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Full text of "Revue belge de philologie et d'histoire. Belgisch tijdschrift voor philologie en geschiedenis"

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/ 


REVUE    BELGE 


PHILOLOGIE    ET   D'HISTOIRE 


PREMIÈRE   ANNÉE 
1922 


REVUE   BELGE 


DE 


PHILOLOGIE  ET  D  HISTOIRE 

RECUEIL   TRIMESTRIEL 

PUBLIÉ   PAR   LA 

SOCIÉTÉ  POUR  LE  PROGRÈS  DES  ÉTUDES  PHILOLOGIQUES  &  HISTORIQUES 


TOME   r 


1922 


BRUXELLES 

LES    ÉDITIONS    ROBERT   S  AND 
86.  Rue  de  la  Montagne 

1 92-2 


p 

^^ 
t.  / 


Notes  sur  deux  passages  d'Euripide 


L'Oracle  de  la  Médêe 

Le  roi  d'Athènes,  Egée,  n'ayant  pas  d'enfant,  s'est  rendu 
à  Delphes  pour  demander  à  Phébus  comment  il  pourra 
obtenir  une  postérité.  C'est  le  motif  traditionnel  qui  con- 
duit au  même  oracle  Xuthus  dans  Vlon  et  Laius  dans  les 
Phéniciennes.  A  son  retour,  le  pèlerin  s'arrête  à  Corinthe 
et  y  rencontre  Médée  qui  l'interroge  sur  son  voyage  (674  et 
suiv.)  : 

MÉDÉE,  Eh  bien!  que  t'a  dit  Phébus  sur  la  naissance 
d'enfants? 

Egée.  Un  oracle  dont  l'interprétation  dépasse  la  sagesse 
humaine. 

MÉDÉE.  M'est-il  permis  de  connaître  la  réponse  du  dieu? 

Egke.  Oui,  d'autant  plus  qu'elle  exige  un  esprit  ingé- 
nieux. 

MÉDÉE.  Quel  est  donc  l'oracle?  Dis-le,  s'il  m'est  permis 
de  l'entendre. 

Al.    'AaKoO  |ue  TÔv  TrpouxovTa  |uri  XûaaiTTÔba, 
Mi].  TTpiv  âv  TÎ  bpâ(T];iç  r\  tîv'  èEiKJ^  xQàvu;  680 
Al.    TTpiv  âv  TTttTpujav  auGiç  écTTÎav  |liô\uu. 
Ml].  Zù  b'ibç  TÎ  xpiî^ujv  Ti'ivbe  vauaroXeîç  x^ôva; 

Egée  explique  ensuite  sa  présence  à  Corinthe  en  disant 
qu'il  se  rend  à  Tré/ène  pour  y  demander  au  sage  roi  Pit- 
thée  l'interprétation  de  la  réponse  du  dieu. 


I,.     l'AHMKNTIEH 


Voici  le  commentaire  du  scholiaste  au  sujet  de  l'oiiicle 
(V.  (>79)  : 

XpncTiLiôç  ô  bo6eiç  tlù  AÎYeî  oùtôç  êCTtiv. 

'AaKOÛ  TÔv  TTpoùxovTa  TTobdova,  cpépiaie  XaiLv, 
ixï]  Xûaijç,  TTpiv  Youvôv  'AGnvaioiv  àcpiKéCTGai. 

'AcTKGO    OUV    TIÎÇ  YttCTTpÔÇ*  TTÔba    bè    t6  jUÔpiOV,    TTapÔaOV  LUC  ô 

TTobeùjv  Toû  daKOÛ  Tipoéxei.  Aé^ei  ouv  on  lxpr]aé  |uoi  )Liri  cruveX- 
6eîv  èrépo!,  -rrpiv  èmPnvai  inç  TraTpîboç.  Toûto  'fàp  aiviTteTai, 
ÔTTep  aÙTÔç  où  cruviticriv.  'Aokôv  toîvuv  Xéyei  tov  irepi  iri  j  "ça- 
arépa  tôttov.  'ApxiXoxoç  (fr.  7!2)'  «  Kai  Trecreîv  bprjOTriv  ètt'  ddKÔv 
KÙTTÎ  -faoïpi  Ya(^Tépa  7TpoO"PaXeîv  jaiipoùç  t€  MnpoîÇ  »<  bp/iOinv 
XÉYujv,  oia  bpùoavTÙ  ti.  TTobeûjva  bè  eiubOadi  XéYeiVTÔ  toû  ùvbpôç 
afboîov. 

Sur  le  V.  681  :  é'uuç  <cxv>  èv  ti]  Traipibi  Yévuj|uai.  'EEéxovTa 
bè  .uûXiOTa  èv  crubuaii  TÉcro'apa,  KecpaXi'i,  x^îP^Ç'  aîboîov,  TTÔbeç. 

Le  scholiaste  entend  donc  que  àcTKÔç,  «  outre»,  a  ici, 
comme  dans  un  passage  d'Arcliiloque,  le  sens  de  -{aotrip, 
«  ventre  »,  et  que  TTobeubv,  proprement  «  cou  de  l'outre  », 
désigne  le  membruni  virile.  L'oracle  défendrait  ainsi  à 
Egée  davoir  commerce  avec  une  femme  avant  d'être  de 
retour  dans  sa  patrie. 

Plutarque,  Thésée  3,  donne  le  même  sens  à  l'oracle  et  il 
Je  cite  comme  il  suit  : 

'Aokoû  t6v  TTpoùxovTa  Tiôba,  |uéYot  cpépTaie  Xaiûv, 
|uf-]  Xûaiiç  Tipiv  bniuov  'ABnvéuuv  eicraqpiKéo"9ai. 

Apollodore,  Bibliothèque,  III  1o,  6,  "2,  coïncide  avec  J^lu- 
tarque  pour  le  premier  vers  (TTÔba,  et  non  TTobctovai  et  offre 
au  second  la  variante  Trpiv  èç  dKpov  'Aôiivaiuuv  àcpÎKiicii.  Les 
manuscrits  <le  Tzetzès,  Ad  Lycophr.,  v.  494,  p.  548,  ont 
sinq)lemcnt  nôba  ou  TTÔba  ôv  ou  Tiôba  u).  CA.  aussi  Anth. 
Pnlui.XlV,  loO. 

Il  faut  retenir  de  là  que  la  version  TTobdova  n'a  pour 
elle  d'autre  garant  (pie  le  scholiaste  :  ce  grammairien  à 
l'esprit  obscène,  en  mettant  l'oracle  en  vers,  l'y  a  intro- 
duite au  lieu  d(;  TTÔba  pour  mieux  faire  concorder  le  texte 
d'Euripide  avec  l'interprétation  (pi'il   inventait.   Au  sur- 


DEUX    PASSAGES    d'eURIPIDE  3 

plus,  si  le  terme  TTobâova  avait  figuré  anciennement  dans 
l'oracle  et  s'il  avait,  comme  le  veut  le  sclioliaste,  désigné 
couramment  le  membriim  virile,  il  n'eût  point  été  besoin 
d'un  esprit  ingénieux,  Œocpri  cppr|v,  pour  deviner  l'énigme. 

Il  y  a  lieu  de  s'étonner  de  ce  que  l'interprétation  du 
sclioliaste  ait  pu  se  maintenir  depuis  l'antiquité  jusque 
dans  les  dernières  éditions  modernes.  Elle  est  d'abord  en 
contradiction  avec  le  caractère  général  des  réponses  du 
dieu,  qui  n'a  pas,  que  nous  sachions,  l'habitude  de  choi- 
sir ses  j)lirases  à  double  entente  dans  un  pareil  genre 
d'images.  Elle  est  aussi  tout  à  fait  indigne  du  ton  et  du 
style  de  la  tragédie,  et  elle  eût  apparu  comme  une  vulgarité 
sans  exemj)le  sur  la  scène  du  drame.  Aristophane  lui-même 
eût  été  le  premier  à  tancer  à  ce  sujet  le  poète  qu'il  surveil- 
lait de  si  près. 

A  ma  connaissance,  M.  P.  Corssen  est  le  premier 
moderne  qui  ait  eu  le  mérite  de  chercher  à  expliquer 
l'oracle  par  une  autre  voie  (Berliner  philolog-ische  Wochen- 
schrift,  1913,  col.  92  sq.) 

Selon  lui,  le  mot  dO'KÔç  est  emploj^é  dans  un  sens  qu'il  a 
plus  tard  perdu,  a  Littéralement,  l'oracle  n'a  rien  dit 
«  d'autre  que  le  symbolon  pythagoricien  :  tù  CTipubjuaTa  àei 
«  auvbebeiuéva  ëxeiv  (Diogène  Laërce  VIII,  17).  Hippolyte 
(c  {Philosoph.  VI,  27),  qui  donne  le  symbolon  sous  la 
((  forme  :  tôv  ŒTpouiuaTÔbeaiuov  5fi(Tov,  ajoute  l'explication  : 
«  èîTei  ci  ôboiTTopeîv  juéXXovTeç  eîç  6ép|ua  5e(j)Lioûcri  là  îjuÛTia 
((  aÙTiûv  TTpôç  èTOi)aaaiav  ti^ç  ôboû.  Le  fait  qu'anciennement 
«  le  terme  àcJKÔç  n'était  pas  seulement  employé  pour  une 
«  outre  à  vin,  mais  aussi  pour  un  sac  de  cuir  où  l'on  empor- 
«  tait  en  voyage  des  effets  de  toute  sorte,  est  prouvé  par 
a  V Odyssée,  k,  19  : 

bûjKe  hé  )u'  èKbeîpaç  dcTKÔv  Poôç  èvveuûpoio, 
ëvGa  bè  PuKTcxuuv  àvé|uaiv  Kaiébiicre  Ké\eu9a. 

«  Autrement  en  effet,  les  compagnons  d'Ulysse  ne  vien- 
«  draient  pas  à  penser  qu'Éole  y  a  mis  pour  lui  des  objets 
ic  d'or  et  d'argent.  L'oracle  ordonnait  donc  à  Egée  de 
K  retourner  directement  à  Athènes,  sans  s'arrêter  en  che- 
(c  min.  Egée,  ne  comprenant  pas  cet  ordre  et  allant  deman- 


4  L.    PARMENTIER 

<c  der  à  Pittliée  le  sens  de  l'oracle,  pécha  contre  lui  en 
«  s'efforçant  de  l'accomplir.  » 

Il  ne  m'a  pas  été  possible  de  parcourir  la  Berliner  philo- 
logische  Wochensclirift  depuis  1914,  mais  je  crois  bien 
que  la  plupart  de  ses  lecteurs  auront  trouvé,  comme  moi, 
l'explication  de  M.  Corssen  inacceptable.  Une  outre,  àaKÔç, 
est  bel  et  bien  une  outre,  et  elle  a  pour  destination  de  rece- 
voir du  liquide,  même  si  occasionnellement  il  arrive  au 
poète  d'imaginer  une  outre  énorme,  faite  de  la  peau  d'un 
bœuf,  une  outre  épique  où  sont  enfermés  les  vents,  comme 
dans  un  ballon.  Chez  Homère,  la  vraie  outre  est  toujours 
en  peau  de  chèvre,  aiVeioç  àanôç  r2i4.  Z:  78.  1 196  ;  elle  sert  à 
contenir  du  vin  ou  de  l'eau,  et  le  sac  destiné  à  recevoir  les 
autres  provisions,  KÛjpuKOç  (plus  tard  GuXaKOç)  en  est 
expressément  distingué,  e257.  i213.  Chez  Euripide,  daKÔç 
ne  se  dit  que  d'une  outre  à  vin,  Cyclope  143-161.  510-529, 
Electre  oll.  D'autre  part,  le  rapprochement  avec  le  pré- 
cepte pythagoricien  est  illusoire.  Celui-ci  recommande 
d'être  toujours  préparé  à  partir,  d'avoir  toujours  ses 
paquets  prêts  ;  il  ne  défend  nullement  de  s'arrêter  ni  d'ou- 
vrir son  sac  au  cours  du  voyage. 

Il  n'importe  guère  ici  de  savoir  si  le  mot  irobctûv,  «  cou 
de  l'outre  lié  par  une  courroie»  (Hérodote,  121,4.  Pol- 
lux  II,  196)  a  été  employé  quelquefois  pour  désigner  le 
membrum  virile.  En  effet,  le  mot  de  l'oracle  d'Euripide  est 
-iTÔba,  et  il  n'y  a  pas  d'exemple  que  ttoùç  soit  jamais  pris 
dans  un  sens  obscène.  C'est  en  partant  du  mot  îtoûç,  et  par 
une  tout  autre  voie  que  M.  Corssen,  que  j'essaierai  de 
trouver  la  solution  de  l'énigme. 

Une  interprétation  des  vers  d'Iùiripide,  qui  parait 
simple  à  première  vue,  serait  celle-ci  :  «  Ne  délie  pas  le 
cou  saillant  de  l'ontre.  c'est-à-dire,  ne  bois  pas  ».  Mais  si 
Hgée  ne  s'en  -satisfait  ])as,  c'est  évidemment  que  ttgOç  ne 
lui  semble  pas  ijouvoir  s'entendre  comme  un  substitut  de 
TTobeujv.  Et  il  faut  bien  que  cette  synonymie  n'existe  pas; 
sinon,  il  n'y  aurait  en  réalité  ni  piège,  ni  énigme.  Au 
surplus,  avec  un  tel  sens,  ra<ldition  inutile  de  TrpouxovTa 
resterait  inexpliquée. 

Kuripide  faisait  représenter  sa  pièce  devant  un  peuple 
de  marins;  si  ceux-ci  ont  essayé  d'entendre  l'oracle  dans 


DEUX    PASSAGES    D  EUKIPIDE  O 

un  sens  imagé,  les  tropes  qui  se  sont  présentés  le  plus 
naturellement  à  leur  pensée  sont  ceux  qui  appartiennent  à 
la  langue  nautique.  Le  mot  ttgùç  désigne  pour  les  marins 
l'extrémité  inférieure  du  cordage  que  l'on  attache  pour 
tendre  la  voile  et  recevoir  le  vent  (bouline).  Cf.  Euripide, 
Oreste  707.  Sophocle,  Antigone  715,  etc.  Mais  ce  sens, 
qui  s'offre  si  facilement,  ne  peut  s'accorder  ici  ni  avec 
TTpouxovTa.  ni  avec  dcTKÔç. 

Je  crois  que  la  solution  de  l'énigme  gît  avant  tout  dans 
l'acception  à  donner  au  mot  dcTKÔç.  Pour  les  marins 
d'Athènes,  il  suggérait  un  sens  métaphorique  très  précis. 
Ils  désignaient  par  le  terme  dOKUJiua  la  gaine  de  cuir  par 
laquelle  passait  la  hampe  de  l'aviron  des  rameurs,  et  qui 
rappelait  plus  ou  moins  la  forme  d'une  outre  dont  le  goulot 
serait  tourné  vers  la  mer.  L'ascome,  dit  Alphonse  Willems, 
est  une  «  outre  ou  bourse  de  cuir  adaptée  au  sabord  de 
nage,  et  enserrant  la  hampe  de  l'aviron  pour  empêcher  la 
lame  de  pénétrer  dans  le  navire  »,  Aristophane,  Achar- 
niens  97,  où  le  scholiaste  explique  :  d(TKUj)ua  bè  ô  tudç  ô 
(Juvéxuuv  Triv  KiiiTiriv  Trpôç  tlù  crKa\|ULÙ. 

Il  devait  naturellement  y  avoir  dans  l'oracle  un  piège, 
et  il  réside  dans  l'emploi  d'dcTKÔç  au  lieu  du  terme  ordinaire 
àoKVjjJLa.  Piège  peu  grave  d'ailleurs,  et  ne  contrevenant  pas 
à  ce  qu'on  peut  appeler  les  règles  loyales  du  Jeu  oraculaire. 
Il  est  presque  impossible  que  les  marins  n'aient  pas 
employé  à  l'occasion  le  mot  dcTKÔç  comme  synonyme  d'do"- 
Kuu)ua.  Au  surplus,  le  verbe  signifiant  «  munir  un  vaisseau 
d'dŒKubiuaTa  »  se  dit  simplement  d(TKÔ0)uai. 

Le  sens  d'dcTKÔç  ainsi  établi,  il  devient  évident  que 
TTÔba  signifie  l'aviron  qui  fait  marcher  le  navire,  et  l'on 
comprend  ainsi  l'indication  contenue  dans  TTpoùxovTa  :  c'est 
l'aviron  attaché  à  son  bord  et  qui  fait  saillie  hors  de 
l'daKÔç  vers  la  mer. 

L'oracle  disait  donc  :  Xe  détache  pas  l'aviron  de  son 
bord,  ne  cesse  pas  de  ramer,  c'est-à-dire,  sans  métaphore, 
voyage  sans  interruption  jusque  chez  toi.  On  reconnaît  là 
immédiatement  un  genre  d'interdiction  dont  le  folklore 
offi'e  fréquemment  des  exemples  (ne  pas  se  retourner,  ne 
pas  regarder,  etc.). 

Je  crois  bien  que  l'énigme  a  été  facilement  comprise  par 


b  I..     PAHMKNTIEli 

les  coQtemporainsd'Kuripide,  et  que  nul  n'a  songé  à  l'inter- 
prétation obscône  où  plus  tard  devait  se  complaire  l'imagi- 
nation d'un  compilateur  ctranger  à  la  vie  athénienne. 

Au  surplus,  Euripide  a  mis  son  public  sur  la  voie,  et  il 
est  étrange  qu'on  ne  s'en  soit  pas  aperçu.  Médée,  en  sa 
qualité  de  Œoqpfi  qppiîv,  a  dû  rapidement  comprendre  l'oracle. 
Interrompant  au  v.  080,  elle  demande  : 

TTplv  âv  ïi  bpâ(T),iç  r\  tîv'  èEÎKi]  \Qàva; 

Elle  voit  donc  tout  de  suite  qu'il  s'agit  d'un  mode  de 
voyage  imposé  à  Egée.  Celui-ci  répondant  :  a  avant  d'être 
rentré  chez  moi  »,  elle  réplique  vivement  : 

lu  b'ujç  TÎ  xP'î^^ujv  Tr|vbe  vauŒToXeïç  x^ôva; 

«  Eh  bien!  qu'as-tu  besoin  de  venir  naviguer  dans  ce 
pays?  »  Le  mot  vauaToXeîç  ici  employé  à  dessein  continue 
la  métaphore  de  l'oracle  {^ly]  TTatiou  vauaToXuùv  Trpîv  ktX  ).  et 
indique  avec  une  certaine  ironie  que  Médée  s'est  rendu 
compte  immédiatement  de  la  faute  d'Egée.  Mais  comme 
celui-ci,  en  s'arrètant  à  Corinthe,  a  déjà  contrevenu  irré- 
médiablement ;i  l'oracle,  la  subtile^personne  juge  sagement 
qu'il  est  inutile  de  l'indisposer  en  lui  expliquant  sa  faute. 
E,lle  ne  parlera  plus  de  l'oracle,  bien  qu'elle  laisse  entendre 
en  quelque  manière  à  Egée  que  le  but  du  pèlerinage  est 
manqué,  lorsqu'elle  lui  promet  (717-718)  de  le  rendre  père 
par  les  moyens  de  son  art  magique. 


II 

Ion.   i')(')o. 

Xuthus.  sortant  du  sanctuaire  d'Apollon  Delphien  à  qui 
il  est  veuu  demander  un  enfant,  rencontre  le  jeune  Ion,  et 
conformément  à  l'oracle  du  dieu  il  le  salue  comme  son  fils. 
Lorsqu'il  s'est  fait  expliquer  cette  paternité  inattendue,  le 
premier  élan  de  son  ccrur  pouss(^  Ion  à  demander  (jui  est 
sa  mère  (o40).  Xuthus  doit  avouer  qu'il  ignore  le  nom  et  la 
condition  de  la  jeune  Delphienne  qu'il  a  jadis  séduite  pen- 


DEUX    PASSAGES    D  EURIPIDE  ' 

daut  les  fêtes  de  Bacchus.  Ion,  déçu,  exprime  modérément 
sa  joie  de  retrouver  son  père,  et  n'a  d'émotion  vraie  qu'en 
revenant  à  la  pensée  de  sa  mère,  avec  cette  invocation  tou- 
cliante  qui  termine  le  dialogue,  568-565  : 

^Çl  cpiXil  jU^Tep,  ttôt'  dpa  Kai  aôv  ôijjoiuai  béjuaç; 
Nûv  TToGô)  ae  juaXXov  r|  irpiv,  t^tiç  eï  ttot',  eîcTibeîv. 
'AW  ïauuç  xéGvriKaç,  iiiueîç  b'oùbèv  âp  buvaî)ue0a. 

Je  cite,  telle  que  la  donne  le  manuscrit,  la  fin  gâtée  du 
dernier  de  ces  trois  vers.  Je  ne  discuterai  pas  les  correc- 
tions généralement  admises,  aucune  ne  présentant  un  sens 
satisfaisant  (oubèv  âv  buvai'iueGa  —  oùbèv  dp'  6vai|ue0'  dv,  etc.). 

En  changeant  une  seule  lettre,  ce  qui  est  à  peine  une  cor- 
rection, je  lirais  simplement  : 

'AW  i'cruuç  léÔvnKaç,  njueîç  b'  oùb'  ôvap  buvaijueG'  dv. 

(c  O  ma  mère  chérie,  quand  donc  verrai-je  aussi  ton 
visage?  Maintenant  plus  qu'auparavant,  qui  que  tu  sois,  je 
désire  te  voir.  Mais  peut-être  es-tu  morte  et,  même  en 
songe,  je  ne  le  pourrais  pas.  » 

Ainsi  se  termine  par  un  cri  d'une  sentimentalité  exquise 
la  scène  où  le  pur  adolescent  nous  a  fait  deviner  son  âme 
méditative  et  rêveuse. 

L.    PAIUrEXTIER 


Xénophon 

Hellexika,  I,  4,   13-17. 


L'interprétation  d'an  texte  renfermant  quelques  «  cru- 
ces  »  ne  peut  raisonnablement  fournir  un  prétexte  pour 
faire  un  examen  critique  détaillé  des  méthodes  employées 
pour  l'établissement  de  ce  que  l'on  est  convenu  d'appeler  : 
les  éditions  critiques  modernes  des  textes  classiques.  Qu'il 
nous  soit  toutefois  permis  de  remarquer,  d'abord  que  le 
«  stemma  »,  parfois  bien  compliqué,  que  l'on  dresse  en  vue 
d'illustrer  la  filiation  des  divers  manuscrits  d'un  auteur 
ancien,  peut  généralement  se  défendre  aisément  pour  le 
dernier  et  l'avant-dernier  degré,  mais  qu'au-delà  du 
troisième  degré  nous  voguons,  neuf  fois  sur  dix.  dans  la 
pure  fantaisie;  ensuite,  qu'en  fait,  une  fois  la  valeur  pri- 
mordiale d'un  codex  établie,  l'éditeur  du  texte  s'en  tient 
rarement  à  cette  source  de  la  tradition  ;  devant  une  leron 
qu'il  croit  meilleure,  bien  que  fournie  par  une  source  qu'il 
a  lui-même  démontré  être  moins  pure,  il  n'hésite  pas  à 
«  corriger  »  son  texte  de  base  ;  même,  lorsqu'il  se  trouve 
devant  un  passage  qu'il  ne  comprend  pas  par  suite  de 
quelque  difficulté  —  que  celle-ci  soit  «  du  domaine  des 
realia,  de  la  pure  logique,  de  la  grammaire  ou  de  la  sty- 
listique ))  (^),  peu  importe  —  il  déclare  le  passage  corrompu 
et  cherche  à  le  corriger;  car  «  c'est  un  devoir  pour  le 
lecteur  et  surtout  pour  l'éditeur  d'établir  les  altérations 
du  texte  et  de  chercher  à  les  réparer  »  (-),  au  besoin  par 


fi)  Th.  Bikt  :  Krilifc  und  Hermcneullk  clc,  Miiiiclicii,  li)i:5,   |>.  l:2i  aiaiid- 
bucli  (VIvv.  Millier,  1,  3). 

(•')  Th.  Bikt:  op.  cit.,  ii.  l-2i. 


10  TH.    I.KFORT 

(les  conjectures.  Quel  que  soit  le  jugement  que  l'on  porte 
sur  la  valeur  de  cette  méthode,  il  est  difficile  de  ne  pas 
avouer  que  l'on  obtient  par  elle  un  texte  nouveau,  ou  plus 
exactement,  une  recension  nouvelle  du  texte,  plutôt  qu'un 
texte  critique.  Kt  ceci  parait  d'autant  plus  vrai  que  par  la 
divination  et  les  corrections  qui  en  sont  le  fruit,  on  intro- 
duit dans  la  place  le  subjectivisme  avec  toutes  ses  consé- 
<iuences  (*). 

Xous  voudri(ms  montrer  par  un  exemple  pris  entre 
beaucoup  d'autres  que  le  texte  des  manuscrits  —  les  fautes 
matérielles  d'orthographe,  de  coupure,  etc.,  mises  natu- 
rellement à  part  —  est  habituellement  aussi  intelligible 
que  les  corrections  faites  ou  proposées.  Nous  avons  choisi 
un  passage  des  Hellenika,  difficile  et  fort  remanié  par  les 
éditeurs  ;  nous  donnons  le  texte  du  codex  B  reconnu  comme 
le  meilleur  témoin  delà  tradition  textuelle  (-);  dans  une 
colonne  parallèle  prendront  place  les  leçons  des  autres 
codices  aux  passages  modifiés;  et  dans  une  autre  colonne 
les  corrections  i)roposées  ou  admises  par  Keller  dans  son 
édition  critique-^).  11  paraît,  en  effet,  superflu  d'étaler  toutes 
les  corrections  proj^osées  par  les  divers  auteurs  d'éditions 
classiques;  car  cet  ensemble  n'importe  pas  à  notre  but  et 
n'aurait  tout  au  plus  qu'un  intérêt  rétrospectif.  Notre 
démonstration  sera  très  simple  puisqu'elle  se  contentera 
de  mettre  sous  les  yeux  du  lecteur  notre  manière  de  com- 
prendre le  passage  avec  les  justifications  nécessaires 
placées  en  note.  La  conclusion  qui  se  dégagei-a  d'elle-même 
de  l'examen  de  ce  passage  ne  sera  pas  formulée  pour 
éviter  le  reproche  de  précipitation  fait  à  l'auteur  du 
«  ab  uno  disce  omnes  »,  bien  que  nous  estimions  que  l'adage 
soit  en  l'occurrence  rigoureusement  applicable. 


(')  (^'llc  iiiftliddc  :iii  fiPiid  repose  sur  uno  péliliun  de  principe  :  l'usiigc  de 
lii  lan},'ue  a  clé  élaldi  par  les  textes,  ol  l'on  corrige  les  textes  en  vertu  de 
l'usage  de  la  langue. 

(-)  C'est  le  l'ari.iiriits.  \i;\H  (autreinis  Collirrninis  VM)-!);  début  <lu 
XIV  .siècle. 

(•')  0.  Kki.i.kii  :  Xe/iop/iiDi/in  /lishnin  (jrdi'id,  éd.  luaioi-,  Leip/ig  1890. 
p.  \xv,  doniM'  le  laliIcMii  ou  sienuna  de  la  lilialidti  des  rnanuscrils  des  llell»''- 
iii<iues. 


XENOPHON 


11 


AuliTS  codd. 
KaTttTrXéovTOç   b'aÙTOÛ   (Alcibiade) 

ô  Te  èK  Toû  TTeipaïujç  Kai  ô  èK  toO 
dŒxeuuç  oxXoç  nGpoîcreii  Trpôç  mç  vaûç, 
QavjJLÛlovTeq  Kai  ibeîv  Pou\Ô|li€voi  tôv 
'AXKiPidbiiv,  XéYOvreç  ôti,  oi  |uèv  ujç 
KpÛTKJTOç  ei'ri  tûjv  ttoXitûjv  Kaî  môvoç 
dTTeXoYi'lOn  UJÇ  où  biKaiuuç  qpÙYor  êtti- 
PouXeuGeiç  5è  ùttô  tûjv  ëXaiiov  èKeivou 
buvaiuévujv  )aox6iipÔTepd  Te  XeYÔvTuuv 

Ktti  TTpÔÇ  TÔ    aÙTÛJV    l'blOV    KépbOÇ   TTOXl- 

TevjôvTuuv,   èKeîvou    b'àei    TÔTe    koivôv 

aùEovTOç  Ktti  àTTÔ  tûjv  aÙTOÛ   Kai  dirô   ^ù^oq  b.c. F. 

TOÛ  TfjÇ   TTÔXéujÇ    buvÔTOU"  èGéXoVTOÇ  bè     aÛToOM.D.V. 

TÔTe  KpivecjGai  Trapaxpiîua  tiîç  aiTÎaç 
dpTi  Y6Yevïi|uéviiç  ujç  l'icrePiiKÔTOç  eîç  Td 
,uu(TTiîpia,  UTTepPaXXô|uevoi  oi  èxBpoi  tô 
boKOÛvTtt  bÎKaia  eivai  dTTOVTa  aÙTÔv 
è(JTépi"|crav  tjiç  TtaTpiboç*  èv  uj  xpôvuj 
UTTÔ   d|uiixctviaç   bouXeùuuv   iivaYKdcrGr) 


hellci'. 


OTl 

Ions  les  mfi. 

àTr€\oYiî6r| 

loiis  les  mfi, 
excepté  F  : 

ÙTTriYYéXOri- 

aÛTiûv  V. 

b'...T6Te 

U.CP.M.D.V. 


[àîreXoYnôri 

d)ç]f-i 


aÛTuJv  (■*) 
àe'i  TÔ  K.  (3) 

aÛTou  (■') 


(')  Y  a-t-il  plus  de  motifs  de  siipprinier  ici  ôxi  (lue  dans  les  jilirase'r  nù  il 
iiitrudiiit  le  discours  direct  ou  In  proposition  iniinitive  après  un  rerinttn 
ilerlarandi  où  oTi  (comme  ici  aussi  i  na  plus  guère  que  la  valeur  de  nos  deux 
points  (:)?  Il  sert  donc  d'introducteur  c/nicra/  du  discours. 

(-)  àTTe\oYtl6n<  conlirnié  indirectement  par  la  leçon  de  F,  est  un  passif  rare, 
peut-être  unique;  mais  ce  n'est  pas  le  seul  mol  attesté  chez  Xénophon  seule- 
ment (cf.  I..  Gaitier:  La  ttivgite  de  Xrnop/ion,  Genève,  1911.  p.  1.53-i."5.'5). 
L'emploi  de  l'indicatif,  mode  de  la  i-éalité,  marquerait  donc  (jue,  dans 
l'assemblée  qu\  décida  de  surseoir  au  jjrocès  des  Hermocopides  pour  ne  pas 
retarder  l'expédition  de  Sicile,  seul  Alcibiade  aurait  été  l'objet  d'un  rapport 
ou  au  moins  d'une  défense  concluant  à  sa  non-culpabilité. 

(3j  b(è)  doit  être  maintenu  ;  il  introduit  un  deuxième  membre,  et  correspond 
à  émPouXeueeiç  et  à  éGeXovToç  bè...;  le  premier  niend)re  eTTiPouXeuBeiç... 
était  en  construction  adjeclive.  la  succession  des  trois  génitifs  normaux 
buvaiuevujv,  Xcy^vtujv  et  ttoXitcuôvtujv  a  mis  dans  l'oreille  de  Xcnoplion  le 
ton  «génitir»  si  l'on  peut  ainsi  dire;  c'est  ainsi  cpie  le  deuxième  membre,  au 
lieu  de  continuer  avec  la  construction  initiale,  inti'oduit  le  génitif  absolu  ; 
construction  continuée  par  le  troisième  membre  éOéXovTOç.  Te  enclilicpie 
est  certainement  surpienant  s'il  a  le  sens  copulatif;  mais  si  [)ar  hasard  il  ctail 
le  siu'vivant  de  Te  d'Homère  B  Î19'2  et  H*  48  il  vaudrait  la  peine  d'être  remarque; 
la  langue  de  Xénophon  n'est  |)as  incapable  (t  priori  de  pareille  surprise. 

{*)  Cet  emploi  peu  conforme  à  la  granunaire  me((rniii)te  est  une  simple 
rontcDiiintdlo  du  discours  direct. 


12 


TH.    LEFORT 


B.C.F.M.D.V. 

TOIOÛTOÇ... 
OlÔOTTep 

B.C.F.M.D.V. 


^èv  6epaTTeùeiv  toùç  èxôicttouç,  Kivbu- 

veùujv  àei  Trap  'éKàcTTnv  l'iuépav  àîTO- 

XioQav  TOÙÇ  5è  oikêiotùtouç  TToXiiaç 

T€  Ktti  (JUYTÊveîç  xai  iriv  ttôXiv  ocTTacTav 

ôpuùv  èEa|uapTdvou(Tav,  oùk  ei'xev  ôttuuç 

uucpeXoiiT  qpuYi), âTreipf ô|aevoç.  oùk  ëcpa- 

(jav  bè  Tujv  oïujvTTep  aÙTOç  ôvtujv  eîvai 

Kaivuùv  beîcGai  TTpaYiucJtTUJV  oùbè  jneta- 

aT(i(Teujç"  ÙTTctpxeiv  yàp  èk  toû  brmou   |uèv  y«pC(') 

éauTiî)    |Lièv   Tuùv    le   i'tXikiuutuùv  rrXéov        éauTôi 

exeiv   TUÙV  Te   TipecpuTépiuv   /un   è\aT- 

T0Û(j6ai,  Toîç  b'aÙToO  èx6poîç  toioûtoç 

boKeîv  eîvai  oiôaTiep  TrpÔTepov  ucTTepov 

bè  buvao'6eîo'iv  dTToWùvai  toùç  PeXTi- 

(TTOUç,  aÙTOÙç  bè  )Liôvouç   XeiqpBévTttç 

bi'    aÙTÔ    TOÛTO    ûtYaTTàcrGai    ùttô   tôjv 

TTOXlTÛJV  OTl  éTÉpOlÇ  PeXTlOCTlV  OÙK  ElXOV 

XpndOai. 

Oi  be,  ÔTi  TÛJv  TTapoixo|Liévujv  aÙTOÎç 
KaKiJùv  laôvoç  aiTioç  eïri... 

Pour  faciliter  l'intelligence  de  notre  traduction  il  ne 
sera  pas  inutile  de  montrer  au  préalable  le  développement 
des  idées  tel  que  nous  croyons  le  saisir. 

La  foule  venue  d'Athènes  et  du  Pirée  aj^ant  appris 
l'arrivée  de  cet  Alcibiade  fameux  qui  va  rentrer  dans  sa 
patrie  après  un  long  exil,  se  presse  sur  les  quais  et,  selon 
l'habitude  des  foules,  extériorise  les  sentiments  qui  l'ani- 
ment et  les  pensées  qui  traversent  son  esprit. 

I.  Les  uns  :  A.  affirment  qu'Alcibiade  est  un  excellent 
citoyen  dont  lu  culpabilité  a  été  contestée  etc.  etc..  (Voilà 


aÙTiù  ('-') 


TOIOUTOIÇ... 

oi'oiç  TTepi 
[jnéveiv  ,uèv] 
l'orrex.  Ziir- 

hovii)  (a) 


(')  Celte  le^oii  de  C  csl  iiilorossaiile;  il  est  dailloiirs  à  leniarquor  (|ik'  ce 
iiiiinusci'il  donne  souvent  des  leçons  qui  méritent  de  retenir  l'attention. 

C^)  Cet  emploi  peu  conforme  à  la  graniiiiairc  mécanique  est  une  simple 
contamina  ho  du  discours  dii'ect. 

(')  Le  nominatif  s  cxiiliciue  épaioment  par  rinllucncc  du  discours  direct  ; 
il  y  a  lonjilenips  ipic  H.  Kiihner,  dans  la  pi'Oini«"'re  «'dilion  de  sa  Ausfiilirf. 
(hinuiiiiilil,,  ^  5t)\,  4,  avait  remar(|ué  :  «  dass  dcr  (îricclic  ciiic  j^rossc 
Ncigunn  lialle  den)  Satze  die  Farhe  derdirekten  Hcdc  hcihclialteii  und  nur  die 
Person  vei"'iiiderl  wiirdc.  Niclil  sclten  ahcr  wiirdc  scllisl  das  SubjccI  und 
die  l'er'son  unveriindeit  licilicjiallcn  ». 


XÉNOPHON  1 3 

pour  le  passé).  B.  nient  que  son  retour  soit  dangereux  ; 
car  il  ne  peut  vouloir  ni  renverser  le  gouvernement  actuel, 
ni  changer  de  parti  :  (^) 

1)  Il  n'a  pas  besoin  de  changer  de  parti  : 

a)  il  est  toujours  l'enfant  gâté  des  démocrates; 

b)  il  est  toujours  aussi  suspect  à  ceux  qui  étaient  ses 
adversaires  sous  l'ancien  régime  (TtpÔTepov). 

2)  Il  n'a  pas  besoin  de  renverser  le  gouvernement  actuel 
(OcTTepQV  buvaffôeîcTiv) ;  car  il  n'y  a  pas  de  gouvernement;  on 
se  contente,  faute  de  mieux,  des  individus  qui  ont  pris  le 
pouvoir  (6uvao"6eîcriv)  (2). 

II.  Les  autres  prétendent  : 

a)  qu'il  est  seul  responsable  des  malheurs  passés  ; 

b)  qu'il  en  amènera  vraisemblablement  de  nouveaux  à 
l'avenir. 

Xous  traduisons  donc  : 

«  Pendant  que  (l'escadre  d')  Alcibiade  descend  (vers  le 
port),  la  foule  (accourue)  et  du  Pirée  et  de  la  capitale  se 
masse  en  face  des  navires,  pleine  de  curiosité  et  désireuse 
de  voir  cet  Alcibiade  ;  elle  émet  les  réflexions  suivantes  : 
Selon  les  uns,  Alcibiade  était  le  meilleur  des  citoyens 
(opt.  obliq.),  pour  lui  seul  en  fait  (indic.)  on  plaida  l'in- 
justice du  bannissement  ;  objet  des  embûches  de  gens  d'une 
capacité  inférieure  à  la  sienne,  qui  tenaient  des  propos 
autrement  graves  et  gouvernaient  à  leur  propre  profit, 
tandis  que  (bé)  lui  travaillait  au  bien  commun  en  mettant 
de  son  capital  avec  celui  de  l'Etat;  alors  qu'il  voulait  à 
cette  époque  être  jugé  immédiatement  sur  la  toute  récente 
accusation  de  profanation  des  mystères,  ses  adversaires, 
pi'ofitant  de  son  absence,  le  privèrent  de  sa  patrie  en 
exploitant  ce  qui  î^vait  les  dehors  de  la  vérité  ;  pendant  ce 
temps,  sous  l'empire  de  la  misère,  il  fut  forcé  de  servir  les 
pires  ennemis,  exposé  chaque  jour  à  y  laisser  la  vie,  tandis 
qu'il  voyait  ses  partisans,  ses  concitoyens,  ses  parents,  la 


(')  A  iiolro  avis  iLieTOÎaTaoïç  doit  avoir  le  sens  (]tu'  f.ie6iaTTT,ui  a  souvent 
(liez  Thucydide  par  ex.  1,  35,  107,  130;  VIII,  70;  Xénoplion  :  llellen.  I,  1,0, 
sinon  il  tonne  tautologie  avec  xaivà  irpâYMCtTa. 

(-)  Nous  sommes  peu  après  la  révolution  de  ill. 


14  TH.     LKFOKT 

République  entière  se  fourvoyer,  impuissant  qu'il  était  à 
leur  venir  en  aide,  puisqu'il  était  tenu  éloigné  par  l'exil. 

Ils  niaient  que  ce  fût  le  propre  de  gens  de  sa  trempe 
d'avoir  besoin  de  renverser  le  gouvernement  ni  de  changer 
de  jjarli  politique.  En  effet  il  se  faisait  que  de  la  part  de 
la  démocratie  il  jouissait  toujours  d'une  considération 
supérieure  à  celle  de  ses  compagnons  d'âge  et  nullement 
inférieni-e  à  celle  de  ses  aînés,  tandis  qu'à  ses  ennemis  il 
apparaissait  absolument  tel  que  sous  le  régime  antérieur 
(TrpÔTepov).  Sous  le  dernier  régime  (ucfTepov)  ^il  se  faisait 
que)  ceux  qui  exerçaient  le  pouvoir  avaient  mis  à  mort 
les  meilleurs  citoyens;  aussi  (be)  restés  seuls  ils  étaient 
acceptés  par  les  citoyens  pour  le  seul  motif  que  l'on  n'en 
avait  pas  de  meilleurs  sous  la  main. 

Les  autres  prétendaient  etc..  ». 

Tu.  Lei-out. 


Notes  et  conjectures 
sur  les  œuvres  de  l'empereur  Julien 


Lu  nouvelle  édition  des  œuvres  de  Julien  que  préparent 
AIM.  Bide/>  et  Cumont  annulera  toutes  les  précédentes  et  fournira 
enfin  une  base  solide  aux  travaux  des  historiens  et  des  philo- 
logues. Il  m'a  été  donné  d'apporter  une  modeste  —  bien  modeste  — 
contribution  à  cette  œuvre  scientifique.  Pendant  les  loisirs  forcés 
que  me  faisait  l'occupation  allemande,  j'ai  eu  de  fré(iuents 
entretiens  avec  mon  excellent  ami  Bidez,  qui  a  bien  voulu  me 
consulter  sur  les  nombi'euses  difficultés  (lue  i^résente  le  texte  de 
Julien.  C'est  de  ces  entretiens  qu'est  sorti  le  présent  article. 

En  le  rédigeant  je  me  suis  reporté  par  la  pensée  vers  ces 
années  terribles  où  j'ai  trouvé  un  secours  moral  inappréciable 
dans  l'étude  et  dans  l'amitié. 

Pour  les  lettres  de  Julien,  je  renvoie  à  l'édition  Bidez-Cumont, 
dont  les  bonnes  feuilles  m'ont  été  communiquées  ;  les  autres 
ouvrages  sont  cités  d'après  les  pages  de  l'édition  de  Spanheim. 

Discours. 
Or.  1,  p.  3D-4A  ;  oùb' ujCJTrep   êk   tivoç  xpa-fiKiîç  )anx«vnç, 

CpY\GX. 

Lire  qpadl,  puisqu'il  s'agit  d'un  proverbe.  Cf.  Or.  I, 
p.  31D-3!2A  :  eïEaç  bè  ojuuuç  ôipé  TTOie,  cpacrî,  rfi  GexTaXiKt)  net- 
9avàYKi,i  ;  Or.  IV,  p.  14oD  :  èTtei  5è  ômaaia,  qpacriv  (correction 
certaine,  que  Hertlein  a  eu  tort  de  rejeter  pour  reprendre 
la  leçon  des  mss.  qpricriv),  dKOiiç  ècTTi  TriOTÔTepa;  Or.  VI. 
p.  200  C  :  Yeué(J9(ju  bè  xpuqpnç  laiibè  dKpuj,  qpaai,  tlù  buKTÙXiu; 
Misopogon,  p.  3o3A  :  ë6oç,  qpaaî,  beuxépn  cpùcriç;  ep.  8:2, 
p.  102,  o  :  TÔ  TipàYMOi  aùiô,  (paoi,  beiEei. 

Ibid.,  p.  12D  ;  Kaiioi  tôv  'Obuaaéa  a'uveT6v"0)mipoç  êk  ttuv- 
TÔç  àTToqpfjvai  TTpoaipoù)aevoç  ttgXùtpottgv  eivai  cpncri  Kai  ttoWùjv 


16  P-    THOMAS 

àvGpuuTTULiv  TÔv  voûv  KaTaYvôivtti  Kai  èTreXeeîv  Taîç  irôXecriv,  ïv' 
ê£  ânâvTUJV  èTTi\e£à|uevoç  4'xoi  xà  KpÛTiCTTa  Kai  Trpôç  iravioba- 
7T0ÙÇ  âv6pub7TOuç  ô|ui\eîv  bûvaiio,  àWà  t6v  (Voss.  :  tô)  |Lièv  oùk 
èpaaî\eucre7TOiK{Xujvii6ûJvè)Li7Teipiaçxpeî«- 

«  Locus  corruptus  »,  dit  Hertlein.  qui  a  recours  à  un 
remède  pire  que  le  mal.  Je  serai  peut-être  plus  heureux  eu 
proposant;  dXXà  tûj  m^v  ouk  èç  paaiXeiav  ttoikiXuuv  neujv 
èiuTTeipiaç  xpeî«-  «  mais  lui  (T'iysse)  n'avait  pas  besoin  d'une 
expérience  si  variée  pour  gouverner  (sa  petite  île 
d'Ithaque)  ».  A  cela  s'oppose  ce  qui  suit  (p.  43A)  :  xôv  bè 
TTpôç  TOcraÛTiiv  »Vfe|uovîav  xpeqpôiuevGV  oùvc  èv  oîkîctkuj  ttou  xPHv 
èibâo'KeaGui. 

//)/(/..  p.  14B  :  ouxe  yàp  AaKebai)Liôvioi  twv  'EXX^vuuv...  ouxe 
Tôjv  pappâpuuv  ci  Kapxn^ôvioi.. 

La  symétrie  exige  gutê  Yàp  <oi>  AaKebai|Liôvioi. 

IbicL,  p.  ISA  :  f]  yàp  ToiauTii  KttTà  luiKpôv  u7Tobuo|aévn  ouvn- 
Geia  Tttîç  H^uxottç  èvTexeîv  ÙTToqjîav  tujv  KpeiTxôvuuv. 

L'infinitif  èviexelv  ne  s'explique  pas.  Wj^ttenbach  le  chan- 
geait en  èvéteKev.  Petau  suppléait  uTé9UKev  -èvreKeiv.  Je  pré- 
férerais :  f)  Yàp  TOiaÙTri...  auvnGeia  <(piXeî>  xaîç  vpuxaîç 
èvT€Keîv.  Cf.  Or.  VTI,  p.  216  C  :  cp  iXeî  Yàp  n  cpûciç  KpûiTTeaGai; 
ep.  ad  Themist.,  p.  256  G  :  riKiata  5è  qpiXeî  Tfjç  eù6ai)Liovîaç  x] 
PePaiÔDiç  Tf)  TÙx»3  TTiCTeOeiv,  et  ailleurs. 

Or.  VII,  p.  210B-('.  Il  s'agit  de  l'impudence  des 
cyniques  :  oî  b'àvaTraTOÛdiv  èv  tlù  |Lié(JUJ  là  KOivà  vô)ai)Lia 
auYxéovTeç. 

'AvaTTttTOÛO'iv  a  paru  suspect  à  Cobet,  (^ui  corrige  dva- 
<crTpé(povTai  Kai  TTepi>TTaTOÛ(Jiv.  Je  n'hésiterais  pas  à  le 
remplacer  par  dTTOTraTOÛaiv.  Le  mot  est  grossier,  mais 
Julien  ne  se  fait  pas  scrupule  de  l'employer  ailleurs. 
Or.  VI.  p  202B-C  :  èîTei  Kai  AïOYévnç  eiTe  àTTÉTrapbev  eVie 
âTTerrâTi-icrev  eiie  dXXo  ti  toioûtov  eirpaEev,  ûjanep  oOv  XéYOu- 
ffiv,  èv  àYopâ...  Cf.  Lucien,  Le  hniuiuct  ou  les  Lapithes,  3o  : 
ô  Gau)uâcrioç  bè  'AXKibàiuaç  (un  philosophe  cynique)  Kai  èou- 
p€i  èv  TÛJ  juéaiu. 

Ihii]..  p.  22()K  :  eÏTa  oùk  àvacTxô|Lievov  tô  buu|uâTiov  èv  tuùv 
KTiiiaàTUJV  Toû  Aiôç  ùttô  toO  Kcpauvoû  KaTeqpXèY€TO. 

A  KTniaâTuuv,  (pli  est  absurde,  je  substituerais  pXiiMÙTuuv. 
VA.  Denys  d'Halicarnasse,  Ant,  Rom.,  X,  l«i  :  auvepYOÙv- 
Toiv  Toîç  pXi'iMac^i  Kai  tûjv  ibiuuv  Papiùv. 


NOTES   SrU    LES   ŒUVRES    DE   JULIEN  17 

Oj-.  VIII,  p.  254 B  :  oiaTe  lueiZIôvujv  r\  Kaià  toùç  ctWouç  *  *  *. 

Hertleiii  :  «  Lacunam  indieavi;  nain  recte  Petavius  : 
<c  Dcest,  inquit,  ôpéYedGai  vel  simile  quidpiam.  «  Peut-être 
<è(piecr9ai>.  Cf.  plus  lia  ut  p.  350D  :  èqpié)uevoç  be  tujv  dTTÔvTuuv. 

Lettre  à  Thémistius. 

P.  2o6C  :  Ktti  TOÙÇ  èv  TToXiTela  lujvTaç  oùk  ëveaTiv  aveu  Taû- 
Ttiç  àvttTTveîv  TÔ  br\  \eYÔ)iievov  *  *  *. 

Je  sui)pléerais  :  dvanveîv  t6  br)  XeyôiLievov  <où5'  àKapfj 
Xpôvov>.  Cf.  Or.  II,  p.  66B  :  èKeîvuuv  oùbè  diKapfi  xpôvov  èv5i- 

bÔVTUJV 

Le  banquet  ou  les  Césur.s. 

P.  ?)38B  :  BàXX'  eiç  paKapiav,  eiTrev  ô  Aiôvuffoç,  èTrei  (Tkuuît- 
Teiç  au  TTÛvTaç  aÙTOÙç  Kai  iToieîç  oùbèv  ùnèp  éauTUJV  Xéxeiv. 

Les  interprètes  me  semblent  s'être  mépris  sur  le  sens  de 
la  phrase  soulignée.  Cunaeus  traduit  :  «  neque  permittis 
cuiquam,  uti  pro  se  dicat.  »  Spanheim  :  «  tu  ne  leur  donnes 
pas  seulement  le  loisir  de  plaider  leur  cause.  »  Talbot  : 
((  tu  les  emi^êches  d'ouvrir  la  bouche  pour  s'expliquer.  » 
Silène  n'empêche  nullement  les  héros  de  s'expliquer,  mais 
il  s'amuse  à  réduire  leurs  prétentions  à  néant.  Or,  l'expi-es- 
sion  familière  oùbèv  XéYeiv  =  nugari,  ineptire,  et  par  exten- 
sion iiullius  monienti  esse.  Le  sens  est  donc  :  efflcis  at  pro 
se  dieentes  nuffari  videantur,  «  tu  démolis  leurs  plai- 
doyers. » 

P.  334  A  :  'OXÎYOv  ô  ZeiXiivôç  ujO'Trep  ùtrô  ttûktou  beSioû  TtXri- 
yeiç,  EïpriTai  juév  (Joi  toûto,  eme,  kt6. 

Il  manque  un  verbe  avec  ôXîyov.  Reiske  en  avait  l'ait  la 
remarque  :  «  Post  ô  ZeiXiivôç  déesse  videtur  biaTropi'icraç  aut 
eTTicTTriaaç  vel  taie  quid.  »  Il  faudrait  un  terme  plus  expres- 
sif que  biaTTOptidaç  ou  èiriaTricTaç,  un  terme  en  rapport  avec 
ùjairep...  tiXiiyêiç-  Ce  terme,  Platon  nous  le  fournira.  Dans 
un  passage  du  Protagoras  (c.  26,  p.  339E)  évidemment 
imité  par  Julien  ('),  nous  lisons  :  xai  eYÙJ  |uèv  TipiÛTOV  ibcTTrepei 


(')  Cf.  plus  liant  (p.  333B)  :  boKeî  YÙp  elvaî  ,uoi  ttuuç  dvi^p  kutù  tov  Zi|iiu»- 
vibrjv  T6TpdYuuvoç  aveu  i|j6you  t6tuym^voç.  à  rapprocher  de  Plaloii,  l'rotu- 
f/o}'as,  c.  26,  [).  339A-l$  :  Klyti  fdp  itou  Zijumvibnç—  âveuvjJÔYou  TexuYiuévov. 


18  p.    THOMAS 

ÙTTÔ  dYaBoû  ttûktou  TT\riYeiç  èaKOTuOenv  Te  Kai  iXif^xaaa. 
Notons  encore  dans  Platon,  Gor^iHs,  c.  41,  p.  486B  :  gîctG' 
oTi  oÙK  dv  exo'Ç  o,  ti  xpy\aa\o  crauTtù,  àW  iXrfïiûJiK  ^fv  Kai 
xaaiiâio  oùk  ëxuuv  ô,  ti  einoiç;  Lysis,  c.  13,  p.  21 6G  :  dWà  tûj 
ôvTi  aÙTÔç  iXiTïiû  uttô  tiiç  toû  Xôyou  dîTopiaç.  Nous  resti- 
tuerons donc  avec  vraisemblance  :  'OXiyov  <i\iYTi«^aç>  ô 
ZeiXnvôç  uùcTTTep...  tiXiiyciÇ-  T^e  mot  îXiYYiâaaç  a  pu  être  faci- 
lement (unis  après  ôXîyov. 

Lettres. 

Ep.  14  (p.  18-19)  :  'E|Lioi  |uèv  ouv  aicrxpôv  eîvai  boKeî  —  ti^v 
bè  ÙTièp  TUL)v  dGXiuuv  dv6pâ)Truuv  dîToXeiireiv  TdEiv. 

Dans  ce  passage,  Julien  semble  s'être  inspiré  de  Platon, 
Apologie  (le  Socrnte,  c.  17,  p.  28D-E  :  'Eyùj  ouv  beivà  dv  ei'nv 
eïpYaaiaévoç  —  Xirroi.ui  Trjv  TdSiv. 

Ep.  26  (p.  30-;^)  :  TTdvTa  dSpôuuç  èireiai  )uoi  Kai  dîroKXeiei  tiîv 
qpuuvriv  dXXo  dXXo)  TTpoeX9eîv  où  EuYXiupoûv  tujv  èjauùv  biavoimd- 
Tuiv,  6iT€  i^uxiKÛJV  TTaGûjv  eiTe  ÔTTuuç  qpiXov  KaTovo)udZ;eiv  Td 
TOiaÛTa. 

Telle  est  la  leçon  des  manuscrits  de  dialcê;  C'a  :  ijjuxpôv 
Tâ)V7Ta6âiv.  Il  est  aisé  de  corriger:  ei'Te  ijjuxikôv  <ti> 
TÛJV  TTaGujv. 

Il)i(l.  (p.  32,  10-13)  :  ol  0eoi  bè  Tapaxdç  |uév  Tivaç  iaeaQai 
Trepi  (Jè  cpavepuùç  èbriXouv,  oùGèv  juévTOi  beivôv  oùbè  eîç  epYOV 
TÛJV  d6é(7)Liujv  pouXeujudTUJV. 

L'expression  eîç  êpYOv  peut-elle  être  coordonnée  à  beivôv? 
Gela  me  paraît  fort  douteux.  Je  crois  qu'il  manque  un  par- 
ticipe, et  je  suppléerais  eîç  ëpYOv  <fiEov>  ou  <TTpoxujprio'ov>. 
Cf.  ep.  73  (p.  88,  16)  :  îv'  n  x^ipiÇ  ^Mîv  eîç  ëpYOv  TTpoxuupiîai;] 
(((  devienne  une  réalité,  se  réalise  »). 

Ep.  30  (p.  37,  0-7)  :  eiTe  baiinoviujTépa  xPnt^^M^vov  tTrivoia, 
eÏTe  Tivi  Geîa  bôo"ei  bid  Tiva  auvTuxiav  dmixavov. 

Il  est  clair  que  bid  Tiva  auvTUxiav  d)nr|xavov  ne  peut  pas 
sei'vir  d'exi)lication  iiTivi  Geîa  bôaei,  mais  exprime  une  sup- 
position différente.  On  suppléera  en  conséquence  :  <eÏTe> 
bid  Tiva  auvTUxîav  d)Lirixctvov.  Cf.  Suétone,  Div.  .Tul.,  1  :  sine 
(lininilns  siue  nlhjua  coiiiectiiru.  Claud.,  13  :  cusii  (juodnin 


NOTES    SUR    LES   ŒUVRES    DE   JULIEN  19 

un  (c'est  ainsi  qu'il   faut  lire  avec  Torrentius;  mss  :  ne) 
(Uoinitns. 

Ep.  41  (p.  47,  ll-l^)  :  dWa  TÔ  ye  niuàç  outuu  biaTe6eî(79ai  Kai 
5iaKeî(J0ai  Tiepi  crè  Kxè. 

Quoique  les  mots  Kai  bittKeîcrOai  manqueut  dans  M,  il  me 
paraît  que  biaKCicrSai  est  la  vraie  leçon  et  (pi'il  faut  rejeter 
les  mots  biaTe0eî(J6ai  Kai.  La  bonne  gréci/é  veut  biaK€ÎcrGai, 
que  Julien  emploie  partout  ailleurs:  ej).  82  fp.  lOo,  5)  :  toùç 
OUTUU  biaKeijuévouç;  ep.  89  (p.  126.  8-9)  :  niuàç  bè  outuu  pa0ij,uujç 
Ta  TTpôç  TOÙÇ  0eoùç  biaKeijuévoùç;  ep.  89  (p.  131,  5-6)  :  irepi 
TOÙÇ  oùbèv  iibiKrjKÔTaç  dvnXeuùç  Kai  àTTav0pujTTuuç  biaKeîo"0ai; 
ep.  136  (p.  197,  3-4)  :  jLtâXiCTTa  rràvTuuv  dWoTpiuuTaTa  Tipoç 
(p0opàv  biaKei|Liévoiç;  ep.  153  (p.  208,  20)  :  tô  cruLi|ua  biÛKeiTai 
lueTpîuuç.  La  forme  vulgaire  biaT60eî(J0ai  ne  peut  être  qu'une 
glose. 

Ep.  58  (p.  63,  20-22)  :  Kaî  ti)uîv  koiviî  Tipôç  d)aqpoTépouç 
xdpiç  dvTiKeîo"0Lu,  'AXeSavbpeûm  |uèv  Ziîvuuva,  o"oi  bè  drroboûvai 
Triv  'AXeEavbpeiav. 

Dans  ce  passage,  xàpiç  ne  signifie  pas  «  faveur,  bienfait», 
mais  «  reconnaissance,  gratitude  »,  comme  le  prouve  niaîv 
dvTiK€Î(70uu.  Xous  écrirons  donc  :  KOivr)  Tipôç  djucpoTépuuv  xdpiç. 
Ep.  60  (p.  66,  18-19)  :  eÎTa  tiiç  ôpiurîç  dvacTTeiXavTeç. 
On  attendrait  Triv  ôpinriv  dvacTTeiXavTeç,  comme  dans 
Elien,  Vnr.  hist.,  XII,  64  :  dvécJTeiXe  bè  ty\v  ôpiufiv  toû  TTep- 
bÎKKa  ô  TTTo\e|uaîoç.  Mais  on  trouve  aussi  dvadTéXXeiv  con- 
struit avec  l'accusatif  de  la  personne  qu'on  détourne 
d'agir  et  le  génitif  de  la  chose  dont  elle  est  détournée,  par 
exemple,  dans  Elien,  Var.  hist..  X,  15  :  ôrrep  Kai  dvécTTeiXev 
èKÊÎvouç...  èvbôEou  te  d)ua  Kai  aeiavoTaTOu  Yd|uou.  De  même  le 
génitif  est  employé  avec  le  passif  dans  Elien,  Var.  hist.. 
XII,  64  :  ô  bè  TTepbÎKKaç...  dvecTTdXii  toû  bpôjuou,  oîôiiievoç 
èx€iv  TÔ  d0Xov.  Xous  api)uyant  sur  ce  deinier  passage,  nous 
corrigerons  dans  le  texte  de  .fulien  dvacTTeiXavTeç  en  dva- 
CTTaXévTÊÇ.  Cf.  Sozomène,  V,  7,  2  :  dvaKonévTeç  bè  Tfjç 
TTapauTÎKa  ôpiufiç. 

Ep.  61  (p.  71,  5-7)  :  Kai  eî  ,uèv  èm  ŒjuiKpoîç  ei'n  tô  bidcpopov 
Tvîç  YvuJiuriç  TTpôç  Triv  YXûjTTav,  kokôv  |uév,  oiO'TÔv  bè  ô|nuu0"  tuù 
TToaû)  YiveTai. 

Telle  est  la  leçon  du  manuscrit.  Suidas  donne  o|uujç 
TTÔ(7iy.  Hertlein  a  corrigé  ôjuuuç  ôttujctoûv.  .T'ai  pensé  à  la 


20  P.    THOMAS 

locution  ujuujçYtTTUjç,  (iiii  est  souvent  défigurée  dans  les 
manuscrits  (voy.  Cobet,  \':ir.  /cr/..  p.  2oo).  Cf.  ep.  107 
(p.  100.  10),  où  ITerclier  a  restitué  d|auu(JY6TTUJç  (niss.  ;  dXXuuç 
TTiuç  ou  simplement  dWuuçi 

Ihid.  (p.  71),  7-10)  :  Boû\o|Liai  ù|uûjv  eYÙJ  Kai  xàç  àKodç,  ùjç  âv 
ùueîç  ei'TTOiTe,  Kui  irjv  Y^ÛTiav  èEavaYevvqGnvai  toutujv,  ujv  euoi 
Y6  ei'n  |a€Téx€iv  dei  Kai  ôciiç  è|uoi  cpî\a  voeî  xe  Kui  irpàxiei. 

Le  génitif  toûtuuv  peut-il  dépendre  de  èSavaYCvvnQiîvai 
(«être  régénéré  par  le  bai)tème))i,  qui  serait  construit 
comme  ègavdYCiv,  èEavaipeîv,  etc.?  J'en  doute  fort  et  je  soup- 
çonne qu'il  y  a  dans  le  texte  une  lacune  que  je  comblerais 
ainsi  :  èEavaYevvrjGiivai  <.Kai  dTroTpéTTeCTGai  >  toûtujv. 

Un  peu  plus  bas  (1.  11:5)  le  texte  porte  :  Oùbè  Ydp  oùbè  eû\o- 
Yov.  Il  manque  un  mot  api'ès  Ydp  ;  nous  suppléerons  :  oùbè 
Ydp     eiKÔç  ■  oùbè  eùXoYOV. 

E().  81  (p.  99,  101^)  :  eiTa  .ueid  toû  qpiXdvbpou  t6  qpiXôGeov 
TÎç  èv  YUvaiKÎ  beùrepov  TiGiiffi,  Kai  où  qpaveîiai  ttoXùv  Tidvu  tôv 
luavbpaYÔpav  èKTreTTujKLuç; 

La  leçon  jueTà  xoû  qpiXdvôpou  ne  peut  se  défendre.  J'ai 
api)rouvé  autrefois  (Rcniie  de  l' Instruction  publique  en 
Bel^-Kjue,  t.  XXXII,  1889,  p.  ioO)  la  correction  de  Reiske 
jUÊTà  TÔ  qpiXavbpov,  en  citant  à  l'appui  Aristophane,  Chev., 
132,  et  Xénoplion,  Cyroj).,  II,  2,  4.  Maintenant  je  serais 
d'avis  de  supprimer  tout  simplement  netà  :  un  glossateur 
aura  voulu  expliquer  la  construction  toû  qpiXdvbpou  beÙTepov 
par  jjLeià  (tô  qpiXavbpov).  Cf.  Or.  VIII  (p.  24'2B)  :  oùk  èv 
beuTépuj  TÛiv  è)uiLv  èGéiuiiv  xd  crd.  Eunap..  Mt.  sojthist., 
p.  4o9.  21-22  Boisson.  :  Gep)ad...  XouTpd...  rOùv  y^  kutù  tîiv 
'Puj)naiKriv  èv  Bdiaiç  beÙTepa. 

Il  faut  ensuite  accentuer  qpiXôGeôv  tiç  au  lieu  de  qpiXô- 
Geov  TÎÇ  (Hertlein);  tiç  est  l'indéfini  et  non  l'interrogatif. 
Le  sens  est  :  Pietntem  erfj>a  deos  aliquis  in  muliere  nmori 
in  imirituni  ])()sthubet,  neque  videbituv  innndru<^orue 
pciinultuin  t>i bisse? 

l'4).  82  {{).  1U4,  Oj  :  où  TrpujTOç  oùbè  luôvoç  eTraGov,  iL  Aïo- 
vÙCTie. 

"EîTaGov  n'a  pas  de  complément,  lleiske  suppléait  vô>  où, 
ce  qui  produit  un  fort  vilain  hiatus.  Nous  restituerons 
<toût'>  dû. 

Ibid.  (p.  108,  13-19)  :  'AXX'  i'crujç  èKeîGev  'AXéEavbpoç  uiqpGn 


NOTES    SUR    LES   ŒUVRES    DE   JULIEN  21 

(TOI  }xéfaç,  ÔTi  Ka\\icr9évri  |uèv  dTréKxeive  rriKpujç,  KXeÎTOç  5è 
aÙToO  Tfjç  Trapoiviaç  epYOv  èYéveio,  OiKdixriç  xe  xai  TTapiueviuuv 
[Kai  xô  TTapiuevîujvoç  iraibiov],  èTiei  xà  rrepi  xôv  "EKXopa  —  Kai 
xàç  dWaç  aùxoû  naibiàç  criujTTuj. 

Je  soupçonne  qu'il  y  a  une  lacune  après  OiXcuttiç  xe  Kai 
TTapiLieviujv,  carPliilotas  et  Parménion  ne  furent  pas,  comme 
Clitus,  victimes  de  l'ivresse  d'Alexandre. 

Ep.  88  (p.  122,  12-14)  :  '0  ^èv  oùv  Oeôç  où  xoùç  xÙTcxovxaç 
oùbè  xoùç  ùppi^lovxaç,  dWà  xoùç  dnrocrxepoOvxaç  xujv  xijliûjv  eïvai 
xoîç  Geoîç  èxOpoùç. 

Le  verbe  dont  dépend  la  proposition  infinitive  a  disparu. 
Spanlieim  intercale  cpiicTi  après  eivau  Comme  il  s'agit  d'un 
oracle  (1.  2  :  xûùv  xoû  Aibujuaiou  becTTrôxou  xP'IO'Iliuùv),  ne  pour- 
rait-on pas  lire  :  xoùç  diTOO"xepoûvxaç  xûùv  xijuûjv  <dveî\ev> 
eivai  xoîç  Geoîç  èxOpoùç?  L'omission  de  dveîXev  devant  eîvai 
(ANEIAENEINAI)  s'explique  facilement. 

Ep.  89  (p.  146,  7-8):  ujCTTrep  oi  xà  Tiaibîa  ■  btd  xoû  (.s/c 
Hertlein)  TrXaKOÛvxoç  ègairaxujvxeç. 

Il  ne  s'agit  pas  de  l'appât  d'un  gâteau  déterminé,  mais  de 
l'appât  de  quelque  gâteau.  Nous  accentuerons  donc  :  <bià> 

TOU  TXXaKOÛVXOÇ. 

Ep.  98  (p.  lo7,  10-11)  :  oùxuu  XajUTrpdç  *  **  èît'  aùxi]  (Juytê- 
Tpamuévnç. 

Heyler  :  «  Supplendum  erit  pîpXou  vel  jLiovujbiaç.  »  L'addi- 
tion de  pipXou  n'est  pas  admissible  à  cause  de  l'hiatus 
(PipXou  èTr').  Il  faut  suppléer  non  pas  simplement  |uovuj6iaç, 
mais  aoi  juoviubiaç.  Cf.  plus  haut  (1.  6-7)  :  dXX'  eiri  juèv  xi] 
Aàcpv);i  Y^ÏPttTTxai  ffoi  Xôyoç. 

Ibid.  (p.  158,  19-21)  :  è|uoi  y^P  xô  |uri  Ttdvxa  eKeivujv  xûùv 
dvbpuùv  dYatrâv  dbiKriMOtTuuv  oùbèv  ouxuu  qpauXôxaxov  eîvai 
boKeî. 

Texte  corrompu.  Je  corrigerais  :  où  b^Ttou  x6  qpauXôxaxov 
ou  XUJV  cpauXoxdxujv,  en  prenant  qpaûXoç  dans  le  sens  de 
«  léger,  peu  grave,  insignifiant,  sans  importance  ».  Où 
qpaûXov  dbÎKrma  =  non  mediocris  iniuria. 

Ibid.  (p.  159,  10),  je  maintiens  la  correction  èîri  KecpaXaiou 
(pour  èîTei  Kai  cpainv)  que  j'avais  proposée  dans  la  Revue  de 
l'Instruction  publique,  t.  XXXII,  1889,  p.  150,  mais  je  ne 
suis  plus  d'avis  de  regarder  bi  'ôXiYtuv  comme  une  glose. 


■i-  p.    THOMAS 

Nous  avons,  en  effet,  une  redondance  analogue  Or.  VT, 
p.  182A  :  TÔ  KÊcpâXaiov  W  el'iriju  EuveXuuv  èv  Ppâx^i- 

Ep.  111  (p,  172,  1-4):  ov  5è  èE  aiôivoç  àirav  ôpâ  tô  tOùv 
dvGpdjTTUJV  Yévoç  Ktti  pXéîTei  Kaî  (Téperai  Kai  crepô|U€vov  eO  TipÛTiei, 
TÔv  |uéYav"H\iov  Xé-fou,  t6  cûjv  àfuX^a  Kui  e^ijjuxov  Kai  ëvvouv 
Kui  otYaSoepYÔv  toû  voiitoû  traTpôç  *  *  *. 

La  lacune  signalée  par  Petau  pourrait  être  comblée 
ainsi  :  <où  vojuîIeTe  6e6v  eivai;   . 

Ep.  llîj  (p.  179,  20-22)  :  oûkoûv  èTreibr)  aÙTOÎç  ùttô  toû  6au- 
uadiuuTâTOu  vôjuou  TrpoeipnTai  '*'  *  *,  ïv'  eîç  Trjv  PacriXeiav  tûjv 
oùpavôjv  eùobiuTepov  TTOpeuGuùO'i  Kîé. 

Après  TTpoeipr;Tai,  il  y  a  une  lacune  qu'on  a  proposé  de 
combler  de  différentes  manières.  Reiske  :  «  Post  îTpoeîpi'iTai 
videtur  OXi^ecrGai  vel  cnevGxujpeîcTOai  vel  taie  quid  déesse,  w 
Hertlein  :  «  Milii  TTévea9ai  vel  simile  quid  déesse  videtur.  » 
Comme  il  s'agit  d'un  précepte  de  la  loi,  l'infinitif  doit 
exprimer  une  action  volontaiie  plutôt  qu'un  état  passif. 
C'est  pourquoi  j'ai  conjecturé  dans  le  temps  (Revue  de 
rinsiructioii  itublique,  t.  XXXII,  1889,  p.  151)  :  v.Tà  ÙTrdp- 
XOVTU  àqpiévai  ;  cf.  Saint  Matthieu,  XIX,  21,  27,  29;  Saint 
Marc,  X,  21,  28-30;  Saint  Luc,  XVllI,  22,  28-30.  Je  préfé- 
rerais aujourd'hui  -Ta  uirdpxovTa  TTpoéa"9ar-,  L'omission 
s'explique  mieux  par  la  ressemblance  de  TTpoeipr|Tai  et  de 
TTpoécrOai.  TTpoieo'Gai,  pvoicere,  «renoncer  à...,  abandonner, 
sacrifier,  )>  est  employé  par  Julien,  Or.  VII  (p.  224B)  : 
juiKpà  Trpoé)uevoi;  ep.  82  (p.  102,  18):  tô  lf\\i  TipoéaGai;  ep.  89 
(p.  130,  11  et  13)  :  Toîç  beoiuévoiç  TTpoé)uevoç...  Kai  oùbeTTOTé  uoi 
)ueTe)LiéXricre  irpoeuévoi;  ibid.  (p.  li(),  8)  :  tûj  koi  biç  Kai  Tpiç 
TTpoécFGai  iTrXaKOÛVTa  toîç  Traibîoiç). 

Lellres  ;ij)()<ryi>hcs. 

Hp.  180  (p.  2211,  li-li>  :  'HpobÔTUj  bè  dpa  tûj  cruYïpacpeî  Tipôç 
èTTÎbeiEiv  èpriiuîaç  dXtiGoOç  lipKeŒev  einôvTi  «  Tiap'  oïç  gùtê  aÛKU 
eŒTiv  oÛTe  d\Xo  dYaGôv  oùbév,  »  oiaTiep  gùtê  dXXou  tivôç  èv  Kap- 

TTOÎÇ     dYaOûO     TTpOTépOU     TUJV     aÙKUJV    ÔVTOÇ,    OUTe     ÉTl    TTdVTUJÇ 

dYaGoû  béov  tivôç  rrap'  oîç  dv  i,i  tô  aÛKOv. 

Suj)primer  dYaGoû  devant  TTpOTépou  :  c'est  une  interpola- 
tion inepte  ou  une  dittoajiaphie  du  second  ÔYaGoû.  "AXXou 

TIVÔÇ  èv  KapTTOÎÇ  dXXoU  Tivôç  KapTTOÛ. 


NOTES   SUR    LES   ŒUVRES   DE   JULIEN  23 

Ihiil.  {p.  281-232)  :  Kai  là  jnèv  dWa  tûjv  aÙKUJV  f\  ÔTToipivriv 
€xei  Tr]v  PpûjcTiv  n  Tepcraivôfaeva  èç  t6  ôfaoïov  ëpxeTai. 

(iuel  sens  raisonnable  peut-on  tirer  de  èç  tô  Ô)lioiov  epxe- 
Ttti?  Aux  figues  fraîches  qu'on  consomme  en  leur  saison 
(ÔTTUjpevfiv  exei  Trjv  PpiLaiv)  s'opposent  les  figues  qu'on  fait 
sécher  (lepcraivôiueva)  pour  les  conserver.  Nous  remplace- 
rons donc  l'ahsurde  èç  tô  ôfioiov  par  èç  tô  Taïueîov,  «  dans  le 
magasin,  dans  le  garde-manger.  »  Dans  la  finale  -|Lieîov  le 
copiste  a  cru  lire  -luoiov,  et  le  mot  Ô)lioiov  s'est  présenté  à 
son  esprit. 

Ep.  183  (p.  240-241)  :  àv  {sic  le  ms.  de  Chalcé)  b'ècpùXaEaç 
èjuàv  qppéva  Kaio|uévav  ttô6uj. 

Texte  évidemment  corrompu.  Je  proposerais  àvb'ëi|j u- 
Eaç.  Le  verbe  dvaipuxeiv,  ((rafraîchir,»  va  fort  bien  avec 
KaiO|uévav. 

Ep.  -184  (p.  244,  2-3)  :  'Eyài  bè  ei  juév  ti  (Juvi^beiv  èjLiauTuJ  toû 
irpôç  aè  Yi"fvo|uévou  Kai  KaTà  )uiKpôv  èX\eii|iavTi  KTe. 

Supprimons  KaTà  :  il  n'est  pas  question  de  savoir  si  l'au- 
teur a  failli  ])eu  i)  peu  (KaTà  juiKpôv),  mais  s'il  a  failli  qiwl<iuc 
peu  (uiKpôv)  à  son  devoir.  Cf.  même  lettre,  p.  246,  9-10  :  eî 
bè  LUC  à\r|6il)ç  èWeivpavTâ  ti  toû  irpôç  crè  KaOriKOVTOç.  Ce  malen- 
contreux KttTd  a  été  amené  par  le  Kai  (|ui  précède. 

Ibid.  (j).  244,  0-6)  :  oùk  l'ipvoùiufiv. 

Il  faut  suppléer  oûk  <âv>  ripvoùjuriv,  car  il  s'agit  d'une 
hypothèse  contraire  à  la  réalité  (cf.  1.4:  èiTeipuJiuîiv  âv). 

Ibid.  (p.  248.  10-11)  :  aÙTÔç  èKaTépou  Tr]v  xpeiav  oÎKeiou. 

Il  y  a  là  une  faute  d'accentuation  que  les  éditeurs, 
jusques  et  y  compris  Hertlein,  se  sont  transmise  religieu- 
sement. Il  faut  accentuer  oikêioû.  C'est  l'impératif  moyen 
et  non  l'impératif  actif  :  oiKeioûcr0ai  -^  «  s'approprier,  assu- 
mer ».  Le  sens  est  :  «  Assume  toi-même  (à  toi  seul)  l'office 
de  tous  les  deux.  »  Cf.  plus  haut  (p.  244,  8  9):  Kai  èv  oFç 
Xaïupdvuj  TÔ  TTàv  Tf|ç  xàpiTOç  eiç  èfiauTÔv  oiKeioû|uaL 

Ep.  194  (p.  264,  4-6)  :  TTivbâpuj  )aèv  dpYupéaç  eivai  boKeï  Tàç 
Moûaaç,  oîovei  tô  ëKbiiXov  aÙTÛJV  Kai  Trepicpavèç  Tfjç  Téxviiç  èç 
TÔ  Tfjç  uXriç  XaiaTTpÔTepov  dTreiKâlovTi. 

Au  lieu  de  XajUTrpÔTepov,  lire  XaïuTTpÔTaTov.  Les  copistes 
ont  la  manie  de  substituer  les  formes  du  comparatif  en 
-T€poç  à  celles  du  superlatif  en  -TaTOç. 


24  P.    THOMAS 

Ihid.  (p.  26.'),  :2-3  :  èîTei  jÀ^bè  ô  AiO)unbiiç  ïcrujç  àpYUpà 
Xpuduùv  dvTébuuKev. 

Il  me  parait  nécessaire  d'écrire  :  icyuuç  âv  àpyupà 
XpuaûJv  àvTébuuKÊV. 

Ep.  198  (p.  "261,  ^O-SS)  :  Toû  Te  yàp  TpujiKOÛ,  KaGânep  ucrie- 
pov  'A9iivaîoiç  Kai  AaKebui)aovîoiç  toû...,  irpocnKei  tô  TrXéov 
èKÊÎvoiç  fepYOu. 

Diibner  proposait  de  suppléer  toû  •  TTepcjiK0Û>  ou  -^Mi]bi- 
KoG>.  C'est  MiibiKOÛ  qu'il  faut  adopter.  Les  guerres  des 
Athéniens  et  des  Lacédémoniens  contre  les  Perses  s'ap- 
pellent TÙ  MiibiKd  (ep.  ad.  S.  P.  Q.  Atlien.,  p.  269B  Spanli.)  ; 
celles  d'Alexandre  contre  Darius,  Ta  TTepaïKâ  (Le  banquet 
on  les  Césars,  p.  320C  Sp.).  (Jf.  Tliucyd.,  1,  21-)  :  Tuùv  bè  npô- 
TÊpov  ëpYoïv  luéYiCTTOV  èirpâxÔil  Ta  Mr|biKâ. 

Ibid.  ip.  2»58, 17)  :  eiç  KttKiav  èTrapBévTeç. 

La  tradition  manuscrite  ne  fournit  que  ..  Kiav.  L'édition 
d'Aide  a  suppléé  <eiç  Ka  KÎav.  Je  préfère  <èç  dbi  Kiav. 
C'est  contre  l' injustice,  et  non  contre  la  méchanceté  des 
Corinthiens  que  proteste  l'auteur  de  la  lettre. 

Ep.  201  (p.  27,-»,  18-14)  ;  Kai  TiàvTa  ocra  èbÔKei  Trpôç  Tqv  toù 
TTà6ouçTrapa|uu8{av  up)aÔTT£iv. 

Ne  faudrait-il  pas  :  6oa  ■  Mv  ■  èbÔKCi,  puisque  toute  la 
phrase  exprime  une  hypothèse  contraire  à  la  réalité? 

Ep.  202  (p.  278,  1-8)  :  làç  tujv  eu  YeYovÔTUJV  Tiepioucriaç,  tùç 
eiç  aé  Te  Kai  toùç  ôuotpôttouç  doi  Pap^âpouç  ùrrô  toû  dSpoTÙTOu 
Kai  TToXueTOÛç  KuuvcTTavTiou  KevuuGeio"aç. 

Après  Kevuu0ei(Taç,  je  suppose  qu'il  y  a  une  lacune  et  qu'il 
faudrait  ajouter  (quelque  chose  comme  xoiip^iv  èâcraç. 
('f.  .Tul.  Or.  IV,  p.  i87('  :  dXXà  jà  |uèv  tiûv  ttouttiùv  x«îpciv 
èd(Juj)uev. 

Ep.  204  (p.  281.  6-9)  :  ibç  TtavTaxô9ev  ù|uîv  t6  d.uépi)nvov 
ÙTrdpxeiv  tiîç  èmiç  (BacTiXelaç,  ïva  drroXaûovTeç  *  *  *  eTi  uei- 
Z^ovaç  eùxàç  TTOuîo'Be  thç  è.uiîç  PaatXeîaç  tû  TrdvTuuv  KpeÎTTOvi 
Kai  briiuioupYtù  Geô). 

Supi)riuions  Tnç  èjuiiç  PacTiXeiaç  après  ÛTrdpxeiv  :  c'est  une 
dittographie  du  thç  èufiç  PaCiXeiaç  qui  suit.  L'auteur  dit 
j)lus  loin  (1.  IMi  :  toùç  bè  TravTaxôGev  exovTaç  t6  d,uépi|uvov.  — 
Après  dîToXaùovTeç,  nous  suppléerons,  non  ])ar  eipi'ivnç, 
comme  le  veut  lleiske,  mais  ricruxiaç.  Cf.  ej).  199  (p.  272. 
16-17j  :  nbù  uèv  Kai  t6  èir'  ôXîyov  nduxîaç  dîToXaûcrai.  — ■  Knfin 


NOTES    SUR    LES   ŒUVRES    DE   JULIEN  '-^Ô- 

nous  ajouterons  urrèp  de\  ant  tiîç  è)uiîç  ^acTiXeiaç,  car  ce  géni- 
tif ne  peut  dépendre  de  eùxàç  TTouîo'Be.  Ci.  p.  281,  14-1  o  : 
uTrèp  Toû  pacTiXeiou  iKeTripîouç  XaTpeiaç  iroieiCTÔai  tuj  lueilovi. 

Sur  le  sens  du  verbe  |uvn(TT£Ùeiv  dans  les  lettres  apo- 
cryphes. 

Le  verbe  luvncTTeùeiv  se  rencontre  trois  fois  dans  les 
lettres  apocryphes  : 

Ep.  180  (p.  229,  H)  :  tuj  KÙWei  bè  iffuiç  àpK0Û0"av  nboviîv 
|uvn(TTeuuuv. 

Ep.  186  (p.  251.  13)  ;  aÙTÔç  iiiaîv  toû  ^éXouç  tô  èvbôo'ifiov 
luvriCTeùeiç. 

Ep.  196  (p.  266,  6-7)  :  'E)noi  Kai  jpàfJLjJLa  rrapà  aoû  )uiKp6v 
àpKGÎ  |Li6Yâ\nç  nbovnç  Trpôqpaaiv  juviicTTeûdai. 

De  la  comparaison  de  ces  trois  passages  il  résulte  que 
ILivri^^Teûeiv  doit  avoir  le  sens,  non  i^as  d'  «  accorder  », 
comme  le  supposait  M.  Cumont,  avec  hésitation  d'ailleurs 
{Sur  l'authenticité  de  (luehjues  lettres  de  Julien,  p.  19, 
note  1),  mais  celui  du  latin  conciliare,  «  ménager,  procu- 
rer, fournir  «.  L'auteur  est  parti  de  l'expression  bien  con- 
nue juvnCTTeueiv  xâ|uov,  conciliare  nuptias  ('),  «  ménager  une 
alliance,  faire  un  mariage  »,  et  a  étendu  l'emploi  du  verbe 
ILivncTTeùeiv  à  d'autres  objets.  Cf.  Trpo£eveîv. 

P.  Thomas. 


(')  Cf.  Corn.  j\e|)Os,  Allie,  o  -.  Erat  nupta  soror  Attici  Q.  Tullio  Cireroni 
easque  nuptias  M.  Cicero  conciUantt.  Id.,  ibid.,  12  :  Atqne  harum  m  ptiari  m 
coNciLiATOR  fïiU . . .  M.  Antonius.  Justin,  VII,  (î  :  Uxorem  duxit  concii.iantk 
Niii'TiAS  fratre.  De  là.  conriliarp  a  pris  le  sens  de  «  pi'ocurer  »  en  général, 
p.  ex.  conciliare  (jloriiim,  (/raliaiii,  avrtorilatcm,  famrem,  dignitalem,  pacem, 
olium,  ete.  Quinlilien  (VI,  3,  l.j)  dit  mmw  tonciliare  risiun,  «  taire  rire  ». 


Notes  d'épigraphie  byzantine 


Los  inscriptions  suixautcs,  connues  depuis  longt(uii])s  et 
])lus  d'une  fois  commentées,  donnent  lieu  à  certaines  obser- 
vations qu'on  ne  trouvera  point  chez  leurs  précédents  édi- 
teurs. Ces  textes  figurent  dans  notre  Fecueil  des  inscrip- 
tions g-recques chrétiennes  d'Asie  Mineure,  dont  le  i)remier 
fascicule  ])araîtra  ])r(K'luiinenient.  Mais  ils  risquent  d'y 
demeurer  confondus  avec  la  masse  des  funéraires  plus  ou 
moins  banales,  tandis  qu'ils  intéi'cssent  l'iiistoire  litté- 
j-aire,  i)olitiqne  et  religieuse  de  rEni])ire  d'Orient.  C'est 
pourquoi  nous  les  re])roduisons  ei-ai)rès,  avec  un  bref  com- 
mentaii'c  destiné  surtout  à  compléter  celui  de  nos  i)rédé- 
cesseurs. 

I.  L'épitHphe  de  Vcvcque  Mncédonius. 

A  Paclia-Keuï,  au  sud  de  Palamout  (Lydie),  en  1886,  un 
Grec  de  Smyrne,  d'origine  française,  zélé  corres])ondant 
de  l'Eeole  française  d'Athènes,  M.  Aristote  Fontrier, 
déeouvrait  un  sarcoi)luige  de  mail)re  rouge,  dont  le  cou- 
vercle portait  une  inscri])tion.  Il  la  i)ublia  dans  la  célèbi'c 
revue  de  l'Ecole  évangélique  de  Smyrne,  Moucreîov  xai 
BipXioenKn,  IV  (1886),  n°  cpve'  (oo9).  M.  P.  Foucart,  alors 
directeur  de  l'Ecole  française  d'Athènes,  rei)roduisit  ce 
texte  dans  le  Bulletin  de  correspondance  hellénique, 
tome  XI  (1887),  p.  82-89,  d'ajjrès  un  estam])age  i)ris  i)ai- 
M.  Fonti-ier.  Mais  la  jniblication  ])i'incipale  est  celle  de 
M.  L.  Duchesne  Bulletin  de  correspondance  hellénique, 
t.  XI  [1887],  ]).  312).  Le  futur  histoi-ien  de  l'Église  aperçut 
immédiatement    l'intéi-èt    de    l'inscription,    un    des   rares 


2S  H.   GHÉGOIHK 

(locuinciits  é|)i^ra])]iiqu('s  où  il  soit  fait  iiKMitioii  d'une 
secte  hérétique.  Voici  le  tifiilus.  à  peu  près  tel  qne 
M.  Uucliesiie  le  ti-anseril  : 

+  "Ixveaiv  dTTO(JTÔ\uuv  èîTipàç  àvrip  ùjbe  èv  crapKei  Te  )uri  kutù 

adpKa  iepateu- 
crâ|uevoç,  Kai  Taùin  laaKÛpuuv  àipaiTOÙç  èXOujv,  èvGùbe  aKiivoç 

èvBéou  ^JUx^ç  dTToXéXuTrev, 
TToXùç  |uèv  Xûuijjaç  àaKncrei,  ttoXùç  5è  dYàmT,  Yevà,uevoç  eTricr- 

KOTTOç  9eîoç'  ôç  bii  Kai  Kaià  ttù- 
anç  aipécreujç  Ô7rXi(Tâ|uevoç,   inv  diXii6n  tuùv  TraTépuuv  tiîç 

KaBoXiKiîç  èKXiicTiaç  biecrobcTaTO  [ttîcjtiv]. 
.")     MaKebôvioç  outoç  Xaiurrpôv  èvTÛcpiov  èîTiTeXei  Kai  tô  Kaiù  toû 

'Avo)aoiou  baî[|uovoç] 
èv  TToXXoîç  Toîç  ÙTièp  XpicTTOÛ  biujYMOîç  àTT£vevKâ)U6voç  KXéoç. 

M.  Diichesne  a  foi't  bien  traduit  les  quatre  ])reniières 
lignes. 

«  Cet  homme  a  marché  sur  les  traces  des  apôtres,  et,  quoi- 
(pie  vivant  dans  la  chair,  exercé  le  ministère  sacerdotal 
(Tune  manière  toute  sj^irituelle;  il  a  pris  ainsi  le  chemin 
des  Bienheureux,  et  laissé  ici  l'enveloijpe  de  son  âme 
divine;  son  austérité,  sa  charité,  ont  jeté  un  grand  éclat, 
il  a  été  un  évêque  vraiment  divin.  De  j)lus,  armé  contre 
toutes  les  hérésies  il  a  gai'dé  («  sauoé  ».  Duehesne)  la  viuie 
foi  des  pères  de  l'Église  catholique.»  M.  Duehesne,  à  la  lin 
de  la  ligne  4,  supplée  avec  raison  1(^  mot  TrîffTiv  «  api)elé 
évidemment  par  le  contexte  et  qui  ne  peut  manquer  que 
par  suite  de  quelque  accident  ». 

M.  Duehesne  continue  ainsi  :  «  La  dernière  idirase  est 
l)eaueou]>  moins  claire.  A  la  fin  de  la  cinquième  ligne,  on 
trouve  un  groupe  de  trois  lettres  AAI,  j)uis  un  commence- 
ment de  lettre,  ])eut-ètre  «l'un  M  ou  d'un  N.  On  poun-ail 
sui)i)oser  que  la  ligne  se  continuait  et  sui)pléer  bai[jaoviuj- 
bouç  bÔYMaTOç],  aj)])osition  à  toû  dvo|Lioiou  (1'  'Avô)aoiov,  \v 
dogme  des  Anomœens).  » 

M.  Fran/.  Cumont  a  de|)uis  ])r<)])()sé  le  su|)i)lémen(  beau- 
couj)  j)lus  simpli'  :  bai[)aovoç].  Quelques  lettres  mancpiaient 
donc  à  hi  fin  de  la  ligne  4,  comme  à  la  fin  de  la  lign*^  5,  la 
|)ien-e  étant  légèrement  endommagée  du  coté  droit. 
M.    Duehesne,    il   est    vrai,  est  imait  que   le   texte  souffrait 


NOTES    d"ÉPIGRAPHIE    BYZANTINE  29 

d'une  lacune  infiniment  plus  grave.  «  Le  groupe  KAITO 
avant  KATA,  dit-il,  interrompt  le  sens.  S'il  doit  être  main- 
tenu, s'il  ne  forme  pas  digrapliie  avec  le  groupe  suivant 
KttTà  Toû,  il  exige  un  supplément  plus  compliqué.  Les  cinq 
j)remières  lignes  ont,  il  est  vrai,  leurs  dernières  lettres  au 
bord  de  la  cassure;  mais  je  ne  crois  jias  que  la  cassure 
ait  emporté  beaucoup  de  lettres...  Peut-être  le  gi-aveur 
a-t-il  omis,  par  distraction,  un  assez  grand  nombre  de 
lettres  ou  de  mots.  Quoi  qu'il  en  soit,  nous  n'avons  pas 
l'inscription  dans  son  intégrité.  L^ne  chose  est  claire, 
malgré  tout,  c'est  qu'elle  parle  des  mérites  que  le  défunt 
s'est  acquis  en  luttant  contre  les  Anomœens  et  en  su])por- 
tant  des  persécutions  pour  le  Christ.  » 

M.  Duchesne  montre  ensuite  que  Macédonius,  évèque 
d'Apollonis  en  Lydie  (^),  doit  être  identifié  avec  Macédo- 
nius,  l'un  des  04  évêques  signataires,  en  366,  d'une  lettre 
au  pape  Libère  (Jaffé,  228).  Le  document  ne  nous  est  point 
l^arvenu;  en  revanche,  nous  avons  la  réponse  de  Libère, 
qui  «  nomme  dans  l'intitulé  les  64  évêques  w,  tous  de 
Thraee  ou  d'Asie  Mineure.  Les  soixante-quatre  étaient 
des  modérés,  partisans  de  rôfioioûmoç  plutôt  que  (h' 
rôjUOOÙcriGÇ,  mais  en  tout  cas  adversaires  des  Ariens  purs 
ou  Anomœens,  Persécutés  sous  Constance  et  Valens,  ils 
eherehèrent  un  appui  à  Rome,  «  en  sacrifiant,  dans  la 
lettre  au  pape  Libère,  les  nuances  qui  les  séparaient 
encore  de  la  pure  orthodoxie  ». 


Il  serait  regrettable  de  renoncer  à  bien  comprendre  la 
dernière  ligne  de  l'insci'iption,  celle  qui  précisément  jmrle 
des  Anomœens  et  des  persécutions  subies  par  Macédonius. 
Nous  i)ensons,  comme  nous  l'avons  indiqué  plus  haut, 
qu'aucune  lacune  grave  ne  nous  emjîêche  de  lire  cette  der- 
nière phrase.  Le  supi)lément  ba{[juovoç],  de  M.  Cumont, 
suffit,  comme  le  supplément  [Triaiiv],  de  M.  Duchesne.  Si 


(1)  M.  Duchesne  dit  ApoUonias,  mais  le  véritaljle  nom  paraît  être  Apollonis. 
Cf.  \V.  M.  Uamsay,  Hist.  geogr.  of  A.  M.,  p.  120;  et  le  nom  ttuc  à  lui  seul 
(Palamonf)  paraît  témoigner  en  laveur  d'  'AiroXXuuviba.  Cf.  paXavîbi  =  bala- 
mout. 


30  H.   GRÉGOIRE 

doiiclo  texte  de  la  1.  li  paraît  inintelligible,  c'est  qu'il   est 
mal  accentué  et  mal  cou]»'. 

En  effet,  la  dernière  phrase,  telle  qu'on  la  ])()nctue  et 
(ju'on  racccntue  dejmis  Fontriei-  :  MoKebôvioç  oûtoç  \a)HTTpôv 
èvTÛqpiov  èTTiT6\€î  Kttî  TÔ  Kaxà  Toû  àvouoiou  bai[)aovoç]  èv  ttoXXoÎç 
Toîç  ÙTTèp  Xpiaioû  biiUT.Lioîç  dTTÊvevKàpevoç  kXéoç,  est  évidem- 
ment incorrecte,  ]misqu'elle  senible  coordonner  l'indi- 
catif èmTeXeî  et  le  ])artiei])e  dTrevevKÛuevoç.  On  voit  que  le  xô 
qui  embarrassait  M.  Duchesne  doit  être  l'articb»  du  sub- 
stantif kXéoç  dont  il  est  séparé  ])ar  une  série  de  dix  mots, 
mais  on  n'ajierçoit  pas  la  raison  d'une  construction  si 
embarrassée.  Cette  critique  subsiste,  même  si  Kai  signifie 
aussi. 

Mais  la  difficulté  i)rincipale  réside  dans  les  mots  èvrâ- 
q)iov  èTTiTeXeî.  'ETTiTeXiIi  ne  signifie  pas  autre  chose  qu'accom- 
plii\  célébrer.  'Evrâqpiov  ayant  le  sens  de  linceul,  non 
iV enterrement,  rex])ression  est  intraduisible. 

Nous  croyons  avoir  résolu. ce  petit  problème  en  lisant 
èvTÛcpiov  èTti  réXei  et  (mi  mettant  une  virgule  avant  Xa)LiTTpôv. 
MaKebôviOç  oùtoç  termine  ainsi  la  ])ro])()sition  ]ir('C('Mlente. 
Et  l'on  tiaduira  désormais  : 

«  Enfin,  il  a  aussi  emporté  (dans  la  tombe)  —  glorieux 
linceul  —  la  gloire  (du  triomphe)  sur  le  démon  Anomœen 
au  cours  de  nombreuses  persécutions  subies  pour  l'amour 
du  Christ.  «  Tout  s'éclaire.  La  place  singulière  de  l'article 
TÔ  ai)paraît  maintenant  naturelle,  puisque  XajUTrpôv  èvrâqpiov 
est  Vattribui  de  tô...  KXéoç. 

Notre  lecture  et  notre  interprétation  seront  évidentes 
pour  quiconque  aura  reconnu,  dans  le  texte  ainsi  constitué, 
une  allusion  à  un  mot  fameux  dans  la  littérature  grecque. 
Nous  n'avons  j)as  l'intention  de  faire  ici  l'histoire  com  - 
j)lète  de  ce  mot,  bien  que  le  sujet  mérite  d<'  tenter  quelque 
|)hilologue.  Peut-être  un  vers  de  Simonide  est-il  la  source 
j)i-emière  d'une  longue  tradition  :  èvidcpiov  bè  toigOtov  dut' 
eùpùjç  0Ù6'  ô  navbaïadTuup  âinaupubaei  xpôvoç  (fr.  -i,  à  jjrojxjs 
des  morts  de  Salamine).  En  tout  cas.  déjà  la  métaphore  y 
ap])araît,  èvTdqpiov  étant  employi'  au  sens  de  gloire  . 

Isoerate  (p.  l2oA,  Archidumo.s),  sans  douti'  d'après  Phi- 
listos,  historien  de  Denys,  pi'ête  à  un  familier  du  tyran 
cette   j)hrase  où  l'on  |)eiil   iceonnaît  re  rinflnence  de  Sin)o- 


NOTES    d'ÉPIGRAPHIE    BYZANTINE  31 

nide  et  qui,  à  son  tour,  devint  classique.  Denj^s,  assiégé 
par  les  Carthaginois  et  menacé  par  ses  sujets,  veut  fnii-. 
Tûjv  bè  xpwjjiivvjv  Tivôç  To\|un(TavTOç  eÎTieiv,  ibç  KaXôv  ècriiv 
èviâqpiov  n  Tupavviç,  ai(Jxuv0eiç  èqp'  oîç  bievon9r|  ktX.  (iucl- 
qu'iui  ayant  osé  lui  dire  :  «  la  roj^auté  est  un  beau  lin- 
ceul »,  il  rougit  de  sa  détermination,  vainquit  les  Cartha- 
ginois, rétablit  son  autorité,  resta  tyran  jusqu'à  sa  mori  et 
transmit  le  sceptre  à  son  fils  (i). 

Plutarque  se  réfère,  en  deux  passages  i^),  à  cette  anecdote 
qu'on  lit  aussi  dans  Diodore  fXIV,  8, 4  --  XX,  78).  Au  début 
du  traité  El  irpecrPuTÉpiu  TToXiTeuiécv,  An  Seni  Respiiblicn 
}>erenda  s/7  (p,  783  d-e,  éd.  Bernardakis,  V,  p.  22)  il  s'ex- 
prime ainsi  :  Où  yàp  x\  lupavviç,  ujç  tiç  eirre  Aiovucrîiu,  Ka/ôv 
èvtàqpiov  àW  èKeiviu  ye  Trjv  juovapxîcxv  juetà  Trjç  dbiKiaç  lô  yc 
\kv\  iraùcracrôai  crujuqpopàv  leXeiwiépav  èTToiiicre...  TToXiieia  bè 
br|)U0KpaTiKri  Kai  vÔ)lii)uoç  dvbpôç  eOiCuévou  TrapéxÊiv  aÙTÔv  eux 
fiTTOv  dpxôjuevov  ujcpeXî)uuuç  \\  ctpxovia  KaXôv  èvrâcpiov  mç  dXii- 
6iijç  iriv  dîTÔ  roû  piou  bôEav  ruj  Gavdruj  TipocTTiGticri... 

(c  Non,  ce  n'est  pas  la  tyi'annie,  c'est  la  conduite  d'uji 
républicain,  d'un  citoyen  docile  aux  lois,  prêt  à  se  rendre 
aussi  utile  dans  l'obéissance  que  dans  le  commandement, 
qui  nous  fait  vraiment,  à  l'heure  de  la  mort,  un  beau  lin- 
ceul de  la  gloire  gagnée  ])endant  notre  vie.  » 

On  aura  remarqué  que  la  construction  KaXôv  èvrdqpiov... 
tnv  diTÔ  T.  p.  bôEav...  Trpo(JTÎ6ricri  est  exactement  imreille  à 
XaïuTTpôv  èvTdqjiov...  tô..,  dTTevevKtt)iievoç  KXéoç.  Il  est  possible 
({ue  le  passage  très  connu  de  Plutarque,  cité  plus  haut,  soit 
le  modèle  de  l'épitaphe,  quoique  Polybe  et  d'autres  aient 
imité  la  même  expression  (v.  Thesniiriis.  s.  v.  'evidcpioç) 

D'ailleurs,  le  mot  du  familier  de  Denys  (^)  n'a  jamais 
cessé  d'être  pojjulaire.  Plus  d'un  siècde  et  demi  a])rès 
Maeédonius,  l'impératrice  Théodora  en  faisait  une  bril- 
lante a])])licati()n  à  son  ('poux  et  à  elle-même,  que  iruMiaçait 


(')  Voir  aussi  Emex,  Var.  Hist.,  IV,  8. 

{'-)  Voir  Pai  i,Y-WissowA,  s.  v.  Dionysios,  V,  S8()  ;  Cafo  Major,  'H.  Variantes, 
Apop/itli.  Reg.,  ITod;  Dion.,  .S.j. 

P)  TûJv  éTaîpuuv  tiç  'EWoTribriç  ovo,ua  (t^licii,  V.  H.,  IV,  8).  'E\iwpiç  |uèv 
ouv,  €Îç  Tiûv  cpiXuuv,  diç  b'ëvioî  qpaaiv,  ô  TToiriTÔç  iraxiip  (Diodore,  \IV,  8,  ."> 
=  t.  III,  p.  193,  éd.  Vogel).  Plus  loin  (p.  194)  Diodore  rapporte  un  mol  de 
Pliilistos  ([ni  exprime  la  même  idée  an  moyen  d'une  image  plus  grossière. 


32  H.  GRÉGOIRE 

la  sédition  Xika  (o32).  Prooopc  (B.  P.,  I,  24)  nous  lapportc 
sa  virile  harangue  en  ])résoiK'e  de  Justinieii  et  de  la  cour, 
frai)])és  de  panique.  Elle  conclut  i)ar  cette  citation  d'iso- 
erate  ou  de  Phitarque  :  'E)uè  yàp  tiç  Kai  TraXaiôç  àpécTKei  Xôyoç, 
liuç  KaXôv  èvidcpiov  n  PacTiXeîa  ècTTÎv.  11  se  ])ourrait  que  beau- 
coup d'entiv  nous  connussent  ré])isode  et  le  mot  ])oui'  les 
avoir  lus  jadis  dans  Vllistoire  du  moyen  âge  de  V.  Duruy  : 
«  Pour  moi,  j'adopte  cette  j)ensée  des  Anciens  que  le  trône 
est  un  glorieux  tombeau  »  (*). 

*     * 

Mais  revenons  une  dernière  fois  à  notre  éjntaphe.  Le 
tour  oratoire  et  i)oétique  n'en  a  pas  été  assez  remarqué. 
Datée  de  378  environ  (2),  elle  présente  déjà  très  nettement 
le  rythme  byzantin.  La  loi  dite  de  Meyer  est  appliquée 
avec  rigueur  :  dâpKa  lepaTeucrâiaevGÇ,  quatre  atones  entre 
deux  toniques,  finale  dactyliqu(^  (tonique);  vpuxiiç  diroXé- 
XuTT€V  (^),  i\('U\  atones  entre  les  dernières  toniques,  finale 
dactylique;  Xà)anjaç  dcTKricrei,  èiTiO'KOTTOç  Geioç,  aîpéaeaiç  ôttXi- 
(7â)uevoç,  MaKebôvioç  oùtoç,  dTtevevKâiUÉVOç  kXégç.  La  seule 
dérogation  à  la  règle  serait  èviâçiov  èiriTeXeî  (cinq  atones 
entre  deux  toniques).  Or,  si  EFTITEAEI  était  réellement  un 
veibe,  il  finirait  la  phrase  et  la  loi  devrait  trouver  son 
application  dans  cette  clausule  comme  les  autres.  Ainsi 
l'étude  rythmicpie  du  morceau  confirmerait,  s'il  en  était 
besoin,  notre  lecture  ("'). 

On  n'exigera  point,  ])ens()nsnous,  que  nous  citions  des 
exemples  de  la  tournure  èiri  léXei,  assez  rare  à  réi)oque  clas- 
sique, qui  ])araît  être  avec  léXoç  adverbial  dans  le  même 
rapport  que  notre  sur  la  fin  avec  notre  enfin.  On  en 
trouvera  quelques-uns  dans  le  Thésaurus,  s.  v.  TéXoç, 
col.  1996i).  Platon  lui-même  a  dit  dans  la  République 
fVl,  j).  oO()i))  :  Mr)  Trpôç  Aiôç,  r\  b'ôç,  uj  ZujKpaTeç,  ô  rXaÛKUJV, 
ujdTTep  èni  léXei  ujv  dTTOCJTi'îiç. 


(*)  «  J'ainii'  l'ctie  vieille  iiuixiiiie  (|iie  l;i  inmi'ijre  est  un  ijlorieiix  lineeiil  », 
liaduit  M.  Cil.  Dielil,  Jnstinien,  p.  52. 

(-)  Voir  L.  UiciiESNE,  /.  /. 

(^)  Pour  diToXAûiirev. 

(*)  Voir  eiieoie,  sur  répilaplie  de  Maeédonius,  le  Dûtiommire  d'Arr/icologie 
rlirctjenne  et  (le  liturgie...,  .s.  r.  Culholitiiie,  eol.  :2G3i(p()wr  l'expression  koSo- 
AiK>i  éKKXpaia). 


NOTES    D'ÉPIGRAPHIE    BYZANTINE  33 

II,  Le  Typikon  de  Nicéphore  de  Constantinople 
et    un   poème   méconnu    de    Nicéphore   Blemmydès. 

MM.  Joseph  Keil  et  voii  Premei'steiu,  les  excellents 
épigraphistes  autrichiens,  ont  publié  de  1908  à  1914  les 
résultats  de  trois  fructueuses  exi^lorations  de  l'Asie 
mineure  occidentale.  Parmi  les  nombreux  textes  byzantins 
qu'ils  ont  copiés  avec  exactitude,  et  commentés  avec  le 
même  soin  que  les  inscriptions  antiques  relevées  par  eux. 
se  trouve  un  curieux  fragment  (^)  où  ils  ont  cru  reconnaître 
le  début  du  typikon  ou  règle  monastique  composée  par 
TsTicéi^hore  Blemmydès  i)Our  le  couvent  qu'il  avait  fondé. 

Voici  ce  fragment,  restitué  en  partie  ])ar  les  éditeurs,  en 
partie  par  nous-raême  : 

[AÔYOi  NijKiçôpou 

[îTpôç  TTJàvraç 

[toùç  èv  Xi'piaT)uj  dbeX- 

[cpouç.  'AY]aTTdT€  dXîXouç. 
o  [Eï  Tiç  UYiaJi'vov  rô  crô- 

[|ua  ô\iYUj]peî  xôv  irpo- 

[Keijuévov  e]îç  èKiadOn- 

[cTiv  iLbe  è]vTa\)uôv  Trpo- 

[qpaaiZlôJiuevoç  irpocpâ- 
10  [O'eiÇ  èv  à|u]apTrieç,  (2)  oûto- 

[ç  dcpoptlJéaGo  eùbo- 

[|udba  )u]îav  :  —  Eï'tiç  u- 

[|aôv  dJvTiXÉYei  èîTi- 

[Ti|uub|Lie]voç  Tiapà  àb- 
lo  [eXqpoO  rjd  Kard  bùv- 

[ajuiv]  Kè  )nî  ÙTraKOÙcTri 

[d(pop]iZ;écr9o  Ô|ulioç. 


(*)  Territoire  de  l'ancienne  Baçjis.  Près  de  Gjiire.  Jéniseliéliir,  eiinelière 
turc.  Pilastre  à  demi-colonne.  Le  champ  de  l'inscription  se  trouve  sur  la  lar- 
geur du  pilastre.  L'inscription  vient  d'un  monastère  dont  il  est  question  dans 
les  Denkschriften.  —  Keil  et  von  Premerstein,  Denkschriften  de  l'Académie  de 
Vienne,  LIV(i911)  II,  p.  127,no23i.  Fig.  80. 

(^)  TTpoqpaoïîIôiuevoç  TTpoqpctaeiç  év  â|uapTiaiç.  Paroles  du  psaume  CXL,  4, 
souvent  citées.  Par  exemple,  v.  St-Grégoire  de  Nazianze,  Migne  PG,  p.  .391a 
(XXXV1,2),  etc.. 


34  H.   GRÉGOIRE 

Je  110  défendrai  pas  ici  mes  sui)])léiiieiits  (1.  5,  7,  8,  9, 
10,  12).  Je  ne  crois  j)as  utile  non  plus  de  transcrire  ce 
texte  dans  l'orthograplie  usuelle.  Mais  je  ti-aduis  :  «  Paro- 
les de  Nicépliore  à  tous  les  frères  en  Christ.  x\iinez-vous 
les  uns  les  autres.  Si  quelqu'un,  étant  sain  de  corps, 
méprise  les  préceptes  proi^osés  ici  et  qui  doivent  être 
ap])ris  par  cœui",  en  alléguant  des  ])rétextes  ])()ur  i)éclier, 
qu'il  soit  excommunié  ])endan1  une  semaine.  Si  quelqu'un 
auquel  un  frère  imi)Ose  une  ])enitence  n'excédant  j)as  ses 
forces,  y  contredit  et  n'olx'it  point,  qu'il  soit  i)areillement 
excommunié.  « 

Or.  il  n'existe  aucune  ressemblance  entre  la  partie  con- 
servée du  typikon  de  Nicépliore  Blemmydès  (v.  Nicé- 
phore  Blemmydès,  éd.  Heisenberg,  ]).  93-99)  et  notre 
inscription.  Par  contre,  ces  deux  canons  rappellent  le  ton 
et  le  style  d'une  règle  monastiqiu;  autrement  fameuse,  les 
canons  de  Nicépliore,  iiatriarclie  de  Constantinople, 
publiés  par  J.  B.  Pitra  dans  Juris  Ecclesinstici  (irnccoriim 
historiii  et  moniimenta,  t.  II  (1868).  Il  faut  lire  ce  que  dit 
Pitra  de  la  célébrité  d(^  ces  canons  (]).  314  et  3lo).  Le  canon 
Ef'  (63)  de  Nicéiiliore  porte  :  Ei  xiç  eùpéGri  qpaTpmZ^ojv  là  toû 
TTpoecTTÛJTOç  Yivô|ueva  Kai  0"uvTapâcrcruuv  Triv  d5e\9ÔTi'iTa,  dqpo- 
pilioQoj  r|uépaç  lé  tnpocpaxuùv.  Le  canon  pK^',  !>  339,  surtout, 
rappelle  notre  second  i)récepte,  sur  les  ])énitences  Katà 
bùvauiv  :  TTepl  5è  TeTpâbujv  Kai  TTapadKeuuùv  ô  èTTixiiuûJV  5oki- 
piàcfaç  THV  èKâcTTOu  bûva)uiv  Kui  là  pdpn  Kaià  tô  buvuTÔv  ôq)ei\ei 
bibôvai. 

Il  est  vrai  que  les  canons  de  notn^  ins('ri])ti()n  ne  se 
retrouvent  pas  textuellement  dans  le  recueil  de  Pitra. 
Mais  ce  recueil  est  formé  d'éléments  assez  disparates; 
quelques  ])réce])tes  seuhmient  y  sont  formellement  jH'é- 
cédés  d{^  l'indication  NiKiicpôpou.  L'atti'ibution  au  patriai'che 
de  Constantiiioi)le  (8U6-8I5)  est  en  général  douteuse (*). 
Il  est  j)robable  qu'on  mettait  sous  son  nom,  j)<)ur  leur 
donner  jilus  d'autorité,  beaucoup  de  ces  cunons  monas- 
tiques. 

S'il  faut  ainsi  renoncer  à  mettre  au  nom  de  Nicépliore 
Blemmydès  ce  fragment  d'ailleurs  insignifiant,  nous  avons 


i|  (tu  |ieiil  |M'n.sci-  ;mssi  :'i  Mcridioïc  Ir  .Iimiiic  (l:2()0-12(5f),  <•!.  I'ili:i,  |i.  ."{lt>. 


NOTES    d'ÉPIGIIAPHIE    BYZANTINE  35 

en  revaiiclu'  i>ii  l'estituer  an  grand  i)olygra|)ho  byzantin  du 
xiii^  tsièele  vingt  «  hexamètres  »  d'une  eertaine  importance 
historique.  Il  s'agit  d'une  inseri])tion  anonyme,  aujour- 
d'hui disj^arue,  qui  se  trouvait  sur  hi  porte  Nord  de  la  cita- 
delle de  Smyrne.  Kirchhoff  l'a  donnée  jadis  (CIG,  8749) 
d'après  Chandler  et  Pococke.  Mais  M.  Hasluck,  l'épigra- 
phiste  anglais,  mort  si  prématui'ément.  m'en  avait  com- 
muniqué une  meilleure  copie,  retrouvée  par  lui  dans  les 
])apiers  du  vo^-agenr  Salter,  au  Eritish  Muséum  : 

1     Tnvbe  TTÔXiv  TTàpoiBev  dxaKXuTnv  irep  èoûcav 
leîxeai  luapiuaipouaiv  èiJO'Teqpàvoiç  t'  èvi  ttùpyoiç, 
Kai  x«pi(?i  Ppûouaav,  ôcrailçi  TTioXîeBpov  déEei, 
eùcTTOov,  eùàyu  i  av,  èpibo|uov,  eùKoéteipav, 
o     d\i  TTepi|uâxiiTOv  îbè  x^ovi  TTOuXuPoTeipi'i, 
Xeip  ôXooîo  xpôvoio  biéxiitafev,  lîûre  ve^pôv 
TTÔpba\iç  dYpia,  pd\e  bé  )uiv  Kaid  Tcî'lÇ» 
Ypnï  bé  )uiv  SfiKaTO  TTavÎKeXov  îaxvoTrapeiuu, 
KdWoç  djaaXbùvada  Kai  dYXauiv  èpaieivriv. 

lO     'AWd  'PubiuTiç  Koîpavoç  ÔTTXoTépnç  Muudwnç 
Tiaiç  AouKoqpÙTUJV  èpiKubuuv  PaaiXnuuv, 
oiKieipaç  |U0Y€0ucrav,  d7Tocp0i)uévriv  T'é\e(ai)puuv 
YnpotÇ  dfréEeaev  Kai  dK|miiTa  TeiiEaro  Yuîa, 
puKvd  {xic)  Te  napr'Yia  Kai  à^)ea  XuYpà  TOvuJCTaç, 

lo     9r|KaT0  KOUpibir|v  dnô  Ypcôç  TTevTaKopujvou. 
Tôv  bé  Te  Kai  ^aaiXeiav,  dva  xQovôç  nbè  ttôXgig, 
KàWifjLOv,  eÙTTaTépeiav,  èTTiÎpaTOv,  eiboç  dpiCTriv, 
ôqjiv  éTTUKeXov  XapÎTeaai  XeuKOTrapeîoiç, 
qpur^v  9'  ùv|jiKÔ|uoiaiv  ei(TKO|uévnv  KUTrapÎTTOiç. 
Oeinç  èç  XuKdpavTaç  dîTeipeaiouç  auvavdcro"eiv. 

Traduction  : 

«  Cette  cité  jadis  illustre  ])ai"  ses  murs  éclatants,  ses 
tours  bien  couronnées,  cette  cité,  i)leine  des  agréments 
qui  grandissent  les  villes,  beaux  portiques,  belles  rues, 
nobles  i)alais,  bains  luxueux,  cette  cité  disputée  et  sur 
mer,  et  sur  la  terre  fei'tile,  la  main  du  Temps  destruc- 
teur l'avait  ravagée,  comme  la  panthère  sauvage  déchire 
le  faon.  Elle  l'avait  abattue,  et  rendue  semblable  à  une 
vieille  aux  joues  décharnées,  détruisant  sa  beauté  et  son 
charme   aimable.    Mais   le    ])rince   de  la   nouvelle  Rome, 


36  H.  GRÉGOIRE 

Jean,  fils  des  j^loricux  ('ni])ereiii'.s  de  la  souche  des  Dueas, 
eut  ])itié  de  sa  jx-iue,  et  compassion  de  sa  ruine.  Il  fit 
disparaître  les  traces  de  sa  sénilité,  rendit  la  solidité  à  ses 
membres,  effaça  les  rides  de  son  visage,  donna  une  vigueur 
nouvelle  à  ses  articulations  usées;  et,  d'une  aïeule  qui 
avait  vécu  cinq  âges  de  corneille,  il  fit  une  jeune  épousée. 
O  roi  de  la  Terre  et  du  Firmament,  jjermets  qu'ils  i-ègnent 
ensemble  d'innomljrables  années,  cet  Empereur  et  son 
Impératrice,  belle,  bien  née,  adorable,  dont  le  eorps  est 
cliannant,  dont  le  visage  est  pareil  à  celui  des  Grâces 
aux  blanches  joues,  et  la  taille  semblable  à  celle  des 
cyprès  aux  cimes  chevelues.  » 

On  li-ouvera  dans  mon  Recueil  un  a])i)ai'eil  critique 
justifiant  les  leçons  adoptées.  (>e  texte  ])eut  être  con- 
sidéré comme  sûr.  Mais  le  princijjal  intérêt  de  la  coine 
de  Salter  est  de  nous  i-évéler  la  date  précise  du  poème  : 
<(  At  Smyriui  (Jasile  Gaie,  on  tht'  bottom  ofthe  stones  is 
E  ,S'MJ\â,  (ëiei  ,S"Mi\â)   »  L'an  6731  de  la  Création  du  monde 

Cette  date  ne  fait  que  confirmer  les  indications  très 
claires  de  l'inscription  métri(iue  en  ce  qui  concerne  les 
souverains  nommés  aux  derniers  vers,  Jean  Vatatzès, 
monté  sur  h;  trône  en  l:2'-'2.  et  Irène  (morte  en  12-41),  que 
célèbr(mt  à  l'envi  tous  les  contemporains  (Acroi)olite, 
p  67-68.  Eonn  (I  (12-63.  Heisenberg).  Pacli^^mère.  1,  \).  70). 

Si  donc  la  nouvelle  copie,  à  cet  égard,  n'ajoute  rien  à  ce 
que  savait  déjà  Kirchlioff  (voir  son  commentaire  dans  le 
Corpus  de  Eoeckh)  la  date  donnée  par  Salter  rend  certaine 
l'attribution  à  Nicéphore  Blemmydès,  que  nous  ])ro])osons 
l^our  la  première  fois. 

A  ftrioi  i,  on  aurait  pu  latrirmer.  Seul,  à  cette  éi)oque, 
l'universel  Nicép.iore  Blemmydès,  le  plus  savant  homme 
de  l'Empire  de  Xicée,  théologien,  i)hilosophe,  physicien, 
médecin.  géograi)lie.  poète,  pouvait  se  risquer  à  com])oser 
des  he\amètres.  M.  Krumbacher  disait  de  lui,  en  1897  : 
(Geschichte  (1er  hyzn  iH/iischen  Literntur,  deuxième  édi- 
tion, j).  iiK)  :  <(  Sa  culture  classi([ue  le  fit  recourir  à  l'hexa- 
mèd'c.  un  xci's  (pii  avant  son  éi)oque  est  extrêmement  rare 
et  qui  ne  fut  emi)loyé  un  peu  ])lus  fréiiucminent  (pi'aux  xiv* 
et   xv*-'   siècles,    sous    rinilucnce    de   l'humanisme.  »   C-ette 


NOTES    DÉPIGRAPHIE    BYZANTINE  37 

l'cniarqno  stn-  la  rareté  do  riicxainètre  à  l'époque  byzantine 
(lenieure  absolument  vj'aie. 

Les  Byzantins,  en  effet,  ne  l'ont  jçnère  employé  que  pour 
des  pièces  très  courtes;  les  uMivres  ijoétiques  de  longue 
haleine  sont  en  trimètres  ïanibiques,  ou  en  vers  (c  ])()li- 
tiques  ».  Ainsi  Georges  Pisidès  (vu*  siècle)  et  Tliéodor-e 
Stoudite  (viii*'-ix^  siècle)  n'ont  écrit,  le  premier  qu'un  seul 
poème  en  hexamètres,  le  second  qu'une  seule  épigramme 
eu  distiques.  Comparées  à  la  masse  énoi-me  de  leurs 
œuvres  ïambiques,  ces  exceptions  coufii-ment  la  règle.  Du 
neuvième  siècle  il  nous  reste  un  curinen  ei>ii>ruphiciini  en 
hexamètres,  l'inscription  de  l'église  de  Skripou  (Orcho- 
mène)  en  Béotie  (St)-zygowski,  Byzantînische  Zeitschrift, 
III  (1894),  p.  8  et  suiv.)  Au  dixième.  Jean  Géomètre  fit 
([uatre  hymnes  en  distiques  et  un  hymne  alphabétique  en 
hexamètres,  le  tout  en  l'honneui-  de  la  Vierge;  il  faut  y 
joindre  le  TTapâbeiO'oç,  (99  quatrains  en  disticpies)  et  bon 
nombre  d'épigrammes.  Mais  Jean  Géomètre  est  un  isolé. 
véritable  classique,  et  humaniste  avant  la  lettre.  Chris- 
tophe de  Mytilène  (xi«  siècle)  sur  145  i)ièces,  n'en  a  écrit 
que  18  en  hexamètres  (Ed.  Kurtz.  Die  Gcd.  d.  Christ.  Mity- 
lennios,  préface)  (^).  Enfin,  Théodore  Prodrome  (première 
moitiédu  xii"  siècle)  s'est  servi,  lui  aussi,  du  vieux  mètre 
épique  (cf.  Ki'umbacher.  p.  749,  cf.  T-'ii)  :  de  nouveaux  spé- 
cimens de  son  savoir-faire  ont  été  publiés  en  ces  dernières 
années  (Byznniinische  Zeitschrift,  XVI  (1907),  p.  75 
et  MO;  Xli(190H)p.  264). 

Il  faut  ensuite  attendi'c  le  xiV  siècle  pour  retrouver 
des  hexamètres.  Pendant  cette  période  qui  embrasse  le 
XIII*  siècle  tout  entier,  la  seule  réaction  contre  la  tendance 
générale  à  délaisseï-  ce  vers  est  due  à  Xicéplioi-e  Blenimy- 
dès.  Encore,  n'avions-nous  de  lui  que  soixante-dix  hexa- 
mètres :  Toû  aÙTOÛ  eïç  tt'iv  uovnv  tûjv  Zuucàvèpujv  aiixoi 
riptuiKOÎ  (éd.  Heisenberg,  p.  112  sq.).  Or,  nous  savons  très 
exactement,  par  l'autobiographie  de  Bleinmydès  ^AuiTilCiç 
,uepiKr|.  p.    I    sqq.)  où    se  trouvait  en    12:!2-1223   ce   savant 


(*)  Autres  rélei'ftiicos  (Unis  Kniiiiljaclit'i".  (Iciildri  hoiii('ri(iiie  en  l'Iioiini'iii"  du 
général  AI;miak<''.s.  Ki'uiiihachci',  p.  TH.  \o\v  Indcr  dr  r(nivi-ai',c.  s.  v.  Hexa- 
)netiT . 


38  H.   GHÉGOIRE 

homme.  11  habita  Ephèse  et  Smynie  eiitie  l:2l.'iet  ll>:2l-^"2, 
dès  l'avènement  de  Jean  Vatatzès  (12!2i2)  il  fut  son  favori, 
et  vécut  à  la  cour,  qui  fésidait  alors  à  Nymphaeon  près  de 
Smyrne.  Car  h'  nom  (V Empire  de  Xicéc  est  donne  assez 
improprement  à  ce  moment  de  l'histoire  byzantine.  Vatat- 
zès et  Th('0(h)re  II  Lascaris  furent  sni-tout  les  empei'eurs 
de  Nymphaeon  et  de  Smyrne. 

Au  début  de  l'ill'l,  Hlemmydès  se  i-endit  à  Scamandre 
pour  y  étudier  sous  un  maître  nommé  Prodrome.  Mais 
bientôt  il  rejoint  Tenipereur  à  Nymphaeon  et  ne  le  quitte 
qu'à  la  fin  de  \ll%^.  Il  était  donc  dans  l'entourage  immédiat 
du  sou\ei'ain  au  moment  où  s'achevaient  les  travaux  des 
fortifications  de  Smyrne.  Jean  Vatatzès  devait  tout  natu- 
rellement s'adresser  à  lui  lorsqu'il  voulut  consaci-ei"  pai' 
une  inscription  en  vers  «  héroïques  »  la  renaissance  de  la 
patrie  d'Homère. 

Ace  petit  })oème  s'appliquerait  parfaitement  ce  que  dit 
M.  Heisenberg-  (p.  cv)  d'autres  pièces  de  circonstance, 
«  commandées  »  pai-  Vatatzès  :  «  Hlemmydès  imperatoris, 
ni  fallimur,  iussu  duo  carmina  alterum  heroïcis  alterum 
iambicis  \ersibus  composuit...  atque  imperatoris  laudes 
eis  })ra'dicantui-...  ».  Tous  les  doutes  sur  l'origine  de  notre 
morceau  disparaissent  lorsque  l'on  compai'e  les  soixante- 
dix  hexamètres  sur  Sosandra  aux  vingt  hexamètres  sur 
Smyrne.  Ils  se  ressemblent  étonnamment  par  un  même 
mépris  de  la  prosodie  et   des  règles  classicpies. 

11  n'existe  pas  encore  à  notre  connaissance  d'étude  spé- 
cialement consacrée  à  l'hexamètre  byzantin.  M.  Ed.  Kurtz, 
dans  sa  préface  aux  poèmes  de  Christophe  de  Mytilène 
(Ed.  Kurtz,  Die  (iedichic  <l.  Chrisloplioros  Mitylcnaios. 
Lpzg  1903,  ]).  IX)  dit  que  les  licences  «  byzantines»  dont 
usent  les  ïambogi-ai)hes  se  retrouvent  dans  les  hexamètres 
de  l'époque.  C'est-à-dire  que  a,  i,  u  sont  i'é])utés  communs, 
que  les  noms  ])i'o])res  excusent  toutes  les  ii-i-égularités,  et 
que  l'hi^tos  est  toujours  i)ermis.  Néanmoins,  les  hexa- 
mètres de  Théodore  Prodrome,  les  derniers  avant  ceux  de 
Blemmydès,  sont  encore  à  peu  près  corrects.  Et  M.  llei- 
senbei'g  déclare  n'avoir  i)u  découvrir  le  «système»  enqjloyé 
])ar  Blemmydès  dans  son  ])oème  sur  Sosandra.  l^n  effet, 
comment  scander   un    \  ers  comme  Sosmuli-u    il  :  oiZ^upôç 


NOTES    d'ÉPIGRAPHIE    BYZANTINE  39 

aïoç  (TriKÔç,  ouTOi  pr|i5ioç  oî)aoç,  ou  Sofuuidra  43  Tfj  Xamôqppnv 
dvaH,  6eîa  juepjuaipuuv  aiév,  ou  comme  Sinyrne  7  irôpbaXiç 
ctYpia,  pdXe  5é  |uiv  xaià  YCÎnÇ'' 

Je  pense  avoir  trouvé  le  secret  de  cette  versification  bar- 
bare. Blemmydès  doit  avoir  poussé  à  leurs  extrêmes  consé- 
quences les  «  licences  »  indiquées  plus  haut.  Il  a  traité 
comme  longs  jusqu  à  des  iôta  suivis  d'une  voyelle.  Il  faut 
scander,  Smyi-nc  7  :  7TÔpba|\iç  àjYp{a|  pàXe  bé  )uiv  Karàl^cxiriç, 
et  Smyrnc  14  :  piKvà  Te!7rapri|ia  Kai|  dipea]  Xuypà  To|vijbcraç.  Il 
reste  toutefois  dans  Sinyrnc  deux  vers  irréductibles,  H 
et  18,  mais  AouKOcpûiaiv  est  un  nom  propre,  et  quant  au 
vers  i.'-{,  il  suffit  d'écrire  dTTégeae  ])Our  le  ramener  à  la 
«  norme  ». 

J'avoue  que  dans  le  poème  sur  Sosandra  les  vers  irré- 
ductibles sont  plus  nombreux,  mais  les  copistes  ont  dû  en 
altérer  un  certain  nombre.  Quoi  qu'il  en  soit,  la  fabrique 
est  la  même. 

Notre  insci'iption  ne  manque  ni  d'un  certain  mouvement 
poétique,  ni  d'une  certaine  fraîcheur.  L'avant-derniei-  vei'S 
rappellera  aux  néo-grécisants  une  comparaison  fréquente 
dans  les  chants  populaires  romaïques  Le  poème  de 
Sosandra,  un  peu  plus  pédant  et  pesant,  commence  ainsi  : 

Tôvbe  veuuv  jueYeOûvtaTOv,  ai'Y^j;i  iraïuqpavôuuvTa 
Kâpiei  TTa|U)ue5éovTOç  eY^ipc  |Lié5ujv  KâpTidroç, 
Ppiapôqppuuv  craôcppouv  xe,  Yot^nviôuuv,  îeûbiKCç, 
bouKÔpXacTTOç  Muuâvvnç,  kO&oç  ôXriç  PacriXeînç. 

On  le  voit,  l'allnre  générale  est  pai-eille;  cf.  Tr|vbe  ttôXiv 
Tiâpoieev.  AouKÔpXacTTGç  =  iraiç  bouKoqpîiTUJV,  etc 

Au  vers  22  de  Sosandra,  Nicée  est  dite  eùpuàYUia  comme 
Smyrne  eùaYuia;  et  il  est  même  possible  que  l'aTraE  eipii- 
ILiévov,  eùÛYUia,  soit  une  faute  pour  eùpuaYuia.  EuXoéTeipa, 
d'ailleurs  mal  formé,  paraît  emprunté  au  vocabulaire  de 
Théodore  Prodrome.  Du  moins  pi'oposerai-je  de  corriger 
en  eùXoÉTeipa  (^)  le  mot  corrompu  eùoXéTeipav  qui  figure 
dans  un  poème  de  Prodrome  (Byzantinisclie  Zeitschrift, 


(*)  Cf.   Frankei.,  Geschichte  (1er  t/riechisc/ien  Nomina  agentis  aiif-Tv\p.   I, 
p.  127  (rt'l'érencc  obligeamiaent  communiquée  par  M.  Emile  Boisacq). 


40  H.   GHÉGOIRE 


Xll  (l'J03),  p.  !2()4j.  Quant;  ù  TrevTUKÔpuuvoç,  foi-mé  d'après 
TeTpaKÔpujvoç  (Hésiode,  fr.  171  Rziich  ;  et  cf.  Aristopliane, 
Oisenux,  (509)  l^lcmmydès  l'aura  pris  dans  VAntholog-ie 
(XI,  67).  Ce  mot  est  une  vai-iaiite  planudéeinie  (le  manu- 
scrit palatin  porte  Aaï  KopwveKdpri)  ;  <''f'st  ])Our(iuoi  Liddell- 
Scott  ne  le  cite  que  d'a])rès  notre  inscription,  tandis  que 
Hailly  l'omet  tout  à  fait. 

Henri  Grégoire. 


I 
J 


Astanetum 


I.  Comme  nom  commun,  ce  tenue  n'existe  ni  dans  les 
dictionnaires  latins,  ni  dans  Ducange.  D'Arbois  de 
Jubainville  ne  l'a  point  rencontré  dans  sa  moisson  de 
noms  en  etiim.  Nous  le  restituons  d'après  les  chartes,  où  il 
apparaît  seulement  comme  nom  propre  de  lieu.  xVvant 
donc  de  hasarder  une  conjecture  sur  l'origine  et  le  sens  du 
mot,  il  faut  cette  fois  commencer  par  en  prouver  l'exis- 
tence. Voici  d'abord,  au  point  de  vue  linguistique,  un 
tableau  des  principales  formes  latines  et  romanes  qui  ser- 
viront de  base,  rangées  autant  que  possible  par  ordre  de 
dégradation. 

On  trouve  Astanetum  en  827,  ])our  désigner  la  foi'èt  de 
Staueux  (j^rov.  de  Liège);  Astanido  en  814,  Asianid  en  888 
et  930,  aujourd'hui  Esneiix,  sur  l'Ourtlie,  près  de  Liège; 
Astanid,  Astancit,  ^J66,  désignant  Astenet  près  de  Wal- 
horn,  au  sud  d'Aix  la-Chapelle;  Astenidiim,  ix''  siècle 
(Essen,  Prusse  rhénane)  nous  montre  a  protonique  atté- 
nué en  e;  il  est  affaibli  en/  dans  Astinetum.  1170,  dési- 
gnant ."Tssenois  (comm.  d'Offagne,  prov.  de  Luxembourg'; 
dans  Astnide  874,  Astnid  927,  Astnidensis,  Asinetensis, 
Asnithe,  Asnide,  Asnede,  au  x^  siècle,  on  voit  la  voyelle 
protonique  disparaître,  puis  le  groupe  st  se  réduire  gra- 
duellement à  ss,  s,  comme  dans  le  wallon  tchession  ==  chas- 
tillon  (il  s'agit  encore  pour  ces  formes  d'Esscn  en  Prusse 
rhénane);  un  Ilasnidi  indéterminé  de  912  montre  l'appari- 
tion d'un  h  initial,  qui  peut  être  parasite  ou  marquer  un 
retour  à  l'éiymologie;  on  arrive  ensuite  à  des  formes  fran- 
çaises, wallonnes,  germaniques  :  Asteneit  966,  Aste- 
noit  1236,  12^'9,  Hastenoit  1154,  Astenoi  1192,  Ila.ste- 
noy  loOo,  Asneit,  Asnoit,  Assenais,  Assenede,  etc.  Les 
noms  des  lieux  germanisés  ont  en  général  mieux  conservé 


42  J.    FKLLF.rt 

la  consonne  tinale,  ede,  et:  Essen  fait  exception.  La  trans- 
formation de  la  finale  eit,  ei  en  eu,  propre  au  Nord-Est 
wallon,  apparaît  dans  /^aneux,  Staneux.  où  Vx  est  une 
graphie  an.i logique  des  mots  en  osiis,  eux.  Enfin  r  final, 
produit  de  l'analogie  également (aforem,  fr.  eur,  wallon  eu) 
appaïaît  dans  A.stenoir  1233,  Asfeneur  1303.  Ces  formes 
sont  assez  transparentes,  assez  nombreuses  et  assez  dissé- 
minées pour  nous  forcer  à  conclure  à  l'existence  d'un  sub- 
stantif astanetum. 

II.  (^uel  est  le  sens  de  ce  mot?  Il  s'agit  certainement 
d'un  lieu  boisé,  témoin  le  Slaneux,  qui  est  une  forêt  entre 
Theux,  Polleur  et  Spa,  témoin  le  lieu-dit  bois  cVEsneux, 
commune  de  Boninne  (Namur).  Si  le  radical  était  un  nom 
d'arbre,  (ju'il  fût  latin  ou  germanique,  il  n'aurait  pas 
échappé  aux  recherches.  11  n'est  pas  probable  non  plus  que 
ce  soit  un  nom  gaulois  d'arbre,  car  en  ce  cas  ce  nom  aurait 
du  rester  bien  vivant  à  l'époque  gallo-romaine,  comme 
betullos,  vernos,  et  se  serait  combiné  de  même  avec  le  suf- 
fixe latin  ctum  ;  or,  il  n'en  est  rien  :  la  littérature  latine  de 
Gaule  ne  nous  a  pas  cité  une  seule  fois  ce  terme  fécond  en 
applications  toponymiques.  J'en  conclus  d'abord  que  ce 
terme  doit  signifier  quelque  chose  de  plus  modeste  qu'un 
arbre.  Mais  vers  quelle  langue  orienter  ses  recherches?  Il 
semble,  d'après  les  formes  et  les  identifications  données 
ci-dessus,  que  les  Astauetum  sont  un  produit  de  l'extrême 
Nord,  faisant  son  apparition  assez  tard,  et  qu'il  est  naturel 
de  les  assigner  à  la  langue  germanique.  Mais  il  y  a  des 
localités  plus  méridionales  du  même  nom,  que  nous 
n'avons  ])as  encore  eu  l'occasion  de  citer  faute  de  foi-mes 
médiévales.  Ce  sont  Asnois  sur  la  Charente  (Vienne), 
Asnois  sur  l'Yonne  (Nièvre),  Assenny  dans  l'arrondisse- 
ujent  de  Troyes  (Aube),  Hnstenoy  k  Outrcau  (Nord),  Athe- 
iiay  de  la  commune  de  Chcmii'é  (Sarthe).  A  moins  que  la 
ressemblance  de  ces  noms  avec  les  précédents  ne  soit  un 
leuri'e,  une  étymo'.ogie  germani(iue  ne  s'im])ose  i)as.  Le 
chanoine  Roland  (article  Asiinctuni  dans  les  Mélan<;'es 
Kurlh),  a  la  suggestion  de  Grandgagnage,  Mém.,  ]).  39,  a 
eep<'niiant  proposé  un  hyi)Othétique  usfan  (variantes  astcn, 
<tslin),  (pii  serait  issu  de  l'allemand  asi,  branche,  n(xHid. 
Mais  le  collectif  tiré  de  ust  ou  de  :ist((n  ne  ])ouirait  dési- 


ASTANETl M  43 

gner  qu'une  collection  de  branches,  un  tas  de  branchages 
ou  d'émondes;  comme  tous  les  bois  sont  évidemment  des 
réunions  de  brandies,  il  ne  viendrait  à  l'espi'it  de  personne 
de  désigner  ainsi  un  bois.  On  pourrait  objecter  vir^ulfiim, 
mais  uir^iiltuin  est  un  buisson  de  belles  baguettes  droites 
et  poussant  dru  où  l'imagination  pratique  voit  déjà  de 
futures  cannes,  de  futures  flèches,  de  futures  lances. 
A  preuve  l'épisode  de  Polydore  au  début  du  III"  livre  de 
VÉnéide,  où  virgiiltn  alterne  avec  hastilia  (vers  22-23)  : 

Forte  fuit  juxta  tumulus.  quo  cornea  summo 
Virgiilta  et  densis  hiistilibii.s  horrida  myrtus. 

(c  Des  buissons  de  cornouillers  et  du  myrte,  se  hérissant 
en  dards  épais  ». 

Et  plus  loin  (v.  37)  :  «  Tertia  sed  postquam  majore  hasti- 
lia nisu  Aggredior...  »,  de  nouveau  le  buisson  est  apj)elé 
hastilia,  ce  qui  évoque  une  tout  autre  image  que  ramos  ou 
frondes  ou  l'allemand  astc. 

On  comprendrait  donc  un  collectif  *hastiletiim  au  sens 
de  collection  ou  bois  de  verges  droites  et  fortes  propres  à 
faire  des  javelots,  des  piques,  des  lances.  Or  * hastiletum 
serait  un  dérivé  du  latin  hasta.  Il  y  aurait  avantage  au 
point  de  vue  du  sens  et  de  la  dissémination  des  Astanetnm 
à  recourir  au  latin  hasta  plutôt  qu'au  germanique  ast. 
Hasta,  devenu  asta  en  Gaule,  aste  ou  haste  en  gallo-roman, 
est  resté  très  vivant  et  a  pris  des  acceptions  multiples  : 
lance,  broche  pour  rôtir  le  gibier,  verge  servant  de  mesure 
agraire,  bâton  féodal,  tige  d'asphodèle,  etc.  La  difficulté 
gît  du  côté  linguistique,  et  elle  est  la  même  que  pour  ast  : 
d'où  provient  le  an  de  astanetnm? 

Nous  renonçons  à  voir  dans  a.s/an  le  cas  régime  d'un 
nom  féminin  de  pi-emièrc  déclinaison  latine,  comme 
nonne-nonnain,  Berte  Bertain,  pour  deux  raisons  :  1°  cette 
désinence  ne  sattache  qu'aux  noms  propres  ou  communs 
de  personnes  ou  d'êtres  personnifiés  (rivières,  épée  de 
héros;  cf.  A.  Thomas,  Essais  de  philol.  franc.,  p.  31-50); 
or,  si  asta  est  un  féminin,  condition  qui  n'est  pas  réalisée 
pour  ast,  il  est  difficile  d'en  faire  une  personnification; 
2°  il  serait  difficile  aussi  d'admettre  que  le  suffixe  etum  ait 
été  joint  au  cas  régime  et  non  au  cas  sujet.  Il  faut  donc  se 


44  J.    FKI.LEI5 

rabattre  sur  le  suffixe  nniis,  mais  hàtons-nous  de  dire  qu'il 
n'y  a  rien  de  téméraire  dans  cette  nouvelle  proposition. 
Nous  postulons  l'existence  d'un  adjectif  ustaiiiis,  -a  ou  has- 
tanus,  -a.  signifiant  «  de  lance  »,  bientôt  devenu  substantif 
au  sens  de  «  bois  de  lance  ».  Ce  n'est  pas  plus  étrange  que 
*altaniis  hauhain,  *lon<>itnniis  lointain,  (pie  villiinii.s,  cam- 
panwi,  montanus,  fontanus,  issus  de  substantifs  comme  le 
serait  *astanus.  A  supposer  qu'on  ne  trouve  plus  aucune 
trace  directe  de  rainpanus,  monlonus,  fontanus,  il  serait 
nécessaire  d'en  admettre  l'existence  pour  expliquei'  cani- 
pania  ou  campagne,  inontania  ou  montagne,  fontania  ou 
Fontange.  Or,  nous  avons  au  moins  trouvé  astanea,  qui 
suppose  astanns.  Non  pas  un  astanea  incontestable,  il  est 
vrai,  mais  ([ue  le  lecteui'  juge  notre  intei"prétation. 
Ducange  a  donc  relevé  un  terme  astanea,  de  sens  indéter- 
miné, dans  un  acte  de  vente  de  meubles  (hisinensis  eccle- 
siae  poui"  le  rachat  de  captifs.  Le  texte  porte  «...liostiales  3 
pro  byzanliis  12,  astaneas  2  pro  byzantiis  8,  pulvinaria 
serica  ti-ia...  »,  ti'ois  manteaux  pour  douze  besants,  deux 
astanea  pour  huit  besants,  trois  coussins  de  soie.  L'article 
ajoute  que  certaines  copies  portent  castaneas  ;  mais  que 
viendi'aient  faire  dans  un  inventaire  de  meubles  deux  châ- 
taigniers, entre  trois  pallium  et  trois  coussins  de  soie? 
Tout  au  plus  peut-on  conjecturer  qu'il  s'agit  de  flèches  ou 
de  bâtons  à  suspendre  des  habits.  En  Languedoc  on  trouve 
un  dérivé  parallèle  à  astana,  c'est  le  roman  astonne,  que 
Du  Cange  explique  par  un  texte  de  1457  :  «  une  lance  que 
l'on  appelle  ou  ])aïs  communément  astonne,  fériée  à  l'un 
des  bouts  ». 

Il  ne  nous  parait  donc  pas  invraisemblable  que  astane- 
tiim  soit  issu  de  asta,  par  l'intermédiaire  d'un  astanns  ou 
astana.  La  sémantique  ue  s'y  oppose  pas.  J'ai  entendu 
admirer  une  forêt  de  sapins  par  cette  exclamation  :  «  Quels 
beaux  poteaux  télégraphiques!  »  Qu'on  songe  à  l'impres- 
sion (pi'une  jeune  futaie  aux  jets  sveltes  et  droits  ])ouvait 
produire  sur  des  barbares  préoccupés  de  bataille  et 
d'armes  :  «  Quels  super-bes  bois  de  lance!  »  l'u  astanelnm 
est  une  foi'èt  de  bois  de  lance.  La  toi)()gi'apliie  ne  s'()i)pose 
pas  non  i)lus  à  cette  étymologie.  Poui-  i)r()duirc  des  buis- 
sons vigoureux,  des  jets  de  belle  venue,  il  faut  un  tcirain 


ASTANETUM  45 

bieu  aiTOsé.  Or,  uos  astaiietiini  ne  sont  point  situés  au  som- 
met des  montagnes,  mais  en  plaine  ou  dans  la  vallée.  Le 
frêne,  le  coudrier,  le  cornouiller  (cf.  lat.  colurnus,  cornus) 
«t  les  autres  essences  qui  servent  à  fabriquer  des  piques  et 
■des  lances  ne  poussent  pas  sur  les  côtes  sèches  et  rocail- 
leuses. 

III.  Les  localités  où  nous  croyons  reconnaître  ce  col- 
lectif s'échelonnent  de  la  Charente  au  Rhin,  En  voici  la 
liste.  Quelques-unes  sont  munies  d'un  dossier  historique 
assez  probant. 

Asnois,  sur  la  Charente  (Vienne). 

Asnois,  sur  l'Yonne  (Nièvre). 

Assenoy,  arr.  de  Troyes  (Aube). 

Hastenoy,  ancien  lieu-dit  à  Outreau  (Pas-de-Calais), 
dans  le  Terrier  de  Saint-Wulmer  de  Boulogne,  150o,  sous 
la  forme  «  A  Winde  vers  Hastenoy  »  (Kurth,  F.  L.,  I.  248). 

Astene.  sur  la  Lj'^s,  arr,  de  Gand  (Flandre  orientale). 

Assenede,  arr.  d'Eecloo  (Flandre  orientale). 

Assent,  dép.  de  Bueken  (Brabant)  =-  Aanoth,  839  (Piot, 
Cart.  de  Saint-Trond,  I,  p,  5), 

Asneux,  dép.  de  Hamois  (Xamurj  =:  Asteneur  en  1345 
(BoiiMANs,  Seigneuries  féodales  de  Liège;  Roland,  Mé- 
langes A'«r//2,  I,  291) 

Bois  d'Esneux,  comm.  de  Boninne  (Namur). 

Esneux,  sur  l'Ourthe  (prov.  de  Liège),  Asfanido  81  i, 
Hasfenoit  1154,  Astenoit  1236,  Aslenoir  1235  Asteneur 
1363,  Asteneuz  1381,  Esseneux,  xiv^  siècle  (Simoms,  «  La 
Seigneurie  et  le  comté  d'Esneux  :»,  dans  Bull,  de  rinstitut 
arch  liégeois,  t.  ^^lY,  p.  108-169;  Roland  et  Halkin, 
Cart.  de  V abbaye  de  Stavelot-Malniedy,  I,  p.  66;  Bormans 
■et  ScHOOLMEEsi'Eits,  Cartul.  de  l'église  Saint-Lambert  de 
Liège,  t.  I,  p.  73;  Poncelet,  Fiefs... 

Esneux,  comm.  de  Vaux-Chavanne  (Luxembourg). 

Staneux,  forêt  au  nord-ouest  de  Spa  (prov.  de  Liège). 
Astanelum  en  827.  Louis  le  Pieux  tranche  un  différend 
entre  l'abbé  de  Stavelot  et  le  receveur  du  fisc  de  Theux  au 
sujet  d'un  bois  faisant  partie  du  Staneux  :  <(  silva  que,  in 
loco  nuncupante  .4sfa;ie^izn7,  inter  duos  rivulos  Tailernion 
et  Dulnosuni  esse  videtur  ».  Sur  l'emplacement  de  la  silva 
■contestée,  les  historiens  ne  sont  pas  d'accord.  La  topogra- 


46  J.   FEr.i.EU 

phie  exige  qu'elle  soit  située  au  sud  de  Spa  vers  l'Amblèx  e. 
Néanmoins  il  est  impossible  de  ne  pas  assimiler  Astane- 
tum  et  Slaneuw  Si  la  forêt  de  Staneux  actuelle,  avec  la 
portion  dite  Devant  Staneux  est  confinée  par  la  Hoigne,  le 
Wayai  et  le  ru  de  (Uiawion,  elle  englobait  sans  doute  jadis 
les  bois  situés  plus  au  sud,  aujourd'hui  distingués  par 
d'autres  noms  ou  en  partie  défrichés.  Une  carte  du 
xviii"^  siècle  donne  encore  à  cette  partie  méridionale  le  nom 
de  forêt  d'Aineux. 

Assenais,  comm.  de  la  prov.  de  Luxembourg,  près  de 
Neufchàteau,  est  Astenoi  en  1 192,  Astenoit  en  1299  (Goffi- 
NET,  Cart.  d'Orval,  p.  47;  Cart.  de  <  lairefontaine,  p.  99). 

Assenais,  dép.  d'Offagne  (Luxembourg),  Astinelum 
en  1170  (IIanquet,  Cantatorium  Sancti-Huberti,  j).  64; 
KuRTH,  Cart.  de  Saint- Hubert,  p.  129),  Astenoix,  Astenoit 
en  1300  (KuRTii,  ibifl.,  p.  37L  H7o'. 

Assenais,  dép.  de  Homi)ré  (Luxembourg).  Asionaiz 
en  I3o0,  Astennor  en  Io.'kS  (Roland,  dans  Mélanges  Kurth, 
p.  291). 

Essen,  au  nord  de  Diisseldorf  (Prusse  rhénane)  est 
Astenidum  au  ix=  siècle,  Astnidc  en  874  et  898,  Astnid 
en  927,  Asnide,  Asnithe,  Asnede  au  x"  siècle,  avec  Asni- 
densis  et  Astnedensis  comme  adjectif  ethnique  iM.  G.  H., 
SS.,  t.  III.  p  541  ;  Lacomhlet,  Urk.,  1,  69  et  31  ;  F<)kste- 
MANN,  Altdeufsches  Namenhuch,  Ortsnamen''^,  p.  I  16; 
GitANDGAGNAGK,  Mém  ,  p.  o9  et  Vocab.,  p.  2! 3)  Jlsnidi 
en  1039  {Annales  Hildesheimenses).  Essen  est  donc  pour 
Essent,  qui  est  une  réduction  de  Essenet,  Estenet  avec 
régression  de  l'accent  toni(iue  conforme  aux  habitudes 
germaniques. 

Astenef,  i)rès  de  Walhorn,  au  sud  d'Aix-la-Chapelle 
(Prusse  i-hénane),  était  Astanid  en  8SS,  du  moins  à  ce  que 
l'on  conjecture  d'une  liste  de  biens  cou  firmes  par  l'empe- 
reur Arnoulf  à  l'église  d'Aix-la-(Jhapclle  (Euxsr,  Ilist.  du 
duché  de  Limbaurg-,  t  VI,  p  87)  Astaneit  en  966,  Astcn- 
hert  en  122(5  (Laco.miîlkt.  Urk.  .  La  finale  de  cette  der- 
nière foi'me  semble  (empruntée  à  une  série  à  suffixe  -rade 
qui  s'atténue  en  rc/,  -/•/  ou  bien  elle  est  analogique  du  bas- 
allem:ind  ster  -^  stet,  on  enfin  ce  peut  èti-e  une  in)itation 
à.\\stenair-Astencur  wallon  avec  r  parasite, 


ASTANKIl  JI  47 

11  y  a  aussi  des  mentions  dWstaneluni,  dont  l'identifica- 
tion est  impossible.  Tele  est  celle  qu'on  trouve  dans  un 
capitulaire  de  Charles  le  Chauve  déterminant  les  régions 
où  son  fils  pourra  chasser  :  a°  877  «...  in  Lens  et  Wara  et 
Asienido,  et  feramina  et  porcos  capere  potest...»  (Baluze, 
('«/>.  l'cg.  franc,  II,  col.  2BS).  —  De  même  pour  un  Hasnidi 
de  90!2  (Lacomblet,  Urk.,  I,  p.  8:2:  Ernst,  o.  c,  t.  VI, 
p.  90).  Il  s'agit  de  terres  appartenant  à  un  certain  Rohin- 
gus  qui  est  seigneur  de  Moi'tier  et  qui  possède  deux  manses 
à  Wandre,  plus  des  droits  in  alio  loco  Flasnidi  vocato.  Ce 
lieu  e>.t  à  chercher  dans  la  région  au  nord  de  la  Vesdre. 
Un  catalogue  des  revenus  de  l'église  Notre-Dame  d'Aix- 
la-Chapelle,  fait  au  XII*  siècle  (Ernst.  o.  c,  VI,  p.  85), 
mentionne  des  biens  in  Asneit.  Le  lieu  est  cité  entre 
Eni>-eheies  (José)  et  Jopilla  (Jupille). 

Enfin  il  faut  examiner  des  cas  où  l'attribution  à  la 
famille -e/ï/m  est  douteuse  ou  fausse.  Elle  reste  douteuse 
pour  Moresnet,  qui  pourrait  être  un  noir  ou  sombre  Esnet 
ou  Esnen.  Les  formes  anciennes  nous  manquent.  Elle 
reste  douteuse  aussi  pour  Stenay,  cpii  mérite  une  mention 
particulière. 

L'érudition  intrépide  de  Jeantin  Mannel  de  la  Meuse, 
p.  o4  et  1813  sqq.)  a  donué  comme  antécédents  à  Stenay 
les  formes  Asta  d'une  charte  de  la  reine  Gerberge  de 
l'an  968,  Asienido  du  capitulaire  de  Charles  le  Chauve  cité 
plus  haut  (a°  877),  Satanaciini  la  vraie  forme  courante,  dont 
nous  reparlerons,  et  enfin  Stadonis  ou  Stadiniso.  La  pre- 
mière mention  peut  être  écartée  comme  ne  contenant  pas 
-etum  ou  -acum  qui  expliquerait  la  finale  -ay  de  Slenay. 
La  seconde  nous  ramène  du  côté  de  Lens,  comme  on  l'a  vu 
plus  haut.  La  quatrième  s'applique  à  Atton  (Meurthe  ;  c'est 
prouvé  par  des  diplômes  et  des  chronifjues  de  793,  869.  ^75, 
88o,  906,  946,  dont  on  trouvera  le  texte  dans  dom  Bouquet 
(t,  VII,  616c,  t.  IX,  ^i\b,  37-26,  381a,  391a).  Reste  Satana- 
cuin,  dont  la  première  mention  est  assez  tardive  (876)  et 
qui  de  ce  chef  pourrait  être  suspectée  Mais  Stenay  a-t-il 
l'antiquité  phénoménale  que  lui  suppose  Jeantin,  la  haute 
antiquité  que  l'éclame  le  rédacteur  de  l'article  Stenay  dans 
le  Dictionnaire  des  communes  de  .Toanne?  C'est  une  villa 
regia  à  l'époque  carolingienne,  un  caslrum  à])artir  du  duc 


48  J.    FELLF.R 

Godefroy  le  Bossu.  Les  variantes  du  nom  sont  insigni- 
fiantes et  donnent  peu  de  prise  à  la  recherche  étymolo- 
gique. On  trouve  Satunaciun  villam  à  l'année  876  dans  les 
Annules  Bertiniani  (éd.  Deiiaisnes,  p  249,  Dom  Bouquet, 
t.  VII,  12 Ir/)  «  imperator  a  Carisiaco  (Quierzy  ^  movit  atque 
ad  Satanaciim  villam  venit,  dispositum  habens  Metensem 
civitatem  adiré  »,  ce  que  la  chronique  de  Saint-Denys  tra- 
duit ainsi  «  tantost  se  parti  li  enipereres  de  Karisi  et  s'en 
alaa  Sanienay ..  »  {Dom  Bouquet,  t.  VII,  I44c).  On  trouve 
de  même  Satanaciim  dans  Hincmar  (MGH.,  I,  oOl,  n°  83); 
dans  les  Lettres  de  Gerbert,  pour  l'année  980,  Saianaca 
villa  (D.  Bouquet,  VII,  291);  Sathanaciim  en  1069,  1090, 
1096  fMiKAEUs,  Op.  dipl.,  t.  I,  p.  3^.3,  360,  365i.  En  1076 
Godel'roy  le  Bossu  fortifie  la  villa  :  «  in  Sathanaco  sui  juris 
oppido  castrnm  firmavit  »  (D.  Bouquet,  t.  XIII,  628d). 
Stenay  depuis  ce  temps  est  nommé  «  Sathanaciim  cas- 
trum  »  ibid.,  6316),  «  Slanaciim  castrnm  »  avec  ellipse  de  a 
(ibid.,  633/>)  C'est  la  forme  qui  a  triomphé.  Jeantin,  éty- 
mologne  de  même  force  que  nos  anciens  chroniqueurs,  a 
vu  dans  ce  mot  (en  1863!)  Satan  et  Saturne  et  vingt  autres 
choses  hébraïco-géologiques,  toutes  ensemble  d'ailleurs  et 
l'une  ne  détruisant  pas  l'autre  dans  sa  i^ensée.  Houzé  rap- 
prochait Stenay  de  Staneux  et  par  conséquent  d'Astane- 
tiim,  et  Ki'RTH  a  fait  de  môme  dans  la  Frontière  lingriis- 
tiqiie  (I,  46o).  Le  dernier  qui  s'est  occui^é  de  cette  question, 
le  chanoine  C-G.  Roland,  dans  son  article  des  Mélanges 
Kiirth  déjà  cité,  écarte  cette  solution.  Son  argument  capi- 
tal est  que  la  forme  originaire  est  Satanaciim.  Il  note 
cependant  qu'on  trouve  Estenay,  A  stenay  dans  quelques 
actes  romans,  mais  il  croit  que  c'est  «  par  euphémisme  w, 
c'est  à-dire  par  euphonie.  Bien  que  nous  ayons  cherché  à 
renforcer  l'argument  principal  en  étalant  plus  haut  les  pas- 
sages où  l'on  trouve  Satanaciim,  nous  ne  sommes  pas  aussi 
tranquille  sur  la  conclusion.  Si  on  possédait  des  mentions 
plus  anciennes  de  ce  nom,  il  n'est  pas  dit  qu'elles  concor- 
deraient avec  Satanaciim  :  il  faut  se  défier  de  la  finale 
-aciim  doni  les  chroniqueurs  et  les  scribes  ont  affublé  tant 
de  noms  de  lieux;  Satan  ou  Sathan  peut  être  le  produit 
d'une  étymologie  pieuse,  qui,  une  fois  inventée,  devait  faire 
fortune.   Ne  s'est-il   pas   trouvé  des  scribes    lettrés  pour 


A ST AN KIT M  49 

rendre  Brabani  par  Bratiispantiiini  ou  par  Proponiis  à  la 
faveur  de  quelque  vague  ressemblance?  Ce  qui  pouvait 
inspirer  une  certaine  confiance  dans  Satanacum.  c'est 
l'existence  d'autres  noms  similaires  comme. S'a^/îonaj  (Ain), 
Satonnay  (Saône-et-Loire),  dont  nous  n'avons  malheureu- 
sement pas  les  formes  anciennes.  D'autre  part,  le  rapport 
phonétique  entre  Stenay,  A>itenay,  Satenay  peut  appa- 
raître tout  différent;  Astenay,  Estenay  seraient  les  formes 
pleines;  Stenay  la  forme  apocopée  après  une  voyelle, 
comme  dans  à  'Stenay  pour  à  Astenay;  enfin  Satenay 
serait  le  produit  d'une  insertion  de  voyelle,  phénomène 
régulier  en  wallon  et  en  lorrain  quand  un  mot  commençant 
par  plusieurs  consonnes  suit  un  mot  à  finale  consonnan- 
tique.  Comparez  le  wallon  nos.se  riwè  et  H  rwè,  uosse  sitàve 
et  on  stàve,  lès  sieûles  et  one  siteùle,  po  stàrer  et  po  V  sità- 
rer.  On  trouve  alternativement  dans  des  actes  anciens 
skevin,  eskeoin  et  sekeoin,  échevin.  Un  texte  de  1269,  rap- 
porté pai'  (louEFRov  (ai-t.  hauton),  «  tout  le  hauton  du 
secourgeon  »,  nous  montre  .sec-  usurpant  la  place  de  .se-, 
esc-  sans  nécessité  phonétique.  Il  faut  donc  attendi-e  de 
nouvelles  données  pour  concluie. 

Ces  noms  de  lieux  ont  évidemment  passé  à  des  familles. 
On  trouve  pai-  exemple  le  nom  de  Desneux  dans  la  pi-o- 
vince  de  Liège.  Dasnoy  est  le  nom  d'un  géomètre  qui  a 
publié  en  I808  un  petit  dictionnaire  wallon-français  pour 
la  région  de  Neufchateau  (Luxembourg),  qui  est  la  région 
des  trois  .4.s.seno/.s  cités  i)lus  haut.  Un  Thiris  d'Asfenoit 
figure  dans  Bbouwers,  Cens  et  rentes  du  comté  de  Nawur 
au  Xlir  siècle  (p.  245).  Il  serait  facile  de  continuer  l'énu- 
mératiou,  mais  elle  n'apporterait  aucun  renseignement 
nouveau. 

Jules  Feller. 


A  propos  de  la  traduction  française 
des  Sermons  de  Tauler 
par  le  Père  Hugueny  0.  P.^'^ 


MAGET   et  lUNf'FROWE. 


Dans  ses  Tauleriana  de  1911  {^),  le  P.  Raymond- 
M.  Martin  O.  P.  nous  a  dit  tout  le  bien  et  tout  le  mal  qu'il 
fallait  penser  de  l'entreprise  du  P.  Noël,  qui  prit  pour  base 
de  sa  traduction  française  des  œuvres  de  Tauler  l'édition 
latine  de  Surius,  à  un  moment  où  la  bonne  et  correcte 
édition  des  sermons  du  «  docteur  illuminé  »  publiée  par 
M.  Vetter  (^)  existait  déjà.  Il  fallait  partir  de  celle-ci.  C'est 
ce  qu'a  voulu  faire  le  P.  Hugueny  :  dans  deux  numéros 
de  la  Vie  Spirituelle,  il  nous  donne  un  échantillon  de  son 
travail.  On  connaît  du  P.  Hugueny  l'excellente  traduction 
commentée  des  Psaumes  et,  dès  l'abord,  on  était  en  droit 
d'attendre  de  lui  une  version  consciencieuse,  correcte, 
élégante.  Cette  attente  est  pleinement  remplie,  encore 
qu'il  puisse  y  avoir  des  i)oints  de  détail  sur  lesquels  on 
pourrait  ergoter.  Ses  annotations  explicatives  et  docu- 
mentaires sont  très  précieuses  et  on  ne  regrette  pas  la 
longueur  de  certaines  d'entre  elles  Félicitons  donc  le 
savant  religieux  de  son  travail  et  souhaitons  qu'il  nous 
donne  au  plus  tôt  la  traduction  complète  des  sermons  du 
mystique  dominicain. 


f«)  Dans  La  Vie  Spirituelle.  Dec.  1919.  —  Janv.  \U-li). 

(2)  Revue  thomiste.  XIX. 

(3)  F.  Vetter  :  Die  Predigten  Tanlers.  Berlin.  Wpidmanii.  1910. 


52  A.-L.    CORIN 

Pourtant,  dans  le  premier  sermon  tiaduit,  celui  de 
Noël  (*),  il  piopose,  nou,  il  uous  impose  uue  interprétation 
nouvelle  que  je  ne  puis  adopter  et  contre  laquelle  il  me 
faut  prendre  le  parti  de  la  tradition. 

Le  (c  docteur  illuminé»  expose  le  symbolisme,  courant 
au  moyeu-àge,  des  trois  messes  de  Noël  II  en  arrive  à 
«  donner  quelques  explications  au  sujet  de  la  seconde 
naissance  qu'on  célèbre  en  ce  jour,  celle  par  laquelle  le 
Fils  de  Dieu,  eu  cette  nuit,  est  né  d'une  mère  et  devenu 
notre  frère  ».  Celui  qui  veut  voir  Dieu  naître  spirituelle- 
ment dans  son  âme  comme  il  est  né  dans  l'âme  de  Marie, 
doit  considérer  quelles  étaient  les  dispositions  particu- 
lières qui  furent,  en  Marie,  les  conditions  de  sa  maternité 
spirituelle  et  corporelle. 

Le  texte  se  continue  par  cette  phrase  nettement  tri- 
partie, où  chacun  des  trois  prédicats  est  énoncé  en  double  : 

a)  su  waz  ein  liiter  mag'et,  eine  Jiincfrowe. 

h)  UNI)  su  WHZ  eine  verlohete,  vertriiweie  jimcfrowe. 

c)  UND  sii  waz  ing'eslossen,  von  nllern  abgescheiden,  wan 
(1er  en<>'el  ging  zti  ir. 

Un  u  un,  ces  trois  points  sont  ensuite  développés  en 
quelques  lignes. 

a)  .su  sol  sin *-  Ireii  in  inic  (p.  11,  1.  11-20); 

b)  Maria   waz    eine    vertruwete  Juncfrowe ^    ge~ 

hol/jfen  werde  (p.  11,  l.  20-23}  ; 

c)  Maria  was  onch  ingeslossen ♦-  aile  âing  mussent 

iizgon  (p.  Il,  1.  2S  —  p.  12,  1.  I). 

Le  point  en  litige  est  le  premier  :  le  P.  Hugueny  traduit 
maget  par  servante  et  l'oppose  à  juncfrowe.  vierge. 

Voici  du  reste  les  observations  par  lesquelles  il  justifie 
sa  <c  trouvaille  »  : 

(C  Les  servantes  sont  généralement  applicpiées  au  service 
intérieur  de  lu  maison  et  plus  embarrassantes  qu'utiles  au 
dehors.  (Test  pour  n'avoir  pas  compris  cette  réflexicm 
de  Tauler  que  les  éditeurs  postérieurs  de  ses  serni(ms  ont 
traduit  servante  pai-  vierge  dans  la  pensée  qu'ils  abouti- 


C*)  L.  Niiiinianii,  dans  .sa  tliési-  (ioclorali'  (Halle,   llMIi.   l'alli-ihiic  ;i  niaîlic 
Kckharl  :  je  me  réscivi'  <\o  iov(>nir  sur  cottn  queslion. 


TRADUCTION    DE    TAULER  53 

raient  à  un  symbolisme  plus  naturel  en  écrivant  :  «  Être 
«  vierge,  cela  signifie  qu'on  n'a  pas  de  fécondité  au  dehors, 
«  encore  qu'intérieurement  on  produise  les  fruits  les  plus 
«  abondants  ».  Mais  outre  qu'on  ne  voit  pas  ce  que  peut 
être  cette  fécondité  intérieure  de  la  vierge  qui  devrait  êtte 
de  inôme  genre  que  l'infécondité  extérieure,  si  l'on  veut 
les  opposer,  cette  interprétation  fait  violence  au  sens  du 
mot  maget  très  distinct  de  Jiingfrau  (^)  et  supprime  un 
des  termes  de  l'énumératiou  des  couditions  de  la  maternité 
de  Marie,  un  terme  sur  lequel  Tauler  insiste  en  souvenir 
des  paroles  mêmes  de  la  Vierge  :  Voici  la  servante  du 
Seigneur  «. 


La  première  difficulté  que  trouve  le  savant  traducteur  à 
admettre  l'interprétation  traditionnelle  est  donc  «  qu'on 
ne  voit  pas  ce  que  peut  être  cette  fécondité  intérieure  de 
la  vierge  qui  devrait  être  de  même  genre  que  l'infécon- 
dité extérieure  )). 

Je  ne  me  hasarderai  pas  à  eu  donner  l'explication  phy- 
siologique qui  s'offre  d'emblée  à  notre  esprit  moderne, 
parce  qu'elle  serait  anachronique  (^).  Mais  la  philosophie  de 
l'École  avec  sa  distinction  de  la  jmissance  et  de  V acte  ne 
pourrait-elle  pas  nous  venir  en  aide?  La  vierge  a  une 
fécondité  potentielle,  latente,  plus  grande  que  celle  de  la 
mère  devenue  en  partie  déjà  actuelle,  extérieure. 

Au  reste,  le  sens  spirituel  seul  importe  :  dans  la  virgi- 
nité, état  supérieur  à  celui  du  mariage,  la  vie  intérieure 
est  plus  riche,  plus  féconde,  qu'elle  ne  peut  l'être  ici,  où  les 
charges  et  les  soucis  de  la  vie  matérielle,  extérieure,  acca- 
parent toutes  les  facultés. 


Mais    c'est   la    deuxième    difficulté    rencontrée    par    le 
P.  Hugueny  que  je  voudrais  surtout  écarter. 


(*)  Pourquoi  (;ette  orlliographe  modernisée? 

(2)  Mais  lisez  ceci  pourtant  p.  Il,  1.  l-i-15:  «  also  sol  dise  iiiagct  ir  ussere 
minne  /usliessen  und  nit  vil  gewerbes  do  mltte  han,  nût  vif  fruht  do  mifte 
bringen  n  ! 


54  A.-L.    COHIN 

«  8i  l'on  veut  les  opposer  )>,  dit-il, 

a)  «  cette  interprétation  fait  violence  an  sens  dn  mol 
miig-et  très  distinct  de  iun}>fraii  et 

b)  «  supprime  un  des  termes  de  Ténumération  des  condi- 
tions de  la  maternité  de  Marie,  uu  terme  sur  lequel  Tauler 
insiste  en  souvenir  des  paroles  mêmes  de  la  Vierge  Marie  : 
Voici  la  seronnte  du  Seigneur  ». 

Je  ne  trouve  que  trois  points,  développés  par  le  prédi- 
cateur dans  la  suite  de  son  discours.  Ces  termes  de  Ténu- 
mération sont,  comme  le  montre  la  synthèse  initiale  citée 
plus  haut  : 

a)  être  vierge  ; 

b)  être  fiancée  ; 

c)  se  tenir  enfermée  et  à  l'écart. 

Un  quatrième  n'y  trouverait  place  qu'à  condition  d'en 

chasser  le  premier,  essentiel  :  l'analyse  du  premier  point 

va  nous  le  montrer  tout  à  l'heure. 

* 
*     * 

Mais  où  donc  le  Père  Hugueny  a-t-il  trouvé  que  «  le 
sens  du  mot  ina.get  était  très  distinct  de  (celui  de)  junc- 
froiiwe  »?  En  allemand  moderne  cette  distinction  s'im- 
pose ;  mais  c'est  là  l'aboutissement  d'une  évolution  séman- 
tique qui  ne  faisait  que  commencer  au  moyen-âge. 
Ecoutons  le  témoignage  de  Lexer  : 
Pour  J  II  nef ro  II  ioe  il  connaît  les  sens  suivants  f*)  : 

1.  junge  herrin,  allgem   ; 

2.  unverheiratete,  vornehuie  dienerin,  edeilrànlein  ; 

.3,  ledigea  frnncnziinmcr  non  iinbeflcckter  keuschhcit  ; 
jungfraii  : 

4.  aiich  non  mànncrn  : 

5.  iiberhinipl  ziir  bezcichniing  des  feinen,  unbcfleckten. 
De   ces    cinq    acceptions,    trois    renferment    l'idée    de 

pureté. 

Quant  à  inaget,  il  peut  signifier  (*)  : 

\  jiingfrnu,  bcs.  die  Jung frau  Maria:  allgcin.  ich  œil 
mâget  gnn        jiingfniu  blcihen  : 

2.    iibcitr.  :iu<h  non  infinnlichen  jn'rsonen  : 


(»,  Mlid.  Handwli.  :   I.  liKH. 
(«)  1,  2(108. 


TRADUCTION    DE    TAULEl!  55 

w.  (hmii  ivie  ndj .  :  nnberûhvi,  uiiuerletzl.  rein  : 
4    (Jic  jun^rfrHU  hIs  zeichcn  des  tierki-eises  ; 

5,  die  weibliche  schmn  der  jiingfrau  : 

6.  uni'reies  madchen,  dienende  jungfrau  einei-  orouine, 
dieneriii.  raagd. 

C'est  eucore  l'idée  de  virginité  qui  est  à  la  base  de  cinq 
de  ces  six  acceptions.  Les  mots  de  la  même  famille  ne 
connaissent  point  le  dernier  sens,  qui  n'est  donc  qu'ad- 
ventice : 


magetbaeve 
magetUch 


=^  jungfraulicli,  fr.  vierge. 


"    ,     ,     ,..  =  lunglrauhchkeit,  lungfernschaft,  fr.  nir- 
magetschcift  ''..,,  '  J      & 

,,  i  gin  lie. 

magettnom    \ 

et  d'autres;  de  ce  groupe  détachons  un  composé  particu- 
lièrement probant  : 

maget-reine  =^  rein  wie  eine  jungfrau, 

iv.  pur  comme  une  vierge  '. 

8i  donc  dans  quelques  cas  exceptionnels  magei  peut 
avoir  la  valeur  de  servante  (j'en  cite  un  plus  bas),  peut-on 
dire  que  «  c'est  faire  violence  au  sens  de  ce  mot  »  que  de 
le  considérer  comme  synonyme  de  Jimrfrouwe  / 


Le  contraire  serait  plus  défendable  !  A  toute  évidence, 
en  tous  cas,  la  traduction  par  servante  fait  violence  au 
sens  du  texte,  que  nous  allons  suivre  pas  à  pas  dans  son 
développement  du  premier  poinr  : 

.Su  ivaz  eine  luter  maget,  eine  junrfrowe. 

La  symétrie  de  la  phrase,  signalée  plus  haut,  indique 
déjà  que  ces  deux  expressions  vont  de  pair  et  que  eine 
juncfrouwe  n'est  autre  chose  qu'une  apposition  à  luter 
maget,  une  répétition  de  la  même  idée,  pour  l'emphase; 
de  même  que  vertruwete  ne  fait  que  reprendre  verlobet  et 
que  von  allem  abgescheiden  varie  l'idée  de  ingeslossen. 

Au  demeurant,  que  faut-il  entendre  par  «  une  pure 
servante  »  et  plus  loin,  «  une  chaste  et  pure  servante))? 
S'il  s'était  agi  de  distinguer  les  deux  concepts  de  servante 


p6  A.-L.    CORIN 

et  de  i)i('i-^>e,  u'eùt-il  pus  élé  plus  logique  et  plus  clair 
d'écrire  :  une  servante,  une  vierge  pure?  —  Mais  non  : 
entendez  :  c'étaii  une  Jeune  fille  pure,  une  vier^-e,  n'eu 
déplaise  au  P.  llugueny.  Kcontez  la  suite  : 

>c  \ein  f>ei.stlich  muter  Gottes]  sol  sin  luter  reine  ninget ; 
ist  fin  wol  ettewenne  ^'eweaen  uz  der  luterkeit,  so  sol  su 
nu  widerkeren.  so  wurt  sii  mifier  reine  und  nmgtlich  ». 

Qu'est-ce  qu'une  servante  qui  sort  de  sa  pureté  et  qui, 
par  un  retour  sur  elle-même,  doit  redevenir  pure  et  vierge? 
Vierf>e  et  non  servante,  en  dépit  du  P.  Hugueuy.  La  litté- 
rature médiévale  ne  connaît  d'autre  sens  à  mâg'tlich  que 
celui  de  uier^e,  virginal;  j'en  appelle  à  Lexer.  Bien  mieux  : 
tout  au  début  du  sermon,  le  P.  Hugueny  traduit  lui-même  : 
MEGDp^LiCHER  kûschikcH  par  sa  vir(iinai,p:  chasteté  ! 

Kt  faut-il  répéter  que  cette  (expression  de  la  même  idée 
par  deux  synonymes  est  un  procédé  de  style  si  familier  à 
Tauler  et  à  toute  son  époque,  (ju'on  ])eut  en  puiser  des 
exemples  à  pleine  main  dans  la  littérature  mystique  du 
XIV*  siècle  :  liden  und  lazcn.  siillenissc  und  rasle.  ukhi 
und  lidig(^)  etc.? 

*     * 

C'est  à  ce  moment  que  le  prédicateur  l'oriiiule  sa  défini- 
tion de  maget,  dont  le  P.  Hugueny  a  cru  pouvoir  extraire 
le  sens  de  servante  :  Ein  maget  betùtet  aise  vil  als  daz 
uzwert  unfruhtber  ist  ujul  von  innan  vil  fri'ihte  hat  ; 
puis  l'appliquant  à  Marie  (*),  i  dit  :  innewendig  sol  su  vil 
frûhte  haben,  et  cite  à  ra])pui  le  verset  du  psalmiste  : 
Toute  la  parure  de  la  fille  du  roi  vient  de  l'intérieur. 

Le  parallèle  entre  Marie,  considérée  comme  servante 
de  Dieu,  et  la  fille  du  roi  me  choque  un  i)eu  ;  il  serait  au 
contraire  ])arfait  entre;  la  vierge  et  la  fille  du  roi. 


I 


(1)  Voyez  aussi  les  (Hudi^s  slylislit|ii(>s  sur  li-  «  livre  dr  l:i  Sni;(;ss«'  »  de  Siisn, 
par  Hoyor,  dans  la  Znitschrift  fur  deulschv  Philologie.  t(î,  p.  175,  39i]. 

C^)  Los  iiirils  Maria  niflnwetc  nùt  icnn  zû  gftfclir/iev  dingen  pourraient 
paraître  interpolés.  Il  (;st  une  autre  inter[)rétatiiiii  possibl(>  :  endowrie.  forme 
dialectale  de  entmiqetr.  aurait  remplace,  par  eii-eur,  une  forme  |triniilive  : 
pndorlilp.  rridmfitr  —  ne  pensait  à...  (Test  ce  (jue  porleul  le  Ms.  itfifi  de  (iand 
el  le  Ms.  :^78i  de  lîi-uxeilcs  :  Maria  indu  htc  anders  nie!  <ian  liemeIsclM;  eiide 
j^oddelike  dinf;hen.  Rapi>i'oclie/-en  I  Cor.  7,  Hi  :  ((  virjjo  rorfitnl  (\yi.i-  domini 
suni  ». 


TRADUCTION    DE    TAULEU  57 

Kt  qu'où  veuille  même  faire  commencer  à  ce  verset  une 
pensée  nouvelle,  la  phrase  qui  en  termine  le  développement 
me  fournit  un  argument  péremptoire  pour  établir  l'identité, 
dans  noti-e  texte,  de  ma^ei  et  de  Jiincfrouive  et  confirme 
que  l'idée  dominant  tout  l'exposé  est  celle  de  j)ureté,  de 
virginité  :  «  alsua  sol  dise  juncfrouwe  in  abg'escheidenheit 
sein,  aile  ir  sitten,  ir  sinne,  ir  g-elas,  ailes  inwert,  so 
bringet  su  vil  frûlite  und  grosse  frulit. ..  ». 

{(  Ein  maget  beti'itet  alae  vil  ah  daz  von  innan  vil  frûhte 
hat  »,  disait  la  définition. 

Celle  qui  produit  ces  fruits  à  l'intérieur,  c'était  tantôt 
la  mag-et,  c'est  maintenant  la  juncfrouwe.  Mag-et  et  junc- 
frouwe, c'est  donc  la  même  chose? 


Si  l'on  veut  tirer  argument  de  l'usage  que  Tauler 
fait  de  ce  terme,  on  n'aura  pas  à  se  livrer  à  de  longues 
recherches.  Le  mot  se  rencontre  deux  fois  encore  dans  ses 
sermons  : 

Au  sermon  76,  p.  408,  1.  19,  il  est  dit  :  Kunst  /.s  die  dirte 
ii^obe  in  den  sûben  goben  und  g-eht  rehte  der  minnen  vor 
ois  eine  maget  die  einre  frouwen  dienet  und  norget. 

«  La  science  est  le  troisième  don  du  Saint-Esprit;  elle 
précède  l'amour,  comme  une  servante  va  devant  la  dame 
au  service  de  qui  elle  se  trouve  ». 

C'est  presque  la  nutget  du  P.  Hugucny;  c'est  l'escorte 
que  la  bienséance  du  moyen-âge  accordait  à  la  dame  de 
condition,  demoiselle  de  compagnie  plus  utile  au  dehors 
qu'à  la  maison. 

L'autre  passage  est  franchement  contre  le  trop  ingé- 
nieux interprète.  Du  moins  nous  a-t-on  toujours  parlé  de 
la  parabole  des  vierges  sages  et  des  vierges  folles.  Or,  ces 
VIERGES  folles  Tauler  les  appelle  :  die  torechtcn  mf:gde  ! 
p.  137,  1.  2.-). 


Pour  finir,  pnuirait-on  méconnaître  la  portée  de  l'obser 
vation  suivante  ? 

Tauler  a  employé,  pêle-mêle,  les  mots   maget  et  junc 


ÔH  A.-L.    COIUN 

froiiLVii.  Voici  dans  qae!  ordre  ils  se  présentent  dans  notre 
passage  : 

magei  — juncfrouwe  —  juncfvouwe —  magei  —  (maegi- 
lich)  —  iniif>-et  —  mag-el  —  jancfrouive  —  jiincfronive. 

Qu'il  lui  taille  maintenant  vraiment  exprimer  l'idée  de 
servante  de  Dieu,  emploiera-t-il  maget  ?  Que  non!  On 
pourrait  n'y  plus  voir  clair  :  écrivain  presque  raffiné,  il 
voudra  trouver  le  terme  dont  le  sens  précis  rende  impos- 
sible toute  confusion,  et  il  écrira  :  die  dirne  Gottes  (^). 

S'il  s'était  agi  pourtant  de  répéter  une  idée  déjà 
exprimée,  l'emploi  du  même  vocable  ne  lui  eût-il  pas  donné 
l)lus  de  poids  ? 

» 

*     « 

Il  est  donc  établi  que  ; 

i.  MAGET  peut  bel  et  bien  être  synoiiynie  de  juncfkoowe  ; 
c'est  si  vrai  que  tous  ses  dérivés  et  composés  ne  connais- 
sent que  ce  sens  de  vierge,  virginal; 

2.  Rien  n'empêche  de  lui  attribuer  celui-ci  dann  le  pas- 
sage discuté,  d'autant  que,  ayant  à  exprimei'  l'idée  de 
servante  dans  ce  même  sermon,  le  pieux  Dominicain  met 
une  coquetterie  de  style  à  éviter  le  mot  qu'il  vient  d'em- 
ployer dans  un  autre  sens,  et  à  en  trouver  un,  dont  la 
netteté  rende  impossible  toute  amphibologie  :  die  dirne 
Gottes  ; 

3.  L'examen  du  développement  stylistique  de  la  pensée, 
du  contexte,  des  procédés  littéraires,  nous  oblige,  au  con- 
traire, à  admettre  Videntilé,  dans  ce  passage,  de 

MAGET    avec    JUNCFROUWE. 

Liège.  A.-L.  C-orin. 


(^)  Voyez  aussi  kuchen  dirnen,  Vettei-,  p.  126,  I.  :2:2. 


La  littérature  des  proscrits 
en  Angleterre 


Deux  poèmes  auglais  du  xiv*  siècle  idéalisant  la  vie  des 
proscrits  dans  les  bois  nous  ont  été  conservés.  La  critique 
littéraire  se  contente  de  signaler  des  points  de  contact 
entre  eux,  mais  sans  être  jamais  entrée  dans  le  détail  de 
leurs  analogies  et  de  leurs  dissemblances.  Leur  influence 
sui-  les  littératures  modernes  de  l'Europe  a  cependant  été 
assez  grande  pour  mériter  un  examen  attentif. 

L'un  d'eux,  intitulé  par  son  éditeur,  Thomas  Wright, 
J^e  chant  du  proscrit  de  traillebaston,  est  en  réalité,  malgré 
sa  forme  lyrique,  une  satire  contre  une  réforme  judiciaire 
de  la  fin  du  règne  du  roi  JMouard  P"^  d'Angleterre,  l'ordon- 
nance dite  de  traillebaston  (1305).  Ce  dernier  mot,  dérivé 
du  verbe  ancien  français  trailler,  c'est-à-dire  traîner,  halei- 
de  mot  flamand  treilen  signifie  remorquer),  désignait  des 
i-ôdeurs  armés  de  gourdins,  des  traîneurs  de  bâtons,  qui, 
à  la  fin  du  règne  d'Edouard  I*''  et  au  début  de  celui 
d'I'Mouard  II,  semaient  la  terreur  dans  les  campagnes 
anglaises,  et  se  livraient  à  des  excès  contre  la  population 
paisible.  Ils  intimidaient  témoins  et  jurés  des  cours  de  jus- 
tice au  point  que  leurs  victimes  étaient  privées  de  la  ])ro- 
tection  des  lois.  Ils  paraissent  d'ailleurs  avoir  joui  de 
l'appui  de  certains  grands  seigneurs  qu'ils  aidaient  à  s'em- 
parer de  l'avoir  des  roturiers. 

Pour  porter  remède  à  ces  désordres,  le  parlement  du 
printemps  de  130o  conféra  au  roi  le  pouvoir  d'ordonner  des 


60  p.    HAMELIUS 

enquêtes  judiciaires  par  magistrats  spéciaux  dans  les 
diveis  comtés,  en  vue  d'exercer  une  l'épressiou  énergique. 
Des  maliaiteurs,  le  terme  de  traillebaston  fut  transféré 
d'abord  a  l'édit  promulgué  contre  eux,  ensuite  à  la  juridic- 
tion extraordinaire  instituée  par  l'édit.  L'ordonnance  elle- 
même,  datée  du  f)  avril  \?A)o  et  imprimée  dans  son  texte 
latin  dans  Rymer  {Fœdera,  II,  p.  960-'J61),  est  adressée  à 
cinq  officiels  royaux,  dont  quatre  sont  nommés  dans  le 
poème;  deux,  Henri  de  Spigurnell  et  Roger  Belfloui- 
(Rogerus  de  Balafaga  dans  Rymer)  comme  «  gens  de 
cruauté  »,  deux,  Guillaume  de  Knoville  et  Guillaume  Mar- 
tyn,  comme  «gens  de  piété  »,  (|ui  prient  pour  le  salut  des 
pauvres. 

L'édit  décrit  avec  quelque  détail  la  vie  des  proscrits  que 
la  littératui-e  anglaise  devait  glorifier  pendant  des  siècles 
comme  compagnons  de  Robin  des  Bois  :  «  Vu  que  de  nom- 
breux malfaiteurs  et  perturbateurs  de  notre  paix  royale 
commettent  de  joui-  et  de  nuit  homicides,  brigandages, 
incendies  et  autres  dommages,  errent  et  vaguent  par  les 
bois,  les  parcs  et  autres  lieux  divers,  soit  dans  la  banlieue, 
soit  eu  dehors,  dans  les  comtés  de  (Jornouailles,  Devon, 
Somerset,  Dorset,  Hereford.  Worcester,  Shropshire,  Staf- 
ford,  Wiltshiie  et  Southampton  et  y  reçoivent  asile  au  très 
grand  péiil  des  gens  qui  traversent  ces  régions  et  de  ceux 
qui  les  habitent,  au  mépris  de  notie  autorité  et  au  dom- 
mage évident  de  notre  paix  loyale  »,  les  nouveaux  juges 
reçoivent  l'ordre  de  rechercher  les  malfaiteui-s,  les  gens 
(pii  les  abritent,  qui  les  soutiennent,  qui  leur  prêtent  main- 
forte  et  secours,  qui  les  encouragent  et  dirigent  dans  leurs 
méfaits.  Ils  doivent  poursuivi-e  aussi  ceux  qui  composent 
pour  de  l'argent  avec  les  ci-iminels,  qui  les  guident  pour 
frappei",  blesser,  maltraiter  et  tuer  dans  les  foires  et  mar- 
chés, par  haine,  envie  et  malice,  les  sujets  du  royaume, 
notamment  ceux  qui,  étant  appelés  aux  assises,  au  jury  ou 
aux  en(|uùtes  conti-e  les  méfaits,  y  ont  rendu  leur  verdict. 
Cîar  ces  criminels  ont  souvent,  par  leurs  menaces,  empêché 
les  jurés  de  faire  leur  déclaration  ou  leur  réquisitoire.  Il 
faut  rechercher  aussi  ceux  (jui  font  des  paiements  aux 
traillebastons.  qui  les  nourrissent  et  les  entretiennent, 
ceux  (|ui  les  couvrent  de  leur  puissance  seigneuriale  et  qui 


LITTÉRATURE    DES    PROSCRITS  61 

se  tout  leurs  défeuseurs,  ceux  qui  extorquent  de  l'argeut 
au  moyen  de  menaces. 

Par  son  énuraération  pi-olixe  des  crimes,  délits  et  com- 
plicités qu'il  dénonce,  ce  document  législatif  ressemble 
aux  règlements  de  police  affichés  de  nos  jours  sur  les  murs 
de  la  ville  de  Londres.  Il  permet  par  là  même  de  se  repré- 
senter la  société  anarcliique  on  le  vagabondage,  le  bracon- 
nage et  la  violence  étaient  encouragés  et  utilisés  par  les 
grands  seigneurs,  favorisés  par  la  corruption  et  les 
craintes  des  petites  gens  et  subis  lâchement  par  les  mar- 
chands et  les  voyiigenrs.  l^e  Robin  des  Bois  des  poètes  a 
de  même  des  alliés  pai-mi  les  nobles  dont  le  rapproche  sa 
naissance,  et  des  protégés  parmi  les  pauvres  dont  il  par- 
tage la  vie  misérable.  Quant  aux  commerçants,  il  leur 
accorde  généreusement  la  vie  sauve  après  avoir  prélevé 
sur  leurs  richesses  le  tribut  dû  à  sa  vaillance 

Cette  sympathie  pour  les  bandits,  représentés  comme 
des  victimes  des  officiers  royaux,  soit  évêques,  soit 
vicomtes  (c'est  l'équivalent  français  du  titre  anglais  de 
sheriffj,  éclate  dans  le  poème  conservé  au  manuscrit  Har- 
ley  2251!  du  Musée  britannique  et  publié  par  Thomas 
Wright  ;  Le  chant  du  proscrit  de  traillebaston  (').  L'auteur 
du  poème,  écrit  sous  forme  de  monologue  en  dialecte  anglo- 
normand,  la  langue  usuelle  de  la  noblesse  anglaise  à  cette 
é])oque,  critique  l'édit  comme  tyrannique.  puisqu'il  expose 
aux  rigueurs  de  la  loi  le  gentilhomme  coupable  seulement 
d'avoir  infligé  à  son  valet  un  châtiment  bien  méi'ité  «  d'une 
buffe  ou  de  deux  ».  Tout  en  exceptant  de  ses  récrimina- 
tions la  personne  royale,  il  appelle  la  malédiction  divine 
sur  les  auteurs  de  l'édit,  qui  d'après  lui  est  fautif  en  plu- 
sieurs points.  En  menaçant  des  gentilshommes  de  prison, 
il  fournit  au  vicomte  (sheriff  un  prétexte  pour  leur  extor- 
quer une  rançon.  Aussi  le  poète  veut-il  se  tenir  sous  les 
joyeux  ombrages,  où  la  fausseté  et  la  mauvaise  foi  sont 
inconnues,  au  bois  de  Beauregard,  où  vole  le  geai,  où  le 
rossignol  chante  tous  les  jours  sans  relâche   Les  iué(diaiits 


(*)  Tfœ  Political  Sonys  of  Englarxl  fruni  t/ie  reiyn  vf  .lo/in  la  l/ial  of 
Edward  II.  Londres  1839.  —  Une  édition  anléricnrc,  datée  de  1818,  est  due 
à  Francis  Cohen,  nommé  plus  tard  Sir  Francis  Palgrave.  Ayant  collalionm'  le 
texte  de  Wright  avec  le  manuscrit,  je  l'ai  U'ouvi-  parfaitement  tidtMe. 


62  F.     HAMEIJUS 

vauriens  l'ont  accusé  de  brigandage,  au  point  qu'il  ne 
trouve  pas  d'asile  parmi  ses  amis.  Quoiqu'il  ait  servi  son 
sire  le  roi  en  paix  et  en  guerre,  en  Flandre,  en  Ecosse  et 
en  Gascogne,  il  se  trouve  sans  ressources  et  toutes  ses 
peines  ont  été  en  pure  perte.  Des  menaces  de  vengeance 
contre  les  «  jureurs  »  et  les  cruels  à  qui  il  veut  briser 
l'échiné  et  la  croupe,  les  bras  et  les  jambes,  témoignent  de 
l'humeur  batailleuse  du  proscrit.  Ils  sont  accusés  de  pous- 
ser au  crime  :  «  car  par  crainte  de  prison,  maint  homme 
se  fera  larron  ».  Aussi  marchands  et  moines  devraient 
maudire  les  auteurs  de  l'édit;  la  protection  royale  ne  sau- 
rait les  préserver  d'avoir  à  livrer  leurs  deniers.  Tous  les 
suspects  sont  invités  à  se  joindre  au  proscrit  au  vert  bois 
de  Beauregard,  où  il  n'y  a  nul  procès,  sauf  bêtes  sauvages 
et  joyeux  ombrages,  car  le  droit  coutumier  est  trop  redou- 
table. Mieux  vaut  vivre  libre  qu'être  appelé  devant  les 
juges  et  souffrir  la  prison  sous  la  garde  de  l'évêque.  Qui 
n'est  ])as  assez  riche  pour  acquitter  sa  rançon  sera  livré  à 
mort.  Dieu  seul  peut  protéger  l'innocent  poursuivi  par 
l'envie,  qui  n'ose  retourner  dans  sa  propre  terre.  Il 
demande  aux  b<mnes  gens  de  prier  pour  lui,  car  il  n'est  pas 
homicide  ni  voleur  de  plein  gré. 

Le  quatrain  final  seit  d'envoi;  sa  tournure  est  ingé- 
nieuse : 

CesL  i-yiii  Just  fet  al  bois  desouz  vn  lorer. 
Lachaunte  merle,  russinole,  e  crye  l'esperuer. 
Escrit  estoit  en  parchemyn  pur  moût  remembrer, 
Ktgittô  en  haut  chemyn,  qe  vm  le  dust  trouer.  (*) 

l'el  est,  en  abrégé,  ce  poème  mêlé  de  convention  litté- 
raire et  de  ressentiments  x)ersonnels,  d'allusions  politiques 
et  de  tableaux  de  la  nature.  Dans  son  essence,  c'est  un 
témoignage  de  la  résistance  des  hommes  de  guerre,  indis- 
ciplinés et  brutaux,  aux  lois  protégeant  contre  leurs  exac- 
tions les  marchands  et  les  gens  d'église.  La  profession  de 
fidélité  au   roi   qu'ils  ont  servi    à  la  guerre  n'est  qu'un 


(M  CeUc  lime  fui  faite  au  bois,  sous  un  laurier. 

Là  «liMiileul  le  uierlr-  el  Ui  rossignol  et  crie  l'épervier: 
Rllo  est  ('Cille  sui-  parihemin  pour  mieux  se  retenir. 
El  jetée  sur  la  ({rand'route  pour  (luon  l'y  puisse  trouver. 


I 


LITTÉRATURK    DKS    PliOSCRlïS  63 

masque  transparent,  où  perce  leur  haine  de  l'ordre  social 
et  de  ses  gardiens.  L'évocation  du  vert  bois  de  Beanre- 
<;ard,  avec  ses  ombrages  riants,  ses  chants  d'oiseaux  et  son 
gibier  sauvage,  relève  la  vie  du  proscrit  par  son  charme 
poétique,  mais  sans  l'empêcher  de  se  comparer  au  sanglier 
des  forêts  : 

Que  ore  vueille  vivre  come  pork  merra  sa  vye. 

Pour  l'histoire  littéraire,  ce  poème  n'est  pas  moins 
curieux  que  pour  l'histoire  sociale,  car  il  annonce  une 
longue  série  d'œuvres,  comprenant  les  ballades  anglaises 
en  l'honneur  de  Robin  Hood  et  de  ses  archers,  datant  des 
xv«  et  XVI*  siècles,  des  pièces  de  théâtre  du  règne  d'Elisa- 
betii  et  notamment  la  comédie  de  Shakespeare  intitulée 
(Jomme  il  uoiis  j}lairn  (écrite  probablement  en  1699)  et 
aboutissant  à  l'époque  romantique  à  la  glorification  du 
bandit  et  du  proscrit.  Il  faut  dater  notre  satire  anglo-nor- 
mande d'une  époque  proche  de  l'édit  du  13  avril  1)^05, 
puisque  quatre  des  juges  nommés  dans  l'édit  y  sont  men- 
tionnés et  caractérisés.  Dans  ce  cas,  un  siècle  et  demi  la 
sépare  des  plus  anciennes  ballades  de  Robin  des  Bois,  celle 
de  Robin  Hood  et  du  Moine,  celle  de  Robin  et  de  Ganda- 
leyn,  conservées  dans  des  manuscrits  de  1450  environ. 
Dans  l'intervalle  se  place  un  autre  poème  de  proscrit,  le 
conte  de  Gamelyn,  qu'on  s'accorde  à  placer  vers  1350.  Ce 
conte  s'écarte  sur  plus  d'un  point  de  la  satire  que  nous 
venons  de  résumer  :  sa  forme  est,  non  didactique  ou 
lyrique,  mais  narrative,  sa  langue  est  le  moyen-anglais, 
non  l'anglo-normand,  son  accent  est  plus  vulgaire,  plus 
grossier,  moins  influencé  que  la  satire  par  la  poésie  cour- 
toise. Mais  le  fond  de  sentiments  et  d'idées  y  est  le  même, 
ou  à  peu  près. 

La  vie  vagabonde  du  braconnier  au  sein  des  bois  n'y  est 
nullement  idéalisée  :  le  vieil  Adam,  le  «  despensier  »  ou 
chef  d'office  de  la  noble  famille  de  Gamelyn,  jure  par 
Saint-Richier  qu'  a  il  vaut  mieux  porter  les  clefs  qu'errer 
au  bois  sauvage  et  y  déchirer  ses  habits  »  (vers  621-62:2). 
Les  oiseaux  n'y  chantent  pas,  la  verdure  n'y  réjouit  pas  le 
cœur.  Les  plaisirs  de  la  chasse  n'y  figurent  pas  davantage. 
«  Il  faut  bien  aller  au  bois  quand  on  ne  peut  rester  en 


f>A  P.     HAMKLUIS 

villo  »,  avoue  le  jeune  Gamelyn  en  réponse  à  un  question- 
neur. «  Si  nous  rencontrons  un  clievreuil,  nous  tirons  des- 
sus, comme  gens  affamés  et  sans  nourriture,  qui  sont  en 
mauvais  point  sous  les  tilleuls  des  bocages  »  (v.  (i72-676). 
Nous  voilà  loin  de  la  poésie  foi'cstière  des  ballades  de 
Robin  Hood  et  des  scènes  pastorales  de  Shakespeare. 

En  retour,  la  même  haine  pour  les  gens  de  justice  rem- 
plit le  conte  de  Gamelyn  el  la  satire  de  traillebastoii. 
Juges,  jurés  et  vicomtes,  tous  les  officiers  du  i-oi  y  sont 
battus  et  injuriés  par  Gamelyn,  qu'ils  ont  lié,  condamné 
et  tenu  en  prison.  Dans  l'épisode  final,  le  proscrit  s'installe 
au  banc  du  tribunal,  fait  comparaître  vicomte,  juges  et 
assesseurs,  et  oidonne  de  les  pendre  haut  et  court.  Cette 
rancune  contre  les  serviteurs  de  la  loi  n'empêche  du  reste 
pas  la  réconciliation  entre  le  proscrit  et  son  souverain  :  il 
est  admis  à  faire  sa  paix,  il  est  même  nommé  «  chef  juge 
de  la  franche  forêt  »  pour  le  venger  des  avanies  que  lui  ont 
fait  subir  les  gens  de  la  loi.  Un  autre  point  où  le  conte  de 
Gamelyn  concorde  avec  la  satire  de  traillebaston  est 
l'aversion  pour  les  gens  d'église,  et  surtout  pour  les  pi-é- 
lats.  Ils  sont  roués  de  coups  et  bafoués  dans  le  conte,  où 
par  des  plaisanteries  assez  lourdes  on  ne  leur  laisse  passer 
la  porte  (pTaprès  leur  avoir  administré  le  sacrement  de 
l'ordre  et  leur  avoir  donné  l'absolution  à  coups  de  gour- 
din (v.  o33);  l'on  y  i-ecommande  aussi  de  ne  pas  verser  le 
sang  des  hommes  de  Sainte  Eglise,  mais  de  leur  rompre 
bras  et  jambes  (v.  ol(3-o24).  Dans  la  satire  de  traillebaston, 
c'est  l'évèquc  qui  gaide  dans  ses  cachots  les  proscrits  pri- 
sonniers (p.  234).  Tous  ces  détenteurs  de  l'autorité  judi- 
ciaire sont  du  reste  dépeints  comme  des  fauteurs  d'injus- 
tice et  des  oppresseurs.  Pai-  leurs  persécutions  et  leurs 
voleries  ils  chassent  dans  les  bois  et  réduisent  à  une  vie  de 
rapine'des  hommes  de  race  noble,  d'âme  généreuse  et  de 
cœur  pieux,  ({ui  deviennent  malgré  eux  larrons  et  meur- 
triers, et  qui  n'ont  d'autre  désir  que  de  se  réconcilier  avec 
leur  légitime  souverain  et  de  reprendre  leur  rang  dans  la 
société  féodale.  I^e  guerrier-  anglo-normand  du  règne 
d'Edouard  I"""  et  d'Edouard  II  a  toute  raison  de  se  sousti-aire 
par  la  fuite  aux  duretés  du  droit  coutumier,  aux  exactions 
des   vicomtes   et   aux   prisons  épiscopales;    Gamelyn   ne 


LITTÉRATURE    DES    PROSCRITS  65 

réclame  que  son  héritage  paternel,  et  n'est  que  trop  accom- 
modant envers  son  frère  aîné  tyrannique  et  rapace. 

Les  vertus  distinctives  des  proscrits  poétisés  sont  le 
courage  et  la  force  physique.  Dans  le  conte  de  Gamelyn  et 
dans  les  scènes  de  Shakespeare  qui  en  sont  tirées,  le  héros 
n'atteint  à  ses  fins  que  par  la  vigueur  musculaire.  Son 
grand  triomphe  est  une  partie  de  lutte  où  il  casse  les  côtes 
à  un  champion  insolent  et  orgueilleux,  soudoyé  pour  le 
supprimer.  Vis-à-vis  de  la  ruse,  il  reste  naïf  et  désarmé. 
Il  incarne  déjà  le  type  conventionnel  très  britannique  du 
grand  cœur  simple  et  droit,  servi  par  une  volonté  ferme 
et  une  musculature  puissante.  Mais  les  critiques  anglais 
font  fausse  route  en  voulant  y  reconnaître  une  création  de 
la  muse  populaire  ou  un  idéal  démocratique.  Sa  confiance 
en  son  courage  et  en  son  adresse  procède  de  la  tradition 
militaire  des  féodaux,  tout  comme  l'orgueil  de  sa  naissance 
noble.  Ses  sentiments  et  son  genre  de  vie  sont  ceux  d'un 
aristocrate  et  d'un  guerrier;  on  pourrait  ajouter  d'un 
sportsman,  si  l'on  ne  craignait  de  verser  dans  le  moder- 
nisme. 

Jamais  les  légendes  de  proscrits  ne  se  sont  départies  de 
leurs  tendances  nobiliaires  et  féodales  :  le  bandit  y  est 
jours  bien  né,  habile  aux  armes  de  guerre  et  de  chasse 
(l'arc  est  son  arme  favorite  dès  la  satire  de  traillebaston  et 
le  restera).  Il  est  vaillant  et  loyal,  et  ses  victimes,  mar- 
chands et  moines,  n'ont  guère  lieu  de  se  plaindre,  car  ils 
ne  sont  dépouillés  que  de  leur  superflu  et  ils  méritent  les 
coups  par  leur  bassesse.  Les  œuvres  poétiques  consacrées 
aux  proscrits  couvrent  d'un  voile  discret  leurs  actes  de 
brigandage  et  se  contentent  de  ridiculiser  leurs  trop  riches 
victimes.  Le  jeune  héros  Gamelyn  pille  avec  ses  amis  la 
cave  et  le  garde-manger  de  son  frère  dénaturé,  mais  c'est 
en  légitimes  représailles  des  extorsions  et  des  injustices 
qu'il  a  subies  avec  la  complicité  des  légistes  et  des  ecclé- 
siastiques. 

L'étude  de  toute  cette  vaste  branche  de  la  littérature 
anglaise  a  été  dominée  par  des  préjugés  qui  en  faussaient 
les  conclusions.  Les  ballades  de  Robin  Hood,  dont  aucune 
ne  remonte  au  delà  du  xv^  siècle,  ont  été  arbitrairement 
attribuées  à  une  antiquité  reculée.  En  y  cherchant  l'ex- 


66  p.    HAMELIUS 

pression  de  sentiments  populaires,  on  a  voulu  y  trouver 
une  protestation  des  anciens  habitants  germaniques,  des- 
cendants des  Anglo-Saxons,  contre  la  Conquête  normande 
et  la  tyrannie  des  nobles  de  langue  fi-auçaise.  Ces  théories 
aventureuses,  inspirées  par  la  passion  nationaliste  et 
dépourvues  de  toute  base  documentaire,  sont  abandonnées 
(le  jour  en  jour.  Vne  savante  américaine,  M"^  Louise 
Pound,  vient  de  leur  porter  un  Jiouveau  coup  dans  un  livre 
récemment  paru  sous  le  titre  :  Poetic  Origine  and  the 
Ballads  (1921),  oui  elle  démontre  l'influence  de  la  poésie 
religieuse  sui-  les  ballades  séculières.  Malgré  la  sûreté  de 
sa  méthode,  nous  cro3'ons  que  certains  aspects  de  la  ques- 
tion lui  ont  échappé  et  qu'il  est  possible  de  pousser  plus 
avant  l'étude  des  sources  de  la  légende  de  Robin  Hood. 
Qu'il  nous  suffise,  pour  aujourd'hui,  d'avoir  [)récisé  les 
relations  entre  le  Chaut  du  proscrit  de  traillebaston  et  le 
conte  de  Gamelyn. 

Si  nos  conclusions  sont  coi'rectes,  nous  goûterons  peut- 
être  un  peu  mieux  la  poésie  bocagère  de  la  Forêt  d'Ar- 
denne,  dont  la  fraîcheur  et  le  charme  font|aimer  la  comédie 
sentimentale  Comme  il  vous  plaini,  de  Shakespeare,  la 
robuste  naïveté  de  son  héros  Orhindo,  le  vainqueur  de  la 
lutte,  ses  scènes  de  chasse  et  son  tableau  des  joies  du 
forestier.  Xous  y  trouverous  un  écho  éloigné  du  poème  de 
traillebaston,  de  son  éloge  du  vert  bois,  de  ses  cliants 
d'oiseau,  dans  la  chanson  qui  flatte  la  mélancolie  de 
Jacques,  le  banni  pensif  et  délicat  : 

Under  the  greenwood  tree 

Who  loves  to  lie  with  ine 

And  turn  his  merry  note 

Unto  tlie  sweet  bird's  tliroat. 

Corne  hither,  corne  hither,  conie  liitlier, 

Hère  shall  he  see  uo  enemy, 

But  Winter  and  rough  weather. 

Quant  aux  romantiques  français,  ils  ont  connu  tout 
d'abord  Robin  des  Bois  par  VIvanhoé  de  Walter  Scott 
(ISIÎI)  et  par  un  roman  de  Thomas  Love  Peacock.  intitulé 
Muid  Marian  (1822),  traduit  en  français  i)ar  M""^  Daring, 
sous  le  titre  de  Robin  Hood  ou  la  Foret  de  Shermood, 
roman    historique  (1826).   Un  autre    livre   témoignant   de 


67  LITTÉRATURE    DES    PROSCRITS 

l'enthousiasme  qu'excitait  sous  la  Restauration  la  littéra- 
ture des  proscrits  est  un  recueil  des  ballades  imprimé  à 
Paris  en  langue  anglaise  chez  Renouard  fl82o).  La  préface 
en  estsignée  par  un  publiciste  d'origine  allemande,  Loève- 
Veimars.  En  1830,  Victor  Hugo  fit  retentir  au  Théâtre 
Français  le  cor  de  chasse  d'Hernani,  écho  des  sonneries 
des  forêts  de  Sherwood  et  de  Nottingham,  et  mit  sur  les 
planches  son  proscrit  espagnol,  couvert  du  froc  de  moine 
dont  s'étaient  affublés  les  archers,  compagnons  du  proscrit 
anglais. 

Paul  Hamklius. 


Les  limites  chronologiques 
du  moyen  âge 


Ce  n'est  pas  sans  de  bonnes  raisons  que  Godefroid 
Knrth  écrivait  naguère  ces  lignes  :  «  A  proprement  j)arler, 
il  n'y  a  pas  de  moyen  âge.  Ce  nom  provisoire,  que  les  dic- 
tionnaires de  l'avenir  ne  connaîtront  pas,  ne  désigne  en 
réalité  que  la  jeunesse  du  monde  moderne  (^)  ».  Mais  enfin, 
depuis  le  xvii^  siècle  (2),  le  terme  est  admis,  universelle- 
ment employé  par  les  historiens.  Comme  cette  autie 
expression  discutable  :  art  i>-()thi(jue,  l'usage  l'a  consacré. 


Nous  ne  nous  proposons  [pas  de  discuter  une  nouvelle 
fois  la  valeur  de  ces  deux  mots  conventionnels,  mais  d'ap- 
précier les  divers  systèmes  qui  déterminent  les  bornes  du 
moyen  âge.  En  ces  dernières  années,  en  effet,  on  a  clier- 
clié,  çà  et  là,  à  modifier  les  traditions  qui  les  ont  depuis 
longtemps  fixées  :  «  Sous  prétexte  que  le  champ  de  l'his- 
toire s'agrandit  sans  cesse  et  que  les  époques  les  plus  rap- 


(i)  Qu'est-ce  que  levioyen  àqe!  p.  .'îS. 

(2)  Dès  1639,  le  Liégeois  Rausin  écrit  dans  son  ouvrage  Leodium  :  «  Qui 
Iniquis  (lomiiiiuni  ferunt  oculis,  prjeter  alla  fabulantur  in  quibusdam  inedii 
etiani  aevi  instrunientis  magislraluin  Leodiensem,  ele.  »  ;  l'iiistorien  alleniaud 
G.  Horn,  dans  son  Arca  Noe  (1B(j6)  donne  le  nom  de  médium  aevum  à  la 
période  ([ui  s'étend  de  300  à  loOO.  après  quoi  commence  Vliisloria  nova 
<]hristophe  Keller  (Cellarius).  dans  ses  manuels  qui  eurent  en  Allemagne  un 
grand  succès,  adopte  cette  innovation.  Voyez  son  Nuileus  histonae  (1()76)  et 
surtout  son  Itistoria  viedii  aevi  a  temporilius  Constanlini  luaf/ni  ad  Constan- 
Hnopolim  a  Turcis  ca.utam  (l'*"  éd.  1()88;  "2''  éd.  1()98). 


70  L.    LECLÈRE 

prochées  de  nous  ont  droit  dans  l'enseignement  à  une  place 
légitime,  on  voudrait  élargir  démesurément  les  limites  du 
moyen  âge  (*)  ». 

Pendant  longtemps  —  et  cette  manière  de  marquer  le 
début  et  la  fin  de  cette  époque  est  loin  d'être  abandonnée 
—  on  fut  d'accord  pour  adopter  comme  date  initiale  476, 
l'année  de  la  disparition  de  l'Empire  d'Occident  par  la 
déposition  de  Romulus  Augustulc  et  par  le  passage  de 
l'Italie  sous  la  domination  d'Odoacre;  et  comme  date 
finale  14r)3,  le  moment  où  fut  effacé  de  la  carte  le  dernier 
vestige  de  l'Empire  d'Orient  par  l'entrée  à  Constantinople 
des  Turcs  de  Mohammed  II. 

On  a  proposé  ensuite  de  déplacer  —  de  peu  —  ces  deux 
termes,  de  faire  commencer  le  moyen  âge  en  395,  lorsque 
Tliéodose  mourant  confia  l'Occident  et  l'Orient  à  ses  fils 
Honorius  et  Arcadius;  et  de  le  clore  en  1492,  l'année  pen- 
dant laquelle  Colomb  découvrit  la  première  terre  dépen- 
dant du  nouveau  Continent  (*). 

D'aucuns  ont,  depuis  lors,  émis  l'opinion  qu'il  convien- 
drait de  pousser  jusqu'à  1517,  jusqu'au  joui'  où  Martin 
Luther  afficha,  à  Wittenberg,  les  propositions  doù  allait 
sortir  la  Réforme  protestante. 

Plus  récemment,  on  a  voulu  aller  plus  loin  encore  dans 
le  xvi*=  siècle,  en  reversant,  il  est  vrai,  au  crédit  de  l'anti- 
quité une  partie  du  v^.  A  partir  de  1904,  les  candidats  à 
l'agrégation  d'histoire  (en  France)  eurent,  entre  autres 
épreuves,  à  rédiger  une  composition  sur  «  la  période  com- 
prise entre  476  et  1559»,  l'année  du  traité  du  Câteau- 
Cambrésis.  En  1912,  par  exemple,  les  futurs  agrégés 
d'histoire  ont  dû,  par  application  de  cette  règle,  étudier 
notamment  les  questions  d'histoire  du  moyen  âge  portées 
au  programme  du  concours  :  l'Italie  de  1400  à  1559  (^). 


(')  L.  Bréhikk,  liei'iie  internai ionalc  de  renseiqnemenl,  13  décembre  I90il, 
p.  524. 

("•)  (l'est,  |>ar  cxciiiplc,  ce  syslcine  (|ui  ;i  (''lé  iidoitlc  |i:ii'  Lavissk  iM  UAMBAun, 
dans  leur  Hisfoirp  f/f'nrrale,  I.  I-III. 

(3)  Il  est  vrai  que  le  pioj^raiiime  de  la  licenee  es  lettres  acceptait,  presque 
simultanément  (l!>07),  les  dates  3!t.")-Hît2  comme  limites  du  moyen  Àgo.  Cette 
contradiction  avait,  stolon  la  juste  remarque  de  Cli.  V.  Langlois,  «  (|uelque 
chose  de  comique  »  {Hcme  'mlernationalc  de  l'enseiqnement,  V.\  mars  1909, 
P.  235). 


LIMITES  DU  MOYEN  AGE  71 

Presque  en  même  temps,  en  considérant  d'ailleurs  l'évo- 
lution des  idées  et  non  pas  l'histoire  politique,  M.  François 
Picavet,  le  savant  commentateur  des  pliilosopliies  médié- 
vales, que  la  Sorbonne  et  ses  amis  ont  eu  la  douleur  de 
voir  disparaître  il  y  a  quelques  mois,  s'exprimait  ainsi 
en  1905  :  (c  II  faut  reculer  les  limites  entre  lesquelles  on 
enferme,  à  d'autres  points  de  vue,  la  civilisation  médié- 
vale, puisque  les  conceptions  tliéologiques  relatives  à  Dieu 
et  à  notre  union  présente  ou  future  avec  lui  prédominent 
au  premier  siècle  de  l'ère  chrétienne  chez  les  partisans 
de  l'hellénisme  comme  chez  les  chrétiens  et  les  juifs; 
puisqu'elles  persistent,  avec  une  force  égale,  jusqu'au 
xvn*'  siècle,  jusqu'à  l'Edit  de  Nantes  et  au  traité  de  Ver- 
vins,  jusqu'à  l'apparition  des  travaux  de  Galilée,  de  Bacon, 
de  Harvey  et  de  Descartes  (^).  D'après  ce  système,  le  moyen 
âge  commencerait  au  i"^'  siècle  de  l'ère  chrétienne  et  non 
au  v^;  il  s'achèverait  ou  plutôt,  selon  l'expression  de 
M.  Picavet,  «  il  laisserait  une  place  de  plus  en  plus  grande 
à  la  civilisation  moderne  »  au  xvii*  siècle,  et  non  au  xv* 
ou  au  xvi*'. 


Que  valent  ces  diverses  mesures  chronologiques?  Notons 
tout  d'abord  que  si  l'emploi  des  années  395  ou  476,  1453 
ou  1492,  pour  désigner  l'aube  ou  le  crépuscule  du  moyen 
âge,  est  commode  pour  l'enseignement  comme  pour  la 
rédaction  des  programmes  et  des  manuels,  leur  précision 
même  leur  enlève  toute  valeur  scientifique.  La  succession 
des  événements  historiques  ne  se  découpe  pas  en  tranches 
aussi  nettement  séparées.  Au  point  de  jonction  des 
grandes  périodes  du  passé,  il  y  a  des  siècles  mixtes.  Cer- 
tains caractères  du  moyen  âge  ont  apparu  avant  476,  même 
vivant  395;  certains  autres  n'ont  pas  brusquement  disparu 
«n  1453  ou  1492.  Inversement,  les  institutions  antiques  ne 
se  sont  pas  soudainement  éclipsées  après  la  mort  de  Théo- 
dose ou  l'avènement  d'Odoacre;  et  à  beaucoup  de  points 


(*)  Esquisse  d'une  histoire  gencrnie  el  composée  des  philosophies  médiévales, 
[I.  vi-vii.  M.  Picavet  avait  déjà  lait  ceUe  proposition  dans  nne  étude  de  1901  : 
Le  moyen  âge,  limites  chronologiques.  Il  la  reprit  en  1913  dans  ses  reinar- 
<iaables  Essais  sur  l' histoire  des  religions  et  des  philosophies  médiévales  (p.  17). 


72  L.    LECLÈRE 

de  vue  l'ère  moderne  s'est  ouverte  avant  la  découverte  de 
l'Amérique  et  môme  avant  la  prise  de  Constantinople  pai- 
les  Tui'cs. 

Cette  remarque  préalable  étant  faite,  examinons  les- 
quelles des  dates  que  nous  avons  mentionnées  sont  les  plus 
conformes  à  la  réalité  historique,  lesquelles  évoquent  des 
événements  assez  nombreux  et  assez  caractéristiques  pour 
servir  d'introduction  et  de  conclusion  à  une  grande  époque 
du  passé. 

47H?  Les  faits  qui  se  sont  produits  cette  année-là,  à 
Rome,  nous  paraissent,  vus  de  très  loin,  fort  importants. 
L'oiU-ils  été  aux  yeux  des  contemporains?  On  en  peut  dou- 
ter. Depuis  trois  quarts  de  siècle  l'Empire  d'Occident  avait 
perdu  toute  force  effective;  d'autre  part,  il  allait  encore 
exercer  pendant  longtemps  une  grande  influence  politique 
et  sociale.  D'ailleurs,  il  subsistait  toujours  en  Orient;  et 
l'on  peut  même  dire  que  l'acte  de  violence  d'Odoacre,  en 
supprimant  la  dignité  impériale  à  l'ouest  de  l'Adriatique, 
rendait  à  l'Empereur  byzantin  la  souveraineté  sur  l'Occi- 
dent et  rétablissait  l'unité  de  l'Empire  rompue  en  395. 

Ce  n'est  pas  le  règne  si  court  de  Rounilus  Augustule, 
c'est  bien  plutôt  le  gouvernement  et  la  mort  de  Théodose 
qui  doivent  servir  de  limite  initiale  au  moyen  âge.  C'est 
en  395,  en  effet,  que  se  séparèrent  l'Occident  et  l'Orient, 
fait  cai)ital  dont  les  conséquences  se  manifestent  encore, 
même  dans  l'histoire  la  plus  contemporaine  de  l'Europe. 
Que  sont,  par  exemple,  les  incidents  de  Fiume,  les  ques- 
tions dalmate  ou  albanaise,  sinon  de  récents  épisodes  de 
la  lutte  pour  la  maîtrise  de  l'Adriatique  entre  les  peuples 
riverains  de  cette  mer.  Italiens  ai)partenant  au  catholi- 
cisme romain.  Grecs  ou  Slaves  dépendant  du  christianisme 
oriental?  La  scission  de  395  est  d'autant  plus  remarquable 
qu'elle  a  suivi  de  près  l'érection  du  christianisme  au  rang 
de  religion  d'Etat  (353),  les  mesures  de  Théodose  contre  le 
polythéisme  agonisant,  le  passage  du  Danube  par  les  Visi- 
goths  (376).  Et  n'est-ce  pas  précisément  l'action  combinée 
des  Germains  et  du  christianisme  qui,  en  détruisant  l'em- 
pire d'Honorius,  ouvrit  un  âge  nouveau?  S'il  faut  donc 
choisir  entre  ces  deux  années,  476  et  395,  il  ne  peut  pas  y 
avoir  de  doute,  c'est  la  deuxième  qui  est  la  plus  aisée  à  jus- 


LIMITES  DU   MOYEN  AGE  73 

tifier;  car  si  l'on  peut  dire  que  nous  sommes  toujours  à  un 
«  tournant  de  l'histoire  »,  il  est  certain  que  la  courbe  du 
chemin  s'est  particulièrement  accentuée  à  la  fin  du 
IV''  siècle.  En  476,  au  contraire,  le  triomphe  du  christia- 
nisme était  assuré,  les  grandes  invasions  presque  ter- 
minées. 

Pas  plus  que  476  pour  le  début  du  moyen  âge,  lUVA  ne 
nous  paraît  fournir  une  ligne  de  démarcation  acceptable 
pour  en  marquer  le  terme  final.  Sans  doute,  en  cette  année 
se  sont  succédé  deux  événements  considérables  :  la  prise 
de  Constantinople,  la  fin  de  la  guerre  de  Cent  ans.  Il  faut 
toutefois  éviter  d'exagérer  l'importance  de  ces  faits.  Le 
second  n'a  de  valeur  que  pour  l'Europe  occidentale.  Quant 
au  premier,  gardons-nous  d'y  v(nr  une  coupure  nette  entre 
le  moyen  âge  et  les  temps  modei-nes.  C'est  la  Renaissance 
et  la  constitution  de  fortes  monarchies  en  Espagne,  en 
France,  en  Angleterre,  c'est  l'imprimerie  et  la  Réfoime, 
c'est  Colomb  et  Vasco  de  Gama  qui  caractérisent  les  débuts 
de  l'ère  moderne.  Sur  ces  grandes  nouveautés  l'assaut  du 
29  mai  1453  n'a  pas  eu  d'influence  directe  et  sensible.  L'ap- 
proche et  la  victoire  des  Turcs  ont  sans  doute  chassé  de 
Constantinople  des  lettrés,  des  savants,  des  artistes  qui, 
en  s'établissant  en  Italie,  ont  contribué  à  accélérer  le  mou- 
vement de  la  Renaissance  ;  mais  celui-ci  avait  commencé 
avant  leur  arrivée  dans  la  péninsule. 

