineux  aperçus  du  début  sont 
noyés  comme  à  plaisir  au  milieu  d'innombrables  assertions,  pour  le 
moins  très  confrovcrsables,  affirmées  sans  preuves  sérieuses  avec  une 
assurance  qui  déconcerte. 

L'idée  vraie  qui  fera  son  clicniin  et  à  laquelle  la  justice  veut  que  le 
nom  de  M.  Lemière  reste  attaché  non  pas  seul,  mais  en  très  bonne  place 
peut  s'analyser  ainsi  : 

I"  Les  Gaulois  qui  on!  pris  Rome  et  joué  un  si  grand  rôle  en  Europe 
et  en  Asie,  du  v  au  W  siècle  avant  notre  ère,  forment  un  groupe  à  part 
de  tribus  guerrières  et  à  moitié  nomades,  nettement  distinctes  des  tribus 
cclliqucs,  plus  sédentaires  et  moins  belliqueuses,  antérieurement  établies, 
tant  dans  la  haute  Italie  qu'à  l'ouest  du  Rhin,  dans  les  contrées  connues 
plus  tard  sous  le  nom  de  Gaule. 

2"  Le  point  de  départ  des  expéditions  des  Gaulois  ou  (ialates,  le  fover 
où  <e  préparèrent  les  grandes  invasions  qui  devaient  les  conduire  à  Rome, 
à  Delphes,  en  Phrygie,  était  non  la  Gaule  centrale,  comme  le  crovait  Tile- 
Live,  mais  l'occident  de  la  Germanie  méridionale,  le  pays  de  Pade,  le 
Wurtemberg,  la  Pavière,  la  Bohême;  la  participation  des  tribus  établies 
sur  la  rive  gauche  du  Rhin  ne  devant  être  considérée  que  comme  un  ap- 
point sans  grande  importance. 

3°  A  l'époque  où  César  passa  les  Alpes,  le  mouvement  de  ces  tribus  ga- 
latiqucfi  poussées  vers  l'ouest  par  la  pression  de  populations  orientales  de 
race  différente  les  avait  conduites  jusque  sur  les  bords  de  la  Seine  et  de  la 
Loire,  Quelles  s'étaient  établies  à  l'état  d'aristocratie  militaire,  au  cœur 
même  du  pays  qui  devait  bientôt  porter  leur  nom.  Cinquante  ans  avant 


62  UKVIK    AlU  IM'OI.OGKiUF. 

noire  ère,  elles  faisaient  ili'j.\  corps  avec  les  pupuluiiuiis  aiilénoures. 
Malheiireuïeinoiit,  au  lieu  de  se  renrLMUUT  dans  lellc  Ihùae  suffisam- 
menl  large  cependanl,  au  lieu  de  porter  tous  ses  elVorls  à  eu  éclairer  les 
diver^e5  parties  pour  répoudre  aux  objections  uouibrcuses  qu'elle  devait, 
comme  toute  thùsc  nouvelle,  soub-vcr  nalurcUcmenl.M.  Lemiùrc,  élargis- 
.-aut  son  cadre  au  delà  de  toute  nécessité,  comme  l'indiciue  sufllsam- 
meut  son  sous-titre,  s'est  laissé  éj^arcrà  la  recherche  de  prétendus  CiUis 
tt  ancitus  CcUcs  incoimus  des  auteurs  anciens  et  auxquels  il  ne  consacre 
cependant  pas  moins  de  trois  iintspaijvs. 

Une  erreur  bien  plus  grave  devait  achever  de  jeter  le  trouble  dans  l'é- 
conomie de  sa  première  conception  et  en  dénaturer  compliMcmcnl  le  ca- 
raclèrc. 

Au  lieu  d'accepter  l'opinion  de  l'antiquité  tout  entière  si  bien  résumée 
par  IMutarque,  l'aXârxi  -roù  IveAtdco-j  yévou;;  au  lieu  de  reconnailie  dans 
les  Galatcs  des  frères  ou  au  moins  des  cousins  germains  des  Celte?,  M.  Le- 
mière,  brisant  sans  hésitation  aucune  celle  unité  d'origine,  fait  des  deux 
peuples  lieux  races,  non  deux  yrow/)»  s,  absolument,  ladicalcmenl  distinctes: 
les  CtUcs  d'un  côté,  les  Scytius  de  l'autre. 

La  seconde  partie  du  livre  (p.  572-i:;i)  porte,  en  ell'ct,  en  sous-litrc  seu- 
lement et  en  petits  caractères,  le  nom  desiiaulois.  Le  litre  principal  s'éla- 
lant  en  lettres  majuscules  est  celui-ci  :  Les  Scythes. 

Mais  cela  ne  suffit  pas  : 

Parcourons  les  cn-tète  des  divers  chapitres  contenus  dans  les  370  pre- 
mières pages  du  livre  de  M.  Lemière.  Ces  tn-tctc  nous  ménagent  bien  des 
surprises. 

Après  un  premier  chapitre  intitulé  :  Les  (iauijis  étaient  distinr.ts  des 
Celtes  (7  pi'ges),  et  un  second  plus  développé  (:i3  page.-),  intitulé  :  .\o(/o/js 
gcofjraphiqucs  des  anciens,  où  se  rencontrent  de  fort  bonnes  choses, 
viennent  : 

{.  Les  Celtes  dans  la  Narbonnaisr 7  pages. 

2.  Les  Celtes  en  Ibérie '»  V  — 

;j.  Les  Crltcs  en  Aquilainr '^ 

4.  Les  Celtes  dtnt<i  les  ilcs  bretonnes i  '•'  — 

îj.  Les  Celtes  en  Italie ''1 

0.  Les  anciens  Celtes 1  U'.>  — 

7.  Lci  Celles  et  la  Celtiijnc '»  — 

De  ces  sept  chapilres  dont  quel(|ues-uns  sont,  ou  le  voit,  singulière- 
ment développés  (H)!»  pages  d'un  côté,  îH  d'un  autre), accompagnés  de  no- 
tes et  citations  nombreuses,  il  résulte  pour  M.  Lemière,  et  lo  lecteur 
apprend  avec  un  véritable  élonnemenl,  que  les  Ibères,  hs  Silures,  les  Abu- 
n;y'./<c$  d'Italie,  hs  Latins  (p.  i;i7),  les  l'iln^ues  (p.  l.'l'J),  les  l'cucétkns,  les 
Japy<jes,  les  Daunicns,  les  {£mtricnSy  les  Chùncs  ou  Chaones,  Us  Upiques  ou 


miii.ioc.iiM'iiii:.  O.'j 

Oi<jHes,  loi  Ausonesou  Auruncoi,  les  Skanicns  ou  Siculcs,  les  Ilalict  les  Mur- 
gvUs  soni  des  VcUcs{[).  \i">  et  sq.). 

Cc/<cs  (''guletnenl  sont  les  Ombrims  (ceci  n'a  plus  lieu  d'rloniier)  :  inaij 
la  surprise  recommence  avec  le  nom  des  Tyrrhénlensd^.  180),  des  Liijyes 
ou  Ligures  (\).  i!(7),  lous  Celtes;  liste  k  laquelle  il  faut  joindre  :  \ci  Jnpodcs 
ou  iitfiijtlcs  (p,  '2"»7),  et  eu(ii)  les  llli/ricn>i  (pp.  2'iO  et  sq.)-  (^oux-ci,  il  est 
vrai,  ne  sont  plus  que  d'anciens  Celles;  connue  les  Thrar.e'î:  Thraccs  d'l:u- 
ropc  d'abord  (pp.  208  et  sq.),  Thraccs  d'.Vsic  ensuite  (pp.  283-312). 

Ici  s'oUvre  un  nouveau  chapitre,  toujours  avec  l'en-tûle:  Anciens  Celtes, 
porlant  en  sous-titre  :  Les  Vêlages  en  Europe.  Nous  y  apprenons  (p.  318) 
que  Us  Arcadiens,  les  Vôlasjes  autoctkones  de  l'Altique,  les  ThessalicnSy  les 
Thcsprotes^  élaionl  d'andrns  Celles;  en  Asie  (pp.  321-320),  les  Zyyiens,  les 
llénioetiiens,  les  Lycaoniens,  les  Lycicns,  les  Caucunes  cl  les  Lélèijcs  (p.  327) 
avaient  le  inOme  caractère. 

Cette  énuniéralion  doit  suffiic,  i-l  l'on  coMiprend  que  nous  ne  la  discu- 
tions pas. 

La  conclusion,  après  trois  cents  pages  de  discussion  ou  plutôt  d'accu- 
mulation de  textes  à  l'intini,  est  en  deux  mots  que  :  toutes  les  populations 
primilives  de  l'Europe  sans  cxceplion  et  une  grande  partie  des  populations 
de  l'Asie  Mineure  sont  des  populations  cc/<îgj<es,  Ce/<es  proprement  dits  ou 
anciens  Celtes^  mais  en  fin  de  comple  des  Celtes. 

A  rôle  de  celle  innombrable  série  de  tribus  celtiques  mais  sans  aucun 
lien  avec  elles,  soit  de  parenté,  soit  même,  ce  semble,  de  civilisation  ou  de 
langue  ',  se  placent  les  Gaulois,  qui  sont  des  Scythes. 

Voir,  page  372,  la  seconde  partie,  les  Scythes. 

En  opposition  au\.Celtes,  sont  en  cirot  rangés  sous  celle  dénomination  : 
les  (laulcis  ou  Galalt's  (pp.  373-41 1),  comprenant,  cela  va  sans  dire,  les 
lioiens;  les  Volkes  Tectosages,  les  Senones  on  Semnones,  les  Cénomans,  les 
Eduens,  les  Arvcrnes,  les  Helvètes,  les  Cimbres,  les  Teutons,  les  Bastarnes,  les 
Scordisques,  les  Taurisques,  les  Transes  ou  Prauses,  dont  la  parenté  avec  les 
(ialatcs,  sinon  avec  les  Scythes,  est  très  acceptable;  maiseusuile,  assertion 
bien  autrement  contestable,  les  Vandales,  les  Burgundes  (p.  309),  les  Gé- 
pidcs,  lesGoths,  les  'Wisigoihs,  les  Lombards  (p.  401).  Ce  qui  revientà  dire, 
thèse  ancienne  et  souvent  réfutée,  que  les  Gaulois  étaient  des  Germains. 

Poussant  sa  Ihèseà  l'exlrûme,  M.  Lemière  (p.  431),  dans  un  chapitre 
plus  particulièrement  consacré  aux  Scythes,  nous  donne  la  liste  des 
peuples  de  race  scylhe  apparentés  aux  Gaulois  et  non  énumérés  jus- 
que-là. Celle  liste  nous  conduit  au  delà  de  l'indus.  Clle  comi)rend  les 
Amazonts,  les  Albaniens  d'i  Caucase,  les  Colchidiens,  les  Béjhires.,  les  Mu- 
erons, les  Mosynùciens,  les  Tibaréncs,  les  Chalybes,  les  Caspiens,lesSindes,  et 
enfin,  quoique  avec  réserve,  les  Bactriais,  les  llyreanicns  cl  les  Sog- 
dicns. 


1.  Pour  .M.  Lciiiière,  le  seul  vcsti;ic  restant  de  la  laugue  gauloise  Cbt  :  la   BiUu 
d'Ulfilas,  Le  gaulois  était  uuc  langue  germanique  ! 


Til  lu.vrr.  Anr.iiKoLor.iorr.. 

Il  finil  ^'ar^lMol•  là  : 

Kcs  cent  dernitMos  papos  sont  cousncrrcs  aux  Crltmct  Gnuloisilrlu  (îaulc 
yroprenv  ut  (/».'c.  Nous  rolioiivon.»:  ici  laiiloiir  îles  comimiiiicalioiis  Tuiles 
on  IS72  ot  IS73  à  la  Sociéli'  dos  (lAlcs-dii-Nord,  coque  l'on  pourtail appe- 
ler s'il  s'agissait  d'un  arlislo  :  In  pnmiirc  VKwiirr  de  M.  Lanière,  la 
tiontic. 

Nous  n'insisloris  pas  sur  la  uiamrTe  plus  que  cavalit'ro  avec  laquelle 
M.  I.omiore  liailc  les  commoulairos  do  (".(V'^ar,  cl  au!>si  quelques-uns  îles 
ailleurs  anciens,  qui  ont  lo  inalhour  d'avoir  (''uonrù  dos  opinions  ne  pou- 
vant cadrer  avec  ses  liypoihùses.  Nous  terminons  par  quchjues  lignes  eni- 
pruntt^es  h  M.  d'Arbois  de  Jubainvillc ',  et  auxquelles  nous  nous  associons 
compli'lcnienl  : 

«  On  ne  peut  que  ro_<.'ro(tor  \i\onu'nt  do  voir  un  lionune  rôellcmenl 
instruit,  un  numismate  distingué,  dépenser  tant  de  travail  ponr  jcler  de 
la  confusion  dans  les  notions  ctlinographiques  les  plus  claires  et  les  plus 
fortement  incontestées  »;  ajoutons  :  après  avoir  débuté  par  des  traits  de 
remarquable  sagacité  historique.  I/ou\rage  do  M.  Lomiôre  n'en  sera  pas 
moins  utile  ;\  consulter  et  pourra,  pourvu  qu'il  soit  lu  avec  critique,  con- 
tribuer aux  progrés  de  la  science. 

Ai.KVANDun  IkninAND. 


1.  Hevu".  m'tifjur. 


LI-: 


LAOCOON  ET  LK  CnOl  l'E  D'ATIIKNA 

A   LA  KRISE  DE  PERfiAME 


SUITE 


III 

A  QUELLE  DATE  LE  GROUPE  DU  LAOCOrjN  A-T-IL  ÉTÉ  CONÇU 
ET  EXÉCUTÉ  ? 

Celle  qiioslion  est  une  de  celles  qui  ont  le  plus  préoccupé  les  éru- 
(lits.  Elle  a  toujours  été  un  sujet  favori  de  controverses  depuis 
Winckelmann  et  Lessing,  qui  ne  s'entendaient  pas  sur  ce  point, 
jusqu'à  nos  jour>.  Comme  nous  l'avons  déjà  dit,  nous  espérons  que 
les  récenles  fouilles  de  Pergamc  nous  permettront  de  résoudre  ce 
problème  dilTicile.  Mais,  avant  de  nous  servir  des  moyens  que  nous 
offrent  les  dernières  découvertes  de  Pergame,  il  impmtedc  faire 
l'examen  des  dillicultés  qui  s'opposèrent  à  la  critique,  lorsqu'elle 
voulut  pour  la  première  fois  déterminer  la  date  exacte  de  la  créa- 
tion du  Laocoon. 

La  seule  source  immédiate,  certaine,  précise,  où  l'on  pût  puiser 
quelque  renseignement,  était  un  passage  de  Pline.  Dans  son  trente- 
sixième  livie,  cet  auteur  expose  dans  unoidre  syslématir|uc  cequ'il 
sait  des  sculpteurs  sur  marbre.  Il  y  joint  une  liste  des  œuvres  les 
plus  célèbres  qu'il  n'a  pas  nommées  dans  cette  première  partie  et 
qui  se  trouvent  à  Home,  en  ayant  soin  de  mentionner  à  chacune 

1.  Voir  le  numcrD  de  juillet. 

Août.  XLIV.  T—       o 


(6  KKVl'K    AHC.HKi'I.OC.IurE. 

(iVIlcs  le  nom  de  rarlisle  (jui   l'a  sculplée.    De  celle  façon,  Pline 
pense  avoir  nominé  h  peu  près  loiis  les  seiilptcurs  grecs  les  plus 
rêlùbies,  el  il  ajoute  eu  tenuinanl  :  «  El  il  y  a  bien  traulres  sculp- 
teurs qui  ne  sont  pas  renommés,  en  ce  sens  qui  le  nomlire  des  ar- 
tistes s'oppose  à  la  },'loire  île  (iuel(|ucs-uns  d'enUe  eux,  c'est-à-dire 
(ju'un  seul  ne  peut  pas  obtenir  toute  la  renommée  pour  lui,  ni  plu- 
sieurs la  posséder  tous  également.  Tel  c^t  le  cas  pour  le   l.aocoon 
qui  est  dans  le  palais  de  l'empereur  Titus  ',  une  (euvre  (ju'il  faut 
préférer  à   toutes  celles  de  la  peinture  et  de  la  sculpture.  H  a  été 
fait  d'une  seule  pierre,  <le  cousilii  sculenlin,  ainsi  ijuc  les  enfants 
el  les  merveilleux  enlacements  des  serpents,  par  Agésandre,  Poly- 
dore  cl  Atlianodurc  de  Hliodes.  De  même  (similitcr)   Cralére  et 
PylhoJore,  rolydccleset  lleimolaus,  un  second  Pytliodore  et  Arté- 
mon,  el  Apliro.lisius  Tullianus,  ijui  travaillait  seul,   remplirent 
d'œuvres  remarquables  les  palais  des  Césars  sur  le  mont  Palatin,  n 
Les  deux  mots  de  ce  passage  sur  le>quels  portent  toutes  les  hypo- 
tht'scs  el  les  ciitiijues  sont  le  <lc  cousilii  siiitentia  cl  le  similitcr. 

Le  de  cousilii  seutetttiii  a  été  compris  de  deux  façons  très  diiïé- 
renles.  Selon  Thierscli,  le  consilium  est  le  conseil  (jue  les  trois  ar- 
tistes formaient  entre  eux,  lorsqu'ils  délibéraient  sur  le  plan  de  ce 
monun.ent,  el,  dans  ce  cas,  la  scntrnlin  ne  peut  être  (pie  le  résultat 
détinilif  de  celle  délibération,  le  plan  (jui  les  mil  tous  trois  d'accord. 
D'après  cette  interprétation,  nous  pouvons  admettre  (jue  les  trois 
arli.-les  ont  travaillé  à  répui|ue  des  successeurs  d'Alexandre,  ce  que 
semble  indiquer  aussi  tout  lu  slyle  du  Laocoon.  Mai.^  les  adversaires 
de  cette  opinion  onl  fait  valoir  une  autre  exégèse  de  cette  pbrase  de 
Pline.  Laclimann  soutient  que  le  consilium  ne  jieut  indi(iuerquc  le 
sénat  ou  le  conseil  itrivé  de  Titus,  ci  srulcnliu  l'ordre,  le  décret  de 
ce  conseil.  La  pbrase  entière  signilierail  donc  :  «  Les  artistes  firent 
le  Laocoon  d'après  un  déciet  du  conseil  impérial,  c'est-à-dire  sous 
le  règne  de  Tilus  el  pour  Titus.  » 

Il  est  vrai  que  le  de  consilii  scnlenlia  est  la  formule  olTicielle,  là 
où  il  s'agil  d'un  décret  du  conseil  d'Llat  ou  du  conseil  impérial 
{consilium  jinnctins);  mais  ce  qui  n'est  pas  exact  c'est  (jue  celte  for- 
mule ne  soit  employée  que  dans  ce  sens.  Elle  se  dit  aussi  bien  de  la 
décision  prise  par  d'autres  corps,  par  une  famille,  jiar  exemple,  ou 
par  les  dieux  réunis  en  assemblée  délibérante. 

1.  A  l  ki.fKju"'  où  Pline  écrivait,  Tilus  n'iSlait  encore  <|ue  gOnt-ral.  Ce  oVst  que 
plu    l»rd  qu'il  moulu  hur  le  IrOni-. 


i.i:  LvooooN  Kl   i.K  t;niiii'i:  i)*\  iiikna.  G7 

De  itliis,  le  sens  de  «conseil  inipérial»  ne  va  pas  sans  les  plus 
giafult's  (ii (lieu liés. 

Pour  s'en  rendre  comiile,  il  faut  rejM'endre  d'un  peu  haut  l'Iiis- 
luiie  du  inyllie  de  Laocnnn.  Macrohc'  rioii>  apinciid  (jut- Vir^'ile  a 
lire  de  l'auteur  grec  Pisandrc;  tout  ir  srcdiid  livie  de  Vl'^nridi',  où  il 
parle  de  la  destruction  de  Troie.  Mais  les  (euvres  de  Pisandrc  ont 
disparu  et  il  est  probable  (|u'il  a  raconté  la  mort  de  Laocoon  de  la 
môme  façon  (jue  les  autres  auteurs  grecs,  qui  donnent  un  récit  loul 
diiïérenl  de  celui  de  Virgile.  11  serait  donc  possible  que  ce  fût  Vir- 
gile qui  eiU  inventé  la  légende  telle  qu'elle  est  généralement 
connue.  Suivant  ce  raisonnement,  les  artistes  grecs  dont  le  groupe 
est  d'accord  avec  la  description  de  Virgile  auraient  vécu  après  cet 
auteur.  Ils  auraient  travaillé  d'après  son  poème,  et  cela  sous  les 
empereurs.  Quintus  Calaber^  semble  venir  à  l'appui  de  cette  hypo- 
thèse. Dans  son  récit,  Laocoon  devient  aveugle  par  la  volonté 
d'Athéna,  au  moment  où  il  conseille  aux  Troyens  de  se  mèfici'  du 
cheval  de  bois.  Comme  il  persiste,  malgré  cette  inlirmité  soudaine, 
à  donner  aux  Troyens  le  conseil  de  brûler  le  cheval,  la  déesse  fait 
sortir  de  Ténèdos  deux  énormes  serpents  qui  dévorent  ses  deux  fils, 
mais  le  vieillard  lui-même  est  épargné;  aveugle  et  faible,  il  doit 
entendre  leurs  cris  déchirants  sans  pouvoir  venir  à  leur  aide.  Voilà 
la  forme  sous  laquelle  la  légende  était  connue  en  Grèce,  et  l'on  a 
dit  que  c'était  Virgile  qui,  pour  la  première  fois,  avait  eu  l'idée 
d'envelopper  le  père  des  mêmes  anneaux  qui  causent  déjà  la  mort 
des  fils.  Cependant,  on  ne  voit  pas  pourquoi  ce  ne  serait  pas  au 
contraire  Virgile  qui  aurait  pris  ce  trait  si  frappant  au  groupe  des 
trois  artistes  de  Rhodes. 

Il  est  vrai  que  dans  tout  le  reste  la  description  de  Virgile  n'est  pas 
d'accord  avec  le  groupe  du  Vatican  ;  et  l'on  a  fait  observer  que,  si  ce 
monument  avait  existé  de  son  temps,  il  l'eût  décrit  fidèlement  dans 
son  poème,  tandis  qu'au  contraire  les  sculpteurs  n'étaient  pas  tenus 
de  suivre  Virgile  dans  tous  les  détails.  Pour  n'en  donner  qu'un 
exemple,  les  sculpteurs  ne  pouvaient  pas,  comme  Virgile,  repré- 
senter Laocoon  couvert  de  la  robe  sacerdotale.  Les  plis  de  cette  robe 
entortillés  par  les  anneaux  des  serpents  eussent  été  du  plus  mauvais 
elTel.  Il  me  semble  donc  impossible  de  tirer  une  conclusion  de  cette 
comparaison  du  deuxième  chant  de  VÉncide  et  du  groupe  duLaocoon. 


1.  Satunml.  lib.  V,  cap.  il. 

2.  Paraltp.Ub.  XII,  v.  398-408  et  v.  439-67i. 


68  HRVUR   AUCIIÉOLOGIOUK. 

I/iJée  (l'j'nvoloppcr  lo  pt'iv  de  In  mC-mo  niorl  iiiio  les  iloiix  liU 
poiil  t^tiv  VLMUie  à  Virgile  cl  :\n\  .irlislcs  di'  Kliodc^  d'uni'  trnisit'iiir 
soiiivi'  ijtii  nous  osl  inconnue  '. 

Il  n'est  ilonr  pas  ntVossniro  (juo  Virgile  nil  dans  sa  dosrriplion 
copié  l'iiMiYro  des  sculpteurs,  ni  ipie  ces  derniers  nient  rlé  inspirés 
par  lui. 

Après  ce  rapide  exposé  de  l'Iusloire  du  ni\tlie,  Ijs  dillicullés  que 
présente  le  <lc  coufilii  scntcntin,  pris  dans  le  sens  de  sur  le  conseil 
imprrinl,  vont  sauter  aux  veux. 

Avani  le  groupe  dont  parle  IMiue,  il  n'existait  aucune  représen- 
tation plastiijue  du  Laocoon. 

Aucun  auteur  ancien  ne  mentionne  une  peinture  -  ou  une  sculp- 
ture pareille,  aucun  poète  ne  la  décrit,  et  voici  les  conseillers  d'un 
empereur  qui  prennent  tout  à  coup,  sans  y  être  puussés  par  aucune 
circonstance  extérieure,  la  lumineuse  décision  de  f.iie  sculpter  un 
groupe  représentant  la  mort  de  Laocoon  et  dt  sesd('Mx  (ils.  it  ([uien 
chargent  trois  célèbres  artistes  de  Rhodes  ! 

S'il  s'agissait  d'un  monument  déj'i  connu,  d'une  u'uvie  eélèlne, 
d'un  sujet  représcnlé  dans  un  tableau  renommé,  on  coniprendrail 
que  le  conseil  impérial  décidât  d'en  faire  exécuter  une, copie  par  de 
bons  artistes  pour  orner  le  palais  de  l'empereur.  Mais  que  ce  même 
conseil  se  hasarde  spontanément  à  faire  sculpter  une  (puvre  telle 
que  l'audace  seule  du  génie  pouvait  la  concevoir,  voilà  (jui  est  abso- 
lument invraisemblable,  pour  ne  pas  dire  plus.  Ou  bien  encore,  si  ce 
monument  était  une  œuvre  représentant  ({uebiue  grand  fait  national, 
une  victoire  de  l'empereur  Titus,  on  pourrait  admettre  que  le  conseil 
impérial  a  chargé  de  celte  tâche  (juriques  artistes  en  renom. 

.Mais  le  Laocoon  est  un  sujet  mylliologiiue,  qui  n'a  rien  ;\  faire 
avec  les  ôvénemenls  du  temps;  bien  plus,  c'est  un  sujet  qui  n'existait 
pas  même  ni  sous  celle  forme,  ni  sous  \ine  autre,  avanl  celte  époque  ; 
comment  donc  croire  (jue  les  conseillers  d'un  empereur  ont  pu  avoir 

1.  Nous  verrons  plus  loin  qu'il  faut  attribuer  pcut-ôtrc  au  théâtre  la  plus  grande 
innucncc  sur  la  création  du  groupe.  Selon  d'-iutrcs,  il  faudrait  clirrclicr  l'origin»!  du 
Krou|.c  dan»  Tépopi-c;  d'Arklicio»  où  l'un  des  flls  bpuI  Ruccombn  aux  morsures  des 
iMîrpeits  (voyez  An/i,roliifj.  '/.rttung,  1878,  107  f.).  T.n  effet,  en  considérant  le  chef 
d'œuvr*'  de  Rhoden,  on  peut  supposer  que  lo  llls  aîné  s'échappera,  Sculenitnt  l'u- 
nité de  l'eiiM-mble  y  perd  beaucoup,  et  cette  hypothèse  aquebiuc  chose  d  invraiscui- 
blable. 

2.  l  ne  peinture  trouvée  :\  Poinpéi,  hur  une  paroi,  représente  le  groupe  du  l.ao- 
eooD.  (Voyoi  Àntmli  d'il'  Inst.^  1873,    tav.  d'ag^f.  o,  p.  337.) 


LK    I.AOCOON    KT    LK    (JUOI'I'K    d'aTMKW.  09 

Tidrc  (le  le  l'jiiiT  reprùsenter ?  On  cheiclicrail  vainement  dans  toulc 
riiisloirc  (le  ranti<iuil(''  une  anai()i,Me  à  un  fait  semblable.  On  ne 
Irouvcra  nulle  pari  des  conseillers  impériaux  ayant  de  ces  concep- 
tions de  génie  ot  les  faisant  exécuter  à  des  artistes  dans  des  œuvres 
maj^Mslialt's  et  immortelles. 

Ceiiendanl  d'aulies  auteurs  disent  iju'il  ^/aj^il  d'une  commission 
chargée  d'orner  le  palais  de  l'empereur.  D'autres  pensent  à  la  Hou)./i 
de  la  vilbî  de  lUiodes.  Alais  toutes  ces  liypotlièscs  se  heurtent  aux 
mêmes  diflicultés. 

Dans  (|uil  |)ays,  à  (luclle  époijuc,  Irouvcra-lon  (|uel(jue  chose 
d'analoi,'ue?  Huelle  est  la  lépubliijuc,  (jucl  est  rcmpirc  ou  les  com- 
missions et  les  conseils  inspirent  aux  artistes  de  ces  idées  de  génie 
capables  de  les  immortaliseï'  1  Le  bon  sens  répond  (|uil  n'en  existe 
pas. 

Celte  explication  est  donc  forcée.  Elle  vient  du  désir  de  tordre  les 
mots  de  Pline  au  prolil  d'une  théorie  erronée,  et  il  est  clair  (jue  la 
seule  manière  logique  de  traduire  le  de  coiisilii  sentenlia  doit  être 
la  suivante  :  <(  siw  la  dccision  prise  à  la  suite  de  leur  délibératiou,  les 
artistes  taillérenl  le  Laocoon,  ses  enfants  elles  serpents,  dans  un 
seul  bloc  de  marbre.  » 

Cette  traduction  a  l'avantage  de  tout  expliquer  facilement.  Un  des 
artistes  le  plus  célcbies,  peut-être  Athanodore,  a  conçu  le  projet  de 
celte  œuvre  audacieuse.  Il  en  a  parlé  ù  Agésandre,  son  père,  et  à 
Polydore,  son  frère.  Ils  se  sont  alors  réunis  tous  trois  en  consilium 
pour  délibérer  sur  les  moyens  de  mettre  leur  pj-ojct  à  exécuiion,  et 
le  plan  qui  les  mil  d'accord  fut  cette  sententia  dont  parle  l'Iine.  Il  n'y 
a  donc  rien  dans  ce  texte  qui  puisse  prouver  que  le  Laocoon  ait  été 
sculpté  sur  l'ordre  du  conseil  de  l'empereur  Titus. 

Ce  qui  a  nécessité  une  réfutation  aussi  minutieuse  de  celte  exé- 
gèse du  passage  de  Pline,  c'est  que  Lessing,dans  ^.on  Laocoon  ',  s'est 
efforcé  de  prouver  que  ce  monument  avait  été  composé  après  Vir- 
gile, d'après  son  poème,  et  cebi  sous  Auguste  ou  roiis  l'empereur 
Titus.  Dans  tous  les  cas  Lessiiig  ne  voulait  pas  donner  raisoFi  à 
Winckclmann,  qui  admettait  que  le  Laocoon  avait  été  sculpté  à 
rèpoijue  d'Alexandre  le  Cian.l. 

C'était  pouitanl  Wiiirkelmann  (|ui  se  rapprochait  le  jdus  de  la 
vérité,  comme  nous  le  verrons  dans  la  suite.  Mais  Lessing,  ce  maître 

1.  Laokoon  oder  ûber  die  Grcnzen  dcr  Mulcici  und  Poésie,  17C6. 


7<l  lUVl'K    AnCHKOLOfilOUK. 

il;iii>  la  criliiiiK^  tr.irl,  trouvait  toujours  des  ar}:iini<'nis  pdur  les 
thèses  iiu'il  voulait  juouver. 

Il  nous  faut  donc  détruire  pièce  à  pièce  rétlilice  de  Lessing  avant 
d'arriver  ;\  une  base  solide,  capable  de  soutenir  une  nouvelle 
tlièorio. 

Il  est  vrai  ijue  ee  n'est  pas  Lcssinj,'  qui  a  mis  en  avant  l'interpré- 
lalion  du  de  consilU  sententia  par  les  mois:  sur  lo  conseil  impénal. 
11  était  trop  versr  dans  l'art  de  la  criti(|U(>  poui'  s'aventurer  aussi 
loin.  Mais  celte  interprétation  lloltait  vaguement  devant  son  esprit. 
C'est  ce  dont  on  peut  se  convaincre  en  lisant  la  fin  du  vingl-sixiéme 
chapitre  du  Laocoou,  où  Lessing  attribue  ce  chef-d'œuvre  à  un  plan 
conçu  peut-être  par  Asinius  Pollio,  un  amateur,  un  protecteur  des 
arts,  un  admirateur  de  Virgile,  un  homme  enfin  qui  possédait  une  ri- 
che collection  d'œuvres  anti(]ues  el  (jui  en  faisait  exécuter  de  nou- 
velles à  son  gré.  Si  Lessing  avait  poussé  les  conséijuences  de  ses  hypo- 
thèses jusqu'au  bout,  il  aurait  donc  traduit  le  tie  consiUi  sententia 
par  :  sur  te  ronsril  d'Asinius  Pollio,  ou  bien  :  sur  b'  conseil  de  Titus; 
mais  il  s'est  bien  gardé  de  précisera  ce  point  son  inlerprétation.  Il 
en  voyait  trop  les  dangers. 

Lachmann  el  les  ciitiques  allemands  modernes,  moins  habiles  que 
leurs  ancêtres,  ont  très  certainement  pris  à  Lessing  cette  exégèse 
que  nous  nous  sommes  efforcés  de  réfuter. 

Il  nous  reste  encore  à  reprendre  le  second  argument  de  Lessing, 
basé  sur  le  mot  siiniliter  de  ce  passage  de  Pline  cité  plus  haut. 

Après  avoir  donné  les  noms  des  artistes  du  Laocoon,  Pline  ajoute: 
0  De  même  {similitrr)  les  palais  des  Césars  sur  le  mont  Palatin  ont 
été  remplis  des  chefs-d'(cuvre  les  plusreniar((uables  par  Cratère  et 
P}thodoie,  Polydectes  et  Ilermolaiis,  elc.i 

.Mais  il  .se  trouve  quêtons  les  autres  artistes  mentionnés  par  Pline 
dans  ce  passage  sont  d'une  époque  récente  ;  ce  sont  des  (irecs  (jui 
travaillaient  à  Uorae  sous  les  empereurs.  Lessing  disait  donc  que 
le.-  trois  .sculpteurs  du  Laocoon  mentionnés  jtar  Pline  dans  les 
phrases  précédentes  devaient  être  aussi  les  contemporains  de  cet 
autf'ur,  sinon  il  n'aurait  pas  uni  cette  nouvelh'  pensée  à  la  précé- 
dente par  le  mol  sitnilitrr. 

Opcndanl  il  est  facile  de  prouver  r|ue  cet  adverbe  ne  se  rapporte 
pas  au  temps  où  vivaii-nl  ces  artistes,  mais  à  l'idée  générale  (jue  Pline 
vient  d'exprimer. 

11  a  voulu  démontrer  par  une  succession  d'exemples  l'asserlion 
qu'il  avait  avancée,  d'après  la(iuelle,  lor.Mjue  plusieurs  artistes  Ira- 


LK    LAOCOO.N    KT    (.K    C.Hol'I'i:    d'a  lllliNA.  71 

vaillent  à  une  mt'^ine  iiiuvro,  leurs  noms  sont  moins  illustres,  parce 
qu'aucun  d'eux  n'obtient  pour  lui  seul  toute  la  }<loire  et  (ju'ils  ne 
peuvent  pas  tous  ensemble  la  posséder  également. 

Après  avoir  cité  à  l'appui  de  sa  tliéoiie  les  artistes  du  Laocooii, 
une  (euvre  très  renommée  qu'il  met  au-dessus  de  tout  ce  qui;  la 
sculpture  et  la  peinture  ont  jamais  créé,  il  veut  ajouter  une  série 
d'exemples  et  il  les  prend  tout  natur(dlemenl  au  monde  qui  Tl'Ii- 
toure,  il  les  cboisit  parmi  les  artistes  contemporains  parce  ({u'ils  lui 
étaient  mieux  connus  ainsi  qu'à  ses  lecteurs. 

Je  crois  (jue  cette  interprétation  sulïlt  pour  cxpliqLer  ce  motnoiil 
Lessing  cherchait  à  appuyer  son  hypothèse.  C'est  une  transition  na- 
turelle d'un  fait  plus  ancien,  moins  connu,  à  des  personnages  plus 
récents  et  plus  à  la  porlée  de  tous. 

Lessing  a  trouve  encore  d'autres  arguments  en  faveur  de  sa 
théorie.  Il  dit  que  si  le  groupe  du  Laocoon  avait  été  travaillé  en 
Grèce  à  l'époque  de  Lysippe,  oi!i  Winckelmann  le  fait  remonter^, 
s'il  avait  autrefois  orné  la  ville  de  Rhodes,  il  faudrait  s'étonner  du 
silence  que  tous  les  auteurs  grecs  gardent  au  <ujet  d'un  pareil  chef- 
d'œuvre.  «  Il  serait  étrange,  dit  Lessing,  (j!ie  de  si  gjands  maîties 
n'eussent  pas  sculpté  d'autres  œuvres  célèbres,  et  que  Pausanias 
n'eût  vu  ni  le  Laocoon,  ni  aucune' de  ces  autres  créations  dues,  sans 
doute,  au  ciseau  des  mêmes  artistes.  Au  contraire,  si  le  groupe  a  été 
sculpté  à  Rome  par  des  contemporains  de  Pline,  le  silence  s'explique 
mieux.  La  quantité  de  chefs-d'œuvre  entassés  dans  cette  ville  sous 
les  empereurs  faisait  qu'une  création  comme  le  Laocoon  pouvait 
facilement  passer  inaperçue.  » 

Mais  la  Grèce  n'était-elle  pas  aussi  couverte  de  chefs-d'œuvre?  Les 
récentes  découvertes  de  Pergame  sufllsent  pour  nous  faire  pres- 
sentir quelle  richesse  de  statues  peuplaient  les  agoras  antiques.  A 
Rhodes,  comme  à  Rome,  le  Laocoon  pouvait  disparaître  effacé  par 
la  splendeur  du  cadre  qui  l'entourait  ou  pfdir  sous  l'éclat  des  mar- 
bres sortis  (les  mains  des  plus  grands  maîtres. 

D'ailleurs  Pausanias  n'est  pas  d'une  exactitude  .^ciupuleuse  dansses 
récits.  Il  écrit  au  jour  le  jour  un  album  de  voyage.  Son  intention 
n'est  pas  de  donner  un  traité  complet  des  œuvres  de  la  sculpture 
grecque.  Il  dit  seulement  ce  qu'il  a  vu  et  ne  décrit  que  ce  qui  l'a 
frappé. 

Enfin  le  groupe  du  Laocoon  est  loin  d'être  un  chef-d'œuvre  à 
égaler  à  ceux  de  Phidias  ou  de  Praxitèle.  Voilà  ce  que  Les>ing  ne 
pouvait  pas  savoir,  parce  que  de  son  temps  on  connaissait  trop  peu 


7:i  m  \  i  I    \iii  III oi.tM.h^irK. 

(l'ipuvrcs  (Ii«  la  holk-  t'po(|uo  pour  li-s  cslimcr  :\  leur  juste  v;\hMir.  l.o 
Laoroon  ajiparlii'ut  ;\inu!  êc:i|tî  i|(ii  n'a  pas  olit.-nu  clu'/.  Us  t'iii-cs 
cux-iui^iiics  une  .i;lniiv  aussi  piainh;  qwc  rolN^  (1rs  nrlislo.s  q\n'  je 
viens  (le  iioiiiiniT.  Jiis.|u  a  la  lin  du  xviii'  siril.-  on  a  licnuronp  cxa- 
t;érù  !a  braiilt''  divs  (iMiviesdcs  écoles  de  Uliodfs  ol  de  Poii,Mme.  (>'csl 
(]u'(^n  ne  iioiiviit  pas  alors  les  comparer  aux  fragnienls  des  œuvres 
de  Phidias  elde  Praxitèle  que  les  récentes  fouilles  ont  exhumées. 
Pausnnias  ne  man»iuerail  pas  de  décrire  une  œuvre  de  Phidias,  île 
•Myron,  de  P\th;igoras  de  Uhé},Mon  ou  de  Calamis  d'Athènes,  el  do 
tous  les  anciens  iniiltros;  mais  une  création  il  s  écoles  jdus  modernis 
devait  lui  paraître  beaucoup  moins  digne  d'admiration. 

Au  contraire,  Pline  paraît  éprouver  pour  le  Laocoon  un  enthou- 
siasme (jui  éclate  à  chaiiue  mot.  Ce  n'est  pas  que  ce  senlniieiil  soit 
di'i,  comme  on  l'a  dit,  à  ce  que  ce  groupe  était  une  création  de  son 
siècle,  mais  il  tient  à  une  haliitnde  d'exagérer  lesex[iressions,  proiirc 
à  Pline  et  5  phisieurs  autres  autour.,  latins '.  L'o'uvre  dont  Pline 
s'occupe  dans  le  moment  où  il  écrit  est  toujours  pour  lui  la  plus 
belle  (le  toutes  celles  que  l'on  ait  jamais  cvci^cs.  Il  ne  faut  pas  attacher 
trop  d'importance  à  ces  hyperboles  de  rhéteur.  Si  les  trois  artistes 
dont  parle  Pline  vivaient  de  .'^on  temps,  toute  sa  phrase  devient 
presque  incnnipièhensible.  Comment  croire,  en  effet,  que  les  con- 
temporains de  Pline  fussent  assez  peu  doués  de  mémoire  ou  assez 
désinléressés  des  choses  de  l'.at  pour  ne  pas  se  rappeler  les  noms  des 
trois  artistes  qui  venaient  de  créer  dans  leur  ville,  pour  leur 
empereur,  sous  leurs  yeux,  une  leuvre  pareille  il  celle  du  Laocoon  ? 
.Mais  si  ces  artistes  vivaient  plusieurs  siècles  auparavant,  si  leur 
•  cuvreviiil  h  l»ome  sans  ins  lipliou,  si  leurs  noms  ne  furent  pas 


1.  CiccTon  est  un  de  ceux  qui  coiilienneni  hs  cxagiiratioDs  les  plus  nombreuses 
1 1  souvent  elles  ont  él*l  la  cause  de  pravi  s  erreurs.  Ainsi,  dans  le  Pe  nratore,  I,  54, 
Cicéron  puilHiitdu  juRcment  de  Socrate  dit  :  u  iSocrates!  respondit  sese  nieruisso 
ni  aen|)libsin»i4  lionoribus  et  prasmiii  dccoraretur,  el  ci  victus  fiuotiJianus  in  l'ryU- 
iieo  publiée  pra-beretur  :  (juihuiif)s  apuil  (•rtpcos  warimus  luihctur.  »  Ainsi  d'après 
CicéronVéïait  ch<z  les  Grecs  le  plus  praiid  do  tous  les  lionncurs  que.  d'olro  nourri 
au  l'ryianée  aux  frais  de  ri'ltat. 

I>c««xprissions  de  Cicéron  ont  donc  fait  naître  l'idi^c  fausse  que  Socrate  aurait 
demandé  cette  distinction  parce  qu  clic  était  le  plus  grand  do  tous  les  honneurs.  On 
oublie  que  de  toutes  les  récompenses  accordée»  îi  Athènes  aux  citoyens  vertueux,  «elle 
de  la  nourriture  au  l'rjtauéo  était  une  des  moins  coûteuses;  on  oublie  cjuc  Socrate 
demande  cirlte  dibtiicilon  comme  la  seule  qui  convienne  ù  ui;  vieillard  pauvre.  Je  re- 
lèverai |.l.jAicur»  erreurs  do  ce  genre  dans  uia  Vie  dr  Hocnilc,  qui  jiaraUra  pro- 
ch&iaeœcnl. 


i,K  i.AocooN  i:r  i.\:  (iiuiuri*.  n'\riii;N.\.  73 

copiés  sur  le  nouveau  piédestal,  s'ils  n'ùtaicnl  ronnus  (|ue  des  aina- 
Icurs  et  (l'un  public  de  choix  par  les  écrits  et  les  entretiens  des 
pliilosoplies,  (i;ins  co  cas  on  coniiirciid  comment  Pline  peut  dire  de 
SCS  contemporains  ijuc  les  noms  des  artistes  du  I.nocoon  leur  sdni 
moins  connus  ipie  ceuv  d'autres  sculpteurs. 

C'est  (lue  les  Uomains  ne  cherchaient  pas  à  fixer  dans  leur  m.'- 
nioire  trois  noms  étrangers  et  iiidilTérenls  par  eux-mêmes. 

Il  résulte  de  celte  longue  analyse  qu'on  ne  peut  tirer  du  passage 
de  IMine  absolument  rien  qui  prouve  la  date  précise  à  laquelle  le 
t;roupe  du  Laocoon  a  été  sculpté. 

Heureusement,  il  y  a  d'autres  molifs,  dus  au  style  même  du 
monument,  qui  permettent  d'établir  (jue  ce  groupe  n'a  pas  pu  être 
créé  sous  l'empereur  Titus,  mais  qu'il  remonte  au  moins  au  ii"  siè- 
cle avant  noire  ère.  Il  nous  reste  donc  à  soumettre  le  groupe  du 
Laocoon  et  son  style  à  une  étude  comiiaraiive.  Mais,  av;.nt  de  pro- 
céder à  cette  anatdHiie  esthétique,  il  convient  de  s'élever,  en  jire- 
nant  pour  guide  t mlùt  Lessing  et  tantôt  Vi.-conli,  ù  une  certaine 
hauteur  (lui  permette  d'embrasser  d'un  coup  d'œil  ces  rapports 
intimes,  ces  atlinilés  et  ces  différences  (jui  existent  entre  la  poésie 
et  la  seul  pi  are. 

ADH  li;.\    WAGiN'O.N. 
{La  suite  prochainement.) 


NOTIHL;  SLll  LETAT  ACTUEL 


RUINES  DE   DOCLÉA.' 


La  rivière  Morara,  après  avoir  parcnuru  une  partie  ilii  Monlé- 
négro,  rcroit,  en  tléhouclianl  dans  la  plaine  de  Podgorira,  la  livicre 
Zèla.  Le  confluent  de  ces  deux  rivières  forme  un  angle  aigu  tourné 
au  sud  vers  le  lac  de  Scutari. 

Parallèlement  h  la  Moraea  coule  la  (>liirèlia,  petit  torrent  ijui  des- 
cend des  derniers  contreforts  des  collines  des  l'ipcri  et  vient  se 
jeter  dans  la  Zèla,  à  îiOO  mèires  environ  de  son  eoniluent  avec  la 
Moraea. 

C'est  dans  l'angle  formé  par  la  Zêta  et  la  Moraea,  entre  cette  rivière 
et  la  Chirèlia,  que  s'élevait  l'ancienne  cité  de  iJocléa. 

La  forme  générale  de  Docléa  est  celle  d'un  rectangle  allongé, 
pi.  XIII.  Un  des  grands  côtés  suit  à  peu  près  exactement  la  rive  gau- 
che du  torrent  Chirèlia,  et  le  grand  côté  op[)Osé,  la  rive  droite  de  la 
Moraea. 

L'un  des  petits  côtés  devait  suivre  la  rive  gauche  de  la  Zèla,  et 
l'autre  petit  eûiè  était  à  peu  près  perpendiculaire  à  la  Moraea  et  à  la 
Chirèlia.  L'état  des  ruines  permet  assez  facilement  dt  jugei-dcsco'.i- 
tours  de  l'enieinlc,  surtout  dans  la  partie  nord  et  est. 

Au  point  où  Docléa  a  été  construite,  les  trois  rivières  qui  l'en- 
serrent sont  très  encaissées  (coupe  a  b  cl  r  il).  Le  niveau  des  eaux 


1.  l.A  prévnic  notice,  adressi^o,  bous  formo  de  rnpporl,  ?»  M.  le  Ministre  de  Tins 
truction  |>ublii|uc  t-t  des  bc.iiix-arts,  est  .'>cc<itn|iaKiH'e  d'un   plan  do    Docli'a,  d'un 
lover  l  >pograi»lii'|uc  de  »08  environs,  et  des  dessins  de  quelques  inscriptions  reic- 
véei  tur  place.  {Note  ilr  ht  Dircrliim.) 


NOTicK  SU»  l'État  actukl  dks  iiuinks  me  docliîa.  7.'> 

e?l  à  ()  iiiMrcs  environ  du  i)lan  génrral  du  terrain  ',  el  les  berges, 
complètement  rocheuses,  sont  très  sensiblement  verliralcs. 


7--  ^^ ^ 


1. 


-^;./ 


Le  côté  est,  le  seul  abordable,  était  fermé  par  un  vaste  fossé,  de 
9  à  10  mètres  de  largeur,  dont  nous  reparlerons  dans  la  dcscriiition 
de  rcnccintc.  Au  point  de  vue  de  sa  défense,  Docléa  était  donc 
très  remarquablement  située,  complètement  à  l'abri  de  toute  attaque 
sur  trois  de  ses  faces,  et  sans  doute  très  solidement  protégée  du  côté 
de  Test.  Le  terrain  où  s'élevait  la  cité  romaine  a  au>si  l'avantage 
d'être  plus  élevé  que  celui  des  rives  opposées,  ce  qui  tient  sans 
doute  à  ce  que  cet  espace  de  terrain  fait  suite  au  dernier  contrefort 
des  collines  de  Stjcwna,  situées  au  nord  de  celles  de  Ktribchié  et  de 
Glavitza  Dolianska.  La  Cbirélia  ne  forme  pas,  à  proprement  parler, 
une  vallée;  ce  torrent  coule  au  milieu  d'une  déchirure  de  la  roche. 

L'enceinte  A  (plan  de  Docléa),  qui  fermait  Docléa  du  cùlé  est, 
était  formée  par  une  longue  muraille  rectiligne,  couverte  par  un 
fossé  faisant  sans  doute  communiquer  les  eaux  de  la  Morara  eldc  la 
Chirélia.  Ce  fossé,  en  partie  comblé,  est  encore  très  visible.  Entre  le 
fossé  et  la  muraille  d'enceinte,  une  longue  bande  de  terrain  recou- 
verte de  vestigesdeconstructions,  au  milieu  desquels  on  remarque 
de  larges  pilastres  en  moellons,  ferait  supposer  qu'une  deuxième 
enceinte  de  protection,  probablement  voûtée,  devait  compléter  la 
défense  de  la  ville  de  ce  côté. 

Les  remparts  qui  forment  l'enceinte  de  la  ville  parallèlement  à  la 
Chirélia  s'élèvent  encore,  en  certaines  de  leurs  parties,  h  7  mètres 
au-dessus  du  plan  du  sol.  Ces  murailles  ont  h  leur  base  jus(iu'à 
A  mètres  d'épaisseur,  ce  qui  fait  supposer  que  leur  élévation  devait 
être  assez  remarquable. 

Le  côté  F  E  du  polygone  d'enceinte  est  percé  d'une  ouverture  de 

1.  Lorsque  ces  observations  ont  été  faites  (octobre  1881)  les  cours  d'eau  du 
Monténégro  et  de  la  haute  Albanie  subissaient  une  des  crues  les  plus  considérables 
que  l'on  ait  observées. 


76  iiiM  i:  MK  iiKoi.or.iouK. 

7  ;i  H  iiirlres,  (|ui  ilevail  cire  une  des  purk's  inuniiiucnlales  ilc  la 
villo.  Dans  fclle  |iarlio  do  l'cnrcinlc,  di'S  vides  de  forme  rcclaiij^u- 
laiie  onl  t'ii"  résolves  dans  linliTicnir  de  In  ni;iiailli'. 

Les  murs  do  Hoclca  se  ooiilinuonl  jii^i)u'.iu  conlluoiil  dr  la 
Morara  et  de  la  Z«''la.  A  l'anglo  formé  par  le  coiilluenl  do  la  Cliirolia 
el  de  In  Zola,  sï'Iovnil  iino  vasie  loiir  dotJ.  les  linros  sont  oiioore 
Irùs  visibles,  vaste  liaslion  (jui  a  dû  élro  ôlcvi'  pour  masiiuor  le 
dêhotichê  de  la  Zola,  roiilo  iinlurelle  du  Danube  nu  lac  île  Sculari  el 
à  la  mer. 

rarallolemonl  a  la  Zêta,  il  n'existe  nueunc  Irace  de  eonstruolions, 
mais  de  nombreux  amonoillomenls  de  moellons  me  pcniit  llcnl  do 
suppOHrijue  l'eneeinlo  suivait  à  pou  près  exaclemeiil  lo>  lives  de  la 
Zét.i.  Parallolomenl  à  la  Muraea,  on  lemaniue  des  pans  de  iniiiaille 
beaucoup  uioins  bien  conservés  que  ceux  du  Ironl  nord  de  la  ville  ; 
ces  porlionsde  remparlson'.  inlcrompucs  par  des  lerlrcs  recouvrant 
dos  vesligos  el  perniellanl  de  rcconsliluer  aisément  le  front  sud  de 
l'enceiiile. 

Lu  superficie  de  r;i.neienne  cité  i  (tin  line  est  i\  peu  prés  de  32  bec- 
lares,  ce  qui  donne  une  idée  de  son  imporlance. 

Dans  l'inlérieurde  l'enceinle,  il  est  didicile  de  démêler,  au  milieu 
de  l'amonctlloment  dos  pierres,  les  traces  des  anciennes  constiiie- 
lions  qui  onl  pu  y  exister.  Coitendaiil  on  peut  voir  en  K  (plan  de 
Doeléal  des  ruines  assez  bien  conservées.  Los  ruines  marquées  T 
cl  S,  qui  ont  une  élévation  de  4  a  5  métrés,  paraissent  avoir  appar- 
tenu à  un  ancien  temple  :  on  y  voit  encore  dos  débris  de  colonnes. 
La  superficie  totale  de  Docloa  est  rccou verte  de  voslij,'os  de  cons- 
tructions cacliés  .sous  la  terre  el  les  liantes  boibos.  11  est  presque 
certain  qu'en  enlevant  une  très  mince  ooucbe  du  sol  on  découvrirait 
les  fondations  de  raiicioiuio  cité. 

Dans  aucune  place  on  no  voit  des  traces  do  fouilles.  (Juelques 
rares  parties  de  ces  teri-aiiis  ont  été  mises  en  culture  d'une  façon 
très  primitive. 

L'accès  de  Docléa  est  assez  diflioile,  mémo  on  été,  pour  les  liabi- 
laiils  de  la  plaine  de  l'od^'oiioa  et  de  la  rive  dioilo  tb^  la  vallée  do  la 
Zéla. 

Comme  rindi(|Uo  le  lever  t(qiograplii(|iie  de  la  plaine  do  l'odgo- 
1 10.1,  un  aqueduc,  dont  on  voit  encore  bs  vostij,^os,  amenait  les  eaux 
romarquabloiMeiil  limpides  du  Zjémé  ou  Zjewna  (alIliioMl  de  la  rive 
gauche  du  la  .Moraoa,  servant  l'ii  pu  lie  Ar  liiiiile  au  .Moiiièné^io  et  à 
la  Turijuio)  à  Docléa.  «'.et  aipiediio  av  ni  une  lon^Miour  île  î»  ;\ 
10  kilomètres,   et   aboutissait    probablement  dans  Docléa  vers   le 


NOTICK  sim  r.'iiTAT  Ar,TUF,r,  i)i:s  nriNF.s  nr:  hnci.r.v.  77 

point  M,  par  un  p(int-;ii|U(Nliii'  sur  la  Morara,  dont  il  n'i  xislc  jilus 
anciinc  Iracc. 

I)',i|)ivs  l(\s  renscifînpmcnts  (lu'il  nous  a  élé  possible  di;  rLTiii'illir, 
lanl  sMi'  Ii's  liiMix  t\\\':\  l'odiJ^orira  et  ;i  C(''linjr,  aucune  fouille  sé- 
rieuse n'a  élu  faite  sui'Ies  ruines  de  Docléa  ;  du  reste,  l'aspeel  géné- 
ral du  lorrain  semble  parfailcnienl  rindi(|Ui  i-. 

Il  y  a  donc  tout  lieu  de  croire  ({u'unc  étude  plus  approfondie  des 
ruines  de  l'ancienne  cité  romaine,  et  des  fouilles  liahilemcnt  diri- 
gées, procureraient  des  résultats  impoitants  au  point  do  vue  liisto- 
riquc  et  arcliéo!ogi(iuc  '. 

F.    SASKI. 
LuDéville,  lu  5  mars  1S«2. 


1.  Voir,  p.   711,  les  rt'ilcxions   Je   M.   Mowat   sur   les   inscriptions  découvertes  à 
Doclên. 


luvn:  Mii:iiK()i.().îi(»i!f', 


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M.  Saski. 


NOUVELLES 

iNSCUiPTiONS  in:  1)0CLI:A 

(EXPLORATION    DL:    M.    SASKl) 


On  n'avait  signalé  jusqu'à  présent  qu'un  très  petit  nombre  tle 
monuments  épigrnphiqucs  snr  l'emplacement  tle  l'ancienne  Docléa, 
près  (le  I*odi(oiil/,a.  M.  Monim>en  n'en  connaissait  que  trois  lorsipie, 
en  1873,  il  édita  le  tome  111  du  Corpus  insrriplioitiun  Ititiimnim;  la 
plus  importanle  est  celle  à  laquelle  il  a  donné  le  numéro  170-j  et 
qui  coniicnt  la  mention  de  la  rrs  puhlicd  Dorlratinm  à  l'époque  de 
l'empereur  Gallicn;  elle  prouve  que  le  véritable  nom  de  la  ville 
cl:\\l  Docled,  et  non  Dioclea.  D'autres  ont  été  publiées  dans  VEphe- 
vurifi  rpi(jraplii(ii,  t.  H,  p.  478,  n"  lO^iG,  et  t.  IV,  p.  80-8O.  Cellestjue 
vient  de  relever  M.  le  lieutenant  Saski  pourraient  fournir  la  ma- 
tière d'un  nouveau  supplément  dans  ce  môme  recueil.  Elles  sont 
au  nombre  de  (jualre,  reproduites  en  fac-similés  dans  les  dessins 
qui  accompagnent  le  très  intéressant  rapport  de  cit  oUieier.  J'ai  été 
prié  de  les  étudier,  et  voici  les  remarques  auxquelles  elles  me 
paraissent  donner  lieu  : 

1°  Fragment  surmonté  d'une  corniche,  au-dessous  de  laquelle  on 
lit  quelques  lettres  disposées  sur  trois  lignes  : 

///FLAVI//// 
/////C  •  F///// 
Il/Il  ERTIll/l 

Cette  copie  offre  beaucoup  d'analogie  avec  celle  du  numéro  170G  du 


80  BEVIK    AnCHÉOLOr.HjlK. 

Corpus,  t.  III.  inn  iifia'  pnr  uno  imlt'  Jf   \' Eiilnnims,  t.  !V,  p.  X'k 
(lit  II"  170G  : 


F/AVIA 
CFILIA 

//////////// 

ll/IIIIIKfl 

s/BPOS 
/  D   D  D 

Elle  lionne  trt"'s  probablement  le  comnicncemenl    d'une  seule  el 
nn^me  inscription  à  restiluir  ainsi  : 

...Flaviii  C{aii)  filia  [Tyrt[ia]9...  [si]b[h  po!i[uit); 
l{ocus)  (l[atus)  d{ccreto)  d{pcuhonum). 

2°  Fragment  d'une  inscription  funéraire  dont  il  ne  subsiste  que 
le  coinmencomcnl  des  cinq  dernières  lignes.  Il  est  impossible  de 
restituer  les  noms  de  la  personne  défunte;  tout  ce  qu'on  peut  dire, 
c'est  qu'elle  avait  dil  occuper  un  rang  distingué  dans  la  res  pnhlini 
de  Docléa,  pour  avoir  méiité  la  concession  honorable  d'un  terrain 
de  sépulture  aux  frais  du  public  : 

//////////////////// 
M  II////////////// 
PRO//////////// 

MA///////////// 
Pi  ISS////////// 

L     D/////////// 

...piisslmo]..;  l[ocus)  d{(itus)  \d[ecret6)  d[ccur\onum)\. 

3"  Stèle  dont  la  partie  supérieure  mamjue,  mais  (jui  paraît 
n'avftir  pas  eu  plus  de  quatre  lignes;  une  fracture  a  emporté  le  haut 
des  deux  dernières  lettres  à  la  première  ligne;  celles  de  la  (|ua- 
iriéint-  ligne  sont  un  peu  confuses.  On  ridentilie  avec  le  n"  2tî7  .le 
VEplirmeris,  t.  IV,  p.  8G  : 


NOUVELLES   INSCIUPTIONS    DE    I)(JCLÉA.  81 

VENtn 

AVG 

SACRVM 

FL  BASSILLA 

Vt'n{cri)  aug{ustœ)  sacrum.  Fl{avia)  Dassilla. 

A"  rallie  supérieure  d'un  pelil  autel  à  corniche.  On  y  voit  les 
deux  premières  lignes  d'une  inscription  dont  quelques  lettres  sont 
un  peu  confuses.  Néanmoin?.  on  ne  laisse  pas  que  d'y  lire  : 

DIS  DE 
AB  VSQ 

///////////// 

Di{i)s  deabusij[ue)... 

On  connaît  de  nombreux  exemples  de  cette  dédicace  aux  dieux 
et  aux  déesses,  quelquefois  suivie  du  mol  omnibus. 

Dans  l'élal  actuel  des  choses,  l'exploraliondeM.  Saski  a  pour  résul- 
tat d'accroître  de  trois  le  nombre  des  textes  épigraphiques  relatifs 
à  Docléa.  Il  paraît  plus  (lue  probable  que  des  fouilles  mélbodique- 
ment  ellecluées  sur  ce  terrain,  encore  vierge  de  toute  investigation 
archéologique,  particulièrement  aux  abords  des  ruines  signalées 
par  lui,  procureraient  une  abondante  récolle  d'objels  antiques  et 
d'inscriptions.  C'est  l'opinion  de  M.  François  Lcnorniant,  qui  a  éga- 
lement visité  ce  site.  Une  mission  au  Monlénégro  ferait  honneur  au 
gouvernement  qui  en  prendrait  l'inilialive  et  au  savant  qui  l'accom- 
plirait. 

ROBERT    MOWAT. 


XLIV.  —  G 


]..\  PLUS  ANCIENNE 

INSCRIPTION  LATINE 


Au  priniemps  de  l'année  1880,  rallenlion  do  M.  Ilcnn  Dressel, 
bien  connu  par  les  services  iju'il  a  déjà  rendus  en  d'autres  occa- 
sions à  l'épigrapliie  itali(iue,  fui  attirée  sur  des  jioleries  nouvelle- 
ment entrées  dans  le  commerce  des  antiquités  à  Uonie,  et  qui 
différaient  de  celles  que  les  excavations  des  années  précédentes 
avaient  mises  au  jour,  il  suivit  la  piste,  et  arriva  heureusement 
à  établir  la  provenance  de  ces  objets:  ils  avaient  été  trouvés,  pen- 
dant qu'on  creusait  les  fondations  d'une  maison  de  la  via  Nazionale, 
dans  la  vallée  située  entie  le  (Juirinal  et  le  Viminul.  Dans  le 
nombre,  il  s'en  trouvait  un  d'une  imporlame  particulière,  par  une 
inscription  de  128  lettres  qui  en  fait  le  tour.  31.  Dressel  se  rendit 
acquéreur  de  ce  précieux  petit  monument-. 

FORME  DU  VASE. 

Nous  en  donnons  la  description  d'après  M.  Dressel  et  d'apré>  les 
lilliujj'rapliies  Irés  exactes  (ju'il  a  jointes  à  son  mémoire  (V.  notre 
planche  XiV). 

Il  est  haut  de  trois  cenliniètres  et  demi,  large  de  dix  centimètres 
et  demi,  et  il  se  compose  de  trois  petits  récipients  à  forna^  arrondie, 
réunis  entre   eux  de    manière  à  composer  comme    une  sorte  de 


1.  Ce  morceau  est  la  rcproducUoii  d'un  orliclc  publié  par  les  Me/nnrjcs  d'nrchéo- 
lo'jtc  et  d'histoire  de  tEcole  française  dr  Home.  Nous  avons  prnsé  qu'il  était  do  na- 
ture &  intéruftscr  les  lecteurs  de  la  lievuc  arrhàduQiijuc.  M.  Brcil  nous  a  fourni 
qii(j|r|ueH  additions. 

2.  Amtit'.i  dcW  Isliliiln  di  rurrisiiiiitdruzn  arr/miloyiin,  i.  LU,  p.  lOS,  Jilan- 
cbc  L.  Celle  planche  sera  donnée  dans  uu  de  nos  plus  procliains  numéros. 


LA    PLUS   A.NCIIvNNK    INSCIWI'TION    LMINK.  83 

Irinnpile  (''(inil.iir'ial.  (IIi.kiiic  irci|iii'iil  p.ir.iU  .ivoir  l'-tr  d'-'iboi-.!  f.ilni- 
qiii'  à  pjirt  ;  puis  on  los  a  rallacliés  au  inou'ii  di;  hras  (;yliiiilri(|U(î.s. 
La  nïatit're  est  une  aryilc  iioirAli'c  La  vaU.'ur  arlisliquo  dti  l'(jt)jol 
semble  ôlre  des  plus  modestes.  H  n'est  pas  inutile  (r.ijouiiT  (|ii'uii 
vase  à  forme  srmblahle,  mais  eoiiiposé  d(!  (jualre  récipient';,  a  été 
trouvé  au  même  endroiî;  seulement  il  ne  porte  pas  d'iiiscrii)- 
tion. 

D'après  ces  circonstances,  nous  devons  conj(;i:turt'i-  (j'ie  le  pic,  des 
ouvriers  a  porté  sur  un  ancien  cimetière  romain,  et  (jue  nous  nous 
trouvons  en  présence  d'objets  funéraires.  Ces  vases  à  trois  et  à 
quatre  récipients  étaient  sans  doute  tiestinés  à  contenir  des  oITrandes 
aux  dieux  infernaux,  des  arferiœ  telles  i|ue  du  lait,  du  vin,  de 
riiuile,  de  l'encens.  A  la  rigueur,  on  pourrait  aussi  penser  à  des 
lampes.  La  lecture  de  l'inscription  nous  apprendra  si  cette  hypo- 
thèse relative  à  la  destination  funéraire  est  juste. 

ASPECT  lîXTÉRIEUR  DE  L'INSCRIPTION. 

L'inscription  a  été  tracée  à  la  pointe,  pendant  ijue  l'argile  était 
encore  humide.  Elle  se  divise  en  trois  parties,  et  non  en  deux, 
comme  l'ont  supposé  les  interprètes  qui  nous  ont  précédé.  En  eiïet, 
elle  reprend  trois  fois  à  la  ligne.  M.  Dressel,  en  examinant  un  en- 
droit où  le  style  du  graveur,  glissant  sur  la  surface  convexe,  est  venu 
couper  des  caractères  déjà  tracés,  s'est  assuré  de  l'antériorité  de  la 
phrase  couimençant  par  lOVEIS.  D'autre  part,  la  phrase  commen- 
çant par  AST  doit  venir  la  seconde  :  cela  nous  est  indiqué  par  la 
place  qu'elle  occupe  à  la  suite  de  la  première.  Il  en  faut  donc  con- 
clure que  c'est  la  phrase  qui  débute  par  DVENOS  qui  vient  en  der- 
nier. On  verra  que  le  sens  de  l'inscription  confirme  pleinement  ces 
observations. 

A  l'intérieur  de  chaque  phrase,  il  n'y  a  aucune  séparation  rntre 
les  mots.  Les  lettres  sont  tracées  d'une  manière  très  lisible,  quoique 
la  pointe  du  scribe  ait  fait  quelquefois  des  écarts  involontaires.  Il 
ne  peut  y  avoir  d'incertitude  que  pour  deux  ou  trois  lettres.  Dans 
le  mot  lOVEIS,  le  second  I  a  été  ajouté  après  coup.  Le  mot  suivant, 
qui  est  AT,  avait  d'abord  été  écrit  ET.  Dans  le  mot  DVENOI.  qui 
se  trouve  à  la  fin  de  la  troisième  [)hrase,  le  V  avait  iTabord  été  ou- 
blié :  il  a  été  ensuite  inséré  dans  un  espace  trop  étroit,  en  sorte 
qu'il  a  pris  un  aspect  un  peu  insolite.  Nous  reviendrons  plus  loin 
sur  ces  différents  points. 


8^  IIKVIK    Alu:iiKOLO(ilQUR. 

J"allais  oublier  de  dire  que,  pour  lire  iei  Kllre?,  il  faut  iiictlre  le 
vase  lu  iCle  en  bas. 


FOUME  DIS  LETTHKS. 

La  fornit'  «los  Ictli'cs  est  Irrs  arrliai'iiiic  :  il  faut  irmarqiiiT  surtout 
li>  M.  le  p.  le  Q.  Il'  R  cl  lE,  i|iii  |irt''>tMil«MU  la  in'Miit'  fonuc  que 
dans  les  plus  vuillcs  inscniilions  di'  l.i  (îrircoii  df  rKtruri»*.  Le  Z, 
conlrun'intMil  à  ce  (|n'oii  avait  cru  il'abord,  ne  ligure  pas  dans  l'ins- 
cription. La  lettre  G,  (lu'on  aurait  eu  l'occasion  d'employer  une  fois, 
est  repnVsentée  par  C.  Le  C  sert  h  inaniuer  ^paiement  la  ^.'"•l*>''alo 
forle;  mais  le  scribe  avait  comnieiietV  par  écrire  deux  fois  un  K, 
qu'il  a  ensuite  corrigé. 

Mais  ce  qui,  par-dessus  tout  le  reste,  donne  h  celle  inscription  un 
aspect  à  part,  et  (pli  tranche  sur  toutes  celles  qui  jusqu'à  présent 
ont  été  trouvées  à  home,  c'est  que  l'écriture  est  dirigée  de  droite  à 
gauche,  comme  en  phénicien  ou  en  grec  liés  archaï(iue.  S'il  s'agis- 
sait d'une  inscription  étrusque,  ombrienne  ou  osijue,  le  fait  n'au- 
rait rien  (jue  d'ordinaire  :  ces  peuples,  qui  ont  reçu  leur  écriture 
de  la  Grèce  à  une  ('poque  1res  reculte,  peut-iHie  au  viii''  ou  au 
IX'  siècle  avant  notre  ère,  dans  un  temps  où  la  (iièce  écrivait  elle- 
même  de  droite  à  gauche,  sont  resiés  fidèles  à  l'ancienne  disposi- 
tion. En  général,  l'Italiote  est  conservateur,  et  plus  d'une  particu- 
larité de  la  vieille  civilisation  belléno-italique  (jui  s'est,  avec  le 
temps,  eflTacée  en  Grèce,  s'est  maintenue  en  Sicile,  à  Gumes,  en 
filrurie,  chez  les  Samniles,  chez  les  Oiuliriens.  Même  dans  le  voi- 
sinage de  Home,  à  Paierie  par  exemple,  on  reste  tidèle,  jusque  dans 
le  11"  siècle  avant  notre  ère,  à  l'écriture  allant  de  droite  ù  gauche  '. 
A  Pompèi,  peu  de  temps  avant  la  destruction  de  la  ville,  les  docu- 
ments officiels  sont  encore  gravés  de  cette  fa(;on. 

Mais  à  Home  le  fait  était  jusiju'à  présent  sans  exemple  :  Ht)me 
semblait  faire  exception  sur  le  reste  de  l'Italie.  Si  l'on  coiiiiille  b' C'oc- 
puSs  on  voit  quemèiiie  les  ancieusas  libraux,  avec  leur  ROMANOM 
inscrit  en  grosses  lettres  sur  l'une  des  faces,  que  M.  Mommseii  fait 
figurer  en  tête  de  son  recueil  comme  les  plus  anti(iues  témoins  de 
l'éciilure  romaine,  nous  ollVent  déjà  la  disposition  de  gauche  ù 
droite.  Cette  exception  s'explique  d'ailleurs  facilemeul.  En  premier 

1.  Gtrrucci,  Sytîo'je,  n»  559.  Dréul,  Sl<', noires  ilc  m  >"  u/r-  de  /mj/uiv/i'/U' ,  IV, 
p.  /ÏOO. 


I.A    l'Ll.'S    ANCIKN.NF.    INSCIIII'I  luN    |,\TIM:.  H3 

lieu,  nncun  de  ce»  iiionuincnts  n'csi  iivs  ;iiii'i('ii  :  ils  un  rcinonUMit 
pas  aii-(li'l;i  (lu  iiT  sii-clc  ;iv;nU  iKilre  ère.  A  celle  éiioque,  Home 
était  déjà  la  Kiaiide  ville  où  aîllinient  les  Grecs,  et  en  parliciilicr 
les  Grecs  in.^lrujls,  arlisios,  i)liilosophes,  litt/iraleurs,  graininai- 
riens,  maîtres  d'école,  (jui  apporlaieiit  avec  eux  les  habitudes  mo- 
dernes de  la  (Jréce,  devant  lesipiclh  s  les  anciens  usa^jes  italioli-s 
disparaissaient,  (^est  l'alplialn'l  alliéuicu,  tel  (ju'il  avait  ét6  réformé 
sous  larchontat  d'ICuclide,  et  tel  ([u'il  s'était  peu  à  peu  répandu 
dans  tout  le  monde  grec,  (|ui  est  adopté.  Pour  la  première  fois, 
l'inscription  puliliée  par  M.  Dressel  nous  révèle  à  Home  la  iirésence 
de  rancienne  écriture  de  droite  à  gauche.  A  ce  titre  déjà  elle  mérite, 
dans  le  recueil  des  inscriptions  romaines,  un  rang  à  part. 

A  quelle  époi]ue  faut-il  rapporter  ce  monument?  L'écriture  est 
sans  doute  un  important  critérium;  mais  il  ne  doit  pas  être  le  seul. 
Pour  nous  prononcer  sur  la  (jueslion  d'ûge,  il  faut  examiner  la 
langue,  et  aborder  l'interprétation. 

INTERPRÉTATION. 

Le  premier  qui  ait  donné  une  version  de  ce  texte  est  M.  Ures- 
sel  lui-môme;  aidé  des  conseils  d'un  des  premiers  latinistes  de 
rAliemagne,  M.  François  Biiclieler,  il  a  proposé  une  savante  in- 
terprétnlion '.  De  son  côté,  M.  Biiclieler,  dans  un  article  du  jour- 
nal le  lîlu'inisches  Muséum^,  est  revenu  sur  plusieurs  emlruits, 
pour  élucider  et  conlirmer  cette  traduction.  Presque  en  même 
temps,  M.  Jordan  ^  connu  par  ses  travaux  sur  la  topographie  de 
l'ancienne  Home  et  par  ses  études  sur  le  latin  vulgaire,  a  publié 
une  explication  très  détaillée,  nouvelle  par  certains  côtés,  mais  qui, 
sur  les  points  essentiels,  est  conforme  à  celle  de  M.  Drc>.sel.  Un  peu 
plus  tard,  un  linguiste  distingué,  M.  Osthulf \  aexaminé,  au  point 
de  vue  de  rélymologie,  quelques-uns  des  mots  de  l'inscription. 
Enfin,  tout  récemment,  M.  Jordan'',  dans  un  programme  de  l'uni- 
versité de  Kunigsberg,  a  repris  en  sous-œuvre  son  interprétation, 
en  s^attachant  à  la  justifier  et  à  la  compléter. 


1.  Article  cité  des  Aiutuli. 

2.  1881,  p.  233. 

3.  Dans  le  journal //('///cy,  1881,  p.  225. 
A.  RheinU<:hes  Miiseum,  1881,  p.  481. 

5.  Henrici  Jorrlani   vtniltciae    sermonùt    latini  aniiquisiimi.   Koenigsbcrir,    îtap- 
tung, 1882. 


8G  UKVIK   AHCMKOl.CU.lUl  ••■• 

Qufllt'  que  soil  l'aiilorile  iloiu  jouissiMil  avec  raison    les   snvants 
quo  nous  venons  de  nommer,  nous  allons  proposer  une  traduction 
qui,  sur  la  plupart  des  points,  s'éloigne  sensilileuienl  île  celle  qu'ils 
ont  donnée.  Il  ne  faut  pas  en  «Mre  surpris.  L'iiiltlligence  d'un  texte 
nouveau  et  obscur  ne  s'obtient  cpie  peu  à  peu.  Les   premiers  inier- 
juMesontù  lutter  contre  des  dillicullés  (|ui  n'existent  pas  au  nu^me 
degré  pour  ceux  qui  viennent  après.  Ici  la  difficulté  principale  ve- 
nait de  ce  que  les  mots  ne  sont   pas  séparés  les  uns  des  autres.  IJes 
coupures  erronée"^,  un  peu  trop  vite  adoptées  comme  certaines,  ont 
nus  l'iiitiMprétation  dans  de  fausses  voies.  A  la  |)remiére  liKin",  «ui  a 
lu  lOVEl  SAT,  et  l'on  a  fait  de  SAT  une  abrévinlion  i)0ur  SATVR- 
NO.  (iuoi(|ue,  dans  tout  Iiî  reste  du  texte,  il  ne  se  trouve  pas  un  seul 
niiii  écrit  en  abrégé.  Un  peu  plus  loin,  une  fausse  séparation  lit  lire 
VIRGO,  ce  qui  lit  penser  qu'il  était  (juestion  d'une  jeune  tille  dans 
notre  texte  ;  les  lettres  précédentes  furent  lues  COSMIS,  dont  on  rap' 
procha  soit  l'adjectif  côiuis  «  aff.ible  »,  soit  cornes  «  compai^'non  »,  et, 
comme  la  phrase  renferme  une  défense  (NEI...SlEDj,  un  supposa 
(ju'aucune  jeune  lille  ne  devailtémoigner  son  alTaliilité  au  sacrifica- 
teur, ou  ne  devait  assister  au  saciilice.    Dans  cette   hypothèse,  AS- 
TED  fut  réuni  à  la  phrase  précédente,  et  lu  comme  étant  pour  (idstet. 
Plus  loin,  les  mots  furent  séparés  de  cette  façon  :  NOISl  OPê  TOI- 
TESIAI  PACARI   VOIS,  ce  qui  fut  traduit  nisi  Oin  Tuitrsiae  pacari 
irlts.  Tuitisia  fjt  re^'ardé  comme  un  surnom,  jus(iue-là  inconnu,  de 
la  déesse  Ops.  Dans  la  troisième  phrase,  Buenos  fut  considéré  comme 
!'•  nom  du  potier,  ce  qui   déirnis.iit  It^  lien  entic  celte  jtliiase  et  les 
précédentes.  Enfin  on  lut  EINOM  DZE  NOINE  MED  MA.NO  STA- 
TOD,  et  dans  DZE  NOINE  Idii  vit  l'expression  latine  dû'  nono  :  igi- 
lurdie  nono  me  maiio  sistito. 

Quelques  tâtonnements,  j^le  répète,  sont  inséparables  d'un  pre- 
mier essai  de  traduction.  La  version  que  nous  allons  proposer  no 
sera  sans  doute  pas  exemple  d'erreur,  et  à  son  tour  elle  donnera 
prise  à  la  critique.  .Mais,  de  progrés  en  progrés,  la  science  arrivera 
à  résoudre  les  diflicultés  de  ce  petit  texte.  Des  tâches  moins  aisées 
ont  été  lieureu<ement  accomplies  par  la  linguistique. 

Kst-ce  la  défectuosité  des  premiers  essais  (]ui  a  suscité  la  mauvaise 
humeur  du  savant  directeur  de  l.i  Mneniosj/nc,  M.  C  C.  dohel'.'*  Il  a 
fait  a  notre  inscription  l'honneur  tle  s'en  occufier  ;  mais  l'illustre 
profes^^eur  de  Leydi;  était  dans  un  de  ses  jours  de  sévérité.  Après 
avoir  cité  les  versions  d<ml  nous  avons  inili(iué  les  traits  principaux, 
après  avoir  reproduit  ipielques  passages  des  commentaires,  (ju'il 
iu^e  avec  une   imitilnvalile    rigueur,  il  émet   l'idée  (jue  le  vase  de 


LA    PLUS    ANniF.NNK    1  NSCrufTION    L\T1NK.  87 

Duùnos  pst  Mn(!  falsil^-ntioii,  cl  qut»  Ifs  mois  (|iii  y  sont  lrac(''S  sont 
l'œuvre  d'un  myslilicalour.  (Conclure  de  l'impcrfecliori  dos  Iradiic- 
tions  à  la  non-aulhenlieilé  du  Icxle  ne  nous  paraît  pas  d'un  raisoii- 
ncnicnl  iii,itt;i(jual)le  :  peul-ctii!  M.  Cobut,  s'il  avait  pris  la  peine 
d'examiner  le  monument  en  lui-même,  tout  on  faisant  ses  réserves 
contre  les  traductions  proposées,  aurait  modifié  les  conclusions  de 
sa  spirituelle  boutade. 

Avant  de  proposer  mon  interprétation,  je  remplis  un  aj,'réable  de- 
voir en  remerciant  publi(juement  M.  Gli.  Salomon,  membre  de  l'É- 
cole fian(;aisc  de  Rome,  qui  a  itien  voulu  examiner  pour  moi  les  lec- 
tures douteuses,  el  M.  Henri  Uresscl,qui  s'est  f,'racieuseinent  prélé 
à  toutes  les  vérifications. 

Voici  d'abord  le  texte  transcrit  en  caractères  ordinaires  : 

lOVEISATDEIVOSQOIMEDMITATNEITEDENDOSCOSMlSVIRCOSIED 

ASTEDXOiSKlIM'/rOITESIAIPACARIVOIS 

DVE.\0SMi:DFECEDi:NMAN0Mi:iN().MDVEN0iNEMEDMAI,0STA10r) 

lOVEIS.  C'est  le  nominatif,  faisant  fonction  de  vocatif.  L'I  piraii 
avoir  été  ajouté  après  coup,  le  graveur  ayant  d"ahord  écrit  lOVES. 
On  peut  rappi'oclier  le  nominatif  AIDILES  \C.  I.  L.  31,  «  Aidiles  Co- 
solCesor»).  Sur  le  nominatif  de  la  troisième  déclinaison  en  es,  is,e«s, 
voyez  Biicheler-IIavet,  PrécAs  de  la  déclinaison  latine,  §  3o.  Horace 
{Odes,  I,  15, 3G)  écrit  :  «  Ignis  Iliacasdomos»,  en  faisant  de  ignis  un 
spondée,  —  Jupiter  est  invoqué  ici  comme  divinité  infernale;  cf.  le 
Jupiter  Slygins  (Orelli,  n""*  1^65  et  1:266),  le  Veiovis  de  l'invocation 
citée  par  Macrobe  [Satimi.,  III,  4)  :  a  Dis  pater,  Veiovis,  Mânes,  sive 
vos  quo  alionominefas  est  nominare.  » 

AT.  CoDJoni'tion  pour  AVT.  La  diphtongue  au  prend  le  son  d'un 
a  long  dans  les  dialectes  congénères  du  latin.  En  ombrien,  fatom  e^l 
le  participe  du  verbe  faveo;  flAfw  correspond  à  la  conjonction  latine 
autem.  Le  même  phénomène  est  très  friNpient  dans  le  latin  vulgaire  : 
diinsï  Augustii!<,au(juiium,  auscultare,  Clawlius,  defraudaii,  aug 
mentare,  autem,  Plautus,  deviennent  Agmtus,  agurium,  ascultare, 
Cladius,  defradnvi,agiiiontare,  alem,  Platus  {Schuchardi^  \l,  'iOti). 
Mais  ce  qu'on  n'a  pas  assez  observé  jusqu'à  présent,  c'est  que  le  même 
fait  se  présente  dès  les  plus  anciens  temps  de  la  langue  latine  :  Mars 
pour  ^farols:  agnus  pour  arignus;  asportarc  pour  uusportare,  t\u\ 
est  lui-même  pour  absportarc  ;  axe  (Feslus,  p.  25)  pour  «mj:*'.  Le 
rapport  établi  dans  la  mythologie  latine  entre  Laurens  et  Larentia 


8H  HKVL'K    ARCHKOI.Or.IQUK. 

Ihrtunp,  1,  07^  repose  sur  co  fail  i\o  jwononcialion.  II  y  avait  ù 
Hoiiit»  une  (l('«*ss«»  Fauim  /•'<;/»<;  dniii  le  nom,  liiY'  du  vcilu' /"(Uvo,  dil 
(It'iix  fois  1.1  nuMiU"  clioso,  roiiime  Anna  Perniun,  Mus  Locuttus.  Kw- 
llii  la  cotijonclioti  latine  ot  «  mais  »  est  idei)tit|ue  à  la  conjonction 
osque  ant.  IVest  lenu"^nje  cliaiigemenl  de  prononciation  qui  fait  qu'en 

dnrien   on    dit   :    'At;ii'g«,    tiulîv,    ytXîvTi,    5i!X7:£iv9uts    pour     'ATfttoao, 

Tiuitov,  "[-tÀa^vTi,  ctaTTeivotoiu;  (Alirens,  II,  lUf'). —  Le  ^Tavcur  avait  ila- 
bord  écril  ET.  On  loconnall  encore  les  traits  de  l'E  sous  ceux 
de  l'A. 

DEIVOS.  Sur  l"'s  nominatifs  siii.<,'uliers  en  os,  voyez  Biiilieler,  §45. 
r,e  noiiiiiiatif  fait,  comme  lOVEIS,  fonction  de  vo,-atif.  On  sait  d'ail- 
leurs (|ii('  Deiis^  en  latin,  l,mi(1.'  sa  forme  au  vocatif. 

QOI.  Italir.lu  proniun  relatif:  c'(  si  la  forme  habituelle  dans  les 
vii'ilU's  inscriptions.  L'orllioi^raplic  employée  ici  (QOI  .m  lim  de 
QVOI)  est  un  si}:ne  d'artiiquilé  :  on  connaissait  déjà  MIRQVRIOS, 
PEQVNIA,  QVM,  etc.  Cet  emploi  du  Q  devant  un  O  rappelle  tout 
à  fait  les  formes  locriennes,  comme  KniFOIQOl-.  IIOPnoN  (Cauer, 
n^  91). 

MED.  Accusatif  du  pronom  personnel.  CI.  la  cist<i  .le  Ficoioni  : 
Novios  l'iaulios  meil  lioinai  frciil.  Le  sénalus-consulle  di.s  Uacclia- 
nales  donne  :  iitter  srd.  La  Table  de  Bantia  :  apud  scd.  Les  formes 
med^ted,  sed,  sontatteslées pour  Plante  par  les  ^{lammairienslalin.s. 
V.  IJiicbtler,  §  12o.  —  Le  pronom  doit  ùtre  compris  comiue  se  rap- 
portant non  pas  au  mort,  mais  à  l'objet  votif,  leiiuel  s'adresse, 
à  la  première  personne,  à  la  divinité.  Il  en  sera  de  môme  dans  la 
suite  de  l'in.-cription.  On  connait  celle  habitude  di-  l'anlitiuité,  de 
faire  parler  les  objets  inanimés  :  (juantilé  de  monuments  s'expri- 
ment à  la  première  personne.  On  con(;oil  surtout  l'emploi  de  ce  tour 
quand  il  s'agit,  comme  ici,  d'un  objet  poitatif  iiue  les  fiijnli,  pour 
le  service  des  cimetières,  fabritiuaicnl  sans  doute  par  ilouzaines, 
el  pour  lesquels  on  tenait  en  jé.servc  des  focmiilcs  faites  d'a- 
vance. 

MITAT.  Subjonctif  du  vt  rbe  millcrc.  L'inscription  ne  redouble 
point  les  consonnes,  ni  à  l'intérieur  des  mots,  ni  quand  deux  con- 
ponnes  >embiahlcs  sr  rcncontrifnt  dans  la  phrase  :  on  aura  plus  loin 
ASTED  pour  AST  TED.  —  Le  sujet  de  inillal  n'i  st  pas  exprimé  : 
il  e.sl  ijuesiion  ni  du  mort.  »  Jupiter  ou  qin-l  que  soil  le  dieu  au- 
quel [celui  cij  pourra  m'envuycr.  •» 

NEI  pour  fjc.  ('ttte  orthograplio  ol  fié(|uente  :  vo>e/,  VIndr.r  du 
tome  l  du  (^orjiuH.  .Mais  elb'  n'est  pas  constante,  el  la  même  inscrip- 


lA    PLUS    ANCIKNNK    INSCHIPTION    LATI.NK.  HH 

lion  liK'f  loin- ;i  (OUI-  nci  ou   ne.   (l'est  aussi   ce  i|iii   a  lii'ij  mit   la 
nnlir. 

TED  ENDO.  (liùi  Ion  jK^uvoii-,  eu  1rs  mains.  »  VA.  les  ffuniiilcs  de 
dévot innr.'t  (C.  I.  L,  SIH,  H\\))  :  «Tilii  coninKMido...  Flanc  habcas... 
Hahcs  Kulycliiain  Solcriclii  uxorein...  »  Los  i\\(:ii\  des  enfers  sont 
des  divitiiliR  malfaisantes  :  Cire  entre  leurs  mains,  c'est  lesort(|u'ori 
souhaite  h  ses  ennemis,  qu'on  cherche  à  éloigner  de  soi.  —  La  pro- 
position Piiilo,  fi(^iiueuiment  employée  en  vieux  latin,  se  trouv<!  en- 
tre autres  dans  un  texte  de  rogatio  cité  par  Aulu-Gelle  (V,  !'.»),  qui 
est  ordinairement  é(;ril  ainsi  : 

VELITIS  •  IVBEATIS  •  iQVIRITES-J  VTI  LVCIVS  •  VALERIVS- 
LVCIO  •  TITIO-  TAM  •  IVRE  •  LEGE  •  Q  •  FILIVS  •  SIBI'  SIET  • 
QVAMSI  •  EX  EO- PATRE  MATRE-QFAMILIAS  •  EIVS  •  NA- 
TVS  •  ESSET  •  VTI  •  Q-  EI-VITAE-  NECIS  Q  IN-EVMPOTESTAS  • 
SIET  VTIPATRI  ENDO- FILIOEST -HAEC"  ITA  •  VTI  •  DIXIITA- 
VOS-QVIRITESROGO.  Je  crois  .ju'il  faut  lire:  VTI  •  PATRI  • 
ENDO  •  FILIVS  (vieux  latin  FILIOS)  EST. 

COSMISV  IRCO.  Le  second  mol  est  la  préposition  ergo.  Cf.   les 
formules  :  «  viriutis  ergo,  benelici  ergo,   honoris  ergo,  victoriae 
ergo,  funcris  ergo,  illiusce  sacri  coerccndi  ergo,  liujus  rd  ergo.» 
Le  changement  de  Vr  en  /,  comme  dans  MIRQVRIOS,   STIRCVS 
VIRGILIVS. 

La  préposition  irgo  iloit  nous  faire  attendre  un  complément  au 
génitif  :  ce  complément  est  COSMISV.  C'est  un  substantif  de  la 
quatrième  déclinaison  qui  a  perdu  son  S  final  (fiiicheler,  |  15ff).  On 
avait  déj<à,  comme  exemple  de  cette  chute  de  ,ç,  SENATV  (C.  /.  L. 
4160).  Il  faut  y  joindre  les  neutres,  comme  genu,  cornu,  où  la  sup- 
pression de  s  est  frécjuente  au  génitif.  —  Le  latin  littéraire  ne  pos- 
sède pas  de  substantif  de  la  quatrième  déclinaison  venant  de  com- 
mittere;  mais  nous  avons  permissus,  admissus,  immi'^sus.  —  La 
forme  costnissus  {pour  commissns)  vient  confirmer  de  la  manière  la 
plus  heureuse  un  renseignement  donné  par  Festus,  et  qui  avait  quel- 
quefois été  révoqué  en  doute  :  «Antiqui...  dicebant  co-smitterc  pro 
commiltereet  Cns)nenae  [)vo  C:\mcuac  n  (p.  ()71. —  Une  faudrait  pas, 
je  crois,  entendre  ce  cosniisu  au  sens  moderne  du  mol  :  nous  n'avons 
pas  ici  un  pécheur  qui  implore  de  Dieu  le  pardon  de  ses  fautes.  Il 
s'agit  plutôt  d'un  man(piemenl  aux  cérémonies  funèbres,  d'un  délit 
contre  le  rituel,  pour  lequel  on  olïreen  expiation  un  présent  (piacu- 
lum)  a  u  x  d  i e  u  \  i  II  le rn  ;i  u  X . 


9û  i\kvi:k  ARf.Hi^.oi.or.ioiiK. 

SIED  pourSIET.  (»n  aura  plus  loin  PECED.  Mais,  d'autre  p;irt, 
n.ui>  avons  MITAT.  Ces  inoonsiMinonccs  .le  l'orlli(»|^raphc  sont  Uv- 

qutMilos. 

Le  sens  do  la  premii^re  phrase  osl  donc:  ((Jupiter  aul  «Icus  ruinio 
mittal  [islo],  ne  let-ndo,  conimissi  im^îo,  sil.» 

Av.mt  d(>  i^asscr  à  la  soi-uiulo  phrase,  j'indi(iiitM-ai  en  lieu  de  mol-^ 
uiu^  construction  (iu(d(iue  peu  di(T('rente,  qui  donne  épalcnuMU  un 
sens  satisfaisant,  et  à  laquelle  j'avais  d'ahord  accordé  la  préfcTcnce. 
J'avais  vu  dans  701  un  nominatif  singulier  m:iseulin,  se  rapportant  .\ 
deivos.  Ce  nominatif  était  le  pendant  exact  du  nominatif  poi  ou  pod 
onihrien.  On  sait  ijne  ce  nominatif  se  compose  du  i)ronom  7M0  ou  po 
(forme  sans  désinence,  comme  6  en  grec)  cl  de  l'enclitique  ei,  (pie 
nous  trouvons  également  au  féminin /ja-c»,  au  neuln-  /-r/ci,  de. 
DansMEDMITAT  je  reconnaissais  les  deux  mots  MEADMITAT. 
Sur  lacorMstencc  dans  un  même  texte  de  formes  avec  et  sans  r/, 
voyez  Biicheler,  §  2i8  et  229  '. 

ASTED  doit  tMre  décomposé  en  AST  TED  -.  La  conjonction 
ast,  (lui  ét.iil  très  usitée,  comme  on  sait,  et  qui  avait  dilTérenls  em- 
plois en  vieux  latin,  doit  Cire  traduite  ici  par  ((mais».  EnelTet, 
cette  seconde  phrase  vient  s'opposer  à  la  première.  La  construction 
est:  AST  TED...  PACARI  VOIS.  Ainsi  (lue  Ta  reconnu  .M.  Dressel, 
VOIS  est  le  suhjonctif  du  verhe  ((  vouloir»  :  vois  est  dune  pour  ro/is 
lequel  est  lui-môme  pour  volies  (cf.  sies).  Le  /s'est  mouillé, comme 
cela  est  arrivé  si  souvent  dans  les  langues  romanes,  et  comme  cela 
arrive  déjà  en  latin,  où  nous  trouvons  dans  des  inscriptions  Cor- 
neius  \)0\iv  Corneliu!<,  Aureia  pour  Aurélia,  fiae  pour /i/iae\  Déjà 
les  grammairiens  anciens  ont  distingué  dilTérentes  prononciations 
de  la  lettre  /,  pour  lesiiuelles  ils  admettent  un  sonus  c.cilis  et  un 
80UUS  pin(jni!>.  Nous  rencontrerons  dans  un  instant  un  autie  mol  (lui 
doit  peui-ètrc  s'expli(iuer  par  la  même  particularité  de  prononciation 
de  la  lettre/.  Nous  avons  i<i  le  plus  ancien  exemple  du  /  mouillé 
en  latin. 

PACARI  ot  l'inlinilif  passif  de  paco  ((j'apaise  ».  Cette  forme  a 
déjà  un  aspect  moderni3.  On  aurait  pu  s'attendre  à  une  ïoviuc  p<u'u.<:i 

1.  J'avais  ainsi  traduit  dan»  une  communication  à  l'.\cadi;(nic  des  inscriptions, 
séance  du  2  man  lb82.  L'autre  construction  a  été  proposée  séance  tcnciiite  |)ar 
MM.  G.  Paris  cl  O.  Itayel. 

2.  Hcnïcn,    Acta   fralntm    Arvalium,    p.   CWIX.    A'^tu  pour  axt   lu.  Cf.  ilnd 

cxxx. 

3.  Corucn,  Austprache,  I,  2'2B.  ScliucliarJt,  11,  liHù. 


I.\    l'I.US    ANCIKiNNK    INSC.HU' TIoN    I.ATIM;.  lil 

OU  iiK^mc  p^i^ïis/c/-.  (^e  [toiiil  csl  ù  reiciiir  iiiMir   la   lixalioii   de  l'àgc 
(le  noir»!  iiioiiiiiiumU. 

NOIS  fournit  cMicore  une  lois  la  lucuvi!  de  la  vrrilé  d'un  léiiioi- 
gnaj^'c  (le  Fcstiis  (p.  47):  «  Cdlliin  nntii|ui  dic('l)aiil  pro  clani,  ut  tiis 
pro  nohis.  .sv/w  pco  suain,  ////  pro  cnni.  »  La  foi'nn;  uis  su[)|)OS(;  un 
ancien //o/.s-,  ipic  nous  avons  ici.  —  Ju.iiju'a  présent,  l'objet  votif 
avait  pailc  au  singulier;  il  s'associi;  maintenant  le  mort,  et  dit 
au  dieu  :  «  l^aisse-toi  llécliir  par  }ious.  »  Ce  clianf,'cnient  du  singu- 
lier en  pluiicl  était  commando  par  les  mots  qu'il  nous  reste  à  tra- 
duira. 

10  PETO  ITES  lAI.  C'est  ainsi  que  je  décompose  C(!  (jui  vient 
aprèo  NOIS.  Il  est  aisé,  en  ctTct,  de  voir  que  io  et  iai  sont  deux 
expressions  symétriques.  L'une  est  l'ablatif  sin|,'ulier  neutre,  l'autre 
est  l'aldatif  pluii(d  féminin  du  pronom  /s,  ca,  id.  Nous  avons  ici  un 
exemple  de  la  forme  en  ai(s),  correspondant  aux  formes  grecques 
comme  xE-^a^aT;,  f,;x£pai;.  Si  l'on  exccplc  Devns  Cornisicns,  et  deux  ou 
trois  autres  formes  plus  ou  moins  sûres  (Biicbeler,  |  331),  nous 
n'avions  jusqu'à  présent  que  des  datifs-ablatifs  comme  tahuleis,  eau- 
seis,  controvorsifis,  c'est-à-dire  le  féminin  devenu  semblable  au 
masculin.  Au  contraire,  l'osque  a  des  formes  comme  Diumiiais,  et 
l'ombrien  fait  ses  datifs  féminins  pluriels  en  es  [dequries]  :  iai{8) 
vient  donc  remplir  une  lacune  dans  le  tableau  de  la  déclinaison 
latine. 

PETO.  Dans  ce  mot  il  faut  d'abord  suppléer  la  nasale,  et  lire 
pento.  L'omission  dans  l'écriture  d'un  n  devant  un  t  est  attestée  par 
les  formes  anciennes  DEDROT  (pour  dcderiint),  ATELETA  (pour 
Atalmita),  VEICETINOS  (pour  Vincentinos),  C.  T.  L.  n"'  173,  1501, 
5ii).  En  ombrien,  l'omission  est  fréijuenle:  cf.  Inttra  ei  hondra^ 
persutru  et  persontru,  furfat  et  fnrfdnt,  atcntu  et  andendu.  De 
même  en  osque  :  aragctud  pour  aifjeiito,  set  pour  sunt,  mnfret  pour 
ambiunt y  staiet  [)Ouv  stnnt. —  Pcntiuit  est  l'ancien  participe  passé 
riu  verbe  pendo  «  je  paye  ».  Cf.  ostenlum,  portentum,  qui  sont  des 
composés  du  verbe  tendo,  leijuel  d'ailleurs  conserve  son  participe 
tentus,  altmtus.  On  peut  rapprocher  aussi  les  vieilles  formes  de 
participe  exfutus,  adgretus  et  egretus  (pour  effusus^  aggressus, 
egressus).  —  Pentum  a  ici  le  sens  de  «  don,  oITrande  ».  —  A  cause 
de  la  particularité  qu'olVre  noire  texte,  de  ne  jamais  redoubler  au- 
cune lettre,  on  pourrait  aussi  supposer  io  opcto  :  on  aurait  alors  un 
composé  de  pendo  et  ob  (cf.  offero,  ohmoveo),  qui  serait  le  pendant 
exact  du  verbe  (lui  est  employé  par  les  Tables  eugubines  pour 
signifier  «  ofTrir  en  hommage,  en  redevance  »  {upctu,  opeter). 


Ô2  BRVl'E   ARCIIliOLnOIOUF.. 

ITE5.  n'.ipr6s  ct'  (lu'on  .1  vu  plus  li:\iii,  /7rs-  doit  iMro  un  ahintif 
pluriel  Icuiinin.  Iloniarijucz  i-t'|nMiilaiil  la  iIiIïï'|iMu;c  (rorlhii:,'ra|)lie, 
car  il'aprt^s  i<Mf.«)  on  aurait  all«Mi(lu  iVdïs;  on  trouve;  une  inronsé- 
quencc  toute  parelllo  dans  l'in'^rription  de  Pn)to},'ône  :  Plountma 
que  ffcit  pnptilo  sorcis  (jnniiin  um/cs.  —  A  i|uil  sulislantif  faut-il  rap- 
porter celte  forme  tlex?  Le  sens  appelle  un  terme  si^îiiillaiil 
«  pritMvs,  ciVc^monies  ».  JoronjecturiMwi  moi  sembialdo  au  grec  Xtrr,. 
En  cfTel,  le  verbe /iM/v  nous  prouve  (|u'un  non  de  colle  sorlo  a 
cxisU^  eu  latin.  [.0  fait  de  prononciation  est  jnsi]u'à  un  cerlain  point 
analoiiue  à  celui  qui  a  donné  rois  pour  rolis,  rolies.  Ou  sait  (|u'enva- 
lai]UP  un  /  inilial  produit  après  lui  nn  i  parasite,  cl  que  devant  cet  i  il 
a  lini  par  disparatirc  :  le  latin  Icporem  «lièvre»)  a  donné  lii'pure. 
iepttre.  Quand  /  était  priuiilivenu'nl  suivi  d'un  j,  /  disparaît  ah-^olu- 
nienl:  linutii  donne  jh,  licinm  donne  itz  '.Quelque  cliosede sembla- 
ble a  déjà  lieu  dans  l'anliiiuilé  :  la  forme  etSto,  pour  Xe{6w,  se  trouve 
plusieurs  fois  cliez  Homère  et  cluv,  Hésiode.  Hésychius  cite  kuSv 
pour >.oc;a5v  «vanner  n,  et  la  forme  îxaâv  est  en  etl'el  employée  par 
Tbéoplirasie.  En  ombrien,  aucun  mot  ne  commence  par  la  lettre  /; 
ainsi  /nchv  ^  bois  sacré  »  devient  rttkn .  Pour  le  lalin  vulgaire,  Schii- 
cbardt  (II,  4î)i)  a  réuni  un  certain  nombre  d'exemples  où  un/ parait 
avoir  été  absorbé  par  la  voyelle  i  dont  il  était  suivi  :  Ih'itrani 
pour  V>/j7/7/«».  Il  existe  onlln  sur  la  itrononcialion  «le  /  initial  en 
lalin  deux  jassages  des  grammairiens  Poiupéins  el  Cousenlius,  qui 
montrent  que  lesonus  piuguis  a  pris  souvent  au  commencement  des 
mots,  dans  le  langage  populaire,  la  place  du  soïihs  e.rilis  fv.  Scbu- 
chardt,  111,  .iOJ):  ce  défaut  de  prononciation  avait  même  re(;u  un 
nom,  el  s'appelait  le  labdacisme. 

Remarquons  la  [ilace  difTérente  prise  la  seconile  fois  par  le  pronom 
démonstratif;  il  semble tju'il  y  ail  un  certain  rliytbme  dans  ces  for- 
mules. Le  texte  se  détache  en  pilils  membres  de  phrases  symélri- 
quemenldisposés  :  «  Joveis  al  deivos  —  qoi  med  mitai —  nei  tedendo 
—  cosmisu  irgo  sieii.  —  Ast  led  nois  —  io  pelo,  îles  lai  —  pacari 
vois.  » 

Nous  liaduisoiis,  loiil  l'ii  cniicèdaiil  (juc,  pnui  un  ou  deux  mois, 
nous  sommes  ici  sur  le  terrain  de  la  conjecture,  el  tout  en  nous  dé- 
clarant prél  à  accepter  une  interpr'''ialion  meilleure:  «<  Ast  te  nobls 
eo  dono,  precibiis  ils  pacari  velis.  ..  Sur  rotte   consiruciion   un  peu 

t.  Diez,  Grammaire  (Jet  laivjws  romanrs,  trnil.  frnnçaisc,  I,  p.  IftO.  —  Dans  c«t- 
lalnt  dialecte»  frai.çuls,  par  excmplo  en  normand,  on  trouve  «iissl  un  iùcre  pour  nu 
lièvre. 


I.\    l'I.I  s    A.NGIKN.NK    INSCHII'TION    LATINE.  1)3 

gauche:  «  to  i>ac;iri  velis  «,  je  ferai  remarquer  qxw.  la  syntaxe  est 
analogue  à  celle  de  l'idscripliori  de  Muniinius  (C.  /.  /,.  IW-l)  :  •<  Do- 
num  iioc  daresesc  visum  perfecil.  > 

Cicéroii  fait  remarquer  dans  sa  yf('7<M/>//VyMr'  (|ue  les  deux  princi- 
paux caractères  de  la  religion  romaine  (jui  frapperont  un  jour  la 
postérité  sont  ceux-ci  :  une  extrême  rigueur  dans  les  obser- 
vances ;  une  rare  simplicilé  dans  les  oITrandes.  La  moindre  for- 
malité omise  peut  attirer  la  colère  des  dieux;  mais  pour  les  désar- 
mer quelijues  gouttes  de  vin,  quehjues  grains  de  sel  suffisent.  Les 
offrandes  contenues  dans  les(iuatre  récipients  étaient  sans  doute  de 
cette  sorte.  —  Nous  passons  à  présenta  la  dernière  phrase. 

DVENOS.  Durnos  est  le  nom  du  mort.  Ce  nom  vient  dans  l'ins- 
cription deii\  lois  [Duonoii,Dnonoi).  .'\Lais,  la  seconde  fois,  le  graveur 
avait  d'abord  oublié  d'écrire  la  deuxième  lettre,  en  sorte  qu'il  a  été 
obligé  de  l'ajouter  après  coup  :  son  poinçon  ayant  glii^sé  en  com- 
mençant, et  le  jand)age  de  gauche  s'élant  mêlé  à  la  ligne  verticale 
de  l'E  qui  vient  après,  l'V  qu'il  voulait  faire  a  été  déformé.  Pour  le 
reconnaître,  il  faut  tourner  le  vase  de  manière  à  être  en  face  (h;  la 
lettre.  Ce  Y  avait  été  pris  dans  le  principe  pour  un  Z  '.  —  Trans- 
porté en  latin  classique,  ce  nom  donnerait  Bonus,  ou  bien,  comme 
l'a  conjecturé  M.  Jordan,  Beinius  :  on  en  pourrait  alors  ia;>procher 
Bennius  qu'on  rencontre  en  diverses  insciiplions  (par  ex.  Orelli 
4()3.i). 

MED  FECED.  il  faut  prendre  ici  facto,  non  dans  le  scn.s  do  «  f  ibii- 
quer  »,  mais  dans  celui  de  «  sacrifier  »,  comme  on  dit  facere  calulo 
a  faire  le  sacrifice  d'un  chien  »,  ou  comme  Virgile  dit:  Quum 
facerem  vitula  pro  friKjibus.  iasqu'a  prC'&cni  on  ne  connaissait  pas 
d'exemple  en  latin  de  la  construction  avec  l'accusatiL  En  ouibiien, 
cette  constructioii  est  extrêmement  fréquente:  Tre  buf  fétu,  v  1res 
boves  facito  »  (la  3);  pufc  iipruf  fakurent,  «  ubi  apros  fecerint  » 
(i  b  34).  Si  c'était  le  nom  de  l'artiste  ou  du  potier,  il  serait  écrit  à 
part,  et  non  enfermé  dans  une  phrase  du  contexte.  Les  mots  sui- 
vants ôleni  d'ailleurs  toute  espèce  de  doute  à  ce  sujet. 

EN  MANOM.  Mol  à  mot:  «  in  bonum  ».  L'abjectif  manus  voulait 
dire  u  bon  )>  en  ancien  latin:  de  là  dans  le  Chant  salien  Cerus 
Manus,  que  Festus  traduit  par  «  creator  bonus».  De  là  Mana  Gencta^ 


\.  J'avais  d'abord  cru,  comme  tout  le  monde,  à  l'existence  de  ce  Z.  Convaincu 
que  le  nom  propre  se  trouvait  répété  deus  fois,  j'avais  donc  proposé  do  lire  les 
deux  fois  de  la  même  maaitTe  :  DZKNOS  et  DZK  SOI. 


94  RKVUE   A  ne  II  ÉO  LOGIQUE. 

lilU^ralcmenl  «  la  l>oniU'  iihmo  ■.  la  protoctrice  dos  inorls.  L'adverbe 
mane  signil'i»'  iiroittiMiicnt  a  do  IxtniU'  liouro  ».  linm<iuis  u  redouta- 
ble »  est  le  contraire  de  inauus.  —  Je  suppose  tjuc  In  numoin  était 
une  locution  consacrée;  peul-iMre  avail-elle  pris  le  sens  «  poui  le 
salut,  pour  le  repos».  —  Cette  expression  rappelle  aussitôt  à  l'esprit 
le  iioni  de's  ilànes. 

EINOM.  Celle  conjonction,  (jui  est  fréiiueiile  en  os(]Ufi  et  eu  oin- 
bnen,  ne  nous  était  connue  jusiju'à  présent  eu  lalin  ipif  par  le  déliut 
du  Cliant  des  Arvales,  oii  je  l'ai  conjerturée  sous  la  forme  altérée 
ENOS.  et  par  une  inscription  (C.  I.  L.  lUi)  où  se  trouvent  les  mois  : 
SEFPI  INOM  SVOIS  a  sibi  et  suis  ».  Le  lalin  enim  e>l  de  la  môme 
fvuuille.  Ici  nous  avu:is  celle  coujonclion  employée  de  la  môme 
manière  qu'^HiMi  l'est  quelquefois:  elle  sert  à  réunir  deux  proposi- 
tions entre  elles,  en  présentant  la  seconde  comme  une  conséquence 
de  la  première.  On  peut  la  traduire  en  fiançais  par  udonc».  Cf. 
Virgile,  Gcory.  III,  G'J. 

Semper  cruni  quarum  mutari  corpora  malis  : 
Seiuper  enim  rcflce. 

On  sait  qu'en  ancien  latin  enim  est  souvent  le  premier  mot  de  la 
phrase. 

DVENOI.  C'est  l'ancien  datif  lalin,  tel  que  la  comparaison  des 
idiomes  voisins  le  fait  atlendre,  et  tel  qu'il  était  connu  encore  de 
Marins  Viclorinus  (Biicheler,  ^  275).  Ennius  a  employé  les  datifs 
populoi  romanoi,  Metoi  Fufetioi.  L'o  devait  ôlre  long,  car  ces  der- 
niers mots  ne  pouvaient  se  trouver  qu'à  la  fin  d'un  vers.  lùi  osque 
on  a  de  nombreux  exeuiples  de  formes  analogues  :  huitui,  piiliini, 
Abellanui,  Hcieclui,  Mniiui.  Cf.  le  datif  grec,  avec  sou  lola  adscril 
ou  souscrit. 

A  côté  de  ce  datif  arcliaiiiue,  nous  allons  avoir  la  forme  mo- 
derne malo.  De  môme,  Ennius,  qui  em[doie,  ainsi  qu'on  vient  de  le 
voir,  des  datifs  en  oi,  ne  manijue  pas  de  formes  en  o.  Il  est  possible 
que  dans  les  noms  propres  l'ancienne  llexiou  se  soil  maintenue  plus 
lon(.'lemps.  C'est  ainsi  que  l'ancien  nominatif  pluriel  de  la  seconde 
déclinaison  en  ei«  ou  ex  s'est  surtout  conservé  dans  les  noms  pro- 
pres coninie  llcriniiiris,    Siptiniiids,    Modit's. 

NE  MED  MALO  STATOD.  La  troisième  lettre  de  MALO  n'avait 
pas  été  bien  lue  jusqu'à  présent.  Le  poinçon  du  scribe  ayant  fait  un 
écart,  la  lettre  a  pris  l'apparence  d'un  A  ou  d'un  N.  Mais,  regardée 
dcpré.s,  la  lecture  n'est  pas  douteuse. 


L\    FLUH    ANCIRNNK    INSCUII'TION    I.ATINK.  95 

STATOD  ol  pris  Irniisilivcment  :  d;ins  le  latin  cl;i.ssi(|uc',  stare 
iTc-l  |iliis  employé  que  comme  vorltc  neulrc,  1(!S  signidcalions  tran- 
sitives a  va  ni  tUé  repassées  a  sistcre  {rem  sdlram  sisferr).  Toutefois 
le  sens  actif  est  resté  au  composé  prarslarc '^  fournir  ".  La  phrase 
signille:  «  ne  me  reçois  pas  à  mal,  ne  me  prends  pas  en  mauvaise 
part  pour  Duénos  ».  C'est  la  drprrcallo  après  la  prccntio.  (^ette  répé- 
tition de  la  mt''me  pensée  est  hien  d'accord  avec  l'esprit  formaliste 
de  ranli(|iiité.  Des  tours  analogues  sont  fi(''(|uenls  en  grec  :  Umdi', 

III,    rjî),    Kar     aTuav,    oùo'    Ot:L   oÏtocv  ;    (HidiliC    roi,   ."S   :    po)Tà   /.où/. 

ayvojTa.  La  penséc  au  fond  est  réi|uivalent  de  ces  vœux  si  fréquents: 
«  Quod  bonum,  fauslum,  felix  salutareque  sit...  Dii  bene  vertant... 
Verruncent  bene...  Onod  benc  eveniat...  Dii  fortunent.  » 

Le  sens  de  l'inscription  conlirme  donc  l'iiypotlièse  suggérée  par 
l'aspect  du  vase  et  par  les  circonstances  où  il  a  été  trouvé  :  il  s'agit 
ici  d'une  olïrandc  funéraire.  Pour  fléchir  les  divinités  infernales, 
un  objet  votif  a  été  ))lacé  auprès  des  restes  de  Duenos  ;  l'inscription 
qui  y  est  gravée  esta  l'adresse  de  ces  divinités.  J'ajouterai  ici  deux 
parliculai  ilésqui  sont  révélées  par  la  vue  du  fac-similé. 

Le  scribe,  quand  il  écrit  le  nom  propre  DVENOS,  va  avec  pré- 
caution comme  un  homme  qui  écrit  sous  la  dictée  d'un  autre;  mais, 
une  fois  les  six  letlres  de  ce  nom  tracées,  il  part  vivement  et,  pour 
commencer,  fait  uti  M  deux  fois  grand  comme  les  letlres  qui  précè- 
dent. C'est  que  les  mots  qui  suivent  étaient  de  style.  Lorsque  le 
nom  propre  revient  pour  la  seconde  fois,  il  se  trompe  et  est  obligé 
d'ajouter  après  coup  une  lettre  oubliée.  Ceci  ressemble  fort  à  Toeu- 
vre  d'un  entrepreneur  d'olijels  funèbres,  (lui  avait,  à  l'usage  de  sa 
clientèle,  des  formules  toutes  prêtes. 

Je  fais  suivre  le  texte  de  l'ensemble  avec  traduction  interlinéaire. 

lOVEIS      AT    DEIVOS   QOI    MED   MITAT,  NEI     TED 

Jupiter      aut      deus        cui       me    mittat  [isle],     ne        le 
ENDO,  COSMISV  IRCO,  SIED. 

endo,    commissi     ergo,      sit. 

ASTED    NOIS,  10  PETO,    ITES 

Asl  te      nobis,    eo   penso,     Ài-raT; 

DVENOS  MED  FECED    EN   MANOM 

Duenos       me       fecil       in    bonum  ; 
MED   MALO  STATOD 
me      malo     sistito. 


lAI, 

PACARI 

VOIS. 

iis, 

pacaii 

velis. 

iM    ; 

EINOM 

DVENOI   NE 

1  ; 

enim 

Dueno      ne 

iH»  nKVUK   AHCHKOLCHilyLK. 

Cr  qui  pMit  se  truiiiiiv  en  fi-,m(;ii>-  : 

«  Jupiter  ou  ijui;l  que  soit  le  dieu  au(iuel  rehii-fi  in'adit'sseiM, 
que  celui-ci  ne  IoiuIk^  point  entre  les  mains  pource  qu'il  a  pu  com- 
me lire. 

«  Mais  laisse-tdi  lléi'iiii-  |  ;ir  nous  au  mnyi'ii  de  re  don,  au  moyen 
de  ces  ee'icmonies. 

«  Duènos  m'a  ollVrl  en  honimagc  pour  son  repos  :  ne  me  prends 
doue  pas  en  mauvaise  pari  pour  Duônos.  » 


AGE  DL  I/I>SC;Ull'TlnN. 

Si  nous  rnn-nllons  les  lensoignemenls  fournie  par  la  langue, 
nous  trouvons  d'abord  un  certain  nombre  de  mots  el  de  formes 
qui  parlent  pour  une  époque  relalivemenl  ancienne  :  ce  sont 
surtout  Jorcis  pour  Jovis,  cosmisii  pour  coiiniiissus,  tiois  pour  7iobis. 
prto  jmur  jirtiso,  iai{s)  pour  iria.  mal  el  tod  pour  me  et  (e,  einom 
pour  cnim,  Dnenoi  pour  Din'no.  La  formule  rn  niniiom  ainsi  (jue 
la  teneur  générale  du  texte  ont  aussi  quelque  chose  d'archaïque. 
Mais,  d'un  autre  c(Mé,  l'infinitif  paniri  a  un  air  plus  moderne 
que  les  intiuitifs  en  ter,  comme  y ii ose ier,  figiir  du  sénalus-consulte 
des  Bacchanales,  comme  ntier  du  tombeau  de  P.  Scipion  ;  il  est 
surtout  plus  mo  lerne  que  la  forme  dasi  pour  dari  donnée  par 
Paul  Diacre  sans  indic.ition  de  provenance  (p.  (iS).  Le  rholacisme, 
c'est-à-dire  le  changement  en  r  d'un  s  placé  entre  deux  voyelles, 
fait  déjà  sentir  son  influence.  D'autres  particularités  doivent  plutôt 
Cire  mises  sur  le  compte  du  latin  jiopulairo  <|ue  sur  celui  de  l'âge 
tels  sont  at  pour  aiit,  irgo  pour  ergo^  rois  pour  velis,  itcs  pour  lites. 
En  eiïef,  c'est  du  latin  populaire  que  nous  présente  notre  inscription  : 
ce  personnage  qui  s'appelle  Duénos  tout  court,  el  qui  n'ajoute  pas 
iTiénfie  à  son  nom  le  nom  de  son  père,  a  tout  l'air  d'appartenir 
aux  rangs  les  plus  obscurs  de  la  société  ;  peul-étre  même  eôt-il  un 
esclave. 

Nous  avons  donc  d'un  côté  l'aspect  général  de  l'écriture  et  la  forme 
des  lettres  qui  semblent  assigner  à  notre  inscription  un  Age  très 
reculé, et  d'un  autre  côlé  la  langue  qui,  toul  en  présenlanl  quel- 
ques formes  anciennes,  les  méhmge  de  formes  ndalivemenl  mo- 
dernes. Comment  convient-il  de  résoudre  celte  diflkullé  ?  E\idem- 
mcnl  c'est  le  critérium  fourni  par  la  langue  qui  doit  l'emporter. 


LA    PLUS    ANCIEiV.NK    I.NSniUl'TION    I.MIM!.  97 

L'(Viilurn  lu;  si;  iiiolirn;  pas  .^iniullanémciil  dans  loulcs  les  parties 
lie  1,1  population.  Tandis  que  les  liantes  classes  de  Home  avaient 
adopté,  à  l'école  des  (jianimatici  de  la  Grèce,  un  nouveau  système 
graplii.pie,  d'Iiinnldes  scrihes.  comme  l'étaient  san-^  doute  cenx  (|ni 
olîraienl  lenr  ministère  pour  les  ohsèiines  des  f,'ens  du  pen|)le,  res- 
taient lidMe^  à  la  vieille  mode  ilali(|ue.  Nous  ne  devons  donc  {)as 
pousser  jus(|u'ù  rexlrème  la  portée  de  l'arynineiit  tiié  de  la  formi; 
des  lettres  et  de  la  direction  de  l'écriture. 

Mais,  d'autre  part,  le  rliotacisme,  dont  pacari  nous  prouve  que 
l'action  s'est  déjà  exercée  sur  la  langue,  n'est  pas  une  raison  pour 
placer  ce  monument  à  une  époque  plus  récente  que  les  plus  vieilles 
inscriptions  h  nous  connues.  Les  tombeaux  des  Scipions  en  [)orlent 
êgalemenlla  mnrtiue  irrécusable  :  il  suflildeciler /)/oir»//<(:',//»o/io;o, 
majonn»,  honore,  quairniis,  annorn.  Il  en  est  do  même  de  l'ins- 
cription de  raul-Einile,  où  l'on  a  /lohifnrriit,  liberci,  liaberc.  et  du 
sénulus-consultedes  Haiclianales,  oii  nous  lisons c^wsî/^t^,  deiccrnit, 
habeir,  venirent^  decerneret,  cosoleretur,  inceideretis.  En  général, 
nous  connaissons  des  formes  antérieures  au  rliotacisme,  telles  que 
dasi,  (irhosein,  pi(j)wsn,  asas,  Vulesius,  par  les  citations  (ju'en  font 
les  auteurs  ;  mai<  de  monuments  antérieurs  à  ce  grand  changement 
survenu  dans  la  |  lononcialioii,  nous  n'en  avons  jias.  Les  seules 
exceptions  qu'on  pourrait  alléguer  sont  le  Lases  du  chant  des  Arva- 
les  et  les  formes  avec  z  du  chant  des  Saliens  ;  mais  ce  sont  là  des 
documents  copiés,  et  non  arrivés  directement  jusqu'à  nous. 

Le  rliotacisme  n'e>t  donc  pas  une  laison  pour  regarder  notre  ins- 
cription cummo  postérieure  aux  tombeaux  des  Scipions,  qui  sont, 
selon  l'opinion  commune,  du  commencement  du  111'=  siècle  avant 
notre  ère.  il  ne  faudrait  pas  objecter  la  désinence  pnrari  au  lieu  de 
pacarier  ;  les  formes  d'infinitif  en  /  ne  sont  pas  (h-rivi-es  des  formes 
en  ÙT,  mais  les  deux  désinences  coexistaient  dans  la  langue.  C'est 
ainsi  que,  dans  la  sentence  des  Minucius,  on  trouve  statni,  sequi, 
frui,  solii^  mitti;  que,  dans  la  lex  Thoria,  on  trouve  dari,  nulili,  frui, 
quoiqu'elles  soient  à  peu  pi  es  contemporaines  de  la  le.r  Scrvilia,  qui 
emploie  arocarier  et  <ihdiider,  et  quoiqu'elles  soient  antérieures  à 
l'inscription  funéraire  de  Posllla  Sénénia(C.  1306),  où  l'on  a  oniu- 
rier.  On  sait  que  les  éciivains  comme  Piaule  et  Lucrèce  emploient 
indiiïéremmcnt  les  deux  formes. 

Si  Ton  consulte  le  reste  de  l'inscription,  on  ne  peut  s'empêcher 
de  reconnaître  que  la  langue  a  un  caractère  d'anliquilé  plus  marqué 
que  les  épilaphes  des  Scipions  et  tout  ce  qui  nous  est  parvenu 
en  ce  genre.  On  ne  risque  donc  pis  de  tomber  dans  le  iléfaut  où  li 

\i  IV.  —  7 


98  RirVDE   ARCFIÉOLOOIQUE. 

salisfaction  d'une  .U'couvfrtf  nouvi'lli'  a  i|iieliiiefois  tntratné  U'S 
é|>ii5rapliislos,  eu  lixanl  au  t'omuii'ni'iMUi'nl  du  m'  siùcle  avant  noire 
ère,  ou  à  la  lin  du  \\\  la  date  probable  île  ce  uionumenl.  Munie  en 
restant  dans  ces  limites  tr^s  nio  lérées,  l'inscriplion  de  Dnénos  a 
droit  ;\  une  plaet'  d'honneur  dans  la  prochaine  édition  du  Corpm  : 
la  prenut're  sans  eonlredil,  et  de  beaucoup,  pour  rarcbaïsini'  de 
l'écriiure,  elle  pfut,  en  outre,  se  mesurer  avec  les  pins  anciennes 
pour  la  conservation  des  formes  grammaticales  et  pour  l'anlKinité 
du  vocabulaire.  GrAce  à  un  heureux  ha.'ard,  ce  Din-nos  ouvrira  à 
l'avenir,  dans  l'immense  recueil  des  inscriptions  romaines,  le  délilé 
QÙ  il  paSbC  avant  les  Scipions,  les  Duiliusel  les  Paul-Kmile. 

MK:ni;L  uni'; al. 


i.i;s 
LISTES    IlOYALKS    ï'TIHOl''IF.NNI' S 

LEUR  AUTORITÉ    lIl>TÛRlgUE 


1.  —  Je  (lois  lout  (l'abord  pit'V(Miii'  le  IccU^iir  iiue  U*  lili-c  de  ce 
niiJnioiie  pioiiiel  |)(.'ii[-(Mie  plus  (|U(',  je  ne  licii<liai.  L'oxaiiicn  lii^ou- 
••cuseiiicnt  sciciililiiiiie,  tel  qu'on  le  coiupiiMMliait  aujouidliui,  des 
listes  royales  élliiopiennes,  au  point  de  vue  de  ieur  ar.tlieniirilé,  de 
la  date  de  leur  eomposilion,  de  l'origine  des  li^'gendes  el  liadilions 
qui  ont  été  conipilé'es  par  les  aniialisies  abvs-ins,  serait  un  travail 
considérable,  qui  exigerait  une  compétence  toute  particulière,  et  né-» 
cessilcrait  un  luxe  de  textes  cl  de  citations  tout  à  fait  bors  du  cadre 
de  la  liectte.  Je  nie  suis  proposé  un  but  plus  modeste^  et  surtout  plus 
en  rapport  avec  le  caractère  archéologique  et  bislorique  du  jirésent 
recueil. 

11  m'a  semblé  que,  tout  en  laissant  aux  élhiopisanls  de  profession 
le  soin  de  faire  ce  long  et  patient  dépouillement  des  annales  indigè- 
nes comparées  aux  documents  extérieurs,  je  pourrais  de  mon  côté 
rechercher  l'utilité  et  le  degré  de  ceititude  (jue  peuvent  présenter 
ces  listés  de  rois,  très  dilTérentes  entre  elles  pour  une  môme  période, 
quand  on  veut  les  contrôler  avec  d'autres  sources.  Ce  travail  n'est 
pas  sans  difticullé,  j'ajouterai  même,  sans  ([ueNjuc  déception  eu 
égard  au  mince  résultat  auquel  on  arrive;  mais  si  le  but  n'e=t  pas 
toujours  atteint,  la  route  à  parcourir  est  attrayante,  car  elle  met  en 
contact  avec  des  pays  encore  peu  connus  et  qui  sont  appelés,  à  raison 
des  découvertes  importantes  déjà  laites  el  de  celles  (ju'ils  nous  réser- 
vent encore,  à  fournir  un  vaste  champ  d'exploration  pour  les  orien- 
talistes. Ethnographie,  linguistique,  géographie,  histoire,  épigra- 
phie,  presque  tout  est  encore  ù  faiie  pour  la  vallée  du  Haut-Nil. 


i(S) 


BKVl'K    AllCHKOl.Or.Iol'K. 


Je  bornerai  quant  ."i  pn'-senl  cçl  essai  k  Vèlyiôc  des  noms  propres 
que  l'on  trouve  dans  Ks  aiileur;  ilas>i(|iies,  lis  écrivains  orientaux, 
ou  sur  lesnionumenls  rpix;rapliitiues  indigènes,  cl  je  rechercherai 
dans  quelles  limites  on  peut  les  reconnaître  et  les  iilenlilieravec  les 
noms  analoiîues  'correspondants  ou  liomophon-'s)  que  dDiinent  les  sé- 
ries royales.  En  même  lemp<,jo  passerai  très  sommairement  en  revue, 
et  en  tant  seulement  (|u'ils  se  rattachent  ?i  mon  sujet,  les  rcnsci- 
gnementsj,'éoj,MMi)lii(|uesiiuc  nousont  Iran^-niis  le-.  Grecs  sur  ri'-lhio- 
pie  et  sur  sa  voisine,  l'Arabie  du  sud. 

2.  —  Ce  genre  d'études  comparatives  est  possible  aujourd'iiui  sur 
l'Ahyssinie' grAcc  aux  lr;iv;in\  ile  Riippell,  Dillmanii,  dWlihadie, 
J.  Ilalcvy  (M  aulres  savants  de  France  et  d'Allemagne,  niiaiil  à  l'or- 
dre chrono|ogii|ue,  il  ne  f;iut  guère  y  compter  pour  le  moment;  les 
listes  de  rois  publiées  par  Salt(18l'i),  par  Rii|»pel  (ISiO;,  p.ir  Dill- 
mann  (IS.'i^î)  ne  peuvent  servir  (pie  de  renseignemenis.  souvent  bien 
insuflisants,  ainsi  (|ue  nous  le  verrons.  Les  noms  (pi'elles  contien- 
nent sont  vraisemblablement  exacts,  mais  leur  assemblage,  la  com- 
filatinnet  la  rédaction  de  ces  listes  sont  une  œuvre  relativement  mo- 
derne, qui  ne  date  (jue  du  xiii"  siècle,  épo(juc  à  laquelle  les  moines 
des  couvents  de  Dabra  Bangal  et  de  iJabra  Lib;^nos  firent  ce  travail 
à  l'aide  de  documents  provenant  de  sources  et  d'origines  très  di- 
verses. 

C'est  seulement  après  la  chute  de  la  dynastie  des  Zâguès,  qui  avait 
régné  environ  trois  cent  cinquante  ans  (de  UiO  à  12GS),  que  l'on 
voit  aj)i)araître,  à  la  cour  des  rois  successeurs  de  cette  dynastie,  un 
fonctionnaire,  sorte  d'historiographe  ofliciel,  chargé  de  diriger  la  ré- 
daction des  annales  du  royaume*.  C'est 5  cette  époque  (jue  remonte 
la  chronicjue  (j'Aksum,  le  jthis  ancien  monument  connu,  dont  il  ne 
reste  que  des  fragments  datant  d'Ameda-Tsion  I""  (l.tlii-l.'{4:2). 

Quant  aux  antiques  annales  des  rois  antérieurs  au  christianisme 
ou  contemporains  des  six  premiers  siècles  de  notre  ère,  c'està  peine, 
comme  on  le  verra  dans  le  présent  mémoire,  si  on  peut  identilici- 
quelques  noms,  et  fixer  quchjues  dates  qui  ne  sont  ijue  des  points  de 
repère  isolés. 

1.  J'emploie  indistinripmont.  pour  l'-vitor  dos  n^pétilion.s,  los  mois  »  Abyssinio  »>  rt 
"f.thlopie  ».  Ced<TiiiiT^»pP»^^  .■IM/wyo  parallCiro  d'origine  RrpcfiuejAtOioij;.  Je 
me  méfie  cependant  de  l'éiyiiiolosie  aîOio  o-\i,  ilepnis  (m'oii  connaît  l'rtymolopie  l'fjyp- 
tiennc  et  non  grecque  d'/iV/'//'/'.'  pyramide,  labyrinUie.  Miyssinie  est  un  mot  iniUgî-nr-, 
J!ii//fsli,  J--^  de»  Aralx'». 

2.  R.  Ûmti,  Journal  ufialique,  juin  1S81,  p.  aiS. 


i,i:s  LisTKs  iu)Y.\m:s  i; iiiropirNNi.s.  |01 

3.  —  N'ifiircllernont  los  rois  élliiojiicns  pn-lcn^Iaiont  descendre 
dircnleiiii'iit  dt;  Saloiiion.  C'est  tout  cequc;  l'on  trouve  sur  les  ori;.'i- 
nesde  la  n.Jliori;  car,  bien  eulotidii,  les  annales  élliiopienncs  ni;  ron- 
liennenl  auciune  donnée  etlin():-,'rapliiqMe,  rien  f|iii  puisse  (''Irc  (-(tiii- 
paiù  au  chapitre  X  de  la  (icnrsi'.  Comme  elles  ont  été  confcetioririri^s 
à  l'époffue  chrétienne,  elles  ont  imaginé  une  généalogie  prisedins 
le  Nouveau  Testament,  pailaiit  du  iirciuierliomme  jusqu'à  Salomon 
fils  de  Dâouit  (David). 

En  réalité,  les  Éthiopiens  sont,  comme  les  Phéniciens  (,'t  les  Sa- 
béens,  d'origine  kousliile,  c'est-à-dire sé!iiilii|ue;  mais  ils  se  mélan.!,M> 
rent  avei-  la  race  nègre  ou  africaine  qui  était  déjà  en  possession  du  sol 
au  moment  de  l'immigration  koushite  dans  la  vallée  du  Nil',  Leur  lan- 
gue est  sémitique  bien  plus  que  celle  dos  E,i:ypliens,  qui,  venus  é.L'a- 
jement  d'Asie,  se  sont  séparés  plus  tôt  du  tronc  sémite  commun  et 
n'ont  conservé  de  la  grammaire  sémitique  que  des  traces  pour  ainsi 
dire  ludimcntaires. 

4.  —  D'après  les  annales  éthiopiennes,  Salomon  engendra  Ebna 
Hakém,  Ti'fl}  *  dithoo  :  lequel  est  le  premiersouverain  aksumite, 
celui  qui  est  en  télé  de  la  liste  de  la  première  période.  Comme  on  l'a 
fait  remarquer  -,  ce  nom  tout  ù  fait  arabe  j^^  (^i  prouve  l'origine 
étrangère  de  la  légende;  le  nom  étiiiopiendc  ce  monarque  est  Meni- 
lek,  sa  mère  était  la  reine  de  Saba  que  les  légendes  arabes  et  éthio- 
piennes se  sont  tour  à  tour  disputée:  Bilkîsest  un  de  sesnoms  arabes^; 
elle  régna  à  Mareb  après  avoir  tué  son  époux  Dou  ou  Dzoul  âdzar, 
personnage  légendaire  créé  plus  tard.  Elle-même  se  rattache  à  un 
cycle  astronomique  ou  période  planétaire,  sur  lequel  les  anciennes 
traditions  sont  assez  confuses.  C'est  elle  (juivinl  à  la  cour  du  roi  Sa- 
lomon d'après  la  Bible,  qui  l'appelle  reine  de  xac*,  sans  dire  son  nom 
(I/îo/s,  IX,  10).  Le  mot  N3D  en  hébreu  désigne  une  branche  des 
Arabes  yoklanides;  les  Sabéens  des  inscriitions  himyarites  sont  dc- 


1.  Homère  (Oi/yva' \  1,  23)  distinguait  déjà  les  Éthiopiens  en  Étiiiopions  d'Afrique 
(les  plus  anciens)  et  en  Éthiopiens  d'Asie  ou  Koushites.  V.  Maspero,  Hist.  une.  des 
peupla  (le  i'Ori'int,  1&75,  page  146  et  pat^im. 

2.  Halévy,  Mcl.  d'èpigraplne  sémitique,  in-8",  lS7'i,  p.  132.  —  R.  Basset,  Journ. 
asiat. ^\mn  18S1,  p.  ûU. 

3.  V.  le  résumiSde  toutes  les  légendts  orientales  sur  Bilkî?  dans  le  récent  onvraso 
de  G.  Hœscii,  Die  Kœni'jin  von  Saljn,  111-8°,  tS80.  Bilkîs  parait  Ctre  la  transcrip- 
tion ar.ibe  du  {^rec  na).).axr,(;)  (concubine)  introduit  dans  la  langue  arabe  par  la  It'- 
gendc  grecque.  D'après  Stcinrcluieider,  ce  i-.iot  serait  une  altération  de  N'3u  '"'C'7C 
Maliki  Saba.  (Rœscli,  p.  47;.  —V,  D.  II.  .Miilhr,  R'irgen  unil  6'' ///tewer,  II,  p.  21. 


102  RRM'R  ARciirni.onioi'K, 

signés  p.ir  MIA.  xir.  nu  en  n  lorjclu  ipn'  li  r<'in<'  de  Nzr  «"'Inii 
une  piiiiros';!'  .11  abc  de  ritliiinre,  au  sud  do  la  l';ilostiiie,  cl  i»ar  cuii- 
siqufnl  distinrli*  de  l.i  Tvuw  Hilkis  des  iralilions  sabc'eiiiies. 

Dans  pMMidok  illi.olhéfH"*',  la  reine  de  Saha  esl  appeU'c  Kandakc 
cl  régnait  à  Mi'ioc  l'I  ;i  Ak>Miii.  I.rs  docunienls  rlliiopieiis  cerivenl 
ce  nom  laiilôl  Klieii  IAki\  laiilol  Kliendakû  ou  Klieuiieké;  on  ne  le 
trouve  pas  sur  les  listes.  Ce  mol,  d(u»l  l'origine  e^t  inconnue,  paialt 
avoir  doiinr  naissance,  paicornipiJDii,  à  lafoiiiie  Mâke  Ii\ 'Tfïl^  •• 
Telle  e>t  I  o[)iiiion  de  MM.  (îulscliiiiid  et  Socin'.  Nous  pensons  iju'il 
faul  voir  plutôt  dans  le  nom  propre  Mâkedû  le  restant  d'une  tradition 
qi.i  avait  fait  de  la  reine  de  Sal»a  une  conlemp(uaine  d'Alexandre 
le  .Macédonicii.  Ce  rôcil  fabuleux  esl  racontô  [lar  le  ronipilateur 
alexandrin  du  iv  siècle  de  noire  ère  connu  sous  le  nom  de  Pseudo- 
rallisthènes. 

ilàkedd  sigMifuTail  donc  la  Mact'donienne.  C'est  le  nom  sous  le- 
•  |uel  elle  tigure  dans  les  annales  indigùms  après  les  règnes  fabuleux 
du  serpent  Al  ué  %  du  gi-anl  Angaliù,  do  Gedur,  de  Sebalso  et  de 
Qaouasyà,  Elle  n'gna  elle-même  cinquante  ans.  D'après  la  légende 
élliiopienne,  Alàkedâ  vinl  à  Jérusalem  la  (lualrième  année  du  règne 
de  Saloiiion  et,  à  son  retour,  donna  naissance  à  Iliii-iil-Ilaklm  ou 
Klina-lldkem  que  les  clironicjues  (|iialilicnl  de  <(  fils  de  Mâkedà  et  de 
Salomon  ».  C'est  avtc  ce  prince  (jue  commencent  ce  que  l'on  peut 
appeler  les  temps  historiques  par  opposition  à  l'époque  fabuleuse. 

'.).  —  Les  annales  abyssiniennes  ne  contiennent  h  proprement 
pailer  aiiCune  division  ;  cesl  M.  Dillmann  (|iii,(laiis  son  premier 
mémoire  sur  l'iiistoire  d'Ab\s?iiiic  intitulé  :  «  Zur  Gescliiclite  des 
Abyssiniscben  Reiclis»,  paru  en  l8o;i*,  a  mis  de  l'ordre  dans  ces 
longues  séries  royales  en  les  partageant  en  périodes. 

La  première  période,  aiilérieuic  à  l'époque  clirélicniie.  eoui- 
mcnce  à  Kbna  liakem  ^i-fli  :  àlïUiJO  Jet  linit  à  Hà/èii  fllf)  1 
appelé  aussi  Beesè  Hâzén  'flTirt,  î  (\lL'i  «  Hi'ux  listes  assez  oilTr- 
I  entes  pour  cette  période  se  trou  vent  dans  les  manuscrits  :  M.  Dillmann 
les  a  publiées  toutes  deux,  désignant  la  première  par  liste  A,  la 


1.  Edil.  r.  MiilIfT,  Paris,  Didot,  I.S40,  p.  120. 

a.  Apud  G.  Huîscii,  [)if  Kœniijin  ton  Siifni,  p.  .'10. 

3.  Sur  II- iiiyilie  du  sorpcut,  cf.  Li'iiorinuni,   Oiujinf^  dr    /'/ii\tnirr^l.  Il  (1883, 
p.  273.  al  lli'^l'-irr  une.  de  l'Orirnl,  O'  édil.  t.  I.  p.  a7. 

4.  Darm  WJniirn  d  'le  la  So(:tétéohfnlalcuilcm(iude,(\Me  }ii  dOsigiicruI  par  le  bigle 
(i..luiuir.    ZliMC,    I.  VII,  amiiJi:  lbj3.  1».  338  à  iO*. 


I.KS    MSTKS    RdVAI.KS    KTniOPlKNrXKS.  103 

deuxièmo  |i;ir  lisU;  IJ.  I.a  cliioriiiiiii;  (';lliio[iii'iiiio  (''ciile  en  l'an  i7l0 
environ,  puhlioe  par  M.  H.  U.isscl  dans  le  Journal  asintiijUi'  de  18S1, 
esl  conforuu'  pour  celle  période  ii  la  lislo  H  de  Dillinanii.  Klle  con- 
lieiil  'ii>  rois  donl  un  cerlain  nombre  sont  d'iniporlalion  élrangèrc; 
tels  sonl  :  Ihna  Ilakiin;  Toinâï,  Tlioinas;  Ausabior.,  Eusèbe;  Abrû- 
lyos,  Aurélius;  Toniàlsion;  ce  qui  ne  peul  (pj'insjiirer  du  doule 
sur  la  coniposilion  de  celte  lisle.  Ainsi  (jue  l'a  fait  renianiuer 
M.  llalévy  ',  les  noms  el  les*personna;,'es  ont  sans  doule  existé, 
mais  leur  ordre  clironolot,M(iue  a  été  fabri.-jué  et  on  a  porl6  comme 
anlerieurs  à  Hâzôn  des  noms  de  souverains  en  réalité  postérieurs. 

On  a  lieu  en  cnVl  d'être  élonné  de  ne  rencontrer  sur  la  liste  de 
cette  première  période  aucun  des  noms  des  rois  élbiopiens  que  nous 
ont  transmis  b  .s  monuments  liiéroglypliiques  -. 

0.  —  Dans  l'iiisloire  de  l'Egypte  ancienne,  le  mol  Kousb,  qui 
porte  bien  le  cacliet  de  l'origine  kousbite,  désijj'nail  tout  le  pays  de 
la  haute  K|,'yple  y  couipiis  la  Nubie.  Bien  (|U(;  l'I-Ubiopie  joue  à  cer- 
tains nioiiienls  un  grand  rôle  dans  les  événinients  de  la  vallée  du 
Nil,  il  e-^l  dillb  ile  de  dét'rniiner  géograplii(iuemenl  l'étendue  de  ce 
pays  et  de  dire  (|U{dle  était  sa  limite  méridionale  iiiféiieure.  Il  est 
vraisemblable  que  l'on  compienail  sous  le  nom  d'Ethiopie  la  Nubje 
cl  le  llabesh  ou  Abyssinie,  c'est-à-dire  tout  l'espace  entre  file  de  Pbi- 
l;e,  vers  le  î24" degré  de  latitude,  elle  pays  de  PounletdeNallasiou, 
vers  le  10"  degré  de  latitutle  nord. 