C'est  pour  ces  raisons  qu'il  faut  donner  la  préférence 
à  1492.  Cette  année-là.  la  Renaissance  a  pris  tout  son 
essor;  les  caravelles  de  Colomb  ciaglent  vers  l'Ouest;  les 
Portugais  s'avancent  vers  le  cap  des  Tempêtes;  Louis  XI. 
Henri  VII,  les  rois  catholiques  d'Espagne  ont  achevé  ou 
poursuivent  leur  besogne  centralisatrice;  les  guerres  d'Ita- 
lie se  préparent.  C'est  bien  là,  comme  aux  environs  de  o95, 
un  des  k  tournants  »  de  l'histoire  européenne. 

Mais  n'allons  pas  plus  loin,  sous  prétexte  de  logique;  et 
parce  que  la  Réforme,  la  Renaissance,  les  grandes  décou- 
vertes et  les  progrès  de  l'absolutisme  royal  sont  des  phé- 
nomènes qu'il  est  malaisé  de  dissocier,  ne  datons  pas 
de  1317  le  commencement  de  l'âge  moderne.  Ce  choix  aurait 
en  effet  pour  conséquence,  au  moins  bizarre,  défaire  de  la 
Renaissance  et  de  la  révolution  économique,  de  Léonard 


/4  L.    LECLE'.^E 

de  Vinci  et  de  Vasco  de  Gaina  des  événements  ou  des  per- 
sonnages médiévaux!  .1  fortiori,  fant-il  rejeter  la  date 
de  ISoO,  alors  que  déjà  s'obscurcit  l'éclat  de  la  Renaissance 
et  que  le  Concile  de  Trente  finit  d'édifier  l'œuvi'e  de  la 
Contre- Réforme.  Il  serait  extravagant  de  caser  parmi  les 
questions  d'histoire  du  moyen  âge  la  Réforme  et  les 
guerres  européennes  du  xvi«  siècle.  «  Je  souhaiterais  fort, 
pour  la  beauté  de  la  chose,  écrit  M.  Hauser,  qu'on  donnât 
un  de  ces  jours  à  l'agrégation  le  sujet  suivant  :  «  Conq)o- 
«  sition  d'histoire  du  moyen  âge  *  la  Renaissance.  » 
O  Michelet!  qu'en  dirait  votre  grande  âme?  Et  que  devien- 
drait votre  admirable  introduction?..  On  fera  difficilement 
admetti'e  à  des  historiens  que  la  Renaissance  fait  partie 
du  moyen  âge  (^).  ))  Et  «  on  ne  fera  jamais  croire  à  per- 
sonne, sauf  à  un  candidat  à  l'agi'égation,  que  Luther  ou 
Charles-Quint  sont  des  gens  du  moyen  âge  (^)  )>.  D'ailleurs 
le  système  :  476-'15o9  ne  pèche  pas  seulement  par  l'emploi  de 
la  seconde  date,  mais  aussi  par  l'usage  de  la  première  dont 
la  valeur  est  médiocre. 

Quant  â  la  thèse  de  M.  Picavet,  sa  valeur  est  incontes- 
table. La  pensée  chrétienne  déborde  à  coup  sûr  des  deux 
côtés  le  moyen  âge  proprement  dit,  avant  le  v*"  et  après  le 
xV  siècle  (■').  Mais  l'extension  proposée  par  l'auteur  des 
Philosophies  mcdiévidcs.  parfaitement  justifiée  à  condition 
qu'elle  se  renferme  dans  le  domaine  des  idées,  ne  peut  pas 
s'appliquer  à  l'étude  des  transformatio7is  politiques.  S'il 
en  était  autrement,  on  en  viendrait,  de  proche  en  proche, 
â  allonger  indéfiniment  l'époque  médiévale,  à  l'étendre 
<rune  part  jusqu'au  jour  où  apparaît  la  première  ébauche 
des  conceptions  du  moyen  âge,  et  d'autre  part  jusqu'au 
jour  où   a  disparu  —  s'il  a  disparu  —  le  dci-nier  souvenir 


(')  Revue  înlernalionale  (If  renseignement,  io  niais  li)()!l,  \\ .  "l'-MS. 

(2)  Revue  hi.stori(i?ie,  CX»,  p.  -235  (1913). 

"(■^)  L.  ItRKiiiEK  (toc.  cit.,  p.  o20)  rilc,  à  l'appui  de  l.i  llicse  de  M.  l*icav«!l,  un 
oxenipift  iult'rcssant  :  «  Kn  rUidiant  la  série  <les  loininenlateur.s  d'Aristole, 
/'dites  par  rAeadémie  df  Kcilin,  M.  Praccliter  a  sijçnali'  nue  vérilable  eoupure 
onlre  Alexandre  d'Aphiodisias  (l!)«-:211)  et  Poi-phjre  (233-30.')).  Le  |)rcmier 
^arde  eiifiti'e  sf>ii  indépi'ndance  et  adopte  parfois  des  solutions  o|)posées  à 
<"elies  de,  son  maître;  le  sccnud  (•(uniiuMice  la  série  des  commenlateurs  pru- 
dents qui  se  pri'oecupent  seulement  de  rendre  la  logique  arislolclicienne 
iiilelligilile.  Il  a  déjà  l'espril  de  la  scolastique.  » 


LIMITES  DU   MOYEN   AGE  75 

de  ce  temps.  On  aboutirait  ainsi  à  des  conséquences  pro- 
prement absurdes 

Il  est  au  surplus  une  raison  d'un  autre  ordre  que  celui 
des  événements  i^olitiques  qui  justifie  le  choix  de  395  et 
de  149!2,  une  raison  meilleure  peut-êti-e  que  les  autres  aux 
yeux  des  historiens,  toujours  disposés  à  discuter  de  l'im- 
portance relative  des  faits  qu'ils  étudient.  Le  moyen  âge 
ne  doit  pas  seulement  l'originalité  de  sa  physionomie  à 
certaines  institutions,  à  certaines  croyances,  à  certaines 
formes  artistiques  et  littéraires  ;  il  la  doit  aussi  à  ce  lait 
que  les  sources  de  son  histoire  ont  un  caractère  particu- 
lier, qu'elles  exigent,  pour  être  utilement  employées,  des 
études  déterminées.  Pour  décrire  l'antiquité,  les  érudits  se 
servent  des  inscriptions,  des  papyrus,  des  monuments,  des 
œuvres  littéraires;  et  ils  doivent  au  préalable  être  initiés 
à  certaines  sciences  auxiliaires  :  papyrologie,  archéologie, 
épigraphie  et  paléographie  grecques  et  latines.  Les  médié- 
vistes doivent  surtout  consulter  des  chartes,  des  diplômes, 
des  annales,  des  chroniques;  et  les  sciences  auxiliaires 
dont  la  maîtrise  leur  est  nécessaire  sont,  pour  une  partie 
au  moins,  spéciales  à  leurs  études  :  paléographie  des  textes 
en  langues  vulgaires,  chronologie  chrétienne,  diploma- 
tique—  Or,  à  quel  moment  le  premier  groupe  de  sources 
a-t-il,  dans  l'ensemble,  cédé  la  place  au  second?  Précisé- 
ment vers  400,  et  dans  le  cours  du  V^  siècle.  D'autre  part, 
les  historiens  modernistes  ont  à  leur  disposition,  outre  des 
manuscrits,  des  documents  imprimés;  de  plus,  manu- 
scrites ou  imprimées,  ces  sources  sont  surtout  des  rapports, 
des  correspondances  d'hommes  d'Etat,  d'ambassadeurs,  et 
non  plus  des  textes  hagiographiques,  des  chroniques,  des 
annales,  des  chartes.  Pour  recueillir  et  utiliser  ces  docu- 
ments d'une  nouvelle  espèce,  l'emploi  de  techniques  nou- 
velles aussi  est  indispensable.  A  partir  de  quel  instant 
s'est  produite  cette  transformation?  .1  la  fin  du  XV'  siècle. 
Aug.  Molinier,  arrêtant  à  la  veille  des  guerres  d'Italie 
ses  travaux  sur  les  sources  de  l'histoire  du  moyen  âge, 
a  pu  écrire  :  «  Au  changement  de  politique  répond  un 
changement  dans  la  nature  des    sources  (').  »  L'axiome 


(*)  Les  sources  de  l'histoire  de  France,  I.  V,  p.  I. 


7f)  L.    I.ECLÈRE 

n'est  pas  moins   vrai   pour   le  début  que  pour   la  lin  du 
moyen  âge. 

* 

*     * 

Concluons.  Soit  que  l'on  tienne  compte  de  l'importance 
et  du  caractère  des  événements,  soit  que  l'on  considère  le 
caractère  des  sources  employées  par  les  historiens,  c'est 
bien  vers  400  et  vers  1500  qu'on  peut  convenablement  pla- 
cer le  point  initial  et  le  point  final  de  l'époque  qui  a  reçu, 
depuis  deux  siècles  et  demi,  le  nom  de  moyen  âge.  Ne  pré- 
cisons pas  davantage,  ne  choisissons  pas  telle  année  plutôt 
que  telle  autre.  Ce  procédé  scolaire  risque  d'induire  en 
erreur  en  faisant  croire  à  l'existence  de  coupures  tran- 
chées. Ili.storiii  non  fecit  snltiis.  Bornons-nous  donc,  sans 
plus,  à  admettre  qu'on  doit  raisonnablement  mener  jusqu'à 
la  fin  du  iV  siècle,  et  pas  au  delà,  l'étude  des  tem})s 
antiques;  et  qu'on  doit  faire  commencei"  celle  des  temps 
niodernes  dans  les  dernières  années  du  xv*^  siècle,  et  pas 
plus  pjès  de  nous. 

Cette  conclusion  n'a  rien  de  révolutionnaire  puisque  ce 
n)odc  de  répai'tition  chronologique  est  assez  généralement 
admis.  Nous  avons  pensé  toutefois  qu'il  pouvait  être  utile 
d'en  montrer  une  fois  de  plus  la  valeur,  en  présence  des 
essais  tentés  çà  et  là  pour  lui  apporter  des  modifications 
parfois  assez  sensibles  et  toujours  des  plus  contestables. 

L.  Leci.èke. 


Mahomet  et  Charlemagne 


Cl) 


La  fin  du  viii«  siècle  de  notre  ère  a  vu  se  réaliser  dans 
l'Europe  Occidentale  un  état  de  choses  sans  précédent. 
Pour  la  première  fois  depuis  l'aurore  des  temps  histo- 
riques, le  foyer,  non  seulement  du  mouvement  politique, 
mais  du  mouvement  général  de  la  civilisation,  s'y  est  trans- 
porté du  bassin  de  la  Méditerranée  dans  celui  de  la  mer 
du  Nord.  Le  pivot  de  l'Empire  romain  était  en  Italie; 
celui  de  l'Empire  carolingien  est  situé  dans  la  région 
comprise  entre  le  Rhin  et  la  Seine.  Les  Morins  qui,  durant 
tant  de  siècles,  perdus  à  l'extrême  pointe  septentrionale  du 
moude  civilisé,  avaient  passé  pour  les  extreini  hominiim, 
occupent  désormais  une  situation  centrale,  ei  c'est  Eome 
qui  se  trouve  maintenant  reléguée  et  comme  jetée  en  flèche 
à  la  frontière  de  l'Europe  nouvelle. 

On  n'apeut-être  pas  suffisamment  réfléchi  à  l'importance 
de  cette  transformation.  Y  étant  accoutumés  depuis  un 
millier  d'années,  nous  ne  nous  avisons  pas  suffisamment 
de  ce  qu'elle  présente  d'extraordinaire  et  presque  de 
monstrueux  ou  du  moins  d'anormal.  Jusqu'alors,  en  effet, 
la  civilisation  européenne  s'est  élaborée  aux  bords  de  la 
Méditerranée  par  le  travail  successif  ou  simultané  de 
l'Egypte,  de  la  Syrie,  de  la  Phénicie,  de  la  Grèce  et  de 
Rome.  Celle-ci,  la  dernière  ouvrière  de  l'œuvre  admirable, 


(')  Les  pages  suivanles  exposeiil  dune  manière  évideimiieul  Jjeaucoii|)  Irop 
.sonimaire  une  idée  qui  a  paru  intéressante  à  des  historiens  auxquels  j'ai  eu 
l'occasion  de  la  faire  connaître.  11  m'est  impossible  de  lui  donner  ici  les 
développements  (ju'ello  comporte.  Je  me  swis  borné  à  en  marquer  les  traits 
principavix  et  surtoul  à  déterminer  ciaircmoni  le  point  de  vne  d"on  elle 
apparaît. 


78  H.    PIRENNE  ' 

a  réuni  eu  un  seul  Etat  tous  les  peuples  dont  elle  était 
l'héritière.  L'Empire  fondé  par  elle,  les  comprenant  tous, 
est  donc  un  Emi-ire  essentiellement  méditei-ranéen  {^).  Son 
unité  géographique  frappe  au  premier  coup  d'oeil.  Elle 
fait  sa  force  et  lui  communique  une  incomparable  beauté. 
Ses  provinces  se  groui)ent  autour  de  la  mer  comme  les 
parterres  d'un  grand  parc  autour  d'un  bassin.  Au  lieu  de 
les  séparer  elle  les  rapproche  en  les  unissant  les  unes  aux 
autres  par  une  navigation  rapide  et  facile.  C'est  par  elle 
que  s'échangent  les  produits  des  climats  si  divers,  mais 
également  fertiles,  de  ce  monde  privilégié.  Elle  joint 
l'Europe  à  l'Asie  et  à  l'Afrique,  ou  plutôt  on  n'aperc^oit 
pas  alors  entre  l'Asie,  l'Europe  et  l'Afrique  cette  opposi- 
tion à  laquelle  nous  sommes  depuis  si  longtemps  habitués. 
L'Or^/.s-  Roinaniis  les  a  liées  indissolublement  ensemble 
dans  la  communauté  d'une  même  civilisation. 

Kt  cette  civilisation,  c'est  dans  les  régions  orientales 
de  la  Méditerranée  qui  en  ont  été  le  berceau,  qu'elle  se 
développe  jusqu'au  bout  avec  le  plus  de  vigueur.  Rome 
n'en  est  guère  que  le  centre  politique  et  le  gurant.  Grâce 
à  elle.  Antioche.  Smyrne,  Alexandrie  et  plus  tard  Cons- 
tantinople  peuvent  communiquer  en  paix  à  l'Occident 
leurs  industries,  leurs  philosophies  et  leurs  religions. 
Qu'il  suffise  de  rappeler  ici  la  diffusion  des  cultes  orientaux 
et  du  christianisme 

Or,  c'est  tout  cela,  c'est  cet  équilibre  millénaire  de  notre 
Europe  qui  se  rompt,  non  point  momentanément,  mais 
pour  toujours,  l()rsqu'ap[)araît  l'Empire  carolingien.  On 
dirait  qu'un  cataclysme  a  brusquement  déplacé  l'axe  du 
monde.  Depuis  soixante  siècles,  il  se  trouvait  au  sud  du 
continent,  et  le  voilà  fixé  au  nord.  Des  pays  et  des  peuples 
qui  depuis  toujours  avaient  été  confinés  dans  la  barbarie 
ou  qui  en  sortaient  à  peine,  se  trouvent  appelés  tout  à  coup 
au  premier  rang.  L'Orient  et  l'Occident  sont  séparés  l'un 
de  l'autre.  La  navigation  méditerranéenne  n'atteint  plus 
les  livagcs  de  la  Gaule,  et  sa  disparition  y  entraîne  celle  du 


à 


l'j  il  Oht  sans  (loulc  iiuililc  de  luire  reuiurquer  que  l'Empire  ii':i  élciulii 
au  nord  sa  froiilière  jusqu'au  tUiiii  (|ue  pour  protéger,  coniiiie  pai  uu  glacis, 
le  liassjii  (le  la  .Médilerraiiee. 


MAHOMET    ET    CHAHLEMAGNE  7& 

commerce  et  de  l'industrie.  Les  villes,  dont  elle  entretenait 
l'activité,  se  dépeuplent  et  tombent  en  raines.  A  l'économie 
urbaine  se  substitue  une  économie  rurale  sans  débouchés. 
Bref,  dans  tous  les  domaines  s'accomplit  un  renversement 
complet  de  l'ordre  traditionnel.  En  sortant  de  la  commu- 
nauté méditerranéenne,  l'Europe  occidentale,  c'est-à-dire 
l'Europe  carolingienne,  se  constitue  en  un  monde  distinct. 
Qu'on  l'observe  du  point  de  vue  politique,  du  point  de  vue 
religieux  ou  du  point  de  vue  économique,  c'est  partout  le 
même  spectacle.  L'Empire  franc  s'oppose  à  l'Empire 
byzantin,  l'Eglise  latine  à  l'Eglise  grecque,  les  grands 
domaines  et  les  seigneuries  féodales  aux  cités  manufac- 
turières et  au  gouvernement  bur(ïaucratique  des  teri-itoires 
régis  par  Constant iiiople. 

Comment  expliquer  un  phénomène  d'une  portée  si  vaste 
qu'il  a  déterminé  le  cours  de  la  civilisation  européenne? 
La  question  vaut  la  peine  d'être  posée,  car  il  semble  que 
les  historiens  aient  négligé  non  seulement  d'y  répondre^ 
mais  même  de  remarquer  qu'elle  existait.  Oubli  étrange,, 
à  première  vue,  mais  qui  pourtant  se  compiend  sans  peine. 
Il  convient,  ce  semble,  d'en  chercher  la  raison  dans  l'habi- 
tude invétérée  que  nous  avons  prise  de  considérer  en  soi 
et  pour  ainsi  dire  comme  des  quantités  incommensurables 
l'antiquité  et  le  moyen  âge  (*).  On  dirait  qu'enti-e  celui-ci 
et  celle-là  se  creuse  un  abîme  infranchissable.  Du  moins 
personne  ne  se  i-isque-t-il  à  le  franchir.  Les  historiens  de 
l'antiquité  s'arrêtent  sui"  l'un  de  ses  bords  comme  les 
médiévistes  le  font  sur  l'autre.  Ni  les  premiers  ne  cher- 
chent à  descendre  plus  bas,  ni  les  seconds  à  remonter  plus 
haut.  Il  en  résulte  qu'ils  ne  se  rencontrent  nulle  part  et 
qu'il  existe  entre  leurs  positions  une  soi'te  de  no  nian's 
land.  Chaque  équipe  de  travailleurs  étudie  son  sujet 
comme  s'il  constituait  un  bloc  autonome.  Ils  l'examinent, 
non  de  l'extérieui-,  mais  du  dedans,  et  il  est  clair  qu'en 


(ij  Remaniuei' (juc  |)ies(juc  luiitcs  les  liisloinis  dites  générales  ou  univer- 
selles commencent  à  la  lin  de  lantiiiuilc.  11  laudrail.  si  l'on  voulait  traiter  la 
question  dans  tous  ses  développements,  signaler  que  la  conception  philolo- 
gique (jui  réserve  aux  philologues  l'élude  de  l'antiiiuité'  a  largcniciil  cniilrihué 
à  la  situation  signalée  ici. 


S(^  H.    PIRENNE 

procédant  ainsi  ils  n'en  obtiennent  qu'une  vue  incomplète 
et  déformée.  Du  point  où  ils  se  placent  l'horizon  qu'ils 
découvrent  est  trop  étroit;  leur  regard  ne  peut  suivre  le 
prolongement  de  ses  lignes  dans  le  lointain. 

Il  faut  bien  reconnaître  que  les  divisions  que  nous 
imposons  à  l'histoire,  en  vertu  de  nécessités  d'exposition 
ou  de  recherches,  ne  répondent  point  à  la  réalité.  Ce  sont 
des  étiquettes  commodes,  des  manières  de  parler  aux- 
quelles il  convient  de  n'attribuer  aucune  précision  scien- 
tifique. Il  en  va  d'elles  comme  des  expressions  par  quoi 
nous  désignons  les  phases  de  notre  existence.  Qui  songe 
à  attribuer  quelque  rigueur  aux  termes  d'enfance,  de 
jeunesse,  d'âge  mûr  et  de  vieillesse  ?  Entre  la  naissance  et 
la  mort,  notre  vie  n'est  qu'une  série  de  transformations 
dont  aucune  ne  commence  ni  ne  s'achève  à  date  fixe.  Et  ce 
qui  est  vrai  d'elle  l'est  bien  plus  encore  de  la  vie  de  la 
société.  Sa  continuité  ne  se  ré^Jartit  pas  en  compartiments 
et,  pas  plus  que  le  courant  d'un  fleuve,  elle  ne  supporte  de 
cloisons  étanches.  L'antiquité  ne  finit  pas,  elle  se  piolonge, 
à  travers  quantité  de  nuances  et  de  dégradations,  dans  le 
moyen  âge,  comme  le  moyen  âge  se  prolonge  lui-même 
dans  les  temps  modernes.  Et  du  point  de  vue  proprement 
historique,  ce  sont  justement  les  périodes  intermédiaires, 
les  périodes  de  transition  qui  s'imposent  surtout  à  l'atten- 
tion, parce  que  c'est  en  elles  que  peuvent  le  mieux  s'obser- 
ver les  changements  sociaux  qui  forment  l'objet  même  de 
l'histoire. 

Si  cela  est  vrai,  il  en  résulte  que  les  médiévistes,  en 
abordant  l'étude  de  l'Empire  carolingien  comme  ils  le  font, 
posent  mal  le  problème  à  résoudre.  Etant  médiévistes,  ils 
l'envisagent  uniquement  du  côté  ou,  si  l'on  veut,  en  fonction 
du  moyen  âge,  ils  s'abstiennent  de  le  regarder  du  côté  de 
l'antiquité  Mais  dès  lors  ils  ne  tiennent  compte  que  d'une 
partie  des  éléments  de  la  question,  et  partant  leur  solution 
n'y  est  pas  adéquate.  A  leurs  yeux,  le  peuple  franc,  dès  la 
<',ouquête  de  la  Gaule  pai-  Clovis,  a  déternnné  l'avenir  de 
l'Europe.  Ils  voient  dans  le  royaume  mérovingien  le  point 
<le  départ  et  la  condition  essentielle  de  l'œuvre  cai-olin- 
gienne.  Kn  conséquence,  ils  attribuent  aux  (lermains  une 
importance  capitale.   Ce  n'est  pas  seulement  l'école  aile- 


MAHOMET    ET    CHARLEMAGNE  81 

mande  qui  salue  en  eux  les  fondateurs  du  monde  nouveau 
établi  sur  les  ruines  du  monde  antique. 

Et  je  veux  bien  que  tout  cela  soit  exact,  mais  il  ne  l'est 
que  dans  une  certaine  mesure.  Il  est  évident  que  Clovis 
prépare  Charlemagne,  et  il  ne  l'est  pas  moins  que  les 
institutions  germaniques  ont  exercé  une  action  profonde 
sur  les  institutions  de  l'Europe  médiévale.  Mais  il  est 
indispensable  de  savoir  s'il  devait  nécessairement  en  être 
ainsi,  ou,  en  d'autres  termes,  il  importe  de  se  demander 
si  l'influence  de  Clovis  et  des  Germains  s'est  imposée  en 
vertu  de  sa  vigueur  propre  ou  tout  simplement  en  vertu 
des  circonstances.  Et  que  l'on  ne  croie  point  qu'il  s'agisse 
ici  de  se  livrer  au  jeu  puéril  de  reconstruire  l'histoire 
autrement  qu'elle  n'a  été.  Il  s'agit  —  ce  qui  est  bien  diffé- 
rent —  d'apprécier  à  leur  valeur  réelle  les  forces  qui  ont 
agi  sur  son  développement.  La  question  n'implique  rien 
de  moins  que  le  jugement  à  porter  sur  les  causes  qui  ont 
provoqué  en  Europe  ce  renversement  d'équilibre  dont  je 
parlais  plus  haut.  Il  ne  paraît  pas  qu'il  y  en  ait  de  plus 
essentielle  à  une  appréciation  scientifique  de  ce  que  l'on 
est  convenu  d'aj^peler  le  moyen  âge. 

Si,  au  lieu  de  se  renfermer  dans  l'étude  de  Clovis  et  des 
Francs,  on  jette  un  coup  d'œil  d'ensemble  sur  la  dissolution 
du  monde  romain  au  v®  siècle,  et  si,  surtout,  on  y  observe  le 
cours  des  événements,  non  pas  au  point  de  vue  de  l'Europe 
qui  sera,  mais  au  point  de  vue  de  l'Europe  qui  est  encore, 
c'est  à-dire  non  pas  en  portant  le  regard  vers  le  nord,  mais 
en  le  portant  vers  la  Méditerranée,  le  spectacle  que  l'on 
découvre  est  bien  différent  de  celui  avec  lequel  nous 
sommes  familiarisés.  Ce  que  nous  avons  coutume  de  consi- 
dérer comme  essentiel  se  révèle  tout  de  suite  comme 
accessoire.  La  Gaule  mérovingienne,  au  lieu  de  concentrer 
sur  elle  l'intérêt,  n'apparaît  que  comme  une  puissance 
secondaire  jouant  un  rôle  assez  effacé.  On  est  surpris  de 
constater  que,  malgré  l'effondrement  de  l'Empire  romain 
en  Occident,  la  Méditerranée  ne  cesse  pas  de  constituer  le 
foyer  de  la  vie  historiqite.  Son  attraction  s'impose  irré- 
sistiblement aux  barbares.  Dès  qu'ils  ont  franchi  le  Rhin 
ou  le  Danube,  c'est  vers  elle  qu'ils  se  dirigent,  impatients 
de  s'établir  sur  ses  rivages  et  de  jouir  de  sa  beauté.  Dans 


0"-i  H.    PIRENNE 

le  courant  du  v*  siècle, les  Vandales  s'installent  en  Afrique, 
les  Wisigoths  en  Aquitaine  et  en  Espagne,  les  Burgondes 
dans  la  vallée  du  Rhône,  les  Ostrogotlis  en  Italie.  Les 
Francs,  qui  se  sont  laissés  devancer  dans  cette  course*  au 
Midi,  ne  font  pas  exception  à  la  règle  générale.  Clovis  a 
tenté  de  conquérir  la  Provence  et  il  a  fallu  que  Théodoric 
intervint  pour  l'empèclier  de  pousser  les  frontières  de  son 
royaume  jusqu'à  la  Cote  d'Azur.  Mais  ce  premier  insuccès 
ne  devait  pas  décourager  ses  successeurs.  Un  quart  de 
siècle  plus  tard,  en  536,  ils  profiteront  de  l'offensive  de 
Justinien  contre  les  Ostrogotlis  pour  se  faire  céder  par 
Vitigès  la  région  convoitée,  et  l'on  n'a  pas  assez  remarqué 
que,  depuis  lors,  la  dynastie  mérovingienne  tend  inlassa- 
blement à  devenir,  à  son  tour,  une  puissance  méditer- 
ranéenne. En  o42,  Cliildebert  et  Clotaire  risquent  une 
expédition,  d'ailleurs  malheureuse,  au  delà  des  Pyrénées. 
L'Italie  surtout  attire  la  convoitise  des  rois  francs.  Ils 
s'allient  aux  Byzantins  en  guerre  avec  les  Ostrogotlis  puis 
avec  les  Lombards,  dans  l'espérance  de  i^rendre  pied  au 
sud  des  Alpes.  Constamment  déçus,  ils  s'obstinent  néan- 
moins à  pousser  leur  pointe  vers  la  mer  bleue.  Déjà,  en  53.', 
Theudebert  a  fi-anchi  les  Alpes,  et  lorsque  Narsès,  en  553, 
aura  reconquis  les  territoires  qu'il  avait  annexés,  de 
nombreux  efforts  seront  faits  en  584-585  et  de  588  à  5'JO 
pour  s'en  emparer  de  nouveau. 

On  peut  donc  affirmer  que  l'invasion  germanique  n'a 
pas  mis  fin  à  l'importance  historique  de  la  Méditerranée. 
Elle  reste  pour  les  Germains  ce  qu'elle  était  avant  eux,  le 
centre  même  de  l'Europe,  le  marc  nostruni.  L'Italie  con- 
tinue même  d'y  jouer  le  rôle  principal.  (J'est  parce  qu'il 
l'occupe  que  Théodoric  (493-5i26)  exerce  sur  les  Etats 
barbares  une  hégémonie  à  laquelle  Clovis  ne  cherche  pas 
plus  à  se  soustraire  qu'aucun  autre  de  ses  contemporains. 
L'équilibre  traditionnel  est  encore  tellement  puissant  que, 
Théodoric  disparu,  Justinien  (527-505)  peut  concevoir  et 
[)resque  entièrement  achever  la  reconstitution  de  l'Empire 
romain.  L'Afrique,  l'Espagne,  l'Italie  sont  reconquises; 
la  Méditerranée  ledevient  un  lac  romain.  Byzauce,  il  est 
vrai,  épuisée  pai-  l'immense  effort  qu'elle  vient  de  fournir, 
ne  peut  ni  parfaire  ni  même  maintenir  cette  restauration 


MAHOMKT    ET    CHAKLEMACNE  83 

du  monde  antique.  Mais  si  les  Lombards  lui  enlèvent  une 
partie  de  l'Italie  (568),  si  les  Wisigoths  s'affranchissent  de 
son  joug,  elle  n'abandonne  point  ses  prétentions,  et  la 
lutte  qu'elle  soutient  contre  ses  ennemis  et  d'où  dépend  à 
ce- moment  le  sort  de  rEiiroi)e,  pi'ouve  bien  que  celui-ci 
ne  cesse  pas  de  se  jouer  autour  de  la  Méditerranée. 

Ce  qui  est  vrai  du  mouvement  politique  ne  l'est  pas 
moins,  s'il  ne  l'est  davantage  encore,  de  la  civilisation. 
Faut-il  rappeler  que  Boëce  (480-525)  et  Cassiodore  (477- 
c.  502)  sont  Italiens  comme  saint  Benoit  (480-543)  et  comme 
Grégoire  le  Grand  (590  604),  et  qu'Isidore  de  Séville 
(570-636)  est  Espagnol?  C'est  l'Italie  qui  conserve  les 
dernières  écoles  en  même  temps  qu'elle  lépand  le  mona- 
cliisme  au  nord  des  Alpes  et  qu'elle  poi-te  le  christianisme 
aux  Anglo-Saxons  (596).  C'est  chez  elle  que  se  rencontre 
à  la  fois  ce  qui  subsiste  encore  de  la  culture  antique  et  ce 
qui  s'enfante  de  nouveau  au  sein  de  l'Eglise.  Et  pour 
achever  de  montrer  combien  la  physionomie  de  l'Europe 
après  les  invasions  germaniques  reste  conforme,  dans  ses 
traits  essentiels,  à  la  physionomie  de  l'Europe  romaine, 
constatons  enfin  que,  jusqu'au  milieu  du  vu''  siècle,  l'Occi- 
dent demeure,  ^-râce  à  la  navigation  méditerranéenne,  sous 
l'influence  économique  de  l'Orient.  De  Byzance,  d'Asie 
Mineure  et  d'Egypte  des  maichands  juifs,  mais  surtout 
des  marchands  syriens  continuent  à  l'approvisionner 
d'objets  de  luxe,  d'étoffes  précieuses,  de  vins  fins.  Par 
leur  intermédiaire,  il  reçoit  l'or  nécessaire  à  la  frappe  de 
ses  monnaies  et  le  j^apyrus  dont  se  servent  les  copistes  ou 
les  clercs  de  chancellerie. 

Cependant  la  Gaule  mérovingienne  se  débat  dans  une 
effroyable  décadence.  L'Etat  fondé  par  la  conquête  de 
Clovis  tombe  bientôt  en  décomposition.  Ce  qui  subsistait 
encore  de  la  civilisation  romaine  s'y  dissout  avec  une 
rapidité  surprenante.  La  barbarie  y  domine  partout,  dans 
la  vie  politique,  dans  la  vie  sociale,  dans  la  morale  privée. 
Les  faits  donnent  le  démenti  le  plus  tragique  au  thème 
convenu  de  l'invasion  germanique  i-ajeunissant  et  vivifiant 
par  un  afflux  de  forces  fraîches  la  décrépitude  romaine. 
Les  Francs  ont  bien  accepté  le  christianisme,  mais  ils  se 
montrent  aussi    incapables   d'en  faire   la   règle  de  leurs 


84  H.     PIHENNE 

mœurs  que  de  le  propager  autour  d'eux.  Il  faut  que  ce 
soient  des  apôtres  venus  d'Aquitaine,  d'Irlande  (*)  ou 
d'Italie  qui  l'apportent  en  Alsace,  en  Suisse,  dans  les 
Paj^s-Bas,  en  Angleterre.  La  démoralisation  et  l'inertie  du 
peuple  valent  celles  de  ses  rois.  Ce  n'est  pas  la  jeunesse, 
mais  la  déchéance  qu'atteste  la  société  des  temps  mérovin- 
giens, et  Grégoire  de  Tours  (538-594)  qui  a  vécu  au  milieu 
d'elle  et  en  a  été  épouvanté,  résume  mélancoliquement  son 
impression  dans  ces  paroles  découragées  ;  inundus  senescit, 
le  monde  vieillit. 

Si  l'on  se  reporte  au  commencement  du  vii'^  siècle,  on 
remarque  donc  que  l'Europe  occidentale,  malgré  les 
catastrophes  qui  se  sont  abattues  sur  elle  et  les  boulever- 
sements de  toute  sorte  qu'elle  a  subis,  n'a  pas  rompu  avec 
l'évolution  historique  de  l'antiquité.  Elle  la  continue  sur 
le  même  théâtre  et  sous  les  mêmes  influences.  Aucun 
indice  n'annonce  la  fin  de  la  communauté  de  civilisation 
établie  par  l'Empire  romain  des  colonnes  d'Hercule  à  la 
mer  Egée  et  des  côtes  d'Egypte  et  d'Afrique  à  celles 
d'Italie  et  d'Espagne.  Malgré  l'invasion  germanique  le 
monde  nouveau  n'a  pas  perdu  le  caractère  méditerianéen 
du  monde  antique.  Aux  bords  de  la  Méditerranée  se  con- 
centre et  s'alimente  tout  ce  qu'il  possède  d'activité  Seul, 
le  ro3'aume  franc,  confiné  dans  son  isolement  septentrional, 
semble  privé  de  toute  chance  d'avenir. 

Or,  de  tout  ce  qu'il  était  alors  naturel  et  rationnel  de 
prévoir,  rien  ne  s'est  réalisé.  Brusquement,  un  événement 
imprévu  s'est  jeté  au  trav^ers  du  courant  de  l'histoii-e,  a 
interrompu  la  série  de  ses  causes  et  de  ses  conséqneuces, 
l'a  fait  en  quelque  sorte  refluer  sur  soi-même,  et,  par  ses 
répercussions  inattendues,  a  coupé  court  à  la  tradition. 

L'invasion  musulmane  à  laquelle,  du  vivant  même  de 
Mahomet  (571-632),  personne  n'avait  pu  ni  songer  ni  se 
préparer,  s'est  abattue  sur  l'Univers  avec  la  force  élémen- 
taire d'un  cataclysme  cosmique.  Il  ne  lui  a  pas  fallu 
beaucoup  plus  de  cinquante  ans  pour  s'étendre  de  la  mer 


Cj  L'aclivilc  de  l'Kglisc  irlandaise,  loin  d'inlirmor  la  tlièso  exposée  ici,  la 
conlirme  au  contraire.  On  sait  que  le  christianisme  fut  introduit  en  Irlande,  à 
IV()0(jue  romaine,  |i:ii'  des  missionnaires  venus  de  Marseille. 


MAHOMET    ET    CHARLEMAGNE  85 

de  Chine  à  l'océan  Atlantique.  Eien  ne  résiste  devant  elle. 
Du  premier  clioc,  elle  renverse  l'Empire  perse  (637-644); 
elle  enlève  successivement  à  l'Empire  b^^zantin  la  Syrie 
(634-636).  l'Egypte  (6i0-642),  l'Afrique  (698i,  l'Espagne  (711), 
la  Corse,  la  Sardaigne.  les  iles  Baléares,  l'Apulie  et  la 
Calabre.  Sa  marche  envahissante  ne  cessera  qu'au  com- 
mencement du  viii^  siècle,  lorsque  les  murs  de  Constanti- 
nople  d'une  part  (718),  les  soldats  de  Charles  Martel  de 
l'autre  (732),  auront  brisé  sa  grande  offensive  envelop- 
pante contre  les  deux  flancs  de  la  chrétienté.  Alors  elle 
s'arrête.  Sa  force  d'expansion  est  épuisée,  mais  elle  a  suffi 
à  changer  la  face  de  la  terre.  La  poussée  soudaine  de 
l'Islam  a  détruit  l'Europe  antique.  C'en  est  fait  de  la 
communauté  méditerranéenne  qui  avait  survécu  à  l'Empire 
romain.  La  mer  familière  et  quasi  familiale  autour  de 
laquelle  elle  se  groupait  devient  subitement  étrangère  et 
hostile  Depuis  des  siècles,  l'existence  sociale,  dans  ses 
caractères  fondamentaux,  était  la  même  sur  tous  ses 
rivages;  la  religion,  la  même;  les  mcxnirs  et  les  idées,  les 
mêmes  ou  tout  proches  de  l'être.  L'invasion  des  barbares  du 
nord  n'avait  rien  modifié  d'essentiel  à  cette  situation.  Et 
voilà  que  tout  à  coup  les  pays  mêmes  où  notre  civilisation 
était  née,  lui  sont  ai-rachés,  que  le  culte  du  prophète  s'y 
substitue  à  la  foi  chrétienne,  le  droit  musulman  au  droit 
romain,  la  langue  arabe  à  la  langue  grecque  et  à  la  langue 
latine.  La  Méditerranée  avait  été  un  lac  romain  :  elle 
devient  un  lac  musulman.  La  navigation  byzantine  n'ose 
plus  s'y  risquer  au  large;  elle  ne  dépasse  plus  les  côtes 
de  l'Italie  méridionale.  Plus  de  vaisseaux  syriens  dans 
la  mer  Tyrrhénienne.  De  l'intercours  encore  si  actif  au 
vi«  siècle  entre  l'Orient  et  l'Occident  on  perd  toute  trace 
au  VIII''  siècle  La  substitution  qui  s'accomplit  en  Gaule  à 
cette  époque  de  la  monnaie  d'argent  à  la  monnaie  d  or  et 
du  parchemin  au  papyrus  nous  fournit  la  preuve  significa- 
tive et  irrécusable  de  sa  disparition. 

Ainsi,  pour  la  piemière  fois  depuis  son  entrée  dans 
l'Empire  romain,  l'Europe  occidentale  se  trouve  placée 
dans  des  conditions  toutes  nouvelles.  La  Méditerranée, 
qui  l'avait  jusqu'alors  mise  en  contact  avec  le  monde 
extérieur,  n'est  plus  qu'une  barrière  qui  l'isole.  Coupée  de 


66  H.     PI  HENNE 

ses  relations  avec  Byzance,  elle  est  forcée  de  se  replier  sur 
soi-même  et  de  vivre  à  huis  clos.  Et  c'est  alors  précisément 
que  son  centre  de  gravité,  si  l'on  peut  ainsi  dire,  se  déplace 
enfin  du  sud  au  nord  et  que  l'État  franc,  qui  jusqu'alors 
n'a  joué  qu'un  rôle  historique  de  second  ordre,  devient 
l'arbitre  de  ses  destinées.  Il  est  impossible  de  ne  voir 
qu'un  jeu  du  hasard  dans  la  simultanéité  du  blocus  de  la 
Méditerranée  par  l'Islam  et  de  l'entrée  en  scène  des  Caro- 
lingiens. A  envisager  les  choses  de  haut,  (m  aperçoit 
clairement  entre  l'un  et  l'autre  un  rapport  de  cause  à  effet. 
L'Empire  fraric  va  jeter  les  bases  de  l'Europe  du  moyen 
âge.  Mais  la  mission  qu'il  a  remplie  a  eu  pour  condition 
essentielle  le  renversement  de  l'ordre  traditionnel  du 
monde.  Rien  ne  1'^^  aurait  appelé  si  l'évolution  historique 
n'avait  été  détournée  de  son  cours  et,  pour  ainsi  dire, 
désaxée  par  l'invasion  musulmane.  Sans  l'Islam,  l'Empire 
franc  n'aurait  sans  doute  jamais  existé,  et  Charlemagne, 
sans  Mahomet,  serait  inconcev^able. 

H.    PiRENNE. 


La  villa  et  l'oppidum  de  Saint=Trond 


Pour  désignei'  l 'agglomération  d'habitants  qui  s'était 
formée  auteur  du  monastère  de  Saint-Trudon,  plusieurs 
expressions  ont  eu  cours  du  viii'^au  xii^  siècle  : 

1°  Villa  Sarchiniiini  est  la  forme  la  plus  ancienne;  elle 
apparaît  dès  l'année  741  (*)  et  se  retrouve  en  959  {^)  ; 
en  1023,  on  rencontre  Sarchinia  tout  court  (3);  en  106o, 
Sarchinia  et  villa  Sancti  Trudonis  sont  des  termes  équiva- 
lents (^).  Villa  Sancti  Trudonis  continue  à  être  employé 
dans  le  cours  du  xii«  siècle  (S).  Quant  à  villa  Sarchinium. 
nous  le  retrouvons  en  usage  en  1138  {^),  en  1 138  C'^)  et  plus 
tard,  mais,  cette  fois,  servant  à  désigner  non  plus  Saini- 
Trond,  mais  une  de  ses  dépendances.  (Mais  ceci  est  une 
parenthèse). 

2"  Oppidum  apparaît  dès  1060  (8);  il  tend  dès  lors,  mais 
sans  y  réussir  complètement,  à  se  substituer  à  villa.  Dans 
tout  le  cours  du  xii*  siècle,  il  est  mentionné  (9). 


(')  Carlulaire  de  Sainl-Trund,  édition  Piol,  l.  \,  \t.  i  :  "  basilicn  Sancli 
Pétri  et  Sancli  Trudonis  que  l'st  in  villa  Sarchinio  oonstructa.  » 

(2)  Id.,  p.  H  :  «  in  monastcrio  Sancli  Trudonis,  ...  in  villa  Sarchinio.  » 

(3)  Id.,  p.  14  :  «  monasterium  .Sancli  Trudonis  positum  in  Sarcliinnia.  » 
(^)  Id.,  p.  22  :  «  Villa  Sancli  Trudonis  que  Sarchinia  dicitur  ». 

(5)  Id.,  p.  55  (H40),  p.  106  (llOi)  \).  129  (1176).  Parfois  on  trouve  Sanctus 
Trudo  tout  court.  W.,  p.  76  (1147-1155)  «  Scnhini  ilf  Sanrtn  Tn/dorir,  p.  1  iT 
(H84),  «  apud  Sanctuni  Trudonem.  » 

(^^  Id.,  p.  45. 

(')  Id.,  p.  47. 

(8)  Id.,  p.  20  :  «  Scrutum,  lisez  gruluni  ejusdem  oppidi.  » 

(^)  Id.,  p.  30  (H07)  :  «  medietateu)  videlicet  ejusdem  oppidi  in  (iwu  uionas- 
leriuni  situm  est,  et  cambatum  de  toto  oppido  »:  p.  33  (1 108)  «  acluin  publiée 


88  A.    HANSAY 

3°  Biir^-iis  et  huri^cnsis  sont  usités  à  partir  du  milieu  du 
xii"  siècle  (*). 

4°  CivilHs  enfin  est  employé  con«îurremment  avec  uilla 
et  oppidum  par  le  deuxième  continuateur  du  Gcsta  qui 
écrivit  vers  J180(^). 

On  vient  de  s'en  rendre  compte,  les  expressions  i)illa  et 
oppidum  sont  de  loin  les  plus  anciennes  et  les  plus  fré- 
quentes. D'autre  part,  villa  apparaît  depuis  le  viii^  siècle 
et  oppidum  n'est  pas  mentionné  avant  1U6().  Il  est  vrai  qu'à 
partir  de  cette  dernière  date,  oppidum  devient  rex])ression 
consacrée;  villa  est  beaucoup  moins  usité. 

De  cette  substitution  de  oppidum  à  villa  n'y  aurait-il 
rien  à  conclui-e? 

Saiut-Trond,  par  exemple,  n'aurait-il  pas  pris  la  désigna- 
tion d'oppidum  du  jour  où  il  aurait  été  emmuraillé  ou  for- 
tifié? Ce  serait  une  erreur  de  le  croire,  car  l'abbé  Rodolphe, 
qui  écrivit  en  M14-H15  la  première  partie  du  Gesta  abba- 
tum   l'rudonrnsium.  parle  à  un  endroit  de  Yoppiduui  de 


(ippido  San;liiiii()  »  ;  p.  38  (1112)  «  In  oppido  uoslru  »;  p.  4i  (1133)  Sancti  Tni- 
(lonis  ...  opiduni  populosum  valde  »;  /c/.,  p.  .57  (lliO),  05  (1144),  98  (1181), 
104  (MOI),  lit)  (1170)  où  sont  iisilés  les  tcrnios  oppidum  et  oppidanus. 

Ce  sont  les  nirnics  tonnes  ipremploicnt  j^énc  ralemenl  les  trois  pirniiers 
réda(,'l<Mirs  dn  Geshi  ahhadim  Tnidoncyiahiui  f.Ic  elle  d'après  Icdition  de  Bor- 
man). 

L'abbe  Rodolplie  qui  écrivit  en  1114-111.)  la  vie  des  abbés  de  103.5  à  1107, 
emploie  une  fois  la  simple  désignation  Sarcliiniuni  {Gesta,  t.  I,  p.  22);  partout 
ailleurs,  il  use  des  termes  oppidum  et  oppidanus  (Id.,  p.  17,  18,  37,  38,  40 
à  t2,  i.5,  48,  51,  .57.  59,  <)7.  1)8.  82,  83,  85,  !I0,  118). 

Le  premier  conlinuateur  du  ^jes7«  qui  éerivit  en  11.3(5  1138  fait  également 
usage  des  qualiliealils  appiduiu  et  oppidanus  {Id.,  \>.  183  à  185,  191,  190,  198, 
210.  217,  218,  223.  225,  220,  239i;une  fois  seulement  il  parle  de  hi  vH la 
Sancd  Trudonis  (ht.,  p.  230). 

Le  deuxième  eontinualeur  qui  écrivit  vers  1180,  bien  qu'il  emploie  aussi  les 
termes  villa  {Id.,  t.  II,  p.  18,  21,  25,  37)  et  civitas  {Id.,  p.  22  à  24  et  G7j,  se 
sert  généralement  des  (pialifiealifs  oppidum  et  oppidanus  {Id.,  p.  13,  17,  18, 
22   2.5,0.5,00,  72). 

(')  Il  est  fait  mention  dans  le  'Àtrlulaire  de  Saint- irond.  l.  I,  p.  70  (1147- 
H.55j  de  huiyen.ses,  dans  b'  Caiiulaire  de  Sainl-Lamhert.  t.  I,  p.  94  (1 17  i),  du 
huryus  .Sunrii  Trudonis;  on  rencontre  endn  dans  le  Carhtlaire  de  Saint  Trond, 
I.  I,  p.  105  (I  l()3)  la  curieuse  fornu'  «  In  opido  liuifji  Sanrll  Trudonis  ». 

(-)  Gesla,  t.  II,  p.  22  à  21  d  07. 


vil. LA    DE    SAINT-TKOND  89 

Saint-Trond  comme  étant  sine  oinni  viillo  ci  iniini- 
tione  (^). 

Mais,  s'il  convient  de  rejeter  la  traduction  ù'oppidiiin 
par  «  localité  fortifiée  »,  que  faut-il  penser  de  sa  traduc- 
tion par  (c  localité  juridiquement  affranchie  »? 

Dans  un  article  intitulé  Le  sens  juridique  du  mot  oppi- 
dum dans  les  textes  flamands  et  brabançons  des  XIP- 
Xlir  sick'lcs  (2),  M.  Des  Marez  a  fort  bien  montré  que  la 
(lualification  d'opj)idum  pour  désigner  une  localité  se  sub- 
stitue fréquemment  en  Flandre  et  en  Brabant  à  la  qualifi- 
cation de  villa  du  jour  où  cette  localité  est  affrancMe  par 
le  droit  urbain.  Il  ajoute  que  ce  fut  le  cas  à  Saint-Trond 
vers  l'année  1140  (^). 

J'admets  la  traduction  donnée  par  M.  Des  Marez  du  mot 
op})idum  et,  pour  m'en  tenir  à  Saint  Trond,  j'admets  avec 
lui  qu'en  1140  cette  localité  était  un  oppidum,  c'est-à-dire 
une  ville  affranchie. 

Mais,  ajouterai-je,  cette  ville  n'était-elle  pas  alors  depuis 
longtemps  affranchie  (car  elle  est  qualifiée  d'oppidum, 
M.  Des  Marez  ne  l'ignore  pas,  en  1107  et  en  1133)?  Non,  dit 
M.  Des  Marez,  car,  en  1106,  oppidum  désigne  l'endroit  où 
le  monastère  est  bâti,  et  si,  en  1133,  l'évêque  de  Liège  dit 
également  oppidum,  ce  qui  semble  le  guider  dans  cette 
appellation,  c'est  le  nombre  d'habitants  qu'il  trouve  dans 
l'endroit  :  oppidum  populosum  valde  (*). 

C'est  là  une  double  erreur.  Dans  le  document  de  1107,  la 
moitié  de  Voppidum  est  dite  a^^partenir  à  l'abbaye;  n'est-ce 
pas  la  preuve  que  par  oppidum  il  faut  entendre  la  moitié 
qui  était  la  propriété  de  l'abbaye,  plus  l'autre  moitié  qui 
appartenait  à  l'évêque  de  Metz?  Remarquons  d'ailleurs  que 
l'abbaj'^e  exerce  un  droit  sur  les  brasseries  dans  tout  Voppi- 


(^)  Voici  le  texte  iiilégral,  Gesla,  I.  1,  p.  18:  «  niililes  vero,  qui  de  L-ircimi 
atljaeeiUlbus  villis  ;ib  inreslalioiieni  iuimiL'oruni  siiorum  oppidum  uo.struin 
incolebant,  cuni  adhuc  esset  sine  onuii  vallo  et  niunitioiie.  >>  Ceci  .se  passait 
pendant  la  prélature  d'Adelard  il  (jui  va  tle  1035  à  1082.  Comme  en  1086  la 
ville  était  fortifiée  (Ge«<«,  t.  I,  p.  il),  la  fortification  est  postérieure  à  10.5?}  et 
aiilérleure  à  1080. 

(-)  Paru  en  1910  dans  le  Festsc/irif  ileinrUh  Bninner. 

(3)  Id.,  p.  3fô. 

(')  Des  Makkz,  mivr.  rite,  \t.  .Wi.  n"  12. 


90  A.    HANSAY 

(iuni.  ce  qui  veut  dire  aussi  bieu  dans  la  partie  qui  lui 
appartenait  et  où  le  monastère  était  bâti  que  dans  la  partie 
dépendant  de  l'évêque  de  Metz  (*). 

Quant  à  admettre  qu'en  1133  la  localité  de  Saint-Trond 
ait  été  qualifiée  d'oppidum  parce  qu'elle  était  fort  peuplée, 
c'est  inadmissible  si  l'on  considère  (et  c'est  ce  qui  a 
échappé  à  l'attention  de  M.  Des  Marez)  qu'elle  est  men- 
tionnée comme  telle,  non  seulement  dans  la  charte  de  1107 
que  nous  venons  de  voir,  mais  déjà  dans  une  charte  de 
l'année  1060,  puis  encore  dans  une  charte  de  1108,  et  enfin 
une  vingtaine  de  fois  dans  la  partie  du  (îestn  écrite 
en  1114-1115  (2). 

Le  qualificatif  d'oppidum  n'a  d'une  part  rien  à  voir  avec 
le  fait  d'une  population  urbaine  plus  ou  moins  dense,  et, 
comme  d'autre  part  rien  n'indique  que  ce  qualificatif  ait 
changé  de  sens  à  Saint-Trond  vers  1140,  nous  sommes 
amené  à  reporter  à  dès  avant  1060  l'affranchissement  de  la 
ville.  Et  cela  ne  paraîtra  pas  inadmissible  si  l'on  songe 
que,  vers  le  milieu  du  xi*  siècle,  Saint-Trond  était  un  lieu 
de  pèlerinage  extrêmement  fréquenté  où,  par  suite,  les 
marchands  affluaient  de  toutes  parts  (dcsiu,  t.  J,  p.  17). 
Or,  on  sait  combien  le  développement  de  la  vie  commer- 
ciale a  contribué  à  l'affranchissement  des  bourgeoisies. 

C'est,  du  reste,  vers  la  même  époque  (1066)  ({ue  la  ville 
de  Huy  fut  affranchie,  et  il  y  a  des  raisons  de  croire  que 
Jluy  avait  été  précédé  par  Liège  dans  la  môme  loi  de 
l'émancipation. 

J'estime  donc  pouvoir  conclure  ({ue  l'antique  oillu  de 
Saint-Tiond  sera  devenue  un  opjndum,  c'est-à-dire  une 
ville  affranchie,  vers  le  milieu  duxi*  siècle. 

A.  Hansay. 


(  ')  Voici  le  texte,  Cartulaire  de  Saint  Trond,  l.  1,  p.  .'ÎO  :  «niedietaleni  vidc- 
licel  ejusdem  oppidi  in  quo  monastoriuin  sitiim  est,  et  cainbatum  de  tolo 
oppido.  » 

(^)  Voir  ci-dessus,  p.  88. 


La  date  dans  les  actes 
de  Philippe  le  Bon  (1419=1467) 


De  nos  jours,  les  actes  administratifs,  tels  que  les  lois 
et  les  décrets,  sont  datés  de  l'endroit  où  le  souverain  qui 
les  signe  est  présent.  Ainsi,  des  actes  donnés  par  le  roi 
des  Belges,  Léopold  II,  le  31  mars,  le  24  avril,  le  12  juin 
et  le  23  août  de  l'année  1900,  à  Laeken,  à  Wiesbaden,  à 
Gastein  et  à  Ostende,  on  doit  conclure  avec  une  entière 
certitude  que  ce  souverain  se  tï-ouvait  réellement  dans  les 
localités  indiquées  dans  ces  pièces. 

Peut-on  être  aussi  affirmatif  pour  les  chartes  du  moyen 
âge  et  tirer  les  mêmes  conclusions  de  leurs  données  chro- 
nologiques? Pas  le  moins  du  monde.  Dans  son  remar- 
quable travail  La  grande  chancellerie  royale  (1328-1400). 
M.  Octave  Morel  a  établi  qu'au  xiv'  siècle  «  l'interprétation 
de  la  date  d'une  lettre  royale  se  réduit,  en  somme,,  à  un 
calcul  de  probabilités,  et  ce  n'est  guère  qu'en  confrontant 
un  ensemble  de  lettres  roya'es  que  l'on  peut  arriver  à  une 
certitude  morale  sur  tel  ou  tel  séjour  du  roi(*))).  Moi- 
même  j'ai  montré  pour  les  chartes  des  ducs  de  Bourgogne 
qu'on  pouvait  difficilement  prendre  au  pied  de  la  lettre 
leurs  éléments  chronologiques  quant  à  leur  lieu  d'émis- 
sion et  à  quelles  singulières  erreurs  on  aboutirait  si  on 
leur  accordait  une  confiance  aveugle.  Si  je  reprends 
aujourd'hui  cette  question  spéciale,  à  peine  traitée  jadis. 


(')  Publié  dans  les  Mémoires  el  docnincnts  do  la   Société  de   l'Ecdlc   (Im 
chartes.  Paris,  1900,  p.  ^88. 

(2)  H.  Nklis.  Catalogue  des  vharles  du  sceau  de  l'Aitilience.  Biiixoiles  (1013), 

p.   I.XVLXIN. 


92 


H.     NKI.IS 


et  limitée  au  seul  règne  de  Philippe  le  Bon  (  1419-1 467)» 
c'est  que  je  dispose  d'une  documentation  plus  complète, 
réunie  en  vue  de  l'édition,  bien  éloignée  encore,  hélas,  de& 
régestes  des  actes  du  conditor  Bclgii. 

Le  petit  problème  à  résoudre  peut  se  libeller  comme 
suit:  comment  faut-il  entendre  une  date  ainsi  inscrite  dans 
un  mandement  de  Pliilip})e  le  Bon  du  7  mais  1438  \i\.  st)  : 

Donné  en  nostre  ville  d'Arran,  le  VIF  jour  de  murs  mil 
C(J(^C  trente  sept,  souh  nostre  seel  de  secret,  en  l'ul^sence 
du  grant  ('). 

La  date  mentionnée  dans  cette  pièce  est-elle  l'expression 
de  la  vérité?  Si  elle  ne  l'est  pas  —  ou  ne  l'est  pas  toujours 
du  moins  —  que  représente-t-elle  donc  en  réalité? 

Tout  d'abord,  il  pourra  sembler  étrange,  aune  observa- 
tion superficielle,  que,  dans  les  chartes  bourguignonnes, 
l'indication  du  lieu  d'émission  puisse  indiquer  autre  chose 
que  l'endroit  véritable  où  se  trouvait  le  duc.  En  effet, 
d'une  confrontation  rapide  entre  les  données  chronolo- 
giques des  actes  diplomatiques  et  l'itinéraire  de  Philippe 
le  Bon,  dressé  en  partie  par  Gachard  {^)  d'après  les  sources 
les  plus  sûres,  c'est-à-dire  les  pièces  de  comptabilité,  il 
résulte  clairement  un  accord  parfait.  Ne  prenons  comme 
preuve  que  le  tableau  suivant  : 


Chartes 

hoRiir.iXHT,  JJ  mars  1427  (n.  st  1 
Anal.  A.  Vkhrooiikn.  Inv.  des  char- 
tes tin  Lnxeinliourg,  t.  IV  (1917), 
|..  196. 

/kveniîf.rchk.  20)»nr.s-  J427{n.  st  ). 
OriK-  Acquits  de  Lille,  cart.  191, 
au.\  Arcli.  gén.  roy. 

btiKT,  -S'  viai  1427. 

Anal.  DiKCJKKiOK.  Inv.  tnch.  <l  Ypres^ 
t.  111,  [..  li2-2. 


Itinéraire. 

!.(•  14  mars  1427,  le  duc  de 
Bonrgoiïnc  est  près  de  Dord redit. 

Cf  GAnivnit.  (Collection.  ..  t.  I, 
p.  72. 

Du  15  au  ôi  mars  1427,  Phi- 
lippe le  Bon  est  en  mer  devant 
Zevevherghe. 

Cf.  Gaciiari)    tbid.,  p.  72. 

Du  0  au  10  mai  1427,  Philippe 
le  Bon  réside  à  Dclft. 
Cf.  GAniAui).  Ibid.,  p.  72. 


(*)  Cfr.  H.  Nki.is,  Calalof/ne  des  chartes  du  sceau  de  t' Audience,  p.  i.xxxvii. 
(2)  M.  Gaciiaki»,   Collection    des    voyages   des   souverains    des    Pays-Bas, 
dans  Publicntions  de  la  Commission  royale  d'histoire  I.  I  fl876),  p.  70-100. 


ACTES   DE   PHILIPPE   LE    BON 


93 


Amsterdam,  18  mai  1427. 

Copie.  Acquits  do  Lille,  carton  191- 
192. 

LiLLK.  7  jitillel  1427. 

Orig.  Ac(iuits  de  Lille,  carton  177- 
178. 

Bruges.  26  août  1427. 

Copie.  Acquits  de  Lille,  carton  il . 


ZiERiKZEE,  11  février  1428  (n.  st.) 
Copie.  Cart.  de  Flandre  B,  \Y>  1604, 
fol.  60,  de  la  Chambre  des  comp- 
tes, aux  Arcli.  dëp.  du  Nord,  à 
Lille. 

Arras,  16  novembre  1428. 

Anal.  L.  Devillers.  Cartul.  comtes 
(le  Hainaut,  t.  V,  p.  38. 

Bruges,  8  janvier  1441  (n.  st.). 
Cf.  H.  Nelis.  Cat.  chartes  de  l'Au- 
dience, n    120. 

QuESNOY   18  mai  1441. 
Cf.  H.  Nei.[S.  Ibid.,  n°  1.37. 

Dijon,  22  décembre  1441. 
Cf.  H.  Neus.  Ilml.,  no  163. 

Bruxelles.  2  décembre  1462  {^). 
Cf.  H.  Nelis.  Ibid.,  n»  870. 


Bru<;f,s,  20  mars  1463  (n.  st.). 
Cf.  H.  Nelis.  Ibid.,  n"  899. 

Hesdin.  17  septembre  1463. 
Cf.  Gachard.   Inv.   arch.    Chambre 
des  comptes,  t.  I,  p. 


Les  18  et  19  mai  1427,  le  duc 
est  à  Amsterdam, 
a  Gachard  Ifnd  ,  72. 

Du  2  au  7  juillet  1427,  Philippe 
le  Bon  se  trouve  à  Lille. 

Cf  Gachard.  Ibid  ,  p.  75. 

Philippe   le   Bon  passe  tout  le 
mois  d'août  1427  (excepté  le  31) 
Bruges. 

Cf.  Gachard.  Ibid.,  p.  75. 

Les  1 1  et  12  février  1428,  le  duc 
est  à  Zierikzee. 

Cf.  Gachard.  Ibid.,  p.  75. 


Du  11  au  17  novembre  1428,  le 
duc  réside  à  Arras. 

Cf.  Gachard.  Ibid.,  p.  79. 

Du  1  au  9  janvier  1441,  le  duc 
est  de  résidence  à  Bruges. 
Cf.  Gachard.  Ibid.,  p.  79. 

Du  16  au  21  mai  1441,  Philippe 
le  Bon  est  au  Quesnoy. 
CL  Gachard.  Ibid.,  p.  85. 

Du  20  au  51  décembre  1441,  le 
duc  se  trouve  à  Dijon. 
Cf.  G.\CHARD.  Ibid.,  p.  86. 

Le  duc  de  Bourgogne  passa 
tout  le  mois  de  décembre  1462  à 
Bruxelles. 

Cf.  Gachard.  Ibid  .  p.  86. 

Le    duc   réside    à   Bruges    du 
22  févri»  r  au  24  juin  1465. 
Cf   Gachard.  Ibid.,  p.  88. 

Philippe  le  Bon  résida  au  châ- 
teau de  Hesdin,  du  l^*"  septembre 
au  23  octobre  1465. 

Cf.  Gachard.  Ibid.,  p.  90. 


(')  Voyez  aussi  les  chartes  du  mois  de  décembre  1462,  toutes  datées  de 
Bruxelles . 


94 


H.     NELIS 


Lii.it,  Jl juin  141)4. 

(if..  NviniFK.  (iedenku'uanJIf/fieden 
uit  de  (jesvhiedenis  vnv  Geldn- 
land,  t.  IV,  p.  3i3. 

Lii.LE,  2G  octobre  1464. 

CL  1.  l>iE(;t;KiCK,  htr.  avili-  d)  prex, 
1.  m,  p.  :2o5. 

Brl'xii.i.es.  24  mars  14(i5  in.sl.)(i). 
Cf.  st.  BouMANs.  Cjxrl.  dr  Namur, 
t.  III,  p.  ini). 


Du  ;2  au  17  juin  t  itii.  le  duc  est 
à  Lille. 

Cf.  G\(:iiAr,ii.  Ibid..  p.  M5 

Philippe  !<'  lUui  t-sl  à  Lille,  du 
10  octobre  au  !26  novembre  146i. 
(.{■.  (ivf.iiAP.ii.  Ibid.,  p.  it.'i 

hu  i(  iléeembre  litjiau  lit  avril 
1465.  le  duc  neut  d  autre  séjour 
que  Bruxelles. 

Cf.  GvniARn.  Ibid.,  p    W  100. 


Si  frappant  que  soit  ce  rapprochement,  il  n'en  est  pas 
moins  trompeur  et  de  nature  à  induire  gravement  en 
erreur.  Sans  doute,  la  chancellerie  bourguignonne  rédi- 
geait des  actes  diplomatiques  libellés  de  la  ville  où  le  duc 
résidait  momentanément,  mais  le  contraire  est  tout  aussi 
vrai  et  fréquent.  Il  n'est  par  conséquent  pas  rare  de  con- 
stater un  écart  considérable  entre  le  lieu  d'émission  d'une 
charte  et  l'itinéraire  de  Philippe  le  Bon. 


Chartes. 

BRijiiES.  26  janvier  1421  (n.  st.). 
Orip.  Acquits  de  Lille,  eart.  112. 

Lille,  14  février  1421  (n   st.;. 
Cartul.   de   Flandre,   fol.    lOti,  aux 
Arch.  dép.  du  Nord,  à  Lille 

Château  de  Bellemotti,  lez-Arras, 
18  avrill421  (n.  st.) 
Acquits  de  Lille,  cail.  Ii:^. 

Lille,  4  mai  1421. 
Acquits  de  Lille,  cari.  li;{. 


Gand,  31  mai  1428. 

r,arlul.  de  Flandre,  fol.  t-40v".  aux 
Arcliiv.  (Icp.  du  Nord.  ;i  Lille. 


Itinéraire. 

l>u  il»  au  31  janvier  U27,  Phi- 
lippe le  Bon  est  à  Zierikzee. 
Cf.  Gachard    Coll...,  l   L  p.  71. 

Tout  le  mois  de  février  1427,  le 
duc  réside  à  Dordrecht. 
Cf.  Gaciiard.  Ibid  ,  p.  71. 

En  avril  1427.  le  duc  de  Bour- 
gogne se  trouve  en  mer  devant 
Zeuenberghe. 

Cf  Gacharii.  Ibid..  p.  72. 

Du  l*"'  au  ô  mai  1427  à  Zeven- 
berf/he;  le  4  mai  1427  en  mer; 
du  5  au  10  mai  1427  à  Delf'l 

Cf.  Gachard    Ibid.,  p    72. 

Le  51  mai  1428.1e  due  u  est  pas 
à  Gand,  mais  à  Arras. 
Cf.  G\r,iiARi>.  Ibid  .  \\.  77. 


(>)   Voyez  IL  Nki.is,  I.h-.  .il.,  n-  i0(>!t-IO7(l. 


ACTES    DE    PHILIPPE   LE    BON 


95 


IJruges.  15  juin  1428. 
Acquits  de  Lille,  cart.  \'l. 

Bruges,  12  janvier  1441  (n.  st.). 
Charte  de  la  duchesse    de    [Jour 

gogne. 
Acquits  de  Lille,  cart.  1446. 

Bruxelles.  28  février  1463 h.  st.l 
Cf.  H.  Nelis,  Catal.  n»  897. 

Bruges.  24  juin  1463. 
H.  Nelis.  Catal.  n»  933. 

vSaint  Omer,  16  août  1463. 
H.  Nelis,  Catal.  n«  939. 

Salnt-Omer,  12  septembre  1463. 
H.  Nelis.  Catal.  944. 


Le   15  juin    1428,   Philippe   le 
Bon  est  de  séjour  à  VEcltise. 
Cf.  Gachard.  Ibid.,  p   77. 

Du  10  au  15  janvier  IMi,  le 
duc  et  la  duchesse  de  Bourgogne 
se  trouvaient  à  V Écluse. 

Cf.  Gachard.  Ibid  ,  p.  80. 

Du  22  au  28  février  1463.  le  duc 
se  trouvait  à  Bruges. 

Cf.  Gachard.  Ibid  ,  p.  87. 

Le  24    juin   146.5,   Philippe    le 
Bon  réside  à  Ardeiibonrg. 
Cf.  Gachard.  Ibid.,  p    89. 

Du  13  au  24  août  1463,  le  duc 
est  à  Boulogne  s  Mer. 
Cf.  Gachard.  Ibid.  p.  90 

Tout  le  mois  de  septembre  1465 
le  duc  séjourne  à  Hesdin. 
Cf.  Gachard.  Ibid.,  p.  90. 


On  peut  donc  considérer  comme  acquis  le  point  suivant  : 
les  lieux  d'émission  des  chartes  de  Philippe  le  Bon  ne 
prouvent  nullement  que  le  souverain  était  présent  dans 
l'endroit  y  mentionné. 

Il  en  résulte  que  ces  données  chronologiques  sont  pure- 
ment conventionnelles  ou  plutôt  administratives.  Rien 
n'est  plus  éloquent  à  cet  égard  que  les  habitudes  de  la 
chancellerie  ducale  fonctionnant  en  Brabant.  Ici,  en  effet, 
les  chartes  de  Philippe  le  Bon  ou  bien  n'étaient  pas  datées, 
ce  qui  était  le  cas  le  plus  fréquent  (^),  ou  bien  elles  étaient 
données  à  Bruxelles  ('-)  ou  à  Louvain  (•^),  alors  que  le  duc  ne 
se  trouvait  pas  dans  ces  villes.  L'acte  suivant  souligne  le 
caractère  bureaucratique  des  lieux  de  séjour.  C'est  une 
charte  de  Philippe  le  Bon,  datée  de  Gand  le  IS*"  jour  du 


(1)  Cfr.  Chambre  des  comptes,  reg.  n»  632.  fol.  SSvo,  43.  i'S\"\  m,  132, 
i34vo,  1.36,  152,  157v  ,  207,  etc.,  aux  Archives  générales  du  royaume. 

(2)  Cfr.  registre  n»  632.  fol  33  35,  36,  37,  48.  52vo,  rjSv»,  80,  98,  108v'>, 
110,  128,  139vo,  1.55.  156vo,  1.58v'',  199vo,  204.  etc.,  de  la  Chambre  des 
comptes,  aux  Archives  générales  du  royaume. 

(^)  Ibidem.   fol.:)7,  7ôv",  83. 


96 


H.     NELIS 


mois  de  mais  14312  (u.  st.);  or,  à  ce  moment  le  duc  ue 
séjournait  pas  aux  Pays-Bas,  comme  le  porte  d'ailleurs  la 
note  cwtra-sigilliun  :  a  Par  nionseigiieiir  le  duc,  à  In  rela- 
tion de  madame  la  duchesse,  ainnt  en  son  absence  le  g'ou- 
vernement  de  ses  pais.  »  (*) 

Mais  dès  lors  que  les  dates  sont  des  indications  admini- 
stratives, elles  ont  dû  néanmoins  signifier  quelque  chose 
aux  3'eux  des  rédacteurs  qui  les  ont  mises  sur  les  chartes 
bourguignonnes.  En  réalité,  en  dehors  de  la  présence  du 
duc,  le  lieu  d'émission  peut  se  rapporter  à  divers  ordres  de 
faits  que  nous  devons  déterminer. 

Un  des  plus  fréquents,  et,  à  bien  réfléchir  un  des  moins 
étranges,  est  l'attestation  de  l'intervention  administrative 
du  chancelier  de  Bourgogne.  Celui-ci,  en  effet,  est  non 
seulement  le  premier  personnage  de  l'Etat  après  le  duc, 
mais  il  est  le  chef  d'une  immense  bureaucratie  ;  comme 
détenteui"  du  grand  sceau,  il  tient  les  clefs  des  rouages 
politiques.  Les  lettres  patentes  et  les  mandements  se  com- 
posent et  s'expédient  en  quelque  sorte  sous  sa  surveil- 
lance. Cette  suprématie  s'étale  tout  au  long,  pour  qui  sait 
voir  et  comprendre,  dans  les  actes  de  Philippe  le  Bon  (2). 
Le  parallélisme  suivant  ne  laisse  aucun  doute  à  cet  égard. 


Dates  des  chartes 

Bruges,  2  février  1458  (n.  st. 
H.  Neus.  Catalogue  n"  i31. 


Gan»,  7  juillet  au  -îO  juillet  M58. 
Ihid.,  nos  i8r;-491. 


Itinéraire  du  chancelier. 

Le  2  lévrier  1458,  le  chancelier 
est  de  passage  à  Bruges. 

Reg.  20356  de  la  Chambre  des 
comptes,  aux  Arcli.  cfcn.  royau- 
me (S). 

Pendant  tout  le  mois  de  juil- 
let 1458,  le  chancelier  séjourne  à 
Gnnil. 

Ihid. 


(')  Cfr.  L.  Devilleks,  Carlnlnhe  des lumles  de  Uainauf.  l.  V,  p.  I  il. 

(2)  Cfr.  II.  Neus.  Catalogne. .  .,  p.  -W  et  suivantes. 

(')  Les  comptes  de  i'audicncier  de  Fiandrc-Boui'jiogue  ((liiainbrc  des 
comptes,  reg.  nos  2035(3  et  siiiv.)  mentionnent  réjoui ièremenl  la  présence  du 
chancelier  :  exemple  :  «  Le  Ville  diidit  mois  [8  juin  1-4&7]  monseigneur  le 
chancelier  se  partit  de  Valenciennes  pour  aler  à  Brouxelles.  >i  Cfr.  reg.  20.3?)6, 
fol.  iv». 


ACTES   DE  PHILIPPE   LE   BON 


97 


Lille.  24  août  1458. 
Ibid.,  110  198. 


Arras,  1  septembre  1458. 
Ibid.,  n"  oOi. 


Lille,  19  septembre  1458. 
Ibid.,  H»  o02. 


AuTUN,  7  avril  1459. 
Ibid.,  n»  348. 

Dijon,  12  mai  1459. 
Ibid.,  noS6â. 


Bruxelles,  8  janvier  1460  (n.  st. 
Ibid.,  n"  643. 


Paris,  28  août  1461. 
Ibid.,  n»  774. 


Valenciennes,  19  octobre  1461. 
Ibid.,  n»  77fl. 


LouvAiN,  17  septembre  1466. 
Ibid.,  no  1182. 


La  présence  du  chancelier  est 
signalée  à  Lille  le  25  août  1458. 
Ibid. 

Le  chancelier  est  à  Arras  jus- 
qu'au 11  septembre  1458. 
Ibid. 

Le  chancelier  se  trouve  à  Lille 
au  moins  depuis  le  18  septembre 
li58. 

Ibid. 

Le  chancelier  est  à  Aulun  de- 
puis le  i  avril  1439. 
Ibid. 

La  présence  du  chancelier  à 
Dijon  est  signalée  du  7  au  20  mai 
1459. 

Ibid 

Tout  le  mois  de  janvier  1460, 
le  chancelier  est  de  séjour  à 
Bruxelles. 

Ibid. 

La  présence  du  chancelier  est 
signalée  à  Paris  au  moins  depuis 
le  29  août  1461,  ainsi  que  pendant 
tout  le  mois  de  septembre. 

Ibid. 

Le  chancelier  réside  à  Valen- 
ciennes  le  19  octobre  1461. 
Ibid. 

Le  chancelier  est  signalé  à  Lou- 
vain  du  1«""  au  50  septembre  1466. 
Ibid. 


Ce  tableau  lui  aussi  ne  doit  pas  induire  en  erreur;  il 
prouve  simplement  que  des  actes  diplomatiques  émanés 
de  Philippe  le  Bon  sont  datés  de  l'endroit  où  se  trouvait  le 
chancelier  de  Bourgogne,  gardien  du  grand  sceau  des  pro- 
vinces Flandre-Bourgogne;  s'il  en  était  autrement  on  ne 


98  H, 

pourrait    faire    concorder 
comme  celles-ci  : 


NELIS 

des     données    chronologiques 


Date  des  Chartes. 

MoNS.  5  janvier  1459  (n.  st.) 
H.  Nk.ms.  Cnf.  Il"  r>iH. 


Bruxi:i.i.i:s.  27  février  /45'.)' n.s[. 
Ihid.,  ii'>:i-2i. 


Bruxelles,  9  mars  1459  (n.  st.). 
Und.,  n'537. 


Bruxelles.  «V  avril  1459. 
Ibùf.,  11°  517. 

Bruges.  15  mai  1459. 

Acquits  do  Lille,  carloii  11)71. 


Bruxelles,  25  mai  1459. 
H.  Nelis.  Cal.  n"  .563. 


Bruxelles,  24  août  1459. 
Ibid..  n»  386. 


Itinéraire  du  chancelier. 

Le  chancelier  est  à  Àiiiieries 
le  6  janvier  14o9. 

Be-;.  iSGôO.  fol.  o  d.-  la  Cham- 
bre des  comptes. 

Le  chancelier  est   à    Aulun    le 
27  février  1459. 
Ibid 

Le  chancelier  réside  hÀlilkume 
le  9  mars  1459 
Ibid. 

Le  chancelier  est  de  résidence 
à  Anliiii  le  5  avril  li.j9. 
Ihid. 

Le  chancelier  est  à  Dijon  le 
16  mai  1439. 

(>h.  des  comptes,  reg.  20536, 
fol.  46v» 

Le  chancelier  est  à  Authnme 
le  25  mai  1439. 

Ch.  des  comptes,  reg.  48650. 

Le  24  août  1439,  le  chancelier 
réside  à  Heaune. 
Ibid. 


Eu  dehors  du  séjour  soit  du  duc  de  Bourgogne,  soit  de 
son  chancelier,  les  dates  des  chartes  peuvent  aussi  se  rap- 
porter à  quelque  autre  fait  administratif.  C'est  ainsi  qu'il 
faut  expliquer,  semble-t-il,  une  troisième  variante  dans  les 
données  chronologiques  Voici  un  exemple  fi-appantde  ces 
paiticularités  : 


Bruxelles, 

4  juin  1451. 
H.  Nelis.  Ca/.  n»  «I 


BRiiiEs.  4  juin  1457    j   Vai.enciennes, 

M.  Nelis.  Ca/.  n"  13:>.    I  4  juin  1457. 

Chambre  des  comptes, 

j  reg.  :203.')6  fol.   iv». 


ACTES   DE   PHILIPPE  LE   BON  9^ 

Valenciennes  étant  la  localité  où  se  trouvait  alors  le 
chancelier  (^),  Brii<>'es  la  ville  où  était  vraiselllblablelneu^ 
de  résidence  Philippe  le  Bon (2),  comment  laut-il  expliquer 
le  lieu  d'émission  Bruxelles'/ 

Une  snpposition  se  présente  immédiatement  à  l'esprit. 
Les  chartes  bourguignonnes  mentionnent  très  fréquem- 
ment qu'elles  sont  scellées  du  sceau  secret  en  l'absence  du 
grant  (3),  ce  qui  revient  à  dire  que  les  actes  munis  du 
grand  sceau  —  dont  le  chancelier  était  le  gardien  ("*)  — 
sont  donnés  dans  la  localité  où  résidait  ce  dei'nier;  et  par 
contre,  que  les  chartes  qui  portent  le  sceau  du  secret 
peuvent  être  datées  d'un  endroit  où  ne  se  trouvait  pas  le 
chancelier. 

Mais  nous  savons  partaiûemeut  qui  tenait  ce  sceau  spé- 
cial, destiné  surtout  à  authentiquer  les  lettres  scellées  sur 
simple  qneue;  c'était,  en  principe,  le  premier  chambel- 
lan {})  et  [dus  habituellement  quelque  secrétaire  ducal.  Le 
cas  qui  nous  occu[)e  peut  s'expliquer  dès  lors  comme  suit  : 
le  chancelier  résida  à  Valenciennes  jusqu'au  8  du  mois  de 
juin  pour  se  rendre  de  là  à  Bruxelles;  le  compte  de  l'au- 
diencier  mentionne  (pie  tandis  que  le  chancelier  était  à 
Yalenciennes,  le  secrétaire  L.  Mesdach  scella  du  sceau  du 
secret   sept   lettres   patentes  à  simple   queue   et  deux  à 


(')  Lei'.omple  do  l'aiidiencio,r  porte  :  Le  VllI'^  dwlil  mt»is\  jning  t4'i7]  mon- 
seigneur le  chunrefier  se  fuirtit  de  Valenciennes  pour  aler  à  Brouxelles, 
Chambre  des  coinples,  reg.  2i;}56,  fol.  iv  aux  Arch.  gén.  du  royaume. 

(-')  La  charte  domiee  a  Bruges  a  la  mention  extra-siij'llum  ((  Par  monsei- 
gneur le  duc  »;  celle  du  même  jour  doniice  à  Bruxelles  contient  la  note  beau- 
coup plus  i'X|tlicite  :  Par  monseigneur  le  duc,  à  la.  relation  du  Conseil. 

(3)  Cfr.  H.iXelis,  Calidogue..  ,  p.  xxviii. 

(*)  Le  rôle  du  chancelier  est  bien  relaie  dans  une  lettre  patente  de  Philippe 
le  Bon  du  14  janvier  \  i'2'i  (n.  st.  j  :  Acons  proui'S  et  promellons  en  bonne  fog, 
par  C'S  présentes  à  iceulx  île  Coitrtrag,  que  sitost  que  nostre  chancelier,  lequel 
A  ET  PORTE  nostre  GRAND  scEL.  sera  devers  nous,  soit  en  noz  pays  de  parderà  au 
ou  ailleurs,  et  que  iceulx  de  Courtrag  g  crieront  ou  envoienmt  lesdictes  lettres, 
que  icelles  nous  ferons  sceller  de  riostre  (/rand  scel,  sans  aucune  faulte  on 
difficulté.  In.  de  Llmblrg-StirijM,  Coutumes  du  quartier  de  Gand,  t.  XI  (1905), 

p.  ^-.v.). 

(5)  Voir  une  cédule  du  29  mars  liiO  :  furent  scellé  du  scel  de  secret  par 
monseigneur  de  Crog,  preuiier  chauihellan.  Cfr.  H.  \elis,  Catalogue...  \).  xxix. 
Dans  la  chani^ellerie  des  rois  de  France  du  xiv  siècle,  le  clunnbellan  avait  la 
garde  du  sceau  du  secret;  cfr.  0.  Morel,  La  grande  chancellerie,  p.  3(14. 


100  H.    NELIS 

•double  queue,  pour  lesquelles  il  perçut  144  sous  (*).  Pour- 
quoi insister  spécialement  sur  ces  faits,  alors  que  uulle 
pai't  ailleurs  on  ne  signale  des  détails  pareils,  sinon  pour 
marquer  que  le  secrétaire  qui  gardait  le  sceau  du  secret  ne 
se  trouvait  pas  à  Valenciennes,  en  compagnie  du  chance- 
lier, mais  résidait  dans  une  autre  ville,  probablement  à 
Bi'uxelles.  Ainsi  l'on  comprend  que  trois  chartes  émanées 
du  duc  de  Bourgogne  puissent  être  datées  de  trois  endroits 
distincrs. 

liésumons  comme  suit  les  éléments  essentiels  de  cette 
notice  : 

1°  Le  lieu  d'émission  des  chartes  de  Philippe  le  Bon  est 
une  donnée  administrative,  variable  d'après  la  chancel- 
lerie qni  l'expédie  (chancellerie  de  Flandre-Bourgogne  et 
<îhanccll(M-ie  braba.nçonne). 

"1"  Ce  lieu  d'émission  peut  se  rapporter  soit  à  la  présence 
-du  duc  de  Bourgogne,  soit  à  celle  du  chancelier  de  Bour- 
gogni^,  soit  enfin,  mais  plus  rarement  peut-être,  à  celle  du 
premier  chambellan  ou  d'un  secrétaire  ducal.  Il  va  sans 
dire  que  le  duc  a  dû  se  trouver  dans  une  même  localité  ou 
bien  avec  son  chancelier  ou  bien  avec  le  chambellan  ou 
les  tleux  eu  même  temps. 

Est-il  possible  maintenant  de  déterminer  d'une  manière 
«ûre  la  signification  de  ces  variantes  chronologiques  par 
l'examen  des  notes  extra-sigillaires  ou  de  mentions  tou- 
<;hant  les  sceaux?  C'est  là  une  question  très  complexe  dont 
l'exposé  serait  tiop  long  pour  être  développé  en  ce  moment. 

Hubert  Xelis. 


(")  fendant  le  leniftx  rjue  mnndil  seigneur  le  chancelier  a  esti-  à  Valenciennes, 
•a  este  scelle  du  scel  de  secret  ce  (/ni  s'ensuit  par  L.  Mesdach.  Cfr.  Chambre  des 
complcs.  reg  20;356,  fol.  4v'>,  aux  Arcli.  gén.  du  loyaumc. 


De  la  méthode  à  suivre 

pour  évaluer  en  monnaies  modernes  les  valeurs  anciennes 

énoncées  dans  les  textes  historiques  belges 

du  XI    siècle  au  XVlir. 


Dans  les  textes  historiques,  il  est  fréquemment  fait 
mention  de  valeurs.  En  général,  leur  énoncé  dit  i)eu  de 
chose  à  l'esprit;  aussi  l'idéal  serait-il  de  pouvoir  les  expri- 
mer en  équivalents  modernes. 

D'ordinaire  on  renonce  à  faire  ce  calcul,  vu  les  difficul- 
tés d'aspect  insurmontables  qui  se  présentent  dès  que  l'on 
veut  y  procéder.  Le  but  de  cette  étude  est  d'indiquer  par 
cpiels  procédés  on  peut  arriver  à  nue  solution  satisfaisante. 


Le  problème.  —  Qu'entend-on  i)ar  exprimer  en  mon- 
naies modernes  des  valeurs  anciennes?  C'est  fixer  la 
somme  d'argent  moderne  qui  con-espondrait  exactement 
aujourd'hui  à  celle  dont  le  document  ancien  fait  mention. 

Cette  détermination  nécessite  trois  opérations  succes- 
sives : 

1°  établir  la  quantité  intrinsèque  de  métal  précieux  à 
laquelle  la  somme  énoncée  correspond  ; 

-o  calculer  la  quantité  de  monnaie  moderne  qui  pour- 
rait être  fabriquée  avec  le  poids  «le  métal  précieux  ti-ouvé 
par  l'opération  précédente  ; 

3"  rechercher  pour  l'époque  actuelle  la  proportion  de 
la  diminution  de  puissance  d'achat  subie  par  les  métaux 


102  V.    TOURNEUR 

précieux,  ou,  coinnie  on  disait  autrefois,  celle  du  «surhaus- 
sement  des  esi)èces  >i. 

En  effet,  depuis  l'antiquité,  nous  constatons  une  baisse 
croissante  de  la  i)uissance  d'achat  des  métaux  précieux;  la 
guerre  de  1914-1918,  par  la  multiplication  du  papicr-mon- 
"naie,  a  compliqué  la  situation  à  l'extrême,  malgré  les 
efforts  des  banques  régulatrices,  et,  par  suite,  le  monde 
«ntier  se  débat  aujourd'hui  dans  des  difficultés  financières 
inextricables. 

La  première  des  trois  opérations  auxquelles  il  convient 
de  procéder  est  simple  en  théorie;  nous  verrons  ])lus  loin 
que,  dans  la  pratique,  elle  doit  être  exécutée  avec  beau- 
coup de  prudence. 

Les  métaux  précieux  sont  inaltérables;  un  mouton  d'or 
de  Brabant,  frappé  sous  Jeanne  et  Wenceslas,  est  encore 
aujourd'hui  tel  qu'il  se  présentait  lorsqu'il  sortit  des  fers 
des  monnayeurs  de  l'atelier  de  Vilvorde;  l'or  qui  a  été 
«mployé  pour  le  fabriquer  est  de  môme  nature  que  celui 
dont  on  frappait  nos  pièces  d'or  de  20  francs.  Son  poids 
n'a  pas  changé  de  manière  appréciable  II  nous  est  donc 
loisible  de  déterminer  la  quantité  de  métal  précieux  con- 
tenue dans  cette  monnaie  ancienne. 

Nous  pourrons  ensuite  aisément  établir  à  quelle  somme 
d'argent  moderne  cette  quantité  de  métal  correspond  :  il 
nous  suffira  de  calculer  la  quantité  de  monnaie  contem- 
poraine qui  pourrait  être  fabriquée  au  moyen  du  métal 
fin  contenu  dans  la  pièce  ancienne. 

Ce  résultat,  si  l'on  s'arrêtait  là.  serait  cependant  incom- 
plet. A  l'époque  de  .Jeanne  et  Wenceslas.  l'or  et  l'argent 
possédaient  un  pouvoir  d'achat  bien  supérieur  à  celui  dont 
ils  jouissent  aujourd'hui.  C'est  la  détermination  de  cette 
propoi-tion  qui  fera  l'objet  de  la  troisième  i)artie  de  cette 

étude. 

* 

*     * 

Le.s  (linerses  espèces  de  valeurs.  —  Les  valeurs  énoncées 
dans  les  textes  historiques  sont  de  trois  ordres.  On  les 
trouve  exprimées  : 

1°  en  poids  di'.  métaux  précieux; 

2°  en  monnaies  réelles; 

•S"  en  monnaies  de  compte. 


VALEURS  ANCIENNES  lOii 

Examinons  successivement  les  trois  cas  qui  peuvent  se 
présenter.  Le  premier  est  le  plus  difficile  à  étudier. 


Le  métal  jiesé.  —  A  partir  du  xi^  siècle,  pour  énoncer  des 
valeurs,  deux  poids  sont  en  usage  :  la  livre  et  le  marc. 

La  livre  est  une  survivance  de  l'époque  carolingienne; 
elle  ne  se  rencontre  guère  que  pour  édicter  des  amendes 
tellement  élevées  pour  l'époque  qu  on  n'aurait  pu  les 
payer  :  cent  livres  d'or  (1066).  La  réduction  de  ces  livres 
en  monnaie  moderne  est  donc  sans  intérêt. 

Il  serait  d'ailleurs  difficile  de  tenter  cette  opération  : 
nul  ne  peut  dire  avec  certitude  quel  était  le  poids  de  cette 
livre.  Il  s'agit  vraisemblablement  de  la  livre  de  Charle- 
magne.  mais,  malgré  les  nombreux  traA^aux  qui  ont  été 
consacrés  à  la  question  il  faut  bien  avouer  qu'on  n'est 
arrivé  à  aucun  résultat  convaincant. 

Je  connais  cependant  un  cas  où  la  livre  d'or  est  employée 
pour  spécifier  un  payement  réel,  dans  un  règlement  de 
payement  de  contributions  à  la  Chambre  pontificale  (Saint- 
Bertin,  1173-1 181).  Cette  livre  est  romaine. 

A  partir  du  xi''  siècle,  —  la  plus  ancienne  mention  que 
j'en  aie  notée  est  de  1046  —  les  payements  sont  tarifés  en 
marcs  d'argent.  A  cette  époque,  l'industrie  et  le  commerce 
ne  s'étaient  pas  encore  développés;  la  monnaie  était  peu 
abondante  dans  noti-e  pays;  elle  consistait  encore  exclusi- 
vement en  deniers  et  en  oboles  d'argent.  Aussi,  les  paye- 
ments quelque  peu  importants  se  faisaient-ils  en  métal 
brut  pesé  à  la  balance.  j)resque  toujours  en  argent,  parfois 
en  or. 

En  1089.  un  abbé  de  Saint- Vaast  acquiert  un  alleu  en 
pesant  au  vendeur  10  marcs  d'argent;  en  1096,  l'évêque  de 
Liège  Otbert  achète  Couvin  à  Baudouin  de  Jérusalem 
moyennant  oO  marcs  d'or. 

L'attention,  lorsqu'on  se  trouve  en  face  de  telles  don- 
nées, doit  être  attirée  sur  deux  points  :  d'abord  sur  la 
nature  du  poids,  ensuite  sur  la  qualité  du  métal. 

Le  premier  travail  à  faire  est  d'identifier  le  poids  dont 
il  est  question.  Déjà  autrefois  ce  n'était  pas  chose  facile, 
et  il  se  faisait  que  des  contestations  s'élevaient  entre  les 


nu  V.    TOURNEUR 

parties  parce  que  le  poids  au  moyen  duquel  ou  devait  peser 
l'argent  n'avait  pas  été  spécifié  (1145).  Aujourd'hui  c'est 
bien  plus  difficile  encore  pour  ces  époques  au  sujet  des- 
(juelles  nous  sommes  mal  documentés.  Les  poids  belges, 
d'ailleurs,  jusqu'à  présent  n'ont  guère  fait  l'objet  de 
recherches  approfondies.  Et  la  question  est  complexe.  Un 
grand  nombre  de  marcs  différents  ont  été  en  usage  sur  le 
sol  de  la  Belgicpie  ;  on  trouve  mentionnés  le  grand  et  le 
petit  marc  de  Flandre,  le  marc  de  Brabant,  le  marc  de 
Cologne,  etc.  II  faut  établir  d'abord  avec  précision  quel  est 
celui  dont  il  s'agit  et  en  retrouver  la  valeur. 

A  la  fin  du  xii^  siècle  et  au  commencement  du  xiii'^,  à  côté 
du  marc  pesé,  on  voit  apparaître  le  marc  compté.  On  doit 
éviter  avec  soin  de  les  confondre. 

A  Douai,  en  1201,  le  marc  valait  31  sols  4  deniers  arté- 
siens, soit  376  deniers  artésiens,  et  à  Courtrai,  en  1203, 
33  sols  4  deniers  ou  400  deniers  artésiens.  Pour  cette 
époque,  il  s'agit  donc  de  déterminer  si  le  marc  est  un  poids 
ou  une  monnaie  de  compte,  de  façon  à  ne  pas  se  laisser 
induire  en  ei'reur. 

Pour  ce  qui  est  du  métal,  en  général  c'est  l'argent  fin, 
pur  de  tout  alliage.  Il  est  accompagné  d'une  multitude  de 
(]nalificatifs  tous  synonymes  :  argentiim  piiruni .  jninim  et 
probutnm.  boiiiiin.  fîniun,  Ic^itiimiin.  clariim. 

Quand  l'argent  n'est  pas  fin,  on  en  spécifie  le  titre. 
Quelquefois  la  mention  est  éuigmatique  pour  nous.  Qu'est- 
ce  que  l'argent  au  titre  de  Cambrai  {(^aineraccnse  arg-en- 
tum)?  D'autres  fois,  le  titre  est  clairement  exprimé  :  pro 
una  qnaqiic  inarca  très  fert[ones\  et  dimidiiim  ar^-enti 
clari,  i)our  chaque  marc,  trois  quarts  et  demi  d'argent  pur, 
c'est-à-dire  que  le  marc  était  au  titre  de  "/g  ou  de  ^"^/looo- 

D'une  manière  générale  la  coutume  de  peser  le  métal 
brut  pour  faire  des  payements  cesse  chez  nous  au  début  du 
XIII*  siècle.  Elle  a  disparu  devant  l'abondance  du  numé- 
raire frappé  au  nom  ou  aux  armes  des  villes  en  Flandre  et 
eu  lirabant.  Elle  a  survécu  dans  des  cas  très  particuliers  : 
certaines  amendes  et  certains  émoluments  que  devaient 
payer  ou  recevoir  les  officiers  des  monnaies  ont  été  expri- 
més en  marcs  d'argent  fin  jusqu'à  la  fin  du  xviii'  siècle. 


VALEURS  ANCIENNES  105 

Lu  monnnic  rvcllc.  —  Depuis  Pépin  le  Bref  l'unité  moné- 
taire était  le  deniei'  d'argent.  Celui-ci  se  partageait  en 
2  oboles.  Le  denier  et  l'obole  étaient  les  seules  monnaies. 
On  se  souvenait  qu'il  y  avait  eu  un  temps,  à  l'époque  méro- 
vingienne, où  une  monnaie  d'or,  le  sou,  avait  valu  12  de- 
niers d'ai'gent  Le  sou  d'or  avait  disparu,  mais  l'expression 
de  sol  avait  survécu  pour  désigner  un  groupe  de  12  deniers, 
et  comme  on  avait  taillé  20  sous  de  deniers  dans  une  livre 
d'argent,  on  avait  pris  l'habitude  de  désigner  sous  le  nom 
de  livre  un  ensemble  de  240  deniers.  Le  nom  du  poids  était 
ainsi  devenu  un  simple  nombre.  C'est  pourquoi  lorsqu'on 
comptait  des  monnaies,  on  ne  se  servait  pas  de  la  numéra- 
tion décimale,  mais  de  la  numération  par  livre,  sols  et 
deniers, 

la  livre  valant  20  sols  ou  240  deniers, 
le  sol  12  deniers  et  le  denier  2  oboles. 

Depuis  l'époque  carolingienne,  jusqu'à  la  fin  de  l'ancien 
régime,  ce  mode  de  calcul  a  été  seul  en  usage. 

On  dira  donc  :  1  livre  2  sols  3  deniers  artésiens  pour 
267  deniers  artésiens;  2  livres  o  sols  8  esterlius  jwur 
608  esterlius;  1  livre,  I  denier  gros,  au  lieu  de  241  gjos.  La 
monnaie  réelle,  dans  toutes  ces  expressions,  c'est  le  denier 
artésien,  l'esterlin,  le  gros 

C'est  elle  qu'il  faut  étudier  pour  déterminer  la  quantité 
d'argent  qu'elle  contient.  Le  nombre  des  monnaies  est 
exprimé  par  les  expressions  livres,  sols,  deiiiev,  ce  dernier 
étant  l'équivalent  d'imité. 

Cette  manière  de  compter  ne  s'applique  qu'à  l'argent. 
Les  sommes  en  or  sont  exprimées  en  chiffres  décimaux  : 
20,000  deniers  d'or,  denier  étant  ici  aussi  l'équivalent 
d'unité,  de  pièce. 

* 

Lu  inonnnic-  de  compte.  —  A  partir  du  xvi*^  siècle,  il  fut 
nécessaire  d'aller  plus  loin  encore.  Les  variations  conti- 
nuelles dans  l'évaluation  des  monnaies  rendirent  néces- 
saire la  création  de  monnaies  de  compte,  monnaies  idéales, 
immuables  et  invariables  destinées  à  assurer  la  stabilité  des 
transactions,  et  qui  s'évaluaient  à  leur  tour  en  monnaies 
réelles,  celles-ci  soumises  à  des  surhaussements perpétuels. 


106  V.    TOI  l{NE(;i! 

Telles  furent  la  livre  de  Flandre,  la  livre  de  Bi-abant  ou 
florin  Brabant,  l'argent  courant  de  Brabant,  l'argent  de 
banque  de  Brabant,  le  florin  de  Liège,  etc. 

Pour  pouvoir  déterminer  la  valeur  de  toutes  ces  mon- 
naies de  compte,  à  un  inoinent  donne,  il  faut  savoir  d'abord 
à  quelle  quantité  de  monnaies  réelles  elles  cori-es]iondaient 
à  ce  moment-là,  et  calculer  tout  d'aboi-d  la  (quantité  d'or  ou 
d'argent  fin  que  celles-ci  renfermaient. 


Le  calcul  du  métal  fin. —  Pour  évaluer  la  quantité  de  fin 
d'une  monnaie,  il  faut  en  connaître  le  poids  et  le  titre. 
Ceux-ci  peuvent  parvenir  à  notre  connaissance  de  deux 
manières  :  par  la  méthode  expérimentale  ou  par  les  docu- 
ments d'archives. 

Pour  les  temps  antérieurs  au  xiv"  siècle,  à  i>art  quelques 
exceptions  offertes  par  les  procès- verbaux  d'analyses  de 
monnaies  faites  par  des  villes,  il  est  de  toute  nécessité  de 
recourir  à  l'analyse  chimique  et  à  la  balance  pour  décou- 
vrir le  poids  et  le  titre  des  monnaies.  Cette  méthode  qui 
paraît  infaillible  est  cependant  la  moins  recommandable 
des  deux;  les  alliages  étaient  souvent  imparfaits;  partant, 
certaines  pièces  renfermaient  plus  d'argent,  d'autres  plus 
de  cuivre;  les  monnaies  étaient  taillées  à  recours,  c'est-à- 
dire  que  pourvu  que  le  poids  de  l'ensemble  de  la  fabrica- 
tion fût  exact,  certaines  pièces  pouvaient  être  plus  lourdes, 
d'autres  plus  légères.  Le  fort  portait  le  faible,  comme  (m 
disait  autrefois.  Par  conséquent,  pour  obtenir  expéri- 
mentalement une  détermination  exacte  du  poids  et  du 
titre  d'une  monnaie  antérieure  au  xiv^  siècle,  il  serait 
de  toute  nécessité  de  sacrifier  un  grand  nombre  d'exem- 
plaires, ce  qui  n'est  pas  ])Ossible.  La  méthode  expérimen- 
tale ne  peut  donc  fournir  que  des  résultats  très  appi'oxi- 
matifs 

Tout  autre  se  présente  la  question  dès  que  les  docu- 
ments d'archives  s'offrent  à  nous. 

Le  i^oids  est  exprimé  d'oi-dinaire  par  rapport  au  marc  de 
Trouves.  Le  marc  de  Troyes  des  Pays-Bas  se  subdivisait 
en  8  onces,  chaque  once  en  2<1  esterlins  et  ceux-ci  en  32  as, 
<le  sorte  que  le  marc  total  renfermait  5,120  as. 


XAr.ElîHS   ANCIENNES  107 

Le  mai'c  de  Troyes  des  Pays  Bas  a  été  calculé  an  poids 
du  système  décimal  d'après  les  étalons  de  Bruxelles  par  la 
Commission  des  poids  et  mesures  du  département  de  la 
Dyle  en  l'an  IX.  Celle-ci  l'a  évalué  à  246  gr.  07(». 

Le  titre  s'énonçait  de  manici'cs  différentes  sui\  ant  (ju'il 
s'agissait  de  l'or  ou  de  l'argenl. 

L'or  fin  était  dit  à  24  carats.  Chaque  cai'at,  c'est-à-dire 
chaque  vingt-quati'ième  partie,  se  divisait  en  o2  parties  ou 
en  24  grains.  Un  pliilippus  rider  de  Philippe  le  Bon,  au 
titre  de  23  carats  '^j^  et  1/1,5  était,  dirions-nous  aujourd'hui, 
au  titre  de  ^''-/looo-  Le  calcul  long  et  comi)liqué  de  la  réduc- 
tion en  millièmes  du  titre  exprimé  en  carats  est  grandement 
facilité  par  d'excellentes  tables  que  l'on  irouve  dans  le 
Traite  des  inonnnics  il' or  et  (l'urinent  de  Bonneville 
(Paris,  1806). 

Pour  l'argent  fin,  il  était  dit  à  12  deniers,  et  chaque 
denier  se  divisait  en  24  grains.  La  réduction  en  millièmes 
s'obtient  pratiquement  par  les  tables  de  Bonneville. 

La  quantité  des  monnaies  étant  connue,  leur  poids  et 
leur  titre  ayant  été  l'amenés  au  système  décimal,  on  ai'rive 
à  déterminer  le  poids  de  métal  fin  qu'elles  renferment. 


L'cvaliuiiion  du  nu'-lnl  /in  en  inoruiuics  modernes.  —  Si 
calculer  la  valeur  de  la  monnaie  moderne  qui  ])ourrait  se 
fabriquer  à  l'aide  d'une  certaine  quantité  de  métal  fin  est 
une  oi)ération  simple  en  apparence,  sa  mise  en  pratique 
exige  de  multiples  précautions. 

D'abord,  il  faut  faire  choix  d'un  système  monétaire.  Pour 
nous,  ce  sera  natui-ellement  le  système  de  l'Union  latine. 

Les  conceptions  qui  ont  présidé  à  l'élaboration  de  celui- 
ci  sont  partiellement  en  opposition  avec  celles  de  l'ancien 
régime  :  le  rapport  de  l'or  à  l'ai'gent  1  :  15  1/2  n'est  pas 
celui  d'autrefois;  ensuite,  la  distinction  entre  monnaies  à 
valeur  inti-insèque  et  monnaies  d'appoint  n'existait  pas; 
toutes  les  monnaies  des  anciennes  provinces  renfermaient 
une  quantité  de  fin  corrospondiint  à  leur  valeur  réelle,  ([uel 
que  fût  leur  titre. 

Le  franc  argent  à  '^-^^/looo  "<^^'  pourra  donc  jamais  être  pris 
en  considération. 


108 


\'.    TOURNEIjR 


D'après  le  système  de  rUnion  latine,  le  Irauc  or  corres- 
pond à  un  poids  de  Ogr.  2903.  Si  nous  avons  affaire  à  une 
somme  exprimée  en  or,  il  suflira  de  diviser  le  poids  de 
métal  fin  par  0  gr.  2903  pour  obtenir  le  nombre  de  francs 
modernes  auxquels  elle  correspond. 

Mais,  si  l'on  se  bornait  à  cette  seule  opération,  le  résul- 
tat ne  serait  pas  exact  :  les  monnaies  d'or  de  l'ancioi 
régime  étaient  alliées  d'argent  ;  c'est  cette  circonstance  qui 
leur  donne  la  belle  couleur  jaune  que  nous  ne  l'ctrouvons 
pas  dans  nos  monnaies  modernes.  Il  faut  donc  calculer  la 
valeur  de  cette  quantité  d'argent  et  l'ajouter  à  celle  de  l'or. 

Et  c'est  ici  que  le  problème  devient  difficile  Lorsque  le 
rai)port  de  l'or  à  l'argent  est  de  1:15  ^2'  i^  faut  4  gr.  oO 
d'argent  pour  équivaloir  à  1  franc  or.  Mais  ce  rapport  a 
fortement  varié  au  cours  des  siècles,  et  il  est  indispensable 
de  onnaitre  ce  rapport  pour  pouvoir  calculer  avec  exacti- 
tude la  valeur  d'une  quantité  d'argent  à  une  époque 
d(mnée. 

Pour  donner  une  idée  des  variations  subies  par  ce  rap- 
port, voici,  dressé  par  un  maître  des  monnaies  de  Brabant 
qui  vivait  à  la  fin  du  xvi"  siècle,  le  tableau  des  variations 
du  rapport  de  l'or  à  l'argent  depuis  1350  jusqu'en  1680. 


1350. 

:  10  V2. 

1418, 

1  :  10,  puis  9  ■V,. 

1359, 

;  12. 

1420, 

1  :    9^74- 

13(51, 

:10V2- 

1426, 

1:113,. 

1380, 

:  10  3/,. 

1427, 

1  :  10 '/2. 

1381, 

:     0  72. 

puis  à  9  "/g. 

1428. 

1  :  10  3/,. 

1381, 

■     9-,. 

puis 

10. 

1430, 

1  :  11 -Vs,  puis  10 '/g. 

1388, 

:10  V,. 

1453, 

1  :  12 

1389, 

:    93/,. 

1466, 

1  :10  3/,. 

1392, 

:  13. 

1489, 

1     11. 

1393. 

:  12  '/„ 

puis 

12  '/-, 

14  6, 

1:10  3/,. 

1404; 

:    93/g. 

li99. 

1:11  '/s- 

1407, 

:  10. 

1520. 

1  :  10"  .^.  P"is  i  1  V2 

1408, 

:    93/3. 

1522, 

1  :  12. 

1409. 

:     9V4. 

1524, 

1  :  10  '/«. 

lilO. 

:     93/,. 

1526. 

1  :  123/,,,  puis  lO'/s 

14l(), 

:    9. 

1539, 

1  :  12,  puis  10  7/8- 

1417, 

:  10  V,, 

1548, 

1:11  V/^. 

VALFARS  ANCIENNES  109 


4557, 

i  : 

;  10  Vs- 

1599, 

1  :  12^/8. 

4572, 

:  HV8- 

1003, 

1  :11%. 

4576, 

:ll  V.o- 

1609, 

1  :  12  i/,. 

4577, 

:  11  V^. 

1612, 

1  :  12. 

1579, 

:  10  ^/g,  puis 

11. 

1644. 

1  :13-V8. 

1581, 

:  1  1  -'/g,  puis 

10 

Vs- 

1680, 

1  :  13  ^/s. 

1590, 

:  11  V- 

Je  publie  ce  tableau  sous  bénélice  d'inventaire  :  je  ne  l'ai 
pas  contrôlé,  parce  que  ce  contrôle  exigerait  un  travail 
très  considérable.  Il  doit  être  en  grande  partie  conforme 
à  la  vérité,  parce  que  les  maîtres  des  monnaies  s'en  ser- 
vaient lorsqu'ils  avaient  à  calculer  la  valeur  d'une  monnaie 
ancienne  en  monnaie  de  leur  temps.  » 

Pour  calculer  la  valeur  d'un  poids  d'argent  fin  en  mon- 
naie moderne,  il  faut  tenir  compte  de  ce  tableau;  on 
recherche  quelle  est  la  proportion  entre  l'or  et  l'argent  en 
l'année  qui  nous  intéresse,  et  l'on  multiplie  0  gv.  290,3, 
poids  d'un  franc  oi",  par  cette  propoition  pour  obtenir  le 
poids  d'argent  correspondant  à  cette  éjjoque  à  un  franc  or. 

Il  suffit  de  diviser  alors  le  poids  d'argent  fin  total  par 
le  résultat  de  cette  multiplication  pour  obtenir  la  valeur 
moderne  de  l'ancienne  somme  d'argent. 

* 

*     ♦ 

Le  pouvoir  d'achat  des  valeurs  anciennes.  —  La  monnaie 
en  elle  même  ne  présente  aucune  utilité  ;  e!le  n'en  offre  que 
pour  autant  qu'elle  puisse  servir  de  moyen  d'échange.  L'im- 
portance d'une  somme  n'est  pas  en  raison  du  nombre  plus 
ou  moins  considérable  de  chiffres  qui  la  constitue,  mais 
elle  dépend  de  ce  qu'elle  peut  permettre  de  se  procurer. 
Aussi  sourions-nous  simplement  lorsque  les  journaux  nous 
racontent  que  dans  le  double  fond  de  la  valise  d'un  Russe, 
arrêté  à  Paris,  on  a  découvert  deux  millions  de  roubles... 
Koltchak.  Malgré  cette  somme  plantureuse  le  possesseur 
de  la  valise  eût  été  bien  en  peine  de  s'offrir  à  dîner. 

Nous  avons  assisté  depuis  la  guerre  à  un  accroissement 
fabuleux  du  coût  de  la  vie.  Nous  n'en  cherchei-ons  point 
les  causes,  nous  nous  bornerons  à  constater  le  fait.  Les 
gouvernements  se  sont  trouvés  dans  la  nécessité  d'aug- 
menter  les   traitements   de    leurs   fonctionnaires,    et   de 


110  V.     lOUHNEUR 

réglementer  la  vente  de  certains  produits  de  première 
nécessité.  Pour  s'éclairer  ils  ont  établi  ce  que  Ton  appelle 
des  «  Index  numbers  ». 

L'index  number  s'obtient  en  comparant  les  prix  actuels 
d'un  certain  nombre  de  denrées  nécessaires  à  la  vie  avec 
li'S  prix  de  ces  mêmes  denrées  en  U>14. 

C'est  de  la  même  manière  qu'il  convient  de  procède!" 
si  l'on  veut  détei-miuer  le  pouvoir  d'achat  des  valeurs 
d'autrefois. 

Il  faut  commencer  par  relever  le  prix  des  denrées  néces- 
saires à  la  vie,  le  pain,  le  beurre,  les  œufs,  la  viande,  le 
poisson,  les  souliers,  les  liabits,  les  loyers  si  possible, 
dans  l'endroit  même  où  la  valeur  à  déterminer  est  spécifiée, 
et  dans  le  cours  de  la  même  année,  vers  la  même  date  si 
})ossible. 

Ces  investigations  sont  en  général  aisées,  pour  ce  qui 
concerne  les  grandes  villes  depuis  le  xv'^  siècle.  On  trouve 
la  documentation  nécessaire  principalement  daus  les 
comptes  relatifs  à  la  bienfaisance;  ces  comptes  sont  en 
général  fort  développés,  et  parlent  précisément  sur  les 
denrées  particulièrement  intéressantes  pour  notre  sujet. 

En  comparant  les  prix  anciens  réduits  en  francs  or, 
avec  les  prix  modernes  également  réduits  en  francs  or,  on 
obtient  le  rapport  déterminant  le  surhaussement  de  la 
valeur  de  l'ai-gent. 


Valeur  du  résiiltni.  —  Le  résultat  obtenu  par  cette 
méthode  est  d'une  exactitude  mathématique  pour  les  deux 
premières  opérations,  pour  peu  qu'elles  aient  été  bien 
conduites  (^uaut  à  la  troisième,  c'est  la  plus  délicate 
parce  que  les  conditions  économiques  de  la  vie  d'autrefois 
étaient  toutes  différentes  de  celles  d'aujourd'hui. 

Avant  la  construction  des  chemins  de  fer  et  l'application 
de  la  vapeur  aux  navires,  les  communications  étaient 
lentes;  la  distribution  des  produits  nécessaires  à  la  vie 
s'opérait  péniblement;  lorscpie  l'un  d'eux  venait  à  faire 
défaut  dans  la  contrée,  il  fallait  un  long  temps  pour  qu'il 
leparùt  sur  le  marché.  De  là  des  hausses  subites  et  inex- 
plicables à  première  vue,  des  difféi-ences  considérables  de 


NALEl'RS  ANCIENNES  111 

la  valeur  des  mêmes  denrées  d'aunée  en  année,  et  même 
de  mois  en  mois. 

Par  suite  de  cet  état  de  choses,  on  ne  peut  jamais 
généraliser  ni  dans  le  temps  ni  dans  l'espace.  Chaque  cas 
doit  être  étudié  sépai'ément  dans  son  milieu  et  au  moment 
auquel  il  appartient.  Plus  tard  seulement,  quand  on  aura 
poussé  plus  loin  les  études  de  nombreux  cas  particuliers, 
on  pourra  tracer  des  tableaux  géographiques  et  chronolo- 
giques dont  l'examen  permettra  d'avoir  une  vue  générale 
de  la  diminution  du  pouvoii'  d'achat  des  métaux  précieux 
dans  notre  pays  au  cours  des  siècles  passés. 

*  * 
Exemple  de  réduction.  —  En  1450,  un  chapelain  de 
Sainte-Gudule,  Gilles  Van  de  Kerchove,  possédait  entre 
auti'cs  une  rente  de  sept  Philippus  d'or  et  de  quatre 
florins  d'or,  dits  florins  de  cens  (septem  denarios  aureos 
dictos  Philippus  riders  et  qnatuor  florenos  denarios  aureos 
dictos  cheinsguldeneu.  Archives  des  Hospices  civils  de 
Bruxelles,  carton  B.,  liasse  Evere  ) 

A  quelle  somme  cette  rente  correspondrait-elle  aujour- 
d'hui ? 

A.  i°  Le  Philippus  rider.  —  Le  Philippus  rider  de 
Philippe  le  Bon  était  de  GT  '/g  au  marc  de  Troj^es  et  de 
23  carats  ^/^  et  Vie  d'aloi. 

Son  poids  était  donc  de  'iii^  gr.  ()7o  \i)oids  du  marc  de 
Tro^^es)  divisé  par  67. o  =  3  gr.  G4. 

Le  titre  de  23  carats  3/^  et  Vie  réduit  en  millièmes  donne 
992  millièmes. 

Le  poids  de  l'or  fin  sera  donc  de  3  gr.  64  X  0,992  -=  3gr.6L 

L'argent  de  l'alliage  étant  seulement  de  8  millièmes 
peut  être  négligé  dans  ce  cas- ci. 

La  valeur  du  poids  d'or  fin  en  monnaie  moderne  s'obtient 
en  divisant  3  gr.  61  par  0,2903  (poids  du  franc  or),  ce  qui 
donne  12  fr   4.io. 

Les  7  philippus  riders  valent  donc  87  fr.  04o. 

2^  Le  florin  de  cens.  —  Le  denier  d'or  dit  florin  de  cens 
est  l'ancien  florin  de  Florence  qui,  au  xv*  siècle,  avait 
disparu  de  la  circulation.  On  l'évaluait  en  argent. 

En  1450,  il  valait  à  Bruxelles  2  sols  9  deniers  gros,  soit 
33  gros. 


112  V.    TOURNEUR 

Le  gros,  depuis  1434,  était  frappé  à  raison  de  144  au 
marc  de  Troyes,  et  au  titre  de  0  deniers. 

Il  pèse  donc  246  gr.  070  divisé  par  144,  soit  1  gr.  708. 

Le  titre  de  6  deniers  coirespond  à  500  millièmes.  Le  gros 
renferme  donc  Ogr.  Soi  d'argent  fin. 

Les  33  gros  valant  1  florin  de  cens  correspondent  donc 
à  un  poids  d'argent  fin  de  28  gr.  182,  et  les  4  florins  à 
112  gr.  728. 

L'or  était  à  l'argent  comme  1  est  à  10  '/.s- 

Le  poids  du  franc  argent  équivalait  donc  à  0,2903  (poids 
du  franc  or)  multiplié  par  10  '^/g,  soit  3  gr.  157. 

Les  4  florins  de  cens  réduits  en  argent  moderne  valent 
donc  112  gr.  728  :  3,157  =  35  fr.  71. 

Les  deux  rentes  que  possédait  en  1450  Gilles  Van  de 
Kerchove  équivaudraient  donc  aujourd'hui  à  87  fr.  045 
+  35fr.  71  =  122  fr.  755. 

7^.  Efforçons-nous  maintenant  de  nous  rendre  compte 
de  ce  que  l'on  pouvait  acheter  en  1450  avec  ces  122  fr.  755. 

Pour  la  facilité  du  lecteur,  je  laisserai  de  côté  le  méca- 
nisme des  réductions. 

En  1450,  le  beurre  se  vendait  à  Bruxelles  3  gros  (1  fr.  10) 
la  livre  (0  kg.  467),  soit  2  fr  35  le  kilogramme. 

Les  œufs,  10  gros  (3  fr   68)  le  cent,  soit  0  fr.  036  pièce. 

Le  cent  de  hai-engs.  24  gros  (8  fi-.  83),  soit  0  fr.  088  pièce. 

Un  jeune  cochon  de  boucherie,  70  gros  (25  fr.  76),  si  nous 
le  supposons  de  100  kilogrammes,  ce  qui  est  le  poids  moyen 
ordinaire  des  jeunes  cochons,  cela  porterait  le  prix  du 
kilogramme  à  0  fr.  257. 

Enfin,  une  paire  de  souliers  tout  en  cuir  valait  6  gros 
(2  fr.  21). 

C.  Aujourd'hui,  le  beurre  coûte  15  francs  le  kilogramme, 
soit  6  francs  or;  un  œuf  0  fr  80,  soit  0  fr.  32  or;  un  hareng 
0  fr.  40,  soit  0  fr.  10  or;  le  porc  12  francs  le  kilogramme, 
soit  4  fr.  80  or;  une  paire  ordinaire  de  souliers  65  francs, 
soit  2o  francs  or. 

On  peut  donc  dire  que  l'argent  en  1450  possédait  une 
puissance  d'achat  bien  supérieure  à  ce  qu'elle  est  aujour- 
d'hui; suivant  les  denrées,  elle  variait  de  2  à  16  fois  plus. 

Victor  Tourneur. 


MELANGES 


Notes  épigraphiques. 

I.   Fra<>tnent  inédit   de  dédicace  d'archonte. 

J'ai  copié,  en  4914,  au  Musée  de  Daphni,  le  petit  frag- 
ment d'inscription  suivant,  qui  paraît  bien  être  resté 
inédit.  Il  est  gravé  sur  marbre  pcntélique.  La  plaque,  qui 
mesure  actuellement  O.ilO  de  long  sur  O.lo  de  haut,  est 
incomplète  adroite  et  en  haut.  Épaisseur,  0.01.  Lettres 
de  0  01,  terminées  par  de  petites  barres.  Le  M  a  la  forme 
onciale. 

YnOMAKP 

L'inscription,  gravée  dans  une  couronne  de  myrte,  qui 
subsiste  en  partie  sous  l'unique  ligne  conservée,  appartient 
visiblement  à  la  série  des  dédicaces  d'archontes  trouvées 
dans  la  grotte  d'Apollon  du  flanc  nord  de  l'Acropole 
d'Athènes,  ou  qui  en  proviennent  sûrement.  La  liste  en  a 
été  dressée  par  Cavvadias,  'Eqp.  dpx.,  1897,  p.  8  et  87  et  sui- 
vantes (cf.  1)1.  IV).  On  peut  donc  restituer  en  toute  certi- 
tude : 

I 'AttôWuuvi] 
ÙTTÔ  MaKp|aîç|. 

(/f.  Cavvadias,  /.  /..  |).  8,  n°  1:  F. 'loùXioç  MriTpôbaipoç 
Mapa;6ubvioç)  0eo"|uo0eTr|O'aç,  'AttôWujvi  ùttô  MaKpaîç  dvéôriKev. 

D'après  les  caractères,  noti-e  dédicace  ne  serait  pas  anté- 
rieure au  II®  siècle  de  notre  èi'e  :  nous  savons  par  IG.  111, 
715  (cL  'Eqj.  dpX-,  /•  /••  p.  13,  n"  10  et  pi.  111,  I,  i)  que,  vers  le 


114  MÉLANGES 

milieu  du  m*'  siècle  encore,  les  archontes  continuaient  à 
faire  graver  des  inscriptions  de  ce  genre  dans  la  grotte 
d'A])ollon. 

2.   l'l-:ii;incnt  de  dérlicncc  copiée  par  Spon  à  I-^leusifi. 

Nous  avons  signalé  ailleurs  le  cas  assez  curieux  d'un 
texte  trouve  dans  des  fouilles  récentes,  pratiquées  à 
Athènes,  et  publié  comme  inédit  bien  qu'étant  connu  déjà 
par  une  co])ie  de  Pittakis  (^).  Le  cas  n'est  i)as  unique.  Un 
fragment  de  dédicace,  exhumé  à  Eleusis  (l'éditeur  ne  s'en 
est  pas  aperçu),  ai)partient  sûrement  à  une  inscription 
depuis  longtem])S  éditée  :  elle  avait  été  copiée  par  Spon  à 
une  époque  où  le  marbre  était  encore  intact. 

Ce  fragment  est  celui  qui  a  été  publié  par  Skias,  dans 
r  'Ecpriiuepiç  dpxaioXoYiKri,  1899,  p.  208,  n"  35. 

L'éditeur  le  restituait  comme  suit  : 

1  Ai 
[TTaiépJa  5'EuTT 

ou  Tri  'Puu[|uaiujv] 

la  dpEavTtt  [toû  Kripûî- 

[kuuv  Yé]vouç,  dpE[avTa  Trjv  èTTub]- 
[vu|uov  dpxi'iv,  T.  K\.  A]uo"ià[6ou] 


L'éditeui'  ffui)])osait  qu'il  s'agissait  ici  d'un  fils,  inconnu, 
du  dadouque  Tib.  Claudius  Lysiadès.  De  cette  supposition 
erronée,  il  tirait  la  restitution  [toû  KiipuKuuv  Té]vouç,  qui  est 
])ar  hasard  exacte!  Il  émettait  aussi  rhy])othèse qu'un  autre 
fj-agment,  également  trouvé  à  Eleusis,  ai)pai-tenait  proba- 
blement de  la  même  dédicace,  ce  qui  est  faux. 

On  s'en  convaincra  aisément  en  se  rei)ortant  à  la  dédi- 
cace IG,  III,  702  (2),  11.  5  à  10,  d'où  provient  sûrement  le 
fragment  i)ublié  par  Skias  : 

TTpeoPeûcravTa  rrpoÎKa, 
Ti|ur|6évTa  bè  ùttô  0eoû 


(')  il  s';igit  (lo  l:i  (Irdicncf  IG,  III,  {V.H.  |)iil)]ico  i-oinmc  inédite  par  KouPdii- 
niotis,  TTpaKTiKÙ  xf]ç  ùpxaioAoTiKf|ç  'Exaipiaç.  1!M(),  p.  iii,  n"  9.  <;f.  lil.ll. 
XXXVIll,  lî»|.i,  p.  il!).  iv"2:i. 

(-)  LdKWY,  Inschr.  gr.  Bildhanern,  i.iO;  HoHKKrs-GAunNKit,  his<r.  of 
Alliai,  :)'2^. 


MÉLANGES  1  15 

Ko|u,uôbou  JY]  'Puj)aaiujv 
TToXixeia,  dpEavia  toû 
KiipÙKuuv  yévouç,  dpSav- 
Ta  Tiîç  iepdç  ^epoudiaç. 

Les  lettres  soulignées  sout  exactement  celles  du  frag- 
ment d  Eleusis.  Intacte  au  moment  où  Spon  la  copia, 
l'inscription  a  été  ensuite  brisée.  L'on  voit  qu'il  reste  bien 
jjeu  des  restitutions  proposées  :  c'est  môme  par  le  ]>lus 
grand  des  hasards  que  l'une  d'elles  résiste  à  l'éj^reuve. 

Rap])elons  ici  qu'on  a  également  retrouvé  dans  les 
fouilles  d'Eleusis  deux  autres  dédicaces  qui  avaient  été 
copiées  autrefois  par  Fourmont  et  Cliandler,  dont  elles  ont 
l^ermis  de  rectifier  les  lectures  (i). 

?>    Un  ethnique  à  supprimer  iZa)ua(JaTeûç). 

Skias  a  publié  dans  1' 'Eqpriiuepiç  dtpxaioXoYiKri,  de  1899, 
p.  210,  n°  89,  deux  fragments  qui,  d'après  la  forme  des 
lettres,  les  dimensions,  la  qualité  et  le  travail  du  marbre, 
appartiennent  sûrement  à  une  même  dédicace.  L'éditeur  la 
restitue  : 

l'O]  biiuoç  (tôv  beîva  -']^0K)  Zanao"|a]- 
léuuç  Bu^Yarépa,  Muiiôeiclav  dqp'  écriiaç. 

Il  observe  lui-même  cpi'on  ne  connaît  pas  d'autre  exemi)le 
de  l'ethnique  ZauacraTeûç,  au  lieu  de  TajAGOaieûç  f-).  Mais  il 
ne  s'est  ])as  apei"çu  que  sa  restitution  se  heui-tait  à  une  dif- 
ficulté i)lus  grave  :  nous  savons,  par  plusieurs  textes,  que 
l'initiée  de  l'autel  ne  pouvait  être  choisie  que  pai'mi  les 
jeunes  filles  de  pure  race  athénienne  (^).  Par  conséquent, 
ce  n'est  i)as  un  ethnique,  mais  un  démotique  qu'il  faut  cher- 
cher à  la  fin  de  la  1.  1 .  On  y  lira  vraisemblablement  —  bouc 
'A|uaH[av]Téuuç.  Cette  lecture  nécessite  une  très  légère  cor- 


(•)  IG,  III,  731  (=  'E(p.  àpx-,  1883,  p.  77  et  I89i,  p.  185,  n»  31)  et  IM  ('Ecp. 
dpx-,  i894,  p.lBîi,  II"  32). 

(2)  Sur  la  ville  de  Sainosale,  ef.  en  dernier  lieu  l'article  de  Weissenbach, 
Reaf-Enc,  la,  2,  p.  2220  sqq. 

(')  Pour  ces  textes,  cf.  Foicakt,  «Les  grands  Mystères  d'Eleusis  »,  Méin.  de 
lAcad.  des  hiscr.,  WWIl,  lilOO,  p.  97  sq.,  et  «  Les  Mystères  d'Eleusis»,  Paris, 
1ÎH4,  p.277  sq. 


116  MÉLANGES 

rection  :  la  dernière  lettre  conservée  de  la  1.  la  été  lue  C, 
une  forme  de  a  qui  est  différente  de  celle  des  cinq  autres 
de  la  dédicace  (Z).  Bien  (ju'il  ne  soit  pas  rare,  à  l'époque 
impériale,  de  ti'ouver  jusqu'à  trois  formes  (^)  pour  une 
mcm(i  lettre,  dans  des  documents  attiques,  il  ])araît  évident 
que  Skias  a  pris  ici  un  Z  i)our  un  E. 

Paul  Gratndor. 


Une  quittance  signée   de  Watteau. 

Une  tradition  qui  s'est  transmise  dans  la  famille  d'Aren- 
berg  affirme  l'existence  dans  ses  archives  d'une  quittance 
du  peintre  Antoine  Watteau.  Personne,  jusqu'à  ce  jour, 
n'avait  pu  la  découvrir. 

Quand  je  fus  chargé  du  classement  des  archives  de  la 
famille,  j'eus  mon  attention  éveillée  sur  ce  point. 

Aussi  fut-ce  avec  une  véritable  émotion  que,  ajirès  avoir 
rencontré  dans  un  livre  de  comi)tes  de  la  Maison  la  men- 
tion d'un  paiement  fait  au  peintre  Watteau  ;  «  Paj'é  au 
S""  Vateau  suivant  mémoire  et  quittance  2>j0  livres  »,  je 
retrouvai  dans  les  pièces-annexes  le  reçu  signé  du  peintre. 

Je  tenais  enfin  la  quittance  tant  recherchée! 

J'en  fis  aussitôt  p.irt  au  duc  d'Arenberg  dans  une  lettre, 
datée  du  21  mars  1914,  et  dans  laquelle  je  lui  donnais  les 
renseignements  que  je  reproduis  ici. 

Le  duc,  appréciant  toute  l'importance  de  la  découverte, 
fil  immédiatement  photographier  le  document  afin  de  le 
pouvoir  montrer  à  quelques  personnes  de  son  intimité. 
C'est  ainsi  qu'une  épreuve  photographique  en  fut  commu- 
niquée au  prince  de  Ligne  et,  en  mai  lOli,  au  marquis  de 
Biron. 

Le  duc,  me  réservant  l'honneur  de  ma  découverte,  m'au- 
torisa à  publier  la  pièce.  Elle  allait  devenir  la  base  d'une 
notice  sur  les  œuvres  de  Watteau  appartenant  ou  ayant 
appartenu  aux  collections  d'Arenberg,  dont  les  éléments 
inédits  ont  été  tous  ])uisés  aux  archives  de  la  famille. 


(')  (^r.  lutlainmeHl  le  (h-crci  IG,  III,  -2  ■=  IG,  11%  107:2.  dû  le  o  prend  liois 
foiines  (liinirenlcs. 


MÉLANGES  117 

L'étude  était  complètement  au  point  quand  la  guerre  vint 
en  empêcher  la  publication.  Je  suis  heureux  aujourd'hui 
d'offrir  aux  lecteurs  de  la  Revue  belge  de  philologie  et 
d'histoire  la  primeur  de  la  publication  de  ce  document 
presque  unique,  me  réservant  de  traiter  le  même  sujet  plus 
longuement,  au  point  de  vi:e  art,  et  de  publier  alors  la 
reproduction  phototypique  de  la  pièce  originale. 

Néanmoins  je  puis  déjà  indiquer  que  cette  découverte  du 
reçu  de  Watteau  est  de  toute  importance,  elle  nécessite  un 
nouvel  examen  des  tableaux  donnés  comme  exécutés  de  sa 
main  selon  la  tradition  courante  dans  la  Maison  d'Aren- 
berg".  Il  s'agit  de  deux  tableaux  le  Bain  domestique  et  le 
Bain  rustique  qui,  aujourd'hui,  sont  attribués  à  Pater. 

Cette  quittance  consiste  en  un  petit  feuillet  détaché, 
d'environ  10  centimètres  sur  15.  Le  document  a  tous  les 
caractères  d'une  authenticité  indiscutable.  Il  se  trouvait 
dans  une  liasse  de  pièces  serré  j  de  ficelles  anciennes,  qui, 
certainement,  n'avait  pas  été  ouverte  depuis  le  jour  où  le 
caissier,  il  y  a  deux  siècles,  vers  1720,  l'avait  formée  et 
déi)osée  dans  les  archives. 

Le  texte  en  est  écrit  de  la  main  de  M.  Bureau  de  Saint- 
André,  caissier  particulier  du  duc  d'Ai'cnberg  à  Paris.  Il 
est  l'édigé  comme  suit  : 

«  J'ay  receu  de  M'".  Bureau  De  S'.  André  la  somme  de 
«  deux  cent  livres  pour  deux  tableau  que  j'ay  fait  pour  son 
((.  .Ait.  M=^  le  Duc  D'Arenberg  à  Paris  ce  4  may  1717.  « 

Un  peu  plus  bas,  sur  la  même  feuille,  de  la  main  même 
de  Watteau,  qui  signe,  il  est  éciit  : 

c(  bon  pour  200  <&. 

Vateau.  w 

Au  dos,  le  caissier  a  ajouté  : 

«  Q^''^'  du  S.  Vateau,  pintre 

ce  4  may  1717 200  %. 

«  Enreg.  au  8  may  1717.  » 

Ce  document  est  extrêmement  intéressant. 
La  forme  du  nom  de  l'artiste  retient  d'abord  notre  atten- 
tion: Fa/eaiz.  L'orthographe  de  ce  nom  restait  incertaine; 


lis  MÉLANGES 

on  l'a  écrit  d'une  don/aine  de  manières  :  Vatteaiix,  Vatau, 
Vataiix,  Vnllc'iui,  Waltenii,  etc.  Ici,  c'est  Vateaii.  Cette 
forme,  noiin  la  trouverons  encore  dans  un  inventaire  des 
tableaux  des  collections  d'Arenberg  de  1768  {^). 

Et  le  prix  que  l'on  payait  ses  œuvres,  de  son  vivant, 
n'est^il  pas  intéressant?  Deux  cents  livres  pour  deux 
tableaux  ! 

La  date,  1717,  est  la  même  que  celle  de  Vl-^inbanjucnient 
pour  Cythcre;  c'est  la  bonne  époque,  celle  du  plein 
épanouissement  du  talent  du  peintre  ! 

Vateau  livrait  ces  œuvres  au  duc  Léopold-Pliilippe 
d'Arenberg,  protecteur  des  arts,  ami  des  lettres  (1690-1754). 
Il  se  peut  que  le  due  l'ait  rencontré  à  Paris,  où  il  aimait  à 
séjourner;  ou  peut-être,  et  tout  aussi  bien,  à  Raismes, 
près  de  Valenciennes,  où  il  possédait  un  château,  ou 
encore  à  Valenciennes  même. 

Une  quittance  authentique  du  grand  peintre  est  chose 
précieuse.  Je  ne  connais,  en  dehors  de  la  pièce  qui  nous 
occupe,  que  le  reçu  donné  ])ar  Watteau  au  duc  Philippe 
d'Orléans  en  1719(2). 

Parmi  les  autogra])hes,  on  cite  encore  la  signature  qu'il 
apposa  au  bas  du  procès-verbal  de  sa  réception  à  l'Acadé- 
mie :  a  Vateau  »  (3).  On  dit  encore  qu'il  ne  reste  de  cet 
artiste  que  quatre  lettres  ! 

Le  cliché  de  la  quittance  que  nous  comptons  publier 
ultérieurement  i)ermettra,  par  la  comparaison  des  écri- 
tures, de  distinguer  avec  certitude  les  vrais  autographes 
des  faux  qui  circident  nombreux. 

Eu.  Laloire. 
Bruxelles,  le  \Vy  octobre  1921. 


(')  D'après  les  anciens  livres  de  coniiilos  de  la  Maison  d'Ai-enl)er£r,  son  nom 
s'écrit  encore  Valuu.r  (\~-l)\-\~îL^\\,  Wattmu.r  (177;î). 

(-)  «  J'ay  i-ecn  de  Monseij'rienr  le  ûw  d'Oi'leans,  :2(Kt  livres  |Miur  un  iietil 
tableau  qni  re|ireseiile  un  jardin  avei-  Iniil  lis,Mires. 

Fayl  il  l'aiis,  le  II  Aonsl  ITl'.l. 

Antoine  Vateau  ».  (Pilon,  VA.,    H'nllcdn  cl  son  émir.  Uruxelles, 
l!t|-2,  p.  12rj.) 

(')  I.e  28  août  1717.  (.losz,  V.,  \.  Wallcav,  Paris,  éd.  darl  II.  IMaz/.a  et  C'e. 
p.  U52.) 


COMPTES  RENDUS 


Hermann  Hirt.  Der  indogermanische  Vohalismus.  Heidelberg, 
Cari  Winler,  1921,  in-8°,  256  pages. 

Ce  travail  du  professeur  de  sanskrit  et  de  grammaire  com- 
parée à  l'Université  de  Giessen  forme  le  tome  second  d'une 
grammaire  indo-européenne  qui  comprendra  quatre  volumes, 
le  premier  devant  être  consacré  à  une  introduction  et  au 
consonantisnie,  le  troisième  à  l'accentuation,  le  quatrième  à 
la  formation  des  thèmes  et  à  la  morphologie  ;  les  tomes  III  et 
IV  paraîtront,  nous  dit-on,  dans  un  temps  assez  rapproché; 
le  tome  1  ne  viendra  que  plus  tard. 

Ce  tome  second,  qui  traite  du  vocalisme  indoe-uropéen  et  de 
son  apophonie,  peut  être  considéré  comme  une  deuxième 
édition  du  mémoire  publié  par  M.  Hirt  en  19U0  sous  le  titre 
de  :  Bas  mclogermamsche  Ahiaut,  fornehmlich  in  seinem 
Verhalfais  zur  Betonung  (Strassburg  Triibner),  mémoire 
auquel  j'ai  consacré  un  compte  rendu  détaillé  dans  la  Reime 
de  rinstruction  publique  (tome  XLVI,  19U3,  p.  189  sqq.), 
mais  dans  le  détail  et  dans  la  disposition  de  la  matière,  le 
cadre  étant  élargi  et  l'analyse  approfondie,  il  en  diffère  sensi- 
blement. Une  fois  de  plus,  M.  Hirt  s'y  révèle  avec  son  érudi- 
tion de  premier  ordre  et  sa  forte  personnalité,  mais  aussi  avec 
sa  hardiesse  coutumière.  Un  bon  nombre  d'étymologies  adop- 
tées au  cours  du  xix"  siècle,  puis  rejetées  comme  étant  en 
contradiction  avec  les  lois  phonétiques,  reçoivent  ici  une 
lumière  nouvelle  par  l'interprétation  propre  à  l'auteur  ;  on 
ne  saurait  dire  encore  si  cette  lumière  sera  durable.  11  va  de 
soi  que  ce  livre  est  d'un  puissant  intérêt  et  qu'il  s'impose  dès 
l'abord  à  l'attention  de  tous  les  comparatistes,  mais,  ainsi  que 
je  le  disais  ailleurs  et  à  propos  de  son  Handbuch  der  grie- 
chischen  Laid-  und  Formenlehre  (l'"'' éd.  1902;  2'^  éd.  1912; 


120  COMPTES    RENDUS 

cf.  Revue  des  FAudes  orecques,  tome  XXXI,   1918,  p.  381), 

ce  travail  de  M.  Hii't  sera  lu  avec  fruit  par  ceux-là  surtout 

qui  peuvent  exercer  ua  droit  de  critique  et  discuer  in  petto 

les  idées  du  maître. 

Emile  Boisacq. 


Bacchi  ide.  Odi  e  Fram/menH  a  cura  di  Nie.  Festa  (Bihl.  di 

class.  greci  tradotti  e  illustr.  col  testo).  Florence,  Sansoni, 
1911),  in-8^  XLViii-154  p.,  L.  1.80 -t-5J  p.  c. 

Petit  livre,  qui  ne  peut  évidemment  soutenir  la  compa- 
raison avec  la  luxueuse  édition  de  MM.  d'Eichthal  et 
Th.  Reinach.  Gracieux  opuscule  néanmoins,  qui  se  lit  avec 
plaisir  et  profit. 

M  Festa  est  un  spécialiste  de  Bacchylide.  Dès  la  découverte 
des  premiers  fragments,  il  s'est  occupé  d'un  auteur  qui  semble 
avoir  suscité  chez  les  Italiens  bien  plus  d'enthousiasme  que 
Ménandre(^).  Avant  la  trouvaille  de  1S9H,  20  années  avant 
la  résurrection  de  Bacchjdide,  la  «  Sirène  babillarde  »  de 
(]éos  était  déjà  populaire  en  Italie;  elle  devait  cette  faveui- 
aux  vers  grandioses  que  Carducci  lui  avait  consacrés  : 
*  Vederti,  o  Lidia,  vorrei...  Je  voudrais  te  voir,  ô  Lydie,  dans 
un  chœur  candide  de  vierges,  ceindre  en  dansant  l'autel 
d'Apollon,  bien  haut  dans  les  soirs  rosés,  en  marbre  de  Paros 
rayonnant,  parmi  les  lauriers,  et  répandre  des  anémones, 
joie  des  yeux,  et  de  ta  lèvre  harmonieuse,  un  hymne  de 
Bacchylide  ». 

Mais  le  génie  de  Carducci  ne  pouvait  deviner  la  nature 
d'un  écrivain  du  vi"  siècle  avant  notre  ère.  C'est  pourquoi, 
bien  qu'aux  Italiens  les  vers  que  nous  venons  de  traduire 
apparaissent  peut-être  comme  une  divination,  rien  ne  res- 
semble moins  au  poète  grec  que  ces  vers  ma'estueux  (\'In  una 
chiesa  Gotica.  Le  profane  même  peut  s'en  rendre  compte  en 
lisant  l'une  ou  l'auti-e  des  excellentes  traductions  que  nous 
possédons  C'^i. 


(*)  L'Ilîilie  |)()ss('Ml;iil  (lt''J!i  deux  Ixtiiiio.s  (''dilions  do  Bacohylido  :  celle  de 
N.  FeslJi  iiii-mr'iTic  {l'Ion'iuc,  l«i)8)cl  iiiio  autre  de  A.  Taccone  (Ttiriri.  1907). 

[-)  Dksumisskmx.  Paris,  llaclicllc  l«it«;  u'I-jciniiAi cl  Tii.  Hkinaoii.  Paris. 
Leroux,  I8!t8.  (Irad.  en  vers). 


COMPTES    RENDUS  121 

Celle  de  M.  Festa  Ips  confirmera  dans  cette  opijiiou  que 
Bacchylide  est  un  grand  poète  de  second  ordre.  Le  style 
apparaît  bien  plus  clair  que  celui  de  son  rival.  Pindare.  Mais 
la  iàche  n'est  pas  aisée  de  rendre  ces  épithétes  nombreuses, 
où  il  semble  lutter  de  condensation  et  d'éclat  avec  Pind;ire 
même  :  aeiuvobÔTeipa,  xotpiTcOvuiuov,  Gpaoùxeip...  M.  Festa  s'est 
très  bien  tiré  de  cette  ditiiculté,  par  exemple  ch.  II  :  «  Prends 
ton  vol,  ô  Renommée,  dispensatrice  de  gloire,  et  porte  à  la 
sainte  Céos  l'annonce  que  dans  la  lutte  aux  bras  vigoureux. 
Argéios  a  remporté  la  victoire  ».  C'est  textuel  et  cependant 
sans  efFort,  sans  contra  nte.  Le  traducteur  n'a  reculé  que 
devant  xapiTUJvu)uoç.  Mais  il  a  gardé  pour  la  fin  l'idée  princi- 
pale :  la  victoire  d'Argéios. 

Pour  le  texte,  la  destination  du  volume  a  imposé  à  M.  Festa 
l'obligation  d'indiquer  seulement  par  un  astérisque  les  pas- 
sages douteux.  M.  Festa  n'a  pas  voulu  parsemer  ceux-ci  de 
crochets  et  de  points.  Le  lecteur  s'en  trouvera  mieux;  le 
philologue  le  regrettera  d'autant  plu>  qu'il  sera  obligé  de 
recourir  i^  Blass-Suess  (Leipzig,  A^  éd.,  1912)  et  de  compléter 
ce  dernier,  pour  les  nouveaux  frai^ments,  au  moyen  du 
Supplementum,  lyricum  de  Diehl  (3"  éd.,  Bonn,  1917).  M.  Festa 
n'a  pas  donné  non  plus  de  bibliographie  ni  de  notes  critiques. 

Par  contre,  l'introduction  de  40  pages  satisfera  le  plus 
difiicile;  les  remarques  judicieuses  et  fines  y  abondent,  et 
dans  presque  toutes  les  questions  débattues,  on  est  de  l'avis  de 
M.  Festa  :  rivalité  de  Bacchy  ide  et  de  Pindare;  comparaison 
de  l'aigle  chez  les  deux  poètes;  le  duel  xapùeiov  ;  erreur  de 
Schmidt  (6«  éd.)  en  ce  qui  concerne  le  buste  de  Hacchylide,  etc. 
C'est  donc  bien  à  regret  que  je  me  vois  contraint  à  une 
remarque. 

M.  Festa  a  su  nous  apporter  quelque  chose  de  nouveau  sur 
le  lieu  d'exil  de  Bacchylide  :  c"e-t  l'examen  qu'il  entreprend, 
après  d'autres  sans  doute,  mais  à  fond  cette  t'ois,  d'un  passage 
du  irepi  qpuYnÇ  de  Plutarque(i)  (14  p.  605  G)  :  Kai  Yàp  toîç 
TTaXaîoiç,  ujç  eoiKev,  al  Moûo"ai  là  KctWiOTa  tûùv  ouviaYMâTiJuv 
Kài^boKiMÛJTaTa  cpuYqv  XaPoûaai  OuvepYÔv  èTTeTéXeffav.  0ouku- 
bîbnç  'ABnvaîoç  auvéYpavpe  t6v  TrôXeiuov  tuùv  TTeXoTTovvricriuuv 
Ktti  'ABqvaiuuv  èv  OpâiKni  Trepî  rtiv  ZKarrTriv  u\r|V  Zevôqpuuv  èv 


(')  Go  |)ass;ig(>   vient  dêlre   ctiidié,    mais  à    un    aiili'c    poiiil   dr    \  iic.    pai- 
(i.  KoRTK,  fleniips.  1918,  p.  1  irM.47. 


1-2  COMPTES    RENDIS 

rKiWoûvTi  Tiîç  'H\eiaç"  OiXidroç  èv  'HîTeipoir  Ti|uaioç  ô  Tau- 
poueviniç  èv  'A9nvaiç'  'AvbpoTÎuuv  'A9i]vaîoç  èv  Me-fotpoiç- 
BttKxuXibiiç  ô  TTOiiiiriç  èv  TTe\oTrovvi'icru)i.  Plutarque  dit  ailleurs 
{Dion,  13)  que  Philistos  a  été  exilé  à  Hadria;  de  plus,  dans  le 
texte  ci-dessus,  après  le  mol  BaKxu\îbr|ç  on  altend  un  adjectif 
d'origine;  enfin,  affirme  M.  Festa.  (7uvéYpai|;e  tôv  ttôXêiliov  est 
une  expression  verbale,  forme  un  tout,  dont  BaKxuXibriç  est 
le  sujet.  M.  Festa  en  conclut  que  nous  avons  ici  afïaire  à  un 
«  pasticcetto  ».  Nous  l'épondrons  :  1"  la  théorie  des  interpo- 
lations battue  en  brèche  même  pour  le^;  textes  latins  (^),  l'est 
plus  encore  pour  les  textes  grecs  (-);  "^J'  le  pasticheur  est  bien 
maladroit,  puisqu'aprés  avoir  écrit  cruvéYpaijJe  tôv  ■nà\ç.\xov, 
il  accorde  à  Bacchylide  l'épithéte  ô  TTonÎTriç;  3°  les  noms 
propres  au  nominatif  sont  sujets  non  de  cruvéYpaipe  tôv  iroXe- 
jLiov,  mais  de  cruvéYpaqje  seul.  XuYYP«(peiv  se  dit  très  bien  d'une 
composition  quelconque,  même  d'une  poésie  (cf  Théocr.  20,  4); 
4"  la  correction  de  Gobet  ô  'IouXuîtîiç  lève  toute  difficulté  (3); 
5"  'Ev  'HTreipuj  peut  être  dû  à  l'une  de  ces  innombrables 
méprises  auxquelles  Plutarque  nous  a  accoutumés  ("*).  Mais 
c'est  plus  vraisemblablement  une  erreur  du  copiste;  aussi,  au 
lien  de  èv  'H-rreîpuui,  proposei^ai-je  de  lii^e  èv  TTiKiivoîç  ou  èv 
TTiKiivibi.  La  confusion  a  pu  être  causée  par  un  manusciit  à 
abréviations. 

11  y  a  lieu  de  féliciter  les  éditeurs  d'avoir  eu  la  main  si 
heureuse  en  choisissant  M.  N.  Festa  pour  publier  le  premier 
volume  de  leur  collection.  C'est  de  bon  augure. 

Arth.  Humpers. 


(♦)  Glakk,  Rcvenl  developments  in  lextual  crilicisin  (Oxford,  l'.Hti:  Tlir 
Descent  of  Mannscripts  (ibid.,  1918),  etc.  > 

(-)  C'est  la  leçon  qu'ont  donnée  aux  crllùiuos  d'outro-Rhin  les  récentes 
découvertes  de  papyrus  littéraires.  Oi.  (îkk.nkki.i.,  dans  Journal  of  Hell. 
Stndies,  lî(i8,  p.  17  sq. 

(•*j  Cobet  est  l'un  de  ces  hellénistes  dont  les  conjectures  ont  le  moins  à 
craindre  des  découvertes  de  textes.  Voyez  en  effet  yeue  Jahrhiiilier,  1917, 
|).  .306. 

(^)  P;u'  exenijile  en  ce  (jui  coiu-erne  la  victoire  d'un  Aiitijjone  (textes  dans 
Bclocli,  III,  2,  p.  128).  Il  est  vrai  qu'ici  ej^alcment,  je  serais  d'avis  de  suppri- 
mer la  coniradiclion  entre  dr  ips.  (and  !.">  l'AvriTOvoç  ô  beûrepoç;  de  même 
Àpop/iHi.  Ani.  2  et  Qiiacs/.  Sipnp.  V.  2,  2)  et  la  vie  de  Pelop.  2  ('AvTiYovoç  ô 
Y^pujvj  en  lisant,  non  pas  Aûj0ujv  (ainsi  (|ue  le  propose  Kelocli.),  mais  beùxepoç, 
comme  dans  les  autres  textes.  La  correction  de  Helocli  remplace  une  contra- 
4liction  pai'  une  autre.  Nous  reviendrons  sur  celte  ([uestion. 


COMPTES    RENDUS  123 

Alfred  Humpers.  Etude  sur  ta  lan(jue  de  Jean  Lemalre  de 
Belges,  Liège,  Vaillant-Garmanne,  1921, 1  vol.  in-8°,  'Mi  p. 
(Bibliothèque  de  la  Faculté  de  Philosophie  et  Lettres  de 
l'Université  de  Liège,  fascicule  XXVI). 

Voici  un  de  ces  travaux  modestes,  mais  utiles,  qui  récla- 
ment de  leurs  auteurs  des  qualités  solides,  encore  que  sans 
vif  éclat  :  une  longue  patience,  une  attention  minutieuse,  un 
sens  critique  toujours  en  éveil,  et,  par-dessus  tout,  une  cer- 
taine dose  d'abnégation. 

Ces  vertus  diverses.  M.  Humpers  les  possède  en  grande 
part,  et  son  étude  sur  la  1  ingue  de  Jean  Lemaire  peut  pren- 
dre rang  parmi  les  bons  travaux  philologiques  dont  ont 
fourni  le  sujet  les  écrivains  de  la  Renaissance.  Sa  méthode 
est  rigoureuse  et  précise.  Il  a  pris  pour  base  de  ses  dépouil- 
lements les  dernières  éditions  parues  du  vivant  de  son  écri- 
vain. Encore  a-t-il  dû,  au  préalable,  déterminer  la  date, 
demeurée  obscure  et  controversée,  de  la  mort  de  Jean  Le- 
maire. Il  a  donc  commencé  par  examiner  ce  menu  problème 
d'histoire  littéraire  dans  une  petite  dissertation  fort  bien 
conduite,  à  laquelle  il  renvoie  le  lecteur,  mais  qu'il  aurait 
pu  reproduire  dans  le  présent  volume  sans  l'alourdir  outre 
mesure. 

Le  lexique  qu'il  nous  offre  cette  fois  comprend  cinq  divi- 
sions. Les  deux  premières  rangent  dans  l'ordre  alphabétique 
les  mots  ou  les  sens  qui  ont  disparu  de  l'usage  moderne,  ou 
qui,  tout  au  moins,  y  sont  devenus  rares.  Ces  deux  rubriques 
constituent  donc  un  glossaire  destiné  à  faciliter  la  lecture  de 
Lemaire.  Les  trois  suivantes  groupent  les  mots  récents,  les 
mots  nouveaux  et  les  sens  nouveaux  employés  par  Vindiciaire 
belgique.  On  aura  une  idée  de  leur  richesse  quand  j'aurai  dit 
que  M.  Humpers  enregistre  ainsi  prés  de  .'^00  mots  nouveaux 
ou  dont  l'emploi  n'avait  pas  encore  été  signalé  à  pareille 
date.  Il  a  naturellement  eu  soin  de  mettre  chacun  de  ses  arti- 
cles en  rapport  avec  les  principaux  répertoires  du  vocabulaire 
français  :  le  Dictionnaire  général,  Littré,  Godefroy,  Bonnard 
et  Salmon,  et,  pour  le  xvi'=  siècle,  Palsgrave  et  Delboulle.  Il 
n'a  pas  manqué  non  plus  de  recourir  à  certaines  études  philo- 
logiques sur  d'autres  écrivains  de  la  Renaissance,  et  il  a  tenu 
compte  des  résultats  obtenus  par  Allut,  dans  son  livre  sur 


124  COMPTES    RENDUS 

Symphoi'ien  Ghampier,  et  par  M.  Oulmont,  dans  sa  petite 
thèse  sur  Gringore. 

La  critique  d'un  'ouvrage de  ce  içeni*e,  qui  est  avant  tout  un 
recueil  de  matériaux,  ne  peut  guère  se  faire  qu'à  la  longue  et 
par  l'usage.  Je  ne  suis  pas  sûi'  que,  par  excès  de  prudence, 
M.  Hunipers  n'ait  pas  accepté  parfois  des  formes  qui  sont  de 
simples  ((  coquilles»  d'impression.  Je  suis  plus  certain  encore 
que  des  dépouillements  ultérieuis  réduiront,  dans  une  assez 
forte  mesure,  l'origine  lexicologique  de  Jean  Lemaire.  L'éru- 
dit  qui  aurait  le  courage  de  soumettre  à  pare  Ile  analyse 
philologique  l'œuvi-e  d'un  Molinet,  par  exemple,  y  découvri- 
rait. >elon  toute  vi'aisembiance,  nombre  de  mots  et  de  sens 
dont  il  est  ici  fait  honneur  à  l'auteur  des  Illustrations.  Mais 
je  crains  que  nous  n'attendions  longtemps  en'-ore  ce  lexico- 
graphe intrépide...  Aussi  bien,  c'est  le  sort  fatal  de  semblables 
recherches  de  niemeurer  toiijoui's  provisores,  et  quand  on 
signale,  pour  un  terme,  le  premier  emploi  connu,  il  faut 
presque  toujours  l'entendre  avec  cette  réserve  tacite  :  «jusqu'à 
plus  ample  informé  ».  Il  re>-le  que,  dans  bien  des  cas.  , 
M.  Humpers  a  réussi  à  reculer  sensiblement  dans  le  temps  la 
première  apparition  constatée  de  maint  terme  et  de  maint 
emploi.  Il  apporte  ainsi  une  estimable  conti-ibution  à  notre 
connaissance  historique  du  vocabulaire  français. 

Les  mêmes  mérites  se  retrouvent  dans  le  consciencieux 
dépouillement  des  faits  de  syntaxe  qui  complète  son  étude. 
Le  •  lassement  en  est  rigoureux,  et,  ici  en'  ore,  une  lai'ge  part 
se  trouve  faite  au  point  de  vue  compai-atif.  L'auteur  pi-end 
pour  guides  les  tableaux  densemble  qu'a  donnés  M.  Brunot 
diins  sa  mag  strale  Histoire  de  la  langue  française,  mais  il 
utilise  aussi  et  avec  raison  le  livre  de  M.  Huguet  sur  la  syn- 
taxe de  Rabelais,  la  thèse  de  Hamon  sur  Jean  Bouchet  et 
nombre  d'autres  études  de  détail. 

On  l'egret le  qu'un  index  généi'al  ne  termine  pas  le  volume  : 
il  en  aurait  singuliéi-enient  facilité  la  consultation.  M.  Hum- 
pers a  préféré  nous  donner  une  bibliographie  des  œ  'Vi-es  de 
Lemaire,  qui  rendra  de  réels  services,  môme  après  celles  de 
Stécheret  de  Mi.-Ang.  Becker.  Les  historiens  littéraires  trou- 
veront à  glaner  au  si  dans  les  textes  nombreux  qu'il  rassemble 
au  seuil  de  son  élude  i  our  établir  combien  a  été  grande  l'in- 
flu(Mice  de  son  auteur.  PeuL-èti'e  aurait-il  jju  chercher  davan- 


COMPTES    RENDUS  \'2î) 

tage  à  dégager  de  ces  témoignages  des  raisons  d'ensemble  et 
à  tracer  d'un  trait  plus  net  la  courbe  de  cette  influence.  Une 
défiance  pleine  de  modestie  l'a  presque  constamment  retenu 
de  s'élever  à  des  idées  générales.  Le  peu  qu'il  nous  dit  pour 
interpréter  les  textes  recueillis  est,  du  reste,  assez  judicieux 
pour  nous  faire  i^egretter  qu'il  n'ait  pas  osé  davantage. 

En  rppeniiice,  M.  Humpers  nous  livre  enfin  une  série  de 
noies  critiques  sur  l'édition  Stécher  des  œuvres  de  Lemaite. 
Ces  errata  sont  assez  riches  en  omissions,  additions,  erreurs 
de  lecture,  substitutions  et  confusions.  Il  paraît  bien  résulter 
de  cet  examen  attentif  que  la  seule  édition  moderne  de  Vindi- 
ciaire  belgique  a  été  procurée  avec  quelque  négligence.  Les 
bévues  y  sont  parfois  curieuses,  comme  celles  qui  trans- 
forment un  chapeau  en  un  houppeau,  une  potion  melliflue  en 
une  portion  mellifltte.  Et  la  moins  étrange  n'est  pas  celle  qui 
enrichit  d"un  personnage  nouveau  la  Couronne  margariti que, 
en  transformant  le  vers  : 

Et  là,  la  vierge  innocente  et  purette 
en  cet  autre  ; 

Et  Lala,  vierge  innocente  et  purette. 

Décidément,  il  ne  faudra  désormais  accorder  à  l'édition 
Stécher  qu'une  confiance  sagement  mesurée.  Et  c'est  encore 
un  enseignement  dont  nous  sommes  redevables  à  M.  Humpei's. 

Gustave  Charlier. 


Gustave  Cohen.  Ecrivains  français  un,  Hollande  dans  la  pre- 
mière moitié  du  XVII"  siècle,  Paris,  Champion,  1920, 
in-8°,  /56  p.  et  52  pi.  hors-texte.  5j  francs  ('). 

L'ouvrage  du  savant  professeur  à  l'Université  de  Sfras- 
bour;i  apporte  une  contribution  non  seulement  à  l'histoire  de 
l'expansion  française  à  l'étranger,  mais  encore  à  l'histoire 


(')  Cf.  larlielL'  de  M.  Gistave  Lanson  par»  sous  le  même  litre  dans  la 
Revue  des  Deux  Mondes,  l*^""  oclobi'e  19:21,  p.  555  583  et  celui  de  M.  Gistave 
Cohen  [)ublié  par  Le  Flainhean,  30  avril  1921,  p.  481-50-!.  —  Il  faut  coniger 
dans  l'arlicle  de  M.  Lansori  trois  taules  malencoulreuses  :  p.  555,  au  litre, 
1.  3;  lire  :  première,  au  lieu  de  :  deuxième  ;  p.  56i,  1.  21,  lire  :  /.57J,  au  lieu 
de  :  i67S;  p.  570,  I.  9,  lire  :  Lei/de,  au  lieu  de  :  Liéfje. 


126  COMPTES    RENDUS 

générale  de  la  littérature  et  de  l'humanisme  dans  la  première 
moitié  du  xvii'  siècle. 

La  Hollande  a  été  bien  avant  1685,  date  de  la  Révocation 
de  l'Edit  de  Nantes,  un  refuge  et  un  séjour  de  prédilection 
pour  les  protestants  français,  et  aussi,  dans  un  grand  nombre 
de  cas,  pour  les  catholiques  «  lorsque  ceux-ci  avaient  soif 
d'indépendance  et  de  liberté  ». 

Laissant  de  côté  la  pénétration  de  la  civilisation  française 
en  Hollande  i)ar  les  relations  commerciales  et  économiques, 
ne  s'inquiétant  pas  des  «  friseurs  »,  des  «  perruquiers  »  et  des 
«  danseurs  »  que  la  France  y  envoyait,  M.  Cohen  n'a  regardé 
que  l'élite  imellectuelle  :  ce  que  la  France  a  donné  aux 
Provinces-Unies  de  poètes,  d'érudits  et  de  penseurs. 

La  matière  est  distribuée  naturellement  en  trois  livres  : 

Un  poète-soldat  s'enrôle  dans  les  Régiments  français  ati 
serriœ  ries  Etnls  :  Jean  de  Schélandre,  gentilhomme  Ver- 
dunois  :  c'est  le  Livre  L 

Des  professeurs  et  des  étudiants  français  affluent  à  l'Uni- 
versité de  Leyde,  c'est  la  matière  du  Livre  IL 

Le  Livr"  HL  suite  et  synthèse  des  deux  autres,  est  consacré 
à  la  Philosophie  Indépendante,  a  Descartes  faisant  de  la 
Hollande  l'asile  de  sa  pensée  solitaire. 

Qui  mieux  que  M.  Cohen,  grand  blessé  de  la  dernière 
guerre,  pouvait  donner  une  âme  à  ces  noms  de  grands  et 
brillants  officiers  et  de  rudes  soldats  qu'il  fait  défiler  devant 
nous  en  un  tableau  vivant? 

Aux  côtés  du  poète-soldat,  l'auteur  de  Tyr  et  Sidon,  nous 
prenons  part  aux  combats  des  régiments  français  au  service 
des  Etats,  et  nous  pénétrons  leur  existence.  Ses  vers  nous 
tracent,  avec  une  minutieuse  exactitude,  les  champs  de 
bataille  et  les  marches  de  ces  vaillants  soldats  :  c'est  la 
Bataille  de  Nieuport  et  VOde  pindariqxe  sur  le  voyage  fait 
par  l'armée  des  Etats  de  Hollande,.,  l'an  1(>02.  et  sttr  la 
Prise  de  Grave. 

L'immatriculation  de  Jean-Louis  de  Balzac  et  de  Théophile 
de  Viau  en  qualité  d'étudiants  à  l'Université  de  Leyde.  le 
8  mai  1615,  ouvre  le  Livre  il. 

Le  peuple  de  mari-hands  qui  adora,  selon  Saumaise,  «  le 
démon  de  l'or  couronné  (ie  tabac  et  assis  sur  un  trône  de 
fromatre  »,  n'hésite  pas  enti'e  la  fondation  d'une  Université  et 


COMPTES    RENDUS  127 

une  exemption  d'impôts  :  il  choisit  1'  «  Académie  »  et  c'est 
ainsi  que  le  8  février  1575  est  installée  l'Université  de  Leyde. 

Les  deux  premiers  professeurs  nommés  sont  deux  théolo- 
giens français  :  Louis  Gappel,  Parisien,  et  Guillaume  Feu- 
geroy,  de  Rouen.  Trois  ans  plus  tard,  des  Belges  prendront 
place  au  sein  du  personnel  enseignant  :  Drusius,  d'Aude- 
naerde,  Vulcanius,  de  Bruges,  Bollius,  de  Gand  et,  grand 
entre  tous,  Juste-Lipse,  qui  enseignera  l'histoire  et  le  droit. 

Après  eux,  c'est  un  défilé  des  meilleures  gloires  françaises 
dans  l'église  des  Béguines  Voilées,  puis  dans  le  cloître  des 
Dames  Blanches,  où  l'Université  trouve  en  1581  son  établis- 
sement définitif. 

C'est  Lambert  Daneau,  de  Beaugency,  un  des  plus  grands 
théologiens  du  xvi'"  siècle,  et  après  lui,  Saravia,  Du  Jon,  du 
Moulin.  Trelcat  et  Basting. 

C'est  Hugues  Doneau,  de  Ghàlon-sur-Saône,  le  juriste 
émule  de  Gujas,  c'est  Charles  de  l'Escluse,  d'Arras,  le  fameux 
botaniste,  ce  sont  Baudius,  de  Lille,  et  Polyander,  de  Metz, 
l'un  juriste,  l'autre  théologien;  c'est  encore  André  Rivet, 
l'excellent  théologien  protestant;  ce  seront  plus  tard  Duban, 
d'Autun,  un  des  professeurs  de  Descartes  au  collège  de  La 
Flèche,  et  Botté,  qui  se  feront  les  propagateurs  de  la  doctrine 
cartésienne.  Ce  sont  aussi  des  professeurs  d'éloquence  ou  de 
langue  française,  tels  Jarrige,  La  Barre  et  Lamôle,  mais  ce 
furent  surtout  :  le  plus  grand  philologue  du  xvr  siècle, 
l'incomparable  Joseph-.Juste  Scaliger  et  son  digne  successeur 
du  xvi"  siècle,  l'illustre  Claude  Saumaise  (^). 

Les  négociations  qui  doivent  décider  ces  savants  français 
à  se  rendre  en  Hollande  sont  longues  et  difficiles  :  «.  les  traités 
«  de  Westphalie  et  de  Nimègue  ne  sont  pas  menés  a  bout  plus 
«  facilement  que  l'acquisition  de  Scaliger,  de  Rivet  ou  de 
(c  Saumaise  par  l'Université  de  Leyde  {^)  ». 

Les  voyages  incommodes  et  le  climat  font  hésiter  longue- 
ment un  Rivet,  un  Scaliger,  un  Saumaise.  Mais  l'attrait  du 
gros  traitement  que  l'on  fait  miroiter  à  leurs  yeux  —  ce 


(')  Il  ne  faut  pas  conlundro  le  piiiUilogue  Claude  Saumaise,  alias  Suhnasius, 
el  railleur  du  Dictionnaire  des  Prc'cieusen,  Baudeau  de  Soniaize.  connue  l'a 
fait  dernièremeul  encore  M.  Emile  Heuriul,  à  Toccasion  de  la  souleuant;e  de 
Ihèse  de  M.  Cohen  (Le  Temps,  16  février  1921). 

(-)  GrsT.  Lanson,  article  cité,  p.  500. 


128  COMPTES    RENDUS 

peuple  de  marchands  sait  payer  la  science;  Scaliger  reçoit 
2000  florins  et  Sauniaise  verra  son  traitement  porté  à 
3000  iîorins  en  1644  —  et  surtout  un  bien  plus  précieux,  la 
liberté,  ont  raison  de  leurs  hésitations.  On  ne  leur  impose 
aucune  ob'igation.  Ils  ne  feront  pas  de  cours  :  on  ne  leur 
deman  le  que  d'être  là,  de  se  livrer  à  leurs  travaux,  de  décorer 
l'Université  par  leur  présence  et  leurs  ouvrages! 

Scaliger  vécut  seize  ans  à  Leyde,  Sauniaise  y  passera  vingt 
années. 

Jalousies  de  collègues,  querelles  de  préséance,  rigueur  du 
climat  peu  favo  able  à  ses  rhumatismes  :  Saumaise  (^)  n'y 
fut  pas  très  heureux.  Grognon,  il  réclame  toujours,  mais 
toujours  les  Curateurs  lui  accordent  tout,  honneui-s  et  ai'gent  : 
ils  tiennent  trop  à  sa  pei'sonne,  purui'e  et  gloire  de  leur 
Universiié! 

Content  ou  mécontent,  Saumaise,  après  des  absences  pro- 
longées, revient  toujours  «en  ce  pais,  parmi  ces  ventres  de 
bière  »  où  il  devint  «  fort  flegmatique  et  catarreux  ». 

II  y  préférait  la  certitude  de  sa  pension  «  payée  à  poinct 
nomme,  tous  les  trois  mois  un  quartier»,  aux  belles  pro- 
messes de  France  :  «  Une  pension  en  France,  et  rien,  c'est 
tout  un  »,  écrit-il. 

Avec  la  mort  de  Saumaise,  se  termine  le  régne  de  la  philo- 
logie française  à  l'Université  de  Leyde,  mais  il  ne  tint  pas 
aux  (Curateurs  qu'il  ne  fût  continué  par  Tanneguy-Lefévre,  le 
père  de  M"*  Dacier. 

Les  maîtres  sont  suivis  à  Leyde  de  nombreux  étudiants.  De 
1576  à  1649,  c'est  une  succession  ininterrompue  de  jeunes 
gens  venus  de  toutes  les  parties  de  la  France,  selon  un  mou- 
vemeni  régulier  dont  les  sommets  sont  à  l'ai-rivée  de  Scaliger, 
de  Rivet  et  de  Saumaise. 

De  mœurs  peu  exemplaires,  ils  aiment  la  tavei-ne,  la 
«  Porte  du  Ciel  »,  ou  le  «  Lion  combattant»;  ils  ne  dédaignent 
pas  les  femmes,  pas  plus  que  les  dés  et  les  rixes  avec  le  guet 
où  les  duels  tiennent  une  grande  place  dans  les  annales 
universitaires. 

(')  «Saiiniaisi!  est  catlioliquc  -,  tlil  M.  Lmiisoii,  p.  .iOT.  Saumaise,  né  de  père 
(;aUioli(pie  el  de  mère  proleslanle,  avait  empniiilc  le  piolcslaiilismc  depuis 
loiifjleiiips  déjà  lorstiucî!^  10:2.3  il  épousa  Anne  Meivicr,  une  des  filles  du 
savant  'losias  Meiciei". 


COMPTES    RENDIS  129 

Le  Livre  III  synthétise  les  deux  aspects  de  linfluence 
française  aux  Pays-Bas. 

Suivre  Descartes  dans  les  rangs  des  troupes  de  Maurice  de 
Nassau  à  Bréda  en  1618.  puis  étudiant  aux  Universités  de 
Franeker  et  de  Leyde  et  ensuite  dans  sa  retraite  à  Santpoori, 
à  Harderwijk  ou  à  Endegeest,  telle  est  la  tâche  que  M.  Cohen 
s'est  imposée  dans  ce  livre  qui  constitue  la  partie  la  plus 
importante  de  sou  travail  (p.  355-689).  Il  a  voulu  être  le 
continuateur  des  biographes  du  grand  philosophe,  de  celui  du 
xvir  siècle,  André  Baillet  et  de  ceux  de  nos  jours.  Adam  et 
Tannery. 

Utilisant  les  sources  déjà  connues,  M.  Cohen  y  ajoute  de 
nouvelles  pièces  d'archives  dont  la  plus  intéressante  est  sans 
doute  le  contrat  d'édition  du  Discours  de  la  Méthode,  contrat 
qu'il  publie  pour  la  première  fois  (  p.  o03  et  5(J4).  et  dont  il 
nous  donne  un  superbe  fac-similé  (planches  XLI  et  XLII). 

C'est  surtout  la  part  du  sentiment,  beaucoup  plus  large 
chez  Descartes  qu'on  ne  le  croit  communément,  que  M.  Cohen 
a  fait  ressortir  :  bonté  et  complaisance  envers  ses  domestiques 
dont  il  fait  ses  élèves  et  ses  amis;  amour  paternel  pour  sa 
fille  Francine,  née  d'un  «  divertissement  »:  «  Amour  intel- 
lectuel »  pour  la  Princesse  Palatine  Elizabeth  :  sentiment 
religieux,  attitude  mystique  :  son  catholicisme  et  ses  relations 
avec  les  Rose-Croix. 

11  raconte  aussi  les  querelles  de  doctrine  :  la  lutte  de 
Descartes  et  plus  souvent  de  ses  disciples  contre  les  partisans 
de  l'aristotélisme,  de  son  élève  Régius  contre  son  détracteur 
Voetius,  pour  ne  pas  citer  les  autres. 

Pour  compléter  cette  analyse  biographique  de  Descartes, 
M.  (Johen  apporte  encore  un  document  précieux  :  il  nous  fait 
connaître  (pi.  LI,  fi-ontispicej  un  portrait  inconnu  du  philo- 
sophe, conservé  à  la  Galerie  Ny-Carlstadt  de  Copenhague,  une 
robuste  toile  de  Frans  Hais,  qui  semble  être  «  ou  la  réplique, 
ou  peut-être  l'original  »  du  tableau  du  Louvre. 

.\joutons  quelques  lignes  encore  pour  faire  connaître  un 
des  ouvrages  utilisés  par  M.  Cohen  et  dont  l'importance  est 
considérable  poui'  l'histoire  de  l'humanisme  au  xvir  siècle  : 
c'est  la  publication  magistrale  enirepi-ise  par  le  D'  P.  C  Mol- 
huijzen,  bibliothécaire  du  Palais  de  la  Paix  à  La  Haye,  des 
archive-;  de  l'Université  de  Leyde,  sous  le  titre  ;   Bronnen 


]'.M)  COMPTES    RENDUS 

tôt  de  gescliiednn.s  der  Letdsche  Universiteit  (Rijks  Geschied- 
kundige  Pubiikatiën,  La  Haj^e,  M.  Nijhoff.  in-4°,  T.  1,(1574- 
1610),  1913;  t.  11,(1610-1647).  1916;  t.  111,  (1647-1682),  1918). 

Dans  une  forme  particulièrement  vivante  et  agréable,  sous 
une  pi'ésentation  impeccable  qui  facilite,  par  l'emploi  de 
judicieux  titres  courants  et  par  l'existence  d'un  index  ono- 
mastique, le  travail  de  recherche,  M.  Cohen  nous  livre  «  un 
beau  travail  de  restauration  archéologique  ». 

Nous  espérons  que  M.  Cohen  ne  nous  fera  pas  attendre 
longtemps  le  deuxième  volume  de  son  étude  qui  nous  mènera 
jusqu'à  la  Révocation  de  l'Edit  de  Nantes. 

Jean  Baugniet. 


Ch.=P.  Julian  et  P.  Fontan.  Arithoiogie  du  Félibrige  provençal 
(1850  à  nos  jours).  Poésie.  Tome  1  :  «  Les  fondateurs  du 
félibrige  et  les  premiers  félibres  ».  Paris,  Delagrave,  1920, 
in-12,  460  p.  (Collection  PallasK 

Le  mouvement  littéraire  dont  Mistral  a  été  l'âme  pendant 
plus  d'un  demi-siéclo  continue  de  retenir  l'attention.  Les 
anthologies  néo-provençales  se  succèdent  rapidement.  Après 
celles  de  Praviel  et  de  Brousse  (L'Anthologie  du  Félibrige, 
Par-is.  1909),  de  Gaubert  et  Véran  (Anthologie  de  l'amour 
provençal.  Paris,  1909),  de  Bourilly.  Esclangon  et  Fontan 
(Flourilege  prouœnçau,  Toulon,  1909).  de  Portai  {Antoiogia 
pronenzale,  Milano,  1911),  etc.,  voici  un  recueil  qui  prend 
très  avantageusement  |)lace  à  côté  de  ses  devanciers. 

L'ouvrage  comprendra  trois  volumes,  le  tome  II  étant 
destiné  aux  poètes  de  la  deuxième  génération  et  aux  poètes 
actuels,  et  un  tome  111  étant  réservé  à  la  prose.  MM.  .Tuliau 
et  Fontan  limitent  leur  collection  aux  écrivains  qui  ont  utilisé 
la  langue  illustrée  par  les  chefs-d'œuvre  de  Mistral  ;  ils 
assurent  ainsi  à  ce  florilège  une  harmonieuse  unité  et  ils 
évitent  de  l'encombrer  d'une  Coule  de  compositions  ayant 
toutes  les  faiblesses  des  littératures  patoisantes.  Les  auteurs 
admis  à  figurer  dans  le  premier  volume  sont  peu  nombreux, 
à  peine  unevingtaine,  parmi  lesquels  une  large  place  se  trouve 
naturellement  faite  aux  chefs  de  file,  Mistral,  Roumanille  et 
Aubanel.  Le  choix  des  pièces  ou  fragments  destinés  à  donner 


I 
1 


COMPTES    RENDUS  131 

une  idée  de  l'œuvre  de  ces  poètes  prête  à  des  chicanes,  cela  va 
de  soi.  II  était  bien  difficile,  par  exemple,  de  détacher  de 
Mireille  un  extrait  qui  remplaçât  le  poème  entier,  et  peut- 
être  eût-il  mieux  valu  renvoyer  le  lectenr  aux  éditions  si 
répandues  de  cette  exquise  épopée  pastorale.  Parmi  les  poésies 
détaciiées  du  félibre  de  Maillane,  je  regrette  de  ne  point  ren- 
contrer le  Psaume  de  la  Pénitence,  auquel  les  événements 
récents  ont  rendu  un  intérêt  d'actu  dite  et  qui  montre  mieux 
que  toute  autre  pièce  la  puissance  du  souffle  lyrique  cliez 
Mistral.  J'aurais  aussi  voulu  voir  reproduire  l'hymne  A  la 
race  latine,  remarquable  par  la  splendeur  du  verbe,  et  qui 
trahit  une  des  vastes  aspirations  chères  aux  félibres  de  la 
première  heure.  Mais  il  serait  vain  de  nmlt'plier  les  observa- 
tions de  cette  espèce.  Constatons  plutôt  que,  dans  la  copieuse 
floraison  poétique  rassemblée  par  MM.  Julian  et  Fontan,  il 
n'y  a  pas  un  morceau  vraiment  médiocre  et  indigne  de  figurer 
dans  une  anthologie  où  les  auteurs  de  second  plan  voisinent 
avec  les  meilleurs  écrivains.  Les  traductions  françaises 
accompagnant  les  textes  provençaux  ont  été  revues  avec  soin 
et  méritent  toute  confiance.  Des  fac-similés  d'autographes  et  la 
musique  des  chansons  les  plus  connues  donnent  au  volume  un 
intérêt  documentaire  Mais  il  faut  surtout  signaler,  pour  leur 
exactitude,  la  richesse  de  leur  information  et  leur  valeur 
objective,  les  notices  bio-bibliographiques  consacrées  à  chaque 
poète.  On  y  trouvera  tous  les  éléments  d'une  histoire  anecdo- 
tique  et  critique  du  félibrige.  Rédigées  a  l'aide  des  travaux 
les  plus  récents,  de  ceux-là  surtout  qui  ont  enfin  soumis  la 
production  félibréenne  à  des  investigations  de  nature  scien- 
tifique (notamment  le  livre  d'Emile  Ripert  sur  La  Renais- 
sance provençale,  Paris,  1918),  ces  notices  se  recommandent 
par  une  juste  évaluation  du  mérite  littéraire  propre  à  chaque 
écrivain,  et  elles  déterminent  avec  précision  le  rôle  joué  par 
chacun  dans  le  relèvement  national  et  littéraire  du  Midi. 

A.  Uayot. 

Giulio    Bertoni,    Italia    dialettale,    Milan,  U.    Hoepli,    1916, 
petit  in-8°,  249  p.,  31.  50,  majoration  1  I. 

Sous    le    titre,    renouvelé    d'Ascoli,    (Vlialia    dialetlale, 
M.  G.  Rertoui,  dont  on  connaît  les  savants  travaux  dialecto- 


132  COMPTES    RENDUS 

logiques,  i-ésume  en  uu  manuel  Hoepli  ce  que  l'on  sait  du 
lexique,  de  la  phonétique  et  de  la  syntaxe  de  l'Italie  septen- 
ti-ionale,centi'aie  et  méridionale,  l^e  premier  groupe  comprend 
les  dialectes  italo-gallo-Jadin  et  vénitiens.  C'est  celui  que 
M.  Bertoni  a  le  plus  étudié,  et  sur  lequel  il  donne  les  ren- 
seignements les  plus  circonstanciés.  Il  sait  très  bien  que  la 
notion  de  dialecte,  inséparable  de  l'idée  de  loi  phonétique, 
est  une  constructiDu  de  notre  esprit.  D'ailleurs,  la  géographie 
linguistique,  telle  que  l'atlas  de  Gilliéron  l'a  rendue  possible, 
n'a-t-elle  pas  ébranlé  à  jamais  la  pseudo-science  naturelle 
des  changements  phonétiques?  Mais  il  y  a  des  groupes  régio- 
naux, des  modes  du  langage,  et  cela  étant  assez  typique  pour 
former  un  «  dialecte  m.  on  voit  parfois  ce  dialecte  essaimer  en 
dehors  de  sa  province.  L'Italie  a  des  îlots  linguistiques;  et 
M.  Bertoni  consacre  un  appendice  à  ce  qu'il  appelle  les 
colonies  dialectales,  telles  que  le  génois  à  Bonifacio  (Corse) 
et  ritalo-gallo-latin  en  Sicile. 

La  bibliographie  de  M.  Bertoni  est  copieuse  comme  son 
érudition.  Au  §  8  (élément  français)  il  aurait  pu  rappeler  la 
communication  de  Paul  Meyer  au  Congrès  de  Rome  (1903), 
quoiqu'elle  soit  de  nature  littéraire.  L'histoire  du  langage 
(et  la  linguistique  est-elle  autre  chose?)  est  inséparable  de 
l'histoire  littéraire  et  de  l'histoire  tout  court. 

Un  index  de  40  pages  achève  de  rendre  pratique  et  com- 
mode ce  traité  consacré  à  la  province  la  plus  harmonieuse  de 
la  terre  parlante.  . 

A.    COUNSON. 


Bertha  S.  Phillpotts  :  The  Elder  Edda  and  ancieni  Hcandina- 
vian  drama.  Cambridge  University  Press,  1920,  in-8". 
Prix  :  2  shillings. 

L'origine  du  théâtre  de  l'Antiquité  et  des  mystères  du 
Moyen  Age  est  rattachée,  par  'certains  théoriciens,  au  rituel 
du  culte  religieux,  soit  païen,  soit  chrétien.  Ce  sont  des 
conjectures  plus  ou  moins  plausibles.  Sur  ces  fondations 
hypothétiques.  Miss  Phillpotts  édifie  une  nouvelle  et  double 
hypothèse,  qui  renchérit  sur  les  deux  autres. 

C'est,  primo,  que  cei'tains  chants  de  l'Ancienne  Edda  con- 
tiennent des   débris  de  drames  en   vers;   secundo,  que  ces 


COMPTFS    MENDUS  133 

di'anies  étaient  liturgiques  et  se  rapportaient  à  un  culte  de  la 
fertilité  pratiqué  dans  les  formes  de  l'ancienne  mythologie 
Scandinave.  Les  idées  bien  connues  de  Sir  James  Frazer, 
l'auteur  du  «  Golden  Bough  »  (Rameau  d'Or)  sont  ainsi  éten- 
dues à  un  ensemble  de  documents  littéraires  obscurs  et  confus, 
où  l'apport  des  différents  siècles,  des  différentes  n  itions,  des 
diflff^rentes  religions  est  difficile,  sinon  impossible,  à  distin- 
guer. Préhistoire,  folklore,  mythes  primitifs,  âme  populaire, 
on  peut  chercher  de  tout  cela  dans  les  deux  Eddas,  dans 
l'ancienne  littérature  Scandinave,  dans  Saxo  Orammaticus  et 
dans  les  savants  écrits  de  leurs  commentateurs  et  traducteurs. 
Miss  Phillpotts  ne  néglige  aucun  moyen  d'information  :  elle 
cite  abondamment  les  suppositions  de  ses  prédécesseurs,  y 
ajoute,  par  petites  doses,  de  l'un  à  l'autre  de  ses  dix-huit 
chapitres,  ses  conjectures  personnelles,  procède  par  insinua- 
ti'»ns,  entasse  les  probabilités  sur  les  possibilités,  et  finit  par 
échalaudei'  une  théorie  d'aspect  imposant,  mais  d'équilibre 
instable,  trop  ténue  poui'  admettre  une  l'éfntation  directe. 

Nous  objecterons  cependant  :  1"  qu'il  n'existe  [)as  dans 
l'Edda  de  textes  proprement  dramatiques,  rien  que  des  dia- 
logue- ou  monologues  insérés  dans  des  narrations;  ^2°  que 
les  déguisements,  interprétés  par  Miss  Phillpotts  comme 
indices  de  costumes  revêtus  par  des  acteurs,  peuvent  faii'e 
l'objet  de  récits  aussi  bien  que  d'actions  scénique>  ;  ;^"  que 
les  'li-ames  populaires  (folkplays)  anglais  et  Scandinaves, 
appartenant  à  des  âges  modernes,  ayant  subi  des  influences 
chrétiennes,  sont  susceptibles  d'interprétations  variées. 

Une  intrigue  amoureuse,  comprenant  les  avances  d'un 
galant,  les  refus  d'une  jeune  fille,  puis  une  reconnaissance 
soudaine  suivie  d'accordailles,  se  conçoit  très  bien  sans  aucun 
rituel  magique  de  la  fertilité  !  Les  luttes  ardentes  de  deux 
rivaux,  aboutissant  à  la  défaite  et  à  la  mort  de  l'un  d'eux, 
viennent  naturellement  compléter  ce  tableau  des  conflits 
éternels  de  l'instinct.  Il  est  naturel  que  la  science  philologique 
s'efforce  d'épuiser  la  série  des  hypothèses  possibles,  et,  lot  ou 
tard,  les  dialogues  et  monologues  de  l'Edda  devaient  tenter  la 
curiosité  d'une  critique  ingénieuse  à  reconstituer  des  genres 
littéraires  peut-être  disparus.  Mais  ne  serait-il  pas  plus  simple 
de  se  souvenir  que  la  récitation  publique  des  por-mes  devait 
revêtir  un  caractère  plus  ou  moins  théâtral  et  qu'un  change- 


134  COMPTES    RENDUS 

ment  d'intonation  et  d'attitude  d'un  même  déclamateup  pou- 
vait suffire  à  charmer  un  auditoire  ?  Nous  en  savons  si  peu 
sur  la  société  norvégienne  avant  l'adoption  du  christianisme, 
l'interpi'étation  de  la  mythologie  germanique  est  sujette  à  tant 
de  contestations,  que  nous  hésitons  à  suivre  Miss  Phillpott^, 
tout  en  rendant  justice  aux  grandes  qualités  de  savoir  et  de 
méthode  de  son  exposé. 

P.   Hamelius. 


Dorothea  Zeglin.  Der  homo  ligius  und  die  franzôsische  Mi- 
msterialitât,  Leipzig,  1915.  in-8o.  (Leipziger  Hîstorische 
Ahhandlunpen,  XXXIX) 

L'étude  de  M"*"  Zeglin  a  été  suscitée  par  celle  de  M.  Pirenne 
sur  les  origines  de  la  vassalité  lige.  (Qu'est-ce  qu'un  homme 
lige?  Bullelins  de  l'Académie  Royale  de  Belgique,  classe  des 
lettres,  1909.)  M.  Pirenne  taisait  procéder  la  vassalité  lige  de 
la  ministérialité.  M"«  Zeglin  s'est  proposé  de  rechercher  si 
pareille  hypothèse  était  fondée. 

Les  recherches  de  l'auteur  sont  très  étendues  et  conduites 
avec  une  méthode  qu'il  faut  louer.  La  documentation  est 
abondante;  on  n'y  rencontre  pas  le  défaut  de  tant  d'érudits 
allemands  contemporains  qui  ignorent  systématiquement  ce 
qui  se  publie  hors  de  chez  eux. 

Le  travail  de  M"*"  Zeglin  apporte  à  la  science  des  données 
intéressantes  au  sujet  des  diverses  acceptions  dans  lesquelles 
est  pris  le  mot  ligius,  comme  en  ce  qui  regarde  les  rapports 
entre  le  vassal  lige  et  son  seigneur.  Tout  ce  que  l'auteur  dit 
notamment  des  divers  aspects  sous  lesquels  se  manifeste  la 
fidélité  particulière  impliquée  par  la  ligesse,  est  excellent. 

Nous  ne  pouvons  en  dire  autant  de  ce  qui  concerne  la 
ministérialité,  où  l'auteur  se  laisse  trop  dominer  par  l'esprit 
de  système.  Si  elle  admet  très  justement  l'existence  d'une 
ministérialité  en  Lotharingie,  elle  conteste  l'existence  d'une 
ministérialité  en  France  :  les  cheval iei's  serfs  et  les  fonction- 
naires non  libres  que  l'on  y  rencontre  au  xr  siècle  ne  s'y 
sont  pas  groupés  en  classe  sociale;  il  ne  peut  donc,  assure- 
t-elle,  être  question  de  ministérialité. 

C'est  là,  pensons-nous,  une  erreur  :  il  est  vrai  que  les  che- 
valiers serfs  ne  se  sont  pis  groupés  en  France  en  une  classe 


COMPTES    RENDUS  135 

sociale  fermée  et  héréditaire  comme  en  Allemagne.  Mais  du 
moment  que  l'on  reconnait  l'existence  en  France  de  ces  che- 
valiers serfs  —  qualifiés  ministériales  pai*  la  terminologie 
historique  allemande  —  il  est  légitime  de  parler  de  ministé- 
rialité  en  France. 

M"*"  Zeglin  n'admet  pas  la  thèse  de  M.  Pirenne  d'après 
laquelle  la  ligesse  procéderait  de  la  ministérialité.  Elle  estime 
même  que  le  lien  féodal  lii^e  était  précisément  destiné  en 
France  à  suppléera  l'absence  de  ministérialité;  comme  celle- 
ci,  la  ligesse  devait,  en  effet,  assurer  une  subordination  et 
une  fidélité  plus  entières  que  l'on  ne  pourrait  en  attendre  de 
la  pat't  d'un  vassal  ordinaire. 

L  auteur  n'a  pu,  cependant,  pensons-nous,  établir  le  mal- 
fondé de  l'hypothèse  de  M.  Pirenne.  Elle  a  même  été  obligée 
de  convenir  (p.  41  et  51)  qu'en  Hainaut,  le  iiget  —  redevance 
à  cause  de  mort,  consistant  dans  l'abandon  du  cheval  d'arme^ 
du  vassal  lige  au  seigneur  —  n'était  pas  la  même  chose  que 
le  relief  consistant  en  un  cheval  quelconque,  que  l'on  ren- 
contre en  divers  endroits.  La  possibilité  d'y  voir  une  sur- 
vivance du  meilleur  catel  demeure  donc  entière,  nous 
paraît-il. 

Signalon--  enfin  une  erreur  qui  se  reproduit  par  d-ux  fois  : 
Galbert  de  Bruges  est  appelé  Galhert  von  Frûssel  (p.  39  et  42). 

François  L.  Ganshof. 


Hintzen  (Johanna=Dorina).  De  kruistoclitplannen  oan  Philips 
den  Goede.  Academisch  I  roefschrift  teLeiden.  Rotterdam, 
W.  Brusse,  1918,  in-8",  196  p. 

L'histoire  des  efforts  tentés  par  le  duc  de  Bourgogne, 
Philippe-le-Bon.  pour  mener  à  bien  une  expédition  militaire 
contre  les  Turcs,  est,  comme  on  l'a  dit,  un  sujet  d'étude  pas- 
sionnant. Il  touche  à  la  fois  à  la  littérature  par  les  œuvr»  s 
livresques  qu'il  a  provoquées,  a  la  politique  internationale  de 
lépoque  en  mettant  aux  prises  le  Bourguignon  et  les  papes 
avec  l'empereur,  le  roi  de  Hongrie,  le  roi  de  France  et  les 
égoïstes  républiques  italiennes  de  Gènes  et  de  Yenise,  et  enfin 
à  l'administration  financière  delà  papauté  et  du  duc  de  Bour- 
gogne. M.  G.  Doutrepont  a  fait  connaître  jadis  avec  érudition 


136  COMPTES    HENDIS 

l'essentiel  du  point  de  vue  littéraire  ;  d'autre  part,  en  mettant 
bout  à  bout  les  chiffres  que  M.  L.  Pastor  a  consacrés  à  la 
Croisade  dans  sa  GeschicJite  der  Pâpste  on  formerait  un  récit 
suivi,  exact  et  documenté,  des  tentatives  des  souverains  pon- 
tifes et  de  Philippe-Ie-Bon.  Celui  qui  voudra  traiter  cette 
étude  devra  non  seulement  consulter  les  documents  imprimés 
(surtout  par  Jorga,  Cartel lieri  et  Pastoi").  mais  en  premier 
lien  les  Archives  Vaticanes,  les  bibliothèques  de  Paris,  de 
Vienne,  d'Arras  et  de  Munich,  ainsi  que  les  Archives  du 
Royaume,  à  Bruxelles,  et  les  Archives  départementales  du 
Mord,  à  Lille,  etc. 

Les  conditions  matérielles  dans  lesquelles  M'*^  Hintzen  a 
travaillé  (années  de  guerre)  l'ont  empêchée  de  s'adresser  aux 
sources  d'archives;  c'est  dire  assez  que  son  travail  est  très 
incomplet  et  ne  renouvelle  guère  la  question.  Sa  dissertation 
constitue  une  agréable  et  honnête  compilation,  très  bien  pré- 
sentée, au  surplus,  des  matériaux  réunis  avant  elle.  C'est  un 
excellent  guide,  mais  ce  n'est  que  cela. 

Du  dossier  réuni  jusqu'à  présent  résultent,  à  l'évidence,  les 
deux  points  suivants  :  d'abord,  que  le  projet  de  croisade  ne 
fut  pas  un  rêve  romantique  de  Philippe-le  Bon,  mais  que  le 
duc  de  Bourgogne  fit  l'impossible  pour  pousser  son  idée 
jusqu'à  sa  parfaite  réussite;  secondement,  que  les  tentatives 
de  Philippe  furent  contrecarrées  soit  par  l'hostilité  des  rois 
de  France  et  de  l'empereur  d'Allemagne,  s  it  par  la  jalousie 
des  principautés  italiennes.  Celle-ci  se  résume  assez  crûment 
dans  une  lettre  d'Aug.  de  Ruhes  et  d'Othon  de  Carrelto  au 
duc  de  Milan.  Francesco  Sforza  :  PercJie  ni  il  diœa  de  Bor- 
gogna  ne  altri  signori  ultraniontani  cercliaceno  d'aquista>' 
Ysole  ne  prnvintie  in  Oriente,   v.   ne    seguirebe  tuto   ii> 

CONTRARIO  DE  QDELLO  NOY  CERCHAMO.  (  Voyez  L.  PasTOR. 

Ungedrukte  Ahten  zur  GeschiclUe  der  Papiste,  1,  i9U4,  1S9; 
M"''  H...  n'a  pas  connu  ce  travail  capital.) 

Mais  la  Croisade  se  heurtait,  on  ne  peut  pourtant  pas  l'ou- 
blier, dans  les  pays  du  duc,  ainsi  que  dans  toute  la  chrétienté^ 
à  des  difficultés  financières  que  l'auteur  n'a  pas  entrevues. 
Pour  faire  l'expédition  maritime  que  le  duc  rêvait  d'accom- 
plir, il  fallait  de  l'ai'gent  (;t  même  beaucoup  d'argent;  les 
Etats  du  duc.  et  spécialement  les  Pays-Bas,  furent  donc  natu- 
rellement misa  contribution;  or,  le  moment  était  mal  choisi. 


\ 


COMPTES    HENDTS  13T 

en  1453,  après  la  bataille  de  Gavi'e,  pour  être  très  exigeant  en 
fait  de  taxes,  de  dons  gratuits,  de  dîmes  en  vue  d'une  entre- 
prise que  la  population  jugeait  sans  doute  chimérique.  De  fait, 
le  clergé  des  Flandres  a  boudé  aux  appels  financiers  du  duc 
et  paralysé  singulièrement  les  eflorts  de  celui-ci  en  vue 
d'aboutir;  Philippe-le-Bon  pouvait-il  attendi'e  meilleuraccneil 
de  la  part  des  Liégeois  qu'il  devait  priver  de  leurs  libertos? 
Tout  bien  considéré,  le  duc  ne  disposait  pas  des  sommes 
énormes  sufAsantes  pour  réussir  brillamment  dans  son  expé- 
dition. Là  encore  la  correspondance  adressée  au  duc  de  Milan 
est  pleine  de  saveur;  le  29  avril  14()4,  Albricus  Ma lletta  écrit 
à  Fr.  Sfor/a  :  Che  alcani  hene  informati  dcJ  prefato  duca 
di  Belr<jO(ina  dicono  che  iuy  œran/ente  non  ha  dinari  et 
(juelli  délia  Picardia  riceiruti  da  nueMo  re  de  Franza  souno 
za  consumati  et  in  maie  vivere  et  in  pagare  debïtl  vechii,  et 
ogui  di  consuma  piu  tra  Imj  (le  duc  de  Bourgogne)  et  quelli 
ch'ei  governo.  (Cf.  L.  Pastor,  loc.  cit.,  1,  p.  288.) 

Au  bref,  après  la  dissertation  non  sans  mérite  de  M"''  flint- 
zen,  il  reste  un  gros  et  un  beau  livre  à  écrire  sur  ce  sujet 
captivant.  Espérons  qu'il  voie  le  jour  en  Belgique;  car  c'est 
chez  nous  que  la  Croisade  de  Philippe  fut  activement  con- 
seillée, préparée  et  payée  de  nos  deniers. 

H.  NÉLis. 


L.  Lévy=Schneid£r.  L'application  du  Concordat  par  un  prélat 
d'Ancien  Régime,  M^'  Champion  de  Cicé  (1802-1810). 
Paris,  Rieder  et  C'«,  1921,  in-8°,  xvi-604  p.  {Bibliothèque 
d'Histoire  Moder  ne) . 

Le  gros  volume  consacré  par  M.  L.  à  l'activité  de  Cham- 
pion de  Cicé  n'est  pas  seulement  une  biographie,  grossie 
d'une  étude  d'histoire  religieuse,  à  un  moment  donné  et  sur 
un  terrain  restreint,  c'est  encore  et  surtout  un  livre  qui 
ouvre  des  aperçus  d'ensemble  sur  toute  une  époque,  parti- 
culièrement intéressante,  de  l'histoire  de  France,  et  l'éclairé 
au  point  de  vue  politique  et  administratif,  aussi  bien  qu'au 
point  de  vue  moral  et  religieux.  Fortement  ilocumenté,  grâce 
à  la  connaissance  de  toutes  les  sources  imprimées  et  à  la 
découverte  de  nombreuses  sources  manuscrites,  à  ta  Biblio- 
thèque Méjanes  d'Aix  en  Provence,  dans  les  dépôts  de  Mar- 


138  COMPTES     HKNmS 

seilleel  de  Toulon, aux  Archives  Nationales  à  Paris,  1  ouvrage 
est  en  même  temps  composé  avec  une  claire  logique  et  écrit 
d'une  plume  alerte  :  à  côLé  des  historiens  de  profession  qui  y 
trouveront  maint  ensei^iinement,  il  s'imposera  au  public 
lettré,  pour  |)eu  que  celui-ci  veuille  bien  ne  pas  s'effaroucher 
de  son  ampleur. 

Le   personnage   autour  duquel   gravitent   les   événements 
relatés  est    un   grand   seigneur   ecclésiastique    de    l'Ancien 
Régime,  dont  la  fine  inteligence  et  l'habileté  manœuvriére 
méritaient  d'être  mises  en  lumière.  Jérôme-Marie  Champion 
de  Gicé  était  né  à  Rennes  en  1735,  dans  une  famille  de  vieille 
noblesse,  sans  fortune.  Après  des  études  à  Paris,  au  collège 
Du    Plessis,   où    il  connut   Morellet  et   Boisgelin,    il  suivit 
lexemplc  de  son  frère  aîné  qui  allait  être  successivement 
évêque  de  Troyes  et  d'Auxerre,  reçut  une  abbaye  en  1760  et 
devint  agent  içénéral  du  clergé  de  France  en  1765;  ces  fonc- 
tions, qui  firent  éclater  et  développèrent  ses  talents  d'admi- 
nistr.iteur.   le  désignaient  pour  les  hautes  dignités  :  évêque 
de  Rodez  (1770),  puis  archevêque  de  Bordeaux  (1781),  le  nou- 
veau prélat  sut  louvoyer  adroitement  entre  les  partis  et  fut 
élu  en  178!)  piemiei-  député  du  clergé  de  la  sénéchaussée  de 
Bordeaux  aux  Etats-Généraux.  Sur  ce  théâtre,  il  ne  larda  pas 
à  passer  pour  un  ami  des  réformes,  tout  en  ménageant  les 
ultra- royalistes  parmi  lesquels  figurait  son  frère,  et  pour  un 
des  auteurs  de  la  réunion  du  clergé  au  Tiers-Etat,  quoiqu'il 
s  y  fiit  secrètement  opposé.  Son  rapport  sur  les  travaux  du 
Comité  de  constitution,  où  il  repu. liait  «  tout  intérêt  d'Ordre 
ou  de  corps  »,  le  fit  entrer  au  ministère  :  depuis  le  4  août  1789 
jusqu'au  milieu  de  novembre  1790,  il  occupa  le  poste  de  garde 
des  sceaux,  poste,  scabreux  pour  un  ecclésiastique  au  milieu 
des  débats  sur  les  biens  et  la  constitution  civile  du  clergé. 
L'archevêque  s'y  compromit,  du  reste,  et  ne  put  jamais,  dans 
la  suite,  en  dépit  de  ses  protestations,  se  laver  du  reproche 
d'avoir  éludé  un  bref  du   pape  Pie  VI  du  10  juillet  179U, 
déclarant  schismatiques  la  constitution  civile  du  clei'gé  et  ses 
soutiens;   à  peine  si  on  lui  tint  compte  de  la  fermeté  avec 
laquelle  il  refusa  ensuite  de  prêter  serment  à  la  constitution 
et  préféra   s'expatrier,   à    partir  de  mai    1792,  en  Belgique 
d'abord,  puis  en  Hollande,  en  Allemagne  et  enfin  en  Angle- 
terre (  1 795) . 


COMPTES    RENDIS  139 

L'exil  lui  ménagea  beaucoup  de  déboires.  Mal  vu  par  le 
€lergé  émigré  et  par  le  comte  d'Artois  qui  le  considéraient 
comme  un  révolutionnaire,  il  trouva  le  futur  Louis  XVIII  et 
sa  cour  de  Milan  assez  peu  accessibles  à  ses  sages  conseils  en 
vue  d'une  restauration  éventuelle  (179^))  :  sou  plaidoyer  en 
faveur  d'une  déclaration  relativement  libérale,  maintenant  en 
partie  l'organisation  administrative  de  la  Révolution,  ne  fut 
pas  apprécié  à  sa  valeur;  ses  invites  à  agir  «  non  en  se  repor- 
tant à  l'époque  de  1789,  mais  en  s'élevant  à  la  hauteur  des 
circonstances  »,  ne  furent  approuvées  que  par  Saint-Priest, 
tandis  que  d'Avaray  les  dénonçait  comme  de  véritables 
hérésies. 

A  cette  époque,  le  régime  consulaire  venait  de  s'établir  en 
France  et  tentait  de  reconstruire  l'ancienne  société  en  se  récon- 
ciliant avec  le  Saint-Siège  et  en  facilitant  la  rentrée  de  tous 
les  éléments  modérés.  Gicé  n'était  pas  de  ceux  qui  restent,  par 
principe,  invinciblement  attachés  à  une  cause  perdue.  Il  com- 
mença par  défendre,  môme  devant  le  Prétendant  et  son  frère, 
la  conduite  des  prêtres  qui  acceptaient  de  jurer  fidélité  à  la 
constitution  de  l'an  VIII  (1800):  il  écrivit,  quelques  mois 
après,  divers  mémoires  «  sur  le  rétablissement  du  culte  catho- 
lique en  France  »  et  en  faveur  du  Concordat  (1801);  il  con- 
sentit enfin  à  renoncer  à  son  siège  épiscopal,  comme  le 
demandait  le  pape  Pie  VII  et  négocia  son  retour  au  pays. 
Cambacérés  et  Lebi'un,  les  deux  consuls  en  sous-ordre,  le 
jugaient  alors  comme  un  politique,  d'une  famille  hostile  au 
gouvernement,  mais  ayant  «  trop  d'esprit  »  pour  imiter  ses 
proches  (p.  128).  Lorsqu'il  débarqua  à  Paris,  en  février  1802, 
il  éprouva  quelques  ennuis  tout  d'abord,  avant  d'être  rayé  de 
la  liste  des  émigrés,  mais  le  9  avril  (19  germinal  an  X)  il  était 
nommé  archevêque  d"Aix. 

Le  diocèse  d'Aix  englobait,  depuis  le  Concordat,  celui 
d'Arles,  avec  les  évêchés  sulïi-agants  d'Ajaccio,  Avignon, 
Dijon  et  Nice.  L'étude  de  la  politique  ecclésiastique  de  Cham- 
pion de  Cicé  dans  ce  domaine,  de  1802  à  1810,  remplit  la 
plus  grande  pai'tie  du  volume,  .le  ne  puis  l'aborder  ici  en 
détail;  il  y  faudrait  plus  de  place  qu'il  n'en  est  légitimemenl 
accordé  à  un  compte  rendu  en  l'an  de  grâce  1921.  Je  me 
boine  donc  à  signaler  la  tactique  prudente  et  couronnée  de 
succès,  grâce  à   laquelle   le  prélat,   appuyé  plus   ou    moins 


140  COMPTES    RENDIS 

ouvertement  par  Portalis,  sut  peu  à  peu  protitei-  du  Concordat, 
qui  reconstituait  l'alliance  du  trône  et  de  l'autel,  pour  rendre 
au  culte  catholique  son  ancienne  prépondérance,  rétablir, 
malgré  Fouclié,  l'influence  souveraine  du  clergé  sur  l'instruc- 
tion publique  et  intervenir  presque  en  maître  dans  l'admi- 
nistration départementale.  Le  préfet  des  Bouches-du-Rhône. 
Delacroix,  voulut  s'opposer  à  ces  emj)iétenjents;  il  fut  brisé 
(avril  1 808)  et  rempla  é  par  l'ex-conventionnel  Tliibaudeau, 
qui  se  laissa  complètement  dominer,  de  sorte  que,  jusqu'en  1807, 
l'ai'chevèque  put  travailler,  presque  sans  obstacle  à  la  restau- 
ration du  pouvoir  ecclésiastique.  Le  conflit  entre  Napoléon 
et  le  Saint-Siège  et  l'enlèvement  de  Pie  Vil,  qui  traversa  le 
diocèse  en  prisonnier,  avantd'être  interné  à  Savone(aoiit1809i, 
mirent  Cicé  en  fâcheuse  posture  :  entré!' En) pereui*  et  le  Pape, 
il  semble  bien  avoir  cherché  à  éviter  les  foudres  du  premier 
plutôt  qu'à  prendre  la  défense  du  second;  la  mort  le  tira  d'em- 
barras. Quand  il  expira,  le  22  août  1810,  son  œuvre  était 
accomplie;  l'édifice  bàli  par  lui  et  ses  collègues  de  l'épiscopat 
concordataire,  à  l'ombre  de  l'Etat  napoléonien,  était  assez 
solide  pour  servir  bientôt  d'appui  au  gouvernement  de  la 
Restauration,  qui.  en  revanche,  allait  conférer  au  clergé  un 
énorme  accroissement  de  puissance  (p.  580i. 

La  doctrine  dont  Champion  de  Cicé  s'est  inspii-é  doit-elle, 
C'imme  il  est  dit  à  diverses  reprises,  être  qualifiée  de  «  galli- 
canisme épiscopal  »,  parce  qu'elle  serait  une  doctrine  intei'- 
médiaire  entre  le  gallicanisme  de  la  déclaration  de  1682  et 
l'ultramontanisme,  [)arce  qu'elle  comporterait  avant  tout  la 
prépotence  de  l'évêque  dans  son  diocèse?  La  chose  et  le  mot 
peuvent  se  discuter.  Ce  qui  est  certain,  c'est  d'une  part  que 
ce  gallicanisme  était  singulièrement  approprié  aux  circons- 
tances, et  d'autre  part  que  le  livre  de  M.  L.  apporte  une  très 
importante  contribution  à  l'histoire  de  l'opportunisme  ecclé- 
siastique en  France,  au  temps  de  la  Uévolution  et  de  l'Empire. 

AlIîERT  WAODINtTTON. 


I.IVRES  NOUVEAUX 


LINGUISTIQUE   —  PHILOLOGIE 

Beaufort  (Dominique)  et  Tilkin  (Louis).  Petit  glossaire  de 
termes  inédits.  Liège,  Tilkin  [1921],  in -8",  42  p. 

Boer  (R.  C).  Oudnoorsch  handboek  i  Oud-Germaansche  liand- 
boeken,  111.  Haarleni,  Tjeenk  Williuk,  1921,  in-H",  xvi-269  p. 
26  fr   25  c. 

Bosworth  (J.)  An  Auglo-Saxon  dictiouary.  Edited  aud  enlarged 
by  T    N    Tôlier    Oxford  University  Press,  1921,  in-8«. 

Cahert  (Maurice).  Études  sur  le  vocabulaire  religieux  du  Vieux- 
Scandinave.  La  libation.  Paris,  Champion,  1921,  in-8°,  333  p., 
30  francs  (Coll.  linguist.  publiée  par  la  Soc.  de  linguist.  de 
Paris). 

Cahen  (Maurice).  Le  mot  a  Dieu  n  eu  vieux  Scandinave.  Thèse 
complémentaire  pour  le  doctorat,  présentée  à  la  Faculté  des 
Lettres  de  Paris.  Paris,  E.  Champion,  1921,  iii-8°.  93  p. 

Cauer  (P.)  (irundfragen  der  HomerKritik,  dritt  Aufl.  Leipzig, 
gr.  80,  iv40()p    66  M. 

Chaplin  (A).  The  romance  of  ianguage.  London,  Sidgwiek  and 
Jackson.  1921,  in-8°,  10  pi  .  2  cartes.  7  s    6  d. 

De  Flou  (K  ).  Woordenboek  der  toponymie  van  Westelijk  Vlaan- 
dereu,  Vlaamsch  Artesië,  het  Land  van  den  Hoeck,  de  graaf- 
schai)pen  (iuines  eu  Bologne  en  een  gedeelte  van  hetgraafschap 
Ponthieu.  11  Beanf-Bijz.  Gent,  Siffer,  1921,  in-S»,  576  p.  à  2  col. 
25  francs. 

de  Groot  (A.-W.)  Verouderde  denkwijzen  en  nieuwe  problemen 
in  de  Latijnsche  taalwetenschai).  Croningen,  Walters,  1921, 
23  p.  0  fl.  75. 

Fourvières  Xavier  de).  Grammaire  et  guide  de  la  conversation 
provençale.  Avignon.  Aubanel,  1921,  in-32,  249  p.  3  francs. 


142  LIVHES    NOUVEAUX 

Gabarrou  (F  ).  Le  latin  d'Arnobe.   Paris,  Champion,  1921,  in-8"^ 

242  p.  12  francs. 
Gilliéron  (J.).  Étude  de  géographie  linguistique.  Pathologie  et 

thérapeutique  verbales.  Paris,  Champion,  11)21,  in-8%  111  p. 

Grammatik  (Indogermanische).  Teil  II.  Der  Indogermanische 

\okalismus.   von    Hermann   Hirt.    Heidelberg,   Winter,    1921, 

in-8». 
Hemme  ^Adolf  j.  Das  latinische  Spraclnnaterial  im  Wortschatz 

der  Deutschen,  Franzôsischen  undEnglischen  Sprache.  Leipzig, 

Ha^ssel  (1921),  in-8".  36  M. 
Jespersen  Otto).  Language  :  its  nature,  development  and  origiu. 

London,  Alleu  and  Unwin.  1921,  in  8».  18  s. 

Juret  (A.-C).  Manuel  de  phonétique  latine.  Paris,  Hachette, 
1921.  in-8«,  390  p.  7  fr.  50  c. 

Lindsay  ("W.  M.j.  The  Corpus,  Epiual,  Erfurt  and  Leyden 
Glossaries.  Oxford  University  Press,  1921,  in  8°,  122  p.  15  s. 

Lindsay  ("W.  M  .  The  Corpus  Glossary.  Cambridge  University 
Press,  1921,  in-8°,  292  p.  40  s. 

Meillet  (A.).  Linguistique  historique  et  linguistique  générale. 
Paris,  Champion,  1921,  in-S»,  viii-335  p   40  francs. 

Nicholson  (G-G.j.  liecherches  philologiques  romanes.  Paris. 
(^Jianipion,  1921.  gr.  in-8°,  xii-255  p.  30  francs. 

Pernot  (Hubert).  D'Homère  à  nos  jours.  Histoire,  écriture,  pro- 
nonciation du  grec,  avec  illustrations  et  cartes.  Paris,  Garnier,^ 
1921,  in-16.  8  francs. 

Santesson  (C.-G.;.  La  particule  cum  comme  préposition  dans  le» 
langues  romanes.  Paris,  Champion,  1921,  in-8",  343  p.  15  francs. 

Strohmeyer  (Fritz  i.  Franziisische  Grammatik  auf  sprachhisto- 
risch-psychologischer  Grundlage.  Leipzig,  Teubner,  1921,  in  8°, 

u;m. 
Teiplinck  (Is  ).    Zuid-Oostvlaandersch  idioticou.  Tweede  deel. 
Tweede  aflevering   :   Lo.s-Quotiënt.   (îent,    Siffer,    1921,  in-8". 
]).  221  423  (K.  Y\.  Ac.  . 

Thomas  (P.  G.).  An  introduction  to  the  history  of  the  Euglish 
lauguage.  London.  Sidwick  and  Jackson,  1921,  in-8°,  5  s. 

Wardale  ;E.  E.  .  .\n  OUI   Knglish  gi-ammar.  London,  Arcthnen, 

1921,  in-S»,  7  s.  6d. 
"Wartburg   ("W.    voni.    Franzôsisches   etymologisches   Worter- 

l.ucli.    lioun,    Schrtuder,    1921-192"2,  iu-8°,    h  20  liv.   =  2   vol. 

=  ±  3000  p.  30  M. 


LIVRKS    NOr VEAUX  143 

"Wyld  (Henry  Cecir.  A  bistory  of  modei-n  collo(|uial   Euglish. 
London,  Fisher  ITnwiu,  1921,  iii-8'.  21  s. 


LITTÉRATURE 

Alajmo  M.).  Le  correzioui  agli  8posi  Promessi  e  il  realismo  del 
Maiizoni.  Palermo,  Sandron,  1921,  in-8",  120  p.  6  lire. 

Anglade  (J).  Histoire  sommaire  de  la  littérature  méridionale  au 
moyen  âge  (des  origines  à  la  fin  du  XV  siècle).  Paris,  de 
Boccard,  1921,  in-8°.  274  p.  12  pages. 

Archibald  (W.  A.  J.).  Romantic  movemeut  in  English  literature. 
London.  Longmans,  1921,  in-S",  472  p.  7  s.  6  d. 

Birkhead  (Edith).  The  taie  of  terror.  A  study  of  the  Gothic 
romance.  London,  Constable,  1921,  in-S".  15  s. 

Bradi  (L  de).  Jeanne  d'Arc  dans  la  littérature  anglaise.  Paris, 
Boivin,  1921,  in  16,  112  p.  3  fr.  50  c. 

Caracappa  (Teresa  .  Medea  nella  letteratura  latina.  Palermo, 
1921,  in  8»,  116  p. 

Chambers  (R.  W.).  Beowulf.  An  introduction  to  tlie  study  of  the 
poem  wilh  a  discussion  of  the  stories  of  Offa  and  Finn.  Cam- 
bridge Uni versity  Press,  1921,  in-8',  8  pi.  30  s. 

Correa  d'Oliveira  (E.).  Dante  e  Beethoven.  Milano,  Caddeo, 
1921,  in-8»,  2  lire. 

Dante.  La  vita.  Le  opère.  Le  grandi  città  dantesche.  Dante  e 
l'Europa.  Milano,  Trêves,  1921,  in-8»,  390  p.  20  lire. 

Dante,  1321-1921.  Mélanges  de  critique  et  d'érudition  fi-an- 
(^aises  publiés  à  l'occasion  du  sixième  centenaire  de  la  nioi-t 
de  Dante.  Paris,  Champion,  1921,  in  4°.  66  francs. 

Dante  Le  Opère,  testo  critico  délia  Società  Dantesca  Italiana. 
Firenze,  Bemporad,  1921,  in-lH,  1100  j).  36  fr. 

Des  Granges  (Gh.  M).  An  illustrated  histor^y  of  French  litera- 
ture. Translated  from  the  French  by  Louise  Morgan  Sill. 
Paris,  Hatier,  1921.  in-8»,  956  p. 

Gabarrou  (F.)  Aimobe;  son  œuvre.  Paris,  Champion,  1921,  in-H", 
79  J).  5  francs. 

Gatto  (Gaetano).  UAmphitruo  di  Plauto  e  le  imitazioni  di 
Ludovico  Dolce  e  Molière.  Catania,  Mouachini,  1921,  in  8», 
98  p.  5  lire. 


144  T.IVIîES    NOUVEAUX 

Gennrich  (Fr  i.  Rondeaux,  virelais  iind  Balladen...  I  :  Texte 
Ges.  f.  l'omaii.  Lit  ,  143)  Dresden,  Ges.  f.  roman.  Lit.,  1921, 
in  8». 

Giglio  (A.)  Stendhal  e  la  letteratnra  italiana.  Milano,  Hoei)li, 
1921,in-16,  KiGp.  9  lire. 

Guli  f Amelia  .  La  fiiiui-a  di  Caino  nella  lettei'alura  niodei-na. 
Paleiniu,  Vena,  1921,  in-H",  134  ]>. 

Haluva  (T.).  Dante  Alighiei-i  uud  sein  lil.  Lied,  (xedenkblatter 
zur  600.  Wiederkelir  von  Dantes  Todestag.  Karlsruhe,  Eadenia, 
1921,  in-H",  vin-G3  p. 

Herford  (G.  H.).  Shakespeare's  treatnient  of  love  and  marria<i:e. 
London.  Fisher  Unwin,  1921,  in-8',  10  .s.  G  d. 

Holbrook  (R.  T.).  Etude  sur  Pathelin.  Essai  de  bibliographie  et 
d'interprétation.  Oxford  University  Press,  1921,  in-8°.  5  s.  (">  d. 

Jansen  (E.  J  -B.  Dante  Alighieri.  zijn  leven  en  zijn  werken. 
Nijniegen.  Malml.erg,  1921,  in-8»,  186  p.  7  fr.  20  c. 

Jourdain  (EleanorF.).  Dramatic  tlieory  and  practiee  in  France, 
1690-1808.  London,  Longmans,  192L  in-8r  12  s.  6  d 

Lanson  (Gustave).  Manuel  bibliographique  de  la  littérature  fran- 
(;aise  moderne,  xvi^,  xvii*^^,  .xvni''  et  xix^  siècles.  Nouvelle  édi- 
tion, revue  et  augmentée,  avec  un  chapitre  complémentaire  sur 
le  movivement  littéraire  au  début  du  xx-"  siècle  et  sur  la  littéra- 
ture de  la  guerre.  Paris,  Hachette,  1921,  in-S"   80  francs. 

Lyonnet  Henrii.  Les  «  Première.^  »  de  Molière.  Paris,  Delà- 
grave,   1921,  in-18.  7  francs. 

Lyriek  (Nederlandschei  van  af  de  dertiende  eeuw  tôt  1880.  \'er- 
zameld  dooi-  Th.  E.  C.  Keuchenius,  toegelicht  door  D.  C.  Tin- 
bergen.  I.  De  Middeleeuwen.  Met  aanwijzing  vooi-  de  uitspraak. 
verantwooiding  van  de  teksten,  alfabetische  lijst  van  begin- 
regels  en  dertien  afbeeldingen.  Leiden,  Sijthoff.  1921.  in-8". 
4  fl.  90. 

Neilson  (^V.  Ai.  A  history  of  English  literature.  London, 
Macmillan,  1921,  in -8°,  ill.  10  s. 

Neumann  (Friedrich).  (Jeschichtedes  neuhochdeutschen  Reimes 
von  Opitz  bis  Wieland.  Studien  zur  Lautgeschichte  der  neuhoch- 
deutschen Gemeinsprache.  Berlin,  Weidmann,  1920,  gr  in-8'', 
xvi-394  p.  18  M. 

Nolhac  (Pierre  dej.  Ronsard  et  l'humanisme.  Paris,  Champion, 
1921,  in-80.  :}66  p  ,  2  pi.  3;")  francs. 


LIVRES    iNOUVEATJX  145 

Omond  (T.  S.)-  English  metrists,  being  a  sketch  of  English  pro- 
sodical  criticism  frora  Elisabethan  times  to  the  présent  day. 
Oxford,  Clarendon  Press,  1921,  in-S".  10  s.  6  d. 

Ord  (Hubert).  Chaucer  and  the  rival  poet  in  Shakespeare's 
sonnets  :  a  new  theory.  London,  Dent,  1921,  in-8°,  64  p.  2  s.  6  d. 

Pearl  :  Au  English  poem  of  the  xivth  century.  edited  with  modem 
renderings,  by  sir  Israël  Gollancz  (Médiéval  Library).  London, 
Chatto.  1921,  in-8«,  437  p.  7  s.  6  d. 

Phillips  (W.  J.).  Carols  :  their  origin,  music,  and  connection 
with  mystery  plays.  Londou,  Routledge,  1921,  in-S",  134  j).  6  d. 

Pità  (Mario).  11  pessimisme  nella  letteratura  latina  :  Saggio 
critico  filologico.  Catania,  1921,  in-16,  99  p. 

Quartana  (Maria).  La  Donna  romana  nella  letteratura  latina  del 
I  secolo.  Palernio,  Sandi'on,  1921,  in  8»,  135  p.  4  lire. 

Salverda  de  Grave  (J.  J.).  Dante.  Amsterdam,  Meulenhoff,  1921, 

in-8°,  132  p.,  pi.  4fr.  25  c. 
Siclari  (Natale).  La  rima  in  Virgilio  (ô|uoioTé\euTov).  Palmi,  Geno- 

vesi,  1921,  in-8°,  52  p. 
Uren  met  Ruusbroec.  Een  keur  uit  zijne  werken,  saamgebracht, 

ingeleid  en  met  aanteekeningen  voorzien  door  Jeanne  Veen. 

Baarn,  Hollandia-Drukkerij,  1921,  in-8».  2fl.  90. 

Verse  and  Prose  (Fourteenth  Century)  édites  by  Kenneth 
Sisam.  With  a  map,  introduction,  notes  and  an  appendix  on 
the  English  language  in  the  fourteenth  Centurj^  Oxford, 
Clarendon  Press,  1921,  in-8\  xlviii-292  p.  7  s.  6  d. 

"Wendell  (Barrett).  The  traditions  of  European  literature  from 
Homer  to  Dante.  London.  Murray,  1921,  in-8'».  28  sh. 

Zuccante  (G.).  Figure  e  dottrine  nell'  opéra  di  Dante.  Milauo, 
Trêves,  1921,  in-16,  277  p.  8  lire. 

HISTOIRE 

Adams  (G.  B.).  Constitutional  historj-  of  Englaud.  London,  Cape. 
1921,  in-8%518p.  21  sh. 

Adams  (Louise  E.  W.).  A  study  in  the  commerce  of  Latium 
from  the  Early  Iron  Age  through  the  sixth  century  B.  C. 
Classical  Etudies,  Smith  Collège,  Xorthampton.  Mass.,  1921. 
in-S». 

Ali  Syed  (Ameer).  A  short  history  of  the  Saracens.  With  maps, 
illustrations,  and  genealogical  tables.  Third  impression.  Lon- 
don, Macmillan,  1921,  in-8°.  12  s. 

10 


14(i  MVHES    NOl  VEAIX 

Allbutt  sir  Cliffordi.  Green  medicine  in  Rome.  Londou,  Mac- 
mi]  laii.  1921,  iii-8°.  30  s. 

Aimeras  (Hf^nri  d'  .  Marie  Antoinette  et  les  pamphlets  royalistes 
et  révolutionnaires,  avec  une  bibliographie  de  ces  pamphlets. 
Paris,  Albin  Michel,  1921,  in-8»,  428  p.  10  francs. 

Barnes  (H.  E  )    Social  history  of  the  Western  World.  London, 

Appleton,  1921,  in-8".  6  s. 
Bell  (Mary   I.    M.).    A  short  history    of   the   papacy.   London, 

Methuen,  1921.  256  p.,  in-8",  2  cartes.  21  s 
Berr  (Henri).  L'histoire  traditionnelle  et  la  synthèse  historique. 

Paris.  Alcan.  1921,  in-16,  146  p 

Blok  (P  J  ).  Geschiedenis  van  het  ^Jederlandsclie  volk.  Tweede 
druk.  Leiden.  Sijthoff.  1921,  4  t.  in-8«.  10  fl.  50  le  tome. 

Brugmans  (H  )  et  Kernkamp  'A.  W.).  Algemeene  geschiedenis. 

Tweede,  herziene  en  geheel  bijgewerkte  druk.  Leiden,  Sijthoff, 

1921.  4  vol.  in-8°.  12  fl.  50  le  volume. 
Bourinot  John)    Canada.  Xew  édition.  Londou,  Fisher  l'nwin, 

1021.  in-8».  12  s.  6  d.  (The  Story  of  the  Nations.) 

Boyd  ("William)  The  history  of  western  éducation.  London, 
Black,  1921.  in-8".  15  s 

Broodbank  (J.)  History  of  the  Port  of  London.  London, 
D.  O'Connor,  1921,  2  vol.  in-4°,  80  ill.  63  s. 

Brunhes  Jean)  et  Vallaux  iC  )  La  géographie  de  l'histoire. 
Pai'is,  Alcan,  1921,  in-8°,  720  p.,  36  cartes.  40  francs. 

Buxton  (E  M.  V.  .  A  Catholic  history  of  Great  Britain.  With  an 
introduction  by  G.  G.  Martindale,  S.  J.  London,  (3ates.  1921, 
in-8^  349  p.,  13  cartes.  5  sh. 

Celebracion  del  cuardo  centenario  del  descubrimiento  de  Filipinas 
por  Fernando  de  Magallanes    Manilla,  1921,  in^". 

Chamberlin  (F.).  The  private  character  of  (^ueen  Elizabeth. 
London,  Lanc,  1921,  in-8".  18  ill. 

Champion  Pierre)  Procès  de  condamnation  de  Jeanne  d'Arc. 
Texte,  traduction  et  notes.  Paris,  Champion,  1920-1921.  2  vol. 
in-8°,  x.\xii-428  p.,  cx-452  p.,  planches. 

Chauve-Bertrand.  La  question  du  calendrier.  Etude  historique 
et  examen  critique  des  projets  de  réforme.  Paris.  La  Renais- 
sance du  Livre,  1921,  in-18.  4  francs.  {Bibl.  internat.de  critique.) 

Chuquet  (A).  Le  départ  «le  l'ile  d'Elbe,  Paiis,  Leroux,  1921, 
in-16.  2.")0  p    7  francs. 


I.IVHES    NOUVEAUX  147 

Colenbrander   (H.    T.).    Historié  en  leven.    Amsterdam,    Van 

Kampen,  1921,  4  vol.  in-8»   Le  vol.  4  fl    50. 

Con-way  (sir  Martin).  The  Van  Eycks  and  their  followers. 
London,  Murray.  1921.  in-4»,  529  p.  42  s. 

Crâne  (Thomas  F.).  Italian  social  customs  of  the  xvith  century. 
London,  Wilford,  1921,  in-8°,  689  p.  25  s. 

Doléjal(0.).  Le  milieu  politique  et  économique  du  royaume  de 
Xaples  au  xvi^  et  au  début  du  xvir  siècle.  Ligugé,  Aubin,  1921, 
in-S",  viii-907  p. 

Empire  (The  Turkish  .  From  1288  to  1914.  By  Lord  Eversley. 
And  from  1914  to  1920.  By  Sir  Valentine  Chirol.  New  éd.  Lon- 
don, Fisher  Unwin,  1921,  in-8°.  21  s. 

Evans  (Arthur).  The  Palace  of  Minos  :  A  comparative  account 
of  the  successive  stages  of  the  Early  Cretan  Civilization  as 
illusti-ated  by  the  discoveries  at  Knossos.  I.  The  Neolithic 
and  Early  and  Middle  Minoan  âges.  London,  Macmillan.  1921, 
in -4°,  pi  ,  542  fig. 

Farnell  (L.  R.).  Greek  hero  cuits  and  ideas  of  immortality. 
(Gifford  Lectures  )  London,  Murray,  in-8°,  450  p.  18  s. 

Faure  (E.)   Napoléon.  Paris.  Crès.  1921,  in  16,  280  p.  6  francs. 

Gallotti  (P.i.  L'entrepreneur  à  travers  les  âges.  Paris,  Librairie 
de  l'Enseignement  technique,  1921,  in-8°,  544  p.,  figures. 

Glaesener  i Henri i.  La  révélatrice  d'un  peuple  (Madame  de 
Staël  .  Bruxelles,  Lamertin,  1921.  in  8«,  313  p   10  francs. 

Gonnard  (R.).  Histoire  des  doctrines  économiques.  1.  De  Platon 
à  Quesnay.  Paris,  La  Nouvelle  Librairie  nationale,  1921,  in-8°, 
300  p.  10  francs. 

Gould  (S.  Baring).  Germanj-.  New  édition.  111.  London,  Fislier 
Unwin.  1921,  id-8\  12  s.  6  d.  (The  Story  of  the  Nations.) 

Halphen  (Louis).  Etudes  critiques  sur  l'histoire  de  Charlemagne. 
Les  sources  de  l'histoire  de  Charlemagne.  La  conquête  de  la 
Saxe.  Le  couronnement  impérial  L'agriculture  et  la  propriété 
rurale.  Lindustrie  et  le  commerce.  Paris,  Alcan,  1921,  in-8°, 
viii-314  p.  14  francs. 

Heath  'Sir  Thomas).  A  history  of  greek  mathematics.  London, 
Milford.  1921.  2  vol.  in-8^  50  s. 

Heitland  ÇW.  E.i.  Agricola  :  A  study  of  agricultural  life  in  the 
Grseco  Roman  world  from  the  point  of  view  of  labour.  Cam- 
bridge, University  Press  (1921).  in-8",  494  p.  47  s   Od. 


148  LIVRES    NOUVEAUX 

Helm  iV/.  H.).  Homes  of  tlie  past.  A  sketch  of  domestic  buildings 
an<l  lil'e  in  Enfjland  from  tlie  Xorman  to  the  Georgian  âge. 
London,  Lane,  1921,  in-4°.  42  sh. 

History  of  labour  in  the  United  States.  By  J.  R.  Gommons, 
D  J.  8aposs,  II.  L.  Sumner,  E.  B.  Mittelman,  H.  E.  Hoagland, 
J.  B.  Andrews,  J.  Perlman.  London,  Macmillan,  2  vol.  in-S», 
60  sh. 

Jackson  'F  J.  Foakes).  The  bistory  of  christianity,  A.  D. 
590  1314     London   Macmillan,  1921,  in-8". 

James  H  R  ).  Our  Hellenic  héritage.  Vol.  I.  Part  I.  The  Great 
Epies.  Part  II.  The  struggle  with  Persia.  London,  Macmillan, 
1921.  in-8°,  ill.,  cartes.  6  sh. 

Kossinna  G  ).  Die  Indogerraanen.  Ein  Abriss.  I.  Das  indogerma- 
nische  Urvolk.  Leipzig,  Kabitzscb,  19il,  in-S",  vi-79  p.,  250  fig., 
7  cartes.  G  pi.  22  M.  {Mnanus-Bibliothek,  26.) 

Liema  (Marquis  de).  Spain  since  1815.  Cambridge  University 
Press.  1921,  in-S".  4  s.  6  d. 

Miller  CWilliam).  Essays  or  tbe  Latin  Orient.  Cambridge  Uni- 
versity Press.  1921,  in-8»,  7  pi,,  ill.,  carte.  40  s. 

Mirot  (Léon).  Lettres  closes  de  Charles  VI,  conservées  aux 
arcbivcs  de  Reims  et  de  Tournai.  Paris,  Champion  fl921),  in-S", 
77  p. 

Mourret  (F.i.  Histoire  générale  de  l'Eglise.  VIII.  L'Eglise 
contemporaine.  I.  1823-1878.  Paris.  Bloud,  1921,  in-8'.  714  p. 
15  fran''s. 

MuUendorf  (Prosper).  Das  Grossherzogtum  Luxemburg  unter 
Willielm  I,  1815-1840.  Luxemburg,  Biick,  1921,  in-8°,  371  p. 
12  francs. 

Muller  (F  L.)  Geschiedenis  van  onzen  tijd  sedert  1848.  Voort- 
gezet  door  J  S.  Bartstra.  Deel  ILl.  Haarlem,  Tjeenk  Willink, 
1921,  gr.  in-8",  505-695  p.  3  fl.  75. 

Oman  (  harles)  Seven  Roman  statesmen  of  the  Later  Republic  : 
Tbe  (iracclii.  Sulla,  Crassus,  Cato,  Pompey,  Caesar.  London, 
Ai-nohl,  1921,  in  8»,  .348  p.  7  s.  6  d. 

Posthumus  (N.  "W  )  Documenten  betreffende  debuitenlandsche 
liandelspolitiek  van  Nederland  in  de  xix«  eeuw  II,  1813-1838. 
's  (iravenluige.  Nijboff,  1921,  in  8  ,  xvi-495  p    28  fr.  75  c. 

Ralph  F  H.  M  )  et  Griffith  W.  J.  N).  A  digest  of  British  éco- 
nomie historj'.  London,  Murra^',  1921,  in-8".  5  s. 


LIVRES    NOUVEAUX  14& 

Rees  (J  F.).  A  fiscal  and  fiuancial  history  of  England,  1815-1918. 
London,  Methuen,  1921,  iu-8°.  6  s. 

Renouvin  (Pierre).  Les  assemblées  provinciales  de  1787.  Oi"i- 
gines.  développement,  résultats.  Paris,  Picard,  1921,  in  8"*. 
405  p. 

Reuss  (Rodolphe^  Histoire  de  Strasbourg,  depuis  ses  origines 
jusqu'à  nos  jours.  Paris,  Fisclibaclier,  in-4",  420  p.  40  francs. 

Romana  (Ariannal.  Le  tre  Caterine  (Caterina  Sforza  Riai-io, 
Caterine  de'  Medici  regiiia  di  Francia,  Caterina  II  di  Russia;. 
Firenzo,  la  Nave,  1921.  in-8-,  338  p.  8  lire. 

Scott  (Ernest).  Men  and  thought  in  modem  history.  London, 
Macmillan,  1921.  in-8",  12  s.  6  d. 

Sedgwick  (Henry  D  ).  Marcus  Aurelius.  London,  Milford,  1921, 
in-8",  309  p.  11  s.  6  d. 

Sée  (Henri).  Esquisse  d'une  histoire  du  régime  agraire  en  Europe 
aux  xviii'=  et  xix^  siècles.  iBibl.  internat,  d'écon  polit.)  Pai'is, 
Giard.  I92I,  in-8». 

Studi  e  memorie  per  la  storia  dell'  Università  di  Bologna.  Vol.  VI. 
Parma,  Fresching,  1921,  iu-S",  308  p..  pi.  20  lire. 

Thiminelli  (P.).  Bibliografia  délia  storia  délia  riforma  religiosa 
in  Italia;  contributo  allô  sLoriografia  religiosa  italiana.  Roma, 
Eilychnis,  1921,  in-I6,  viii-301  p.  5  francs. 

Tourneur  (V).  Catalogue  des  monnaies  et  des  médailles  napo- 
léoniennes du  Cabinet  des  Médailles  de  la  Bibliothèque  royale 
de  Belgique,  exposées  à  l'occa.sion  du  centenaire  de  la  mort  de 
Napoléon  imai-novembre  1921).  Bruxelles.  Monnom,  1921  iu-8°, 
90  p.  4  francs. 

Tout  (T.  F.).  Chapters  in  the  administrative  history  of  mediaeval 
England.  London,  Longmans,  I92I,  2  vol.  in  8"».  18  s.  le  volume. 

Ure  (P.  N  ).  The  Greek  Renaissance.  Londou;  Methuen,  1921, 
in-8«,  12  pi.  6  s. 

van  der  Essen  (Léon).  Contribution  à  l'histoire  du  port  d'Anvers 
et  du  commerce  d'exportation  des  Pays-Bas  vers  l'Esiiagne  et 
le  Portugal  à  l'époque  de  Charles- Quint,  .\nvers,  de  Secelle 
1921,  in-8",  30  p. 

van  Wyk  (F.  W.).  De  republiek  en  Amerika.  1772-1782.  Leiden, 
Brill.  1921,  gr.  in-8°.  38  +  211  p.  4  fl. 

Vermale  (F.).  Notes  sur  Joseph  de  Maistre  inconnu.  Chambéry, 
Dardel,  1921,  in-8",  4  francs. 


150  LIVHKS    NOUVEAUX 

"Wieringa  [P.  A.  G).  De  oudste  boerenrepublieken  Graaf-Reinet 
en  Zwellendam,  van  1775  tôt  1806.  "s  Gravenhage,  Nijhoff,  1921. 
in  8",  117  p.  2  fi.  40. 

W^illiamson  (James  A).  A  short  history  i)(  British  expansion. 
London,  Macmillan,  1921,  in-8°,  21  cartes. 

Zaniboni  (E.).  Alberghi  italiani  e  viaggiatori  stranieri,  Sec.  XlII- 
XVllI.  Napoli,  Detken,  1921.  in-8",  xvi-178  p.  12  francs. 


PERIODIQUES 


INDEX  SOMMAIRE 

Linguistique.  —  27,  38,  54,  67,  71,  7o.  74,  84. 
Philologie.  Généralités.  —  4,  8,  10.  20,  38,  31).  70.  73,  81. 

—  indo-européenne.  —  30.  34,  38. 

—  grecque.  —  20.  24,  26,  27,  30,  31,  34,  37,  40,  41,  .04.  66, 

71.81. 

—  latine.  —  11,  24,  26,  30,  34,  36,  37,  38,  39,  40,  4L  ."»4,  66, 

71.  81,  84. 

—  romane  (gén.).  —  38,  39,  67,  84. 

—  espagnole.  —  36,  48,  70,  73,  84. 

—  franc-aise.  —  34,  38,  39,  49,  51,  54,  .55,  56,  59,  61,  65, 

67,  68,  70,  73,  79,  84 

—  italienne.  —  70,  73.  84. 

—  roumaine.  —  84. 

—  celtique.  —  2,  50,  52.  54.  79,  81. 

—  germanique  (gén.).  —  30,  39,  52,  81,  84. 

—  allemande   —  9,  15,  38,  39.  49,  82,  84. 
anglaise.  —  9,  15,  18,  30,  38,  39,  44,  45. 

—  néerlandaise.  —  9,  15,  39,  67,  77,  78,  80. 
Littérature.  Généralités.  —  30,  54. 

—  grecque.  —  20,  26.  27,  30,  31,  40,  41,  58,  71. 
latine.  —  26,  27,  30,  40,  41,  46,  66. 

—  —      du  moyen  âge  et  des  temps  modernes.  —  6,  21. 
30.  38,  39,  56. 

—  espagnole.  —  14.  36,  46,  47,  48.  84. 

—  française.  —  2,  3,  12,  17,  20,  22.  23,  35.  36.  38,  39,  45, 

46.  51,  53,  57,  59,  61,  62.  65,  68,  70,  79,  84. 


152  l'KHlODKjrKS 

Littérature   italienne  (sauf  Dante).   -  38,46,  47,  84. 

—  italienne.  Dante.  —  1,4,  17,  19,  20,  22,  23,  35,  3H,  46, 

53.  57,  62,  65,  68,  69,  74,  78,  83. 

—  portugai.se.  —  48. 

—  roumaine.  —  9. 

—  allemande.  —  9,  14,  15,  27,  38,  69,  71,  73,  82. 

—  anglaise.  —  20,  22.  38,  44,  45,  62,  69. 

—  néerlandaise.  —  9,  11,  33,  74,  77,  78,  80. 

—  Scandinave.  —  39,  82. 

Histoire  de  l'antiquité.  —  1,  26.  27.  28,  29,  31,  39.  40,  43,  44,  50, 
52,  54,  ()0,  64.  69,  75,  76,  83. 

—  du  moyen  âge.  —  2,  5,  6,  14,  19,  21,  29,  32,  33,  44,  58,  60, 

62,  64,  69,  71,  76,  79.  80,  83. 

—  moderne.  —  2,  11,  12,  17,  19,  20,  22,  25.  43.  44.  45,  47,  49, 

56,  57.  60,  65,  72.  74,  78,  79,  83. 

.-. —         contemporaine  (sauf  Napoléon  P').  —  1,2.  17,  20,  43, 

44,  49,  60,  72,  83. 
.    —         contemporaine.  Napoléon  P^  —  16,  19,  20,  35,  49,  51,  53, 

57,  61,  62,  65,  68. 

—  économique.  —  1,  2,  7.  10,  19,  47,  50. 

—  des  mœurs.  —  2,  11,  16,  33,  40.  51,  72,  76,  79,  83. 

.    —         des  sciences.  —  S,  13,  17,  20,  27,  32,  40,  41.  44,  50,  55,  72, 
76,  83. 

—  de  l'art.  —  1,  13,  16,  20,  27,  28.  29,  .33,  35.  47,  50,  51,  63, 

64,  65,  75,  79,  80.  81.  83. 
Archéologie   —  10.  14,  28,  29,  32.  50,  51,  54,  63. 
Autres  sciences  auxiliaires  de  l'histoire.  —  6,  7,  14,  18.  27,  61,  63, 

64.  68,  71.  73. 


I 


PÉRIODIQUES  153 

1.  —  Académie  royale  de  Belgique.  Bulletin  de  la  classe 
des  Lettres,  1921. 

Joseph  Cuvelier     Vu  capitalisie  du   xiV^  siècle.   [G.  de  Duven- 

voorde].  46. 
Jules  Leclercq.  Le  temple  de  .Jupiter  Ainmon.  57. 
J.  BiDEZ.  La  jeunesse  de  l'empereur  Julien.  197. 
Cardinal  D.-J.  Mercier.  Le  génie  poétique  de  Dante.  26."). 
F^RNAND  Khnopfe.    Les  œuvres  d'ai-t  inspirées  par  Dante.  2i)0. 
Paul  Errera.  Dante  et  les  Flandres.  298. 
H.  Vander  Linden.   L'inauguration    de    Guillaume    l",    roi    des 

Pays-Bas,  et   l'installation    des    États  généraux   à   Bruxelles 

(21  septembre  1815).  378. 
G.  des  Marez.  Les  premières  étapes  de  la  formation  corporative. 

L'entraide.  412. 

2    —Annales  de  Bretagne,  XXXIV,  1919-1921. 

G.  S.\iNT-MiEUX.  Les  armements  de  M.  de  Chateaubriand,  1 

Documents  Ménaisiens.  15. 

J.  LoTH.  Irl.  acher,  gall.  ag-eriv,  irl.  uccarb.  51. 

E.  DÉPREZ.  Une  lettre  missive  du  prétendant  Jean  de  Bretagne, 

comte  de  Montfort.  56. 
M.  Le  Guyades.   L'ancienne  Faculté  des  Lettres  de  Rennes   77. 
Henri  Sée.   L'agriculture  dans  les  Côtes-du-Nord  en  1844.   111. 
E.  Galmiche.    La    vie    militaire   à    Saint-Brieuc    sous    l'ancien 

régime  et  au  début  de  la  Révolution,  129. 

E.  DÉPREZ.  Un  pays  de  bocage  du  massif  armoricain  :  le  Bas- 
Maine.  i43. 

LÉON  DuBREUiL.  Révolutionnaires  de  Basse-Bretagne  :  le  conven- 
tionnel Pierre  Guyomar.  168,298. 

J.  LoTH.  An  privatif  dans  les  langues  celtiques.  187. 

(J.  DoTTiN.  Un  traité  irlandais  du  moyen  âge  :  La  langue  toujours 
nouvelle.  190.  278. 

F.  UzuREAU.  Les  prêtres  insermentés  du  Finistère  (1791-1793).  261. 
L.  GouGAUD.  Mentions  anglaises  des  saints  bretons  et  de  leurs 

reliques.  273. 

G.  EsNAULT.   Le  Laé.  319 

Henri  Sée.   Le  rôle  de  la  bourgeoisie  bretonne  à  la  veille  de  la 
'   Révolution.  405 

Georges  Collas.  La  jeunesse  de  Chateaubriand  à  Fougères  et  à 
Paris  (1786-1791).  434. 


154  PÉRIODIQIES 

J.    UE  LA   Maktinikri;.    Documents    |)oiir    servir    à   l'histoire    de 

Vannes.  1160. 
R.  Durand.  Un  chanoine  de  Dol  au  .wii*^  siècle.  4S(). 
F.  DuiNK.  L'évêque  Hai-lrit  [ix«  sièelel.  492. 

3.  —  Annales  Prince  de  Ligne.  I,   1921. 

Richard  Dui'iEKRErx.  Le  Prince  de  Lijrne  et  ses  lettres  à  la 
Marquise  de  Coigny    1. 

Louis  DuMONT-WiLDEN.  Le  Prince  de  Ligne  et  l'esprit  européen  .IL 

Prince  de  Ligne.  Œuvres  posthumes  inédites    21,  150,  212. 

Les  correspondants  du  Prince  :  Madame  de  Krûdener.  73. 

Ernest  de  Ganay.   Le  Prince  de  Ligne  à  vingt  ans   89. 

Henri  Lebasteur   Impressions  littéraires.  Les  poètes.  94. 

Octave  Uzanne.  Missives  et  billets  du  Prince  de  Ligne  à  Casa- 
nova. 114. 

Gustave  Charlier.  Lettres  à  Eugénie  sur  les  spectacles.  120,  189 

Les  correspondants  du  Prince  de  Ligne  :  Kotzebue.  lOT. 

Edouard  Chapuisat.  De  Saussure  et  le  Prince  de  Ligne   181. 

Les  correspondants  du  Prince  :  Madame  de  Souza   222. 

4.  —  Nuova  Antologia.   CCXIII,  1921. 

Alessandro  Chiapelli.  Novita'  dantesche.  li. 
Oiacomo  Boni.  Studi  danteschi  in  America.  97. 
Cesare  de  Lollis.  La  fede  di  Dante  nelP  arte.  208. 
Eugenio  Barbarich.  Dante  soldato.  309 
GiULio  Bektoni.  Etimologia  idealistica.  3.")(!. 
Angei.o  Sodim.   Statistica  dantesca.  364. 

CCXIV,  1921. 

ViTAi.i.wo  Brunkm.i.   Dante  Ira  gli  Slavi  mei-idionali.  87. 

5.  —  Nederlandsch  Archief  voor  Kerkgeschiedenis 
N.  S.,  XVI    1920-1921 

A.  Eekiiok.  Drie  onbekende  dokunienien   beîrelt'ende  de  Pilgrim 

Fathers  in  Holland.  1. 
H.  A.  Enno  Van  Gei.der.   TTumanisten  en    Lihertijnen,  Ki-asnuis 

en  C.  P.  Hooft.  35. 
Paul    SÉ.IOURNK.    Les   corresponihmts    de    Sainte- H ildegarde    à 

Utrecht.  144. 
P.  Oscar.  La  biographie  de  s.  (Maire  d'Assise.  205.  277. 


PÉRIODIQUES  155 

N.  LiPPENs.  Un  missel  fi'auciscain  belge  du  xv*^^  siècle  au  British 

Muséum.  249. 
P.  Fredeganu.  Drie  stukkeu  betreli'ende  Zr.  Francisca  Taffiii 

van  S.-Omaars.  269. 

6.  —  Neues  Archiv  der  Gesellschaft 
fur  altère  deutsche  Geschichtskunde,  XXXIV,  1920-1921 

MiCHAEi,  Tangl.  Bericht  ûber  die  Herausgabe  der    Monumenta 

Germaniîe  historica,  1916-1918.  i. 
P.  Kkhr.  Bericht  iiber  die  Herausgabe  der  Monumenta  (ierma- 

nia?  historica,  1919.  xv. 
Karl  Strecker.  Zu  den  Quellen  fur  das  Leben  das  hl.  Niuian.  1. 
Amandus  G'sell.  Die  Vita  des   Erzbischofs   Arnold    von    Mainz 

(1153-1160)  auf  ihre  Echtheit  gepruft.  27,  317. 
Adoi.f  Hofmeister.  Eiae  neue  (Quelle  zur  Geschichte  Friedrich 

Barbarossas.    De    ruina  civitatis   Terdonaî.    Untersuchungen 

zum  1.  Romerzug  Friedrichs  1.  87. 
Robert  Hoetzmann.  Studien  zu  lleinrich  von  Lettland.  159. 
H.  WiHEi>.  Drei  TJivschriften  Cremoneser  Diplôme  aus  dem    lU. 

und  11.  Jahrhundert.  215. 
M.  Perlbach.  Vier  Fragmente  der  Paderborner  Annalen.  224. 
Hermann  Degering.  Ein  unbekannter  Brief  zur  Geschichte  der 

Liitticher  Bischofswahl  im  Jahre  1119.  235. 
LuDwiG  Steinberger.  Zum  dritten  Mal  Heinrich  der  Taube.  239. 
E.  Posner.  Das  Register  Gregors  1.  "243. 

WiLHELM  Levison.  Zur  altesten  Urkunde  das  Klosters  Priim.  383. 
Xarl  Strecker.  Drei  Rhythmen  Alkuins.  386. 
GusTAv  Sommerfei.dt.  Zu  Langensteins  Abhandlungen  iiber  die 

Landgrâfin  Elisabeth  von  Thiiringen,  und  iiber  die   Prophe- 

zeiungen  dei*  hl.  Hildegard  von  Bingen   394. 
H,  Otto.  Zur  Frage  nach  der  Entstchung  der  Limbui'ger  Chro- 

nik.  397. 

7.  -  Archiv   fur  Urkundenforsebung.  VII.  1918-1921. 

Edmond  E.   Stengei,.    Fuldensia.  11.   Ueber  die  Karolingischen 

Cartulare  des  Klosters  Fulda.  1. 
Adolf  Hasenclever.  Eine  Kanzleiordnung  Gattinaras  aus  dem 

Jahre  1524.  47. 
M.    Treiter.    Die    Urkundendatierung  in   angelsâchsisclier   Zeit 

nebst   Ueberblick   iiber  die   Datierung  in    der   anglo-norman- 

nischen  Période.  53. 


156 


PERIODIQUES 


Karl  Frolich.  Zur   Kritik  der  Naclii'icliteu    iiber   deu   iilteren 

Bergbau  am  Rammeisberge  bei  Goslar.  161. 
Aij^'rtKU  Hessel    Studien   zur   Ausbreituiig   der    Karolingischen 

Minuskeln.  T.  Spanien.  197. 

8.  —  Archivio  di  storia  délia  scienza.  II,  1921. 

Epaminonda  Crivelm.  Le  vicende  dei  nomi  dei  metalli.  1. 
Antonio  Favaro.  Evangelista  Torricellie  Giovanni  Ciampoli.  46. 
RoiîERTO  Almagia.   Il  primo    téntativo   di  misura   dei    rapport© 

quantitivo  Ira  le  terre  emerse  e  i  mari.  51. 
AiJGUSTO  Bkguinot  et  wSir.viA  Zenari    Illustrazione  dell'  erbario 

eomposto  da  G.  B.  Brocchi  in  Egitto  e  Nubia.  05,  185. 
Mario  Vall.vuri  I  fondamenti  generali  délia  mediciua  indiana.  70. 
Studi  e  note  Vinciane.  108. 
La  storia  dclla  scienza  nelle  vniiversità  e  negli  istituti  di  cultura 

superiore  :  Italia.  Estero.  120 
Gusïav  Enestkôm.  Sur  l'auteur  d'un  traité  a  De  motu  »  aut^uel 

Bradwardin  a  fait  allusion  en  1328.  133. 
Antonio  F.\v.\ro.   Galileo  Galilei  in  una  rassegna   dei   pensiero 

italiano  nel  cor-so  dei  secolo  decimosesto.  137. 
Carlo  Del  Lungo.  Del  pendolo  e  dolla  sua  applicazioiu'  ail'  oro- 

logio.  147. 
GiNO  LoRiA.  Philip  E.  B.  Jourdain,  matematico  e  storieo  délia 

scienza  (1879-1919).  167. 
QuiDo  Vetter.  La  storia  délia  matematica  presso  i  Cei-hi.    199. 
HuMBERTo  Julio  Paoli.  11  libro  di  Garcia  da   Orta  (contributo 

alla  storia  délia  scieuza  lusitana;.  202. 
Mario  Battistini   Xote  d'archivio.  211. 
GiusEPi'E  Steianini.  Spigolature  cestoniane.  215. 
Enrico  Rukini    Gli  studi  geometrici  di  Eudosso  da  t'nido.  222. 
Note  Vinciane.  240. 
Andréa  Corsini.  Storici  italiani  dclla  scienza.   Kaffaele   Maturi 

(1832-1910).  248. 
<»iiGLiEF,Mo  BiLANOioNi.  A  ])roposito  de  ((  L'orecchio  e  il  naso  nel 

sistema  autropomctrico  di  Leonardo  da  Vinci  »    250. 


9.  —  Beitrâge  zur  Geschichte  der  deutschen  Sprache 
und  Literatur,  XLV.   1920-1921. 

F.  HoLTiiAUSKN.  Nordl'riesi.sclic  studien.  1. 

M.  H.  Jellinkk.  Zwci  Dichter  des  Reiiiacrl?  51. 

—  Zù  Ilartmanns  lyrik.  59. 

—  Zù  den  pseudoreinmarischen  («edichto.  71. 


PÉRIODIQIES  157 

M.  H.  Jeli.inkk.  Zur  altsîichsischen  Geiiesis    79. 

G.  HÛBENER.  Das  Problem  îles  flexionsschwundes  im  ags.  S5. 

E    OcHS.  Die  heiligen  und  die  Seligen.  102. 

—       Larmstange.  112. 
A.  Leitzmanx.  Die  Freidankcitate  im  Renner.  116. 

—  Zù  den  mnd  Sprichwôrter.sammiungen.  121. 
O.  Behaghei,.  Do'Utsch.  130. 

—  Mischen.  132. 

—  Ein  possessiver  dativ.  134. 

—  Deutsche  priiposition  mit  lateiniseher  casusform. 

136. 

—  Eine  vorlage  Boners.  137. 

J.  Meier.  Zur  âltesten  deutschen  gaunerspraelie.  141. 

W    HoRN.  Zui'  vvortgeschichte.  141. 

VON  Grienbergeb.  Sivitus.  143. 

W.  Braune.  Gentilis.  145. 

P.  Ortmayr.  Zur  deutuug  der  abkûrzung  j^f.  N.  146. 

V.  MosER.  Zur  geschichte  der  neuhoehdeutschen  schriftsprache 

in  Bern.  149. 
K   ZwiERZiXA.   Steyrer  bruch.stiick  von  Notkers  psalmeniiberset- 

zung.  192. 
Th.  V.  Grienbkugek.  Althochdeutschen  texterklârungen.  212. 
J.  LoEWENTHAL.  Religionswissenscliaf tliclie  parerga  zur  german. 

Altertumskunde.  239. 
A.  Bach.  Die  Schiirfung  in  der  moselfrânkischen  mundart  von 

Arzbach  (Unterwesterwaldkreis).  266. 
R.  HiixNERKOPF.  Die  Rothersage  in  der  Thidrekssaga   291. 
F.  HoLTHAusEN.  Etymologien.  297. 
K.  Hentrich.  Zum  Vernerschen  gesetz.  300. 
E   KiECKERS.  Zum  nomiuativus  und  accusativus  sing.  der  ia  — 

Stamme  im  altenglisclien.  302. 

E.  KiECKERS.  Zù  altengl.  specan  und  ahd.  spechan  «  spreclien  ». 
304. 

W.  Stkij.er.  Der  leich  walthers  von  dei-  Vogelweide  und  sein 

Verbaltnis  zum  religiôsen  leich.  307. 
Th.  V,  Griexbergkr.  Althochdeutsche  texterklârungen   404. 

F.  Panzer.  Ein  rumani.sches  Siegfriedmiirchen.  429. 

K.  ZwiERZiNA.  Ampezzaner  bruchstiicke   von  Wolframs  Wille- 
halm  443. 

E.  ScnwEXTXER   Zur  wortsippe  diinkel  im  germanischen.  452. 

F.  Vogt.  Zum  Kiirenberger.  459. 

C  H.  DiEBEL.  Ein  eigentiimliches  ordnungspriiicip  bei  Herbort 

von  Fritslar.  467. 
H.  Xau.maxn.  Der  grosze  eber.  473. 


158  PÉRIODIQUES 

XLVI,   1921-1922. 

R.  PuiKSCii.  Bruclistûcke  deutscher  dichtuiigen  des  13-14.  Jahr- 
hunderts.  1. 

R.  LowE.  Dei"  wechsel  von  u  und  an  in  dcr  gotischen  a—  décli- 
na tion.  51. 

K    ViËTOR.  Die  kunstanseliîiuung  der  hofischen  ejiigonen.  85. 

F    HoLTiiAUSEN.  Wortdeutungen.  125. 

E.  Ociis    Der  lautwandel  — b — > — \v—  in  Baden.  147. 
G.  NrccKKi,.  Zu  Heinrich  von  Morungen    156. 

F.  Klakbkk   Zur  alt.saclisischen  Genesis.  164. 
S    SiNGivH.  Blume.  168. 

Th    Sikbs.  Krimgotiseh  Kilcmschkop.  170. 

10.  —  Bibliothèque  universelle  et  Revue  suisse,  CI,  1921. 

Jean  Hurny   La  nationalisation  chez  les  anciens  Romains.  13. 
Jacqueline  de  i.a  Harpe.  Sons  terre  en  Italie.  77- 

—  Saint-Benoît,  Subiaco,  et  le  Mont  Cassin.  355. 

CIV    1921. 

E.  Tappoeet.  Le  mot  et  la  chose   226. 

11.  —  Het  Boek.  X,  1921. 

Robert  Foncke.  Ruzie  bij  de  Rederijkers  te  Mechelen  (1718)    65. 

E  Kroxexberg  Executie  te  Autwerpen  van  Niclaes  van  Olden- 
borch    drukker.  71. 

Maurits  Sabbe  Uit  de  bi'ielwisseling  van  Clusius  met  Chr.  Plan- 
tin  en  J.  More  tus.  97. 

Over  Raadselliteratuur    114. 

M.  Boas.  Gillis  en  Sambucus.  129. 

C.  P.  BuRGER  De  haring  in  de  gescbiedenis  en  in  de  lireratuur.  145. 

J.  F.  M    Sterck.  Joannes  Scorel  en  Jt)annes  Secundus.  213. 

J.  Berg  et  B.  M.  Bkrg-v.\n  der  Stempee.  Refereinen,  uitgegeven 
ten  bâte  van  eene  loterij.  225. 

C.  P.  BuRGER  Jr.  Een  buiidel  nieuwjaarsdichten  van  de  gerefor- 
meerde  school  te  .Antwerpen    273. 

Maurits  Sabbe  In-  en  uitvoerre -hten  op  boeken  en  papier  ge- 
durende  de  17*  en  18<^  eeuw  in  Zuid-Nederland.  2-^5,  337 

David  de  Kok.  De  zegen  van  S.  Clara  in  het  Oud-Nederlandsch» 
321. 

A.  A.  v.\x  SciiEEVEN    Werken  van  Marten  Micron.  327. 

C.  P.  BuRGER  Jr.  Een  .Vnti-Roomscli  painflet  van  1564.  331. 


PÉRIODIQUES  15& 


12.  —  Bulletin  du  Bibliophile  et  du  Bibliothécaire.  1921. 

Ernksï  Jovy.  La  CoiTesi^ondance  de  Bossuet.  1. 
PiKRRK  Vii.LKY.  La  cliroDologie  des  œuvres  de  Marot  49,  101,  171. 
Georges  Mongrédien.  Précisions  sur  une  lettre  de  Malherbe  125. 
J.  Mathorez.  Les  catholiques  de  langue  allemande  à  Paris  au 
XVII6  siècle.  189. 


13  —  Bulletin  du  Cercle  archéologique,  littéraire 
et  artistique  de  Malines,  XXVI,  1921. 

Fern.   Donxet.    Jean   van   Wavere,   i^eintre  ou  sculpteur  mali- 

nois  1. 
G.  Van  Doorslaer.  Un  jîortrait  malinois  du  xv®  siècle.  15. 
Em.  Steenackers.  La  grande  école  à  Malines  (1450-1630).  21. 

14  —  Bulletin  hispanique,  1921. 

G.  CiROT.  Fernàn  Gonzalez  dans  la  Chronique  léonaise.  1,  77. 

J.  Sarrailh.  Quelques  sources  du  Cudiz  de  Galdôs.  33. 

G   CiROï.  Cervantes  et  les  frères  Tharaud.  57. 

R  CosTES.  Pedro  Mexia,  chroniste  de  Charles-Q,uint.  95^ 

M.  Bataillon.  Les  sources  historiques  de  Zaragoza.  \t^. 

Pierre  Paris.  Bas-relief  ibérique  au  Musée  provincial  de  Cor- 

doue.  173. 
J.-.T.-A.  Bertrand.  Herder  et  le  Cid.  180. 

15.  —  Leuvensche  Bijdragen,  XIII,   1921. 

J.  MaiNSIon.   Oud-Geutsche  namenkunde.   Eene   bijdrage  tôt  de 

kenuis  van  het  Ouduederlandsch.  1. 
A.  J.  Carnoy.  The  semasiology  of  American  and  other  slangs.  49. 
J.  M.  Kleine  mededeeling  [Hiklebrandslied].  68. 
E    Ulrix    Les  chansons  inédites  du  ms.  f.  f.  844  de  la  Biblio- 
thèque nationale,  à  Paris.  69. 
L    Grootaers.  Limburgsche  accentstudien.  1,  80. 

—  De  dialect  géographie  op  Duitscli    en   op  Neder- 

landsch  taalgebied.  Ul  (liijblad). 

16.  —  The  XIXth  century  and  after,  I,  1921. 

J.  A.  H    Marriott.  Napoléon  and  nation-makiug.  853. 

Lesi.ie  Hore-Belisha   Xapoleon  the  Deinocrat.  870. 

Rose  M.  Huadi-ey.  Tlie  liousewifc  a  liUTidred  vears  ago.  1024. 


160  PÉRIODIQUES 

II,   1921. 

HuMPiiKv  Wari).  An  art  dealer  nnder  Louis  XV  [Lazare  Duvaux]. 
46L 

17.  —  Le  Correspondant,  t   283.  1921. 

Pierre  de  Nolhac.  Ronsard  humaniste.  1,  239,  410. 

<T.  Saint- Yyes.  L'occupation  française  du  bassin  de  la  Ruhr.  877. 

T    284,  1921. 

Marius  André.  A  propos  des  «  centenaires  »  sud-américains.  La 
révolution  libératrice  de  l'Amérique  espagnole,  d'après  les 
«  Archives  des  Indes  »  à  Séville.  .3,  247,  645. 

Robert  Lavollée  Les  Mémoires  du  cardinal  de  Richelieu  sont- 
ils  faux  ?  220. 

Henry  Cochin.  Dante  Alighieri  et  les  catholiques  français.  Oza- 
nam  et  Sainte-Beuve.  769. 

Henri  Bremond.  Pascal,  l'abbé  de  Villars  et  la  première  réfuta- 
tion des  «  Pensées  ».  904. 

T.  285,  1921. 

Jui/Es  Véran.  Le  septième  centenaire  de  la  P'aculté  de  médecine 

de  Montpellier.  289.  ' 

Claude  Cochin.   Figures  du  xvii''  siècle.    Henry  Arnaud  et  ses 

amis.  447. 

18.  —  Discovery,  1921. 

Henry  Cecil  Wyld.  Standards  of  correctness  in  English.  233. 
W.  R.  Halmday.  The  Roman  calendar.  238. 

19.  ~  Etudes,  t    166,  1921. 

Alexandre  Brou.  La  soumission  de  Fénelon  d'après  la  corres- 
pondance de  Bossuet.  208. 

Paui.  Du  don.  Un  centenaire.  La  découverte  du  détroit  de  Magellan 
(octobre-novembre  1520j.  214. 

GuiLi.AU.ME  de  Jerphanion.  Choses  d'Orient.  Sur  l'antique  Bjzance. 
334. 

T.  167,  1921. 

Pierre  d'Hérouvii.i.e.  Sciences  agronomiques  il  y  a  vingt  siècles. 

68. 
Paui,  Dudon.  Sur  le  cercueil  de  Napoléon  (1821-1921).  129. 
Adhémar  d'Alès.    a   Byzance.    .4ux   origines  du   schisme   grec. 

Psellos  et  Cérullaire.  178. 


PÉHIODIQUES  161 

T    168,   1921 

Ferdinand  Cavallera.  Dante  et  son  œuvre.  5,  166. 

Paul  Dudon.  Ignace  de  Loyola  au  siège  de  Pampelune  (1521  1U21). 


20.  —  Le  Flambeau,  I,   1921. 

Frans  Yan  Kalken.  La  Belgique  et  la  France  en  1830.  Trois  mois 
d'histoire  de  Belgique.  24,  240. 

Taeda.  L'Académie  belge  des  Lettres  françaises.  295. 

Gustave  Charlier.  Au  temps  de  Charles  de  Lorraine,  361. 

Joseph  Biuez.  Les  premiers  philosophes  grecs  expérimentateurs 
ou  techniciens.  414. 

Gustave  Cohen.  Ecrivains  français  en  Hollande.  481. 

Henri  Grégoire.  Les  Bacchantes  d'Euripide.  Traduction  nou- 
velle. 509. 

Albert  Counson.  Dante  et  Napoléon.  544. 

II,   1921 

{SzYMON  AsKENAZY.  La  jcuncsse  de  Napoléon.  48. 

Gustave  Cohen.  Les  plus  anciennes  pièces  du  théâtre  liégeois.  80. 

Auguste  Vincent.  Les  noms  de  lieux.  102. 

Jules  Vannérus.  Toponymie  politique.  257. 

Fernand  Khnopff.  Les  œuvres  d'art  inspirées  par  Dante.  349. 

A.  Anureadès.  Etapes  de  la  littérature  grecque  moderne.  470. 

III,   1921. 

Henri  Pirenne.  Godefroid  Kurth.  1. 

H.  Carton  de  Wiart.  Un  gentilhomme  de  lettres  :  Le  Prince  de 

Ligne.  84. 
Philippe  Sagnac.  La  Belgique  au  xvii*  et  au  xviii®  siècle.  141. 
GiuLio  Gagliani.  La  question  romaine.  228. 
Paul  De  Reul.  Le  Centenaire  de  Keats.  391. 


21.  —  Franciscana,  1921. 

B.  Kruitwagen,  Gérard  van  Saint-Quentin  en  Petrus  van 
Kamerijk  (eind  xiii»^  eeuw)  resp.  dichter  en  componist  van  een 
rijmofficie  van  St.  Elisabeth.  18. 

P.  Hii>DEBRAND.  Xotes  sur  les  Cai)ucins  de  Courtrai.  29. 

A.  Van  den  Wyngaert.  Stukkcn  nopens  de  Derde  Orde  (af- 
komstig  van  Maastricht,  aanvang  der  xive  eeuw).  60. 

11 


162  PÉRIODIQUES 

H.  Néms.  Les  statuts  du  Tiers  Ordre  de  Saint- François  édictés  à 

Zepperen  en  1487.  76,  193. 
B.  Kruitwagen.  Gérard  van  Saint- (Quentin 's  Trnnslatio  critcis  el 

coronif  Doininicœ.  304. 

22.  —  De  Gids.  III,  1921. 

Ph.  h.  Wickstbkd.  Wordingengrondgedachte  der  Divina  Comœ- 

dia.  343. 
.7.  J.  S.\i>VKRDA  DE  Grave.   Over   bet  verband   tusscheu   «  Vita 

Xuova  »  ea  «  Divina  Commedia  ».  368. 
G.  BusKEN  HuKT.  De  «  Roman  de  la  Rose  »  en  Dante.  382. 
Franz  Erens.  Kautteekeningea  bij  Dante's  Monarchia.  391. 
•T.  P.  Kuenen.  De  heinelsiereu  bij  Dante.  397. 
J.  HuiziNGA    De  iiguur  van  deu  Dood  bij  Dante.  419. 
Carel  Scharten.  Dante  en  Petrarca  tôt  Maria.  424. 
André  Joi-i-es.  Het  Amorvisioen  in  de  Vita  Nuova.  427. 
W.  G.  C    BijvANCK.  Dante  en  Potgieter.  449. 
.1.   HuiziNGA.  Welke  voorstelling  heef t  Erasmus  omirent  Dante 

gehad  ?  464. 
E.  F.  KossMANN.  Twee  puntdichten  op  Dante  uit  de  zeventiende 

eeuw.  473. 
Frans  Erens.  Eeu  aclittiende-eeuwer  over  Dante.  484. 

IV,   1921. 

W.  G.  O.  BijvANCK.  Een  nieuwe  Shakespeare-uitgaaf.  125. 
E.  C   Abendanon.  De  beteekenis  van  den  naam  Celebes.  317. 

23.  —Il  Giornale  dantesco,  1921 

L.  V.  Il  diritto  di  intendere  Dante.  1. 

LuiGi  PiETROBONO.  Dentro  e  dintorno  «  La  piccola  Vallea  »  dell' 
antipurgatorio.  7. 

GuiDo  VrrAi-ETTi    11  «  Rifugio  Dantesco  »  di  Fonte  Avellana.  23. 

G.  Maruefi  I  due  Carli  (Carlo  1  e  Carlo  II  d'Angio)  in  un  passo 
del  «  Paradiso  ».  32. 

Camii-lo  Guerrieri  Crooetti.  La  naturadel  linguaggio  Adamitico 
secondo  la  Bibbia,  S   Tommaso  e  Dante.  35. 

(30RRADO  Rrcci.  La  morte  e  l'invettiva  del  conte  Ugolino.  40. 

GiULO  Salvadoki.  Sanf  Anna  nel  ciclo  dell'  umiltà  e  la  riposta 
alla  canzone  «  Donne  che  avete  ».  48. 

LuiGi  PiETROBONt).  La  donaziouc  di  Costantino  e  il  pcccato  ori- 
ginale. 58. 

EMir.io  Bertana    Dante  e  Mazzini   73. 


PÉIUODIQUES  163 

Giovanni  Lattanzi   L'ottimismo  del  poemadantesco.  85. 

Primo  Vannutelli.  Pian  ta  opiota?  92. 

GiusEPPE  BoFFiTO.  Dante  geodeta.  96. 

Enrico  Sicardi.  Appuuti  sul  teste  délia  «  Vita  Nuova  n.  120. 

Ettore  Allodoli.  Stendhal  e  Dante.  127. 

GiULio  Bertoni.  Sulla  poesia  di  Dante.  132. 

Francesco  Ercole.   Medio   Evo  e   Rinascimento  nella  dottrina 

politicadi  Dante.  141. 
G.  B.  SiRAGUSA.  Per  la  versionedel  trattato  «  De  Mouarchla  ».  168. 
GuiDO  ViTALETTi.   La  commemoi'azione  dantesca  a    Fonte  Avel- 

lana.  176. 
GiULio  Bertoni.  Nota  sul  codice  landiano  délia  «  Divina  Comme- 

dia  ».  189. 
G.  Folchieri.  Sapere  e  amore  nel  «  Convivio  »  e  nella  «  Comedia  » 

di  Dante.  194. 
P.  Ghignoni.  Alla  sogliadel  Purgatorio  (Canto  LX).  213. 
GuiDo  ViTALETTi.  Per  la  fortuna  di  Dante  nel  secolo  xv.  217. 
LuiGi  Vai-li.  XJlisse  e  la  tragediaintellettuale  di  Dante.  227. 
C.  G.  Crocetti.  Poesia  e  storia  nella  «  Divina  Commedia  ».  236. 
LuiGi  Pietrobono.  Il  cerchio  di  Dite,  245, 
Giovanni  Livi.  Un  personaggio  dantesco.  265. 

24.  —  Glotta,  XI,  1921. 

Albkrt  Debrunner.  Das  hellenistische  Nebensatziterativpra- 
teritum  mit  av.  1. 

Franz  Hugo  von  Helle.  Problem  der  lateinischen  Silbentren- 
nung.  29. 

Friedrich  Si.otty.  Beitrlige  zur  Kenntnis  des  VulgJirlateins,  51. 

E.  ScHWYZER.  'Kleine  Bemerkungen  zu  griechischen  Dialektin- 
schriften.  75. 

E.  KiECKERS.  Ziir  Satzappo.sition.  79. 

Robert  Munz.  Ueber  Y^^Î'fTa  und  biàXeKToç  und  ûber  ein  posido- 
nianisclies  Fragment  bei  Strabo.  Ein  Sprachwissenscbaftlich- 
philologischer  Exkurs  zu  Posidonius  bei  Strabo  C  176  Uber 
dialektiscbe  Verschiedenheiten  bei  den  Galliern.  85. 

25.  —  0ns  Hemecht.  Organ  des  Vereines 
fur  Liuxemburg-er  Geschichte,  Litteratur  und  Kunst,  1921. 

Das  chemalige  Landkapitel  Arlon.  3,  75. 

Alphonse  Rupprecht.   Logements  militaires  à  Luxembourg  pen- 
dant la  période  de  1794-1814.  10,  65. 
La  famille  Schramm  de  Larochette.  16. 


164  PÉRIODIQI  ES 

Das  Eligiusamtzu  Luxemburg  22,  56,  88,  117. 

Die  Kirche  van  Waldbredimus.  37,  49. 

Sammluug  von  Akten.stucken  zur  Geschichte  des  Gnadenbildes 

Mariil,  der  Trosterin  der  Betrûbten,  zu  Luxemburg    128. 
.1.  ScHMiT.  Luxemburgische  Folklore.  Die  Zahuspende.  130. 

26.  —  Hermès,  1921 

F.  J.vcoHv.  Das  Proœmium  des  Lucretius.  1. 
K.  MuN.sciiER.  Metrische  Beitrâge,  G6. 

W.  Otto.  Das  «  Tor  der  Audienzen  ».  104. 
K.  Prakchter.  Diogenes  Laeitius  X.  16,  107. 
Lucretius  V.  165-180,  108. 

G.  WissowA.  Die  Varronischen  di  certi  und  iiuerti.  113. 

R.  Laql'eur.  Scipio  Africanus  und  die  Eroberung  von  Neukar- 

tbago.  136. 
K.  Praechtek.  Por])li.\  rius  in  Aristot.  Categ.  Comni.  p.  123.  29  ff. 

Busse.  226. 
F.  Bechtel.  Myth.  AAGHnOI.  228. 

E.  VON  Stern.  Zur  Beurteilung  der  ])olitiseben  Wirksamkeit  des 
Tiberius  und  Gains  Gracchus.  229. 

C.  Robert.  Zu  Euripides'  Troerinnen.  302. 

L.  Deubner.  Zum  Freiburger  Makedonierdialog   314. 

U.  Kahrstedt.  Sparta  und  Persien  in  der  Pentekontaetie.  320. 

O.  Weinreich.  Blutgerichte  EN  YnAIOPQI.  326. 

W.  Spiegeliîer(;.  VAPAAN,  VAPAAI,  ZAPAAI.  332. 

O.  Weinreich.  Zu  Apuleius.  333. 

K.  Praechter.  Zu  Philodem  HEPI  OPrHI,  Fr.  E  (p.  4,  Wilke).  334. 

F.  Bechtel.  Thess.  KEPKINEYI,  BOYAEYI.  335. 

G.  WissowA.  Naclitrag  zu  Seite  113  ff.  336. 

27.    —  Neue   Jahrbucher  fur   das   klassische  Altertum, 
Geschichte,  und  deutsche  Literatur.  XLVII,  1921. 

Gerhart  Rodexwaldt.    Die  Form  des  Ereehtbeions.  1. 

Georg   Wissowa.    Die    Oîei-mani.scbe    Urgescbiehte    in    Tacitus' 

Germania.  14. 
.ïoHANNEs  li.BERG.  Phllologiselu'  Problème  der  Mediziugeschiehte 

des  Altertums.  31. 
WiLiiEL.M  Hoi/rsciiMiDT.  Dlchter  und  L'ebersetzer.  45. 
Emu,  Abegg.  Wilhelm  von  Ilumboldtund  die  Pi'obleme  der  allge- 

meine  Sprachwissenscliîift.  62. 
Wilhelm  Nestlé.  Der  Pessimismus  und  seine  Ueberwindunii  bei 

den  Grieclien    81 . 


PÉHIODIQIES  165 

WiLHEi-M  Kroix.  Die  Kunst  des  Livius,  97. 

JoHANNES  Hali-er.  War  Kaiser  Heinrich  VI.  ein  Miiinesauger? 

109. 
Otto  Weinreich.  Alexaiidros  der  Liigenprophet  und  seine  Stel- 

luug  iu  der  Religiositiit  de  II.  Jahrhunderts  n.  Chr.  129. 
J^ULios  Stenzel.  Ueber  deu  Einflusz  der  griechischen  Spraclien 

auf  die  philosoi)liische  Begriffsbildung.  152. 
WiLHELM     Weinbergkr.     Bezieliuiigen     zwischen     griechischer, 

lateiuischer  und  unserer  lioutigen  Sehrift.  164. 
Otto  Regenbogex.  Hippokrates  und  die  Hi[)pokratisclie  Samm- 

lung.  185. 
JoHANNES  KoHL,  Die  homerische  Frage  der  cliorizonten.  198. 
Arthur  Laudien    Gerhart  Ilauptmanns  k  Bogen  des  Odysseus  ». 

215. 
Richard  Laqueur.    Câsars  gallische   Statthalterschaft  und  der 

.lusbruch  des  Bûrgerkrieges.  233. 
Paul  Geigenmuller.  Plutarchs  Stellung  zur  Religion  und  Philo- 
sophie seiner  Zeit.  251 
Rudolf  Papenstecher.  Die  Landschaft  in  der  Malerei  des  Alter- 

tums.  271. 
Karl  Strecker.  Die  deutsche  Heimat  des  Ruodlieb.  289. 
Gerhart  Salomon.  War  Heinricli  (VII.)  ein  Minnesjiuger?  Eine 

Entgegnung.  305. 
Alfred  Gercke.  .\uch  ich  war  in  Arkadien  geboren.  313. 
Heinrich  Peters.  Die  Einheit  der  Ilias.  318. 
Ernst  Bickel.  Gyges  und  sein  Ring.  336. 

Ludwig  Deubner.  Ein  Stilj)rinzip  hellenistischer  Diehtkunst.  361. 
Georg  Steinhausen.  Die  Tragik  der  hoheren  Menschen.  379. 


28.  —  Bonner  Jahrbucher,  126,  1921. 

R.  ScHULZE.  Das  PriEtorium  von  Vetera.  1. 

H.  Mylius.  Die  Rekonstruktion  des  Legatenpalastes  im  rômi- 
schen  Lager  Vetera,  22, 

Fr.  Drexel.  Ein  Trierer  Fragment.  45. 

A.  OxÈ.  Der  Grabstein  des  Pudens.  51. 

H.  AcHELis.  Denkmaler  altchiistlichei-  Kunst  in  den  Rhein- 
landen.  59. 

J.  Hagen.  Drei  rheinische  Miinzfunde  aus  dem  Ende  des  17.  Jahr- 
hunderts. 82. 

F.  WiNTER.  Stilbesonderheiten  in  dei-  rômischen  Architektur 
Galliens  und  der  Rheinlande.  105. 


166  PÉIUODIQ!  ES 

F.    WiNTER.    Die    Darstelluug   des   Bliekes  in   der  griechischeu 

Kunst.  110. 
H.  Lehnkr   Zukunftaufgabeii  der  rheinischen  Altertumsvereine. 

111. 

A.  Dyroff.  Die  lionner  Marklsilule  uud  ihre  Verwaiulten.  124. 
P.  ScHUBRiNG.   Der  antike  Mythos  in  der  Malerei  des  Quattro- 
cento. 1118. 

B.  Sadée.  Der  neolitbische   Festungsbau  uud  die  Aclueennauer 
der  Uias,  129. 

F.  ÛELiiANN.  Haustypen  in  Bibrakten.  132. 


29.  —  The  Antiquaries  Journal.  I.   1921. 

A.  \V.  Clapham.  Tbe  Latin  niouastic  buildings  of  the  Uhureli  of 

the  Holy  sepulchre  at  Jérusalem.  1. 
A.  O.  CuRi.E.  Tbe  discovery  of  silver  at  Traprain  Law   42. 
E.  C.  R.  Armstrong.  Au  imperfect  Irish  sbrine.  48. 
C.  Johnson.  Jobn  Plummer,  Master  of  tbe  cbildren.  52. 
H.  F.  Westlake.  a  coffin  cbalice  from  Westminster  Abbey.  56. 
L.  H.  DuDLEY  BuxTON.  Excavations  at  Frilford.  87. 
E.  A    Rawlence.  On  tbe  site  of  tbe  battle  of  Etbandun.   105. 
E.  C.  R.  Armstrong.  An  Irisb  bronze  casting  formerly  presei-ved 

at  Killna  Castle,  Co.  Westmoatb.  122. 
Laurence  Weaver.  Discoveries  at  Amesbury   125. 
Reginald  a.  S.mith.  Irisb  gold  crescents.  l'M. 
Hekcui-es  Read.  Muséums  in  tbe  présent  and  future.  167. 
C.  R.  Peers  et  Reginald  A.  Smith.  Wayland's  smitby,  Berkshire. 

183. 
Stanley  Casson.  Tlie  Doriun  invasion  reviewed  in  the  light  of 

some  new  évidence.  199. 
W.  L.   HiLOBDRGH.  Notes  on  some  Englisb   alabaster  carvings. 

222. 
C.  R.  Peers.  Two  relic-holders  from  altars  in  tbe  uave  of  Rie- 

vaulx  Abbey,  Yorksbire.  271. 
O.  G.  S.  Cravvforu.  Tbe  ancient  settlements  at  Ilarlyn  Bay.  283. 
II.  DiKFORD  S.MITH.  An  EngUsli  Fifteentb-Century  panel.  300. 
J.  B.  P.  Kaiislake.  Furtber  observations  on  tbe  polygonal  type 

of  settlemeut  in  Britain.  303. 
Reginald  W.  Hooley.   Note  on   a   lioard  of  iron   currency-bars 

found  on  Wortby  Down,  Winchester.  321. 
W.  L    IIilubuimtH.  Note  on  h  bron/e  ])olycandelon  found  in  Spain. 

328. 


PÉRIODIQUES  167 

30.    -American  Journal  of  Pliilology    XLII,  1921. 

AV.  H.  KiRK.  And  aiui  or.  1. 

A.  M.  Sturtevant.   Die   Endung  des   Partizipium  prâteriti   der 

germauischen  starken  Verben.  12. 
T.  D.  GooDELL.  Plato's  Hedonism.  25. 
R.  B.  Steele,  Clitai'chus.  49. 

D.  A.  Penick.   Paul's   Epistles  compared  with  one  another  and 
with  the  Epistle  to  the  Ilebrews.  58. 

J.  W.  D.  Ingersoli,.  The  Fiist  Ode  of  Horace.  73. 

J.  E.  Harry.  Sopliocles  Philoctetes  13G0-1361.  77. 

W.  P.  MusTARD.  Petrarch'.s  Africa.  97. 

W.  N.  Brown.   Vyàgbraniâri,  or  the  Lady  Tiger-Killer  :  A  study 

of  the  motive  of  bluff  in  Hindu- Fiction.  122. 
Charles  W.  Peppler    Comic  terminations  in  Aristophanes.  152. 
Paul  Haupt.  Abraham's  bosora.  162. 

F.  A.  Weight.  Horace  and  Philodemus.  168. 

Tenney  Frank.  Horace,  Carm.  III.  4  :  Descende  caelo.  170. 
B    O.  FoSTER.  Livy  VII,  XIV,  6-10.  174. 

W.  P.  Shepard.  Chansons  de  geste  and  the  Homeric  problem.  193. 
Archer  Taylor.  The  .Tudas  curse.  234. 

G.  M.  Boli-ing.  Vulgate  Homeric  papyri.  253. 

Clara  M.    Knight.    The    time-meaniug   of   the   fo-participle   in 

Vergil.  260. 
G.  Bayley  Dolson.  1.  T.,  translator  of  Boethius   266. 

E.  H.  Stdrtevant.  V^^ords-ends  and  pauses  in  the  hexameter.  289. 
Clinton  W.  Keyes.  Original  éléments  in  Cicero's  Idéal  Consti- 
tution. 309. 

Tenney  Frank.  The  Carmen  saeculare  of  Horace.  324. 

Harold  II.  Bender.  Fluctuation  between  o  -  and  à  -  Systems  in 

Lithuanian.  330. 
W.  M.  Lindsay.  Desultory  remarks  on  Latin  pronunciation.  335. 
J.  H.  Baxter.   Contributions  to  Late  Latin  lexicography.  .340. 

31.  —  Journal  of  Hellenic  studios,  1921. 

W.  W.  Tarn.    Alexander's    ÛTro|uvr)|uaTa   and   the    a  World-King- 

dom  ».  1. 
W.  W.  Tarn.  Héraclès  son  of  Barsine.  18. 
H.  J.  W.  Tillyard.  The  problem  of  Byzantine  Neumes.  29. 
Marcus  N.  Tod.  The  progress  of  Greek  epigraj^hy,  1919-1920.  50. 
E.  J.  Webb.  Cleostratus  reddivivus.  70. 
H.  J.  Rose.  The  Greek  of  Cicero.  91. 


168  PÉRIODIQUES 

32.  ~  Leodium,  XIV.  1921. 

Lkon  Laiiaye.  Le  concile  décanal  et  l'Association  des  Trente 
Prêtres  à  Liège    1. 

A.  PouLLET.  Gens  de  lignage  au  Pays  de  Liège.  3. 

H.  VAN  DE  Weerd.  Hoccascaute  (in  pago  Texaudrensi).  7. 

G.  LE  Paige.  Un  sceau  du  curé  de  Spontin  (xiii''  siècle).  9. 

(jT.  Simenon   Les  serfs  d'église  à  Jupille  au  xii®  siècle.  11. 

.r.-.T.  Laminne    La  cosmogonie  de  Rupert  de  Deutz.  13. 

.r.  CoENEN.  La  topographie  de  nos  monastères  romans.  26. 

A.  P.  Gens  de  lignage  au  pays  de  Liège.  36. 

Demahkt.  Histoire  de  la  collégiale  Notre-Dame  de  Huy.  37. 

J.  Langohr.  Autour  de  Montzen;  son  église,  sa  paroisse,  ses  en- 
virons. 39. 

A.  DE  Ryckel  Le  couvent  de  Sainte-Marie-Madeleine  de  Bétha- 
nie  à  Lens-Saint-Remy.  51. 

.r.  Ceyssens.  Un  conflit  fiscal  au  xv^  siècle  dans  le  pays  de 
Dalhem.  57. 

DE  LiMBouRG    La  manière  d'écrii'e  l'histoire  d'une  famille.  61. 

Jean  Gessler.  La  réception  du  cardinal-légat  Nicolas  de  Ousa  à 
Hasselt.  62. 

Théodore  Gobert   Les  Sacs  à  Liège.  65. 

J.  Ceyssens.  Au  Val-Dieu.  Un  vieux  manuscrit.  68. 

Schoolmeesters.  Les  statues  de  la  Sainte  Vierge  à  la  Cathé- 
drale. 72. 

J.  Ceyssens.  Les  anciens  records  civils  et  ecclésiastiques  comme 
sources  pour  l'histoire.  74. 

H.  Gobert.  Prières  de  XL  heures  en  1710  à  Liège.  91. 

L.  Laiiaye.  Les  Sacs  à  Liège   94. 

33.  —  Mechlinia.  I,  1921. 

Deftige  herbergen  in  Mechelen.  2. 
Une  acquisition  récente  aux  Archives  de  Malines.  6. 
L.  Antiieunis.  Het  Oud  Apostelinnen  Klooster.  7. 
H.  CoNiNCKX.  Het  altaar  van  het  Smedersambacht. 
O.  Le  Maire.  Une  Malinoise  fondatrice  du  couvent  des  Carmé- 
lites anglaises  de  Darliugton.  14. 
H.  CoNiNClvX.  Albert  Diirer  à  Malines.  17. 
G.  Van  Doorslaer.  Drie  mannen  van  de  oude  «  Peoene  ».  19. 
G.  Van  Doorslaer.  Jean  Ruyssche.  21. 

O    Le  Maire.  Notice  sur  la  famille  van  Ileydenryck.  24.  41. 
H.  DiERicKX.  La  corporation  des  graissiers  à  Malines.  27. 
.F.  V7iTTMANN.  L'ancien  couvent  des  Apostolines.  30. 


I 


PÉRIODIQI'ES  169 

R.  Van  Aerde.  Musicalia.  31,  35,  55. 

H.  DiERiCKX.  Het  Stadsmuseuni.  33. 

U.  FoNCKE.  Mechelsche  folklore  39. 

Fr.  Van  den  Bergh.  SchermoeLsblok   40. 

G.  Van  Doorslaer.  Beeldsnijderij  in  palmhout.  47. 

G.  Van  Doorslaek.  L'origine  malinoise  de  l'organiste  composi- 
teur Jean  Lestainnier.  49,  68. 

Robert  Foncke.  In  memoriam  Victor  A.  de  la  Montagne.  52. 

J.  WiTTMANN.  Anciennes  maisons  de  campagne  des  Jésuites.  54. 

H.  CoNiNCKX.  Henri  Van  den  Broeck,  peintre,  dit  :  Henri  uit  de 
Kroon.  60. 

E.  Stp;enackers.  Over  seholen  van  Oud-Mechelcn.  65,  88. 

Robert  Foncke.  Mechelsche  folklore.  Van  vroegere  heiligen- 
viering.  73. 

R.  Van  Aerde.  Musicalia  (suite).  74,  81. 

Robert  Fonckk.  Mechelsche  folklore.  Een  oud  lied  :  «  Van  den 
ruiter  ».  83. 

G.  Van  Doorslaer.  Valentin  Klee,  le  premier  fabricant  de  cuir 
doré  à  Malines.  87. 

34.  —  Mémoires  de  la  Société  de  Linguistique  de  Paris, 
XXII,  1920-1921. 

H    Pedersen.  Deux  étyniologies  latines  [sacerdos,  sosijes].  1. 
A.  Meillet.  Du  nominatif  et  de  l'accusatif.  49. 

—  De  quelques  contradictions  phonétiques.  56. 

J.  Vendryes.  Sur  les  mots  attaques  ((ui  ont  pr)  au  lieu  de  pà.  H4. 

A*-C.  Juret.  Notes  d'étyraologie  latine.  68. 

J.  Vendryes.  Sur  quelques  formations  de  mots  latins.  97. 

G.  HôEG.  Le  dialecte  des  Dialexeis.  107. 

V.  Magnien.  L'alternance  rythmique  chez  Ilomèi'e  (fin).  113. 

A.  Meili^et.  a  propos  du  nom  iudo-eui*opéen  de  la  «  puce  ».  142. 

—  Le  nom  de  nombre  «  un  ».  144. 

—  L'emploi   du  duel  chez;    Homère  et  l'élimination  du 

duel.  145. 
V.  Magnien.  Deux  questions  homériques.  165. 
J.  Marouzeau.  Xotes  sur  la  formation  du  latin  classi(iue.  174. 
L.  Laurand.  Eîrioav  et  Fionisme  de  Thucydide.  182. 
A.  Meii,i-et.  Les  nominatifs  masculins  singuliers  de  démonstra- 
tifs en  latin.  201. 

—  Les  noms  du  type  FépYov.  203. 

35.     Meicure  de  France.  CXLVIII,   1921. 
J.  G.  Prod'homme.  Napoléon,  la  musi(iue  et  les  musiciens.  127. 


170  l'ÉHlOniQl  ES 

CXLIX,  1921. 

Gabriel  Brunet.  L'art  de  vivre  en  l'œuvre  de  La  Fontaine,  40. 
Georges  Izambard.  L'exemplaire  conversion  de  Monsieur  de  La 
Fontaine.  127. 

CL,   1921. 

Fi,ORiAN  Delhorbk.  Dante,  critique  littéraire.  419. 

36.  —  Neuphilologische  Mitteilungeu.  1921. 

Werner  Mulertt.  Ueber  die  Frage  nach  der  Herkunft  der  Troba- 

dorkunst.  1. 
V.  Tarkiainen.  Quelques  observations  sur  le  roman  «  Persiles  y 

Sigismuuda  »  de  Miguel  de  Cervantes   41. 
Léo  Spitzer.  Hispanistische  Wortmiszellen.  44. 

—  Katalauisch  ■  ■  -y  lot.  50. 

0.  J.  Tallgren.  Fortuna  «  tempête  ».  5.3. 

W .  SoDERiiJEi.M.  Dante  et  l'Islam.  8i).  ■ 

37.  —  Mnemosyne,   1921. 

Paulus  Thomas.  Observationes  ad  scriptores  latinos.  1. 

GuiiJELMUS  VoM-GRAFF.  Silenus  libaturus.  76.  _ 

1.  I.  H.  Ad  luvenalis  S.  III.  vs.  57.  81.  ■ 
P.  H.  Damsté.  Ad  C.  Valerii  Flacci  argouautica.  S2,  118,  251. 

J.  VAN  Wageningen.  De  siccandis  unioribus  (ad  Min.   Fel.  Oct. 

II  §  3).  102. 
C.  Brakman.  Prudentiana.  106. 

—  Ad  historiam  Appollonii  régis  Tyri.  110. 
G.  V.  Euripidis  fragmentum  4G6.  112. 
GuiLiELMus  VoLLfîRAFF.  De  inscriptionc  Argiva.  113. 
I.  I.  H.  Ad  Cicerouis  pro  Milone  i:^  68.  117. 

J.  H.  VAN   Haeringen.  h  Sciiptores  forenses  »  apud  Ambrosium 

(exam.  III,  3,  13;.  136. 
Ch.  Ch.  F.  Charitonides.  Varia  ad  \'arios.  139. 
G.  V.  Plutarch.  Sol.  19.  4-143. 

J.  C.  N.VBER    Obscrvatiunculae  de  iure  Romano.  144. 
I.  1.  H.  Ad  Senecae  Fpl.  xxii,  7-171. 
F.  MuLLER.  De  Hygini  aetate.  172. 

J.  VAN  YzEREN.  De  Cratylo  Ileracliteo  cl  de  Platonis  Cratylo.  174. 
J.  J.  E.  HoNDius.  Novae  inscriptiones  atticae   201. 
J.  RÉVAY.  Lectiones  Serenianae.  205. 
I.  I.  H.  Ad  Ciceroni^  pro  rege  Deiotaro  .^  8.  208. 
C.  Brakman.  Horatiana.  209. 


PÉRIODIQUES  171 

K.  KuiPER   De  Theociiti  Carminé  XVIII.  223. 

I.  S.  Phillimore.  Ad  Moretum.  243. 

I.  I.  H.  i  d  Ciceronis  in  Vatinium  int.  §  21.  245. 

GUILIELMUS  VOLLGRAFF.  'Ev   |UljpTOU   K\ab(.  246. 

I.  I.  Hartm.\nn.   De  locorum  similium  consideraudorum  ratione. 

269. 
GuiLiELMus  VoLLGRAFF.  De  voce  Tliracia  abauTuiç.  285. 
C.  Brakman.  De  Ciceronis  libris  de  Republica   295,  304. 
I.  I.  H.  Ad  Luciani  de  Salvatione  §  64.  309. 
G.  V.  Ad  legem  collegii  cantoi'um  Milesii.  310. 
I.  I.  Hartmann.  Propertiana,  311,  337,  427. 
Bonus  e  Gallia  nuntius.  333. 
I.  I.  H   Lans  Arnhemiae   335. 
I.  M.  HooGVLiET.  Ad  Aristophanis  Nubes,  aunotationes  criticae- 

352. 
1.  I.  H.  Ad  Platonis  Rempublicam .  379. 
C.  Brakman.  Nugae.  380. 
G.  V.  Xenoph.  Hell.  IV,  2,  18.  381. 
C.  Brakman.  Ad  Cic.  de  Rep.  IV.  382. 
P.  H.  Damsté.  Ad  C.  Valerii  Flacci  Argonautica.  383. 
J.  D.  Meerwaldt.  De  Trimalchionis,Ctesibii,  Platonis  automatis. 

406. 
G.  V.  Ad  Alemanem.  426. 
I.  I.  H.  Ad  Ciceronis  or.pro  Sestio  §  46.  448. 

38.  —  Germanisch-Romanische  Monatsschrift.  1921. 

W.  VON  Wartburg.  Romanische  liexikographie  seit  1912.  1. 
Karl  Luick.   Ueber  die  Betonung  der  franzôsischen  Lehnworter 

im  Mitteleuglischen.  14. 
Heinrich  Schrôder.  Hyperkorrekte  (umgekehrte)  Schreib-  und 

Sprechformen,  besonders  im  Niederdeutschen.  19. 
Albert  Leitzmann.  Heimat  und  Al  ter  von  Goetbes  angeblicher 

.Tosephdichtung.  31. 
Alfred  Schirmer.  Die  deutsehe  Umgaugssprache.  42. 
Ernst  Fraenkel.  Zur  Bezeichnung  der  Zeiteiateilungen  in  den 

indogermanischen  Sprachen.  53. 
Ernst  Ociis.  Die  Gliederung  des  Alemannischen.  56. 
Léo  Spitzek.   Zur  stilistischen   Bedeutung  des   Imperfekts   der 
Rede.  58. 
—  Spâtlat.  iotticus.  60. 

Max  J.  Woi.FF.  Zum  Wesen  des  Komischeu.  65. 
Karl  Holl.  Goethes  Vollendung  in  ihrer  Beziehung  zu  Byrou 

und  Carlyle.  75. 


172  PÉHIODIQI'ES 

Hans  Hkcht.  Slielley  iibcr  politische  Reformen.  87,  149. 
Friedrich  ScniiRR.  Bas  Aufkomuien  der  matière  de  Bretagne  im 

Lichte  der  veniiulerten  literarliistorischen  Betrachtuiig.  96. 
Cari<  Wesle.  Die  deutsche  Suldatensprache  iiii  Kriege.  108. 
.\nton  BiicHNER.  Rainiunds  «  geflugelte  Wurst  ».  117. 
Charlotte  Buhlek.  Die  Typisieruug  in  der  Diclitung.  129. 
GusTAV  Neckel.   Das  Gedicht  von  Walthariu.s  manu  fortis.  V^'è, 

209. 
Max  J.  Wof.FF.  ttalienische  Komôdiendichter.  160,  230. 
Otto   Cartkijjkki.  Theaterspiele  am  Hofe   Karls    des  Xiihnen 

von  Burguud.  168. 
Adolf  V.  Groi.man.  Goethes  :  Xovelle.  181. 
Franz  Harder.  Zur  Verwendung  von  Finalausdi-iicken  in  «  pro- 

videntieller  Bedeutung  ".  188. 
Franz  Dornseiff.   Das  Zugehôrigkeitsadjektiv  nnd  das  Krenid- 

wort.  193. 
Oskar  Walzel.  Fritz  von  Unruh.  20U. 
Fritz  Necbert.  Studien  zur  franzosischen  Aufklârungsllteratur. 

221. 
KoNRAD  Hentrich.  Modales  «  tun  »  im  Hoehdeutschen.  240. 

—  Lautliche  Differenzierung  als  Folge  des  .Af- 

fekts    und    ps^vchologisch    —   begriffliclier 
differenzierung    242. 

—  Das    Vernersche    Gesetz    in    der    Hoehdeut- 

schen Umgangssprache.  244. 

—  Dieser  —  der  nâchste.  2^5. 

Max  h.  Jelmnek.  Schopenhauer  und  die  Sprach-«issenschaft.246. 
Feux  Rosenberg.  Shakespeare  in  demUrteil  HippoIyteTa.ine.250. 

39.        Neophilologus,  VI,  1920-1921 

B.  H.  J.  Weerenbeck.  A  projjos  de  Galimatias.  1. 

Emile  Boulan.  La  littérature  féminine  et  le  dix-huitième  siècle 

«  charmant  et  maudit  ».  5. 
('.  KiiAMER.  Les  poèmes  épiques  d'André  Chénier,  III.  1.3. 
SiGMUND  Feist.  Der  Name  der  Germaneu.  29. 
J.  J.  A.  A.  Frantzen.  Kleine  Beitriige  zur  Wortkunde.  42. 
P.  FiJN  VAN  Draat.  The  place  of  the  adverb,a  study  in  rhythra.rj6. 
Jos.  ScHRiJNEN.  Genitivus  mysticus.  88. 

—  De  Latijnsche  accusativus  absolu  tus.  90. 

M.  Boas.  De  raetoromaansche  versie  der  Disticha  Calonis.  97. 
W.  VAN  Eeden.     De    groote    Olafs    saga    Tryggvasonar    en    de 

Hallfredar-saga.  105. 
A.  G.  Van  Hamel  —  K.  R    Gallas.  Over  Ossian    117 


PÉRIODIQUES  173 

J.  J.  A.  A.  Fkantzkn.  Ein  spates  Zeugnisz  lateiniscber  Kleriker- 
dichtung.  130. 

(t.  Busken  Huet.  ((  Tartuffe  ",  145. 

().  Kramer.  Les  poèmes  épiques  d'André  Cliénier.  IV,  L'Amé- 
rique. 149. 

A.  L.  CoRiN.  Ueber  den  Ursprnng  von  mhd.  zecke  imd  desseu 
Bedeutung  bei  Tauler  161. 

W.  A.  VAN  DoNGEN.  Almost  and  nearly.  184. 

D.  C.  Hesskling.  Spoken  {g-alei,  kaoiaar,  pantoffel).  207. 

40.  —  Classical  Philolog-y,  1921. 

Charles  D.  Auams.  Ta  Yéppct  évetriiuTTpaaav,  Demosthenes.  XVIIl, 

169.  1. 
W.  L.  Westermanx.  Land  registers  of  Western  Asia  under  the 

Seleueids.  12. 
John  A.  Scott.   Homer  as  tbe  poet  of  the  Thebais.  20. 
L.  R.  Taylor.  The  Latina  Colonia  of  Livy,  XL,  43.  27. 
Donald  McFayden.  The  Princeps  and  the  Sénatorial  Provinces. 

34. 
Caul  1).  BucK.  Studies  in  Greek  noun-foi-mation.     Dental  termi- 

nations.  II,  1.  51,  IL  2.  200. 
Francis  A.  Wood.  Greek  and  Latin  etymologies   63. 
W.  A.  Oldfather,  j.  B.  Titchener.  A  note  on  the  Lexicon  raili- 

tare.  74. 
Paul  Shorev.  Note  on  the  repeated  simile.  Homer  Iliad,  XI,  555 

and  Xv'IJ,G64.  76. 
W.  A.  Heidel.  Two  Sophoclean  cruxes.  77. 
A.  S.  Pease.  Sceleratum  frigus. 

Frank  E.  Robbins.  The  tradition  of  Greek  arithmology.  U7. 
Gordon  Laing.  The  origin  of  the  cuit  of  the  Lares.  124. 
Hardin  Craig.  Drydeu's  Lucian.  141. 
Paul  Shorey.  Horace  .Sa/ires.  I,  3,  112.  13  and  Plato  Thesetetus, 

172,  A,  B.  164. 
W.  L.  WesteriMANn.  The  a  uninundated  lands  »  in  Ptolemaic  and 

Roman  Egypt.  II.  169. 
A.  E.  R.  BoAK.  Greek  and  Coptic  school  tablets  at  the  University 

of  Michigan.  189. 
A.   Shewan.  nO0H  and  nOGOI  in  lUnd  and  Odyssey.     Another 

chorizontic  failure.  193. 

C.  RiTTER.  Platon  Symposion.  215  E.  197. 
Cîlyde  Murley.  lYKOctANTHI  and  lYKINOI.  199. 
A.  S.  Pe.vse.  Paraliporaena.  200. 

D.  R.  Stuart.  On  Vergil  Erlog-uc,  IV,  60-63.  209. 


17  4  PÉRIODIQUES 

E.  A.  SoNNENSCHiciN.  Ego  emphatic  and  unemphatic,  in  rises  and 

falls  of  Old  Latin  dramatic  verse.  231. 
Robert  J.  Bonner.  The  Megarian  decrees.  238. 
W.  H.  KiRK.  Uti  legassit.  246. 

R.  P.  RoBiNSON.  The  inventory  of  Niccolô  Niccoli.  251. 
M.   E.   Dkutsch.    Caîsar  and   the    Ambrones    (Suetonius   JuUus, 

IX.  3).  2.-SG. 
Paul  Shorey.  Tùxn  i^i  Polybius.  280. 
A.  S.  Ferguson.  On  a  fragment  of  Gorgias.  284. 
G.  M.  Calhoun.  Demosthencs  against  Bœotus  I    XXXIX),  37-38. 

287. 
A.  G.  L.mrd.  The  Persian  army  and  tribute  lists  in  Herodotus. 

305. 
H.  W.  Prescott.  Callimachus'  Epigram  on  the  Nautilus.  327. 
X.  W.  De  Witt.  Virgils  copyright.  338. 
Gertrude  S.MrTH.  The  Prytaneum  in  the  Atheniau  ainnestylaw. 

345. 
R.  B.  Steele.  Ablative  of  the  efficient.  354. 
G.  M.  Boi-LiNG.  Infinitives  in  —  é|uev  in  Homer,  Tmmanuel  Bekker 

and  Professer  Scott.  362, 
H.  C.  NuTTiNG.  Horace,  Ars  poetica,  179  ff.  384. 
Tenney  Frank.  Horace's  «  Swan  »  song,  Odes,  II,  20.  386. 
S.  E.  Bassett.  On  Iliad,  II,  301  ff.  387. 
J.  O.  LoFBERG.  ((  Unmixed  milk  »  agaln.  389. 
W.  L.  Westermann.  Correction  upon  the  «  Land  registers  under 

the  Seleuoids  ».  391. 

41.  —  The  Classical  Quarterly,  1921. 

.John  Burnet.  Vindicia?  Platonicse  III.  1. 

J.  A.  Fort.  Corrigenda  on  the  Peroigiliiim  Veneris.  7. 

T.  W.  LuMB.  Notes  on  Achilles  Tatius  (suite).  8. 

F.  H.  CoLSON    The  fragments  of  Lucilius  IX,  on  El  and  I.  11 . 

Cyrii.  B.mley.  Notes  on  Lucretius.  18. 

D.  Emrys  Evans.  Case-usage  in  the  Greek  of  Asia  Minor.  22. 

Ethei,  Mary  Steuart.  The  earliest  narrative  poetrjj^  of  Rome.  31. 

W.  M.  LiNDSAY.  «  Glossae  coUectae  »  in  Vat.  Lat.  1469.  Calomum 

Naumachia.  38. 
Robert  Weiu.  Apnleius  Glosses  in  the  Abolita  Glossary.  41. 
k.  S    Fkrguson.   EE  rnOBOAHI.  43. 
RoDERiCK  McKenzie.  GriBca.  44,  186. 
M.   T.    Smii-ey.    The  MSS.   of  Callimachus'    Hymns  (suite).   57, 

113  (fin). 
B.  L.  Ui.i.M.AN.  Ca^sar's  funeral  in  Lucan  VTll,  729-735.  75. 


PÉHIODIQIES  175 

M.  L.  W,  Laistnkr.  Isocratea.  78. 

C.  M.  MuLVANY   On  Eth.  Nie.  1,  c.  5.  85. 

F.  W.  Hall.  Nuances  in  Plautine  mètre.  99. 

J.  E    Harry.  Sophocles,  AJax.  601-60.3.  106. 

T.  W.  Allen.  Notes  on  Greek  geograiihy.  107. 

J.  Whatmough.  Fordiis  and  f'ordicidia.  108. 

J.  U.  PowKLL.  NéiTobeç  Ka\fiç  'A\oaij&vnç.  125. 

Arthur  Platt   Sophoclea.  125. 

A.  S.  Fkrguson.  Plato's  simile  of  liglit.  Part.  I.     The  siiniles  of 

the  Sun  and  the  line.  131. 
M.  Platnaukr.  Greek  colour-perception.  153. 
E.  LoBEL.  Sappho,  Book  I.     The  NeretVZ  Ode.  163. 
J.  U.  PowELL.  'lepà  |)éEeiv.  165. 
J    U.  PowELL.  "Eppe  KOKH  T\r|vr|-  165. 
E.   S.  FoRSTER.    Some    eraendations  in   the    fragments   of  Theo- 

phrastus.  166 
Tenney  Fr.\nk.  The  Scipionic  inscriptions.  169. 
A.  E.  HousMAN.  Lucan  Vil,  460-465.  172. 
E.  V.  Arnold.  A  wilful  exaggeration.  174. 
A.  E.  HousMAN.  The  Codex  Liiisieusis  of  Mauilius.  175. 
E.  H    W.  CoNWAi'.  The  singular  nos  in  Vergil.  177. 
Madeleine  E.  Lees.  The  ablative  case  in  Vergil.  183. 

E.  A.  Lowe.  The  oldest  extant  MS.  of  the  combined  Abstrosa 
and  Abolita  glossaries.  189. 

J.  F.  MouNTFORD.  Some  quotations  in  the  Liber  g-lossaruin    192. 
Carl  Scnocu.  The  earliest  visible  phase  of  the  nioon.  194. 

42.  —  The  classical  Review,  XXXV,  1921. 

J.  W.  Mackail.  a  lesson  ou  an  Ode  of  Horace.  2. 
T.  L.  Agar.  The  Homeric  Hymns,  XIV.  12. 

F.  A.  Wright.  Meleager  :  Notes  and  translations.  16. 
A.  S.  Ferguson.  Plato.  Republic,  421  A.  17. 

J.  A.  Smith   TOAE  TI  in  Aristotle.  19. 

S.  EiTREM.  Miscellanea  [phil.  class  ].  20 

J.  P.  Postgate.  De  uihilo  nil.  23. 

J.  W.  M.  Ou  the  word  «  educare  ».  26. 

W.  R.  Halliday   Pygmies  and  crânes.  27. 

J.  E.  Harry.  HAPa"  nOAA  and  EN  nOIlN.  27. 

F.  L.  Lucas.  Aeschylus  and  the  huuting  field.  28. 

R   J.  Shackle.  Pindar,  Nem.  HT,  59-63.  28 

Arthur  Platt.  On  Aetna,  597-598.  29. 

A.  D.  Godley.  Some  translations.  51. 

A.  C.  Pearson.  The  Rhésus.  52. 


176  PÉRIODIQUES 

C.  E.  S.  IIeadlam.  The  teclinique  of  Vergil's  verse.  61. 
WiLMAM  Kerry.  .4.n  écho  of  Euripitles  in  Propertius.  64. 
J.  Wh.vtmough.  cil.  I,  1538  (=  YI,  335)  65. 

E.  H.  BiAKENEY.  Xote  ou  IgnatrEp   ad  Eph.,  XK.  66. 
J .  P.  PosTGATE.  Horatiana.  66. 

W.  M.  LiNDSAY.  Varro'.s  (luae.stionuni  plautiuaiuiii  libi-i  V.  67. 

F.  L.  Lucas.  The  Octavia.  91. 

T.  L.  Agar.  The  Homeric  Hymus  (XV).  93. 

AusTiN  Smyth.  Notes  on  Aesehylus.  97. 

J.  U.  PowELL.  Aesehylus.  Choephori  296    99. 

J.C.  Lawsox.  Aesehylus,  A^amemnon.  100. 

Arthur  Platt.  Emendations  of  Xenophon's  HeUenica.  100. 

H.  W.  Garroi).  Horace,  Odesl,  VIII.  1-2.  102. 

W.  R.  INGE.  Horace,  Epp.  1,  2,  30.  31.  103. 

Alexander  J.  T>.  PoRTKous.  Virgil's  «  Eclogues  »  :  a  metrical  due 

to  the  order  of  composition.  103. 
S.  G.vsELEE.  Martial  IX.  21.  104. 
(î.  C.  Richards.  HEPIAKTOI  (0YPAI)    105 

43.  —  The  American  Historical  Review.  XXVI,  1920-1921. 

J.  Fka.nki-in  .Tamkson.  The  American  Historical  Review,  1.S95- 
1920.  1. 

Robert  L.  Schuvlek.  The  recall  of  the  Légions  :  a  phase  of  the 
decentraiization  of  the  British  Empire.  18. 

Edward  Channing.  An  historical  retrospect.  191. 

MiKiiAii.  RosvoTTSKR.  South  Russia  in  the  Prehistoric  and  Clas- 
sical  Period.  203. 

L.  M.  Skaks.  a  Confedei'ate  Dijjloinat  at  the  court  of  Napo- 
léon III.  255. 

Frédéric  Dun'Calf.  The  i)easants  crusade.  440. 

Frank  A.  Goi.dku.  The  American  Civil  War  through  the  eyes  of 
aRussian  diploraat.  464. 

44.  —  The  English  Historical  Review,  1921. 

The  Beginnings  of  the  l'higlish  Historical  Review.  1. 

Ai.iCE  M.    AsHLEY.   The  «  .\liinenla  »   of  Nerva  and  his   suci-es- 

sors.  5. 
F.  M.  PowiCKE.  Maurice  of  Rievaulx,  17. 
Godfrey  Davies.  The  battle  of  Kdgehill.  30. 
W.  A.  MoNis.  A  mention  of  scutage  in  the  year  llOO.  4.j. 
.TH.  Round.  A  butler's  serjeantrj'.  46. 


I 


PÉRIODIQUES  177 

James  Tait.  The  two  earliest  municipal  charters  of  Coventry.  50. 

HiLDA  JoHNSTONE.  Tlie  Parliamcnt  of  Lincoln  of  1316.  53. 

C.  Johnson   Negotiations  for  the  ransom  of  David  Bruce  in  1349., 

57. 
C.  H.  Haskins  &  Mrs.  Eric  Geokcîk.  Verses  on  the  Exchequer  in 

the  xvth  century.  58. 
CouA  L.  ScoFiELD.  Indeuturcs  between  Edward  Wand  Warwiok 

the  Kingmaker  67. 
Irkne  Wright   The  early  history  of  Jamaica,  1511-153^.  70. 
J.  E.  Neale.  The  authorship  of  Townshend's  «  Historical  Col- 
lections ».  96. 
(t.  h.  Wheei.er.  The  genealogy  of  the  early  West  Saxon  Kiags. 

161. 
Richard  A.  Nkwhali,.  The  war  finances  of   Henry  V.  and  the 

Dukeof  Bedford.  172. 
Hosea  Bai.i.ou  Morse.  The  supercargo  in  the  China  trade  about 

the  year  1700.  199. 
J.  H.  Round.  «  Shire-house  »  and  castle-yard.  210. 
J.  A.  TwEMi-ow.  The  etymology  of  «  Bay  sait  ».  214. 
S.  T.  GiBsoN.  The  Eschcatries,  1327-1341.  218. 
Winifred  Jay.  The  House  of  Commons  and  St    Stephen's  Gha- 

pel.  225. 
GoDDARu  H.  Orpen.  An  unpublished  letterfrom  Charles  I.  to  the 

Marquis  of  Ormonde.  229. 
.r.  Hoi.LAND  Rose.  Lord  Elgin's  report  on  Levantine  affairs  and 

Malta,  28th  February,  1803.  234. 
J.  H.  Round.  The  dating  of  the  early  Pipe  Rolls.  321. 
Charles  H.  Haskins.  The  «  De  arte  venandi  cum  avibus  »  of  the 

Emperor  Frederick  II.  334. 

F.  M   Greis  Evans.  Writs  of  assistance,  1558-1700.  356. 
Lillian  M.   Penson.  The   Loudon   West   ludia   interest   in    the 

xvuith  century.  373. 
H.  Idris  Belle.  A  list  of  original  Papal  Bulls  and  Briefs  in  the 

Department  of  Manuscripts,  British  Muséum.  393. 
H.  E.  Salter.  The  beginnings  of  Cambi'idge  University.  419. 

G.  R.  Cole-Baker.  An  «  attracted  »  script.  420. 

Preserved  Smith.  Englishmen  at  Wittenberg  in  the  xvith  cen- 
tury  422 

45-  —  The  North  American  Review.  Vol.  213.  1921. 

Martin  T.  Baldwin.  The  tariff  aud  the  English  language.  36. 
Marshall  Putnam  Thompson.  Royal  Auvergne  sans  Tache.  225. 

12 


178  PÉRIODIQUES 

Vol    214,  1921. 

Gertrude  Schoepperle.  John  Synge  and  his  old  French  farce.  503, 
Archibald  Marsiiali>.   American  speech  and  English  lauguage. 
G28. 

E.  S.  Roscoe.  Johnson  and  Wordworth.  690. 
William  II.  Scheifley.  The  centenary  of  Flaubert.  809. 
P,  Scott  Stevenson.  Milton  and  the  Puritans.  825. 

46.  —  The  Romanic  Review.  1921. 

Ralph  C.  Williams.  The  purpose  of  poetry,  and  particularly  the 

epic,  as  discussed  by  critical  writers  of  the  sixteenth  century 

in  Ital3\  1. 
J.  L.  Perrier.  Bertran  de  Born,  patriot,  and  his  place  in  Dante's 

Inferno  (fin).  21. 
R.  T.  HiLL.  The  Vie  de  Sainte  Eiiphrasine  (fin).  44;. 
M.  Romera-Navarro.  Estudio  de  la  comedia  himenea  de  Torres 

Naharro.  50. 
John  L.  Gerig.  Doctoral  dissertations  in  the  Romance  languages 

at  Colurabia  University-A  survey  and  bibliography.  73. 
T,  F.  Crâne.  The  mountain  of  Nida.  A  postscript.  79. 
G.  L.  Hamilton.  The  pedigree  of  a  phrase  in  Dante  (Pui-g.  VII, 

107-108).  84. 

F.  Vexler.  Etymologies  and  etymological  notes.  90. 

P.  E.  GuYER.  The  influence  of  Ovid  on  Crestien  de  Troyes.  97. 

A.  M.  EspiNOSA.  Sobre  la  legenda  de  los  Infantes  de  Lara.  135. 

J.  P.  WicKERSHAM  Crawford.  A  notc  on  the  Boy  Bishop  in 
Spain.  146. 

R.  Weeks.   The  Siège  de  Barbastre.  155. 

A.  Hamilton.   Ramôn  de  la  Cruz   social  reformer.  168. 

A.  H.  Krappe.  The  sources  of  Sebastiano  Erizzo's  Di.scorso  dei 
gooerni  cioili.  181. 

A.  S.  CooK.  Comparisons-Dante,  Infei-no,  1.  80:  Petrarch.  Mon- 
taigne, etc.  185. 

E.  Buceta.  Proparoxitonismo  y  rima  encadenada.  187. 

4~.  —  Revista  de  Archives,  Bibliotecos  y  Musées,  1921. 

Cristôbal  Espejo.  La  carestia  de  la  vida  en  el  siglo  xvi  y  medios 

de  abarataria.  1,  199. 
Angela  Garcia  Rives.  Clases  sociales  en  Léon  y  Castilla   19,  157- 
José  Masia  Millâs.  Influencia  de  la  poesia  popular  hispano  mu- 

sulmana  en  la  poesia  italiaua.  37. 


I 


PÉRIODIQUES  .  179 

Enrique  Pacheco  y  de  Leiva    Grave  error  poli'tico   de   Carlos  I 

haciendo  la  boda  de  Felipe  II  con  doua  Maria,  reina  de  Ingla- 

terra.  60,  276. 
Vicente  Castaneda  y  Alcover    Relaciones  geograficas,  topogra- 

ficas  e  historicas  del  Reino  de  Valencia  heclias  en  cl  siglo  xviii 

a  ruego  de  don  Tomas  Lopez.  85,  247. 
Angel  Gonzalez  Palencia.  Fragmentes  del   archivo  particular 

de  Antonio  Pérez,  secretario  de  Felipe  II.  111,  293. 
M.  S.  Y.  S   Documentos  relatives  a  la  pintura  en  Aragon  durante 

los  siglos  XIV  y  xv.  136. 
Carmelo  Vinas  Me  y.   Una  pagina  para  la  historia  del  lieleuismo 

en  Espana.  168. 
Antonio  Ma.  Alcover.  Los  mozarabes  baleares.  226. 

48.  —  Revista  de  filologia  espanola,  VIII,  1921. 

Américo  Castro.  Unos  aranceles  de  aduanas  del  siglo  xiii.  1. 

T.  Navarro  Tojias.    Historia  de  algunas  opiniones  sobre  la  can- 

tidad  silâbica  espanola.  30. 
Léo  Spitzer.  «  Arribota  ».  58. 

Samuel  Gili.  Una  nota  para  las  «  Cantigas  ».  60. 
Erasmo  Buceta.  Sobre  una  pai'onomasia  en  gonzalo  de  Bereeo  G3. 
Fr.  a.  de  IcAZA.  Cristôbal  de  LIereua  y  los  origenes  del  teatro 

en  la  America  espanola    121. 
José  F.  Montesinos.  Contribuciôn  al  estudio  del  teatro  de  Lope 

de  Vega.  131. 
J.  Sarrailh.  Algunos  datos  acerca  de  D.  Antonio  Linâu  y  Ver- 

dugo,  autor  de  la  «  Guia  y  Avisos  de  Forastei'os  »  (1620).  150. 
F.  DE  Figueiredo.   O  thema  de  «  Quixote  »  na  litteratura  portu- 

gueza  do  seculo  xix.  161  . 
J.  M    Chacôn  y  Calvo.  El  primer  poema  escrito  en  Cuba.  170. 
Leo   Spitzer.    Vieil   esp.    «  poridad  n    esp.    «  puridad  ».    post. 

«  puridade  »,  «  secret  »,  176. 
E.  Buceta.  La  critica  de  la  oscuridad  sobre  poetas  anteriores  a 

Gôugora.  178. 
A.  C.   «  Viedro  »     180. 

49.  —  La  Révolution  française,  1921. 

A.  HouTiN.  Quelques  notes  sur  l'histoire  des  Jésuites.  28. 

L.  Lévy-Schneider.  Le  système  corporatif  dans  le  Nivernais  à  la 

fin  de  l'ancien  régime.  46. 
A.  Aui.ard.    La   mort   de   Napoléon   et   les   journaux    parisiens 

en  1.S21. 


180 


PEHIODIQUES 


R    CHEVAiJiiKR.   Les   revenus  des   bénéfices   ecclésiastiques  au 

xviii"  siècle.    113. 
.1 .  DuRiEux.  Thermidor,  d'après  des  documents  inédits.  150. 
J.  TiKKsoT.  Rouget  de  Lisle  et  Quiberon.  167. 
A.  Aur.AUD.    Le   portrait   de   Barère   par    David    [au    Musée   de 
Bruxelles].  170. 

—  La  trahison  de  Marie- Antoinette   172. 

Henri  Hauskk.  De  quelques  aspects  de  la  Révolution  améri- 
caine. 193. 

PoMMKRKT.  L'esprit  public  dans  les  Côtes-du-Nord  pendant  la 
Révolutiou.  21 1. 

li.  Durand.  Le  personnel  judiciaire  dans  les  Oôtes-du-Nord  pen- 
dant la  Révolution.  218. 

Louis  Vii.LAT.  L'histoire  de  la  Révolution  en  Corse,  232, 

J.  Raspail.  Les  papiers  de  Lalande.  23C. 

R.  BoNNKT.  Rouget  de  Lisle  et  Quiberon.  255. 

—  Féminisme   et   franc-maçonnerie    à    Confoleus   sous 

Louis  XVI.  206. 

—  Le  drapeau  rouge  pendant  la  Révolution.  258. 

—  Le  mot  allemand  Reich  et  le  mot  français  Empire.  259. 


50.  —  Revue  archéologique,  XIII,  1921. 

Jean  Ebersolt.  Miniatures  irlandaises  à  sujets  iconogra- 
phiques. 1. 

K.  Friis  Johansen.  Un  nouvel  aryballe  au  Musée  du  Louvre.  7. 

Victor  Bérard.  Textes  et  scolies  de  l'Odj'ssée.  21. 

H.  Breuie.  Les  bas-reliefs  de  Marqulnez  (Alava).  25. 

Fi,  Passemard.  Signes  gravés  de  la  caverne  d'Isturitz.  33. 

Maurice  Besnier.  Le  commerce  du  plomb  à  l'époque  romaine 
d'après  les  lingots  estampillés.  36. 

F.  de  Mkly.  Nos  vieilles  cathédrales  et  leurs  maîtres  d'œuvre. 
77. 

G.  Seurk.  Archéologie  thrace    108 

Henry  Corot.  A  propos  de  l'exploitation   du  minerai  de  fer  à 

l'époque  gallo-romaine.  127. 
Louis  Sirkt.  Prométhée.  132. 
W.  Dkonna.  Statues  de  terre  cuite.  136. 

G  -I.  Br.vtianu.   Les  fouilles  de  Curtea  de  Argesh  (Roumanie).  1. 
Henri  SoTTAs.   Le  thiase  d'Ombos.  24. 
André  Joubin.  Quelques  aspects  archéologiques  du  Languedoc 

méditerranéen.  37. 
H.  Brkuil.   Les  pétroglyphes  d'Irlande.  75. 
E.  Vassee.   Le  bélier  de  Baal  Hammon.  78. 


PÉRIODIQUES  181 

J.  LoTH.  Les  traits  caractéristiques  du  Gaulois  d'après  un  livre 

récent.  108. 
S.  DE  Ricci.   M.  Ed.  Naville  et  la  linguistique  égyptienne.  121. 
Denyse  Le  Lasseur.  L'école  américaine  de  Jérusalem.   123. 

XIV,  1921. 

A.  Merlin  et  L.  Poinsot.   Candélabres  de  marbre  ti'ouvés  en  mer 

près  de  Mahdia.  1. 
Louis  HautecœUr.  Le  Soleil  et  la  Lune  dans  les  crucifixions.  13. 
F.  DE  MÉLY.  Le  rétable  de  l'Agneau  des  Van  Eyck  et  les  pierres 

talismaniques.  33. 
Adrien  Blanchet.    Le    prétendu    tombeau   antique   de    Neuvy- 

Pailloux.  81. 
Maurice  Besnier.  Le  commerce  du  plomb  à  l'époque   romaine 

d'après  les  lingots  estampillés  ifi>i).  98. 
Salomon  Reinach.  Observations  sur  Valentin  et  le  Valentinisme • 

131. 
Pierre  Paris.   Le  faux  sarcophage  égyptien  de  Tarragone.  146. 
André  Julien.  Le  Musée  de  l'Ermitage.  165. 
P.   Deffontaines.    De  la  méthode  géographique  en  préhistoire. 

171. 
W.  Deonna.   Sostratos  de  Cnide  et  la  vertu  des  formules  invi- 
sibles. 175. 

51    —  La  Revue  de  Bourgog-ne,  1921. 

Eugène  Fyot.  Les  rues  de  Dijon  :  la  rue  de  Condé.  1. 
Pierre  Perrenet.  Sacs  à  procès  :  pour  un  peu  d'encens.  33, 
Etienne    Picart.    Le    jaquemart    de     l'église    Notre-Dame    de 

Dijon.  77. 
Charles  Oursel.  Existet-il  un  Art  bourguignon?  97. 
Pierre  Perrenet.  A  propos  du  centenaire  de  Napoléon.  134. 
Ernest  Andrieu.    Une   épave  du  triptyque  de  Lierre  à  Dijon. 

156. 
Jeanne  Magnin.  Du  Fra  Bartolomeo  et  de  quelques  autres  j)ein- 

tures  de  la  Cathédrale  de  Besançon.  197. 
Pierre  de  Nolhac.  Pour  le  IV*  centenaire  de  Pontus  de  Tyard, 

Pontus  de  Tyard  et  Pierre  de  Ronsard,  237. 
Eugène  Fyot.  La  Chartreuse  de  Champmol.  297. 
Pierre  Perrenet.  Dijon  au  XVII*  siècle.  Les  Bleus,  les  Verts  et 

les  ,1  aunes.  327. 
Robert  Schnerb.   La  mission   en   Bourgogne  du    Conventionnel 

Bernard  de  Saintes. 
Henri  Drouot.  Auxois  ou  Aiisaois  ? 


182  PÉRIODIQUES 

52.  -  Revue  celtique,  XXXVIII,  1920-1921 

Louis  Gougand.  Répertoire  des  fac-similés  des  manuscrits  irlan- 
dais {fin).  1. 

E.  C  QuiGOiN.  An  Old  Welsh  Gloss,  Armon  Armenia,  Initial  G 
in  Welsli.  15. 

J.  Vkndryes.  Les  vins  de  Gaule  en  Irlande  et  rexx)ression  fin 
aicneta.  19. 

Alf  SoMMKHFKi/r.  Le  système  verbal  dans  In  Cathe  Catharda 
{suite j  25. 

J.  LoTH    Notes  étj'mologiques  et  lexicographiques  {suite).  48. 

Fr  C.  Diack.  Place-names  of  Pictland.  109. 

Joseph  Dunn.  Life  of  Saint  Alexis.  133. 

J.  LoTH.  Alternances  AI  :  a;  OU  :  o.  144. 

J.  LoTH.  Notes  étymologiques  et  lexicographiques.  152. 

Alf.  Sommerfklt   Breton  Bomm    178. 

J.  LoTH.  La  première  apparition  des  Celtes  dans  l'île  de  Bre* 
tagne  et  en  Gaule.  259. 

D.  Hydic.  The  Reeves  Manuscript  of  the  Agallamb  na  Seno- 
rach    289. 

M.  V.  Hay.  Columbanus  and  Rome.  315. 

Jérômk  Carcopino.  a  propos  du  nom  des  Germani.  319. 

53    —  Revue  des  Deux-Mondes,  63,  1921. 

Frédéric  Masson.  La  mort  de  l'Empereur.  48,  310. 

Louis  Madelin.  Napoléon  à  travers  le  siècle  (1821-1921).  73. 

G.  Lacour-Gaykt   Bonaparte  et  l'Institut.  294. 

Victor  Giraud.  Jean- Jacques  Rousseau  prophète  religieux   415. 

E.  Wetterlé.  La  «  langue  maternelle  »  en  Alsace  et  en  Lor- 
raine  526. 

Saint-Denis,  dit  Ali  Souvenirs  du  second  mameluck  de  l'Empe- 
reur. 7G7;  t.  04,  27,  583;  t.  65,  L52,  620. 

64,  1921. 

André  Hallays.  Jean  de  La  Fontaine.  96,  375,  848;  t.  65,  395. 
Edmond  Pilon.  Autour  de  La  Fontaine.  121. 

65,  1921. 

Paul  Hazard.  Les  plagiats  de  Stendhal.  344. 
Louis  Gillet.  Dante  et  Ravenne.  446. 

Gustave  Lanson.  Ecrivains  français  en  Hollande  au  XVII*  siècle. 
555 


PÉRIODIOUES  183 

66,  1921 

Edmond  Pilon.  Un  centenaire  romantique.  Ondine  Valmore.  202. 

54.  —  Revue  des  Etudes  anciennes,  XXIII.  1921. 

A.    CuNY.    Questions   grécooiùeu taies,    xii.     L'inscription    lydo- 
araméenne  de  Sardes  (2«  art.)    1. 

P    Cloché   Le  discours  de  Lysias  contre  Hippothersès.  28. 

C.    JuLLiAN.    Notes   gallo-romaines,     lxxxix.     La    question   des 
«  poypes  ».  37. 

A.   Blanchet.   Recherches  sur  les   «  grylles  »,   à  projjos  d'une 
pierre  gravée,  trouvée  en  Alsace  43. 

Ch.  Martkaux.  Note  sur  Chamerande.  52. 

C  JuLLiAN.  Chronique  gallo-romaine.  55. 

P.  Perdrizet.  Copria   85. 

L.  Ha  VET.  La  fable  du  loup  et  du  chien.  95. 

C.   JuLLL^N.  Notes  gallo-romaines,  xc.   Les   tares  de  la  Notitia 
dignitatum  ;  le  duché  d'Armorique.  103. 

C.  JuLLiAN.  Inscription  de  Savigny  (Rhône).  110. 

J.  LoTH.  Le  gaulois  turno-  dans  les  noms  de  lieux.  111. 

J.  LoTH.  Turnomagus  =  Dormagen.  116. 

C.  JuLLiAN.  Tor  et  plan.  116. 

E.  Dlprat.  Notes  sur  Saint  Jean  de-Gargtiier.  120. 

C.  JuLLL\N.  Locus  gargarius    124. 

A.  Blanchet.  Une  inscription  d'Antibes,  composée  sous  Fran- 
çois P^  125. 

C.  Jullian.  Chronique  gallo-romaine.  127. 

M.    FoGHALi.    Linguistique   évolutive   ou    linguistique    descrip- 
tive? 138 

M.  Holleaux.   Etudes  d'histoire  hellénistique,  xii.  L'expédition 
de  Philippe  V  en  Asie  (201  avant  Jésus  Christ),  2«  article.  181. 

C.  Jullian.  Notes  gallo-romaines,  xci.  De  Pontchartrain  à  *Ico- 
randa,  sur  les  routes  romaines.  213. 

J.  Soyer.  Les  «  BasilicjB  »  de  la  «  civitas  Carnutum  »  et  de  la 
«  civitas  Aurelianoium  »    219. 

C.  JuLLiAX  et  R.  Gadaxt.  Dallages  de  voirie  urbaine.  221. 

S.  Chabert.  Sépultures  et  inscription  gallo-romaines  découvertes 
à  La  Tronche,  près  Grenoble.  225. 

H.  Prentout.  Les  inscriptions  de  la  fontaine  de  la  Herse,  forêt 
de  Bellème  (Orne).  227. 

G.  Chenet.  Dépôt  d'objets  de  l'âge  du  bronze  et  du  premier  âge 
du  fer  dans  des  sépultures  d'époque  plus  récente   232. 

C  Jullian.  Chronique  gallo-romaine   2  3. 


184  PÉRIODIQUES 

55.  —  Revue  des  Etudes  arméniennes.  I.  1920-1921. 

GÉDÉoN  HuET.  L'Arménie  dans  certaines  versions  de  Booon  de 

Hantone. 
J.  Artignan.  Les  plantes  de  l'antiquité  classique.  Sisumbrium. 

56.  —  La  Revue  de  France,  II,  1921. 

PiKRRK  DK  Noi.iiAC.  La  Pléïadc  et  le  latin  de  la  Renaissance   742. 

III,  1921. 

JosKPU  DiDiKR.  Quelques  scènes  de  la  «  chanson  de  Roland  ».  284. 
Ch  -V.  Langlois.  Mystiques  du  xvii«  siècle.  738. 

57.  —  La  Revue  hebdomadaire,  V.  1921 

Général  Maxgin.  Napoléon,  homme  de  guerre.  80,  210. 

A.  CiiEsNiKR  i)K  CiiESNE.  L'opinion  publique  en  Angleterre  à  la 
mort  de  Napoléon.  i)2. 

Marie  de  Roux.  Napoléon  législateur.  334. 

FoRTUNAT  Strowski.  Napoléon  et  le  gouvernement  de  l'intelli- 
gence (fin  VI,  81).  459. 

VI,  1921. 

LoRENzi  Di  Bradi.  Lcs  bandits  de  Prosper  Mérimée.  48. 
Henri  Pourrat.  Le  secret  impérial.  76. 
Maurice  BARRtcs.  La  grande  mission  de  Dante.  203. 
Raymond  Poincaré    Dante,  colonne  milliaire  de  la  latinité.  321. 
Francesco  RuFiNi.   Le  caractère  moderne  de  la  pensée  politique 
de  Dante.  331. 

VII,  1921. 

Ed.mond  Jai-oux   Le  centenaire  de  Baudelaire.  66. 

André  Thérive.  La  légende  de  Dante  hérétique.  79. 

Jules  Véran.  Dante  et  les  Troubadours.  93. 

Gustave  Dupont-Ferrier.  L  arrivée  de  Bonaparte  à  Paris. ^217, 

340. 
Franc-Nohain.  Les  fables  de  La  Fontaine  405. 
Jean  Ravennes.  Les  petits  écrits  du  chevalier  de  Boufflers.  467. 
Louis  Batiffol.  La  véritable  figure  du  cardinal  de  Richelieu.  509. 

VIII,  1921. 

Jean  Balde.  Napoléon  et  l'éducation  des  filles.  Madame  Gam- 
pan  et  la  maison  d'Ecouen.  333. 


PÉRIODIQUES  185 

X.  1921. 

Jkan  u'Elbék.  L'étonnante  aventui-e  d'un  gentilhomme  gascon 
sous  Louis  XIV  [du  Causse  de  Nazelle].  85. 

58.  —  Revue  d'histoire  ecclésiastique,  1921. 

Paul  Fournier.  La  collection  canonique  dite  «  CoUeclio  XII  par- 

tiiim  ».  Etude  sur  un  recueil  canonique  allemand  du  xi''  siècle. 

31,  229. 
M.   ViLLKR.  La  question  de  l'union   des  Eglises  entre  Grecs  et 

Latins  depuis  le  Concile  de  Lyon  jusqu'à  celui   de    Florence 

(1274-143S).  260,  515. 
L.  Lauranu.  L'oraison  funèbre  de  Théodore  i)ar  saint  Ambroise. 

Discours  prononcé  et  discours  écrit.  349. 
Fr.  Callaey.  L'influence  et  la  diffusion  de  VArbor  Vilœ  d'Uber- 

tin  de  Casale.  533. 

59.  —  Revue  d'Histoire  littéraire  de  la  France.  1921. 

Arthur  Chuquet.  Mots  historiques.  1. 

François  Vézinet.  Un  vers  de  Vigny  et  un  problème  de  géogra- 
phie biblique.  26. 

Pierre  Jourda.  Un  disciple  de  Marot  :  Victor  Brodeau.  30,  208. 

Paul  Bonnefon.  Scribe  sous  la  Monarchie  de  juillet,  d'api'ès  des 
documents  inédits.  60,  241. 

P.  M  BoNDOis.  A  propos  du  «  Mariage  de  Figaro  ».  Une  lettre  de 
Chamfort  à  Beaumarchais.  100. 

Maurice  Souriau.  La  langue  de  Voltaire  dans  sa  correspon- 
dance  105.  279..  423. 

Edouard  Droz.  Corneille  et  1'  o  Astrée  ».  161. 

Gérard  Gailly.  Un  point  obscur  de  la  vie  de  Gresset.  204. 

Etienne  Gros,  .\vant  Corneille  et  Racine.  Le  «  Tile  »  de  Magnon 
(1660k  229. 

Pierre  Martixo.  Stendhal  et  l'acteur  Perlet.  261. 

Fernand  Baldensperger.  a  propos  de  nouveaux  fragments  du 
«Journal  n  de  Vigny  :  Quelques  précisions  chronologiques.  265. 

Paul  de  Lapparent.  Remarques  bibliographiques  sur  quelques 
ouvrages  de  Bossuet.  267. 

Georges  Prévôt.  Les  emprunts  de  Rémy  Belleau  à  Jean  Second 
dans  ses  «  Baisers  »  (2"'  journée  de  la  Bergerie).  321. 

Gustave  Charlier.  La  source  principale  de  <  Mateo  Falcone».340. 

Félix  Boillot.   La  Fontaine  coloriste.  346. 

Edouard  Droz.  Corneille  et  1'  «  Astrée  ».  361. 

Gaston  Cohen.  Prosper  Mérimée  et  la  Russie.  388. 


186  PÉRIODIQl  lis 

Paul,  A.  Tuii.lat.   Un  précurseur  des  pacifistes  contemporains  : 

Pierre  Dupont  (1821-1870)   397. 
Gustave  Cohkn.  Notes  généalogiques  et  documents  inédits  sur  le 

poète  Jean  de  Schelandre  et  sur  sa  famille.  408. 
Félix  Portefaix.  La  date  du  «  Repas  ridicule  ».  414. 
Philippe  Rexouard.  «  Les  fleurs  et  antiquités  des  Gaules  ».  416. 
J.  Dkhocquigny.  Notes  lexicologiques.  420. 

60.  —  Revue  historique,  CXXXVI,   1921. 

Charles  Bost.  Les  «  Prophètes  »  du  Languedoc  eu  1701  et  17U2. 
Le  prédicant-prophète  Jean  Astruc,  dit  Mandagout.  1  ; 
CXXXVII,   l 

Eugène  Déprez.  La  bataille  de  Najera,  3  avril  1367.  Le  «  com- 
muniqué »  du  Prince  Noir.  37. 

Septime  Gorceix.  Les  sources  de  Voltaire  et  la  chronique  mol- 
dave pour  le  récit  de  la  capture  de  Charles  XII  à  Bender.  60. 

Joseph  Rémacle.  Napoléon  III  et  la  paix.  161. 

Marc  Bloch.  Serf  de  la  glèbe.  Histoire  d'une  expression  toute 
faite.  220. 

CXXXVII,  1921. 

André  Boudier.  Charles  Desmarets.  corsaire  dieppois.  Docu- 
ments inédits  de  1445.  32. 

H.  Weil.  Un  précédent  de  l'affaire  Mortara.  49. 

Alfred  Stern.  L'insurrection  polonaise  de  18G3  et  l'impératrice 
Eugénie.  66. 

LÉON  Homo.  Les  piivilèges  administratifs  du  Sénat  romain  sous 
l'Empire  et  leur  disparition  graduelle  au  cours  du  iir  siècle.  162. 

Pierre  de  Labriolle.  Le  «  Mariage  spirituel  »  dans  l'antiquité 
chrétienne.  204 

CXXXVIII,  1921 

Léon  PIomo.  Les  privilèges  adininisti-atifs  du  Sénat  romain  sous 
l'Empire  et  leur  disparition  graduelle  au  cours  du  iii«  siècle.  1. 

E.  Waldner  Lettre  de  Charles  Marchand,  abbé  de  Munster  en 
Alsace,  à  un  confi-ère  (16  >2)   53. 

Adrien  Bi-anchet.  Les  journées  de  juillet  et  août  1789  à  Stras- 
boui'g.  57. 

61.  —  La  Revue  critique  des  Idées 
et  les  livres,  XXXI,   1921. 

Pierre  de  Noihac.  Ronsard  lecteur  d'Homère.  513. 
Charles  Du  Bos.  Notes  sur  Joseph  de  Maistre.  522. 


PÉRIODIQUES  187 

XXXII,  1921. 

Jean  Longnon.   Le  mirage  hellénique,  notes  pour  le  centenaire 

de  l'Indépendance  grecque.  17. 
André  Thérive.  L'argot  et  la  langue  populaire.  272. 
Jean  Luoas-Dubreton.  Mj'thologie  d'alchimiste.  414. 
Albert  Thibaudet.   Propos  sur  Fénelon.  423. 
Louis  DuMOXT-WiLDEN.  Xai)oléon  et  le  prince  de  Ligne.  517. 
Tancrède  de  Visan.  Bossuet  à  Metz.  544. 
Albert  Thibaudet.  La  question  Rancé.  556. 
Xavier  de  Courvilt-e.  Le  silence  de  La  Fontaine.  678. 

XXXIII.  1921. 

René  de  Planhol.  Les  libertins  du  xvii*  siècle.  38. 
Xavier  de  Courville.   Une  forme  racinienne  de  la  tragédie  lyri 
que   50. 

62    —  La  Revue  mondiale,  CXLII,  1921. 

Ai,bert  Cim.  De  Bossuet  à  Massillon.  39. 

R.  de  Nolva.  Keats  et  le  culte  littéraire  français  eu  Italie.  61. 
Desbordes- Valmore.  Napoléon  et  Talma  (pages  inédites).  310. 
G.  Lacour-Gayet.  Napoléon  et  la  Pologne.  379, 

CXLIII,  1921. 

Comte  Serge  Fi.eury.   Un  frère  de  Napoléon  en  .Angleterre.  398. 
Ci-ément  Pansaers.  Comment  fut  fondé  le  Béguinage.  205. 
R.  Paulucci  di  Calboli.  Dante  et  Bonaparte.  375. 

63.  —  Revue  numismatique,  XXIV,  1921. 

F.  Préchac.  Le  Colosse  de  Néron,  son  attitude  et  ses  vicissitudes 
d'après  les  textes  et  les  monnaies.  I,  105. 

S.  MiRON'E.  Les  Eros  de  Praxitèle  et  en  particulier  l'Eros  des 
Mamertins.  23, 

J.  Baii-hache.  Histoire  numismatique  des  règnes  de  François  II 
et  de  Charles  IX.  38,  153. 

Jkan  Babelox.  Un  médaillon  inédit  de  Charles-Quint  au  Cabinet 
des  Médailles.  79. 

Fernand  d'Hébraru  de  Saint-Sulpice  et  Armand  Viré.  Un  atelier 
monétaire  clandestin  au  xvii^  siècle,  au  château  de  Saint-Sul- 
pice (Lot).  89. 

Adr.  Bi-anchet.  Les  «  Aboulcelbs  »,  monnaies  fabriquées  en  Hol- 
lande. 91. 

Ch  Le  Hardelay  Contribution  à  la  numismatique  de  Bretagne. 
Variétés  inédites.   185. 


188  PÉRIODIQUES 

A.  David.  Jetons  des  co-gouverneurs  de  Besançon.  193. 

A.  DiEUDONNÉ   La  collection  Pozzi.  202. 

Malbois   Notes  sur  l'atelier  monétaire  de  Visan  (Vaucluse).  206 

64.  —  Revue  belg-e  de  numismatique 

et  de  sigillographie.  1921. 

L.  LaI'Kranciii.  La  translation  de  la  Monnaie  d'Ostie  à  Arles 
dans  la  tj'pologie  numismatique  constantinienne.  7. 

B.  DE  JoNGHE.  Monnaies  au  titre  de  duc  de  Bouillon,  de  Henri  de 
la  Tour  d'Auvergne  prince  de  Sedan  et  de  Raucourt  (1504- 
1623).  17. 

Victor  Tourneur.  Le  mcdailleur  anversois  Steven  van  Herwijck 

(I55T-15G.J).  27. 
Ch.  Giij.e.man.  Les  jetons  du  comté  au  pajs  d'Alost   57. 
Victor  Tourneur.  Le  sceau  du   Chapitre   Saint-Pierre  de  Cor- 

tessem   75. 
Ch.  Gilleman.  Le  graveur  Fabien  Jean  Borduno.  79. 

F.  Vermeylen.  Un  jeton  d'argent  de  Nuremberg.  80. 

Victor  Tourneur.  Les  méreaux  de  la  Maison  du  Saint-Esprit  dite 
de  Notre-Dame  ou  Fondation  van  Bruyssegem  à  Bruxelles.  82. 
Jos.  DE  Béer.  Trouvaille  de  Liège.  8G. 
Robert  Osterrieth.  Trouvaille  de  Putte  lez-Maliues.  89. 
—  Trouvaille  de  Turnhout.  91. 

65.  —  La  Revue  de  Paris,  1921,  III. 

A.  Tanant.  Napoléon  chef  de  guerre.  51. 

Henri-Robert.  Napoléon  et  la  justice.  72. 

René  Tournés.  Le  G.  Q   G.  de  Napoléon.  Ir   134. 

G.  Pariset.  Le  système  napoléonien  de  gouvernement.  242. 
Louis  Bertrand  Une  évolution  nouvelle  du  roman  historique. 326. 
Emile  Mâle.  Eludes  sur  l'art  de  l'époque  romane.  491,  711. 
Henri  Hauvette.  Dante  et  la  pensée  moderne.  605. 

1921.  IV. 

J.  Dkssaint.  Le  centenaire  de  Joseph  de  Maislre.  139. 
A.  AuLARD.  Bonaparte  républicain.  329. 

1921,  V 

G.  G.  Picavet.  La  légende  de  Tureune  aux  xvii"  et  xviii»  siècles. 

322. 
Henri  d'Almères.  Dante  étudiant  à  Paris.  398. 
Antoine  Albai-at.  La  langue  française  et  le  style  archaïque.  870. 


PÉRIODIQUES  189 

1921,  VI. 

Comte Primoi.i.  Gustave  Flaubert  chez  la  princesse  Mathilde.306. 

66.  —  Revue  de  philologie,  de  littérature 
et  d'histoire  anciennes,  XLV,    1921. 

Paul  Oltkamare.    Le  Codex  Genevensis  des  Questions  naturelles 

de  Scnèque.  5. 
Bernard  Haussoui-lier.  Inscriptions  de  Didymes,   Didymes  au 

i""  siècle  avant  J.-Chr.  45. 
P.  JouuDAN.  Térence,  Andricnne.  87,  62. 
A.  Cartault.  Les  Choliambes  de  Perse.  6'^. 
Louis  Havet.  Iliade,  9,  164.  —  65. 
A    Cartault.  La  Satire  I  de  Perse,  66. 
Louis  Havet.  La  serniconjecture  et  les  Suppliantes  d'Eschyle,  75. 

Un  fragment  de  ^lénandre.  Adelphes.  86. 

Platon.  Alcibiade,  133  c.  —  87. 
Arth.  Humpers.  Gloses  homériques  sur  Ostrakon.  90. 

67.  —  Revue  de  philologie  française  et  de  littérature.  1921. 

J.  Giei.iéron,  Patologie  et  térapeutique  verbales.  Appendices.  1. 
K.-J.  RiEMENs.  Les  débuts  de  la  lexicograi'ie  franco-néerlandaise. 

20. 
J.  GiLUÉRON.   Essette-Mouchette  dans  l'Est  du  domaine  gallo- 
roman.  39. 
Albert  Dauz.\t.  Une  inscription  du  xv«  siècle  en  français  dans  la 

vallée  de  Suse  (Piémont).  67. 
.\.  Dauzat   Essais  de  Géografie  linguistique,  Animaus  sauvages. 

—  3.  Contribution  à  l'histoire  du  hanneton  — 4.  Lever  luisant 

dans  la  basse  Auvergne.  81. 
G.  EsNAULT.  Lois  de  l'argot,  V.  108. 
,T.  Gilliéron.  Leurs  étimologies  :  Tourbillon  —  Tourmente  — 

Entournor  >  entourer  au  .wi^'-xvir  siècle  —  Ajourer  et  ajourner. 

129. 

F.  Baldensperger.  Bilboquet?  161. 

68.  —  Revue  politique  et  littéraire.  Revue  bleue,  1921. 

G.  MoNGRÉDiEN.  Une  vieille  querelle  :  Racine  et  Pradon    52,  76. 
Edme  Champion.  Le  scepticisme  de  Montaigne.  189. 

René  Gillonin.  Le  mysticisme  racial.  193. 
Louis  Madelin.  L'Ecole  des  Chartes.  212. 
Georges  Bkunet   Une  théorie  magique  de  la  royauté.  248. 


190  PÉRIODIQUES 

Albert  Mii-haud.  Napoléon.  273. 

Baron  de  Trèmont.  Souvenirs  sur  Napoléon.  (Mémoires  inédits, 
publiés  par  J.  G    ProcFliomme.)  'lll . 

Henky  Asselin.  La  langue  française  en  Hollande.  287, 

Martial  Teneo.  Napoléon  Bonaparte  et  l'Opéra.  291,  34S. 

Emile  Macne.  Le  mariage  de  Tallemant  des  Réaux.  321. 

Edmond  Pilon.  La  maison  du  Bonhomme  (A  propos  du  tri-cente- 
naire de  La  Fontaine).  403. 

Capitaine  Gagneur.  Napoléon  et  le  Mémorial.  419. 

John  Charpentier.  Napoléon  et  les  hommes  de  lettres.  482,  510, 
540,  574. 

Maurice  Mignon.  Le  sixième  centenaire  de  la  mort  de  Dante.  H43. 

André  Thérive.  L'ancêtre  de  la  «  Divine  Comédie  ».  671. 

69.  —  Revue  de  l'Université  de  Bruxelles,  1920-1921. 

E.  Dupréel.  Socrate  et  l'histoire  de  la  philosophie  grecque.  42. 

Charles  Beckenhaupt.  Henri  de  Kleist  et  sa  poésie  nationaliste. 
274. 

P.  DE  Reul.  Bjron.  501. 

P.  Errera.  Dame  et  les  Flandres.  533. 

P.  BoNENFANT.  Le  premier  gouvernement  démocratique  à  Bru- 
xelles (1303-1306).  506. 

70.  —  Romania,  XLVII,  1921. 

S.  Glixelli.  Les  Contenances  de  Table.  1. 

M.  LoR-BoRODiNE.  Les  deux  conquérants  du  Graal  :  Perceval  et 

Galaad.  41. 
P.    Studer.    Notice   sur   un    manuscrit    catalan    du    xv»    siècle 

(Bodley  Oriental  9),  98. 
E.  HoEPFFNER.  Le  chansonnier  de  Besançon.  105. 
P.  Marchot.  Wallon  nôrè  <*  oraricium.  116. 
P.  Marchot.  Wallon  hi  <  ancien  ht  ail.  Scaro.  117. 
A.  Piaget.  Les  Princes  de  Georges  Chastelain.  161. 
P.  Marchot.  Notes  étymologiques.  207, 
L.   FouLET.  Comment  ont  évolué  les  formes  de  l'interrogation. 

243. 
.1.  Weston.  The  Perlesvaus  and  the  Vengeance  Raguidel.  349. 
A.   Thomas.  Percoindar  dans  la  Passion  de  Clermont-Ferrand. 

360. 
N.    Bertoni.    Iiitorno   a   una    denominazione    alto-italiana    dell' 

«  ape  »  :  annida.  362. 
E.  Hoepffner.  Chanson  française  du  xiii'^  siècle.  367. 


PÉRIODIQUES  191 

J.  MoRAWsKi.  L'auteur  de  lu  seconde  Vie  des  Pères.  381. 

M.  I'rinet.  Remai-ques  ononiastiques  sur  le  WuKliarius.  382. 

G.  HuET.  Un  épisode  de  VYseniçrimus  et  quelcjucs  récits  appa- 
rentés. 383. 

A.  Thomas.  vVuc.  franc,  sisme  u  sisième  ».  388. 

A.  Thomas.  Xouveaus  témoif^nages  sur  le  jargon  (1464  et  1484- 
1486)   389. 

71.    —  Sitzung-sberichte  der  Preussischen  Akademie 
der  Wissenschaften,   1921. 

ScHucHAKDT.  Exkurs  zu  Spracliursprung.  III.  194. 

DiELS.  Lukrezstudien.  237. 

vox  Harnack.  Xeue  Fi-agmente  des  Werks  des  Porphyrius  gegen 

die   Christen.   Die    Pseudo-Polycari^iana  und   die   Schrift  des 

Rhetors  Pacatiis  gegen  Porphyrius   266. 
VON  WiLAMOwiTZ-MoEi.LENDOREF   Sphakteria.  306. 
Kehr.  Zur  Geschichte  Wiberts  von  Ravenna  (Clemens  III).  I,  355. 
ScHAFER.  Ilonor,  cilru,  cis  im  mittelalterlichen  Latein.  372. 
Kehr.  Beiicht  liber  die  Herausgabe  der  Mouumcnta  Germaniae 

bistorica  192n.  401. 
Stutz.  Reims  und  Maiuz  in  der  Konigswahl  des  zehnten  und  zu 

Begiun  des  elften  Jabrhunderts.  414. 
HiLLER  VON  Gaertringen.  Attisclic  Inschriften.  436. 
Heusler.  Die  deutsche  Quelle  der  Ballade  von  Kremolds  Rache. 

445. 
H.  ScHUCHARUT.  Possessivisch  und  passivisch.  651. 

72    —  Société  d'Études  de  la  Province  de  Cambrai. 
Bulletin  mensuel,  XXI.   1921. 

Edm.  Leclair.  Notes  pour  servir  à  l'iiistoire  du  clergé  à  Dun- 

kerque  pendant  la  Révolution.  6. 
Edm.  Leclair.  Réclame  pharmaceutique  et  remède  secret.  18. 
E.M.  M.vrTHiEU.  Reconstruction  de  Bouchain  en  1594.  20. 
J.  Gennevoise.  Le  régime  des  pensions  à  l'abbave  de  Vicoigne.  21. 
Th     Leuridax.    Quelques   règlements  de  coniréi-ies  d'archers  et 

d'arbalétriers.  23. 
Notes  sur  quelques  fiefs  de  la  région  de  l.ille.  31. 
Deux  testaments  de  Brillon.  41. 
Un  compte  de  l'église  d'Escarmain.  44. 
Une  taille  de  faux  frais  à  Escarmain.  47. 
Joseph  Gennevoise.    Vicognette  et  les   refuges  de  l'abbaye   des 

Prémontrés  de  Vicoigne,  49. 


192  PÉRIODIQUES 

H.  Trouillet.  La  Loi  de  Bousies.  75. 

Documents  divers  sur  Escarmain.  77. 

Documents  sur  l'église  et  les  pauvres  du  Maisnil-eu-Weppes.  78. 

La  seigneurie  de  Ligny.  80. 

Em.  Matthieu.  Ecole  de  Lanh-ecies.  82. 

Ed.m.  Lecl.\ir.   Le  corps  de  Jean  Levasseur  ;  son  inhumation  à 

Lille  en  179:^.  83. 
Emm.  Thieuli.et.   Cloches  de   Notre-Dame  de   la  Consolation  à 

Lille.  87. 
DU  Chastel  ue  i,a  Howarderie.  Les  seigneurs  de  Bercus.  88. 
A.  BoNTEMPS.  Busigny,  Nord,  a-t-il  eu  autrefois  deux  paroisses? 

89. 
La  Société  populaire  de  Fournes-en-Weppes,  93. 
T.  L.  et  E.  L.  La  guillotine  à  Lille,  1792-17',)4.  99. 
Edm.  Leclair.  V  a-til  eu  un  cours  d'anatomie  à  Lille  entre  1732 

et  1736?  113. 
Th.  Leuridan.  Les  minutes  notaiiales    115. 

73   —  Die  neueren  Sprachen,  1921. 

EuGEN  Lerch.  Die  «  halbe  »  Négation.  6. 

W.  RiCKEX.  Aler  und  andave.  55. 

BiCHARi)  ScHiEUEKMAiR.  Ncupliilologische  Strômungen.  130. 

Kari,    Bergmann.    Kulturgeschichilich    bemerkensvt'^erte    Wen- 

dungeu  der  frauzosischen  Sprache.  140. 
Fritz  Strohmeyer.   Dualismus  in  den  franzôsischen  Sprachge- 

setzen.  Die  Artikellehre.  161. 
Ernst  Eriedriciis.    Werthers    Einwirkung   auf   den   russischen 

Originalroman.  178. 
Erwin    Rosenbach.   h.    G.   Wells    Glaube    und    Geschichtsbe- 

trachtung.  206. 
Richard  Riegler.  Italienisch-sj)anische  Sprachniischung.  218. 
Leo  Spitzer.  Argotfranz,  frère  miroton.  221. 
H.  ScHMiDT.  Eino  auffallende  Verwendung  von  des.  223. 

74.— Studiën    XCV.  1921 

T.   W.    Een    berijnide    vertaling    van    Thomas    a    Kempis'   Ver- 

Dolging.  53. 
G.   GoRRis.    Espéranto,   Tdo,    en   de  Katholieke   Internationale. 

139. 
J.  Bkuns.  Geoi'ge  Eliot  en  haar  romans.  215. 
Oanisius-nummer.  321,  412. 


PÉRIODIQUES  193 

XCVI,  1921. 

P.  Albers.  De  stand  van  het   Maria-Stuart  vraagstuk  volgens 

Pastor.  62. 
H.  Padbkrg.  Bante's  Diviua  Commedia,  T,  De  Kern-Idee.  81. 

75.  —  Syria,  II,  1921. 

Charles  Dieui..  L'école  artistique  d'Antioche  et  les  trésors 
d'argenterie  syrienne.  81. 

Raymond  Weill.  Phéniciens,  Égéens  et  Hellènes  dans  Ja  Médi- 
terranée primitive    120. 

Franz  Cumont.  Catacombes  juives  de  Kome.  145. 

C.  Léonard  Woolley.  La  Phénicie  et  les  peuples  égéens.  177. 

R.  Normand.  La  création  du  Musée  d'Adana.  195. 

Edmond  Pottier.  Note  sur  la  statue  de  Métellé.  203. 

R.  MouTERDE.  Inscriptions  grecques  et  latines  du  Musée  d'Adana. 
206. 

DU  Mesnii.  du  Buu'.son.  Les  anciennes  défenses  de  Beyrouth.  235. 

76.  —  Tijdschrift  voor  Geschiedenis,  1921. 

W.    S.    Unger.    De   Regeering    van    Middelburg   in   de  Middel- 

eeuwen.  1 . 
Otto  Carteelieri.  Ritterspiele  am  Hofe  Karls  des  Kiihnen  von 

Burgund(1468).  15- 
M.  Engers.  Grieken  en  Egyptenaren  in  Egypte  onder  de  Ptole- 

maeën.  31. 
J.  S.  Theissex.  Een   paar   Groningers  als   studenten  te  Leiden 

in  1720-1722.  45. 
A,   A.    Van    Schelven.    Zuid-Nederlandsche  schoolmeesters    en 

schoolvrouweu  in  Noord-Nederland.  80. 

77.  —  Tijdsclirift  voor  Nederlandsche  Taal- 

en  Letterkuude,  XL,  1921. 

A.  Kluyver.  Bilderdijk's>l/s(7jeirf(1811).  1. 

J.  L.  Walch.  Theatraal.  31. 

J.  Van  Mierlo  jun.  Hadewych  en  de  ketteriu  Blommardinne.  45. 

H.  J.  Eymael.  Hugeniana  Costelick  Mal,  Vs.  284.  Bunt  werker.  64. 

C.  G.  N.  de  Vooys.  Een  Utrechtsche  navolging  van  Huygens' 

Voorhout.  67. 
J.  Prinsen.  Gloriant.  86. 

W.  DE  Vries.  Etymologische  aanteekeningen.  89. 
J.  Prinsen.  Ronimelsoo,  I,  2.  111. 

13 


194  l'ÉIilODIQliES 

K.  Prikbsch.  Die  Passion  der  hl.  Claristino  in  Mine  iStrophen.  113. 

D.  C.  Hksseling    Kandeel.  131. 

.1.  Prinsen.   Gedrukte   nederlandsche  fragmenten  in  de  Univer- 

siteits  bibliotlieek  te  Cambridge   133. 
.1.   W.   MuLLER.   Een  en   ander  ovei-    den    nieuwnederlandschen 

tweeklank  oi  of  oii  fa  ui  »).  140. 
<i.  J,  BoEKKNooGEN.  De  mansuaam  Wuiten.  176. 
\V.  DE  Vreese.  Velthem,  IV,  22,  65.  182. 
A.  A.  Verdknius.  Lexicologische  aanteekeningeu  bij  stichtelijk 

proza  uit  de  Middeleeuwen.  193. 
.7.  L.  Wai.ch.  Nog  cens  :  Het  proza  in  Mariken  uan  Nieumeg-hen. 

220. 
J.  W.  Mvi.i.ER.  Bontiverker.  139. 
F.  A    STOKi/r.  Juhannes  in  eodcni  blijveii.  232, 

"5  8.  —  Verslagen  en  Mededeelingen  der  Koninklijke 
Vlaamsche    Académie    voor    Taal-   en    Letterkunde,    1921. 

Edw.  Gaim.iard.  Ivleine  verscheidenheden.  20,  31,  40,  47,  58,  76, 

90,  113.  142,  169.  201,  214,  234,  247,  325,  337,  447. 
Léonard  Wii.i-ems.  Graaf  Herman  van  Neuenabr  en  de  troebelen 

der  16^  eeuw.  33. 
L.  Reypens.  Uit  den  vooi-arbeid   tôt  eene  critische  uitgave  van     ) 

Ruusbroec's  «  Brulocbt  ».  77. 
Alfons  Fierens.  Historisehe  sprokkeling.  139. 
J.  Vercoui-me.  Etymologisch  kleiugoed.  165. 
Hugo  Verriest.  Beschaafd  Vlaanderen.  171. 
GusTAAF  Zegers.  Het  eerste  eeuwfeest  van  .Tan  van  Beers  :  1821- 

1921.  De  dichter.  203.  De  leeraar,  de  p:pdagoog.  235. 
Dantedag  op  19  Mei  1921.  251. 
AuG.  Vermeyeen.  Dante  in  1921.  257. 

.lui-.  Persyn.  Dante  in  de  Nederlandsche   letterkunde.  277. 
LÉON   Wii.r.EMs.   Jan   Cauweel's  inleiding  op   M.  de  Casteleyn's 

Consl  oan  Rheturiken  (1555).  329. 
OiMER  Wattez.  Jan  van  Beers.  348. 

79    —  La  Vie  wallonne,  I,  1920-1921. 

JuEES  Fei-eer.  Sur  le  sens  du  mot  wallon.  49. 
Auguste  Dootrepont.  Le  Wallon  à  l'Université.  97. 
Fernand  Beondeau.  Le  martyre  de  Dinant  en  1466. 
Jean  Haust.   A  propos  de  toponymie  wallonne.   Le  mystère  du 
«  Fond  des  Cris  ».  145. 


PÉKIODIQUES  195 

EuGÈNK  Poi.AiN    Le  folklore  de  Nijc-I  en  Wallonie.  152. 

AuGUSTK  DouTRKPoxT.  Uii  Koël  inédit.  174. 

.Iules  Fkli-kr.  Quelle  langue  parlaient  le.s  anciens  Belges?  241, 

2S9. 
.lLit,i;H  DuMONT.  Le  cloître  i-oman  de  Nivelles,  monographie  archi- 
tecturale, 'Ml. 
.Tkan  Haust   Kos  vieux  mots    Heel.  'SMi. 
Paui,    IIkupgkn.    Vieu.x-Mons     Prisons    d'ancien    régime,    notice 

historique.  340. 
Jui.KS  Fkllkr.  Les  noms  de  nos  provinces.  iiSâ 
Alfrko  Duchesnk.  Grétry  écrivain   40S.  450.  487 
EuG.  PoLAiN.  Le  «  Perron  »  en  Wallonie.  Notice  historique    430. 
Em.  I)ony.  Citadins  et  paysans  dans  le  Ilainaut  de  jadis,  notes 

de  folklore.  481. 
Paul  Collkt.   La  Joyeuse  Entrée  à  Nivelles,  en  Rrabant,  des 

archiducs  Albert  et  Isabelle.  497. 
Félix  Magnkttk.  Une  carrière  de  joui-naliste  au  Pays  de  Liège  : 

Pierre-H.-M.   Lebrun  et  le  «  Journal  de  Hervé  »  (1785-1793). 

121. 

80.  —  Dietsche  Warande  en  Belfort,  1921. 

Jan  Paquay.  De  Apostels  van  Xeder-Germanië   3. 

L.  Grootakrs.  Hoe  staat  het  met   het   wetenschappelijk  onder- 

zoek  der  Zuid-Nederlandsche  dialecten?  49. 
J.  Vax  Mierlo.  Uit   de  geschiedenis  van  onze  Middeleeuwsche 

letterkunde.  135,  309,  441. 
H.  Van  DE  Wkerd.  De  heiligc  Willibroi-dus  onder  de  Vlamingen. 

389. 
A.  De  Ceulexeer.  Cai'paccio   eu   .Memlinc,   en  de    Légende  der 

St.  Ursula.  521. 
Dom    Rayxerius     Podevvn.    De  oorsprong    der    vereering   van 

((  O.  L.  Vrouw  van  Vrede  >  in  de  St.  Xiklaaskerk  te  Brussel. 

723. 

II,   1921. 
L.  Revpkns.  Nienwe  onoorspronkt'lijkdeid  l)y  llendrik  Mande.  79. 

81.  —  Philologische  "Wochenschrift,  1921 

Fk.  Walikk.  Zu  Tacitus  und  Apiileius.  22. 

E.  Oktm.  'e\aqppô<;  aïs  Stilbegrifl'.  47. 

W.  Weixher(;kk.  Abstrakte  liegriffe  und  Platons  Ideenlehre.  71. 

M.  MiiiiL.  Bdppapoi  q)ùa€i  TTo\émoi.  71. 

L.  SonMiDT.  Zu  den  Dialogen  des  Seneca    92. 


196  PÉRIODIQIES 

A   Groth    Di-eidecker,  niclit  Dreiruderer.  93. 

Fr.  Lkvy.  Platon  Gorgias4G0  c    s.  115. 

O.  (JÛTiii.iNG.  Evsvng.  nach  Matthaus  6,  27,  118. 

A.    Klotz.    Die  gallische    uud    germanische    Sprache   zur   Zeit 

Ctisars    118. 
A    KuRFELs.  Zur  Deutuug  dcr  vierten  Ekloge  Vergils.  141. 
K.  MuNscHKR.  Eiii  lu'ues  Wort  bei  Thukydides.  1G3. 
A.  GuDEMAN.  Glosseninder  aristotelischen  Poetik.  185. 
K.  LoscHHORN.  Kritische  Bemerkungen  zu  Juvenals  Satiren.  211. 
AV    Gkmom,.  Xenophon  iind  des  Vôlkei'recht.  230. 
Griknbkrgkk    Cliumstinctus.  239. 
Th.  Birt    Keiiie  Gotterbilder  bei  Ilomer.  258. 
C!.  RiÏGER.  Zu  Demosthenes'  Rede  Ttepi  ouvrôEeiuç.  284. 

F.  Kluoe.  Lat.  nôinen.  286. 

W.  Bannier.  Zu  attischen  inschriften,  XII    307. 

W.  Xesti.e.  Nocbmals  die  Homerische  Redaktions-Kotiimission 

unter  Peisistratos.  330. 
O.  RossBACH   Zu  Pausanias.  330. 
F  PoLAXD.  Pindar,  Paean  VI    50.  332. 
Tfi    Bist.  Zur  Octavia  des  vermeintlichen  Seneca.  333. 
K.  Praechter.  Zur  Leiikii)i)osfrage.  355. 
F  Kluge.  Griech   vùE,  ôvuE,  ôpru£.  379. 
C.  KocH.  Zu  Tacitus  Annalen  6,  22.  380. 
J.  ScHNEi'z.  Ueber  die  reelitsrheinis(;hen  Alamannenorte  des  geo- 

grapben  von  Ravenna.  381. 
n    O TTE.  Zu  .\nstoteles  Politik  Buch  8.  404. 
P.  Wessxer  Die  Donatscbollen  des  Codex  Parisinus  7899  (P)  des 

Terenz   428,449. 
O.  RossBvcii    Ilandscliriftlicbes  zur  Anthologia  latina,  aus  der 

Leidener  Bibliothek.  475. 
W.  Baehrens  Zu  Vergil.  499. 

A.  W   DE  Groot    Philologie  und  Matheniatik.  502. 
Fr.  WAi/rER.  Zu  Si  lias  Italicus.  525. 

R    IIerzog.  Xocli  eininal  zu  den  Consular  fasten  von  Ostia.  527. 
R.  Samse  Zu  Lukan  II,  691  G93.  549. 
Fr    Pkister.  Die  Brahmanen  der  Alexandersage  569. 
A    KuRKESS  Zu  Sallusl  IV.  597. 

G.  IIi;i..MRi:iCH.  Zu  Scribonius  Largus   599. 

—  Ein    beiteres    Missverstaiidnis   [Pauly-Wissowa. 

«  graniineen  ».  ]).  1698]    600. 
A   8ussKANi).  Clioi-pai-tie  der  Choëpboren  des  Aiscbylos   616. 
K.  Bl'scme.  Zu  (;ic-('ros  Orator.  645 
II    PiiiLU'P.   Emendatioues  geographicic.  I.  647. 


PÉRIODIQUES  197 

F.  Orth.   Lucretiana..  668. 

P.  Lehmann.  Johannes  Scotas  iiber  die  Katcgorieii.  ()70. 

A.  KoLAÎi.     DtM-   Zusammenliaiif;-   <1(M-    ncuen    Komcklic    mit    (1er 

alten    688. 
K.  Fr.  W.  SoHMiDT.   Zu  Menaniler.  (I)    714    II.  l'.il. 
(!nR.  RoGGK.  Die  Angleichung  bel  refert  und  interest.  762. 
L.  Radermachkr.  Ein  unbekaniites  Zitat   788. 
Fr.  Walter.  Zu  Taeitus  uiid  V^alerius  Maxiinu.s.  789. 
W.  Baehren.s    Zu  Origenes.  792 

F.  BiCKEL.   Varros  di  ccrti  uiid  inccrli.  8.52. 
W.  Baehrens.  Zu  Cicero  an  A.ttic.  V.  4.  1    8:?S. 

R.  Laqueur.  Diodors  Bericht  iiber  die  Schlat-ht  an  dei-  .Mlia   861. 
A.  Dyroff.  Der  Xame  «  Germanen  ».  885. 
R.  Philippsox.  Diogenes  Lacrtios  X  14.  911. 
.1.  Mesk    Zu  Ciceros  Briefen  an  Atticus    933. 

G.  Helmreih.  Zu  Galen.  957. 
F.  Kluge.  ZTpu|uô&uupoç.  960. 

Fr.  Sciiemmel.   Das  Atbenaoum  in  Rom    II    982 

F.  IIowAM).  Zu  Aristoteles'  Poetik.  999. 

A.  Heisenbkrg.  DieZeitde.s  byzantiniseben  Male)-.s  l-;ulalio.s.  1024. 

82.  —  Zeitschrift  fur  deutsches  Altertum  und  deutsche 
Literatur    LVIII.   19^0  1921 

K.  Droege.  Zur  gescbicbte    der  Xibelungen    dicbtung    und    der 

Thidrekssaga.  1. 
11.  Frânkel.  Aus  der  friibgescbicbte  dos  deut.scben  i-ndreims.  41. 
H.  Patzig.  Zum  text  der  Liederedda.  65. 
H   Thoma.    Ein    neues    bruebstûck    des    gediobtes    auf   Kaiser 

Ludwig  deu  Baiern.  87. 
l'v.  Schroder.  Zur  Kritik  des  .Innoliedes.  92 

E.  Schroder.  Gedrut   95. 

II.  Schneider.  Das  mittelhochdeutscbe  heldeijepos.  97. 

R.  Hexning.    Wettu  irmingot  uiul  das  Ilildebrandslied.  140. 

F.  Wallner    Ein  altbairisches  zeugnis  zur  Dietricbssage    152. 
X:  Strecker.  Der  leicb  «  De  littera  Pytbagoru'  ».  154. 

-X    Streckeu.    Die  alteste  spur  vom  l'art leben  des  Erzpoeten  ?  157. 

W.  H   VoGT.   Die  frâsagnir  der  Landnâraabôk.  161. 

F.  VoGT.  Strophenbindung  bei  Reinniar  von  Hagenau   205. 

l'L  Schroder.   Lûckenbiiszer  illiinmelreich  \  .  40)    216. 

M.  H.  .Iellinkk.    Ueber  das  gediclit  von»  llinnnolreicb.  217. 

V.  Doll.mayr.  Ein  noues  doppelblatt  dor  Parzival-bs  G*^"    222. 

K.  Schroder.  Ein  burgundiseher  ïrauennanio  in  Basel?  224. 

<;.  Neckki,.  Dio  gôttoi-  auf  dom  goldnon  boi-n.  225. 


198  pÉRioniQi'KS 

O.  Neckki,.  Christliclie  kriegerethik.  '2-V3. 

Th.  Baunack.  \ùch  dem  wiiie  hœre.t  daz  bibelinum  (Prl.  G8).  239. 
G.  Bakskcke.  îlraban.s  Lsidorglossieruiifi  Wulahfrid  Sti-abus  und 
das  ahd.  schrifttum.  241. 

E.  SciiRoDKR.  Zu  Koiirads  von  Warzbui-g  tan/leich.  279. 

F.  BuRG.  Die  insclirit't  des  .stoines  von  Eggjuin.  280. 
E.  ScHRODKR    Das  gt'dicht  vom  .spitale  zu  Jérusalem 

83.  —  Historische  Zeitschrift.  CXXIII,  1920-1921 

Matthias  Gklzkr    Die  Entstehung  dei-  iHiinischeu  Nobilitiit.  1 

Friedrich  Mkinix  kk.  Die  Lelire  von  den  Interessen  der  Staaten 
im  Frankreich  Richelieus.  14. 

Cari,  Neumann.  Deliios  Geschiclite  der  deutsclien  Kunst.  81. 

Félix  Rachfaiil.  Max  Lenz  und  die  deutsche  Gescbiclitswisseu- 
schaft.  Zu  seinem  70.  Geburt.stage    189. 

Karl  Brandi.  Ei-brecht  und  Wahlrecbt.  221. 

Hermann  O.nckkn.  Fi'ie'dricli  Engels  und  die  Anfange  des  deut- 
sclien Koniinuiiismus    2;}9. 

Hans  Rothfels.  Zur  Bisinarek-Krise  von  1890.  267. 

Carl  Schmitt-Dorotic.   Politische   Théorie  und  Roman tiU     :i77. 

Fritz  Vigkxku.  Ketteler  vor  dem  Jalire  1848.  398. 

CXXIV,  1921. 

Wii.HELM  Erbex.   Betracliluiigen  zu  der  italienischen    Kriegstii- 

tigkeit  der  Scliweizer.  1. 
Fritz  IIartung.  Carl  Auguste  von  Weiniar  als  Landesherr.  41. 
Siegfried    Kh.ïler.    Raiidglossen    zur    Beainten    (ieschichte    im 

Neueren  Preuszen.  63. 
JusTUs  IIasiiagex.  Rheinisehes  Geistesleben  im   spjiteren    Mit- 

telalter.  189. 
Paul  Lknei,.   Heitriige  zur   Biographie  des  preuszischen  Stîuits- 

rats  von  Kelidigei".   220. 
Friedrich  Schneider.  Neuere  Dante-Literatur.  250. 
Fritz  Hartu.ng.  Zur  Frage  nach  den  burgundischen  Kinfliissen 

auf  die  Behorden  organisation  in  Oesterreich.  2.18. 
Ernst  Tr()klt.->ch.   Der  historische   Entwicklungsbegriff   in    der 

modernen  Geistes-  und  Lebenspliilosophie.  ii.  Die  Marburger 

Schule,  die  Siidwestdeutsche  Schule,  Simmel.  377. 
Karl  Wenck.    Die    romische    Kurie   in    der    Schilderung    eines 

Wiirzburger  Stiftsherrn  aus  den  Jahren  1263   64,  448. 
Friedrich  Lexz.  Karl  Marx.  466. 
Johannes  Sein  ltzk   Zur  Entstehungsgeschichte  der  Historisehen 

Zeitschrift  474. 


PÉlilODlQl  ES  199 

84   —  Zeitschrift  fur  Romanische  Philologie,  XLI,  1921. 

Ph.  Aug.   Eeckeu.  Clément  Marots  Estreines  aux  Dames  de  la 

Court.  1. 
JosEF  Bruck.  kSecli,  Zelter,  Mantel.  15. 

—  Lat.   Feminiua  aui'  —  a  als  gei-iu.  Maskuliiia  und 

Neutra.  20. 
K.  VON  Ettmayer.  Das  webllatinisclie  Passivum.  'M. 
Ernst  Ga.millscheg.  Zur  Kritik  des  Cantar  de  mio  Cid.  T)?. 
EuGEN  Herzog.  Runi.  -andrii.  70. 

Sextil  Puseariu.  Der  lu-  genetiv  ini  Kvuiiiuiiseheu,  70. 
Elise  Richteii.  Beitriiye  zur  provenzalischen  Grammatik.  83. 
Alfred    Risop.    Der   Wandel    von   m'ame  zu  mon  unie  und  Ver- 

wandtes.  96. 
Margarete  Rôsi.hr.  Der  Londener  Pui.  111. 
Friedrk'h  ScHiiRR.  Sprach^escluchtlicli  —  sj)racbgeogra])lii.sche 

Studien.  I.  117. 
O.  ScHULTZ-GoRA.  Eine  Stelle  in  CJavaudans  Kreuzlied.  14.S. 
Peter  Skok.  Beitriige  zur  Kunde  des  romanischen  Eléments  ini 

Serbo-Kroatischen.  147. 
Hans   Si>erber.    Maxima  und    Minima  im   Wirken    der  sprach- 

verjiudernden  Krafte,  153. 
Léo  Spitzer.  Franzosische  Etymologien.  IGl. 
Albert    Stimminc.    Bemerkungen  zum  Text  der  Destruction  de 

Rome.  176. 
W.    VON   Wartburg.    Albii.s   und    seine    Famille    in    Frankreich. 

182. 
Emu,  Winkler.  Arturiana.  193. 
Adolf  Zauner.  C  im  Anlaut  der  Mittclsillie  der  Propai'oxytona 

im  Franzôsischeii.  210. 
Carl  Appel.  Tristan  bei  Cercamon  .'  219. 
Norbert  Jokl.  Vulgarlateiuisclies  im  Albanesischen.  228. 
Alfons   Hilka.   Die   Berliner  Bruchstiicke   der    altesten    italie- 

nischen  Historia  de  preliis.  234. 
Hugo  Schlcharut.  «  Ecke,  Winkel  ».  254. 
P.  Hôgberg.  Seltene  Worter  und  Redensarten  in  Unterengadiu. 

264. 
F.  Gennrich.  Die  beiden  neuesten  Bibliograpliieii  altfranz.  und 

altprovenz.  Lieder.  289. 
H.  SciiucHARDT.  Rom.  baf'ii  =  ital.  a  fa  «  Schwiile  ».  347. 

—  Frauz.  cibaiidière.  347. 

—  Siidrom.  coca  Kuchen.  348. 

—  Lat.  eschara.  348. 

—  Si)an.;  polaina  !  348. 


200  PÉRIODIQIES 

H    ScHUCHARDT.   Sariî.  tirriôlu.  340. 

—  Tormentnm,  -turbo.  350. 

L.  Spitzer.  Frz.  bègue,  a  stotternd  ».  351. 
G.  RoHLFS.  Franz,  biche,  ital.  biscia,  etc.  354. 
L.   Spitzer.  Zu  Kol.sen,  Diclituugen  der  Trobadoi-s,  III.  355. 

—  Zu  Kolsen,  Zwei  provenzalische  Sirventese.  361. 

—  Zu  Kolsen's  «  Altprovenzali.sclies  ».  363. 


CHRONIQUE 


Académie  royale  de  Belgique.  —  Concours. 

CLASSE    DES    LETTRES    ET    DES    SCIENCES    MORALES    ET     POLiriQUES 
PROGRAMME    POUR    1923. 

\.  Section  d'histoire  et  des  lettres. 

Première  question.  —  On  deuidiule  une  histoire  critique 
(le  l'Empire  romain  d'Occident,  depuis  la  mort  de  Théodose 
jusqu'à  Homulus  Aufjusfulus  (SO.î-'û.îj. 

Deuxième  question.  —  On  demande  une  étude  sur  la  valeur 
littéraire  des  pamphlets  du  XV I'  siècle  en  langue  néerlandaise. 

Troisième  question.  —  On  demande  une  étude  sur  l'établis- 
sement de  la  Compagnie  de  Jésus  en  Belgique  et  sur  ses  déve- 
loppements jusqu'à  la  fin  du  règne  d'Albert  et  Isabelle. 

Quatrième  question.  —  On  demande  une  étude  sur  le  rôle 
économique  des  Juifs  en  Belgique  (Pays-Bas  méridionaux), 
depuis  le  haut  moyen  âge  jusqu'à  la  fin  de  l'ancien  régime. 

II.  Section  des  sciences  morales  et  politiques. 

Première  question.  —  Quelle  est  la  cause  principale  de  la 
décadence  de  l'Empire  romain  '/  Sous  quel  règne  s'est-elle 
prononcée  ?  Jusqu'à  quelle  époque  aurait-elle  pu  être  enrayée 
et  par  quelles  mesures  ? 

Deuxième  question.  —  On  demande  une  étude  sur  les  tr(ntés 
(lui  ont  créé  des  unions  internationales  et  sur  l'organisation 
de  ces  unions. 

Quatrième  question.  —  On  demande  une  étude  sur  les  cou- 
tumes, la  législation  et  les  usages  commerciaux  d'Anvers  sous 
l'ancien  régime  à  partir  de  l'impression  de  la  coutume  (l'étude 
ne  portera  point  sur  le  droit  nuiritime,  mais  comprendra,  pour 
le  surplus,   une   appréciation   critique  ainsi   que  l'exposé   des 


202  CHRONIQUE 

rapports  du  droit  co/nnicrcùd  en  cif/tietir  (wec  notre  lé(/isl(t- 
tion  commerciale  aclaellei. 

Prix  pour  chacune  des  questions  :    1,Ô0U  francs. 

Les  mémoires  doivent  être  envoyés  à  .M.  le  Secrétaire  per- 
pétuel  de  l'Académie   avant   le  1  '    novembre  1922. 


CLASSE    DES    DEAUX-ARTS    PROGRAMMK    POUR    1923. 

Histoire  et  critique. 

Phkmikke  gi'KSTiox.  —  On  demande  une  nionoc/raphie  his- 
torique et  critique  sur  un  groupe  de  sculpteurs  des  XV7/"'  et 
XVIII''  siècles  en  BeUjique.  Le  qroupe  peut  être  déterminé  au 
point  de  vue  local,  à  celui  du  ç/enre  ou  à  celui  du  style.  -- 
Prix  :  2,000  francs. 

Dki'XIÈmi-:  question.  —  Faire,  au  point  de  vue  artistique, 
l'histoire  de  l'illustration  du  livre  dans  les  anciens  Pays-Bas, 
par  la  yravure  sur  hois,  jusqu'iui  milieu  du  A'\7'  siècle.  — 
Prix  :  1,000  francs. 

Troisième  question.  —  Faire  l'histoire  de  la  lithographie 
d'art  en  Beh/ique,  en  s'attachant  à  la  valeur  esthétique  des 
œuvres.  —  Prix  :   1,000  francs. 

Quatrième  question.  —  Faire  la  monoqraphie  de  l'œuvre, 
comme  portnutiste,  de  l'un  des  peintres  suivants  :  Jan  van 
Bockhorst  (Lange  Jan),  Flrasme  Quellin.  Lucas  et  Pierre  Fran- 
choys.  —  Prix  :  3,000  francs. 

Les  mémoires  doivent  être  envoyés  à  M.  le  Secrétaire  per- 
pétuel de  l'Académie  avant  le  1  "^  octobre  1923. 


PROGRAMME    POUR    l^'V."). 
Histoire  et  critique. 

Premikiu-:  QiiESTiON.  —  Quel  est  l'étal  actuel  de  nos  connais- 
sances, relativement  à  l'évolution  de  la  peinture  flamande, 
depuis  l'infiltration  de  l'influence  yiotlesque  jusqu'à  l'appa- 
rition du  refable  de  /'  «  Adoration  de  l'Aqneau  mystique  »  ?  — 
Prix  :  2,000  francs. 

Deuxièmi:  QUESTION.  —  Ecrire  l'histoire  de  l'architecture 
civile  en  BeUjique,  les  restaurations  exceptées,  au  XIX'  siècle. 
—  Prix   :   1500   francs. 


CHRONIQUE  203 

TuoisiÈMi-  QUESTION.  —  Faite,  à  l'aide  des  sources  authen- 
tiques, l'histoire  de  la  peinture  au  XVIII  siècle,  dans  les  pro- 
vinces formant  la  HeUjique  actuelle.  Prix  :  1,000  francs. 

QuATiuÈMi:  QUESTION.  —  Déterminer,  à  l'aide  de  construc- 
tions existantes,  de  documents  (jraphiques  et  autres,  les  carac- 
tères de  Varchitectnre  privée  diuis  les  centres  urbains  de  la 
Belgique  au  XV I'  et  au  XV IF  siècle.  Indiquer  les  différences 
et  les  rapports  caractéristiques  de  ville  à  ville,  en  citant, 
autant  que   nossible,  les  constructeurs. Prix  :   1,500  francs. 

C.iNQUiÈMi:  QUESTION.  —  Faire  l'histoire,  au  point  de  vue 
artistique,    de    la   sif/illoqraphie    dans   les    anciens   comtés   de 

Flandre  et  de  Hain(tut  ou  dans  le  duché  du  Brabanl. Prix  : 

l.OOO    francs. 

Sixième  question.  -  Faire  l'histoire  du  théâtre  musical  en 
Belgique,  depuis  les  origines  jusqu'en  18i8.  On  se  placera  spé- 
cialement an  point  de  vue  de  l'étude  du  répertoire  des  prin- 
cipales scènes.  On  notent  l'époque  exacte  de  l'introduction  des 
grandes  (cuvres  étrangères,  l'accueil  que  le  public  belge  leur 
a  réservé  et,  éventuelletnent,  leur  influence  sur  les  produc- 
tions nationales.  Pour  ces  dernières,  on  s'attachera  à  en  ana- 
lyser et  à  en  préciser  ht  signification,  tant  dans  l'histoire  de 
la  musique  en  Belgique  que  dans  l'histoire  de  la  musique  en 
général.  -     Prix  :  2,000  francs. 

Les  niémoirts  doivent  être  envoyés  à  M.  le  Secrétaire  per- 
pétuel de  l'Académie  avant  le  1-"^  juin  1925. 


Institut  des  hautes  études  de  Belgique. 

Section  IV.   —  Sciences   liisloritjiic.s  cl  philoloifiqiies. 
Directeur  :  M.  Ouvemek.  archiviste  général  du   Royaume. 

(lour.^  et  lonférenccs  de  l'unttée  académique  1921-1922. 

MM.    .T.  EiDEz,  Professeur  à  riniversité  de  Gand. 
PItiloloi'ie  i>recque  et  astrolof^ie  chnldéenne. 
(i.  BoLiNNE,  Professeur  à  l'Athénée  royal  de  Bruxelles. 
Les  satires  VI  {Les  Femmes)  et  X  {Les  Vœu.x)  de  .Juvénid 

(cours). 
.T.  CuvEEiEK,  Archiviste  général  du  Royaume. 
L'.4 rchivécovomie  (cours). 


204  CHRONIQUE 

MM.    Paui.  de  Keul,  Professeur  à  l'Université  de  Bruxelles. 
Le  centenaire  de  Shelley. 
Camille  (Îaspar,  Conserviiteur  du  Cabinet  des  niîiuuscrits 

de  la  Bibliotlu'que  royale  do  Belgique. 
Le  théâtre  grec  :  l'interprétation  icours). 
PAur,  Hamelius,  Professeur  à  l'Université  de  Liège. 
Les  quatre  fils  Aymon,  léifende  ardennaise,  Georges  Clias- 

tpllain,  indiciaire  de  Bourgogne,  Henri  Conscience. 
LÉON  Leclère,   Pro-Recteur  de  l'Université  de  Bruxelles. 
La  Question  d'Occident. 

Cn    Pkrgameni,  Professeur  à  l'Université  de  Bruxelles. 
Études  révolutionnaires  {fin  du  XVI II"  siècle)  (cours) 
Louis  Speleers,  Attaché  aux  Musées  royaux  du  Cinquan- 
tenaire, à  Bruxelles. 
Les  cioilisations  orientales  anciennes  (Asie    antérieure   et 

Egypte)  (cours). 
Victor  Tourneur,  Conservateur  du  Cabinet  des  Médailles 

de  la  Bibliothèque  royale  de  Belgique. 
La    médaille   en    Belgique    au    XVII''    siècle   et    au   XVI 11^ 

(cours). 
H.  Van  der  Linden,  Professeur  à  l'Université  de  Liège. 
La  Révolution  de  1830  (coui-s). 

René  Verdeyen.  Professeur  à  l'Université  de  Liège. 
Les  origines  et  l'évolution    de   la    liftéralnrc    flamande   au 

moyen  âge  (cours). 
Au<J.  Vincent,  Conservateur  à  la  Bibliothèque  royale  de 

Belgique. 
Les  noms  de  lieux  au  point  de  rue  iihilologiquc  et  Insiorique. 

La  toponymie  belge  (cours). 
Maurice  Wii. motte,  Professeur  à  l' Université  de    Liège. 
Poètes  et  conteurs  restés  peuple. 


Cycle  de  conférences  sur  le  XVll'    siècle  français. 
I.  La  littérature  française  du  XVI1>'  siècle.     -  Les  origines  du  style  classique. 

MM.    GusTA\E  CoMEN,  Profcsseur  à  l'Université  de  Strasbourg. 
Les  origines  de  la   mise  en  scène  du   théâtre  classique.  La 
oie  d'un  grand  philositphe  :   René  Descaries  (d'après  des 
documents  inédits). 
.1.  RoiJER  CiiARBoNNEi..  Professour  au  Lycée  de  J^ille. 

Le  lyrisme  de  Bossuel    L'arl  iln  portrait  chez  La   Bruyère. 


CHUONIQUE  205 

MM.    Mkdkkic  Dui'ouK,  Professeur  à  l'iniversité  de  Lille. 
Le  tricentenaire  de  Molière. 

Jkan  Pi.attaku,  Professeur  à  l'Université  de  Poitiers. 
Montaig-ne,  précurseur  du  classicisme. 

Paul  Spaak,  Directeur  du  Tliéàtre  Royal  de  la  Monnaie. 
La  formation  du  théâtre  classique. 

J.  ViANKY,  Doyen  de  la  Faculté  des  Lettres  de  Montpellier. 
La  poésie  lyrique  et  le  roman  en  France,   au  XVII^  siècle. 

'i.  Les  arts  plastiques,  jusciu'à  la  (;n>:itioti  de  Versailles. 

MM.   Gaston  Brièrk.  Consei-vateur  adjoint  au   Musée  de  Ver- 
sailles. 
La  peinture,  la  tapisserie,  la  gravure. 
Paui-  Vitry,  Conservateur  au  Musée  du  Louvre, 
L'architecture  et  la  sculpture . 

8.  L'histoire. 

M.    Philippk  Sagnac,  Professeur  à  l'Université  de  Lille. 
La  conception  de  l'histoire  en  France,  au  XVI J^  siècle. 

i.  L'économie  politique. 

M.   Hknri  Hauskr,  Professeur  à  la  Sorbonne. 
Les  prédécesseurs  de  Colbert. 

5.  La  philosophie  et  la  religion. 

MM.  J.  RoGKR  Charboxnkl.  —  Le  pessimisme  naturaliste  delà 
Rochefoucauld  et  le  pessimisme  chrétien  de  Pascal. 

Lévy-Bruhi-,  professeur  à  la  Sorbonne. 

Descartes  et  le  cartésianisme. 

Rexaudet,  Professeur  à  l'Université  de  Bordeaux 

Sainte  Thérèse,  sa  vie  et  son  œuvre.  La  mystique  de  Sainte- 
Thérèse.  I^' humanisme  dévot  de  Saint-François  de  Sales. 

(>.  La  musique. 

MM.    LioNKi,  DE  la  Laurencie,  Ancien  président  de  la  Société 
française  de  musicologie. 
La  musique  instrumentale  française  du  XV^IL  siècle. 
Henry   Prunières.   Docteui-   es   Lettres,    directeur   de   la 

((  Revue  Musicale  ». 
L'opéra  italien  en  France  au  XVI I^  siècle.  —  Lully. 


206  (HMONIQUE 

Archives  de  l'Etat  en  Belgique. 

La  publication  du  volume  Lea  Archives  de  l'Elat  en  Belgique 
pendant  la  guerre  {1914-191H)  a  permis  de  se  rendre  compte  à  la 
fois  des  vexations  eudui-ées  par  nos  archivistes  au  cours  de 
l'occupation  et  de  l'activité  scientifique  qu'ils  n'ont  cessé  de 
déploj'er  pendant  cette  i)ériode  néfaste.  Sans  parler  de  nombreux 
inventaires  sommaires,  cinq  gros  volumes  d'inventaires  ont  été 
imprimés,  qui,  pour  ne  pas  avoir  été  soumis  au  visa  de  la  censure 
allemande,  n'ont  vu  le  jour  qu'après  Tai-mistice. 

Des  considéi-ations  budgétaires  seules  ont  /impéché,  depuis 
lors,  la  publication  de  nouveaux  inventaires,  dont  les  manuscrits 
.sont  entièrement  achevés  A  défaut  de  ces  manifestations  exté- 
rieures du  travail  archivistique,  les  trois  années  qui  viennent  de 
s'écouler  ont  été  marquées  par  une  série  de  mesures  destinées  à 
améliorer  la  conservation  et  l'utilisation  des  archives 

Presque  au  lendemain  de  l'armistice,  des  démarches  ont  été 
faites  auprès  de  M.  le  Ministre  du  llavitaillement  pour  demander 
aux  dirigeants  du  Comité  national  de  secours  et  d'alimentation 
que  les  archives  de  cet  important  organisme  fussent  conservées 
et  ti'ansférées  dans  le  plus  bref  délai  possible  aux  Archives  de 
l'Etat  de  chaque  province.  Grâce  aux  mesures  prises  par  les 
autorités  compétentes,  l'immense  majorité  des  documents  présen- 
tant quelque  intérêt  ont  été  sauvés  d'une  destruction  certaine. 
Les  historiens  de  l'avenir  sauront  gré  aux  archivistes  de  leur 
avoir  conservé  une  mine  de  renseignements  provenant  d'un  des 
organismes  les  plus  intéi-essants  de  l'histoire  contemporaine  et 
même  de  toute  l'histoire.  11  appartiendra  maintenant  aux  pou- 
voirs publics  de  prendre  des  mesures  pour  assurer  dune  manière 
efficace  la  conservation  de  ces  archives.  11  est  à  peine  besoin 
d'affirmer  que  nos  anciens  dépôts  ne  sont  pas  outillés  pour  rece- 
voir un  accroissement  aussi  formidable  que  celui  des  documents 
du  Comité  national  Déjà  à  l'étroit  pour  la  consei-vation  des 
archives  anciennes,  la  plupart  de  nos  dépôts  n'ont  pu  jusqu'ici 
réserver  une  place  convenable  à  cette  avalanche  de  papiers.  En 
plusieurs  endroits,  il  y  aura  lieu  d'agrandir  con.sidéi-ablement  les 
locaux;  en  d'autres,  il  faudra  aménager  de  nouvelles  salles,  de 
manière  à  permetti-e  d'entreprendre  le  classement  des  nouvelles 
archives  et  éventuellement  la  destruction  de  certaines  d'entre 
elles  existant  en  double  ou  n'offrant  aucun  intérêt  au  point  de 
vue  historique.  Les  locaux  que  l'Etat  a  ilù  louei-  à  Bi-uxelles  et  à 
Gand  ne  peuvent  être  (jue  des  abris  provisoires,  en  attendant  (jue 
les  d  pots  proprement  dits  puissent  recevoir  l'intégralité  des 
collections  nouvelles. 


CHHONIQIE  207 

La  iiiênie  question  se  pose  jtour  les  Archives  de  lu  friierre  dont 
il  sera  question  plus  loin 

Une  autre  amélioration  en  ee  qui  eoneerne  la  eonservation  des 
archives  est  l'organisation  définitive  de  l'atelier  de  restauration 
de  documents  aux  Archives  générales  du  Royaume.  Au  début  de 
l'année  1914,  le  Gouvernement  avait  trouvé  un  docteur  en  sciences 
chimiques,  chai-gé  d'étudier  les  divers  procédés  en  usage  dans  le 
monde  pour  restaurer  les  archives  que  l'âge,  l'humidité,  etc. 
avaient  détériorées  et  qui  étaient  vouées  à  une  lente  mais  sûre 
destruction.  Après  avoir  étudié  la  littérature  du  sujet,  le  nouveau 
fonctionnaire  avait  reçu  l'autorisation  de  faire  un  voyage  d  études 
à  l'étranger  et  il  se  disposait  à  commencer  par  l'Allemagne,  lors- 
(jue  la  guerre  éclata  qui  réduisit  à  néant  tous  nos  beaux  projets. 
Les  expériences  furent  néanmoins  continuées  pendant  ])lus  d'un 
an  encore,  avec  les  moj-ens  de  fortune  dont  on  disposait:  mais, 
dès  la  troisième  année  de  la  guerre,  la  plupart  des  prod  its  chi- 
miques dont  il  fallait  se  servir  devinrent  introuvables  et  il  fallut 
attendre  jusqu'en  1919  pour  pouvoir  rejjrendre  les  travaux 

A  défaut  du  docteur  en  sciences  chimicjues,  qui  n'avait  pu 
attendre  la  fin  des  événements  poui*  chercher  d'autres  occujja- 
tions,  le  restaurateur  d'archives,  qui  lui  avait  été  adjoint,  conti- 
nua à  appliquer  les  principes  scientifi(iues  auxquels  on  s'était 
arrêté  et  il  fut  parfaitement  à  même  d  organiser,  avec  l'aide- 
restaurateur,  le  nouvel  atelier  dont  le  Gouvernement  a  bien 
voulu  doter  les  archives  et  qui,  depuis  bientôt  trois  ans,  rend  les 
plus  grands  services.  11  est  évidemment  prématuré  de  se  pronon- 
cer sur  l'efficacité  absolue  des  procédés  actuels  de  za])onisation. 
Seul  le  temps  nous  fixera  à  cet  égard  Mais  les  observations 
systématKiues  et  péiùodic^ues  dont  sont  l'objet  les  documents 
traités  permettront,  au  bout  de  quelques  années,  de  faire  des 
constatations  qui  conti-ibuei-ont  puissamment  à  nous  doter  du 
procédé  idéal,  surtout  si  les  autres  pays  veulent  bien  se  livrer, 
de  leur  côté,  aux  expériences  et  observations  scientifiques  qui 
seront  suggérées  par  les  praticiens. 

En  attendant,  nos  restaurateurs  d'archi  ves  s'occupent  également 
<lu  moulage  des  sceaux  et  dans  ce  domaine  aussi,  de  nouveaux 
j)erfecti()unements  ont  été  introduits  au  point  de  vue  technique. 
A  l'heure  «[u'il  est,  on  peut  se  procui-er  aux  .\rchives  non  plus 
seulement,  comme  pai-  le  passé,  des  emi)reintes  en  plâtre  et  en 
soufre,  mais  encore  des  empreintes  en  plâtre  imbibé  de  cii'c  ou  de 
stéarine  et  en  soufre,  des  empreintes  en  plâtre  teinté  de  la  couleur 
du  sceau  original  et  des  empreintes  en  galvanoplastie  ^^). 


('1  Pour  les  prix,  voir  lîtrirli'  iiiiiiislriicl  du  l'^^  ;i(»ùl  19:^1. 


208  CHRONIQUE 

Au  point  de  vue  de  rutilisution  des  archives,  il  y  a  lieu  de 
signaler  i)rincipulement  l'organisation,  aux  Archives  générales, 
du  Cours  d'arcliivéconomie.  créé  par  arrêté  royal  du  27  décem- 
bre 1919,  au  moment  même  où  l'on  instituait  une  école  d'ai'chi- 
vistes  aux  Archives  générales  du  Royaume  à  La  Haye. 

La  création  de  ce  cours,  demandé  depuis  de  longues  années  par 
toutes  les  compétences,  était  le  complément  indispensable  de 
l'excellent  examen  de  candidat  archiviste,  institué  par  l'arrêté 
royal  du  1*  juin  1895.  Désormais,  nul  ne  peut  être  nommé  défini- 
tivement à  un  emploi  scientifique  dans  les  Archives  de  l'Etat, 
s'il  n'a  suivi  avec  fruit,  pendant  un  semestre  au  moins,  le  cours 
d'arcliivéconomie.  Il  faut  bien  le  dire  :  nos  candidats  archivistes, 
qui  connaissaient  à  fond  l'histoire  avec  toutes  ses  sciences  auxi- 
liaires, n'avaient  pas  la  moindre  idée  de  la  manière  dont  il  fallait 
faire  un  inventaire  d'archives  En  prenant  possession  de  leurs 
fonctions,  les  jeunes  archivistes  étaient  trop  souvent  livrés  à 
eux-mêmes,  et  quelques  uns  risquaient  même  d'être  complètement 
déformés  par  des  chefs  qui  avaient  passé  leur  vie  dans  les  archives 
sans  avoir  jamais  appi'is  ce  qu'était  un  fonds  d'archives  et  beau- 
coup moins  encore  comment  il  fallait  l'inventorier.  Il  faut  dire  d'ail- 
leurs à  leur  décharge  qu'ils  n'étaient  que  trop  i-arement  à  même  de 
lire  des  livres  ou  des  revues  s'occupant  de  (questions  d'archives. 

Cette  situation  désastreuse  a  heureusement  pris  fin.  Depuis 
1920,  les  candidats  archivistes  sont  initiés,  grâce  à  un  cours 
théorique  d'une  trentaine  de  leçons,  aux  méthodes  scientifiques 
d'inventorisation,  préconisées  depuis  longtemps  par  les  plus 
hautes  autorités  archivistiques  de  tous  les  pays. 

Les  leçons  théoriques  sont  suivies  d'autant  d'heures  de  cours 
pratique,  où  le  maître  et  les  élèves  s'asseyent  à  la  même  table  et 
élaborent  ensemble  le  classement  et  l'inventaire  d'un  fonds  d'ar- 
chives C'est  ainsi  qu'au  cours  de  l'année  1920.  les  archivistes 
M"''  Nicodème.  MM.  J.  Lefèvre.  P  Rolland  et  .1.  Boisée  ont 
classé  et  inventorié  le  fonds  du  Conseil  souverain  de  Justice, 
organisé  en  1787  par  Joseph  II,  et  qu'en  1921,  l'archiviste 
M.  .1.  Germain  a  classé  et  inventorié  le  fonds  des  Archives  des 
intendances,  créées  à  la  même  époque.  Pour  se  rendre  compte  de 
l'intérêt  de  ces  travaux,  il  suffira  de  dire  que  l'existence  même 
de  ces  fonds  d'archives  était  ignorée  juscju'ici. 

Comme  on  le  voit,  malgré  l'âpreté  de  la  crise  que  nous  traver- 
sons en  ce  moment  et  au  cours  de  laquelle  les  institutions  scien- 
tifiques ne  peuvent  guère  c>si)érer,  en  Eelgicpie  pas  plus  qu'ail- 
leurs, être  l'objet  d'une  sollicitude  particulière,  il  semble  (lue 
nos  Archives  de  l'Etat  peuvent  envisager  l'avenir  avec  confiance 
et  sérénité.  •!•  Cuvelier. 


CHRONIQUE  209 

Lies  Archives  de  la  Guerre. 

Dès  les  premiers  mois  de  la  guerre  mondiale,  la  Commission 
royale  d'Histoire  s'était  préoccupée  de  l'importance  (jue  i)résen- 
terait  pour  les  historiens  de  ce  conflit  sans  précédent  la  réunion 
d'une  documentation  sûre  et  étendue,  propre  à  éclairer  les  multi- 
ples aspects  de  l'existence  qvii  fut  faite  à  la  population  belge  pen- 
dant les  terribles  années  1914-1918. 

Le  rôle  important  joué  par  la  Belgique  dès  l'ouverture  des 
hostilités  ;  la  participation  glorieuse  de  ses  troupes  à  des  combats 
implacables  ;  l'attitude  des  civils,  indignés,  mais  impuissants, 
devant  les  excès  d'une  soldatesque  sans  frein  et  les  calomnies 
sans  nombre  répandues  à  ce  propos  par  un  ennemi  sans  scrupules; 
la  splendide  résistance  de  nos  populations  contre  les  exigences 
toujours  croissantes  du  pouvoir  occupant;  les  moyens  multiples 
employés  par  les  autorités  allemandes  pour  abattre  notre  moral; 
la  lutte  chaque  jour  plus  âpre  contre  les  difficultés  de  la  vie 
matérielle;  l'organ  sation  des  groupements  de  réfugiés  belges 
dans  les  Pays-Bas,  en  Angleterre,  en  France;  la  situation  faite 
en  Allemagne  à  nos  soldats  prisonniers  et  à  nos  concitoyens 
déportés;  autant  de  chapitres  de  l'histoire  de  la  Belgiciue  pen- 
dant la  guerre  qu'il  deviendrait  difficile,  sinon  impossible, 
d'écrire  —  tant  la  passion  et  les  légendes  avaient  quelquefois 
déformé  les  faits  —  si  l'on  n'avait  pas  à  sa  disposition  de  nom- 
breux documents,  précis,  probants,  à  l'abri  de  toute  suspicion, 
d'où  l'on  pût  tirer  un  récit  authentique  des  faits  et  un  tableau 
fidèle  de  l'état  des  esprits. 

La  réunion  de  semblable  documentation,  naturellement  impos- 
sible pendant  l'occupation  même,  fut.  immédiatement  ajjiès  l'ar- 
mistice, i'objet  de  toute  l'attention  de  la  Commission  d'histoire. 
Cependant,  l'entreprise  était  si  vaste  que  la  Commission  ne  pensa 
pas  pouvoir  s'y  consacrer,  et,  sur  l'initiative  de  son  secrétaire, 
M.  Henri  Pirenne,  elle  proposa  au  Gouvernement  de  la  confier  à 
un  organisme  approprié. 

Une  commission  si)éciale  fut  donc  instituée,  par  arrêté  royal 
du  15  novembre  1919,  sous  le  titre  Commission  chnrifée  de 
recueillir  et  d'inventorier  les  documents  relatifs  à  lu  guerre  et  à 
l'occupation.  Installée  à  Biuxelles  le  14  février  1920,  dans  les 
ocaux  mêmes  de  la  Commission  roj'ale,  elle  a  pris  actuellement 
le  nom  de  Commission  des  Archives  de  la  Guerre  {C.  A.  G.). 

Elle  se  compose  de  treize  membres  :  MM.  Henri  Pirenne.  pré- 
sident; Dom  Ursmer  Berlière;  Jos.  Cuveliet-.  archiviste-général; 
G.  Des  Marez  archiviste  de  Bruxelles;  A.  De  Man,  directeur  au 
Ministère  des  Sciences  et  des  Arts  ;    A.   De  Ridder,  directeur- 

14 


210  CHRONIQUE 

général  au  Ministère  des  Affaires  Étrangères;  E.  Graeffe,  du 
Corps  diplomîiti(iue,  à  Mexico;  A.  IIi.nsay  et  L.  Lahaje,  conser- 
vateurs des  Archives  de  l'Etat  à  Hasselt  et  à  Liège;  P.  Lam- 
botte,  directeur  au  Ministère  des  Sciences  et  des  Arts;  H.  Nclis, 
sous  chef  de  section  aux  Archives  généi-ales  du  Royaume: 
F.  Passelecq,  avocat  à  IJi'uxelles.  ancien  directeur  du  Bureau 
Documentaire  Belge  ;iu  Havre,  et  J.  Vanuérus,  conservateur 
honoraire  des  Archives  de  l'Etat  à  Anvers.  Les  fonctions  de 
secrétaire  de  la  Commission  furent  confiées  à  M.  Xelis,  tandis 
que  M.  Vanneras  fut  nommé  (ïonsei'vateur  des  Archives 

A  côté  du  Comité  central,  installé  à  Bruxelles,  105,  rue  Terre- 
Xeuve,  existent  des  Coinini<sion.s  i>ruoinciales  instituées  dans  les 
chefs-lieux  des  neuf  provinces  ;  créét^s  par  arrêté  royal  du  10  octo- 
bre 1020.  elles  ont  principalement  pour  but  de  recueillir  à  la  fois 
les  documents  relatifs  à  la  période  de  la  guerre  et  les  renseigne- 
ments de  tout  genre  concernant  l'histoire  de  cette  époque  dans 
chacune  des  provinces.  Des  instructions  et  un  questionnaire 
détaillé  ont  été  élaborés  pour  leur  faciliter  cette  double  tâche. 
Elles  sont  placées  sous  la  présidence  d'honneur  des  gouverneurs 
de  province  et  comprennent  les  érudits  les  plus  familiarisés  avec 
nos  documents  d'archives. 

Voici,  d'ailleurs,  la  liste  des  présidents  et  des  secrétaires  de 
ces  comités  provinciaux  : 

Anvers  :  MM.  Schobbens,  greffier  provincial.  etGielens,  archi- 
viste de  l'Etat. 

Brnbanf  :  le  P.  Ed.  de  Moreau,  de  Louvain.  et  M.  Marinus, 
folkloriste  à  Bruxelles. 

Flandre  occidentale  :  le  Baron  A.  van  Zuylen  van  Nyevelt. 
archiviste  de  l'Etat,  et  M.  ,E.  Hosten,  archiviste  honoraire  dé 
Dixmude,  à  Bruges. 

Flandre  orientale  :  MM.  R.  Schoorman  et  Ch.  Van  den  Haute, 
conservateur  et  conservateur-adjoint  des  .\i-chives  de  l'Etat,  à 
Gand . 

Hainaiit  :  MM.  E.  Poncelet,  conservateur  des  Archives  de 
l'État  et  P.  Faider,  professeur,  à  Mons. 

Liéfjce  :  MV[.  E.  Vierset,  archéologue  à  Huy,  et  E.  Fairon, 
archiviste-adjoint  de  l'Etat,  à  Liège. 

Limbourg  :  MM  Rodants,  greffier  provincial,  et  G.  Van  Hee, 
profcsseui"  à  Ilasselt. 

Luxembourg  :  MM  le  chanoine  Flamion,  inspecteur  de  l'ensei- 
gnement libre,  et  II.  Michaëlis,  ai'chiviste  de  l'Etat,  à  .A.rlon. 

Namur  :  M.\l.  Max  Wasseige  et  Fr.  Hubert,  avocats  à  Namur 

Secondée  efficacement  par  les  comités  provinciaux,  la  Com- 
mission centrale  des  Archives  de  la  Guei-re  n'a  pas  ménagé  les 


CHRONIQUE  211 

efforts  pour  atteindre  l'objectif  qui  lui  a  été  assigné;  le  but 
qu'elle  poui'suit  n'est  pas,  disons-le  de  suite,  d'écrire  l'histoire  de 
la  Belgique  pendant  la  guerre,  mais  bien  uniquement  de  la 
prépnrer,  en  rassemblant  les  matériaux  nécessaires,  qui  sont 
classés  et  inventoriés  selon  les  principes  observés  dans  les  dépôts 
des  Archives  de  l'Etat. 

La  Commission  recherche  donc  tous  les  documents  générale- 
mont  quelconques,  manuscrits  ou  imprimés,  qui  intéi'cssent  la 
période  1914-li)18  au  point  de  vue  belge;  elle  voudrait,  en  effet, 
former  un  ensemble  aussi  comi)let  (jue  possible  de  renseigne- 
ments de  tout  genre,  sur  la  vie  sociale,  intellectuelle,  politi<iue. 
administrative  et  économi(iuc  de  la  Belgique,  en  généi-al.  occupée 
et  non  occupée,  ainsi  que  tout  ce  qui  peut  concei-uei*  l'existence 
des  Belges  installés  à  l'étranger,  qu'ils  fussent  réfugiés  ou 
déportés  ('). 

Dès  maintenant,  avec  un  budget  très  limité  et  un  personnel 
des  plus  restreint,  la  Commission  des  Archives  de  la  Guerre  a 
déjà  réuni  un  ensemble  très  appréciable  de  séi'ies  intéressantes; 
les  espérances  les  plus  légitimes  sont  donc  permises  sur  l'im- 
portance que  prendront  ses  collections  une  fois  qu'elle  pourra 
disposer  de  locaux  autrement  appropriés  à  leur  destination  que 
le  misérable  bâtiment  où  elle  a  trouvé  un  asile  provisoii-e  :  de 
très  importants  fonds  lui  ont,  en  effet,  été  promis  dont  elle  ne 
peut  prendre  immédiatement  possession  en  présence  de  l'exiguité 
de  son  dépôt  actuel. 

Quoi  qu'il  en  soit,  je  ne  puis  mieux  faire,  pour  donner  une 
idée  des  résultats  acquis  à  ce  jour  et  des  perspectives  de  résultats 
féconds  qui  s'offi-ent  à  l'activité  du  ('omité  central  et  des  Com- 
missions provinciales,  que  d'énumérer  rapidement  les  collections 
déjà  rassemblées  (')  ;  certaines  d'entre  celles  ci  ont  fait  1  objet 
d'un  inventaii'e  et  sont  indiquées  ici  par  un  astérisque. 


(1)  La  Commission  ne  saurait  assez  insister  auprès  du  public  pour  qu'on  Mil 
envole,  quelle  que  soit  leur  imporlanco,  tous  les  documents  écrits,  tous  los 
imprimés  quelconques  (journaux,  revues,  brochures,  feuilles  volantes,  alfi- 
clies,  etc.),  belges  ou  allemands,  relatifs  à  l'occupai  ion  ou  aux  Belges  exiles  : 
le  moindre  «  papier  y  peut  pré.senter  de  rinU''rèl  à  un  point  de  vue  quel- 
conque, i)eut  combler  une  lacune  de  notre  doeuinontalion  ;  incorporé  dans 
une  colleclion  déjà  constituée,  bien  cla.ssée,  utilis:ible  par  les  chercheurs,  il 
acquerra  une  valeur  qu'il  n'aurait  j.imais  présentée  s'il  était  resté  i.solé,  perdu 
dans  les  tiroirs  d'un  particulier,  exposé  à  toutes  les  chances  de  destrudion. 
Ajoutons  encore  qu'en  principe  tous  les  documents  des  Archives  de  la  Guerre 
sont  secrets. 

(')  Celte  liste,  simplement  énumérative,  donnera  inie  idée  de  la  variété  des 
collections  déjà  rassemblées.  Ces  collections  ne  sont  pas  toujours  eenipléles 


212  CHRONIQUE 

I.  —  Archives. 
A)  Archives  administratives  d'origine  allemande. 

*  Finanzabteilung  beini  General  Gouverneur  in  Belgien. 
Militar  Bauamt. 

Materialabgabestelle  Maubeuge. 
Passzentrale  i  Bruxelles). 
Zentrale  fiir  Soziale  Fiirsorge  (Bruxelles), 
Kriegslazarett  (Pahiis  des  Académies,  Bruxelles). 
Armée  Intendantur  des  Generalgouvernements. 
Militar  General  Direktion  der  Eisenbabnen 
Verwaltungs-Chef  fur  Flaudern. 

Kaiserl.  Deutscbes  Gouveruements-Gei"icht  von  Briissel  und 
Brabant. 

*  Der  Pressedelegierte  f  tir  das  Gouvernement  der  Stadt  Briissel 
u.  die  Provinz  Brabant. 

Chancellerie  civile. 
Coui-  des  Conij)tes. 
Kreiscbef  de  Malines. 

*  Kreiscbef  de  o^ivelles. 

Commissaire  civil  dans  l'arrondissement  de  Louvain. 

Commandanture  de  Bruxelles  (Service  des  prisons  et  ijolice 
militaire). 

Commandantures  d'Alost,  *  Clercken,  Hérinnes,  Middelkerke, 
Péruwelz,  Puers,  Rouler.s,  *  Saint-Xicolas,  Saventbem,  Sotte- 
gbem,  *  Tbourout. 

Gouvernement  d'Anvers. 

Prison  de  Grammont. 

Archives  (militaires  et  administratives)  provenant  de  l'état- 
major  de  la  Quatrième  Armée. 

Hafenilmter  (Boom.  Charleroi). 

Archives  militaires  pi-ovenant  de  Spa. 

*  Maschinengewehr  Scbarfzcbiitzen-Kommando  «  West  »  (Tri- 
bunal militaire  de  Tongres). 


malliourenseineiil,  et  nii  cerlaiii  noinbie  do  fonds  ne  sont  que  tragmentaires  : 
tout  particulièrement,  les  arciiivcs  allemandes  pi  ésenlont  souvent  do  grandes 
lacunes,  qui  s'ox|)liquenl  aisément  par  les  circonstances  dans  losciuelles  elles 
ont  été  relrouv(-es,  dans  les  bureaux  ou  mémo  dans  les  wagons  où  les  autorités 
occupantes  les  ont  abandonnées  (d'aucunes  nous  soni  parvenues  dans  des 
paniers  à  pigeons!) 

Certains  des  fonds  d'archives  belges  sont  aussi  fragmentaires,  actuellement, 
mais  seront  (toin|)léLés  par  la  suite,  les  aulorilcs  ou  couiinissions  dont  elles 
proviennent  n'ayant  pas  encore  pu  se  dessaisir  jusqu'à  nouvel  ordre  de  tous 
leurs  documents. 


CHRONIQUE  2 1  H 

B.   Arc.hioes  administratives  d'uvi-jçine  belge. 

a)  Dans  le  pays. 

(Certains  de  ces  fonds  concernent  des  organismes  ayant    fonc- 
tionné, à  la  fois  ou  successivement,  en  lielgiqu'!  et  à   l'étranger). 

Archives  coin:naaales  :  d)ssiers  relatifs  aux  rapports  des  com- 
munes avec  les  autorités  allemandes  (envois  des  commissaires 
d'arrondissement,  consécutifs  à  une  circulaire  du  Ministère  de 
l'intéi'ieur  du  20  avril  lO'iOi.  Des  inventaires  spéciaux  existent 
pour  les  coin  naaes  ai  *  B  )acelles,  *  Flémalle-IIaute,  *  Hainin, 
*  Plainevaux,  et  *  Temploux. 

*  Commission  d'enquête  sur  la  violation  du  droit  des  gens. 

*  Sûreté  militaire  belge;  bureau  d'études  économitjues. 
Reconstruction   du  ft)yer  du   soldat   démobilisé  :    commission 

centrale  (arrondissement  judiciaire  de  Bruxelles). 

*  Croix-Rouge  de  Belgique. 
Dossiers  relatifs  à  l'activisme  (Malines). 

*  Comité  National  de  secours  et  d'alimentation  :  Beeringen,  etc. 

*  Œuvre  d  aide  et  protection  aux  Sans  Logis  de  St-Gilles. 
Œuvre  pour  l'exhumation  et  l'identification  des  soldats  belges 

(M"«  Orianne). 

L'Aide  aux  soldats  belges  (M""^'  Van  Hal). 

*  Commission  des  déportés,  réquisitionnés  et  prisonniers  civils 

b)  A  l'étranger. 

Office  central  belge  pour  les  prisonniers  de  guerre  (camp  de 
Hameln  et  Soltau,  en  pai'tie). 

*  Belgian  Relief  Committee  de  Londres. 
Belgian  Refugee  Committee  de  Bristol. 

*  Cardiff  War  Refugee  Committee. 
Belgian  War  Refugees  (.Angleterre). 
Belgian  War  Relief  Fund,  de  San  Francisco. 

*  Comité  officiel  belge  pour  les  Pays-Bas. 
Conseil  économique  et  Comité  belge  de  La  Haye. 
Consulats  belges  en  Angleterre;  aux  États-Unis  d'Amérique; 

en  Fi-ance;  aux  Pays-Bas;  en  Afrique;  en  Amérique;  en  Asie. 
Réfugiés  belges  eij  France. 
Office  national  belge  du  Travail  (F'rance). 

C.    Archives  internationales. 

Commission  internationale  d'armistice  de  Spa. 

D.   Archives  et  documents  d'origine  privée. 

Plusieurs  journaux  de  guerre,  manuscrits,  tenus  par  des  habi- 
tants de  diverses  régions  du  pays. 


214  CHRONIQUE 

Documents  relatifs  aux  rapi)Oi'ts  individuels  avec  l'autorité 
occupante  (par  exemple  :  perquisitions,  saisies,  arrestations),  etc. 

Documentation  i-cunie  par  divers  particuliers  :  *  Fonds 
L.  Varier,,  de  Gand  (Le  chômage  et  les  autres  œuvres  de  secours 
pi-incipalement  à  (Jiand);  Fonds  Th.  Heyse  (mouvement  flamand)  ; 
Fonds  II.  Obreen  (La  Belgique  occupée);  etc. 

II.    "  Imprimés. 
A.  Bibliothèque. 

La  (])ommission  s'est  attachée  à  rassembler  tous  les  livres, 
revues,  brochures,  pamphlets  et  placards  ayant  trait  à  la  Bel- 
gique pendant  la  guei-re;  la  documentation  imprimée  ainsi  réunie 
est  déjà  fort  appréciable,  car  le  catalogue  sur  fiches  qui  eu  est 
dressé  au  fur  et  à  mesure  des  entrées  est  arrivé  à  ce  jour  au 
numéro  5904. 

B.  Journaux. 

Cette  collection  (dont  les  clandestins  ne  sont  pas  les  moins 
intéressants)  conipi-end  environ  200  journaux,  pour  lesquels  il 
existe  un  inventaire  détaillé. 

C.   Coupures  de  Journaux, 

Une  collection  générale  d'articles  de  journaux  est  également 
commencée  en  dehors  des  coupures  faisant  partie  de  fonds  spé- 
ciaux, tels  que  les  Fonds  Heyse,  Obreen  et  Variez). 

D.  Affiches. 

Cette  série,  dont  l'intérêt  documentaire  est  très  grand,  sera 
fort  importante  et  plusieurs  milliers  d'affiches  ont  fait  lobjet 
d'un  premier  classement  :  Affiches  du  Gouvernement-Général 
(ordonnances:  nouvelles;  etc.),  des  gouveraeui-s  de  province,  des 
chefs  d'arrondissement,  des  commissaires  civils,  des  comman- 
dantures,  etc.  Chacune  de  ces  catégories  est  ensuite  soumise  à  un 
classement  chronologique. 

E.  Bons  de  caisse  de  communes  et  de  comités. 

Environ  400  bons  ont  été  réunis,  provenant  d'une  centaine  de 
communes  et  comités  divers. 

m.    —    DOCU.VIENTS    ICOXOGR.VPHKiUES    ET    PHOTOGRAPHIQUES. 

Cartes  postales  illustrées,  caricatures,  portraits,  photos, 
clichés,  etc. 

Telles  sont  les  collections  réunies  jusqu'à  présent  aux  Archives 
de  la  Guerre;  l'énumération  en  est,  certes,  fort  suggestive,  car 


CHRONIQUE  215 

mieux  que  n'importe  (luel  autre  exposé  elle  montre  combien  la 
création  de  la  Commission  a  servi  les  intéi-cls  de  ceux  qui  vou- 
dront, j)lus  tard,  écrire  l'histoire  de  la  Belgi(iue  de  1914-1918. 

J.  Vannérus. 


Musées  royaux  du  Cinquantenaire. 

Cours  pratiques  d'archéologie.   1921-1922  (dix-liuilièiTK»  année). 

MM.    le  baron  A   de  Loë.  conservateur. 
La  Belgique  avunt  r histoire. 
Le  cours  sera  donné  à  deux  séries  d'auditeurs  le  vendredi 

et  le   dimanche  (au   choix  des  élèves),   à   10   heures,   à 

partir  dr  févi  ier. 
Jean  Cap.art.  conservateur. 
La  Civilisation  égyptienne. 

Le  jeudi,  à  14  h.  1  /2,  à  partir  du  10  novembre. 
Louis  Spei.eeks.  at'aché. 
L'Archéologie  de  l'Asie  anté,  ieiire. 

Le  jeudi,  à  15  h.  12,  à  partir  du  10  novembre. 
F.  Mayekce,  consei'vateur  adjoint. 
L'Art  industriel  en  Grèce.  Terres  cuites  et  petits  bronzes. 

Le  maidi,  à  14  h.  1/2,  à  partir  du  15  novembre. 
Marcei.  Laurent,  conservateur-adjoint. 
Histoire  de  la  Céramique  (2"""  partie).  Les  porcelaines. 

Le  lundi,  à  IG  h.  1/2,  à  partir  du  14  novembre. 
Henry  Rousseau,  conservateur. 
La  Scnlj)ture  monumentale  en  Grèce  [2'"''  partie). 

Le  jeudi,  à  14  h.  1/2,  à  partir  du  l''  décembre. 

Projections. 
J.  Iîommer.  conservateur. 
Etude  détaillée  de  l  Estampe  japonaise. 

Le  mercredi,  à  14  h.  1  2,  à  partir  du  16  noveml)re. 
Georges  Macoir,  conservateur. 
Elude  détaillée  des  collections  du  Musée  de  la  Porte  de  Hat. 

Le  samedi,  à  Ifi  h.  l'2,  à  i)artir  du  'i  décembre. 


Bibliothèque  royale  de  Belgique,  à  Bruxelles. 

Exposition   rétrospective. 

En  octobre  1921  a  été  ouverte,  à  la  lîibliollièque  royale,  une 
exposition  retra<,'ant  l'histoire  de  cet  établissement. 
■Cette  histoire  se  divise  en  deux  périodes.  La  première  corn- 


21fi  r.HKONIQUE 

iiience  en  1559,  avec  la  formation,  par  Philippe  II,  d'une  biblio- 
thèque centrale  de  l'Etat,  dans  le  Palais  de  la  Cour,  à  Bruxelles; 
la  seconde  commence  en  1837,  à  la  création  de  la  Bibliothèque 
royale  actuelle,  dans  laquelle  viennent  bientôt  se  fondre  les  deux 
tronçons  princi])aux  de  1  iincienne  Bibliothèque  royale  :  en  1838, 
les  manuscrits,  formant  une  bil)liothèque  indépendante  depuis 
1815;  en  1845,  les  imprimés,  constituant  la  Bibliothèque  de  la 
Ville  de  Bruxelles  depuis  1803. 

Une  partie  générale  retrace  cette  histoire,  compliquée  à  sou- 
hait, au  mojen  de  plans,  de  gravures,  de  portraits,  d'auto- 
grajjhes. 

Dans  la  deuxième  paitie  de  l'exposition,  la  formation  et  l'his- 
toire de  chaciue  collection  spéciale,  manuscrits,  impiimés,  cartes, 
estampes,  médailles,  sont  ilîusti'ées  par  des  spécim  ns  intéres- 
sants à  des  titi-es  divers;  le  visiteur  a  devant  les  yeux  une  véri- 
table coupe  géologique  de  ce  riche  dépôt  national. 


The  Angle  American  Conférence  of  Professors  of  History 

The  conférence  met  in  London  during  the  week  of  July  1 1-18. 
Its  unqualified  success  was  due  to  the  initiative  and  effective 
management  of  the  teaching  staff  of  the  University  of  London. 
Ils  purpose  was  tlireefold  :  1.  to  conseci-ate  in  fitting  stjle  the 
new  building  known  as  the  Institute  of  Historical  Research, 
acquired  by  the  University  through  private  benefaction  and 
intended  to  serve  as  centre  for  historical  investigatoi'S  in  Lon- 
don; 2.  to  acquaint  American  and  Canadian  histoi'ians  with  the 
"wealth  of  original  materials  and  oj)poi'tunities  for  research 
wliich  London  offers  the  advanced  student;  and  3.  to  emphasize 
and  by  friendly  personal  contact  to  promote  the  community  of 
political,  cultural  and  spii'itual  values,  whieh  are  the  inheritance 
and  possession  of  ail  English-speaking  peoples. 

The  programme,  mostly  the  joint  effort  of  Professors  A.  P.New- 
ton  and  A.  F.  PoUard  of  London,  was  a  most  judicious  combina- 
tion  of  professional.  social,  and  diplomatie  sessions.  Both  the 
opening  and  closing  meetings  were  held  under  the  auspices  of 
the  British  Government  :  .\Ir.  H.  A.  L.  Fislier,  eminent  Napo- 
leonic  scholar  and  now  Minister  of  Education  in  Lloyd  (îeoi-ge's 
Government,  officially  wclcomed  the  American  University  Dele- 
gates  in  an  inaugural  address.  and  later,  in  the  course  of  a 
magnificent  banquet  offei-ed  by  the  British  Government  to  mark 
the  sessions'  close,  bade  them  a  gracions  and  officiai  farewell. 
Of  a  diplomatie  nature,  too,  was  the  gift  by  the  Prince  of  Wales 


CHRONIQUE  217 

to  each  overseas  delegate  of  a  facsimile  reproduction  ol'  a  manu 
script  of  the  Black  Prince. 

TactfuUy  cordial  and  warmly  hospitable,  the  British  hosts 
conti'ibuted  splcndidly  to  tlie  social  success  of  the  conferen<;e 
and  the  personal  enjoymcnt  of  the  American  visitors.  Whereas 
the  morniug  hours  were  devoted  to  the  readiiig  and  discussion  of 
historical  papers  and  problems,  the  afternoous  and  evenings 
were  occupied  with  recei)tions  and  visits  to  i)laces  of  historical 
and  professional  interest.  Of  an  evening  we  were  formally 
entertained  by  our  fcliow  countrywoman,  Lady  Astor,  of  the 
House  of  Gommons  ;  of  an  af  ternoon  tca  and  refreshments  were 
served  to  ail  the  participants,  Bi-itish  and  American,  together 
with  iheii"  wives,  at  the  rooms  of  the  Roj-al  Historical  Society  ;  of 
another  afternoon  we  traniped  off  to  Windsor  to  enjoy  the  sights 
of  the  Castle,  guided  by  the  most  omniscient  of  «  ciceroni  »,  the 
King's  own  Librarian;  or  again,  we  made  the  pilgrimage  to  the 
home  of  the  Archbishop  of  Caiiterbury,  Lambetli  Palace,  to  be 
shown  its  treasures  in  manuscripts,  incunabula  and  objects  of 
art,  and  to  share  the  warm  hospitality  of  His  Lordship  and 
Mrs.  Davidson.  The  Sinn  Fein  agitation  was  then  at  its  height, 
nevertheless  the  worthy  Archbishop  (conservative  member  of  the 
House  of  Lords)  had  among  his  biddea  guests  the  dyed  in-the- 
green  Sinn-Fciner,  Mrs.  .T.  R.  Green. 

The  i)rofessional  part  of  the  programme  was  filled  in  part 
with  conférences,  and  in  part  with  visits  of  exploration  to  Lon- 
don's  treasurehouses  for  historical  investigations  :  to  the  Public 
Record  Office  with  its  médiéval  Rolls  and  Treasury  Papers,  its 
extensive  séries  of  Government  Correspondence,  Domestic  and 
Foreign;  to  the  British  Muséum,  with  its  wealth  of  Pnpyri, 
Greek,  Latin  find  Oriental  manuscripts;  to  the  Gui Idhall,  with 
its  rare  collection  of  charters  from  Anglo-Saxon  and  Nonnau 
times. 

As  for  the  conférences,  they  were  either  of  interest  to  historians 
in  gênerai,  or  of  particular  interest  to  the  workers  in  a  spécial 
field.  Of  a  gênerai  character  was  the  session  devoted  to  the 
problem  of  «  How  to  conduct  a  Semiuar  in  History  »  —  it  com- 
menced  with  a  painstaking  paper  by  Professor  C.  H.  Firth  of 
Oxfoi'd  (in  which  he  acknowledged  his  indebtedness  to  the 
methods  of  the  lamented  Professor  Frédéricq  of  Ghont,  urgcd 
the  need  of  adopting  the  cours  pratique  or  pro-seminary  by  the 
Englishspeaking  universities,  stressed  the  value  of  strictly 
limitiug  the  numbers  —  three  or  four,  I  believe,  he  suggested  as 
idéal  —  and  counseled  maintaining  a  certain  unity  in  subject- 
matter),  and  was  followed  by  the  informai  talks  of  Pi-ofessors 


218  CHRONIQUE 

E  R  Turner  of  Micbigan,  E.  P.  Clieyney  of  the  University  of 
Pcniisylvania,  T.  F.  Tout  of  Manchester  and  A.  F  Pollard  of 
London  —  each  describing  his  partieular  method  of  conducting  a 
seminary.  A  liappy  phrase  of  Professor  Chej'ney  was  wortli 
remembering  :  that  the  number  of  students  in  a  seminar  shoiild 
be  no  less  than  that  of  the  Grâces  nor  more  than  that  of  the 
Muses.  Another  interesting  session  generally  attended  concer- 
ued  itself  with  «  Methods  of  Editing  Oi-iginal  Sources  ».  The 
meeting  was  addressed  by  Mr.  Hillary  .Tenkinson  of  the  Public 
Record  Office,  who  pied  for  the  exact  transmission  of  orthogra- 
phie peculiarities  and  foi-  the  methods  of  editing  emj)loyed  by  the 
Surrey  Record  Society;  by  Sir  Israël  Gollancz,  the  distinguislied 
authority  on  Engllsh  Philology,  who  made  an  impassioned  plea 
for  the  pecuniary  sui)port  and  increased  professional  interest  of 
historians  in  the  Early  English  Text  Society  Publications:  and 
by  Mr.  G.  X.  Clark,  the  new  Managing  Editor  of  the  English 
Historical  Review  (succeeding  Mr.  Reginald  Lane  Poole),  who 
took  occasion  to  dwell  upon  certain  policies  of  the  Review 
regarding  publications,  and  particularly  urged  the  submission  of 
more  manuscripts  dealing  witli  the  field  of  Modem  History. 
The  discussion  was  terminated  by  the  sound  suggesti(m  of 
Mr.  .T.  Franklin  Jameson,  Managing  Editor  of  the  American 
Historical  Review,  that  the  methods  of  editing  historical  sources 
be  fixed  by  gênerai  agreement  among  scholars  and  internatio- 
nalized. 

Spécial  conférence  meetings  were  devoted  to  English  Légal 
Records  (presided  over  by  the  vénérable  and  famed  authority 
on  English  Légal  History,  Sir  Frederick  Pollock),  to  the  oppor- 
tunities  for  original  investigations  in  the  fields  of  English 
Ecclesiastical,  Colonial,  and  East  European  History,  and  to 
médiéval  Administration  (presided  over  by  the  tactful  and  amia- 
ble Professor  Tout  of  Manchester,  a  medicvalist  of  fir.st  l'ank, 
and,  by  reasou  of  his  wide  influence  with  the  members  of  the 
])rofession,  the  Dean  of  English  Histoiùans).  Other  sessions 
dealt  with  Diplomatie  Documents,  Naval.  Colonial,  and  Indian 
Records,  and  Médiéval  Science  and  Thought.  The  discussion  in 
the  session  last  mentioned  was  opened  by  the  noted  Franciscan 
scholar.  Mr.  A.  G.  Little,  who  recommended  the  wi'itings  of  thé; 
médiéval  Schoolmen  (particularly  William  of  Occam)  as  a  fruitful 
field  of  research  ;  and  continucd  by  Mr.  and  Mrs.  C.  J.  Singer, 
who  volunteei-ed  the  interesting  information  that  they  were 
making  a  complète  list  with  invcntoried  contents  of  ail  manu- 
scripts in  European  Libraries  dealing  with  médiéval  Science,, 
that  they  planned  making  the   London  Institute  of  Historical 


CHRONIQUE  219 

Research  both  thc  depositury  of  such  data  and  the  Clearinj?- 
House  of  Information  ou  ail  similar  j)robleius  the  world  over. 

Such  in  sum  were  the  agenda  of  proceedings.  Altliough  the 
information  imparted  through  the  formai  conférences  was  of 
undoubted  value,  I  believe  that  tbe  chief  benefits  derived  by  the 
participants  were  esscntially  social  and  pei'sonal.  T(  enabled 
one  to  visualize  in  the  flesh  and  liear  viva  voce  scholars  whose 
autboritative  books  and  articles  had  become  a  by-word  in  the 
historical  guild  —  such  as  C.  H.  Pirth,  Sir  F  Pollock,  T.  F  Tout, 
R.  L.  Poole,  H.  A.  L.  Fisher,  J.  P.  Whitney.  and  J.  Forteseue 
amoiig  the  British  ;  and  J.  F.  JHmeson,  E.  P.  Cheyney,  J.  T.  Shot- 
well,  H  D.  Foster  and  W.  R  Sbepherd  among  the  Americans  — 
and  to  discuss  with  meii  of  similar  iulerests  aud  possibly  sym- 
pathies problems  of  histoi'ical  moment,  whether  of  the  past  or 
of  the  présent. 

It  is  with  impressions  and  toughts  like  thèse  that  1  would 
urge  upon  the  historical  workers  and  teachers  of  Belgium  the 
feasibility  of  organizing  a  conférence  somewhat  simi  ar  to  the 
above,  but  limited  instead  to  the  French-speaking  world  (of 
France,  Belgium  and  French  Switzeriand).  Such  a  conférence 
could  serve  as  a  base  for  subséquent  union  with  the  now  perma- 
nently  established  Anglo  Amei'ican  Organization  (independent  of 
the  University  of  London.  with  committee  représentation  in 
England,  the  British  Doininions  and  America),  and  thus  effect  an 
even  doser  intellectual  rapprochement  than  now  exists  between 
the  Franco- Belgian  and  Anglo-American  civilizations. 

John  R.  Knipfing, 

Ass't.  Prof,  of  Hist., 

Oliio  State  University,  U.  S.  A. 


Répertoire  des  Chartes  de  franchises  des  villes  de  France. 

La  Société  d'Histoire  du  Droit  s'efforce  de  promouvoir  la 
publication  des  Chartes  de  franchises  des  villes  de  France  depuis 
les  oi'igines  jusqu'il  la  Révolution. 

Comme  travail  pi'éparatoire  aux  éditions  que  lui  ont  promises 
plusieurs  érudits,  la  Société  a  jugé  nécessaire  de  constituer  uu 
répertoire  sur  fiches  de  toutes  les  Chartes  de  franchises 
existantes. 

En  vue  d'assui-er  l'uniformité  du  travail,  elle  a  établi  des 
modèles  de  fiches  de  Recherches  et  de  Documents. 


220  CHRONIQUE 

La  Société  serait  heureuse  d'obtenir  de  nouvelles  collabora- 
tions à  la  confection  de  ce  répertoire. 

Prière  de  s'adresser  à  M.  (i.  Espinas,  198,  Boulevard  Saint- 
Germain,  Paris  (7  ). 

Voici  le  programme  élaboré  par  Ut  Commission  des  Chartes  de 
franchises. 

/.  Division  du  travail.  —  Les  collaborateurs  qui  voudront 
bien  apporter  leur  concours  à  la  Commission  des  Chartes  de 
franchises,  devront,  au  préalable,  lui  communiquer  l'objet  spé- 
cial de  leurs  recherches,  qu'ils  entendent  les  applicjuer,  soit  à 
une  région  particulière,  soit  au  dépouillement  de  fonds  d'archives, 
de  bibliothèques,  d'ouvi-ages  ou  de  périodiques  déterminés.  Il 
est,  en  effet,  souhaitable  i)()ur  la  bonne  marche  de  ces  recher- 
ches, que  les  collaborateurs  volontaires  s'attachent  à  inventorier 
une  ou  plusieurs  séries  de  fonds  manuscrits  ou  imprimés,  de 
fnçon  à  éviter,  autant  que  possible,  dans  leurs  enquêtes  tout 
double  emploi  ou  toute  lacune.  On  comprendra  aisément  qu'il 
serait  inutile  de  dépouiller  seulement  certains  ai'ticles  disparates 
d'une  série  d'archives  ou  quel{[ues  tomes  dispersés  d'un  pério- 
dique. 

//.  Fiches  de  recherches  (Manuscrits).  —  Ces  fiches  (petit 
format,  vertes)  serviront  à  inscrire  les  séries  d'archives  ou  les 
fonds  de  manuscrits  dans  lesquels  les  recherches  auront  été 
effectuées.  Par  exemple  : 

Lieu  de  Dépôt  :  Amifns 
Dkpôt  :  Archives  lommunales. 
Cotes  :  AA  1  à  20. 

JIJ.  Fiches  de  recherches  (Imprimés).  —  Sur  cette  série  de 
fiches  (petit  format,  roses)  on  notera,  soit  des  ouvrages  isolés 
(auteur,  titre,  lieu  et  date  d'édition),  soit  des  périodiques  (titre 
exact  et  complet  de  la  collection,  série,  tomaison,  lieu  et  dates 
extrêmes  des  volumes  dépouillés).  Ainsi  : 

\     Nom  :  Gartner. 
Auteur  :  j     r.  .  ri 

f     Prénom  :  Joseph. 

TiTRK  DU  LIVRE  OU  DE  LA  COLLECTION  :  Chartes  de  communes  et 
d' Il ffrant-hissotnents  fn  Bourgogne. 

Série  kt  Tomaison  :  t.  1  à  4 

f  ^      l.i'U  :  D'jfiii. 