Sî  population  était,  comme  je  l'ai  dit,  un  mélange  de  Kbamiles  ou 
Africains  autochtones  et  de  Kousbilcs  venus  de  l'Asie.  Loin  d'avoir 
colonisé  l'Egypte,  comme  le  croyaient  les  anciens  (Hcro  iole  et  Dio- 
dore),  l'Ethiopie  reçut  au  contraire  d'elle  sa  civilisation  el  fit  pen- 
dant des  siècles  partie  intégrante  du  leiritoire  égypilien^.  Les  textes 
hiéroglyphiques  la  traitent  de  vile,  miséralde,  Kfirst,  iroliable- 
ment  à  raison  de  l'infériorité  de  la  race,  ou  peut-élre  à  cause  des 
giierres  que  les  Egyptiens  eurent  longtemps  à  soutenir  contre  elle 
avant  la  Xll«  dynastie,  époque  de  son  annexion  au  royaume  des 
Pharaons. 

7.  — D'abord  une  simple  province  égyptienne  administrée  par 

1.  ^fét.  d'Epiqr.  sémit.,  p.  132.  —  Krcmer,  >iudnrahisrhf  Sage,  p.  lOtt. 

2.  Voir  en  appendice  à  la  fin  de  ce  méuioire  les  deux  li>tes  A,  B,  et  une  troiftiëme 
C,  que  donnent  certains  manuscrit^. 

3.  Maspero,  Htst.  anc.  de  l'Orient,  p.  14. 


loi  ilKM'K    AhClIKOLOuKil  i:. 

ili-s  vii'tMois  qui  pienaieiil  le  lilrc  ilo  «•  prince  de  Koiisho,  l'IUliio- 
pieseienilit  iiidè(ieiidanle  sousller-lutr,  l'un  d'eux,  pitMied'Auuuun, 
vers  le  \r  sièiie  av.uil  noire  »''rt',  sous  In  \\l' ilynastie  saïle.  Sa 
capitale  èlail  Nopli,  Nopl  ou  Napala,  hàlie  sur  le  iNil,  un  peu  au-des- 
sous du  '20'  tleL'rè  de  latitude  nord,  au  pii  d  de  la  niontaj^ne sainte /)« 
ùah,  le  I)jel)el  Baïkal  njodeme ,  célèbre  par  les  stèles  qu'a  dé- 
couvertes Mariette'.  Le  culte  d'Aninion,  introduit  par  les  rois  prôlres 
de  Koush,  resta  Jus(|u'aux  Lagides  le  culte  national. 

l'n  peu  plus  lard.  IKtliiopio  devient  à  son  tourcon  luèrante,  elses 
souverains  commandent  5  IK^iyple  entière,  pendant  environ  un  siè- 
cle. Le  plus  célèbre  d"entiecu\  est  Pianklii  .Merianioun,  le  héros  de  la 
stèle  de  ce  nom;  puis  vient  Kasiila,  élu  par  l'assemblée  des  prôlres 
el  dont  le  lils  fonde  la  XXV»  dynastie  Murlhiopiemie.  Nous  connais- 
sons les  rois  de  lelle  dynastie.  Ce  sont  : 

Shabaka  ou  Sliaba -,  le  iiaSâxwv  d'Hérodote,  le  Souva  du  livre 
des /1I015,  contemporain  du  roi  d'Assyrie  Salmanazar.  mort  veis  "Î^O; 

La  reine  Aménirilis,  sa  sœur,  et  Pianklii  II  ; 

Sbabataka,  710-(590; 

Tahraka,  liOU-tiGd,  le  Sésosirisdes  Koushiles  suivant  l'expressioa 
de  Mariette; 

Ourdamen  ou  Houdamcn,  son  lils,  OOrj; 

Amenmérinout  ou  Naouùt  .Mèri  Aiiioun,  le  Pliaraon  de  la  slèle  du 
Songe,  elses  deux  sœurs  Kérarbi  et  Kerljéla,  contemporains  des  douze 
rois  de  la  dodécarchle^;  c'est,  d'après  Diodore  de  Sicile,  le  dernier 
des  princes  éthiopiens  qui  régnèrent  sur  l'Egypte  (Maspcro,  Ilist. 
anc,  p.  480). 

Psamétik  I,  le  fondateur  de  laXXVI'  dynastie,  vers  G50,  est  d'ori- 
gine égyptienne,  mais  il  est  l'époux  d'une  Klliioiiienne,  la  princesse 
Shapenap,  tille  d'Aménii  ilis. 

8.  —  A  partir  de  cette  époque  l'Egypte  s'affranchit  du  joug  éthio- 
pien, et  l'Ethiopie  conserve  ses  souverains  in.lépendanls,  dont  les 
noms  nous  ont  été  conservés  par  des  stèles  et  des  inscrii>ii(Mi>  hiéro- 
glypiiiqurs.  Tels  sont  : 

Aspourta,  contemporain  de  la  XXVl'  dyna-lie  ; 

Asran,  successeur  d'Aspourta; 

1.  Si.-lc  (le  Pianklii,  siiMc  du  Sodr'',  siilo  de  l'Intronisntion,  RtMc  d'ovcommuni- 
catioii,  rf.  V.  lier.  (ti</„-<il.,  18û.*i,  II,  p.  17/|. 

1».  K't  est  une  pririicuio  afAxe  jouant  \o  r.'.ln  d--  rarliclf?  («.  nivh.  I.  c). 
3.  r.  Ixnoniiani,  H,U.  anc.  île  l'Or.,  O'Cdil.,  Jb81,  I.  H,  p.  381. 


I.I.S    USIKS    lUlVAI.I.S    KlllIllIMlAM  s.  lOiS 

Ilorsi.itef,  fils  de  Tesma  régenlc  de  Kousli,  et  In  princesse  Bch- 
tari  sa  femme; 

Nastaseneri,  coiileiiporain  di;  ri[iva>iiiii  perse  ; 

Arkaiiiène,  "KfiYafAiv/.c;  des  (irecs,  (jui  liL  hàlii'  le  sanctuaire  de  Pak- 
kcli  et  (h;  nombreux  moniiiiicnls  conservés  jii-(|ii'à  nous;  il  siv.iil 
sous  Plolémée  II  IMiiiadjiplic  (:28'i--'i7  av.  J.-C); 

l'Ulotile  celle  loiigut;  liste  <le  rois  él!iioi)iciis  dont  les  carlouclies 
onl  été  trouvés  dans  les  ruines  dt;  Méroé,  Barkal,  Dakkeli,  Naga, 
Amara,  mais  (|ui  n'ont  pu  encore  être  dérliilTrés  et  encore  moins 
idenliliés  avec  les  transcriptions  gicc  jues.  Maiiéllion  (,'t  Diodure  étant 
muets  sur  leur  compte  '. 

L'Élliiopie  égyptienne  parlait  ou  du  moins  éciivaii  le  puil.mgage 
égyptien,  témoin  le  style  des  inccrijilions  de  Tahraka  el  de  Pi.inklii; 
mais  a[)rés  la  séiiaration  des  dcuv  piys,  il  se  (orma  un  dialei:tt!  t.lliio- 
pien  (jui  devint  à  son  tour  une  langue  littéraire,  dont  on  trouve  des 
spécimens  dans  la  stèle  de  Naslasenen  el  dans  celle  de  llorsiatef.  A 
côté  de  cette  langue  littéraire  il  y  eut  de  tout  temiis  un  idiome  vul- 
gaire d'oi'igine  sémitique,  (jui  devint  plus  laid  le  gliecz  ou  ancien 
éthiopien. 

1).  — Voilà  pour  l'Ethiopie  pharaoniiiue,  telle  qu'elle  nouscst  con- 
nue par  les  docvimenls  égyptiens;  quelle  trace  en  esl-il  resté  dans 
les  annales  aksumitaines  '? 

La  première  péi'iode  de  l'histoire  élhiopienne  telle  que  les  docu- 
ments indigènes  nous  l'ont  retracée,  et  qui  a  la  prétention  de  com- 
prendre toute  l'hisloirc  du  pays  d'Aksum  depuis  Salomon  jusqu'à  la 
naissance  du  Chrit  sous  Bazén  OH»^  s,  ne  renferme  dans  ses  21  ou  20 
rois,  suivant  les  listes^  aucun  nom  (jui  puisse  êlre  rapproché  avec  cer- 
titude de  ceux  qui  nous  viennent  des  documents  égyptiens.  Il  faut 
en  conclure  qu'il  ne  s'agit  pas  du  même  pays  el  que  le  territoire 
dont  Aksum  était  la  capitale,  c'est-à-dire  le  Tigré,  beaucoup  plus 
au  sud,  du  reste,  que  Napata,  Kipkip,  A^tamouras,  Baroua  (Méroé), 
Kerkis  et  toutes  les  villes  de  Nubie  citées  dans  le  dictionnaire  géo- 
graphique de  Brugsch,  était  resté  tout  à  fait  étranger  aux  grands 
événements  historiques.  Le  pays  d'Aksum  et  du  Hahcsh  formait 
donc  un  royaume  tout  différent,  d'une  importance  relativement  se- 
condaire, et  il  n'app  irait  en  réalité  dans  l'histoire  qu'au  r'  siècle  de 
notre  ère,  alors  que  l'ancienne  puissance  égypto-éthiopienne  était 
depuis  longtemps  absorbée  par  la  domination  grecque. 

1.  V.  Lcpsi.is,  Kœai'jibuch  d.  a'.ten  Acffiji'ter,  Berlin,  183S,  in-4",  p!.  71. 


inr,  KKVL'K    ARCHI-.OI.CX.lolK. 

Dans  cts  circtonslanccs  il  n'y  a  aucun  piolil  à  lu  or  des  deux  li-los 
A  il  H  des  chioniques  élhidpii'niu's  de  la  iireinièrc  période,  lesquel- 
les, coniint' je  l'ai  dil.  ne  cotilicnncnl  pidljiMciiient  (]ne  des  pj'isofi- 
napcs  II')?'  n  laires  ii  sultant  tle  ijucliues  traditions  c.iiifii.t  s,  la  plu- 
part postérieures  à  la  naissance  du  (llirisl,  ainsi  ipioii  a  pu  s'en 
eoiivaiiure  toutes  le>  fois  iju-on  a  rlierclit'  î^  véiilicr  cerlaiiis  noms. 

U).  —  D'après  les  auteurs  ('ihiopicns,  ee  fut  l'an  H  du  rt'^pne  de 
Hà/èn  (juc  naquit  le  (îhrist.  Kn  raison  de  l'iniporlancc  ilc  l'évrne- 
iiunl,  on  peut  considérer  l'indication  coninii'  exacte  et  tenu  le  der- 
nier roi  de  la  première  période  comme  contemporain  de  Tére  chré- 
lienne.  Ksl-ce  à  dire  cepen  i;!nl  (jue  l'on  puisse  faire  remonler  à 
celle  époque  la  fondation  du  royaume  aksuniitc? 

Les  populalions  de  l'KlIiiopie  étaient  sans  doute  alors  des  tribus 
errantes  et  barhares,  (jui  éiaient  loin  d'avoir  un  élal  poliii(|uc  régu- 
lier et  de  compoiicr  une  série  de  mis  telle  ipic  les  léi,'cnd«'s  popu- 
laires l'ont  confectionnée  plus  tard.  Noussavonsdu  reste  par  Strabon. 
qui  élait  contemporain  d'Au|,Misl<'  et  de  Tiliére,  (jue  de  son  temps 
rKtliioiiie  du  nord  ou  Nubie  n'était  (lu'un  ramassis  de  brigands  et  de 
pnpulalionsnoma  lesjieudangereuses  il  est  vrai,  puis(|ue  trois  cohor- 
tes romaines  suffisaient  pour  proléijer  la  frontière  d'Kgypte  àSyène. 
]jO  savant  géographe  ajoute:  «  Les  Ltbiopiens  du  sud  n'avaient  pas 
réussi  davantage  à  former  un  État  uni  et  com[iact,  et  ils  se  trou- 
vaient par  le  f.iit  aussi  mal  jiourvus  pour  la  guerre  que  pour  les  be- 
soins de  la  vie  ordinaire'.  » 

Cependant,  sous  la  ronduitcdc  leur  reine,  «pip  Sirabon  appelle 
Kandake,  les  Éthiopiens  pénétrèrent  jus(|iren  Tliébaide  ;  mais  le  gé- 
néral romain  l'étroiic  les  chassa  de  l'Égyplc  et  les  ^mursijivit  jus- 
qu'à Pselchis,  Méroé  et  Napala,  villes  dont  il  s'empara  de  force  vers 
l'an  li  de  J.-C,  sous  Auguste. 

Ce  nom  de  Kandake  est  une  réminiscence  de  la  reine  Uilkt-, 
f|ui  nous  ramène  au  pays  d'Aksum  et  nous  montre  que  la  campagne 
de  Pélrone  eut  lieu  jusipie  cln  7,  les  Aksumites.  Les  listes  d'Abyssi- 
nie  ne  mentionnent  aucune  reine  dans  leurs  séries  royales;  il  serait 
du  reste  difficile  de  savoir  exactement  de  quelle  souveraine  il  s'agit, 
car  Piine  nous  dit  (pielque  part  (|ue  «  le  jtays  est  gouverné  par  une 
femme,  la  reine  Candace,  nom  qui  depuis  grand  nombre  d'années 
pasïc  de  reine  en  reine  »  (trad.  LiliiV-,  livre  M,  §  :jri\ 

1.  Sirabon,  XVII,  i,  :>^,  ira'].  Tard  ou. 


ij:s  i.istks  novAi.Ks  r.TiiioriKN.NKs.  \(\', 

En  (Irliors  flo  relie  expéililioti  lom.iiric  (jui  ;■(;  Icnnin.i  par  une 
vicloire  loniplèlc,  un  tribut  impoM"!  aux  vaincus  et  un  envoi  «ram- 
bassadeurs  aupi  es  de  César  S  nous  n'avons  plus  lien  de  pn-ris  sur 
l'histoire  de  l'Altyssinic  JMS(|u';i  rii.sciiplion  ^,'rec(|ue  d'Adulis.  Les 
auteurs  classiiiues  ne  font  plus  nienlion  de  l'Kliiiopie  (jue  pourccMis- 
hlev  réiat  Icirliare  des  populations  de  i'Alri(|ue,sur  les(|uellesilss()ril 
(lu  reste  II  (S  mal  rcnscij^'nés,  accueillant  et  ie[iroduisanl  aveccuin- 
plaisanc(!('t  nnivclé  les  récits  i,Mules(|n('s  et  légendaires  des  voya- 
geurs. 

i\.  —  Avec  Bàzên  et  la  naissance  du  (iliri^l,  commence  In  deu- 
xième péi  iode  (|ul  s'étend  jiisi|ii  a  répo(|ue  probabh;  de  l'introduc- 
tion du  christianisme  en  Abyssinie,  vers  r.30  de  notre  ère.  Pemlani 
ce  laps  de  temps  de  trois  t-iècles  il  y  eut  trente  et  un  rois  d'après  la 
liste  A  d(!  Dilliiiann,  dix  d'après  la  liste  H,  et  quatorze  d'après  la 
liste  C. 

La  liste  A  paraît  èvidemm.'id  la  plus  'xacte  ou  du  moins  la  plus 
complète,  saut  à  iiiodillcr  le  nombre  d'années  de  rèi;ne  de  chaque 
roi,  car  le  total  doiuifiMil  'l'iO  ans  nu  lieu  de .'{().  Aucune  recherche 
n'est  possible  avec  les  listes  Ij  ct(],(iiii  sont  incomp;ète>;  mais  parmi 
les  trente  et  un  personnages  que  donne  la  liste  A,  un  cerl  lin  nombn; 
a  pu  au  contraire  être  identifié,  ou  du  moins  rapproché  de  noms 
aiialoL^ues  trouvés  soit  dans  les  auteurs  grecs,  soit  sur  les  mon- 
naies, cesl-à-dire  dans  ce  que  nous  pourrions  appeler  les  docu- 
ments extrinsèques  provenant  de  soiiras  aiitios  que  les  listes elks- 
mêmes. 

1:2.  —  (]es  nionuiiients  exlrin>è. pies  sont  : 

1"  Les  aiitiiirs.L;rccs,  et  notamment  le  Périple  d'Aï  témidore,  ccLii 
d'Agatliaicliidc.  et  le  Péiijile  anonyme  de  la  mer  Liytlirée,  d  n- 
na:il  tous  les  trois  la  d;'scrijilio!i  de  tou^  les  ports  de  la  mer  lloii.ie 
cl  d'une  partie  de  l'océan  indien  ;  etloi;s  les  trois  contemporains. uit 
par  leur  exécution, soii  par  leur  ré  laciioii.  des  souvcr.iiiiséllii'qiieris 
de  la  deuxième  période; 

2"  Les  inscriptions  grecques  tiou\écs  dans  les  ruines  dAdulH, 


1.  «  Pctrone  invita  lis  émissaires  de  la  leim.-  kaiidakc  à  se  rtndre  en  ambassade 
auprès  de  César  (Aujicste);  et  comme  ceux-ci  prétendaient  ne  pas  savoir  qui  était 
César  et  par  quels  chemins  ils  pourraient  arriver  jusqu'à  lui,  Pétrone  l"ur  fournit 
une  ej'corte.  o  Ils  parvinrci  t  ains.i  à  A!exa!id:ie  et  d  •  la  i  Samos  où  bc  trouvait  Au- 
gUbUi.  Strabon,  \VH,  i  b'i. 


108  Hivi'K  Aiu'.iiKoi.or.K'tK. 

il'Aksum  cliIeTalmis,  jar  cons/'-iuenl  lmi  Alivssinie  et  on  Nubie; 
ce  sont  dos  t»'moi;:ii  ij:  s  aullinni(|iu'^  de  l'oNisIence  de  f»Tlaiiis  iiio- 
inriiues  ••lliiopii'ii'j,  d/  leur^  {Minii;ioMes  et  le  lents  vieloires  sur  It s 
jcuplcs  voisins  el  jusiju'en  Arabie,  dans  le  pays  des  Iloinrriles;  le 
piec  était  la  lanjjiie  île  tout  le  Levant  jus  ju'à  l'Indus,  c'était  la  lan- 
gue eomnierciale  de  la  mer  Uuut,'e,  et  si  ks  rois  d'Abyssinie  ont 
choisi  de  préférence  la  langue  }ïreci]uc  pour  retraeer  dans  ces  ins- 
criptions leurs  actions  et  leurs  ooïKjuètes,  c'éliil  s ms  doute,  dit  Le- 
ironni-,  alin  (jue  les  inarclian.ls  et  les  voyageurs  [.ussenl  en  prendre 
facilement  connaissance ',  la  langue  ghccz  leur  élant  inconnue; 

3°  Les  inscriptions  en  langue  glieez  ou  ancien  éthiopien,  trouvées 
à  Aksum,  d'une  haute  importance  iii.-torii|ue  elgéograplii(|ue; 

4"  Et  les  monnaies  aksumitaines,  encore  en  petit  nombre,  mais 
dont  la  lecture  et  linterprélalion  ont  déjà  commencé  à  exercer  la 
patience  et  l'érudition  des  archéologues. 

Nous  passerons  successivement  en  revue  et  très  sommairement 
chacun  de  ces  divers  ordres  de  documents,  en  tant  seulement  iju'ils 
peuvent  servir  de  coulrùle  aux  listes  abyssiniennes. 

LES  PÉRIPI.KS. 

i'.].  —  Lcn  géographes  grecs  qui  nous  ont  laissé  les  descriptions 
les  plus  complètes  sur  l'Arabie,  la  mer  Krylhrée,  l'K-ypte,  l'Kthiopie 
et  le  pays  des  Troglodytes  cl  des  IchlliNophages,  sont,  eu  dehors  de 
Strabon  qui  ne  fait  guère  (juc  reproduire  les  ouvrages  de  ses  devan- 
ciers, 

Artémidon^  d'Ephésc, 

Ag:lharclii'lc, 

El  l'auteur  anonyme  du  Péiiple  de  la  mer  Erythrée. 

Agalharchide  et  Arlémidore  paraissent  avoir  été  contemporains  : 
l'i.n  \ivait  (n  Égypic  sous  Plolémêe  Vlll,  veis  117  avaiil  J.-<:  ; 
l'autre  écrivait  en  Grèce  veis  l'an  lO'i. 

1  ',.  _  L'ouvrage  d'Agatharchide  r.zzi  r?;;  'EfuO:a;  OaXacTr,;,  dont  il 
ne  reste  que  des  fr.igmenls  *,  comitren  I  li   dc^rriplion  de  tous  les 

1.  Mrm.  xur  l'imrri(,tiun  de  Stlm,  p.  '.G  do  IVditioii  Fagnnii  (iKuvrcA  clioisies  de 
U'ironnf,  t.  I.  IKKll. 

2.  \\%  »e  trouvent  daim  lot  r,eogrti;ihi  ininon-t  (l'-ilii.  Didot.  18.)  i  ,  p.  111  :i  l''3 
du  premier  volume,  y  ccropris  It-  texte  de  Diodore  de  Sicile  mis  ui  p;iialli.le  §  2.(4 
6  Hi. 


i.i:s  LisTi:s  noYAi.Ks  khiioimknm.s.  109 

poi'ls  tic  la  iiii'i-  Koiigo  ou  Krvlhnl'iî  ',  et  des  pays  voi-in;?,  principa- 
li'inonl  rAialiic  cl  l('sc(M»^slial»ilr('-;par  l(S  Iclilliyop|)a;,'ns,  les  Spliiri\ 
cl  autres  populalious  encore , peu  connues  du  voyageur.  Hicn  ipie 
nous  n'ayons  i\u(i  dos  fragments  des  livres  premier  cl  rinquicnie 
du  Périple  d'Agalharchide,  ce  (|ui  nous  a  élé  conservé  est  encore 
suflisanl  poursuivre  l'étal  des  connaissances  géograplii(|ue8  au  ii" 
siècle  avant  l'èri'  chrétienne.  Maiiuîureusenienl,  il  n'y  a  pas  un  seul 
nom  de  roi  de  cité,  de  sorte  qu'aucune  comparaison  ou  idenlilica- 
tion  ne  sont  possibles  avec  les  listes  abyssiniennes  et  hirayarites. 

l'j.  —  Ce  qui  nous  reste  de  la  géographie  d'Artémidore  d'Kijlièse 
se  borne  à  qnehiucs  fragments  (ju'en  a  sauvés  .Marcien  d'IIéracléc 
dans  son  -:Ept->.o;  t9;;  £;o)  OaXâTTr,;  qui  a  élé  lui-!néme  en  j)aitic  perdu -. 
Ce  sont  les  paragraphes  !)  à  W)  de  Marcien  d'IIéracléc  qui  renfer- 
ment l'abrégé  d'Artémidore.  Ils  donnent  la  description  du  golfe  ara- 
biipie,  'ApaÇio;  xo>::o;.  la  mer  Krylhrée,  'KpOçà  Oâ).a7ca,  et  l'océan  In- 
dien, 'Ivûixô;  xAavo;,  jusiju'à  Uhapla  (Zanzibar;.  Ou  voit  que  l'auleur 
distingue  ces  trois  mers  que  d'autres  géographes  désignent  à  tort 
sous  le  nom  génériiiuede  «mer  Erythrée»;  nolonsce[)endatil qu'Hé- 
rodote, antérieur  de  trois  siècles  à  Arlémidorc,  avait  déjà  établi 
celle  distinction. 

Arlémidorc  parle  ensuite  de  l'Azanie  (ou  pays  des  SomAls  cl 
Zanzibar  actuel),  et  des  Ilomériles  (jui  sont  d'origine  étliiopienne  : 
'OaYipixat  eOvoç  AiOiôtiwv,  erreur  assez  fréiir.enle  chez  les  géographes 
cl  hisloricns  grecs,  ipii  confoiidonl  souvent  les  deux  peuples.  C'est 
la  phis  ancienne  menlion  des  Himyarites;  Agatliarchide  ne  cite  que 
les  Sabéens  et  les  Adramilcs  (Hadramaul), 

Dans  toute  sa  description  de  l'Arabie  et  de  l'Egypte,  Strabon  cite 
souvent  Arlémidorc,  qu'il  suit  presque  pas  à  pas;  il  ne  fait  pas  le 
même  honneur  à  Agatliarchide,  dont  l'ouvrage  cependant,  d'après 
les  fragments  qui  nous  en  reslent,  avait  une  certaine  impor- 
tance. 

Pas  plus  que  dans  Agalharchidc,  on  ne  trouve  de  noms  de  rois 
dans  les  fragments  d'Artémidore.  C'est  une  lacune  regrcttaMo  pour 
l'histoire  des  pays  sabéo-élhiopiens. 

10.  —  Le  plus  intéressant  et  le  plus  complet  de  tous  ces.  voyages 

1.  Voir  sur  l'explication  de.  ce  mot,  Strabon,  XVI,  iv,  20. 

2.  Voir,  ces  fragments  dans  l'édition  de  M.  E.  Miller,  Paris,  1839,  in-8°,  3G0  pagps 
avec  carte,  et  dans  le  tome  I  dds  Geographi  minores,  p.  516  à  543. 


110  nKVUK    ARClIKOLtXWQL'K. 

«Si  OtMtninoinpn!  1»^  Prriiilr  lic  l<i  mer  finjtUnt'^  sur  l.i  ii;i!t*  duiiin'l 
nn  l'sl  loin  triHiod'.ui-onl.  On  cii  :»  l(ini;li'iiiiis  nllriliut:  la  n'-dactioii 
à  Arrion,  l'autt  ur  rtilain  ilu  l'tnple  du  Poul-Euxitt^  d'où  le  nom 
dt'  /Vri/i/r  */'.l/;((»  doniir  au  Piriplc  tie  la  nuT  Kryllui'C.  La  chose 
ne  seraii  pis  inipossihli',  rlanl  tloini('e>  les  coiin.iissanccs  yùnf,Ma- 
plnilut'N  lin  ci'-lt'ltic  liisloiiiii  d'Alexandre,  gouverneur  de  la  ('.a|»pa- 
do:e  1 1  voyatrenr  en  Asie  ';  mais,  d'après  les  nicnlions  fré(iuentes 
de  IKiJM'''*'  ^  l'T|«»elle  le  narraltur  .--emble  loul  lappoi  ler-,on  peui 
conclure  que  le  rédacteur  du  Périple  de  la  nn-r  Krytlirée  clail  un 
Grec  orii^'inairt' d'Alexandrie,  contemporain  lui-même,  ou  relatant 
des  voyatres  ciinlemporains  des  deux  empereurs  dont  (^liaribael,  roi 
des  Homériles,  était  l'allié,  ©O^oç  tîov  «ÙToxca-rôfwv,  contemporains  de 
Zoscalès,  roi  des  Aksumitis,  de  ('liolacbus,  lyran  de  Savé,  et  de 
Malichas,  mi  des  Nahailiéens  de  Pétra. 

Il  semble  qu'avec  ces  indications  précises  on  aurait  pu  lixer 
répofjue  à  laquelle  le  voyageur  anonyme  effectuait  son  péiiple  de  la 
mer  llou{,'eet  de  la  mer  des  Indts,  car  il  va  d'un  côté  jusqu'à  Hliapta 
et  Ménoutliias,  et  de  l'autre  jusqu'à  (]eylan  ensuivant  toute  la  côte  de 
31alal)ar;  mais,  comme  on  va  le  voir,  les  tentatives  ont  été  à  peu 
près  vaines.  Uien  ne  prouve  que  Cliariijael,  Zoscalès,  Cliolaebus  et 
iMalichas,  parce  qu'ils  sont  cités  dans  le  niômc  ouvrage,  aient  été, 
du  moins  tous  les  (juatre,  contemporains  les  uns  des  autres,  et  il  est 
foi  l  possible  que  ce  voyage,  à  raison  de  son  étendue,  n'ait  pas  été 
entrepris  par  un  :eul,  et  ciue  k-  récit  (jui  nous  en  a  été  conservé  soit 
plutôt  une  compilation,  une  réunion  de  relations  antérieures,  écriles 
à  des  époques  dilTérenles,  sorte  de  portulan  à  l'usage  des  commer- 
çants et  des  navigateurs. 

17.  —  Dans  ces  conditions,  la  question  de  la  date  du  Périple  con- 
cerne plutôt  l'époque  de  sa  composition  «lue  celle  du  voy-igc  lui- 
même;  car,  si  l'ouvrage  manipie  d'unité,  si  le  l'ériple  de  la  mer 
Ronge  et  de  la  mer  des  Indes  n'est  plus  que  le  résumé  d'autre.^  Pé- 
riples antérieurs,  la  fixation  de  la  date  de  ces  divers  voyages  partiels 
di'vient  d'autant  plus  dilllcile.  C'est  cependant  sur  ce  point  seul  (|in' 
les  découvertes  modernes  pourront  jeter  (luebjue  clai  lé  en  permet- 
tant didcnlitler  quelques-uns  des  souverains  mentionnés  ci-dessus. 
Uuanl  à  la  date  de  la  compilation  elle-même,  le  problème  ne  sera 
vraisemblablement  janiais  résolu   d'une    manière    coiiiiilèlc    tant 

1.  Arrieii  vivait  dans  le  Becond  siècle  de  notre  ère,  de  105  à  108  l'iivin.n. 
J.  Voir  le»  tj!}  0.  t>    2'-'.  3V,  etc.,  du  Péripl.-. 


LKS    LISTI'S    ROYVLRS    I^TMIOI'FF.NNKS.  111 

(lu'on  n'.iiir,'!  p.i^  lioiivt'  dans  les  iiioriasli-rcs  de  l'Oii(MU  ou  ilaiis  les 
f(»uillt'.s  trilcrciilaiiiiiu  i;(  île  l*oiii|H''i,  donl  les  trésors  .Miiil  ciicctre 
peu  connus,  i|iu'lque  document  t,Mec,  latin  ou  nn>inc  sôniiiique,  con- 
tonanl  des  cxliails  du  Périple.  Il  est  inipossihle  (ju'un  écrit  di-  rolte 
luipoilance  ne  se  trouve  pas  relaté  dans  des  oiivrafjes  posléiieiirs 

IH.  —  (Jiieissoiil  les  empereurs  régnant  en  même  temps  auxquels 
il  est  fait  allusion  dans  le  paragraphe  2.'l  du  Périple,  à  propos  de 
CliarilKiel  ' 

(In  a  proiiosé  suecrssivcmeni  :  Vespasien  et  Titus,  (|ui  i-éi;naienl 
ensemble  de  71  à  lu  d.-  .I.-(1.  ';  Marc  Auréle  et  Lucius  Vérus  (HA 
i\  \U\r-;  Seplime  Sévère  et  Caraealla  (l!)8-iîlli  '.  M.  Reinaud  * 
avance  la  date  jiisiiu'à  '24U  ou  "l'tl,  époijuc  où  IMiilippe  I"  l'Arabe  et 
Philippe  II,  son  lils,  ont  eu  tous  deux  le  titre  d'imperator,  corres- 
pondant au  grée  aÙToxpattop.  M.  Dillmann  repoil(! la  rédaction  de  l'ou- 
vrage avant  l'an  Tu  \  Dans  l'ancienne  Académie,  (Josselin  ''  plaçait 
la  date  du  voyapre  à  l'an  lOD  de  J.-C,  ot  Freret  '  pensait  que  le 
voyage  et  la  première  rédaction  étaient  du  piemicr  siècle  de  notre 
ère,  mais  avec  des  retouches  postérieures.  C'est  peut-être  la  qu'est 
la  vérité,  ainsi  que  je  l'ai  exprimé  plus  haut,  mais  à  la  condition 
toutefois  que  la  rédaction  définitive,  telle  que  nous  l'avons  aujour- 
d'hui, soit  postériiure  à  Plolémée,  attendu  que  si  cet  illustre  géo- 
graphe n'en  [larle  pas  plus  que  ne  le  font  Pline  et  Strabon,  c'est  que 
le  texte  du  Périple  n'était  pas  encore  établi. 

Renonçons  donc  à  rechercher  la  date  exacte  de  la  composition  de 
ce  livre  de  navigation,  pour  nous  en  tenir  à  re  qui  est  plus  spécia- 
lement notre  sujet. 

10.  —  Nous  avons  vu  que  Strabon,  qui  a  laissé  une  intéressante 
relation  de  la  campagne  de  Pétronius  comre  une  Kandake,  reine  des 
Éthiopiens,  ne  cite  pas  le  nom  des  Aksumites;  par  conséquent  toute 
celle  partie  de  l'Abyssinie,  qui  n'était  pas  encore  érigée  en  royaume 

1.  M.  Ch.  Muller,  le  savant  éditeur  des  Geographi  miiiorei.  p.  xcvi  et  suiv.  de 
rintrod.,  t.  I.  —  Vivien  Saint-Martin,  J.  asiat.,  1863,  ï,  p.  333,  adopte  l'opinion  de 
Muller.  —  V.  dans  le  môme  sens  Prideaux,  Trunuict.  oflitlil.  anh.,  1873,  p.  17.  et 
Mac  Crindle,  Commerce,  etc.,  of  Erijthraenn  Sert,  1879,  p.  .1. 

2.  Dodwell,  Lea  petitigéogr.  grecs  (1700). 

3.  Letronne  {Mém.  sur  l'inscr.  deSilco,  p.  Uti  de  réditioii  Fagnati,  t.  I"), 

û.  Mém.  de  l'Acad.  des  inscr.,  1860,  p.  232,  et  Jour,,,  asuit.,  sept.  1801,  p.  233. 

5.  Die  Anfœnge,  etc.,  p.  194. 

6.  Ane.  Acad.  des  inscr.,  t.  XLVll,  p.  269. 

7.  Uème  recueil,  t.  XXI. 


Ml*  ni-viK  Anr.iir.oior.inri'.. 

avec  !a  cU'italc  à  Aksum,  hii  est  infoiimic.  Les  diMails  assez  cir- 
constanrii'f!  (|ii'il  donne  siii"  les  l^llii(i|ii('iis,  icms  lullcs  avec  les 
Libyens  (leurs  voisins  ili'  raulie  eùti''  du  Nil,,  leur  vie  niix'-falile,  etc., 
prouvent  que,  s'il  avait  existe  à  la  m(''Mie  ('iKi.iut'  un  Iliat  K'.uMilier 
fonctionnant  avec  une  capitale  à  Aksuiu,  le  [,'(''iij,'ia|)lie  j^it-c  n'eùl 
pas  nianqut'  de  nous  en  faire  la  description. 

Pline,  qui  décrit  avec  assez  de  détails,  quoi(iue  très  confus,  le 
pays  des  Trop:lodytes  et  de  ri-'lliiopie,  ne  prononce  pas  davantage  Ir 
nom  d'Aksuni,  mais  il  cite  la  ville  il'Adulis,  «oppidiini  Aiiuleilon  », 
au  milieu  d'une  énuuiération  de  promontoires,  de  lacs,  d'Iles  de 
celle  partie  de  l'Afrique  :  «  la  ville  des  Adulites,  fondée  par  des  esclaves 
fugitifs  égyptiens,  c'est  le  plus  grand  marché  d-s  Troglodytes  cl 
même  des  Éthiopiens;  elle  est  à  cinq  jours  de  IMolémais  '.  »  M.  Ma- 
riette '  a  cru  retrouver  le  nom  de  cette  ville  dans  l'Adala  des  py- 
lônes de  Karnak  (xv*  siècle  avant  notre  ère).  Cependant  ni  Artéini- 
dore,  ni  Agatharchide,  ni  Slrahon  ne  mentionnent  le  port  d'Adiilis, 
qui,  à  l'époque  du  l'éiipie,  malgré  ce  qu'en  dit  îMine,  n'étail  en- 
core qu'une  ville  peu  importante,  y.i<y\ir\  cuai/sTpoî. 

20.  —  Quant  au  royaume  des  Aksumiles  proprement  dit,  c'est 
seulement  dans  le  Périple  de  la  mer  Erythrée  que  l'on  en  trouve  la 
première  mention.  <•  Du  portd'Adulis,  ville  de  jieu  d'importance,  on 
va  à  Coloé,  ville  dans  l'intérieur  des  terres  [zU  KoÀo'v  as^dysiov  -^roXtv), 
en  troi<  jours,  et  de  Coloé  on  cinq  autres  jours  à  la  capitale  des  Ak- 
sumiles (t^iV  |XETpôzo).iv  Ttov  A'j;i.)LtiT(ov).  »  (Périple,  §  i.) 

1  loléinée,  qui  écrivail  sa  géographie  de  i:iU  à  KiO  de  J.-C,  cite 
ég.iiemenl  parmi  les  plus  importantes  de  la  contrée 'ASouXî;  ou  'AooûXt}, 
■f,  A'j;o'ja7),  £v  ^  paci'Xstov,  xat  y,  KoÀo'r.  ttoXiç,  c'est-ii-dire  Adulis,  Aksum 
où  est  le  siège  du  gouvernement,  et  la  ville  de  Coloé. 

A  l'époque  du  périple  le  roi  qui  régne  à  Aksum  '  est  Zoscalès  : 

Au  non!  et  au  sud  du  pays  des  Aksumiles,  c'est-à-dire  toute  la 
côte  depuis  les  Moscliophages*  jus(ju'à  la  seconde  IJarharie,  appartient 


1.  Pline,  VI,  5;  34,  trad.  Littré,  édit.  Nisard,  1848.  Cotte  énonciaiion  qu'Adtilis 
fut  fondé  par  des  esclaves  fuj:itifs  tî^yptiens  rappille  le  fait  iiislorique  de  la  fon- 
dation du  royaume  Éthiopien  par  des  prClres  d'Ammon  venus  d'Épypte  (v.  supm, 

§7). 

2.  Listes  géographiques  des  pylônes  de  K  iinak,  in  '»",  ISTfi,  p.  rjO. 

.}.  Aksum  htlft"?"  »  nVst  pas  mcntionn"'  surlcs  pylônes  de  Karnak.  M.Marictu- 
a  cru  reconnaître  sa  voisine  Adoiia  sous  la  forme  Adou  {.Mi'nt.  citi-,  p.  50). 

ft.  Sur  la  rôle  d'-s  MoscliophaRos  se  trouvait  le  port  de  Plolénials  Épitln^ra»,  m-I'^ 
l(i'  lai.  N.  Voir  la  carte  <lu  P.Mijile  dan»  l'i-tlas  d-'  Cii.  Muller  (Didot,  IS',",  .  |.;.  \  I 


LKS    LISTKS   ROYALKS    f':TIII0I'IENNR8.  II'J 

au  roi  Zosralès;   «  [WiO.ûu  tiov  to:to)v  toutow  Zoj^xâAr,;  ^v^wi~.0',  y.7.\  Yf!^- 

{iaTwv  'EXXr.vixwv  £(xz£ipo;,  lioiiime  supûrieur,  v(3rsé  dans  les  lollics 
grecques»  (Périple,  §  5).  Ce  bel  éloge  d'un  roi  barbare  ne  nous 
surprendra  poiril,  quand  nous  saurons  qu'à  celle  époque  le  grec, 
depuis  longtemps  langue  commerciale  de  lout  le  Levant  asiati(|ue 
et  africain,  était  devenu,  et  resla  grâce  à  la  protection  de  souverains 
comme  Zoscalôs  et  Acizana,  la  langue  officielle  delà  raonarcliie 
éthiopienne. 

Quant  à  la  seconde  Barbarie  dite  ultérieure,  Ta  TtÉpav  ^ifou-i^a.  Bap- 
6ac(a  (Pér.,  §7),  elle  n'avait  pas  de  monarque  et  se  composait, 
comme  encore  aujourd'iiui  le  pays  des  Somâls,  do  tribus  insoumi- 
ses gouvernées  par  des  princes  distincts  :  oO  paaiXeueTai  b  tottoi,,  àXXi 

TUfâvvoi;  îûîoi;  xaO'  e/.adTOv  ÈpLitopiov  SioixêItsi  (Pér.,  §  ià). 

2i.  —  Zoscalès  était  donc  le  souverain  qui  régnait  en  Ethiopie  à 
répoijue  où  le  navigateur  grec  parcourait  le  golfe  Arabique  et  la  mer 
Erythrée.  Il  est  certain  que  si  l'on  connaissait  la  date  de  la  rédaction 
du  Périple  on  pourrait  en  déduire  celle  du  règne  de  Zoscalès,  ce 
qui  permellrail  d'avoir  un  point  de  repère  pour  cette  période  loin- 
laine  de  l'histoire  abyssinienne.  Mais,  s'il  est  difficile  d'être  fixé  sur 
l'époque  du  voyageur  gréco-égyptien,  il  l'est  tout  autant  de  trouver 
dans  les  listes  royales  le  souverain  qui  correspond  au  Zoscalès 
grec. 

Certains  auteurs,  comme  Sait  {Travels  in  Abyssinia,  in-4°,  Lond., 
1814),  Ch.  Millier  dans  son  édition  des  Geor/raphi  minores  ',  rappor- 
tent ce  Zoscalès  au  roi  Za-Heqlô  qui  aurait  régné  treize  ans  vers  70 
à  83  de  J.-C.  On  rencontre  en  effelsur  la  liste  A,  2" période,  après  sept 
monarques  qui  ont  régné  ensemble  soixante-dix  ans  à  partir  de  la 
naissance  du  Christ,  un  roi  du  nom  de  Heqlê  «h^A>  ',  qui  a  eu  treize 
ans  de  règne.  Cette  date,  70  à  83,  ainsi  obtenue,  est  précisément  cello 
de  Vespasien  et  Titus,  si  tant  est  que  ce  soient  les  deux  empereurs 
auquels  le  Périple  fait  allusion  dans  le  passage  précité. 

M.  Dillmann  '  se  refuse  à  celte  identification  parce  que,  dit-il,  elle 
ne  rend  pas  compte  de  l'origine  du  sigma  médial,  et  que  Za,  qui  n'est 
en  effet  qu'une  particule  royale,  n'appartient  pas  au  nom  propre.  On 
pourrait  ajouter  que  dans  Za-Heqlô,  \c  h  dï  avait  sans  doute  encore 

à  XI ,  et  la  carte  qui  accompagne  l'ouvrage  do  Spicngcr,  Die  aile  Géographie  Ara 
biens,  in-8»,  1875. 

1.  Tome  I,  p.  xcvi. 

2.  Die  Anfœnge,  etc.,  p.  194, 

XLIV.  —  8 


i[\  RFTrP.    ARC^I^OLOGIQUF.. 

en  glicez  la  prononciation  pullurnli»  kh  roirospondaiit  au  4*  lilniya- 
riu*,  ilo  It'llc  sorlo  (iiio  l'on  s'i'XpliiHKMait  fiicnrc  moins  coniniciit 
Za-Klio<iir-nuiail  pu  tlov('nir/<;.s7.*//,  au  lieu  ilf  (iu«'l(|ii('  ciiosc  couiuii' 
Za/axa).T,;.  CeptMulanl  li'S  auleuis  >;rcrs  nous  (Uil  liahilu«Vs  à  des  alh'- 
ralions  lelles,  dans  lcsnom>;  propre;-  el  dans  les  noms  de  lieux  étran- 
gers, (|u'il  n'est  pas  absolument  impossilde<iU(' Za/a/.a).r,;soil  devenu 
ZoffxxXr.,-.  Le  savant  professeur  de  Berlin  n'adopte  pas  davanlape  le 
rapprochement  proposé  par  M.  Heinaud'  entre  le  Zoscalésdu  Périple 
et  le  roi  Kla  Sagal  Tifi  •  ^7A  •  qui  est  le  vingliéuie  sur  la  même 
liste,  cl  qui  d'apns  le  nombre  d'années  de  n  ;:ne  de  ses  prédécesseurs 
tombe  en  effet  à  l'année  ^'tOou  S.'iOde  J.-C,  dale  contemporaine  des 
dfux  FMiilippe.  L'explication  de  M.  Heinaud,  adoptée  par  M.  Hlau  *, 
est  conforme  à  sa  théorie  que  le  voyage  grec  a  été  exécuté  apr«"^s  la 
chute  du  royaume  de  .Mésène.  c'est-à-dire  après  ti3.*)  de  J.-C.  Quant 
à  nous,  du  moment  qu'il  ne  s'agit  plus  de  déterminer  la  date  de  la 
compilation  générale  du  Périjde,  nous  ne  verrions  aucune  diUicullô 
à  placer  le  règne  de  Zoscalès  vers  75  à  80  de  J.-C. 

Si  celte  date  a  quelque  certitude,  Zoscalès  se  trouverait  contem- 
porain de  .Malichas  roi  des  Nalialhcens,  cité  par  le  Périple.  Depuis 
les  derniers  travaux  de  M.  de  Vogiié  el  de  M.  de  Saulcj  ',  on  con- 
naît une  monnaie  de  Malchus  I""",  deuxième  roi  de  Nabathène,  qui 
vivait  vers  Tio  av.  J.-C. 'Ce  ne  peut  être  le  nôtre.  Il  existe  un  .Mal- 
chus II  également  antérieur  à  l'ère  chrétienne,  dont  on  n'a  pas 
encore  retrouvé  de  monnaies,  et  enlin,  un  Malchus  III,  fils  d'Harè- 
l;<l  IV,  occupant  le  dixième  rang  dans  la  série  des  dynastes  Naba- 
lliéens.  M.  de  Vogué  place  son  régne  de  \0  à  75  de  J.-C;  c'est  celui 
(jue  Joséphc  [Bell.  JuiL,  III,  4,  ii,  édil.  Didot)  désigne  comme  allié 
de  Vespasien,  sous  le  n(uu  de  6  "Apaj/  MaX/o;.  On  a  de  lui  des  mon- 
naies datées  de  l'an  33  el  une  inscription  en  trois  lignes  datée  de 
l'an  17  de  son  règne.  II  est  vraisemblable  que  c'est  le  personnage 
dont  il  est  (juestion  dans  ce  passage  du  Périple,  §  19  :  t  ôSo;  £(jtiv  eî; 
lls.'T|;av -p;  Ma/.t'/av  taffiXta  Naôaxaiwv' f .  Si  l'oD  doit  regarder  Celle 


1.  .Vr'm.  cité,  p.  237. 

2.  Z[)M<:,  18"/1,  p.  260. 

3.  V.  de  Vogué,  Hev.  de  numism.,  JSC.g,  p.  158  i  168.  —  Inscr.  xémitiq.  de  In 
Syrie,  (•  \HQIi-\bn  passim;  de  Saulcy,  Annuaire  de  la  Sdc.  de  ntiinism.,  t.  IV 
(1873),  p.  1  à  35. 

k.  Après  Maliclius  III,  son  fils  Zabt;l  est  le  dcrnirr  roi  de  cette  dynastie  ;  il  fui 
Tâincii  it  déposM-di-  par  Trujuii  eu  lOJ  de  ndirr  in'.  On  possède  de  lui  des  mon- 
mil  s  cl  une  inscription    de    l'an    Tj    de   bon    rij;ue.  ^De    Vogui*,    Inicnpf.,   etc., 

p.  ni.) 


I,r;S    LISTRS    noVAI.F.S    KUIIOI'II.NNF.S.  ll.J 

idcnlincaliiin  coiiiiiu'  cx.'iclo,  on  peut  dire  (juc  r'c.'t  la  sniilf!  fjiii  soil 
cert;iiiu',  car  inms  lu;  pou  vous  mr-connailn!  loul  ce  (|u'a  d'iiypollit''- 
ti(lii('  la  lixalidii  de  r<'p()i|ii(;  di'  Zo-^calri  el  de  (^liai'ihaël   (v.  iiifni, 

Zdsf.'ilrs  e^l  l(;  seul  roi  élliiopicii  ijik;  nicnlionn(!  le  l'ériplc  do 
la  Hier  Mrytlirnî.  Nous  aurons  ;\  revenir  sur  les  souverains  (|ui  ré- 
gnaienl  de  raiilrc  cûlc  de  la  mer  Hougc,  c'csl-à-dire  en  Arabie 

H.    DltOUIN. 
(La  suite  prochainement.) 


DÉCOUVERTE 

D'UNE   ÉPÉR  DE   P>RONZE 

ET   D'UNE   ÉPÉE   GAULOISE    EN    FER' 


Il  y  a  quelques  nnnécs,  j'ai  eu  l'honneur  d'apporter  aux  réunions 
lie  la  Sorltonne  une  épée  de  bronze  avec  sa  boulerolle,  un  couteau 
et  une  (î-pingle  de  môme  métal,  trouvées  dnns  une  sépulture  du  dé- 
parlement (le  l'Aube. 

Aujourd'hui  j'en  présente  une  autre,  venant  du  département  de 
Vaucluse,  ainsi  qu'une  épée  gauloise  en  fer,  provenant  de  la  DrAme. 

Je  place  ces  deux  armes  intéressantes  sous  vos  yeux,  persuadé 
que  la  vue  des  objets  vaut  mieux  (ju'un  bon  dessin  ou  la  meilleure 
des  descriptions. 

En  sortant  d'ici,  ces  belles  armes  iront  à  Saint-ri.'imain  pour  qu'il 
en  soit  fait  des  reproductions  pour  les  musées  nationaux.  C'est  tou- 
jours de  celte  façon  que  je  procède  lorsque  je  trouve  des  objets 
uniques,  rares  ou  précieux,  et  c'est  ainsi  que,  tous,  vous  seriez 
heureux  d'a?ir  en  pareil  cas. 

L'épée  de  bronze  a  été  trouvée  sur  la  gariyue  d'Orange,  sous  un 
clapier.  Je  ciie  les  propres  expressions  de  la  personne  qui  me  l'a 
apportée  et  qui  la  tenait  de  l'inventeur  lui-même,  lequel  l'avait  re- 
cueillie sous  un  amas  de  pierres  dans  des  travaux  de  défrichement. 

Il  est  évident  pour  moi  que  cette  arme  a  été  trouvée  dans  un  lu- 
mulus  élevé  sur  le  versant  d'un  coteau,  aux  environs  de  la  ville 
d'Orange,  l'antique  Arausio. 

Celle  découverte  étant  toute  récente,  je  n'ai  pas  encore  eu  le 

1.  Celle  nolo  k  élé  lue  à  la  Sorboiino  en  avril  1882. 


NM. 


N'4. 


î 


m 


M8  H:VIK   AHi.lIKOLOr.IQUE. 

lemps  d'aller  sur  les  lieux  vériller  le  gisomcnl  et  voir  s'il  n'y  avail 
pas,  sous  fi't  amoncfllenuMil  de  pierres,  (juchiues  autres  ol«jets  inté- 
ressanls,  eu  oiilre  des  quel.iues  osseiuenls  qui  ui'onl  clé  signalés  et 
qui  n'ont  pu  ^ire  délerminés. 

Celle  êpée  de  bronze,  de  ir,71)  de  longueur  et  de  (i"',03r)  à  sa 
plus  grande  larj^eur  au  milieu  de  la  lame,  se  fail  remarquer  par  sa 
belle  conservalion  cl  par  une  vérilable  élégance;  elle  est  droile,  à 
double  Irani'lunt,  légèrement  renllée  sur  le  dos  à  i  iK'Kjue  face; 
vers  le  quart  de  sa  longueur,  ses  deux  tranchants  s'Inflécliisscnl  et 
s'évasent  pour  se  développer  ensuite  et  prenilro  leur  plus  grande 
largeur  à  peu  prés  vers  le  milieu.  La  lame,  bien  palinée,  porte  deux 
crans  signilicatifs  à  sa  base;  elle  est  ornée  de  deux  line>^  nervures 
longitudinales  se  rejoignant  à  la  pointe,  qui  n'est  pas  aiguë,  mais 
légèrement  mousse. 

La  lame  el  la  soie  ont  été  coulées  d'un  seul  jet.  La  poignée  qui 
recouvrait  celte  dernière  devait  être  en  corne,  en  os  ou  en  ivoire, 
fixés  par  quatre  rivels  dont  trois  sont  encore  adhérents;  sa  forme 
est  sinueuse,  terminée  par  un  carré  comme  le  type  halstatlien. 

ilais  ce  qui  donne  un  vérilable  intérêt  archéologique  à  celte  épée, 
déjà  remarquable  par  clle-méuie,  c'est  sa  bouterolle,  également 
en  bronze,  exhumée  du  monceau  de  pierres  en  même  temps  que 
l'épée,  et  qui  en  est  aujourd'hui  le  précieux  accompagnement. 

Celle  boulerolle  (l  bis],  d'une  rareté  extrême  dans  les  proportions 
où  elle  se  trouve,  est  à  ailettes  horizontales,  et  ne  mesure  pas 
moins  de  0°',"2'i  d'envergure  sur  O^jOS  de  hauteur.  Son  milieu, 
qui  s'allonge  un  peu  en  pointe,  était  de.Uiné  à  recevoir  le  bas  de  la 
lame  qui  venait  s'y  encastrer.  Elle  devait  servir  de  fermoir  ou 
d'armature  au  bas  du  fourreau,  Ic(iuel  était  probablement  en  cuir 
ou  en  bois.  Quand  on  l'a  trouvée  au  bout  de  l'épée,  elle  était  biiséo 
en  trois  tronçons  qui  ont  été  habilement  rajustes  et  soudés. 

On  se  demande  comment  un  fouireau  d'épée  a  pu  se  lenuincr 
par  un  appendice  si  large  el  si  volumineux.  Peut-être  le  fouireau 
.servait-il  en  même  temps  à  plusieurs  usages;  peut-être  rcnformait- 
il  h  cùlé  du  glaive  une  da;^'ue,  un  poignard,  des  javelots,  des  llèchrs  ? 
Peut-être  aussi  était-il  dcsiiiié,  comme  les  sabretachos  des  hussards 
de  notre  ancienne  armée,  à  faire  rofficc  d'une  poche  projire  à  con- 
ti'uir  des  objets  divers.  IJuoi  (ju'il  en  soit,  on  se  perd  en  conjec- 
tures sur  l'utilité  ou  la  destination  «l'un  appendice  ou  d'un  orni'- 
menl  si  incommode,  et  qui,  au  moment  du  combat,  pouvait  devenir 
si  dangereux  pour  celui  (jui  le  portail. 

Les  nombreux  spécimens  de  fourre.iux  antiques  fournis  par  la 


DIvCOUVERTR    d'dNK   ÉPKR    DE   nRONZF,    ETC.  H'J 

sculpture  ou  par  les  médailles  n'ont,  que  je  sactic,  révélé  jusqu'à 
présent  rien  de  pareil. 

Cepeiidanl,  dans  la  séance  du  G  février  1878  de  la  Société  des 
antiijuaires  de  France,  le  savant  cl  zélé  conservateur  du  musée  de 
Sainl-ricrmain,  M.  Alexandre  Bertrand,  a  présenté  une  boulerolle 
rcmaL(iualjlc  par  l'étendue  de  ses  ailettes,  non  hori/onlales  comme 
la  nùtrc,  mais  relevées,  achetée  par  lui  chez  Lehmaiin,  et  à  laquelle 
il  attribue  une  origine  assyrienne  (n"  '■2).  C'est,  dil-il,  un  ornement 


N"  2.  —  Bouterollc  dans  son  foarreau  restauré. 

asiatique,  venant  des  contrées  où  s'élevaient  Babylone  et  Ninive.  Ace 
sujet,  il  donne  une  liste  de  ces  bouteroUes  à  ailettes  qu'il  a  pu  dres- 
ser dans  ses  vovapres  et  de  laquelle  il  résuite  que  7  proviennent  de 
France,  12  d'Allemagne  et  de  la  vallée  du  Danube,  et  3  d'Irlande. 

Il  est  à  remarquer  ijue  presque  toutes  ont  été  rencontrées  dans 
les  tumuli. 

De  son  côlé,  M.  Flouest,  l'heureux  explorateur  des  tumuli  de  la 
Bourgogne,  a  signalé  le  15  janvier  suivant,  à  la  môme  Société,  deux 
autres  bouterolles  trouvées  en  France  :  l'une  fait  partie  de  la  col- 
lectiondeM.rabbéDe?noyers(ii"  3)  à  Orléans  et  provient  du  départe- 
ment de  l'Ain:  l'autre  fait  partie  de  la  collection  de  M.  Yaleniin  à 
Montélimarl,  et  a  été  trouvée  à  La  Laupie  (Diùmej,  en  18^8,  au 
cours  de  travaux  agricoles,  sans  que  l'on  ait  vérifié  les  causes  de 
son  enfouissement. 

Je  me  suis  renseigné  auprès  de  M.  Valentin,  qui  m'a  envoyé  le 
dessin  de  sonépée  de  bronze  et  de  sa  bouterolle  (n°  4),  et  j'ai  acquis  la 
certitude  que  l'un  et  l'autre  de  ces  objets  sont  identiquement  sem- 
blables à  ceux  que  je  vous  présente.  Ou  croirait  presque  qu'ils  sor- 
tent du  même  moule. 


120  RKVIK    AnCUKOI.OC.IOt'K. 

Voilà  donc  deux  ùpées  somblablcs  trouvées  à  ciniiuanle  kilomi- 
ros  di'  dUt.mre,  dans  li'  midi  de  h  Fraiicv,  associées  rliacune  à  une 


N°3. 

boutcrollc  idcnlique,  jusqu'ici  sans  analogue  dans  nolro  pays,  mais  so 
rapproclianl  du  type  signalé  dans  le  cimetière  de  Halstall  par  Von 
Saken. 

J'ai  pensé  que  ce  fait  intéressant  méritait  de  vous  élre  signalé. 

La  seconde  ôpée  que  j'apporte  est  en  fer  ;  elle  a  été  trouvée  dans 
le  déparlement  de  la  Drôme,  à  La  Rochetle,  par  un  paysan  occupé  à 
défricher  un  terrain  inculte.  Elle  mesure,  âme  de  la  soie  comprise, 
O-^jS!.  Elle  est  à  soie  plate,  à  crans  encore  visibles  et  à  pointe 
mousse,  et,  comme  les  épées  de  bronze,  elle  présente  un  léger 
renflement  rcrs  son  milieu.  D'après  le  rapport  de  M.  Alexandre 
Bertrand,  inséré  dans  la  Revue  de!^  sociétés sdinutcs,  le  type  de  celle 
épée  est  en  Gaule,  pour  les  épées  de  fer,  le  type  le  plus  ancien  déri- 
vant directement  des  plus  belles  épées  de  bronze.  Il  nous  apprend 
que  le  musée  de  Sainl-Germain  possède,  en  moulages  et  fac-similés, 
onze  épées  en  fer  de  ce  type  essentiellement  gaulois.  Jusqu'ici  elles 
avaient  été  presque  exclusivement  recueillies  en  Bourgogne,  en  Al- 
sace et  en  Franche-Comté,  sans  parler  des  premières  découvertes  en 
Autriche  tians  le  cimetière  de  llalstalt. 

.Mais  cette  grande  épée  de  fer,  que  l'on  a  toujours  rencontrée  dans 
les  lumuli,  n'avait  pas  encore  été  signalée  dans  le  midi  de  la 
Gaule. 


DI^-COUVEI\TK    d'une    ÉI'ÉE   DE    LHO.NZK,    LTC.  IJI 

Celle  tl(!  \a  Rochelle,  quoique  bien  conserv(''e,  n'est  mallipiireuse- 
moiit  pas  complète,  il  mamiuc  au  moins  la  moitié  de  la  partie  supè- 
rieurt!  de  la  poignée.  Sur  ceiiui  reste  on  voit  encore  trois  rivets  en 
fer  (\u\  retenaient  le  manclux 

Si  elle  était  intacte,  elle  atteindrait  presijue  les  [iropoilions  de 
celle  qui  a  été  trouvée  par  M.  de  Sauicy  dans  un  tumulus  près  (l(! 
Nolay  ((]ôte-d'Or)  et  qui  figure  dans  les  vitrines  du  niii>ée  de 
Saint-fiermain. 

(lomme  vous  le  voyez,  la  découverte  de  l'épéc  de  bronze  d'Orange 
et  de  sa  bouterolle,  celle  de  l'épée  de  fer  de  La  Uocbelle,  m'ont  sem- 
blé présenter  un  véritable  intérêt  pour  l'étude  de  nos  origines  na- 
tionales. 

A  ce  point  de  vue,  Messieurs,  je  suis  heureux  d'en  ôlre  posses- 
seur, et  d'avoir  pu  les  soumettre  aujourd'liui  à  voire  haute  et  savanle 
appréciation. 

LÉON    MOREL, 

Membre  de  l'Académie  de  Vaucluie,  refci:cu' 
(/(>  finances,  d  Carpenlrat 


BULLETIN    MENSUEL 

D  i:   1/  A  (  :  A  I»  I  :  .m  i  !•:   n  i:  s    i  n  s  c  u  i  v  no  n  s 


MOIS    un    JUILLF.T. 


M.  le  prince  Simon  Lazarew  annonce  qu'il  a  découvert  une  inscription 
biliiiL'iie,  en  grec  cl  en  dialivte palmyrémar,  sur  les  ruines  de  Palmyre.  U 
en  en\oie  un  eslaniparjo,  qui  a  uiaihomeuscment  beaucoup  soutVerl  à  la 
douane,  l'iie  pliOtogi;i[ihic  du  monumoul  sera  envoyée  ullérieuretnent. 

M.  Léon  Henier  communique  une  note  de  M.  Masqueray,  directeur  de 
l'École  supérieure  des  lettres  d'Alger,  relative  à  des  fouilles  exécutées, 
sous  sa  direction,  à  El-Mcral  a.  Cent  trente  inscriptions  ont  été  décou- 
vertes, parmi  lesquelles  trois  sont  pailiculiéroinenl  importantes.  lilles 
nous  font  connaître  le  nom  de  la  cilé  disparue.  Ce  nom  est  Cclliana. 

M.  (:iermont-(ianneau  communique  îles  observations  sur  un  monument 
d'origine  phénicienne  portant  une  inscription.  Il  s'agit  d'une  statuette  de 
femme  nue  ^'appuyant  sur  une  rame-gouvernail  à  la  partie  supérieure 
de  laquelle  est  enroulé  un  dauphin.  Sur  le  plat  de  la  rame  sont  gravés 
quatre  caractères  pbéniciens  qui  se  lisent  sans  peine,  et  qu'on  peut  tra- 
duire :  Aux  Sidonicns,  iliowviojv.  M.  (ianneau  pense  qu'on  ne  saurait  mé- 
connaître, ici,  la  déesse  môme  des  Sidoniens. 

M.  .\ubé  termine  la  lecture  de  son  mémoire  sur  l'ulyructf  dans  t'his- 
ioire. 

M.  Ch.  .Nisard  lit  une  étude  intitulée  :  De  VHat  incutam  U  prccaiic  de 
la  propriété  Ullcrairc  dans  te  militu  du  w"  sixte. 

M.  Joseph  Halévy  communique  le  résultat  de  ses  études  sur  la  nature 
des  inscriptions  clialdécnncs  rapportées  de  Mésopotamie,  par  M.  de 
Sarzcc. 

M.  Lodrain  conimuiiique  de  son  ((Mé  diverses  observations  eouccniaut 
la  tiièine  collei  lion. 

M.  Kd.  Le  Hlutit  lit  en  communication  un  mémoire  intitulé  :  Lcn 
chnJtiens  dans  la  sotiiti  païenne  aux  premiers  a<jcs  de  t'EijIisc. 

M.  Léopold  Ucliblc  anuoucc  lurriNcc  d'estampages  envoyés  par  .M.   le 


BULLETIN    MENSUEL    DE    l'aCADÉMIE   DES    I.NSCRII' TIO.NS.  123 

capiluliic  Aymoriifir,  en  iniision  au  (l.iinbodge.  (les  Icxles  ont  élé  confiés 
ù  MM.  Abel  hergaigne  et  K.  Scnarl  pour  en  rendre  coniple. 

M.  Gaston  Paris,  rapporteur  deladonunission  des  anliquités  nationales, 
fait  connaître  le  rrsultatde  ce  conroiirs. 

Les  trois  nu'dailles  ont  6tc  décernées  dans  l'oidre  suivatil  :  t"  à 
M.  (uiiirrcy,  pour  .•■on  ouvrage  sur  la  Tapisserie  en  France:  2"  à  MM.  Hé- 
ron de  Villel'ofsc  et  fl.  Thédeiial,  pMur  leur  publication  intitulée  :  (kiclitts 
d'oculistes  romains,  1^'  vol.;  3"  à  M.  Koliler,  pour  son  élude  sur  une  vie  la- 
Une  de  sainte  Geneviève. 

Les  cinq  uieulions  honorables  ont  été  accordcca  à  MM.  Héron,  Charles 
Molinier,  Perroud,  Fierville  et  Hermansard.  H-y. 


NOUVELLES  AUCIIÉOLOGIQUES 


ET    CUl'J'.KSI'UNDAMCE 


Nous  avons  sous  les  youx  une  publication  nouvLlle,  duc  \  l'iiii- 

liative  privée  et  qui  mérite  d'obtenir  le  meilleur  accueil.  C'est  le  Bulletin 
trimestriel  des  antiquiti's  africaines,  recueillies  par  les  soins  de  la  Société 
de  {.'éographie  et  d':ircbéologie  de  la  province  d'Oraii,  et  puliliées  sous  la 
direction  de  MM.  E.  Poinssol  et  L.  Demaeghl.  Voici  le  sumuiairedcs  deux 
premiers  numéros  : 

I.  A  nos  lecteurs; 

Instructions  pour  les  recherches  d'antiquités-, 

Ch.  Tiïsot,  Fastes  des  provinces  a fricainrs; 

Héron  de  Villefossc,  yotcsd'iqigraphic  africaine: 

i.  Poinsol  et  L.  Demaeght,  Jn^crif'tion^  de  lu  Mturélanic  Césarienne; 

L.  Demacght,  Musée  archéologique  ; 

i.  l'oinssoi,  Nouvelles  archéologiques,  conespondances  et  bibliographie. 

II.  Tissot,  Fastes  des  provinces  africaine  (suilc)  ; 
E.  Bibeloii,  Monnaie  de  S'jphax; 

J.  l'oin^^ot  et  L.  I)en)acgbt,  Ejùgraphie; 

L.  Deniacgbl,   Musée  archéologique  d'Orati  ; 

Poinssot,  Nuiatlles  archéologiques,  correspondance  il  bibliwjraih 


u\ 


M.  M  lélopoulos  vient  de  publier  aux  frais  du  sylloguc  pbilologi- 

que  t'ilelirtm,  qui  sii'i^e  au  l'iréc,  le  texte  de  la  curieuse  inscripiion  ré- 
ccmtueni  di'couverte  au  Piiéc  cl  qui  a  trait  ;\  la  consliuction  de  Yarsemil 
de  Vhilon.  Il  en  oITre  le  texte  épigrapliiquc  et  la  Iraiiscriplion  en  carac- 
l<'.'rcs  couiuiils  ;  mais  il  n'essay.;  [las  (l'i'\[diqu(T  les  nomlircux  termes 
technique»  qui  font  à  la  fois  le  prix  et  la  dinicullé  de  celle  inscription,  i'o 
qui  donne  >urlout  la  valeur  de  (Otlc  in.^ciiption,  r'e.'-t  la  pliolo;;r.iphi('  du 
texte  qui  e>i  Jointe  à  la  dissertation. 


>(ii;vi.:lij:s  Aiii.iir:'»L()(;igui-.s.  IJ.'i 

liullciin  d'il' cil ùulogie  chréiicnnc  de    .M.  'i.   M.   lic   W  ssi,  4»  s'r!e, 

|f  .iiiiico,  n"'  i  Pl  2. 

Co  luiinrio  .  bl  picsqiH'  loiil  ciilicr  iiMiijtli  [i.ir  iitio  iinporlatilc  disscrla- 
li.jti  do  M.  lie  H'is-i  itilitiilcc  :  Lt  cuntUcrc  de  Suintllipiiohjtc  prdx  de  la 
coic  Tih  .vtinc  et  sa  inincipalc  cnjpti:  hitiloriqiie  aujourd'hui  déconvcrlc  A  la 
fin,  une  noie  inl('I•os^aIlte  sur  une  inscription  ijrenjue  décoiivcrtt:  réranin''nt 
en  Vhryjic,  comparée  d  la  cclchrc  épitnpiic  m((ri(iur  d'Ahcscios.  Vnn  [danclic 
donne  une  vue  perspective  du  fond  do  la  ciypU!  d'ilipijolylc,  lollc  qu'on 
Va  trouvi'o  dans  h's  fouilles  r^'centes.  Quatri:  autres  planches,  qui  repn'- 
senleiil  des  fresques  du  ciuieliùre  des  Saints  l'ierre  et  Marcellin,  seront 
cxpliqULk's  dans  un  numéro  suivant. 

Archœologische  Zeitung,  1882,  2«  caliicr  : 

G.  Hirjchfeld,  Pausanias  H  lea  inscriptions  d'O'ytnpie.  (Article  important. 
D'après  l'étude  des  inscriptions  et  des  inonunienis  retrouvés  dans  les  der- 
nières fouilles,  M.  llirichfeld  affirme  que  Pausanias  a  surtout  travaillé 
»i)r  des  livres.  S'il  a  vu  Olympie,  ce  n'est  qu'eu  passant,  La  description 
qu'il  en  donne  représente  surtout  l'Olynipie  de  l'époque  macédonienne; 
il  ne  rédige  pas  des  notes  prises  sur  les  lieux;  il  compile  les  données 
qu'il  a  tirées  de  PoU'mon  et  dos  autres  périégètes  qui  l'ont  précédé.)  — 
A.  Ilcrzog,  Une  loutrophoros  (fixe,  d'après  un  vase  du  musée  de  Berlin,  le 
vrai  sens  de  Cftte  e^pre^sion,  qu'ont  obscurci  certaines  erreurs  des  lexi- 
cographes). Planche  V  et  deux  bois.  —  G.  Treu,  Das-relùf  atecinscriplion 
dédicatoirc représentant  Artémis.  Planche  VI,  1.  —  P.  J.  Meier,  Bas-reliefs 
du  7nusée  de  Berlin  représentant  des  gladiateurs.  Pl.  VI,  2  et  3.  — G.  Robert, 
La  vie  des  femiyics  à  Athènes,  deux  vases  du  musée  de  Berlin.  Pl.  VII.  —  E. 
Curtius,  Deux  terres  cuites  :  Scène  de  pédagogie;  Anjlc  cherché  prés  de  la  sta- 
tue d'Athéna  (à  propos  de  ces  deux  groupes,  on  trouvera  ici  quelques-unes 
de  ces  vues  générales  sur  l'art  auxquelles  M.  Curtius  s'élève  toujours  sans 
eiïorl).  —  Mélanges  :  Ch.  Hclger,  Comment  le  Gaulois  mourant  connu  sous  le 
nom  de  Gladiateur  a-t-il  été  frappé  ?  (conclut  contre  l'hypothèse  d'un  sui- 
(;i(jo).  —  U.  Kletle,  Sur  la  copies  de  la  frise  de  Phigalie  retrouvées  à  Patras 
(achève  de  prouver  que  ce  sont  des  pastiches  modernes).  —  Nouvelles  : 
Acquisitions  du  .Musée  britannique  en  1880.  —  Si'ance  solennelle  de 
rinslifut  archéologique  à  Rome. —Société  archéologique  de  Berlin,  séances 
de  mai  à  juillet,  —  Les  fouilles  d'Olympie.  —  Purgold,  Inscriptions  d'O- 
lympie,  xx"  43b-438. 

Ilapvaaffoiî,  revue  périodique,  mai  1882. 

Nous  remarquons  dans  ce  numéro  les  articles  suivants  :  Jacob  nragr.tsis, 
Caractères  particuliers  de  l'art  dans  la  peinture  religieuse  des  Byzantins.  — 
Athanase  Laspopoulos,  L'Olympe  et  ses  habitants;  Usages  de  Lytochorion;  le 
cèdre  (plusieurs  poésies  populaires  sont  citées).  —  Proverbes  populaires 
de  Tbéra. 


126  nETi'F.  AncHÉoi.or.iouE. 

liulletlim  délia  commissione archeototjica  communale  di  liomo,  \W  an 

née,  w  2  : 

r.iiiseppe  Tom.is-îolti,  De  la  colonne  d'll<i,ii  IV.nr  l'Esi^uilin  (pi.  Mil). 
—  Caniillo  Ue.  Le  Coiutole  et  ses  environs  au  xn"  sicc.lc  (pi.  XIV  cl  XV).  — 
i;.  H.  de  Hossi,  La  hygia  de  la  comtmiue  de  lUme  aclin>c  au  ('(lyitole  juir  les 
finateursin  /'«/;j;j»"f  l'JOl».  —  l"..  H.  tif  llo>si,  Li  viUa  de  Stliui  Ilalirus  cl  le 
collcgium  salutarc  à  Tnsculum  (un  bois).  —  \{.  I.iuK'iaiii,  Supplàncnt^i  au 
tome  YI  du  Corjms  inscriiUionum  latinarum  (pi.  XVi,  XVII).  —  Cahier  de 
tables  qui  voul  de  jainicr  1H77  à  d('ccml>re  1881. 


lUHLIOGllAPllll': 


Das  Landes  Zeughaus  in  Gratz.  ner/iusg/'fje/jeu  von  dcr  Voislelutriy  r/es 
Mnuz>->t  and  Anîilii-ii-Cnhiiii'Ies  (jm  St.  L.  Joftnneum.  Leipzig,  F.A.  Brockliau8,t&80. 
Gr.  iu-/i",  accoinp.iKntS  de  63  plancliea  (17G-XLVI-l.'i9  p.). 

J'ai  cm  devoir  signaler  aux  lecteurs  de  la  Ilevue  archéologique  rctle 
importante  publication.  L'ouvrage  est  divisé  en  deux  parties,  dues  à  deux 
auteurs  difiéients. 

Dans  la  première  partie,  M.  le  docteur  Fritz  Piclilcr,  conservateur  du 
Musée  dos  antiques  au  Joanneum,  et  connu  pai  de  nombreux  et  excel- 
lents ouvrages  d'archéologie  ',  fait  d'abord  une  élude  approfondie  de  l'ar- 
mement en  Styrie,  depuis  les  temps  les  plus  j;eculés  jusqu'au  régne  de 
Maximilien.  Ici  les  amis  de  la  haute  antiquité  et  mûme  du  préhistorique 
trouveront  une  foule  de  renseignements  intéressants  sur  les  aimes  de 
piene  et  de  bronze  avant  les  Romains,  sur  celles  de  l'époque  romaine, 
puis  de  l'époque  romaine  à  l'invasion  des  Baibares,  des  grandes  migra- 
tions à  la  création  du  duché  indépendant  de  Styrie,  et  enfin  depuis  celte 
création  jusqu'à  Ma\imi!ien.  Le  docteur  Pichlera  ensuite  abordé  l'histoire 
de  l'arsenal  deGralz,  et  reproduit  des  inventaires  en  vieil  allemand  où 
l'on  trouve  les  noms  du  temps,  le  prix  de  revient,  et  une  multitude  de 
documents  pleins  d'intérêt. 

La  seconde  partie  est  une  description  technique  des  richesses  archéolo- 
giques de  l'arsenal,  par  un  auteur  dont  les  initiales  sont  F.  G.  v.  M.  Cette 
description,  et  les  planches  qui  s'y  rapportent,  ont  le  mérite  tout  particu- 
lier de  montrer  é[)oque  par  époque  quels  sont  les  accessoires,  tels  que 
harnachement,  engins  divers,  et  même  objels  de  campement,  qui  corres- 
pondaient à  une  armure  déterminée  oui  telle  et  telle  arme  d'hast  ou 
de  jet.  Les  planches,  accompagnées  d'une  échelle,  sont  d'une  exécution 
très  soignée. 


1.  Je  citerai  notamment  un  excellent  volume  sur  les  monnaies  gauloises  de  Styrie 
{Repertorium  der  Slcirischen  Mûnzkunle,  I.  Band,  Die  kclttschen  und  consularen 
Mùnzen  der  SteieDnnrk),  ouvrage  de  nature  à  intéresser  tout  particulièrement  les 
collectionneurs  de  France,  qui  trouveront  dans  les  légendes  des  létradrachmes  du 
Danube  quelques-uns  des  noms  de  cliefs  que  présentent  les  monnaies  de  notre  Gaule; 
et  une  brochure  sur  des  souveoira  étrusques  découverts  ea  btyrie  et  eu  CariatLie. 


128  MKViK  auchèulogique. 

Lt8  richesses  de  l'arsenal  iloGraiz  ont  un  nu'rilc  particulier  :  ce  n'est  pas 
une  collection  «naloj;ue  A  celles  qui  se  font  de  nos  jours  à  prix  d'arj^ent 
et  où  les  armes  oITtMisives  et  défensives  manquent  le  plus  souvent  d'une 
oiii:ine  cortaine.  Les  pi»>L"i'S  qu'il  ctuilionl,  au  nombre  de  '2H,000,  ne  sont 
autre  chose  que  les  armes  oiïeiisives  et  di^feiiiives  cl  les  engins  d^  guerre 
de  toutes  sortes,  y  compris  los  lentes,  qui  sont  venus  prendre  place  suc- 
cessivement, depuis  le  xvi*  siècle,  dans  l'arsenal  de  <irnlz,  non  comme 
oljets  de  colleclion,  mais  comme  approvisiomiemenis  de  guerre.  Parmi 
les  armures  reproduites  et  décrites  dans  ce  \olume,  il  en  isl  qui  sont  pré- 
cieuses :  je  crois  cependant  qu'on  rencontre  au  Musée  d'artillerie  de  l'a- 
ris  et  dans  d'autres  musées  des  pièces  isolées  d'une  \aleur  plus  grande. 
Mais,  je  le  répète,  l'ensemble  de  l'arsenal  de  Gratz  a  un  mérite  tout  par- 
ticulier. G'psI  tout  un  passé  militaire  encore  en  place,  et  qu'on  peut  dé- 
sormais étudier,  prftce  à  la  précieuse  publication  dont  je  viens  de  donner 
une  courte  analyse. 

I>.  C.BAni.ES  RuHERT. 

Paris,  lo  2D  ;icûl  1SS2. 


LE 


A  [.A  l'iMsi-:  ni':  pkp.c.amI': 


SUITE 


IV 

LK  LAOCOON  ET  LF'.  DKAME  DE  SOPHOCLE. 

Visconli  a  prononcé  une  itaroleqiii  pniMissniLjiitlicioiisc  autrefois. 
Il  a  dil  que  1(>  mythe  du  Laocoon  était  iiiuiiordl,  et  tous  ceux  qui 
ont  présent  à  l'esprit  le  récit  de  Virgile  seront  d'accord  avec  cette 
opinion. 

Les  r,recs,  dit  Virgile,  feignant  d'abandonner  le  siège  de  Troie, 
ont  laissé  derrièie  eux  le  cheval  de  bois  qui  contient  dans  ses  lianes 
le  noyau  de  l'armée  des  Argiens.  Ils  espèrent  que  les  Troyens  intro- 
duiront avec  lui  la  destruction  dans  leurs  murs.  Priam  et  ses  guer- 
riers entourent  cette  mystérieuse  machine.  Ils  doutent  de  sa  véri- 
table signilication  :  lorsque  Laocoon,  le  grand  prêtre  d'Apollon, 
accourt  plein  de  noirs  pressentiments,  et  emploie  toute  son  éloquence 
à  dévoiler  le  stratagème  des  Grecs  et  à  prouver  aux  siens  que  les 
dons  mûmes  des  ennemis  sont  à  craindre  : 

. . .  Timeo  Danaos  et  doua  ferentes  ! 

Pour  augmenter  la  valeur  de  ses  paroles,  il  heurte  de  sa  lance 

1,  Voir  les  numéros  de  juillet  et  d'août. 

Septembre.  XF.IV.   —    0 


130  nFVLR    \ ne H KO LOGIQUE. 

les  flanrs  ilu  cheval,  dont  les  ravilîs  irsonmiit  longuomeiil.  A  cet 
instant,  la  rus(3  des  (Jrecs  est  bien  près  d'ap|tarailre  évidente.  .M.ii> 
Sinon,  un  Crcc  i\a'\  feinl  d'avoir  ètù  mutilé  et  abandonné  sur  !»• 
riva^v  par  ses  (Minpalrioti's,  (Si  alois  amené  au  roi  Priain.  lisait 
envelopper  l'esprit  du  vieillard  d'un  lilet  de  nienson^'es  babiliiuenl 
tisst's  el  persuader  aux  Troyens  ijue  le  cheval  «lu'ils  redoulenl  esl 
un  présent  divin,  un  bienfait  de  la  déesse  Minerve.  Ce  (lui  vient 
encore  achever  de  les  convaincre  de  la  vérité  de  ces  iiaroles,  c'est 
la  mort  alTreuse  de  Laocoon.  Au  moment  où  ce  prêtre  se  prépare  à 
offrir  un  sacrifice  sur  l'autid  de  Neptune,  deu\  serpents  sortis  de 
Ténédos  traversent  la  mer,  se  jettent  sur  les  enfants  de  l.aocoon, 
qu'ils  broyenl  de  leurs  anneaux,  el  saisissent  tiiliii  le  perc,  (|ui  suc- 
combe aux  mêmes  étreintes.  Puis  ils  se  retirent  sous  le  bouclier  de 
la  statue  de  Minerve.  Les  Troyens  considèrent  ce  miracle  comme 
un  chàiiinent  inllitié  par  la  dresse  à  Laocoon  pour  le  i)unir  d'avoir 
insulté  au  [irésenl  .ju'elle  leur  avait  faiL  Ils  introduisent  le  cheval 
dans  leurs  murs,  et  Iliou  est  perdue. 

Tel  est  ce  récit  de  Virgile,  dont  l'immoralité  est  évidente.  Le  lec- 
teur du  poêle  doit  croire  avec  les  Troyens  que  la  mort  de  Laocoon 
est  due  aux  paroles  qu'il  a  prononcées  pour  avertir  ses  concitoyens 
du  stratagème  d'Ulysse.  La  divinité  apparaît  ainsi  comme  la  com- 
plice de  la  ruse  des  Grecs.  Elle  sacrilie  à  sa  vengeance  et  fait  périr 
au  milieu  des  plus  atroces  tourments  un  père,  un  prêtre,  un  citoyen 
dévoué,  à  l'instant  môme  où  il  s'efTorce  d'arracher  sa  patrie  aux 
complots  de  ses  ennemis.  Et  remanjucz  que  la  moit  de  Laocoon 
n'est  pas  un  martyre,  comme  on  a  voulu  le  prétendre,  sans  savoir 
ce  que  ce  mol  siguitie.  Un  martyr  est  un  homme  (jui,  convaincu 
d'une  vérité  religieuse,  [irofomlément  persuadé  d'être  d'accord  avec 
la  volonté  divine  ou  avec  les  lois  supérieures  qui  président  à  l'har- 
monie de  l'univers,  soutient  au  prix  de  sa  vie,  devant  une  foule 
irritée  ou  sacrilège,  ou  devant  un  tribunal  de  fanati(jues,  l'existence, 
l'essence,  la  nécessité  de  celte  vérité  ou  de  celle  volonté  (ju'il  a 
reconnue.  Il  n'y  a  rien  de  pareil  dans  le  mythe  du  Laocoon.  C'est 
un  prêtre  innocent,  un  prophète,  pres(iue  le  sauveur  de  sa  patrie, 
(pie  la  divinité  sncrilie  à  son  ressentiment  et  livre  avec  ses  enfants 
à  la  plus  cruelle  de  toutrs  les  morts.  C'est  un  meurtre  per- 
pétré avec  des  détails  révoltants  de  cruauté  par  la  plus  sage  des 
déesses,  par  Minerve,  dans  le  seul  but  d'assouvir  sa  haine  impla- 
cable. 

Certes,  nous   pouvons  réj)éter  avec  Visconti  :  Le  iii>the  du  Lao- 
coon est  immoral,  irréligieux,  inhumain,  exécrable. 


I.K    LAOCOON    11    I.K    (iHOLIMi    D'aTHKNA.  131 

HeiircusciiiL'tii  pour  rcspril  dcî  In  religion  t,M<'(<iue,  nous  savons 
que  la  iû^îcndc  [icllénii|U(;  avait  des  vari.inles.  Dans  (Juinlus  (^ala- 
ber  et  Lykopliron,  Laocoon  n'est  pas  mis  à  mort  avec  ses  enfants. 
(les  derniers  seuls  .^ucfoinbenl.  I^e  vieillard  devient  aveu;^le,  comine 
Ol-ldipe.  Si  le  piètre  est  innocent,  ce  supplice  parait  encore  nijslé- 
rieuseraent  injuste.  Mais  des  allusions  semées  ici  et  là  dans  lescom- 
niciilatoiirs  loinains  '  perniellent  d'établir  i[ue  la  légende;  avait  une 
autre  forme  dans  le  monde  grec.  El,  même  sans  le  secours  iJes 
auteurs  l.itiiis,  le  seul  fait  (jue  Sophocle  a  écrit  une  tragédie  inti- 
tulée LditijoH  suflirait  pour  nous  faire  pressentir  (ju'une  .lutre 
tradition  a  dû  former  le  tissu  du  drame  sopbocléen.  iJans  les  grands 
tragiiiues  grecs,  ce  sont  toujours  les  passions,  les  égarements  des 
héros  (jui  entraînent  la  catastrophe.  Plus  le  crime  commis  au  début 
de  la  vie  est  contraire  aux.  lois  divines  et  humaines,  plus  la  puni- 


1.  Sorviiis  Maunis,  ad  Aùieid.  2  201  donne  les  cxplicat'ons  suivantes  aux  mots  de 
Virgile  :  «  L  t  Lupliorioii  dicit,  posl  adventuin  Gra;corum  sacerdos  iNeptuiii  lapidibus 
occisiis  est  quia  non  .sacrificiis  eorum  vctavit  adventum.  Post  absccdenlibus  (jrajcis 
quum  velient  sacrificare  Neptuno  Laocoon  Tliymbraii  Apollonis  sacerdos  sorte  duc- 
tus  est  :  ut  solet  fieri  cum  dccst  sacerdos  certus.  Hic  piaculum  commiserat  ante 
siauiiacruni  numinis,  cum  [Antiopia  suaj  uxorc  coeuiido.  Et  ob  boc  iiiimissis  dra- 
cuuibus  cuui  suis  tiliis  intereinptus  tst.  Uistoria  quidem  hoc  habct.  Sed  poeta  in- 
terpretalur  ad  Trojanorum  eicusationeni,  qui  hoc  ignorantes  decepti  sunt.  Alii 
dicuiit  quod  post  contemptuin  semel  a  Laomedonte  .Neptunuin  certus  ejus  sacer- 
dos apud  Trnjam  non  fuit  :  unde  putatur  iNeptunus  etiaui  iniuiicus  fuisse  Trojanis 
et  (juod  ilie  uieruerit  (iili  nierucrint)  in  saccrdote  monstrare  qnod  ipse  alibi  osteadit, 
dicens(V,  810)  :  Cupereni  cum  vertcre  ab  ifljo  siructa  meis  manibus  perjurje  mœnia 
TroJ;i.'.  Quod  autem  ad  arcem  ierunt  serpentes  vel  ad  teniplmn  Minervae,  aut  quod 
et  ipsa  iniinica  Trojanis  fuit  aut  signuin  fuit  periturai  civitatis.  Saue  Bacchilides 
de  Laocooute  et  uxore  ejus  vel  de  serpentibus  a  Calydnis  (cod.  F.  Calydoms  ; 
alii  C'a/e(/o/<iS)  insulis  venientibus  atque  in  lioinines  conversis  dicit.  Sorte  ductus; 
sic  Sallusiius.  »  —  Au  vers  211,  Servius  remarque  :  «  Hos  dracones  LysimachusCuri- 
liu  ?  et  Peribœam  dicit.»  (C'est  d'après  ces  notes  de  Servius  que  nous  reconstruirons 
plus  loin  l'intrigue  du  drame  de  Sophocle]  Nauck  suppose  que  les  noms  des  serpents 
donnés  par  Servius  au  vers  211  doivent  ùtre  llosxy,;  et  .\aptGo'.a.  Comparez  aussi 
Hygin,  Fdlndu  135.  Si  nous  préférons  suivre  Servius,  c'est  qu'il  donne  le  vrai  mo- 
bile tragique  de  l'action  dans  les  mots  :  Hic  piaculum,  etc.  Nous  croyons  aussi  que 
tout  son  récit  est  pris  ;i  Lupiiorion,  qui,  par  conséquent,  a  déjà  enveloppé  le  père  et 
les  deux  lils  de  la  même  mort.  M.  Cari  Hubert  ^Philolof/isclie  L'uttrs.  li.  ■-■.  von  A. 
Kiessling  und  Von  Wiiamowitz-.Mullendorf,  V,  p.  205)  s'efforce  de  prouver  qu'Eu- 
phorion  n'a  pas  traité  la  légende  de  Laocoon.  Mais  son  argumentation  est  trop  sub- 
tile pour  nous  convaincre.  Aucun  texte  ne  saurait  résister  à  celte  critique  qui  re- 
tourne chaque  lettre  et  chaque  mot.  La  phrase  de  Servius  :  «  Historia  quidem  hoc 
habct  )) ,  indiqued'une  façon  claire  et  précise  que  soit  la  cause  de  ce  terrible  châtiment 
de  Laocoou,  soit  lu  mort  simuttaniic  du  père  et  des  deux  enfunts,  étaient  déjà  con- 
nues par  une  tradition  antérieure  à  Virgile. 


!•  -  iu:\LK  Ain.iii-.iti.cxiiniii:. 

lion  réservée  au  coupalil(>  par  la  divliiilt''  >tMa  h'iTiliaiiU'  cl  i;iirmce. 
—  l>ans  la  traililioii  hollt'iiiiiiic,  la  iiioit  de  Laocooii  cesse  clNMre 
immorale  parce  qu'elle  ii'esl  plus  en  rajiporl  avec  sa  clairvoyance 
et  son  zèle  prophétique.  Le  supplice  (ju'il  subil  oi  1''  châtiment  «l'un 
égaremenl  impie,  Je  la  satisfaction  d'une  passion  s^Mossiére  el  bru- 
tale sur  les  marches  mêmes  Je  l'autel,  dans  le  lieu  sacro-saint, 
devant  la  statue  d'Apollon,  incariialioii  lerreslriî  de  la  divinité 
chaste  et  lumineuse.  I.es  deux  enfants,  fruits  de  l'acte  sacrilé.L'C  <ie 
leur  père,  doivent  supporter  aussi  le  poids  du  courroux  des  dieux. 
Dans  le  monde  antique,  ces  crimes  de  Idse-dii  initr  sont  ceux  que 
la  Némésis  poursuit  de  ses  déchaînements  les  plus  lei  rildes,  de  ses 
éclats  les  plus  foudroyants.  Comme  dans  le  drame  d'Œdiiie.  ce  n'est 
pas  seulement  Laocoon,  le  jière coupable,  qui  doil  périr,  c'est  la 
famille  tout  entière  (]ui  doit  disparaître  dt' la  lumière  bienfaisante 
du  jour  et  rentrer  dans  cette  ombre  de  l'Adès  où  Ljèmisseni  tant  de 
pâles  générations  criminelles,  impies,  sacrilèges. 

Ainsi  la  mort  (b's  deux  adolescents  excite  notre  pitié,  mais  elle 
cesse  d'être  inexplicable,  parce  qu'elle  devient  le  complément  de  la 
peine  qui  doit  atteindre  le  père  coupable. 

Telle  est  la  véritable  tradition  hellénique,  cl  c'est  elle  que  Sopho- 
cle a  dû  suivre.  Il  a  dû  représenter  ce  père  accablé  par  le  souvenir 
de  son  infamie. 

Tremblant  pour  lui-même,  pour  ses  tils,  Laocoon  les  voit  grandir 
avec  terreur  comme  les  images  vivantes  de  son  crime,  qu'ils  lui  rap- 
pellent à  chatjue  heure  du  jour,  à  chaque  minute  de  ses  nuits  in- 
(|uiétes.  Le  drame  a  dû  montrer  ce  prêtre  en  proie  aux  remords 
incessants,  à  celle  tristesse  latente,  honteuse  d'elle-même,  qui  mine 
les  coupables,  peut-être  même  aux  persécutions  intermittentes  des 
Furies.  Sous  l'impulsion  d'une  conscience  tourmentée,  le  prêtre  sa- 
crilège s'améliore  lentement.  Il  devient  plus  humble,  plus  dévoué, 
jilus  pur,  et  il  vieillit  ainsi  plein  d'amertume  et  de  mépris  pour  lui- 
même,  tandis  que,  dans  le  peuple,  la  vénération  qu'on  lui  porte 
grandit  avec  le  nombre  des  années. 

Dans  ses  heures  de  solitude  il  éclate  en  actions  de  grAce  envers 
la  divinité  qui  daigne  dilîérer  encore  Tceuvre  de  la  Némésis.  Les 
.scènes  de  remords,  d'angoisse,  de  désespoir,  doivent  dominer  toute 
l'action.  Klles  doivent  insjiirer  aux  spectateurs  une  profonde  sym- 
pathie pour  cette  grande  âme  régénérée  par  la  sincérité  du  repentir. 
Kl  c'est  lorscjue  cet  intérêt,  celle  symi)athie,  cette  pitié  grandit  et 
.se  transforme  en  admiialion,  au  moment  où  la  clairvoyance  et  la 


LE    LAOCOON    F.T    I.K    fiROUPH    D'ATflKNA.  13;^ 

sagesse  du  prêtre  alleignent  une  liautcur  divine,  à  riifinc  où  il  va 
peul-tMro  sauver  sa  pairie  par  le  sniiflle  inspiré  de  sa  paroh;  proplié- 
liquo,  c'est  à  cet  instant  siiprénK!  (jue,  —  par  un  de  ces  contrastes 
tragiques  dont  Sophocle  et  Kschyie  seuls  ont  le  secret,  —  la  divi- 
nité se  dresse  iinpiloyable  devant  le  prêtre  [)Our  lui  demander 
compte  du  sacrilège  jiassé. 

Non!  Laocooii  ne  doit  pas  alteindr"  à  la  gloire,  au  Ijonlieur  inef- 
fable d'avoir  sauvé  sa  patrie  de  la  ruine  imminenle  et  fatale.  Toute 
une  longue  vie  de  remords,  de  dévouement  et  de  piété  nesauiail 
racheter  le  grossier  sacrilège,  l'enlraineraent  brutal  qui  l'a  con- 
damné dès  l'origine.  Dans  l'idée  grec([ue  la  faute  est  iriéparable,  la 
souillure  a  gravé  sur  le  fond  de  l'âme  sa  mar(|ue  indélébile,  iticn 
ne  saurait  la  laver,  ni  les  remords,  ni  les  tourments,  ni  les  mérites. 
Prêtre  impie,  Laocoon  doit  périr  sur  cet  autel  qu'il  n'a  pas  su  res- 
pecter. Tendre  père,  il  doit  voir  la  mort  hideuse  de  ses  (ils,  partager 
leur  supplice  et  sentir  le  froid  de  ces  enlacements,  l'âcreté  de  ces 
morsures  venimeuses  dont  il  est  la  cause.  Citoyen  dévoué,  il  suc- 
combera en  songeant  que  son  châtiment  même  doit  entraîner  la 
ruine  de  la  patrie. 

Ce  dernier  trait,  —  qu'on  n'a  pas  encore  remarqué,  —  est  sans 
doute  ce  qui  devait  rendre  plus  poignante  l'épouvantable  catastro- 
phe du  drame  de  Sophocle.  Une  vie  perdue,  l'enfance  innocente  li- 
vrée h  d'atroces  angoisses,  Ilion  s'écroulant  dans  le  feu  et  le  sang, 
et  par-dessus  tout  la  conscience  d'avoir  été  la  cause  de  tant  de 
maux,  voilà  les  tourments  qui  étrcignent  le  cœur  du  prêtre  sacri- 
lège, plus  malheureux  encore  si  le  poète  le  laisse,  comme  le  fait 
QuinlusCalabcr,  vieillir  aveugle,  misérable,  repoussé  de  tous',  que 


1.  Les  arguments  que  l'on  a  donnés  pour  prouver  que  Sophocle  n'a  pas  fait  périr 
Laocoon  de  la  mùme  mort  que  ses  fils  sont  tous  négatifs.  Dionysios,  Arch.l  ^8  et 
le  Scholiaste  de  Ljkopliron,  V,  347,  ne  mentionnent,  en  effet,  que  la  mort  des  tils  du 
prêtre  troycn.  Mais  ils  ne  disent  pas  d'une  façon  certaine  que  le  père  n'ait  pas  péri 
du  môme  supplice.  Si  nous  n'osons  pas  adlrmer  que  Sophocle  ait  été  le  créateur  de 
ce  dénouement  qui  fait  succomber  à  la  fois  les  trois  victimes,  c'est  que  l'autre  est 
encore  plus  dramatique.  Laocoon  devenu  aveugle  et  survivant  à  son  malheur,  roilJi 
une  catastrophe  qui  rappelle  celle  de  VCEdipeHui.  Quant  à  ceux  qui  répètent  après 
Lessing  que  Virgile  seul  a  eu  l'idée  de  faire  périr  ensemble  le  père  et  les  fils  (cf. 
M.  C.  Robert  cité  plus  haut  ,  nous  croyons  les  avoir  réfutés  dans  ce  qnenous  avons 
dit  sur  Euphorion  (voyrz  la  r.ote  de  la  page  77).  Tourqu^M  M.  Uobert  a-t-11  oublié 
dans  8P8  nombreusfis  citiuions  de  mentionner  ,>facrobe  qui,  dans  un  passngc  caracté- 
ristiqiio  pour  notre  recherche  {Satumnl.  lib.  V,  cap.  ii),  s'exprime  comme  suit  : 
Il  QuM  Vîrgllliis  traxit  a  Graîcis,  dicturumne  me  puiatis  qua?  vulgo  nota  sunt  ? 
Quod  Theocritum  sibi  fecerit  pastoralisoperis  autorem,  ruralis  Hesiodum?  Et  quod 


134  IIKVUK    AUCHÉOLfXiigilK. 

s'il   le   livr.  ,    avct-   Him'idr,   h    l.i    fureur   et   .lu   venin  des  rep- 
tiles. 

Mais  si  le  pointe  a  pu  nous  faire  i>.isser  par  laiil  iréinolions,  s'il  a 
pu  nous  ilévelopper  le  eararU^re  de  I.noroon,  nous  tenir  en  suspens, 
nous  faire  j)ressent!r  loiit^'ucnient  la  ealaslroplie,  c'est  ipie  son  do- 
maine c'est  le  temps,  etijiic  les  moyens  (ju'il  emploie  pour  jieindre 
consistent  en  des  sons  articulés  placés  dans  le  temps. 

Au  contraire,  le  peintre  ou  lescul[»leur  a  pour  domaine  l'espace^ 
les  moyens  dont  il  dispose  sont  des  couleurs  ou  des  figures. 

Les  objets  qu'il  cherche  à  repré>enler  sont  placés  les  uns  h  côté 
des  autres  dans  l'espace;  tandis  ijuc  le  poêle  se  sert  il'ohjels,  de  si- 
gnes, placés  les  uns  après  les  autres  ou  qui  se  succèdent  dans  le 
temps. 

Desohjets  placés  les  uns  à  côté  des  autres  ou  dont   les  pirties  se 


in  ipsjs  Georgicis,  tcmpcstatis  screnitatisque  si^-na  do  Aiati  Phirnomcnis  traxcrit? 
\elquod  evcrsioiicmTroj.T,  cuni  Siiionesuo,  ctequo  ligiieo,  ctrteri^qui'  omnihui.  quœ 
iiLruniscrundwii  /wiiixl,'!  l'is'inilni  iicne  <t<l  verbum  tmiiirripserit  ?  Qui  interGrir. 
cos  poetas  emiiKi  opère,  quoii  a  ruipiiis  Jovis  et  Junoiiis  iiicipiciis  uiiivcrsas  liis- 
toria»,  quœ  inediis  omnibus  sn'culis  usquc  ad  a?tatem  ipsius  Pisandri  conti- 
gt.Tuiit,  in  unam  gcriem  coactas  redcgtrit,  et  unum  ex  diversis  liiatibus  tcmpo- 
ruui  corpus  ellecerii?  in  ([uo  operf  iiitcr  liistorias  citeras  intérims  quoque  Trejo; 
in  liunc  maluin  relatus  est.  Qua;  /iilr/iter  M&ro  intcrprclando,  /'(lOncalus- est  sibi  Uia- 
c:l' urbis  ruinam.  Sed  et  ha;c  et  talia  ut  puoris  dccantata  prwtereo.  »  Voilà  un 
tt^moignapc  parfaitomont  clair  et  prOcis.  11  serait  diflicile  d'en  tordre  le  sens  comme 
M.  Itoburt  l'a  fait  pour  celui  de  Serrius  citant  Kupliorion.  Macrobe  nous  dit  qu'en  gé- 
néral Virgile  a  imité  les  Grecs  et  il  ;ijouie,  coDinic  l'evemplc  W  plus  frappant  do 
ceittj  vérité,  que  le  si  coud  livre  de  V  Enéide,  avec  la  destruction  de  Troie,  les  épiso- 
des de  Sinon  cl  du  clieval  de  bois  et  tous  les  autres  (lyrterisque  nmnibiis)  ont  été 
traduits  par  Virgile  du  texte  grec  de  l'isandii",  et  velu  jire.iyuc  mot  à  mut  {fjene  ud 
vcr/jum).  Heniarquez  ijuo  Macrobe  ne  fait  pas  d'exception  pour  le  Laocouu;  il  a  bien 
soin  de  bpéciliur  {ca-lei  tique  omnibus).  Il  revient  même  une  seconde  fois  sur  cette 
idée  avec  une  nuance  d'imnie  qui  n'échappera  à  personne,  lorsiiu'il  dit  :  «  Virgile 
n'est  foryi  {silii  fiibrinitus  est)  une  ruine  d'Ilion  en  traduisant  Pisandre  fiililcmeut  » 
(fiflelilei  ttit<  rpt ctanJ'j/.  Coinuiciil  croire  après  cela  qui;  Virgile  a  inventé  la  mort 
Bimultaaée  de  Laocoon  cl  de  ses  deux  ûh  '1  II  a  pris  ce  trait  à  Sophocle,  à  Pisandre, 
ou  à  Euphorion.  M.  Uobcrtest  de  ceux  qui' veulent  prouver,  en  accumulant  les  textes 
et  sans  considérer  le  fe'roupe  lui-même,  que  le  clief-d'u  uvre  du  Vatican  a  été  créé  par 
d<'8  Homain»  qui  s'inspiraient  du  texte  de  Virgile.  Cette  méthode  exigerait  an  moins 
qu'on  ne  laittsAt  pas  de  côté  d<  s  anirmations  telles  que  celles  de  Macrobe.  D'ailliiirs, 
si  nous  pensons  que  l'archéologie  ne  peut  pas  se  passer  do  In  criti'pio  des  textes, 
nou*  croyons  la  réciproque  également  vraie:  la  criti<pin  des  textes  ne  ^nllrail  se  pns- 
spf  den  lumi«';res  de  l'arcliéulopie.  Kt  ce  n'ebt  pas  seulement  Macrobe  que  M.  lloberi 
a  oublié,  il  i(rnorc  auul  lu  ténu  i/nnge  il  liupurtaut  dt  Pluie,  que  nous  avons  cité 
plut  haut. 


I.K    I.AOCOON    ET    W.   GROUI'K    d'aTIIKN  V.  435 

troiivciillesunesà  côté  des  autres  dans  l'espace  se  nomment  en  gé- 
néral des  corps. 

Les  eorps,  voil;"i  donc  le  vérilalde  doni.iiiie  de  la  seulpluic  »^l  il»; 
la  peinluii'. 

Des  signes,  des  objets,  ([tii  se  suivent  dans  h\  temps,  (jui  ne  sont 
reliés  entre  eux  <|ue  par  eette  succession  mAme,  s'appellent  généra- 
lement dos  actions. 

Des  aclions  qui  se  succèdent  dans  le  Icinps,  tel  est  donc  le  véri- 
table objet  de  la  poésie. 

Cependant  tous  les  corps  n'existent  pas  seulement  dans  l'espace, 
ils  sont  aussi  dans  le  temps.  Ils  durent,  ils  peuvent  à  cliaque  instant 
de  leur  durée  prendre  une  autre  apparence,  avoir  des  rapports  dif- 
férents avec  les  objets  qui  les  entourent. 

Chacune  de  ces  apparences  momentanées  est  la  consé<iuence 
d'une  action  qui  précède^  peut  être  la  cause  de  celle  qui  suivra,  et 
peut  devenir  ainsi  le  centre  d'une  action. 

Kn  coiisù(|uenc(',  la  peinture  et  la  scul{tture  peuvent  aussi  repré- 
senter des  aclions,  mais  seulement  d'une  laçon  incomplète,  en  les 
indiquant  par  des  corps. 

D'un  autre  côté,  des  actions  ne  peuvent  pas  exister  en  elles- 
mêmes,  elles  doivent  appartenir  à  certains  êtres,  pour  autant  que 
ces  êtres  sont  des  corps  ou  qu'ils  sont  considérés  comme  des  corps. 
La  poésie  représente  donc  aussi  des  corps,  mais  seulement  d'une 
façon  incomplète,  en  les  indiquant  par  des  actions. 

La  peinture  et  la  sculpture  ne  peuvent  employer  dans  leurs  com- 
positions qu'un  seul  moment  de  l'action. 

Le  sculpteur  doit  donc  choisir  le  moment  le  plus  frappant,  celui 
qui  fait  le  mieux  comprendre  ce  qui  a  précédé  et  ce  qui  va 
suivre. 

D'autre  part,  la  poésie,  dans  ses  représentations  successives,  ne 
peut  employer  qu'une  seule  qualité  des  corps  et  doit  choisir  celle 
qui  éveille  dans  notre  âme  l'image  la  plus  frappante,  la  plus  palpa- 
ble de  ce  corps,  ou  sous  le  côté  qui  lui  est  nécessaire  pour  dépeindre 
le?  actions. 

Il  suit  delà  que  si  un  grand  poète,  comme  Sophocle,  s'est  efforcé 
de  dérouler  le  mythe  de  Laocoon  dans  une  série  d'actions  succes- 
sives, s'il  a  eu  raison  de  nous  faire  passer  par  tous  les  détails  de 
l'action,  d'égrener  lentement,  une  à  une,  ces  scènes  de  remords, 
d'angoisse,  d'espérance,  de  retarder  le  plus  possible  la  catajtrophe, 
qui  devient  d'autanljplus  terrifiante  que  |la  faute  est  passée  depuis 


130  nEVUE   ARCHKOl.OGIOUK. 

un  plus  gnml  nombre  d'nnnêes;  si  Virgile  a  eu  tort  de  trop  s'atta- 
rlu'r  à  reprosiMitor  h»  rhAtiinonl  lui-nu^ino,  tr(»iil>Ii('r  parcetlc  préoc- 
cupation la  vcrilatilo  cause  ilu  supplice  ol  tic  nous  en  laisser  sup- 
poser une  immorale  et  inhumaine,  on  ne  peut  cepenilanl  pas  exi- 
ger (lu  sculpteur  on  du  p'-intre  les  nit'^incs  ()l)li;,Mlion-. 

Le  sculpteur  ne  peut  pas  nous  représenter  les  dilïérentes  phases 
de  l'action;  il  est  obligé  de  choisir  un  moment  ijui  soit  la  résultante, 
le  point  culminant  d-j  tous  les  autre-;,  l'instant,  souvent  rapide 
comme  l'éclair,  (pu  rapproche  le  mieux  le  passé  di'  l'avenir. 

Il  peut  échapper  à  une  fausse  interprétalinn  eu  tvilint  de  re[)ré- 
senter,  d.ins  le  i^MOupe  du  I.nocoon,  par  exemple,  le  cheval  de  bois, 
mais  il  lui  est  matérieilenjenl  impossible  de  nous  faire  sentir  dans  un 
groupe  de  statues  que  le  supplice  de  Laocoon  csi  l'expiation  d'une 

faute  commise,  il  y  a  nombre  d'années,  par  un  prêtre  sacrilège. 
Un  chef-d'<euvi-e  de  la  scul[ilure  limité  à  Laocoon  et  à  ses  enfants 

ne  peut  représenter  (lue  la  catastrophe  du  mythe  dans  sa  réalité  la 

plus  nue  el  la  i»lus  ciuelle. 

Cependant  nous  avons  vu  que  le  peintre  et  le  sculpteur  peu- 
vent jusqu'à  un  certain  point,  avec  des  corps  immobiles  dans  l'es- 
pace, nous  faire  sentir  la  succession,  la  gradation  des  actions  dans  le 
temps.  Mais  ils  ne  doivent  pas  faire  irruption  dans  le  domaine  de  la 
poésie,  ils  peuvent  seulement  lui  emprunter  quelques  traits. 

Lors(iuc  le  Titien  représenie  en  tableaux  successifs  toute  l'histoire 
de  l'Enfant  prodigue,  sa  vie  dissolue,  sa  misère,  son  repentir,  nous 
disons  que  c'est  une  invasion  du  peintre  dans  le  domaine  de  la 
poésie,  (jue  le  bon  goût  ne  saurait  approuver.  Jamais cettesuccession 
île  tableaux  ne  vaudra  le  récit  d'un  grand  poète,  jamais  surtout  elle 
ne  vaudra  un  seul  tableau  concentrant  sur  un  seul  moment  de  l'ac- 
tion, résumant  dans  une  seule  situation  poignante  ou  mélancolique 
toutes  les  scènes  du  drame. 

Mais  si  l'on  nous  dit  que  dans  Uaphaid  tous  les  plis  des  costumes 
ont  leurs  causes  spéciales,  que  tantôt  ils  sont  dus  an  poids  môme 
de  l'étolTe,  tantôt  aux  mouvements  des  membres  ;  on  voit  aux  plis 
do  l'étolTe  qiK  lie  élail  la  position  des  membres  qui  a  immédiate- 
ment précédé  celle  que  le  tableau  représente  ;  ces  plis  indiquent  si 
les  membres  bo  détendent  ou  si,  au  coutrairc,  ils  étaient  étendus 
Dupnravanl  et  se  contractent  dans  rin;laniiepréscniêpar  le  peintre; 
nous  illi'onsnlor»  que  ro  procédé  osi  un  emprunt  fnii  au  domaine 
delà  poésie,  hidU  un  emprunt  do  pénio  c^pnMo  doropiîfonlcr  avco 
dcc  '■'^rpi  '.T  -n^^";>i ju  iliv<  nrlion*  il:ins  le  lomp?i 


LK    LAOCOO.N    I.T    l.i;    (ilU)LI'!'.    d'mIII.NA.  137 

Le  groupe  du  Laoroon  est  une  inia^'o  viv.inir  d'un  de  rcs  cm- 
jininls  faits  par  le  scnliileur  au  domaine  de  la  poésie. 

C'est  ici  (jue  nous  nous  séparons  de  Lcssing,  qui  a  voul  ;  i  oh-r 
'un  de  l'autre  l'art  du  sculplcur  et  celui  du  poëte. 

Il  y  a  entre  la  poésie  et  la  sculpture  certains  liens  ni\stéricux, 
certaines  afiinilés  intimes  (|ui  résident  dans  l'inspiration  poéli(iue, 
l'iinitulsion  donnée  au  sculpteur  par  le  souflle  i)uissant  de  la  poésie. 
Il  j  a  certains  enthousiasmes  (jui  naissent  d'une  helle  o'uvre  l\ri- 
que  ou  épique  et  prennent  corps  dans  les  statues  des  grands  artistes. 
Sans  doute,  le  sculpteur  se  sert  d'autres  procédés  que  le  poète, 
mais  il  est  un  domaine  où  les  deux  aris,  si  étrangers  en  appa- 
rence, se  lencontrent  et  se  prennent  par  la  main  pour  mener  la 
grande  ronde  des  passions  humaines.  Ce  domaine,  cet  espace  où 
la  plastiiiue  et  la  poésie  se  louchent  et  s'enlr'aident  mutuellement, 
ce  sont  les  planches  d'un  théàtrcr. 

Le  poète  dramati(iue  songe  non  seulement  à  éveiller  l'émotion 
tragique,  mais  il  prévoit  encore  les  effets  plastiques  et  grandioses 
que  certiines  scènes  peuvent  produire.  Le  poète  tragique  règne  sur 
l'espace  el  sur  le  temps,  sur  les  corps  et  sur  les  actions. 

Entre  les  trois  murs  de  la  scène  il  réunit  à  la  fois  ce  qui  manque 
ai'  peintre,  au  sculpteur,  et  aux  poètes  lyriques  et  épiiiues.  Le 
temps,  l'espace,  les  objets,  les  corps,  les  actions,  les  sons,  les  cou- 
leurs môme,  tous  les  moyens  que  l'art  ne  distribue  au  peintre  et 
au  sculpteur  qu'avec  une  paiciinonie  avare,  le  poète  tracrique  les 
tient  tous  dans  sa  main  puissante;  il  peut  tour  à  tour  emprunter  les 
procédés  de  la  plastique  ou  faire  oublier  les  corps  par  la  sonorité 
des  vers  et  l'intérêt  palpitant  des  actions. 

Celte  observation  est  surtout  vraie  pour  ces  grands  théâtres  de 
l'antiquité  où  la  distance  énorme  qui  séparait  le  public  de  la  scène, 
où  les  chœurs,  où  les  cothurnes,  les  manchettes,  les  masques,  les 
costumes  destinés  à  grandir  les  acteurs,  où  le  domaine  des  actions 
tragiques  ce  monde  légendaire,  divin,  héroïque,  surhumain, 
monstrueux,  dont  s'inspirent  les  poètes,  exigent  sur  la  scène  des 
mouvements  lonls,  solennels,  des  combinaisons  de  groupes  long» 
temps  étudiées,  des  efTeis  plastiques  semblables  à  ceux  que  les 
sculpteurs  lailjnient  dan?  le  marbre  de  P^iros  ou  du  Fcntélique. 
Une  foule  de  lrait>  indiquent  l'importance  qiio  1rs  pnélos  do  ranli" 
qiiilômetloiontà  ce  côté  plastique  de  leur  art.  Es^chylc,  qui  jonnit 
lul-mûme  ses  tragédies,  inventa  des  machines  deslinêes  à  favoriser 


I3S  I\KVri:    AlHlIKoLOdlnlK. 

les  npparitions  soudaiius  l'i  li>s  clTets  des  proiipps  qu'il  combinait. 
Sophocle,  que  sa  voix  trop  faible  retenait  loin  îles  fatigues  de  la 
scène,  inventa  le  i<Me  muet  de  Nausicaa,  où  la  souplesse  ilt;  ses 
l^esles,  la  bi-aulé  plastique  di-  son  corps,  la  i,'i;kc  avec  la(|uelle  il 
jetait  la  balle  en  se  jouant  sur  le  bord  de  la  mer,  à  l'arrivée  d'I'- 
ly.sse,  enlevèrent  tous  les  applaudissements.  I.orsquc  Vt'khulxlcnid 
montrait  tout  à  coup  aux  spectateurs  (iresle  assis  dans  le  sanc- 
tuaire de  Delphes, 'entouré  des  Furies  endormies  cl  lasses  de  le 
poursuivre,  ou  ('lylemnestre  le  glaive  en  main  au  milieu  des  cada- 
vres d"Ai,'amemnoii  et  de  (/issandra.  cmit-on  ijue  ces  elTets  n'a- 
vaient pas  été  ména}fés  par  le  poète,  croit-on  surtout  que  les  grou- 
pes qui  devaient  les  représenter  n'étaient  pas  combinés  d'avance 
avec  le  soin  qu'un  sculpteur  pourrait  mettre  à  grouper  ses  sta- 
tues :' 

Kn  évoiiuant  sans  cesse  devant  l'imagination  des  artistes  ces 
graniles  scènes  du  monde  héroiijue,  en  leur  donnant  pour  ainsi 
dire  un  corps  sur  la  scène,  les  poètes  tragiques  ont  dû  exercer  la 
plus  grande  influence  sur  les  créations  de  la  plasii(]ue  '. 

Sans  doute,  un  grand  sculpteur  ne  suivait  pas  servilement  les  com- 
binaisons (juMl  avait  vues  au  lliéfitit';  mais  (|ui  oserait  nierque  cer- 
taines scènes  n'eussent  pas  laissé  dans  son  Ame  une  impression 
ineiïaçable  et  (juc  celle  pi'ciiiière  impulsion  donnée  par  le  poète  ne 
dût  pas  se  révéler  dans  l'o'uvre  de  l'artiste? 

Nous  avons  vu  (lue  le  groupe  du  Laocoon  n'a  pas  pu  être  inspiré 
par  les  (puvres  des  poètes  épiques.  Ce  mythe  ne  se  prèle  pas  non 
plusîl  une  roprésenlalion  plastique.  I.a  combinaison  de  trois  corps 
humains  et  de  deux  serpents  n'a  rien  en  elle-même  (pii  puisse  ten- 
ter le  ciseau  d'un  sculi)leui-.  Oui  donc  a  pu  pousser  les  artistes  de 
Rhodes  à  s'imposer  une  lâche  ingrate,  diflicile,  élrange,  si  ce  n'est 
l'ipuvre  de  (iuel(|ue  grand  lragi(|uc?  Que  ce  soit  Sophocle  ou  un 
autre,  le  poète  qui  a  eu  l'audace  d'évoquer  sur  la  scène  à  la  lin 
d'une  tragédie,  celte  apparition  lerriliante  du  i)ère  el  des  fils  enve- 
loppés des  mêmes  reptiles,  a  dil  être  la  cause  première  de  la  créa- 
tion jusqu'à  présent  inexpliquéi-  du  groupe  du  Laocoon. 

1.  Et  nou  sculcinciit  sur  ceUcs  ili-  la  srulilurc,  omis  aussi  sur  celles  do  la  poin- 
ture sur  VMO.  l'ni-  peinture  sur  uiicrnltrc  tl»  musc'c  l'*ol,  A  Cfiiî-vc,  rcprûsiMito  Oroste 
plac»- entrcle  Kpcciro  de  Clyltmnrstrc  et  le  dieu  Apollon.  Mnl(çrtS  une  certain"  in- 
tention de  r.tirc  rire,  f|ui  fri^e  la  cariruniri',  Um  monvfinentK,  les  costumes,  l'allitud.! 
dc6  pt•r^onha^{(  8,  iudi'iuciit  (juc  k  peintre  u  él(iiu3j)irc  par  une  scèuc  «ju  il  avuil  vue 
au  tbcÀlrc. 


m:  i.A()(:.)r)\  r.T  i.k  ciiouim:  F)  atiii  \v.  l.p.j 

iNous  soiniucs  certains  (jii'il  ;i  cxislé  un  ilr.imc  dont  la  calaslioplic 
(lovait  etro  l'anAanlissonKiiit  de  la  race  en(i("'re  du  pnMre  sarri- 
l(^.'e. 

Nons  nr  pouvons  allirnii'i- ijiii'  Sophocle  ail  élr  le  créateur  de  ce 
drnoïKMHi'nl,  mais  la  jrgciidi'  di;  l.aocoon  une  fois  mise  au  théâtre 
par  Soj)lioc,le,  elle  a  dû  cire  reprise  souvent,  comme  tou!(!s  les 
autres  tra^'édies  du  grand  i)oéte  athénien,  et,  parmi  toutes  les  mo- 
dilicalions  ({u'elle  a  pu  siildi-,  celle  d'une  catastrophe  représentant 
la  mort  simultanée  de  Laocoon  et  de  ses  fils  est  la  plus  naturelle  et 
la  mieux  iiiotivce.  Nous  savons,  en  cITcl,  que  dans  la  tragédie  de 
Sophocle  l'apparition  des  serpents  n'était  pas  le  dernier  acte  du 
drame;  cette  scène  alTreuse  n'était  ([u'un  des  épisodes  précurseurs 
de  la  ruine  d'Ilion,  et  elle  était  suivie  d'un  dernier  tahlcau  repré- 
sentant la  fuite  d'Énée,  et  sans  doute  aussi  toutes  les  horreurs 
d'une  ville  livrée  à  la  flamme  et  à  l'épée  '.  FI  est  donc  prohablo 
(ju'après  Sophocle  on  a  voulu  limiter  le  drame  à  l'épisode  de  Lao- 
coon, et,  dansée  cas,  le  dénouement  le  plus  naturel,  le  plus  ira- 
gi(iue,  celui  qui  devait  se  présenter  lui-même  aux  poêles,  peut-être 
aux  acteurs  chargés  de  remanier  le  drame  sophocléen,  c'était  cet 
anéan'.issement  instantané  de  toute  la  génération  du  prêtre  Iroyen. 
C'est  ce  drame  qui  a  dû  inspirer  Pisandre,  Euphorion  et  Virgile; 
car,  si  cette  tradition  n'existait  pas  avant  eux,  il  n'y  aurait  eu  au- 
cune laison  pour  que  des  poètes  épiques,  —  qui  se  basent  toujours 
sur  des  légendes  populairco,  —  l'introduisissent  dans  leurs  ceuvres. 

Ainsi  les  récits  de  Pisandre  et  de  Virgile  combinés  avec  l'exis- 
tence du  groupe  du  Laocoon  nous  ont  conduits  à  h  conviction, 
presque  à  la  certitude  qu'il  a  dû  exister  un  drame  — •  de  Sophocle 
ou  de  ses  imitateurs  —  dont  le  dernier  acte  était  !a  mort  de 
Laocoon. 

Mais,  cette  scène  une  fois  inventée,  on  sent  quelles  dilTicultés 


1.  Denys  d'Halicaniasse,  .l/i/iV/.  1,48,  expose  que  dans  le  Aaocoo;2  Sophocle  raconte 
la  fuite  d'Éiiiîc  averti  par  le  supplice  des  liis;de  Laocoon.  Cf.  Proclus,  C/irest. 
p.  400.  Mais  la  légende  dusacrilùge  commis  par  Laocoon,  et  source  de  tous  ses  mal- 
heurs, existait  avant  Sophocle,  cunime  le  prouvent  les  scholies  du  Fuldensis  à  VE- 
néu/e,\l,'20l  :  «Sanc  B.icchilides  deLaocoonteet  M.roree/Mî  vel  de  serpcnlibus  a  Ca- 
lydnis  insulis  vcnientibus  atque  in  liomincs  convcrsisdicit.  »  Les  mots  et  uxore  ej'u.- 
ne  peuvent  se  rapporter  qu'au  crime  mentionné  par  Scrvius  (voyez  p.  72  dans  la 
note).  Ainsi  un  poète  lyrique  célèbre,  comme  Bacchylides,  avait  déj^  attribué  à  un  sa- 
crilège la  mon  de  Laocoon.  C'était  un  fait  que  Sophocle  uc  pouvait  pas  ignorer. 
D'ailleurs  si  Laucooucbt  co'jp;iblc  lui-mûmc,  il  est  clair  qu'il  doit  périr  avec  6e&  liU. 


lAO  HKviK  Aiu:ni:oi.or.iot'i-.. 

ont  ilù  ^'oppos(>r  à  >a  repiï-scnlalion.  Il  a  lillii  ^'roupt'r  avci;  art 
sur  Vckkuhlt'ina  les  troi?  arlciirs  el  les  ticux  serpents.  Un  a  dil  rc- 
clierrlier  la  combinaison  la  plus  plastique  et  la  plus  saisissante  de 
ces  trois  t'Icnienls  disparates.  Cette  dilliculti!  a  dû  suri,'ir  à  cliaipic 
repré.seiilalion.  On  voit  donc  comment  sa  solution  a  jm  oITiir 
(lucl  [ue  atlrait  aux  sculpteurs  contemporains,  on  comprcnl  com- 
ment, sous  l'impression  d'un  drame  célèhre  et  de  certaines  réminis- 
cences de  la  frise  de  Perganie  que  nous  analyserons  plus  lard, 
Allianodore,  Agcsandre  el  l'olydore  ont  pu  (Hre  conduits  i\  choisir 
ce  mythe  si  défavorable  à  leur  art. 

On  a  dit  avec  raison  que  le  groupe  du  Laocoon  n'était  pas  (rn- 
gique  en  lui-même,  parce  (|u'il  ne  représente  ([ue  la  douleur  phy- 
siijue  et  la  dernière  crise  du  supplice,  sans  pouvoir  iiidiiiuer  la 
cause  de  ce  châtiment.  .Mais  si,  à  la  lin  d'une  liagcdie  magistrale, 
où  ce  dénouement  aurait  élé  préparé  de  longue  main,  où  les  récils 
des  envoyés,  les  cris  du  chœur,  des  femmes  cl  des  enfants,  les 
craintes  tie  Laocoon,  l'agitation  de  la  mer  et  les  silllcments  des  rep- 
tiles auraient  fait  pressentir  aux  spectateurs  l'horreur  du  supplice 
qui  va  être  infligé  à  Laocoon,  si  à  cet  instant  on  voyait,  pendant 
quelques  minutes,  surgir  tout  à  coup,  au  fond  du  théâtre,  sur  Vekl.n- 
klcma,  le  groupe  du  Vatican  éclairé  des  rellels  rougeâlres  d'Ilion 
s'écroulant  dans  les  llammcs,  l'ellel  ne  serait  pas  seulement  fantas- 
tique, mais  il  serait  encoie  profondément  Ivniiiqucl 

Nous  ne  voulons  pas  dire  (jue  le  groupe  du  I.,aocoon  a  élé  créé 
uniquement  dans  ce  but,  théâtral,  mais  nous  croyons  avoir  fait  sen- 
tir que  le  choix  de  cet  étrange  sujet,  —  pres(|ue  incompatible  avec 
les  exigences  et  les  lois  de  la  sculpture,  —  a  élé  dû  avant  tout  à 
l'induence  du  Ihcàlre  tragique. 

ADRIE.N    WAUNON. 
(La  suite  prochainement.) 


NOTKS 


LIÎS  raiOOES  (lllliÉTIKNNES  IIEI/ITALIE 


(sriTi;) 


VI 


DES  ÉLÉMENTS  ANTIQUES  DANS  LKS  MOSAÏQUES  ROMAINES 
DU  MOYEN  AGE. 

Dans  un  liavail  publié  ici  même  il  y  a  quelques  années,  au  mois 
(le  novembre  1878  et  au  mois  d'août  d879,  j'ai  entrepris  de  dé- 
montrer que  deux  des  plus  célèbres  mosaïques  de  la  Ville  éternelle, 
les  compositions  absidales  de  Saint-Jean-de-I.atran  et  de  Sainte- 
Marie-Majeure,  reproduisaient  des  motifs  propres  à  l'art  chrétien 
primitif,  et  que  l'on  était  en  droit  de  les  considérer  soit  comme 
des  mosaïques  du  v°  siècle,  restaurées  et  remaniées,  soit  comme  des 
copies  de  mosaïques  remontant  à  cette  époque. 

Depuis,  j'ai  eu  la  joie  de  voir  le  juge  le  plus  autorisé  en  pareille 
matière,  M.  de  Ro.si,  adopter  mon  hypolbèse,  la  fortifier  par  de 
nouveaux  arguments,  enfin  lui  donner  sa  véritable  consécration 
scientifique.  (Ju'il  me  soit  permis,  avant  d'aller  plus  loin,  de  céder  la 
parole  à  mon  illustre  maître,  et  de  reproduire  celles  du  moins  de  ses 
considérations  dans  lesquelles  sa  bienveillance  à  mon  égard  ne  l'a 
pas  emporté  trop  loin  :  «  L'artiste  du  xiii-^  siècle,  dit  M.  de  llossi 

1.  Voyez  la  Revue  archéoh.giqut'^  septembre  187/i,   octobre  et  novembre   1875 
décembre  187G,  ja-jvier  et  septembre  1877,  juin  et    ovcmbre  1878,  août  1879. 


l'kl  nEVUE  AncnÉOLOGiyiR. 

s*e.<t-il  conlt  nié  d'imiler  h  sa  guise,  dans  la  mosaïque  de  Sainle- 
Maiie-.Majenre,  eelle  espùre  de  (N'coration  d'un  lypo  classi(|ue,  ou 
bien  n"a-l-il  pas  plutiM,  non  seuli-nienl  reinoluit  exactement  les 
ornemrnts  de  l'aneiiMine  abside  du  v°  siècle,  (jui  menaçait  ruine, 
mais  nii^me  conservé  dans  la  zone  infêiiciiie  une  partie  de  l'an- 
cienne niosai<iue  ".■'  C'est  la  ijucstion  (jue  >e  pose  M.  Muntz. 
L'exemple  de  ce  que  Jacciues  Tonili  avait  fait  dans  la  basilique  de 
Lalran  lui  parait  donner  un  certain  poids  à  sa  conjecture;  de  plus, 
un  li'inoii,'n;ige  liistoriiiue,  dont  il  lire  parti  fort  à  propos,  piouve 
jusqu'à  l'évidence  la  relation  entre  la  mosaïque  antérieure  et  la  nou- 
velle, ainsi  que  la  probabilité  (lu'une  partie  de  la  première  a  été  res- 
tituée et  insérée  dans  la  seconde.  Dans  la  hrscriiiliu  sdnctuani  Latc- 
raiiensis  rcclcsiœ,  document  (jue  nous  avons  déjà  cité  et  dont  la  date 
doit  se  placer  entre  les  années  1073  et  llo'.),  il  est  dit  à  propos  de 
l'abside  de  Sainte-Marie-M.M(urc,i\  une  époque  (jui  précède  de  deux 
siècles  environ  les  nouveaux  travaux  de  Nicolas  IV  :  «  lliec  absida 
«  nimis  pulcbra  de  musivo  est  cllecta  ;  nam  videntur  a  pluribus  pis- 
«  ces  ibi  in  lloribus  etbestiie  cum  avibus.  »  Donc,  bien  avant  le  pon- 
tifical de  Nicolas  lY,  cette  abside  était  décorée  dune  très  belle  mosai- 
(juc,  (jui  était  remaniuablc  à  cause  de  ses  poissons,  de  ses  oiseaux  et 
autres  animaux  placés  a  in  iloribus  »,  c'esl-à-dire  au  milieu  d'une 
décoration  de  fleurs  ou  de  volutes  fleuries  de  vignes.  Aucune  des 
nombreuses  mosaï(iues  (jui  nous  restent  encore  de  Pascal  I"  ne  pré- 
sente ce  genre  de  composition;  il  faut  remontera  l'âge  des  origines 
de  la  basilique  et  à  Siècle  lil  [432-l'i<))  pour  trouver  un  exemple 
analogue  à  celui  dont  l'écrivain  du  xi'  ou  du  xii"  siècle  nous  a  laissé 
la  description.  Nous  souscrivons  donc  volontiers  ii  l'ingénieuse  opi- 
nion de  Jil.Miintz  et  aux  raisons  (juil  a  mises  en  avant  pour  trouver 
que  dans  l'abside  du  xiii'  siècle  de  Sainte-Mai  ie-Majeure  il  existe 
une  partie  ou  au  moins  une  réminiscence  et  une  imitation  des 
ornements  de  celle  du  V  '.  » 

Encouragé  par  cette  baute  approbation,  je  viens  aujourd'hui 
compléter  ma  démonstration,  c'esl-à-dire,  rechercher  si  le  système 
(juej'ai  préconisé  ne  peut  pas  s'appliquer  h  quelques  autres  pein- 
tures en  mosaïque,  jusiju'ici  attnbuée>  au  moyen  Age. 

1.  iliaaici  criitiani.  Mosaïque  de  l'aliside  de  Saintc-Maric-Majourc. 


NOTES  suii  Li;s  .uosAkiUKS  ciinih'iENNES  i)i:  i.'iiM.ii..        li;i 

1 

Unedc^mosai(|UL'S  roiiiaiiies  les  plus  célèbres  est  celle  dont  (loîis- 
laiilin  lUoriiiT  r.ilisiih;  de  la  hasilique  da  Vatican.  Le  Librr  poiiti- 
(Icalis,  noire  supivine  ressource  pour  l'étude  de  celle  épo(|ue,  m- 
nienlionne  pas,  il  est  vrai,  ce  genre  de  décoration;  il  se  borne  à  dire  : 
«Coiistanlinus  Aug.  fecil  basilicani  bcato  i*elro  apnslolo  ex  i-o;,'atu 
Silveslri  episcopi  in  teniplo  Ajjollini.s...  in  ijuo  loco  corpus  cju.sdem 
aposloli  mirilice  collocavit  '  ».  Mii'is  Vltincrnire  d'Einsiedrlu  déjà 
vient  comi)ler  celte  lacune  en  nous  apprenant  ([ue  l'arc  de  la  ba- 
siliiiue  renfennait  une  inscription  conçue  comme  suit,  insiription 
que  nous  montreron.s  dans  la  suite  avoir  été  tracée  en  •<  ojtus  ver- 
miculalum  »  : 

Qnod  duce  U  mnndus  surrexit  in  aslra  triainphans, 
Ilnur  Coustautiniis  riclor  tihi  condidit  dulam-. 

Trois  siècles  plus  tard  la  inosaniue  avait  déj;\  besoin  de  réparations, 
preuve  de  son  anlii|uilé.  «Severinus  renovavil  absidamB.  Felriapos- 
toli  ex  musivo,  (juod  dirutum  eral  ■^.  »»  Ciampiiii  prétend  que  ce 
travail  eut  lieu  en  038  \  mais  cette  date  est  fausse,  Séverin  n'ayant  été 
proclamé  pape  qu'en  (J40.  Bien  d'autres  épreuves  attendaient  cette 
composilion  :  au  -xiii"  siècle  Innocent  III  (1108-1216)  en  renouvela 
une  partie  et  y  introduisit  son  portrait;  au  commencement  du 
xvi"  siècle  Jules  II  fit  détruire  l'arc  avec  rinscri[>tion  Qnod  dncc; 


1.  Vita  S.  Silvestri,  §  i/j.  M.  Valentini  sait  l'année,  le  jour  et  presque  l'heure  de 
la  consécration  de  l'éditici',  :  «  compiuta  clic  fù  l'edificazione  di  questa  novclla  Basi- 
lica  venue  soleniiomentc  consecrata  da  S.  Silvestro  il  18  novembre  324.  »  Lapulriar- 
cale  liasilica  V"ticana  {Rome,  18i5-1855),  t.  I,  p.  G. 

2.  Urlichs,  Codex  urbù  Roi/kl-  toporjiaphicus  (Wurzbourg,  1871),  p.  GO.  Muratori 
{Inscriptiones,  p.  1853)  écrit  «  iriumpluis  »  et  croit  que  l'inscription  est  postérieure 
de  quelques  siècles  :\  Constantin.  Voy.  aussi  .Mai,  Vet.  scnptorum  nova  collectio, 
t.  V,  p.  105,  note.  Rapprocher  cette  inscription  de  celle  que  Didier,  abbé  du  Mont- 
Cassio,  fit  placer  dans  son  mouastcre,  au  xi«  siècle  : 

Vt  duce  te  patriit  justis potuUur  (sic)  ulejita, 
Uinc  Desiderius  pater  hanc  tibi  ojudidit  uitlatu. 

3.  Lib.  Pont.,  Vita  Severini,  §V. 
U-  De  siicris  œdificiis,  p.  42. 

5.  AadrcaFulvio,  qui  vivait  sous  Julos  II  et  Léon  X,  nous  dit  que  «logcbalur  naper 


IVi  HKVLK    AIlCIIKOLOdlOt'K. 

en  l."t'.>J,  iMilin.  r.U^iucnl  VIII  (lomia  ritiiiie  d'ahallrc  ce  qui  restait 
iiiroro  lie  la  in<><aii|iu',  fVsl-;i-ilire  la  coinjtusilion  incrustée  dans  la 
coiu'ha.    IM.  xi\). 

Si  la  mosaïque  absiilale  de  Saml-l'u'irr  n'cxisli'  plus,  nous  en 
possi'dons  du  moins  plusieurs  copies  anciennes,  dont  lune,  exécutée 
par  ordre  du  pape,  et  cerliliée  conforme  par  un  prolonolaire 
apostolique, est  conservée  dans  les  archives  du  chapitre  de  Sainl- 
Pierrc,  où  il  m'a  été  donné  de  l'examiner  '.  On  y  aiierçoil  sur  le  sol, 
au-dessous  des  ti},Mires  principale^;,  plusieurs  scènes  de  dimensions 
cxifruës,eldonlladispositin!i.  non  moins(|ue  le  style,  rappelle  l'anli- 
(piilé  classi(|ue  :  citons  paiini  elles  des  lulclierons  placés  prés  d'un 
édicule  et  fiappanl  un  arhre  a  coups  de  hache,  tandis  qu'un  lion  s'ap- 
proche (le  luii  d'eux.  La  signilication  de  ces  scènes  est  assczénigma- 
ti(|ue  (Mirr  Harluerde  Montaulty  voit  la  personnification  des  saisonsi -; 
mais  ce  point  importe  peu  à  la  solution  ilu  prohléme  (jue  nous 
cherchons  à  résoudre;  ce  qu'il  est  essentiel  de  constater,  c'est  l'éié- 
jrance,  lei-aractére  éminemment  décoratif  de  ces  petites  composi- 
tions :  elles olïicnt  iiiliiiimeiit  plus  d'anaio^'iesavec  les  peintures  de 
l'empire  romain  qu'avec  celles  du  moyen  ûge. 

La  ressemblance  de  la  scène  principale,  le  Christ  assis  entre 
saint  Pierre  et  saint  l'aul,  avec  les  représentations  connues  sous  le 
nom  de  Don  du  (Unist  ou  Christ  triomphant,  si  fré(juenles  dans  l'art 
chrélien  piimilif,  ne  peut  (jue  coiioboier  une  telle  manière  de  voir. 
Signalons  aussi  les  doux  ceifs  s'approchant  des  lleuves  du  paradis 
{Gion,  l'Iiison,  Tiyris,  Euphratcs)  ;  ils  rappellent  de  la  manière  la 
plus  frappante  les  mosaiijues  absidalesdu  Lalran  elde  Sainte-Marie- 
iMajeiire. 

Mais  (juc  devient  noire  conjecture  en  présence  de  l'inscription 


iii  abside  quu*  iiunc  diruta  est  dibtichùii  ex  inusivo  paucis  n<>tum  :  i/whI  duce  tf....  » 
Auti'/uU'itei  i'r/jis{  Home,  1527^,  fol.  xxxv. 

1.  Deux  autres  copies  anciennes  se  trouvent  à  la  bibliolliùquc  du  Vatican,  dajis 
le  recueil  de  dessins  de  Ciacconio,  XXXIV,  50,  fui.  l.'>8;  deux  &  la  bibliothèque 
Uarberini  (XLIX,  n»  19,  fol.  iO;-,  une  cinquième  &  l'Anibiosienni;  'F.  iiif.  n*  227, 
fol.  3;;  unesixitme  enfin  à  notre  Diblioiliéquc  naiionale  fnouNeau  fonds  italien,  mo- 
numents de  la  primitivi- f^pliso,  u*  0,  t.  II;  larg.  0">,liS,  liaut.  (i"',39/.  Ji;  dois  la 
connaissance  de  cette  dernière  h  notre  Oniinont  arclièolo;:ue  M.  I.o  Bl.mt,  que  je  suis 
heureux  de  pouvoir  remercier  ici  de  son  obligcancr.  (lianipini  a  publié  une  gravure 
assez  exacte  de  la  copie  conservée  aux  archives  di-  Saint  Pierre  ;  il  a  notamment 
rctipect»;  la  forme  dt-s  Inscriptions  qui  ont  ttii  alién'cs  par  Torrigio  (Sdcrc  ijrvtte  \'u- 
tirani;,  é'i.  de  M/S'J,  p.  03  et  suiv.)  it  pur  h's  Hoilandistcs  {Artn  xiiwlDiunt,  juin, 
t.  Vil,  p.  135,. 

2,  Lr$  ioul'it  aim  et  ic  lirtor  de  Sauit-I'i''rrr  (Umnc,  18(30),  p.  77. 


NUTKS  suii  LKs  MosAigUKs  chiikhknm;.";  di:  i.'iim.ii:.         |'i5 

léonine  siiiv.iiilc,  (tnrri!  .iii-dessoiis   de  l,i    mosai  |ii<j,    lucuvc  bien 
évulenlc  d'iiin'  oiit^'iiit;  iiii'dirvalc  : 

Sitiniiin  Pelri  si-des  est  hivc  sacra  jninciiiis  œdes, 
Malrr  cuiiclantin  décor  et  dmis  ircirsitiritm. 
Ih'iotiis  (]liristn  qui  Inniilo  sfiiil  m  isio 
Flores  liitnti^  enriiil  /)  mliisijiti'  snhilis. 

(Jiic  devient- die  siirhmi  (Il  pi  rsciicc  du  poi  Irait  d  liinocciit  III, 
(jiii  (Ml  so  faisant  rciirésciilor  dans  la  haiidi;  iiitériciiio  de  la  composi- 
li(tn.  (Ml  r('L,Mrd  de  VEcrlesia  roniaiia,  S(3mble  avoii-  rcvr.'iidii|ii(''  [)Our 
lui  riioiiiieur  d'avoir  créi':'  cellt;  dé'cor.ilion  'V 

Nous  r(''poiidrons  ([u'ici,  coiiiin;'  dans  tant  d'autres  nioiiunienls 
romains,  lepapenni  a  lait  pioe(''deià  la  reslauialion  a  pu  s"alli  iijuer 
DUS  les  droits  d'un  V('iital)le  rondaieiir:  rii-n  n'fUait  plus  facile  que 
d'inlioduiro  le  portrait  d'Innocent  III  dans  un  ouvraifo  datant  du 
IV'  ou  du  V  si(\'lé  ;  on  ne  proc(;da  pas  auliement  jiour  intercaler  les 
portraits  de  saint  François  d'Assise  et  de  saint  Anloinc  de  l'adoue 
dans  les  mosaïi|U(S  du  Latran  et  de  Sainte  Marie-.Majeure. 

Celle  opinion,  liàlons-nou.>  de  l'ajouter,  ne  date  pas  d'aujourd'hui. 
Dès  le  sii'cle  dernier,  les  bollandisles  ont  essayé  de  prouver,  en  se 
fondant  sur  dos  arguments  d'ailleuis  peu  solides,  que  la  mosaïijue 
absidale  de  Saint-Pierie  était  la  copie  d'un  original  détruit,  original 
remontant  au  régne  de  Constantin-. 
Le  témoignage  des  auteurs  du  xvi"  siècle,  (]ui  ont  encore  vu  la  mo- 

1.  Le  porirait  d'Innocent  III  se  irouve  aujourd'hui,  en  compagnie  de  celui  de  Gré- 
goire IX,  provenant  de  l'ancienne  façade  du  Vatican,  dans  la  chapelle  dd  la  villa 
Catena,  près  de  l'oli.  llcumont,  Geschichle  der  Slndt  Hoin,  t.  III,  irc  partie, 
p.  321. 

Un  autre  fragment,  d.'nué  de  toute  authenticité  et  ayant  pi  rdu  tout  caractère, 
se  trouve  dans  les  crjpios  du  Vatican,  sous  le  n"  199.  On  lit  sur  la  plaque  de  mir- 
bre  fixile  ;\  coté  de  lui  ce  ccrtilicat  d'origine  :  »  Pauli  apostoli  niusiva  imago  erit  in 
apsida  Innocentii  papn;  111,  antealtare  S.  Pétri,  hic  M.  D.  G.  XXXI  affixa  ->.  Ce  frag- 
ment, mesurant  0"'.so  do  largo  sur  On'.Oj  de  haut,  représente  saint  Paul;  la  tête  et 
la  poitrine  seules  ont  éciiappti  au\  coups  îles  dtmolisseurs,  ei  encon;  la  première  a-t- 
clle  été  si  mal  restaurée  qu'on  la  prendrait  plutôt  pour  le  portrait  de  saint  Pierre  que 
pour  celui  de  saint  Paul. 