CHRONIQUE 


221 


IV.  Fiches  de  documents  (Manuscrits).  —  Ces  fiches  (grand 
format,  vertes),  destinées  à  classer  méthodiquement  les  ren- 
seignements extraits  des  textes  dépouillés,  seront  remplies 
d'après  le  modèle  suivant  : 

(      Nom  original  :  Mous  Albanus. 

Nom  actuel  :    Montauban  ;    dép.    Tarn-et-Ga- 

rvnne. 
Nom  original  :  Alfonsux,  cornes  Pictavensis  et 

Tolosartvs,  mnrchio  Provincie. 
Identification  :  Alf/hnnsf,  cowte  de  Poitii'rs  et  de 

Toulouse,  mat  guis  de  Provence  [12491253). 
Forme  originale:  Anna  Domini  M°  duantesimo 

quinquogesimo  primo,    sabbato  post   oclabas 

apost  lorum  Pétri  et  Pauli. 
Concordance  avec   le    style    grégorien    :    1251, 

8  juillet. 
Latin. 
Mo)itauba7i . 
Archives  communales 
A  A  4,  Livre  dfs  serments,  fol    85. 
Matérielle  :  Parchemin. 
Diplomatii^ue  :  C"pie  a7ionyme  du  14^  siècle. 
Juiidique  :  Confirmation  des  «  libertés  et  bonnes 

coutumes  ». 


1»  Localité 


2°  Autorité; 
concedante 


3°  Date 


4"  Langue 


MANUSCRITE 


6°  Nature 
DE  l'acte 


V.  Fiches  de  documents  (Imprimés).  —  Ces  fiches  (grand 
format,  roses)  seront  remplies  comme  les  précédentes  pour  les 
rubriques  1,  2,  3,  4  et  6  (nature  juridique  seule).  Sous  le  n"  5 
(source  imprimée)  on  désignera  l'ouvrage  isolé  ou  l'article  de 
périodique  dans  lequel  le  document  est  édité,  étudié  ou  analysé, 
eu  indiquant  la  page  ou  les  pages  extrêmes,  et  éventuellement  le 
numéro  de  la  pièce,  et  en  donnant  la  référence  au  texte  utilisé 
par  l'auteur,  d'après  le  modèle  suivant  : 

Nom  original  :  Mons  Calvtdus. 

Nom  actuel:  Montchauvet;  dép.  Seine-et-Oise, 
cant.  Iloudan. 

Nom  original  :  Simon,  cotnes  Ebroycensis. 

Identification  :  Simon  III  de  Mottifort,  comte 
d'Ér.reux  (1140-1180). 

Fi)rme  originale  :  Manque. 

Conioi'dance  avec  le  style  grégorien  :  [1167  en- 
viron^. 


1"  Localité 


2"  Autorité 
concédante 


3"  Date 


222  CHRONIQUE 

4"  Langue         :     Latm . 

Rhein,    André.    La    seiyticurie  de  Montfort  en 

Ivi'line  d>puis  son  originf  jusqu'à  son  union 

au  duché  de  Bretacjne  {X^-X[  V^  siècles),  dans 
5"  Source  )         ^'^^  Mémoires  de  la  S  déié  archéologique  de 

IMPRIMÉE  ]         Ramhoui/lrt,  t.  21  {PJJOj,  p.  309-302,  pièce 

juslifcalive  n°  5. 
Edité  d'après  ;   Bibl.  nat.,  ms.  français  30008, 

Montfort,  fol.  60. 
6"  Nature  i       Confirmation     des     coidumes     acordées     par 

.JURIDIQUE  \         Louis  VI  le  Gros  et  Amaui y  III  de  Mon' fort. 

VI.  Remarques.  —  On  voudra  bien  observer  pour  l'utilisation 
des  lïehes  de  documents  les  reconiniandations  suivantes  : 

1"  LocAMTÉ.  —  Le  nom  actuel  devra  être  snixi  de  la  désigna- 
tion du  département,  et  éventuellement  de  celles  du  canton  et  de 
la  commune,  orthograpbiées  d'après  la  dernière  édition  du 
Dictionnuij  e  des  Postes. 

2°  AuTORiTi'i.  —  S'il  existe  i)lusieurs  autorités  concédantes,  on 
les  mentionnera  naturellement  toutes. 

3°  D.VTE.  —  Si  la  date  fait  défaut,  on  conjecturera  entre  [  ]  une 
année  ou  du  moins  une  époque  approximative. 

4°  Languk.  —  On  ne  négligej-a  pas  de  noter  les  traductions, 
même  modernes. 

5"  Source.  —  On  indiquera  le  dépôt  d'arcbives,  la  bibliothèque 
ou  encore  la  collection  privée,  qui  renferme  le  document  manu- 
scrit, avec  la  cote,  en  spécifiant,  pour  les  registres,  leur  nature 
ou  leur  appellation  traditionnelle  :  Curtuhiire  miinicip'd.  Registre 
aux  btms.  Registre  de  copies;  Liore  blanc,  Liore  enchaîné,  etc.,  et 
en  précisant  les  folios  ou  les  pages,  au  besoin  extrêmes. 

6"  Nature.  —  1°  La  nature  matérielle  fera  connaître  l'état 
actuel  de  la  pièce  :  si  elle  est  sur  parchemin  ou  sur  papier  ;  si  elle 
est  détériorée:  rognée,  déchirée,  moisie...,  ou  si  l'écriture  e.st 
pâlie;  enfin  si  elle  est  scellée  ou  porte  des  traces  de  scellement  (<;). 

2°  La  nature  diplomatique  indi(iuera  si  l'acte  est  une  minute, 
un  orijrinal  ou  une  copie,  et,  dans  ce  dernier  cas,  quels  en  sont 
lauteur  et  le  caractère  :  copie  authentique  ividimus.  transcrip- 
tion notariée),  copie  d'érudit,  co])ie  anonyme,  etc. 

3"  Enfin,  la  nature  juridique  de  l'acte  mérite  des  explications 
plus  déveloi)pées.  En  piincipe,  cette  rubriciue  doit  renfermer  une 
désignation  aussi  sommaire  et  précise  que  possible  de  la  pièce. 


(')  La  Sociclé  recevra  avec  une  parliculière  reconnaissance  les  photogra- 
phies de  documents  dont  ou  voudra  bien  lui  faire  don. 


CHRONIQUE  223 

une  sorte  de  titre;  mais  il  convient  de  déterminer  quels  genres  de 
textes  il  faut  rechercher  et  noter. 

Généralement,  les  documents  que  doivent  signaler  les  collabo- 
rateni's  concernent,  ou  les  localités  pourvues  d'une  commune, 
c'est  à-dire  possédant  un  gouvernement  plus  ou  moins  autonome, 
ou  les  localités  qu'on  peut  appeler  les  villes  de  franchises  :  quelle 
que  soit  l'origine  de  ces  aggloméi-ations,  qu'elles  représentent 
d'anciennes  villes  romaines,  des  villes  neuves  proprement  dites, 
des  sauvetés,  des  bastides  etc..  il  semble  que  toutes  peuvent 
renti-er  dans  les  deux  gi-oupes  politi(iues  précédents.  Les  colla- 
borateurs aui'ont,  bien  entendu,  à  noter  avant  tout  les  documents 
qu'on  appelle  les  chartes  de  communes  ou  de  fi-anchises,  mais  il 
serait  insuffisant  de  se  borner  à  ces  deux  seuls  genres  de  pièces. 

En  effet,  telle  commune  de  pi'emier  ordre,  comme  Douai,  qui, 
du  moins  à  l'oi-igine.  n'a  pas  reçu  de  charte  i)i'oprement  dite,  a  eu 
cependant  plus  d'une  fois  ses  «  bonnes  coutumes  »  confirmées 
purement  et  simplement  par  le  pouvoir  public  :  ces  confirmations, 
qui  transforment  au  besoin  en  même  temps  sa  constitution  inté- 
rieure, ne  sont  en  réalité  que  des  concessions  de  chartes.  Telle 
autre  ville,  comme  Corbie,  ])ou!'vue  au  contraire  d'une  charte  de 
commune,  a  vu  régler,  et  môme  à  plusieurs  reprises,  par  la  puis- 
sance souveiaine,  ses  différends  avec  le  pouvoir  abbatijil  local  : 
ces  règlements  ont  infuencé,  au  fond,  le  fonctionnement  de  sa  vie 
communale.  Certaines  villes  encoie  possèdent  des  statuts  muni- 
cipaux, qui  ne  sont  que  le  développement  des  churtes  de  com- 
munes ou  de  franchises.  Rappelons  également  les  chartes  de 
pariage,  qui  sont  très  fréquemment  liées,  soit  à  la  fondation  de 
villes  neuves,  de  bastides  ou  de  sauvetés,  soit  à  l'organisation  de 
villes  préexistantes,  et  les  chartes  d'affranchissement  ou  même 
d'abonnement  à  la  taille,  particulièrement  nombreuses  en  Bour- 
gogne . 

Mentionnons  aussi  certains  serments  très  développés  :  tel 
serment  prêté  par  le  seigneur  local  à  la  ville,  comme  celui  de 
I'évc(iue  de  Clermont  en  1 198,  est  un  exposé  -^-éritable  et  com])let 
des  rapports  politiques  des  deux  pouvoirs;  et  tel  autre,  comme 
celui  que  prête  le  Magistrat  d'Hénin-Liétard  à  la  commune  vers 
le  milieu  du  xiii*  siècle,  est  un  véritable  petit  code  urbain.  Et 
encore  telles  autres  communes,  comme  Arras  ou  Aire-sur-la- Lj's, 
ayant  également  reçu  chacune  une  charte,  ont  aussi  obtenu  du 
pouvoir  public  territorial,  lune  une  «  loi  et  coutume  »  criminelle 
qu'on  peut  considérer  comne  une  sorte  de  charte  de  commune, 
l'aurre  une  concession  générale  relative  à  l'exercice  de  la  justice. 
Enfin,  on  notera  les  chartes  cassant  les  communes  et  celles  qui, 
éventuellement,  les  auront  rétablies. 


224  CHRONIQUE 

Tous  ces  documents,  et  d'autres  similaires,  tels  que  les  eu(]uêtes 
sur  les  coutumes,  les  recours  aux  chefs  de  cens,  etc.,  présentent 
cependant  un  trait  commun  fondamental,  c'est  leur  caractère 
juridique  absolument  général;  s'ils  ne  sont  pas  la  charte  propre- 
ment dite,  ils  la  remplacent  ou  la  complètent.  A  son  exemple,  ils 
règlent  ou  transforment  plus  ou  moins  les  institutions  de  la 
localité  à  laquelle  ils  s'appliquent.  Si  l'on  doit  donc,  par  prin- 
cipe, laisser  de  côté  tous  les  actes  juridiques  ne  visant  qu'à  une 
fin  particulière,  nous  croyons  qu'il  ne  saurait  en  être  ainsi  des 
pièces  précédentes  •  leur  utilité  pour  l'histoire  du  droit  municipal 
n'est  guère  moindre  que  celui  des  chartes  proprement  dites. 


Le  thème  du  sacrifice  volontaire 
dans  la  tragédie  d'Euripide  ' 


C'est  un  fait  bien  connu  que  la  tragédie  grecque 
€mi3runte  les  sujets  qu'elle  traite  à  la  tradition  légendaire. 
Mais  peut-être,  dans  l'examen  particulier  de  chaque  tra- 
gédie, n'a-t-on  pas  toujours  tiré  de  ce  fait  toutes  les 
conséquences  qu'il  entraîne.  Par  une  tendance  naturelle, 
on  recherche  avant  tout  quelles  modifications  l'auteur  a 
apportées  aux  données  antérieures;  on  tâche  à  détermi- 
ner la  mesure  de  son  originalité.  N'y  aurait-il  pas  intérêt 
à  modifier  le  point  de  vue,  en  se  demandant  ce  que  l'auteur 
a  gardé  des  données  traditionnelles,  et  aussi  les  raisons, 
variables  peut-être,  pourquoi  il  les  a,  en  une  large  mesure, 
respectées?  Quand  le  mythe  s'est  fixé  en  légende,  non  seu- 
lement il  s'est  localisé  dans  le  temps  et  dans  l'espace  ;  mais 
encore  la  cristallisation  s'est  faite  dans  une  société  déter- 
minée :  les  institutions  et  les  croyances  de  cette  société 
doivent  alors  transparaître,  d'une  manière  plus  ou  moins 
distincte,  dans  la  légende.  On  conçoit  que  les  poètes  tra- 
giques qui  la  traitent,  en  dépit  d'un  puissant  effort  d'adap- 
tation, ne  puissent  effacer  entièrement  les  traces  d'un 
passé  plus  ou  moins  aboli  ;  on  conçoit  aussi  que  cei'tains 
d'entre  eux  —  un  Euripide  par  exemple  —  esprits  curieux 
et  attentifs,  d'un  parti  délibéré,  aient  conservé  ces  restes 
du  passé,  non  point  sans  doute  avec  une  fidélité  et  une 
intelligence  complètes,  mais  au  gré  de  leur  fantaisie  amu- 


(1)   Conféreiicf    fnitc    :i     IJnixelies    au    Cercle   de   Philologie    rlassi(iiie   le 
17  février  \9±2. 

15 


226  p.    ROUSSEL 

sée,  par  bribes  et  morceaux,  sans  grand  souci  de  la  dispa- 
rate des  dépôts  anciens  et  des  apports  nouveaux. 

L'étude  d'un  thème  —  celui  du  sacrifice  volontaire  ou 
du  dévouement  paraît  pro])re  à  illustrer  ces  réflexions. 
Il  n'apparaît  point  qu'Eschyle  ni  Sophocle  l'aient  traité (*)  ; 
au  conti-aire,  les  tragédies  d'Euripide  nous  en  offrent 
plusieurs  exemples;  et  l'on  n'a  point  tout  dit  lorsqu'on  a 
analysé,  au'i)oint  de  vue  de  la  technique  euripidcenne, 
les  scènes  dans  lesquelles  un  héros  ou  une  héroïne  se 
dévouent {'),  ni  non  plus  lorsqu'on  a  relevé  les  raisons 
historiques  pour  lesquelles  ce  thème  du  dévouement  atti- 
rait le  poète  et  plaisait  au  public  (•'^). 


Par  persuasion  ou  par  ruse,  Apollon  a  obtenu  des  Moire& 
que  son  ami  Admète,  dont  les  jours  étaient  comptés,  pût 
suspendre  l'arrêt  du  destin,  si  quelqu'un  consentait  à 
mourir  pour  lui  :  seule,  l'épouse  d'Admète,  Alceste,  y  con- 
sent. Il  n'y  a  point  là  sacrifice  rituel,  mais  l'équivalent. 
Quand  la  reine  des  Perses,  Amestris,  femme  de  Xerxès^ 
devenue  vieille,  faisait  enterrer,  au  témoignage  d'Héro- 
dote (^),  quatorze  enfants  choisis  dans  les  familles  les  phis 
notables  «  pour  rendre  grâce  en  son  nom  au  dieu  que  l'on 
dit  habiter  sous  la  terre  »,  elle  entendait  bien  que  le  dieu, 
en  échange  de  ces  jeunes  vies,  i^rolongeât  sa  propre  exis- 
tence, penchant  vers  son  déclin.  Alceste,  elle  aussi,  est  une 
victime  de  substitution  ;  mais  elle  l'est  devenue  par  un  acte 
volontaii-e  ;  au  sens  précis  du  mot,  elle  s'est  dévouée  ;  elle  a 


(*j  L'i(l(k'  fie  s;icri(ico  apparail  pciil-ôtre  dans  les  Sept  contre  Tlièbes^ 
(l'Eschyle,  où  Kt»>ocle,  se  sentant  niaiulil,  croit  qtio  sa  niorl  seule  sera  agréable 
aux  (lieux  (v.  708).  Mais  nulle  part  n'est  exprimée  nettement  lidée  (juMl 
donne  sa  vie  pour  la  cité,  contrairement  à  ce  (jue  soutient  (].  Robert,  Oidipns, 
t.  I,  p.  20G  et  j).  41(5  et  suiv. 

('^)  C'est  ce  qui  a  été  lait  dans  une  récente  élude;  cl.  Joiian.na  Scilmitt, 
Freiwilliger  Opfrrtod  hei  Eurlpides  i  lieligionsf/esc/iichtlic/ie  Versiir/ie  n.  Yor- 
arlieiten,  XVII,  2,  1921),  avec  le  sous-lilre  qui  restreint  singulièrement  l'intérêt 
du  travail  :  Ein  Beilray  zu  seiner  dramathchen  Technik. 

('j  11  est  bien  assuré  que  la  pénible  jiuerre  où  était  engaf^é  Athènes  a  exalté 
le  palriotisnu'  d'Euri|jidc  et  détermine  le  choix  des  sujets  qu'il  traitait  r 
cf.  J.  Oeki,  Euiipidrs  unir,-  drin  Ihiitk  des  nizil.  >i.  ilekef.  Kricf/s,  Bàle,  190.5. 

(*)  VII,  114. 


THÈME    DU    SACRIFICE  227 

attiré  sni-  sa  tète  la  sanction  de  mort  qu'une  volonté  ou  une 
colère  surnaturelle  avait  prononcée  contre  Admète. 

Nul  ne  conteste  que  le  dévouement  d'Alceste  ait  été  un 
sujet  légendaiie;  mais,  parce  que  notre  délicatesse  morale 
s'offusque  du  consentement  donné  par  le  mari  à  ce  sacri- 
fice, on  a  soutenu  naguère  que,  dans  la  légende,  Admète 
n'avait  pas  eu  à  donner  ce  consentement.  M.  Maurice 
Croiset  écrit  (^)  :  <(  Tout  s'est  passé  entre  Apollon  et  la 
jeune  femme.  Le  dévouement  d'Alceste,  accepté  par  le 
dieu...  était  iri-évocable,  lorsque  son  mari  l'avait  connu... 
L'important  est  de  ne  pas  se  mettre  dans  l'esprit  que  le 
dévouement  d'Alceste  ait  dû  être  entouré  de  formalités, 
comme  un  contrat  passé  devant  notaire,  ni  qu'elle  avait 
besoin  pour  l'accomplir  d'une  autorisation  maritale  en 
forme...  N'oublions  pas  qu'il  s'agit  de  vieux  récits  popu- 
laires, presque  de  contes  d'enfants...  qu'il  faut  interpréter 
avec  complaisance  «. 

Il  est  possible  que  la  légende  n'ait  point  précisé  les  con- 
ditions de  l'acte  d'Alceste  ;  mais  elle  les  sous-entendait,  et 
l'une  de  ces  conditions,  à  coup  sûr,  était  qu'xVdmète  y 
prêtât  les  mains.  Nous  savons  assez  que  les  sociétés  primi- 
tives ont,  en  toute  occasion,  un  scrupule  extrême  des  rites, 
que  tout  engagement  y  prend  la  forme  d'un  contrat, 
sanctionné  par  des  gestes  déterminés  et  des  cérémonies 
prescrites.  Encore  que  la  légende  eût  été  entièrement 
muette  sur  ce  point,  nul  n'aurait  pu  croire  que  la  volonté 
unilatérale  d'une  femme,  exprimée  contre  le  vœu  ou,  du 
moins,  à  l'insu  de  son  mari,  suffît  à  créer  l'irrévocable.  En 
fait,  Alceste  s'est  offerte,  et  Admète  a  accepté  la  substi- 
tution. 

Il  est  notable  qu'un  historien  du  droit,  replaçant  la 
légende  dans  le  milieu  où  sans  doute  elle  s'est  formée, 
nous  fait  apercevoir  l'inexistence  du  problème  que  veut 
poser  la  critique  littéraire.  Dans  son  étude  sur  La  solida- 
rité de  la  famille  dans  le  droit  criminel  en  Grèce,  M.  Glotz. 
dit  :  ((  Si  beaux  qu'ils  soient,  certains  dévouements  sont 
moins  extraordinaires  qu'ils  ne  paraissent.  L'individu  ne 


(1)  Revite  des  Éludes  Grecifiies,  1912,  p.  1  el  siiiv.  La  inriiie  idée  est  exprimée 
par  J.  L.  Myuks,  Journal  of  Itellenic  Sludics,  1917,  p.  19."j  et  suiv. 


228  p.     ROUSSEL 

compte  pas  dans  le^évoç;  sa  peisonnalité  disparaît  dans 
une  existence  colleclive...  Ce  n'est  pas  un  miracle  qu'un 
^tre  faible  et  inutile  aime  mieux  se  survivre  dans  un  groupe 
puissant  que  vivre  dans  un  groupe  décapité  »  (^).  Nous 
tenons  le  principe  ([ui  nous  rend  compte  de  la  conduite 
<i'Admète  aussi  bien  que  d'Alceste.  Le  chef  du  Yévoç,  dont 
l'existence  est  menacée,  a  le  droit  et  presque  le  devoir  de 
provoquer  et  d'accepter  les  dévouements  qui  s'adressent 
moins  à  sa  personne  qu'à  la  collectivité. 

Il  nous  suffit  de  reconnaître  le  principe  sans  étudier  le 
détail,  si  curieux  i)Ourtant,  de  l'œuvre  dramatique (^j  Cette 
donnée  fondamentale,  Euripide  l'a  acceptée  :  il  ne  paraît 
point  qu'elle  ait  dû  particulièrement  choquer  son  public, 
sinon  le  poète  —  non  moins  ingénieux  que  M.  Croiset  — 
aurait  bien  imaginé  quelque  artifice  pour  la  dissimuler.  Il  a 
laissé  dans  l'ombre  les  circonstances  du  «  contrat  »  où 
Alceste  donnait  sa  vie  à  Admète;  mais  il  n'a  point  feint 
une  ignorance  d' Admète  (^).  Remarquons  aussi  qu'il  ne  lui 
a  point  attribué  l'hypocrisie  dont  parfois  on  l'accuse. 
Quand  Admète  supplie  sa  femme  de  vouloir  bien  ne  pas 
mourir  (■*),  il  est  prêt,  pour  sa  part,  à  déchirer  le  «  contrat  », 
qui  maintenant  l'accable;  mais  —  et  c'est  un  principe  juri- 


(1)  Op.  luud.,  |).  liiH. 

{-)  Les  innombrables  éUides  dont  VAlceslc  a  été  h;  sujet  (voir  en  dernier 
Jieu  J.  T.  Shki'pauu,  Journ.  Ilell.  Stud.,  191!>,  p.  37-47)  n'en  ont  pas  épuisé 
l'intérêt.  Dans  cette  pièce,  qui  date  de  i38.  Euripide  paraît  répondre  au  pro- 
blème posé  en  quelques  vers  fameux  de  YAnlifjune  de  Sophocle  (v.  904 
■et  suiv.)  :  Antigone  y  déclare  qu'elle  meurt  pour  son  frère,  mais  qu'elle  ne 
mourrait  pas  pour  son  mari  et  ses  enfants.  La  conduite  d'Alceste  est  toute 
<;ontraire  :  c'est  ici  la  fennne,  étrangère  au  y^voç,  qui  meurt  pour  conserver 
le  Yévoç  L'introduction  des  enfants  d'Admcte  et  d'Alceste,  due  peut  être  à 
Euripide,  est  une  source  de  patliéli(iue;  mais  il  y  a  lieu  de  croire  tjue  les 
données  de  l'ancieiuie  It'gende  en  sont  (iu(!l(iue  [leu  brouillées.  En  fait,  c'était 
immédiatement  après  son  mariage  (juAdmcte  avait  etc  menacé  de  mort;  il 
n'avait  pas  encore  de  descendance:  le  crinu;  véritable  de  son  père  et  de  sa  mère 
était  alors  de  n'avoic  i)as  consenti  à  assurer  |>ar  leur  mort  la  |»erpétuilé  de 
la  famille. 

{'^)  Il  l'aurait  dit  expli(;itement,  car  nul  n'aurait  pu  le  supposer  en  un  temps 
■où  une  femme  ne  pouvait  traiter  la  moindre  aflaire  sans  l'intervention  de 
son  KÛpioç. 

(*)  V.  â.'iO  :  Ënaipe  aauTnv,  (b  Toi\aivo,  \xr\  irpobûjç.  —  Voir  d'ailleurs  toute 
la  tirade  lyri(jue,  en  particulier  les  vers  27'i  et  suiv. 


THKMK    ni:    SACHIFICE  32î> 

diqiie  —  la  volonté    d'uu    seul    ne    suffit    pas   à    annuler 
raccord-conclu  entre  deux  pei'sonnes. 

Dans  les  pièces  cpie  nous  allons  maintenant  examiner,  il 
y  a  sacrifice  rituel,  égorgement  de  la  victime  volontaire. 
Makaria(^)  et  Ipliigénie  (2)  meurent  sous  le  couteau  da 
sacrificateur;  Ménoikeus  vei'se  lui-même  son  sang('^). 
Ainsi,  ce  thème  se  rattache  étroitement  à  la  pratique  du 
sacrifice  humain. 

Nul  ne  conteste  plus,  j'imagine,  que  l'antiquité  grecque 
ait  connu  cette  pratique;  en  quoi  les  Grecs  ne  se  distinguent 
point,  par  un  pi-ivilège  spécial,  des  autres  peuples  t"*).  Ils 
se  sont  servis  de  l'être  humain,  aussi  bien  que  de  l'animal, 
comme  d'un  moyen  pour  obtenir,  en  le  mettant  à  mort, 
certains  effets  utiles  à  la  communauté,  qu'il  s'agisse 
d'apaiser  uu  défunt  ou  de  faire  pousser  la  moisson.  A  <le 
certains  jours,  pour  satisfaire  à  un  besoin  de  purification 
collective  et  pour  concentrer  sur  des  tètes  déterminées 
les  sanctions  divines  qui  menaçaient  le  groupe,  ils  choisis- 
saient des  victimes  expiatoires,  qu'ils  pourchassaient,^ 
battaient,  mettaient  à  mort.  C'étaient  les  i)harmakoi{^)^ 
vivants  remèdes  aux  maux  dont  la  communauté  souffrait 
ou  dont  elle  redoutait  l'approche.  Quand  la  peste,  la 
famine  ou  la  guerre  suscitaient  l'épouvante,  on  constituait 
ces  «  boucs  émissaires  ^C^)  pour  dériver  sur  eux  le  courroux 
d'invisibles  i)uissances. 


('j  HvrakNdes,  v.  i7i  cl  ,sui\.  -  I.o  lumi  de  M;ik;iri;i  n'csl  p;is  (Idriiic  dans  la 
pièce  telle  ([iie  nous  la  possi-ddiis:  mais  il  est  liadilioimcl  ri  je  le  ^'ardc. 

(-)  Ip/ilffénie  à  Aiilis. 

(^)  P/wnirlrtines,  v.  831-1018;  \.  10!K)-1(1U:2. 

{■*)  Voir  la  bonne  fliide  de  Fkikh.  Schwknn.  Die  Mnischc/iop/rr  l>el  den 
Grierlien  n.  Rihiirrn  (licliyionsf/esr/i.  IV/s.  //.  Vorttili..  W,  3,  19lo).  —  A.  Lani;, 
Folklore,  \\1,  1910,  p.  137  et  siiiv.,  a  encore  eleve  ties  doiUes. 

(•^)  Sur  les  qpapiuaKoi  ii  Athènes  et  dans  le  reste  de  la  Grèce,  cf.  J.  Hakkison, 
l'wleffnini'Tui  tu  Hir  Stiidi/  off/rrrk  Hcliyimu  p.  9')  el  suiv.  ;  Sc.iiwknn.  op.  hvid., 
p.  3()   et  suiv.  .le    ne   discute    pas   ici    la    (pieslion    iW   la    survivance   des 

q)ap|aaKoi  à  l'eiKtcjue  liisloricjue.  —  Pour  rctvniologie  du  mot,  souvent  discutée 
(cf.  W.  llwKiis,  hido(/enii.  Forsr/i.,  \\\,  1909.  p.  375  et  suiv.;  A.  Ki.or/., 
(Uottiu  111,  191:2,  p. -23(»  el  suiv.  I.  le  rapiiroclicmenl  a\cc  qpctpiuoKOV  me  paraît 
incontestable. 

C^)  Ce  ternie,  emprunte  ii  une  autre  civilisation,  peut  n  être  pa>  tuul-a-fait 
adeciuat  -.  mais  il  est  d'un  usage  conunode. 


230 


p.     ROUSSEL 


Makaria,  I])higénie,  Ménoikeus  sont  des  pharmakoi 
volontair3S(*)  ;  mais  l'addition  de  cette  épithète  et  la  qualité 
<ie  ces  victimes  ne  suffisent-elles  ])as  à  rompre  tout  lien 
«ntre  ces  héros  tragiques  et  les  boues  émissaires  (-?  Le  rituel 
ne  fournirait  à  l'imagination  du  poète  qu'une  donnée  de 
<lépart  :  le  sacrifice  humain.  Puis  cette  imagination  substi- 
tuerait aux  misérables,  aux  mendiants,  aux  condamnés  u 
mort,  qui  dans  la  i)ratique  servaient  de  pharmakai,  de 
nobles  créatures,  des  fils  et  des  filles  de  roi.  Ces  victimes 
d'élite  ne  devaient  pas  être  conduites  à  l'autel  comme 
l'animal  à  l'abattoir;  on  leur  attiùbuerait  donc  une  libre 
décision.  Ensuite  il  est  permis  de  conclure  :  «  Derrière  ces 
-données  de  la  légende  se  peuvent  dissimuler  des  faits  réels; 
mais,  dans  l'utilisation  poétique  du  motif,  on  travaille 
librement  sur  les  données  »  (3). 

En  fait,  ni  dans  le  choix  des  victimes,  ni  dans  l'inven- 
tion du  motif  volontaire  qui  détermine  leur  acceptation  du 
sacrifice,  l'imagination  poétique  n'a  opéré  avec  cette 
liberté  souveraine  qu'on  lui  veut  reconnaître. 

La  tradition  légendaire  connaît  maintes  jeunes  filles 
sacrifiées  au  salut  de  la  communauté  ;  sans  sortir  de 
l'Attique,  nous  trouvons  les  filles  de  Léos,  héros  obscur 
pour  nous,  mais  vénéré  sans  doute  par  la  tribu  Léontide 
dont  il  était  le  patron;  les  filles  du  roi  Erechtheus;  les 
filles  d'Hyakinthos  ("').  Dira-t-on  qu'en  tous  ces  cas,  la 
légende  ait  inventé  regorgement  de  tendres  créatures  pour 
toucher  plus  vivement  la  sensibilité  des  auditeurs  ?  On  ne 
le  croira  i)oint,  si  l'on  se  rap])elle  le  prix  attaché  à  la  virgi- 
nité et  les  vertus  spéciales  dont  elle  revêt  ceux  qui  la 


(^)  Jai  iifjilij;!'  Il  (Icssciii  les  ;iulre.s  exemples  de  saerilice  volonlaire  dans  la 
tragédie  euripidéciine  (^Polyxèiie  offerte  sur  le  tombeau  d'Aeliille;  Évadnè  qui 
se  jette  sur  le  hùdier  de  sou  mari  :  Laodamia.  l'épouse  de  Protésilas,  qui 
ressortit,  selon  uiui.  a  un  tlicnii;  loul  dillérrnl,  l'Iirixns  dont  nous  ne  savons 
presque  rien). 

(-)  UiK'  li'aditinn  dont  nniis  ne  pouvons  établir  l'anciiMniflé  rap(»orle  que, 
lorsqu'Kpiniéni<lc  de  Crète  puritia  .Vtliènes  au  vr  siècle  av.  J.  C.  deux  jeunes 
gens  s'étaient  olleits  volontairement  à  la  mort:  et.  Allien.,  XIH.  00-. 

(^)  SciiwKNN,  oj).  /f(U(l.,  \>.  1:22;  les  phrases  qui  précédent  la  citation  résument 
sa  doctrine. 

(')  Sut'  CCS  di\cr.i  r;is.  cl'.  .S(.ii\vi:n>.  p.  1 2i)  et  suiv. 


THÈME    DI     SACHIFECE  ~^':il 

possèdent  (M.  Elle  leiii-  confère  en  particulier  un  triste 
l)rivilège  :  c'est  d'être  des  victimes  entre  toutes  agréables 
aux  dieux.  Euripide  ne  l'a  point  méconnu,  qui,  dans 
les  Phéniciennes,  écarte  comme  impossible  le  sacrifice 
d'IIaimon,  fils  aîné  de  Kréon,  parce  que,  fiancé  à  Antigoné, 
il  n'a  ]>lus  la  virginité  absolue  que  requiert  la  divinité''^). 
Ainsi  les  jeunes  vierges,  plus  encore  que  les  riîGeoi.  sont 
menées  à  l'autel  non  point  dans  la  fiction,  pour  arracher 
des  larmes  à  l'assistance,  mais,  en  réalité,  à  cause  de  la 
merveilleuse  efficacité  du  sang  que  répandra  leur  corps 
non  pollué. 

Les  héros  coutumiers  des  légendes  populaires  sont  des 
l'ois  et  des  enfants  de  rois  Mais  si,  dans  les  légendes  de 
sacrifices,  les  victimes  sont  souvent  de  race  royale,  il  en 
faut  peut-être  chercher  une  autre  raison.  Les  études  de 
M.  Frazer  nous  ont  familiarisés  avec  l'idée  du  sacrifice  du 
roi(^)  Le  roi  primitif,  i^rêtre  et  sorcier,  presque  dieu, 
assure  l'existence  et  le  bien-êti-e  de  toute  la  communauté; 
son  énergie  s'use  à  cette  lourde  tâche;  une  mise  à  moi't 
rituelle  substitue  une  force  neuve  à  sa  vigueur  défaillante. 
De  par  cette  origine  lointaine,  le  roi  demeure  comme  le 
pharnitikos  désigné  ;  quand  sa  vie  ne  suffit  plus  a  préserver 
son  peuple  d'un  péril,  il  le  sauve  par  sa  mort.  Ou  bien,  il 
donnera  du  moins  l'un  des  siens,  son  premier  né.  Ce  n'est 
donc  point  à  l'origine,  mais  bien  plutôt  par  l'abâtardisse- 
ment de  la  tradition  que  les  pharmnkoi  furent  i)iis  parmi 
les  rebuts  de  la  société  :  le  prestige  même  dont  un  groupe 
social  entoure  certains  individus  les  qualifie  d'abord  essen- 
tiellement pour  devenir  des  boucs  émissaires. 

La  légende  grecque  n'ignore  pas  que,  dans  la  balance  de 
la  destinée,  la  vie  d'un  roi  é(]uilibre  en  quelque  sorte  celle 


(*i  La  rtniiai'(|iu'  :i  dt-jà  cti-  laite  par  I",.  Fcliric  dans  un  (■(iiii|<l('  iciulii  (h> 
réUidf  de  Scliwemi  (Bert.  p/iil.  War/icrisclir..  I91it,  col.  I08j.  .M.  l'i;iim.E  est 
rauleur  d'un  ouvrage  ;  Die  laillisc/ic  Keusrhltelt  im  Altertmn  {llcUffiimxfiescli. 
Vers.  n.  Vorarb.,  VIj,  où  l'on  U'ouvera  des  fails  niMnIireux  conlinnaiil  les 
indications  données  ci-dessus. 

(••J)  V.  nU-OiO;  cf.  P.  RorssKi..  Rev.  El.  (ireri/ues ,  lili:i.  \>.  '2VS. 

(■*)  Voir  en  particulier  dans  la  .3«  édition  du  ihilden  Hoi/gli  les  tomes  IV  cl  l\ 
intitulés  Tho  <ly'>i<i\<j»il  et  The  Srapcrjoat,  et  d'autre  part,  l'étude  traduite  en 
français  sous  le  titre  -.  Lvs  orif/itu:-!  mdijiiiiirs  ilr  la  raf/iutd'    Paris.  l'.)"2()). 


232  P.    HOUSSEL 

de  la  cité.  Si  les  emiemis  tuent  Kodros,  Athènes  échappera 
à  leur  emprise(');  et  Kodros,  par  une  véritable  devotio{^K 
les  contraint  à  le  sacrifier  en  dépit  qu'ils  en  aient.  La  mort 
de  Léonïdas  aux  Thermopyles  a  été  conçue  après  coup 
comme  un  acte  de  même  signification.  L'oracle  avait  offert 
l'alternative  :  le  Perse  devait  faire  sa  proie  de  Sparte  ou 
d'un  roi  de  la  race  d'Héraklès.  Léonidas  aurait  ])u  aban 
donner  la  position  qu'il  défendait,  quand  une  trahison  en 
rendit  la  défense  impossible  ;  mais,  plein  du  souvenir  de 
l'oracle,  il  s'est  fait  massacrer  sur  place,  espérant  bien 
que  son  sacrifice  ne  serait  point  inutile  (^).  Kodros  et 
Léonidas  apparaissent  donc  comme  des  victimes  de  sub- 
stitution ;  ce  n'est  point  un  sang  vil  qui  rachète  la  cité  ; 
il  ne  faut  pas  moins  que  le  roi  lui-même  pour  détourner 
sur  lui  la  destruction  menaçante. 

*     * 

Légendes  de  jeunes  filles  sacrifiées,  de  rois  se  sacrifiant, 
voilà  ce  que  trouvait  Euripide.  Si  les  dernières  mettent 
déjà  en  évidence  l'acceptation  volontaire  du  sacrifice,  les 
autres,  à  l'ordinaire,  réclament  non  point  le  consentement 
de  la  victime  elle-même,  mais  le  consentement  de  ceux 
dont  elle  dépend.  Il  est  notable  qu'Euripide  ait  accepté 
l'une  et  l'autre  donnée,  et  n'ait  point  jugé  que  le  conflit  de 
sentiments  était  moins  pathétique,  s'il  se  passait  tout 
entier  en  dehors  de  -a  victime  désignée. 

Dans  Vl'^reclithens,  dont  nous  n'avons  conservé  que  des 
fragments  (*),   l'oracle   annonce   au   roi,  engagé  dans  une 


(ijVoireiv  dernier  lieu  sur  t-eUe  légende  l'article  consacré  par  Kschkk  à 
Kodros  dans  l'Encycloiiédie  de  Pauly  et  Wissowa,  l.  VI. 

(')  Les  Romains  ont  interprété  son  acte  connue  une  dpvotio;  mais  ce  rite 
mériterait  une  étude  parliculicre  que  je  ne  puis  entreprendre  ici.  Voir,  outre 
ScHWF.NN,  p.  loi  et  suiv.,  les  intéressantes  remarques  de  AV.  Fdwiku,  The 
religions  erperienre  of  tlie  roman  peuple,  p.  iO(J-:20!J. 

(3)  Hérodote.  VIL  -220.  On  s'étoiine  (jue  Ht  soi.t,  Griecli.  Gesrit.,  I.  p-  220, 
note  2  et  U,  p.  128,  note  2,  ait  pu  croire  que.  la  légende  de  Kodros  avait  été 
inventée  sur  le  modèle  de  la  mort  de  Léonidas,  puistpi'on  a  reconnu  depuis 
longtemps  l'élément  légendaire  (ju'inlroduit  le  chapitre  (l'Hérodote  dans  l'his- 
toire des  Thermopyles  :  cf.  H\i  vettk,  Hérodot".  htslorien  des  ç/uerres  medif/nes, 
[I.  .3r)f)-3rj7.  —  Bki.ooi,  Grirr/i.  Gescfi.,  t.  Il',  2'"''  partie,  i>.  I0<  considér(>  au 
contraire  la  légende  de  Léonidas  comme  un  «  duplicat  »  de  celle  de  Kodios. 

(■*)  i'.ï.  .Nvrch,  l'raf/in.  Irat/ir.  ffraec,  2»  éd.,  |).  1(57  et  suiv. 


THÈME   nu    SACRIFICE  ?33 

latte  sans  merci  contre  les  Thraces,  (lu'il  doit  sacrifier  une 
de  ses  filles.  Il  hésite  ;  mais  sa  femme  raffermit  son  cou- 
rage. Avec,  une  éloquence  quelque  peu  didactique,  elle 
énumère  les  raisons  qui  la  déterminent  à  donner  la  vie  de 
sa  fille  pour  le  salut  commun.  Il  est  difficile  d'imaginer 
que,  dans  une  scène  perdue,  la  jeune  fille,  consultée  à  son 
tour,  acceptait  de  bon  gré  la  mort  :  la  répétition  eût  été 
insupportable.  On  croira  plutôt  que  le  ])oète  n'insistait 
point  sur  les  circonstances  du  sacrifice  (^). 

Toute  la  première  partie  de  VIphigénie  ù  Aiilis  nous 
dépeint  la  lutte  tragique  dans  le  cœur  d'Agamemnon.  Une 
scène  entre  autres  nous  surprend,  nous  choque,  et  par  là- 
mème  mérite  d'attirer  notre  attention.  C'est  l'intervention 
de  Ménélas  qui,  avec  une  incroyable  âpreté,  exige  le 
sacrifice  d'Ipliigénie(^).  De  quel  droit  intervient-il  ainsi? 
Agamemnon  n'est-il  pas  maître,  comme  il  le  déclare,  de 
régler  lui-même  ses  affaires  de  famille ?(^)  .\  son  ordinaire, 
Euripide  jette  dans  la  discussion  qui  s'élève  entre  les  deux 
frères  les  arguments  les  plus  divers,  inspirés  même  par 
des  passions  contemporaines  ("*)  ;  et  le  sens  du  débat  en  est 
quelque  peu  obscurci.  On  entrevoit  pourtant  que  Ménélas 
fait  appel  à  la  solidarité  du  y^voç;  il  a  subi  un  affront  et 
tous  les  membres  lui  doivent  de  poursuivre  avec  lui  et 
par  tous  les  moyens  la  réparation  de  l'outrage,  u  Faut-il 
que  ma  fille  meure  parce  que  la  femme  de  Ménélas 
a  été  enlevée?))  demandera  plus  tard  Klytemnestre  (^). 
Puisque  cette  mort  est  la  condition  i)remière  de  sa  ven- 


(V)  L:i  rpstiliilioii  do  hi  piôco  prôsciile  mille  diniiuiltés  :  les  deux  aiiiros 
fillos  devaient  sv  tuer  en  apprenant  la  mort  de  leur  S(eur.  (loninieiit  cette 
mort  vnlontaiie  élait-elle  amenée,  juslitiée,  exposée?  ^'ous  l'ij^norons.  Kn  tout 
cas,  les  trois  sn-urs  paraissent  avoir  eu  l'âge  de  raison,  et  on  les  pouvait  con- 
sulter avant  de  disposer  (l'eiles. 

(■-)  V.  303  et  suiv. 

(•*)  V.  331  :  Tov  é|uôv  oiKeîv  oiKOv  oÙK  éâoo|uai; 

('')  Les  diverses  données,  qui  se  croisent  ainsi  dans  la  discussion  et  l'obscur- 
cissent, sont  les  suivantes  -.  1"  L'expédition  est  une  enti-eprise  de  la  Crèce 
entière  (ce  (jui,  ii  la  lin  de  la  pièce,  expli<jnera  !a  décision  d'Ipliigénie)  ; 
i"  Hélène  est  une  femme  adultère,  ([ui  ne  mérite  pas  (|u'on  lui  sacrilie  une 
pure  jeune  Mlle;  3°  Ajramemnon  est  représente  comme  un  déma}{ogue,  et 
Kuripide  atlaciue  en  sa  pei'sonne  des  politiciens  contemporains. 

r>)  V.  HGGet  suiv. 


^34  p.   RorssF.r, 

geance,  Ménélas  considère  qu'elle  lui  esr  due.  Le  refus 
d'Agaraemnon  est  une  trahison  à  l'égard  d'un  frère  (').  Et, 
dans  la  suite,  quand  la  nécessité  impose  à  Agamemnon  le 
sacrifice,  si  Ménélas  s'attendrit  et  s'il  a  compassion  de  la 
victime  qui  lui  est  attachée  par  les  liens  du  sang,  les 
paroles  par  lesquelles  il  manifeste  son  revirement  décla- 
rent avec  solennité  qu'en  n'exigeant  plus  regorgement 
d'Ii^higénie.  il  renonce  à  lui  droit  {-). 

Mais  voici  qu'un  groupe  plus  large  que  ce  y^voç.  dont 
Ménélas  est  le  représentant,  exigera  son  droit,  et  l'armée, 
réunie  à  Aulis,  réclame  à  grands  cris  l'immolation.  Certains 
indices  donnent  à  croire  qu'Agamemnon  lui-même  a  justifié 
cette  exigence  cruelle.  Après  avoir  reçu  l'oracle,  il  avait 
consenti  au  sacrifice,  sous  la  pression  de  son  frère,  nous 
dit-il,  mais,  s'il  en  faut  croire  Ménélas,  liln-ement  et  sans 
contrainte (^).  Dès  lors  ce  consentement  donné  constitue 
un  engagement  irrévocable.  Ulysse,  en  le  proclamant,  aura 
beau  jeu  à  ameuter  l'armée  {*j.  Si,  dès  le  début,  Agamemnon 
n'avait  pas  fait  une  promesse  imprudente,  l'armée  aurail- 
elle  eu  le  droit  d'intervenir ?('')  Dans  quelques  légendes, 
l'oracle,  tout  en  réclamant  une  victime,  spécifie  expressé- 
ment qu'elle  doit  être  librement  livrée  par  son  père  (^). 
Dans  les  Hcraklides,  Démophon,  roi  d'Athènes,  déclare 
qu'il  ne  forcera  nul  de  ses  sujets  à  sacrifier  sa  fille;  si  l'un 
y  consent,  soit!  Mais  qui  serait  assez  fou  pour  donner 
volontairement  au  trépas  ce  qu'il  a  de  plus  cher?(^)  Au 


(*)  Sl's  plaiiilos  ;i  fM'  nioiiit'iil  sont  naïves  cl  sim-rios;  cf.  v.  iOI  cl  siiiv. 

(-)  Voir  surtout  le  v.  499  :  ooi  vé|um  toÛ|uov  lu^poç. 

(•')  Les  vers  97-98  du  prologue  sont  contredits  par  les  vers  ;^00-:{()l,  on 
Ménélas  déclare  avec  force  :  Kai  iréiuTTeiç  éKibv  ,  où  pîa  —  fjir]  toOto  ^eîtiç  — 
xjr|  bdfxapTi. 

(*)  Ménélas  a  déjà  insisté  sur  la  valeur  de  lengatieuient  coiilraité,  v.  3t).")  et 
suiv.  ;  puis  Agamemnon  lui  même  déclare  (juTIv-sse  révélera  à  l'armée  :  S.  KctX- 
Xaç  Qéocpai'  éEriYn^aTo,  Kâ|u'  diç  ûirëOTriv  60|ua  kùt'  éijjeub6|Liriv  (v.  K9  rjîW). 

('')  V.  94  et  suiv.  :  Aganienmoii  paraît  considérer  qu'après  avoii-  reçu  l'oracle, 
il  aurait  pu  congédier  l'armée  sans  aucune  exiilication. 

('■)  Légende  de  la  lille  d'Aristodémos  :  cf.  Pmsamvs,  IV.  9,  4.  L'oracle 
<leinandc  une  lillc  des  Aipylides,  tirée  au  .sort,  |inis  ajoute  ;  )^v  bè  acpaXfiTe, 
■Kaiirap'  àWoiou  Tôxe  Gùeiv,  bibôvToç  éç  aqpoYnv  éKouaûuç.  Le  sacrifice  de 
la  fille  d  Aristodémos  |)araîl  avoii-  été-  le  sujet  d'une  tragédie;  cf.  lîcr.  EL 
■arecr/ties,  191."),  |>.  :2t.'L 

C)  V.  41-2  el  suiv. 


THÈME   nv   SACRIFICK  235 

•contraire,  dans  les  Phénicicimcs,  Kréon,  dès  que  Tirésias 
lui  révèle  la  volonté  divine,  s'est  rebellé;  mais  il  sait  que 
le  peuple  ne  prendra  nul  souci  de  sa  résistance  et  arra- 
chera de  ses  bras  son  fils  MénoikeusC). 

Cette  discussion  n'était  sans  doute  point  oiseuse;  en 
posant  le  problème  du  droit  de  contrainte  (pie  la  commu- 
nauté large  peut  exercer  sur  le  groupe  restreint,  elle  situe  à 
un  certain  moment  les  légendes,  ou  du  moins  certains  élé- 
ments des  légendes  traitées  par  Euripide.  Celle  d'Alceste, 
nous  Taxons  vu,  s'éclaire  suffisamment  dans  le  cadre  du 
Yévoç  Ici.  de  nouvelles  données  interviennent.  DanslcYévoç 
primitif,  dans  le  clan  solidaire,  on  ne  peut  imaginer  une 
l'évolte  de  l'individu  contre  la  volonté  du  dieu,  qui  ne  l'ait 
•<pi'exprimer  le  besoin  du  groupe.  Mais  la  cité  s'est  consti- 
tuée par  l'union  des  ^févr\  et,  bien  (pi'elle  ait  hérité  en  partie 
■de  l'attachement  qui  liait  les  membres  au  y^voç,  il  arrive 
pourtant  que  le  conflit  se  ])roduise  entre  le  sentiment  du 
grou])e  particulier  et  le  sentiment  collectif.  Ce  conflit  se 
résoudra-t-il  par  un  compromis  ou  par  la  violence?  La  cité 
recourt  à  l'un  et  l'autre  moyen  :  elle  paraît  souvent  prête 
à  agir  rudement  contre  le  représentant  du  groupe  qui  ne 
se  plierait  pas  aux  intérêts  de  tous  ;  mais  aussi  elle  décerne 
l'éloge  à  celui  qui  ne  l'oblige  pas  à  recourir  à  une  con- 
trainte, devant  quoi  elle  éprouve  quelque  scrupule  ou 
quelque  inquiétude.  Ainsi  l'esprit  de  sacrifice  est  magnifié 
au  point  de  devenir  une  condition  essentielle  de  la  valeur 
jiième  du  sacrifice. 


La  cité,  qui  a  intégré  les  "jévr],  magnifie  res])rit  de  sacri- 
fice du  TÊVOç,  non  de  l'individu.  Mais  on  sait  assez  que  la 
cité,  i)eu  à  peu,  a  émancipé  l'individu  par  la  dissociation 
des  Yévn  en  familles  étroites,  oîkoi(').  Pourtant,  ce  n'est  pas 
seulement  à  la  fa\  eur  de  cette  évolution  (pie  le  consentc- 


(1)  V.  <)T()  cl  suiv. 

(-')  Sur  celle  évoliilidii,  oiilic  l'cliidc  de  (1.  Glolz,  .sijîiialéc  ci-dcssiis.  |».  '2'2~, 
voir  L.  (iKKNK.T.  lîerhcrrlics  sur  />•  (IcrelojipemeJil  de  la  pensée  juvidif/iie  et 
}itnyttle  l'ji  (.'mv  ( l'nris,  1017).  D:iiis  Vlpliicfenic  ù  Aiilis.  a|)p;u"nt  déjà  j'opposi- 
liim  des  iiili'ivts  de  IoIkoç  particulier  d  Vj^aïuciiiiKHi  ;i  ceux  du  y^voç  d'>iit  il 
l'ail  i)arlic  avei'  son  IVci'c. 


236  p.    ROUSSEL 

ment  de  rindi\idu  ])reiKl  une  valeur  particulière;  un  autre 
élément  intervient,  qu'Euripide  lui-niénie  nous  permet  de 
reconnaître 

Dans  les  Phéniciennes,  à  la  volonté  défaillante  du  i)ère 
se  substitue  celle  du  fils  qui  mourra  i»our  Thèbes;  dans- 
Ylphigénic  :)  Aiilis,  le  consentement  d'Agamemnon  ne 
satisfait  point,  tant  que  sa  fille  ne  l'a  ]>oint  ratifié;  enfin 
dans  les  Iléraklides,  Makaria,  d'elle  même,  s'offre  pour 
assurer  la  victoire.  En  cet  épisode  où  elle  apparaît,  Euri- 
pide a  dressé  devant  nos  yeux,  avec  une  saisissante  préci- 
sion, la  figure  du  i>hiirmnkos  volontaire. 

Quand  la  jeune  fille  a  déclaré  sa  résolution,  entre  elle  et 
lolas,  impuissant  protecteur  des  Héraklides,  s'engage  un 
dialogue  lourd  de  sens  (^).  Puisque  l'oracle  n'a  point 
spécifié  la  victime,  le  vieillard  estime  que  le  pi'océdé  le 
plus  juste  serait  de  -tirer  au  sort  entre  toutes  les  filles 
d'Héraklès.  Et  en  effet,  le  tirage  au  sort  n'est-il  pas  con- 
sidéré comme  un  appel  à  la  volonté  divine  qu'il  manifeste? 
Makaria  ne  l'entend  point  ainsi  :  le  sort,  c'est  la  contrainte; 
il  n'3'  a  nul  mérite  à  mourir  si  le  hasard  en  décide.  Mais  si 
l'on  peut  voir  là  comme  une  protestation  consciente  contre 
un  procédé  traditionnel  (~i,  voici,  dans  la  suite  du  dialogue, 
un  retour  à  des  croyances  traditionnelles  :  «  Ma  fille,  dit 
lolas,  je  ne  t'ordonne  ni  te  défends  de  mourir  ».  Et  Makaria 
qui  l'entend  à  demi-mots,  lui  réplique  :  ((  Tu  parles  sage- 
ment; ne  crains  pas  que  la  souillui'e  retombe  sur  ta  tète; 
mais  c'est  volontairement  que  je  meurs  ».  La  doctrine  est 
ainsi  nettement  foi-mulée,  et  on  la  ])eut  retrouver  dans 
ÏJphigcnieà  AulisÇ-^)  :  le  consentement  de  la  victime  libère 
de  toute  souillure  ceux  (pii  la  sacrifient. 


(')  V.  5.i!l  cl  siiiv.  —  On  srliimic  (|iii'  .lnli;iiiii:i  Sclimill,  op.  hiiiil..  \k  'ri. 
voie  dans  <•!•  dialogin-  snilcniciil  «  <his  rrUirdicroédc  Miniir/il  <>  i|ii'rll('  (Ic'cinivi'c 
«  m  (illcri  Dpi'()fio/iss:e/im  ». 

('-')  Il  est  possible,  connue  le  veut  11.  Wk.m.,  Etudes  sur  le  drinue  (iiilique. 
|>.  1:28,  (|ue  le  tirapo  au  sort  ait  «'•li'  «  conlornicà  rancienne  version  de  la  fable», 
.le  donle,  en  elîel,  im"Kni'i|iide  ail  inv(»nlé  de  loule  pièce  l'épisode  de  Makaria, 
comme  le  veni  encore  .lolianna  Sclimitl.  p.  Si  el  sniv.  —  .Noions  (juc  hlyleni 
nesU'C  aussi  indi(|ni'  le  lirage  au  sort  connue  le  procédé  le  plus  jiisle  {Ipli. 
Au/.,  V.  1197  et  suiv.);  en  sa  passion,  elle  oublie  (piArlémis  a  désif^né  I» 
victime. 

(3)  Cf.  Mev.  Et.  Crectiiirs,  101.").  p.  "2(7  el  suiv. 


THKME    ni'    SAC.KIFir.K  237 

Or.  c'ctto  doctrine  nost  point  propre  à  Euripide  :  elle  a 
des  ;ilt:K'hes  lointaines  (*  ).  Rai)pr()olions-en  d'abord  un 
prineipe  dn  droit  atticpie  :  on  ne  peut  poursuivre  un  meur- 
tier,  quand,  avant  de  succomber,  la  victime  lui  a  accordé 
son  pai-don  (-).  FA  ce  i)rincipe,  vivant  dans  les  consciences, 
Euripide  aussi  le  fait  intervenir  à  la  fin  de  son  Ilippolytc  : 
par  une  déclaration  solennelle,  le  fils  qui  meurt  du  fait  de 
son  père,  l'absout  du  meurtre (3),  le  libère  et  le  décharge 
de  la  souillure  du  sang-  répandu.  En  l'un  et  l'autre  cas,  il  y 
a  une  conception  identi<pie  :  nul  esprit  courroucé,  nul 
démon  vengeur  ne  sera  déchaîné  contre  les  survivants  par 
la  victime  résignée,  celle  qui  accepte  le  sacrifice  ou  celle 
qui  pai'donne  le  meurtre. 

L'assimilation  n'est  ni  arbitraire  ni  scandaleuse.  On  a 
reconnu  depuis  longtemps  que  le  sacrifice  rituel  impliquait 
une  étrange  ambiguïté  (^).  La  mise  à  mort  de  la  victime 
apparaît  comme  un  véritable  crime,  et  mille  restes  de  cette 
croyance  ont  survécu.  Le  sacrifice  humain  a  à  peu  près 
disparu  dans  la  (xrèce  classique  Pourtant,  à  une  époque 
tardive,  on  sacrifiait  encore  un  enfant  à  Zeus  Lykaios, 
€n  Arcadie^-^).  Le  sacrificateur,  après  avoir  accompli  le 
meurtre  rituel,  quittait  son  vêtement,  traversait  à  la  nage 
un  lac  et  fuyait  dans  la  solitude  où  il  menait,  neuf  années 
durant,  la  \  ie  errante  d'un  loup  :  il  expiait. 

Cette  expiation  n'a  pas  été  introduite  après  coup,  quand 
le  sacrifice  d'un  être  humain  i)arut  abominable,  encore  que 
commandé  par  la  religion  (6).  La  conscience  primitive  ne 
trace  pas  une  ligne  de  di'marcation  nette  entre  deux  caté- 
gories de  créatures  :  l'homme  et  l'animal.  Et,  lorsqu'il  s'agit 
du  sacrifice  d'un  animal,  les  rites  qui  précèdent,  accom- 
pagnent et  suivent  l'immolation,  révèlent  assez  le  trouble 


(1)  Il  n'est  pas  ino|)poi'luii  dindiciut^i"  '<'•  "|'"'  i*'  ""nsidt're  lidt'o  de  la 
souillure  coiiime  très  ancienne  en  (îrece.  et  non  point,  ainsi  (jue  l'estime  encore 
G.  (îlot/.,  citnune  introdHite,  à  une  époijuc^  relativement  tardive,  jiar  i.i  reli- 
gion apollinienne  ;  cf.  ('■f.knk.t,  p.  -IVA  et  sniv. 

(2)  Gi.oTZ,  p.  6V);  Geknkt.  p.  143  et,  du  même  auteur,  Platon.  Lois,  livre  \. 
Irad.  et  commentaire  (Paris,  IÎM7),  p.  13!),  note  1"21,  et  p.  I  iO.  note  1:27. 

(3)  V.  1447  el  su'v. 

{*)  Cf.  J.  H.vKKisoN,  Proleyo)nenii,  p.  113. 

('')  Sohwen.n;,  p.  iO  el  suiv. 

(6)  Hypothèse  de  Gm  i-i-h;,  Crierh.  Mj/Hn,/..  p.  !»l!t. 


238  p.   RorssKL 

émoi  des  consciences  :  «  On  s'excusait  de  l'acte  qu'on  allait 
accomplii-,  on  gémissait  de  la  mort  de  la  bête,  on  la  pleurait 
comme  un  parent.  On  lui  demandait  i)ardon  avant  de  la 
Irappei"...  Sous  l'influence  des  mêmes  idées,  il  ari-ivait  que 
l'auteur  du  meurtre  était  puni;  on  le  frappait  ou  on 
l'exilait.  A  Athènes,  le  prêtre  du  sacrifice  des  Boiiphoiiia 
s'enfuyait  en  jetant  sa  hache;  tous  ceux  qui  av^aient  pris 
part  au  sacrifice  étaient  cités  au  Prytancion  ;  ils  rejetaient 
la  faute  les  uns  sur  les  autres  ;  finalement  on  condamnait 
le  couteau,  ([ui  était  jeté  à  la  mer.  Les  purifications  que 
devait  subir  le  sacrificateur  après  le  sacrifice  ressem- 
blaient d'ailleurs  à  l'expiation  du  criminel  »('). 

On  conçoit,  dès  lors,  que  le  consentement  de  la  victime, 
libérant  de  toute  crainte  les  participants  du  sacrifice,  ait 
été  désiré  et  sollicité.  A  Kos,  le  bœuf,  offert  à  Zeus  Polieus, 
se  présentait  de  lui-même  à  l'autel (-);  à  Argos,  la  chèvre, 
offerte  à  liera,  grattant  le  sol  de  sa  patte,  déterrait  le 
couteau  qu'on  y  avait  caché  et  manifestait  ainsi  son  appétit 
de  sacrifice  (•*).  Mais  Plutarque  a  formulé  la  thèse  géné- 
rale ("*)  :  (c  Les  anciens  étaient  si  respectueux  de  tout  être 
vivant  qu'ils  ne  se  sont  résignés  à  sacrifier  des  animaux 
que  sur  l'ordre  exprès  de  Del])hes  ;  encore  l'ont-ils  fait  avec 
une  sorte  d'épouvante  (TapaTTÔ|uevoi  Kai  beiinaivovieç),  et, 
maintenant  encore,  on  n'égorge  nul  animal  avant  qu'en 
baissant  la  tête  sous  une  libation  d'eau  pure,  il  ait  adhéré 
par  ce  signe  au  sort  qu'on  lui  léserve  )).  L'interprétation 
du  rite  peut  être  arbitraire  et  fausse  ('');  elle  n'appartient 


{^)  H.  HlBEKT  et  M.  Mai:ss,  Essai  sur  la  nalmc  cl  Ut  foiatimi  du  snrri/ice. 
(Melanf/es  d'histoire  des  religions,  190!)),  p.  -l()-47. 

(-)  Cf.  M.  P.  Nii.ssoN,  Griechische  Feste,  p.  17;  .1.  ll\itms(i.N,  Tlir)nis,  p.  lo"}. 

(3)  Nii.ssoN,  p.  58. 

{*)  Quaest.  conr.  Vlll,  8,  3;  cl',  sdiol.  ;i(l  Aristonli.,  Par.,  v.  !)()(l  ;  l»lut., 
lie  defecln  orar.,  itî;  scliol.  ad  Apitlloii.  IJIiod.,  I,  v.  42.'). 

(^)  Fkazek,  T/ie  inaffiv  art  (Golden  IioH</h'^,  t.  I),  p.  88i,  noie  7,  i  rnil  tjuc  la 
viclinie  devait  iiianifeslcr  par  un  sij;iu;  ou  iiii  nTnibloiiicnt  ([u'cllf  »'tait  coinine 
saisie  par  l'esprit  sacré.  —  .l'ai  laissé  de  cote  le  cas  du  Ixeiil  saciilie  aux  Bou- 
plionia  d'Allieiies  :  les  forains  que  Ion  déposait  sui'  l'autel  étaient-ils  destinés 
à  l'attirer  alin  «ju'il  parùl  se  |)résonlor  librement,  ou  à  lui  donner  un  caractère 
sacré  par  le  fait  même  (|u'il  les  avait  consommés  (cf.  Ma>nhaki>t,  Mytholog. 
Forsrli  ,  p.  .")8  et  suiv.)':'  Les  rites  complexes  des  Boiiphonia  prêtent  à  multiples 
discussions.  Aussi  bien,  ce  (jui  nous  intéresse;  ici,  c  est  moins  le  sens  réel 
des  rites  (|iu' le-,  iiilerpn'-tatioiis  «lui  de  lionne  heure  en  ont  clé  données. 


THÈME    Di:    SACHIFICK  23î^ 

})as  à  Plutarque,  mais  elle  s'accorde  avec  des  seutiments 
très  anciens,  qu'il  a  excellemment  traduits. 

Lorsqu'un  être  humain  jouait  le  lôle  de  \ictiiiie,  l'inten- 
sité de  ces  seutiments  devait  s'accroître  singulièrement  ('). 
La  communauté,  qui  sacrifie  un  des  siens,  souvent  dans  un 
mouvement  passionnel  où  elle  croit  reconnaîtie  une  force 
extérieure  et  supérieure  qui  la  dirige,  s'inflige  une  i)riva- 
tion  et  une  souffrance;  elle  éprouve  comme  un  remords. 
L'idée  de  souillure  n'est  que  la  traduction  matérielle  et  en 
quelque  sorte  physique  de  la  l'éaction  éprouvée  par  le 
groupe,  une  fois  l'acte  accompli.  Sou  sentiment  d'inquié- 
tude s'incaïue  eu  cet  esprit  vengeur  du  mort,  que  l'on  a 
déchaîné  et  qui  peut  causer  mille  maux.  Mais  si  par  avance 
on  a  su  l'apaiser,  si,  par  des  flatteries  et  des  cajoleries,  on 
a  enchaîné  son  courroux,  si,  eu  un  mot,  son  consentement 
est  acquis,  le  sacrifice  produira  tous  les  heureux  effets 
qu'on  en  attend  sans  aucune  des  conséquences  funestes 
(pi'on  peut  toujours  redouter.  Iphigénie,  mourant  inaj^ai- 
sée,  en  dé]>it  du  bâillon  qui,  sur  sa  bouche,  arrête  la  malé- 
diction, fra])pera  i)eut-èti-('  les  auteurs  res])onsables  de  sa 
mort  (2),  Toute  horreur  disparaît  et  toute  crainte  s'efface 
quand  elle  annonce  à  tous  sa  libre  décision;  la  déesse  lui 
substitut^  uiu.^  auti'e  victime  et  le  sacrifice  (hnient  une 
source  de  bénédictions (■*). 

Les  vents  agitent  Tair  «Flieuroux  frémissoTnents 
Et  la  mer  leur  répond  i)ar  ses  nnigissemeiits  (*). 

* 
^      * 

Telle  est   roriginc  du   prix  attache  au  consentement  de 

la  victime.  Il  n'y  a  ])as  là  ])ure  création  poétique,  non  plus 

que  ])ur  ])roduit  de  la  réflexion  moi-ale.  On  saisit   encore 

dans  les  vers   d'Kuripide  l'eeho  d'uni^  croyance  ancienne 

dont    la    conscience    p()])ulaire    avait    consei'vé    la  forte 

empreinte. 


(*)  HritEHT  et  Mviss,  p.  12  et  note  'i. 

(-)  Voir  le  eliarit  saisissant  du  clifpur  dans  VAyiinieiunon  dKscliyle,  v.  !23.') 
et  suiv. 

(■^)  La  lin  de  la  pièce  d'Kiuipide  nous  est  niallieureusement  transmise  de 
suspecte  manière. 

(*)  Racine,  Iphif/dnie  en  Aulide,  acte  V.  sct-nc  VI. 


240  p.     ROUSSEL 

Aussi  bien  tout  le  thème  du  sacrifice  volontaiie,  tel 
qu'Euripide  l'a  traité,  nous  est-il  ai)])aru,  sous  ses  <Iiverses 
formes,  comme  i^rofondément  engagé  dans  le  passé.  L'ima- 
gination du  poèt(^  s'exerce  dans  certains  cadres,  travaille 
sur  certaines  données  qu'il  respecte  et  qu'il  vivifie. 
N'accepte-t-il  pas  la  donnée  primordiale,  l'arbitraire 
volonté  d'une  puissance  surnaturelle  qui  nécessite  ces 
nobles  dévouements?  A  l'ordinaire,  il  n'est  pas  ménager 
de  ses  critiques  envers  les  dieux  ;  dans  les  pièces  que  nous 
avons  examinées,  si  i)arfois  un  blâme  api)araît,  bien  vite  il 
est  étouffé  (^).  L'identité  s'établit  naturellement  entre  le 
vouloir  du  dieu  et  le  besoin  commun  Dans  les  Phéni- 
ciennes, quand  Tirésias  préi)are  Kréon  à  la  nécessité  du 
sacrifiée  qu'il  demandera  de  lui,  le  premier  mot  qui 
s'échappe  de  sa  bouche,  c'est  que  le  pays  souffre  (vo(Teî)(^). 
Ce  n'est  pas  une  simple  métaphore  :  la  souffrance  du  pays 
appelh^  le  phnrmakos,  l'homme  dont  les  veines  recèlent 
comme  un  baume  de  guérison  et  de  salut. 

Sous  ces  termes,  nous  apercevons  le  sentiment  antique 
de  l'efficacité  du  sacrifice^  pour  la  conservation  de  la  vie 
sociale.  Euripide  est  pénétré  de  ce  sentiment,  et  l'a  traduit 
magnifiquement  dans  son  cxnivre,  qui  vaut  ainsi  i)our  tous 
les  temps.  Car  il  a  su  traiter  un  de  ces  thèmes  qui  émeu- 
vent le  plus  vivement  les  profondeurs  de  la  conscience 
humaine.  Dans  toutes  les  périodes  de  grandes  crises, 
l'utilité  pratique  du  dévouement  total  de  l'individu  à  la 
communauté  ne  se  traduit-il  pas  par  le  sentiment  mystique 
de  la  valeur  expiatoire  et  propitiatoire  du  sang  librement 
répandu? 

P.     ROUSSKL. 


(*)  Par  exemple  dans  les  Hértiklides,  v.  t:2o-i26  :  timide  (jueslidii  du  elid'ur. 
Dans  la  première  |)arlie  de  Vlpldgvnie  à  Aiilis,  on  voit  poindre  le  conflit  entre 
la  religion  el  riiumanité  ;  mais  la  péripétie  de  la  pièce  l'efface  entièrement. 

('-)  V.  H67.  —  L'expression  se  retrouve  chez  Eui'ipide  (Hvrakfrs,  v.  3i),  chez 
les  historiens  et  les  orateurs  pour  qualifier  un(>  ville  que  déchirent  les  luttes 
civiles. 


Le   nom   de   lieu   gaulois 
CAMBOS,  «La  Courbe» 


Au  complément  de  son  Altceltiacher  Sprachschat:  (*), 
Holdei"  dérive  de  l'adjectif  cambos,  «courbe»,  pris  substan- 
tivement, un  certain  nombre  de  noms  de  Heu,  situés  tous 
en  pays  germanique,  entre  autres  Kamp  (Haute- Autriche), 
Kani  (Bavière),  qui  est  Kanib  en  1040  et  (]hambe  en  1094, 
Kamp  (Bas-Rliin,  dans  une  boucle  du  llhini,  qui  est  Cambo 
en  IO80.  On  voit  par  le  dernier  exemple  que  Holder  admet 
que  la  désignation  Cambos  a  pu  être  choisie  pour  dénom- 
mer un  lieu  habité  situé  à  la  courbe  d'un  fleuve  ou  d'une 
rivière.  Ce  doit  être  là  le  cas  le  plus  fréquent  ;  toutefois  il 
n'est  pas  exclu  que  quelque  courbe  d'une  autre  nature, 
comme  un  coude  dessiné  par  un  chemin  gaulois,  ait  pu  être 
parfois  aussi  la  cause  détermiiumte  de  la  dénomination 
Cambos. 

On  peut  dire  qu'en  terre  de  langue  française  également 
Cambos  doit  être  à  la  base  d'un  certain  nombre  de  dési- 
gnations toponymiques  et  qu'il  y  a  sans  doute  plus  d'un 
Champ(S)  qui  lui  doit  son  origine,  (^uoi  qu'il  en  soit,  voici, 
à  titre  d'exemple,  un  cas  de  l'emploi  de  Cambos  en  terre 
française,  qui  me  paraît  concluant. 

Il  y  a  dans  le  testament,  en  date  de  f)36,  d'un  diacre 
nommé  Grimo,  de  Longwy,  une  donation  ainsi  conçue  : 
<c  Villa  vero  mea  Chambo  secta  super  Orto  fluviolo, 
(juantum  jjortio  mea  continet,  ad  integrum  omnia  et  ex 
omnibus    matriculi    Choinse    ecclesie    in    integro    possi- 

(')  m.  i():i!i. 


242  p.    MARCHOT 

deant...  »  (*).  Qu'il  puisse  s'agir  dans  ce  passage  d'un  lieu; 
tirant  son  nom  du  gaulois  Cnmbos,  malgré  la  graphie  ch,. 
c'est  ce  qui  résulte  de  nombreuses  analogies  fournies 
depuis  61  o  par  les  dii)lômes  mérovingiens,  telles  que 
Charisago  =  Carisiacum,  Chaciaco  =■-  Cassiacum  (-). 
Comme  il  n'y  a,  sur  le  cours  de  l'Ourtlie,  aucune  espèce  de 
localité,  ni  commune,  ni  dépendance  de  commune  ou; 
hameau,  ni  même  partie  ou  section  de  localité,  du  nom  de 
(Ihamp(s),  il  faudrait  bien  admettre  que  la  villa  Chambo 
du  temps  mérovingien  eût  disparu  sans  laisser  de  traces, 
si  l'on  ne  s'avisait  qu'il  y  a  de  l'expression  «super  Orto 
fluviolo»  une  autre  interprétation,  qui  conduit  à  une  iden- 
tification tout  à  fait  satisfaisante  de  Chambo.  Il  faut  bien 
prendre  garde  que,  dans  le  latin  des  clercs  et  des  notaires 
mérovingiens,  une  expression  Orto  fluviolo  peut  parfaite- 
ment n'être  que  le  cas  ablatif  de  Orto  fliiuioliis  (le  mot 
Orto  étant  pris  au  datif),  signifiant  simplement  :  un  «flu- 
violus»  (c'est-à  dire  un  petit  affluent)  de  l'Ourtlie.  Voici  de 
nombreux  exemples  analogues  pour  l'emploi  de  datifs  dans 
cette  fonction  :  dans  les  inscriptions  chrétiennes  de  la 
Gaule  Ursiniano  siibdiacono...  ossa  :  dans  une  inscription 
du  VII*  siècle  Qui  foerunt  fili  Magna  ;  dans  les  «  Leges 
Alamannorum  »  filiuui  duci,  iii  curte  ducii'')  ;  enfin,  même 
avec  un  simple  nom  de  chose,  primus  fuit  abbas  inonasterio 
nostro  dans  une  inscription  du  VI^  siècle  {"-). 

Une  villa  (liambo  sise  sui'  un  affluent  de  l'Ourtlie  n'est 
pas  difficile  à  identilier  ;  c'est  le  village  de  Champs  (sec- 
tion de  la  commune  de  Longchamps),  situé  à  environ 
quatre  kilomètres  au  nord-ouest  de  Bastogne,  sur  un  petit 
affluent  de  l'Ourthe  portant  aujourd'hui  le  nom  de  ruisseau 
de  Rouette,  du  nom  d'une  des  localités  arrosées.  Précisé- 
ment, un  peu  plus  avant  dans  son  testament,   le  diacre 


(•)  Bf.vkk,  l'rkiijKicjiliiicli  :iir  ('•c.ttinr/ilc  lier  Hcgicninff.ihi'zirlie  Cohhnt:  nnd 
Trier,  I,  7.  L'exciiiplaii'c  de  la  Bililiotlicquo  Royale  <'Xi)li(Hie  C/ioi/isp.  adjectif, 
par  Huy  (dans  une  arinolatioii  en  iiiar^ic). 

(")  MKïKK-l.iiitkK,  llislor.  fnim.   Gramm.,  ^   103. 

{')  BontciK/,,  Kkhn.  de  linf/iiisl.  romane,  ^  228. 

C)  Kxoniiilc  pris  à  liiti  not,  llist.  de  lu  langue  franc  1,  91,  et  (ju'a  bien 
vdiilii  iiH'  cuiiiimiiiiciiM'r  M.  le  professeni'  Cli.  Hruneau  (Nancy),  à  qui  j'ai 
liiil    pail  de  inuii   inlciiin'latimi  de  "villa  C/iaudion. 


GAULOIS    *CAMBOS  243 

Grimo  en  vient  à  parler  de  ses  biens  qui  sont  situés  à 
Bastogne,  Quant  an  village  de  Champs,  son  existence  nous 
est  attestée  au  moins  pour  l'époque  romaine  par  un 
tumulus  (^).  En  ce  qui  concerne  l'interprétation  môme  de 
fliwioliis  par  «ruisseau,  petit  cours  d'eau»,  elle  est  aj^puyée 
efficacement  par  le  fait  que  jamais  dans  les  documents  du 
haut  moyen  âge  l'Oarthe  n'est  qualifiée  de  fluoioliis.  C'est, 
comme  on  sait,  une  rivière  importante,  ayant  un  cours  très 
étendu,  navigable  dans  le  dernier  tiers.  Voici  comment 
parlent  de  l'Ourthe  les  documents  les  plus  anciens  :  in 
fluvinm  Ortc  (895),  sicut  fliimen  Urta  surgit  (870),  jiixta 
fluviiim  Urta  (893)  (-).  Son  nom  le  plus  ancien  est  bien 
Urtiis,  et  non  pas  Urta,  car  elle  est  formée  de  deux  bran- 
ches (dites  Ourthe  occidentale  et  orientale),  à  la  source  de 
chacune  desquelles  se  trouve  un  village  du  nom  de  ()iirt(h) 
(prononcé  Our).  L'analogie  à  d'autres  noms  féminins  de 
rivières  aura  fait  changer  le  mot  de  genre. 

Dans  sa  Frontière  linguistique  en  Belgique,  Kurth  s'est 
occupé  le  premier  de  la  villa  (Ihambo  citée  dans  le  testa- 
ment de  Grimo  et  a  tenté  de  Chambo  la  première  explica- 
tion et  l'identification.  C'est  un  mot  à  «ph^^sionomie 
celtique  bien  prononcée»  (•^),  qui  ne  peut  désigner  rien 
autre  que  la  commune  de  (Grand  et  Petit)  Han  sur 
rOurthe  dans  le  nord  de  la  province  de  Luxembourg. 
Kurth  admet  donc  implicitement  que  Chambo  serait  un 
celtique  *IIambo  inconnu  du  reste  par  ailleurs),  qu'un 
scribe  mérovingien  aurait  écrit  avec  ch,  par  une  sorte  de 
licence  imputable  aux  traditions  de  l'orthographe  franque; 
comp.  le  bas  latin  ('hlodovechus  pour  le  franc  Illubawig^ 
etc..  En  outre,  Kurth  ("*)  fait  de  Chambo  l'ancêtre  de  tous 
les  Ilan,  Ilam,  qui  sont  nombreux  en  territoire  wallon,  et, 
surfaisant  étrangement  l'obscur  vocable,  il  en  fait  aussi 
l'ancêtre  de  tous  les  noms  de  lieu  finissant  en  -han,  qui 
sont  légion  (par  ex.  :  Bohan,  Dohan,  Poupchan,  etc.,  sur  la 
Semois,  où  de  prime  abord  poui'tant  se  reconnaît  un  nom 
d'homme  germanique  Bodo,  Dodo,  Popjto,  qui  se  serait  donc 


(')  Annales  (h   llnslitut  unlirol.  (hi  Litxemh.^  XXXIV,    \\i. 
('')  Roi, AMI,   Toponymie  Naininoise,  I,   l.'iS-O. 
(•^)  Front,  linyiilst.,  I,   i64  et  i(36. 
(•»)  Op.  vit.,  1,  257. 


244  p.    MARCHOT 

accolé  bizarrement  à  un  thème  celtique  ;  pour  cela,  natu- 
rellement, il  eût  fallu  de  toute  nécessité  que  "Ilambo  vécût 
encore,  comme  appellatif  à  sens  bien  déterminé,  en  latin 
vulgaire  à  l'époque  des  invasions  franques). 

L'opinion  de  Kurth  est  i^arvenue  à  faire  illusion  aux 
toponymistes  et  aux  romanistes,  qui,  après  lui,  ont  étudié 
les  noms  Han  (et  Hum)  et  les  noms  finissant  par  le  suffixe 
-han.  Feller  (M,  qui  a  consacré,  en  1912,  à  la  question  un 
copieux  mémoire,  de  valeur  inégale,  mais  important  par 
la  somme  de  matériaux  acccumulés,  n'arrive  à  se  libérer 
qu'imparfaitement  de  l'opinion  de  Kurth.  Il  pense  bien  à 
un  mot  germanique  qui  signifie  «courbure,  incurvation)), 
mais  il  ne  sait  pas  rejeter  délibérément  Chambo,  dans 
lequel  il  voit  le  radical  celtique  camh-,  «courbure)).  Il  ne 
s'exprime  pas  bien  catégoriquement  ;  on  croit  deviner  qu'il 
admettrait  volontiers  un  celtique  camb-  influencé  par  le 
germanique.  Il  croit,  comme  Kurth,  que  la  finale  topony- 
mique  -han  (Bohan,  etc  j  est,  employée  comme  suffixe,  le 
même  vocable  que  les  Han  et  les  Ham.  L'année  suivante, 
en  1913,  Ch.  Bruneau,  dans  sa  Limite  des  dialectes  (~), 
croit  toujours  que  pour  (Grand  et  Petit)  Han  «la  forme 
Chambo  est  attestée  en  636))  et  que  tous  les  Han  et  Ham 
viennent  de  r«énigmatique))  Chambo,  mais  il  rejette  ce 
Chambo  pour  le  suffixe  -han  et  il  démontre  de  façon  con- 
vaincante que  ce  dernier  n'est  autre  que  le  germ.  haim 
{ail.  mod.  heim)  (■'). 

Quant  à  la  question  des  Han  ou  Ham,  employés  absolu- 
ment, elle  n'est  pas  encore  résolue  et  elle  demanderait, 
naturellement,  une  étude  à  j)art.  Il  est  à  remarquer  que  le 
mot  germanique  qui  rendrait  compte  de  Han  Ham  est  en 
ancien  haut  allemand  hamma,  de  genre  féminin  (mod. 
hammei,  en  moyen  néerlandais  hammc,  aussi  féminin,  ce 
qui  postule  un  franc  *  hamma,  féminin,  lequel  n'aurait  pu 
donner  que  des  Hame.  On  ne  pourrait  non  plus  invoquer 
un  pluriel  hammiin,  car,  en  ce  cas,  parmi  un  si  grand 
nombre  de  désignations  toponymiques,  il  se  rencontrerait 


(*)  liiilletin  (te  lu  Socic'lv  vervicUtise  d'arcltrol.  et  fllnstoirr,  XI. 
(^)  P.  81. 
e)  p.  80-83. 


(iAPLOIS    *CAMBOS  245 

bien  quelques  singuliers  Hame.  Des  diminutifs  toponymi- 
ques  de  Hun  Ilam  et  les  formes  anciennes  indiquent  un  m 
étymologique.  L'aspiration,  à  l'initiale,  plaide,  évidem 
ment,  d'une  faron  assez  catégorique,  pour  une  origine 
germanique  ;  pas  d'une  fa(;on  absolue  toutefois,  les  celtistes 
n'excluant  pas  la  possibilité  de  l'existence  de  h  aspiré  en 
gaulois. 

Dans  le  grand  nombre  des  Bun,  il  en  est  assurément 
une  certaine  (xuantité,  tardifs,  qui  remontent,  comme  le 
suff.  -han,  au  germani(iue  haim,  ulogis,  demeure»  ;  ce 
sont  des  hameaux,  (juai'tiers,  sections,  écarts,  voiie  des 
lieux-dits  sans  doute  déjà  habités.  Pour  les  autres,  je  sup- 
poserais un  belgo-gaulois  *hainin()s  «  masure,  baraque  », 
ada])tation,  à  portée  péjorative,  du  germ.  haim. 

Paul   Marchot. 


Les  diminutifs  de  noms  propres 
de  lieux. 


Lorsqu'on  cxiiuiinc  une  carte  détaillée  tl'uue  région  de 
l'Eiirojx'  occidentale,  on  y  l'eniai'qiie  de  nombreux  noni> 
propres  de  lieux  à  forme  diminutive  :  tantôt  ils  sont  isoles, 
tantôt  ils  sont  ()i)posés  au  nom  simi)le  désignant  un  lieu 
voisin. 

Les  diminutifs  isolés  sont  de  trois  es])èces  : 

l''  Le.s-  nomft  communs  devenus  noms  de  lieux  :  Coutu- 
relle ,  Espinette,  Hospitalei,  Montreux,  Mouligneiiu, 
Huent  je,  Ileiken,  Meuleken  (^). 

2°  Les  noms  de  cours  d'enu  devenus  noms  de  lieux.  Nous 
n'avons  i-enconti'é  ([u'un  exemjde  sûi*  de  ce  geni-e  de  dimi- 
nutifs :  c'est  le  nom  ancien  d'un  faubourg  de  la  ville  de 
Namur  {^}. 


(')  Voir  aussi  M.  d'Akiiois  de  Ji  baiwii.i.k,  Rerlierrlies,  S2I.  ([iii  citf  (l<*s  cas 
:anciens  :  F«i'er«//e.v-la-Caiii|iagiio,  Eure,  t)90  Favariolas;  etr. 

(2)  l:24o  in  .N'aiimco  in  vico  qui  dicilur  Hoyolus.  Roland,  Tujk  Mdin.,  loi  ; 
l:2ol  cxU'a  portain  in  Hoylo  juxla  fossatuni  tirniilatis  ville  Namucensis. 
Harbier,  Gcronsitrt,  'liH ;  t^îM  as  foni'bos  do  Namur.  ron  disl  en  Haioiiiel. 
Cart.  tSconiir,  I,  I  iO.  Le  nom  de  ee  faubourg  est  emprunté  au  ruisseau  (jui  le 
traverse,  le  Hoyonl,  Hoiii/oiil  ou  Hniii/on.r,  aflluent  de  la  Meuse  ii  Namur.  Ce 
ruisseau  ajiparaît  aneiennement  sous  les  formes  suivantes  :  1291  rivum  de 
Houjoul;  13:2;}  son  moidin  (jui  siet  sour  Huyoïd  ;  1402  Houyoul.  Hoyoul; 
1168  Hoyoux,  llol.,  I.'il  ;  I  tSli  les  eauvesde  Hoioul,  Ann.  Soc.  arch.  A'.,  IV,  ioG. 
Le  même  nom  désignait  une  porte  de  l'enceinte  de  la  Ville.  -  Trois  localités 
ont  porte  le  nom  sim|)le  de  //«//,  (lu'elies  ont  évidemment  emprunté  au  ruis- 
seau. Ce  sont  :  Sni/it-Marti/i  (Lmines  N),  jadis  Snint-Mitr/in-llii(/list\  [lin/lisc,  et 
pi'imitivemeiit  Hnti-I' Église  ;  Huii-IcCmirt .  nom  disparu  désignant  un  lieu 
voisin  du  précédent;  et  Hnlpliinr/w  (Kmines  .Ni.  jadis  lliti/  le-planviie.  Deux  de 
ces  localités,  probalilenicnt  la  pi-cniicre  et  la  dernière,  purtenl  au  xni«  siècle 
•un  nom  légèrement  diffcreni  :  1218  in  lloio  magno...  in  lloio  parvo,  Roi.,  lio. 


248  A.    VINCENT 

3"  Les  noms  de  lieux  simples  transformés,  à  un  certuin 
moment,  en  diminutifs  (^).  Ils  sont  assez  rares  (2). 

Les  gr()U])es  formes  du  simple  et  du  diminutif  sont  di; 
deux  es])èees  : 

1"  Le  diminutif  et  le  simple  sont  deux  noms  communs 
devenus  noms  de  lieux;  c'est -à-dii-e  que  l'idée  dimiiiutive 
al'feele  le  sens  etymoloj;i(]ue  : 

Monl-sur-Murehienne,  11.  et  Moncenu-sur-Snmbre,  H.  ; 
Fraire,  X.  et  Fuiront  (Fniire,  N.)  (ferraria)  ;  Heide  (Lub- 
beek,  H  )  et  Heideken  (ibid  )  (^). 

Ces  couples  sont  assez  rares;  ils  sont  j)arfois  difficiles  à 
<listiiiguer  de  res])èce  suivante. 

2"  Le  diminutif  est  dérivé  du  nom  simple  en  tant  que 
nom  propre  de  lieu;  c'est-à-dire  que  l'idée  dimimitive 
ex])i'imée  j)ar  le  suffixe  n'affecte  j)as  le  sens  étymologique; 
Vauclusotie  signifie  exactement  <c  petite  Vaucluse  )>,  et 
rien  de  ])lus.  Dans  ce  cas,  nous  connaissons  donc  comi)lè- 
tenient  le  sens  (\u  diminutif,  même  si  celui  du  simple  nous 
est  inconnu  (*). 

Ces  eou])les  renti-ent  dans  l'immense   catégorie,  encoi-e 

(')  J.c  pliciKdiièiio  se  produil  aussi  dans  les  iiuius  de  cours  d'eau. 

C^)  Citons  les  suivants  :  A r^oy*/es  Somme,  797  Argubium,  tl2.">  Arguvium, 
1298  Argouves,  ti92  Arjioules,  Mcm.  Soc.  Antiq.  Pic,  3«  s.  I,  39-iO;  Braibe- 
teaii  (Eprave  N)  747  Brabante,  7")l-7()8  Brat^bante,  802  Hragbanle,  v.  llOi 
Braibentel  lier.  cit.  Stor.  Malin.,  I;  Ihirct  (Tavignv  Lux),  891  Banis,  phis  tard 
Bœur,  ilrld.;  ÉraussinesiVEnQÏneix  cl  Kriiussines-\.n\nmg  H.,7.j1  Scaneia  Duv., 
Hecti.,  1181-118.')  altare  de  Seasines,  Ana/cctes,  V,  xu«  siècle,  Scalcinae  (lisl.  ; 
llamptedii  (()|iiieylissem  Bi,  1011  llanips,  1032  Ham,  xv»  Hamnie,  1219  Hani- 
leal,  ïailier  et  Wauters,  1371  Hammelay  Cuv.  />('«.  13  ;  Lincheux  Somme, 
100.'),  Linigeium,  1119  Linchuei,  1.')(I7  Ijiiclioel,  Mém.  Soc.  Ant.  Pic,  .3«  s.,  I, 
.'')17;  Longnevillrfli'  Somme,  1088  Longavilla,  12()5  Loiigevilia,  13.'jl  J>ongue- 
villette,  iliid.  oi;  le  nom  simple  se  retrouve  encore  en  1372  et  en  1492;  puis 
le  diminutif  rester  seul  en  usage;  ManheuUes  Meuse,  973  Mainliodoro, 
1  i:)7  Manhure,  H542  Mainhuel,  LiiMiard,  Uicl.  top.  M,  1 10;  V/fAp/(^^(l$ossières^), 
1211  Vissigni,  1219  Vissegni,  Berliere  Wo««s/.,  I,  118. 

(^)  Voir  aussi  i)"Aiutois,  Herli.,  ."521,  pour  Aclti-rr.s  (Theuiy,  Kure  et  Loir) 
rx'  .Apiarias,  et  .\cherolles  (ihid.)  ix«  Apiarolas. 

(*)  Appartiennent  vr.iisemhlablenMMit  à  <-elte  classe  les  noms  en  -oIk.i  cités 
par  iiAitiiuis,  /icr/(.,  .")21,  et  ijuil  croit  dérivés  <lirectement  d'ini  gentilice  ou 
d'un  cognomen  en  -lus  :  Queirolcs  (^oriège.  917  C.airolus  «  *C,ari(dus),  de 
Karins;  A/rtro//es-sur-Seine  S  et  M.  78(;  Madriolas,  829  Matriolas,  de  Matrius; 
Mequeruil  Indre-et-Loire,  808  Meicuriolus,  de  Meicurius,  Xnlen.^ollc  B.-Alp.^ 
v  Valenliola,  de  Valenlius. 


DIMINUTIFS   DE    NOMS    DK   LIEUX  249 

peu  ('tiulice,  des  groiijx's  de  noms  pi-oprcs  de  lieux  sem- 
blables dont  l'un  au  moins  est  affccti'  d'une  (b'termina- 
tion  (!)• 

Souxent,  la  j^randcur  relatixc  des  localilc's  homonymes 
est  indiquc'c  ])ar  un  adjectif,  petit,  f>r:iiul,  etc.  (2). 

L'im])<)rtanee  relative  des  deux  localités  foi-mant  uu 
couj)le  a  j)arfois  été  renversée  de|)uis  r('po(|ue  où  a  été 
ad()])1é  le  nom  diminutif  (^). 

Ajoutons  que  les  cours  d'eau  j)r(''sentent  de  nombreux 
couples  i\u  ty])e  qui  nous  occu])e,  le  diminutif  d(''si<;nant 
presque  toujours  un  affluent,  mais  i)arfois  aussi  un  cours 
d'eau  voisin  de  celui  qui  i)orte  le  nom  simple  (''). 


Les  din)inutifs  de  nonis  pi'opres  de  lieux  ne  sont  qu'un 
ij;r()U])e  dans  la  catégorie  imi)oi'tante  des  to])onymes  foi-més 
sur  d'autres  t()])<)nyines.  Il  im])orte,  dans  l'étude  de  la  topo- 
nomastique  d'une  région  donnée,  de  recounaître  et  de 
metti'c  à  ])art  les  noms  de  ce  genre;  on  évitera  ainsi  les 
erreurs  commises  jadis,  (piand  on  em])loyait  la  nu'thode 
<l(''fectueuse  consistant  à   ('tudier  les  noms  de  lieux   isolé- 


(*)  Voyez  Ak;.  Vincent.  Les  (Icloniiinatifs  (l(;s  iioiiis  |ii-()[n-('s  cli'  lion  sciii 
I)l;ibIo.s  (IhtUelhi  pliiloloiiifjv-  ri  /lislorif/ifc,  I,  li)2(l,  17-^0). 

(-)  Dans  boaiu'oiip  dt'  cas  du  reste,  le  (iiiiiiiiiilif  allenie  avec  l'expression 
en  adjectif  f(iuivaleiile  :  Si'ressla  (Forville  >',  Ii2l}l  Serencial.  Roi.  18(5,  cité 
avec  Srron  (Forville  N)  en  I  li9  :  di>  niajori  et  niinori  Seron  Mir.-Fopp., 
(11335;  Te/nn// (Tellin  Lux.),  1-2(U  Telineal,  C//.  Saint-llnberi,  llSi  Parvuni 
Tellin,  ihiil.x  Marrinclle  H.  8t)8-8C9  Marcianis,  Duv.,  Rech.,  301,  10!H  Marcinel 
HCRIl,  rif  s..  IV,  18<)i,  173,  ii41-l'2ii  Marcenieles,  ibid.,L\\\\\,  19-2,  123! 
Marchines  les  Petites  C.  Suinl-lAunherf ,  I;  Jauchchtte  R.  Il7i  Jawclie- 
Iciie.  Tarlier-Waulers,  C.  .lad.,  (>!,  1220  de  Jacea  niinori  liCRH,  {<■  s.,  VIII,  .338: 
.1/V;a// (Neufciiàteaii^lez-Vise  Lg)  diniinulil'  de  Airhiv,  osl  traduit  imi  tlainaiid. 
en  I  i!((î,  par  Clexn  Lllien  Lcodiiim.  Vil. 

(^)  C'est  ainsi  (jue  Pcssesur  n'est  plus  aujourd'hui  (|u'un  hameau  de  l'cssoux  N, 
1312  Pesesson,  Holand,  33!);  hannctli)  n'est  plustpi'un  hameau  de  Doniielletlo. 
Novare,  Italie;  de  mcme,  on  liduvi'  au  xiv  siècle,  .Vncliy  deles  .Vucliel, 
de  Loisne,  blrl.,  lop.  Pas-dc-Caliti.f,  I!»  f.l//cAi/-an-Bois,  P.  de  C,  et  Auchel, 
P.  de  C). 

{*)  11  existe  même  nn  groupe  formé  d'un  nom  propre  de  région  et  dvi 
diminutif  correspondant  :  \g  Fezeiizac,  l'ancien  Fidentimus  payusAWvs.,  et  le 
Feienzaç/iict,  petit  «  |)a\s  »  de  ("■a.scogne,  Gers. 


SôO  A.    VINCKNT 

ment  (*).  Ces  eii'ciirs  sont  du  reste  ('X]>lic'ables,  car  Irvolu- 
tion  (lu  siin])l('  et  du  diM-Ivi'  en  fait  souvent  des  noms  fort 
iliffcicnts  d'asijeet,  ainsi  qu'on  le  veri-a  en  examinant  les 
couples  étudiés  ci-dessous  (*) 

Les  diminutifs  de  noms  ])roi)res  de  lieux  sont  une  forma- 
tion essentiellement  romane;  dans  les  régions  germa- 
niques, leui-  rareté  est  frappante.  Poui-  la  Belgique  fla- 
mande, nous  ne  ])Ouvons  en  citer  avec  cei'titude  ([ue  deux, 
inusités  du  reste  aujourd'hui  {^). 

Dans  les  i)ays  de  langue  allemande,  il  existe  quelques 
diminutifs  de  noms  ])roi)res  de  lieux,  tous  d'oi'igine  récente 
])robablement;  mentionnons /^er/z'/ir/jen  et  Berlin,  Prusse, 


(*j  C'est  ainsi  (juc  Warisunl-r  N,  1272  Wnrisiiel,  Annlecles,  '.'^s..  Il,  i2i5, 
diminutif  de  nVrreMa-Ciianssée  N,  v.  13i3  Wares  le  cliaciiic,  lionnans,  Fiefs  i>'., 
52.  a  été  pris  pour  un  «  wai'écliaix  »,  Aîifi.  Soc.  arrh.  N.,  IV,  ISo-o,  234  stj.; 
Kurtli,  Front,  liny..  38(3.  classe  Doireaii  (Grez-I)oieeau  B)  xu''  Dueneel  Tariier- 
Wauters,  C.  Wuvre.  221,  (limiiuilit'  de  i*>o//-le  Val  B.,  dans  les  noms  germa- 
niques en  -zete,  en  exprimant  dailleiirs  son  hésitation.  Certaines  formes 
bizarres  que  Ion  trouve  dans  les  anciens  documents  résultent  aussi  d'erreurs 
dans  l'interprétation  de  diminutifs  de  noms  de  lieux.  Domvosfel.  localité 
disparue  à  Domvast,  Somme  (ilil  Domnus  Vedaslus  =  «  Saint- Vaàst  »,  Mém. 
Soc.  Antiq.  Pic,  3^8.,  1,  298)  est  appelé  en  1114  Domnus  Vedastellus,  ilticl. 
3*  s.,  IV,  1  W.  — ^cdoncliel  P.  de  C  ,  1179  Xiedoncel,  diminutif  en  -cellus  de 
Kedon  P.  deC,  H76Niedon,  est  traduit  en  1072  par  Nedonis  cella  de  Loisne, 
Dict  /'.  de  C.  272.  —  Ban'onsel  Nd,  1093  Bantoselio  .Mamiiei-,  2t)0,  diminutif 
<le  Banteiix  Nd,  est  en  109.'>  Bantulli  curtis,  Mannier,  2lj0;  le  rédacteur  de 
l'acte  y  a  don(;  vu  *Bantulf-zele.  — liiirsin  I  Vaud.  1139  Hrucines  Jaccard,  "JS. 
dimimitif  en  -ellns  de  Unrsins  Vaud,  v.  1000  Hiucins  Jaccard,  .j9,  est  en 
102t)-1032  Hruciniaco  Romania  WXVli,  31,  mauvaise  inlerprétalion  de  la 
forme  vulgaire,  dont  1'/  final  est  tond)é  de  bonne  heure.  —  De  même,  Co?t- 
nantraïf  Marne,  1131-1142  Conantrel,  diminutif  de  Conimiitre  Marne,  1131 
Conantrium,  Limgnon,  Z>ù/.  M^r/if,  72,  a  été  confondu,  au  xvuie  siècle,  av(>c 
les  noms  gallo-romains  en  -luuui  ;  du  reste,  le  scribe  ne  dissinude  aucune 
doiniée  du  problème:  17.>jConantriacuni,  alias  Conantrel! uni,  vulgo  ConanU'ay, 
Longnon,  72. 

(')  Voyez  aussi  .Kic.  Vincf.m  .  tju('l(|ucs  diniiinilirs  de  noms  de  lieu  >Mc/(ni(/es 
Camille  de  horman...,  Liège,  I91Î),  p.  r)49-.'w8),  où  sont  e\|)li(pic>  dix  dimi- 
nutifs de  la  Helgi(]ue  (trienlale. 

(•*)  Pi'deSaintc-Gertnide  (Schepdacl  H)  est,  au  xv  s.,  Bedeken,  llijdrofiin. 
IX''.  par  opposition  à  l'ude-Sai/ilc-Atine  (lUerbeek  B)  xv»  S.  .Vniiae  l'e,  iliid.: 
d'autre  pari,  une  localité  non  identiliée,  empruntant  le  nom  de  l'EseauI,  est 
citée  ainsi  dans  lespouillés;  xiv®  vScoIleke  (=*Scelleke);  xv'^Scelden  Ueiisens, 
Poiiilli-s,  102.  On  rencontre  aussi,  dans  la  Belgique  flamande,  quel(|ues  rares 
diminutifs  de  noms  de  c(turs  d'eau. 


DIMINUTIFS   DE   NOMS   DE  LIEUX  251 

Oschiitzclien  et  Onchatz,  Saxe,  Skiiszrhcn  et  Sknss;t,  Saxe, 
Zermiittje  et  Zermaii,  Valais. 

C'est  dans  les  ré<>ioiis  romanes  de  l'Europe  occidentale 
que  les  diminutifs  de  noms  de  lieux  abondent  ivelleiuent. 
Ils  ne  sont  i)as  rares  en  Italie  (')  ;  ils  ne  sont  ])as  très  rares 
non  i)lus  en  Espagne  (^);  mais  c'est  dans  la  région  linguis- 
tique française  qu'ils  sont  les  ])lus  fréquents,  et  de  beau- 
coup; c'est  d'elle  que  nous  nous  occuperons  six'cialement 
ici  (3). 

A  quelle  époque  remontent  les  diminutifs  de  noms  de 
lieux  de  la  région  française?  Il  est  généralement  difficile 
<le  le  dire  d'une  manière  précise.  On  en  voit  encore  se  for- 
mel' quelques-uns  au  xiv"  et  au  xV  siècle;  la  grosse  majo- 
rité existait  déjà  auxi*';  mais  beaucoup  sont  sans  doute 
bien  plus  anciens,  et  ce  t3'i)e  toponomastique  est  assez 
i'ourant  dès  l'c'poque  romaine,  dans  toutes  les  i)ai'ties  de 
rEm])ire  ("*). 


(1)  Citons  FloroneUo  (Fiano)  (98i>  Floraïuillo,  Pieri,  Toponomustica  Scrr/iin) 
et  Fiano  (8 17  Flojaiio,  de  * Floriannm)  ;  Gragnaiiella  (('«asteinovo)  et  Griigrxntii 
(Piazza  al  Sercliio)  :  Miglianello  (Massarosa)  cl  Mif/li((no  (Cainajore)  ;  Selthianella 
(Barga)  et  I^'ehhitmo  (Caniajoi'e)  ;  f'ojisunello  (Garlai^iianu)  el  Pnnsano  (Vil)- 
biana)  ;  Veroneitu  e{  Verona. 

(-)  Par  exemple  Anilares  et  An/hiritios,  piuv.  de  Leôii:  Canf(irljnl/(ts  c\ 
Cant  ri/tas  (Ciiidad-R()drij;o,  prov.  i\v  Salaiiiaii(|ne);  C<tna}narcjot  (Fiienles- 
Claras)  et  Cttnamares,  prov.  de  taienea;  Conlolnlhi.  prov.  de  Badajos,  et  Cor- 
dolia,  «  Cordoue  »  :  Tulavernelu  et  Tahtvcra  la  Vifja,  prov.  deCaeeres;  Toral- 
lola  et  Toralla,  prov.  de  Lérida;  TorrecuadradUla  et  Torrecnadrad  • ,  prov. 
de  (inadalajara.  —  Le  nom  de  Venezuela,  «  petite  Venise  »,  fut  donné  primi- 
tivement .1  un  village  de  la  baie  de  .Maracaibo,  qu'Ojeda  et  Aniéric  Vespuce 
avaient  appelée,  en  1  Wit,  «  golfe  de  Venise  ». 

(^)  On  ti-duve  (jnelques  diminutifs  à  forme  romane  dans  des  contrées 
actuellement  gerniani((nes.  Dans  le  Sussex,  à  Litlleluimpton.  I:27i  llamptun. 
1  iïtrî  l.yttellianipton,  sont  opposés  Faaiinvnpnett,  1:200  Kslliamptonet,  i'^M'^ 
Esllianiplenet  et  ^yest/iampriel,  h27i  Hamptonel ,  1278  Westliamconett 'R.  <1. 
RoitKKTs,  T/ie  placc-numea  of  Susse.r,  llMit,  (il,  171.  103;.  Fn  Braliant,  a  Coté 
de  Louvain  B,  11.  Luven,  HHl  Lovon,  801  Lovonniiun.  xi»  Lovanium,  hurtli  ■)0t), 
se  trouve  Lovenjiml  B,  xr*  Loviniel  Mlili,  &S,  Vil.  l.">0,  1183  Lovengiul. 
BIjdragen,  VII.  148. 

(*)  Exemples:  Deolnlfpila  It.  Aiit..  a  colé  du  simple  Deohriga  II.  Ant., 
entre  .Astorga  et  Pampelune,  Fs|iagne;  Flmentiiila  Har.,  aujourd'hui  Fiien- 
zuola  Italie,  et  Fhirenlia,  II.  AnI.,  Tali.  Peut.,  aujiuird'luii  Florertre.  italien 
Firenze.  Masruliila,  Nuiuidaruni  ipii  Masculula'  habitant  Cil.  VII  s.  I')77.").  el 
Maaritla,  en  Nnmidie,  nninicipium  Mastulilanuni  Cil.  VllI  \ll'2il;  Miirsella, 
dcf.  m.  MurseliMisium  Cil.  111  s.  102i."{  Mursa   minor  llm.,  et  Miirsa.  an  iioiii 


■^O'^  A.    VINCENT 

Dans  le  doniaiiie  français,  le  ('oui)le  le  i)lus  ancien  que 
nous  connaissions  est  ilu  vi''  siècle  :  Otiana,  localité  dis- 
parue à  Martigny,  Valais,  516  Actanis,  Gremaud,  Doc^ 
rcl.  ù  riust.  (lu  la/..  I,  o;  H78  Ottane,  Jaccard  323;  1200 
Otans,  Gremaud,  I,  140;  1269  Octans,  ibid..  II.  140,  et 
Actiinclluin,  auj.  Vernayaz  (Salvan,  Valais).  516  Actunel- 
luni  (-=  *Actanelluin),  Gremaud,  I,  o;  1138  Atlionellum, 
Ottonellum,  1732  Yerneya  seu  Octanez,  .Jaccard  323. 

On  en  trouve  cites  au  viii'  siècle  :  Mis.soul  (My  Lux) 
770-779  Medolum,  Roland.  Orchimoni,  13,  diminutif  de 
3/y  Lux,  873  Médis,  11o7  Mies,  Rcr.  eh.  Stiw.-Mnlm.  ('); 
Ri^neux  (Rouveroy  H)  779  Hriniolo,  844  Ilriniolum.  1178 
de  Kenniolo,  diminutif  de  (iniiul-Renf^  H.,  770  Hrinio, 
844  Hriniuni,  897  ville  Ken,  1178  Grant  R,eef>n,  Duv.,  Rech. 

On  renconti'e  i)oui'  la  i)remière  fois  au  ix*"  siècde  :  Pc^ai- 
rolles,  Héi'ault  (l'une  des  deux  localités  de  ce  nom)  853  villa 
Petrolianum  (<  *Petr()nianum)  et  Petronianellum  ;  1110 
castrum  Pegairolas,  E.  Thomas.  Divi.  ioft.  lier..  141;  le 
nom  sim])le  de  855  n'est  i)as  identifié;  (loiorcl.  Aisne, 
868-869  ('oi^vrel  (forme  modernisée^  ^^'aricllet.  Lohbes,  193^ 
diminutif  de  doeuvrcs,  Aisne,  868-869.  Coviure,  AVai'.  193, 
1159  Cova,  1590  Ceuvres,  Matton.  Dirt  lop.  Aisne,  72; 
Fk'iirjoux  (L^leui'us,  IL),  ix"  in  \illa  quae  dicitur  Fleder- 
r\o]o  BCRII.  LXXVllI,  261;  868-^69  Fledelciolum,  Duv.^ 
Rech.,  310,1691  Fleurisoul.  Laliaye-Radiguès  280;  dimi- 
initif  de  Flcurus  H,  1U33  de  Flerusio  Berl..  Doc,  1,12;. 
CuilhiWcL  Aude,  870  Soloncllum  \r-  *Calavellumj,  1234 
Calavellum.  diminutif  de  (Inilhuii,  Aude,  782  Callavum 
villa,  870  ("alau,  Sabartliès,  Dicl.  top.  Au(h',V)D. 


tl(?  Belgrade,  (Ici',  cdl.  Mms.  CIL  III  'MHH,  Mtiisa  civilas  //.  .\>il..  .Mm>;i  iiKiior 
Uav.;  RomiiUt  (ii"  I),  ;mliv  nom  de  Uhjxilis  =  Scville,  Ksiiagiie.  li.')-IU)  qui 
RoimiUe  negotiaiilui-  CIL  II  I  KJλ  IGI-Ki!)  civitatis  lioiimlciisinm  CIL  II  1180; 
Roiuitta  (11"  2).  en  Dacie,  aujouni'liui  Heî-ka,  Honniaiiic,  -liH  rolonia'  sua* 
Iluiniil.,  Dessau  Itiscv.  lai.  .selecl.,  rilO:  inunicipi  lldniiilensiiini,  ihid.,  iitio; 
Suessula,  dendr.  Siiessul.  CIL  \  SIM,  et  Snessa.  pirs  de  CaiKuic,  Kalie, 
193  in  (îoioiiia  Suessa,  CIL,  X,  tTOO;  Umila,  civilas  Iccnla,  CIL.  Mil.  S.  I  i3Gi, 
cl  i'cuni  major,  en  Afrique,  res  publica  eolonia'  Mariana'  .\iij;iisla'  Alexan- 
driana'  l Cliilanoriini  iiiaioruni,  CIL,  Vil.  S.  l.'Ji'Ji. 

(')  La  forme  inndcrne  ne  dérive  pas  direclenient   de  Mciliihim,  mais  est 
l'efaite  sur  Mica. 


DIMINUTIFS   DK    NOMS    DE   LIEUX  253 

("eux  que  nous  xoyons  se  l'oriuer  le  plus  lai<li\  eineiit 
sont  :  .l/Ji,'7;/~r//r.s,  Manie,  MIT  Anj^leduia,  I  llto  Aiigli- 
(lura;  itl'ài  Eugieurella  Lon^non,  iJicl.  top.  Marne,  o, 
(liniiiuitif  {VAnf>liir(',  Maine,  1128  Aiigluria,  1131  Angli- 
tura,  îjouiyuon.  A;  liurcclonncltc.  lîasses-Ali)es,  ville  fon- 
dée en  1231  i)ar  le  comte  de  ri-ovence  Raymond  Bérenger, 
dont  la  famille  était  originaire  di'  Jiurcclonnc.  Esi)ag'ne  ; 
Quilhincl  (Hizanet,  Aud(M,  7.S2  (^uilianum,  1189  Quilanum, 
130!)  (^uillianeto,  1318  (^uilliaïuim,  Sabarthès,  Dict  top. 
Aude,  3."')(),  diniiiMitif  de  Quillun,  Aude,  1145  (^uilliaiuini, 
il)i(l.;  I'^ni>ihoul  (Eliein  Lg),  diminutif  iVEn^-is  Lg;  au 
milieu  du  xiii''  siècle  encore,  les  deux  localités  sont  homo- 
nymes :  1232  inter  Engeili  \illam  |  Eiigis  |  quae  est...  sita 
supt-r  littus  Mose  versus  castrum  dictum  (de  Claromonle).. 
risque  ad  aliam  villam.  que  vocatui-  Engeili  [Engilioul], 
Antilectes.  2^  s,,  YII,  34o;  le  diminutif  api)ai'aït  au 
XIV*'  siècle  :  1314  Kngiz...  Engihoule,  Livre  fiefs  Lg,  146, 
147;  Ai)i'>-iionet,  Haute-Gar  ,  bastide  fondée  au  xiié' siècle 
pai' Alphonse  de  Poitiers;  Oiijonnet  Hursinel,  Vaud),  nom 
tiré  de  celui  du  couvent  iVOiijon.  Vaud,  à  qui  ce  village 
fut  donné  en  1252  ])ar  l'abbaye  de  Bonmont,  Mai'tignier- 
Crousaz,  Dict.  Vaud,  715;  Mnrseillette,  Aude,  993  Mas- 
silia,  1178,  Marsella,  12(59  Massilia,  1347  Masselheta, 
1387  Masilia.  1395  Marselheta.  Sabarthès.  228;  oi)posé  a 
Marseille  :  \'ico<^nette  (Yalenciennes,  Nd),  nom  d'un  refuge 
de  l'abbaye  de  Vieoi'>ne  !Raismes,Nd);  sa  création,  décidée 
vers  1350,  fut  réalisée  en  i;j()8;  1404  Vicongnette,  Soc.  Et. 
Prov.  Cambrai,  Bull.  1921,  o'i;  liarcillonnette.  H. -Alpes, 
1339  Harcelonia,  1478  Harccdoneta,  1492  Barcilloneta, 
Roman.  Dict.  top.  IL-Alp..  9,  oi)i)osé  à  liarcelomie. 
Espagne. 

La  formation  des  couples  a  lieu  de  deux  manières  : 
1°  Les  deux  localités  portent  d'abord  le  nom  simple:  on 
transforme  ensuite  en  diiuiiuil  if  le  nom  de  la  moins  impor- 
tante (»). 


{')  Nous  venons  dv  citer  plusieurs  cas  de  ee  genre  ;  nieiitioniioris  eiuore  : 
AinhresùiiaKx  {Amfiresùi  Lg)  1220  apud  iilruinqiie  Anihesiiuini,  M(tn.  I,  138. 
120i  .Vnii)resin...  ,\nibresiniaus,  Broiiwers,  ('ens,  I,  2i():  Brittuionnct, 
AIp.-Marit.  v.  8UH  Kriganlione  comme  Brlanton  Alp.-Marit.  v.  800  Itijfjan- 
lione,  Longnon  .4//((.s-.    texte,  26:    Linsmc(tii   15  et    LhuenI  i-i,'   M-S!»  I.vnseni 


254  A.    MNCENT 

2°  Le  nom  n  forme  (liminiitioc  est  donne''  (lirccicmcni  à 
une  localité.  C'est  certainement  le  cas  ])oin'  ceux  qui  dési- 
«>nent  un  faubourg-  de  ragglonicration  ])riinitive,  comme 
Homclctte {Uomu],  B.),  Momelette {MomaUe,  Lg),  Moxhcron 
(Moxhe,  Lg),  Pictrcmcau  (Piétrain.  E.). 

Xotons  qu'il  existe  des  groui)es  comi)tant,  outre  le 
simple  et  le  diminutif,  un  ou  des  noms  en  jtctit-,  ^rand-,  ce 
qui  décèle  un  stade  de  i)lus  dans  la  formation  de  nouvelles 
localités  (^). 


Les  suffixes  em])l()yés  dans  les  dimiiuitifs  de  noms  de 
lieux  français  sont  :  -olus,  -ellns,  -ccllus.  -inus,  -ci,  -clct, 
-ert'i,  -oi,  -crot  et  -cron.  Les  trois  premiers  ont  eu  une 
évolution  ])lionétique  normalement  très  vai'iée.  et  dont 
l)lusieui"s  stades  anciens  sont  encore  représentés  dans  les 
foi-mes  officielles  modernes.  Voici  quelques  exemi)les  pour 
chacun  d'eux;  on  en  trouvera  d'autres  i)lus  loin. 

lo  -oins  (-ol.  uol,  -ui'l,  -ocl,  -cul,  -cuil,  -en,  -ieu,  -oui,  -ni, 
-onil,  -on)  :  IIoni)ii>nenl  (Houvin,  P.  de  C),  1177  Houvinol; 
de  Houvin,  P.  de  C.,  1079  Olvin,  de  Loisne,  Dict.  top. 
P.  de  C,  207;  Ilnmeroeille,  P.  de  C.  1119  Homoroles 
(=  *Homeroles),  1200  Humerolles;  de  Ilnmières,  P.  de  C, 
10o8  Humieres,  de  Loisne,  209;  Jnndrenouille  (Jan- 
drain  H),  x^  Gandrinul,  Tarlieret  Wauters,  Cn.  Jod.,  293; 
de    Jandrain,  B.,    8oo    Gundi'inium,     ibid.;    Matii>nolles 


Pellciidis  (Liiisini'ati.  voisin  de  l'cllaiiios  Ljï),  Lyiisoiii  Hnllei  (Linceul,  voisin 
(les  doux  llallot  Lg)  HCIUI,  3»  s.  H,  ii",  lli.j-lîiii  apiiii  Liiisincid,  .\,ialcrlcs, 
^cs.  VIIL  19^;  Muvriiielle  H.  et  Mfircliimnr-dn-Fntit  11  8()(S-ît  Marciaiiis,  item 
Marcianis  Duv.,  liec/i.,  301,  lOλ!  Marciiici  llCIiH  :y  s.,  IV,  17.*);  Pinilhaç^iiet 
IL-Loiro,  V.  888  Pauliacuin,  1  Li8  Paulagi'to,  et  l'nnlhac  H.-Loiro,  v.  960 
l'aiiliaco,  XI'  Pauliiajîo,  (lliassaiiig:,  Dicl.  top.  H. -Loire,  i04,  :203  ;  Honielte 
ll.-Al|).,  739  Rdiiia",  XlVf  Roiiiola,  Itomaii,  Dict.  H.-Atv.  133:  opposée  à  Rome^ 
(!)  Bra/fi;  H,  Briffoeil  cl  Petil-Briffoeil  (Wasnies-Aiuleniez-Brinoeil  H)  ; 
Mar-hais  B,  Marinmiix  et  Peiit-Marhais  (Marl)ais  H);  Matagne-ltiGrande  N, 
Mafaf/ïte  (((-Petite  N  Maligriolles  (Treii;nes  N);  Grand-Ueiui  II,  Grniul-Rigneux 
et  l'elit-BI(jïiei(.r  (Uouvoi'oy  H);  Somme-Leuze  ÎV,  Somat  (Malle  N),  Petite- 
Somme  (Horion  Lux);  \V((nze  Li;,  Waii:o((i  (Viiialmonl  Lg),  Petit-Wdnze 
(Antlicit  Lg);  Wuret-ln-Chaxssée  N,  Warisoidx  N,  Pe/JMi'f/;-e/ (Landeune  N), 
Petit-lVnrisoul.r  (Wai'isoulx  N).  —  Les  noms  comme  Petite-Somme,  Petit- 
IVauze,  Petit-W((ret,  datent  d'une  époque  où  le  sens  des  diminnl ils  corres- 
|ion<lants  n'esl  pins  i)er<u. 


DIMINITIFS   DE    NOMS    DK   T.IEI  X  255 

(Trei^ncs  Ni.  I  !.")()  MatluMioiilc,  Kolaiid.  Top.  Xuiii,  'ilO; 
de  .Ua/c-»i,'7K'-la- Petite  N.  SdS-SdO  Matagna.  Waiiclict, 
Lohhcs,  ISti  ;  Mcrbocllcs  iMcrbes-le-Chàteau  llj,  liill  Mer- 
biules,  Devillers,  Desrript.  cari.  II.,  I,  183;  de  Mcrhcs-le- 
Chàteau  H,  1084  Merbes.  Du\..  licch.,  440;  Prooiscii.w 
Aisne,  1082  Provisiolo;  de  Prounuis.  Aisne,  1082  Prova- 
siuni,  Malton,  Dict.  top.  Aisiw,  224:  Wnsmiiel  H.,  1113 
cuiu...  Gamiolo,  Mon.,  VIII,  342;  de  U';j.s/;j('.s-  II.,  lOO^i  duii- 
niiis,  Duv..  Rech.,  174,  n»  4  (^). 

2°  clliis  (-cl,  -ici,  -cal,  -ni,  -nu,  -nul,  -c;iu,  -cnul.  -inul, 
-inl,  -in,  -en,  -ny )  :  Afnny  (Xeiif('biiteau-le/-Visé  Lg),  1253- 
1254  Abenilia,  1324  Aubenai,  1610  Aiibneau,  1760  xViifneau, 
1706  Aufnai,  Leodium,  YI;  d'Aubin,  nom  <le  la  paroisse 
de  Neufohàteau  :  1324  Abin,  ihid.  :  A  wlcnelle  {Andenne  N), 
1278  Andenelle  liCRH,  5'  s.,  III,  303;  dWndennc  X 
1101  Andanam.  Misson,  237;  An}>renu  H.  1118  de  Angrello, 
Mon.,  VIII,  342;  d'Ancre  H,  1075  Angra.  Duv.,  Rech., 
152;  Bnr.^enal  (Leignon  N),  1316  Barsinelles,  Roland,  522; 
de  Hnrscne  (Ciney  N),  747  Barsina,  Rcc.  ch.  Stnv.-Mnlm., 
49;  Clcmodcnu  (Villers-le-Tem])le  Lg).  122'  de  Villier  et 
de  Cleniondeal,  Cart.  Val-Benoit,  I,  37;  de  dlenuont-lez- 
Nandrin  Lg,  1260  Clermont,  Analecte.s.  2'  s.,  VII,  394; 
Offoil  (Saint  Bliniont,  Somme),  1185  Aufouel;  d'OfJcu.x 
(Saiut-Hlimont,  Somme),  1185  Aufoii,  Mcm.  Soc.  nnt.  Pic, 
3"^  s.,  IV,  126,125;  Willemenu  H.,  1107  Willemel,  Duv., 
.-Ic^e.s-,  54;  de  ir///('/;/.s-,  Nd,  1277  M'illcm.  Roman.  I-lsch- 
}>en,  XXV,  40. 

3°  -cellus  (même  évolution  que  -cllus)  :  Xcdonchel,  P. 
de  ('.,  1179  Xiedoncel,  de  Loisne,  272;  de  Xédon,  P.  de 
C,  1176  Xiedon,  ibid.,  271  ;  Rois.sin  (Leuze-lez-Dbuy  N), 
1252  Rievenc'heas,  Barbier,  (iéron.sart,  259,  1265  Rion 
(•eaux,  Hrouwers,  Cens,  1,  35;  de  Rhion  (  Dluiy  N), 
1236  Ryum,  Annlectes,  IV,  78. 

4°  -inus  :  Quenestine  (Saintes,  B.),  ix*  Nahtinas  sive  ad 
Sanctas,  RCRII,  LXXVIII,  257;  868-869  r.nactinis.  Wa- 
ricbet, /.()/)/)('.s,  188;  1 747-1748  (^uenestinne.  Kurtb,  liront. 
lini>-.,  201;  de  Quennsl  H.,  J  1 19  Canatba.  Duv..  Rech.,  521; 


(^)  En  lT8-i,  on  trouve  en  outre    Waincrct,  .iHaa  du  tlivàlndr  lu  t/iirrrr. 
P.ifis,  Desnos. 


256  A.    VINCENT 

4219  Kauaste.  Mon.,  11.  iî,  778;  Solriiws,  Nord;  de  Solrc- 
le-Chàteaii,  Nord. 

o"  -et  :  Uomeloitc  (Bornai  B.).  lo74  Boinmalette;  de 
Boimil.  H.,  V.  1100  Bornai.  Tailier  et  Wauters,  Cn.  Jod., 
326.  32o;  (:eyssaf>uet  (La-Voûte  sur-Loire,  H. -Loire),  1255 
Saissagiiet;  àe  (^eyssiic,  H.-Loii-e,  xi*^  Ceyssac,  Chassaiiig-. 
Diit.  top.  II. -Loire.  51. 

6^  -elet  :  Endette,  N.,  1508  Evellet,  (Jart.  Ciney,  275; 
d'Ene,  N.,  1456  Eve,  Bormaiis,  Seii>-n.  féoil.,  43;  Jniirhe- 
lette,  B.,  1174  Jam-lielette.  Tarlier  et  Wauters.  Cn. 
Jod.,  61:  de  Jamhe,  B.,  lO'.'l  .Jace,  Evrard,  Elône,  13, 
1231  de  .Tacea  majore.  .  1  mdectes,  2''  s. ,  I X,  321 . 

7'  eret  :  Roiiillerot  (Rouilly-Saint-Lonp,  Aube),  1152- 
1180  Kuilleret,  1292  Ruillerot;  de  Roiiilly.  634  Kulliacnm. 
1153  Kuilliat'um.  Boutiot  et  Socard,  Dict.  top.  Aube,  138. 

%^  -ot  :  Beaiinotte,  C.  d'Or;  de  Beau  ne,  C  d'Or;  Mure- 
lottes  (MariUea,  B),  1204  Marelotes,  Tarlier  et  Wauters, 
Cn.  Jod.,  247,  1216  Marlot,  BCRH,  4'  s.,  VU,  151;  de 
Marille.s,  B.,  1145-1164  Mariles,  Annlectes,  2*^  s.,  VIII.  103; 
Polisot.  Aube,  1169  Polesot;  de  Polisy.  Aube,  1101  Poli- 
seius,  1103  Poliseius  major,  Boutiot  et  Socard,  Dict.  top. 
Aube,  i'HA;  Wiuclusoite.  Doubs;  de  ]';iu(luse,  Douha. 

9°  -erot  :  EhiDÏ^nerot,  C  d'Or;  de  Eliwi^ny.  V.  d'Or; 
Quéti^nerot.  (".,  d'Or;  de  Quéti^-ny,  (\  d'Or. 

lOo  -eron  :  Mo.xheron  {Moxhe,  Lg),  1241  Moxeron.  Brou- 
wers,  Cens,  I,  239,  1252  Mugheron,  Livre  G.  de  Ryckel, 

243,  1262  Moserou.  BCRH,  b^  s  ,  IV,  29,  1497  Moxlierou, 
Paquay.  Pouillé,  105;  de  Mo.xhe,  Lg.,  1085  Mois.  Ana- 
lectes,  XVI,  13,  1125  Moz,  Bull.  Soc.  art.  et  liist.  L<>-,  VIII, 
347;   xiii'"  Grande-Mugh,  Granmug,   Livre  G.  de  Ryckel, 

244,  1241  Mox,  Broiuvers,  Cens,  I,  239. 


Le  diminutif  prend  naturellement  le  genre  du  simi)le; 
mais  cet  accord  est  souvent  vite  perdu  dans  l'ccriture  ('). 


(1)  //«/m-siir-CiijiMil  I'.  (le  (;.,  HOi  Hoiiiii,  1 1  lit  Miiiiiimmi  inajiis  de  Loisno. 
l)i(t.  top.  P.  de  C.  103;  llrnlnellc  I'.  deC,  1081  lliMiiiiiicl.  xiu'  villa  quae  ah 
Jlcniiiiiio  Hoiiniiiclliis  dicitiir;  xir  Hoiuiinellae.  1-281  Hi'-niiu'l,  »'/>/.;  Fal- 
maf/îie^.  94G  Falcniaiiia.  Roland  Top.  Kaiu.  ^08;  Falmigriitnl  y,  1210  Falo- 
migimcle  Analecles,  XVI,  .'">i  ;  l."io8  Falmyii^noidlt',  ihid..  Il,  V>{). 


DIMINUTIFS   DE   NOxMS   DE  LIEUX  257 

Un  suffixe  est  parfois  remplacé  par  un  autre,  phonéti- 
quement voisin;  cette  substitution  peut  être  j)assagère  ('); 
mais  elle  est  sou\ent  définitive  ('). 

Parfois,  [)rimitif  et  dcrivc  restent  semblables  à  tra- 
vers les  siècles;  tel  est  le  cas  pour  Munncville,  Calv.  et 
Mnnncoilli'ttc  (Angerville,  Calv.  ;  Mnnncvillc-la-iioiipil, 
Seine-Inf  ,  et  Mannevillette,  Seine-Inf.  ;  Membre,  X.,  1213 
Mambre,  et  Mcnibrcttc  (Vresse,  X.j,  1184  Manibreta, 
Kol.  184. 

Mais  ordiiiairenient  simi)lc  et  dérivé  se  différencient 
])lus  ou  moins  2>i"<>l<'i'dément. 

("est  dans  le  diminutif  que  se  remarquent  généralement 
les  modifications  les  i)lus  notables. 

Elles  sont  caus(''es  en  i)remier  lieu  par  le  déi)lacement  de 
l'accent  tonique,  qui  est  i)orté  sur  le  suffixe.  La  voyelle  de 
la  syllabe  accentuée  du  simi)le,  cessant  de  l'être  dans  le 
<lérivé,  s'altère  i)resque  toujours. 

il  devient  e  :  Linnil,  B  ,  'J48  Littemala  subteiiore,  Lacom- 
blet,  1,  56,  lloo  Litmal  Bijdragcn,  11,  oOo;  1175  Liemale, 
Mon.,    1,    818,    et    Liinclctte,    B.,   1209   Limeletta,    Cart. 

(1)  A>tr/icn\  de  C,  1081  AIreel.  120^2  Aiiclii'l,  1270  Aiicliocl,  IBIO  Audunil, 
1311  Aloiol,  (le  LoisiU',  18;  Vlvch'melle  (Enquiii  P.  (le  C),  IH!»  FeJciiiol, 
12i3  FlecliiiH'l,  1282  Flecliinool,  do  LoisiU',  loi  ;  Vleurjou.i:  (Fiennis  H), 
8()8-8(li|  Flcciclciohmi,  Duv.  Rech.  810;  I23r>  Florisol  Uol.  479;  licsdùjneal- 
lc:-lloul()(/ne  ]'.  <lo  C,  li2o  Hesdiiiolae,  1338  Hosdignoel,  xv»  Hcsdiiigiieel, 
lij03  liidogiu'i,  de  Loisiie,  Dict.  top.  P.  de  C.  199;  Hourifjnetil  (Hmivin 
P.  de  C),  1117  Houvinol,  12U  Houvegiiel,  ihid.  207  ;  Melleçjnoiile  (Melin  B), 
-13()6  Melieguouls,  Boniians,  Fiefs  >'.,  1,  82,  1374  Melleneel,  Cuv.  Dcn.  0; 
l'rovisevx  Aisne,  1082  Pruvisiolo,  1393  Provisueil,  liOn  Provisel,  MaUoii, 
Diii.  top.  Aisne,  221;  Wa.smiiel  II,  1118  ciiiu...  Ganiiolo  Mon.  VllI,  312, 
117-i  Waïuiul  Duv.  Actes,  n.  s.  81  ;  12»)2  Wamicl,  Mon.  Vlll,  Ul. 

(-)  Le  suffixe  -ellns  fait  place  à  -oliis  dans  Stapsoul  {Sliwe  N)  xi<"  Stable- 
cellas  (=  Stables  -f  ellus;  iniluenoe  de  -cellus  dans  réorilure).  Uol.  :>i, 
1033  de  Stavieceilis,  I5erl.  Dor.  13,  1170  Slavesoul  lU.lUI,  LWl,  92,  1.^08 
Staveclionlle,  xin*-  Stapsoulle,  1209  Staules,  1230  Sables  Roi.,  diniinulif  de 
Stave  N,  8G8-8G9  Stabulis  Duv.,  Recli.,  310,  xv<=  Stawes  Roi.  —  Le  suffixe  -ellus 
est  remplacé  par  -et  dans  :  Bassuet  Marne,  ll4o  Bazuel,  xviiP  Bassue 
Longnon,  Dict.  top.  Murne,  15,  diminutif  de  liassK  Marne;  Bézuet  (Bé/.u- 
Saint-Germain  Aisne),  1217  Besuel,  XVIIF  Bezois,  Mallon,  28;  Ponlniet 
Aisne,  111(1  Ponlnde,  1220  Ponlruello,  1496  Ponl-Tniel,  Malton,  22C,  dinii- 
juitif  (le  l'o/itru,  Aisne. 

17 


258  A.    VINCENT 

A|}l.,U\■,^f()nt:^llc,  Lj>-,  1034,  Mosraale,  Grandg.,  Mém.,Si, 
H8o  Moniale,  Cart.  StLamb.,  I,  104,  et  Mometctte  (Mo- 
malle,  Lg),  1224  Momelette.  ('art.  St-Lamb.,  I,  210. 

a  devient  /  ;  Bnif/c.  H,,  1186  Braffe,  Cliot.,413,  et  Brif- 
fœil  ("Wasmes-Audeniez-Briffœil,  H.),  1186  lîriffœnl, 
Chot.,  486,  1215  Bi-ifuel,  Vos,  St-Mcdard,  II.  161;  Fal- 
nuii>nc,  X.,  1)46  Faleniania,  Roi.,  o()8,  et  Falini^noul,  N., 
1210  Falemignuele,  Analccics,  XVI,  53;  Matn^ne-hi-Petite, 
X..  et  Mn(ii^ne-la-(irun(l(',  X.,  868-869  Matagna,  War., 
Lobbes.  186.  1199  Matania,  Berl.,  Doc,  30,  et  Mati<>nolles 
(Treignes.  X.),  1150  MatLenoule,  Roi  ,  510,  1470,  Mati- 
gneulle,  BCKII,  LXXI,  90; 

e  devient  /  ;  Braives,  Lg,  1070  Rro\  ia,  Analcctcs,  XVI^ 
10,  1190  de  Broevis,  Evrard,  Flâne,  67.  l334Breives,  (\irt. 
St-Lamb.,  III,  446.  et  Bvwioiille  (Braives,  Lg).  1325  Bre- 
voles,  1330  Brivoles,  Poncelet,  Livre  fiefs  Lg,  83;  Flo- 
reffe,  X.,  1033  Florefia,  Roi.,  353,  et  Floriffoux,  X.,  1121 
Floreffioluni,  1145  P^lorifuel,  Roi,,  353  ;  Pro//r;a/.s-,  Aisne, 
et  Prooiseux.  Aisne,  1082  ai)ud  Provasiuni...  cuni  capella 
de  Provisiolo,  Chartes  St-Hubcrt,  54; 

o  devient  e,  puis  parfois  /  ;  (pilonne,  H  ,  1108  Calona, 
Chot.,  416,  1147  Caloniam,  Uuv.,  Actes,  119,  et  Calle- 
nelle.  H.,  1186  Callenielle,  Chot  ,  416,  1279-1280  Kalle- 
nielle,  Verriesl,  Ins.  jiir.  T.,  60;  (Jonncu.x,  X.,  1147  Col- 
nos,  Rec.  ch.  Stav.-Malm..  table,  17,  et  Conjoux  (Con- 
neux,  X.),  1299Cornisuel,  121i9  Conisul.  Cart.  St-Lamb.,  II, 
o6o,  564;  IIollo>>ne-niL\-Pierres,  Lg,  862  Holoniiim,  Rec. 
ch.  Stao.-Malm..  89,  et  Ilognoul,  Lg,  1044  Ilolinola, 
1092  Ilolengnele,  BCRII,  3"  s.,  II,  281. 

De  mrme  on  devient  en,  i)uis  généralement  e  :  Dion  -le- 
Val,  B,  et  -le-Monl,  B..  1155  Diun,  Cart.  AfJL,  155,  et  Doi- 
ceaii  (Grez-Doiceau,  B.),  xii<=  Daencel.  Tarlier-Wauters, 
Cn.  Wavre,  221,  1374  Dmvensial,  Cuv.,  Dén.,  8;  Séron 
(Forville,  X.),  1149  Seron,  Mir.-Fop]).,  III,  305,  et  Séressia 
(Forville,  X.),  1231  Serencial,  1500  Sereciau,  Roi.,  186. 

oi  devient  /  ;  Ihilloy  (Braibant,  X.),  875  Halogis,  RoL, 
lo9,  1104,  Halois,  Rec.  ch.  Stav.-Malm.,  275,  et  Ilaljoux 
((•iney,  X.),  1302  Halixuel,  Cart.  Clairefontaine,  109, 
xv«  Ilalisoul,  Cart.  Dînant,  VIII,  29. 

Parfois  l'iiiflueuee  analogique  du  simple  a   fait  l'élablir 


DIMINUTIFS   DE    NOMS    DK    LIEUX  ~^59 

:in  moins  tcmporaireiucut  la  voyelle  priiiiitixc  dans  le 
(li'rivé  i/) 

L'altération  de  la  voyelle  qui  cesse  d'être  accent ih-c  est 
fréquemment  suivie  de  syncope,  enti-aînant  même  la  chute 
de  consonnes  \  oisines  f^). 

La  consonne  ou  la  voyelle  finale  du  siin])le,  une  fois 
suivies  du  suffixe  diniinulif,  subissent  dilTc'rentes  trans- 
foi'inations. 

La  consonne  forte  s'affaiblit  <>('n(''ralement  : 

Bccouvl,  Somme,  1207  Hecurt.  1278  Becourt  et  lii'covdol 
(Bécourt,  Somme),  1301  Becourdel,  Mrm.  Soc.  Aiil.  Pic, 
3^  s.,  I,  93  ;  Ciuimoni  (Huchenneville,  Somme),  1100  ('al\  us 
mons.  1163  Caiimont,  et  C;jn///(*/u/c/ (Huchenneville,  Som- 
me), 1164  Canmondel,  Mcm.  Soc.  Aiit.  Pic,  3^  s.,  I,  218. 
(A'Ys.'iac,  H.-Loire,  xT",  Ceyssac,  1229  Saissac.  Chassaing, 


(^)  Cinnlnon  (La  Haiiiaidc  H),  toujours  Caiiil)roii  ou  CainlHM'on,  et  Cam- 
hroncliaii  (Wodeoq  H),  1;277  Caiiil)r('clit'l  (ielcs  Wontloki',  Mo».  Il,  :2,  707, 
1:278  Cainberonciel  deles  Woudoko,  ihid.  70o,  1:289  Caiiihrecicl  ki  est  ou  le 
|)aiT()clie  de  Wodeke,  r/m/.  717;  Vezati  11,  1031  Vesiiiis,  Duv.  ^r/r.v,  98,  lOfM 
Vesoniuin,  iliid.  35,  et  Vezonchanx  (Maubray  H),  10(51  Vcsencolli,  Duv. 
Acte.'!,  36,  1131  Vesoncel  Cli.  St.  Martin  T.,  1,  50, 1^273  Vezeuciiiel,  1-280  Vesen- 
cliiel,  Poman  Fr.schgen,  XXV,  101,  110;  Garnirez  H,  779  Waldneguiii, 
Lacomblet,  I,  1,  126o-l'280  Waufbcl,  Cnrl.  renies  CJcs  H.,  I,  l-2i,  (M  yVait- 
ilresetle  (Waudrez  H),  11(53-1179  Waudrisel.  Berl.  Doc.  1,  301,  12(55-1286 
Wadrisel,  V^art.  rentes  Ctes  IL,  I,  84;  Wochm  (Cortil-Wodon  N),  1125  Veldunt 
Roi.  25,  1227  Vodon,  Devillers,  Descr.,  L  175,  et  Wodeceaii  (Cortil-Wodou  Nj,^ 
1227  Vodencial,  Dcv.,  I,  175,  1366  Vodeneliiaul,  Barbier,  Mafonne,  361, 
V.  1380  Vodedieal,  Boriuans,  Fiefs  y.,  1156  Vodonvlria,  ReL,  25. 

(2)  Chérutte  Ljï.  et  Cherlal  (Chératle  Lg);  Corlxiis  1?.  1210  Corbais,  Tarlier- 
NVauters.  Cv.  Perwez,  80,  et  (Jo/wo'/j- (loe.  disp.  à  Corbais  15).  1757  (^orbisoux, 
ilyid..  81;  C[)reinœ'S,  1015  Colrinas  Reri.  Doc.  11,  v.  1343  Coraimie,  Bormaus 
Fiels  N.,  94,  et  Corwp«e  (Stave  N),  1180  de  Coriiiellis,  Berl.  Doc,  24.  1281 
Cojreneiles,  Ann.  Soc.arch.  N,  XXIV,  38^1;  Dorimic'S,  llOSHorina,  Roi.,  524, 
et  Dnrnal  Nr  v.  1131  Dornella  liée.  cli.  Stuv-Malm.,  313,  xvi»  Duiiialle  Cart. 
Ciney,  262;  Holfugne-auv- Pierres  Lg,  862  Holoniuin,  Hec.  ch.  Stuc-Malm.,  89, 
1105  Holonge.  iliid.,  278,  1044  Holinola  BCRII,  3  s.,  II,  281.  1085  Hoinole, 
Corl.  St-Laint>.,  43,  664,  1234  Holegnuole.  iind.  331,  1304  Holigiioule,  ilrid.  III, 
44,  XVI- Holnioule,  Cart.  binant,  I.  123  ii;  Linceitt  Lg,  1031  Lviiscn  liCRH, 
3«  s.,  11,279,  1139Lyiiseni  Hallei,  d,id.  447,  et  Linsmean  B,  1139  Lynseni 
Pelleiidis,  iliid.  447,  1 145-1  Kii  Linsnieai  Analecles,  2'-  s.,  Vlll.  192,  1187 
Linseiuel,  ilnd.,  2"  s.,  IX,  257;  7V>//i?i  Lux,  817  Teiins  Cit.  Sl-Hitliert  5,  et 
Tetnaii  (Tellin  Lux),  1184  Parvuiu  Telliii.  (7m/.  14L  12(54  Teliiie-il,  iltid.  373. 
1373-1374  Teliiiea/,  H>id .  (500. 


260  A.    VINCENT 

DicL  lop.,  II. -L,  .'il,  et  Ccyssuouct  (La-Voûte-siir-Loire, 
H.-L.),  4255  Saissaguet,  ibid.. 

Cependant,  Brimont  Marne,  1171  Brimons,  a  donné 
Brimontel  docaliti'  disparue  à  Brimont  Mai'ne  ,  1219  Bri- 
montel  Longnon,  38;  d'autre  x^ai't.  le  diminutif  correspon- 
dant à  S('bouri>-  Nd,  1142  Sevoreli  Duv.  Actes  1211,  1263-86 
Sebourc  Cari,  rentes  Ctes  IL,  II,  184,  est  SebourquiHii 
(SebourgNd),  1142  Sevortoheel  Duv.  Actes  213,  126o-1286 
Seborkiel,  Cart.  rentes  Ctes  H.,  II,  184,  qui  a  eu  passagè- 
rement la  consonne  faible  :  1163-68  Subui-geaus  Duv.  Actes, 
n.  s  59;  aujourd'hui  que  le  simple  s'écrit  par  analogie 
Seljonrg-,  on  a  une  tendance  à  adoptei-  la  forme  correspon- 
dante Seboari>uuiu. 

La  sifflante  finale  du  simple  se  transforme  parfois  en 
<'huintante  dans  lo  diminutif  (^). 

Invei'sement,  une  chuintante,  finale  dans  le  simple, 
devient  parfois  sifflante  dans  le  diminutif  (2)  ; 


(1)  Vuarrens  Vaiid,  1147  Warens,  et  Vi/arrengel  Vaiid,  1184  Wairengel, 
Jaccard,  .d:2.");  Vien  fAnlhisaes  Lg),  108:2  Vileinz  Bec,  ch.  Stav.-Malni.,  ^40,  cl 
Vigeai  (.Vntliisues  Lg),  v.  M3I  Vilengal  ihid.,  311,  lolï2  Villegeal,  Cart.  Cinei/, 
272,  1831  Vigoai  Varidei-  Macleii.  DIrf.  pror.  Lg,  22o,  184(1  Viégcai  Havard, 
Dict.  c.  Belg.  246.  En  Belgique,  cetlo  Iransformalion  sest  généralement  pro- 
duite au  xvie  .sieele  ou  plus  lard  :  Conneux  y  1147  Colnos  fier.  ch.  Stav.- 
Mahn..  table.  17,  et  Conjoux  [Goimeux'S),  1299Coi"nisuel,  Cart.  St.  Lumb.,  II, 
563,  1583  Conisoux,  Cart.  Ciney,  1011;  Flennis,  H.,  1033  de  Flerusia,  Berl. 
Doc.  I,  12  et  F/eiirjoHx  (Fleurus  H),  Xl'^  Villa  quae  dicitur  Flederciolo,  UCHU, 
LXXVIII,  261,  868-8()!)  Fledeldolum,  Duv..  Ilec/i.  310,  1691  Fleurisoul  Laiiaye- 
Radiguès,  280:  Gfahal.s  \),  1197  Glabais  Tarlier-Wauters,  Cn.  (k-nappe  21  et 
Glahjonx  (Ways  B),  H80  (;iai)esul  de  .Morcau,  Ch.  Xlh  \iHers,  W.  1338  Glob- 
soul  (=*(ilabsoul),  Anniecles,  II,  280,  1397  Giabioel.  1(343  Glabl)ejuul  Tar- 
Iiei--\Vauler.s.  27:  llullog  (Hraibanl  .Nj,  1104  Halois.  lier.  eh.  Stav.-Mut.m.,  273, 
130:2  Halixuel,  Gait.  Clairefonlaine.  109,  xvi-'  Ilailizoux,  Cart.  Cineg,  203: 
Mnlenihais-.Salrit-.Jo.ise  B,  IlOi  .M()leiMl)ais,  .\nalprtes,  203,  Vill,  207,  132G  Mo- 
lebai.s  Cuv.  f>m.,  1103,  et  Molonhhonl  U'iiàleau  «iisparu  à  Jodoigne  B),  1104, 
Molembi.sul,  Analectes,  2»  s.  VIII,  203,  1326  Mollebejoul,  Cuv.-Dcn.  403, 
153f)  Moleiibisul,  Tarlier-W.,  Cn.Jod.,  3.  —  Marfrisoux  (Marbais  B),  1272  Mar- 
bizucl,  Analecle.i,  3^'  s.  Il,  420,  est  un  nom  oflJLMel  lige;  la  prononcialion 
populaire  est  Mahjou. 

(2)  Vlumierge  Lux,  1293  Fiamiergos  Mon..  III,  357,  el  Flantisonl  fLong- 
champs-ie/.-Baslogin'  Lux),  1109  Flaniosoulle  Tandel,  IV,  8:  Maredret  fSosoyp 
N.)  1002  Merendrek,  1131  .Mcrendrerh,  1272  Marendiecli,  xiii"  Morendrel, 
XVI''  Maredrel,  Berl.    Terrrs  .Mar.   12-73,  et  .Maredsons  (Denée,  N.),   1183   in 


DIMINUTIFS  DE   NOMS   DE  LIEUX  261 

Quand  le  simple  se  termine  par  nne  voyelle  nasalisée, 
le  diminutif  a  n  entre  deux  voyelles;  cet  n  se  mouille  le 
plus  sou\ent  :  Cninbluin-l'Abbé  P.  de  V  ,  10()8  Camblin, 
Cardevacque,  Mont-St-Eloi,  182,  v.  1187  Cambeliu,  de 
Loisne,  81.  et  Cambli(;-neul  P.  de  ('.,  116i  Canibelinnol, 
1213  Cambelignuel,  de  J^oisne,  81  ;  Ilesdin-l'Abbé  P.  de  ('  , 
1112  Hedinium,  1145  lledinnm,  de  Loisne  200.  et  Ilesdi- 
g-neiil-lez-Boulog^ne  V.  de  (\,  ll2o  Hesdinolae,  1208  Hes- 
dingnol,  de  Loisne,  199. 

Les  désinem-es  y,  iiy  provenant  de  —  nciiin,  placées 
devant  le  suffixe  diminutif,  donnent  une  semi-voyelle,  qui 
tombe  après  un  certain  temps  (V). 

Les  assimilations  et  les  dissimilations  sont  fréquentes 
dans  les  diminutifs  (-). 

Il  y  a  chute  de  Vii  initiale  dans  Ansucllcs  '  Anderlues  H^ 
1190  de  Ilaineceolis  Duv.  Actes  n.  s.  lo2,  17U0  Hane- 
clioelles,  Loix...  aille  de  Mons,  4,  (Haines  +olus),  diminutif 


Mc'ieiid[rjici(>k>,  l:20o  Maieiidrerlioiil,  1387  Marcdclioiil,  looT  M:iiclioux, 
l.")'J4  Miircdsoiis,  ilntl.  li-17;  il  y  a  peut  ètn»  eu  iiiniieiicc  aiialogiqvie  de 
dessous. 

(')  Aiichy-iiii-IUiis,  P.  df  (',..  877  villa  Aiiciaciis,  xiv  Aiiciiy,  de  Lnisiic  19, 
ot  .■l?/f/*é'/,  P.  de  C.  1(181  Alceel,  1^19  Aiuecl,  1-262  Anchol,  rVm/.  18;  Herce- 
nay-en-Otlie  Aube,  114(5  Breleiiiacum,  llo3  Broi-enaiuiii,  et  Bercenelle  (Berce- 
nay-en-Othe  Aube)  1292  Breecneelle,  xiw^  Breceneile,  Boullot  et  Socard, 
Divt.  top.  Aulie,  7;  Gii:enclij/-ni-Gohelle,  P.  de  C,  1070  Juveneliii,  1329Given- 
cliy  de  Loisne,  1(38,  et  Gioent/iiel  (Givcncliy-en-(lolielIe,  P.  de  C),  xn>'  Juven- 
eel.  i20i  Juvenclieel,  ihicL.  xix"  (livencclle;  PoHsy  Aube,  liOl  Poliseius, 
1201  Polisy,  et  l'n/lsot  Aube,  1 1(59  Polesot.  I38H  Polisot,  BdUtiul  et  So-ard,  124; 
Pamef.  L'^.,  1298  Puclies  liaibier,  Gir.,  307,  1301  l>ucliey,  Cli.  Ile-Duc 
Grmpr,  185,  et  l'issoiil  Ol(tin:dle,  Lg.).  1330  Pui-liues,  xv  Pouehoule,  Cart. 
Sf-L((ml).,  III,  3.i0  et  341:  Tliozrc  (Mettel,  N.).  1161  Toseias.  BŒU,  LXXVI, 
()72,  132oTosei's  Bol.  i.~i2,  et  7r//.so*//  (Saiiit-C.erard,  .N.i,  1160  Tdisdies  Duv. 
Arles,  27 i. 

(2j  Forseille  (Héron  Lg),  1 12.";  de  Forselis  Ernsl  Hist.  U>nl,.,\ï,  126,  1137 
Forcclle.s  Evrard  Flône  23,  i26"i  Foireille.s  Hoiiiarn'd,  XVII.  o7rj,  et  iosseroulle 
(^Hueeoi'giie  Lg),  (iroduil  dune  double  dissiniilalion  :  1299  Koi>illoles,  Cart. 
St-Lamh.,  III;  1326  Foiclieroules  IJvir /icfs  Uj.  (iT  .  161(1  Fosseroule  Bor- 
Mians  Siifii).  fvoil.  ISC)  ;  .liiiiilh-  Lg.  1  i70  Ju|.ille  />V.7i7/,  l.XXI.  et  Ju/xelle  Lg, 
Ilt7  Ju|)ilella,  1 186  Jupelella  (iraudg.  \'<>r..  1212  .lu|irelle,  Arxilcrles, -2'--  s. 
VI,  iril  ;  VilleneKre-Sdinl  Visfre  Marne,  v.  12i0  Villa  nova,  1271  Ville  neuve, 
Longnon,  Dicl.  top.  Marne.  29t.  et  Villevtle.  hameau  de  celle  commune  : 
V.  1222  Ville  novete  :  137.'i  Ville  l.ouvele  ;  1113  Villa  L.vela.  I."i82  Villelou 
voile,  ihid.,  298. 


262  A.    VINCENT 

de  Haine-Sainl-Pniil,  H.  et  Uiiine-Snint-Pierre,  H.  868-9 
Hagna,  Wai.,  Lohbes,  905  villa  Haiua  Duv.,  Rech. 

Il  y  a  prosthèse  de  ii,  phénomèue  fréquent  en  Belgique, 
dans  Xniifnl  ( Villers-sur-Lesse,  N.),  diminutif  de  Aiiff'e 
(Ave-et-Auffe  N.);  Xniveroule,  localité  disparue  près 
d'Awirs,  Lg.  1200  Xouverueles  Cart.  .St-Lanib.  122,  1341 
Naweroule  Bull.  Inst.  arcli.  liégeois,  IX.  diminutif  de 
Awirs  Lg,  1200  Auvire  Cari.  St  Lamb.,  122;  Naxhelet 
(Wanze  Lg),  1289  Aiseleth,  Barbier,  Flor.,  2«  éd.,  II,  191, 
i3o8  Ast'helet,  Analectes  XII,  75,  1445  Aisselet,  Bormans, 
Fiefs  X  1292  (M,  diminutif  de  Aische-en-Refail  X.  805 
Hasca,  Roi.,  l/Jl,  1179  Aiz,  Barbier,  Flor,  2*  éd.  II,  3o,  1444 
Aische,  Bormans,  Fiefs  X.  289  (~). 

Dans  Angluzelles  Mai-ne,le  z  a  remplacé  r  auxvi^siècle  : 
1117  Angledura,  1233  Engleurella.  1501  Anglurelles,  1502 
Angluzelles,  Longnon,  4,  5  ;  la  même  transformation  n'a 
pas  eu  lieu  dans  le  simple  :  Anglure  Mai-ne,  1128  Angluria, 
ibid.  4. 

Le  diminutif  de  Mellet  H.  1033  Melenck,  Berl.,  Doc,  1298 
Meling,  Anal  2«  S.  IV,  présente  la  même  métatbèse  que 
Cognelée  (Cliampion  X.),  1239  C'olignees,  Roi.  :  c'est  Mi- 
gneloiix,  qui  n'existe  plus  isolé,  mais  se  trouve  dans  Pont- 
à-Migneloux  (Mellet  H.),  123G  per  viam  qua  itur  de 
Gocellies  Melhignul,  Anal.,  IX   270. 

Enfin,  les  diminutifs  prêtent  à  de  nombreuses  déforma- 
tions par  étymologie  populaire.  Corenne  X.,  a  poui-  dimi- 
nutif Cornelle  (Sta\e  X.).  qui  se  transforme  aujourd'hui 
en  Corneille;  Fumai  Lg  1240  Female  Anal.  2«  S.  VII,  364, 
1252  Fiimal  Anal  XII,  44,  a  donné  Famelette  (Huccorgne, 
Lg),  déjà  en  1252  Famelet  ibid.  ;  le  diminutif  de  Gougnies 
H.  1265  Giiignies  BrouNvers  Cens  I,  154,  1289  Goingnies 
ibid.  II,  est  Gazelle  (MettetX.)  1265  Goinzelcs,  ibid.  I,  144, 
1289  Goingniselles  ibid.  II  373;  à  Genappe  1067  Genape, 
Tarlier  et  AVauters,  Cn.  Gen.  3,  correspond  Gempioul 
(Vieux-Genappe,  B  ),  1374  Gemprioel  C'iiv.  Dén.  6,  1403  Ce- 


(ij  Cdinpart'z  le  nom  de  iamille  Da-ilirlct,  ortlioi^raplic  aucioiitie  i»uiir 
d'Axliclel. 

(^)  l.a  inÎMiic  [)roslht'sc  se  ooiislale  dans  le  imiii  du  ruisseau  d'Aische,  le 
Nasclttinr,  (|iii  est  le  tioiii  du  village  mis  au  diminutif  en  —  ellus. 


niMIM    TIFS   DE    NOMS    DE    LIEUX  263 

nepioul,  145V)  Gempioel,  Tarlier  et  AVauters,  3,  que  l'on 
voit  parfois  tj-aiisformi'  en  Jeniine-Pioiil  et  Jeuiie-Piou; 
Oujonnet  (Bursinel  Vaiul),  diminutif  d'Oujon  Vaud,  s'ap- 
pelle couramment  le  (iei\cl. 


D'autre  part,  ceitaiiies  caiisen  d'c-xolution  ajj;issent  sur 
le  simple  sans  atteindre  son  d(''ii\(',  conti'ibuant  donc  à 
accroître  leur  dissemblance. 

La  consonne  finale  du  primitif  peut  se  transformer  ou 
disparaître,  au  moins  dans  l'écriture,  tandis  qu'elle  reste 
protégée  dans  le  corps  du  diminutif  (*). 

La  syllabe  finale  du  sim])le  ])eut,  au  cours  des  siècles. 
j)erdre  une  consonne  ou  une  voyelle  qui  est  restée  intacte 
dans  le  dérivé  :  (icnappe,  12ii2  Gena])ia,  Tarlier  et  A\'au- 
ters,  Cn.  (ion.,  15,  en  flamand  i)endant  longtemi)s  Gcna- 
})ic.  p.  ex.,  1374,  Cuv..  Dcii.,  6,  et  Gcinpioiil  (Vieux- 
Genaj)pe,  B.),  1374  Gcmi)rioel,  C"u\.,  6;  Rcucs,  H.,  v.  1163 
Roevia,  Barbier,  Flor.,  II,  25,  1198  Ravia,  Du\ .,  Actes, 
n.  s.,  252.  1231  Roavie  (document  éci-it  en  français).  Devil- 
1ers.  Dcscr.,  1,  111,  et  Rcvioiix  (Rêves,  H  ),  1474  Rivioel, 
("uv..  (5. 


(')  «awW  Li,'.  llH-2  Kaiiiel  Atial.  -2"  s.  VU,  335,  1-21G  Uammoil  Grandj,'. 
Yor.  I.  :il,  127^  Rainei,  Anal.  *•  s.  111,  3()o,  et  Bamioiil  (IXamH  Lg),  lOoO 
Raiiiolul  BCliH:i^  s.  XVII,  o67,  VM>  Haincilhoiil.  .\nal.  '2«  s.  Vlll,  179,  1831 
Ramidiille  ChùMet,  H.,  1 171  Castclin,  D.'villcrs,  Hescr.  I,  M,  l?t!)  Chesteliii, 
Darras,  Hist.  Cfi.,  i,  14,  12()7  Cliaslclliii-,  VcMTic.sl,  Serrage,  i98,  1170  Glias- 
lellct  liClUl,  LXXl,  87.  ol  Chàtel'mean.  11.,  lài.'i  Kaisteliiiicl,  Hroiiwcr.s,  Cens., 
I,  18.  1:5-20-1  Cliastoliiiiaul,  VeiTio^l,-i:;3;  KInin,  Xd.,  881,  Stnini,  Maiiiii.M',  278. 
1-227  Kstniciii,  Metn.  Aeail.  Arras,  XXXVlll,  31  i,  et  Estmirmrl,  Nd.,  lOOti  .Sini- 
mella.  ManiiiiM',  279.  1170  Estrumel,  Bruyollc,  Divl.  arr.  Camlu-ai,  13{>.");  Filât, 
hg.,Hm,  Fielon,  fier.  eh.  Stav.-Malm.,  I33i  Filolag.  Cari.  Sl-Lamh.  111,  U6, 
el  Faymml,  (Ferrières  Lg.),  110.5  Fieligiiel,  fier.  ch.  Slav.-Malm  ,  xix«  Fégiioiil, 
1831  Fagnouille;  Piétrain.  M.,  1216  Peterlieia  BCRH,  ■i<- s.,  VII,  i:jl,  I37t 
Piplrt'liciii,  Cuv.  Dén.  9,  et  PhUremeaii  (l'it'Mrain,  H.),  1210  PetonuoU'  ItCRIl , 
4e  s.  Vil,  VA,  1272  Pelioniiol,  Anal.  3«  7..  H,  ■4:i.''i  ;  Warèt-la-CInirnsce,  N., 
V.  I;i43  Wares  la  Cliacliif,  Bonnans  Fiefs  N.,îiî*,  et  iVarisouljc.  >'..  1272  Wari- 
siiol.  .Anal.  3''  s.  Il,  i23.  —  Rappolons  onliu  qualrc  diniiiiulifs  drjà  cités 
plus  haut,  où  est  conservé  ïs  de  dcelinaisoii  du  uioveii-àge  :  .Xnsuelles  = 
Haines  +  olus,  Conjou.r  =  Colnos  -|-  olus,  Missoul  =  Mies  -f-  olus.  Slap- 
soul  --=  Slaves  -|-  ellus,  remplacé  ensuite  par  olus. 


'2(^4  A.    VINCENT 

La  syllabe  finale  du  simple  j)eut  même  tomber  entière- 
ment (*). 

Le  simple  peut  ('])i'ou\ei'  des  ti-ansformations  internes 
qui  ne  se  produisent  pas  ou  ne  sont  ])as  durables  dans  le 
diminutif  {^). 

Kniin,  le  nom  sim])le  est  souvent  allonge  d'une  dc'termi- 
nation;  nous  avons  i-encontrè  plus  liautdi\ers  cas  de  ce 
l)hénomène,  très  commun  du  reste. 

Parfois  le  dcterminatif  se  soude  au  nom  simi)le,  ce  qui 
agrandit  encoi-e  l'écart  existant  déjà  entre  celui-ci  et  le 
dérivé  :  Ilulsonniaux,  X.,  v.  1400  Hu}'  les  Oneals,  146^ 
Hulesoniauls,  Roland,  199,  et  Uouyet.  X.,  1558  Huyet, 
.l/K-7/cr/c.s.  II,  4o2;  MnrrIuHH'lcU('.  X  ,  1046  Marcha, 
Ivoland,  207,  1260  Marcliedonmartin  Ile  i)atron  est  saint 
Martin),  Brouwers,  Cens,  I,  96.  1294  Marche  l'escouve- 
Ictte,  ib'uL,  221.  v-13yo  Marche  le  Scovelette.  Roland,  207, 
16oo  Marche-C'hovelette,  1701  Marchovelettc,  Ibid.,  208  et 
Maquc-letle  (Marchovelette,  X.),  1234  Markelettes,  1492 
Marquelettes,  Roland,  209;  Millci^rand  (Trèbes,  Aude), 
900  villa  Milianum,  1681  Millegiand  et  Milleret  (Badens,. 
Aude),  1119  de  Millanello,  1539  Milharet,  Sabarthès,  Dict. 
top.  Aude,  240. 

AUG.    VlXCKNT. 


l'i  Soiiillir,  Aude,  l-22f)  Solh;iiiiiiii,  H  {:5  SoIIki,'  l.">7i  Soillo,  Sal);irtliès  hirt. 
top.  Aiidr,  i}{  Sovil/iaiiels  \{nU\  li:2(')  Sollinnclluiii,  I  i!t4  Sollianels, //;?>/. 

{^)  Vron,  Sonnne,  IIW)  Virrnin,  H()(»  Vroii,  Mrin.  Suc  Aiit.  l'ic,  S«  s.  IV, 
i09,  et  Vironc/iaux,  Somme,  Xli«  Viroiieels,  Garclevac(nie  Hist.  Auc/u/,  iOO, 
12i4  Vironchaus,  Mrm.  Soc.  Atit.  l'ic,  'tO-2:  Mair/mmic-aii-l'oTit,  H.,  8(j8-8()9 
Marcianis,  Diiv.  Rcr/i.^Q],  1 1  i3  Maiciiics,  Car/.  St-Uimli..  l^i'i  Marcliines 
C/i.  Ste-iyainlni,  et  Maniriclfe,  H.,  8()8-8()!)  Marcianis  Duv.,  lOi»,  Marcinel 
BCRH,  .>  s.  IV,  175,  12i0-liil  Marceiiiles,  ihkl.o^  s.  XIV,  1!)2,  l-2i2-l-2i:5 
Marcclinis,  ihid.  229;  du  xill*  au  xiv<^  siècle,  on  trouve  du  reslc  aussi  la  forme 
cil  ch,  qui  n'a  pas  subsisté  :  1297  Marclienolles  Ch.  Ste-Waudru,  1538  Marehi- 
iielles,  ^nrf/.  If,  :«1. 


Les  «  Comédiens  de  Campagne  » 
à  Bruxelles,  au  XVH  siècle 


Bruxelles  a  connu  très  tôt  les  représentations  données 
par  les  «comédiens  de  campagne»,  qui  ne  manquaient  pas 
de  s  arrêter  dans  la  capitale  des  Pays-Bas  espagnols, 
quand,  émigraut  de  la  province  française,  ils  s'aventu- 
raient sur  les  routes  du  Nord.  Dès  1598  on  en  voit  paraître 
à  Gaud  ;  d'autres  sont  a  Mons  l'année  suivante  ;  une 
«bande»  joue  à  Lille  en  1609,  et,  pour  la  première  fois,  en 
1615  une  troupe  vient  jouer  au  Palais  des  Archiducs  ;  elle 
y  revient  en  novembre  1616,  peu  avant  une  troupe  espa- 
gnole. Malheureusement  les  registres  du  Trésorier  de 
L.  A.  S.  n'indiquent  pas  le  nom  du  chef  de  la  troupe  : 

«A  unos  comediantes  franceses  300  flos  p  très  comedias 
que  representaron  en  palacio  300  florines». 

De  semblables  mentions  apparaissent  plusieurs  fois  dans 
les  «livres  de  raison»  des  années  1615  à  1617  (^).  Il  est 
certain  que  des  comédiens  étrangers  étaient  déjà  venus 
antérieurement  à  Bruxelles,  puisqu'une  résolution  du 
Magistrat,  en  date  du  7  mars  1608,  frappe  toutes  leurs 
représentations  d'une  taxe  d'un  demi-sou  par  entrée  (-'). 
Dans  les  Comptes  des  Hospices,  nous  avons  relevé  plu- 
sieurs mentions  de  sommes  perçues  «  van  de  Comedianten 
op  versehejden  daeghen,  als  oyck  van  diversche  monsters 
van  beesten  ». 


(')  Pour  les  faits  (|uc  iimis  ;i\aiicfr(iiis  ici,  ninis  ne  donnerons  pas  toutes 
les  références  darcliives  :  ce  sérail  alourdir  inutilement  eelte  élude  <|ui 
sera  développée  et  aee(Mnpagnée  de  toutes  ses  jiièees  justificatives  dans  un 
travail  complet  ipie  l'auteur  se  propose  de  publier. 

1-)  Cf.   Hknnk  et  \V  An  Kits  :   Histoiir  de  la  cille  dr  ISni.n'Ilcs.   11.  2«<). 


266  H.     LIEBHECHT 

Ces  premières  troupes,  arrivant  à  Bruxelles,  ne  dispo- 
saient d'aucun  local  approprié  ;  mais  comme  elles  appor- 
taient une  distraction  dont  les  bourgeois  étaient  aussi 
friands  que  les....  Magistrats,  ceux-ci  autorisèrent  l'érec- 
tion d'une  scène  i)rovisoire  dans  la  grande  salle  nommée 
de  (c  Scliermers  Schole  »  ou  «  Ecole  des  Escrimeurs  w,  qui 
servait  de  lieu  de  réunion  à  la  Gilde  de  Saint-Michel  et 
qui  était  située  dans  l'aile  postérieure  de  l'Hôtel  de  Ville. 
Des  abus  ayant  sans  doute  été  commis,  les  Magistrats 
revinrent  sur  leur  décision,  et  par  leur  résolution  du 
26  janvier  1627,  ordonnèrent  la  démolition  de  ce  premier 
théâtre  (^)  ;  mais  les  avantages  qu'offrait  aux  acomédiens 
de  campagne»  le  séjour  d'une  ville  de  Coui-  étaient  trop 
certains  pour  qn'un  obstacle  matériel  de  ce  geare  pût  les 
arrêter.  D'autre  part  leur  venue  régulière  devait  inciter 
quelque  propriétaire  entreprenant  à  construire  une  salle 
de  spectacle  à  leur  usage. 

C'est  en  effet  ce  qui  advint  :  à  partir  de  1649,  nous  con- 
statons la  présence  annuelle  d'une  «troupe  de  campagne». 
Bruxelles  va  devenir  un  centre  de  rayonnement  :  non 
seulement  les  comédiens  français  y  feront  désormais  de 
longs  séjoui'S,  mais  ils  y  reviendront  après  avoir  poussé 
jusqu'en  Hollande  ou  représenté  soit  à  Liège,  soit  à  Gand. 
On  verra  des  «bandes»  ne  pas  rentrer  en  France  pendant 
plusieurs  années  et  passer  à  Bruxelles  leurs  contrats  de 
renouvellement  d'association,  envoyer  à  Paris  un  de  leurs 
membres  pour  y  enrôler  les  sujets  qui  font  défaut,  à  moins 
que  deux  troupes  venant  à  se  rencontrer  ne  fusionnent 
totalement  ou  partiellement. 

En  arrivant,  le  chariot  comique  s'arrêtait  à  l'une  des 
deux  grandes  auberges  situées  au  Grecht  ou  Fossé  aux 
Loups.  C'était  tantôt  à  «  Malines  »,  tantôt  à  «  La  Grande 
Carpe  »  que  les  comédiens  prenaient  logis  :  ils  étaient  ainsi 
très  à  portée  du  théâtre  situé  derrière  le  Couvent  de 
Sainte-P]lisabeth,  dans  cette  voie  qui  en  a  gardé  jusqu'à 
nos  jours  le  nom  de  rue  des  Comédiens  ('-),  à  moins  <{u'ils 


(*j  Index  (1er  resolitiien  rakendc  de  sltiiU  llnisscl.  aux  Archives  de  la 
Ville,  fol.  72. 

('-)  Elle  s'a|)jjf'lalt  antérieurciiicnl  le  «  Vieux  Marche  )■  ou  le  «  Fossé  au 
Sable  »,  (Cf.  IIknne  et  Wai  tkks,  lac  rit.  111,  ."jH.^i. 


COMEDIENS  DE  CAMPAGNK 


267 


ne  trouvassent  moins  onéreux  ou  plus  comniode  de  louer 
le  ((jeu  de  paume»  du  (ireelit,  situé  eu  face  dv,  leur  auberge, 
presqu'nu  eoin  de  la  rue  d'Argent  (i). 

Le  théâtre  de  la  Montagne  Sainte-Elisabeth,  bâti  sur  le 
coté  droit  de  la  rue  presqu'à  hauteur  de  la  rue  Saint- 
Laurent,  comportait  deux  bâtiments  avec  une  cour  <]ui  les 
sépai-ait  et  un  jardin  derrière  :  la  salle  était  consti-uite 
dans  le  second  bâtiment,  et  prenait  jour  sur  le  jardin. 

Quant  au  ((jeu  de  paume»,  lieu  favori  des  comédiens  pour 
y  ériger  leurs  salles  de  plauches,  il  était  également  con- 
struit  dans   un  jardin,   la   nuaison   à  fi'ont    de   rue  étant 


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licstitiiti(i/i .   iri   coiijic  cl  vn  jihtii,   tic  lu    schtc  cicccc  ii/i 
Jeu  (le  l'diniie  du  h'osKc  uu.r  Loups. 

Loiignciir  Idlalc  :  1(10  jiicds  (le  pied  cImiiI  r.ilnilr  a  (l.:i(l  m.  cm  irmi);  lar- 
geur tolalc  :  'X.\  ijicds  A  gaïu-lic,  l'ciiliri';  ain|)liillié:Un'  en  gradins  avec  tmis 
loges  ail  |i(iinl  If  plus  élevi'  An  cciilrele  par(|ucl  ou  iiartiTrc  m"i  on  se  tenait 
debout.  I.i'  plaiirlier  on  était  à  i  |iii'ds  sous  le  niveau  de  la  seene.  ii  la(|uelle  on 
accédait  par  un  ex-aiier.  He  cluuine  coli''  (jnalre  loi;('s.  Profondeui'  de  la  scène  .- 
■M  pied>.  On\ertiii'e  au  rideau  :  17  pieds  .\n  l'und.  le  pelil  liiéàlre,  dit  <>  de 
Jupiter  )'. 

occu))ée  i)ar  une  boulangeiie  qui  devait   sui)portcr  la  ser- 
vitude du  passage  i)ar  l'entrée  doniuiut  accès  au  tripnt. 


(')  Là  oii  l'ut   longtemps  rilùtel  de  la  l'o.-le,  actuellement  occupé  jiar  un(^ 
banque. 


268  H.    LIEBRECHT 

Ce  jeu  de  paume,  comme  tous  ceux  de  l'espèce,  était  de 
forme  rectangulaire,  large  d'environ  10  à  11  mètres 
(35  pieds)  et  long  de  30  (100  pieds).  C'est  dans  cet  espace 
que  le  charpentier,  avec  lequel  les  comédiens  passaient 
contrat  sitôt  le  local  loué,  devait  aménager  une  salle  et 
une  scène. 

Le  toit  du  jeu  était  posé  à  environ  r)'"40  du  sol,  sur  des  co- 
lonnes dont  les  intervalles  étaient  tout  d'abord  clos  de  i)lan- 
clies.  Le  théâtre  proprement  dit  —  ce  que  nous  nommons 
aujourd'hui  la  scène  —  occupait  le  fond  sur  toute  la  largeur 
et  sur  une  profondeur  de  32  pieds  (9'"60),  soit  envii'on  le 
tiers  de  la  longueur  totale.  L'ouverture  au  rideau  n'était 
que  de  17  pieds  (5™10)  et  le  «  plateau  »  allait  en  se  rétrécis- 
sant, de  manière  à  ne  laisseï-  entre  les  portants  du  fond 
qu'un  espace  de  7  pieds  (2'"  10).  Encore  ce  fond  était-il  occupé, 
entre  les  derniers  portants  et  le  mur.  par  un  second  petit 
théâtre,  nommé  dans  les  contrats  ((théâtre  de  Jupitei"»,  et 
dont  le  plancher  était  à  trappes,  pour  permettre  aux  appa- 
ritions de  surgir  dans  ce  guignol.  Parfois,  il  était  à  deux 
étages,  et  constituait  un  reste  curieux  des  mises  en  scène 
du  moyen  âge  :  «■  un  téâtre  avec  un  petit  téatre  au  dessus  » 
dit  un  contrat  de  1651  ;  ((trois  téâtrcs...  un  embas  et  deux 
aultres  téâtrcs  dessus».  j)récise  celui  de  1662.  Al'avant-plan 
de  la  scène,  un  fossé,  profond  de  30  à  40  centimètres,  permet- 
tait de  loger  la  rampe,  laquelle  était  constituée  par  une 
planche  percée  de  trous  i)our  y  ficlier  les  chandelles  et 
pouvant  s'abaisser  ou  se  lever,  selon  les  nécessités  de 
l'éclairage.  Le  plancher  de  la  scène  était  en  pente,  vers  la 
rampe,  avec  une  différence  de  niveau  de  50  centimètres  à 
])eu  pi'ès. 

Les  décors  étaient  formés  par  des  portants  symétriques, 
placés  sur  sept  plans  différents  éloignés  de  i  pieds  l'un  de 
l'autre.  Chaque  plan  de  décors  débordant  du  précédent, 
l'ensemble  des  7  plans  formait  une  ])ers})ective  très  fuyante, 
jusqu'à  la  ((petite  perspective»  du  fond.  Chaque  poi'tant 
était  large  de  4  pieds  (1'"20)  ;  c'était  un  châssis  de  bois  sur 
lequel  on  tendait  la  toile  peinte  ;  à  chaque  mât  on  attachait, 
en  les  adossant,  deux  châssis  de  décors  différents,  de  telle 
sorte  qu'une  simple  rotation  du  mât  faisait  apparaître  le 
second  décor  :  c'est  l'origine  des  changements  à  vue. 


COMÉDIENS  DE  CAMPAGNE  ^69 

Dans  les  coulisses,  des  deux  côtés  du  théâtre,  il  y  avait 
<ies  loges  pour  les  acteurs,  au  nombre  de  6  ou  de  8,  sur 
■deux  étages  superposés. 

Il  est  certain  que  des  places  étaient  réservées  sur  la 
scène  aux  spectateurs  de  marque,  car  un  escalier  de  cinq 
marches  permettait  de  monter  du  parquet  sur  le  plateau. 
La  salle  comportait  trois  parties  essentielles  :  les  loges, 
l'amphithéâtre  et  le  parquet,  les  deux  dernières  séparées 
par  une  barrière.  Le  parquet  avait  la  largeur  de  l'ouverture 
du  rideau,  soit  dix-sept  pieds  ;  il  était  en  contre-bas,  c'est- 
à-dire  que  le  plancher  eu  était  à  4  pieds  sous  le  niveau  de 
la  scène  à  l'avant-plan  ;  comme  on  s'y  tenait  debout,  le 
regard  était  donc  à  la  hauteur  voulue. 

Des  deux  cotés  du  parquet  étaient  placées  des  loges, 
8  à  10  en  tout  :  chaque  loge  avait  une  petite  porte  ;  elle 
était  couverte  et  garnie  de  bancs  ;  une  grille  mobile,  sur 
le  devant,  permettait  aux  dames  de  la  noblesse,  qui  n'as- 
sistaient jamais  aux  représentations  qu'en  loges,  de  se 
dissimuler  aux  regaids  du  parterre  ;  quant  aux  sépara- 
tions entre  les  loges,  elles  étaient  rudimentaires  et  ressem- 
blaient à  peu  près  à  des  bat-flancs  d'écurie.  Des  allées 
distinctes  contournaient  l'amphitliéâtre  et  donnaient  accès 
aux  loges  et  au  parquet  L'amphithéâtre  occupait  le  fond  ; 
il  était  en  gradins,  garnis  de  bancs,  et  répondait  ainsi  à 
nos  galeries  ou  aux  balcons  de  nos  théâtres.  Enfin  dans  le 
iond  de  la  salle,  au  plus  haut  de  l'amphithéâtre,  ou  plus 
exactement  derrière  lui,  il  y  avait  encore  trois  ou  quatre 
loges.  Derrière  celles-ci  s'ouvrait  l'entrée  de  la  salle  :  il 
fallait  y  établir  des  barrières  pour  contenir  la  foule  et 
empêcher  les  gens  d'entrer  sans  payer.  L'amphithéâtre 
était  parfois  divisé  en  deux,  de  manière  à  réserver  aux 
laquais  une  place  séparée  du  reste  des  spectateurs  (^). 


(1)  On  sait  que  les  documents  concernant  les  théâtres  provisoires  construits 
dans  les  jeux  de  paume  sont  assez  rares.  Nous  avons  retrouvé  aux  Archives 
cinq  contrats  datés  de  Kiol,  1G32.  1G02,  1678  et  1080  (jui  nous  ont  servi 
à  établir  une  descripliou  assez  niinulieuso  de  la  scène  érijîée  au  Greclit.  Au 
dernier  contrai  est  juintc  une  pièce  précieuse  dont  les  données  ont  permis  : 
-M.  Paul  Saintenoy,  rèmiuent  arciillecte,  détaldir  avec  nous  le  plan  ci-dessus 
qni  reconstitue  le  tln'àlrc  du  Jeu  de  Paume  du  Fossé-aux-Loups.  .Nous  ne  pou- 
vons songer  à  ]iul)licr  ici  toutes  ces  pièces  jusiificalives. 


270  H.    LIEBRECHT 

Dans  certains  cas  les  acteurs  stipulaient  que  la  scène 
devait  être  munie  des  trappes  nécessaires  à  la  repiésenta- 
tion  des  «pièces  à  machines»  comme  rOry>/iée de  Chai)otton, 
VAndromèdeou  la  Toysan  d'Or  de  Corneille.  Parfois  aussi, 
devant  la  scène,  de  plain-pied  avec  le  parquet  et  situé 
comme  l'orchestre  de  nos  théâtres,  il  y  avait  un  espace 
réservé  aux  acteurs,  sans  communication  avec  les  loges  ou 
le  parterre  et  pourvu  d'une  porte  qui  y  donnait  accès  des 
coulisses  :  c'est  ce  que  le  contrat  de  1652  nomme  (d'ante- 
théàtre»  (^). 

Il  est  certain,  comme  nous  eu  avons  donné  la  preuve, 
que  des  troupes  de  «comédiens  de  campagne»  sont  venues 
à  Bruxelles  dès  le  début  du  xvii'^'  siècle  ;  mais  c'est  à 
j)artir  de  1049  seulement  qu'il  est  possible  d'en  ])réciser  la 
composition  et  de  constater  leurs  séjours  réguliers.  En 
février  1649,  «  les  maistres  comédiens  de  la  Compagnie 
Hollandoise  estans  présentement  en  cette  ville  de 
Bruxelles,  à  leur  grant  regret,  ilz  ont  entendu  le  triste 
deuil  de  cette  court,  cause  pourquoy  les  remonstrants  ne 
peuvent  présentei-  leur  très  humble  service  pour  pouvoir 
présenter  quelques  nouvelles  pièces  de  leur  théâtre  »  (~). 
Aussi  sollicitent-ils  de  S.  A.  S.  un  passeport  pour  gagner 
l'Allemagne. 

Le  19  décembre  1650,  les  «  Commédiens  ayant  esté  en 
compaignie  pour  feu  son  Alteze  d'Orange  »  louent,  au 
maître  paumiei-  Adrien  Aubertin,  le  «  Tripau  »  ou  jeu  de 
paume  du  Grecht.  moyennant  tiei/.e  florins  par  jour.  Les 
signataires  du  bail,  pour  les  comédiens,  sont  Guérin  et 
Philandre.  Cette  même  troupe  alla  passer  la  saison  d'été 
à  Gand  ;  d'après  la  requête  adressée  aux  Magistrats  de  la 
Keure,  elle  comportait  vingt  sujets,  tant  acteurs  qu'ac- 
trices, sans  compter  les  domestiques  et  les  gagistes  qui 
les  accompagnaient  ('^j. 


(')  Ce  (|iii  cniitirmo  Bapst:  Essaisiir  l'Hislnlre  du  Thrntrc,  Paris  1893,  p.  173- 
(2)  Papiers  d'État  et  de  l'Audience,  Registre   lOiO,  folio  91.  Ne   serait-ce 
liuinl  la  troii[>('  du  (•(iniétlien  Kloridor  qui  était  en  Hollande  en  H)-i9  et  dont 
parle  «ionstantin  Huy^^liens  dans  une  lettre  à  (Corneille  (31  mai  lOiitj  '.' 
(■')  (If.  J'uosi'KK  (li.AKYS  :  Histoire  du   T/icYilre  à  (kirid,  II,  p.  l'.l-!20. 


COMKniKNS   nV.   CAMPAGNK  27)' 

Le  H  (IcH'einhre  l(i.")l.  la  tioupe  l'cnouvclle  son  bail  ù 
Bnixollcs,  à  douze  florins  seulement  par  joui*.  Cette  fois 
c'est  Germain  Clairin,  dit  Villabé,  qui  ase  fait  fort  pour 
ses  compagnons».  Quelques  jours  auparavant,  Toussaint 
Le  Riche,  sieur  de  Hautefeuille,  et  Nicolas  Dufranne,  au 
nom  des  comédiens,  avaient  passé  contrat  avec  François 
Drion,  maître  charpentier,  pour  l'érection  de  leur  scène. 
Mais  le  l'î  avril  H)oi2  ils  jugent  préférable  de  louer  au 
brasseur  Jean  Vander  Elst  son  théâtre  de  la  Montagne 
Sainte-Elisabeth  ;  ce  propriétaire  ne  semble  pas  avoir  eu 
un  caractère  très  conciliant,  et  il  ne  tarde  pas  à  se  prendre 
de  (luerelle  avec  ses  locataires,  qui  reviennent  au  jeu  de 
paume  du  Grecht  le  27  novembre  suivar.t  :  ce  joui--là.rean 
Philandre  et  Villabé  passent  une  nouvelle  convention 
avec  un  autre  charpentier.  Jamais  les  «  Comédiens  du 
Prince  d'Orange  )>  ne  semblent  avoir  été  aussi  bien  dans 
leurs  affaires,  car  ils  dépensent  825  florins  en  une  fois  pour 
la  construction  de  cette  scène.  Cependant  Jean  Vander 
Elst  perdit  le  procès  qu'il  avait  intenté  aux  comédiens  et 
il  fut  très  heureux  de  voir  ceux-ci  reprendre  son  théâtre  à 
partir  de  la  Saint-Jean  16o3. 

La  troupe  de  Philandre  était  encore  à  Bruxelles  en  I600  ; 
cette-année  là  elle  eut  l'honneur  insigne  de  jouer  devant 
Christine  de  Suède,  et  il  est  probable  qu'elle  participa  aux 
brillantes  représentations  données  en  février  I600  au 
Palais  de  Bruxelles,  en  présence  de  la  Reine(i).  La  troupe 
des  «  Comédiens  du  Prince  d'Orange  »  avait  l'habitude  de 
ces  représentations  au  Palais,  où  l'archiduc  Léopold- 
Guillaume,  grand  amateur  de  théâtre,  la  faisait  venir  trois 
fois  par  semaine  (2).  Mais  après  avoir  diverti  de  la  sorte 
Christine,  elle  prit  le  nom  de  «  Troupe  des  Comédiens  de  la 
Reyne  de  Suède  »,  sous  lequel  on  la  voit  passer  un  acte  le 
14  avril  I600  :  les  signataires  en  sont  Toussaint  Le  Riche, 
M"«  Anna  de  la  Chassée,  sa  compagne  (•'),  Jean  Philandre, 
Charles   Guérin   et   deux   autres   comédiens.     Et   si    l'on 


(')  Cf.  IIkmu  LiKimrcin  :  Les  Onfjines(lpl'0/)rra  <)  lini.relles  («Le  Klaniboau  », 
31  décembre  U):2I). 

(■-)  CI.  LoSANocité  par  Fal)er  :  llistnirc  du  Thrùtrc  /ramais  en  lielginue,  I.  .">9. 

(■*)  Le  uom  est  évidemiiieiil  mal  oriliograpliic  :  Toussaint  Le  Riche  avait 
épousé  Anne  Lacliappe. 


'21'2  H.    LIKBRKCHT 

s'étonne  de  la  présence  d'une  troupe  de  comédiens  français 
<3ans  la  capitale  des  Pays-Bas  es])agnols  en  pleine  guerre 
entre  la  France  et  l'Espagne,  on  pourra  y  voir  une  man- 
nœuvre  diplomatique  de  Mazarin  :  ((  Par  une  espèce  de  ga- 
lanterie, qui  cachait  peut-être  quelque  nouvelle  intrigue 
politique.  Mazarin,  malgré  la  guerre,  fit  i)artir  de  Paris 
une  troupe  de  comédiens  pour  divertii-  Christine  à 
Bruxelles  (i)^). 

La  dernière  trace  que  nous  ayons  de  son  séjour  à 
Bruxelles  est  datée  du  28  avril  i6o7  :  Philandre  y  donne 
procuration  à  Xocl  Yiot,  boucher  à  Paris  (^;.  Le  départ  de 
son  protecteur,  l'Archiduc-Gouverneur,  éloigna  sans  doute 
la  troupe  de  Bruxelles.  En  1057,  MM.  de  Villiers  virent 
rcîprésenter  à  Bruges  la  Mort  de  Pompée,  par  une  troupe 
qui  passait  pour  «avoir  été  à  feu  M.  le  Prince  d'Oi'ange))(^i. 
Puis  elle  prit  la  route  de  Hollande,  où  elle  jouait  à  La 
Haye  en  février  1658, 

On  sait  que  la  troupe  de  Philandre  est  une  des  plus 
fameuses  parmi  celles  qui  couraient  la  province  :  M.  Henri 
Chardon  nous  paraît  avoir  démontré  qu'elle  a  servi  de 
modèle  à  Scarron  pour  écrire  son  Koninn  Comique  et 
M.  Henry  Lyonnet  a  pu  dire  avec  vérité,  parlant  de 
Philandre  lui-même,  que  sa  «  biographie,  si  elle  pouvait 
jamais  être  reconstituée,  serait  bien  à  coup  sûr  une  des 
plus  intéressantes  pour  nous  faire  connaître  la  vie  des 
comédiens  de  campagne  au  xvii^  siècle  (■*)  ».  Parmi  les 
acteurs  principaux  de  sa  troupe,  dont  nous  n'avons  cité 
que  les  plus  importants,  remarquons  la  présence  de 
Germain  Clairin,  dit  Viilabé,  un  des  anciens  compagnons 
de  Molière,  un  des  signataires  du  contrat  du  'àO  juin  1643 
(qui  institua  l'Illustre  Théâtre),  et  dont  on  avait  pei'du  la 
trace  depuis  1645  (^),  puis  celle  de  Pierre  Marcoureau,  dit 


(ij  Les  Anlénors  Modernes,  Paris,  180(i,  .'5  vol.,  I,  I  il . 

{-)  Cf.  IIeniu  (".haudon,  Scarron  inconnu,  11,  H'H.  (\u'\  iii(Ii(iiu'  par  crn-nr 
28  mai  1(>n. 

(')  Cfl  KiG.  Dksimus  :  Le  Thi'ùlre  Français  sous  Louis  MV,  p.  !Çi. 

(■*)  Cf.  H.  Lyonnet  :  Dictionnaire  des  Omirdiens,  I,  "Jl  col.  2  ;  Jal  :  Diction- 
naire critit/ue  ;  H.  Ciiakdon  :  La  Troupe  tht  -Honian  Comiiiue-  dévoilée  ;  du 
iiiriiio  ;  Scarron  inconnu. 

(')  11  doit  avoir  qiiill»;  Philandre  vers  UmI  iioiir  pn-iidrc  la  direclioii  d'uni' 
Injupc  (Cf.  CiiAiMT/.KAi   :  Théâtre  Français,  édiUou  Monval.  ]>.  181). 


COMÉDIENS   DE   CAMPAGNE  273 

Beaulieu.  le  père  de  Brécourt,  et  celle  encore  de  Charles 
Guérin,  le  père  d'Isaac  Fi-an(jois  Guérin  d'Estriclié,  lequel 
devait  épouser,  en  l(i77,  Armande  Béjart,  la  veuve  de 
Molière, 


Ku  !()")()  nous  n'avons  pas  eu  à  signaler  la  présence  à 
Bruxelles  de  la  troupe  de  Pliilandre.  Par  contre  une  autre 
«bande»  non  moins  célèbre  y  fait  alors  sa  première  appa- 
rition ;  c'est  celle  dite  des  «  Comédiens  de  M."^  d'Orléans». 
On  sait  que  la  Duchesse  de  Montpensier,  tante  de 
Louis  XIV,  exilée  après  la  Fronde  au  château  de  Saint- 
Fargeau,  y  îivait  lait  venir  une  troupe  de  «  comédiens  de 
campagne» qu'elle  avait  vue  jouer  à  Orléanset  qu'elle  avait 
ensuite  attachée  à  sa  personne  (^).  Cette  troupe  entreprit 
à  diverses  reprises  des  tournées  dans  le  Xord.  Au  début 
de  I606  elle  séjourna,  cinq  semaines  durant,  dans  le  duché 
de  Luxembourg.  Vers  la  mi-juillet,  les  comédiens  arri- 
vèrent à  Namur,  munis  d'un  passeport  émanant  du  Comte 
de  Saint-Amour.  La  pièce  n'était,  paraît  il,  pas  régulière, 
et  les  comédiens  furent  incarcérés  par  ordre  du  Conseil 
Provincial.  Heureusement  pour  eux,  le  jeune  duc 
d'Enghien,  fils  du  prince  de  Condé,  intervint  en  leur 
faveur.  On  demanda  des  ordres  au  Gouverneur  Général, 
Don  Juan  d'Autriche,  qui  les  fit  relâcher.  Peu  après  il 
leur  délivra  même  un  sauf-conduit  qui  leur  permettait 
d'  <c  aller,  venir  et  séjourner  dans  les  villes  des  pa^'s 
de  par  deçà  ».  Ce  sauf-conduit  leur  fut  renouvelé,  à  la 
demande  du  prince  de  Condé,  le  2  janvier  liiol,  preuve 
qu'ils  séjournèrent  aux  Pays-Bas  durant  près  de  deux 
ans. 

Les  (c  Comédiens  de  M""  d'Orléans  »  y  revinrent  en  IGliO  : 
le  26  juin  ils  sont  à  Gand  et  y  jouent  plusieurs  mois 
durant,  de  façon  plus  ou  moins  régulière  (-).  Rentrés  à 
Paris,  où  ils  sont  en  janvier  1601,  ils  en  repartent  bientôt  ; 
à  la  mi-février  ils  sont  installés  à  Bruxelles,  et  leurs  repré- 
sentations sont  un  des  divertissements  les  plus  fréquentés 


(')  Mnnoires  de  Ut  Diiclirs.ie  de  Monlpeiisicr,  II,  :>i!>. 
(■-)  P.  Ci.AVEs,  np.  cit.,  II.  -2'2-2ri. 


18 


•274  H.     LU".  BRECHT 

du  Carnaval  (').  Ils  ont  loué  durant  leur  séjour  le  Théâtre 
de  la  Montagne  Sainte-Elisabetli.  mais  il  leur  advient  de 
le  quitter,  soit  pour  aller  en  pi-ovince,  —  notamment  à 
(Jand,  où  ils  sont  le  7  août  1661  —  soit  pour  pousser 
jus(|u'en  Hollande,  —  ils  jouent  à  La  Haye  en  mai  1662. 
Dans  l'intervalle,  revenus  à  l>iu\elles,  qui  semble  avoir 
été  le  centre  de  leurs  opérations,  ils  se  prennent  de  querelle 
avec  leur  propriétaire,  et  transportent  leurs  Lardes,  décors 
et  bagages  au  jeu  de  paume  du  Greclit.  Le  maître  char- 
pentier Etienne  Mees  devra  leur  construire  une  salle  et 
une  scène,  laquelle  sera  à  trois  étages,  et  devra  comporter 
la  machinerie  «i^onr  juer  la  pièce  de  la  machien  de  la 
7'ov.so/j  f/' Or  et  aultres».  C'est  en  effet  le  i-épertoire  des 
pièces  à  machines,  tel  qu'on  l'interprétait  au  Théâtre  du 
Marais,  qui  fit  le  succès  des  <(  Comédiens  de  M"*"  d'Or- 
léans )).  D'autres  actes  parlent  de  V Andromède  de  Cor- 
neille et  de  la  Descente  d'Orphée  aux  Enfers,  qui  ne  peut 
être  que  la  pièce  de  Cliappoiton.  reprise  au  Marais,  en 
cette  même  année  1662,  avec  les  décors  de  Denys  Buffequin, 
pour  faire  concurrence  au  succès  de  YErcolc  A  manie  de 
Cavalli. 

La  troupe  quitte  Bruxelles  en  avril  1662  :  elle  passe 
contrat,  le  l**'  avril,  avec  le  maître  batelier  Pierre  Wauters 
pour  le  transport  jusqu'à  La  Haye  de  toute  la  troupe,  y 
compris  les  valets  et  servantes,  moyennant  la  somme  de 
loO  floi'ins. 

Les  nombreuses  pièces  notariées  signées  par  la  troupe, 
à  Bruxelles  et  dans  d'autres  villes  des  Pays-Bas,  j^ermet- 
tent  d'en  détailler  la  composition  :  elle  comprend  des 
acteurs  de  marque;  elle  est  particulièrement  nombreuse, 
ce  qui  ne  l'empêche  pas  de  s'adjoindre  encore  de  nouveaux 
sujets.  Les  deux  chefs  sont  Xicolas  Dorimond,  l'acteur- 
auteur,  et  ce  Philippe  Millot.  d'abord  graveur,  ensuite 
comédien  qui  fut  un  moment  le  camarade  de  Molière,  dans 
la  troupe  de  l'Illustre  Théâtre,  vers  1643.  Mais  il  y  a  encore 
Nicolas  Biet  de  Beauchamps,  avec  sa  femme  et  ses  trois 
enfants,  futurs  comédiens  également  ;  Joseph  Du  Landas, 
sieur  du    Bignoii,    dit    Du])in,    petit    gentilhomme    ruiné 


Cj  lieliiliims  rrrilnhlrs  du  lil  IV'vricr  Kitil  ol  du  .")  iii;irs  suivaiK. 


COMEDIENS   DE   CAMI'ACiNK  2i:j 

devenu  Jieteur  par  nécessité,  et  qui  épousa  en  KJGo  la  l'ille 
de  Montfleurv  ;  Louis  Dorimond  et  A.braham  Mittalat, 
dit  La  Source,  ancien  chel'  de  troupe  lui-niènie.  et  qui  ne 
tardera  pas  à  le  redevenir  (V). 

Ce  pendant  qu'ils  sont  à  La  Haye  (^j,  arrive  à  Bruxelles, 
en  mai  1662,  une  autre  troupe,  qui  s'intitule  tantôt  ((Comé- 
diens du  Roy  d'Angleterre»,  tantôt  ((Comédiens  du  Séré- 
nissime  Prince  de  Liège»  Il  3"  a  là  Rosidor,  également 
acteur  et  jjoète.  avec  sa  femme  Charlotte  Mesliei',  Claude 
Jannequin,  dit  Rochefort,  Denys  Lavoy,  qui  semble  en 
être  le  chef,  Jean  de  Surlis.  —  dont  la  scx'ur  Catherine  a  été 
également  de  1'  ((  Illustre  Théâtre  »  et  dont  la  sœur  Etien- 
nette  épousera  Brécourt,  -  Jean  Pallet  dit  Hellefleur,  ua 
ti-anst'uge  de  lu  troupe  des  ((  Comédiens  de  M"'^  d'Orléans  », 
qu'il  ne  tardera  pas  d'ailleurs  à  rejoindre  par  raison  senti- 
mentale poui'  épouser  .leanne-Françoise  de  I^an  (3).  Les 
«Comédiens  du  Sérénissime  Prince  de  Liège»  ne  sont  guère 
en  fonds  quand  ils  s'installent  au  jeu  de  paume  du  Greclit  ; 
ils  n'y  resteront  pas  longtemps  d'ailleurs,  car  ils  redoutent 
la  concurrence  de  la  ti-oupe  rivale,  plus  nombreuse  et  plus 
réputée.  Il  semble  pourtant  que  les  deux  a  bandes  »  se 
soient  rencontrées  à  Bruxelles  et  que  la  plus  riche  ait 
porté  financièrement  secours  à  l'autre  :  un  contrat  de  prêt 
en  fait  foi,  ce  qui  montrerait  que  cette  rivalité  entre  les 
troupes  de  campagne,  dont  parle  Cliappuzeau,  n'allait  pas 
sans  exceptions. 

Le  7  août  16(32,  les  ((  Comédiens  de  M"''  d'Orléans  » 
reviennent  à  Bruxelles  et  louent  le  Théâtre  de  la  Montagne 
Sainte-Elisabeth,  du  quatorzième  jour  après  la  Toussaint 


(1)  Voir  iiotainiiicnl  sur  celte  troupe  i-i-lébre,  Ciiakixin  :  Troupe  du  u  Ihniian 
Coniiijuc  y>  p.  lii;  Micmku  :  l^e  T/icàlreen  Savoie,  p.  1  i  ;  IJuorciioi  i>  :  l.cs  Ori- 
gines (lit  Théâtre  11  Lyon,  passi/ii  ;  K.  Tk.m  tmann  ;  Friinziisise/te  Sr/iaiispieler 
nm  lidi/risrlien  Ho/er  (■■.Talii'l)iK'li  fi'ii-.Miinclieiierdoscliiclile-,  liSH8);K.  Roisskm  : 
Documents  pour  I  Histoire  du  Théâtre  franrais  en  lieltjii/uc  «Revue  helj^e  d'His- 
toire», T. I.  19i-i  ;  P.  Clakys  op.  cit.  passi)n.  —  Fahik  :  Histoire  du  Thééttre 
franrais  en  Belgiiiue,  surtout  les  pièces  publiées  eu  addenda,  dans  les  docu- 
ments du  tome  IV. 

(-)  Intermédiaire  des  Clierriieurs  et  des  Curieux,  Hîi  juillet  188i.  col.  134. 

( ')  Philip|)e  Millol  avait  épousé  Marguerite  Prunier,  veuve  de  Hugues  de  Lan, 
jadis  membre  de  la  troupe.  Le  mariage  de  Hellel'leuiet  de  .Icanne-Francoisedo 
Lan  fut  célébré  à  lîruxelles  le  3  janvier  Itlli."). 


^76  H.    LIEBRECHT 

jusqu'au  trentième  jour  après   Pâques    1663,  moyennant 
220  patacons,   dont   100   payables  anticipativement  et  le 
solde  quatorze  jours  après  Noël.  Nous  ne  connaissons  pas 
Je  répertoire  que  la  troupe  interpréta  :  tout  au  plus  est-il 
permis  de  croire  qu'elle  prêta  son  concours  aux  fêtes  don- 
nées en  avril  1(563  par  le  Marquis  de  Caracène,  Gouverneur 
Général    des    Pays-Bas.    pour    l'anniversaire     de   Leurs 
Majestés.  Elle  repartit  pour  la  Haye  à  la  fin  de  l'année, _ 
songea  à  passer  en  Angleterre,  où  elle  envoya  Jean  Pallet 
dit  Bellefleur  pour  préparer  une  tournée  qui  n'eut  pas  lieu, 
et  revint  finalement  à  Bruxelles  en  janvier  1604.  Mais  ce 
fut  seulement  pour  y  établir  leur  quaitier  général  et  rayon- 
ner de  là  dans  les  villes  principales  des  Paj-s-Bas  :  en  juin 
1664  ils  sont  à  Anvers  (*)  et  en  août  à  Gand,  où  ils  inau- 
gurent, le  20,  la  nouvelle  salle  de  la  Confrérie  des  Archers 
de  Saint-Sébastien  (~).  L'iiiver  1664-16(io  ils  le  passent  dans 
la  capitale  et,  en   mars   166o,  ils  mettent  ordre  à    leurs 
affaires,   la  troupe  réglant  d'anciennes  sommes  d'argent 
■dues  à  l'un  de  ses  membres,  Adrien  de  Marsennes,  sieur 
de  Belleville,  qui  par  ailleurs  prête  46  florins  à  Abraham 
Mitallat,  dit  La  Source.  Durant  ce  même  mois  de  mars  1665, 
il    y    a    lieu   de    signaler    à    Bruxelles  la    présence    de 
Ouillaume  Marcoureau  de  Brécourt  qui,  le  27  mars,  donne 
procuration  générale  à  sa  femme  Etiennette  de  Surlis  pour 
la  gestion  de  leurs  affaires.  Sans  doute  fut-il  alors  en  rap- 
port avec  les  «  Comédiens  de  M"=  d'Orléans  ». 

En  avril  166o,  ceux-ci  ont  repris  la  route  de  laHollande(''), 
•et  on  les  signale  encore  à  La  Haye.  Enfin,  pour  la  dernière 
fois,  ils  reparaissent  en  septembre  1666  {*)  à  Bruxelles 
et  font  louer  par  un  des  leurs,  .Joseph  Dupin,  l'habituel 
Théâtre  de  la  Montagne  Sainte-Elisabeth,  qui  leur  est 
concédé  juscju'à  Pâques  1667.  C'est  malheureusement  le 
seul  détail  que  nous  ayons  relevé  au  sujet  de  ce  dernier 
séjour  des  «  Comédiens  de  M"«  d'Orléans  »,  qui  reprirent 
la  route  de  la  France;   ils  jouent  à  Dijon  en  mai   1667. 


(';  Le  3  et  le  m  juin,  ils  y  passtMit  plusieurs  actes  iiotnriés. 
C^)  P.  Clavks,  11,  28. 

(•')  Inlenncd'aire  des  Chercheurs  et  des  Curieux,  loc.  cil. 
{*)   Dès  le  mois  de  mai  un  de  leurs  envoyés,  Philippe  La  Jeunesse,  est  à 
Bruxelles  en  vue  de  préparer  ce  reiour. 


COMÉDIENS   DE   CAMPAGNE  277 

Ultime  étape  de  PIiili|)pe  Millot  et  de  ses  (•ompag'nons,  qui 
vont  se  fixer  à  Muiiicli  où  ils  joueront  de  1()07  à  1G71  et 
deviendront  la  «  Troupe  franroise  de  l'Electeur  de  Ba- 
vière». Siméon  Chappuzeau  dira  d'elle  qu'elle  «n'est  i)as 
forte  en  nombre  de  personnes,  mais  elle  est  bien  concertée 
et  l'ayant  vue  à  Munich  en  deux  voyages  que  j'y  ny  faits^ 
je  reconnus  que  la  Cour  en  estoit  fort  satisfaite  (^)  )>. 


Nous  ne  pouvons  songer,  dans  cette  esquisse,  à  suivre 
ainsi  en  détail  toutes  les  troupes  de  «comédiens  de  cam- 
pagne» dont  nous  avons  relevé  le  passage  à  Bruxelles  au 
cours  de  la  seconde  moite  du  xvii*  siècle.  Leurs  séjours 
successifs,  et  parfois  simultanés,  forme  une  suite  ininter- 
rompue, et  on  peut  dire  que  jamais  la  capitale  des  Paj-s- 
Bas  espagnols  ne  s'est  trouvée  sans  une  troupe  de  comé- 
diens français.  Les  meilleures  «bandes»  y  ont  fait  des 
apparitions,  et  plusieurs  d'entre  elles  y  sont  revenues,  soit 
durant  plusieui-s  années,  soit  à  intervalles  irréguliers. 

Abraham  Mittalat  de  La  Source  n'avait  pas  suivi  ses 
compagnons  qui  se  rendaient  à  Munich.  Il  se  mit  à  la  tête 
d'une  nouvelle  troupe  qui  s'intitula  «Troupe  des  Comédiens 
de  la  Reine  de  France»,  et  dans  laquelle  on  rencontre 
Abraham  Mittalat,  Jolimont,  tous  deux  transfuges  de  la 
troupe  de  Millot,  Guérin,  de  Raynez,  Denys  Claircelier, 
sieur  de  Xanteuil,  acteur-auteur  que  nous  retrouverons 
comme  chef  de  troupe i-  ;  Jean  Thomas,  sieur  de  la  Mette- 
rie,  Bernarde  Boisvert,  sa  femme,  et  Demoiselle  Gillette 
Loiseau. 

Le  lo  mars  1669,  avant  de  se  mettre  en  route  i)Our  leur 
tournée  d'été  (•'),  ils  renouvellent  leui-  contrat  d'a^^sociation 
l)oui"  une  année,  à  peine  de  mille  livres  de  dommage  pour 
les  défaillants.  L'acte  stipule  les  attributions  des  i-ôles 
dans  le  répertoire.  De  Nanteuil  jouant  les  amoureux, 
Bernarde  Boisvei-t  les  amoureuses  et  I^a  Source  se  réser- 


(M  S.  Chai'PIZKai    :  T/iei'ilrc  Frdmois.  l'd.  M(iii\;il,  |i.   \'-i~ . 

(')  Sur  l'actenr-autt'iir  De  Nanteuil  voir  :  La  Timipr  de  Suntrtiil  à  Anr/oK- 
li'mc  tm  1()8iJ  (••  Molic'risle  «.  1888.  ."iTi,  Hk  \i champs:  li('< /irrc/ies  sur  les  Tlicùtres 
(le  Viamr,  2.'i7  ;  Dk  M(»i  iiv  :  Alurfjr  I,  /lassini  ,-  1)k  I.kuis  :  Dlilùiri/iniri'. 

( ')  En  juin  1()69,  ils  jouent  à  Lille. 


278  H.    LIEBRECHT 

vant  les  pères.  De  N'anteuil  et  Beruardc  Boisvert  «iront  à 
Paris  de  la  part  des  dits  associez  pour  choisir  les  person- 
nes qui  leur  seront  nécessaires  »,  Ce  sont  ces  deux  manda- 
taires (^ui  engagèrent  sans  doute  Jolimont,  Raynez  et 
Gurrin,  lesquels  figurent  dans  les  actes  ultérieurs.  Tandis 
qu'ils  étaient  à  Paris,  les  autres  agréèrent  le  sieur  Jean 
Gillaret,  sieur  de  Koncourt,  sous  la  condition  «  qu'il  se 
pourra  séparer  de  leur  association  quand  bon  lui  semblerat 
sans  estre  tenu  en  aucune  amende  moyennantqu'il  laisserat 
au  prouffit  des  susdits  comparants  ses  deux  parts  de  déco- 
rations du  Théâtre  ». 

La  troupe  joua  comme  ses  devancières  à  la  Montagne 
Sainte-Elisabeth,  en  1669,  puis  Mittalat  entraîna  ses  com- 
pagnons jusqu'à  Lalïaye,  se  souvenant  des  succès  anciens. 
Mais  il  semble  que  les  «  Comédiens  de  la  Reine  de  France  » 
ne  reçurent  pas  le  même  accueil,  et  qu'ils  se  séparèrent 
peu  après.  On  retrouve,  à  quelque  temps  de  là,  les  éléments 
dispersés  de  la  troupe  dans  d'autres  troupes  voyageant  en 
Allemagne. 

Dès  le  mois  de  juillet  1670  paraît  une  «compagnie» 
nouvelle, composée  de  Jacques Pomier,  sieur  de  Fontenelle, 
Pierre  Benar,  sieur  de  Bonoeil.  Jean- Baptiste  Pohu,  sieur 
de  Prél'leury,  Jean  Cliantemelle,  sieur  du  Boccage,  Laurent 
de  Mangot,  tous  accompagnés  de  leur  femme,  et  Guillaume 
Savoyen,  sieur  de  Liancourt.  A  raison  de  trois  patacons 
par  jour,  la  troupe  s'engage  à  représenter  de  la  Saint- 
Remy  au  Carême  suivant ,  sauf  à  subroger  une  autre  troupe 
dans  ses  droits  et  devoirs  avec  l'agrément  du  propriétaire  ; 
elle  ne  tarde  pas  à  user  de  cette  clause  et,  le  7  octobre,  elle 
cède  la  place  à  Jean  Simonin,  dit  Chevalier,  et  à  ses  com- 
pagnons, qui  jouent  durant  tout  l'hiver  à  la  Montagne 
Sainte-Elisabeth . 

Le  11  juillet  1671,  Catherine  Bidou,  en  (jualité  d'envoA'ée 
-de  la  <(  Troupe  de  Monsieur  le  Dolphin  de  France  »,  prend 
à  bail  le  théâtre  à  dater  de  la  Toussaint  ])rochaine.  Cette 
troupe  est  celle  des  ((  comédiens-enfants  »d'Kdme  Raisin  (M, 


(')  On  t'oiinail,  |i;ii'  (Iriiiijircsl  iKilamiiuMit,  l'Iiisldirc  de  la  U'oiii)e  des  roim''- 
dieiis-cnfants  (rKdinc  Uaisiii  et  celle  de  It'piiieUc  iiia^Miiiic  (lue  cet  aiu'ieii 
organiste  fil  jouer  devant  la   Heine.  Plus  tard  il  prcsenla  sur  une  |>elite  scène 


COMÉDIENS   DK   CAMPAGNE  279 

■dbveime  depuis  la  ((Troupe  du  Dauphin  de  France  ».  Le 
9  mars  1072,  les  acteurs  (pii  la  composent  renouvellent  leur 
contrat  d'association  «pour  faiie  la  comédie  ensemble  à 
commencer  d'aujourd'huy  jusqu'au  jour  des  Cendres  KH;^», 
à  condition  de  partager  tous  les  profits  et  sous  dédit  de 
50  pistolles  d'Espagne  pour  qui  sortira  de  la  troupe.  IjCs 
signataires  sont  Marguerite  Siret.  veuve  du  sieur  Raisin, 
((  se  faisant  fort  poui'  ses  enfants  Jacques,  .Jean,  Cato  et 
Babet  Raisin»  ;  Jean  de  V^illiers  ;  Charles  Savoien,  sieur 
de  Clermont  ;  Guillaume  Savoien,  sieur  de  Liancourt, 
Louis  Mordan  et  la  i)"*^  J.  Siret  C'est  vraisemblablement 
cette  troupe  qui  était  encore  à  Bruxelles  en  novembre  1672, 
en  même  temps  qu'une  autre,  puisque  ]ei^  Relations  ]'crita- 
blea  annoncent  que  le  dimanche  6  et  le  lundi  7,  ((une  diffé- 
rente troupe  de  comédiens  fit  tout  son  possible  de  bien 
satisfaire  la  compagnie  ». 

Le  même  cas  se  produisit  trois  ans  après  :  tandis  que  les 
comédiens  de  «  S.  A.  Monsieur  le  Ducq  d'Hannovre  »,  con- 
duits par  Scipion  Clavel,  jouent  sur  la  scène  habituelle,  les 
«  Comédiens  de  la  Reine  de  France»,  dirigés  par  Denys  de 
Nanteuil,  font  ériger  au  jeu  de  paume  du  Grecht  une  salle 
et  un  théâtre  pi'ovisoires.  Les  deux  troupes  paraissent 
d'ailleurs  avoir  vécu  en  bonne  intelligence  :  elles  se  prêtent 
leurs  meilleurs  sujets,  et  font  des  tournées  dans  les  pro- 
vinces tantôt  simultanément,  tantôt  l'une  après  l'autre. 

La  première  des  deux  troupes  prétend  cependant  avoir 
le  privilège  exclusif  de  jouer  aux  Pays-Bas  (^).  Elle  est 
importante,  par  le  nombre  et  la  qualité  de  ses  membres  : 
Germain  Le  Riche,  Scipion  Clavel,  Romainville,  Jacques 
Valliot,  Isabelle  Yalliot,  La  Chevalier,  et,  à  partii-  de  1680, 
Jean  Barrié,  dit  Fonpré,  (jui  devait  revenir  à  Bruxelles, 
à  différentes  reprises,  et  être  un  des  premiers  <(  entrepre- 
neurs des  spectacles  »  au  Grand  Théâtre  sur  la  Monnoie. 


la  troupe  lilliputienne  composée  de  ses  quatre  enfants  et  du  jeune  Michel 
Boyron.  le  futur  Baron.  Le  plus  jeune  des  enfants,  Jean-Baptiste  Baisin, jouait 
si  bien  quil  fut  surnomme  par  le  public  «le  Petit  Molière».  Il  en  ^'anla  lliabi- 
tude  (le  signer  du  nom  de  Molière,  allant  jusiiuà  imilcr  la  graiiliie  de  son 
illustre  homonyme  1 

(')  Voir  sa  requête  au  (irand  Bailli  et  aux  Kchevins  de  la  Keure  lors  de  son 
passage  à  dand  en  juin  lOTi).  (Cft  P.  Ciayks,  »p.  cit..  Il,  33.) 


280  H.    LIF.BHECHT 

Entrée  en  conflit  avec  le  propriétaire  du  théâtre  de  la 
Montagne  Sainte-Elisabeth,  elle  loue  à  son  tour,  le  14 
novembre  1680,  le  jeu  de  paume  du  Grecht  devenu  libre  : 
c'est  un  nouveau  venu,  Pierre  Chasteauneuf  ('),  qui  signe 
le  bail  pour  lui  et  ses  associés.  Une  représentation  de  la 
Toyson  d'Or, de  Pierre  Corneille,  donnée  par  la  troupe  à  la 
fin  d'octobre  1680  devant  S.  A.  le  Prince  Alexandre 
Farnèse,  lui  valut  l'iionneur  de  pouvoir  prendre  le  titre  de 
«Comédiens  de  S.  A.  le  Prince  de  Parme»,  bien  que  le 
patronage  du  duc  d'Hanovre  l'eût  déjà  rendue  célèbre,, 
depuis  tantôt  dix  ans  qu'elle  était  à  ses  gages  (-). 

L'âge  d'or  des  «comédiens  de  campagne»  touche  à  sa  fin. 
En  janvier  1682  Bruxelles  voit  s'installer  le  premier 
théâtre  d'opéra  et  la  première  troupe  à  demeure.  C'est 
l'Opéra  du  Quai-au-Foin,  qui  ne  disparaîtra  définitivement 
en  1695,  que  pour  céder  la  place  au  Grand  Théâtre.  La 
venue  des  «comédiens  de  campagne»  est  donc  désormais 
intermittente  et  il  faudra  le  faste  de  Maximilien-Emmanuel 
de  Bavière  et  son  goût  de  la  comédie  pour  qu'une  troupe 
soit  encore  attachée  à  la  personne  du  Gouverneur  Général 
et  payée  par  lui.  Le  chariot  de  Thespis  aura  bientôt  paru 
pour  la  dernière  fois  au  jeu  de  paume  du  Grecht  et  à  la 
Montagne  Sainte-Elisabeth. 

En  février  1683,  voici  une  troupe  qui  se  dit  à  Monsei- 
gneur le  Prince  d'Orange.  Elle  est  composée  presque  entiè- 
rement d'acteurs  que  nous  avons  déjà  rencontrés  :  Germain 
Le  Riche,  Charles  de  La  Haye  dit  Romainville,  Jean  de 
Surlis,  De  Fonpré,  Chateauverd,  Denys  Lano3'^er  et 
Richemont.  Son  chef  est  Barthélémy  Gourlin,  sieur  de 
Roselis,  qui  allait  entrer  trois  ans  plus  tard  à  la  Comédie 
Française,  où  il  remplaça  Lathuilerie  (*). 

En  1687  reparaît  la  troupe  qui  est  venue  ici  dix  ans 
auparavant  ;  on  y  retrouve,  outre  son  chef  Jean  Gillaret 


(^)  Pierre  Pâtissier,  dilCiiasteauiieiif,  est  sans  doute  cet  acteur-coincdien 
qui  publia  eu  1(503  La  Feinte  Mort  de  Pancrace  et  qui  fil  partie  eu  1053  de  la 
troupe  de  Molière.  Il  avait  épousé  la  fille  de  Jean  Chantrelledit  Duboccage,  et 
de  Madeleine  Biet. 

(-')  Cf.  SiMÉON  CiiAPi'A/.KAr  :  L'Allemagne  protestante,  p.  348. 

(•')  La  troupe  se  dispersa  à  Rouen  en  1080-1087. 


COMÉDIENS  DE  CAMPAGNE  281 

de  Concourt,  quelques  illustrations  comme  ce  même 
Roselis  et  Pierre  Trochon,  dit  Beaubour,  autre  futur 
sociétaire  du  Théâtre  Françjais. 

Qu'importe  désormais  qu'en  1694  arrive,  dans  les  baga- 
ges de  Maximilien-Kmmanuel,  la  troupe  dirigée  par  .Fcan 
de  Marcelle,  et  qui  joue  sous  le  nom  de  l'Electeur  de 
Bavière;  qu'en  1099  passe  la  troupe  dite  «de  Rosidor»;  que 
peu  après  s'installe  une  nouvelle  troupe  réunie  pour  les 
plaisirs  du  Prince  et  qu'il  emporte  à  sa  suite  tantôt  à 
Munich,  tantôt  à  Bruxelles,  quand  ce  n'est  point  à  Mons 
ou  à  Namur  durant  son  exil  !  Le  Roman  Comique  est  bien 
fini  :  on  ne  verra  plus  paraître  à  la  Toussaint  (da  charrette 
attelée  de  (juatre  bœufs  fort  maigres,  et  pleine  de  coffres, 
de  malles  et  de  gros  paquets  de  toiles  peintes,  qui  faisaient 
comme  une  pyramide,  au  haut  de  laquelle  paraissait  une 
demoiselle  habillée  moitié  ville,  moitié  campagne»,  que 
nous  déciit  Scarron  à  son  arrivée  au  Mans  et  qui  sans 
doute  fit  plus  d'une  fois  des  entrées  pittoresques  dans  le 
Bruxelles  de  1650. 

Le  théâtre  est  désormais  organisé  officiellement  dans  la 
capitale  des  Pays-Bas  espagnols.  Les  troupes  de  passage 
ne  pourraient  plus  y  représenter,  car  un  octroi  exclusif 
protège  les  ((Maîtres  de  l'Opéra».  C'est  un  autre  chapitre 
de  l'histoire  théâtrale  de  Bruxelles  qui  commence. 

Henri  Liebreciit. 


Les  Chaumont  germaniques 

NOTK  I)K  TOPONVMIK. 


Dans  sa  Frontière  Iinf>-uisti(jii('  en  Bel}>-i(jue  ('),  où  il 
ïi  oiixert  tant  d'horizons  nouveaux  sur  la  toponymie  do 
notre  pays,  le  regretté  Kurth  mentionne  Claircfonliunc  et 
BonncDoic  dans  le  Luxembourg,  Colinont  et  Riinckelcn 
dans  le  Limbourg,  Lovcnjoul  dans  le  Brabant,  comme 
autant  de  «  noms  à  caractère  foncièrement  roman  qui  se 
rencontrent  dans  nos  régions  germaniques.  Ces  noms,  qui 
ne  sont  pas  les  seuls  sans  doute,  doivent  leur  origine  à  des 
fondations  monastiques  qui  y  ont  apporté  l'usage  du  fran- 
çais ou  tout  au  moins  du  latin  ;  ils  sont  nés  en  plein  moyen 
âge,  Pt  ils  ne  doivent  pas  rentrer  dans  la  catégorie  des 
vocables  de  formation  romaine  ». 

Cette  opinion  de  l'illustre  historien  est  certainement 
exacte  pour  Clairefontaine  et  pour  Bonnevoie,  mais  est- 
elle  admissible  pour  les  autres  appellations? 

Sans  rechercher  ce  ({u'il  peut  en  être  de  Runckelen  et  de 
Lovenjoul,  je  voudrais,  dans  ces  quelques  pages,  examiner 
le  cas  de  C'olmont  et  de  ses  congénères,  les  Calmunt  plus 
ou  moins  dénaturés  ([ue  nous  rencontrons  assez  noml)reu\ 
en  pays  de  langue  germanique,  dans  le  Limbourg  hollan- 
dais, dans  l'Eii'el,  dans  la  région  l'hénaue,  dans  le  bassin 
de  la  Moselle  et,  plus  spécialement,  dans  le  Luxembourg. 

Chaumont  —  (hilniis  mons.   la  montagne  dénudée  (-)  — 


(1)  ToiiH'  1,  I{iiixi>lles.  18i)t).  i>.  ri2;i. 

(•)  Kn  France  on  c;ite,  pour  quelques  ("hannuml,  la  fornic  ancienne  Culidus 
mon!',  <(  montaiïne  eliaude  »,  exposée  au  niitli,  mais  pour  notre   pays  et  h-s 
ré^inns  envisagées  dans  eel  article,  je  n'ai  jamais  rencontré,  jiour  ma  part, 
ue  Ciihiis  iiiori.s. 


2^4  J.    VANNÉRUS 

est,  en  effet,  un  nom  très  intéressant;  d'abord  à  raison  d& 
sa  fréquence  extrême;  ensuite,  parce  (|ue  dans  les  paj'^s  de 
langue  romane,  où  on  l'a  pour  ainsi  dire  exclusivement 
signalé  jusqu'à  présent,  son  origine  ne  laisse  pas  d'être 
souvent  très  douteuse.  C'est  ainsi,  par  exemple,  qu'étu- 
diant les  noms  de  communes  de  la  Hauto-Marne  (*),  Lon- 
gnon  rangeait  ])rudemment  les  deux  Cluiumont  de  ce 
département,  Cliaumont-la-Ville  et  Cliaumont-en-Bassi- 
gny,  parmi  les  «  noms  d'origine  romaine  ou  romane  »,  en 
expliquant  comme  suit  la  création  de  cette  catégorie  :  «  le 
latin  populaire  étant  l'origine  de  notre  langue  nationale,  il 
est  souvent  fort  difficile  de  distinguer  entre  les  noms  de 
lieux  français  qui,  d'origine  latine,  remontent  à  l'époque 
romaine,  et  ceux  qui,  d'origine  romane,  sont  postérieurs  à 
cette  période  »  ;  il  a  donc  «  classé  en  une  série  uni(iue  les 
noms  de  commune  formés  en  tout  ou  en  partie  de  mots 
latins  qui,  sous  une  forme  romane,  ont  passé  dans  l'idiome 
de  nos  ancêtres  du  moyen  âge  ». 