2.  «  ...diceniium  picturam  musivam  Innocentii  III,  in  apside  Vaticana,  quantum 
ad  pra'cipuas  ejus  figuras  attiiict,  verosimiliter  repra-sentare  eadem  quae  reprœsen- 
tabat  picturaibi  n-novata  a  Severino  papa,  et  primum  facta  (secundum  indicatam 
opiuioMLin  nostram)  a  S.  Silvestro...  conjici  non  temere  potest  apsidis  ab  Innoccriiio 
lil  restaurata'  picturam  Innocentii  setate  multo  antiquiorem  esse.  »  Acta,  juin,  t.  VU. 
p.  135,   137. 

XLIV  —   1(1 


14G  HEVIE   AHCHKOLOGKJLK. 

sai^iuotMi  place,  iloniiesinpiiliiToinenl  do  poids  nu  sysliMne  soulonu 
par  les  ('dil«Miis  dos  Acin  sanctorum.  Koouloiis  d'ahord  Tiborio  Alfa- 
rano,  l'un  di-s  liislorii'iis  les  plus  auloiiM-s  de  la  ba-nlhiue  :  «(Jucï-la 
ahsida  overo  tribuna  »,  dil-il,  a  ù  la  inedohiiiia  i|uale  (ii  Talla  rare  da 
Couslanliiii)  niiper;.tore,  lulla  oiiiat;i  de  iiiosivo,  cl  allrc  figure  et 
segni  tlie  >ino  a  ijueslo  di  se  rilrovaiiD,  (piali  (sic)  ^lU^aico,  celc- 
brando  uu  giorno  papa  CIcnienle  VII  m  d»  llo  allare,  casc«'i  un  pezzo 
per  il  che  volen  lolo  far  ruinare  tulu»,  perc'tiiisii;li(t  di  cerlo  excellen- 
lis>iiiio  luaesliu  (il  discepulu  del  (|ual('  me  l'Iia  rcferilo  (|iie>l<»  élu; 
lia  lavoralo  in  ijuesf  opéra)  fu  de  lai  modo  iiicliio  lalo  detlo  iiaisaico 
ihd  muro  did  alisid.i  cou  cerle  slelle  de  melallo  inaiiiale  pusle  per 
loiza  de  Irapani  eonliUo  pni  a  mo  io.le  liivello,  elic  in  ii  più  fu  peri- 
coloclie  d°  musaico  cascasse',  elie  referiva  che  era  discoslu  dal 
niuro  in  aleuiii  luoghi  più  d'un  paliiio,  (|uali  sielle  lui^i  si  vegguno 
in  segno  el  leslimomo  de  (jucbla  eosa  et  ne  leneniu  una  flie  é  ca.s- 
cata  quesli  giorni  pas.sali.» 

Un  eontempuioiii  d'AU'araiio,  J.iciiues  (Jrimaldi,  socciipe  plus 
spécialement  de  la  mosai(iue  de  l'arc  Iriumplial,  c'esl-à-dire  de  l'are 
précédant  l'abside  proprement  dite-;  il  nous  dit  (ju'elle  élail  urnée 
d'une  inscriilion  rappelant  la  i)art  (jue  Constanlin  avait  eue  à  sa 
fondation:  »  Versus  luusivcis  litlcris  in  arcu  m:ijure  veleiis  Valicaice 
basiliCiX'  in  capite  coluiiiiiaïuiii  iiiediu3  navis  anle  araiu  iiiaxim  un  : 

{Juud  duce  le  inundus  suri  eut  m  aslia  (i  lumiiliuns 
liane  Conslaidinus  victor  tiOi  cundidit  (luiuin. 

Hic  arcus  periit  sub  Julio  2",  in  demolllione  pu>Unoris  partis  ba- 
silicy.  Apsidie  conjuiiclus  paries  ad  seplentriones  (démentis  VIII 
pontllicatu  mullis  liistoriis  b.  Pelri  musivcis,,  sed  peiie  VLlustaleel 


t.  L/Q  documtul  inédit  lits  Arcliivcs  de  la  l'abriquo  do  Saiiit-l'icrrc  nous  apprend 
que  le  nialtrc  ciiargé  de  ce  travail  no  fut  autre  que  le  ctilèbru  Jean  d'Udiue  :  1531, 
15  avril,  u  A  maestro  Giovanni  da  Ldinu  per  acronciatura  del  mu-aico  di  San  Pictro 
duc.  :!5.  Il  7  juin.  «duc.  10  di  caincra  a  M""  Gio.  d.»  L'dine,  per  più  stelle  di 
brouzo  per  il  musaiciio.  » 

•j.  .Sur  la  gravure  de  l'ietro  Suuli  Hartoii  {Tnbunadi  musuico  Jel/acfiicsn  nntic/tii 
di  S.  Ptelro  in  Vatican»^  ilcrntta  du  Carlo  l'ulr<i/io,  discjuald  el  intuylinla  iln 
Pielro  Saiiti  linrtuli),  il  s'agit  non  de  l'arc  triomphal,  mai»  de  l'arc  de  la  tribune, 
c'c^t-.'i  dire  de  l'arc  (|ui  précùde  iimiiéilialemciil  la  cuiicliu  de  l'absid'-.  Nous  devons 
faire  observer  que  les  huit  ligures  tracées  sur  cet  arc,  les  apolres  uccompugné»  de 
brebis,  pourraient  bien  être  uu  produit  de  la  trop  (écunde  imagination  de  l'ar- 
tiite. 


NOTRs  sim  m;s  mosaiouks  ciihkiiknm.s  di:  i.'hauk,        J't7 

imbro  ca-calis  onialiis  erat.  Conslatilini  tcmpoio  hos  Un  conscrijilos 
versus  afllniial  Maiilieus  Vi'ggius  sic.  (Juoriim  caracleros  longo 
vt'Iusti  |i('ii('(|U(!  (Jixciiin  dccrepili  nulluin  cliain  aliu  I  (juain  Cons- 
taiiliiii  liiii|iiis,  (luu  il)i  Cdiiscripli  siuil  iii.iiiircyic  argmie  vidi-iiliir. 
Smit  et  iii  alio  arcii  absidiL',  super  allare  niajus,  alko  liller.'nqua;  ne- 
gligcnlius  lialiil;i!  niajori  ex  parte  corrucnint,  sed  ex  paucis  caruiii 
qua;  vix  adliiir,  Icgi  possuiil  depreliondunlur,  licel  non  intègre, 
verha  h.i'c  : 

Conslanliniis  rxpintd  liuslili 
Incnrsio)!!'  '.  » 

Oiiantà  Oiiofiio  l'aiiviiiio,  apirs  avoir  rovcndiqué  une  partie  du  la 
décoration  de  l'abside  pour  le  règne  de  Constantin,  il  ajoiilc.  par 
une  exagération  évidente,  i\uc  la  mosaïque  de  la  cnnrlia,  celle-là 
même  dont  nous  nous  occupons,  a  été  faite  entièrement  par  Inno- 
cent III  :  ((  Alisidam  liasilic;i'...  musiveis  figuris  primus  ornavit 
Constantinus,  quarum  pauio  inlra,  ex  utroquc  parietum  latere,  ali- 
quol  vesligia  exlanl,  ut  ex  liis  versibus,  qui  in  ca  erant,  manifeslum 
eral  : 

Quod  duce  le  mundus  surrexit  in  astra  triuwphnm 
Hanc  Constantinus  victor  tibi  condidil  anlani. 

Musiveas  easdem  imagines  temporis  injuria  exolescentes  renova- 
vil  Severinus  papa,  ut  tradit  bibliolhccarius,  quas  dirutas  omnino, 
ut  nuncaspicimus,  refccit  Innocentius  III.  »  Ailleurs  il  dit,  en  par- 
lant de  l'inscription:  «  qui  cliaracleres  vetusiissimi  et  pia'gnmdes, 
etiam  exolescentes,  nuUum  aliud  quam  Constantiui  lempus,  quo 
ibi  scripti  sunt,  arguere  vidcbantur-.  » 


En  résumé,  les  témoignages  si  formels  sur  la  présence,  dans  la 
mosaïque  absidale  de  Saint-Pierre,  de  fragments  remontant  à  l'ère 
constantinicnne,  el,  d'autre  part,  le  caractère  même  de  celte  mosaï- 
que, avec  ses  réminiscences  antiques  si  frappantes,  nous  autorisent 
à  croire  que  nous  avons  affaire,  ici,  coFnme  au  I.atran  et  à  Sainte- 


1.  Bibl.  Barberini,  XWIV,  50,  fol.  IC'i,  v. 

2.  Bibl.  nation.,  fonds  latin,  n"  3179,  liv.  III,  cli.  !i,  fol.  211,  22;),  et  Spici/egium 
romamtm  de  Mai,  t.  MF,  y.  230.  t.  IX,  p.  225. 


1  iS  RKVUK   AnCHKOLOC.lMUK. 

Mnrit^-MnjiMiic,  snii  à  la  mosalfiiie  orijîinalo.  rcslauivc  cl  rciiinnirc 
soil  ù  uiif  copie,  Itgi'renuMil  ir.oilifiée,  do  la  cdinposilion  originale, 


il 

Plus  enrore  quo  la  innsaïiiie  alisidale  dt»  Saint-Pienv,  relie  de 
Sainl-Clëmenl  oITre  des  motifs  propres  à  Tari  rlirélien  des  premiers 
siècles;  la  diin-renre  d'inspiralion  el  de  style  csl  siirloul  seiisihie 
si  nous  comparons  la  mosaïipie  de  la  coiicliaà  cclli'dc  l'arc  de  la  lii- 
l'unc.  ici,  il  faut  tout  d'aliord  le  dcclarer,  nous  avons  affaire  à  uni' 
œuvre  du  xir  on  du  xi:i'  siècle.  On  sait,  en  elTcl,  que  la  liasiliijue 
actuelle  de  Sainl-llh'menl  a  t'ic  (■Ifvée  au  xii"  sirclc  seulement,  sur 
les  ruines  d'une  ha-iliiiuc  jdiis  ancienne,  retrouvée  et  ilégagée  il  y  a 
une  vingtaine  (rannées.  Mais  si  celle  mosai  |ue  est  relativement 
moderne, (}uanl  à  la  date  de  son  exécution,  toulnous  autorise  à  aflir- 
mer  que,  quant  à  sa  composition,  elle  se  liorne  à  reproduire,  avec 
([uelcjucs  légères  variantes,  une  mosaii|ue  beaucoup  pins  ancienne  ; 
selon  toute  vraiseuiblance,  celle  (]ui  ornait  la  basiliijue  inférieure. 
M.  de  Rossi  nous  apprend  que  l'on  pouvait  pénétrer  dans  cette  der- 
nière au  XI'  siècle  enci  re,  en  IO*i'.)  '  ;  ne  sommes-nous  pas  en  droit 
de  supposer  (lue  l'on  en  a  profité  pour  copier  une  œuvre  à  la(|uelle 
s'attacliait  la  vénération  universelle?  Peut-èlre  même  s'est-on  servi 
des  cubes  d'émail  île  celle  mosaïque  primitive  pour  exécuter  la 
mosaïque  nouvelle,  de  même  ijue  l'on  a  employé  pour  le  cliancel  de 
la  basirKjuc  nouvelle  les  marbres  de  la  basilique  souterraine,  ('es 
sortes  d'adaptations  ne  sont  pas  rares  au  mo\en  âge.  nous  le  savons 
par  l'exemple  dedharUinagne  (jui  mil  en  coupe  réglée  les  mosaitiues 
de  Ravenne. 

Ce  (|ui  frappe  avant  tout  dans  la  composition  absidale  de  Saint- 
Clérnerit'IM.wiii),  c'est  sa  ressemblance  avec  la  mosaiiiue  du  portique 
(Je  Sainl-Venance,  situé  àipicbiues  pas  de  là  (baptistère  deConstanliii. 
au  Latran).  Dans  l'une  comme  dans  l'autre,  d'immenses  iineeaux 
couvrent  le  cbamp  de  l'altsidf!  et  forment  le  iiKilif  principal  de  la 
décoration.  H  e-t  vrai  tpie  ri-ix  du  puiliqtie  de  Saint-Venance  l'em- 
portent singiiliériMiient  par  leur  légèreté,  leur  élégance  ;  mais  cette 
sujiéritirilé  n'a  rien  (pii  doive  nous  élonnei';  les  juges  les  plus  auto- 
risés sont  aujourd'iiui  d'accord  pour  attribuer  la  décoration  du  por- 
li(iue  à  11  lin  du  iv'ou  au  coiiimencemenl  du  v  siècle.  c'es!-à-dire. 
h  une  époque  où   la    Iradilion   classique  élail  encore  dans  toute  sa 

1.    yniOf   .,,(•■>;,■    'l-nle  dellll   liflSlll-n   .1.   <.,.,  Il,n„,.l, 


NOÏhS    ;-L'H    l.l>    MO'^Mol'KS   CIIIIKIIKNNKS    KK    l.'l  r  \  f.I  K.  W'.i 

foi'c'O.  I/.ulisli'  lin  ijKiyrii  ;li,'('  ;iiii|ii(l  nous  «levons  la  niosaïiinc  de 
Sainl-dlt'nicnl  ne  pouvait  (''Vidcmnii-nt  s'élovcr  à  la  iiaulcnr  d'un  Ici 
nu)d(''l(\  nit"^inc  en  s'asIreij^'Mant  à  une  rcinodurlion  Icxlujdjc 

Si  nous  cxauiinnns  niainlcnanl  l'iMnpIoi  des  rinceaux  comme 
molif  de  di-i'oralion,  nous  trouvons  (ju'il  conslilU(3  un  des  Iralls 
(lislinclifs  d(;  la  peinture  clirélicnin;  primitive.  A  Home,  des  rin- 
ceaux gigantosiiues  formaient  ou  forment  aujourd'liui  emore  la  hase 
de  la  décoration  île  Sainte-(]onstance  cl  de  Saintc-Maric-Majeure; 
h  Napics,  nous  les  trouvons  dans  le  haptistère,  monument  du 
v"  siècle;  à  Capoue,  dans  la  chapelle  de  San  Prisco;  à  Havenne, 
dans  le  mausolée  de  l'iacidie.  ilans  le  li  iplistére  des  orthodoxes  et 
dans  la  hasilique  de  Saint-Vital. 

Revenons  aux  nnaloj^ies  entre  la  mosaïque  de  Saint-Clément  et 
celle  du  portique  de  Sninl-Venance.  Ainsi  (lue  M.  de  Rossi  l'a  fait 
remarquer,  les  pâlies,  en  co^tiiuK^  antique  (penula;  jamhes  nues), 
qui,  à  Sainl-Clémenl.  se  trouvent  dans  le  bas  de  la  composition,  rap- 
pellent de  tous  points  ceux  que  l'on  voyait  autrefois  dans  la  mosaï(iue 
de  Sainl-Venance  :  la  rejiroduction  d'un  modèle  plus  ancien  est 
évidente,  car  ce  costume  cessa  d'être  porté  à  partir  du  triomphe  des 
harharcs. 

Si  nous  étendons  notre  examen  à  d'autres  monuments  des  cinq  ou 
six  luiiniers  siècles,  les  points  de  repère  ne  sont  \k\s  moins  caracté- 
ristiques. Les  cerfs  se  désaltérant  aux  fleuves  ilu  piradisse  rencon- 
trent à  Saint-Jcan-de-Lalran,  à  Sainte-Marie-Majeure,  dans  le  mau- 
solée de  Placidie  et  dans  diverses  autres  mosaïques  contemporaines. 
La  profusion  des  oiseaux  est  également  une  preuve  de  la  haute  anti- 
quité de  la  composition  traduite  sur  la  conclia  de  Saint-Clément  : 
elle  rappelle  la  décoration  des  deux  chapelles  du  baptistère  de 
Constantin,  celle  .!u  baptistère  de  Naples,de  Saint-Vital  de  Ravenne, 
do  Sainte-Mnrie-Majeure.  En  ce  qui  concerne  les  douze  colombes 
représentées  sur  le  crucitîx,  M.  de  Rossi  les  a  rapprochées  avec 
raison  des  figures  similaires  de  la  mosaïque  de  Noie,  décrite  par  saint 
Paulin,  et  de  celles  qui  sont  sculptées  sur  les  sarcophages  du  iv"  et 
du  ve  siècle  '. 

Les  génies  nus  placés  entre  les  rinceaux  méritent  surtout  de 
fixer  l'attention.  Par  la  liberté  de  leurs  mouvements  et  la  variété  de 
leurs  attitudes,  ils  rappellent  de  la  manière  la  plus  frappante  les 
modèles  du  temps  de  Constantin;  je  crois  même  pouvoir  aller  plus 
loin,  et  les  rattacher,  rapprochement  qui  n'a  pas  été  fait  jusqu'ici, 

1.  Musitci  a-istioni:   abside  iJella  Baulica  di  Suu  Clcmcutc,  p.  3. 


J50  REVUR   AnCHKOLOilKU  K. 

nux  I^ros  de  la  voillc  annulairo  de  Sniiit<>  (:)nslancc:  rin<;piralion 
est  idiMiliciue,  (luoiquf  lis  liguies  de  Suiil-dléincnl  soiciil  loin 
davoir  la  grâce  (lui  caraeléiis"'  li-urs  alnres  du  iv"  sièeje,«'l  nuoitiiie 
Ton  eonslale  une  eerlainc  dilTérenec  dans  les  fails  ou  gestes  de  ces 
pcrsonn  i^es  si  rniinciiiinenl  païens  :  à  Sainle-C.oiistance,  ils  planent 
en  t|U(li|ue  sorte  dans  les  air>;  ;\  Sainl-Oli'nit-nl,  l'un  joue  de  la 
noie,  un  autre  numlre  une  corne  d'abondance,  un  troisième  en- 
fourchi-  un  dauphin  (ceilernier  motif,  on  se  le  rappelle,  se  rencontre 
dans  les  niosaïiiues  du  Latran  el  de  S.iiiite-Marie-Mijeure,  (|Ui  sem- 
blent l'avoir  clles-niômes  emprunté  ;i  I.i  décoraiion  de  la  coupole  de 
Sainte-Constance). 

11  est  cependant  dans  la  mosaïque  de  Sainl-fdément,  comme  dans 
colles  du  Latran,  de  Sainte-.Marie-Majeurc,  de  Saint- Pierre,  un  cer- 
tain nombre  de  motifs  (jue  l'artiste  du  xii"  siècle  n"a  p.is  pu  emprun- 
ter à  ses  prédécesseurs,  pour  la  raison  ijuc  ceux-ci  les  ignoraient, 
cl  qu'il  faut  porter  à  l'actif  du  moyen  âge  proprement  dit.  De  ce 
nombre  i^onl  les  docteurs  de  l'Kdise,  placés  dans  les  intervalles  des 
rinceaux,  el  la  Crucitixion,  scène  si  rarement  représentée  dans  les 
sanctuaires  des  douze  premiers  siècles. 

Notons  encore  lesjinalogies  entre  rorncracnlalion  du  velarium  de 
Saint-Clément  et  celle  des  velaria  de  Sainte-Marie  du  Transtévère  et 
de  Sainte-Marie-Nouvclle  (Santa  Francesca  Uomanai  :  agneaux  de- 
bout (ce  motif  se  trouve  également  dans  la  mosaï(|ue  du  porliiiue  de 
Saint-Venance),  main  tenant  la  couronne,  etc.  Les  oiseaux  placés 
dans  des  cages,  à  l'extrénuté  gauche  inférieure  de  la  mos.iïque, 
méritent  aussi  une  mention  spéciale  :  les  mosaïstes  de  Saint-Clément 
s'y  sont  rencontrés  avec  ceux  des  deux  basiliques  que  nous  venons 
lie  citer. 

.\dnu'tlra-t-on.  après  ce  qui  vient  d'èlre  dil,  (jue  les  auleurs  de  la 
mosaïque  de  Sainl-Clément,  c.cf.  arlislt  s  <|ui  ont  fait  preuve  d'une  si 
grande  ignorance  dans  la  décoraiion  de  l'arc  de  la  tribune,  se  soient 
ingéniés,  dans  la  décoration  de  la  concha,  à  recben  lur  partout, 
dans  le  portique  de  Saint-Venance,  à  Saint-Jean-de-Latran,  à  Sainte- 
Constance,  sur  les  sarcophages,  etc.,  etc.,  les  symboles  les  plus  ca- 
ractéristi(iues,  les  motifs  les  plus  |)iltoresques  de  la  primitive  école 
chrétienne;'  ou  bien  ne  préférera-t-on  pas  tout  simplement  considé- 
rer leur  travail  comuii-  la  reproduction,  légéreuient  nimliliée.  d'un 
original  existant  au  même  endroit,  dans  la  basili(jue  inférieure? 
Telb:  est  la  <|uestion  (jue  nous  soumettons  au  Ici  leur,  pleins  de  con- 
fiance dans  le  résultat  de  ses  méditations. 


NOTKS   suit    LKS    .MOSAKjUK.S   (JIHLTIENNI.S    DK    l/lTALIK.  181 


III 

l,rs  (|ii;ilr.'  composilions  rpie  nous  venons  d'cvaininor  si;  ralta- 
clicnl  IduIcs  à  (les  6(li(ic('s  niipartcnantà  la  promirrc  jn'Tiode  di;  l'art 
cliirliiM)  :  (lo  là  CGlU;  pn'ilomin.anrc  d'c'iï'inonls  nntiqups,  qui  est 
bien  failc  pour  surprondrodans  dos  ouvrai,'fisal(iihu('ssi  lon;,'tiMiips, 
poui- l'invention  aussi  bien  (pie  pour  l'exùculion,  au  xii'  et  au 
Mii'siècle.  Si  la  ville  de  Honu'  avait  clé  à  cette  rpoque  le  centre 
d'un  vérilalilc  mouvement  de  renaissance,  si  ses  vaillants  u  mai-mo- 
rarii  d,  les  iJaiiuci-io,  li-s  Paolo,  les  Vassaletus,  les  Cosmali,  suivis 
en  cela  par  Jac(|U('s  Toiiiii,  s'étaient  {iroposé  l'imitation  rigoureuse 
de  l'antiipie,  il  serait  tout  naturel  que  nous  retrouvassions  les  mômes 
tendances  dans  celles  des  compositions  que  nous  savons  d'une  ma- 
nière pertinente  avoir  pris  naissance  pendant  le  xii"  et  le  xiii"  siè- 
cle. Or,  nous  avons  beau  analyser  les  mosaïques  de  Sainte-Marie  in 
Trasirrerc  et  de  Sainte-Franroise-Romaine,  appartenant  toutes  deux 
au  pontificat  d'Innocent  II  ili;U)-l  1  4;'>),  celle  de  Saint-Paul  hors  les 
murs,  exècutècsousllonoriusl  II  (  1211)- 12-27)Jes  fresques  de  Calixte  II 
(Il  19-1  l-^'i)  dans  l'ancien  palais  du  Latran  ',  les  peintures  ou  mosaï- 
ques contemporaines  ornant  les  autres  sanctuaires  ou  palais  de  Rome, 
nulle  part  nous  ne  trouvons  la  moindre  réminiscence  de  cette  anti 
quité  (jui  comptait  cependant,  à  ce  moment  encore,  tant  de  chefs- 
d'œuvre  sur  les  bords  du  Tibre. 


En  résume,  le  mouvement  de  renaissance  que  l'on  a  cru  découvrir 
à  Rome  pendant  le  moyen  âge  s'est  borné,  pour  la  iicinture  en  mo- 
saïi|ue,  à  la  restauration  de  quelques  compositions  dans  les  données 
fournies  par  les  fragments  encore  existants;  tout  au  plus  les  mo- 
saïstes ont-ils  poussé  l'ambition  jusqu'à  copier  un  monument  qui 
allait  disparaître  et  dont  il  importait  de  conserver  le  souvenir  à  la 
piété  des  fidèles.  La  puissance  créatrice,  la  force  d'évocation  leur 
ont  fait  défaut;  ils  n'ont  pas  su,  comme  leurs  successeurs  du  xv*  et 
du  xvi'-  siècle,  développer  et  interprèler  les  idées  du  monde  an- 
tique, les  faire  icvivre,  créer  à  nouveau.  Mais  il  n'en  faut  pas 
moins  constater  l'esprit  critique  dont  ils  ont  fait  preuve  en  copiant, 


1.  Voy.  do  Rossi,  Esatnc  storico  ed  archeologico  dell'  imagine  di  Vrbano  II 
Pnpa  e  dclle  ultre  antic/tc  pitiure  nelV  oratorio  diS,  Nicolo  entra  il  paluzzo  La- 
teranen.ie.  Rome,  1881. 


155  nF.Vl'F,    AnCHÉOLOr.lQUK. 

ayec  une  (ItltMilt^  relative,  des  fliofs-ii'iruvr.'  exécutés  ilans  \\n  si\  lo 
si  iliffi Ti'hl  ilu  leur. 

D'un  autre  côté,  si  le  xir  et  le  xiii'siécle  voient  tlimiuuer  leur  pari 
dans  la  création  des  <,M\indes  pa^es  ilu  Latran,  du  Vatican,  de  Saiiite- 
Mane-Majeure,  de  Saint-Clément,  le  résultat  de  nos  invcsli^jalions 
n"aura  pas  cependant  été  de  tout  point  néi^atif  :  il  y  avait  quelque 
intérêt,  nous  le  crevons,  à  retrouver,  5ous  des  ouvrages  attribués  au 
moven  àj:e,  drs  idéesetdes  formes  appartenant  à  la  plus  bt'lleépoijue 
de  l'art  chrétii-n,  au  iV  et  au  \"  siècle,  et  à  augmenter  le  catalogue, 
encore  trop  incomplet,  des  splendides  créations  de  rKglise  au  sortir 
de  l'ère  des  persécutions. 

KUG.    MIJNTZ. 


I,  I  s 


LISTKS    ROV/\|J:s    KTIIIOl'IKNM-S 

KT 

LEUR   AUTOllITÉ    IIISTOIiloilK 


22.  —  En  dehors  du  Périple,  les  monuments  grecs  et  éllilopiens 
nous  r»'v«Mcnl  re\is!oncc  de  personnan^es  qui  ont  dû  jouer  un  lôle 
importjnl  d;ins  leur  pays,  et  (jui  ont  iiris  soin  de  f;iire  graver  pour  la 
postérité  le  récit  de  leurs  conquêtes  et  de  leurs  victoires.  Nous  ver- 
rons si  l'on  peut  retrouver  avec  quelque  certitude  sur  les  listes,  le.s 
noms  (lue  nous  ont  tr.insmis  les  monuments  hipid.iires.  Ces  inscrip- 
tions sont  intéressantes  pour  Ihisioire  et  la  géographie  du  iiaut  Nil  ; 
elles  témoignent  de  l'existence  de  rapports  étroits  ayant  exiMé  entre 
les  deux  pays  riverains  de  la  mer  Houge,  bien  avant  l'époque  chré- 
tienne, c'est-à-dire  avant  le  iv  siècle  de  notre  ère  et  probjblemenl 
dés  le  I*'  siècle. 


INSCRIPTIONS. 


23.  —  Les  monuments  épigraphiques  de  l'ancienne  Eiliiopie  sont 
de  deux  caléi^ories  : 


A.  L'inscription  grecque  d'.VJulis. 

B.  L'inïcription  grecque  d  Alcsum. 

C.  1/inscriplion  grecquedeTalmL-. 


D.  Deux  inscr.  ghcrz  d'Alisum. 

E.  I/inscription    copte    de     Den- 

dur. 


21.  —  A.  i;in>criplion  grecque  d'AdulisCAooôXr,)  est  celle  qui  a  été 

1.  Voir  le  nnnit'ro  d'août. 


154  RKVUE    AnCHÈOI.OlWyUK. 

ropitV  pour  la  pr^Mln^I•e  fois  pnr  Ko'tmns  '  en  .".'(."'i  .loj. -('..;  l'Ilc  :i  ('it' 
publiée  t'n  16:M  par  Alialins.  on  181'>  par  Hn  kli  cl  en  ISOiJ  |.;ir 
Vivien  S  liii'.-Marlin  V 

Kllc  se  compose  ilc  deux  fi  ajimeiUs  (juo  Kosnias  ronsidt'Tail  comme 
h  snile  l'un  de  Taulre.  mais  ()tii  en  réalilc.  ain-^i  (]ue  l'.i  rccdnnu  le 
premier  le  voyageur  anglais  Sali  en  1H(>7,  formeiil  ilciix  iiisnip- 
lions dislinries,  U  p^emi^re.  de  vinpl-qualre  lii,'ne'.  conreriianl  IMo- 
lém«''e  Kvcrg(^le  i2M-t2i  av.  J.-d.  ■•  el  par  coiisé(|ULMil  élraii^'rre  à 
riiisloire  qui  nous  occupe,  el  la  deuxirmc,  en  trenlc-ntiif  lignes, 
émananl  d'un  roi  étbiopien  donl  le  nom  n'est  pas  doun»''. 

Tout  le  commenccmcnl  de  l'inscripiion  min-pie;  nous  somuies 
ainsi  piivcs  du  prniccole  indiijuatil  le  nom  du  mnii;iri|ue,  roi  des 
rois,  arec  la  liste  des  peup'es  vaincus  depuis  le  pays  de  l'encens 
jusqu'à  l'occident  de  rKlliioj»ie.  I/inscriplion  donne,  en  tous  cns,  le 
dclail  de  ces  conqui^les.  Le  roi  raconte  "î^es  vicloircs  sur  la  nalion 
des  nazi,  raC»)  éOvo;.  c'e«t-à-dire  les  Gheez^  sur  lesdilTi  iculs  pcuiiies 

«lu  Nil  au  sud  et  au  nord  jusqu'en  Egy[ile;  <(  tous  ces  peuples el 

beaucoup  d'autres  sont  venus  d'eux-mêmes  se  soumellrc  au  tribut. 
El  j'ai  envoyé  des  forces  de  terre  et  de  nier  c  ntre  \e<  Ai  rbabiies,  les 
Kina'idocolpiles  (juilnilitetit  do  Vnulre  rôle  do  In  mer  lùythvrr  :  leurs 
cliefs  vaincus  iii'dnl  i^iyé  tribut  cl  ils  ont  cessé  d'iuiiuiéicr  les  roules 
de  terre  el  de  mer.  J'ai  ainsi  porté  mes  arnie>  depuis  I.eui-é  Corné 
jusqu'aux  terr(  s  des  Sabéens.  Le  premier  et  le  seul  des  rois  dont  je 
descends,  j'ai  soumis  tous  ces  peuples.  Je  rends  cjiàces  à  Mars,  le 
dieu  1res  grand,  de  qui  je  lire  mon  origine;  par  lui  j'ai  pu  soumeltre 
à  ma  puissance  tous  les  peiiples  qui  confinent  ;\  mon  royaume,  i\  l'o- 
lienl  jusqu'au  pays  de  l'encens,  au  coucliaiit  jusqu'aux  terres  des 
Elbiopiens  et  de  Saso  ....  Je  suis  descendu  à  .Adulis  offrir  un  sacri- 
ficp  à  Jupiter,  à  Mars  et  à  Niqitune  pour  la  séciirilé  des  navigateurs. 
Kl  ayant  rassemblé  là  mes  armées,  j'y  ai  con.-'acré  ce  trône  à  Mars, 
dans  la  vingl-sepliéme  année  de  mon  régne  ^'.  » 

2j.  —  Ainsi  il  s'agit  d'un  roi  pnïen,  adorateur  des  divinités  grer- 

1.  Ko^mat  indo/ilrusta  in  Topogrnphia  chriitinnn  nnno  5^5,  é.lit.  Monlfaucon. 

2.  <'orp.    irifcr.  drirr,  iii-f*,  t.  III,  p.  SOS,  on  sp  trouve  le  récil  de  Ko.siiias. 

3.  Journ.  asiat  ,  ociob.  I8C3. 

k.  Corp.  inscr.  Crnr.  t.  lil.  p.  509,  lettre  A  et  p.  511. 

'.>.  CVnt  le  nom  indiKÎ-ne  le  plusanrifii  que  l'on  Irouvo  pour  di^siynrr  l'f'.iliiopie, 
^dll  •  v*';,  dont  l-r  snis  CM  «  voyageur,  librn  ».  M.  Marit-tto  a  cru  retrouver  r.o 
noai  dati^  l.n  Kain  drs  listes  de  Knrnuk  (Listes  ijéoyinpUiipus  tir  K'iiHok,  iii-4', 
1875.  p.  îii,. 

0.  Traduciiun  d(   M     Vivitii  baiiil-Martin  {Journ.  atiut. ^oi-lub.  16C3,  ().  347). 


I.KS    LlrilKS    noVAI.r.S   r  rilIOl'IKNNKS.  £55 

(|iios,  niiliTiciir  |i;ir  cnns^Mpiciit  nu  iv"  siècle,  époque  de  I;i  rf)ri\('r- 
siitii  (le  rKiliiopie  .111  cliri-ilianisine,  (l'ii'i  roi  (|iii  s'inlilule  le  iire- 
iiiicf  (le  s:i  dyinislie,  ttvoto;  v.i\  y.ovo;  'yi'-.O.iwt  rôiv  Tiô  oiùtoj  el  eriliri 
qui  .1  (('•giié  ;in  moins  viiigl-sepl  ans. 

Q.iel  esl  ce  roi?  Toute  la  iliniciilii'  vient  de  l'inlerpri-lalion  de  ces 
mots  :  «  le  |)feiiiief  el  le  seul  dus  rois  dont  ji'  dcscr (id>  )».  I,a  liste  A 
de  la  deuxième  période,  (jui  donne  {)Oiji'  cliaquc  nioii.icqiic  |(.  rii.ni- 
bre  d'années  de  règne,  ne  présente  (jue  deux  d'eniic  eux  qui  puis- 
sent répondre;  à  l'iinliealion  de  la  duiée;  ce  sont  :  KlaAoïida,  liste  A, 
n°  11,  trente  ans  de  ni/ne,  de  lOl  à  lai  de  J.-C.  TiA  «  ^fl>-^  i  cl 
VÀA  Azguâguâ  "hli  !  hll^^  !  nièuielisle,  nMîj,  (jui  icj^Mia  soixantc- 
dix-sepl  ans,  de  l'i^  <à  2^1.  En  supposant  qu'il  faille  ajiniter  uik,'  foi 
absolue  aux  nombres  d'années  de  règne  ilonnès  par  les  listes,  ce  sérail 
donc,  d'aprèsM.  Vivien  Saint-Martin,  à  l'un  de  ces  deux  rois  (pi'il  fau- 
drait attribuer  l'inscription  d'Adulis;  a  pcut-èlrc  rantéiiorilé  m  me 
il'Kla-Aouda  serail-elleun  motif  de  préférence ^Ml  ce  qu'elle  convien- 
drait bien  au  rôle  de  fontlaleur  de  l'empire  aksuniite  que  l'inscrip- 
tion donne  au  prince  dont  elle  consacre  les  actions  '.  » 

Avec  cette  interprétation,  comment  placer  Zoscalès  par  rapport  ;\ 
ce  roi  fondateur  de  rcnipiic  aiisumite  ?  M.  Vivien  Saint-.Mailiu  ne 
se  préoccupe  pas  de  cette  objection. 

Les  li,\i)otliésesse  présentent  ici  en  nombre.  Ou  Zoscalès  et  l'au- 
teur de  Tinscription  d'Adulis  ont  régné  dans  le  môme  pays,  et  alors 
il  faut  supprimer  de  la  liste  A  tous  les  noms  antérieurs  î\  l£la-Aouda, 
à  commencer  par  Za-lleqlè  qui  est  idacé  le  huitième  ;  ou  Za-IIeqlé, 
Zoscalès,  est  le  même  que  le  souverain  de  l'inscription,  il  faudra 
alors,  comme  il  est  ie  premier  de  sa  dynastie,  supprimer  également 
de  la  liste  les  sept  rois  qui  figurent  avant  Za-He(|lè;  ou  bien  Zosca- 
lès esl  postérieur  au  roi  d'Adulis  et  dans  ce  cas  notre  inscription  esl 
aniérieure  au  voyageur  du  Périple;  ou  Zoscalès  et  le  roi  d'Adulis 
ont  régné  sur  des  pays  dinërenls;  ou  enfin,  dernière  liypotbcse,  nous 
proposerions  d'interpréter  les  mots  -pwTo;  xal  ix6^>o;  [iacrOiojv  rwv  rSo 
aÙToS  en  ce  sens  que  Ela  Aouda  esl  le  premier  roi  de  sa  famille  sans 
être  pour  cela  le  fondateur  de  l'empire  aksumilc  ;  il  a  eu  jiai'  consé- 
quent des  prédécesseurs  sur  le  trône,  au  nombre  desquels  Zu.-cilès, 
et  rien  n'est  changé  sur  la  liste  indigène.  J'incline  donc  à  penser 
que  l'inscription  grecque  d'Adulis  est  d'Ela-Aouda. 

Dans  le  fragment  de  l'inscription  que  j"ai  rapporté  ci-dessus,  le 
roi  élliiopien  raconte  son  expédition  de  l'autre  côlé  de  la  mer  Ery- 

t.  Journ.  asiut.,  p.  362. 


l--)l)  llliVlK   AUCIlliOLOGI'Jl'i:. 

llir/'O.  P.Mir  \n>^n  ooinpnMidro  co  passapn,  il  csl   luH'ossaire  de  jelor 
un  roiip  d'œil  sur  l'i  lai  do  l'Aribie  du  sud  à  colle  époque. 

if),  —  Ihi  lomps  do  Slr.ilioii,  ou  pitilûl  (ri'raloslhèno  (iTO-l'.il 
avant  J.-C).  cité  par  Slralion  (liv,  XVI,  oli.  iv,  ^  ii),  (|iialro  poiiplos 
piiiioipiiK  se  parlagoaionl  lo  sud  de  l'Araliio  :  los  .Mméeiis  le  long 
de  la  mer  Kiylliri'e,  avec  Karna  pour  rapilalo;  les  Sahôens  avec 
M;irialia  pour  rtiof-lieu;  troisionioinonl  les  Catlalianros,  dont  le  ter- 
ritoire s'étend  jusqu'au  doiroil  d-'  Bal-el-Mandcli  où  s'opère  liabi- 
luellenient  la  traversée  du  i^olfe  Arabiciue,  et  dont  les  rois  ont  pour 
résidenoo  une  ville  a[ipelée  Tainna;  puis,  pour  linir,  à  rextréniilê 
orientale  du  pays,  les  Clialraniôliles,  avee,  la  ville  de  Salialapour  capi- 
tale '.  Plus  loin  (même  cliap.,  §  19).  cilaot  Arlémidore.  qui  érrivail 
cent  ans  après  Kralostliène  et  'ont  an^  avant  Strabon,  ce  dernier  dit 
que  les  Sabéciis  constituent  la  nation  la  plus  puissante  de  l'Arabie 
et  la  plus  fertile,  grâce  à  leur  commerce,  sous  le  rapport  duquel  ils 
luttent  avec  les  Gorrliéens  du  golfe  Porsique.  Enfin,  parlant  de  son 
icmps  ivers  lo  de  J.-C).  Slnbon  ajoute  ([ue  lesSabéons  ont  fait  leur 
soumission  aux  Romains  à  l'iniitaiidn  des  Syriens  et  des  Nabatécns 
de  Petra  (|  :fl  . 

Dos  IIim\aii;os,  il  n'en  est  jias  (]ucsti(m,  bien  (ju'ils  soient  men- 
tionnés par  Arlémidore  ain<:i  (ju'on  l'a  vu  ci-dossus;  mais  ils 
n'avaient  sans  iloute  alors  aucune  puissance  ot  aucum;  noloriètt'. 
C'étaient  les  Sabéens  (|ui  avaient  la  suprématie  dans  l'inlérieur  du 
Yemen  ;  les  Catlabanécs  étaient  maîlres  de  la  côie  de  Muza  à  Okelis 
et  du  détroit;  leur  cajjitalo  Tauva  ou  Woj^va  n'a  pu  être  retrouvée-. 
Mariaba  au  contraire,  la  métropole  des  Sabéens,  existe  encore  aujour- 
d'hui 3;  elle  est  souvent  citée  dans  les  inscriptions  himyarites  sous 
le  nom  de  2'""r  nu  tie  Saba,  Nzr  ijui  est  l'éiiuivalent.  à  côté  de  Ileidân 
et  de  Sillien. 

A  l'épo  |iio  (je  l'iine,  les  Cattabanées  avaient  fait  place  aux  Géba- 
nitcs  (Shm  I  "IVr*!'  ^xz:  ^nx  dos  inscr.  bimyaritcs),  i|ui  étaien 
maîtres  du  porl  d'Ukelis;  quant  aux  Sabéen<,  ils  étaient  soumis  aux 
Himyarites,  les(juels  apparaissent  alors  couiino  population  impor- 
tanlc,  numcrosissiitios  rv.sv  llomnilds  *. 


1.  Tridiict.  T.irdipii.  t.  Ul,  p.  300. 

2.  V.  Sproiigcr,  §  246.  I.cs  (^aitabanét  s  jonl  lis  ^flX^    'ZPT  ^''^  inscriptions 

3.  V.  n  ilévy,  7oii;7i.  «wn/.,  Janv.  1R72,  y.  i!»;   juin  1K7:1,  p.    i37.   C'osl  A  MAreb 
que  »c  trouvait  la  famcuhe  digue,  fl?)]]  .^t'inh  dos  in<cr.  Iiimyir.,  mod    <_,>,U 

h.  Plinr,  VI,  5  20. 


I.KS    l.isns    ItoVALIS    KTIMOPIE.N.NKS.  457 

27.  —  Le  mûinc  r'i.il  de  clinscs  existe  à  répoijne  du  voy.ige  (h;  l.i 
mer  Kl  vllir(''o;  penilml  (juc  ZoscnhVs  n"'{,'fi(' en  Klliiopic,  les  lloiiié- 
rilescl  lusSiibiH-ns  ont  |»oiir  roi  liVjiliiiic  (lliarili.iël  :  \apiÇar,X  evOcî- 
(xoç  paiiXtù;  ÈOvôiv  S-Jo,  xoû  te  '()ixt,cÎto'j  /.ott  toû  irapaxEiuEvou  XeYoat'voj  2i7- 
CxiTou,  (3l  la  capitale  est  à  Sapliar  (inod.  DtiafAr). 

Ci;  roi  l(''f,Mtime  était  le  souverain  élu  par  les  (Jail  ou  Tusavvot,  soric 
lie  princes-électeurs  ou  conléiléiés  (pii  choisissaient  leur  lolihd\ 
ar.  [x.'^.  Le  périple  delà  H)er  Krylliric  nous  fait  ronnnîlrc  ilcux  de 
CCS  tyrans  ou  feudataires.  Ce  sont  : 

Le  tyran  anonyme  du  pays  des  Maplioriles^  qui  avait  succédé  aux 
Céhanilcs  et  coniiiiandait  toulc  la  cùte  sud  de  la  mer  Uougc  à  Muzn 
et  Okelis. 

Le  tyran  Ghohebus^  qui  gouvernail  à  Savè,  xlans   le  pays  des 

iMapIlOrites,  ttoXi;  ]Saûy]  t7,;  rspi  ajr/;v  Ma-iapiTioo;  \f^o^i^y\:,  "/lopa;  îz~.\ 
ùz  Tupavvo;  xai  xaroixiov  aÙTr,v  XoAai'So;  (Pér.,  |  '22),  la  Savé  de  Pline 
(VI,  §  26),  iaor,  IkaîXeiov  de  Plolémée   moil.  Ta'iz). 

Le  roi  (^liaribaiM  et  le  tyran  des  Maplioriies  se  partageaient  la 
souverainelé  de  l'Azanie,  c'est-à-dire,  ainsi  (|u'on  l'a  vu,  tout  le  pays 
des  Somâls,  situé  de  l'autre  côlé  de  la  mer,  en  Afrique,  jus(|u'à 

Uliapta  :  r,  'ACavta  Xapt6ar,Ài  xai  tco  Maï-aoeiV^  Tupâvvw  fPér.,  |  3). 

Le  Périple  ne  cite  pas  le  Hadramaut  (Clialramôlitfs  de  Stralion, 
Atramiles  de  Pline  ,  dont  la  capitale  était  Sabala  (Scliabouat  des 
inscr.  bimyar.),  mais  il  mentionne  le  port  de  Kané,  qui  appartient  au 
roi  Eléazos  et  fait  partie  de  la  région  de  l'encens  :  Kavr,  [ia'jrAEta; 
T.XEtxî^ou  ■/(');«;  XiÇavwTOvopoi»  (Pér.,  §27),  «  Cane  tliuriferajrcgionis  »  dit 
Pline  (mod.  llisn  Ghorâb  sur  l'océan  Indien)  ^  en  face  Dioscoride 


1.  V.  Macoudi  III,  p.  225;  Sprenger,  §85;  Kremer,  Sûdarabische  Sage  (1S6C) 
p.  94. 

2.  Le  pays  rie  Mafir,  v.  Sprenger,  g  kkô  ;  Ma?opî-ai  de  Ptolémée. 

3.  Xo).atêo;  est  le  Kaleb  scmitique;  on  trouve  la  forme  Xa^Ca;  dans  les  inscriptions 
grecques  du  Sinaï.  Cliaribatl,  nu  mieux  Cliaribail,  se  trouve  dans  les  séries  de  rois 
himyarites.  V.  Tra/i-^acf.  of  HiUicaf.  (trcheol.,  1873,  page  13;  Jintni.  asiui..  juin 
1882,  p.  382;  Millier,  Diirgrr  und  Sclilœiser,  II,  p.  31.  M.  Prideaux  a  publié  ré- 
cemment dans  le  Journ'i/  a:/(iti^ur  (lu  [ienynle,  tome  L  (18St),  deux  monnaies 
d'argent  frappées  i  llaidan  avec  le  nom  de  Karibuil  lelma'm,  qu'il  pense  être  le 
CliaribaCl  du  Périple.  Kn  elTet  Raïdan  était  le  cliâieau  ou  hourf)  de  Dhafàr.  Ces 
monnaies  ne  contenant  aucune  date,  l'époque  de  leur  fabrication  reste  toujours  in- 
certaine à  un  siùclr  près,  vu  l'incertitude  de  la  chronologie  des  rois  himyarites. 
M.  J.-H.  Moidtmnnn  avait  déjà,  en  18S0  (Su»i.  Zeitsrhr.  de  Vienne,  t.  XII,  p.  307,, 
publié  deux  autres  monnaies  du  môme  Karibail  lehna'm. 

6.  Célèbre  par  une  inscription  himyarite  datée.  V.  ZDMG,  1872,  p.  43G,  et  1881, 
p.  38. 


15S  nKVLK   AIICIIKDLOC.IUUK. 

qui  est  SOUmist»    au   lUi'^mo  roi,  ■>,   vT-ao;  aoTi"    -riô    lîaiiXtT  tt-;    ),iC«va)TO- 

9Ôfow(Périp|p,  i'W). 

Le  nom  ilo  i*e  roi  du  lladrauiaiil,  K"/£ïv>;,  ii'csl  pnilMbloiiicnl 
qu'uni'  alti  Talion  de  la  Inriiit'  araltc  ll-shai<ili  qui  st  iKUivo  dans  les 
inscriplions  liiniyanle:.  (4'>^1h,  n-'C  Sx)  et  que  les  Grecs  avaient 
également  transcrite  par  llXisafOs  '. 

Quant  aux  Minéen?,  Mîivaioi,  Miwaïoi,  duul  lacapilaie  d'après  Éra- 
to.sthéncs  et  SlraluMi  était  Karna,  ils  constituaient  une  conféiiéralion 
de  peuples  diveis,  parmi  listiuels  les  Cliaram;ri  de  Pline,  lionl  le 
nom  est  resté  dan.>  Henât-Kliarm,  remplacement  actuel  de  Karna, et 
les  Kiiidiles,  qui  jouèrent  jilus  tard,  à  répoijue  antéi>laniique,  un 
lûle  important  -.  -Ils  liabilaient  le  Nedjd,  il  M.  J.  Ilalévy  a  trouvé 
dans  les  ruines  de  Mein  (une  de  leurs  Nil  Us  principales;  1 1  aux  envi- 
rons plus  de  trois  cents  inscriptions  liimyarites  écrites  dans  un 
dialecte  particulier,  que  le  savant  vowigeur  a  appelé  le  luinéen,  et 
(|uil  distingue  du  sabéen  ou  liimyarite  proprement  dii  et  du  liadra- 
mautiie  \ 

Telle  était  la  situation  de  l'Arabie  vers  la  Un  du  i"  siècle  de  notre 
ère. 

2H.  —  Daprés  l'inscription  grecque  d'Adulis,  le  roi  d'Abyssinie 
avait  fait  une  exjiédilion  en  Asie,  et  comme  il  ne  parle  pas  des 
Ilimyariles,  peuple  puissant  qu'il  avait  lieu  de  redouter,  il  faut 
croire  ([u'il  se  borna  à  faire  la  guerre  aux  populations  du  Hedjaz, 
les  Arilia'Mles  ou  Arabanites,  les  Kinaïdocolpites  ',  sans  même  enta- 
merle  Iciiiloire  des  Sabéeus,  lis(|uels  restèrent  soumis  aux  lliiiiya- 
riles.  «  J'ai  porté  mes  armes  depuis  Leucé  Corné  jusqu'aux  terres 
des  Sabéeiis,  »  eo;  tôjv  iLaCaitôv  /tôp;.  (Juand  il  dit  plus  loin  qu'il 
soumit  tous  les  peuples  à  l'Orient  jusiju'au  pays  de  l'encens '/-.oavtoro- 
çpôp;  xtipa),  c'est  par  empbase  si  le  loi  ententl  par  là  ilésij;ner  le 
Hadiaiiiaul,  (jui  était,  encore  plus  (pie  le  pays  des  Somàls  la  région 
tliuiifère,  car  il  n'aurait  jamais  pu  pénétrera  Kané  et  à  Syagros 


1.  Hatt'vy,  JoMrn."»iV//.,  décembre  187 î,  p.  518.  Pridcaux   dans    Tramartiotlf  of 
Itibt.  nrcUeol.,  t.  II,  1873,  p.  12.  Mordtmann,  /.DMC,  1877,  p.  7<i. 
3.  CatiRsin  de  l'crcrva!,  t.  II.  p.  205.  Sprcii(;pr,  ij  237. 
3.  Mfin^   ~ou»  en  nrabp,  est  appelé   H®^    p'-   dans  le»  Inscriptions. 

k.  L".  payn  d'Arliab,  w^^j'   des  géograplius  urubes,  iesquils  ne  sont  pas  d'nccord 

l 
sur  sa  situation  ciactc.  V.  Sprcngcr,  i;  /|37.  —  Les  Kinaldocolp.lci  ouKiuaiia  îlaien 

K  la  h2ut<  ur  de  la  Mecque.  S|>rungcr,  §30. 


LKS   LISTES    ROYALKS    KTIIIOPII.NNF.S.  MO 

san-;  nvoir  vainci  les   Iloinéritcs,  co  fiii'il  n'aurait  pa^  inanijur;  (le 
iiiciiliomu'r. 

Unis  l'iiis('ri|itioii  gici"  |ut;  il'Ak>iiiii,  <|iii  ol  poslcrijuru  d'uii  ou 
di'ux  sircloy  cl  (jtio  nous  allons  cxaiiiincr,  les  lloinérilcs  sont  ini'n- 
lioiinés  au  nombre  des  pcuplis  dépendant  du  loyauiiic  alvMiiniic. 
f.a  (;nn(|ijèli'  du  Ycni;'n  par  les  rois  du  llabesli  est  donc  survenue 
dans  l'intervalle  et  l'alliance  est  consoiiMinJe  dejiuis  longtemps  entre 
les  diiii  pays;  landis  (|u'aii  contraiie,  à  l'ôpoque  de  l'inscription 
d'Adulis  les  populations  de  l'Aia!  ie  ne  sont  traitées  que  comme  des 
ennemis  et  des  piiali's. 

2!).  —  B.  C'est  à  Aksiim,  dont  il  no  reste  [dus  que  des  ruines 
encore  mal  explorées',  qu'ont  été  tiouvées  une  inscription  i^'rec'iuc 
et  deux  inscriptions  en  langue  glicez. 

L'inM'riplion  grecque  a  été  découverle  par  Sali  en  180j  et  publiée 
dans  le  Corpus  inscriplionum  gracanim  *.  Malgré  sa  longueur 
(31  lignes),  elle  n'est  que  le  récit  foil  incomplet  d'une  expédition  du 
roi  d'Aksum,  Aîi^avaç,  contre  les  Bougaïtes  ou  liabitanls  du  pays  de 
Béga  déjà  cité  par  l'inscription  d'Adulis,  contre  lesTsiamô,  Tciaao), 
^^V^  *,  et  le  pays  de  Kasou,  Kacrou,  hfh  ',  le  Kasua  de  la  slèle 
élliiopienne  de  Naslosenen  ^,  le  Gash  moderne  '. 

Il  n'est  fait  mention  d'aucune  autre  expédition  et  notamment 
d'aucune  guerre  de  l'autre  côté  de  la  mer  Bouge,  ce  qui  laisse  sup- 
poser que  l'Arabie  du  sud  éla.l  ilepuis  quelque  temps  soumise  aux 
rois  d'Ethiopie  et  que  les  deux  peuples  liimyaritc  et  aksumite 
étaient  unis  sous  un  môme  sceptre.  C'est  là  un  hit  important  qui 
nous  parait  rcssorlirde  rinsciiption  grec(iue  d'Aksum.  «vCtleinscrip- 
lion  est  en  outre  intéressante  par  les  litres  royaux  qu'Aeizana  se 
donne  avec  l'emphase  qui  est  le  propre  des  itiscriplions  oricFilales 
et  (pii,  on  peut  le  dire,  a  bien  son  importance  pour  la  géograpliie 
ancienne. 

Aeizana  s'intitule  Sa(Tt).£j;  'A;ci)a(TOJV  xa\  'Ou.r,p'!T(ov  xal  toj  'Paîioîv 
X7\  AîOiÔ7:o)v  xal  — aisaeiTwv  y.xi  Tcîi  — lÀî/i  xat  xou  ïaïaaio  xal  Bouvast-rwv  x«\ 
Toxaa'ou,  paaiXsù;  QaaiXsojv,  uiô;  Oêoj  àvixr,T&u   'Af  £0);. 

Nous  n'avons  pas  à  nous  arrêter  ici  sur  la  valeur  de  chacun  de 
CCS  mots;  nous  relèverons  seulement  ce  fait  qu'Aeizana  se  donne 

1.  Elle  estsiluée  par  U"  7'  40"  lat.  nord  (I^iippel,  H,  p.  28S,\ 

2.  Tome  III,  1853,  p.  515. 

3.  Lue  par  M.  .Maspero  iTransact,  of  liiLlical  archaoL,  t.  IV,  1876,  ligne  19  da 
verso  de  la  stèle).  Cf.  supra,  p.  1j2,  note  5. 

U.  Le  pays  de  Tigré  d'après  M.  d'Abbadie,  Acad.  des  viser.  1877,  p.  27. 


160  UK\ii.  \iii:hkoloc.I(JI;k. 

|t'-«  iiiialiliralions  do  ri>i  des  idis,  roi  des  Ak<iimili>>,  ilcs  iloiiiiiili'^, 
(II'  llaM;in,di'sKtliio}iieiis.dcsSaln''i'nsel  iIoSiIImmi  oiiSalliiiKcii  daii- 
trcs  tiMincs,  le  stj/frain  de  loulc  l'Araliic  du  Sud  et,  on  Afn  |iu\  do 
loulo  l'Klhiopio,  jiiscjuos  ol  y  rnin|iris  l'Aznnie  jusiiu'à  llliapla.  Hni- 
tlan  ,';T"^W'lSillu'ri  ^n'-^r)  olaioiU  dos  forloKxsos  loyalos  liiiiiyariioj. 
Los  iiioiianjiKs  saliooiis,  dans  los  insniidions  liimv.n  ilo-,  s.'  don 
nonll(>li:i-odoroisdeSalj;iotdcUaïdan,  SHÎ>II«'  I  hrii^  I  (SIB, 
]~r-'r,  azz  "]*?::.  I-o  <oiivoraii)  aliysin  so  (luililic,  do  iiiriin',  roi  de 
Uaidan,  de  Saha  cl  do  Sillieu,  aiipollalion  (juo  ii.  us  venons  ropro- 
duile  plus  loin  dans  les  deux  insoiiptioiîs  ghee/.. 

rîO.  —  La  slolc  prorijuc  d'Aksuni  ôtail  liilingue,  rar  Sali,  (|iii  Ta 
dôcouvorlo,  a  vu  au  verso  (la  parlie  exposée  à  l'air)  dos  rariicloros 
glioez  coniplrlfinoiit  olTai-o>  ol  dont  il  n'a  pu  roi'uoiltir  licn  de  cor- 
tain.  Il  est  pi'ohahlo  ipio  ce  lexlo  indi|,'one  n'était  (|ue  la  roproduo- 
lion  de  l'insniplion  grceiiuc.  Ce  f.iil  prouve  l'existonre  vl  l'emploi 
des  deux  lanj^ues  a  la  cour  d'Aksuni.  à  répopio  d'Aoizana  '. 

Quelle  esl  celte  époque  ^? 

Il  existe  sur  la  lislo  A  de  la  deuxième  période  un  souverain  du 
nom  d'Lla  San,  ^A  '  ^Tf  'ou  Za  San,  (|ui  occupe  le  vini,'t-septiéme 
rang  et  qui  aurait  ré|ïné  treize  ans.  (Vost  Kla  San  (pu,  d'après 
Hiippel  et  Vivien  Saint-Martin,  serait  le  mémo  (lu'Aoizaua  ilv 
notre  inscription  -.  La  chose  esl  vraisonilil  ihlo,  car  si  Aeizana  est 
véritablement  paion,  il  s'intitule  lils  de  .Mars  l'invincible,  vilo;  àvur,- 
Toj  'Apeto;.  Kla  San  est,  en  elTot,  de  l'époijue  luodirétienne,  étant 
aniérieur  d'environ  80  à  100  ans  à  Ela  Abrelia  et  Ela  Atsbcha,  sous 
le  régne  des(|uels  fut  introduit  le  catiiolicisme,  et  par  ronso(|uent 
vers  liiOdc  J.-('.  Nous  ne  pouvons  pas  adopter  cette  intoi[iréiation 
car  il  y  a  une  dilTicullé,  c'est  la  lettre  de  remporour  Constance. 

Dans  l'inscription,  Aeizana  dit  (ju'il  fut  aidé  dans  ses  campa- 
gnes par  ses  deux  frères  Saiazanas  el  Adéplias,  r.aéTEcou;  àosÀsoù; 
lata^iavî.... /.ai  'Aot,ï.5  (ligne  î»)-  Or  on  possède  une  lettre  de  (Cons- 
tance II  (3;i7  à  .'JOI),  datée  de  l'an  350  ^  el  adrosséo  précisémenl  à 
Atîiava;  et  Ia!;ava;    .s/r),   'dis  d'Aks'im   Cl  frères  respCCtabIcs,  «ceÀAO, 


1.  Dilltnoiin,   Die  .\nj<i  ivjn  ile'i  A.rum.  Ilenl.s-,  p.  210, 

2.  ntippcl,  rtf-zï'"  i/i  Abi/sfin.,1.  Il,  p.  34J.Vivi'  Il  Saiiii-.Martiii,  Juurn.  niint.  803, 
II,  p.  30^.  Kla  b&ii  Rc  figure  ni  dans  la  !isl(r  de  Sali  ni  dans  lu  clironi(|uo  tMhiopi.Miuo 
de  M.  II.  Kxssct,  J'tuiH.  asittl.,  I8R1,  I,  p.  iï'J'J  (liste  H  . 

3.  Celle  lettre  ne  ontieiit  itial!i':ureusoinciU  aucuo  d-vOiicmuiil  liistoriiue. 


Li:S    I.ISTKS    iKtVM.KS    I.Tll  lol'l  I.V.NLS. 

A.i/.ui.i  .■lS,u;i/.;iiia  nii  Ai/aii)  et  Sn/'inn  étaient  dune  des  princes 
ciirélioiis  i(''|:n;inl  en  Ahyssinu!  .'lU  milieu  du  iv  siècle  «le  lUtUc  ù-re, 
fl,  p.ir  suilc,  Kl.i  San  (ou  mieux  Za  San,  (jui  se  rapproche  jdus  de 
iiaîiava;  (|M(' de  Aeîî;ava<:)  '  n'est  pas  le  môme  ()uc  le  roi  (jui  li;,'ur(; 
dan>  la  li>li'  païenne  piè-  d'un  sifN'Je  plus  haut. 

;{|.  —  MaisjKiuelle  époiiue  exaele,  jiar  rapport  a;:\  propagateurs 
du  cliristiaiiisme,  faut-il  placer  ces  deux  souvriains  cités  dans  le 
documer.t  impérial  signé  de  Constance? 

I.a  solulion  de  celle  (jueslion  n'est  jias  san<  dillicnité. 

(Vest  sous  les  dcii.v  frères  Kla  Ahrehà,  ?iA  s  h'Uélàl  ',  et  Ela 
Alsiiejia,  TiA  «  h^^ildl  ',  que,  d'après  les  lislesethiopieiines  (li.<ie 
A,  li>le  H,  liste  C  de  hillinann,  ^''  période},  qui,  toutes, concordent  à 
cet  égard,  le  christianisme  fut  introduit  en  Abyssinie. 

Cette  coïncidence  rem.iniuaMe,  alors  ipic  le  surplus  des  noms  de 
rois  diiïère  lotahMnont,  s'expliiiue  d'elle-même  en  même  temps 
(lu'elle  coi'ioliore  la  tradition  éthiopienne  qu'Ahreha  et  Atsljeha 
liiicnlles  premiers  rois  chrétiens. 

Nous  connaissons,  par  les  auteurs  rontcmporains  grecs  et  latins, 
répcKjue  de  la  conversion  de  l'Ethiopie  au  chrislianisme  ;  on  sait 
que  ce  fut  l'évéque  Frumentius  qui  fut  envoyé  par  Atlianase,  pa- 
triarche d'Alexandrie,  pour  prêcher  l'Évangile  aux  populations  du 
sud  de  l'Egypte,  vers  :{28  à  330  de  notre  ère,  et  qu'il  devint  l'apôtre 
de  l'église  éthiopienne  sous  le  nom  de  Abbâ-SalâmA.  La  chronifjue 
publiée  par  M.  R.  Basset  (ouvrage  cité,  p  410)  raconte  ain3i 
révénement  :  a  Ce  fut  à  l'époque  d'Abreha  et  Atsbeha,  pendant 
qu'ils  étaient  à  Aksum,  qu'apparut  le  christianisme.  En  ce  temps- 
là,  il  n'y  avait  pas  de  Turcs ,  une  partie  du  peuple  d'Ethiopie 

vivait  alors  dans  la  religion  juive,  d'autres  adoraient  le  serpent. 
Abbâ-Salàmà  leur  enseigna  la  religion  du  Christ  et  lit  des  miracles 
devant  eux.  Ils  crurent  et  reçurent  le  baptême  chrétien.  Leur  con- 
version eut  lieu  l'an  333  de  la  naissance  du  Christ.  » 

Les  auteurs  indigènes  varient  beaucoup  sur  la  date  et  les  circons- 
tances de  cet  événement.  Les  écrivains  chrétiens  grecs  et  latins, 
Eusèbe,  Rufin,  Àthanase,  Philostorg,  Nicéphore,  etc.,  nous  ont 
laissé  des  récits,  qui  sont  plutôt  des  légendes,  sur  les  voyages  de 
Métrodor,  Frumentius,  Théophile,  dans  l'Inde,  et  sur  les  principaux 
épisodes  de  leur  apostolat.  M.  Dillmann,  dans  son  récent  mémoire 

1.  Dillmann,  Die  Anfa-nge,  etc.,  p.  20«,  rapproche  plutôt  Sazanas  de  l'himya- 
rite  Za-iezen  (ar.   ^jy^i). 

VMÎI.  —    I  ! 


l*'>-2  niilM'i:    AnCHKOLUGIQUE. 

/ur  (irschichte  drs  ATuinitiscfieii  Heichs,  1880,  pnges  f>  à  20,  a  clirr- 
ch('',  mais  sans  ^;iaihl  succè'J,  vu  Itîdi'f.iul  de  |iri'cisi(»ri  de  ces  réciis,  à 
jcler  (iuoli|ue  Imnière  sur  celle  é|itt.|ue  oli^cure.  Nous  renvoyons  le 
lecteur  à  rinU'ressanl  travail  du  savant  prof-sscui-  de  Hciiin  '. 

'M.  —  Sait  et  les  auteurs  du  Corpus  iiiscr.  ijrac.  veulent  (lu'Ai/.ana 
elSazana  soient  les  nn'^nies  (luWlirelia  et  Atsiielia.  Kn  3.*)(5,  date  de 
la  lettre  impériale,  les  deux  frères  avaient  donc  iljà  au  moins  vin^'l- 
fiiKl  ans  de  régne;  la  liste  A  leur  donne  vingt-huit  ans.  (juanl  à 
Adéplias,  nommé  dans  l'inscription,  il  n'était  proltablemenl  (ju'un 
prince  du  sang,  commandant  des  armées,  mais  non  associé  au 
trône.  On  expliiiuerail  enfin  dans  cette  liypolliése  l'invocation  de 
Mars,  nommé  à  deux  reprises  dans  l'inscription,  par  un  reste  d'usage, 
dans  le  style  épigraplii(|ue  de  répoipie.  Ares  est,  en  elTct,  invoijué 
dans  l'inscription  païenne  d■Aduli^,  cl,  pl;is  tard,  Tazenâ,  (|uoi(jue 
chrétien,  cite  également  un  certain  Mahrem  invincible  (}ui  paraît 
correspondre  au  Oeoj  (ivixr,Toi»  'Apéo);. 

S'il  en  est  ainsi,  si  Aizana  et  Sazana  sont  bien  les  mêmes  qu'Ela 
AbreUa  el  Atsbelia,  il  faut  encore  expli(iuer  la  dilTércnce  de  nom 
par  une  confusion  de  traditions  faite  plus  lard,  lors  de  la  confection 
des  listes  royales,  ou  par  ce  fait  (jue  les  rois d'Abyssinie choisissaient 
un  nom  nouveau  quand  ils  montaient  sur  le  trône,  en  sorte  qu'ils 
avaient  ainsi  deux  appellations,  l'une  connue  seulement  des  étran- 
gers et  l'autre  des  annalistes  indigènes.  lÀtte  explication,  mise  en 
lunnère  par  M.  d'Abbadie-,  peut  paraître  assurément  fort  commode, 
mais  il  est  impo.^sible  de  la  rejeter,  au  moins  dans  de  certaines  limi- 
tes, si  l'on  veut  tenter  de  concilier  tant  soit  peu  les  documents  indi- 
gènes avec  les  témoignages  contemporains  el  les  monuments  épi- 
grapliiques. 

Pour  notn;  coiiiple,  et  nous  en  terminons  sur  cette  question, 
nous  [ien>ons  que  rii\pothése  de  Sait  et  dei  auteurs  du  Coiims  est 
encore  la  plus  satisfaisante  entre  les  nombreux  systèmes  que  sou- 
lève ce  puinl  difficile  de  riiisloire  d'Abyssinie.  Nous  croyons  donc 
({u'Aizana  el  Sazana,  les  auteurs  de  l'inscription  grec({ue  d'Aksum, 
sont  les  premiers  rois  chrétiens  d'Abyssinie,  les  mêmes  (jue  ceux 
dont  les  listes  royales  ont  fiil  mention  sous  le  nom  il'Kla  Abrelia 
cl  Lia  Alsbcba. 


i.  Dillmann,  /.  G.  de*  Axum.  Reir/n,  18R0,  p.  18. 
3.  A<Md,  des  iiwcr.,  (Joinptes-rvHduji,  1S77,  p.  '2k- 


LF.S    I.ISTFS    noVAI.F.S    f^.THrOPlKNNKS.  16.') 

3.'{.  — Nous  arrivons  ;\  l,i  lroisi(''me  i^'-riodc  i\&  l'hisloiro  d'Ahys- 
sini(i,  ri'llc  i|iii  coiiiinciice  avec  riiiliDiliii-lioti  ilu  rlirislianisme, 
c'esl-à-dire  vois.'JlJO  de  J.-C,  el  se  leniiirie  au  x*  siècle. 

Nous  relrouvons  ici  la  conlinualion  des  trois  listes  dilTé- 
rentes  : 

L'une,  la  lis'e  A,  eontieiil  2!)  rois,  dont  le  premier  est  Ela  Ahrclia, 
et  le  dernier  (;al.ra.Masqai,  liïd  *  tfoft'/'A  ». 

La  di'uxiènii',  la  liste  H,  renferme  '\\  rois,  dont  le  premier  est 
Asfeiia,?^ftyA  '  (i|ui  csl  le  second  dans  la  liste  A),  et  le  dernier 
DelnaàdouD.'Jnàod,  ^M/*K. 

VaU'iu,  la  liste  C,  (onlient  :W  rois,  commençant  comme  la  pré- 
cédente par  AsJ'eha  ou  Asfeli  et  Fe  terminant  à  Terda-Gabaz. 

Hien  qu'il  s'agisse  d'une  époque  plus  rapprochée  de  nous,  on  re- 
trouve la  même  incertitude,  les  mûmes  différences  entre  ces  di- 
verses séries  de  rois,  non  pas  seulement  sur  l'or.lre  chronologiiiue, 
qui  varie  notablement  de  l'une  à  l'autre  :  ainsi  Deinaâd  est  le  ID' 
sur  la  liste  C  et  le  31°  sur  la  liste  B;  Gehra  Masiial,  le  ûi)'  de  la 
liste  A,  est  le  8"  liste  B,  le  D'  liste  C,  etc.;  mais  aussi  sur  les  noms 
des  personnages  eux-mêmes,  dont  ridenlificalion  est  toujours  dilli- 
cile  avec  les  noms  (jue  nous  ont  transmis  les  historiens giecs,  arabes 
ou  syriens,  et  les  monnaies  aksumitaines. 

Deinaâd  paraît  être  le  nom  du  dernier  roi  de  la  dynastie  salomo- 
nicnne  vers  9-20  de  notre  ère  ;  il  fut  renversé  p:ir  une  révolution 
qui  mit  sur  le  trône  la  dynastie  des  Zâgues,  laquelle,  ainsi  que  je  l'ai 
dit,  dura  environ  tiois  cent  cinquante  ans,  de  9i0  à  1'2tJ8. 

34,  —  Divers  documents  importants  appartiennent  très  probable- 
ment à  cette  troisième  période,  l'époque  chrétienne  de  l'histoire 
d'Élhiopie;  ce  sont  : 

L'inscription  grecque  de  Talmis, 
Les  deux  inscriptions  gbeez  d'Aksum, 
L'inscription  copte  de  Dendur. 

3").  —  C.  L'inscription  de  Tairais,  appelée  aussi  inscription  de 
Silco,a  été  trouvée  par  le  Français  Gau,  en  1817,  à  Khalapsheh, 
l'antique  Talmis,  c'esl-à-dire  vn  Nubie. 

On  désignait  sous  le  nom  générique  de  N'ubie  toute  la  partie  nord 
de  l'Ethiopie,  la  plus  près  de  lÉgypte.  Elle  porte  le  nom  de  To  kens 


l«4  ii;\ri.   i:;i.ufc;i»LuuiyLi.. 

dans  les  le.xles  hit'roo'lyphiiiiu's:  la  [lartie  sud  ou  l'^iliiopie,  Aliyssi- 
nie,  eli\,  avait  lo  nom  iVAlon  liicz  les  ^'l'O^^'iaplios  arabes'. 

La  Nubie  est  rirlie  en  mserijilions  greecpies,  mais  elles  sont 
presque  lnules  tritrii^m."  roiuiine,  c'est-ù-ilire  gravùes  par  des  voya- 
peurs  jjrec>  ou  ro  nains  el  nieiiiioniiaul  les  eiuju  leiirs.  La  plus  aii- 
eienne  remonte  à  Domilieii,  les  plus  réeenles  desi-endenl  jusqu'à 
Alexandre  Sévère  el  Nalérien.  (le  sont,  la  pliiparl.  des  prosi'vnèmes 
ou  adresses  à  des  divinilt-s  locales  comme  llermé>,  Mandulis  -. 

Linscriplion  de  Silcoesl  la  seule  i|ui  ait  été  rédij^ée  par  un  prince 
indigène,  c'eslàce  lilre  »iu'elle  nous  intéresse. 

Lue  par  Niehulir  en  1S2(>,  recopiée  par  le  voyageui'  fiançais 
Caillnud  en  182<).  (die  a  lait  l'oljel  d'un  important  mémoire  de 
Leironne-'. 

Silco,  ClAKGO,  s'inlilult!  'W'zCfJ.tixo;  Nouoâoiov  xii  i').o)v  TÔiv  AtOto'-wv, 
chef  des  .Noubades  et  de  tous  les  Kthiopiens;  avec  les  Hlenimycs  ce 
sont  les  seuls  peuples  menlionnts  dans  celle  inscription,  il  ne  parle 
ni  des  lliinynrites  ni  des  Sabéens.  Les  Noubades  .sont  les  Nu- 
biens; leur  territoire  à  l'époque  grecque  ne  dépassait  pas,  au  nord, 
la  ville  de  IIpui;  (mod.  Ibrim);  ils  restèrent  plus  longtemps  païens 
que  les  Aksumites  leurs  voisins,  car  ce  fut  prés  de  deux  siècles 
après  ces  derniers  qu'ils  embrassèrent  le  cbristianisme.  Le  récit  de 
la  conversion  des  Noubades  se  trouve  dans  Bar  Hebra'us,  le  célèbre 
li(dy<:raidi(>  syria(|ue  connu  sous  le  nom  d'Aboiilfaradj.  Ce  fut  le 
prêtre  Julien  (jui,  sur  l'ordre  de  Juslinicn  et  de  l'impératrice  Thèo- 
dora,  introduisit  vers  o i(J  ((  la  vraie  foi  chez  le  peuple  de  Koush,  la 
nation  noire  des  Nobades  »  ■*.  Siico  était  donc  probablement  chré- 
tien. 

Les  Blemmyes  étaient  des  peuples  nomades  qui  se  trouvaient,  à 
l'époque  de  Silco,  entre  la  Nubie  cl  l'Egyple  ;  ils  ne  sont  pas  men- 


1.  I.e  nom  de  A'ouii  se  IroiiTC  aussi  dans  hs  textes  égyptiens;  ou  a  pcnsti  qu'il 
Tenait  de  noub  «  or  »;  ce  serait  donc  u  le  pays  de  l'or  ». 

2.  Voir  le  recueil  de  ces  inscriptions  dans  le  Corpus  iuscr.  ijrœc,  t.  111,  ti°*  4970 
à  512G.  L'inscription  de  Silco  occupe  le  n"  5072. 

Sur  les  populations  de  la  Nubie,  lirr  la  s.-ivante  introduction  df  Lepsius  à  sa  Su- 
biscfie  Grarniiiitik,  1880,  et  Kln-ts  dans  /DMC,  18S|,  j).  209. 

.1.  Acad.  (Ifs  Inscrijit.,  t.  IX  (1831),  et  t.  1  de  la  nouvelle  édition  des  œuvres  d<' 
Leironne  (in-S,  1881,  Paris,  Leroux,.  Le  texte  ^rec  a  été  revu  par  Van  der  ll.ie- 
glicn  sur  la  copie  de  Lcpsiius^itome  \1I  des  Hi-nki/nrtcr,  n°  377);  voir  l{'V.  arrhéoL, 
t.  X,  IHOJi,  p.  202)  et  .1  été  republié  en  car-iclùre»  coptes  par  .M.  Révillout  dansson 
iléin.  sur  les  Itlrtmiiyes  {A<mi.  des  inscr.  Sav.  >lr.,  t.   Vlll.  IRG'.',  2"  |)artip). 

k.  Rérilloui,  p.  635.  ('.t.  I^tronne,  l'dit.  (  iicjr,  p.  32. 


I.i:S    MSTKS   HdVAI.KS    i;  I  llloi'l  I.NNKS.  465 

tionnùs  daiu  lis  iiisciiplions  d'Ailiilis  cl  {rAk>^iini.  (les  ]io|(iil;ilioris 
s,iiiv;if,'('s,  à  r.isport  rlrarif,'*',  (^liicnl  d'oci^'inc  lil)V(|ii(',  (iciil-T'in^  des 
Toii.iregs  '.  Aven  Its  Snrracctii  (rAiiiiniiïti  .Maicrlliii,  (-((mms  (l(;|iiiis 
longtemps  en  Kgy()tt'  par  li'ijr>  déprédations  «'l  l<'uis  ravages,  ils 
«'■taienl  la  terreur  du  ll.iiit-Nil.  (le  fut  sous  Juslinicn  (|iit;  Silc,(»  par- 
vint, avec  l'aide  de  Narsès,  à  d(»in[iler  les  IJIciutnyes  aux(iuels  il 
imposa  sa  doniitialion. 

',]().  —  Tout  en  se  donnant  le  tilic  de  chef  ou  prince  de  tous  les 
Etliiopiens,  il  est  difficile  de  croire,  ainsi  qu(!  N;  fait  remarquer  Le- 
tronne-,  (jue  Silco  ait  entendu  désigner  l'AliNssinie  et  Ak^um. 

Vivant  au  milieu  du  \i"  sièch;  (la  campagne  de  Narsrs  à  Pliila;  est 
de  î)4.*{),  Silco  est  contemporain  de  Kâleb  dont  nous  parlerons  bien- 
tôt, et  ses  Ktats  étaient  voisins  et  distincts  du  royaume  ak=umite 
dont  Silco  élait  le  vassal,  simple  paTiXîcrxoî  par  rapport  au  titre  de 
paciXeù;  ^aaiXt'ov  que  prend  Aizana.  Silco  est  donc  un  roi  nubien  qui 
a  été  autorisé  à  prendre  le  litre  de  prince  d'Ethiopie  et  de  vainqueur 
des  RIemmyes.  On  ne  doit  donc  pas  s'attendre  à  Irouver  son  nom  sur 
les  listes  royales 3. 

L'emploi  de  la  langue  grec(|ue  en  Nubie  ne  doit  pas  plus  nous 
étonner  que  l'usage  du  même  idiome  dans  les  inscriptions  d'Adulis 
et  d'Aksum.  Le  grec  était  la  langue  du  commerce  dans  toute  celle 
contrée  comme  dans  la  mer  Erythrée  et  sur  les  côlcs  d'Arabie  :  les 
monnaies  d'or  et  d'argentaux  types  grec  et  latin  circulaient  depuis 
longtemps  dans  les  provinces  voisines  du  grand  empire  romain.  Le 
Périple  de  la  mer  Erythrée  compte  les  deniers  d'or  et  d'argent 
parmi  les  articles  d'exportation  sur  les  côtes  d'Ethiopie  et  d'Ara- 
bie'*. La  longue  domination  des  Lngides  dans  toute  la  vallée  du  Nil 
avait  fait  du  grec  la  langue  oflicielle,  laquelle  devint  plus  tard  aussi 
la  langue  religieuse  ;  à  l'époque  de  la  conversion  de  la  Nubie  au 
christianisme,  vers  oiO,  il  y  avait  déj'i  longtemps  que  le  grec,  par 
suite  des  relations  commerciales,  était  usité  à  Méroé,  à  Dongola  et  à 
Khartura  tout  comme  à  Aduliset  Aksum,  à  côté  de  l'idiome  national'*. 

1.  Ac.  des  inscr.,  Comptes-  rend  us  y  1871,  p.  26. 

2.  Mémoire  cité,  p.  36. 

3.  Il  existe  sur  In  liste  B.  sous  les  numéros  13  et  17,  deux  rois  portant  le  nom  de 
Ikia,  mot  qui,  précédé  de  la  particule  royale/f«,  donnerait  Za-ikia,  dont  les  Grecs  au- 
raient jiar  métatlièse  formé  leur  Silko;  miis  il  ost  probable  que  la  forme  grecque 
e>i  l'ulitration  de  quelque  nom  indigène  qui  n'a  rien  d'étliiopion. 

ti.  Letronne,  méu\  cité,  p.  ij.  —  PéripL-  do  la  m^r  Erythrée,  §  VIII, 
.'(.  Lf-tronn»»,  p.  s^i,  est  d'une  opinion  différente, 


Jgfi  HKVir     MU.Ill  OI.OOIQL'K. 

;17.  _  H.  11  pci  difiuMli'  .rnrrirmpr  si  l'inscription  procqiio  liuc  h 
Ai/.ana  n'Oî«l  plus  do  rrp().|iio  piitMino;  l»'s  li-xlcs  niainiuciil  de 
pivi-ision  à  ri'l  l'i^.inl  ;  an  l'oiitrain»,  avoc  les  iloux  iiisci  ijlKtiis  ^'liccz 
d'Aksun»,  nous  sommes  on  pleine  périod»'  chivlicnno,  environ  20O 
ans  après  l'iiilrtului-lion  ilu  ealliolirisme.  Ces  deux  inscrii)lions  ont 
élé  dèciuiverles  du  du  moins  copiées  pour  la  preunéie  fois  en  iSilii 
parUiïppell,(le  KrancforI,  cl  ont  ëlé  l'oi-ji'l  de  travaux  de  la  part 
de  U(vdiKer,  Sapelo,  Dillmann  '  et  d'Aldiadie.  Nous  n'avons  à  nous 
en  oicuper  ici  ijuau  point  do  vue  des  concordâmes  avec  les  likies 
indigènes, 

La  pr<Mniore  de  ces  inscriptions  a  'M)  lignes  i\c  texte,  et  la 
deuxième  en  a  52.  Toutes  deux  sont  en  caractères  ètliiopiens  ar- 
chaitiucs,  avec  les  voyelles  adhérenles  pour  constituer  la  syllabe, 
les  mots  séparés  par  un  trait  vertical  (au  lieu  des  deux  points  em- 
ployés aujourd'hui)  comme  en  liimyarilo.  mais  avec  des  lacunes  ou 
plutôt  des  défectuosités  de  copies  (^ui  ont  poriiiis  les  interprétations 
les  plus  diver^îcnti  s. 

La  plus  iiii[iorlanlo  de  ces  divergences  est  dnis  le  nom  de  l'auteur 
de  ces  inscriptions.  D'après  Rœdigor,  Sapelo  et  Dillmann.  les  deux 
textes  sont  du  roi  Tazènâ.  Tous  deux  ont  du  reste  à  peu  prés  le 
mémo  début  : 

«  Tazénâ  tUsdc  Lia  Amidil,  Bcse  Ilalen,  roi  de  Aksumet  llimyar 
et  Haïdan  et  Saba  et  Salhon  et  Tziyamo  et  Huga  et  Kasli,  roi  des 
rois,  lils  de  Lia  Amidâ,  lils  do  Malirein  qui  n'a  élé  vaincu  par 
aucun  ennemi,  elc.  « 

Le  premier  mot  de  la  première  li|,'no  eU  muîilé,  il  ne  reste  ijue 
les  doux  caractères  ftÇ.  Zènfi,  que  l'on  a  facilement  complétés  en 
;*•![.?.  Tâzènâ.  (lui  est  en  elTet  un  roi  élliiopien  le  sixième  de  la 
li>(c  15,  lilsde  LIaAmèdA  père  do  Kàlcb.  M.  d'Abbadie-  a  interprété 
ce  mol  tout  aulremenl  :  il  y  a  lu  non  pas  un  nom  propie,  mais  l'ex- 
pression la-zénù.  (ju'il  traduit  :  «pMir  la  renommée))  «Jes  enfants  de 
«  Ha  Imida  »  :  quant  au  nom  du  loi,  le  mèine  s.iv.int  le  trouve  dans 
Icsdeux  molsBe.'saia  Halèn,  'flïifî?  '  thi^'i  »  (ju'il  rend  par  «  le 
valeureux  Halèn».  Le  [)rèlro  abys>in  d(»nt  rdipiioll  donne  la  version'' 
elllœdigor  faisaient  également  d»î  Unlén  le  nom  d'un  roi  d'Aksum. 


1.  /I)\li.,  [HJ^,  |).  35:.,  et  Acnii.  (Ir  Hiiltti,  1878,  p.  210  ft  sq.  Il  ii'.iisli'  (^l'une 
■eulc  C'<|(ic,  c'cj>l  celle  de  lliipitell  ;  i-llu  se  trouve  dan»  l'ailas  du  voyage  de  ce  »»v»nt, 
/('•iTf  l't  .\liijssiiittn. 

S.   .!"<'/.  '/'•»  insr.r.,  I  oin/'l'  •>iii,ilus,  1877,  (i.  2'j. 

3.  lieue  lu  Aby$$tmrri.  Il,  p.  280. 


i,i;s  i.isTKs  fu)yAM:<  i  riiif)i'ii.NM:s.  iCH 

Mais,  ainsi  que  le  reconii.ill  lui-inôme  M.  d'Ahljadic.re  nom  manque 
sur  les  listes  et  il  est  obliK'î  'le  supposer  qtie  If.ilAn  est  le  nom  primitif 
d'un  lies  divers  Kl.i  AukVIA  qui  ont  ré},'né  en  Ktliio[iie,  ou  simple- 
meiil  ILdiMi  de  hi  dynastie  (L-s  Amidi  '  i|ui  aurait  régné  vers  la 
lin  du  II!"  siècle  de  notre  ère. 

D'apiès  Dillinaiin-  le  mot  Hnliii  ne  serait  pas  éthiopien,  mais 
bien  la  transcrijition  du  mol  grec  iXlr^w,  de  sorte  <iue  hraa'iti  ayant 
le  sens  de  <'  guerrier,  homme  d,  Vc\\)vcs?,\on  bcsaVi  hulén  signifie- 
rait soit  «  homme  des  Hellènes  »  dans  le  sens  £i  fréf|uent  en  iiumis- 
mati(|ue  ancienne  de  tpiXc'XXv^,  soit  «  chef  des  troupes  composées  de 
(îrecs  ou  armées  à  la  grecqui;  ». 

Nous  pensons  que  telle  doit  èire  la  vraie  interprétation,  de  sorte 
(|ue  les  deux  inscriptions  glieez  d'Aksum  sont  bien  toutes  deux 
du  roi  Tazéiiâ  (ils  de  Éla  Amida  père  de  Kàleb,  d'après  la  liste  111  (j, 
vers  tJOO  à  niO  de  notre  ère. 

Comme  on  le  voit  par  l'ènumération  contenue  dans  le  protocole, 
Tazèiiâ  est  encore,  comme  Aizana,  roi  dilimyar,  Ilnïdan,  Saba  et 
Silhen.  Au  commencement  du  vi"  siècle  les  rois  d'Aksum  se  don- 
naient donc  encore  le  titre,  peut-être  purement  nominal,  comme 
beaucoup  de  monanjucs  du  xix."  siècle,  de  seigneurs  de  Raïdan, 
Saba  et  Silhen.  En  effet,  le  Yemen  avait  déjà  secoué  le  joug  de  i'A- 
byssinie  et  repris  ses  i-ois  particuliers  ou  tobhd.  11  est  vrai  que  quel- 
ques années  plus  taid  l'un  d'eux  est  vaincu  par  le- négus  d'Ethiopie, 
qui  prend  de  nouveau  possession,  mais  seulement  pendant  un  demi- 
siècle,  du  Yemen. 

38. —  E.  A  côté  de  ces  deux  inscriptions  gheez  il  faut  signaler 
l'inscription  copte  de  Dendur*  publiée  par  Lepsius,  revue  et  tra- 
duite sur  un  estampage  du  Louvre  par  M.  E.  Revilloul^'.  Elle  fut 
écrite  par  Joseph,  exarque  do  Talmis,  sur  l'ordre  du  roi  Eirpanoma, 
sous  l'épiscopat  de  Théodore,  évéque  de  Philse.  Le  texte  n'a  que 
quatorze  lignes  et  n'offre  qu'un  intérêt  religieux:  c'est  une 
inscription  volive  en  l'honneur  de  la  fondation  du  christianisme; 
mais  elle  est  datée  de  la  vii°  indiction,  qui  correspond  à  l'an  544  de 
J.-C.  C'est  à  peu  près  la  date  de  l'inscription  de  Silco  et  de  la  dé- 


1.  Acnd.  des  mscr.,  1877,  p.  199. 

2.  Die  Anfœnrje,  etc.,  p.  212. 

3.  C'est  le  version  de  M.  Halévy.  Dillmann.  op.  fnwl.,  p.  212,  note. 

4.  Sur  le  Nil,  près  l'ancienne  Talmis. 

f  5.  Mcmoire  sur  les  Blemmyes,  Acad.  des  inscr .  Snv.  étrang.,  t.  VIII  (18G9),  p.  hii 


1(]8  UKVIK    .VIlCIIK(lI.(»iiloir. 

faite  lies  Blemmyes.  D'apiès  M.  Hevillout,  Kirpanonia  serait  une  al- 
ti'ialion  «rKi-Kamèiie,  tiui  est  un  noniconnu  fu  Niiltie,  \umU'  par  \\n 
iMiconleuip.uain  lie  Ploli'-ni.V  11  l'iiiladclplu- '.  Kii,Mni«M.ii'  deiioli.' 
inscription  serait  un  roielirélien  îles  Noubades,  successeur  iinuiêdiil 
de  Sileo. 

ni),  _  Kii  dehors  des  monuments  t''pi^M-apliiiHii's  <]iie  nous  venons 
d'analyser,  et  des  monnaies  dont  nous  .liions  liifulùl  parler,  l'il- 
Ihiopien'apas.  à  vrai  dire,  dedocumrnis  historiijues  contemporains, 
car  les  annales  et  les  actes  des  saints  ont  été  écrits  beaucoup  jdus 
lard.  La  vie  religieuse  et  liistorique  de  l'Abyssinie  commence  au 
vr  siècle  :  il  se  passe  alors  dans  cette  partie  du  monde  sabéo-èlliio- 
pien  un  événement  important  dont  le  souvenir  nous  a  élé  conservé 
par  les  auteurs  j,'recs  et  orientaux.  Il  s'ai^Ml  de  la  ij;iierre  entreprise 
parles  rois  chrétiens  il'Abyssinic  contre  les  llimyariles  à  l'occa- 
sion des  persécutions  chrétiennes  cpii   ensanj;lantcrent  le  sud  de 

l'Arabie. 

Nous  avons  pour  cette  époque  les  historiens  arabes  llam/.a  d'Is- 
fahan,  El  Nowairi,  Maïdan,  Maçnudi  e(  qu(>iiiuesdocumenlssyiiaques 
ou  élhioidens. 

Le  plus  ancien  écrit  sur  les  persécutions  chrétiennes  en  Arabie 
est  une  lettre  de  Siméon,  évéïjue  île  Belh  Arsliam(  Perse),  adressée  à 
Mar  Siméon,  évùtjue  (h.'.tlahula -,  su:  la  mi.ssion  (ju'rl  remplit  par 
ordre  de  l'empereur  Justin  auprès  du  roi  païen  Mondhir  111,  l'an 
835  des  Séleucides  (.j->'t  de  J.-C).  Al  Mondhir  III  (lien  ma  essamas 
Dou'Ikarn.iïni,  AÀaacvoafo;  des  chroniques  byzantines)  régnait  a 
Hira  et  Hamieh,  au  centre  de  l'Arabie,  de  51 1  à  .'iCO.  Au  moment  de 
l'arrivée  de  la  mission  grecque  à  Ramieh,  Mondiiir  venait  de  rece- 
voir du  roi  juif  des  llomériles  (le  texte  l'appelle  seulement 
lj;^>ii— 1  l^iiic,  viflliO  d-Khamiria)  une  lettre  dans  laquelle  il  se 
pi.iinl  det.  cliréliens  et  demande  à  Mondhir  de  les  poursuivre.  Si- 
méon de  son  côté  fait  dans  sa  lettre  le  récit  des  persécutions  et  mas- 
sacres exercés  [tar  le  roi  juif  sur  les  chréiieiH  de  la  ville  de  Nagrfin 
et  il  réclime  le  concours  du  roi  d'Llhiopie  Kousfiia)  pour  prolé-'er 
les  catholiques  d'Arabie. 

1.  1,0  nom  cbt  égyptien,  Ark-anion^   ^     ^    \  ,—^   •  serment  d'Ammon  »  ? 

2.  t;»'itc'  Iciiro,  écrite  rn  syriaf|in',  se  trouve  avec  une  traduction  latine  et  de»nn- 
ti-sdnn.s  le  recueil  d'AsHoinani  {Hi'il.  on'cit'.,  l.  I,  in  f\  lUmi',  171t»,  \^.^6t^,  16  en- 
Innoc»  in-8).  lillc  csi  tiès  loneunmfni  onalyséo  dans  lt|rccucil  dci  UoHiiniisles  (octo- 
bre, t.  X.  p.  700i.  —  V.  /.DMH,  1S77,  |>.  302,  1S8|,  p.  13  et  s<|. 


i,i:s  Lisri:s  iiov.vi.i-.s  i.iiiioi'ii  ■  \i;  -  \(]'.) 

On  sait  pnr  le.sdociiincrils  ar,'il)es  quo  \o.  roi  jiiil  cm  .|ii.-siiofi  (■lau 
Ziiiiili  il)ii  AiiirDzoïi  Joscf,  surrioiniiK'!  AV;//7i.s-,  <(  le  frise  '  •,  d'oi'i,  par 
ahri'vi.ilion,  l'a[)|)('llati()ii  (i(!  Dzou  ou  Dou-NowAs,  ^Jy  ^i,  soiisla- 
(|uelle  il  eslIiabilueilcMiionl  d('!sign(j-  chez  los  Aralics;  ks  <;(Tivains 
grecs  el  syriaques  Iranscrivcnl  ce  nom  p;ii'  A-jvacr,-.  Ou  trouve  dans 
les  mômes  auteurs  un  personua},'e  à  peu  prés  conteFiiporain  niipelû 
Dimian,  Dimiun,  Dimnos,  Daiunus,  (|ui  est  représenlé  connue  un 
roi  dos  llouiérilcs.  Plusieurs  savants  modernes  ont  cru  devoii-  l'i- 
denlilier  avec  Dou-No\\;is. 

Uuantaii  nom  ilu  vainqueur  de  Dou-Nowàs,  il  varie  suivanlles 
chioni(iues.  Sim6on  Holli  Arshain  ne  l(!  nomme  pas.  Les  annales 
éthiopiennes  M'appellent  Kâlùb,  ^Irt.'fl  :,,ir.  wJli,  Kàleb,  tandis 
([u'ilest  dcsii^né  dans  les  documents  aiahes  et  grecs  sous  N;  nom 
de  Elesbaa,  l'^lelsbalia. 

Ce  dernier  mot  a  été  écrit  de  diverses  manières  par  les  auteurs 
conlemporains,  mais  ce  sont  plutôt  des  variantes  orthographiques 
sans  importance,  ainsi  'EXs^gâa,-,. 'KXecÇï,-  et  'laXaT^^ota? '.  Procope 
donne  la  forme  'EXXriffOeaTo;  avec  0  pour  6  ;  les  chroniques  armé- 
niennes écrivent  Elisbahaz  et  Elesbowan.  Il  est  difficile  de  mécon- 
nailie  ridi'nlité  de  toutes  ces  variantes  avec  le  mot  éthiopien  Ela 
Atsbelia,?iA  '  hX''{\ih  s  fréquentdans  l'onomasli(iue  royale  et  qui 
figure  notamment  liste  m  A  à  la  place  correspondant  à  peu  près  à 
Kàlèl)  sur  la  liste  m  H.  Les  clironi(|;ies  indigènes,  rédigées beauco.p 
plus  lard  d'après  des  liad;tions  oialesou  même  des  documents  écrits 
perdus,  mais  d'origine  monacale,  ne  connaissent  (jue  le  nom  sé- 
mitique Kàleb,  nom  sacré  que  prit  Ela  Atsbeha  (piand,  après  son 
expédition  en  Arabie,  il  se  retira  dans  un  couvent.  Kâleb  et  Ela 
Atsboha  sont  donc  le  même  personnage. 

Les  historiens  arabes,  grecs,  syriaques,  et  les  légendes  populaires 
éthiopiennes,  ont  fait  connaître  en  détail  tous  les  épisodes  de  l'in- 
vasion du  sud  de  l'Arabie  par  l'armée  abyssinienne. 

40.  —  Attiré  par  les  plaintes  des  chrétiens  martyrs  de  Nagrân, 
encouragé  par  l'empereur  Justin  qui  lui  envoya  le  prince  chrétien 

1.  Paul  d'Édesse  le  nomme  mesrùk,  qui  a  le  môme  sens,  joeumo. 

2.  Dzou,  Dliou,  Uou.ji  est  la  particule  arabe  qui  est  spéciale  aux  princes  himya- 
rites;  clic  parait  avoir  le  sens  de;«  maître,  possesseur  de  »,  et  se  rattache  au  relatif 
himynrite  za.  —  Cf.  Malévy,  Jour».  a«a/.,  juin  1873,  p.  ^50  et  /i09. 

3.  V.  notamment  le  Synaxare  étliiopiea  cité  par  Dillmaun,  /.  G.  des  Axumit. 
Reic/ts,  1880,  p.  45. 

li.  V,  W.  Fell  dans  i^DMG,  1881,  p.  iSet  sq. 


17(1  HKVIK    VU  :ilKo|.ii(;|Ml  K. 

ilfla  Mec(|uc,  D.iiis  !l(tii  IVa'IliAii  ',  K;^U'l)  KIchb.i,  nrcjjarln  du  nc^^'iis 
d'Aliyssinii'.  rasscinMc  iiiu'  l1(tUt»  lOnsidc'M.iMi'  dans  li's  dilTtMcnls 
poiliîili'  Nàci'  Ziilarl  KIh.'i  |'U's  Adulis,  fraticliil  la  iikm"  llnii^rc  à  la 
lAltMle  70,(»00  hoinmos*  cl  dcMianiUf  à  (ili  illAlikali  sur  la  cnW  de 
Zi'Itld,  l'ii  Aral)i.(Ma(;(nidii.  I.c  V»mii(Mi  «si  envahi,  In  ville  ilc  Dlia- 
pliar  lomhe  au  iioiivoir  des  i;iliio|tiens,  Don  NowAs  .s'eiifiiil  el 
péril  dans  les  llols  Çtili  de  J. -(',.).  Aiial,  |)iiis  Ahralia'  el  Ahluain, 
Yaksihii  el  Mesrrtk  pouvcrneiil  siicees^iveinenl  ronune  vice -rois  au 
noui  d(  l'AliNssiiiie  jusipic  vers'iTli,  é|io.|unà  la(|uellc  les  Iliniyariles 
aidés  des  Perses  Sassanidcs  chassèrent  il  leur  lour  les  Ahyssins, 
l'an  -Ki  du  ri'i^uc  de  Khosroès  1  .Nowsliiiwûn  i'i|ui  ré;,'na  de  Ti.'JI  à 
57U)  \ 

'il. —  Quoh;ues  chroniqueurs  parlent  encore  d'une  {guerre  (jui 
eut  lieuenlre  Aksonodon  el  Andas.  Jean  d'Ainida,  (''V(\jue  d'Kphèse 
(r)78',  raconte  la  guerre,  «bellum  Inler  Xenodoneu»  Iiidoruui  re- 
gem  et  inler  Aidng  alterum  IikUm'  inlerioris  regem  )),el  plus  loin 
((  rex  Elhiopum  Aidug».  11  dislingue  aussi  Xenodon  de  Dimiou  : 
«  Aidug  rébus  cuui  Xenodone  composilis,  ileruni  adversus  IJiinio 
nem  regem  llomoritaruni,  (jui  et  ip>-i  "x  Indis  numerantur,  bellum 
suscepil'.  » 

Ainsi  Aidug  fait  d'abor.l  la  guerre  au  roi  i]c>'  Indes  iiuinnift  X-î- 
n'  don  ou  Axonodop,  puis  >e  tourne  contre  Diininn,  r(U  des  llonié- 
ritcs,  donl  il  est  également  vainqueur. 

Ce  môme  roi  Aidug,  qu'on  peut  lire  aussi  Andiig,  est  appelé 
"AvSa;  dans  Malala,  'AvSâo  d.ins  Tliéoplianc  et  Cédrénus.  C'est  tou- 
jours, comme  on  voit,  même  confusion  dans  l'orthographe  des 
noms  propres;  d'où  la  difTiculté  d'interprétation  et  d'identilication 
de  ces  deux  noms  Andas,   Xénodon.  Adad  ou  Andas  est  indiciué 


1.  Maçotidi,  l'rnutrt  d'or,  trad.  B.   do  Mcynard,  t.  I,  p,  130,  et  III,  p.  167. 
D'après  Procope,  Molala  et  Jean  d'I-lphùse,  lus  causes  di;  la  u'ui>rre  &eraiL'tU  toutes 

diffcrcntes.  V.  Full,  mémoire  cité,  p.  15,  note. 

2.  Le  canlifiue  étliiopien  sur  la  prisf  do  NagrAn  «lit  120,000  guerriers.  D'apr^s  le 
mOmc  document,  le  roi  Juif  til  tendre  une  ciialuc  d'un  rûté  &  l'autre  de  la  nier  Houge, 
dan»  un  endroit  rewwîrré  appelii  Madik,  pour  emp<^clier  la  flotte  chrétienne  de  passer; 
il  ne  fallut  ri«ii  moins  que  Tint'  r>en  iun  divine  pour  hriser  la  cIimIih'  (V.  Fell,  mém. 
cité,  p.  07-72). 

3.  D'aprts  Maçoudi  (III,  p.  167),  la  date  d<-vrait  ùtre  reportée  <n  iO?.  Georpo 
(iJe  Aflfiiofium  inipenit,  Uerolini,  1833,  p.  W;  a  discuté  ce  point  de  chronoioS 
gie. 

i.  Je  cite  la  traduction  latine  d'apK-»  les  Bullandisles,  octob.,  t.  \,  p.  600. 


i.i;'<  i.isiKS  luivM.r.s  iViimoi'iknmis,  171 

coinino  roi  des  AksinniU;s,  pa^iXeù;  'KÇ(.);m'to)v  (Throphanc),  on  ili; 
riiidc  iiilriii'iin*  (Jean  (rK|ilii"'S(;),  Il  r<l  ovidcril  (pic  noii«;  .ivons 
;iiï;ii/(;  ;i  un  mol  altcMr  (.'t  ([n'il  ne  Iniil  jias  coiiiiitcr  trouver  tel  '|iifl 
sur  l(!s  lisles  royales  ahyssiniennes. 

Il  csl  possilili'  (|ti('  Av'>i;  soit  [)our  Ai/oa;,  et  alors  on  aurait  le  roi 
(■'lliio|ii('n  Aniida,  Kla  Ainida,  nu  des  prédéecsseiirs  de  Kalêh  Klels- 
bilia  (III  M,  n "  îi),  e'esl  l'opinion  de  M.  W.  Fcll  ;  ou  que  la  vraie, 
foruK!  soit  Adad  et  rciuésente  Kla  Adliana  (III  A,  n"'  i  et  \ï),  ce 
sont  les  ex[)licalions  de  Hlau  (XI)MG,  LSI).),  p.  TiOO)  el  de  Pnelorius 
(ni("^nu'  recueil,  1870,  p.  0:2(1);  ou  enHii()u'il  faille  lire  A:to7;:  on  au- 
rait dors  le  roi  Ared  (II  Ii,  n"'  1,  8),  l'Arialde  Maroudi,  un  des  noms 
du  successeur  de  Uou  Nowàs  (v.  .vM/yra,  §  10),  c'est  la  lecture  que 
propose  W.  Gulsclimid. 

A2  — Quant  au  mot  Xénodon,  employé  par  Jean  d'Épiièse,  on  a 
voulu  en  l'aire  une  corruption  de  Dou  Xowâs  (Fell,  p.  18),  mais  il 
a  élé  dénionlré  avec  plus  de  vraisemblance  (jue  ce  prétendu  nom 
propre  n'étail  antr«'  qu'une  sorte  d'épithéte,  formée  des  mots  £;o) 
"Ivowv  «  roi  de  l'Inde  exiérieure  »  (Mordtmann,  /  )s8l,  p.  700),  par 
opposition  au  «  roi  de  l'Imle  intéi  ieure  »  ^Kvoov,  Andug. 

Dans  les  chroniques  liyzanlim  s,  les  contrées  de  l'extrême  sud  ou 
de  l'e vil éme  orient  reçoivent  souvent  le  nomgénéi-ique  de  «  Indes». 
L"Klliiopie  est  l'Inde  intérieure;  le  pays  des  lloniérites  est  l'Inde 
cxléiieuie.  Ces  dénominationc,  outre  qu'elles  sont  erronées,  ne  sont 
même  pas  constantes,  el  nous  avons  vu  ci-dessus,  à  propos  de  Fru- 
mentius,  combien  étaient  confuses  et  naïves  les  connaissances  géo- 
grapln(|ues  des  auteurs  du  vi**  siècle  de  notre  ère  pour  tous  les  pays 
endeliors  du  cende  de  l'empire  romain  d'Orient.  Du  reste,  Letronne 
a  déjà  e\pli(iué  tjue  la  confusion  de  l'fnde  avec  l'Étliiopie  remonte  à 
Homère  et  aux  poètes  grecs  '.  Je  me  rallie  très  volontiers  à  l'cxpli- 
calion  de  M.  Mordtmann  sur  la  formation  des  mots  Xénodon  el  Andug. 
Dans  celle  hypothèse,  Xénodon  et  Andug  ne  seraient  pas  des  noms 
de  rois,  mais  de  simples  ethniques  pouvant  s'appliquer  à  n'importe 
quels  souverains  d'Arabie  ou  d'Kihiopie,  el,  par  suite,  l'exiiédition 
contre  Xénodon,  roi  des  Indes,  et  celle  contre  Dimion  ouDimian,  roi 
des  llomériles,  ne  forment  qu'une  seule  et  môme  guerre.  Rester;ii[  à 
savoirs!  la  guerre  de  l'Abyssinie  contre  Dimian  est  la  même  que 
l'expédition  de  Kàleb  contre  Dou  Xowàs.  Je  crois,  au  contraire,  <iuc 
Dimian  est  un  personnage  distinct  de  Dou  Xowàs,  comme  lui  roi  des 

1.  Aaul.  (Jesjnscr.,  1830, f p.  158. 


17i  IIKM  K     Vlli:ill.(>l.(M.lol  K. 

Ilitiiirrilos  ',  ni.iis  niiti  riiMii-  .i  ce  drrnii'r  ol  (kii',  coiisniiictit,  t'-liMii. 
iicr  ;i  1.1  f.imouse  piHM  II"  |ii<tvo.]ii(''p  par  If  massacre  îles  cliiiiniis  à 
N.ij,'!  fin.  I/t*\amiM)  ilc  ii'llc  i|ii(*sli(»ii  est  en  dehors  de  notre  sujet  ;  nous 
verrons  eependanl  plus  loin  une  rnonuiie  étlimpienue  de  i'épiitjue 
païenne,  antérieure  par  eonstSjuenl  de  deux  siècles  à  Dou  NowAs  cl 
i|ui  porle,  nu  revers,  lies  proli.ddeiiien!  le  l)ii>te  et  le  nom  d'un  Di- 
luian. 

K.    DP.iill.N. 
{La  suite  pro'-hnincmciit.) 


1.  On  trouve  des  Dini&u,  Doman,  Dalimii,  dans  les  roi»  liini}  .irites  citL^s  par 
Ilamdani.  V.  Muller,  Sinl-nnif).  Slu)lirii,inn,  p.  113,115,  etc. 

L'inscription  liimyarite  de  Hisn-Ghor.'ib,  encore  ni.tl  lue,  mai»  qui  relate  un  épi- 
sode dos  guerres  avec  les  I-;ihio|iieiis,  pourrait  bien  se  rapporter  à  ce  Diinian,  au 
lieu  de  Dou  Nowas.  V.  ^ur  cette  inscription  datée,  Ilali'vy,  Jotirn.  ntutt.,  juin  1873; 
Fell,  ZDMC,  1881,  p.  38,  etc. 


suit    \A. 


(;I5(HII'K  DU    DKS    IVVr.OlJKS 

AU  FliilNTON  OIUKNTAL  1)1;   l'AI{Tlli;.\()N 


I 

Tout  lo  iiiondo  connaît  Ui  i^roupe  côlobni  auqui-l  Vi.scuiiii  a  1^ 
premier  donné  le  nom  des  Parques.  «  Je  pense,  disail-il  dans  un 
mémoire  adressé  à  Lord  KIgin,  (\\ni  ces  trois  déesses  sont  les  Par- 
ques; elles  présidaient,  suivant  la  mythologie  grecijue,  ;i  la  nais- 
sance aussi  liien  «ju'à  la  mort;  elles  étaient  les  compagnes  d'Ilitliyia, 
déesse  des  aceoucliements,  (  t  clianlaieiit  les  destinées  des  nouveau- 
nés'.  »  Le  fronton  oriental  du  Farlhénon  représentant  la  nais- 
sance d'Atliéné,  l'illustre  anliiiuaire  italien  trouvait  naturel  d'y 
placer  ces  divinités  de  la  naissance,  au  milieu  des  autres  dieux  et 
déesses  rassemblés  pour  fêter  l'avénemenl  au  monde  d'Atliéné 
sortie  tout  armée  de  la  léle  de  Zeus. 

Celte  première  explication  resta  longtemps  presque  la  seule.  A 
part  Leakc  et  Weber,  qui  proposaient  d'autres  noms-,  tous  les 
archéologues,  tant  anglais  ([u'allemands,  jusqu'en  18l.j,  se  rangè- 
rent ù  l'opinion  de  Visconti.  Welcker,  qui,  lui  aussi,  l'avait  adoptée 
d'abord,  fut  le  premier  (}ui,  en  1845,  y  porta  une  atteinte  sérieuse 
en  proposant  de  remplacer  les  noms  des  Parques  par  ceux  des  lilles 
de  Cécrops.  Son  avis  entraîna  celui  d'Overbeck.  Malgré  celte  double 
autorité,  la  dénomination  proposée  pa  V.cconti  est  resiée  la  seule 
populaire,  moins  peut-être  pour  ce  qu'elle  vaut  en  elle-même  que 


1.  Mémoire  su/-  des  ouvrages-  de  sculpture  du  Part/trnon,  par  le  chevalier  E.  Q. 
Visconti  (Paris,  1818  ,  p.  32. 

2.  Voir  daus  Micliaiilis  {Der  Par theiioit,  Leipzig,  1871,  p.  105;  le  tableau,  complet 
jusqu'à  cette  époque,  des  différentes  explicatioDS  des  figures  du  frontou  orit-iiUl. 


17  i  RKVUK   AnCHÉOLOGlOrP. 

parce  qu'aucuDo  autii',   parmi  collos  (|iii  ont  ôlô  proposées  depuis, 
n'a  pu  i^lro  «''lablie  sur  tics  ar^'uinenls  assez  pliusiMes. 

l)i'  ce  côti'  du  Hliiii,  nous  pensons  l'aire  le  seul,  parmi  les  écrivains 
qui  se  sont  occupés  du  Parlhénon,  (|ui  n'ail  pa>  adop'.é  l'opinion  de 
Viscoiili  '.  Nous  reconnaissons  volonliers  i|ue  les  noms  proposés 
par  nous  un  peu  à  la  lé}:('rc  ne  n;érilaienl  pas  délre  adojités.  En 
revanche,  un  crilii|nt'  allemand,  luul  en  nous  Iraitanl  assez  mal, 
a  bien  voulu  reconiiailre  (|ue  nous  avimis  liicn  jugé  en  si;:nalanl 
le  caraclére  voluptueux  des  liguns  d(Mit  il  s'agit  comme  incom- 
patible avec  celui  des  sévères  divinités  dont  on  h  ur  avait  donné 
les  noms  -. 

Le  livre  où,  avec  plus  d'enthousiasme  (luc  d'expérience,  nous 
nous  étions  livré  à  léluile  de  Phidias  et  île  son  iruvrc,  était  écrit 
depuis  longtemps,  et  nous  nous  occupions  d'autres  travaux,  (juand 
le  liasir  I  d'une  lecture  nous  lit  tomber  un  jour  sur  un  passage 
de  Pausanias  dans  lequel,  à  tort  ou  ;\  raison,  nous  avons  cru  voir 
un  trait  de  lumière.  Voici  ce  passage;  il  fait  partie  de  la  description 
des  peintures  de  la  Lesché  de  Delphes  : 

«'  Au-ilessous  de  Phèdie,  Ch  loris  est  couchée  sur  les  genoux 

deTh}ia.  On  ne  se  trompera  pas  en  pensant  (jue  ces  deux  femmes 
ont  été  liées  de  leur  vivant  par  une  affection  singuliéie.   Chloris 

était  d'Urchoménc  en   Héotie.  Quant  ii  Thyia (il  y  a  ici  une 

lacune  dans  le  texte  grec).  Une  autre  tradition  rapporte  (|ue  Thyia 
fut  unie  à  Po?eidon,  et  que  Chloris  fut  l'épouse  «le  Néicus,  (ils 
de  Poséidon.  Près  de  Thyia  se  tient  Procris,  lille  d'Krcchtheus^...  » 
N'y  a-t-il  pas  queltjuc  chose  de  singulièrement  caractéristique 
dans  l'attitude  respective  de  ces  deux  femmes,  dont  l'une  est 
couchée  sur  les  genoux  de  l'autre  (tcriv  èirxy.z/.lvxi'^-ii  XXoipi;  £ri  toT; 
Buîa;  yj^oizi] ,  et  CD  décrivant  la  pose  de  ces  deux  figures  de 
Polygnote,  Pausanias  ne  semhle-t-il  pas  avoir  décrit  celle  de  deux 
figures  de  Phidias  qui  font  partie  de  notre  groupe? 

Les  termes  mêmes  dont  se  sert  ici  le  périégète  montrent  à  (jucl 
point  cette  altitude  de  Thyia  et  de  Chloris  lui  avait  paru  carac- 
tèristiqtie  et,  pour  ainsi  dire,  unique  dans  les  re|trè-enlations  de 
l'art,  en  ce  sens  que  cas  deux  femmes  .seules  avaient  pu  être 
représentées  dans  un  rapport  aussi  intime. 

1.  l'Iiidias,  sa  vin  et  xrs  ouvraynf,  Paris,  1801,  p.  240  et  (•uivaiitcs. 

2.  l'i  Icrscn,  I)ir  Kuiist  il  fi  l'/iniliut  nm  l'ari/irnnti  unit  zii  O/i/mpiu,  Brrlia,  187H, 
p.  131.  .M.  l'elereen,  duut  la  publication  ost  puHtcricturc  à  cvllt;  de  M.  Miclia<"lis.  ro- 
coniiali,  dans  lut  troi^t  figures  dont  il  s'agit,  llcsiia,  Aphrodite  et  l'eillio. 

3.  l'ausauias,  X,  1!'J,  5. 


SUH    LE   GIlOl  l'K    DIT    DES    PARQUES.  17.'» 

II 

On  se  (IcMiiaïKlc  naliirclliMiicnt  si  la  jiréscncc  de  ces  deux  fciiiinos 
peut  Cire  jiisliliùc  sur  un  fioiilon  du  Parthônon.  C'est,  en  tlTcl,  la 
preiniric  (jucslion  (|ui  se  [mm'. 

Je  ferai  riMiianiuer  daijord  i|u'clles  font  partie  toutes  deux  de 
la  légende  alhônienne.  C'est  à  ce  lilre  évidemment  qu'elles  figu- 
raient dans  les  peintures  de  Delphes  au  milieu  d'un  i,Moupe  tout 
alliénien,  entre  IMiédre,  l'épouse  (Je  Tliéseus,  el  l'rocris,  lille  d'Krecli- 
llieus,  et  qu'elles  y  occupaient  ensemble  une  place  émincrite. 

Voyons  maintenant  ce  qu'étaient  ces  deux  femmes  q:ii  semblent 
avoir  formé  un  couple  si  uni,  et  (|uels  étaient  au  juste  leurs  rap- 
ports avec  Athènes. 

Pour  ce  (jui  concerne  Cliloris,  cela  va  tout  seul.  Cliloris,  épouse 
de  Néleus,  est  la  mère  des  Néléides.  Suivant  Homère,  Cliloris, 
femme  d'une  grande  beauté,  était  lille  d'Ampliion,  (ils  d'Iasidas, 
qui  régnait  sur  Urcliomène  '.  Néleus,  lui,  était  lils  de  Poséidon 
et  de  Tyro,  lille  de  Salmoneus  -.  De  leur  mariage  na(|uiient 
douze  lils,  (jui  tous  périrent  de  la  main  d'Héraclès,  à  l'exception 
du  seul  Nestor,  qui  fut  roi  des  Pyliens,  célèbre  par  sa  longue  vie, 
par  sa  sagesse  et  par  son  éloquence.  On  connaît  son  rôle  dans 
Vlliadr.  Or  les  Néléides,  chassés  de  la  Messénie  par  les  Héraclides, 
se  rélugiérenl  dans  l'Attique,  où  ils  trouvèrent  une  nouvelle  patrie. 
Godros,  le  dernier  roi  d'Athènes,  fils  de  Mélampos,  était  un  des- 
cendant de  iNéleus  et  de  Cliloris,  et  plusieurs  des  grandes  familles 
d'Athènes,  telles  que  les  AIcméonides  et  les  Pisistralides,  s'attri- 
buaient la  même  origine  ^. 

Cliloris  pouvait  donc  prendre  place  sur  le  fronton  du  Parlhénon, 
où  elle  aurait  représenté,  avec  de  vieilles  légendes  religieuses  el 
nationales  dont  elle  était  la  personnification,  cette  tradition  d'an- 
ti(iue  hOï^pitalilé  dont  Athènes  était  si  fière,  el  qui,  dès  la  plus 
haute  antiquité,  avait  contribué  à  sa  grandeur  et  à  sa  puissance  *. 

Ouant  à  Thyia,  les  textes  qui  la  concernent  ne  semblent  pas  très 


1.  Odyss.,  XI,  283. 

2.  Ihicl.,  XI,  254;  Diod.  Sic,  IV,  68. 

3.  Hérodoti",  V,  65;  Puiisaii.,  11,  18.  V.  aussi,  pour  l'importance  des  Ntîltiidesdans 
l'histoire  de  la  Grùce  primitive,  Grote,  Uiatoire  de  la  Givce,  Irad.  frauç.,  1. 1,  p.  12U 
et  suivantes. 

a.  Thucydide,  I,  2. 


ITii  ni-.viK  aui:mkolo<;kh'k. 

nonihtviix,  tM  il  osl  fikhcux  (lUft  relui  Ar  I'ausnnia<5,  cilt'  pitordcin- 
ment,  se  trouvt»  imilili^  à  l'ciKlroil  le  plus  inliMcssant  puiir  nnus. 
Voyons  pouilanl  rojjuc  nous  pourrons  apprentlrc  d'olle  ailleurs. 

Ilèsioili'  parle  (riinc  Tliyia,  (ille  do  Drucaiion  '.  Pausanias  la  fait 
dans  un  endroit  (peut  iHn;  esl  ce  la  tradition  pertiuc  dans  la  la- 
cune) nile  de  Casialios,  maîtresse  d'Apollon  cl  mère  de  Delplios-, 
et  ailleurs  épouse  de  Poscidoti  (c'est  le  passage  cité).  Tour  Héro- 
dote'', clic  cft  lille  de  ('éphissos  et  anianle  de  Poseiilon. 

Plulanjue  nous  dit'  que  les  Tliviades  jouaient  un  i(Me  très  im- 
portant dans  les  solennités  delplii(jucs,  et  (juc  seules  elles  comi)re- 
naient  le  sens  de  certaines  cérémonies. 

Jiis()u'ici  nous  avons  alTaire  à  une  divinité  lluviale  ou  marine, 
pourvue  d'un  rôle  divinatoire,  mais  qui  n'a  rieii  d'alliénien, 
puJMjue  le  Céphissos  dont  il  est  ici  cjuesiion  esl  le  tlcuve  de  la 
Btotie,  non  la  rivière  de  l'Aitique. 

Cependant  Pausanias  nous  apprenti  encore  que  les  Tliyiadcs 
étaient  «  des  femmes  de  l'Allique  qui  allaient  tous  les  ans  au  mont 
Parnasse  célébrer,  avec  des  femmes  de  Delphes,  des  or},'ics  en 
l'honneur  de  Dionysios  ')). 

Ce  texte  sudil-il,  avec  la  place  occupée  par  Thyia  dans  les  pein- 
tures de  la  b'sclic  de  Delphes,  pour  lui  donner  droit  à  monter  à  ce 
fioulon  ilu  Parlliénoii,  en  compii^nie  de  la  mèie  des  Néléides,  son 
inséparable  amie,  et  pour  l'y  faire  symboliser  les  antiques  relations 
des  sanctuaires  de  l'Atticiue  avec  le  temple  de  Delphes,  relations 
célébrées  quelquefois  par  les  poètes  d'Athènes'"?  Je  ne  sais;  je  n'ai 
pas  mieux. 

Je  me  bornerai  à  ajouter  que  Thyia  et  Chloris  se  trouvent  par  les 
textes  en  rapport  avec  Poséidon,  l'antique  possesseur  de  l'Allique, 
((u'Alhéné  esl  venue  chasser  de  son  vieux  domaine.  Si  l'on  pensait, 
avec  Heulé,  que  la  composition  du  fronton  oriental  a  dil  procéder 
de  l'hymne  d'Homère  >ur  la  naissance  d'Alhèné",  et  si  l'on  admet- 
lait,  comme  l'auteur  de  cet  article  l'a  proposé  autrefois,  (|ue  d'un 
cAlé  de  la  nouvelle  divinité  se  trouvaient  les  dieux  de   la  terre  ;\ 

1  .Fragment  '27,  édition  Diiiut,  |).  .'jU. 

'J.  i'aiDian.  X,  G,  h. 

.1.  Utrodot.  VI,  178. 

k.  (Jiiiiit.    fjnir.^  12. 

0.   l'uuBan.  X,  6,  'l- 

0.  l'ar  exemple  dans)'/'»;/  d'Lurii'ido. 

7.  Airopote  d'Affit-ner,  t.  Il,  p.  05,  tiû 


siu  i.K  giiouim:  dit  lus  i'ahoi'K'î.  i77 

qui  1.1  honiiii  nouvelle  était  apiiortéo.  [lar  Iris,  tandis  i\\u'  de  l'autre 
l'Iaiciil  ie,^  dieux  marins  à  (|ui  la  Viclnirc  armonrail  la  fin  de  leur 
ré^ne,  Tliyia  et  Cliloris  n'iiiiciaicul  a.vsc/.  liiiMi  dans  l'cxiiiicalion 
(|Uf  nous  avions  d()nn(''e  de  ce  troulon  (uiculal,  et  i|ui,  micore  au- 
jounriiui,  nous  paraîi  [louvuir  èlre  maintenue  dans  son  ensemble, 
siniiii  dans  ses  détails  '. 

On  sait  (|ue  M.  Hiunn,  dans  sa  rcstilulion  du  fioiiton  orienlal,  a 
plis  é^'alemenl  pour  son  point  de  départ  l'Iiymne  XXVIII  d'IIiunère. 
Dans  >ii)n  explication  savante,  les  filles  de  Cécrops  proposées  par 
Wcltkcr,  les  noms  de  l'.mdrosos,  Tliallo  et  Auxo  mis  en  avant 
par  M.  Micli;iëli.s,  ceux  d'lIo>[ia,  d'Apliro  li(c  et  de  Peitlio  aux- 
quels s'est  arrêté  M.  Petcrsen,  sont  remplacés  par  les  trois  Ilyades*. 

Si  nous  écrivions  une  dissertation  en  régie,  nous  aurions  à  nous 
évertuer  pour  détruire  les  explications  précédentes,  et  pour  démon- 
trer de  notre  mieux,  à  grand  renlort  de  textes  et  d'arguments,  que 
la  nôtre  est  la  véritable.  Peut-être,  si  jamais  nous  acbevons  la 
nouvelle  édition  de  notre  livre  sur  Pliidias,  à  laquelle  nous  tra- 
vaillons d'une  manière  fort  intermittente,  devrons-nous  nous  livrer 
à  (iuel(|ue  travail  de  ce  genre,  qui  sera  plus  ou  moins  heureux. 
Aujourd'hui  nous  ne  voulons  écrire  (|u'une  simple  note  à  propos 
de  deux  seules  ligures.  Toutefois,  nous  ne  voulions  pas  manquer 
l'occasion  de  réclamer  pour  la  critique  française  (pour  Heulé,  non 
pour  nous)  l'honneur  d'avoir  vu  la  première  que  l'explication  du 
fronton  oriental  devait  ôtre  cherchée  dans  l'hymne  homérique. 


III 


On  nous  demandera  ce  que  nous  faisons  de  la  troisième  figure; 
car  il  y  en  avait  trois  dans  le  groupe  dit  des  Parques,  tel  que  l'avait 
reconnu  Visconli.  Welcker,  en  proposant  les  trois  filles  de  Cécrops, 
M.  Hrunn  avec  ses  trois  Ilyades,  sont  restés  fidèles  à  cette  idée 
d'une  triade  dont  les  trois  membres  seraient  en  relation  intime  et 
nécessaire.  Les  groupes  formés  par  iMil.  iMicliaëlis  et  Petersen  sont 
plus  artificiels,  et  il  ne  serait  peut-être  pas  bien  difiicile  de  trouver 
quelque  divinité  à  maître  avec  Thyia  et  Ghloris  dans  un  rapport  de 


1.  Voir  cette  explication   dans  Phidiaa,   sa  vie  et   ses  ouvrages,  p.   255  et  sui- 
vantes. 

2.  Lne  analyse  du  travail  de  Brunn  sur  les  sculptures  du  Partliénon  a  été   don- 
née dans  la  Revue  archéologique,  livraison  de  juia  1875,  p.  395  et  suiv. 

XLIV.  —  12 


ï"8  nF.vuK  MiciiKdi.oiMorr. 

raison  loi  (|im>  relui  on  se  trouve'  Pnndrosos  avec  Tuallo  ou  Ilosli.i 
vis-à-vis  il  Apliroilitc. 

Nous  no  le  rlioivluTons  pis  aujoiir-l'liui.  lîifti  i\\\c  dans  le  lifssin 
lie  ('arroy  <'(M(i'  Iroisièino  lijjurc  soil  placée  dans  un  rapport  assez 
t'iroit  avee  les  dt>nx  autres,  puisipie  le  bras  de  Tli>ia  vient  s'aeeou- 
dcr  sur  son  genou,  on  peut  copindant  Ten  sépaier juscju'à  nouvel 
ordro.  Si  noire  cxpliralion  du  fronton  oriental  pouvait  t^lrc  admise, 
re  serait  dans  le  ryele  des  divinités  marines  i|u'il  faudrait  chercher 
un  nom  à  lui  attribuer. 

Je  n'ajouterai  plus  (ju'un  inul  : 

Iheii  (]ue  né  à  Tliasos,  Polygnote,  anu  de  Cimnn  et  amant  de  sa 
sonir  Elpinice,  jieut  être  considéré  comme  un  arlisie  atiiénien.  Sa 
connaissance  des  antiijuilés  athéniennes  ne  saurait  ôlrc  mise  en 
doute,  non  plus  (jue  le  (  aractère  éjdriue  et  la  f;ravilé  religieuse  de 
son  slyli'.  Il  est  très  probable  (|uc  Phidias,  (jui,  suivant  les  calculs 
d'Olfried  Muller',  devait  avoir  environ  vin.uM  trois  ans  lors(jue 
Polygnote  arriva  à  Athènes,  dut  s'inspirer  de  si  m.miéie  grandiose; 
peut-être  prit-il  des  leçons  de  lui.  On  sait  (lu'il  commenei  par  la 
peinture-,  fl  n'y  aurait  donc  rien  que  de  naturel  h  ce  {|ue  Phidias 
se  fût  inspiré  de  Polygnote  et  eût  transporté  au  Partliénon  des  ligu- 
res athéniennes  de  la  Leschc  de  Delphes. 


L.    DE    HUNCHAUD. 


1.   De  Phidiœ  vita  et  operibuv,  3. 
*i.  PliD.  Hiit.  7iat.  XXXV,  34. 


EXl'LiilîATlON    DES 

TROIS  TIJMIJLUS  l)i:  KEllVKUN 

EN    PLOZI<:VET    (l'I.XISTÈRE) 


Si  on  suil  la  voie  qui  mène  du  liourg  de  I'Iozl'vcI  à  (Juimper,  à 
trois  kilomètres  au  nord-csl  de  Plozévet,  en  face  la  borne  kilomé- 
tri(|iie  II"  18,  on  Iroiivc  trois  tiiiiiulus  dans  une  lande  à  cent  rin- 
(|uaii(e  mètres  au  nord  de  cette  roule. 

Disposés  sur  une  ligne  droite  orientée  sud-est  et  nord-ouest,  ces 
trois  monuments  sont  éloignés  l'un  de  l'autre  de  30  k  So  mèlres. 

Les  propriétaires  du  village  de  Kervern,  sur  les  terres  duquel  ils 
s'élèvent,  m'y  ayant  autorisé,  le  mois  de  mai  dernier  j'en  ai  fait  l'ex- 
ploration en  commençant  par  celui  du  milieu. 

PREMIER  TUMULUS 

De  deux  métros  de  liant,  sur  vingt-cinq  mètres  de  diamètre.  Nous 
avons  ouvert  à  son  sommet  une  large  tranchée  de  six  mètres  de  dia- 
mètre, dans  laquelle  nous  n'avons  pas  lardé  k  liouver  des  frag- 
ments de  charbon,  quelques  perculeuis,  quelques  éclats  de  silex, 
parmi  lesquels  deux  petits  gralfoirs  finement  retouchés,  et  d'nsscz 
nombreux  fragments  île  poterie  ayant  appartenu  à  des  vases  faits 
sans  le  secours  du  tour.  Ces  fragments  sont  en  terre  gros>ière 
et  mal  cuite,  mêlée  de  gros  grains  de  quartz.  L'un  d'eux,  à  cou- 
verte rouge,  est  décoré  de  chevrons. 

A  un  métré  dix  centimètres  sous  le  sommet  du  tumulus,  nous 
avons  rencontré  qurhjues  pierres  posées  avec  ordie;  les  faisant  lais- 
ser en  place,  nous  les  avons  dégagées  avec  soin.  <  l  avons  bientôt 
reconnu  ([u'ellcs  font  pnrljp  d'une  construction,  en  forme  de  fer  à 


ISO  RF.VUE  ARCHKOLOtilyUK. 

clicval,  t'Iovt^i"  h  pioiresst^.hcs.  Suivant  W  pniiilour  d»'  cr\[r  pro'^sicir 
maçdnntMic,  nous  ronslnloii*,  a;»rès  rompli't  (lt''{?a{ç(»inrnl.  (iii'i'llc 
a  (luatrt'  iiirliis  de  (li.inn^lrc  l'Xlrrifiir  ol  (in't  Ile  laisse  .-in  milieu  un 
espace  liliiT,  de  deux  luMres  de  diaiiiélre,  rempli  île  terre, 

Vidanl  avec  soin  cette  sorte  (te  cliainlire  à  ciel  ouvert,  iiniis  y  re- 
nianiuons  les  traces  d'nn  rofTre  en  bois  de  1"',K0  de  Ion;.,'  sur  ir.fiO 
de  |>rofo:ideur.  Dans  ce  coffre,  orienté  est  et  ouest,  fait  avec  ducliéne 
doMl  les  restes  ont  encore  six  centimètres  d't'paisseur,  avait  été  dé- 
posé, sur  le  dos,  le  corps  d'un  indivilu  iiiliuiné  la  téieà  l'est,  re^rar- 
dant  le  couclianl. 

L'écraseinenl  produit  lorsque  le  coffie  a  cédé  à  la  pression  des  ter- 
res accuuiulées  sur  lui,el  au.ssi,  prnhililemcnt,  la  nature  du  sol,  ont 
mis  le  squelette  en  si  mauvais  état  que  nous  n'avons  pu  en  recueil- 
lir aucune  partie.  Pi  es  de  lui,  dans  le  coffre,  nous  n'avons  remar- 
qué aucun  dépôt  d'oltjet  mobilier.  Dans  les  terres  qui  l'entouraient, 
nous  avons  seulcnieiil  relové  quelques  morceaux  d'un  vase  fait  à  la 
main,  en  terre  serrée,  affectant  la  forme  de  deux  cônes  troucjués 
réunis  par  la  base,  si  bien  que  la  panse  en  était  beaucoup  plus  large 
que  la  base  et  (jue  l'orifice. 

Dans  l'enceinte  de  pierres  qui  entourait  celte  sépulture,  existait, 
au  nord-ouest,  une  solution  de  continuité  de  0'°,(tO  de  large.  C'est 
sans  doute  parcelle  sorte  de  porte  qu'on  a  procédé  à  l'inliuinationà 
ruitérieiir  de  cellL  cliamlire  à  ciel  ouvert,  après  iiuoi  on  a  recouvert 
le  tout  de  terre  et  formé  le  tumulus  que  nous  venons  de  fouiller. 

Four  terminer  le  récit  de  cette  exploration,  ajoutons  que,  parmi  les 
pierres  faisant  partie  de  l'enceinte  circulaire  recouverte  par  le  tu- 
mulus, nous  avons  relevé  deux  pierres  brisées  à  concasser  le  blé  et 
un  broyeur  ayant  sans  doute  servi  à  cet  usage.  Disons  encore  que  le 
cercueil  en  bois  renfermant  les  restes  du  défunt  était  rond  en  des- 
sous, ne  portail  aucune  trace  de  clous,  cl  repo>ail  sur  un  lit  de 
lerre  jaune  compacte,  établi  à  l^jOO  au-dessous  du  sommet  du  tu- 
mulus, c'est-à-dire  à  peu  prés  au  niveau  des  terres  environnantes. 

DEUXIÈME  TUMl LUS 

Le  lendemain  \(j  mai  nous  avons  entrepris  l'exploration  d'un  se- 
cond tumulus  faisant  partie  de  ce  groupe,  celui  le  plus  à  l'ouest  des 
trois. 

Un  peu  plus  considérable  que  le  précédent,  il  mesure  ti  ente  mé- 
ires  de  diamètre  sur  trois  mètres  de  liaui. 


i:xi'i.()ii\Tio\  i)i;s   iitdis  riiMULis  ne.  KKnvrnN.  iHi 

Ay.'int  |ir;itii|iir!  au  soiiimcl  iinn  Innchi^o  à  rid  ouvnii  ilc  Imii  rnr- 
ties  (II'  (liaiiirlie,  nous  avons  hiculôl  ivinaniur,  parmi  les  tcircsijue 
iciiiiiciil  nos  Iravailloiii-s,  dis  restes  de  cliaihon,  des  ('•elals  de 
silex  parmi  lfsf|uels  plusieurs  petits  grattoirs,  tels  (pic  relui  dessiné 
ici   eoiitre,  et    de  nombreux   morceaux  de  pf.teri.',   fra},MMciils  de 


Fie.  1. 

vases  faits  sans  le  seconi-s  du  tour,  en  terre  gros^iôre  mcMée  de  gros 
grains  de  quartz.  La  plupart  sont  de  couleur  rouge. 

Nous  rencontrons  aussi,  à  r",-i()  au-dessous  du  sommet  du  tumu- 
lus,  des  pieri'es  plaeées  avec  ordre.  Les  dégageant  avec  soin,  nous 
mettons  à  découvert  une  lonstruction  circulaire  tout  à  fait  sembla- 
ble à  celle  f|ue  recouvrait  le  tumulus  fouillé  la  veille. 

Cette  construction,  faite  à  pierres  sèches,  aiïecte  la  forme  d'un  fer 
à  cheval,  ainsi  qu'on  peut  s'en  rendre  compte  en  jetant  les  yeux  sur 
lo  plan  par  terre  ffig.  2)  du  tumulus  et  de  la  sépulture  intérieure.  Au 
point  n,  dans  sa  partie  sud-est,  elle  n'a  pas  moins  de  1°',00  de  large, 
tandis  que  venant  en  se  rétrécissant  vers  ses  deux  extrémités  E 
et  E'  pour  laisser  en  A  un  passage  libre  de  Om.f)-)  de  large,  en  ces 
deux  points,  les  murs  n'ont  plus  que  0",60  de  large.  La  partie  inté- 
rieure du  fer  h  cheval,  mesurant  2", 70  de  diamètre,  est  remplie  de 
terre  fine. 

Enlevant  cette  terre  avec  soin,  nous  reconnaissons  qu'un  coffre 
en  bois  a  été  placé  au  centre  de  ce  cercle  dans  une  orientation  est  et 
ouest.  Le  bois,  qui  n'est  antre  q^e  du  chêne  dont  les  restes  décom- 
posés ont  encore  une  épaisseur  de  huit  centimètres,  ayant  pourri,  le 
couvercle  s'est  affaissé,  en  serrant  entre  lui  et  le  fond  les  restes  du 
défunt  qu'on  y  avait  placés. 

Ce  cercueil  de  bois  a  été  fait  d'un  tronc  d'arbre,  préalablement 
creusé,  sur  lequel  on  a  posé,  sans  clou  aucun,  un  morceau  de  bois 
destiné  à  préserver  des  terres  environnantes  le  dépôt  qu'on  lui  a 
contié.  Moulé  dans  la  terre  glaise,  sur  laquelle  nous  l'avons  trouvé, 


182  ni:vLK  Anr.iiÉOLOGiQUF. 

h  forme  du  tronc  tr.ubro  ol  l'iu-ore  assi'Z  distincte   pour  (jue  nous 
puissions  en  prendre  les  mesures,  ijui  sont  :i",'tO  de  loiiy  sur  0"',l)0 


fST 


Fi?. 


de  large  à  rexlrémilé  ouest,  l'",10  de  large  .1  ro\tié:iiilé  est,  et 
0'",50  de  profondeur. 

Dans  ce  cercueil  avaient  été  placés  les  restes  du  défunt,  iiiliumê 
sur  le  dos,  lesdeux  bras  le  long  du  corps,  la  tête  à  l'est,  regardant 
lecoucliant.  Près  de  liii,;isa  gauche,  à  la  linnteur  do  la  tôle.étaitun 
vase  en  terre. 

Ce  vase,  fjit  à  la  main,  sans  le  secours  du  tour,  est  d'uno  terre 
grossière  et  assez  mal  cuite.  Il  olTrc  la  représentation  de  deux  cônes 
tronqués  réunis  par  la  hr^.sc  vers  le  milieu  du  vase, de  telle  sorte  que 
la  panse  aO",!?  de  diamètre,  tandis  que  roridcc  n'en  a  que  qua- 
torze et  la  hase  huit  'voir  li^'.  3;.  De  ()'",I0  de  haut,  il  a  une  anse  cl 


i;xr'i,i)ii\riiiN  ni:s  riiuis  ti  mi  i.is  d,.  IvKiivi.u.n.  J8j 

est  (iéforésurloiil  le  poiirlDiir,  dans  sa  iiioitit-siiiirricuie,  doclicvrons 
Iraccs  à  l'rljaucliuir.  I/aiisc;   iiorlc  la  inriiic  ornciiieiitaliori. 


Il  renfermait  sans  doute  des  aliments  plac(^'s  près  îles  leslesdu  dé- 
funt, touchante  preuve  de  la  croyance  à  la  transmigration  des  âmes. 
Ces  aliments  avaient  môme  dû  ôlre  cuils  dans  ce  vase,  à  en  juser 
par  les  restes  d'une  matière  noire  calcinée  que  nous  avons  pu  y  n- 
cueiilir,  adhérente  aux  parois  intérieures.  Nous  avons  confié  ces  ré-o 
sidus  à  un  chimiste  pour  leur  analyse.  Il  n'a  malheureusement  pa 
tenu  à  la  promesse  qu'il  nous  avait  laite  et  ne  nous  a  pis  donn é  k s 
résullals  de  l'expérience  que  nous  lui  avions  confiée. 

L'enveloppe  de  bois  qui  renfermait  les  restes  du  défunt  était  à 
2°',80  au-dessous  du  sommet  du  tmnnlus,  et  le  cercle  en  pierres  qui 
l'entourait  reposait  sur  un  lit  préalablement  préparé  avec  des  pier- 
railles et  de  la  teire  argileuse. 

Parmi  les  pierres  de  la  muraille,  nous  avons  rencontré  deux  pier- 
res à  concasser  le  blé,  l'une  entière,  l'autre  brisée,  deux  broyeurs  et 
plusieurs  percuteurs,  les  uns  en  quartz, les  autres  simples  galets  pr  is 
h  la  grève  distante  d'environ  six  kilomètres. 


TROISIÈME   TDMDLUS 

Cette  seconde  exploration    terminée,  le  lendemain  17  mai  DOUg 
avons  entrepris  celle  du  troisième  lumulus,  celui  le  plus  à  l'est  du 
groupe. 

Mesurant  vingt-cinq  mètres  de  dia  n  èlir  ^ui  lici?  n  èties  de  haut 


184  Kl  ML    AKt.hKOLUCIQt'K. 

nous  l'nvons  allaqurcoiumolos  pivcrMlciits,  eu  pi;ili(iu;iiil  .m  suiiiiiicl 
aiu'  liaiiflii'C  î'i  ciel  ouvert. 

Il  nous  a  (lonn(^  ;i  rmiéi  ii'iir  iin<'  sépultuir  stinlilable  à  (l'ilos  i|uc 
recouvraieni  IC';  tlmix  :iulrt-«  lumulus  explorés  la  vcillf  il  lavaiit- 
veillo,  c\*sl-à-(lin',  à  (r",'.>()  au-lcssous  du  soniim'l,  uik'  conslnirlion 
h  pierres  si-ches  (Mï  formo  de  fer  .'i  cheval  el  à  riiitt'rieur  de  celle 
conslruclion,  A  2",80  au-dessous  du  poinlleplns  élcvr  du  luniulus, 
un  rercueil  en  Ikhs  de  l^.'JO  de  lonp  sur  (>'",riO  de  |ii(tf(iiideur,  oi  ieiité 
eslelouosi,  dans  letjuel  «"'laienl  les  restes  d'un  Sipielette  prés  du(|uel 
nous  n'avons  remarqué  aucun  objet  mobilier. 

Dans  l'enveloppe  de  ce  tumulus  nous  avons  aussi  recueilli  de 
nomhi  eux  frayuienls  de  poterie,  appart.'uant  à  des  vafcs  i^aossiers 
faits  sans  le  secours  du  tour;  des  éclats  de  silex  p::rnii  lesquels  plu- 
sieurs petits  grattoirs,  des  morceaux  de  charbon  el  (jnelques  percii- 
icurs,  et.  i-armi  les  pierres  de  la  muraille  euluiiranl  la  sépullun", 
trois  frajimenls  de  pierres  à  concasser  le  blé. 

J"ai  pensé  que  l'exploration  de  ces  trois  tumulus,  oITiant  des  sépul- 
tures intérieures  d'un  genre  nouveau,  méritait  d'être  .signalée,  et  si 
j'avais  à  dater  ces  monuments,  je  n'hésiterais  pas  ù  les  rappoiler  à 
l'époque  dulironze.  L'ornementation  et  la  forme  du  vase  recueilli 
dans  l'un  d'eux  lue  porte  à  le  troirc  par  comparaison  avec  les  nom- 
breuses poteries  que  j'ai  recueillies  dans  les  sépulluns  (|ui  dans 
noire  département  m'ont  fourni  des  armes  en  bronze. 

l'AUi,  nr  cnATr.i.iii-.H. 