Dès  lors,  si  nous  rencontrons  des  Cliaumont  dans  des 
régions  où  l'on  parle  actuellement  une  langue  germanique, 
les  circonstances  dans  lesquelles  ils  apparaissent  ai)porte- 
rout  sans  doute  quehpies  pi'écisions  destinées  à  jeter  de  la 
clarté  dans  cette?  obscure  question  ('-).  Reprenons  donc  le 
problème,  déjà  touché  par  des  auteurs  allemands  (•*),   en 


(*)  E.  I.ECi.KKC,  Orif/ine  des  nn)iis  de  coiiniu/fics  de  la  Ihtii/e-Monie.  iM'.sumc 
des  conférences  données  à  l'Flcolc  des  Hautes  Kliitics  en  Sorlxiiini'.  [cii' 
M.  A.  Longnon.  I.îingres.  1908.  p.  ^2-2. 

(-)  Evidemment,  si  nous  n'avions  à  envisager  (|ne  le  premier  élément  ca/-, 
les  Calmnnt  germani(jues  ne  poiirraienl  nous  êlre  d'aucun  secours  pour 
éclaircir  la  (piestion,  puisijue  le  llaniand  Kaal  et  l'allemand  A'«/(/  sont  habi- 
luellenienl,  tous  deux,  considérés  comme  ayani  l'té  empruntés  au  lalin  Cniviis  ; 
par  contre,  le  terme  -niunt  \w  possédant  ain-un  correspondant  germani(iue 
avec  le  sens  de  montagne,  nos  appellations  ('nhnnnf  conservent  tnule  leur 
valeur  probante  au  point  de  vue  s|)écial  où  nous  nous  plaçons  ici. 

Il  est  curieux  de  constater,  à  i)ropos  des  nombreux  Kahlenherg,  i|ue  leur 
étymologie  peut  présenter  um»  dillicullé;  analogue  ;i  celle  (|ue  nous  avons 
signalée  poui'  les  Chaunionl,  où  l'on  fient  (|ueli|uefois  liesiter  entre  Calriis 
mons  l'I  Calidus  mons  ;  scîulemenl,  ici,  il  s'agit  de  décider  entre  la  "  montagne 
chauve  »  (Kafilenherg)  et  la  <c  montagne  froide  »  {Kaltenherg). 

f'^)  Dans  son  travail  R/ieinisr/ie  Ortsnamen  ans  vorn'imtsrher  und  roiniseher 
Zeit  fniisseldorf,  19tH)  Fhanz  Ckamkk  a  déjà  signale  un  certain  nombre  de 
Cahnunl,   mais  en  essayanl    d'expli(|uer  par   le  celli(]ue   les   deux   éléments 


CHAI  MONT    tiEHMWIQUES  285 

nous  phirant  spécialement  au  point  de  vue  de  la  Belgique 
orientale  et  des  pays  limitroplies  de  langue  germanique. 


CoLMOXT.  pour  commencer  par  le  nom  signalé  par 
Kurth,  désigne,  près  de  Tongres,  un  «  cône  boisé  d'une 
grande  élévation  »,  dominé  par  les  ruines  d'un  château 
certainement  fort  ancien,  car  on  y  voit  un  mur  en  arêtes 
{<)})us  spicntnm)  (^).  Colmont  est  cité  à  partir  de  1096  sous 
les  formes  suivantes  {^)  : 

1096,1247  :  Knlnionl.  127-2-xviii«  siècle:  CocZ/z/c/?/. 

ll-2o,    117o,     1333    :    Cuhuis  I-J80  :  Chiuinonl. 

Mous.  128o  :  Kolcniont. 

Ters  1183  :  Culmiint.  1292,  1317,  etc.:  Chniiiont. 

1200  :  ChuliuuiU.  1308  :  Kolciuiini. 

1232,  123:;,  etc.  :  Calinonl.  1318,  1365,  etc  :  Colmonl. 

1269,  1318,  etc.  :  Cluiiinioiil.  1338,  1340  :  Coclcnuuil. 

Prononciation  populaire  :  (^olmoi. 

Colmont,  mentionné  comme  place  forte  dès  le  xii''  siècle, 
ne  peut  devoir  son  appellation  à  un  monastère,  comme  le 
pensait  Kurth  {^).  Dès  lors,  l'origine  romane  de  Colmont, 


coiisliliuinls,  (7f/-  ;iiissi  liicn  ([iic  -iiiiint  ;  c'csl  là  iiiic  Iciil.-ilivL'  assez  liarilic, 
où  je  lie  veux  suivre  le  Idpoiiyiiiisle  rhénan,  le  plus  souveiil  très  intéressant, 
mais  quelquefois  Iroj)  ingénieux. 

D'autre  i)art,  K.  Fokstkmann  et  H.  Ji-;i.i.im;h.u  s  (Altdeutsc/ii's  IS'uihctiIikcIi. 
Ortsriamen,  11)13  et  lOKi,  i,  HMiii,  et  II,  io.'Ji)  mentionnent  sous  la  rubriciue 
Kul  (chauve)  Kolnionl,  Cliaumont-(iistoux  et  Kalinnilh  (jjrés  de  Ilonihurfi- 
sur-le-.Main),  en  considérant  -mont  comme  un  emprunt  fait  i)ar  l'allemand. 
Seulement,  Chaumonl-Gisloux.  du  BrahanI  walhin,  n'est  évidemment  pas  à  sa 
place  dans  un  recueil  de  noms  allemands. 

(*)  C.  i>E  BoKMA.N,  Histoire  du  château  de  Colmont,  dans  le  Uni/,  de  l  Institut 
arcliénl.  licgcoix,  t.  V,  Liège,  186:2,  p.  97  à  loi. 

(-)  Foiu'nies  |)ar  m;  BnioiAN  {op.  cit.),  Foiistk.mann  et  .Iullinoiiais  (I.  1G-2H); 
PoNCKr.KT,  Fie/s  de  i  église  de  Liéjc  sous  Ad.  de  lu  Marrk,  1898,  fjasst)n. 

(3)  il  pourrait  en  être  autrement  d'un  Cai.mom,  encore  appelé  i'.ahnund  et 
Caeten,  sis  |)rcs  de  Melderl,  à  7  kilomètres  au  sud-ouest  de  Tirlemont,  et  où 
l'on  a  |>lacé  un  monastère  Cf.  à  ce  propos  Moi  i.akkt.  «Essai  sur  le  comte  de 
Brunengeru/,  »,  dans  le  Bulletin  de  ta  Commission  roi/ale  d'Histoire,  i""-'  série, 
t.  \,  18.')7,  p.  17."jà  178,  avec  cart«'  jointe  ou  est  indiquée,  entre  .Meldert  et 
l'Écluse,  une  montagne  avec  le  château  de  Calmont,  siège  d'une  abbaye  de 
bénédictines  (010-881'/).  Tahi.ikk  et  Waiteks,  Cotnmnnes  hehjes,  canton  de 
Wavre,  186i,  p.  26i2,  appellent  ce  mont  C.ulfsberglie'  ;  cependant,  la  proximité 


2S6  J.    VANNÉUrS 

sis  en  pays  flamand,  devient  moins  probable.  On  a  bien 
d'autres  exemples  de  châteaux  portant  un  nom  roman  en 
territoire  germanique  —  par  exemple,  Berbourg  dans  le 
Luxembourg,  qui  est  un  ancien  Jiel-Rcpuirc  — ,  et  l'on 
pourrait  peut-être  invoquer  pour  Colmont  une  influence 
romane,  partant  de  Liège,  de  même  qu'il  est  permis  d'ex- 
l)liquer  le  Beaurepaire  luxembourgeois  par  l'orientation 
romane  constatée  à  la  cour  de  Luxembourg  depuis  l'avène- 
ment de  Henri  de  Namur,  en  1136.  Cependant,  les  Calmunt 
(]ue  nous  allons  rencontrer  en  pleine  Germanie,  loin  de 
toute  influence  romane,  qu'elle  soit  de  source  monastique 
ou  due  à  une  dynastie.,  vont  nous  obliger  à  chercher  ail- 
leurs l'origine  du  nom  de  Colmont. 

En  effet,  si  nous  jetons  les  yeux  sur  la  carte,  nous  allons 
rencontrer  à  l'est  de  Colmont,  puis  plus  loin,  dans  la 
région  du  Rhin  et  de  la  Moselle,  toute  une  série  de  loca- 
lités dont  les  noms  s'apparentent  directement  à  celui  du 
château  limbourgeois. 

C'est,  tout  d'abord,  dans  l'arrondissement  de  Maestricht 
Kelmont,  près  de  Beek-over-Maas;  puis  Colmond,  près  de 
Voerendael,  pour  lesquels  je  manque  malheureusement  de 
formes  anciennes. 

C'est  ensuite,  en  nous  dirigeant  vers  l'Eifel,  Kalmuth, 
près  de  Miinstereifel,  dans  le  cercle  de  Schleiden,  par  où 
passe  un  atiueduc  romain  bien  connu  et  qui  est  mentionné 
comme  KHloinuni  en  1243,  Kolcmunt  en  1263,  KiilnicUen 
en  1572  ('),  Kolmnih  en  1645  (dans  Gelenius),  Kulmund 
en  1777  (sur  la  carte  de  Ferraris). 

Plus  loin,  contre  Remagen  sur  le  Rhin,  existe  un  Cal- 
MUTH,  appelé  en  1138  Kalcmiinte,  en  1166  et  en  1212  (hde- 


dc  la  frontii'ic  liiij,Miisli(ju('  —  .Mcldc^rl  est  tlainand,  mais  Ips  localilcs  limi- 
ln)|)lios  de  rKcliise  cl  d(!  Baiivecliaiii  sont  ac^tin-llciiu'iit  roiiianiseos  — 
m'ein|)<"'('heiit  de  faire  état  de  ce  nom  au  puint  de  vue  on  je  me  plaee,  d'autant 
[dus  (|ue  l'ein[)laeement  de  (te  monastère  est  conlesté  :  en  effet,  Tarlier  et 
Wauters  (loc.  cit.),  qui  ridentilicnl  eomme  Moulaert  avec  le  Cahnuntis  du 
partage  de  870,  admettent  (pi'il  était  situé  à  (liiaumont  (-(lislonx),  à  trois  lieues 
de  là. 

(*)  Cf.  OutiscHi.AUEK,  «  Die  Deutung  aller  Ortsnanien  am  Mitlel-  und 
Niederrhein  »,  dans  Annalm  des  Hisf.  Yrrrivs  fiir  den  Niederrfiein,  t.  21-22, 
1870,  p.  170. 


CHAUMONT  GERMANIQUES  287 

nuiiit,  en  ['2'')\1  {de)  CnlcDionlc,  eu  lti!97  (Inlciuunti'  en  1:298 
KuiU'iuunie  (^). 

Ce  n'est  j^as  le  seul  de  la  région,  et  nous  pouvons 
encore  relever  :  Calsmunt  ou  Calsmind.  montagne  près  de 
W'etzlar,  avec  un  château  souvent  cité  (~);  Kallmutt, 
autre  montagne  s'élevant  à  l'est  de  A\'ertlieim,  près  de 
lIomburg-sur-le-Main  et  appelée  en  llO(i  Knlcitiiini  (3); 
Calmit  ou  CALMrrr,  cime  élevée  de  la  Haardt  du  Palatinat, 
près  de  Neustadt  an-der  TIaardt  (^). 

Tuis,  revenant  au  Rhin  même,  c'est  à  2  kilomètres  à 
l'ouest  de  Boppard  que  nous  retrouvons  un  Kalmut,  dont 
le  nom  figure  comme  Mons  Kn/cimiic  dans  une  charte 
de  12-2i  (•'). 

Si  nous  remontons  la  vallée  de  la  Moselle,  nous  rencon- 
trons à  Bremm  (cercle  de  Cochem)  une  crête  allongée,  du 
nom  de  Calmono,  où  furent  plantées,  d'après  la  tradition, 
les  premières  vignes  de  la  Moselle  moyenne;  en  1435,  un 
vignoble  y  est  signalé  in  (hitmont  et  en  1431  un  autre  est 
cité  yii  Liuig  K'cilemoiil  (6), 

Plus  en  amont,  c'est  àAVittlich  (ju'un  document  du  milieu 
du  xiii"  siècle  place  des  vignobles  in  nioniibns  (Innipellc, 
Kalemonth  (ou  Kclomonih),  Altrcnsni-t  {'). 

La  Sarre,  également,  possède  son  Kalmit-Hof  près  de 


fi)AD.  GoEKZ,  Mittelrh.  liegesten,  II,  187!),  n  i:V2,  et  lY,  i88G,  n"  27.'57; 
Ôi.icsciii.ù.KK,  Inc.  cit.  ;  Lacombi.et,  Urkundenfmc/é  des  Niederr/ieins,  I.  II,  n°  4(58; 
hisKY,  Dit  Hegestrn  der  Erztnsch.  vo7i  KiJln,  t.  IV,  ii<'  7:2, 

(■')  .le  luaiuiuc  de  formes  anciennes;  c'est,  en  tout  cas,  pour  le  xin^  s.,  Kals- 
mxint  (l-2i-2,  1 -2.ir>,  elc,),  Calsmunt  (12o2,  12o3,  etc.j,  A'a/mra<  (120-4),  Cah- 
inuuth  (1272),  Calisnumt  (1273,  1278),  Kaksmunt  (1270),  Calzmont  (1277), 
(lidumnt  (12n()),  etc,  (Ei.tester  et  Oœkz,  Mittelrh.  Urkundenlmc/i,  t.  III,  et 
Mittelrh.  Reyesten,  t.  III  et  IV,  pussim). 

{^)    FORSTEMANN  et  JeLLINGIIAIS,  Op.  Cit.,  II,    looi. 

(')  La  carte  de  l'étal-major  allemand  au  10(1,000'  l'appelle  Der  huhiiit,  celle 
de  Baedeker  (.\lleniaj>ne  du  .^ud)  Die  Kalmil. 

(•■)  Ei.TE.STEK  et  GiEiiZ,  Mitlclrh.  i'rkdli.,  III.  lit-t,  ("/est  à  ce  Kalmut,  ou  bien  à 
(^aluiutli  sous  Remagen,  «luc  s'applique  ceilainonient  la  mention  d'un  Mous 
C.aliiumt,  cité  dans  le  pays  rlicnan  en  li;{<),  rajjpoitee  par  Hrck,  (Hierdeittschrs 
Fhirnnnietihuch,  1880,  p.  178. —  Signalons  encore  qu'Oi.it;s(:Hi.Ai;tu  (lor.cil.) 
mentionne  des  prairies  du  nom  de  (.ahnnth  près  d'Ehrenlierg  et  de  Ik'ilstein. 

C^)  Krihewh.,  Klein,  .\rchive  der  Hhtiuproririz,  t,  III,  l'.KKj,  p.  '.);>,  il'après 
les  originaux . 

Ç)  Mittelrh.  Irkdl,..  t.  II,  p.  121  ;  Mittelrlt.  Het,..  t.  III,  n-  7:i5, 


28H  J.    NANNÉHIS 

Mer/ig-,  et  non  loin  do  là.  près  de  Bouzonville,  existe  un 
village  de  Colmen,  appelé  Koliiuin  en  1 1;)3,  ('olinc.s  en  1179, 
Colincn  en  1 182,  mais  (^ui  apparaît  en  1338  et  en  1377  sous 
les  noms  plus  transparents  de  (lolinonl  et  de  doilinoni, 
en  1700  sous  celui  de  llolmcl  i^). 

Tous  ces  noms,  dont  la  caractéristi([ue  principale  réside 
dans  la  disparition  de  la  nasale  de  mont  —  le  contraire 
serait  étonnant  dans  des  bouches  germaniques  —  sont  si 
nombreux,  certains  d'entre  eux  sont  à  une  distance  telle  de 
la  frontière  linguistique  qu'il  est  absolument  interdit  de 
penser  pour  eux,  comme  le  faisait  Kurth,  à  une  origine 
romane  :  sans  doute  aucun,  il  faut  les  rattacher  au  latin,  en 
ligne  directe.  Nous  sommes  d'autant  plus  fondé  à  les  faire 
remonter  jusqu'à  l'époque  romaine  qu'ils  apparaissent 
dans  une  région  qui  fut  romanisée  à  l'extrême  ;  à  ce  point 
de  vue,  Kalmuth  dans  l'Eifel,  avec  son  aqueduc  romain, 
et  le  Kiilemoiith  de  la  région  de  Wittlich,  cité  entre  des 
noms  aussi  caractéristiques  que  (huji pelle  et  Alireii.siirt, 
sont  particulièrement  significatifs. 

Si,  revenant  vers  la  Belgique,  nous  arrivons  dans  un 
pays  qui  nous  intéresse  davantage  encore,  le  Luxembourg 
de  langue  germanique  (Grand-Duché  et  région  d'Arlon), 
nous  verrons  se  confirmer  cette  opinion,  malgré  la  proxi- 
mité de  la  frontière  linguistique  ;  ce  n'est,  en  effet,  pas 
moins  de  cinq  Chaumont  germaniques  que  nous  retrou- 
vons là. 

Tout  d'abord,  si  nous  n'avons  aucun  renseignement  sur 
le  Calmuth  itiif  (lein  lierre,  (|ue  Cramer  y  signale,  nous  y 
connaissons  par  contre  un  lieu  dit  In  der  Kalmuth,  où  la 
chapelle  de  IIoscheid-lez-Brandenbourg  (au  nord-ouest  de 
Diekirch)  possédait  une  terre  en  1570  {^). 

C'est  ensuite  dans  la  commune  de  Saeul,  au  nord-ouest 
de  Luxembourg,  Calmus,  en  patois  luxembourgeois  Ktxl- 
mea,  dont  les  documents  nous  autorisent  à  faire  un  Ciilinm 
Mous,  car  nous  le  rencontrons  sous  les  formes  suivantes  : 


(*)  De  Bdi'TKii.i.Kii,  Dict.  Iqpoc/r.  de  l'ancien  itrparl.  dr  Ut  Moselle,  187i;  Vkr- 
KoiniKN,  Chartes  du  Ln.retnhnnrfi,  11»^  75!t  et  12:21;  «  Archives  de  Marches  de 
Guirscli  »,  dans  .4 nna/e«  de  l'Inslilitl  (irclieolofftrjite  du  Liixembourij,  t.  Xll, 
Arlon,  1880,  n"  2:^8. 

(*)  Heydinc.ek,  Archidiueunahisiv  I.onf/iiiono  (/escri/^/io.  Trêves,  188 i,  i).2.'j(). 


CHAUMONT  GERMANIQUES  289 

Vers  1)-50U  :  Kulmccc  (compte  orig.,  latin). 

I'!l7  :  Knlniiinzc.  Knimuzzc,  (hiliniizze  (compte  orig., 
latin;  ('). 

1IÎI8  :  (^uliiicns  (charte  orig.,  latine). 

13:27  :  (.'a//?jn/j/c  (charte  orig.,  latine)  (2). 

1327:  C.-i//7j»;i/ce  (cartul.,  latin)  (^). 

1329  :  Cnlniciitzc  (charte  orig.,  romane)  C*). 

1346  :  CliHuniont  deleyzSej}if()iiteiiiics{charte  romane)  (^). 

1473  :  Cnlmes;  141)5  :  Kiilnicsz;  \l)'Sl  :  Knlnwtz  (comptes 
tranchais)  (''). 

1509  :  Kiilmes  (charte  orig.,  allemande). 

1561  :  Calmes  (record,  allemand,  en  copie), 

1569  :  Knliniis;  Knlinusser  Biisch  ;  Johan  von  Kninuis 
^record  orig.,  allemand). 

1588  :  Calmas;  Calmes  (i-ecord  orig.,  allemand). 

1608  :  Calmesser  Weg- ;  Calmesser  Busch  ;  Michell  (Cal- 
mes (doc.  allemand,  en  copie)  (\i. 

D'autre  part,  sur  une  hauteur  près  de  Consdorf  (au  sud- 
ouest  d'Echternach)  est  établi  le  hameau  de  Colbette, 
frère  authentique  de  Calmus  comme  le  montre  la  liste  sui- 
vante, absolument  convaincante,  malgré  sa  bigarrure 
extraordinaire  : 


(*)  N.  VAN  Wekveke,  Cdrtnl.  du  prieuni  de  Maiienl/tal,  l.  I,  1885,  |).  ^2:20 
et  850-3ol  (Piililic.  de  la  Sect.  /list.  de  Luxeinhourt/,  t.  38  el  39). 

(■^)  X.  VAN  Wekveke, //!»'<'/?/.  mml,  des  Archives  du  rhàlnni  d'Aitsenltourg, 
nos  20  el  24  (/^^ft//m^o«,s- susdiu^s,  I.  47,  1899). 

(')  VViKTH-PAyiET,  Ttihie  chronolof/iqiip  des  (■litirl''s,  rtc,  n"  IHH. 

(*)  [ni\  d'Àriscrdmiirfj,  ii»  20.  (Iclle  loniio,  ainsi  (juo  le  Cfr(i)u'7is  lU-  1318, 
t'sl  iiitt-rcssaiili'  i"i  lapiucKlier  du  nom  Cahnenzfjoirc  ou  Kalnienzgaii,  sons 
lequel  est  égalenuMil  connu  le  Clianniontois  ou  l'ar/iis  C(il[v()\ini)Tdrri.iis,  (|ui 
eoinprenait  les  bassins  de  la  Haute  Moselle  et  de  la  Meuitlie  icf.  Vvmikk- 
KiNKERE,  La  fariiKitùm  territoriale  ..,  II,  1902,  p.  io9). 

('')  A.  HoiiiUEMoNT,  Histoire  de  la  langue  française...  an  pai/s  <lc  Laxeni- 
hoar;/,  1897,  p.  o8. 

(•')  J.  (jRon  et  .1.  Vannékis,  Ih-ninnlirenient  des  (rtir...  du  Lii.a-ndtoin-ji,  1.  1. 
1921,  j).  2i,  37,  tl()  et  itii. 

(■;  /«e.  (/■.4«.s'e/i//o»/r7,  u"s  1 10,  272,  117(1,  1171  et  1 17:5.  On  pciil  scndde  l-il, 
nu'llie  en  rajjpoit  ;ivee  Calmus  deux  liaïueaux  dcpiMidaiil  de  Moresiiet,  Kclmis 
et  Kelmisrrlieide.  dans  raii'oiulissenu'nt  dKupeii  ;  de  uirme,  le  nom  d'un  pei'- 
somiage,  l'ahn  ron  Kalniis.  qui  scelli'  en  1  i07  un  aeeord  avee  le  comte  do 
S|ianlieim  et  de  Vianden  (Archives  du  Goiivernenu'ui  à  Luxembourg,',  comte  de 
Vianden). 


i;^ 


290  J.    VANNÉRUS 

149o,  1301,  15:25,  1537  :  Kolbant  (comptes  français) 

1528  :  Koluniniif  (compte  français). 

1528,  1531  :  Kolhunni.  Kolbant  (comptes  allemands)  (i), 

1534,  1556  :  Kolnier  (doc.  orig.,  allemands)  (2). 

1541  :  Kolbant,  Kolbannt  (dénombrement  allemand)  (3), 

1541,  1599  :  Kolbet  (doc.  orig.,  allemand)  (4). 

1560  :  Colmcth  (record  allemand)  ij^).  , 

1569  :  Khollmunt  (doc.  orig.,  allemand)  (6). 

1631  :  Colmet  (doc.  orig.,  allemand)  ("). 

1695  :  Colbeth  (compte  allemand)  {^). 

1743  :  die  Kohvetter  Gutter  {^). 

1766-1771,  1777  :  Calbet{^^). 

1794  :  Kalbet  ou  Colbet  ("). 

1847  :  Colbette  (i^). 

Cette  série  de  formes,  si  hétéroclites  à  première  appa- 
rence, ne  serait  pas  complète  si  je  négligeais  d'ajouter  que 
Colbette  se  prononce  encore  de  nos  jours,  en  patois 
luxembourgeois,  Koulwent. 

A  ceux  qui  pourraient  s'étonner  de  ce  chassé- croisé 
déconcertant  des  terminaisons  -miint,  -met,  -bet,  -bant, 
-wannt,  -went,  -wet,  je  me  contenterai  de  signaler  : 

1°  La  variante  Colmet,  citée  plus  haut  pour  Colmen  ; 

2o  Colming  ou  Colmingen.  commune  de  Gommelange,. 
arrondissement  de  Boulay,  qui  apparaît  sous  les  formes 
suivantes  :  Kolvengen  et  Colvengea  en  1209  et  1287;  Colvin- 


(1)  J.  GRon  elJ.  Van.nkius.  «/>.  cit.,  p.  66,  130,  ^211,  251,  316,  409  et  4o3. 

(2)  Archives  du  Gouverneinent  à  Luxoinboiir},s  aveux  ot  dénombr.  de  fiefs. 
(=')  Archives  gén.  du  Royaume,  à  Bruxelles,  Ch.  desC,  rcg.  698  et  700. 

{*)  K.  VAN  Weuveke,  Archives  de  Bet zdorf,  n°  298  (Pulilic.  de  Luxembourg, 
t.  o3,  1908)  ;  Arch.  gouv.  Luxembourg,  aveux  et  dcnoiu.  de  fiefs. 

(^)  Hakdt,  Luxcmijurg.  Weistlnimcr,  Luxembourg,  1870,  p.  \A1. 

(6)  Arch.  de  Betzdorf,  n»  367. 

(')  Arch.  gouv.  de  Lux.,  aveux  et  dcn.  de  fiefs. 

(»)  Breithof,  L'abbaye  d'Echlernach,  Luxembourg.  1882,  p.  11. 

('•)  Proloc.  du  notaire  Promenschenckel  au  trihunal  de  Dickiicii  (t.  XIL 
no  24). 

('")  P.  UiHi'EUT,  Circonscription  du...  Lii.remlioiirfj  en  1760-1771,  Lux.,  1899; 
carte  de  Ferraris. 

(")  Ann.  de  l'Institut  archc'ol.  du  Luj-cmlmirf/,  t.  10,  1878,  Arlon,  p.  134 

(i2j  Tal)le  ulphabctique  des  villes...  et  maisons  isolées  du  Grand-duché, 
Luxembourg,  1847. 


CHAIJMONT   GEKMAMQliES  291 

f;uin  et  C<>li}ini>in  en  12()ïî;  Coalnuiif^cs  en  loOi;  (î(>lliii<>cn 
en  1590;  Colinin^cn  en  \()^'i;  K<)lmnn<>i'  an  xvin"  siècle; 
Colbin^en  on  (lohuiu^cn  en  1756  :*j. 

8°  L'emploi,  bien  connu,  de  bit  au  lieu  de  uni  :  «  hid 
gesammidir  liant»  (manu  unita),  dit  par  exemple,  en  1282, 
un  document  de  Coblence;  «  das  dorf  lialvit  dut  lieysit 
Derinbach,  /)//  alem  redite,  bit  veldin...  »,  lisons- nous 
ailleurs,  dans  un  acte  de  1341  relatif  à  la  région  de  Wittlicli. 
Chose  curieuse,  une  même  charte  de  l'année  i  i?)2,  émanant 
d'un  seigneur  d'Ansenbourg  (à  3  lieues  au  nord  ouest  de 
Luxembourg),  contient  à  la  lois  «  bit  eynander  »  et  a  mil 
aile  syme  zubehoeren  »  (2). 

4°  Certains  biens  sis  à  Gilsdorf  lez-Diekirch  et  devant  le 
meilleur  catel,  appelé  dans  les  documents  luxembourgeois 
Ciinniilh.  Kirnu't.  Knlirmct.  ('hurmei.  Kurmctb.  etc., 
sont  désignés  en  lo91  comme  Kurbctlcii  (iiittcr  (•*). 

Enfin,  pour  achever  l'énumération  des  Chaumont  du 
Luxembourg  de  langue  germanique,  il  me  faut  signaler 
deux  noms  de  lieux  qui  se  rattachent  évidemment  au 
groupe  des  Calvi  Montes.  Le  premier,  Kalend  ou  Kaleni- 
der,  est  celui  d'un  plateau  très  élevé,  couvert  de  bruyères  — 
en  1852,  du  moins  —  et  situé  dans  le  Grand-Duché,  sur  le 
territoire  de  Bigonville  (au  nord  d'Arlon),  du  côté  de  Wol- 
velange;  on  y  a  signalé  un  camp  romain,  traversé  par  une 
«  voie  consulaire  »(').  Le  second,  Kolemt,  est  donné  à  un 
petit  groupe  de  maisons  entre  Habergy  et  Guelff,  dans  le 
Luxembourg  belge,  au  sud-ouest  d'Arlon  (^);  seulement,  de 
même  que  pour  Cal  mont  lez-Meldei-t,  la  proximité  de  la 
frontière  linguistique  m'empêche  d'inscrire  Kolcnit  sur  la 


(')  De  BoiTEii-LER,  Uùiiimvaire  ln/xigr.  de  l'ancien  (IvpartemenI  de  la  Moselle, 
Paris,  187^  ;  etc. 

('-')  Mittclrh.  Reg.,  I.  IV,  11°  93i;  J.  V.\>>Kms,  «  Dociiinetils  luxeiiiljoiu- 
geois...  »  dans  Awn.  de  l'Institut  arclicol.  du  Lu.veml>our</,  t.  3:2,  Arloii,  1902; 
>'.  VAN  Wkkvekk,  Cartul.  de  Marienthal,  t.  11.  \-H. 

(3)  Acte  on  ma  pdssossion  (ropio  do  I73();. 

{*)  Puhlicalions  do  la  Soc.  airliool.  do  I.iixonibourjï,  l.  VIII,  l«5:2;  carie  du 
Graiid-Puclic.  par  Hanscn.  La  noialion  la  plus  exacte  est  sans  doute  Kaletnt. 

(^)  Tanhei,,  C.ommunea  lii.retnliourf/i'oisex,  t.  Il,  p.  -ttO.  Labbo  Loes  a  sijjnalc 
sur  le  territoire  de  Ilaberfiy  des  Irouvailios  de  substructions  romaines  et 
d'nrnes  funéraires  {Annales  d'Arlim,  t.  l."?.  I!t(l<s,  p.  |  |."i). 


292  J.    VANNÉRUS 

liste  des  Chaumont  (xui  ont  dû  recevoir  leur  nom  en  dehors 
de  toute  influence  romane. 

D'ailleurs,  j'espère  avoir  réuni  suflisamraent  de  preuves 
de  l'origine  romaine  des  Chaumont  répandus  en  territoire 
germanique  et  nous  pourrons,  je  pense,  admettre  qu'il  en 
est  de  même  pour  la  très  grande  majorité  de  leurs  congé- 
nères de  pays  roman  :  fort  souvent,  sans  doute,  les  trou- 
vailles faites  dans  la  région  viendront  confirmer  l'origine 
latine  du  nom. 

Ce  nom  de  Chaumont  peut  donc  s'ajouter  à  ceux  (pie  l'on 
a  déjà  signalés  pour  montrer  l'importance  de  la  pénétra- 
tion latine  dans  nos  contrées,  apportant  ainsi  sa  contribu- 
tion à  l'histoire  de  la  colonisation  de  notre  pays  par  les 
Romains. 

Au  point  de  vue  plus  spécial  de  la  toponymie,  cette  note 
aura  encore,  en  montrant  toutes  les  déformations  subies 
par  nions  dans  les  bouches  germaniques,  fourni  un  nouvel 
exemple  de  la  difficulté  avec  laquelle  les  populations 
conservent  dans  leur  vocabulaire  un  terme  qu'elles  ne 
comprennent  plus. 

Jules  VANNÉiits 

Postscriptuni.  —  Aux  exem])les  déjà  donnés  précédem- 
ment, je  tiens  à  ajouter  les  suivants,  trouvés  alors  que 
mon  article  était  déjàimi^rimé  : 

1"  TTn  i)iton  volcanique  est  indiqué  par  les  cartes  alle- 
mandes, comme  Vulkan  Kalem,  au  N  -O.  de  Birresborn- 
sur-la-Kyll  (Eifel),  à  proximité  d'un  chemin  romain  et  dans 
une  région  très  habitée  déjà  à  ré])oquc  gallo-romaine  ; 

2^  Le  Dictionniiire  topo^raiihùjiie  du  Haut-Rhin  (Paris, 
4868,  p.  29)  signale  à  ])roi)OS  de  la  ferme  de  Chalmont  (com- 
mune de  Lièpvre),  que  «  ce  nom  se  retiouve  sous  une  forme 
plus  ou  moins  germanisée,  dans  la  partie  allemande  du 
déi)artement  savoir  :  K(')Lmkt,  à  Hiederthal  ;  Kelmenrain, 
à  Froningcn  ;  Kàlmet,  à  Vieux-Ferrette;  Calmet  ou  Kal- 
MET.  à  Waldighofen;  Kalmen,  à  Willer,  canton  d' Alt- 
kirch  ;  an  dcm  Caelment.  1416».  Ce  même  répertoire 
mentionne  encore  (p.  233)  à  Bartenlieim  (terr.  de  St-Alban), 
en  lo33,  un  lieu  dit  Uff  dem  Calmon. 


Onuitgegeven  Refereinen. 

(Brussel,  Hs.  II.  119.) 


Op  de  Koniiiklijke  Hibliotlieek  te  Brussel  bei'ust  een 
liandschrift  met  tôt  dusver  onuitgegeven  refereinen,  waar- 
van  de  eigenaardige  vorm  en  iuhoud  een  vi-ij  nitvoei'ige 
besclirijving  volkomen  reclitvaardigen.  De  inven taris  ver- 
meldt  liet  onder  n""  II,  119.  Het  \verd  gekoeht  op  de  auctie 
Serrure (^),  den2?>^»  November  1873,  voor  de  som  van  1  10  fr. 
Serrure  zelf  was  er  in  liet  bezit  van  gekomen  op  de  boeken- 
veiling  van  Graaf  de  Hane  de  Steenliuyse,  te  Gent  in  1843. 
Het  moet  hem  aan  tijd  ontbroken  liebben,  anders  zou  hij 
stellig  het  vêle  intéressants  dat  het  bevat,  hebben  bekend 
gemaakt. 

Vôôr  hem,  had  Mone  het  reeds  doorbhiderd.  Hij  citeert 
het  dikwijls  in  zijn  Uebcrsicht  (-).  Opmerkelijk  is  liet.  hoe 
weinig  belang  hij  schijnt  te  hechten  aan  de  28  refereinen, 
welke  hij  nochtans  een  eerbiedwaardigen  ouderdom  toe- 
kent  :  «  Aile  sind  im  16'"  Jahrhundert  geschrieben  und  die 
nieisten  auch  nicht  illtor  (•^)  ».  Hij  laat  dus  vermoeden  dat 
enkele  uit  de  xv*  eeuw  dagteekenen  !  Niettemin  bepault  hij 
zieh  bij  het  citeeren  van  een  vers  hier  en  daar. 

De  codex  is  een  papieren  kwartijn  in  perkamenten  band 
llJ.5  cm.  lang  bij  13. o  cm.  breed  en  bevat  twee  duidelijk 
scheidbare  deelen. 


(•)  Catalogue  des  livres  délit  Bililiolhr(fiic  de  M.  ('..  P.  Serrure.  Briixcllos, 
1873,  dl  II,  w  2()07. 

('^)  Fr.  Jos.  Monk.  Uehersicitl  der  Niederldndisrlien  Yolks-Llleradir.  TiHiin- 
gcn,  1838. 

(3)  Mon.',  Il"-  3fi-2. 


294  F.    LYNA 

I.  F°  l-:2;2  en  f''  95-195,  ei^igrammen,  gelegenheidsgedich- 
ten,  samenspraken,  spreuken,  raadsels,  etc..  in  't  Latijn, 
Fransch,  Italiaanseh  en  Nederlandsch. 

Het  is  een  rommelzoo  van  rijp  en  groen.  Ik  vermeld  hier 
enkel  : 

F°  3.  Een  paai-  strophen,  waarnit  wij  den  kopiïst  van 
het  eerste  gedeelte  leeren  kennen  : 

Iratis  musis,  irata  Pallade,  scribit 
Omnia  Grammaeyus  nomine  digna  facit 
Gandavus  scribit  Gi'ameij-s  (sic)  quod  fuit  ante 
Urbs  in  luce  nigris  nune  jacet  in  tenebris... 

F.  3  v.-l  I .  Latijnsche  gedichten. 

F.  11  V.-14  Een  sonnet  en  drie  hekeldichten  : 

Teghen  eenen  grooten  geux.  —  Tegen  eenen  bancqne- 
routier.  —  Tegen  eenen  rentmeester  van  Hollandt. 

F.  15.  Questiones. 

F.  16-22.  Questiones  quodlibeticae. 

F.  152-154  V.  De  légende  van  Sinte  Haringus(^). 

F.  156-200.  Historisehe  en  politieke  liederen  en  gedich- 
ten in  't  Franseh  en  een  paar  in  't  Latijn. 

II.  Het  tweede  gedeelte  omvat  een  reeks  refereinen  en 
gaat  van  F"  32  tôt  F"  83,  Het  maakt  een  goed  afgesloten 
gelieel  uit,  en  versehilt  uitwendig  zoô  van  het  overige 
handschrift,  dat  ik  aanvankelijk  meende  dat  hetlater  was 
ingelaseht  geworden.  Ik  steunde  hierbij  op  het  geschrift 
dat  blijkbaar  van  ouderen  datum  is  en  waaraan  zorg  is 
besteed.  Hier  en  daar  komen  roode  beginletters  en  rubrie- 
ken  voor.  Ik  had  het  evenwel  mis  Het  papier  vertoont 
doorloopend  hetzelfde  watermerk  :  de  kan  met  hengsel, 
kroon  en  bloem  (-).  Dat  merk  wordt  volgens  Briquet  (^) 
aangetroffen  in  de  laatste  jaren  der  vijt'tiende  eeuw  en  in 
de  eerste  helft  der  zestiende  eeuw.  Wij  zijn  dus  op  een 
hypothèse   aangewezen.    De  verzamelaar   heeft   de    beste 


(')  Mone  heeft  er  i9  verzen  van  afgeschreven,  d,  i.  ongeveer  de  lielfi  v.ni 
het  heele  gedicht.  Zie  :  n""  113  van  zijn  Uehersicht. 

(-)  Stoi'I'Ei.aak.  Het  papier  in  de  Nedcrianden  gedurende  de  Midilefeeuwrn 
inzonderheid  in  Zcriand.  Middelbiirg,  1809,  hl.  80,  pi.  XIII. 

(•*)  Bkiquet.  Dictionnaire  historique  des  )nartii(es  de  papier.  (1282-1600)- 
Paris,  1907,  dl.  LV.  ir^  I2()l2-12r>18. 


ONUITGEGEVEN  REFEREINEN  295 

refereinen  ait  eeu  gansche  période  bijeengegaaid  en  lieeft 
ze  ron  ainore  opgeteekeiul.  Later  heeft  een  andere  hand 
de  witgebleven  vellen  volgepend.  Ik  geef  hier  de  stok- 
rijmen  op  : 

1  (F.  32).  Een  Latijnscli  gedicht  met  Xederlandsche 
vertaling  over  de  voorbehoedmiddelen  tegen  de  pest. 

2.  (F.  82  V.).  Rétrograde. 

3.  (F.  33-33 V.).  Tsy  souctmen  wijsheit  daer  gheen  in  sij  (*). 

4.  (F.  33  v.-3i  V.).  Joos  Balau.  Thelich  gedochte  licht 
verborglien  (-). 

5.  (F.  34  v.-3o  V.).  Referein  oj)  denzelfden  stok. 

6.  (36-37v.).Dit  es  tsalichste  weero  datGod  noyntwrachte. 

7.  (F.  37-38).  Tes  elcken  om  tzyne  den  duvel  om  al. 

8.  (F.  38).  De  vreese  is  meer  in  de  huere  der  doot. 

9.  (F.  39-40).  Veel  zynder  gheroupen  maer  lettel  ver- 
cooren. 

40.  (F.  40-42).  Lof  dien  die  es  den  wech  de  \vacrlieit  en 
dleven. 

11.  (F.  42-43).  Of  God  met  ons  wilt  wie  zal  ons  deeren. 

12.  (F.  43).  Een  raadsel,  dat  als  bladviilling  moet  die- 
Tien(^). 

13.  (F.  43  V.).  Lydt  met  den  tyde  liy  ghevet  huiidt.  Dit 
referein  bevat  maar  twee  stroplicn  en  vier  verzen,  doordat 
tusschen  f"  43  en  f°  44  bladeii  moeten  uitgesohenrd  zijn. 

14.  (F.  44-48).  Zedelijk  gedicht  van  26  stroplien  van  8  à 
10  verzen ('). 

15.  (F.  48-49).  Zyn  ditte  ghoe  si)illen  zy  draeyen  nu  Nvel. 

16.  (F.  49).  Beneden  op  deze  bladzijde  hebben  we  één 
enkel  vers  :  Alzo  langhc  als  ic  volghe  der  heeren  hove... 
Het  overige  van  het  referein  is  achterwege  gebleveu,  waut 
f»  49  v.  en  50  v.  zijn  \vit. 

17.  (F.  50  V.-5I  V.).  Iloe  zuldy  ontvlien  dat  oordeel  der 
hellen. 


(1)  Zie  helzclfde  refereiii  in  :  Refereynen  int  sol,  (itiiuiens  icijs.  .\nlwer|ieii, 
Jaii  vaii  Doesborcli  (t  1.520). 

(2)  Mone,  Op.  cit.,  n'  362. 

(^)  (iedrukt  bij  Mono,  Op.  cit..  tv  ."^ild,  on  in  :  (.nlaloqne  drs  /ivips  rnrrs  de 
.Serrure,  II,  n""  2007. 

(*)  Mone.  Op.  cil.,  n'  -im. 


29b  F.  LYNA 

18.  (F.  ol  v.-o!2  V.).  Eu  gheloeft  al  niet  dat  eenen  selveren 
steert  heeft. 

19.  (F.  52  v.-o3  V.).     Sweerels    antierynghe    dynct    my 
bedroch  zjni. 

20.  (F.  o3v.-54v.).  Al  sietmen   die  lieden  men  kentse 
niet(i). 

21.  (F.  54  V.-55  V.),  De  rycke  es  nu  de  wel  glieboerne(2). 

22.  (F.  55  V.-57  v.).  Gedicht  van  twaalf,   twaalfregelige 
sti'oplien  over  't  recht. 

23.  (F.  57  V.-60).  Amorues  balade(^).  Stok  :  Hier  by  moet 
liefde  cleen  gheacht  zyn. 

24.  {F.  60-63  V.).  htrafgedicht  op  Gent('').  Samenspraak. 

25.  (F.  63  V.-65).  Der  zonnen  lieht  in  dwater  Imer  scynen 
ghedooglien. 

26   (F.  b5-66).  Hoe  zou  een  aerman  ryck  ghewerden. 

27.  (F.  66-68  v.).  Gedicht  van  negen   tienregelige   stro- 
phen. 

28.  (F.   68v.-70v.).   O   doot  gliy    moet   wel   een   bitter 
morseel  zijn  (4). 

29.  (F.  70-7  I  ).  Wat  ick  huer  doe  kin  canse  niet  ghepaeyen. 

30.  (F.  71-72).  Mont  toe  hoe  zoo  men  machts  niet  segghen. 

31.  (F.   72  V.-73).    Wist   men    die   waerheit   wy    soudea 
geschent  syn. 

32.  (F.  73  \  .-74).  Hoe  sàl  ick  dan  elcken  te  passe  leven. 

33.  (F.  74  V.-76).  Heden  es  vervult  die  scriftuere  in  liu 
hooren. 

34.  (F.  76-78).  Saude  ic  dacr  niet  voor  gode  yet  verdienen. 

35.  (F.  78-79  v.).  Al  comter  quaet  af  ten  es  gheeu  won- 
dere. 

36.  (F.  79  V.-81).  Vint  gliemeenen  oorboor  zoo  doedy  wel. 

37.  (F.  81-82).    Want  die  keysers    mogenthcyt   es    wel 
tonsiene. 


(')  Koint  ook  voor  in  den  bundel  van  Jan  v.iii  Styevoort  (l.'i'^i).  Rorlijn 
(M.  Genn.  6;JJ).  F.  l.o. 

(«)  Mone,  Op.  cil.,  n"-  280. 

(:*)  Ihicl.,  ni-Si?. 

(')  llitgeg.  naarhetHs.  16910-18  der  Koninkl.  Uibl.  Brussel,  (IooiLeendertz^ 
Tijdschrift  voor  Nederlandsdie  Taal  en  Letterkunde,  XX,  1900,  bl.  70-71,  onder 
den  lilel  :  Eeniye  r/eneurhlijke  rjedichten.  —  Zell'de  refcrein  in  de  werken 
van  Wir.s,  Us.  \my.i  <I.t  Koiiinkl.  Hil)!.  BrHssol,  F"  78-79. 


ONIUTGEGKVEN    MEFKRKINEN  29' 


.    88.  (F.  8:i\.-83).  Uees  liefde  es  weerdicli  jegheu  ••■audt 
glieweglien. 


Een  enkel  van  deze  rerereiiien  en  lang  niet  liet  beste  is 
geteekend  :  Joos  Balau.  Ik  lieb  geen  enkele  aanwijzing- 
mogen  ontdekken  omirent  dezen  dichter.  De  andeie  drageu 
nocli  naam,  noch  kenspreiik.  De  verzamelaar  moet  zicli 
weinig  oni  het  vaderKchap  hebben  bekoinmerd  ;  hij  be- 
kreunde  zich  mogelijk  meer  oiu  liet  gehalte  der  gedichten, 
die  van  uiteenlooi^enden  aai'd  en  verscbillenden  ouderdom 
zijn.  N""  1  trel'feu  wij  reeds  aan  in  den  bnndel  van  Doesboi'ch 
die  volgens  Kalff  «  bezwaarlijk  onder  kan  zijn  dan  1520(^})) 
î^""  21  hebben  \ve  eveneens  terngge\  onden  in  het  liand- 
schrift  van  Jan  van  Styevoort  van  lo24(-).  N""  29  moet 
volgens  Leendertz  (•')  dateeren  iiit  de  tweedc  helft  der 
zestiende  eeuw,  en  maakt  ook  deel  uit  van  een  reeks  onuit- 
gegeven  refereincn,  door  Frederiks  en  Vandenbranden  i^) 
toegesclireven  aan  Wils,  factor  van  de  Gondsbloem  te 
Antwerpen.  Ik  zeg  toegeschreven,  want  ik  ben  overtnigd 
dat  er  in  den  lijvigen  bnndel  waarop  zijn  naam  prijkt, 
lieel  vvat  voorkomt  dat  niet  uit  zijn  pen  is  gevloeid. 

Hetblijktdus  dat  die  reiereinen  op  verschillende  datumK 
over  een  période  van  tenminste  vijftig  jaai'  vervaardigd 
zijn. 

Xaar  den  geestzijn  zij  bovendien  van  ongelijke  waarde. 
Eenige  van  godsdienstigen  aard,  staan  diclit  bij  de  Middel- 
eeuwen;  zij  zijn  geschreven  onder  de  obsessie  van  den 
dood,  kenmerken  zich  door  een  ascetische  verachting  van 
de  menschelijke  natnnr,  en  geven  zedelijken  raad  ten 
beste  (n'''  8,  il,  28,  33,  34).  Een  enkel  is  streng  allegorisch 
(n'"  37).  Audere  vertoonen  merkbaar  den  invloed  van  de 
Hervorming.  Zij  gispen  de  goede  werken,  stcllen  de  biecht 


(  ')  Kai.kf.  (lesc/iit'denis  der  Sederfnndsrhr  [.ef/i'rkiindr.  (îroiiiiifîcii.  ItMIT.  Il, 
1)1.  1-28. 

(-j  Zie  :  (",.  G.  N.  DE  VooYS.  Eeii  ongedrnlile  Inmdel  refvreinen  van  /.*-'/. 
{Tijdsrln:  v.  ISederl.  Taal  en  Lellerk.,  X\i,  11)0-2,  bl.  78-7!t). 

(•')  Zie  iiooger. 

(■•)  Fitt:i)EKiKS  enVvN  dkn  Buwhkn.  liiiupdpliisr/i  Wonrdenlioek  derSuord-  en 
Xuid-Nederlandsche  Letterkunde.  1878,  bl.  ().>}. 


298  F.    LYNA 

■en  <le  vasten  aan  de  kaak  en  moeten  in  't  geheim  of  wel 
vôôr  liet  uitvaardigen  der  eerste  plakkaten  vervaardigd 
zijn  (1521j  (n''*  4  en  o). 

Een  betrekkelijk  groot  aantal  liebben  een  stei-k  naar 
voren  tredende  sociale  strekking  (n'^  7,  9,  18,  17.  18,  19,  21, 
2(),  30,  81,  35).  Met  zijn  de  beste.  Ze  zijn  niet  zelden  door- 
^loeid  van  edele  verontwaardiging  tegen  de  heerscliende 
misbrniken,  en  sommige  mogen  wel  naast  die  van  Anna 
Bijns  worden  gelegd.  Zij  varen  uit  tegen  de  «  sjaiionyten 
-en  gheestelicke  ypocryten  »  welker  hand  «  altyts  moet  syn 
ghesmeert  ».  De  officieren  noemen  zij  smalend  «  leever- 
heeters  ».  De  rijke  menschen  worden  gescholden  voor 
<c  ghiereglie  balghen,  vuj^l  stinckende  bucken  ».  Ailes  gaat 
verkeerd  en  «  wist  men  die  waerheyt  wy  souden  gesclient 
sjai  ».  Zij  zijn  vol  mêewaren  voor  den  «  aennan  »  die  alom 
verdrakt  en  vertrapt  wordt,  en  zôô  lieftig  gaan  ze  soms  te 
keer  tegen  den  hardvocbtigen  «  rijckman  »,  dat  ik  geneigd 
ben  te  gelooven,  dat  sommige  verzen  wel  konden  inge- 
geven  zijn  door  de  anabaptische  ideeën  die  omstreeks  de 
jaren  lo30  zoo  ongelioord  om  zic.li  grepen. 

Zoo  leest  men  in  refei-ein  26,  1' strophe  : 

Ende  al  zijn  daerme  ghesmeten,  zij  moetent  lierden. 
Zij  moghen  hem  selveii  lecken  willen  zij  versoent  zijn. 
Maer  smeteu  ze  yemende,  tzoïi  moeten  geboet  zijn. 

3^  strophe  : 

Wat  heeren  temmeren,  metsen  of  maeken 
Daerme  moeter  gheven  stijlen  en  staeken, 
Tnioet  altoos  vàn  liueren  halze  diupen. 

In  den  heelen  bundel  is  ongelukkig  maar  één  referein  in 
^t  zotte  (n""  29).  Het  is  een  bitter-komische  klaclit  tegen 
het  huwelijk.  Er  zit  gang  en  leven  in.  Ik  geef  het  hier- 
ac'hter  weei'. 


Uit  het  voorgaande  blijkt  teu  overvloede  hetbelang  van 
ons  manuseript  vooi'  de  Nederlandsche  letterkunde.  Kalff 
heeft  terecht  gewezen  op  het  geringe  aantal  refereinen 
van  vôôr  de  Hervorming,  die  tôt  ons  zijn  gekomen.  Wij 
hebben  een  bundel,  gedrukt  bij  van  Doesborch,  het  hand- 


ONUITI.EC.EVF.N    HEFEREINEN  299 

sclii'ift  van  Jau  van  St^^eyoort,  enkele  refereinen  ait  de 
verzameling  van  Jan  de  Hruyne  (^),  de  Gentsche  uitgave 
van  1539  (~).  Dut  is  ongcveer  ailes.  De  rederijkers  staau 
in  k\vaden  geur  bij  onze  meeste  letterkundigen.  Die  min 
of  lueer  erfelijk  geworden  vooringenomenheid  tegen  hen 
hebben  Knuttel  (3)  en  Kalff(')  gepoogd  den  kop  in  te 
drukken.  Had  Knuttel  de  gedichten  en  refereinen  van 
Doesborch  en  Styevoort  gekend,  hij  zou  wellicht  een  vol- 
lediger  en  eervoller  «  eei'herstel  «  hebben  bewerkt  ! 

Onder  de  handschriften,  die  hier  en  elders  nog  op  het 
uitgeven  wachten,  zal  wellicht  nog  wel  Nvat  goeds  op  te 
diepen  zijn,  en  Van  Houts  oordeel  als  zouden  de  Rederij- 
kers enkel  «  in  hun  vadsigheyt  een  rondeelken  weten  op 
te  ruspen  ».  kon  wel  eens  wat  te  streng  uitvallen. 

Ik  laat  hier  een  paar  refereinen  volgen  nit  den  bnndel, 
dien  ik  zooeven  besproken  heb.  Ik  hoop  in  de  gelegenheid 
te  worden  gesteld,  eerstdaags,  het  handschrift  in  zijn 
geheel  en  met  het  noodige  comraentaar,  te  kunnen  uit- 
geven. 

N^  8. 

Vreest  liu  gliy  nieuscheii  die  zyt  manslaclitig 
Vreest  hu  eer  de  clyncke  up  den  dume  slaet(s) 
Vreest  hu  der  sponde  die  zyt  vrauwe  crachtich 
Vreest  hu  die  gods  ghehodeu  versmaet 
5     Vreest  hu  die  up  vrauwen  speelen  gliaet. 
Vreest  hu  gliy  aile  die  vonnesse  gheeft. 
Vreest  hu  beghevene  (''/  die  vuyt  huwer  regliele  staet 
Vreest  hu  elc  mensche  die  in  nyde  leeft 
10     Keert  hu  vuyt  souden  ende  niet  en  sneeft 
Haut  gods  ghebodeu  cleen  ende  groot 
Vreest  hu  voor  thende  hu  zelven  ancleeft 
Tôt  gods  dieuste  weerde  vrienden  menjoet 
De  soi'ghe  es  meest  in  de  huere  der  doot. 


(')  l  ilgegeven  door  Uielens,  I87!)-I881.  (Sociott'  des  Bibliophiles  auvcrsois). 

(^)  liefercynen...  Geadl,  Joos  L;iini)reclit,  1539. 

(3)  K.MTTEL.  Reclerijhers  eerfterstel.  (GIds,  I,  1910,  l3ovig.). 

(■*)  Kalff,  toc.  cit. 

(5)  eer  het  le  laat  is.  —  (•')  lihtostelingru. 


300  F.   LYNA       « 

Vreest  hu  die  draecht  valsche  ghetugheu 
lô     Vreest  hu  die  lierders  zyt  vanden  scapen 
Vreest  lui  die  vader  noch  inoeder  en  buglien 
Vreest  bu  die  met  valsclieeden  deu  cost  betrapen 
Vreest  hu  die  heereu  eiide  vrauwen  cnapen(i) 
Vreest  hu  die  ghierich  zyt  voort  eertsche  goedt 
20     Vreest  hu  ghy  luxuryeusche  papen 

Vreest  hu  aile  die  wel  weet  dat(2)  sterven  moet 
Vreest  tviants  temptacie  so  sydy  vroet 
En  scuwet  tgloet  des  liels  eonroet(^) 
liloet  zyt  niet  in  duechden  ende  hebter  toe  spoet 
25     Vreest  hu  voort  sterven  scuut  tviants  stoet 
De  vreese  es  meer  in  de  huere  der  doot. 

Vi'eest  hu  ghy  menschen  hoe  vaste  ghy  staet 
Vreest  hu  keysers  coninghen  hertooghen 
Vreest  hu  der  doot  tes  ons  toeverlaet 

30     Vreest  hu  besculdicb  tsyne  voor  gods  ooghen 
Vreest  hu  die  heeden  /weert  daer  es  gheloghen 
Vreest  hu  die  anders  beddeghenoot  begheert 
Haut  Christus  ghebodt  naer  hu  vermoghen 
Vreest  hu  die  in  gulsichheden  tgoet  verteert 

35     Wilt  altyts  dyncken  om  den  uppersten  weei-t 
Dat  hy  u  wille  verleenen  in  habrahams  scoot 
Herberghe  om  hu  ziele  met  duechden  bespeert(*) 
Ende  wilt  hu  altyts  wachten  voor  tvians  c]oot(s) 
De  sorghe  es  meest  in  de  huere  der  doot. 

40     Prince  wilt  dyncken  altyts  om  sterven 

Scuut  plaetse  der  sonden  weest  daer  in  niet  bloet 
Tôt  allen  dueghden  wilt  stellen  hu  bederven (') 
De  sorghe  es  meest  in  de  huere  der  doot. 

N^  29. 

Messie  de  waerheit  god  wilt  my  vergheven 
Van  wonderlicker  planeete  was  noynt  gescreven 
Dan  myn  wyf  es  want  gheen  vruecht  en  raepse 
Kin  canse  niet  ghepaeyen  al  blyvic  huer  beneven  (") 
5     (Jaetse  staetse  waectse  of  slae])se 

Wiltse  ter  kercken  ghaen  ic  vercnaepse  (•*) 


(')  dionen.  —  {•)  dut  ghy.  —  (3)  bende,  jçebroed.  —  (*)  vcrsicnl.  -  (s)  kofjel. 
('')  \>(t{i'mg(m.  —  (")  l)ij  linar.  —  (**)  vergezel  ze. 


OMITGKGEVEX    lU-.FERKINEN  301 

Gaetse  te  betlde  ick  outcousse  ick  ontscoeyse 
Ick  segge  god  sein  u  licf  iiiesse  gheeuse  gaepse 
Dan  neniic  wat  rooswaters  ende  iek  bespoeyse 
10     Legghic  goet  vier  an  sy  secht  ick  verbroeyse 
En  een  rysekiu  dunct  huer  te  zeere  lae^eu 
Sy  claeclit  elkerlycke  en  secht  ick  vermoeyse 
Wat  ick  huei'  doe  kin  canse  niet  ghcjjaeyen. 

Ick  fleeuse  ick  snieecse  en  ick  l'iatteirse 
15     Ick  strycse(')  ick  streecse  (*)  endo  le  stoffeirse 
Met  juweelkins  costelic  nae  tnieuwe  taeliekin  (') 
Ick  stelle  huer  tuutkins(*)  ende  ick  parreirse 
le  voude  huer  capproen  zo  doe  ic  huer  falgekin(^) 
le  rjde  huer  kuerskin  van  naelge  tôt  naelgekin 
20     le  canune  huer  hoef  en  ic  winde  huer  haer 
Al  voor  myn  duere  maekic  een  baelgekin  (") 
Om  datser  uprusteu  soude  myn  wederpacr 
le  slute  deen  duere  hier  dauder  veynster  daer 
Om  dat  huer  niet  een  windekin  en  soude  bewaeyen 
25     Om  huer  believeu  doe  ick  myn  beste  maer 
Wat  ic  huer  doe  kin  canse  niet  ghepaeyen. 

Ic  gheve  huer  ducaten  angeloten(';  en  lipkins('*) 
Om  huer  eten  cokyc  partrj-sen  en  snipkins 
Tvleeskin  suuchse  of  en  de  beenkius  cnaghic 

30     Ick  heffe  huer  stert  up  ick  râpe  huer  slipkins 

Huer  troechskins  (^)  screpicii")  en  liuer  kuekene  vagic 
Ghelieft  u  j^et  anders  lief  dit  vraghic 
Om  datse  van  huer  selven  maect  zo  veil  quax('') 
Sceltseme  smytseme  dat  verdraeghic 

35     le  vaglie  huer  scoens  ende  ic  wryve  huer  clacx  (' -; 
Xoch  vintse  an  myn  wercken  altyt  wat  lacx 
Al  doe  ic  mynen  wille  naer  den  hueren  draeyeu 
Xoch  claechse  en  secht  ic  doe  hier  lettel  ghemac 
Wat  ic  huer  doe  kin  canse  niet  ghepaeyen. 

40     Prinche  de  waerheyt  en  willic  niet  veinsen 
Wat  mond  mach  spreken  oft  herte  ghepeinsen 
Dat  doeic  huor  hehben  van  lecker  mocae^kins  '3) 
Moorbeisciieii  i-ooin  ghcbroct  met  freinsen  {**) 


(*)  reinig  ze.  —  (•')  streel  zc.  —  (^)  modo.  —  {*)  liaarvlecliton.  —  (^)  shiicr. 
(6)  hekwerk.  —  (")  Engeisch  gciudeii  iiuirilstuk.  —  (**)  niuiilstiik  nergeiis  ver- 
raeld.  —  (3)  vaatwerk.  —  (*")  iiiaak  ik  scliooii.  —  (")  oinslag.  —  (*-)  vlekkeii. 
(•3)  suort  vaii  decgkoek.  —  i"j  aardbeziëii  («  fraise  ») 


302  F.    LYNA 

Waermo  pasteyeii  ghesuuckerde  vlaeykins 
45     Feerkins  iuden  wyn  appelen  metten  vicrsaeykins(i) 
Heefse  dit  niet  zo  sechse  zy  es  te  veegherer) 
le  stoofse  ic  waermse  ic  heete  huer  baeykmsi^j 
Dan  draghicse  up  en  neer  lanex  den  steegherei*) 
Sitse  te  liooghe  ic  stelse  wat  leeghere 
50     Om  dat  huer  den  gheest  wat  soude  verfraeyen 
Xoch  segghic  al  bem  ic  huer  aldus  weeghere 
Wat  ic  huer  doe  kin  cause  niet  ghepaeyen. 

Frederik  Lyna. 


(1)  suikererwten.  —  (-)  doodelijk  ziek.  —  (3)  woUen  klcedoren.  —  (■•)  trap. 


Les  «  homines  de  casa  Dei  » 

du  très  ancien  droit  liégeois 


Il  a  existé  à  Liège,  jusqu'à  la  fin  de  l'Ancien  Régime^ 
une  juridiction  spéciale  devant  laquelle  étaient  faits  tous 
les  actes  judiciaires  que  nécessitaient  les  mutations  des 
alleux  situés  dans  la  principauté. 

Cette  cour,  dont  il  est  fait  mention  dès  1207  (^),  siégeait 
entre  la  cathédrale  de  Saint-Lambert  et  l'église  Notre- 
Dame  (-).  Dans  les  textes  relatant  les  œuvres  de  loi 
accomplies  devant  elle,  ses  membres  étaient  désignés 
par  les  mots  homines  de  casa  Dei  ou  hoiuines  de  casa 
Dei  et  beati   Lamberti  (•^),   homines    aUodiah's  et   (h'  casa 


(*)  Analectes  pour  serrir  à  l'/iisloire  eccl('-siasti(jue  ilc  In  liclgii/iir  .-  t.  1» 
Loiiviiiii,  1804,  p.  ;:i()2-3<)3  :  Charte  (l'Hugues  do  Pierrepout,  évêque  de  Liège, 
coiilirmanl  une  douation  dEhroin  de  Fleron  en  laveur  des  abbayes  d'Aulne  et 
du  Val  Sainl-Lamberl  :  ...  intei-  erclesiam  beale  Marie  et  errlesùtm  heati 
Lamberti,  in  loin  iihi  allodioruin  solet  fïrmari  donatio. . . 

(■-)  Cf.  I«  texte  cité  à  la  note  préeédonte  et  en  général  tous  les  actes  éma- 
nant do  la  cour  allodiale  :  la  formule  inlcr  samtam  Mariam  et  Sanctiim 
Lamlurtiim,  entre  Sainte-Marie  et  Sain t-Lamhert  est  toujours  la  mr-me.  Citons 
cependant  le  texte  suivant  particulièrement  caracteristiciue  :  dk  Iîorman, 
Les  ('cfievins  de  la  Souveraine  litstice  de  Lié</e,  Liège,  18*.):2-18il!)  ;  2  vol.  in-i". 
(«  Société  dos  Hlliliopiiilcs  liégeois  )>)  t.  I,  p.  -iSH-W-i  ri2()l,  5  avril)  :  ...  entre 
Sainte-Marie  et  Saint-Lainhier  a  Lief/e,  la  n  oui  a  faite  les  tilns  ai  L'en  justice .  .  . 

(3)  S.  BouMANs  et  SciKioi.MEESTKus,  Cartiilnire  de  l'éf/lise  Sai7it-ljamfierl  de 
Liège,  Bruxelles,  1803-1913;  5  vol.  in-i"  parus  ;  le  .V  par  Ponceikt,  («Commis 
sion  Royale  d'Histoire»)!.  1,  p.  36i-36.'5  (i23G,  26  sept.)  ;  Ibid.  I,  p.  371 
(i23(),  nov.)  ;  J.  Ci  VEi.iKii.  Cartulairc  de  l'Abbaye  du  Val  Benoit,  Bruxelles, 
l!)0(i,  in-i"  («Commission  Royale  d'Histoire»),  p.  i.3»)-l37  (1254,  dèc.)  ; 
Barbiek,  Histoire  de  l'Abbaye  de  Floreffe,  Namur  ,  1802;  2  vol.  in-8  ,  t.  Il, 
p.  11;)  (1257.  19  juin);  Analectes  xxm,  p.  889-390  (1257,  15  sept.)  ;  Cartulaires 
de  S;iiiit-LnH)liert  et  du  Val  lîenoit,  jutssiui. 


oOl  F.-L.    GANSHOF 

IJei  (^),  vu  Iranoais  hoiuincs  de  (^ysc  Dcii  ou  delU-  chisc 
Dieu  (-),  ou  encore  nluens.  alloivens  (•'). 

C'est  l'arcliiprètre  de  Liège  qui  scellait  de  son  sceau  les 
ivctes  de  ce  tribunal  (^);  mais  après  que  celui-ci  eut  ve^u  en 
1403,  par  la  Modération  de  la  Paix  des  Seize  (•^),  une  orga- 
nisation permanente  et  régulière,  un  sceau  propre  à  la 
cour  l'ut  employé  concurremment  avec  celui  de  l'arclii- 
prètre. Le  nombre  des  membres,  jusque-là  variable,  lut 
fixé  à  un  maïeur  et  douze  conseillers. 

Cette  cour  allodiale  était  la  juridiction  suprême  en 
matière  d'alleux  C^)  ;  pour  que  ceux-ci  fussent  considérés 
i-omme  tels,  ils  devaient  être  inscrits  sur  ses  registres  ('). 

* 
*     * 

Que  sont  ces  hontiiws  de  casa  Dei't  Des  éi'udits   se   sont 


fi)  Saint-Lambert,  II,  p.  1-27-1-28  (i-2Gi,  -20  juillet);  Ihid.  U.  p.  131  (l-2(;i_ 
juillet)  ;  Val  Benoit,  |».  180  f  120.^,  juillet)  etc.  —  On  renconlre  aussi  les  formes 
corrompues  hommes  de  capitagio  Dei  (S.  Bormans,  Les  Seigneuries  atlndiales 
/in  Pays  de  Liège,  Liège,  1867,  in-8''  ;  p.  IS,  n.  1,  1278),  ou  en  français  liommes 
<le  chef  Dieu. 

fz)  Val  Benoit,  p.  176-177  (126-i,  7  sept.)  ;  llnd.,  p.  178-180  (1265.  lo  avril)  : 
lliîd.,  p.  183-186  (1267,  22  cet.)  ;  llnd.,  p.  186-187  (1267.  29  oct.)  ; 
Saint -La  mberl.  11,  p.  236-237  (127.3,  17  juillet)  ;  Carlulaires  de  Saint  Lamherl 
<'l  (lu  Val  Benoit,  passim. 

(■')  Par  exemple  dans  S.  P.  Eknst,  Histoire  dn  Limlmiirg  (publiée  par 
Kd.  Lavallaye;,  Liège,  1837-1848,  7  vol.  in-8',  t.  VI,  \k  280-281  (1270j.  —  Cf. 
Jiussi  JAcyi  Ks  iiE  Hemkicoiht,  Patron  del  Tempnraliteit  dans  Uaikem  et  Poi.ain, 
4!inilinues  du  l'aijs  de  Liège,  Bruxelles,  1870-1884,  3  vol.  in-i",  («  Recueil  des 
Anciennes  Coutumes  de  la  Belgique  »)  t.  I,  p.  276. 

{*)  Val  Benoit,  p.  136-137  (12.34,  déc.)  ;  Ibid.,  p.  147-148  (1258,  19  juillet)  ; 
Saint- Lambert,  II,  p.  127-128  (1261,  26  juillet)  ;  Val  Benoit,  p.  176-177  (1264, 
7  sept.)  ;  (Carlulaires  de  Saint-Lambert  et  du  Val  Benoit,  passim. 

i^)  B'iKMA.NS,  Ordonnances  de  la  Principauté  de  Liège,  Bruxelles  1878,  f» 
{«Recueil  des  anciennes  ordonnances  de  la  Belgirpuî  »)•.  Première  série,  p. 397. 

C")  Hk.mkicoikt,  Patron  del  Temporaliteil,  p.  276  :  ...  les  hommes  de 
Monsignor  on  les  esf/iwvins  de  Liège  ou  les  alluwens  encre  Sainte-Marie  et 
Suint-Lambert,  i/ui  sont  les  trois  chie/'s  de  nosfre  pays. . .  —  Sur  la  cour 
idiodiale  et  son  fonctioimement  à  partir  du  xv"  sièchï,  on  se  reportera  aux 
Seigneuries  allodiales  de  S.   Bohmans. 

(')  Ch.  de  Mean,  Observationes  et  res  judicata'  ad  jus  civile  Leodiensium 
<3«éd.  de  M.  G.  de  Louvrex),  Liège,  1740,  2  vol..  î^;Obs.,  121,  n"  14. t.  I,  p.  268. 
-  Plusieurs  cours  allodiales  siégeant  en  diverses  localités  de  la  principauté 
ressortissaient  à  la  coui'  allodiale  de  Liège  (M.  G.  i>e  Loivkex,  Becucil  conte- 
nant les  cdils  et  ricjlenients  faits  pour  le  païs  de  l.iege  et  comicdc  Looz,  Liège, 


Il    HOMINRS    DE  CASA   DEI   »  305 

bornés  à  traduire  hoinincs  allodiaiix  ('),  par  où  ils  euien- 
dent  des  propriétaires  d'alleux. 

Wohhvill  (2)  a  élevé,  avec  raison,  croyons-nous,  des 
doutes  sur  cette  interprétation  ;  il  lui  opposait  essentiel- 
lement les  objections  suivantes  : 

L'expression  homines  de  ca.sa  Del,  surtout  lorsqu'on  y 
ajoute  les  mots  et  sancti  Lumberti,  paraît  impliquer  une 
relation  de  dépendance  personnelle  entre  les  hommes 
ainsi  désignés  et  l'église  de  Liège,  ce  qui  s'accorde  mal 
avec  la  notion  d'alleutier  (^). 

D'autre  part  la  paix  d'Angleur  du  14  février  1313  (*) 
applique  les  mots  hommes  de  chief  Dieu  et  Saint- Lambert 
à  toute  la  population  de  Liège,  patriciens  et  plébéiens.  Il 
n'est  donc  pas  possible  de  limiter  le  sens  de  ce  terme  à 
celui  que  lui  donnait  Sclioonbroodt. 

Après  Wohlwill,  MM.  Des  Marez  {%  G.  Kurth  (6)  et 
Pirenne  (~)  ont  contesté  que  les  homines  de  casa  Dei  aient 
été  des  propriétaires  d'alleux. 

Xous  nous  sommes  efforcé  de  déterminer  à  qui  s'appli- 
quait en  réalité  ce  terme  d'homines  de  casa  Dei  et  comment 


I7.jO-17o2,  i  vol.,  i°,  t.  11,  p.  180)  ;  il  convient  de  citer  |)arnii  elles,  la  cour 
allodiale  de  Uociiei'ort,  (jui  parait  avoir  été  parlioulièrement  importante 
(Lamotte,  Etude  historique  sur  Itt  comté  de  Rochef'ort,  jNamur,  1893,   in-8°, 

p.  -m.) 

(')  IS'otaninient  SciKKiMiKonKi  dniisson  Inventaire  des  Charles  du  Chapitre  de 
Saint-Lamhert  à  Liéf/e,  l.iigf,  IH()3,  in-i"  ;  Dahis  dans  son  Cartulaire  de 
l'Ablxiye  de  Hervkenrode  («  Bullclin  de  l'Institut  arcli(''ol()gi(|ue  liégeois»),  t.  X, 
1870  et  t.  XI,  1872  ;  S.  Bokma.vs  dans  ses  Seif/nemies  allodiales. 

('^)  Die  Anjiiîtge  der  landsttindisrhen  Xerfassiinfi  im  Uisthiim  Liiîtich^ 
Leipzig.  1867,  in-8«,  p.  17<i-177. 

(•*)  Jean  Boitu-HIEU,  Somme  Rurale,  1,  8i,  cité  par  Esmeln,  Cours  élémen- 
taire d'histoire  du  droit  français,  2"  éd.,  Paris,  1893,  in-8°,  p.  217,  n.  2  : 
Tenir  en  franc  alleu  si  est  tenir  terre  de  Dieu  tant  seulement. 

(*)  BoRMA.Ns,  Ordonnances  ;  Première  série,  p.  Hl  ss. 

(•")  Etude  sur  la  propriété  foncière  dans  1rs  villes  du  Mui/en  Ar/e  et  spéciale, 
ment  en  Flandre  (20"  l'asoicule  du  «  Recueil  de  Travaux  publiés  par  la  Faculté 
4e  Philosophie  et  Lettres  de  lUnivcrsitc  de  Cand  )>).  (Jand  et  Paris,  1898,  in-S", 
p.  82. 

(ti)  La  cité  de  Liège  au  Moyen  Aye,  Bruxelles  et  Liège,  1!I()'.I-1!»1U,  3  vol.  in-H». 
t.  I,  p.  L"j7. 

(")  Sur  la  rondilion  sociale  de  Henri  de  Dinanl,  «  Bullelins  de  l'Académie 
Royale  de  Belgique  »,  Classe  des  lettres,  1908,  p.  01. 

20 


30t3  F.-L.    GANSHOF 

cette  expression  a  pu  désigner  les  membres  d'une  cour 
allodiale. 


L'église  de  Liège  —  ou  plus  exactement  St- Lambert  — 
était  originairement  propriétaire  du  territoire  de  la  ville 
de  Liège  avec  ses  environs,  ainsi  que  de  tous  les  domaines 
que  des  donations  successives  y  avaient  ajoutés  (').  L'en- 
semble de  ces  terres  constituait  l'alleu  de  Saint-Lambert. 

L'immense  majorité  des  habitants  de  cet  alleu  appar- 
tenait, au  ix^,  au  X'',  au  xi'  siècle,  aux  divers  échelons  de 
la  non-liberté  ou  de  la  demi-liberté,  et  se  trouvait  donc 
dans  une  situation  de  dépendance  personnelle  vis-à-vis  de 
l'église  de  Liège  ;  elle  constituait  la  familia  ecclesiœ,  dont 
les  membres  pouvaient  être  qualilës  honiines  de  casa  Dei, 
quoique  nous  n'ayons  pas  d'exemple  de  l'emploi  de  cette 
expression  à  ces  éxsoques  très  reculées. 

Dans  cette  familia  de  condition  juridique  inférieure,  un 
groupe  d'hommes  s'élève  peu  à  peu  à  une  situation  sociale 
plus  élevée  :  ce  sont  les  ministeriales,  ceux  des  serfs  ou  des 
demi-libres,  que  l'évêque  a  affectés  à  certains  emplois  de 
sa  maison,  à  certaines  fonctions  domaniales,  ou  dont  il  a 
fait  ses  hommes  d'armes  (^).  La  classe  se  développe  à 
travers  le  xi"  et  le  xii^  siècle  ;  au  xiii",  elle  n'est  i^lus  loin 
d'être  l'égale  des  vassaux  libres,  avec  lesquels  elle  se 
fondra  à  la  fin  du  siècle. 

Or,  pi'écisément  au  début  du  xiii®  siècle,  nous  constatons 
l'emploi  du  terme  homines  de  casa  Dei  comme  synonyme 
de  ministeriales  (•^).  L'expression  prend  un  sens  tech- 
nique {*). 


(1)  WoHi.wii.r.,  op.  cit.,  p.  8-9  ;  Kuktii,  op.  cit.,  t.  I,  p.  157  ;  t.  III,  p.  37i.  — 
L'églisp  n'clail  évidemment  pus  propriétaire  de  tout  le  territoire  qui  constitua 
la  principauté  de  Liège  ;  celle-ci  conipresiait  des  régions  dont  révé(|iu^  n'avait 
reçu  (jue  1(!  cowt?7r////s,  c'est-à-dire  le  pouvoir  public,  ce  qui  n'entraînait  pas 
la  propriété  du  sol. 

(■-)  Nous  nous  proposons  d'expliquer  le  dévelopiiement  liisloriijue  de  la 
ministérialité  liégeoise  au  cours  d'un  ouvrage  d'ensemble  —  actuellement  en 
préparation  —  sur  les  minixtenales  en  Belgi(|ue. 

(3j  Dans  ce  sens,  cf.  Wohlwux,  op.  cit.,  p.  177-178. 

(*)  A  Bâle  pendant  tout  le  xin"^  siècle  /lomines  de  casa  Dei  et  ministeriales 
sont  synonymes  (Aknoi.u,  Verfassungsgescliichte  der  deuischen  Freistddfe  ;. 
Hambourg  el  (lotha,  IS.'ii,  2  vol.  iii-8"",  t.  11,  p.  180-181.) 


<<   HOMINKS   DE   CASA   DEI   »  307 

Nous  en  avons  la  preuve  dans  plusieurs  textes. 

Le  premier  est  une  charte  de  Hugues  de  Pierrepont, 
évôqne  de  Liège,  du  22  juin  1203  (^),  au  sujet  de  l'inféoda- 
tion  de  divers  biens  au  comté  de  Looz.  Dans  le  corps  de  la 
charte,  l'évèque  prend  certains  engagements  envers  le 
comte,  pour  lui-même  et  pour  tota  Leodiensis  ecclesia, 
barones  et  nobiles  et  niinistcriales.  Dans  les  souscriptions, 
on  trouve,  faisant  pendant  à  Vecclesia,  un  groupe  de 
témoins  annoncé  par  de  clericis  ;  répondant  aux  barones  et 
nobiles,  un  autre  groupe  introduit  par  testes  snnt  de  nobili- 
biis  uirls  ;  enfin  un  dernier  groupe  de  témoins  correspon- 
dant aux  ministeriales  et  précédé  par  les  mots  testes  sunf  de 
casa  Dei.  Il  ne  peut  y  avoir  dans  ce  cas  de  doute  sur  la 
nécessité  d'identifier  les  homines  de  casa  Dei  avec  les 
ministeriales. 

La  nécessité  de  cette  identification  s'impose  encore  à 
raison  même  de  la  disposition  des  souscriptions  des 
témoins  :  on  oppose  les  témoins  de  casa  Dei  aux  témoins 
nobles,  comme,  dans  d'autres  chartes,  on  oppose  à  ceux-ci 
les  ministeriales  rassemblés  sous  l'expression  de  familia 
ecclesiœ  {-). 

Cette  disposition  est  encore  la  même  ailleurs.  Elle  l'est 
notamment  dans  une  charte  de  juin  1227  [^),  par  laquelle 
Thierry,  sire  de  Heinsberg,  reprend  à  titre  de  fiefs  des 
alleux  qu'il  a  donnés  à  l'église  de  Liège  ;  elle  l'est  encore 
dans  une  charte  du  14  mars  1234('*),  par  laquelle  Aruould, 
comte  de  Looz  et  de  Chiny,  engage  à  l'église  de 
Liège  ses  avoueries  de  Tongres,  Alken  et  Oreye.  Dans  les 
deux  textes,  les  homines  de  casa   Dei  souscrivent   à    la 


(1)  SainI -Lambert,  1.  p.  387-;588. 

(})  Par  exemple,  Annlecles,  XVII,  p.  7;^-7;')  (1  l.'Ji  :  de  nnbililms  viris  :  . . .  :  de 
familia  Sancli  Lumberli  :  .  . .)  ;  Analectts,  XXIV,  p.  197  (1  l.>i:  nobiles  viri  :...  ; 
de  familia  Sancli  ÏMmberti  :  ...);  Daius,  Notice  historique  sur  l'abbaye  de 
Beaurepart  à  Liège,  «Bulletin  de  l'InsliUit  archéologique  liégeois»,  t.  IX,  1868, 
p.  3i0-341  (1 1.00  :  liberi  homines  :  . . .  ;  de  familia  :  .  .  .)  ;  Miraei  s-Foppens  : 
Opéra  diplomatica,  Louvain  et  Bruxelles,  i  vol.,  1",  t.  II,  p.  1178-1179 
(1173:  fiberi  ho»i.ines  :  .  .  .  ;  de  familia  Sancti  Lamberti  :  ...);  Ibid.,  III, 
p.  ri77-578  (1 19()  :  de  nobilibiis  niris  :  .  . .  ;  de  familia  majoris  ecclesia'  :...);  etc. 

(i)  Salnl-Lambcrl,  1,  p.  "23(^:237. 

(^)  Saint-Lambert,  1.  p.  307-3(59. 


308  F.-L.    GANSHOF 

manière  des  niiiiisteriales,  après  les  viri  nobiles  et  sous  une 
rubrique  différente  (*). 

Dans  d'autres  chartes  encore,  d'ailleurs,  en  1213  (~)  et  en 
i236(•^),  on  retrouve  la  même  distinction. 

Mais  ce  qui  ne  peimet  plus  le  moindre  doute  sur  la 
nécessité  d'identifier  avec  les  ministeriales,  les  homines 
de  casa  Dci,  c'est  l'examen  des  noms  que  portent  ceux-ci. 

Bodon  de  Hozémont  (1203)  est  cité  dans  trois  textes  de 
1176,  1178,  1196,  comme  minislerialis  {'^)  ;  Garnier  de 
Nivelles  (1203)  l'est  en  1196,  1204  et  1209  (^^  ;  Gérard  de 
Hozémont  (1203),  l'est  en  1203,  1204  et  1209  (6)  ;  Lambert 
de  Iluy  (1203),  en  1204  et  1209  (')  ;  ses  ancêtres  le  sont 
depuis  le  xi^  siècle  (8)  ;  Libert  et  Rigaad  de  Lexhy  (  1203), 
en  1203,  1204  et  1209  (9)  ;  Fastré  de  Hemricourt  (1203-1227), 


(1)  1:227  :  .  . .  nohilium  vero  hominum  :  ...  ;  lioniinum  etiam  de  casa  Del  :. . . 
1234  :  . . .  viroruni  nohilium  -.  . .  .  ;  et  hominuvi  de  casa  Dei  :  .  .  . 

(2)  Ernst,  VI,  p.  181-182  (. ..  tam  nolnl'nim  hominiiin  ndslronon  iiuam 
homimtm  de  casa  Dci.) 

(■')  Saint-Lambert,  I,  p.  367-3()9  (. . .  miiltis  utils  noliililnis  hnmlnilnis  nostris 
et  de  rasa  Dei.) 

(*)  Daris,  Beaurepart,  p.  343-344  :  liberi  homines  ■....;  de  familia  ecclesia- 
Sancti  Lamherfi  sunt  testes  : .  . .  Godinus  de  Hosemont  et  Boddo  frater  ejus.  . .  ; 
MiRAEUs,  II,  p.  1183;  MiRAKus,  III,  p.  577-378  —  Pour  ces  diverses  ideiUili- 
catioiis,  nous  nous  bornons  à  indiquer  les  sources  en  ne  repi'oduisant  une 
partie  du  texte  que  pour  une  seule  réiérence. 

(5)  MiRAEUS,  III,  p.  S77-.578  {de  noinliltits  viris  -.  .  .  .  \  de  familia  majoris 
ecclesia'  :  . . .  Wanieriis  de  Nivella . . .)  ;  de  Reiffenberg,  Momtincnts pour  servir 
à  l'histoire  des  provinces  de  Namur,  de  Hainanf  et  de  Luxemliourg,  Bruxelles, 
in-40  («  Commission  Royale  d'Histoire  »),  t.  I,  1844,  p.  13  ;  Ilnd.,  1,  p.  129-131  ; 
Saint- Lambert,  1,  p.  157-159. 

C')  Daris,  Beaurepart,  p.  350-351  [de  liberis  hominHnis  :  ...  ;  de  familia 
Sancti  Latnherti  :  Gerardus  de  Hozémont . .  .)  ;  de  Reiffenberg,  Momiments,  I, 
p.  13:  Ibid.,  1,  p.  129-131  ;  Saint-Lambert,  I,  p.  157-1.'J9. 

(")  DE  Reiffenberg.  Monuments,  l,  p.  13;  Saint- Lambert,  I,  p.  157-159  (c/p 
hominibus  suis  ntilrllibns  :  . . .  ;  de  favnlia  :  Latnlnrtns  de  Iloio. . .) 

(8)  Cf.  par  exemple  :  Saint-Lamiiert,  I,  p.  4G-48  (1090)  ;  Bulletin  de  l'Institut 
archéoloçfique  liégeois,  l.  XII,  p.  21  (1124)  ;  Bulletin  de  la  Coinmission  Boyale 
d'Histoire,  4e  série,  t.  1,  p.  108-109(1129,  25  mai)  ;  Miraeis,  III,  p.  708-710 
(1147)  etc. 

(•')  Daris,  Beaurepart ,  p.  .3J!)0-351  (Rigaiid)  ;  de  Reiffenbei»;,  Momonents,  I, 
p.  13  (Libert  et  Rigaud)  ;  llyid.,  I,  p.  129  131  (plusieurs  témoins  nobles  suivis 
des  mots  et  (juamptures  viri  nobiles  ;  puis  les  noms  de  (pielques  ministeriales 
connus,  el  parmi  eux  Libert  de  Lexiiy)  ;  Saint- Lambert,  I,  p.  157-159  (Libert)- 


((   HOMINES   DK  CASA   DEI   »  309 

en  120;^,  1209  et  1220  (^j;  Baudouin  de  Jeneffe  (1227-1236), 
en  1220  (~);  Guillaume  de  Hozémont  (1227),  en  1209  (•^); 
Godefroid  de  Skeuvre  (1227),  en  1220  ('). 

Lorsqu'en  1295  (»),  le  chapitre  de  Saint-Ijambert  et  le 
mambour  font  allusion,  dans  une  charte  aux  divers  ordres 
de  la  population  qu'ils  ont  consultés,  ils  font  encore  une 
place  particulière  aux  homes  de  le  chise  Deii,  c'est-à-dire 
sans  doute  ici  aux  représentants  des  familles  de  minis- 
teriales  (6),  dont  la  fusion  avec  la  noblesse  était  encore 
toute  récente. 

Nous  arrivons  ainsi  à  déterminer  l'un  des  sens  de  l'ex- 
pression homines  de  casa  Dei,  employée  au  xiii®  siècle 
comme  synonyme  de  ininisterintes. 

En  tenant  compte  de  cette  signification,  on  comprend 
pourquoi,  lorsqu'en  1230  C)  Baudouin  de  Jeneffe  est  investi 
de  la  cliâtellenie  de  Waremme,  il  doit  prendre  l'engagement 
que  son  fils  aîné  épousera  feininnm  de  casa  Dei  et  beati 
Lamberii  {^),  c'est-à-dire  une  femme  appartenant  à  la 
ministérialité  de  Saint-Lambert, 

C'est  qu'en  effet,  Baudouin  et  son  fils  sont  —  on  l'a  vu  — 
des  ministeriales  de  Liège  ;  or,  si  le  fils  de  Baudouia 
épousait  une  femme  n'appartenant  pas  à  la  ministérialité 
liégeoise,  son  petit-fils  suivrait  la  condition  de  sa  mère  à 


(1)  Dakis,  Beaurepart,  p.  330-351  (lâ03j  ;  ue  Reiffenrekg,  Monunie/i/s,  I, 
p.  120-130(1209)  ;  Saint -Lambert,  1,  p.  18(5-188  (nièmo  disposition  quàravanl- 
(iernicre  référence  de  la  note  précédente). 

(■-)  Saint-Laiiilwr/,  I,  p.  18()-I88. 

(»)  llrki. 

(*)  llmL 

(5)  Charte  inédite  (L/'6<T  f//«;7.  498);  extrait  reproduit  |)ar  \N Diii.wii.i.,  o/;. 
cit.,  p.  97,  n.  2  :  euissieines  tnandeit  les  chevaliers  et  le  conscilh  de  Ititnes  riles 
de  pais  et  les  homes  de  la  chise  Den. 

(••)  Ce  qui  contribue  à  nous  le  faire  croire,  c'est  notamment  une  autre  charte 
de  1293  (2  nov.  ;  Saint-Lamhert,  II,  p.  329-331)  dans  la(iuelle  on  annonce 
successivement  les  sceaux  des  nobles  homes,  puis  ceux  des  chevaliers  du  comte 
de  Looz,  et  autres  chevaliers  dele  escheviet  de  Liège.,  (jui  sont  prt'cjscment 
presipie  tous  des  descendants  de  ministeriales,  notamment  Guillaume  de 
llemricourt  et  (lérard  de  Berlo/  cités  en  tête. 

(■)  Saint-La mliert,  I,  p.  239  (1230,  2  mars)  ;  Wohlwill  (p.  .-i-'i,  n.  2  et  p.  180) 
avait  déjà  saisi  la  véritable  portée  de  ce  texte. 

(*)  BoioiANS  {Seigneuries  alludialcs,  p.  9-10)  avouait  ne  pas  pouvoir  s'expli- 
quer cet  usage:  il  s'iinajiiuait,  en  effet,  (|u'il  s'afjissait  de  la  cour  allodialc. 


310  F.-L.    GANSHOF 

lui  (*)  et  la  c'iuitellenie  de  A\'aremme  passerait  dans  une 
maison  sur  laquelle  l'évêque  de  Liège  et  le  chapitre  de 
Saint-Lambert  n'auraient  pas  nn  pouvoir  aussi  direct  que 
sur  un  de  leurs  niinisieriales.  Bien  plus,  l'église  de  Liège 
verrait  lui  échapper  une  famille  importante  de  sa  minis- 
tèrialité. 

Cette  restriction  à  la  liberté  de  mariage  est  simplement 
une  mesure  tendant  à  conserver  l'intégrité  du  domaine. 
Elle  correspond  absolument  aux  mesures  analogues  prises 
en  ce  qui  concerne  les  serfs. 

C'est  aussi  en  voyant  en  eux  des  ministeriales  que  l'on 
peut  arriver  à  comprendre  pourquoi,  dans  une  charte  du 
4  juin  1260  {^),  le  chapitre  de  Saint-Lambert  réserve  à  des 
honiines  de  casa  Dei  les  fonctions  de  châtelain  de  la  forte- 
resse de  Sainte- Walburge.  Cette  mesure  est  évidemment 
dictée  par  le  souci  de  ne  pas  voir  cette  importante 
forteresse  aux  mains  de  vassaux  sur  lesquels  le  chapitre 
aurait  moins  d'action.  Des  vassaux  nobles,  plus  indépen- 
dants, installés  sur  cette  hauteur  qui  domine  Liège» 
auraient  constitué  pour  la  ville  un  danger  considérable. 

* 

*     * 

A  côté  de  l'acception  technique  de  ministeriales,  les 
mots  homines  de  casa  Dei  ont  conservé  le  sens  général  de 
membres  de  la  familia  de  Saint-Lambert.  Mais  par  suite 
de  l'affranchissement  progressif  de  la  population  urbaine 
de  Liège  et  des  autres  villes  soumises  à  l'autorité  de 
l'évêque,  une  partie  importante  de  cette  familia  devait  être 
désormais  considérée  comme  libre.  Aussi,  au  xiii'  siècle, 
le  terme  familia  n'a-t-il  plus  désigné  exclusivement  les 
serfs  ou  les  demi-libres  de  l'église  (3),  mais  aussi  quel- 
quefois tous  ceux  qui  relevaient,  au  temporel  ou  même  au 
spirituel,  de  la  juridiction  èpiscopale  (^). 


(1)  En  vertu  du  principe  fructus  ventrem  sennUnr. 

(2)  Suint-Linnberl ,  II,  p.  117-1 18  —  Wohlwill  {op.  cit.,  p.  55,  n.  2)  avait 
également  coinitris  qu'il  était  ici  question  de  ministerialex. 

(3)  Comme  par  exemple  dans  un  texte  de  12G5  {Saint- Lamhrrt ,  il,  p.  157- 
158;  cl'.,  WdHi.wn.i-,  a/t.  cit.,  p.  179,  n.  1.) 

{■*)  (lest  le  cas  notamnienl  dans  un  acte  du  20  juin  1215  relalil  à  Maostcicht 
(A.  WAr  TKKS  :  De  l'onyine  et  des  premier.^  développements  des  lUierlis  vomimi- 
nnles  en  llelf/ùiiie  ;  l'reiirrs,  Bruxelles,  1809,  in-H",  p.  159-1()1). 


«   HOMINES   DE   CASA   DEI   »  311 

C'est  conçue  dans  ce  sens  large  de  sujets  de  l'église  que 
la  fâmilia  Sancti  Lamberti  a  pu,  au  xiii*  et  au  xiv*  siècle, 
être  indiquée  par  l'expression  hoinines  de  casa  Dei  (*). 

Ainsi  s'explique  le  fait  que  la  Paix  d'Angleur  du 
14  février  1318  (^)  qualifie  les  parties  contractantes,  c'est-à- 
dire  toute  la  population  de  Liège,  de  hommes  de  chef  Dieu 
et  Saint-Lambert  {^) 

Pris  dans  cette  acception  générale  de  sujets  de  l'église, 
les  mots  homines  de  casa  Dei  constituent  en  quelque  sorte 
un  archaïsme,  une  survivance  (**)  du  temps  où,  avant 
l'affranchissement  de  la  bourgeoisie,  tous  les  sujets  de 
l'église  étaient  les  serfs  ou  demi-libres  de  Saint-Lambert. 

Mais  peut-être  faut-il  donner  encore  au  terme  homines 
de  casa  Dei  un  troisième  sens  :  au  sein  de  la  population 
urbaine  de  Liège,  qui  a  dû  comprendre  très  rapidement 
des  éléments  adventices  assez  nombreux,  les  descendants 
des  membres  de  l'ancienne  fnmilia  de  vSaint-Lambert 
auraient  constitué  comme  un  groupement  privilégié, 
analogue  à  celui  des  homines  sancti  Pétri  de  Louvain, 
descendants  des  membres  de  l'ancienne  familia  de  l'église 
Saint-Pierre  (^). 

On  comprendrait  ainsi  une  disposition  de  la  charte  de 
l'évèque  Albert  de  Cuyck,  confirmée  par  Philippe  de  Souabe 
en  1208  (*^),  d'après  laquelle  des  citoyens  de  Liège  peuvent, 


(*)  C'est  ce  qu'avait  déjà  vu  Wohlwi II  (op.  vil.,  p.  179)  qui  cependanl  no 
s'était  pas  reiiiiu  (•onqjte  ((uil  n'était  pas  ici  (jucslion  de  tninisteriales. 

(■')  BouMASs,  Ordonnâmes  ;  Première  série,  p.  lil-lio. 

(■^)  Art.  21  :  ht  se  les  parties  avoieni  inestier  de  conseille  de  dit  capitle  ni 
ocquison  des  dis  mais,  H  dis  capitle  les  en  doit  conselhier,  si  avant  qu'illi  en  est 
tenus  a  chu  qu'illi  puissent  eistre  maintenus  a  loy  si  corn  hommes  de  chef-Dieu 
et  Saint-Lambert,  solonc  la  constumnie  dei  pays. 

(*)  WoHLwnj,  (op.  cit.,  p.  181)  a  déjà  noté  ce  caractère  de  survivance. 

(5)  M.  PntENNF.  indique  cette  sij^nilication  et  l'ail  ce  rapprocliement  dans  sa 
Note  sur  Henri  de  IH/ianI  (p.  01)  citée  |)lus  liant.  —  Sur  les  homines  Sancti 
Pétri,  cf.  H.  Van  r>F.K  Linhen.  Histoire  de  la  constitution  de  la  ville  de  Lonvain 
au  moyen  âge,  Gand,  189:2,  in-8°  (T«"  fascicule  du  «  Recueil  de  Travau.x  publiés 
par  la  Faculté  de  Pliilosopliie  et  I.ettres  de  l'Université  de  Gand),  p.  a-1 1. 

{^}  G.  Kl  RTii,  Les  origines  de  la  commune  d''  Licgc,  «  Hullelin  de  l'Institut 
arcliéologi(iue  liégeois,  t.  XXXV,  1905»,  p.  30i-;{09  ;  art.  l:î:  Si  aticui  liheru 
homini  ad  facicndam  legem  suam,  iiniis  aul  duo  liltcri  homines  defuerini,  hene 
Hcelùl  civihus  Lendiensihus  cum  eo  et  pru  eo  Jiirure,  si  lumen  de  casa  Dei 
fuerlnt. 


312  F.-L.    GANSHOF 

si  iamen  de  casa  Dci  fiicriiit,  servir  de  co-jureiirs  à  un 
noble  (1). 

Ainsi  peut  aussi  se  justifier  l'appellation  hommes  de  cise 
Dieu  donnée  à  des  citains  de  Liège,  c'est-à-dire  à  des 
bourgeois  {^),  qui,  à  partir  de  la  seconde  moitié  du  xiii* 
siècle,  constituent  de  plus  en  plus  l'élément  prépondérant 
dans  la  cour  allodiale  siégeant  entre  Sainte-Marie  et 
Saint-Lambert  (^). 


Comment  se  fait-il  que  ces  homines  de  casa  Dei,  en  qui 
nous  avons  reconnu  tantôt  des  ministeriales  et  tantôt  en 
général  des  sujets  de  l'église,  soient  juges  en  matière 
d'alleux  ? 

Il  convient  de  se  demander  d'abord  ce  que  sont  en 
réalité  ces  alleux. 

Il  paraît  peu  probable  qu'à  l'intérieur  du  patrimoine  de 
Saint-Lambert,  qui  constituait  un  alleu,  il  ait  pu  exister 
originairement  des  propriétés  libres.  Tout  le  sol  devait 
appartenir  à  l'église  C*).  Et  pourtant,  dans  le  courant  du 
xiii^  siècle,  les  œuvres  de  loi  accomplies  entre  Sainte-Marie 
et  Saint-Lambert  paraissent  bien  avoir  des  alleux  jjour 
objets  (5). 

Nous  croyons  que  la  solution  du  problème  est  indiquée 
par  quelques  textes  que  nous  avons  réunis. 


(•)  Wolilwiil  (op.  cil  ,  p.  178)  a  le  lort,  crojons-nous,  de  considérer  les  mots 
si  tamen  de  casa  Dei  fueriiit  comme  se  ra|)i)orlanl  au  lil)er  hoinu  :  liber  homo 
et  de  casa  Dei  paraissent  des  termes  contradictoires. 

{-)  Parmi  lesipiels  se  trouvent  xles  descendants  de  ministeriales,  tel  Thomas 
de  Heniricourt,  marchand  de  vin,  niaïeur  de  la  cour  allodiale  en  1330 
(Hainl-Lamltert,  III,  p.  3;3!2.) 

(^)  Saint-Linnherl ,  II,  p.  127-128  ^1261,  26  juillet)  ;  Val  Benoit,  p.  171-172 
n2G3,  2i)  juillet)  ;  ll>iil.,p.  170-177(126-4,  7  sept.):  Ihid.,  p.  178-180  (1265, 
l;i  avril);  lliid.,  \k  180  (1265,  juillet);  Ihid,  186-187  (1267,  29  oct.;  ;  Saint- 
Latnhcrl,  H.  p.  23()-237  (1275,  17  juillet);  Cartulaires  de  Saint-Lambert  et  du 
Val  Benoit,  passini. 

{*)  Dans  ce  sens:  Wom.vvn.L,  op.  cit.,  p.  181  ;  I)i;s  Mahez,  op.  cit.,  p.  30-31 
KiHTH,  Cité  de  Liège,  t.  111,  p.  375;  Ha.nsay,  L'alleu  urbain  à  Liège  au  Xlle 
siècle,  «15idlelin  Philologique  et  Historique  publié  par  la  Société  pour  le  progrès 
des  éludes  historiques  et  philologiques»,  t.  I,  1920,  p.  35. 

(5)  Cf.,  noiaFnment  Saivt-Lamiierl,  II,  p.  6.5-67  (1254,  16  janvier)  :  decein 
lifr/iiitirÎK  (le  fiiirii  allnditi  incii. 


c<    HOMINES   DE   CASA   DEI   »  313 

Le  premier  est  une  charte  de  1146  ('),  par  laquelle 
Henri  de  Le3'en,  évêque  de  Liège,  met  l'abbaye  d'Aflli- 
gbem  (2)  en  possession  d'une  terre  sise  à  Frasnes-lez- 
Gosselies  (^)  pour  être  affectée  au  prieuré  que  l'abbaye 
avait  en  cet  endroit.  Or  la  terre  dont  il  s'agit  est  un 
nllodluni  qiiod  Albertiis  de  Tines  atqiie  iixor  ejiis  Agolon- 
dis  tenebant,  et  qui  avait  été  donné  à  la  dite  Agolendis  par 
sou  père  lors  de  son  mariage.  Cet  alleu  est  vendu  à 
l'abbaye  d'Afflighem  ;  mais  (jiiia  vero  Alberliis  de  familia 
beatî  Lantberti  erat  (■*)  et  ideo  hoc  idem  allodiiiin  ad  eandem 
ecclesiam  jiertinebat,  c'est  Tévêque  qui  met  l'abbé  en  pos- 
session de  la  terre  et  qui  recevra  annuellement  de  celui-ci 
un  cens  de  deux  deniers,  récognitif,  à  n'en  pas  douter,  du 
domaine  éminent  de  Saint-Lambert. 

Il  ressort  nettement  de   ce  texte  qu'un  membre   de  la 
familia  de  Saint-Lambert  ne  pouvait,  au  xn«  siècle,  avoirt 
de  propriété  foncière  personnelle;  il  n'était  qu'un  tenan 
de  l'église;  l'alleu  dont  il  disposait  appartenait  à  celle-ci. 

C'est  ce  qui  ressort  également  d'une  charte  à  peu  près 
contemporaine  (elle  est  des  environs  de  1147(5)  dans 
laquelle  Gobert,  neveu  d'Henri  de  Leez,  donne  à  l'abbaye 
d'Afflighem  un  alleu  de  dix  bonniers,  situé  près  de  la  cour 
de  Lauzelle  (^i.  La  donation  est  faite  à  charge  pour  le 
donataire  de  payer  chaque  année  un  cens  d'un  denier 
Sancto  Lamberto...  in  die  natali  ejiisdem  martyris  ciiiiis 
serviis  ego  >mm,  ajoute  le  concédant.  Ici  encore  ce  cens  — 
dont  la  modicité  indique  le  caractère  récognitif  du  domaine 
éminent  —  prouve  que  nous  nous  trouvons  en  présence 
d'un  alleu  appartenant  non  pas  au  donateur,  mais  à  l'église 
de  Liège,  dont  il  est  miiiisterialis  ;  ce  donateur  n'est  qu'un 
tenant. 


f)  E.  DE  Makneffe,  Cartnlaire  d' Aff'lighem  (Analedes  pour  servira  l'hisloire 
erclesiasfiffue  de  la  Belgùfite,  2^  section  :  Cartulaires  et  Doatmen's  (-tendus, 
Louvain,  189i-1896,  in-S"),  p.  H7-118. 

(-)  Dépendance  d'Hekelghem,  province  de  Brahant,  arrondissement  de 
Bruxelles,  canton  d'Assclie. 

(3)  Province  d(^  llainani,  arrondissement  de  Cliarleroi,  canton  de  Gosselies. 

{*)  C'est-à-dire  qu'il  était  ministerialis  de  l'cglise  de  Lièvre. 

(5)  DE  Makneffe,  Carlulaire  d'Afflif/hcm,  p.  1:21. 

('")  La  ferme  de  Lauzelle  est  située  sur  le  territoire  de  la  commune  de 
AVavre  (province  iU'  Hraliani,  arroiulisscnicnl  de  Ni\ elles,  ciief-lieu  de  canton). 


314  F.-L.    GANSHOF 

Un  troisième  texte  —  celui-ci  de  1207  (^)  —  n'est  pas 
moins  caractéi'istiqne  :  c'est  une  charte  de  Hugues  de 
Pierrepont,  évoque  de  Liège,  notifiant  qu'Ebroïn  de  Flé- 
ron,  chevalier,  a  donné  aux  abbayes  d'Aulne  {^)  et  du  Val- 
Saiut-Lambert  (3)  son  alleu  d'Alleur  (■*)  et  de  Hombroux  (^). 
Or,  avant  de  faire  le  transfert  entre  Sainte-Marie  et  Saint- 
-Lambert,  hoc  allodiiini  prias  quidem  noniine  elemosine  in 
maniis  nostras  reportavit,  dit  l'évêque.  Il  nous  parait  que 
si  l'alleu  est  reporté  d'abord  par  le  donateur  entre  les 
mains  de  l'évêque,  c'est  qu'il  dépend  de  celui-ci. 

Quelles  conclusions  est-il  permis  de  tirer  de  ces  textes  ? 

Ils  légitiment  à  nos  yeux  l'hypothèse  que  les  alleux  que 
nous  rencontrons  dans  les  domaines  de  Saint-Lambert 
sont  des  alleux  de  l'église  (^),  qu'ils  constituent  son 
treffojid  ('),  et  qu'une  usurpation  lente,  mais  incontestable, 
fut  nécessaire  pour  qu'on  les  considérât  comme  des  alleux 
appartenant  à  ceux  qui,  dans  le  courant  du  xiii''  siècle, 
accomplissent  à  leur  sujet  des  œuvres  de  loi.  Ceux-ci  ne 
sont  donc  que  des  tenants,  et  la  cour  allodiale  n'est 
originairement  qu'une  cour  de  tenants  (8),  tout  comme  une 
cour  féodale  ou  censale. 

De  cette  manière  on  comprend  comment  des  homines  de 
casa  Dei,  des  membres  de  la  familia  aient  pu  être  des 
hom ines  allodiales. 


(')  Analecfes,  1,  p.  362-363. 

(')  Dépendance  de  Gozée,  province  de  Hainaul,  arrondissemenl  et  canton 
(le  Tliuin. 

(•*)  Dépendance  de  Seraing-sur-Meuse,  province  de  Liège,  arrondis- 
sement de  Liège,   ciief-iieu  de  canton. 

(■»)  Province  de  Liège,  arrondissemenl  de  Liège,  canton  de  Fexhe-lez-Slins. 

(5)  Dépendance  d'Alleur. 

('')  Dans  ce  sens  :  Woiii.wn,!.,  op.  cit.,  p.  181  ;  Klrth,  Cite'  de  Licge,  t.  I, 
p.  l.o7  ;  t.  111,  p.  382  —  Wohlwill  tire  argument  —  avec  raison,  ijensons-nous 
—  en  faveur  de  (;etle  hypothèse,  du  fait  que  les  actes  émanant  de  la  cour 
allodiale  sont  scellés  par  l'archiprètre,  survivance  de  l'époque  où  le  domaine 
éminent  de  l'église  sur  les  alleux  correspondait  à  une  realité. 

(')  Cf.  dans  P.  Euueka,  Le.t  Masiiirs,  Bruxelles,  1891,  2  vol.  in-S»,  t.  I. 
p.  37i,  un  extrait  de  la  traduction  française  faite  au  xui»-'  siècle  de  la  charte  de 
l'avouerie  de  .luinel,  de  1201  :  Ircffons  el  alhied  y  sont  synonymes. 

(•*)  Dans  Cl' sens  :  IMhknne,  Henri  de  Dinaiil,  p.  61  et  Kiuth,  (/ilr  de  Liège, 
I,  ]).  l.")7,  n.  3. 


((   HOMINES   DK   CASA    DEI   »  315 

Ce  qui  paraît,  d'ailleurs,  prouver  que  ces  allodia  n'ont 

pu  être  de  véritables  alleux,  c'est  le  fait  même  que  tous  les 

actes  juridiques  accomplis  à  leur  sujet  devaient  se  faire 

devant  cette  juridiction  spéciale  des  homines  de  casa  Dci. 

S'il  s'était  agi  de  terres  appartenant  en  pleine  propriété  à 

ceux  qui  en  faisaient  le  transfert,  le  tribunal  compétent 

eût  été  le  tribunal  public,  c'est-à-dire  celui  des  échevins. 

* 
*     * 

Il  n'en  est  pas  moins  vrai  que  dans  le  courant  du 
XIII'  siècle  déjà,  les  homines  de  casa  Dei  étaient  tenus  pour 
propriétaires  d'alleux  (i).  Nous  l'avons  dit,  ceci  est  dû  à 
une  usurpation.  Services  et  redevances  dus  pour  les 
tenures  sont  tombés  peu  à  peu  en  décadence. 

Certaines  de  ces  tenures  —  celles  notamment,  sans 
doute,  qui  avaient  été  attribuées  aux  ininisteriales  —  ont 
pu  être  primitivement  de  ces  fiefs  de  service,  tenus  à  foi 
sans  hommage,  qui  ont  été  longtemps  en  Allemagne  les 
fiefs  propres  aux  nilnisieriales  (^).  On  conçoit  que  des  fiefs 
de  cette  nature  aient  pu  perdre  plus  aisément  leur  carac- 
tère et  être  considérés  par  leurs  possesseurs  comme  des 
alleux,  lorsque,  dans  le  courant  du  xii*  siècle  (•^),  les  ininis- 
teriales liégeois  reçurent  des  fiefs  ordinaires.  L'hommage 
qui  manquait  aux  fiefs  de  service,  apparaissait,  en  effet, 
désormais,  comme  l'élément  essentiel  du  contrat  féodal. 

Mais  la  plupart  des  tenures  faisant  partie  du  domaine 
allodial  de  Saint-Lambert  ont  été  des  biens  censaux. 
Originairement  les  membres  de  la  familia  qui  en  étaient 
les  tenanciers,  ont  dû  acquitter  de  ce  chef  un  cens 
récognitif  de  la  propriété  de  l'église,  ou  payer  en  cas  de 
changement  de  propriétaire  ou  de  tenant  un  droit  de 
relief,  dit  droit  de  réquisition.  Mais  en  même  temps  que 


{})  Cf.  KiKTH,  CJlr  de  Lirf/e,  1,  p.  i.^7,  ii.  8. 

('^)  ScHuoEDKR,  Lrhrhiirh  fier  (lotit strlien  Ficclilsgencliic/ile,  o<-'  édit.,  Leipzii;, 
1907,  iii-8»,  p.  ii8  ;  Kfjtuen,  Die  Enlsteliung  lier  deuischen  Minisleiialitiit 
«  ViertclJMlirsi'hrift  fur  So/.ial-  iind  Wiftscliaftsgescliichte  »,  t.  VIII,  1910, 
p.  508 -.WJ. 

(•*)  Nous  savons  par  Gislebort  de  Mons,  Clironi<iue  (édition  de  L.  V'andor- 
kindere,  Bruxelles,  190-i,  in-8",  «  Commission  Royale  d'Hisloire  »),  c.  -217, 
p.  30"2-308.  (ju'en  I  l9o.  Hellin  do  Ville  en  Uesbaye,  eomniandanl  du  cliàlean 
de  Hu>  et  miinslcrialis  de  l'évèque  de  Liej^e,  avait  fait  lionimage  au  ci  mile  de 
Nannir  pour  un  fief  qui  n'est  pas  précisé. 


316  F.-L.    GANSHOF 

les  citains  s'affranchissaient,  les  cens  fonciers  et  les  droits 
de  relief  (*)  de  bien  des  terres  tombèrent  en  désuétude  {^), 
le  nom  d'alleu  qui  s'appliquait  à  elles,  en  se  pla^;ant  au 
point  de  vue  de  l'église  à  qui  elles  appartenaient,  leur  fut 
désormais  appliqué  en  se  plaçant  au  point  de  vue  de  l'an- 
cien tenant,  considéré  dorénavant  comme  propriétaire. 

Nous  n'avons  guère  conservé  de  textes  relatant  des 
actes  juridiques  accomplis  devant  la  cour  allodiale  anté- 
lieurement  à  cette  transformation,  qui  devait  être  achevée 
au  début  du  xiii^  siècle  {^).  Mais  les  origines  de  cette  cour 
remontent  plus  haut. 

Elle  n'a  dû  être  d'abord  qu'une  réunion,  au  centre  de 
lalleu  de  Saint-Lambert,  de  membres  de  la  familia  de  cette 
église,  qui  tenaient  d'elle  une  portion  de  son  alleu.  C'est 
ainsi  que  s'explique  la  double  appellation  de  ses  membres  : 
homines  de  casa  Dei  et  hoinines  allodiales.  Entre  eux, 
comme  devant  une  cour  de  i)airs,  ils  faisaient  tous  les 
transferts  de  leurs  tenures,  propriétés  de  l'église  de  Liège, 
et  dont  ils  n'avaient  que  le  domaine  utile  ("*!. 

Lorsqu'à  la  suite  de  l'évolution  que  nous  avons  esquissée, 
ces  tenui'es  furent  considérées  comme  appartenant  à  leurs 
tenants,  l'usage  ne  changea  pas  :  ce  fut  toujours  entre 
Sainte- Marie  et  Saint-Lambert,  devant  les  homines  de  casa 
Dei,  que  s'accomplirent  les  œuvres  de  loi  ;  mais  désormais 
les  hommes  de  cise  Dieu  constituaient  une  cour  composée 
d'alleutiers,  et  il  en  fut  ainsi  jusqu'à  la  fin  de  l'Ancien 
Régime.  François  L.  Ganshof. 


(')  Dans  un  acte  de  vente  de  mars  1225,  il  est  «Micore  question  d'un  alleu 
fjrevé  d'une  rente  et  comportant  un  droit  de  relief  (Souonbrooht,  Inventaire 
des  citurtes  de  Saint-Lambert ,  \\°  i8.) 

(2)  WoHi.wn.i.,  op.  cit.,  p.  181  ;  Ki  kth,  Citr  de  Liège,  I,  p.  157. 

(^)  C'est  en  1207  {.inalectes,  1,  p.  862-363),  en  elfet,  (|ue  nous  rencontrons  le 
dernier  texte  où  l'on  trouve  encore  des  traces  recoiuiaissables  du  domaine 
éminenl  de  l'église  de  Liège  sur  un  alleu  donl  l'affectation  est  faite  entre 
Sainte-Marie  et  Saint-Lambert. 

(■')  Absolum(Mit  comme  cela  se  faisait  encore  à  Saint-Trond  en  i25i  :  nous 
y  voyons  à  cette  date  une  mutation  d'alleu  accomplie  devant  despares  allodii... 
(jui  oinnes  hahent  de  allodio  ecclesie  {Le  livre  de  l'Abbé  Guillaume  de  Ryckel, 
publié  par  H.  Puœnne,  Bruxelles,  1896,  in-8»,  <<  Commission  Royale  d'His- 
toire »,  n.  331). 


L'accession  du  Luxembourg 
au  Zollverein  en  1842 


L'union  douanière  belgo-luxembourgeoise  a  mis  fin  à 
l'accord  commercial  qui,  pendant  trois  quarts  de  siècle,  a 
uni  les  destinées  économiques  du  grand-duché  de  Luxem- 
bourg à  celles  du  Zollverein. 

L'entrée  du  Luxembourg  dans  le  Zollverein  ne  fut  con- 
clue qu'à  la  suite  de  discussions  longues  et  pénibles  et  c'est 
à  leur  corps  défendant  que  le  roi  grand-duc  et  ses  sujets 
se  résignèrent  à  lier  le  sort  de  leur  pays  à  celui  des  Etats 
de  l'Association  commerciale  allemande. 

Les  négociations  engagées  sous  Guillaume  I®%  au  lende- 
main même  du  retour  du  Luxembourg  sous  sa  souveraineté, 
avaient  abouti  sous  son  fils  et  successeur  Guillaume  II  à 
la  signature  du  traité  du  8  août  1841.  Mais  lorsque  le  roi 
grand-duc  connut  les  conditions  draconiennes  insérées  par 
la  Prusse  dans  le  traité  et  qu'il  constatât  le  mécontente- 
ment que  l'union  projetée  provoquait  dans  le  Luxembourg, 
il  se  décida  à  refuser  la  ratification  des  préliminaires 
signés  à  Berlin  par  sou  plénipotentiaire. 

J'ai  raconté  ailleurs  (^)  l'effet  que  produisit  la  décision 
du  roi  grand-duc.  Le  gouvernement  prussien  voulut  y  voir 
une  manœuvi'e  de  la  France  et  un  recul  de  l'influence  ger- 
manique. Le  roi  de  Prusse  écrivit  à  son  roj-al  cousin  et 
ami  pour  l'avertir  des  dangereuses  conséquences  de  sa 
résolution.  Mais  rien  n'3'  fit;  le  roi  Guillaume  déclara  que 
la  force  même  ne  le  ferait  pas  céder  et,  pour  mettre  la 


(')  «Les  ilestiiu'es  éroiioiniques  liii  Ltixenibourfï  en    18il.   Zitllveroiii  ou 
Union  belge?  »  Revue  ge'nc'ra/e.  février  19:2:2. 


318  FL.    nE   LANNOY 

Prusse  et  l'Europe  en  présence  du  lait  accompli,  il  offrit  à 
la  Belgique  de  conclure  avec  elle  ime  union  économique^ 
ou  tout  au  moins  un  traité  de  commerce.  Cette  union 
repondait  aux  vœux  des  Belges  et  des  Luxembourgeois. 
Depuis  1839,  une  loi  spéciale,  dite  loi  de  faveur,  atténuait 
pour  les  habitants  du  Luxembourg  allemand  la  rigueur  de 
la  législation  douanière  belge,  et  la  Belgique,  pour  des 
motifs  sentimentaux  et  politiques  autant  que  pour  la  sau- 
vegarde de  ses  intérêts  économiques,  redoutait  l'établisse- 
ment de  relations  étroites  entre  le  Grand-Duché  et  l'Alle- 
magne. 

Les  menaces  de  la  Prusse,  la  crainte  aussi  que  le  roi 
Guillaume  ne  profitât  de  la  suppression  des  douanes  pour 
favoriser  la  propagande  orangiste  dans  ses  anciens  Etats, 
paralj'-sèrent  la  bonne  volonté  du  gouvernement  belge  :  au 
moment  de  conclure,  il  recula  et  perdit  ainsi  l'occasion 
d'atténuer  une  des  désastreuses  conséquences  du  traité 
des  XXIV  articles. 

Guillaume  II,  abandonné  par  la  Belgique,  brouillé  avec 
la  Prusse  et  pressé  i^ar  ses  sujets  luxembourgeois  de  faire 
cesser  le  dangereux  isolement  économique  de  leur  petit 
pays,  chercha  en  vain  une  solution  qui  lui  permît  de  réser- 
ver l'avenir  en  maintenant  l'indépendance  du  Grand- 
Duché. 

Je  voudrais,  dans  ces  quelques  pages,  rappeler  à  la  suite 
de  quelles  circonstances  il  fut  obligé  de  reprendre  les 
négociations  avec  la  Prusse,  et  comment  la  Belgique  con- 
tribua, pour  une  part  bien  minime,  il  est  vrai,  à  faire 
entrer  le  Luxembourg  dans  le  Zollverein. 


Depuis  le  moment  où  le  roi  Guillaume  avait  refusé  de 
ratifier  le  traité  d'accession  du  Luxembourg  au  Zollverein, 
la  Prusse  avait  employé  tous  les  moyens  pour  vaincre 
l'obstination  du  roi.  L'échec  des  négociations  avec  la  Bel- 
gique avait  été  un  premier  succès  i)our  la  diplomatie  prus- 
sienne; elle  espérait  bien  en  profiter  x'our  amener  le  roi  à 
céder.  Mais  le  roi  était  soutenu  dans  sa  résistance  par  le 
représentant  de  la  France  à  La  Haye,  M.  de  Bois-le-Comte, 
et  c'est  ce  qui  exaspérait  la  Prusse.  M.  de  Bois-le-Comte,  à 


LUXEMBOimC.    ET    ZOLLVEREIN  319 

la  tin  d'octobre,  avait  rejoint  son  poste  et  l'on  n'avait  pas 
tardé  à  constater  que  «  le  monde  politique  de  La  Haye 
subissait  son  influence  inquisitoriale  et  passablement  tra- 
cassière  »  (^).  Le  diplomate  français  avait  offert  au  roi 
d'appliquer  au  Luxemboin-g-  les  stipulations  du  traité  com- 
mercial franco-hollandais.  Il  lui  avait  aussi  conseillé, 
pour  échapper  à  la  pression  qu'on  s'efforçait  d'exercer 
sur  lui  par  l'intermédiaire  du  gouvernement  hollandais, 
d'abdiquer  la  couronne  grand-ducale  en  faveur  d'un  de 
ses  fils. 

Ni  l'une  ni  l'autre  de  ces  deux  propositions  n'avaient 
chance  de  réussir.  La  seconde  ne  plaisait  pus  au  roi  et, 
quant  à  la  première,  elle  était,  de  l'avis  du  prince  de  Chi- 
may,  «  sous  le  masque  de  la  conciliation,  un  puissant  ali- 
ment de  discorde».  L'union  du  Luxembourg  à  la  France 
était  précisément  ce  que  l'Allemagne  redoutait  par  dessus 
tout.  On  connaissait  à  Berlin  les  s^^mpathies  des  Luxem- 
bourgeois pour  la  France  et  l'on  prévoyait  que  si  la  garni- 
son prussienne  de  la  forteresse  se  trouvait  noyée  dans  une 
population  que  les  relations  commerciales  rapprocheraient 
chaque  jour  de  la  France,  elle  ne  serait  plus  «  qu'une  senti- 
nelle perdue  de  la  Confédération  ».  C'est  en  éveillant  la 
crainte  d'une  alliance  franco-luxembourgeoise  que  le 
ministre  de  Prusse  à  La  Haye,  M.  de  Lottum,  avait  obtenu 
l'appui  de  ses  collègues  dans  la  campagne  injuste  et  pas- 
sionnée qu'il  menait  contre  le  roi  grand-duc;  il  avait  même 
trouvé  un  allié  assez  inattendu  dans  le  ministre  anglais, 
Sir  Edward  Disbrowe.  Ce  diplomate,  personnage  borné  et 
violent  (2),  considérait  la  non-ratification  «  comme  un 
démembrement  que  la  France  voulait  faire  subir  à  l'Alle- 
magne et  que  l'Europe  ne  devait  pas  tolérer  ».  Il  avait 
répondu  à  Guillaume  II  qui  lui  demandait  son  avis  «  que 
le   l'efus    de   i-atifier   était   contraire   à   toute    espèce    de 


(')  Dépèolie  (lu  priiicc  de  Ohiinay.  27  octobri'  IStl.  Lc>  ilf|i(V*li('s  helges  pro- 
viennent des  A7Tlnves  ihi  Ministère  des  Affaires  KIrangères  de  Bruxelles  : 
registres  Pai/s-lSas,  4;  Aufriche,  8:  Prusse,  (>;  Grnnde-lireUunie,  18.  — 
Atcltives  /uditico-comnierciales  :  .Vccession  du  Luxembourg  au  Zollverein.  Dos- 
sier spécial  18:2. 

(■')  «  L'homme  aux  rares  idées»,  eoninie  l'appelail  un  di'  ses  eollègues. 


320  FL.    DE   LANNOY 

droit  ))  (^).  Cette  attitiule  pouvait  paraître  étouuante,  car 
l'Angleterre  n'avait  aucun  intérêt  à  favoriser  l'extension 
de  l'Association  des  douanes  allemandes  et  elle  avait  même 
fait  tout  ce  qu'elle  avait  pu  pour  empêcher  cette  associa- 
tion de  se  former  et  ensuite  de  se  consolider.  Mais  dans  la 
circonstance  présente  l'Angleterre  faisait  le  sacrifice  — 
très  grave  à  ses  yeux  —  d'un  intérêt  commercial  à  un  reste 
de  l'esprit  de  iSlo,  au  désir  de  ne  laisser  affaiblir  aucune 
des  garanties  armées  que  le  Congrès  de  Vienne  avait  éle- 
vées contre  la  France. 

Le  chef  du  Foreign  Office,  lord  Aberdeen,  ne  se  contenta 
pas  d'approuver  l'attitude  de  son  agent  à  La  Haye,  il  voulut 
agir  |)ersonnellement  sur  l'esprit  du  roi  et  lui  adressa  une 
dépêche  qui  pressait  Guillaume  II  de  revenir  sur  sa  déci- 
sion :  «  Les  difficultés  du  roi  grand-duc,  déjà  formidables, 
peuvent  devenir  plus  grandes  encore,  à  moins  que  Sa  Ma- 
jesté n'écoute  les  conseils  prudents  et  modérés...  Le  gou- 
vernement de  Sa  Majesté  (britannique)  n'a  aucun  intérêt 
direct  dans  cette  affaire,  sans  doute,  aucun  dans  l'adoption 
de  la  marche  qu'il  approuve.  Mais  son  opinion  a  été  exclu- 
sivement formée  par  la  considération  de  ce  qui  paraissait 
devoir  le  plus  contribuer  à  l'honneur  et  à  l'avantage  du  Roi 
lui-même  w  ('^j.  Lord  Aberdeen  ajoutait  que  son  opinion 
était  partagée  par  les  cabinets  de  Saint-Pétersbourg  et  de 
Vienne.  Le  ministre  d'Autriche  à  La  Haye,  M.  de  Senfft, 
qu'on  considérait  à  juste  titre  comme  l'homme  le  plus 
modéré  et  le  plus  influent  du  corps  diplomatique,  désap- 
prouvait les  écarts  de  langage  et  les  procédés  passionnés 
de  son  collègue  prussien,  mais  comme  celui-ci  il  condam- 
nait la  conduite  du  roi  :  «  Sans  nier  le  droit  absolu  qu'avait 
le  roi  à  ne  pas  ratifier,  il  estimait  qu'il  était  insolite  d'en 
faire  usage  et  qu'on  devait  reprocher  au  roi  moins  son 
refus  que  l'esprit  anti-allemand  qui  l'y  avait  porté,  après 
qu'il  s'était  laissé  entourer  et  entraîner  dans  le  Luxem- 
bourg par  ce  qu'il  y  avait  de  plus  exalté  parmi  les  révolu- 


(1)  Df'pêclio  (le  Bois-lc-Conilc,  30  oi-lobre  18 il.  Les  (lé|têclies  fraii(;aises  sont 
extraites  des  Àrrliims  du  Ministire  des  Affaires  Klrangires  de  Paris.  Registres  :  ' 
Pays-Hds  (543  (sept.-diV..  1841),  04i  (jaiiv.-juillel  1842j. 

('■^j  Dépêclie  de  lord  .Vberdeen,  19  novembre  1811. 


LUXEMBOURG    F.T    ZOLI.VE    F.  \  '-^'21 

tionnaircs  belges  ».  La  Pi'ussc  eût  voulu  cutiaincr  l'Au- 
tiiche  à  une  action  commune  et  obtenir  d'elle  qu'elle  agît 
à  La  Haye  au  nom  de  la  Confédération  germanique.  Mais 
Metteruich  refusa;  il  consentit  seulement  à  proposer  à 
Guillaume  II  sa  médiation  pour  trouver  une  solution  qui 
satisfît  en  même  temps  le  roi  et  le  Zollverein  «  (^). 

C'était  dans  ce  sens  aussi  que  la  Russie  consentait  à 
intervenir  à  La  Haye.  Le  ministre  de  Russie  suggérait  au 
roi  grand-duc  l'idée  de  ratifier  le  traité  tout  en  faisant  des 
réserves  pour  les  articles  qui  paraissaient  blessants  pour 
l'amour-propre  de  la  nationalité  luxembourgeoise.  Mais 
les  bons  conseils  pas  plus  que  les  menaces  ne  semblaient 
faire  impression  sur  l'esprit  du  roi.  Il  répondait  à  l'envoyé 
russe,  bien  dévoué  cependant  aux  intérêts  de  la  Hollande  : 
«  Vous  pouvez  envoyer  chez  moi  200,000  on  '500,000  hommes 
et  vous  n'en  trouverez  que  30,000  pour  vous  attendre,  mais 
vous  les  trouverez.  Les  temps  où  le  roi  de  Hollande  avait 
peur  sont  passés.  »  Et  il  ajoutait  :  <c  Xous  verrons  bien 
comment  ils  me  forceront  à  mettre  mon  Willem  au  bas 
d'un  traité  quand  je  ne  le  veux  pas  !  »  (-) 

Aune  note  officielle  publiée  par  le  gouvernement  prus- 
sien dans  le  courant  du  mois  d'octobre  (^),  le  roi  grand-duc 
répondit  par  uu  mémorandum  qui  fit  scandale  parce  que 


(M  Calmes,  hir  Zollanschluss  des  Grnsslu-rzoijliims  Liixcnilmij/  iiti  Dculsifi- 
/«m/(18i2-l!tl8),  i,  p.  1»)9. 

('-)  Dépèclio  du  marquis  de  la  Rozièro,  12  oclobre  I8i2  :  «  Jo  suis,  disait 
Guillaume  II  au  diplomate  français,  un  petit  roi,  un  très  petit  roi,  mais  je  suis 
maître  chez  moi,  uu  point  sur  un  i,  mais  un  poiut.  J'ai  des  liens  avec  les  sou- 
verains du  Nord;  je  suis  le  beau-frère  de  l'un  d'eux,  cousin-germain  de 
l'autre.  C'est  très  bien,  mais  je  n'entends  pas  être  autre  chose.  " 

( ')  La  note  prussienne  du  18  octol>rc  déniait  au  roi  p:rand-duc  le  droit  de  no 
pas  ratiiier  un  traité  conclu  par  des  plénipotentiaires,  confornicment  à  leurs 
instructions.  Klle  voyait  dans  la  non-ralilication  le  triomiihe  du  parti  anti- 
all(>niand  dans  le  Grand-Duché  :  «  Ce  parti,  qui  depuis  1830  et  les  années 
suivantes  a  ('te  si  actif  contre  la  maison  d'Orange,  a  relevé  la  tète  avec  arro- 
gance. La  répulsion,  on  peut  même  dire  lavcrsion  contre  l'Allemagne,  le 
penchant  pour  les  voisins  non-allemands,  s'exprime  sans  réserve...  Il  est  indé- 
niable que  ce  n'est  pas  la  jjrotection  et  l'encouragement  des  intérêts  matériels, 
mais  des  passions  ijoliticjues  qui  sont  les  vrais  motifs  de  l'activité  politique 
des  partis  du  tirand-Ducht'.  Le  but  de  cette  activité  n'apparaît  ([ue  troj)  claire- 
ment, c'est  la  séparation  complète  du  Luxembourg  de  IWlIemagne...  » 

21 


322  FL.    DE   LANNOY 

pour  légitimer  sa  conduite,  Guillaume  II  y  faisait  allusion 
à  une  lettre  privée  de  Frédéric-Guillaume  et  à  l'approba- 
tion qu'il  avait  reçue  du  roi  de  Prusse  (').  C'était,  certes^ 
un  procédé  très  incorrect  et  l'on  comprend  qu'à  Berlin  on 
ait  qualifié  la  note  hollandaise  d'  «  incongrue  w.  Les  minis- 
tres prussiens  auraient  voulu  recourir  à  des  mesures  de 
coercition,  soumettre  l'affaire  à  la  Diète,  mais  ces  moyens 
répugnaient  à  Guillaume  IV. 

Stifft,  le  directeur  de  la  chancellerie  luxembourgeoise, 
plus  Prussien  que  Hollandais,  confiait  secrètement  à  Lot- 
tum  son  opinion  personnelle  :  «  D'après  lui,  il  n'y  avait 
qu'un  moyen  de  faire  céder  le  roi...  c'était  de  forcer  le  roi 
de  Hollande  par  la  Hollande  elle-même.  Stifft  conseillait 
donc  d'envoj^er  un  ultimatum  avec  la  menace  de  mesures 
contre  le  commerce  hollandais  si  la  ratification  n'était 
pas  donnée  dans  un  délai  fixé  et  assez  court  pour  que  dans 
l'intervalle  un  traité  ne  fût  pas  signé  avec  la  France  ou  la 
Belgique.  ))(2)  Ce  fut  la  dernièi-e  manœuvre  de  Stifft.  Depuis 
quelque  temps  déjà  le  roi  grand-duc  avait  retiré  sa  con- 
fiance à  ce  fonctionnaire  infidèle.  Au  début  de  novembre 
il  le  renvoya  et  nomma  comme  chancelier  M.  de  Bloc- 
hausen,  le  représentant  le  plus  actif  du  parti  français 
dans  le  Grand-Duché. 

Stifft  partit,  mais  le  conseil  donné  par  lui  était  bon  et 
Lottum  s'empressa  d'eu  faire  son  profit.  Précisément  les 
États- Généraux  venaient  de  se  réunir;  par  eux  on  pouvait 


(ij  Noie  de  .M.  de  Slifft  du  25  octobre  18il  :  «  11  y  a  encore  un  fait  qui  mérite 
d'être  relevé  dans  la  note  prussienne,  disait  le  cliaiicelier  grand-ducal,  c'est  la 
correspondance  particulière  entre  le  roi  grand-duc  et  S.  M.  le  roi  de  Prusse 
dont  le  mémoire  ne  fait  aucune  mention.  CeUe  correspondance,  il  est  vrai, 
n'est  i)as  conçue  dans  les  formes  diplomali(iues.  Cependant,  le  sens  du  contenu 
de  la  jireinière  lettre  du  roi  grand-duc,  écrite  à  S.  M.  le  roi  de  Prusse  et  ofli- 
ciellement  envoyée  par  l'intermédiaire  du  général  aide  de  camp  (}ui  également 
rai)porla  la  réponse  de  S.  M.  prussienne  fut  de  demander,  avant  de  prendre 
auiunt;  détermination,  l'assentiment  du  moins  tacite  du  roi  de  Prusse  ;»  la  non- 
ratilication.  .Viires  avoir  exposé  avec  la  plus  complète  franchise  rend)arras  où 
la  signature  du  traité  avait  placé  le  roi  grand-duc,  la  réponse  du  roi  de  Prusse 
ne  pouvait  être  interprétée  que  dans  un  sens  parfaitement  conlunne  aux  désirs 
du  roi  grand-duc  et  c'est  alors  seulement  que  la  résolution  définitive  de  ne  pas 
ralilier  fut  prise.  » 

(2)  Lottum  au  roi  de  Prusse,  2i  octobre  18il. 


LUXEMBOIHG    HT    ZOLLVEREIN  323 

agir  sur  le  roi.  rjOttura,  aidé  par  Disbrowe,  s'efforça  d'en- 
traîner les  membres  des  Etats  à  refuser  le  budj^et,  à  moins 
que  le  roi  ne  renonçât  à  la  couronne  grand-ducale  en 
faveur  d'un  de  ses  fils. 

Cette  ingérence  étrangère  déplaisait  aux  Hollandais, 
mais  la  crainte  de  compromettre  leurs  colonies  en  se 
brouillant  avec  l'Angleterre  et  la  prospérité  de  leur  com- 
merce en  rompant  avec  l'Allemagne  les  impressionnait 
vivement. 

Quelle  que  fût  l'obstination  du  roi,  il  lui  était  impossible 
de  ne  pas  tenir  compte  du  mécontentement  de  ses  sujets  (*). 
L'écliec  de  l'entente  avec  la  Belgique  l'obligeait  en  quel- 
que sorte  à  reprendre  les  négociations  avec  le  Zollverein. 
Une  nouvelle  lettre  de  Frédéric-Guillaume  lui  offrit  l'oc- 
casion de  sortir  de  l'isolement  dangereux  où  il  se  trouvait 
placé.  La  lettre  commençait  par  des  menaces,  mais  elle 
promettait  au  roi  les  bons  offices  de  son  cousin,  s'il  con- 
sentait à  cltercher  un  terrain  d'entente.  «...  Votre  gouver- 
nement oublie  vis-à-vis  du  mien  ou  plutôt  des  nôtres  jus- 
qu'aux .  formes  requises  par  la  diplomatie  européenne. 
Toute  l'Allemagne  et  bien  au  delà  des  limites  de  la  coali- 


(')  Les  hommes  politiques  les  plus  uianiiiauts  (loniiMiciit  torl  an  roi.  Le 
baron  van  Zuylen,  (pii  avait  refusé  d'accepter  le  ministère  des  Affaires  Htran- 
gères  tant  (|uo  la  (piestion  de  la  ratification  ne  serait  pas  solutionnée,  disait  au 
(li[)lomate  français  :  «  Ce  maudit  Luxembourg,'  nous  a  toujours  porté  nialiieur. 
Sous  l'ancien  roi,  il  lui  a  servi  de  prétexte  à  sa  folle  résistance;  sous  celui-ci, 
il  va  nous  impliquer  dans  des  tiraillements...  Qu'est-ce  que  ces  Luxembour- 
{jeois  pour  lesquels  nous  allons  nous  exposer  à  des  complications?  Des  trans- 
fuges, des  félons  qui,  après  la  révolution  belge,  ont  été  les  premiers  à  criera 
la  déchéance  de  la  maison  de  Nassau...  "  Pour  décider  le  roi  à  donner  sa 
rntilication,  M.  van  Zuylen  lui  écrivit  une  lettre  où  il  allait  justpi'ii  lui  dire  (juc 
son  refus  de  ratilier  était  un  procède  dvloyal.  Le  roi,  après  avoir  reçu  cette 
lettre,  lit  venir  un  de  ses  conseillers,  M.  Rappartr  -  Allez,  lui  dit  il,  reporter 
celte  lettre  à  M.  van  7,uylen  et  revenez  dans  une  demi-heure  avec  la  lettre  tout 
entière  biffée  de  sa  main  ou  avec  sa  démission.  S'il  persiste  à  croire  son  maître 
déloyal,  il  lU'  doit  plus  le  servir  ;  dites-lui  que  je  lui  parle  comme  son  roi  que 
je  suis;  si  je  pouvais  lui  parler  comme  |)articulier,  je  lui  dirais  autre  chose.  • 
—  Rappart  était  revenu  ave(t  la  lettre  biffée.  —  Falck,  le  ministre  hollandais  a 
Uruxelles,  désapi)rouvail  aussi  le  roi.  »  C'est  un  ancien  républicain,  disait  le 
roi  en  parlant  de  lui,  je  l'observe  avec  attention;  ce  n'est  pas  d'aujourd'hui 
que  j'ai  des  soupçoris  siu-  lui...  ••  Cf.  dépêche  de  Bois-le-Comte,  !•  novem- 
bre 1841. 


324  FL.    DE    LANN'Y 

tion  douanière  retentit  d'un  seul  cri  d'indignation.  Il  n'y 
a  pas  de  doute  que  la  Zollkonferenz  qui  va  se  réunir  ne 
demande  des  mesures  de  rétorsion.  La  Diète  germanique 
même  agitera  fortement  la  question  luxembourgeoise.  Et 
moi,  dont  l'influence  aurait  peut-être  j)u  calmer  la  trop 
grande  agitation,  moi,  j'ai  les  mains  liées.  L'indiscrétion 
commise  par  un  ou  deux  de  Vos  trop  zélés  serviteurs,  en 
montrant  deux  lignes  du  commencement  et  deux  lignes  de 
la  fin  de  ma  première  lettre  à  Vous,  cher  et  bon  Guillaume, 
me  condamne  à  l'inaction...  En  un  mot  votre  position  peut 
devenir  très  critique.  » 

Frédéric,  après  avoir  rappelé  ce  qu'il  avait  fait  pour 
amener  le  roi  grand-duc  à  ratifier,  ajoutait  :  «  Voici  n)on 
idée.  Vous  enverriez  un  négociateur  ici  et  Vous  nous  feriez 
dire  :  «  Ah  ^'a!  entendons-nons.  Votre  traité  était  pour 
quatre  ans.  Ce  temps  est  trop  long.  J'ai  eu  de  giands  doutes 
sur  son  opportunité  j^our  mon  Grand-Duché  :  ces  quatre 
ans  l'auraient  peut-être  ruiné.  C'est  pour  cela  que  je  ne 
ratifierai  jamais  avec  les  quatre  ans.  Mais  n'j'  aurait-il  pas 
moyen  de  changer  ces  vilains  quatre  ans?  Si  vous  acceptez 
un  an  de  durée,  tout  est  changé.  Un  an  ne  fera  pas  de  mal 
au  Luxembourg.  Donnez-moi  un  an  et  je  signe.  »  Qu'en 
pensez-vous,  cher  Guillaume?... 

(c  Si  au  contraire  Vous  rejetez  mes  bonnes  et  loyales 
intentions,  je  me  trouverais  au  bout  de  mon  latin.  Je  ne 
pourrais  plus  faire  prévaloir  le  cousin  —  chose  bien  cruelle 
pour  mon  cœur  —  et  je  me  trouverais  dans  la  triste  néces- 
sité de  ne  plus  me  mêler  personnellement  de  l'affaire  et 
d'en  laisser  faire  une  purement  de  gouvernement  à  gou- 
vernement.. Si  vous  entrez  dans  mes  vues,  le  cousin  se 
mettra  en  quatre  pour  faire  adopter  Vos  propositions  aux 
autres  cours  du  Zollverein.  Tout  en  ne  pouvant  ^'ar a; j//r 
le  succès  de  mes  bons  offices,  je  n'en  doute  pas...  » 

Deux  jours  après,  Frédéric-Guillaume  ajoutait  en  post- 
scriptum  :  «  J'ai  fait  parler  depuis  à  quelques  gens  du 
métier  sur  le  côté  i)ratique  d'un  traité  pour  un  an  Ils 
énoncent  de  grands  doutes  sur  la  bonne  volonté  d'y  entrer 
des  autres  États  du  Zollverein.  Cette  circonstance  ne  me 
retient  pas  un  moment  de  vous  envoyer  M  de  Luck  avec 
cette  lettre     La  chose  principale  est  que  Vous  renouiez 


LUXEMBOURG    ET    /.OI.IA  KiHEIN  H25 

avec  nous  autres.  Prenez  le  niotiï  (iiin  un  ou  bien  celui  de 
meilleures  conditions  pour  la  frontière  des  deux  Luxera- 
bourgs  (chose  plus  faisable  peut-être)  ou  tout  autre  motif, 
mais  renouez,  renouez,  renouez!!!  iwniit  que  les  clameurs 
des  Hollandais  ou  les  mesures  du  Zollverein  et  de  la  Diète 
de  Francfort  Vous  3'  forcent.  Je  prie  Dieu  qu'il  guide 
Votre  cœur  et  Vos  pas.  » 

Le  roi  de  Prusse  engageait  donc  son  cousin  à  ratifier  en 
y  mettant  comme  condition  ou  bien  de  signer  pour  un  an. 
ou  bien  d'obtenir  des  conditions  spéciales  pour  le  maintien 
des  relations  entre  les  deux  Luxem bourgs. 

Guillaume  II,  au  lieu  de  choisir  entre  ces  deux  condi- 
tions, se  décida  à  les  réclamer  toutes  les  deux.  Au  début 
de  décembre,  il  renvoya  M.  de  Scherff  à  Berlin  pour 
reprendre  les  négociations  et  proposer  pour  prix  de  sa 
ratification  })Oiir  un  an  l'admission  de  tontes  les  condi- 
tions que  la  Belgique  mettrait  au  maintien  de  la  loi  de 
faveur.  Avant  son  départ,  M.  de  Scherff  fît  connaître  au 
prince  de  C'himay  la  nouvelle  résolution  de  son  maître  : 
«  Je  n'ai  pas  besoin  de  vous  dire,  confia-t-il  au  ministre 
belge,  l'opinion  du  roi  sur  les  relations  à  maintenir  entre 
les  deux  parties  du  Luxembourg.  C'est  donc  à  la  Belgique 
H  nous  aider  à  sortir  d'embarras.  Si  nous  sommes  jugés  par 
la  Diète  nous  devrons  sans  aucun  doute  subir  le  traité 
pour  quatre  ans;  si  nous  transigeons,  nous  serons  libres 
au  bout  de  la  première  année  —  mais  pour  cela  il  nous  faut 
le  concours  du  gouvernement  belge...  Il  serait  à  désiicr 
que  le  général  Willmar  reçût  des  instructions  pour  agir  de 
concert  avec  moi,  de  manière  à  ce  que  le  maintien  de  la  loi 
du  6  juin  et  des  compensations  fissent  (dans  un  instrument 
séparé)  partie  de  la  transaction.  »  (')  Le  roi  grand-duc  se 
mettait  ainsi  «  à  la  merci  de  la  Belgique  »,  mais  il  créait 
pour  cette  dernière  une  situation  très  délicate  :  «  I^a  ques- 
tion du  Luxembourg,  remarquait  Chimay,  se  trouve  placée 
entre  l'Allemagne  et  la  France.  La  première  s'est  unani- 
mement prononcée  sur  la  ratification.  La  seconde,  ;ui  con- 
traire, obéissant  involontairement  peut-être  à  son  instinct 


(')  DépOcbf  (lu  iniiice  ilo  Gliiniiiy.  :2l  iiovcinlnc  IStl 


326  FL.    DE   LANNOY 

national  plus  qu'à  la  raison,  s'est  élevée  contie.  »  (*)  Si  le 
roi  Léopold  mettait  au  maintien  de  la  loi  de  1839  des  con- 
ditions inacceptables,  il  risquait  de  se  brouiller  avec  la 
Prusse;  s'il  cédait  trop  facilement,  il  mécontentait  la 
France.  Avec  une  extrême  habileté,  le  roi  grand-duc 
endossait  donc  à  la  Belgique  la  responsabilité  du  succès 
ou  de  l'échec  des  négociations. 

A  Bruxelles,  on  espéra  un  moment  que  ce  rôle  d'arbitre 
permettrait  d'obtenir  des  avantages  considérables.  «  Il  ne 
saurait  échapper  à  votre  attention,  mandait  M.  de  Briey 
au  ministre  belge  à  Berlin,  qu'il  y  a  par  le  fait,  une  grande 
différence  entre  notre  position  actuelle  et  celle  que  nous 
avions  avant  lés  embarras  suscités  j)ar  le  refus  de  ratifica- 
tion du  roi  grand-duc.  Nous  pouvons  aujourd'hui  nous 
montrer  phis  exigeant  qu'auparavant.  »  (-) 

Mais,  malgré  l'invitation  du  roi  de  Prusse  et  la  promesse 
de  ses  bons  offices,  M.  de  Scherff  et  ses  propositions  furent 
fort  mal  accueillis  à  Berlin.  Les  ministres  prussiens, 
revenant  sur  une  parole  donnée  précédemment,  firent 
valoir  que  l'établissement  du  traité  pour  un  an  ne  valait 
pas  les  frais  et  les  pertes  que  causerait  au  Zollverein 
l'union  avec  le  Luxembourg. 

Quant  à  la  seconde  demande  luxembourgeoise,  elle  parut 
tout  à  fait  inadmissible.  Un  des  membres  du  ministère 
prussien,  rencontrant  M.  Willmar,  lui  déclara  que  M.  de 
Scherff  arrivait  avec  des  conditions  qui  n'étaient  pas 
acceptables;  et  comme  M.  Willmar  s'étonnait  et  faisait  la 
supposition  que  ces  conditions  devaient  donc  être  bien 
plus  importantes  que  celles  que  la  Belgique  avait  présen- 
tées avant  le  8  août,  le  ministre  prussien  répondit  :  «  Celles- 
là  n'étaient  déjà  pas  si  modestes!  La  demande  d'introduire 
io,000  moutons  dans  un  pays  d'une  population  de 
150,000  habitants,  c'était  vraiment  vouloir  le  monopole  de 
la  vente  des  moutons.  »  (^) 

La  Prusse  ne  voulait  pas  accorder  les  allégements  récla- 
més en  faveur  des  produits  métallurgiques  belges  paice 


(')  I)c|H'clie  (lu  priiKM'  de  (Iliiinny,  Hi  novoinhi'c  ISil. 
(•^)  de  Briey  ii  Willmar,  8  (i.Tciiihn'  18il. 
P)  I).'|mm1m>  (Ii>  WilliiiMi-.  -_>:{  (i.'Tcnii.n-  I8il. 


LUXEMBOURG    ET    ZOLI.VEHEIN  327 

que  ces  dégrèvements  ne  profiteraient  pas  aux  provinces 
rhénanes.  Si  les  intérêts  luxembourgeois  se  trouvaient 
quelque  peu  compromis  par  la  suppression  de  la  loi  belge 
de  1839,  on  estimait  qu'ils  trouveraient  une  compensation 
suffisante  dans  l'ouvertui'C  du  marelic  allemand. 

Aux  efforts  de  M.  de  Scherff  s'ajoutèrent  bientôt  ceux 
de  deux  commissaires  luxembourgeois,  MM.  Simons  et 
Pescatore,  qui  avaient  tenu  à  défendre  eux-mêmes  les  inté 
rôts  de  leur  pays.  Ils  faisaient  partie  de  la  commission 
réunie  par  le  roi  pour  l'éclairer  sur  la  situation  du  Grand- 
Duohé  et  avaient  été  naguère  de  çliauds  partisans  de  la 
révolution  de  1830;  on  les  savait  très  opposés  à  l'entrée  du 
Luxembourg  dans  le  Zollvei-ein  ,mais  aussi  très  aigris  de 
l'échec  des  négociations  avec  la  Belgique  ('). 

L'accueil  qu'on  leur  réserva  à  Berlin  fut  des  plus  frais. 
Pour  faire  échouer  leur  mission,  on  avait  écrit  du  Luxem- 
bourg à  divers  membres  du  gouvernement  prussien  dans 
un  sens  tout  à  fait  mensongei'  sur  leurs  antécédents  On 
avait  même  avancé  que  M.  Simons,  comme  membre  du 
Congrès  national,  avait  voté  la  déchéance  des  Nassau  ;  au 
point  de  vue  i)russion,  c'était  un  grief  fort  sérieux  (}j.  Le  roi 
Frédéric-Guillaume  les  qualifia  de  «  misérables  »  et  refusa 
de  les  recevoir  ;  ses  ministres  ne  les  écoutèrent  qu'avec 
froideur  et  défiance.  Ce  ne  fut  que  lorsque  la  calomnie  dont 
ils  étaient  les  victimes  fut  dévoilée  qu'on  consentit  à  dis- 
cuter avec  eux.  Mais  les  pourparlers  qui  suivirent  se  res- 
sentirent de  la  contrainte  des  premières  entrevues.  Leurs 
instructions  leur  recommandaient  «  de  s'adresser  au 
ministre  de  Belgique,  de  s'étayer  de  lui,  d'agir  de  concert 
avec  lui  ».  Dès  la  i)remière  conférence,  on  leur  déclara  de 
la  manière  la  ])lus  formelle  qu'on  n'admettrait  pas  les  modi- 
fications de  tarifs  demandées  par  la  Belgique  et  ils  en  con- 
clurent que  rai)pui  du  ministre  belge  leur  serait  inutile  et 


(1)  Dé|M"'clic  (le  Willmar,  8  janvier  lHl-_>. 

(-)  Dépôclie  de  Veiinorsi-li,  9  février  l8t-2.  M.  Simons  n'avait  jias  jH-is  |iart  an 
vote  (le  1^  dé.'héanci'.  Son  élertioii  n'était  pas  ciu'oro  validée  à  ce  immienl.  Le 
ministre  d'Aulriciie  a  La  Haye,  le  eomte  Sentit,  avertit  Metternicli  que  l'aecn 
sation  portée  contre  .\L  Simons  et  son  compagnon  était  fausse  :  «  Ce  n'est  pas 
exact  en  point  de  l'ait  pour  ces  deux  individus.  »  iSic  .')  Dépêche  du  'lo  jan- 
vier 1842. 


328  FL     DK    LA\.\_yY 

même  nuisible.  Ils  s  apercevaient  avec  étonnement  qu'on 
traitait  les  intérêts  matériels  du  Luxembourg  avee  un 
superbe  dédain;  «n  ne  leur  répondait  pas  quand  ils  pré^en- 
tai(Mit  des  objections  au  traité  du  8  août  et  on  se  contentait 
de  leur  dire  «  qu'ils  étaient  Allemands  et  que  leur  vocation 
devait  être  d'entrer  dans  la  grande  association  comme i-- 
ciale  allemande  »  (M- 

Somme  toute,  la  Prusse  ne  voulait  faire  aucune  conces- 
sion; elle  estimait  qu'en  traînant  les  choses  en  longueur, 
le  Luxembourg  se  fatiguerait  des  difficultés  de  sa  situation 
et  que,  pour  sortir  de  sf)n  isolement  économique,  il  signe- 
rait le  traité  du  8  août. 

Le  gouvernement  prussien  fit  donc  savoir  qu'il  refusait 
de  signer  le  traité  pour  un  an  ;  en  môme  temps,  il  rai)i)clait 
au  Luxembourg  que  ses  devoirs  d'État  confédéré  lui  inter- 
disaient de  conclure  un  traité  avec  la  France  ou  la  Belgique. 
Il  semble  (jue  Guillaume  II  avait  bien  prévu  que  ses  der- 
nières i)ropositions  seraient  rejetées;  il  ne  les  avait  faites 
que  pour  amener  une  situation  nette  et  précise  où  l'Alle- 
magne et  le  Ijuxembourg  retrouveraient  leur  liberté 
d'action.  L'cchcc  de  la  mission  de  M.  de  Sclierff  était  donc 
un  succès  ])our  lui  et  l'on  ])ouvait  croire  que  les  négocia- 
tions luxembourgeoises  seraient  suspendues  poui-  long- 
temi)s  En  réalité,  elles  étaient  à  la  veille  de  leur  conclu- 
sion. 


Les  souverains  anglais  avaient  invité  Frédéric-Guil- 
laume IV  à  être  ])ar]"ain  de  leur  second  enfant,  le  prince 
Edouard  —  le  futur  Edouard  VII.  Non  seulement  le  roi  de 
I*russ{;  avait  accepté,  mais,  à  l'étonnement  de  la  Cour  d'An- 
gleterre, il  annonçait  au  mois  de  janvier  184^2  qu'il  assiste- 
rait personnellement  au  baptême.  Dans  le  but  de  donner  à 
la  Hollande  et  à  son  roi  une  ])reuve  publique  de  son 
mécontentement,  il  décida  qu'au  lieu  d'adopter  la  route  de 
Hollande,  il  j)asserait  par  la  Belgique  et  viendrait  s'em- 
barquer à  Ostende.  Le  gouvernement  belge  s'empressa 
d'offrir  au  royal  voyageur  toutes  les  facilités;  il  lit  rcmar- 


l')   l>('-|ir(li('  (le  \\illin;ir,  -_>:>  JMiivii-r  IHS: 


LUXKMBOUlîG    ET    ZOL'.\  F.     I  IN  329 

qiicr  que  grâce  à  son  réseau  de  chemins  de  fer,  le  voyage 
(le  Liège  à  Ostende  ne  durerait  que  quelques  heures.  Il  eût 
voulu  ménager  nue  entrevue  officielle  entre  les  souvei'ains 
à  Bruxelles  ou  à  Laeken,  mais  Frédéric-Guillaume  s'y 
refusa.  Tout  au  plus  consentit-il  à  rencontrer  le  roi  Léo- 
pold  à  Ostende.  Pour  qui  se  rappelle  la  ré])robation  que  la 
révolution  de  1830  avait  soulevée  en  Allemagne  et  la  con- 
stante défiance  que  depuis  lors  on  nourrissait  à  Berlin 
contre  la  Belgique  et  son  souverain,  la  décision  de  Frédé- 
ric-Guillaume constituait  une  véritable  victoire  morale  ('). 
L'entrevue  des  deux  rois  fut  d'ailleurs  ])lus  longue  que  ne 
l'avait  prévu  le  roi  de  Prusse.  Par  une  nc^li^ence  uolon- 
taire  de  l'amirauté  anglaise,  le  bateau  chargé  de  trans- 
porter le  roi  eut  un  retard  de  trente-six  heures  et  Frédéric- 
Guillaume  fut  bien  obligé,  })endant  ce  temps,  d'être  l'hôte 
du  roi  des  Belges. 

Quand  on  connut  à  La  Haye  l'itinéraire  choisi  i)ar  le  roi 
de  Prusse,  le  gouvernement  hollandais  en  ressentit  une 
très  vive  émotion.  Sous  la  pression  de  ses  ministres,  Guil- 
laume II  fut  forcé  de  s'adresser  à  Lottum  pour  obtenir  que 
le  souverain  prussien  se  décidât  tout  au  moins  ou  à  reve- 
nir par  la  Hollande,  ou  à  réserver  à  son  cousin  une  entic- 
vue  à  Aix-la-Chapelle  ou  à  Cologne. 

Mais  Lottum  veillait;  il  croyait  cette  fois  avoir  trouxc' 
le  moyen  de  vaincre  l'obstination  du  roi  grand-duc.  Il  ])ar- 
vint  à  rallier  son  souverain  à  la  manière  forte  et  celui-ci 
répondit  à  l'invitation  du  roi  de  Hollande  qu'il  n'avait  pas 
l'intention  de  revenir  par  la  Hollande  et  qu'il  ne  conseil- 
lait pas  à  son  cousin  de  se  rendre  dans  les  provinces  rln'- 
nanes  pendant  le  carnaval  à  cause  des  sentiments  hostiles 
du  i)euple  à  son  égard.  Mais  le  roi  ajoutait  :  «  Si  le  roi 
grand-duc  accepte  le  traité  du  8  août,  alors  je  lui  promets 
de  faire  tout  mon  possible  pour  atténuer  les  dommages 
causés  au  Luxembourg  i)ar  la  su])i)ression  des  avantages 
belges;  alors  je  prolongerai  mon  voyage  et  je  me  icndi-ai 


(')  I.c  ((iinlf  (le  Hricv  linl  ;i  liiirc  icin;ir(|ii»'r  ;'i  1imi>  iiii>  :ii;(Mits  à  rétraii^er 
riiiip  rtaiice  ([lie  ce  voyai^c  avail  |Mmr  la  Helgi(|ii('  :  >'  Otic  niaiiifcstatioii  (ios 
seiitimeiils  de  l'illustre  monarque,  leur  rcrivait-ila  lail  la  plus  vive  impression 
sur  les  esprits.  >->  Dcpcclie  <\\i  (">  fi'vpicr  181:2. 


330  FL.    DE    LANNOY 

à  La  Haye  pour  remercier  le  roi  de  Hollande  en  mon  nom 
et  au  nom  du  Zollvcrein.  »  (^)  Par  une  dernière  habileté  de 
Lottum,  cette  note  fut  remise  au  ministre  des  Affaires 
Etrangères  de  Hollande  et  non  au  chancelier  du  Luxem- 
bourg-. Guillaume  en  jugea  le  ton  menaçant  et  blessant.  Il 
fut  frap])é  de  l'idée  que  ses  sujets  allaient  voir  dans  le 
voyage  du  roi  de  Prusse  à  travers  la  Belgique  le  prélude 
de  cette  alliance  germano-belge,  si  redoutée  en  Hollande 
parce  qu'elle  isolerait  ce  pays  de  la  France  et  le  rejetterait 
entre  l'Angleterre,  mal  disposée,  et  rAllemagne,  aliénée. 
Les  États-Généraux  avaient  déjà  manifesté  plus  d'une  fois 
leur  mécontentement;  que  feraient-ils  si  le  roi  se  j^résen- 
tait  à  eux  avec  la  responsabilité  d'avoir  comijromis  leur 
politique  et  leur  commerce  pour  un  intérêt  de  famille  qui 
leur  était  totalement  étranger  (2)?  Le  roi  avait  bien  affirmé 
qu'il  mourrait  sur  la  brèche  plutôt  que  de  céder,  mais  il 
n'avait  pas  le  caractère  obstiné  de  son  père  ;  la  crainte  de 
l)erdre  toute  popularité  en  Hollande  eut  raison  de  ses  der- 
nières hésitations.  Il  fit  venir  M.  de  Blochausen,  lui 
exposa  l'urgence  impitoj^able  de  prendre  une  décision 
dont  il  n'avait  même  plus  le  choix  et  lui  dit  qu'il  allait 
envoyer  à  Londres  des  propositions  d'arrangement.  M.  de 
Blochausen  entendit  le  roi  avec  une  profonde  douleur,  mais 
il  ne  put  disconvenir  que  par  le  refus  ou  l'hésitation  de  la 
Belgique,  la  position  était  devenue  intenable  (^). 

Deux  jours  après  les  commissaires  hollandais  partaient 
pour  Londres.  On  n'avait  pas  choisi  des  agents  du  gouver- 
nement luxembourgeois,  mais  deux  ministres  liollandais, 


(1)  Calmes,  oi).vH.  1,  p.  l«-2. 

f^)  Dt'péchf  de  Bois-le-Comte,  12  février  1842. 

(■')  Le  roi  avait  dit  à  M.  de  Blochausen  :  <■<  Les  choses  ne  peuvenl  rester 
coinine  clh's  sont  :  l'AlIenKiffne  va  nous  être  délinitivement  fermée  et  toute 
notre  conihinaison  jiour  vivre  sans  elle  était  basée  sur  la  ilisposition  (|ue  mon- 
trait la  Hel^i'iue  d'accorih'r  au  Luxembourg  un  traité  de  connuenîe  (|ui  lui  eut 
icndu  ceipie  nous  étions  résij^nés  à  perdre  du  côté  de  l'Allemagne.  Mais  la 
Helgi(|ue  (M'aint  de  blesser  la  Prusse  en  ni'goi'iant  avec  nous.  Elle  n'ose  évidem- 
ment U'  faire  sans  avoir  son  assentiment  que  la  Oour  de  Berlin  se  gardera  i)ien 
<l('  lui  diiiiiicr  et  pendant  ce  tcMups  le  Grand-Duché  (!St  exjjosé  à  mourir  de  laim; 
le  voyage  du  roi  de  Prusse  i)ar  la  Belgique,  en  me  présentait  connue  brouillé 
avec  lui,  me  compromet  de  plus  en  plus  avec  l'opinidn  de  la  Hollande.  » 
Dépêche  de  Bois-le-Comte,  1?)  février  18i2. 


UXEMBOUKC.    ET    ZOLFAEREIN  331 

le  baron  van  Hecckeron  et  Rochusscn,  pi-cuvc  ('videntc  que 
l'affaire  du  Luxembourj^-  écbai)i)ait  en  quelque  sorte  à  la 
direction  du  roi  i;rand-(luc.  Lottuiu  avertissait  son  maître 
que  Rocbiissen  était  un  de  ses  bomnies  de  confiance,  que 
par  conséquent  des  concessions  de  la  part  de  la  Prusse 
n'étaient  pas  nécessaires  (^). 

Les  ministres  hollandais  étaient  munis  de  ])h'ins  pou- 
voirs qui  leur  permettaient  d'accepter  la  ratification  pure 
et  simple  du  traité  du  8  août.  Cependant  ils  devaient  insis- 
ter pour  le  maintien  de  la  loi  de  faveur.  Le  roi  en  faisait 
même  «une  condition  absolue  )>  de  son  accei>tation  {h.  Ainsi 
jusqu'au  dernier  moment  il  conservait  à  la  Belgique  son 
rôle  d'arbitre. 

A  Londres,  les  négociations  marclièrent  rapidement;  les 
ministres  hollandais  étaient  décidés  à  tout  sacrifier  pour 
aboutir.  Le  roi  de  Prusse  se  fit  fort  d'obtenir  du  roi  Léo- 
pold  la  i)romesse  du  maintien  de  la  loi  de  faveur  et  donna 
la  garantie  que  si  la  loi  était  retirée  l'Allemagne  ferait  au 
Grand-Duché  des  avantages  plus  qu'équivalents  (^). 

Pour  sauvegarder  la  dignité  du  roi  grand-duc,  on  décida 
que  le  traité  du  8  août  serait  annulé  et  remplacé  par  un 
texte  nouveau  qui,  à  quelques  détails  près,  ne  fit  que  repi'o- 
duire  le  premier  traité  (''). 

Frédéric-Guillaume  promit  de  passer  par  la  Hollande. 
A  son  retour  d'Angleterre,  il  rencontra  une  seconde  fois  à 
Ostende  le  roi  Léopold.  La  Belgique  avait  abandonné  le 
Luxembourg  ;  elle  aurait  eu  mauvaise  grâce  à  compro- 
mettre par  une  attitude  intransigeante  l'accord  conclu 
entre  le  Grand-Duché  et  le  Zollverein,  Léopold  consentit 
donc  au  maintien  provisoire  de  la  loi  de  faveur. 

Les  ministres  hollandais  redoutaient  un  nouveau  revire- 
ment de  leur  roi.  A  peine  débarqué  à  La  Haye,  le  baron  van 


(1)  Dépik'he  (II!  Lultiim  du  -2!t  janvier  ISi-2. 

('^)  D.''i)('<-lie  (le  Bois-le-Coititt',  1^2  IV'viior  l8i-2. 

P)  Dépêche  (le  IJois-le-Cointe,  !»  février  lSi2. 

(■•)  «  Les  dates  el  les  signatures  constiliienl  (mite  la  diflerence  ».  disait  Bois- 
le-Conile. 

Un  article  dt'clarait  (|ue  .s.  M.  le  roi  de  Prusse  «  a  en  vue  de  faire  tout  ce 
qui  sera  possible  alin  que,  dans  le  cas  où  la  loi  du  ti  juin  183!t  serait  revoqui'e. 
les  sujets  de  S.  M.  le  roi  grand-duc  re(;oivenl  un  dcdonunajrcincnt  suHisaiil  pour 
compenser  cette  révocation  ». 


3.i2  FL.    DE    LANNOY 

Heeekeren  se  rendit  à  2  heures  du  matin  près  du  lit  du  roi 
pour  obtenir  que  lilocliausen  apposât  sa  signature  sur  la 
convention  conclue  à  Londres.  Blochausen  poussait  de 
profonds  sou])irs  et  levait  les  bras  au  ciel  (^).  Le  chancelier 
grand-ducal  était  désespéré  de  l'accession  de  son  pays  au 
ZoUverein  et  il  en  rendait  la  Belgique  responsable  :  «  Si  elle 
n'avait  reculé,  disait-i),  au  mois  de  novembre  lorsque  le  roi 
était  maître  de  la  situation  par  sa  fermeté  et  sa  persévé- 
rance, l'arrangement  entre  les  deux  Luxembourgs  serait 
aujourd'hui  un  fait  accompli  et  déjà  ancien.  »  Il  attribuait 
non  sans  raison  les  retards  de  la  Belgique  à  l'influence  de 
la  Prusse  «  qui  à  Bruxelles  a  paralysé  l'action  du  gouver- 
nement du  roi  »  (^). 

M.  de  Bois-leComte,  jusqu'au  dernier  moment,  avait  tout 
ignoré  des  négociations  menées  à  Londres;  il  ne  cachait 
pas  son  désappointement  et,  comme  Blochausen,  il  accu- 
sait la  Belgique  :  «  Ce  n'était,  disait-il,  que  sur  les  instances 
persévérantes  de  sa  légation  que  nous  nous  étions  engagés 
dans  une  affaire  qui  gênait  toute  notre  politique.  »  (^)  Le 
diplomate  oubliait  que  son  gouvernement  et  lui-même 
avaient  considéré  l'entrée  du  Luxembourg  dans  le  ZoU- 
verein comme  un  recul  de  l'influence  française  et,  quelques 
jours  après  la  signature  du  traité,  il  reconnaissait  que  cet 
acte  portait  préjudice  aux  intérêts  français.  «  Dans  son 
effet  local,  écrivait-il,  l'accession  du  Luxembourg  au  ZoU- 
verein est  un  préjudice  pour  le  département  de  la  Moselle 
en  substituant  le  tarif  de  l'Association  au  tarif  existant. 
.Jusqu'à  un  certain  point,  c'en  est  un  pour  la  France  en 
prolongeant  d'une  dizaine  de  lieues  la  ligne  des  douanes 
prussiennes  et  l'action  directe  de  la  Prusse  sur  notre  fron- 


(1)  Calmes,  op.  cit.  1,  p.  18."). 

(-)  Dé|M"'che  de  Vermerst-li,  du  o  lévrier  184i2. 

(•')  Quand  Blocliauseii  vint,  au  nom  de  son  maître,  avenir  M.  de  Bois-le- 
Comte de  l'accession  du  Luxembourg  au  ZoUverein,  le  dii)lomate  lui  répondit  : 
((  .le  suis  reconnaissant  des  paroles  ((ue  me  fait  porter  S.  M.  Néerlandaise,  mais 
je  ne  prt'tcnds  i)as  cacher  ([uc  je  suis  pntfoiidcment  blessé.  On  n'engage  pas 
une  puissance  connne  la  France  dans  une  (|uesti(in,  pour  conclure  ensuite  sans 
la  prévenir.  L'oi)inion  (]ih'  j'ai  comMHini(iut'e  à  ma  Cour  reposait  sur  les  paroles 
même  de  S.  M.  iNcerlandaise.  .l'ai  itesdin  |)onr  me  dégager  de  paroles  royales.  » 
Dépêche  du  li  février  \H4'-2. 


LUXEMBOURG    ET    ZOLFAEREIN  333 

tière.  »  (^)  Pour  pallier  la  déconvenue  qu'avait  subie  sa 
politique  et  l'éclioc  de  ses  efforts  de  plusieurs  mois,  le 
diplomate  franç^ais  ajoutait  que  la  lin  de  l'affaire  du 
Luxembourg-  rendrait  à  la  France  sa  liberté  d'action 
«  parce  que  le  rôle  qu'on  nous  faisait  ou  qu'on  nous  prêtait, 
bien  ])lus  que  nous  ne  l'avions  en  réalité,  nous  gênait  avec 
l'opinion  nationale  hollandaise  très  prononcée  pour  la 
séparation  du  Luxembourg-  »('). 

Le  Luxembourg  se  résigna  assez  facilement  à  l'union 
commerciale  que  la  Prusse  avait  imposée  à  son  souverain. 
Somme  toute,  le  Grand-Duché  avait  obtenu  ce  qu'il  dési- 
rait :  l'ouverture  d'un  grand  marché  par  son  entrée  dans  le 
Zollverein  et  la  sauvegarde  de  ses  relations  anciennes 
avec  la  Belgique  par  le  maintien  de  la  loi  de  faveur. 

Fl.  De  Lannoy. 


(')  Dc|..'cli.-  (lu  !)  iV-vriiT  181-2. 


MELANGES 


Inscription  de  Mégare. 

Skias  a  fait  connaître  dans  T'Ecpriiuepiç  'apxcxioXof ikiî,  1894, 
p.  244,  une  petite  plaque  de  marbre  bleuâtre  portant  le 
nom  de 

TTicriXaç. 

Skias  n'avait  pu  en  déterminer  la  destination. 

Elle  doit  évidemment  être  rapprochée  de  la  série  d'in- 
scriptions funéraires  de  Mégare  que  nous  avons  publiées 
dans  la  Revue  archéologique,  1917,  IV,  p.  33-119.  Comme 
celle  qui  nous  occupe,  elles  sont  gravées  sur  de  petites 
tablettes  de  marbre  et  ne  comportent  souvent  que  le  nom 
du  défunt,  sans  sa  filiation.  Le  marbre  portant  le  nom  de 
Pisilas  a  d'ailleurs  été  acheté  à  Mégare,  mais,  étant  don- 
nées ses  dimensions  très  faibles  (0.216  X  0.075  X  0.03).  il 
aurait  pu  aisément  être  apporté  d'ailleurs. 

Il  ne  paraît  pas  douteux  que  le  nom  de  Pisilas  puisse  être 
maintenant  utilisé  pour  l'histoire  de  l'onomastique  et  du 
dialecte  de  Mégare. 

Paul  Grainuor. 


Simonide 

(fr.  103). 

Bergk,  Poehie  Lyr.  (irncci.  t.  II,  1915,  Simonide,  fr.  103. 
Eù6u)uâxujv  dvbpuùv  .uvncruJiueGa  kt\ 
V.  3.  'îva  aqpioi  \xr\  KaOéXiiTui 

'EWdç  âTTO(pei)uév>i  KpaTÔç  è\eu9epiav. 
Des  notes  critiques,  il  ressort  que  dans  le  cod.  Pal.  on 
lit  ce  génitif  inexplicable  :  dTToqpGiuévou.  Planiule  a  corrigé 


."■536  MÉ:.ANGES 

en  à7TOcpei|uévoiç  Kàproç  èXeu6epîaç.  Jacobs,  avec  trop  d'au- 
dace, conjecture  :  ôtt'  iqpGi'iLiou  Kpaxôç  èXeuGepiav.  Dans  la 
0'  édition  de  VAiiiholo^iH  Lyricii  (Bergk-Hiller7('rusius, 
1913,  n"  88)  nous  lisons  :  dTTOcp6i|uévov  Kpaiôç  èXeuBepinv. 

Observons  en  premier  lieu  que  les  conjectures  avec 
Kpaiôç  doivent  cti'e  écartées  :  l'a  de  ce  mot  est  bref.  Pla- 
uude  a  proposé  une  correction  plausible  :  Kàproç  Mais  Kap- 
Toç  è\eu6epîaç  (ou  iriç)  —  qu'on  lise  dfToqpeiiuévri  avec  Hillcr- 
Ci  iisius,  ou  àTToqp6i)Li€voiç  avec  Planude  —  n'offre  aucun 
sens;  KpaTÔç  èXeu6epîav  est  tout  aussi  peu  intelligible.  Que 
signifie  eu  effet  :  «  Afin  que  la  Grèce  qui  périssait  dans  sa 
force,  ne  leur  enlève  pas  sa  liberté?  »  ou  bien  :  «  Afin  que  la 
Grèce  n'enlève  pas  aux  morts  la  force  de  la  liberté?  » 

Le  contexte  ne  peut-il  nous  suggérer  une  solution  plus 
simple?  Que  veut  le  poète?  Perpétuer  la  mémoire  de  ceux 
qui  sont  tombés  devant  la  ville  de  Tégée,  en  combattant 
pour  la  libert:é  de  la  Grèce.  C'est  à  ces  morts  que  celle-ci 
doit  la  gloire  de  n'être  pas  asservie.  Aussi  le  poète  débute- 
t-il  par  cette  forte  parole  :  fivr|crdj|ae0a. 

Un  mot  fait  tacbe  dans  l'épigramme  :  c'est  KpaTÔç.  Il  est 
métriquement  impossible,  et  c'est  pourquoi  Planude  a  bien 
fait  de  l'écarter.  Je  me  permets  de  proposer  la  lecture  que 
voici  :  KÛboç  èXeuBepiiiç  (')  (ou  laç).  Nous  traduirons  alors, 
si  nous  lisons  d7TO(p9i)uév)'i  :  (c  Souvenons-nous  de  ces 
hommes...  afin  que  la  Grèce  qui  périssait  ne  leur  enlève  (^) 
pas  la  gloire  de  sa  liberté  (reconquise).  »  Ou,  si  nous  adop- 
tons à7TO(p9i|uévoiç  :  «  ...  afin  que  la  Grèce  n'enlève  pas  à 
ceux  qui  sont  morts  la  gloire  de  sa  liberté.  » 

Au  point  de  vue  paléographique,  la  confusion  s'explique 
par  la  «  ressemblance  générale  ^>  entre  les  deux  mots  Kpa- 
TÔç et  KÛboç  (■').  Enfin  le  premier  est  plus  employé  :  la  sub- 
stitution est  donc  normale. 

Arth.  Humpers. 


(')  J'avais  pense  aussi  à  k\€Îoç,  lormo  épiqii?  de  kX^oç. 

(2)  Il  est  à  noier  que  Baillj  s.  v.  KoBaip^uu  ne  donne  au  moyen  de  ce  verbe 
que  les  deux  sens  :  ahnisser  et  accomplir.  Mais  il  en  est  de  KaGaipéui  eomnie 
de  tant  d'autres  veri)es  :  le  moyen  a  dû  avoir,  outre  ses  sens  particuliers,  tous 
les  sens  de  l'actif. 

(3)  Hai.i.,  -4  Companion  ta  clas.siral  texls,  Oxford,  li)l3,  |).  170;  etc.. 


MÉLANGES  337 

Bâtards  de  Brabant  et  bâtards  de  Bourgogne. 

Malgré  la  notice  du  bai'on  de  Reiffenberg  :  Enfants 
nnturels  de  Philippe  le  Bon,  duc  de  B()iir^-()<>-nc.  ijubliée 
daus  les  Bullelins  de  l'Académie  royale  de  Jiel^iqiie 
en  1847  (t.  XIV,  u"  1,  p.  o85-597),  l'obscurité  la  plus  grande 
plane  encore  sur  les  bâtards  de  la  lignée  des  ducs  de  Bour- 
gogne et  des  branches  y  apparentées.  Tout  texte  contem- 
porain sur  ces  j)ersonnages,  dont  quelques-uns  occupèrent 
une  place  en  vue  dans  le  monde  politique  et  surtout  ecclé- 
siastique, doit  donc  être  accueilli  avec  reconnaissance. 

A.  Bâtards  de  Brahanl. 

I.  —  Le  premier  entant  naturel  dont  les  archives  de  la 
Chambre  des  comptes,  aux  Archives  générales  du  royaume 
(Acquits  de  Lille)  fassent  mention,  est  un  nommé  Jehan, 
bastard  de  Brabant.  L'appellation  de  Brabant  indique  clai- 
rement un  descendant  illégitime  des  ducs  de  ce  nom.  Une 
série  de  pièces  d'ordre  diplomatique  fournit  quelques  élé- 
ments biographiques  nouveaux  :  Le  30  novembre  1444 
l'évêque  de  Soissons,  Jean  Millet,  donne  quittance  d'une 
somme  de  100  livres  reçue  de  Philippe  le  Bon  pour  l'éduca- 
tion donnée  à  Jean  de  Brabant,  celui-ci  fréquente  le  cours 
de  la  Faculté  des  arts  à  Paris. 

«  Nous  Jehan,  par  la  permission  divine,  évesque  de 
Soissons,  confessons  avoir  receu  de  honorable  homme  et 
sage,  Martin  Cornille,  conseillier  et  receveur  gênerai  de 
toutes  les  finances  de  monseigneur  le  duc  de  Bourgogne  et 
de  Brabant,  la  somme  de  cent  livres  parisis  monnoye  royal 
que  mondit  seigneur  le  duc  par  ses  lettres  données  le 
XXIP  jour  de  ce  mois  a  ordonné  nous  estre  baillée  et  déli- 
vrée, pour  le  nourrissement  et  gouvernement  à  l'estude  de 
Jehan  bastard  de  Brabant,  escolier  en  l'Université  de 
Paris  en  la  faculté  des  ars,  pour  ceste  présente  année  com- 
maneant  le  premier  jour  de  janvier  derrainnement  passé  et 
finant  le  derrenier  jour  de  décembre  proucbain  venant,  et 
aussi  pour  robes,  livres  et  aultres  nécessitez  dudit  .lehan 
de  Brabant  en  la  dite  année,  de  laquelle  somme  nous  nous 
tenons  pour  contens  et  quittons  mondit  seigneur  le  duc 

22 


3:^8  MÉLANGES 

son  recepveur  général  et  tous  aiiltres.  En  tesmoing  de  ce 
nous  avons  séeller  ces  présentes  de  nostre  seel  aux  causes 
et  icelles  avons  signées  de  nostre  main,  le  derrenier  jour 
de  novembre  l'an  mil  quatre  cens  quarente  et  quatre. 
Johannes,  Suessionnensis  episcopus  ». 

(Acquits  de  Lille,  carton  1148). 

Deux  années  plus  tard,  le  21  août  1446,  Philippe  le  Bon 
ordonna  de  paj-er  au  précepteur,  l'évèque  de  Soissons,  une 
nouvelle  somme  de  100  livres  pour  frais  d'entretien  de  Jean 
de  Brabant.  Le  mandat  de  payement  libelle  pittoresque- 
ment  la  destination  de  cette  générosité  :  «  pour  la  des- 
pense et  gouvernement  tant  de  bouche  et  pour  doctrine 
comme  pour  robe,  pourpoins,  chausses,  bûche  en  yver, 
chandoilles,  papier  et  autres  nécessitez  de  nostre  ame 
Jehan,  bastard  de  Brabant,  escollier  au  collège  de  Navarre 
à  Paris,  en  la  faculté  des  ars,  pour  ceste  année  présente.  » 
(Acquits  de  Lille,  carton  1148). 

Les  études  de  Jean  de  Brabant  n'étaient  pas  encore  ter- 
minées, qu'il  avait  déjà  débuté  dans  la  carrière  cléricale 
par  l'obtention  d'un  important  bénéfice  ecclésiastique.  Il 
reçut  le  11  mai  1433  d'Eugène  IV  la  dignité  archidiaconale 
de  Bruxelljes,  au  diocèse  de  Cambrai  (cfr.  A.  Le  Glay, 
Cameracum  christianum,  p.  388).  Peu  après  son  écolage  à 
Paris,  le  protégé  de  Philippe  le  Bon  fut  mis  aux  études  à 
l'Université  de  Louvain  avec  une  pension  alimentaire  de 
200  livres  par  an.  L'ordre  de  paiement  du  duc  de  Bour- 
gogne au  receveur  général  de  Brabant,  Guillaume  de  Pou- 
pet,  du  25  mars  1448,  contient  des  détails  biographiques 
intéressants  :  Comme  nous  [Philippe-le-Bon]  aions  fait 
nourrir  et  tenir  à  l'escole  de  Paris  par  l'espace  de  sept  ans 
environ  nostre  ires  chier  et  bien  amè  maistre  Jean  de  lira- 
bant,  arcidiacre  de  Bruxelles  en  l'è^-lise  Cambray,  et 
jusques  à  ce  qu'il  a  esté  i^-raduez  en  la  faculé  des  arts  et 
qu'il  a  esté  admenè  pardevers  nous,  ou  il  a  esté  lui  et  un 
jeune  clerc  servant  avecques  lui  depuis  le  mois  d'octobre 
ensuivant,  que  nous  l'avons  envoie  et  fait  mettre  à  l'estude 
de  nostre  ville  de  Louvain  pour  estudier  en  lois  et  y  prou- 
fiter  comme  il  a  appertient,  sans  ce  que  pour  sa  despense 
pour  le  temps  qu'il  a  esté  par  devers  nous  ne  aussi  pour  le 


MÉLANGES  339 

temps  (le  son  cstiide  ou  il  est  lui  et  un  Jeune  elerc  servant 
des  ledit  mois  d'octobre  dernier  passé  ne  pour  sa  despense 
extraordinaire  de  robes,  pourpoins  et  autres  ses  nécessitez 
selon  son  restât  et  pour  son  estude,  lui  avons  fait  aucune 
provision,  comme  avons  fait  à  ses  frères  les  autres  bastards 
de  Brabant  de  nostre  hostel  les  autres  ne  autrement  ne  qu'il 
ait  eu  de  nous  aucune  chose  sinon  que  Pavons  fait  pour- 
veoir  dudit  archidiaconé,  duquel  il  n'a  eu  possession 
jusques  à  la  Toussains  dernier  passée,  pour  avoir  et  pour- 
chassier  tant  ù  Bruges  comme  à  Anvers  la  délivrance  de  ses 
bulles  a  esté  fait  despense  par  emprunt  à  recouvrer  ens  la 
revenue  dudit  archidiaconé... 

(Acquits  de  Lille,  carton  1148.  —  Arch.  gén.  roy.) 

Maître  Jean  de  Brabant  donna  quittance  de  cette  somme 
le  17  avril  suivant  (ibidem,  carton  1148);  mais  peu  après,  le 
3  juin  de  cette  année,  une  nouvelle  générosité  ducale  de 
84  livres  vint  l'atteindre.  Le  mandat  de  payement  de  Phi- 
lippe le  Bon  fournit,  au  surplus,  sur  le  bâtard  de  Brabant, 
deux  nouvelles  indications;  d'abord  celle  de  Bastard  de 
Brabant  Vaisné,  puis  celle  de  son  canonicat  à  N.-D.  de 
('ambrai.  La  pièce  vaut  d'être  citée  en  extrait  :  à  nostre 
bien  ame  maistre  Jehan  bastard  de  Brabant  l'aisné,  pour 
retite  d'un  don  de  iiii  XL  XVI  L.  monnoie  dicte  que  nous 
lui  avons  donnée  et  octroyée  de  nostre  grâce  especiale  pour 
une  fois,  tant  pour  luy  aidier  à  avoir  son  habit  de  chanoine 
en  l'église  Xostre  Dame  en  la  ville  et  cité  de  Cambray, 
comme  pour  luy  aidier  à  résider,  vivre  et  soy  entretenir  sur 
sondit  bénéfice. 

(Acquits  de  Lille,  carton  1148) 

Le  passage  de  Jean  de  Brabant  à  l'Université  de  Lou- 
vain  est  noté  comme  suit  dans  la  niati'icule  de  l'année  1450  : 
Dominus  et  magister  Johannes  de  Brabantia,  archidiaco- 
nus  Bruxellensis  in  ecclesia  Cameracensi  (Cfr.  Edm.  Reu- 
sENS,  Matricule  de  l'Université  de  Louvain,  t.  T,  1903, 
p.  166). 

Philippe  le  Bon  n'oublia  jamais  sou  protégé;  c'est  ainsi 
qu'il  l'aida  dans  ses  dépenses  domestiques  de  chanoine  le 
16  décembre  145:2  (cfr.  Acquits  de  Lille,  cart.  Il  i8j  eu  lui 


340  MÉLANGES 

allouant,  sur  les  finances  de  l'Etatune  somme  de  100  francs. 
Jean  de  Brabant  ne  reçut  cette  somme  qu'au  mois  de  mai 
suivant  et  en  donna  quittance  le  8  mai  1453  (cfr.  Acquits  de 
Lille,  cart.  1148).  La  quittance  signale  ainsi  le  motif  du  don 
de  100  francs  :  pour  une  fois  pour  moy  aidier  à  vivre  et 
entretenir  mon  maisnage  sur  ma  dicte  prébende  de  Cam- 
bray. 

Aux  dires  d'A.  Le  Glay  (Cameracum  christianum, 
p.  388),  Jean  de  Brabant  serait  mort  le  20  février  1459. 

II.  —  Un  autre  bâtard  de  la  lignée  brabançonne  appa- 
raît dans  les  documents  d'archives,  sous  le  nom  de  Phi- 
lippe, baslard  de  Brabant;  il  figure  dans  une  quittance,  du 
16  décembre  1450,  attestant  un  don  de  Philippe  le  Bon 
d'une  somme  de  50  francs,  moitié  du  prix  de  sa  pension 
annuelle;  il  était  à  ce  moment  écuyer-panetier  au  service 
du  duc  de  Bourgogne.  (Cfr.  Acquits  de  Lille,  carton  1148.) 
Déjà  auparavant,  le  24  janvier  1448  n.  st.  Philippe  de  Bra- 
bant avait  donné  quittance  pour  une  somme  de  18  livres 
(cf.  ibidem). 

III.  —  Parmi  les  bâtaids  de  Brabant  il  y  a  encore  à  men- 
tionner .1/7 /o//7e  (/e  Brabant,  écuj^er-échanson  de  la  mai- 
son du  duc  de  Bourgogne.  Il  reçut  le  18  octobre  1447  de 
Philippe  le  Bon  une  pension  journalière  de  18  livres 
(cfr.  Acquits  de  Lille,  carton  1148),  puis  le  27  avril  1451 
Antoine  de  Brabant  s'acquitta  pour  le  don  d'une  somme  de 
25  francs  (ibidem,  carton  1149). 

IV.  —  Guillaume,  bâtard  de  Brabant  reçoit  de  Philippe 
le  Bon,  le  19  novembre  1454,  la  somme  de  1,000  écus  d'or 
pour  l'équipement  d'une  galère  destinée  à  combattre  les 
Tuics.  Il  était  à  la  fois  chevalier,  conseiller-chambellan 
ducal  et  commandeur  de  la  Moree,  de  l'ordre  de  Saint- 
Jehan  de  Jherusalcm.  (Cfr  Acquits  de  Lille,  carton  1149.) 


B.  Bâtards  de  Bourgogne. 

I     -  Un  des  bâtards  les  plus  connus  de  Philippe  le  Bon 
est  Corneille  de  Bourgogne,  seigneur  de  Beveren,  capi- 


MÉLANGES  341 

taine  général  du  duché  de  Luxembourg,  moi-t  ù  Rupel- 
inonde  le  16  juin  14o2.  Il  touchait  une  pension  annuelle  de 
2,000  francs  pour  laquelle  il  donna  quittance  le  12  mars  14oU 
(n.  st.)  et  le  13  avril  1451  (n.  st.)  (cfr  Acquits  de  Lille,  car- 
tons 1148  et  1449). 

II.  —  Une  sœur  adultérine  d'Antoine  est  Mur^-ueriic  de 
Bourgogne,  fille  d'Isabelle  de  la  Vigne,  dont  Olivier  de  la 
Marche  signale  la  présence,  en  1454,  à  la  fête  du  faisan  de 
Lille.  Philippe  le  Bon  fit  octroyer  à  sa  mère,  le  25  avril  1450, 
la  somme  de  60  livres  pour  lui  permettre  d'acheter  une 
maison  à  Louvain  (cfr  Acquits  de  Lille,  carton  1149). 

III.  —  Raplniel  de  Mercatel  (t  3  août  1508)  était  fils  de 
Philipi)e  le  Bon  et  de  dame  de  Mercastel,  née  de  Belleval. 
Il  fut  abbé  de  l'abbaye  de  Saint-Bavon,  à  Gand  et  amateur 
de  beaux  manuscrits.  Son  ciirriciilnm  uitae  figure  dans  la 
Revue  bénédictine,  t.  XXI,  1904,  ]).  353  354. 

IV.  —  Il  convient  encore  de  mentionner  Jérôme  de 
Bourgogne,  fils  illégitime  de  Corneille  de  Bourgogne, 
siernalé  plus  haut,  (i)ai-  conséquent  petit-fils  de  Philippe  le 
Bon),  et  de  Marguerite  Corbaulde.  Le  i)ape  Sixte  IV  lui 
accorda,  le  21  mai  1471,  la  dispensatio  canonica  super 
defectu  natalium  ;  la  bulle  s'exprime  ainsi  à  son  sujet  :  te, 
qui  ut  asseris  clare  memorie  Cornelii  de  Burg'undia,  filii 
dum  viverei  naturalis  dilecti  filii  nobilis  viri  Philippi  ducis 
Burg'undie,  natus  etiam  naturalis  existis.  (Cfr  Reg'istre 
du  Vatican,  t.  660,  fol.  80v''-90.  aux  Archives  vaticanes.) 

V  et  VI.  —  Le  plus  réputé  des  bâtards  de  Bourgogne  est 
inconlestablement  Jean  de  Bourg'ogne,  évêque  de  Cam- 
brai de  1440  à  1473.  On  en  fait  très  souvent  un  fils  illégi- 
time de  Philippe  le  Bon,  mais  c'est  à  tort.  Il  faut  le 
distinguer  de  maître  .Jean  de  Bourgogne,  notaire  papal  ; 
une  bulle  du  21  octobre  1436  d'Eugène  IV  dit  de  lui  : 
«  te  qui  ut  acccpiinus  nK  ducum  génère  procrealus  ac  in 
decimo  nono  vcl  circa  tue  etatis  anno  constitutus  existis 
[Rcg-.  du  Latran,  t.  338.  fol.  161,  aux  Archives  Vaticanes  ; 
par  contre,  une  bulle  d'Eugène  IV,  du  27  mars  1438  (n.  st  )^ 
lui  accordant  en  expectative  la  prévôté  Saint-Pierre,  à 
Lille,  dit  formellement  à  son  ))roi)OS  qu'il  était  [rater  g-er- 


342  MÉLANGES 

maniis  de  Philippe  le  Bon  (cfr  Regisirum  Lateranense,  t. 
354,  fol.  225,  aux  Archives  Vaticanes).  L'évéque  Jean  de 
Bourgogne  mériterait  (qu'une  étude  lui  fût  consacrée. 

C  Bâtards  de  Bavière. 

Un  certain  Guillaume,  bastarl  de  Bavière,  signe  une 
quittance,  le  21  mars  1454  (n,  st.),  pour  sa  jjension  annuelle 
de  3,000  francs  accordée  par  Philippe  le  Bon.  Il  était 
écuyer  et  conseiller  du  duc  de  Bourgogne  (cfr  Acquits  de 
Lille,  carton  1149). 

H.  Nelis 


Pie  VI  et  le  serment  de  Liberté=Égalité. 

La  loi  du  27  novembre-26  décembre  1790  enjoignit  à  tous 
les  ecclésiastiques  «  fonctionnaires  publics  »  de  prêter  un 
serment  ainsi  conçu  :  «  Je  jure  de  remplir  mes  fonctions 
avec  exactitude,  d'être  fidèle  à  la  nation,  à  la  loi  et  au  roi, 
et  de  maintenir  de  tout  mon  pouvoir  la  Constitution 
décrétée  par  TAssemblée  Nationale  et  acceptée  par  le  roi.  » 
La  formule  de  ce  serment  fut  solennellement  condamnée 
par  Pie  VI  le  10  mars  et  le  13  avril  1791 . 

Le  10  août  1792,  éclatèrent  à  Paris  les  événements  qui 
précipitèrent  du  trône  l'infortuné  Louis  XVI  et  changèrent 
la  forme  de  l'Etat  La  chute  du  roi  rendit  caduc  le  serment 
qui  lui  promettait  fidélité.  Aussi  l'Assemblée  Législative  le 
remplaça-t  elle  ])ar  le  nouveau  serment  de  Liberté  et  d'Ega- 
lité. Voici  quelle  en  était  la  formule  :  «  Je  jure  d'être  fidèle 
à  la  nation,  et  de  maintenir  la  libei'té  et  l'égalité,  ou  de 
mourir  en  les  défendant.  » 

Ce  second  serment  fut-il  également  condamné  par  le 
Souveiain  Pontife?  Une  réponse  de  Pie  VI  à  l'évéque 
d'Ypres,  inconnue  jusqu'ici,  va  nous  éclairer  sur  l'opinion 
i-oniaine. 


MÉLANGES  343 

Au  mois  de  mai  1793,  Mt'""  de  Conzié,  archevêque  de 
Tours,  écrivait,  de  Dnsseldorf,  à  M»""  de  Bovet,  évoque  de 
Sisteron,  qui  était  à  Fribourg,  en  Suisse  :  «  M^""  le  nonce  de 
Bruxelles  qui  s'était  réfugié  à  Dnsseldorf,  où  il  a  j)assé 
riiiver,  lorsqu'il  a  été  forcé  d'abandonner  sa  résidence 
(novembre  1792),  nous  a  dit  avoir  adressé,  au  mois  d'oc- 
tobre dernier  (1792),  au  Souverain  Pontife  un  Mémoire 
très  raisonné  de  M"""  l'évoque  d'Yijres,  par  lequel  ce  j)rélat 
j)roposait  au  Saint-Siège  les  motifs  respectifs  de  la  diver- 
sité des  o])inions  réi)andues  dans  son  clergé  français  sur  la 
question  du  serment  de  Liberté  et  d'Égalité.  Mf-'""  le  nonce 
prétend  que  ce  Mémoire,  fort  bien  fait,  présentait  tous  les 
moyens  des  deux  partis.  La  réponse  ayant  été  différée,  il  a 
écrit  de  nouveau,  sur  les  instances  de  M*''"  l'éveque  d'Ypres. 
Enfin,  dans  les  premiers  jours  d'avril  (179.3),  il  a  reçu  le 
Bref  d'autre  part,  qu'il  nous  a  communiqué  en  extrait, 
assez  mal  traduit  par  son  auditeur,  mais  fidèlement  et  litté- 
ralement. Je  n'ai  pas  cru  devoir  y  rien  changer.  Quoique 
le  Chef  de  l'Église  se  réserve  de  prononcer  ci-après  sur  le 
serment  et  croie  devoir,  par  prudence,  différer  sa  décision, 
on  peut  remarquer  que  les  motifs  des  opposants  sont  qua- 
lifiés de  fortes  raisons,  et  qu'en  attendant  la  décision  il 
n'est  })as  permis  de  jurer.  » 

Voici  maintenant  la  lettre  du  cardinal  de  Zelada,  secré- 
taire d'État  de  Pie  VI.  àM^^'le  comte  de  Brancado,  nonce 
apostolique  à  Bruxelles  :  «  Si  Sa  Sainteté  eût  décidé  la 
question  élevée  sur  le  nouveau  serment  prescrit  par  la  Con 
vention  Nationale,  elle  ne  vous  en  aurait  certainement  pas 
laissé  ignorer  la  décision.  Mais,  comme  à  l'instance  de 
M?'"  l'évoque  d'Ypres,  que  vous  m'avez  remise  par  votre 
lettre  du  13  novembre  passé  (1792),  se  sont  unies  les  autres 
instances  d'une  infinité  d'évèques  et  d'ecclésiastiques  fran- 
çais, comme  il  y  a  entre  eux  diverses  formules  en  ligne  de 
fait  dudit  nouveau  serment,  et  beaucoup  plus  en  ligne  de 
droit,  les  uns  pensant  de  l'admettre  absolument,  d'autres 
sous  différentes  conditions  et  d'autres  finalement  soute- 
nant ])ar  de  fortes  raisons  qu'on  ne  doit  pas  l'approuver 
d'aucune  façon,  les  conditions  môme  exclues,  ainsi  Sa 
Sainteté  susdite,  procédant  avec  cette  prudence  qu'exige 
l'importance  de  l'affaire,  a  voulu  qu'avant  tout  on  se  pro- 


344  MÉLANGES 

curât  des  éclaircissements  du  fait,  pour  ensuite  prendre 
en  discussion  sérieuse  la  controverse,  et,  après  l'examen 
le  plus  scrupuleux,  la  résoudre,  avertissant,  en  attendant, 
qne  dans  le  doute  il  n'est  pas  permis  de  jurer,  afin  que 
personne  ne  se  laisse  séduire,  et  qu'il  ])ourvoie  à  sa  con- 
science. Cette  conduite  sage  du  Sai ut-Père  pourra,  de 
votre  part,  se  manifester  audit  M*^"^  l'évèque  d'Ypres,  afin 
qu'il  ne  soit  pas  surpris  par  la  dilation.  » 

Une  copie  de  ces  deux  importantes  lettres  se  trouve  à 
la  Bibliothèque  de  Troyes(ms.  2871). 

F.  UzUREAU. 


COMPTES  RENDUS 


Ch.  Georgin.  Homère  illustré  :  Iliade,  Odyssée,  Poèmes 
homériques.  —  Paris,  A.  Hatier,  1921,  in-8°.  Cartonné, 
6  fi\  50. 

Cet  ouvrage  fait  partie  d-i  la  collection  des  Auteurs  grecs 
publiée  sous  la  direction  de  M.  Gh.  Georgin  et  dans  laquelle 
Sophocle  est  déjà  représenté  par  son  Oedipe-Roi. 

L'auteur  y  a  réuni,  avec  les  chants  les  plus  connus,  de 
larges  extraits  de  riliade  et  de  l'Odyssée,  en  les  reliant  par 
des  résumés. 

Il  a  ajouté  des  fragments  des  hymnes  à  Apollon  Délien,  à 
Apollon  Pythien,  à  Hermès,  à  Déméter,  à  Dionysos,  deux 
épigrammes,  et  une  centaine  de  vers  de  la  Batrachomyo- 
mochie. 

Ces  textes  sont  précé  lés  d'un  tableau  sommaire  des  princi- 
pales particularités  de  la  langue  homérique,  et  suivis  de 
remarques  sur  la  grammaire,  la  versification  et  le  style.  Tous 
ces  renseignements  seront  fort  utiles  aux  élèves. 

L'annotation  au  bas  des  pages  est  destinée,  lit-on  dans  la 
Préface,  à  faciliter  lintelligence  du  texte;  pas  de  rapproche- 
ments ni  de  jugements  littéraires;  le  soin  de  les  établir-  est 
réservé  aux  maîtres  En  réalité,  les  notes  sont  loin  d'élucider 
les  principales  difficultés  et,  en  voulant  les  rendi-e  aussi  rares 
et  aussi  succinctes  que  possible,  M.  Georgin  a  manqué  son  but. 
C'est  surtout  à  propos  d'un  auteur  tel  qu'Homère,  dont  les 
étudiants  doivent  lire  de  longs  exti'ails,  qu'il  impoite  de  leur 
venir  en  aide  dans  la  préparation  du  texte.  Or,  nous  pourrions 
citer  quantité  de  vers  qui,  faute  d'explications,  rebuteront  les 
jeunes  lecteurs.  D'autre  part,  la  plupart  des  notes  offrent  à 
l'élève  une  traduction,  alors  qu'il  eût  suffi  de  lui  signaler  la 
difficulté  par  un  bref  avertissement. 


346  COMPTES    RENDUS 

A  la  fin  du  volume,  un  Index  nominimi  explique  les  noms 
propres  et  un  Indcr  reruni  donne  le  sens  de  quelques  termes, 
moins  de  50,  ce  qui,  pour  plus  de  40U  pages  de  texte,  est  fort 
incomplet  :  on  n'y  trouve  pas,  par  exemple,  les  expressions 
irébiXa,  Treoaôç,  Gpôvoç,  Bptîvuç,  k\i(7)U0ç,  xépviijj,  Trpôxooç,  ha\- 
Tpôç,  pour  ne  citer  que  des  mots  empruntés  au  premier  chant 
de  l'Odyssée. 

Mais  ce  qui  donne  un  cachet  particulier  à  cette  nouvelle 
édition  d'Homère,  c'est  l'abondance  et  la  richesse  des  illustra- 
tions, qui  aideront  les  élèves  à  se  rendre  compte  de  la  façon 
dont  le  poète  grec  fut  compris  à  travers  les  âges.  Cette  inno- 
vation assurera  certainement  le  succès  de  l'ouvrage. 

J.    HOMBERT. 


Plutarco,  Dell'  Educazione  deiFîgliuoli,  k  cura  di  C.  Mondesi, 
Florence,  Sansoni,  1916,  in-S"*,  xxiv — 86  p.  L.  1,20  + majo- 
ration. 

Cet  opuscule  appartient  à  la  même  collection  que  le  précé- 
dent. Le  même  plan  y  a  été  suivi  :  introduction,  texte  grec, 
traduction  en  regard,  notes  explicatives,  indices  des  noms 
propres,  des  passages  cités,  des  faits  et  des  expressions 
remarquables. 

Après  quelques  mots  sur  la  fortune  de  Pluiarque  en  Italie, 
en  France  et  en  Angleterre.  M""  Mondesi  a  essayé  de  replacer 
dans  son  milieu  le  sage  de  Chéronée  :  elle  a  adopté,  pour 
caractériser  ses  tendances,  et  particulièrement  sa  morale,  le 
mot  de  Wedgwood  :  le  christianisme  inconscient.  Peut  être 
est-il  permis  de  douter  que  ce  mot,  d'ailleurs  si  expressif, 
rende  bien  compte  et  de  l'état  du  christianisme  et  de  la  situa- 
tion du  paganisme  au  ii*  siècle  après  Jésus-Christ.  On  a 
reproché  avec  raison  à  un  savant  allemand  de  mettre  au  début 
de  recherches  de  mythologie  ancienne  la  parole  célèbre  :  «  Au 
commencement  était  le  Verbe  ».  Ces  rapprochements  sont 
forcés.  De  même.  M"*'  Mondesi  reti'ouve  dans  certains  pas- 
sages du  traité  de  Plutarque  quelque  chose  de  comparable  à 
«  l'esprit  combatif,  l'éloquence  vive  et  passionnée  des  meil- 
leures pages  de  saint  Paul  »;  or,  il  y  a  un  abîme  entre  les 


COMPTES    RENDUS  347 

deux  tempéraments  comme  entre  les  deux  conceptions  de 
l'art  et  de  la  morale. 

Ces  critiques  n'enlèvent  rien  aux  mérites  réels  de  cette 
introduction.  L'appréciation  littéraire  y  est  faite  avec  soin  et 
avec  goût.  On  y  aborde  le  problème  de  l'authenticité,  problème 
dont  M"''  Mondesi  connaît  toutes  les  données,  puisqu'elle  y  a 
elle  même  consacré  jaiis  plusieurs  pages  (^).  On  sait  que 
l'authen licite  a  été  mise  en  doute  surtout  par  Wyttenbach. 
Le  savant  hollandais  s'appuie  sur  une  série  d'arguments; 
parmi  lesquels  il  en  est  de  ti'és  solides.  Le  plus  convaincant, 
c'est  la  différence  de  style  entre  ce  ti-aité  et  les  auti^es  œuvres 
morales  de  Plutarque.  Sans  doute,  M"*"  Mondesi  a  raison 
d'objecter  que,  si  ce  critère  a  une  valeur,  il  faut  refuser  à 
Manzoni  la  paternité  de  ses  œuvres  de  jeunesse;  sans  doute 
talent  et  génie  se  transforment.  Mais  le  nepl  Traîbujv  àYuuT»lç 
a  contre  lui.  non  seulement  d'être  différent  des  autres  traités, 
mais  encore  d'être  le  premier  de  la  série.  Le  doute  est  dès 
l'Ts  permis. 

Ce  doute  est  renforcé  par  les  résultats  de  l'épreuve  faite  à 
l'aide  d'un  «test  mathématique»  des  clausules.  M.  de  Groot, 
dans  son  Ilandbooh  of  Ant/que  Prose-Rhythni  (^l  a  établi 
que  dans  les  œuvres  authentiques  de  Plutarque,  les  clausules 
—  o  —  ':f  se  trouvent  dans  la  proportion  de  29  p.  c.  Ce  sont 
les  clausules  favorites  de  l'auteur.  Or,  nous  avons  constaté 
que  dans  l'œuvre  soupçonnée,  le  pourcentage  de  la  clausule 
favorite  s'abaisse  à  15,  5  p.  c.  L'étude  de  la  prose  métrique 
n'en  est  encore  qu'à  ses  débuts  :  malgré  les  travaux  de  Zie- 
linski.  de  Havet,  de  Bornecque,  de  Zander,  de  Novotny,  de 
A.  de  Groote,  le  nombre  des  pages  et  des  écrivains  qui  ont 
été  étudiés,  est  trop  minime  pour  que  la  prudence  dans  les 
conclusions  ne  s'impose  pas.  Néanmoins  le  test  métri(|uea  une 
grande  valeur  quand  il  n'est  pas  seul,  et  c'est  bien  le  cas  ici. 

Signalons,  en  attendant  que  nous  puissions  revenir  sur  ce 
travail,  que  la  même  collection  comprend  une  édition  des 
Caractères  de  Théophraste  ('),  édition  due  à  l'auteur  du  livre 
magistral  Orazio  Lirico,  Fiorence,  Le  Monnier,  1920,  in-S". 

Arth.  Hdmpers 


(1)  Sludi  italiiint  (Il  fîfol.  classica,  t.  \X,  lOi:},  |).  J-J  s(|(i. 

(2)  T.  I.  (Jroniiij,^»'!!,  Wollors,  1918. 

(■')  Teofrastn  /  Carat teri,  a  cura  di  ('.i(iif,n(i  Pasiiiiali.  lUI'.l. 


348  COMPTES    RENDUS 

Les  débuts  de  la  Lexicographie  Franco-Néerlandaise.  Leçon 
d'ouverture  faite  le  28  janvier  1921  par  K.-.I.  Riemens, 
admis  comme  «  privat-docent»  à  l'Université  d'Amsterdam. 
Paris,  Champion  li)21,  in-S»,  2\i  p 

Le  Grand  Dictionaire  François-Flamen,  imprimé  en  1624, 
à  Rotteidam,  par  Isaac  van  Waesberghe,  est  orné  d'un  fron- 
tispice encadré  à  droite  et  à  gauche  de  six  portraits  en 
médaillon,  représentant  les  lexicologues  Jacques  du  Puis, 
M.  Nicod,  Ed.  Mellema,  Gabriel  Meurier,  Mathias  Sashouf 
et  l'impiimeur  anversois  /.  Waesbergue.  M.  Riemens,  de  qui 
nous  possédons  déjà  une  Esquisse  histo?^ique  de  l'enseignement 
du  français  en  Hollande  (Leyde,  A.  W.  Sijthotf  1919)  a  voulu 
cette  fois  «rendre  un  peu  de  vie  à  ces  vieilles  figures  effacées». 
A  cet  effet  il  a  réuni  les  principaux  éléments  bio-bibliogra- 
phiques des  cinq  premiers  «  doctes  personnages  »  cités  plus 
haui.  Il  examine  en  particulier  le  Vocabulaire  françois- 
flameng  de  Meurier  (ijetses  sources  —  la  valeur  du  Diction- 
naire fran(:ais- flamand  de  M.  Sasbout  (1579),  qui  donne, 
pour  la  lettre  l  seule,  40  mots  que  Nicod  n'a  pas,  des  néolo- 
gismes  que  Brunot  trouve  pour  la  première  fois  chez 
Cotgrave{1614)et  un  Traité  de  la  navigation,  renerie  et  fau- 
connerie, «emprunté  sans  doute  aux  augmentations  fournies 
par  Nicod  en  1573»  (au  dictionnaire  de  Robert  Etienne,  édité 
par  Jacques  du  Puys).  En  passant  il  signale  que  le  Dictionaire 
flaoneng  francoys  du  même  Sasbout  (Anvers  1576)  n'est 
qu'une  copie  du  Thésaurus  de  Plantin,  moins  le  latin  et  que 
le  Dictionnaire  ou  Promptuaire  flarneng-françois  de  Melle- 
ma (édition  de  1592)  n'est  qu'une  revision  de  celui  de  Sasbout- 
Plantin. 

Dans  la  préface  du  dictionnaire  de  Mellema  de  1624  figure 
également  le   nom   de   Glat'.de  Lniton,   inconnu   à    B'unot. 


(*)  Ce  Vocabulaire  fui  réiu»|irini(';  plus  tard  vomina  U'ulioncnre  Vrunçois- 
Flameng  :  celui-ci  contient  1500  mots  qu'on  ne  trouve  pas  chez.  Cotgrave  ;  ils 
furent  publiés,  avec  800  autres  mots  tirés  des  Dictionnaires  Flamen-Franrois 
de  ioU-i  et  1507  et  iOO  mots  du  Thésaurus  de  Plantin  par  H.  Vaganay  :  Le 
vocalmlaire  français  du  XVF'  siècle  et  detijc  lexicographes  flaviands  du  niêuie 
siècle,  2000  uiols  inconnus  à  Colgrave  (Congrès  pour  l'extension  et  la  culture  de 
la  langue  fr-ançaise,  Liège  1905).  —  Je  dois  les  détails  de  cette  note  à  l'ama- 
bilité de  mon  collcgiie,  M.  J.  llaust,  ijui  a  bien  voulu  me  communiquer  la 
brochure  de  M.  II.  Vaganay. 


COMPTES    RENDUS  340 

M.  Rienicns  croit  pouvoir  l'identifier  avec  le  maître  anversois 
■«  Claude  Luythart  »,  signalé  dans  une  note,  éciite  par-  un  élève 
sur  un  feuillet  de  garde  d'un  vocabulaire  de  Noël  de  Berlai- 
raont.  Ce  Luitou  aurait  publié  en  français  et  en  allemand, 
d'après  de  Berlaimont,  dix-huit  règles  de  prononciation 
Irançaise. 

Le  point  de  départ  de  l'œuvre  des  lexicologues  précités 
serait  le  Vocabulaire  de  Berlaimont,  qui  donne  poui*  la 
première  fois,  dit  M.  Riemens  une  liste  alphabétique  de 
vocables  néerlandais-français.  Ce  vocabulaii'e  a  t-il  quelque 
rapport  avec  le  Vocabularlo  pa»  a  aprender  franches,  espan- 
noly-flainincq,  imprimé  en  15:30 par  Vorsterman?  M.  Riemens 
le  suppose  el  à  cette  occasion  il  attire  l'attention,  à  simple  titre 
documentaire,  semble-t-il,  sur  le  Vocabulair  pour  aprendre 
romain  et  flameng  —  Vocabulaer  om  te  leerne  Walsch  en 
Vlaemsch,  sorti  des  i)resses  de  l'imprimeur  anversois  Roland 
van  den  Dorpe  au  plus  tard  en  1501. 


M.  liiemens  dit  lui-môme  (p.  23)  que  l'objet  de  sa  leçon 
«est  si  vaste  qu'il  demanderait  au  moins  un  volume  pour  être 
traité  à  fond»  et  que  «son  étude  ne  prétend  pas  fixer  le  terme 
des  recherches  à  faire,  mais  en  marque  plutôt  le  point  de 
départ».  Sa  leçon  en  effetne  fait  qu'esquisser  le  développement, 
de  la  lexicologie  franco-néerlandaise  du  XVI*"  siècle,  et  spé- 
cialement de  la  seconde  moitié,  en  la  rattachante  *ies  person- 
nages connus  ;  elle  ne  fait  qu'effleurer  les  véritables  débuts, 
et  ne  cherche  pas  à  démêler  les  raisons  multiples  qui  ont 
provoqué,  à  Anvers  surtout,  la  publication  de  es  nombi"eux 
ouvrages  lexicologiques  de  toute  espèce  <  t  de  toute  langue. 

Ellf^  ne  nou-<  donne  pas  ce  que  promet  le  titre,  mais  a  l'avan- 
tage de  soulever  plusieurs  questions  importantes.  Pour  n'en 
citer  qu'ui.e  :  faut-il  admettre  que  le  vocabulaire  de  Noël  de 
Berlaimont  est  le  point  de  départ  des  dictioinaire»;  «  qui  sont 
venus  api-és,   du  moins  des  tomes  flamands-français»  (^)? 


{')  M.  Uieinens  ('cril  que  ce  vocai)iiiaii'('  «semble  l)i('ii  remonter  à  i.">80  au 
moins»,  et  renvoie  en  note  à  sa  notice  dans  Het  Bock,  VII.  37:2.  Cet  «an  moins» 
est  de  trop  et  la  note  aurait  du  être  pins  explicite.  La  pins  ancienne  édition 
conntie  date  de  1.^36.  Il  y  a  une  étition  antérieure,  on  pourrait  à  lu  rigiirur 


350  COMPTES     RENDUS 

M.  Riemens  ne  l'affirme  pas,  mais  selon  lui  c'est  «  assez  pro- 
bable ».  Nous  doutons  même  de  ce  «  probable  ».  L'argument  de 
l'ordre  alphabétique  est  bien  faible  et  la  genèse  du  Thésaurus 
de  Planlin  n'est  pas  de  nature  à  confirmer  l'hypothèse  ;  nous 
y  ajoutons  que  ce  dictionnaire,  comme  d'ailleurs  celui  de 
Sasbout  (le  1576,  s'adressait  à  un  tout  autre  public  que  les 
Vocabulana,  Colloquia  et  Dictionariola  du  XVI*  siècle,  com- 
posés plutôt  à  l'usage  des  mai'chands,  des  voyageurs  et  des 
gens  d'affaires. 

Déjà  en  1577  lan  Waesberghe  publie  une  édition  a'  régée  du 
dictionnaire  de  Sasbout,  dédiée  «aux  très  vertueux  et  discrets 
modérateurs  et  instructeurs  de  la  langue  Françoise,  M.  Pierre 
He3''ns  et  M.  lean  Borrekens»—  «ses  amis».  Le  but  classique  de 
cette  édition  est  évident.  Est-ce  le  cas  pour  lédition  de  1576 
et  pour  le  Thesaurusl  Nous  ne  le  croyons  pas.  Le  caractère 
nettement  différent  des  ouvrages  en  cause  ne  plaide  pas  en 
faveur  d'une  source  ou  d'une  inspiration  unique.  La  question 
ne  peut  être  tranchée  que  par  l'étude  comparée  et  méthodique 
des  différentes  catégories  de  livres  lexicologiques  ;  en  atten- 
dant le  résultat  de  cette  étude,  résistons  à  la  tentation  des 
hypothèses,  et  métions-nous  de  rapprochements  basés  sur  des 
données  purement  biblioscraphiques. 

M.  Riemens  a  forcément  dû  restreindre  les  limi  es  de  sa 
leçon  ;  on  peut  toutefois  regretter  qu'il  n'ait  pas  compris  dans 
son  examen  e.  a.  le  Dictionnarium  ...  latinum  (jalliCMm  et 
theutonicum  de  Brechtanus  (Anvers  1549),  Het  Tresoor  der 
Duytscher  Taie  de  Jan  van  de  Werve  (Anvers  1552)  et  le 
Dictionnarium  tetraglotton  (Anvers,  C.  Plantin,  1562).  Les 
dates  sont  imp  irtantes  et  permettent  de  supposer  quelque 
influence  sur  les  ouvrages  lexicologiques  de  l'époque  ;  même 


dater  de  1530,  mais  alors  tout  au  plus  comme  Icnninux  a  quo.  CeUe  cdilion 
est-elle  Vedilio  princeps  V  On  l'ignore  ;  on  ne  sait  qu'une  chose,  c'est  que  l'édi- 
tion qu'on  croyail  f'trc  de  iiHJ,  est  de  tS40.  Pendant  plus  d'un  siècle  les 
bibliographes  nous  ont  l'idclement  transmis  la  lecture  erronée  (MDXl  pour 
MDXL)  ;  Mrlle  Ki(»neid)erg,  intriguée  par  un  article  de  M.  Kouiman  dans  le 
Xieuwe  Tualgils  (1!H8,  [>.  Gn  et  s.)  a  remis  les  choses  au  i)oiiit  dans  la  même 
revue  (1018.  p.  172  17:}).  La  découverte  bibliographique  de  Melle  Kronenherg 
est  d'un  intérêt  tout  particulier  pour  l'histoire  des  débuts  de  la  lexicologie 
Iranco-nécrlaiidaise  et  méritait  bien  les  honneurs  dune  citation  à  côté  de  la 
notice  de  l'auteur  dans  llil  lUick. 


COMPTES    RENDUS  351 

à  défaut  de  cette  influence  ces  dictionnaires  méritent  toute 
notre  attention.  Cette  remarque  n'est  pas  une  critique,  l'omis- 
sion étant  peut-être  volontaire  ;  elle  n'enlève  rien  au  mérite 
de  cet  essai  d'histoire  lexicologique,  que  nous  signalons  volon- 
tiers à  nos  philologues. 

R.  Verdeyen. 


Paul  Hamelius,  Introduction  à  la  liltérature  française  et 
flamande  de  Belgique,  Bruxelles.  Office  de  publicité,  1921, 
in-8°,  316  p. 

Ce  volume,  écrit  sous  une  forme  pleine  d'aisance  et  d'agré- 
ment, mérite  la  plus  sérieuse  attention.  M.  Hamelius  le  dédie 
aux  étrangers  et  à  la  jeunesse.  Il  a  droit  à  une  diffusion  bien 
plus  large.  Tous  ceux  qui  s'intéressent  aux  choses  de  chez 
nous,  les  lettrés  aussi  bien  que  les  simples  curieux,  y  trouve- 
ront leur  compte.  Pareil  ouvrage  a  sa  place  marquée  dans 
chacune  de  nos  bibliothèques. 

La  pensée  génératrice  du  travail  peut  se  formuler  en  ces 
termes:  si  la  nation  belge,  en  tant  que  collectivité  morale, 
est  une  réalité  historique,  il  doit  exi-ter  une  littérature  belge, 
douée  de  traits  spécifiques,  quelle  que  soit  la  langue  dans 
laquelle  elle  s'exprime. 

L'idée  paraîtra  neuve  à  beaucoup.  Elle  ne  l'est  pas  tout  à 
fait.  Elle  a  inspiré,  il  y  a  quelques  années,  à  M.  Camille 
Liégeois,  un  article  remarquable,  paru  sous  un  titre  trop 
modeste,  car  on  j  trouve  une  solide  vue  d'ensemble  sur  la 
production  littéraire  de  notre  pays,  depuis  les  origines 
jusqu'au  xix«  siècle  [Les  Lettres  belges  au  moyen  âge,  dans  le 
«  Bulletin  bibliographique  du  Musée  belge»,  t.  XIII,  1909, 
p.  5-24).  M.  Hamelius  ne  paraît  pas  avoir  connu  cet  article. 
Il  doit  à  ses  pi-opres  observations  d'avoir  découvert  le  carac- 
tère national  de  notre  littérature.  La  coïncidence  est  à  relever. 
Peut-être  y  verra-t-on  une  présomption  favorable  à  la  thèse 
défen  lue  dans  ce  livre. 

Tandis  que  M.  Liégeois  proposait  aux  méditations  de  ses 
lecteurs  une  pure  synthèse,  M.  Hamelius  combine  la  méthode 
analytique  et  synthétique.  Il  étudie,  en  des  chapiti-es  particu- 
liers, une  série  de  compositions  et  d'écrivains  choisis  parmi 


352  COMPTES    RENDUS 

les  plus  représentatifs  des  diverses  époques  de  notre  histoire 
littéraire  ;  en  même  temps,  il  s'attache  à  suivre  le  dévelop- 
pement de  cette  hist  ire  et  à  découvrir,  sous  les  formes 
changeantes  de  l'idéal  artistique,  la  continuité  de  la  tradition 
indigène.  Un  exposé  ainsi  compris  offre  le  précieux  avantage 
d'éviter  les  nomenclatures.  Il  suppose  un  certain  courage,  en 
ce  qui  touche  à  la  période  contemporaine.  Mais  quel  est  le 
lecteur  épris  de  vues  générales  qui  ne  souscrirait  à  une  décla- 
ration comme  celle  ci  :  «  Dans  une  simple  introduction, 
destinée  u  dégager  les  figures  principales  et  à  établir  les 
lignes  maîtresses  de  l'évolution,  on  peut  passer  sous  silence 
les  auteurs  secondaires.  Mieux  vaut  fixer  l'attention  sur  Ips 
œuvres  assez  hautes  pour  interpréter  l'esprit  belge  auprès  de 
la  postérité  et  de  l'étranger  »  (p.  8)  ? 

S'il  faut  louer  le  procédé  d'exposition  adopté  par  M.  Hame- 
lius,  ce  livre  touche  à  trop  de  problèmes  pour  ne  point  laisser 
place,  sous  d'autres  rapports,  à  des  divergences  de  vue. 

Gomment  interpréter  historiquement  le  mot  Belgique, 
inscrit  au  frontispice  du  livre  ?  Comment  concevoir,  dans  le 
passé,  cette  entité  en  laquelle  on  a  foi,  la  nation  belge,  si  elle 
n'a  trouvé  qu'à  une  époque  récente  son  moule  politique? 
Tranchant  dans  le  vif,  l'auteur  regarde  uniquement  comme 
belges  les  œuvres  nées  sur  le  territoire  du  royaume  actuel 
(p.  7).  Opération  trop  radicale,  à  coup  sûr,  notamment  en  ce 
qui  regarde  la  littérature  du  moyen-âge.  Pour  la  production 
flamande,  on  ne  s'en  aperçoit  guère,  puisque  la  littérature 
néerlandaise  de  cette  période  se  localise  surtout  dans  nos 
provinces.  La  difficulté  est  tout  autre,  lorsqu'il  s"agit  de  la 
production  en  langue  française.  Le  moyen-âge  nous  a  laissé 
une  foule  de  compositions  dont  la  provenance  ne  peut  être 
déterminée  qu'approximativement,  d'après  leur  dialecte.  Des 
écrits  de  l'espèce  trouveront-ils  place  dans  le  cadre  rigide 
tracé  par  M.  Hamelius?  Il  semblerait  plus  logique  de  conser- 
ver à  ce  cadre  national  sa  souplesse  traditionnel  le;  de  regarder 
comme  nôtres,  aux  époques  lointaines,  les  œuvres  écloses 
dans  les  régions  qui  constituaient  la  Belgique  d'alors  et  qui, 
remarquons-ie,  prenaient  part  à  notre  vie  collective.  Avec  le 
système  de  M.  Hamelius,  il  devient  impossible  de  réunir  dans 
un  même  ensemble  le  groupe  si  nettement  caractérisé  des 
écrivains  bourguignons. 


COMPTES    RENDUS  353 

La  réalisation  du  plan  général  de  l'ouvraji^e  implique, 
disions-nous  à  l'instant,  un  choix  des  œuvres  regardées 
comme  la  plus  parfaite  expi-ession  de  notre  effort  littéraire. 
Besogne  délicate,  que  ce  choix  !  A  n'envisager  que  la  littéra- 
ture française  du  moyen-àge,  je  regrette  l'omission  à'Aucassin 
et  Nicolette,  ce  délicieux  chef-d'œuvre  dont  la  provenance 
belge  ne  paraît  plus  aujourd'hui  contestable  (cf.  G.  Doutrëpoxt 
et  F,  Bethunk,  Bulletin  d'histoire  linguistique  et  littéraire 
française  des  Pays-Bas,  année  1901,  Bruges,  1903,  p.  23-24, 
et  années  1902-1903,  Bruges,  1906,  p.  85  ;  Liégeois,  art.  cité, 
p.  12).  Tandis  qu'un  chapitre  est  consacré,  avec  raison,  à 
Guido  Gezelle,  l'illustre  champion  fie  la  littérature  régiona- 
liste  flamande,  peut-être  ne  serait-il  pas  hors  de  propos 
d'accorder  une  mention  à  la  littérature  dialectale  de  la 
Belgique  romane,  spécialement  à  celle  qui  fleurit  à  Liège 
depuis  1854.  Dans  le  mouvement  littéraire  français  datant  de 
1880,  on  voudrait  voir  figurer,  à  côté  de  Verhaeren,  de  Van 
Lerberghe,  de  Grégoire  Le  Roy  et  de  Maeterlinck,  l'un  ou 
l'autre  poète  d'origine  wallonne,  et  l'on  song  ■  tout  naturel- 
lement à  Fernand  Séverin,  à  Mockel..  Enfin,  puisque  j'en 
suis  à  relever  ce  que  d'aucuns  regarderont  comme  des  lacunes 
de  ce  livre,  combien  j'aurais  trouvé  à  sa  place,  en  tête  du 
volume  et  en  guise  d'introduction,  un  chapitre  sur  la  situation 
linguistique  de  notre  pays  (*)  ! 

Si  l'on  peut  signaler  dans  l'ouvrage  quelques  déficits  regret- 
tables, la  sélection  opérée  par  l'auteur,  à  la  prendre  dans  son 
ensemble,  est  cependant  on  ne  peut  plus  heureuse.  Ce  qui  me 
trouble  davantage,  c'est  la  manière  dont  M.  Hamelius  conçoit 
ce  travail  de  haute  vulgarisation,  là  où  il  traite  de  la 
littérature  médiévale.  11  s'arrête  à  des  problèmes  relevant 
uniquement  de  l'érudition  ;  il  prend  parti  dans  des  questions 
controversées  ;  il  répète  sous  forme  dogmatique  de  pures 
conjectures  de  savants  ;  il  avance  lui-même  des  hypothèses 
nouvelles.  Attitude  périlleuse  et  sans  profit,  si  ce  n'est  le 
mérite  de  l'originalité.  La  nature  de  l'exposé  commandait 
plutôt,  sur  ce  terrain,  une  sage  réserve.  A  défaut  de  quoi  plus 


(')  L"aiitL'ur  L'i  rit,  p.  ;}  :  «  Si  les  (iciix  laiigiu-s  parlées  |)ar  les  Belj,'es  sont 
celles  de  deux  peuples  voisins,  les  Franeais  el  les  Hollandais...  ».  La  luieveté 
■de  la  formule  risque  de  faire  eroire  (jue  la  Belgique  flamande  pi'ali(iue 
couramment  le  hollandais. 


354  i  COMPTES    RENDUS 

d'un  chapitre  appelle  une  mise  au  point.  Non  que  M.  Hamelius 
se  laisse  aller  à  de  bien  graves  écarts.  Mais  il  dit  trop  et  trop 
peu  à  la  fois.  Qu'il  me  soit  permis  de  m'expliquer  là-dessus. 
au  risque  d'allonger  démesurément  cette  notice. 

Le  chap.  Il  (Le  cycle  de  Godefroi  de  Bouillon  et  de  la 
Croisade)  soulève  la  question  de  la  légende  du  chevalier  au 
cygne.  Des  recherches  nombreuses  ont  scruté  les  origines  de 
cette  légende,  longtemps  tenue  pour  un  mythe  germanique 
(cf.,  p.  ex.,  DouTREPONT  et  Bethune,  Bull,  cité,  année  1901, 
p.  37-44,  années  1902-1903,  p.  48-62).  M.  Hamelius  les  passe 
sous  silence.  Il  paraît  avoir,  sur  le  sujet,  des  idées  person- 
nelles et  serait  disposé,  semble-til,  à  faire  remonter  les 
éléments  du  récit  à  des  sources  latines,  notamment  à  Ovide. 
Je  ne  prétendrai  pas  qu'il  ait  tort.  Néanmoins,  l'exposé 
manque  de  méthode  et  de  netteté.  Il  s'y  mêle  des  réminis- 
cences de  travaux  antérieurs,  intelligibles  pour  les  seuls 
spécialistes.  J'imagine  que  ces  pages  doivent  laisser  le  lecteur 
perplexe. 

Plus  loin,  lorsqu'il  aborde  les  diverses  branches  du  cycle 
de  la  Croisade,  l'auteur  obéit  à  une  suggestion  malencontreuse 
en  proposant  de  les  attribuer  toutes  à  Renaud  de  Saint-Trond 
(p.  30)  Sans  parler  du  trouvère  Richard  le  Pèlerin,  person- 
nage peut-être  problématique,  Graindor  de  Douai  a  attaché 
son  nom  à  la  chanson  d'Antioche  et  à  celle  des  Chètifs  (cf. 
DouTREPONT  et  Bethune,  Bull,  cité,  années  1902-1903,  p.  114; 
Liégeois,  art.  cité,  p.  10-11).  La  mention  de  Renaud  apparaît 
seulement  dans  un  remaniement  des  Enfances  Godefroi,  à  la 
suite  de  morceaux  adventices  ;  elle  est  inconnue  aux  plus 
anciens  manuscrits.  D'après  les  dernières  recher^-hes,  cette 
branche  des  Enfances  aurait  été  écrite  entre  1160-1187  par 
un  poète  originaire  du  pays  de  Bouillon,  tandis  que  le 
Chevalier  au  Cygne  se  placerait  entre  1170-1192  et  serait  dii 
à  un  trouvère  de  la  région  de  Saint-Quentin  (Maria  Einstein, 
Beitrdge  zur  I^berlieferung  des  Chevalier  au  Cygne  und  der 
Enfances  Godefroi,  Erlangen,  1910.  Dissertât,  de  l'Univ.  de 
Berne) . 

Au  chap.  III  Le  roman  des  ([uatre  fils  Aymoii.  Karel  ende 
Elegast),  on  est  dérouté  de  ne  point  voir  citer  l'étude  de 
Bédier,  qui  place  à  l'abbaye  de  Stavelot  et  Malmédy  le  berceau 
de   la  légende    de     Renaud  de    Montauban    (Les    Ugendes 


COMPTES    RENDUS  355 

épiques,  t.  IV,  1913,  p.  189-278).  Concernant  Karel  ende 
Ele(jast,  était-il  superflu  de  rappeler  que  le  thème  fondamen- 
tal de  ce  roman  a  dû  figurer,  suivant  l'opinion  commune, 
dans  Basin,  chanson  de  geste  française  connue  par  des 
allusions  et  des  imitations  étrangères  (cf.  Léon  Gautier, 
Bibliogr.  des  chansons  de  geste,  p.  62-63  ;  Liégeois,  art.  cité, 
p.  10)  ? 

Dans  le  chap.  IV,  à  propos  du  Heinaert  moyen- flamand, 
l'auteur  fait  sienne  la  thèse  qui  a  été  en  faveur  durant  ces 
dernières  années.  Il  voit  dans  le  fameux  poème  une  œuvre 
bi-partite,  due  à  deux  écrivains  très  différents  de  tempé- 
rament, Willem  et  Arnold,  La  thèse  est  rendue  attachante 
par  l'exposé  plein  de  vie  qui  en  est  fait  ici.  Elle  se  présente 
toutefois  avec  un  cachet  Me  certitude  qu'elle  ne  peut  reven- 
diquer. Aussi  le  chapitre  court-il  le  risque  d'être  vite  démodé  ; 
déjà,  le  débat  relatif  à  la  composition  du  Reinaert  a  repris  de 
plus  belle  (cf.  Kloeke,  Het  aandeel  ran  Willem  en  Aern  ut 
in  dcn  Reinaert  L  dans  «Tijdschrift  voor  Nederlandsche 
Taal-  en  Letterkunde».  t.  XXXVllI,  1919,  p.  34;  L.  Willems, 
De,  nieuive  Prolog  van  den  Reinaert  en  het  Arnoiit 
vraagstah,  dans  «  Verslagen  en  Med.  der  K.  Vlaamsche 
Académie  ^s  Februari  1920,  p.  157-203;  A.  Kluyver,  De 
heer  Wiltems  en  de  proloog  van  "  Reinaert  ",  dans 
K  Nieuwe  Taaigids  »,  t.  V,  1920,  p.  225  ;  Jellinek,  Zwei 
Dichter  des  Reinaert '?  dans  «  Beitràge  zur  Geschichte  der 
deutschen  Sprache  und  Literatur»,  t.  XLVI9,  20,  p  51-58). 

Au  chap.  VII,  M.  Hamelius  propose  d'attribuer  à  .lean 
d'Oulremeuse  les  Voyages  de  Mandeville  ainsi  que  le  vaste 
remaniement  du  cycle  de  la  Croisade  dont  font  partie  des 
poèmes  tels  que  Le  Chevalier  ait  Cj/gne  et  Godefroid  de 
Bouillon  publié  par  Reiffenberg,  Baudouin  de  Sebourc  et  le 
Bastart  de  Bouillon.  L'hypothèse  est  faite  pour  surprendre, 
surtout  en  ce  qui  concerne  les  longs  romans  de  croisade  du 
XIV''  siècle.  Faute  d'espace,  l'auteur  renonce  à  développer 
les  raisons  qui  ont  déterminé  une  conjecture  si  audacieuse  ; 
il  renvoie,  là-dessus,  à  son  édition  de  Mandeville  dans  la 
«Early  English  Text  Society».  Je  n'ai  pas  cet  (ouvrage  sous  la 
main.  Loin  de  moi,  par  conséquent,  la  pensée  de  me  pronon- 
cer à  ce  sujet.  Néanmoins,  quelques  réflexions  ne  seront 
peut-être  pas  hors  de  propos.  On  a  beaucoup  prêté  à  Jean 


35(i  COMPTES    RENDUS 

d'Outremeuse.  St  Bormans,  dans  l'Introduction  qu'il  a  jointe 
au  Myreur  des  Histors  et  à  la  Geste  de  Liège  («Gommiss  roy. 
d'hist.»,  in-4°,  1887,  p.  xii-xx),  porte  à  l'actif  de  l'écrivain 
liégeois  plusieurs  œuvres  perdues  :  un  remaniement  de  la 
Geste  d'Ogier  le  Danois,  peut-être  une  Geste  de  Jean  de 
Lanchon  et  une  Geste  de  Hiion  de  Bordeaux,  puis  encore  une 
composition  sur  la  guerre  de  la  Vach^,  incorporée  par  la 
suite  dans  la  Geste  de  Liège.  Dans  son  Etude  critique  sur 
Jean  d'Outremeuf^e  (Acad.  roy.  de  Belgique,  Mémoires  in-8°. 
2«  sér.,  t.  VII,  1910),  où  il  démontre  péremptoirement  que  le 
prétendu  chroniqueur  est  un  pur  romancier,  doublé  d'un 
impudent  faussaire,  God.  Kurth  admet  que  cet  homme  si  peu 
digne  de  foi  aurait  du  moins  été  un  poète  fécond  (p.  12).  On 
se  demande  si  la  méfiance  n'est  pas  de  mise,  même  à  ce  propos. 
Pcur  ma  part,  j'incline  à  regarder  comme  non  avenues  toutes 
ces  compositions  sur  lesquelles  on  n'est  renseigné  que  par  le 
témoignage  de  l'écrivain  lui-même.  En  ce  qui  concerne  les 
Voyages  de  Mandeinlle,  le  problème  est  plus  troublant. 
Gomme  audace  dans  l'imposture,  ces  Voyages  valent  le 
Myreur  des  Histors.  De  plus,  il  existe  des  rapports  non  dou- 
teux entre  les  deux  œuvres.  Faut  il  les  ex[)liquer  par  une 
paternité  commune  ?  L'étude  philologique  de  la  rédaction  pri- 
mitive des  Voilages  serait  d'un  précieux  secours  pour  trancher 
la  question  ;  malheureusement,  il  ne  faut  pas  songer  à  porter 
un  jugement  sur  ce  point  d'après  les  textes  imprimés  dans 
l'édition  de  Warner.  En  revanche,  nous  sommes  armés  pour 
nous  faire  une  opinion  touchant  l'immense  compilation  du 
XI V''  siècle  qui  a  comme  centre  l'histoire  des  croisades. 
Outre  les  poèmes  cités  par  M.  Hamelius,  cette  compilation 
comprenait  diverses  branches  aujourd'hui  disparues,  entre 
autres  le  roman  de  Baudouin  de  Flandre,  conservé  dans  une 
mise  en  prose  de  la  seconde  moitié  du  XV*  siècle,  mais  dont 
le  hasard  m'a  fait  retrouver  autrefois  un  fragment  de  160  vers 
(voy.  Revue  des  Bibliothèques  et  Archives  de  Belgique, 
t.  IV,  19j6,  p.  429-438).  Gaston  Paris,  à  qui  l'on  doit  la  recon- 
stitution de  ce  vaste  cycle  poétique  [Journal  des  Savants, iS93, 
p.  288),  croyait,  à  la  fin  de  sa  carrière,  que  plusieurs  auteurs 
avaient  dû  y  collaborer  (Esquisse  historique  de  la  litt.  franc. 
au  moyen  âge,  1907,  p.  211).  A  en  juger  par  la  langue,  rien 
n'autorise  à  croire  qu'aucun  de  ces  écrivains  ait  été  Liégeois. 


COMPTES    RENDUS  357 

Au  contraire,  pour  Baudouin  de  Sehourc  et  le  /:aslart  de 
Bouillon,  nous  avons  des  études  récentes  qui  établissent  que, 
par  leurs  traits  linguistiques,  ces  deux  compositions  appar- 
tiennnnt  à  la  région  de  Yalenciennes  (H.  Breuer,  Sprache 
tend  Heiiuat  des  Baldtdn  ron  Sebourt/,  Bonn,  1904,  dissei'tat. 
de  Bonn  ;  —  A.  Deutscmmann,  Untersuchung  ûber  die 
Sprache  der  Chanson  de  geste  aHugaes  Capet»  und  ûber  die 
Identitdt  des  Verfassers  mit  dem  des  aBaiiduin  de  Sebotcrc», 
Halle  a.  S.,  1909,  dissertât,  de  Leipzig  ;  -  H.  Harms.  Sprache 
■und  Heimat  des  aBasiart  de  Buillomy,  Rostock,  1911, 
dissertât,  de  Rostock.  Sur  les  rapports  étroits  unissant  les 
deux  branches  principales  du  cycle,  on  peut  encore  citer 
W.  Kleinsch.midt,  Das  Verhâltnis  des  (diauduin  de  Sebourc^^ 
zu  dem  iiCheralier  au  Cygne»,  «Marco  Polo»,  «Hrandan», 
«Barlaam  et  Josaphat»  und  den  Fabliaux,  Gottingen.  1908, 
dissertât,  de  Gottingen).  Jean  d'Outremeuse  a  eu  entre  les 
mains  ne  fût-ce  qu'une  partie  de  l'énorme  compilation,  puis- 
qu'il insère  dans  sa  chronique  le  contenu  du  roman  de 
Baudouin  de  Flandre  (cf.  Bormans,  ouvr.  cité,  p.  cxvi). 
Pour  être  en  droit  de  lui  attribuer  la  paternité  de  l'ensemble, 
il  faudrait  des  raisons  d'une  force  peu  commune.  On  se  heurte 
ici  contre  des  invraisemblances  d'ordre  philologique.  Le 
chroniqueur  liégeois,  de  même  que  son  contemporain  Jacques 
de  Heraricourt,  écrit  une  langue  donnée  «l'une  physionomie 
bien  à  elle,  une  langue  largement  mâtinée  de  francien  et 
d'éléments  hétérogènes,  mais  dont  le  fond  est  dialectal.  Cet 
instrument  linguistique  n'a  rien  de  commun  avec  celui  du 
dernier  cycle  de  la  Croisade,  si  ce  n'est  l'alllux  des  formes 
centrales,  et  encore  d  ins  des  prop  >rtions  bien  différentes. 

Dans  le  chap.  VIII,  M.  Hamelius  qualifie  de  légende 
flamande  l'histoire  de  sœur  Béatrice.  Il  s'agit  du  conte  de  la 
sacristine,  un  des  miracles  de  Notre-Uame  les  plus  répandus 
au  moyen  âge.  Certes,  il  s'en  trouve  plusieurs  versions  dans 
la  littérature  néerlandaise,  ancienne  ou  moderne.  Mais  cetie 
légende  se  rencontre  partout  (cf.  Dot  irepont  et  Bethune, 
hitlletin  cité,  années  1902-1903,  p.  154  155).  En  Belgique,  elle 
a  toujours  joui  d'une  popularité  spéciale.  Elle  ^'est  localisée 
au  monastère  de  Pare-les  Dames,  prés  de  Louvain,  et  surtout 
à  celui  de  l'Olive,  près  de  Mariemont.  Outre  la  pièce  qu'en  a 
tirée  Maeterlinck,  elle  a,  tout  récemment  encore,  en    1920, 


358  COMPTES    RENDUS 

inspiré  le  poème  de  .Tub^s  Delacre  pris  comme  sujet  du 
Concours  de  Rome  pour  la  musique. 

Les  remarques  qui  viennent  d'être  formulées  atteignent 
uniquement  la  portion  de  l'ouvn^age  consacrée  à  la  littérature 
médiévale  et  ne  visent  pas  autre  chose  qne  les  menus  problè- 
mes d'érudition  inhérents  à  l'étude  de  nos  lettres  anciennes  (i). 
Il  serait  regrettable  qu'on  exagérât  la  portée  de  ces  modestes 
notes.  L'essence  même  de  l'histoire  littéraire,  c'est  l'évalua- 
tion esthétique  des  œuvres  et  leur  interprétation  historique. 
Le  livre  de  M.  Hamelius  me  parait  remarquable  sous  ce  rap- 
port. L'auteur  discerne  avec  pénétration  ce  qu'il  y  a  de  saillant 
dans  la  vie,  le  caractère  et  la  production  des  écrivains.  H 
dispose  d'un  esprit  critique  et  d'un  goût  très  averti.  Rompu 
à  la  pratique  de  l'histoire  littéraire,  il  s'entend  à  situer 
œuvres  et  auteurs  dans  leur  perspective  véritable.  Enfin, 
habitué  aux  études  de  littérature  comparée,  il  relève  ses  ana- 
lyses d'œuvres  belges  de  rapprochements,  instructifs  pour  le 
grand  public,  avec  les  principales  productions  des  littératures 
étrangères. 

L'auteur  ne  se  contente  pas,  au  surplus,  de  mettre  l'effort 
littéraire  de  la  Belgique  en  parallèle  avec  celui  des  autres 
peuples.  Soucieux  de  découvrir  un  lit-n  entre  les  écrivains 
indigènes  de  différentes  époques,  il  signale  volontiers  des 
points  de  contact  de  l'un  à  l'autre.  Ainsi,  il  aperço  t  des  res- 


(')  Dans  le  dét;iil  de  la  n'-dactioii,  les  dcfecliiositôs  sont  vraiineiil  clairse- 
mées cl  il  s'agit,  le  plus  souvent,  d'inadverlances.  .J'ai  relevé  les  suivantes  : 

P.  58,  «  l'ode  VIII  de  Dante  »  :  le  terme  ode  prête  à  confusion  ;  il  s'agit  du 
n"  LXXXII  des  Itiine  dans  Le  opère  di  Dante,  Teslo  critiro  délia  Sorietà  dantesra 
italiana,  Firenze,  Bemjiorad,  1921. 

P.  131,  Raoul  I.efèvre  ne  doit  pas  être  inscrit,  à  côté  de  Van  Ma(îrlant,  |)arnii 
les  imitateui's  de  Benoît  de  Sainte-More.  Cf.  A.  Dayot.  La  h-ffcnde  de  Troie  à  la 
Coiirde  Boiirijofjne,  Bruges,  1008. 

P.  270,  la  prosodie  de  Verhaeren  «  ne  s'est  jamais  risquée  jusqu'au  vers 
libre.  Elle  est  restée  fidèle  ii  la  rime  ».  Lire  :  jusqu'au  vers  hlanc. 

P.  i2,  à  «  dépravité  »  substituer  dépravation. 

P.  80,  «  envahies  n  ? 

P.  108,  «  critiqucuse  »  ? 

P.  181,  «  zélateur  »  n'a  pas  tout  à  lait  le  sens  (jue  l'auteur  y  allaclie. 

P.  81,  141,  195,  210,  «  renseii^ner  »  est  (tris  dans  son  acception  belge. 

P.  70  71,i)0  1.  i,  19il.  13,  h;  rap|K)rt  du  possessif  au  possesseur  n'est  |)as clair. 

P.  19,  21,  22,  i9,  écrire  (juelfe  plutôt  (pu;  «  guelplic  ». 

P.  2-t3  I.  9,  il  doit  y  avoir  une  erreur  d'impression. 


COMPTES    RENDUS  359 

semblances  entre  Georges  Ghastellaiu  et  Maeterlinck  (p.  115); 
il  montre  en  Van  Hasselt  le  prédécesseur  de  Vaii  Lerberghe, 
de  Maeterlinck  et  de  Verhaeren  (p.  199)  ;  il  note  une  parenté 
d'àmeentre  Maeterlinck  et  Octave  Pirmez  (p.  2'^1)  ;  il  retrouve 
dans  le  monde  poétique  chanté  par  Verhaeren  l'influence  des 
théories  d'Edmond  Picard  sur  l'art,  social  (p.  259)  Si  intéres- 
sants que  soient  ces  rapprochements,  certains  ont  quelque 
chose  de  spécieux  ;  par  exemple,  lorsque  se  juxtaposent  le 
Traité  de  la  Sainte  Eglise  gallicane  de  Jean  Lemaire  et  le 
Biienhorf  de  Marnix  (p.  134),  ou  encore  lorsque  l'auteur  éta- 
blit une  relation  entre  les  Quatre  Fils  Aymon  et  le  Reinaert 
flamand  (p.  54-55).  Pour  que  les  traits  communs  à  ces  deux 
dernières  compositions  soient  vraiment  caractéristiques  du 
terroir  belge,  ils  devraient  avoir  été  inventés  chez  nous  ;  or 
le  Reinaert  flamand  les  tient  du  Plaid  français.  Dés  hTs,  c'est 
bien  en  vain  que  l'on  insiste  sur  cette  hypothèse  que  Renaud 
de  Montauban  pourrait  s'être  appelé  d'abord  Renard  (p. 34, 55); 
philologiquement,  cette  supposition  n'a  rien  d'inadmissible, 
puisque  l'échange  des  suffixes  —  aldet  —  ard  est  fréquent  au 
moyen  âge  ;  mais  elle  est  sans  objet,  du  moment  que  le  nom 
de  Renard,  désignant  le  protagoniste  de  l'épopée  animale,  nous 
vient  de  France. 

Malgré  le  soin  avec  lequel  M.  Hamelius  rattache  l'une  à 
l'autre  les  œuvres  étudiées,  le  travail  laisse,  dans  quelque 
mesure,  l'impression  d'une  suite  de  monographies,  à  peine 
reliées  entre  elles  par  le  fil  d'une  idée  directrice.  11  se  trou- 
vera peut-être  des  lecteurs,  rétifs  à  la  doctrine  unitaire  d'une 
littérature  nationale,  pour  y  voir  une  mixtion  d'éléments 
français  et  flamands,  plutôt  qu'une  véritable  synthèse.  Comme 
forc^  synthétique,  assurément  ce  livre  ue  saurait  faire  oublier 
l'article  de  M.  Liégeois  que  je  rap[>olais  lantôt.  Les  traits 
distinctifs  attribués  a  l'ensemble  de  la  littérature  belge  (p.  9) 
pourront  paraître  grêles  et,  jusqu'à  un  certain  point,  incon- 
sistants. Ne  contestons  pas  le  premier  :  la  prédominance  des 
intentions  morales  et  politiques.  Le  second  —  le  caractère 
collectif  du  sentiment  et  de  la  pensée  —  se  vérifie  chez  nos 
vieux  auteurs  et  jusque  chez  Conscience  ;  en  revanche,  loi's- 
qu'on  arrive  à  la  période  contemporaine,  si  féconde  et  s.i  bril- 
lante, ne  faut-il  pas  plutôt  déplorer  le  malentendu  qui  sépare 
nos  écrivains  de  la  masse  de  leurs  compatriotes  et  qui  fait 


360  COMPTES    RENDUS 

que  notre  littérature  n'a  pas  encore  retrouvé,  auprès  du  grand 
public,  la  faveur  à  laquelle  elle  a  droit  ? 

Mais  trêve  de  chicanes  !  L'ouvrage  que  voilà  contribuera  à 
dissiper  des  malentendus  de  l'espèce.  En  faisant  mieux  com- 
prendre le  génie  de  nos  lettres  nationales,  il  les  fera  mieux 
aimer.  Un  tel  livre  sert  intellectuellement  le  pays.  Il  nous 
manquait  Saluons-en  l'apparition  avec  joie. 

Alphonse  Bayot. 


H.  Bornecque,  L.  Druesneset  L.  E.  Rogie.  Conunentaire  de  pages 
choisies.  —  Paris,  F.  Rieder  et  G*S  1921,  in-8".  Cartonné, 
4  fr.  50. 

On  sait  avec  quel  goût  sûr  et  quel  esprit  judicieux  M.  Bor- 
necque s'entend  à  commenter  les  belles  pages  des  écrivains 
français,  et  la  plupart  des  professeurs  belges  mettent  au 
nombre  de  leurs  meilleurs  instruments  de  travail  les  guides 
publiés  par  le  distingué  professeur  de  l'Université  de  Lille, 
notamment  son  Commentaire  littéraire  du  Recueil  de  mor- 
ceaux choisis  d'auteurs  français  et  deux  volumes  d'Explica- 
tion littéraire  des  ouvrages  et  textes  français. 

Le  nouvel  ouvrage  qu'il  vient  de  faire  paraître  avec  l'aide 
de  MM.  Druesnes  et  Rogie,  est  en  tous  points  digne  de  ses 
aînés;  il  ne  ren  Ira  pas  moins  de  services  aux  jeunes  maîtres 
chargés  de  l'enseignement  du  français  et  surtout  à  nos  étu- 
diants en  philologie  romane.  C'est  un  recueil  de  morceaux 
lires  des  auteurs  français  du  xvi®  au  xx«  siècle,  choisis  de 
manière  à  donner  une  idée  exacte  et  complète  des  maîtres  de 
la  langue;  tous  les  textes  sont  accompagnés  d'une  explication 
littéraire  et  de  l'indication  d'exercices  destinés  à  compléter 
les  commentaires.  Il  n'y  a  d'exception  que  pour  quelques  pages 
intéressantes  au  point  de  vue  de  l'histoire  de  la  littérature,  et 
qui  sont  mises  en  appendice,  sans  être  commentées. 

Les  explications  des  noms  propres  et  des  mots  difficiles,  les 
observations  grammaticales,  se  trouvent  au  bas  des  textes; 
ceux-ci  bont  suivis  d'analyses  littéraires. 

Une  même  méthode  est  généralement  suivie,  celle  que  doit 
adopter  tout  maître  soucieux  de  faire  un  enseignement  fruc- 
tueux :  en  premier  lieu  est  indiquée  la  place  du  morceau  dans 


COMPTES    RENDUS  361 

l'ouvrage  entier,  puis  vient  le  plan  du  morceau,  enfin  le 
commentaire,  portant  d'abord  sur  le  fond,  ensuite  sur  la 
langue  et  le  style. 

Un  travail  préparé  aussi  consciencieusement  n'épargnera- 
t-il  pas  aux  professeurs  bien  du  temps  et  des  recherches?  Il 
ne  leur  restera  qu'à  développer  et  à  enrichir  ces  notes  judi- 
cieuses, selon  leur  science  et  leur  talent. 

J.    HOMBERT. 

Gustave  Lanson.  Manuel  bibliographique  de  la  littérature  fran- 
çaise moderne,  XVl',  XV II',  XVIIF  et  XIX'  siècles.  Nou- 
velle édition  revue  et  augmentée.  Paris,  Hachette,  1921, 
1  vol.  in-8",  182U  p.,  80  fr.  (séparément  en  5  fasc.  : 
1,  xvP  s.,  14  fr.  ;  2,  xvii«  s.,  17  fr.;  3,  xviii^  s.,  20  fr. ; 
4.  XIX*  s.,  30  fr,  ;  5,  Supplément  et  Index  général,  15  fr.). 

En  1904,  M. -G.  Lanson  commença,  à  la  Sorbonne,  un  cours 
de  bibliographie  de  la  littérature  française  moderne.  Dans  ce 
domaine,  aucun  guide  convenable  n'existait  à  cette  époque  ; 
chacun  devait  refaire  lui-même  sa  bibliographie.  Cette  tâche, 
fastidieuse  pour  la  plupart  des  travailleurs,  était  au-dessus 
des  forces  des  étudiants;  le  savant  professeur  voulut  faire 
bénéficier  ceux-ci  des  informations  recueillies  par  lui  durant 
vingt-cinq  années  de  travail.  Combien  d'autres  cours  de  biblio- 
graphie spéciale  ne  seraient  pas  donnés  avec  autant  de  fruit 
dans  nos  Universités,  pour  ne  rien  dire  delà  bibliographie 
générale  ! 

De  19(J9  à  1912,  M.  Lanson  publia  son  cours  en  4  fascicules 
comptant  1520  pages,  et  23130  numéros.  Il  disait  dans  sa  pré- 
face (1908)  ;  (c  Le  travail  purement  bibliographique  que  je 
présente  ne  correspond  tout  à  fait  ni  à  mon  éducation  litté- 
raire ni  à  mon  goH,  qui  me  portent  plutôt  vers  l'étude 
historique  des  faits  et  l'analyse  esthétique  des  textes.  Pour- 
quoi donc  l'ai-je  fait?  Parce  que  personne  ne  le  faisait,  et 
qu'il  fallait  enfin  que  cela  fût  fait!  Parce  que  je  suis  profes- 
seui%  et  tenu  de  fournir  à  mes  élèves  la  meilleure  prépai'a- 
tion  que  je  conçois.  Parce  que,  cet  outil  créé,  il  sera  facile  à 
d'autres  ou  à  moi  de  l'améliorer  ». 

Ce  manuel  a,  suivant  le  vu-u  de  l'auteur,  épargné  aux 
jeunes  gens  les  tâtonnements  dont  on  avait   souftért  avant 


362  COMPTES    RENDUS 

son  apparition;   bien  plus,    tous  les  chercheurs   s'occupant 
d' Histoire  littéraire  y  ont  eu  constamment  recours. 

On  y  sent,  à  le  pratiquer,  l'élan  même  de  son  auteur;  ce 
n'est  pas  ici  une  simple  liste-inventaire,  mais  le  résultat  d'un 
choix  fait  après  soigneuse  réflexion,  et  du  reste  avec  beau- 
coup de  souplesse  :  «  La  peur  des  responsabilités,  dit 
M.  Lanson,  n'est  pas  une  vertu  en  bibliographie,  non  plus 
qu'ailleurs  ». 

En  1914,  pai'ut  une  deuxième  édit'on,  unifiée,  pourvue 
d'une  liste  générale  des  abréviations,  d'un  supplément,  et 
d'un  index  général  (eu  tout,  1736  pagesi. 

Le  Manuel  a  eu  un  tel  succès  que  nous  pouvons  aujourd'hui 
en  saluer  une  nouvelieédition,  préparée  par  l'auteur  lui-même. 

Les  [jages  1  à  1526  (n"'  1  à  23130)  S'ut  les  mêmes  que  dans 
la  2^  édition.  Le  chapitre  XXV,  intitulé  :  Au  commencetnent 
du  XX^  siècle.  Tendances  et  théories,  comprend  en  plus, 
comme  §  3,  La  littérature  de  la  guerre;  celle-ci  fait  l'objet 
d'un  choix  réglé,  non  sur  l'intérêt  historique,  mais  sur  l'in- 
térêt littéraire;  elle  nous  mène  jusqu'au  n"  23337.  Enfin,  les 
pages  1537  à  1738  forment  le  Supplément  (qui  comprenait 
130  pages  dans  la  2"  édition),  subdivisé  de  la  même  façon  que 
le  corps  de  l'ouvrage.  Un  index  général  des  noms  propres, 
sur  trois  colonnes,  occupe  les  pages  1741  à  1795;  et  la  table 
des  matières  sur  deux  colonnes  prend  les  pages  1799  à  1820. 

La  nouvelle  éditioa  que  nous  donne  M.  G.  Lanson  de  son 
Manuel  est  un  instrument  exact,  d'un  maniement  commode 
et  rapide.  L'auteur  compte  le  perfectionner  encore  iiar  la 
publication  d'un  supplément,  environ  tous  les  cinq  ans. 

Ceux  qui  s'intéressent  à  l'histoire  littéraire  et  aux  domaines 
voisins,  les  bibliographes,  les  bibliothécaires,  seront  unanimes 
à  féliciter  le  savant  professeur  de  l'Université  de  Paris  pour 
la  publication  de  celte  édition  de  son  Manuel;  elle  sera 
installée  à  la  portée  de  leur  main  sur  leur  table  de  travail. 

AuG.  Vincent. 

Frans  Van  Kalken.  Histoire  de  Belgique.  Bruxelles;  Office  de 
Publicité;  1920,  in-8°,  644  p..  fig.,  15  fr. 

Nous  regrettons  que  des  circonstances  fortuites  aient 
empêché  jusqu'à   présent   de   donner   un   compte    rendu  de 


COMPTES    RENDUS  363 

YH/'stoire  de  Belgique  de  M.  Van  Kalken.  Quoique  parue 
depuis  près  de  deux  ans  nous  croyons  indispensable  de  la 
présenter  aux  lecteurs  de  la  Revue. 

L'ouvrage  de  M.  Van  Kalken  est  un  manuel,  en  ce  sens 
qu'il  est  conçu  et  ordonné  de  manière  à  répondre  aux  nécessités 
de  l'enseignement  moyen  belge.  Du  manuel,  il  a  toutes  les 
qualités  :  la  précision,  la  clarté,  la  méthode;  les  divisions  en 
Parties  et  en  Chapitres  se  justifient  historiquement  et  logique- 
ment: enfin,  il  présente  l'attrait  d'être  fort  bien  illustré  au 
moyen  de  documents  contemporains.  Ajoutons  que  l'impres- 
sion en  caractères  plus  gras  de  certains  noms  et  de  certaines 
phrases  a  l'avantage  de  fixer  mécaniquement  l'attenti-'n  de 
l'élève  sur  les  personnages  les  plus  importants  et  sur  des  idées 
essentielles  à  la  compréhension  de  notice  histoire. 

On  peut  afl^rmer  cependant  que  le  volume  de  M.  Van  Kalken 
dépasse  largement  le  cadre  et  la  portée  du  manuel  scolaire. 
L'auteur  ne  s'adresse  pas  seulement  aux  élèves  de  nos 
Athénées  et  de  nos  Collèges;  il  écrit  pour  tout  le  public  cul- 
tivé de  chez  nous  et  de  l'étranger.  Il  lui  fournit  le  guide  sûr 
et  bien  documenté  qui  permet  aussi  bien  de  prendre,  du  cours 
de  notte  histoire,  une  connaissance  générale,  que  de  vérifier 
un  détail  ou  de  rappeler  à  l'esprit  les  ti^aits  les  plus  caracté- 
ristiques d'une  époque  déterminée. 

M.  Van  Kalken  s'était  jusqu'à  ce  jour  fait  surtout  connaître 
par  d'excellents  travaux  sur  les  derniers  siècles  de  notre 
histoire.  Rien  d'étonnant  dans  ces  conditions  à  ce  qu'il  ait 
donné  dans  son  Histoire  de  Belgique  un  développement 
particulièrement  étendu  aux  chapitres  traitant  des  époques  les 
plus  récentes.  11  nous  en  fournit  lui-même  la  raison  :  l'in- 
fluence considérable  que  les  xvir  et  xYin''  siècles  ont  exercée 
sur  la  Belgique  d'aujourd'hui;  ce  que  l'on  ne  peut  songera 
contester,  surtout  après  la  lecture  du  tome  V  de  VHistoire  de 
Belgique  de  M.  Pirenne. 

C'est,  d'ailleurs,  parmi  la  bonne  centaine  de  pages  consacrée 
par  M.  Van  Kalken  à  ces  deux  siècles  que  nous  avons  ren- 
contré les  trois  chapitres  qui  nous  ont  paru  les  mieux  venus 
de  tout  le  volume  :  celui  qui  traite  de  «  la  vie  économicjue  et 
sociale  aux  Pays-Bas  durant  le  xvii"  siècle  »  ;  le  chapitre 
consacré  au  «  règne  de  Joseph  II  de  1780  à  1787»;  enfin 
«  Li  Révolution  Brabançonne  (1787-1790)  et  la  Restauration 


36  i  COMPTES    RENDUS 

autrichienne  (1790-1792)  ».  Le  premier  de  ces  trois  chapitres 
surtout  constitue  un  tableau  saisissant  de  la  médiocrité  écono- 
mique, intellectuelle  et  politique  dans  laquelle  vivait  —  on 
serait  tenté  do  dire  «  vivotait  »  —  la  Belgique  après  l'expulsion 
des  Protestants  et  la  fermeture  de  l'Escaut.  Ici,  comme  dans 
les  tableaux  analogues  que  l'auteur  a  donnés  pour  les  autres 
périodes  de  notre  histoire,  il  a  réussi  à  être  complet,  sans  cesser 
d'être  vivant  :  la  chose  n'est  pas  aisée  dans  ce  genre  d'exposés. 

Notons  encore  le  grand  développement  donné  par  M.  Van 
Kalken  à  l'histoire  de  la  Belgique  de  1S30  au  Traité  de 
Versailles.  On  y  trouve,  en  cent  cinquante  pages  environ, 
une  synthèse  claire,  fouillée  et  solidement  documentée  de 
révolution  de  notre  pays,  tant  au  point  de  vue  économique  et 
social,  intellectuel  et  artistique  qu'à  celui  de  la  politique 
intérieure  et  extérieure.  Aux  deux  extrémités  de  cet  excellent 
aperçu,  on  remarquera  particulièrement  les  chapitres  où 
l'auteur  expose  la  formation  politique  et  diplomatique  du 
Royaume  de  Belgique  en  1831  et  ceux  où  il  résume  le  rôle  de 
la  Belgique  pendant  la  dernière  guerre,  en  apportant  notam- 
ment dans  la  présentation  des  événements  militaires  une 
exactitude  et  une  précision  dignes  d'éloges. 

M.  Van  Kalken  nous  permettra  cependant  de  lui  chercher 
quelques  chicanes 

Pourquoi  parler  des  Kerels  (p.  52  et  113-114)  que  M.  Van 
Houtte  a,  croyons-nous,  fait  rentrer  définitivement  dans  le 
domaine  de  la  légende  (Les  Kerels  de  Flandre  ;  Louvain,1898)? 
Pourquoi  attribuer  l'assassinat  de  Charles  le  Bon  en  1127  à 
l'irritation  de  Bertulphe,  prévôt  de  Saint-Donatien  de  Bruges, 
contrarié  par  le  comte  dans  ses  opérations  d'accaparement  lie 
grains  (p.  74)  ?  On  sait  par  les  récits  contemporains  de  Galbert 
de  Bruges  et  de  Gautier  de  Téronanne  que  le  mobile  de 
Bertulphe  et  de  sa  famille  était  leur  ressentiment  contre  le 
comte  qui  avait  fait  reconnaître  que  ce  puissant  lignage  devait 
compter  au  nombre  des  serfs  de  son  domaine. 

Enfin  nous  nous  permettrons  de  faire  remarquer  que  les 
cantons  d'Eupen  et  de  Malmédy  (p.  459)  ne  sont  pas  les  deux 
seuls  anciens  territoires  belges  réunis  à  la  Prusse  par  l'Acte 
de  Vienne  du  9  juin  1815  :  les  cantons  de  Rolduc,  Neder- 
kruchten,  Saint-Vith,  Schleiden,  Kronenburg,  l'ari'ondisse- 
ment  de  Bitburg  et  partie  de  celui  de  Diekrich  eurent  le  même 


COMPTES     RENDUS  365 

soi't.  On  pourrait  discuter  aussi  les  effectifs  allemands  devant 
Liège  en  1914  (p.  6U6-(J07). 

Ce  ne  sont  là,  d'ailleurs,  que  des  détails,  qui  n'enlèvent  rien 
à  la  valeur  de  V Histoire  de  Belgique  de  M.  Van  Kalken.  On 
peut  sans  hésiter  prédire  à  cet  ouvrage  un  bel  avenir  et  de 
nombreuses  éditions.  Il  est  permis,  croyons-nous,  de  le 
■compter  au  nombre  des  meilleures  productions  de  l'école 
historique  belge  au  cours  de  ces  dernières  années. 

François  L.  Ganshof. 


Giuseppe  Pavani.  U7t  i^escoDO  belga  in  Italia  nel  secolo  X.  Studio 
storico-critico.  Torino,  1921,  in-8°,  181  p.  Prix  :  5  lires. 

Rathier  de  Vérone,  né  dans  le  diocèse  de  Liège  vers  la  fin 
du  IX*  siècle,  moine  de  Lobbes,  évêque  de  Vérone  et  de  Liège, 
mort  à  Namur  en  974;  tel  est  le  personnage  dont  M.  Pavani, 
à  la  suite  desFrèresBallerini(1765)et  de  AlbrechtVogel{1854j, 
nous  présente  la  biographie.  Hauck  lui  a  décerné  le  titre 
mérité  de  plus  grand  théologien  du  x^  siècle.  Mais  très  érudit 
et  excellent  professeur,  Rathier  manquait  totalement  de  la 
mesure  nécessaire  à  l'évèque.  A  trois  reprises  on  le  voit  forcé 
de  quitter  le  siège  de  Vérone  et,  à  Liège,  l'opposition  de  la 
noblesse  obtint  le  même  résultat  après  un  an  et  demi  seule- 
ment d'épiscopat.  11  décourageait  peu  à  peu  par  sa  violence 
et  son  manque  de  doigté  ses  plus  puissants  protecteurs.  Et, 
privé  de  ressources,  abandonné  de  tous,  il  dut  plus  d'une  fois 
errer  de-ci  de-là,  cherchant  des  occupations  et  du  pain. 
Pendant  les  sept  dernières  années  de  son  séjour  à  Vérone  son 
zèle  à  améliorer  les  mœurs  du  clergé  est  incontestable.  Ce 
fut  d'ailleurs  toujours,  à  ce  qu'il  semble,  un  évéque  modèle, 
pénétré  de  la  sainteté  du  sacerdoce  chrétien.  Tout  en  recon- 
naissant certains  de  ses  défauts,  la  fierté  et  l'irascibilité, 
M.  Pavani  s'attache  surtout  à  montrer  en  Rathier  le  grand 
évêque  réformateur  du  x'=  siècle.  Je  ne  veux  pas  lui  contester 
cette  gloire;  mais  il  faut  bien  avouer  que  ses  excellentes 
intentions,  mal  servies  par  son  caractère,  ne  réalisèrent  jamais 
cette  purification  du  clergé  qu'elles  recherchaient  si  persévé- 
ramment.  L'auteur  a  quelque  part  une  comparaison  assez  mal 
choisie  :  «  Ci  sembra,  écrit-il,  che  Raterio  sia  una  di  quelle 


366  COMPTES     RENDUS 

«  rosa  tra  le  spine  ».  Pour  moi,  Rathier,  encore  que  très 
respectable  et  même,  si  on  le  veut,  sympathique  à  certaines 
heures,  ressemble  beaucoup  plus  à  une  épine  qu'à  une  rose. 
Rentré  à  Lobbes  à  la  fin  de  sa  carrière,  l'ancien  évêque 
désabusé  parvint  encore  à  troubler  profondément  ce  monas- 
tère et  il  força  même  l'abbé  Folcuin  à  lui  céder  la  place. 
M.  Pavani  se  contente  de  dire  à  propos  de  cet  incident,  qui, 
je  le  veux  bien,  ne  devait  pas  être  conté  longuement  dans  son 
livre  :  «  Fu  un  po'  in  discordia  anche  con  Folcuino,  ma  poi 
si  réconcilié  ».  Bref,  je  me  demande  si  M.  Pavani  ne  nous 
présente  pas  Rathier  sous  un  trop  beau  jour  en  tenant  trop 
compte  de  ses  intentions  et  en  le  jugeant  trop  d'après  ses 
propres  écrits.  A  part  cela,  j'avoue  que  le  travail  est  des  plus 
sérieux  et  des  plus  critiques.  Parmi  les  meilleures  pages  il 
faut  citer  celles  où  nous  est  donnée  la  clé  qui  aidera  à  mieux 
comprendre  cette  œuvre  étrange  de  l'évêque,  intitulée  : 
«  Excerptum  ex  dialogo  confessionali  ».  La  bibliographie  est 
bien  diessée,  mais  on  y  oublie  quelques  études  belges  qui 
méritaient  d'être  mentionnées,  en  particulier  la  notice  com- 
posée par  Godefroid  Kurth  dans  la  Biographie  nationale  de 
Belgique. 

E.    DE    MOREAU. 


J.  Cuveller.  Un  capitaliste  du  XIV^'  siècle  («  Bulletin  de  la 
Classe  des  Lettres  »,  Académie  royale  de  Belgique,  1921, 
p.  4f)-56). 

Id.  Les  origines  de  la  fortune  de  la.  maison  d'Orange-Nassau. 
Contribution  à  l'fnstoire  du  capitalisme  au  moyen  âge. 
Bruxelles,  1921,  in-8°,  114  p.,  pi.  de  sceaux  (Mémoires 
publiés  par  l'Académie  royale  de  Belgique,  Classe  des 
Lettres,  in-8",  2"  série,  t.  XVI). 

On  connaît  la  théorie  buchérienne  de  la  société  acapitaliste 
du  moyen  âge.  Née  d'une  regrettable  limitation  de  cadre, 
basée  sur  la  généralisation  arbitraire  de  l'état  de  moinrlre  et 
tardif  développement  économico-social,  caractéristique  de 
l'évolution  historique  de  l'Allemagne,  cette  théorie  a  été,  plus 
récemment,  reprise  par  W.  Sombart  sous  une  forme  bien  dif- 
férente et  avec  plus  de  radicalisme  encore.  Le  Moderne  Kapi- 


COMPTES    RENDUS  367 

talismus  (*)  de  l'ériidit  professeur  de  Berlin,  inspiré  et  sou- 
tenu par  les  convictions  politico-économiques  de  l'auteur, 
arrivait  aux  conclusions  que  le  choix  de  l'objectif  allemand 
avait  imposées  à  l'esprit  perspicace  de  son  collègue  de  Leipziî?. 
Ainsi  en  se  départissant  de  la  méthode  scientifique  pour  obéir 
aux  sollicitations  d'un  nationalisme  trop  étroit  ou  d'un 
marxisme  trop  rigoureux,  l'érudition  allemande,  par  deux 
fois,  faisait  fausse  route. 

La  critique  pénétrante  et  les  études  d'histoire  économique 
et  constitutionnelle  de  Pirenne,  les  premières,  battirent  en 
brèche  la  théorie  de  l'économie  médiévale  anticapitaliste.  Le 
moyen  âge  urbain  ne  fut  pas  absolument  revêche  au  capita- 
lisme, puisque,  partout  où  les  villes  atteignirent  leur  plus 
beau  développement  — dans  les  Paj^s-Bas,  par  ex.,  et  dans  le 
Nord  italien,  j)Our  ne  citer  que  ces  deux  exemples  devenus 
classiques  —,  elles  durent  leur  vitalité  et  leur  essor  à  l'orga- 
nisation capitaliste  de  la  haute  finance,  de  l'industrie  d'expor- 
tation ou  du  commerce  interrégional.  Les  ti-avaux  de  Pirenne 
ne  restèrent  pas  sans  lendemain;  ils  suscitèrent  des  recherches 
laborieuses  qui  permirent  notamment  de  reconstituer  le  capi- 
talisme médiéval  dans  son  élément  subjectif,  de  faire  revivre 
des  types  concrets  de  capitalistes  du  moyen  âge.  Et  tour  à  tour 
on  a  ressuscité  chez  nous  la  figure  d'un  Jehan  Boine  Broke, 
d'un  Thomas  Fin,  des  Saphir,  des  Gui,  etc.  Et  que  d'autres 
capitaines  d'industrie  et  représentants  du  grand  commerce  et 
de  la  finance,  pour  lesquels  la  pénurie  de  documents  n'a  per- 
mis de  découvrir  qu'un  nom.  une  profession  et  un  faisceau  de 
pi'euves,  parfois  bien  éloquentes,  de  l'acquisition  rapide  d'une 
vaste  fortune  (^)  ! 

A.  la  galerie  de  nos  capitalistes  du  moven  âge  les  travaux 
de  M.  (]uvelicr  viennent  d'ajouter  une  nouvelle  figure,  non  la 
moins  intéressante  ni  la  moins  personnelle.  Car  Duvenvoorde 
n'a  pas  seulement  chargé  d'or  le  blason  de  la  famille  dont  il 
n'était  qu'un  bâtard,  qu'elle  n'eut  d'ailleurs  aucune  hâte  à 


(*)  Une  seconde  édiliou,  complètonicnt  retondue  el  considérablement  aug- 
mentée, a  paru  à  Leipzig  en  1916. 

('-)  Sur  le  capitalisme  au  moyen  âge,  on  lira  la  dissertation  remarquable  île 
M.  H.  Pireruie  :  Les  pvriodes  de  l'fnstnire  sociale  du  capilnlisnte  {a  Bull,  de 
l'Acad.  royale  de  Helgiciuc  »,  Classe  des  Lettres.  I!»l  i,  p.  iî.'JS  Si\.). 


368  COMPTES    RENDUS 

reconnaître;  il  n'a  pas  seulement  bâti  en  l'espace  de  quelques 
années  une  fortune  colossale  qui  eut  le  privilège  bien  rare  de 
se  maintenir  intacte  pendant  des  siècles  et  de  conduire  à  un 
trône;  il  a  réussi,  malgré  ses  origines  obscures,  en  dépit  de  sa 
tache  de  naissance,  à  se  hisser  au  faîte  de  la  hiérarchie  des 
fonctionnaires  féodaux  et  à  jouer  un  rôle  marquant  dans  l'his- 
toire des  Paj'^sBas  au  xiv«  siècle.  Il  semble  même  établi  que, 
seuls,  les  revers  de  fortune  qui  attristèrent  la  fin  de  ses  jours 
l'empêchèrent  de  se  tailler  dans  ses  vastes  domaines,  entre  le 
Brabant  et  la  Hollande,  une  principauté  indépendante. 

Qui  donc  était  ce  Duvenvoorde  dont  le  nom  jusqu'ici  était  à 
peine  connu  ?  M.  Guvelier  nous  le  dit  dans  le  premier  chapitre 
de  son  mémoire,  et  la  notice  biographique  qu'il  lui  consacre 
est  d'une  telle  richesse  de  détails  qu'on  pourrait  à  peine  croire 
qu'elle  a  été  rédigée  sans  l'assistance  de  sources  narratives. 
Sans  doute  les  chroniqueurs  de  l'époque  ont  coudoyé  Duven- 
voorde; peut  être  même  y  en  a-t-il  parmi  eux  qui  lui  furent 
redevables  d'informations  précieuses,  reprises  dans  leurs 
œuvres.  Son  rôle  n'était  pas  assez  brillant  ni  assez  apparent 
pour  retenir  longuement  leur  attention.  Heureusement  notre 
homme  a  laissé  des  traces  de  son  activité  politique,  économique 
et  sociale  dans  les  sources  d'archives  si  précieuses  pour  com- 
pléter et  rectifier,  dans  les  sources  littéraires,  ce  que  l'absence 
de  jugement  politique  ou  de  sens  psychologique,  ou  simple- 
ment le  manque  de  recul  a  fait  négliger  ou  mal  interpréter. 
Et  que  de  documents  les  Archives  nous  ont  conservés  au  sujet 
de  Duvenvoorde!  Il  y  en  a  de  quoi  étonner  celui  que  le  com- 
merce journalier  avec  les  Archives  n'a  pas  convaincu  de  la 
richesse  d'information  qu'elles  recèlent,  du  soin  jaloux  avec 
lequel  les  administrations  d'antan  gardaient  leur  documenta- 
tion. Aussi  doit-on  féliciter  le  savant  archiviste  général  du 
royaume  d'avoir  pu  déterrer  et  réunir  cette  riche  documenta- 
tion, éparpillée  dans  tant  de  publications  et  de  dépôts,  et 
d'avoir  prouvé  magistralement  par  son  mémoire  que  «  l'utili- 
sation judicieuse  de  nos  documents  d'archives  peut  éclairer 
d'un  jour  nouveau  les  phénomènes  d'histoire  économique  et 
sociale  qui  apparaissent  dans  les  Pays-Bas  au  xiv^  siècle  ». 

Bâtard  d'un  petit  seigneur  hollandais  que  le  manque  de 
ressources  avait  réduit  à  entrer  dans  le  fonctionnarisme, 
Duvenvoorde  naquit  en  1291 .  11  ne  devait  que  bien  plus  tard  se 


COMPTES    RENDUS  369 

voir  reconnaître  le  nom  patronymique  de  son  père,  pour  se 
contenter  en  attendant  du  sobriquet  jieu  harmonieux  de  Huik- 
herieme.  Ce  fut  un  oncle  paternel,  majordome  du  comte  de 
Hollande,  qui  «  découvrit  »  le  petit  Suikkerieme  et  le  fît 
admettre  à  la  cour  en  qualité  d'écuyer  Aussitôt  Duvenvoorde 
se  fît  remarquer  par  ses  brillants  talents.  Tout  jeune  encore,  à 
l'âge  de  '2iS  ans,  il  fut  investi  par  la  confiance  de  son  maître 
des  fonctions  importantes  de  chambellan  du  comte  en  Hol- 
lande et  en  Hainaut.  Nommé  peu  après  chambellan  à  vie,  il 
n'a  pas  dû  tarder  à  s'imposer  au  prince  comme  son  expert 
financier.  Gréé  chevalier,  puis  légitimé,  il  devint  le  conseiller 
le  plus  influent  du  comte  qui  le  désigna  comme  un  de  ses  exé- 
cuteurs testamentaires.  Sous  le  régne  de  Guillaume  II,  son 
influence  subit  si  peu  de  recul  que  le  prince  lui  confiait, 
durant  ses  absences,  la  gestion  des  affaires  de  Hollande  et  de 
Zélande.  Après  la  mort  du  comte,  il  resta  jusqu'à  la  fin  de  ses 
jours  l'homme  de  confiance  de  l'impératrice  Marguerite,  la 
sœur  de  Guillaume  II.  La  fortune  cependant  réservait  des 
revers  à  celui  qu'elle  avait  tant  favorisé.  Duvenvoorde,  qui 
avait  eu  le  bonheur  de  voir  couronner  de  succès  sa  politique 
de  rapprochement  de  la  Hollande  et  du  Brabant,  vit  s'éva- 
nouir le  rêve  de  voir  ses  maîtres  ajouter  le  duché  de  Brabant 
à  leurs  Etats  héréditaires;  de  plus  il  assista  à  la  sécession  du 
Hainaut.  Il  mourut  en  1353  dans  son  château  de  Malines,  non 
sans  avoir  reçu  du  Pape  une  indulgence  plénière  in  articulo 
tnortU. 

Voilà  trop  imparfaitement  résumé  le  premier  chapitre  du 
mémoire.  Plus  d'un  événement  important  de  notre  histoire 
politique  du  xiv^  siècle  y  apparaît  sous  un  jour  nouveau  ;  je 
me  bornerai  ;i  relever  ici  les  données  si  intéressantes  concer- 
nant la  participation  à  l'œuvre  d'unification  de  nos  provinces 
des  financiers  capitalistes  mués  en  seigneurs  féodaux. 

Le  chapiti'e  II  s'intitule  :  «  La  Constitution  de  la  fortune  de 
Duvenvoorde  >;  il  est  divisé  en  trois  paragraphes,  étudiant  suc- 
cessivement les  opérations  financières,  l'acquisition  de  rentes 
et  de  propriétés  foncières  et  les  affaires  commerciales.  C'est, 
à  mon  avis,  le  chapitre  capital  du  mémoire. 

S'il  fallait  juger  de  l'importance  respective  des  trois  facteurs 
qui  ont  fourni  leur  ai)point  dans  la  constitution  de  la  fortune 
du  chambellan,  d'après  le  nombre  de  pages  que  l'auteur  con- 

•24 


370  COMPTES    RENDUS 

sacre  à  chacun  d'eux,  on  risquerait  bien  fort,  je  crois,  de  se 
faire  une  opinion  erronée.  En  eflet,  ce  chapitre  se  présente 
sous  la  forme  d'un  tryptique  dont  le  panneau  central  repré- 
sente la  constitution  de  la  fortune  foncière,  les  volets  respec- 
tivement les  spéculations  financières  et  les  opérations  com- 
merciales. Le  groupement  en  dyptique  aurait,  me  semble-t-il, 
rendu  de  façon  plus  expressive  le  mouvement  réel  de  l'œuvre 
capitaliste  de  Duvenvoorde.  La  division  admise  par  M.  Guve- 
lier  se  justifie  néanmoins.  Si  elle  ne  rend  pas  la  perspective 
exacte,  elle  n'en  est  pas  moins  parfaitement  rationnelle.  Au 
surplus  la  disproportion  frappante  entre  le  paragraphe  qui 
traite  de  l'acquisition  des  rentes  et  des  propriétés  foncières  et 
ceux  consacrés  aux  opérations  financières  et  commerciales 
s'explique  aisément  quand  Ton  tient  compte  des  sources 
d'information  dont  disposait  l'auteur.  Nous  ne  possédons  plus 
les  archives  personnelles  de  Duvenvoorde  et  si  nous  sommes 
abondamment  renseignés  sur  la  constitution  de  la  fortune  fon- 
cière, c'est  que  les  biens-fonds  ne  disparaissent  pas  et  que  les 
titres  de  propriété,  les  titres  féodaux,  les  privilèges,  les  actes 
constitutifs  des  servitudes  et  rentes  dont  ils  sont  grevés  se  con- 
servent avec  eux.  En  outre,  la  plupart  de  ces  actes  relèvent 
de  la  juridiction  gracieuse  d'administrations  publiques,  qui  en 
gardent  le  texte  dans  des  registres  d'entérinement.  Il  en  est 
tout  autrement  des  transactions  financières  et  commerciales. 
Celles-ci  se  passent  facilement  de  l'intervention  du  pouvoir 
public  et  en  général  les  documents  qui  s'y  rapportent  cessent 
d'ofïVir  un  intérêt  réel,  même  pour  les  parties,  dès  que 
l'affaire  est  liquidée  ou  que  la  prescription  devient  acquise. 
C'est  par  cette  considération  qu'il  faut  expliquer  que  presque 
toutes  les  opérations  financières  et  commerciales,  dont  il  est 
question  dans  ce  mémoire,  se  sont  traitées  avec  des  princes 
régnants. 

La  ricliesse  d'information  concernant  l'achat  de  rentes  et 
biens-fonds  a  permis  de  tracer  un  tableau  détaillé  de  la  créa- 
tion de  la  propriété  foncière  la  plus  considérable  des  Pays-Bas 
au  XIV*  siècle.  Emaillant  discrètement  son  exposé  de  considé- 
rations judicieuses,  recherchant  les  raisons  économiques  ou 
politiques  qui  motivèrent  les  divers  achats,  l'auteur  nous 
montre  en  Duvenvoorde  un  homme  d'affaires  avisé,  spécula- 
teur aussi  habile  et  prévoyant  dans  les  acquisitions,  qu'excel- 


COMPTES    RENDUS  371 

lent  administrateur,  s'entendant  à  merveille  a  mettre  ses 
propriétés  en  valeur.  Par  des  achats  avantageux  et  une  exploi- 
tation rationnelle  il  consolida  et  agrandit  sa  fortune,  tandis 
qu'il  établissait  sur  des  assises  solides  sa  puissance  politique 
et  le  prestiije  de  sa  famille.  Qu'on  ne  s'y  trompe  pas  cependant. 
Ce  ne  fut  pas  la  terre  qm  créa  sa  fortune.  Celle-ci  n'est  le  pro- 
duit ni  de  l'accaparement  du  sol  ni  de  l'accumulation  des 
rentes  foncières.  Malgré  ses  apparences,  la  fortune  de  Dnven. 
voorde  ne  plaide  pas  en  faveur  do  la  théorie  sonibartienne,  et 
M.  Guveliera  i;randement  raison  de  le  souligner.  La  constitu- 
tion de  la  fortune  foncière  ne  représente  en  majeure  partie 
que  le  placement  intelligent,  fructueux  et  définitif  d'nn  avoir 
acquis  par  d'autres  moyens  et  qui,  bien  placé,  produit  un  sur- 
croît de  revenus  formant  un  accroissement  régulier  et  pro- 
gressif du  capital  investi.  En  d'auti'es  termes,  l'acquisition  de 
rentes  et  de  biens- fonds  n'est  que  l'enchaînement  à  la  terre 
d'un  capital  préexistant,  sa  transformation,  sa  consolidation. 
C'est  le  second  tableau  du  dyptique.  Et  immédiatement  surgit 
la  quest  on  capitale  :  quelle  a  été  la  source  première  et  réelle 
des  richesses  accumulées  par  le  chambellan  hollandais? 

Sur  ce  point  les  documents  sont  moins  prodigues  de  rensei- 
gnements. Doit-on  en  reporter  l'orig-ine  aux  largesses  de 
Guillaume  l"  de  Hainaut,  son  maître,  prince  généreux  s'il  en 
fiît?  Elles  lui  auront  évidemment  fourni  un  premier  appoint 
qui  n'était  pas  à  dédaigner;  elles  ne  furent  pas  cependant  l'élé- 
ment générateur  de  cette  fortune  immense.  D'ailleurs  la  gêné, 
rosité  du  comte  se  manifesta  surtout  par  des  cessions  de  rentes 
et  de  fiefs.  Les  richesses  de  Duvenvoorde  dérivent-elles 
d'affaires  commerciales  avantageuses?  Cela  est  moins  probable 
encore,  M.  Cuvelier  démontrant  le  caractère  accidentel  des 
transactions  conclues  par  le  chambellan.  Restent  les  opéra- 
tions financières.  Il  me  paraît  indiscutable  que  c'est  en  elles 
qu'il  faut  chercher  la  souice  réelle  et  principale  de  cette 
grosse  fortune.  Il  y  a  peu  de  pages  dans  le  mémoire  de  l'émi- 
nent  archiviste  général  qui  ne  portent  témoignage  de  l'activité 
et  de  l'habileté  financières  de  Duvenvoorde.  Il  y  apparaît 
comme  un  banquier  hors  ligne,  un  i)rofessi(mnel  de  la  finance, 
maniant  l'argent  avec  souplesse  et  prudence,  ne  sacrifiant 
jamais  à  la  sentimentalité  quand  il  s'agit,  soit  de  fixer  le  taux 
de  l'intérêt  d'emprunt,  soit  de  faire  exécuter  un  contrat.  Seul 


372  COMPTES    RENDUS 

parmi  les  créanciers  d'Edouard  III  d'Angleterre  il  parvient  à 
rentrer  rapidement  dans  ses  fonds  et  plus  d'une  propriété  lui 
échoit  à  bon  compte  parce  qu'elle  a  servi  de  gage  pour  le  rem- 
boursement d'un  prêt  dont  les  débiteurs  ne  peuvent  se  libérer 
à  terme.  S'il  ne  dédaigne  pas  les  opérations  fructueuses  de  la 
spéculation  au  change  et  aux  rentes  viagères,  il  a  une  préfé- 
rence marquée  pour  le  prêt  à  intérêt;  il  est  même  un  des  prin- 
cipaux bailleurs  de  fonds  des  princes  de  son  époque.  Avec 
une  clientèle  de  choix,  dont  il  n'exige  pas  moins  des  garanties 
solides,  au  taux  d'intérêt  usuraire  qu'il  réclame,  sans  le  don- 
ner lui-même  quand  il  est  dans  la  nécessité  d'emprunter,  ses 
opérations  bancaires  ne  pouvaient  laisser  de  lui  rapporter 
gros.  Possédant  au  plus  haut  degré  le  génie  de  l'argent,  le 
financier  put  enrichir  le  chambellan  et  lui  permettre  de 
rehausser  le  prestige  de  ses  hautes  fonctions  par  l'acquisition 
d'une  fortune  foncière  colossale. 

Doit-on  avec  Sombart  chercher  dans  le  code  pénal  la  qua- 
lification des  moyens  auxquels  Duvenvoorde  eut  recours  pour 
accumuler  ces  immenses  richesses?  Je  ne  crois  pas  qu'il  faille 
faire  peser  de  graves  soupçons  sur  sa  mémoire  pour  expliquer 
son  enrichissement.  Les  fonctions  dont  il  s'acquittait  à  l'en- 
tière satisfaction  de  ses  maîtres  ont  pu  et  dû  lui  faciliter  sin- 
gulièrement l'accès  à  la  fortune;  seul  toutefois  le  caractère 
économique  de  l'époque  à  laquelle  il  vivait,  fournit  la  clé  au 
problème  de  la  constitution  de  cette  fortune.  Il  ne  s'agit  pas  en 
l'occurrence  d'une  forme  franche,  d'un  cas  spécial  d'amoncel- 
lement de  richesses,  comme  Sombart  voudrait  nous  le  faire 
croire;  nous  nous  trouvons  devant  un  phénomène  social, 
illustré  par  d'autres  exemples.  Duvenvoorde  rei)résente  un 
type  déterminé  de  capitalisme;  il  appartient  à  une  classe  de 
capitalistes,  exceptionnels  sans  doute,  mais  pas  anormaux  dans 
la  société  dans  laquelle  ils  apparurent.  Le  moyen  âge  urbain 
a,  au  point  de  vue  économique,  préparé  les  temps  modernes  : 
il  s'y  rencontre,  dès  les  premiers  siècles  de  l'existence  des 
villes,  de  ces  hommes  de  volonté  et  d'action,  doués  d'initia- 
tive âpre  et  avide,  trop  conscients  de  leur  supériorité  et  de 
leur  force  pour  ne  pas  rompre  en  visière  à  la  doctrine  écono- 
mique régnante,  héritage  des  conceptions  économiques  de 
l'époque  domaniale.  Duvenvoorde  nous  offre  le  type  accompli 
de  ces  capitalistes  médiévaux.  Tout  dans  la  constitution  et  la 


COMPTES    RENDUS  373 

consolidation  de  sa  fortune  trahit  l'esprit  capitaliste.  11  ne 
recherche  pas  l'argent  dans  le  but  exclusif  d'augmenter  sa 
puissance.  Ses  volontés  dernières  nous  prouvent  qu'il  reste  le 
capitaliste  jusque  dans  la  disposition  de  sa  fortune.  Car 
M.  Cuveliei"  n'a  pas  voulu  déposer  la  plume  sans  nous  dire 
quelles  furent  les  destinées  de  ses  biens.  N'est-ce  pas  en  eflet 
un  phénomène  exceptionnel  de  voir  une  fortune  d'un  pareil 
montant,  d'abord  se  constituer  et  se  consolider  en  une  vie 
d'homme,  puis  résister  pendant  des  siècles  à  la  loi  de  l'émiet- 
tement  et  de  l'etl'ritement  pour  se  conserver  en  bloc  dans  la 
même  famille? 

Comme  tant  d'autres  capitalistes  du  moyen  âge,  Duven- 
voorde,  sans  sacrifier  au  désintéressement,  fut  généreux  de 
fondations  pieuses  et  charitables.  Il  crut  bon  de  les  faire  de 
son  vivant  :  son  testament  ne  contient  pas  de  nouvelles  libé- 
ralités en  faveur  des  pauvres  et  du  clergé.  Par  contre  ses 
bâtards  n'y  sont  pas  oubliés;  ils  reçoivent  des  apanages.  Son 
mariage  avec  Helwige  de  Viaenen  étant  resté  stérile,  le  gros 
de  la  succession  échut,  par  disposition  testamentaire,  à  son 
neveu,  Jean  de  Polanen,  seigneur  de  la  Leck,  pour  être 
apporté  en  dot  par  la  petite-fille  de  ce  dei'nier  à  Englebert  de 
Nassau.  Ainsi  la  fortune  délaissée  par  Duvenvoorde  forma  le 
premier  et  principal  noj^au  de  la  puissance  d'une  famille  dont 
le  nom  ne  tarderait  pas  à  se  couvrir  de  gloire.  Allemande  et 
frauçaise  par  le  sang,  la  famille  régnante  de  Hollande  est 
essentiellement  nationale  par  ses  origines  économiques.  L'un 
des  principaux  artisans  de  notre  unité  nationale  durant  la 
période  pré-bourguignonne,  le  bâtard  Suikkerieme,  devenu 
le  chambellan-financier  Duvenvoor,ie,  a  préparé,  à  son  insu, 
la  dynastie  qui  devait  régner  sur  les  provinces  unifiées  du 
Nord. 

En  retraçant  avec  tant  de  talent  la  carrière  brillante  du 
fondateur  de  la  fortune  des  Orange-Nassau,  en  faisant  revivre 
en  Duvenvoorde  un  type  si  caractéristique  et  si  personnel  de 
capitaliste  médiéval,  le  savant  archiviste  général  a  ajouté  des 
pages  de  haute  valeur  à  son  œuvre  historique,  déjà  si  fécond 
et  si  varié.  Grâce  à  son  mémoire,  complétant  sa  lecture  à 
l'Académie,  l'histoire  économique  du  xiv^  siècle  s'est  enrichie 
d'une  contribution  précieuse  à  un  problème  capital  de  son 
évolution.   La  thèse  de  l'économie  médiévale  acapitaliste  a 


374  COMPTES    RENDUS 

reçu  un  nouveau  coup  de  boutoir  qui  la  relègue  davantage 
parmi  les  légendes  que  la  réaction  romantique  a  fait  naître 
Outre-Rhin. 

Henri  E.  de  Sagher. 

Henri  Stein,  Charles  de  France  frère  de  Louis  XI  (Mémoires 
et  documents  publiés  par  la  Société  de  l'Ecole  des  Chartes, X); 
Paris.  Picard,  1921.  in  8",  ix-871  p.,  50  fr. 

Ce  livre  constitue  vraiment  un  modèle  de  biographie  :  il 
joint  à  une  information  des  plus  étendues,  —  comme  on 
pouvait  l'attendre  d'une  œuvre  produite  par  un  des  meilleurs 
connaisseurs  du  xv*  siècle  français,  —  une  critique  très 
pénétrante,  un  constant  souci  d'exactitude  et  d'impartialité. 
Sur  bien  des  points,  il  renouvelle  un  sujet  que  l'on  pouvait 
croii'e  épuisé  depuis  longtemps  :  les  origines  de  la  Ligue  du 
Bien  public  et  les  principales  phases  de  la  guerre  à  laquelle 
elle  donna  lieu. 

Charles  de  Fi-ance  passait  jusqu'à  présent  pour  avoir  été 
l'âme  de  la  coalition  des  princes  contre  Louis  XL  De  l'étude 
de  M.  S.,  il  ressort  nettement  qu'il  en  fut  plutôt  le  chef 
nominal  et  inconscient.  Son  rôle  a  été,  en  tout  cas,  fortement 
exagéré  par  les  chroniqueurs  aussi  bien  que  par  les  historiens 
modernes.  Il  fut  avant  tout  le  jouet  des  circonstances,  un 
instrument  passif  entre  les  mains  de  conseillers  ambiiieux  et 
intrigants. 

L'auteur  a  su  dégager  admirablement  les  facteurs  essen  iels 
qui  ont  déterminé  la  psychologie  du  frère  cadet  de  Louis  XL 
Il  insiste  en  particulier  sur  l'ambiance  qui  a  entouré  sa 
jeunesse  inexpérimentée,  les  faveurs  toutes  spéciales,  la 
véritable  sollicitude  dont  le  a  petit  seigneur  »  a  été  l'objet  de 
la  part  de  son  père  et  qui  lui  ont  attiré  la  jalousie  de  son  frère 
aîné  Le  titre  de  duc  de  Berry  lui  fut  octroyé  dès  avant  l'avè- 
nement de  celui-ci.  peut-être  même  à  sa  naissance.  Il  ne  tenait 
donc  pas /ow^  de  son  frère,  ainsi  que  l'ont  affirmé  plusieurs 
historiens  :  Louis  XI  ne  fil  que  lui  donner  le  Berry  en 
apanage  (1401)  Le  jeune  prince  acquit,  semble-t-il,  en  Berry 
une  certaine  popularité,  bien  qu'il  abandonnât  presque  toute 
l'administi-ation  a  ses  officiers.  C'est  à  son  initiative  que  fut 
créée,  en  1463,  l'universit''  de  Bourges. 


COMPTES     RENDUS  ."^"5 

Les  princes  coalisés  dans  la  Ligue  du  Bien  public  l'éussiient 
non  seulement  à  l'entraîner  dans  leur  conspiration,  mais  à  le 
mettre  seul  en  avant.  Ils  demandéient  pour  lui  à  Louis  XI 
un  plus  grand  apanage  que  le  Berry,  et  Bourges  devint  leur 
quai'tier-général.  La  premiéi'e  phase  de  la  guerre  du  Bien 
public,  dans  laquelle  le  comte  de  Charolais  joua,  on  le  sait, 
un  rôle  considérable,  se  termina  par  un  compromis  entre  le 
roi  et  les  coalisés  :  Louis  XI  fut  contraint  de  cédera  son  frère 
le  duché  de  Normandie.  Dés  lors,  la  lutte  allait  changer  de 
terrain.  Charles  de  France  ne  sut  pas  d'ailleurs  profiter  de  la 
situation  :  ballotté  et  indécis,  il  désirait  à  la  fois  complaire 
à  ses  nouveaux  sujets  et  se  débarra-ser  des  importuns  et  des 
ambitieux,  qui  l'assaillaient  de  demandes.  En  outre,  il  se  défia 
du  comte  de  Charolais  et  tenta  notamment  de  se  rapprocher 
des  Liégeois  en  voyant  que  le  comte  semblait  lui  lefuser  la 
mai  II  de  sa  fille.  Trahi  par  le  duc  de  Bretagne,  il  ne  sait  quel 
parti  prendre.  Finalement  il  accepte  un  arbitrage.  Grâce  aux 
lettres  de  l'ambassadeur  milanais  et  à  d'autres  documents 
inédits,  M.  S.  fait  connaître  les  curieux  détails  des  négo- 
ciations qui  s'engagèrent  à  ce  moment  entre  le  roi  et  son  frère, 
les  embarras  de  celui-ci,  surtout  après  sa  fuite  en  Bretagne, 
oîi  il  fut  moralement  prisonnier  du  duc  François  II.  C'est  là 
que  s'ourdit  une  nouvelle  coalition,  plus  formidable  que  la 
première.  Encore  une  fois,  Charles  de  France  ne  sut  pas 
profiter  des  difficultés  où  se  débattait  le  roi  :  il  ne  put  se 
résoudre  à  faire  cause  commune  avec  le  duc  de  Bourgogne, 
qui  l'engageait  à  réclamer  la  Champagne  comme  apanage. 
On  le  voit  entre  autres  se  rendre  en  pèlerinage  à  Trégnier  au 
tombeau  de  saint  Yves,  ce  patron  des  avocats  qui  sait  apaiser 
les  différends  entre  frères.  Enfin  il  doit  se  contenter  de  Vapa- 
nage  de  Guyenne. 

Charles  de  France  fut  très  bien  accueilli  en  Guyenne  et  son 
administration,  dont  M.  S.  montre  tout  le  mécanisme  et  le 
fonctionnement,  contribua  à  faire  revivre  ce  pays,  si  éprouvé 
par  les  récentes  luttes  intestines.  Contrairement  â  l'opinion 
de  plusieurs  historiens,  il  résulte  de  l'étude  attentive  des 
sources  que  l'influence  du  nouveau  duc  y  fut  salutaire  et  qu'il 
ne  rencontra  guère  d'inimitiés. 

L'auteur  consacre  alors  un  chapitre  aux  projets  de  mariage 
de  Charles  de  France  et  spécialement  à  la  question  du  mariage 


376  COMPTES    RENDUS 

avec  la  fille  du  Téméraire,  qui  fut  de  nouveau  agitée  en  1469 
malgi'é  la  promesse  solennelle  faite  par  Charles  sur  la  croix 
de  Saint- Laud  de  ne  pas  rechercher  la  main  de  cette  princesse. 
M.  S.  fournit  à  ce  sujet  une  série  de  détails  nouveaux  et 
suggestifs.  Pendant  ces  négociations  avec  le  Témérai'e  se 
prépare  une  nouvelle  coalition  contre  Louis  XI  :  cette  fois, 
Charles  n'y  participe  qu'indirectement,  et  il  meurt  d'ailleurs 
au  milieu  des  préparatifs  de  défense  contre  une  invasion  du 
duché  par  les  troupes  royales. 

Le  dernier  chapitre  est  consacré  à  la  mort  du  prince,  qui 
parut  mystérieuse  aux  contemporains  et  sur  laquelle  circu- 
lèrent les  bruits  les  plus  fantaisistes  :  Louis  XI  fut  même 
accusé  de  l'avoir  provoquée.  L'auteur  prouve  de  manière 
irréfutable  que  cet  événement  fut  dû  à  des  causes  naturelles. 

M.  S.  a  joint  à  son  travail  cinq  appendices  traitant  succes- 
sivement :  1)  la  chancellerie  de  Charles  de  France;  2)  les 
monnaies  frappées  au  nom  de  ce  prince;  3)  ses  portraits; 
4)  ses  livres  d'heures  ;  5)  son  itinéraire.  Prés  de  cent  cinquante 
pièces  justificatives,  dont  plusieurs  assez  étendues,  suivies 
d'un  excellent  index  des  noms  de  lieux  et  de  personnes, 
complètent   cette   monographie   si   fouillée  et  si  solidement 

construite. 

H.  Vander  Linden. 


J.  Gessler  en  C.  Vanderstraeten.  Alpemeen  Repertorium  der 
Hasseltsche  ordonnantieboelien.  Hasselt,  L.  CroUen,  1921, 
in-8",  11-122  p. 

Ce  répertoire  est,  en  définitive,  le  relevé  par  ordre  alphabé- 
tique des  noms  de  personne-^  et  des  noms  de  lieux  ainsi  que  des 
matières  renfermées  dans  les  treize  registres  ou  liasses  in-f" 
des  ordonnances  du  magistrat  de  Hasselt,  depuis  l'année  1402 
jusqu'en  1796.  (]omme  ce  travail  a  été  fait  avec  grand  soin  et 
que  les  auteurs  se  sont  efforcés  de  condenser  en  un  minimum 
de  pages  le  maximum  de  matériaux,  on  devine  l'utilité  de 
cette  publication  pour  les   futurs  historiens  de  la  ville  de 

Hasselt. 

A.  Hansay. 


PERIODIQUES 


INDEX  SOMMAIRE 


Linguistique.  —  10. 

Philologie.  Généralités.  —  10,  29,  3G. 

—  indo-européenne.  —  8. 

—  grecque.  —  8,  9,  12,  15.  27,  33. 

—  latine.  —  4.  8,  9.  12,14.  15.  20.  27,  31,  33,  30. 

—  romane  (gén.).  —  19,  36. 

—  espagnole.  —  19,  36. 

—  française.  —  7,  8,  27.  36. 

—  roumaine.  —  36. 

—  celtique.  —  1,  2,  8,  36. 

—  germanique  (gén.)   —  4.  8,  31,  36 

—  allemande.  —  4,  31,  .33.  .34,  36. 

—  anglaise.  —  6,  8. 

—  néerlandaise.  —  31.  32 
Littérature.  Généralités.  —  10.  13,  14.  17.  23. 

—  grecque.  —  8,  9,  12.  13,  14,  15.  27,  28,  32,  33,  35. 

—  latine.  —  5,  12,  14,  20,  22,  27,  28.  33 

—  —     du  moyen  âge  et  des  temps  modernes  —  7,  12, 
27.  34. 

—  espagnole.  —  13,  19,  36 

—  française.  —  1.  2,  3,  5,  7,   11,    13.   14.  18.  21.22,  23, 

24,  26. 

—  italienne  (sauf  Dante).  —  3,  18,  19,  23. 

—  —         (Dante).  —  3.  6,  11,  32. 

—  roumaine.  —  23. 

—  allemande.  —  3.  4,  13.  21.  34. 

—  anglaise.  —  6,  13.  16.  21.  29,  32. 

—  néerlandaise.  —  13.  14,  29,  31,  32. 


378  PÉRIODIQUES 

Littérature  Scandinave.  —  13 

—  slave.  —  29. 

Histoire  de  l'antiquité.  —  1,  10,  12,  17,  20.  25,  27,  28,  35 

—  du  moyen  âge.  —  1.  10,  14,  17,  23,  25,  35. 

—  moderne.  —  2,  3,  10.  14,  17,  25,  2G,  35. 

—  contemporaine  (sauf  Xapoléou  1""^).  —  1,3,  5,  6,  10,  14, 

16,  23,  32,  35. 

—  contemporaine  Napoléon  I^'.  —  3,  22,  24. 

—  économique  et  sociale.  —  10,  22,  30,  33,  35. 

—  des  mœurs.  —  4,  15,  20,  28,  29,  33. 

—  des  sciences.  —  7,  12,  34. 

—  de  l'art.  —  10. 
Archéologie  —  10,  12.  20. 

Autres  sciences  auxiliaires  de  l'histoire.  —  1,  2,  5,  10,  II.  16,  17, 
22,  25. 


1.  —  Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres. 
Comptes  rendus,  1921. 
O.   Baii,m-:t.   Marc-Aurèlc,  Lucius  Vérus  et  le  gouverneur  Catu- 

linus  :  Thèbes  d'Egypte.  58. 
P.     CoLLiNET.   La  carrière  de   Leontius,  professeur  de  droit  à 

Beyrouth,  préfet  du  prétoire  d'Orient  sous  Anastase.  77. 
J.  Capart.  Un  mythe  égyptien  dans  le  Roman  de  Renart  ?  113. 

C.  HuART.  L'expédition  des  Russes  en  943.  182. 

2    —  Annales  de  Bretagne.  XXV,  1921. 
<ji.  Collas.  Dix  ans  au  château  de  Combourg  (1786-1790).  1. 

D.  Bkrnard   Le  breton  dans  les  actes  publics  33. 

L.  Maîtkk.  a  quels  usages  ont  servi  les  domaines  do  la  couronne 

en  Bretagne.  50. 
Dk  la  Martinière.  La  ville  de  Vannes,  siège  du  Parlement  de 

Bretagne  (1425-1554).  69. 
H.  DU  Halgoukt.  Le  chartrier  de  Blain   81. 

E.  Galmichk.  Les  prêtres  insermentés  du  Finistère.  89. 

F.  DuiNE.  Un  second  manuscrit  de  la  Chronitiue  de  Dol.  Les 
archevêques  Baudry  et  Roland.  Le  catalogue  des  arche- 
vêques. 92. 

3.  —  Nuova  Antologia.  CCXIV,  1921. 

J.  DKL  LuxGo.  A  Fiorenza.  La  Canzone  d'un  Guolfo  Bianco.  97. 

G.  Boni.  Il  tricolore  dantesco.  108. 

A.  Ottoi-ixi.  Napoleone  nella  mente  del  foscolo.  155. 


PÉRIODIQUES  379 

O   RosADi    Domenico  Gnoli.  204. 

A.  LiPAKi.  Cristoforo  (Colombo    e  il  viaf^o  di   Ulisse  nel  poema 

di  Dante.  237. 
O.  BusTico.  Le  esitazioni  matrimoniali  di  Ciulia    Manzoni  (cou 

due  lettere  inédite  di  Alessandro  Manzoni).  272. 
C     DE   LoLLis.  Baudelaire.  (In  occasione  del  suo  centenario).  289. 
(i.  Lksc.v.  L"  «  Adelchi  »  et  la  censura  austriaca.  301. 
CCXV,  1921.    -    A.  Fauixem-i    Gottfried  Keller  poeta  e  educa- 

tore.  3. 
T.  DI  SoAfMA.  11  preteso  tranello  délia   i)oli/,ia  borbonioa  contra 

G.  Murât.  37 
A.    Chiappkm.i.     Il    messaggio    spirituale    di    Dante    ])el  nostro 

tempo.  97. 
G   Lesca.  Ancora  dell  «  Adelchi  ».  114. 
A.  Fradei-etto.  Rileggendo  il  Parini.  309. 
C  DE  L()i,i,is.  Gustavo  Flaubert.  328. 

4.  —  Beitriige  zur  Geschichte  der  deutschen  Sprache 
und  Literatur.  XLV,  1920-1921. 

AV.  WiciiGRAF.  Der  Tractât  von  der  Tochtci-  von  Syon  und  seine 

Bearbeitungen.  173. 
C  Wesle.  Der  Donauvibergang  im  alteren  Xiebelungenepos.  231. 

—  Zur  Sage  von  Ermenrichs  Tod.  248. 

R.  Blumei,.  Zusammensetzung  der  Vocale.  265. 

—  Reim  und  tonliolie  im  ueuhochdeutschen,  275. 

—  Der    Sclieinspondcus  ini  deutschen  hexanieter   und 
pentameter.  297. 

R.  Pai.gen.  m.  F.  3,  7.  301 

—  Salliure,  schantiure,  pareliure.  309. 

—  Lapsit  exillis  (P.  469.  7).  312 

A.  LKrrz.MAXN.  Zum  Codex  palatinus  341.  313 

—  Zu  den  altdeutschen  tischzuchten.  320. 

E.  Ociis.  Zwei  diinkle  stellen  im  Georgslied.  333. 

F.  HoLTHAL'SKX.  Zum  Heliand,  v.  5778.  337. 

5.  —  Bibliothèque  universelle  et  Revue  suisse. 
CIV, 1921. 
P.  M.  DE  MuNNYNCK.  Henri  Pironne.  273. 
Henry  Druey.  I^a  révolution  vaudoise  de  1845.  317. 
Chaklks  Burxier.   Les  épigranimes  champêtres  de  Martial  et  les 

odes  rustiques  d'Horace.  340. 
CIV.    1922.    On.     Burxier.     Les    épigrammes    champêtres    de 
Martial  ot  les  odes  rustiques  d'Horace.  3(). 


380  PÉRIODIQUES 

H.  Druey.  La  révolution  vaudoise  de  1445-71.  200. 
P.  KoHLER.  Molière  et  l'esprit  classique.  137. 

6.  —  Discovery,   1921. 

B.  LiTT.  An  eighteenth-century  character.  241,  297. 
H.  C.  WiLD.  Standards  of  correctness  in  English.  267. 
E.  G.  Gardner.  Daute's  lyrical  poems.  279. 

C.  S      S.     HiGHAM.     The     raid   on    the    Bruges-Ostend    Canal 
in  1798.  313. 

7.  —  Le  Flambeau.  III,  1921. 
Albert  Mockei..  Hommage  à  Flaubert.  473. 
P    Mazon.  L'association  Guillaume  Budé.  478. 

8.  —  Indo-germanische  Forschungen.  XXXIX,  1921. 

K.  Brugmanx.  Zur  Frage  des  Ursprungs  der  Personalendungen 
des  indogermanischen  Verbums.  131. 

—  Griech.  aï  al  s  sinnverstarkendes  Vorderglied  in 

Nominalkomposita   140. 

—  biKeîv  als  Aorist  zu  pdWeiv.  144. 

—  Boot.  TTiTeûuu    149. 

—  Altlat.  humus  Gen.  Sing.  =  gr.  x^ovôç.  1.51. 

—  Lat.  sevërus.  154. 

—  Analogische  Neuerungeu  in  den  Ausgângeu  der 

Formen     des    Verbum    finitum     in    den    idg. 
Spracheu. 157. 

F.  MÛLLER.  Lat.  barba.  172. 

R.  Thurneysen.  Alte  Problème.  189. 

A.  Debrunner.  Homerica.  202. 

E.  KiECKERs.  Der  elliptische  Dual  im  Ergânzungswort.  207. 

M.  Leumann.  Avestiscb  srifa.  209. 

—  Zur  lateinischen  Sprachgeschichte.  209. 
A.  Wai.de.  Umbrisch   purditom.  216. 

J.  PoKORXY.  Die  Herkunft  des  irischen  Artikels.  217. 
J.  Wackernagel.  Zu  altir.  fitir.  220. 

—  Zu    der    altpersischeu    Stelle  in  Aristophanes 

Acharnern.  2,  224. 
E.    ScHRÔDER.    Die  2.    Pers.    Sing.    Perf.    st.  Flexion   im  West- 
germanischen.  224. 

—  Zu  if.  39,  72  (gadrobe,  parterre).  230. 
W.  HoRN.  Zu  IF.  39,  72,  ae.  bèocere.  230. 

Zu  if.  39,  67,  got.  wit  »  wir  beide  «.  231. 

G.  Ipsen.  Lat.  cuprum,  griech.  Koirpoç  und  idg.  *aios.  232. 


PÉRIODIQUES  381 

9.    -    Glotta.  XI,   1921. 

H.  Blase.  Zum  Konjunktiv  iiu  Lateiuisclieii .  2.  Der  Konjunktiv 

im  bediugenden  Satze.  145 
O.  N.  IIatzidakis.  Griechiselie  Miszellen  1' Ape\T€poç.  Il .  ZapTTdjvuj  = 

verschrumpen,  zusammeiizielien.  III.  KovaKi  —  Koveuuj.  IV.  Zum 

Verstjindnis  einiger  Komposita   175. 
E   KiECKEKs.  Zum  Sclialtesatz  im  spâteren  (iriechiscli.  17!». 

—  Zum  ÔTi  recitativum.  183. 

—  Zu  inqiiit,  rpr\a\v..  Iwiszt  en    184. 

Manu  Leumann.  Laieiuische  Etymologien  und  Bedeutungen 
unxicia,  axitia  u.  axitiosiis  ;  fiislibalus,  —  buliim-,  —  biilator; 
mîscelliis.  185. 

Manu  Leumann.  Part,  perf,  pass.  mit-fui  im  spatcreii  Latein.  192. 

—  eg-ressnm  iri.  195. 

—  Zum  spjiteu  griech.  r]v.  195. 
Paul  Kretschmer.  Ares.  195. 

F.  Hartmann.  Xachtrag  zu  Germnnus  Glotta  9,  1  ff    198. 

E    Methner.  Zu  dem  Aufsatz  von  H.  Blase  «  Zum  Konjunktiv  im 

Lateiuisohen  »  Glotta  X.  S.  30  ff.  204. 
M.  HAMMARSTRom.  Griecbisch-ctruskische  Wortgleichungen.  211. 
R.  Thurneysen.  Alt-Italisches.  1  Vulskisch.  2  Marrukiniscli.  217. 
Fr.  VoLLMER.  Noch  einmal  "est  und  'est.  221. 
Leo  Spitzer.  liai,  camporeccio,  camperecciô  lândlicli.  224. 
Paul  Kretschmer.  Pelasger  und  Etrusker  276. 
J.  Wackernagel.  Zu  Hesiod  und  Horaer.  280. 
Th.  Kakridis.  Die  Bedeutung  von  ttoXùtpottoç  in  der  Odyssée.  288. 
A.  Nehring.  Lat.  sa//uA*   291. 

10.  —  Journal  des  savants,   1921. 

H.  Lemonniek.  La  ci'éation  d'une  ville  seigneuriale,  Gliantilly 
(1692-1740).  5. 

Ed.  Cuq.  Les  j)ierres  de  bornages  babyloniennes  du  Britisli 
Muséum.  20,  63,  111. 

A.  Rébelllvu.  Les  nonces  en  France  sous  Louis  XIII.  30. 

E.  Babelon.  Le  voyage  archéologique  des  P.  P.  Janssen  et 
Savignac  en  Arabie.  49. 

L.  MiROT.  La  pénétration  des  étrangers  en  France.  74,  118. 

P.  Paris.  Stèles  funéraires  discoïdes  de  l'Espagne   97. 

E.  Lavisse.  Le  Musée  Condé  en  1920.  123. 

P.  .TouGUET.  Les  Grecs  au  temple  d'Abydos.  145. 

J.  Mathorez.  Ra])ports  intellectuels  de  la  France  et  de  la  Hol- 
lande du  xiii'^  au  xviiie  siècle.  157. 

L.  A.  CoNSTANS.  Ivéceutes  découvertes  archéologi<iues  eu  Italie. 
168,  214. 


382  PÉRIODIQUES 

P.  Monceaux    Alfaric.  Le  Manichéisme.  193,  247. 

A.   Ernout,    Linguistique   historique   et   linguistique    générale. 

205,  258. 
L.  Léger.  L'académie  polonaise  de  Cracovie.  265. 

11.  —  Mercure  de  France    CLI,  1921. 
Canudo.  L'heure  de  Dante  et  la  nôtre.  577. 
M.  CouLON.  L'œuvre  d'Ernest  Raynaud   599 
CLiII,  1921.  —  R.  DuMESNiL.  Flaubert  et  l'opinion.  289. 
H.-C.  Un  problème  d'histoire  et  de  cryptograijhie.  385. 
P.  MoNKiER.  Gustave  Flaubert  coloriste.  401. 
H.  Mazkl.  Les  trois  tentations  de  saint  Antoine   626 
G.  Lazzeri.  L'année  de  Dante.  644 
CLIII,  1922.  —  .T.  Gaument  et  L.  Cmouville   Ninon,  Molière  et 

les  dévots.  36. 
G.  Bruneï.  Le  comique  de  Molière  2*^9. 
E.  Levrat   Le  cas  du  Malade  imaginaire.  387. 
G.  d'Aui-an.  L'œuvre  critique  de  Reray  de  Gourmont.  594. 
G    LoTE.  —  Voltaire  et  la  déclamation  théâtrale.  669. 

12    —  Le  Musée  belge.  XXV,  1921. 

J.  Wai.tzixg.  Pour  l'étude  de  TertuUien.  7. 

O.  Jacob.  Le  service   sanitaire  dans  les  armées  grecques  et  ro- 
maines. 38. 
J.-P.  Waltzing.  Inscriptions  latines  de  la  Belgique  romaine.  50 
Paul  Graindor.  Kykladika,  II.  68. 
Alph.  Roersch.  Un  humaniste  gantois  méconnu  :  Gérard  Rym. 

(1497-1570).  127. 
L.  Lauraxd.  Contribution  à  la  bibliographie  du  Cursus  grec.  133. 
J.-P.  Waltzing.   Inscriptions    latines  de  la  Belgique  romaine. 

XVI-XVIII.  139. 
P   d'Hérouville.  a  propos  d'Aristote  naturaliste    145. 
Ernest  Merciiie.  Sur  l'emploi  de  siniia  comme  substantif  mas- 
culin   148. 
J.  HuBAU.x.  Virgile  et  Méléagre  de  Gadara.   Yirgile,  Bue  ,  Vlll, 

17  et  50  sq.  149. 
Ernest.  Merciiie.  Un  aspectde  la  i)rose  de  Sidoine  Apollinaire.  165. 
J.  Herbillon.  Artémis  Laphria.  181. 
J.-P.  Waltzin(;.  T<]ncore  Minucius  Félix  et  TertuUien.  Théodore 

Reinach,  Revue  de  l'Histoire  des  Religions,  p.  83,  1921,  p.  59-68. 

189. 
M.  il.  N.  Le  songe  dans  V Enéide.  197. 
G-  DossiN.  Une  consultation  à  l'oracle  de  Trophanios  à  Lébadée. 

209. 


PÉRIODIQUES  385 

J.  Hardy.  Senex  avidus  futuri.  227. 

A.  RoKRSCH.  Un  collège  belge  au  temps  jadis.  La  Grande-École  à 
Malines.230. 

13.  —  Neophilologus    VII,  1921-1922. 

J.-W.  Makmelstein.  De  eenheid  iu  liet  leven  vau  Rimbaud.  1. 

J.-A.  VAN  PraaCt.  Les  traductions  de  El  mnyor  encunta  Amor  de 
Caldéron  eu  néerlandais.  8. 

Bella  Jansen.  Ueber  don  Okkultismus  in  (Justav  Meyrinks  Ro- 
man Der  Golem.  19 

Jax  de  Vries.  Oudnoorsclie  Sagen  op  de  Faeroër.  23. 

GusTAV  HuBENEU.  Die  Entstehung  von  GiiUioers'  Travela  und  die 
«  curiosity  »  Kultur.  35. 

R.  Priebscii.  Eiu  Beitrag  zu  den  Quellen  des  Esmoreits.  57. 

^Y.  E.  J.  KuiPKK.  De  gedaante-verwisseling  van  Polyphemos.  62. 

14.  —  Nova  et  vetera.  IV,  1921. 
E.  Remy.  Le  concept  cicéronien  de  la  gravitas.  5. 
X.  Wallez.  Le  VIII«  livre  de  VEnéide.  15. 
K.  Elebaers.  Zelfwerkzaamheid  bij   het  lezen   der  oude  schrij- 

vers.  27. 
J.  Cochez.  Homeros,  de  Ilias  en  de  mykeensche  bescliaving.  32, 

177,  281. 
E.  Dkru.me.  Sophocle,  éducateur  du  peuple  athénien.  40. 

B.  Lebbe.  L'enchaînement  des  parties  dans  les  discours  de 
Démosthène.  40,  290. 

L.  Vermeirsch.  Vondel  als  lyrisch  dichter   vervolg).  5L 

L.  Chevalier.  Etude  des  tragédies  françaises.  63. 

E.  Soudan.  Les  Belges  en  Palestine  au  XJI'=  siècle.  72. 

E.    Remy.    L'exorde    et    la    péroraison    de   la    troisième  Catili- 

naire.  129. 
K   Eleb.vers.  De  doodsgedachte  in  de  Ode  van  Horatius.  169. 
A.  Walgrave.  Margaritam.  188. 
E   Derume.  La  disgrâce  du  romantisme.  194. 

Les  intentions  politiques  de  Cicéi'on  dans  le  plaidoyer 

pour  Murena.  257. 

C.  Van  der  Straeten  Eenige  rhetorisclie  kunstmiddelen  in  de 
1^'«  Ode  van  Horatius.  274. 

X.  Wali.kz.  Origines  de  la  nationalité  belge.  306. 
—  Où  s'est  livrée  la  bataille  du  Cid'>.  348. 

15.  —  The  Classical  Review    XXXV,   1921. 
Arthur  Platt.  On  homeric  technique.  141. 
H.-L.  LoiuMER.  Aeschvlus,  Eiimenides  41-2.  143. 


384  PÉRIODIQUES 

G  -R   Driver.  Eurisides,  Mfidpa  560-561.  144. 

W.-M.  Calder.  Aristophanes,  Acharnians,  11.  6S.  ff.  144. 

S.  Casso.n.  ATTOAEBII,  Invcntory,  in  Herodotus  and  Thucydides. 

144. 
R.-G.  BuKY.  On  some  passages  in  Plato's  Laws.  145. 
CoNSTANCK  Garmck.  What  was  the  Greek  hyacinth?  146. 
H  -J.  Rose.  Zeus  Meilichios,  Zeus  Agaminnon,  and  Zanes.  147. 
F. -H.  Coi.soN.  Quintilian  T.  9  and  the  'Chriain  ancient  éducation. 

150. 
"\V.-R.  Hai.liday.  Roman  burial.  154. 
M.  MAR.IORIK  Crump.  Vergil  and  the  Messeniaca  of  Rhianus.  157. 

16.  —  The  American  Historical  Review  XXVI,  1920  1921. 

Carl  Beckkr.  Mr.  Wells  and  the  new  history.  641. 

John  R.   Kxipfing.   Germau    historians   and  Macedonian   impe- 

rialism.  657. 
ViscouxT  Bryce.  The  life  of  Disraeli.  V.,  YI   672. 
Percy  W.  Biddwki.l.  The  agricultural  révolution  in  Xew  Eng- 

land.  683. 
Kexneth  s.   Latourkttk.  Chinese  historical  studies  during  the 

past  seven  years.  703. 
AV.\LTER  T.  SwiNGLE.  Chiuese  historical  sources.  713. 

17.  —  The  English  Historical  Review    1921. 
Mabkl  h.  Mills.  Adveutus  Yicecomitum,  1258-72.  4SI. 
J.  y..  Ne.\le.  Parliament  and  the  succession   question  in  1562/3 

and  1566.  497. 
G.-X.  Clark.  Trading  with  the  Enemy  and  the  Corunna  Rackets, 

1689-97.  521. 
R.-L.  PooLK.  Monasterium  Niridanum.  540. 
F.  i)K  Zulueta.  The  Avranches  Manuscript  of  Vacarius.  545. 
L.  Ehrlich.  Exchequer  and  wardrobe  in  1270.  553. 
R.-L.  Atkixson.  The  Channel  Islands  Pétitions  of  1305.  554. 
C.-S.-B.  Bucklanl).  a  letter  of  1721  froni  S'  Saphorin  to  Towns- 

hend.  583. 

18.  —  The  Romanic  Review.  1921. 
T. -F.  Ckane.  The  sources  of  Boccaccio's  novella  of  Mithzùdaues 

and  Natan.  193. 
JnoN-CiiARLES  Dawson.  The  floral  Games  of  Toulouse   248. 
Ralph   C.   Williams.    Methods  of  treatment  of  the  epic  as  dis- 

cussed  by  sixteenth  centurj-  critics.  276. 
Archer  Taylor.  Arthur  and  the  wild  Iluut.  286 
Constance  C.  Wriuht.  «  A  entercer  le  pur  Tristan.  »  290. 


PÉRIODIQUES  385 

19.  —  Revista  de  filologia  espanola  VIII.  1921 

AV.  Mkykk-Lubke.  La  ovoluciùu  do  la  «  c  »  latiiui  delaiile  de  «  e  » 

e  «  i  »  en  la  Peninsula  Ibérica.  225. 
Zacarias-Gaucia  Vii.i.ada.  Notas  sobre  la  Crunira  de  Alphonso  III . 

252. 
Samuel  Gili.  La  «  r  >)  simple  en  la  pronunciaciôn  espauola.  271. 
EuGENio  Mêle.  Nuevos  dates  sobre  la  fortuna  de  Cervantes  eu 
Italia  en  el  siglo  XVII.  281. 
—  ('  dinare,  e  ])iù  dinare  ».  283. 

A.-(ii.  Solalixde.  La  feclia  del  «  Ovide  moralisé.  »  283. 
Leo  Spitzeu.  Judéo-esp.  «  meldar  ».  288. 

Narciso  Alonso  Cortes.  El  autor  de  la  «  Comedia  Doleria  »  21)1. 
F.  Kruger.  a  propôsito  de  «  de  aqui  a  »  hasta.  295. 
H.  Tiio.AïAs.  Emmiendas  al  texto  de  «  Dos  romances  anônimos  del 

siglo  XYI.  »  29(1. 

20.  —  Revue  des  études  anciennes.  XXIII,  1921. 

O.  Navarre.  Le  papyrus  d'Ilerculanum  et  le  texte  des  Caractères 
de  Théophraste.  261. 

P.  Pedrizet.  MiscellanQa  :  XII.  La  Ligue  achéenne  et  les 
Lagides;  XIV.  Cas  de  mort  par  jdqûre  de  scorpion;  XV.  De 
quelques  poilus.  281. 

J.  Carcopino  et  C.  Jlllian.  La  Table  de  Veleia  et  son  importance 
historique.  287. 

C.  Jullian.  Notes  gallo-romaines  :  XCII.  Questions  hagiogra- 
phiques, Victor  de  Marseille.  305. 

A.  Blanchp:t  et  J.  Hanezo.  A  propos  de  l'inscription  d'Antibes. 
324. 

J.  Lo'i;h.  L'arrivée  des  ('eltes  dans  les  Iles  Britanniques.  327. 

C.  Jullian.  Chronique  gallo-romaine.  333. 

21  —  Revue  germanique,  1921. 
L.  Mis.  Les  études  sur  Shakespeare  d'Otto  Ludwig.  1. 
K.  Seilmèrk.  Une  correspondante  de  M^''  de  Staël  à  Weimar  il  y 

a  cent  ans.  Sophie  de  Schardt.  123. 
li.  Michaud.  Emei'son  et  la  gaie  science.  231. 

D.  Saurat.  Les  sources  anglaises  de  la  pensée  de  Miltou.  359. 

L.  Cazamian.  Goethe  en  Angleterre.   Quehiues  réflexions  sur  les 

problèmes  d'influence.  371. 
<;.  RoTH.  Ce  que  Sainte-Beuve  a  su  d'anglais.  378. 

22.    -  La  Grande  Revue.  104,    1920-1921. 
Elie  Fauue.  Napoléon.  35.J,  541. 

Ernest  Tisserand.  Les  mauvais  génies  de  la  Fiance.  Gabriel- 
Lucien  (^uvrard.  415. 

25 


386  PÉRIODIQUES 

105,  1921.  —  Eme  Faure.  Napoléon  (suite^  29,  213,  382. 

106,  1921.  —  Georges  Renard.  Histoire  technique  et  sociale 
de  l'imprimerie.  25. 

AUREL.  Ovide  et  l'art  d'aimer.  365. 

L.  Lemonnier.  Baudelaire  au  lycée  Louis-le-Grand,  426. 

107,  1921-1923.  — A. Provost.  Les  sources  de  «Thaïs», d'Ana- 
tole France.  16. 

G.  DE  BÉvoTTE.  La  popularité  de  Molière.  353. 

23.  —  La  Revue  latine.  III,  1921. 
A.  DEiiAcouR.  Gabriele  d'Annunzio.  336. 

A.  Thérive.  Une  nouvelle  critique  du  romantisme  social  et  litté- 
raire. 459. 

IV,  1921.  —  André  Thérive.  La  gloire  de  La  Fontaine.  645. 
Rachel  de  Villers.  Essai  sur  l'influence  française  en  Roumanie. 

681. 
A.  CouNsoN.  La  Chevalerie.  759. 
K.  Hanquet.  Godefroid  Kurth,  historien.  850. 
Hommages  à  Godefroid  Kurth.  866. 
A.  Thérive.  Les  frères  Tharaud  et  le  roman  historique.  1098. 

24.  —  La  Revue  mondiale.  CXLVI,   1922. 

Martin  Ginouvier.  Raspail  et  Napoléon  1'^''.  63. 
H.  d'Almèras.  Les  années  d'épreuves  de  Molière  (1643-1653).  151. 
G.  MoNGRÉDiEN.Un  rival  de  Molière  :  le  comédien  Montfleury.  280. 
Lacour  Gayet  Bonaparte,  membre  de  l'Institut  de  la  République 

cisalpine.  396. 
J.  LoRTEL.  Le  féminisme  de  Diderot.  426.  , 

25.  —  Revue  belge  de  numismatique  et  de 

sigillographie,   1921. 
J.  L.   HoLLEXFELTZ.  Lcs  monnaies  aux  types  dégénéi'és  des  deux 

Tétricus.  115. 
E.  BERNAYsetJ.  Vaxnérus.  Un  esterlin  à  tête,  frappé  à  Arlon 

dans  les  derniers  mois  du  règne  de  Jean  l'Aveugle.  121 . 
V*    B.  DE  JoNGHE    Monnaies  de    Frédéric-^Laurice  de   la  Tour 

d'Auvergne,  prince  de  Sedan,  de   Raucourt,  et  i^rétendant  au 

duché  de  Bouillon  (1622-1652).  127. 

V.  Tourneur.  La  médaille  de  Philibert  Guigonard.  137. 

A.   ViSAKT   DE   BocARMÉ.    Les   jetons  de  la  Généralité  des  Huit 

Paroisses.  145. 
J.  Vannérus.  Matrices  et  sceaux  luxembourgeois  (2«  série).  165. 
V.  Tourneur.  Demi  gros  d'Albert  de  Bavière.  197. 


PÉRIODIQUES  387 

A.  ViSART  DE  BooAHMÉ.  Les  jetous  de  la  Chambre  des  Comptes  et 

du  Bureau  des  Finances.  200. 
V.  Tourneur.  Les  méreaux  de  la  maison  du  Saiut-Esprit  dite  de 
Notre-Dame    ou  fondation  van    Bruyssegem   à 
Bruxelles.  205. 
—  Les  sceaux  de  Guillaume  de  Duvcnvoorde.   207. 

26.  —  Revue  politique  et  littéraire  et  Revue  bleue.  DX,  1922. 

A.  Lk  Breton.  Les  comédies-ballets  de  Molière.  40,  76. 

Y    GiRAUD.  A  l'ombre  de  Port-Royal.  Comment  fut  composé  le 

Discours  sur  les  pensées  de  Pascal.  43. 
G.  Geffroy.  Les  frères  Zemganno.  65. 
M.  d'Auriac.  Pierre  Corneille  a-t-il  collaboré  à  Psyché  ?  88. 

27.  —  Rivista  di  filologia  e  di  istruzione  classica. 
XLIX,  1921. 

R.  Sabbadini.  Apicio.  1. 

G.  A.  PiovANO.  Il  corre  délie  Coefore  ed  appunti  Eschilei.  7,  195. 

Lencii.vntin  de  Guberxatis    Studi  sull'  accento  greco  e  latino. 

IX.  Turbamenti  nei  fenomeni  di  apofonia  latina.  33. 
C   O.  Zuretti.  ITIXOMY0IA.  42. 
E    Stampi.  Come  ho  tradotto  Catullo.  57. 
S.    CoxsoLi    La  satira   IX  di  Gio vénale  nella  tradizione  délia 

cultura  sino  aile  fine  del  medie  evo.  79. 

C.  O.  Zuretti.  Ancora  sull  «  orma  di  pie  mortale  ».  98. 

U.  MoRicA.  Le  tragédie  di  Seneca.  4.  Il  coro  nelle  tragédie  di 

Seneca.  161. 
F.   Stabile.  Critica   e  lingua  délia    «   Vita   Alexandri  Magni   » 

o  «  Historia  de   preliis  »    di  Léo   archipresbyter  secondo  la 

recensione  del  cod.  Bambergensis.  215. 

D.  Bassi.  Ovidio  Metamorfosi  XV  805-6.  228. 

P.    FossATARO.    Xeottolemo  e   Orazio.  A  proposita  d'un  saggio 

suir  opéra  irepi  TioîriMctTov  di  Filodemo.  230. 
F.  Pellati.  Vitruvio  e   la  l'ortuna   del   suo   traLtato  nel  monde 

antico.  305. 
F.  Stabile.  Costruzione  parattatica  appositiva  in  Cato?  336. 
D.  Bassi.  Papiro  Ercolanese  873.  OiXobriuou  Trepi 'OmXîaç.  340. 
B   Terracini.  Gallico   e  latino.  A  proposita   di   un   récente  libro 

sulla  lingua  gallica.  401. 
V.  UssANi   La  canizie  précoce  di  Virgilio  e  le  biografie  virgiliane 

al  Petrarca    431 
S.   CoNsoLi.    Reminiscenze   virgiliane   nelle  piose  di    L.    Aiiueo 

Seneca.  456. 


388  PÉRIODIQUES 

28.  —  Sitzungsberichte  der  Preussischen  Akademîe 
der  W^issenschaften,  1921 
U.  v(»N  WiLAMOWiTz-MoELLENDORF.  Zui"  Griechischeu  Geschichte 
und  Literatur.  1.  Ein  vergessenes  Homerscholion.  729. 

E.  Meyer.  Tougener  und  Teutonen.  750. 

C.  ScHDCHiiARDT.  Rhetlira  und  Arkona.  756. 

J.Ilberg.  Aus  eiuer  verlorenerllandschrift  derTardae  passiones 

des  Cselius  Aurelianus.  819. 
A.  VON  Harnack.  Nachtrage  zur  Abhaudlung  a  Xeue  Fragmente  des 

Werks  des  Porphyi'iusg  egen  die  Christen  »  (s.  o.  S.  266  ff .1. 834. 
K.  Hou..  Der  Kirchenbegriff  des  Paulus  in  seinem  Verhaltnis 

zu  dem  der  Urgemeinde.  920. 

29.  —  Studien.  XCVI,  1921. 
J.    VAN    Heugten.   Theodoor   Michailowitsj    Dostojefski.   (1821- 

1881).  133. 
L.  P.  P.  Francke.  Cbesterton  over  Joden  en  Zionisme.  288. 

F.  VAN   LiTH.    De   vertaling   van    bet    «   Onze   Vader   »    in    bet 
Javaanscb.  353,  405. 

J.   C.   J.    Groot.    De    katholieke    Engelscbe    dichter    Francis 

Tbompson.  375. 
L.  DE  JoNGE.  Paradijsvloek  en  Paradijszegen.  450. 
P.  Albeks.  Bezeteuen  en  beksen  in  Duitscbland  na  den  30-  jarigen 

oorlog  volgens  Duhr.  462. 

30.  —  Taxandria  (Turnhout).   1921.   1. 
J.  E.  Jansen.  Boerenverbuis  in  de  Kempen.  3. 
R.  Verstreyden.  Ambacbtsbrieven  van  Herentbals.  9. 
P.  J.  Goetschalckx.  De  Heeren  van  Oostmalle.  26. 
1921.    2.  —   P.  J.   Goetschalckx.   De  Heeren  van   Oostmalle 
(Vervolg;.l.  * 

F.  DoNNET.     Une     tentative    de    vente    de    la    Seigneurie    de 
Turnbout  en  1743.  14. 

A.  Verheyen.  Wezel-  bof.  35. 

1921.  3-4.  —  L.  Stroobant.  Les  Sires  de  Ryckevorsel.  1. 

31.  —  Tijdschrift  voor  Nederlandsche  Taal- 
en  Letterkunde.  XL,  1921. 

G.  Neckei..  Zur  Lebre  von  den  germaniscben  Synkopen.  233. 
J.  F.  M.  Sterck.  Tessalica   246. 

C.  B.  VAN  Haeringen.  Sporen  van  Fries  buiten  Friesland.  269. 
C.  G.  N.  DE  VooYS.  Twee  mystieke  traktaatjes  uit  de  eerste  belft 

van  de  xiv*=  eeiuv.  301. 
C.  Bake.  Huygens  en  de  Groote  Zaal.  310. 


PÉIUODIQIJES  389 

32.  —  Dietsche  Warande  en  Belfort.  II,  1921 

St.  De  Ci.ippelk.  De  Hamlet  fij,'uur.  141. 

JuL.  Peusijn    Dante  in  de  Nederlandsche  letterkunde.  269. 

Jos.  Mansion.  Na  het  conji;res  te  Mechelen.  (Plet  spellingsvraag- 
stuk.)  310. 

J.  Van  MiEiir.o.  XJitde  Geschiedenis  onzer  Middeleeuwsche  letter- 
kunde. 4S0,  622. 

Edm.  ItuHBENS.  De  roi  van  Edward  Ducpétiaux  in  de  omweuteling 
van  1830.  555. 

33.  —  Philologische  'Wochenschrift,  1921. 
E.  Orth.  Euripideum.  1052. 

J.  SiTZLEK.  Zn  griechischen  Lyrikern  und  Tlieokrit.  1053. 
A.  Zlm.merman.  Zum  lateinischen  Gôtterbeinamen   Sispes  bezw. 

Sospes.  1056. 
J.  SiTZLER.  Zu  Herodot.  1076. 

M.  MuHi..  Isokrates  und  die  Volkerrechtsidee.  1078, 
K.  WiTTE.  Horazens   soehzehnte  Epode  und  Yorgils   Bucolica. 

1095. 
R.  Samse.  Zu  Lukan  III.  284,  288,  1125. 
K.  KuNST.  Der  Oidipusmythos.  1149. 
R.  Stube.  Heiszt  fleve  «  vvichern  »  ?  1171. 
Th.  Grienberger.  Codanovia.  1198. 
Fr.  Xetomtzky.   Das   Festland  von   der  Atlantisinsel  Platons* 

1221. 
K.  Lkhmann-H.\rtleben.   Die  Hohlenprozession  von  Acharaka. 

1245. 

34.  —  Zeitschrift  fur  deutschen  Altertum  und  deutsche 
Literatur.  LIX.   1921-1922 

J.   Schatz.   Eine    Reinibibel    des    12-jabrliunderts.  Xeue   bruch- 

stiicke  des  sog.  Mittelfrankisclien  legendars.  1. 
P.  Hagen.  Das  bucb  von  der  Xaebfolge  Christi  und  Tbonias  à 

Kempis.  23. 
R.  O.  ^Ikver.  Die  (^uellen  des  Borteu.  36. 
E.  ScHRoDKK.  Zum  text  der  Warnung.  46. 
—  Meister  Renausz.  47. 

— -  Sprichwort.  48. 

H.  Sperber.  Ein  gesetz  der  bedeutung.sentwiekelung    49. 

Anhang   :    A  us   dem    gebiet    der    belagej'ungsteehnik    stani- 
mende  ausdriicke.  61. 
J.  Petersen.   Aufluhrungen    und  biilineni)laii  des  iiltern   Frank- 
furtPi-  pnssionsspiel.  83. 


390  PÉRIODIQUES 

A.   BiENER.    Zur  méthode   der    untersuchuugen    ûber    deutsche 

wortstellungen.  127. 
R   Hknning.  Auf  alten  colonistenwegen.  145. 

E.  ScHRODKR.  Der  frauen  Turnei.  160. 

—  Fragment  eiues  mhd.  prosaromans  aus  dem  anl'ang 

des  13-jalirhunderts.  161. 
K.  ScHiFFMANN.  Die  liandschrift  des  Linzer  Entechrist.  163. 

35    —  Historische  Zeitschrift.  CXXV,   1921. 
L.  V.  Sybel.  Eutwickelungsgeschichte  der  christlicheu  Autike.  1 . 
A.  Frus.  Die  Aufhelning  des  Artikels  V  des  Prager  Friedens.  45. 
W.  Lenel.  Zur  Geschichte  Venedigs.  65. 
M.  Laubert.  Die  Sendung  des  Gnesener  Erzbiscliofs  v.  Przyluski 

nach  Berlin  im  April  1846.  70. 
R.  Herzog.  Nikias  und  Xenophon   von    Kos.  Zwei  Character- 

kôpfe  aus  der  griecliisch-romisclieu  Geschichte.  189. 

F.  Meinecke.  Drei  Generationen  deutscher  Gelehrtenpolitik.  248. 

36.  —  Zeitschrift  fur   Romanische  Philologie,   XIjI,    1921. 

Angei.a  Hàmki,.  Der  Humor  bei  José  de  Esprouceda.  389. 
Stefax  Hofer.  Beitrage  zu  Kristian's  Werke.  4089. 
C.  Dicui.ESCU.  Altgerm.  Bestandteile  im  Rumanischen.  420, 
J.  Briich.  Die  Entwickelung  von  -us,  -um,  im  Volksiatein,  429. 
Ion.  D.  Ticèloîn.  Zum  Rumanischen.  435,  588. 

G.  Blaist.  Bigre.  447. 

—  Met  und  Steinmetz.  450. 
Adoi.f  Koi.sen.  Altprovenzalisches.  538. 

W.  MeyerLubke.  Beitrage  zur  romanischen  Laut-  und  Formen- 

lehre.  555. 
Kari,  Strecker.  Ein  neuer  Dungal?  566. 
J.  BrIich.  Zur  Entwickelung  der  betonten  Vokaleim  Volksiatein. 

574. 

—  Etymologien.  582. 

M.  L.  Wagner.  Zu  Rum.  fenwie  «  Frau,  Gattin  »,  586. 
Vie.  Garcia  de  Diego.  Etymologiae  hispanae  notae.  587. 
G.  Baist.  Esligier.  591. 

—  Falca.  592. 

—  Die  Halle.  593. 

O.  ScHULTz-GoRA.  Zur  Pastorela  de  Gui  d'Uisel  Uautrier  ciwiil- 
gaua.  594. 


CHRONIQUE 


Association  des  Arcliivistes,  Bibliothécaires  et  Conservateurs 

de  Musées. 

Séances  de  février  1922,  à  Bruxelles. 


Section  des  Archives.  —  Dimanche  5  février. 

La  séance  est  ouverte  à  10  12  heures,  aux  Archives  générales. 
Présents  :  13  membres  et  3  invités. 

M.  Hansay,  président,  rend  hommage  aux  membres  disparus. 

Le  Bureau  est  ensuite  renouvelé  ;  sont  nommés  :  président, 
M.  Brouwers,  vice-président,  M.  d'Hoop  (pour  2  ans);  vice- 
président,  M.  Dierickx;  secrétaire,  M.  Cam.  ïihon  (pour  1  an). 
M.  Brouwers  étant  absent,  M.  d'Hoop  prend  la  présidence. 

M.  Vannérus  lit  une  lettre  de  M.  Fairon  (Liège  ,  au  sujet  du 
nouveau  barème  de  traitements  ;  tont  en  réservant  une  discussion 
ultérieure,  l'assemblée  vote  des  remerciements  aux  archivistes 
dont  le  dévouement  a  amené  l'adoption  de  ce  barème. 

M.  VaNiNékus,  revenant  sur  une  question  déjà  traitée  par  lui 
à  la  réunion  du  14  février  1909  et  au  Congrès  international  des 
Archivistes  et  Bibliothécaires  de  1910,  parle  de  la  conservation 
des  anciens  registres  paroissiaux  et  tout  spécialement  des  doubles 
originaux  de  ces  reg-istres  (177S  à  1796).  Il  fait  reprendre  par 
l'assemblée  les  vœux  qu'il  a  présentés  au  Congrès  de  1910.  (Voir 
Actes,  p   660). 

Le  Bureau  est  chargé  de  préparer  la  réalisation  de  ces  va-ux,  et 
notamment  le  transfert  aux  Archives  de  l'Etat  des  doubles  origi- 
naux de  1778  à  1790.  actuellement  conservés  au  greffe  des 
tribunaux. 

M.  Nélis  parle  de  la  guerre  et  les  archives  ;  pertes  en  Belgique 
et  dans  le  Nord  de  la  France.  Archives  de  guerre  à  T Etranger. 
Histoire  économique  de  la  guerre  et  l'entreprise  de  M.   Shotwell. 


392  CHRONIQUE 

La  guerre  a  amené  la  destruction  de  nombreuses  archives  en 
Belgique  et  dans  le  Nord  de  la  France.  D'autre  part,  la  guerre  a 
accumulé  les  documents  et  a  provoqué  l'éclosion  de  toute  une 
littérature.  Dans  presque  tous  les  pays  des  organismes  ont  été 
créés  en  vue  de  réunir  ces  souvenirs  M.  Xélis  expose  ce  qui  s'est 
fait  dans  ce  domaine  en  France,  en  Italie  en  Angleterre,  en 
Allemagne,  aux  Etats-Unis,  au  Canada  et  en  Australie 

Enfin  l'orateur  retrace  l'activité  de  la  3''  division  de  l'Institut 
Carnegie  de  New-York,  dirigée  par  M.  ShotAvell,  et  (jui  a  entre- 
pris de  faire  l'histoire  économique  et  sociale  de  la  guerre.  Il  a 
amené  la  coustitution  en  Belgique  d'un  comité  auxiliaire  sous  la 
présidence  de  M.  Pirenne;  des  comités  analogues  existent  aussi 
en  France,  en  Angleterre,  et  ailleurs . 

M"''  NicoDÈME  expose  les  progrès  réalisés  dans  le  moulage  des 
sceaux.  Le  moulage  des  sceaux  ne  date  que  de  la  Révolution  fran- 
çaise ;  depuis  lors,  de  nombreux  progrès  ont  été  réalisés.  Une 
collection  d'empreintes  exposées  dans  la  salle  montre  la  valeur 
des  divers  procédés  ;  elle  prouve  que  les  Archives  générales  du 
Royaume  peuvent  à  cet  égard  rivaliser  avec  tout  autre  établisse- 
ment similaire 


Section  des  Bibliothécaires.  —  Dimanche  5  février. 

La  séance  est  ouverte  à  10  1/2  heures,  à  la  Bibliothèque  royale 
(Section  des  Manuscrits),  sous  la  présidence  de  M.  le  Chanoine 
Van  Wafelghem.  Présents  :  18  membres. 

M.  Tourneur  adresse  à  M.  O.  Grojean,  (|ui  a  quitté  la  Biblio- 
thèque royale,  quelques  paroles  d'amical  hommage  auxquelles 
s'associe  l'unanimité  de  l'assistance. 

M.  Verlant  parle  de  l'instruction  que  reçoivent  les  bibliothé^ 
caires  aux  Etats-Unis.  D'ai)rès  les  renseignements  nombreux  et 
précis,  extraits  du  volume  récent  de  Friedel  {Training  for  libra- 
rianship  New-York,  Lipi)incott,  1921,  in-8°),  on  constate  combien 
les  Américains  sont  soucieux  d'avoir  des  bibliothécaires  bien 
informés  de  toutes  choses,  possédant  une  instruction  générale 
variée  et  une  éducation  professionnelle  orientée  intelligemment. 

Un  échange  de  vues  amené  par  cette  communication  met  en 
lumière  le  fait  que  les  bibliothécaires  anglo-saxons  se  préoccupent 
attenLivemeiit  des  (juestions  actuelles. 

M.V.vuTHiER  retrace  l'activité  de  la  Rivista  de  archioos,  biblio- 
tecas  y  inuseos  de  Madrid.  Le  plan  de  cette  publication  est 
analysé  en  détail  L'Association  trouverait  sans  doute  dans  la 
revue  espagnole  d'utiles  indications  pour  le  périodique  qu'elle 
médite  de  faire  parai tre 


CHRONIQUE  393 

M.  ViNCKXT  analyse  et  discute  deux  douzaines  de  bibliographies 
récentes  que  les  bibliothécaires  auront  a^vantage  à  avoir  con- 
stamment sous  la  main 

M.  Hacks  ne  veut  pas  remettre  en  (jucstion  le  principe  de  la 
clusai  fient  ion  décimiile,  mais  montrer  avec  quelle  légèi'eté  se  forme 
l'opinion  des  «  antidécimalistes  »    les  plus  passionnés. 

Dans  la  revue  Ilet  Boc'k{l5  octobre  1921  )se  lit  cette  déclaration  : 
«  C'est  une  chose  jugée  que  pour  les  grandes  bibliothèques  srientifi- 
que-^i,  hi  classification  décimale  <tst  tout  à  fait  inutilisable  ". 
L'origine  de  cette  assertion  est  une  étude  de  M.  Hanson,  de 
Chicago  {Library  Journal,  13  février  1921).  où  il  n'est  apporté 
pour  condamner  le  système  décimal  d'autres  arguments 
que  des  considérations  émises  par  Karl  Dziatzko  en  1897. 
{Die  moderncn  Bestrebungen  einer  Generalkatalogicsierung , 
^  Samndung-  Bibliotheksivissanschaftlicher  Arbeiten,  fasc.  11  . 

Les  critiques  de  Dziatzko  ont  un  caractère  tout  théorique,  ({ui 
empêche  de  leur  accorder  la  moindre  valeur. 

L'assemblée  adopte  enfin  deux  motions  :  la  première,  souhaitant 
de  voir  sui)primer,  comme  il  le  fut  jadis,  et  pour  les  raisons  qui 
ont  alors  prévalu,  le  Conseil  de  la  Bibliolhè([ue  royîile,  et  la 
seconde,  exprimant  le  regret  que  dans  l'organisation  récente  des 
bibliothèques  publiques,  il  n'ait  pas  été  fait  appel  au  concours  de 
l'Association,  (jui  groupe  les  spécialistes  des  principales  biblio- 
thèques du  pays. 

'Section  des  Conservateurs   de    Musées.     —   Samedi  4  février. 

La  séance  est  ouverte  à  2  heures  aux  Musées  Royaux  du 
Cinquantenaire,  sous  la  présidence  de  M.  le  baron  de  Loë. 
Présents  :  9  membres 

Le  mandat  des  membres  du  bureau  est  prorogé  ;  M.  Van  den 
Ven,  secrétaire,  ayant  quitté  les  Musées,  est  remplacé  par 
M.  Macoii'. 

La  section  décide  de  présenter  une  série  de  nouveaux  membres 
à  l'assemblée  générale.  11  est  décidé  également  de  proposer  l'ad- 
mission de  tous  les  conservateurs  de  Musées  à  caractère  scien- 
tifique. 

M.  i,E  B.VKox  Dii  Loi:  rapi)elle  qu'en  1914,  dans  une  assemblée 
générale  tenue  à  Tournai,  le  titre  suivant  avait  été  adopté  : 
Association  des  Conservateurs  d'Archives,  de  Bibliothèques  et  de 
Musées.  La  section  demandera  à  l'Assemblée  générale  de 
reprendre  ce  titre  i)Our  l'Association. 

La  section  propose  d'inviter  l'assemblée  générale  à  constater 
avec  satisfaction  ce  qui  a  été  décidé  pour  le  barème  des  .Archi- 


394  CHRONIQUE 

vistes  et  Bibliothécaires,  et  à  demander  que  les  Musées  de  l'Etat, 
dépendant  de  la  direction  des  Beaux- Arts,  soient  mis  sur  le  même 
pied. 

La  section  émet  ensuite  le  vœu  de  voir  ressusciter  le  plus  tôt 
possible  le  Bulletin  des  Musées  Royaux,  le  seul  lien  entre  les 
Musées  et  le  Public.  Il  y  aurait  lieu  de  faire  paraître  un  numéro 
unique  destiné  à  clôturer  l'exercice  1914,  interrompu  par  la 
guerre,  et  à  annoncer  la  reprise  de  la  publication  du  Bulletin  sous 
un  nouveau  format  imitant  celui  adopté  par  les  Musées 
Américains. 

La  séance  est  levée  à  4  1/2  heures. 

Assemblée  générale.  — -  Dimanche  5  février. 

La  séance  est  ouverte  à  2  1,2  heures  au  Cabinet  des  manuscrits 
de  la  Bibliothèque  Royale,  sous  la  présidence  de  M.  le  Chanoine 
E..  Van  Wafelghem,  de  la  section  des  Bibliothécaires.  Sont  pré- 
sents :  32  membres. 

Le  président  souhaite  la  bienvenue  aux  nouveaux  membres  et 
fait  des  vœux  pour  la  prospérité  de  l'Association.  Il  rend  hom- 
mage à  M.  Oscar  Grojean,  appelé  au  Cabinet  du  Ministre  des 
Sciences  et  des  Arts,  et  l'invite  à  rester  membre  de  l'Association. 
M.  Grojean  l'emercie  et  assure  celle-ci  de  son  bienveillant  concours. 

M.  A.  d'Hoop,  trésorier,  fait  rapport  sur  la  situation^financière 
depuis  1914  ;  celle-ci  est  en  tous  points  excellente. 

MM.  Nélis  et  Gaspar  sont  élus  par  acclamation  respectivement 
secrétaire-général  et  trésorier  en  remplacement  de  MM.  Grojean 
€t  d'Hoop. 

M.  TiHON  fait  rapport  sur  la  séance  de  la  Section  des  archi- 
vistes ;  M.  Hacks  sur  celle  des  bibliothécaires,  et  M.  Macoir  sur 
celle  des  Musées. 

Abordant  la  question  des  publications  de  V Association, 
M.  Vincent  préconise  la  publication  de  fascicules  consacrés 
chacun  à  un  seul  sujet  ;  certains  de  ces  fascicules  seraient  de 
vrais  syllabus  facilitant  la  préparation  professionnelle.  Après 
discussion  générale,  une  commission,  composée  du  bureau  de 
l'Association,  et  de  délégués  des  sections,  ^IM  d'Hoop,  Fierens- 
Oevaert.  Macoir  et  Vincent,  est  chargée  d'étudier  la  question  des 
publications. 

La  cotisation  annuelle  est  portée  à  10  francs  à  jjartir  de  l'J22. 

M.  C.  Gaspah  attire  l'attention  de  l'Assemblée  sur  VOeuvre 
nationale  pour  la  reproduction  des  manuscrits  à  miniatures,  créée 
récemment  à  Bruxelles  sous  le  patronage  de  la  Société  des  Biblio- 
philes. Elle  vise  à  i-eprodnire  les  ])Ius  beaux  manuscrits  composés 


CHRONIQUE  395 

€11  Belgique  ou  existant  à  l'étranger  et  d'origine  belge.  La 
première  publication  sera  le  Livre  d'heures  de  S  D.  de  Hennesy 
École  ganto-brugeoise),  par  les  soins  de  M.  .foseph  Destrée. 

M.  Victor  Tourneur  donne  une  conférence  sur  les  :  Archivistes 
et  Bibliothécaires  d'autrefois.  Il  s'en  tient  aux  bibliothécaires  et 
archivistes  au  service  de  nos  anciens  souverains,  qui  dépendaient 
en  fait  des  gouverneurs  généraux  des  Pays-Bas.  à  Bruxelles,  et 
<les  corps  de  juridiction  (Conseil  d'Etat,  Conseil  privé  et  Con- 
seil finance).  Il  va  sans  dire  que  la  bibliothèque  dont  il  s'agit  ici 
n'a  rien  d'un  dépôt  public  (c'est  celle  du  Palais  Royal),  et  que  les 
archives  sont  strictement  fermées  pour  les  éiudits.  Le  sujet, 
éclairé  par  des  textes  d'archives  savoureux,  ne  manque  i)as 
d'apei\-us  nouveaux,  piquants  et  singuliers.  M.  Tourneur,  familier 
depuis  longtemps  avec  les  vieux  parchemins,  fait  revivre  ses 
bibliothécaires  et  ses  archivistes  dans  leur  milieu  naturel,  leurs 
livres,  leurs  manuscrits,  leurs  dossiers  et  leurs  grimoires.  Un 
seul  nom  émerge  de  l'ensemble:  c'est  Viglius,  personnage  poli- 
tique de  valeur  et  homme  de  lettres  ;  les  autres  furent  des  fonc- 
tionnaires zélés  ou  des  personnages  falots 

La  séance  est  levée  à  5  heures. 


British  Muséum. 

Exposition  de  ])apyrus  grecs  et  latins. 

Le  10  mars  1922  s'est  ouverte  au  British  Muséum  une  exposi- 
tion de  papyrus  grecs  et  latins,  donnés  à  cette  institution  par 
lEg-ypt  Exploration  Society  (jadis  Ei^ypt  Exploration  Fund).  La 
section  gréco-romaine  de  cette  société  célèbre  en  ce  moment  son 
25'  anniversaire,  l'n  guide  de  l'exposition  donne  une  introduction 
générale  et  des  descriptions  détaillées  des  pièces  exjiosées.  On 
remartiue.  parmi  cette  riche  série  de  documents  de  tous  genres, 
les  Péans  de  Pindare.  les  poèmes  de  Cercid'as  et  le  texte  de  l'his- 
torien d'Oxvrhvnclius. 


V   Congrès  international  des  Sciences  historiques 
(Bruxelles,  Pâques  1923). 

Donnant  suite  à  la  proposition  qui  leur  était  faite  i)ar  la  Royal 
Historical  Society  et  la  British  Academy,  les  historiens  belges  se 
sont  rcnconti'és  à  Bruxelles,  le  diniaiiclu'  2  avi-il,  i)Our  étudier  la 


396  CHRONIQUE 

possibilité  de  réunir  en  Belgitiue  le  V*  Congrès  international  des 
Sciences  historiques. 

A  l'unanimité,  l'assemblée  a  décidé  de  se  charger  de  la  mise 
sur  pied  de  ce  congrès;  celui-ci  aura  lieu  à  Bruxelles  en  1923, 
pendant  les  vacances  de  Pâques  —  vraisemblablement  au  cours 
de  la  semaine  suivant  Pâques.  U  a  été  constitué  un  comité  orga- 
nisateur, dont  le  bureau  comprend  :  M.  H.  Pirenne.  président; 
le  R.  P.  Delehaye  S.  J.  et  x\I.  F.  Cumont,  vice-présidents; 
M.  G.  Des  Marez,  secrétaire-général;  M.  Ch.  Terlinden,  tréso- 
rier; M.  F.  L.  Ganshof,  secrétaire.  Le  secrétariat  est  provisoire- 
ment fixé  à  Gand,  7,  avenue  Saint-Denis. 

On  sait  que  les  Congrès  précédents  eurent  lieu  à  Paris  (1900), 
Rome  (1903),  Berlin  (1908)  et  Londres  (1913). 

Pour  i)ermettre  de  juger  du  champ  de  leur  activité  scientifique, 
rappelons  quelles  étaient  les  sections  organisées  au  Congrès  de 
Londres  :  Histoire  de  l'Orient  —  Histoire  grecque,  romaine  et 
byzantine  —  Histoire  du  moj'en  âge  —  Histoire  moderne  et  con- 
temporaine —  Histoire  religieuse  et  ecclésiastique  —  Histoire  du 
droit  —  Histoire  économique  —  Histoire  de  la  civilisation  (phi- 
losophie, sciences,  doctrines  i^olitiques  et  sociales) —  Histoire  de 
l'art  et  archéologie  —  Sciences  auxiliaires. 

Il  va  de  soi  que  ce  cadre  n'est  pas  immuable  et  qu'il  est  suscep- 
tible de  subir  des  remaniements.  C'est  ainsi  que  dès  à  présent  la 
création  d'une  section  relative  à  l'histoire  du  monde  pendant  la 
guerre  a  <  té  décidée. 

Nous  tiendrons  régulièrement  nos  lecteurs  au  courant  de  l'état 
d'avancement  des  travaux  préparatoires  au  Congi'ès.  G. 


Aux  Archives  du  département  du  Nord. 

Il  m'a  été  donné,  tout  récemment,  de  passer  une  journée  aux 
Archives  du  Xord,  et  je  me  fais  un  devoir  —  un  agréable  devoir 
—  de  signaler  ici  l'exceptionnelle  activité  que  ne  cesse  de 
déployer  le  conservateur,  M.  Max  Bruchet,  pour  mettre  en  valeur 
son  magnifique  dépôt. 

M.  Bruchet  conç^-oit  ses  travaux  professionnels  d'une  manière 
essentiellement  pratique  et  intelligente,  en  vue  de  mettre  le  plus 
vite  possible  à  la  portée  des  chercheurs  les  moyens  de  découvrir 
rapidement  ce  qui  les  intéresse.  Il  a  compris  que,  pour  cela,  les 
répertoires  numériques,  les  index  idéologiques,  les  tables  ono- 
mastiques,  etc.,  sont  d'une  utilité  primordiale,  et,  depuis  quel- 
ques années,  il  s'est  résolument  attaché  à  la  besogne,  ingrate  et 
fastidieuse,  de  dresser  de  pareils  index  et  répertoires. 


CHHONIQUE  397 

Les  archives  de  la  Chumbre  des  comptes,  tous  les  historiens  le 
savent,  constituent,  avec  les  f'uncls  ecdésiustiques,  le  gi"OS  du 
dépôt  de  Lille.  Ces  archives  n'étaient  encore  que  partiellement 
connues  et  accessibles  et  il  importait  d'en  rendre  la  consultation 
possible  dans  le  plus  bref  délai.  A  cette  fin,  M.  Bruchet  vient  de 
publier  un  «  Répertoire  numérique  »  (i),  et  il  faut  le  louer  sans 
réserve  de  la  manière  dont  il  l'a  conçu  et  réalisé.  Pas  de  phrases, 
mais  des  noms  de  personnes,  des  noms  de  lieux,  des  dates,  des 
numéros,  des  indications  claires  et  concises  quant  au  contenu  des 
fonds.  Le  tout  habilement  disposé  au  point  de  vue  typoj^ra- 
phique.  Le  tout  précis  et  exact. 

Les  inventaires  précédemment  publiés  de  la  Chumbre  des 
comptes  s'arrêtaient  à  la  cote  B-3665;  or.  le  répertoire  de  M.  Bru- 
chet (fascicule  I)  nous  conduit  à  B-2021G;  c'est  assez  dire  quelle 
masse  de  documents  figurent  là.  Et  quelle  mine  merveilleuse  que 
tout  ce  fonds!  Comme  on  se  sent  sollicité  ])ar  tant  de  documents 
dont  si  peu  a  été  tiré  jusqu'à  présent!  Et  comme  on  voit  aussi, 
rien  qu'à  la  lecture  des  rubriques,  combien  il  reste  à  faire  dans  le 
seul  domaine,  par  exemple,  des  institutions  du  moyen  âge!  Voici 
des  comptes  de  domaines,  d'épiers,  de  cours  de  justice,  de  fiefs; 
voici  des  «  cartulaires  »  de  rentes,  cens,  «  gavènes  »,  morte- 
mains,  etc.;  voici  des  comptes  de  fiefs,  de  watergravies,  de  véne- 
ries, d'églises,  d'hôpitaux,  des  monnaies,  des  tonlieux,  des 
aides,  etc.;  voici  des  procès,  des  plans,  des  archives  seigneu 
riales,  des  «  coutumes  »  ;  voici  les  lettres  missines  (fonds  remar- 
quable) ;  voici  encore  des  comptes  de  l'artillerie,  des  lombards, 
des  villes,  de  l'hôtel  des  i)rinces,  etc.  Et  tout  cela,  en  très  grande 
partie,  concernant  nos  provinces.  Puis,  dans  le  2''  fascicule,  un 
tableau  synoptique,  un  index  (tables)  de  185  pages  à  3  colonnes 
de  petit  texte  et  où  les  noms  sont  exactement  orthographiés  et 
soigneusement  identifiés  ;  une  «  concordance  de  l'inventaire 
Bemay  »  (il  s'agit  des  k  sceaux  de  la  Flandre  »),  une  «  concor- 
dance de  l'ancien  tome  i  »  qui  fut  remanié  naguère  ('),  une  «  con 
cordance  de  l'inventaire  Godefroj-  »  '*).  une  «  concordance  de 
l'Etat  général  de  Flandre  »   '). 

En  publiant  ce  «  Répertoire  .),  M.  Bruchet  a,  une  fois  de  plus, 
rendu  à  la  science  historiciue  belge  un  service  éminent    Travail- 


Ci  .\r('liives  dciiaili-iiiciitalcs  du  Nord.  Hcpoiluirc  iiinncricuie.  rédige  par 
MaxBkiciikt,  archiviste  du  departenieiil,  série  B.  Cliaml>re  des  cnmples  de 
Lille.  Fascieule  1  :  liilroduction,  bibliographie,  répertoire  (i..\vii-r)l.')  pages). 
Fascicule  II  :  Taldeau  syiioplitjue,  index  et  concordances  (xxxn-:2o3  pages). 
Lille,  l>aiicl,  19:21,  :2  volumes  iu-i». 

(-')  Cf.  Verkiest,  Les  arcfiives  deparfementnlrs  du  Sonl  à  Lille,  hiiixelies. 
1913. 


398  CHRONIQUE 

leur  acharné,  consciencieux,  averti,  connaissant  son  métier  et 
Texer^'ant  avec  amour,  désintéressement  et  altruisme,  il  peut  être 
cité  comme  un  modèle.  Et  nous  autres,  Belges,  nous  lui  devons 
une  très  vive  reconnaissance. 

M.  Bruchet,  inlassable,  dépense  son  activité  à  de  multiples 
travaux.  Je  signale  notamment  qu'il  a  entrepris  le  classement, 
toujours  différé  par  ses  prédécesseurs,  des  Archives  ecclésias- 
tiques, riches  surtout  de  chartriers  et  de  cartulaires  magnifiques. 
Déjà  le  fonds  de  l'abbaye  d'Anchin  est  ordonné  et  inventorié 
sommairement.  Et  là  aussi  des  mines  inexplorées  appellent  le& 

travailleurs. 

Léo  Yerriest. 


Un  guide  classique  en  Italie. 

C'est  une  heureuse  idée  qua  eue  Miss  Frauces  Ellin  Sabin  de 
donner  aux  voyageurs  en  Italie  loccasion  de  relire  commodément, 
en  parcourant  le  paj's,  les  textes  classiques  qui  s'y  rapportent. 
A  propos  de  chaque  ville  et  de  chaque  site  remarquables  elle 
réunit  les  fragments  d'auteurs  grecs  ou  latins  qui  les  décrivent 
ou  racontent  les  grands  événements  qui  s'y  sont  passés.  Ces 
textes  sont  accompagnés  d'une  traduction  anglaise  en  prose  ou 
en  vers,  judicieusement  choisie  et  contrôlée.  Je  ne  crois  pas  qu'il 
existe  de  recueil  analogue  en  français.  Le  succès  qu'obtiendra 
certainement  celui  de  Miss  Sabin  lui  vaudra  sans  doute  de  trouver 
en  Gaule  des  imitateurs  (Classical  Association  of  places  in  Italy, 
Boston.  Marshall  Jones,  1921,  in-12°,  526  p.). 


Les  traités  de  morale  d'Aristote 

Mgr.  Auguste  Pelzer,  de  la  Bibliothèque  Vaticane,  iiublie  dans 
la  Revue  néo-scolastique  (août  et  nov.  1921)  deux  articles  —  qui 
n'intéresseront  pas  seulement  les  médiévistes  —  sur  les  plus 
anciennes  «  versions  latines  des  ouvrages  de  morale  conservés 
sous  le  nom  d'Aristote  ".  Les  conclusions  de  cette  étude  très 
fouillée,  qui  repose  sur  une  connaissance  étendue  et  précise  des 
manuscrits,  paraissent  définitivement  acquises.  De  la  Morale 
Eudémienne,  sauf  la  partie  qui  lui  est  commune  avec  la  Morale 
à  Xicomaque,  seul  un  fragment  du  livre  Vil  a  été  connu  au 
xni'^  siècle  :  il  est  inséré  dans  le  Liber  de  bona  fortuna  dont  le 
l'édacteur  est  inconnu. 

La  Grande  Morale  a  été  traduite  par  Barthélémy  de  Messine  à  la 
cour  du  roi  Manfred  (1258-12G6).  Le  traité  Des  Vertus  et  des  Vices 


CHRONIQUE  399 

a  eu  pour  traducteur  Robert  Grosseteste,  l'érudit  évê(iue  der 
Lincoln  (12l^5-125!i).  Quant  ù  la  Morale  ù  Niromaque  on  en  trouve 
d'abord  plusieurs  versions  partielles  (livres  II-llI  et  I)  sous  le 
nom  d'Ethica  oetiis  et  d'Ethicn  nova.  Faites  sur  le  grec,  elles  sont 
comi>létées  par  des  traductions  dérivées  de  l'arabe  :  celles  de  la 
paraphrase  d'Averroès  et  de  l'Abrégé  dit  d'Alexandrie;  celles-ci 
ont  pour  auteur  Hermann  l'Allemand,  mort  évèque  d'Astorga, 
qui  les  termina  en  1240  et  en  1243  ou  1244.  Mais  en  même  temps 
s'achevait  ailleurs  une  traduction  complète  et  directe  des  dix 
livres  de  la  Morale  à  Mcomacjue.  C'est  encore  à  Robert  Grosse- 
teste,  et  non  comme  on  l'a  cru  à  Guillaume  de  Moerbeke  ou  à  un 
prétendu  Henri  Kosbien.  que  revient  l'honneur  d'avoir  mené  à 
bonne  fin  cette  œuvre  considérable  entre  1240  et  1243.  L'évêque 
de  Lincoln  compléta  cette  œuvre  en  faisant  passer  en  latin  les 
commentaires  grecs  d'Eustrate  de  Nicée,  de  Michel  d'Ephèse  et 
d'Aspasius,  et  il  intercala  dans  son  propre  texte  de  la  Morale  à 
Xicomaque  des  annotations  personnelles  et  en  couvrit  les  marges 
dé  son  manuscrit.  Une  partie  de  ces  éclaircissements  est  emprun. 
tée  à  Surdas  et  les  indications  précises  que  fournit  à  cet  égard 
Mgr.  Pelzer  (p.  393)  viendront  à  point  aux  futurs  éditeurs  du 
grand  lexicographe  byzantin. 


Rome.  —  Bibliothèque  Vaticane. 

La  Bibliothèque  Vaticane  vient  de  s'enrichir  d'une  importante 
collection  de  manuscrits  et  d'incunables  ;  c'est  l'accroissement  le 
plus  considérable  qu'elle  ait  obtenu  depuis  l'acqui-sition  de  la 
Barberina.  11  s'agit  de  la  bibliothèque  formée  dans  la  première 
moitié  du  xix^  siècle  par  Giau  Francesco  de  Rossi  qui,  ayant 
épousé  Louise  Charlotte  de  Bourbon,  dont  il  avait  commencé  par 
être  le  majordome,  consacra  une  i)artie  des  revenus  de  sa  noble 
épouse  à  satisfaire  sa  passion  pour  les  beaux  livres.  II  acheta 
notamment  au  Collège  Capranica  la  précieuse  collection  qu'avait 
léguée  à  celui-ci  en  1458  le  cardinal  de  ce  nom.  Lorsque  Rossi 
mourut  en  1854  sa  bibliothèque  fut  donnée  par  sa  veuve  aux 
Jésuites  et  après  1870  ceux-ci  la  transportèrent  à  'Vienne.  Elle  est 
enfin  revenue  dans  la  ville  où  elle  a  été  formée  et  sera  désormais 
au  Vatican  accessible  à  tous  les  érudits.  11  suffira,  pour  donner 
quehjue  idée  de  sa  valeur,  de  rappeler  qu'elle  comprend  une 
cinquantaine  de  mss.  grecs,  plus  de  onze  cents  mss.  latins,  dont 
dont  beaucoup  sont  ornés  de  miniatures,  et  deux  mille  cinq  cents 
incunables.   Le   préfet   de   la  Vaticane,    Mgr.  Mercati,  avec  un 


-iOO  CHRONIQUE 

empressement  libéral,  a  aussitôt  pris  les  mesures  nécessaires 
pour  que  ce  trésor  fût  mis  à  la  disi)Osition  des  savants.  Il  existe 
des  catalogues  imprimés  des  mss.  grecs  et  des  mss.  à  miniatures 
et  un  inventaire  soigné  des  mss.  latins. 


Le  vieux  calendrier  romain. 

Des  fouilles  exécutées  par  M.  Gioacchino  Mancini  sur  la  i)lage 
d'Antium  lui  firent  retrouver  un  petit  édifice,  dont  le  crépi, 
réduit  en  menus  fragn)ents.  était  couvert  de  caractères  latins.  Il 
recueillit  ainsi  trois  cents  morceaux  de  ce  cju'un  examen  plus 
attentif  montra  avoir  été  un  calendrier  accompagné  de  fastes 
consulaires  M  is  ce  qui  donna  à  cette  découverte  une  importance 
singulièi-e,  ce  fut  la  constatation  que  ce  calendrier  romain  était 
le  plus  ancien  que  l'on  connût,  et  antérieur  à  la  réforme  de  Jules 
César  (46  av.  J.  C  ',  c'est-à-dire  qu'il  est  essentiellement  celui 
dont  on  attribuait  la  j^aternité  au  vieux  roi  Numa  II  était  formé 
de  355  jours  répartis  en  douze  mois  de  29  et  de  31  jours  et  l'on 
introduisait  tous  les  deux  ans  un  treizième  mois  (Mercedo/iiiis) 
jîour  rétablir  un  accord  approximatif  avec  l'année  solaire.  Ce 
mois  venait  se  i)lacer  le  23  février  au  moment  où,  dans  le  calen- 
drier Julien,  on  intercale  le  jour  supplémentaire  des  années 
bissextiles  (bissextus  mite  Kalendas  Mavtias).  Sur  la  paroi  de 
l'édifice  ruiné,  les  mois  étaient  disposés  en  colonnes  parallèles 
et  à  certains  jours  sont  indiquées  des  fêtes  qui  n'apparaissent 
pas  dans  les  calendriers  postérieurs.  Les  fastes,  où  les  noms  des 
consuls  sont  notés  en  noir  et  ceux  des  censeurs  en  rouge,  couvrent 
la  période  qai  s'étend  de  113  à  S2  av.  J.  C  ,  et  ils  comblent  une 
lacune  des  Fastes  Capitolins.  Calendrier  et  Fastes  viennent  d'être 
publiés  avec  un  commentaire  plein  d'érudition  par  M.  Mancini 
{Calendario  e  Fasti  consolari  e  censorii.  Rome,  Tipogr.  Accad 
Lincei.  1921) 


Alfred  Gauchie 

(24  octobre  ISGO  —   10  février  1922) 

Le  10  février,  le  clianoine  Alfred  Caucliie,  professeur  à  ITni- 
versité  de  Louvain  et  directeur  de  l'Institut  historique  belge  à 
Rome,  est  mort  dans  cette  dernière  ville,  victime  d'un  accident 
de  voirie.  Renversé,  au  Largo  Argentina,  par  un  attelage,  il  eut 
le  crâne  fracturé  et  mourut  le  lendemain  matin  à  l'hôpital  du 
Saint-Esprit. 


CHRONIQUE  401 

Cette  mort  tragique  a  consterné  tous  les  amis  du  défunt,  et, 
comme  le  disait  un  de  ses  disciples,  le  R.  P.  E.  de  Moreau,  elle  a 
l'ait  verser  des  larmes  à  des  yeux  (|ui,  depuis  longtemps,  n'étaient 
plus  habitués  à  pleurer.  C'est  que  le  chanoine  Gauchie,  savant 
de  grande  valeur  et  initiateur  intrépide,  avait  su  conquérir  le 
res])ect,  sinon  l'affection  de  tous  par  la  loj'auté  de  ses  efforts 
scientifiques,  sa  bonne  humeur,  sa  jovialité  et  son  amitié  franche 
et  durable.  Chose  rare  poui-  un  homme  d'études,  il  était  devenu 
pojjulaire  dans  tous  les  milieux  où  l'on  avait  vu  apparaître  sa 
l'obuste  figure,  où  l'on  avait  entendu  sa  grosse  voix  un  peu 
pâteuse  et  où  avaient  retenti  ses  éclats  de  rire  larges  et  sonores. 
Il  ne  fallait  l'avoir  frécjuenté  que  peu  de  temps  pour  reconnaître 
de  suite  en  lui  l'homme  dont  l'uniciue  but  était  la  recherche  et 
l'affii'mation  de  la  véi'ité.  C'est  là  ce  qui  explique  que  le  chanoine 
Cauchie,  prêtre  et  professeur  à  l'Université  catholique,  était 
honoré  de  l'estime  de  tous  ceux  de  ses  collègues  qui  ne  parta- 
geaient point  ses  croyances  ou  différaient  de  lui  par  leurs  opi- 
nions philosophiques.  Tous  l'aimaient  parce  <iue  tous  avaient  fini 
par  découvrir  en  lui  un  cœur  d'or,  un  ami  sûr  et  fidèle.  Enfin,  sa 
loyauté  scientifique  allait  de  pair  avec  la  sainteté  de  sa  vie  de 
prêtre,  et  cette  sincérité  de  ses  convictions  sacei'dotales  n'en 
imposait  pas  moins  que  son  culte  désintéressé  de  la  vérité. 


Dans  un  organe  comme  la  Revue  beli^e  de  philologie  et  d'hisloirc. 
c'est  sui'tout  la  place  (ju'Alfred  Cauchie  a  i)rise  dans  le  mouve- 
ment historique  national  <iui  doit  être  mise  en  lumière.  Xous  ne 
parlerons  donc  point  du  professeur  et  du  rôle  particulièrement 
actif  et  influent  qu'il  a  joué  à  l'Université  de  Louvain,  si  ce  n'est 
pour  autant  ([ue  ce  rôle  est  de  nature  à  mieux  faire  comprendre 
comment  le  regretté  défunt  contribua  à  la  marche  progressive  de 
la  science  historique  en  Eelgiciue. 

Comme  historien,  Alfred  Cauchie  occupa  en  Belgique  une  place 
à  part.  iSans  vouloir  trop  systématiser,  nous  croyons  cependant 
pouvoir  dire  que  l'Université  de  Gand  produisit  surtout  des  tra* 
vaux  d'histoire  constitutionnelle  et  écoiiomi<jue.  celle  de  Bruxelles 
des  travaux  d'histoire  du  droit  et  d'histoire  ])oliti(iue,  celle  de 
Liège  des  études  consacrées  principalement  à  l'histoire  de  l'an- 
cienne principauté  de  ce  nom.  A  Louvain.  Alfred  Cauchie  s'occupa 
surtout  et  engagea  ses  élèves  à  s'occuper  d'histoire  ecclésiastiiiue 
et  des  rapports  entre  l'Église  et  l'État. 

Il  y  fut  amené  tout  naturellement  par  son  enseignement.  Pro- 
fessant il  la  fois  à  la  Faculté  de  Philosophie  et  Lettres  et  à  la 
Faculté  de  Tliéologie.  il  avait  une  charge  fort  lourde.  11  avait 


•26 


402  CHRONIQUE 

succécli'  au  fhauoine  .Tungraaun  {-f  1895)  comme  professeur  (l'his- 
toire ecclésiastique,  il  avait  créé  lui  même  un  cours  d'  «  Introduc- 
tion à  l'histoire  ecclésiastique  »  —  véritable  cours  d'encyclopédie 
—  et  il  avait  transformé  en  un  vaste  organisme  triparti  te  l'ancien 
«  Séminaire  d'histoire  ecclésiastique  »  de  Jungmann  (t),  destiné 
surtout  à  familiariser  avec  la  critique  des  sources  les  étudiants 
en  droit  canon. 

Esprit  d'ordre  et  de  systématisation,  le  chanoine  Gauchie  avait, 
dès  le  dél)ut,  évité  l'éparpillement  de  forces  que  semblait  devoir 
produire  le  nombre  des  cours  dont  il  était  titulaire  :  Exercices 
critiques  sur  l'histoire,  critique  historique  et  application  à  une 
période  de  l'histoire,  institvitions  du  moyen  âge,  histoire  de 
l'Église,  introduction  à  l'histoire  ecclésiastique.  11  ne  laissa 
point  subsister  de  cloison  étanche  entre  son  enseignement  à  la 
Faculté  de  Théologie  et  celui  qu'il  donnait  en  Philosophie  et 
Lettres,  et,  concentrant  ses  efforts  sur  les  cours  pratiques,  il  fit 
du  «  Séminaire  historique  »  —  une  de  ses  principales  créations  — 
le  laboratoire  commun  où  étudiants  ecclésiastiques  et  étudiants 
laïques  travailleraient  sous  une  même  direction  et  se  coudoie- 
raient dans  une  camaraderie  très  utile  pour  leur  information 
réciproque. 

Ce  «  Séminaire  histoi-ique  »,  créé  en  1890  sur  le  modèle  des 
cours  })rati(|ues  inaugurés  à  Louvain  par  Jean  Moeller  et  intro- 
duits à  Liège  par  Godefroid  Kurth,  présente  ceci  de  particulier  : 
il  compoi-te  trois  sections  :  les  Conférences  historigup.s,  les  Exer- 
cices critiques  sur  les  sources,  le  Cours  pratique  d'institutions 
médiévales.  Les  «  Conférences  historiques  »  ont  surtout  pour  but 
d'initier  la  généralité  des  étudiants  en  théologie  au  travail  per- 
sonne], sans  y  consacrer  le  temps  qu'exigent  les  travaux  cri- 
tiques sur  les  sources;  elles  concourent  à  parfaire  la  formation 
historique  des  élèves  pour  lesquels  l'histoire  n'est  qu'une  branche 
auxiliaire.  Les  «  Kxercices  critiques  sur  les  sources  »  —  la  sec- 
tion du  Séminaire  historique  (jui  continue  en  réalité  le  Séminaii'e 
de  Jungmann  -  groupent  les  étudiants  en  droit  canon  et  les  étu- 
diants laïques  qui  i)réfèrentla  matière  de  l'histoire  moderne  pour 
leurs  travaux  personnels.  On  s'y  applique  à  toutes  les  o})érations 
du  travail  histori(iue  :  heui"isti(iue,  criti(|ue,  construction  et  .syn- 
thèse, alors  <iue  les  «  Conférences  historicjues  »  apprennent  sur 
tout  à  utiliser  et  à  critiquer  les  auteurs  ou,  si  l'on  veut,  les  travaux 
modernes.  Enfin,  le  «  Cours  pratique  des  institutions  médiévales  » 
est  destiné  à  donner  aux  étudiants  de  la  Faculté  de  Philosophie  et 


(1)  Voir,  sur    ce    cours,    Hoiuniatjc    à    Godefroid    Kurth    à    l'occasion   du 
\  A' V""  anriiversdirr  de  ht  fmdalio»  de  soji  cours  pratupie  d'irisloire,  p.  111. 


CHRONIQUE  403 

Lettres  la  iiièine  fonnation  (jne  reeoivcut,  dans  la  seconde  sec- 
lion,  les  étudiants  en  droit  canon  Ce  (jui  j)lus  est,  les  membres 
d'une  section  ])euvent  suivre  les  travaux  de  l'auti-e.  et  cette 
interdépendance  des  trois  sections  du  «  Séminaire  historique  »  (*) 
a  comme  conséquence  de  donner  aux  étudiants  laùiues  se  prépa- 
rant au  doctorat  des  notions  élémentaires,  sinon  étendues,  de 
droit  canon  et  d'institutions  ecclésiasti(|ues.  C'est  là  un  avantage 
«jue  seul  le  «  Séminaire  lnstoi"i([ue  n  de  Louvain  est  en  état  de 
fournir  aux  aspirants  historiens. 

Ce  travail  en  commun  d'étudiants  ecclésia$ti(|ues  et  laïques 
explique,  tout  autant  (jue  l'enseignement  principal  d'Alfred 
Cauchic,  })Oui'([Uoi  le  ((  Séminaire  »  de  Louvain  a,  dans  l'ensem- 
ble, ])roduit  de  nombreux  travaux  d'histoire  ecclésiastique,  et 
])our(iuoi  nous  nous  sommes  cru  autorisé  à  dire  que  c'est  là  ce 
([ui  caractérise  l'action  d'Alfred  Cauchie  dans  l'ensemble  de  la 
])roduction  historique  des  universités  belges. 


Ce  serait  cependant  sous-évaluer  considérablement  le  rôle 
d'Alfred  Cauchie  comme  directeur  du  «  Séminaire  historique  »  de 
Louvain  que  de  restreindre  le  tableau  de  son  activité  à  l'hisloire 
ecclésiasti(iue  Ce  (jui  caractérisait,  en  effet,  le  regretté  défunt, 
c'était  l'universalité  de  ses  connaissances,  son  esprit  progressif 
et  ses  merveilleuses  qualités  d'assimilation  et  d'adaptation. 

Dès  lors,  Alfred  Cauchie  a  familiarisé  ses  étudiants  avec 
l'histoire  des  pays  les  plus  divers  et  les  a  lancés  dans  l'étude  des 
branches  les  plus  variées  de  l'histoire  spéciale.  Si  l'histoire 
ecclésiastique  comme  telle  avait  ses  préférences,  il  ne  négligeait 
point  l'histoire  économique,  l'histoire  des  institutions,  l'histoire 
des  sciences  et  des  lettres,  et  même  il  a  dirigé  avec  une  remar- 
(juable  compétence  des  études  sur  l'histoire  de  l'art  (*). 

C'est  cette  variété  de  sujets,  au  milieu  descjucls  il  se  mouvait 
à  l'aise,  qui  mérite  d'être  particulièrement  signalée  comme  un 
des  grands  mérites  du  professeur  de  Louvain.  Qu'on  nous  per- 
mette dès  lors  d'aligner  ici,  à  titre  d'exemple,  l'objet  de  quelques 


(1)  Voir  ;'i  ce  siijcl  yHoinntdi/e  l'i  (lodcfroid  Kiirth,  déjà  cite,  p.  13.^  svv.  ; 
A.  (-AiCHiE,  The  teachiny  nf  Histvri/  ut  l/ie  Univcrsiti^  itf  Louvain,  dans  Tfie 
('.atltulic  Univeisity  bulletin  (\Vashiii{îlon),  t.  XIH,  1907,  p.  516  svv.  Voir  aussi 
la  plaquette  Le  Séminaire  (iist(»i(iue,  Louvain,  Cli.  Peelers,  IflOiî. 

(■-)  Voir  la  dissertai  ion  de  R.  Lemaikk,  Len  ori(fines  du  style  yot/ii(/ite  en 
liialiant.T.  I.  L'arcliitertiife  rotnane.  {Vii6L-\cvi\(}  li  du  "  Recueil  «les  travaux 
pultlifs  par  les  membres  des  Couloreiices  d'histoire  et  di-  philologie  ».) 
itruxelies,  IDOG. 


404  CHRONIQUE 

■études  faites  au  «  Séminaire  historique  »  de  1902  à  19 li"  :  on  sera 
étonné  de  constater  Textrênie  variété  et  la  richesse  des  études 
produites  sous  la  direction  d'Alfred  Gauchie  ('). 

Signalons  d'abord,  pour  les  «  Conférences  historiciues  »,  l'étude 
de  i.  épotjue  de  la  Réforme,  qui  provoqua  des  travaux  sur  la 
théorie  de  la  justification  chez  Luther,  Tetzel  et  la  prédication 
des  indulgences,  Luther  et  la  Bible,  Mélanchton,  la  confession 
d'Augsbourg.  Bossuet  et  son  livre  sur  les  variations  protestantes 
{i;)()2-1903).  L'année  suivante,  on  étudie  la  Réforme  catholique 
après  les  troubles  du  Protestantisme,  et  voici  les  études  aux- 
quelles se  livrent  successivement  les  étudiants  :  Michel  Eaius,  la 
théologie  positive  du  Père  Petau,  Saint  Charles  Borromée,  les 
opinions  de  Bellarmin  sur  les  rapports  entre  1  Église  et  l'État,  le 
probabilisme  dans  l'Eglise  catholique,  l'histoire  de  l'Index. 

Yeut-on  savoir  comment  travaille  la  section  du  «  Cours  pra- 
tique des  institutions  médiévales  »  ? 

Voici  les  sujets  traités  en  1904-1905  :  l'hagiographie  mérovin- 
gienne eu  Belgique,  Saint  Jean  Chrj'sostôme  et  son  influence 
dans  le  monde  latin,  les  polémistes  et  la  querelle  des  Investi- 
tures, l'histoire  de  l'abbaye  de  Villers,  les  Cathares,  le  mouve- 
ment franciscain  au  xiir  siècle,  la  littératui'e  franciscaine 
primitive,  les  origines  de  l'Ordre  des  Frère.-- Prêcheurs,  l'Inqui- 
sition, les  corporations  de  îs^amur  aux  xiii"  et  xiv«  siècles,  les 
institutions  charitables  des  Pays-Bas  au  moyen  âge. 

En  1912-191.3,  à  la  section  «  Exercices  pratiques  sur  les  sour- 
ces ».  on  s'attela  à  l'étude  des  questions  suivantes  :  La  situation 
juridique  de  l'Église  dans  les  Paj'S-Bas  sous  l'ancien  régime,  la 
propriété  ecclésiastique  et  les  immunités  fiscales,  l'organisation 
de  la  dîme  à  la  fin  de  l'ancien  régime,  la  condition  juridique  des 
ordres  religieux  dans  les  Pays-Bas  à  l'époque  moderne,  le  Murs 
Gallicus  de  Jansénius. 

Le  meilleur  moj-en,  toutefois,  de  se  rendre  compte  de  l'univer- 
salité des  sujets  abordés  par  les  disciples  du  chanoine  Cauchie, 
c'est  de  parcourir  la  liste  des  travaux  publiée  dans  le  «  Recueil 
<ies  travaux  i)ubliés  par  les  membres  des  Conférences  d'histoire 
et  de  philologie  de  l'Univer.sité  de  Louvain  »,  qui  en  est  aujour- 
d'hui à  son  quarante-sixième  fascicule,  et  où  l'histoire  de  France, 
d'Italie.  d'Angleterre,  d'Allemagne  et  d'Amérique  est  représentée 
aussi  bien  que  notre  histoire  nationale. 


0)  Voir  les  «  Rapports  du  Séminaire  historique  »  de  1902-4903  à  191â-i913 
dans  Y  Annuaire  de  l'I'nUersité  calliolique  de  Louvain.  (I.ouvain,  Van  Lintliout, 
pul)li(;ati(>n  annuelle. ) 


CHRONIQIE  405 

L'action  tlu  cluuioine  Cauchie  ne  se  fit  pas  sentii-  seulement  à 
Louvain  même  :  elle  s'étendit  jjIus  loin  et,  partout  où  elle  se 
manifesta,  elle  fut  féconde.  En  lHK8-lSSÎt,  Alfred  Caucliie  avait 
été  envoyé  par  son  évéciue.  Mgr  Du  Kousseaux.  en  Italie  i)()ur 
s'y  livrer  à  des  recherches  aux  Arcliives  vaticanes  et  dans  les 
autres  dépôts  littéraires  de  Ronie. 

Ce  fut,  pour  resi)rit  ouvert  tiu'étail  le  défunt,  une  véritable 
révélation.  Il  comprit  de  suite  (piels  trésors  Rome  et  l'Italie 
recelaient  au  point  de  vue  de  notie  histoire  nationale,  ('e  i)re- 
mier  voyage  fit  d'Alfred  i  auchie  rexi)U)rateur  infatigaljlc  qui 
allait  travailler  désormais  à  reconnaîti-e  et  aussi  faire  reconnaître 
])ar  ses  élèves  les  terrse  incognitœ  des  grands  dépôts  d'archives 
de  l'étranger. 

C'est  ainsi  que  naquit  chez  lui  l'idée  d'obtenir  du  Gouverne- 
ment l'érection  à  Rome  d'un  Institut  historique  belge.  Déjà 
en  1889,  le  regretté  savant  développa  cette  idée  :  elle  ne  fut 
réalisée  qu'en  1902  par  feu  Jules  de  Trooz,  alors  ministre  de 
l'intérieur  et  de  l'Instruction  publique.  Ce  fut  surtout  la  bro- 
chui-e  De  lu  création  d'une  École  bel^fe  à  Rome  (Tournai,  181)6)  qui 
exerça  une  influence  décisive  sur  l'esprit  du  Gouvernement  et 
décida  le  Ministre  à  créer  une  Ecole  belge  à  l'instar  des  autres 
Instituts  nationaux  existant  à  Rome.  Alfred  Cauchie  y  disait, 
entre  autres  (p.  64-()5  :  «  Ou  peut  le  dire  sans  exagération,  Rome 
est  devenue  la  métropole,  la  cajjitale  des  études  historitiues. 
Quelle  utilité  donc  n'y  aurait-il  pas  pour  notre  pays  à  y  députer 
(pielques-uns  des  siens  ?  Il  y  a  là  non  seulement  matière  à  des 
travaux  considérables,  il  y  a  là  un  milieu  scientifique  éminem- 
ment salutaire  au  jeune  historien  (jui,  tout  en  s'adonnant  au  tra- 
vail personnel,  désire  se  préparer  soit  aux  fonctions  d'archiviste, 
soit  à  la  carrière  professorale  dans  l'enseignement  supérieur.  La 
Ik'lgique  ne  peut  donc  rester  étrangère  à  ce  mouvement  inter- 
riational.  Il  y  va  de  ses  intérêts  les  plus  chers.  » 

Kn  mettant  en  relief  la  nécessité  de  l'Institut  liist<)i'i<iue  belge, 
Alfred  Cauchie  pouvait  invoquer  son  expérience  personnelle. 
Chargé  à  diverses  reprises  de  missions  scientifiques  en  Italie, 
sous  les  auspices  de  la  Commission  royale  d'histoire,  il  en  rap- 
porta des  trésors  qui  enrichissent  considérablement  l'histoire  de 
Belgique  :  les  ■<  Archives  farnésiennes  »  de  Najiles  et  de  Parme, 
les  «  Nonciatures  »  au  dépôt  du  Vatican,  les  })apiers  de  Roita- 
.\dorno  et  de  Belgioioso  à  Milan  servirent  de  matière  à  des 
publications  variées  et  inspirèrent  plusieurs  travaux  de  ses 
élèves.  Il  attachait  surtout  de  rimi)ortance  aux  «  Nonciatures  » 
et  un  explorateur  d'archives  américain,  le  professeur  Russel 
Fish,  a  rendu  justice  aux  efforts  du  défunt  en  ce  domaine  en 


406  chroniqt:e 

affirmant  que  ce  sont  les  Belges  (jui  ont  fait  le  i)lus  pour  faire 
connaître  cette  source  capitale  de  l'histoire  moderne  (*). 

Devenu  membre  de  la  Commission  royale  d'iiistoire,  le  chanoine 
€auchie  continua  à  appeler  l'attention  sur  l'importance  des 
recherches  à  entreprendre  dans  les  dépots  d'archives  de  l'étran- 
ger. Le  rap])Oi't  qu'il  soumit  à  ce  sujet  à  la  Commission  est 
remarquable  :  il  coueenie  L'orgunisalion  de  niifisiuns  scientifiques 
en  vue  de  répertoriser  ù  l'étranger  les  documents  diplomatiques 
relatifs  à  Vhistoire  de  Belgique  {-)  et  met  vivement  en  lumière  que, 
<(  si  la  Belgique  doit  regretter  bien  plus  que  les  grands  Etats  de 
ne  pas  posséder  chez  elle  une  partie  considérable  des  sources  de 
son  liistoire  moderne  »,  c'est  pour  elle  une  nécessité  impérieuse 
d'organiser  des  missions  de  recherclie  à  l'étranger. 

Cet  appel  fut  entendu,  et,  on  se  le  rappellera,  des  missions 

furent    oiganisécs    avec,    comme   but,    Rome,    Xaples,    Parme, 

Simancas.  Vienne.  Lille  et  Paris. 

* 
*      * 

Il  ne  nous  appartient  pas  de  signaler  ici  le  rôle  (}ue  le  chanoine 
Cauchie  joua  au  sein  de  la  Commission  royale  d'histoire:  ses 
confrères  s'en  chargeront  dans  les  Bulletins  de  cette  institution 
scientifique.  Mais  nous  ne  sortirons  point  du  cadre  que  nous  nous 
sommes  tracé  en  rai)pelant  la  part  importante  que  le  défunt  a 
prise  aux  divers  congrès  d'histoire,  soit  internationaux  {^),  soit 
nationaux.  C'était  pour  l'homme  éminemment  sociable  et  expansif 
qu'était  Alfied  Cauchie  une  joie  profonde  que  de  prendre  part 
aux  congrès  organisés  par  la  «  Fédération  historique  et  ar(;liéo- 
logique  de  Belgiciue  ».  dont  on  a  repris  la  tradition,  brisée  par 
la  guerre.  11  y  retrouvait  ses  collègues  et  amis  des  autres  univer- 
sités; il  y  revoyait  de  vieilles  connaissances:  il  s'y  distrayait 
dans  les  agapes  fraternelles  et  les  réunions;  il  finissait  toujours 
par  faire  quelques  stations  dans  les  cafés  de  l'endroit,  en  compa- 
gnie de  confrères,  et  il  s'y  livrait  tout  entier,  inter  pocula,  racon- 
tant des  (;  bons  mots  »,  taijuinant  les  na'ifs  ou  les  gens  suscei)tibles. 
instruisant  souvent,  égayant  toujours  tout  le  monde.  Dans  ces 
réunions,  Henri  Pirenne,  (Jodefroid  Kurth  et  .Alfred  Cauchie 
formaient   une   trinité   bien    intéressante    et    lorsque   1  excellent 


(')  Voir   le    Hvr(3  de   Ki  ssKr.i.    Fisii,    Guide  In  Un-  tittderiids   for  Àmcriitin 

llistonj  in  liomari  tind  oUirr  Unliim  (irrhirrs.  W:i,sliiii^l liMI.  (l'uldic.ilion 

de  la  r.;iniej;i(;  Instiliition.) 

(-)   liullciin  de  ht  Cntiimissùw  n>i/(de  d'Iiistoiif,  t.  I.XXIll.  1!H)'(. 

(3)  C'csl  an  ;-$'■  Coii-iPÙs  scieiililiqiic  iiilonialioiial  des  calholitiiies  tenu  ;i 
Bruxelles  en  l,S94-  (|iiAII'red  «lanchie  lit  ("onnaître  les  jinpiers  de  Hoita  Adorn... 
si  importants  puni-  le  rèj^ne  de  Marie- Iliérese. 


CHRONIQUE  407 

Paul  Fre(lei'ic(i  s'y  joij;iiait,  il  ne  fallait  •iuùi-e  attendre  lonj^tenips 
pour  entendre  les  éclats  de  rire  fuser  et  les  exclamations  jaillir. 

Ces  congrès  furent  pour  Alfred  Cauchie  l'occasion  d'appeler 
l'attention  sur  certains  ])i-t)l)lènies  négligés,  de  faire  connaître 
des  sources  ou  des  collections  de  sources,  de  suscitei*  l'iniative 
en  faveur  de  telle  ou  telle  entre])rise  d'imi)ortance  générale. 
Ainsi,  au  Congrès  de  Gand,  en  1907,  il  insista  sur  l'iinpoi-tance 
des  archives  farnésiennes  ;  au  Congrès  de  Liège  de  1010,  il 
rappela  l'utilité  des  archives  privées  de  l'étranger;  au  Congrès 
de  (iand  de  10!.*{  il  exjjosa  l'intérêt  de  l'étude  du  janséuisnie  en 
Iîelgi(|ue.  dans  l'espoir  de  provocjuer  des  travaux  dans  ce 
domaine.  Ici  aussi,  l'univci-salité  des  connaissances  du  défunt  fut 
r«^mar<[uée  en  toutes  occasions,  et  il  se  mt)ntra  toujours  un 
initiateur. 

La  (juestion  de  linveutorisalion  des  petites  archives,  qui 
s'imposa  à  l'attention  des  historiens  quehjues  années  avant  la 
gueri-e.  grâce  à  l'initiative  de  M.  H  Pirenne,  trouva  en  Alfred 
Cauchie  un  zélateur  et  un  propandiste  actif.  Il  prit  une  part 
iini)ortante  aux  discussions  que  cette  question  souleva  lors  des 
différents  congrès  de  la  u  Fédération  historique  et  archéolo- 
gijjue  »  et,  par  l'influence  qui!  exerçait  dans  le  monde  ecclc';- 
siastique  belge,  il  parvint  à  faire  réaliser  ce  travail  d'inventaire 
dans  certains  diocèses  où  il  pouvait  compter  sur  le  concours 
dévoué  de  ses  nombreux  anciens  élèves.  Il  est  intéi-essant  de 
signaler  à  ce  sujet  le  rapport  présenté  par  l'abbé  .T.  Paquay  à 
r  «  Association  des  anciens  membres  du  Séminaire  historitiue  de 
Louvain  »  en  1012. 


Xous  sommes  ainsi  amené  à  dire  queUpies  mots  de  l'influence 
que  sut  exercer  Alfred  Cauchie  au  point  de  vue  scientificiue  dans 
les  milieux  du  clergé  belge.  Dans  ces  milieux,  il  pouvait  compter 
sur  de  nombreux  anciens  élèves  qui,  tant  en  Flandre  qu'en 
Wallonie,  continuaient  dans  la  mesure  de  lenrs  moyens  à  s'oc- 
cuper d'histoire,  entretenant  la  vie  des  cercles  archéologicjues 
locaux  ou  régionaux,  collaborant  aux  revues  comme  Leodiuni, 
les  Annales  de  la  Société  d'Emulation  de  Bruges,  etc.  Le  chanoine 
Cauchie  s'efforçait  de  les  encourager,  de  les  aider,  de  maintenii' 
chez  eux  le  feu  sacré,  en  leur  demandant  de  collaborer  à  la  revue 
fondée  par  Reusens,  les  Amilcctes  pour  servir  à  l'histoire  ecclé- 
siastique de  la  Belgique.  En  1000,  il  allait  offrir  à  ces  «  anciens  » 
roccasion  de  reprendre  un  contact  plus  intime  avec  Louvain.  en 
créant  la  Revue  dliistoire  ecclésiastique.  Cette  Revue  est,  avec  le 
((   Séminaire   historiciue  »,   la    i>lus   belle    entreprise  du    défunt. 


408  CHRONIQUE 

Nous  iiavons  }i;uère  besoin  de  l'appeler  ici  rexcollence  de  cette 
l)ublic'ation  :  les  milieux  scientifi(iues  les  plus  îiutorisés  d'Alle- 
magne. d.An}:;leteiTe.  de  Fi-ance.  d'Italie,  d'Autriche,  d'Espagne 
et  d'Amérique  ont  maintes  l'ois  rendu  hommage  à  cette  oeuvre  de 
grande  envergure.  Ce  que  nous  désirons  mettre  ici  en  relief, 
c'est  le  rôle  que.  dans  la  pensée  d'Alfred  Gauchie,  cette  Riviie 
devait  jouer  ])our  la  formation  intellectuelle  du  clergé  belge. 
Comme  le  disait  le  défunt  dans  son  article-programme  :  Les  études 
iVhistoire  ecclésiastique  (i),  «  [II]  apparaît  non  seulement  pour  les 
classes  supérieures,  mais  avant  tout  pour  le  clergé,  la  nécessité 
d'une  forte  culture  scientifi(iue  et  notamment  d'une  forte  culture 
historique.  Il  importe  (jue  son  éducation  commencée  au  collège 
et  continuée  soit  dans  les  séminaires,  soit  dans  les  scolasticats 
des  congrégations,  soit  aux  universités,  se  poursuive  et  se  pro- 
longe à  travers  toutes  les  étapes  de  son  ministère  :  il  est  dange- 
reux de  s'en  remettre  toute  sa  vie  aux  connaissances  ac([uises 
pendant  les  années  de  formation  sacerdotale  et  professorale.  » 

Cette  vérité-là,  Alfred  Cauchie  l'a  prèchée  toute  sa  vie  au  clergé 
belge,  et  si  celui-ci  compte  dans  ses  rangs  tant  de  travailleurs 
sérieux,  c'est  surtout  à  l'influence  du  maître  de  Louvain  qu'on  le 
doit.  Signalons  surtout  les  efforts  du  défunt  j)Our  introduire 
dans  tous  les  diocèses  de  Belgique  l'œuvre  de  la  rédaction  des 
monog-raphies  paroissiales  (2),  d'après  un  plan  uniforme  établi  à 
Louvain,  et  la  belle  entreprise,  destinée  à  rehausser  le  niveau  de 
renseignement  libre  et  connue  sous  le  nom  de  Collection  belge  de 
manuels  d'histoire.  Le  comité  de  rédaction  de  ces  manuels  —  ceux 
qui  ont  paru  sont  excellents  —  est  composé  de  MM.  P  Demeul- 
dre.  A.  Kempeneer,  A.  Pasture,  V.  Schollaert.  J.  Warichez, 
A.  Wauthy,  membres  du  clergé  belge,  et  M.  C.  Leclère,  pro- 
fesseur à  l'athénée  de  Liège,  tous  anciens  membres  du  Séminaire 
historique. 

Le  chanoine  Cauchie  a  donné  au  clergé  belge  un  magnit'i(iue 
exemple  de  travail  et  d'honnêteté  scientifi(]ue  :  nous  esj)éi'ons 
qu'il  ne  sera  j)oint  oublié. 


Le  défunt  était  un  membre  fidèle  de  la  «  Société  pour  le  ])ro- 
grès  des  études  philologiques  et  histori(iues  n.  Il  assistait  régu- 


(*)  Hevne  d'histoire  rcclvsixsllii'tc.  I.  I,  fasciiiile  1  (1900),  p.  :27-28. 

(■')  Voir  le  «  Rapport  sur  les  pclilcs  arcliivcs  et  moiio^iMpliios  |  nroi.ssialcs  » 
(|ui  se  trouve  dans  le  Bulletin  de  t'Assoriatii)n  des  itiiciens  tneinlires  du  Svmi- 
naire  kistoriqiir,  1912  (Louvain,  IÎ)I2)  el  dans  le  louic  WXVIIl  (\rs  A/ndecIcs^ 
pour  serrii-  à  l'histoire  ecclrsiastit/ite  de  ta  liet(/l(/iie. 


CHRONIQUE  109 

lièrement  aux  séauces  et  y  prenait  souvent  la  i)ar()l('.  Ici  encore, 
son  action  s'est  caractérisée  par  des  initiatives  fécondes,  des  idées 
(ju'il  lançait  dans  l'espoir  de  provo<|uer  des  travaux,  des  ])lans 
d'étude  ou  de  travail  ([u'il  ])roj)Osait  à  1  attention  de  tous. 

C'est  à  ce  titre  que  la  Revue  belge  de  phUologic  et  d'histoire 
—  organe  de  la  «  Société  »  —  se  devait  de  lui  payer  un  tribut  de 
reconnaissance  et  de  rappeler  son  souvenir.  La  mémoire  de  ce 
travailleur  achai'né,  de  cet  orjajanisateur  incomparable,  de  cet 
homme  de  cccur  et  de  ce  saint  pi-êti-e  lestera  en  bénédiction  : 
il  survit  dans  ce  que  Dom  Ursnier  Berlière  a  si  justement  ai)pelé 
w  sa  postérité  intellectuelle  »  {-). 

Louvain.  Lkox  Van  dkh  Essen. 


Alexis  Lallemand 

(1H40  l'J'il) 

Le  VA  mai  dernier  est  décédé  à  Gand,  dans  sa  81"  année,  Alexis 
Lallemand,  i)rofesseur  honoraire  d'histoire  et  j^éo^raphie  à 
l'Athénée  de  Bruxelles. 

Né  à  Moutfort  (hameau  d'Esneux-s/Ourthe),  A.  Lallemand  fit 
ses  études  moyennes  à  Saiut-Trond  et  conquit  le  diplôme  de 
docteur  en  philosophie  et  lettres  à  l'Université  de  Liège,  en  1867. 
Il  donna  toute  sa  carrière  à  l'enseignement  moyen,  occupa  succes- 
sivement les  chaires  de  grec  et  d'histoire  au  Collège  communal  de 
Nivelles,  d'histoire  et  géographie  aux  Athénées  de  Bruges  (1871- 
1880).  de  Gand  (1880-1889)  et  de  Bruxelles  (1889-1902). 

lCs])rit  lucide  et  méthodique,  travailleur  probe  et  tenace,  il 
publia  un  cours  complet  de  i^-éographie  et  toute  une  série  de  ma- 
nuels historiques  à  l'usage  des  Athénées  et  lOeoles  moyennes, 
régulièi'ement  remaniés  et  tenus  à  jour,  (jui  sont  demeurés  d'ex- 
cellents instruments  de  travail.  Nous  citerons  notamment  :  His- 
toire de  l'antiquité.  4^  éd.  illustrée  ;  Cahiers  d'histoire  [Antiquité, 
3*  éd.  ;  Moyen  âge,  4*  éd.  ;  Temps  modernes  et  contemporains, 
3*  éd.;  Histoire  de  Belgique,  2"  éd.)  ;  Précis  de  l'histoire  universelle 
(en  collaboration  ;  2  vol.  ;  3''  éd.)  ;  Petite  histoire  de  Belgique 
(4*  éd.).  Les  grands  faits  de  l'histoire  contemporaine  (éd  De  Boeck; 
*J3.")  pages^  viennent  d'atteindre  la  /u///iè/;(t' édition  (1921)  ;  ce  petit 
ouvrage   est  un   modèle  de  concision   et  d'exactitude   objective; 


(-')  .Xrliclc  iiccriilo^iqiie  dans /.? /{((/>/></  de  (;ii;n-lei'-i.  On  houvcia  la  hililio- 
};ia|i!iie  (hi  (iéfuiil  dans  li's  l''  cl  (}'  su|i|ilénicnls  de  la  liiliiiiitjriipliii  (nudriuiiiiie 
|uil»lic)'  par  riniviTsili'  de  l.niivaiii. 


410  CHROXIQîE 

feu  A.  Fierens,  Inspecteur  de  l'Enseignement  moyen,  en  avait 
fait  une  adaptation  en  langue  flamande,  qui  a  eu  elle-même  plu- 
sieurs éditions  (la  dernière,  en  1921).  D'autres  maniids  historiques 
d'A.  Lallemand  ont  été  ti-aduits  de  même  en  flamand  par  le 
professeur  Roumen. 

A.  Lallemand  a  édité  en  outre,  en  collaboration  avec  W .  De 
Vreese  :  Documents  fondamentaux  de  riiistoire  de  Delifique 
(chartes,  édits  et  actes  diplomatiques',,  Liéf^e,  H.  Dessain,  in-S", 
280pa{îes.Il  fut  en  1909,  lauréat  du  Cercle  \ei-viétois  de  Bruxelles 
et  son  ouvrajre  couronné  :  La  lutte  des  Etats  de  Liège  contre  la 
Maison  de  Bourgogne.  i;i901492,  Bruxelles,  A.  De  Boeck,  in-S», 
159  pages,  est  une  des  meilleures  vulgarisations  qui  aient  i)aru, 
en  ces  vingt  dernières  années,  dans  le  domaine  de  l'histoire 
A. Lallemand  collabora. jusque  dans  les  derniers  temps  de  sa  vie,  à 
plusieurs  périodiques  savants  et.  Wallon  de  cœur  comme  de  race, 
il  fut  au  nombre  des  correspondants  les  plus  fervents  du  Diction- 
naire Wallon,  dont  il  enrichit  les  matériaux  d'approche  de  con- 
tributions précieuses 

Km.   Doxv 


Jean  Lesquier 

1879-1921 

Les  papyrologues  français  ne  pouvaient  manquei-  de  réi)ondre  à 
l'appel  des  fondateurs  de  la  nouvelle  Revue  de  philologie  et  d'his 
toire.  Il  leur  est  agréable  de  resseiTer  ou  de  nouer  des  relations 
toujours  plus  étroites  avec  les  savants  belges.  Malheureusement 
cette  collaboration  doit  être  inaugurée  par  un  article  nécrolo- 
gique L'un  des  nôtres,  le  plus  actif  d'entre  nous,  Jean  Lesquier. 
n'est  plus.  Il  a  lutté  douze  ans,  avec  une  lucidité  calme,  contre  un 
mal  impitoyable,  sans  cesser  de  travailler  et  de  produire;  et 
après  ces  douze  ans  de  labeur  et  de  souffrance,  ai)rès  cette  courte 
carrière  de  recherches  heureuses  et  d'amertume  poignante,  gar- 
dant jusqu'à  l'ultime  seconde  sa  pleine  conscience  et  sa  grande 
âme,  le  28  juin  dernier,  notre  ami,  sans  révolte,  a  glissé  stoïciue- 
ment  dans  la  mort.  Nous  écoutons  tristement  nos  souvenirs. 
11  n'est  point  pour  nous  de  tâche  plus  impérieuse,  il  n'en  est 
point  de  plus  pénible  que  de  retracer  les  étapes  de  sa  splendide 
et  brève  existence  de  savant.  La  réputation  de  Jean  Lesquier 
était  universelle  dans  le  monde  des  érudits  attachés  aux  études 
égyptiennes.  Il  était  en  relations  de  science  et  d'amitié  avec  les 


CHRONIQUE  411 

papyrologues  d'AiigleteiTc,  dltalic.  de  Russie.  (rAutriclic:  il 
corresj)oii(lait,  avant  l'.n4,  avec  les  professeui's  alleinaiuls.  C'est 
notre  devoir  de  dire  qu'il  eût  avec  joie  aj)porté  sa  collaboration 
à  la  Renne  heh-e  d'Hintoire  et  de  Pliil<>U>gic. 

Jean  Lesquier  eomnienea  ses  études  au  C'ollèye  de  Lisieux.  sa 
ville  natale;  il  les  continua  à  Paris,  à  l'Eeole  Bossuet.  au  Lycée 
Louis-le-(ii"and  et  les  termina  à  l'Ecole  Xormale  Supérieure,  où  il 
entra  à  la  suite  du  coneoui's  de  1900.  Très  vite,  il  se  spécialisa 
dans  les  questions  d'histoire  ancienne.  Sous  l'impulsion  de  son 
maitre,  M.  G.  Blocli,  «  un  de  ces  maîtres  pour  qui  l'enseignement 
est  l'amitié  »  ('),  il  s'orienta  vers  l'égyptologie  gréco-romaine,  à 
laquelle  dos  fouilles  fructueuses  venaient  do  donner  un  renouveau 
d'atti-ait  et  d'actualité.  Soutenu  par  les  documents  anciens  et  nou- 
veaux, l'élève  composa  avec  clarté  et  concision,  sous  la  direction 
du  maître,  son  premier  travail  original,  un  diplôme  sur  Le  recru- 
tement de  l'armée  romaine  d'Egypte  au  /•'"  et  au  II"^  sièc  e.  esquisse 
fragmentaire  du  livre  admii'able  ([u'il  })ul)lia  en  1918.  Agrégé 
en  l\)0'A,  Les(iuier  fit.  on  mission  officielle,  deux  séjours  à  Berlin. 
Il  y  suivit,  sans  laisser  entamer  sa  personnalité,  les  savantes 
le^-ons  des  papyrologues  allemands,  entre  autres  celles  de  M.  Paul 
M.  Meyer.  sur  le  conseil  duquel  il  étudia  Les  actes  de  dioorce 
^•récuégyptiens{^).  11  collabora  aussi  j)ar  l'édition  de  plusieurs 
textes  aux  Berliner  (Iriechische  Urknnden.  Rentré  en  Franco,  il 
fut  nommé  professeur  au  Lycée  dé  Saint-Quontin.  ("était  réj>oque 
où  Pierre  Jouguet,  revenu  d'Egypte  avec  une  bollo  moisson  de 
papyrus  et  d'oslraoa.  engrangeait  ses  collections  à  l'Université 
do  Lille.  Initiateur  zélé  ot  bienveillant,  Jouguet  avait  eu  le  mérite 
d'instruire  et  d'entraîner  ([uelcjucs  élèves;  Lesquier  vint, 
empressé,  se  joindre  au  i)etit  grou|)e.  Ainsi  fut  fondé  l'Institut 
papyrologicjue  de  Lille  et  comuionça  la  jjublication  des  Pupy-rus 
jurées  de  Lille  Lo  pi'omioi-  fascicule  i)arut  en  1907  sous  les  signa- 
tures do  Jouguet  et  de  Losciuior.  .Auparavant  ils  avaient  donné 
communication  à  l'Académie  des  Insci'ii)tions  et  Belles-Lettres 
du  plus  important  de  ces  textes  :  Plun  et  deris  de  IraïKinx  de 
Fuji  27  de  l'tolémée  Philadelphe  ("').  Le  deuxième  fascicule, 
Lesquier  le  i)ublia  avec  moi  en  190-^,  après  que  nous  eûmes  pré- 
senté à  r.Académie,  ])ar  l'intermédiaire  de  .M.  Bouché-Leclercq, 
le  pins   beau   papyi'us  du  recueil  :  Frui^ment  d'ioi  code    ')    Dans 


(')  Jean  Los(|iiici'.  Anin'i-  Ihnnnhie,  l'iôracc.  in  /Irif. 
(-')  Ret\,lp  Phil.  I.  \\\,  |..  ■\m.  I9(lt;. 
(3)  Séance  ilii  i:!  juillet  t'.MIC). 
C)   Séance  ilii   17  jaiivief  l'.tOX. 


4lL^  CHRONIQUE 

l'entre-temps,  notre  ami  i)assHit  au  Lycée  de  Douai,  puis,  sur  la 
demande  de  M.  Cliassinat  et  la  désignation  de  notre  commun 
maître  et  ami  .longuet,  il  s'embanjuait  jjour  l'Egypte  et  faisait, 
de  février  à  avril  lilOH,  une  campagne  de  fouilles  à  Telineli- 
Acoris.  Ses  recherches,  entreprises  après  celles  de  MM.  Jouguet, 
Lefebvre  et  Bary  sur  le  même  site,  ne  donnèrent  pas  de  papyrus,^ 
mais  il  déblaya  d'intéressantes  constructions.  Son  rapport  ('), 
fait  surtout  au  ])oint  de  vue  topographiciue  et  ai-chéologique,  est 
un  modèle  d'exposition  modeste  et  i)récise  ;  tout  fouilleur  débu- 
tant fera  bien  de  le  lire  avant  de  se  présenter  sur  le  terrain. 

Nous  arrivons  au  moment  fatal  :  un  Iiasard  aveugle,  la  location 
d'une  chambre  malsaine,  fait  qu'à  28  ans,  au  moment  de  passer 
des  promesses  aux  réalisations.  Lesquier  contracte  le  germe  du 
mal  odieux  qui  allait  lui  compter,  à  une  si  brève  mesure,  le  reste 
de  ses  jours  Le  malade  sait  la  vérité  et.  au  lieu  de  sombrer  dans 
le  désespoir,  il  organise  la  vie  ralentie  qui  lui  est  permise.  Plus 
de  v(îjag-es,  plus  de  fouilles,  plus  d'enseignement;  la  retraite  pai- 
sible est  nécessaire,  mais  retraite  fébrilement  studieuse,  retraite 
dont  chacjue  minute  est  dense  de  travail  et  de  vie  De  cette 
période,  par  un  miracle  de  volonté,  datent  les  œuvres  maîtresses 
de  Lesquier;  ses  thèses  d'abord,  Lt'S  institutions  milituires  des 
Lagides  (1911)  et  les  Papyrus  de  Magdôla  (1912),  jniis  une 
Grammaire  égyptienne,  d'après  Ad.  Erman  '1914),  enfin  son  der- 
nier grand  ouvrage,  L'Armée  romaine  d'Egypte  d'Augusle  à 
Dioctétien  (1918;. 

Le  livre  sur  les  Institutions  militaires  des  Lag-ides  renouvelle, 
grâce  à  sa  documentation,  les  idées  antérieurement  admises,  et 
éclaire  sur  bien  des  points  des  questions  obscures  jusque  là  ;  c'est 
pour  longtemps  l'ouvrage  fondamental  sur  ce  sujet.  Nous  y  trou- 
vons, après  un  dépouillement  scrupuleux  des  textes  littéraires, 
épigraphiques,  papyrologiques,  après  un  examen  impartial  des 
opinions  émises  par  des  devanciers,  une  claire  synthèse  de  nos 
connaissances  sur  l'armée  ptolémaïque.  Lesquier  y  étudie  .succes- 
sivement la  composition  générale  de  l'armée  et  sa  division  en 
différentes  armes;  l'origine  et  la  situîition  respective  des  clé- 
rouques  et  des  Tf\ç  éTriYovriç;  l'organisation  intérieure  des  troupes, 
le  commandement  et  l'administration;  le  recrutement  aux  diffc- 
lentes  époques  des  réguliers,  des  mercenaires,  des  indigènes,  des 
officiers:  la  condition  juridicjue  des  hommes;  les  cléi-ouchies  et 
les  opérations  aux(iuelles  elles  donnent  lieu  :  la  culture  des  KXfjpoi. 
leui"   situation   fiscale   et  juridiciue;    la   marine   sui-  hniuelle  les 


(')  liulleiin  de  l'irixlitiit  frnniiiis  d'nnlii'iiliitjic  oiic/é/tilc,  1.  VIII. 


CHRONIQUE  413 

témoignages  sont  si  rares;  la  ])()lice  des  appariteui's  et  des  gen- 
darmes; enfin,  dans  un  dernier  chapitre,  il  examine  les  survi- 
vances des  institutions  j)toléniaï(ines  dans  les  institutions  de 
rem])ire  romain.  L'Associntion  pour  rEncoiiriii'ciuenl  des  Eludes 
Grecques  ne  i)Ouvait  mieux  faire  (jne  de  reconnaître  les  mérites  et 
la  haute  valeur  d'une  telle  œuvre  en  décei-nant  à  son  auteur, 
coniuie  elle  l'a  fait,  la  plus  haute  de  ses  récomi)enses,  le  prix 
Zographos  (*). 

Les  l'upy^ru.s  l'e  Mu^dàhi  sont  la  réédition  des  pétitions  que 
MM.  .Touguet  et  Lefebvre.  malgré  les  difficultés  de  décljiffi-ement 
et  d'interprétation,  s'étaient  hâtés  de  publier  dans  le  Bulletin  de 
Correspondance  Hellénique  pour  satisfaire  à  la  curiosité  avide  des 
savants.  Des  corrections,  des  lectures  avaient  été  proposées 
ensuite  i)ar  (luelques  paj)\  l'ologues,  M.  Wilcken  enti-e  autres. 
Lesquier  repieud  les  originaux  à  loisir,  réussit  encore,  à  force  de 
ténacité,  à  améliorer  le  texte,  et  en  donne  une  édition  définitive 
avec  apparat  critique,  traduction  et  commentaire  explicatif. 
!Mais  la  nouveauté  essentielle  de  son  livre  réside  sans  aucun 
doute  dans  la  copieuse  Introduction.  Pour  permettre  aux  tra- 
vailleurs de  tirer  des  documents  tout  le  profit  possible,  il  \ 
dégage  des  circonstances  particulières  à  chaque  affaire  le  formu- 
laire des  actes;  il  indicpie  la  procédure  suivie  et  les  juridictions 
compétentes  ;  il  extrait  des  dates,  spécialement  des  doubles  dates, 
des  renseignements  chronologi(iues,  et  trace  enfin  un  tableau 
animé  de  la  vie  quotidienne  dans  ce  coin  de  l'Arsinoïte  aux  alen- 
tours de  220  avant  Jésus- Christ. 

Cependant  son  intelligence  avide  cherchait  et  trouvait  un  nou- 
veau champ  d'activité.  Aux  papyrus  grecs  il  ajouta  l'étude  des 
hiéroglyphes  et  publia  en  1914  une  Grammaire  égyptienne  d'après 
la  .?"  édition  d'Adolf  Erman  '-).  En  vérité  ce  n'était  pas 
une  traduction,  ni  même  une  adaptation  de  l'œuvre  d'Ermau. 
Sans  doute  la  doctrine  du  maître  était  conservée,  mais  Lesquier 
en  modifia  l'exposé  d'une  manière  profondément  originale.  Les 
livres  de  ce  geni-e,  et  ceux  d'Erman  lui-même,  avaient  juscju'à  ce 
jour  enseigné  conjointement  l'écriture  et  la  grammaire  11  sem. 
blait  à  Lesquier  que  c'était  là  commettre  une  erreur  de  péda- 
gagie,  provoquer  la  tentation  d'attacher  autant  et  plus  d'impor- 
tance à  l'écriture,  à  cause  de  son  étrangeté,  qu'à  la  grammaire,  et 
ainsi  courir  le  risque  de  mettre  plus  de  divination  que  de  science 
dans  la  traduction  des  textes.  Pour  cette  raison  donc,  et  aussi 
pour   éviter  des   complications,   il   Jugea    bon    de    faire    étudier 


(')  l'artaj,'!'  («Ile  aiuiée-là  (1913)  entre  J.  Maspéro  et  Jean  l.fsiiuiiM-. 
(';  Hil)li(>llièiiii('  (l'i'tiulo  (le  l'Iiistiliit  du  Caire,  I.  Vil. 


414  CHRONIQUE 

(l'abord  la  langue  el  la  grammaire,  en  se  servant  des  ti-anscrip- 
tions  admises,  et  en  second  lieu  l'écriture  et  l'oi-tliograplie,  les- 
hiéroglyphes  eux-mêmes  Ce  lut  une  véritable  l'évolution,  et  il 
rencontra  des  résistances.  Un  recueil  de  textes  hiérogl\  phiciues 
(pi'il  préparait  et  se  proposait  de  publier  aurait  été  une  démons- 
tration pratique  de  sa  théorie,  et  peut-être  y  aurait  rallié  des 
incrédules  ou  des  indécis. 

Mais  déjà  le  laborieux  chercheur  avait  commencé  i)ar  de  vastes 
lectures,  ])ar  le  dépouillement  de  plusieurs  milliers  de  papyrus, 
ostraca,  inscriptions,  la  pi-éparation  de  son  livre  magistral  : 
L'Armée  romaine  d'Egypte  d' Auguste  à  Dioclélien  (').  Le  sujet 
était  neuf.  Seul,  M.  Wilcken  dans  ses  Grundziige  (2)  y  avait 
consacré  (juelques  alinéas  justes  et  denses.  Mais  la  documenta- 
tion de  ces  treize  pages  s'arrêtait  à  1912;  le  livre  de  Lesquier 
a  GOO  pages  et  parut  en  1918.  Xon  seulement  les  revues  spéciales 
en  signalèrent  la  publication  et  adressèrent  à  l'auteur  le  tribut 
d'éloges  auquel  il  avait  droit,  mais  le  grand  public  même  en  fut 
informé  par  un  article  ingénieux  où  M  Gagnât,  dans  la  Revue  des 
Deux-Mondes  (•*).  résumait  et  adoptait  le  nouvel  ouvrage  Que 
l'on  veuille  étudier  le  rôle  de  l'armée  dans  les  annales  de  l'Egjpte 
romaine  ou  plus  spécialement  l'histoire  des  différents  corps  et  de 
la  flotte;  que  l'on  s'intéresse  au  commandement  général  des 
troupes  et  aux  états-majors;  qu'on  s'attache  à  la  question  jadis 
si  discutée  des  trois  prétendues  épicriseis  (militaire,  fiscale, 
éphébiquej:  qu'on  désire  se  renseigner  sur  le  recrutement  des 
hommes,  leur  patrie,  leur  condition,  leur  vie  quotidienne,  en 
service  où  privée  ;  qu'on  cherche  à  se  documenter  sur  la  situation 
des  vétérans,  sur  la  façon  dont  s'effectuaient  les  fournitures 
militaires  en  l'absence  du  service  spécial  dintendance,  sur 
l'emploi  des  troupes  d'occupation  et  leur  l'épai'tition  à  travers  le 
territoire,  il  faut  et  il  faudra  toujours  désormais  recourir  au  livre 
de  Lesquier.  Les  trouvailles  ultérieures  n'en  poui-ront  modifier 
que  des  points  de  détail.  Ce  n'est  pas  seulement  l'interprétation 
intelligente  de  textes  consciencieusement  compilés,  c'esr,  une 
construction  clairement  ordonnée,  hai-monieuse  de  pro])ortions, 
attrayante  de  style;  c'est  une  encj-clopédie,  par  endroits  divina- 
toire, qui  porte  en  elle  la  diversité  et  le  bruissement  de  la  vie. 
En  1920,  l'Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres,  par  l'attri- 


(')  .MéiiKiircs  di'  llnstiliil  fniiKîiis  du  Caire,  t.  il. 
(2)  Ch.  XI,  MUiftir  nnd  Polizci,  B.  :  Hvinisclie  Zctt,  p.  :i!)0-iO;5. 
(•*)  René    OA(iNAT,   L'armée  d'occujKdId/i   de   l'IUjijptc   soks   les    iîomainSf 
i'^'^  ntiirs  1!)20. 


CHRONIQUE  415 

bulioii  du  jtrix  Hordin,  u  ajouté  l'autoritô  tic  ses  stilfra'^'es  aux 
apprécialions  unaniineinent  élo^^ieuses  des  critiques. 

Les  recherclies  nécessitées  par  ses  travaux  de  longue  haleine 
n'empêchaient  pas  Lesquier  de  fournil-  à  différents  périodiques 
une  collaboration  ap])réciée.  11  axait  donné  à  la  Revue  do  Philo- 
logie (')  une  Note  sur  une  instriplion  iVAshmounein;  à  VArchiv 
fiir  Papyrusf'orschunif  (-),  des  reinar<iues  Sur  deux  didea  d'Ever- 
i^ète  et  de  Philojiator.  Dans  la  Renue  Archéologique  (j)  il  avait  écrit 
des  articles  sur  Talabai-tiue  et  sur  les  ])apyrologues  italiennes.  Il 
avait  préparé  avec  inoi  le  fascicule  III  des  Papyrus  grecs  de  Lille, 
dont  la  publication  arrêtée  i)ar  la  guerre  ne  saurait  plus  tarder. 
Tout  dernièi-enient  dans  le  volume  du  Cin(iuantenaire(*j  de  VAsso- 
ciiilion  pour  Vcncouragenwul  des  éludes  grecques,  à  ])ropos  du 
Pap^-rus  7  de  Fribourg-,  il  revenait  par  un  mémoire  oii  sa  coni- 
])étence  faisait  merveille  sur  la  (luestion  des  tenures  clérou- 
chiques  et  du  lotissement  des  K\)Îpoi  i)ar  les  Lagides.  Les  pro- 
blèmes calendériques  avaient  toujours  eu  pour  lui  un  intérêt 
très  vif;  il  poursuivit  la  solution  de  (iuel(|ues  uns  dans  l'intro- 
duction des  Papyrus  de  Ma^-dola  et  dans  son  dernier  travail  ('•)  : 
Les  nouvelles  études  sur  le  calendrier  ptolémaïque.  11  s'en  préoccu- 
])ait  et  m'en  entretenait  encore  sur  son  lit  de  mort.  11  m'avait  aussi 
parlé  à  plusieurs  reprises  et  me  i)arla  à  ce  moment  encore  d'un 
livre  de  vulgarisation  sur  1  Eg3i)te  et  d'un  ouvrage  sur  les  Civili- 
sations primitives  de  la  .^L'-ditei'ra/tée.  «  J'aimerais  les  achever 
vite,  me  disait-il.  sans  laisser  i)araitre  son  inquiétude,  .si  toute- 
fois on  m'en  laisse  le  temps.  »  Xommé  en  novembre  1920  à  la 
Faculté  d'Aix-en-Provence,  il  eut  la  double  joie  d'y  enseigner 
'luchiues  mois  et  d'y  vivre  dans  ce  Midi  (ju'il  aimait  avec  délices. 
La  mort  l'a  emporté  comme  il  en  revenait,  sans  lui  laisser  la  dou- 
ceur de  l'evoir  son  i)ays  natal. 

Si  maintenant,  détaché  des  œuvres  dont  on  vient  de  parler,  on 
essaie  de  définir  l'intelligence  (jui  les  a  composées,  on  trouve 
chez  Lesquier  les  dons  naturels  de  l'historien  né  et  les  (jualités 
acquises  ou  dévelojtpées  du  vrai  i)apy]ologue.  Papyrologue, 
Lesquier  avait  la  j)atience  tenace  et  prudente  du  déchiffreur,  la 
circonspection  avisée  de  l'interprète,  la  sagacité  et  l'habileté  à 
confronter  les  textes,  à  en  extraire  la  substance.  Historien,  il  était 
maitre  de  sa  documentation,  la  dominait;  il  avait  l:i  vision  nette 


(*)  T.  :>2,  j).  :2o:i-2-2r;. 

(2)  T.  IV,  p.  ^Si-'JOT. 

(3)  Revue urcliéoloyùiue.  l'JIT,  i-.  ".i.)  l(i:].  2«:j--28t. 
'■*)  Rev.  des  Et.  gr.,  t.  32,  p  3:)î»-.375  (IJ)iJI). 

(^)  Rrr.  F.fiiipli>h,iii,,,ie,  II,  p.  I-.38  (10-21). 


416  CHRONIQUE 

des  faits,  des  objections  possibles,  la  sûreté  du  jugement  qui 
chemine  droit,  écarte  l'ombre  des  doutes,  des  obstacles,  devance 
parfois  par  l'intuition  l'autorité  des  témoignages  et  fait  jaillir  la 
vérité.  Cet  érudit,  à  qui  son  mal  avait  enseigné  cruellement  le 
prix  des  minutes,  était  arrivé,  à  force  d'activité  méthodique,  à 
économiser  le  temps.  La  liste  de  ses  ouvrages  écrits  en  quelques 
iinnées  en  est  la  preuve  —  et  je  n'ai  rien  dit  de  ses  remarquables 
contributions  à  l'histoire  locale,  à  l'étude  des  antiquités  lexo- 
viennes.  Aux  autres  même  il  désirait  éviter  des  efforts  inutiles  et 
faire  gagner  du  temps.  Les  précieux  index,  les  tableaux  multipliés 
dans  ses  livres  ne  sont  pas  un  étalage  d'ériidition.  c'est  une  œuvre 
d'assistance,  c'est  la  main  tendue  au  chercheur  qui  tâtonne.  C'est 
que  Lesquier  avait  la  foi  du  savant;  il  était  de  la  race  des  por- 
teurs de  flambeaux  et  voulait,  avant  de  disparaître,  léguer  à  des 
successeurs  la  flamme  qui  doit  survivre.  La  Science  peut  le 
pleurer  :  en  lui  s'est  éteinte  une  intelligence  radieuse.  Ses  amis 
aussi  le  pleurent  :  à  ses  éniinentes  qualités  d'esprit,  Jean  Lesquier 
joignait  les  plus  rares  dons  du  cœur.  Il  dissimulait  parfois  sa  sen- 
sibilité sous  un  air  ironique  ou  enjoué,  mais  son  amitié  se  révélait 
avec  le  temps  sérieuse,  délicate  et  profonde.  Rarement  un  mot,  un 
geste,  une  intonation  décelait  au  dehors  cette  tendresse  virile, 
mais  toujours  ses  actes  en  étaient  la  démonstration  touchante. 
Et  son  grand  cœur  a  cessé  de  battre  !  Interdits  devant  l'évidence 
brutale,  nous  avons,  nous,  ses  amis,  l'angoisse  de  nous  sentir 
amoindris  par  sa  disi)arition  ;  nous  souffrons  d'une  stupeur  dou- 
loureuse :  une  partie  de  notre  être  s'est  arrachée  de  nous  pour 
entrer  dans  l'ombre  avec  lui. 

Paul  COLI.ART. 


ERRATUM 

X"  I,  page  139.  ligne  4,  lire  Miluii  au  lieu  de  Mil.in 


Sur  le  sens  méconnu 
de  quelques  mots  homériques 

(aîôXoç  et  ses  dérivés) 


Le  terme  aiôXoç  est  une  éi)itliète  assez  fréquente  chez 
Homère,  et  qxii  reparaît  ^'à  et  là  dans  la  poésie  ])Ostérieure. 
Voici  comment  nos  dictionnaires  (^),  d'accord  avec  la  tra- 
dition dos  gi'amma irions  anciens,  établissent  la  succession 
dos  sens  de  ce  mot  :  i.  qui  se  meut  rapidement;  2.  brillant; 
3.  bigarré,  versicolor  (d'où  variable,  changeant);  4.  (au  sens 
moral)  rusé,  trompeur. 

Les  dictionnaires,  de  môme  que  les  lexiques  si^éciaux  et 
les  commentaires,  tendent  à  expliquer  par  l'un  des  deux 
premiers  sons,  «  rai)ide  »  ou  ce  brillant  »  tous  les  om])lois 
de  aiôXoç  chez  Homère.  Je  voudrais  démontrer  ici  que  le 
mot  aiôXoç  n'a  jamais  à  ])ropromont  i)arler  aucun  de  ces 
deux  sens  dans  l'épopée,  et  qu'il  faut  toujours  partir  du 
sens  de  versicolor,  bigarré,  c'est-à-dire  marqué  de  couleurs 
qui  tranchent  l'une  sur  l'autre. 

A  première  vue,  il  peut  ijaraîtrc  étonnant  que,  depuis  les 
anciens  jusqu'à  nos  jours,  les  grammairiens  se  soient  à  ce 
])oint  méi)ris  sur  la  signification  d'un  i)areil  mot.  Mais  il 
faut  songer  que,  dès  l'époque  alexandrine,  beaucoup  de 
termes  homériques  avaient  cessé  d'être  vivants  depuis  des 
siècles,  et  qu'ils  nous  ont  été  ex])liqués  par  des  savants  de 
cabinet.  Certes,  ils  avaient  certains  j)rincii)es  excellents. 
Aristarque,    ])ar   exemi)le,    disait    (lu'il    fallait   cxi)liqiier 


C)  Les  arlicli's  (le  Puiie-Sengobuscli,  I.idtloll  ol  Scott,  Uailly,  ft  de  Passow- 
Criniert,  le  plus  récent  de  tous,  soiil  (unir  lesseiitiel  conformes  dans  leurs 
interprétations. 

27 


418  L.    PARMENTIER 

Homère  par  lui-même.  Je  ne  doute  pas  qu'un  système 
d'érudition  ])urement  livresque  ne  puisse  souvent  suffire 
quand  il  s'agit  d'un  auteur  qui  lui-même  a  travaillé  sur  une 
table  avec  des  livres.  Le  ])rofesseur  Bergeret,  sans  sortir 
de  sa  bibliothèque,  finira  peut-être  par  nous  donner  un 
excellent  Virgiliiis  naiiticus.  Mais  avec  un  Homère,  qui, 
lorsqu'il  peint  les  objets  et  les  êtres,  en  a  la  vision  nette  et 
directe,  il  faut  souvent  se  mettre  comme  lui  en  face  de  la 
nature  même,  et  essayer  de  retrouver  la  qualité  s])éeiale  de 
sa  perception.  C'est  là  un  effort  que  les  grammairiens, 
anciens  et  modernes,  s'avisent  rarement  de  s'imposer. 


J'examine  d'abord  les  cas  où  l'on  donne  généralement  à 
aiôXoç  le  sens  de  «rapide,  agile  ».  M  167  oqpiÎKeç  juéoov  aiôXoi 
r|è  luéXiCTOai.  Le  scholiaste  T  explique  :  tô  juécrov  eÛKivriTOi  bià 
xnv  èvTO|Lniv,  et  son  idée  a  été  admise  par  la  plupart  des 
modernes,  Cronert,  Liddell,  Huttmann,  Ameis-Hentze,  etc. 
Bailly  explique  :  «  guêpes  au  corsage  mobile,  c'est-à-dire 
qui  peuvent  se  replier  en  tous  sens  ».  Xous  entendrons 
qu'il  s'agit  de  la  couleur  des  guêpes,  et  que  c'est  aussi  une 
désignation  de  couleur  qu'il  faut  chercher  dans  le  terme 
aîôXoç  joint  à  oîcTTpoç  (x300),  à  propos  d'une  sorte  de  grosse 
niouehe  à  aiguillon  qui  affole  un  troupeau  de  vaches. 

M  208,  réi)ithète  aiôXoç  est  appliquée  à  un  serjxmt  et  de 
iu)uveau  je  la  trouve  traduite  par  «  se  remuant  vivement  » 
{sic h  ringelnd  Cronert,  iorig-gling  Liddell,  etc.),  ou  quel- 
quefois «brillant»  (schillernd  Ameis-Hentze).  Il  convient 
ici  d'indiquer  le  contexte.  Zeus  envoie  un  présage  pour 
arrêter  l'élan  des  Troyens  victorieux.  Un  aigle  apparaît 
au  haut  des  airs  (ùvjJiTréTriç),  tenant  dans  ses  serres  un 
énorme  serpent  ensanglanté,  encore  vivant  et  se  débattant. 
Il  parvient  à  mordre  au  cou  l'aigle,  qui,  de  douleur,  est 
obligé  de  le  irich(n\  Le  monstre  tombe  à  terre  au  milieu  de 
l'arnK'e. 

TpiBeç  b'èppi-j^aav,  ôttujç  ïbov  aîôXov  ôcpiv 
Kei)Lievov  èv  )Liécraoi(7i,  Aiôç  lépaç  aÎYiôxoio. 

On  ti'ouvcra  que  ce  serjx^nt,  tombé  du  i)lus  haut  des  airs 
<'t  qui  s(î  (h'battrait  encore,  aurait  vraiment  la  vi(»  dure. 