BULLETIN    MENSUEL 


DE    L'ACA  DILMI  E     DES     IiNSClUPTIONS 


MOIS   D  AOUT. 


M.  Egger  communique  à  l'Acadômie  quelques  observations  sur  une  ins- 
cription fuiK-raire  d'Ath(;îneï-,  publitie  par  M.  Komanoudis,  correspondant 
de  riiislitui,  dans  le  dernier  fascicule  do  \'A(/icnrrum  hcUmiqu- .  Celle 
inscription  se  compose  d'une  liste  de  soldats  morts  dans  diverses  guerres, 
dont  la  date  se  place  dans  les  trente  ou  quarante  annces  qui  précèdent  la 
guerre  du  Péloponèse,  ef  de  deux  discours  à  l'honneur  de  ces  soldats. 
M.  F.gger  signale  l'inlénît  que  présente  celle  liste  pour  les  historiens. 

M.  Bergaigne,  maître  de  conférences  à  la  faculté  des  lettres  de  Paris,  lit 
un  rapport  sur  les  inscriptions  envoyées  du  Cambodge  par  M.  Aymonier. 
La  plus  ancienne  de  ces  inscriptions  portant  une  date  est  de  6ti7  apr("!s 
J.-C  ;  elle  provient  d'Ang.  Chumnik  et  nous  fait  connaître  les  nom>  de 
cinq  rois  qui  se  suivent,  et  dont  le  dernier  porte  le  nom  d'Iaijafarman. 
Une  autre  inscription,  mais  non  datée,  est  plus  ancienne;  elle  fait  men- 
tion de  l'un  des  cinq  rois  précédant  layavarman,  et  a  été  gravée  par  les 
ordres  de  son  Q!s;  une  autre  série  se  rapporte  à  un  prince  ayant  régné 
de  87o  à  880.  Toutes  ces  inscriptions  sont  du  plus  haut  inlér.n  et  la  mis- 
sion de  M.  Aymonier  commence  sous  les  plus  heureux  auspices. 

M.  Dieulafoy,  ingénieur  des  ponis  et  cbaussées,  chargé  d'une  mission 
en  Perse,  communique  à  l'Académie  les  résultats  de  ses  recherches. 

M.  Léon  Ilenzey  communique  ;\  l'Académie  une  note  dans  laquelle  il 
développe  le  résultat  de  ses  premières  études  sur  les  antiquités  chal- 
décnnes  rapportées  par  M.  de  Sarzec.  La  Revue  archéologique  publiera  en 
entier  cette  intéressante  communication. 

M.  H.  de  la  Blanchére,  professeur  à  l'école  supérieuie  d'Alger,  commu- 


|gO  UKM'K    ARCHKOLOGIOL'K. 

nique  quelques  rt-^sultats  de  la  mi^8io^  lioul  il  a  clé  clmrp<^  r.'ooinmcnl 
dans  le  sud  d.'  la  colonie.  Il  oroil  avoir  découvert  les  tombeaux  d'une  d>  iias- 
lie  indij:.ne  c/.r<'ricH'i.\  puissanlo  dans  la  Maurétanie  césaii.-nne,  vers  le 
\*  ou  VI*  sii^cle  de  noire  ère. 

M.  Ferdinand  Delaunay  lit,  au  nom  de  M.  H..nianel  du  Caillaud,  une 
notesur  rongiMf.la  Ki/c'uret  la  ./<i/.-  de  la  loi  romaine  connue  sous  le 
nom  de  Junia  Sorlnina.  ''"^* 


SOCIÉTJ-:  NATIUNAU-: 

DES   ANTIQUAIRES  DE  FRANGE 

PRÉSIDENCE    DE    M.    G.    DUPLESSIS 


VlCE-rnESIURNT. 


SÉANCt:   DU    6    SEPTEMBRE. 


M.  le  miniïtre  do  1j  guerre,  en  réponse  à  une  Icllre  Ju  prcbident,  in- 
forme la  Sûciélé  que  la  porte  de  Lille,  à  Valencicnues,  n'est  pas  acluellc- 
menl  iiie-iucée,  mais  que  la  courline  intérieure  doit  teule  être  démolie,  cl 
que  les  Corsés  doivent  être  remplis  par  uusure  hygiénique. 

M.  Courajod  remet  sur  le  bureau  un  exemplaire  du  catalogue  de  la 
collection  Timbal,  récemment  acquise  par  le  .musée  du  Lou\re,  et,  de- 
puis la  veille,  exposée  dans  les  galeries. 

il  lit  ensuite  un  travail  sur  les  objets  d'art  recueillis  par  Alexandre 
Lenoir  et  dispeisésun  peu  partout.  Il  signale  parliculiéreineni  à  l'atten- 
tion un  lion  en  marbre,  qui  devait  accompagner  la  statue  de  l'amiral 
Chahut,  exposé  depuis  de  longues  années  dans  une  cour  de  l'itcole  dci 
beaux-arts,  et  il  émet  le  vœu  que  cette  figure  vienne  retrouver  le  monu- 
ment qu'elle  accompaguait  primitivement. 


NOLVKLLES  AliCllKOl.OfilOll'.S 


F.T  cnr.HKSpoM)  \N(:i: 


I.c  savant  auteur  d'un  mnnuel  du  Droit  publir  romain  depuis  li 

fondation  dv  Home  jmqu'à  Jm^tiiiien,  qui  on  est  .'i  sa  ii''  iMiliou,  M.  V.  Wil- 
Icuis,  profes-mir  ;\  runivctsiii'  de  Louvain,  vioiil  de  puldicr  le  second 
voliimo  <hi  priii  1  ouvrage  qu'il  a  oiilri'pris  sur  le  S<^nat  de  la  irpul/lique 
romaine.  Ce  livre,  dont  le  tome  premier  a  obtenu,  dans  toute  l'I'urope 
sivantp,  un  succôs  nii'rilé,  se  trouve  ainsi  complot.  Dans  la  section  pre- 
mière, l'autnur  montrait  conim>'nt  le  ?i^nat  se  recrutait  ;  ici  il  expose,  avec 
la  mi'ni''  am[i|enr  d»^  prouves  et  la  m<?mo  critique,  sesattriluilions  et  son 
rAle  politique.  Nous  c<p»?rons  que  la  h>vue  aura  l'occasion  do  revenir  sur 
cet  ouvrage. 

M.  Arnould  Locard,  membre  de  l'Académie  dcl.ynn,  vient  de  pu- 
blier une  Irc'S  curieuse  Notcmr  une  tombe  romaine  troun^r  à  Lyon  et  rew/ier- 
marif /'^  r7ja.<;7i/o  (/'m/i  c«/"'ni(.  Dins  une  si'pulturc  qui  a  été  ouverte  sur  le 
haut  de  la  colline  de  Fourviéres,  pour  les  travaux  du  chemin  de  fer  funi- 
culaire de  Saint-Jusl,  on  tRTi-,  on  a  recueilli  un  objet  qui  n'avait  pas  at- 
tiré tout  d'abord  l'attention  qu'il  mérite.  C'est  un  disque  de  plllro  très 
dur,  mêlé  de  nain,  qui  avait  été  brisé,  sans  druie  par  d'antiques  viola- 
teurs de  la  tombe  ;  quand  on  en  a  rapproché  le?  morceaux,  on  y  a  reconnu 
un  moulage  pris  sur  nature,  quelques  heures  après  la  mort,  du  visage 
de  rcnTaiit  de  dix  ans,  Claudia  Victoria,  dont  le  cippe  était  couché  au- 
dessus  df  la  fosse  qui  conlonait  losossements  et  le  i>ortraif.  On  lira  avec 
un  vif  intérêt  les  détails  (juo  donne  .M.  Locard  .«^ur  la  manière  dont  il  a 
r.iit,;i  l'aide  de  cet  original  précieux,  un  moule,  dont  on  pourra  tirer  au- 
tant d'épreuves  que  l'on  voudra  de  celte  image  \ivaiiti'  irune  jeune 
lyorinaisoqui  est  morlo  il  y  a  quinze  ^ièiles. 

La  Rouie  arcll^'ulo^;iqu(î   croate  (Virslmik  lirvolshniia  mkcologicrs- 

koga  druztia),  qui  est  cnlrée  récemnicnt  dans  sa  quatrième  annéo,  conti- 
nue de  publier  des  travaux  fort  inlércssants,  trop  peu  acccs.>'il)le8  malheu- 
reuBoraont  à  la  mafR^  dts  lecteurs.  Cfllo  rovue  continue  d'élrc  rédigée 


NOUVKLLKS   AltClll JiLOGIQL'KS.  189 

[).ir  M.  Siiue  l-jiilii.-cli,  Ift  savanl  coiisim  \.il('iir  du  Musée  d'Agram.  Pendant 
un  iL'coiil  VDya^'c  clicz  les  Slaves  iiu'-i  idiotiaux,  i;oiis  avons  ou  l'occasion 
tic  vi.>-i(L'f  ce  iiiusi'c  niUL:riiliqii(!rn('Ml  installé  dans  li'  local  de  la  Juyijsla- 
vi7isk<i  iikniltinijn,  cl  nouï  ne  ïaiiriciis  Irop  le  rcconin.aridci' aux  aichrolo- 
gues.  I,c  uiusée  chl  surtout  riciie  en  in.^c  riplioiis  roinain<'ti,  on  numi.->ma- 
tlque  n.iuaiiie  cl  slave.  M.  Ljuhisch  a  donné  la  meilleure  dtîsci  iption  des 
moiinaiiis  sud-slaves  {Opisunic  j:iii"-slitveiiskih  Jiovacu,  Agrarii  187.i),  A 
Ik'lgiade  nous  avons  éi^aleniont  trouvé  le  musée  en  fort  bon  état,  les  mon- 
naies classées  et  décrites  par  les  soins  de  l'en  J.inko  S'-liafurik  et  du  nii- 
nislr'^  actuel  de  l'inslriiclion  publitiue,  .M.  Slojan  .Novakovich.  Dans  la 
capitale  de  la  Bulgarie,  à  Sofia,  un  musée  est  en  voie  d'organisation;  il  ren- 
ferme déj;ï  des  médailles,  des  bijoux,  notanuuent  une  couronne  do  laurier 
en  or  pur,  d'un  travail  Tort  icniaïquable.  Les  Mémoires  de  la  Société  de 
littérature  bult;are  [tubliés  dans  celte  ville  conlienneul  un  précieux  tra- 
vail de  M.  Jireczek  sur  la  géographie  anticjue  cl  l'épigrapliie  de  la  Macé- 
doine. A  riiilippopoli,  la  direction  de  l'instruction  publique  organise  éga- 
lement une.  culleclion  numismatique  fort  considérable,  mais  qui  n'est  pas 
encore  cataloguée.  Si  l'on  bon;;e  qu'il  y  a  quinze  ans,  lors  de  notre  pre- 
mier \o\a;^e  chez  les  louyo-Slaves,  il  n'y  avait  pas  un  seul  musée,  on  re- 
connaîtra les  progrès  considérables  accomplis  dans  ces  contrées  par  la 
science  archéologique.  L.  Lkger. 


P.II'.I.IOCP.AIMMI", 


Collection  Camille  Lécuycr.  Terres  cuites  antiques  trouvées  en 
Grèce  et  en  Asie  Mineure.  .Notice»  par  .M.M.  Fn.  I,BM>nuAM,  J.  dk  WirrK, 
A.  C^RTAii.r,  (;.  >rMi,i  uni T.c.FR,  1',.  lUueLON,  C  I.hciTEn.  In-folio,  Ish-j,  \r*  li- 
vraison, 21  planches,  Uollia  cl  Keuardent. 

Bien  conmio  dfi  tous  lo3  amafnns,  la  collcclion  ('aruille  l.t'ciiycr  cA 
une  des  plus  belles  qui  aient  l'Ié  rurriiéos  dans  ces  ilernii'^ies  années  ;  depuis 
l'cxpo.-^ition  universelle  de  \'^1H,  elle  est  célèbre  pour  la  beauté  des  mor- 
ceaux de  choix  ijui  la  composent.  Klle  n'a  d'ailleurs  pas  cessé  de  s'aug- 
menter dans  les  années  qui  ont  suivi,  et  tous  ceux  qui  l'ont  \isilée  chez 
son  heureux  possesseur  ont  été  charmés  non  seulement  du  mérite  des 
pièces  qui  la  coniposenl,  mais  encore  de  la  simplicité  et  de  ia  bonne 
grAce  a>ec  laquelle  les  huuntuis  en  sont  f.iiis  par  celui  qui  a  su  réunir 
toutes  ccb  œuvre»  d'art  et  qui  est  toujours  prOl  à  les  comuiuni  |uer,  à  les 
laisser  copier,  à  les  livrer  en  quelque  sorte,  comme  utu-  j>ri)pii' té  com- 
mune de  tous  les  gens  de  goû',  à  quiconque,  archéologue  ou  artiste,  se 
montre  capable  de  les  compreuilrc  et  de  les  aimer,  à  quiconque  est  en 
mesure  d'eu  tirer  parti  dans  l'iulérél  de  riii>t();re  el  de  la  science.  Plût  à 
bieu  que  les  collectionneurs  fussent  tous  animés  du  même  esprit!  mais 
combien  il  en  est  qui  se  figurent  qu'un  monument  perd  de  son  prix 
dès  qu'il  est  publié,  et  qui  ne  disputent,  dans  les  ventes,  les  plus  rares 
objet»  que  pour  les  cacher  derrière  des  portes  ei  des  volets  fermés,  pour 
les  confisquer  à  leur  profit  ! 

C'est  cette  même  ouverture  lie  cœur  el  d'intelligence,  celte  même  dis- 
position libérale  qui  a  décidé  M.  C.  Lécuyer  à  entreprendre  cette  pu- 
blication. «  l.c  nombre  de  ceux  qui  ont  joui  avec  moi  de  ces  chefs- J'œu- 
Tre  est,  dit-il,  nécessairement  restreint,  el  c'est  le  public  tout  entier 
que  je  voudrais  as>ocier  à  me>  joies.  » 

Bien  n'a  été  négligé  pour  que  ce  but  fût  atteint.  Voulant  mettre  l'u'u- 
vre  elle-même  du  coroplaste  antique  sous  les  yeux  du  graveur,  c'est  à  la 
pliûtolypie  qu'a  eu  recours  .M.  I.écuyer  ;  il  s'est  ainsi  alTranchi  d'avoir  à 
compter  avec  les  faux  embellissemenis  et  les  trahisons  du  dessinateur  el 
du  graveur.  Comme  tous  les  procédés  de  Iraduclion,  celui-ci  a  ses  défauts, 
sur  le.-quels  il  e-t  inutile  d'insister;  il  déforme  les  parties  saillantes,  plus 
rapprochée»  que  le»  autres  de  l'objectif,  en  les  faisant  plus  fortes  que  na- 
ture; il  donne  des  ombres  opaques  où  disparaît  tout  modelé  et  n\\  se  per- 


ItlIîl.lui.liAi'iiii;.  1<JJ 

dont  loiifps  les  d('îlicaW>ssos  de  l;i  loDchc;  mais  CfS  di-fauls  ppuvcnl  ôire 
tri's  a(t('im(''s.  dans  la  pratique,  par  l'Iiabilett:  de  l'oiiéraloiir,  par  liî  soin 
avec  lequrl  il  cluii^ii  1 1  pose  et  par  les  adrosses  d'un  tirage  approprié  au 
caractère  du  niominicnl.  Ici,  tout  \r  pos^ilde  a  rlé  fait,  dans  les  ulclicrs 
de  pliololypic  du  Moitiicur;  si  l'a-ipect  général  ganh;  toujours  une  certaine 
molle.-sf,  luiil  au  moins  est-on  ((Mlain  (lu'il  n'y  a  pas  h\,  entre  l'œuvre 
niCnie  et  le  connaisseur  qui  clioiclie  à  l'appréciei-,  un  intermédiaire  qui  ait 
osé  substituer  sa  manière  personnelle  à  celle  du  statuaire  antique.  L'image 
ne  peut  remplacer  l'original,  en  présence  duquel  l'œil  se  rend  mieux 
compte  delà  dilVércnce  d  -s  plans  et  de  la  \aleur  des  reliefs  que  n'a  pu 
le  faire  la  glare  photographique  ;  ceil.'-ci  n'a  pas  le  secret  de  ces  instinc- 
tives et  rapides  corrections  dont  l'esprit  s'acquille  sans  mûme  en  avoir 
conscience;  elle  ne  donne  pas  cette  transparence  des  ombres  à  travers 
lesquelles  le  re;4ard  perçoit  cl  saisit  toutes  les  finesses  du  contour;  mais 
au  moins  est-on  certain  que  le  slyle  est  bien  celui  du  modèle.  Il  siiKit  de 
rei:arder  atleutivenieut  ces  planches  pour  saisir  les  particularités  de  goût 
et  de  fiire  qui  distinguent  les  coroplastes  laiiagréens  de  ceux  de  l'Asie 
Mineure;  or  croyez-vous  qu'il  aurait  été  aisé  de  trouver  un  graveur  qui, 
par  le  car;iclére  de  son  dessin  et  par  le  travail  d>!  sa  pointe,  aurait  aussi 
netlcm-^nl  marqué  une  dillVrence  qu'il  csl  plus  aisé  de  sentir  que  de  dé- 
finir? Le  parti  qu'a  pris  M.  Lécuyer  élait,  dans  l'espèce,  le  plus  sa^'C  et 
le  plus  sur  auquel  il  pût  s'arrûter;  il  avait  plus  chance  d'obtenir  la  sin- 
cérité de  l'im.ige  en  choisissant  un  photogiaphe  attentif  et  loyal  qu'en 
essayant  de  diriger  la  main  tanlôt  routinière  et  tantôt  capricieuse  d'un 
artiste  qui  se  serait  refusé  peut  étic  à  déférer  aux  observations  et  à  re- 
connaître la  compétence  de  celui  qui  l'aurait  employé  et  payé. 

A  chaque  planche  est  jointe  une  de  ces  notices  descriptives  et  explica- 
tives dont  le  modèle  a  été  donné  par  de  Longpérier  dans  celles  qui  ac- 
compagnent les  planches  du  Musée  Napoléon  III,  tradition  qu'ont  suivie 
avec  beaucoup  de  goût,  dans  les  Monuments  de  l'ait  antique.  M,  Olivier 
Hayet  et  ses  collaborateurs.  Conmie  dans  ces  ouvrages,  la  notice  est  plus 
ou  moins  étendue  suivant  que  le  monument  est  plus  ou  moins  impor- 
tant, ou  pluiôl  suivant  que  l'interprétation  en  pi  Ole  plus  ou  moins  à 
la  discussion.  Nous  avons  particulièrement  remarqué  celles  qui  sont 
duesà  M.  Cartault;  nous  signalerons  les  pages  où,  à  propos  de  char- 
mantes figures  de  Tanagre,  il  discute  une  opinion  émise  par  M.  Hcu- 
zey  sur  les  Groupes  qui  reproduisent  Vallitnde  de  l'Encuti/lé.  Ce  n'est  pa« 
ici  le  lieu  d'entrer  dans  le  débat;  nous  nous  bornerons  à  dire  que  le»  rai- 
sons alléguées  par  M.  Cartault  pour  ne  voir  dans  ces  figures  que  la  repré- 
sentation d'un  jeu  cher  aux  enfants  et  aux  jeunes  gens  sont  très  bien  pré- 
sentées et  nous  paraissent  avcir  beaucoup  de  force. 

11  ne  nous  reste  qu'a  exprimer  le  désir  de  voir  cette  publication  se  con- 
tinuer avec  autant  de  rapidité  que  le  permettront  les  nécessités  d'une 
bonne  exécution.  C'est  un  vrai  service  que  M.  Lécuyer  rend  aux  savants 
et  aux  artistes  que  de  meitre  ainsi  à  leur  portée  et  à  leurs  ordres  tous 


iOi  IIKVUK   ARCUKOLOUlnn:. 

les  mommieiiU  qu'il  no^^cde,  li.loleim'iil  ri|»odiiil!»  el  accoinjmgnAs 
dû  loulo*  les  c%i»ln.alions  el  do  l)U9  les  rcnsci-^UfiueMls  lu'ccssuiros; 
iioui  lui  en  cxpriiitous  noire  reconnaissance,  au  non»  de,  lous  ceux 
qui  nuronl  rocra>ion  d'apprendre,  en  reuillclanl  ce  vidume,  A  mieux 
lonnallic  le  j:énie  grec,  hi  rii  lie  de  ressources  el  si  créateur  jusque  dans 
lea  petits  ouvrn^'cs.  et  à  l'aiiuiT  d'un  atnoiir  plus  tendre  el  plus  >if  A  me- 
sure qu'ils  pénélrcronl  j'Ius  a\aul  dans  snu  inliniilc '. 

G.  TtuiuiT. 


1.  Au  moiiioiit  ou  nous  iinH  >iis  sous  prps»r,  rct  arlirlo  (cni  di'|iuis  six  mos,  nous 
rocevons  la  iocondt;  livroitoo,  que  uous  n'nvoiis  pas  tMitorc  eu  lu  u  u»|  »  il'uainiruT. 


LE 

l\mm  ET  LE  OROUI'K  D'ATIIKNA 

A    l,\    FKISI',   IIK   l'KilC.A.MH 

SUiTli    ' 


V 

ÉTUDE  PSYCHOLOGIQUE  DU  LAOCOON. 

Nous  avions,  cinns  un  article  précédenl,  cxposi;  l'iiiflucncc  que 
la  musc  tiayiijue  de  Sophocle  ou  de  ses  imitateurs  a  dû  exercer  sur 
la  ciéaiion  du  groupe  du  L;iocûon.  Mais  ce  n'est  pas  seulement 
l'inspiialion  môuie  (|ui  peut  èti'e  euipruiitée  par  les  sculpteurs  aux 
poètes,  ce  sont  aussi  c('rt;iins  procédés. 

Nous  avions  vu  que,  si  le  domaine  propre  du  sculpteur  est  l'es- 
pace, si  ses  objets  sont  de:,  corps,  il  peut  cependant  avec  ces  corps 
innnuhiles  dans  res[)ace  f;iire  sentir,  jus(ju'à  ua  certain  point,  la 
succession  des  actions  dans  le  temps.  Dans  llapliaèl,  les  plis  du 
costume  indiquent  ([uel  a  été  le  niouvenient  qui  piécédait  celui  que 
le  maître  a  re[)réseuté.  Ce  procédé  rappelle  le  passé  et  fait  pressen- 
tir l'avenir.  De  même,  les  artistes  de  Hliodes  ne  pouvaient  repré- 
senter que  la  calisti-oplie  du  drame  de  Laocoon;  mais,  dans  cette 
crise  môme,  ils  ont  su  choisir  trois  moments  qui  nous  font  toucher 
au  doigt  et  à  l'œil  la  succession  teriiliante,  rapide  et  fatale  des 
actions. 

Le  plus  jeune  des  enfants  est  déjà  livré  au  froid  delà  mort; 
l'aîné  s'elToice  vainement  de  fuir;  ciiez  lui  la  duuKuir  n'est  encore 

1.  Voir  les  numéros  de  juillet,  août  et  sopteuibre. 

Octobre  M.jv.  —   {'^ 


l'ji  RF.VUE   Al\(:ilK<U.(»GI(.U  K. 

que  morilt\  Aiini  nnu!;  nssislons  liicn  h  une  succession  de  scènes. 
Nou<  l'.issoiis  par  louU's  les  (•iiiolioiis  du  tli  'ii'  l'nial.  Nous  voyons 
la  gr.Klatioii  cl  la  dégrada  lion  nalurelli'S  d(>  siiinViiicos;  plivM  |iu'S 
à  gauclu\  morales  à  droite,  légères  aux  exliéniilôs,  elles  vont  en 
augnu-nt.inl  vers  le  centre,  où  elles  attei}înenl  leur  i>aro\ys!iie  et 
éclaleiil  dans  les  cuiiloisiuns  du  père. 

Pour  bien  saisir  toute  l'action  de  ce  drame  de  marbre,  il  faut  se 
leprùsenler  -pie  Laoï'uon,  la  lùle  ceinte  des  lauriers  d'Apollon,  se 
tenait  debout  près  île  l'autel,  élevé  .sur  deux  marclies,  et  re  prépa- 
rait à  oITrir  un  sacrilice.  Ses  deux  lîls  l'aidaient  dans  ses  fonction*, 
ce  (ju'on  i)eut  coiij.  cturtr  aux  long>  losluinos  de  i)iétre  (pii  glissent 
de  leurs  membres. 

Tout  à  coup  les  deux  serpents  s'approclienl  avec  la  rapidité  de 
l'éclair.  Avant  ipie  leuis  victimes  puissent  même  songer  à  la  fuite 
ou  à  la  défense,  ils  enveloi)pent  les  jambes  et  les  br;is  des  trois 
personnes,  suspendant  tous  leurs  mouvements;  ils  pressent  le  père 
sur  l'autel,  où  le  manteau  sacerdotal  vient  de  tomber,  et  le  blessent 
lui  et  le  plus  jeune  de  ses  lils  d'une  morsure  venimeuse  dont  lelTet 
est  insiaotané. 

Le  groupe  est  donc  absolument  diiïércnl  de  la  description  de 
Vir.u'ile,  où  les  serpents  saisissent  leurs  victimes  tout  babillées, 
couvrent  cnliérement  le  corps  de  Laocoon  de  leurs  anneaux  pressés, 
s'enroulent  deux  fois  autour  de  son  cou,  dardent  leur  baleine 
empestée  sur  son  vi>agc  et  couvrent  d'une  bave  venimeuse  sa  tôle 
ornée  de  lauriers  et  de  bandelettes  sacrées  : 

Perfui-us  sanic  vitlas  atroque  ventuo  ! 

Autant  d'images  repoussantes  (ju'on  saurait  à  peine  représenter  en 
peinture,  mais  (jui  sont  impossibles  à  rendre  en  sculpture.  Uemar- 
quez  encoie  que,  dans  Viigile,  l'unité  de  l'image  est  bri>ée.  Il  dit 
d'abord  les  deux  enfants  étranglés  cbacun  par  l'un  des  ser|)<Mits, 
ensuite  le  père  qui  s'avance  avec  des  traits  pour  les  secouiir  et  iku- 
tage  la  mort  de  ses  fils. 

Ainsi  le  |)^|•e  nous  paraît  encore  plus  intéressant,  puisiiue,  au 
lieu  de  fuir,  il  se  dévoue  on  essayant  de  sauver  la  vie  de  ses  enfants. 
Mais  ce  dernier  Irait  ne  fait  (lu'augiiienter  ee  défaut  il'imiiioralitô 
rcprociiè  [lar  Visconti  au  mythe  de  Laocoon,  tel  qu'il  a  été  compris 
ei  raconté  par  Virgile. 

L'aelion  faiale  du  venin  ei  des  co!iliai:tions  {\cr^  .mij  ents  est  sur- 
tout très  avancée  cbcz  le  plus  jeune  des  enfants.  L'un  des  serpents 


LR    LAOCOON    I:T    LK   fillDUIT,    D'aTIIKNA  .  195 

a  lit"  (li;  s'i  (|ucii(;  I(î  picil  ^r.uiclic  do  l'.iîiir,  lon;,'t''  sn  jaml  c  ilioitt;, 
saisi  It's  jamiies  du  pt'ie,  v.l  cnvcloiipi'!  crWcs  du  pliH  jeune  cnfanl, 
qu'il  vient  mordre  sous  l'aisselle  après  s'ôlrc  appli(ph''  sur  ses 
épaules.  Tout  le  corps  de  la  victime  inlique  (|iic  le  vrnjn  a  fait 
sentir  instaiilanémciit  toute  la  iiuissance  de  sou  action. 

La  mort  commence  sous  nos  yeux  à  délivrer  de  ses  an{,'oisses  cet 
ôlre  faible  et  diMicat.  Nous  rcconnaispons  pourtant  les  douleurs  qui 
viennent  de  le  torturer,  à  la  manière  mécanitiue  dont  il  saisit  de  la 
main  i,'auelie  la  tùle  du  serpent.  Mais  toute  la  résistance  de  la  vic- 
time a  déjà  cessé,  les  mouvements  ne  sont  plus  qu'instinctifs.  C'est 
uiK!  iiiiage  vivante  du  jiassage  de  la  vie  à  la  mort.  La  bouche  vient 
d'exhaler  le  dernier  j-oupir,  h  s  yeux  se  renversent  dans  l'orldte, 
les  traits  se  détendent,  ils  n'ont  plus  même  l'énergie  (h;  la 
souiïrance.  La  langueur  envaliissanle  de  la  mort  est  aussi  très  bien 
rendue  par  la  mullesse  des  chairs,  par  une  sorte  de  laisser-aller 
morbide  que  respire  tout  le  corps.  Cette  impression  devient  encore 
plus  saisissante  si  l'on  donne  au  luas  droit  sa  véritable  restauration. 

Ce  bras  avait  été  brisé  dans  forigind  ;  .Monlorsoli,  un  élève  de 
Michel-Ange,  le  restaura,  et  lui  donna  la  pose  qu'il  a  dans  le 
groupe  du  Vatican.  Mais  celle  restauration  est  malheureuse'.  La 
forme  de  l'épaule,  aussi  bien  que  la  nature  même  de  la  blessure, 
indiquent  que  le  bras  a  dû  retomber  inerte  sur  la  tôte  de  l'enfant 
et  que  sa  main  devait  effleurer  ses  cheveux  de  rextréiiiitô  de  ses 
doigts.  Je  trouve  dans  le  jeune  géant  de  la  frise  de  Pergame,  blessé 
mortellement  par  le  serpent  d'Athéna,  la  preuve  évidente  que  celte 
pose  a  dû  être  celle  de  l'original.  La  morsure  du  reptile  atteint  le 
géant  sous  l'aisselle  droite^,  sa  main  retombe  inerte  derrière  sa  tête; 
ces  deux  actions  sont  exactement  les  mêmes  que  celles  du  plus 
jeune  fils  de  Laocoon.  Seulement  ici  le  reptile  a  entouré  le  haut  du 
bras  droit  de  l'enfant.  Cet  effet  ne  pouvait  être  observé  par  le  sculp- 
teur du  géant.  Les  giandes  ailes  déployées  de  ce  dernier  ne  lui 
permettaient  pas  de  faire  passer  le  reptile  derrière  l'épaule.  Ces 
ailes  étaient  nécessniies  à  leur  lour  pour  équilibrer  le  groupe  et  cor- 
respondre a  celles  de  la  Niké  du  côté  gauche. 

1.  La  véritable  position  de  ce  bras  est  indiquée  parla  icttre  B  dans  laplanclie  XVf, 
qui  accompagre  celte  étude. 

2.  Vnyez  la  plaiiclie  XVI,  lettres  B  et  C.  Dans  celte  planche,  A  et  B  indiquent  la 
véritable  po-e  du  bras  droit  de  Laocoon  et  celui  de  son  fils  (cf.  pi.  XV).  Ces  lettres 
et  les  autres  iodiquent  ai.ssi  les  points  analogues  qui  peuvent  être  comparés  dans 
le  y:roupc  du  Laocoon  et  dans  celui  d'Athéna  (cf.  pi.  XVII).  Ainsi  C  indique  la 
morsure  du  serpent  sous  l'aisselle,  analogue  à  C  de  la  planche  XVII. 


196  ni.vi  i:  AHciii.oi.odini  i;. 

Djus  II'  groupe  (lu  ValuMii,  nniiiiu'  a  la  Irise  de  Pergnnu',  nous 
avons  sous  les  yeux  tli's  n-ptilfs  dinn^  .  leur  aclion  tloii  ('[w  par 
lonsj'quiMil  inslanlant''(',  iniKicuh'tisi'.  On  (Kiil  siMilir  (juo  tout  le 
drame  s'accomplit  dans  l'espace  de  ijuehpies  secondes.  Celle  im- 
jnession  est  aussi  celle  i|ue  l'on  éprouve  au  même  detîré  en  rej^ai- 
(lanl  Iliuélade  '  ou  en  conleniplanl  le  |i|iis  jeune  lils  de  l.aocoon. 
Un  croit  voir  le  serpent  arriver,  envelopicr  l«s  janiltes  des  trois 
jiersonnes.saisir  les  épaules  du  plus  jeune,  le  mordre  el  raiiéantir, 
tout  cela  en  moiu.>  de  Icnips  (juc  nmis  iTcn  mellon-  à  lediri'. 

Le  Danle  seul  a  pu  rendre  avec  des  mots  une  impression  sembla- 
ble, lorsqu'il  dit:  «Kl  voilà  que  sur  l'un  des  damnés,  (jui  était  jués 
de  la  mémeriveiiue  nous,  s'élanç.i  un  serpent  tiui  le  piqua  là  où  le 
col  s'articule  aux  épaules. 

(I  Jinmiis  ni  0  ni  J  ne  s'irriril  iinssi  liir  iju'il  s'i'iijhniiiiKi  t(  bnïlit 
tout  entier,  et  tomba  réduit  en  eeudres  -,  » 

Ici  nous  louchons  du  doi.iri,  bien  mieux  encore  qu'en  lisant  la 
description  de  Virgile,  la  ililTéreace  des  procétiés  du  scDlptoiir  et  du 
poêle.  Dante  nous  lail  sentir  par  la  comparaison  d'une  action  faite 
dans  le  temps  la  teriirnnle  lapidilé  d'une  action  des  corps  dan> 
l'espace,  r/cst  la  phrase  :  Jaiiutis  ni  0  ni  J  ne  s'écrivit  aussi 
vite^  eii'.,  qui  nous  frappe,  nous  saisit,  nous  leriilie,  comme  si 
nous  voyions  la  scène  de  nos  projtres  yeux. 

Mais  le  sculpteur  ne  peut  représenler  cette  rapidité  de  racliou 
dans  le  temps  que  par  des  corps  existants  simultanéinenl  dans  l'es- 
pace. C'est  pouripioi  les  jambes,  le  corps,  le  bras  droit  du  [dus 
jeune  enfant  de  Laocoon  sont  déjà  ceux  d'un  ca  lavre,  les  jambes 
surtout  n'ont  plus  môme  la  force  de  se  coniracler,  elles  pendent 
incites  el  paraissent  n'avoir  plus  desaiii,';  tandis  que  le  bras  g.iu- 
elie  a  conservé  le  mouvement  instinctif  de  répul>ion  cl  de  défense 
.pii  a  précédé.  Le  sculitt(!ar  a  donc  pu,  lui  aussi,  exprinii'r  deux 
actions  qui  se  succèdent  avec  une  rapidité  verligineuse  ilans  le  temps, 
mais  en  les  indi(juant  par  le  inoViMi  îles  coips. 

Le  lils  aine  de  Laocoun  luiiue  le  contraste  le  plus  frappant  avec 
celui  que  fious  venons  de  décrire.  Il  esl  encore  jdein  de  vie  ;  seuls 
son  pii  d  gauche  et  son  bras  droit  onl  élé saisis  par  le  serpent,  el  telle 
est  la  force  de  ces  liens  vivants,  que  nous  pouvons  être  cerlains  (jue 
lui  aussi  doit  subir  le  sort  cruel  de  son  cadet. 


1.  O  nom  peut  dire  doniiii  au  B''ant   d<î    Perfiainc,   parce  qu'il   csl   l'iilvcréaire 
(I  Atliénn. 
•2-  Oinl",  l'Liifer,  cli&iit  WIV,  v.  34  cl  3û  (iraduciiou  ili'  l.anicnnai»}. 


i.K  i.AOfion.N   i.T  r.K  c.itoi'i'K  d'ahuc.na.  !97 

Mais  (l;iii>  II'  iiioiiK'iil  ri'|irr:-,'iilr  l'aîriT'  ('<l  loiil  al)«)i  lir  [lar  I'Iidi-- 
reiir  iiiit!  lui  inspire  le  s|ieclacle  des  souffranrcîs  de  son  pr-rc;.  H  voit 
ses  veines  se  gondcr,  SCS  muscles  se  Iciiilre  ;  il  enlend  h'  cri  liale- 
laiil  de  son  rAle  et  les  os  ipii  ciaqiienl  sous  la  piession  du  ri-ptilc. 
La  piliéct  ranf.:oisse  ((u'il  le  senl  le  fa^^cinenl  au  point  (|u'il  son|,'e 
à  peine  à  hii-nK^uie.  Cat",  s'il  cherclie  h  défaire  le  lucnd  dont  le  ser- 
[leiil  a  lie  son  pied  gancln',  il  le  fait  fcpendatil  d'un(;  laçoFi  pF'esquc 
inécaniipie,  tandis  ipu!  son  esiuil  est  cnlirrcnient  occupé  par  le 
spei'lude  dont  il  est  témoin,  (liiez  lui  l'ilTort  corporel  commence 
si'uli'inenl  ;  les  angoisses  seules  auxi|iicllrs  il  est  vn  [)roie,  voila  ce 
(|u\'Xpriment  toute  sa  pose,  le  mouvement  tli-trait  de  sa  main  gau- 
che, l'expression  de  son  visai,'e  el  la   li.vité  de   son  œil    fasciné. 

Le  geste  de  sa  main  droite  est  tout  spécialement  intéressant.  Le 
bras  a  été  saisi,  envelo|)pé,  comprimé  par  le  serpent;  ?ous  cette  pres- 
sion la  main  s'ouvre  lentement,  i)éniljlement,  suivant  la  crampe  rpii 
commence  à  saisir  les  muscles.  Ce  bras  a  été  bien  restauré  el  l'on 
peut  remarquer  un  elîet  semblable  dans  la  main  et  le  bras  gauche 
d'KncrIade  à  la  frise  de  Ptirgame'.  Seulement  ici  le  bras  est  plus 
puissant  et  il  a  été  saisi  plus  liaut,  en  sorte  qu'on  suit  encore  mieux 
la  pressiondu  reptile  dans  les  gros  musclesetles  veines  qu'elle  fait 
enfler  instantanément. 

L'interprétation  des  mouvements  du  j  ère  lui-même  a  soulevé 
les  opifiions  h^s  plus  différentes.  Pour  abréger  cette  étude  déjà  trop 
longue,  nous  les  lamènerons  to.itcs  à  doux  opinions  contradic- 
toires. 

Les  uns  viulenl  reconnaître  dans  l'cxpiession  du  visage  la  gran- 
deur morale  d'un  héros  qui  supporte  la  douleur  avec  courage  et  sem- 
ble reprocher  au  ciel  le  cliàlimeni  qui  vient  de  ralteindre.  D'autres 
estiment  que  la  douleur  physi(|ue  a  déjà  envahi  tout  le  corps  de 
Laocoon,  qu'elle  le  domine  entièrement,  que  ses  mouvements  ne 
sont  plus  qu'instinctifs  et  que  le  visage  reflèle  seulement  l'épouvan- 
table supplice  (ju'il  endure. 

La  première  opinion,  qui  est  erronée,  vient  en  grr.nde  partie  de  la 
fausse  icstaui-ation  du  briis  droit  due  à  Giovanni  .Montorsoli,  et  d'une 
erreur  de  Leasing. 

Le  corps  de  Laocoon  est  en  proie  aux  plus  \iolentes  contorsions 
que  le  corps  humain  puisse  faire  lorsque  ses  quatre  extrémités  sont 
violemment  occupées,  de  façon  à   ne   [louvoir   s'écarter  du  tronc, 

1.  Comparez  le  mouvement  indiqué  par  la  lettre  G  de  la  pi.inclic  XVI  avec  celui 
qui  est  désigné  par  la  m!imc  lettre  dans  la  planche  Wll. 


108  nr.vn.  AUcmutLoniorn. 

M.iis  cos  moiivcmonts  no  soiil  pas  si'ulcini'iit  satif^  Itiii,  iU  sont  on 
rore  sans  iiili'iilioii.  Ils  in  liiucnl  <|ii»'  LaociMui  a  dt'jà  pciilii  1 1  c^u- 
^l•lence  lie  si?s  oiToils;  il  les  i-oniiniii'  iiistiiii'tivtMUi'Ml,    ini'caniijiie- 
nu'nl;  cc>[  la  lulle  do  l'agoiiio,  l»;  oonilMl»ruii  lioinin.'  alLilô  par  la 
lirrouret  par  l'appitiih  •  de  la  mort. 

La  jaral'O  ^'auolic  osl  orarloo  violt;:iiinonl  du  Irono.  mais  co  n'osl 
pa<  dans  l'inlonlion  do  so  lovor,  do  rôsisicr  ;i  la  loiision  oxorrôc  par 
los  ropiilcs,  rar  daii!;  C(î  oas  lo  pied  ciU  icpdso  ftiiicnicnt  lotilo  la 
pi  into  sur  lo  marbre  du  picdrslal.  Mion  loin  do  laisser  suppo^or  une 
paroillo  aclion,  le  pied  paraît  soulevé  du  sol,  ipiil  n't  lllouro  (jiic  de 
son  oxlrt'niilo. 

La  mémo  olisi-rvation  s\ippli(|uo  oncoro  à  la  jambe  droite.  Elle 
e>l  contractée  au  miliou,  violommont  pressée  on  deux  endroits  par 
rétroinio  du  ro[ililo;  le  ttlon-so  i approche  do  la  base  île  l'aulol,  les 
doigts  se  orisptMii  douloiiroustineiil.  Comme  on  le  vuil,  Laocoon  a 
complètement  perdu  pioti,  il  a  été  forcé  de  s'asseoir,  ou  [)lutôl  de 
tomber  lourdement  sur  l'autel;  ses  jambes  s'abritent  encore,  mais 
sans  pouvoir  opposer  une  résistance  appréciable. 

On  a  dit  que  de  sa  main  gauche  Laocoon  cbcrcliait  à  écarter  le 
serpent  de  son  corps.  On  a  voulu  voir  dans  ce  geste  iiuehiue  chose 
qui  rappelle  le  vers  de  Virgile  : 

Illc  simul  manibns  lendit  divcVcre  nodos. 

.Mais  cotte  appréciation  doit  être  molilioo,  en  ce  sens  .|uo  lo  mou- 
vcuientdo  Laocoon  est  absolument  instinctif  et  pies|ue  involontaire. 
Ce  qui  le  prouve  c'est  que  la  main  saisit  le  serpent  beaucoup  trop 
loin  de  la  télé  pour  pouvoir  exercer  sur  lui  une  action  oflicaco.  Enfin 
Il  main  no  s'écarte  [»as  du  corps,  elle  semble  au  contraire  descen- 
dre sous  l'impression  de  la  douleur. 

Quant  au  thorax,  il  suit  les  conlor>ions  du  reptile.  Le  côté  gau- 
che se  plie  en  an  iére  au  point  (|Ut!  l'on  croit  cnleiidre  craquer  les 
os,  t m  iis  (jue  le  côlé  droit  de  la  poitrine  rossorl  violemment  tendu. 
On  sont  que  ce  lorse  ne  se  lomeltra  jamais  de  cetie  secousse 
qui  lui  brise  les  reins;  que,  malgré  sa  vigueur,  cette  musculature 
ne  pourra  plus  rejuendre  sa  première  élasticité.  Celte  impression 
est  augmentée  encore  par  la  cavilc  résultant  des  coiilraclions  du 
diaphragme. 

Tous  les  mouvements  (|ue  nous  venons  d'analyser  sont  instinctifs, 
sans  résultat,  sans  intelligence,  sans  dessein,  presque  sans  volonté. 
C'est  le  rorp^  d'un  agonisant  qui  gémit,  râle,  s'agite,  se  lord  aiïreu- 


UK   LVOCOON    F.T    tJ!    (IIIMII'K    r)"ATIIl'\  A .  jgQ 

spmotilsoiis  l'eiïorl  d'iiMC  soulTr.inre  itio'.ïc.  Un  ?oul  (^cstfi  s'oppose 
à  ct'llo  conception,  cVsl  (•,(>liii  du  hns  droit,  M.ii.^  loul  ce  Ims  a  ôlé 
reslaiirépar  Monloisoli,  cl  il  est  évidcni,  d';lpI•^.s  loul  cp  ipio  nous 
venons  ■i'('Xpo>cr,  (juMI  ne;  doit  p;is  avoir  eu  la  posr  (|iji  lui  ;,  {.[{. 
donnée  dans  le  },'ri)Ujui  du  Vatican. 

Un  iresle  de  celle  violence  exigcrail  iuk;  pn-ssioii  rorres[iond  mte 
du  pied  dioil  sur  le  sol,  une  vigueur,  une  force  de  résistance  du 
thorax  hc.iucoup  plus  puissante  (|uc  celle  (pie  nous  avons  sous  les 
yeux. 

Il  esl  clair  qut;  le  bras  a  dû  se  couiber  derriôre  la  tôle,  que  Lao- 
coon  saisissait  à  pleine  main  '  ;  ce  qui  est  aussi  le  geste  le  plus  carac- 
téristique du  paroxysme  de  la  douleur.  On  a  trouvé  dans  les  che- 
veux de  l'oii.uMnal  une  large  place  qui  a  été  polie  après  coup  :  c'était 
là  que  reposaitauliefois  la  main  crispée  de  Laocoon. 

Enfin,  autour  de  son  épaule  droite  devait. s'enrouler  rexlréniité  de 
la  queue  du  serpent.  De  celle  l'.içon,  toute  la  pose  de  ce  reptile  de- 
vient plus  naturelle,  tandis  qu'on  la  comprend  à  peine  dans  la  res- 
tauration du  Vatican. 

L'expression  du  visa-e  et  la  jiose  de  toute  la  tète  sont  aussi  d'ac- 
coid  avec  celle  «iouleurqui  ne  raisonne  plus.  Par  une  brusque  con- 
traction du  gian  1  muscle slerno-clcido-mastoïdien,  la  tête  a  été  vio- 
leninirnl  it  jetée  à  L'auciie,  la  bouche  s'ouvre  el  fait  entendre  des 
ciis  inarticulés,  l'œil  tourne  el  la  prunelle  se  renverse  dans  l'orbite. 

Ce|>endanl  ces  traits  ont  été  interprétés  tout  difTéremment  par  les 
anciens  arciiéologues.  Winkelmann  croyait  qu'il  regardait  vers  le 
ciel  pour  lui  deuiamii  r  co!",pte  de  ce  supplice  imiuérilé.  Visconti 
disait  qu'on  pouvait  reconnaître  sur  ce  visage  que  Laocoon  ne  re- 
grettait pas  le  dévouement  dont  il  avait  fait  jireuve  en  frappant  le 
cheval  de  bois. 

Ces  assertions  se  heurtent  à  deux  difficultés.  Elles  font  supposer 
ou  que  la  douleur  physique  de  la  victime  n'a  pas  atteint  son  pa- 
roxysme, et,  dans  ce  cas,  elles  sont  en  contradiction  avec  les  mou- 
veoents que  nous  venons  de  décrire;  ou  bien  elles  nous  forcent 
à  admellre  (jiie  Laocoon  donne  la  preuve  d'un  courage  héioïi|ue  qui 
lui  fait  mépriser  les  lortuies  du  supplice,  d'iiri  orgm-ii  et  d'une 
volonté  qui  maintiennent  jusque  dans  la  mon  même  l'expression 
liaiilaine  de  ses  iiails. 

Lessing  a  coraballu  avec  raison  celte  dernière  hypothèse.  li  a 
(iéiuûiitré  ([u'uiie  telle  corn  eplion  était  celle  de  l'époque  barbare  et 

1.  Co  II  ouvenipnt  a  été  indiqué  par  la  lettre  A  dans  la  planche  XVI. 


200  iiKvii:  sn<'.nK(iLor.iQUK. 

chri'lienne.  CVsl  riiomme  du  Nonl  <|ui  ri^sUle  impassible  à  l;i  iIdu- 
loiir  |>li>>i  jue.  0'.  si  le  sjuvaijc  iitii  m«'l  son  or^^iuMl  à  (lis-inniicr 
sous  un  m.isijUt»  haulaiu  It^  aniîojssos  de  la  torliiii'.  C  f.-t  la  liaiiltur 
morale  de>  pivmiors  rliivlii'n>  (jui  les  éltWe  aii-th'ssus  du  Hiailyre. 
Mais  11  n.ili'MJ  ;,Mer.iiie  csl  UM  peupl.î  (r.iilisics,  ucrv.ux,  sensible, 
diMifit,  viliiMUl  il  toutes  les  impressions  du  deliois.  Les  héros 
d'Homère  pleurent,  gèmiùsent,  hurlent,  iinpiorrnt.  l'hiloclète  est 
lun  lies  plus  hrives  héros  de  la  Grèce,  le  compnj.Mion  intrépide 
d'Ilerculi',  el  c<.  pend;ini  Sophoele  nous  le  monîre  sur  la  Si'éne  hur- 
lant des  cris  insensés  el  se  roulant  dans  la  poussière,  sans  essayer  de 
réajfir  contre  la  soulTranceijiii  le  dévore. 

Si  Laocoon  reslait  insetisil)le  ;\  la  douleur,  il  ne  serait  pas  ["ree, 
ce  serait  une  inspiration  élr.miîèreau  génie  île  la  nation  hellénifjue. 
Cette  obscrvalidii  de  Lessing  est  parfaileinenl  juste,  et  cependant 
c'est  cet  auteur  lui-même  qui  a  pour  Ij  première  fois  accrédité  l'er- 
reur dont  j'ai  parlé,  c'est-;i-dire  que  Lcssiui;  e.>timail  aussi  que 
l'expression  de  la  douleur  dans  le  visage  de  Laocoon  était  plutôt 
modérée;  mais  il  appuyait  son  hypothèse  sur  une  autre  raison  que 
celle  de  Vi<con!i  ou  celle  de  Winkelmaiiii.  Lessin;,'  croyait  q  rmi 
artiste  de  bon  i^oùl  ne  devait  pas  représenter  le  paroxysme  de  la 
douleur  physique  ;  qu'une  bouche  ouverte  avec  elTorl  pour  proférer 
des  cris  alîreux,  comme  ceux  dont  parle  Virgile  loi'squ'il  dit  de 
Laocoon  : 

Clamores  simul  horrcndos  ad  sidcra  tollit, 

devait  |.!od..:ie  une  impression  pénible,  répulsive,  p-ut-èlre  même 
l'iilicule.  Un  portrait  qui  représente  ua  visage  rianl  aux  éclats  linil 
[lar  produire  urie  impression  désagréable.  De  même,  dit  Lessing,  une 
bouche  ouverte  pour  crier  continuellement  ne  peut  pas  être  rejtrè- 
sentéeavec  succès  en  sculpture  ou  en  peintuie. 

Al  ilgié  l'apparente  \érilé  de  ce  raison!;einenl,  il  est  léfuté  pai- 
l'ieuvre  même  que  nous  avons  sou.-:  les  yeux,  lue  liouciii'(|ni  ne  crie 
plus,  c'est  celle  du  plus  jeuiii;  des  liU;  une  autre  (|ui  n'a  pas  encore 
crié,  c'est  celle  (le  l'allié;  mais  la  liouche  de  Laocoon  est  ouverte 
pour  faire  place  ù  l'explosion  de  la  douleur.  Sans  doute,  elle  ne  pro- 
fère plus  des  cris  articulés,  des  gémissements  ou  des  plaintes.  Klle 
jette  un  seul  cri,  soutenu,  perçant,  releiiiis«;aut;  le  cri  d'une  forte 
nature,  pbine  de  vigueur  et  de  sauté,  (|ui  se  voit  tout  à  coup  livrée 
sans  retour  à  une  mort  imprévue. 

L'e\pre>sion  du  vlsa:,'e  est  en  liarmoiiK!  avec,  la  douleur  que  vo'- 


i.i:  i,\()r,;)()N   i:t  i.k  cii'U'I'i:  d'aiimaa.  201 

piitvil  l.i  l)oi:-li('  cl  II'  corps  ciiliiT.  K'i  (^1T"I,  loiilos  les  parties  du 
vhy.\'^t\  \\û  peiiV(Mil  iHi-c.  mises  (MI  m  )UV  ■iiumU  >():il  U'.itHrormr'es  par 
la  iloiileiir,  a;,Mléis,  loiinne  il/'is  ilaiis  ^(îllc;  W-^nvi'.  mii'ijx  i|U(!  dam 
aiieune  aulre  œjvre  <Je  T mli  piii  •  ;  louis  hs  surfaces,  comme 
celles  ilu  fronl  el  des  joii!s,  soûl  boiilt'VcMsécs  par  Ij  hMisiuu  des 
muselés,  qui  ressortent  ici  et  \i  avec  lauldi^  violcnrc  qu'on  peul  à 
peiu"'  se  rendre  enmple  île  la  piriii;  sf)lide  du  s  luclciif;  ([u'iU  doi  - 
veut  ri'couvrir.  Celle  inauirre  a  i'ir  pi)ursuivie  ju-(|U('  ilaus  la  harlie 
et  W>  clievcux,  i{ui  ne  soiil  nulle  part  Irailcs  en  |,Mand(S  masses, 
mais  f|ui  se  divisenl,  se  délaclicnl,  se  loi-dcul.  comme  si  la  douleur 
cl  l'horreur  i|ul  saisissent  le  palient  s'çtaii'iil  pi'olon^îées  jusqu'aux 
exlri'iuilrs  des  cheveux. 

Le  visage  de  Laocoon,  comme  toul  ?on  corps,  rie.'t  donc  que 
rima^^e  de  la  souiïranre  physique,  lorsqu'elle  vient  d'alteindre  son 
plus  haut  degré  d  intensité.  Il  n'y  a  pas  un  trait,  pas  un  muscle, 
ni  de  la  lii^ure  !ii  du  corps,  qui  exprime  autre  chose.  Il  n'y  a  pas  de 
place  faite  dans  celle  œuvre  à  celte  prélenilue  exptession  d'une 
douleur  morale,  à  celte  mélancolie,  ou  à  ce  mépris  hautain  des 
angoisses  de  la  mort,  qu'on  voulait  y  voir  aulrefois. 

Les  arti'^tes  de  Illiodes  n'ont  représeniô  dans  k-  groupe  du  Laocoon 
que  le  paroxysme  de  la  douleur  physique.  D'autre  pari,  dins  notre 
article  précédent,  nous  avions  démontré  que  le  Laocoon  ne  re|)ré- 
senle  (pie  la  catastrophe  du  drame  dans  toute  sa  poignante  nudité. 

Voilà  les  deux  faits  principaux  qui  ressorlentde  toute  cette  élude, 
el  leurs  conséquences  sont  des  plus  graves. 


LE  r.UOUPE  DU  LAOCOON  PRODUIT-IL  UNE  IMPRESSION  TRAGIorE? 

Il  est  évident  que  la  catastroph.e  seule  d'un  drame  ne  peul  pas 
nous  éclairer  sui*  les  péripéties  de  la  tragédie  qui  l'ont  précédée. 
Nous  ne  scnlons  pas  la  cause  intime,  le  motif  moral  dont  celte 
catastrophe  n'est  que  l'elTet  visible  el  saisissant. 

Cependant  les  artistes  de  Rhodes,  en  sculptant  le  groupe  du 
Laocoon,  ont  eu  le  mythe  devant  les  yeux  de  l'esprit.  Ils  ont  fait 
tout  ce  qui  était  en  leur  pouvoir  pour  le  rapjieler  viveni'^nt  aux 
spectateurs.  Ainsi  l'autel,  h  s  longs  manteaux  du  père  et  du  lils, 
sont  les  symboles  de  leurs  fondions  sacerdolales.  j/idée  que  le 
sang  humain  va  souiller  le  lieu  le  plus  sacré  du  sanctuaire  devait 
éveiller  chez  les  Grecs  le  souvenir  du  sacrilège  commis  autrefois 
par  l.aocoon  à  cette  môme  place;  la  rapidité  avec  laquelle  le  venin 


20i  REVfK    Anr.llÉOl.OOIQUE. 

des  si^ponls  agit  sur  lo  plus  jeune  «K-s  enf.inl^î  <Ie  Laoroou  doit 
nou>  iiuliiiiUM-  tjue  ces  repliles  sitnl  envoyés  par  la  divinilê,  que  ce 
sont  des  tMres  uinnMrucux  <|iii  n'appariieiinenl  pis  au  monde 
lerreslre.  Cepeudanl  loiiles  ces  Irgt'r.s  allusions  lu*  sullisfiil  pas 
pour  faire  passer  «levant  nos  yeux  le  dranu'  entier,  ils  nous  indi- 
quent seulenuni  que  rintenllon  des  artistes  était  de  représenter  re 
n>yllie-là  et  pas  un  autre.  Elles  nous  inonlrenl  «lue  1rs  smlptenrs 
oui  lu  le  drame  présent  à  l'esprit,  mais  ell's  nous  permettent  en 
même  temps  de  constater  qu'ds  ont  été  impuissants  à  le  représenter 
dans  toute  sa  gran  Inir,  dans  toute  si  hauteur  morale. 

Il  en  existe  une  preuve  certaine  :  c'est  que  les  speclaleurs  du 
proupe  tjui  ne  connaissaient  que  le  lécit  de  Virjîile  ont  reproché 
an  chef-d'teuvre  de.>  sculpteurs  d  •  Kli<.des  la  même  immoralité 
qu'ils  avaient  hlàinéc  dans  le  itoélc  de  iÉiin<l(\  Tel  fui  le  ras  pour 
Yisionti. 

Les  >culi>leiirs  n'ont  don."  représ.iilé  i|ue  la  dornieie  scciie  du 
dernier  acte  de  la  tragédie,  cl  si  itous  préférons  rattacher  ce  der- 
nier épisode  au  drame  grandiose  de  Sophocle  pluUM  (ju'au  récit 
immoral  de  Virgile,  cela  vient  non  pas  du  génie  des  sciil[ileiirs  eux- 
mêmes,  mais  de  noire  manière  de  sentie  et  de  la  coiin  lissance  ipie 
nous  avons  de  la  légende  hellénique. 

Le  groupe  du  Laoeoon  ne  révèle  <lonc  pas  par  lui-même  le  fond 
moral  de  la  légende.  Les  anciens,  comme  nous-mêmes,  devaient 
apporter  avec  eux  l'exégèse  du  sujet  représenté.  L'explication  de 
l'ensemble  vient  donc  du  dehors,  elle  n'émane  pas  du  groupe  lui- 
même. 

Ei\  d'autre?,  termes,  lo  clipf-d'a'uvre  des  sculi>tcitrs  de  lUioih's  n'est 
pds  réellement  tnujique. 

L'impression  tragique  des  souffrances  que  nous  voyons  ne  peut 
être  que  le  résultat  du  r3|)pnrl  (iiic  nous  étahlissons  entre  elles  et 
l'action  dont  elles  sont  les  conséiiuences  justes  et  nécessaires.  La 
douleur,  le  pathos,  ne  sont  pas  tragiques,  ils  sont  sculemenl  im|uié- 
lants  ou  allli^eants  partout  où  ce  rapport  immédiat  entre  la  cause 
et  l'elTet  n'éclate  pas  au  premier  coup  d'«eil.  Si  l'on  a  hesoin  d'une 
longue  explication  pour  comprendre  ce  que  Ion  a  sous  les  yeux, 
l'elTet  lragi(pie  est  alisolunieni  maïupié.  .Miis  l'émolion  tragique 
n'existe  qu'autant  que  les  souiïrances  qut;  nous  voyons  sont  justes 
cl  méritées,  c'est-à-dire  proporiionnées  à  léMormiié  du  crime 
commis.  Là  où  celle  proportion  n'ixisle  pas,  les  soiilTianees  que 
nous  voyons  ne  foui  (ju'exciler  noire  indignation  ou  noUe  dégoût. 


!,[•:  i.AocooN  i:t  i.i:  ghoim-r  [j'atihaa.  i>0;j 

C'est  pour  colle  raison  (|U(',  d  uis  l'Ilamlet  de  Sliikcspenrp',  le 
héros  ne  luf  p.is  le  lyniii  l()rsi|u'il  piii"  «:t  se  rej.ciii.  C  t'-.l  pour  le 
niôuie  niolir(|ii('  Sli;iki;spe;ire  a,  dans  celle  pii'ce,fail  représenter  par 
des  eoinéiliens  le  crinic  du  roi  sur  la  y^cvnii,  devant  le  coupalde  lui- 
mômc  et  devant  les  spcclateurs,  quelques  iiii-lants  avant  la  calas- 
troplie.  De  relie  façon  la  i)unilion  du  criminel  nous  paraît  juste. 
Nous  ne  soiilTroiis  plus  à  la  vue  du  cliAliuient  (ju'il  doil  suliir, 
parce  que  le  senlinient  de  la  jusiice  éteint  en  nous  celui  de 
l'horreur  (]ue  de  telles  scènes  peuvent  inspirer. 

.Mais  il  n'en  est  pas  de  même  à  l'aspect  du  Laocnon,  et  on  écri- 
vanl  ci's  lii,'nes  nous  avouons  que  le  blâme  le  plus  grave  qui  ait  été 
élevé  contre  le  groupe  du  Laocoon  est  |)arfaile!nent  fondé. 

0:i  a  dit  avec  raison  que  l'on  ne  peut  contempler  longuement  le 
prouiie  du  Laocoon;  que,  si  ce  chef-d'œuvre  est  entouré  d'autres 
statues,  on  dOtourne  volontiers  son  regard  pour  le  reporter  sur  des 
objets  plus  at^Méables;  que  ce  senlimeul  n'est  dû  ni  à  la  mauvaise 
restauration  des  l)ras  par  Monlorsoii,  ni  aux  serpents  dont  les  enla- 
cements onl  (p.iehiue  chose  de  répulsif,  ni  à  ce  (pi'd  y  a  d'odieux 
dans  celle  i;orle  de  supplice.  On  a  été  plus  loin.  On  a  affirmé  que,  si 
ce  groupe  était  enlevé  à  l'entourage  de  statues  qu'il  a  le  plus  sou- 
vent dans  nos  musées,  si  nous  n'élioiis  habitués  depuis  longtemps 
à  le  voir;  si  nous  pouvions  oublier  un  instant  qu'il  ne  .s'agit  pas 
d'une  scène  réelle,  mais  d'un  giou[)f.'  taillé  dans  le  marbre,  s'il 
nous  apparaissait  tout  à  coup  dans  la  solitude  d'un  sanctuaire, 
ce  senlimont  d'Iîorreur,  de  répulsion,  dominerait, absorherait  abso- 
lument toules  les  aulies  impressions  (|u'il  di'\rait  éveiller  dans  no- 
tre esprit  ou  dans  notre  cœur. 

Le  groupe  du  Laocoon  n'est  donc  pas  un  vtritable  chef-d'œuvre 
Iragiipie,  parce  qu'il  n'est  que  paihéti  jue,  c'est-à-dire  que  les 
soulTrances  physiques,  la  pathos  qu'il  représente,  ne  retlMent  pa.s 
une  idée  morale  supcriture.  M  »is  la  léalilé  seule  ne  suffit  pas  pour 
produire  cet  elTel  tragique  qui  dépend  avant  tout  de  l'idée  morale 
qu'éveillent  en  nous  les  soulTrances  auxquelles  nous  assistons. 

Cependant  on  peut  invo(;uer  en  faveur  des  artistes  de  Hhodes  le 
fait  (jue,  le  m\the  de  Liocoon  étant  donné,  ils  ne  pouvaient  le  re- 
présenler  autrement  qu'ils  l'ont  fait.  Tout  autre  moment  de  l'action 
n'eût  pas  résumé  au  même  point  toul  ce  qu'il  y  a  de  divin,  de  mira- 
culeux, d'instantané,  dans  ce  châtiment  qui  atteint  le  piélrc  cou- 
pa Ide  et  ses  deux  lils. 

Après  celte  analyse  psychologique  et  moiale  du  Laocoon,  il  fau- 


204  iiKVLK    Aiu,niv<)i.O(;igUF.. 

drail  l'i'lu  lier  j'Hi'ori' ilins  S.1  composition,  exposer  les  Imule-;  (pm- 
lilôs  lie  slyK' (luil  contifiil.  Mais  relie  élu  le  ptiM'iiient  e.>ilièli(|iie 
du  {iroiipe  nous  entr.ilnerail  Irop  loin.  Klle  a  élé  d'ailleuis  faite  si 
souvent,  qu'il  est  inutile  de  répéter  onroie  ce  que  d'autres  onl  déjà 
dit.  Nous  rappellerons  seulenieiîl(|iieliiues  Ir.iils  principaux  (jui  res- 
sorlenl  des  juj,'c:iienl«  prononcés  par  les  critiques  inodernes. 

Aulanl  le  {::roupe  peut  être  crili(|ué  au  jioint  de  vue  de   riinpivs- 
sion  morale  et  psy('lioloj:i'|iie  ipi'il  produit,  autant  il  f;iut  en  aduiircr 
la  composition.  Il  n'y  a  peut-être  pas  d'autre  <euvre  dans  le  inonde 
anli(iue  ni  dans  le  monde  moderne  où  d'aussi  prandes  dilTicullés  de 
coMiliinaison  aient  été  vaincues  avec  autant  de  suciùs.  Il  s'agisî^ail 
de  comltiner  tiois  corps  humains  el  deux  serpents,  de  telle  soi  le 
que  le?  enlacements  des  reptiles  ne  détruisissent  pas  la  lieaulé,  des 
formes  liumaines.  L'ensemble  de  la  composition  a  dû  suri,'ir  tout  à 
coup  devaiil  la  fantaisie  surexcitée  de  (|uelipie  ailisle  de  génie,  (l'est 
ce  que  Cirrlhe  veut  dire,  lorsqu'il  s'écrie  :  (i  Le  Laocoon  esl  un  éclair 
fixé,  une  vague  iiétrifiée  à  l'instant  où  elle  frappe  le  rivage.  »  .Mais 
.il  y  a  loin  de  cette  image  spo.tanée  qui  apparaît  vaguement  devaiil 
la  conception  de  l'ailislc,  il  y  a  loin  de  celle  idée  première  à  l'exé- 
culion  plasti(|(ie  du  groupe.  l'our  réaliser  l'idée  dans  le  maihre  la 
réllexion  devait  s'unir  à  la  fantaisie.  C'est  aussi  ce  qui    (ait  dire  ù 
Pline   qu'Agésandre.  .Mlianodore  el  l'olydore  de  Hliodes   avaient 
sculpté  le   Laocoou  de  consilii  sriitciilia.    Dés  (|<ii'   l'un  d'eux    eut 
conçu  le  plan  général,  il  dut  consulter  ses  deux  collègues,  discuter 
avec  eux  tous  les  moments  de  la  composition,  choisir  ses  modèle?, 
placer  et  déplacer  les  ligures,  essayer  eu  aigile  Texécution  de  celle 
pensée  générale  (|ui  venait  di'  lui  être  suggérée  dans  un  heureux 
moment  d'inspiration.  Il  n  y  a  peut-être  pas  une  seule  œuvre  «l'art 
où  nous  jinissions  aussi  liieii  (jue  ilans  le  Laocoon  prendre  sur  le 
fait  ces  lieux  activités  de  l'esiuit  humain,  la  fantaisie  spontanée  et  la 
lente  léd  xion  se  comtiinant  pour  créer  un  chef-d'œuvre.   Malgré 
se>  hautes  qualités,  le  Laocoou  no.is  rappelle  sans  cesse  le  travail  des 
artistes,  la  difficullé  de  huir  «eux  re,  »'t  il  n'est   pas  besoin  de  faire 
remanjuer  que  c'est  là  son   principal   défaut,  l'n  véritable  chef- 
d'inuvre  <loit  nous  faire  oublier  les  elToits  «le  ceux  tjiii  l'ont  composé  ; 
il  doit  nouo  paraître  tellement  naturel  i|ue  nous  nr  devons  pas  luêuie 
penser  aux  sculpteurs  (jui  l'ont  créé.  .Mais  ce  n'est  pas  le  cas  pour  le 
Laocoon.  Tout  en  lui  nous  rappelle  reiïort,  la  scirnc  ,  to-it  nous  ra- 
mène à  cet:e  idée  (pi'il  s'agit  d'une  œuvre  due  à  une  épociuc  où  le 
lalcul  el  l'élude  s'unissent  au  génie,  à  une  époque  de  gr luimaiiiens 
et  d'anatomisles. 


i.t:  I, vocwo.N  i;t  i.k  giioui'K  d'aï  iikna.  205 

Celle  obscrvalion  nous  r.ipprocluMJu  but  (lii  ccllo  (Hiiilc,  (jui  csl 
(i'i'l;iblir  d'une  façon  ceilaine  Thisloire  du  Kroupe  du  Laocoon  el  la 
dalu  il  la(|U(  Ile  il  a  dû  iMre  sc.ul|ité.  La  niuscul.ilure  des  (igurcs  est, 
dans  loutes  ses  parlies,  cxéculôe  avec  une  lelle  suiiériorilé  qu'elle 
nous  rappelle  sans  cessj  et  coniuie  involonlaireinenl  que  c'est  à  l'é- 
poque des  successeurs  d'Alex.mdre  cpie  les  études  d'aiiatoniie  ont 
counuencé  à  s'acclimater  dans  les  écoles  de  Grèce  el  d'Asie  Mineure. 
L(î  réalisme  ipii  ressort  de  chaque  détail  el  la  précision  scicntilique 
que  ilénole  chaque  muscle  ne  permeltenl  pas  de  douter  que  cette 
œivre  soit  née  d'un  sié('le  de  recherches  positives,  où  les  artistes  ont 
emprunté  à  la  science  ce  senliuient  (jue  loul  le  corps  humain  est  un 
organisn:e  dont  chaijue  partie  leur  est  connue  dans  sa  nature  et  dans 
ses  fonctions.  Les  sculpteurs  du  Laocoon  ont  manié  le  scalpel  (h;  la 
dissection,  on  peut  en  être  certain,  et  il  n'est  aucune  période  de  la 
science  grecijue  qui  s'accorde  mieux  avec  ce  fait  que  celle  des  suc- 
cesseurs d'Alcxan  lie,  soit  de  -2','A)  à  loO  avant  noire  ère.  Mais,  pour 
arrivera  la  conviclion  que  celle  dale  est  bien  la  seule  possible  pour 
la  création  du  Laocoon,  il  faut  iciourner  à  Pergame  et  examiner  si 
les  archéologues  ont  bien  conipris  ce  (pie  la  frise  de  l'autel  de  Zeiis, 
dont  on  a  tant  parlé  ces  derniers  temps,  représeniait  aux  yeux  des 
Grecs. 

ADRItlN     WAC.NON. 
{La  suite  prochainement.) 


IJ  s 


LISTi:S    KO\ALi:S    î:TIIIOIMI«>iNi:S 


LKUIÎ   AUTOIUTK    IIlSTOIUOi:!': 


suite'. 


MONNAIES. 

.'»3.  —  Il  nous  rcslc  à  éliidiiT  les  monuni'nl^  ninn»''tnircs  do 
l'Abyssinie. 

Ln  numisnialique  clhiopionne  ne  remonle  i-'uèro  au  delà  do  ISGS. 
Ce  sont  MM.  de  Longpérier  et  d'Ahhijdic  qui,  les  premiers,  oui  lente 
d';  ;.o  niiinjf'îre  suivie  un  décliilTreuient  et  un  classenienl  i!es  rares 
pièces  que  nous  possédons  sur  le  royaume  de?  Aksr.mites^.  M.  Dill- 
manii  et  surtout  M.  J.  Ilalévy^  ont  repris  cl  complétt',  en  lanlciue 
la  chose  i'iail  possiiile,  car  ils  n'api  orlaient  p;is  de  doeuuients  nou- 
veaux, les  travaux  de  leurs  devanciers  au  point  do  vue  de  la  lec- 
lui-e  des  légi-ndcs  el  do  l'idenlilication  des  personnages. 

Il  existe  jusqu'à  ce  jour  environ  ^ix  monnaies  d'or,  une  pièce 
d'argont  ("?j  el  une  vingtaine  de  nionn.iies  de  cuivre  connues.  Toutes 
poricnl  des  busles  de  princes  et  des  légendes,  les  unes  en  grec,  les 
auTes  en  glieez  ou  ancien  éthiopien. 

1.  Voir  1(R  numéros  d  août  et  si'ptemlirc. 

2.  Le»  premier»  Piisais  sont  de  Ed.  Riippcli  (1840\  Kenncr  (18G2),  Ilougliii  (1863). 
La  notice  de  M.  de  Loiijrpérier  sur  les  iiioniiiiit  s  de»  rois  d'Ëiiiiopir,  suivie  de»  ob- 
»crvalions  de  M.  d'Abbadie,  ii  puru  dans  la  Hevue  numiMnatique,  t.  XIII  (IbOS),  cn- 
Bcmblc  3'J  p.  in-boei:  planches. 

3.  Dillmann,  l>tr  Anf-mge,  etc.,  p.  220  et  sij.  —  llnkWy,  Mc(aurjes  d'épigraphie 
némiti'/ur,  p.  120  à  160. 


I.KS    I.ISTKS    HOYALKS   KTIIIOI'IKNNKS.  ii07 

L(>  f.iit  (le  rcxislciicc  (l'un  syRl^mo  moni-laire  rclalivcrncril  pcr- 
fccliofiiir,  coiiiinc  le  iiioiilniil  les  rares  spécimens  parvenus  jiiS(iu'â 
nous,  prouve  un  (le^M'é  de  civilisalion  el  un  (Hit  s(jcial  assez  av-inci; 
sur  le  liaul  Nil  à  une  (!'po.|uc  recnlcM',  non  anh^rieure  toutefois  ?i 
l'ùre  clnvlienne.  Les  relations  conunerei.ili's  CH'-t'-es  par  les  (Jrcrs, 
sous  les  Lagiiles,  et  la  fondiiion  de  comptoirs  dans  la  mer  Erylliréo 
avaient  forcément  iotrolnil  jus(pie  dans  l'inléi  ieurde  rAlriiiue  et 
en  Aralii(!  l'nsaj^'e  de  la  monnaie  gréco-romaine  (jui  circulait  alors 
dans  le  monde  iiilier. 

Sous  ce  rapport,  l'Arabie  paraît  avoif  devancé  l'Afiinue  sa  voisine. 
Antérieuiement  à  rÉthiopie,  et  dés  le  deuxième  siècle  avant  notre 
ère,losIlimyarilesuvaienlunsysléme  monéiaireempruntéauxGn.'Cs: 
d'une  part,  c'est  le  ty[ie  des  Séleucides',  des  Arsacidcsel  des  rois  de 
la  Kliaracène  qu'ils  prennent  pour  modèle;  puis  c'est  la  monnaie 
d'Alliénes  avec  la  chouette  sur  l'anipliorc  panatliénai(jue  que  les 
tobbas  adoptent,  se  conlenlant  de  les  conlremaripier  avec  un  mo- 
nogramme bimyarite.  Plus  tard,  les  souverains  de  l'Yémen  frappent 
à  leur  tour  des  pièces  d'argent  î\  l'imit  ition  du  type  alliénien  et 
avec  des  légendes  sabéennes.  Enfin,  aprè.^  que  ces  peuples  eurent 
connu  les  Romains,  à  la  suite  de  l'expédition  d'yElius  Gallus  (24  ans 
avant  J.-C),  ils  gravèrent  leurs  monnaies  au  lypeauguslécn-, 

i\.  —  En  ■  ihiopie  on  ne  trouve  rien  de  p.ireil.  Il  sulfil  de  con- 
sidérer l'ensemble  des  monnaies  étbioiienneo  pour  voir  (jue  le  type 
n'a  rien  d'analogue  aux  monnaies  liimyariles  ni  aux  pièces  grecques. 
C'est  avant  tout  au  t\  pe  du  bas-e:;ipire  romain  qu'il  faut  les  rappor- 
ter, tel  (|u'il  commence  à  apparaître  au  milieu  du  m''  siècle  ver:  les 
trente  tyrans,  el  surtout  aux  piéc(,'S  romaines  et  byzantines  des  iv% 
v^  el  VI®  siècles,  et  même  du  moyeu  âge. 

Le  module,  le  poids,  la  forme  ext-^rieure,  le  costume  des  person- 
nages et  lous  les  détails  monétaires  sont  empruntés  aux  Romains; 
mais  les  légendes  sont  en  grec,  la  langue  commerciale  de  tout  l'an- 
cien monde,  le  grec,  qui,  depuis  Alexandre,  avait  peu  à  peu  rem- 
placé en  Orient  tous  les  idiomes,  a  la  cour  du  inoin^  des  souverains. 

1.  V.  le  tétradrachmc  publié  par  Barclay  V.  Head  en  1880,  portant  la  Itgende 
®ôtI  In   nb-iatso,  et  qui  est  du  u*  siècle  avant  J.-C. 

2.  V.  Scliliiraberger,  Le  Trésor  de  Saitaa,  in-i",  Paris,  1830,  65  p.  III,  pi.  et  les 
observations  do  M.  J.  H.  Mordtmuna  dans  ZDMG,  1S81,  p.  501  ;  dans  /.  ffir  Nu- 
mism.,  Wien,  1880,  p.  289.  —  B.  Ilead,  Numùm.  Chronicie,  1873,  p.  274. 


i(>S  IIKVUK   Alu,lll.ui.ti(.lyi;r.. 

(yi'>l  seulemcnl  plus  l.inl  ijik' los  rois  (r.\k>iiiii  miiciil  li'iirs  ikhiis 
l'I  leurs  |(''j;fritles  rii  langue  illiiojiicniie. 

Les  intmiinies  élhiopiedius  à  earaiMères  grecs  soiil  donc  les  |irt- 
niières.  et  parconséi|uenl  plus  anciennes  que  celles  donl  les  légendes 
sonl  en  gliee/. 

L'élude  lie  ces  monuments  nuniisiualiques  esl  d'une  i,'iMndf  im- 
portance au  point  de  vue  de  riii>l()ire.  (juoi.|ue  rares,  on  |i  ut  dire 
qu'ils  sonl  [)lus  aullienliques  cl  (dTrenl  plus  de  eiédil  (lue  les  listes 
royales  abyssjnieniies,  et,  quand  on  en  aura  découvert  un  nomhre 
suHisanl,  c'est  par  les  monn  ues  seules  .|U('  Vwa  pourra  élalilir,  d'une 
manière  à  peu  prés  certaine,  l'ordre  vl  la  diroiiologie  de  qiiidi|U('s- 
uiis  des  mis  d'Aksum.  l^e  sera  un  nouveau  service  ajnulé  à  tint 
d'autres  que  la  nuniismnliiiue  aura  rendus  à  l'hisloire. 

l'arini  ks  treize  à  tiuatnze  noms  de  rois  que  j  ré>e:ite  la  «éiicmo- 
nélaiie  connue  jusqu'à  ce  jour,  c"»'sl  à  peine  si  on  a  pu  en  retrouver 
quelques-uns  sur  l'ensemble  des  listes,  sans  même  iiu'oii  puisse  être 
certain  de  I  idenlité,tellemeiil  l'orthograplic  dilTère.  Pour  It  plupart 
des  autres,  comme  'Aç-iÀot;,  lia/a-ra,  Naîleva,  Mtiigsn,  ce  sonl  des  noms 
tout  à  fait  nouveaux;  les  dillicullé>  d'identilication  sont  au^si 
grandes  (jucpour  les  inscriptions  et  les  auteurs  classiq-jcs,  syriaijucs 
ou  arabes. 

4o.  —  Avant  de  passer  ;\  l'examen  des  monnaies  élliiopiennes,  je 
dois  dire  un  mol  de  leur  classincalion. 

Ainsi  (ju'on  vicnl  de  le  voir,  il  ne  peut  être  encore  question 
d'ordre  clironologique,  il  faut  attendre  la  découverte  de  nouveaux 
spécimens  monétaires,  ce  (|ui  esl  l'œuvre  du  basard  cl  surtout  du 
temps.  La  science  des  médailles  étbiopiennes  est  dans  l'enfance; 
mais,  maintenant  que  ralteiition  esl  attirée  sur  celte  brandie  de  la 
science  et  sur  cette  partie  de  l'Afrique,  comme  elle  l'esl  depuis  un 
quart  de  siècle  sur  sa  voisine  l'Arabie,  il  esl  à  espérer  (jue  notre 
série  monétaire,  encore  si  pauvre,  attirera  la  sympatbie  des  voya- 
geurs et  s'enricliira  des  trouvailles  et  di  s  fouilles  soigneusement 
préservéesdii  pillage  et  de  l'exploitation  Cdinmcrci  ilo  coiiiiiie  il  n'y  en 
a  eu  que  trop  d'exemples. 

Kn  atlendanlon  peut  se  contenter  de  classer  les  monnaies  aksu- 
milaines  soit  d'ajiréa  la  légende,  soit  d'après  le  type.  Je  n'ai  pas  ;\ 
m'occiifter  ici  des  variétés  du  lyjie  des  monnaii  s  au  croissant,  ù  la 
croix,  à  deux  bustes,  à  une  seule  effi;.de,  etc.;  je  n<'.  m'ariéle  (ju'a  ce 
qui  rentre  direcieinenl  dans  mon  sujet,  je  veux  dire  à  r()iioniasti()ue, 
el,   pour  ((la,  il    y  a  lieu   de  faire  la  distinclioii    entre  les  mou- 


I,KS    LISTES    IlOVALKS    KTIIlOl'l  l-..\  M.S.  209 

nait's  il  ligmilcsel  ci  raclures  grocs  cl  les  monnaies  ii  légendes  ùlliio- 
liicniics. 

Monnaies  à  léycndca  yrio/ua. 

'i(i.  —  l'ariiii  CCS  pièoos,  rt'llo  (|iii  csl  classée  la  picniiére  dans 
ltiii)[)L'll,  de  Loiigiiérier  cl  Ilalévy  csl  iiarliculiércnicnl  inlércssaiilc, 
parce  (lu'oii  a  cru  devoir  la  rallailn  r  .'i  l'Iiisloin;  de  j.i  f(ucrrc  corilre 
Ddii  Xowàs. 

iTcs:  une  pièce  en  oi-  (il  y  en  a  pli.sii'iiis  exem[)lajres)  ayant  juste 
le  liiaiiiclic  de  nos  pièces  françaisis  de  cimj  francs  en  or,  porlanl 
d'un  côlè  un  buslc  louiiié  à  droilc,  la  lèle  couvcrle  d'une  couronne 
j-adiéc  avec  les  mots  BACIAGVC  AOIAAC,  et  le  croirsanl  avec  point 
entre  les  deux  cornes;  au  revers,  autre  busle,  la  tète  ceinte  d'inie 
sorte  de  liarc  spliériiiue,  mèine  cridssant,  h;  mot  grec  AZWMITWN 
cl  un  groupe  de  di\  lellrcs  grec(iues  BICIAIMHAH. 

Le  nom  du  roi  des  Aksumites  a  été  lu  Apiddas,  Aridas,  Atjilas, 
cl  ApJtilds.  Celle  dernière  lecture  a  générikmenl  prévalu.  Apliila» 
élail  lin  roi  païen;  le  croissant  (|ue  l'on  trouve  sur  ses  monnaies, 
cl  (|ui  esl  imité  des  Sassanides,  indiijuc  ijue  le  pays  n'élail  pas  en- 
core convLili  au  christianisme.  Ouant  à  Tidenlité  d'Apliilas,  il  est 
bien  dillicile  de  l'olablir. 

Sur  les  listes  de  la  première  période,  c'est-ù-dire  avant  Bàzèn,  on 
trouve  (liste  A,  nMO)  un  F/7w,  «&A^,  ou  Snféliâ,  ÙiLôi^  (liste  ïi, 
n'"'20},qm  se  rapprocherait  de  la  forme  grecque  Apldtas.  Si  c'était  le 
même  peiv^onn.ige,  la  pièce  aurait  été  frappée  environ  soixante-dix 
ans  avaiil  l'ère  cliréticnne.  Il  esl  impossible  d'ailmcttre  une  pareille 
date  ;  il  suflît  de  voir  le  costume  des  deux  princes  repréîenlés  sur 
Vaureus  pour  se  convaincre  qu'un  dessin  de  ce  genre  n'a  pu  ({u'élre 
emprunté  aux  monnaies  du  111"=  ou  iv"  siècle.  Il  faut  donc  chercher 
le  roi  AphibiS  sur  la  lisle  de  la  deuxième  période;  mais,  ici  encore, 
sauf  Gafalè,  Id^ùs,  qui  figure  sous  le  numéro  13  et  qui  ne  régna 
qu'un  an,  on  ne  trouve  malheureusement  aucune  forme  analogue. 
La  lecture  Aphidas,  pioposée  par  Huppcll  qui  voit  dans  ce  mot  une 
imiljlion  grecque  de  Ainida  (Amila,  Apliidi),  permoltrait  une 
identilicalion  plus  facile.  Ela  Amîdâ,  hfi  s  0*^^  s  esl  en  elTet  un 
des  derniers  rois  de  la  période  païenne  :  d'après  la  liste  H  A,  n^ao, 
il  s. 'lait  l'avaiil-ili  rnier  avMit  les  (îdix  rfèir^  A'u'eha  et  Atsbeha ', 

r.  C'e.>i  i  tort  (iiic  M.  llaiuvy  affirme  (o/a  /.,  p.  136),  d'après  M.  d'Abbadio,  que 

XLIV.  —  li 


210  HKVIK    .MK.Hl'OLOCiigl'K. 

c'esl-à-dire  vers  300  do  J.-C.  Ci-llc  ilalo  comortlt  rail  parfait.  iiilmiI 
avfr  \c  ^jonre  île  la  [uère  el  m)ii  i  oiils  {i  gr.  iiO  ;\  2  t,M-.  (iJ),  (jui  esl 
h  peu  près  le  poiils  du  semis  d'or  de  Pépoiiiie  de  Dioclélien  cl  llons- 
lanlin'.  Cepeudanl.  sui-  les  dnix  pit-ees  di)iil  M.  d'Aliliadie  .i  ii(»iinù 
la  gravure,  la  leeluie  AOIAACpirall  liieu  eei laine,  il  non  AcJJlAAC. 
Il  sulVil  d'examiner  le  niot  AIMHAH.  «pii  esl  sur  le  revers,  pour  s'as- 
surer ijue  le  A  el  le  A  ne  pruveiil  iMre  eoiifoudus. 

Il  faul  lione  s'en  lenir  à  un  roi  Apliilas  lowt  ;\  fail  ineonnu, 
comme  nous  en  trouverons  d'autres  plus  loin.  .M.  Ilalévy  rapproche 
ce  mol  d'une  r.iiliic  fh^A  *  linfal'i  :  «liiii  rasxinl'le  ^le  peuple)». 

.'j7.  —  Nous  arrivons  au  revers  de  la  pièce  cl  à  la  légende  BICI- 
AIMHAH,  qui  a  donné  lieu  ;\  Iden  des  intei  prèlilions. 

Kiippell,  el  aprts  lui  M.  Laiii^'lois-.  el  M.  A.  l.èvy,  de  TJreslau^, 
n'hèsilent  pas  à  lire  BACIAGVC  AIMHAN,  «  le  roi  Dinii m  »,  et  à 
voir  dans  rcHîgie  (lu'aeiumpa.-ne  celle  lè;;inde  le  buste  du  roi  juif 
Dou  N(>\vàs,doiit  le  nom  aurait  été  altéré  en  Dimian.On  aurait  ainsi 
une  monnaie  sabéo-élliiopiennc  portant  les  elllgies  cl  les  noms  du 
roi  d'Aksum  comme  suzerain,  el  du  roi  Dou  Nowâs  comme  vassal, 
tous  lieux  alliés  avant  les  événements  de  Nagriin. 

((  La  présence  des  deux  princes  liimyarile  et  abyssin  siir  une 
môme  monnaie  prouve,  dit  M.  Langlois,  qu'à  une  certaine  èpoijue 
il  y  avait  alliance  entre  les  Arabes  de  l'Yémen  el  les  Sémiles  de  l'E- 
Ihiopie.  »  Le  fait  de  l'alliance  di's  deux  peuples  ou  du  moins  de  la 
soumission  de  l'Arabij  du  Sud  à  l'Abyssinie  ressort  des  inscri[»lions 
grecques  et  glieez  d'Adulis  el  d'Aksum,  ainsi  qu'on  a  pu  le  voir.  Nous 
seiions  tout  disposé  à  adopter  en  principe  celte  liypolliési'  d'une 
monnaie  sabéo-élhlopienne,  sauf  la  lecture  sur  la(iuelle  nous  ne  se- 
rions pas  d'accord.  Il  est  impossible  ijue  BICI  puisse  ô!re  une  cor- 
ruption 'Ir  BACIAGVC,  alors  ijuc  de  l'aulie  eôlé  île  la  pièce  le  mot 
BACIAGVC  se  trouve  en  toutes  lettres;  d'autre  part,  nous  avons  vu 
que  Uimian  esl  un  personnage  tout  j\  fait  distinct  di'  Dou  NowAs,  au- 
quel il  esl  de  beaucoup  antérieur.  Enl'n,  il  serait  étrange  (jue  le  nom 
de  Dou  Nowâs  fut  altéré  p.ir  le  loi  lui-:iiéaie  sur  ses  muiinaies  d'une 

les  rois  qui  portf-nt  lo  tioin  d'Elu  Auiidu  sont  Idih  posléricupi  à   l'ialroduction   du 
clirihtianihiiK;  en  i-.iliiopi'. 

1.  Iluppi-ll    II,  p,  3'i'i)  clioisii  pour  en  fairi-  son  Npiiida'^  l'I.la  Aniida  pt'Tu  du  Ta- 
xtua  (III  U,  u"  0),  qu'il  suppose  uiori  un  542  de  J.-C.  el  conlcniporuin  de  Dou  Nowàs. 

2.  Surnisin.  anléisliii/t.fp.  Il!i2el  153. 

a.  Ei/i'jraphtsche  Ikttra-ye  z.  G.  ilcr  Judcri,  18G0,  p.  273  (dans  le  Jnln-l-uri,   fur 
die  G,  der  Juden,  toiuc  II). 


LKS   LISTKS    HOY.VLKS    KTIIIOI'IKNNES.  211 

iirmic're  ;iii.s.-.i  iiirorreclo.  Sans  doule  il  n'est  pas  sans  cxcmiilu  en 
niinii-iii;ilii|iiecl(;  voir,  aux  6i)0(|ues  barh.iics,  les  nonis  proiircsgros- 
si(''reni('iil  drligtirés,  mais  ce  no  sont  h;  pins  couvent  (jue  des  va- 
riétés oillio;,'iMplii(|iics  <pii  sont  surloiil  sensibles  à  I'omI  plutôt 
qu'elles  ne  Triaient  peiil-élie  dans  la  prononciation.  ïci  il  est  im- 
possible d'idenlilier  Diniian  avec  iJou  NuwAs  ou  du  moins  (l'admellre 
que  la  inoiin  lie  il'or  ipii  porte  ce  nom  soit  contemporaine  du  roi  des 
Ilomérites  '. 

La  Iccluri  AIMHAN  étant  1res  possible,  notre  monnaie  aurait  donc 
d'un  c(Hé  Apbilas,  roi  pjïen  des  Aksuiniles,  d  de  l'aulie  Dimian, 
vice-roi  du  Vémen,  ayant  rôpitbélc  de  BICI  sur  le  sens  duijuel  je 
m'expliquerai  bientôt.  La  tète  (|ui  a  un  simple  bonnet  en  forme  de 
tiare  est  bien  celle  (fun  vice-roi  ou  i,^ouvern(ur;  .\1.  Dillmann^  en 
fait  un  éi'onymc  élbiopien.  Sur  les  monnaies  biuiyariies,  il  y  a  éga- 
lement deux  bustes  dont  l'un  représente  le  tobba  ou  roi  légitime  et 
l'autre  le  (jail  ou  vice-roi,  mais  tous  deux  arabes,  car  on  n'a  pas  en- 
core trouvé  de  monnaie  sabéo-i5tl;!opienne  ù  légende  bimyarile. 

48.  —  M.  Guslchmid  et  M.  Nœldeke  ^  intervertissent  et  inélan- 
gcni  les  légendes  des  deux  faces  de  l'aureiis.  Ils  llscnl  A-.-rr.av  HacriAîù; 
'A;c.)aiTO}v,  font  de  Diméas  un  roi  élbiopien;  par  contre  Apbilas  devient 
le  vice-roi  de  rVémen.  Celte  interprétation,  outre  bien  des  invrai- 
semblances, est  manifestement  contraire  ù  ce  que  nous  disent  les  au- 
teurs conîemporains  grecs  ou  syriaques,  lesauels,  malgré  les  diver- 
gences dans  l'ortbographe  du  nom,  sont  '  ord  pour  faire  du 
personnage  un  roi  des  Ilomérites. 

-M.  d'Abliadie  et  M.  Ilalévy -*  lisent  AlMHAH  au  lieu  de  AI- 
MHAN elfoiilde  BICIAIMHAH  un  mot  glieez,  qu'ils  rendent  l'un 
par  «  parlement  solennel  »,  le  second  par«riiomme  de  l'assemblée» 
Otùt^ao^,  Bîsîiliinara;  mais  ils  ne  disculpas  ce  que  représente  alors 
le  second  liuste.  Si  notre  bypotlièse  est  préférable  à  celle  inlei-piéta- 
lion,  si  l'efligie  qui  est  au  revers  de  celle  d'Apbilas  est  celle  du 
vice-ioi  Dimian,  quelsen.  faudrait-il  donc  donner  à  re  mol  BICMont 
la  lecture  cA  certaine?  Je  n'hésite  pas  à  voir  dans  ce  groupe  de  let- 

1 .  M.  de  Longpérier  (ouvrage  cilé,  p.  10)  u  fait,  du  reste,  remarquer  que  le  type 
de  la  tOteraséeà  clievi  ux  courts  s'opposerait  a  ricJuitificution  a\ec  Dou  i\owâs, 
dont  le  nom  signifie  «  le  bouclé». 

2.  Di':  An/œ>i(/i\  etc.,  p,  230. 

3.  Tabari  trad  ,  1879,  p.  185.  —  ZHMG.,  «880,  p,  737. 

U.  D'Aljbadie,  ouvr.  cité,  p.  27;  Halévy,  K/u^r.  sémii.,  p.  137.  -  V.  aussi  Dill- 
manu.  Die  A?ifœnge,  p.  212,  et  supra,  §  37. 


■2[)i  ''"^  nKvrK  vut'.m>.Mi.()(;i(i(  K. 

livsKsulKlantifplieoz^fV.s*',  «AXA,  (|uc.M.  Il;ilt' v.v  ;>  iiilio.liiil  dans 
sa  lerluiv  liistdimira  ot  <]ui  u  le  sens  ilc  «  tîncirii'i».  Nmis  l'avons 
sijînalt"'  dans  les  inscripliuiis  d'Aksiiiiu'l  ilfst  vraiscmlilaMiMuoiU  le 
nii'inc  quo  ivliii  ipio  nous  fouriiissi-nl  les  noms  iiropros  Wic^Cr  naz("^ii, 
Beesù  Sai(|,  IU>ost^Tsa\votsâ,  (jue  l'on  tiouvo  sur  les  listes  royales,  ('c 
sérail  (ionc  «le  ;j;n('rrierl)iniian  »  avec  le  sens  de  },'éii''r.il.  va>Ml  do 
ri-lhiopie. 

Kii  allendanl  (ju'iin  plus  grand  noinl>n' de  jut^'crs  iiciinelU',  par  la 
eomparaison,  de  fixer  d'une  ulani^re  délinilive  la  lecture  de  ces 
monuments  monétaires,  il  faut,  croyons-nous,  s'en  tenir  ;\  l'expli- 
caiion  que  nous  venons  de  donner. 

1<)  _  n.iiis  11  nioii:iaii'  d'or  de  Hakliasa,  du  même  type  que  la 
rècédenle,  nous  trouvons  é^'iliMU.  iil  ia  tùie  et  la  légende  d'un  roi 
sabéen. 

L"  droit  porte  le  buste  royal  et  la  légend''  ►î-  BAC  +  CIS  +  BAX 
►f-  ACA.  Klle  a  été  lue  avec  beaucoup  de  vraisemldance  BAC1A6VC 
BAXACA,  «  le  roi  IW/olcol  »,  (|ui  est  de  ré[ioiiiie  clirétienni-  aii.si  que 
rindi(iuenl  les  croix  qui  séparent  les  syllabes.  Ce  nom  ne  lîgure  pas 
sur  la  liste  de  la  3»  période,  il  y  est  iHobablemenl  sous  une  autre  ap. 
pellation;  pouilanlun  loi  Bakhas.  OHlA,  se  trouve  dans  les  [iremiers 
souverains  d'Abyssinie,  liste  A,  n»8.  Nous  rencontrerons  plus  loin  le 
roi  Ba/aia  sur  une  monnaie  de  Nezana. 

Le  revers  contient  également  un  buste  avec  la  légende  +  lAN  + 
AAOel,dansun  aiilresens,  ►!<  Cl B  +  ^00£.  Ainsi  nueTa  établi  .M.  J.  II. 
Morltinann  ',  lANAAO  n'ot  autre  (jue  le  nom  bimyarite  bien  connu 
OHÎ  (n:-.  o^),  et  fréquent  dans  les  dynasties  sabéennes;  CIB 
e.-lla  lecture  rétrograde  de  BIC,  ipie  nous  venons  de  voir;  la  dispo- 
sition générale  de  la  légende  permet  celle  restitution;  le  dernier 
mot  est  illisible  -. 

M.  Gulscbmid  ^  trouve  moyen  de  lire  BIC-IAH-AAY  •  EON  qu'il 
divise  en  B.  ICPAHA  AYEHN,  «  Israi-I  roi  du  pa\s  d'Aue  h.  Cet 
Israël  serait  le  fils  aine  de  KJleb  Kle>baa  le  vainqueur  de  Uou  Nowà«, 
et  A'ir,  le  nom  d'une  contrée  d'Abyssinie  entre  Adulis  et  Aksuni. 
Quant  au  roi  ijui  est  représenté  sur  l'autre  côté  de  la  pièce,  le  .-a\  inl 


1.  Seue  hitivjnrische  iîûnzen,  1880,  p.  U.  —  Scliliimbergtr,  p.  1.3. 

2.  Les  Icclurc»  contradictoires  proposées  par  M.  d'Aljbadic  (o/».  /.,  p.  28)  et  M.  Ni- 
léry  (op.  /.,  p.  130;  no  iim  |)araiss(;iit  pas  plausibles. 

3.  X1).\IG.,  ibbO,  p.  730.  —  V.  uuh^i   Fell,  imin.i  rccu'il,  lti8l,  p.  3r.  it  suiv.,  et 
M'^rdtTT.ann,  1877,  p.  GO. 


m:s  i.istks  it((\.vi,i;s  i'itiiiopik.nnks.  2<3 

lnuIVssoar  di;  Tiihii'.gon  y  voit  l.i  (i.i,Mii-('  et  li  l(''},'(Miflfi  de  u  Assioba- 
rlia  roi  des  Snlirciis»,  B^iiIeÙ;)  ACCINBAXA  CA^oaitôv^.  Aiosi  lu  où 
jo  vois  lo  roi  (Hliiopicn  n.ikli;i>:i,  M.  (iiilxliiiiid  lil  «  Assiiil).ikhn, 
roi  des  S;d)(''ens  »:  (|ii;int  ,111  n'vcrs  que  j'inlerprètc  par  le  buste  du 
roi  himyarile  ;ivec  léj^-eiide  «  le  ^(iierricr  lanAr»,  le  savant  alleiiiruid 
l'alliibue  à  «  l^ra.d  roi  d'Aiié  ».  Il  csl  inutile  tU:  f.iin;  re;Sorlir  tout 
ce  (|(ie  eette  derniùre  lecliirc  dlTre  d'incertain  etdiiforcé.  Le  prétendu 
Assinbaklia  serait,  suivant  .M.  riulsrliniiil,  le  même  personnage 
que  Prûcop(î  appelle  'KciuicpaToç  et  (jue  les  inseriplions  liimyaiiies 
(lésij,Mient  par  VE^'rv,  ar.  ^t*-r- '.  D'après  Procope ,  Esimi[)liaïos 
était  un  prince  elirétien  (d'oiigine  sabéenne?),  qui  fut  instalN;  par 
Kfdel)  sur  le  tiône  de  Saba  après  la  déposition  de  Dou  Nowûs  en 
M.-);  il  fut  à  son  tour  renversé  par  Abramos  en  îùil.  Mais,  suivant 
iMalala  le  vire-roi  (|ue  Kàleb  mil  à  la  place  du  roi  des  Homèrites 
s'appelait  'AYrav/i;  -.  Le  savant  allemand  modifie  ce  nom  en 
'A7(7avr,;,  (le  maiiiùie  à  le  rapportera  Ilas<àn,  (jui  aui'ait  été  le  prédé- 
ceFseurirEsiiniphaios.  D'après  Maçoudi  le  premier  souverain  étliio- 
pien  dans  le  Vénien  fui  Arial,  nom  que  l'on  trouve  assez  fréi)uem- 
mentsurlt's  listes,  hCO^  ,  l'AcïOaç  des  auteurs  grecs.  Il  est  proba- 
ble que  tournées  personnat^es,  E-iiiii[d)aios,  Assan,  Arial,  Abramos, 
furent  contemporains,  adminisirant  peut-être  cliacun  une  province 
au  n()!ii  du  roi  d'Ktliiopie;  mais  les  auteurs  arabes  eux-mêmes  man- 
quent de  pi-èi  ision  sur  cette  époque  de  leur  liisloireanléislauiique, 
et  vouloir  les  suivre  dans  leurs  indications  de  personnages  c'est 
s'exposer  à  créer  les  hypolbè.'es  les  plus  liasaidées. 

50.  —  Les  autres  monnaies  connues  à  légendes  grecques  n'offrent 
aucune  difficulté  de  lecture,  mais  l'embirras  est  toujours  le  ii,ênie 
quand  il  s'agit  d'identifier  les  noms.  Ce  sont  : 

Un  aureus  à  deux  effigies,  portant  d'un  côté  ►i'  BACIAI  AZGOMI, 
et  de  l'autre  >h\'Z>hPC>i<Ç,>i'tA,  ce  qui  se  traduit  pai-  «  Gerseia  roi 
des  Aksumites  »;  le  nom  du  second  personnage  n'est  pas  donné. 
Gersi m  n'est  pas  sur  les  listes,  mais  M.  Halévy  ^  propose  de  lire  r6P 
(MA;CEM,  dont  le  sens  seraiten  éthiopien  .-«crainte  du  nom  (divin)», 
IC^I  :  il2°  i  ;  on  aurait  alors  un  nom  analogue  à  Germa  Asfaré  (!I 
Bn°o)(les  premières  années  après  le  Christ;  Germa S:ifar(ili  BnMi) 
du  vil®  siècle  de  no:re  ère.  Notre  pièce  doit  être  de  celte  dernière 

1.  Mordtmann,  ZD.l/G.,  1881,  p.  438. 

2.  Dillmami,  /.  (;.  des  Axiiin.  Rcichs,  1880,  p.  30  cl  /i3. 

3.  Épigr.  scmit.,  p.  \l\\. 


'iW  REVUF   Anr.lIKOLOCIOUK. 

époque».  lUippoll,  qtii  a  li»  pioiiiior  piiMu''  ct'llc  inonniiio,  avnil  stip- 
po><^  j'i  lori  «lUP  (i<Tscm.  (ju'il  n-sliluc  «mi  (icrscmur,  ôiail  la  Iraiis- 
criplion  p:ror(|iii'  Au  ndin  j,'h(M'Z  Kla  Satnara  (Il  A  n'  il)  de  r(>|>0(|(ie 
prérliniitiine  '. 

Tu  aurcus  (•galomcnt  à  diMix  cfn^ios,  piibliô  (loiir  la  iiromii^re  fois 
par  11  ili'Vy  ^,  qui  nVn  ilonih-  pas  la  gnviiic.  I.n  ir-cnlo  des  rlciix 
rôlt^s  <lc  la  |)i(Vo  scmuiI,  d'apiAs  ce  savant,  OVCAC  BACIACVC  0ÇOV 
GVXA  :!<m'»),  «I  Oiisas  rni  parla  giAcc  do  Dii'ii  »,  f<iniiiil('  cluôiiciine 
s'il  v\\  fut.  Los  lisios  abys^iIlicllIlOs  tic  incniinîMn  ni  aiiciiti  souve- 
rain (II'  re  nom.  M.  Hilévy  h;  lai'proclic  d'une  ncinc  ati^,  «  don  », 
d'où  aurail  ••lé  formé  le  mol  Aiisi'id,  ti(D*{iy,  nom  i\r  dciiN  i\r<  rois 
aiili'rii'ursà  Hâ7.ôn(IM  i/"  :»  ri  11;;  ou  pcul-ôirc  Waziin  (Dlldl  (lA 
n"  l'2).  Ce  n'csl  qu'uneanalogieloinlaino;  il  faut  <  epi-ndanl  s'en  c  )n- 
tenler,  faule  de  mieux.  Ici,  comme  sur  la  pièce  prêcédenle,  un  des 
deux  bu.sles,  celui  du  vassal,  reste  anonyme. 

Un  aureus  à  deux  efH;,'ies,  môuie  type  (pie  les  préc/'dents,  mais  pc- 
sanl  seulement  1  gr.imine  ;i",  acipiis  par  le  musée  de  Merlin  en 
1879^  et  décril  par  Kilhuiun  *.  Celle  pièce  nous  f.iit  coniiidlre  un 
nouveau  roi  cluélien  Nezma  >h  NCZANA  BACIACVC  (les  C  comme 
sur  la  monnaie  (II-  BAXACA)  (pii  maixpie  également  ;i  nos  listes;  le 
seul  nom  (pii  puisse  lui  être  comi)aré  est  celui  de  Tazénâ.  Le  côté 
de  la  télé  à  couronne  radiée  présente  les  lettres  suivantes  :  CNA  Hh 
MA  +  4-  ACA^^CAC,  (jue  l'on  peut  transcrire  en  CNA  4<BA>ΫXACA 
►i-CAC,  groupe  dans  leipit^l  on  l'etrouveiait  le  nom  BAXACA  connu 
par  i'aureus  ci-,Jessus  décril,  et  occupant,  comme  sur  ce  drinjer-,  la 
preiiiière  [dace,  c'est-à-dire  accompagnant  le  buste  à  couronne  royale. 
Ncsana,  (juoiiiue  [ia^i/sj;,  est  représenlé  avec  le  bonnet  du  vice-roi, 
comme  sur  les  monnaies  postérieures,  où  le  bonnet  spliériiiuo  et  la 
couronne  radiée  sont  mis  indilTéremmenl.  Dans  le  champ,  sur  le  de- 
vant de  la  ligure  du  roi,  un  M  élliiopieii  arcliaï  |ue. 

Un  aureus  à  deux  efligies  du  même  type  que  le  précédent,  jiublié, 
sans  de.«cri()lion,  par  M.  Prideaux  dans  le  Joninnl  nsintiqtip  du 
Bengale^.  La  légende  est  barbare.  Je  lis  :  du  côté  du  luiste  ;i  UMe 
radiée,  +  CIA  +  ►f  +  CA  +  AD  +  CIA,  c'est-à-dire  +  BA  «f*  XACA 

1.  liri^e  in  Ahys^.,  Il,  p.  /ji'O;  oi  trouve lo  nom  propre  Germn  dans  les  iiiscrip- 
tioiiN  n.ibuléenn*'»  et  cti  bûiiiiti<|ue,  v.  iiutauiment   Mtyerdaiib  /l)M(i,  IB63,  p.  570. 

2.  Efitijr.  si'iiiit.,  p.  l/iO. 

3.  ZeihcliriH  fur  Sumism.,  Ucriiii,  iblO,  t.  VU,  p.  2J0  cl  pi.  IV  où  r.sl  la  gra- 
vure. 

U.  Dir  Anfwrifjc,  etc.,  p.  230,  note  i. 
5.  Tooje  L  (IHHl;,  pi.  \.  m    «. 


I.KS    LISTIS    ftOVAMS    l-TlllOCU'.NNr'S .  i>15 

►^  BA  ►f  CIA  «,  l(^  nti  H.ikliasn  »  ;  d  sur  la  face  opposr'30,  C.  + 
CA  ++  —L'A  +  CAC.(jir(>ii  |i(Mil  irsliliicr  <l(;  la  iiianirro  ^iiivanlc  : 
CNA  +  BA  4-  XACA  +  CAC.  Ce  scr.iil  .lonr  une  luontiaio  |i«)j  (aiil 
stirij'jiix  côlés  II,'  inMu  (lu  iiirmc  ^-()|lV(■^aill  Hakliasa. 

îil.  —  Pour  iLTiiiiiicr  la  série  dos  pièces  à  lég(întie  grecfjuc,  il  faut 
cilei  les  diverses  monnaies  de  cuivre  faisant  parlie  de  la  eolleclioii 
de  M.  d'Ahliadie  '  el  jtuhlifcs  pour  la  lu-euiicrr  fois  par  M.  de  Long- 
pt'rier.  ^lv  sont  r 

Plusieurs  monnaies  à  doulde  cnigic,  louh's  deux  coiirées  du  hoii- 
nel  spliéri'iue,  portant  la  légende  0YAZHBAC  BAClAeVC  (lue 
iM.M.  il'.Vbbadic  el  llalévy  2  ont  traduite  jiar  «  le  roi  Ouaz<  Ija  «.  Ils 
rapprochent  ce  nom  de  la  f.-ruie  W.izlia  (v,  |  50),  roi  antérieur 
au  (diristianisine,  FA  n»  12,  (jui  i)eut  aussi  bien  ôtre  l'analogue  de 
Ou^a;  (|ue  nous  avons  rencontré  au  paragraphe  précédent.  Je  pré- 
fère lire  OVAZHBAC,  ipii  se  rapproche  beaucoup  plus  de  i:À£c;Ç7a, 
KUsT^Sa,  des  auteur,  grecs,  forme  glieez  Ela  Atsbelia  (v.  §  31)  ou 
ElaTsebah,  les  souverains  bien  connus  de  la  période  chrétienne, 
liste  III  A,  n"'  7  et  18,  peul-ôtre  le  Kaléb  Eletsba  de  la  guerre 
d'Arabie  (§§  39  el  40).  Le  buste  du  revers  ne  porte  que  le  tilre  de 

Plusieurs  monnaies  h  une  seule  effigie,  dont  la  l.'cturc  est  encore 
incertaine.  Les  caractères  présentent  un  ensemble  AXCACA  •i'  ►î^et 
AXCACA  dont  on  a  fait  un  roi  A  ^  CA€A,  que  M.  llalévy  comi)are 
au  motgheez  asidiela,  «  misericors  fuit  »,  el  qui  serait  un  des  Ela 
Sahl  (III  A  n"  3,  iî,  17)  ou  Sehùl  (n"  1i>).  Cette  lecture  est  certaine 
si  l'on  remarque  que  le  signe  X  qui  suit  la  première  lettre  A  est  la 
croix  ([ui  surmonte  le  sceptre  du  roi  et  n'appartient  par  consé(iuent 
pas  à  la  légende  ^. 

Plusieurs  pièces  de  cuivre  portant  seulement  le  titre  BACIACVC 
autour  d'un  buste  sans  indicalion  de  nom  de  roi. 

Les  trois  types  que  nous  venons  de  décrire  sommairement,  mon- 
naies d'OuIzeba,  Asacl,  et  anonyme  fiaciXsuç,  ont  le  même  levers  : 
buste  (Oulz.dja)  ou  croix  grecipie  dans  le  champ,  et  autour  la  légende 
plus  ou  moins  correcte  toOto  àp^V/;  xr;  -/Ôkol  (TOYTOAPECH,  TOTYO 

1.  0;ivrai;e  cit{\  jil.  III. 

2.  E()tyr.  séinit.,  p.  142. 

a.  M.  Dillmann  cite  [Die  Aufœnge,  p.  228)  une  monnaie  d:a,fjct,t  portant  le  nom 
Affas),,  sans  indiquer  où  elle  se  trouve,  de  sorte  que  le  contrôla;  est  impossible. 


tilCt  nr.vi'r.  AU(;iii:«»i(u;iuir.. 

APlLH.  mP3:3H.  TH  XCOPA),  .unie  ceci  plaisc  an  jinys»,  iluiilnous 

reiroiivorons  ri'.jnivaltMil  sur  1<'>  innmiaics  à  lôf^LMules  yliocz. 

l'ai  rallrralion  des  lê^'oinles  on  |u'iil  conclure  .|uc,  en  delinrs  du 
ti Ire  royal  8«Ti>.fj;,  le  prec  n'a  jamais  élu  bii  n  compris  (]r^  moii- 
nayeur?  pcndaiil  toute  la  piemière  période  de  la  circulation  moné- 
taire en  Etliiopi.'.  Il  y  a  lieu  de  remaniuer  aussi  ipie  les  deux  luistes 
ne  se  rencontrent  que  sur  les  monnaies  à  léi^eiides  precques  et  jamais 
sur  cell«*s  à  raractrres  j^lu'e/,,  ce  qui  fei-iil  supposer  qu'à  partir 
du  vir  ou  VIII"  siècle  de  notre  ère,  époipu»  à  laquelle  apparaissent 
ces  dernières,  l'organisalion  constitulionnellc  de  l'Kthiopie  était 
changée  '. 

Îi-J.  —  Les  monnnieftà  Ifgewlrsélliiopirmirfi  ?ont  considérées  comme 
plus  récenles  (pie  celles  avec  des  caractères  grecs.  La  chose  s'expli- 
que d'elle-même,  étant  donné  que  les  premières  étaient  frappées  à 
l'instar  des  coins  impériaux  qui  avaient  cours  d ms  la  région  du  Nil 
et  les  ports  de  la  mer  Houge,  et  que  ce  fut  surtout  pour  le  commerce 
avec  les  étiangers  que  ce  mode  d'échange  lut  adopté  par  les  souve- 
rains .iksumites. 

Les  monnaies  à  légendes  éthiopiennes  sont  donc  de  beaucoup  les 
plus  récentes,  naturellement  toutes  de  l'époque  chrétienne,  proba- 
blement postérieures  au  vu*"  siècle  de  notre  ère,  date  à  laquelle  le 
grec  semble  définitivement  abaniouné  comme  langue  oflicielle  pour 
faire  place  à  l'idiome  national. 

Toutes  ces  pièces  sont  en  cuivre,  i  une  seule  effigie,  le  buste  de 
profil  avec  couronne  perlée  ou  tiare  sphérique  comme  sur  les  mon- 
naies grecques  ci-dessus  décrites,  ou  de  face,  couronne  perlée  ou 
crucigère  coiume  sur  les  monnaies  byzantines;  plusieurs  variétés  de 
croix  dans  le  champ  du  reveis.  Les  lectures  sont  encore  très  difficiles, 
vu  le  mauvais  état  et  le  petit  nombre  de  pièces  connues  jus- 
qu'ici -. 

Cinq  noms  propres  seuls  ont  pu  éîri-  lus  avec  (Hiel(|ue  cerlilude; 

ce  sont  : 

aodi^lili  '  ill^  3  Mfîfr?"  s  Mhigsn  negusli  Aksum  ; 


1.  Dillrnann,  oiivr.  cité,  p.  230. 

2.  M.  d".\t)ba<lio  a  donné  lu  p'aviire  do  quinze  de  ces  pièces,  pi.  Il  et  III  de  ses 
obsirvnlions  à  la  suite  du  inéinnirc  de  M.  do  Lnngpi'riersur  les  monnaies  l'thiopien- 
i\r%.  Lis  caractères  glio'  z  dos  monnairs  sont  beaucoup  moins  aicliaiques  (jue  ceux 
de»  iui>criiiiion»  d'Aksum,  sans  c.  pciidanl  avoir  les  voyelles  maniuées  comme   l'ont 

c»  dornkrs.  —  V.  la  planche  ci-joii.tc. 


LKS    I.ISTI'.S    U(>V\Li;s    I  IIIIOPIF.NNF.S,  2l7 

V7lP  :  hCffOfh  3  Nt'^'u.'li  Anii;ili  ; 

dl'î*U  s  Ï7U*  s  h'h(h7°  '  ll.ihiz  ncgu:li  Aksmn  ; 

hii  '  h%  sNV^Mish  Kla  Ats  ; 

>7(ll'i  5  l/fiï//  :  Ncgiisli  Zwnz.  on  Zw.ix.ii,  Z\v;iz:in 

Le  roi  MIii.Lfsii  csl  toui  II  f;iil  iiiconnii.  M.  il.ilévy  .l<:'Coinpo=c  ce 
nom  pro[)ir  cil  .Mlif.u'i)-!  .k-m,  «que  le  iiuséiiconlieiix  me  fusse 
grâce  ». 

Armnh  ou  Airuakli  est  uu  roi  (■hrélicn  do  la  3-^  période;  il  (ij,'iire 
sous  le  n°  2\  .le  la  lisle  III  A;  il  régnait  à  la  lin  de  la  dynastie  aksu- 
iiiile,  e'es(-à-ilii\'  vei's8  10. 

ilalaz  ou  Ivliat  iz  ne  se  trouve  ni  da-is  la  dynastie  aksumite  ni 
dans  celle  de.-.  Zàgues.  Il  se  peut  que  ce  mot  soit  un  écho  de  la  forme 
Khadaus  (le  Za  Hadiis  de  Sali)  de  la  lisle  A  n"  11),  sans  que  ce  soit, 
bien  entendu,  le  môme  personnage,  cari!  doit  y  avoir  un  intervalle 
de  quatre  ou  cinq  siècles  entre  les  deux  souverains  Khadaus  et 
Khataz. 

Ela  Aiscst  peut-èti'e  un  des  Ela  Atsbeha. 

La  légende  Zwaz  neg  a  été  lue  Ziznn  par  M.nalévy,qui  a  rappro- 
ché ce  mol  de  Zaizana  ou  Sazana,  nom  du  frère  d'Aizina  (v.  supra, 
§  32).  On  peut  aussi  lire  Zwazan  N(gsh). 

La  pliipait  de  ces  diiïéi  t-ntes  pièces  ont  au  revers  la  môme  légende, 
sorte  de  sentence  analogue  au  to^tq  àpscv)  xTi  /^wca  des  monnaies 
grecques.  Cette  formule,  sauf  quelques  variantes,  est  celle-ci  :  «  la- 
kliazab  fashakha  liakouna,  populo  gaudium  sit  »  ou  «  la  kliazab 
shahil,  populo  gratta  ». 

53.  —  l]n  résumé,  les  liste  i\c>  ti-ois  preiiières  périodes  n'ont,  par 
elles-mêmes,  qu'une  valeur  historique  ti^s  limitée.  Le  manque 
d'ordre,  le  défaut  de  concordance  entre  ks  diverses  séi-ies,  leur  en- 
lèvent, en  effet,  beaucoup  d'autorité.  Elles  sont,  en  outre,  incom- 
plètes, parce  qu'elles  ne  donnent  pas  tous  les  souverains,  ni  tous  les 
noms  d'un  môme  roi,  et  enfin,  qu'elles  ne  permettent  de  retrouver 
avec  certitude  aucun  des  noms  propres  fournis  par  les  documents 
étiangers  ou  les  monnaies  locales.  Cependant  ces  listes  ne  sont  pas 
sans  valeur,  du  moment  que  l'on  ne  o'en  sert  (jue  comme  auxiliaires 
et  à  litre  de  renseignements  bistoiiques.  Comme  je  l'ai  dit  au  début 
de  ce  mémoire,  elles  demandent  à  être  examinées  de  prés,  contfô- 
lécs  et  remaniées  au  point  de  vue  d'une  chronologie  sérieuse. 

Les  monnaies  sont  encore  en  trop  petit  nombre  et,  par  suite,  les 


2!8  HEVLK   AllCHF'OLOt.igUK. 

Ii'Cluns  t'iifAiv  tn»!  mci-iiainos  pour  pormrtln'  îles  roirciiims  aux 
lisUs  loyalis  tU-s  rliioui<jin''<  ;  mais  cclli'  laiMinc  ircxisU'ra  jias  hui- 
juiirs.  Il  suflil  irune  ou  deux  irouvaillcs  iinporlaiitcs  pour  recoiMi- 
luer  louli.'  la  série  moiuHairc  ('llHnj.itnne.  Le  jour  où  l'on  possèdi ra 
une  collection  riche  ri  variée,  on  ^Cl•a  h  ini^ine  île  s'asnirer  si  les 
pi6ce«  (jue  nous  avons  décnle>  ciilessus  cl  (jue  nous  avons  clicrcliô 
à  idenliiier  avec  des  princes  de  la  dvnasiie  salomoniennc  ne  sonl 
pas  (Il  lèalilè  lieaiiionp  plus  récciiles,  au  iiioiiis  les  inoniiaies  à 
li^gendes  glieez,  el  ne  nous  riinèiient  pas  en  plein  moyen  âge 
c'esi-h-iliie  aux  x",  xi"  el  xii'  siècles. 

Je  donne  iniunic  suil,  en  appendice,  el  comme  complêinenl  du 
prèsi-nl  mémoire,  les  lisles  des  Rois  d'Elhiopie,  pour  les  irois  pre- 
mières pério  les,  ainsi  «jue  les  noii'v  des  rois  lels  (ju'un  a  pu  les  ilé- 
cliMTier  sur  les  niunuaies. 


AlMMi^NDlC 


CATALOGUE    DES    liUlS    D'ETHIOPIE 

d'après  les  difféuentf.s  listes 

DIJ'UIS  LtS  OIUGI.NKS,  JUSQU'A  L'AVÈNli.Mli.M    DL  LA   h>\\sriK 
DKS  ZA(i. 

Il  existe  trois  lisles  dilTérentes  pour  la  succession  des  rois  d'Ethio- 
pie; on  les  dési;,Mie  généraicmeni,  d'après  M.  Dillmann,  (|ui  le  pre- 
mier les  a  publiées  dans  un  ordre  méthodi(|ue,  par  hs  lettres  A, 
B,  C,  avec  la  réféience  aux  niaiiuscrils. 

M.  Dillman.i  esl  aussi  le  premier  (jui  ail  eu  l'idée  de  p;ii  'jg.'i'  ces 
li^lcs  el,  par  suite,  riiisloire  abyssinienne,  en  trois  périodes  : 

La  preiidére  s'éleiid  depuis  .Meiiilek,  le  premier  loi  de  h  dynastie 
salomoniennc,  jus<|n'à  la  naissance  du  (>liiist  sous  H;i/,én  ;  la 
deuxième,  depuis  Hûzén  jus(|u'à  l'inlroduclion  du  christianisme  à 
Aksum;  et  la  troisième  période  va  jusqu'A  la  (in  de"  la  dynastie  sa- 


LKS    LISTES    ftOVALMS    liTHIOrMKNNKS.  219 

lomnnifimc  (M  son  nMiipInccmcnt  par  collo  dos  Z^^^'ucs  ou  Zi;.'  fvcrs 
OtiO  a.'  J.-C). 

(ili.iciiiii' (|.  s  Irois  listes  priiici|i;ili!>  A,  H,  (i,  coiiipn  ibl,  .ivcc  des 
variantes  iniporlanltîs,  toule  la  séiiu  (l(!S  p(VS((nna^'es  peiidanl  les 
trois  périodes.  Je  renvoie  aux  observations  do  DiMniannel  autres,  sur 
les  (liverjfences  et  les  points  de  roinparai.'-'on  à  iHaMir  entre  ces  difTô- 
rcnles  listes.  Je  me  lif)rne  ici  à  indiiiner  les  sources  et  à  'lonner 
les  séries  ro.\ aies,  à  jifu  prés  telles  (|iie  les  a  piildiécs  M.  Dillniann 
en  185.'};  les  dilTérences  viennent  des  p'iblications  postérieures  à 
cette  date. 

La  lisle  A  se  irouve  dans  :  le  nimuscrit -C»  de  la  H nlleienne,  f"  1)0 
(eatal.  de  Dillinann,  1848),  le  manuscrit  .Si)2,  f°  28,  du  inôme  fonds 
(calalo;4.  de  AVri^^lit,  1877),  le  minnseril  118  du  citalogue  de 
M.  d'Abhadie  (INoO),  le  nianuscril  l'i3,  f"  22,  de  la  |jililiollié(|uc  na- 
tionale de  Paris  (catal.  Zotenljcrjï,  1878).  Lille  a  élu  publiée  |)0ur  la 
prenuére  fois  p;ir  Marianus  Yicloriiis  el  Ludolf,  puis  pir  Bruce  en 
17UÛ,  puis  [lar  Sali  (Isli),  Combes  el  Tamisicr  (1830)  el  Ilup- 
pell  (18411,  en  pariie).  Dans  la  lisle  de  Sali,  tous  les  rois  depuis 
Menilek  jiisi|u'à  Ilaïas  (!I  A,  19i  |)ortenl  la  particule  préfixe  Z«, 
dont  le  sens  est  aussi  inconnu  que  celui  du  [)réli\c  Eld,  autre 
paili'  ule  io\ale  ([ue  portent  un  grand  nombre  de  souverains  '. 
iM.  iMllmann  ilrsigiie  pai- AI  la  lisle  des  manuscrits,  A'2  celle  pu- 
bliée dans  l'IIispanin  illiistrnta,  et  par  A'i  li  liste  de  Sait  et  Uiip- 
pell. 

La  lislc  B  existe  daii.^  le.s  iiian!is''riis  2i),  i"  iiju,  -^b,  f°  7-8,  29, 
i°  1-14,  32  (le  la  Bodiéienne  (eatal.  de  Dillinaiin);  ;{'I2,  f  3G  du 
même  fonds  (calai,  de  Wriglit);  manu.scrils  141,  I»  8,  l'i"!,  ï"  2,  li.'J, 
r  ;iO,  li't  el  IV>  de  la  l)ililiolhé(|ue  naiionale  (oat.  de  Zolenberg),  et 
dans  la  Chronique  clhiopicnne  publiée  par  M.  Hené  Has-^el  dans  le 
Journal  aaialique  {en  1881;  c'esl  le  n°  142  de  la  bibliolbéque  na- 
tionale). 

La  lisle  C  e?t  celle  du  manuscrit  25,  f'  91,  de  la  Boilléienne,  et  du 
manuscrit  14G  de  la  bibliolbéque  iKiliuii.ile.  M.  Diilmann  désigne 
par  C2  el  C3  les  listes  qui  se  trouvent  dans  ï'Hispania  illustrata  et 
dans  Bruce. 

Elle  ne  commence  qu'avec  la  deuxième  période  dans  Diilmann, 


1.  Il  est  pns>iblo  qiio  le  Za  ait  la  inôiiic  origine  que  le  Dzou  liinijarite  (v.  sujjva, 
§  39,  note  3).  Le  piélixe  Eia  serair  quelque  chose  d'analogue.  Cf.  Kremer,  Sùdora- 
bischr  S(if/e.  n.  lOS. 


2iO  nr.viK   vuciikolouiulk. 

(Hii  no  «lomio  (|;io  les  tlcux  li^ttvs  A  ol  H  pour  l.i  prcinii^iv  piMiode; 
j'ni  nii  devoir  ro!nplt''t»r  cell»^  latMiiif  i\  Tni'lc  du  iiiamis<'ril  l '»'.), 
Mlil.ilo  1.1  bihliolluSjiu'  nation  île  (calalo,Mit' ZolciiluMi,',  p.  tîr)2;,(|ui 
conliiMil  ."{0  noms  de  roi«,  depuis  Menilek  ou  l!lin-vl-il;iklm  jus(|u*à 
HAzt^n;  pour  les  deux  nuires  pi-riodes.  ilc  Hjzi"^m  à  ravencincul  dos 
Zij;,  la  liste  du  manusrril  \V.)  dilTùre  peu  de  la  liste  (1  de  Dilj- 
inanii:  je  désigne  parCi,  la  Iroisii^mc  liste  de  la  première  période'. 


pHKMifiRi-:  pf:iuoi>i-; 


DEPUIS    l,KS    OIlK.IMs    II  S(H    A    IHZft\  '. 


I-i-^TE  A  Liste  B                         Liste  C  '('.  *) 
Ans. 

a  Anié  (^e^penl). .  4no 

b  Ang.lbô 2(0 

c  GeJur lOo 

d  Selialso oO 

e  Qaouasy.l 1 

f  M.ikocM ;;() 

1  ll)n-:il-n.ikim,li!s  I   Khni   Ilikîni,    fils       I    Kbn-el-llakim ,  lils 

de  MOikcdâ  et  de  de  Salomoii.                      de  Saloinou. 

Salomon '2.') 

2  Ilandadyo I       2  TomAi.                           2  RarAkid. 

3  Aiiila-Aiii.i; Il        '.i  Za  (i''(liir.                        3  Abraiiiyos. 

4  Aujcyô :<       4  AksiimAi.                        4  TAzeiiA. 

H  Tsaout'' 31       H  AuscyO.                           5  l'AzenA. 

6  (iasyO,  12  licur.  s  fi  TaliaouAsyô.                   G  Qiiali/A. 

7  Maoual S       7  Abràlyus.                       7  l'aïadaTsaliAi. 

K  M.iha; 0      8  l'arada-TsabAi.              8  Dangasli. 

9  QaoudA 2       !»  Ilatideyô.                         1»  TAzcni. 

10  (J.ii;az 1(1     Kl  l  arada-Nagâ'li.           10  IMz(}n. 

11  HalutiA !i     11   Aoiiseyô.                      M    Dàiez. 


1.  M.  II.  IkiAst;!  (7i(M(/j.  fl.v/a/.,  juin  1881,  p.  /il?)  la  désigno  par  B,  co  qui  éia- 
blit  une  confusion  avec  lu  listo  H  accpiOu  pur  tous  les  uuieurs  ci  qui  est  celle  de 
sa  C/irotiK/ue. 

2.  Lo»  irf('';?ulariiû&  et  1p9  incorliludps  (|iio  lo  Irrttur  p«mnrquorn  poiit-ùiro  dans  1.-. 
iransctiption  do»  nom*  propres  «hlilupions  vioiiiuni  do  l'absence  d«  sipni's  typn^ra- 
pliiqiKn  »|K";iaux  (Ictirus  |>oinir;i'»,  acccnluirs,  eic).  L'orlliogr.iplu'  di's  noms  du  rois 
varie  du  rcfttc  quelqoi  fois  d'une  IIhIoà  l'a.itrf  dans  les  nianuscrils  ('Mlii-i|iioMs  cux- 


LKS    LISTI-S    i.oVAI.KS    K  rilKJl'lIlNNKS. 

12  r;i/.li.i i      12  Kia;yùii.  12  (iuaiii. 

1:j  Ilulir 2     ri  'l'oinA  Siun.  \'.i  Asgiia;^uam. 

14  Ivilas 7     I  i   li.lsjrt.  14   Lclorn. 

lo  S.ilyA 17     i:;  Aoiilel.  l.i  Talatcni. 

K;  Kilvil 2(i     lii  Ziouan'-Ni'brat,  li;  Alin-lia. 

17  Aglcliû :t     17  SaifAi.  17  C-fâ. 

15  AoUM^iiû i      18  Iliiiiliài.  18   liAdg.'Zil, 

19  IloriouAs 2:)     1!»  llaiid.^.  l!)  Zergcvo. 

20  Mahsi I     20  SifiMy;!.  20  Madmen. 

21  lleesiî   BAzOn  (la  21   Agicluil.  21   Ucticin. 

S"  année  de  son  22  Maouflouel.  22  Gernia-AsTan", 

ri^[;ne  lo   Chrisl  23  11  louaris.  23  Lcb-DikliAiû. 

est    venu     au  24  Maliati}.  24  liiiza-YoqrC. 

lucnde)' 17     2.i  Nàlki"'.  2;»  Nagsherû. 

20  i;âzi'n(sousl(Mr'gne  2(1  ll(z!;-Aread. 

duquel,  en    lu    S"  27  HAlir-Aread. 

année,  est  m'   le  2'<  .MAckaia-I'euoni. 

Clirisl,   louange  à  20  l>Alii-Uedciii. 

lui).  30  lidzùu. 


DKCXIE.MK  l'ÈUIODK 

IJEI'IIS    UAZÈ.N    JU^QU'A    AUniiIl\    LT  ATSliEIIA. 

Liste  A  Liste  B  .    LisTt  C 

'  Sariù 27  1  Senfâ  Aréd.  1  Senfa-A<ga;l. 

2  I-ekas 10  2  BAIir-A-^gad.  2  liAlir  Sagid. 

3  Miib^Oiih 7  3  fîenna-Asfdrô.  3  fierma-Ajrar. 

4  Sateuâ 0  4  Sliarguûi.  4  SerAdA. 

5  A'IgalA 10  1/2  o  ZateAi.  o  Kuilu-Sion. 

6  AgliA 1/2  6  Sabea-Asgad.  6  Sarf^uAi. 

7  Masîs  ou  Mails..  7  7  Sion-GczA.  7  Zarâi. 

8  lleqlû 13  8  Agdûr.  8  Bagainâi. 

!)  UeinAliê 10       '.)  SenfaouSuifa-ArOd       0  DjAa-Asgad. 

10  Ao  ilel 2     10  Al)reh;i  el  Ai.^beha     10  Sion-Ilcgez. 

11  ElaAoudaou  Ela-  (sous    leur  réi.'ne     il  .AlaouAl  Gciih. 

lad 30  le      christianisme 

12  Zegen  el  RemA.       8  fut    introduit    en     l2SArAr'ad. 

1.  La  listft  de  la  prrniière  période  est  forci'mpiit  incomplète,  car  le  total  des  années 
de  règnes  n'est  que  de  200  ;  or,  si  Ibu-al-Hakim  est  h"  fils  de  Salomon,  il  y  a  un  in- 
tervalle de  huit  siècles  entre  suu  règne  et  cl!;  i  de  Bàzèn.  Par  contre,  le  total  des 
années  de  lu  deuxième  période,  qui  est  d'>  345  ans,  est  assez  ex;ict. 


-2ii  fthVUE  AncHÉoi.or.iouE. 

13  CifalC  on  GaralO  \  l-':iliio,.if  j.nr  A!>l)A     <3  Ag'Ulr. 

l4nocî«^^'"'  '»  SalAinA  ru  l'ii  ri  ;»:»:»     fi  Ahri'ha  et  Alsl'chu 

15  Ela  '  la  i»ai8>aiicc  du  «  les  frères  aimé»'». 

IG  Kla-1!  1  Kl...  i.liiibl). 

17  HeiM^  -  T»aur 

on  Isauiia  ....  I 

18  Uakpnfl »  ., 

19  H.Kiis» 1  '" 

20  Kla-Sagal  (  u  Ae- 

g'-l 3 

21  K'H-Aïft'ha H 

22  Ma-Tsegab *23 

23  Elii  Saniara 3 

2V  EI'-Aiba HJ 

23  i:i  i  KskciiJi  ....  37 

2G  D.iT.saham 9 

27  Elà-Saa 13 

2S  Elu-Aiya IS 

20  Ela-Atnicia..,.30  1/2 

30  Ela-Ahyaua 3 

31  Ela-Abrcha      et 

Ela-Atsl.eha,  27  1/2 
(Dans  la  12«  année  de 
leur  règne    le    christia- 
nisme   fut    introduit    à 
Akïuai). 

TROISIÈME  PERIODE 

DEPDIS    AnnElIA     ET   ATSBÎIIA    JI'SQU'A    DtLNAOD. 

I.i^TE  A  LisTi:  R  Liste  C 

1  Asfeh. 

2  Aifed. 

3  Ani>i. 

4  Al  Ad. 
\i  Saladol-A. 
fi  AlamMA. 

7  TuzOnn. 

8  Kilcdi. 


.    j..  iju'à  c  l'riiicc  tous  les  ikhhs  i!i    i    i-,  finil  nrrrrdi's  ilc  /u  dans   la   iisto  lii' 
Sait. 


1   Abroha 

.      12 

1  Asfoha. 

2  i:in-Asfcha 

.       7 

2  Aifed. 

3  ElaSiniil 

.      14 

3  AniH. 

4  Ela  A.llnna  ... 

.     H 

4  SaladobA. 

5  Kla-Hi'la(n&)... 

1 

5  AI-AmOda. 

6  Asf.'ha 

.       1 

C  T.iz<?na. 

7  Ela-Al.-I)tha  ... 

li 

7  KAIeb. 

H  Ela-Amcda 

.      If. 

8  Gabra-Masqal. 

Lr.'>    MSTi:S    IIOY.M.KSKTIIIOPIKNNKS.  223 

y  Kl,i-Alii(h:i. .,    .  1/2      0  ConslHriiiiKH.               9  G.ibr.i-Mnsqal. 

10  Kla-Slialil 1/2  JO  II.isan-Sat,M(I.  10  CoiiM.mliixjs. 

i  1   Kla-i;  il.az -J.  II    Ff'ri^-  -haii.li.  1 1   Mx/.ç^nr. 

IJ  H'a-Siliiil I  1-2  A  Itr.iza'.  A'ireaz.       12  A>(ÏîIi, 

liJKIa-A-I.Ali ;i  i:M:kl,i-i;i' If-ra.  l'I  AmiAh. 

li  Kla-Ahr.lirl  i:ia-  li  C.TiiiASarar.  14  DjAn-Asfeh. 

AdlMii.l 10 

15  Eli-'IVaham 2S  i:»  Gergaz.  i:;  Dj.ln-A-K-i''. 

10  Kla-AiiiMa 1-'  10  !)t'p,,A-.\likAel.  10  l'crO-SliMtjai. 

17   i;ia-Slialil 2  17  H.AIii-ikli.  17  Adiiraz. 

l.S  Kla-Tsebali 2  |,<t  ('.uni.  IS  Aizûr. 

19  lila-Tsah.im i:'>  li)  Asguangnm.  19  DcIriAôcl. 

20  lila-CalKiz 21  :0  Lclern.  20  Madûi. 

21  Agai)tî  cl  Ltîiii...  4  21   TalAlom.  21   KsalO  ou  Giiodîlli. 

22  l-:i:i-Aniîtli Il  '22  Oda-Gosh.  22  Ant.a^A-Udom. 

23  Jacob  <<l  Daviil..  3  23  Aizûr.  23  KiialA-lldom. 

2i  ArmAli 1  i  24  Detlem.  -4  GormA  Asfarû. 

25  ZilAin 2  25  Udcdem.  2o  Zi-rgaz. 

20  Jicob 9  26  Udem-Asfarû.  20  l)ei:ri\-.\!ilvacl. 

27  CoiîManlinos 2.S  27  AniiAI).  27  Hadigaz. 

28  Bela-l«rael ?  28  DegnA  Djân.  28  Ar.i.Ah. 

29  Gilira-Masqal.  29  GedA-DjAn.  29  Shinahani. 

30  AubasA-Udem.  30  Te rdà-Gabaz,  après 

31  DelriAôd    (qni     fut  Icqiiel    arrive    la 

cbassé parles Zag).  famille  des  Zag. 


LISTE  DES  ROIS  MONÉTAIRES 

LÉGENDES  GRECQIBS. 

Aphilas,  au  IV'.  Dimian  (voir  la  planche  XX,  n°^  1,  2,  3). 
B:»khasa,  au  ÇT.  ianaf  (raûme  planche,   n"»  4,  et  Journal  asiatique  du 
Bengale,  tome  50,  pi.  X,  n°8). 
Gersem,  au  ft".  anonyme  (planche  XX,  u»*  o  et  (>). 
Oii^^as,  il.  (citée  par  Hal6vy,  Epigr.  !^cmit.,  p.  140). 

Nezana,  au  IV.  Baklia^a  (mûme  planche,  n"  7). 
Oiilzeba,  au  l\~.  anonyme  {ibid.,  n»  S). 
Asael,  au  R".  à  la  croix  {ibid.,  n"  9  et  10). 
Bustes  anonymes  (/6/(Z.,  n°'  11,  12,  13). 


i\  lu.vui;   V  f.in.t»!  nui«»n. 

LicUNDE!»   iTHIDlIB.N.NtS  ià  UIIC  SUUlC  ffllgic)  '. 

Mhigsn  (lilaiichi;  ci-jointo,  n"  [\), 
Arinah  (Md.,  n«»  i:i,  «••,  17). 
Il.i(;i/.(i6i(/.,  i.-  IS,  l'J,  IM»,  '21). 
i:i;i  Als  (tbid.,  n»  22). 
Zwai  ou  Zwazan  (ibid.,  u"  2v) 

i;.    DIHiClN. 

I.  Voir  lu  plaiicliu  XXI  pour  l'alpliabcl  éiliiopicn,  ei  lus  légendes  ii.ont-iaircs. 


conniGLyDA 


\\n:c  10»,  noie  1,  li?cz  :  '1rs  mois  E>jnptc,  pyramide,  labyrinthe.  — 
l'a^zc  l.-iT,  iiolo  1,  li.-t'7.  :  .Migoiidi.  —•  l'aiin  loT,  noli'  3,  lis»-z  :  Mnllcr, 
hurijni  uiid  Sddocsstr.  —  l'unie  lo?*,  loie  3,  li.-ei:  l'arabe  :  ma'i/i  au  lieu 
de  ina'ir.  — Page  100,  ligm:  33,  li>^iz  àoîXsoi. 


Li:S   BAUDI^S 


TKXTES   PRIMITIFS    SUR    LLS   BARDES. 

Il  est  souvent  question  des  bardes  gaulois  riiez  les  auteurs  de 
l'antiiiuité.  Les  deux  plus  anciennes  mentions  que  nous  trouvions 
de  ces  bardes  se  rapportent  à  di^s  événements  qui  datent  du  second 
siècle  avant  notre  ère.  M.iis  les  textes  qui  concernent  ces  événe- 
ments ne  se  servent  pis  du  mot  «  barde  »  ;  les  auteurs  emploient 
des  termes  grecs  qui  veulent  dire  poète  lyrique. 

Le  premier  de  ces  textes  concerne  un  barde  qui  chantait  les 
louangt's  (le  Louernios,  roi  des  Arvernes.  Louernios  est  le  père  de 
Biluilos,  envoyé  prisonnier  à  Rome  l'an  121  avant  J.- G.  Louernios 
donna  un  jour  un  grand  festin  dans  une  salle  quadrangulaire  cons- 
truite ex|)rè>,  usage  que  nous  retrouvons  en  Irlande  dans  la  pièce 
intitulée  Festin  de  Bricriu,  récemment  publiée  par  M.  "NVindisch^. 
Le  barde  arriva  trop  tard.  Posidonius  nous  le  représente  suivant  à 
pied  la  roule  où  le  roi  était  traîné  dans  un  char;  il  court  à  côté  du 
cliar  royal,  chantant  un  poème  où  il  fait  l'éloge  du  roi,  et,  quant  à 
lui-même,  déplore  le  malheureux  sort  qui  l'a  fait  arriver  après  le 
festin  terminé.  Le  roi  lui  jette  un  sac  d'or,  que  le  poète  ramasse  en 
chantant  :  «  La  trace  que  votre  char  laisse  sur  la  terre  produit  aux 
hommes  de  l'or  et  des  bienfaits^.» 


1.  Cet  article  est  extrait  d'ua  volume  iiUilulé  :  Introduction  à  l'étude  de  la  litté- 
rature celtique,  qui  paraîtra  prochainement  chez  Ernest  Thorin,  7,  rue  de  Médicis. 

2.  Irische  Texte,  p.  25^-303.  La  salle  de  festin  de  Bricriu  était  construite  à  l'imi- 
tation de  celle  des  rois  suprêmes  d'Irlande  à  Tara,  qui  avait  la  forme  d'un  parallé- 
logramme rectangle. 