I 
I 


MOTS  HOMÉRIQUES  419 

En  réalité,  aîôXoç  a  ici  le  même  sens  que  cIr'/.  Sophocle, 
TrHchinienncs  11  et  (S3i  aîôXoç  bpâKoiv,  où  les  eoinmcnta- 
teurs  d'Homère  auraient  pu  voir  que  le  lexique  de  Dindorf 
traduit  exactement  par  versicolor. 

Comme  nous  le  constaterons  dans  beaucoup  d'autres  cas, 
ré])itliète  aïôXoç  alterne,  déjà  dans  la  langue  épique,  pour 
le  mot  ôcpiç,  avec  celle  de  TroïKÎXoç,  qui  est  restée  en  grec  le 
terme  vivant  pour  exprimer  l'idée  de  couleui-  variée.  C'est 
ce  qu'on  voit  chez  Hésiode,  Théo^-onie  300,  à  ])ropos 
d'Écliidna  qui  est  décrite  comme  un  TréXuupov  ocpiv,  beivôv  xe 
fiéyav  Te,  ttoikîXov.  Cf.  Pindare,  Pyth.  IV  249  Y^«UKÛJTra... 
TTOïKiXôvujTGv  ôcpiv.  VTIT  4()  bpÛKOVTa  TTOïKiXov.  EuripIdc, 
Iph.  Taiir.  124i  ttgikiXôvuutoç  oîviuttôç  bpÛKuuv. 

Il  me  paraît  très  vraisemblable  que  la  désignation  la 
plus  ancienne,  aiôXoç,  a i)i)'ar tenait  au  dialecte  éolien  et 
qu'elle  a  été  supplantée  peu  à  peu  dans  l'usage  courant  par 
son  synonyme  ionien  TTOïKiXoç.  Très  souvent,  notamment  au 
commencement  du  vers,  les  deux  mots  sont  méti"iquement 
équivalents,  et  en  pareil  cas  le  terme  banal  a  pu  quelque- 
fois, au  cours  de  la  tradition,  être  substitué  par  les  aèdes 
au  terme  ])lus  rare.  Par  exemple,  au  chant  K,  particulière- 
ment ionisé,  30  {TTapbaXéi;})  ttoikiXî]  et  149  (o"âKOç)  TTOïKiXov. 
(^uoi  qu'il  en  soit,  tous  les  passages  d'Homère  où  s'est  con- 
servé le  terme  aîôXoç  doivent  être  considérés  comme  appar- 
tenant à  une  couche  ancienne. 

L'exemple  de  X  o09  où  les  vers  qui  dévorent  un  cadavre 
na  sont  a])i)elés  aiôXai  eùXai  (on  traduit  ivimmelnd,  wri^-g-- 
Iini>-)  ne  peut  plus  maintenant  faire  difficulté.  L'épithète 
s'applique  aux  taches  bigarrées  que  font  les  vers  sur  le 
cadavre. 

Nous  avons  laissé  j)our  la  fin  le  ])assage  que  l'on  cite 
d'ordinaire  en  premier  lieu  à  l'apimi  du  sens  i)rimitif  de 
«  rapide  »,  et  peut-être  des  lecteurs  l'ont-ils  déjà  oi)i)Osé 
dans  leur  i)ensée  à  l'opinion  que  nous  présentons.  Il  s'agit 
de  l'expression  TTÔbaç  aîôXoç  îttttoç  T  404,  dans  laquelle  on  a 
cru  devoir  reconnaître  sans  hésiter  un  équivalent  de 
TTobûjKriç.  L'expression  ne  se  trouve  chez  Homère  que  dans 
cet  unique  j)assage,et  l'on  comprend  (]ue  le  contexte  mérite 
un  examen  détaillé. 

Achille,    a])rès    la    mort   de  Pat  rode,   s'est    armé   pour 


420  L.    PARMENTIER 

retourner  au  combat;  il  s'approche  de  son  char  tout  prct  à 
remmener,  et  iiiter])elle  ses  chevaux  (400)  : 

EàvBe  TÉ  Ktti  BaXîe,  TriXeKXuià  TéKva  TTobàpYnÇ/ 

L'un  s'ai)pelle  Xaiithos,  c'est-à-dire  bai  —  nous  dirions 
Baj-ard  —  et  l'autre  Balios,  pommelé.  Ils  sont  fils  de  la 
cavale  Podargé,  fécondée  par  le  vent  Zéphja-e  (TT  loO). 
Achille  leur  demande  de  le  ramener  vivant  de  la  mêlée  et 
de  ne  pas  le  laisser  mort,  comme  Patrocle,  sur  le  champ 
de  bataille.  Alors  vient  le  passage  célèbre  où  le  cheval 
Bayard  obtient  le  don  de  la  parole  et  prédit  à  Achille  sa 
mort  prochaine  : 

Tôv  b'dp'  ÙTTÔ  luYÔqpi  7Tpoa"éqpri  rrôbaç  aiôXoç  ïttttoç 
ZâvGoç,  dcpap  b'ninucTe  Kapi'iaTi,  uâaa  bè  xahr] 
levf\r]ç  è£epi7ToDcra  Tiapà  Ivjov  oùbaç  ÏKavev. 

Ces  vers  sont  de  la  meilleure  frappe  homérique  ;  quel- 
ques traits  essentiels  et  nets  y  font  vivre  tout  un  tableau  : 
Achille,  éclatant  dans  son  armure,  et  le  cheval  attelé  qui, 
affligé,  baisse  la  tête  vers  ses  pieds,  tandis  que  sa  longue 
crinière  descend  jusqu'au  sol.  Que  vient  faire,  dans  un  tel 
tableau,  ré])ithète  banale  «  aux  j)ieds  rapides  »,  à  propos 
d'un  cheval  en  arrêt  et  qui  voudrait  ne  pas  partir?  Notons 
d'ailleurs  que  dans  le  grec  il  n'y  a  point  ici  une  épithèt(! 
constante  et  que  le  mot  voisin  appelle  en  quelque  sorte 
mécaniquement  (])ar  exemple  juuuvuxeç  ou  TTobujKeeç  ïnTioi), 
puisque  rrôbaç  aiôXoç  ittîtoç  est  une  expression  unique. 

Cependant,  si  nous  recourons  au  sens  «  varié  de  cou- 
leurs »  que  nous  avons  établi  i)our  aiôXoç,  comment  expli- 
quer qu'une  telle  qualification  soit  donnée  à  un  cheval  baiV 
Ici  nous  avons  bien  un  cas  où  la  méthode  des  rechercdies 
livresques  ne  peut  rien  donner.  Il  faut  essayer  de  bien 
regarder  les  chevaux,  comme  le  faisait  Homère,  ou  s'adres- 
ser à  ceux  qui  savent  les  voir  mieux  que  nous.  S'il  était 
encore  en  vie,  ce  serait  le  moment  d'interroger  Paul-Louis 
Courier,  éminent  helléniste  et  traducteur  des  traités  lii])- 
piques  de  Xénophon,  en  même  temps  qu'officier  d'artillerie 
à  cheval,  chargé  de  la  remonte  en  Italie.  A  son  défaut,  je 
me  suis  adressé  siiiiplenicnt  au  vétérinaii'e  de  mon  village, 
et  il  m'a  a])pris  tout  de  suite  ce  que  c'est  qu'un  cheval  bal- 


MOTS   HOMÉRIQUES  421 

zan.  A])rès  cela,  je  n'ai  i)lus  eu  qu'à  ouvrir  Littré  :  a  Balzan. 
Cheval  balzan,  cheval  noir  ou  bai,  qui  a  des  marques 
blanches  aux  pieds.  — Balzane.  Taxîhe  blanche  circulaire, 
entourant,  en  l'orme  de  ceinture,  une  ])ai"tie  i)lus  ou  moins 
large  de  l'extrémité  des  membres  chez  le  cheval.  » 

Ainsi  nous  découvrons  dans  le  tableau  d'Hoinère  une 
touche  nouvelle  qui  nous  donne  le  signalement  caractéris- 
tique du  cheval  d'Achille;  ceux  à  qui  s'adressait  le  poète 
voyaient  dans  son  tableau  la  tête  brune  de  Xanthos  pen- 
chée vers  la  ceinture  aux  ])oils  blancs  de  ses  membres  infé- 
rieurs. Le  nom  de  cheval  bausant  est  très  fi-équent  dans 
les  chansons  de  geste  ;  Ern.  Langlois  en  signale  plus  de 
cinquante  exemples  (^). 

Du  môme  cou]),  nous  comprenons  la  raison  du  nom  de 
Podargé  donné  à  la  mère  des  chevaux  d'Achille.  Nous  ne 
voulons  ])as  allonger  ce  travail  en  y  joignant  une  ('tude 
détaillée  sur  l'adjectif  dpYÔç,  mais  il  est  certain  que  son 
sens  primitif  est  celui  de  «blanc»,  et  non  «  rajjide  » 
comme  on  l'admet  souvent  à  cause  de  son  application  à  des 
chevaux  ou  à  des  chiens.  Cf.  àpYiôbovTeç  (Jueç  \  413.  —  kuv€ç 
A  292.  C'est  donc  encore  un  cheval  bausant  que  Ménélas 
Y29o  et  Hector  0  185  appellent  du  nom  de  ÎTôbapTOç. 

S'il  restait  des  doutes  sur  l'interprétation  de  notre  pas- 
sage, j'espère  qu'ils  seront  levés  entièrement  i)ar  le  rap- 
j)rochement  (^ui  va  suivre  avec  des  vers  de  la  parodos  de 
Vlphi^'cnie  il  Aiilis  d'Euripide  (~).  Les  jeunes  femmes  du 
chœur  sont  venues  contempler  les  guerriers  grecs  et  dans 
des  strophes  toutes  pleines  de  réminiscences  de  l'Iliade, 
elles  racontent  notamment  qu'elles  ont  vu  Achille,  en 
armes  et  à  pied,  luttant  de  vitesse  avec  un  quadrige  traîné 
l)ai"  les  célèbres  chevaux  d'Eumèle  (B  763,  M' 376).  Les 
quatre  chevaux  sont  décrits  comme  il  suit,  221  et  suiv.  : 


(*)  Tailles  (les  tin)iis  iiro/irrs  de  Imite  naliire  riuiipris  diins  les  ch(inso7is  de 
geste  imprimées  (coiuinmiicalioii  de  mon  collègue  Aiig.  Doutre|>oiil).  Ou  vou- 
drait savoir  si  la  jument  de  Roland  ou  le  l'.ayard  des  (|ualre  lils  Ayniou  elail, 
eomme  le  elieval  d'Achille,  un  cheval  bausanl. 

(-1  La  pièce  a  été  mise  à  la  scène  après  la  mort  du  poète  par  son  lils.  Il 
importe  peu  ici  (jue  cette  parodos  soit  une  des  parties  ipii  paraissent  oMiirdes 
traces  de  retouches  anciennes. 


422 


L.    PAUMRNTIER 


Toùç  )uèv  juécjouç  ZIuyîouç 

XeuKOCTTiKTLu  Tpixî  PaXioùç, 

TOÙÇ  b'è'Euj  aeipocpôpouç 

dvTi'ipeiç  Ka|U7Taî(Ji  bpôjuuuv, 
TrupŒÔTpixotç,  |uovôxa\a  b'ÙTTÔ  crqpupà 
7TOiKi\o5ép)Liovaç 

L'imitation  d'Homère  est  manifeste;  les  couleurs  des 
elievaux  sont  les  mêmes  et  leur  nombre  est  simplement 
doublé.  Au  joug-  sont  les  chevaux  PaXioi.  Les  i)areils  d(^ 
Xantlios  (TTUpCÔipixeç  et  balzans  comme  lui,  ùttô  (Jqpupà 
TTOiKi\o5ép|UOvaç)  sont  guidés  i)ar  des  longes,  aux  deux  côtés, 
c'est-à-dire  au  poste  difficile,  à  cause  de  la  manœuvre 
qu'ils  devaient  faire  au  virage  près  de  la  borne  (V  330. 
Soidîocle,  Electre  720).  Il  semble  donc  qu'à  cette  é])oque 
les  balzanes  étaient  considérées  comme  une  qualité  des 
cbevaux.  En  tout  cas,  il  résulte  de  ce  rapprochement  que 
le  sens  de  irôbaç  aîôXoç  mnoç  était  encore  exactement  com- 
pris par  l'auteur  de  la  strophe  d'Iphigénie  à  la  fin  du 
V*  siècle.  Mais  il  a  senti  qu'il  devait  pour  son  public  sub- 
stituer le  terme  ordinaii-e  TroïKiXoç  à  celui  d'aîôXoç. 

Dès  lors,  il  devient  évident  qu'il  ne  faut  plus  traduire 
a  aux  coursiers  rapides  »,  mais  bien  «  aux  coursiers  tache- 
tés )),  l'épithète  aioXÔTToiXoi  donnée  deux  fois  aux  Phry- 
giens r  185  et  Hymn.  Yen.  137.  Si  Théocrite  (22,  34  aioXô- 
muXoç  Kâ(JT(jup)  se  rendait  bien  compte  du  sens  ancien  de 
l'expression,  c'est  une  auti-e  question.  Ij'Etymologiciim 
magnum  s.  v.  aioXÔTTiuXoç,  exjîlique,  comme  les  modernes, 
(Triiuaîvei  t6v  Taxùv  Kai  eÙKÎvriTOV  ïttttov.  Mais  Suidas,  s.  v.,  a 
gardé  une  trace  de  bonne  érudition  en  glosant  :  ttoikîXouç 
ÏTTTTOUç  Ix^uv. 

C'est  encore  i)ar  «  rapide  »  (eÙKÎvriTOv  Kai  Taxeîav)  que  le 
scholiaste  d'Eschyle  explique  aiôXiivdans  le  v.  494  des  iSept. 

Xiyvùv  )aéXaivav,  aiôXtiv  rrupôç  Kdcriv. 

M.  P.  Mazon  a  rendu,  autant  qu'il  est  possible,  l'impres- 
sion du  terme  en  traduisant  :  «  une  vapeur  noirâtre,  sœur 
tourbillonnante  du  feu  ».  Je  ne  connais  pas  de  mot  fran- 
çais qui  pourrait  exprimer  exactement  ce  qu'il  y  a  de 
variable  et  d'inconsistant  dans  les  teintes  de  la  fumée. 


MOTS  HOMÉmUCES  423 

Abordons  une  seconde  catégorie  de  passages,  ceux  où 
l'on  attribue  généralement  à  aîôXoç  le  sens  de  «  brillant  ». 

Hymne  ù  Hernies  33.  Le  petit  brigand  d'Hermès,  à  peine 
né,  s'enfuit  de  la  grotte  de  sa  mère  et  il  s'écrie,  en  rencon- 
trant la  tortue  dont  l'écaillé  va  lui  servir  à  fabriquer  la 
première  lyre  : 

7TÔ6ev  TÔbe  KaXôv  d9up)ua 
aîôXov  ôcTipaKov  ecao  x^^^Ç  ôpecri  lubouaa; 

Cf.  40  èpaieivôv  d6up)ua.  Il  est  clair  que  ce  n'est  pas  à 
cause  de  son  éclat  qu'Hermès  appelle  l'écaillé  un  beau  et 
aimable  jouet.  Elle  lui  plaît  à  cause  de  son  bariolage  de 
couleurs,  de  môme  que  les  coquillages  réjouissent  nos 
enfants. 

On  traduit  également  par  «  brillant  »  l'épitliète  aiôXoç 
donnée  au  fameux  bouclier  (crâKOç)  d'Ajax  II  222.  TT  107,  à 
moins  qu'on  n'aime  mieux  entendre,  avec  Buttmann,  «  facile 
à  mouvoir  »  !  Ici  le  vrai  sens  d'aiôXoç  apparaît  sûrement  si 
l'on  compare  l'épitliète  de  TroïKiXov  donnée  K  149  (en  tête 
d'un  vers;  ancicnnemeni  aiôXov?)  au  cràKOç  d'Ulysse. 
Cf.  aussi  TTavaioXov  0"âK0ç  X  oo2  —  dcnriba  A  374. 

Au  V.  E  29o,  les  armes  (Teùxea)  du  Phrygien  Pandaros 
sont  dites  aiôXa  TrajucpavôuuvTa.  Evidemment  aiôXa  marque 
ici  une  qualité  différente  de  celle  de  (c  brillant  »,  exprimée 
dans  7ra|uqpavôujvTa.  C'est  de  nouveau  le  terme  rare  conservé, 
au  lieu  de  TroïKiXa  que  nous  trouvons  très  souvent  avec 
xeùxea  F  327,  A  432,  M  396,  X  181,  etc.  De  même,  avec 
êvxea  K,7o,  apiuaia  A  226,  etc.,  biqppoç  K  oOl. 

Les  héros  grecs  aimaient  à  orner  leur  armure  de  cou- 
leurs variées.  Le  sens  de  afoXoGdjpj-i^  A  489,  TT  173  nous  est 
expliqué  à  souhait  par  TT  134  edjpiiKa  TTOïKiXov  daTepôevTa. 
Comparez  de  même  TravaîoXoç  IvjOi^p  A  186,  2io,  K  77, 
A  236  et  aioXo|uÎTp)iç  E  707  (cf.  Théocrite  17,  19)  à  KecTTÔv 
ijudvTa  TTOïKÎXov  (ceinture  d'Aphrodite)  Z21o, 

On  ne  traduira  plus  l'épitliète  si  fréquente  d'Hector  (une 
fois  d'Ares,  Y  38),  Kopu9aîoXoç,  par  «  qui  agite  son  casque  » 
(ô  Kivuùv  Tiiv  KÔpu0a),  mais  Ton  pensera  aux  reflets  de  cou- 
leur changeante  de  cette  pièce  de  son  armure.  AîôXoç  en 
vient  ainsi  assez  souvent  à  acquérir  un  sens  voisin  de  notre 
adjectif  (c  chatoyant  ».  Ce  dernier  mot,  au  sen.-^  insuffisam- 


424  L.    PARMENÏIER 

ment  expliqué,  vient  de  «  chat  »,  sans  doute  à  cause  des 
teintes  changeantes  de  son  œil  (Littré)  et,  comme  l'a  dit 
un  poète,  «  des  parcelles  d'or,  ainsi  qu'un  sable  fin  », 
étoilant  «  vaguement  ses  prunelles  mystiques  ». 

Sophocle  a  conservé  particulièrement  bien  le  sens  pri- 
mitif d'aîôXoç.  Xous  avons  déjà  vu  plus  haut  aiôXoç  bpÛKuuv. 
La  manière  dont  il  faut  comprendre  aiôXa  vuH,  Triuli.  132, 
nous  est  clairement  expliquée  par  Eschyle,  Prométhée  24 
7roiKi\ei)uujv  vOS,  la  nuit  au  manteau  parsemé  d'étoiles.  Cf.  ■ 

Euripide,  frg.  503  ôpcpvaia  vùE  aioXôxpuuç.  Hélène  1096  ào"Té- 

PUUV  TTOlKÎ\|UaTa. 

Dans  VAJcix  102o,  où  Tencer  dit  en  présence  d'Ajax 
percé  de  son  épée  :  ttûjç  O"'  dTTOcnrâo'uu  TTiKpoû  TOÛb'aiôXou 
KViObovTOç,  l'épithète  aiô\ou  me  paraît  de  circonstance, 
comme  TriKpoû,  et  elle  tend  à  peindre  l'aspect  du  glaive 
taché  du  sang  d'Ajax. 

Enfin  Philoctcte  1 157,  è)uâç  o'apKÔç  aîôXaç  représente  avec 
réalisme  la  couleur  des  chairs  du  pied  gangrené  de  Phi- 
loctète. 

L'idée  de  teintes  variées  impliquée  dans  aiôXoç  apparaît 
encore  par  les  mots  xaÙTÔv  TTiépov  qui  suivent  cet  adjectif 
chez  Eschyle,  Sui)pliaiites  327  : 

aiôX'  dvôpujTTuuv  KaKOf 
TTÔvou  5'  ïboiç  dv  oùbai^oû  taÙTÔv  Trxepôv. 

M.  P.  Mazon  a  traduit  avec  son  bonheur  ordinaire  :  «  Les 
malheurs  humains  ont  des  teintes  multiples  :  jamais  ne  se 
retrouve  même  nuance  (littéralement  «  plumage»)  de  dou- 
leur. » 

* 
*     * 

11  faut  placer  ici  dans  la  succession  des  sens  l'emploi  des 
mots  de  couleur  aiôXoç  et  ttoikîXoç  pour  rendre  la  variété 
de  timbre  de  certains  sons.  C'est  un  trope  naturel  et  que  le 
style  moderne  a  tourné  au  procédé.  Je  n'en  trouve  des 
exemples  certains  pour  aîôXoç  qu'après  Homère. 

Euri])ide,  Ion  499  oupi^^vjv  ùtt'  aîôXaç  îaxâç  0)lIvujv. 
Cf.  Piudare,  Olymp.  III  8  TTOïKiXÔYapuç  (pôpm-fE,  IV  2  ttoiki- 
XôqpopiuiTE  doibâ.  Dans  Olymp.  IX  42  aîoXoPpôvTaç  (Zeus) 
que  l'on  traduit  «  vibrantia  fulmina  iaculaus  ))  pourrait,  je 
pense,  s'appliquer  aussi  bien  au  son  qu'à  l'éclat  du  tonnerre. 


MOTS  HOMÉHIQUES  425 

Aristophane,  Grenouillefi  247,  fait  dire  au  clia'ur  discoi- 
dant  des  grenouilles  : 

evubpov  èv  PuGô)  xopeiav 
aîôXav  è(p9e-fHâ)Liea0a 
Tro)ucpo\uYOTTa{p\âcr|uc(CTiv  (^). 

Une  expression  sûrement  ancienne,  que  l'on  trouve  dans 
les  Problcmes  d'Aristote  941  B  24,  appelait  aiôXoi  les  jours 
d'automne  pendant  lesquels  les  teintes  du  ciel  et  les  vents 
sont  particulièrement  variables  et  changeants. 

Si  le  nom  du  dieu  du  vent,  Aiolos,  est  le  même  que  notre 
adjectif,  ce  serait  sans  doute  son  allure  inconstante  et 
changeante  qui  l'a  fait  aj^peler  ainsi.  En  effet,  l'idée  de 
«  rapide  »,  admise  généralement,  si  elle  convient  bien  à  la 
tempête,  ne  caractérise  j)as  proprement  le  vent  dont  la 
variabilité  est  ce  qui  frappe  le  plus,  surtout  chez  un  peuple 
de  marins. 

Le  sens  moral  de  «  rusé,  trompeur  »,  appai'aît  dès 
l'époque  épique  pour  aîôXoç  et  nous  retrouvons  ici  de  nou- 
veau le  parallélisme  parfait  avec  ttoikî\oç.  Hésiode,  Théog. 
5H  TTOïKÎXov,  aioXô|unTiv  (Prométhée),  frg.  27,4  ZÎŒuqpoç  aioXo- 
jui'iTriç.  L'épithète  a  été  répétée  par  les  épiques  tardifs, 
Oppien,  Ha/.  II  503,  etc.  Cf.  chez  Homère  TTOïKiXoMnTnç 
A  482  et  souvent.  Eschyle,  Suppliuntcs  1037  aioX6|unTiç  9eôç 
(Aphrodite);  cf.  TTOiKiXo|uriTibeç  diai  Sophocle,  frg.  o33,  ttoiki- 
Xôqppuuv  Euripide,  Héciibe  131.  Eschyle,  Prométhée  661 
aioXoOTÔjuouç  xPH^^MO^Ç;  cf.  TTOïKiXujbôç  Z91YS  Sophocle,  Ocd.- 
Koi  130. 

L'équivalence  d'aiôXoç  et  de  ttoikiXoç  est  restée  sensible 
jusque  chez  les  poètes  les  plus  tardifs  et  ils  ont  pu  ainsi  de 
tout  temps  user  d'un  jeu  de  synonymes  commodes  pour 
varier  l'expression.  Quelques  exemples  : 

aioXôpouXoç  Oppien,  Cyn('i>-.  I  4o2;  cf.  ttgikiXôPouXoç 
Hésiode,  ']'hi'0'>-.  o21.  —  aîoXobdKpuç  Xonnus  20,  79  et  ttoiki- 
XôbttKpuç  10,45.  —  aioXôbeipoç  Ibycus  8,  Xonnus  47,  31  et  ttoi- 
KiXôbeipoç  Hésiode,  Tranaiix  203,  Alcée  81.  —  aioXôbuupoç 
Epiménide  19,  iroïKiXôbuupoç  Xonnus,  lo.  12,  lo.  —  aioXô|uop- 


(')  Il  serait  trop  loiigr  d'éludier  ici,  le  texli'  iiY-lanl  pas  sur,  la  vaU'iir  daiôXav 
chi;/.  Aristopliane,  Tfie.onopliories  lO.'il,  aîôXav  vékuoiv  èm  TTopeictv.  Kn  Imil 
cas  le  sens  n'est  pas  OKoreivriv  isclioliasle). 


426 


L.    PAKMF.NTIER 


cpoç  Orjih.Ar}^-.  975,  TTOïKiXôiuopqpoç  Aristophane,  Pliitus  530. 
—  aioXôvuuTOç  (Taubv)  Oppien,  Cyiiég.  II  590.  Cf.  plus  haut 
TTOïKiXôvuuTOç.  —  aioXôcpuXoi  Oppien,  Hul.  II  420  et  ttoikiXô- 
(puXoç  ibid.  1617,  etc. 


1 


Il  nous  reste  à  étudier  trois  exemples  anciens  où  appa- 
raît le  verbe  dérivé  aiôXXuj  dans  la  poésie  grecque.  On 
indique  comme  première  signification  «  agiter  vivement 
en  tous  sens  »,  mais  il  est  certain  que  pour  l'un  des  trois 
cas  au  moins,  on  traduit  sans  difficulté  en  partant  du  sens 
premier  que  nous  avons  donné  à  aiôXoç.  Hésiode,  Bou- 
clier 399,  décrivant  la  saison  la  plus  chaude,  dit  que  c'est 
l'époque  où  les  raisins  verts  (ôjuqpaKeçi  aiôXXovTai.  Entendons 
que  les  grains  de  raisin  se  bigarrent,  commencent  à 
prendre  des  tons  blancs  et  rouges,  exactement  comme 
l'espèce  de  cerise  que  nous  avons,  pour  la  même  raison, 
appelée  bigarreau. 

Le  second  emploi  de  aiôXXeiv  se  trouve  dans  une  curieuse 
comparaison  de  V Odyssée  u  25  et  suiv.  Il  s'agit  d'Ulysse 
qui  se  retourne  dans  son  lit,  pendant  qu'en  proie  à  l'insom- 
nie il  médite  la  perte  des  prétendants. 

'ATàp  aÙTÔç  éXicrceTO  ëv0a  xai  evGa. 
'Qç  b'ôie  YotcTTép'  dvrip  ttoXéoç  irupôç  ai9o|uévoio, 
è)aTTXei)"iv  kvîœiiç  te  Kai  aï)uaT0ç,  êvGa  xai  ëv6a 
aîôXXi,!,  \xù.\a  5'  djKa  XiXaiexai  ÔTTTr|9fivai, 
ùjç  âp'  ô  y'  ev9a  Kai  evGa  éXiodeTO  juepiuripilujv 
ÔTTTTuuç  6ri  juviiOTiipoiv  àvaibé(Ji  x^ipotÇ  èqpr|(7ei 
jucOvoç  èùjv  TToXéai. 

Le  genre  de  mets  que  fait  rôtir  ici  le  cuisinier  nous  est 
connu  notamment  par  a  44  et  par  Aristophane,  Nuées  409. 
C'est  un  estomac  de  chèvre  ou  de  porc,  rempli  de  graisse 
et  de  sang.  «  De  même  qu'un  homme,  quand,  à  un  grand 
feu  flambant,  il  rend  aiôXoç  de  côté  et  d'autre  un  estomac 
plein  de  graisse  et  de  sang,  désireux  de  le  faire  très  vite 
rôtir,  de  même  Ulysse  se  retournait  de  côté  et  d'autre,  en 
méditant  comment  il  frapperait  les  prétendants.  »  La  com- 
paraison paraît  un  peu  étrange  parce  que  d'une  part  nous 
avons  le  cuisinier  agissant  sur  un  objet  étranger,  et  de 


MOTS  HOMÉRIQUES  427 

l'autre  Ulysse  agissant  sur  lui-même,  mais  ce  dédouble- 
ment d'Ulysse  a  été  préparé  par  les  vers  qui  précèdent 
(io  sqq.)  où  il  a  adressé  la  parole  à  son  propre  cœur.  On 
traduit  aiôX\i,i  comme  s'il  y  avait  èXicTCTii,  entendant  que  le 
cuisinier  tourne  en  tous  sens  son  gaster  farci.  Assurément, 
il  doit  le  déplacer  et  le  faire  rôtir  de  tous  côtés,  mais  je 
crois  que  le  poète  n'a  pas  simplement  répété  ici  une  troi- 
sième fois  l'idée  de  éXicrcreiv,  exprimée  au  début  et  à  la  fin 
de  sa  comparaison,  et  suffisamment  suggérée  par  le  tableau 
qu'il  présente.  Il  a  introduit  une  image  nouvelle,  en  nous 
montrant  l'aspect  que  gagne  l'espèce  de  gros  boudin  pen- 
dant la  rapide  opération  du  cuisinier  :  il  prend  couleur, 
c'est-à-dire  il  devient  aiôXoç,  de  blanchâtre  qu'il  était,  à 
mesure  que  sa  surface  est  rôtie  au  feu.  Il  me  parait  donc 
que  le  verbe  aîôXXeiv  est  ici  un  terme  culinaire,  à  rappro- 
cher à  quelques  égards  de  nos  expressions  «  rissoler,  faire 
revenir  )>. 

Je  ne  m'arrêterai  guère  au  troisième  passage,  Pindare, 
Pyth.  IV  233,  parce  que  le  texte  n'y  est  pas  sûr.  Jason  par- 
vient à  conduire  les  bœufs  d'Aiétès,  qui  vomissent  la 
flamme,  et  grâce  aux  recettes  magiques  de  Médée  le  feu  ne 
l'atteint  pas  :  Ttûp  bé  viv  oùk  aiôXXei  (manuscrits).  Pour  des 
raisons  métriques,  les  éditeurs  admettent  la  correction 
médiocrement  poétique  èôXei  (Boeckli),  plus-que-parfait  de 
eïXuu.  On  voit  cependant  quelle  belle  image  mettrait  ici  le 
verbe  aiôXXei.  Le  héros  conduit  les  bœufs  qui  soufflent  la 
flamme,  sans  même  que  le  feu  le  bariole  de  ses  reflets. 


Les  fervents  de  la  paléontologie  linguistique  rappelle- 
raient sans  doute  ici  que  Aiolos,  fils  d'IIellen,  l'ancêtre 
éponyme  des  Eoliens,  a  un  frère  Xouthos,  qui  porte  égale- 
ment un  nom  de  couleur  (fauve),  et  l'origine  et  le  sens  pri- 
mitif du  nom  des  Eoliens  pourraient  leur  donner  l'occasion 
d'hypothèses  analogues  à  celles  que  l'on  trouve  par 
exemple  chez  Victor  Hehn  à  propos  du  nom  des  Pkti  et  de 
celui  d'autres  peuples  {Kiiltiirp/Jnnzen  iind  flnusticre, 
p.  17.  8«  éd.). 

wSans  m'aventurer  dans  un  domaine  aussi  fantaisiste,  je 
crois  pouvoir  indiquer,  à  la  fin  de  cet  article,  qu'il  convient 


428  L.    PARMENTiER 

de  reviser  l'explication  que  l'on  a  donnée  jusqu'à  ce  jour 
du  nom  grec  du  cliat  aiéXoupoç.  On  le  dérive  de  aîôXoç,  pris 
dans  le  sens  que  nous  rejetons,  et  de  oùpâ  «  queue  »,  et  on 
l'explique  comme  «  l'animal  qui  remue  la  queue  ».  Ce  serait 
très  bien  s'il  s'agissait  du  chien,  mais  il  suffit  d'un  instant 
de  réflexion  pour  reconnaître  combien  une  telle  qualifica- 
tion est  peu  caractéristique  du  chat.  Ici  encore,  les  gram- 
mairiens et  les  étymologistes,  bien  que  comptant  sans 
doute  parmi  «  les  savants  austères  »  qui  aiment  les  chats 
«frileux  et  comme  eux  sédentaires  »,  ont  négligé  de  con- 
fronter avec  la  réalité  l'explication  que  leur  suggérait  la 
lettre  écrite.  Je  me  compte  parmi  eux,  car  je  n'avais  pas 
songé  à  tirer  à  l'égard  de  la  gent  féline  la  conclusion  qui 
résulte  de  l'étude  précédente.  C'est  un  de  mes  amis,  à  la 
fois  savant  biologiste  et  très  érudit  helléniste,  le  D''  Robert 
Legros,  qui  m'a  expliqué  que  aîéXoupoç  devait  signifier 
l'animal  à  la  queue  tigrée.  Ainsi  se  révèle  à  nouveau  le  don 
merveilleux  qu'avaient  les  anciens  Ioniens  pour  distinguer 
dans  les  objets  et  les  êtres  la  qualité  unique  et  vraiment 
caractéristique.  Dans  la  faune  qui  leur  était  familière,  le 
chat  —  il  s'agissait  alors  sans  doute  du  chat  sauvage  — 
était  le  seul  animal  dont  la  queue  offrait  cette  particularité. 
Les  linguistes  ne  seront  pas  embarrassés  pour  imaginer, 
pai-  des  rapprochements  avec  des  langues  éloignées,  une 
ou  plusieurs  autres  étymologies  pour  le  mot  aiéXoupoç.  Il 
n'en  reste  pas  moins  qu'au  v«  siècle  encore  la  valeur 
descriptive  du  nom  de  l'animal  était  si  bien  sentie  qu'on 
répondait  naturellement  i)ar  aiéXoupoç  à  l'idée  de  ttoikiXgç. 
Un  témoignage  pittoresque  nous  en  est  apporté  par  le 
drame  satyrique  de  Sophocle  récemment  découvert,  les 
'IXveuTtti,  v.  295.  La  nymphe  Cylléné  décrivant  comme  il 
suit  la  tortue  avec  laquelle  Hermès  a  fabriqué  sa  lyre  : 

ppaxùç  xuTpuubriç  ttoikîXi,!  bopa  KaTeppiKVuujuévoç 

le   chœur  devine  tout   de   suite   qu'il   s'agit   du   chat   et 
répond  : 

ùjç  aiéXoupoç  eÎKâcJai  TréqpuKev  iî  tujç  TTÔpbaXiç. 

L.  Pakmentier 


Auguste  et  Athènes 

I 

L'initiation  d'Auguste  aux  Mystères  d'ÉIeusis 

La  date  de  l'initiation  d'Auguste  aux  Mj'stères  d'Eleusis 
pose  un  problème  qui  ne  semble  pas  avoir  été  résolu  encore 
d'une  manière  satisfaisante. 

Fouoart  s'était  contenté  de  i^lacer  l'événement  en  24  (^), 
sans  s'être  aj^ercu  qu'il  était  difficile  de  concilier  cette 
date,  qui  nous  est  donnée  par  Dion  Cassius  (*j,  avec  celle 
de  31,  qui  nous  est  fournie  par  un  autre  passage  du  même 
historien  (•^),  i^our  l'initiation  du  môme  empereur. 

Giannelli  a  bien  vu  la  contradiction  qui  semble  exister 
entre  ces  deux  textes,  et  il  a  essayé  de  la  faire  disparaître 
de  la  manière  suivante  (^)  :  Auguste  aurait  bien  été  initié 
en  31  ;  si  Dion  mentionne  encore  cet  événement  à  l'occa- 
sion de  l'initiation  de  l'Hindou  Zarmaros,  qui  se  place 
dans  l'hiver  de  21-20,  c'est  i)0ur  rappeler  que  l'empereur 
avait  été  lui-mcme  i)récédemment  initié. 

J'estime  que  cette  exjDlication  n'est  pas  admissible  :  elle 
oblige  à  solliciter  un  texte  qui  semble  pouvoir  s'expliquer 
plus  simplement. 

Ce  que  Giannelli  paraît  bien  avoir  établi,  c'est  que  l'ini- 
tiation d'Auguste  eut  sûrement  lieu  en  31.  Le  seul  des  deux 
textes  de  Dion  qui  soit  parfaitement  clair  est  celui  où  l'his- 


(')  P.  FoiCAKT,  «  Les  Roiuaiiis  iiiilii's  aux  Mystères  d'Klousis  ».  Hc'ue  de 
Phil.,  XVII,  1893,  p.  IS)8,  ii.  1.  Garki.  i,  llendknnto  delf  Acatd.  Sa/ndl,  1000, 
pp.  .J.J  sqq. 

(•')  DioCas.,  LIV,  il. 

(<)  Dio.  Ll,  -4. 

(')  GivNNEi.i.i,  «  I  iioiiiMiii  :i(l  Kli'iisi  »,  Mli  Armd.  lorlnu.  !..  I91i-iî>l;j, 
pp.  iii^i  sqq.  Cf.  aussi  (J.vuimi viskn,  Àiif/ustus  und  seine  Zeit,  I,  pp.  380,  83:2; 
II,  -481,  n.  !(;  DKiMANN-diioKHK,  Grsrlnrlile  Hinn.i,  IV,  p.  291  ;  vi»'  Domaszkwski, 
CjCscIiIcIiIl'  (fer  n'iiniscfien  AVf/.vr-,  1,  p.  l.'iT. 


430  p.    GHAINDOR 

torien  nous  assure  qu'après  Actium,  Auguste  se  rendit  à 
Athènes  et  y  fut  initié  avant  de  se  transporter  en  Asie,  il 
faut  comprendre  à  Samos,  où  il  passa  un  ijrcmier  hiver  (i)  : 
Ktti  ô  )uèv  ibç  oùbevôç  ëri  beivoû  rrapà  tûjv  èCTpaTeujuévujv  è(7o- 
Mévou,  TÛ  T€  èv  rr]  'EWàbi  biûjK^ae  Kai  tuùv  toîv  9eoîv  laucTTr)- 
piuuv  .ueiéXa^ev  (~i,  ëç  xe  xriv  'Aoiav  KOiuiaBeiç  kui  èKeîva  Trpo- 
(JKa9i(TTaT0  (LI,  4,1,  éd.  Boissevain). 

Le  fait  qu'Auguste  se  rendit  à  Athènes  immédiatement 
après  la  bataille  est  confirmé  par  Plutarque  {^).  Certes, 
c'était  pour  s'occuper  des  affaires  de  la  Grèce,  mais  on  peut 
penser  que  l'approche  des  Mystères  ne  fut  pas  sans 
influence  sur  sa  décision. 

Le  second  passage  de  Dion  nous  reporte  à  l'hiver  21-20, 
au  moment  où  Auguste  passait,  une  fois  encore,  l'hiver  à 
Samos.  Parmi  les  ambassades  qu'il  y  reçut,  il  y  en  avait 
une  de  l'Inde  :  eîç  b'ouv  tôiv  'IvbOùv  Zdpiuapoç,  eiie  bx]  toû  tûjv 
CoqpiaTÛJV  Yévouç  ujv,  Kai  KaTàTOÛTO  ùttô  qpi\0Ti|uiaç,  eiTe  Kai  ùttô 
TOÛ  "féptJuç  Karà  tôv  Trârpiov  vô)aov,  eiie  Kai  èç  èîTibeiEiv  toû  t6 
AÔYOÛaTOu  Kai  tûjv  'AGnvaiuuv,  Kai  yàp  èKeîae  ii\9ev,  dTTo6aveîv 
èGeXiîaaç  è)uuiî0»-i  t6  Ta  toîv  Oeoîv,  tujv  |uu(7Tripîujv  Kaînep  oûk  èv 
Tuj  KaôiÎKOVTi  Kaipiî),  ujç  qpao"i,  bià  tôv  Aûyoucttov  Kai  aÙTÔv 
lueiauimévov  Yevo|uévujv,  Kainupî  èauTÔv  Z^iÎJVTa  èSébuuKev  (*). 

Giannelli  se  débarrasse  un  peu  trop  aisément  de  la  diffi- 
culté que  présentent  les  mots  xai  aÛTÔv  luejuuiiiuévov  en  com- 
prenant qu'Auguste,  qui  avait  été  initié  en  31,  obtient, 
en  21,  en  faveur  de  personnes  qui  lui  étaient  agréables,  une 
réjjétition  des  Mystères  qui  avaient  déjà  été  célébrés. 

Il  n'y  a  cependant  qu'une  manière  de  traduire  le  texte  de 
Dion  :  «  Zarmaros...  fut  initié  aux  Mystères  des  deux 
déesses,  les  Mystères  ayant  été  célébrés  à  une  date  excep- 
tionnelle, dit-on,  à  cause  d'Auguste  qui  fut  initié  lui 
aussi...  » 


(1)  Sur  la  succession  des  événements,  cf.  les  textes  réunis  en  dernier  lien 
par  FiETZi.EK  elSKKCK,  liral-Enr.,  X,  pp.  .S32  S(|. 

(2)  Pour  pouvoir  placer  l'initiation  en  15)  (V),  Gaiuiici,  o.  /.,  p.  57,  esloldigé 
de  traduire  <•(!  verbe  par  «  assista  »  !  A  supposer  que  cette  traduction  fût  pos- 
sible, Dion  eùl-il  rappelé  qu'.\uguste  fut,  comme  les  non-i)iitiés,  simple  spec- 
tateur des  cérémonies  pnhH<jues  des  Mystères? 

(^)  Put.,  Ant.,  08. 

(■•)  Pour  la  date,  cf.  la  bibliographie  citée  par  Diehi.,  lies yestar  diri  Avgusli^, 
Honri,  1018,  note  du  ,!^  ."il. 


AUGUSTE   ET  ATHÈNES  431 

Si  Dion  a  voulu  dire  qu'Auguste  avait  été  précédemment 
initié,  il  faut  avouer  qu  il  s'exprime  en  termes  peu  clairs 
et  qu'un  adverbe  n'aurait  pas  été  inutile  pour  préciser  le 
sens  de  luejuurmévov.  D'ailleurs,  pourquoi  rappeler  cette 
initiation  en  21,  si  elle  a  eu  lieu  déjà  en  31  ?  Le  bià  marcjue 
clairement  que  ce  n'est  pas  uniquement  pour  plaire  à 
Auguste,  qui  désirait  assister  à  la  mort  de  Zarmaros,  que 
l'on  répète  les  Mystères,  mais  aussi  parce  qu'il  voulut  lui 
aussi  se  faire  initier. 

Mais  alors,  comment  éviter  la  contradiction  ({ue  nous 
avons  signalée? 

Faisons  d'abord  observer  que  ni  Foucart  ni  Giannelli 
n'ont  remarque  l'existence  d'une  autre  difficulté  tout  aussi 
sérieuse  :  quelle  que  soit  la  date  à  laquelle  Auguste  a  été 
initié,  il  est  sûr  que  ce  n'est  pas  en  Anthestérion,  dans  le 
mois  qui  correspondait  à  peu  près  à  février-mars  (').  La 
première  fois  qu'il  vint  à  Athènes,  ce  fat  en  septembre  31, 
immédiatement  après  la  bataille  d'Actium,  pour  se  rendre 
ensuite  à  Samos  où  il  séjourna  une  partie  de  l'hiver  et  qu'il 
quitta  précipitamment,  au  milieu  de  l'hiver  encore,  pour 
gagner  Brundisium,  à  la  nouvelle  des  troubles  suscités  par 
les  vétérans.  Après  avoir  passé  27  jours  dans  cette  ville, 
il  retourne  en  toute  hâte  en  Asie,  pour  s'arrêter  à  Rhodes 
d'abord,  passer  ensuite  à  Ptolémaïs  et  de  là  en  3^]gypte  {^). 

Il  est  donc  impossible  de  supi)oser  qu'il  ait  pu  assister 
aux  Petits  Mystères  qui  avaient  lieu  en  Anthestérion. 

Par  contre,  il  aurait  pu  se  trouver  à  Athènes  pour  les 
Petits  Mystères  de  21.  Au  début  de  l'année,  il  était  encore 
en  Sicile  qu'il  quitte  pour  le  Péloponèse.  Dion,  après  la 
mention  de  son  séjour  à  Sparte,  ajoute  seulement  qu'il 
enleva  Erétrie  et  Egine  aux  Athéniens  avant  d'aller 
passer  un  second  hiver  à  Samos  (•*).  Il  ne  nous  dit  même 
pas  qu'il  séjourna  à  Athènes,  encore  moins  qu'il  assista 
aux  Petits  Mystères  de  21  ■*)  :  il  n'aurait  pas  manqué  sans 


(')  BisciidKK,  lUal-En(.,  X,  p.  i.j'.)l. 

(2)  Sur  tous  ces  faits,  cl",  les  textes  réunis  \):\r  ordre  chronologique  dans  la 
Heal-Enr.,\,  p.  332-33i. 
(■')  Pour  tous  ces  t'vénoinoiils,  i-f.  ifiiil.,  p.  3'JO. 
(^  Di...  LIV,  7,  1-3. 


432  P.    GRAINDOU 

doute  de  nous  signaler  le  fait,  puisqu'il  mentionne  à  deux 
reprises  l'initiation  d'Auguste,  en  31  et  après  septembre  21. 

D'ailleurs,  il  est  certain,  d'après  le  même  historien, 
qu'Auguste  avait  déjà  été  initié  en  31;  si  même  l'empe- 
reur participa  aux  Petits  Mystères  de  21,  il  aurait  donc  dû 
en  être  dispensé  lors  de  sa  première  initiation.  Cependant, 
les  Petits  Mystères  constituaient  une  préparation,  mais 
une  préparation  obligatoire  (^),  si  bien  que,  lorsque  Démé- 
trius  Poliorcète  voulut  recevoir  en  une  fois  l'initiation 
complète,  on  fut  obligé  de  donner  au  mois  Mounichion  le 
nom  d'Antliestérion,  pour  pouvoir  célébrer  les  Petits 
Mystères,  puis  de  l'appeler  ensuite  Boédromion,  mois  où 
les  Grands  Mystères  se  plaçaient  ('). 

Plus  tard,  il  ne  semble  plus  qu'on  ait  eu  besoin  d'avoir 
recours  à  de  pareils  subterfuges. 

Un  décret  de  215-214  atteste  que  l'on  pouvait  répéter  les 
Petits  Mystères  dans  un  mois  autre  que  celui  d'Anthesté- 
rion  et  qu'il  était  même  d'usage  de  les  célébrer  deux  fois 
les  années  où  avaient  lieu  les  Grandes  Eleusinies  (^).  Même 
une  dédicace  d'Eleusis  nous  apprend  qu'il  était  permis, 
GeiLiiTÔv,  de  procéder  deux  fois  à  la  célébration  des  Mys- 
tères la  même  année,  comme  on  le  fit  pour  l'empereur 
Lucius  Vérus  ("*). 

Mais,  jusqu'ici,  rien  n'atteste  que  dispense  pouvait  être 
accordée  des  Petits  Mj^stères,  même  à  des  empereurs.  Il 
semble  toutefois  que  ce  fut  le  cas  i^our  Marc-Aurèle  et 
Commode,  initiés  tous  deux  en  176.  Pour  ce  qui  les  con- 
cerne, Foucart  s'est  borné  à  dire  :  «  Si  l'on  suppose  qu'ils 
observèrent  la  règle,  comme  l'avait  fait  Hadrien,  ils  furent 
initiés  aux  Petits  Mystères  en  mars  176  et  aux  Grands  en 
septembre  {^).  »  Giannelli  s'est  contenté  d'affirmer,  je  tra- 
duis, «  que  l'empereur  était  déjà  à  Smyrne,  au  printemps 
de  176,  où  Commode  le  rejoignit.  De  là,  ils  i^assèrent  en 


(1)  Foi'CAUT,  Ijes  Mystères  d'Eleusis,  p.  267. 

(•')  Pi.t  T.,  Dem.,  26.  Cf.  Giannei.i.i,  p.  .324  et  ii.  1. 

(•')  IG,  IMII-,  847,  1.  22  (cf.  van  deu  Loeff,  De  Indis  Kleimniis,  Diss., 
Leydc,  100.3,  p.  7;  Stexoei,,  lieul-Enc,  V,  p.  2331;  Griecli.  KultnsaUertiiinef^, 
p.  182. 

(<)  'Eqp.  dpx.,  1895,  p.  111,  iio  27,  11.  23  sq.  =  SIG\  860. 

(:■)  FntcMtr,  Rcv.  l'/ril.,  XVII.  p.  20ri. 


AUGUSTE  ET  ATHÈNES  433 

Grèce  et,  en  automne,  ils  se  trouvaient  encore  à  Athènes. 
Au  commencement  de  novembre,  ils  retournèrent  en 
Italie  0).  » 

Si  les  deux  empereurs  ne  se  trouvaient  pas  à  Smyrne  au 
mois  d'Antliestériou,  comme  on  l'a  parfois  supposé  (-),  il 
semble  bien  qu'ils  ont  passé  l'été  en  Asie  Mineure  ou,  en 
tout  cas,  ne  se  sont  pas  rendus  à  Athènes  avant  l'été  (^). 

A  supposer  même  que  nous  nous  trompions  sur  ce  point, 
il  est  sûr  qu'Auguste  n'a  j^as  été  initié  avant  ol  et  qu'il 
n'était  pas  à  Athènes  avant  le  mois  de  septembre.  Comme 
il  a  certainement  été  initié  cette  année-là,  il  dut  sûrement 
être  dispensé  des  Petits  Mystères.  D'ailleui's,  même  si  l'on 
admettait  avec  Foucart  que  sa  première  initiation  ne  date 
que  de  21-20,  elle  aurait  eu  lieu  après  la  célébration  des 
Mystères  de  Boédromion  pour  lesquels  Auguste  arriva 
trop  tard,  et  il  ne  pourrait,  cette  année-là  non  plus,  être 
question  de  son  initiation  aux  Petits  Mystères. 

Comment  échapper  à  la  contradiction  qui  semble  exis- 
ter entre  les  deux  textes  de  Dion  et  à  la  difliculté  résul- 
tant de  l'obligation  de  se  présenter  d'abord  aux  Petits 
Mystères? 

Je  n'aperçois  que  deux  solutions  possibles.  Ou  bien 
Auguste  a  été  initié  aux  Petits  Mystères  qu'on  aurait 
répétés  pour  lui,  en  31,  et  aux  Grands  en  21  ;  ou  bien  il 
aurait  été  admis  dii-ectement  aux  Grands  Mystères  en  31 
et  au  troisième  degré,  à  l'époptie,  en  24. 

La  première  doit  sans  doute  être  rejetée  ;  si  Dion  a  soin 
de  mentionner  les  conditions  exceptionnelles  de  l'initia- 
tion de  21,  il  ne  nous  dit  rien  touchant  celle  de  31. 

Et  nous  conclurons  qu'Auguste  a  été  initié  deux  fois  aux 
Grands  Mystères,  pour  respecter  tout  au  moins  la  pres- 
cription qui  exigeait  un  intervalle  minimum  d'un  au  entre 
l'initiation  proprement  dite  et  l'époptie  (■»)  :  cette  dernière 
se    conférait,    elle   aussi,    en   Boédromion   (&).    Beaucoup 


(')  GlAVNEl.LI,  p.  381. 
(^)  Clinton,  Fasfi  Roniani,  ;i  raïuiéo  176. 
(3)  vox  RoiiDEN,  Real-F.m.,  1,  p.  2301. 

(*)  FoiCART,    Les  Mystères  d'Eleusis,   p.    432;    M.    Brillant,    Les   Mystères 
d' Eleusis,  pp.  84  sq. 
(^)  Ftn  CART,  p.  432. 

•28 


434  p.    GRAINDOR 

n'allaient  pas  jusqu'à  ce  degré  suprême,  mais  l'on  peut 
croire  qu'Auguste  fut  de  ceux  dont  parle  Sénèque  et 
qui  revenaient  à  Eleusis  pour  y  chercher  peut-être  «  un 
surcroît  de  garanties  pour  la  vie  future  (^)  «  :  non  semel 
quiiedam  sacra  tradiintur;  servat  Eleusis  quod  revisenti- 
biis  ostendat  {^). 

II 

Un  décret  d'Athènes  en  l'honneur  d'Auguste 

Kirchner  a  copié  au  Musée  épigraphique  d'Athènes  un 
fragment  de  décret  trouvé  dans  la  Bibliothèque  d'Hadrien 
et  l'a  publié  dans  Veditio  minor  des  IG,  11^.  1071.  C'est  un 
fragment  de  stèle  de  marbre  pentélique  de  0"30  de  haut 
sur  0™27  de  large  et  0"^09o  d'épaisseur  (complet  en  haut 
seulement).  D'après  l'écriture,  le  texte  daterait  du  début 
de  l'Empire.  Nous  allons  essayer  de  montrer  que  l'éditeur 
avait  deviné  Juste  et  qu'on  ne  doit  pas  se  contenter  d'ad- 
mettre, avec  Hiller  von  Gaertringen  (3),  qu'il  y  était  peut- 
être  question  du  jour  anniversaire  de  la  naissance  d'un 
empereur  (1.  8). 

—  —  —  —    Aîaviiç    —    —    —    — 

—  —  —  —  loç  èTT£aTdT[ei]      -      — 
—  'AvTmdTpou  vu  0\    —    — 

—  —  [TTpiÔTepov  èvjJiicpiaaTO  ô  b[fi|uoç] 
D         [Kai(7ap]i  ZePaatiJùi  TTpàTTe(79a[i]     — 

—  —  uuv  xaîç  é'vaiç  Tijuaîç    —  —  — 

—  —  eTtti  v  Tr)v  |uèv  bujbeKaT[riv]    — 
—  Yevé6\iov  éopTâIei[v] 

—  ['AttôJWuuv  iriv  èpbôjunv  iep[àv] 
10 uuv  eiai  bniuoTeXeîç     —  — 

—  —  —     TrapôvTuuv  }JLe  —  —  —  — 

—  —  —  —  [6euu]poûvTa    —  —  — 

Quoique  nous  possédions  peu  de  décrets  du  temps  d'Au- 


(ij  Jhid.,  p.  iin\, 

(2j  Sen.,  Quaest.  «a/.,  VII,  31, 

(3)  IG,  H-,  /.  /. 


AUGUSTE  ET  ATHÈNES  435 

guste  et  même  de  l'Empire  (^),  le  texte  étant  complet  en 
haut,  on  doit  restituer  le  début  comme  suit  : 

['0  beîva  Toû  beîvoç  (dème)  rjpxev]  Aiaviiç  [ènpuTdveuev] 

[ô  beîva  èYpa|u)aàTeuev,]  — loç  è7TeaTâT[er  êboEev  xni] 

[pou\f|i  Kai  Tuiji  btTjuuur  'AvTÎTraTpoç]  'AviiTTotipou  0\[u€Ùç  emev] 
[là  )aèv  dWa  Trâvia  KaGàrrep  TrpjÔTepov  èipirpicraTO  ô  b;^n)uoç] 
[ô  'AGnvaiuuv  AÙTOKpdTopi  Kaîcrap]i  lePaaTuùi  TrpàTTeaea[i]    - 

On  n'emploie  i)lus,  après  le  milieu  du  iv®  siècle  avant 
J.-C,  de  ces  i)réambules  où  le  nom  de  la  tribu  au  nomi- 
natif est  suivi  de  ô  beîva  ..  iTieoràTei{^).  Il  y  a  ici,  semble-t-il, 
un  retour  vers  le  passé  qui  s'expliquerait  bien  si  le  décret 
était  soit  du  temps  d'Auguste,  soit  du  ii'^  siècle,  é])oques 
où  l'archaïsme  fleurit  en  art,  en  littérature  et  même  en 
épigraphie. 

Si  la  rédaction,  telle  que  nous  la  restituons,  était 
logique,  comme  elle  l'était  dans  les  décrets  que  l'on  imite 
ici,  le  nom  du  secrétaire  et  de  l'épistate  serait  accompa- 
gné du  patronymique  et  du  dème,  comme  il  l'était  sans 
doute  pour  l'archonte,  à  en  juger  par  l'étendue  de  la  lacune 
(elle  nous  est,  semble-t-il,  exactement  connue  par  la  1.  4) 
et  comme  il  l'était  sûrement  pour  le  nom  du  ro<>-ator.  Mais, 
dans  les  rares  décrets  d'époque  impériale,  on  observe  la 
même  hésitation  que  celle  que  suppose  notre  restitu- 
tion (3). 

L  8.  —  Après  le  nom  propre  au  génitif  qui  ne  peut  être, 
à  cette  place,  que  le  nom  du  ])èrc  de  l'auteur  de  la  proposi- 
tion, il  faut  restituer  son  dème.  Les  deux  premières  lettres 
qui  subsistent  seules  permettent  d'hésiter  entre  OXueùç  ou 
0a\r|peuç  (*)  :  la  seconde  letti-e  est,  en  effet,  donnée  comme 


(!)  IG,  II-Ill-,  10()!)à  1087. 

(2)  Cf.  notamment  IG,  U\  107  =  S[G^.  164  (368-367).  -  Parmi  les  derniers 
exemples,  cf.  IG.  II  III^,  213,  211  (347-316).  Larfeld,  Handb.  d.  qr.  Epigr., 
II,  p.  619. 

(■*j  IG,  II-III-,  1072  :  les  noms  de  larclionte,  du  secrétaire,  du  rof/alur  sont 
suivis  du  nom  de  leur  père  et  de  leur  (Icnie,  tandis  (|ue  ce  dernier  est  seul 
ajoute  au  nom  du  proèdrc;  1077  :  le  palr()ii.vnn(]ue  et  le  dème  sont  cités  pour 
l'archonte  et  le  secrétaire,  ni  Tun  ni  l'autre  pour  l'cpislatc  et  le  patronymicjue 
seul  pour  le  proèdre  tiui  a  mis  aux  voix. 

{*)  Cf.  la  liste  des  déiues  de  von  Schoefker,  Real-Fnc,  V,  p|).  1 1 1  sqtj. 


436  p.   GRAINDOR 

n'étant  qu'en  partie  conservée,  mais  l'éditeur  l'ayant 
transcrite  par  \  semble  bien  indiquer  que  OXueûç  est 
seul  possible.  Nous  connaissons  d'ailleurs  un  person- 
nage, fils  d'Antipatros,  de  ce  dème.  C'est  un  'AvTiTTaT[po]ç 
('AvTmdTpou)  0X[u£Ù]ç,  qui  est  mentionné  dans  une  liste 
de  nature  incertaine  (^),  en  même  temps  qu'un  [Oi]vôq)[iJ- 
X[oç]  ZuvbpôjLiou  TTeipieuç.  Pour  ce  dernier,  on  peut  déter- 
minei'  approximativement  l'époque  où  il  vivait.  Il  ligure, 
notamment,  sur  une  liste  de  notables  du  début  de  l'Em- 
pire (~),  en  même  temps  que  KaWiKpaTÎbriç  Zuv5pô|uou  Ziei- 
pieùç  (3),  son  frère,  le  même  sans  doute  qui  fut  archonte 
en  38-37,  en  34-33  ou  vers  33-3i>  C»). 

Comme  le  texte  doit  dater  du  commencement  de  l'Em- 
pire, on  restituerait  donc  volontiers,  à  la  l.  3,  ['Avrinarpoç] 
'AvTiTTaTpou  0\lU6Ûç  eiTTÊv],  d'autant  plus  que  d'autres 
indices  vont  nous  ramener  vers  la  même  époque. 

L.  4.  —  Comme  il  est  question,  à  la  1.  6,  d'honneurs 
votés  l'année  ])ré('édente  (^),  l'on  doit  sans  doute  restituer 
ici  [tù  jLièv  dWa  Tràvra  KaGànep  Trpjôtepov,  etc.  C'est  la  for- 
mule bien  connue  qu'on  emploie,  à  Athènes,  pour  les  amen- 
dements :  l'auteur  de  la  proposition  s'en  servirait  ici  pour 
amender  un  décret  voté  non  pas  immédiatement  avant, 


(*)  IG,  III,  1297.  Personnage  omis  par  Kirchner  dans  la  Prosopographia 
Attica  et SuNDWALL,  ISacklruge  z%ir  Prosopogruphio  Attira,  Ofversigt  afFinska 
Yetenskaps-Sncietetcns  Forhandlingar,  LU,  1909-1910. 

(2)  'Ecp.  dpx-,  1898,  p.  19,  n»  16,  1.  10.  IG,  III,  1296,  391o.  Cf.  Prosop.  Alt., 
I,  p.  106,  n°  11369.  Wilhelm,  Beitràge  zur  griech.  Inschriftenkundc,  Vienne, 
1909.  p.  88. 

(3)  'Ecp.  dpx-,  /.  f-,  1.  8.  /G,  III,  89,  618-650,  1019.  Prosop.  Att.,  I,  p.  531, 
n»  7990. 

{■*)  KoLKE,  Die  uttisc/ien  Arrhnnten  von  2'J2-29 1-3 1-30  v.  Chr.,  Abhandl.d. 
Gesell.  d.  Wissensch,  zu  Giittivgen,  PhU.-Inst.  Kl.,  nene  Folge,  X,  1908,  p.  1  il  ; 
KiKCHNER,  Real-Fnc,  X,  p.  1613.  n°  2  et  IG,  Il-lll^,  pars  i,  fasc.  1 ,  p.  ^5  (38-37); 
KiucHNER,  Uhein.  Mus.,  LUI,  p.  391  (31-33);  P.  Roussel,  Délos,  colonie  athé- 
nienne, Paris,  1917,  p.  381  (±33-32).  Pour  les  différents  archontes  de  ce  nom, 
cf.  aussi  notre  «  Chronologie  des  archontes  athéniens  sous  l'Empire  »  (Mém. 
Ac.  Belgi(/ne,  VIII,  1922),  p.  66,  n.  2  et  81. 

(^)  ^vaiç  Ti|uûîç.  Pour  le  sens  de  cet  adjectif,  cf.  l'expression  ëvoi  ëqpnPoi 
qui  désigne  les  cphèbes  de  l'année  précédenle  {IG,  II-Ill-,  1011,  1.  10).  Meis- 
terhans-Sciiwy7>:r,  Graminatik  der  allisrhen  liisiliriften'^,  p.  8(),  n.  731  :  il  faut 
accentuer  ëvoç  et  non  ëvoç.  L'éditeur  des  IG,  H-,  hésite  entre  ces  deux  ortho- 
graphes. 


AUGUSTE  ET  ATHÈNES  437 

comme  c'est  généralement  le  cas,  mais  pour  ajouter  de 
nouveaux  honneurs  à  ceux  qui  ont  été  décrétés  un  an 
plus  tôt,  en  faveur  de  rem])ereur,  par  le  ])euple  d'Athènes. 
Pour  le  verbe  TipâiTeaGai  (1.  5),  usité  dans  cette  formule, 
qu'il  me  suffise  de  renvoyer  à  un  décret  des  AthcMiiens 
pour  la  femme  de  Septime-Sévère  :  tù  )uèv  dWa  [îràvia  ouruuç 
7Tp]àTTe[a6ai,  KaGuûçl,  etc.  (^). 

(^uant  au  nom  de  l'empereur,  il  faut,  croyons-nous,  le 
restituer  [AùiOKpàTopi  Kaiaapji  ZePaaTÔii,  Il  s'agirait  d'Au- 
guste lui-même,  qui  est  plus  d'une  fois  désigné  de  la  sorte 
dans  les  textes  attiques  {^).  Non  seulement  l'écriture  et  le 
nom  d'Antipatros  nous  ramènent  au  début  de  l'Empire, 
mais  le  jour  anniversaire  qu'on  décide  de  fêter,  à  la  1.  8 
(YevéÔXiov  éoptà^eiv),  ne  i)eut  guère  être  que  celui  de  la  nais- 
sance d'un  empereur  (^),   comme  l'a  vu  déjà  Hiller  von 


(1)  /G,  11-1112,1076. 

(-)  IG,  111,  6o  :  AÙTOKpdTopoç  Geoû  uioO  ZePaOToO.  De  même  dans  i30, 
431,  130.  AÙTOKpd[Topoç  Kaioapoç  lepaOToO]?  i32.  Pour  les  tiU"es  d'Auguste 
dans  les  insfriiilions  attiques,  ci",  aussi  notre  Chronologie,  pp.  56.  .jS,  60. 

(^)  Il  est  bien  invraisemblable,  en  effet,  qu'il  s'agisse  du  milalis  imperii 
(Cf  W.  ScHMuiT,  «  Geburlstag  ini  Altertuni»  [Rfligionfjrsr/iichlliclie  Versuclie, 
VII,  1],  p.  76;  WissowA.  Reli(/io)i  iind  Kultvs  dcr  Romcr-,  p.  3io;  Wii.lems, 
Le  droit  public  romain',  p.  ili;  ^Iommsen,  Riim.  Str.,  Il'-,  p.  797,  813,  n.  1, 
841,  n.  3),  àpx»iç  "ffvéOXiov  (/G,  ll-lU-,  1077,  I.  30.  L'expression  est  omise 
dansMAc.iE,  De  Romanornm  juris  publia  sacriqne  voiabnlis  solemnibits,  Leip- 
zig, 1905).  Les  témoignages  les  plus  anciens  relatifs  au  natalis  imperii  ne 
remontent  pas  plus  haut  que  Callgula,  le  premier  dont  on  ait,  à  notre  connais- 
sance, célébré  ce  natalis  (Schii.ten,  Real-Enc,  V,  p.  478;  W.  Schmidt,  o.  /., 
p.  76).  Or,  notre  décret  ne  paraît  pas  pouvoir  descendre  aussi  bas  :  plusieurs 
indices  attestent  sutli.sannncnt  (ju'il  est  du  début  de  l'Empire.  De  plus,  le 
natalis  imperii  avait  moins  d'importance  que  le  natalis  genuinus  (Scni  ltex, 
/.  /.),  si  bien  que  certains  empereurs,  comme  Septime  Scvére,  donnaient  des 
fêtes  à  l'occasion  de  ranniver.saire  de  leur  naissance,  mais  non  de  celui  de  leur 
accession  au  trône  («  Ilist.  Aug.  »,  Vit.  l'ertin.,  15).  Enlin,  il  s'agit  vraisem- 
blablement d'Auguste  et,  dès  l'antiquité,  on  hésitait  déj;'i  sur  la  date  de  son  dies 
imperii,  les  uns  le  faisant  remonter  au  7  janvier  ou  au  19  aoiU  43,  d'autres  au 
16  janvier  27,  d'autres  enfin  au  ^'"^  juillet  23,  date  d'où  partent  ses  puissances 
triiiuniciennes.  (Cf.  Schii.ten,  /.  /.,  p.  477;  Fitzleu-Seeck,  Real-Knc.,  X, 
p.  287,  3i8.)  C'est  cette  dernière  date  (ju'Augustc  lui-mCMnc  devait  préférer 
(Mommsen,  Riim.  Str.'-,  IV,  pp.  46  sq.;.  S'il  s'agissait  donc  d'Auguste  dans  notre 
décret,  comme  c'est  à  pCH  près  certain,  il  faudrait  admettre  (lue  ce  docunn-nl 
ne  serait  pas  antérieur  ;i  23  et  (]ue  le  précédent  décret  ijui  y  est  mentionné 
serait  de  24,  l'année  précédente  (^vai  Ti)uai)  :  il  est  bien  invraisemblable  que 


438  p.    GRAINDOR 

Gaertringen,  et  d'un  empereur  qui,  vraisemblablement,  ne 
peut  être  qu'Auguste. 

Ce  n'est  pus  seulement  parce  que  le  Sénat  romain,  lui 
aussi,  avait  décidé,  en  30,  de  fêter  l'anniversaire  de  la  nais- 
sance d'Auguste,  dans  un  sénatus-oonsnlte  qui  putiusjurer 
le  décret  d'Athènes  (^),  c'est,  surtout,  parce  que  ce  YevéGXiov 
est  ici  rapproché  du  nom  d'Apollon.  On  racontait  qu'Atia 
avait  conçu  Auguste  dans  un  temple  d'Apollon,  des  œuvres 
d'un  serpent  dont  elle  avait  même  gardé  l'image  sur  le 
corps,  signe  tangible  de  l'origine  divine,  apollinienne, 
d'Auguste  (2),  légende  inspirée  sans  doute  par  celle 
d'Olympias  et  du  serpent  d'Ammon,  «  père  »  d'Alexandre. 

Auguste  lui-même  n'attribuait-il  pas  à  l'aide  du  dieu  ses 
victoires  navales  de  Sicile  et  d'Actium,  et  n'est-ce  pas  en 
souvenir  de  ces  victoires  qu'il  fit  édifier,  dans  sa  demeure 
même  du  Palatin,  un  temple  d'Apollon  {^),  qu'il  consacra  au 
dieu  un  certain  nombre  de  navires  pris  à  Antoine  et  insti- 
tua en  son  honneur  les  fêtes  pentétériques  des  Aktia  (^)? 

Et  c'est  encore  Apollon  qui  figure,  avec  Artémis,  sur  la 
cuirasse  historiée  de  la  fameuse  statue  d'Auguste  de  Pri- 
maporta  et  sur  des  tessères  d'Athènes  au  nom  de  l'emi^e- 
reur  (5), 

Pour  le  septième  jour  dont  il  est  fait  mention  à  la  1.  9, 
Hiller  von  Gaertringen  s'est  borné  à  renvoyer  à  Hésiode 
("EpY.,  770),  où  le  poète  nous  dit  que  c'était  le  jour  de  la 
naissance  d'Apollon.  Mais  c'est  aussi  à  ce  dieu  qu'appar- 
tenait sans  doute,  on  l'avait  supposé  depuis  longtemps,  le 
7  Boédromion.  C'était  vraisemblablement  le  jour  des  Boé- 


les  Alliéniens,  qui  avaient  beaucoup  à  se  faire  pardonner,  pour  avoir  suivi  le 
parti  d'Antoine,  aient  attendu  si  longtemps  pour  voter  des  honneurs  à 
Auguste. 

(1)  Dio,  LI,  19,  2. 

(2)  ScET.,  Ang.,  94,  A;  Dio,  XLV,  1,2;  Imhoof-Bixmer,  Monnaies  grecques, 
p.  300,  21a;  Real-Enc.,  X,  p.  277. 

(')  Gari)TH.\i;sen,  Angnsins  iind  seine  Zeit,  I,  p.  873;  Real-Enc,  X,  p.  319; 
WissowA,  Religion  nnd  Knlliis  der  R<mier^,  p.  290. 

{*)  Cf.  les  textes  cités,  Real-Enc,  X,  p.  332. 

{^)  Cf.  la  biblioi,Mapliie  dans  Gagnât  et  Chapot,  Manuel  d'archéologie 
romaine,  I,  p.  021.  Reproduite  en  dernier  lieu  dans  Spkinger-Woi.ters,  Vie 
Kunst  des  AUertums^^,  p.  171,  fig.  920;  Lïibke-Pekmce,  Die  Kunst  d.  AUer- 
tums^^,  p.  443,  fig.  628.  Festschrift  Hirsrhfchl,  \)\>.  305  sqq. 


AUGUSTE  ET  ATHÈNES  439 

dromia,  de  la  fête  d'Apollon  Boédromios,  le  dieu  qui  aide 
dans  les  combats,  comme  il  avait  aidé  Auguste  en  Sicile,  à 
Actium  (^). 

Mais  y  a-t-il  moyen  de  mettre  la  date  donnée  dans  noti-e 
décret  d'accord  avec  celle  de  la  naissance  d'Auguste? 

Le  douzième  jour  qui  y  est  mentionné  n'est  pas  une  date 
du  calendrier  romain,  auquel  cas  on  attendrait  npô  suivi 
d'un  nom  de  nombre  et  du  génitif  de  celui  des  calendes, 
des  noues  ou  des  ides.  Comme  Auguste  est  né  le  23  sep- 
tembre, ce  douzième  jour  serait  celui  de  Boédromion.  qui 
chevauchait  sur  les  deux  mois  juliens  de  septembre  et 
d'octobie  (2).  Et  le  premier  Boédromion  aurait  alors,  à 
l'époque  du  décret  du  moins,  concordé  avec  le  12  septembre 
de  l'année  julienne. 

Notre  décret  ne  peut  avoir  été  voté  avant  27,  à  cause  du 
titre  d'Aiigustus  attribué  à  l'empereur.  Mais  il  ne  doit  pas 
non  plus  être  placé  beaucoup  plus  bas  :  on  ne  compren- 
drait guère  que  les  Athéniens,  qui  avaient  beaucoup  à  se 
faire  pardonner  pour  avoir  pris  le  parti  d'Antoine,  eussent 
longtemps  tardé  à  décerner  à  Auguste  les  honneurs  men- 
tionnés dans  notre  texte,  qui  complètent  ceux  qui  avaient 
été  votés  l'année  précédente  (3). 

Peut-être  le  furent-ils  en  26-2o,  en  ])révision  de  l'anni- 
versaire de  2o  {'*).  En  25,  le  premier  de  l'an  attique,  le 
premier  Hékatombaion  tombe  vers  le  16  juillet  (^).  Le 
premier  Boédromion  équivaudrait  alors  au  1 3  et  non  au 
12  septembre,  comme  nous  l'avons  supposé.  Mais  on  sait 


(1)  Miii.i.KK,  Uoricr,  I,  pp.  331:  Mommsk.n,  f>s/c  der  S/adl  Athen,  p.  170; 
Stengei.,  Renl-Ettc,  III,  p.  oOi  sqq.  et  Suppl.,  I,  p.  233  et  Griech.  Kultus- 
alterlihner\  p.  226. 

(2)  BiscHOFK,  Kalender,  Real-Enc,  X,  pp.  1382  et  1591.  n»  3i. 

(3)  Parmi  ceux-ci,  il  faut  sans  doute  compter  l'érection  du  temple  d'.Auguste 
et  de  Rome  sur  l'Acropole  ilG,  111,  03.  Jideich,  To/tof/rap/ne  von  Athen, 
p.  233).  Nous  avons  supposé  dans  notre  «Chronolojîie  des  archontes  athéniens 
sous  l'Empire»  (Ment.  Ac.  Bclgii/iie,  Vlll,  1922),  p.  31,  qu'il  avait  dil  être 
construit  entre  27-20  et  18-17. 

(*)  Le  décret  de  l'année  précédente  tomberait  alors  en  27  et  aurait  été  rend» 
lors  de  l'octroi  du  titre  lïAin/ttsfus  et  d'autres  honneurs  par  le  Sénat,  à 
Auguste  (/{<?a/-£wr.,  X,  pp.  312  sq.). 

(5)  Cf.  les  tables  de  Ungkr,  Zeitrcchnung  drr  Grirr/ien  itnd  lUimer'-,  p.  704 
et  celles  de  Schmuit  et  de  Ginzki.,  dans  le  Handlmch  der  mat/triiialisc/ie)i  und 
tecfniiscficu  Chronologie  de  ce  dernier.  11,  p.  170. 


440  P.    GRAINDOR 

que  les  concordances  que  l'on  a  établies  entre  les  calen- 
driers julien  et  attiquo,  pour  cette  époque,  ne  sont  qu'ap- 
proximatives et  qu'il  faut  compter  avec  une  erreur  d'un 
jour  ou  deux,  soit  en  avance,  soit  en  retard  (*). 

Il  existe,  on  le  voit,  un  faisceau  de  ])résomptions  qui 
semblent  indiquer  que  notre  document  est  bien  contem- 
porain d'Auguste.  Par  une  singulière  rencontre  qui  a  dû 
sans  doute  influer  sur  le  vote  de  l'amendement,  le  12  Boé- 
dromion  est  précisément  l'anniversaire  du  retour  de  Tlira- 
sybule  {^),  le  restaurateur  de  la  démocratie  comme  Auguste 
l'était  ou  plutôt  prétendait  l'être  de  la  constitution  républi- 
caine. 

Quant  au  7  Boédromion  qui  aurait  correspondu,  d'après 
nos  déductions,  au  18  septembre,  c'est  à  peu  près  la  date  où 
Auguste  dut  arriv^er  à  Athènes,  où  il  se  rendit,  on  le  sait^ 
immédiatement  après  Aetium  (^). 

Quoique  les  trois  dernières  lignes  du  décret  soient  très 
mutilées,  on  devine  que  brmoieXeîçne  i)eut  guère  s'appliquer 
qu'à  des  fêtes  données  aux  frais  de  la  Cité  ;  et  il  faut  peut- 
être  restituer  [0€]ujv  eîcTi  5ri|U0Te\eîç  [éopiai]  (■*)  :  on  a  supposé 
déjà  que  le  12,  jour  du  retour  de  Tlirasybule,  était  aussi 
celui  d'une  fête  d'Athéna  à  laquelle  il  avait  offert  un  sacri- 
fice (^).  Le  verbe,  au  présent,  indique  qu'il  s'agit  non  de 
fêtes  nouvelles  créées  par  le  décret,  mais  de  fêtes  déjà 
existantes  et  confirme  notre  hypothèse  concernant  les 
dates  du  7  et  du  12  Boédromion. 

III 

Un  écho  des  «  Ludi  saeculares  »  à  Athènes 

La  dédicace  'Eqp.  dpx.,  1887,  p.  113,  n°  33  nous  apprend 
que  Quintus  Pompeius,  fils  d'Aulus,  avait  exécuté  et  con- 


{')  Un(;ek,  o.  /.,  p.  76i. 

{-)  PixT.,  De  f/lor.  Atlieri.,  7  :  xf)  bè  biubeKoiTri  (Boribpo|uiâ)voç)  xapiOTiÎpia 
ëBuov  éXeuSepiaç,  év  éxeivr)  yàp  oi  àizo  0vXr\q  KaTfjXGov.  Cf.  Mummskn,  Feste 
der  Stadl  At/ien,  p.  178,  n.  2.  Ste.ngel,  Gr.  Kiiltusallerlihner\  p.  228. 

(3)  Cf.  ci-dessus,  p.  130. 

(*)  Cf.  OGI,  îîi),  1.  11;  Insr/ir.  v.  Priene,  113,  1.  71.  On  trouve  aussi  Travr)- 
"fupiç  br^iLioTeXnç,  OGf,  1,  II.  43,  11;  .^0,  11.  31,  3.')  et  6uaia  bri^oxeXt'iç,  S/G', 
lOlîi,  î.  20. 

(^)  Xen.,  HelL,  11,  1,  39;  Mommsen,  l.  /.  ;  Stengel,  p.  228. 


AUGUSTE  ET  ATHÈNES  441 

sacré  à  Eleusis,  avec  ses  frères  Aulus  et  Sextus,  une  statue 
d'Aiôn,  eîç  Kpâxoç 'PuO|uriç  Ktti  5ia)aovnv  jnuCTiripîujv  (•). 

De  l'absence  du  co^iiomen  {-),  du  fait  que  l'iota  adscrit 
est  toujours  indiqué  et  que  le  nom  d'un  empereur  n'est  pas 
associé  à  celui  de  Rome,  Dittenberger  a  déduit  très  juste- 
ment que  le  monument  était,  au  ])lus  tard,  de  l'époque 
d'Auguste.  On  peut  ajouter  qu'il  ne  peut  guère  non  plus 
remonter  beaucoup  plus  haut,  non  seulement  à  cause  du 
gentilice  des  dédicants,  mais  les  formes  onciales  des  lettres 
€,  <7,  ui,  bien  qu'usitées  sous  Auguste  déjà,  sembleraient 
même  inviter  à  descendre  plus  bas,  n'étaient  les  bonnes 
raisons  qu'on  a  fait  valoir  contre  une  date  trop  tardive. 

On  n'a  pas  jusqu'ici,  semblo-t-il,  cherché  à  trouver  le 
motif  qui  a  pu  pousser  Quintus  Pompeius  et  ses  frères  à 
ériger  ce  monument  et  pourquoi  ils  l'ont  élevé  à  Eleusis. 

Si  Aiôn  est  la  personnification  de  l'éternité,  le  mot  aîubv 
avait  aussi  le  sens  de  «  durée  de  la  vie  »  et  de  «  siècle  »  \^}, 
autant  dire  celui  de  saeculum.  Et  il  est  bien  tentant  de 
supposer  que  c'est  à  l'occasion  des  saeciilares  ludi  que  le 
monument  a  été  dédié.  Il  y  eut  précisément  des  jeux  sécu- 
laires en  17  avant  J.-C,  sous  le  règne  d'Auguste,  à  l'époque 
duquel  on  avait  conjecturé  que  la  dédicace  d'Eleusis 
devait  se  placer  {*).  Cette  dédicace  est  faite,  observons-le, 
par  des  citoyens  romains  et  c'est  à  peu  près  la  seule  de 
l'espèce  que  nous  possédions,  d'où  l'on  doit  inférer  qu'elle 
a  trait  à  un  événement  dont  le  retour  ne  devait  pas  être 
fréquent. 

Cette  hypothèse  explique  aussi  très  bien  pourquoi  la 
statue  d'Aiôn  a  été  érigée  dans  le  téménos  d'Eleusis  plutôt 
qu'à  Athènes, 


(»)  SIG^,  112o. 

(-)  Sur  l'emploi  du  cof/iiomen,  qui  est  générnl  sous  Claude  déjà,  cf.  en  der- 
nier lieu  Dean,  A  sludy  of  the  coynoiniua  of  soldiers  in  l/ir  lioman  légion, 
Diss.  Princeton,  liMO,  |).  108  f,qq. 

(■')  Cf.  L.vcKEiT,  Aion,  Ik'id-Knc.,  Siippl  ,  111,  pp.  Ul  scpi.  (nous  n'avons  pas  à 
notre  disposition  la  diss(M"tation  de  i'anteur  de  cet  article,  Aion,  Zeil  und 
Eu'igkcit  i?i  Sprac/ic  und  He/ii/ion  der  Grier/ien,  1  Teil,  Spnic/ie,  Konigs- 
berg,  li>lt)),  qui  cite  (p.  (58)  notre  dédicace,  sans  en  donner  une  interjirétalion 
nouvelle.  Cf.  aussi  Deciinek,  dans  Roschek,  Le.rikon,  III,  p.  :21:28.  Pour  les 
autres  références  relatives  à  celte  dcdicaci-,  cf.  SIG\  I.  l. 

(*)  Pour  les  saecidares  Ituti,  cf.  eu  dernier  lieu  Nilssos,  /fra/-/-."w< ..  la. 
pp.  1696  sqq. 


442  p.    GRAINDOR 

Les  liidi  saeculares,  tout  au  moins  à  l'éi^oque  républi- 
caine, étaient  des  l'êtes  de  caractère  funéraire,  une  sorte 
d'inhumation  du  siècle  défunt,  accompagnées  de  saciifices 
à  Dis  pater  et  à  Proserpina,  autant  dire  à  Pluton  et  à 
Perséphone,  car  ces  liidi  étaient  d'origine  grecque;  ils 
avaient  été  institués  à  la  suite  d'une  consultation  des 
Livres  Sibyllins,  en  249(0. 

Certes,  avec  Auguste,  le  caractère  de  la  fête  se  modifie. 
C'est  la  naissance  du  siècle  nouveau  j^lutôt  que  la  mort  du 
précédent  que  l'on  célèbre  maintenant  (2).  Mais  ces  ludi 
rénovés  comportaient  cependant  encore  des  sacrifices  à 
la  Terra  mater,  qui  eurent  lieu  la  nuit  du  3  juin  (^).  D'après 
Zosime  même  (^),  il  faudrait  aussi  compter  Hadès  et  Per- 
séphone parmi  les  divinités  auxquelles  on  sacrifiait  à 
cette  occasion. 

D'ailleurs,  d'après  Philon  de  Byblos  {^),  Aiôn  aurait 
appris  aux  hommes  à  se  nourrir  des  fruits  des  arbres  :  par 
là,  il  méritait  d'être  associé  à  Dèmèter  qui  leur  avait 
enseigné  la  culture  du  blé. 

Notre  dédicace  se  placerait  donc  vers  le  mois  de  juin  de 
17  avant  Jésus-Christ.  Et  les  mystères  dont  il  y  est  ques- 
tion n'auraient  rien  à  voir  avec  ceux  de  Mitlira,  même  si 
les  rapports  existant  entre  le  culte  de  ce  dieu  et  Aiôn 
étaient  plus  certains  et  mieux  définis  (6).  Ces  mystères  ne 
peuvent  être  que  ceux  d'Eleusis,  endroit  de  la  découverte 
de  la  base  dédiée  par  Quintus  Pompeius  C);  au  début  d'un 
siècle  nouveau,  il  leur  souhaite  ainsi  qu'à  Rome  une  durée 
éternelle,    cette  aeternitas   dont  le  nom  apparaît  sur  les 


(1)  WissowA,  HcHgion  und  Kulhis  (1er  Romer'^,  p.  309.  Nilsso.v,  /.  /.,  p.  170i. 

(2)  WlSHOWA,  p.   i31.  NiLSSON,  p.  1716. 

(3)  NiLSSON.,pp.  1713  sq. 
(*)  ZosiM.,  II,  3. 

(5)  Ap.  EusEB.,  Praep.  er.,  I,  10, 10. 

(6)  SIG^,  l.  L,  n.  2,  4.  Cf.  Cumont,  Les  Mystères  de  MU  lira,  I.  p.  7(5,  et  Les 
Mystères  de  Mit/ira,  3«  éd.,  pp.  106  sqq. 

C)  D'après  IIkuodian.,  III,  8,  à  l'occasion  des  jeux  séculaires  de  20i,  Sep- 
time-Sévcre  fit  célébrer  lepoupYÎaç  Te  Kai  Travvuxîbaç  éTTiTeXeoGeioaç  éç 
luuOTripîuuv  CfiXov.  Si  c'était  bien,  comme  on  l'a  dit,  pour  rivaliser  avec  les 
Mystères  d  Eleusis  (Foucakt,  Rev.  de  P/iil.,  \\U,  p.  207),  c'est  qu'il  existait 
sans  doute  quelijue  rapport  entre  les  deux  fêtes. 


AUGUSTE  ET  ATHÈNES  443 

monnaies  impériales  dès  Auguste,  mais  dont  la  figure  ne 
se  montrera  qu'à  partir  de  Vespasien  ('). 

De  même,  sur  des  monnaies  d'Alexandrie,  de  139,  année 
qui  marque  le  début  d'une  période  sothiaque  {^),  on  voit 
figurer  le  Phénix,  accompagné  de  la  légende  AIQN,  de  cet 
autre  Phénix  qui  renaissait  de  ses  cendres  :  il  n'y  aurait 
donc  rien  d'étonnant  si  on  avait  érigé  une  statue  à  ce  dieu, 
à  la  naissance  d'un  siècle  nouveau. 

Paul  Graixdok. 


(1)  ArsT,  Heal-Enc,  I,  p.  69i;  Deibner,  /.  /.,  p.  21io. 

(2)  Head,  Historia  numorum'^,  p.  863. 


Etymologies  wallonnes  et  françaises 


*  GABA  et  ses  dérivés  wallons. 

Sous  le  type  *gaba  «  jabot  »,  Meyer-Lûbke  cite  quel- 
ques formes  dialectales  modernes,  notamment  le  picard 
f^'civ,  le  wallon  ^>a/"  et  le  namurois  djef  [sic]  «jabot  du 
pigeon  ».  Ces  indications,  en  ce  qui  concerne  nos  dia- 
lectes, ne  sont  pas  des  plus  exactes.  Quoi  qu'en  disent  G., 
I,  228,  II,  508,  P'orir  et  Sigart,  ^af  —  ou  mieux  >>Hve 
comme  en  ancien  français  —  n'a  pas  cours  au  pays  liégeois 
(le  jabot  du  pigeon  s'y  api^elle  face)  ;  ce  n'est  même  pas  du 
wallon  proprement  dit.  Gave  appartient  au  picard  et  au 
messin.  De  là  il  pénètre  en  Wallonie  dans  le  gaumais,  le 
chestrolais,  le  givétois  (sous  la  forme  ^'aue,  qui  se  pro- 
nonce g'af)  et  dans  le  namurois,  où  il  devient  djafe  (Namur, 
Stave,  Ciney,  etc.).  Il  y  donne  plusieurs  dérivés,  tels  que 
gavé  (Givet)  «  gaver  »  ;  g-aoiot  ou  gavion  (Fosse-la- Ville) 
«  larynx,  gorge  »:  gavéye  (Neufclmteau)  «  jabot  d'oiseau, 
devant  de  chemise,  gorge  »,  proprement  «  gorgée,  plein  la 
gorge  »  comme  le  gaumais  gavàye,  gafàye;  gavii,  gafii 
(Virton  :  Cl.  Maus)  «  qui  a  un  gros  jabot  »;  etc.  Quant  à 
djef,  qui  nous  est  donné  comme  namurois,  il  ne  me  paraît 
pas  des  plus  sûrs.  Je  n'y  vois,  pour  ma  part,  qu'une  gra- 
phie approximative  de  djève,  qui  existe  notamment  à 
Fosse-la- Ville  au  sens  de  «  gésier  »,  à  Gembloux,  en  Iles- 
baj-e,  en  Famenne  et  dans  la  province  de  Liège  au  sens 
péjoratif  de  «  gueule  »,  en  parlant  d'une  personne  (-).  Reste 


(')  AitKKViATiuNS  :  G  ==  Graiulgagnago,  Uict.  etym.  nallon  ;  BSV^' =  ISufletin 
de  la  Société  de  Litt.  wallimne  ;  BD  =  Bulletin  du  Dictionnaire  iciillon  ; 
Meyer-Liibke  =  liomanisches  Etym.  WUrterlnicli  ;  \v  =  wallon. 

(2)  Par  exemple,  en  liégeois,  cloyiz  vosse  djcve;  dji  li  f'rè  peler  s'  djève. 
A  Malniedy-Stavelol,  djéve  signifie  «  bonehe  bavarde,  caiiuet  »,  d'où  les  dérivés 
djèv'ter,  djèv'ler  «  jacasser  ».  A  Dinant,  Gembloux  et  en  Famenne,  le  son  r,  tout 
en  restant  long,  n'est  pas  aussi  ouvert   qu'en  liégeois.  A  Charleroi,  dans  le 


446  J.    HAUST 

à  voir  si  ce  mot  bien  wallon  djève  s'explique  par  le  type 
proposé. 

M.  Dauzat(*)  a  publié  récemment  une  étude  approfondie 
sur  *gaba  et  ses  dérivés.  Il  admet  plutôt  un  type  primitif 
*gava,  d'origine  probablement  celtique,  et  démontre  que 
*gauta  «  joue  »  postule  un  intermédiaire  *gavita  (et  non 
*gabata  comme  «  jatte  »).  Tromjjé  par  la  mauvaise  gra- 
phie djcf  de  Meyer-Lûbke,  il  estime  que  «  seul,  ce  mot 
namurois  [lisez  plutôt  :  «  liégeois  »]  est  phonétique  m.  Je  ne 
puis  partager  son  avis  :  *gaba  ou  *gava  aurait  donné  en 
liégeois  djëoe,  comme  f  aba  > /eue  et  l'imparfait  -abam 
> -ève.  Pour  expliquer  djève,  il  faut  comparer  cavea 
ytchève  «grande  cage  pour  transporter  les  pigeons,  les 
poulets,  etc.  »,  *  s  api  us  >  sève  «  sage,  lucide  »,  et  partir 
d'un  déi'ivé  *gabia  (que  Meyer-Liibke  ne  donne  pas)  ou 
mieux  gavia.  Dans  l'étude  intéressante  que  j'ai  signalée, 
M.  Dauzat  admet  que  gavia,  mot  rare  et  isolé  en  latin, 
attesté  seulement  par  Pline  l'Ancien  au  sens  de  «  mouette  » 
(cf.  Mej-er-Liibke,  n°  3708),  se  rattache  nécessairement  à 
*gava,  la  mouette  étant  remarquable  par  la  grosseur  exté- 
rieure de  son  jabot.  Le  wallon  djève  attesterait  que  gavia 
a  survécu  à  l'extrême  Nord-Est  du  domaine  roman. 

Au  reste,  ce  n'est  pas  le  seul  dérivé  important  que  le 
wallon  a  conservé  sous  une  forme  originale. 

A  propos  du  liégeois-namurois  j!,''awe,  s.  f.,  «guimbarde, 
petit  instrument  sonore...  »,  G.,  I,  233,  pour  toute  explica- 
tion, se  demande  s'il  faut  y  voir  une  onomatopée.  En  réa- 
lité, le  sens  de  «  guimbarde  »,  aujourd'hui  le  seul  connu, 
est  secondaire.  Il  est  certain  que  gawe  répond  littérale- 
ment aufr./oHc  et  vient,  comme  ce  dernier,  de  *gauta, 
dont  nous  parlons  ci-dessus;  comi)arez  caive,  anc.  fr.  coiie, 
queue;  hawe,  houe,  mawe,  moue,  etc.  Le  sens  primitif  se 
perçoit  encore  dans  l'expression  ironique  fé  aler  s'  gawe 
«  faire  aller  sa  bouche,  pour  manger  ou  pour  parler  »,  et 
dans  le  dérivé  gawi  (Namur)  «  brifer,  gruger  »,  djaivyi 
(Luttre)  «  bavarder  ». 


Coq  d'AwoHs'  (lu   13  mars  1909,  on  signale  bien   dji've   «  caquet  »  :  fc  aler 
s'  dji-ve  su  lot  r  monde  ;  mais  il  faut  probablement  lire  djève,  à  moins  que  è 
ne  se  soit  n'cllemcnl  abr('t,'c  par  altération. 
(!)  Romania,  t.  \LV  (1919),  p.  250-258. 


ETYMOLOGIES  447 

On  notera  dans  ces  deux  derniers  termes  ^-  =  dj,  comme 
dans  ^'aue,  djâve,  que  nous  avons  cités  plus  haut;  de  même 
le  fr.  s'engouer  a  la  môme  origine  que./oae.  On  ne  s'éton- 
nera donc  pas  si  nous  voyons  dans  badjaive  un  composé  de 
<>-iime.  G.,  I,  42,  ne  connaissait  en  liégeois  que  la  forme 
budjowe  et  le  sens  de  «  babil,  caquet,  bagou  ».  Eu  fait 
budjawe  est  la  forme  première,  connue  aux  environs  de 
Liège  et  encore  à  Liège  même  (comp.  caive  «  queue  »,  que 
le  liégeois  altère  en  cowe).  Ce  mot  signifie  :  1.  <(  bajoue  », 
équivalent  littéral,  qui  subsiste  dans  l'expression  on  II  a 
fèt  peter  s'  badjawe  «  on  l'a  souffleté  »  ;  2.  bouche  bavarde  : 
cloyiz  vosse  badjawe,  fé  aler  .s'  badjawe;  3  personne 
bavarde;  4.  caquet,  bagou  :  //  a  'ne  fameuse  badjawe. 

Le  liégeois  badjawe  répond  donc  à  deux  mots  français 
bajoue  et  bagou,  auxquels  les  étymologistes  n'assignent 
pas  la  même  origine.  Ont-ils  raison?  Il  est  permis  d'en 
douter.  Le  fr.  bagou,  pour  Clédat,  est  un  terme  d'argot,  ce 
qui  dispense  ai)paremment  de  plus  am])les  explications. 
Diez,  Scheler,  Kcirting,  Meyer-Liibke  ne  le  signalent  j)as. 
Pour  le  Dictionnaire  général  —  qui  reprend  en  somme, 
avec  des  atténuations  i)rudentes,  l'opinion  de  Littré  — , 
(c  bagou  est  peut-être  substantif  verbal  de  l'anc.  fr.  bagou- 
ler,  parler  inconsidérément,  lequel  semble  composé  a\^ec 
la  particule  péjorative  ba  et  goule  pour  gueule,  cf.  déba- 
gouler  ».  On  peut  se  demander  si  bagouler  n'est  pas  un 
ancien  *bagouer  influencé  par  goule.  Le  w.  badjawe  appuie 
cette  présomption.  Ajoutons  que  «  bajoue  »  se  dit  bajole  en 
rouchi,  bajote  à  Tournai  (Comp.  jouter  ic  mettre  en  joue, 
viser  »,  à  Wiers-lez-Tournai);  or,  dans  ces  mots,  la  finale 
ne  peut  s'expliquer  que  par  des  influences  analogiques. 

Chestr.  anêvè,  dusnévé;  gaum.  auàvéy,  dénàvéy. 

Dasnoy  (p.  22,  172)  et  M.  Liégeois  (BSW.,  37,  p.  294,  323) 
signalent  ces  mots  à  Neufehâtoau  et  à  Tintigny;  de  môme 
Cl.  Maus  dans  son  Vocabulaire  des  environs  de  ]'irti>n 
(manuscrit,  1850).  Voici,  d'après  des  enquêtes  person- 
nelles, de  quoi  com])léter  leurs  données  sommaires  : 

anèvè  (Xcufchàteau,  Recogne),  v.  tr.,  engendrer,  produire, 
introduire  (des  êtres,  plantes  on  choses  nuisibles)  :  ène  pikeùre 


448  J.    HAUST 

du  gurzuliè  [groseillier]  anêve  lu  panaris  /  lès  nich'tès  d'  la  mûjon 
[saletés  de  la  maison]  anêvant  lès  pïices  ;  lès  pwinnes  [cbieiulents] 
s'anl  anêoè  par  tout  V  (champ.  I  De  même  le  gaumais  anâvèy  : 
(•a  anàoe  lès  puces,  dit-an  (Tiutigny);  èç  djeû  la  n'anâvrè  rin 
d"  bon  (Buzenol);  vèy^  [vous  avez]  anâvèy  in  tas  de  p'tites  biètes, 
i  n'  fôt-m'  lès  layi  sanàoèy  (Musson)  «  il  ne  faut  pas  les  laisser  se 
multiplier  •■;  lès  môvêses-yérbes  s'anâoant  da  note  niêje  (Virton). 

dusnévè  (Xeuf château.  Recogne),  dènâvèy  (gaumais),  v.  tr., 
1.  détruire,  extirper  (une  race  nuisible,  de  mauvaises  herbes)  : 
dju  n  su- in  foutu  f/'  dènaoè  lès  pavines  [chiendents]  du  note 
tchamp  (Buzenol)  ;  —  2.  expulser  :  djè  Vans  dènàvè  de  d'  tchû  nos 
(Musson)  «  nous  l'avons  expulsé  de  chez  nous  "  ;  —  3.  faire  dis- 
paraître, escamoter  :  tu  m'es  bintot  eu  dènâoé  m'  batan  !  (Prouvy- 
Jamoigne  :  BSW  49,  p.  150);  —  4,  v.  réfl.,  se  débarrasser  (d'une 
chose  nuisible,  d'un  importun)  ;  —  5.  (réfl.  ?)  «  émigrer,  rassem- 
bler ce  qu'on  a  et  quitter  un  lieu,  un  pays  »  (Cl.  Maus)  (*). 

Si  l'on  détache  les  préfixes  de-,  dus-  (fr.  dé-,  lat.  de-  ex-) 
et  a-  (qui,  dans  cette  région,  représente  le  fr.  en-,  lat.  in-, 
anssi  bien  que  le  fr.  a-,  lat.  ad-),  il  reste  un  radical  nèo-, 
nâv-  (2),  où  nous  reconnaîtrons  l'anc.  fr.  naif,  naïf.  lat. 
nativum.  Les  formes  *ennaiver,  *desnawer  ne  sont,  je 
pense,  signalées  nulle  part;  .Kôrting  et  Meyer-Lùbke  n'in- 
diquent aucun  dérivé  verbal  de  naiiviis  (^);  ce  type  latin  a 
cependant,  comme  on  le  voit,  provigné  dans  la  région  de 
Neuf  château- Virton- Verdun. 

Liég.  bak'neùre,  fr.  techn.  bacnure. 

Le  Sii})j)lénient  de  Littré  accueille  bacnure  ou  baque- 
nure,  t.  de  mine,  syn.  bouveau.  Le  mot  est  emprunté  du 
liég.  bak'neùre,  syn.  trintche  «  tranche  »  :  c'est  ainsi  que 
nos  bouilleurs  appellent  une  galerie  menée  horizontale- 
ment à  travers  bancs  de  roche  pour  atteindre  la  couche  de 
houille,  po  r'côper  l  vanne.  G.,  I,  42,  ne  donne  pas  d'éty- 


(')  Vahi-et,  bict.  du  patois  meusien,  signale  à  CbaUancourl  se  dénavi  «  se 
défaire,  se  dépouiller  :  i  n'  veut-m'  se  dénavi  de  s'  bin.  Ktym.  du  lai.  dehahere, 
avoir  de  moins,  manquer  »  (!). 

{^)  Pour  le  gaum.  à  =  w.  ê,  comp.  àdi,  alùdi,  plàji,  wàli,  etc. 

(^)  Godefroj  cite  lanc.  fr.  naifver  (  1060)  «  représenter  naturellemeni  ». 
La  tonique  i  de  naïf  devenant  atone  dans  naiver,  disparaît  nécessairement; 
comparez  le  rouclii  aide  (aide,  s.  f .)  à  côté  de  aider. 


ETYMOLOGIES  449 

mologie.  Bormans,  Voc.  des  houilleiirs  lic^-eois,  y  voit  un 
dérivé  de  banc  (!).  11  signale  le  syn.  bakcn'inint  (inusité); 
mais  il  oublie  le  verbe  bak'tier,  qui  est  d'usage  courant  au 
bassin  de  Liège  comme  synonyme  de  triiitrhi  («  tran- 
cher »  :  pratiquer  une  bacnure).  On  ne  peut  séparer  bak'ner 
du  néerl.  bakenen  «  baliser,  jalonner  »  (i)  :  dans  le  creu- 
sement d'une  bak' neuve,  le  géomètre  doit  fréquemment 
jalonner  la  galerie  pour  s'assurer  que  les  ouvriers  tiennent 
la  direction  voulue.  Cette  action  pai'ticulière  a  donné  son 
nom  à  l'ensemble  des  opérations. 

Liég.  canabùse. 

Ce  mot  signifie  (c  sarbacane  »  :  lès-èfants  soflèt  dès  peùs 
avoii  'ne  canabùse  (syn  soflète).  G.,  I,  99,  écrit  cane-à-bùse, 
comme  si  c'était  proprement  une  «  canne  à  tuyau  ».  Cette 
explication  n'a  manifestement  que  la  valeur  d'une  étjauo- 
logie  populaire.  Le  néerlandais  appelle  knapbiis  (^)  un 
autre  jouet  qui  ressemble  à  la  sarbacane,  à  savoir  la  canon- 
nière —  que  le  liégeois  appelle  bon  haie.  Malgré  la  diffé- 
rence de  signification,  il  y  a  une  telle  ressemblance  de 
forme  entre  knajtbiis  et  canabùse  que  je  n'hésite  pas  à  voir 
dans  le  second  un  emprunt  du  premier.  Pour  l'insertion 
de  a  dans  le  groupe  initial  kn-,  comparez  le  fr.  canapsa  (de 
l'ail.  Knap])sack),  canif  et  canivet.  La  finale  s'est  allongée 
sous  l'influence  de  bùse  (tuyau  i;  comp.  harkibùse  (arque- 
buse). 

"SV.  cakédô  et  heùpon  «  gratte-cul  ». 

J'ai  relevé  cakèdà  (églantier;  gratte-cul)  dans  l'est  du 
Brabant  (Xoduwez,  Marilles,  Jodoigne,  Gistoux,  Chastre, 
Perwez)  et  au  nord  de  Namur  (Gembloux,  Meux).  Ce  terme 
est  inédit;  Rolland  lui-même  ne  donne  rien  d'analogue 
dans  sa  Flore  populaire,  V,  !229.  On  y  reconnaîtra  le  flam. 
et  néerl.  hagedoorn  (aubépine),  qui  a  i>assé  par  les  étapes 


(!)  Dérivé  du  néerl.  haken  <(  l)alise,  bouée;  »,  d'où  le  w.  hakhie,  l.  de  bat., 
méiiie  sens  (G.,  II,  oOO).  L'aeceplion  iiriuiilive  de  Ixike/t  est  w  signe  »  en 
général;  ef.  Kluge  isakk;   Franek-van  Wyk   iîaak;  Scluiennans,  De   Bo  n.vKE, 

BAAK. 

(2)  Composé  de  knap,  crae,  el  de  l>us,  i)oile,  canon  (de  fusil). 

29 


450  J.    HAUST 

*hagcdôr.  *hakèd<),  pour  aboutir  à  cakèdô  par  assimilation 
régressive  (M. 

Entre  l'églantier  et  l'aubéptne,  la  confusion  n'a  rien  de 
surprenant  :  ces  deux  arbustes  sont  communs  dans  les 
haies  ;  ils  ont  tous  deux  des  épines  et  des  fruits  rouges.  Au 
reste,  l'ail,  hagedorn  (littéralement  «  épine  de  baie  »)  se  dit 
à  la  fois  de  l'aubépine  et  de  l'églantier.  D'autre  part,  si  le 
west-fl.  hiepe  signifie  a  baie  d'aubépine  »  (^l,  l'ail,  dialectal 
hiefe  est  synonyme  de  hagebuite  «  fruit  de  l'églantier, 
gratte-cul  ».  La  divergence  s'explique  ici  encore  par  le 
sens  général  de  «  épine  »,  qui  est  celui  du  primitif  anc. 
saxon  hiopo,  anc,  h.  ail.  hiiifo(^). 

G.,  I,  293.  propose  dubitativement  de  rattacher  à  ce  pri- 
mitif le  liég  heiipon  «  gratte-cul  )>  {'*) .  Je  tiens  cette  éty- 
mologie  pour  assurée.  A  première  vue,  la  protonique  eu 
pourrait  faire  difficulté  {^)  ;  mais,  si  l'on  compare  le  liég. 
reùpe,  -er  (rot,  roter),  qui  est  emprunté  de  l'ail  bavarois 
riilp.  et  si  l'on  tient  compte  de  ce  que  des  dialectes  du  haut 
ail.  moderne  ont  hiefen,  hiifeii  (gratte-culi,  on  en  conclura 
que  le  liég.  heiipon  provient  d'une  forme  bas- ail.  *hiipeji. 

Malm.  déve,  dêve. 

Villers  (1793)  donne,  en  dialecte  de  Malmedy,  dève,  s.  f. 
«  écorce  de  bouleau  »  C').  Scius  (//?.,  1893)  écrit  déve,  c'est- 
à-dire  dëue.  Ce  mot  n'étant  pas  connu  ailleurs  chez  nous, 
on  lui  supposera  de  prime  abord  une  origine  germanique 
et,  de  fait,  nous  en  retrouvons  l'équivalent  dans  le  bas  alle- 
mand d'Eupen,  tout  proche  de  Malmedy.  Le  Wôrterbuch 
der  Kiipener  Spniche  a  un  article  :  dauer,  m.,   «  écorce 


('^  Comp.  le  fr.  dcyirujandv  pour  dchinya/idc. 

(2)  Cf.  De  Bo,  West-vl.  Idiot.  :  «  hiepe,  fr.  cenelle,  péchalle  (!),  baie  d'aubé- 
pine ».  —  L'auteur  fait  au  ii('g.  pîtchale  l'honneur  de  le  prendre  pour  du 
français. 

(^)  Voy.  Weigand  hieh:,  Kalk-Torp  mype. 

(*)  G.  fait  fiai  dune  forme  nam.  Iicùtan  {'!).  qui  parait  des  plu.s  suspectes, 
il  a  ton  de  comi)arer  le  liég.  hivc  (ou  niieu.x  hife)i(  gousse  d  ail  ». 

(■'}  On  s'attendrait  à  ■''liùiion  (pour  *liipon;  coinp.  liég.  Vùli-  \h)\iv  *lHè 
«  l'îlol»;  lii'iff'jje  pour  liifi'i/r,  etc.).  —  On  trouve  hnpion  ;i  Krezée,  lieùpion  ii 
Verviers,  avec  le  sullixe  diminutif -io«,  fr.  ilhm.  Comp.  l'art.  Iiortm  (à  lialleux 
hurion). 

('')  G.,  dans  ses  Ljtrails  de  Villers,  écrit  a  tort  dèee. 


ETYMOLOGIES  451 

sèche  du  bouleau»,  dauere  «  Tac  ti  on  d'éeorcer  le  bouleau  )>. 
Toutefois,  l'on  y  déclare  que  ces  mots  se  dérobent  à  toute 
explication  satisfaisante.  Si  l'eupenois  daoer  est  aussi  isolé 
dans  le  bas  allemand  que  le  malmédien  doue  dans  le  wallon, 
la  question  en  devient  plus  obscure.  Dès  lors,  il  est  bien 
tentant  de  s'adresser  au  celtique  dervu  k  chêne  »  (^). 
L'écorce  du  bouleau  servant  à  tanner  comme  celle  du 
chêne,  une  confusion  a  pu  se  produire  entre  les  deux 
essences. 

Fr.  s'ébrouer,  anc.  fr.  espro(hler;  liég.  sprognî. 

I.  L'anc.  fr.  es})ro(Ii]er  vient  du  francique  sprowan 
(Meyer-Liibke,  n°  8188),  forme  ancienne  de  l'ail,  spriïhen 
«  faire  jaillir  ».  La  façon  dont  Godefroy  en  parle  prête  fort 
à  la  critique.  Il  fait  deux  articles  au  lieu  d'un  seul  et,  si 
dans  le  second  espro{h)er,  v.  a  ,  «  asperger,  éclabousser  » 
est  défini  correctement,  dans  le  premier  où  il  range  trois 
exemples  du  v.  n.,  il  passe  trois  fois  à  côté  de  la  traduction 
exacte  :  (son  cheval)  esproha  signifie,  non  pas  «  hennit  », 
mais  ((  s'ébroua  »;  chat  qui  esproe  «  souffle  de  colère  »,  et 
non  ((  miaule  »  ;  de  même,  en  parlant  d'un  oiseau  à  qui  vous 
tenez  en  votre  bouche  le  bec  jusqu'aux  3'eux,  s'il  esproe 
bien  après,  dont  est  il  sains,  il  faut  comprendre  :  «  si  cet 
oiseau  souffle  de  colère  contre  vous,  c'est  un  indice  qu'il 
est  sain  »  (^).  De  plus.  Godefroy  oublie  la  forme  sproher, 
que  G  ,  II,  639,  signale  dans  une  variante  de  Jean  d'Outre- 
meuse  au  sens  de  «  cracher  »  Enfin,  d'après  Godefroy, 
esproement  «  exprime  l'idée  de  moquerie  »;  nous  y  ver- 
rons, au  ])ropre,  un  éclat  de  gros  rire,  une  explosion  de 
rire  qui  asperge  autrui. 

On  n'a  pas  encore,  que  je  sache,  cherché  dans  l'anc.  fr. 
espro(h)er  l'origine  du  fr.  niod.  s'ébrouer.  Cependant  les 


l'i  C.ilé  jiar  Moy('r-Liil)k(',  n"  T.'J.'ii.  Voy.  Du  Gange  :  dcrvitm,  ceKiciiic  dcrw 
{v\\viw}  ;  (ioilefroy  :  dervee  (oliôiiaie). 

(-)  God.  ne  donne  pas  de  U'aduelion;  celle  du  Lc.iù/ur  de  Udiiiiard  et 
Salinoii  :  «  erier  »,  ne  vaut  rien.  —  De  même,  le  wallon  dit  ipi  un  elieval  (|ui 
s'ébroue  {(/ul  spnxjne)  est  sain  ;  sprof^ni  peut  se  dire  aussi  d'un  eiiat  (jui  suutlle 
hruyannnent  de  peur  el  de  eolère.  Le  wallon  peut  ici  servir  de  guide  :  dans 
tous  les  exemples  cités,  csproher  ri'pond  au  w.  spror/ni,  oii  nous  voyons 
d'ailleurs  un  dérivé  du  trancique  sproiritn  :  voy.  ci-après. 


452  J.    HAUST 

hypothèses  émises  pour  expliquer  ce  dernier  sont  nom- 
breuses et  diverses.  Pour  l'un,  «  ébrouer  dérive  i)eut  être 
de  *broii  (—  brave\  l'ébrouement  du  cheval  pouvant  passer 
pour  un  signe  de  courage  »  ')  ;  comme  si  ce  n'était  pas  tout 
aussi  bien  et  ])lutôt  un  signe  de  surprise  et  d'effroi  !  (')  Pour 
l'autre,  n'ébrouer  se  rattache  à  s  esbroufer  et  vient  donc  du 
provençal  esbroufa  qui  a  le  même  sens  (^j;  mais  comment 
justifier  la  chute  de  /"?  Pour  le  Dict.  général,  «  peut-être 
s'ébrouer  se  rattache-t  il  au  même  radical  que  ébrouer, 
t.  techn,  :  plonger  dans  l'eau  (des  tissus  sortant  du  métier), 
l'ébrouement  des  animaux  ayant  pour  résultat  de  faire 
sortir  une  sorte  de  vapeur  par  les  naseaux  »  f^).  En  somme, 
la  question  reste  pendante,  car  même  la  dernière  hypo- 
thèse, la  plus  sérieuse,  ne  va  pas  sans  quelque  difficulté  de 
sémantique. 

Pour  moi,  il  me  paraît  naturel  d'admettre  que  esproer, 
au  lieu  de  disparaître  comme  on  le  croit,  a  donné  régulière- 
ment *cproucr,  lequel  est  devenu  ébrouer,  v.  intr.  (1564), 
puis  V.  réfl.,  sous  l'influence  du  synonyme  s  esbroufer. 
L'homonyme  ébrouer,  anc.  fr.  esbroer  abbriihen),  t.  techn., 
a  \)W  aussi  influer  sur  le  changement  anormal  de  pr  en  br. 
Pour  le  traitement  vocalique,  la  concordance  est  remar- 
quable entre  ies)broer,  {é,brouer  :  alî.  niod.  iab  briihen  et 
esproer,  ébrouer  :  ail.  mod.  spriihen.  Enfin  cetfe  hypothèse 
a  l'avantage  de  montrer  la  survivance  de  esi)roer  dans 
la  langue  moderne  et  la  parenté  du  fr.  s'ébrouer  avec  le 
w.  sprogni,  qui  a  le  même  sens. 

II,  L'article  de  G.,  II,  Î-JUG,  sur  le  liég.  sprogni,  est 
incomplet  et  ne  donne  pas  d'étymologie.  On  le  remplacera 
par  ce  qui  suit. 

FoRMKS  DIALECTALES  :  sj>ro£>-ni  Liégc  (Forir  :  //  dfvk 
sj)r()gne},  Fléron;-/  Rtavelot,  Malmedy,  Doncols,  Wardin 


(1)  KuiiTi.Nd,  Dirt.  d'étyin.  fr.  ;  c'csl  l'opinion  'le  Dicz,  adoptée  par  LiUre. 

(2)  Comp.  «  un  él)rouemeiit  de  clieval  souttlant  de  peur  »  Zoi.a,  Une  paye 
d'amour,  p.  -102. 

(3)  L.  Ci.KDAT,  Dict.  i-lym.  tte  la  larif/ar  fr.,  1912. 

(*)  C'est  l'opinion  de  Sclieier  et  aussi  de  Meyer-Liihke,  n»  1323  ;  ce  dernier 
dérive  du  germ.  Iirôjari  :  e7;ro«e/(abl)riiiieM)  et  s'éhrouer  (sclniauben).  Ch.  Jouet 
(It'fend  la  môme  thèse  dans  Ihniianla,  1\,  p.  118.  Voy.  enlin  les  Fra/iziisiscfic 
Studien,  VI,  p.  31,  33. 


ETYMOLOGIES  453 

lez-Bastogne,  Gives  et  dans  le  Coiulroz;  -er  Jupille.  Trem- 
bleur;  -è  Bande;  sprougnè  Neufcliàteau ;  sprugni  Ver- 
riers; sproni  Nanuir,  Crelien  (Ben-Ahin  :  Il  dj'vù  spronih, 
il  a  sprog-ni  :  c'est  signe  qu'il  est  hèti  ou  sain).  Les  gra- 
phies suivantes  sont  suspectes  :  sprongni  (G.)  ;  sprôgner 
Verviers  (BSW.,  40,  p.  458;  lire  o?);  spreûgner  Jupille 
[ib.,  49,  p.  375;  lire  œ'i);  sprôni  Naniur  (Pirsoul;  lire 
sproni'f). 

Significations  :  1.  s'ébrouer,  souffler  bruyamment  de 
l'eau  liors  de  la  bouche  et  du  nez;  se  dit  surtout  du  cheval. 
C'est  le  sens  le  plus  ordinaire;  on  le  connaît  partout  :  de 
Liège  Verviers  à  Neufehâteau  et  à  Namur;  2.  éternuer,  en 
parlant  de  l'homme  :  Doncols,  Wardin,  Bande  et  dans  le 
Condroz;  3.  pouffer  de  rire  au  point  de  s'engouer  (Mal- 
med3'^  :  Villers).  ou  mieux  :  rire  en  projetant  de  la  salive, 
rejeter  de  la  nourriture  en  riant  la  bouche  pleine  (Fléron); 
4.  souffler  de  colère,  en  parlant  d'un  chat  (Jupille  : 
BSW.,  49,  p.  375)  ;  5.  «  souffler  un  liquide  qu'on  a  mis  dans 
sa  bouche  »  (Verviers  :  Remacle,  v°  sprugni)  ;  <c  pousser  un 
liquide  avec  la  bouche  au  visage,  etc.;  imprégner  avec  la 
bouche  une  étoffe  d'eau,  d'huile  «  (ib.  :  Lobet,  v°  spriig-ni); 
«.  répandre  de  l'huile  grasse  ou  de  pétrole  sur  une  chaîne 
trop  encollée  :  l'ouvrier  projette  le  mélange  d'eau  et  d'huile 
par  la  bouche!  »  fib.  :  M,  Lejeune,  Voc.  de  V apprèteiiv  en 
draps  :  BSW.,  40,  p.  458);  6.  v.  unip.,  bruiner  (Stavelot, 
Malmedj')  :  /  sprog-ne,  il  a  sprogni;  il  a  tourne  one  supro- 
gnore  «  il  est  tombé  une  légère  ondée»;  à  Faymonville, 
on  emploie  dans  ce  cas  le  diminutif  sprœg-n'ter,  d'où 
sprœgn'iœre  «  bruine,  légère  ondée  ». 

Etymologie  .  dérivé,  à  l'aide  du  suffixe  diminutif  -icu- 
lare,  du  francique  sprowan  (i),  forme  ancienne  de  l'ail. 
spriihen  «  faire  jaillir,  projeter  avec  force  (pai-  ex.  des 
étincelles)».  Le  type  schématique  *spro\N-iculare  abou- 
tit normalement  à  "sproeillier  *spro-yi,  d'où  sprogni,  par 
épaississement  de  r  en  gn  (-).  Dans  le  liégeois  Jean 
d'Outremeuse  on  lit  :  «  a  rote  sa  lenge  et  les  piechez  sprel- 
hoii  (var.  sj)rohoit)  hors  de  se  boche  »  |  ^  il  a  déchiré  sa 


{■)  Meyer-Liihke,  u°  8188,  tire  de  là  l'aiie.  fr.  esproer. 
(2j  Comp.  Iiouyot  (bowle  de  neige)  >  honynol,  etc. 


454  J.    HAUST 

langue  et  crachait  les  morceaux]  (*)  ;  sprelhoit  est  sans  doute 
une  graphie  inexacte  pour  'sproelhoii,  imparfait  de  "sproel- 
hier.  G.,  II,  639,  a  deviné  dans  ce  verbe  un  fréquentatif  de 
l'ail.  Hpviihen:  mais  il  a  négligé  de  le  rapprocher  du 
moderne  sprogni,  qui  en  est  pourtant  inséparable.  Compa- 
rez au  surplus  le  malm.  /  sprog-ne,  qui  répond  à  l'ail,  es 
sprûht  «  il  tombe  une  pluie  fine  »,  et  ce  que  nous  disons 
l^lus  haut  du  fr.  ébrouer. 

Ane.  fr.  gistel,  w.  custèl,  cristal,  rouchi  aguistiller. 

I.  Godefroy  à  l'ai'ticle  suivant  : 

gistel,  s.  m.,  fût  d'une  arme?  le  manche?  "  Puis  prent  une 
[corr.  une]  malhe  erant  de  fier  par  le  gistel  «  (Jeh.  des  Preis, 
Geste  de  Lieg-e,  24795,  ap.  Scheler,  Gloss.  philol.). 

L'éditeur  de  la  Geste,  A.  Borgnet,  traduit  par  «  le 
manche  ».  Scheler  dit  à  ce  propos  :  «  Je  ne  connais  pas  ce 
mot  et  je  renonce  à  en  préciser  la  valeur.  M.  le  professeur 
Le  E,oy  est  tenté  d'y  voir  l'ail.  t>-estell  (monture);  il  a  peut- 
être  rencontré  juste,  mais  je  doute  que  le  mot  allemand  ait 
jamais  été  appliqué  au  fût  d'une  arme  et  que  le  wallon 
présente  d'autres  cas  d'application  du  préfixe  alle- 
mand -<>-e  ». 

Pour  le  dernier  point,  Scheler  se  trompe  certainement  : 
il  existe  une  bonne  poignée  de  termes  wallons  qui  repré- 
sentent des  mots  germaniques  pourvus  du  préfixe  ge-. 
Scheler  pouvait  trouver  dans  Grandgagnage  les  plus 
connus,  guilite,  giiimène,  giiinàde.  L'autre  objection  ne 
paraît  pas  plus  sérieuse.  Admettons  que  le  germ.  gestel{l) 
n'ait  jamais  été  aj)i)liqué  au  fût  d'une  arme;  il  s'agit  de 
savoir  si  telle  accei)tion  est  possible.  Or  le  sens  générique  : 
(c  disposition,  arrangement,  assemblage  ».  d'où  :  «  mon- 
ture, charpente,  bâti,  châssis,  pied  ou  base  »,  conduit 
logiquement  à  celui  de  :  «  manche  (d'un  outil),  hamjje  (d'un 
maillet  d'armes)  ».  Dans  son  Glossaire,  Scheler  note  sou- 
vent des  mots  dont  Jean  d'Outremeuse,  ])our  le  besoin  de 
la  rime,  n'hésite  pas  à  étendre  la  signification;  il  dit  lui- 


(•)  Mi/reur  des  fiistors,  IV,  383.  —  Godefroy  reproduit  ce  texte  sans  la 
variante  et  avec  :  arotc,  au  lieu  de  nrote,  que  G.  corrige  ;  a  rote. 


ETYMOLOGIES  455 

même  que  cet  auteur  «  a  su  enrichir  le  vocabulaire  de  son 
temps  par  une  multitude  de  termes,  très  légitimes  de  façon 
et  de  sens,  qu'il  a  puisés  dans  le  terrain  natal  ou  créés 
selon  le  besoin  accidentel  de  sa  pensée  ou  l'entraînement 
de  la  versification  »  (préface  du  Glossaire,  p.  6).  Gisiel  est 
dans  ce  cas.  Il  signifie  «  manche  )>  et  représente  le  germ. 
g-estcl[l).  Nous  allons  montrer  d'ailleurs  que  nos  dialectes 
ont  conservé  le  mot  dans  une  acception  analogue. 

II.  De  Malmedy  à  Namur,  le  brancard  d'un  chariot  et 
surtout  d'un  tombereau,  ainsi  que  l'espace  com])ris  entre 
les  deux  bras  du  brancard,  s'appelle  ciistàl  (Verviers  : 
Lobet;  ard.  :  Body,  Voc.  des  charrons),  criistal  (Bormans, 
Voc.  des  honilleiirs  lié>>-eois  i^};  nam.  :  Pirsoul).  cristal 
(G.,  II,  olo  t.  de  min.,  avec  un  sens  quelque  peu  différent), 
cristèl  ^Jupille  :  BSW  ,  49  p.  363).  Le  mot  est  ancien  :  braz 
de  crustelles  figure  dans  nos  Chartes  des  Métiers,  I,  82  (^l, 
et  G.,  II,  o73,  cite  ce  texte  de  1723  :  «  chevaux  attelés, 
comme  l'on  dit,  al  cristalle  ».  De  source  orale,  j'ai  recueilli 
crustal  à  Dorinne,  Ben-Ahin,  Marche  et  Heure-en-Fa- 
menne,  Erezée,  Villers-Sainte-Gertrude,  Vielsalm;  ciistcl 
à  Masta-Stavelot  et  à  Thimister-Clermont;  enfin,  près  de 
Malmedy  :  kœstœl  à  Gueuzaine,  kcstèl  à  Robertville.  Le 
genre  varie  :  masculin  à  l'origine,  il  est  devenu  presque 
partout  féminin  à  cause  de  la  terminaison. 

Les  dernières  formes,  originaires  de  la  frontière  linguis- 
tique, reproduisent  nettement  le  germ.  g-estel(l)  qui,  outi-e 
le  sens  général  indiqué  ci-dessus,  désigne  le  train  d'un 
chariot.  Cette  signification  apparaît  encore  dans  l'ancien 
wallon  braz  de  crustelles  et  attelé  al  cristalle.  Comme  le 
mot  s'employait  surtout  à  cette  occasion,  il  a  fini  par  dési- 
gner spécialement  la  limonière  ou  prolongement  de  l'avant- 
train  (3).  Pour  la  forme,  on  notera  i°  l'altération  de  -cl  en 


(ij  Bormans  est  le  seul  qui  pruiuise  une  étymulugio  ;  il  croit  y  voir  deux 
mots  flamands  :  kruyen,  pousser,  traîner,  et  stall 

(2)  Le  texte  porte  :  hraz  de  Brus/elles.  11  est  cité  dans  G.,  Il,  .o6'2,  où  Scholer, 
moins  heureux  (jue  dliahilude,  voudrait  lii-e  :  bars  de  Britscelles  (=  civières 
de  Bruxelles)!  La  correction  crustelles,  qui  sinipose  à  l'évidence,  est  de 
Body,  l.l. 

(')  De  même  dans  certains  dialectes  jjermaniques.  Le  HVir/.  (1er  hirenili. 
Mimdart  (1906)  traduit  gestell  par  Gaheldeiclisel. 


456  J.    H  A  LIST 

-al[e]  sons  l'influence  des  nombreux  diminutifs  en  -aie, 
fr.  elle;  2°  répenthèso  de  r  après  A*  initial  ;  comparez  scrâne 
«  échine  »  (anc.  li.  ail.  skina);  croiizire,  à  Sibret,  pour 
conzire,  coiisire  «  amas  de  neige  »;  crèssôde  «  pâquerette  » 
(con  solida);  3°  le  durcissement  de  ^-  initial  en  A*. 

m.  Il  faut  attribuer  la  même  origine  au  montois  a^-iiis- 
tiller  «  ajuster,  arranger  »  (ED.,  1911,  p.  52).  Sigart  essaie 
de  l'expliquer  par  *(ijiistiller  qui  serait  un  diminutif  de 
ajuster,  mais  c'est  pure  fantaisie.  Ce  verbe  se  décompose 
en  a-^^'estel-\-ier  et  signifie  proprement  «  pourvoir  de  l'ap- 
pareil convenable,  appareiller».  Comparez  l'ail,  anstellen 
«  arranger»  et  le  fr.  agréer,  t.  de  mar.,  «  garnir  (un  navire) 
de  ses  agrès  »  (de  l'anc.  lioll.  gereideii  :  ])réparer). 

AV.  gô,  gôti;  gaum.  djô,  djwôti;  fr  mugot.  mijoter. 

Le  w.  gô,  s.  m.,  signifie  :  «petite  provision  de  fruits 
qu'on  tient  en  réserve  pour  ses  menus  appétits  ».  G  ,  I,  234, 
paraît  l'assigner  au  dialecte  namurois;  mais  on  clierche 
vainement  ce  mot  dans  les  glossaires  de  F.  D.  (manu- 
scrit, 1850)  et  de  Pirsoul.  En  revanche,  gô  se  lit  dans  une 
pièce  ancienne  de  Marche-en-Famenne  (*)  et  se  dit  surtout 
à  l'est  de  Liège,  vers  la  frontière  linguistique.  A  Malmedy, 
Villers  (1793)  a  un  article  gô,  s.  m.,  «  magasin,  corps  de 
réserve,  magot  »  (2).  A  Stavelot  :  fé  s  gô  «  faire  sa 
réserve  »,  surtout  de  fruits  (3).  A  Fayraonville-Weismes, 
où  l'on  prononce  i)arfois  cô,  M.  J.  Bastin  distingue  deux 
sens  :«  1.  i)ro vision  de  fruits  cachée,  mise  en  réserve; 
2.  portion  de  fruits  donnée  en  cadeau  »  (■*).  A  Verviers 
enfin,  Lobet,  ]).  223  :  gô  «  dépôt  (d'argent  ou  autre  effet  en 
quantité),  magot  ».  Nos  autres  lexicographes  ignorent  ce 
mot,  qui  d'ailleurs  n'existe  pas  en  liégeois.  Dans  les  témoi- 
gnages cités,  nous  ne  trouvons  i)as  racce])tion  suivante  : 
«  endroit  d'un  bois  où  abondent  les  fruits  à  cueillir,  notam- 
iiH'iil  les  myrtilles  ».  Tel  est  pourtant  le  sens  unique  que  je 


(•)  Li  Marii-dje  )ii(inij)i('  (ISOfi),  v.  202  :  tant  qu'i  un'  aurc  <lrs  pome.i  T)  go. 
1')  Grandga(;nagk,  K.vlraits  de  Villers,  p.  ai. 

(■')  Haist,  Voc.  de  Stavelot,  p.  18  (BSW  ii,  p.  liOS).  De  im-im'  a  Sprimoul 
et  d;ins  toute  la  région  verviéloise. 

{*)  Voc.  de  Faymonville,  p.  36  (BSW  tSO,  p.  tm-,  corr.  *•.  f.  en  .s-,  tn.). 


ETYMOLOGIES  457 

eonnaissais  à  Vorviers  dans  mon  enfance  (^)  ;  nous  pronon- 
cions gon,  avec  la  résonance  gutturale  i^ropre  au  vervié- 
tois  devant  voyelle  ou  à  la  fin  de  la  phrase,  et  gô  devant 
consonne  (-).  (*ette  nasale  provient  d'une  altération  :  f>-ô, 
isolé  dans  la  langue  ou  du  moins  ])araissant  tel,  a  subi 
l'analogie  des  nombreuses  finales  en  -on  :  -ô  =  fr.  et  liég. 
-on  (3). 

De  la  pointe  nord-est  du  domaine  roman,  il  faut  des- 
cendre au  pays  de  Virton  pour  trouver  l'équivalent  de 
notre  g-ô.  A  Tiutigny  et  à  Sainte-Marie-sur- Semoi s,  un 
(Ijow,  c'est  aussi  une  «  provision  de  f  Juits  tenue  en  réserve 
dans  une  cachette  »  (BSW..  37,  p.  344).  Le  Vocabulaire  des 
environs  de  Virton,  par  Gl.  Mans  (manuscrit,  I85U),  éci-it 
Jnii,  avec  la  même  définition;  il  a  de  plus  cet  article  : 
«  saiiré,  jaunir  :  mette  des  peiinie  saura;  syn.  jouoti,  de  là 
ain  jouo  de  peunie  i^.  Au  lieu  de  Jau.  jouo,  jouoti,  lisez  djô, 
djouo  ou  djouw,  djouàti  ou  djwôti,  comme  j'ai  entendu 
prononcer,  près  de  Virton,  à  Saint  Léger  et  à  Musson.  De 
là  le  fr.  dialectal  :  «  mettre  joùtir  des  nèfles  »,  que  donne 
le  Larousse  illustré. 

Ce  verbe  dérive  de  djô,  djouw,  qui  avait  donc  à  l'origine 
un  t  finaL  Or  le  liégeois  possède  un  verbe  g'ôti.  dont  le 
rapport  avec  g-ô  devient  par  là  manifeste  et  que  nous 
devons  dès  lors  comi^rendi  e  dans  nos  recherches. 

On  n'a  encore  publié  sur  g-ôti  que  des  notes  incomplètes 
ou  peu  exactes  ("*).  En  partant  du  ]nnmitif  g-ô,  nous  pou- 
vons résumer  comme  suit  le  développement  sémantique  de 
ce  verbe  intransitif  :  c'est,  à  l'origine,  un  terme  d'écono- 
mie rurale,  conservé  comme  tel  dans  un  coin  extrême  de  la 
Wallonie  (Malmcdy,  Faymonville,  Yielsalm);  non  loin  de 


(')  Il  existe  aussi  à  Malmédy  :  su  wener  (se  glisser)  cl'  70  a  //o  fol  pluuk'lanl 
dès  frambï'lies  (Annonac  do  r  samdne,  I90G,  p.  30). 

(-)  Voy.  Mélanf/es  wallons  (Liège,  1892),  p.  28. 

(3)  Voy.  BSW  t)3,  p.  306,  où  j'explique  do  iiiriuo  tkiîi,  \.  d.  d'Aycncux,. 
altération  de  nd,  forme  inaseuliiie  du  fr.  noue  :  *iiaii(ia. 

(■*)  Trois  articles  de  G.,  I,  239,  3.53,  11,  529,  douiu'iit  sans  explioation  deux 
sens  différents  que  l'auteur  ne  songe  pas  à  raj)pr(>clier.  Dans  ses  E.riniils  de 
Yillers.  il  écrit  (j(ilelii('.)  au  lieu  de  yôli.  M.  J.  Bastin.  /./.,  signale,  avec  des 
exemples  typiques,  deux  significations  dont  il  faut  intervertir  l'ordre.  Iluiierl 
et  (i.  écrivent  (/o// (?)  au  lieu  de  i'inclioatif  yoli.  Cambrcsier,  Uemacle.  Lobet 
n'en  parlent  pas. 


458  J.    HAUST 

là  (Liège,  Huy),  il  survit  daus  des  expressions  métapho- 
riques, avec  un  sens  dépréciatif. 

I.  Proprement,  en  parlant  des  fruits  qu'on  met  sur  la  paille  ou 
dans  le  foin  :  "  mûrir  dans  le  fruitier  "•.  sens  attesté  pour  Malmedy 
par  Villers  (1793),  pour  Faymonville  par  M.  J.  Bastin,  qui  donne 
cet  exemple  :  lès  bilokes  qiii-arîn  tourné  d'vant  d'èsse  mawes,  ô  lès 
met  g-ôti  o  foûre  «■  les  prunes  tombées  avant  d'être  mûres,  on  les 
met  mûrir  dans  le  foin  ".  [Comme  on  vient  de  le  voir,  c'est 
l'unifiue  acception  du  gaumais  djouôti  et  du  fr.  dial.  joCitir].  \  Par 
analogie  :  1.  à  Vielsalm.  les  pommes  sauvages,  dont  on  veut  faire 
du  vinaigre,  sont  mises  en  plein  air  pendant  deux  ou  trois 
semaines  pour  les  laisser  gôti,  syn.  atinri,  maw'ri  «  s'atten- 
drir, mûrir  »  (BD  1906.  p.  35)  ;  2.  à  Faymonville,  »  s'avachir, 
s'amollir  [=  blettir]  par  un  commencement  de  dessiccation,  se 
dit  des  fruits  qui  n'arrivent  pas  à  maturité,  des  feuilles,  de 
l'herbe,  qui,  peu  de  temps  après  avoir  été  coupées,  deviennent 
flasques,  surtout  sous  l'action  du  soleil  »  (J.  Bastin,  /./.;  voy.  les 
exemples).  [L'influence  de  rôti  «  rouir,  pourrir  n  n'est  peut-être 
pas  étrangère  à  cette  extension  de  sens.] 

II.  Par  métaphore  et  toujours  péjorativement:  1.  en  parlant 
d'une  préparation  culinaire  qui  a  mijoté  trop  longtemps  sur  le 
feu  :  -  se  dessécher,  perdre  sa  saveur  "  :  i  n'  fût  nin  lèyî  gbti 
V  café  (G.,  I,  355).  de  gôii  café  iib.|;  qwand  on  ratint  lès-autes 
po  diner,  lès-  cvompîres  gôtihèt  (Forir);  C  feû  /j'  va  nin  assez  rû, 
lé  djig-ot  gôtih  (Muy);  //  tchar  est  g-ôtèye.  li  rosti  a  V  gos'  di  gôti 
(Liège)  :  ce  goût  de  gôti  diffère  du  goût  de  bâti  »  havi,  desséché 
à  la  surface  -  et  de  celui  de  bvoûlé  ••  brûlé,  carbonisé  •  ;  2  en 
parlant  d'une  personne  qui  reste  paresseusement  au  coin  du  feu  : 
"  se  cuire,  croupir  ".  Duvivier  donne  cet  exemple  :  /  s'  gôtih  èl 
coulêye  de  feû,  où  le  réfléchi  est  sans  doute  amené  par  l'analogie 
de  /■  s'  rostih,  i  s'  ciit  «  il  se  rôtit,  il  se  cuit  ".  Je  n'ai  entendu  à 
Liège  que  le  v.  intraiisitif  :  èle  gôtih  èl  coulêy^e,  à  propos  d'une 
femme  indolente,  d'/zje  crope  è-cindrs\  3.  en  parlant  de  l'eau 
qui  se  corrompt  faute  de  juouvement  :  "  croujiir  »  ;  c'est  le  sens 
uni(jue  que  donne  le  liégeois  Rouveroy  (ap.  G.,  II,  559)  Le  même 
a  un  article  gômi,  où  il  se  contente  de  renvoyer  à  gôti. 

Enfin  ^'ôti  a  donné,  à  Erezée,  le  diminutif  <>-ôtinrr, 
X.  intr.,  I.  «  mijoter»;  2.  en  parlant  d'une  personne: 
«  traîner  (en  route),  croupir».  Quant  a  }>odiner,  auquel  G. 
compare  fi'ôti,  sa  structure  phonétique,  malgré  la  ressem- 
blance pai'tielle  des  significations,  dénote  une  origine  dif- 


ETYMOLOGIES  459 

férente.  On  dit,  à  Liège  et  à  Jupille,  f>o<Uner,  1.  «  mijoter, 
mitonner  »  :  dj'a  niètoii  m'  rosti  ^odiner  sa  l  costé  de  fciï  ; 

2.  fig.  «  dodiner,  dorloter  »  (^).  Le  verviétois  gondiner 
(Lobet,  p.  224  :  «  gratiner,  mitonner  »,  avec  une  fausse 
nasale  on  (  =  o),  peut  s'expliquer  par  croisement  de  g-odiner 
et  âeg-ôti. 

Voilà,  en  somme,  ce  que  nous  savons  actuellement  de  g-ô 
et  de  g'ôti  dans  le  domaine  wallon.  Quelle  est  l'origine  de 
ces  mots?  (^)  Leur  habitat  paraît  dénoter  une  provenance 
germanique.  De  même  la  comi)araison  phonétique  avec 
d'autres  termes,  tels  que  hô  «  giron  »,  hôt'lèye  «  *  giron- 
née  »  (du  néerl.  schoot,  gothique  skniiis);  pâti  «  patrouil- 
ler, manier  indécemment  »  (Stavelot),  dérivé  de  pôle 
«patte»  (néerl.  poot,  francique  paiita);  rôti  <(  rouir  », 
gaum.  roiiôti  (néerl.  voteii,  francique  rofjan,  d'une  racine 
germ.  raiit  «  pourrir»  :  Klugo.  \-°  rôsten).  D'après  ces  ana- 
logues, un  type  *g-aiit,  *gôt,  expliquerait  g-ô,  g'ôti.  Seule- 
ment, rien  dans  les  langues  germaniques  ne  permet 
d'étayer  cette  conjecture. 

Un  fait  certain  —  et  qui  doit  déjà  nous  satisfaire  —  c'est 
que  nous  reconnaissons  gô,  gôti  dans  le  second  élémeni  du 
fr.  mus>-ot,  mijoter. 

Lie  h-,  mijoter  «  faire  cuire  doucement  et  longtemps  »  n'a 
pénétré  que  depuis  peu  (Acad.,  1798)  dans  la  langue  géné- 
rale. Il  provient  des  dialectes  du  Xord  et  de  l'Ouest  (meu- 
sien,  ronchi,  picard,  normand,  manceau),  où  il  a  des  formes 
et  des  acceptions  diverses  :  1.  a  faire  mûrir»  ^norm.  mig'eo- 
ter),  a  mûrir  sur  la  planche  »  (Haut-Maine  ;  id.)  ;  2.  «  cacher 
son    argent,    thésauriser»    (rouclii   :    mig'oler,    miigoter); 

3.  «  bouillir  à  petit  feu  »  (boulonnais  :  miigoter).  Il  dérive 
de  mig-eot  «  lieu  où  l'on  garde  les  fruits  jusqu'à  maturité  » 
(Haut-Maine);  migoe  «  provision  de  ])ommes  d'hiver,  etc.  » 
(Bayeux);  m «^>-of  «  provision  de  fruits  qu'on  garde  pour 
l'hiver  et  qu'on  laisse  mûrir  sur  la  planche»  (norm); 
mijau  :   1.  même  sens;   2.   «collection    d'objets   faite   en 


(1)  Duvivier  donne  -.  «  rjorliner,  dodiner,  dôrlnliucr,  fr.  (lodiner,  dorloter». 
J'ai  entendu  en  liégeois  :  si  ç/odincr  «  se  dorloter  ». 

(-)  G.,  qui  d'ailleurs  ne  soujx/onne  pas  de  |iarenté  entre  go  et  gi>(i,  compare 
simplement  go  avec  gi'»nà,  lequel  n'a  certainement  rien  a  faire  ici. 


460  J.    HAUST 

caelietle  »  (Ard.  fr.);  mi^ot,  mii^ot  «  magot,  trésor  caché  » 
(rouchi,  picard)  ;  etc.  (') 

En  français  moderne,  le  Dict.  ^én.  admet  mugot  «  magot 
(d'argent)  »  La  forme  la  ])lus  ancienne  date  du  xi<^  siècle  : 
miisg-ode,  dans  la  Vie  de  saint  Alexis,  v.  254,  où  le  sens 
est  :  «  provision  (de  bouche),  réserve  (d'aliments)  )>  {^). 
L'étvmologie  reste  incertaine  (3).  Le  dernier  qui  en  parle, 
Meyer-Liibke,  n°  5776,  pose  comme  étj'-mon  *musgauda 
(magasin,  grenier,  réserve),  d'origine  inconnue,  probable- 
ment gauloise  C*) 

Xotre  étude  contient,  croyons-nous,  des  données  inédites 
qui  peuvent  servir  à  préciser  la  question.  Il  en  ressort 
notamment  que  miisg'ode  est  bien  un  mot  composé,  dont  le 
second  élément  —  le  plus  significatif  —  a  ])aru  suffisant 
au  wallon  et  an  gaumais.  De  plus,  l'aire  de  ffo,  djà,  oriente 
les  recherches  vers  le  domaine  germanique.  Le  premier 
élément  de  tniisg-ode  pourrait  bien  être  le  moyen  h.  ail. 
m  nos  (cibus;  ail.  mod.  nms),  comme  le  jn-oposait  Storm  {■'). 
Le  second  reste  éuigmatique.  Sans  avoir  la  prétention  de 
le  déchiffrer,  je  terminerai  sur  ces  réflexions  : 

Le  groupe  g-ô,  gôti,  djà,  djonôti,  postule  un  type  *gau- 
tum,  antérieur  à  *(mus)gauda. 

On  admet  gabata  (écuelle),  *gauta  (joue)  pour  expli- 
quer le  fr.  «  jatte  »,  «  joue  »  (Meyer-Liibke,  n»  3625).  Notre 
*gautum  y  serait-il  apparenté?  J'attire  plutôt  l'attention 
sur  ce   fait  que,   à  côté   de  gô,   le  dialecte    de   Faymon- 


(')  Voy.  notamment  de  Monlesson,  Vac.  du  Haut-Mitine  :  migeot,  -er ; 
Goll'art,  Gloss.  du  Mouzonnais  :  mijnu;  Baiuloii,  Patois  de  Relhcl  :  miyvim  ; 
Sigarl  :  mic/ot,  -cr ;  Ilocarl  :  magot,  -cr,  -eu;  Gorblct  :  muffoler ;  .loiiancoux, 
Dcllxmlle  :  magot;  etc.  —  Vax  Wallonie,  nigo  (nani.  :  G.,  II,  10:2;  aussi  à 
(lliaiicroi)  «  amas  caché  de  fruits,  d'argent,  etc.  »  s'est  altéré  de  innjo  sous 
l'influence  de  Jiid.  —  Le  fr.  )aag<)l  lui  aussi  est  considère  coninic  un(>  alté- 
ration de  mufjut. 

(•)  Voy.  Godei'roy  :  laarjoe,  margoe,  majoe,  etc.,  s.  f.,  «  amas,  pi'ovision  ; 
cellier  où  l'on  conserve  les  pommes  ». 

(3)  Voy.  notamment  Sclieler,  v«  miigol  ;  Romania,  II,  85;  G.,  Paris,  Vie  de 
Saint  Alexis,  p.  fWi;  X.  /'.  rovi.  Pliil.',  XXXII,  -i45;  XXXIII,  433;  Jouancoux, 
II,  'iio. 

{*)  Il  cite  le  wallon  migo;  lisez  :  rouchi  (Sigarl),  au  lieu  de  :  wallon. 

(^)  Romania,  II,  85.  —  Comp.  le  moy.  h.  ail.  muoshàs,  maosteile. 


ETYMOLOGIES  461 

ville  (^)  possède  une  forme  cô.  Peut-on  en  déduire  que 
*gautum  est  altéré  de  *cautum? 

Le  latin  cautum  (lieu  protégé,  enclos;  de  cuiitua, 
cavT're),  qui  a  survécu  dans  le  Sud  (*),  conviendrait  assez 
pour  le  sens  (endroit  préservé  :  réserve);  mais  les  condi- 
tions géographiques  ne  lui  sont  2>as  favorables  :  il  faudrait 
qu'il  eiît  passé  sur  le  Rhin  et  fût,  de  là,  revenu  chez  nous, 
ce  qui  est  bien  problématique. 

Dès  lors,  notre  *cautum  ne  poui-rait-il  provenir  de 
cavatum  (endroit  creusé  :  creux,  cachette),  accentué  à  la 
mode  germanique  sur  l'antépénultième? 

En  dernière  analyse,  si  la  réponse  à  ces  questions  est 
négative,  il  ne  nous  restera  qu'à  supposer  à  tout  ce  groupe 
une  origine  celtique. 

Liég.  gossê. 

J'ai  entendu  ce  mot  1°  à  Ampsin  et  à  Bergilers  (Hesbaye 
liégeoise)  on  gosse  d'ansène  «  un  petit  tas  de  fumier 
déposé  sur  le  terrain  à  fumer  :»  ;  2°  à  Jupille  et  à  Liège- 
Cointe  :  on  gossê  d'foùre  «  une  veillote,  un  tas  de  foin 
plus  petit  que  la  hoiignète  ».  Le  sens  générique  est  donc 
«  petit  tas  arrondi  ».  A  part  Body,  ]^oc.  agr  ,  qui  atteste 
aussi  le  1"  en  Hesbaye,  et  G.,  I,  235,  3o4,  qui  attribue  les 
deux  sens  au  hesbignon  g-ossiâ,  gocha  [nam.  -ya  =  liég.  -c  : 
-ellumj,  nos  lexicographes  se  taisent  à  ce  sujet  (3). 

Hubert,  Duvivier  et  Forir  donnent  le  terme  suivant  que, 
personnellement,  je  n'ai  pas  retrouvé  :  g-oss'lé  u  chargé, 
bien  i-empli  »,  syn.  de  hop  lé,  hoz'lc.  On  aurait  tort  d'y  voir 
l'altération  de  ce  hoz'lé,  hoss'lé,  qui  dérive  de  hozc  «  hou- 


(1)  Ce  dialecte,  à  rextrènie  N.-E.  du  doniaiiie  roinaii  iMaliiiedy),  est  rciiuir- 
quable  par  l'abondance  de  ses  formes  archaïques.  M.  J.  liastiu  en  a  étudié  le 
vocabulaire  et  la  morphologie  (BSW,  t.  50  et  .'il). 

('-)  Frioui,  Espagne,  Portugal  ;  voy.  Meyer-I.vibko,  ii»  178i;  Kdrting,  n°  2030; 
Diez,  p.  Wi,  et  Du  Gange. 

(3)  Forir  a  deux  articles  qui  ne  mcritenl  aucmic  conliance  :  «  goc/iù  veil- 
lote »  et  i<  goral  sorte  de  gerbe  de  blc  ».  l/un  reproduit  une  erreur  de  G., 
I,  23ri,  que  G.  lui  même  a  corrigée  \).  3.'ji;  la  dclinilion  de  l'autre  est  suspecte 
et  la  l'orme  gorul  est  sûrement  une  co(iuille  pour  ;/urui.  J'ai  constate  gossia 
(de  fumier)  à  Crehen  (Hesbaye). 


462  J.    HAUST 

seau  »  (*);  <>-()ss'lé  vient  de  gosse,  comme  hop'lc  de  hopè. 
Le  sens  propre  est  :  «  tassé,  bourré  ». 

D'où  vient  gossè  lui-même?  G.  n'en  dit  mot.  Body  com- 
pare le  hesb.  gosse  à  Tard,  cossèt  «  veillote  »,  et  cette  indi- 
cation se  trouve  être  juste  :  il  nous  reste  à  le  démontrer. 

Le  liég.  cossèt,  nam.  coiichet  (de  même  souche  que  le  fr. 
coche,  cochon),  signifie  proprement  «  petit  porc  »  et,  au 
figuré,  dans  certains  villages  ardeur ais  (Vielsalm,  Jalliay, 
Sprimont),  «  veillote)),  petit  tas  de  foin  qui  ressemble  au 
dos  arrondi  du  cossèt  {-)  Du  même  radical,  à  l'aide  d'un 
suffixe  équivalent,  on  a  formé  cossè,  dont  l'initiale  s'est 
ensuite  adoucie  (^)  :  une  charte  liégeoise  de  139(i,  relative 
aux  habitants  de  Jupille.  contient  en  effet  cocheaii,  forme 
francisée  qui  atteste  au  xiv*^^  siècle  l'existence  du  type  wal- 
lon cossè  ('*);  une  autre  charte  liégeoise  de  1403  porte  la 
forme  gocJienii  [^'). 

(A  suivre.)  Jl:an  Haust. 


(1)  L'anc.  liég.  qosseaii.r  (G.,  II,  399j  est  une  mauvaise  leçon  i)Our  liosscaux 
(voy.  BSW  o,  p.  467]. 

(2)  De  même  Tandain  s'appelle  cochon  à  Bosséval  (Brineat,  Enqiicte,  I,  31). 
A  Coruesse  et  à  Surister,  leà  «  loup  »  =  petit  tas  de  foin  :  fc  dh  leùs,  rilèver 
a  leùs.  A  Vielsalni,  d'après  Body,  poùtrin  «  poulain  »  =  gros  tas  de  blé. 
Meyer-Lubke,  n"  9406,  admet  que  veillote  dérive  de  vitulus  «  veau  »  (comp. 
cependant  Thomas,  Mélanges,  p.  163).  —  On  peut  voir,  dans  Behrens,  Beitnhje, 
p.  19(1-19^.  une  dissertation  sur  les  noms  d'animaux  pris  métaphoriquenienl. 

(•')  .Même  variation  de  sullixe  dans  le  verv.  (fossc  «  aisselier,  gousset  (pièce 
de  cliarpenlcj  »,  que  Lohet,  p.  2:24,  donne  à  côté  de  gossrt  «  gousset  ».  Pour  le 
radical,  ce  yossc  n'a  évidemment  rien  à  démêler  avec  le  nôtre. 

(■•)  «  S'illi  advenoit  que...  demoraist  sur  les  |)reis  foiire  en  coclienus,  par 
faute  de  clierons  ou  par  plovaige,  lydis  sorseans...  devront  contrewardier 
leurs  biestes  qu'ilhs  ne  l'aclieiit  damaiges  asdis  cocheuns  de  fours  »  {Cartnlaire 
de  l'abhayc  du  Val-Benoit,  p.  721,  éd.  J.  Cuvelier).  —  Ce  cocheau  pourrait 
expliquer  le  fr.  écocheler,  t.  d'agric,  javeler,  d'origine  inconnue  d'après  Litlré 
et  le  Dicl.  général. 

(■•)  «  Pour  le  dit  four  aidier  feneir  et  commourneir  puis  le  mettre  en  grans 
gocheauz  ».  Texte  cité  |)ar  L.  jErNEHOMME,  FUnnaUcllaule,  p.  29. 


Un  lignage  namurois  au  XIF  siècle 
Les  Falmagne 


L'étude  de  la  condition  des  personnes  et  des  terres  au 
moyen  âge  soulève  encore  bien  des  problèmes.  Si  l'on  n'est 
pas  parvenu  plus  tôt  à  des  solutions  définitives,  c'est  que, 
trop  souvent,  on  est  parti  de  théories  toutes  faites.  Des  con- 
clusions générales  ne  pourront  être  énoncées  avec  certi- 
tude que  lorsque  nous  posséderons  de  très  nombreuses 
études  de  détail,  basées  sur  des  documents  originaux. 

Pour  ma  part,  ayant  conçu  le  projet  d'écrire  une  histoire 
des  classes  rurales  dans  le  Namurois  au  moyen  âge,  j'ai 
commencé  par  rédiger  des  monographies  de  villages,  voire 
de  simples  fermes,  en  me  plaçant  surtout  au  point  de  vue 
de  l'évolution  et  de  la  répartition  de  la  propriété  foncière. 
Comme  l'histoire  du  sol  ne  se  conçoit  pas  sans  celle  de  ses 
occupants,  j'ai  parallèlement  essayé  d'établir  les  vicissi- 
tudes subies  par  des  lignages  de  rang  et  d'imijortance 
divers. 

C'est  une  étude  ):)i'éliminaire  de  ce  genre  que  je  présente 
aujourd'hui.  Elle  a  pour  objet  le  petit  village  de  Falmagne, 
situé  à  9  kilomètres  de  Dinant.  Elle  comprend  trois  par- 
ties. En  premier  lieu,  je  passe  en  revue  les  personnages 
du  lignage,  cités  dans  les  sources  narratives  et  diploma- 
tiques, en  ayant  soin  de  relever,  pour  chacun  d'eux,  les 
particularités  et  les  qualificatifs,  indices  de  leur  rang- 
social;  j'étudie  ensuite  l'alleu  lui-même;  enfin,  dans  un 
dernier  paragraphe,  je  groupe  quelques  remai-ques  d'un 
caractère  général. 

Un  mot  d'abord  sur  le  passé  de  Falmagne,  antérieur  à  la 
période  qui  nous  occupe.  Le  sol  de  cette  localité  n'a  livré 
aucun  vestige  romain  ;  par  contre,  on  y  a  découveit  plu- 


464  F.     ROUSSEAU 

sieurs  cimetières  francs  (^),  Il  est  possible  que  le  village 
ait  donné  son  nom  au  i>îig-iis  Falniancnsis,  ou  de  Fa- 
menne  (*);  dans  ce  cas,  Falmagne  aurait  eu  une  certaine 
importance  à  l'époque  mérovingienne. 

A.  La  famille  de  Falmagne. 

I.  A\'iDRic  DE  Falmagne,  qualifié  de  uir  nobilis,  vir  iiobi- 
lissimiis,  donne  à  l'abbaj^e  de  Waulsort,  le  8  octobre  946, 
jour  du  transfert  dans  ce  monastère  des  reliques  de  saint 
Bloque,  un  cens  d'une  demi-livre  de  cire  à  percevoir 
annuellement  sur  chaque  maison  de  son  alleu  de  allodio 
inco  Fidemaniiia,  quod  teneo  jure  paterno),  et  engage  les 
membres  de  sa  famille  {precipio  genti  inee)  à  se  rendre  une 
fois  l'an  à  l'église  de  Waulsort,  de  même  qu'ils  ont  l'habi- 
tude de  venir  à  la  messe  à  Falmagne  aux  principales  fêtes 
de  l'année  (^). 

La  charte  qui  nous  fournit  ces  renseignements  est  un 
faux  composé  de  toutes  pièces  vers  1  loO  par  Robert,  moine 
de  Waulsort  (■*;.  Auteur  de  la  Vita  Foraiini  et  peut-être  de 
VHistoria  Walciodorensis  monasterii,  ce  religieux  était  très 
au  courant  de  l'histoire  et  des  traditions  de  son  monas- 
tère(^).  On  peut  donc  supposer  que  le  AVidric  de  l'acte  de  946 
n'est  pas  un  personnage  imaginaire,  mais  bien  un  ancêtre 
encore  connu  au  xu*'  siècle  de  la  famille  de  Falmagne. 

II.  Du  temps  d'Otbert,  évêque  de  Liège  (1092-1117),  un 
certain  Gerulfe,  vir  nobilis,  possédait,  jure  hereditario, 
avec  sa  femme  Berlexde  et  ses  deux  fils  Heribert  et 
WiNAND,  des  droits  sur  l'église  de  Falmagne  et  des  biens 
allodiaux  dans  cette  localité  (6).  Gerulfe  était  le  fi-ère 
d'Albert  de   Briey  (")  (en   Lorraine),  qui,  en  1084,  adnii- 


(')  Annales  Sfjcivfi-  arch.  de  N(i»iiir,  l.  VII,  p.  308;  t.  XIII,  p.  52(3;  t.  XXI, 
p.  108. 

(2)  Chanoine  Rur.AM),  u  Toponymie  naniuroise  »,  ibid.,  t.  XXIII,  p.  .^07. 

(3j  Anniertes  piinr  servir  à  l'/iist.  crrh.  t.  Il,  p.  2(55;  H.  Piuenne,  Album 
t/clye  de  diplo7)iati(pte,  planche  XVI. 

f^)  H.  PniENNE,  op.  cit.,  notice  de  la  |)lanihe  XVI  |»ar  H.  ScuinEKT. 

(^)  Cfr.  L.  Lahaye,  Étude  sur  i abbaye  de  yVaulsort,  pp.  101,  103  cl  ss. 

1^')  Maktène  et  Di  RAM),  Aviplisshna  rollectio,  t.  I,  eol.  867,  8(38;  Analertes, 
XVI,  pp.  31,34. 

(')  Analertes,  XVI.  p.  34. 


ligna(;e  NAMirmis  465 

Distrait  le  domaine  (prediiim)  de  Donceel  en  Hesbaye 
comme  fondé  de  pouvoir  de  Régnier  de  Briej'.  serons  et 
membre  de  la  familin  de  la  célèbre  marquise  Mathilde  de 
Toscane,  veuve  de  (iodei'roid  le  Barbu  (^). 

III.  GoDEFRoii),  qui  lut  nrcliei)é(]iie  de  Trêves  de  lli24 
à  i  127,  était  né  à  Falmugne  de  parents  nobles.  Son  père  se 
nommait  Rutfrid  et  sa  mère  Fridesinde.  11  était  venu  dans 
la  cité  archiépiscopale  à  la  suite  de  son  oncle  Ariioul  qui 
remplit  les  fonctions  de  prévôt  de  la  collégiale  Saint-Pierre 
de  cette  ville,  et  qui  construisit  une  église  dédiée  à  la 
Sainte-Croix,  près  delà  Porte  blanche  (^). 

IV.  HiLLiN,  circheoèijiie  de  Trêves,  major  natu  et  diiçni- 
iate  ejiis  parentele  (^),  se  rattachait  au  lignage  de  Falmagne 
par  sa  mère.  En  1164,  il  rappelle  que  celle-ci  et  ses 
ancêtres  reposaient  dans  l'église  de  ce  village  ("*).  Il  était 
frère  utérin  d'Anselme  de  Falmagne  (■''),  et  avait  une  here- 
ditatis  portio  dans  l'alleu  de  ce  nom  (^).  Pendant  sa  jeu- 
nesse il  avait  étudié  en  France.  Sa  science  et  ses  bonnes 
mœurs  lui  valurent  d'être  élevé,  vers  114.-),  à  la  dignité  de 
doj^en  du  chapitre  de  la  cathédrale  de  Trêves  (").  En  1152, 
il  remplaça  Albéron  de  Montreuil  sur  le  siège  archiépisco- 
pal. Henri  l'Aveugle,  comte  de  Xamur,  avoué  de  la  puis- 
sante abbaye  de  Saint-Maximin  à  Trêves,  paraît  ne  pas 
avoir  été  étranger  à  son  élection  (S).  Il  mourut  en  1 169. 

V.  Anselme  de  Falmagne,  senior,  ulraqiie  liiiea  ^-eiie- 
rosi    saiii>iiiiiis    ingeiiuiis ;  liber  hoino ;   iiohllls  el  liber; 


(*j  .1.  DE  (Ihf.stukt  dk  IIaneffe,  m  La  terre  fniiiclic  de  IlaiicH''  -,  dans  Hnll. 
Inst.  (irch.  lit^i/rois,  l.  38,  |)p.  91,  11-i,  llti. 

(■-)  Gesla  Treverornm,  MGH.  SS.,  1.  VIII,  p.  li)8;  Gesta  Gmlefndi  un/iiepis- 
copi,  iliiiL,  \).  :200, 

(3)  Analectes,\..  \VI,  p.  3o. 

(*)  Ibidem,  p.  33. 

(^)  Dans  un  acte  de  I  H)3,  Anschnc  de  Falmagne  est  appelé  rnrne  geniminis 
de  l'arclievèipie  llilliii  {A)iiiiflssi)n(i  cnllectin,  t.  1,  col.  8137).  Par  enutre, 
en  HG'i,  ililliii  liii-inèiiie  spéeilie  tprAnselnie  est  son  frère  utérin  {AnitU'cfcs, 
l.  XVI,  p.  3:2).  Deux  autres  ehartes  de  1 103  et  1  KiC)  {Ihid.,  pp.  :28,  3-ii  désii;nenl 
Anselme  comme  frère  utérin  de  rarciievè(|ue.  Le  doute  n'est  donc  plus  pos- 
sible. Le  terme  f/eniKinus  employé  dans  le  premier  acte  de  H63  est  certaine- 
ment fautif. 

(6)  Analectes,  t.  \VI.  p.  33. 

(')  MGH.  SS.,  t.  XXIV.  p.  380    Gallia  Chrktiana,  t.  Xlll.  col.  ;in. 

(*)  Cfr  mon  étude  sur  Henri  IWveugle,  comte  de  Namur.  p.  ."i."). 

30 


466  F.     ROUSSEAU 

illiistcr  vir,  frère  utérin  de  l'archevêque  Hillin,  est  cité 
dans  six  actes  de  1146  à  1 166  (*). 

VI.  Anselme  DE  Falmagne,  _/zz;î/or,  nobilis  vir;  nobilis 
et  liber;  liber  ;  miles,  fils  d'Anselme  senior,  est  cité  dans 
treize  actes  de  1163  à  1^213  (^).  II  était  consang-uineiis 
d'Henri,  dit  de  Leyen,  évêque  de  Liège  (ll4o-1164)  (^),  et 
neveu  de  Godefroid  de  Héron,  en  Hesbaye  (•*).  Anselme 
junior  avait  des  droits  sur  l'église  et  la  dîme  de  Glime 
dans  le  Brabant  En  1212,  il  les  céda,  conjointement  avec 
Jac<xues  de  Glime,  à  l'abbaye  de  Malonne  (^t. 

Une  charte  de  1 163  nous  fournit  une  liste  de  co'>-nati  des 
deux  Anselme  de  P'almagne,  à  savoir  :  Jean  de  Dave; 
A\'autier  et  Godefroid  de  Verenne  (en  Famennej;  Guil- 
laume et  Gervais  de  Neuville  (en  Fameune);  Thierri  de 
Faing;  Arnoul  de  Givet  et  Baudouin  d'Orehimont,  tons 
qualifiés  de  liber i  homines  ('■''). 

Dans  cette  liste,  plusieurs  noms  méritent  d'être  relevés. 
Baudouin  d'Orehimont,  chevalier,  était  le  chef  de  la 
grande  famille  ardennaise  de  ce  nom;  il  possédait  en  outre 
des  propriétés  en  Hesbaye  (').  Thierri  de  Faing,  dans 
l'Entre-Sambre-et-Meuse,  peut  être  i-egardé  comme  l'un 
des  principaux  feudataires   d'Henri  l'Aveugle,  comte  de 


(')  En  H-i6  (Bull.  hist.  arcli.  Htgenis,  t.  IX,  p.  337):  1103  {Auiphssimu  col- 
leclio,  t.  I,  col.  8Go;  Analectes,  t.  XVI,  pp.  -IS,  .30);  ll()i  (Amdectes,  t.  XVI, 
p.  3:2j  ;  11(36  (llein,  p.  34);  Historia  iValriodorensis  motiasterii,  .MGH.  SS., 
t.  XIV,  p.  536 

(-')  En  1163,  H6i,  1166  (dans  les  actes  signalés  dans  la  note  précédente)  ; 
1197  (liiill.  Corn.  roi/.  Iiist.,  4«  série,  t.  I,  p.  126j;  1:20:2  [bnll .  Insl.  urvh. 
lietjeois,  t.  XI,  p.  199j  ;  1:203  (Miraels  et  Foppens,  t.  IV,  p.  388;  Ueui.ière,  bm\ 
inddits  hist.  eccl.  BeUjûiue,  p.  31);  1204  (Ernst,  Hisl.  du  Liinliounj,  t.  VI, 
p.  l()9j;  1210  (Cartuhiire  de  Grandprc,  t.  I,  p.  2,  Archives  de  l'Élal,  Namnr); 
i'2l-2(A7iulecles,  t.  XX,  p.  14);  1213  (Chartes  de  Suinl-Lumhert,  t.  I,  |).  170). 

(3)  Sur  les  origines  de  ce  prélat,  voir  mon  élude  sur  Henri  l'Avcnj^le,  p.  32, 
note  4. 

{*)  Analectes,  t.  XVI,  p.  30. 

(')  Analectes,  t.  XX,  p.  14,  avec  la  luiuivaise  lecture  Salaniai;iu'  pour  Faia- 
magne.  cfr  Curlulaire  de  Miilarine,  n"  2,  loi.  44'''^,  Archives  de  lÉlat,  a  >amur. 
Otte  cession  l'ut  conlirniéc  en  1230  par  l'évéque  de  Liège,  Hem,  p.  20. 

("';  Cartitlaire  de  H'uiilsurt,  n"  30,  fol.  61,  .Vrchives  de  l'Élal,  à  Kaniur;  le 
texte  pnlilic  d:ins  l'Ajuptisaiiiid  cidlectio,  I.  I,  col.  867,  |trcsenle  à  cet  endroit 
des  lacunes. 

(■)  C  (j.  KuiAMi,  «  Orchinionl  et  ses  liefs  ».  Aji.  Academir  arc/icoloyie 
.4«tf'r5,4<^^  série,  1.  Vlll  (180(;),  p.  Sm. 


LIGNAGE   NAMljROlS  467 

Namui-;  il  faisait  partie  de  sou  conseil  (^).  Quant  à  Arnoiil 
de  Givet,  il  appartenait  à  la  famille  des  châtelains  de 
Givet,  château  relevant  de  l'évêque  de  Liège  {-). 

VII.  GoDEFROiD  DE  Falmagne,  fils  d'Ansclmc  senior  et 
consungiiineus  d'Henri,  évoque  de  Liège.  Il  mourut 
avant  1163  (3) 

VIII.  AscELE  DE  Dave,  matroiiR  illustris;  nobilis  et 
libéra,  citée  dans  quatre  actes  de  1163  et  1166  {*),  était 
coi^-mitii  d'Anselme  senior  et  de  l'archevêque  Hilliu  {^).  Ses 
biens  à  Falmagne  semblent  avoir  été  importants.  Nous  lui 
connaissons  une  fille  nommée  Helwidc,  mariée  à  un  certain 
Antoine,  peut-être  de  Foi-seille,  en  Hesbaye  (6)  Son  petit- 
fils  prit  l'habit  religieux  â  Waulsort.  Sa  petite-fille  Flo- 
rence habitait  Namur  en  1163  C'). 

IX.  Thierui  de  Latolk  (près  de  Virton),  niinisterialis 
de  Bullione ;  castellanns ;  liber  homo ;  nobilis  et  liber,  était 
châtelain  de  Bouillon  pour  l'évêque  de  Liège.  Il  est  fait 
mention  de  lui  dans  six  documents  de  1148  à  1170  (8). 
Comme  dans  les  chartes  relatives  à  Falmagne  il  est  cité 
avec  sa  femme  Mathilde,  on  peut  supposer  que  c'est  par 
elle  qu'il  se  rattachait  à  ce  lignage.  Il  mourut  avant  1 17o;^). 


(1)  Voir  mon  t'iiidc  stir  Henri  l'Aveugle,  comte  de  Namur,  p.  6:2. 

(2)  G.  (î.  Roland,  «  Xolice  sur  .\g-iniont  »,  An.  Soc.  arcluiologiijtte  de  ]\'aj)iur, 
l.  XVl,  p.  2.3i-25:i. 

(3)  .\mp1issima  coUectio,  t.  I.  eol.  8'i7  ;  Ilistoria  Wdhiodorensis,  .MGH.  SS., 
t.  XIV,  p.  rj3G. 

(«)  Analrrles.  t.  XVI,  pp.  2fl,  .31,  8.').  A7n/)l).<!.sli»ia  conerlio,  t.  I,  col.  867,  8()8. 

(5)  Historia  IVdInodorenai.i,  lue.  vit. 

(^)  Cet  Antoine  avait  des  biens  in  parte  sua  à  Forseille  en  iUÏS  (Anuleiies. 
t.  XVI,  p.  30).  11  existait  à  cette  époque  une  famille  de  Foi-seille:  nous  citerons 
(iodescalc,  Ilarduin  et  Anselme  de  Forseille,  lihefi  homines,  témoins  d'un  acte 
(le  ll."i8  (Bull.  Com.  roij.  histoire,  t.  I,  p.  115).  Anselme  de  Mont  (près  de 
Giney'O  et  Gérard  de  l»orinne  étaient  parents  (parentes)  d'Antoine  (Analectes, 
t.  XVI,  p.  30). 

C)  Analectes,  t.  XVI,  p.  .'JO. 

f«)  En  Hi8(Roi.AM.  et  Hai.kin,  Chartes  de  .'^tarelot,  I.  I,  pp.  -Hl  et  412  note); 
1163  (Ainpiissima  collectif!,  t.  I,  col.  8()T,  868.  865);  Anale  tes,  l.  XVl,  p|).  îO,  31); 
il&i  (.Analectes,  item,  pp.  3.^j,  36);  1170  ((i.  Kikth,  Chartes  de  Saint-Huliert, 
t.  I,  p.  129).  A  cause  de  ses  fondions,  Tliierri  de  Latour  était  appelé  aussi 
Thierri  de  Bouillon. 

I^\  GoKFiNET,  Cartulaire  fie  l'alihai/e  d'Orval,  p.  o'J. 


4fi8  F.     HOUSSEAU 

Il  avait  trois  fils  :  Thicrri,  Ilcribrand  et  Xicolas,  et  plu- 
sieurs filles  (*). 

X  et  XI.  Thierri  et  Godefroid  de  Falmagne,  servi, 
membres  de  la  fuinilia  de  l'église  de  ce  lieu,  cités  en  1163 
et  1160  (-)  Ces  deux  personnages,  fils  d'un  certain  Engel- 
bert,  doivent  être  considérés  sans  aucun  doute  comme  des 
gens  de  sainteur  de  franche  origine;  ils  étaient  apparentés 
avec  les  précédents,  y  compris  l'archevêque  (•^),  et  comptés 
parmi  les  participes  allodii  de  Falmagne. 

XII.  Thierri  Conon  de  Falmagne  assista  en  1163 
comme  témoin  de  la  donation  de  l'église  de  Falmagne  à 
l'abbaj^e  de  Waulsort  (■*). 

XIII.  Alard  de  Falmagne,  chanoine  de  la  collégiale 
Saint-Pierre  à  Trêves,  eu  1164  (5). 

B.  L'église  et  Talleu  de    Falmagne. 

Le  village  de  Falmagne  était  un  alleu  qui,  au  xii^  siècle, 
apparaît  comme  très  morcelé.  Déjà  Gerulfe  de  Briej^  et  sa 
femme,  qui  vivaient  sous  l'épiscopat  d'Otbert  de  Liège 
(1092-1117),  n'en  possédaient  que  la  huitième  partie  (6). 
En  1163,  les  participes  allodii.  (pie  nous  font  connaître  les 
chartes,  étaient  les  suivants  :  l'archevêque  Hilliu,  Anselme 
senior  et  son  fils,  Ascele  de  Dave,  Thierri  de  Latour  et  sa 
femme  Mathilde,  les  deux  frères  Thierri  et  Godefroid. 

Il  serait  intéressant  de  connaître  la  part  respective  de 
chacun  d'entre  eux.  Nous  ne  sommes  renseignés  que  sur 
celle  d' Ascele.  Cette  dernière  était  propriétaire  d'une  mai- 


(')  GoFFiNET,  Carhilaire  de  l'ahhaye  d'OrrttI,  j».  .j9. 

(-)  Analcrtes,  1.  XVI,  pp.  20,  .31,  .Sri;  Amptissinui  roUectio,  l.  I,  ool.  807; 
Hisloria  Walriodorcri.sis.  MGII.,  SS.,  XIV,  p.  .')3(). 

(■')  Ce  |)oinl  ressort  <lii  contexle  de  plusieurs  netcs.  Ku  IKîi,  l'arclievèiiue 
Hilliii  dil  que  les  doualeurs  de  l'éfilise  de  Fjdni;ijîiie  à  l'abbaye  de  Waulsort 
étaient  ses  parents  {Analecles,  t.  XVI,  p.  32).  Or,  Thierri  et  Godefroid  lii^urent 
au  nombre  des  donateurs.  D'apiès  la  première  charte  de  1I()H.  ceux-ci  des- 
cendaienl  des  fondateurs  de  la  collégiale  de  Faimaf^ne  (A)iiplis.^i)iKt  rollertio, 
t.  1,  col.  «()(>,  8()7j. 

{■')  Analertes,  l  XVI,  |).  20.  Tliendciinis  Cono  désigne  bien  une  seide  et 
même  personne.  Dans  l'original  aux  Archives  de  l'h^lat,  à  N'annir,  tous  les 
prénoms  des  témoins  sont  suivis  d'un  |ioinl.  Or,  il  n'en  existe  pas  entre  T/ieo- 
dcrinis  et  Cono. 

(•"•i  Analcrfes,  l.  XVI,  p.  33. 

(6)  Ampli ssima  col krluj.  I.  I,  col.  HIJH,  012;  Arialprlci,  I.  XVI,  p.  3}. 


LIGNAGE  NAMUROIS  469 

son  en  pierre,  qu'elle  avait  fait  construire,  du  tiers  du 
moulin,  de  1 1  1/2  quartiers  de  terre  et  de  M  serfs,  Robert, 
Asceline  et  Ave,  avec  leurs  fils  et  filles  (^).  Kn  11(53,  elle 
fit  don  de  ces  biens  à  l'abbaye  de  Waulsort  (^). 

A  cette  même  époque  Anselme  et  son  fils  cédèrent  la 
se.xtuni  decitiuim  piiriem  totiiis  ullodii.  Mais  de  la  teneur 
de  la  charte,  on  ne  peut  i)as  déduire  avec  cerlitude  que 
c'était  là  tout  ce  qu'ils  })0ssédaient  dans  l'alleu  (^). 

L'église  de  Falmagne,  qui  avait  rang  d'église  entière, 
était  dédiée  à  saint  Pancrace  et  possédait  un  autel  placé 
sous  l'invocation  de  sainte  Geneviève.  Au  xi*'  siècle  vrai- 
semblablement, les  propriétaires  de  l'alleu  l'avaient  érigée 
en  collégiale  avec  quatre  prébendes  Trente-deux  quartiers 
de  terre,  quatre  sessures  avec  courtils,  la  dîme  de  Fal- 
magne, les  cens  capitaux  des  serfs  de  l'autel  de  Sainte- 
Geneviève,  la  chapelle  de  Wiesme  et  sa  dîme  constituaient 
la  dotation  de  ces  prébendes. 

Les  prébendiers  étaient  libres  de  toute  obligation  envers 
les  jjossesfiures  fiindi,  sauf  à  la  Noël  où  ils  devaient  leur 
faire  don  de  16  deniers,  de  4  pains  appelés  fouaces,  de 
4  poules  et  de  H  petits  muids  d'avoine  (■*) 

Les  fondateurs  avaient  conservé  la  nue  propriété  de  ces 
prébendes  et  l'avaient  transmise  à  leurs  descendants.  Pro- 
bablement par  le  fait  qu'elle  i)()rtait  sur  des  biens  allo- 
diaux,  cette  nue  propriété  s'était  morcelée.  En  H63,  elle 
était  répartie  comme  suit  (^)  : 

La  mojï/c  avait  appartenu  à  Gerulfe 
et  à  Jîerlende  qui  l'avait  cédée  à 
l'abbaye  de  Waulsort. 
Première  prébcnilv.    (   f'^î    (]iiart    appartenait    à    Anselme 

senior. 
In  (jiiurt   aux  frères  Godefroid  et 
Thierri. 


('j  Ces  trois  serfs  et  leurs  enfants  l'onuaieiit  la  |)arl  de  la  fumitia,  fcliue  à 
Ascele  (.■l»i;>//.sv.r»i«,  t.  I,  eol.  U\^]. 

{'-)  Analectes,  t.  \VI,  p.  :2it. 

(')  Amplissima  collertio,  I.  1.  p.  !»i;3.  Il  n'est  pas  dit  à  i.iopus  de  ces  <ler 
niers  eonime  eesl  le  eas  poiii'  Aseele  :  «  quidiiuid  in  eadeni  villa  Falleniaiiie 
liereditario  jure  habebat  vel  liabere  poterat  ».  Aiiaicctes,  l.  XVI,  p.  2it. 

{*)  Amj/liiisiina  collfclio,  t.  I,  eol.  Stilî. 

(■'•)  Ilml.,  col.  8(57. 


470  F.     ROrSSEAU 

La  moitié  appartenait   à   Anselme 
senior. 
Deux làinc  prébende.  \  i^^uitre  moitié  aux  ir ères  Godefroid 

et  Thierri. 

La   moitié  appartenait  à  Anselme 
senior. 
Troisième  prébende.  \  jy,,,itre  moitié  à  Thierri  de  Latour 

et  à  sa  femme. 

2  sparts  appartenaient  à  Ascele  de 
Dave. 
,   Une  moitié  de  la  8''  part  à  Anselme 
Quatrième  prébende.  (       senior. 

L'autre  moitié  delà, 3'' part k  Thierri 
de  Latour  et  à  sa  femme. 

Cette  division  des  droits  et  par  conséquent  des  obliga- 
tions n'avait  pas  été  profitable  à  la  petite  collégiale. 
En  1163,  l'église  se  trouvait  dans  un  état  lamentable,  tom- 
bant pour  ainsi  dire  en  ruine.  Quant  aux  prébendes,  deux 
d'entre  elles  avaient  pour  titulaires  des  enfants,  les  deux 
autres  de  simples  sous-diacres  (*).  Les  possessores  fundi 
firent  abandon  de  leurs  droits  à  l'abbaye  de  Waulsort. 
Sans  doute,  ils  ne  parvenaient  pas  à  s'entendre  entre  eux 
pour  la  répartition  des  charges. 

Par  ces  diverses  acquisitions,  le  monastère  de  Waulsort 
devint  le  plus  gros  propriétaire  foncier  de  Falmagne. 
En  123o,  il  arrondit  encore  ses  domaines  en  achetant  les 
biens  allodlaux  et  féodaux  de  Jean  de  l'Ile,  bourgeois  de 
Dinant  (2). 

A  partir  de  1213,  nous  manquons  de  renseignements 
précis  sur  les  destinées  du  lignage  de  Falmagne  Henri  de 
Falmagne,  abbé  de  "Waulsort  de  1231  à  1251,  appartenait 
peut-être  à  cette  famille  (^).  En  1304,  l'évoque  de  Liège 
chargea  trois  de  ses  vassaux  de  se  rendre  à  Douzy,  pour 
faire  hommage  en  son  nom  à  l'archevêque  de  Reims  du 
château   de   Bouillon.  Tin  des  trois   vassaux   se  nommait 


(•)  Analecles,  l.  XVI,  p.  :J1. 

(2)  Ibidem.,  p.  131. 

(3)  DoM  Berlièke,  Monaslicon,  p.  i.^.  Henri  de  Falmagne  est  appelé  aussi 
Henri  de  Graux. 


LIGNAGE    NAMIHOIS  471 

Jacquemin  de  Falmagne,  éonyer  (M.  En  1308.  ce  môme  Jac- 
qucmin  de  Falmagne  était  prévôt  de  Marville  et  de  Saint- 
Mard,  près  de  Virton  {^).  Sur  Robin  de  Falmagne,  éeuyer, 
nous  ne  savons  rien,  si  ce  n'est  qu'il  mourut  en  1333  en 
laissant  une  rente  de  6  sous  à  l'église  de  (iedinne,  où  il  fut 
enterré  (•^). 

Les  destinées  du  lignage  de  Falmagne  furent  celles  de 
nombreux  lignages  namurois.  Après  avoir  brillé  d'un  cer- 
tain éclat  i)eudaut  plusieurs  générations,  il  disparut  brus- 
quement de  la  scène  de  1  histoire. 

Dans  les  documents  du  xii'  siècle,  je  n'ai  recueilli 
aucune  allusion  au  di-oit  de  haute  justice  à  Falmagne.  Au 
XIV*  siècle  nous  voyons  que  ce  droit  était  exercé  par  le 
prévôt  de  Poilvaclie,  donc  un  fonctionnaire  comtal.  Il  est 
fort  i)robable  qu'il  en  était  de  même  au  xir  siècle.  Dans  le 
comté  de  Namur,  au  moj^en  âge,  le  comte  possédait  la  juri- 
diction hautaine  dans  la  plupart  des  villages. 

C.  Remarques  diverses. 

On  a  pu  constater  que  plusieurs  personnages  du  lignage 
de  Falmagne  sont  qualifiés  tantôt  de  nobilis,  tantôt  de 
liber  ou  de  nobilis  et  liber  à  la  fois.  Ces  deux  tertnes  sont- 
ils  synonymes?  Je  ne  le  pense  pas.  Liber  hoino  doit  se  tra- 
duire par  friuic-honiine.  Il  y  avait  au  xiii*^  siècle  un  village 
du  Namurois  appelé  en  roman  Noville-les-frans-hommes 
(aujourd'hui  Xoville-les-Bois).  Nous  connaissons  les  noms 
de  quelques-uns  des  habitants  de  ce  village  au  xii*  siècle, 
tels  Guillaume  et  son  frère  Godescalc,  de  Dompierre 
(Dompierre  est  le  nom  d'une  ferme  de  Noville).  Dans  des 
chartes  de  1 146  et  de  1 159  ces  personnages  sont  mentionnés 
comme  liberi  honiincs  (').  Le  nom  du  village  lui-même, 
Noville-les-fruns-homines,  est  traduit  par  Xovilla  libero- 
riini  hoiniiiiim  dans  un  document  diplomatique  de  1256  (^. 


(')  BoR.M.\>s  et  Scnii()i..MEKSTEKS,  Cluiiies  (le  Sai?il-L(inil>ert ,  l.  111.  p.  .'Ji. 

(2)  GoFFiNET,  Cartvlaire  d'Orvnl,  p.  &2îi. 

(3)  C.  G.  RoLAM),  Orcliimont  et  ses  fiefs,  op.  cit.,  p.  3t8,  noie  1. 

(*)  Analectcs,  t>  WIII,  p.  313;  iInJ.,  t.  XIX,   p.  -400;  Uakbikh.   Histoire  de 
l'abhaye  (le  Flore //'(',  t.  M,  p.  I'.). 

("■>)  Bakbieh,  Histoire  du  monastirc  de  Gvronsdrt,  pp.  -IM,  -2'iU,  :>()l. 


412  F.     ROt'SSEAU 

Les  francs-hommes  sont  des  alleutiers;  le  dénombre- 
ment du  comté  de  Namur  de  1289  les  appelle  les  tréfonciers 
sur  leurs  tréfons  (*1.  Mais  la  propriété  allodiale  se  morcelle 
sans  cesse.  En  effet  l'alleu  ne  constitue  pas  un  tout  indivi- 
sible, se  transmettant  de  père  à  fils;  à  la  mort  du  proprié- 
taire, il  est  partaf^é  à  part  égale  entre  tous  les  enfants, 
aussi  bien  filles  que  garçons.  Un  alleu,  qui  souvent  à  l'ori- 
gine comprenait  un  village  tout  entier,  se  trouve  en  fait,  à 
la  fin  du  xii*  siècle,  morcelé  à  un  point  qu'il  est  difficile  de 
nous  représenter  A  cause  de  cette  division  infinie  de  la 
propriété  allodiale,  la  classe  des  francs-hommes  s'appau- 
vrit de  génération  en  génération. 

Les  nobles  sont  des  chevaliers  ou  des  descendants  de 
chevaliers.  La  coutume  de  Namur  au  moyen  âge  reconnaît 
la  noblesse  à  qui  compte  un  chevalier  parmi  ses  ancêtres, 
poui'vu  que  la  filiation  soit  légitime  et  ne  dépasse  point  le 
septième  degré  (^).  La  noblesse  s'est  constituée  comme 
classe  sociale  bien  distincte,  vers  le  début  du  xiii*^  siècle. 
En  1207,  Philippe  le  Noble,  comte  de  Namur,  déclare  que 
pour  obtenir  une  prébende  de  chanoinesse  à  Andenne  une 
femme  devra  être  noble,  née  de  parents  nobles  (^)  Les 
nobles  ont  des  origines  différentes.  Les  uns  sont  des  liberi 
hoinines,  des  francs-hommes,  entrés  dans  la  chevalerie; 
les  autres,  les  moins  nombreux,  sont  des  chevaliers  do  la 
fiiinlViii  comtale,  lesquels  se  qualifient  déjà  de  nobles  au 
xii*^  siècle  ('').  Le  même  comte  Philippe  s  efforça  d'effacer 
toute  distinction  d'origine  entre  les  deux  classes  de  cheva- 
liers en  décrétant  eu  1212  que  désormais  les  chevaliers  de 
la  familia  ne  seraient  plus  soumis  au  meilleur  catel.  cou- 
tume qu'il  juge  injuste,  indécente  et  contiaire  à  l'honneur 
chevaleresque  (•']. 


{')  D.  IX  Bkoiweus,  Adtiunislrat.  et  jinances  du  conitv  de  Mamiir,  cens  et 
rentes,  t.  Il,  passiin. 

(2)  M.  HoiTAUT,  Une  erufiiète  sur  les  (jcns  de  liijniUje  du  roiiite  de  Nunnir 
en  Iij89-lii90,  Mclaiif^cs  de  Honiiaii,  p.  iU.u. 

(^j  Feminam...  nol)ileiii,  uoljilibus  orlani  pareiUibus.  Misson,  Le  e/iapitre 
nuhle  d' Andenne,  p.  :2!)2. 

(*)  il  y  avait  aussi  [>armi  les  membres  de  la  fuinUia  coiiilale  des  f,'cns  de 
franche  origine;  cfr  mon  élude  sur  Henri  l'Aveugle,  n/i.  <il.,  |i.  [j-l,  à  propos 
(l  une  donalion  de  lacitnilesse  Krmesinde. 

(  )  MiHAti  s  et  FoPPK.NS,  Opéra  diplomalica,  t.  I,  p.  :297. 


I.IG\A(.E   NAMUMOIS  473 

Pour  en  revenir  aux  Irancs-honHiies,  ceux  d'entre  eux 
qui  j)arvinrent  à  la  noblesse  étaient,  selon  toute  vraiseni- 
blanee,  des  propriétaires  fonciers  restés  assez  riches  ])our 
supporter  les  charges  et  les  dépenses  de  la  vie  militaire 
Les  autres,  plus  atteints  par  le  morcellement  des  biens 
allodiaux,  constituèrent  à  partir  du  xiii'^  siècle  une  sorte 
de  classe  moyenne,  intermédiaire  entre  les  nobles  et  les 
simples  vilains. 

Mais  au  xii®  siècle,  éi)oque  où  la  noblesse  était  en  voie 
de  tormation,  un  chevalier,  comme  Anselme  de  Falmagne, 
pouvait  èti'C  qualit'ié  ii  la  fois  de  franc-hoinine  (liber  hoino) 
et  de  noble  homme  [nobilis);  franc-homme  indi(]uant  son 
origine  et  noble  homme  son  rang  social  C'est  à  cette  con- 
statation que  je  voulais  aboutir. 

Une  autre  remarque  encore  est  suggérée  par  l'étude  du 
lignage  de  Falmagne. 

Nous  avons  vu  que  deux  archevêques  de  Trêves,  au 
xn"  siècle,  Godefi'oid  et  Hilliu,  étaient  originaires  de  ce 
petit  village.  Ce  ne  furent  pas  les  seuls  Namurois  que  l'on 
trouve  établis  aux  xii*^  et  xin"  siècles  dans  la  cité  archiépis- 
copale. J'en  donne  ici  une  liste  que  je  n'ose  point  certifier 
complète  :  Anselme  de  Dave,  chanoine  de  la  collégiale 
Saint-Pierre  vers  11  oO  (^)  ;  A  lard  de  Falmai^-ne,  chanoine 
de  la  même  collégiale  en  1164  {^);  Gérard  de  Falina<>ne, 
témoin  d'une  charte  de  l'official  de  Trêves  en  lî2rîl^  proba- 
blement chanoine  de  la  cathédrale  (^);  Guillaume  de  Dave 
senior,  cité  de  1223  à  1257,  fut  prévôt  de  la  collégiale  Saint- 
Siniéon  (^j;  Renier  de  Daue,  frère  de  Guillaume,  mentionné 
de  12i()  à  l2o2,  chanoine  de  Pfalzel,  pi'ès  de  Trêves,  puis 
chanoine  de  la  cathédrale  (^);  enfin  (juillaume  de  Dave, 
junioi-,  dont  le  nom  apparaît  dans  les  chartes  de  12o6 
à  12.'j8,  appelé   chanoine  de  Ti'êves  sans  autre  spécifica- 


(')  L.  Laiiayk,  Htiiile  sur  l'iihlnnje  de  Waiilxort,  p.  :2.'j|. 

(2)  Amilectes,  l.  XVI.  |».  m. 

(8)  Bever,  Eltester,  Gokz,  Urkiindenimcli  ziir  Geschicfife  der  jelzt  de 
preiissisc/ien  ReijieniTiyshezirke  Coldenz  und  Trier  l)ildendt?i  Millelr/ieiniaclieit 
Territnrien,  t.  111,  p.  :J7!I. 

(«)  Itdd.,  t.  111,  pp.  I7!t,  2th',  -27:5,  -2i)!t,  430,  0-2-2,  00-2,  7  50,  7(r2,  7!t7,  8:22,  «-2.S. 
8io,  858,  80().  ilOO,  007,  !»8.j. 

(5)  //,((/.,  t.  III.  pp.  002,  829,  8.j8,  86o,  860. 


474  F.     nOUSSEA[J 

tiou  (•).  Dave  est  un  village  situé  sur  la  Meuse  à  7  kilo- 
mètres en  amont  de  Nanuir.  Au  xii^  siècle,  le  lignage  des 
Dave  avait  des  liens  de  parenté  avec  celui  des  Falmagne. 
Un  i)ersonnage  fort  en  vue  sur  les  bords  de  la  Moselle  vers 
le  milieu  du  xii*  siècle  était  Siger,  abbé  de  la  riche  abbaye 
de  Saint- Maximin,  qui  s'élevait  dans  un  faubourg  de 
Trêves.  Siger  était  originaire  du  Namurois;  ses  frères 
vivaient  dans  l'entourage  du  comte  Henri  l'Aveugle  {^). 
Je  dois  signaler  encore  le  clerc  Baudiy,  natif  du  bourg  de 
Florennes  dans  l'Entre-Sambre-et-Meuse.  En  1147,  lors 
d'un  séjour  du  pape  Eugène  III  à  Paris,  Baudry  était  clerc 
de  la  curie  louiaine.  L'archevêque  Albéron  de  Montreuil, 
qui  eut  l'occasion  de  l'entendre  plaider,  fut  charmé  de  son 
talent  et  le  ramena  avec  lui  à  Trêves,  où  il  le  nomma  éco- 
lâtre  de  la  collégiale  Saint-Pierre  (^).  Baudry  célébra  les 
mérites  et  les  hauts  faits  de  son  bienfaiteur  dans  des  Gesta 
Alberonis  archiepiscopi  qu'il  écrivit  après  la  mort  de 
celui  ci.  I!  note,  entre  autres,  ce  trait  qu' Albéron  ne  par- 
lait l'allemand  qu'avec  difficulté  ("')  Le  prélat,  en  effet, 
était  Lorrain  de  naissance. 

Dans  ses  Origines  de  l'influence  française  en  AHe- 
magne  {^K  M.  Reynaud  déclare  qu'au  xii®  siècle  l'arche- 
vêché de  Trêves  fut  un  véritable  foyer  de  civilisation  fran- 
çaise. Il  n'est  pas  douteux  que  nos  Wallons  du  pays  de 
NamuT-  n'aient  contribué,  eux  aussi,  à  ce  l'ayonnemeut  de 
la  pensée  romane  en  Rhénanie. 

FÉLIX  Rousseau. 


(')  Beyer,    Eltester,    Gùrz,    i'rkundenhvr/i  :ur    Gescliirlite    etc.,   op.    cit. 

111,  pp.  98.5,  99(),  1007,  10.^3. 

(2;  Cfrinon  (''lude  sur  Henri  l'Aveugle,  \).  iîi. 

(:')  MGH.,  SS.,1.  Mil,  p.  -25.i. 

(■•)  Galiia  lingua  iialus  lu  leulhoiiica  non  erat  ex|)e(litus.  llndem,  p.  257. 

(S)  T.  I,  p.  483. 


Jean  d'Ypres  ou  de  Saint=Bertin  (t  1383) 

Contribution  à  l'histoire 
de  l'hagiographie  médiévale  en  Belgique. 


Dans  l'étude  que  nous  avons  pul)liée  naguère  sur  les 
Vilne  ou  biographies  des  saints  mérovingiens  de  l'ancienne 
Belgique  (^),  nous  avons  examiné  une  quantité  considérable 
de  matériaux,  dont  l'ensemble  se  répartit  sur  plusieurs 
siècles.  Certaines  }'itae  étudiées  par  nous,  comme  par 
exemple  celle  de  saint  Vaast,  remontent  au  vii'^^  siècle; 
d'autres  datent  du  xiv=,  et  l'ensemble  des  productions 
hagiographiques  dont  s'occupait  notre  travail  a])partient 
à  toutes  les  époques  enfermées  entre  ces  deux  dates.  11  en 
résulte  que  des  constatations  et  des  conclusions  de  portée 
générale  furent  possibles  Nous  en  avons  indiqué  quelques- 
unes  dans  le  dernier  chapitre  de  notre  livre,  notamment 
au  sujet  (le  l'existence  et  de  l'origine  des  «  cycles  «  hagio- 
graphiques, c'est-à-dire  de  séries  entières  de  Vitae  qui 
dépendent  les  unes  des  autres  et  qui,  souvent,  sont  copiées 
les  unes  des  autres (-). 


('j  Etude  rnliqHC  cl  Ullvvairv  sur  /l's  Vitac  des  saints  inrrovingieyis  de 
l'ancienne  Helfjiiiuc.  (lU'cnt'il  des  Inivaiix  |)iil)liés  |):ir  les  luciubres  des  eoiifc- 
renccs  d'histoire  et  de  pliilologie  de  II  iiiversité  de  Loiivain.  fascieiile  17.) 
Louvain-Paris,  1907.  4i7  pages. 

(-)  Op.  cit.,  p.  -éiU-iSG,  et  le  tableau  eiioarlé  dans  le  volume.  —  «  On  ne 
saurait  trop,  et  pour  l'honneur  des  saints  et  pour  le  progrès  de  la  saine  liagio- 
grapliie,  se  mettre  en  garde  contre  l'illusion  de  eeux  (jui  ne  se  bornent  pas  ii 
vénérer  les  saints,  mais  croient  devoii-,  par  respect  pour  eux,  canoniser  aussi 
en  quehiue  sorte  les  ouvrages  par  lcs(juels  la  postérité  a  voulu  cclélirer  leur 
gloire  et  dans  la  rédaction  descpiels  la  connaissance  des  faits  n'a  malheureuse- 
ment pas  toujours  été  de  pair  avec  la  piété  qui  inspirait  les  écrivains  » 
(A.  PoNc.EiET,  (f  Les  saints  de  Micy  »,  dans  les  .\nalecla  Bitllaiidianu,  t.  WIV, 
lOOrj,  p.  :i  sv.). 


476  L.    VAN    DE  15    ESSEN 

L'indication  de  ce  résultat  était  loin  d'éiîuiser  la  série 
de  constatations  générales,  caractérisant  l'ensemble  du 
«  genre  »  hagiograi)liique,  que  nous  suggérèrent  nos 
recherches.  Nous  nous  étions  réservé  de  rev^enir  sur  ces 
constatations  dans  un  nouveau  volume,  dont  plusieurs 
circonstances  ont,  bien  malgré  nous,  retardé  jusqu'ici  la 
publication. 

Nous  croyons  qu'il  est  utile  de  résumer  ici  les  principales 
de  nos  conclusions  générales,  comme  une  espèce  d'intro- 
duction à  l'étude  sur  l'hagiographe  Jean  d'Ypres  ou  de 
Saint-Bertin.  En  effet,  si  nous  faisons  connaître  de  plus 
près  cette  intéressante  figure,  c'est  précisément  parce  que, 
en  tant  qu'hagiographe,  Jean  occupe  une  place  à  i)art  dans 
l'ensemble  des  productions  de  la  littérature  médiévale 
belge  que  nous  avons  étudiées.  C'est  un  hagiographe  qui, 
tout  en  se  révélant  enfant  de  son  époque  et  tout  eu  sacrifiant 
aux  exigences  et  aux  traditions  du  genre  hagiographique, 
se  distingue  cependant  par  des  dispositions  critiques, 
exceptiounelles  dans  le  monde  des  écrivains  de  cette  caté- 
gorie. De  tous  les  hagiographes  —  la  plupart  anonymes  — 
dont  nous  avons  étudié  l'œuvi'e  dans  notre  Etude  citée,  il 
n'y  en  a  que  trois  qui,  parmi  les  rédacteurs  de  biographies 
non  contempoi'aines,  méritent  une  place  à  part.  Ce  sont  : 
Hucbald  de  Saint-Amand  (t  vers  980)  ('),  Plériger  de  Lob- 
bes  (t  1007)  (^)  et  Jeau  de  Saint-Bertin. 

Si  Jean  mérite  notre  attention  parce  qu'il  est  une  figure 
peu  commune  dans  le  monde  des  biograi)lies  qui  s'occu- 
pèreut  des  gestes  des  saints  mérovingiens  de  Belgique,  il 
est  nécessaire  que  nous  fassions  connaître  dans  ses  grands 
traits  le  «  genre  »  littéraire  dont  l'hagiographe  ypj'ois 
ne  suit  pas  servilement  les  traditions.  En  essayant  de 
caractériser  ce  genre  pour  une  partie  restreinte  unique- 
ment à  l'hagiographie  des  saints  mérovingiens  de  notre 


(')  Ci.  Dksiim:,  De  schola  EInuncnsi,  p.  93  et  siiiv.  Loiivain,  18i)0.  Voiraiissi 
A.  .Moi.i.MKit,  l.(  s  siiiirces  (le  l'hisloirt'  de  France,  I.  Mvrovitujiens  et  Curolifiçjicns, 
II"  7Î)«.  l'nris,  l!l()'2. 

(-j  (11'.  S.  Bai. Al ,  Les  xuurres  de  l'/iisfvire  du  pni/s  de  Lieye,  p.  1:21-146. 
Bruxelles,  1903;  G.  Kiuth  «  llérlgcr  »,  dans  la  Biographie  nationale,  t.  IX, 
col.  246;  Le  mi'me,  Nolyer  de  Liéye,  t.  1,  p.  332  sv.  Bruxclies-Liégc,  1905. 


JEAN    DYPHES  477 

pays  ('),  nous  nous  baserons  sur  les  constatations  réunies 

au  cours  de  notre  enquête  ])ubliée  en  1907. 

* 
*     » 

Comme  le  savant  bollandiste  H.  Deleliaye  l'a  fait  ob- 
server dans  ses  Lcgendes  hiigiofiTnphùjucs  (2),  l'tx'uvi'c  de 
l'hagiographe  i)eut  ctre  historique,  mais  elle  ne  l'est  pas 
nécessairement.  On  ne  i)eut  oublier  que  le  document 
liagiogTa])hique  —  qu'il  s'api)elle  Vitn,  Pussio,  Miraciilu, 
Trunslalio  ou  Elevaiio  —  est  toujours  inspiré  par  le  culte 
des  saints  et  destiné  à  promouvoir  celui-ci  :  il  a  pour  but 
princi])al  l'édification.  Ad  edificntioncm  Chrisli  fidclium 
est  une  formule  qui  revient  contiiuicllement  sous  la  ])lume 
des  liagiograplies.  Ceux-ci  ont  surtout  en  vue  de  présenter 
la  personne  du  saint  sous  le  jour  le  plus  favorable,  de 
convaincre  le  lecteur  que  le  héros  dont  ils  retracent  la  vie 
a  approché  de  très  près  ou  a  complètement  atteint  l'idéal 
de  la  sainteté,  que  par  conséquent  il  est  digne  du  respect, 
de  l'amour  et  de  la  vénération  des  fidèles. 

Pour  les  hommes  du  moyen  âge  —  aussi  bien  les  écrivains 
que  le  public  —  le  saint  est  avant  tout  «  l'homme  qui  fait 
des  miracles  »,  ou,  pour  employer  l'expression  des  iiagio- 
graphes  eux-mêmes  :  vir  uirtutibus  et  niirnciilis  refiil- 
^•cn.s  (■^).  C'est  pourquoi,  lorsque  la  tradition  orale  ne  i)eut 


(1)  Pour  l'éUide  <hi  genre  lia^MOgraphiqiie  dans  son  ensemble, cf.  11.  Deieuvyi:. 
Les  Ivr/cndcx  /lOf/iof/rnii/nifics.  Bruxelles,  190o;  Gunteu,  Legendcjislndien. 
Cologne,  190(5;  Zoepf,  Das  Heilic/enlehen  un  .V.  .lahrlnnidcrt.  Leipzig,  l!)08; 
H.  Dei.ehave.  Les  Ivifcndes  (jrcctjitcs  des  atiints  inUildires.  l'iiris.  I9(lt);  Le  mkmk. 
Les  l'assinns  des  mnrtijrs  et  les  iienres  Hlferaires.  Bruxelles,  19:21.  Nous  ren- 
voyons aussi  il  noire  arlicle  «  Der  geg(Mi\v;irlige  Sland  der  liagiographisclien 
Forscliung  »,  dans  la  revue  IJie  Geislesirisf,ens{ liaficu.  Leijj/.ig,  L  I,  19i:M91i, 
p.  -2IO--21.i. 

(2)  Page  ± 

(^)  Il  est  à  remarquer  (jue  par  riituUhus  on  ne  jRMit  entendre  les  verliis  du 
saint,  miracula  rendant  alors  le  concept  clioses  itiiracnlenses.  Miraviila  et 
virlutes  sont  employés  indilTérennnent  pour  intituler  le  récit  des  miracles  du 
saint.  Par  exemple  Miranila  S.  AtjneUi  ahlialis,  d'autre  part  :  Viitules  i/Koe 
fhvid  siirtt  post  diseessiiin  heatae  Gerelriidis  alihalissae  ;  Vif  a  Silrini,  r\\.  13: 
«  Et  non  nnrum  si  Doniiniis  Jésus  Christus  per  suum  servum  lanta  p?regil 
miracula  in  niiindd,  qui  ci  al)  adolescenlia  placuit,  cum  eliam  aliqiiando  falsos 
clirisliaiids  patialiir  lacère  virlutes.  »  i  Pour  la  lï/rt  .S'i/d/i?,  voir  nuire  f,7»/(/c 
rrilii/ne,  citée  plus  haut,  p.  il;")  sv.)  —  Voir  l)i c.vm.e,  (ilossariuiii  inrdiar  et 
infiinae  lut  nitalis,  suh  verbo  :  virtiites. 


478  L.    VAN    DER    ESSEN 

livrer  au  rédacteur  d'une  biographie  de  saint  des  renseigne- 
ments sur  cet  aspect  capital  de  la  vie  de  son  héros,  l'écri- 
vain se  tire  de  la  difficulté  en  recourant  à  des  affirmations 
ou  des  lieux  communs  qui  sonnent  presque  toujours  comme 
suit  :  ((  Le  lecteur  doit  bien  savoir  que  la  grande  quantité 
de  ses  miracles  nous  est  inconnue;  la  faute  en  est  pai'tiel- 
lement  à  la  négligence  des  écrivains  qui  nous  ont  précédé, 
partiellement  à  la  mentalité  des  informateurs  d'aujourd'hui, 
qui  ne  voulaient  point  ennuyer  le  lecteur  par  cette  énu- 
mération  {''}  »  D'autres  fois,  l'auteur  se  contente  d'affirmer  : 
«  Si  nous  avions  le  courage  de  raconter  les  miracles  que  le 
saint  [ou  la  sainte]  a  faits  après  sa  mort,  c'est  le  souffle 
qui  nous  ferait  plus  vite  défaut  que  la  matière  (-').  )> 

Dans  le  plan  classique  d'une  biographie  de  saint  —  que 
presque  tout  hagiographe  suivait  servilement  ("^)  — .  une 
l^artie  était  d'ailleurs  réservée  pour  les  passages  traitant 
des  miracles  du  personnage. 

Pour  comprendre  la  mentalité  des  hagiographes,  nous 
ne  pouvons  pas  non  plus  oublier  une  caractéristique  du 
culte  des  saints  qui  a  été  mise  en  lumière  par  M.  A.  Du- 
fourcq('*j  :  ce  culte,  dans  son  origine  et  dans  son  expression, 
est  essentiellement  local.  C'est  à  l'endroit  où  le  saint  est 
enterré,  où  se  dresse  son  mémorial  (tombe  ou  chapelle),  où 
la  foule  accourt  pour  jouir  de  ses  faveurs  et  de  son  inter- 
vention au})rès  de  Dieu,  que  son  culte  est  le  plus  vivace  et 
que,  d'ordinaire,  la  première  biographie  est  composée  (^). 


(')  P.  (ix.  «  Vita  Aiulomari  sociinda  ».  ch.  13  {Étinle  critique...,  p.  405-407). 

(-')  P.  ex.  «  Vita  Pharaïklis»  [Étude critique...,  p.  303-304). 

(■^)  Voir  p.  ex.  le  prologue  de  la  Mta  Aidherti  :  «  Id  vero  leetor  a  iiol)is 
curiosius  reiiuiiere  non  débet  ut  heali  viri  gesta  coniinenli  ordine  st-ribaiitur, 
videlicel  :  (juihus  oriundus  natalibus,  ({uibus  initiis  eitis  san(;ta  iiilanlia, 
qiiilnis  (idolcscentia  miraculin  claruit...  » 

(*)  La  Chrislmuisathm  des  fontes  (dolleclion  «  Science  et  Religion  », 
fase.  2.")2)  et  le  livre  L'Avenir  du  cliristinnisme,  V.  L'Éf/lise  du  llle  au  Xl<^  siècle. 
Le  C/irislia?nsrne  et  les  Barbares,  p.  74  el  suiv.  Paris,  19 li.  Voir  aussi  : 
H.  Dei.ehayk,  Les  urigincs  du  aille  des  marlt/rs,  p.  48  sv.  Bruxelles,  1912; 
et  P.  D(')KFi,F,it,  Die  Anfânge  der  Heiligenverelirunf/  nacli  dru  roinischeu 
Inscltriften  iind  liildwerke.  Munich    1913. 

(•'•)  Cf  Vita  Silririi,  cli.  22  :  «  Mullas  (juidein  virtiiles  ob  mcriluni  S.  Silvini 
post  eius  bealum  transilum  operatus  esl  Doniinus  in  linibus  Tei'uancnsiuui, 
maxiuie  in  eo  lorn,  rdii  ipse  vurpore  recptiescit.  »  Ka|)procliez  l'expression 
typiipie  de  beaucouj)  d'actes  de  donation  :  «  ubi  ipse  [Sanclus]  |)ieciosus 
rcquiescit  iii  corpore.  » 


JEAN    DYPaES  479 

Dans  son  livre  La  monarchie  fran(jiie(^),  Fustel  de  Cou- 
langes  a  écrit  une  phrase  remarquablement  suggestive  :  la 
biographie  du  saint,  dit-il,  est  souvent  ce  la  légende  expli- 
cative des  reliques  ».  Eu  effet,  de  môme  qu'aujourd'hui 
des  écrivains  pieux  rédigent  un  Guide  ou  un  Manuel  du 
pèlerin  à  l'usage  des  fidèles  qui  se  rendent  à  des  endroits 
de  pèlerinage  renommés,  de  même  les  hagiographes 
médiévaux  rédigent  la  Vita  i)our  faire  connaître  la  vertu 
curative  des  reliques  {^)  ou  la  puissante  intervention  du 
défunt. 

Grâce  à  la  présence  des  reliqties,  l'église  ou  le  monastère 
qui  en  est  l'heureux  possesseur  est  l'objet  de  donations 
pieuses,  par  lesquelles  rois,  grands  propriétaires,  fonction- 
naires essaient  de  se  concilier  le  puissant  patron  de  l'en- 
droit. C'est  grâce  à  la  possession  de  reliques  des  saints 
Wandrille,  Ansbert.  Vulfran,  Gudwal.  Bertulphe,  Amal- 
berge  que  le  monastère  gantois  de  Saint-Pierre,  au  mont 
Blandin.  fut  si  généreusement  doté  par  le  comte  de  Flandre 
Arnoul  le  Vieux,  au  x«  siècle,  et  si  l'autre  abbaye  gantoise, 
celle  de  Saint-Bavon,  n'attirait  guère  l'attention  du  prince, 
c'est  que  son  trésor  de  reliques,  en  comparaison  de  celui 
de  l'abbaye  rivale,  était  peu  appr(''ciable  (^). 

Il  n'est  dès  lors  pas  étonnant  que  bien  des  hagiographes, 
poussés  par  le  désir  de  favoriseï*  l'église  ou  la  communauté 
à  laquelle  ils  appartiennent,  aient  essayé  de  montrer  (^ue 
le  fondateur  de  leiir  monastère  ou  le  saint  qui  repose  dans 
leur  église  ou  dont  ils  possèdent  les  reliques  est  plus 
puissant  que  le  patron  de  l'abbaye  voisine,  qui  est  en  ce 


(1)  P:if;p  10.  Paris,  1888. 

(')  Le  ch.  o  (les  Mlrucnlu  S.  Vismari  nous  raconte  que  les  moines  île  Lol)bes 
donnent  des  fraj^inents  de  reliques  à  un  de  leurs  conlrères  qui  désire  les 
envoyer  dans  son  pays  d'origine,  et  on  y  ajoute  «  lil)e!luni  vilae  sanetoruni  ». 
[Ursmari  et  Ennini].  Le  eh.  2  de  Vllistona  iniraculunnn  [S.  Uisniari]  in 
cirntmlatione  per  Flanilriiun  raconte,  ii  propos  (l"ini  moine  élrangec  ipii  soulTre 
des  dents  :  «  Coepil  rcquirere  a  iiobis  si  (|uod  exinde  nossemus  medicamcnlum. 
Nos  inhil  (|uidein,  sed  dedimus  ei  vilain  sancii  Icgendain,  in  ipia  rei'ertur  noveni 
annis  et  septem  liebdomadibus  eandem  suslinuisse  passionem.  »  C'était  une 
invitation  à  invoquer  S.  Ursmer  comme  patron. 

(•')  Voir  sur  la  lutte  entre  les  deux  abbayes  mon  Ktiide  critique...,  p.  3.^)8  sv.  ; 
MoN.SKiK,  Les  moines  et  les  saiids  de  Gand.  Bruxelles,  1907  (complète  cl 
conduit  en  partie  i'clnde  de  Ibdder-Kgjier  siu'  le  mémo  sujet  i. 


480  L.    VAN    DER    ESSEN 

luoment  là  le  centre  d'un  pèlerinage  très  fréquenté.  Un 
exemple  typique  d'une  telle  préoccupation,  c'est  la  Vita 
Remucli,  dont  l'auteur,  un  moine  de  Stavelot,  désirant 
favoriser  son  monastère  au  détriment  de  Liège,  où  le  culte 
de  saint  Lambert  attirait  les  foules,  rédige  une  biographie 
de  Remacle  en  i)illant  consciencieusement  la  Vita  Lamberti 
et  en  arrangeant  son  récit  de  façon  à  mettre  son  héros  à 
l'avant-plan  et  à  faire  rentrer  dans  l'ombre  saint  Lam- 
berti^). 

Parmi  les  buts  que  se  proposent  les  hagiographes,  on 
l^eut  encore  citer  la  défense  de  possessions  ecclésiastiques, 
d'immunités  ou  de  privilèges    L'on  n'ignore  pas  que,  au 
IX''  et  au  x^  siècle,  les  actes  privés,  l'édigés  par  des  parti- 
culiers sans  participation   des  pouvoii's  publics,    avaient 
l^ei-du  beaucoup  de  leur  valeur  probante  ('-).   Le  serment, 
le    duel    judiciaire    et    l'ordalie    commencent   à  jouer    de 
nouveau   le  rôle  princii)al  dans  la  procédure  devant  les 
tribunaux.  L'Eglise,  à  laquelle  le  droit  canon  interdisait 
l'usage  du  «  glaive  »,  n'avait  d'autre  moyen  pour  attester 
ses  droits  que  la  preuve  documentaire,  et,  pour  donner  à 
cette  preuve  une  valeur  particulière,  elle   en   appelle  au 
saint.  Dans  les  biographies  de  saints,  l'écrivain  insistera 
souvent  sur  le  fait  que  tel  domaine  ecclésiastique,  qui  est 
menacé  par  un    seigneur  féodal,  a  été  cédé   autrefois  au 
saint  patron  de  l'endroit,  et  il  s'ensuit  que  celui  qui  serait 
assez  téméraire  pour  s'emparer  de  ces  biens,  n'échapperait 
pas  à  la  vengeance  de  ce  saint  {^). 

C'est  en  rapport  avec  ces  idées  que  la  formule  commi- 
natoire des  actes  de  donation  se  termine  souvent  par  les 


(')  G.  Kl  KTii,  «  Notice  sur  la  plus  ancienne  biographie  de  saint  Ueuiacle,  pour 
servir  à  l'histoire  des  supercheries  littéraires  »,  dans  les  Bulletins  de  la  Com- 
mission royale  (^histoire,  ¥  sér.,  t.  III,  p.  3uo  sv.  Voir  la  critique  -  non 
convaincanle  —  de  cet  article  de  Kurlh  par  M.  F.  Bvix,  «  Nouvelles  recherches 
sur  les  deux  biographies  de  S.  Uemacle  »,  dans  Mvlunges  Churles  Moeller,  t.  I, 
p.  267,  n.'l. 

('j  Cf.  PossK.  Die  Lrfire  von  (loi  Privât- Urkunden,  II.  Diplomalik,  p.  62. 
Leipzig,  1887. 

C^)  L.  ZoEPK,  htis  lleilicjenlrhen  iiii  X.  Jahrliunderl,  p.  18  sv.  ;  M.  Stimming, 
«Dipheilige  IJillliildis.  Kin  Beitrag  zur  Forschung  iicber  Urkundenfalschung 
und  Hciligenlegcnde»,  dans  les  Mitleilnuf/en  des  Oesterreiclnsc/wn  Instituts  fiir 
Geschirtits/orschung,  dîH7,  t.  XXXVIl.  p.  23i-2.'J.j. 


JEAN    D'YPRES  4H1 

mots  :  Indig'nntionem  SS.  Ai)<)stoloriini  Pelri  et  Puiili  se 
noverit  inciirsiiriiin  ('). 

La  légende  do  l'origine  de  la  dime  d'Amberloux,  ap])ar- 
tenaiit  a.  l'abba^'e  de  Saint-Hubert,  a  été  ainsi  introduite 
dans  la  Vita  Bereg-isi,  qui  attribue  la  fondation  de  cette 
dîme  au  saint  lui-même.  Le  comte  de  Xamur,  qui  s'en  était 
emparé  au  xi''  siècle,  comi)rit  fort  bien  l'allusion  que  le 
biographe  de  Bérégise  avait  faite  dans  la  Vita  ('). 

Les  «  cycles  hagiographiques  »  ou  séries  de  plagiats  dont 
nous  avons  démontré  l'existence  dans  notre  Etude  critique 
citée,  sont  la  conséquence  de  l'idée  que  se  font  les  liagio- 
graphes  du  genre  de  travail  auquel  ils  se  livrent.  Les 
auteurs  de  pièces  hagiographiques  connaissent  et  dis- 
tinguent deux  sortes  d'écrits  :  les  uns  auxquels  on  est 
obligé  d'ajouter  foi  —  c'est  l'Ecriture  sainte  dans  toutes 
ses  parties  — ;  les  autres  au  sujet  desquels  il  est  permis  de 
se  montrer  sceptique  ou  défiant.  L'hagiographe  a  parfaite- 
ment conscience  que  ses  propres  écrits  appartiennent  à 
cette  dernière  catégorie.  Il  s'ensuit,  comme  le  dit  le 
R.  P.  Dclehaye  (^),  qu'il  prend  beaucoup  de  libertés  avec 
la  vérité  historique.  Son  œuvre  est  surtout  une  œuvre 
littéraire;  beaucoup  de  remaniements  postérieurs  de  bio- 
graphies anciennes  doivent  leur  origine  au  souci  de  l'effet 


'  Pour  la  base  jiirnliqtio  de  ceUe  formule,  cf.  R.  Kosti.f.k,  «  Huidont/.ug 
als  Strafe  »  {Kirckenrcriitliche  AliIunuUunfjCJt,  éd.  U.  Siutz,  fasc.  6:2).  p.  68  st. 
Stuttgart,  1910. 

(')  Voir  mon  Etude  criliiiiie,  p.  113,  119 -il'O.  —  Voici  un  texte  intéressant 
destiné  à  défendre  riuviolai)ilité  du  droit  d'asyle  :  nous  rempruntons  aux 
Miraniln  S.  Ursinari,  eh.  (3  :  «  De  eodem  eastro  [Grignart],  tempore  ijuo 
bellum  intcr  eos  et  Tudinienses  agebatur,  eum  aliis  pluribus  quidam  pislor 
Laubias  venerat.  faeees  ad  eonficiendos  panes  pctilurus.  Aderant  etiam 
aliijuanti  de  Tudiniensi  clientela  et  ex  verborum  injuriis,  ut  fit,  orta  est  inter 
eos  gravis  sedilio.  Irruunt  alteri  in  alteros,  et  ut  quemque  easus  armaverat, 
jierniixtum  vulgus  desaevit.  Fugiuut  Tudinienses  et  in  ecdesia  S.  Ursmari 
relut  fiitissima  proteguntur  iixi/li>.  \{  vero  ille  pi.stor  correpto  arcu.  dum  unum 
illorum  intra  monaslerium  tdo  apix'lit,  nutu  Dei  volans  sagitta  januae  inli- 
gitur.  »  La  vençreance  de  saint  l"r.<nier  ne  se  fait  pas  attendre  :  le  boulanger 
meurt  misérablement.  —  Sur  les  origiiK's  et  les  déments  du  droit  d'asyle, 
cf.  J.  (Ihoii  .  «  Die  Elemenlc  des  kirchlidien  Fi'eiunpsredites  mit  besonderer 
Beriicksiclitiguiig  der  oesterreichiselien  Enlwirkluiig  dargeslellt  »  (Kircfien- 
reclitlic/tc  Abliaiidluuffen,  fasc.  7.')  et  76).  Stuttgart.  1011. 

(^)  Les  Ic'yendes  liagiograpliii/ues,  p.  95. 

31 


482  L.    VAN   DER    ESSEN 

littéraire  (^).  De  là  l'habitude  de  la  compilation  —  choix  de 
morceaux  divers  bien  rédigés,  reliés  par  cxuelques  transi- 
tions souvent  peu  habiles  —  et  aussi  du  plagiat.  C'est  le 
plagiat,  auquel  ont  recours  la  plupart  des  hagiographes, 
qui  explique  en  partie  la  formation  des  «  cycles  hagiogra- 
phiques ». 

Il  est  presque  superflu  de  dire  que  l'esprit  critique  est 
généralement  absent  chez  la  plupart  des  écrivains  médié- 
vaux (~).  D'ordinaire  l'hagiographe  estime  qu'il  n'est  guère 
besoin  de  rechercher  l'origine  on  la  provenance  des  ren- 
seignements qui  lui  sont  communiqués  ou  qu'il  est  parvenu 
à  se  i^rocnrer  péniblement.  La  tradition  populaire  lui 
suffit  :  ut  fertiir,  ut  dicitur  sont  chez  lui  des  formules 
favorites.  Arrive-t-il  maintenant  que  cette  tradition  popu- 
laire ne  lui  fournit  point  une  quantité  suffisante  de  détails 
ou  d'anecdotes  ou  qu'elle  ne  signale  pas  assez  de  faits 
miraculeux,  l'auteur  de  la  biographie  se  croit  obligé  de 
combler  ces  lacunes.  C'est  le  moment  de  recourir  aux  lieux 
communs,  aux  «  thèmes  »  hagiographiques,  ces  traits 
universellement  applicables  dont  l'ensemble  crée  le  type 
abstrait  du  saint.  Si  l'auteur  est  peu  érudit  —  et  c'est 
souvient  le  cas  (^) — ,  il  ne  réussit  même  pas  toujours  à 
trouver  les  généralités  ou  les  thèmes  dont  il  a  besoin  et  à 
les  mettre  sur  parchemin  dans  une  langue  plus  ou  moins 
littéraire.  C'est  pour  ce  motif  que  tant  de  ces  moines  et  de 
ces  écrivains  pieux  ont  recours  à  la  copie,  au  plagiat.  La 
bibliothèque  ou  le  scriptorium  de  l'abbaye  ou  de  l'église 
contient  souvent  l'une  ou  l'autre  Vita  qui  peut  passer  pour 
un  modèle,  elle  possède  peut-être  une  œuvre  de  quelque 
écrivain  renommé  —  par  exemple  Alcuin  — ;  dès  lors, 
l'hagiographe  n'hésite  point  à  copier  de  ce  modèle  les 
passages  et  les  thèmes  qui  peuvent  être  adaptés  à  son 
travail.  C'est  ce  que  fit  notamment  l'auteur  de  la  biographie 


(1)  On  en  trouvera  de  multiples  exemples  dans  noire  Êlnde  crilique..,  passim. 