3.  'AyOpÎTavTo;  o'aJto^  ~poOii7(j.t'av  -otît?,;  OotvT);,  ày'JGTîprjTavTi  T-.va  tûv  ]îap6àpa)v 
itoir,Tr)v  àçtxsTOa'.jXxl  ir'JvavTYJTavTa  jiîtà  tôOT);  'j\vii\-i  aO-roj  rr;/  'Jzîpo/fiV,  éa'j-ôv  5'à:T0- 
OpriVîïv  ôxt  OcTTEprixE,  -ôv  oï  Tîp^OEVTa  OyXàxiov  aÎTr,(7at  /_pucio'j,  xaî  di<!"'  stùtiô  ^rapsTpé- 

xi.iv  —  15 


225  HKVUK  Aiu:m>(iLor.ioi'K. 

Oiiolquos  annt''es  plii-^  '.ir.l,  en  Tau  \'ll  avant  nolro  ('i(\  h-  pro- 
forisiil  roninin  (în.  Doiniliiis  .Kiioliarbus  rcnit  de  Hiluitos,  lils  de 
Loiiernios,  une  amliassadt'  où  so  Irouvail  liii  Nanle  qui  cliimlail  la 
noblesse,  la  bravoure,  les  ricliesses  de  Hiluitos,  des  Allolroges  et 
du  cln'f  de  raiiibassado'. 

Le  mol  «  barde  »  n'apparaît  pas  dans  ces  deux  textes,  le  preuiicr 
de  Posidonius,  le  second  d'Appien.  Poeitloiiius  se  serldc  l'expression 
«  un  poêle  barban'  »,  ti;  tcÔv  fiapSâpwv  r.oir,-:r,;,  et  Appien  écrit  U0U71- 
xô;  ivT":,  c,'esl-;\-d ire  un  niu>icien  ei  un  poète.  .Mais,  dans  un  autre 
endroit,  Posidonius  nous  apprend  (jue  b-s  poètes  (pii  chantent  des 
lonaiiires,  cliezle>  riaulois,s'a|»pellenl  «  bardes  d  -.  Posidonius  repro- 
duil  dansée  pas-aj^'e  des  notes  de  voyage  reeueillies  par  lui  aux  en- 
virons de  l'an  100  avant  notre  ère,  où  il  visita  la  Gaule. 

Le  nom  des  Inrdes  gaulois  est  r«''pèlè  environ  soix  inie  ans  plus 
lard  par  Diodore  de  Sirile  : 

«  Chez  les  Gaulois,  dit  Diodore,  il  y  a  des  poêles  lyriques  qu'on 
appelle  bardes.  En  s'aceompagiiant  d'insli'iiinenls  semblables  aux 
lyres,  ils  clianlenl  reloi,'e  des  uns,  la  satire  des  autres 3.  » 

Tels  sont  les  textes  les  plus  aiirieiis  (]ue  nous  possédions  sur  les 
bardes  gaulois.  Le  premier  se  réfère  à  un  événement  (jui  peut  re- 
monter vers  le  milieu  du  second  siècle  avant  notre  ère.  Le  dernier, 
postérieui'  d  un  siècle  environ,  a  été  écrit  ;i  peu  piès  (juarante  ans 
avant  la  naissance  de  J.-C,  et  constitue  un  des  éléments  d"un  ta- 


/ovTi,  àv£/o[i£vov  ô'èxîîvov  TziÀiv  ùijlveîv  ).£'YOv:a,  oiôti  ti  l/vr,  rf;;  yf,:,  tf '  f,;  àixapTT,).aT£î 
yp'jdov  xal  £-j£pYîa(a;  àvOptoTîoi;  ç£pîi.  Didot-Miillcr,  Fitif/incnln  /ii>toricorinn  gra- 
coruni,  t.  III,  p.  261.  AthtMiOe,  édition  TcubntT-.Mcimke,  liv.  IV,  cli.  xxxvii,  t.  i, 
p.  273-274. 

1.  .Mo'j<tixo;tî  àvTjpEÏTieTO,  pap6âp(o  (AouTi/.ri  tov  [iïffiÀéa  Bitoïtov,  et-'  'A).),66piYa;, 
lîîa  Tov  j:pEa6£'jTr,v  aÙTàv,  ê;  te  yé'toi  xal  àvôpitav  xai  Ttîpiovaiav  yfAvûv.  Appicn, 
liv.  IV,  De  rébus  (jnUtcis,  ch.  xii,  édit.  Didot,  p.  28.  UHn^lot  ii:ir  un  i  à  la  premii-ro 
syllabe  est  préférable  à  Bcluitus,  par  un  e,  ortlioBPaplie  :ido(>tée  par  M.  Moininsen, 
lUemische  Geschicfile,  6""  édit.,  t.  II,  p.  ICi,  sous  l'influence  des  Acta  tnutnphorum, 
Corpus  mscriptiouuui  lutiniirum,  t.  I,  p.  /iGO.On  trouve  col  i  dans  tjtrahon,  liv.  IV, 
ch.  Il,  §  3,  éd.  Didot-.MiilIcret  Diibncr,  p.  159,  r-t  clioz  Florus,  liv.  IH.rli.  Il,  ou  liv.  I, 
cil.  XXXVII,  éd.  Teubucr-Halin,  p.  iO,  comme  clu'z  Appien,  dans  le  passuRi;  cité;  et 
c'ett  un  iqu'txiKC  lu  Krammair»!  celtique.  Voirréiu<!o  sur  |i'  mot  irlind.iis  bith  qui 
se  trouve  chri  Zcuss,  Crammntica  celliat,  p.  800;  cf.  pp.  12,  23H,  2.1U. 

2  Ta  ô:  iv.o-J'7\s.Ti-.'x  aOxûv  tliiv  ol  xa).oJ|ievot  Bip^oi  •  iroiriTai  5t  oiiot  Tvy/divouoi 
|ht'  ùiif,^  d-»ivo'j;  JiyovTî;.  Didot-.Miiller,  Frn /inenta  hi''toriC'>ritm  f/rercnrum, 
l.  III,  (t.  2:>tt.  Aih''-né«\  liv.  VI,  cli.  xi.ix,  éd.  TeubutT  M<'inek<',  t.  I,  p.  *.3«. 

3.  EItI  li  Tixp'  auTOÎ;  xai  ïioir.Tal  jxt/wv  oO;  [iàp5o'j;  ôvoiixïo'j'iiv  •  oiroi  Se,  iiix' 
opYd-<(i)v  Tïî;  )jpaic  éiioiwv  àôovTt;,  ou;  |Atv  û(ivou3iv,  o'j;  Se  fJ),affÇT||Jio"jat.  Diodore, 
liv.  V,  ch.  XXXI,  éd.  Didot-Mûiler,  t.  I,  p   272. 


i.Ks  i!Aiti)i:s.  227 

hliî.iii  tli!  1,1  Gaule  Iransalpirui  au  moment  où  l'auteur  tenait 
la  |)l  iiU",  i|uel  lues  années  a|iii'.s  la  eomiuôle  de  ce  pays  par  Jules 
César,  (luelijiifs  années  avml  l'élaljlisîement  (Je  l'empire  par 
AuL'Usie. 


iw\  j.yrl:  di:s  baudls.    -  la  cuotta. 


Dinilnre  ne  nous  dit  pas  le  nom  de  l'espèce  de  lyre  dont  se  .-cr- 
vaienl  les  Ijardes.  On  peut  supposer  (jue  cette  lyre  est  la  crottd, 
dont  en  G.iule  Furtunat,  au  vi"  siècle,  parle  le  premier.  Faisant 
rél(tg(!  de  Loup,  duc  de  (^liampagne,  il  s'écrie  :  <(  Que  chacun  le 
vante  par  le  [U'océdé  où  il  excelle,  et  en  s'accoiiipafjnanl,  le 
Romain  de  la  lyre,  le  barbare  de  la  harpe,  le  Grec  de  la  ciihare 
d'Achille,  le  Hrttjn  de  la  crotta\  »  Le  plus  ancien  manuscrit 
irlandais  où  nous  puissions  aujoLinl'hui  lire  ce  mot  date  du  neu- 
vième siècle;  ce  sont  les  gloses  du  Sainl  Paul  de  Wurzbourg,  où  le 
laiin  sire  tihbi,  sire  cilhnra-  e>t  ren  lu  pai-  i-sintl-hitiiiiiin  no  cuuiT, 
et  aut  naod  citliarizulur  par  no  ani  CKOTiichtcr'^.  Cvoil  est  le  lialif 
de  croit,  dont  la  Iroisieuic  personne  du  singulier,  iuiiicalif  présent 
passif,  crotlicltther,  est  déi'ivée.  Telle  e^t  la  forme  sous  laquelle  le 
nom  de  la  liaipe  celtique  apparaît  dans  le  manuscrit  le  plus  ancien 
que  nous  puissions  citer,  et  ce  manuscrit  est  du  neuvième  siècle; 
mais  croit  se  retrouve  à  une  èpoipie  contemporaine  de  Fortunat, 
dans  la  pièce  célèbre  connue  sous  le  nom  d'.lwrrt  Choluimb  f^lulli, 
composée  pour  célébrer  l'éloge  de  saint  Columba,  par  Ualia:i,  fils 
de  Forgall,  chef  des  filé  d'Irlande  vers  la  fin  du  vi®  siècle.  Dans  le 
plus  vieux  manuscrit  (|ue  nous  en  possédions,  le  Liber  hyinuorum 
de  Trinily-College,  à  Dublin,  xi'  siècle,  on  lit  : 

Is  croit  ccn  chois,  is  ccll  ccn  abail.  «  C'est  une  crolta  sans  ceis^ 
un  monastère  sans  abbé.  » 


1.  Fortunat,  liv.  VII,  cli.  viii;  Migne,  Patrologia  latina,  t.  LXXXVIII,  col.  244  : 

El,  qua  quisquc  valet,  le  prece,  voce  sonet, 

Honianu^qui-  lyra,  plaudat  libi  barbarus  barpa, 

Grxcus  Acliilliaca,  chrotta  Uritauna  caoat. 

2.  Afl  Coiinlhios  prima,  c.  xiv,  v.  7. 

3.  Zimmer,  Glossœ liibernicw  e  codicibus  Wuzibui gensiyCarolisrufiensibus,  aliis 
p.  7S;  Berlin,  ISSI. 


'228  RKVLE    AnCUKOLOr.IQLK. 

Suit  un  comnionlairc  l'rril  prohalilriiicnt  nu  m"  siècle  et  où  l'on 
voit  (|irà  celte  époiiue  on  coiin.iissnil  loujoiirs  cii  Irlande  IVspt^ce 
(le  harpe  ap|telt^e  crott,  mais  on  avait  oiihlié  le  sens  du  mot  cris. 
Peu  nous  imimrle  ici  ce  liétail'.  (le  i|ui  nous  inléresse  est  une 
menlion  de  la  crutta  en  Irlande  au  vT  MÎ'cle. 

Il  est  (luelijucfois  (jui'slion  de  cet  inslrumcnl  dans  la  pui'-sie 
épique  irlandaise-.  Ainsi  Aillill,  amoureux  d'iilan,  sa  belle-sd'ur, 
tombe  malade  de  douleur,  et,  clianianl  en  vers  son  infortune,  il 
dit,  entre  autres  choses,  que  «  le  son  de  sa  crotta  ne  lui  procure 
plus  aucune  joie-'  ». 

Une  crotla  célèbre  est  celle  de  Dugdé,  dont  le  nom  veut  dire 
«  bon  dieu  '  ».  Dagdé  était  père  de  la  déesse  Iirigil\  qui  elle-même 
était  mère  de  trois  dieux  **. 

La  crotta  de  Dagdé  tomba  entre  les  mains  de  l'ennemi  dins  la 
bataille  mythique  de  Mag-Tured,  où  les  Tuatha  dé  D.inann,  et 
parmi  eux  Dagdé,  battirent  les  Fomoré,  c'est-à-dire  une  autre  race 
divine.  Les  Fomoré,  vaincus,  emportèrent  avec  eux  cette  crotta 
dans  leur  fuite,  et  raccroclièrcnl  au  mur  de  leur  salle  de  festin  ; 
mais,  à  l'appel  magi(iue  de  son  maître,  la  crottd  se  détacha  elle- 
même  de  la  paroi  ù  laquelle  les  Fomoré  l'avaient  suspendue,  et 
elle  vint  se  placer  devant  Dagdé  (lui  en  tira  des  sons  merveil- 
leux". 

La  crotta  de  Daj;dé  était  ordinairement  confiée  à  un  artiste  de  pro- 


1.  Sur  le  sens  du  mot  reis,  voir  une  dissertation  d'O'Curry,  On  the  manners  and 
customs  of  the  tincient  Inxh,  l.  III,  p.  248-25C>. 

2.  Wliitjt'y  Siokes,  Goidelioi,  2»  éd.,  p.  IGO.  Cf.  O'Beirne-Crowe,  The  Amra  Cho- 
luunb  Cftilli,  p.  28-29,  et  fac-similé  du  Leahhur  nu  /i-l'id/irc,  p.  8.  En  moyen  irlan- 
dais, on  dit  cruit  au  nominatif. 

3.  Si-m-sasad  ceol  mo  citruile.  —  Toc/imun:  Etaini',  9,  chez  Wiiidiscli,  Inscftc 
Texte,  p.  123. 

U.  «  Digda  idon  dagh  dô,  idon  dia  soinomail  ng-na-geinlibli  ô,  ar-do-adliradliais 
Tualha  dû  Uanan/i  d'ô.  Ar-ba  di.i  talman  d'oib  ô.  »  Glose  conservée  dans  un  glossaire 
par  le  ms.  H.  3.  18,  du  Trinity-College  de  Dublin,  p.  582. 

5.  «  Orixit  idon  b&nfliile,  ingcn  in  Dagdai.  Is-<'isidc  Brigit  baneccas  idon  Uriglt 
bandée  no-adradis  lUid.  »  Sanris  Cormuic,  chez  Wliitley  Siokes,  Tfiree  irisfi  glossa' 
ries,  p.  8. 

6.  «  Na  Iri  de!  Daua,  tri  maïc  Brigti  banf/iili,  id'in  Brian  ncm  IncAar  cm*  Uar, 
t;i  tn'iir  Brcssi,  mnic  Kladan ; ocim  Brigit  banfAili'  i/ig  n  in-Dagdai  moir,  rig  liKrend, 
hm-miiilini'-.  „  Uialnyuc  des  deux  docteurs,  fac-similé  du  Livre  de  Lcinster,  p.  187, 
col.  3. 

7.  Seconde  bataille  de  Mag-Tured,  dans  h?  ms.  du  musée  Brilanniquo,  har- 
léicti  4280,  f"  O'J,  cilé  par  O'Curry,  On  the  munncrs  and  customs  of  the  ancient  Insh, 
t.  m,  p.  1\k,  note. 


I,KS    BAUDKS.  229 

fessioii,  ;iii  li.irpisle  Uailliiu'';  mais  L'aiiliin''  en  ce  moment  6lail  pii- 
soniiic'i"  (It's  Foiiiorr. 

Les  lils  d'Uailliiié  Hijurt-nl  ilans  le  second  dt-s  cycles  é|)iques 
d'Irlande,  le  cycle  de  Concliobu-  cl  de  Cùcnulainn.  Une  des  pièces 
de  ce  cycle  esl  ronlt-veiiicnt  des  vaches  de  Froech.  Froecli  a  pour 
mère  une  side ,  unt;  feninie  de  la  race  niyllii(|uc  des  Tnallia  di"! 
iJanaiin,  lir/ind  ou  n  la  belle  f'Mnine  »,  sœur  de  Boinn,  (|ui  est  la 
déesse  de  la  nviere  de  ce  nom,  la  Hoync.  11  vient  un  jour  au  palais 
de  Cruaclian,  capitale  du  Coiinau.L,'lil,  où  rèj^naienl  Aillill  et  Medb, 
adversaires  de  Concliobar;  il  amène  avec  lui  les  trois  fils  de 
Uaillmè,  le  harpiste  du  dieu  Dagdé,  Ces  trois  harpistes  jouent  de 
la  crotta,  et  les  soiis  (|u'ils  en  tirent  sont  prodigieux;  l'émotion  qui 
saisit  l'auditoire  est  si  puissante,  que  parmi  les  personnes  pré- 
sentes douze  ne  peuvent  la  suppoiter  et  en  perdent  la  vie*. 

Ainsi  nous  retrouvons  dans  la  littérature  épique  de  l'Irlande  la 
lyre  dont  parle  Foitunat,  et  celle  lyre  semble  être  celle  dont  se 
servaieni,  suivant  Diodore  de  Sicile,  les  bardes  gaulois  transalpins 
au  temps  de  la  conquête  romaine.  Mais,  en  Irlande,  nous  n'avons 
pas  tiouvé  le  nom  des  bardes  associé,  comme  en  Gaule,  au  nom  de 
cet  instrument-. 

m 

LES   BARDES   SOLS    L'EMIMUE    ROMAIN. 

Revenons  aux  bardes  de  la  Gaule  et  aux  monuments  de  la  littéra- 
ture cl.iSsique  qui  les  concerne. 

Peu  de  temps  après  Uiodore  de  Sicile,  il  est  question  d'eux  aussi 
chez  Timagène,  et  chez  Strabon.  Les  bardes,  dit  Timagène,  compo- 
sent des  vers  où  ils  vantent  les  exploits  des  hommes  illustres,  et 
cbanlenlces  vers  d'une  manière  agréable^  Les  bardes,  écrit  Slra- 


1.  Taiii  bô  Fraidi,  fac-similé  du  livre  de  Leinaler,  p.  249.  Ce  récit  a  été  publié 
T^nr  O'Udrac-CrowCy  Procevdinys  of  l/ie  royal  irish  Academij.  .Insh  Mis.  Stries, 
vol.  I,  part.  I,  1870,  p.  UO;  cf.  O'Curry,  On  the  mauners  and  customs  of  the  an- 
cient  Insh,  t  III,  p.  221. 

2.  M.  W.-K.  Sullivau  a  inséré  une  étude  sur  la  crutt  dans  son  introduction  au 
livre  d'O'Curry,  Munners  and  customs  of  tke  ancienl  Irish,  t.  I,  p.  ccccxv-IjIV  ;  cf. 

p.  DXIX. 

3.  «  Bardi  quidem  forlia  viroruiii  iilustriuni  facta  heroiciscomposita  versibus  cum 
dulcibus  modulis  concitarunt.  »  -\mmicn  Marcellin,  XV,  9. 


230  luviK  Anf:'iiî:oi.or.iorF. 

bon,  sont  aufpurfulc  pnnt''j;yrii|ius  »'l  >\c  poiMiics '.  I.tir.iiii  cnlin,  nu 
1  rein  UT  su'clr  tli*  iioln'  i'\o  roiuiiu>  SIimIiom,  iiiiiis  i|ii.w  iiili'  .iiis  en- 
viron .i|>n\'î  ct*  s.iv.iiil  t:r()';i;i|»!io,  f.iil  iiilcrvt'iiir  U's  h.i'dis  A:\n<-  sa 
Pharsale  c\  leur  adi-i'^si-  In  ppiolo  :  a  Vous  aussi,  il;l-il.  |  (xics 
(|ui,  par  vos  Inu  iii^'i's,  ((msj'ivcz  à  la  postt'iilt''  la  plus  rcriiU"'!'  le 
stiuvenir  tics  braves  tui  s  à  la  (.Mieric,  vous  avez,  ù  bai'iles  !  clianlê 
sans  niiule  des  |>nènii  s  iioinhienx  -.  » 

Nous  ne  voyons  nulle  |iiit  que  les  Iniiles  aient  ét(^  pers(^culi"'s 
par  U'S  Koiuains.  Ils  siiivèeur.  ni  (Mi  (îaiile  au  ilrni  lisine.  (pii  dispa- 
raii  av.uil  li  lin  di:  premier  siècle  de  noire  ère.  I.»'s  Honiains  adop- 
tèrent nit^'int'  une  des  parties  du  vi'^tenieiit  des  bardes,  le  ciiruUus, 
dit  plus  tard  cuciilla  nu  rouli\  ipii  les  distinguait.  On  lil  dans  une 
L'pigraninie  de  .Martial  : 

Gnlliu  satitomco  vestil  te  bardo-cucullo  3. 

i.a  (Jaulu  (f  rcNcH  du  cucullus  bardiiiue  de  Saintes. 

Ce  vers  a  élu  écrit  vers  la  fm  «lu  pioniier  sièele  de  notre  ère. 
Dans  la  seconde  moitié  ilu  troisiénu-,  l'empereur  Gallnn,  (pii  régna 
de  '^(JO  à  ^08,  voulant  être  agréable  à  Claude,  plus  Lard  empereur, 
deuxième  du  nom,  lui  fail  cadeau  de  divers  objets,  entre  autres  d'un 
bardo-runilhif^  K 

Barilus  apparaît  comme  nom  propre  illiommo  dans  idusieiirs  ins- 
criptions romaiuesde  l'époque  impériale.  Nous  citerons  un  diplôme 
de  riloven  i"omain  accoi(b'',  en  fii,  par  Néron,  à  l'IIelvélien  Callaus 
lils  de  Mardus.  Ce  monument  est  conservé  au  niii.«ée  de  .Mu!iicli ''. 
Le  musée  de  Vienne  en  Autriche  possède  un  nioniiuient   funèbre 

1.  «  Bifôoi  |xy,v  'jjxvr.Tsi -/.ai  T:o'.r,Ta(,  Sirabon,  liv.  IV,  ch.  iv,  §  4,  éd.  Uidot,  L)iil)npr 
ei  Mùiler,  p.  16^. 

2.  I^nreio,  Pharsale,  liv.  F,  v.  !ilil-ihQ  - 

Vos  quoqne,  qui  fortes  animis  bcllnqun  pi-rcnipta» 
L.iurlil>U!>  in  lunguiii,  vates,  dimiUilis  il'Viiiii. 
riiiriina  ncriiri  fiiilistis  cirmina,  bnrtli. 

a.  Mar''nl.  liv.  \IV,  ('jiit'r.  12S,  v.  1  édition  T'iibnor-S;lmcidewin,  p.  33,'i.  Com- 
parez liv.  I    (î|ii(jr.  53,  V.  5,  Hiidrin,  p.  '2h. 

k.  Vte  de  CInuilp  11,  par  Trébelliiis  Pullion,  cli.  wii.  dans .Scri/i/ofr.»  histori(f  àu- 
r/usla,^d.  H<Tinaim  l'fter,  l.  Il,  \>.  la.').  Giillitn  rif;ii:i  do  2(i0  &  208,  et  Claude  de 
2C8  îi  270.  ('uriillni  a  pris  plus  tard  iiin'  forme  fc'ininlno,  cunitlu,  en  français cou/t'  : 
cVit  un  vôtemont  iiionaitifpic 

5.  Corpui  inKcrifttionum  Idlinaruni,  l.  111.  p.  PHI',;  Uniicr,  Herucil  île  (lijiti'mcs- 
militaires,  p.  2.'i.'i,  2*5. 


M:S    IIAMDF.S.  231 

é!i'V(';  ;'i  l:i  iiiriiioin;  Je  Titus  Flavius  H.irdiis,  vrlri;in  du  corps  de 
lv()[i\)i'<,  :\\)\H'\i'  Atd  jirimti  l'idrid  AikjiisIh  liriloiiiiin  MiliitiiaK  (Jn 
a  li'oiivi' d  iiis  l';iiK'icii  li'i'i  iloiie  du  Noiicuiu  des  slrlcs  fuiK'-r.iiics 
ôIl'vim's  à  iliMix  liMiiiui-s  doiit  le  prie  s'a|){)eliiil  llardiis.  L  une,  dont 
la  stèlf  a  t'ir  dt'couvci  l(M'U  Styrio,  se  noiuuiail  lidiiond';  l'auiic, 
dont  la  stt'dc  a  «"'h''  d('Couv('rl('  en  Carinlliii',  se  iiouiinail  Julid  et 
avait  é[ious(''  lin  ct'ilaiii  lilhniiaiiis,  dmit  le  nom  est  (''Vitlcinnient 
gauloise  Knliii,  il  y  avail  en  Italie,  près  di;  Milan,  une  localité 
appelée  BdriloMdyus  ou  champ  du  barde,  dont  le  nom  est  conservé 
pardeiix  ins(ri|ilions  ',  Le  ikuii  des  haides  st;  lit  doiii;  six  lois,  ù 
noire  connaissaihc,  ilans  les  inscriptions  romaines  du  temps  de 
l'empire.  On  sait  ijue  celui  des  druides  ne  s'y  est  encore  jamais 
trouvé  ■'. 


IV 

Lli;S    BAHDKS   GALLOIS,   CORNIQUES    ET    BRKTONS. 

Les  hardes  gaulois  ilu  continent  disjiarurenl  quand  on  cessa  de 
parler  la  langue  dans  laijU(dle  ils  composaient  leurs  poésies,  et  on 
ne  la  pai'Iait  plus,  ce  semble,  au  v"  siècle,  (juand  eut  lieu  l'invasion 
franque.  En  Bretigne,  le  celtique  avec  les  bardes  survéïut  à  l'em- 
pire romain.  Ainsi  les  gloses  galloises  du  iiianuscril  de  Marlianus 
Capella,  De  nuptiis  PInloloyiœ  et  Mercurii,  transcrit  au  viii®  siècle  et 
conservé  à  la  bibliollièque  de  Corpus-College  i  Cambridge,  expli- 
quent par  or  bardaul  leteinepp  les  mois  «  epica  vulgo  lyricaque  pa- 
gina consoiiarenl  »  ;  dans  celte  formule  galloise,  leteinepp  vend  le 
\M\i\  pitgina,  or  bdrdaul  traduit  le  laiin  epica  lyricaque  ;  si  de  or 
bardaul  nous  relranclions  or,  qui  est  rarlii:ie  précédé  d'une  prô- 
posilion  avec  sens  d'ablatif,  reste  l'adjectif  bardaul  qui  est  dérivé 
de  bard  '.  Les  Gallois  avaient  donc  encoie  des  bardes  au  huitième 


•i.  Corpus  inscriptionum  Intinnrum,  t.  III,  n°  4575. 

2.  Corpus  ittscriptionum  lutinnrum,  l.  III,  n"  5473. 

3.  Corpus  inscriptionum  latinarum,  t.  III,  n»  4838. 

4.  Corpus  inscriptionu)ii  /(itinurum,  t.  V,  n"»  5872,  5878. 

5.  Voir  chez  Clwirles  l\obert,  Eiugraphie  guUo-rO'naine  de  la  Moseltr,  p.  87  et 
suiv.,  iineémde  sur  riiisciii)iioii  2200  d'Orelli,  où  qucluues  savants  ont  cru  trouver 
la  memioii  d'une  druides^^e. 

6.  Ikirddul,  poétique  :  Wiiitley  Stokes,  The  old-wehh  glosses  on  Martiunus 
Cape/la,  dans  les  Deitrage  de  Kulin,  t.  VII,  p.  386. 


03i  HKVIF.    AnCIlKOLOOKlLE. 

sit'cle.  El  l'neiïcl.  ilnns  les  lois  galloises,  doiil  Us  plus  jinciciis  nia- 
nuscrils  apparlit'iiiuMil  ;iii  \m'  siècle,  mais  iloiit  Ir  texte  ivmonle 
t'viih'miiuMit  à  une  date  plus  nnrionne,  le  hardctsl  un  des  person- 
nages (li>nl  s'oi'iMipe  le  législateur.  Dans  le  eode  vénL'dolii'n,  il  est 
le  luiiliènie  des  fonelionnaires  de  la  cour  du  roi  ;  dans  le  code  diuié- 
lien,  il  est  le  onzième,  (l'est  un  de  ceux  (jui  s'assoient  à  l;i  lalile  du 

roi'. 

Nous  lisons  dans  le  code  vùnédotien:  Le  huitième  des  ofticiers  du 
roi  est  le  barde  du  j^alais  -.  Il  doit  avoir  sa  tt  rre  libre,  un  cheval  ;\ 
sa  disposition;  la  reine  lui  fournil  son  linge,  le  mi  ses  vêtements  de 
laine.  Il  doit,  aux  trois  principales  fêtes,  s'asseoira  côté  du  chef  de  la 
maison  du  roi,  ijui  lui  met  la  harpe  en  main.  Le  régisseurdu  roi  lui 
fournit  des  habits  aux  trois  priiicip;iles  fêles.  Si  la  reine  désire  un 
chant,  le  barde  du  palais  doit  chanter  pour  elle  aussi  longtemps 
qu'elle  en  a  envie;  et  il  faut  qu'il  le  fasse  à  voix  ba.'îsc,  de  peur  de 
troubler  ceux  (jui  S'Ont  dans  la  salle.   Quand  les  gens  du   roi   vont 
chercher  du  butin  dans  un  pays  voisin,   le  roi  prend   d'abord  son 
tiers,  puis  le  barde  a  droit  à  une  vache  ou  à  un  bœuf;   et,  pendant 
qu'on  fait  le  partage  du  reste,  il  doit  chauler  le  poème  (jui  commence 
par  :  «Monarchie  de  Bretagne».  La  valeur  du  barde  du  palais,  c'est- 
à-dire  le  prix  qu'on>loiL  payer  quand  on  le  lue,  est  de  cent  vingt- 
six  vaches;  et  en  cas  d'insulte  grave  on  lui  doit  une  indemnité  de 
six  vaches  et  de  cent  vingt  pièces  d'argent.  On  applique   le  même 
tarif  au  premier  fauconnier,  au  juge  du  palais  et  au  premier  valet 
du  roi*.  Si  le  barde  du  palais  vient  adresser  une  requêle  au  roi,   il 
doit  lui  chanter  un  poème;  s'il  .s'adresse  à  un  simide   noble,   c'est 
trois  poèmes  qu'il  doil  chanter;  si  c'est  un  vilain,  il  faut  qu'il  chante 
jusqu'à  ce  (ju'il  n'en  puisse  plus  *. 

A  côté  du  barde  du  jialais,  le  code  vénédolien  mentionne  le  barde 
pourvu  de  chaire,  e bart  kadeyryauc''.  Le  barde  [lourvu  de  chaire  a 
le  pas  sur  le  barde  du  palais.  Quand  on  demande  un  chant  et  qu'ils 


1.  Ancient  low;  and  inslilutes  of  Wnles,  18/11,  p.   2,  5    15  et  16,   1G7,  1S5,  186. 

2.  liard  teulu,  litit''ralcnient,  «  barde  de  la  famille  ». 

3.  Code  vénédolifi),  I.  I,  cli.  lii,  dans  Amn^nt  L'iuw  and  Insittutes  of  Wales, 
p. 15-10, 

II.  Code  démdticn,  I.  I,  cli.  itiii,  Ancient  laws  and  institulfx  of  Wales,  p.  185. 
Cf.  Legn  u:allicœy  liv.  I,  cli.  xxii,  §  2;  i/xd.,  p.  779;  suivant  ce  document,  comme 
suivant  le  code  déaiélien,  ce  n'est  pas  uu  monu-nt  du  partage  du  butin,  c'est  peu- 
dani  Us  batailk'b  que  le  barde  chante  le  poème  ijui  comiucnce  par  «  Monarchie  do 
DrclaRDc  ". 

j.  Livre  I,  ch.  vi,  i;  1,  Ancient  lax-i  and  uislitules  of  Walcs,  p.  5. 


Li;s    IIAUDKS.  233 

sont  l;i  tous  deux,  c'esl  le  birde  pourvu  de  clnirc  qui  roiinncricc.  Il 
chante  trois  poèmes  :  le  preiuici ,  en  riionncur  dr  Dim;  le  scroriii, 
en  riioiiiu;tH"  du  loi  présent  ;  le  lioisiètu»;,  en  l'Iionncur  d'un  autre 
roi.  Vicnl  ensuite  le  tour  du  barde  du  palais,  (jui  chaule  au.=.^i  tiois 
poèmes'. 

Les  coinposilions  lyriipies  ron^^ervéos  dans  les  quatre  anciens 
manuscrits  f(;illois(|ue  M.  Skene  a  réunis  sous  le  nom  de  Four  nn- 
cient  boolcs  of  Wales  nous  donnent  un  spécimen  dos  poùfnes  (|ue 
les  liai'des  j,^illois  chantaient  dans  les  jurandes  salles  des  palais 
royaux.  Les  poèmes  lyriques  qui  composent  cette  collection  ont  eu 
pour  auteurs  des  bardes.  Les  manuscrits  d'où  M.  Skene  a  tiré  ces 
poèmes  sont  connus  sous  le  nom  délivre  noir  de  Cacnnarlhen,  de 
livre  d'Aneurin,  le  livre  de  Taliesin,  de  livre  rouge  de  Hergest. 

Le  livre  noir  de  (^aermarthen  est  alliibué  à  la  seconde  moitié 
du  xii°  siècle,  le  livre  d'Aneurin  au  xiii*,  celui  de  Taliesin  au 
xiv",  le  livre  rouge  de  Hergest  au  xv" ,  et  on  croit  (ju'une 
partie  des  poèmes  contenus  dans  ces  manuscrits  remonte  à  une 
date  plus  ancienne.  A  l'exceplion  du  livre  rouge  de  Hergest,  qui 
est  conservé  à  Jesus-College,  à  Oxford,  ces  manuscrits  sont  des 
propriétés  particulières,  peu  commodes  à  consulter.  Le  livre  noir 
deCacrmartlien  et  le  livre  de  Taliesin  appartiennent  i  M.  Wynne 
de  Peniarth.  Le  livre  d'Aneurin  estdans  la  collection  de  sir  Thomas 
Philips,  à  Middl(,'Hill.  Les  textes  lyiiques  contenus  dans  ces  manus- 
crits ont  été  publiés  avec  traduction  anglaise,  introduction,  notes  et 
fac-similés,  par  M.  Wdliam  Skene,  en  deux  volumes  in-8°  qui  ont 
paru  à  Edimbourg  en  1868.  Le  nom  de  barde  apparaît  de  temps  en 
temps  dans  les  poèmes  (|ue  cette  collection  contient,  et  l'attribution 
de  ces  poèmes  à  des  bardes  est  justifiée.  Enfin,  le  nom  des  bardes 
persiste  dans  le  gallois  moderne  sous  la  forme  bardd,  au  ^iluriel 
beirdd,  beirddion- 

Nous  trouvons  encore  le  nom  des  bardes  en  comique,  c'est-à- 
dire  dans  la  langue  néo-celtiiiue  qui  était  parlée  dans  la  pres(|u'ile 
anglaise  de  Cornouaille.  11  y  a  au  Musée  britannique,  dans  le  fonds 
cotlonnieii,  un  manuscrit  du  xii*  siècle  (]ui  contient  un  glossaire 
comique  ;  et  dans  ce  glossaire  nous  lisons:  «  Tubicen,  barlhhir- 
gorn....  ;  niimus  vel  scurra,  barth-.  » 
11  y  avait  donc  dans  la  Cornouaille  anglaise,  au  xii-^  siècle,  deux 


!.  CodeTénédotien.liv.  I,  cli.  iiv,  §  5.   Anrient  laivs  and  imiitutes  of  Wales, 
p.  16. 
2.  Grammatica  celtica,  2»  édit.,  p.  1070. 


234  iiKVi  I    \iu:iii;oi.o(;iori:. 

espèces  (le  barde;;  ;  les  uns  soiifll  lionl  dans  iKs  insliuments  à  veut, 
qu'on  apprl.ii'/jin/orrt,  c'esi-à-ilirt*  ijui  «•laieiil  longs  vl  fails  diiiiL» 
corne  d'ani  iial  ;  d<  ressiMiihlaienl  à  ce  qm-  les  colleciionneiirs  ;i|i|mI- 
lenl  des  vliiihuns  ;  li'  glo>s;iI«Mir  rend  leur  tu)iM  en  latin  p.ir  liiliirm. 
D'antres  hanles  tlianl.iient  des  vers  fomnie  les  jon},'l('urs  français 
du  moyen  Açe  ;  le  pinssairnr  rend  leur  nom  harlh  par  Iclitiii  inimns 
vclscurrn,  «i  lioulTon.  lialadin  ». 

I.es  Bretons  (^mi}j:rès  en  Gaule  à  l'époque  où  l'empire  romain  suc- 
comba cl  pc:idaiil  l'invasion  saxonne  porténnl  le  nom  de  bardes 
sur  le  comment,  d'tui  le  inoinplie  de  la  I  in^ue  latine  l'av.iii  b mni. 
Sa  firuic  aciuelleest  bnrz.Ow  ne  le  trouve  pas  seulement  dans  les 
dictionnaire  tu  dans  les  lexles  de  notre  siècle,  hans  le  glossaire 
breton  que  Lag  ideuc  a  composé  sous  le  nom  de  Oilholivon^  vers  la 
(indu  XV'  siècle,  nous  lisons  que  barz  se  traduit  en  fiançais  par 
meiieslricr,  et  en  l.ilin  par  miimts.  Un  homme  appelé  le  liarze 
ligure,  en  1:>84,  dans  unecliaile  de  l'abliayc  de  n.auporl,  aux  ar- 
chives du  départeineiil 'les  QMes-du-Nord '.  iJèsb  xii' siècle,  ce  nom 
emploNé  au  féminin,  Ihirzn.  apparaît  comme  nom  de  femme  dans  le 
cartulaire  de  lledon-.  A;ii>i,  dans  le  territoire  conquis  par  les 
Romains  sur  les  Celtes,  les  barde-  ont  survécu  i  la  chute  de  l'iiidé- 
pendance  ccllique  ;  de  celle  anlii|ue  in>ii'.iilion  le  nom  est  resié 
vivant  tliiis  la  bouche  du  peuple  breton,  cl  Ir.iveoanl  le  moyen 
âge,  il  est  parvenu  dans  la  laugue  pai'lée  jusqu'à  nous. 

V 

Li:S    BAUDMS    DMIU.ANDK. 

Nous  Irouvons  aussi  les  bar.les  en  Irlande;  mai.-'.,  [lar  la  <ujiréiin- 
lie  et  le  mépris  des  file,  ils  sont  tenus  dans  une  situalion  tout  à  fait 
secondaire.  Le  nom  de  buis  compositions  est  buirtiie.  Les  bairtne 
sont  des  chansons  consaciée>  ;\  l'éloge  des  personnages  vivanls. 
Happelons-nous  le  barde  (jui,  au  second  siècle  avaiil  noire  ère, 
courait  à  pied  sur  la  roule  à  colé  du  char  du   roi  arveiiu!  Louer- 


1.  I\evue  celtifjw,  t.  III,  p.  VOjGosUn  de  Bourgoguo  et  A.  do  nnrilu'h'iny,  An- 
cinit  éiécltét  (le  hretiiyuc,  i.  IV    p.  200. 

2.  Aurélieo  du  Courson,  Curtutiiitr  ite l'afjbin/r  ilc  lledon,  Paris,  \m:\,  p.  325. 
Comparez  le  uoni  propre  d'iiomme  Dardus  duiiB  les  inscriptions  romaines  citées  plus 
hkut,  p.  02. 


i.rs  HARnF.s,  235 

nins,  (Ml  clinnlnnl  sn  f.iim,  son  il(''s;i|i|)f»iiitcin('ril  cl  les  m(''rit('s  du 
roi.  Le  Ixtirtut'  (riil.iiiilc  est  une  co!ii|iosili()ii  di'  œ  jjciii'c.  I.c  plus 
niicii'ii  iii.niiiM'i  il  iiim  lais  on  iimis  KMjcotiliions  li;  mol  hiiiituc  csl 
un  inaniiM'iil  de  Sam!  l'uiL  en  (i.iiinlliic, 'pii  i-oniiciit  cini]  |i()6incs 
lyii(|U('s  doiil  la  piciiiii'Mc  ("'dilidri  (•oiiiid(''l(' a  (■Ir  |nil)lir»;  par  M.  Witi- 
disch  dans  ses  Irisclir  Te.rtc,  p.  210  cl  siiiv.  On  discute  la  dali-  de 
ces  poèmes,  (|iic  M.  Zimmcr  place  au  xi'  ou  au  xii"  sii'clc,  cl  ipie 
M.  Windix'li  croit  plu>  ancien^,  I.a  cnuiuicn.c  des  pièces  est  un 
éiojiro  d'un  ccriain  .Wv/,  roi  de  Lciiisler.  Li-  dernier  vers  pcul  se  tra- 
duire ainsi  :  «  Di'  niclodicuv  hiiirtnp  {poèmes  Ijardiques)  font  rclen- 
lir,  au  milieu  de  Unis  de  lucre,  un  nom,  celui  d'Acd  '.  » 

On  renconlri!  aussi  le  nul  bdirhie,  jiocme  iiardn|uc,  dans  le  mor- 
ceau le  plus  célèbre  du  plus  impori. ml  des  cycles  épiquef-"  irlandais, 
dans  rKnlèvemenl  du  taureau  de  (iûaigné,  seclion  iiililulée  :  Coni- 
liat  de  Teidiad.  Le  manuscril  le  plus  ancien  de  cette  partie  de  l'épo- 
pée est  le  Livrcilc  f.eiuster,  écrit  au  milieu  du  xii"  siècle  et  apparte- 
nant à  la  I)ihlioilu'N|ue  de  l'Université  d'Iilande.  La  reine  Medh  de 
ConnauLîlii,  s'adiessanl  ;\  Ferdiail,  (jui  va  combillre  pour  elle  le  lié- 
ros  Cùcliulainn,  lui  parle  de  la  troupe  qui  chaule  les  bairlne  ou 
poésies  bardii|ues,  luclit  nn  bairddne-. 

Il  est  encore  (jucslion  i\cb(iiilnr  dans  la  Vir  triparlitc  i\c  saint  Pa- 
trice, telle  ([u'on  la  trouve  au  Brili>li  Muséum  dans  le  manuscrit 
Egeilon  1)3,  dont  celle  paitie  a  été  écrite  en  li77.  D'après  cette  Vie, 
au  mouienl  où  sailli  l'alrice  projetle  av(  c  Dubthacli,  cb'f  d  s  file 
d'Irlande,  (pie  Fiacc  sera  le  premiei  Irlandais  élevé  à  répiscop.il, 
Kiacc  est  absent;  il  se  liouve  dans  b;  pays  de  Connaugbi,  où  ilélail 
allé  avec  une  poésie  bardi^ue  ou  bairlne  pour  les  rois-'. 

Racontons  en  quelles  circonstances  se  produit  celle  mention  de 
poésie  baniiijue. 

Patrice  était  allé  de  Tara,  capitale  de  Tlriande,  aux  frontières  de 
Leinster,  dans  la  localité  appelée  Doinuacli  niâr  Crialliar;  il  y  ren- 
contra Uublb.icli,  lils  de  IJa  Lugir.  Uublliacb  était  le  chef  suprême 
dei  file  d'Irlande;  il  croyait  à  la  mission  de  Patrice,  et  dans  une  cir- 
constance solennelle,  Patrice  sY'lant  rendu  au  palais  du  roi  suprême 

1.  ((  Arbeitlet  bairtiii  hindi  tri  loitli-tiiiiii  aiiimm  Aoda.  »  Irishe  Tr.rte , 
p.  320. 

2.  Livre  dt  Ltinstcr,  p,  81,  col.  1,  ligne  38.  Ce  passage  a  t;té  puljjié  par  W.  K. 
Sullivan,  ciiez  O'Curry,  Munners  itnd  cuitums,  t.  lit,  p.  418. 

3.  «DocLoid  huaini-se  lii  tirCondaciil  cum-b.iirliii  doiiaib  rigaib.  »  WliitJpy  Slo- 
Ices,  GoidelicOy  2»  éùit.,  p.  87. 


J36  HKVIK    AHCUKOLOGIQLK. 

dlrlnndc  à  Tara,  «le  tous  les  grands  pi-rsoniiapes  présents  un  seul 
s'iMait  lou'' pour  faire  lionneiir  à  révi^jne  cliri'tien.  c'était  Diib- 
tlinrl»  '.  Or  raUice,  se  trouvant  à  Doninarli  iiifir  Crialliar  avec  Duli- 
tliaili.  le  pria  île  lui  inilitpii'r,  en  Leiiister,  un  doses  élèves  dont  on 
pourrait  faire  un  évéïiue.  <•  Je  voudrais,  dil-il,  un  liouiuic  libre, 
de  naissauee  noble,  sans  dilToruiitc  pliNsiijueet  de  bonne  répulalion, 
ni  trop  petit  ni  trop  grand,  (jui  possède  une  certaine  aisanct'  ;  je  dé- 
sire un  homme  qui  n'ait  nirune  fi-nime  et  i|n"iin  etifaiit.  —  l'armi 
mes  diseiph'S,  réponilit  iJulilliaeh,  je  n'en  v(ii>  (pi'un  (jui  puisse 
vous  convenir:  c'est  le  beau  Fiacc  de  Leiiislcr.  11  m'a  (|uilté  pour 
aileron  Connaui:hl  avec  une  poésie  bardii|iie,  un  hnirtne,  pour  les 
rois.  » 

Dublbarh  et  Patrice  parlaient  donc  de  Fiacc.  Tout  d'un  coup  Fiacc, 
dont  ils  iiinoraicnt  le  retour,  paraît.  Dublliacli  dit  à  Patrice  :  «  Fais 
semblant  (lue  tu  veux  me  tonsuier  ;  Fiacc  voudra  me  venir  en  aide 
et  s'offrira  lui-même  pour  être  tonsuré  à  ma  jilace,  car  il  m'aime 
beaucoup.  »  Patrice  suivit  le  conseil  de  Uubtliacli.  «>  La  tonsure, 
s'écria  Fiacc,  sera  pour  IJubtliacli  une  flétrissure  aux  yeux  de  la 
multitude.  Pourquoi  ne  me  prendrait-on  jias  à  sa  place?  —  On 
te  prendra,  »  dit  Patrice,  Aussiiôi  Patrice  le  tonsure,  le  baptise,  lui 
écrit  un  alphabet  latin.  On  prétend  qu'au  bout  d'un  jour  Fiacc  était 
en  élat  délire  les  psaumes.  C'est,  à  la  rigueur,  possible,  puiscpie 
Fiacc  devait  connaître  l'alphabet  ogamique  et  (jue,  sauf  la  forme  des 
lettres,  l'alphabut  o.,'ami(pie  est  identiiiue  à  l'alphabel  latin.  Kniin, 
Patrice  le  sacra  évéque.  Fiacc  fut  le  premier  évêiiue  de  Lcin.»ter. 
Patrice  lui  donna  un  reliquaire,  une  cloche,  une  église,  une  cro<se, 
un  livre  et  sept  des  clercs  qui  l'avaient  accompagné  jusque-là  ; 
et  c'est  ainsi  (pie  le  nouveau  pontife  fut  installé.  Avant  (fétre  évé- 
que,  il  avait  chanté  un  bairlne  pour  les  lOis'. 

I/Irlande  ancienne  connaît  donc  les  poésies  bardiques:  bairlne. 

Le  mot /;///•(/,  d'où /y.'//r///^  dérive,  apparaît  aussi  dans  la  lilléra- 
lureirlandaise.  Ainsi  le  Livre  de  Leinstercou\\ci\[  un  poème  lyii(iui', 
probahlemenldu  xi'  siècle,  et  (pi'à  giaiid  tort  on  attribue  au  célèbre 
Dubthach,  contemporain  de  saint  Patrice.  Dans  ce  poème,  (jue  0'(-urry 
a  publié,  il  ot  (lUL'stiiin  ile.>  barde.^.  Ce  pdèineest  un  éloge  d'un  cer- 
tain Crimibann,  roi  de    Leinster,    et  l'auteur    dit    (pie   les    bardes 

1.  «  Bellia  Palraicc,  »  clicz  Wliiiloy  Stoki-s,  T/nrr  midiile-inx/i  ltnuiilies,p.  •2li. 

•1.  DatiK  ce  récit,  nous  avons  fondu  le  §  1 1  di-s  notes  irlandaises  du  livre  dArniagli, 
œs.  du  II*  8i.';i.le,  cIipz  Wnilloy  Siokes,  Goiil'lirn,  2'  t'-d.,  p.  8(3-87,  91,  avec  l'extrait 
de  la  Vie  irlandaise  d<;  saint  i'utrice,  iOrIcm,  p.  87,  note  H. 


Li:s   IIAUDKS.  -37 

[Imird]  rnconlont  l'histoire  de  ce  prince  '.  Ajr)ii(ons  qu'une  eom|)osi- 
tion  é()i(iu(',  aujourd'liiii  perdue,  portait  le  litre  de  :  ((  Massacre  de 
la  fort(;ressi!  ilu  barde  royal  -.  » 

Les  textes  des  lois  irlandaises  parlent  aussi  des  bardes  ■',  mais  r/esl 
avec  fort  peu  d'estime.  Les  bardes  y  sont  placés  au-dessous  du  der- 
nier ranjî  des  fiU.  «  Le  barde,  lisons-nous,  n'a  besoin  de  rii;n 
savoir:  son  intelligence  naturelle  lui  suflit^')  Nous  trouvons  la 
mùme  idée  dans  un  texte  de  provenance  inconnue,  inséré,  au 
XVI"  siècle,  dans  le  glossaire  d'O'Davoren.  «Il  n'est  pas  nécessaire 
pour  les  bardes,  dona  hdrdaih,  d'avoir  la  connaissance  des  lettres 
ogamiques,  i  feadaib  (liltéralemenl  :  «■  des  bois  »,  IJuchstabe),  ni 
celle  du  mètre  poétique,  deacli^.  »  Feadaib  est  le  datif  pluriel  de  fid^ 
«  arbre  »  (en  hwion  g  ire:  en,  en  t;;dlois  (jai/ddi'ii'),  nom  des  caractères 
ogamiques  dans  la  langue  irlandaise;  tandis  (|uc  les  letlr'es  latines 
ont  pénétré  en  Irlarnle  avec  leur  nom  \M\n  Hier'',  les  lettres  ogami- 
ques s'appellent //'/,  '<  ar'bre  »,  au  pluriel  feda,  et  chacune  poi'te  le 
nom  d'un  arbre  dilTér-ent.  Ainsi,  dans  la  préface  du  panégyrique  de 
saint  Columba,  composé  par  Dallan,  (ils  de  Forgall,  chef  i\c^  filé 
d'Irlande  ;\  la  fin  du  vi"  siècle,  nous  lisons  que  ce  panégyrique  est 
un  «/ia»<^//«  entre  deux  fr-ènes.  A»rt//iam  est,  dans  la  langue  des 
grammairiens  irlandais,  le  terme  technique  spécialement  employé 
pour  désigner  les  poèmes  compo^éspar  les  chefs  des  file,  c'est-à-dire 
par  les  o//«w,  car  o//</m  était  le  nom  que  donnaient  les  file  i\  ceux 
d'entr-eeux  qui  occupaient  le  rang  le  plus  élevé  dans  leur  hiérar- 
chie. Dallan,  fils  de  Forgall,  étant  un  ollam,  le  panégyrique  composé 
par  lui  pr-enait  le  nom  iVananiaiii'  ;  et  co;nment  cet  anamaiii  se 


1.  In  scêlscailit  haird  bnidg  Banba,  «l'histoire  que  r:icontent  les  bardes  immor- 
tels (?)  d'Irlande  ».  Lvre  de  Lein-tter,  p.  45,  col.  1,  liRiie  27.  O'Gurry,  Lectures  on 
the  munuscript  mnterinls  of  ancient  ivish  history,  p.  48/j,  a  traduit  hnvlfj  par  boasi- 
fui.  Je  suppose  qu'il  faut  lire  buvl,  «  durable.  »  O'Donovan,  Supplément  à  O'I^eiHy. 

2.  «  Argmn  rallia  rirjbaird  »,  Livre  de  Lein^ter,  p.  190,  col.  1,  ligues  28-29.  Cf. 
O'Curry,  Lectures  on  the  manuscript  materiah  of  ancient  irish  Instorxj,  p.  591. 

3.  Voir  notamment  :  Ancient  lnir<;  of  Ireland,  t.  I,  p.  88. 

h.  «  Bard  duo  cin  dligcd  fogluime  acht  a  indieacii  fadesin.  »  Ancient  Laivs  of 
Irelnnd,  t.  IV,  p.  3C0.  Ce  texte  a  été  reproduit  d'après  un  autre  manuscrit  par 
O'Donovan,  Supplément  à  O'Reilly,  p.  580,  au  mot  fjard,  et  on  y  trouve  la  môme 
leçon,  à  quelques  variantes  près  :   «  fer  gan  dliged  fogloma  acht  a  intlcclil  fadesin  ». 

5.  «  Ni  dlegar  dona  bardaib  eolus  i-feadaib  ocus  an-deachaib.  »  Whiticy  Stokes, 
Tliree  irisli  G/ossnries,  p.  81,  au  mot  eolus. 

\   C.  Ms.de  Saint-Gall,  p.  6,  col.  2,   chez  Ascoli,  //  codice  irlandese  dell'  Ambra- 
siana,  t.  II,  p.  15;  cf.  Grammaticn  celticn,  2"  édition,  p.  279. 

7.  Glossaire  de  Cormac,  ciiez  Whitley  Stjkes,  Three  irù>h  Glossnries,  p.  3. 


{38  KEVUE  AKCii^OLUGKjrK. 

lroi»vait-il  onliv  doux  fitMJcs  ?  Parce (|Uf  cri  (iinnnain  avait  pour  pre- 
inion*  li'llro  un  n  vl  [tour  (h-rnièn*  It'Ur»'  ciuori'  un  «,  i-l  i|Uf  U'iunii 
lie  1.1  Icllr»'  «.  dans  ral|i|ial)il  ojîaniique,  l'iail  uni,  c'osl-a-dire 
•  frùiio  »,  ash,  roinnicon  dii  en  au},'lais. 

Los  promiùros  Ullr.s  tle  l'alplialiol  oganii()U('  sont  : 

H,  bi'itli,  «  houleau  »  ; 

L,  /m/<,  •'  sorbier  »  ou  frî^Dc  do  moiilagin'  »  ;  —  mi<uiilnin  nsli, 
couiino  on  dit  on  anglais  ; 

F,  fcni,  «a une  »  ; 

S,  sail,  «  saule  »  ; 

N,  iiiii,  0  frùno  '  ». 

L'élogo  do  saint  Colnniba  par  Dallan,  fils  do  Forgall,  débute  par 
CCS  mots  :  Si  discroil,  «  oo  n"osl  pas  i.no  polilo  bi^lnjre.  un  médiocre 
évoncncnt  »,  et  il  setormino  par  li'<'\uol>  tii-ihnn-liuaiu,  djen'ai  pas 
le  loisir  ».  Or  A'i  disceoil  cumnioiue  par  un  h,  iii-dani  huoin  liiiit 
par  un  n  ;  voil;\  pour(|uoi  il  est  dit  dans  la  prëf;ico  ijue  c.lio  pl^ccost 
Anomaincterda  iiin  -,  Ci"  (|Uo  feu  O'iieirno  (Irowe  a  liaduit  par  «  un 
aiiamaiii  onlic  doux  frôncs^».  Voiji  un  des  [KiiiUs  delà  science  tech- 
nit|uo  ipio  les  bardes  n'étaient  ii.is  tonus  ^\c  posséder.  Ils  pouvaient 
seilisponsor  d'étudier  l'u-rituro  o^jauntiue.  Ils  n'avaient  pas  non 
plus  besoin  lie  connaît: 0  le  nièire  poéti(iuc,  dcnch.  Los  ^'rarnniai- 
riens  irlandais  distin;,'uonl  luiil  f/o(/(7i.  Le  premier  est  le  monosvl- 
labo,  le  second  le  dis>yllabe,  et  ainsi  de  suite  jusqu'au  mol  de  liuit 


«, 


2. 


The  AmniCholuim  C/nll,  -/  l><>Hnn  l'orymll,  p.  15.  (f.  Wliitley  Slokps,  liot- 


delicfi,  T  Ltlii.,  I'.  1^8,  l\\tue  1. 

3.    The  Amr»  CMutm  Chillt,  p.  10. 


LKS    llAUDKS,  -.'i'J 

syll;il)is.  L;i  ^MMiininiri'  irl.iinlaisc;  .-ipp'llc  l.i  sy  1  la he  f/iVi/^  (îl  a  un 
termn  spr-ci,!!  ponnir-si^'ii  r  i-lnciiii  des  luiil  (1paclt,dr\>\i\<,  li;  iiioiio- 
syll;il)(!  jii'-"(|ii';i  l'oclosNlIahc  '. 

Les  haiilcs  ii'rlaiciil  pasol)li},'6.s  di;  connaître  cclto  nomenclaliiro 
prainniaticalc.  Volontaires  de  la  p(trsie,  ils  élaicril  peu  appréciés  îles 
poètes  (>lli(it'ls.  On  l(^  voit  siirloiil  dans  \i)  Diahi'jui'  des  deux  doc- 
leurs.  Cette  pièce  dan*  l'étal  où  nous  la  possédons  date  prohabliMnenf, 
du  coniinenceincnl  du  ix"  siècle,  mais  renferme  des  clémotils  plus 
anciens  et  tout  à  fait  |iaïens.  Deux  ///t'  se  disputent  la  robeel  la  chaire 
d'o//^//u  ou  chef  des ///6'  à  Kmain  iMacha,  capitale  de  TUisIer,  en 
présence  du  roi  épique  (^oncliobar  ;  ccsonl  Nédé,  jeune  lilsdii  défunt 
oWim  Adné.  et  l-Vnertné.  Il  y  a  entre  eux,  sous  forme  de  dialogue, 
une  lulle  lii/.aiiv  de  science  et  d'éiorpience,  et  l'un  d'eux  linit  par 
p?-édiieun  déluge  de  maux  (|ui,  avant  la  fin  du  monde,  [deuvra  sur 
l'Irlande: 

M  Chacun  soi  tira  de  son  rang  -...,  tous  les  rois  toiuberonl  dans  la 
misère^...,  on  méprisera  tous  les  nobles;  tous  les  hommes  de  nais- 
sance servile  seront  glorifiés*...  On  verra  se  changer  :  la  sagesse  en 
faux  jugement'',  tous  les  mariages  légitimes  en  adultères'"',  les  belles 
broderies  en  haillons,  et  les  vêtements  perdront  leurs  belles  cou- 
leurs^...; les  esclaves  des  deux  sexes  n'obéiront  plus  à  leurs  maî- 
tres**..., les  fils  ni  les  lilles  à  leurs  pére>  ^.  Le  grand  seigneur  ven- 
dra pour  un  denier  son  honneur  el  son  âme"^.  » 

Enfin,  el  c'est  ici  (juc  nous  voulons  en  venir,  «  les  p,lé  dégénére- 
ront ù  ce  point  (|u'ils  ne  seront  plus  que  i\{i>  bardes  "  ». 

Ainsi  les  bardes  tiennent  dans  la  société  irlandaise  une  très  petite 


1.  Glossaire  de  Cormac,  cliez  Wliitlcy  Slokes,  Three  in'sh  G/ossaries,  p.  lG-17; 
Sanas  Chormaic,  p    56-57. 

2.  <i  Hapaid  cec/(  oen  ass-a-riclit.  »  Livre  de  Lcinster,  p.  18S,  col.  2. 

3.  «  Bill  [jau/;»';- c  ch  ri  tdun  bid  boc/it  cec/(  ri.  »  Ihidcm. 

h.  «  Dimicniglîder  cec/t  saer,  idon  cec/j  socAenel,  conustatar  sec/t  doôr,  idon  co- 
turct'biluir  cec/i  droc/(-CPnel.  »  Ihiilnn. 

5.  «  Sai(it/ier  ecna  is-sâi,b]-brei/(a.  »  Ihidem. 

G.  «  Sùifid  cec/i  lunawnas  \n  adulirus.  i>  Le  f:lossaleur  a  ajouté  :  «  ir-rcib  irgar- 
thaib», —  «  par  usage  du  mariage  en  temps  prohibé  ».  Ibidem. 

7.  Sôir.d  rodruine  m  ôniiiite  ocus  atc/iessa  iden  in  aicAisaige,  cosaiifiter  etaige  cen 
liga  ido)t  con  aicliter  ûtaigc  cen  datha  idon  cen  i«demna  ôir  is-argait.  »  lôideni, 
p.  188,  col.  3. 

8.  «  Co-na-fogenat  mo},Mid  na  c«maia  a-co>/jdedu.  »  Ihidem. 

9.  «  Co-na-fogenat  m«ic  ocus  ingena  an-athre.  »  Ibidem. 

10.  «  Co-riife  \n  fer  uullach  a  enec/i  acus  a  anmai;»  ar  lôg  oen  scripuil.  »  Ibidem. 

11.  «  Dic/»la»(uaigfitt';'  flliV/  idun  co-na-biat  iWid  aclit  baird  uawma.  »  Ibidem. 


'i'tO  HKvri:  Anc.iiKOLOf.iQUE. 

plai'o.  Il  no  paraît  pas  prol);\l)It'  tprils  (mi  eussent  en  fiaulf»  iino  plus 
ronsiilôralilo.  ('e  ijiii  lésa  ^Maudis  dans  le  jiays  de  (îalles  c'est  (ju'aa 
nioyon  âjjc  ils  s'y  sont  ti(uivt''s  les  seuls  rt  pri-scnlanls  de  la  classe 
considëralde  d'hommes  IvlUcs  où  César  ne  menliorine  que  les  Jvmj- 
cfes  cl  (»ii  nous  dislin;,Mi()ns,  avec  d'aulres  auteurs,  trois  clémenls  : 
1"  les  druides  propremetii  dils;  i"  les  devins,  cubages,  oùâxei; (rflfe«) 
de  Diodore,  Timagèneel  Stralion;  3'  les  bardes  '. 

Nous  ne  (piittcrons  pas  les  bardes  d'Irlande  sans  donner  un  spéci- 
men des  plus  anciennes  poésies  que  nous  leur  devons.  Nous  pren- 
drons un  des  poèmes  lyriiiues  conservés  par  le  manuscrit  de  Saint- 
Paul,  en  Carinthie.  M.  Windiscli  date  ce  ninnuscril  du  vm"  siècle, 
et  suivant  M.  Zimmcr  il  n'est  pas  antérieur  à  la  lin  du  xi"  :  (pioi 
qu'il  en  soit,  sa  date  est  fort  respectable,  et  remonte  plus  haut  ipie 
celle  du  premier  des  quatre  manuscrits  bardiques  du  l'ays  de  Galles 
publiés  p;ir  M.  Skcne. 


Aed  par  sa  puissance  a  do  la  flaiiimc  l'éclat; 

Aed  ofTre  un  sujet  de  longs  dévelopiieinciils  poétiques; 

Son  sccpirc  gracieux  est  plus  beau 

Que  les  collines  qui  dominent  la  plaine  dcRoeriu*. 

C'est  la  maltresso  poutre  qui  abrite  le  peuple  chrétien  ; 
Elle  brille  par  sa  beauté  sous  l'heureux  toit  qu'elle  supporte; 
C'est  un  objet  de  e.boix  :  il  est  supérieur  à  toutes  les  générations 
Qui  habiiérciit  les  campagnes  séduisantes  de  Moisliu. 


Le  fils  de  Diarmait  m'est  cher. 
Que  me  (Icmandc-t-on  ?  La  réponse  est  facile  : 
Sa  louange  sera  le  plus  beau  des  trésors 
Que  je  cb;inlerai  dans  mes  vers. 


1.  Les  bardes  apparaissent  les  premiers  en  date  cliez  Posidonius,  qui  parle,  d'eux 
seuls  et  ne  dit  rien  des  druides  ni  du  second  groupe  (devins,  oJâ-rei;,  cubages).  Dio- 
dore s'accorde  avec  Tiniagèn.'  et  Sir,il)on  pour  nommer  les  bardes  t-n  prtmière  li- 
gne, avant  les  druides  et  lu  second  groupe.  Ou  aurait  lorl  d'en  conclure  iiuc  les 
bardf's  eussent  en  Gaule  la  préiîinincnce  sur  les  druides  et  les  devins  (oJàTti;  ou 
euljafji:s). 

2.  Littéralement  : 

Acil  graoïl  pour  feu  d'éclat, 
A<'<l  long  puur  iiililition  podiqiio, 
RAtun  gracieux  plun  joli 
Que  otllinvi  de  lluuriu  um. 


m:s  it\iu)i:s.  241 

Son  nom  csl  uitné  :  je  ne  dis  lien  ilc  nouveau, 
(^iir  Aed  iuî  nubile  pas  de  rcproclie. 
Il  est  sans  luclie  :  co  n'est  pas  un  secret  que  la  gloire 
f)  1  prince  à  qui  appiirlicnt  la  liellc  riviùre  de  l.ill'cy. 

llliislr.'  pclillil:;  dft  Muit'dliachY 

Sa  haute  diKiiilé  l'élcHc  comme  une  roche  clioisie. 

Jamais  on  n'a  trouve  semMable  descendant 

Aux  rois  qui  gouvcrnôrent  les  peuples  de  Cûalann. 

Son  pouvoir  lui  est  venu  par  héritage; 
C'est  d'iiOrilage  qu'il  lient  ses  vertus  et  sa  dignité; 
Il  est  un  rejelou  de  la  famille  sans  reproche 
l»es  rois  m.ijestucux  de  Marge. 

C'est  une  souche  grande  d'honneur  el  de  noblesse, 
Dans  les  comi>als  e.'est  le  fondement  de  la  primauté; 
i-'illuslre  cl  puissant  prince  est  un  rameau  d'argent, 
Issu  de  la  race  de  cent  rois  et  de  cent  reines. 

Près  de  la  cervoisc  on  chante  des  vers, 

On  chante  les  batailles,  lc«  pièyes  que  s'y  tendent  des  hommes; 

l']t  de  mélocieux  poèmes  bardiqucs  font  retenlir, 

Au  milieu  des  (lois  de  bière,  un  nom,  celui  d'Aed. 

Et  l'on  reprend  : 
Aed  par  sa  puissance  a  de  la  flamme  l'éclat'. 

Ce  vers  a,  en  vieil  irlandais,  un  charme  que  le  français  ne  peut 
rendre,  parce  que  le  nom  propre  Aed,  employé  comme  nom  com- 
mun, veut  dire  «  feu  »  en  vieil  irlandais. 

Au  nom  des  bardes,  la  dernière  strophe  associe  un  mot  qui  nous 
rappelle  un  des  plus  anciens  usages  de  la  race  celti(jue.  C'est  le  mot 
que  j'ai  traduit  \m-cervoisc,  en  irlandais  co?rmou  cuirm-.  11  ie  trouve 
déjà  vers  l'an  100  avant  notre  ère  chez  Posidonius,  le  premier  en 
date  des  auteurs  de  l'antiquité  classique  qui  nous  parle  des  bardes. 
«  Chez  les  Celtes,  dit-il,  les  gens  riches  boivent  du  vin  qui  leur 
arrive  d'Italie  par  Marseille;  ils  le  prennent  soit  pur,  soit  mélangé 
avec  de  l'eau.  Les  gens  de  fortune  moyenne  le  remplacent  par  une 

1.  Windiscli,  Irische  Texte,  p.  319-320. 

2.  Grammaticu  ccllico,  2"  l'd.,  p.  2C8,  2C9. 

xt.iv.  —  ir, 


243  IIKM  i:    AHC.IIKoLOr.IQlK. 

bit^rc  préparée  au  mitl.X  I»'  plus  grand  nomltrc  so  conl(Milo  triinc 
biiTO  sans  miel  (jifon  .ippcllf  connu.  »  Suivant  lui  r'cst  avi'c  du 
froment  (ju'on  la  falirhiuc '.  Dioscoridc,  poslérifur  d'un  sij^cle  et 
demi,  est  plus  exact  en  disant  (|u'on  la  fait  avec  de  l'org»»,  et  il 
écrit  le  nom  de  cette  lii|u<'ur  avec  une  or!lio;,Maplio  (pii  se  rap- 
proche plus  de  l'ortliogiaplie  irland  lise.  Au  lieu  de  xô:;/.-»,  il  écrit 
xoùfui-,  mot  rigoureusemoiil  identi(pie  à  l'irlandais  eui/m,  datif 
f on/1  <ii;/».  C'est  à  Posidoniiis  (|ue  nous  devons  la  première  mention 
de  celte  boisson  et  des  li.irdes.  Il  est  curieux  de  trouver  le  nom  de 
cette  boisson  et  celui  des  bardes  associés  dans  la  dernière  strophe  de 
notre  poème,  que  conserve  un  manusciit  postérieur  de  dix  siècles 
à  Posidonius: 

«  Oc  ('ormniin  gaititir  ililana  » 

Prùs  de  la  cervoisc  on  chante  des  vers; 

On  clianle  les  l).ilailles  et  k-s  piùges  que  s'y  teiuieiil  les  hoiiniies, 

Kl  de  mélodieux  poèmes  bardiqucs  font  relenlir 

Au  milieu  de  Ilots  de  bière  un  nom,  ci'iiii  d'Aed. 

II.    DAUnOIS    DK    JUnAlNVILLE. 

1.  Ilapa  r.i  toî;  ûzoôieTripoi;  TrJpivov  [AETà  [xî).'.-o;  È(7X£ya<j|j.ivov  •  Tiapa  ôi  toî;  "oX- 
>oî;  xaO' oJTo  •  xa/.EÎTat  ôà  x6p|Aa.  •  Ailiéiiée,  IV,  152.  (if.  Frnyiiwnta  historkorum 
grœcoruni,  l.  III,  p,  200. 

2.  Koûpixi  <TX£vas6|i£vov  èxTr,;  xpiOy,;.  Uioscoridc,  II,  110,  ciiû  duiis  la  Gianiniatiai 
celtica.  2«  édition,  p.  IIS. 


INSClUrnONS   de   CiïE.\fTOU 

(SIMITTU)    TUNISIE 


(suite) 


Le  \'.\  mai  (!(M-nier,  j'ai  eu  de  nouveau  l'oceasion  de  me  reiidie 
aux  ruiues  de  Ciieuilou.  Dés  mou  arrivée,  y\.  Sovel,  le  directeur  de 
la  cairière,  me  inoulra  une  colonne  de  pierre,  trouvée  peu  de  jours 
auparavant  à  i|ucl(|ues  pas  de  la  façade  de  sa  maison. 

Cette  colonne,  longue  de  r",7.'i  d  mesurant  O'^,']0  de  diamètre, 
porte  celte  double  inscription  milliaire  : 


57. 


DN  •  FLAV(îo) 
DELMA(f/o) 
NOB-CAES  • 
COLSIMITTHVS 


Hauteur  des  lettres  :  O^jO?. 


IMPP • CAESS 
FELL • VALENTl 
NIANO  •  ET • VALEN 


1.  Voir  la  Revue  archéologique,  avril  et  juillet  1881,  mai  1SS2. 

2.  Cette  quatrièine  ligi:e  a  ûtc  elTac(5e  au  marteati,  ce  qui  fait  ressembler  les  1 
à  des  E  et  rend  assez  difficile  la  lecture  du  nom  pr^ipre. 


244  IIKVUK    Anf.lltU)LO(.IoLF.. 

TE    AVGG • DEVOTA 
SIMITHVS     F 


Hauteur  des  Iclircs  :  0",iùj. 

Inulilc  de  faire  oljservrr  (jiie  ces  deux  in<ci  i[i|ii)ns  sotil  gravi'c.s 
cil  sons  inverse,  puisijue  la  colonne,  <|ui  'l'abord  porlail  le  nom  de 
Drlnuitiini,  fui  reiiverFée  pour  rerevoir  eclui  des  empereurs  Valrn- 
linien  et  Valeus. 

Ce  double  texte  i)roiive  ijuc  l'orllidi^raplie  de  l'.Tnrii  ii  nom  de 
C.liemlou  .1  varié  selon  les  dilTerenls  sireles.  Ce  nom,  (pii  est  gravé 
SIMITTV  sur  les  insciiplions  don!  h  beauté  des  rnrartéres  indi  |ue 
le  ["  et  le  II'  siècle,  se  Iransfurme  au  i\*  siècle  en  SIMITTHVS  cl 
SIMITHVS. 

C'est  la  première  fois  (|iie  le  titre  d(^  colonid  se  rencontre  sur  les 
inscriptions  de  Cbemtou.  On  ne  pouvait  d'ailleurs  douter  que  celte 
ville  n'eût  été  une  colonie,  puisque  les  épilaplies  nous  montrent 
qu'un  certain  nombre  de  vétérans'  y  étaient  envoyés  pour  récom- 
pense de  leurs  longs  services.  L'Itinéraire  d'Anlonin'  et  la  Table  de 
Peuiinger  donnent  ce  litre  à  l'antiiiue  Simittu. 

Cette  colonne  indique  le  premier  mille  sur  la  voie  qui  condui- 
sait de  Simittu  à  Bulla  Hegia,  voie  sur  la(]uelle  j'ai  déj;\  découvert 
en  1880  la  base  mutilée  d'une  autre  borne  milliaire.  La  roule  lon- 
geait au  sud  les  collines  mirbrières  de  Cliemlou  et  venait  rencon- 
trer un  mille  plus  loin  la  voie  de  Simittu  à  Tliabraca.  L'angle  formé 
par  ces  deux  voies,  qui  se  dirigeaient  l'une  au  nord,  l'autre  à  l'esl, 
était  occui»é  par  la  partie  exploitée  des  carrières. 

Grâce  à  la  complaisance  de  M.  Sovet,  je  pus  faire  donner  quel- 
(|ucs  coups  de  pioclie  sur  l'emplacement  du  cimetière  romain  de 
Cbeinlou.  Voici  les  éi»ilaplies  (jue  les  ouvriers  rendirent  au  jour  : 

Au-dessous  d'un  bu>ti'  bien  sculpté  : 


1.  Voir  le»  II»*  5.  l 'i,  18,  29,  39  cl  50. 

3.  Ilinerniiiitri  Anlomni,  ^'^in.  Pariliryd  F'indor,  ii»  /j3. 


l.NSCnil'iloNS    I)K   CIIKMTOU.  245 

D   M    s 
P  •  PETRONIVS  •  PIS 

CATOR  •  PI  VS 
VIXIT    •    ANNIS 
LXXV 
H  •  S  •  T         {sic) 

I.a  Irliro  S  des  qii;itr(^  prcinièrcs  lignes  a  élé  placée  à  dessein  par 
le  lapiciilc  sur  uno  iii(*'iiit'  veilicalc  La  forintilr  H  •  S  •  T  est  assez 
i"are.  Li;  Onpus  mscrijttionnm  Idtinaium  Afiicœ  ue  la  renferme 
(lue  deux  fois  (V.  n°»  193  et  7(Jo(]). 

59. 

Au-dessous  d'un  personnage  sculpté  : 

L-  MANLIVS 

L  •  F    QVIR- 

ROGATVS 

PIVS  •  V  •  AN  •  LV 

H  •  S  ■  E 

Hauteur  des  lettres  :  8  centimètres  et  demi. 

60. 

(  dis    mnnib.     s  )AC 
OPIDIATERTIA 

PIA- VIXIT 

ANNIS-LXXXV 

H-S-  E 


61. 


.   .   .MEN 
CVRIAE 


246  IIKYLK    AUi:ili;()L(t(;HjLE. 

TIAEHSX 

CAVIT 

....    MERITO  •  P    P 
CVRIA     •     CAELEST 
MESVLEVM- P- SVA 
ET  •  EX  VVIAS-  El  VS-  XI  -K 
APRIL    •    AEPVLANTVR 

.\  h  première  cl  à  la  Irni^iènit'  iijîne,  E  a  la  forint'  de  F. 

J"aj(Uilt'rai  à  fos  ijiiclijiies  textes  un  fr.i^iiirnt  d'iiiseription  lrouv(?( 
par  M.  Hoiissel  à  environ  quatre  kilouiMrcs  suil-csl  de  (>licnilou  el  à 
près  (l'un  kilomètre  a  gauche  du  17i»  kilomètre  de  la  ligne  de 
Tuijis  à  la  frontière  algérienne. 

G2. 

.  .  I  (?0  L  I  (».s-  hi) 
LARVS  Pl(«sn) 
XIT  {a)H:nis)  .  .  . 

ALF 

E  I  V  (5 

SIM 

o  (^  b.  <j.) 

Les  noms  de  Jnliiis  Ililarus  se  lisent  sur  une  èpilnphc  trouvée  en 
faCL'  du  \2l)'-  kilomètre  de  la  voie  ferrée,  et  inâcrile  dans  le  Corpnx 
inscriptionuni  hitinnniiii  Africœ,  sous  le  numéro  lOoTi. 

A  la  sixième  liL,'tie,  on  croirait  reconnaître  lis  trois  premières 
lettres  du  mot  SIMITTV,  mais  ce  n'est  sans  doute  qu'une  partie 
d'une  formule  de  ce  genre  : 

jKilri  y/:/.siSIM)o  fcat. 

A.    I,.    DKLATTRE, 
Saint-Louis  de  CartliDgr,  30  Juin  '.883. 


iNscHiPTioNS  m-:  cnKMTOU.  247 

N"  m.  —  C'est  la  première  inscription,  Iroiivi'e  en  Alriquo,  <-n  riKjnncnr 
de  Klaviiis  iK'liniliiis,  neveu  de  CoriHlaiilin.  Ce  jeiine  pi  iiice  ret.ul  le  lilre 
do  Cé.sar  en  iJ.'i.'i;  il  fui  lue  en  X\~.  C(!s  deux  dales  nous  indiiiucnt  ainsi 
l't''poqi)i;  i\  laqiudle  remonie  le  premier  loxie. 

I.a  seconde  in>criplion  a  l'ii^  gravée  quelques  années  plus  laid,  entre  les 
onnées  3fii  et  3G7,  sous  le  r«>gne  de  Valentinien  I"  et  de  Valons.  D'après 
le  P.  Pelallre,  la  colonne  avait  él6  renversée  en  337,  ;\  la  ninrl  de  Dflnia- 
lius.  Tronic  ans  après  on  la  iel(;va  et  on  l'nlilisii  une  seconde  fois;  mais 
on  eut  soin  de  la  relouriier  pour  y  graver  le  nouveau  lexle  en  l'honneur 
des  empereurs  Valenlinien  \<"  et  Valons.  Il  me  parait  certain  que  la  se- 
conde liynedoit  se  Im;  :  FFLL  =  Flaviis.  I.c  F  i  celte  époque  ressemble 
beaucoup  an  E  cl  la  confusion  est  facile. 

Le  P.  Del. litre  se  trompe  en  disant  que  ce  texte  cpigraphique  est  le 
premier  (jui  donne  à  Siinilha  le  litre  de  colonvi.  Une  inscription  du 
Ml*  siècle  de  notre  ère,  dècouverle  à.  Cheratou  par  Wilmanns  (C.  /.  L., 
t.  VIII,  n"  I2'il  ;  cf.  le  n»  10594,  copie  moins  bonne  du  même  texte  repu- 
blié par  ericiir),  renferme  le  litre:  colonia  [Julia  \el  Flaiia]  Augusta 
Numidicii  Sunitlien^ium. 

N"  iJ8.  —  La  formule  H  •  S  '  T  semble,  au  premier  al)ord,  une  lecture 
fautive  de  H  *  S  •  E  *,  mais,  comme  le  fait  remarquer  le  P.  Delattre,  il  y 
en  a  d'autres  exemples  en  Afrique,  et  une  petite  inscription  funéraire, 
trouvée  au  Coudiat-Ali,  près  de  Conslanline,  paraît  contenir  l'explication 
du  T  filial.  Celle  inscription  (C.  /.  L.,  l.  VllI,  n"  7G5(j)  est  ainsi  conçue  : 

/j  O   M    P   E    I  A 
N  ATA  V I  X I  T 
XI   HIC  SITVS     {sic) 
TIBI 


Pompei'a  Nota  vixit  {annos)  XL  Hicsita.  Tibi.  Je  ne  crois  pas  qu'il  faille 
tenir  compte  du  S  final  de  la  3''  ligne.  Le  gra\eiir  avait  évidemincnl  écrit 
par  erreur  HIC  '  SITVS  au  lieu  do  HIC  '  SITA;  on  a  corrigé  en  bar- 
rant le  V  dont  on  a  fait  ainsi  un  A  placé  la  lèle  en  bas,  et  on  a  négligé 
d'offacôr  le  S.  C'est  le  développement  de  la  formule  inscrite  en  abrégé  au 
bas  de  notre  texte  de  Chemtou  et  qu'on  retrouve  encore  sur  l'inscripiion 
n"  193  du  I.  VllI  du  C.J.L. 

Dans  l'inscription  n°  58,  il  faut  donc  lire  :  n{ic)  s{itus).  T{ibi). 

N°6l.  —  L'état  incomplet  de  l'inscription  est  très  regrettable.  Elle  men- 
tionnait  sans  doute  une  fondation  à  laquelle  au  moins  une  des  curies  de 
Siniillii  se  tiouvail  mêlée.  (Ve>l  cille  dont  le  n(im  o>l  reconnaissable  dans 
le  texte,  la  CVRIA  •  CAELEST(ls)  on  CAELEST(ta).  En  eflel,  c'est  sous 


248  HKVUK    AnnHK(»LOr.I(.tL'K. 

cotîe  sO'OnJo  formp  que  \<*  m<''rnc  nom  nppnrall  dans  une  iiisnipiion  (K> 
Tiiizi  tiviui''t}u'u'n  Ani'eUttm  CommoUnnum  Turcctnuum)  :  CVR  •  CAE- 
LESTIA  •  PATRONO  (C.  I.  L.,  l.  vm.  n»  829).  Il  faul  xuir  «luis  n'ile 
ép.tli«'le  le  ^oll^.  i;ir  (le  la  giamle  diviniti^  ilo  Carihaf^c,  tlca  Caehstis  ou 
siiiii'l<>nuMr.  r,(/..s'/s,  «ous  la  iToleclinu  de  Inquolle  la  luric  -''Iml  plicto. 
On  IrouNo  de  li.t^nic  à  l,«tI1l)l\^(•  jmjo  ruria  Jovia  cl  une  curia  :>atuniia 
(C.  /.  L.y  l.  VIII,  n»'  3302  cl  3301).  I.e  repas  oumnirmoriilif  avait  lieu  lo 
H  des  ca'ondi s  d'avril  =  22  ntui!!.  I.'inscTiplinn  dp  CdiPinlou,  drjà  citi'c, 
menlionno  les  curiulcs  unhersi  coloniac  (C.  L  L.,  I.  VIII,  n»  IJHl). 

N*>  (»2.  —  Le  tiom  de  fomme  incomplet,  A  li  4"  ligne,  doit  iMic  ALFcn^j 
Il  faul  sans  dou'e  compléter  aiu^i  les  dernières  lignes  : 


ALFc;m  ....  it.ror 
El  V.s- .  mnfito  .  raria 

SIMo jWit. 

O.  /.  b.  q. 


O".  mnrit»  o«r/.<SIMo,  cola  esl  absolument  rcrfain.   Il   .•^erait   ciifuniin  de 
vouloir  rechercliLT  à  la  ?i\i  me  ligne  le  mot  SIM(7/)i<. 

A.  II.  m:  V. 


BULLETIN    MF.XSIJEL 

I)  K    I.  •  A  r.  A  I)  K  M  I  !•:     DES     I  N  S  C  Mil'  T  I  <  )  N  S 


MOIS   I)K    SKI'TI'Mlîl'.K 


M.  François  I.onormanf  met  sous  les  \eiix  de  l'Académie  des  phologra- 
pliics  exécutées  par  M,  le  capitaine  Maimier  d'aprùs  les  caihédiales  de 
Siponlo  et  Termoli  dans  la  l'ouille.  La  prcmiùie  de  ces  églises  daie  de  la 
fin  du  x"  siècle  ou  du  commenceiuent  du  xi",  avant  la  conquiîte  des  Nor- 
mands. Son  architecture  présente  le  plus  curieux  mélange  des  influences 
byzantines  et  arabes.  La  cathédrale  de  Termoli  date  du  pontificat  de 
Pascal  11,  au  commencement  du  xu"  siècle;  une  inscription  en  nomme 
l'arcliitecte,  luhamics  Grimakli.  L'inGuence  du  stylo  roman  français  est 
manifeste  dans  cet  édifice. 

M.  J.  Halévy  commence  la  lecture  d'un  mémoire  consacré  à  rhistoire 
de  la  croyance  à  rimmortalilé  de  i';lme  chez  les  peuples  sémitiques. 
M.  Ilalévy  croit  pouvoir  démontrer  que  cette  croyance  existait  chez  le 
peuple  d'Israël. 

M.  Derembourg  combat  l'opinion  de  .M.  Ilalévy. 

M.  Ferdinand  Dclaunay  lit  au  nom  de  M.  l'abbé  Amélineau,  ancien  élève 
de  l'École  pratique  des  hautes  éludes,  un  mémoire  sur  le  papyrus  gnosti- 
que  Bruce,  conservé  à  la  bibliothèque  d'Oxford. 

M.  Natalis  de  Wuilly  lit  une  note  addilioaaelle  à  son  mémoire  sur  la 
langue  de  Joinville. 

On  se  rappelle  que  M.  Dieulafoy  avait  rapporté  de  sa  mission  en  Orient 
une  sérieM'étuiie?  archilccturalcssur  lesquelles  il  s'appuyait  pour  com- 
battre l'idenlificatioM  de  .Meched-Mourgab  avec  Pasargado,  ainsi  qu3  celle 
du  Gabre-.Moderè-è-Soleïraan;avec  le  tombeau  de;  Cyrus. —  M.  Oppert 
rappelle  qu'il  a  un  des  premiers  contesté  ces  identifications.  Il  est  heu- 
reux de  constater  que  M.  Dieulafoy  apporte  à  cette  thèse  de  nouveaux  e^ 
excellents  arauments  H-v. 


SOCIÉTÉ  NATlONAI.t: 

DES   AXTIOllAlliKS   DE   FRANGE 

PUKSIDHNCK    m-:    M.    A.     UKirniANI). 


StANCi:    Dl'    'i    OCTOBRi:. 


M.  niiillaume  iiiforinc  la  Société  qu"i\  a  découvert  des  snbstruclions 
sous  la  salle  di'S  Ciuialidos,  au  Louvre;  ces  subsliuctious  paraissent  re- 
uioiiler  à  Charles  V. 

M.  Floueît,  associé  correspoiulant,  cninintHiique  de  la  part  de  M.  Cour- 
nault,  associi'  correspondant,  le  dessin  d'un  casque  et  d'uno  bnucle  d'o- 
reille de  l'i-poque  i:auloise;  ces  objets  ont  été  trouvés  à  Ureuvanncs 
(Haute  Marne). 

M.  de.  Alarsy,  associe  correspondant,  lit  une  note  de  M.  Ihipo  Lœrscb, 
professeur  à  l'université  de  IJoun,  sur  une  cloche  municipale  d'Aix-la- 
C-tiapelle.  Celte  cloche  est  datéi;  du  18  février  1231;  elle  est  sortie  des 
ateliers  de  Jacques  de  Croiselles,  fondeur  artésien. 

SÉANCE    DU   14    OCTOKUK. 

M.  I.e  Blant  donne  des  détails  sur  les  fouilles  entreprises  prés  do  Pom- 
péi,  sur  la  rive  droite  du  Sarno.  Ce  ruisseau,  fougueux  et  prolond,  arrêta 
dans  leur  fuite  uni;  partie  des  huhitauls  de  l*oui|ii'i,  qui  périrenl  avant  do 
parvenir  à  le  liaverser.  Ci-s  fu^itif>,  dont  ou  tiouve  les  caiiavies  en  grand 
nombre,  étaient  chargés  de  bijouv  d'or,  de  piéce.>de  monnaie  et  d  autres 
olijiiB  précieux. 

M.  (iuillaume  entretient  une  seconde  fois  la  Société  des  restes  de  cons- 
tructions anciennes  découvetts  pendant  les  tra\au\  qui  s'exécutent  sous 
la  f.a\\e  des  Caria.ides  au  Louvre.  Sous  la  salle  moderne,  construite  par 
Piiric  Lescol  et  achevée  par  Pcrci-i  cl  Konlaine,  subsisteul  lis  ruiiu-s  de 
saLcs  ogivales,  Jadis  carrelées  de  carreaux  éniaillés,  qui  {lataissenl  dater 
du  régne  de  Ph:lippc-Augustc. 

Les  retombées  de  voûtes  sont  encore  conservée.-!,  cl  dans  les  déblais  so 
icncoiitrenl  de**  frafc;inenl>  de  tuU-de-lanipe  ornés  de  figures. 


NOUVELLES  ARCIIÉOLOGIOUES 


ET    COUIIESPONDANCE 


M.  Krnesl    Ciirliiis   \ioiit   de   publier   dans   los  comptes  rendus 

(Sitzuiiy>beiichtt:)  de  l'Ac  idémie  de  Berlin  une  disserialion  inlilulre  : 
Dii'  Gncchni  in  dcr  Dia<<pora.  Comme  loulfs  les  pages  signifies  par  l'aul^ur 
de  Vllistiiirc  grecque,  cellet-ci  soni  pleines  d'idées  el  de  vues  nouvelles. 
Le  lilre  surprend;  on  se  demande  pourquoi  ce  mol  grec  dans  un  ti're 
allemand.  A  lire  le  mémoire,  on  se  rend  compte  de  celte  singularité. 
L'aulcur  n'a  {las  Irouvé  rn  allemand  de  terme  qui  lui  parût  avoir  la  pré- 
cision de  celui  qu'il  emprunte  pour  éviter  une  longue  périphrase.  Ces 
Grecs  dont  il  éludie  Tmlluence  dans  le  bassin  de  la  Méditerranée,  ce  sont 
ceux  qui  s'y  étaient  répandus,  comiuc  marins,  comme  artisans,  comme 
marchands,  avant  le  temps  où  se  fondèrent  les  colonies  proprement  ditis, 
et,  dans  des  siècles  puslérieurs  à  ces  fondaiions,  sur  certnins  points  des 
rivages  de  la  Méditerranée  où  ne  se  constituèrent  jamais  des  cités  grec- 
ques, au  vrai  sens  du  mot.  Il  y  a  eu  là  une  forme  de  l'action  de  la  (irèce 
qui  n'avait  peul-Ctre  pas  assez  attiré  l'attention  de  l'historien.  Sans  entrer 
dans  le  détail,  M.  Curtius  énumèrc  bien  des  indices  qui  permettent  de 
croire  que  ces  individus  et  ci's  familles  qui,  l'herninaut  ainsi  par  petits 
groupes,  pénétrèrent,  par  exemple,  jusque  dans  les  oasis  de  l'Afrique, 
répaudiicnt  sur  leur  passige  bien  des  germes  féconds.  Voici  la  conclusion 
de  ce  travail  :  «  On  n'a  pas  fait  toute  l'bibtoire  de  la  Grèce,  si  on  ne 
s'occupe  que  de  la  métropole  et  des  colonies.  Sur  toutes  les  côtes  de  la 
Méditerranée,  les  IIi?llèues  ont  été  le  sel  de  la  terre  ;  ils  l'ont  éi^-,  là  même 
où  ils  n'ont  formé  qu'une  faible  minorité,  et  où  l'on  ne  retrouve  que  des 
traces  assez  peu  marquées  de  leur  présence.  » 

MM.  Amhroise  Tardiou  el  François  Boyer,  deux  enfants  de  l'Au- 
vergne qui  s'intéressent  vivement  ù  l'histoire  et  auv  souvenirs  de  leur 
patrie,  \ieni)cnt  de  publier  une  utile  monographie  intitulée  :  L-i  li/Zega/Zo- 
romaine  de  Bcaucl  tir  {commune  do  Vomgt,  près  d'Heiment,  Puy-de-Dôme), 
Fouilles  et  découvertes,  in-k°,  ifi'^i,  Herment  et  C'crmont-Ferrand.  On  y 
trouvera  le  récit,  bien  présenté,  de  fouilles  qu'ils  ont  exécutées  à  leurs 


HTtl  UI\IK    AHCHKOLOGIQUK. 

frais  et  qui  leur  ont  fait  retrouver  à  lleauclair  U's  restes  d'une  nc^cropolc, 
d'un  temple,  d'un  aqueJuc  el  d'un  omidullitAiro,  avec  de  nomhieux 
objets  anliquts.  dont  le  plus  ruricux  e.^t  un  >.i>e  ;\  reliefs  que  n-pro  luit 
une  pl;uu'ht'  en  ronleiir,  très  bien  tirée;  il  porlf.  outre  la  si^^iiaiure  du 
potier,  une  inscripiinn  qui  ne  me  parait  pas  encore  expliquée  d'une 
minière  dèllnilivc.  l-es  deux  autres  planches  ont  leur  inuîrûl.  L'une  nous 
donne  le  plan  des  ruines  le  plan  du  temple,  i\  plus  gran'le  échelle,  el, 
en  couleur,  un  fragment  d'une  peinture  murale  qui  décorait  cet  édifice; 
il  s'agi:  de  plantes  d'eau  qi;e  séparent  des  colonnes  siniulécs.  I.a  dernière 
planche  présenle  la  reslilulion  du  tracé  de  la  voie  romaine  de  Clermoiil 
i\  Limoges,  ou  plutôi  de  la  partie  de  celte  voie  qui  est  comprise  dans  le 
déparlenienl  du  Puy-ile-IWme ;  il  y  a  li,  dans  le  texte  qui  explique  cette 
planche,  des  détails  curieux  sur  la  direction  et  sur  les  parties  Us  mieux 
conservées  de  ce  cheniii». 

t^n  ne  saurait  donc  trop  remercier  l"s  deux  autt-nrs  de  la  peine  qu'ils 
ont  prise  et  des  renseignements  qu'ils  nous  lournissent. 

^ous  apprenons  que  VÉcole  américaine  d'Athènes,  fondée  à  l'imi- 
tation de  l'Éi-oli-  franrai>c  el  de  l'Kcolo  allemande,  achève  de  s'organiser. 
Le  professeur  Packard  succédera,  la  seconde  année,  au  prolcîseur  (jood- 
•win,  qui  s'est  chargé  de  jnetlre  l'oeuvre  en  tr.iin.  Une  maison  commode 
a  été  louée  pour  l'école,  sur  le  houlcvard  qui  bor.le  les  jardins  du  palais  ; 
on  y  a  installé  une  hildiolhèque  qui  conlient  déjl  les  ouvrages  les  plus 
nécessaires.  L'école  s'ouvre  avec  six  memlirt-i.  (>n  a  le  projet  de  publier 
un  hulletin.  L'existence  de  l'école  est  déji  as.-urée,  pour  un  certain  nom- 
bre d'années,  par  le  capital  qui  a  été  versé  et  parles  engagements  qu'ont 
pris  [dusieurs  universités  auxquelles,  on  resi)ère  du  moins,  d'aulres  vien- 
dront hieniôt  se  joindre  pour  supporter  les  charges  de  l'établissement. 
Nos  lecteurs  n'auront  pas  oublié  que  la  fondation  de  l'école  est  unique- 
ment duc  à  l'initiative  privée. 

M.José  Uamon  Mélida,  allaché  au  Musée  archéologique  national 

de  Madrid,  vient  de  publier  une  courte  notice  sur /es  rases  grecs,  étrusques 
etilahjfjrccs  que  renferme  ce  musé.'  (in-8,  188-.»).  Klleest  bien  succincte  ; 
mais  elle  donnera  pourlanl  une  idée  des  piiiicipales  pièces  de  cette  col- 
lection, qui  paraît  renfermer  quelques  niorceaux  iuléressanls.  L'auteur 
de  celle  note  s'esi  mis  au  courant  ;  il  cotmaît  bien  ce  qui  a  é'.é  écrit, 
dans  ces  derniers  temps,  de  plus  complet  et  de  plus  mélhodique  sur  cette 
malière.  11  serait  désirable  que  M.  Hamon,  qui  parait  bien  préparé  A  celle 
l.irhe,  voulût  bien  entreprendre  un  lalalogue  de  celle  colleclion,  en  y 
joignant  quelques  planches  destinées  à  faire  connillre  les  plus  im;'or- 
tanls  des  monuments  qu'elle  renferme. 

M.   Horlololli,   de   .Modène,   poursuit   sur  la  coudi^e  j>rnnitirc  de 

VK'j'ivi':  des  lecherrhcs  qui  piiais-eiil  fuites  avec  beaucoup  de  soin.  Il  en 


vot  vi:i.i,i:s  AiiciiKoLOGiQUKS.  253 

étudie  les  rapports  g('om''lriqii(!S  nvoc  les  autres  uiiili's  de  Imipueiir,  de 
ciliacili'  cl  (le  poids,  soit  t'iran^ôrcs,  soit  l'gypliciiiics,  N'.iynnl  rcr'j  que 
le  lroi;-iènie  ra^cicllIe  de  cet  oiiviat;e,  nous  devons  nous  roiitenliT  d'en 
transi'rirc  le  titre  :  P.  HcTlolotli,  0(7  primitivo  cuhito  KifVD  e  du  sxi<ji  gco- 
mctnci  rniijiorti  colle  allrc  uiiHiï  ili  inisura  e  di  itcao  cijnianc  e  stramerc. 
A^odeiia,  società  lipogratici,  in-i°,  188:!. 

Dans  le  liiillrtln  <lc  lu  soriiilè  du  V.onhi,   sou   aicliivi.Me,  M.    iùnilc 

Tdillel;ois,  décrit  le  Trésor  de  Lunjuian  ((ler.^).  11  s'agit  de  !).S(»  dctuerâ  îles 
Klusates  qui  ont  élé  trouvés  dans  un  vase  de  terre  par  un  ouvrier.  Celui- 
ci  a  reçu  la  moilié  du  In'àor,  el  sa  niéllaucc  a  emjiâ.hé  M.  TailUbois 
d'cxaiuiner  les  't!M)  pir-ces  qui  faisaient  lu  pari  de  l'inventeur;  mais  il  a 
pu  étudier  à  loitir  l'autre  moilié  de  la  liuuvaille,  el  toutes  les  pièces  qu'il 
y  a  vues  sotit  au  nulme  type,  avec  de  i-iuiples  variétés  de  coins.  11  en 
donne  une  description  qu'accompagne  la  reproduction  figurée  des  prin- 
cipales de  ci  s  variétés,  puis  il  dienheà  montrer  que,  dans  les  dessins 
barbares  qui  couvrent  les  deux  (ôtés  du  n.i:i,  il  ne  faut  voir  qu'une  imi- 
tation du  type  des  monnaies  macédoniennes,  arrivée  au  dernier  dc^^ré  de 
la  déiîénérescence. 


RIBLIOGRAPllïR 


Études  nrchcologiques.  œuvre  posthume,  i  ai  .M.  It  U"  Pu.  A.  l'irintn. 

In  vol.  in-4",  Paris. 

M.  Ik'lbici,  (juc  nous  avons  jadis  connu  à  Conslanliruiilo,  ('i.iit  un 
liomnic  excelleni,  actif,  curieux,  passionnt'  pour  les  irclicrchcs  d'archt'o- 
logie  el  d'épi|j;raphie  ;  il  a  rendu  de  grai.ds  services  en  >auvaiil  bien  des 
mcuiumcnis  île  la  dcslruclion  cl  de  l'oubli,  l'ersonne  ne  connaissait 
comme  lui  tous  ces  coins  el  recoins  de  Conslanlinople  cl  des  environs,  où 
tant  de  vestiges  de  l'époque  byzantine  el  uiOnic  de  l'cpoque  romaine 
sont  cacbés  sou?  des  conslrucliuns  ou  îles  ariaiigcuîcnlsmoiicriics,  el  bien 
souvent  dérob(?s  au  regard  par  la  difOcollé  de  pinétrcr  dans  une  mos- 
quée ou  tians  ses  dépendances,  voire  niOme  dans  une  maison  turque  ou 
arménienne,  dont  certaines  parties,  en  vertu  de  leur  destination,  sont 
rigourcuscmenl  Fermées  à  l'iMiangcr.  Non  conletil  de  fouiller  en  tous 
sens  la  ville  et  sa  banlieue,  il  avait,  malgré  la  modicité  des  ressources 
dont  il  disposait  el  les  exigences  des  fondions  dont  il  vivait,  exploré  aussi 
avec  soin  les  doux  rives  du  Bospbore,  les  côtes  de  la  mer  de  Marmara,  el 
tout  le  pays  entre  Andrinople  el  Conslanlinople. 

Ce  qui  lui  manquait,  pour  tirer  de  ses  recherches  et  de  ses  découvertes 
tous  1.  s  résultais  scienlitiques  qu'elles  aui aient  pu  comporter  el  toute  la 
répuiation  qu'elles  auraient  pu  lui  valoir,  c'était  celle  première  éduca- 
tion scientilique  à  laquelle  rien  ne  supplée.  11  n'avait  point  passé  par  la 
discipline  de  ILniveisilé,  puis  de  ces  haules  écoles  de  critique  et  de  mé- 
thode que  l'Allemagne  el  la  France  eniretiennent  à  Rome  el  ;\  Alliénes  ; 
il  n'avait  pas  une  culiure  générale  suflisanle,  une  coiinaissance  assez 
exacte  des  souices  anciennes  et  moderne.-,  des  dillérenti  slyle>  (t  de.  leurs 
caractères  originaux  ;  il  ne  savait  ni  conduire  son  propre  esprit,  ni 
mener  par  degrés  celui  des  autres  à  accepter  ses  conclusions  ;  il  se  ba- 
sai dail  aux  rupprocbcnienls  les  plus  téméraires,  il  ne  se  méliail  point 
as.'ez  des  lai  unes  de  son  instruction  et  des  hardiesses  de  son  esprit  tout 
prime-saulier  cl  un  peu  bizirre.  C'i.'t  ainsi  qu'après  avoir,  pendant  une 
trentaine  d'années,  entrepris  el  fait  presque  A  lui  seul  cet  inventaire  des 
antiquité»  de  Cunsiantinoplc  qu'a  repris,  avec  plus  d'ordre  et  de  suite,  le 
SyUoijiic  de  Contlantinople,  il  ne  laihse  guèie  que  des  travaux  qui  sont 
preçiiue  luusû  refaire  el  dont  aucun  d'u  un  caractère  «léiinilf. 


itiitLiocitviMiii:.  255 

Les  mi^rilOH  ol  les  (lémiits  qtift  nous  venons  il'indiquer  sont  égalomonl 
sensibles  iluns  h',  volume  qui  a  été  formé,  api-t'-s  h  mort  (Je  M.  Dethier, 
d'un  crTl.iin  noniitic  d'arlic'cs  qui  avaient  61(5  publiés  dans  dillérenls 
recueils;  inaiA  i;ouiqiini  M.  Deihier,  qui,  si  nous  ne  nous  Irornpons,  était 
autrichien,  .>-'o-l-il  ilna^iu6  de  rédii^.-r  ces  dirseilalioiis  en  rran(.-iiisV  Co 
français  n'est  pas  du  français,  c'est  de  l.i  lingiia  franca,  du  petit  sabir, 
comuio  on  dit  en  Orient,  c'est  le  palois  que  vous  parbnt  tous  ces  inler- 
médi. lires  trop  (dîli^^cants  qui  air(îlcnt  le  voyagiur  .^ir  le  pont  de  Galala 
et  qui  lui  ollreiit  les  services  qu'ils  savi  ulsi  bien  faire  payer,  l/i'lrangeté 
d(î  Cet  idiome  eoiu[)o>ili'  riiud  rrieuic  plus  sensibles  les  défauts  habiluels 
de  l'auteur. 

Sans  insister  davaul^ig'-.  Il^u^*  .si-nalt  rons  les  principaux  des  travaux 
qui  ont  é'é  recueillis  dans  ce  volume  et  nous  en  i'idiquerons  le  sujet.  La 
prétonlion  de  retrouver  le  s(u'coi>hagc  d'Enripilc  dans  un  monument  qui 
se  conserve  au  musée  impérial  ottoman  ne  soutient  pas  l'examen  ;  ce 
sarcophage  n'a  pas  plus  de  droit  à  cet  honneur  que  lanl  d'autres  cuves 
funéraires  qui  représentent,  comme  celle-ci,  des  s(ènes  cmpruutéi-s  aux 
tragédies  du  poète;  tous  ces  sarcophages  à  bas-reliefs  sont  de  l'époque 
romaine.  On  irouvera  (dus  à  apprendre  dans  les  mémoires  consacrés  aux 
édilices  et  aux  autres  nioimments  de  l'époiiue  byzantine.  A  ce  titre,  on 
lira  avec  profit  le  suivant  :  Polyandrion  ou  Myiimdrion.  L'ajlisi-  desapôlrcs, 
aujourd'hui  Mclnncdicli,  ou  les  tombeaux  des  empereurs  byz'tntin^,  surtout 
dans  cette  église. 

Pour  les  mêmes  motifs,  nous  appellerons  l'attention  sur  la  dissertation 
qui  vient  ensuite  :  Deux  iiucription-'  grecques  paléologines  (c'est-à-dire  du 
temps  des  Paléologues)  très  curituscs.  lilies  ont  eu  eirot  leur  intérêt  ;  mais 
l'autour  recommence  ;i  montrer  combien  il  connaît  mal  l'antiquité  cIhs- 
sique,  dans  les  mémoires  qu'il  consacre  i  V Hermès  p^ychopompe  des  ban- 
quets funèbres,  à  une  stèle  funéraire  où  il  s'imagsne  trouver  l'image  d'une 
lenmie  tuée  par  la  foudre,  à  un  colosse  antiquissime  cliyprien,  comme  il 
dit  en  son  jargon.  Nous  ne  continuons  pas  celte  énumération  ;  il  est  fâ- 
cheux que  M.  Uelhier  ne  se  soit  pas  borné  ik  s'occuper  de  la  Byzance 
grecque  et  de  la  Gouttantinople  chrétienne,  sur  lesquelles  il  pouvait 
nous  beaucoup  apprendre,  et  qu'il  se  soit  lancé  sur  un  terrain  où  il  n'a- 
vait pas  appiis  à  marcher.  ^-  l'tnuor. 

Sédulius  de  Liège,  par  Henri  Pirenne.  Druxclles,  1882,  in-8,  72  pages,  avec 
un  fac-similé  (extrait  des  Mémoires  de  l'Acmlémie  royale  de  Belgique,  collection 
in-8,  tome  \X\11I). 

Sédulius  est  du  nombre  dos  Irlandais,  missionnaires  ou  lettrés,  qui  vin- 
rent sur  le  conlinent,  durant  la  période  franque,  faire  bénéficier  de  leur 
haute  culture  intellectuelle  les  anciennes  provinces  romaines,  devenues 
barl)ares.  Chassé  de  l'Irlande,  selon  toute  apparence,  pur  l'invasion  Scan- 
dinave, il  arriva  dans  les  Éiats  de  l'etnpereur  Lothaire  entre  les  années 
840  à  8oI,  fut  accueilli  i\  Liège  par  l'évéque  Hartger,  et  paraît  avoir  di- 


-.*iO  IIKVI  K    ARCMKOMir.loUK. 

rigé  lioole  i*piscopnlp  de  l'i^pliso  calhécltali>  lic  Saitil-l-iimbcrt  :  il   \i\;iii 
encore  on  S74  au]>r(''s  dr  iVv^qiic  Francon,  siiccissciir  il'll.irl^or. 

Lp  nom  d(>  ritlandais  Srilulins  no  scrnil  point  pat  vomi  jusqu'il  nous  »'il 
n'avait  com|>o^ô  ifnssoz  nomliroMsiCs  poé-ios.donl  un  mamiscrildu  xn"  siè- 
cle,Icu"  lOTÎjdo  la  IJibliollii'quo  royalcdc  nruxelles,  ne  seuildo  avoircon- 
sorvi*  qu'une  partie.  Toutefois,  à  l'exception  de  quelques  ver*  citfs  par  Ma- 
billon  dans  yes  Vctcra  nnalcrUi,  sou  «pinre  re.*ta  lueomuie  jus(]u'eu  IK.'J'.», 
daleà  laq-iello  le  mamuciit  de  Itiuxclles  fut  .••ignali' pai  IN  riz  ilalteution 
des  i^rudits,  et  ce  fui  .«.eulcmcul  en  !8iil  que  six  des  qiiairc-vin};t-sepl 
pièces  de  »crs  qui  le  eomposent  fuient  publiées  par  le  savant  allemand 
Puemmler.  Cetie  première  puMica  ion  fut  S'Ui\ie  à  sept  anm'es  d'inter- 
valle par  eello  de  seize  ar.lros  pières,  due  à  M.  I-Iinilo  (îrosic.  Kii  \HC>\t, 
M.  Duemniler  mil  au  jour  quarante  pièces  nouveiles,  et  aujomd'liui 
.M.Piienne  donne,  dans  les  appendices  de  son  cHudc,  lei  vingt-cinq  pièces 
restées  inédites. 

M.  Pirenne  constate  qu'  «  il  ne  faut  pas  voir  uniciuemenl  dans  Sédu- 
liiis  un  curieux  représ-etilant  do  la  liltrr.iiure  du  ix''  siècle.  Il  est  cinore, 
et  c'est  là  ce  qui  lui  donne  pour  le  lecteur  belge  un  inténM  tout  spécial, 
une  source  historique  des  plus  précieuses.  GiAce  à  ses  vers,  on  peut  enfin 
combler  cette  lacune  fjui,  dans  l'lli^toire  de  Liège, 'sépare  les  règnes  des 
évéques  qui  vécurent  avant  Charlemagne  d'avec  les  règnes  de  ceux  qui 
sont  postérieurs  à  l'invasion  normande  i>. 

Les  vers  de  Sétiulius  ii'intéressent  pas  ?(Mileinent  riii>l(irien  ;  rarchéo- 
logue  y  trouvera  quelques  renseignements  préc  ieux  sur  les  monuments 
dont  l'évéque  Hariger  dota  la  ville  de  Liè^je.  On  doit  donc  savoir  gré  à 
M.  F'ircnne  d'avoir  fait  connaître  à  ses  compatriotes  un  auteur  qui,  avant 
sa  publication,  n'était  guère  connu  qu'en  Allemagne.  A.  L<'.\(i.No.N. 


ij-: 


LAOCOON  n  LK  (iKdll'i:  DAÏIIKNV 

A  L,V  l''RISK   ni';   IM'.IIC.AMK 


SUITE 


VII 

LA  FRISE  DE  PERGAME.  —  GÉANTS  OU  TITANS? 

L'autel  de  Zeus  construit  à  Pcrgnme  sous  le  règne  d'Eumùnès  II, 
de  197  à  loU  av.inl  notre  ère,  était  orné  d'une  frise  colos.-alc,  dont 
les  fragments  se  trouvent  actuellement  à  Berlin  et  représentent  le 
combat  des  Dieux  et  des  Géants  ou  Gigantomachie. 

Avec  la  guerre  des  Centaures  et  des  Lapillies,  colle  des  Amazones 
et  des  Athéniens,  la  giganlomacliie  est  le  tlièrae  favori  qui  se  dé- 
roule aux  frises  des  temples,  sur  les  sarcophages,  et  que  la  peinture 
sur  vases,  cette  éternelle  parodie  des  œuvres  des  grands  artistes  de 
l'antiquité,  reproduit  le  plus  souvent  d.uis  ses  compositions  bur- 
lesques. 

Ce  qui  doit  paraître  étrange  à  tout  homme  qui  réfléchit,  c'est  que 
le  combat  des  Dieux  et  des  Titans  ou  Titanomachie,  chanté  par  Hé- 
siode dans  la  Théogonie  (v.  616-/20),  n'ait  jamais  été  représenté 
dans  les  œuvres  des  sculpteurs  grecs  de  la  belle  épo  ]uc.  Faut-il  attri- 
buer ce  fait  à  ce  que  les  poèmes  homériijues  ne  mentionnent  les 
Titans  qu'une  seule  fois,  sans  indiquer  tiuclle  élait  leur  forme?  - 

1.  Voir  les  nuni(5ros  de  juillet,  août,  septembre  et  octobre. 

2.  Iliade,  cb.  XIV,  T.  278. 

Xoi-cmbre.  XU^.  —    1  / 


^58  KEVLE  Aiu:m:oLuGiQL'K. 

Los  Géants,  au  l'onlrairc,  aiipanisscnl  à  pliisiiMirs  n'iirises  dans 
VOdyssèe\  où  ils  sont  ro|ii-i'.»t'ntés  comme  un  pouple  puissant,  mais 
dont  r  )rgu;il  ciitraiiia  la  niinc.  Les  Géants  d'IIoinérL'  ne  sont  ilonc 
pas  encore,  comme  ilanc  Il.sioilc,  des  représcnlanls  des  éléments 
du  Chaos,  des  forces  aveugles  (jui  dominent  le  monde  avant  le  ré- 
gne de  Zeus;  ce  sont  des  Cires  humains  révoltés  contre  la  diviinlé. 

Dans  Hésiode  -,  les  Titans  forment  une  première  génération  de 
dieux. 

Nés  dOuranos  (le  Ciel)  et  de  Gaia  (la  Terre),  ils  sont  au  nomhre 
de  douze,  dont  six  du  scxe  masculin  :  Okéanos,  Koius,  Kreios,  Hy- 
périon,  tapélos,  Kronos,  etsix  du  si  xe  féminin  :  Thcia,  Uheia,  Thé- 
nus,  Mnémosyne,  IMioibé,  Thélis.  A  côté  dos  Titans,  la  Terre,  fertile 
en  monstres,  crée  i  ncorc  les  Cyclopes  :  Bronlcs,  Stéropcs  et  Argés, 
les  démons  Je  la  lempéte  et  des  éclairs  ;  puis,  les  llékaloncheires  : 
Kotlos,  Hiiareus^.,  Gyès  ou  Gygès,  les  représentants  des  eaux  in- 
doînptables  et  débordées  ;  enlin,  la  Terre  fait  naîire  lesErinnyes  (les 
Furies),  les  Géants  et  les  Nymphes  Mélicnnes,  les  démons  de  la 
vengeance,  de  la  violence  ei  du  meui  trc. 

Celle  prennére  dynastie  de  dieux  vit  sous  le  règne  de  Krono>  et 
de  Rheia,  jusiiu'à  ce  que  leurs  descendants,  les  nouvelles  divinités  à 
formes  humaines ',  Ai  los,  Poséidon,  Zeus,  He-tia,  Déméter,  liera, 
leur  livrent  cette  guerre  (jui  s'appelle  la  Titauomachic. 

Ainsi  dans  Hésiode  les  Géintssonl  fiéds  des  Tilins,des  llcknlon- 
cheires^des  Kiinnyes,iles  Nymphes  Mélii'iiiies.  Tout  semble  donc  in- 
diquer que  dans  la  conception  du  poète  de  la  Throijunic  les  Géants 
font  partie  de  celte  race  monsliueuse.  Ils  appartiennent  h  ce  monde 
d'êtres  elTrayanls,  à  ces  représcnlanls  des  forces  aveugles  de  la  na- 
ture qui  régnaient  sur  le  chaos  avant  ijiie  les  (lieux  à  formes  hu- 
maines eussi-nl  inlroduit  l'ordre  et  riianiioiiie  dans  l'univers. 

Dans  la  Théoyonie  les  formes  des  Géants  ne  sont  [-as  décrites; 
car  le  ver?  183  d'après  lequel  Overbeck  et  les  autres  archéologues 
ont  conjecturé  que  les  Géants  d'Hésiode  doivent  ôlre  représentés 
comme  des  héros  couverts  d'ar.ues  étinccluntes  n'a  jamais  été  écrit 


1.  Odyssée,  ch.  VII,  59,  206  ;    X,  120. 

2.  Théogome.  V,  133. 

3.  Hésiode,  Thiofjonie,  T.  617.  Lc  nom  le  plus  ancien  est  Olriarcu^,  qui  a  la 
mCtDc  fiRniIlcalion  que  le  mot  Obrimos  {puissant),  qui  se  trouve  Ctrc  le  nom  inscrit 
tout  la  (Igiirv  dt-  l'un  des  géaoU  de  la  frise  do  l'crgamc. 

k.  Thiogonie,  v.  V.'.T  cl  buivantA. 


i.K  LAOCOON  ET  LR  r.ROLPt:  d'atiikna.  250 

par  l'autour  do  la  Tlirof/onir^  Il  a  élu  fabriiiiK';  d'après  le  vers  TilO 
du  XVIlr  chant  de  VIliade  et  iulercalé  plu^  lard  par  (juelquc  rliap- 
bodo  dans  le  Icxie  d'Ilésioilc. 

La  Théoijonie  ne  parle  pas  non  plus  de  la  lulle  des  Dieux  el  des 
Géants.  Mais  peut-ôtre  Hésiode  les  comprend-il  sous  le  nom  plus 
général  de  Tilans  dont  ils  sont  les  proches  paients.  Du  reste  Hésiode 
senihle  adniellre  au  moins  deux  phases  dans  celte  lutte  des  nou- 
velles divinités  contre  ce  moiule  fabuleux  que  je  désignerai  désor- 
mais |tii-  le  nom  de  :  monde  des  Titans. 

Dans  la  première,  Zcus  et  les  siens  combattent  seuls  contre  les 
Tilans  (v.  030-1)35);  dans  la  seconde,  les  dieux  invoquent  le  se- 
cours des  Hékatoncheires,  qui  avaient  été  enfouis  sous  terre,  mais 
qu'ils  avaient  rappelés  à  la  lumière  du  jour  sur  le  conseil  de  Gaia 
[Théogonie,  640-720j.  Avec  l'aide  des  Hékalonclieires  les  Titans 
sont  vaincus  et  précii)ilés  dans  le  Tartare. 

Si  les  Géants  d'Hésiode  appartiennent  au  monde  des  Titans,  il 
n'en  est  pas  de  même  de  ceux  d'Homère.  D'après  VOdijssée,  les 
Géants  sont  un  peuple  sauvage  de  TUccident.  Ils  hahitent  avec  les 
Cyclopes  dans  l'Hypéreia  {Odyssée,  cli.  YI,  'i),  une  contrée  mystique, 
légendaire,  dont  le  nom  signifie  :  le  i)ays  d'en  haut.  Ces  Géants  sont 
même  beaucoup  plus  civilisés  (jue  les  Cyclopes,  qui,  d'après  Homère, 
n'appartiennent  pas  non  plus  au  monde  des  Tilans,  mais  sont  des 
êtres  barbares,  à  forme  humaine,  errant  sur  les  montagnes,  sansau 
tre  loi  (}ue  celle  de  l'aulorilé  aveugle  du  père  sur  la  famille,  sans 
princes,  sans  villes  et  sans  autre  habitation  que  celle  que  peuvent 
oiïrir  des  grottes  naturelles  [Odyssée,  cli.  IX,  v.  105-1  irj). 

Au  contiaire,  les  Géants  ont  un  roi,  Eurymédon  qui,  par  son  or- 
gueil mdomptable  entraîna  sa  ruine  et  celle  de  tout  son  peuple  im- 
pie [Odyssée,  ch.  VII,  v.  58-60).  Cet  Eurymédon  avait  laissé  une 
fille  cadelle,  Périlioia,  qui  devint  l'épouse  de  Poseido!i  (Neptune)  et 
en  eut  un  fils,  Nausithoos.  Ce  prince  ne  règne  plus  sur  les  Géants, 
qui  ont  été  anéantis,  mais  sur  une  race  qui  leur  a  succédé,  les  Phéa- 

1.  Ht^siode,  Théor/onie,  v.  185  :  teû/egi  ),aLi.7;oa£vo'j;,  00)1/'  Iy/.'-^  X-p'^''  î/.ovTa;. 
Goeitlinu;  remarque  à  ce  sujet  :  «  Hic  versus  deest  in  Bar.  Vidctur  additamentum 
esse  alicujus  rhapsodi,  qui  verba  Homerica,  //.,  XVIIJ,  510,  conjunxit.  Adversatur 
Schomann,  p.  114,  qui  exempli  instar  allegavit  Spartos  Boeticos,  draconis  ex  den- 
tibus  natos,  atque  heroes  in  Colchidfl  progenitos  et  ab  Jasone  interfecloB.  Gênera- 
tores  fiulein  Itominuin  cum  i/lis  Gigantibus  letris  comparari  non  possunl.  Pro 
spurio  igitur  habuerunt  Koechl.  Weiss.  Fi.  »  Comme  on  le  voit,  les  meilleurs  phi- 
lologues considèroat  ce  vers  comme  D'ayant  pas  existé  dans  l'original. 


:2G0  HEVLE    ARCHÉOLOGIQUE. 

ciens.  Mallieurouscracnl  res  di'sccmlanls  des  Géants  ne  sont  pas 
aussi  vip^ourciix  que  leurs  aucôlres,  ils  sont  conslaiumenl  exposés 
aux  invasions  de  leurs  voisins  les  Cyclopes,  ol,  sous  la  conduite  de 
Nausithoos.  iis  se  décident  i  abandonner  lllypércia.  Ils  s'établissent 
dèfinilivi-inent  dans  un  autre  pays  légendaire  placé  plus  au  sud,  la 
Siliéria  (Of/ywe,  «h.  YI.  v.  1-10;.  Là  le  roi  Nausithoos  bilil  une 
ville,  des  remparts,  des  palais,  des  temples,  et  parli<,'e  entre  ses  vas- 
saux la  lenv  quils  doivent  labouier.  (l'est  donc  une  civilisation 
avancée  qu'il  représente  et  j)ourlant  il  est  le  petit  (ils  du  (jéanl  Ku- 
rymédon.  Enlin  Nausithoos  eut  pour  successeur  ce  roi  Alcinoiis, 
père  de  Nausic.ia,  (pii  reçut  Ulysse  dans  ce  palais  tout  étincelant 
d'or  et  d'argent,  dont  la  description  est  donnée  dans  i'IJdyssée  au 
chant  VII,  v.  81  à  1)7.  Ainsi  cet  Alcinoiis,  hôte  d'Ulysse,  avait  pour 
aïeul  un  (îé.int  et  il  le  déclare  lui-même  ÛM\>\'0(l!/ssce  au  chant  VII, 
v.  i!0  i,  où  li  se  dit  «  parent  des  dieux,  des  C\clupes  et  de  la  mer 
sauvage  des  Géants  ».  Comme  on  le  voit,  tous  ces  récits  de  VOdyssée 
nous  conduisent  à  cette  conclusion  :  c'c.s7  que  les  Géants  d'ïlomire 
sont  des  honim''s  pritmtifs  d'une  taille  colossale,  mais  ijui  n'ont  aueun 
rapport  avec  le  inonde  des  Titans,  avec  les  Géants  moiistrueux  d'Ile- 
siode. 

Cette  conception  est,  ilu  reste,  d'accord  avec  toutes  les  croyances 
homériques  '.  Pour  les  rhapsodes  de  Vlliade-Odyssee  les  hommes 
modernes  sont  une  race  dégénérée,  leurs  ancêtres  étaient  diMix  fois 
plus  forts  et  plus  grands. 

Si  nous  avons  cherché  à  établir  cette  ditTérence  fondamentale 
entre  la  tiadition  dllunière  et  celle  d'Hésiode,  c'est  (juclle  n'a  pas 
encore  été  observée.  Il  en  est  résulté  de  graves  erreurs  dans  l'appré- 
ciation des  monuments  qui  représentent  la  Ciganîomachie  ou  le 
combat  des  Dieux  et  des  Gi  anls.  Comme  je  l'ai  déjà  dit,  ce  sujet  esi 
choisi  par  les  sculpteurs  cl  par  les  peintres  sur  vases  dés  les  temps 
les  plus  reculés. 

Au  VI'  siècle,  nous  le  trouvons  en  bas-nljef  au  tympan  du  tré.sor 
des  .Mégariens  k  Olympie  (Pausanias,  G,  6i),  1:2).  Des  fragments  de 
celle  gigantomachie  ont  été  retrouvés  dans  les  fouilles  (TOlympie 
entreprises  en  1870. 

Au  v"  siècle,  celte  légende  décore  les  métopes  de  Sélinonie.  Le 
même  suj(;l  orne  aussi  le  lem|ile  plus  récent  de  Sélinonie,  construit 
vers  4G0  avant  notre  ère.  Il  revient  encore  à  l'intérieur  du  bouclier 

1.  Voyez  aussi  la  Batrnrhomyomiclur ,  v.  109. 


LE    LAOCOON    l'.T    LF-:   GHOUPE    D'aTHKNA.  2Gi 

(le  l*Atlirii;i  P;irtIi(^nos  de  Phidi.is,  et  aux  métopos  du  fronton  orien- 
tal du  Parlliriion.  A  la  nu^mo  époijue  apparliennent  aussi  la  Rigm- 
tomacliie  aux  mt'tnpes  du  crtlô  oriental  de  l'IIrraiou  d'Arposct  celles 
du  tympan  oriental  du  temple  de  Zeus  à  Akragas  et  des  mélopcsdu 
sanctuaire  d'Apollon  à  Delphes. 

-M  lis  ce  i|iij  est  caract.rislii|uc,  ce  qui  est  de  la  plus  hauti-.  impor- 
tance pniir  iio:is,  c'est  que  dans  tous  ces  monum-nts,  de  môme  que 
dans  loulcs  les  peintures  sur  vases  de  la  pf'Tiodc  arcliaï|ue  et  de  la 
belle  ('po.iue,  les  Géants  sont  reprisentés  comme  des  héros  du  monde 
homériiiue,  armés  de  lances  et  de  boucliers.  Ni  à  Olympie,  ni  à  Sé- 
linonle,  ni  à  Akragas,  ni  à  Athènes,  ni  ;\  Delphes  nulle  part  ils 
ne  revêtent  l'aspect  monstrueux  des  géants  de  Pergame. 

L'explication  de  ce  phénomène,  dont  on  n'a  pas  encore  recherché 
la  cause,  nous  paraîtra  bien  simple  si  nous  songeons  aux  traditions 
homériques. 

Au  vr  et  au  V  siècle  VIliade-Odyssée  est  dans  toutes  les  houches. 
C'est  dans  les  poèmes  homériques  que  les  enfants  grecs  apprennent 
5  lire.  Ce  sont  les  chants  des  rhapsodes  de  Vlliade-Odysséc  qui  ins- 
pirent les  poètes  lyriques  et  dramatiques  et  les  grandes  compositions 
des  artistes.  Les  Géants  de  touts  celle  époque  ne  sont  <ionc  pas  dif- 
férents de  ceux  d'Homère.  Ce  sont  des  hommes,  ce  sont  les  vassaux 
du  roi  Eurymédon,  au  cœur  magnanime,  comme  dit  le  rhapsode  de 
VOdyssée,  mais  dont  l'orgueil  et  l'impiété  entraînèrent  la  perte  et 
celle  de  tout  son  peuple. 

Les  tableaux  si  animes,  si  riants  de  VOdyssée,  ces  descriptions  de 
Géants  et  de  Cyclopes  qui  vont  môme  parfois  jusqu'au  burlesque, 
voilà  ce  qui  a  inspiré  les  artistes  encore  croyants  et  naïfs  de  ces. 
deux  premières  périodes  de  l'art  grec. 

Ces  gigantomachies  qu'on  voit  aux  frises  des  temples  et  sur  les 
vases  de  cette  époque  ne  représentent  donc  pas,  comme  l'ont  cru 
Overbeck  et  les  autres  archéologues,  la  soumission  des  forces  bru- 
tales de  la  nature  à  l  harmonie  universelle  introduite  par  les  dieux 
olympiques.  Ils  représentent  la  lutte  des  dieux  contre  les  Géants 
d'Homère,  c'est-à-dire  le  triomphe  des  divinités  ordonnatrices  sur  des 
hommes  cruels,  onjucilleur,  impies,  doués  d'une  force  physique  co- 
lossale, mais  qui  méprisaient  les  lois  divines  et  humaines.  Ces  Géants 
personnifient  l'humanité  primitive,  fière  de  ses  conquêtes  sur  la  ma- 
tière, mais  sans  mœurs  et  sans  vertu;  ils  sont  vaincus  par  les  dieux 
de  l'Olympe,  les  fondateurs  des  lois  de  la  civilisation,  qui  seules 
peuvent  protéger  la  race  humaine  dans  sa  lutte  contre  les  monstres 
du  monde  héroïque. 


'2Gi  RKVUE   ARCIIKOI.OI-.IQUR. 

Ce  sujet  est  If  plu-;  sonviMil  rt'ini'-sciilt''  au  fronton  oriental  ilos 
teinpit's,  i>.Trc.'  i\nc  c'est  (olui  i|ui  frap;»!'  la  vue  loiil  d'ahoril  à  l'oii- 
tri'e  ilu  saiiftuair.',  c'est  la  jil.ice  triioiiiit'iir  lians  la  [,Ml<'iie  dt-s  tym- 
pans et  des  frises  grecs  '. 

Mais  ces  Gisants.  re>  jiommes  primitifs  doinplt's  pir  les  dieux  de 
riiannonie  et  df  l'ordre,  ont  tlonnè  naissance  à  une  iiniivelle  race 
humaine,  obéissanle  aux  dieux  et  aux  lois  ipii  lï'i^isseiit  l'univers. 
Ces  liommos  civilisés  entri-preuii'iil  à  leur  tour  une  lutte  liéroi(|ue 
contre  les  monstres  (|ue  la  nature  eiu'cre  liarliare  faisait  naître  au- 
tour d'eux. 

C'est  celle  grande  guerre  dis  honinies  civilisés  et  îles  brutes  in- 
formes que  personnifie  le  combat  des  Centaures  et  des  Lapiilns  re- 
présenté sur  les  autres  cAlés  aux  frises  des  temples  grecs. 

Kniin,  le  troisième  joyau  de  celte  couronne  «le  ch  fs-d'ieavrc  qui 
couraient  aux  frontons  des  sanctuaires,  c'est  le  triomphe  des  Allié- 
nions  sur  les  x\ma/.ones,  cette  personnification  des  peuples  venus  de 
l'Orient.  Yoil.i  le  vérilahlc  sens  de  celle  trinilé  de  liiomplies  (jui 
reviennent  à  travers  toutes  les  œuvres  des  poètes  et  des  altistes 
grecs  de  la  belle  époque. 

Triomphe  des  dieux  civilisateurs  sur  l'humanité  sacrilège  et  cri- 
minelle; triomphe  des  hommes  civilisés  et  purifiés  par  la  religion 
sur  les  monstres  antédiluviens  ;  triomphe  des  Crées  sur  les  Perses, 
de  la  civilisation  sur  la  barbarie,  de  la  petite  llellas  sur  l'énorme 
Orient  I 

Au  fond,  cette  trinité  représente  les  trois  jihases  de  la  civilisation 
liumaine.  Si  l'on  défait  le  pre-nier  anneau  de  cette  clnîue,  eu  attri- 
buant la  Cigaiituuiachie  au  monde  des  Titans,  antérieur  à  l'Iiuina- 
nilé,  ou  ne  voit  pas  le  lien  qui  devait  réunir  ces  grandes  œuvres 
entre  elles.  En  quoi  le  triomphe  d'une  race  de  dieux  sur  une  autre 
peut-il  servir  d'introduction  aux  luttes  des  Centaures  et  des  Lapilhcs, 
des  Grecs  et  des  Perses?  Mais  si  les  Géanls  vaincus  sont  îles  hom- 
mes semblables  à  ceux  d'Honiùre,  on  comprend  ijuelle  est  la  base 
commune  de  ces  poèmes  de  marbre.  Ce  canevas  fondaiiu-nlal  où  les 
artistes  bro  lent  ces  trois  légendes,  c'est  l'histoire  tie  l'humanité. 

Au  fronlou   oriental,  l'iiuujanilé  cruelle  et  malfaisante  révoltée 

1.  Co  n'osi  donc  pas  p.ir  hasard  qu'au  P.iriln'iion,  \  l'H-^raioii  <l*Ainos,  au  u-mpln 
de  Z<:ui  k  AkraK:i»,  la  gig;ini'im.irliic  décore  les  Uii^lopca  du  fruutua  onen^u/ ;  cepen- 
dant eu  fait  n'avait  paa  encore  ét^  relevé. 


LK    LAUCUUN    ET    LE    GROUPE    d'aïIIK.N A.  2C.'{ 

contre  la  divinilt',  mais  ilomplée  par  elle.  Sur  l'un  des  grands  côlùs 
(lu  Iciniile,  rhiiiiiaiiiiï;  |)ieusc  cl  l)ipnfai.santc  luUanl  coiilro  les 
nioiiiilros  destructeurs.  Sur  l'autre,  (Milin,  riiuiiiaiiilc  altei^;iiaiil  son 
apogée  dans  le  peuple  grec  et  terrassant  l'Orient  liarhare. 

Telles  sont  les  trois  grandes  pt^riodes  du  monde  liom  lin  qui  se 
déroulent  aux  frises  des  sancluaices  giees.  C'est  une  erreur  qui 
seule  a  |iu  voiler  jusqu'il  présent  cette  belle  union,  cette  majestueuse 
trinité  humaine  née  des  clnnls  homériques  et  cristallisée  dans  le 
marbre  par  le  ciseau  magique  de  Phidias  ! 

Mais  les  croyances  se  transforment  avec  les  changements  qui  s'o- 
pèrent dans  la  vie  matérielle,  morale  et  intellectuelle  d'une  nation. 
A  la  grave  imagination  des  philosophes,  des  penseurs,  des  poêles  de 
la  fin  du  IV*  et  du  m"  siècle  avant  notre  ère,  la  simplicité  naïve  des 
tableaux  d'Homère  ne  sulTit  plus,  ils  préfèrent  les  scènes  grandioses 
de  la  T//^o^on?>  d'Hésiode  où  les  éléments,  les  Titans,  les  monstres 
et  les  dieux  s'agitent  à  la  lueur  continue  des  éclairs  dans  la  four- 
nai^e  du  chaos.  On  trouve  déjà  dans  Eschyle  des  traces  de  celle  tra- 
dition venue  d'Hésiode.  Dans  son  Prométhée  enchaîné  (v.  3ol)  Es- 
chyle suit  la  tradition  d'Hésio  le,  et  non  pas  celle  d'Homère,  à  propos 
d'un  nouveau  monsirc  du  monde  des  Tilans,  Typhon,  dont  nous  de- 
vons aussi  nous  occuper. 

Dans  les  hymnes  homériques  (If,  128-189)  et  dans  Stésichore^ 
Typhon  est  un  fils  de  liera  (Junon),  (]ui  crée  cet  être  dans  son  cour- 
roux contre  Zeus  (Jupiter).  Mais  le  père  des  dieux  et  des  hommes  le 
foudroya  et  jeta  sur  lui  la  Cilicie,  le  pays  des  Ariméens-.  Ainsi,  dans 
la  tradition  homérique,  Typhon  n'appartientpns  non  plus  au  monde 
des  Titans,  puisqu'il  est  le  fils  d'une  déesse  de  la  seconde  génération 
des  divinités. 

Dans  le  récit  d'Hésiode,  suivi  par  Eschyle,  la  créalion  de  Typhon 
est  le  dernier  effort  de  Gaia.  La  Terre  ou  Gaia  en  le  mettant  au  jour 
a  voulu  venger  la  chute  de  ses  fils  les  Tilans.  Elle  a  réuni  toutes  ses 
forces  pour  produire  cette  dernière  apparition,  ce  cadet  des  Titans. 
Et,  en  effet.  Typhon  est  plus  effroyable  encore  que  ses  frères  et  il 
représente  le  plus  terrifiant  des  phénomènes. 

Hésiode  nous  le  décrit  comme  le  dernier  fils  de  la  Terre  et  du 
Tartare. 


1.  Voyez  Ettjm.  Magn.,  p.  773,  50. 

2.  Voyez  llia  le,  cli.  II,  v.  782. 


Of,l  REVIE   AnCH^-OLOGlOlE. 

«I  rcrsonnc.  ilil-il.  ne  saiirail  approrlier  de  ses  nmins  qui  oui  la 
fone  (l'arromplir  tout  ce  (|u'elles  entreprennent.   Se>  jjieds  sdiU 
infalijî.ibles.  De  ses  ('paules  s't''eliappeni  cent  («Mes  de  serpent.  (|ui 
dardeul  autant  de  langues  noires  comme  la  nuit,  ('es  lôles  merveil- 
leuses laissent  jaillir  le  feu  de  leurs  >eux  clincelanlssous  leurs  sour- 
ciU.  Dans  toutes  ces  liMes,  il  y  a  des  gosiers  capables  de  jeter  toutes 
sortes  de  voix  t'tranpes.  Tantôt  elles  parlent  une  Impue  que  les 
dieux  peuvent  comprendre  ',  tantôt  elles  liurlenl  connue  un  taureau 
superbe,  dont  la  force  est  inépuisable,  tantôt  elles  rugissent  comme 
un  lion  impitoyable,  tantôt  elles  aboient  comme  de  jeunes  cbiens  cl 
elles  sont  iiieiveilleuses  ^  entendre.  D'autres  fois  encore  elles  sifllenl 
cl  les  longues  chaînes  de  montagnes  en  retentissent  au  loin-.  »  Telle 
est  la  description  de  Tjpbon  dans  Hésiode,  et  il  faut  en  retenir  les 
principaux  traits,  parce  qu'ils  nous  serviront  pour  Téludc  des  mo- 
numents de  Tergame. 
• .    Dans  le  monde  des  cléments,  Typhon  reprùsenle  les  gaz,  les  feux 
souterrains  et  la  lave  qui  grondent  dans  l'intérieur  des  volcans. 
C'est  bien  \h  le  plus  terrible  des  enfants  que  Gaia  (la  Terre)  ait  en- 
core créés.  Mais  Zeus  le  foudroya  sur  les  hauteurs  de  l'Etna,  qu'il 
embrasa  dans  sa  chute  d'un  feu  qui  coule  comme  rctaiu  ou  le  fer 
fuudu. 

Cette  description  de  la  chute  de  Typhon  dans  Hésiode  est  en  même 
temps  la  première  mention  d'une  des  éruptions  volcaniques  de 
l'Etna. 

Comme  on  le  voit,  la  tradition  homérique  pâlit  devant  ce  récit  cos- 
mogonique,  et  c'est  de  cette  image  grandiose,  telle  qu'elle  apparaît 
dans  la  Throgouie,  qu'Eschyle,  dans  le  Prométhée  enchnxné^  s'est 
inspiré  pour  chanter  Ks  phénomènes  de  l'Etna. 

Mais  ce  n'est  pas  .seulement  l'imagination  des  poêles,  c'est  aussi 
celle  des  peintres  que  l'apparition  de  Typhon  ne  larda  pas  à  inquié- 
ter. Dans  les  vases  de  la  périoilc  archai  lue  ;\  ligures  noires  sur 
fond  rouge,  on  voit  apparaître  un  élic  à  jambes  de  serpents,  armé 
d'ailes,  portant  à  la  léte  des  oreilles  d'animaux.  Comme  nous  avons 
vu  que  dans  toute  cette  période  les  Géants  sont  représentés  sous  une 
forme  humaine,  suivant  la  tradition  homérique,  ce  démon  dilTorine 
qui  combat  seul  contre  Zeus  ne  peut  ôlre  que  le  Titan  Tyiihon.  .Mais 


1.  Ost-à  dire  pmpftétiquei,  prt-disant  pour  les  dieux  les  ériiplions  dcB  volcan». 
a.  Traduit  d'Hésiode,  Théogonity  v.  820. 


r.K    [,AOCOON    ET    LK    (HldUPI".    D'aTIIKNA.  20," 

ccllR  figiiro  une  fois  cn'-éo  cl  s:ins  ces^p  roprn  iiiito  sur  los  v.isc-;  de 
luxe,  poul-ôlre  sous  l'inlluenie  du  drame  (;>cliyl(''(,'n,  elle  ramena 
les  csprils  vers  ce  monde  des  Titans  drcrllpar  llf'-siode  dans  la  Tlirn- 
ijoiiir.  Sous  l'inllucnce  des  pliilo<(>plies,  des  penseurs  iiiysli(|iies,  la 
tradition  lioméri(iut!  ne  larda  pas  à  s'oublier,  la  pensée  devint  plus 
cosmo},^oni(iue  cl  penlil  de  si  poésie.  On  ne  voulut  plus  représenter 
ces  (îéar)ls  de  VOdyssée,  cesaurèlres  des  Pliénriens,  (|ui  frailleuis 
étaient  devi'iius  lidiculos  et  défrayaient  les  laz/is  et  les  pasquinades 
de  la  comédie  aiitiipie  ;  les  artistes  voulurent  tailler  dans  le  marbre 
les  Géant-;  i\[i  monde  des  Titans,  les  frèics  des  Titans,  des  Ilékaton- 
cbeires,  d(!s  Erinnyes,  desiNympbes  .Méliennes,  de  Typhon,  tous  ces 
représentants  des  éléments  indomptés  du  ebaos. 

Mais  lorsque  la  sculpture  clicrcba  des  modèles  pour  ces  Géants  du 
monde  des  Titans,  elle  ne  les  rcnconira  ni  dans  les  œuvres  anté- 
rieures des  sculpteurs,  ni  dans  les  poèmes  d'Hésiode,  puisqu'il  ne 
les  déciit  pas. 

Ce  fut  alors  ijul'  la  figure  de  Typbon,  décrite  par  Hésiode,  illus- 
trée par  E.vcbyle.  reproduilo  jiar  les  peintres  sur  vases,  s'olTril  à  la 
pensée  des  arlistes.  Il  était  tout  naturel  de  représonler  les  Géants 
du  monde  des  Titans  sous  les  traits  de  Typbon,  puisqu'il  est  leur 
frère  cadet. 

C'est  ainsi  que,  dès  la  fin  du  iv"  siècle  avant  notre  ère,  nous  ren- 
controns à  Priène,  dans  le  temple  d'Alhéna  Polias,  un  bas-relief  re- 
présentant des  Géants  ailés  et  à  jambes  de  serpents,  qu'il  n'est  [dus 
possible  de  discerner  de  leur  frère  Typbon.  L'art  se  cbargea  ensuite 
de  varier  ces  formes  fondamentales,  en  créant  des  êtres  tantôt  ailes 
et  h  jambes  humaines,  tantôt  à  jambes  de  serpents  mais  sans  ailes, 
et  en  intercalint  ici  et  là,  comme  un  souvenir  du  vieux  monde 
d'Homère,  un  géant  à  forme  humaine,  dont  la  beauté  classique  met- 
tait en  relief  la  monstruosité  des  autres. 

Dès  lors  cette  tradition  des  Géants  à  jambes  de  serpents  se  conti- 
nua à  travers  les  âges,  et  l'idée  de  la  procbe  parenté  de  Typbon  et 
des  Géants  devint  telle  que  dans  les  poètes  du  m"  siècle  la  distinc- 
tion entre  ces  deux  créations  n'existe  plus.  Dans  Callimaque,  par 
exemple  {Hymne  à  Délos,  V,  143),  Typbon  est  confondu  avec  Hria- 
reus,  cl  11'  poète  nous  dit  que,  sous  l'Etna,  lorsque  le  (îéanl  Briareus 
se  retourne  sur  l'autre  omoplate,  le  feu  s'échappe  du  cratère  du  volcan 
avec  le  grondement  du  tonnerre.  Ce  passage  contient  deux  confu- 
sions. En  effet,  d'après  Hésiode,  c'est  Typbon  qui  est  enfoui  sous 
PEtna  ;  de  plus,  dans  la   Théogonie,  Briareus  n'est  pas  un  Géant, 


2Cft  REVUE    AHCHÉOLOGIQUE. 

ni3i>  un  Hi'katonchcirc.  C'est  qiK'  les  po(Mos  dn  la  d^cadenre  n'y  ir- 
gar.lrnl  plus  do  si  prt''s ;  pour  iMix  If  Titan  Typhon,  riI<"'k)lonrlu'irc 
Biiareus,  k  (îr.int  Kncéladc,  se  rônfondciii  d  ins  uiicsiiilt'  ligure  do 
pèanl  au(|uol  ils  donnent  indilToroniinciii  l'un  nu  r.iulir  de  r.  s  trois 
noms,  mais  qui  por-onnifio  les  secmissos  et  les  éruplKMis  do  rKlna. 

Comnie  on  lo  voit,  la  ODnfusion  qui  sVsl  fnito  dans  1rs  ar:ssuil  une 
marche  paralh'-ie  d.uis  la  poésie.  M.iis  on  ooiuprond  (pii'  do?  que  les 
Géants  ont  révolu  les  niénios  formes  monstrueuses  (|ue  les  Titans, 
dès  (]u'ils  sont  doveiius  leurs  hvres  par  li  forme,  ds  ont  cess»''  de  re- 
présenter los  (]éanls  ancôtres  des  hommes  du  vieil  Homère.  El  lors- 
qu'on se  promène  aujourd'hui  dans  la  salle  assyrienne  du  musée  de 
Horlin,  lorsqu'on  voit  se  dèioulerà  ses  pieds  dans  la  frise  de  Por- 
gamc  cctlo  lutte  cosmogonique,  ce  mélange  de  corps  monstrueux, 
véritables  Calibans  du  uionde  nntédiluvien,  qui  rampent,  volent  et 
courent  h  la  fois,  ces  amas  d'êtres  dilTormes,  traversés  ici  et  là  par 
l'apparition  de  quelque  divinité  toute  rayonnante  de  jeunesse  et  de 
beauté,  on  comprt.'nd  que  les  artistes  de  Pergame  n'ont  pas  voulu 
représenter,  comme  au  temps  archaïque,  le  combat  des  dieux  et  dos 
hommes  révoltés  contre  eux,  mais  la  lutte  des  divinités  cr  des  géants 
du  monde  dos  Titans  d'Hésiode,  la  victoire  des  lois  civilisatrices  sur 
les  éléments  en  fusion  dans  l'énorme  creuset  du  chaos  '. 

Il  résulte  donc  de  celte  étude  un  fait  certain,  c'est  (|ue,  par  un 
phénomène  fréquent,  la  chose  a  changé  bien  que  l'étiquelto  soit 
reslie  la  même.  Les  artistes  d'Euménès  II  appelaient  leur  œuvre  la 
Gigantomachie,  et  c'est  aussi  le  nom  que  lui  donne  Ampélius  ;  mais 
ce  ijui  llottail  devant  l'imagination  des  sculpteurs  de  Pergame,  lors- 
qu'ils travaillaient  à  Tautei  de  Zeus,  c'était  un  souvenir  inconscient 
peut-être  delà  Titanomncliie  d'Hésiode,  c'était  la  légende  lliéogoni- 
que  plutôt  que  la  tradition  épi(iue. 

Si  j'insiste  sur  cette  dilTércnce,  c'est  qu'cHe  est  de  la  plus  haute 
valeur  pour  la  compréhension  dos  œuvres  découvertes  à  Pergame 
récemment,  et,  en  général,  de  toutes  colles  qu'on  connaissait  déjà  et 
qui  se  rattachent  à  celte  école  et  à  ce  thème  favori.  En  effet,  je  suis 
presque  certain  qu'à  Pergamo  môme  los  deux  traditions,  l'une  épi- 

1.  M.  li.  Minlicl  a  eu  comme  une  intuition  il.'  ce  f;iil,  lorsiuM  a  dit,  on  parlant 
des  p»iants  de  Pcrgnme  :  ■<  Ces  [)ersonnagcs  mullifornies  pcissôdcnt,  coucentrécs  en 
eux,  tout.sliR  puissance»  que  la  nature  nous  montre  dispcrsiVs  dans  rnnivors.  » 
(i:,  Michel,  les  Muséet  de  Uertin;  Hevue  des  Deux  Mondes,  15  ftivricr  18SÎ, 
p.  012). 


i.K  r.vocoo.N  i:t  li:  nnoci'ic  d'atiikna.  2G7 

que  «'tvoniuî  (ril()iii(''n',  l'-iiilro  cnsino!,a)ni(iii(;  (H  s'iiispiranl  d'Hé- 
siode, ont  exislé,  coiiimc  dcnix  (''clios  paiiillclcs  cl  lointains,  et  cela  à 
cinquante  années  sculciiicnt  d'intci  vallc.  On  sait  qiu!  les  Géants 
d'Homère  n'ont  |)as  été  seulenu^nl  représentés  dans  l'ait  coniiiie  des 
liéros  armés  de  lanees  et  de  bouiliers,  mais  aussi  comme  des  êtres 
sauvages  ù  demi  nus,  errant  les  clieveuxépars,  les  épaules  couvertes 
d'une  peau  de  lion  on  di;  panthère,  et  armés  d'aiiji'cs  cl  de  roclicrs 
énormes. 

Dans  l'art  et  dans  la  poésie,  cette  conception  se  trouve  répandue 
et  vuli(aiisèe  depuis  l'époriue  de  Flalon'.  11  est  évident  qu'elle  se 
ratlaclie  aux  légendes  liomèriques. 

Ce  sont  les  récits  de  VOdyssée  sur  les  Géants  et  les  Cyclopes  qui 
ont  fait  naître  cette  seconde  forme  des  Géanls  d'Homère. 

Dans  ï'OdijsHi'e,  Eurymédon,  parlant  de. ses  ancêtres,  les  appelle 
déjà  :  la  race  sauvage  des  Géants 2.  Mais  c'est  très  probablement 
sous  cette  forme  qu'ont  été  représentés  les  Géants  dans  un  monu- 
ment érigé  sous  Altale  1^'^  tandis  qu'une  génération  plus  tard,  sous 
Euménôs  H  *,  les  Géants  onl  la  forme  monstrueuse  que  nous  connais- 
sons par  la  frise  de  Pergame.  Il  faut  donc  bien  que  ces  formes  dif- 
férentes qui  ajjparaissent  à  cinquante  années  d'intervalle  environ 
représentent  des  traditions  dilïérenles. 

Le  monument  érigé  sur  l'agora  de  Pergame  nous  est  connu  d'a- 
bord par  un  passage  de  Pline,  dont  voici  la  traduction  :  «  Plusieurs 
artistes  ont  représenté  les  combats  (prœUa)  d'Attale  et  d'Euméncs 
contre  les  Gaulois.  Ce  sont  Isigonos,  Phyromachos,  Stratonikos  et 
Antigonos,  qui  écrivit  aussi  des  livres  sur  son  art.  »  Comme  ces  ar- 
tistes appartiennent  au  siècle  d'Attale  I",  il  est  clair  que  cet  Eume- 
nès  dont  il  est  ici  question  ne  peut  pas  ôlre  Euménès  II,  mais  Eu- 
ménès  1",  pré  lécesseur  d'Attale  1°'. 

Il  résulie  de  dillérentes  inscriptions  trouvées  à  Pergame  en  1881 
et  (jui  appartiennent  à  un  piédestal  de  neuf  mètres  de  long  (dont  les 
dimensions  étaient  p.nit-èlre  plus  considérables  eneore),  qu'il  y  avait 
à  Pergame  un  monument  représentant  non  scule;iient  les  combats 
d'Euméncs  I",  mais  aussi  tous  ceux  d'Attale  I"  contre  Prusias,  An- 


1.  Voyez  Platon,  Sophistn^p.  246,  A. 

2.  O'/yssée,  ch.  VII,  v.  206  :  xal  aYpia  9Ù).a  riY^"'"""^- 

3.  Attale  !'='•  répnait  à  Pergame  de  2;il  ;i  197  avant  notre  ère.  Il  fit  ériger  le  mo- 
Dumeut  en  souvenir  de  sa  victoire  sur  les  Gaulois  un  peu  avant  l'an  200. 

U.  Euménôs  li  fut  roi  de  Pergame  de  197  à  159  avant  J.-C. 


2G8  RKVUF.   ARCUKOLOGIQUF.. 

tiochos  Hit'Tax  et  les  Gaulois.  Co  piiMlt^tal  portait  des  statues  d'ai- 
rain dont  on  a  pu  reeonn  Itre  lies  tnces,  re  iiui  d'ailleurs  est  d'ac- 
cord avec  le  fait  (lue  Pline  parle  des  sculpteurs  d'Attale  I''  dans  son 
livre  traitant  des  artistes  (jui  ont  travaillé  l'airain. 

Ce  monument  remonte  donc  h  Atlale  1"  et  il  est  scpan-  de  cin- 
quante ans  environ  de  la  création  de  l'autel  de  Zens  cl  do  h  g'^-'^"- 
lomacliie  qui  l'ornait.  En  eiïel,  on  sait  qu'avant  l'an  200  Atlale  T' 
avait  envoyé  à  .Athènes  un  groupe  de  (10  :\  80  statues,  représentant 
quatre  grands  sujets  :  le  eouilj;fl  des  Dieux  cciiire  l-'s  fiéanls  et  le 
triomphe  d'.\ttalc  1"  sur  les  Gaulois,  la  reiicniiire  des  Amazones 
avec  les  Alhéiiiens  et  la  victoire  qu'ils  rempni  léreut  sur  les  Perses  à 
Muathon.  Nous  savons  encore  par  Pausauias  (jue  ces  ligures  avaient 
trois  pieds  de  haut,  et  Pluiarquc  {Anton.,  00)  nous  rapporte  qu'une 
des  statues  de  cette  gigaiMomachie,  celle  de  Dionysos,  avait  été  jetée 
par  un  orage  dans  le  théâtre  qui  se  trouvait  au  pied  du  mur  méri- 
dional de  l'Acropole.  D'après  ce  rfcit,  ce  monument,  ce  inést'iil  royal 
d'Attale  1",  aurait  donc  été  placé  au  sud  de  l'acropole  d'Athènes. 

Tous  CCS  faits  ont  attiré  ralteutiou  des  archéologues  sur  une  sta- 
tue d'Amazone  et  sur  un  ensemble  de  statues  (lui  représentent  des 
guerriers  presque  nus,  à  l'asi-ect  farouciie  et  sauvage.  Ces  difTérentes 
œuvres  ont  été  étudiée-  par  Drunn,  qui  lit  la  remarque  ([u'elles  dé- 
notaient toutes  le  même  style  et  qu'elles  avaient  toutes  la  dimension 
indiquée  par  Pausanias. 

D'aju  es  Hiunn,  t(»utes  ces  statues  disséminées  dans  divers  musées, 
au  Vatican,  a  Naples,  à  Paris,  à  Venise,  à  Aix,  seraient  des  répli- 
ques de  ce  grand  monument  érigé  sous  .\lta!e  I''^  Cette  hypotiiése  a 
été  admise  par  les  principaux  archéologues  d'Kurope'.  .Mais  au  mi- 
li.'U  de  toutes  ces  ligures  il  en  est  une,  celle  de  Naples 2,  (jui  repré- 
sente très  certainement  un  Géant  étendu  sur  le  dos.  Ses  cheveux 
ahoudaiits,  épais,  sa  bai be  négligée  et,  détail  caiactéristiiiue,  les 
poijs  qu'il  a  sous  les  aisselles  et  qui  ne  se  retrouvent  dans  la  sculp- 
ture grecque  (jue  chez  les  natures  grossières,  chez  les  Satyres  et  les 
Faunes,  eiilin  la  peau  de  lion  qui  couvre  un  do  ses  bras,  indiijuent 
qu'il  ne  s'agit  pas  d'un  Gaulois,  comme  ou  l'a  cru,  mais  il'iin  Géant, 
seulement  il  n'a  pas  de  jambes  de' serpents. 

Mjis  je  ne  crois  pas  que  dans  ce  monument  isolé,  composé  do 


1.  Voyez  Brunn,  Arrh/oloy.  Zeitung  von  IfOr).  Anz  .S.  05,  f.  vprpl.  dass  1S09. 
S.  1T  (T.  FriL'dench»,  Ilaiislemc  lur^Gtsch.  der  (iriec/i.  Plustili,  S.  322,  (T.  UrMil., 
t'Aeroi-oif  d  Ancnet,  II,  p.  212. 

3.  Voypi  Monat.  del  Ind.,  XX f,  8. 


lf:  laocoon  i:t  lk  groupe  d'atiikma.  2G9 

sl.iliies  à  formes  humaines,  de  dieux,  d'Amazones,  de  Perses,  de 
Gaulois  el  de  (ié.inls,  il  y  ail  eu  [dace  pour  des  (itîures  de  Géanls  à 
jambes  de  seipciits. 

Il  est  donc  piolialde  queees  (îrants  avaient  tous  la  forme  humaine 
comme  h'  seul  exemplaire  (pie  nous  en  possédons,  el,  dans  ce  cas,  ce 
ipii  a  (!ù  inspirer  les  arlisles  d'Atlale  I'%  c'est  la  Iradilion  êpiipie. 
Ce  .pi'ils  ont  voulu  repiésenlcr,  c'est  une  trinilé  de  triomphes,  ana- 
lo^'U(^  à  celle  dont  j'ai  jiarlù  au  comnienremeiit  de  ce  chapitre.  Seu- 
lement, tandis  ([ue  la  trinilé  créée  par  Phidias,  c'est-à-dire  la  Gii.';in- 
lomachie,  la  lulte  des  Centaures  et  des  Lapitlies,  celle  des  Athéniens 
et  des  Amazones,  esl  absolument  légendaire  et  mythologi(pie,  les  ar- 
tistes d'Altale  I"  y  ont  inli'oduit  un  élément  historiijue  et  une  allu- 
sion Halleuse  pour  leur  roi.  En  elTet,  ils  ont  rendu  leurs  Géants 
aussi  semblables  .juc  possible  a  ces  terribles  Gaulois qu'Attalc  I"  ve- 
nait de  vaincre,  et  la  preuve,  c'est  que  le  seul  exemplaire  que  nous 
en  connaissons,  le  Géant  de  Naples,  a  longtemps  été  pris  pour  un 
Gaulois. 

Leur  trinilé  se  décompose  donc  autrement  que  celle  de  Phidias,  et 
le  groupe  de^tiné  ù  orner  la  place  publique  d'Alhènes  semblait  diri; 
sans  doute  aux  spectateurs  :  a  0  Athéniens,  vous  avez  vaincu  les 
Perses  à  Marathon,  comme  vos  ancêtres  conduits  par  le  héros  Thé- 
sée ont  triomphé  des  Amazones,  mais  Allale  1"  vient  d'anéantir  les 
hoi'des  des  Gaulois,  comme  ses  aiicélres,  les  dieux  de  l'Olympe,  ont 
jadis  fouilroyé  la  race  sauvage  des  Géant;  !  » 

Si  je  ne  crains  pas  d'attirer  l'attention  des  archéologues  sur  celte 
hypothèse  nouvelle,  c'est  que  je  me  demande  quel  rapport  aurait  pu 
exister  entre  la  lutte  des  dieux  sur  des  êtres  monstrueux  à  jambes 
de  serfients  et  h  victoire  d'Atlale  l-^'sur  les  Gaulois,  tandis  que  si  le 
groupe  a  été  inspiré  par  la  tradition  épique,  déjà  suivie  par  Phidias, 
l'allusion  aux  faits  historiques  de  l'époque  devient  évidente. 

Au  point  de  vue  esthétique,  l'harmonie  môme  de  la  composition 
et  cette  syniéti  ie  tant  aimée  des  artistes  grecs  nous  indiquent  aussi 
que  les  formes  élégantes  des  Amazones  ont  dû  correspondre  dans  le 
groupe  aux  membres  efféminés  des  Perses,  comme  les  corps  sauvages 
des  Géants  à  ceux  des  Gaulois  entièrement  nus.  Comme  on  le  voit, 
en  attribuant  l'inspiration  du  groupe  d'Atlale  1"  à  la  légende  épique, 
tout  dcNienl  clair  el  l'on  comprend  les  rapports  qui  reliaient  le 
groupe  à  l'histoire  du  temps.  Or  celle  relation  a  dû  exisler,  à  moins 
d'admettre,  comme  on  le  fait  trop  souvent,  que  les  monuments  de 
l'antiquité  n'ont  qu'un  but  esthétique,  sans  aucune  autre  signification 
plus  élevée. 


57(1  RF.VL'P.   AnClIKOLOGlOUK. 

D'ailleurs  on  compreml  (nn'  los  sciilphnirs  criin  groupe  oinanl 
une  place  pulili.|ue,  ileslini^  h  rappeler  un  haut  f.iil  d'iiruies  t-l  à 
satisfaire  l'orgueil  d'un  roi  [)uisNanl,  se  soient  inspirés  de  la  tradi- 
tion lioniériiiue,  (|u'ils  aient  puisé  dans  le  nii»iule  liéroïijue  des  allu- 
sions aux  exploits  d'Attale  1".  Mais  à  ciiKiunntc  ans  do  \h  la  lAchc 
des  sciiliileursde  la  frise  ijui  décorail  l'aul-l  de  Zeus,  à  Perginie,  a 
dil  être  bien  différente.  Ce  qu'ils  voulaient  glorilier  ce  n'était  pas  un 
roi.  mais  le  plus  puissant  des  dieux,  Zeus,  et  sa  lille  Alliéiia.  Ils  ont 
donc  dû  s'inspirer  de  la  légende  liiératii|ue,  siceidolale,  lliéoiîoni- 
que;  ce  qu'ils  ont  voulu  représenter  au  seuil  du  saïutuaire,  ce  n'é- 
tait pas  celte  lutte  des  dieux  et  des  gémis  à  formes  humaines,  telle 
ijue  l'a  conçue  Homère,  c'était  ravénemcnt  des  divinités  nouvelles 
toutes  rayonnantes  de  beauté,  le  triomphe  des  dieux  df  l'Olympe, 
or.lonnateurs  des  lois  universelles,  sur  l'ancien  mon  le  moii.^lrueux 
des  Titans  et  des  (léaiits  d'Hésiode. 

C'est  ainsi  (jnc  de  ces  deux  Iraditionô  d'IIomérc  et  d'Hésiode, 
l'uno  épicjue,  l'autre  théogonique,  on  vil  naître  à  l'ergame,  sous  la 
main  des  aitislts  grec>,  deux  gigaiilomacliies  difféienles,  l'une  d'ai- 
raiîi  et  se  dressant  sur  la  voie  jubliiiue  en  l'honneur  des  rois  triom- 
phants, l'anire  de  marbre  cl  .iécorant  de  scènes  grandioses  l'autel 
(les  deux  ilivinités  souveraine^,  coniine  un  pieux  hommage  rendu 
aux  dieux  dispensateurs  de  l'harmonie  universelle! 

ADIUt.N    WAG.NON. 
(La  fin  prochainement.) 


LES 

ROIS    DE    TELLO 


ET  LA 


PÉRIODE  archaïque    de    L'ART   CUALDÉEN 


I 


En  communiquant,  l'an  ikrnier,  ?i  i'Aca<]êmie  une  lettre  (le  M.  Je 
Sarzt'C,  j'y  ai  joint  qui-lqucs  prcmiries  observations  sur  la  sculpture 
clialdéenne,  celartqui,  hier  encore,  était  un  art  perdu,  et  que  les 
fouilles  de  Tcllo  ont  rendu  à  la  science '.Dès ma  pi'ccédente  commu- 
nication, j'avais  établi  que  les  remarquables  statues  de  Goudéa  re- 
présentaient seulement  la  période  moyenne  de  la  sculpture  en 
Chaldée.  Je  signalais,  à  côté  d'elles,  toute  une  série  de  fragments 
qui  ne  sont  pas  d'une  moindre  importance;  car  ils  apparliennenl  à 
plusieurs  époques  successives  de  l'art  cbaldéen,  et  permettent  déjà 
d'en  mesurer  le  développement  hisloriiiue.  J'avais  indiqué  surtout 
qu'un  certain  nombre  de  débris  offraient  ce  rare  intérêt  de  nous 
faire  remonter  jusqu'à  l'époque  archaïque  et  même  jusqu'aux  pre- 
miers essais  d'un  art  qui  lui-môme  occupe  une  place  reculée  dans 
l'histoire  de  Thumanité. 

Ces  premières  inductions,  que  j'avais  tirées  uniquement  du  stylo 

1.  La  prcseiite  notice  a  i5té  lac  à  l'Académie,  dans  la  séance  du  11  août  1882  : 
pour  la  communicatioi  précédente,  voir  la  Revue  de  novembre  18S!.  Je  signalerai 
aussi  deux  articles  publiés  récemment  sur  les  découvertes  de  M,  de  Sarrec,  l'un  de 
mon  savant  ami  M.  Georges  Pcrrot,  dans  la  Revue  des  Deux  Mondes  du  i«r  octo- 
bre 1882,  l'autre  de  M.  E.  Ledrain,  dans  le  journal  l'At-t  du  mois  de  novembre  de 
la  même  année. 


278  HF.VLE    AHCHÉOL0(iIQL'K. 

des  sculptures,  se  trouvcnl  ronfirmcos  aujourd'hui  pai  uno  suiiiMlL' 
fnils  pnVis,  que  j'ai  dérouvcrls  en  êluiliml  cl  en  classant,  pour  nus 
catalogues,  les  monuments  archaitiucs  île  Tcllo. 

l'n  petit  fragment  de  bas-relief  m'avait  frappr  toutd'abord,  parson 
rarai it^re  très  anliqueet parson  styleot  ienlal  trrs  |irononc(''(pl.  WII). 
La  sculpture,  biisée  en  partie,  laisse  voir  la  moitié  d'un  aii;le  de 
face,  aux  ailes éployées,  dont  la  serre  repose  sur  la  croupe  d'un  lion 
passant.  Ces  figures,  découpées  trc'-s  sommairemcnl  sur  le  fond,  sont 
d'une  forme  lourde,  mais  originale  et  déjà  puiss.inle,  (|iiidilTcrc  sen- 
siblement des  types  correspondants  créés  par  l'art  égyptien.  Les 
règles  de  la  symétrie  montrent  «lUc  la  composilion  complète 
devait  figurer,  sous  la  seconde  serre,  un  autre  animal,  sans  doute 
aussi  un  lion,  qui  marcliîiil  en  sens  inverse  du  premier.  On  re>tilue 
ainsi  l'ima-'O  symltoliiiue  de  l'aigle  qui  s'appuie  sur  la  croupe  di! 
deux  lions.  Il  faut  observer  aussi,  à  gauclie  de  la  repiéseiitation, 
l'angle  supérieur  d'une  mouluresaillanle,  qui,  selon  l'usage  pres- 
que constant  des  sculpteurs  elialdéens,  devait  encadrer  la  tablette 
de  pierre  grise  sur  biquelle  senléve  le  petit  bas-relief. 

Dans  le  champ,  fort  étroit,  que  limite  cet  encadrement,  j'avais 
entrevu  qucli|ues  trai!s  épars,  recouverts  dune  couche  d'efflores- 
cences  calcaires,  queje  lis  enlever  avec  soin,  pour  examiner  le  mo- 
nument de  plus  près.  C'étaienl  quatre  lignes  ou  cases  de  caractères 
chaldéens,  tracés  rudement  à  la  pointe,  quelque  peu  dérangés  par 
le  voisinage  des  figures,  mai» cependant  reconnaissables.  Leur  situa- 
lion  à  l'angle  supérieur  de  droite  de  la  tablette  était  d'auianl  plus 
di;-'nc  d'attention,  qu'elle  marquait  nécessairement,  selon  la  direc- 
tion ordinaire  de  l'écriture  chaldéennc,  le  début  d'une  inscription. 

Une  [iremière  case  contient  deux  caractères  précédés  de  l'étoile 
à  huit  rayons  ;  puis  vient,  dans  un  deuxième  compartiment,  l'idéo- 
gramine  complexe  (jui,  en  clialdéen  comme  en  as>yrien,  signifie 
roi.  Dans  la  troisiémi;  case,  on  trouve  quel(|ues  traits  plus  difficiles 
à  déîirouiller  ;  mais  je  finis  par  y  reconnaître  avec  certitude  les 
trois  èlémenls  constitutifs  du  nom  de  ville  qui  répond  aux  ruines 
de  Tello  {Sirylnlla,  Sirpouiia  ou  Sirtella]  ;  la  forme  concise  de  l'écri- 
ture priiuitive  lesaseulement  privés tles  signes  complémentaires (jui 
les  suivent  dan?  les  inscriptions  d'une  époque  moins  ancienne.  Li 
quatiiérne  ligne  est  incomidéle  :  on  n'y  voit  plus  que  deux  signes, 
qui  me  parurent  être,  bien  (lue  pi  icés  un  [>eu  en  désordre,  ceux 
qui,  réunis,  cxj  liment  l'idée  de ///s. 

L'espérance  d'avoir  retrouvé  une  sculpture  datée  par  le  nom  d'un 
Irts  ancien  roi  de  Tello  me  fit  porter  ui«  >  recherches  i-ur  deux  au- 


LKS   ROIS    DE   TELLO. 


273 


1res  inscriptions,  où  j'avais  reconnu  le  munie  type  d'écriture  linéaire 
et  primitive.  Je  constatai,  avec  une  vive  satisfaction,  qu'elles  com- 
menç.iienl  toutes  les  deux  p.ir  le  nom  (jue  j'avais  prrcédenimi^nt 
décoiiVL'it,  suivi  du  môme  titre  ro\al,  avec  le  même  signe  de  lilia- 
lion,  mais  cette  fois  avec  un  sjcoiul  nom  propre,  indiquant,  seloa 
toute  prohahililé,  le  père  de  ce  loi. 

Voici  ces  noms  "l  ces  litres,  tels  (|u'ils  sont  dessinés  sur  les  monu- 
ments : 


A 

3 

ï 

1 

^    ' 

i 

Y 

> 

u 

!  1 
1 

\ 

-> 

f 

-  A 

Je  n'ai  pas  la  prétention  de  décliiiïrer  les  inscriptions  chaldéennes 
et  parliculièreiiienl  les  noms  propres,  dont  la  lecture  et  la  pronon- 
ciation sont  encore  si  llotlantes,  de  l'aveu  même  des  savants  spé- 
ciaux. Mais,  si  riiiterprttatiou  des  vieux  textes  clialdéens  e.4  encore 
sujette  à  beaucoup  de  difticullés,  la  réalité  graphique  de  ces  noms 
royaux  n'en  reste  pas  moins  imlisculable.  Il  y  a  là  un  fond  solide, 
qui  permet  il  Tarcliéologue  et  à  l'historien  de  con>lruire  déjà  quel- 
ques assises,  môme  en  se  plaçant  en  dehors  de  toute  discussion 
philologique. 

Je  me  suis  d'ailleurs  empressé  de  soumettre  ces  faits  à  notre  savant 
confrère  xM.  Opperl,  qui  reconnaît  avec  moi  la  haute  antiquité  de 
ces  monuments  et  la  parfaite  certitude  du  titre  de  «  roi  de  Sirtella  », 
titre  nouveau  dans  les  monuments  de  cette  ville  et  qui  prouve,  con- 
trairement à  l'oitinion  jusqu'iei  répandue,  qu'elle  n'a  pas  toujours 
eu  pour  chefs  de  simples  gouverneurs  ou  patési.  Pour  le  second 
nom,  celui  du  père,  M.  Oppert  adopte  la  lecture  Ilaldou.  Dans  le 
premier,  il  reconnaît  un  no;u  composé  avec  l'iiléugramme  de  la 
déesse  Nina  efav.'C  le  signe  qui  se  lit  our  et  aussi  lik.  Ce  serait  donc 
Nina-our  ou  Nina-lik;  mais,  pour  un  motif  dont  nous  aurons  plus 
loin  l'explication,  il  préfère  renverser  ces  deux  éléments,  ce  qui 
donnerait  Our-nina  ou  Lik-nina. 

X  IV.  —  18  • 


274  nEVU£  AHCiibULoui^iii::. 

I/uiîi'  lie  CCS  deux  inscriplioiis  coiiUMuporaitJûs  du  polil  bas-rolief 
de  l'aigle  eldi  lion  osi  une  pla(|iie  iialiirelle  de  pii-rre  jjrise,  assez 
friable,  sur  laquelle  on  a  d'abord  Ir.icé  cin(|  lij;iie>  parallèles, Cdiniuc 
lorsi|ue  iMUâ  réglons  une  feuille  de  papier.  Dans  les  iniervalU-s  un 
a  commencé  à  graver,  1res  grossir-remenl,  se()l  eases  do  caracières 
cbnldêens,  (jui  n'ooiupenhiue  le  premier  inlerlij^'iie  el  leromnience- 
nient  du  second,  les  autres  reslanl  vides.  Voici  la  Iraduclion  i]iiC 
M.  Opperl  a  bien  voulu  me  donner  de  ce  pelil  texte,  dont  je  lui 
avais  adressé  une  copie: 

<(  Our-nina,  roide  Sirlella.  (ils  de  Haldou,  ce  séjour  lieureux  a 
fait » 

La  septième  case  paraît  renfermer  le  mot  «  brique  »,  appartenant 
sans  doute  à  la  partie  de  l'insciiplion  (jui  est  restée  inachevée,  la 
mauvaise  qualité  de  la  pierre  n'ayant  pas  permis,  comme  on  peut  le 
supposer,  de  continuer  le  travail. 

La  secon  le  inscription  ilu  même  roi  est  beaucoup  plus  longue.  Elle 
t'ompiend  43  cases  d'écriture  cbaldéenne.  C'est  une  plaque  natu- 
relle de  calcaire  bl.inc,  assez  dure,  cassée  sur  deux  de  ses  bonis,  île 
manière  à  présenter  la  forme  approximative  d'un  triangle  ou  plutôt 
d'un  segment  de  cercle.  On  y  reconnaît  une  longue  liste  de  fonda- 
tions, attribuées  au  roi  dont  elle  porte  le  nom.  L'écriture,  tracée 
superlicicllemenl  à  la  pointe,  avec  une  irrégularité  toute  primitive, 
eslcependanl  large  et  bien  visible.  Cette  liste  très  ancienne  sera  un 
point  de  départ  et  un  terme  de  comparai^on  des  plus  utiles,  pour 
étudier  les  constructions  et  les  monuments  do  diverse  sorte,  élevés 
successivement  sur  le  sol  de  l'antique  cité  cbaldéenne  dont  M.  de 
Sarzec  a  fouillé  les  ruines.  Je  co:npte  que  M.  Opperl  nous  en  adres- 
sera prochainement  la  iraduclion. 


II 

Ces  premiers  résultats,  dtjà  importants,  devaient  être  bientôt  con- 
firmés et  développés  [<ar  d'autres  faits  du  môme  genre.  La  collection 
formée  par  M.  de  Sarzec  comprend  encoie  [dusieurs  monuments 
arcliai(|ues,  apparleniut^  une  épo(jue  un  peu  moins  ancienne  que 
les  précédents.  Je  veux  parler  des  fragments  d'une  grande  stèle 
opislliographe  de  [lierre  biaiit  lie,  que  j'ai  déj;\  sij^nalée  à  ralleiition 
desr«rrhéologues.  Elle  représente,  en  bas-nlief,  de  sini>ties  scènes  de 
guerre  et  de  carnage,  qui  alternent  avec  l'inscription  tracée  sur  le 
fond,  à  peu  prés  comme  les  gravures  et  le  texte  de  nos  livres  illus- 


LES    nOlS   DE   TELLO.  275 

liés.  II  était  intéressant  de  recherolier  si  ces  curieux  débris  por- 
taient aussi  la  mention  des  rois  de  SirleiJa. 

La  plus  extraordinaire  de  ces  représenlalions  Cit  assurément 
celle  où  l'on  voit  une  troupe  de  vautours  (|iii  emportent  dan.,  leur 
vol  des  tôtes  coupées  et  d'autres  débris  liumains.  Au-des,»ous  de 
la  partie  sculptée,  commence  un  paragraphe  d'inscription,  malheu- 
reusement interrompu  par  les  cassures  de  la  pierre.  Le  revers  du 
même  frajjment  n'a  pas  de  sculptures  :  il  est  rempli  tout  entier  par 
sept  ratifiées  de  coiiipaitimcnts  coiitcnmt  des  caractères  chaMéens 
un  peu  usés  par  le  flottement,  mais  encore  déchilTrahles.  Ijien  (jue 
l'inscription,  coupée  par  les  deux  bords  du  fragment,  n'oiïre  plus 
un  sens  suivi,  je  fus  cependant  assez  heureux  [)our  y  reconnaître  le 
titre  de  «  roi  de  Siitella  n  i)lusiiurs  fois  répété  et  chaque  fois  pré- 
cédé d'un  nom  dillVrent. 

L'un  de  ces  noms  loyaux  est  mèine  formé,  comme  relui  (|ue  nous 
avons  étuilié  précédemment,  des  deux  éléments  Aina  et  Our{ouLik); 
seulement  l'ordre  des  signes  est  renversé.  Comme  les  caractères, 
dans  ces  insciiptions  arcliiïi|ues,  ne  sont  pas  jdacés  ri!,'oureuse- 
menl  l'un  au-ilessous  de  l'autre,  mais  présentent  un  mélange  assez 
arbitraire  de  l'ordre  vertical  et  de  l'ordre  horizontal,  tout  porte  à 
croire  qu'il  y  a  là  une  simple  inversion,  qui  ne  doit  pas  empêcher 
de  reconnaître  dans  les  deux  variantes  le  nom  d'un  seul  et  même 
roi.  C'est  aussi  l'opinion  de  M.Oppert,  (lui  s'est  appuyé  sur  ce  fait 
pour  lire  déjà  plus  haut:  Our-yina  '. 


YY 


JLI 


W 

V 


1 1^1 1 


Ce  qui  est  très  important,  c'est  que  ce  roi,  nommé  déjà  sur  le 


1.  M.  Oppcrt  cite  à  ce  propos  le  Adrahoiis  du  dëlugp,  qui  est  devenu  Hasixju- 
Adrn,  d'où  le  grrc  ZtToôOpo;.  On  |)eiit  ajouter  (jnp.  dans  un  nom  <Ac'0/>Aorc,ladc?o- 
tion  pouvait  commander  d'écrire  en  lÊ.c  le  nom  de  la  diviuité. 


2l(j 


REVUE  ARCIIEOLOGIOUR. 


b.is-reliof,  de  laiglo  elilu  lion,  ol  ici  menlionnô  comme  le  père 
il'un  aune  roi  doiil  le  nom  oi"C;ii)e  proltalilemeiU  la  case  n"  1.  Ce 
nom  serait  forme  île  trois  signes,  dont  les  deux  derniers  se  lisent  : 
...KoitrGal.  Cependant  l'état  intompicl  de  la  piern-,  la  longueur  des 
liiincs  iiilerrompues,  doivent  donnir  lieu  à  quelipie  réserve;  il  n'est 
pas  iiiipos.'ible  ijui'  le  tiiie  royal  ^e  trouve  qurl(|uefuis  préctdé d'au- 
tres litris  et  de  qualifications  (jui  ne  seraient  pas  le  nom  même  du 
roi. 

Le  nii^ine  tcxie,  à  la  ligne  précédente,  contient 

/\  encore  un  autre  mol,  (jui  e->t  suivi  également  du 

/  j  A  titre  de  roi  de  Sirtella  ;   nous  donnons  ici  la  forme 

de  cet  autre  nom,  probaMenient  royal,  mais  avec 

les  mêmes  réseives  ()ue  pour  le  précédent. 

L'importance  de  ces  faits  pour  l'histoire  de  la 
Chnldé»!  et  jiour  la  clironologie  des  monumenis 
clialdcens  ne  saurait  échapper  même  aux  esinils 
les  plus  scejiliiiues.  Nous  apprenons  d'ahurd  que 
l'anliiiue  cité  qui  occupait  l'emplacement  de  Tello  formail,  à  u::c 
époque  1res  ancienne,  correspondant  aux  premieis  essais  de  l'art  eh,d- 
déen,  un  petit  Étal  indépendant,  gouverné  par  des  rois.  Ici,  comme 
en  d'autres  pays,  l'organisation  politique  des  peuples  sédentaires  n'a 
pas  commencé  par  de  vastes  agglomérations  d'hommes  et  par  de 
grands  empires,  mais  par  la  constilulion  de  cités  autonomes,  avec 
des  royautés  locales,  que  la  conquête  a  fondues  peu  à  peu  dans  des 
ro\aumes  plus  étendus.  On  ne  peut  plus  sous  ce  rapport  opposer  l'his- 
loiie  ancienne  de  l'Urienla  celle  de  l'Occident;  c'est  là  une  K>i  (lui 
tend  à  se  généraliser  et  à  devenir  commune  à  la  fornnlion  des  so- 
ciétés humaines. 

Pour  ce  qui  concerne  l'histoire  particulière  de  celle  cilé,  si  nous 
ne  pouvons  pas  garantir  ab-^olument  la  lecture  et  la  pronomialion 
des  noms  de  ses  anciens  rois,  nouj  sommes  pourtant  autorisés  à 
dresser  la  liste  généalogique  suivante: 

1"  Jliil-Dou,  ijui  ne  porte  pas  jusqu'ici  le  lilie  royal,  mais  qui, 
s'il  n'était  rui  lui-même,  eslau  moins  l'ancêtre  de  cette  dynastie; 

■j.^  (htr-ytna  (ou  toute  autre  lecture  du  même  nom),  roi  de  Sir- 
lella,  fil  ûcHalJJou; 
3°  .N.,  roi  de  Sirtella,  (ils  de  Our-Nina. 

I)ans  les  mé.nes  monuments,  nous  trouvons  aussi  deux  poinlslixes 
pour  l'élude  des  origines  de  lasculptiire  chaliléenne.  Kn  elTet  la  re- 
marquable stèle  q  .i  mentionne,  sur  l'un  de  ses  fragments  le  lils  de 
Dur- .Nina,  e»t  ccrtiincment  postérieure,  au  moins  d'une  généralion. 


i.rs  nois  DK  TiM.r.o.  277 

h  ccl  nncitm  roi,  cl  par  coiisrijuciil  au  pelil  his  relief  <lc  l'aigle  et  du 
lion,  (|ui  jioilo  son  nom  gravé.  Xous  avons  ainsi  une  (îtape  niaKiuéu 
dans  le  développcmcnl  de  rarcliaisnic  local.  Le  progrès  apporté  par 
le  Icnips  est  on  elTct  très  sensible,  quand  on  compare  les  deux  mo- 
numenls,  jiour  l'épigrapliie  aulanl  que  pour  la  sculpture.  Dans  le 
second,  les  caractères,  toujours  gravés  au  Irait,  sont  plus  fermes  et 
plus  profonds  (juc  dans  les  inscriptions  précédentes;  mais  ils  de- 
viennent courts  et  ramassés,  ce  ([ui  dénote  un  reste  de  timidité  dans 
la  main  du  graveur.  La  sculpture,  par  la  netteté  du  dessin,  par  la 
variété  des  altitudes,  par  le  mouvement  et  la  complexité  des  compo- 
sitions, dénote  égalemmt  un  art  plus  avancé.  Les  télés  des  guer- 
riers sculptés  au  revers  de  deux  des  fragments  de  la  même  stèle, 
dans  des  proportions  beaucoup  plus  fortes  que  les  autres  figures, 
olïrent  déjà  un  ty[te  nettement  déterminé,  au  nez  aquilin,  aux  sour- 
cils saillants,  aux  gros  yeux  pre:"(jup.  triangulaires,  aux  oreilles  re- 
montées et  d'un  dessin  liés  particulier.  Ce  type  periiicld'allribuer  à 
la  même  époque  archaïque  plusieurs  petites  tôles  de  pierre  calcaire, 
seulpiées  en  ronde  bosse,  qui  ne  sont  pas  au  nombre  des  fragments 
les  moins  intéressants  rapportés  par  M.  de  Sarzec. 


III 

Voici  maintenant  une  autre  série  de  faits,  qui  va  nous  permettre 
de  déterminer  encore  une  nouvelle  époque  dans  la  période  arclnï- 
que  de  l'histoire  monumentale  de  Tello.  Cette  époque,  il  est  vrai, 
ne  se  Iro  ive  représentée  jusiiu'ici  ijuc  par  des  inscriptions  et  non 
par  des  scul[)tures  ;  mais  ces  inscriptions  ont  un  sl\Ie  particulier  et 
mar(|uenl  un  progrés  de  la  technique,  (jui  a  dû,  parallèlement,  se 
réaliser  aussi  dans  l'ait. 

L'écriture  appartient  toujours  au  système  linéaire  de  l'époque 
précédente.  L'élément  cunéiforme,  introduit  sans  doute  par  l'habi- 
tiidc  d'écrire  sur  l'argile,  ne  s'y  montre  pas  encore,  bi.n  que  l'on 
en  pressente  la  prochaine  apparition  :  les  carai-téres,  larges  et  pro- 
fonds, sont  gravés  avec  une  sûreté  et  une  précision  antérieurement 
inconnues.  Il  faut  ajouter  que  les  matièivs  employées  ne  sont  plus 
le  calcaire  tendre,  clier  aux  graveurs  des  temps  primitifs,  mais 
des  roches  plus  résistantes.  Enliii,  dans  la  rédaction  môme  des  tex- 
tes, un  changement  grave  s'est  produit:  les  chefs  du  pays  ne  por- 
tent [dus  le  titre  royal,  mais  déjà  celui  dopatési  de  Sirlella. 

Ces  monuments  sont  des  blocs  naturels  ou  sommairement  dé- 


278  RF.VrR   AhCH^OLOGlOUE. 

gr">ssi«,  qui  rosçomMoni  boaucoup  nu\  pierrrs  de  sonil  qui  ont  6lê 
tiouviT!;  on  piMinl  nombre,  pnr  M.  di»  S.iizcc,  d.ms  les  fouilles  de 
Tollo.  Seulement,  nu  lieu  de  porler  un  Irou  si  rvnnl  de  cnpaudinc 
et  {ic'-lint^  à  recevoir  un  pivol  de  perle,  elles  sont  cnl.iillôes  sojgneu- 
si-nienl  d'une  enviti'-  plus  l;irp««et  comme  d'une  sorte  de  cuvclte.  On 
peut  croire  (ju'ils  servaient  de  supports  cl  de  pierres  de  f^n  lalion 
pour  soutenir  <)uelque.î  grands  récipients  A  panse  spbùroïdale. 

i.e  plus  curieux  île  ces  supports  est  d'albAlri!  dur  ;  on  lui  a  donné, 
par  la  taille,  une  forme  à  peu  près  liéiiiispliérique.  Autour  de  la 
cavité  dont  nous  venons  déparier,  ou  vitii  une  assez  longuein.'crip- 
ti'.n,  tracée  circulairemeni.  C'est  une  consécralion  au  dieu  Sin-Sah 
(ou  Pniisoukal),  si  souvent  menlioniiè  par  les  inscri[ilions  votives 
de  Tello  i-tijui  paraît  avoir  été  la  grande  divinité  locale.  Dans  le 
corps  de  l'inscription,  on  lit,  deux  fois  répété,  un  nom  (jUcM.  Oppert 
lu  £n-i4MNa-Z)oM,  deux  fois  suivi  du  litre  de  patési  de  Sirlella.  Ce 


3 

3 

1 

personnage  se  donne  en  outre  comme  le  fils  dt>  En-Té-Na,  qualifié 
cgalemenl  du  lilre  ticpaU'si  de  Sirlclla. 


LES  ROIS  Di:  Tiai.o. 


279 


r 


Voici,  du  reste,  la  trarluction  du  texte  complet,  telle  queM.  Opporl 
a  bien  voulu  la  faire,  sur  ma  copie  : 

«  A  Niiisati,  le  guerrier  du  dieu  Moulkil,  Fln-Anna-Dou,  patési 
«  dtî  Siriella,  dont  lecœur  de  Nina  se  souvient  (par  amour)  de  Nin- 
0  sali,  (ils  de  Kniéna,  le  palési  de  Sirt'lla,  (Kn  l'Iionnenr)  dcNinsah 
«  il  a  rèiahli  .1  sa  place  (antérieure)  le  temple  nouveau.  —  Puisque 
((  Kii-Anna-IJou  est  celui  (jui  a  rétabli  à  sa  place  ce  temple  en  faveur 
.(  (Il-  Nirisah,  son  dieu  étendra  sa  puissance  (ou  proté{,'e ses  jours),  d 
J'ai  signalé  encore  h  notre  savant  confrère  un  bloc 
A  naturel  de  diorite  noir,  ayant  servi  de  pierre  de  seuil, 

^—M  (\n\  porli'  le  nom  d'un  patcsi  de  Siitilla,  dont  la  pre- 
miéie  syllabe  se  lit  nam  et  la  dernière  »i,  le  caractère 
du  milieu  reslaiit  douteux.  Mais  ici  l'écriture  est 
déjà  composée  d'éléincnts  en  forme  de  clou  ou  de  coin, 
ce  qui  indique  une  6pO(|ue  moins  ancienne. 

Pour  revenir  aux  deux  inscriptions    précéilenles, 

.'elles  nous  donnent  un  renseignement  historique  d'une 

grande  valeui-:  la  révolution  qui  a  déiruit  le  petit  royaume  indé- 
pendant de  Siriella,  pour  en  faire  un  l'iat  tributaire,  ne  date  pas  de 
l'époque  de  Goudéa  :  elle  est  antérieure  à  l'introduction  du  type  cu- 
néiforme dans  l'épigrapliie  monum'mtale  do  la  Clialdée. 

Les  progrés  des  études  assyriologiqu;'s  pourront  modifier  ou 
même  changer  complètement  quelques-uns  des  noms  dont  nous 
avons  dû  donner  une  première  lecture,  sous  peine  de  ne  pas  les 
prononcer.  11  n'y  en  a  pas  moins  li  un  certain  nombre  de  faits 
précis,  (]ui  se  groupent  déjà  de  manière  à  fournir  (juebiues  données 
historiques.  Ces  résultats  sontdc  nature  à  faire  patienter  ceux  que 
décourageraient  les  difficultés  qui  entourent  encore  le  déchiffrem  nt 
des  anciens  textes  ciiaMécns. 


LÉON     HEUZEY. 


EXEMPLES 


DB 


CliAVlllE  AMKHE  SI  II  VEHRE 

A  PnOPOS  DE  QUELQUES  FRAGMENTS  PROVENANT  DE  DUKLE 

(MO!«TK!<l<!GnO). 


.M.  Sa  ki,  liciilcnnnt  au  V  rt-gimont  de  dragons,  vient  d'adresser 
au  Ministre  de  l'instruction  publi(iuc  et  des  beaux-arts  des  frag- 
mcnls  lie  verres  antiques  rociioillis  par  lui,  près  de  Podgorilza,  sur 
remplacement  de  Dukic,  ranciiMine  Docléa  de  Dalmatie,  pendant  le 
cours  d'une  mission  dont  il  était  chargé  au  Monténégro.  Ces  frag- 
ments, ([ue  nous  avons  déjà  si;4nalés  à  l'attenlion  «le  la  Société  des 
Antiquaires  de  France,  dans  sa  ?éance  du  ."{  mai  18S'2,  nous  ont  été 
obligeamment  communiciués  par  M.  Georges  Perrul,  membre  de  Tins- 
tilut,  avt'c  l'autorisation  de  les  publier. 

En  essayant  de  les  raccorder  entre  eux,  non»  avons  tout  d'abord 
constaté  (juc  ce  sont  les  restes  de  deux  objets  diiïérents. 

Cin^i  d'entre  eux,  en  verre  uni,  légèrement  venlAlre,  ont  fait  par- 
lie  d'une  sorte  de  plateau  circulaiic,  ou  plutôt  de  bassin  à  forme 
basse  cl  à  fond  plat,  ayant  une  épaisseur  moyenne  de  4  1/2  milli- 
mètre et  un  diamètre  de  30  cenliiiiéties,  mesure  déduite  de  la  cour- 
bure d'un  de  ces  morceaux. 

Vers  la  circonférence,  la  nappe  de  verre  se  relève  d'environ  .'{  cen- 
timètres au-dessus  du  fond,  se  replie  sur  elle-même  de  dedans  en 
dehors,  de  manière  à  (loul)ler  l'épaisseur  de  la  paroi  montante,  cl 
rejoint  le  fond  autnur  dmjiicl  elle  forme  un  bouind.  t  servant  d'ap- 
pui cl  destiné  à  exhausser  l.i  paitie  centrale  pour  la  proléger  contre 
les  portc-à-faux.  Il  résulte  de  cette  disposition  que  la  saillie  de  la 


HXEMI'LI.S    UK   (lUAVUni:    ANTluUK   SL'H    VKIIHK. 


281 


bordure  consiste  en  un  vrrilablc  outicl  qui  emprisonne  un  espace 
vide  dans  son  pouilouinl  dont  la  section  ini'-ridii'nne  atTccle  la  furme 

-JJleonetTi-OiSS • 


d'une  boucle,  f.a  minceur  exln^^mc  du  fond  exclut  la  pensre  qu'un 
pareil  pinleau  ait  servi  dans  la  vaisselle  de  table;  il  n'aurait  pu  con- 
Icnii-  un  liciuide  ou  (ies  fruits,  par  exemple,  sans  se  rompre  sous  le 
poids.  Rien  n'cmpôche  de  croire,  d'ailleurs,  que  le  plateau  n'ait  étô 
muni,  dans  sa  partie  centrale,  d'un  pied  donnant  à  l'ensemble  l'as- 
pect d'un  large  cylir. 

Un  vase  de  cette  forme  pouvait  faire  partie  d'un  mundus  muUo- 
bris  et  contenir,  à  la  manière  de  nos  baguiers  modernes,  de  menus 
objets,  bijoux,  anneaux,  épingles,  entrant  dans  l'attirail  de  toilette 
d'une  dame.  Le  musée  de  Trêves  possède  un  élégant  cyli.r  de 
verre,  au  pied  élevé,  muni  de  deux  anses  et  décoré,  sur  la  panse, 
d'une  zone  d'bexagones  allongés  comprise  entie  deux  zones  de 
carrés  obtenus  à  la  meule  '. 

Les  treize  autres  fiagments  de  verre,  également  de  teinte  ver- 


dûlre,  et  exempts  d'irisation,  ont  une  épaisseur  de  3  millimètres,  et 


1.  Gazette  do's  Bnnur-A>t<:,  tome  XLVIII  (1881),  article  de  .M.  Alfred  Darcel  sur 
l'exposition  rétrospective  de  Dusseldorf,  p.  18. 


i82  REtDK   ARCHÉOLOGIOfE. 

un  plateau  concâTc  im-suiaiit  32  rentim^ires  do  (li3m<^lr<^  Pt  :\ffoc- 
liiil,  tiu.inlaii  (f  ill)P,  une  foi  me  li'jrèromoni  tlilTôronlo  du  prvoôdonl. 
l-;t  n>n  |M»  sf  rolcvc  on  pliait  de  rond  di'  '.\  r.  ii:iint'!rt's  rt  se  termine 
par  une  iranelie  A  bords  vifs.  Ces  frijgmcnls  sont  oi  nés  de  dessins  (^ra- 
i<*.<3u  moyen  d'une  pointe  di'  di.iin.inl  on  d'rmeraiidi'.avc  licrefTiMs 
d'ombre  obtenus  par  dessillons  ereusès  à  la  nn'ule  dans  les  massifs. 
La  surfare  peut  ("^Ire  évaluée,  ixiur  rensemble,  à  325  centimètres 
carrés,  tandis  que  celle  du  [)laleaii,  supi^osé  rntier,  serait  d'environ 
8()5  cenliinèlres.  De  là  il  suit  que  la  portion  perdue  représente  une 
surface  de  180  ccnlimèlres,  c'esl-à-dire  (lu'on  possède  seiilem«'nl  les 
deux  riiu|ui"!nes  de  l'objet  complet.  La  perle  des  autres  trois  cin- 
quièmes rend  très  difllcile  la  restitution  di's  sujets  ti;.,'urés,  car  il  est 
impossible  de  raccorder  avec  certitude  les  treize  fiagmenis  entre 
eux,  s:iuf  deux.  La  réunion  de  ces  dernieis  perinel  de  reconmltre 
un  personiiatîe  barbu,  tourné  à  droite,  à  demi  vùlu  d'une  peau  de 
bète  suspendue  à  l'épaule  gaucbe  comme  une  exomis  et  caractérisée 
par  ses  pattes  retombantes  aux  angles  inférieurs;  c'e^l  le  costume 
traditionnel  des  pâtres,  souvent  attribué  aux  satyres  et  aux  bac- 
cbanl.s'.  Les  pieds  sont  couverts  d'un  (|uadiillage  lemontanl  jus- 
qu'au-dessus de  la  chevdlc  et  simulant  peut-être  une  cbaussure  *.  La 
létc  est  nue,  le  baut  du  corps  penché  en  avant,  le  bras  droit  demi- 
tendu.  Derrière  ce  personnage  se  dresse  une  co'onnelto  loni,'ue  et 
grêle,  surmontée  d'un  chapiteau.  Surla  ligne  de  terre,  trois  arbustes 
plantés  verticalement.  A  gauche  de  la  colonnette  apparaît  en  partie 
le  haut  du  corps  d'une  femme  drapée,  auquel  on  peut  rapporter 
peut-être  un  fragment  montrant  une  tête  féminine  tournée  à  gauche. 
Dans  un  compartiment  inféiieur,  on  voit  une  tête  imberbe  regardant 
à  gauche;  le  corps  manque  (pi.  XXHI). 

Sur  un  quatrième  fragment,  de  même  importance  en  raison  de 
ses  dimensions,  on  voit  la  partie  supérieure  d'un  personnage  se  diri- 
geant à  droite;  la  tête  est  barlme  et  couronnée  d'un  feuillage  indé- 
terminé ou  d'épis  ('.').  Les  mains  tendues  en  avant  supportent  un 
vase  en  forme  d'écuclle  hémisphérique,  ornée  d'un  (luadrillagc^; 


1.  Clitbouillet,  Catalogue  général  et  raisonné  des  camées  et  pierres  gravées  du 
Cahinet  des-  mi'dnil/es,  n»  2802  (cantharc  d  arpenl).  De  Wiltc,  Drxniplion  des  an- 
tx'fuitéM  et  (ihjftt  d'art  contpouinl  tt  catinet  du  chevalier  Durand,  n»»  tJ&,  143 
(vâ'c»  pi'int»), 

7.  Dt:  Wiiie,  liiV/.,  n»  15  (fasc  peint). 

3.  Id.,  ibid.,  a'  130,  vaie  p<>iia  Kiir  li-<|un|  on  voit  un  Katyro  tca.iiit  iiuecoupo;  cc 
lojei  c«i  frviiueuiuiuQi  reproduit  sur  d  aulrci»  luuuuiuuJiUi. 


o'i  av.iiil,  uni'  i'dIo mellc  à  rhipllcau,  au  picil  de  liquolle  se  dre-ï86 
un   ailmslc.   Dans   un    comparlimenl    supéiifur,   un  personnage 


debout,  dont  il  ne  reste  plus  que  les  jambes  croisées  l'une  devant 
l'autre,  altitude  qui  r;ippelk'  celle  d'un  pâtre  appuyé  sur  son  pcduni. 
Les  pieds  sont  ornés  d'un  quadrillage  destiné  peut-être  à  simuler  des 


284 


REVUE   ARCHEOLOGIQUE. 


brodequins,  comme  ceux  qu'on  voil  .lueKjui'fois  à  Silviin.  Sur  la 
ligne  lie  IitivJi  t,Murlic,  iliiix  arliuslcs;  à  (lroilt>,  un  fiU  ilocolonucllo. 
Sur  le  cinquième  fragnienl,  portion  d'un  personnage  inurnt'   à 
gauclie,  couronné  de  feuillage,  à  deiui  velu  liinu'  néliride  llullanle 


Sur  les  autres  fr-ii^niints,  d'imporlanfc  moindre, on  voit  l.i  partie 
inférieure  de  deux  j.mibes  nues,  (jui  devaient  appartenir  ii  un  per- 
sonnage de  face;  en  ou;re,  des  bras  tendus,  une  palte  d'ani- 
mal, etc. 

La  composition  paraît  avoir  été  divisée  en  plusieurs  comparli- 
menls  ou  registres  superposés  el  contenant  des  sujets  (|ui  se  ratta- 
chent au  cycle  baclii(iue  des  Satyres  et  des  Ménades.  Le  travail, 
négligemment  exécuté,  dénote  une  liberté  de  main  qui  n'est  pas 
dépourvue  d'un  certain  mérite  artistique  et  (lu'on  j'eul  rapportera 
la  transition  du  m"  au  iv*  sié.:le  de  noire  ère. 

Le  fait  que  c<s  objets  ont  été  découverts  à  DiiMe  rep(Ml(>  iiiiiné- 
dialement  notre  esprit  j\  la  fameuse  coupe  di;  l'odgiiritza,  signalée 
pour  la  première  fois  par  M.  Albert  Duuiont  aux  Antiquaires  de 
France'  et  entrée  dans  la  colleriion  Basilewski.  Or,  Podgoritza 
n'étant  qu'à  5  kilomètres  de  Diikie,  il  n'y  a  guère  à  douter  qu'elle 


t.  Bull,  fie  la  Soc.  des  Ant.  de  Fr.  1873,  p.  71. 


KXKMI'LI.S    !)(•:   GUAVUIIE   ANTKjUK   SUH    vkhhr. 


28;j 


186  REVUE   AI\(;ilKOI.O(i|nt'E. 

n«^  provienne,  en  princi|it\  i\c  relie  ilenuère  localité,  loiil  comme 
les  fnginenls  npport.'s  par  M.  le  lieiite  lanl  Saski.  Celle  rommu- 
naulé  d'orij^ine  iinplitjue  la  possihililè  d'une  commuiiaiiU'  .!••  falni- 
calion,  car  la  coupo  Hasilewski  csl  de  mt'me  forme  liémisphôriquo 
que  celle  qu'on  voil  aux  mains  d'un  des  personnages  llgurés  sur  un 
verre  de  Dukio;  il  esl  \rai  que,d'auln'  pari,  le  dessin  en  esl  forl 
inférieur,  cl  que  les  scènes  biljliijues  donl  elle  esl  décorée,  lelU-s 
que  le  sacrilke  d'Isaie,  l'avenlure  de  Jonas,  apparlicnnenl  à  l'art 
chrfticn  du  v*  siècle  '. 

Le  mustc  du  Louvre  possède  un  fragment  de  vei  rc  ginvé  (ancienne 
colleclion  Campana),  donl  je  dois  l'indicalion  à  M.  Héron  de  Ville- 
fosse*.  En  rélndiant  de  luès,  j'ai  coiisialé  (lue  c'est  le  débris  d'une 
coupe,  peut-être  d"un  c\ii\,  de  2:2  cenliuiètres  «le  diamètre,  ;\  forme 
basse  comme  celle  des  plaleaux  de  Dukle,  sans  doute  un  meuble  de 


toilette  ayant  servi  an  même  usage.  Iji  raison  de  celte  similitude,  je 
crois  oppoi  tun  de  le  faire  connaître  ici  par  un  dessin  pour  faciliter 
le  rapprocliemenl.  Le  verre,  d'une  belle  irisation  opale,  est  giavè 


1.  nullftin  d'archéologie  ehrétienne,  édiU  fr.  1874,  p.  17 J,  pi.  XI;  Edtn.  Le 
Blant,  Etudes  sur  les  saicophnrjps  chrétiens  antique.t  <lc  la  ville  d'Arles,  p  28, 
pi.  .\XXV;  Hev.  archëid.,  XXXVIII  (1870),  p.  2;U,  pi.  XXIV  ;  JnhrLùchtr  des  Ve- 
reiiis  vuH  AHert/iiimtfreiiiiilen  tm  H/iciiiIdnili',  fasc.  I.XIX,  IbbO,  |).  'jb,  pi.  V,  t.  VI, 
»riicl«:  de  M.  K.  Au»'m  Wi-'-nli. 

J.  Hevue  urch^ologifjue,  t.  XXVII,  187/j,  p.  2S7,  noto  1.  ariiclc  de  .M.  HOron  de 
Vilk'f.'usp,  Iniituii;  :  \'eir<-K  nitti'/urf  trouves  en. Hyène;  cf.  Frœlii.cr,  La  verni ic  an- 
fi'/u«,  lb7'J,  p.  WO,  .  J  V  3. 


EXEMI'LtS   Dli   (JIUVUUL   AM  flgUE   SU»    VKlUtK.  281 

non  p.'is  à  la  [lointo,  mais  enliorciininl  à  la  meule,  coiume  les  cristaux 
(le  l{ul>(}ine.  A  l'iiitciieur  il'uii  médaillon  circulaire,  on  voit  un 
Saiyie  nu  exéciilaiil  une  danse  animée  devant  uin-  M'iiade.  Le  .^tylc 
est  suiijMiù  il  a[)|)arli('nt  à  l'cpoiiue  anlunine;  c'esl  un  chamunt 
éclianlillon,  d'autant  |ilus  [tiécicux  ijue  le  inusêe  d,i  l.ouvn;  ne 
saurait  montrer  aucun  autre  spécimen  de  ce  giMire  de  travail. 

Le  cahinet  des  rnt'ilailleseldescami'es,  à  la  IJdjJiotliè  jue  nationale, 
possède  un  spécimen  île  voire  gravé,  réputé  antriuc,  mais  c'est  une 
qualiticalion  à  laquelle  il  ne  nie  semble  avoir  aucun  lili'C.  On  va 
voii'  pour(|uoi.  M.  Cl»ai)0!iillei  a  eu  parfaitement  laison  d'y  voir  une 
simple  iinitdlion  d'intaillc  anti  pie. 

il  consiste  en  une  loupe  ou,  si  l'on  veut,  une  sorte  de  gros  bouton 
liémisphéri(iuc,  de  couleur  vert  foncé*.  Un  y  voit  un  petit  symbole 
surmonté  d'une  inscription  grecque  de  tiois  lignes. 

En  y  regardant  de  prés,  il  m'a  semblé  reconnaître,  dans  l'objet 
gravé  au-dessous  de  l'inscription,  une  palme  placée  liorizoutalumenl  ; 
(luanl  à  l'inscription,  je  la  lis  1res  distinctement  : 

HPflAOYT  (sic) 

PAPXOYTIBEPI 
AC 

palme 

Or  il  existe  des  monnaies  de  bronze  frappées  à  Tibérias  par 
Héroilc  Aiilipas,  le  télraïque  de  Galilée  qui  lit  périr  saint  Jean- 
Baptiste  et  qui  fut  exilé  à  Lyon  par  Caligula.  Voici  le  signalement 
de  ces  monnaies-  ;  au  droit,  la  légende  circulaire  IIPCOAOV 
TQTAPXOV;  dans  le  champ,  une  p^z/wt' avec  la  date  L.  Ar(an  X\), 
ou,  sur  d'autres  exemiilaires,  L.  AA  un  3i);  au  revers,  la  légende 
TIH61MAC,  en  deux  lignes  dans  une  couronne  de  laurier. 

Une  fois  ce  rapprochement  fait,  il  devient  évident  (jue  l'inycrjp'.ion 
gravée  sur  la  lûu[)e  de  verie  du  Cabinet  n'est  autre  chose  qu'une 
copie  de  la  légende  monétaire  d'Uérode;  tout  s'y  retruuve,  même  la 
palme.  Bien  plus,  on  devine  aisément  que  Texemplaire  servant  de 
modèle  avait  perdu,  par  usure,  deux  de  ses  lettres,  et  que  le  faus- 


1.  Catalogue  fjénéral  et  raisonné  des  camées  et  pierres  g i  avées  Je  la  bibliothèque 
imj'ériale,  etc.,  18j8,  p.  OU,  n»  3i84. 

2.  Eckliel,  Doctr.  n.imm.y  t.  lit,  p.  48C;  Mionnet,  Description  des  médailles  an- 
tiques, grecques  et  7'omaines,  t.  V,  p.  566,  n»»  73  et  74. 


J8S  REVUE   ARCnÈOLOr.IQDe. 

saire  ne  s'osl  pas  nporni  de  la  lacune,  puisqu'il  l'a  rcproduilo  avec 
une  iniiiU'Iligi'iiie  liili'liliS  s;\ns  so  ilouler  de  la  reslilutiou  obligée 

HPHAOY    T   - 

PAP  XOY    TIBEPI 

AC 

Ce  roJrO'^somonl  do  loclure  rnv\  plus  fiappauto  encore,  s'il  est 
possible,  la  fausseté  de  rinlaille,(iue  jcsoupçoiiiio  avoir  éléfabri<|U(''e 
par  cpiebiue  anlitiuaire  do  Lyon  désireux  d'exhiber  un  monument 
du  séjour  d'IIéroile  dans  celle  ville.  La  lacune  des  deux  lettres  n'a- 
vait pas  encore  élé  3pcr(,-ue;  nn  s'imngitiail,  en  consé(|uencc,  <iue 
riîiscriplion  avait  été  incorrec  lemenl  rédigée,  et  on  avait  essayé 
de  la  traduire  \\i\r  Hriodote,  rjmrqiie  on  nrchonir  de  l'Ibriir,  tandis 
qu'elle  signitie,  letlie  à  lellie,  d'Urroiir,  l[('l]nmju«ule  Tibi-rins. 

La  digression  à  laquelle  je  viens  do  me  livrer  a  pour  elTel  de 
diminuer  le  nombie  de  verres  gravés  anti(]ues  (ju'on  peut  ciier 
comme  aullicnti  |ues.  Bien  que  leur  rareté  ne  soit  pas  excessive,  nos 
grands  musées  de  Paris  en  soril  trop  pauvrement  dotés;  c'est  une 
raison  de  plus  pour  formuler  le  vœu  que  l'un  d'eux  s'enrichisse  des 
fragments  provenant  de  Diikic.  Heureusement  il  sVn  trouve  dans 
d'autres  collections  publiques  ou  privées-  Sans  m'occuper  des  verres 
à  décors  géométri  |ucs,  dunl  les  plus  beaux  éclianlilbuis  figurent 
dans  la  collection  Slade',  acluelleinenl  au  Hnlisii  Muséum,  et  dans 
la  collection  Chnrvet,  je  me  bornerai  à  rappeler,  comme  étant  d'un 
plus  grand  intérêt  arcliéologi(]UC,  les  plus  curieux  de  ceux  (jui  .-ont 
ornés  de  sujets  ;\  ligures. 

Dans  le  trésor  de  Saint-Marc,  à  Venise,  on  conserve  trois  vases  -; 
sur  l'un  on  voit  une  ronde  de  Salyres  et  de  Ménades;  sur  un  autre, 
une  cha?se  à  cheval  et  des  animaux  sauvages.  Je  ne  cite  le  troisième 
que  pour  mémoire,  à  cause  de  sa  date  relativement  récente;  il  est 

1.  Aug.  Franks,  Cut'ihgun  nf  thr  collecliu:i  •>!  -jlm-i  formed  b'j  Felii  Slade, 
1871. 

2.  Df ville.  Histoire  île  tort  île  la  verrerie  ilrni  l'atilirji.iti',  p.  21,  pi.  XII  ;  p.  36, 
pi.  XXXIV  flXXXV;  p.  ',b,p\.  XC.  Il  en  txistc  aussi,  nu  di-partciin-nl  dos  cslam- 
pnis  de  1.1  LiblioiliL<iue  nationale,  de  bims  dessins  dans  VAl/as  d'aulnjuites  dnrrsts 
de  Millin  G.i  06,  fol.  41,  ft2  cl  43),  demi  J'ai  pu  prendre  connaissance,  grâce  à  une 
ob!i>:enntc  inforin.ition  de  .M.  François  L<-noin)ant.  M.  Wieseli-r  a  publié  un  croijuis 
partiel  du  va»o  d-  con-  de  la  chasse  à  cheval  dans  le  J'ili>f,ûrhrr  tlct  Vcreius  von 
Atlerlhumtfieuuflen  im  Hlieiulundc,  Doiui,  fasc.  LIX  (1870,,  p.  74. 


KXEMI'LRS    DK   GlUVUnE   ANTIQUE   SUIl    VEnili;.  289 

d(^corê  {\c  lions  niïroiités,  av<'C  une  ir'f,'enile  aral»;  (jui  nois  apprend 
(jue  ce  vase  apparlenail  au  calife  faliiniln  Aziz  Dillali,  et  (|iie  par 
consi'(|iienl  il  a  élo  fahriqué  vers  l'an  'J'JG;  il  est  probablement  de 
fabrication  .ilcxandrini'. 

Sur  une  ainiiulla  conseivc'e  au  nui.-ée  de  Vienne  (Autricbe),  on 
voit  un  allilèle  vainqueur  entre  deux  couples  de  lutteurs  '. 

Sur  une  petite  coupe  découverte  à  Strasbourg  en  1S78,  et  déposée 
au  musée  île  la  Société  pour  la  conservation  des  monum(!nt>  liisto- 
ri(iues,  un  lièvre  pouisuivi  par  un  chien-;  gravure  à  la  meule. 

Sur  un  bol  trouvé  à  Bonn  et  conservé  au  musée  provincial  de 
celle  ville,  un  lièvre  poursuivi  pjr  un  cha  seur  à  cheval  et  par  ses 
doux  chiens^. 

M.  Darcel  '  a  remarqué  que  le  dessin  de  celte  pièce  doit  avoir  été 
•tracé  à  la  pointe  de  diamant,  ou  à  la  jderre  d'émeri,  carie  trait  est 
opaque  et  comme  égraligné;  c'est  une  observation  que  je  retiens 
parce  qu'elle  est  également  applicable  à  la  gravure  des  verres  de 
Duk!e. 

Sur  une  coupe  provenant  de  Maycnce  (collection  Charvet),  quatre 
figures  drapées,  debout,  portant  à  chaiiue  main  un  rameau,  et  sépa- 
rées par  des  colonneltes '•;  gravure  i\  la  meule. 

Sur  une  coupe  de  la  collection  Gréau,  une  bacchante  drapée, 
tenant  un  thyrse  et  dansant*^. 

Sur  une  coupe  de  la  collection  Beunlelay,  une  femme  assise  prés 
d'un  temple  et  agitant  un  cistre;  plus  loin,  un  homme  gravant  une 
stèle  à  l'aide  d'un  ciseau  et  d'un  m.iillel  ^. 

Sur  un  petit  vase  découveit  à  Holien-Siilzcn,  une  scène  bachique 
ayaiU  pour  personnages  B;ici'lius  leriant  un  thyrse  et  une  coupe, 
monlé  sur  une  bise  ornée  d'un  masque  scénique,  Hercule  ivre  et 


1.  Sacken  et  KetT.cr,  Die  Samtnlungen  des  II.  K.  Miinz-und-Antiken  Kabinets^ 
p.  458. 

2.  Juhrbïtcher  des  Yereim  von  Altertkumsfreunden  im  Rheinlande,  fasc.  LXIX 
(18S0\  p.  50,  pi.  II.  Sîraiib,  ie Cimetière  gallo-romain  de  Strasbourg,  1881,  p.  28, 
planche. 

3.  Jdhrbiic/ier  d.  Ver.  v.  Allerthunisfr.  im  Rheinl.,  LIX  (18S0;.  p.  CO,  pi.  111. 
II.  Gnzftie des Deau.r-Aitx,  1881,  p.  18. 

5.  Frœlinor, /a  Vénerie  antique;  description  de  la  collection  Chancf,  1879, 
p.  9.'i,  vi£;iiette. 

6.  Ibid.,  p.  90,  note  3. 

7.  Ibid.,  p.  96,  notp  5,  Cntn/ogue  de  l'rrpr.ifnn  :nu'verseUe  de  1867;  Histoire 
du  travail,  p.  227,  n"  335. 

XI.III.  --   19 


290  iiKVLf.  Aiu:Hi-U)L()(;iyi'K. 

élorulu  à  loue,  Allis  (?),  Pan,  Sili^-MC,  bni-i-linnlc,  sntvns '.  C'est  la 
mise  en  scène  de  la  fameuse  allé^'oric  il'Hereiilc  vaincu  par  Ilacclius, 
ou  le  Trioinplie  ilu  \in  sur  la  force. 

Sur  une  coupe  découveile  à  Trêves,  rexlérieiir  du  grand 
Cirque*. 

Parmi  les  monumonls  de  celle  calri^orie,  il  en  esl  iiueli|ues-uns 
doiU  les  sujets  sont  accompagnîs  de  légendes  explicatives  grecijues 
ou  latines  qui  en  rehaussent  encore  l'inlêrèl. 

Ils  méritent  de  former  un  gioupe  spécial,  celui  des  graffiti  sur 
verre,  à  mettre  en  regard  de  celui  qu'on  pourrait  former  d'autre 
pai  t  en  réunissant  les  verres  à  légendes  et  à  sujets  vioulcs  en  relief. 

Voiii  ceux  que  j'ai  recueillis  : 

V  Coupe  de  Leuna,  prés  Merseburg  (Saxe),  actuellement  au 
Brilish  .Muséum  3.  j.e  dessin  représente  Diane  surpiise  au  liain  par- 
Acléon  et  avertie  par  les  aboiements  de  son  chien.  Une  protome  de 
cerf  symbolise  la  métamorphose  du  chasseur  léniéraire;  légende  : 

AKTAIGON 

APT£M 

IC 

2'  Deux  fragments  trouvés  à  Castlesleads  (Angleterre),  près  du 
n.ur  d'II.idrien.  AcUiclIrnuMil  à  Lazonby  Hall  *.  Variante  du  sujet 
précédent.  Sur  l'un  des  fragments  est  gravée  la  léle  d'un  chien,  sur 
l'autre  le  mot 

AKTAIOON 

3*  Coupe  trouvée  à  Cologne,  conservée  au  musée  Wallraf- 
Hichaitz-'.  Epi^ode  du  drame  des  Danaïdes  :  Lyncée  armé  et  raar- 

1.  Jahrbûcherd.  Ver.  v.  Alterthuiif>fr.  im  RhciiiL,  LIX(1870),p.  7/i,  pi.  III,  2,  cl 
pi.  IV.  Frœhn«*r,  op.  laud.^  p    96. 

2.  \Vilmow!»ki,  An./iaolofjis'he  funde  in  Trier  und  Vingcyend,  1873,  p.  13, 
pi.  II.  Frcclincr,  up.  laud.^  p.  90. 

3.  DfiUif/r  zum  AnzeigT  fur  Kundr  îles  Deul.ichfn  Vorz^'il,  mars  1 8G0.  Anp.  Fraiiks 
Calahujue.  of  the  c(dl.  of  fjlnss  formrd  bij  F.  Shule^  p.  SB,  n»  3".'0,  IIr.  74  fi  75. 

A.  Drucc,  Lapidariuni  septenlrionale,  p.  233,  no  417,  vigooitc.  Cvrp.  insc.  ial.  Vll, 
p.  231. 

5.  Kaœp,  l)ie epigraptiischtr,  Aniicaglicnin  K'Oln,  1809,  p.  10. 


KXEMPLKS  DE  GRAVURE  ANTIQUE  SUR  VERRE.         291 

clianl  ;  dcvunl  lui,  Hypcnnnestre  couronnée,  loiidaiil  la  main  vers 
une  guirlande  placée  eulic  eux  deux  ;  au-dessous  d'ellf,  l'uliius  ailé; 
légende  : 

'Y  n e  PM  H c  {sic)  A  Y  n  r e  Y  (vie)       n  o  0  0 c 

TPA  C 

iNotez  l'esprit  rude  sur  le  Y  inilial  ;  notez  aus^i  In  formn  nrlliogn- 
pliiijue  'VTiEfurîirpa,  pour  'V-icii.wî'jTpa,  couime  KAVi'AIMli-iPA, 
qui  se  lit  pour  KAYTAIMNEi^TPA  sur  un  vase  peint  (Wehker, 
Aile  Drnicmaler,  Y,  p.  21>7). 

4°  Autre  coupe  de  Cologne,  conservée  au  musée  de  licrlin'.  Li 
création  de  l'homme;  Proméiliée  façonne  une  statue;  Epimétliée  lui 
tend  un  objet  globuleux,  pr()l)ablemeiit  une  masse  d'argile.  Un 
autre  lapélide,  sans  doute  Atlas,  contemple  cette  opération.  Dans  un 
autre  compaiiimcnl,  un  homme  étendu  sur  le  dos,  leut-ètie  le 
quatiiènu'  la[)étiile,  Mrnoilios,  ffjudi'oyé  par  Jupiter.  iJucùté  opposé, 
un  enfant  jouant  près  d'une  femme  à  demi  couchée  per:onnihant  la 
Terre;  légende  : 

nPO  AN0PCO  YnOMHOGY 

(sic)  Meoev  noroN  c 

c  lA 


PH 


Il  faut  remarquer  le  nom  erroné  Tiroar.Orj;  pour  'E-iar.OE-j;. 

5°  Fragment  recueilli  à  Pise  par  Passeri -.  Course  de  chars  dans 
le  cirque.  Sur  le  pourtour,  une  inscription  en  lellres  à  double  trait 
bien  formées,  sur  deux  lignes. 

On  ne  voit  plus  (]ue  le  commencement  de  la  première  et  le  dernier 
mot  de  la  seconde  entre  deux  points. 

CLAVDIA///////// 
/////////////•  ZESE  S- 


1.  lilirh.  d.  Ver.v  Alterl/iumsfr.  im  Rheinl.,  XXVIII  (1860),  p.  'j'j,   pi.   XVIII. 
Bull.  del'Insl.  de  Corresji.  arch'foL,  1860,  p.  60,  158. 

2.  Devilli',  flist.  de  l'art  de  la  verrerie  duns  Fautiquiti!,  p.  73,  [-1.  LXX,\IX;    ne 
précise  pas  l'itidication  bibliograpliique,  que  jn  n'ai  pu  vérifier. 


2'J-2  HKVL'K   AnCHKOLOCiyUK. 

Le  premier  mot,  ('LAVDIA,  esl  peul-iMre  entier,  h  moins  qu'on  ne 
jMèfére  le  compléter  en  (!LAVI)IA(nc\  voe.ilif  du  nom  d'un  auriija 
favori,  Claudi.uius;  K»  umi  ZKSKS  rsl  la  InnsL-riplion  de  l'exrlania- 
lion  grci'que  s'i»»»;  éi|uivalanl  à  riras. 

G*  ('oupc  de  Mayenrc,  au  mu<ée  d»"  eellc  ville'.  Un  chasseur  à 
pied,  avee  ses  deux  chiens,  atlaijuo  à  l'épieu  un  sanglier;  légende 
circulaire  : 

VALERI    VIVAS 

7°  Coupe  d'Anifernicii,  conservée  au  musée  provineial  de  IJonn'. 
Cerf  poursuivi  par  deu\  chiens  cl  deux  chasseurs  à  chevjl  ;  légende 
circulaire  incomplète  : 

/////////VIS  v/;ncas 

?  [Cuwi  t\uis  v[i]ncas. 


8"  Coupe  trouvée  à  Cobern-sur-MoselIe  en  IH78  et  conservée  au 
musée  de  Berlin''.  Neptune,  armé  du  trident,  tenant  le  pied  i,'auche 
levé  au-dessus  d'un  éilifice;  à  ses  côtés,  un  capricurne  el  un  lion 
marin  avec  des  poissons;  légende  circulaire  : 

PROPINO     AMANTIBVS 


M.  E.  Aus'm  AVeeilh  a  établi  un  inizénieux  rapprochement  ••nlrc 
le  petit  édifice  donné  pour  attribut  à  Neptune  et  le  Posciilôn  Doma- 
tiles  de  Pausanias  {III,  14). 

y»  Un  fr;igmcnt  trouvé  à  Rome  et  conservé  au  British  Muséum*. 
Suivant  M.  Krmhncr  on  y  lit  les  noms  des  Muses,  mais  il  ne  les  indi- 
que pas.  Je  désirais  les  donner  ici;  malheureusement  les  reeher- 
ches  (|ui  ont  été  faites  sur  ma  «lemande,  au  musée,  n'ont  abouti  ù 
aucun  résulta!  ;   l'olijet  en  qiiestion  y  est  inconnu  ou  éi^'aré. 

10"  Un  va-c  à  i)anse  sphérique  cl  à  long  goulot,  trouvé  lu-.s  .le 

1.  Johrh.  fl.  Vrr.  v.  A'tcrthutmfr.  imRhcinl.,  LXIX  (1S80),  p.  60,  pi.  I.  article 
ic*.  M.  E.  Aus'm  NVccril). 

2.  H..  ,fjtfi..  |j.  51,  pi.  IV. 

3.  ]'l.,i(jtf/.,  p.  52,  pi.  V, 

4.  Frœlincr,  op.  lawL,  p.  fiO,  note  3. 


KXEMPLi.s  nr:  onAvunE  antique  sur  VEnnE.  203 

Rome  et  consorvr  h  la  Propagande  ',  est  d6corè  d'une  vue  panora- 
miiiue  d('  Haios,  doiillcs  édiliccssont  désignée  [)ar  leurs  noriis  tracôs 
en  belles  iiiiijuscuk's  au-dc>sous  d'une  insciiiilion  funéraire  <jui 
forme  le  pourluur  : 

MEMORIAE-FELICISSIME-  FILIAE 
FAROS-STAGNV  NERONIS  05TRIARIASTAGNV  SILVA  BAIAE 

ilemoriœ  felicissim(a)e  fîliœ  I 
aros{[i^phnros);  stagnu{m)  Neronis;  ostriaria:  stafjn{u)m;  silva;  fîoi.r. 

Il  est  visible  que  ce  vase  a  élc  gravé  à  n;iïc.s  mt^me  et  emporté 
comme  souvenir  par  des  parents  qui  y  avaient  perdu  une  jeune 
enfant  âgée  de  quoli|iies  jours  seulement  et  n'ayant  pas  encore  reçu 
de  no:n.  La  fabrication  de  ce  verre  remonte  manifestement  à  une 
époque  où  le  nom  de  Néron  restait  encore  atlaclié  à  l'un  dos  grands 
travaux  d'art  exécutés  par  ses  ordres. 

Pralilli,  imparfaitement  informé  de  la  découverte  de  ce  vase, 
avait  travesti  le  sujet  (jui  le  décore  en  femmes  nues  tenant  di  s  pa- 
tères  à  la  m;iin,  et  défiguré  l'inscription  en  BAIAE  ME....NTACCVS 
lAVANT.  Pour  rehausser  l'intérêt  d'une  question  topographi^ue  à 
la(|uelle  il  travaillait,  il  donnait  à  entendre  que  ce  prétendu  vase 
provenait  d'Avenzo,  sur  la  voie  Appienne-.  Le  P.  Garrucci  ^  a  dé- 
voilé cette  petite  supercherie,  et  M.  .Mommsen  a  consigné  avec  raison 
la  version  de  Pratilli  dans  les  Falsœ  de  son  recueil  d'inscriptions 
du  lovaume  de  Naples,  p.  "20",  n°  301  *,  mais  n'a  pas  donné,  à  cette 
occasion,  le  texte  du  monument  authentique,  qui  avait  encore  plus 
de  ilroil  de  figurer  dans  le  roi'ps  de  l'ouvrage. 

11°  Un  vase  semblable  au  précédent  a  été  découvert  a  Populonia  *, 

1.  Mamaclii,  Orig.c/irùt.  I  (1749),  p.  4G3,  mauvaise  vigoetie  de  faiilaisio  ;  Dul- 
letl.  SupoL,  nuov.  ser.  185a,  p.  130,  lav.  IX,  n"  1  ;  Cosie,  Voyage  d'exploration  sur 
le  littoral  de  la  France  et  dcl' Italie,  1861,  p.  98  et  99,  planche.  Comme  sujet  ana- 
logue, comparez  une  peinture  antique  reprôjentaui  le  panorama  d'une  ville  indc- 
terniinée,  et  reproduite  en  vignette  par  Beliori,  Fragm.  veut,  vcler.  Romœ,  p.  1. 

2.  Pralilli,  Yia  Appia,  1745,  p.  388. 

3.  Bull,  archeol.  NapoL,  1853,  p.  138. 

4.  Seslini,  Illustrazione  d'unvaso  antico  di  veiro,  1812;  traduit  en  français  par 
Ciri\aud,  1813.  Millier,  Handôuc/t^éd.  li,  p.  447  ;  Merckliu,  De  vase  vitreo  Populo- 
niemi,  Dorpat,  1851  ;  De  Rossi,  Le  prime  nuxoUe  d'antiche  isaizioni,  p.  58;  idem, 
Topogrii/li  délie  spuyge  di  Baja,  dans  Bulletl.  archeolog.  Sopolit.,  nuov.  ser.  1853, 
p.  133,  t;iv.  IX,  :<;  Coâte,  Voyage  d'exploration,  p.  98  ei  99.  Cf.  Héron  de  Ville- 
fosse,  dans  Rev.  archéol.,  l.  c. 


394  lu-.viK  AHciiKouir.iorF.. 

piès  de  PioMibinn  (Ilnlic).  Au-di'ssous  (ruiii' acclnninlion  funt'-rair.», 
piobaliltMiuMil  nlalive  .i  un  jeune  enfani,  on  lit  les  noms  dos  t-ilili- 
ccs  d'unt'  ville  (lui  n't-bl  pas  dt^signée,  maio  (jui  me  semble  ôlre  Baies 
pribC  d"un  aulre  point  de  vue. 

ANIMA- FELIX- VIVAS  palme. 

STAGNV  •  PALATIV  •  P 

OSTRIARIA  I 

RIPA  •  L 

A 

E 

Anima  felix,  vivas  !  stagnu(m);  ostn'aria  {[)' ostrenha);  j)alatiu{m)\ 

rijKi;  pilœ. 

Comparez  l'acclamalion  Anima,  fcti.r  rivas  :iux  foriiiule>  Ilic  jacet 
dulcis  anima  (Hrelli,  4800),  el  Vivas  qui  dixeris,  virit  Ehj'<iis  {Corp. 
iuscr.  Int.  ill.  I9:i2). 

12°  Un  iroisiènie  vase  semblable  aux  deux  pivcédenîs,  provenant 
des  ruines  de  la  station  romaine  d'Odemii'a,  dans  l'Alemlejo  (Por- 
tugal), a  ligure  à  l'Exposition  uiiiveiselle  de  48<)7  par  les  soins  du 
marquis  de  Souza.  Aetuellemenl  au  musée  de  Lisbonne  '.  A  la  diffé- 
rence des  précédents,  il  ne  porte  aui  une  inscription  funéraire,  il  est 
décoré  d'édilices  désignés  par  leuis  noms;  aulre  vue  de  Baies. 


SOLARIV  THERME  AANI 

AMPITHEAT  THEATRVM  RIPA 


1.  Catalogue  de  rexpositionunhrrsrlle  de  MCI,  Histoire  du  travail,  2»  partie, 
p  303  f»ocl.  portURaisc,  n*  121).  Arclurol.  Zeilung,  Bi-ilin,  1808,  p.  01,  pi.  Il; 
Muffaiin  pttlnri-iQue,  février  1873,  p.  hO.  Cf.  Mi.'ron  de  VillefoPse,  /.  c.  J'.i  cliercl)é 
en  vaiD  la  mention  do  ce  monument  épigrapiii(|uo  dans  le  ïonic  II  du  Corpus  in- 
tcrijitionurn  Ititinurum  {Inscr.  hi^p,  latin.)  de  Hiibncr,  et  dans  les  Supplemi'rila  do 
rEphrmerti  epif/raphica.  Cette  omission,  si  omission  il  y  a,  pourrait  Ctrc  lieureu- 
•cmcnt  reparte,  toui  la  rubrique  Buiœ,  dans  l'ua  des  tomes  IX  ou  X  actuellement 
en  préparation. 


IXEMPLKS    DK   GRWUnR    ANTlQUK   SUR    VKIIME.  29j 

Pnr  suilo  do  l'iticorliliide  du  cararlt^ic  A,  ([ui  me  [lanil  Aire  un  I 
dôfiLîiiri' pir  des  traits  parasilos.  on  a  In  d(!  diverses  nianirrcs  les 
deux  derniers  mots  dr  la  preniiôre  ligne,  lherm[a)e  Traiani,  ou 
thrnn'jCr  Seidiii,  ou  enlui  tlii'riii'ii)c  Jani.  Toutes  ces  lectures  sont 
inadn)is^illles  ;  le  dt'cliilïreiiit'nt  ;</«/  me  |tara!t  seul  correct,  à  la 
condition  de  n'en  pas  faire  le  nom  du  dieu  Janus  au  génitif,  coniinc 
comidiMient  d(''terniinatif  de  t/ieiiitai^  mais  simpl  mont  le  nominatif 
plnritd  ;■//;</ si!,MiilVinl  «  passage,  areadeu.  Pour  éviltM'  toute  éijui- 
voque,  je  lis  dans  le  sens  vcrtieal,  de  ileux  en  deux  : 

solariu{m)\  amp{li)itheal{rum) ;  therm{a)e;  theatrum;  jani;    ripa; 

pilas  {\f  pilœ). 

Les  vases  de  Populonia,  de  Rome  et  d'Odemira  forment  un  groupe 
inséparahle.  Ils  sont  certainement  de  fabrication  campariicnne. 
Les  verres  fi  inscriptions  gicciiues,  cités  plus  haut,  et  probahlenient 
quehiues-uns  de  ceux  à  inscriptions  latines  avec  lesquels  ils  oITrent 
tant  d'analogie,  ont  liés  vraisemblablement  la  même  ori.^'ine;  ils 
appartiennent  à  la  civilisalion  gréco-romaine  de  Tltalie  méridio- 
nale. 

13°  Grande  coupe  conservée  nu  musée  provinrial  de  Trêves'.  On 
y  voit  le  sacrilice  d'Isaac.  Dans  le  milieu,  un  aulrl  allume;  à 
gauche,  Isaac  debout,  les  mains  liées  derrière  le  dos;  à  droite, 
Abraham  tenant  le  couteau  du  sacrifice;  près  de  lui,  un  bélier  ; 
dans  le  haut,  le  bras  de  Dieu  étendu  et  sortant  d'un  nuage.  Tout 
autour,  l'inscription  : 

VIVAS    IN    DEO   Z 

M.  de  Rossi  pense  que  la  Icltrc  Z  est  la  sigle  du  mot  7Jesps),  pour 

Z-/-ir:a'.;. 

14°  La  coupe  de  Podgoritza  (collection  Perrod,  à  Sculari  d'Alba- 
nie; aujourd'hui  collection  Basilewski,  à  Paris).  Dans  la  partie  cen- 
trale du  fond,  le  sacrifice  d'Isaac,  avec  un  dispositif  analogue  à 
celui  du  verre  de  Trêves;  sur  le  pourtour,  Adam  et  Eve,  entre  eux 
le  serpent  enroulé  autour  de  farbre  du  bien  et  du  mal  ;  l'aventure 
de  Jonas;  Suzanne;  les  trois  enfants  dans  la  fournaise;  Daniel  dans 


1.  Jahrb.d.  Ver.v.  Mterthvmfr.im  Bhrinl.,  LXIX  ^1880',  p.  53,  pi.  VI,  ariiclc 
de  M.  E.  Aus'm  Weerth;  comparez  le  dessin  de  grandeur  réelle,  publié  par  Wil- 
inowsky,  Archœol.  Funde  in  Trier, 


290  HE  VIE   AnCUKOLOGIQUR. 

la  fos>c  aux  lions;  Moiso  frappant  île  sa  bagiictle  le  rocliiT  ot  en 
faisant  jaillir  la  source;  la  rêsurrci'lion  <lt'  I-a/.iro.  Par  suiu;  il'iine 
confu-ion  bizarre,  l'arlislf  a  salistilué  1.'  no:ii  irAbialiaiu  {Abritm) 
à  celui  d'AJam.  Onani  à  celui  de  sainl  Pierre  {Pctrus)  suh'itilué  à 
celui  (le  Mi)i>e,  on  sut  (pie  tl.ins  le  pirallêiisme  rialili  par  ri'.^'lisc 
entre  Tancienne  cl  la  nouvelle  Alliance  saint  l'icrre  correspoud  a 
Moïse.  Légcudes  : 

ABRAM 

ETETEV 

AM 

Abram  (pour  Adam)  et  et  (redoublement  fautif  de  et)  Evam. 


DIVNANDEVENT 
REQVETILIBERATVSEST 

Diunau  (pour  Jonas)  de  ventre  qucti  (pour  ccti)  liberatus  est. 

SVSANA 

DEFALSOCRI 

MINE 

Susana  de  falso  cn'mine. 

TRISPVERIDEEGNE 
CAMl 

tris  (pour  très)  pueri  de  egne  (pour  igné)  cami{ni). 

DANIELDELACO 
LEONIS 

Danirl  dr  laco  (pour  lacn)  Iconis. 

Puis  cinq  lignes  de  caractères  cursifs  qui,  d'après  les  dôrliiiïrc- 
monis  combinés  (b;  M.  Albert  Duraont  et  de  51.  Ivlmond  Le  ni  int, 
pi.uvcul  se  lire  ainsi  : 


EXKMPLtS    DE   r.RAVUllK    A.MlOLi:   SLll    VERKE.  2U7 

PETRVSVIRGAPEnn 

VOVSET 

FONTE^SCirE 

liVNTQVOIiE 

RE 

Pctnis  virga  perquoiifiPt  (pour  jicrcitasit):  fontes  àperunt  (pour 
co'pcrunt)  quorcrc  (pour  currcre). 

Enfin,  i\cn\  liç^nes  de  caractères  réguliers  suivies  de  deux  lignes 
de  caraclèri'S  cursifs  : 

D  O  M  I  N  V  S 

LAIARVM 

RESVSCIT 
AT 

Dominiis  Laiarum  (pour  Lazarum)  resuscitat. 


15°  Fragment  tle  verre' conservé  à  la  bibliothèque  de  la  Valli- 
cella,  à  Rorne.  Le  sujet  est  la  résurrection  de  Lazare,  rl;iirement  in- 
diqué par  son  nom  gravé  au-dessus  de  sa  léle,  LAIAVRS  {sic]\  au- 
dessus  de  celle  du  Christ,  les  lettres  LIATA,  probablement  la  fin  du 
nom  do  la  personne  gratifiée  de  ce  présent  avec  un  souhait  accla- 
malif  : 

Laiaurs  (pour  Lazarus).  [Amp]liata  [vivas]  ! 

!G°  Fragment  provenant  de  l'Aventin,  au  musée  Kircher.  On  y 
lit  les  noms  de  trois  apôtres  : 

PETRVS    ANDREAS     PHILIPPVS 


1.  Pour  ce  verre  et  les  suivants,  voir  le  grand  ouvrage  du  P.  Raphaël  Garrucci, 
Storia  deW  arte  cristiaun,  vol.  VI,  p.  91-99,  pi.  402-401.  Cf.  Uull.  d'nrch.  crnl., 
1867,  p.  48;   1868,  p.  35,  3S  ;    1876,  p.  7;  1878,  p.  147. 


298  nKVLK   AHCUKOI.Or.lQUE. 

Il"  Fnpment  de  couiic  iIi-couvlmI  :i  Uonio.  Scène  de  baptômo  ar- 

compaj!!).'.    i"  1  !  Ii'i;eiide  : 

ALBA    MIRAX 

IS"  rr.ipnuMil  con.^rrvô  au  iniist''e  du  Valiiaii.  On  y  voit  des  figures 
de  saints  avec  la  lég<nde  inulilùe  : 

///////INVS    PE/ 11/ III 

Je  crois  qu'il  faut  restiluff  les  mots  [Dom]inus,  Pe[trus]....  cor- 
respondant au  Seigneur  et  au  prince  des  Ap(Mres. 

l'J'  Sui'  un  autre  fiai;menl  on  voit  le  llédenijiti'ur  renicllant  fi 
Pierre  les  tables  de  la  loi.  Légende  : 

^     LEX    DOMINI 

iO°  Sur  un  fin.trnienl  conservé  au  musée  de  Crolone  on  lit  : 

^^^    VI  VAS    CVM  TVIS    PIAE   ZESES 

21°  Sur  un  autre,  au  musée  Kircher  : 

[duîcisaurtAA   PIE   ZESE 

22"  Enfin,  sur  divers  fragments  trouvôp  à  Rome,  on  reconnaît  la 
figure  Dimhée  du  Clirisl,  avec  le  monogramme  sacré  : 

f 

Les  Romains  assimilaient  l'ait  do  In  gravure  sur  v^rre  à  celui  delà 
taille  des  gemmes  et  le  comcrenaicnl  dans  la  dénomination  grnéri(iue 
dt- tu/u/M/'M  appliqué  à  la  ciselurcdes  sub>lances  dures  detouics  sor- 
tes, métaux,  pierres,  bois,  ivoire,  etc.  Cela  résulte  des  termes  dont  se 
sett  Quiniilien  (II,  21)  :  Qn"'  aiiro,  nr'jonto,  (ire,  ferra  opéra  effi- 
at  :  nom  sculptura  diain  ln/nuin.  ebur.  tnarinur,  vHruin,  gi  iinnas 
cotnplectiinr. 


EXEMPi.F.s  ni:  nRAvrnr;  antiquiî  su:;  yrhrf:.  299 

L'usage  du  loiii'cL  ou  loiir  :\\i\i\'.  d'un  itisliiiiiifnl  :i|i|iroprié  a  ce 
travail  se  (•(•l'unnaîl  riairciiicnt  dans  deux  |)assa;,'es  de  Pline  :  et 
aliud  (rilnuii)  (lufu  fi;/ uni  fur;  nliml  lunio  laitiir,  dliml  (iif/nili 
moiln  ctphitnr  ;  cl  aillcui's  :  ut  dllir.  (iicinnnr,  ftrio  sriilpi  non  passinl^ 
aiiiv  non  nisi  rctn^to,  vcruiii  nviw!^  adumunlc  jibiriiniiiii  (intcm  in 
his  tri-i'liruniiii  jinificit  fi  rior  '. 

FaiiU!  d'avdir  ra|)|ir();;lié  les  Ini^ulion-;  l')nio  Icritnr  (![  tcvrbvdrum 
firvor  (|ui  s*L'X|dii[U(!nt  l'une  par  Taulre,  les  iraducloiirs  cl  les  coni- 
menlaleurs  ne  les  ont  pas  toujours  Iden  couiprjscs;  il  s'agit  niani- 
foslenicnt  de  la  rotation  rapide  (■oniniuniiiuéc  par  le  tour  aussi  bien 
à  la  inololte  (ju'aux  lorels  et  aux  drilles;  IJoiacc;  a  dit  de  môme  fcr- 
vidn  rota  en  ()arlant  de  la  roue  il'un  char.  Par  les  mots  aryonti  modo 
cirlntnr,  il  faut  entendre  la  gravure  au  trait  efTecluée  au  moyen 
d'une  pointe  «le  diamant,  comme  la  ciselure  l'est  sur  l'argent  au 
moyen  du  burin. 

Il  n'est  pas  jusi|u'à  l'oulii  encore  en  iisige  de  nos  jours  sous  le 
nom  de  diamant  dos  vitriers  ou  des  miroitiers  qui  ne  se  reconnaisse 
dans  la  description  (|u'en  a  f.iile  le  Naturaliste  :  et  quuni  féliciter 
(adamati)  rumpere  eontigit  in  tam,  parvns  fraw/itur  crustas  ut  cerni 
vix  poss;int.  E.rpeluntnr  hœ  scalptoribus  ferroque  indnduntur,  nul- 
lani  non  durilidm  ex  fncili  cdvantes-.  Les  anciens  ont  peut-ùtre  em- 
ployé aux  munies  lins  le  corindon,  s'il  est  peiinisde  l'identifier  avec 
une  pierre  qu'ils  apiielaient  le  r/rélon,  aussi  dure  que  le  diamant, 
chnlazids  grandinuni  et  candorem  et  fi-juram  habet,  adamdutinœ 
durit  iœ  ^. 

,  Héraclius  recommande  l'emploi  d'une  autre  pierre  dure,  avec 
lubr^^aclion  prcilable  du  verre  '  : 

Un.ri;  qno  facto  temptavi  sculpere  vitrum 

Cuni  duro  lapide  piritis  (alias  smerilli)  noniine  dicta. 

Malheureusement  le  texte  n'est  pas  sûr  en  cet  endroit;  si  l'on 
s'en  tient  à  la  leçon  piritis  pour  pyritis,  il  s'agirait  d'une  pierre 
dont  les  pioiiriétés  meulières  sont  indiquées  par  Piine'';  ce  serait 

1.  Pline,  [list.  nnt..  XXXVF,  cr,  et  87. 

2.  PluR-,  ;6.,  XXXVU,  If.. 

3.  Piiiie,  ih.,  XXXVtl,  73. 

k.  IIiTaclius,  de  culuri/jiii  et  nrlibus  Rom  rioruin,  IV  (artcle  Je  sculptura  vilri)^ 
V.  10-11,  (5dilij  et  traduit  en  allemand  par  Alb.  I!g  Juns  les  Queticnschriften  fur 
Ku/ist'jcschichle,  IV,  p.  7,1873,  Vieiaie. 

5.  Piine,  II-  y.,  XXXVI,  30  :  inolarem  quidam  pyriten  vocant. 


300  RKVUE   ARCHÉOLOGiyUK. 

donc  le  procédé  de  la  meule.  Si  l'on  corrige  pyrilis  en   niyntis 
(suJft;,  ffuupîrr,;)  on  aiirail  nlT.iiri'  à  rèmeri. 

Le  liaité  du  moine  Tliénpliili' '  ne  s'occupe  que  de  la  f.ibricalinn 
du  verre  et  des  vilraux  peints,  sans  aucune  allusion  aux  procédés 
de  la  gravure  et  de  la  taille. 

i;ui'.i;n  T  muw  a  r. 

.V.  IL  —  Au  dernier  inonvnl,  nous  avons  la  s.ilisfaclion  d';ip- 
prendre  (jue  le  Louvre  est  entré  en  possession  des  verres  anliijues 
recueillis  par  M.  Saski  ;  celui-ci  !•■<  a  gênércuscniciil  olT.;i>  .m 
musée. 

i;.  M. 


5.  Theophili  presbijleri  et  monachi  diversarum  artium  schedula  liber  secundus.  Ce 
traité  a  été  édité  et  traduit  en  fraiiç;us  par  lo  comte  de  L'Escalopicr  en  1843. 
il.  Gt'jrpes  Boiilcinps,  ancien  dinclt'ur  (ie  la  inanulacturc  de  Clioisy,  et  l'un  des 
hommes  les  plus  compétents  en  la  matière,  en  a  donné  plus  réceoituent  uue  excel- 
lente IraductioQ,  avec  texte  aunoté,  en  1870. 


UKNSKIGNEMEMS  AHCIlf:OL(j(;iQLES 

Tll.WSFOIli\TIO^  DU  C  GL'TTI'RIL  l)U  L.\TI\ 

EN   UNE    SIFFLANTE'. 


Ln  prononciation  du  c  dans  In  langue  latine  et  dans  les  langues 
romanes,  ses  transformations  suivant  les  temps,  les  pays  et  la  posi- 
tion de  cette  lettre  dans  les  mots,  ont  été  l'objet  de  sav.intes  élud.-s 
de  la  part  des  linguistes.  Fra[tpé  de  l'inlértH  ([ue  pouvaient  olîiir, 
pour  l'histoire  des  changement-;  survenus  d.iiis  l'articulation  do 
celle  consonne,  (jnelques  renseignements  fournis  par  rarchêolngie 
et  la  numisinatiiiue,  j'en  ai  enlrotenu  un  de  nos  confrères,  éminem- 
ment compétent  en  ces  matières;  il  a  pensé  qu'il  y  aurait  utilité  à  les 
faire  connaître,  et  celte  appréciation  a  déterminé  la  communica- 
tion que  j'ai  l'honneur  de  faire  aujourd'hui  à  l'Académie. 


I 


Je  dois  tout  d'abord  indiquer  sommairement  l'état  actuel  de  nos 
connaissiinces  d'après  les  recherches  de  MM.  Diez  -,    Corssen^, 

1.  Ce  mt^moire  a  été  lu  à  l^cadémio  des  inscriptions  et  belles-lettres,  dans  les 
séancps  des  31  mars  et  li  avril  ISS2. 

2.  Gra  Kiy^ntili  drrroinamsflien  Sprachcn  {Grammaire  dr.^ langues  romanes],  troi- 
sième édition,  1869,  traduction  de  MM.  Brachet  et  Gaston  Paris;  i:i-8*,  Paris,  1374, 
t.  I,  p.  225-233. 

3.  L'ehcr  Auisprache,  Vocali<mus  und  Bclunung  der  laieinxschen  Sprache, 
deuxième  édition,  Leipzig,  1868-1870,  t.  I,  p.  48. 


302  RKVLK   AnCllKOLO(;IOUR. 

ScllUcharJl',  et  di'  M.  Ch.Jorct,  (jui,  en  dernier  lieii,  aeonsacréà  la 
lettre  c  un  travail  spécial,  rempli  de  faits,  île  liues  observations  el 
d'apereiis  in^jénieiix  -. 

Jus(iirà  la  lin  ila  n:uit-I':mpire,  le  c  latin  a  ou,  dans  toutes  les 
portions  et  iiuelle  <pie  liU  la  lettre  do!it  il  était  suivi,  la  valeur  jînl* 
lurale,  el  il  s'est  prououcô  connue  le  x  des  Groes.  Ce  point  est  hors 
(le  doute. 

Plus  tari,  et  ù  une  époque  qu'on  a  rherché  ii  dêlinir,  celle  con- 
sonne a  eu  de:ix  sons  diirùreuts  .suivant  la  lettre  ilvant  laquelle 
elle  était  placée. 

Devant  a,  o,  u.  au,  ou,  devint  une  consonne,  nu  à  la  linale,  c  csl 
resté  guttural. 

Placé  devant  c,  i,  ae,  oc,  il  a  perdu,  dans  !(>  domaine  romain 
pres(iue  entier,  son  anciciine  prononciation,  pour  devenir  une  sif- 
flante. 

A  quelle  date  el  comment  ce  phénomène  d'assibilation  s'est-il  pro- 
duit? Les  éruditscjui  s'en  sont  occupés  reconnaissent  (juil  règne 
encore  à  ce  sujet  de  l'incertitude.  Toutefois  il  y  a  des  |)oin!s  de 
repère  qu'ils  ont  oitservés  et  d'après  lesquels  ils  sont  arrivés  aux 
conclusions  suivantes  : 

1°  Pendant  toute  la  durée  de  l'empire  d'Occident,  c'csl-;i-dire 
jusqu'il  Tan  47(i,  le  c  latin  a  conservé  le  son  guttural  devant 
toutes  les  voyelles.  Celle  première  proposition  est  énoncée  sous  la 
réserve  de  faits  exceptionnels  qui  seront  mentionnés  plus  bas. 

2"  D'après  sa  valeur  dans  certains  mots,  qui  ont  passé  du  latin 
dans  l'allemand- el  qui  ne  paraissent  y  avoir  passé  que  depuis  les 
grandes  invasions  gernianiiiues  des  v'  el  vi*  siècles,  ce  mode  de 
prononciation  subsistait  à  ces  époques. 

3''  Les  transcriptions  grecques  de  groupes  latins,  dans  les  chartes 
de  Ravenne  des  vi'  el  vu*  siècles,  nionirenl  quelle  se  maintenait 
encore  dans  ces  temps-là  ^. 

4"  Pourtant,  déjà  aux  vr  et  vu'  siècles,  c  était  aussi  employé, 
dans  certaines  positions,  comme  une  sifllante,  el  il  faut  distinguer, 
pour  la  recherche  de  la  date  de  celte  nuuvelle  prononciation,  entre 

t.  Vocaiitmut  des  Vulgnrloteim,  in-S",  Loipiig,  1800.  t.  I,  p.  104. 

2.  Du  C  lians /es  langues  romanes;  liUt'dlt.  de  l'tvoic  /n-alviuc  des  Imuteê 
élwtft.  10»  fascicule  ;  l'uris,  187;,  pp.  ï.i  à  30  i-l  00  \  70. 

S.  Eiecnplc»  :  Career  a  fait  fo  allemand  «  Ku/kcr  »;  Celinrium,  aK.K\icr»:Cistn, 
■  KlUc  u. 

4.  Eiemplc»  :  ôt..ii  pjur '/«ff.71,  çtxiT  pour  fcctl. 


TRANSFORMATION    DU   C   (;UrTUIUt.    I)i:    LATIN.  303 

le  f  suivi  de  on  d'i  cl  d'une  aulic  voyolle,  et  le  c  placé  devant 
e  ou  /  l(iul  seul. 

li"  Dans  le  premier  cas,  l'a-ssibilalion  paraît  s'(Mre  pioduile  d'assez 
bonne  heure,  car  les  cliarles  int'Movingiennes  du  vu'  siècle  nous 
nuuilrrnl  c/eniplovô  concurreninienl  avec  //';  orf,  jdacé  devant  un  i 
suivi  d'une  autre  voyelle,  av;iit,  au  vi*  siùcle  el  peut-ôlie  dès  le  v', 
perdu  le  son  dental  pour  se  cliatifîcr  en  sifdante,  cl  au  vm*  siècle,  il 
pt'  pronon(.Mit  de[)uis  longlrmiis  tzi,  /.si,  zi  ou  si  ;  il  fallait  dunt;  rvi- 
deninieiit,  pour  (ju'on  lui  siibitiluàt  dans  les  Charles  r/,  ou  (ju'il  .'C 
substituât  ù  (•/■  (ce  (|ui  étail  (également  l'réiiuent)*,  il  fallait,  dis-j.-, 
que  ce  dernier  eût  une  valeur  égale,  et  (|uc  c  eût  perdu  le  son  gut- 
tural et  alïcclàt  cehii  du  /  liansformé,  c'i  sl-à-dire  de  (z  ou  ts. 

(')°  Il  en  fut  de  iiiéiue,  mais  un  peu  plus  lard,  dans  le  second  ras, 
c'e>l-à-dire  loisque  c  élait  devant  un  seul  e  ou  i.  Un  trouve  des 
exein[des  de  ce  changement  au  viir  siècle,  à  la  lin  du  vi»  et  même  au 
v'  siècle^  Dans  les  deux  cas,  d'après  M.  Joiel,  le  lail  était  le  résul- 
tai de  réhranlemenl  (jui  se  produisit,  lors  de  la  dc^slruttion  de  l'em- 
pire, dans  la  plioiiéii(iue  du  latin,  et  ([ui  affecta  surtout  les  guitu- 
lales;  et,  une  fois  cet  ébranlemenl  survenu,  il  n'y  avait,  dit-il  \ 
aucune  raison  pour  que  le  c  palatal  conservât  sa  valeur  oiiginclle 
devant  une  voyelle  simple  plutôt  que  devant  le  groupe  ia  ou  ius. 
Aussi  est  il  vraisemblable,  suivant  M.  Joret,  que  la  modification  qui 
nous  occupe  eut  lieu  simultanément  dans  les  deux  cas  indiqués,  ou 
que  du  moins,  si  elle  s'effectua  plus  tùt  dans  le  premier  que  dans  le 
second,  il  n'y  eut  entre  les  deux  faits  qu'un  intervalle  peu  consi- 
dérable. 

Je  dois  ajouter  que,  sur  cette  question  de  dates  relatives,  Diez  pro- 
fesse une  doctrine  différente,  car  il  considère  l'assibilation  dans  le 
premier  cas  comme  ét.mt  sensiblement  plus  ancienne  que  dans  le 
second. 

Quanta  la  cause  des  changements  survenus  dans  la  phonétique 
du  latin,  que  M.  Jorct  attribue  à  l'ébranlement  produit  par  la  des- 
truction de  l'empii'e,  je  ferai  observer  qu'il  serait  peut-être  plus 
exact  de  dire  qu'ils  commencèrent  à  se  produire,  et  s'accomplirent 
graduellement,  à  [)artir  des  invasions  ou,  mieux  encore,  des  intru- 


J.  Exemples  :  solacin,  perdicio^  racio,  à  côté  de  solaîio,  perdit io^  ratio. 

2.  Exemples  :  Martin  pour  Murcia,  .\futiui  pour  Mucius. 

3.  Aa  v«  siècle,  intcitiimento  pour  incitatnenlo ;  au  vi«,  /ja:c  pour  pace ;  au  vm» 
zeteroruiii  pour  ceteroruin, 

k.  Cb.  Joret,  Du  C  dans  les  langues  romanes,  p.  71. 


:]0\  REVUE   ARCni^.OLOGIQCK. 

sions  ou  des  innitrilions,  sur  les  terres  de  Tunipire,  de  races  bar- 
bares, dont  la  phonclicjue  diITcrail  si  profondénieul  de  celle  des  po- 
pulalions  latines  ou  laliniscVs,  et  qui,  au  iv'  et  m/'ine  au  m*  sicS'lc, 
piMuHiiVonl  lie  tout  s  parts  le  monde  romain.  M.  Joret  hii-mi^me 
n'estsan>doule  pas  bien  éloigné  deretle  manière  ilo  voir,  car,  après 
avoir  dit  que  <les  exemples  multiplic!(y  iippaiaissant  (le|)uls  le 
V*  siérie,  prouvent  (|iie,  à  dater  de  celte  époiiuc,  ti,  suivi  d'une 
autre  voyelle,  lendit  à  se  transformer  déliniiivemcnl  en  ts,  son  (jui 
fui  désormais  reconnu  comme  le  seul  régulier',  il  cite  des  exemples, 
dont  queliiues-im<  remontent  plus  haut  :  ainsi  tenninac'jones), 
rfe/j/jïcion/s,  de  2i0  à  2.']."i,  ocio  en  3H!I-.  De  même  pour  ti  suivi 
d'une  autre  voyelle,  changé,  dés  le  iv"  siècle,  en  -  '  ou  en  ss  re- 
doublé*. 

Telle  est,  en  résumé,  la  théorie  des  transformations  du  r  Inlin,  telle 
qu'elle  ressort  des  écrits  des  auteurs  cités  plus  haut:  résumé  défec- 
tueux sans  doute,  à  certains  égards  (comme  tous  les  résumés,  surtout 
eu  une  matière  si  coinpli(iuée),  par  roiniN>ion  partielle  de  périodes 
de  transition,  cl  par  une  indication  de  dates  peut-être  un  peu  irop 
précise  quant  à  raccomplisscment  des  [)liénoménes  de  changenuril 
dans  la  phonéti(jue,  c'est-à-diie  pour  ce  qu'il  y  a  de  plus  fui;ilif  et 
de  plus  mobile  dans  la  linguistique. 


II 


Il  est  à  remarquer  d'abord,  et  les  savants  précités  déclarent  eux- 
mêmes  que,  sur  la  (lueslion  dont  il  s'agit,  les  preuves  directes  font 
défaut,  et  qu'ils  y  ont  su[)pléé  par  des  témoignages  indirecls.  En 
second  lieu,  ces  témoignages  sonl  exclusivement  empruntés  aux 
auteurs  de  l'antiquité  et  du  moyen  âge,  aux  inscriptions  et  aux 
chartes.  On  n'en  trouve  aucun  qui  soit  tiré  de  rarchéologie  propre- 
ment dite  ou  de  la  numismatique.  On  ne  rencontre  pas  même,  dans 
les  ouviagis  publiés  sur  ce  sujet,  la  mention  d'un  travail,  peu  dé- 
velojqié  il  est  vrai,  (lue  M.  Henri  Cohen,  le  laborieux  et  savant 
auteur  de  la  Description  historique  des  monnaies  romaines'',  a  fait 

1.  0/1.  rit.,  p.  08 

2.  /Ajrf. 

3.  Op.  cit.,  p.  87. 
A.  P.  08. 

6.  I, 'Académie  des  intcr  ;;i"(i-,  ii  bellislcllK  s  a  déccrnû,  en  1602,  lo  prix  do  nu- 
mUmitique  à  c«i  itoportaut  ouvrage. 


TRANSFORMATION    DU   C   GUTTURAL   I>U    LATIN.  303 

pnntlre  on  IH.'li,  sous  lo  lilro  (VE^aiidi  sur  la  véritable  prononcia- 
tion du  latin,  tl'aprrs  h's  nirilailli's  antiijucs*. 

Les  exiMiiphs  (pio  je  v;)is  si},'naler  à  l'allenlion  des  érulils  don- 
neront une  iilrc  du  parti  corisidérahlc  (jii'on  peut  lircr  dos  Irgiîndes 
inscrites  sur  les  monnaies  et  sur  les  (il)jcts  d'art  ou  autres  jirovcMant 
des  époijues  où  durent  ^'opérer  les  liansforinations  qui  nous  oc- 
cupent. 

Le  premier  de  ces  exemples  nous  est  fouini  par  un  vase  en  verre 
de  couleur  verte,  de  forme  hémispliériijue,  qui  faisait  partie  du 


mobilier  d'une  tombe  mérovingienne  fouillée,  le  l'y  mai  1880,  par 
M.  l'abbé  Hamard,  au  lieu  dit  le  Mont-d' -Hennés,  commune  de 
Hernies,  département  de  l'Oise,  et  dont  une  description  a  été  in- 
sérée au  Bulletin  de  la  Société  des  antifjiiaires  de  Fnince  -.  Ce  vase, 
dont  la  surface  est  imbriquée,  est  orné,  au  pourtour,  de  chevrons, 
et,  H  la  partie  inférieure,  d'une  rosace  autour  de  laquelle  est  une 
inscription  rélrogra^le,  précédée  ou  suivie  d'une  palmotle,  le  tout 
moulé  avec  le  verre.  Nous  reproduisons  ici  le  dessin  de  ce  vase. 


1.  Fievue  numisinattqur,  première  sûrio,  t.  XIX,  pp.  200  et  suiv.  M.  Cohen  a  traité 
des  lettres  C,  II,  J,  U  et  des  diphtongues  OU  et  AV.  Il  a  dL-moiitré  (pages  302 
à  304),  d'après  des  exemples  empruntés  aux  monnaies  romaines  de  la  république  et 
de  l'empire,  (|ue  les  Romains  prononçaient  le  c  en  toute  occasion  comme  le  x  des 
Grecs,  et  que  Caisnr  ou  Cuesar,  Coilius  ou  Coelius,  Cito  ou  C/ul'j,  se  disaient 
Kaesar,  Kodius,  Kilo. 

2.  Année  1880,  i»  trimestre,  p.  228,  n"  10  de  la  plaucbe. 

\L1V.  —  20 


306  RKVLR   ARCHÉOLOGIQUE. 

On  y  lit  en  rarnrtiVes  irùs  pleins  et  trt"*s  nets  : 
OFIKINA    LAVRENTI    V 


Nous  dirons  bicntût  pourquoi  la  dernière  lettre  V  doit  Cire  isolée 
ilu  nom  du  UKiiire  de  l'atelier. 

K,  uns  ici  à  la  place  de  C,  est  une  preuve  directe  et  irrécusable  de 
la  persistance  de  la  valeur  gutturale  de  celte  dernière  consonne 
dans  la  période  niérovinj,Menne;  et  ce  fait,  dont  on  ne  connaissait 
pas  encore  d'exem[de  à  cette  époque,  est  rendu  plus  intéressant  en- 
core i»ar  un  rapprochenienl  ijui  nous  pernietlra  de  fixer  avec  une 
très  grande  vraisemblance  le  lieu  et,  approximativement,  la  date 
de  la  fabrication  du  vase  du  Mont-de-IIermes. 

La  marjue  OfUinn  Lnurenti  nous  a  remis  t;»ut  aussitiM  en  ni6- 
nioirc  une  monnaie  célèbre,  un  tiers  de  sou  d'or,  portant,  au  droit, 
le  nom  de  l'empereur  Maurice  Tibère,  et  au  revers,  dan^j  le  champ,  le 
chrisme,  po^é  sur  un  petit  globe  et  accosté  des  lettres  A  et  CO,  avec 
une  légende  circulaire  ainsi  conçue  : 

+  VIENNA  DE  OPFICINA  LAVRENTI. 


THWSI'nilMATIO.N    DU   C   GUTTURAL    DU    LATIN.  :K)7 

Ccllo  pkVc,  (|iii  psl  ;iu  caliinrt  des  in(''(lnill('s  de  l.i  niljliolht'que 
n;ilii)ii;il('  cl  ([lie  nous  y  avori:;  (Hudiùo ',  a  élé  piihli»';'»;  pour  l.i  pre- 
luièn'lois  par  Houtorouo  en  lOOO*,  rcproiluiUî  c.ix  1710  par  de  Hoze', 
et  en  l.S.'iî  p.n-  M.  (]|i.  Leiiornianl,  dans  la  licnu'  nuiiiisjiitiliijne,  sur 
une  des  pl.iiii  lies  qui  acc()nipa},'ti('nl  s;i  XI"  Icllie  à  M.  île  Saulcy 
relative  aux  plusancicns  monuments  nuinismali(iues  de  la  série  mé- 
rovingienne '. 

La  lorniule  désignant  roflicini'  du  monnayer  est  peu  usitée  dans 
cette  période,  puisque  l'on  n'en  connaît  (jiic  deux  autres  exemples, 
qui  remonleiM,  comme  ctdui-là,  à  la  seconde  moitié  du  vi'  siècle,  el 
sont  égaleunnt  fournis  i)ar  la  vallée  du  Illiône"'.  Il  est  donc  tout 
nalund  de  la  rapprocher  de  la  marque  inscrite,  dans  les  mêmes 
termes,  sur  un  vase  faltri(jué  \rvf,  la  mrme  (époque,  par  un  artisan  du 
même  nom.  (lelle  tiiple  coïncidence,  (jui  w  paraît  pouvuir  être 
rellt'l  du  liasard,  autorise,  ce  me  semble,  à  considérer  les  deux 
objets,  vise  et  médaille,  comme  étant,  suivant  toutes  les  probabi- 
lités, sortis  du  même  atelier. 


1.  Ce  Irions  appartenait,  au  moment  où  il  fut  édité  par  Bouteroue,  i  M,  Seguin 
doyeu  de  Saiiit-Geniiain-l'Auxerrois,  ()ui  Tavail  eu  de  M.  Vaclion  de  la  Rociie,  con- 
seiller au  parlement  de  Ga-noblo.  Après  la  mort  de  M.  Seguin,  il  passa  avec  toute  sa 
collection  dans  le  cabinet  du  roi.  Nous  empruntons  ces  détails  à  un  mémoire  du  de 
Boze,  intiiul«5  lièfluxions  sur  une  médaUle  d'or  de  l'emp'ireur  Mnitricc,  et  inséré  au 
tome  XV  (p.  Z|82}des  Mànoiresde  rAcad.iles  inscr.  et  helliuf-lettres-,  ir«séritî.  Dans 
ce  mémoire,  sur  lequel  uous  reviendrons  plus  bas,  de  Boze  fait  connaître  que  le  mar- 
quis de  Caumontlui  envoya  une  pièce  semblable  à  celle  dont  il  est  ici  question,  et 
qui  venait  d'être  trouvée  dans  les  (erres  de  ce  personnafc'e,  près  d'Avignon. 

2.  Hechercfics  curieuses-  des  luuimoies  de  France,  p.  130. 

3.  MtiDi.  de  l'Acud.  des  inscr.  et  bv  II  es- lettres^  1"  série,  t.  XV,  p.  /|S2. 

4.  hev.  tium.,  l'«  eérie,  t.  XIX,  pi.  Xlll,  n"  11. 

5.  On  connaît  en  effet  :  1°  deux  tiers  de  sou  d'or  portant  au  droit  le  nom  de  l'em- 
pereur Jusîinien,  et  au  revers,  DK  OFICKXA  -MAHET,  avec  un  nionogramme  d.ms 
le  cliaHip  (B.  Fillon,  Considérât,  sur  tes  monn.  de  France,  pi.  II  ;  I\ev.  wnusm.,  1844, 
pi.  1,  n°  3,  et  1854,  pi.  XII,  n»  12);  M.  Cli.  Leuormant  a  interprété  le  monogramme 
par  Viennensis  ecelesia  Uicv.  num.^  1854,  p.  322),  mais  à  tort  suivant  nous;  la 
lettre  L  poiulée,  qui  est  au  droit  dans  le  champ,  désigne  la  cité  lyonnaise;  2°  deux 
tiers  de  sou  de  la  colleciion  de  .M.  de  Ponton  d'Amécourt,  portant  au  revers  :  DE 
OFFICI.NA  .MAVIÎliMl  {Annuaire  de  la  Soc.  franc,  de  nuinist/tat.  et  d'arr/iéologie, 
année  1800,  p.  UTj.  Le  monogramme  gravé  dans  le  champ  de  ces  pièces  est  sem- 
blable à  celui  du  triens  de  Maret,  et  il  nous  parait  vraisemblable  que  ces  quatre 
médailles  sortent  de  la  môme  officine.  11  y  a  aussi  quelques  rares  exemples  de  mon- 
naies impéri.des  portant  en  légeude,  au  revers,  o/^c//irt  en  toutes  lettres  ou  seule- 
ment o/".,  suivi  du  nom  de  la  ville  où  était  l'atelier,  mais  sans  nom  de  monnayer  : 
ce  dernier  vocable  ne  parut  qu'après  la  chute  de  l'empire  d'Occident;  on  trouve 
notamment  des  pièces  avec  l'inscriptioa  :  Of/icina  Lugduni. 


308  HEVlE  AUCiii:oi.(ir,i(jir. 

Di  plu"?,  le  V  plncL^  à  la  fin  .le  la  mar-iue  ihi  verrier,  h  la  suite 
du  nom  Je  Laurenti,  lequel  esl  iiéressiiiicnuMil  décliné  uu  tiéiiilif, 
devient  iogiiiuenienl  l'initiale  du  Vienna  de  la  nioiinaie,  el  nous 
avons  alors  la  reproduction  presijue  intét,Male  de  la  légende  Vii'nna 
de  offiana  Lnunuti. 

Notre  iriens  nous  procure  ainsi  un  double  el  précieux  avantage  : 
1"  il  fixe  la  position  de  râtelier  df  Luirent,  ;^  la  fois  monnayer  el 
veriier,  ;\  Vienne  en  Daupliiné,  ancienne  coionif  louiaine,  chef-lieu 
de  la  province  viennoise;  2°  il  délerniine  a|ipro\inialiveineiil,  par 
la  durée  du  réjjne  de  l'enipereurMain  ice,  au  nom  duipiel  il  esl  frappé, 
la  date  de  la  fabriiation  du  vase.  Maurice  succéda  à  Tihére  en 
582  el  mourut  en  ()U2;  c'est  donc  dans  la  période  comprise  entre 
CCS  deux  années  (|ue  se  placeraient  les  deux  nutiiumcnts  (jui  nous 
occupent.  Peui-étre  même  n'esi-il  pas  impossible  de  resserrer  cet 
intervalle  el  d'obtenir  une  date  encore  plus  appro\in:ative;  c'esl  ce 
que  nous  allons  tenier. 

Kn  ll'kV),  un  membre  de  l'ancienne  Académie  des  inscriptions  el 
belles-lettres,  Bonamy,  donna,  dans  un  long  mémoire,  l'expli- 
cation du  nombre  considérable  de  monnaies  d'or  frappées  a  Mar- 
seille, Arles,  Vienne,  Valence  el  Viviers,  au  nom  de  l'empereur  Mau- 
rice Tibère,  après  une  période  de  dix-sept  ans  où  le  monnayage,  en 
Gaule,  au  nom  des  empereurs  régnant  ù  Constantinople,  avait  été 
interrompu  presque  entiéiement  sous  l'un  des  deux  prédécesseurs 
de  Maurice  et  complètement  sous  l'autre';  il  expliqua  ce  fait  par  la 
tentativede  Gondovald,  qui  sedisait  (Ils  naturel  de  Clolaire  1",  et,  après 
s'élre  réfugié  dans  le  nord  de  l'Italie  en  oOi  et  de  là  à  Constantinople 
en  o6.),  revint  en  Gaule  avec  l'assistance  de  Maurice,  débarqua  à 
Marseille  en  ;i8:j,  occupa  plusieurs  villes  des  bonis  du  Khône  else  lit 
reconnaître,  à  la  fin  de  l'année  ris't,  dans  la  Provence,  l'Auvergne,  le 
Limousin,  l'Augoumois,  la  Sainlonge  cl  les  pays  situés  au  sud  de  ces 
provinces,  (iondovald  fut  élevé  sur  le  bouclier  et  proclamé  roi  à 
lirive  en  Limousin.  Mais,  bienlùl  abandonné  par  les  cbels  (jui  l'a- 
vaient soutenu  jus(iue-l;i,  il  essuya  des  défaites,  alla  s'enfermer  dans 
Lugdunnm  Conicuarum  (Sainl-Berlran  I  de  Comminges]  et  périt  par 
trahison  sous  les  murs  de  celle  place  fortifiée,  au  commencement  du 
mois  de  mai  de  l'an  58.j.  Ainsi  finit  celte  expédition,  dont  Grégoire 
de  Tours  nous  a  laissé  le  dramaticjue  récit-. 


1.  Nous  avons  confacré  à  ce  point  do  f;iit   une  di&Bcrtation  spéciale,  dont  la  pu- 
blication suivra  de  pr^*  elle  du  présont  mt'moire. 

2.  llutona  ecclesiuitica  Fiuncoruin,  VI,  2i,VII,  lOclBuJv. 


rnANSFORMATlON  HU  C  nUTTUIUl.  DU  I.\TI\.         309 

En  échnngo  de  l'nppui  qu'il  av.iil  rrni  dn  Maiirire,  Gondovald 
s'él.iilforl  proijablement  en},Mgt;  à  rvlahlir,  d.ins  les  fitjl»  dont  il 
prcndr.iit  possession,  la  siiprôimilie  impériale,  bien  alTaihIie  ou  plu- 
tôt à  p'Jii  prùs  (li<p:ini(*  do  la  tern'  gauloise.  Tflle  ^tail  du  moins  la 
cioyancc  îles  ronlcmpoiains,  d'après  un  passage  de  (îrégoire  de 
Tours'.  Or,  ajoute  l'aulcur  du  mémoire  que  nous  analysons,  Gondo- 
vald  lie  pouvait  faire  aucun  acte  nianiuant  mieux  la  souveiaineté 
impériale  (|ue  de  faire  frapper  des  monnaies  au  nom  du  prince  ré- 
gnant }i  Hyzance;  aussi  esl-ii  grandement  à  présumer  que  rémis- 
sion de  sous  et  de  tiers  de  sou  d'or  (pii  eut  lieu,  dans  les  grandes 
cités  de  la  vallée  du  Ulione,  au  nom  de  Maurice  Tibère,  correspond 
au  temps  (|ue  dura  l'expédition  du  prétendant-,  et  dut  cesser  peu 
après  son  issue  tragiiiue. 

IVaprés  cette  explication  de  Bonamy,  c'est  donc  entre  l'année 
583,  ou  plus  vraisemblablement  l'année  o8-4,  et  la  fin  du  mois  de  mai 
5H5  (|ue  le  triens  de  Vienne  à  la  légende  Dr  officina  Laureitti  aurait 
été  frappé;  et  c'est  par  suite  vers  la  même  époque,  ou  du  moins  à 
une  époque  qui  n'en  serait  pas  éloignée,  qu'aurait  été  fabriipié  le 
vase  sorli  de  l'atelier  du  môme  artiste  ou  artisan,  avec  la  marque 
Ofikina  Lnureuli. 

En  tout  cas,  du  rapprochement  de  ces  deux  monuments  archéolo- 
giques il  résulte  une  preuve  directe  de  la  persistance  du  c  guttu- 
ral devant  t  seul,  dans  une  région  tiéterminée  de  l'ancienne  (îaule, 
sous   l'empereur  Maurice ,   c'est-à-dire  entre  les  années  582   et 

6oe. 


III 


Ce  n'est  pas  tout;  la  même  monnaie  nous  fournit  une  autre  indi- 
cation fort  curieuse  et  intéressante  pour  l'étude  des  changements 
dans  l'articulation  du  c  à  la  fin  du  vr  siècle. 

Nous  avons  reproduit  plus  haut  la  légende  du  revers  de  celte 
pièce;  voici  maintenant  la  légende  qui  est  au  droit  et  qui   entoure 


1.  VI,  2!i,  édit.  Guadct  et  Taranne,  t.  I.  p.  /il7. 

2.  Telle  est  aussi  l'opinion  eipriinée  d'une  manière  très  décidée  par  M.  Ch.  Le- 
normanl  dans  sa  XI'  lettre  sur  les  plus  anciexi  nionum.  nuimsmat.  de  la  série 
méroving.,  lier,  num.,  \"  série,  t.  XIX,  pp.  306-309,  et  par  M.  de  Saulcy  dans  son 
Essai  de  classiflcalion  des  suites  monétaires  byzantines,  pp.  36-37. 


310  nKvuK  AncnKOLOfiiouE. 

rt'fni,'ie  impiVi.ilo  ;  elle  est  vemu'  fort  nollt-mcnt  sous  le  coin  cl  la 
letluiv  u'iMi  i'>l  «loulciiso  dans  aucinu»  ilc  sc<  pailifs  : 

DN    COA  RlOOCIVS    PP    AV. 

On  remarquera  l'  S  rou  •lié,  (jiii  esl  an  milieu  du  nom  de  Mau- 
rice. Un  des  plus  haliiles  areiiéDJogiics  de;  l'aruMOtine  Acadt'uiie  des 
inscriptions  il  hellcs-lellres,  de  IJoze',  proposa  d'y  voir  la  siple  de 
Sdiictus,  et  de  consiilérer  la  pièce  (|ui  nous  oiTupe  eonime  l'ianl 
une  nu-daille  votive,  frap[)t''e  en  riionneur  de  siinl  Miiiriee,  p  ilron 
de  l'église  métropolitaine  de  Vienne;  «m  devait,  d'.iprès  sou  avis, 
traduire  ainsi  l;i  li},'eiide  eiitièie  :  Ddininus  tiostd  MAVRICIVS 
Sanclus  PcrFrlHHx  A^yintus-. 

Mais  les  objections  abondent  contre  une  telle  inlerprélaiion. 

Il  n'y  a  point,  croyons-nous,  d'exemple  ([u'à  aucune  époque  on 
ait  fait  suivre  le  nom  d'un  saint  de  ces  deux  (jualiliratifs  perpe- 
iuus  et  augustiis. 

Nous  connaissons  une  certaine  quantité  de  sous  ci  de  tiers  de 
sou  au  nom  de  Maurice,  sortis  des  ateliers  d'Arles,  de  Marseille  et 
de  Valence,  dont  ils  portent  les  dilTérenls^.  Comment  expliquer 
qu'on  eût  frappé,  dans  ces  trois  cités  et  avec  leurs  marques  re>pec- 
tives,  une  médaille  en  l'honneur  du  patron  de  la  ville  de  Vienne? 

Ces  mômes  pièces  ont  au  droit,  sauf  le  S  renversé,  la  même  légende 
que  celle  de  Vienne;  (juelques-unes  portent  en  plus,  à  la  suite  du 
nom  d"  Mauricius,  celui  de  son  prédécesseur  et  beau-père,  l'empe- 
reur Tibrrius. 

Kniin,  elles  présenteni  au  revers  :  1°  Victoria  Ainjusloruin,  el  ea 
exergue  la  mar(jue  immobilisée  Conob,  qui  a  été  diversement  com- 
prise ;  2"  les  lettres  numérales  XXI  sur  les  sous  d'or,  et  VII  sur 
les  tiers  de  sou,  lesijuelles  expriment  le  nombre  de  siliques  con- 
tenu dans  les  uns  et  dans  les  autres. 

Toutes  ce<  inscriptions  sont  incontestablement  celles  de  mon- 


1.  De  Onze,  qui  occupa  la  charge  de  garde  des  médailles  du  cabinet  du  rui,  était 
entré  fort  Ji-um*  à  l'Académie  des  iutcriptions  et  bulles-lettres,  dont  il  devint  le  secré- 
taire perpétuel  4  l'Age  de  vingt-six  uns. 

2.  Mé'i'.  lie  rArad.  des  inscri/it.  et  brll.  Irtt.,  1"  série,  t.  XV,  pp.  482  cl  suir. 

3.  Uem.  fie  l'Acud.  des  inscr.  et  l/eU.-icll.,  t.  XX,  pp.  209  et  210  et  \>-a  planclies 
Ret.  uum.,  1"  série,  t.  XIX,  pi.  Xili,  n*  1;  Conibriune,  Hecueil  de  000  motiét.  mé- 
rof.,    pi.    LIX,  U'»  1  cl  3  ;  l'unlun    d'AoïccOurt,    Lstui  sur  la  nuimsmat.  im'rov., 
pp.  10»  et  174. 


THANSFOUMATION    DU   C   (X'TXrRAL    hV    l.\TIN.  3!1 

naios,  et  il  est  de  l;i  dcrniùn;  (''vidcncn  (uraiinine  d'elles  ne  saurait 
convenir  ;\  une  médaille  volive  en  riionneiir  diiii  saint. 

L'hypollu'ise  conçue  par  de  Hoze  est  donc  absolument  inadmissi- 
ble ù  tons  l(;s  points  de  vue.  I.a  pir-cc  en  (jueslion  est  bien  un  tiers 
de  son,  frappé  au  nom  de  l'empereur^Mauricc  Tibère,  el  la  légende 
du  droit  doit  être  interprétée  ainsi  : 

D{ominus)  H{oster)  MAVRISCIVS  P{cr)?{rtuus)  AW{giistm:. 

Cela  posé,  nous  avons  à  examiner  la  valeur  d'une  autre  conjecture 
émise  par  l'abbé  Diibos  sur  la  signilicalion  p.irticnliére  qu'aurait  eue 
le  S  couché  ijui  est  inleicalé  dans  le  nom  de  Mduricius. 

Le  célèbre  auteur  de  Vllistoirc  critique  de  l'établissement  de  la 
monarchie  française  dans  les  Gaules  a  cru  y  trouver  l'initiale  du 
nom  du  comte  Syagiius,  qui,  d'après  un  passage  de  Frédégaire, 
ayant  été  envoyé,  en  o87,  par  le  roi  Contran,  en  ambassade  à  Cons- 
tantinople,  fut  élevé  par  l'empereur  Maurice  Tibère  à  la  dignité  et 
aux  fonctions  de  palrice,  avec  le  dessein  de  rétablir  dans  la  Gaule 
Tautorité  de  l'empereur  byzantin'. 

Bonamy,  qui,  dans  le  mémoire  déjà  cité,  a  discuté  cette  opinion 
de  Uulios,  la  reproduit  en  ces  termes  :  «  M.  l'abbé  du  Bos...  croit 
qu'en  vertu  du  diplôme  de  l'empereur  .Maurice,  qui  l'avait  élevé  au 
patriciat,  Syagrins  voulut  se  faire  reconnoitre  pour  un  oflicier  de 
l'empire;  d'où  il  conclut  que,  dans  le  temps  où  se  tramoit  ce  com- 
plot, quelques-uns  des  adliérans  de  Syagrius  tirent  frapper  dans 
Vienne  la  monnoie  dont  il  s'agit...  On  peut  encore,  ajoute  M.  l'abbé 
du  Ik'S,  appuyer  la  conjecture  que  je  bazarde  sur  ce  qu'il  y  a  dans 
la  médaille  de  Vienne  une  S,  laquelle  coupe  les  leitrcs  qui  compo- 
sent le  nom  de  Maurice,  et  que  cette  lettre  est  la  première  du  nom 
de  Syagrius  -.  » 


1.  «  Anno  XXVII  ejusdem  regni  (Guntchrammi) 

Ipsoque  aiiiio  Syagrius  cornes  Constantiiiopolim,  jussu  Guntchramni ,  in  lega- 
tione  pcrgit,  ibi(|ue  fraude  patricius  ordinaiur.  Cœpta  quidem  est,  sed  ad  pcr- 
fectionem  liaec  fraus  non  peraccessit.  »  Fredcpiir.  Scliolastic,  Chronicum,  cap.  ti  ; 
dans  Bouquet,  Histor,  de  France,  t.  II,  p.  418. 

2.  M' m.  (IcrAcad.  des  i>f;cr.  et  hell.-lett.,  1"  s(*rif,  t.  XX,  pp.  208-209.  Nous 
avons  reclierclié  cette  conjecture  dans  le  tome  III  (p.  209j  de  l'Htstoire  crilifjue  de 
l'établissenicitt  de  lu  monnrchie  fnmçoise,  où  Dubos  s'est  occupé  de  la  leulative  do 
Sy:igrius;  nous  y  avons  trouvé  la  citation  de  Bunamy,  ^uuf  en  ce  qui  concerne  lo 
sens  du  S  couché  de  Mauriscius,  qui  avait  peut-être  été  l'ubjet  d'une  coiumunica- 
tiOQ  spéciale  de  Dubos  à  l'Académie. 


31  J  1\RYIK    Ancm^OLOCIOLT.. 

Bonamy  ileVlarc  cnsuito  que  celte  expliralion  est,  à  ses  yeux,  in- 
soutcii.ilile,  p.irc»»  (|u'eii  ttS?,  alors  que  (îonlran  rêgniil  sans  coii- 
leslesiir  i*es  pailics  de  la  (laiile,  il  n'y  avait  pis  (r.ipparciire  (ju'on 
eût  osé  battre  monnaie,  (lan>«  la  ciié  viennoise,  au  roiu  de  l'empereur; 
«aussi,  (lit-il  en  tenniiiaiil,  M.  l'ahlu^  du  Hos  ne  donne-l  il  celle  ex- 
plication «lue  comme  uni*  pure  conjecture,  d 

Elle  a  t'tè  pourtant  reprise,  en  IS'ii,  par  M.  (",li.  I.enormanl,  qui 
s'esl  elToné  de  la  léliabililer.  Il  a  f.iit  oliserver  (jue  l'entreprise  de 
Syagrius  recul  peul-iMre  un  commencement  d'«  X('tulion,et  il  a  pensé 
qu'on  ne  (le\;tii  lien  voiid'impossible  à  ce  que  ce  personnage,  à  son 
retour  de  Cotislaulinople,  ciU  fait  reconnaître  son  autorité  de  patrice 
et  celle  de  rempereuiilans.iuelques  cités  du  Midi  cl  jusqu'à  Vienne, 
ce  qui  expli<iuerait  la  présence  de  son  luilialc  sur  le  Iriens  fabri- 
qué dans  cette  ville  '. 

Rappelons  d'abord  que,  d'après  les  expressions  employées  par 
Fréilégaire,  cœpta  quidem  est.  scd  ad  perfcctionem  hnc  frans  non 
peracccssit,  le  complut  dut  avoitcr  cumiilèlemciit,  c'esl-r.-dii"e  recevoir 
à  peine,  s"il  en  reçut  aucun  en  (laule -,  un  conimeucement  d'exécu- 
tion. .Mais,  dans  le  système  de  M.  LcnoiiiLinl,  il  f.uidrail  bien  plus 
encore;  car,  avant  de  parvenir  à  Vienne  et  d'y  établir  son  autorité 
de  manière  à  y  faire  battre  luonnaie,  au  nom  de  .Maurice  et  avec  sa 
propre  initiale,  Syagrius  aurait  dû,  après  sou  débarquement  ;\  Mar- 
seille, se  faire  acce|)tcr  comme  patrice  dans  cett>.'  cité,  et  successive- 
ment dans  celles  d'Arles  et  d'Avignon;  ce  tiui  suppose  une  série 
de  succès  (jue  contreilisent  les  paroles  de  rauriali>le,  et  (jue  rend 
bien  invraisemblable  le  silence  absolu  que  tous  Ie-«  liistoriens  au- 
raient gardé  sur  ces  graves  événements. 

Ensecond  lieu,  l'idée  de  faire.' constater  son  liire  jinr  l'intercala- 
lion  d'un  ^',  iniliaie  de  sou  nom,  au  milieu  du  vocable  impérial, 
dans  une  légeiide  monétiire,  n'eût  pas  été  seulement  bizarre  et  pué- 
rile; elle  risi|uait  encore  plus  d'être  ineflicace,  car  il  y  avait  de 
grandes  cbances  pour  (pr<'l!e  restât  incomprise  et  méine  inaperçue 
dc^  populations  dont  on  aurait  voulu  frapper  l'attention. 

Qaanlùla  particularité  du  S  couclié,  à   laquelle  on  parait  avoir 

1.  Bfv.  num.,  \">h(T\o,  t.  XIX,  p.  310-317. 

1.  Voici  coiiiri.ciil  Diilios  a  tiitcndu  ce  passaRO  de  Frédi'fjairc  :  «  I.a  tra'sino  ayant 
été  d«*'rouv<TiP,  ••ll<"  df  m«'ura  sans  rffel  ;  c'i'st-à-dirc  ijiu'  Maiirico  n' voiiua  It;  diplôme 
en  vcrlu  du'im-l  Sy:'grius  ili-voil  se  fair»;  n-connoistre  dans  les  (i.nilcs  pour  un  oflliicr 
de  l'cuipire  ou  ijuc  ce  Koiiuiii  ii'o&a  lo  publier  ni  lenlfrdc  s'iu  prûvaloir.  u  Loc.  ctt  , 
p.  309. 


TnANSFOIlMATIUN    DU    C    GUTTUIUI,    DU    LAI  IN.  313 

altarlu*^  do  rimporinnro,  ('Il(»  nVn  a  vt'ritnhlpmont  aiiciirie  :  le  mon- 
nay.'i^'O  hyzaiiliii  el  lis  monniyagtîs  vi.si;,'()lli  cl  in(''roviii;,'icn  nous 
oITrcnl  de  tort  noinitreiix  exein|iles  de  celle  Icllre  ainsi  li^'urén,  laiilôl 
dans  le  hul  de  remplir  un  cspact'  trop  éliMidu  pour  la  lé^'emle, 
taiilôl  cl  plus  souvi'Ul  sans  doulc,  par  un  siiipi-'  (Mprire  du  graveur 
de  coins.  Les  planches  i|ui  accompagnent,  dnis  l.i  lipvue  nuinisiiia- 
tique,  le  travail  de  M.  (]li.  I.ciiorinant,  en  préseiiteiil  à  elles  seules 
sejit  f-rniiplcs^;  et  aux  yeux  de  tous  les  nuinisinati>les,  de  M.  VA\. 
LeUDiiMaiil  liii-iut"^uie,  celle  lettre  n'en  faii  pas  moins  partie  inl'"'- 
grante  ilu  n.)ui  dans  leijUfd  elle  est  inlercalée,  ou  à  la  suite  duiuel 
elle  esl  inscrite;  et  persontie  n'a  songé  et  ne  songe  à  lui  attribuer 
une  signification  spéciale.  Toutefois  il  esi  nécessaire  d'expliquer 
l'emploi  qui  en  a  été  fait  ici. 

Lee  lie  iW'/»r/c/«s  est  devant  un  t  suivi  d'une  autre  voyelle,  et 
nous  avons  vu  plus  haut  ipie,  selon  l'avis  unanime  des  linguistes, 
celte  consonne,  dans  de  telles  conditions,  a  perdu  de  bonne  heure  :a 
valeur  gutturale  el  pris  celle  d'une  sildante. 

On  écrivait  en  elïel,  in. iilîéreuinienl,  au  vu' siècle,  pro;3i/io  et  pro- 
picio,  pretiuin  ou  picciuin;  d'où  l'on  a  Justement  induit  que  c  se 
prononçait,  en  pareil  cas,  comme  le  //,  traiisloiiué  en  tzi  ou  tsi, 
ou  zi  -.  Mais,  au  siècle  précèdenl,  l'assibilation  du  c  n'était  pas  en- 
core bien  établie,  et  il  régnait  alors  sans  doute,  comme  à  toute  épo- 
que de  transition,  de  l'incêrtilude  dans  le  mo  le  d'articulation  de 
cette  consonne.  En  plaçant  un  s  devant  le  c  de  Mauricius,  le  mon- 
nayer, ou  son  graveur  de  coins,  a  voulu  sans  doute  déterminer  la 
prononciation  sifflante  de  cette  dernière  consonne. 

Ajoutons  que  si  le  fabricant  de  notre  triens  avait  intentionnel- 
lement gravé  ou  fait  graver  le  S  méJial  dans  la  position  hurizonlalc 
où  nous  le  voyons,  ce  n'aurait  pu  être  que  dans  le  bul  d'accentuer 
d'une  manière  plus  sen>iblece  mode  d"arliculatio:i. 

Telle  est  l'explication,  très  simple,  d'une  circonstance  qui  a  sug- 
géré les  étranges  conjectures  que  nous  avons  rapportées  et  discu- 
léesplus  haut. 

11  esl  intéressant  de  constater  que,  tandis  que  le  monnayer  Lau- 
rent marquait  ainsi  l'assibilation  du  c  suivi  de  deux  voyelies  au 


1.  Voir  fier.  7ium.,  V  série,  t.  XiX,  pi.  XI,  n»' 5,  Gel  8;  pi.  XII,  n*  11;  pi.  XIU  , 
n<"  12  ot  13  ;  pi.  XIV,  11"  i.  Si;;nalous  ea  particulier  le  n°  8  de  la  plaiuliti  XI,  ou  0!i 
lit  :  DN  IVCOTINI ANVCO.  n  y  a  aussi  beaucoup  d'exemples  de  S  gravé  à  re- 
bours :  2,  Comme  dans  le  n"  ^  de  la  plauclie  XIV. 

2.  Voir  Joret,  Du  C  dans  les  langues  romanes,  pp.  311-313. 


314  nr.vrR  AnrnKoi.or.iouK. 

droit  du  Iricn?  fnpp^  à  Vienne,  sous  le  r^|Itl(»d('  Manrir<»,  il  s'al)>tp- 
iiait  de  ce  prorclt''.  dans  la  [«'{îcndc  du  rexcts,  à  l't'jîard  du  c  suivi 
d'un  I  >eul  A'ofjit'ina^  lui  l.iissanl  sa  valeur  i;uitiiralp,  It'lieijue  \\  mar- 
quail encore  très  nellenieut  riiiscriplioii  ofiliina  du  vase  de  verre  la- 
briquè  par  ce  mùuic  Laurent. 

IV 

Il  me  reste  h  parler,  en  terminant,  de  deux  monuments  ruimis- 
mali«]ues  qui  tou^iienl  i^fîih'nifnt  à  noire  sujtt;  ils  n'apportent 
point,  à  vrai  dire,  des  renseignements  nouveaux  ;  mais,  eu  conlir- 
niantli>s  informaiions  puisses  ;i  d'autres  sources,  ils  nou<  procurent, 
l'un  avec  une  date  ap|)roximative,  l'autre  avec  une  date  très  pré- 
cise, des  exemples  de  la  suhstitution  de  et  à  /i,  laquelle  impli<iuait, 
aiiii^i  que  je  l'ai  dit  plus  haut,  ridentiti''  de  valeur  des  deux  ^Toiipes. 

Le  premier  dp  ces  monuments,  dccrils  par  Banduri,  est  un  tiers 
de  sou  d'or,  portant  : 

Audroit,  nulour.le  l'eflVjie  imp('rial(\  DN  MAVRITI  PP  VG; 

Au  revers  :  VICTORIA  AVGG;  en  exergu.',  CONOB  '. 

Le  second  t>l  un  médaillon  de  bronze  de  grande  dimension,  pré- 
sentant : 

Au  droit,  autour  du  buste  habillé  et  orné  de  l'empereur,  MAVRI- 

TIVS; 

Au  revers,  ANNO  XI-  A,  et,  séparés  de  cette  lettre  par  un  large 
espace.  RE-. 

Dans  le  nom  de  Maurice  Tibère,  qui  s'écrivait  communément  et 
même  pic^iue  toujours  MAVRICIVS,on  a  gravé  ici  un  T  au  lieu 
de  C,  et  celle  forme  M>iuriliU!<,  (jui  se  re[iro  luil  fré(iuemment  dans 
des  périodes  plus  récentes  3,  montre  bien  que  l'assibiJation  de  et 
suivi  d'une  autre  vo\elle  était  opérée  à  la  date  fixée  jiar  le  revers 
du  médaillon  à  la  onzième  année  du  règne  de  Maurice,  laquelle 
tombe  en  51)3. 

On  voit,  par  les  exemples  que  nous  venons  de  produire  louchant 

1.  Banduri,  Numismnta  impenilur.  Romnnor.,  suj<plemeni.y  p.  39.1. 

2.  Op.  cW.,  I.  II,  p.  603. 

3.  Voir  noinminent  :  l'Uidnna Langobantor.,  de  P;iul,m«.  d«^l;il)iblioth.  d'Assise, 
du  *iii'M6cle  {Monumrnt.  G-rman.  /n.<it<>i:;Scnptûr.  rer.  huKjnlmnl.  et  liai.,  iu-4*, 
p.  125,  :  2»  EptsloluChilililM!$-ti,  etc.,  llis.  du  n'sitVlc:  P.irdi;5.sus,  Diplont.  et  ch., 
t.  I,  p.  100.  —Chrumc.  ilniisÙJC.;  PcrU,  ilouum.  Ocrman.  hiitor.  SS.,  1. 1,  l>.  286, 
D>.  du  11*  ou  !<'  siècle. 


TRANSFORMATION    DU   C    OUTTDRAr,    DU    I.ATIN.  HI*) 

les  changrmrnis  surveni]s  flans  la  phon6tr|iie  du  c  l.ilin,  quelles 
ressources  rarclirolnj^ie  el  suilout  l;i  nuiiiisiii:ilii|Uo  licriiieiil  en  ré- 
serve pour  les  sciences  pliilûl(){,'ii|ues,  et  comliien  il  est  ù  désirer 
que  ces  deux  brandies  iiiipoiUinle'»  de  I  érudition  soient  mises  à 
conlril)Ution,  sous  ce  rappor!,  plus  souvent  qu'elles  ne  l'ont  été 
jusqu'à  ce  jour  '. 

M.    DKI.OCIIi:. 


1.  Je  veux  parler  de  l'arclu'ologic  proproinont  dite,  car  los  nionumrnls  épigra- 
pliitiuos  ont  dKé.  lurgpiiiniu  utilisés  |p;ir"les  linguistes.  Il  iiV'st  (lup  juste  de  iiicntionnfr 
Ici  deux  cxcellfiils  travaux  de  M.  d'Arbois  du  Jubainville  :  \'  Lu  (Irclitinison  /atine 
en  Gaule  à  i'éjxxiue  mérovingienne  (Pari-,  1872);  2"  Etiulcs  t/ramniulicaies  sur  les 
/c/Mj/K'.'*  ceZ/jV/u^jT  (la  première  (lartie  vieui  de  jiaraltre,  Paris,  188ly,  où  ce  savaut 
a  mis  à  profil  les  légendes  mouétaires. 


liULLHTIN    Ml'A'SUEL 


DK    l/ACA  I)  KM  I  i:     I)i:S     l.N  S  C  i;  I  I'  I'  1  DNS 


MOIS  I)  o':toiihk. 


M.  Oppcrl  développe  SCS  idées  au  sujet  de  romjlaconioiit  de  Pasarfradc 
ol.  par  suite,  du  tftuibeau  de  Cyius,  faussement  plaiL'  à  Mur^jliab. 

M.  fiermain,  jneinbie  libre  de  i'Acadt'mie,  cuinuuiniqiic  uu  ciiapitrc 
iiiL^dit  de  son  [li'^toirc  de  V université  de  Montpellier,  concernaiU  la  faculté 
de  tht'olopie. 

M.  Nalalis  de  Wailly  fciriiinc  la  seconde  lecture  de  son  nit'moire  sur  la 
langue  de  Joinville. 

M.  Maurice  de  Pange  est  admis  à  coniniuniquer  un  lra\ail  relatif  à 
riiistuire  du  duché  de  Lorraine  au  xn'  siècle. 

M.  de  Laigne,  consul  de  France  à  Livourne,  adresse  un  estampage  pris 
sur  une  plaque  de  plomb  antique.  Celte  plaque  porte  une  inscription 
funéraire;  elle  était  évidemment  fixée  à  un  lomlteau.  M.  de  Laigne 
attribue  ce  monument  à  l'époque  àa  F  lavions .  Ce  monument,  dit  M.  de 
i.aii^ne,  provient  de  l'île  de  Sardaigni'.  il  y  a  lieu  d'attendre  de  nouveaux 
renseignements. 

.M.  Georges  Perrot  communique  un  mémoire  relatif  ;\  divlinit  cacliels 
d'argile  appartenant  à  M.  CiiistavcScliliimbergeret  trouvés  en  Asie  Mineure. 
Plusieurs  de  ces  monuments  portent  des  caractères  do  l'uncienne  écriture 
hittite,  {.es  grandes  inscript  ions  d'i'lj-'yiite  et  d'A>sy  rie  parlent  d'un  peuple  qui 
joua,  un  moment,  un  rôle  prépondér.int  dans  la  haute  Suie  et  en  Asie 
.Mineure.  Ce  peuple  représente  une  civilisation  tout  entière,  une  langue, 
une  écriture,  sans  doute  aussi  une  religion  spéciale,  il  arrOla  longlemp 
lea  armes  victorieuses  de  Itamsès  11,  le  grand  Sésosiris  des  (iiecs.  Puis  in- 
tervint Mil  traité  entre  le  souverain  de  ce  peuple  et  Uamsès,  traité  dont  le 
le\te  nous  a  été  conservé.  Ce  peiiplf.  dont  le  nom  se  lit  Kctas,  Katti  ou 
fi(</i(cs,  était  de  race  cananéenne;  il  avait  des  scribes  et  possédait  un 
système  d'éciilurc  particulier  que  M.  Siyce  con.Mdère  comme  l'origine  de 
l'écriture  chypriote.  On  comprend  dès  lors  l'intérêt  qu'il  y  a  à  recueillir 


BULLRTIN    MKNSUEL   DE   l'aCADÉMIR    DF.S   INSCRIPTIONS.  31 7 

jusqu'aux  plus  faibles  débris  do  l'i'criluic  cl  des  inscriplions  hiltiles.  I.a 
soci6li:  (i'arcliéologie  bililiqiie  de  I.oiidre?,  viotil  de  publier  tout  ce  que 
l'on  connaissait  jusqu'ici  à  ('.(ïl  (''g.ud.  La  coniuiuiiicaliori  de  M.  l'crrot, 
qui  paniilra  dans  notre  prochain  num'io,  aut^inenle  beaucou[)  ce  pré- 
cieux bagage. 

H-Y. 

M.  Ferdinand  Delannay  mol  sous  los  yeux  de  l'Acadi^niic  doux  croquis  à 
l'huile  d'un  jeune  artiste,  M.  Haoul  Caignard.  (a-s  croquis  repn'scnlent 
des  vups  piltore.-ques  pri>cs  au  inilii  u  dos  ruinesde  Siinxay,  si  bien  explo- 
rées par  le  U.  V.  de  la  Croix.  M.  Alexandre  Herlrand,  qui,  comme  M.  De- 
lannay, a  visité  rôccmnicnt  ces  ruine?,  donne  à  rAcad(^mic  quelques 
explications  sur  leur  étendue  et  leur  inipurlanco.  Il  y  a  vu  un  frag- 
ment d'inscription  sur  lequel  se  lisent  encore  los  trois  lettres  POL, 
qui  semblent  indiquer  qu'Apollon  était  une  des  divinités  honorées  dans 
cette  localité  par  les  populations  gallo-romaines. 


SOriKTi;:  NATIONALE 

DES   AXTIQUAIPiKS   Dl^    FHAXCE 

PnÉSIDENCE    DK    M.    C.    PFJUIOT. 


SÉANCi:    DU    8    NOVKMBnE. 


Celte  si^ancp  n  élà  consacréo  à  des  queslions  administratives,  et  i  l'ôlec- 
lion  de  M.  l'abbé  Thédcnal  comme  nicmbre  r6:idant. 


SÉANCE    DU    15    NOVEMBRE. 

M.  Flouesl,  associé  correspondant,  présente  une  superbe  épée  en  bronze 
appartenant  à  la  période  dite  «  Age  du  bronze  »,  qui  a  àlé  trouvée  prés 
de  Langres,  dans  un  ancien  lit  de  la  Marne,  et  qui  appartient  aujourd'bui 
au  Musée  d»î  Saint-Germain.  VA\q  aurait  sans  doute,  conforniéinent  i  un 
usage  mentionné  par  un  auteur  ancien,  été  jetée  dans  les  eaux  à  tilie 
d'oIVratuie  aux  divinités. 

}i.  Mowat  annonce  qu'il  possède  une  épée  trouvée  dans  des  conditions 
analogues,  dans  le  lit  de  la  Vilaine. 

M.  Gaidoz  rapproche  certains  usages  religieux  de  la  Homo  ancier.nc,  do 
la  France  et  du  Congo,  et  s'élève  contre  le  système  qui  fait  venir  do  l'Asie 
toutes  les  croyances  et  toutes  les  pratiques  religieuses  ôcs  peuples  euro- 
péens. 

SÉANCE    DU    22   NOVEMBRE. 

M.  Héron  de  Villcfusse  lit  une  note  de  M.  Castan,  associé  correspon- 
dant, sur  un  anneau  en  bronze  doré  du  musée  de  Hesançon.  Lecliaton, 
«impie  tablette  de  cristal  de  roilie,  est  acccisté  d'un  côté  d'un  éciis.-on 
surmonté  de  la  tiare  poniMicale  et  renfermant  les  deux  clefs  en  sautoir; 
de  l'autre,  d'un  saint  (ieorges  A  cheval   périmant  de  sa   lance  le   drajjon. 


80CIRTÉ    NATIONALE    DKS   ANTIQUAIRES    Dli   l'IlANCK.  319 

Sur  lo3  carlouclies  on  biseau  que  le  chalon  surmonte,  on  lit  d'un  côté 
P  •  N  *,  de  raiide  DVX.  [.es  clefs  en  sautoir  sont  les  armoiries  pcrsou- 
nciles  du  pape  Nicolas  V,  dont  les  initiales  se  lisent  sur  un  des  cartouches; 
le  litre  de  dux  et  le  saint  Georges  appartiennent  au  doge  de  Gùncs,  Or 
Nicolas  V  avait  cédé  au  fiûnois  Lui|;i  Frcgoso  ses  droits  souverains  sur  la 
Corse;  <'elui-ci  les  rétrocéda  uussit^M  X  la  république  de  (iénes,  qui  en 
remit  la  jouissance  à  lu  fameuse  compagnie  appelée  «  l'office  de  Sainl- 
fieorges»).  jM.  (lastan  reconnaît  dans  l'.tnneau  du  musée  de  IJcsançnn 
l'anneau  par  lequel  l'office  de  Saint-Georges  fut  investi  en  iMi-i  de  la  sei- 
gneurie de  la  Corse  au  double  nom  de  Nicolas  V,  suzerain  de  l'ile,  ot  du 
précédent  fcudalaire,  le  doge  de  Gènes. 

M.  Hayet  lit  une  note  tur  un  fragment  de  table  iliaque  trouvé  par 
M.  Tliicrry  ;l  Tivoli,  el  sur  Kqucl  sont  représentés  en  abrégé  certains 
épisodes  de  la  guêtre  de  Troie,  empruntés  à  la  Destruction  de  Troie  par 
Stésichore,  et  à  VEthiopvlc  d'Arclinos  de  Milet. 

M.  llcaii  informe  la  Société  que  la  seconde  moitié  desaréncs  de  Lulèce, 
dont  la  pieiuière.  partie,  découverte  en  1870,  est  actuellement  cachée 
sous  des  bAliracnls  élevés  par  la  compagnie  des  omnibus,  est  à  son  tour 
menacée  de  destruction  par  un  projet  de  percement  de  rue.  Sur  son 
invitation,  la  Société  renouvelle  sa  délibi'ralion  du  G  avril  1S70,  tendant 
à  la  consorvaliun  de  ces  restes  intéressants  du  plus  ancien  monument  du 
Paris  romain,  et  décide  que  son  président  fera  en  ce  sens  une  déuiaiclio 
auprès  du  conseil  municipal. 

M.  Nicard  rectifie  quelques  erreurs  contenues  dans  la  partie  du  tome  II 
de  VInvcntuire  (jénéral  dts  richesses  d'art  de  hi  ville  de  Paris  qui  concerne 
les  vitraux  de  Sainl-Élicnne-du-Monl.  Un  vitrail  rejrésentant  le  Pressoir 
mystique  et  attribué  par  l'inventaire  à  Hobert  Vinaigrier,  peintre  verrier 
de  la  première  moitié  du  xvi"  siècle,  est  simplement  la  copie  faite  par 
Nicolas  Vinaigrier,  qui  vivait  au  xvii",  d'une  verrière  peinte  par  Kobert 
pour  Saiiit-Ililaire  de  Chartres.  Cela  avait  été  déjà  dit  par  Cmeric  David 
en  1823,  dans  un  article  de  la  Biûyraijliie  uniicnelk  de  Micbaud. 

Le  Secrétaire. 

Signé:  0.   RAYET. 


NOUVELLES  AUCllKOLOCIQUES 


I-T    COUUKSrdNDANCK 


J]ulhtin  âc  la  commission  archéologique  communale  Je  Jluwic,  10"  an- 
née, 11°  3.  juillel-seplembre  1882  : 

Cil.  I,.  Vi^conli,  D'une  statue  qui  représente  le  gcnie  de  Jupiter  avecl'égidc 
\\)\.  XVllI  MX).  — Le  pure  Bruzz;i,  Fragment  d'un  disque  de  verre  qui  rc- 
présciite  lei^fetcii  de  la  vingtième  année  de  Dioclctienli^].  \\).  —  D.  Enrico 
Fabiani,  D'une  statuette  de  puytijphore  égyptien  récemment  découverte  (plao- 
dic  XXI). 

.\ rchxologische  Zcitung  (Gazelle  archiiologiquc  de  Iteiiin),   1882, 

3'=  cahier  : 

A.  FurlNvaengler,  Phts  d'Kginc  (pi.  IX,  X  cl  une  vignclle).  —  V.  von 
Duhn,  le  Jugnnctil  de  Paris  sur  un  lécythe  athénien  (pi.  XI  et  une  vignelle). 
—  G.  Treu,  Sur  les  (ouillcs  d'Olympie.  11.  L'arrangement  des  statues  dans  le 
fronton  oncntal  du  tnnj'b:  de  Zeus  (pi.  Xli).  —  A.  Furlwccnglcr,  .Sur  l'Apol- 
lon du  Belvédère.  —  P.  \Vci>zreck('r,  Uemarques  sur  ilknule  Farné^e  (qua- 
tre bois  tirés  dans  le  texte).  —  Mélanges  :  M.  Fiœnkel,  Figures  archaïques 
de  femmes  assises  (deux  boiï).  Sur  la  Loutrophorus  de  Sunium  (un  bois).  — 
Hc■n^eigneIncnts  :  Acquisitions  du  Musée  royal  de  Berlin.  —  G.  Treu,  l'An- 
tiquarium.  —  Acquisitions  du  Musée  britannique  pendant  l'année  1881. 


LK 


LAOCOON  ET  LE  («KOUPE  iïATlIÉNA 

A  LA  FRISE  DE  PERGAME 


VIII 

ANALOGILS  KNTRE  I,E  GROUPE  DU  LAOCOON  ET  LE  GF50UPE   D'ATHKNA 

A    I.A    l'niSK    DK    l'autel    DE    ZEL'S    A    PERGAME. 

Si,  qiiitlaiit  rcnsemble  de  ces  monuments  qui  ornaient  l'acropole 
des  rois  Altale,  nous  revenons  à  l'autel  Je  Zeus  pour  étudier  les  dé- 
tails de  la  frise  récemment  découverte,  nous  verrons  que  les  Géants 
revêtent  les  formes  les  plus  diverses.  On  dirait  que  les  artistes  ont 
voulu  représenter  dans  la  matière  toutes  ces  voix  différentes  de 
Typhon  dont  parle  Hésiode.  Typhon  rugit  comme  un  lion,  nous  dit 
Hésiode,  et  les  artistes  de  Pergame  ont  rendu  cet  effet  dans  la  ma- 
tière en  donnant  une  tête  de  lion  à  l'un  des  Géants,  Typhon  hurle 
comme  un  taureau  superbe,  et  les  sculpteurs  de  notre  frise  donnent 
à  l'un  des  Géants  une  sorte  de  bosse  semblable  à  celle  qu'ont  sur  la 
nuque  les  buffles  de  l'Asie  Mineure.  Ce  Géant,  en  outre,  combat  avec 
la  télé,  comme  un  taureau.  On  le  sent,  il  court  dans  toute  la  frise 
comme  un  souvenir,  sinon  direct,  du  moins  vague  et  inconscient,  du 
monde  Ihéogonique  d'Hésiode. 

Parmi  tous  les  groupes  de  comballants  que  la  frise  de  Pergame 
nous  a  conservés,  le  plus  beau,  le  plus  frappant  de  tous  c'est  celui 

1.  Voir  les  numéros  de  juillet,  août,  septembre,,  octobre  et  novembre. 
Décembre  XLIV.  —   i>l 


322  nr.vuE  archéologiqde. 

d'Athr-na  (v.  pi.  XVI  ■.  —  J'.ii  ^U'jh  dit  iiuel  l'iail  le  sujet  (|ti'il  irpré- 
Sfiil;iil,  on  sorte  (ju'il  est  inulili-deievetiirsiirce  pcjiiit.  Mais  en  eon- 
templani  ceproupeonpeut  odmirer  riiarnioiiie  de  la  eoinposilion,  de 
la  coinldnaison  des  ligures  et  des  iiiouveiiieiits  (|iii  évite  réeiieil  de  la" 
monotonie;  on  est  frappé  du  génioavecleiiucl  leMiiIpleura  suriin|dir 
l'espace  d'un  cadre  (jui  ce|)endanl  csl  bien  restreint  j)our  desfi;;urc.s 
d'une  telle  i^randeur  et  pou r  une  scène  aussi  couipliiiuée.  On  admirera 
choix  heureux  des  eontiastes  qui  éclate  dans  l'opposition  des  formes 
lîiatronales  li'Alhéna  el  de  la  légèreté  du  corps  llottanl  de  la  Victoire, 
et  surtout  le  patlios  de  la  souffrance  physique  (jui  se  lèvèle  dans  la 
figure  du  jeune  (îénnt  ',  oiiposè  à  celte  gran. le  douleur  morale  qui  se 
rellète  dans  les  yeux  suppliants  de  Gaia.  Kt  >i  l'on  s'abôorhe  longue- 
ment dans  cette  contemplation,  l'illusion  sera  (elle  qu'on  croira  en- 
tendre Valiilé  victoiieux  dAlliéna,  les  plaintes  de  Gaia  et  de  son  fils, 
mélangées  au  bruissement  étrange  des  grandes  ailes  de  la  Victoire 
et  il'Lincélade  vaincu.  Ouanl  au   personnage  de  Gaia,  si  heureuse- 
ment conservé  dans  notre  frise,  il  se  voit  déjà  dans  le  bas-relief  de 
Priène  et  il  apparaît  dans  la  peinture  sur  vase  depuis  le  iV  siècle. 

Mais  Pergamc  est  voisine  de  itliodes,  et  nous  avons  vu  que  l'école 
de  l'ergamc  e^t  proche  patente  de  celle  de  Rhodes.  On  admet,  en 
effet,  que  l'art  florissait  à  lUiodes  de  250  à  ioO  environ  avant  notre 
ère,  cl  nous  savons,  d'autre  part,  que  l'autel  de  Zeus  a  été  construit 
sous  Euménôs  H,  qui  régnait  de  11)7  à  loi)  avant  notre  ère.  Si  le 
groupe  du  Laocoon  appartient  vraiment  à  la  grande  période  d'épa- 
nouissement des  arts  à  Ithodes,  il  sera  contemporain  de  la  frise  de 
Pergame.  Mais  nous  avons  déjà,  par  une  série  d'.uguments,  cherché 
à  établir  que  le  Laocoon  n'a  pas  pu  être  composé  à  l'époque  romaine. 
Cependant  il  en  reste  encore  un,  que  nous  avons  gardé  pour  la  lin 
parce  qu'il  est  le  i)lus  concluant.  Le  Laocoon  est  une  œuvre  de  la 
plus  haute  originalité.  Avant  ce  groupe,  aucun  sculpteur,  aucun 
peintre  n'avail  traité  ce  sujet,  et,  ù  ce  point  de  vue,  il  est  un  phéno- 
mène pres(|ue  unifjue  dans  le  monde  des  arts.  On  peut  donc  dire 
que  le  trait  ioiidaniental,  caractéristi(iue  du  Laocoon,  c'est  précisé- 
ment son  originalité.  Eh  bien,  dans  toute  l'époque  romaine  où 
Lessing  a  voulu  le  placer,  il  ne  s'est  pas  créé  une  seule  œuvre 
originale  ayant  quelque  valeur.  Avec  la  tin  de  la  jjéiiode  des  succes- 
seurs d'Alexandre,  l'art  antique  a  terminé  son  ère  de  création. 
Depuis  le  siècle  d'Augutle  les  artistes  ne  font  guère  que  copier,  lan- 


1.  Nous  lo  dd'signcrons  aussi  du  nom  d'Euc«ilado  qui  est  l'advcrâiiro   liabiiucl 
d'AUiOoa. 


l.E    LAOCOON    KT    LE   GROUPE    d'aTHÉ.NA.  1^2 

lot  diri-'ctcmcnl,  larilùt  avec  dos  varianlcs  souvent  inallieurciisos,  lo 
riclie  lii'.^ur  de  cliefs-d'œuvri;  iiuc  les  siècles  précédeiils  leiii-  .ivaieiil 
laissé.  Et  c'est  de  ce  monde  de  copislis  qu'on  aurait  vu  sur;;ir  tout  à 
cuu[)  une  des  œuvres  les  plus  oiiginalesde  l'anliiiuilé!  C'est  une 
liypolliùse  impossible  à  défen  Ire,  tandis  que  l'originalité  même 
du  groupe  du  l.aocoon,  le  choix  d'un  sujet  aussi  diflicile,  aussi 
compIi(|U('',  la  connaissance  (lu'il  révèle  des  fondions  de  chaque 
org.me  du  corps  humain,  tout  nous  indiijue  une  période  où  le 
génie  encore  créateur  s'unit  cependant  déjà  aux  éludes  anatomi- 
qucs  les  plus  consciencieuses.  Il  n'y  a  pas  d'époque  qui  réunisse 
toutes  ces  conditions  à  un  plus  haut  degré  que  celle  où  llorissaient 
les  écoles  de  Rhodes  et  de  Pergame. 

Nous  ne  commettrons  donc  pas  un  anachronisme  en  plaçant  les 
deux  gioupes  dans  la  même  période  et  en  les  rapprochant  l'un  de 
l'autre  pour  saisir  leurs  rapports  et  leurs  différences. 

Si  nous  considérons  les  deux  groupes  au  point  de  vue  de  l'effet 
moral  et  psychologique  qu'ils  produisent  sur  le  spectateur,  nous 
donnerons  la  prélérence  au  groupe  d'Athéna. 

En  effet,  nous  avons  vu  que  le  groupe  du  Laocoon  ne  nous  dit 
rien  sur  les  circonstances  qui  ont  précéiié  ou  accompagné  la  catas- 
trophe; il  est  la  représentation  de  la  crise  dans  toute  sa  nudité. 
C'est  pourquoi  il  ne  produit  que  l'impression  de  cette  horreur  qu'ins- 
pire la  souffrance  physique,  et  sa  contemplation  fatigue  et  repousse 
à  la  longue.  L'œil  qui  parcourt  ces  membres  tordus,  ces  serpents  et 
ces  corps  humains  entrelacés  ne  sait  où  se  reposer  et  finit  par  se 
détourner  avec  horreur.  L'effet  du  groupe  de  la  frise  de  Pergame 
est  tout  différent.  Un  coup  d'œil  nous  suffit  pour  comprendre  ce  qui 
s'est  passé.  La  Victoire  souriante  qui  vole  au-devant  d'Athéna  nous 
apprend  qu'une  luUe  terrible  a  précédé  la  scène  à  laquelle  nous 
assistons.  Le  buste  de  Gaia,  son  expression  suppliante,  sa  brusque 
apparition  au-dessus  du  sol  qu'elle  n'a  pas  encore  entièrement  quitté, 
nous  font  comprendre  qu'elle  vient,  au  dernier  moment,  sans  doute 
apiès  une  longue  lutte  entre  sa  tendresse  et  son  orgueil,  implorer  la 
clémence,  la  miséricorde  d'Athéna  pour  le  plus  jeune  de  ses  fils, 
pour  cet  ange  déchu  qui  se  tord  à  ses  pieds  dans  les  dernières 
secousses  d'une  agonie  atroce.  Nous  ne  pensons  pas  à  chercher  une 
explication,  nous  n'avons  pas  besoin  môme  de  la  contemplation  des 
autres  groupes  pour  comprendre  celui-ci  ;  c'est  un  tableau  complet 
qui  se  sulfil  à  lui-même.  Nous  assistons  à  une  tragédie,  h  un  drame 
à  trois  personnes,  contenu  dans  le  cadre  étroit  de  la  frise.  Le 


32\  HKVrE  AnCHKOI.OGIQUE. 

souffliMli»  fureur  qui  anime  In  marche  trionipliante  d'Alhéna,  les 
tortures  physiques  du  pé.int,  la  haute  douleur  mor.ile  de  Gnia,  la 
npurc  si  lêfjt'rc  de  la  Victoire,  se  r«''unissent  pour  i)roduire  au  plus 
haut  de?r«''  eel  effet  trafique  (jui  maïKjue  alisolumetit  au  Laocaoïi. 
•Mais  celle  impression  tr3i,'i(jue  di-pend  avant  loul  du  sujet,  et  nous 
avons  vu  que,  le  mythe  du  Laocoon  étant  donné,  les  artistes  ne  pou- 
vaienl  pas  lerepréseiiternnlreiiient  (pi'ils  m  l'onl  fait.  Celle  différence 
enire  les  deux  groupes  n'e.-t  donc  pas  fondauienlale.etnous  ne  nous 
laisserons  pas  détourner  de  notre  comparaison  par  celte  infériorité 
que  nous  reconnaissons  au  Laocoon.  Kn  ce  qui  concerne  la  compo- 
sition, une  comparaison  dcf^  deux  }:roupes  pris  chacun  dans  leur 
ensemble  est  impossible,  [.es  lois  (jui  président  à  la  composition 
d'un  has-relief  dont  le  cadre  est  dontié  par  les  corniches  de  la  frise 
ne  sont  pas  les  mêmes  que  celles  (|ui  doivent  déterminer  la  combi- 
naison des  ligures  d'un  groupe  isolé.  Dans  un  monument  de  celle 
nature,  composé  de  statues  idacées  dans  un  espace  libre  que  l'on 
peut  considérer  de  plusieurs  ou  de  tous  les  cûlés,  lunilé  d'action  et 
le  rythme,  c'est-à-dire  la  combinaison  des  mouvements,  doivent 
être  lieaucoujt  plus  forts,  dans  ce  sens  que  ce  sont  les  mouvements 
eux-mêmes  qui  doivent  enlermer  le  grou[ie  dans  leur  harmonie  et 
lui  donner  un  cadre.  On  ne  saurait  donc  pas  non  plus  comparer  les 
deux  groupes  au  point  de  vue  de  la  composition. 

Mais  si  les  deux  groupes  ne  peuvent  pas  ôtre  rapprochés  l'un  de 
l'aulre  à  ces  dillerents  points  de  vue,  la  ligure  d'Eiicélade  prise  en 
elle-même  présente  les  plus  grandes  analogies  avec  le  Laocoon. 

Dans  celte  figure  cl  dans  le  Laocoon,  le  problème  que  les  artistes 
se  sont  proposé  de  résoudie  était  le  même.  Il  s'agissait  de  donner 
au  corps  humain  les  plus  violentes  coiitor>ions  dont  il  esl  capable, 
en  enlaçant  tous  les  membres  parles  anneaux  d'u;i  reptile  qui  a 
déterminé  ces  mouvements  tout  en  les  cnlravanl.  Mais  ces  convul- 
sions et  ces  enlacements  doivent  être  combinés  de  façon  i\  ne  pas 
gâter  l'éclat  de  la  beauté  du  corps,  l'harmonie  de  la  musculature. 
Celte  tâche  difficile,  presrjue  surhumaine,  a  élé  résolue  avec  le 
même  bonheur  dans  l'un  el  dans  l'autre  cuef-d'ceuvre.  Seulement  il 
y  a  dans  la  manière  dont  le  jeune  Céant  a  été  tiaiié,  dans  l'art  avec 
leijuel  toute  celte  belle  musculature  a  été  étalée  et  comme  jetée  sous 
nos  yeux,  dans  la  frai  •heur  de  ces  formes  pleines  de  jeunesse,  une 
inspiration  supérieure,  (juelque  chose  de  pluslar^'e  cl  de  plus  tou- 
chant à  la  fois. 

Mais,  dans  toutes  ces  appréciations,  il  ne  faut  pas  oublier  non 


i.K  t.Aor.ooN  KT  LR  cnoupK  d'atiii^na.  325 

plus  (juc  les  S(iil|i[i'wr.s  (lo  lUiodes  avaient  à  vaincre  une  diflirullù 
plus  !5'ran(le,  puisqu'ils  devaieul  couihinor  trois  corps  liuniaius  cl 
deux  serpents,  puisque  surtout  il  fallait,  sans  détruire  l'unilé,  varier 
les  contorsions  de  chacun  des  trois  i)crsonnages. 

Cependant  nulle  part  la  parenté  des  di-ux  cliefs-d'œuvrc  n'éclate 
avec  aulanl  d'évidence  que  dans  la  manière  dont  Encélade  a  été 
saisi  par  le  serpent  de  la  déesse.  Dans  cette  figure,  comme  dans  le 
groupe  du  I/iocoon,  les  sculpteurs  ont  choisi  pour  le  représenter  le 
point  suprême  de  la  crise,  le  dernier  acte  du  drame.  Dans  le  grou[»e 
de  la  frise,  nous  avons  vu  que  la  puissance  miraculeuse  d'Athéna  a 
été  exprimée  par  l'action  foudroyante,  instantanéf^du  serpent  divin. 
Il  en  est  de  môme  dans  le  groupe  du  Laocoon.  C'est  avec  la  rapidité 
de  l'éclair  que  les  deux  serpents  ont  envahi  à  la  fois  les  deux  (ils 
et  le  père.  C'est  cette  circonstance  qui  nous  a  fait  sentir  que  ce 
terrible  chàlimenl  est  une  (ouvre  divine,  une  œuvre  de  la  Némésis, 
de  la  vengeance  céleste.  Ainsi,  dans  le  groupe  du  Laocoon  comme  dans 
notre  ligure,  c'est  le  même  moment  qui  a  été  choisi,  et  sur  ce  point 
il  ne  peut  pas  y  avoir  de  doute,  la  manière  est  la  même,  le  procédé 
est  identique,  il  y  a  dans  l'un  et  dans  l'autre  chef-d'œuvre  la 
recherche  du  même  eiïet.  Mais  c'est  dans  l'analyse  des  détails  que 
les  analogies  vont  venir  en  foule  frapper  nos  yeux  et  notre  esprit. 

Si  nous  cherchons  à  comparer  la  lèle  d'Encélade  avec  celles  du 
Laocoon  et  de  ses  lils,  cette  étude  nous  conduira  aux  observations 
suivantes  :  L'âge  du  Géant  est  celui  de  la  jeunesse  dans  tout  l'éclat 
de  sa  grâce  et  de  sa  beauté;  c'est-à-dire  qu'il  n'est  ni  aussi  jeune 
que  les  nis  du  Laocoon,  ni  aussi  âgé  que  le  père.  Celte  première 
différence  en  entraînera  nécessairement  une  série  d'autres  dans  la 
composition.  En  effet,  un  jeune  homme  n'oppose  pas  à  la  douleur 
physique  la  même  résistance  que  celle  des  enfants  ou  d'un  homme 
dans  toute  la  force  de  l'âge. 

L'inclinaison  violente  de  la  tète  se  retrouve  dans  le  Laocoon  cl 
dans  Encélade,  et  cependant  elle  n'est  pas  la  même.  Chez  le  Céant, 
ce  n'est  pas  seulement  la  souffrance,  c'est  aussi  la  main  puissante 
d'Athéna  qui  a  courbé  celte  tête  rebelle.  L'inclinaison  de  la  tête  d'En- 
célade n'est  donc  due  ni  à  la  crise  convulsive,  presque  nerveuse,  qui 
agite  le  Laocoon,  ni  ;\  l'envaliissemenl  de  la  mort  (jui  a  penché, 
comme  une  Heur  malade,  Ja  lêle  du  jilus  jeune  des  fils  du 
Laocoon  ;  c'est-à-dire  que  nous  avons  sous  les  yeux  un  mou- 
vement intermédiaire  qui  n'est  déjà  plus  celui  de  Laocoon,  mais  qui 
n'est  pas  encore  celui  'le  son  fils.  Et  l'expression  d'Encélade,  dirons- 


320  nrvL'E  Anrur.ot.or.inrr., 

nous  qu'elle  rsl  la  inî^inc  que  collo  (lo  T.nncooii  ou  do  ses  fils?  Les 
voux  (lu  (ifVinl  tonrnenldans  rorbiic;  ceux  do  Laoronn  so  N'-vent  vors 
ie  «iol.  I.n  bourbe  du  Lnocoon  est  onir'ouvorle;  celle  d'Kncrlade 
s'ouvre  auss^ijuais,  trindisqiic  losiiiusrlo;  du  vis;ipodans  lol.noroon 
sont  tordus  par  la  doideur  à  un  toi  point  quo  la  surface  de  la  lipiire 
pnr;ill  traversée,  divisée  et  comme  niorcel<^c  par  uno  foule  de  petites 
excavations,  celle  du  pc'-anl  est  dôlenduo;  à  l'oxociition  du  front  et 
de  ses  deux  prantl<  yeux  dont  la  beanti^  ni6lanroli(jue  est  d'un  toi 
effet  qu'on  peut  à  peine  croire  (ju'ils  sont  de  marbre,  sos  traits  ont 
déjà  l'immobiliK'-,  la  ripiditf^  quo  donnent  les  promiéros  ailointos  de 
In  mort;  on  sont  que,  s'ils  avaient  une  couleur,  ils  seraient  livides. 
La  boucbe  du  Laocoon  se  tord,  s'ouvre,  et,  contrairement  à  ce 
qu'aflirmail  Lessing,  elle  pousse  des  cris  affreux  : 

Clamons  f^hnul  horrcndos  ad  sidcra  toUit  ! 

dit  Virgile,  qui,  nous  pouvons  le  supposer  niainlonnnt,  connaissait 
le  groupe  du  Vatican.  Il  n'en  est  pas  de  niômc  de  la  bouche  d'Kncè- 
lade.  Elle  ne  se  lord  plus,  elle  s'cnir'ouvro;  elle  ne  orio  ]dus,  elle  a 
cessé  de  crier;  elle  est  semblable  à  celle  de  ces  raallioureux  qui, 
sous  l'impression  d'une  terreur  ou  d'un  cauchemar,  veulent  crier  et 
ne  le  peuvent  pas;  elle  ne  supplie  plus,  elle  gémit  la  dernière 
plainte,  elle  exhale  le  dernier  souille  de  l'agonie.  Cependant  cette 
bouche  est  encore  vivante,  elle  n'est  pas  pareille  à  celledu  jeune  fils 
du  Laocoon  qui  a  (loj:\  cessé  de  vivre.  Mais  il  no  faudrait  pas  croire, 
comme  Lessing  avait  cherché  à  l'établir  pour  le  Laocoon,  que  noire 
Encélade  ne  crie  pas  parce  que  l'artiste  aurait  recherché  une  cer- 
taine modération  d'expression,  une  certaine  iramiuillité,  une 
certaine  dignité  particulière  au  génie  hollériiiiuo,  ce  je  ne  sais 
quoi  qui  sent  la  convention  et  que  l'on  croyait  autrefois  être 
l'apanage  des  œuvres  classiques.  Ce  sont  là  de  vieilles  théories, 
de  vieux  préjugés  que  la  frise  de  Pergame  et  au  besoin  le  Laocoon 
suffisent  pour  réfuter  victorieusement.  Le  Laocoon  est  la  représen- 
tation de  la  douleur  physique  dans  toute  son  horreur.  Il  serait 
difficile  d'aller  plus  loin  sans  .itleiiidre  le  laid  ou  l'ignoble.  (Juant  à 
la  frise  de  Pergame,  elle  nous  fait  assister  d'un  bout  ;\  l'autre  au 
(b'chatnement  de  toutes  les  passions,  à  rneharnement  dos  combat- 
tants, à  1.1  cruauté  froide  des  vainqueurs.  Si  doue  Hncélade  ne  crie 
pas,  ce  n'est  pas  à  celle  luétendue  mo  léraliou  de  l'expression  (ju'on 
le  doit;  c'est  qu'il  représente  le  moment  qui  suit  le  paroxvsmede  la 
duuleur  ox[uimé  par  le  Laocoon  el  qui  précède  la  dernière  agonie 


r.K  LAOCOON  ET  LF  onoupE  d'atiikna.  327 

du  plus  jrunn  do  ses  fils.  Et  nous  rnmpiTndrnns  f.iciloïïiont  pourijiioi 
l'iiilislo  a  choisi  ce  moinpnl-l;i  plulôt  (|ii"iiri  autre  :  rali.iiidori  do 
lout  son  petit  corps  aux  enlacements  froids  des  reptiles  et  la  mort 
instanlnnùe  sont  naturels  chez  un  enfant;  les  dernières  contorsions 
d'une  n-sislaiicc  opiniâtre,  les  cris  affreux  et  les  rides  du  visage, 
convionnont  à  un  homme  de  l'Age  du  Laocoon;  mais  cette  grâce, 
cette  beauté,  ce  charme  élrange  et  mystérieux  qui  sont  aimahles 
jus(|uc  dans  les  bras  de  la  mort,  sont  réservés  ;\  la  jeunesse  dans  sa 
Heur  et  dans  tout  son  éclat.  Là  encore,  Tinspiration  de  la  frise  de 
Pergame  est  bien  supérieure  à  celle  du  Laocoon,  f^etlc  grande 
beauté  (jui  s'en  va,  celte  éclalanlc  jeunesse  qui  succombe  aux  étrein- 
tes du  monsirc  nous  saisissent  d'une  émotion  que  ni  la  mort  de 
l'enfant,  ni  la  lullc  du  Laocoon  n'étaient  capables  d'éveiller.  C'est 
qu'on  sent  tout  ce  qu'Encéladc  perd  avec  la  vie,  la  beauté,  la  grâce,  la 
force,  l'orgueil,  et  sans  doute  aussi  les  illusions  et  les  passions  de  la 
jeunesse.  El  si,  quittant  cette  agonie,  nous  jetons  un  regard  sur  Gaia, 
sur  ce  grand  deuil,  sur  cette  mère  qui  vient  implorer  en  vain  la 
pilié  pour  le  plus  jeune,  le  plus  beau  de  ses  fils,  l'éinolion  deviendra 
réellement  puissante  et  tragique. 

Le  résultat  de  cette  étude  de  l'expression  dans  l'un  cl  dans  l'autre 
chef-d'œuvre  est  donc  que  le  Géant  de  Pergame  est  bien  le  frérc  du 
Laocoon  de  Rhodes,  seulement  c'est  un  frère  plus  jeune. 

Toutes  les  autres  différences  ne  sont  que  les  conséquences  nor- 
males, logiques,  naturelles  de  cette  première  différence  d'âge. 

Mais  c'est  surtout  dans  la  comparaison  du  torse  et  des  membres 
que  Panalogie  d'Encélade  et  du  Laocoon  devient  frappante.  J'ai  pu 
indiquer  par  des  lettres  les  traits  qui  se  ressemblent  dans  l'un  et 
dans  l'autre  chef-d'œuvre  K 

La  lettre  D  indique  dans  le  géant  de  Pergame  une  contorsion  à 
droite  produite  par  l'étreinte  du  serpent  qui^  en  s'appliquant  sur  le 
dos,  fait  ressortir  violemment  celte  paitie  du  thorax;  il  en  résulte 
que  le  flanc  gauche  se  creuse  et  se  contracte  à  tel  point  que  l'on  croit 
entendre  craquer  les  os  sous  la  tension  violente  des  muscles.  Les 
mêmes  traits  se  retiouvent  dans  le  Laocoon  aux  points  marqués  aussi 
par  les  lettres  D  et  F.  La  lettre  E  désigne  cette  cavité  de  l'abdomen 
qui  suit  les  convulsions  du  diaphragme  et  que  l'on  a  tant  admirée 
dans  le  Laocoon,  comme  le  siège  même  de  la  souffrance  horrible 
qu'il  endure.  Elle  nous  frappe  aussi  à  première  vue  dans  le  torse 
d'Encélade.  Placez  ces  deux  torses  l'un  ù  côté  de  l'autre  et  vous 

1.  Voir  les  planches  XVI  et  XVII  de  la  livraison  d'octobre. 


3-2S  nK.YUK  Anr.néoLoGiQi'F.. 

serez  èlonnés  de  liMir  nir  de  parenté.  Seuleineiil  il  faudra  tenir 
compte  eneore  ici  de  cilte  dilTérenee  d'âiït;  (|iii  donne  au  torse  du 
(ièant  plus  d'ëlastieité,  {dus  de  souplesse  et  d'élégance.  D'ailleurs 
Laocoon  étant  assis,  son  torse  offre  plus  de  résistance  aux  étreintes 
du  reptile,  il  se  tient  plus  droit  (jiie  c<diii  du  (îéanl,  qui  s'incline  en 
tombant.  Kn  outre,  le  fait  (jue  le  (iéanl  n'est  pas  une  statue  libre, 
mai?  un  bas-ielief  applitiué  par  le  dos  au  fond  de  la  frise, et  la  posi- 
tion des  ailes,  ont  foreé  le  sculpteur  ;\  présenter  ce  torse  en  face, 
tandis  que  celui  du  Laocoon  se  tord  davantage  vers  la  droite. 

Les  analogies  des  membres  sont  plus  évidentes  encore.  La  cuisse 
gauche  du  géant,  ipie  j'ai  désignée  par  M,  s'étend  et  s'écarte  du 
tronc  d'une  façon  analogue  à  lacui.sse  gauche  du  Lnocoon,  égale- 
ment indiquée  par  M.  Le  bras  gauche  d'Kncéladc  a  été  entouré  h  sa 
naissance  par  Tanneau  du  reptile.  C'est  cet  enlacement  que  j'ai 
désigné  par  les  lettres  N  et  IL  11  se  retrouve  en  H  et  N  du  Laocoon, 
c'est-à-dire  au  bras  droit  du  lils  aîné,  cl  en  N  bis,  soit  au  bras  droit 
du  fils  cadet.  Le  même  anneau  se  retrouve  en  F,  au  bras  droit  du 
Laocoon.  Sous  la  pression  du  serpent,  le  bras  gauche  d'Encélade 
s'étend  en  G,  la  main  s'ouvre  lentement,  les  doigts  s'écartent,  on 
croit  ressentir  la  crampe  qui  les  saisit.  Un  effet  semblable  a  dû 
exister  dans  le  Laocoon  à  la  lettre  G,  qui  désigne  la  main  droite  du 
lils  aîné,  dont  la  restauration  me  paraît  exacte.  L'ccartement  des 
cuisses  est  analogue  dans  le  Laocoon  et  dans  le  Géant,  avec  cette 
différence  cependant,  qu'Encéladc  étant  tombé  sur  un  genou,  au  lieu 
d'être  assis,  cet  écartement  est  plus  brusque  et  plus  violent  chez 

lui. 

J'ai  désigné  par  K  el  J  le  rapprochement  soudain  de  la  cuisse  et 
du  pied  droit  d'Encélade,  enlacés  à  la  fois  par  la  queue  du  reptile. 
En  effet,  il  y  a  là  quchjuc  chose  d'analogue  avec  la  manière  dont  la 
queue  du  reptile  enveloppe  l'extrémité  de  la  jambe  gauche  du  Lao- 
coon au  point  manjué  par  la  lettre  J. 

Un  effet  semblable  reparaît  en  K  à  la  jambe  droite  du  Laocoon. 

La  queue  de  l'un  des  serpents  du  Laocoon,  indiquée  par  L,  est 
semblable  à  celle  du  serpent  d'Athéna  désignée  au.ssi  par  L. 

La  morsure  cruelle  du  rei>lile  sous  l'aisselle,  que  j'ai  désignée 
par  G,  est  analogue  dans  le  Géant  el  dans  le  plus  jeune  lils  du 
Laocoon. 

La  chute  du  bras  droit  renversé  sur  la  tète  n'est  pas  différente 
dans  Encéladc  de  ce  qu'elle  esl^dans  le  jilus  jeune  lils  du  Laocoon, 
et  dans  le  Laocoon  lui-même,  aux  iioinls  inar(|ués  A  el  M. 

Celle  pose  du  bras  du  (iéant  vient  d'ailleurs  conlirmer,  d'une 


LK    LAOCOO.N    KT    I.K    GROUPR    D'aTHKNA.  329 

façon  éclntanle,  la  restauration  qui  fait  retomber  derrière  sa  lôie  le 
bras  du  plus  jeune  des  lils  du  Laocoon. 

(Juant  aux  conlorsions  des  serpents,  le  mouvement  furieux  de  la 
Itîle  indiqué  par  C  ',  le  repli  raraetérisliiiue  nianiui';  par  I,  sont 
autant  de  points  de  ressemblance  qu'on  ne  saurait  nier. 

La  lettre  0  désigne  dans  les  deux  cliefs-d'œuvrc  la  tension  du 
grand  muscle  slerno-cléido-masloïdien,  due  au  renversement  de  la 
léte  à  gauclie. 

Le  contraste  entre  les  deux  parties  du  corps  d'Encéiade,  rappro- 
clié  et  tordu  à  droite  par  la  tension  du  reptile  tandis  que  le  côté 
gaucbe  a  été  comme  détendu  par  la  surprise  et  la  douleur,  se  re- 
trouve observé  et  rendu  de  la  même  manière  dans  le  corps  du  Lao- 
coon. 

Dans  les  enlacements  du  serpent  de  la  frise  il  n'y  a  qu'un  point 
qui  ne  soit  pas  absolument  identique  à  ceux  des  reptiles  du  Lao- 
coon; c'est  que  la  naissance  du  bras  droit  du  Géant  n'a  pas  été  en- 
lacée par  le  reptile,  tandis  que  dans  le  groupe  du  Laocoon  les  deux 
bras  des  personnages  sont  toujours  occupés  par  les  étreintes  des 
serpents,  et  tout  particulièrement  le  liaul  de  l'épaule  droite  du  plus 
jeune  des  enfants  est  embrassé  par  un  dernier  anneau  du  monstre. 
Mais  cet  enlacement  n'eût  pas  été  naturel,  ni  même  possible,  dans 
Encélade,  dont  le  dos  est  occupé  par  deux  grandes  ailes  déployées, 
qui,  à  leur  tour,  étaient  nécessaires  pour  établir  l'barmonie  du 
groupe,  c'est-à-dire  pour  correspondre,  à  droite,  aux  deux  grandes 
ailes  de  la  Victoire  que  l'on  voit  à  gauclie. 

Les  cheveux  d'Encéiade,  qui  se  détachent  par  mèches  et  se  tordent 
comme  si  la  douleur  s'était  réfugiée  jusqu'à  leur  extrémité,  sont 
traités  de  la  même  manière  que  ceux  du  Laocoon. 

En  résumé,  il  n'y  a  qu'une  seule  différence  un  peu  grave  dans 
rexéculion.  C'est  la  manière  dont  les  serpents  du  Laocoon  ont  été 
travaillés.  Leurs  enlacements  sont  plus  lourds,  leurs  corps  informes, 
ils  n'ont  pas  d'écaillés. 

La  dégradation  du  corps  du  reptile,  qui  doit  être  plus  épais  au  mi- 
lieu et  s'amincir  aux  extrémités,  a  été  très  bien  observée  dans  le  ser- 
pent d'Athéna,  tandis  que  ceux  du  Laocoon  sont  pr.esque  partout  de 
la  même  grosseur.  Particulièrement  le  serpent  qui  suit  le  dos  du  Lno- 


1.  La  tète  du  serpent  qui  manque  dans  notre  dessin  du  groupe  de  Pergamc  a  c^tô 
retrouvée  depuis  l'époq.ic  où  j'écrivais  ces  lignes  et  elle  s'adapte  bien  à  celto 
place. 


330  nEvuR  AncHeoi.or.iouR. 

foon  pour  le  mordro  h  la  Imnclif^  aurait  gipm^  h  (Mro  tnvaillL^  avec 
autant  do  soin  (|uo  relui  dWtliôna  à  la  frise  do  IVrgnmc. 

Celle  infériorité  nous  a  fiil  supposer  que  le  groupe  du  Valiean 
n'iMnil  pas  l'oripinal.  ('epend;inl  on  peut  a  Imellre  aussi  que  l(>s  ar- 
ticles de  Uliodes,  tout  en  s'inspirant  «lu  groupe  de  la  frise  de  Per- 
gaine,  n'ont  passa  s'élever  à  la  même  hauteur  dans  le  soin  des  dé- 
tails. 

Une  dernière  observation  :  il  y  a  dnns  la  manière  dont  le  serpent 
d'Athéna  se  jette  sur  Encélade  une  rapidité,  une  fureur,  une  vie, 
qucl'iue  chose  de  vigoureux  et  de  naturel,  ([u'on  ne  retrouve  pas  au 
même  degré  dans  le  Laocoon.  Si,  à  la  vue  du  Laoeoon,  nous  avons 
de  la  peine  à  nous  représenter  ce  qui  a  précalé,  il  n'en  est  pas  de 
même  lorsque  nous  contemplons  Kncélaile.  A  son  aspect,  l'esprit 
saisit  à  la  fois  ce  qui  vient  il'avoir  lieu  et  ce  qu'i4  voit,  le  passé  et  le 
présent.  Il  comprend  instantanément  l'action  du  reptile,  tant  elle  est 
naturellement  représentée.  Nous  ne  nous  arrêtons  pas  h  rédéchir 
longuement  sur  ce  qui  est  arrivé  ;  nous  sentons  que  le  reptile  s'est 
rué  tout  à  coup  sur  sa  victime,  av.ec  une  fureur  sans  égale,  qu'il  l'a 
surprise,  terrassée,  de  telle  sorte  qu'elle  succombe  avant  même 
d'avoir  eu  le  temps  de  se  reconnaître  ou  de  pousser  un  cri. 

L'effort  que  l'artiste  a  dû  faire  pour  trouver  cet  effet  nous  trappe 
donc  beaucoup  moins  que  dans  le  Laocoon.  Notre  pensée  n'est  pas 
sans  cesse  ramenée  vers  la  personne  du  sculpteur;  plus  nous  la  con- 
templons, plus  la  scène  nous  paraît  vivante,  et  nous  n'imaginons  pas 
qu'elle  eût  pu  se  pa.^ser  autrement  dans  la  réalité. 

C'est  par  là  surtout  que  le  Géant  de  Pergamc  est  supérieur  au 
Laocoon,  qui  nous  rappelle  sans  cesse  le  travail  des  artistes. 

C'est  là  ce  qui  m'engage  à  admettre  (]u'il  est  une  œuvre  anté- 
rieure au  groupe  du  Laocoon,  Cependant  la  difricuité  de  composition 
que  les  artistes  de  Rhodes  avaient  à  résoudic  est  de  telle  naluro 
qu'on  ne  peut  pas  affirmer  leur  infériorité  et  qu'il  faut  user  de  la 
plus  grande  prudence  dans  de  tels  jugements. 

En  tout  cas,  j'espère  avoir  démontré  la  nature  de  l'analogie  qui 
existe  entre  ces  deux  chefs-d'œuvre. 

Ils  sont  évidemment  sortis  de  la  même  école.  Ils  sont  frères  par 
l'expression,  par  le  travail  minutieux  de  l'analomie,  par  hs  contor- 
sions du  torse,  par  la  pose  des  membres,  par  les  enlacements  des 
reptiles,  et  surtout  par  le  choix  même  du  moment  représenté,  la 
dernière  convulsion  de  la  souffrance  physicjue  prise  sur  le  fait  cl 
cristallisée  dans  le  marbre  I 


i.\'.  (. \onoov  l'T  i.r  r.noL'pR  d'atjikna.  331 

Lfi  (lerninr  jirobl^mc  .i  cx.'iminfir  csl  celui  (Jj  In  datf  respective 
des  deux  cliefs-d'œiivic.  Il  ix'ui  so  formuler  en  une  f|uesfion  :  «  Le 
Laocoon  a-l-il  t'iô  crt^é  avant  ou  après  la  frise  de  Pergamc?» 

Nous  rt'pondrnns  ceci  ;  c'est  ([n'en  admclt.nnl  a  priori  que  le  l.no- 
coon  a  été  créé  après  la  frise  de  Perganio,  lo  voile  (jui  couvrait  l'ori- 
gine de  ce  groupe  s'écarte  tout  à  coup  lU  la  façon  la  plus  naturelle. 

En  effet,  la  frise  de  Pergaïuc  terminée,  elle  jouit  aussitôt  d'une 
renommée  retentissante.  La  preuve  de  ce  succès  c'est  (|ue  nous  con- 
naissons un  sujet  cfipié  à  la  fiisc  do  PcM'gamc,  c'est  le  vieux  (Jé;mt 
d'un  bas-ielief  du  Vatican.  Une  preuve  plus  frappante  encore  de 
cette  faveur  est  celte  petite  Gigantomarliie  qui  a  été  trouvée  dans 
les  fouilles  de  1881  et  qui  reproduit  exactement  la  granile. 

La  1,'loire  (|ue  les  sculpteurs  de  Pergame  s'étaient  acquise  devait 
engager  leur.-  émules  à  travailler  des  sujcis analogues.  Mais,  dans  la 
frise  de  l'aul''!  de  Zens,  ce  qui  frappe  l'œil  à  première  vue  c'est  le 
mélange  des  serpents  et  des  corps  humains,  et  la  plus  belle  inspi- 
ration de  ce  monument,  celle  d'Encélade,  représente  les  dernières 
secouL^ees  de  l'agonie  d'un  homme  enlacé  par  un  serpent  divin. 

Pouvait-on  li-ouver  un  sujet  plus  analogue  à  celui-là  que  le  mythe 
du  Laocoon  ?  La  vue  de  ces  reptiles  et  de  ces  corps  humnins  en- 
chevêtrés ne  devail-elle  pas  évoquer  la  mort  du  prêtre  de  Troie  ?  Do 
là  vint,  peut-élre  aussi  sous  l'influence  d'un  drame  célèbre  à  celte 
é[ioque,  ce  qui  paraissait  autrefois  le  plus  étrange  dans  cette  créa- 
tion, c'est-à-dire  l'iJée  même  de  représenter  un  pareil  sujet,  la  com- 
binaison de  trois  corps  humains  et  de  deux  serpents. 


CONCLUSION. 


Les  monuments  de  l'art,  comme  les  phénomènes  de  la  nature, 
s'expliquent  par  une  succession  de  développements,  d'évolutions. 
Ils  ont  leur  histoire.  Ils  ne  sortent  pas  tout  à  coup  de  la  pensée  des 
artistes,  comme  Minerve  du  cerveau  de  Jupiter.  Us  sont  généra- 
lement précédés  d'une  série  d'es?ais  et  d'elTorts  dont  le  couron- 
nement est  une  œuvre  qui  résume  les  qualités  de  toutes  les  autres. 
Mais  le  Laocoon  surgissait  tout  à  coup  de  terre  comme  un  phéno- 
mène isolé.  On  se  trouvait  en  présence  d'un  groupe  d'une  composi- 
tion admirable,  mais  étrange  par  le  choix  du  sujet,  des  serpents  et 
des  corps  humains  enlacés,  traités  avec  un  réalisme  cruel,  presque 
repoussant.  Et  toutes  les  investigations  sur  la  liliationde  cette  œuvre 
restaient  infructueuses.  Ni  dans  les  frises,  ni  dans  les  peintures  sur 


332  nKVUK    ARCHÉOLOGIQUE. 

vases,  nulle  pari  on  ne  liou>ail  une  composilion  anlérieure  analo- 
gue à  celle  du  Laoïoon. 

L'origine  (lu  I.aocoon  nstail  une  lie  ces  rnijîines  que  la  pcicnco 
critique  est  incapable  de  résoudre,  et  l'impression  de  celle  impuis- 
sance «Mail  si  pùnible  que  les  arclu'ologues  avaienl  clierclié  une  ex- 
plication en  se  jelanl  dans  des  hypothèses  dont  la  base  môme  élail 
fausse.  C'esl  ainsi  tju'ils  vonhiienl  rattacher  la  création  du  Laocoon  à 
rinduen.'e  de  la  poésie,  t^urloul  à  celle  de  Virgile. 

On  se  demandait  donc  autrefois  :  «  Comment  celte  combinaison 
de  trois  corps  humains  et  de  deu\  serpents  a-t-clle  été  possible?  Où 
les  artistes  de  Uhodesoat-ils  pu  tiouverles  modèles  de  telles  contor- 
sions? D'où  leur  viennent  ce  réalisme  elceltccxacliludescrupuleusc 
de  l'analomie?  » 

Toutes  ces  questions  restaient  sans  réponse. 

Je  crois  pouvoir  affirmer  aujourd'hui  que  la  frise  de  Pergamc  con- 
tenait tous  les  modèles  nécessaires  à  la  combinaison  du  groupe  du 
Laocoon,  tous  les  éléments  dont  il  se  compose,  tous  les  sujets  d'ins- 
piration, et  en  ^léniral  tout  ce  (jui  pouvait  diriger  la  pensée  hu- 
maine vers  une  légende  pareille. 

ADRIIIN    WAGNON. 
Genève, juin  1882. 


SCEAUX  HITTITES  EN  TERRE  CLITE 


APPARTENANT  A  Al.  G.  SCilLUMBERGER. 


Il  y  a  des  modes  dans  les  études  historiques,  comme  en  matière 
d'ameublement  ou  do  toilette.  Il  y  a  des  engouements  qui  favorisent 
et  qui  servent  la  recherche,  en  tournant, .à  certains  jpurs,  tous  les 
yeux  d'un  mùiiK» côté;  ceux-ci  se  fixent,  comme  à  un  signal  donné,  sur 
un  même  point  de  l'horizon,  et  ils  Unissent  ainsi  par  distinguer  ce 
qui  jusqu'alors,  perdu  dans  les  ombres  du  passé,  n'avait  pas  attiré 
le  regard.  En  ce  moment,  paimi  ceux  qui  s'intéressent  à  l'histoire 
ancienne  de  l'Orient,  la  mode  est  aux  llélliéens,  Hittites  ou  Khélas, 
comme  on  voudra  les  appeler. 

Après  avoir  étudié  d'abord  l'Egypte,  puis  la  Clialdée  et  l'Assyrie, 
on  s'est  aperçu  que,  pour  celte  période  reculée  qui  précède  l'entrée 
en  scène  des  Grecs,  ni  l'Egypte,  ni  l'Assyrie  ne  remplissaient  h  elles 
seules  tout  l'espace,  dans  la  région  qui  s'étend  depuisle  bassin  du  Nil 
jusiju'au  Taurus,  et  de  la  vallée  de  l'Euplirale  à  la  Méditerraiiée.  On 
a  relevé,  dans  les  textes  classiques,  certains  passages,  certaines  men- 
tions (jui,  jusqu'alors,  n'avaient  pas  attiré  l'attention;  mais  ce  sont 
surtout  les  documents  hiéroglyphiques  et  cunéiformes  qui  ont  révélé 
.l'existence  d'un  peuple  belliqueux  et  puissant,  lequel,  pendant  plu- 
sieurs siècles,  aurait  eu  son  centre  politique  d!ins  la  Haute  Syrie, 
dans  la  région  où  sont  maintenant  les  villes  d'.\lcp  et  de  llamaih; 
sa  principale  place  de  guerre  aurait  été  Qadech,  sur  l'Oronle. 

Solidement  établi  dans  l'espèce  de  forleres.-e  naturelle,  en  forme  de 
triangle,  que  forment,  en  s'éloignant  l'une  de  l'autre  depuis  leur 
point  de  jonction,  les  chaînes  de  l'Amanus  et  du  Taurus,  ce  peuple, 
à  la  fois  industrieux  et  guerrier,  parait  avoir  èten'lu  sa  domination 
et  fait  sentir  son  indnence  d'une  part  sur  le  plateau  central  de  l'Asie 
Mineure  et,  par  moments,  jusqu'aux  rivages  de  la  mer  Egée,  d'autre 


33i  REVUE   AUCHÉOLOGIQUE. 

part  jiisqu':^  la  rive  droite  de  l'Kuplirate  cl  jusque  dans  h  Syrie 
méridionale,  où  il  rencontra  les  Ki,'yptiens. 

Ce  sont  li'S  doeunicnls  l'ijypliens  ipii,  i-n  nous  racontant  les  ha- 
tùlles  livrées  autour  de  0;»decli  par  les  conquérants  thcbains  de  la 
dix-neuviéme  cl  de  la  vingtième  dynastie,  nous  ont  les  premiers  fait 
deviner  riuiporlance  du  rôle  (jue  les  Khétas  avaient  joué  en  Syrie; 
les  pénibles  campagnes  dont  un  épisode  très  (lraniati(iue  nous  a  été 
conservé  par  le  poème  de  Pentaour  se  terminèrent,  au  moins  pour 
un  temps,  par  un  traité  de  paix  (jui  établit  enire  Uamsés  II  et  le  roi 
des  Kliélas  une  paix  coniiue  sur  un  pietl  d'ég:ilité  et  cjmentée  par 
un  mariage;  mais  la  lutte  recommença  plus  tard,  sous  la  dynastie 
suivante.  Malgré  les  victoires  dont  se  vantent  les  princes  égyptiens, 
la  puissance  des  Ktiélas  ne  fut  pas  sérieu^MUcnl  entamée,  car,  ileiix 
ou  trois siéiMes  plus  tard,  nous  voyons  Saloiuon  reclierdier  l'alliance 
de  ce  môme  peuple,  et,  un  peu  plus  tard,  celui-ci  lutte  avec  énergie 
contre  les  armées  assyriennes.  IJans  leur  constant  elToit  pour  atteindre 
les  plaides  de-la  mer  syrienne,  pour  raltaclier  à  leur  empire  la  riche 
IMiénicie  et  ces  vallées  du  Liban  et  du  Taurus  qui  fournissaient  des 
bois  de  construction  si  recliercliés,  les  couiiuéranis  niniviies  rencon- 
traient sur  leur  chemin  les  lliililes;  ils  finirent,  semble-t-il,  itar  les 
écraser  et  par  briser  leur  force  militaire.  Vers  la  même  époque,  les 
royaumes  de  Phrygie  cl  de  Lydie  se  partageaient  l'intérieur  de 
l'Asie  Mineure,  tandis  que  les  colonies  grecques  s'en  ap[)ropriaient 
les  rivages.  Vers  le  viii"  siècle  avant  notre  ère,  les  Ililliles  disparais- 
sent de  l'histoire;  leuis  descendants,  sujets  des  .^rranils  empires  qui 
se  succédèrent  dans  l'Asie  antérieure,  continuèrent  à  vivre  obscuré- 
ment dans  les  vallées  de  l'Ainanus  *. 

Si  nous  ne  savions  des  llèthèi  ns  de  la  Haute  Syrie  que  le  fait  de 
cette  puissance  politique  et  militaire  qui  h'elTace  vers  le  temps  où 
commence  pour  nous  la  chronologie  rigoureuse,  ils  n'auraient  droit, 
dans  rhi>loire  du  monde  ancien  et  de  sa  civilisation,  (|u'à  une  rapide 
et  sèche  mention;  c.e  qui  justifie  la  curiosité,  o:i  pourrait  presque- 
dire  la  passion  avec  laquelle  certainssavants,  surtout  en  Angleterre, 
s'attachent  en  ce  moment  ù  rechercher  les  moindres  traces  de  ce 
peuple  si  longtemps  oublié,  c'est  qu'il  a  été,  semble-til,  l'inven- 
leiir  d'un  des  systèmes  d'écriture  entre  lesquels  les  Grecs  ont  eu  à 


î.  Ceux  qui  voudraient  étudier  en  détail  l'iiistoirc  de  ce  peuple,  telle  que  nou» 
la  fuul  contiultrc  lis  muuuiiH-nib  liitTO|;l}'plii(|ues  cl  cunéironncs,  en  trouveront  un 
fort  iiitOrcMiant  rîhuniù  dans  un  article  de  M.  Vigourom,  inlitulô  :  Las  Ilclhécnsde 
la  Bibic  (iUiue  dis  (/uestiuns  /iislorii/ues,  l"  janvier  1B82J. 


SCRAL'X    HITTITES    H.N    TIMIRE   CUITE.  335 

choisir,  quand  ils  ont  voulu  noter  les  sons  de  leur  langue.  Cet  alplia- 
bet,  est-il  besoin  de  le  dire,  est  conçu  dans  le  môme  esprit  que 
celui  de  l'Kgypte  et  celui  de  la  Cbaldée  primitive  ;  chacun  descarac- 
lères  qui  le  composent  est,  ou  tout  au  moins  a  élé  dans  l'ori^jine,  un 
idéoijramvw,  la  représentation  abiéyéeet  convenlioniielie  d'un  corps 
célesto,  d'un  ôtrc  vivant  ou  d'un  objet  fabri(iu6  de  main  d'Iiommc. 
Ces  hiéroçjUjpht'x,  pour  piemlre  un  mol  iiue  tuul  le  monde  comprend, 
sont  tout  à  fait  ilislincts  de  ceux  de  TK^ypte  et  de  la  Clialdée;  ils 
forment,  personne  aujourd'hui  ne  le  conteste,  un  système  à  part,  qui 
a  en  sa  naissance  et  sa  vie  indépendante. 

Puuniuoi  incline-t-on  à  en  attribuer  l'iiivenlion  aux  Ililliles? 
D'une  pari,  on  sait  par  les  documents  égyptiens  que  les  Khéias 
avaient  leurs  scribes,  et  que  ceux-ci  avaient  gravé,  dans  leur  langue, 
sur  une  plaiiuc  de  métal,  un  des  exem[)laires  de  ce  traité,  conclu  avec 
Ramsès  H,  ilont  nous  possédons  encore  le  texte;  c'est  le  plus  ancien 
acte  dipl()iiiali(iue  qui  nous  soit  parvenu'.  D'autre  part,  les  plus 
nombreux  et  les  plus  étendus  des  textes  écrits  avec  cessignesonl  été 
Irouvésdans  le  pays  même  que  nous  savons  avoir  élé  le  vrai  centre  de 
la  puissance  des  Hittites,  à  Alep,  à  Ilamalh  cl  dans  les  environs.  Il  y  a 
une  (luinzaine  d'années,  ces  monuments  étaient  encore  tout  à  fait  igno- 
rés, quoi(|ue  l'un  d'eux,  vers  le  commencement  du  siècle,  eût  été  vu  par 
Burcbardl.  Depuis  1S70,  il  ne  s'est  presque  point  passé  d'année  sans 
que  quelque  texte,  ciselé  en  relief,  sur  pierre,  avec  ces  mêmes  signes, 
ail  élé  retrouvé  dans  ce  même  district  -. 

Ce  qui  ajoute  beaucoup  à  l'intéréL  de  ClUc  ..lécouverte,  c'est  que, 
depuis  lors,  dos  signes  qui  appartiennent  évidemment  au  même 
système  ont  élé  découverts  en  dehors  des  limites  du  territoire  sur 
lequel  a  dû  s'étendre  la  domination  directe  du  peuple  hittite.  On  a 
signalé  des  inscriptions  écrites  avec  ce  mèine  caractère,  auprès  de 
sculptures  taillées  dans  le  roc,  sur  les  points  les  plus  divers  de 
l'Asie  Mineure,- en  Cappadoce,  en  Isaurie,  et  jusqu'en  Lydie. 

1.  Voir  Egger,  Éludes  historiques  sur  les  traités  pulilics  chez  les  Grecs  et  les 
Romains,  1806,  iu-S,  Durand,  p.  243-252. 

2.  Sans  doute  il  n'est  pas  t/t'//iO«<»-c,  dans  le  sens  rigoureux  du  mot;  que  celte 
écriture  ait  ûlé  inventée  par  les  Hittites  ou  môme  qu'ils  s'en  soient  servis;  cous 
croyons  pourtant  qu'il  y  a  bien  des  vraisemblances  en  faveur  de  cotte  hypothèse, 
et  M.  Hylands  nous  parait  un  peu  trop  sceptique  lorsque,  en  tête  du  travail  que 
noua  citerons  plus  loin,  il  écrit  ces  lignes  :  »  Tliere  seeuis  to  be  little  or  no  évidence 
to  prove  that  the  inscriptions  aie  in  any  way  connectcd  witli  tiiher  ihe  Hittites  mcn- 
tioned  in  the  Bible,  or  ihe  Kliela  or  Kbaui  of  thj  Egyplian  and  Assyrian  ins- 
criptions, u 


336  nEVL'E  ARCHÉOLOGIQOE. 

Ces  liocouvcrtes  scniMi'iU  bien  piouver  que,  pendant  plusieurs 
siècles,  les  peuples  île  In  pt-niiisiile,  pour  (hm  ire  leurs  lanj^ues,  n'eu- 
rent pas  d'autre  iiistruuiciit.  d'autre  moyen  d'expression  qui;  celui 
qu'ils  avaient  emprunté  ;iux  Hittites.  Il  en  fut  ainsi  jus(|u'au  mo- 
ment où  le  royaume  phry^^icn,  dont  les  monuments  sul)Sl^lenl  encore 
à  re>t  do  Koutahia,  pn^s  de  Sci'l-i'l-Ghazi,  se  décida  à  rompre  avec 
cette  traditmn;  il  atlojita,  pour  écrire  sa  lan}:ue,  ralplialict  hicn  plus 
commode  que  les  IMiéniiicns  avaient  tiié  de  récriture  égyptienne  et 
qui  rcprésonle  par  un  signe  particulier  chacune  des  articulations 
élémentaires  de  la  voix  luimainc. 

Cependant,  si  une  conjecture  qu'a  émise  M.  Saycc  vient  à  élre 
confirmée  par  les  faits,  ce  système  d'écriture,  snus  une  forme  perfec- 
tionnée, aurait  survciu  même  à  la  chute  de  l'empire  hittite  et  à  la 
propagation  de  l'alphabet  phénicien  dans  tout  le  bassin  de  la  Médi- 
terranée. On  connaît  cet  alphabet  qui  a  été  employé  à  Cyprc,  jus- 
qu'au temps  des  premiers  successeurs  d'Alexandre,  pour  écrire  le 
grec;  on  sait  aujourd'hui  (]uc  les  signes  dont  il  se  compose  ont  une 
valeur  phonétique;  chacun  d'eux  représente  une  syllabe,  une  con- 
sonne accompagnée  d'une  voyelle  déterminée.  Dillérenls  indices 
donnent  lieu  de  croire  qu'avant  le  temps  où  les  Cypriotes  seuls  en 
ont  conservé  l'usige  cet  alphabet  a  été  employé  sur  toutes  les  côtes 
de  PAsie  Mineure;  il  était  en  train  de  faire  fortune  quand  la  diffu- 
sion de  Talphabel  phénicien,  qui  est  plus  commode  et  plus  pratniue, 
vint  en  arrêter  les  progrés.  Or,  si  nous  en  croyons  M.  Sayce,  c'est 
aux  hiéroglyphes  hittites  qu'auraient  été  empruntés  les  signes  de 
ralphabel  dit  (ypriotc;  on  les  en  aurait  tirés  en  leur  assignant  une 
valeur  phonétique,  comme  l'avaient  fait  les  Phéniciens  pour  les 
caractères  qu'ils  avaient  empruntés  à  l'Kgypte. 

Nous  n'avons  pas  qualité  pour  discuter  ici  celle  hypothèse;  nous 
avons  tenu  à  la  signaler  pour  montrer  comment,  si  elle  venait  à  se 
vérifier,  elle  fournirait  les  éléments  d'un  nouveau  chapitre  à  cette 
histoire  de  lécriturc  que  l'on  croyait,  il  y  a  quelques  années, 
arrêtée  dans  ses  grandes  lignes. 

Les  lenlalivcs  de  déchilTrcmcnl  dont  les  textes  hittites  ont  été 
l'objet  de  la  i^art  de  MM.  Sayce,  Hyde  Clarke  et  autres  érudils  ne 
paraissent  pas  avoir  prodriil,  jusqu'à  [irésenl,  aucun  résultat  (|ui  ait 
une  valeur  scientifique.  La  difficulté  t-st  d'autant  plus  grande  cpic, 
selon  toute  apparence,  ce  système;  de  signes,  comme  l'alphabet 
cunéiforme,  a  dû  servir  à  écrire  plusieurs  langues  1res  diH'érentes; 
c'est  ce  dont  les  auteurs  de  ces  tentatives  n'ont  pas  paru  se  douter 
jubqu'ici. 


SCF.VUX    IIITTITKS   EN    TF.nRF.   CUITR.  337 

Comme!  C"llc  de  l'alplinbel  cvpriolc,  celle  énigme  aura  sans  doule 
un  jour  sa  soliilion.  Pour  le  moment,  ce  qui  importe,  c'est  de  n'-unir 
le  plus  grand  nomhrc  |>ossllile  de  loxles,  soigneusement  transcrits. 
C'est  ce  (ju'a  iiensé  l'homme  de  mérite  i|ui  dirig(î  avec  tant  de  zèle  et 
de  goût  les  publications  de  la  Soc/V7t'  ^/V/rc/u'o/o7(V  biblique,  M.  W. 
Ilai'ry  Uylands.  Dans  la  tioisièiiKîpaitiedu  loiin'  VII  des  Trtnisacliowi, 
il  a  donné  une  sorte  de  (-oi-pnsdes  insciiplions  liillilcs,  sous  ce  titre  : 
Thr  inscribcd  stonrs  froin  Jiiahis,  Hiimuth,  Mfppo,clc.  (quatorze 
pages  de  texte  et  dix  planches).  Les  inscriptions  sont  rc|)roduiles 
les  unes  en  phototypie,  d'après  les  originaux,  les  autres  d'après  des 
dessins  que  M.  Hyjands  en  personne  a  exécutés  avec  beaucoup  de 
soin;  Iors([u'il  n'a  pu  remonter  au  monument  lui-même,  il  a  repro- 
duit les  meilleures  copies  qu'il  aitpu  se  pi'ocurer.  Dans  les  quelques 
pages  (|ui  sont  jointes  à  ces  planches,  M.  Rylands  fait,  avec  beau- 
coup de  simplicité  et  de  précision,  l'iiistoriiiuc  des  découveiles  suc- 
cessives qui  ont  fait  connaître  ces  monuments,  et  il  énumèrc  les  prin- 
cipaux ouvrages  el  articles  auxquels  auraient  à  recourir  ceux  qui 
voudraient  en  aborder  l'examen  et  en  tenter  le  déchiiïremcnt '. 

L'exemple  de  M.  Rylands  nous  a  paru  bon  à  suivre;  en  voyant, 
il  y  a  quelques  mois,  à  Londres,  entre  les  mains  du  secrétaire  de  la 
Société  iVarchéoloijie  biblique,  les  planches  du  recueil  (|u'il  préparait, 
nous  avions  conçu  la  pen>ée  de  publier,  à  litre  de  supplément,  un 
certain  nombre  de  sceaux  en  terre  cuite  que  nous  savions  appartenir 
à  i>L  Gustave  Schlumbcrgcr  et  qui  portent,  pour  la  plupart,  des 
caractères  appartenant  au  ménnc  système  graphique.  A  notre  retour, 
M.  Schiumberger,  avec  sa  libéralité  ordinaire,  a  mis  les  monuments 
à  notre  disposition;  il  a  fait  plus;  il  a  bien  voulu  se  charger  de  sur- 
veiller rexécution  des  gravures  el  de  préparer  le  catalogue  descrip- 
tif de  ces  petits  monuments. 

Les  sceaux  en  question  ont  été  acquis  par  M.  Schiumberger,  il  y 
a  trois  ans,  à  Conslantinople;  le  marchand  qui  les  lui  a  vendus 
assurait  qu'ils  avaient  été  apportés  de  l'intérieur  de  l'Asie  Mineure; 
on  n'a  pu  avoir  d'autres  renseignements  sur  la  provenance.  A  son 
retour,  M.  Schiumberger  les  avait  montrés  à  M.  de  Longpérier; 
noire  regretté  confrère  en  avait  compris  tout  rintèrèt;  il  les  avait 
rapprochés  des  sceaux,  aussi  en  terre  cuite,  que  M.  Layard  a  trouvés 

1.  11  y  aurait  dès  maintenant  à  ajouter  à  son  recueil,  outre  les  pièces  que  nous 
publions,  une  inscription  de  la  Cappadoce  récemment  signalée  par  M,  Sayce  sous  ce 
titre  :  A  ncw  Hittite  insLiiption  discovered  at  Tyana  by  W.  M.  llamsay  {The 
Acadeviij,  n°  535,  5  août  1682). 

XLIII.  —  22 


338  flKVUK   AnClIKOLOGIOUB. 

à  Kouiouri'ljik,  dans  la  cliambro  dos  archives,  pt  doni  liiiil  portent 
des  rar.icli'res  ijui  font  pirtio  de  ce  nuMiir  .ilpliabel;  il  les  a  gardés 
entre  Si's  mains  jusqu'à  sa  mort  cl  pailail  souvent  de  les  publier, 
avec  d'autres  monuments  «cmblables  qui  lui  avaient  été  commu- 
nitjués  par  M.  Sorlin-Doriiîny  et  qui  avaient,  m'a-l-on  dit,  été 
recueillis  en  Asie  Mineure.  Mieux  que  persoinu',  M.  de  I.ongpôricr, 
grâce  à  la  richissc  de  sa  mémoire  et  aux  rapprocliemcnts  qu'elle  lui 
fournissait,  aurait  pu  commenter  cl  cxidi(iuer  ces  monuments,  et 
peul-t'lre,  comme  il  l'a  fait  dans  d'autres  cludos,  trouver  une  clef 
qui  j'crmlt  le  décliiiïroment.  Nous  n'avons  pas  la  présomption  d'en- 
tieprendre  celle  lâche  diflicile;  nous  ne  cherchons,  comme  M.  Uy- 
lands,  qu'à  fournir  des  matériaux. 

Les  sceaux  sonlnu  nombre  de  dix-huit.  Nous  les  reproduisons  tous, 
dans  la  planche XXIV,  avec  leur  grandeur  léelle.  lis  ont  été  gravés 
par  M.  Dardellc.  L'argile  en  est  fine  et  très  dure,  d'un  jaune  as^cz 
pâle.  Le  n*  1  est  en  forme  de  parallélipipéde  ;  le  même  motif  se 
répète  sur  les  quatre  faces.  Le  n°  8  e.-t  cylindritiuc  cl  porte  une 
cmpreinle  à  chaque  extrémité.  Le  n'  9  est  cylindrique  cl  n'a  d'em- 
prcinle  qu'à  l'un  des  bouts.  Tous  les  autres  sceaux  sont  des  cônes; 
l'image  est  sur  la  base. 

Il  ne  nous  reste,  après  avoir  donné  ces  indications  générales, 
qu'à  présenter  la  description  sommaire  de  ces  objets.  Beaucoup  des 
signes  qui  y  figurent  sont  difficiles  à  définir;  très  souvent  il  est 
malaisé  desavoir  ce  que  le  graveur  du  sceau  a  voulu  représenter. 

1.  Griffons  affrontés,  d'untravail  très  fin,  séparés  par  un  objet  indé- 
terminé. L'un  des  griffons  est  debout  et  l'autre  accroupi.  Cet  objet 
a-t-il  même  origine  que  les  autres  pièces  de  la  collection  ?  L'absence 
de  signes  caractéristiijues  rend  la  chose  incertaine.  Ce  qui  nous  a 
décidé  à  faire  figurer  ici  ce  sceau,  c'est  qu'il  parait  fait  de  la  môme 
terre  que  le  reste  de  la  série. 

2,  3  et  A.  Dcuxzones  concentriques  autour  d'un  champ  circulaire. 
Dans  la  bande  cxlérieure,  ornemenls  effacés,  dont  il  ne  ri'sle  quelque 
trace  que  sur  le  numéro  2.  Dans  la  seconde  zone,  pctils  cônes  très 
allongés,  qui  rappellent  le  clou  de  l'écriture  cunéiforme;  ils  ont  leur 
sommet  dirigé  vers  l'extérieur  cl  sont  disposés  syinélri(iuement  ; 
c:itre  eux,  d'autres  cônes  plus  courts,  tournés  en  sens  contraire.  Le 
champ  du  disque  qui  fait  le  milieu  de  la  pièce  est  occupé  par  treize 
signes  qui,  de  l'un  à  l'autre  de  ces  cachets,  se  ressemblent  assez 
pour  que  l'iûsciiplion  doive,  dans  tous  les  trois,  représenter  le 


SCKAUX    HITTITES    F.N    Tl'HllK   Cl  ITi:.  339 

mCmc  loxlo  ;  mais  il  y  n  poiirluihlelégfercsdilTL'rcnccsd'arrangcmonl 
cl  (lo  (lossiii;  (.'Iles  sont  assez  sciisihli's  pour  iioiiiKillre  (raflirincr  que 
les  dois  cinpicinlt's  soiil  sorlii'S  d'une  inalrict;  dilT'- rente. 
Les  treize  signes  (jiic  nous  croyons  distinguer  sont  : 
Quatre  astres  dont  les  uns  sont  |ileinsel  les  autres  radiés;  un  ohjcl 
en  forme  deT  lbn(iué  de  deux  petites  boules;  deux  croissants;  deux 
groupes  formés  de  deux  baguettes  accolées  el  de  longueur  inégale,  le 
tout  ayant  comme  une  lointaine  ressemblance  avec  un  fléau  replié; 
deux  Heurs  trilobées,  (jui  occupent  toujours  le  centre  du  rond;  deux 
groupes  qui  semblent  constitués  par  la  juxtaposition  de  trois  grains 
de  blé. 

La  disposition  générale  fait  songer  à  celle  du  sceau  de  Tarclion- 
daros,  monument  qui  offre  à  la  fois  une  inscription  biltite  dans  le 
cbamp  et  une  inscription  cunéiforme  dans  la  zone  extérieure.  Ce 
qui  fait  la  diiïérence,  c'est,  outre  la  présence  de  ce  court  texte  assy- 
rien, la  figure  virile  qui,  sur  celte  bulle  d'argent,  remplit  le 
milieu  du  cbamp".  On  se  demande,  en  regardant  nos  trois 
sceaux,  si  les  cônes  de  la  bande  externe  ne  sont  pas  une 
sorte  de  pasticlie  d'une  inscription  cunéiforme,  un  trompc-l'œil 
analogue  à  ces  faux  carlouclies  égyptiens  qui  se  rencontrent  souvent 
sur  les  coupes  de  bronze  pliéniciennes. 

5.  Deux  carquois  ou  poignards  dans  leur  fourreau,  que  sépare  un 
croissant  et  qui  en  supportent  un  autre.  De  chaque  côté,  un  serpent, 

puis  un  nouveau  carquois.  Au-dessus,  deux  fouets  (?).  A   gauclie, 
quebiues  traits  indistincts. 

G.  Une  étoile;  deux  fleurs;  deux  mains  qui  ont  l'index  étendu  ; 
deux  groupes  formés  chacun  de  quatre  grains  de  blé  ou  de  quatre 
bâtonnets. 

7.  Deux  objets  que  je  ne  saurais  définir.  Au-dessous,  les  doigts 
d'une  main,  que  le  graveur  en  taille-douce  n'a  pas  bien  rendus;  une 
boule;  à  droite,  un  oiseau  à  tête  humaine. 

8.  a.  Deux  poignards  au  fourreau;  un  grand  croissant  entre 
deux  boules;  un  t'répied(?);  plusieurs  traits  que  je  ne  saurais 
délinir. 


1.  Le  sceau  de  Tarchondaros,  dont  rauthenliciié  a  été  contestée,  n'est  plus 
représentii  que  par  des  moulages;  l'originel,  qui  appartenait  à  M.  lovanofT,  a 
disparu.  Voir  Sayce,  dans  le  t.  Vil  des  Transactions,  p,  294,  cl  Hylands,  p!.  X. 


[i\i)  ni.VLF.    AIIOIIKOLOGIQI'E. 

b.  l'n  olijel  en  fornu»  île  nénu,  une  oloilo;  doux  hAlonnots  ;  une 
oreille  (?). 

9.  Deux  fleurs  ;  un  poignard  à  iloulile  <in\l^\  dans  sa  g.iinc  ;  une 
massui'",  un  ct"»ne. 

10.  C'est,  ;\  peu  de  chose  prùs,  la  n^pôlilion  du  numéro  5.  Jo  n'y 
retrouve  pas  les  croissants,  mais  j'y  vois,  en  plus,  deux  caractères  en 
forme  de  H. 

11.  Deux  jiieds  humains;  une  tôle  de  lion;  un  croissant;  une 
i;rosse  liouli>  (jui  e.-l  l'Ciil-Olre  le  soleil;  cinij  boules  plus  peliles,  qui 
seraient  des  étoiles. 

12.  Serpent  entre  un  couteau  et  un  carquois;  six  boules;  quatre 
cônes  accolés  deux  à  deux  ;  sept  grains  ou  bûtonncts. 

13.  Une  grande  croix;  deux  objets  ressemblant  ;\  des  mouches 
ailées  ou  libellules;  une  croix  ansée  ;\  pied  lerniinr  i);ir  deux  crosses; 
deux  paires  de  cônes. 

li.  Un  trépied;  deux  fléaux;  une  croix;  plusi^^urs  traits  que  je  no 
puis  délinir. 

io.  Personnage  portant  un  arc  sur  l'épaule,  vôtu  d'une  tunique 
courte,  chaussé  de  souliers  à  la  poulaine,  debout  sur  un  lion;  dans 
le  champ,  un  astre  radié;  deux  croix;  deux  cornes. 

La  figura  principale  présente,  pour  l'attitude,  k  costnme  et  la 
manière  dont  elle  est  groupée  avec  le  lion,  une  analogie  frappante 
avec  le  type,  si  fré(iucnt  en  Asie  lliiR'ure,  que  nous  avons  trouvé 
sculpté  sur  les  rochers  de  la  IHérie  et  que  reproduisent  les  médailles 
de  Tarse'. 

IG.  Un  lion  ou  un  chii>n;  un  trépied;  deux  astres  radiés;  une 
oreille;  un  pied  hiiinnin. 

17.  Vil  Iréiiicd;  deux  rameaux  (leuris  ou  deux  torches;  objet 
indèteiminé  entre  les  doux  branches  duquel  se  trouve  un  anneui  ; 
dans  l'ultérieur  du  cercle,  quatre  petites  boules. 

18.  Objet  en  forme  de  Iléau;  signes  (jui  ont  la  forme  du  A  et  du 

1.  Voir  fi.  Perrol,  Exploioti  ti  anliéolo'jifjuc  de  la  (iilutic,  pi.  XXWllI,  ei/'.l'/ 
ih-  I'  {•If.  \ti  tfure,  p.  42,  daus  les  Mémoires  d'archéolo'jic  el  fl'éf)i'jr(i}>liir. 


SCEAUX    IIITTITf.S    RN    TKIirU':   CLITK.  341 

0  îîrccs;  pplito  boiiK';  ohjcl  en  funiic  de  coiniias;  |iclilc  hr/ulc  ;  onze 
bAloniiels. 

Le  signe  qui  rappelle  le  <t>  grec  se  Iroiive  iqu'-tô  hicn  des  fois  sur 
les  lorliers  de  la  Plôrie;  nous  avions  cru  y  rcconnallre  la  capsule  de 
la  niaiidraiiore*. 

Nous  n'ajouterons  lien  à  colle  dex'iiption;  il  nous  suffit  d'avoir 
fourni  des  documents  et  d'avoir  indiiiué  au  passage  (pielques  rappro- 
clicnienls  qui  s'imposaient.  Nous  souhaitons  vivement  (jue  M.  Sorlin- 
Dorigny  se  décide  h  publier  les  monuments,  semblables  à  ceux-ci, 
dont  il  est,  assure-t-on,  le  détenleur-,  on  posséderait  ainsi  de  nou- 
veaux éléments  de  comparaison  et  nous  pourrions  commencer  à 
établir  des  séries. 

G.  PERROT. 

1.  G.  Perrot  et  E.  Guillaume,  Exploration  archéologique  de  la  Galatie^  t.  1, 
p.  333. 


VASES  DIALYSOS 

LETTUi:    A   M.    ALlii:UT    DL'.MONT 


I 


Permellez-moi,  comme  introduction  nux  remarques  qui  vont  sui- 
vre, sur  les  vases  tllnlysos  appartenant  au  Hiilisli  Mu>eum  et  sur 
ceux  d'un  type  analogue  provenant  de  .Mycènes,  île  Spata  et  de  MT'- 
nidi,  de  rappeler  quelques-uns  des  traits  (jui  caractérisent  le  mieux 
la  plus  ancienne  poterie  grecque. 

I.  On  a  eu  jusqu'ici  l'habitude  déconsidérer  comme  les  plus  an- 
ciens les  vases  couverts  de  dessins  géométriques  mêlés  quelquefois 
à  des  ligures  d'animaux  qui  ont  un  rôle  accessoire.  On  a  trouvé  des 
vases  de  cette  sorte  dans  l'étage  inférieur  des  lombes  du  Dipylon  ',  à 
Athènes,  et  au  pied  de  Tacropole,  du  cAté  sud-.  De  temps  en  temps 
on  en  trouve  ailleurs;  ainsi  le  Hritish  Muséum  en  possède  plusieurs 
de  Camiros,  un  de  Corfou,  probablement,  comme  on  l'a  supposé,  de 
la  tombe  de  Ménékralès^  Un  spécimen  très  beau  et  très  grand  vient 

1.  Hirschfeld,  Annali  delC  Inst.  archooL,  1872,  p.  135.  Une  iMïlIc  Béricdc  ces  vases 
appartient  Ji  Lady  Ilutlivcn,  à  Winton-Caslic,  près  d'Edimbourg.  Elle  m'a  dit  i|u'clle 
les  avait  découvert.'*  ellc-môaie  à  Ailiùncs,  il  y  a  cinquante  ou  soixante  ans,  mais  je 
ne  sais  pas  à  quel  endroit. 

2.  Birch,  Anr.  Pdtery,  2»  Wit.,  p.  183. 

3.  La  tombe  de  MOnil-krato^  est  décrite  dans  VArch.  Zciturtg  (t84G,  pi.  XLVIII) 
comme  contenant,  en  pént-ral,  des  vasi-s  de  style  dit  gn'co-asiaiique,  avec  di  figuros 
d'animaux.  Il  y  a  au  Briii.^li  .Muséum  plusieurs  vases  de  celte  sorie  venus  de  la  col- 
lection Woodiiouso,  à  Corfou,  et  on  suppose  ((u'ils  ont  été  trouvés  avec  le  vase  do 
siyie  géométrique  dans  cette  tombe.  L'inscription  du  tomb><au  est,  je  crois,  du 
Diémc  caractère  que  celU-s  des  pistils  aryballes  de  ce  stylo  au  Brilisli  Muséum.  Ces 
aryballes  viennont  de  Conniliu  et  sont  (çravés  dai:s  les  Anunli  ihll'  Inst,  urch.,  1802, 
pi.  A.  L  inscription  de  Ménékratès  est  donnée  dans  lo  récent  ouvrage  de  Hoebl,  In- 
inipt.  Graca  antiQuisstma,  n"  342. 


VASES  d'ialysos.  3-43 

de  Chypre  '.  Une  nrnemcnl.iiion  de  ce  ijenrc  se  voit  aussi  sur  des 
ouvr;ig(.'s  iiriiiiilifs  de  Ijrmizt;*. 

II.  Il  y  a  s;ins  iloiite  progrès  d.ins  l'art  quand  les  figures  (Fani- 
maux  et  ensuite  la  ligure  humaine  finissent  par  remporter  sur  les 
dessins  géomélriques  et  que  ceux-ci,  réduits  n  un  rôle  secondaire, 
ne  servent  plus  qu'à  remplir  les  vides  autour  des  ligures,  emploi 
qui  convient  tiiVs  bien  à  ce  genre  d'orncmentalion.  Un  bon  exemple 
de  ce  style  est  le  grand  lôbès  avec  deux  lions  affrontés,  découvert  par 
Burgon  à  Ailleurs  ^  Les  petites  œnochoés  à  longs  cols  trouvées  à 
Phalères  sont  do  la  même  série. 

II  a.  A  celle  série,  mais  formant  un  groupe  spécial,  appartiennent 
un  certain  nombre  de  vases  de  Camiros.  Il  y  a  très  peu  de  différence 
pour  le  style,  les  couleurs  et  la  belle  qualité  de  la  surface  entre  le 
lébès  de  lUii'gon  et  une  patère  deCamii'os  représentant  une  chimère 
avec  des  fragments  de  dessins  géométri(iues  qui  occupent  une  partie 
du  fond.  Nous  citerons  aussi  une  grande  tasse  profonde  provenant 
du  même  endroit  et  appartenant  au  British  Muséum.  Mais  cette 
tasse  diffère  du  lébès  de  Burgon  en  ce  qu'elle  est  dessinée  plus 
librement  et  que  les  traits  intérieurs  aux  lignes  indiquant  les  con- 
tours de  la  tête  et  des  cuisses  du  chien  sont  traces  à  la  pointe,  ce 
qui  indique  une  époque  un  peu  plus  récente.  Je  ferai  entrer  aussi 
dans  ce  groupe  les  assiclles  plaies  (pinakes)  de  Camiros,  en  remar- 
quant que,  bien  que  la  plupart  des  dessins  soient  seulement  peints 
et  n'aient  pas  de  traits  gravés,  il  en  est  cependant  autrement 
dans  un  ou  deux  cas,  par  exemple  dans  le  pinax  perlant  une  ligure 
de  bélier*  :  les  lignes  intérieures  de  la  toison  y  sont  mar- 
quées h  la  pointe  ;  de  même  sur  le  pinax  à  figure  de  Gorgone, 
les  plis  du  vêlement  sont  indiqués  par  des  lignes  gravées^.  Sur  tous 
les  vases  de  cette  série  les  espaces  autour  îles  ligures  d'hommes  ou 
d'animaux  sont  occupés  par  des  fragments  d'ornements  géométri- 
ques plus  ou  moins  serrés.  Telle  est  la  belle  plaqued'Hector  etMéné- 
las  combattant  sur  le  corps  d'Euphorbe  ^ 


1.  Cesnola,  C'jprus,  pi.  XXIX. 

2.  Conestabile,  Due  dischi,  pi,  I-H. 

3.  Birch  l'a  gravé  dans  son  Ane.  Poltcnj,  2«  éd.,  p.  1S4 
h.  Salzmaun,  Nécropole  de  Camiros. 

5.  Salzœann,  Nécropole  de  Camiros, 

6.  Salimann,  Nécropole  de  Camiros.  Je  ne  sais  pas  à  quelle  date  Ic«   épigra- 
phistes  placent  l'inscription  de  ce  vase  ;   mais  je  suppose  que  ce  n'est  pas  plus  bas 


'.l\\  IIKVIK    AhC.lIKOLOGKjUK. 

III.  Dans  celte  classe  je  placerai  les  vases  île  Camlrosel  d'iiilltMirs 
qui  ililTùient  lies  précéilenls  à  deux  égards  :  d'.ibord,  landis  qu'ils 
conservent  les  figures  d'animaux,  de  sphinx,  de  sirènes  et  paifois  la 
ligure  luimaine  comme  principal  motif  d'ornenienlalion,  le  potier  se 
sert,  pour  remplir  le  cliimp,  de  rosaces  très  serrées  qui  lemplacent 
ici  le  dessin  géomélri|uc  ;  en  second  lieu  les  lignes  intérieures  sont 
toujours  gravées.  Le  pinceau  csl  employé  seulement  pour  étcnilrc  les 
niasses  de  couleur,  taiiilis  que  dans  la  précédente  séiie(ll  a)  il  ser- 
vait à  tracer  les  contours,  les  lignes  qui  maintenant  sont  gravées  à 
la  pointe  el  beaucoup  d'autres  encore.  Les  peintres  des  vases  de  ce 
style  semblent  avoir  eu  un  goùl  puiiculier  pour  le  pinceau  et  pour 
ces  lignes  hardies. 

Ainsi  donc,  en  étudiant  des  œnochoés,  qui  ont  lanirine  forme  et,  à 
distance,  la  même  a[iparence  générale,  on  trouve  sur  les  unes  des 
bandes  d'animaux  et  di's  dessins  géométriiiues,  le  tout  fait  au  pin- 
ceau; sur  les  autres  on  voit  les  niônios  formes  d'animaux,  mais  le 
fond  est  couvert  de  rosaces  ;  les  contours  sont  peints,  mais  avec  tous 
les  traits  intérieurs  gravés  '.  Au  sujet  des  vases  dont  le  fond  est  orné 
de  rosaces,  on  peut  observer  qu'à  lalysos,  Myccnes  et  Spata  il  a  été 
trouvé  un  grand  nombre  de  petites  rosaces,  failes  quelquefois  d'or 
léger,  mais  souvent  aussi  de  verre  opaque.  Quelle  qu'en  soit  la  ma- 
tière, elles  sont  percées  de  trous  très  fins  qui  permettaient  de  les  atta- 
cher à  quebiue  chose.  Quand  les  rosaces  sont  en  or,  il  n'y  a  aucun 
doule  qu'elles  n'aient  été  posées  sur  des  vêlements,  el  je  ne  vois  pas 
quelle  autre  explication  on  pourrait  donner  pour  celles  en  verre.  Si 
on  a  pu  supjioser  que  les  dessins  géomrlri(}iii'S  des  va^es  les  plus 
anciens  sont  dérivtjs  des  dessins  textiles  des  vêlements,  nous  pou- 
vons penser  aussi  ijul-  rornementalion  des  vases  plus  récents  est 
imitée  de  ro-aces  d'une  ornemenlalion  de  loili-lle'.  11  est  tout  à 
fait  évi  knt  que  le  sydéme  de  couvrir  un  vase  de  rosaces  ne  peut 
venu-,  en  aucune  manière,  d'un  précédent  système  de  décoration 
puieuienl  géométrique;  ce  ne  serait  pas,  au  conlraiie,   une  expli- 


que le  commencement  du  ve*  siècle  av.  J.-C.  au  plus  tard.  Lu  bran  vase  do  co 
Blylc  est  donné  dans  les  Melisc/ic  Thonfjcfœisc  de  Conze,  pi.  III. 

1.  De»  cxemjtli's  des  deux  séries  se  voi'iit  dans  la  Nécropole  de  Ccimiios. 

2  Lcvùti ment  d"Assourbani|ial,  sur  une  (rbc  nuBrilisli  Muséum, est  pn-sfiuccom- 
plèlemenicouveridc  ro!*aces  qui  seiiiblent  avoir  t!té  iuiprimics  sur  rilolTe.  La  rubaco 
se  rrticoiitrc  constamment  comme  ('■liiment  do  décoration  y\ir  les  petits  ivoires 
assyriens,  élément  qui  p<ut  Ctrc  répété  en  grande  quantité.  Sométs  sur  un  vêlement, 
dos  rosaces  en  grand  nombre  produisent  un  cflfct  peu  diflfércnt  du  ci  lui  qu'elles  font 
■ur  lc<>  vaies. 


VASES  d'ialysos.  3'i5 

cation  contraire  à  la  vraisemblance  que  de  regarder  les  rosaces 
comme  une  iiiiilatinn  des  orneriienls  aitarhrs  au  costume.  Sans 
doute,  il  peut  paraître  étrange  que  des  vases  de  celle  série  n'aient 
pas  été  trouvés  à  côté  des  rosaces  d'or  ou  de  verre  d'ialysos,  de 
Mycènes  ou  de  Spata,  mais  la  seule  conclusion  nécessaire  de  celte 
parliculaiité  serait  que  les  peintres  de  vases  n'avaient  pas  encore 
commencé  à  imiter  celle  forme  d'ornement.  De  ceci,  on  [lourrail 
conclure  que  les  vases  particuliers  à  lalysos,  My.ènes  et  Spata  sont 
plus  anciens  que  ceux  de  style  gréco-asiatique  trouvés  à  Camiros  et 
aillcuis.  Il  n'est  cependant  pas  besoin  que  l'inlcrvaile  ait  et.'-  grand. 
Les  vases  à  rosaces  sont  d'un  travail  pli;s  avancé  que  ceux  à  or- 
nements géométriques  dans  les  parties  mécaniques  telles  que  la 
forme  el  l'engobe,  mais  ils  sont  inférieurs  sous  le  rapportdu  dessin, 
qui  est  d'un  arl  plus  faible  et  sans  régie.  A  en  juger  par  l'infériorité 
du  travail  et  par  l'emploi  constant  de  traits  intérieurs  gravés,  nous 
pouvons  penser  que  ces  vases  sont  d'une  date  plus  récente  el  ont  pu 
continuer  à  être  fabriqués  après  le  vi*  siècle  av.  J.-C.  *. 


Il 

De  ce  qui  précède  on  peut  peut-être  conclure  que  les  vases 
d'ialysos,  Mycèneset  Spata  et  de  quelques  autres  endroits  ^  sont  plus 
anciens  au  moins  que  la  seconde  série  de  vases  gréco-asiati(iues  qui 
semblent  avoir  tiré  leur  ornementation  formée  de  rosaces  de  ro- 
saces réelles  en  or  ou  en  verre,  telles  qu'on  les  trouve  dans  les 
lombes  d'ialysos,  Mycénes,  Spata  et  MéniiJi.  Il  est  difficile  de  dé- 
terminer de  combien  elles  sont  plus  anciennes.  D'aljoi  d,  à  lalysos  les 
formes  sont  quelquefois  particulières;  la  plus  caractéristique  est 
celle  d'un  vase  ayant  le  corps  globulaire  d'un  aryballe;  au  sommel 
s'élève  un  col  poslicbe  accosté  de  deux  anses.  En  face  de  ce  col  on 
en  voit  un  véritable,  semblable  à  un  goulot.  L'iJéeparaîl  venir  d'une 

1,  Les  petits  aryballcs  en  forme  de  tûte  casquée,  commentés  par  M.  Heuzey  dans  la 
Gazelle  archéologique,  1880,  p.  145,  pi.  XXVIU,  peuvent  en  général  être  regardés 
comme  de  la  même  époque  que  le  petit  aryballe  de  bronze,  de  forme  et  de  style  dé- 
coratif identiques  du  Fitzwilliam  Muséum,  à  Cambridg.^  publié  dans  le  Journal  of 
Hellenic  SUirtie^:,  II,  p.  00.  11  porto  pravé  ?0102  MAPOEIEN.  Comparer  aussi 
l'aryballe  sisné  ^AMEDE2  EPOESEN  publié  par  de  Witte,  Bull,  de  corresp. 
helU'ii.,  p.  5ii9et  551. 

2.  Il  y  a  au  Britisli  Muséum  quatre  spécimens  qui  viennent  sans  doute  d'Atliènes» 
Deux  au  moins  sont  de  la  colleciijn  de  lord  Elgin.  Il  y  en  a  deux  deCyprc,  trois  do 
Crète  et  un  de  l'île  de  Cos. 


316  nPIVCE   AnCHI^OLOGIQUR. 

simpli?  nmpliore  dont  le  col  est  bouclit"  cl  (jui  a  un  antre  co!  snr  la 
panse.  Il  y  a  \:\  un  degré  d'invention  qui  ne  peut  ôlrc  attril)uô  à  un 
âge  primitif.  Los  prorédcs  techniques  de  coloration,  de  vernis  cl  de 
dessin  ne  Irahi^scnt  pas  non  plus  un  étal  grossier  de  l'art  de  la  po- 
terie, l'n  i:ranil  noinhre  de  vases  d'ialysos  ont  la  forme  de  tasses  et 
sont  ornés  de  zigzags  ou  d'autres  dessins  simples.  L'un  d'eux  fait 
exception,  et  porte  <leux  bandes  jx-inles  pnrallékN.  Celle  du  li.iutcst 
déi'orée  de  cygnes  (jui  s'arraclicnl  les  plumes;  celle  du  lias,  de  pois- 
sons se  suivant  à  l.i  lile.  D'autres  encore  ont  de  puis  ornements 
géométriques,  mais  de  peu  d'importance. 

Justiu'ici  les  vases  d'ialysos  sembleraient  avoir  une  affinité  avec 
la  seconde  série  de  vases  peints,  que  nous  avons  décrite  plus  haut, 
quand  les  formes  d'animaux  viennent  prendre  de  Timporlancc  à 
côté  des  dessins  géométriiiucs.  Ceci  est  encore  plus  clair  dans  un 
vase  de  la  forme  d'un  aryballe,  sur  lequel  nous  trouvons,  alternant 
avec  des  zigzags,  le  dessin  de  vagues  renversées  comme  sur  le  lébés 
de  Burgon  sus-mentionné  et  sur  une  œnochoé  du  type  de  Phalères. 

Le  dessin  géométrique  le  plus  fréquent  est  la  spirale,  générale- 
ment très  développée  et  placée  librement  sur  le  vase,  sans  élrc  pro- 
vi'{juée  naturellement  par  aucun  autre  élément  de  la  décoration  ou 
de  la  forme  du  vase. 

La  spirale  est  en  fait  une  des  phases  primitives  du  système  d'or- 
ncmcntaiion  par  cercles  concentriques  qui  est  si  commun  dans 
la  poterie  de  Gypre,  où  il  continue  à  être  en  usage  jusqu'à  des  temps 
très  bas'.  Trois  vases  de  ce  style  sont  compris  dans  la  série  d'ialy- 
sos, mais  leur  date  ne  peut  pas  être  [\\ùe  uni(iuemeMt  par  le  fait  (luc 
des  vases  du  môme  genre  trouvés  ailleurs  ont  été  attribués  avec  cer- 
titude à  une  basse  époque,  puisque  le  système  des  cercles  a  selon 
toute  apparence  duré  longtemps. 

Outre  la  spirale,  on  trouve  le  dessin  en  forme  de  tresse,  le  losange, 
le  damier  et  les  zigzags. 


1.  M.  Newton  a  vu  des  vases  de  ce  type  d'ornementation  trouvés  à  Cypro  avec 
des  objets  touclianl  à  l'époque  romaine,  sinon  de  ce  temps.  M  y  a  au  Uritish  Mu- 
icum  un  vase  romain  trouvé  en  Angleterre  et  sur  lequel  sont  peints  des  cercles  con- 
centriques appartenant  au  niCmc  système.  Dans  plusieurs  cas,  il  me  semble  quo 
CCS  vases  ont  Lté  décorés  pour  Ctrc  tenus  couchés  sur  le  côté.  Beaucoup  d'cntro 
eux  n'ont  pas  de  pied  cl  doivent  Gtre  mis  sur  le  côté  ;  dans  ce  cas  les  cercles  qui 
semblent  couper  le  vase  en  sections  verticales  s<raient  les  lipn<s  qui  entourent  la 
partie  la  plu»  basse  de  presque  tous  les  anciens  vases.  Ceci  s'applique  seulement  à 
des  cas  simples  et  non  au  systùmo  complexe  trouvé  souvent  sur  les  vases  cy- 
priotes. 


VASES  l/rAI.YSOS.  317 

Bien  quo  les  vases  d'Ialysos  aient  une  ccrlainc  affniilô  .iv.;c  les 
vases  [)riiaitifs  (1(3  la  période  g('Oin(Jlri(iiic  (s(!!ries  I-II),  ils  ont  (U 
nombreuses  ^e^selublances  aussi  avec  ceux  du  slyle  gr6co-asiali(iiie 
le  plus  Tiiceiit  (III).  [Jn  de  ces  vas(.'S,  de  la  forme  caracl(}risti'|uc  des 
aryballes,  a  sur  l'anse  de  larges  rosaces  de  forme  idenliipje  aux  ro- 
saces de  verre  trouvijes  dans  les  miimes  lombes  et  que  nous  suppo- 
sons avoir  ôlii  l'origine  de  la  dtjcoralion  des  premiers  vases  gréco- 
asiali(iucs.  Ainsi  on  ne  peut  dire  que  les  rosaces  d'Ialysos  aient  été 
sans  inllucncc  aucune  sur  les  vases  trouvés  dans  les  mêmes  tombes. 
Sur  les  vases  mentionnés  ici,  les  rosaces  sont  dessinées  très  soigneu- 
sement (le  manière  à  indi(iuer  le  modelé  des  feuilles  et  non  pas  avec 
le  peu  de  soin  ordinaire  des  derniers  vases  gréco-asialiqucs.  J'ai 
trouvé  aussi  des  rosaces  semblables  sur  l'un  des  trois  aryballco 
Cretois  qui  olTrent  le  type  de  ceux  d'Ialysos  et  qui  sont  au  British 
Muséum. 

Je  voudrais  aussi  attirer  l'altenlion  sur  le  fait  que  les  aryballes  de 
la' dernière  classe  gréc'0-asiati(iue  sont  souvent  orn(!'s  par  devant 
d'une  figure,  spliinx,  gorgone  ou  autre,  et  que  les  flancs  et  le  der- 
rière du  vase  sont  relativement  négligés.  Tel  est  le  cas  des  vases 
d'Ialysos  ornés  de  la  seicbc,  qu'ils  aient  soit  la  forme  d'aryballes, 
soit  celle  d'une  haute  coupe.  La  tête  de  h  seiche  est  placée  juste 
sur  le  devant,  ses  tentacules  s'enroulent  sur  les  côtés  et  s'arrêtent 
par  derrière. 

En  ce  qui  concerne  la  seiche,  je  puis  mentionner  ici  qu'il  y  en  a 
une  sur  le  col  d'une  grande  amphore  de  Camiros,  au  lîrilish  Mu- 
séum; mais  elle  est  repiésenléc  là  d'une  manière  moins  décorative  et 
plus  naturaliste.  Le  corps  de  l'amphore  est  couvert  d'un  dessin  formé 
d'écaillcs,  sans  doute,  de  poisson  comme  on  en  trouve  sur  des  vases 
d'Ialysos.  Il  est  vrai  que  sur  les  vases  d'Ialysos  il  n'y  a  pas  de  traits 
à  la  pointe  et  que  pour  cette  raison  ils  pourraient  être  considérés 
comme  antérieurs  aux  vases  gréco-asiatiques  à  lignes  gravées.  xMais 
cet  argument  conviendrait  également  à  une  classe  de  vases  de  Ca- 
miros  *,  tiouvés  dans  le  cimetière  de  Tikellura,  prés  Camiros, oùdes 
vases  à  figures  noires  et  rouges  étaient  en  grand  nombre  -.  Les  vases 


1.  On  en  verra  des  exemples  dans  Salzmanii,  Sécropole  de  Catniro!. 

2.  Va  vase  à  fi;;urc  d'homme  courant  a  ùié  trouvé  dans  une  tombe  avec  «no 
kylix  à  figures  noires  "lur  fond  bl me.  Le  sujet  est  Hi^rmès  penclié  sur  un  rcclier. 
Une  des  ampliores  à  largos  volutes  (dont  Salzmaun  donne  des  exemples  dans  la 
Nécropole  de  Camiroi)  a  été  trouvée  avec  uac  kjlii  à  figures  noires  sur  fond 
rouge. 


3^8  REVCK    AI\CHÉOLOGIQUF,. 

ilonl  il  osl  question  i-laioiU  dos  ;imi>lioivs  do  la  couleur  claire  ordi- 
naire ;  dans  iiuclciues  cas  un  lar^'C  méandre  fait  le  lour  du  col  ;  sur 
le  corps  du  vase  sont  peintes  de  grandes  volules;  une  fois,  dans  un 
seul  cas,  il  y  a  entre  CCS  volulcs  une  li|,^ure  d'honiiue  nu  courant, 
dessinée  quelque  peu  à  la  manière  do  Nikoslliônès  ;  une  autre  fois 
on  voit  un  oiseau,  une  autre  fois  un  (  hioii  l(  nant  un  liovre.  Sur  les 
anses  du  vase,  il  y  a  parfois  un  dessin  do  gramlos  fouilles  de  lierre, 
et  sur  l'une  d'elles  (une  potlle  amphore)  est  gravé  en  grandes  lettres 
M  KO.  Ces  lettres  ne  peuvent  pas  être  plus  anciennes  que  le  milieu 
du  v'siè.loavanlJ. -C.au  plus  tôt.  Un  vase  exactcmciil  de  cette  es[  èce 
se  voit  dans  la  peinture  murale  d'une  tombe  à  Tarquinii,  el  probable- 
mcnlces  vases  peuvent  être  attribués  environ  à  l'an  oOO  avant  J.-G. 

Le  fait  de  placer  une  fii^ure  au  milieu  du  va>c  cl  de  laisser 
le  reste  plus  ou  moins  inoccupé  me  semble  rappeler  bien  plutôt  le 
style  habituel  des  vases  à  figures  rouges  que  les  compositions  en- 
combrées des  vases  à  figures  noires. 

M.  Fr.  Lonormanl  '  a  très  justement  fjit  remarquer  que  les  figu- 
res d'animaux  dans  la  poterie  d'Ialysos  sont  presque  toujours  celles 
d'animaux  marins,  la  pourpre  et  les  coquillage^.  En  outre  je  ferai 
observer  que  les  plantes  qui  se  rencontrent  le  plus  fréquemment  ont 
été  reconnues  par  un  botaniste,  à  qui  je  les  ai  montrées,  comme 
plantes  aquatiques,  quoiiiu'il  n'ait  pu  trouver  en  elles  aucun  carac- 
tère spécial  au  moyen  duquel  il  ait  pu  les  nommei-.  Nous  avons  donc 
clairement  affaire  à  des  créations  d'un  peuple  familier  avec  la  faune 
el  la  flore  aquatiques  vulgaires,  soit  de  la  mor,  solide  l'eau  douce. 
Nous  devons  remarquer,  en  même  temps,  qu'un  peuple  peut  habiter 
pendant  dos  siècles  le  bord  de  la  mer  ou  ailleurs  sans  utiliser  dans 
un  but  artistique  des  objets  placés  sous  ses  yeux,  jusqu'à  ce  qu'une 
impulsion  le  dirige  de  ce  côté.  La  difiicuUé  est  de  trouver  l'origine 
de  cette  impulsion.  Les  procédés  techniques  pour  fabriquer  et 
peindre  les  vases  ont  dû  être  acquis  d'abord,  et  en  ac(iuérant  ces 
procédés  on  a  dû  suivre  d'anciens  moJèles  cl  les  quitter  ensuite. 
Mais  où  est  le  point  de  départ  des  deux  systèmes  ?  Probablement  il 
se  trouve  dans  la  combinai^^on  dos  stylos  grométrique  et  gréco- 
asiatique,  et  il  estdù  à  un  peuple  vivant  dans  l'une  des  lies  grec- 
ques telles  que  Uliodos. 

Cela  est  justifié  quand  on  considère  les  autres  aniiquités  trouvées 
avec  les  vases  d'Ialysos.  Je  ne  crois  i  as  que  les  lombes  remontent 

1.  Dans  un  arlide  do  la  Gazette  archéologique,  1S79,  p.  197. 


VASES  d'ialysos.  3i9 

à  plus  de  six  conts  ans  environ  avant  J.-C.  Nous  trouvons  par  exem- 
ple, une  gemme  cii-cui;iiro  de  cri.stal  sur  bnuelle  est  gravée  la  figure 
d'un  taureau  debout  à  côtùd'un  palmier.  Comme  exécution  artistique, 
ce  taureau  n'est  inférieur  en  rien  ù  la  meilleure  ligure  de  ce  genre 
que  j'aie  jamais  vue  sur  aucun  vase  gréco-asialiipie.  Il  y  a  aussi 
nnc  petite  ligure  de  femme  assise,  en  ivoire,  dans  le  style  des  statues 
des  Branchides,  et  une  petite  chèvre  de  bronze  qui  semble  de  la 
môme  époque.  Sur  l'du  des  ornements  de  verre  on  voit  un 
sphinx  que  je  comparerais  encore  comme  style  au  meilleur  des 
sphinx  des  vases  gréco-asiatiques.  Les  épées  et  les  couteaux  de 
bronze,  trouvés  en  si  grand  nombre,  sont  exactement  semblables 
à  ceux  de  Mycônes.  Il  est  vrai  (ju'on  a  découvert  quelques  sca- 
rabées de  porcelaine,  sur  l'un  dçs(iuels  on  a  lu  le  cartouche  d'un 
roi  d'Egypte.  .Mais  je  ne  vois  aucune  raison  d'être  guidé  par  des 
productions  de  ce  genre,  si  souvent  fabriquées  par  des  marchands 
phéniciens,  pour  déterminer  des  dates,  si  ce  n'est  pour  fixer  le 
terme  extrême  avant  lequel  les  objets  n'ont  pu  être  faits.  Nous  avons 
un  certain  nombre  de  scarabées  de  Gamiros  portant  le  cartouche  de 
Thothmès  III  ;  mais  nous  n'avons  jamais  supposé  que  ces  scarabées, 
ni  les  objets  trouvés  avec  eux,  aient  pu  remonter  jusqu'à  l'époque 
de  ce  souverain. 

A.  s.  MURRAY. 


Je  suis  très  reconnaissant  à  M.  Murray  des  remarques  critiques 
qu'il  a  bien  voulu  m'adresser  au  sujet  du  chapitre  m  consacré  aux 
vases  d'Ialysos,  dans  les  Céramiques  de  la  Grèce  propre.  Ces  remar- 
ques intéresseront,  eroyoïis-nous,  les  lecteurs  de  la  Revue.  On  y 
reconnaît  les  qualités  distinguées  d'un  savant  qui  a  une  très  grande 
habitude  des  monuments  antiques  et  qui  a  fait,  en  les  étudiant,  une 
foule  d'observations  aussi  justes  qu'ingénieuses  et  originales.  Je 
soumettrai  seulement  à  M.  Murray  quelques  réflexions. 

M.  Murray.  qui  a  sous  les  yeux  les  vases  d'Ialysos  et  ceux  de  Ca- 
miros,  ne  croit  pas  qu'ils  soient  d'une  antiquité  très  différenle.  Il  est 
frappé  des  qualités  d'exécution  que  présente  l'ornementation  d'Ia- 
lysos; il  y  remarque  la  rosace,  qui,  il  est  vrai,  ne  se  voit  jus- 
qu^ci  que  deux  fois,  sur  le  vase  n°  8  de  notre  planche  III  '  et  sur  un 

1.  Cérmnique  de  la  Grèce  propre. 


330  nrvi'F.  An('.iii:(ii.(H-,i(jrr. 

oxoniphiire  Iroiivè  en  CnMe  ;  il  faut  roconnnfiro  qu'elle  n'est  pas 
d'un  iisaj^e  fii-iiueiil,  mais  que  selon  tuule  vraisemblance  on  en 
renconîrera  enrorc  d'aulies  exemples  pour  des  époijues  où  elle  n'o- 
laii  pas  devenue  un  motif  général  de  dèeoraiion. 

M.  Mui  ray  est  frappe  de  la  forme  0  de  la  planclic  III  ;  il  ne  la  croit 
pas  très  ancienne.  Nous  avons  noté  (p.  4'0  (ju'eile  existe  dans  la  col- 
let tien  de  Saiilorin,  et  qu'elle  se  retrouve  en  K;;yple. 

Il  observe  (lUc  le  potier  d'Iilysos  soignait  li'  devant  du  vase  cl 
nêiîligeail  au  contraire  la  partie  opposée,  ce  qui  se  voit  souvent  i\ 
l'époque  gréco-orientale;  il  trouve  dans  ce?  rnp|>rochoments  l'in- 
dice (|ue  les  deux  i^pocjucs  ne  sont  pas  éloigné'.'s.  Il  y  a  traccde  celte 
tendance  dans  la  décoration  de  Santorin,  dont  tous  les  autres  carac- 
tères offienl  des  sujets  de  raïqirocliemenl  si  nombreux  et  souvent 
une  complet.'  similitude  avec  le  style  d'Iahsos. 

M.  Murr;iy  signale  cnlin  des  objets  trouvés  à  lalysos  ;  sur  une 
gemme  de  cristal  esl  gravé  un  taureau  prés  d'un  palmier,  tr.ivail 
d'une  industrie  très  avancée  ;  une  petite  ligure  en  ivoire  rejirésenle 
une  femme  dans  le  style  des  Rrancliides  ;  une  petite  chèvre  de 
bronze  paraît  être  du  même  temps  ;  une  {lâte  de  verre  porte  un 
sphinx.  Depuis  que  nous  commençons  à  bien  connaître  la  sculiiture 
de  la  Chaldée  et  de  la  Habylonie,  il  faut  une  grande  réserve  dans  les 
conjectures  que  l'on  propose  sur  la  date  d'anivrcs  souvent  remar- 
quables. En  Assyrie  surtout  l'arl  a  reproduit  de  bonne  heure  avec 
une  étonnante  vérité  les  animaux. 

Le  scarabée  d'Aménophis  III  ne  paraît  pas  à  M.  Murray  être  un 
argument  pour  fixer  une  date;  il  a  tout  à  fait  raison;  ces  sortes 
d'objelsétaientsouvcnt  fabriqués  longtemps  après  l'époque  où  avaient 
régné  les  pharaons  dont  ils  conservaient  les  noms;  nous  avons  à 
Camiros  des  scarabées  ornés  du  cartouche  de  Thoutmés  III  ;  (juel- 
ques-uns  gardent  des  traces  de  dorure,  ce  qui  semble  indiquer  (|u"ils 
servaient  comme  ornements.  M.  Ileuzey,  Catalogue  des  fx/urincs  de 
terre  cuite  du  Louvre,  p.  213,  cite  un  scarabée  de  Klioufou,  le 
Chéops  de  la  IV'dynastie,  trouvé,  au  témoignage  de  M.Salzmann, 
lievue  arclicolofjlque,  t.  VIII,  p.  1,  dansun  tombeau  de  Camiros  dont 
tout  le  contenu  esl  au  L'  uvre;  ce  sont  des  coupes  noires,  des  vases 
à  fond  clair  avec  zones  d'animaux  et  des  figurines  de  terre  cuile. 

La  vérité  e>t  (juc  nous  ne  possédons  aucun  document  (jui  pcrmelle 
dédire  fépofiue  exacte  ù  la(iuelle  apparlieiineiil  les  vases  dlalysns; 
nous  ne  pouvons  délcrminir  qu'une  dale  relative,  et  eiu-ore  bien 
plutôt  pour  la  jdace  qu'occupe  ce  .••tylc  dans  l'hisloire  générale  de 
la  cérami(iue  que  pour  Itl  ou  tel  vase  et  même  pour  telle  ou  telle 


VASES  d'ialysos.  351 

série  de  vases  trouvés  clans  un  lieu  pniliculier.  Or  il  est  évident  que 
le  type  d'ialysos  appartient  au  style  llural  cl  marin  :  à  cet  égard  il 
n'y  '1  aucun  doute;  c'est  là  un  caractère  général  qui  domine  toutes 
les  observations  de  détail.  Kst-il  postérieur  au  siylc  de  S.intorin? 
Il  ne  peut,  je  crois,  y  avoir  aucun  doute;  est-il  antérieur  au  style 
de  IMycùncs?  La  difliculté  provient  de  ce  que  nous  avons  un  véri- 
table musée  pi'ovenant  des  fouilles  (!(!  Mycèncs  et  seulement  quel- 
ques objets  d'ialysos.  .M.  Murray  sait  mieux  que  personne  que  les 
signes  essentiels  du  type  d'ialysos,  la  pieuvre  et  la  pourpre,  les  vé- 
gétaux aipialiiiues,  sont  très  rares  h  Camiros,  (ju'il  est  im[)Ossible  de 
les  concevoir  comme  des  élémenls  du  style  oriental  et  géométrique 
de  l'île  de  Rhodes.  Je  ne  puis  citer  qu'un  seul  exemple  précis  de  ces 
motifs  de  décoration  ;\  Camiros  :  une  amphore  du  liritisk  Muséum 
porte  sur  le  col  la  pieuvre  ;  le  reste  de  la  décoration  est  formé  d'é- 
cailles  semblables  à  celles  de  la  ligure  15,  planche  III.  C'est  là  un 
document  d'une  grande  valeur,  mais  ce  n'est  qu'une  exception. 

ALBERT   DUMONT. 


LES  FOUILLES 

UB 

LINSTITIT  ARCllÉOLOGKJLE  AMÉRlilAlN 

A     A  S  S  G  S 

SECONDE    CAMPAGNE.   -  1882. 


Les  rôsultats  de  la  campngne  de  18SI  h  Assos,  —  rL-sullats  qui  ont 
élé  publit's  el  illustrùs  par  l'Inslilul  arclioologiquc  aiiiL'ricain,  an 
mois  de  juin  dernier,  dans  le  premier  volume  des  mémoires  de  ?a 
série  classique,  — peuvent  être  résumés  lirièvement  comme  suit  : 

i"  La  démonstralion  de  l'inexaclilude  des  travaux  de  ïexier,  en 
ce  qui  louche  à  Assos  ; 

2°  Une  étude  soigneuse  de  la  topographie,  du  site  cl  dos  environs 
de  l'ancienne  ville: 

3"  Une  restauration  sur  papier,  complète  et  certaine  d.ins  tous  les 
déiailsessentiels,  du  plan  ettle  l'élévalion  'lu  céléKre  lemple  dorique 
de  Tacropole  ; 

A"  La  découverte  el  l'étude  partielle  de  plusieurs  monuments  de 
haut  intérêt,  pour  la  connaissance  des  bûliments  municipaux  et 
privés  cl  des  travaux  puMics  hellénii|ues  ; 

5"  La  découverte  de  plusieurs  Mocs  entiers  cl  d'un  grand  nombre 
de  fragments  considérables  de  l'imporlanle  décoraiion  sculptée  du 

temide  ; 

G°  La  (lécouverlc  de  plusieurs  inscriplions  cl  de  beaucoup  d'anîi- 
quités  de  moindre  valeur. 

La  seconde  campagne  des  fouilles  a  commencé  le  l"-"  mars  1882, 
cl  s'est  étendue  jusque  vers  le  commencement  de  décembre.  IVii- 


l'institut   AnCHKOLOGlQUE   AMÉRICAIN    A   ASSOS.  353 

dant  tout  ce  temps  les  travaux  ont  été  poussés  avec  énergie  sous  la 
diroclion  du  chef  de  l'expédition,  M.  Joseph  Tliaclier  Clarke,  et  de 
ses  deux  aides,  MM.  liacon  et  Koldewey.  Les  résultais  de  celte  se- 
conde (■aii)paf,Mie  [iromeltent  de  n'être  point  inférieurs  à  ceux  de 
l'année  passée,  il  ne  sera  pas  possilde  de  former  un  jugement  d'en- 
semlile,  même  sur  ce  qui  a  déjà  été  fait,  avant  la  publication  du  se- 
cond rappoit  de  M,  Clarke. 

Le  diici'teur  de  l'expédition  n'a  pas  eu  le  loisir  d'envoyer  à 
Tadministration  de  llnstilut  des  comptes  rendus  très  détaillés  de  ses 
nouvelles  découvertes  ;  il  n'a  môme  presijue  rien  dit,  jus(ju'à  [iré- 
sent,  des  menus  olijels,  des  souvenirs  précieux  de  la  vie  intime  et 
journalière  de  l'anliijuilé,  qui  ont  été  trouvés  en  grand  nombre.  Il 
ne  sera  pourtant  pas  inutile,  peut-être,  de  donner  dès  maintenant 
un  aperçu,  si  imparfait  (|u'il  doive  nécessairement  étie,  de  ce  qui  a 
été  accompli  par  les  explorateurs  américains  à  Assos  pendant  la 
saison  qui  vient  de  finir.  J'entreprendrai  donc  de  donner  cet  aperçu 
en  divisant  le  sujet  par  catégories. 


1.  —  ARCHITECTURE. 

Temple.  —  Le  célèbre  temple  d'Assos,  si  important  dans  l'histoire 
de  l'arcliileclre  hellénique,  sera  dorénavant  l'un  des  monuments  do- 
riques les  mieux  connus.  H  a  été  trouvé  des  fragments,  du  moins, 
de  tous  ses  éléments  architecturaux,  les  poutres  de  pierre  trans- 
versales du  plafond  du  péristyle  seules  exceptées  ;  et  de  ces  poutres 
la  position  et  les  dimensions  sont  parfaitement  établies. 

Théâtre.  —  Ce  monument  était  encore,  vers  le  commencement  de 
ce  siècle,  l'un  des  plus  parfaits  en  son  genre.  Malheureusement  il  a 
bien  souiïert  depuis  lors,  ayant  servi  pendant  longtemps  comme 
cariiére  de  pierres  de  taille,  non  seulement  pour  la  faible  popul.ition 
du  voisinage,  mais  peut-être  même  pour  les  conslrucieurs  de  Cons- 
tantinople.  Il  en  a  pourtant  échappé  assez,  grâce  surtout  aux  terres 
meubles  emportées  par  la  pluie  sur  les  pentes  de  l'acropole,  pour 
rendre  facile  une  restauration.  Le  plan  du  xorAov  entier  est  retrouvé  ; 
il  est  remarquable  en  ce  que  son  arc  est  moindre  que  celui  d'un 
demi-cercle.  La  disposition,  des  deux  vomitoires  est  établie,  ain.ù 
que  celle  de  plusieurs  constructions  accessoires  ;  et  les  ruines  im- 
portantes de  la  scène  ont  reçu  l'attention  qu'elles  méritent. 

XLiv  —  23 


ooi  REVUE  ARCHEOLOGIQUE. 

Portique.  —  I.a  praiulc  ston  assiso  sur  la  pi^nle  sud  de  l'acropole, 
au-dessus  du  llii'âliv,  avait  plii<5(le  lit  nii'iiv-  de  développeuicnt. 
Elle  prùsenlail  laiil  de  ressemblanco  avec  la«/o<idu  leniple  d'Alliènô 
Polias,  à  PiTgaine,  que  M.  Clarko  n'est  pas  ('Ini^né  de  cioiro  que 
les  deux  i)orli(|ues  oui  élé  eonstruils  par  W  nu^nie  arcliilecle.  L'or- 
nemenlaliou  sculi)lôe  de  celui  d'Assos  esl  de  beaucoup  plus  >imple 
que  celle  de  l'aulre,  le  rude  traclivle  d'Assos  ^'lanl  Iden  moins  pro- 
pre j  recevoir  une  décoration  en  relief  (jue  le  beau  calcaire  de  Per- 
game.  Kn  tous  cas,  le  portique  d'Assos  doit  ùlre  une  création  des  rois 
de  Pergame,  dont  l'aulorité  fut  reconnue  a  Assos  entre  :'il  et  i'l3 
avant  J.-C.  —  La  stoa  comprenait  deux  étages  de  colonnes  d'ordre 
dorique,  dont  celles  d'en  bas  avaient  deux  fois  la  liauleur  de  celles 
de  la  seconde  rangée,  qui  étaient  pourvues  de  bases.  Les  chapiteaux 
étaient  bas  et  maigres.  Entre  les  colonnes  de  chacun  des  étages 
étaient  établies  ù  hauteur  d'appui  des  dalles  sans  ortieiiient.  Il  ne 
paraît  pas  qu'il  y  ait  eu  des  triglyplies  sur  la  frise.  En  somme,  le 
portique  d'Assos  était  quelque  |)eu  plus  élancé  que  celui  de  Pergame  ; 
mais  ce  dernier  était  de  proportions  plus  gracieuses  cl  d'exécution 
plus  élégante. 

Slî'le.  dorique.  —  Sur  la  voie  sacrée  il  a  élé  découvert  une  stèle  ar- 
chaïque dans  la  forme  d'une  colonne  dorique.  Elle  posséJe  une  base 
et  ressemble  beaucoup  aux  piliers  «  proio-doriques  »  do  Béni- 
Hassan.  Le  docteur  Fr.  von  Rcber  trouve  dans  celte  stèle,  dont  un 
dessin  lui  a  élé  communiqué,  un  appui  à  sa  théorie  que  la  colonne 
dorifjue  élail  pourvue  il  l'origine  d'une  base,  et  que  ce  memlire  ne 
fut  retranché  (jue  lorsque  l'emploi  de  la  pierre  au  lieu  du  bois  dans 
les  pallies  hautes  du  bAtinicnt  rendit  nécessaire  le  rap[irochcmeut 
des  colonnes  et  ht  des  bases  un  obstacle  à  la  circulation. 

Murs.  —  L'importance  des  forliQcalions  d'Assos  est  reconnue  de- 
puis longtemps.  Les  chapitres  du  compte  rendu  de  M.  Clarkc  qui 
lrait(Monl  d'elles  seront  ciTlainemcnt  une  des  conlrihutioiis  les  plus 
inqportantes  à  notre  connaissance  do  l'arrhitecture  militaire  hellé- 
nique. Les  murs  de  la  ville  sont  de  plusieurs  époques,  mais  cons- 
truits partout  avec  le  plus  grand  soin.  Il  y  a  un  revêtement  magnilique 
en  pierres  de  taille  à  l'extérieur  et  à  l'intérieur;  l'intervalle  était 
comblé  de  terre  ballue  cl  île  pierres.  Les  murs  sont  garnis  de  tours 
formidables,  dont  la  plupart  sont  carrées,  mais  une  du  moins  a 
la  forme  d'un  demi-cercle.  Les  portes  de  la  ville  sont  de  plusieurs 
genres  ;  les  poternes  sont  surtout  intéressantes.  Il  y  en  a  qui  sont 


l/iVSTITUT   AnCnKOLOGIQDR   AMF^niCAlN    A    ASSOS.  355 

fL'rm(''fis  fin  haut  par  un  liiiloau  soutenu  par  dos  corbeaux  ;  il  y  en  a 
il'aiilrcs  (|ui  ont  la  formo  d'un  arc  on  liorccau;  niais  rare,  au  lieu 
d'ôlre  appareillé,  est  taillé  dans  les  assises  lioriznntales  du  mur.  Une 
grande  partie  de  cette  belle  enceinte  est  toujours  pres(jue  en  [laifait 
étal.  Il  lui  Miau(|uo  soulcuienl  il(!u\  ou  trois  des  assises  d'en  liaul, 
qui  ont  été  jetées  bas  [»ar  la  main  de  l'homme. 

Momimi'nt^^  rlivcrs.  —  Il  snfflrn  do  monlionner  à  tilre  d'invontaire 
le  gymnase,  les  thermes,  et  tant  d'autres  monuments  de  la  vie 
pu!ili(iue  et  privée  de  ranti(|ue  cilé,  sans  oublier  le  beau  pont  hellé- 
niijuo,  qui  ont  occupé  l'oxpédilion  pendant  cette  année.  Les  monu- 
monls  seront  lous  décrits  dans  le  prochain  rapport.  Je  dirai  pourtant 
ici  (lue  le  savant  professeur  Jehb,  de  l'université  de  Glasgow,  qui  a 
visité  Assos  dernièrement,  ne  craint  pas  de  comparer  favorablement 
les  ruines  de  celle  ville,  pour  l'étude  de  la  vie  des  anciens,  môme 
avec  celles  de  Pompéi. 


II.  —  MONUMENTS  FUNÉRAIRES. 

La  voie  sacrée  d'Assos,  qui  suit  les  contours  des  murs  pendant 
une  certaine  distance  avant  de  se  séparer  finalement  de  la  ville, 
était  depuis  les  temps  les  plus  reculés  le  principal  cimetière  des 
liabitanls.  Elle  est  bordée  des  deux  côtés  par  une  longue  file  de  tom- 
beaux de  famille  ou  de  parliculiers,  d'exèdres,  de  terrasses,  et  de 
arcophages  plus  ou  moins  monumentaux.  Les  tombeaux  les  plus 
anciens  sont  rangés  régulièrement  l'un  à  la  suite  de  l'autre.  Plus 
lard,  quand  lous  les  emplacements  les  plus  recherchés,  —  ceux  les 
plus  près  de  la  ville,  —  étaient  déjà  occupés,  on  commença  à  poser 
les  sarcophages,  sans  ordre,  partout  où  il  y  avait  de  la  place  libre  pour 
les  recevoir  :  sur  les  marches  des  exèdres,  entre  et  même  contre 
les  vieux  tombeaux,  et  quelquefois  au  milieu  du  chemin.  Pres(|ue 
tous  les'sarcophagcs  avaient  été  brisés  et  pillés  depuis  longtemps; 
mais  l'expédition  en  a  trouvé  intacts  quelques-uns  des  plus  humbles. 
Dans  un  de  ces  sarcophages  elle  a  retrouvé,  parmi  les  cendres  do 
l'ancien  occupant,  ses  deux  slrigiles  en  fer  avec  quelques  restes  de 
leurs  manches  de  l)ois,  les  aryballcs  qui  ont  contenu  sa  provision 
d'huile,  et  la  pièce  de  monnaie  qui  devait  satisfaire  aux  prétentions 
du  vieux  batelier  Gharon.  —  M.  Glarkc  nous  promet  à  propos  de 
quelques-uns  des  monuments  de  la  voie  sacrée  une  élude  impor- 


3.%  REVL'E   ARCriKOLOGIQUE. 

Imite  nyanl  rapport  à  l'origine  tant  disputée  des  Tombeaux  des  Kois 
près  de  Jérusalem. 

I.a  voie  sacrée  esl  pavée  sur  une  certaine  étendue  de  gros  blocs 
irréguliers  de  pierre  formant  une  chaussée  (jui  ressemble  assez  à 
celle  des  rues  de  l'ompéi. 

m.  —  SCULPTURE. 

Temple.  —  Il  a  été  découvert  cet  élé  un  nouveau  prand  bloc  de 
répi>l\le  sculpté  du  temple.  Sur  ce  bloc,  (|ui  est  dans  un  bon  élal 
de  conservation,  sont  représenlés  quatre  centaures,  non  plus  du 
type  très  archaïque  de  ceux  du  grand  relief  de  ré[)islyle  découvert 
l'année  passée,  (jui  ont  les  jambes  de  devant  de  forme  humaine  et 
Seulement  celles  de  derrière  du  cheval,  mais  du  type  ordinaire,  et 
pareils  aux  centaures  sur  les  sculptures  d'Assos  au  Louvie.  Ce  relief 
porte  à  neuf  le  nombre  des  reliefs  comi)lets  de  l'épistyle  et  des  mé- 
topes du  lempb;  découverts  par  l'expédition  américaine.  Il  a  été 
trouvé,  aussi,  le  fragment  qui  man(iuail  toujours  au  grand  relief 
représentant  deux  sphinx  en  face  l'un  de  l'autre,  dont  la  moitié  en- 
viron est  au  Louvre,  et  dont  un  premier  fragment  était  retrouvé 
l'année  passée.  Les  archéologues  alleinands  lapproclient  avec  raison 
les  belles  télés  de  ces  sphinx  de  celles  de  monuments  comme  l'Apol- 
lon de  Ténéa. 

Provenances  diverses.  —  Il  n'a  été  trouvé  jusqu'à  présent  qu'un 
nombre  relativement  restreint  de  sculptiin.'S  en  calcaire  ou  en 
marbre.  L'explication  de  ce  fait  n'est  que  trop  évidente;  les  traces 
de  fours  à  chaux  sont  fréquentes  dans  l'enceinle.  Nous  avons  pour- 
tant reçu  des  photographies  de  plusieurs  têtes  de  st  itues,  malheu- 
reusement toutes,  je  crois,  détachées.  Ces  létes  sont  pres(jiies  toutes 
d'une  époque  très  basse.  Il  y  en  a  (jui  ressemblent  beaucoup  à  ipiel- 
qucs-uiMS  de  la  série  de  bustes  de  cosmèles  publiée  dans  le  lUillctin 
de  correspondance  hcUc nique. 


IV.  -  CI-t\AMIQUE. 

Prés  de  la  voie  sacrée,  il  a  été  remis  au  jour  un  dépôt  considé- 
rable de  vases  archaitjues,  dont  beaucoup  des  plus  petits,  surloul, 
.sont  intacLs.  La  décoration  do  ces  poteries  n'est  pas  très  riche;  le 


l'institut   AnrUKOLOGIQUE   AMF.nirAlN   A    ASSO"?.  357 

plus  prnnil  nnmhro  en  sont  d'un  roupo  uni,  nu  hion  recouvorlcs  d'un 
vernis  noir  lisse.  Les  formes,  iiourl.inl,  en  sont  trùs  variées  et  très 
élégantes.  On  y  reconnaît  celles  connues  sous  les  noms  de  bombylios, 
oxybii'lion,  kélébé,  slamnos,  liydria,  •■•noclioé,  knnlliaros,  arvhallos, 
et  ilauli't's  encore.  Outre  ce  déiioi,  l'expédition  a  trouvé  houcoup 
d'autres  vases  dont  plusieurs  sont  mieux  pourvus  en  matière  de 
décoration;  mais  le  temps  a  manipié  ju><iu'à  présent  pour  les  dé- 
crire, 

]|  a  été  trouvé  une  grande  quantité  do  figurines  on  terre  cuite, 
cnlièrps  nu  liriséis.  Pluôieurs  do  ces  figurines  proviennent  peut-être 
d'un  llép(^t  d'objets  de  rebut  fait  par  les  prêtres  de  (judijuc  temple. 
Parmi  les  pbotographies  qui  ont  été  envoyées  d'Assos,  on  voit  un 
certain  nombre  décos  figurinc^^,  dont  plusieurs  sont  d'un  iris  grand 
style,  et  auraient  pu  tout  aussi  bien  être  recueillies  à  Tanagre  ou  à 
Cyrénc.  Sur  une  des  pholograpbies,  deux  figures  de  femmes  drapées 
se  font  surtout  remanjuer.  Klles  sont  d'une  très  lionne  époque  et 
parlaiiemenl  conservées.  Sur  la  même  pbotographie  se  voit  une 
Astarté  pbénicienne  pareille  à  plusieurs  trouvées  en  Chypre  par  le  gé- 
néral di  Cesnola,  et  doux  dopas  amphilnjpellon  homériques  du  type 
de  la  coupe  que  tient  la  ligure  derrière  Ib-raklés  dans  le  grand  relief 
d'HérakIés  chassant  les  centaures,  quia  été  découvert  l'année  passée. 

V.  —  LNSCRIPirONS. 

La  liste  complète  des  inscriptions  trouvées  pendant  cette  cam- 
pagne n'est  pas  encore  entre  les  mains  de  l'Institut  archéologique. 
Nous  savons  dès  aujourd'hui,  cependant,  qu'il  y  en  a  plusieurs  de 
très  importantes.  Une  de  ces  inscriptions  renferme  les  ordonnances 
municipales  pour  la  police  de  l'agora,  et  le  règlement  îles  poids  et 
mesui'cs  ;  une  seconde  nous  parle  du  temple  d'Athéné  Polias  à  Assos, 
et  nous  donne  de  nouveaux  et  importants  détails  sur  le  gouverne- 
ment de  la  ville.  Une  autre  inscription  nous  apprend  qu'un  piédestal 
m-issif  de  marbre  sur  la  terrasse  devant  la  grande  stoa  portait  jadis 
une  statue  de  l'empereur  Constantius,  fils  de  Constantin  le  Grand. 
—  Il  y  a  beaucoup  d'inscriptions  romaines,  surtout  des  épitaphes. 

VI.  —  OBJETS  DIVERS. 

Parmi  les  objets  très  nombreux  ayant  rapport  à  la  vie  de  tous  les 
jours  qui  ont  été  retrouves,  et  qui  seront  décrits  plus  tard,  il  faut 


358  nRVCR  AncHÉOLoniouR. 

sigimlor  îles  clefs  liclléiii(|ues  cl  un  second  élalon  de  mesures 
liijui  les,  plus  jieliU'l  rcnfcriiiaul  luoins  de  creux  que  celui  (|ui  fut 
recueilli  en  18SI.  il  a  été  réuni  un  assez  grand  nombre  de  monnaies, 
presque  toutes  des  orapcreui-s  romains  ou  bvznnlins. 

Nous  avions  espéré  que  les  fouilles  d'Assos  se  termineraient  ccllo 
année;  mais  il  restait  tant  ;\  faire  que  cet  e.<poir  n'a  jias  pu  se  réa- 
liser. L'étude  des  ouviviges  militaires  de  la  \iA<\  qui  sont  parmi  les 
plus  considérables  que  lanliquilè  grecque  nous  a  laissés,  est  surtout 
loin  d'être  complète.  1/Inslilut  archénlo^'Kjue  a  jui  réunir  la  somme 
nécessaire  pour  acliever  son  exploration,  (jui  se  poursuivi  a  aussitôt 
que  le  printemps  se  déclarera  de  nouveau  dans  le  nord  de  la  mer 
Égéc. 

TFIOMAS    \V.     LL'DLOW. 
a  CoUagc  Lawn  «,  Yonkcrs,  New-York,  30  dcccmbre  1882. 


NOTE 

Sun    LES 

SILEX  DU  TERRAIN  TERTIAIRE  DE  TIIENAY 

(LOm-ET-CIIER) 


Le  terrain  tertiaire  miocène  des  environs  de  Thonay  (Loir-et- 
Cher)  rcnfi.'rmc  des  amas  de  silex  engagés  dans  une  marne  feuilletée 
et  constiliianl  une  couche  de O"',()0  d'épaisseur,  située  à  4", 83  au-des- 
sous de  la  surface  du  sol.  Parmi  eus  silex,  pour  la  plupart  à  formes 
arrondies  et  de  dimensions  inégales,  M.  l'abbé  Bourgeois  a,  le  pre- 
mier, signalé  quelques  échantillons  brisés  en  éclats  de  diverses 
grosseurs  et  présentant,  sur  une  de  leurs  arêtes,  de  petites  échan- 
crures  ou  retailles  (jue  plusieurs  archéologues  attribuent  au  travail 
de  l'homme.  On  a  également  émis  l'opinion  que  l'état  fragmentaire 
de  ces  silex  serait  dû  à  l'action  du  feu. 

Dans  le  cours  de  l'année  1873,  iM.  Abel  Maître,  attaché  au  musée 
archéologique  de  Saint-Germain-en-Laye,  étant  allé  visiter  le  gise- 
ment de  Thcnay,  y  a  recueilli,  en  place,  de  nombreux  échantillons 
de  ces  silex  et  a  bien  voulu  m'en  conlier  quelques-uns  pour  en  faire 
l'examen. 

Avant  d'exposer  le  résultat  des  essais  auxquels  je  les  ai  soumis, 
je  ferai  remarquer  que  l'élat  fragmentaire  des  silex  peut  élre  attri- 
bué à  diverses  causes  indépendantes  de  Taclion  de  l'homme.  Je  vais 
en  indiquer  quelques-unes. 

1°  Une  masse  rocheuse  tombant  d'un  point  élevé  et  à  pic  sur  un 
sol  parsemé  de  silex  doit  en  briser  un  certain  nombre,  et  c'est  ce 
qu'on  observe  actuellement  aux  pied  des  falaises  crayeuses  des  côîes 
de  la  Manche.  Les  silex  qui  se  détachent  des  couches  supérieures, 
se  brisent  aussi  en  tombant  sur  les  galets  de  la  plage. 


360  RFVUE   ARCIIF.OLOr.lOUK. 

2«»  Une  pro<:sicn  plu^  ou  moins  forte  exeivée  p.ir  une  roche  mns- 
sivc  ?e  dt'pbç.iiit  par. suite  (l'un  mouvement  du  sol  et  venan;  s'.ip- 
puyer  sur  des  silex.  Ceux-ci  peuvent  suliir  alors  des  ébrécliures  sur 
leurs  vivi  s  ari^les  après  avoir  éiù  brises. 

3*  L'action  su*  cessive  des  pelùes  ri  des  d<^}^els. 

4*  L'e'nbrascment  de  foriMs  ou  de  hautes  herbes  sur  un  terrain 
parsemé  de  silex.  Le  feu  peut  s'y  allumer  sans  rintcrverilion  de 
l'homme,  cl  par  les  seuls  elT-ts  de  la  foudre. 

On  sait  que  les  silex,  comme  les  aj^j.iles  et  les  jaspes,  .sont  essen- 
tiellement formés  de  silice  amorphe.  Pour  avoir  (lénêtré  dans  les 
fissures  et  le.s  espaces  vides  de  la  craie,  pour  s'être  moulée  si  exarlc- 
menlà  l'intérieur  des  coquilles  et  s'être  substituée  avec  tant  de  per- 
fection au  ti>su  des  végétiux  qu'on  trouve  pétriliésilans  les  ti'rrains 
sédimentaircs,  il  a  fallu  que  cette  matière  minérale  fût  amenée 
d'abord  à  l'état  de  fluidité  aqueuse,  sous  l'influence  d'un  dis- 
solvanl. 

A  cet  état  (luiile,  In  silire  a  dil  cntrnîner  et  cnalolicr  avec  elle 
diverses  matières  argileuses,  végétales  ou  animales,  acridenlcile- 
mcnl  renfermées  dans  le  liquide  qui  la  tenait  en  dissolution;  cl 
c'est  à  la  présence  de  ces  matières  qu'on  doit  attribuer  la  diversité 
d'aspect  que  présentent  les  silex.  Les  conditions  particulières  de 
pression  et  de  teraptratuie  qui  ont  accompagné  leur  formation  ont 
exercé  encore  une  certaine  iniluence  sur  leurs  propriétés  physiques. 
On  observe  en  effet  sur  les  sib-x  toutes  les  variétés  de  coloration. 
Qielques-uns  montrent  une  cassure  lisse  et  comme  vitreuse;  sur 
d'autres  elle  est  terne  et  esquilleuse.  Il  en  est  qui  résistent  long- 
temps à  l'action  des  intem[iéries  ;  d'autres,  au  contraire,  y  subis- 
sent une  rapide  altération  et  se  recouvrent  d'une  croûte  terreuse  et 
opaque,  que  l'on  a  désignée  sous  le  nom  de  patine.  Exposés  à  l'ac- 
tion d'une  chaleur  de  300  ù  ;U0  degrés,  quelques-uns  décrépilent 
fortement  et  se  brisent  en  éclats,  tandis  que  d'autres  se  fendillent  à 
peine,  sans  décrépiter,  et  prennent  une  teinte  rougeâtre. 

Lors(iu'on  calcine  les  silex  à  une  haute  température  (celle  du 
rouge  orangé,  par  exemple),  leur  traiislucidité  disparaît,  ils  blan- 
chissent et  prennent  l'aspect  du  biscuit  de  [lorcelaine. 

Pour  rechercher  si  les  silex  de  Thenay  avaient  déjà  subi  l'action 
du  feu,  j'en  ai  soumis  plusieurs  échantillons  ù  l'action  successive 
de  températures  de  plus  en  plus  élevées,  en  partant  de  celle  de 
2i0  degrés  centigrailes,  et  pendant  un  temps  détermine. 

Exposés  à  cette  température  pendant  quelques  heures,  les  silex 


SILEX    DU    TERRAIN   TERTIAIRE   DE    TOENAV.  361 

n'ont  pas  subi  de  cliangomcnls  dans  leur  aspect  et  n'ont  rien  perdu 
de  leur  [loids. 

A  320  degrt^s  ilsnnt  dr-rrôpiti";  on  se  fimdilhnt  cl  bissant  dégajjcr 
une  faible  proportion  d'eau,  (^eux  dont  la  couleur  était  blonde 
ou  un  piMi  brune  ont  pris  des  teintes  variant  entre  le  rose  pAle  et  le 
rougit  s'jii^Miin.  Os  teintes  se  conservent  apn';s  le  complet  refioidis- 
sement.  La  translucidité  de  ces  silex  n'est  pas  encore  détruite  par 
ce  digré  de  clialeur. 

A  la  température  du  rouge  sombre,  la  proportion  d'eiu  dégagée 
s'clùvc  encore  en  peu,  la  translucidiic  diminue,  mais  les  teintes 
roses  ou  rouges  se  maintiennent  encore. 

Au  rouge  orangé,  la  perte  produite  par  le  dégagement  de  l'eau  et 
par  la  destruction  desuiatières  comtiusiibles  retenues  dans  la  masse 
siliceuses'élôve, selon  les  échantillons,  à  des  proportions  qui  varient 
entre  4  et  10  niilligrammes  par  gramme.  La  silice  calcinée  a  perdu 
alors  sa  translucidilé,  a  blanclii  en  prenant  l'aspect  du  biscuit  de 
porcelaine. 

Des  elTets  semblables  se  sont  montrés  sur  divers  érhantilions  pro- 
venant des  départements  de  l'Aisne,  du  Calvados  et  de  Seine-et- 
Marne,  recueillis  sur  des  las  de  silex  brisés  par  les  cantonniers, 
pour  servir  à  l'empierrement  des  routes.  Ces  derniers  ne  m'ont 
lais.sc  voir,  dans  leurs  propriétés  pbysiques,  aucune  différence  no- 
table avec  ceux  de  Tbenay. 

Il  me  paraît  résulter  de  ce  qui  précèle  que  les  silex  de  Tbenay, 
dans  les  temps  préhistoriques,  n'avaient  pas  subi  l'action  du  feu  : 
car  s'ils  avaient  alors  été  exposés  à  une  température  n'excédant  pas 
celle  du  rouge  sombre,  ils  devraient  montrer  encore  les  teintes  rou- 
geâires  qui  se  développent  par  cette  faible  calcination;  et  s'ils 
avaient  été  chauffésassez  fortement  pour  que  ces  teintes  rouges  eussent 
disparu,  ils  auraient  alors  perdu  la  translucidité  que  nous  leur 
voyons  encore. 

Il  convient  de  faire  observer  ici  que  dans  les  terrains  renfermant 
des  silex,  à  l'état  brut,  et  qui  évidemment  n'ont  jamais  s  ibi  l'action 
du  feu,  on  en  rencontre  aussi  quelques-uns  montrant  une  couleur 
rouge  plus  ou  moins  foncée.  Il  s'en  trouve  de  pareils  dans  le  gise- 
ment de  Tbenay.  Mais  ces  silex  rouges  décrépitent  au  feu,  laissent 
dégager  un  peu  d'eau,  comme  ceux  de  couleur  difiérente ,  puis  ils 
perdent  leur  translucidilé  et  deviennent  blancs  à  la  température 
du  rouge  orangé. 

La  teinte  rouge  observée  sur  certaines  variétés  de  silex  n'est 
donc  pas  un  indice  certain  de  l'action  du  feu,  mais  quand  un  échan- 


302  nrvDF,  archi^ologioup.. 

lillon  de  roulour  blon^K»  ou  l>runAlro  prend  une  teinlc  roupc  par 
suit'.'  de  raclion  d'une  chaleur  de  3i0  à  UJO  di'gri-s,  il  y  a  toul  lieu 
d'admillre  que  jusqu'alors  il  n'avait  pas  encore  élè  cliauiït_\ 

Quant  aux  ôNrcV'liures  ou  retailles  que  l'on  présume  avoir  élu 
inlentionneliement  elTeeluées,  soit  par  des  liomiues  de  l'époque 
géologique  lerllaire,  soit  par  quelque  animal  intelligent,  il  me 
semide  qu'elles  pourraient  s'expliquer  naturellement  par  l'efTet 
d'une  simple  pression  exercée  sur  les  Itords  tranchants  des  silex, 
par  les  galets  ou  par  les  roches  dont  ils  étaient  environnés. 

Des  observations  (jui  précèdent,  je  suis  amené  à  conclure  ipie  les 
silex  de  Thenav  n'ont  pas  subi  Taction  du  feu,  et  (jue  leur  état  frag- 
mentaire peut  être  attribué  à  toute  autre  cause  <iu'à  l'action  de 
l'homme. 

A.    DAMOUn. 


BULLETIN    MENSUEL 

DE    I/ACAI)1:M1  E    DES    INSCRIPTIONS 


MOIS   DF.   NOVF.MDIIE. 


M.  lleuzoy  communique  uq  travail  sur  les  figurines  de  terre  cuite  du 
musée  du  Louvre.  Ce  travail  doit  servir  d'iulroduclion  cl  de  conclusion 
au  catalogue  de  celle  série.  L'habile  conservateur  du  musée  des  anti- 
quités orientales  y  démontre  avec  clarté  l'origine  orientale  de  1  inJuslrie 
de  ces  terres  cuites.  Tous  ceux  qui  s'intéressent  à  l'histoire  de  l'art 
liront  cette  introduction  avec  le  plus  grand  profil.  L'élégance  du  style 
donne  à  celle  élude  technique  un  attrait  loul  iiarliculier. 

M.  Lrnest  Dcsjardins  annonce  qu'il  a  examiné  l'inscription  donll'eslam- 
page  a  été  envoyé  par  M.  de  Laigne.  11  estime  que  cette  inscription  sur 
plaque  de  plomb  est  fausse. 

M.  Cuq  est  admis  à  communiquer  une  élude  historique  sur  le  conseil 
privé  des  empereurs  romains.  M.  Cuq,  professeur  de  droit  à  la  faculté 
de  Bordeaux,  pense  que  le  conseil  de  nos  rois  est  un  reste  de  la  tradition 
impériale. 

M,  Ulrnest  Renan  présente  à  l'Académie  la  photographie  d'un  fragment 
de  sculpture  et  d'inscription  découvert  à  Edcsse  et  qui  doit  arriver  sous 
peu  au  iimsée  de  Sainte-Irène  à  Conslantinople.  L'envoi  de  celte  photo- 
graphie est  dû  à  M.  Salomon  Reioach,  membre  de  l'Ecole  franijaise 
d'Alhéues.  D'un  côté,  un  buste  ;  de  l'autre,  l'extrémilé  dune  inscrip- 
tion   où  se   lisent    les  mois  :   de  notre  Seigneur  et  adorable  .... 

d'Edesse.  Les  mots  de  notre  seigneur...  et  adorable  ne  peuvent  s'appli- 
quer qu'au  Christ.  M.  Renan  conjedure  que  l'inscription  complète 
pouvait  être  la  copie  de  la  lettre  de  noire  seigneur  Jésus  écrile  i  Abgar  roi 
d'Edesse.  Procope  parle  en  effet  d'une  prétendue  lettre  du  Christ  au  roi 
Abgar.  Celle  lettre  serait  devenue  une  espèce  de  palladium  pour  la  ville 
d'Edesse.  11  est  probal)Ie  que  l'inscription  élail  entre  doux  bustes,  le 
buste  du  Christ  et  celui  du  roi. 

M.  Egger  fait  observer  que  le  buste  pourrait  être  simplement  le  buste 


364  RFvcE  Annn^.ot.or.iorR. 

d'un  personnage  autre  qm*  le  Christ  ou  le  roi  Abgar,  personnage  que  la 
letlre  talismauique  rliil  d.>>tiiu^<'  ;\  prolt^per. 

M.  Bonoist,  professeur  à  la  farult»^  des  le  Ire--  do  Paris,  commeiire  la 
licliire  d'une  rluie  iu'.ituli'e  :  D  !'i)itriAil<itio<t  (/«'«vj  a  cru  rcconnaitre 
dans  Ilirace. 

M.  J.  Oppeil  comniuiiiqiK"  iiiii>  uoii'  sur  la  plus  ancienne  dale  de  l'em- 
pire de  Chald(^e.  Ce'le  dale  placerail  le  rt'-une  du  roi  Narani-Sjn,  flls 
di'  Sargon  i",  entre  37(iO  et  ^'«On  ans  avant  J^sus-Chrisl.  Celle  ins- 
cription, conservt^e  au  Hritish  Muséum,    a  iHé  8ignal(?e  et  ex[iliquée  par 

M.  Pinclios. 

M.  Wallon,  secrtMaire  prr  i-t'iel,  annonce  que  M.  I.efeljvre-neumier 
h'^gue  à  rAcadéniie  des  iuscriplii>ns  et  à  l'Académie  des  sciences  morales 
et  politiques  nue  rente  de  4,000  francs,  de-tinôe  à  fuu'Ier  un  prix  quin- 
quennal de  20,000  francs,  qui  sera  déceriu'^  ;\  tour  de  rôle  par  rhniiuc 
Acad«îmie.  Ce  pri\  r.^compenjcra  l'auteur  d'un  ouvrage  surir,  mytho- 
logie, 1(1  phil'jS'iphie,  les  religions  comparées.  Les  auteurs  élranj^ers  dont 
les  écrits  auront  été  traduits  en  fran<;ais  pourront  prendre  p.irt  au  con- 
cours. Ajoutons  que  les  deu\  Académies  n'auront  la  di>pn<i(ion  de 
cette  rente  que  quinze  ans  après  le  décès  du  t<^statfur,  en  sorie  que  l'Aca- 
démie des  sciences  morales  ne  décernera  le  prix  que  dans  vingt  ans  d'ici, 
et  l'Académie  des  inscriptions  dans  \ingt-cinq. 

Il-Y. 


SOCIÉTÉ  NATIONALE 

DES  ANTIQUAIRES  DE  FRANGE 

PRÉSIDENCE   DE    M.    G.    PEIUIOT. 


SÉAN'GE  DU  C  DÉCEMBRE. 


La  Société  constitue  son  bureau  pour  1883.  Sont  élus  :  prûsidenf, 
M.  Duplcssis;  vice-présidents,  MM.  Deniay  et  Edmond  Guillaume;  secré- 
taire, M.  Mûniz. 

M.  Mowat  communique  les  dessins  envoyés  par  M.  Decombc,  d'épées 
et  de  boucles  en  bronze  trouvées  à  Rennes  dans  un  ancien  lit  de  la 
Vilaine. 

M.  Courajod  présente  le  moulage  d'un  masque  en  marbre  du  xv'' siècle, 
conservé  au  musée  de  l'hôpital  de  Villeneuve-lés-Avignon.  Ce  masque, 
plat  par  derrière,  de  manière  à  pouvoir  être  posé  sur  un  coussin  ou  adapté 
à  une  coillure,  représente  le  visage  d'une  jeune  fille.  M.  Courajol  y 
retrouve  de  grandes  analogies  de  facture  avec  un  buste  de  femme  in- 
connue du  Louvre,  un  aulre  appartenant  à  M.  G.  Dreyfus,  un  troisième 
conservé  au  musée  d'Ambnis  à  Vienne,  celui  de  Baltisla  Sforza  au  Har- 
gello  di^-  Florence  et  deux  de  Marii-tia  Strozzi,  dont  l'un  est  au  Musée 
de  Berlin  et  l'autre  chez  M.  CastcUani  à  Home.  Il  reconnaît  dans  les 
regards  puliciuemcnl  baissés  et  comme  endoimis,  dans  les  yeux  en  lou- 
lisse,  dans  la  construction  chinoise  des  paupières,  des  particularités  de 
technique  provenant  d'une  interprétation  fantaisiste  et  individuelle,  et 
décelant  une  individualité  artistique  dont  on  peut  dès  à  présent  marquer 
la  place  dans  le  xv'  siècle  italien,  sans  être  encore  en  état  de  lui  assigner 
un  nom. 

M.  Heuzoy  remarque  que  l'obliquité  des  yeux  dans  les  œuvres  de  l'art 
grec  primitif  lient  pareillement  à  des  traditions  d'école  ;  il  cite  à  ce  sujet 
un  passage  de  son  catalogue  des  (erres  cuites  antiques  du  Louvre,  dont  le 
premier  volume  sera  procbaiiicment  publié. 

M.  Flouest  présente  des  clous  trouvés  dans  les  ruines  deVertillum  (Côte- 


3CC  nF.viT.  Anr.nnoLoniQCR. 

d'Or),  et  iMonnamnicnl  consrrvés.  puisqu'ils  provicnnont  de  maisons  cun- 
sumiH'S  par  un  fou  violenl  :  d*api(Sli's  expériences  de  M.  Caillelel,  la  pi.- 
Ecrvalion  du  nuHnl  csl  due  à  la  pellicule  d'o\ydc  majjnélique  qui  bVsi 
formi^o  à  51  surface. 

SÈAN'CL  DU  13  DÊCFMBnK. 

M.  do  NYîilc  commence  la  lecture  d'un  mt'mniro  sur  la  conquCte  de  la 
Gaule  méiidionalc  par  les  Uomains  ;  il  explique  les  services  que  les  Mas- 
saliùlcs  reudironl  à  la  poliliquc  romaine,  reconstitue  les  évt'iicmenls  do 
Tannée  l'Jl  a\nnt  Ji^suf-Clirisl,  cl  fixe  les  ('aies  de  la  bnlaille  de  Vindi^lium, 
gagni^e  pr«is  des  bords  do  laSorgues  par  le  proconsul  C.  Dùmilius  Alu^no- 
barlius  sur  le  roi  arvernc  !U:uiliis  cl  les  Allobropes,  cl  de  celle,  plus  im- 
porlanle  encore,  <lans  laquelle  le  consul  0-  Kubitis  Maximus  tailla  en 
pièces  une  seconde  armée  de  ce  roi,  au  conlluciil  du  Uhône  et  de  ris('Te  ; 
à  la  suite  de  colle  dc^faile  Hiluiuis  so  rendit  piisonulcr  cl  fltjura  sur  son 
char  d'aigenl  dans  le  triomphe  de  Fabius. 

M.  llysse  Hoberl  pri^scnle  une  suite  de  photographies  des  tombeaux 
des  comtes  d'Ku,  exécutées  au  moyen  d'une  lampe  au  magnésium  par 
M.  de  Kcrmangant.  Il  montre  ensuite  le  fac-similé  d'un  sceau  de  Jean 
Priorat,  deHesançon,  rimeur  do  la  fin  du  xm"  siècle,  qui  a  traduit  Négoce 
en  vers  sous  le  litre  de  «  l'Abrejance  de  l'ordre  de  chevalerie».  Le  sceau 
de  Priorat  csl  appondu  à  une  quittance  donnée  en  1280,  d'une  indemnité 
de  quiiiZ''  livres  reçue  par  lui  en  vin  de  Grosson,  comme  dédommagement 
de  la  perle  d'un  cheval  de  guerre  dans  la  campagne  qu'il  avait  faite  en 
Aragon  à  la  suite  du  comte  de  Bourgogne  Olhou  IV. 


SÈANCl-:  DU  20  Dl'iCEMDnr. 

M.  de  ^Villc  termine  la  lecture  de  son  mémoire  sur  la  conquCto  de  la 
Gaule  méridionale  par  les  Ilomains.  Heconnaissanl,  avec  Ch.  Lcnormanf. 
que  les  vaincus  représentés  sur  l'arc  d'Orange  sont  les  Gaulois,  et,  avec 
M.  A.  Bertrand,  que  parmi  les  vainqueurs  figurent  des  guerriers  munis 
dccnémides  qui  ne  peuvent  Ctre  que  des  Massaliètcs,  il  établit  que  ce 
monument  a  été  érigé  en  comménioralion  dos  victoires  remportées  en  121 
par  Fabius  Maximus  cl  Homitius  Ahénobarbus  sur  les  Ai  voriios  ot  les 
Allobroges.  Il  admet  d'ailleurs  conimc  pos^ible  que  l'arc  n'ait  point  été 
terminé  alors,  et  qu'il  ait  été  achevé  et  dédié  plus  tard  par  Tibère,  après 
la  compression  de  la  révolte  de  Florus  cl  de  Saciovir.  Ainsi  se  jusiilierail 
Il  Institution  de  l'inscription  dédicatoire  ([uc  M.  do  Saulcy  a  tentée  d'après 
la  place  des  clous  qui  lixaienl  les  lettres  de  bronze  aujourd'hui  dis- 
parues. 

.M.  de  NVitic  reconnaît  égairment  un  monument  de  ces  victoires  dans 
le  lypo  du  revers  de  plusieurs  pièces  romaines,  où  l'on  voit,  sur  un  char 


SOCIKTI-:   NATIONALE    DRS  ANTIQUAIRES   DE  FRANCE.  307 

lancé  au  galop,  un  homme  nu  brandissant  une  lance  à  long  fer  et  tenant 
la  carny\  (tiomptiUo  gauloiso  à  enltouchure  en  forrno  do  ICte  d'anim.il). 
Ce  peisonnago,  que  l'on  a  pris  jusijuVi  iiri'senl  pour  Mars,  lui  parait  Olro 
le  roi  des  Arvcrnos,  iUluilus,  sur  son  char  d'argent. 

M.  Muwat  défend,  d'après  un  passage  des  Chroniques  de  Limoges,  l'nu- 
thenlicilé  d'une  ylalue  en  pierre  Irouvcc  à  Luxeuil,  di-lruiie  pendant  la 
Itévoliilion,  cl  qui  n'est  plus  connue  que  par  le  recueil  d»;  Caylus.  Cotte  sta- 
tue, de  hasi^e  (''poque  et  iK'  travail  gro.-sier,  représentait  un  cavalier  armé 
à  la  romaine,  dont  le  chcvul  posait  un  pied  sur  la  tûle  d'un  homme  ren- 
versé à  terre.  Les  Chroniques  de  Limoges  prouvent  qu'il  a  existé  dans 
cette  ville  un  monument  srinhlable,  confirmant  par  suite  l'antiquité  de 
Celui  de  Luxeuil,  et  donnent  l'explicalion  de  l'un  et  de  l'autre.  Ils  auraient 
représenté  Constantin  faisant,  dans  la  bataille  où  il  vainquit  Licinius, 
passer  son  cheval  sur  le  corps  de  Callus  llannihalianus,  ancien  légat 
d'Aquitaine,  alors  passé  au  service  de  son  rival. 

M.  de  Barthélémy  lit  une  note  de  M.  Ilupin,  associé  correspondant  de 
la  Société,  sur  une  cuve  baptismale  en  plonib  du  xiii"  siècle,  conservée 
dans  l'église  d'Aubin  (Aveyron).  Le  pourtour  en  est  décoré  d'arcades 
romanes,  sous  lesquelles  sont  des  personnages,  entre  autres  un  évoque. 

Le  Secrétaire. 

Signé  :  0.  RAYET. 


NOUVELLES  ARCHÉOLOGIQUES 


LT    COKULSrOMJANCfc: 


Monsieur  cl  liODoré  Coarrère, 

N'ayant  plus,  depuis  un  an,  la  Revue  archéologique  à  ma  disposition, 
j'ignorais  complùtcmcnt  qu'il  y  avait  «té  rendu  compte,  il  y  a  six  mois, 
de  mon  Éhile  sur  /es  Ccths  et  les  Gauluis,  quand  ces  jours  derniers  je 
reçus  d'un  ami  la  copie  de  rarlicle  de  M.  Alcvandre  IJerlran  1. 

Ai-je  le  droit  de  n'pondre  dans  voire  Heviie  i  dos  critiques  que  je  crois 
mal  fondées,  je  ne  .-ais  ;  en  tous  cas,  je  ne  veux  ici  faire  appel  qu'à  votro 
esprit  d'c^quité  et  à  voire  bienveillance,  et,  bien  convaincu  qu'ils  ne  me 
feront  pa>  défaut,  j'aborde  immédialeuieiit  mon  sujet. 

Aprùs  a\oir  accordé  quelques  éloges  à  la  lliése  esquissée  dans  mes  pré- 
cédenles  publications  et  dont  l'ouvrage  paru  il  y  a  un  peu  plus  d'un 
an  n'est  que  le  développement,  M.  Bertrand,  qui  en  adinei  une  partie, 
ajoute:  «  Malheureusement,  au  lieu  de  se  renfermer  dans  celle  thèse, 
suffisamment  large  cependant,  au  lieu  de  porter  tous  ses  efforts  à  en 
éclairer  les  diverses  parties  pour  répondre  aux  objections  nombreujes 
qu'elle  devait  soulever  naturellement,  M.  Leuiicre,  éla^gi^sant  ton  cadre 
au-delà  d«5  toute  nécessité,  comme  l'indique  son  sous-liire,  s'est  laissé 
égarer  à  la  recherche  de  prétendus  Celtes  et  anciens  Celtes  inconnus  des 
auteurs  anciens » 

Ainsi,  M.  Hertrand  le  reconnaît  lui-même,  et  avec  raison,  dans  celle 
dilficile  question  de  nos  origines,  le>  points  qu'il  croit  les  plus  acceplaldes 
6ont  encore  aujourd'hui  très  discutés;  ils  prêtent  à  de  nombreuses  ob- 
jeciions. 

M.ii?,  puisque  celle  question  e:l  encore  aujourd'hui  si  obscure,  com- 
ment ptut-il  avec  tatil  d'assurance  critiqui-r  la  voie  que  j'ai  sui\ie  et 
prétendre  m'en  tracer  une  meill.'ure?  —  Cette  piélentiun  est  d'autant 
moins  juslifiable  que  lui  et  moi  nous  n'envisageons  pas  la  queslion  de  la 
même  manièie. 

Kn  effet,  donnant  aux  qualrc  mois  «le  i'iulaniuc  :  IVAaTai  toj  Kt).Tixov; 
YÎvw*;,  une  mlerprétaiion  trop  littérale,  cl  qui,  quoi  qu'il  en  dise,  u'élail 


NOUVF.IJ.KS    AMCHI^OLOGIOUES.  369 

pas  l'opinion  do  lonle  rantiqiiil6  (voir  mon  Elude,  p.  1-7  ot  2")4), 
M.  lierlrand  porsisU;  ;\  voir  dans  les  (ialatcs  des  frùres  on  an  moins  ilcs 
cousins  gormains  des  (Celtes  ;  il  ne  s'inqnièlo,  cl  pour  cause,  ni  du  lieu  où 
se  serait  opt'n:  le  fractionnement  de  la  famille,  ni  de  l'époque  approxi- 
mative ;\  laquelle  il  aurait  eu  lieu,  ni  des  pays  où  se  seraient  établies  ces 
deux  branches  devenues  distinctes,  on  |ieut  milme  dire  ennemies. 

Ouant  ;\  moi,  prorondémcnl  convaincu,  au  contraire,  de  la  dualité 
ctbiiique  des  Cellcîs  et  des  Galates  ou  Gaulois,  après  avoir  justifii^  ce'ito 
proposition  au  moyen  des  témoignages  anciens  les  plus  séiieux,  je  devais 
forcément  achever  ma  démont^tration  en  essayant,  comme  je  l'ai  fait, 
de  reconnaître  l'un  après  l'autre  les  peuples  fi  monibreux  composant  la 
grande  race  celtique  ;  puis,  celle  proniière  inconnue  du  problème  ainsi 
dégagée,  tenter  de  découvrir  les  diverses  nations  véritablement  galates 
et  la  race  à  laquelle  elles  appartenaient. 

Dans  chacune  de  ces  recherches,  j'aurais  peut-être  pu  m'en  tenir  pro- 
vi>;oiremotit  à  l'Flurope;  M.  Hertrand,  on  vient  de  le  voir,  aurait,  mi'^.me 
dans  ce  cas,  trouvé  mes  excursions  trop  loiiifaints;  mais,  découvrant  en 
Asie  dos  Thraces  ou  Pélasges  en  si  prodigieuse  quantité  qu'il  fallait  ab- 
solument renoncer  à  les  prendre  pour  des  colons  sortis  de  l'Europe,  pou- 
vais-je  ra'arrôter  avant  de  connaître  autant  que  possible  tous  les  membres 
composant  ce  groupe  ethnique  dans  lequel  se  trouvait  évidemment  le 
berceau  de  nos  ancêtres  ? 

Pouvais-je  également,  après  avoir  rattaché  les  Galates  aux  Scythes,  ne 
pas  pousser  jusqu'au  bout,  au  moins  dans  certaines  régions,  la  recherche 
des  peuples  appartenant  à  ces  derniers?  Non,  car  c'était  le  complément 
forcé  de  mes  investigations  précédentes.  —  Chez  un  grand  nombre  des 
peuples  que  j'ai  cru  pouvoir  rattacher  à  la  race  celtique,  j'avais  rencontré 
des  Scythes,  ou  desempreintesscylhiques  parfois  tellement  prononcéesquo 
l'on  pouvait  concevoir  des  doutes  sur  la  nationalité  primitive  de  quelques- 
uns  de  ces  peuples  mélangés  :  mes  nouvelles  recherches  devaient  dissiper 
ces  doutes.  En  eiïet,  en  me  montrant  les  forces  immenses  des  Scythes 
par  l'étendue  de  leurs  possessions,  elles  venaient  corroborer  les  assertions 
des  anciens  touchant  les  longs  siècles  de  la  domination  des  peuples  do 
cette  race  en  Asie,  et  par  suite  me  permettaient  de  reconnaître,  dans  ces 
groupes  d'origine  douteuse,  des  indigènes  qui,  durant  une  si  longue  sou- 
mission aux  Scythes  et  dans  le  voisinage  de  leurs  nations  les  plus  belli- 
queuses, avaient  fini  par  adopter  en  partie  leur  langue,  leurs  coutumes 
et  leur  manière  de  vivre. 

Malgré  les  erreurs  de  détail  que  j'ai  pu  commettre  dans  mes  recherches 
ethnographiques  à  travers  l'Asie,  je  n'ai  pas  à  regretter  ce  premier  essai 
dans  une  voie  toute  nouvelle,  car,  jusqu'ici,  tout  tend  à  me  le  démontrer, 
je  suis  encore  le  plus  près  de  la  vérité. 

Comment  pouirais-je  en  douter,  lorsque  tous  les  écrivains  modernes 
quels  que  soient  par  ailleurs  leurs  dissentiments,  s'accordent  ù.  recon- 
naître que  les  Celles,  nos  ancêtres-  sont  sortis  de  l'Asie,  c'esl-à-diro  do 

xuv.  —  2i 


370  RKVL'P.  AnCHKOLO»U0UK. 

l'Asie  coMlr.ilt»,  ce  qui  impliquo  forcL^menl,  dans  loul  ce  long  parcours,  nno 
si'rie  coiiii.lôrable  diUablisiiiMuiuils  «'l  qi»'  ^^  aoinciiir  ilt»  ci's  6lul»li»M'- 
monts  s'etail  iiiiîino  si  liion  coiucrv."'  dans  ranliiHiiU-,  qno  ^^lll^it•u|•.s  do 
si'8  écrivains  allribuaiont  aux  Coites  la  luesquc  lolalilé  do  l'Kurope.  el 
d'antres  la  totalité  {Elude,  p.  308,  30ii]. 

('.jn)nieat  pourrais-jo  douter  do  l'unité  cltiniquo  deit^'lloset  de  tous 
les  pcuplos  que  tant  do  ti'moignages  am  icns  m'ont  permis  do  leur  rat- 
tacher, lorh(iuo  les  partisans  d'opinions  conlr.iires  sont  ti  loin  do  b'eii- 
teudrc  sur  l'origine  des  IIiltcs,  des  Basques,  des  Lignres,  des  i  yi  rhénieus, 
des  Ombriens,  dos  My»ieus  el  de  tant  d'autroi  peuples,  qu'il  est  permis 
de  se  demander  ^i,  l'anthropologie  aidant,  l'on  no  verra  pas  1  icnlôl  prt^- 
doœiner  l'idt^o  que  tons  ces  groupes  humains  ont  poussé  sur  place  comme 
l'herbe  dos  ihamps  ! 

Si  je  persiste  à  croire  bonne  la  voie  que  j'ai  suivie  depuis  le  commcn- 
remonl  jusqu'à  la  Hn  do  l'ouvrage  dans  lequel  je  cherche  on  vain  lex 
deux  vianivrca  dont  parle  M.  Horlrand,  je  reconnais  Iras  volontiers  que 
CCI  laines  parties  1. lissent  à  désirer  :  ainsi,  par  exemple,  le  rattachement 
delà  famille  }^alale  à  la  race  scytbique ,  el  la  rccberclie  des  anciens 
Celtes  qui  conservéreol  leur  nationalité  au  milieu  des  envahisseurs,  exi- 
gent de  nouveaux  développements. 

Ces  parties  faibles  de  mon  élude  s'expliquent  un  peu  par  la  nouveauté 
du  sujet,  mais  surtout  par  les  circonstances  douloureuses  au  milieu  des- 
quelles j'ai  dû  achever  bîliivemenl,  sur  des  noies,  le  volume  donl  j'avais 
dt'ji  livré  plusieurs  feuilles  à  1  impression. 

Un  autre  ouvrage,  que  j'espère  pouvoir  terminer  celle  année,  me  four- 
nira l'occasion  de  combler  ces  lacunes  el  de  présenter  en  même  temps  de 
nouveaux  el  solides  arguments  i  l'appui  de  ma  thèse  principale. 

Il  me  serait  bien  facile  de  répondre  ù  M.  Horlrand  sur  ce  qu'il  appelle 
it  la  manière  cavalière  avec  laquelle  j'ai  traité  les  Commenlaiivs  de  d'-s  ir  »  ; 
mais  je  dois  craindre  d'abuser  de  votre  bienveillance,  car  ma  lettre  est 
dtji  longue  cl  j'ai  encore  une  observation  à  présonler. 

Je  ne  puis,  en  elTet,  laisser  passer  sans  protestation  celle  opinion  émiio 
par  M.  IJerlrand  au  début  de  l'article  auquel  jo  réponds  :  «  Uuelle  est 
l'idée  historique  dont  personne  uil  le  droit  do  revendiquer  la  piopriété 
exclusive?  I' 

Sans  revenir  ici  n\v  certaines  idées  historiques  donl  j'ai,  dans  le  temps, 
revendiqué  la  propiiélé,  j'ose  avancer  sans  cruinto  d'un  démenti,  avec 
preuves  à  l'appui,  que  personne  avant  moi  n'avait  80Up(,()nné  : 

!•  Le  lôle  joué  par  Massalio  dans  la  seconde  guerre  punique,  poul-ÛIre 
mémo  dans  la  première  {Etude,  p.  Tii-Hi)  ; 

2°  (Juo  loi  Galaies  t\o.  l'Lluropc  c<Milralo  ont  clé  les  aïeux  el  non  les 
colons  de  ceux  de  la  (iaule  de  C.'sar  {Etude,  p.  402,  40:5  cl  note  i,  4Ji); 
3"  Cluo  le»  (ialates-Helges  de  la  Transalpine  n'ont  jamais  envoyé  de  co- 
lonie dans  l'Ile  de  Hretagne  (p.  iri-ï-l't,  l20-r2!t); 

i»  Uuo  U'6  lialulcs  u'oul  jamais  fondé  d'Étal  en  Ilalic  et  qu'ils  n'ont 


NOUVICLLI'S   AHCUKOLOGIQUP.S,  371 

figuré  dans  les  guerres  do  colle  p(';ni(isulo  qu'en  qualilô  de  mercenaires. 

(Quelle  que  soit. lu  valeur  de  ces  idées  hitloriqucB,  elles  m'appailicn- 
nenl  i'xclu>ivcmf'iif. 

Veuillez,  ji!  voue  pria,  Monsieur  et  honoré  Confrère,  rocevoir  à  l'avance 
mes  reinerciemculti  et  agréer  l'assuratjcc  du  mou  dévoucmenl  et  du  mon 
respect. 

\\  I,.  l.iiHH.ni-:. 

f.a  ma'soii  Aï^licr,  do.  IliMlin,  onlropreiid  nue  iiubiicalioti  qui  est 

do  nature  à  intéresser  vivement  les  amis  des  éludes  arcliéoio^iques;  e'cat 
celle  di;s  monuments  qui  composent  une  des  plus  bnlles  colloclions  pri- 
vées qu'il  y  ait  en  Europe,  la  collection  .Sal)Ouroiï.  I.u  cabinet  de  M.  de 
Sabourofl",  actuelhîment  ambassadeur  de  Hus^ie  à  lU-rlin,  ne  comprend 
que  des  objets  trouvés  en  (iréce  mûme.  Ils  ont  été  ac(|uis  sur  place  et  de 
première  main  par  leur  propriétaire  a(  tucl.  Presque  toutes  les  branches 
de  l'art  y  sont  représenlées,  et  cela  par  des  exemplaires  d'une  valeur  hors 
ligne. 

I,e  recueil  do  planches  qu'on  nous  promet  a  pour  but  do  mettre  ^  la 
pnilée  du  monde  bavant  les  pièces  les  plus  importantes  de  celle  collection 
unique,  figurées  aussi  fidèlement  que  possible  et  accompagnées  d'un 
lexlc  explicatif.  Ce  texte  sera  rédigé  par  l'un  des  meilleurs  archéologues 
de  l'Allemagne,  M.  Adolf  Furtwoengler.  Pour  tous  les  objets  en  marbre  et 
pour  une  petite  partie  des  terres  cuites,  l'éditeur  a  adopté  comme  pro- 
cédé de  re[)roduclion  l'héliogravure;  la  chromolithographie  a  été  réser- 
vée pour  les  figurines  en  lerre  et  pour  les  vases  qui,  pour  la  plupart,  se- 
ront rendus  avec  leurs  couleurs;  pour  les  terres  cuites,  on  se  promet  de 
nô  reproduire  que  les  légères  traces  de  couleur  antique  qui  se  trouvent 
réellcuient  sur  l'original. 

L'ouvrage  sera  divisé  en  trois  sections.  Les  monuments  de  la  sculpture 
et  les  vases  formeront  le  premier  volume,  et  le  isecond  comprenrha  les 
terres  cuites  et  les  bronzes.  Le  nombre  des  planches  sera  d'environ  fiiO. 
Chacune  des  trois  sections  sera  précédée  d'une  introduction  substantielle 
résumant  le  développement  historique  de  la  branche  de  l'art  à  laquelle 
elle  se  rapporte  et  précisant  la  place  qu'y  occcujtent  les  monuments  do 
la  collection. 

Toutes  les  séries  de  la  collection  renferment  des  pièces  importanles  et 
curieuses;  mais  la  plus  riche  de  ces  séries  est  incontestablement  celle 
des  terres  cuites.  M.  de  Sabouroff  était  en  Grèce  au  moment  où  ont  été 
trouvées  les  premières  figurines  de  Tanagra  ;  il  a  eu  le  bonheur  d'ac- 
quérir, dès  le  début  de  ces  trouvailles,  les  pièces  les  plus  authentiques  et 
les  plus  remarquables.  A  côté  des  pièces  de  choix  qui  représentent  chez 
lui  l'art  des  coroplasles  de  Tanagre,  on  en  trouvera  d'intéressantes,  à  di- 
vers titres,  qui  proviennent  des  autres  villes  de  la  Héotie,  d'Aibènes,  de 
Mégare  et  surtout  de  Coriulhe  ;  queb^ucs-unes  sont  originaires  de  l'Asie 
Mineure. 


^'i  RRVDE  ARCHF^OLOGIQUE. 

L'ouvrage  roiuproiulra  quinte  livraison!?,  chacnno  de  liix  plnnchps  en 
nioyenne.  Ces  f.iM'ii  iilos  se  suivront  à.  des  intervalles  do  deux  ou  trois 
mois  au  plus,  l.e  pri\  de  la  livraison  est  ti\i''  ;\  "J.'i  marcs,  soil  31  fr.  '25.  Il 
paraîtra  deux  tWiilions,  l'une  avec  texte  rrant;ais  et  l'autre  avec  texte  alle- 
uiaiid  :  les  souscripteurs  auront  le  choix  entre  les  deux.  —  (i.  1'. 

l'n  (les  plus  intt^rcssants  programmes  que  la  Société  archéologique 

de  Ilorlin  ait  imprinitl's  i\  jjropos  de  la  fi''le  de  Wiiukeltnann  est  celui 
qu'elle  a  donné  en  1>S2,  sous  ce  titre  :  La  libi'ration  de  Vromèthéc ,  xmt 
découverte  de  Pergame  (in-4»,  Rcimcr,  avec  une  planche  et  deux  zincs  tirés 
dans  le  texte).  Avec  des  fragments  découverts  récemment  ;\  Pergame, 
M.  M.  restitue  un  groupe,  compost!;  de  trois  ligures,  qui  représentait  la 
déli\ranoe  de  Prométliée  par  Hercule  en  présence  d'une  de  ces  divinités 
locales  qui  personniliaient  le  lieu  de  la  scùne.  Le  groupe  a  bien  le  carac- 
tère mouvementé,  potloresque  et  pathétique  qu'affectionnaient  les  écoles  . 
de  Hhodes  et  de  Pergame.  L'auteur  du  mémoire  trouve  la  trace  de  l'ad- 
miration qu'il  aurait  excitée  à  la  fois  dans-  la  sculpture  de  l'époque  romaine 
et  dans  la  peinture  campanienne.  Son  exposition  est  menée  de  la  manière 
la  plus  méthodique  et  la  jdus  claire,  et  des  notes  très  savantes,  rcjetécs 
à  la  fin,  éclaircissent  toux  les  points  douteux  et  conliennenl  bien  des  rap- 
prochcmenls  ingénieux.  —  C.  P. 

Dans  la  séance  générale  de  l'Académie  de  Berlin,  qui  a  été  tenue 

le  14  décembre  18'<2,  le  professeur  (Justave  Hirsclifeld  a  lu  une  note  in- 
téressante, où  il  résume  les  résultais  du  voyage  qu'il  a  fait  cet  automne 
en  Asie  Mineure  dans  la  Paplilagonie  et  dans  le  Pont.  Ces  résultats  seront 
parliculièrcnienl  importants  [)our  la  cartographie  de  cette  partie  de  la 
péninsule,  que  renouvelleront  et  que  permettront  d'établir  sur  une  base 
scientiUque  des  itinéraires  soigneusement  relevés.  De  plus,  le  voyageur 
a  trouvé,  dans  les  basses  vallées  des  fleuves  qui  se  jettent,  sur  toute  cette 
côte,  dans  la  mer  Noire,  des  monuments  analogues  à  ceux  que  l'on  con- 
naissail,  depuis  Uatnilton  et  Texicr,  en  (lapadoce,  tombeaux,  sanctuaires, 
figures  de  lion  taillées  dans  le  roc.  Nous  attendons  avec  impatience  la 
publication  des  photographies  que  .M.  llirschfeld  a  prises  de  ces  sculptures 
rupestres.  —  Ci.  P. 

Bulli tin  de  correapondance  hellénique,  1S82,  n»  de  décembre: 

E.  Pottier  et  S.  Heinach,  Fouilles  dans  la  nécropole  de  Myrina  (suite). 
Planches  .WIll,  \\\  et  X.\.  —  LalichelV,  InscrifUions  de  Ndrlli'ikian  (suite). 
IL  Liste  des  proxénes.  111.  Liste  des  noms  propres.  —  (î.  Harilleau,  Ins- 
criptions de  Myconos  sur  les  constitutions  de  dA.  —  F.  Ilomolle,  Ir  Vtoconsul 
liahirtus  ;  Comxlion  au  texte  de  Josiphc,  —  S.  Heinach,  l'Insi  ripiion  de 
Cyitque  en  l'honneur  de  l'Anlonia  Tryphcena  et  de  sa  famille.  —  Tables. 

M.  Oiio  Rcnndurr,  le  savant  professeur  de  1  lni\ersité  de  Vienne, 


NOUVEf.LF.S    ARCHliior-OGIOfRS.  .'i73 

vient  de  publier  un  R'ipport  sommaire  sur  deux  rxpéilitioun  arrh^.olrifjiques 
autricliicinics  en  Asie  Mineure  (dans  le  second  lu^cicule  de  la  hixiùine  an- 
née des  Archx'ologischc  cpigraphimUc  Mitlhcilunijen  aus  Oesterreichy  1883). 
Les  CTpi'dilions  ont  él6  cnlreprisca,  la  première  aux  Trais  du  youverne- 
nient,  et  la  seconde  aux  frais  d'un  tomil6  composiî  de  riches  protecteurs 
de  l'art.  Dans  leur  premier  voyage,  M.  HcMinduif  et  raicliileclc  Niemann, 
qui  l'avait  dt''j;\  accompagné  à  Samolhracc,  parcoururent  une  partie  de  la 
Syrie  et  de  la  Carie  et  reconnurent  l'inlérûl  que  présentaient  les  sculp- 
tures d'un  hùrcon  jadis  signalé  par  Schœnborn.  Ce  nionument  rappelle 
bien  celui  dit  des  Néréides,  que  possède  le  Musée  de  Londres  et  qui  a 
été  si  bien  décrit  par  Micbaëlis.  Dans  leur  second  voyage,  les  mêmes  ex- 
plorateurs. accompaj,'nés  de  tout  un  personnel  d'excellents  ouvriers  de 
métier,  réussirent,  non  sans  de  très  grandes  difficultés,  i  enlever  et  à 
embarquer,  pour  le  Musée  de  Vienne,  les  sculptures  qui  décoraient  ce 
petit  éditice;  ils  complétèrent  en  môme  temps  l'exploration  de  la  Lycie, 
et  les  photographies,  les  dessins,  les  inscriptions  qu'ils  ont  rapportés  four- 
niront la  matière  d'une  belle  publicalion,  qu'on  nous  annonce.  En  atlen- 
dant,  on  lira  avec  un  vif  intérêt  le  rapport  de  M.  Benndorf  ;  il  est  accom- 
pagné de  trois  planches  et  il  contient,  outre  une  description  rapide 
mais  précise  du  monument,  des  pages  aimables  et  vives  de  description  et 
de  récit.— G.  I». 

M.  de  Ceulenecr  vient  de  publier  dans  le  Bulletin  de  l'Acadéniie 

royale  de  Belgique  (t.  III,  u"  3,  1882)  une  intéressante  notice  sur  las  tètes 
ailées  de  satyre  trouvées  à  Angleur.  Il  étudie  à  ce  propos,  avec  beaucoup 
de  science  et  de  précision,  l'histoire  des  figures  ailées  dans  l'art  antique, 
et  montre  par  quelle  voie  on  en  a  été  conduit  à  donner  des  ailes  au 
satyre. 

M.  de  Rossi  vient  de  donner  la  table  générale  de  la  troisième  série 

du  Bullcti7i  d'archéologie  chrétienne  pour  les  années  1870-1881. 

naûvacTo;,  septembre  et  octobre.  Parmi  les  articles  que  contient 

ce  numéro  double,  nous  signalerons  les  suivants  :  Petridis,  Découverte  de 
la  ville  antique  de  Moraiu  (croit  avoir  retrouvé,  près  de  Kyparissia,  dans  un 
endroit  qui  a  gardé  le  nom  de  Moptora^a  et  où  exisicnt  dos  restes  antiques, 
l'emplacement  d'une  ville  ancienne  qui  aurait  donné  à  la  péninsule  son 
nom  moderne).  —  Partie  archéologique.  Fouilles  d'Eleusis.  Fouilles  d'Epi- 
daure  et  de  l'acropole  d'Athènes.  Découvertes  récentes  de  Fergame.  L'Uermés 
de  Praxitèle.  —  Dragalsis,  Antiquités  du  Pirée  (deux  tèles  de  pierre,  une 
staluette  de  Cybèle,  une  mesure  agoranomique,  une  pierre  tombale  avec 
iuïcription,  uue  inscription  relative  à  la  marine  a\cc  bas-relief).  L'actopole 
de  Pergame.  L'aqueduc  de  Samos,  etc. 

Sans  doute  pour  suppléer  dans  quelque  mesure  à  la  disparition 


374  HEvcE  AncHi^.oi,or.iouR. 

do  r  *A(Kvatov,  le  TlaîvoiffiToç  a  sinfiulit^rcmcnl  cli^-clnpp(<  sa  parlio  arrht^o- 
lot'iquc;  cello-ci  forme  inaintcrnmt,  dans  ihaqiin  cahier,  une  scciion  à 
{larl.  nan.<  le  ilornior  numéro  que  nous  ayons  reçu,  celui  de  novcml.ro 
18^2,  nous  trouvons  pour  cctto  Boclion,  le*  articles  suivants  : 

P.  I.anjbros,  Moiimirs  m'ailles  d'Erizoi,  ville  de  Carie  (ligures).  — 
M.  Dra>;oumls,  în^iriptions  de  l'Atliquc  d  de  la  Mi'çjande.  —  AmpiMas, 
InicriptUms  de  Zik'/niho<i.  —  Danit^rali,  Inscrijytions  de  Tricah.  —  Mtliilo- 
poulos,  home  du  Virée.  —  Kabbadios,  Pouillca  d'Epidiurc;  Fouilles  d'Eleusis. 
—  A.  0.,  Antiquités  de  Tirnovo;  Notes  archéologiques  sur  Sinope. 

.M.  Vonturi,  directeur  de  laRalerie  royale  d'Kîle,  ou,  comme  nous 

dirions,  du  must'C  do  Modùfio,  a  entrepris  une  descriptitm  circonstanciée 
de  la  g.ilorio  conliéc  i  ses  soins,  et  pultlie  ce  catalo^^uo  illuslrt'  par  livrai- 
sons hebdomadaires,  sous  co  titre  :  La  Uealc  yalleria  Eslcnsc  in  Modcua. 
Il  débute  par  une  histoire  intc^rcssante  de  la  collection  cl  il  en  parcourt 
ensuite  les  diiïi'rcntes  séries,  en  reproduisant  par  la  gravure  les  morceaux 
les  plus  importants.  11  y  a  dans  cette  6lude  de  la  science  cl  de  la  critique. 
L'ouvra>;e  complet  coûtera  43  francs  et  formera  un  volume  d'environ 
500  pages. 

nnlletindecorrefpondance  hcllcniquc,  septième  année,  janvier  18S3  : 

\V.  J.  Slillniann,  Une  cuirasse  antique.  (Ce  monument,  qui  a  été  trouvé, 
comn>c  bien  d'aulnes  armes  votives,  dans  la  lit  de  l'Alphée,  est  des  plus 
curieux.  L'n  nettoyage  3oi;:nousement  exécuté  a  permis  d'y  reconnaître 
loule  une  suite  de  tîuures  gravées  au  Irait,  avec  beaucoup  de  finesse, 
dans  un  style  archaïque  très  pur,  que  permettent  d'apprécier  trois 
planches  en  héliogravure.  La  scène  principale  est  formée  de  six  figures 
qui  se  divisent  en  deux  groupes.  D'un  côté  Apollon,  suivi  d'Artémis  et 
de  Latone  ;  de  l'autre  côté,  un  roi  ou  un  prêtre,  suivi  de  deux  person- 
nages, s'avance  vers  le  dieu.  Au  dessus,  deux  taureaux  cornupétos,  une 
paire  de  lions,  deux  siiliinx  rampants  et  deux  léoi»;irds.  P.is  d'inscription.) 

—  Am.  Hauvette-Besnaull,   Inscriptions  de  Délos  (décrets  dos  Nyiiuôtai; 
'  décret  en  honneur  d'un  descendant  d'Alexandre  ;  dédicace  faite  par  les 

Ko'xr:eTa/i«r:a().   -  \V.  M.  U.imsay,  inscriptions  de  la  C,  ilntie  et  du  Vont. 

—  Mvlonas,  Ifeux  tablettes  judidnires  inédites.  —  S.  Heinacb,  iii<cnptiou 
de  Môthymna.  —  V.  Monceaux,  Inscriptions  de  Thcfsulie  ;  le  Calaidrier  de 
Thcssalie  d'après  une  inscription  inéddo  de  MétropoliS  de  Tliessaliotidc.  — 
M.  Dubois,  Lettre  de  l'empereur  Auquste  au.v  Cnili  ns.  —  M.  Foucart,  Ins- 
criptions du  Virée  de  la  collection  de  M.  .Mex.  Mél'tOi>ouli>s  (tdfrando  aux 
MoTpi;  décret  de«  Orgéons;  dédicace  dos  MeXX£or,Goi).  —  S.  Heinacb,  la 
Voterie  jaune  émail lée  de  Saiymc.  Uas-relirf  d'Acra-phitc.  —  M.  (.1ère,  //«- 
c.'iptions  de  Samos. 

M.  F.  Sar.  Cavallarl  a  publié,  dans  les  Notiiie  degli  scaii,  une 


NOUVELLES   AnCHlf.OLOGIQUP.S.  375 

inli^ro=?<!anto  notiVfi  sur  les  foiiillos  qu'il  a  diiigôos  fin  1S9?  dam  l'un  dc§ 
temples  de  Si''linnnlt\  \c  jilus  ;itii:iRn  do  tous,  fouillos  (jui  fai-nipril  siillû 
à  celles  do  1870,  de  1877  et  1878.  Il  a  trouv(5  dans  nombre  d'objets  dëcou- 
vpili^  au  cours  de  ces  fouilles  l.i  prouve  que  le  teiuple  était  binri  celui 
d'IliTculo.  I-es  rouilles,  en  d('!giif,'eant  des  terres  qui  les  cachaient  Itjus 
les  iVaunculs  du  portique  sepieuliional,  orit  permis  de  létahiir  lout  le 
couronnement  extérieur  du  temple,  qui  était  en  terre  cuilc  peinte.  Cette 
corniche  est  d'une  grande  élégance  et  d'ime  grande  richesse  ;  elle  est 
représentée  dans  les  deux  planches,  dont  l'une  est  en  couleur,  qui  «ont 
jointes  i\  cette  intéressante  relation.  Il  serait  bien  ;\  désirer  qui  M.  Cival- 
lari,  qui  ;i  dirigé  toutes  les  foMilles  et  qui  a  sous  la  main  tous  les  fragments 
eutreprll  une  rt^staurafiou  complùle  du  temple  d'Hercule,  travail  pour 
lequel  il  semble  très  bien  préparé  par  les  connaissances  spéciales  cl  par 
le  goill  dont  il  fuit  preuve  dans  ce  travail.  —  C.  P. 

.— —  Les  ■poteries  estaivpiUi^cit  dans  Vnmiennc  Hùqnanie,  par  Alfred  Vaissier, 
conservateur-adjoint  du  Musée  des  antiquités  de  Besançon  (un  vol.  in-S», 
accompagné  de  1.")  planches).  Sous  ce  titre,  M.  V.  a  rédigé  un  Itùs  bon' 
catalogue  où  il  décrit  non  seulement  les  marques  de  potiers  qui  se  trou- 
vent sur  des  vases  de  l'époque  gallo-romaine  appartenant  au  Musée  de 
Besançon,  mais  encore  toutes  celles  qui  lui  ont  olfert  de?  poteries  recueil- 
lies dans  les  lifuilcs  de  la  région  jidis  liabilde  par  les  Séquauos.  (^e  cata- 
logue, inséré  d'abord  dans  les  Mémoires  de  la  SociHé  d'émulation  du  Doubs, 
méritait  d'élre  publié  séparément,  comme  il  vient  de  l'être  en  une  bro- 
chure de  44  pages,  où  sont  décrites  234  pièces  différentes.  On  ne  peut  que 
s'associer  au  désir  qu'exprime  M.  V.  de  voir  ainsi  étudiés  tous  les  moim- 
ments  de  ce  genre  que  renferment  nos  umsées  provinciaux.  —  G.  P. 

On  a  réuni  en  un  volume,  qui  a  paru  chez  Ernest  Leroux  (in-8<», 

144  pages,  1883),  les  leçons  prononcées  à  l'ouverture  des  cours  qui  ont 
commeneé  au  musée,  sous  la  direction  de  M,  de  lionchaud,  et  dont 
rensemble  forme  ce  que  l'on  appelle  VÉcole  du  Louvre.  Dans  ce  cahier 
qui,  nous  ne  savons  pourquoi,  n'a  pas  de  table  de  matières,  on  trouvera 
deux  leçons  de  M.  Revillout,  une  de  M.  Pierret,  une  de  M.  LeJraio  et 
une  de  M.  Alexandre  Bertrand.  Celte  dernière  a  l'avantage  d'être  accoui- 
paguée  de  nombreuses  figures  insérées  dans  le  texte;  elle  forme  la  pré- 
face naturelle  du  cours  d'archéologie  nationale  que  M.  Bertrand  a  entre- 
pris de  professer,  et  l'on  sera  heureu.v  d'y  trouver  réunis  les  derniers 
résultats  auxquels  soient  arrivés  la  science  et  la  critique  sur  la  question 
de  savoir  quels  ont  été  les  plus  anciens  habitants  de  noire  sol  et  quelles 
traces  ils  y  ont  laissées.  —  (i.  P. 

M.  Ludwig  von  Sybel  vient  de  publier  une  intéressante  disser- 
tation intitulée  Kritik  des  œ(jyptischen  Ornamcnls,  arihxologische  Studie 
(Marburg,  Hlwerl'sche  Buchhandluug,  1883,  in-8°),  qui  est  accompagnée 


370  luvir  Anrmî:oi.ooiouF.. 

de  deux  plamiios.  Par  beaucoup  irobservalioiis  el  do  comparaisons  de 
détail,  qui  liMiioi^jncnt  di*  rochorchfs  trt^s  t'ti':ulu«'s  el  d."uii  ^^oùl  Un  cl 
exi'TcC',  l'aiileur  cluTchi:  à  prouvi'r  qu'à  partir  de  la  .WIll"  cl  de  la 
Xl\"  dynastie  l'arl  de  l'f.^'yple  ai^'.é  profondéinonl  inodilii^  par  rinlhience 
de  l'art  clialdt^o-asijyrien,  dont  les  ouvrages  éiaienl  itilroduils  en  Kgyptc 
surlonl  par  les  Pliénirions.  Celle  inlluencc  se  serait  exercée,  selon  lui, 
Don  senlemenl  sur  la  (li''i;oration,  où  auraient  in'ni'lri'  un  cerlain  nombre 
de  motifs  asiatiques,  mais  encore  sur  le  style  nii''n»'>  de  la  >laluaire,  sur 
la  manière  dont  était  représentée  la  forme  humaine. 

Nous  accepterions  volonlieqs,  au  moins  dans  son  ensemble,  la  pre- 
mière partie  de  la  thèse,  quoiqu'il  y  ait  \\  certains  motifs  auxquels 
M.  de  S\bel  attribue  uneori^;inc  a>iati(iue  et  que  l'Asie  a  peut-être  plutôt 
empruntés  à  l'Hiiyptc,  où  ils  ont  été  rencontés  dans  des  inonuments  plus 
anciens  (le  },'lobe  ailé,  la  Heur  de  lotus,  etc.);  nous  admettons  volontiers 
que  la  Mésopotamie,  plus  liihe  en  métaux  que  l'Kgypte,  a  dû,  par  la 
lcchni(iue  du  métal,  lui  suggérer  certains  partis,  certaines  formes  orne- 
mentales. O  qui  nous  parait  plus  diflicile  i  croire,  c'est  que  la  statuaire 
du  Nouvel  Kmpire,  avec  son  caractère  idéaliste  et  l'elVorl  quelle  tente 
pour  atteindre  à  la  beauté,  ne  soit  pas  le  développement  naturel  et 
comme  le  couronnement  de  celle  de  l'.Vncien  Empire.  L'interprétation 
que  la  plastique  égyptienne  donne  de  la  forme  vivante  nous  parait  être 
restée  jusqu'au  bout  originale  el  vraiment  nationale.  ~  G.  1'. 


BIBLIOGRAPHIE 


Trésor  de  Chinon,  par  M.  f.  CiiAni.Ks  HonEiiT  fpxtr;(it  de  VAnnuriirr  tir  la 
Sûctiitd  l'rn  çaisu  (te  niimfimudfjue  et  U'urcftéologic,  1882,.  Iu-8  de  15  pages 
avec  une  planclie  gravée. 

En  18.^1,  on  diîcouviil  à  Chinon  un  triisor  compost?  de  81  sous  d'or  pré- 
sentant les  effigies  cl  les  noms  de  trois  empereurs  d'Orient,  savoir  :  1  de 
Zi^non,  70  d'Anasta^e  et  10  de  Justin.  Trente-sept  de  ces  pièces  sont  en- 
trées dans  la  collection  de  M.  Krncst  Gariel,  qui  u  confié  à  .M.  Gh.  Hobert 
le  soin  de  les  publier.  Il  ne  pouvait  clioisir  un  éditeur  plus  compétent  et 
mieux  qualifiépour  faire  ressortir  l'intérût  scientifique  de  cette  découverte. 
Toutes  les  pièces  sont  décrites  avec  un  soin  minutieux;  les  plus  importantes, 
au  nombre  de  vingt-quatre,  sont  tidèlemenl  reproduites  par  la  gravure.  Il 
n'cA  aucun  de  ces  monuments  qui  n'ait  i^on  intérêt  propre,  en  rai;on  des 
détails  qui  le  particularisent  et  qui  oirient  un  sujet  de  fructueuse  élude. 
On  y  rencontre  des  exemplaires  à  légendes  iuipériales  curieusement  dé- 
forn^ées  par  le  burin  des  monnayeurs  barbares  ;  d'autres  chargés  de  sigles 
et  de  symboles  variés,  de  monogrammes  remarquables,  entre  autres  ceu.x 
qu'or,  est  convenu  d'attribuer  aux  rois  bourguignons  Gondebaud  et  Si^is- 
mond.  La  description  est  avivée  par  un  commentaire  critique  dans  lequel 
le  lecteur  trouvera  un  résumé  lucide  et  précis  des  travaux  antérieurs 
suscités  par  ces  divers  problèmes.  La  monographie  de  M.  Ch.  Robert  est 
un  modèle  de  leçon  de  numismatique.  On  souhaiterait  que  des  trou- 
vailles analogues  au  trésor  de  Chinon  fussent  plus  fréquentes,  et  (ju'elles 
eussent  la  bonne  fortune  d'être  aussi  savamment  éditées. 

R.  MOWAT. 

Cachets  d  oculistes  romains,  pir  A.  Héron  de  Villefosse  et  H.  Thédenat, 
tome  l,  avec  2  planciits  et  19  figures  intercalées  dans  le  ttitc,  dessins  de 
M.  Falcoz;  in-8,  210  pages.  Paris,  Cliauipion. 

MM.  Héron  de  Villefusse  et  Thédenat  ont  voulu  faire  une  monographie 
définitive  des  cachets  d'oculistes  :  à  cette  besogne  ardue  et  délicate  ils 
étaient  très  bien  préparés  par  leurs  précédents  travaux.  Disciples 
de  M.  Léon  Renier,  ils  prennent  place  parmi  les  quelques  épigrapbistes 
qui  font  autorité  dans  le  monde  savant.  A  une  érudition  très  sûre  et  très 
multiple  ils  unissent  l'art  d'écrire  :  sous  leur  plume,  tout  devient  clair. 


378  nrviR  AncFiKoi.oGioi'F.. 

atlraynat  et  vivant  VoilA  sans  doute  ce  que  rAcad(îmio  a  voulu  rt^com- 
poii<pr  on  donnant  iino  d(î*si's  piemiiMos  nwJ  lillos  à  un  ouvrai^c  dont 
un  «oui  volume  a  paru. 

Aprùs  Tôchon,  tirolofend,  Siclicl  et  Klein,  MM.  do  Villerosso  et  Tht-ile- 
nat  ont  cru  qu'il  y  avait  encore  i  dire  tur  les  cachets  d'oculislcs  ;  ces 
monuments  curieux  fournissent,  en  oITot,  do  précieux  renseignements  au 
sujet  do  la  médocino  dos  nncions.  Dans  l'anliquilé,  il  y  avait  ilry\  dos 
spi^cialistos,  et,  conmio  aujtiurd'hni,  l'ait  de  la  n'clame  était  ri'pindu  et 
cultivé  avec  succès,  lies  cachets  portent  en  général  le  nom  de  l'oculiste, 
du  remi''de,  et  le  nom  de  la  maladie  contre  laquelle  le  collyre  était 
employé.  Gravés  en  creux  et  au  rebours,  ils  servaient  i  uiarquer  d'une 
empreinte  les  collyres  formés  d'une  pAle  molle  que  lo  tentps  dovail  durcir. 
I.e  premier  vulumo  i^ublio  contiml  la  noiico  do»  cachets  de  dix-sopt  ocu- 
listes romains  connus  et  de  deux  anonymes,  (ihose  singulière  et  qui 
reste  encore  inexpliquée,  ces  cacliots  proviennent  tous  de  l'ancienne 
Gaule.  Au  nord,  au  midi,  au  centre,  on  les  trouve  ;\  peu  préa  identiques 
de  forme  ot  do  maliéro,  qnoique  avec  des  indiiutions  diversosde  maladios 
et  de  reniodos.  Un  Irôs  polit  nombre  n'a  point  de  provenance  certaine  : 
tel  est.  par  exemple,  celui  que  le  docteur  Hertherand  aurait  rapporté  de 
Lambése.  Cortaines  circonstances  de  la  découverte  inspireraient,  et  à  bon 
droit,  des  doutes  sur  l'aullienliiilé  du  cachet. 

MM.  Héron  de  Villofosse  et  Thédcnat  no  se  contentent  pas  de  lire  la 
légende  de  chaque  monun>ent  :  i!s  expliquent  la  nature  des  afTeciions  de 
la  vue  et  ils  discutent  la  composition  du  spécifique  employé  pour  les 
guérir.  Pline  l'Ancien  et  lialion,  Marcellus  Kmpiricus  et  Dioscoride,  Ori- 
basius  elScribonius  Larj^us  apportent  leurs  témoii^nagos,  (lui  seconllrniont 
les  uns  les  autres.  Il  résulte  de  celte  exposition  que  la  Ihérapcutlqtie 
ancienne  prônait  certains  remèdes  auxquels  revient  la  science  moderne  : 
par  exemple,  le  balsamum  et  Ifn  cendres  d'épongé  pour  la  vue.  Ce  dernier 
remède  a  été  de  la  part  des  auteur»  l'objet  d'une  discussion  nouvelle  ot 
rigoureusement  inattaquable.  Aussi  l'Acadôniie  de  médecine,  à  qui  le 
livre  a  été  on'erl,  lui  a-t-elle  fait  le  plus  bienveillant  accueil. 

L'unanimité  de  ces  éloges  venant  do  si  haut  doit  encourager  les  auteurs 
à  redoublor  do  soins  pour  le  second  volume,  qui  ne  tardera  point  »aiis 
doute  il  paraître.  Ne  feraient-ils  pas  bien  de  donner  quelques  notions  sur 
la  nature  et  la  valeur  des  cachets  d'oculistes?  Ne  pourraient-ils  aussi 
préciser  la  date  de  l'époque  à  laquelle  vivaient  les  praticiens  qui  les 
employaient?  Sont-ils  bien  sûrs,  en  outre,  que  le  fragment  de  tuile  de 
Trenta  (p.  3;j)  porte  une  empreinte  médicale?  J'y  verrais  pluiôt  une 
marque  de  potier.  Je  serais  aussi  tenté  de  faire  à  MM.  do  Villifosso  et 
Tbôdenal  (juelquos  chicanes  sur  la  façon  dont  ils  lisent  certains  mots 
grecs,  et  où  la  dérivation  viole  le»  règles  de  la  langue.  A  dire  >rai,  ces 
^  chicanes  seraient  injustes.  Heaucoup  de  ces  oculistes  n'étaient  que  des 
gens  peu  lettrés  :  les  règles  de  la  dérivation  des  mots  grecs  leur   échap- 


BinLioGRAPiin:.  379 

paiont  ;  ils  s'inquliîtaicnt  pou  de  mulliplier  lc9  solécisme»  et  les  barba- 
ri.sini's. 

Malgré  CCS  h^gères  critiques,  je  répéterai  volontiers  du  livre  do 
MM.  Héron  de  Vilierossc  et  Tliédcnat  ce  qu'en  disait  le  présiden'  diî  l'Ara» 
dénii(<  des  inscriptions  et  bclles-lel'res  en  décernant  une  médaille  A  co 
voliHiie  :  <i  C'est  un  modèle  d'exposition,  de  nelleti\  de  riclie  et  sobre 
l'rudilion.  »  I'a''|-  I-aii.emand. 

La  Poésie  alexandrine  sous  les  trois  premiers  Ptolémées  (32^1  à 
22'J  ;iv.  .I.-C),  par  Aiolstk  Couat,  doyen  de  la  faculté  des  Icltres  de  BordcatiXi 
Paris,  llacliellc,  1882  ;  51i5  pages  iii-8. 

Le  sujet  traité  par  M.  (^ouat  a  pour  les  lecteurs  fronçaiii  tout  l'aliiail 
de  la  nouveauté;  en  Allemagne  même,  aucun  érudit  n'avait  encore  en- 
trepris de  tracer  un  tableau  général  de  la  liltéralurc  alexandiine, 
qui  n'est  pas  comprise,  on  le  sait,  dans  VUistoire  de  la  littérature  fjrccque 
d'Otfricd  Miillor.  Les  travaux  critiques  publiés  on  Allemagne  ne  portent 
que  sur  des  points  particuliers;  le  travail  d'ensemble  restait  à  faire.  Lo 
livre  do  M.  Couat  montre  que  la  tâclic  était  loin  d'èlrc  ingrate.  C'est 
l'élude  do  Catulle,  dil  l'auteur,  qui  lui  en  a  suggéré  l'idée  :  il  y  avait  en 
effet  un  vif  intérêt  à  remonter  jusqu'à  la  source  où  les  poètes  romains 
contemporains  d'AuyusIe  ont  en  partie  puisé  leurs  inspirations,  et  à 
rfcbercbiM-  (juels  étaient,  à  Alexandrie  même,  les  caractères  de  cette  lit- 
térature, dernière  floraison  de  l'esprit  grec,  qui  essaye  de  se  renouveler, 
après  trois  siècles  d'une  maturité  féconde.  L'ouvrage  que  M.  Couat  olfrc 
au  public  savant  est  un  livre  bien  fait,  qui  témoigne  d'une  grande  sûreté 
d'information,  d'une  critique  ferme  et  sagace,  et  où  l'érudiliou  ne  perd 
rien  à  se  trouver  alliée  au  sentiment  littéraire  le  plus  délicat. 

Dans  sa  préface,  l'auteur  indique  très  nettement  quelles  sont  les  limites 
de  son  sujet  ,•  c'est  la  période  d'activité  créatrice  qu'il  étudie,  et  dans  le 
centre  le  plus  important,  c'est-à-dire  dans  la  capitale  des  Ptolémées.  Pour 
l'examen  des  différents  genres  poétiques,  il  ne  s'astreint  pas  à  suivre 
l'ordre  de  discussion  historique,  qui  n'a  plus  aucune  importance,  à  une 
épo()uc  où  tous  les  genres  sont  depuis  longtemps  créés;  en  analysant 
d'abord  ceux  où  les  Alexandrins  ont  le  plus  innové,  il  fait  savoir 
sur  le  vif  les  qualités  et  les  défauts  de  l'école,  et  le  lecteur  suit 
plus  facilement  les  transformations  que  l'alcxandiinisme  a  fait  subir  aux 
autres  genres.  Giilcc  à  celte  méthode,  le  développement  se  poursuit  avec 
une  clarté  qui  n'est  pas  un  des  moindres  mérites  du  livre. 

Sans  entrer  dans  le  détail  qu'exigerait  une  analyse  approfondie,  nous 
voudrions  au  moins  donner  au  lecteur  une  idée  sommaire  des  princi- 
pales divisions  de  l'ouvrage.  L'introduction  s'ouvre  par  une  étude  sur  le 
Musée  d'Alexandrie.  On  comprendrait  mal,  en  ell'ol,  la  lilléralurequis'est 
développée  à  la  cour  des  Ptolémées,  si  l'un  ne  connaissait  ce  milieu  fac- 
tice du  .Musée  bien  propre  à  favoriser  l'éclosion  d'une  poésie  érudile,  culti- 
vée dans  une  société  fermée,  sans  inspiration  nationale.  En  contrôlant  les 


380  REVUE   AnCHE^OLOGlQCE. 

li^raoipnagcsdessavantiqiii  onléiiulu^  la  toj)o;,'rapiùe  d'Alexandrie,  M. C.omt 
cs>a\e  de  roiuirL»  au  Musé''  sou  xéiiiablc  eui[>lacom(Mit,  «  au  bord  do 
la  mer,  à  cô!é  du  llu'.ltro,  dai:s  celle  parlic  do  la  rivo  qui  a  élé  depuis 
rongée  par  le  n.»t  ».  Si  la  disiuissioa  pcul  encore  rcslcr  ouverlo  sur  ce 
point,  on  adinellra  faciletncnl  avec  l'aulcur  que  le  vôrilablc  fuudaleur 
du  Musée  ri  de  sa  riche  l'ililiothoquc  est  IMolém/'e  Pliiladelphe.  C.'o<l  co 
prince  qui,  s'insiiiranl  des  idées  de  l'ioli'ni'^e  Soler,  oiivre  aux  érudits  et 
aux  pot  les  celte  retraite  savante,  bien  faite  pour  le  travail  de  la  recher- 
che, et  d'où  sortira  la  littérature  alexandrine.  Le  Musée  avait  ses  biblio- 
thécaires, choisis  parmi  les  principaux  poètes,  et  conservant  leur  charge 
toute  leur  vie  durant.  On  sait  que  la  chronologie  des  poètes  alexandrins  et 
des  bildiotliécaires  en  particulier  eliil  uKil  lixée.  M.  C.ouat  l'établit  avec 
une  sévérité  de  méthode  qui  laisse  peu  de  place  au  doute,  mais  qui  le 
conduit  forcément  à  mettre  sous  les  yeux  du  lecteur  des  discussions  de 
textes,  de  faits,  et  tout  l'appareil  d'une  argumentation  rigoureuse.  Disons 
tout  de  suite,  que  ce  chapitre,  ei  quelques-uns  des  suivants,  auraient 
gagné  à  être  allégés  de  ces  discussions  minutieuses.  .Nous  souhaitons  (jue 
dans  une  édition  suivante  M.  Couat  les  élimine  pour  les  placer  en 
appendice  et  rendre  ainsi  ù  ses  premiers  chapitres  l'allure  plus  dégagée 
qu'on  aime  à  retrouver  dans  la  suite  de  l'ouvrage.  Nous  nous  reproche- 
rions d'insister  sur  cette  légère  critique  ;  aussi  bien  elle  se  réduit  i  cons- 
tater chez  l'auteur  un  excès  de  scrupules. 

L'élégie  est  pour  les  poètes  du  Musée  un  genre  de  prédilection  ;  c'est 
dans  ces  poèmes  que  l'art  supplée  le  plus  facilement  i  l'insuffi- 
sance  de  l'inspiration.  Aussi,  dès  ses  origines,  l'école  alexandrine  s'y 
complaît,  et  l'on  voit  l'élégie,  où  l'Amour  devient  le  personnage  piincipal, 
se  substituer  au  genre  dramatique  tel  que  l'avait  fait  Kuripide  :  «  L'a- 
mour comme  sujet,  les  légendes  les  plus  rares  comme  cadre,  la  sophis- 
tique, la  langue  de  la  galanterie  comme  moyens  d'expression,  presque 
tout  ce  qu'avait  créé  Kuripide  convenait  parfaitement  à  la  poésie 
élégiaque  des  alexandrins  (p.  02).  Il  reste  fort  peu  de  chose  des  poètes 
élé^jiaques  antéiieursà  Callimaque;  mais',  grâce  à  d'ingénieusesanalyses, 
•M.  Couat  tire  le  meilleur  parti  de  ces  fragments  épars  et  montre  l'élégie 
devenant  tour  à  four  conteuse  et  descriptive  avec  Antimaque,  bucolique 
et  familière  avec  l'hilélas,  érudite  avec  llermésianax  et  Alexandre 
d'Elolic,  qui  nous  conduisent  au  cœur  même  de  l'école  alexandrine. 
Callimaque  donne  à  l'élégie  sa  forme  définitive,  et  l'un  peut  juger  (les 
innovations  qu'il  y  introduit,  grflce  au  poème  sur  la  chevelure  de  Béré- 
nice. Uien  que  cette  pièce  ne  soit  pas  parvenue  jusqu'à  nous  dans  sa 
forme  originale,  la  traduction  de  Catulle  nous  en  a  conservé  l'esprit,  la 
composition,  et  même  les  détails.  Sous  ce  vêlement  latin,  elle  est  i  peine 
déguisée.  Dans  des  pages  linement  écrites,  .M.  Cuual  l'ait  retsortir  l'ironie 
discrète  avec  laquelle  le  poète  courtisan  et  sceptique  raconte  le  miracle 
de  la  chevelure  royale  changée  en  constellation,  et  Halle,  en  se  jouant, 
U  pasaion  de  la  reine.  Le  recueil  d'élégies  composé  par   Callimaquc  et 


bibmographif:.  381 

intiliilô  les  Actia  n'a  pns  survi'cu  ;  il  n'en  reslo  que  des  Tragmonls  insi- 
{,Miili;inls.  Kii  retrouver  h;  siijel,  les  divisions,  la  cornpoiilion,  .i  l'aide  des 
imilutioiis  latines  et  de  la  paraphrase  en  prose  de  l'épisode  de  Cydippé 
faite  au  vi'  sii^cle  après  Jt'sus-Clirist  par  l'épistolcyraphe  Aristéiiéle, 
c'était  une  lAclio  ardue^  dont  l'auteur  s'acquitte  avec  une  critique  pé- 
nétrante, et  sobre  d'liy|»olhéses.  S'il  reste  encore  bien  des  points  obscurs, 
on  voit  au  moins  comment  Ui  poète  alexandrin  le  plus  renommé  avait 
traité  ce  genre  alexandrin  par  excellence.  «  Callim.ique  avait  sinon 
créé,  du  moins  dépeint  mieux  que  ses  devanciers  ce  monde  des  héros  de 
romans,  des  amants  cl  des  amantes,  dont  il  semble  que  la  galanterie  soit 
l'uniciue  science  et  l'uniijue  aiïairc...  F. es  événements  sont  trop  exlraor- 
(litiaircs,  les  hommes  trop  loin  de  l'humanité,  leurs  sentiments  trop  raf- 
finés, leur  langage  trop  précieux,  pour  que  nous  éprouvions  à  celle 
lecture  autre  chose  qu'un  plaisir  littéraire,  où  l'imagination  fait  presque 
tous  les  frais  (p.  159).  » 

En  réalité,  la  poésie  alexandrine  est  plus  A  l'aise  dans  les  courtes  com- 
positions que  dans  les  poèmes  de  longue  haleine.  Aussi  les  poètes  du 
Musée  réussissent-ils  surtout  dans  ré[»igramme  :  leur  goût  raffiné,  leur 
science  de  la  versification,  leur  recherche  des  alliances  de  mois  impré- 
vues et  ingénieuses,  y  trouvent  leur  plus  heureux  emploi.  On  trouvera 
peut-être  que  M.  Coual  glisse  un  peu  rapidement  sur  les  épigrammes 
alexandrines.  Ce  n'est  pas  qu'il  n'étudie  avec  un  sentiment  très  délicat 
ces  petites  pièces  infiniment  variées  pour  la  forme,  et  pour  les  idées 
qu'elles  traduisent;  mais,  Odèle  au  programme  qu'il  s'est  tracé,  il  se 
limite  à  la  période  comprise  entre  les  années  324  et  222.  H  eût  été  inté- 
ressant, croyons-nous,  de  jeter  un  coup  d'oeil  au  delà  de  cette  limite,  et 
de  montrer  quelle  faveur  avait  conservée  l'épigramme  à  une  date  plus 
récente.  Les  épigrammes  métriques  gravées  sur  marbres  et  publiées  par 
M.  Kuibel  auraient  pu  fournir  de  curieux  rapprochements  »  :  elles  font 
voir,  en  effet,  que  l'influence  des  Alexandrins  n'a  pas  été  étrangère  au 
progrès  de  cette  littérature  populaire;  et  même  sous  l'Empire,  alors  que 
ces  petites  pièces  versifiées  accusent  une  rare  platitude,  c'est  aux  poètes 
de  l'école  alexandrine  que  sont  empruntées  les  bribes  de  vers  dont  on 
compose  les  épitaphes. 

Avec  les  hymmes  de  Callimaque,  l'auteur  aborde  l'étude  des  seules 
œuvres  du  poète  alexandrin  qui  nous  soient  parvenues  intactes.  Il  est 
naturel  qu'il  fasse  une  large  place  A  ces  poésies  officielles,  destinées  à 
être  récitées  dans  les  céiémonies  religieuses,  et  qui  nous  font  connaître, 
dans  une  certaine  mesure,  les  caractères  du  genre  lyrique  tel  que  le  con- 
cevait l'école  d'Alexandrie.  iNous  n'essayerons  pas  d'analyser  les  chapitres 
où  iM.  Couat,  avec  une  érudition  très  pénétrante,  restitue  l'ordre  chrono- 
logique des  hymmes,  et  détermine  les  circonstances  à  propos  desquelles 


1.  Epigrammala  gracca  ex  lapùUbus  collecta.  Berlin,  1878. 


38i  HEVUE   ARCIlkOLOCIOUK. 

ils  onl  é[è  compostas,  l'assanl  eiisuilo  A  roxamou  do  la  r.oinposilion  dos 
hwniu'S.  il  lucl  (  ii  Imniùrc  los  procédt^s  du  poôlo,  qui,  loiil  i-a  loiiibinuiit 
dans  C08  iiit\-es  lo."  principes  do  l'épopée  el  du  ^curo  lyrique,  f'cu  écarlc 
cependanl,  o[  cherche  à  renouveler  l'ancienne  Uadilioii  clusiiquo.  Ccl 
tllori  pour  innover  ne  se  Irahil  pas  moins  dans  le  stylo  des  liymmcg. 
Callimaquc  supplée  à  Tabsence  d'inspiration  rcli^'icuse  par  une  curieuse 
recherchû  d'err.dition  ;  des  eiupiunls  savaiuiutnl  .i.'guiïés,  des  raflinc- 
menl>  d'oïpression,  de  l'et-pril  parluut,  voil;\  co  qui  caraclùriso  ces  pièces 
où  il  ne  manque  qu'un  seuliraenl  sincère.  Personne,  pas  mOme  le  poêle, 
no  croit  plus  à  celle  mythologie  qui  fait  tous  les  frais  des  hymmes  :  c'est 
l'eTcuse  de  Callimaquc.  Aussi  bien  le  poète  du  Musée  reste  encore  bien 
grec,  jusque  dans  ses  écarts  :  il  est  fin,  scrupuleux,  épris  de  l'exactiludc 
des  terme?-,  quelquefois  jusqu'il  laséibercsse.  Pour  nous  inléresbcr  aux 
ingénieuses  lentulives  du  chef  de  l'école  alcxamlrine,  M.  Coual  a  trouvé 
la  meilleure  mclhode  :  il  s'y  intéresse  lui-même;  sans  céder  à  la  Icntaliun 
bien  naturelle  de  surfaire  >on  autour,  sans  l'accabler  d'ailleurs  sous  le 
poids  do  ses  comparaisons  dan:;erouses  avec  les  auteurs  de  la  grande  pé- 
riode classique,  il  sait  faiic  la  part  dos  mérites  el  des  défauts.  Celte  criti- 
que impartiale,  sage  et  mesurée  donne  une  idée  exacte  de  la  valeur 
littéraire  des  poésies  de  Calliraaque. 

La  même  préoccupation  d'innover  se  retrouve  dans  tous  les  genres 
auxquels  les  Alexandrins  onl  louché  ;  que  répopéc  soit  mylliolot;ique, 
comme  celle  d'Apollonius  de  Hhudes,  historique,  comme  dans  les  Mcssé- 
nicjincs  de  Uhianus,  ou  qu'elle  atrecto  seulement  la  l'orme  d'un  conte 
épique,  comme  dans  Vllécalé  de  Calliraaque,  elle  n'en  accuse  pas  moins 
les  tendances  de  l'école  alexandrine.  M.  Cûuat  insiste  sur  ces  trois  œuvres, 
qui  lui  semblent  avec  raison  résumer  Ihisloire  des  évolulions  subies  par 
l'épopée  grecque.  Analysant  le»  Anjonnutiqucs  d'Apollonius,  il  montre 
que  les  faiblesses  de  l'œuvre  viennent  d'une  concei)tion  vicieuse;  faute 
de  savoir  choisir,  en  essayant  de  renouveler  un  sujet  souvent  traité,  le 
pfièleesl  victime  de  son  érudiliun  :  iKléchil  sous  la  masse  de  souvenirs 
dont  il  est  impuissant  k  se  dégaf,'er.  Mais  la  tenlalive  étuil-elle  fatalement 
condamnée  à  échouer?  Chose  curieuse  :  nu  temps  où  Apollonius  écrit  aei 
Argonautiques,  l'art,  qui  passe  par  les  mêmes  phases  que  U  littérature, 
triomphe  de  diflicultés  analogues.  Les  sculpteurs  qui  décorent  le  grand 
autel  de  l»ergatnc,  élevé  par  Kumène  H,  appliquent  à  l'art  les  procédés 
delà  poésie  alexandrine,  avec  un  tout  autre  succès.  .Savants  et  érudils, 
ils  traitent  également  un  des  sujets  les  plus  familieis  à  la  sculpture 
grecque  ;  après  tant  d'autres,  ils  reprennent  cet  épisode  de  la  Gijaiit>jina' 
rhk-,  qui  décore  les  frises,  les  IVonlons  ou  les  niélopea  des  temple»  d'Agri- 
gcnle,  dePrièuc,  d'Arpos  et  de  Delphes.  Ils  ne  sont  pas  moins  sceptiques 
que  le»  poètes  d'Alexandrie,  et  lependant  leur  composition  lémoigno 
d'une  verve  et  d'une  fouj^ue  d'inspiration  qu'on  chercherait  vainement 
dans  le  poème  d'Apollonius.  L'an  alexandrin  avait  encore  des  ressources, 
et  c'est  le  génie  qui  a  manqué  à  Apollonius,  plutôt   que  de»  cuuditious 


uiiiMoi^iiAi'iiii:.  383 

lavoralilc-'.  Itans  Vllrcal'-,  Calliniaque  se  moiilre  plus  avisé.  Il  choisil 
unsujoldo  courte  lialoiiie,  d'un  Ion  moins  haut,  où  les  scènes  faniiliùrcs 
liennenl  uiio  lar^'O  plaça.  Ouoi  do  [dus  («impie,  en  clVel,  que.  lo  rccil  de 
riiospilulilii  olViiilo  par  uiio  vieille  femme  do  i'Altique  à  Thésée,  qui  va 
comballre  contre  le  taureau  de  Marillion  V  I.o  talent  do  «:aliimaquc  e»l 
à  l'aise  dans  la  description  de  ces  scènes  d'intérieur,  qui  font  tout  l'in- 
lérél  du  poùme  ;  il  y  trouve  le  motif  de  détails  piquants,  cl  il  y  prépare 
savamment  le  contraste  sur  lequel  repose  tout  le  conte  :  Thésée  reve- 
nant \ainiiuenr,  acclamé  par  la  foule,  et  voyant  élever  le  tombeau  de 
son  hôlcssc,  morte  pendant  son  absence.  Le  conte  épicjue  fjrme  une 
lran.-.ilion  naturelle  avec  l'idylle,  où  les  Alexandrins  se  munirent  réelle- 
ment originaux,  he chapitre  que  M.  Coual  a  écrit  sur  Tliéocriie  est  un 
des  plus  attrayants  du  livre  ;  c'est,  à  notre  avis,  celui  où  l'auteur  trouve 
les  piiges  les  plus  heureuses,  pour  mettre  en  relief  lo  caractère  drama- 
tique des  idylb-s  du  poète  syracusain.  L'étude  des  poésies  scienlifiques 
d'Aratus  et  d'Kratoslliènc,  le  récit  delà  querelle  lilléiairc  d'ApoUonius 
et  do  Callimaque  terminent  levolumc,  et  dans  une  conclusion  dcqnehjucs 
pages,  M.  Couat  définit  les  caractères  généraux  de  l'alexandrinisme,  tels 
qu'ils  se  dégagent  de  cette  longue  et  savante  étude,  et  met  en  lumière 
les  qualités  d'une  litlérature  qui  ne  mérite  nullement  le  dédain.  Les 
Alexandrins,  en  ellet,  «  ont  tenté  un  voyage  de  découverte  :  ils  ont 
cherché  et  trouvé  quelques-unes  des  voies  nouvelles  où  devait  entrer 
après  eux  la  poésie  moderne.  C'est  d'eux  principalement  que  date  la 
poésie  individuelle,  empruntée  aux  choses  de  chacjue  jour,  écho  des 
sentiments,  des  soutlVances,  des  joies  et  des  rêves  de  chacun.  Us  ont  com- 
pris le  parti  que  la  poéiie  pouvait  tirer  d'une  peinture  exacte  de  la 
réalité  la  plus  humble,  et  tenté  de  substituer  aux  personnages  de 
Il  vie  héroïque  ceux  de  la  vie  commune.  Ils  ont,  en  outre,  essayé  de 
faire  entrer  la  science  dans  la  poésie,  non  point  dans  sa  forme  la  plus 
générale  et  la  plus  élevée,  mais  la  technique  et  le  vocabulaire  de  la 
science....  Par  eux  ont  été  élargis  ou  i)risés  les  cadres  inflexibles  dans 
lesquels  la  tradition  enfermait  chaque  genre  poétique  :  ils  ont  ainsi  laissé 
à  leurs  successeurs  une  carrière  plus  largement  ouverte.  » 

Le  livre  de  M.  Couat  n'intéresse  pas  seulenient  les  philologues  et 
les  historiens  de  la  littérature  ancienne.  Il  ramène  l'attention  sur  une 
curieuse  période  de  l'hellénisme  qui  a  été  longtemps  négligée,  et  où 
l'art  subit  les  mêmes  évolutions  que  la  littérature.  Bien  qu'il  se  borne  à 
écrire  l'bistoirc  de  la  poésie  alexandrine,  lauteur  n'en  éclaire  pas  moins 
bien  des  points  étrangers  à  son  sujet;  en  lisant  son  ouvrage,  ou  comprend 
mieux  quelles  induences  ont  agi  sur  l'art  alexandrin.  Comme  les  poètes 
du  Musée,  les  artistes  de  la  période  hellénistique  sont  à  la  fois  érudils  cl 
épris  de  nouveauté;  ils  ont  les  mêmes  goûts  de  ral'dnemenl;  comme  eux, 
ils  cherchent  leurs  inspirations  dans  cette  mythologie  qui  ne  rencontre 
plus  que  des  incrédules  :  ils  s'efTorcenl  de  rajeunir  les  héros  et  les  hé- 
roïnes des  vieilles  légendes,  au  risque  de  tomber  dans  l'afféterie  et  la 


384  RF.VUE   ARCH^.OLOGIQOE. 

manit're.  Enfin,  pour  l'art  comme  pour  la  poésie  de  la  période  helléniç- 
tique,  môme  populariti''  A  Homo.  Apri».s  les  travaux  de  M.  Uelbig,  que 
M.  Hoissicr  a  fail  cintiallre  au  public  français  '.  on  ne  iloule  plus  que 
les  figures  pompricnnes  ne  soient  en  partie  au  moins  inspirées  par  des 
modèles  alox  indrins.  N'est-ce  pas  la  môme  fortune  qui  était  réservée  à 
Home  aux  poùtes  du  Musée  ?  S'il  n'entrait  pas  dans  le  sujet  do  M.  (louât 
d'insister  sur  ces  rapprochements,  ils  s'itnposcnt  à  l'esprit  du  lecteur. 
Tel  chapitre  surTôléi^ie  ou  sur  l'épiLMamnie  est  comme  le  comuierilairc 
littérauc  d'une  peinture  pompéienne,  (le  sont  les  poètes  qui  ont  fourni  aux 
artistes  les  théines  ingénieux  sur  lesquels  s'exerce  leur  fanlaisie.  Les  scènes 
mythologiques  et  galantes  des  pcinturescampaniennos  trahissent  la  tnémc 
inspiration  que  les  élégies  de  ('allimaque  ou  les  Artjonauliqws  d'Apollo- 
nius ;  1 1.  ti'nulrc  part,  ces  innombrables  amours  qui  voltigent  dans  le 
champ  d'S  fresques  sont  bien  les  lils  de  la  poésie  élégiaque  ou  épigram- 
matique.  On  sait  qu'une  épi^rannne  alexandrine  a  été  reirouvée  à 
Pompéi  par  M.  Uilthey,  à  côté  d'une  peinture  représentant  des  Amours. 
Ka  littérature  hellénistique  a  exercé  une  influence  trop  marquée  sur 
l'ait  de  celte  époque  pour  que  l'hisloire  artistique  ne  bénéticie  pas  des 
recherches  consacrées  aux  œuvres  des  poètes. 

Nous  tenions,  en  terminant,  à  signaler  ce  genre  d'intérêt  particulier 
qu'offre  l'ouvrage  de  M.  tlouat.  L'auteur  n'a  pas  seulement  écrit  un  ex- 
cellent chapitre  de  l'histoire  lilléraiic  de  la  Grèce  ;  en  faisant  mieux 
comprendre  l'esprit  général  de  la  péiioJe  alexandrine,  il  a  rendu  service 
à  tous  ceux  qui  se  proposent  pour  objet  l'étude  de  rhelléni-mc,  dans  ses 
manife£talioDS  les  plus  variées. 

Mai.  (llOLLIGNON. 


1.  Voir  les  Promenades  archéologiques  de  M.  G.  Boissier. 


EhI\ATA 

Une  faute  de  composition  s'est  glissée  dans  le  dernier  article  deM.Ueu- 
zey,  sur  les  rois  de  Tello  (n»  de  novembre  1882,  p.  27!i)  ;  le  bois  conte- 
nant le  nom  d'un  paUsi  de  Siriclla  a  été  placé  à  l'envers.  Dans  le  même 
nom,  la  dernière  syllabe  est  ni  et  non  pas  sf'. 

Lire,  (lnn«  Ir"  mémo  numéro,  ;\  l'arliclede  M.  M.  Peloche,  p.  :tiO,  I.  3: 
DN  COAYRJOJCIVS  PP  AV  au  lieu  de  .  DN  OOARICOCIVS  PP  AV. 


TARLF.  AI^PUAIIKTIOIIR 


l'AIi  NOMS  D'AUTEURS 


'♦*.  —  Socit'tt'i  nationalo  dos  antiqunirrs 
dfi  Franco,  pn'sidoiico  de  M.  G.  Df- 
PLESSis,  p.  187  (scptombrc). 

••*.  —  Sociéttî  nationalo,  dos  antiquairos 
dt^  France,  présidence  do  M.  A.  Ber- 
TBAND,  p.  250  (octobre). 

Anbois  DE  .Ii'RAiNviixE  (IT.  d').  —  Los  Bar- 
des, p.  225-2^2  (octobre). 

Babei.on  (E.).  —  Collection  Camille  lé- 
cuyer.  Terres  cuites  antiques  trouvées 
en  Grèce  et  en  Asie-VIinoure.  Notices 
parMM.  Fr.  Lcnormant.  J.  deWitic, 
A.  Cartault,  G.  Scliluniberper,  E.  Ba- 
belon,C.  l/'cuyer,  p.  190-192  (Bibl., 
par  M.  G.  PEnnox). 

BAnTnÉi.FMY  (Anatole de).—  Découverte 
de  monnaies  jrauloises  ;\  Langres, 
p.  58-59  (Nouv.  et  corr.). 

BEtiTRAND  (ALEXANnaE) .  —  Etudo  sur  les 
Celtes  et  les  Gaulois  par  M.  P.  L.  Le- 
mière,  p.  Cl-C.'i.  (Bihl.) 

BnÉAL  (Michel).  —  La  plus  ancienne 
inscription  latine,  p.  82-9S  (août). 

BnocKiiAnsfF.  A.).  —  Das  Landes  Zeup- 
liaus  in  Gratz,  p.  127- 12S   (Bibl.  par 

M.  P.  Charles  Ror.EnT). 
CAnTAULT(\.)  —Collection  Camille  Lé- 
cuycr.  Terres  cuites  antiques  trouvées 
en  nrèceeten  Asie-Mineure.  Notices 
par  MM.  Fr.  Lenormant.  J.  do  Witte, 
A.  Cartault,  G.  Sclilnmb'Tfrfr.  E.  Ba- 
bclon,  E.  Lécuyer,  p.  190-102  (Bibl. 
par  M.  G.  Perhot). 


CiiATi.LLiEn  (Paul  du).  —  Exploration 
des  ti'ois  tiîmiiJus  de  Kervern  en  Plo- 
zévet  (Finistère),  p.  179-1S6,  .3  fig. 
(septembre). 

Coi.LiGxoN  (Max)  —  La  poésie  alexan- 
drine  sous  les  trois  premiers  Ptolé- 
mée,  par  M.  Aiguste  Colat,  p.  378- 
383.   (Hibl.). 

CoiAT  (AiT,isTE\  —  La  poésie  alexan- 
drine  sous  les  trois  premii  r?  Ptolt— 
mée,  p.  378-383.  (Bibl.  par  M.  .Max 
Coli.icnon). 

DAMOi:n  (A.)  —  Xoto  sur  les  silex  du 
terrain  tertiaire  d'?  Tbcnay  (Loir-et- 
Clier),  p.  359-;jG2  (décembre), 

DEi.or.iiE(.M.).  —  Renseignements  archéo- 
logiques sur  la  transformation  du 
C  guttural  du  latin  en  une  sifflante, 
p.  301-315.  2  fig.  (novembre). 

DESJAnniNS  (E.).  —  Inscription  dUas- 
pîxrren,  p.  23-27.  PI.  XII  juilLt). 

Detiiier  (D""  Pu.  A.).  —  Eludes  arcbéo- 
locifiues,  œuvre  postluime,  p.  25,'j-255. 
(Bibl.  par  .M.  (î.  pRimoT.). 

DnoiiN  'E.  .  —  Les  listes  royales  éthio- 
piennes et  leur  autorité  historique, 
p.  99-115  (août);  —  (siiili'),  p.  153- 
172  ^septombre,  ;  —  {■iuitf)^  p.  20  i- 
22  I,  pi.  XX  et  XXI  (octobre^. 

DiMONT  (Albert).  —  Vases  de  Jalysos, 
I>.  3i9-3ùl  (décembre). 

G.  P.  —  Statue  découverte  à  Olympie, 
p.  59-00  (Nouv.  et  corr.). 

XLIV    —  2o 


380 


IIKVIE   AnCllÉOLOGIQUF.. 


IIalkvy   J  ;.  —   l.  iinniorlaliti'  ilc  1  Aino    1 
cUct  les  peuples  »émitiiitie5,  p.  !iVû3 
(Juillft). 

H«»o!i  HR  ViLtr.rossR  (A).  —  Cnrhcts 
,)',.,•  ,1  VI..V  r.,,i,;iiin  pnr  MM  A.  Ilt^rmi 
»i  .  i  II.  TluMfnat.  p.   376- 

.i  -  :.ir   M.  Pâli.  LAi.i.»UA>n). 

Hbizby  'Lroîi;.  —  Ltp  roin  de  'IVHo  et 
la  |>«»rio.lf  arcliai'inodo  l'art  (Iha  dt  ou 
p.  271-'-»:9,  pi.  WII.  0  llg.  (novcm- 
bro).  ' 

H-Y.  —  nuiletin  niensuol  de  l'Arndt^- 
inie  des  inscriptions,  mr>\s  de  juin, 
p.  54-55  (juillet,  ;  —  mois  de  julHiM, 
p.  lai-l'.'H  aoùi)  ;  —  mois  d'aiMll, 
p.  185-180  (soi'ttMihn-;  ;  —  mois  do 
s-piembre,  p.  'Ji9  (octobre)  ;  —  mois 
d'octobre,  p.  3l()-3t7,  (novembre);  — 
mois  de  novembri>,  p.  3(33-3Gi  (dc- 
cembrv). 

I.ALLEUANn  Pau.').—  Caclieisd'oculistes 
roin:iiiis  p  ir  MM  A.  IK^ron  de  Ville- 
fosse  et  H.  ThiSdenai,  p.  370-373  (Bibl.). 

LÉcivER  (C).  —  Collection  Camille  lA- 
cuyer.  Ti  rres  cuites  aiiticjnfs  tmavies 
en  Gr^ce  et  en  Asie  Mineure.  Notices 
par  MM.  Fr.  Lenorniant,  J.  de  Wittc, 
A.Cartault,  (î.  Schlumbcruer.  K.Balx'- 
lon,  C.  Liknyer,  p.  iyO-192.  (Bibl. 
par  M.  (J.  pKimoT). 

LÉcF.n  (L.).  —  Musiie  et  société  arcliéo- 
lo^i(|<ie.$  d'Agrain,  p.  188-189  (Nouv. 
et  corr.). 

LEMii^ne  (P.  L).  —  Etude  .sur  les  Celtes 
Il    les   (îaulois,    p.    01 -Gi    (Uibl.   par 

M.ALE\AM»riF.    BKBTnANO). 

LeuiÈnK  P.  L.;.  —  Les  Celtes  et  les 
Gaulois,  p.  3'J8-3T1  (Nouv.  et  corr.h 

LEN>nMA\T  (FnANÇois).—  Une  inscription 
ibihi-nue,  p.  31-32  (juillet). 

Lenobmavt  ^Fn.).  —  Collection  Camille 
Lt^cayrr.  Terres  cuites  anti(pies  trou- 
vées en  Grèce  et  en  Asiiv.Minfure.  No- 
tices par  MM.  Fr.  Lcnonnant,  J.  de 
Witte  ,  A.  Cartault,  Scblumb"r»:er, 
E.  Bal>«!ou,  E.  L-'-ciiyer,  p.  190-192. 
(Bibl.  par  M.  G.  PKunoT;. 

Lo!«G!«oN  'A.).  —  S^'duiius  de  Liène,  par 
M.  H.  nri  l'ireniK-,  p.  255-250  (Hibl.). 

LcDLOw  fTiioMAs-W).  —  Les  fouilles 
de  riiiMitut  arclirolopique  américain 
à  Assos,  p.  352-358  (décembre). 

MAncAurr  Stokhs.  —  Carte  montrant  la 
diittritiution  des  principaux  dolmens 
d'Irlande,  p.  1-22.  pi.  M  Juillet). 

Monr.i,  LÉON  .  —  Découverte  d'nneépéo 
de  broiiz'!  et  d'un«  opée  (jauloiae  eu 
fer,    p.    110-121,  k  ng.  (août). 


MowAT  (RonEni).  —  Nouvelle»  Inscrip- 
tions do  Docléa,  p.  79-81  (août). 

Mo^v^T{H.^  —  Tré«or  de  Cliinnn  par 
.M.  V.  Cliarles  Robert,  p.  370  Jlibl.). 

MiAT7.    Eir..)  Not's  sur  len    mosaï- 

ques clin'"  innnes  de    ritali"',    p.    tll- 
153,  pi.  XVIll  et  XIX  (septembre;. 

MiitRAT  (A.  S).  —  Vases  do  Jalysos 
lettre  h  M.  AlbiTt  Humonl,  p.  342- 
349  (d''cembre). 

PEnnoT  (G.).  —  ColI.H-tlon  Camille  Lé 
cuyer.  Terri-s  cuites  antiques  trouvées 
en  Grèce  ■  t  en  Asie-Mineure.  Notices 
par  MM.  Fr.  Lenorniant,  J.  de  Witte, 
A.  C.irtnujt,  G.  SrliluujlM>rirer.  E.  Ba-' 
belon,  C.   Lécuyer.  p.  190-192  (Bibl.). 

PEni\OT  (G.V  — Etudi's  Rnliéolopiques, 
(n:vre  postliuru''  par  M.  le  b'  Vu.  A. 
Dh.THien,  p.  25.'i-255  (Bibl.), 

PEniiOT  (G.)-  —  Sreanx  hittite-;  en  terre 
cuite  appartenant  à  M.  G.  Sclilum- 
bergcr,  p.  333-3.!il  (décembre). 

PinENNE  (Henri).  —  Sédulius  de  Liège, 
p.  2.')j-250.  (Bibl.  par  M.  A.  Lo.t- 
cnon). 

Hayet  ^0.).  —  .Société  nationale  des 
a'iiiqu  lires  de  France,  pré-^idetice  de 
M.  Georg  8  Perrot,  p.  50-57  (juillet). 

Ravf.t  (0.).  —  Société  nationale  des 
î'.niiuuaip's  de  Franre,  présidence  de 
.M.  G.  Perrot.  p.  318-3l9;novembpe)  ; 

—  p.   305-307  (décembre). 
R.  M.  —  Exemples  de  gravure  antiqtic 
sur  verre  à  propos  de  quel-^ues  frag- 
ments provenant  de  l)ukle,p.  280-300, 
pi.  XXIII,  11  fig.  ;novenibrc). 

RoDERT  (P.  CnARLhs).  —  D.1S  Landcs 
Z<'Uf;liaus    in   Gratz,    par    M.    F.    A. 

BiiocKiiAis,  p.  127-128  (B.bl.l, 

BoHERT  (P.  CiMRi.Bs).  — Trésor  de  Chi- 
non,  p.  370.  iBibl.  par  M.  H.  Mowat  . 

RoNCilAi'D  (L.  DE;.  —  Sur  le  groupe  dit 
des  Parque»  au  fronton  oriental  du 
Partbénon,   p.    173-178  (septembre). 

SASKt  (F.).  —  Notice  sur  l'état  actuel  des 
ruines  de  Docléa,  p.  7.'i-77,  pi.  XIII, 
5    llg.  (aoi'it.). 

SciiLruiiEnr.ER  (G.).  —  Collection  Ca- 
mille Lécuyer.  'ferres  cuites  anti()ues 
trouvée»  en  GréC"  et  en  A-'ie-Mineuro. 
Notic  s  par  .MM.  Fr.  L-iiormant,  J.  do 
Wiite,  A.  Cartault.  (!.  Schluuib  rger, 
E.  Habclon.  C.  I/coycr,  190-192. 
(Bibl.  pur  M.  G.  PeRRori. 

Théornat  (H.K  -  Cacli<'ls  d'oculistes 
roiiiuin»,  par  .MM.  A.  Héron  do  Ville- 


r  Mti, i:  ni: s  mm  ii;uks. 


;{S7 


fosso  et  ir.Tlii'doiiat,  |>. 370-378.  (Ilibl. 

pur  M.  l'Ai  I.  I.AI.t.tMAND). 

V.  (A. II.  hh). —  liiscripiioiisilc  (Ificnitoii 
(Simillu)'riuiiHie,p.'J/i3  2.'i8  {octobre;. 

WA(;nom  (.\Dr.ii'..N\  —  l.t*  I,;ioronn  et  !•• 
Kioiipo  il'Ailit'iia  h  l:i  frisodePcrRanic, 
p.  ;t3-/|.l.  1  11^'.  fjiiillol);  —  (sutti-], 
p.  i;r>-7a  pi.  XV  (moùD;  —  {suite), 
p.  n'9-U|0  (scptciiibro)  ;  —  (viiilc), 
p.  193-:305  pi.  XVI  et  XVII  (octobre); 
—   {suitt'},  p.  i>j7-27o    iiiovembre)  ; 


—    {sutlr),    p.    321-3.32    (décembre). 

WiTTR  (J.  i)K,.  —  Collection  Camilto 
Léciiyer.  Terres  cui'fiH  niiii()iie»  trou- 
V(Vr  en  Cirèce  et  en  Asie-Miti.  ure. 
Ndiices  [lar.MM.  Fr.  Lenorfiiuiit,  J.  de 
Wili".  A.  <'.url;iiilf,  (j.  Scliluiiiberper, 
E.  ll;ibi.'Ioii,  C.  I/ciiycr,  p.  lOO-l'JL'. 
(Hibl.  p.ir  M.  G.  PinnoT^. 

ZA.Nr.HONiz  (ZoDEi.  db).  —  Monnjiie  d'or 
aux  types  d'Emporics,  p.  28-30,  1  flg. 
(judlet;. 


T.VlîLH    MÉTHODIQUE 


[.  SOCIÉTÉS  ET  NOUVELLKS.  —   11.    EGYPTE   ET  ORIENT. 

III.   GRÈCE.   —   IV.  ITALIE.   —   V.    FRANCE.   —  VI.    PAYS   DIVERS. 

Vil.    IIIRLIOGRAPHIE,    LINGUISTIQUE. 


1.  SOCIÉTÉS  LT  NOLVLLLtS. 

Nouvelles  arcliéologiques  et  correspon- 
dance, p.  58-CO.  (juillet);  -  p.  121- 
li!0  (aoat);  —  p.  188-189  (seiitcmbrek 
—  p.  2.)l-253  (octobre);  —  p.  320 
(novembre)  ;  —  p.  3G8-375  (clLceoibrc). 

Dullctin  Mensuel  de  l'Académie  des  ins- 
criptions, par  M.  II. -Y'.,  mois  ao  juin, 
p.  54-55  (juillet;;  —  mois  de  juillet, 
p.  122-123  (aoiit)  ;  —  mois  d'août, 
p.  185-180  (septembre);  —  mois  de 
septembre,  p.  2/19  (octobre)  ;  —  mois 
d'octobre,  p.  3lG-3i7  (novembre);  — 
mois  de  novembre,  p.  3o3-30i  (décem- 
bre). 

Société  uationale  des  antiqu;iires  de 
France,  prùsidence  de  M.  Geoiigf.s 
l'KBnoT,  par  M.  0.  Havet,  p.  50-57 
(juillet). 

Société  nationale  des  antiqua'res  de 
France,  présidence  de  M.  G.  Dti'LESSis, 
par  M.  "^',  p.  l-<7  (septembre). 

Société  nationale  des  antiquaires  de 
France,  présidence  de  M.  A.Hertua.nd, 
par  M.  *",  p.  250  (octobre). 

Société  uationale  des  antiquaires  de 
France,  présidence  de  M.  G.  Pehiiot, 
par  M.  0.  i\AYET,  11.318-319  Jnovem- 
bre^  ;  —  p.  305-307  (décembre). 


Musée  et  Société  archéologiques  d'A- 
gram  par  M.  L.  Léger,  p.  188-189. 
(Nouv.  et  corr.). 

Vases  antiques  du  Musée  arcliéolo::iquc 
de  Madrid,  p.  252  (iNouv.  et  corr.^. 

Collectiou  Gamillo  Lécuyer.  Terres  cui- 
tes antiques  trouvées  en  Grèce  et  en 
Asie-Minenre.    Notices   par    MM.  Fr. 

LE.\0RMA^T,     J.      DE     WlTTE,     A.    CaT. - 
TAtl-r,    G.   SCIILUMIJERGElljL.  HaUELON, 

G.    LÉGUYER,    p.    190  192   (Bibl.    par 
M.  G.  l'EURor). 

Publication  de  la  collection  SabourolT, 
p.  371-372  (Nouv.  et  corr.). 

Sommaires  de  publications  archéologi- 
ques, p.  125-120  (Nouv.  et  corr.);  — 
p.  320  (Nouv.  et  corr.)  :  —  p.  372-374 
(Nouv.  et  corr.). 

Discours  d'ouverture  des  cours  du  Lou- 
vre, p.  375  (Nouv.  et  corr.). 

IL   ÉGïrXE  ET  OlVlliM. 

Coudée  primitive  de  !  Egypte,  p.  252- 
253  (Nouv.  et  corr.). 

Les  rois  de  Tello  et  la  péiiode  archai- 
iiue  de  l'art  Cbaldéen,  par  M.  Léon 
HttZRV,  p.  271-279,  pi.  X.\ll,  0  lig. 
(novembre). 


390 


ni:vLF.  Anr.iiKoi.or.iot'F. 


Tftblntos  cl  inscriptions  do  la  Rabylonio, 
p.  00  (Il  >uv.  cl  corr.;. 

Sc-iiix  Iliitit<-s  en  IPITO  cuito,  npptrlc- 
DRiit  tk  M.  G.  St'IiliiniborifiT,  par 
M.  G.  l'ennoT,  p   333-311  (dOc  inbic). 

E\|  t*dil ion* arr|uHtli>pi(|tios  Bill rirliionnes 

en  A»ie-.MintMiro,  p.  372-373  (Non»,  et 

corr.). 
VoTAgn  du   profi'ftspuf  Gi'sTAve  llinscii- 

rauD  en  Asie-Mincurr,  p.  372   (Nouv. 

Cl  corr.J. 

Fragments  di^convcrls  à  Pcrgamc,  p.  372 
(Nouv.  vi  corr.). 

1,0  Laoroon  et  l»>  proupo  d'Allit^na  h  la 
fri»«i  df  IVrpamo.  p.>r  M.  Ahiiikn 
Wacxon.  p.  .W-'iS.  I  fii;.  (juillet)  — 
{siiile),  p.  OJ-73,  pi.  XV  (AoiU).  — 
{suitf),  p.  I21I-1Ù0  (septembre).  — 
{suite),  p.  193-205.  pi.  X\  I  cl  XVII 
(octobn'i. —  'SUIH-),  |'.2j'/-270  (noveiii- 
brc).  —(suite],  p.  321-332  .décembre;. 

Les  fooilles  do  llnstitut  arche 'lopique 
amcricaiii  h  A!<^ns,  par  M.  Thomas 
W.  Lt  DLOW,  p.  352-3J8  (déccmbruj. 

III.  (.ItKCE. 

Institution  de  la  Grèce  antique,  p.  00 
(Nouv.  et  corr.). 

Sur  le  groupe  dit  des  Parques  au  fronton 
oriental  du  Partliéoon,  par  M.  L.  i>t 
RoNCHAcn.p.  173-178  (septembre). 

Inscription  découverte  au  Pirée,  p.  121 
(Nouv.  et  corr.). 

Statue  découverte  à  Olympie,  par  M.  G. 
P.,  p.  û'J-GO  (Nouv.  Cl  corr.). 

Vases  de  Jaivfos,  lettre  A.  M.  Albert 
Dumont,  par  M..\.-S.  .Minnw,  p.  342- 
3^9  (décembre,. 

Vases  de  Jalysos,  par  M.  Albi  n  r  Di  mont, 
p.  3.'i'J-351  (déCLinbrej. 

Grecs  répandus  dans  le  bassin  de  la  .Médi- 
ter/anéc,  p. 251  (Nouv.  et  corr.). 

IV.  n Aiii;. 

La  plus  anrienni-  infcription  latine,  par 
.M.  .Mi<  iim.  IlnJAL,  p.  H2-9K  (uoùtj. 

Ilouclicr  d'Acliilie  en  marbre,  découvert 
à  Home,  p.  00  (Nouv.  et  corr.) 

Sénat  de  la  République  romaine,  p.  188 
(.Nouv.  cl  corr.). 

Feuillet  âf>  1882  dans  un  temple  de 
Sélinonte,  p.  37'i-375  (Nouv.  et  corr.). 

Notes  lur  les  Mosaïques  chrélicnn<  s  de 


ritnlie,  par   M.   Kto.  MiNT/,  |>.  t'il- 
ir>2,  l'I.  Wlil  et  MX  Septembre). 


V.  lHANC.i:. 

Nfle  sur  les  sile\  du  terrain  tertiaire  do 
Tiicniiy  (L'>ir-'-t-(;iiiri,  par  M.  A.  I)A- 
Moin,  p.  359  302  (décembre,. 

Exploration  des  irnistumules  de  Kervern 
en  Ploiévei  (rinisièr-),  par  .M.  Paul 
DU  CiiATEi.LiKR,  p.  179-184,3  llg.  (Sep- 
tembre;. 

Dérouverto  d'une  épéc  de  bronrc  et 
d'une  épée  gauloise  en  fer,  par  M. 
LioK  MoRiL,  p.  110-121.  Il  t\f.{auù\). 

In.scripiion  d'llusp;»rren,  par  M.  li.  Des- 
jAnmNS,  p.  23-27.  pi.  XII  (jullcl). 

Découverte  de  monnaies  g-iuloises  h 
Langies,  pur  M.  Anatole  dk  BAnTHÉ- 
LEMY,  p.  58-59  (.Nouv.  el  corr.). 

Trésor  gaulois  de  Lunjuzan  (Gers),  p. 
253  (Nouv.  et  cori.). 

Ville  gallo-romaine  do  Beauclair  (Puy-de- 
Dôme),  p.2.'»l-252  (Nouv.  el  corr.). 

Toijibe  romaine  trouvée  à  i.yon  cl  ren- 
fermant le  masque  d'un  enfant,  p.  188 
(Nouv.  el  corr.). 

Poteries  estampillées  de  l'ancienne 
Séquanie,p.  373  (Nouv.  et  corr.). 

Trésor  de  Cbinon,  par  M.  P.  CiunLEs 
Robeut,  p.  376  (Bibl.  par  .M.  H.  .Mo- 
wat). 

Ruines  du  collège  Dormans  ;\  Paris, 
p.  59  (Nouv.  et  corr.). 

Ktude  sur  les  Celtes  et  les  Giulois,  par 
M.  P.-L.  I-EM1ÈI1E,  p.  01-0'i(Bibl.   par 

M.  ALEXANDHE   BEnTRANU). 

Les  Celtes  et  les  (iaulois,  i)ar.M.  P.-L. 
LEMiir.E,  p.  308-371  (Nouv.  et  corr.). 

VI.   I'\^S    l.TUAXGEllS. 

Carte  montrant  la  distribution  des  prin- 
cipaux dolmens  d'lrland<',  par  M. 
M\llGAIlEr    SlOKES,    p.      1-22,     pi.     XI 

(juillet,. 

Monnaie  d'or  aux  types  d'F.mporics,  par 
M.  ZOIIKL  DB  ZANCnOMZ,  p.  28-30, 
1  llg.  (juillet). 

Une  inscription  ibérlenne,  par  M.  Fuan- 
r.ois  LKNonMANT,  p.  31-32  (juillet). 

Das  Landi's  /i-ngliaus  in  Gratz,  par 
M.  F.-A.  MnocKiiMS,  p.  127128  (Blbl. 
par  M.  P.-('.ll^nl.^»  IloiiKr.T;. 

Notice    sur  l'état    actuel    des  ruine»  de 


TA  Iir.K    nF.S    MATIK  RF.  S. 


391 


Doclra,  par  M.    F.  Saski,  p.    lli-ll , 
pK  Xlll,  5  llg.  (août;. 

Nonvellos  inscri[)tioiis  de  Docléa,  par 
M.  HouEtiT  MowAT,  p.  7 '-SI  (août;. 

ExiMn|iles  de  pravuro  untiquo  sur  verre 
à  pro|ios  il(!  (|ii('l<nir's  fraiîiiieiiis  prn- 
venaiil  d.'  DuUc,  par  M.  II.  M., p.  280- 
300,  pi.  WIII,  11  11k.  (iiovi-iiilire,. 

Bulleliii  triiiiestricl  des  antiquités  afri- 
caiiies,  p.  l'J.'i  (Nouv.  et  corr.). 

Inscriptions  de  Cliemtou  (Siinittu)  Tuni- 
sie, par  M.  A. -II.  de  V.,  p.  2/|.J-2'i8 
(octobre). 

Les  listes  royales  éliiiopicnnes  et  leur 
autorité  liisiorii|Ui',  par  M.  E.  Diioui.n, 
P.9U-1I5  'août).  --  (sitilf),  p.  l.'-).j-172 
(septembre).  —  {suite),  p.  20l)-L'2/(, 
pl.  X.\  et  XXI  (octobre;. 

Kcole  américaiued'Athènes,  p.  2j'i^.\ouv. 
et  corr.). 

Vil.  i:iiM.i()(;nAiMiii:,  Li\(ii  istiqli: 

Bibliograpiiie,  p.  Gl-G/i  (juillet).  — p.  127- 


128  (aoat\  —  p.  100-192  'septembre). 
—  p.  2.'J/|-230  (octobre^.  —  p.  .170-383 
(décembre). 

Kludes  arcli('oloKif|ues,feiivre  posthume, 
par  M.  le  I)f  l'ii.  A.  Df.iiiiKn,  p.  254- 
255  (IJibl.  p.ir  M.  (j.  Phiiiiot). 

Cachets  d'oculistes  romains,  par  ,M.M.  A. 

IIÉIIO.N   riK    VM.I.EI  OSSK  et  II.  'l'illKENAT, 

p.. 570  378   (IJibl.  i)ar  M.  I'm  i,  I.ali.e- 

MlSI)). 

frinimurtalilé  de  1  Ame  ch<z  les  peuple» 
séuiitif|ues,  parM.  J.  IIai.kvy,  p.  ft'i- 
.03  fjuillct). 

Séduliusde  Liège,  par  M  .  Miniu  Pircnnk, 
p.  2.")o-2jG  (IJibl.  par  M.  A.  LoM.^osj. 

Lis  Bardes,  par  M.  H.  n'Aunois  dk 
Jt  iiAlwii.i.E,  p.  225-2'i2  (octobre;, 

La  poésie  alexandrine  sous  les  trois  pre- 
miers IHoléméi-,  par  M.  Auguste 
Co.NAT,  p.  378-383  (Bibl.  par  M.   Max 

COLL'CNON). 

nenseifinemenis  archéologiques  sur  la 
trat.sformaiion  du  C  guttural  du 
hitin  en  une  silUanie,  par  M.  M.  I)i:t.o- 
ciiE,  p.  301-315,  2  lig.  (novembre;. 


TABLE  DES  MATIERES 


LIVRAISON'   DE  Jl  ILLET 

I.  —  Carte   montrant  la   distriliufion  des   principaux  dolmens   d'Irlande 

par  MAiu;\nF.T  Stokes,  traduit  par  Emile  Ki'.nallt 1 

II.  —  Inscription  d'IIasparrcn,  par  M.  F.  Dksjardins 22 

III.  —  Monnaie  d'or  aux  types  d'Emporios,  par  M.  Zoiiel  vr,  Zangkoniz  ...       28 

IV.  —  Une  inscription  jbériennc,  par  M.  1' nA\çois  LENonMA\T 31 

V.  —  Le  Laocoon  ot  le  proupc   d'Atliéna   à    la    frise    de    Pergame,    j)ar 

M.  Aduii:.\  Wagnon 33 

Vi.  —  L'immortalité  de  l'âme  clicz  les  peuples  sémitiques,  par  M.  J.Halhv Y.  i/j 

Bulletin  mensuel  do  l'Académie  des  inscriptions  (mois  do  juin) 5.'j 

Société  nationale  des  antiquaires  de  France 'jG 

Nouvelles  archéologiques  et  correspondance 58 

Hibliograpliie 01 

Planches  XL  —  Carte  des  monuments  mégalithiques  de  l'Irlande. 
Xll.  —  Inscription  d'Ilasparren. 

L1VR.\IS0N  D'AOPT 

I.  —  Le  Laocoon  et  le  groupe  d'Atliéna  à  la  frise  de  Pergame  (deuxième 

article),  par  M.  AnniEN  Wagnon ti5 

II.  —  Notice  sur  l'état  actuel  des  ruines  de  Docléa,  par  iM.  Sa? ki 7i 

III.  —  Nouvelles  inscriptions  de   Docléa   (exploration  de   M.  Saski,,  par 

M.   RonEnT  Mowat '^ 

\\    _  La  plus  ancienne  inscription  latine,  par  M.  .Michel  Briai S2 

V.  —  Les  listes  roynlcs  •'•tliiopicnnes  et  leur  autorité  historique,  par  M.  L. 

DnoiiN ^9 

VI.  —  Découverte  d'une  épée  de  bronze  et  d'une  épée  gauloise  en   fer,    pir 

M.  Lkon  Morei IIG 

Bulletin  mensuel  de  l'Académie  des  inscriptions  (mois  de  juillet; ...  122 


394  UKVl'K    AHCHliOLOGIQUF.. 

Nouvelloj  arclicH>logiqucs  '  -"i 

Diblio(;raphio 1-7 

pLANciirs  MU.  —  Knviron»  do  DocK'a. 

XIV.  —  limcription  l.iiino  dp  Din'no». 
XV.  —  ncstauration  erronée  du  groupo  du  Laocoon. 


LIVIIAISON  I)i:  SKI'II  MlUti: 

I.  —  Le  Laocoon  et  le  proupe  d'AtliOnn  .\  la  frise  de  Pergame  (troisième 

aniclr).  par  M.  Adrien  Waoon l-'J 

U.  —  Noies  sur  les  mosaïques  chriiticnucs  de  l'Itulit',  par  .M.  KiG.  Mu.nti..     lil 
III.  —  Les  listes  royales  étliiopiennes  et  leur  autorité  historique  (deuxième 

article),  par  M.  K.  DnoiiN. ^ 1^^ 

IV    —  Sur  le  proiipo  dit  dos  l'arques,  au  fronton  oriental  du  Parlliénon,  par 

•M.   L.   DE  noNCii.MD .• 1"3 

V.  —  Kxploration  des  trois  tumulus  deKcrvern  en  Plozévet  (Finistère),  par 

M.  PAtL   DU  ClIATELLIER ^"^^ 

Bulletin  mensuel  de  l'Académie  des  inscriptions  (mois  d'août).. 185 

Société  nationale  des  antiouaires  de  France 187 

Nouvelles  arclléologiques *^^ 

Bibliographie ^^^ 

Planches  XVI IL  —  Mosaïque  de  l'abside  de  Saint-Clément. 

XIX.  —  Mosaïque  do  l'ancienne  tribune  de  Saint-Pierro. 


LIVI'.AIsOX   D(>(  lOIMH: 

I.  —  Le  Laocoon  et  le  groupe  d'Alliéna  à  la  frise  de  Pcrgamo  /quatrième 

ariicK'i,  par  M.  AcniKX  Wacnob 103 

11.  —  Les  listes  royales  itliiopicnncs  et  leur  autorité  liistorique  (troisième 

article),  par  M.  R.  DnouiN 207 

III.  —  Les  Bardes,  par  .M.  IL  d'Aiibois  de  Jiiiain ville :237 

IV.  —  Inscription  de  Cliemtou  (Siniitlu)  Tunisie,  par  M.  A.  Oklaitre 243 

Bulletin  mensuel  de  l'Académie  des  inscriptions  (mois  de  septembre)    2k9 

Société  nationale  des  untiqnaircs  de  Franco 330 

Nouvelles  archédlopiques  et  correspondance 2i"J 

Bibliograplii'-. 254 

Pla>ciiks  XVI.  —  Groupe  du  Laocoon. 

X\ll.  —  (;rou()i!  d'Alliéna.  Frise  de  Pergame. 
XX.  —  Monnaies  éthiopiennes. 
XXL  —  Les  diverses  écriture»  éthiopiennes. 


TAHLR    I)i:S    MATIKIIKS.  395 


i.i\i;.\i.s().\  i)i;  .\()Vi:Mi!iti: 

I,  —  i.c  Laocoon  ri  !*•  prrmpc  d'Allit'iia  h  la  ftisc  de  Tcrgamc  (ciiKiuifcme 

article,  par  M.  Adiiibn  Wagnon 2jH 

II.    —  Les  rois   do  Tcllo   et   la   période    arcliaii|iie  du   1  art  chaldéeii,    par 

M.  LÉON  Heuzkv 27) 

m.  —  Kxeniples  de  gravure  niiiiiiui-  sur  verre  (à  propos  de  quelque»  frag- 

itients  provenant  de  Dukie,  Monlénégro),  par  M.  noRKnT  Mowat..     280 
IV.  —  llenseignoments  .irclu'ologiqups  sur  la  transforniatioii  du  C  guttural  du 

latin  en  une  sifflante,  par  M.  M.  Dei.ociib 301 

Bulletin  mensuel  de  l'Académie  des  inscriptions  (mois  d'octobre). .     310 

Société  nationale  des  antiquaires  de  France 318 

Nouvelles  archéologiques 320 

I'LA>ciiKs  Wll.  —  Fragment  clialdéen  arclianiue. 

\X1I1.  —  Verres  gravés  découverts  à  Docléa. 

LIVIIAISOX  DE  DnCKMBllE 

I.  —  Le  Laocoon  et  le  groupe  d'Atliéna   à  la  frise  de  Pcrgame  (sixième 

article),  par  M    Adrien  Wagnon 321 

II.  —  Sceaux  hittites  on  terre  cuite,  appartenant  i  M.   G.    Sclilumbergcr, 

par  M.  G.  pEnnor. 333 

III.  —  Vases  d'Ialysos  (lettre  à  M.  Albert  Dumont),  par  M.  A.  S.  McnnAY..     3/i2 

IV.  —  Les  fouilles  de  l'Institut  archéologique  américain  à  Assos   (deuxième 

campagne.  —  1882),  par  M.  Thomas  W.  Liolow, 352 

V.  —  Note  sur  les  silex  du  terrain  tertiaire  de  Thenay  (Loir-et-Cher),  par 

M.  A.  Damodr 359 

Bulletin  mensuel  de  l'Académiedes  inscriptions  (mois  de  novembre)  363 

Société  nationale  d^s  antiquaires  de  France 365 

Nouvelles  archéologiques  et  correspondance 368 

Bibliographie 377 

Planche  XXIV.  —  Sceaux  hittites  en  terre  cuite. 

Table  alphabétique  par  noms  d'auteurs 385 

Table  méthodique 389 


FIN. 


Paris.  —  Imp.  l'iLLiii  et  Dumoulin,  3,  rue  des  Grands-Auguslio?» 


Revue  Archéologique    1882, 


CARTE  DES  MONUMENTS  MÉGALITHIQUES  DE  L'IRLANDE 
DRESSÉE  J'APHÈS  LES  NOTES  DE  MISS  MARC.  STOKES 


REVUK   AnCIlKOLOOK^LK,    |8rt2.  1^1.    XII. 


FIAMEN'ITEM 
DVMVIRQV^STCR 

PACiaMAGISTER 
V£PVS/\DAVCVS 

TVMLECATOMV 

NEREFVNCTV5 

PRONOVEMOPTI 

NVITPOPVLIS'SE 

IVXEREGALLOS 

VRBERFDVXCE 
MIOPACIHANC- 

DEDICATARAH 


INSCRIPTION    DH  ASPA  R  R  K  N 
(Basses- Pvrcnccs 


I '» (•  V i II-  Ai'i'Itoulo^'Hiui'    1882 


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PLAN  DES  RUINES  DE  DOCLEA 


ENVIRONS    DE    DOCLEA 


ovuG  Archéologique  188^ 


\'l.  XIV 


Imp-Lemerciep  &  C'.'^Paris. 


INSCRIPTION    LATINE    DE    BUENOS 


Ki:vi;i:  AR^.}^KOLOGIQ^I^.  18S2. 


l'I.  XV 


\S'\JT^iJ^ 


A\-e'f4ér  tA, 


RtSTAURATION    ERRONEE    DU     GROUPE    DE    LAOCOOX. 

A.  B.  Pose  défectueuse  du  bras  droit  de  Laocoon  et  de  son  fils,  dus  à  MontorroH. 


Revue  Archéoloôiq^ue  1882. 


PL  XVI 


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RKVUI'   ARCHÉOLOGIQUE.   i88; 


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MONNAIES   ETHIOPIENNES. 


Revue  Archéologique    1882. 


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^ES  DIVERSES  ECRITURES  ÉTHIOPIEN N£.S  (saisies Voyolu-s, 


lÙ-l'lll-       lll  lllU)l<Jt/ll/llf    ,    ll'HÎ  J 


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î^i-lio'?'  iJ'u'ardin 


Imp   Eiidts 


FRAGMENT    CHALDEEN    ARCHAÏQUE 
^  Fouilles  de  M  de  Sarzec.) 


Revue  Archéolo6ique  1882. 


PLxxm. 


VERRES    GRAVÉS   DÉCOUVERTS  A  DOCLÉA 


Revue  Archéologique  loo/ 


la  JUllV. 


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SCEAUX  EN  TERRE  CUITE 
Appartenant  à  M.  G.  Schl'jm'berter 


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