(')  Voir  M.  Sciu  LTZ,  Die  Lettre  von  der  liislnrisclien  Mettiodc  hei  den  GesdiicJtt- 
sclireibern  des  Millelalters,  VI. -XIII.  Jalir/amdert.  Derlin-Lelpzig,  1909; 
G.  Mexge,  «  Krilik  in  den  Heiligenleben  des  Millelalters.  Ein  Beilrag  zur 
Gescliichle  der  Hagiographie  »,  dans  le  Kallinlisclier  Seclsorger,  1905,  p.  01  sv. 

(3j  Voir  F.  F.  J.  Lecoivet,  ((L'instruction  publiijue  au  moyen  âge»,  dans  le 
Messager  des  sciences  cl  des  arts,  18o.j,  p.  J71  sv.;  18.")G,  p.  147  sv.;  18.")7,  p.  G3  sv. 


JEAN  d'ypres  483 

de  saint  Mommelin,  évoque  de  Noyou-Touruai  (t  vers  G8i8), 
(lui  emprunta  à  la  ViUi  Richiirii  d'Alcuin  nombre  de  lieux 
communs  (*).  C'est  ainsi  aussi  que  la  Vita  Rn(Iei>-undis  de 
Venantius  Fortunatus  (t  009)  a  été  pour  plusieurs  bio- 
graphes des  saints  de  Belgique  à  l'époque  mérovingienne 
une  mine  dont  ils  ont  extrait  abondamment  ce  qu'ils  étaient 
incapables  d'inventer  ou  de  rédiger  eux-mêmes  (^j. 

C'est  la  renommée  littéraire  de  leurs  auteurs  et  le  fait 
que  ces  deux  Vitae  se  trouvaient  dans  presque  toutes  les 
bibliothèques  monastiques  (3),  qui  peut  expliquer  qu'on  les 
voit  si  souvent  plagiées  par  des  écrivains  postérieurs,  peu 
lettrés  et  pauvres  d'imagination  (**). 

Ces  quelques  données  auront  suffisamment  (^aiactérisé 
le  genre  hagiograi)liique  tel  qu'il  se  révèle  dans  l'étude 
des  productions  consacrées  aux  saints  mérovingiens  de 
notre  pays,  pour  que  nous  puissions  passer  à  l'étude  de 
Jean  d'Y'pres  et  relever  ce  qui  le  distingue  et  ce  qui  le 
rapproche  des  autres  hagiographes  médiévaux  étudiés 
par  nous(^). 


Jean  le  Long  (Long-us)  naquit  à  Ypres.  Il  entra  comme 
moine  à  l'abbaye  de  Saint-Bertin;  en  1345,  on  le  trouve 
comme  étudiant  a  l'Université  de  Paris;  eu  136o  il  rentra 
à  son  abbaye,  dont  il  finit  par  devenir  abbé  {^).  Il  occui)a 


(')  Voir  notre  Étude  crUii/ue...,  p.  380  s v. 

{-)  Ibidem.  |).  i3(3  et  le  tableau  encarté  dans  le  volume.  W.  Mever  («  Der 
Gelegenlieitsdiiliter  Venantius  Fortunatus  »,  dans  les  Ah/iandlunr/eîi  do  Goet- 
liijgue,  Pliil.-liistor.  Klasse,  nouv.  sér.,  t.  IV,  o,  1901,  p.  l  sv.)  a  montré  que 
les  œuvres  de  cet  écrivain  ont  été  remaniées  à  l'époque  carolingienne. 

(^)  Cf.  M.  M\NiTirs,  «  Geschiclilliclies  aus  mittelalterliclien  Bibliotheks- 
katalogen  »,  dans  le  Nettes  Archiv,  1907,  t.  XX.X11.  p.  G 19-709,  et  le  livre  bien 
connu  de  Gottlob,  Ueber  mittelallerlic/ie  Bihliollœkcn. 

{*)  Pour  les  exceptions,  voir  R.  Teiffel,  Individuelle  l'ersônliihkeitsscliifde- 
nnig  in  den  dculschen  Geschichtswerken  des  10.  und  11.  Jahrhunderts. 
Leipzig,  191:2. 

(5)  Les  constatations  faites  ici  au  sujet  du  genre  liagiograplii(iue  |ieuvent 
être  répétées  dans  d'autres  parties  de  cettle  littérature,  pour  divers  pa,\s  et 
pour  diverses  éjioqucs.  Voir  notamment  les  ouvrages  de  Deleliaye,  Giinler  cl 
Zoepf,  cités  plus  haut. 

(^)  r.f.  II.  DE  Lai'I.vne,  Les  alihes  de  Saint -Berlin  d'apn's  les  undens  uionu- 
ments  de  ee  monastère.  Saint-Omer,  18oi-18oo. 


484  L.    VAN  DER   ESSEN 

cette  charge  pendant  dix-sept  ans.  Il  mourut  en  1383, 
comme  l'apprend  l'épitaphe  placée  dans  la  chapelle  de 
Saint-Denj's,  à  l'abbaye  de  Saint-Bertin  :  «  Hic  iacet  piae 
niemoriae.Tohannes  oriundus  deYpra  quondam  abbashuius 
monasterii,  qui  rexit  17  annis  et  obiit  anno  Domini  1383, 
secunda  die  mensis  Januarii,  Orate  pro  eo.  R.  I.  P, 
Amen  (^).  » 

Jean  d'Ypres  nous  a  laissé  une  œuvre  de  valeur,  la 
Chronica  monasterii  sancti  Bertini,  dans  laquelle  il  a 
retracé  l'histoire  de  son  abbaj'^e  de  o90  à  1294.  Il  n'a  pas 
eu  le  temps  de  terminer  l'ouvrage  (^i,  rédigé  avec  soin  et 
pour  la  confection  duquel  il  a  consulté  nombre  de  sources, 
dont  certaines  nous  sont  conservées  et  dont  d'autres  sont 
perdues. 

Suivant  la  tradition  du  genre  chronistique,  Jean  rappelle 
les  faits  d'histoire  générale,  d'histoire  locale  et  d'histoire 
corporative  qui  sont  étrangers  à  son  monastère  ou  indi- 
rectement en  rapport  avec  les  annales  de  Saint-Bertin;  il 
a  consulté  l'histoire  des  papes,  des  empereurs,  des  rois  de 
France  et  des  comtes  de  Flandre,  bienfaiteurs  de  l'ab- 
baye (3).  Quant  à  l'histoire  des  autres  abbayes  bénédictines 
et  celle  de  son  propre  manastère,  il  a  utilisé  la  copieuse 
littérature  hagiograjihique  qu'il  pouvait  trouver  dans  le 
scriptoriiim  de  son  abbaye,  et  dont  plusieurs  éléments 
nous  sont  parfaitement  connus  :  les  Vitae  des  saints  Bertin, 
Omer,  Folcuin,  Silvin,  Rémi,  Vaast,  Ouen,  Eloi,  Amand, 
Mommelin,  Erkembodon,  Humfride,  Fulcon,  Gérard, 
Grimbald,  Walbert,  Faron  et  AVinnoc  ("*).  Il  s'est  aussi  servi 
d'un  certain  nombre  de  compilations  qui  constituaient  les 


(})  Cf.  A.  MoLiMER,  Les  sources  de  Ihistoire  de  France,  t.  II,  n"  1782; 
Martèxe,  Thésaurus  anecdotorum,  t.  III,  col.  443-416;  Potthast,  I,  p.  6G9-G70' 

(2)  Publié  par  Martène,  Thésaurus  anecdotorum,  t.  III,  col.  443-776. 
M.  Holdor-Egger  en  a  donné  les  parties  originales  dans  les  Monumenta  Ger- 
maniae  Instoriva,  Scriptores,  t.  XXV,  p.  747-866. 

(3)  «  Colleginiiis  ex  clirouieis  Papannn,  inipcratorum,  regnni  Franciae^ 
ducum  austrasioi-uin  et  brabantinoruni,  comiluiu  l'Iandriae  et  (iliisnaruni...  » 
(Martène,  o.  c,  «ol.  448). 

(■•)  «Collegimiis  enim  ex  legendis  sanclonun  IJcrtini,  Aiidoniari,  Folcuini, 
Silvini,  Reniigii,  Vedasli,  Audoeni,  Eligii,  Aniandi,  Moniniolini,  lùkenibodonis, 
Hunfridi,  Fulconis,  Gerardi,  Grimbaldi,  Walberli,  Pliaronis,  Winuoci...  » 
(Martène,  o.  c,  loi-,  cit.). 


JEAN    n'YPRES  485 

encyclopédies  de  l'époque,  comme  les  œuvres  de  Thomas 
de  Cantimpré.  Le  soin  que  Jean  d'Y])res  a  mis  à  s'entourer 
de  tous  les  renseignements  possibles  nous  est  révélé  par 
le  fait  qu'il  a  consulté  les  «  antiquités  »  de  Saint-Bertin 
même,  c'est  à-dire  les  annales,  les  chroniques  et  les  récits 
qui  concernent  directement  le  monastère.  Il  a  poussé  ses 
recherches  plus  loin  encore.  Ne  se  contentant  point  des 
sources  littéraires,  il  a  examiné  les  archives  de  plusieurs 
églises  (^)  et  certains  documents  officiels  lui  ont  servi  à 
compléter  l'ensemble  de  ses  informations  (-). 

Jean  rédigea  la  Chronique  lorsqu'il  était  déjà  abbé  de 
Saint-Bertin  (^).  C'est  l'œuvre  principale  de  l'auteur  et  l'on 
y  trouve  la  trace  incontestable  de  ses  études  universitaires 
à  Paris,  tant  à  cause  de  la  supériorité  de  la  composition 
que  de  la  façon  exceptionnelle  dont  il  a  procédé  aux 
recherches  et  dont  il  a  fait  l'examen  de  ses  sources  d'infor- 
mation. 

Une  œuvre  moins  considérable  que  la  chronique,  mais 
qui  nous  intéresse  plus  directement  que  celle-ci,  c'est  la 
biographie  de  saint  Erkembodon.  Nous  y  consacrerons  un 
examen  attentif  dans  les  pages  qui  suivent. 


La  Vita  Erkembodoiiis  ("*)  retrace  l'histoire  d'Erkem- 
bodon,  quati'ième  abbé  effectif  de  Sithiu  depuis  717,  qui 
s'employa  à  faire  respecter  dans  son  monastère  la  règle  de 
saint  Benoît  et  qui  sut,  par  une  administration  ferme  et 
exemplaire,  développer  considérablement  le  temporel  de 


(')  «  Arcliivis  quo(iuc  publicis  ecclesiainiin  Sancli  Dionysii  aroupat^ilao, 
Bergensis,  Watiiiensis,  Marchiaiiensis,  Blangiacensis,  AïKienicnsis  »  (Maktène, 
o.  c,  loc.  cit.). 

("-)  a  Itemque  ex  testibus  mille  privilogiorum  et  chartarum  auliienlicaniin 
lani  istius  qiiam  aliarum  ecclcsiaruin,  ex  eoriiiii  si^nllis  aiieturilate  eredeiitiain, 
ex  (lie  et  consule  tempora  temporibiis  et  ex  causis  in  eis  eoiitentis  iiogotia 
negotiisconcoi'dando...  »  (Mautène,  o.  c,  loc.  cit.). 

(3)  Voie:  en  efl'ct  un  passage  qui  le  prouve  :  «  Si  quando  vero  plaeitum  et 
utile  quid  occurrat,  opincem  piis  ad  Deuin  preeibus  adiuvet,  qui  se  quinqua- 
ginta  et  octo  abbatiun  ultinuiiii  teinpore  meritis,  online  et  dignilate 
cogno^?cens,  se  Sylliiensinin  (iralinnibus  reeoniinendat  limniiiinie.  » 

{*)  Cf.  PiiTTiivsT,  Bililiotficcit  liislnririt  inédit  aeci,  t.  II.  p.  l-2i)i;  .\.  .McniMKit. 
Les  sources  de  l'Iii.ilnire  de  Fiance,  t.  I,  n°  r>.>4.  l'oip'  les  cdilidiis,  ynr  la 
liihtinllieca  liagiogiapliicn  latiiKt,  t.  I,  n"  :2.')i)S(. 


486  L.    VAN  DER   ESSEN 

l'abbaye,  soit  par  des  acliats,  soit  par  les  libéralités  qu'il 
provoqua  de  la  part  des  rois  Cliildéric  II  et  Thierry  IV. 
A  la  mort  de  Ravangaire,  évêque  de  Térouanne,  Erkem- 
bodon  fut  élu  chef  de  ce  diocèse  (723),  tout  en  conservant 
la  direction  de  l'abbaye  de  Sithiu.  Il  mourut  en  742  (^). 

Dans  le  prologue  de  la  Vita,  Jean  d'Ypres  se  nomme 
f rater  Jomines,  Dei  patientia  Sithiiiensis  coenobii  minister 
hiimilis,  ce  qui  implique  qu'à  ce  moment  il  n'était  i^as 
encore  abbé  de  Saint-Bertin.  La  Vita  est  donc  antérieure 
à  la  Chronica,  et  de  fait,  elle  est  mentionnée  dans  celle-ci 
comme  existap-t  déjà  (2). 

La  Vita,  comme  la  chronique,  révèle  les  mêmes  qualités 
littéraires  et  critiques  ;  c'est  le  moment  de  les  étudier  dans 
leur  ensemble. 

D'abord,  l'œuvre  de  Jean  d'Ypres  nous  offre  des  ré- 
flexions critiques  générales,  qui  sont  de  nature  à  mettre  en 
lumière  ses  conceptions  et  ses  procédés.  Dans  le  prologue 
de  la  Vita  Erkeinbodonis,  l'auteur  appuie  sur  le  fait  que 
son  œuvre  ne  contient  aucune  fiction,  que  toutes  ses 
données  sont  empruntées  à  des  sources  qu'il  est  prêt  à 
citer  :  «  Sciant,  quicumque  haec  legerint,  niliil  nos  de 
propriae  adinventionis  novitate  scripturos,  sed  quod  in 
veteribus  scriptis  sparsim  et  confuse  reperimus,  pro 
modulo  nostro  colligemus  et  ordinabimus  (3).  »  Certes, 
c'est  là  une  formule  que  n'hésitent  point  à  emploj^er  les 
hagiographes  dont  l'œuvre  est  partiellement,  même  totale- 
ment un  produit  de  leur  imagination,  mais  chez  Jean 
d'Ypres,  cette  affirmation  répond  à  la  réalité.  Pour  lui,  il 
existe  deux  moyens  de  prouver  la  vérité  de  ce  qu'il 
raconte  :  l'autorité  des  documents  et  le  raisonnement  : 
«  auctoritate  simul  et  ratione,  si  necesse  fuerit,  per  Dei 
gratiam  defendere  et  probare  valentes  quidquid  scripse- 
rimus.  » 


(ï)  Voir  notre  Ëtmle  critique...,  p.  -i24.  Sur  l'orgaiiisalion  doniahiale  de 
l'abbaye  de  Saint-Berlin,  voyez  G.  W.  Coopland,  «  The  abbey  of  St-Bertin  and 
its  nei{,Md)ourhood,  900-1350»  (Oxford  stmlies  in  social  and  légal  history,  l.  IV). 
Oxlord,  191  i. 

(-)  Ibidem. 

(^)  Comparez  le  prologue  de  la  Clironica  :  (c  ...  Suniendo  de  quolibet  quod 
ad  propositum  s|)Oclare  visuni  est,  niliil  asserendo  cpiod  non  autiienlieis  scriptis 
approbalur  »  Prvlofjns-,  toc.  cit.,  col.  448. 


JEAN    D"YPRES  4k7 

Les  recherches  de  Jean  sont,  en  réalité,  étenrluos  :  nous 
l'avons  entrevu  à  propos  des  sources  de  sa  Chroni(]iie  : 
annales,  chroniques,  histoires  générales,  vies  des  saints 
d'une  part,  chartes,  diplômes  et  archives  ecclésiastiques 
d'autre  part,  ont  été  examinés.  La  même  sollicitude 
d'in formation  se  retrouve  chez  riiagiograplie  :  «  Nos  itaque, 
dit  Jean,  quia  in  veteribus  chartis  et  annalibus  nostris 
quaedam  de  hoc  sancto  scripta  nos  reperisse  meminimus, 
aliquid  de  eo  scribere  proposuimus  (').  » 

L'examen  de  la  Vita  l'^rkenibodonis  même  nous  lait 
retrouver  ces  sources  —  que  nous  appelons  aujourd'hui 
sources  d'archives  et  sources  littéraires.  L'auteur  emploie 
le  catalogue  des  abbés  de  Saint  Bertin  pour  déter- 
miner l'ordre  de  succession  de  son  héros  dans  la  liste 
abbatiale  (~).  Pour  nous  dépeindre  la  vie  active  du  saint, 
sa  sage  administration  et  les  soins  qu'il  consacre  au 
temporel  de  l'abbaye,  il  utilise  constamment  les  diplômes 
des  rois  mérovingiens,  accordant  des  immunités  judi- 
ciaires et  fiscales,  des  actes  de  donation  publies  et  privés. 

La  Chronica  nous  offre  le  même  exemple  de  souci  docu- 
mentaire :  citons  ainsi  la  cession  de  la  villa  de  Rnmilico 
à  Dodebert  par  l'abbé  Rigobert  en  710  (•*),  la  donation  de 
Wormhout  par  Wenemar  en69oi^),  le  diplôme  de  Clovis  III 
confirmant  les  privilèges  de  l'abbaye  en  691  (^),  la  donation 
du  noble  Anialfride  en  679  (*^).  Non  seulement  Jean  nous 
donne  généralement  une  analyse  du  contenu  de  ces 
diplômes  et  de  ces  chartes,  mais  il  ajoute,  dans  sa  Chro- 
nique, l'incipit  et  la  date  complète  de  ces  pièces,  ce  qui 
nous  permet  de  les  identifier  et  de  contrôler  sa  documen- 
tation ('). 


(*)    Vita  Erkemltodmiis,  prologue. 

(-)  Yila,  fh.  2.  Voir  le  «  Lanihcrti  .\ii(loiiiaroiisis  sorips  abbatiun  S.  borliiii  » 
{Monumenta  Germaniae  l'islorica,  Scriplores.  t.  XIIl,  p.  (UIS). 

(')  .M.vuTKNE,  o.  f.,  col.  473,  pars  XIV. 

(')  Ihulem,  col.  173-471,  pars  Mil. 

(^)  Ibidem,  col  i~-2,  pars  XIII  (Cf.  Paudessi  s,  Dipluntata.  t.  II.  p.  i\b:  Pkutz, 
Diplomata,  t.  I,  p.  52). 

('■•)  Ihiilem,  col.  i71,  pars  Xll. 

(")  La  plupart  de  ces  actes  nous  ont  été  conservés;  ils  sont  publies  par 
GiKUAiu),  Carlulaire  (le  Minl-lkrtin,  \>.  il- 12,  4i,  17  19.  Paris,  IHIO.  —  Voici 
comment  Jean  s'exprime  p.  ex.  au  suj(>l  de  la  dniialinn  de  Hittnilita  :  «  Cuiiis 
emtionis  carta  sic  incipil  :  Domino...  » 


488  L.    VAN   DER   ESSEN 

Outre  les  sources  écrites,  Jean  d'Ypres  accueille  aussi 
les  informations  de  la  tradition  orale,  dont  il  examine  au 
préalable  l'antiquité  et  par  conséquent  la  valeur  :  «  Celebris 
autem  adliuc  extat  faraa,  ex  antiqua  seniorum  relatione 
auctoritatem  traliens  (^).  » 

D'ordinaire,  Jean  cite  les  sources  où  il  puise  ses 
affirmations  et  où  il  trouve  un  témoignage.  Parlant 
d'Erkembodon,  il  donne  comme  référence  le  catalogue  des 
abbés  du  monastère  (2)  ;  dans  la  Chronique,  il  nomme  les 
vies  de  saints  qu'il  utilise  dans  son  récit  :  «  Dicitur  enim 
in  beati  Bertini  legenda  (^)  »,  «  Sic  enim  dicitur  in  ejus 
[Silvini]  legenda  ("*)  ».  L'auteurn'en  fait  cependant  pas  une 
règle  :  quelquefois,  il  ne  cite  point  nommément  sa  source 
parce  que  le  lecteur  connaît  ou  est  censé  connaître  suffi- 
samment les  productions  de  la  littérature  hagiograpliique 
locale  ou  régionale,  qu'on  trouvait  dans  toutes  les  biblio- 
thèques et  dont  on  donnait  lecture  le  jour  de  la  fête  des 
saints  (^).  Lorsqu'il  s'agit  d'actes  de  vente  ou  de  donation, 
l'auteur  se  livre  d'ordinaire  à  un  travail  que  nous  appelons 
maintenant  la  confection  de  régestes  diplomatiques  :  il  en 
est  ainsi  pour  la  prélature  des  abbés  du  monastère,  à 
propos  desquels  diplômes,  chartes,  actes  divers  sont  cités 
consécutivement  avec  leur  incipit  et  leur  date.  Souvent,  à 
la  fin  du  chapitre  résumant  la  gestion  d'un  abbé,  Jean 
énumère  tous  les  actes  passés  sous  cet  abbé  (^).  Comment 
Jean  d'Ypres  interprète-t-il  et  utilise-t-il  ses  sources  et 
quelle  est  l'autorité  qu'il  leur  accorde?  Généralement,  il  ne 
donne  et  ne  reprend  dans  son  récit  que  ce  que  les  docu- 
ments lui  fournissent;  il  ne  hasarde  pas  de  conjectures,  il 


(«)  Vita,  ch.  G. 
(î)  Yita,  ch.  ± 
{^)  Mautène,  o.  c,  col.  -4Ti,  pars  XIV. 

(4)  Ibidem,  col.  -479.  cap.  III. 

(5)  «  Aclus  autem  apostolorum  vel  Apocalypsis  Joannis  pro  novitato  gaudii 
Paschalislegciitur...  vel  gesta  sanclonim  coufcssoriim  ac  marlynim  in  solom- 
nitatibuseorum,  utpopulus  intelllgalquaiiUiin  Clirislus  ainaveral  fainulmn...  » 
(Texte  cité  par  Mgk.  Duchesne,  Les  origines  du  culte  chrclien,  j».  194.)  Autre 
exemple  :  «  Procedente  vero  lectore,  qai  beatae  passionis  recenseret  hisloriam, 
ut  revolvit  librum...  »  Grégoire  de  Tours,  De  virluttbus  S.  Jtiliani,  ch,  16. 

(6j  P.  ex.  pour  Erkembodon  :  «  Cartas  sou  privilégia  quas  sanctus  aequisivit 
Erkembodo  sunl  mnuero  (juatuor. ..  » 


JEAN  d'ypres  489 

ne  cherche  guère  à  découvrir  ce  que  le  document  qu'il  a 
à  sa  disposition  ne  lui  révèle  pas.  11  fera,  par  exemple,  la 
remarque  suivante  :  «  Utrum  autem  reliquae  possessiones, 
quas  praedictae  ecclesiae  non  habere  noscuntur,  in  jus 
transierint  Morinensis  ecclesiae,  vel  quo  deveuerint, 
temere  difinire  non  audemus,  cum  aliquam  in  chartis  vel 
scriptis  certitudinem  inde  nondam  rej)erimus  (^).  »  C'est 
là  un  scrupule  que  la  littérature  hagiographique  que  nous 
avons  examinée  ne  fournit  pas  très  souvent. 

Jean  est  tout  aussi  circonspect  à  propos  des  miracles. 
Dans  la  Vita  Erkenihodonis ,  au  chapitre  o,  il  nous  avoue 
son  ignorance  au  sujet  des  faits  merveilleux  de  la  vie  de 
son  héros  :  «  i'ere  nulla  eum  fecisse  miracula  scriptum 
iuveniamus.  »  C'est  là  une  attitude  de  réserve  exception- 
nelle chez  les  hagiographes.  Une  fois,  cependant,  Jean 
sacrifie  aux  habitudes  et  aux  règles  du  genre  :  il  tache 
d'expliquer  le  silence  des  sources  au  sujet  du  merveilleux 
et  il  ne  trouve  d'autre  raison  que  celle  que  le  genre  hagio- 
graphique même  lui  suggère  :  la  négligence  des  contem- 
porains (2). 

Jean  d'Ypres  ne  se  départit  de  sa  réserve  que  lorsqu'il 
se  trouve  en  présence  de  données  contradictoires,  surtout 
en  fait  de  renseignements  chronologiques.  Voici  des 
exemples  : 

L'hagiographe,  ayant  examiné  le  diplôme  de  fondation 
délivré  à  l'église  de  Sainte-Marie  par  saint  Orner,  trouve 
cet  acte  daté  de  la  sixième  année  de  Clothaire  III  (657-603). 
D'autre  part,  les  chroniques  qu'il  a  à  sa  disposition  n'ac- 
cordent à  ce  règne  qu'une  durée  de  quatre  années.  Jean 
fait  alors  le  raisonnement  que  voici  :  ces  quatre  années 
doivent  sans  doute  être  considérées  comme  quatre  années 
pleines  et  entières  ;  dès  lors,  ajoutant  une  partie  d'année 
précédant  ces  quatre  et  une  partie  suivant  ces  quatre,  on 
peut  parler  en  réalité  de  «  sixième  »  année.  D'ailleurs, 
ajoute-t-il  aussitôt,  c'est  le  document  officiel  qui  fait  foi  : 
«  Sigillum  enim  regura  nec  fallit  nec  fallitur  (3).  »  A  un 
autre  endroit,  l'auteur,  ayant  fixé  la  date  de  la  mort  de 


(i)  Vj7ff,  di.  i. 
('-)  Vita,  cil.  G. 
(3)  Chronka  (Mahtèxe,  o.  c,  col.  107). 


490  L.    VAN   DER   ESSEN 

saint  Berlin  à  l'année  698,  se  trouve  en  conflit  avec  des 
données  d'après  lesquelles  Childebert  III  aurait  régné  de 
698  à  715(1).  Il  cherche  à  solutionner  la  difficulté  comme 
suit  :  n  Forte  fit  quia  quidem  historici  quandoque  numerant 
annos  completos  et  quandoque  numerant  excreseentias 
seu  non  completos  annos  pro  plene  completis,  quam  si  in 
temporc  regnationis  novem  vel  deeem  successive  regum 
scrii)tores  différant,  licet  non  sit  bene  tutum  (^).  )>  Remar- 
quez la  réserve  finale,  elle  jette  un  nouveau  trait  de  lumière 
sur  les  idées  de  Jean.  Celui-ci  exprime  encore  en  un  autre 
endroit  ce  principe  tout  moderne  de  la  distinction  entre 
les  sources  d'archives  et  les  sources  littéraires  :  «  Nos 
vero  non  tantum  sequimur  fidem  historiarum,  sed  magis 
sequimur  fidem  privilegiorum  nostrorum  et  sigillorum 
authenticorum  regum  vel  aliorum  :  sigillum  enim  regum 
nec  fallit  nec  fallitur  (^).  » 

Si  nous  examinons  maintenant  le  procédé  de  compo- 
sition, nous  vo3^ons  que  Jean  d'Ypres  n'est  pas  un  compi- 
lateur, comme  la  plupart  de  ses  confrères  en  hagiographie. 
Il  fait  une  véritable  sj^nthèse  :  il  examine  ses  sources,  pèse 
leur  autorité  respective  et  choisit  les  renseignements  les 
plus  intéressants  pour  les  adapter  à  l'ensemble  :  «  Quod 
in  veteribus  scriptis  sparsim  et  confuse  reperimus,  pro 
modulo  nostro  collegimus  et  ordinabimus...  Sic  prae- 
sens  opusculum  ex  multis  voluminibus...  collegimus, 
sumendo  de  quolibet  quod  ad  propositum  spectare  visum 
est  (4).  )) 

Dans  le  classement  des  renseignements  qu'il  a  recueillis, 
l'auteur  procède  de  façon  assez  originale,  mais  toujours 
rationnelle.  Ainsi,  parlant  de  l'abbé  Rigobert  qui  fut  placé 
à  la  tête  de  l'abbaye  de  Saint- Bertin  pendant  que  Bertin 
vivait  encore,  il  attribue  à  l'abbatiat  de  Bertin  les  chartes 
et  les  actes  passés  sous  Rigobert  :  «  Et  quia  sub  sancto 


(')  Childebert  m  a  régné  en  réalité  de  69^1-695  à  711.  Voir  L.  Vanderkindere, 
Introdudion  à  l'histoire  des  institutions  de  la  Belgique  cm  moijen  âge,  p.  136 
flahloan)  et  W.  Lkvison,  «  D.is  Nckrologiiim  von  Doni  Racine  uml  die  Chrono- 
logie der  Merowinger  »,  dans  le  Nettes  Archiv,  t.  XXXV,  1919,  p.  38,  47-48. 

(2)  C/ironiva  (Mautè.ne,  o.  c,  col.  476). 

(•')   Iliidrm. 

{■*)   Vitii,  prolojjuc. 


i 


JKAN    DYPRES  491 

Bertino  et  de  cius  maiidaro  fueruut  impetrata,  ipsi  beato 
Bertino  adscribimus  {/  .  •» 

Les  observations  qui  précèdent  auront  fait  connaître 
suffisamment  Jean  d'Ypres  comme  historien. 

Parlant  des  écrivains  du  moyen  âge,  M.  Cli.- V.  Langlois 
distingue  «  les  uns  [qui]  n'ont  su  que  juxtaposer  les  sources 
qu'ils  avaient  dans  la  main,  en  y  ajoutant  des  bévues,  sans 
se  soucier  d'en  résoudre  les  contradictions  »  des  autres 
qui  «  n'ont  pas  laissé  de  chercher,  de  comparer,  de  discuter 
les  documents,  de  constater  des  lacunes,  d'exprimer  des 
doutes  (-).  )) 

Jean  d'Ypres  appartient  à  cette  seconde  catégorie. 

* 
*     * 

Examinons  maintenant  cet  auteur  plus  spécialement 
comme  hagiographe.  L'étude  de  la  Vita  Erkembodonis 
nous  montre  que  Jean  d'Ypres  se  distingue  de  la  plupart 
des  rédacteurs  de  Vitae  de  saints  par  la  méthode  et  l'esprit 
critique.  Il  s'en  distingue  aussi  par  l'ordonnance  de  la 
matière  et  la  conception  qu'il  se  fait  de  son  travail.  Certes, 
le  plan  de  la  Vita  Erkembodonis  rappelle  le  plan  classique 
de  toutes  les  Vitae,  simple  et  chronologique,  mais  une 
innovation  de  l'auteur  qui  nous  occupe,  c'est  la  division 
en  (c  vie  active  »  et  cf  vie  contemplative  ».  Remarquons,  en 
outre,  que  dans  la  Vita  Erkembodonis  la  vie  active  est 
plus  importante  et  mieux  traitée  que  la  vie  contemplative  : 
cette  particularité  semble  en  oi)position  avec  le  but  même 
que  se  propose  tout  document  hagiograpliique.  Xous  ne 
trouvons  pas  ici  l'histoire  d'un  «  homme  à  miracles  »,  d'un 
visionnaire  ou  d'un  ascète;  nous  trouvons  le  portrait 
d'un  abbé  modèle,  s'occuijant  activement  des  intérêts  à 
la  fois  matériels  et  spirituels  de  la  maison  qui  lui  est 
confiée. 

Si  cette  particiilarité  pourrait  à  la  rigueur  être  expliquée 
par  le  fait  que  Jean  ne  possédait  guère  de  données  sur  la 
vie  pieuse  et  les  vertus  spéciales  du  saint,  aucun  doute 
n'est  permis  quand  il  s'agit  de  la  différence  de  conception 


(')  V.Jtronica  (Mautène,  o.  c.  col.  177). 

{'-)  Matiiiel  (le  Diblioyraphie   lilsfuririin',  f;isii<iilo  II,  j).   '2\'2  sv..   n"  330. 
Paris,  l<JOi. 


492  L.    VAN   DER    ESSEN 

que  l'on  trouve  chez  lui  au  sujet  de  son  idée  du  saint  comme 
tel  et  des  caractéristiques  de  la  sainteté. 

Il  attache,  de  fait,  une  minime  importance  à  l'élément 
miraculeux  ou  simi)lement  merveilleux  Certes,  Jean  sup- 
pose qu'Erkembodon  a  fait  des  miracles,  qu'on  a  oublié 
d'en  conserver  le  souvenir  :  c'est  la  croyance  populaire  et 
l'auteur  l'enregistre  sans  commentaire  •  «  Cum  plura  per 
eum  Dominum  miracula  fecisse,  licet  scripta  non  inve- 
niantur,  a  fideli  tamen  populo...  non  immerito  credatur  et 
praedicatur  (^).  »  11  ne  voudrait  d'ailleurs  point  être  taxé 
de  scepticisme  à  ce  sujet  :  «  Ne  credendum  arbitremur  eum 
nequaquam  miracula  fecisse  {^).  »  Il  pousse  môme  i^lus  loin 
la  concession  à  l'esprit  de  l'époque  et  aux  exigences  du 
genre  hagiographique.  Le  silence  au  sujet  des  miracles, 
affirme-t-il,  peut  s'expliquer  par  la  négligence  des  contem- 
porains du  saint.  On  doit  être  certain  qu'Erkembodon  a 
fait  des  miracles  :  si  on  ne  les  a  pas  vus,  c'est  que  le  saint 
a  voulu  les  cacher. 

Faiblesse  t^'pique  que  ce  passage,  qui  révèle  chez  Jean 
d'Ypres  un  écho  de  la  mentalité  de  son  milieu  (^)  ou  le  désir 
de  ne  pas  scandaliser  le  public  auquel  il  s'adresse  (■*). 


(1)  Yita,  prologue. 

(2)  Yita,  ch.  3. 

(3)  Jean  caractérise  celte  importance  attacliée  aux  miracles  comme  une 
préoccupation  générale  de  son  entourage  :  «  Quod  plerumque  auctoritatem 
sanctorum  commendare  snlet...  »  {Yita,  ch.  5.) 

(*)  Entre  les  monuments  anciens  de  la  littérature  ciu'étienne  jusques  et  y 
compris  Eusèbe  d'une  part  et  les  écrivains  de  la  fin  du  iv^  siècle  de  l'autre, 
il  y  a,  par  rapi»ort  h  l'usage  du  merveilleux,  un  contraste  bien  marqué.  Le 
miracle  proprement  dit  occupe  une  place  très  restreinte  dans  les  écrits  de  la 
période  anténicéenne  largement  prolongée  et  l'hagiographie  elle-même  est 
sous  ce  rapport  d'une  soljriétc  remartjuable.  Le  merveilleux  connue  élément 
ohligatoire  et  prépondérant  fait  son  entrée  dans  l'hagiographie  par  les  récits 
(|ui  célèbrent  les  hauts  faits  des  fondateurs  du  monachisme  et  c'est  de  l'Égj'pte 
que  scMublent  provenir  les  histoires  extraordinaires  qu'on  rencontre  d'abord 
en  Orient,  puis  en  Occident.  A  celte  époque,  l'aUitude  du  «bon  chrétien» 
dépend  de  l'idée  que  chacun  se  fait  de  l'intervention  de  Dieu  dans  les  affaires 
de  ce  monde.  Sur  tout  ceci  et  sur  l'idée  des  maîtres  de  la  pensée  cin'élienne, 
comme  S.  Gngoii'e  de  Nazian/e,  S.  .lean  Clu  ysostome,  S.  Augustin,  S.  Grégoire 
le  Grand,  voir  H.  Dfj.f.havk,  «Saint  Martin  elSuIpice  Sévère»,  dans  les  Analerta 
lioUuiuliuna,  t.  XXXVIil,  1920,  p.  7.3  sv.  —  Une  idée  fondamentale,  c'est  que 
les  iiagiographes,  sachant  (juiis  racontent  des  faits  que  Ton  n'est  i)as  obligé  An 
croire  comme  l'Kcriture  Sainte,  ne  se  jugent  point  tenus  à  contrôler  leurs 
renseignements,  surtout  en  fait  de  merveilleux. 


JEAN  d'ypres  493 

Cett<î  concession  faite,  Jean  déclare  cependant  que  pour 
lui,  l'importance  de  l'élément  merveilleux  est  minime  en 
liagiograpliie  :  «  Sed  quid  tautum  de  miraculis  questionem 
faeimus,  cum  autlieutica  testatur  scriptura  signa  non  esse 
data  fidelibus  sed  infidelibus  V..,  En  propter,  quoniam 
expectatio  justorum  laetitia  est,  multorum  autem  qui 
miracula  fecerunt  vel  faciunt  spes  peribit.  Aemiilemur  in 
Siinctis  chiirismiitti  melioni  (V).  » 

Chez  la  plupart  des  hagiographes  médiévaux,  ou  peut 
constater  un  souci  constant  de  la  perfection  littéraire. 
«  Lorsqu'on  essaie,  dit  le  bollandiste  Ueleliaye  (^),  de  se 
rendre  compte  de  la  manière  dont  les  anciens  eux-mêmes 
comprenaient  l'histoire,  la  naïve  conception  qu'eu  avaient 
les  lettrés  du  moyen  .âge  nous  cause  beaucoup  moins 
d'étonnement...  Leurs  historiens  ont  avant  tout  le  souci 
de  l'effet  littéraire.  »  Le  moyen  âge,  dans  une  certaine 
mesure  héritier  des  traditions  de  l'antiquité  en  cette 
matière,  n'alla  pas  plus  loin  ;  surtout  «  ce  ne  fut  pas  du  côté 
de  la  critique  qu'il  s'orienta  (^).  » 

Ici  encore,  Jean  d'Ypres  se  sépare  de  la  tradition  Chez 
lui,  nul  souci  de  l'effet  littéraire. 

Le  prologue  de  la  Vitn  Erkembodonis,  loin  de  contenir 
—  comme  les  règles  du  genre  le  prescrivent  —  quantité  de 
citations  d'auteurs  anciens  et  de  considérations  philoso- 
phiques, didactiques  ou  morales,  expose  très  simplement 
les  circonstances  de  composition  de  la  biographie  :  «  Questio 
nonnunquara  simul  et  conquestio  de  sancto  oriebatiu- 
Erkembodone  quod  rare  et  fere  nulla  de  gestis  eius  esset 
scriptis  commendata  memoria('*).  » 

Pour  résumer,  malgré  certains  défauts  (^)  et  certaines 
naïvetés  (6)  qui  rappellent  que  Jean  d'Ypres  appartient  au 


(1)   Vita,  ch.  0  01  7. 

(^)  Les  légendes  /utgiograp/ii({Ucs,  p.  73-75.  A  cuiisullor  11.  I'LTt:u,  hic 
gesiliichtlkhe  Literalur  neber  die  rômisclte  Kaiserzeil  bis  Theodosius  l,  I.  II. 
p.  ^276-3 iO. 

{■^j  II.  Dki.kiiayk,  o.  c,  p.  7.J. 

(•*)  V(7«,  prologue. 

(^)  Cf.  Stii.tin»;,  Commciitciriiis  proivius  in  S.  liertiniitn,  ii"  i-'i,  djnis 
Ghesqiikue,  Avla  Sanctonnn  lielgii,  l.  V,  p.  VySl. 

(•')  Voir  p.  ex.  la  Chronica,  cli.  XLVI  (M.\ktk>e,  o.  c,  col.  70-2,  pars  XVIII) 
et  ch.  XXVII  (Ibidem,  col.  oo9,  pars  II). 


494  L.    VAN   DER    ESSEN 

moyen  âge,  cet  écrivain  qui  —  en  compagnie  de  quelques 
autres  —  émerge  au  milieu  du  grand  nombre  des  hagio- 
graplies,  qui  souvent  n'ont  fait  que  produire  des  œuvres 
où  l'histoire  est  réduite  à  la  portion  congrue  et  qui  ont 
sacrifié  aux  exigences  populaires  et  aux  règles  du  genre. 

Voici  un  fait  extraordinaire  :  la  Vita  Erkembodonis, 
rédigée  au  xiv*  siècle  et  racontant  l'histoire  d'un  saint 
mort  au  viii'*  siècle,  a  plus  de  valeur  historique  que  quan- 
tité de  productions  hagiograi^hiques  qui  ont  vu  le  jour  peu 
de  temps  après  la  mort  du  saint  dont  elles  prétendent  faire 
connaître  la  vie  et  les  miracles. 

Cette  remarque  fera  comprendre  toute  l'importance  de 
Jean  d'Ypres  dans  la  littérature  hagiographique  de  la 
Belgique  au  moyen  âge. 

LÉON  Van  der  Essen. 


Le  Comte  de  Chambord  à  Anvers 

(Février  1872.) 


La  politique  intérieure  des  États  voisins  a  toujours  vive- 
ment intéressé  l'opinion  dans  notre  pays.  On  sait  combien 
la  question  polonaise,  dans  les  premières  années  de  notre 
indépendance,  puis  la  révolution  française  «le  18i8,  la  lutte 
du  Second  Empire  contre  les  idées  libérales,  les  péripéties 
de  la  question  romaine,  l'établissement  de  la  troisième 
République  en  France,  le  Kiiltiirkmnpf  en  Allemagne  et, 
plus  récemment  encore,  l'affaire  Dreyfus  et  la  guerre  faite 
par  Waldeck-Rousseau  et  Combes  aux  congrégations  ont 
passionné,  en  sens  divers,  nos  compatriotes.  C'est  toujours 
inspirés  par  un  idéal  de  justice  et  de  vérité  que  ceux-ci  pre- 
naient attitude  dans  ces  conflits  dont  la  solution  ne  les 
intéressait  pas  directement;  mais  les  passions  départis  ont 
toujours  été  si  vives  dans  notre  pays,  elles  ont  tellement 
obnubilé  le  sens  critique  de  la  masse  de  nos  concitoyens, 
que  c'était  uniquement  sous  l'angle  de  notre  politique 
intérieure  qu'étaient  envisagées  les  questions  agitées  chez 
nos  voisins.  Le  caractère  confessionnel  de  nos  luttes  élec- 
torales et  la  trop  grande  confusion  existant  dans  l'esprit 
de  nos  populations  entre  les  questions  d'ordre  religieux  et 
les  questions  d'ordre  politique  ont  eu  pour  résultat  de 
provoquer,  pour  des  causes  absolument  étrangères  à  notre 
évolution  nationale,  des  troubles  et  des  émotions  qui 
eurent  leur  répercussion  sur  notre  vie  intérieure  et  susci- 
tèrent parfois  de  graves  difficultés  à  nos  gouvernants. 

Un  exemple  frappant  de  ce  phénomène  nous  est  donné 
par  les  troubles  qui  éclatèrent  à  Anvers,  au  mois  de 
février  1872,  à  l'occasion  du  séjour  du  comte  de  Chambord 
dans  notre  grande  métroi)ole  commerciale. 

L'histoire  de  ces  troubles  est  assez  difficile  à  écrire 
d'après  des  sources  contemporaines  sûres.  Du  moment 
que  les  passions  i^olitiques  sont  déchaînées,  la  presse  sort 


496  CH.   TERLINDEN 

tout  à  fait  de  l'impartialité  si  difficile,  en  toutes  oireon- 
stanees,  à  conserver  par  les  journaux  inféodés  aux  partis. 
Les  feuilles  conservatrices  et  catholiques  saluaient,  avec 
un  Ij'risme  débordant,  «  l'enfant  du  miracle  »,  le  «  prince 
prédestiné  »,  le  «  héros  du  drapeau  blanc  »  qui  «  en  agis- 
sant au  nom  de  la  foi  de  ses  pères  »  devait  sauver  la  France 
et  rétablir  le  pouvoir  temporel.  Par  contre,  les  feuilles 
libérales  de  toutes  nuances  dénonçaient,  avec  une  sévérité 
non  moins  exagérée,  le  comte  de  Chambord  comme  un 
être  dangereux,  un  réactionnaire  intolérant,  un  fauteur  de 
désordres  et  une  menace  pour  la  paix  européenne.  Dès  que 
les  troubles  éclatèrent  à  Anvers,  ils  furent  exposés  et 
exploités  par  les  journaux  avec  le  même  parti-pris  :  pour 
les  uns,  il  ne  s'agissait  que  d'émeutes  sans  importance, 
regrettables  surtout  à  cause  du  fâcheux  renom  qui  en 
résulterait  pour  notre  proverbiale  hospitalité  ;  pour  les 
autres,  les  troubles  prenaient  un  caractère  d'exceptionnelle 
gravité  :  le  sang  coulait  dans  les  rues,  les  propriétés  parti- 
culières étaient  attaquées,  l'autorité  était  impuissante  à 
rétablir  l'ordre  ! 

Aussi  devons-nous  récuser  en  bloc,  d'où  qu'ils  viennent, 
tous  les  témoignages  fournis  par  la  presse  (^).  Semblable 
prudence  s'impose  en  ce  qui  concerne  les  documents  de 
source  parlementaire.  De  la  rue  et  des  journaux,  les  pas- 
sions politiques  avaient  envahi  la  tribune.  L'opposition 
libérale  avait  trouvé  l'occasion  excellente  pour  partir  en 
campagne  contre  le  ministère  catholique  présidé  par 
Jules  Malou.  Les  députés  de  gauche  accusaient  le  gouver- 
nement de  ])artialité  à  l'égard  du  prétendant  et  se  déchaî- 
naient contre  celui-ci  avec  violence. 

M.  Defré,  député  de  Bruxelles,  avait  ouvert  les  hostilités 
à  la  Chambre  des  représentants,  le  22  février,  en  annonçant, 
par  motion  d'ordre,  qu'il  allait  interpeller  le  gouvernement 
«  relativement  à  la  présence  sur  le  territoire  belge  d'un 
conspirateur  étranger,  M.  le  comte  de  Chambord  (-)». 


(1)  Un  article  i)aru  dans  llel  Ilandehlilad  van  Antrverpen,  sous  le  pseudo- 
nyme de  Taxandeu,  le  17  février  1922,  n'a  pas  grande  valeur  historique  et 
expose  les  faits  dans  un  esprit  de  pol('miinu\ 

(-)  Annules  pnrleinenlaires  de  Belf/ifjiie.  Session  législative  ordinaire  de 
1871-1872.  Glianibre  des  représentants,  p.  513. 


LE  COMTE  DE  CHAMBOFiD  497 

L'interpellation  de  M.  Defré  se  maintint  sur  le  terrain 
des  difficultés  d'ordre  int»;rnational,  qui  pourraient  surgir 
du  fait  que  le  gouvernement  avait  envoyé  des  fonction- 
naires publics  rendre  hommage  au  comte  de  Chambord, 
<c  comme  vs'il  était  déjà  roi  de  France  ». 

«  En  agissant  ainsi,  le  gouvernement,  dans  l'intérêt  de 
ses  sympathies  politiques,  cherche  à  jjcser  sur  les  esprits 
en  faveur  de  ce  prétendant.  N'est-ce  jias  favoriser  la 
conspiration  et  ne  s'en  rend-il  pas  moralement  complice? 
C'est  un  acte  d'hostilité  évident  contre  un  pays  allié  et 
ami.  C'est  exposer  le  pays  à  des  représailles  ! 

(c  Je  le  répète  :  je  ne  blâme  pas  le  gouvernement  de  ne 
pas  avoir  usé  de  rigueur  envers  le  prince  français  qui  se 
trouve  sur  le  sol  belge,  mais  je  le  blâme  et  je  l'accuse 
d'avoir  donné,  en  présence  de  la  situation  politique  de  la 
France  si  troublée,  à  un  de  ces  prétendants  un  témoignage 
public  et  officiel  de  ses  sympathies  {^).  » 

Le  ton  do  la  discussion  atteignit  un  diapason  plus  élevé 
encore  lorsque  MM.  Couvreur  et  Jottrand,  députés  de 
Bruxelles,  et  M.  Defuissaux,  député  de  Mons,  vinrent  à  la 
rescousse  de  leur  collègue.  L'exagération  même  de  leurs 
allégations  et  de  leurs  arguments  enlève  à  leurs  discours 
toute  valeur  comme  docuiuenis  historiques. 

«  Une  cour,  s'écrie  M.  Couvreur,  une  cour,  avec  tout  le 
formalisme  de  l'étiquette  des  vieilles  maisons  régnantes 
s'installe  dans  une  chambre  d'auberge  ;  chaque  train  qui 
arrive  à  Anvers  y  jette  des  flots  d'amis,  de  partisans.  Les 
journaux  en  portent  le  nombre  à  plus  de  quatre  mille. 

(c  Des  conciliabules  s'ouvrent  :  on  délibère  sur  un  pro- 
gramme qui  doit  sceller  la  réconciliation  des  Bourbons 
avec  les  d'Orléans  et,  ai)rès  une  réception  solennelle  dans 
les  salons  du  prétendant,  des  députés  de  la  droite  du  par- 
lement de  Versailles,  unis  à  d'autres  de  leurs  coreligion- 
naires, renouvelant  la  scène  du  banquet  des  gardes  du  i-orps 
qui  fut  le  signal  de  la  révolution  de  1789,  boivent  à  la  santé 
d'Henri  V  et  â  la  restauration  du  pouvoir  tempoi'cl.  » 

Et,  plus  loin,  M.  Couvreur  déclarait  : 

((  On  ])()uvait  se  croire  â  la  veille  d'une  croisade  clérico- 


(')  Annales  purleinen/aircs,  séaiu-e  du  i'i  février  \Sl-2,  p.  ."irîG. 

32 


498  CH.   TERLINDEN 

légitimiste,  rêvant  la  conquête  de  la  France  pour  rendre 
au  Saint-Siège  son  pouvoir  temporel,  passant  par  Paris 
pour  arriver  à  Rome  et  finissant  j)ar  reconquérir  môme 
l'Allemagne  protestante  et  scliismatique,  grâce  au  con- 
cours de  tous  les  orateurs  ultramontains  dont  les  débats 
du  parlement  allemand  nous  ont  dit  les  prouesses  (^). 

(c  C'était  comme  un  suprême  effort  de  l'Eglise,  dépouil- 
lée de  son  autorité  temporelle,  unie  à  l'absolutisme,  pour 
remonter  le  courant  des  révolutions,  pour  retrouver  son 
autorité  perdue  sur  les  masses.  La  Belgique  devenait  la 
citadelle,  la  x)lace  forte  de  l'Internationale  noire  {^).  » 

La  valeur  comme  source  historique  des  discours  des 
membres  de  la  droite  est  également  sujette  à  caution. 
M.  d'Hane  Steenliuyse,  député  d'Anvers,  s'efforça  avant 
tout  de  justifier  l'administration  communale  de  la  métro- 
pole de  l'accusation  de  n'avoir  ni  prévu,  ni  arrêté  les 
troubles  suscités  par  des  agitateurs  étrangers  d'extrème- 
gauche(^)  et  M.  Dumortier.  se  plaçant  à  un  point  de  vue 
S])écial,  démontra  que  le  comte  de  Cliambord,  n'a^'ant  rien 
fait  pour  troubler  la  tranquillité  publique,  il  n'y  avait  pas 
lieu,  comme  le  réclamaient  MM.  Couvreur  et  Jottrand,  de 
l'expulser  en  lui  appliquant  la  loi  du  16  juillet  1835  sur  les 
étrangers.  D'après  l'honorable  député  de  Roulers,  confir- 
mant les  allégations  de  son  collègue  d'Anvers,  c'étaient 
«  certains  communeux  )>  qui  étaient  venus  exciter  un 
mouvement  contre  le  comte  de  Cliambord  et  étaient  resi^on- 
sables  des  troubles  (4). 

Avec  beaucoup  d'habileté  et  beaucoup  de  prudence,  le 
président  du  Conseil,  Jules  Malou,  et  le  ministre  des 
Affaires  étrangères,  le  comte  d'Aspremont-Lynden,  s'ap- 
pliquèrent à  justifier  le  gouvernement  des  accusations 
d'avoir,  comme  le  prétendait  M.  Defré,  ((  envoyé  de  hauts 
fonctionnaires  pour  rendre  foi  et  hommage  à  un  préten- 
dant français  »  et  de  ne  pas  avoir  appliqué  au  comte  de 
Cliambord  la  loi  de  183o  en  le  faisant  expulser  «  dès  le 


(1)  Sur  l'aUitude  prise  au  lleiclislag,  par  les  députés  du  Centre  au  sujet  de  la 
question  romaine,  voir  O.nckes,  bas  Zeitalter  des  Kaisers  Wilhelm,  II,  393-407. 
(^)  Annales  parlementaires,  séance  du  27  février  1872,  p.  550. 
(3)  Annales  parlementaires,  séance  du  27  février  1872,  p.  552. 
{*)  Ibidem,  p.  557. 


LE  COMTE  DE  CHAMBORD  499 

premier  symptôme  d'émotion  »  (^),  mais  leurs  discours 
constituent  trop  des  plai<loyers  pro  domo  ])Our  pouvoir 
satisfaire  les  exigences  de  la  critique  historique. 

Ainsi,  au  point  de  vue  des  causes  et  du  processus  des 
troubles  d'Anvers,  les  débats  parlementaires  qui  se  termi- 
nèrent, le  27  février  1872,  par  un  ordre  du  jour  favorable 
au  gouvernement,  ne  nous  apportent,  pas  plus  que  les 
journaux,  de  renseignements  précis  et  sûrs. 

Nous  avons  heureusement  trouvé  dans  nos  archives 
privées  une  source  de  premier  ordre  qui  nous  permettra  de 
présenter  les  événements  sous  leur  véritable  aspect  :  c'est 
le  rapport  confidentiel  adressé  au  roi,  le  28  février  1872, 
par  le  lieutenant-général  Eenens,  à  cette  époque  gouver- 
neur militaire  de  la  position  fortifiée  d'Anvers. 

Eenens  appai-tenait  à  l'opinion  libérale  et  avait,  avant 
le  vote  de  la  loi  sur  les  incompatibilités  parlementaires, 
siégé  sur  les  bancs  de  la  gauche  à  la  Chambre  des  repré- 
sentants. Son  caractère  énergique  et  loyal  l'avait  désigné 
à  l'attention  du  roi  lors  de  la  guerre  franco-allemande  ;  par 
arrêté  royal  du  lo  juillet  1870,  le  souverain  l'avait  chargé 
d'organiser  la  défense  du  camp  retranché  d'Anvers  et  lui 
avait  confié  le  commandement  de  l'armée  de  réserve  ('). 
Les  opinions  du  général  Eenens,  peu  favorables  au 
ministère  Malou  et  à  l'administration  communale  «  mee- 
tinguiste  »  d'Anvers,  le  sens  qu'il  avait  de  son  devoir  et  de 
ses  responsabilités,  sa  haute  intelligence  et  la  droiture  de 


(1)  Discours  de  M.  Malou  et  <\n  comte  (rAspreinont-Lynden,  Annales  parle- 
mentaires, séances  des  :2.3  et  il  février  187:2,  p.  .■):2T-.^)"28,  .").'>!  et  ."i5.'j. 

(-)  Eenens  (Alexis-Michel),  né  à  Bruxelles  le  10  messidor  an  xni  (2!)  juin  I8O01, 
cadet  à  l'école  du  génie  et  darlillerie  a  Delfl,  le  l.'i  juillet  \Sio  ;  sons-lieutenant 
d'artillerie  dans  l'arnn'-e  royale  des  Pays-Bas,  le  .'i  janvier  1830;  |)assé  au 
service  de  la  Relgiqne  en  (jualité  de  lieutenant  d'artillerie,  le  3  oclolire  1830, 
contribua  à  la  reddition  de  la  citadelle  de  Namur  et  se  distingua  à  la  bataille 
de  Lonvain,  le  1;2  août  1831.  Devenu  lieutenant-gcnéral  en  1806,  i!  fut  succes- 
sivement ins{)eeteur  général  de  l'artillerie,  commaiulanl  de  l'armée  d'Anvers, 
aide  de  camp  du  roi,  etc.,  etc.  Il  mourut  à  Schaerbeek  le  li  février  1883.  Il  était 
grand-cordon  de  l'Ordre  de  Léopold.  Eenens  avait  publié  plusieurs  ouvrages 
de  science  militaire  et  d'Iiistoire,  parmi  les(inels  Les  Conspirations  militaires 
(le  1X51  (Bruxelles,  18T."»-187;»,  -2  vol.  et»)  suppléments)  avaient  provotjiH-  une 
violente  poléniiciue.  Il  s'était  également  occupé  d'agronomie  et  son  mémuire 
sur  la  Ferlilisalion  de  la  V.ampine  (Bruxelles,  181!»)  avait  été  ciiuronnc  par 
l'Académie  royale  de  B('li.;i(|iie. 


500  CH.   TERLINDEN 

son  caractère,  font  de  son  rapport  un  document  de  premier 
ordre,  tant  au  point  de  vue  de  l'exactitude  avec  laquelle 
les  faits  sont  rapportés  que  de  l'impartialité  avec  laquelle 
ils  sont  jugés.  L'armée  devait  être  à  ses  yeux  la  «  grande 
muette  »  et  les  luttes  ou  même  les  préférences  politiques 
devaient  disparaître  devant  la  stricte  observation  de  la 
discipline  militaire. 

* 
*     * 

On  sait  que,  dans  les  derniers  mois  de  l'année  1871,  la 
campagne  de  restauration  monarchique  en  France,  para- 
lysée par  l'habileté  avec  laquelle  M.  Thiers  avait  su 
imposer  aux  droites  de  l'Assemblée  nationale  le  fameux 
pacte  de  Bordeaux,  avait  repris  avec  une  vigueur  nouvelle. 

Pour  ne  pas  être  mêlé  de  trop  près  aux  manœuvres  de 
ses  partisans,  qui  eussent  pu  le  compromettre,  l'obliger 
peut-être  à  sortir  de  la  prudente  réserve  dans  laquelle  il 
se  confinait  et  l'empêcher  de  désavouer,  le  cas  échéant, 
ce  qui  lui  aurait  déplu  dans  les  démarches  de  ses  amis,  le 
prétendant  ne  s'était  pas  établi  en  France.  La  Suisse  et  la 
Belgique  lui  paraissaient  favorablement  situées  pour  sur- 
veiller la  politique  française  et  diriger  l'action  de  ses 
agents.  Au  printemps  de  1871,  après  un  court  séjour  à 
Chambord,  il  avait  résidé  assez  longuement  à  Bruges  et, 
dans  les  derniers  jours  de  janvier  1872,  s'était  installé  à 
Anvers.  Il  avait  retenu,  pour  lui  et  pour  sa  suite,  des 
appartements  pour  six  semaines  à  l'hôtel  Saint- Antoine, 
au  coin  de  la  place  Verte  et  du  Marché-aux-Souliers. 

En  ce  moment,  la  campagne  monarchique  était  arrivée 
à  un  tournant  décisif  (').  On  sait  que  le  général  Ducrot 
s'était  fait  le  champion  de  la  «  fusion  parlementaire  »  dans 
le  but  de  renverser  le  gouvernement  de  M.  Thiers,  de 
proclamer  la  vacance  du  pouvoir  exécutif  et,  en  attendant 
l'arrivée  du  «  Roy  »,  de  confier  la  lieutenance-générale  au 
duc  d'Aumale.  On  raconte  que  Ducrot  se  rendit  à  Anvers 


(*)  Sur  les  péripéties  de  la  campagne  monarchiste  de  cette  époque,  voir  : 
Ha.notaix,  Histoire  de  la  France  contemporaine,  I,  p.  390-396;  Zktokt,  Histoire 
(le  la  Iroisihiie  rrpulilifiuc.  t.  1  ;  be  Makckue,  I' Asseml)lre  nationale  de  1871,  t.  I  ; 
DK  Fai.i.oix,  SoHvinirs  d'un  royaliste;  vicomte  de  MEAtx,  Souvenirs  politiques, 
1871-1877;  marquis  de  Dampierre,  Cinq  années  de  vie  politique;  Bolniols, 
Thiers  au  pouvoir,  1871-1873. 


LE  COMTE   DE  CHAMHOMD  501 

et  se  traîna  aux  genoux  du  prétendant  pour  obtenir  son 
adhésion  à  l'idée  de  fusion  et  pour  le  faire  revenir  sur  son 
manifeste  du  o  juillet  1871,  tranchant  la  question  du 
drapeau.  Il  ne  parvint  pas  à  fléchir  sa  volonté  (').  Même, 
pour  mettre  fin  aux  négociations  poursuivies  entre  les 
divers  groupes  de  la  droite  dans  les  couloirs  de  Versailles, 
le  comte  de  Chambord  lan(;ait,  le  2o  janvier,  un  nouveau 
manifeste,  affirmant  qu'il  n'abandonnait  rien  de  ses  prin- 
cipes et  qu'il  refusait  de  devenir  «  le  roi  légitime  de  la 
Révolution  (-)  ». 

En  dépit  de  ces  déclarations,  qui  paraissaient  condamner 
à  un  échec  certain  toute  tentative  de  restauration,  les 
députés  royalistes  des  diverses  nuances  avaient  continué 
leurs  pourparlers  et.  le  17  février  1872,  quatre  légitimistes 
modérés  :  MM.  Baragnon,  Ernoul,  de  Cumont  et  de  Meaux 
étaient  parvenus  à  rédiger  un  programme  contenant  une 
dose  savamment  répartie  de  principes  orléanistes  et  légi- 
timistes et  indiquant,  comme  moyen  pratique  de  procéder 
à  la  restauration,  un  vote  de  l'Assemblée  nationale  appelant 
au  trône  de  France  l'héritier  légitime  des  anciens  rois. 

On  se  flattait  de  réunir  300  signatures  au  bas  de  ce 
l)rogi"amme,  mais,  pour  obtenir  l'adhésion  des  «  chevau- 
légers  »  de  l'extrême  droite,  l'approbation  du  comte  de 
Chambord  était  indispensable.  C'est  pourquoi, le  18  février, 
MM.  Ernoul  et  Baragnon  firent  le  pèlerinage  d'Anvers  et 
furent  reçus  par  le  prétendant.  Avertis,  dès  la  veille,  par 
un  envoyé  du  prince  que  celui-ci  ne  pourrait  accueillir 
leur  communication,  ils  renoncèrent  à  lui  présenter  le 
programme  des  droites  et  se  bornèrent  à  l'entretenir  de  la 
situation  de  l'Assemblée  et  du  parti  que  le  prince  pouvait 
en  tirer.  Les  instances  les  plus  éloquentes  de  M.  Ernoul  ne 
parvinrent  pas  à  faire  sortir  le  prétendant  de  son  mutisme. 
«  Aucune  réponse  précise  ne  lui  fut  faite  et,  sans  vaciller 
dans  sa  foi  résistante  de  royaliste.  M.  Ernoul  revint 
inquiet,  presque  triste,  à  Versailles  (^)  ».  Dès  lors,  la  tenta- 
tive de  fusion  parlementaire  était  condamnée  à  un  échec 


(')  Dvi  DET  (Eknesti,  Le  duc  (l'Aionale,  \>.  202. 

(■^)  Voir  le  texte  do  «e  manifeste  «huis  Zkvokt.  t.  I,  |>.  38'.l.  a|i|ien«lice  ii"  wiii. 
(•^j  Merveii.lei  X  Kl  Vui.NEAix,  Vn  pru  d'/iislolye  <i  prapos  il'iin  titim  .  Ernoul, 
p.  tio. 


502  CH.   TERLINDEN 

certain.  Devant  l'attitude  de  l'extrême  droite,  le  centre 
droit  fit  des  réserves  et  proclama,  une  fois  de  plus,  sa 
«  fidélité  au  drapeau  tricolore  ».  Les  adhésions  sur  les- 
quelles comptaient  les  rédacteurs  du  programme  firent 
défaut,  on  ne  parvint  à  recueillir  que  159  signatures.  La 
droite  resta  divisée  et  resi)oir  de  restaurer  la  monarchie 
en  France  s'évanouit  une  fois  de  j)lus. 


Tandis  que  se  déroulaient  ces  i)éripéties  de  la  campagne 
monarchiste,  la  nouvelle  du  séjour  du  comte  de  Chambord 
à  l'hôtel  Saint- Antoine  s'était  répandue  dans  le  public.  Le 
choix,  fait  par  le  prétendant,  d'Anvers  comme  lieu  de 
résidence  était  inopportun.  Dans  aucune  ville  de  Belgique 
les  passions  politiques  n'étaient  plus  exaltées,  nulle  part 
les  luttes  de  partis  n'étaient  plus  vives,  nulle  part  la  foule 
n'était  plus  impressionnable.  Chaque  élection  était  mar- 
quée par  des  rixes  plus  ou  moins  sérieuses  et  par  des 
manifestations  dont  les  vitres  des  établissements  catho- 
liques, surtout  celles  du  collège  des  Jésuites,  faisaient  les 
frais.  En  toute  occasion  «  jeunes  gardes  »  libérales  et 
«  stockslagers  »  catholiques  en  venaient  aux  mains  avec 
une  égale  surexcitation  et  la  police  locale  avait  fort  à  faire 
pour  rétablir  l'ordre.  D'autant  plus  qu'en  ce  moment  le 
parti  catholique,  dit  parti  du  Meeting-  depuis  ses  bruyantes 
protestations  contre  la  transformation  d'Anvers  en  place 
de  guerre,  était  maître  de  l'hôtel  de  ville.  La  bourgeoisie, 
en  grande  partie  libérale,  combattait  par  tous  les  moyens 
l'administration  de  M.  Van  Put  et  la  gai-de-civique,  qui 
aurait  dû  concourir  éventuellement  avec  la  police  au 
maintien  de  l'ordre,  était  animée  d'un  esprit  tout  à  fait 
hostile  à  l'administration  communale. 

Dans  ce  milieu  enfiévré  toutes  les  excitations,  même 
celles  venant  du  dehors,  étaient  assurées  de  trouver  de 
l'écho. 

Le  va-et-vient  autour  de  l'hôtel  Saint-Antoine  n'avait 
pas  tardé  à  être  l'cinarqué  et,  sans  verser  dans  les  exagé- 
rations dont  l'honorable  M.  Couvreur  se  faisait  l'écho  à  la 
Chambre,  il  est  certain  qu'un  nombre  considérable  de 
royalistes  français  emplissaient  les  restaurants  et  les  cafés, 


LE   COMTE   DE  CHAMBORD  503 

échangeaient  à  haute  voix  leurs  réflexions  et  ne  dissinui- 
laient  pas  leurs  espérances.  Leurs  faits  ot  gestes,  tout 
comme  leurs  discours,  empreints  de  tout  l'enthousiasme 
mis  i)ar  nos  voisins  à  la  défense  de  leurs  opinions,  exci- 
taient une  vive  curiosité,  mêlée  de  quelque  étonnenient, 
dans  le  milieu  encore  très  provincial  et  d'esi^rit  étroit 
qu'était  Anvers  à  cette  époque.  Aussi  les  libéraux  anversois 
virent-ils  avec  un  certain  mécontentement  M.  Pycke,  gou- 
verneur de  la  province,  et  le  général  Eenens,  gouverneur 
de  la  position  fortifiée,  se  rendre  à  l'hôtel  Saint-Antoine 
et  faire  visite  au  comte  de  C'hambord.  Cette  démarche  de 
pure  courtoisie,  réi)()ndant  aux  visites  faites  par  le  comte 
de  Blacas  aux  premières  autorités  civiles  et  militaires  de  la 
métroi)ole,  avait  été  mal  interprétée  par  une  i)artie  de 
l'opinion,  qui  y  avait  vu  une  adhésion  du  gouvernement 
catholique  de  M.  Malou  aux  principes  mêmes  re])résentés 
par  le  champion  du  drai)eau  blanc.  C'était  singulièrement 
défigurer  la  vérité.  Comme  le  comte  de  Blacas  avait  fait 
part  au  général  Eenens  du  désir  manifesté  par  le  prince  de 
faire  sa  connaissance,  celui-ci  s'était  rendu  à  Bruxelles  et 
avait  demandé  des  instructions  au  roi.  Léopold  II,  se 
basant  sur  les  précédents  créés  lors  du  séjour  du  comte  de 
Cliambord  à  Bruges,  avait  autorisé  le  général  à  aller,  à 
titre  de  membre  de  sa  maison  militaire,  saluer  en  son  nom 
le  prétendant  uni  à  la  famille  royale  de  Belgique  par  des 
liens  de  parenté.  Il  était  bien  entendu  que  le  général  évite- 
rait toute  allusion  à  la  situation  intérieure  de  la  France  et 
aux  raisons  du  séjour  du  prince  à  Anvers.  Tout  l'entretien 
devait  rester  dans  les  limites  d'une  visite  purement  proto- 
colaire (*). 

Il  y  avait  à  Anvers  un  milieu  facilement  émotif,  où  les 
étrangers  étaient  nombreux  et  où  les  passions  politiques 
s'exagéraient  encore  de  l'enthousiasme  j)ropre  à  la  jeu- 
nesse. C'était  Vlnstitul  supérieur  de  coniiiierce.  Déjà,  avant 
même  que  les  visites  faites  au  prétendant  eussent  excité 
l'opinion,  une  cinquantaine  d'élèves  de  cet  établissement 
scientifique,  étrangers  pour  la  plupart,  s'étaient  réunis,  le 
17  février,  devant  l'hôtel  Saint-Antoine,  faisant  entendre 


(')  luslructious  V(M-l)al(>s  du  roi,  dans  VAgemla  du  général  Eenens,  :i  l;i  d;ile 
du  21  février  187:2.  (.\rcliives  privées  de  l'auteur.) 


504  CH.   TERLINDEN 

le  cri  :  «  A  bas  Chambonl  !  »  Mais  cette  manifestation 
n'avait  pas  rencontré  d'écho  et  s'était  bientôt  dispersée, 
sans  même  que  la  police  dût  intervenir  (^). 

Tout  était  i"esté  calme  ensuite,  jusque  dans  la  soirée 
du  21.  Un  attroupement  assez  considérable  se  forma  devant 
l'hôtel  Saint- Antoine,  criant  :  «  A  bas  Chambord!  Les 
conspirateurs  à  la  frontière!  »  et  entremêlant  ses  cris  du 
chant  de  la  Marseillaise. 

«  Le  22,  écrit  le  général  Eenens,  un  nouveau  rassemble- 
ment se  forma,  faisant  entendre  les  mêmes  cris.  Il  comptait 
au  moins  2000  à  3000  personnes  ;  cependant  la  police  locale 
parvint,  à  elle  seule,  à  maintenir  la  situation.  » 

Ces  manifestations  jusqu'ici  assez  anodines  paraissent 
cependant  avoir  causé  quelque  souci  au  gouvernement.  Le 
ministère  Malou,  extrêmement  prudent  et  modéré,  qui 
allait  se  faire  un  titre  d'honneur  d'«  avoir  vécu  »  pendant 
sept  ans,  redoutait  toutes  les  émotions  de  la  rue.  Il  avait 
pris  le  pouvoir  au  lendemain  de  manifestations  qui  avaient 
poussé  le  roi  à  retirer  l'autorité  au  ministère  d'Auethan, 
ainsi  qu'au  lendemain  d'une  crise  internationale  et  sociale 
intense  qui  avait  laissé  quelque  malaise  dans  l'opinion.  Les 
excès  de  la  Commune  avaient  fait  naître  de  vives  appré- 
hensions dans  le  monde  conservateur  et  la  présence  en 
Belgique  d'un  certain  nombre  de  réfugiés  français  affiliés 
à  V Internationale  augmentait  encore  ces  craintes.  A 
Anvers  surtout,  où  la  colonie  étrangère  était  fort  nom- 
breuse, où  la  populace  du  port  était  toujours  prête  à 
descendre  dans  la  rue  et  où  l'on  savait  ne  pouvoir  compter 
sur  la  garde-civique  en  cas  d'émeutes  à  caractère  politique, 
la  situation  paraissait  au  gouvernement  plus  inquiétante 
qu'ailleurs.  D'autant  plus  que,  par  suite  de  la  maladie  de 
M.  Van  Put,  le  premier  échevin,  M.  Van  deu  Bergh-Elsen, 
avait  dû  assumer  les  fonctions  de  bourgmestre  et  on  avait 
complété  le  collège  échevinal  en  y  appelant  le  premier 
conseiller  inscrit  au  tableau,  M.  Van  Hissenhoven.  Enfin, 
il  y  avait  lieu  de  craindre  qu'en  cas  de  troubles  nécessitant 
l'intervention  de  l'armée,  de  graves  malentendus  n'écla- 


i^j  Rapport  du  général  Eonens  au  roi  sur  le  séjour  du  comte  de  Chambord 
à  Anvers,  p.  1.  (Archives  privées  de  l'auteur.) 


LE  COMTE  DE  CHAMBORD  505 

tassent  entre  les  autorités  militaires  et  le  collège  élu  sur  le 
])rogramme  nettement  antimilitariste  du  Meeting-,  Dans 
ces  conditions  le  général  Eenens  crut  devoir  prendre  des 
mesures  de  précaution.  Il  fit  renforcer  les  postes,  si)éciale- 
ment  celui  de  la  graud'garde,  et  fit  tenir  des  piquets  de 
troupes  dans  les  casernes  à  la  disposition  du  commandant 
de  i)la('e. 

Le  23  eut  lieu  à  la  Chambre  l'interpellation  de  M,  Defré 
et,  à  partir  de  ce  moment,  le  général  Eenens  constate  un 
changement  intéressant  à  signaler  : 

(c  Les  manifestations,  qui,  jusque-là,  avaient  montré 
l'action  presque  exclusivement  d'un  élément  étranger  et 
républicain,  commencèrent  à  prendre  un  caractère  poli- 
tique plus  marqué,  accusant  nettement  la  division  si 
tranchée  des  partis  à  Anvers.  Le  parti  libéral  se  montrait 
hostile  au  comte  de  Chambord,  le  parti  catholique  prenait 
fait  et  cause  pour  le  prince  ;  cet  état  de  choses  devait  néces- 
sairement amener  les  rixes  qui  ne  tardèi-ent  ])as  en  effet 
à  se  produire  ». 

Dans  la  soirée  même  du  28,  la  gendarmerie  dut  inter- 
venir pour  rétablir  la  circulation  au  Marché-aux-Souliers 
et  place  Verte,  où  la  police  locale  avait  été  débordée  et,  le 
lendemain,  les  troubles  prirent  une  caractère  plus  grave 
encore.  Dès  l'heure  de  la  Bourse,  une  foule  hurlante 
s'amasse  sous  les  fenêtres  du  prince,  la  gendarmerie  doit 
faire  évacuer  toutes  les  rues  contigucs  à  l'hôtel  et,  le  soir, 
un  grand  meeting,  auquel  assistent  plus  de  2000  personnes, 
a  lieu  au  Café  des  Areades,  rue  Haute. 

(c  Ici,  dit  le  général  Eenens,  l'élément  étranger  et  répu- 
blicain domine.  Le  principal  orateur  est  un  démocrate 
fran^-ais  du  nom  de  Pierre  Lerougc.  » 

A  l'issue  du  meeting  la  foule  parcourt  les  rues  en  criant  : 
«  A  bas  Chambord  !  »  et,  chantant  la  Marseillaise,  se  rend 
devant  la  demeure  du  Consul-général  de  France,  où  elle 
manifeste  aux  cris  de  :  «  Vive  la  France  !  Vive  la  Kéi)U- 
blique  !  ». 

A  ce  moment,  nous  apprend  le  général  Fenens,  se  joint 
au  cortège  un  grand  nombre  d'étudiants  accourus,  à  l'appel 
de  leurs  camarades  de  Vliistitiit  snpri-ieiir  de  (^.omiuerre, 
des    universités  de   Bruxelles,  de  (Jand  et  de  Liège.  La 


506  CH.   TERLINDEN 

foule  se  rend  ensuite  devant  l'habitation  du  bourgmestre  et 
crie  :  «  A  bas  la  calotte  !  A  bas  les  jésuites  !  A  bas  Van  Put  !  ». 

A  cette  manifestation  libérale,  répond  une  contre-mani- 
festation catholique.  Les  fameux  Stockslag'ers,  comme  les 
appelaient  leurs  adversaires  libéraux,  entraient  en  scène. 

On  sait  que,  à  cette  époque  d'intenses  luttes  politiques, 
toute  élection  ou  manifestation  était  l'occasion  de  rixes 
plus  ou  moins  graves  entre  les  partis.  C'est  à  Louvain, 
dans  ce  milieu  estudiantin  facilement  mis  en  ébullition, 
que,  pour  suppléer  à  l'inertie  prétendue  ou  réelle  de  la 
police  locale,  s'organisèrent  des  associations  destinées  à 
protéger  les  manifestations  de  l'opinion  catholique  ;  sem- 
blables groupements  s'étaient  formés  dans  toutes  les  villes, 
où  iTipreté  des  luttes  transformait  les  rues  en  champs 
clos  des  j)artis,  et,  ainsi,  catholiques  et  libéraux  expri- 
maient, par  la  vigueur  des  coups  de  cannes  échangés, 
l'ivresse  des  victoires  électorales  ou  l'irritation  des  dé- 
faites. Ces  luttes  étaient  pour  ainsi  dire  entrées  dans  les 
mœurs  et  aucune  mesure  législative  ou  policière  n'était 
parvenue  à  les  empêcher. 

Les  libéraux,  violemment  attaqués,  sont  refoulés  en 
désordre  vers  la  place  Verte  et  la  tête  de  leur  cortège 
cherche  refuge  à  la  Taverne  alsacienne,  dont  le  premier 
étage  était  occupé  par  les  élèves  de  V Institut  de  Commerce. 
Une  bande  de  plusieurs  centaines  de  jeunes  gens,  conduite 
«  par  un  monsieur  bien  vêtu  »,  vient  cerner  le  café,  en 
criant  :  «  Vive  Chambordl  Vive  A-^an  Put!  »  et  brise  les 
vitres  à  coups  de  pierres. 

«  D'un  côté  on  crie  :  «  A  bas  Chambord  !  A  bas  la  calotte  !  » 
De  l'autre,  on  chante  A.  C.B.  sur  l'air  des  Lampions,  et 
le  Vlaamsche  Leeiiw  (^).  » 


('j  II  est  curieux  de  rappeler  d.ins  quels  termes  M.  Couvreur,  dé[)ulé  libéral 
de  Bruxelles,  :ip|)réciail  l'emploi  de  ces  chants  par  les  manifestants  d'Anvers  : 

«Tous  ces  désordres  s'accomplissent  les  uns  aux  accents  de  la  Marseillaise, 
les  autres  à  ceux  du  Lion  de  Flandre,  deux  chants  qui  n'étaient  en  situation 
ni  l'un  ni  l'autre. 

«  Belges,  nous  n'avons  pas  à  chanter  la  Marseillaise,  pas  à  Anvers  surtout, 
aux  portes  de  cette  Cam|)ine  (jui  résista  si  vaillamment  aux  pillards  de  1793. 
Quant  au  chant  du  Lion  de  Flandre,  c'était  vraiment  un  hommage  (pu  ressem- 
blait à  une  dérision  que  de  le  faiie  retentir  en  l'honneur  du  descendant  de 
rois  ({ui  n'ont  cessé  d'êti'e  les  pires  ennemis  des  Flamands...  (interruption), 


LE  COMTE  DE  CHAMBORD  507 

Les  étudiants  tentent  une  sortie  et  sont  repoussés.  La 
lutte  serait  devenue  sanglante  si  la  gendarmerie  à  cheval 
n'y  avait  mis  fin  en  faisant  évacuer  la  place.  Enfin,  vers 
minuit  et  demi  l'ordre  est  rétabli. 

Le  lendemain,  25  février,  les  troubles  recommencent 
avec  une  nouvelle  intensité.  En  dépit  d'une  ordonnance 
de  l'autorité  communale  interdisant  les  rassemblements  de 
plus  de  cinq  personnes,  la  gendarmerie  locale,  renforcée 
par  des  détachements  venus  de  Malines,  Lierre,  Héren- 
thals,  Boom  et  Brasschaet,  a  beaucoup  de  peine  à  barrer  le 
Marché-aux- Souliers  et  à  déblayer  l'angle  de  la  place  Verte 
contigu  à  l'hôtel  Saint- Antoine. 

Vers  7  heures,  un  nouveau  meeting  a  lieu  au  Café  des 
Arccules.  La  foule  en  sort  vers  8  h.  1/2,  entonnant  la  Mar- 
seillaise et  chantant,  sur  le  grand  air  de  l'opéra  d'Halévy, 
Charles  VI  :  «  Jamais,  jamais  en  France  Chambord  ne 
régnera»,  se  rend,  comme  la  veille,  devant  hî  consulat  de 
France  pour  acclamer  la  République. 

Malgré  une  pluie  battante,  des  groupes  nombreux  cir- 
culent dans  les  rues  et  en  viennent  aux  mains,  criant,  les 
uns  :  <c  A  bas  Chambord  !  A  bas  la  calotte  !  »  les  autres,  par 
une  étrange  juxtaposition  :  <(  Vive  Chambord  !  Vlaanderen 
den  Leeinv  !  )> 

Vers  H  heures,  une  foule  d'hommes  en  blouse,  précédés 
d'un  drapeau  blanc,  fait  d'une  nappe  attachée  à  un  long 
bâton,  attaque  la  Taverne  Bavaria,  située  rue  des  Douze- 
Mois. 

«.  Cette  taverne,  dit  le  général  Eenens,  est  tenue  par  un 
israëlite  du  nom  de  Goldschmidt,  homme  fort  remuant  et 
qui  se  fit  remarquer  à  Bruxelles  lors  des  troubles  en 
novembre   dernier  (^).    Il    tient  dans   son  local    des    dis- 


en  rhonneur  duii  |)iétondant  dont  les  ancêtres  ont  massacré  les  nôtres  dans 
les  |)laines  des  Flandres;  en  l'honneur  de  l'arrière-pelit-lils  d'un  prince  qui  a 
spolié,  dévasté,  ruine,  morcelé  notre  pays,  d'un  prince  que  les  amis  de  M.  de 
Chambord  appellent  le  ^nand  roi  Louis  XIV,  et  <jui,  pour  nous,  n'est  qu'un  bri- 
gand couronné»  {Annales parleiiicfitaires,  séance  du  -21  février  187:2.  p.  5'JO.) 

(')  Il  s'agit  lies  troubles  fomentés  à  Bruxelles  à  l'oi'easion  de  la  nomination 
au  poste  de  gouverneur  du  Limbour^  de  M.  De  Decker,  accuse  par  l'oppo.sition 
d'avoir  eu  des  relaticns  avec  le  financier  Lanj,'rand-Dumonceau.  .\  la  suite  de 
ces  incidents  le  ministère  dWiiethan  lui  n'nii)lacé,  le  7  décembre  1871,  par  le 
ministère  Malou. 


508  CH.   TERLINDEN 

cours  incendiaires  auxquels  donne  la  réplique  un  certain 
Max  Gossi,  panier  percé,  qui  est  à  la  tète  de  la  section 
anversoise  de  Vlnternationale. 

«  La  Taverne  Baimria  est  habituellement  fort  fréquentée. 
Dans  la  soirée  du  2o,  cet  établissement  était  rempli 
d'élèves  de  VInstitiit  de  Commerce  et  d'étudiants  venus  de 
diverses  localités  du  pays,  quand  il  fut  attaqué,  comme  on 
vient  de  le  dire.  Les  personnes  qui  s'y  trouvaient,  parmi 
lesquelles  beaucoup  étaient  armées  de  casse-tête  et  même 
de  pistolets  ou  revolvers,  sortirent,  se  jetèrent  sur  les 
assaillants  et  repoussèrent  ceux-ci,  qui  abandonnèrent  leur 
drapeau  aux  vainqueurs.  Cette  fois  la  victoire  était  aux 
libéraux. 

«  Vers  11  heures  et  demie  l'agitation  se  ralentit.  Il  était 
visible,  dès  lors,  que  la  troupe  n'aurait  pas  à  intervenir  et 
que  la  police  locale,  agents  et  pompiers,  suffirait  avec  les 
gendarmes  à  prévenir  de  plus  graves  désordres  (/).  )) 

Les  mêmes  scènes  se  renouvelèrent  encore  le  lendemain, 
26  février. 

A  7  heures  et  demie  du  soir,  a  lieu  un  nouveau  meeting  au 
Café  des  Arcades.  Les  orateurs  protestent,  comme  les  jours 
précédents,  contre  la  présence  à  Anvers  du  comte  de 
Chambord  et  de  ses  partisans  et  les  assistants  votent,  par 
acclamation,  l'envoi  à  l'Assemblée  nationale  à  Versailles 
d'une  adresse  proclamant  «  que  la  République  est  le  meil- 
leur gouvernement  qui  convienne  à  la  France  ». 

La  foule  sort  du  meeting  eu  chantant  la  Marseillaise  et 
l'air  de  Charles  VI  :  «  Guerre  aux  tyrans,  etc.  »  Un  rassem- 
blement de  3000  à  4000  personnes  se  forme  sur  la  place  de 
l'Hôtel  de  ville,  autour  de  l'Arbre  de  la  Liberté,  et  entre- 
prend ce  qui  allait  devenir  le  périple  traditionnel  des 
manifestations  libérales  de  l'époque  :  la  demeure  du  doyen, 
la  maison  du  bourgmestre,  celle  du  représentant  Core- 
mans,  les  hôtels  des  membres  les  plus  eu  vue  de  l'aristo- 
cratie catholique,  les  locaux  des  œuvres  paroissiales  et  le 
collège  des  jésuites,  dont,  au  milieu  des  huées  et  des  coups 
de  sifflet,  les  vitres  volent  en  éclat.  Des  rixes  se  pro- 
duisent entre  manifestants  et  contre-manifestants,  ceux-ci 


(')  Rapport  du  général  Eenens  au  roi,  p.  7-8. 


LE  COMTE  DE  CHAMBOIU)  509 

chantant  a  A.B.  C.  »  sur  l'air  des  Lampions  et  le  Mauiuschc 
Leeiiw,  ceux-là.  associant  le  cri  :  «  A  bas  Cliambord  !  »  à 
celui  de  :  «  A  bas  la  calotte!  » 

Vers  minuit  le  calme  se  rétablit.  Il  ne  devait  plus  être 
troublé.  Le  lendemain,  on  annonçait  que  le  comte  de  C'ham- 
bord  avait  quitté  Anvers  avec  toute  sa  suite  i)our  s'établir 
en  Hollande.  A  partir  de  ce  moment  l'ordre  régna  partout. 

* 

«  L'autorité  locale,  écrit  le  général  Eenens,  parvint  ainsi 
à  rester  maîtresse  de  la  situation,  à  l'aide  des  agents  de 
police,  des  pompiers  et  des  gendarmes,  renforcés  des 
brigades  stationnées  dans  les  localités  voisines. 

«  L'ordre  put  être  suffisamment  maintenu  sans  qu'il  ait 
été  nécessaire  de  convoquer  la  garde-civique.  S'il  avait 
fallu  recourir  à  ce  moyen,  l'embarras  de  la  Régence  aurait 
été  grand,  attendu  qu'il  règne  dans  les  rangs  de  la  garde- 
civique  d'Anvers  un  esprit  tout  à  fait  hostile  à  l'adminis- 
tration communale  actuelle. 

«  Dans  ce  cas,  on  aurait  été  obligé  d'avoir  recours  à 
l'armée.  J'avais  pris  mes  mesures  en  conséquence,  et 
comme  l'autorité  communale  ne  paraissait  point  songer  à 
se  concerter  avec  l'autorité  militaire,  bien  que  les  instruc- 
tions le  lui  prescrivent,  je  m'étais  mis  d'accord  avec  le 
gouverneur  civil  afin  d'agir  de  concert  avec  lui  suivant 
les  événements,  bien  décidé  à  agir  vigoureusement  de 
manière  à  rendre  la  répression  immédiate  et  décisive  si 
l'intervention  de  la  troupe  avait  été  jugée  nécessaire, 
éventualité  qui,  heureusement,  ne  se  présenta  i)oint(*).  » 

Quant  au  véritable  caractère  des  troubles,  voici  en 
quels  termes  le  général  Eeneus,  témoin  impartial  et  bien 
informé,  le  définissait  : 

«  En  résumé,  dans  les  agitations  qui  ont  eu  lieu  à 
Anvers,  le  mouvement  dirigé  réellement  contre  le  comte 
de  Chambord  n'avait  qu'une  importance  minime  ;  il  a  été 
produit  par  quelques  républicains  français  et  quelques 
affiliés  à  Vlnlernutionnlc,  qui  ont  réussi  à  grouper  autour 
d'eux  une  fouie  considérable,  non  ])oint  (l'adhérents,  mais 
de  curieux  qui  leur  ont  fait  cortège. 


(')  Rapport  au  roi,  \>.  II. 


510  CH.    TERLINDEN 

«  Bientôt,  la  ])rotection  accordée  ouvertement  au  comte 
deChambord  par  l'autorité  locale  et  l'attitude  sympathique 
du  parti  catholique  servirent  de  prétexte  au  parti  libéral 
pour  se  joindre  aux  manifestants;  ce  qui  amena  le  parti 
adverse  à  organiser  des  manifestations  opposées.  De  sorte 
que  le  mouvement  se  transforma  bientôt  en  une  lutte  entre 
les  deux  partis  qui  dégénéra  en  rixes  et  voies  de  fait.  » 

On  i^eut  se  rallier  à  cette  appréciation  pleine  de  bon  sens 
et  de  modération.  Les  bagarres  d'Anvers,  qui  agitèrent  si 
vivement  l'opinion  publique  en  Belgique,  n'eurent  pour 
ainsi  dire  pas  de  répercussion  à  l'étranger.  Il  est  en  effet 
curieux  de  constater,  comme  le  faisait  M.  Malou,  à  la 
séance  de  la  Chambre  des  représentants,  le  27  février  1872  : 
«  que  la  tribune  belge  était  émue  des  faits  qui  se  passaient 
à  Anvers,  alors  que  la  tribune  de  Versailles  demeurait 
muette  (')  »,  et  le  comte  d'Aspremonty-Lynden,  ministre  des 
Affaires  étrangères,  réj^ondant,  au  cours  de  cette  même 
séance,  à  M.  Rogier,  pouvait  déclarer  :  «  Eh  bien,  non, 
Messieurs,  la  présence  du  comte  de  Chambord  n'a  fait 
l'objet  d'aucune  plainte,  d'aucune  observation  du  gouver- 
nement français  pendant  que  le  prince  résidait  sur  le  sol 
belge  (2).  » 

Ainsi  ramenées  à  leurs  véritables  proportions,  les 
émeutes  d'Anvers  ne  constituent  pas  un  événement  ayant 
une  portée  internationale  ;  on  ne  peut  les  considérer  que 
comme  les  manifestations  de  l'état  d'esprit  sévissant  dans 
la  vie  intérieure  des  partis  avant  que  les  grands  problèmes 
sociaux  se  fussent  superposés  aux  stériles  luttes  pour  le 
pouvoir  et  avant  que  la  guerre  eût  fait  comprendre  aux 
Belges  qu'il  est  des  questions  d'ordre  plus  élevé  et  d'intérêt 
plus  général  que  les  rivalités  électorales. 

Ch.  Terlinden. 


(ij  Annales  parlementaires,  1871-1872,  p.  35î>. 
(-)  Ibidem,  p.  oo8. 


MELANGES 


Le  diplôme  de  Henri  V 
pour  l'église  de  Liège  en  1107  *^ 

Ce  diplôme,  qui  avait  essentiellement  pour  but  de  régler 
la  situation  légale  du  clergé  liégeois  vis-à-vis  de  l'échevi- 
nage,  a  été,  dans  ces  dernières  années,  de  la  part  de 
G.  Kurth,  l'objet  d'un  très  savant  commentaire  (^).  J'au- 
rais pourtant  une  ou  deux  observations  à  présenter.  Les 
voici. 

1°  Le  préambule  du  diplôme  donné  par  Henri  V  porte  : 
ce  ...  lulsiibscriptas  lege^i  paternas,  antiquissiina  inquam 
f)riuil('i>-ia  in  mcdiiiin  prodiicta  reccpi,  iiisjtcxi,  jtosiinodiini 
Otbcrto  ejusdein  ecclesie  episcopo  présente  et  ipso  coopé- 
rante, légitime  renovanda  et  corroboranda  decrcvi.  Snnt 
anteni  h  ce.  » 

Or,  les  (c  adsubscriptas  leges  paternas  »  me  paraissent 
ne  pouvoir  signifier  que  «  les  privilèges  octroyés  par  mon 
père  et  ci-dessous  transcrits  (■^)  »;  je  considère  comme  établi 


(*)  Raikem  et  PoLAis,  Coutumes  de  Liège,  t.  I,  p.  353  et  ss. 

("-)  KiKTH,  «  Les  origines  do  la  ouniiniiiie  de  Liège  »  dans  Bulletin  de  l'Insti- 
tut archrologiffue  liégeois,  I.  \XXV,  ji.  i()2-:2T9  et  La  cité  de  Liège  au  rnogeu 
âge,  t.  I,  p.  67-70. 

P)  Kurtii  ne  prête  auniiie  alteiitioii  à  ces  trois  mots  du  diplôme  ;  en 
revanche,  il  fait  observer  qullenri  V  ne  dit  niillenient  ipidii  lui  soumit  un 
diplôme  eontenant  les  privilèges  du  clergé  liégeois,  mais  (pion  lui  soumit  ces 
privilèges  eux-mêmes,  e'esl-à-dire  un  texte  qtii  les  èmimerait  et  qui  était  d'un 
bout  à  l'autre  rédigé  par  les  intéressés  (Les  origines...,  p.  i(}7).  Comme  si  voir 
et  corroborer  des  privilèges  ne  pouvait  pas  aussi  bien  signifier  voir  et  coi  ro- 
borer  un  diplôme  eontenant  des  privilèges! 


512  MÉLANGES 

qu'Henri  V  n'a  fait,  en  1107,  que  ratifier  un  diplôme  pré- 
cédemment accordé  par  Henri  IV,  son  père  (M. 

2"  Le  préambule  dit  aussi  que  les  privilèges  conférés 
étaient  très  anciens  {antiqiiissima  jirioile^ia).  Cette  quali- 
fication ne  doit  pas  être  prise  à  la  lettre.  Ces  privilèges 
étaient  très  anciens  certes,  mais  certaines  de  leurs  dispo- 
sitions avaient  été  récemment  remaniées.  Ne  pas  l'ad- 
mettre, c'est  se  heurter  à  des  difficultés  insolubles  d'inter- 
prétation. 

Le  diplôme,  par  exemple,  nous  apprend  que  les  laïques 
vivant  au  service  du  clergé  relevaient  de  la  juridiction  du 
chapitre.  Cette  stipulation,  la  chose  n'est  pas  douteuse, 
remonte  à  une  haute  antiquité.  Mais,  quand  le  diplôme 
ajoute  que  ces  laïques,  lorsqu'ils  seront  marchands  notoi- 
res, seront  justiciables  des  échevins,  il  introduit  une  stipu- 
lation de  date  toute  récente  qui  suppose,  non  seulement 
l'existence  d'un  droit  ui'bain  liégeois,  mais  celle  d'une 
bourgeoisie  consciente  de  sa  force  et  visant  à  élargir  son 
champ  d'action.  Or,  cela  nous  reporte,  au  plus  tôt,  à  la 
seconde  moitié  du  xi«  siècle. 

J'en  dirai  autant  de  la  juridiction  sur  la  Sauvenière.  Il 
était  naturel  que  le  chapitre  l'exerçât  puisqu'en  ce  quartier 
il  était  maître  et  seigneur.  Mais  notre  diplôme  fait  une 
réserve  :  les  échevins  3^  connaîtront  des  cas  de  vol,  de 
fausse  mesure  et  de  troubles  publics.  Il  saute  aux  yeux  que 
ce  pouvoir  des  échevins  ne  peut  dater  que  du  jour  où  la 
bourgeoisie  a  pu  entreprendre  de  soumettre  à  un  droit 
unique  tout  le  territoire  urbain. 

Et  voici,  je  crois,  comment  il  convient  de  narrer  ces 
deux  épisodes  de  l'histoire  de  Liège. 

Le  chapitre  de  Saint-Lambert  exerçait  originairement 
la  juridiction  pleine  et  entière  dans  le  quartier  de  la  Sau- 
venière ainsi  que  sur  tous  les  laïques  à  son  service, 
fussent-ils  marchands  nofoircs.  Mais,  vers  le  milieu  du 
XI*  siècle,  la  bourgeoisie  de  Liège  se  vit  en  possession  d'un 
di"oit  urbain  et,  bientôt,  consciente  de  sa  force,  elle  songea 


M)  Il  est  intéressant  île  constater  qu'Henri  IV  avait  fait  au  chapitre  de  Spire, 
en  1101,  une  concession  sur  laquelle  (;elle  de  110!)  pour  le  chapitre  de  Saint- 
Lamhei't  semble  cal(|uée  (Kikth,  La  rite  de  Liège,  t,  I,  p   60). 


MÉLANGES  513 

à  faire  appliquer  ce  droit  dans  tout  le  territoire  de  la  ville 
et  sur  toute  la  population  laïque  qui  l'habitait.  Un  conflit 
entre  les  deux  pouvoirs  ne  pouvait  manquer  d'éclater.  Il 
se  termina  par  un  compromis  que  le  roi  Henri  IV  ratifia 
(fin  du  xi"  siècle)  (*).  L'éclievinage  y  gagna  de  pouvoir, 
dans  certains  cas.  pénétrer  dans  le  quartier  de  la  Sauve- 
nière  pour  y  exercer  sa  juridiction  ;  il  y  gagnait  aussi  de 
voir  dorénavant  relever  de  sa  juridiction  les  suppôts  de 
l'Eglise  qui  étaient  marchands  notoires.  Pour  le  reste, 
le  chapitre  semble  avoir  gardé  intactes  ses  immunités. 
Mais  les  deux  pouvoirs  ne  furent  pas  longtemps  d'accord 
et  l'échevinage  recommença  à  empiéter  sur  la  juridiction 
du  chapitre  qu'il  ne  trouvait  pas  suffisamment  réduite  à 
son  gré.  A  cette  nouvelle  tentative  le  diplôme  d'Henri  V, 
de  1107,  mettait  fin  en  rétablissant  la  situation  au  i^oint  où 
elle  était  de  par  le  diplôme  d'Henri  IV.  Ce  faisant,  il  ne 
renouvelait  i)as  purement  et  simplement,  comme  le  laisse 
supposer  le  préambule  de  l'acte,  les  très  anciens  privilèges 
du  clergé,  mais  il  les  renouvelait  tels  qu'ils  avaient  été 
modifiés  quelques  années  auparavant  dans  plusieurs  de 
leurs  stipulations.  Il  importait  peu  du  reste  au  chapitre 
qu'ils  fussent  indifféremment  qualifiés  de  très  anciens,  il 
ne  songeait  pas  à  reprendre  les  concessions  qu'il  avait  dû 
consentir  (2),  que  dis-je,  en  les  qualifiant  ainsi  il  effaçait 
jusqu'au  souvenir  d'un  compromis  qu'il  n'avait  pu  empê- 
cher. 

3°  Kurtli,  analysant  notre  diplôme,  fait  remarquer  que 
les  échevins  de  Liège  avaient  aussi  le  droit  de  lever  cer- 
taines cotisations  que  les  percepteurs  allaient  toucher  de 
porte  en  porte.  Ces  cotisations,  écrit-il,  doivent  repré- 
senter le  plus  ancien  des  impôts  (^j.  Cette  affirmation  est 


(1)  Antérieurement  en  tout  cas  à  l'année  llOi,  car,  à  partir  de  ee  moment 
justju'à  sa  mort,  il  semble  bien  qu'Henri  IV  ait  eu  i)artie  lii-e  avee  l'éclievinage 
et  l'fvéque  Oll)erl  contre  le  ohaijilre  (ht  uni,  Les  origiitex...,  p.  :270  et  La  cité 
de  Liage,  t.  1,  p.  (58). 

(''')  Tout  ce  qu'il  désirait  c'était  n'avoir  pas  à  faii'e  de  concession  nouvelle. 
Cela  s'explique  :  le  chapitre  ne  pralicjuait  qu'une  politique  conservatrice 
tandis  (jue  la  ville,  depuis  la  tin  du  xi'^  siècle,  préludait  à  une  politique  d'expan- 
sion qui  allait  durer  trois  siècles  (Paix  des  clercs,  irîi. 

(•*)  KiuTii,  Les  origines...,  p.  :27tj. 

33 


514  MÉLANGES 

fort  sujette  à  caution.  Caries  §§  2  et  4  du  diplôme  portant 
que  certaines  catégories  d'individus  dépendant  du  clergé 
étaient  exemptes  du  tonlieu  ou  impôt  sur  les  marchandises, 
il  y  avait  lieu  d'inférer,  ce  à  quoi  Kurtli  n'a  pas  songé, 
qu'en  règle  générale  la  ville  percevait  cet  impôt.  Or,  pour- 
quoi l'impôt  perçu  de  porte  en  porte  dont  jparle  Kurth. 
serait-il  plus  ancien  que  le  tonlieu? 

A.  Hansay. 


The  Correct  Date  for  a  Letter  to  Zwingli. 

In  tlie  collection  of  Zwingli's  works  made  bj  Schuler 
and  Sclmltess,  there  is  printed  a  letter  from  Martin 
Bucer  to  Zwingli,  dated  April  30.  Tliis  letter  was  assigned 
by  the  editors  to  tbe  year  1527  (^).  When  Herminjard 
publislied  bis  great  work  on  tbe  correspendence  of  the 
reformers  in  countries  of  tbe  Frencli  language,  lie  referred 
to  tbis  letter  as  written  in  1528,  and  remarked  in  passing  : 
«  Cette  lettre  a  été  placée  par  erreur  à  l'année  1 527  dans 
les  Zwinglii  Opéra  »  C^).  But  for  tins  opinion  be  gave  no 
évidence,  and  tbe  later  editors  of  Zwingli's  works,  wliicb 
were  publislied  in  the  Corpus  Reformatorum,  bave  con- 
tinued  to  date  tbe  letter  1527(3).  Since  tbey  bave  not 
mentioned  Herininjard's  suggestion,  it  is  quite  possible 
that  tbey  did  not  know  about  it,  and  simjîly  foUowed  tbe 
dating  given  tbe  letter  in  tbe  older  édition. 

Tbere  are  two  good  reasons  for  tbinking  that  Herminjard 
was  right,  and  that  tbe  letter  sbould  be  dated  1528,  and 
not  1527.  Tbe  first  is  tbe  close  resemblance  between  tbis 
letter,  and  anotber  written  by  Bucer  to  Farci,  dated  Maj^  1  ; 
wliicb  beyond  doubt  belongs  to  tbe  year  1528('*).     Tbe 


(1)  Hui.DRici  /wiNGLii  Opéra.  Compléta  editio  prima  curantilms  Melchior 
Scliulero  et  do.  Sclniltessio,  111,  p.  o7. 

(2j  A.  L.  Herminjard,  Correspondance  des  re formateurs  dans  les  pays  de  la 
langue  française.  II,  p.  133,  note  16. 

P)  Corpus  Reformatorum,  vol.  96,  Zwingli  Werke,  IX,  pp.  120-121. 

(<)  Corpus  Reformatorum,  vol.  38,  Joliaiinis  Calvirii  Opéra  (/xae  siipersnnt 
omnia,  X  pi.,  H,  p.  1-2.  Also  printed  in  Ilerniinjaid,  op.  cit.,  11,  n»  2.j2, 
pp.  131-1.33. 


MÉLANGES 


115 


following  coniparison  of  extracts  frora  tlie  two  lettors, 
shows  a  similarit}'  whidi  caii  hardly  be  ascribed  to  mère 
coincidence. 


Bncer  to  Ziinni^li,  Apvil  HO. 

Ut  Lutliero  respondeas.  et  id 
pro  tua,  non  illius  dignitate, 
nuigna  cum  aviditate  pii  expec- 
tant.  Ad  id  forte  conducet  tibi, 
quod  de  descrimine  duarum  in 
Cliristo  naturarum  ille  scripsit 
lu  postilla  sua,  in  epistolam 
supremi  saeri  diei  natalis  chris- 
tiani.  Sectio  ea  sumpta  est  ex 
epistola  ad  Hebraeos  in  ilkid  : 
((  Per  filium  suum  ».  Legesquod 
indico. 

Res  nostrae  sui  similes  sunt. 
Oninia  modo  apud  nos  referta 
militibus  sunt.  Caesaris  noniine 
couseripti  vix  abierunt,  et  no- 
mine  Hessi  multo  pkires  colli- 
guntur.  Donet  Cbristus,  ne  quid 
nimis  callidum.  Armis  uum- 
«luarn  est  propagatuni  féliciter 
evangelion.  Mira  et  ingens  re- 
rum  perturbatio  timetur.  Do- 
minus  suos  non  deseret,  sed, 
nisi  omnia  fallunt,  severe  exer- 
cebit...  lani  Caesaris  exercitum 
in  Italia  aiunt  bostibus  impa- 
rem,  et  timendum,  ne  in  Sici- 
liam  cogantur  traiicere.  Eum, 
qui  nunc  Italiam  petit,  veren- 
tur  conieatus  iuopia  laboratu- 
rum.  Ut  autem  féliciter  babi 
turus  sit,  viribus  tamen  suis 
intérim  Germania  destituitur. 
Quas  utinam  non  altérant  et 
motus  Hessici. 

Capito  abcst  Offenburgi  ulii 
de  concordia  agitur  cuni  Cano- 
nicis  exsulibus. 


Bncer  tu  Farci,  Muy  1 . 

Lutberus  ilerum  furiit.  Li- 
brum  30  quaternionum  in  nos 
scripsit  in  quo  omnia  Zwinglii 
et  ipsum  anatbematisavit.  Oe- 
colampadium  tardura,  stultum 
etindoctum,  actumque  a  Sataiia 
calunmiatus  esse  satis  babet. 
Xisi  quod  indicibilibus  sannis 
bominem  iactat.  Mei  per  peri- 
pbrasin  ^^meyne  Scbwermerliu) 
non  proprio   nomine   meminit. 

Non  autcm  libris  solum  pu- 
gnatur,  sed  etai-mis.  Exercitus 
testis.  nomine  Caesaris  con- 
scriptus  Italiam  petit.  Interea 
Ilessi  nomine  alius  et  maior 
coactus  dicitur,  timetur  ingens 
rerum  permutatio.  Vulgus  spe- 
rat  sacrificis  malum  intentari. 
Ideo  turmatim  Hessi  castra 
petunt.  Ego,  si  pugnare  velit 
pro  evangelio,  maie  spero:  sin 
aliquid  est  quo  ex  officio  boni 
principis  ad  arma  vocetur,  me- 
lius  spero.  Patientia  scio  pro- 
pagari  evangelion,  et  legitimis 
populorum  principibus  ad  Do- 
minum  conversis,  non  armis 
subactis  aut  ditione  pulsis.  Sed 
Dominas  viderit  cuius  baec 
référant. 


Capiti)  abest  Offenburgi.  ubi 
tractatur  de  concordia  cum 
canonicis  exulibus. 


516  MÉLANGES 

In  ail  of  Bucer's  correspondence,  tliere  is  liardly  to  be 
fouïid  sucli  a  striking  similarity  between  two  différent 
letters,  writteu  to  two  différent  men.  Wlien  it  is  con- 
sidered  tliat  tliey  correspond  not  only  in  subject  matter 
but  even  in  words,  and  tliat  one  is  dated  April  30  and  tho 
other  May  1  ;  it  is  impossible  to  escai)e  the  conclusion  that 
they  were  botli  written  in  the  same  year.  Most  significant 
of  ail  is  the  last  sentence  quoted  :  «  Capito  abest  Offen- 
burgi  ubi  de  concordia  agitur  cum  Canonicis  exsulibus  ». 
In  the  letter  to  Farel  this  sentence  is  identicallj^  the  same 
except  that  the  verb  is  changed  to  «  tractatur  »,  and  is  fol- 
lowed,  instead  of  preceded,  by  the  phrase  «  de  concordia  ». 
Even  if  it  were  possible  to  suppose  that  Capito  had  gone 
to  Offenburg  both  in  1527  and  4528  at  the  end  of  April, 
Bucer  w  ould  hardly  hâve  made  mention  of  it  in  sentences 
which  correspond  so  closely. 

It  is  equally  clear  that  the  letter  to  Farel  was  written 
in  1528,  because  of  its  close  connection  with  other  letters 
written  at  the  same  time,  Bueer  begins  his  letter  to 
Farel  by  tins  statament  :  «  Simon  morbum  uxoris  hacteuus 
caussatus  est,  et  certe  gravius  illa  decumbit  quam  ut  ille 
deserere  eam  potuerit.  Deinde  revaluit,  tentabit  si  vectu- 
ram  queat  tolerare  ».  This  is  a  référence  to  Simon  Robert 
of  Tournai,  who  was  in  Strasbourg  in  October,  1526  (•). 
Farel  evidently  had  requested  that  Robert  be  sent  to  help 
bim,  but  a  letter  from  Bucer  dated  April  15,  shows  that  he 
was  at  that  time  prevented  from  coming  by  the  sickness  of 
his  wife  {^).  Evidently  he  left  Strasbourg  soon  after  Bucer 
wrote  the  letter  dated  May  1,  because  on  May  11,  1528, 
Oecolampad  wrote  to  Farel  congratulating  him  on  the 
coming  of  Simon  Robert,  who  seems  to  hâve  stopped  at 
Basel  on  the  way(^).  Shortly  afterward  he  had  reached 
Farel,  for  on  May  27,  4528,  the  Council  of  Berne  remons- 
trated  with  the  Parish  of  Bex  for  refusing    to    receive 


(')    HEKMrNJAUD,   1,   p.  137. 

(2)  IIeuminjvki),  II,  p.  127  and  note  3. 

(3)  «  Simonem  hune  et  ipsuin  aTaupobiboKTOv,  sociuni  libi  obtigisse,  (pii 
nihil  vel  uxoris  morbum,  vol  sumptus,  vel  itineruin  (lillicullates  moratus, 
ad  te  contendere  voluil,  licet  laetiores  offerentur  aliunde  conditiones.  » 
(Hkhminjaud,  II,  p.  13i). 


MÉLANGES  517 

hini(i).  In  aletter  toZwingli  in  July,lo28,  Farel  mcntioned 
him  as  having  lately  arrived  (-).  Since  it  is  clear  that 
Robert  made  liis  jouiney  to  Farel  from  Strasbourg  in 
May,  1528,  it  is  only  logit-al  to  conclude  that  a  letter  from 
Bucer  to  Farel,  annouueing  Robcrt's  departure,  and  dated 
May  1,  should  be  placed  in  tlie  same  year. 

Equally  conclusive  foi-  datiug  Hucer's  letter  to  Farel,  is 
tho  followiug  référence  to  liis  commentary  on  the  Gospel 
of  John  :  «  Johannem  meum  tibi  puto  allatum  in  quo  de 
baptismo  disputavi.  Quaeso,  lecta  ea  disi)utatione  reseribas 
tuam  sententiam  ».  Since  Buccr's  commentary  on  the 
Gospel  of  John  was  pnblished  in  April,  lo28(*),  it  is  not 
only  most  likely  that  lie  woiild  make  such  a  request  in  that 
year,  but  incredible  that  he  should  make  it  a  year  bcfore. 

It  is  thus  évident  that  Bucer's  letter  to  Farel,  dated 
May  1,  as  well  as  the  other,  closely-related  one  of  Ai)ril  lo, 
both  belong  to  the  year  io28.  To  the  same  year  must  be 
assigned  Bucer's  letter  to  Zwingli  on  April  30,  because  of 
its  close  resemblance  to  the  one  he  wrote  to  Farel  on 
Mai  1.  This,  however,  is  not  the  only  reason  for  placing 
the  letter  to  Zwingli  a  year  later  than  is  donc  in  the  Corpus 
Reformatorum.  Other  références,  especially  when  com- 
pared  with  those  in  the  letter  to  Farel,  show  that  it  was 
written  in  4o28  and  not  in  1527. 

The  most  significant  of  thèse  is  the  allusion  to  the  mobili- 
zation  of  an  army  by  the  Landgrave  of  Hesse.  «  Caesaris 
nomine  conscripti  vix  abierunt,  et  nomine  Hessi  nialto 
plures  colliguntur.  »  The  construction  of  the  sentence 
shows  that  the  activities  of  Hesse  referred  to,  were  of  a 
militarj^  nature,  because  they  are  spoken  of  as  similar  to 
those  of  the  Emi)eror.  In  the  winter  of  1528  Philip  of 
Hesse  wasled  by  pseudo-revelations  from  Otto  von  Pack, 
to  believe  that  the  Catliolic  jn'inces  had  formed  a  strong 
alliance  against  the  Lutherans.  To  avoid  being  caught 
unprepared,  he  made  a  military  alliance  with  the  Elector 


(ij   IlmiMiNJAKi..  11.  p|..  m.  11-2. 

(")  Cp.  Fakkl  to  Zwix.i.i.  .Iiily  '23,  iri28,  «  Siinoii,  (|iii  imiicr  iii  niiiiistcriiiiii 
fuil  coo[>lsilus...  »  i Henni nj uni.  Il,  !  12). 

(3)  F.  .Mestz.  Hililioyrapliische  Ziisanniiriislclluuy  dtr  (jrdriirktcn  Srhviflen 
Butzers,  n"  19.  Prinled  in  «  Zur  lOUj;thngL'n  Geburlsfeier  .Martin  Hiit/ciN  ». 


518  MÉLANGES 

of  Saxony,  and  in  Marcb  and  April,  1528,  was  busily 
engaged  in  eollecting  an  ai'my  (^).  It  is  most  reasonable  to 
tliink  that  Bucer  refers  to  tliis  famous  épisode.  By  dating 
tLe  letter  i527,  the  editors  of  the  Corpus  Reformatorum 
version,  are  led  to  suggest  as  the  most  plausible  explana- 
tion,  tliat  tliis  refers  to  tlie  calling  of  the  faculty  to  the  uew 
university  of  Marburg(2).  But  if  that  were  the  case,  Buoer 
wonld  hardly  remark  in  the  letter  to  Farel  :  «  Ideo  tur- 
matitn  llessi  castra  petunt  »;  unless  heindiilged  in  humor 
out  of  accord  with  bis  nature  and  with  the  context. 

Bucer  also  tells  Zwingli  of  an  impérial  army,  at  that 
moment  on  its  way  to  Italy  to  aid  the  outnumbered  forces 
of  the  Emperor  there.  This  statement  also,  may  be  most 
fittingly  applied  to  the  Spring  of  1528,  for  at  that  time  the 
French  army  in  Italy  was  larger  than  that  of  Charles.  So 
a  new  army  was  brought  aeross  the  Alps  by  the  Duke  of 
Brunswick,  arriving  in  the  last  part  of  May  (^).  The 
editors  of  the  letter  in  the  Corpus  Reformatorum,  who 
refer  it  to  the  year  1527,  can  only  give  the  indefinite  and 
insufficient  explanation,  that  the  campaign  of  the  Emperor 
in  Italy  was  in  conséquence  of  the  League  of  Cognac,  and 
that  at  f irst  the  Emperor  did  not  succeed  verj^  well  (^).  But 
Bucer's  statement  is  definite  and  clear  ;  and  when  a  corres- 
pondingly  definite  application  i s  tobefound  in  the  year  1528, 
then  it  would  seem  best  to  place  the  letter  in  that  year. 

It  is  hardly  necessary  to  jjoint  out  the  importance  of 
dating  a  letter  correctly,  especially  when  a  year's  différ- 
ence is  involved.  In  this  particular  case,  however,  the 
date  of  this  letter,  lias  a  most  important  bearing  on 
another  question,  that  lias  proved  very  baffling  to  stu- 
dents  of  the  xvi"'  centuiy  :  namely,  when  did  John  Calvin 
first  become  an  adhèrent  of  the  evangelical  reformation. 
In  the  letter  to  Farel  dated  May  1,  Bucer  mentions  a  cer- 
tain youth  of  Noyon,  as  being  at  that  time  a  student  in 


(')  Sleidw,  De  statu  religionis,  éd.  of  (1785),  I,  p.  358.  Hassencamp,  Hes- 
sisclie  KircJiengeschichte  (185:2),  I,  p.  155-160.  Cambridge  Modem  Historij,  II, 
p.  20^. 

(2)  Op.  rit.,  note  .3. 

(3)  Camii.  Mod.  IHst.,  II,  p.  58. 
(*)  Op.  cit..  noie  3. 


MÉLANGES  519 

Strasbourg.  Kampschulte,  the  German  biograplier  of  the 
Genevan  reformer,  claims  that  tliis  joutli  ^vas  none  otlier 
than  Calvin  bimself  (*).  On  the  other  hand,  three  great 
Frencb  bistoriaus,  Douniergiie,  ITerminjard  and  Lefranc, 
tbink  tbat  it  was  Olivetan  (-).  As  bas  been  sbown,  tbis 
letter  to  Farel  must  be  dated  in  the  same  year  as  the  lettcr 
to  Z\vingli  of  April  30.  If  tbe  latter  is  dated  1527,  tlie  same 
date  must  be  given  to  tbe  formel",  and  so  ail  likelibood  of 
a  référence  to  Calvin  is  removed  ;  l)ecaase  in  tbe  Si)ring  of 
tbat  year  lie  was  a  student  at  Paris  {'^\,  and  tbe  yoiitli  of 
Noyon  came  to  Strasbourg  from  Orléans. 

Tbis  would  be  an  easy  way  to  solve  the  problem  and  a 
necessarv  one,  if  tbe  date  of  1527  for  tbe  letter  to  Zwingli 
is  allowed  to  stand.  However  bistorieal  accuraej''  demands 
that  it  be  dated  1528,  and  althougb  tbe  supposition  of  the 
Frencb  bistorians  is  better  supported  than  tbat  of  Kamp- 
schulte, tbe  problem  of  Calvin's  first  visit  to  Strasbourg 
still  exists. 

Another  conséquence  of  daling  tbe  letter  1528  is  to 
correct  the  error  made  by  J.  W.  Baum,  of  placing  Cai)ito's 
journey  to  tbe  Offenburg  Conférence  in  1527  (^).  Follo\v- 
ing  Baum,  the  editors  of  tbe  Corpus  Eeformatorum  bave 
made  tbe  same  mistake  (^).  Adolf  Baum  gives  tbe  correct 
date  for  tbe  conférence,  but  does  not  mention  either  tbe 
letter  to  Zwingli,  or  the  mistake  of  Capito's  biograplier(^). 

Thus  it  is  important  that  Bucer's  letter  to  Zwingli 
sbould  be  given  its  proper  date  of  April  30,  1528,  not  only 
to  avoid  the  i)ossibility  of  errors  in  tbe  future,  but  to 
correct  those  already  made  in  the  past. 

Hastings  Eells. 

Priuceiou  IS.-J. 


(*)  Kampschii.te,  Johann  Calvin,  I,  ]>.  2.31. 

(2)  E.  Dot  MEiu.iK,  Calvin,  les  hotiuiies  et  les  cfiases  de  son  temps,  I,  117  aiid 
noie  3.  Herminjari),  II,  pp.  131,  l.^l,  III,  p.  -4-4.  Lefranc,  La  Jeunesse  de  Calvin, 
p.  29. 

f3)    DOIMERGIE,  op.  cit.,   I.   p.    123. 

{*)  J.  W.  Baim,  Capito  iind  Butzer  (1860),  p.  373. 

(5)  Op.  cit.,  note  7. 

(fi)  .\.  Baim,  Magistral  und  Hefornialion  in  Strassbury.  his  tà29  (1887)  p.  1  Wi. 


i 


1 


COMPTES  RENDUS 


Alethea  Chaplin.  The  Romance  of  Language    London,  Sidg- 
vvick  and  Jackson,  s.  d.,  in-8",  239  p. 

Le  titre  de  ce  petit  ouvrage  en  désigne  très  exactement  le 
caractère,  il  ne  s'agit  pas  de  science,  ni  à  proprement  parler 
d'enseignement,  mais  de  vulgarisation  aimable  et  d'ailleurs 
bien  informée,  dans  la  tradition  des  Leçons  de  Max  Muller, 
avec  plus  d'exactitude  et  moins  de  prétentions.  L'auteur  se 
promène  et  glane  dans  la  Science  du  Langage,  considérée 
comme  un  «  roman  »  propre  à  piquer  la  curiosité.  Une  place 
assez  importante  est  faite, notamment  dans  les planches,à  l'his- 
toire de  l'alphabet  ou  de  l'écriture.  Deux  chapitres  concernent 
les  noms  de  lieux  et  les  noms  de  personnes.  L'histoire  de  la 
langue  anglaise  forme  l'axe  de  l'ouvrage.  Ne  méprisons  pas 
ce  genre  de  livres,  destinés  à  de  plus  jeunes  que  nous,  maison 
même  les  gens  du  métier  trouveront  à  faire  profit  de  certains 
exemples  ceux-ci,  étant,  la  plupart,  ingénieusement  choisis. 

P.  DE  Reul. 


Emile  Ripert.  (Je/de,  poêle  de  L'amour,  des  dieu.r  et  de  l'e^cil. 
Paris,  A.  Colin,  1921,  in-16  carré,  xiv-257  p.,  12  fr. 

Ovide  a  trouvé  en  M.  Ripert  le  plus  éloquent  des  défen- 
seurs, le  plus  indulgent  des  critiques.  Il  était  temps  qu'un 
poète,  un  fils  de  la  Pi-ovence,  vînt  nous  parler  du  chevalier 
de  Sulmone.  Il  nous  semble  entendre  la  sympathie  d'un  frère 
détailler  les  mérites,  excuser  les  défauts  d'un  glorieux  aîné; 
ou  plutôt  c'est  un  dialogue,  presque  un  hymne  à  la  louange 
d'une  amie  commune,  la  Poésie. 


522  COMPTES    RENDUS 

Le  commentaire  séduit  par  sa  franchise  pleine  de  variété  : 
finement  pervers  quand  il  s'agit  de  dévoiler  «  l'Art  d'aimer 
sans  amour  »  (ch.  III),  il  devient  profond  en  analysant  les 
Métamorphoses,  «  la  Légende  Dorée  de  l'antiquité  »  (ch.  IV), 
et  grave  en  soulignant  l'importance  du  Calendrier  national; 
il  s'attriste  pour  dire  les  souffrances  de  l'exil  et  de  la  mort. 
Certaines  pages  sont  poignantes  comme  des  élégies  posthumes. 

Et  voilà  Ovide  réhabilité  :  on  ne  le  reléguera  plus  dans  les 
salons  ou  les  alcôves,  on  ne  le  méprisera  plus  comme  un 
versificateur  didactique  ou  précieux.  Son  œuvre  chante  la 
Beauté,  le  Panthéisme,  la  Patrie. 

Bien  plus,  on  estimera  son  caractère  si  l'on  comprend  qu'il 
a  eu  avant  tout  le  culte  de  son  Art,  qu'il  a  voulu  jouir  pour 
créer,  que  son  talent,  en  le  rapprochant  d'Auguste,  et  peut-être 
d'Agrippa,  lui  a  attiré  la  haine  de  Livie  qui  ambitionnait  le 
trône  pour  Tibère  (^),  et  que,  chassé  de  Rome,  il  a  payé  ses 
écrits  de  ses  larmes  et  trompé  la  solitude  douloureuse  en 
murmurant  des  vers  qui  demandaient  grâce.  Remercions 
l'auteur  du  «  Génie  du  paganisme  »  (p.  171)  d'avoir  eu  assez 
d'esprit  pour  fuir  le  pédantisme;  félicitons-le  d'avoir  gardé  le 
courage  de  flatter  un  ancien  protecteur  dont  une  intrigante 
avait  abusé  la  vieillesse. 

Pour  être  lyrique,  la  démonstration  n'en  est  pas  moins 
solide,  convaincante,  plus  juste,  en  somme,  que  le  froid 
réquisitoire  de  René  Pichon  {^).  Mais  est-il  bien  sûr  que  l'en- 
thousiasme brillant  de  M.  Ripert  ne  fasse  pas  aussi  un  peu 
tort  à  son  client?  Quelques  lecteurs  tentés  de  reprendre  le 
texte  latin  après  cette  introduction,  se  sentiront  déçus  en  y 
retrouvant  entre  les  fragments  choisis,  dont  M.  Ripert  a 
donné  de  jolies  traductions  en  vers  blancs,  une  prolixité  trop 
raisonnable,  un  rythme  trop  impeccable,  une  érudition  trop 
complaisante  dont  il  n'a  pour  ainsi  dire  pas  parlé. 

H.  Philippart. 


(')  Aux  noms  ûf  VMIIenave,  Nageotte  ot  Plessis,  qui  ont  ilcfendxi  celte  expli- 
cation lie  la  relegulio  à  Tomes,  on  peut  ajouter,  p.  17.o,  celui  de  S.  Rei.nach, 
«  Les  compagnons  et  l'exil  d'Ovide  »,  Rev.  de  philol.,  1910,  p.  342-349. 

(2)  Hist.  de  la  litt.  lat.,  7e  éd.  (Paris,  Hachette,  1919),  p.  405-431. 
Cf.  Rev.  Univ.,  1894,  2.  ]k  3,  René  Pichon  rayerait  Ovide  du  programme  des 
Humanités. 


COMPTES    RENDUS  523 

Ernst   Howald,    Untersuchungen  zur    Technih    der   euripi- 
deischen  Tragodien,  Leipzig,  Dieterich,  1914,  iii-8°,  75  p. 

Cette  thèse,  qui  a  été  présentée  en  1912  à  l'Université  de 
Zurich,  semble  répondre  à  l'appel  lancé  quelques  années  auj)a- 
ravant  par  Dieterich  ;/)  qui  se  plaignait  de  ne  pouvoir  citer 
comme  étude  sur  la  technique  d'Euripide  que  l'ouvrage  de 
Detscheff(2).  Elle  réagit  contre  la  tendance  qui  porte  les  cri- 
tiques modernes  à  composer,  à  l'imitation  des  anciens,  des 
recueils  de  sentences  tirées  des  tragédies. 

L'auteur  veut  prouver  qu'Euripide  a  été  principalement 
déterminé,  dans  le  choix  des  sujets,  par  la  valeur  artistique. 
Il  cherche  les  «  problèmes  formels  »  qui  dominent  les  périodes 
successives  (belle-mére  et  beau-fils,  passion  féminine,  recon- 
naissance...) et  auxquels  se  subordounent  des  motifs  secon- 
daires plus  ou  moins  stéréotypés  (autel,  sacrifice  volontaire, 
vieillard...).  Delà  cinq  chapitres  conçus  comme  des  cjxles 
où  se  groupent  autour  des  drames  conservés  en  entier  les 
pièces  contemporaines  dont  nous  n'avons  que  des  fragments  : 
L  Les  débuts  et  la  recherche  d'uno  figure  centrale  (A/  ■.- 
Alctn.  à  Psophis-Protësilas,  Méd.-Ino,  etc  ).  IL  Les  drames 
passionnels  [Hipp.-Sthénébée-Phœmx,  etc.).  III.  Le  point 
culminant.  Parfait  développement  de  la  figure  centrale  {IIcc- 
HéraclM.,  Andr.].  IV.  Le  relâchement  (Suppl -ErechtJwe, 
HéracL).  V.  Les  pièces  d'intrigue  {Ion- Alexandre,  I.  T.-IIèL, 
El.-Cresphonte,  etc.).  On  remarque  tout  de  suite  les  faiblesses 
d'une  telle  classification  :  par  exemple  Méd.  mérite  d'être 
placée  dans  le  IIP  chap.,  Trou  ,  Phén.  et  Bacch.  ne  peuvent 
figurer  dans  le  V^.  La  ressemblance  entre  Cresphonte  et  El. 
ne  supprime  pas  la  quinzaine  d  années  qui  sépare  ces  deux 
pièces  (Nauck  453);  d'ailleurs  Cresphonte  est  encore  beaucoup 
plus  prés  à.' Egée  (av.  431)  que  A' El..  Pourquoi  s'obstiner  à 
faire  rentrer  dans  des  cadres  rigides  toutes  les  tragédies 
d'Euripide?  Pourquoi,  sui'tout,  poursuivre  l'étude  générale 
de  la  techni(}ue  jus(iue  dans  les  drames  perdus?  L'obscu- 
rité du  sujet  s'ajoutant  souvent  iei  à  l'incertitude  chronolo- 


(1)  s.  V.  Eiiripides,  Pvm.y-Wissowa,  Rcal-Enrifclopddif.  Vi,  1909  (1905), 
p.  127rj. 

(-)  D.  Detscheff,  De  tragoetlitinnn  gnirranini  nmformationc  scaenica  ac 
dravKitIra,  diss.,  190 1.  v 


524  COMPTES    RENDUS 

gique,  les  conclusions  sont  singulièrement  fragiles.  Prendre 
pour  base  une  fable  que  chacun  façonne  à  sa  guise  n'est  pas 
un  moyen  bien  sûr  de  réaliser  l'accord  :  rien  ne  m'oblige  à 
croire  qu'il  n'y  a  pas  de  figure  centrale  dans  Tèlèphe  (p.  21) 
ou  dans  Cresplionte  (p.  54). 

On  assiste  avec  intérêt  au  démontage  des  tragédies  conser- 
vées :  s-^ns  doute  Howald,  qui  esquive  sous  de  mauvais  pré- 
textes les  dernières  pièces,  se  borne  d'ordinaire  à  résumer 
les  travaux  de  ses  devanciers,  mais  il  a  le  mérite  d'établir 
systématiquement,  avec  une  heureuse  insistance,  des  paral- 
lèles sutïgestifs.  Cependant  cette  méthode  même  de  décom- 
^position  externe  laisse  un  peu  sceptique  :  qu'on  imagine 
l'impression  qu'elle  donnerait  de  l'œuvre  de  Molière. 

Ni  table  des  matières,  ni  index. 

Aux  exemples  cités  de  Mothnenmg  (p.  18,  25,  35,  43.  48, 
73),  ajouter  Ion  1130-1.  Le  Philoctéte  d'Euripide  (431)  précède 
celui  de  Sophocle  (409)  (p  29).  Dans  Hipp  ,  Euripide  ne 
donne  pas  raison  aux  calomniateurs  des  orphiques  (p.  33). 
C'est  Athéna,  et  non  les  Dioscures,  qui  parle  à  Oreste  dans  /.  T, 
1447  (p.  64).  Nauck  181  prouve  qu'Antiope  ne  récite  pas  le 
prologue  (p.  70),  par  contre  schol.  Ar.  Thesm.  1U65  attribue 
Nauck  114  à  Andromède  (p.  71).  Le  papyrus  ignore  l'inter- 
vention des  fils  d'Hypsipyle  en  faveur  d'Eurydice  (p.  71  ; 
lignes  4  et  5,  corriger  Antiopens  et  Antiope  en  Hj^psipylens  et 
Hypsipyle),  le  roi  Lycurgue  ne  figure  même  pas  sur  l'am- 
phore de  Ruvo  Tp.  71).  Les  qualités  de  Ménélas  dans  /.  A.  ne 
doivent  pas  plus  nous  surprendre  que  celles  d'Hélène  dans 
HèL  (p.  73). 

H.  Philippart. 


Juliani  imperatoris  epistulae,  leges,poematia,  fragmenta  l'aria. 
Collegerunt,  recensuerunt  J.  Bidez  et  F.  Cdmont,  Paris, 
Société  d'édition  «  Les  Belles  Lettres  »,  1922,  xxvi-32S  p. 
Prix  :  25  fr. 

II  est  superflu  d'insister  sur  l'importance  des  œuvres  de 
l'empereur  Julien.  De  ces  œuvres  la  partie  la  plus  intéressante 
est  assurément  la  portion  de  la  correspondance  qui  nous  a  été 


COMPTES    RENDUS  525 

conservée.  C'est  là  que  se  révèle  non  seulement  l'homme  poli- 
tique, le  souverain,  mais  encoi'e  l'homme  privé  avec  ses  qua- 
lités et  ses  défauts  ;  c'est  là  que  se  dessine  le  mieux  la  curieuse 
et  attachante  figure  du  dernier  champion  de  l'hellénisme. 

Mais  dans  quel  état,  hélas!  nous  sont  parvenus  ces  docu- 
ments précieux!  Eparpillés  dans  une  foule  de  manuscrits, 
défigurés  souvent  par  la  négligence  ou  l'ineptie  des  copistes, 
mutilés  parfois,  mêlés  de  pièces  hétérogènes  et  de  lettres  apo- 
cryphes, ils  se  présentent  à  nous  comme  uner^^'^^^.s  indigcsta- 
que  moles.  Les  éditeurs  jusqu'ici  n'étaient  pas  parvenus  à 
débrouiller  ce  chaos.  Tout  en  rendant  justice  aux  efforts  méri- 
toires de  Hevler,  de  Hercher,  de  Hertlein,  il  faut  bien  recon- 
naître que  leurs  éditions  étaient  extrêmement  défectueuses  : 
un  apparat  critique  tout  à  fait  insuffisant,  aucune  classifica- 
tion rationnelle  des  manuscrits,  un  désordre  complet  dans 
l'arrangement  des  lettres,  de  fausses  attributions  admises  sur 
la  foi  des  scribes,  tout  cela  réduisait  singulièrement  la  valeur 
de  leurs  travaux.  Et  c'est  avec  de  tels  matériaux  que  l'on 
entreprenait  d'écrire  l'histoire  de  la  vie  et  du  règne  de  Julien  ! 

L'œuvre  que  la  philologie  allemande  n'avait  pas  su  mener 
à  bonne  fin,  deux  de  nos  compatriotes  —  nous  le  disons  avec 
fierté  —  l'ont  exécutée  d'une  façon  magistrale.  Depuis  de 
longues  années,  MM.  Bidez  et  Cumoiil  se  sont  occupés  de  la 
correspondance  du  fameux  empereur,  de  sa  biographie,  de  son 
milieu,  de  son  époque.  Dès  1889,  M.  Gumont  publiait  dans  le 
Recueil  des  travau.r  de  la  Faculté  de  philosophœ  et  lettres  de 
l'Université  de  Gand  (3*  fascicule)  une  étude  Sur  l'authenti- 
cité de  quelques  lettres  de  Julien,  où  il  démontrait  victo- 
rieusement que  tout  un  groupe  de  lettres,  que  personne  ne 
suspectait,  était  apocryphe.  En  1898,  les  deux  savants  belges 
faisaient  paraître,  dans  les  Mémoire'^  in-S"  de  l'Académie 
royale  de  Belpique  (t.  LYII),  des  Recherches  sur  la  tradition 
manuscrite  des  lettres  de  l'empereur  Julien  {iôQ  p.),  qui  con- 
stituaient en  quelque  sorte  les  prolégomènes  de  l'édition  qu'ils 
préparaient.  Vingt-quatre  ans  se  sont  écoulés  avant  que 
celle-ci  vît  le  jour,  vingt-quatre  ans  pendant  lesquels  de  nou- 
veaux manuscrits  ont  été  collationnés,  les  leçons  douteuses 
vérifiées,  les  passages  difficiles  ou  altérés  soumis  à  un  examen 
réitéré,  toute  la  «  littérature  »  relative  au  sujet  consultée  et 
utilisée.  Ainsi  mûris^^ait  lentement,  mais  sûrement,  une  entre- 


526  COMPTES    RENDUS 

prise  scientifique  qui  marquera  dans  les  annales  de  la  philo- 
logie. 

Ce  qu'il  a  fallu  de  temps,  de  patience,  d'application  et  de 
perspicacité  pour  déterminer  les  rapports  des  manuscrits 
entre  eux,  pour  choisir  les  meilleurs  et  éliminer  les  non- 
valeurs,  pour  établir  enfin  un  texte  auquel  on  pût  se  fier,  la 
simple  lecture  de  la  préface  —  qui  est  un  modèle  d'exactitude 
et  de  méthode  —  le  fera  comprendre  aux  hommes  du  métier. 

Le  texte,  considérablement  amélioré,  est  accompagné  d'un 
apparat  critique  très  complet  et  disposé  avec  le  soin  le  plus 
minutieux. 

Non  contents  de  recueillir  jusqu'aux  moindres  fragments 
des  lettres  proprement  dites,  MM.  Bidez  et  Gumont  y  ont  joint 
les  constitutions  impériales  insérées  dans  les  Godes.  Ils  ont 
rangé  le  tout  selon  les  diflférentes  périodes  de  la  vie  de  Julien, 
en  groupant  ensemble,  dans  chaque  période,  les  lettres  et  les 
fragments  ayant  trait  aux  mêmes  personnages  et  aux  mêmes 
affaires  ou  présentant  entre  eux  quelque  affinité,  de  sorte 
qu'on  peut  suivre  pour  ainsi  dire  pas  à  pas  l'évolution  qui  s'est 
produite  dans  les  idées  de  .Tulien  et  la  marche  de  ses  desseins 
lorsqu'il  fut  parvenu  à  l'empire.  Ils  ont  rendu  par  là  aux  his- 
toriens un  service  inestimable. 

Les  lettres  apocryphes  ou  d'une  authenticité  douteuse  ont 
été  mises  à  part.  En  lisant  certaines  d'entre  elles,  on  s'étonne 
que  les  élucubrations  insipides  d'un  sophiste  bavard  aient  pu 
si  longtemps  être  prises  pour  l'œuvre  de  l'homme  qu'était 
Julien. 

La  sollicitude  des  éditeurs  s'est  étendue  aux  débris  des 
ouvrages  perdus  de  Julien,  à  ses  poésies  et  à  ses  apoph- 
thegmes. 

Tel  est  le  contenu  de  ce  beau  volume,  qui  figurera  au  pre- 
mier rang  parmi  les  publications  de  l'Association  Guillaume 
Budé  (1). 

La  tâche  accomplie  par  MM.  Bidez  et  Cumont  a  été  rude. 
Elle  aura  sa  récompense,  la  seule  qui  soit  digne  de  ce  labeur 
désintéressé,  la  seule  à   laquelle  tiennent    ces    Bénédictins 


(1)  L'exéculioii  lyi)(jgra()lii(]iie  est  remarquablo  et  l'improssion  osl  d'une 
correction  paifaile;  il  est  à  regretter  seulement  que  çà  et  là  une  lettre  n'ait 
pas  marqué  sur  le  papier  lors  du  tirage. 


I 


COMPTES    RENDIS  527 

modernes,  c'est  à  savoir  l'estime  et  la   reconnaissance  du 
monde  savant. 

Qu'il  nous  soit  permis,  en  terminant,  de  proposer  quelques 
petites  conjectures.  —  P.  5,  1.8  (texte  de  Julien,  Epist.  ad 
Atheri.,  273  A)  :  oùb'  ôvap  |uoi  qpaveiç  dbeXqpôçèTreTTpdtxei.  Le  sens 
exige  <(Tuv>  erreTipâxei.  Julien  repousse  l'idée  d'une  action 
concertée  avec  son  frère.  —  P.  72.  1.  13-14  :  pouXo)uévouç  •':bé>, 
bibùdKeiv  epYLjj  TTpÔJTOv,  Ktti  TieiBeiv  toùç  iLiaGniàç  ujç  ....  Je 
lirais  et  je  ponctuerais  :  PouXo|uévouç  <bè>  bibûCKeiv,  ëpYU> 
TTpujTOV  <TTei6eaeai  ■  Kai  TreiGeiv  toùç  )na9riTàç  diç  ....  — 
P.  146,  1.  2,  au  lieu  de  xnv  iaipeiav,  il  faut  lire  Trjv  lepaieiav. 
—  P.  156,  1.  22-23  :  KaWujTriZ^eaGai  5è  ujaTrep  toîç  x^ipîcrTOiç, 
Après  oicTTTep,  suppléer<Ka\oîç  >.  -  P  217,  1.  15  16  (texte  de 
Libanius,  Oraf.  XIIj  :  'énr\  tôv  dvbpa  lurivùcvia  (l.  aejuvu- 
vovTa?).  Je  préférerais  ujuvoûvia.  —  P.  225,  1.  21-22  (texte 
d'Ammien  Marcellin,  XXII,  5,  4)  :  tandem  alios  vobis 
inqmetiorcs  (inetiores  cod.,  1.  molestioresî)  inveni  II  me 
semble  que  inetiores  doit  être  corrigé  en  infestiores. 

P.  Thomas. 


Grammaire,  histoire  et  géographie  d'après  la  linguistique  française» 

Ferdinand  Brdnot  (doyen  de  la  Faculté  des  lettres  de  l'Uni- 
versité de  Paris),  La  pensée  et  la  langue.  Mët/i ode,  principes 
et  plan  d'une  théorie  nouvelle  du  langage  appliqiiée  au 
français.  Paris,  Masson  et  G'^  1922,  954  p.  in-8°,  50  fr. 

A.  Meillet.  Linguistique  historique  et  linguistique  générale. 
(Coll.  ling.  p.  p.  la  Soc.  de  ling.  de  Paris,  viii),  Paris, 
Champion,  1921.  334  p.  in-8°. 

J.  GiLLiÉRON.  Etude  sur  la  défectiritê  des  verbes.  La  Faillite 
de  VEtymologie  phonétiqice.  Résumé  de  conférences  faites 
à  l'Ecole  pratique  des  hautes  études.  En  vente  à  la  librairie 
Beerstecher,  Neuveville,  canton  de  Berne  (Suisse),  1919, 
133  p.  in-8». 

J.  Vexdryes  (prof,  à  l'Univ.  de  Paris  .  Le  langage.  Introduc- 
tion linguistique  à  l'histoire  [L'éoolution  de  l'humanité, 
n»  3.)  Paris,  Renaissance  du  livre,  1922,  439  p.  iii-8",  15  fv. 

L'illustre  président  de  l'Université  Columbia,  M.  N.  Mur- 
ray  Butler,  nommait  naguère  la  langue  française  «  la  plus 


528  COMPTES    RENDUS 

précieuse  des  possessions  humaines  ».  L'histoire,  la  géogra- 
phie et  la  police  de  cette  possession  spirituelle  sont  en  voie 
de  transformation.  L'Atlas  linguistique  de  la  France  permet 
une  nouvelle  toponymie  de  la  raison  parlante.  «  On  est  tout 
surpris,  dit  M.  A.  Meillet  (p.  309),  de  voir  à  quel  point 
l'histoire  de  la  langue  française  a  été  peu  étudiée  jusqu'ici  et 
quelles  lacunes  apparaissent  à  qui  veut,  comme  l'a  fait 
M.  Brunot  avec  tant  d'autorité,  en  retenir  l'ensemble.  »  «  Il  est 
regrettable,  dit  M.  Gilliéron  (p.  96),  qu'en  deçà  du  Rhin  on  ait 
usé  partout  et  toujours,  pour  observer  le  français,  de  besicles 
qui  portent  la  marque  Marie  in  (iernaniij  (^).  Il  serait  temps 
enfin  de  se  débarrasser  de  cet  appareil  qui  déforme  la  vue.  » 

C'est  ce  que  fait  M.  Ferdinand  Brunot,  l'éminent  historien 
de  la  langue  française,  doyen  de  la  Faculté  des  lettres  de 
l'Université  de  Paris.  Son  dernier  livre,  La  pensée  et  la 
langue,  fait  table  rase  du  fatras  aristotélicien  qui  attriste  les 
malheureux  enfants  obligés  d'apprendre  des  grammaires 
ineptes.  M.  Brunot  expose  les  faits  de  pensée  et  les  classe  par 
rapport  au  langage. 

«  La  vraie  science  du  langage,  dit  Anatole  France,  n'est 
pénétrée  que  par  des  esprits  larges,  droits  et  puissants.  » 

Hélas!  Noël  et  Ghapsal,  Bopp  et  Grimm,  Schleicher  et 
Osthoff,  étaient  des  génies  médiocre^.  Tournant  le  dos  à 
Gondillac,  qui  avait  inspiré  la  nomenclature  chimique  et 
d'impérissables  découvertes,  compilateurs  et  comparatistes 
recopièrent  les  niaiseries  scolastiques,  ou  construisirent  une 
pseudo-phonéiique  où  ils  confondaient  le  physique  avec  le 
moral,  la  science  avec  l'histoire,  les  modes  et  les  mots  avec 
les  lois  et  les  faits  naturels. 

M.  Brunot,  qui  étudie  le  passage  du  cri  à  la  phrase,  du 
nom  propre  au  nom  commun,  a  pour  méthode  de  considérer 
le  langage  tel  qu'il  est  dans  le  cerveau  du  sujet  parlant  à 
l'époque  où  il  parle.  «  Ce  qui  importe,  ce  n'est  pas  d'étiqueter, 
c'est  de  comprendre  et  d'enseigm^r  à  comprendre  non  seule- 
ment les  états,  mais  les  mouvements  ».  Bref,  c'est  Martine  qui 
a  raison  quand  elle  réplique  à  Philaminte  : 

Quand  ou  se  fait  entendre,  on  parle  toujours  bien. 


(')  Déjà  le  viciix  Daunou  écrivait  :  «  Les  invasions  désastreuses  de  1811  et 
de  1815  ont  achevé  d'importer  en  France  les  systèmes  germaniques  de  philo- 
sophie et  de  littérature.  » 


COMPTES    RENDUS  529 

Les  vinn;t-cinq  chapitres  de  M.  Briinot  se  lisent  comme  un 
roman  â  tiroirs.  L'auteur  est  impitoyable  pour  le  ])édantisnie 
qui  sévit  encore  dans  l'enseignement  primaire.  «  L'élude  des 
faits  du  langage  repose,  depuis  l'antiquité,  sur  une  classifica- 
tion générale  de  tous  les  éléments  linguistiques  qui  peuvent 
composer  une  phrase,  et  qui  forment  \es  parties  du  discours. 
On  n'a  jamais  pu  se  mettre  d'accord  sur  le  nombre  de  ces  par- 
ties, ce  qui  prouve  déjà  que  le  principe  adopté  n'est  pas  d'une 
grande  solidité,  ni  d'une  clarté  indiscutable.  »  «  Partout  des 
barricades  de  toile  d'araignée  ferment  les  avenues  où  l'usage 
s'avance,  souverain  et  irrésistible.  Au  lieu  d'une  loi  de  vie, 
d'un  code  souple,  adapté,  à  jour,  on  réimprime  une  ordon- 
nance de  police,  toute  pleine  de  prohibitions,  de  restrictions, 
de  chicanes,  sur  laquelle  veillent  quelques  commissaires  de 
bonne  volonté,  qui  croient  sauver  la  tradition  nationale.  » 

Sur  les  rapports  entre  le  verbe  et  l'exclamation  {adjuta>aï'e), 
entre  la  toponymie  et  l'histoire  (les  Ligures  à  Manosque,  le 
chanvre  à  La  Cannebiére),  entre  le  système  métrique  et  les 
mœurs  (faire  du  trente  à  l'Jieure.  M.  T.  S.,  G.  G.  S.),  sur  les 
servitudes  grammaticales,  M.  Brunotest  naturellement  docu- 
menté autant  qu'homme  de  France. 

Puisse-t-il  réussir,  par  ses  lecteurs  comme  par  ses  nom- 
breux élèves,  à  réformer  et  à  simplifier  l'enseignement  gram- 
matical de  la  plus  suggestive  des  langues  vivantes!  Ce  sera 
une  victoire  française  et  un  progrés  humain. 

La  France  paj'^erait  l'Institut  Pasteur,  la  T.  S.  F.,  l'aviation 
et  bien  d'autres  utilités  avec  les  économies  que  lui  procure- 
rait immédiatement  la  suppression  des  lettres  inutiles  de  son 
orthographe  et  des  livres  inutiles  de  ses  écoles. 

Voilà  pour  l'enseignement  primaire  et  secondaire,  pour  la 
presse  et  l'administration. 

Voici  maintenant  la  question  philosophique  du  langage. 

Elle  est  renouvelée  par  la  géographie  linguistique,  la  plus 
intéressante  contribution  à  l'histoire  du  langage  depuis 
cent  ans,  c'est  à  dire  depuis  le  déchiffrement  des  hiéroglyphes 
par  Champollion. 

M.  Gilliéron  ne  cherchait  ])as  précisément  ce  qu'il  a  trouvé. 
Christophe  Colomb,  partant  pour  l'Inde,  rencontra  un  nou- 
veau monde.  M.  Gilliéron,  en  composant  son  immense  tableau 
jdionétique  de  la  Gaule  romanisée,  a  lait  voir  le  néant  des 

34 


530  COMPTES    RENDUS 

pseudo-lois  phonétiques  et  de  la  pseudo-science  naturelle  du 
langage.  11  a  ruiné  tout  l'échafaudage  par  lequel  les  linguistes 
allemands  avaient  obscurci  l'histoire  des  mots. 

De  Malmedy  à  Biarritz  et  de  Guernesey  à  Menton,  M.  Gil- 
liéron  a  choisi  et  M.  Edmont  a  parcouru  639  communes,  dans 
lesquelles  ont  été  recueillies  les  versions  patoises  de  prés  de 
deux  mille  textes. 

Ces  millions  de  notations  phonétiques  sont  une  mine 
inépuisable  non  seulement  pour  l'histoire  du  français,  mais 
encore  pour  la  philosophie  du  langage. 

De  V Allas  Unguisliqiie  on  a  tiré  déjà  nombre  de  monogra- 
phies et  des  idées  générales.  Un  plein  succès  a  couronné  la 
troisième  tentative  du  gouvernement  français  pour  organiser 
la  grammaire  comparée. 

La  première  tentative  fut  celle  de  Napoléon.  En  1807,  il  fît 
recueillir  dans  son  vaste  empire  les  versions  dialectales  de 
la  parabole  de  l'Enfant  prodigue.  Et  à  propos  du  projet  d'éta- 
blir une  école  spéciale  de  littérature  et  d'histoire  au  Collège 
de  France,  il  observa  (Finkenstein,  19  avril  1807)  :  «  La 
grammaire  serait  plus  susceptible  que  la  littérature  de  deve- 
nir l'objet  d'une  école  spécfale;  il  y  a  là  un  fon.ls  plus  abon- 
dant d'observations,  de  comparaisons;  elle  tient  à  l'origine  des 
sensations,  car  la  manière  de  parler  vient  de  la  manière  de 
sentir;  mais  cette  science,  qui  se  confond  avec  l'idéologie, 
est  encore  dans  une  si  grande  obscurité,  que  la  seule  applica- 
tion utile  qui  en  ait  été  faite  est  relative  aux  sourds-muets  : 
dans  cet  établissement  consiste  la  véritable  école  spéciale  de 
grammaire.  » 

Mais  les  documents  de  l'enquête  impériale  restèrent  aussi 
muets  que  les  disciples  de  l'abbé  de  l'Epée  et  de  son  succes- 
seur l'abbé  Sicard. 

La  seconde  tentative  eut  lieu  au  commencement  de  la  troi- 
sième république. 

Quand  les  félibres  eurent  attiré  l'attention  des  pouvoirs 
publics,  le  ministre  de  l'instruction  (1873)  chargea  deux 
Languedociens,  Bringuier  et  le  baron  de  Tourtoulon,  d'ex- 
plorer la  frontière  entre  la  langue  d'oïl  et  la  langue  d'oc. 
Cette  question  semble  aujourd'hui  aussi  déconcertante  que  la 
question  de  la  lune  rousse  posée  à  Laplace  par  Louis  WlII. 
.  Examinons  les  cartes  coloriées   que    MM.    Gilliéron    et 


COMPTES     RENDUS  531 

Roques  ont  établies  pour  un  certain  nombre  de  mots  (voir 
GiLLiÉRON  et  Roques,  Etudes  de  géographie  linguistique. 
Champion,  1912). 

Ecartons  les  enquêtes  qui  laissent  des  lacunes  :  le  mot  ven- 
danger, par  exemple,  est  repr.'^senté  à  Malmedy  et  en  d'autres 
lieux  septentrionaux  par  des  points  d'interrogation. 

Prenons  une  idée  antique  et  populaire,  contemporaine  de 
l'âge  pastoral  et  connue  jusqu'au  fond  des  fermes  :  l'idée  de 
traire.  Le  latin  mulgere  a  survécu  en  Provence  et  en  Langue- 
doc, au  pays  de  Liège  et  dans  le  Pas-de-Calais.  Il  a  disparu 
de  la  plus  grande  partie  de  la  Gaule,  remplacé  à  l'Ouest  et 
au  Centre  par  tirer  et  ajuiiter,  au  Nord  et  à  l'Est  par  traire. 
Mulgere  a  été  évincé  probablement  par  l'homophonie  avec  les 
formes  de  molere  :  là  où  'tnoudre  se  dit  autrement  que 
mulgere,  mulgere  et  molere  survivent  côte  à  côte. 

La  carte  de  traire,  inulgere  et  molere  présente  une  Gaule 
en  six  couleurs  aux  contours  irréguliers. 

Prenons  une  autre  idée  antique  et  familière,  le  nom  du  sel. 
C'est  se  en  Wallonie,  en  Picardie,  en  Gotentin,  en  Bretagne. 
C'est  sel  dans  une  région  autour  de  Paris,  région  qui  atteint 
la  Manche  sur  un  point  et  la  Loire  sur  une  grande  partie  de 
son  cours.  C'est  sr/i«  de  Noirmoutier  aux  Alpes  Maritimes,  et 
de  Belfort  aux  Basses-Pyrénées. 

Les  frontières  dialectables  des  premières  régions  {mulgere- 
traire)  ne  coïncident  nullement  avec  celles  des  autres  cartes 
{se,  sel,  sau). 

La  même  discordance  s'établirait  facilement  pour  tous  les 
groupes  de  mots,  pour  tous  les  critères  dialectaux  autrefois 
adoptés.  Conclusion  :  il  n'y  a  pas  de  frontières  dialectales. 

C'est  dire  qu'il  n'y  a  pas  de  lois  phonétiques,  car  Schuchardt 
lui-même  a  remarqué  que  la  question  des  lois  phonétiques 
était  associée  à  celle  des  dialectes.  D'ailleurs,  les  pseudo-lois 
contenaient  toutes  dans  leur  énoncé  au  moins  un  nom  géogra- 
jjhiijue. 

Des  lois  phonétiques,  au  sens  scientifique,  seraient  ou  des 
lois  de  la  physiologie  ou  des  lois  de  l'acoustique.  Pareilles 
lois  n'existent  pas.  La  a  loi  de  Grimm  »  n'est  pas  le  meilleur 
des  «  contes  de  Grimm  », 

Chaque  mot  a  son  histoire  phonique  et  sémantique.  Rabe- 
lais a  fort  justement  dit  :  «  Les  mots  ne  signifient  naturelle- 


532  COMPTES     RENDUS 

ment,  mais  à  plaisir  ».  Il  faut  ajouter  :  en  passant  de  bouche 
en  oreilles,  et  d'oreilles  en  bouche,  ils  changent  non  pas  en 
vertu  des  lois  naturelles,  mais  selon  le  bon  plaisir  des  audi- 
teurs et  parleurs.  Ils  changent  de  forme  en  passant  des  mères 
aux  enfants,  parce  que  la  tête  humaine  est  un  phonographe 
défectueux.  Ils  changent  de  sens  en  passant  d'une  société  mal 
outillée  à  une  société  mieux  outillée. 

Ces  changements  ont  été  surnommés  la  rie  des  mots,  la  vie 
du  langage.  Images  biologiques  qu'il  ne  faut  prendre  au  pied 
de  la  lettre  : 

Comparaison 

X'est  pas  raison, 

Et  métaphore 

L'est  moins  encore. 

C'est  pour  l'avoir  oublié  que  trop  de  linguistes  ont  parlé 
en  naturalistes.  On  peut  lire  dans  des  recueils  aussi  répandus 
que  Larousse  et  la  Grande  Encyclopédie  cette  affirmation 
stupéfiante  que  la  linguistique  est  une  science  naturelle!  Le 
plus  admirable  répertoire  de  sémantique,  je  veux  dire  le  Dic- 
tionnaire de  Littré,  définit  (en  1863)  la  linguistique  :  «  Étude 
des  langues  considérées  dans  leurs  principes,  dans  leurs  rap- 
ports et  en  tant  qu'un  produit  involontaire  de  l'instinct 
humain  »  !  Littré  commettait  ce  jour-là  la  même  erreur 
que  (juand  il  prenait  la  sociologie  pour  une  science  capable 
de  prédire.  La  langue  est  le  produit  de  la  volonté  humaine 
(si  volonté  il  y  a)  au  même  titre  que  l'alphabet,  la  presse,  le 
téléphone  et  le  phonographe. 

M.  Gilliéron  termine  par  de  sages  conseils  : 

«  Observez  comme  si,  à  la  base  des  évolutions,  il  n'y  avait 
aucun  mystère  physiologique,  mais  simplement  une  œuvre 
de  réflexion,  plus  ou  moins  consciente,  à  laquelle  votre  raison 
peut  atteindre. 

»  Songez  que  peut-être  l'histoire  finira  par  vous  révéler 
qu'il  n'a  tenu  qu'à  un  fil  que  les  plus  grandes  révolutions  pho- 
nétiques, séparant  en  compartiments  la  matière  linguistique, 
se  soient  ou  ne  se  soient  pas  produites,  que  ce  que  nous  consi- 
dérons comme  un  mouvement  général  de  la  matière  linguis- 
tique n'est  peut-être  qu'une  propagation  à  l'infini,  jusqu'à 
des  bornes  qui  en  nécessitent  l'arrêt,  d'un  mouvement  indivi- 
duel,  en  dehors  duquel  il   n'y  a  qu'imitation,   adaptation. 


COMPTES     RENDUS  533 

assimilation,  propagation,  ayant  pour  cause  l'identité  ou  la 
parenté  des  milieux  sociaux.  » 

La  phonétique  qui  traitait  la  voyelle  et  la  consonne  comme 
la  cellule  d'une  biologie  métaphori(iue  ou  comme  l'atome 
d'une  chimie  vocale,  la  psychologie  ou  ethnographie  qui 
divinisait  la  langue,  sont  des  fables  romantiques  comme  le 
Volksgeist  et  comme  k  l'esprit  des  temps  »  : 

Was  ihr  den  Geist  dcr  Zeiten  lieisst, 

Dat  ist  im  Gruiui  der  Ilerreu  eij,nier  Geist, 

In  deni  die  Zeiten  sich  bespiegeln. 

L'histoire  du  français,  l'histoire  du  langage,  l'histoire  de 
l'esprit  humain,  doit  se  débarrasser  de  toutes  les  quiddités, 
lois,  âmes,  génies,  évolutions,  par  lesquelles  on  désigne 
complaisamment  la  somme  de  nos  ignorances.  Il  ny  a  pas 
d'autre  science  du  langage  que  l'hisloire  des  mots.  Le  langage 
est  un  cri  perfectionné  par  des  séries  d'inventions  et  de 
conventions.  Chaque  mot  est  l'invention  d'un  Cad  mus,  d'un 
Morse,  d'un  Edison  qui  n'a  pas  pris  brever  et  qui  n'a  pas  tou- 
jouis  laissé  son  nom.  L'invention  individuelle  réussit  par  des 
conventions  sociales  non  écrites,  par  les  villes  tentaculaires, 
par  le  commerce,  par  les  institutions.  Pour  beaucoup  de 
mots  français,  on  peut  observer  la  propagation  autour  de 
Paris,  dont  l'action  s'accélère  avec  les  chemins  de  fer;  le 
rayonnement  de  Lyon  (^),  de  Genève,  l'importance  du  couloir 
de  Saône  et  Rhône.  Surtout  on  remarque  des  phénomènes 
sporadiques,  des  îlots  linguistiques,  des  sauts  brusques  : 
aucune  langue  n'est  un  fleuve  uni  se  déplaçant  d'un  mouve- 
ment régulier;  la  langue  est  une  abstraction  de  notre  esprit, 
une  sjaithèse  dont  chaque  détail  est  en  perpétuel  usage  et  subit 
l'usure,  la  retouche,  la  réparation. 

Les  lois  du  langage  n'ont  pas  plus  de  consistance  que  les  lois 
de  l'histoire,  de  la  sociologie,  de  la  mode.  Mots  et  modes 
habillent  les  idées  et  les  femmes  au  goût  du  Jour  et  selon  les 
moyens  des  lecteurs  et  des  épouseurs.  L'histoire  grammaticale 
ou  linguistique  serait  un  corollaire  de  l'histoire  économique, 
si  cette  histoire  économique  pouvait  être  écrite  de  façon 
complète. 


(*)  Albeut  Daizat,  1.(1  géugniji/iie  lint/iiistliine,  l'himiiiariun,  fr.  i.oO. 


534  COMPTES    RENDUS 

A  voir  les  actes  individuels  indéfiniment  répétés,  imités  ou 
travestis,  dont  se  compose  l'histoire  du  langage,  on  comprend 
mieux  ce  qu'ont  oublié  les  auteurs  des  cent  langues  fabriquées 
depuis  un  demi-siécle,  du  volapuk  à  l'ido. 

Il  y  a  des  langues  artificielles  qui  ont  réussi.  11  n'y  a  même, 
à  la  rigueur,  que  des  langues  artificielles,  toute  langue  étant 
une  œuvre  d'art  :  il  n'y  a  pas  de  langue  naturelle  au  sens 
biologique,  et  la  grammaire  n'est  chez  personne  le  produit 
d'une  sécrétion  comme  la  bile,  comme  les  dents  ou  comme  les 
cheveux.  Tout  iaugue  est  apprise  comme  la  musique  et  la 
peinture.  Il  y  a  des  langues  techniques,  spéciales,  savantes, 
qui  ont  réussi  :  par  exemple  la  géométrie  analytique  de 
Descartes,  et  la  nomenclature  chimique  de  Lavoisier,  Guyton 
de  Morveau,  Fourcroy  et  Berthollet.  Pourquoi  ces  langues 
ont-elles  réussi?  Parce  que  les  abscisses  et  les  coordonnées, 
les  initiales  des  éléments  et  les  exposants  ont  toujours  la 
même  valeur,  le  même  emploi,  la  même  forme  qu'en  1620  ou 
qu'en  1787. 

Pour  faire  une  langue  universelle,  il  suffit  donc  et  il  est 
nécessaire  de  faire  une  langue  perpétuelle.  Il  ne  faut  par 
conséquent  y  noter  que  des  faits  naturels  qui  échappent  aux 
passions  mouvantes,  à  la  politique,  à  la  «  plaisante  justice 
qu'une  rivière  borne  »,  à  tous  les  sentiments  qu'une  génération 
emporte. 

Ce  qui  est  vrai  des  langues  artificielles  techniques  l'est 
aussi  des  langues  artificielles  dites  nationales.  Elles  durent, 
elles  vivent,  pour  autant  qu'elles  servent,  c'est  à  dire  qu'elles 
enseignent  des  vérités  utiles,  qu'elles  permettent  des  négoces 
fructueux,  qu'elles  enrichissent  et  instruisent  leurs  lecteurs. 
«  Pour  qu'une  langue  se  répande,  dit  M.  A.  Meillet,  il  faut 
et  il  suffit  qu'elle  serve  de  support  à  une  civilisation.  Le 
latin  a  pu  se  répandre  partout  où  il  servait  à  porter  la  civili- 
sation gréco-romaine;  il  n'a  guère  pénétré  là  où  cette  civili- 
sation existait  déjà  sous  la  forme  hellénique...  Une  langue  ne 
s'étend  que  si  elle  porte  une  civilisation  douée  de  prestige.  » 
Donc  l'histoire  du  langage  est  une  histoire  de  l'outillage  :  les 
langues  sont  des  instruments  et  non  des  fétiches. 

Bref,  MM.  F.  Brunot  et  J.  Gilliéron  n'ont  pas  seulement 
élucidé  la  parlure  la  plus  délectable  et  la  plus  commune  à 
toutes  gens,  ils  aideront  aussi,  pour  peu  que  les  grammairiens 


I 


COMPTES    RENDUS  535 

les  suivent,  à  dissiper  quelques-uns  des  malentendus  et  des 
gaspillages  qui  désolent  la  pauvre,  vieille  et  anarchique 
Europe,  où  «  les  hommes,  comme  dit  A.  P'rance,  s'égorgent 
pour  (les  mots  qu'ils  n'entendent  pas  », 

A.  COUNSON. 

Quellen  zu  Romeo  tend  Julia,  herausgegeben  von  Rudolf 
Fischer.  Bonn,  Marcus  und  Weber,  192'^,  in-S",  viii-251  p. 
80  m.  iShaliespeares-Quellen,  2.  Bàndchen.) 

Saluons  avec  joie  la  reprise  de  l'activité  de  la  Deutsche 
Shakespeare  Gesellschaft  qui  nous  envoie  un  recueil  des 
sources  de  Rornéo  cl  Juliette  avec  traductions  allemandes. 
Ces  sources  sont  au  nombre  de  cinq  :  la  noVi\ q\\ q  Mariotto  et 
Gianozza  par  Masuccio  Salernitano,  Julie  et  Roméo  par 
Luigi  da  Porto,  Rornéo  et  Juliette  par  Bandello,  la  rédaction 
française  de  cette  dernière  par  Boisteau  (Boaistuai)  et  enfin 
le  poème  anglais  :  Romeus  et  Juliette  par  Arthur  Brooke.  Ce 
dernier  est  la  source  immédiate;  aussi  M.  Rudolf  Fischer 
en  imprime-t-il  l'original  anglais  en  regard  de  sa  traduction 
allemande. 

Comme  ces  textes  sont  destinés  à  servir  à  des  exercices  de 
philologie,  ils  sont  dépourvus  d'introduction  et  de  notes;  ils 
ne  remplacent  donc  pas  les  travaux  critiques  du  genre  de 
celui  de  J.  J.  Munro  dans  la  Shakespeare  Library  (1908). 
En  ellèt,  Shakespeare  a  probablement  ignoré  certaines  des 
nouvelles  traduites  par  M.  Fischer;  en  retour,  il  a  presque 
certainement  fait  usage  d'une  pièce  de  théâtre  (composée  en 
anglais  ou  en  latin?)  dont  l'existence  est  attestée  par  des 
preuves  variées.  Une  discussion  complète  de  l'origine  de  la 
tragédie  doit  donc  dépasser  l'analyse  des  nouvelles  italiennes 
et  tenir  compte  de  l'influence  hj^potliétique  de  la  tradition 
théâtrale. 

Les  matériaux  réunis  par  M.  Fischer  serviront  surtout 
à  suivre  l'évolution  du  sujet  de  Roméo  et  Juliette  dans  la 
littérature  narrative  des  xv"  et  xvr  siècles. 

Chaque  remanieur  a  complété  ou  modifié  le  conte  dans 
certains  détails.  Dans  Masuccio,  l'amoureux  est  décapité  pour 
avoir  tenté  de  forcer  le  mausolée  où  il  croit  trouver  sa  belle 
endormie  et  la  dame  finit  ses  jours  dans  un  couvent. 


536  COMPTES     RENDUS 

D'après  da  Porto,  Juliette  tuée  parla  douleur  rend  lame  sur 
le  cadavre  de  son  mari  qui  s'est  empoisonné,  la  croyant  morte. 
Bandello  maintient  ce  dénouement  destiné  à  être  modifié 
par  le  Grand  Will.  Il  invente  la  nourrice,  messagère  des 
amants,  dont  Shakespeare  fera  l'un  de  ses  personnages 
comiques  les  plus  saisissants. 

Dans  le  volume  de  M.  Fischer,  on  suit  pas  à  pas  le  travail 
par  lequel  se  constitue  cette  histoire  tragique,  qui  a  fait 
couler  tant  de  larmes  et  qui  domine  toute  une  province  de 
la  littérature  européenne. 

Paul  Hamélius. 


Des  Marez  (G.).  La  première  étape  de  la  formation  corpora- 
tive. L'entr'aide.  Bruxelles,  Alb.  Hayez,  1921,  in-8",  36  p. 
(Académie  royale  de  Belgique.  Bulletin  de  la  Classe  des 
lettres 1921.) 

M.  Des  Marez,  qui  s'était  déjà  occupé  à  plusieurs  reprises, 
on  le  sait,  du  mouvement  corporatif  en  Belgique,  vient  très 
heureusement  de  publier  un  nouveau  mémoire  sur  les  ori- 
gines des  corporations.  Il  pense  qu'il  ne  faut  pas  chercher  à 
considérer  simultanément  tout  l'ensemble  de  la  formation 
«européenne  »  de  ces  organismes  ni  essayer  de  l'expliquer  par 
une  formule  «Juridique  unique»,  en  recourant  à  des  textes, 
tels  que  le  «Gapitulare  de  Yillis»  ou  le  «Livre  des  Métiers» 
de  Paris,  qui  n'ont  rien  de  commun  dans  le  temps  ni  dans 
l'espace,  soit  entre  eux,  soit,  le  cas  échéant,  avec  les  corps 
sociaux  que  l'on  examine  :  «  les  corporations  n'ont  pas  une 
origine  unique,  pas  plus  que  les  villes  dans  lesquelles  elles 
sont  écloses.  Elles  ont  des  origines  suivant  les  époques  et  sui- 
vant les  milieux»:  aussi,  seule  «la  méthode  d  investigation 
régionale  sera  fructueuse».  A  cet  effet,  l'auteur  choisit  la 
Belgique  ou  plus  exactement  la  Flandre  franco-belge  et  le 
Brabant,  avec  les  deux  cités  d'Arras  et  de  Saint-Trond.  Si  ces 
dernières  forment  des  localités  abbatiales,  les  autres  places 
sont  des  centres  représentant  un  «milieu  nouveau».  Leur 
étude  montre  que  la  corporation  a  passé  par  trois  stades: 
«l'entr'aide,  la  lutte  et  le  triomphe».  L'auteur  se  borne  ici  à 
étudier  la  première  étape.  Elle  s'étend  depuis  les  débuts  de 


comptf:s   rendus  537 

la  formation  de  la  ville  jusqu'à  la  fin  du  xii*  siècle.  Pendant  sa 
durée,  les  groupes  professionnels    d'artisans,  comme   l'en- 
semble des  habitants  eux-mêmes,  «  sont  poussés  les  uns  vers 
les  autres  par  la  grande  loi  de  l'entr'aide,  qui  fait  naître 
insensiblement  chez  eux  une  conscience  commune  ».  En  prin- 
cipe, «  ce  travail  de  rapprochement  est  spontané  et  naturel  et 
s'accomplit  dans  les  rangs  mêmes  des  travailleurs  en  dehors 
de  toute  intervention  du  pouvoir  public  ».  En  fait,  ces  unions 
spéciales,   qui   se   forment   dans  la   communauté   générale, 
obéissent  ainsi  à  certaines  forces  dénommées  «  facteurs  ou 
moments  de  la  concentration  corporative  ».  Il  en  existe  six 
principaux:  le  commercial,  l'industriel,  le  militaire,  le  judi- 
ciaire, le  philanthropi  |ue  et  le  religieux;  les  facteurs  poli- 
tique et  fiscal  restent  secondaires.  Les  pi  emiers  sont  étudiés 
successivement  chacun  d'après  un  certain  nombre  d'exemples  : 
ainsi,  la  localisation  des  vendeurs  au  marché  ou  à  la  halle 
les  réunit  par  groupes  professionnels;  les  artisans  iilentiques 
travaillent  les  uns  à  côté  des  autres  ou  s'unissent  dans  la  résis- 
tance; au  moment  de  la  guerre,  les  gens  d'un  même  métier 
sont  groupés  dans  un  seul  cadre;  les  membres  d'une  môme 
profession   comparaissent  simultanément  devant    la  justice 
comme  demandeurs  ou  défendeurs.  Mais,  ces  premiers  fac- 
teurs, tout  en  groupant  les  intéressés,  ne  leur  «donnent  pas 
une  enveloppe  sociale  extérieure  tangible»:  seuls,  les  «mo- 
ments» philanthropique  et  religieux  peuvent  avoir  ce  rôle. 
Il  y  eut,  en  effet,  des  confréries  de  pauvres  et  surtout  reli- 
gieuses, des  «  carités  »  de  divers  genres,  celles-ci  dans  les 
villes  ecclésiastiques,  qui  se  formèrent  peu  à  peu  et  «  grou- 
pèrent les  artisans  8ans  de  vraies  sociétés»,  dans  lesquelles 
nous  découvrons  les  germes  de  la  future  corporation. 

M.  Des  Marez  a  publié  une  très  neuve  et  très  intéressante 
étude.  Sa  thèse  de  la  nécessité  de  recherches  régionales  est 
juste:  replaçons  les  corporations,  si  on  veut  les  comprendre, 
dans  le  milieu  local  ou  teri  itorial  auquel  elles  appartiennent, 
où  elles  sont  nées  et  se  sont  formées,  sans  e~sayer  de  les  ex- 
pliquer exclusivement  par  des  textes  juridiques  généraux, 
beaucoup  trop  éloignés  d'elles  en  principe  à  tous  égards,  dans 
l'ordre  du  temps  comme  ilans  celui  de  l'espace,  ei  qui  peuvent 
n'avoir  rien  à  faire  avec  ces  organismes  très  déterminéi?.  Dans 
ce  but,  l'auteur  a  su  très  habilement  trouver  des  faits  disper- 


538  COMPTES     RENDUS 

ses  dans  l'ensemble  du  territoire  qu'il  a  choisi,  les  réunir,  les 
classer,  les  utiliser  et  en  tirer  des  conclusions  fort  ingé- 
nieuses. Sa  tâche  était  d'autant  plus  malaisée  qu'il  a  dû  parfois 
faire  appel  à  des  documents  postérieurs  à  la  période  étudiée 
par  lui,  d'où  il  fallait  savoir  «dégager  les  traces  obscures  d'un 
état  antérieur».  Aussi,  ce  mémoire  forme- t-il  certainement 
une  très  utile  contribution  à  la  partie  la  plus  difficile  de  cette 
histoire  des  corpoi-ations,  si  peu  connue  encore  et  si  défor- 
mée :  l'auteur  de  ce  compte  rendu  tient  à  lui  rendre  d'autant 
plus  hommage  que  M.  Des  Marez  a  cherché  à  tirer  de  certains 
textes  dont  11  a  été  autrefois  l'éditeur,  un  parti  auquel  il 
n'avait  pas  toujours  personnellement  songé  (^).  Clairement  et 
aisément  écrite,  cette  étude  se  lit  donc  avec  un  réel  intérêt  et 
un  véritable  profit. 

Les  quelques  lignes  qui  suivent  concernent  deux  ou  trois 
points  de  détail,  relatifs  à  des  villes  de  la  région  française 
considérée. 

M.  Des  Marez  a  parfaitement  raison  d'observer  que  tous  les 
«facteurs  de  la  concentration  corporative»,  énumérés  et  étu- 
diés par  lui,  n'ont  pas  une  égale  valeur  et  qu'on  peut,  sinon 
qu'on  doit,  les  séparer  en  deux  groupes:  les  facteurs  non  phi- 
lanthropiques et  religieux  et  ces  derniers.  On  peut  citer  ainsi 
des  villes  de  la  Flandre  française  dans  lesquelles  les  mar- 
chands et  les  industriels  ont  été,  soit  répartis  par  professions 
dans  un  ^eul  marché  ou  une  halle  unique,  ou  même  groupés 
par  métiers  dans  des  lieux  de  vente  ou  des  entrepôts,  parti- 
culiers ou  séparés,  sans  que  jamais  cette  «spécialisation»  ou 
ce  «  sectionnement  local  »  aient  correspondu  à  la  formation  et 
à  l'existence  de  corporations  {^).  Ou  encore,  si  les  «tonsores 
pannorum  »  d'Arras,  du  milieu  du  xir  siècle,  qui,  en  vertu  de 
leur  redevance  religieuse,  obligatoire,  tixe  et  annuelle,  à  une 
église  locale,  formaient  peut-être  déjà  à  cette  époque  un 
embryon  de  confrérie,  sont  devenus,  dès  le  début  de  la  période 
suivante,  une  confrérie-corporation,  militaire,  judiciaire  et 
financière,  parfaitement  et  complètement  organisée  (^),  et  qui, 
à  ce  degré  de  développement,  n'a  peut-être  pas  d'égale  dans 


(')  Voy.  La  vie  urbaine  de  Douai  ;  U,  llJl.3. 
(?)  Voy.  Douai,  II,  232-246. 

P)  EspiNAS-PiMENNE,  Recueil  de  doc.  relatifs  à  l'histoire  de  l'industrie  dra- 
pière  en  Flandre,  l,  n°  90,  p.  2 lit. 


COMPTES     RENDUS  539 

toute  la  Flandre  française.  les  «molendinarii  »  de  Douai  de 
1198,  appelés  comme  témoins  à  un  acte  de  juridiction  gra- 
cieuse concernant  l'un  de  leurs  moulins,  ne  iorment  au  xiii' 
et  au  xiv«  siècle  qu'un  corps  pourvu  d'une  vie  corporative 
presque  uniquement  judiciaire,  donc  assez  restreinte,  sans 
oublier,  on  le  verra,  une  origine  et  une  nature  très  spé- 
ciales (^);  puis,  les  tisserands  d'Arras  qui,  en  1236,  ont  une 
«tente»  de  gueire,  constituent  peut-être...,  probablement..., 
certainement...,  une  corporation,  du  moins  à  titre  militaire, 
mais  on  n'en  sait  absolument  rien;  et  enfin  les  teinturiers  de 
Douai  encore  qui,  en  1230,  doivent  comparaître  comme  défen- 
deurs devant  un  tribunal  pour  soutenir  un  procès  contre  la 
collégiale  Saint-Amé,  ne  formèrent  sans  doute  jamais  une 
union  professionnelle.  Ainsi,  de  ces  quatre  derniers  exemples, 
si  on  met  à  part  le  premier  qui,  concernant  les  tondeurs, 
est  tout  à  fait  probant,  on  voit  que  les  autres,  et  deux  d'entre 
eux  appartiennent  au  plein  xiii*'  siècle,  bien  qu'ils  soient  en 
apparence  identiques,  ne  sont  pas  en  réalité  d'égale  valeur: 
dans  trois  groupements  cités,  réunis  par  une  association 
momentanée,  sortit  peut-être  de  l'un  une  corporation  et  de 
l'autre  une  union  restreinte,  n  ais  du  troisième  il  ne  vint  cer- 
tainement rien. 

Nous  n'avons  bien  entendu  nullement  l'intention  d'attaquer 
ainsi  la  force  et  l'action  du  principe  émis  j)ar  M.  Des  Marez: 
deux  ou  trois  exemples  de  moins  n'enlèvent  rien  à  la  bonté  de 
sa  thèse  et  à  l'intérêt  de  son  développement.  Nous  voudrions 
seulement  attirer  l'attention  sur  une  question  de  méthode.  Le 
principe  de  l'entr'aide,  trouvé  et  formulé  par  M.  Des  Marez, 
en  raison  de  sa  généralité  et  de  sa  rigueur,  atteint  une  réelle 
valeur  sociologique;  on  peut  l'énoncer  ainsi  avec  l'auteur: 
«toute  corporation  se  manifeste  d'abord  sous  la  forme  de 
l'entr'aide».  Il  est  parfaitement  juste  en  soi;  mais,  on  n'en 
saurait  cependant  conclure  que  toutes  les  fois  qu'une  pluralité 
de  travailleurs  agissent  simultanément,  à  titres  commerciaux, 
industriels  etc.,  et  forment  ainsi  un  gi'oupement  économique, 
il  faut  voir  dans  ces  agissements  une  application  du  principe 
en  question;  en  d'autres  termes,  toutes  ses  manifestations 
apparentes  n'en  sont  pas  une  application  réelle,  ou,  si  l'on 


(')  Douai,  Il,:il3  p. 


540  COMPTES     RENDUS 

préfère  encore,  toutes  n'ont  pas  la  même  valeur  historique . 
dans  certains  cas,  les  membres  d'un  métier  groupé  agissent 
bien  «ut  universitas  »,  mais,  dans  d'autres,  ils  se  conduisent 
simplement  «  ut  universi».  On  doit  en  somme  sous-entendre 
ceci:  l'entr'aide  sociale  précède  la  corporation  juridique  et 
l'engendre,  quand  le  simple  groupement  original,  chez  lequel 
elle  se  manifeste  et  agit,  renferme  les  germes  <\q  cette  future 
corporation  et  est  destiné  à  la  former,  mais  elle  ne  la  déter- 
mine et  ne  l'amène  pas  forcément:  il  peut  se  produire  entre 
les  deux  phénomènes  un  rapport  de  cause  à  effet,  accidentel 
et  contingent,   mais  il  n'existe  pas  une  relation  de  même 
nature,  générale  et  nécessaire.  Bref,  les  valeurs  juridiques 
apparentes  de  tous  ces  faits  sont  identiques,  mais  leurs  valeurs 
sociales  réelles  sont  inégales:  une  même  semence  juridique, 
celle  de  l'entr'aide,  tombe  dans  des  terrains  sociaux  différents 
et  produit  des  résultats  dissemblables.  Et  si  nous  prenons  la 
liberté  d'émettre  cette  réflexion,  c'est  précisément  parce  que 
nul  plus  que  nous  n'est  partisan  des  rapports  de  la  sociologie 
et  de  l'histoire,  et  ne  croit  davantage  qu'elles  doivent  mar- 
cher conjointement  et  s'appuyer  l'une  sur  l'autre:  l'histoire 
précisera  la   sociologie  et  la  sociologie  élargira    l'histoire. 
Seulement,  les  principes  sociologiques  ne  peuvent  et  ne  sau- 
raient être  établis  que  grâce  à  des  faits  historiques  absolument 
appropriés,  sinon  trop  d'historiens,  qui  ne  comprennent  au- 
cunement l'intérêt  particulier  que  présente  l'union  des  deux 
sciences,  qui  sont  même  opposés  à  leur  alliance,  ne  trouve- 
ront ainsi  que  des  prétextes  pour  les  séparer  et  les  désunir, 
au  plus  grand  dommage  de  l'une  et  de  l'autre. 

Le  milieu  des  villes,  avons-nous  dit,  est  «nouveau»  et  les 
corporations,  en  étant  nées  et  en  étant  sorties^  ne  peuvent 
être  également  que  des  organes  nouveaux.  Mais,  dans  l'en- 
semble de  la  ville,  ce  qui  est  nouveau  en  réalité,  c'est  le  seul 
«  portus  »  :  or,  il  n'est  pas  toute  la  cité,  car  il  a  été  précédé  et 
il  reste  accompagné  d'un  élément,  qui  n'est  pas  précisément 
anti-urbain,  mais  qui  est  préurbain  et  qui  du  moins  peut  être 
dit  «a[n]-urbain»  ;  c'est  le  «castrum»  public.  Ce  milieu  a-t-il 
engendré  des  corporations?  Peut-on  le  négliger  de  parti-pris 
ou  faut-il  l'étudier  également?  M.  Des  Marez  ne  se  pose  pour 
ainsi  dire  pas  la  question,  parce  que  sans  doute  il  la  croit 
inutile  et  résolue  d'avance  :  il  a  simplement  énoncé,  nous 


COMPTES     RENDUS  541 

l'avons  remarqué,  que  ce  mouvement  originel  de  l'entr'aide 
«  s'accomi)lit  en  dehors  de  toute  intervention  du  pouvoir 
public  ».  Cependant,  ce  problème  a  en  somme  déjà  été  étudié 
avant  lui  :  on  connaît,  en  efïet,  la  théorie  de  Keutgen  sur  l'ori- 
gine publique  et  administrative  des  unions  professionnelles, 
qui  émaneraient  d'  «officia,  Aemter»  publics  (*).  Cette  tiiése  a 
été  déclarée  insoutenable  (-):  tout  au  plus,  a-t-on  dit,  serait-elle 
admissible  pour  les  vieilles  cités  épiscopales  rhénanes,  où  a 
subsisté  plus  ou  moins  l'application  du  «Capitulare  de  Villis» 
et  d'autres  ordonnances  analogues,  mais  à  la  réserve  expresse 
des  villes  semi-neuves  marchandes  de  la  plaine  flamande. 
Nous  nou-  permettrons  cependant  d'observer,  en  nous  excu- 
sant de  rappeler  des  recherches  {)ersonnelles,  que  dans  Tune 
des  cinq  grandes  villes  de  Flandre  précisément,  celle  de 
Douai,  nous  croyons  bien  avoir  trouvé  deux  exemples 
d'unions  professionnelles  remontant  jusqu'au  «castrum»  pré- 
urbain, public  et  officiel,  d'origine  publique  et  de  provenance 
administrative,  par  conséquent,  et  dont  les  premiers  membres 
furent  certainement  de  véi'itables  fonctionnaires  publics,  bien 
que  ces  corps,  au  cours  des  temps,  se  féodalisérent,  puis  s'ur- 
banisèrent successivement  :  l'un  de  ces  exemples  concerne 
précisément  les  «molendinarii»  cités  plus  haut,  dans  un  acte 
de  mutation  immobilière,  à  propos  duquel  ils  paraissent  avoir 
eu  avant  tout  un  rôle  administratif.  Ajoutons  même  en  pas- 
sant que  dans  un  centre  tout  différent  des  villes  post-carolin- 
giennes flamandes,  la  cité  épiscopale  publique  de  Chartres,  on 
paraît  également  trouver,  chez  les  «  tabernarii»  locaux,  un 
troisième  exemple  de  corporation  d'origine  publique  {^).  Ren- 
contrerait-on encore  d'autres  cas  de  ce  genre?  Quoi  qu'il  on 
soit,  si  même  les  opinions  précédentes  ne  sont  données  qu'à 
titre  un  p^-u  conjectural,  nous  attendons  du  moins  leur  réfu- 
tation ;  et  si,  dans  la  ville  de  Douai  en  particulier,  d'autres  cor- 
porations ont  certainement  eu  une  origine  urbaine  nouvelle, 
nous  ne  pouvons  que  maintenir,  jusqu'à  preuve  du  contraire. 


(1)  Aeynter  und  Ziinftc.  Ziir  Ertlsli'lturifj  des  Ziinflwrscits.  Jeua,  l'JO;J. 

{-)  llistorische  Viertelja/usr/iriff,  fflOi  ;  Revue  Higlurii/rte.  I.  00,  lîlOT. 

(•*)  C  R.  de  l'ouvrage  de  G.  Aclocoik.  Les  corporations,  l'industrie  et  le 
commcrve  à  Chartres  du  XI*^  siècle  à  la  Hèvolution,  dans  / -'  M^i/r»  Ai/f. 
1918,  p.  10t. 

(4)  Douai,  II,  ()-2.3. 


542 


COMPTES    RENDUS 


ce  que  nous  avons  écrit  ;iu  sujet  de  cette  dualité  de  formation 
des  associations,  il  y  aura  bientôt  une  dizaine  d'années  : 
«les  sociétés  [professionnelles  douaisiennes]  sont  aussi  bien 
le  produit  de  l'état  préurbain  que  de  l'état  urbain.  Deux 
sources  contribuèrent  à  former  le  courant  [unioniste]:  ce 
furent  le  milieu  public  comme  le  milieu  bourgeois.  Les  habi- 
tants du  «castrum»  ancien  contribuèrent  à  créer  les  unions 
presque  autant  que  les  résidents  du  «portus»  nouveau. 
...  Les  institutions  corporatives  ne  sont  pas  une  représentation 
propre  au  régime  urbain:  on  peut  dire  au  contraire  qu'ex- 
ception faite  de  l'élément  religieux,  mais  non  bien  entendu 
de  son  influence,  les  divers  organismes  locaux,  qui  contri- 
buèrent à  constituer  l'agglomération,  eurent  successivement 
leur  rôle  dans  cette  formation  d'ordre  collectif,  et  que  les  plus 
anciens  ou  les  plus  indirects  ne  furent  pas  les  moins  influents.» 
Ainsi,  sans  remonter  jusqu'aux  ordonnances  carolingiennes, 
peut-être  ne  faut-il  pas  négliger  absolument,  dans  l'étude  des 
origines  corporatives,  le  milieu  immédiatement  préurbain  et 
aussi  «anurbain»,  et  doit-on  ajouter  aux  différents  facteurs 
énumérés  un  facteur  administratif,  à  moins  que  ce  ne  soit  une 
forme  ou  un  élément  d'un  facteur  politique  que  l'auteur  s'est 
contenté  de  citer  sans  en  donner  d'exemples,  en  raison  de  sa 
valeur  secondaire. 

Il  n'y  a  rien  de  plus  utile  que  les  considérations  d'ensemble 
de  M.  Des  Marez  pour  permettre  aux  auteurs  de  mono- 
graphies de  fructifier,  de  «généraliser»  leurs  recherches 
locales  ou  territoriales.  Mais,  il  est  indispensable  que  ces 
exposés  généraux  soient  également  complétés  par  des  études 
d'une  application  géographique  restreinte  absolument  sérieu- 
ses. Celles-ci,  à  vrai  dire,  sont  des  plus  rares.  Dans  la  région 
française  du  Nord,  le  livre  «classique»  de  Giry  sur  Saint- 
Omer  ne  contient  en  somme  rien  sur  les  corporations  audo- 
maroises  (^),  qui  paraissent  d'ailleurs  avoir  été  fort  peu 
nombreuses.  Aussi,  ce  que  l'on  peut  dire  de  plus  certain  jus- 
qu'à présent  sur  les  unions  professionnelles  du  territoire 
flamand  français  se  réduit-il  à  quelques  remarques  générales 
que  nous  ne  donnons  même  qu'à  titre  hjqjothétique.  Une 
réflexion  préalable  s'impose  d'abord,  d'ordre  chronologique. 


(')  Voy.,  à  lextrême  rigueur,  341-34i  et  non  sans  erreurs. 


COMPTES    RENDUS  543 

C'est  que,  sans  entrer  dans  les  détails,  les  villes  de  cette 
région  semblent  être  arrivées  plus  rapidement,  sinon  à  leur 
formation,  du  moins  à  leur  apogée,  que  les  centres  de  la 
région  belge:  on  s'expliquera  naturellement  cette  diderence, 
si  on  remarque  que  la  civilisation  se  dirigea  du  sud  au  nord. 
Observons  simplement  que  le  premier  ban  sur  la  draperie  est 
à  Douai  de  r229  [^)  et  à  Ypres  d'au  moins  1207  (~)  :  cette  sépa- 
ration de  plus  d'un  tiers  de  siècle  ne  signifie  pas  sans  doute 
que  l'économie  lainière  fit  son  apparition  dans  la  seconde 
ville  plus  tard  que  dans  la  première,  mais  (ju'elle  s'y  déve- 
loppa moins  vite.  Mais,  comme  la  grandeur,  la  décadence 
également  fut  plus  rapide.  En  effet,  les  grands  centres  fran- 
çais atteignirent  certainement  leur  point  culminant  au 
XIII®  siècle,  mais,  après  les  guerres  de  Philippe  le  Bel,  ces 
places  économiques,  «fondées  sur  le  fait  de  [la]  draperie»  (^i, 
qui  était  leur  «vie»  C*),  par  la  chute  de  l'industrie  lainière 
entrèrent  en  décadence  et  devinrent  des  sortes  de  villes  mortes, 
au  contraire  de  leurs  voisines  dun  ord  alors  à  l'apogée. 
Or,  si  le  développement  proprement  économique,  industriel 
ou  commercial,  ne  parait  pas  être  nécessairement  la  cause  ou 
le  corollaire  de  la  formation  unioniste  sociale,  si  môme  la 
force  des  métiers  drapiers  était  peut-être  pour  le  patriciat 
dirigeant  de  certaines  villes  une  raison  politique  de  s'opposer 
à  la  création  des  associations,  les  corporations  n'ont  guère  de 
raison  de  naître  ou  de  fleurir  sur  un  terrain  plus  ou  moins 
vide  d'activité  réelle.  En  outre,  comme  les  unions  accom- 
pagnent bien  plutôt  la  seconde  partie  du  Moyen-Age  que  le 
début  ou  le  milieu  de  cette  période,  on  s'expliquerait  que 
n'étant  nées  que  très  relativement  aux  xii^et  xiii®  siècles  pour 
des  raisons  chronologiques, —  les  temps  n'étant  pas  révolus  — , 
elles  ne  se  formèrent  plus  davantage  aux  siècles  suivants  pour 
des  motifs  économiques  et  le  résultat  d'ensemble  très  carac- 
téristique de  toutes  ces  causes  fut  le  petit  nombre  des  corpo- 
rations. Ce  qui  confirmerait  indirectement  cette  manière  de 
voir,  c'est  qu'à  Douai,  ville  pour  laquelle  nous  possédons  la 
somme  de  renseignements  la  plus  considérable,  à  l'extrême 


(1)  EspiN.vs-PiiiENNE,  Recueil,  H,  19. 

(2)  Recueil,  III,  i4l,  sq. 

{•*)  Ordonnances  des  rois  de  France,  IX,  .j."?G. 
{*)  Recueil,  1,  ()-2i,  81»«. 


544 


COMPTES    RENDUS 


fin  du  XIV*  siècle,  nous  arrivons  à  constater  (^j,  dans  les 
métiers  non  drapiers  et  même  drapiers,  quelque  développe- 
ment,   sinon    corporatif,    du    moins   confraternel  :    l'action 
associationniste,  en  se  généralisant,  avait  fini  par  se  faire  sen- 
tir, même  sur  des  terrains  peu  favorables,  très  tardivement 
et  sous  des  formes  embryonnaires  et  secondaires.  Dans  l'en- 
semble, autant  qu'on  peut  s'en  rendre  compte,  le  mouvement 
corporatif  dans  la  région  flamande  française,  jusqu'au  début 
du  XV*  siècle,  paraît  avoir  présenté,   pour  caractéristiques 
essentielles,  des  origines  publiques  comme  urbaines,  des  fac- 
teurs administratifs  aussi  bien  que  sociaux,  une  apparition 
récente,  un  développement  restreint:  en  somme,  il  est  resté 
effacé,  timide,  pour  des  causes  tenant  peut-être  à  l'époque 
considérée,  non  moins  qu'à  l'état  économique  et  à  la  politique 
urbaine,   l'un   et   l'autre   peu   favorables  à  son   expansion. 
Quant  aux  points  de  détails,  ils  demeureront  sans  doute  sou- 
vent obscurs.  Pour  quel  motif  par  exemple,  dans  la  draperie,  à 
Douai,  n'y  eut-il  jamais  de  corporation  proprement  dite  ?  Pour 
quel  motif,  à  Arras,  les  pacifiques  tondeurs,  dés  le  début  du 
XIII''  siècle,  nous  donnent-ils  l'exemple  le  plus  achevé  d'union 
professionnelle  de  la  Flandre,   alors  que  les  puissants  et 
remuants  foulons,  dans  la  période  séculaire  suivante,  en  sont 
restés  encore  à  la  période  de  l'entr'aide?  Pour  quel  motif 
enfin,  à  Arras  encore,  ces  mêmes  tondeurs  sont-ils  arrivés 
seuls  à  une  organisation  corporative,  tandis  qu'à  Saint-Omer 
on  peut  leur  adjoindre  les  tisserands  et  les  foulons?  Autant 
de  questions  qui  ne  comportent  pas  de  réponses  directes  et 
pour  lesquelles  beaucoup  d'hypothèses  sont  permises.  Cer- 
taines causes  locales  nous  échapperont  peut-être  toujours,  et 
du  moins  ne  peut-on  essayer  de  résoudre  ces  difficultés  que 
par  des  études  locales  encore,  qui  seront  aussi  approfondies 
que  possible.  Souhaitons  donc  de  voir  surgir  un  grand  nombre 
de  travaux  particuliers  sur  les  corporations,  mais  dont  les 
auteurs  sauront  en  même  temps  s'inspirer  de  la  suggestive 
étude  de  M.  Des  Marez. 

Georges  Espinas. 


(^)  Douai,  II,  ri84  sq. 


COMPTES    RENDUS  345 

Eduard  Fueter.  Geschichte  des  Europâi.schen  Staatensyste/t/s 
coii  1492  bis  1550.  Munich  et  Berlin,  éd.  R.  Olden- 
burg,  1919,  in-S»,  xxi-843  p.  (Handbuch  der  M ittelalter li- 
chen und  Neueren  Geschichte  de  von  Below  et  Meinegke). 

L'ouvrage  du  savant  professeur  de  Zurich  ne  s'impose  pas 
uniquement  à  notre  attention  par  l'importance  du  sujet,  mais 
encolle  et  surtout  par  l'originalité  de  la  méthode  qu'a  suivie 
l'auteur. 

M.  Fueter  s'est  proposé  d'étudier  les  transformations  du 
système  politique  européen  de  1492  à  1559  :  ces  transforma- 
tions il  les  groupe  toutes  autour  d'un  problème  central 
unique  :  la  lutte  pour  la  suprématie  en  Italie. 

Mais  les  péripéties  mêmes  de  la  lutte  il  ne  les  retracera 
qu'après  avoir,  dans  une  première  partie  de  son  ouvrage, 
étudié  les  éléments  du  conflit. 

Cette  première  partie  est  de  beaucoup  la  plus  intéressante 
et  la  plus  neuve  du  livre.  Nous  dirons  plus  loin  les  grandes 
qualités  de  la  seconde  partie;  mais  on  avait  déjà  d'excellents 
récits  des  événements  qui  y  sont  retracés,  notamment  un 
volume  de  M.  Lemonnier  dans  V Histoire  de  France  de 
M.  Lavisse.  On  ne  possède  par  contre  rien  de  semblable  aux 
deux  cent  cinquante  premières  pages  de  M.  Fueter. 

Elles  sont  précédées  par  un  exposé  général  des  sources  et 
de  la  littérature  historique  que  complètent,  faisant  suite  aux 
différents  chapitres,  des  notes  bibliographiques  succinctes 
mais  où  rien  d'utile  n'est  omis.  Exposé  général  et  notes  per- 
mettent de  rendre  compte  de  l'ampleur  de  la  documentation 
mise  en  œuvre. 

M.  Fueter  a  divisé  en  deux  sections  la  première  partie  de 
son  ouvrage  :  dans  l'une  sont  étudiées  successivement  les 
institutions  et  les  tendances  qui  ont  exercé  leur  influence  sur 
les  événements  politiques;  dans  l'auire  l'auteur  a  analysé  les 
moyens  dont  disposaient  les  acteurs  du  drame. 

C'est  ainsi  que  l'on  rencontre  dans  la  première  section  des 
données  abondantes  et  précises  sur  les  u  facteurs  de  puis- 
sance» {Mac/if/n/ttcl)  :  diplomatie,  transformations  de  la  tac- 
tique, de  l'armement,  de  l'organisation  des  armées,  marine, 
organisation  [)uliti(iue,  état  économique,  courants  religieux 
et  politiques. 

35 


546  COMPTES     RENDUS 

On  retrouve  ces  facteurs  dans  la  seconde  section,  mais  cette 
fois  dans  le  cadre  des  divers  états,  en  tant  qu'ils  constituent 
pour  ceux-ci  des  raisons  de  force  ou  de  faiblesse,  ou  encore 
qu'ils  expliquent  leurs  rapports  avec  d'autres  états. 

M.  Fueter  nous  présente  ainsi  successivement  :  la  France^ 
l'Espagne,  les  états  habsbourgeois  (Héritage  bourguignon; 
Pay.-i  héréditaires  d'Autriche,  Allemagne),  Venise,  l'empire 
Ottoman,  l'Angleterre,  les  petits  états  italiens  (Milan,  Flo- 
rence, Etats  de  l'Eglise,  Naples  et  Sicile,  Gênes,  Savoie)  et  la 
Suisse. 

Toute  cette  première  partie  fourmille  d'aperçus  originaux, 
de  données  intéressantes.  Nous  nous  bornerons  à  attirer 
l'attention  sur  les  pages  qui  nous  ont  paru  les  plus  remar- 
quables :  celles  où  il  est  traité  de  la  réforme  de  l'infanterie 
(p.  9-17),  de  la  marine  en  général  (p.  24-34),  des  armées 
françaises  (p.  58-62),  espagnole  (p.  90-93),  autrichienne 
(p.  119-123),  celles  surtout  où  l'auteur  analyse  avec  tant  de 
pénétration  la  politique  anti  française  et  anti- vénitienne  des 
Habsbourg  en  Italie  (p.  141-149).  Mais  ce  qu  il  y  a  certes  de 
plus  nouveau  dans  le  volume  de  M.  Fueter,  c'est  l'importance 
qu'il  attache  aux  facteurs  économiques  qui  ont  agi  sur  la 
politique  des  divers  états  :  il  faut  lire  notamment  l'exposé 
consacré  aux  relations  entre  l'Espagne  et  l'Italie  méridionale 
(p.  96-98);  on  y  voit  avec  une  lumineuse  clarté  comment  la 
politique  espagnole  tendant  à  s'assurer  la  possession  de 
l'Italie  méridionale,  fut  déterminée  par  la  nécessité  pour 
l'Espagne  pauvre  en  céréales,  de  disposer  des  riches  mois- 
sons (le  blé  de  la  Sicile.  Il  faut  lire  aussi  les  pages  où  appa- 
raît l'influence  (|u'exerça  sur  la  politique  vénitienne,  l'état 
de  dépendance  où  se  trouvait  Venise  vis-à-vis  de  la  Turquie 
et  de  la  Sicile  quant  au  blé  et  à  la  viande  (p.  158-159, 166-17L), 
172-173) 

La  deuxième  partie  de  l'ouvrage  de  M.  Fueter  (p.  249-32S) 
se  recommande  par  les  mêmes  qualités  de  clarté  et  d'érudi- 
tion que  la  première.  Grâce  aux  exposés  qui  ont  précédé  on 
y  suit  avec  une  étonnante  facilité  la  succession  des  événe- 
ments, à  une  période  de  l'histoire  où  cependant  leur  compli- 
cation est  extrême  On  en  jugera,  par  exemple,  en  lisant  le 
chapitre  traitant  de  la  Guerre  de  la  Ligue  de  Cambrai  et  de 
ses  suites  (p.  268-282). 


COMPTES    RENDUS  547 

Rompant  ouvertement  avec  les  traditions  de  l'écoln  «  indi- 
vidualiste »,  M.  Fueter  ne  fait  pas  du  tout  intervenir  les 
personnalités  dans  les  événements.  Pour  lui,  ce  sont  les 
gouvernements  qui  agissent,  non  point  tel  souverain,  tel 
ministre  :  dans  les  décisions  politiques,  il  voit  surtout  des 
compromis  entre  les  conceptions  de  personnalités  diverses. 
On  ne  s'étonnera  donc  point  de  ne  pas  rencontrer  chez  lui  des 
portraits  psychologiques  de  Maximilien,  de  Louis  XII,  de 
François  I*%  de  Chai'les-Quint. 

Peut-être  y  a-l-il  même  un  certain  déterminisme  dans  la 
conception  historique  de  M  Fueter.  Sa  méthode  rappelle 
mutatis  nmtandis  celle  d'un  problème  d'arithmétique,  la 
première  partie  de  l'ouvrage  contiendrait  les  données,  la 
seconde  la  solution.  Mais  c'est  là  peut-être  plutôt  une  analogie 
de  fond  que  de  forme. 

Quoiqu'il  en  soit,  quiconque  se  proposera  d'étudier  l'his- 
toire politique  du  xv!*"  siècle  ne  pourra  se  passer  désormais 
de  l'excellent  ouvrage  de  M.  Fueter. 

François  L.  Ganshof. 


H.  Pirenne.  Histoire  de  Belgique.  Y.  La  fin  du  régime  espagnol, 
le  régime  autrichien,  la  révolution  brabançonne  et  la 
révolution  liégeoise.  Bruxelles,  Lamertin,  1920-1921,  in-8°, 
xiii-584  p. 

L'œuvre  de  notre  historien  national  se  poursuit  avec  une 
étonnante  rapidité  :  le  tome  1  est  daté  de  1900;  deux  ans 
après  paraissait  le  tome  II,  en  1907  le  tome  111  et  en  1911  le 
tome  IV.  Sans  la  guerre,  le  tome  V  aurait  été  imprimé 
certainement  au  cours  de  l'année  J915  et,  en  ce  moment, 
la  Revue  aurait  eu  à  rendre  compte,  très  probablement, 
du  tome  VI.  La  rédaction  du  présent  volume  avait  été 
commencée,  en  effet,  peu  de  temps  avant  l'envahissement  du 
pays  par  les  armées  allemandes.  Elle  était  achevée  le  11  no- 
vembre 1915.  L'élaboration  générale  du  plan  est  certainement 
antérieure  au  début  de  la  guerre;  les  grandes  lignes  en  ont 
été  arrêtées  avant  le  mois  d'août  1914,  de  sorte  qu'il  s'agit 
vraiment  d'un  travail  d'avant-guerre.  Seules,  la  dédicace  et 
la  préface  révèlent  au  lecteur  les  circonstances  à  la  fois  dou- 


548  COMPTES    RENDUS 

loureuses  et  glorieuses  qui  ont  retardé  l'apparition  de  ce 
livre  :  le  drame  de  l'Yser  frappa  lauteur  dans  une  de  ses 
affections  les  plus  chères;  son  fils  Pierre  tomba  le  3  novem- 
bre 1914  pour  la  patrie,  désormais  complètement  indépendante, 
dégagée  des  liens  de  la  neutralité  illusoire  qui  l'enserraient 
depuis  1831. 

De  toutes  les  périodes  de  l'histoire  nationale,  celle  qu'em- 
brasse ce  volume  est  certes  la  plus  ingrate.  Elle  s'ouvre,  en 
effet,  pai'  les  cinquante  dernières  années  du  régime  espagnol, 
c'est-à-dire  par  une  véritable  crise  de  dissolution,  au  cours  de 
laquelle  les  Pays-Bas  méridionaux  perdent  pour  ainsi  dire 
conscience  de  leur  existence  collective.  La  guerre  de  la 
Succession  d'Espagne  les  transforme  en  Etat-barrière  et  les 
fait  passer  des  Habsbourgs  d'Espagne  aux  Habsbourgs  d'Au- 
triche, qui,  tout  comme  les  pi'emiers,  les  sacrifient  entièrement 
à  leurs  intérêts  dynastiques.  D'autre  pai't,  le  pays  de  Liège 
s'i-sole  et  se  singularise  toujours  davantage,  et  tend  à  former 
une  petite  Belgique  enclavée  dans  la  grande  :  tandis  que, 
économiquement,  il  s'oriente  vers  la  Hollande,  politiquement 
il  se  rapproche  de  plus  en  plus  de  la  France,  accentuant  ainsi 
les  contrastes  avec  la  masse  des  Pays-Bas  méridionaux,  livrés 
aux  attaques  incessantes  de  ces  deux  puissances.  C'est 
seulement  à  la  fin  du  xviii*  siècle  que  les  destinées  des 
deux  parties  constitutives  de  la  Belgique  contemporaine  sont 
de  nouveau  confondues,  mais  il  faudra  attendre  1815  pour 
voir  se  reproduire  une  communauté  politique  rappelant,  dans 
une  certaine  mesure,  la  Belgique  bourguignonne,  et  1830 
pour  assister  à  une  sorte  de  renaissance  de  la  tradition 
médiévale  et  au  réveil  définitif  de  la  patrie  belge. 

La  période  qui  s'étend  de  1648  à  1789  constitue  donc  une 
véritable  transition,  le  sort  des  provinces  belges  étant  com- 
plètement lié  ;"i  celui  de  «  l'équil  bre  européen  ». 

L'un  des  principaux  mérites  de  l'auteur  est  d'avoir  montré 
les  répercussions  de  la  politique  européenne  sur  le  dévelop- 
pement de  la  Belgique,  mais  l'intérêt  de  son  ouvrage  résille 
sui'tout  dans  les  larges  perspectives  qu'il  ouvre  sur  l'histoire 
économique  et  sociale,  ainsi  que  sur  l'histoire  morale  et  intel- 
lectuelle des  provinces  belges  pendant  cette  crise  d'atonie 
politique  qui  sévit  pendant  un  siècle  et  demi.  L'étude  de  ces 
phénomènes  était  d'autant  ])lus  malaisée  que  les  sources  n'ont 


COMPTES    RENDUS  549 

guère  été  explorées  jusqu'à  présent  et  que  les  travaux 
d'approche,  les  nionogi'aphies,  font  pour  ainsi  dire  entièrement 
défaut.  L'auteur  n'a  eu  à  sa  disposition  qu'un  nombre  relati- 
vement restreint  de  textes  imprimés  et  a  dû  recourir  parfois 
à  des  manuscrits  épai's  dans  nos  dépôts  d'ai'chives  et  nos 
bibliothèques.  Il  est  parvenu,  toutefois,  grâce  à  une  critique 
pénétrante  et  à  une  interprétation  plus  large  et  plus  com- 
préhensive,  à  renouveler  complètement  la  trame  même  de 
l'histoire  nationale  :  il  montre,  entre  autres,  l'influence  sou- 
vent prépondérante  des  facteurs  économiques  dans  l'évolution 
des  Pays-Bas  méridionaux  comme  dans  celle  de  la  principauté 
de  Liège  et  les  contrastes  qui  en  résultent  entre  ces  deux 
entités  politiques.  11  caractérise  les  diverses  phases  du  déve- 
loppement constitutionnel,  et  particulièrement  les  vicis-itudes 
qu'il  a  subies  au  cours  des  guerres  européennes  dont  notre 
teri'itoire  a  été  le  théâtre.  Parmi  les  pages  les  plus  instruc- 
tives du  début  du  livre,  on  remarquera  celles  qui  se  rapportent 
au  (c  régime  anjouin  »  et  au  rôle  joué,  au  début  de  la  guerre 
de  la  Succession  d'Espagne,  par  Bergejxk,  qui  montra  les 
qualités  d'un  véritable  organisateur. 

Mais,  ce  qui  intéresse  davantage  encore,  ce  sont  les  parties 
de  I  ouvrage  consacrées  à  l'un  des  seuls  ordres  de  faits  où  a 
pu  se  manifester  l'activité  nationale  :  le  mouvement  religieux. 
Pour  la  première  fois,  le  rôle  joué  par  le  jansénisme  est  mis 
pleinement  en  lumière  et  on  constate  l'importance  de  la  lutte 
qui  éclata  au  xviii'  siècle  entre  le  despotisme  éclairé  et 
l'ultramontanisme.  On  y  discerne  plusieurs  des  facteurs 
essentiels  qm  ont  déterminé  la  psychologie  de  la  Belgique 
contemporaine. 

Durant  toute  cette  période,  la  personnalité  de  la  Belgique 
dans  le  domaine  intellectuel  et  artistique  est  allée  en  s'atté- 
nuant.  L'auteur  aurait  pu  cependant  relever  les  indices 
encore  nombreux  de  la  persistance  de  traditions  artistiques 
vivaces  dans  la  seconde  moitié  du  xvii«  siècle,  spécialement 
en  ce  qui  concerne  l'école  de  sculpture. 

Le  régime  autrichien  ne  parvint  pas,  malgré  ses  tendances 
absolutistes  et  centralisatrices,  à  détruire  l'autonoiuie  des 
Pays-Bas  méridionaux  L'auteur  consacre  tout  un  chapitre  à 
montrer  comment  il  s'établit  :  il  explique  les  difficultés  qu'en- 
traînèrent l'exécution  du  traité  de  la  Barrière  et  l'installation 


550  COMPTES    RENDUS 

de  l'absolutisme  autrichien.  La  maison  d'Autriche  ne  visa 
qu'à  exploiter  le  pays,  et,  si  elle  s'eiforça  de  le  mettre  en 
valeur,  ce  n'est  que  dans  le  but  de  l'échanger  à  la  première 
occasion  aux  meilleures  conditions  possibles.  D'ailleurs,  elle 
mit  par  dessus  tout  ses  intérêts  dynastiques  et  leur  sacrifia 
notamment  la  Compagnie  d'Ostende  L'auteur  donne  des 
détails  nouveaux  ou  peu  connus  sur  le  gouvernement  de 
Marie-Elisabeth,  sœur  de  Charles  VI,  l'organisation  de  sa 
Cour  à  Bruxelles,  la  politique  ecclésiastique  qui  aboutit  à  la 
disparition  du  jansénisme. 

Le  demi-siécle  compris  entre  la  mort  de  Charles  VI  (1740) 
et  la  bataille  de  Jemappes  fut  une  période  de  sécurité  et  de 
renaissance  :  le  sentiment  de  l'autonomie  nationale  se  fortifie 
à  mesure  que  le  «  despotisme  éclairé  »  de  Marie-Thérèse  et 
de  Joseph  II  prétend  subordonner  le  pays  à  l'Autriche.  Les 
Etats  de  Brabant,  avec  leur  constitution  écrite,  donnent 
l'exemple  de  la  résistance  au  gouvernement  policier  et 
bureaucratique  et  Bruxelles  devient,  dans  toute  la  force  du 
terme,  le  centre  de  la  vie  politique  du  pays. 

Au  sujet  du  relèvement  économique  qui  caractérise  la 
seconde  moitié  du  xviir  siècle,  Fauteur  fournit  une  foule  de 
données  nouvelles,  qui  prouvent  que  ce  relèvement  fut  assez 
rapidement  arrêté  :  ce  ne  sont  que  les  industries  tradition- 
nelles, déterminées  par  les  produits  du  sol,  qui  présentèrent 
une  certaine  activité,  et  l'agriculture  presque  seule  profita  de 
cette  longue  période  de  paix.  Dans  les  domaines  intellectuel 
et  religieux,  le  despotisme  éclairé  exerça  une  influence 
décisive,  qui  se  prolongea  au-delà  de  l'ancien  régime. 

L'auteur  passe  alors  à  l'histoire  du  pays  de  Liège  au 
xviii*  siècle.  A  vrai  dire,  ce  pays  n'a  jamais  connu  de  régiti  e 
autrichien,  de  même  qu'il  n'a  jamais  connu  de  régime  espa- 
gnol. Ses  princes  ont  suivi  une  politique  essentiellement 
française,  anti-autrichienne,  et  l'Etat  liégeois  garda,  malgré 
les  progrès  de  l'absolutisme,  des  traditions  républicaines.  Ce 
chapitre  compte  parmi  les  plus  suggestifs  de  tout  le  livre  :  on 
y  voit  le  développement  d'une  véritable  révolution  industrielle, 
particulièrement  dans  la  région  de  Liège  et  de  Verviers,  la 
lutte  de  tarifs  avec  les  Pays-Bas  autrichiens,  et  les  t>rogrès  de 
l'influence  française,  se  produisant  entre  autres  par  la  propa- 
gande philosophique. 


COMPTES    RENDIS  551 

L'auteur  souligne  l'importance  des  deux  épisodes  qui  ter- 
minent l'ancien  régime  :  la  révolution  brabançonne  et  la 
révolution  liégeoise.  Il  insiste,  avec  raison,  sur  les  différences 
qui  les  distinguent,  mais  il  note  également  leurs  points  de 
contact  :  il  montre  entre  autres  les  liens  qui  les  rattachent  au 
début  aux  événements  de  France.  La  révolution  brabançonne 
tourna  toutefois  à  la  réaction  et  au  «  cléricalisme  »,  tandis 
que  la  révolution  liégeoise  fut  essentiellement  progressiste, 
égalitaire  et  laïque. 

On  croyait  connaître  les  grandes  lignes  de  ces  deux  mouve- 
ments. L'auteur  les  montre  sous  un  aspect  tout  différent  de 
celui  qu'ils  présentaient  Jusqu'ici  :  il  nous  fait  mieux  saisir 
entre  autres  la  signification  et  la  portée  des  réformes  de 
Joseph  n,  dont  il  exagère  cependant  les  défauts  et  les  mala- 
dresses. Le  portrait  qu'il  nous  fait  de  l'empereur  philosophe 
est  trop  poussé  au  noir  :  il  va  jusqu'à  le  comparer  à  Phi- 
lippe IL  Les  analogies  entre  les  deux  monarques  se  réduisent 
en  somme  à  leurs  tendances  absolutistes;  en  dehors  de  cela, 
ils  n'ont  rien  de  commun.  Leurs  objectifs  et  leurs  procédés 
sont  tout  à  fait  différents  :  on  se  rappellera  que  les  violences 
de  d'Alton  ont  été  absolument  et  immédiatement  réprouvées 
par  .Joseph  II,  tandis  que  celles  du  d'Albe  ont  été  concertées 
d'avance  avec  celui-ci  par  le  roi  catholique.  Quoi  qu'il  en  soit, 
les  conclusions  si  originales  et  si  instructives  de  ces  derniers 
chapitres  fourniront  aux  historiens  de  l'avenir  le  point  de 
départ  de  recherches  qui  ne  manqueront  pas  d'être  très  fruc- 
tueuses, car  cette  époque  compte  parmi  les  plus  intéressantes 
de  notre  passé  national  et  les  sources,  très  nombreuses,  n'en 
ont  encore  été  explorées  et  mises  à  profit  que  très  imparfaite- 
ment. 

L'allure  générale  du  volume  est  plus  concentrée  et  plus 
synthétique  que  celle  de  ses  devanciers  :  il  en  résulte  que  la 
personnalité  même  de  l'auteur  s'y  révèle  davantage;  c'est  le 
cas  surtout  pour  les  résumés  si  utiles  qui  précèdent  les  lïrandes 
divisions  de  l'ouvrage.  Comme  ces  bijoux  en  mosaïque  qui 
constituent  des  réductions  de  grandes  peintures,  ils  marquent, 
en  quelques  touches  sobres  et  vigoureuses,  les  traits  dominants 
des  différents  chapitres  ;  ils  négligent  nécessairement  les 
nuances,  les  demi-teintes,  que  l'on  trouvera  dans  le  corps 
même  du  livre.  Partout  d'ailleurs,  aussi  bien  dans  les  croquis 


552  COMPTES    RENDUS 

synthétiques  que  dans  les  tabteaux  descriptifs,  souvent  très 
fouillés,  s'affirmentles  préoccupations  scientifiques  de  l'auteur, 
sa  haute  probité  et  sa  scrupuleuse  conscience.  S'il  a  cru  devoir 
conserver  les  cadres  traditionnels  pour  certaines  parties  de  la 
période  qu'il  a  étudiée,  il  n'en  est  pas  moins  vrai  qu'il  présente 
la  suite  même  des  événements  sous  un  jour  complètement 
nouveau  et  qu'il  est  resté  toujours  attentif  au  précepte  si  heu- 
reusement formulé  par  Taine  :  «  L'historien  appartient  aux 
faits;  tant  pis  où  ils  le  mènent.  )) 

H.  Vander  Linden. 


Comte  Louis  de  Lichtervelde,  Le  Congrès  yiational  de  1830^ 
études  et  portraits.  Bruxelles,  Dewit,  1922,  in-12,  xiii- 
255  p. 

Le  recul  indispensable  pour  pouvoir  juger  sainement  les 
événements  dans  lesquels  les  passions  politiques  ont  joué  le 
rôle  principal  nous  permet  enfin  d'envisager  sous  leur  véri- 
table jour  l'état  d'esprit,  les  tendances  et  les  aspirations  de  nos 
pères,  au  lendemain  de  la  révolution  de  1830. 

Aussi  le  travail  du  comte  do  Lichtervelde  différe-t-il  abso- 
lument, au  point  de  vue  du  fond  et  de  la  forme,  des  œuvres 
des  écrivains  officiels  qui,  à  commencer  par  Théodore  Juste, 
se  firent  les  apologistes  des  fondateurs  de  notre  indépendance, 
ne  mettant  en  relief  que  leurs  incontestables  qualités  et  les 
services  rendus  au  pays  et  gardant  un  prudent  silence  sur 
leurs  défauts  et  leurs  fautes,  souvent  irréparables. 

Au  moyen  d'une  documentation  sérieuse,  utilisant  à  la  fois 
les  sources  et  les  travaux  modernes,  l'auteur  a  retracé 
l'œuvre  de  notre  Congrès  national  en  nous  permettant  de  la 
mieux  comprendre  par  l'étude  de  la  psychologie  de  certaines 
catéiïories  sociales  et  des  principaux  individus  qui  y  jouèrent 
un  rôle  déterminant.  Ce  travail  consciencieux  abonde  en 
aperçu  nouveaux,  scrupuleusement  objectifs,  et  même  cer- 
tains aspects  de  notre  révolution  y  sont  étudiés  pour  la  pre- 
mière fois  d'une  façon  rationnelle. 

C'est  ainsi  que  le  comte  de  Lichtervelde  consacre  un  cha- 
pitre tout  entier  aux  élections  du  3  novembre  1830,  dont  l'im- 
portance primordiale  n'avait  jamais  été  suffisamment  mise  en 
relief  par  les  historiens.  Il  nous  fait  assister  à  ce  que  l'on 


COMPTES    RENDUS  553 

appelle  de  nos  jours  la  cuisine  électorale  :  convocation  des 
électeurs,  conditions  de  l'électorat,  détail  des  opérations  du 
scrutin,  attitude  des  électeurs  et  des  candidats,  caractère  de 
la  lutte,  nombre  des  votants,  etc.  Il  commente  ensuite  fort 
judicieusement  les  résultats  de  ces  élections  :  l'écrasement 
des  Orangistes,  en  dépit  de  la  force  réelle  qu'ils  avaient  con- 
servée dans  certaines  villes  et  dans  certains  milieux  ;  le 
succès  des  personnalités  connues  depuis  longtemps,  l'empor- 
tant, presque  partout,  sur  celles  mises  sur  le  pavois  par  les 
événements  révolutionnaires;  la  fusion  de  tous  les  éléments 
qui  avaient  lutté  contre  le  gouvernement  déchu  ;  le  triomphe 
de  l'opinion  modérée  sur  les  démagogues  à  la  De  Potter. 
L'auteur  insiste  enfin  sur  le  caractère  admirablement  repré- 
sentatif du  Congrès  national  qui,  bien  qu'élu  par  30,000  élec- 
teurs à  peine,  représentait  parfaitement  la  volonté  de  la 
nation,  exprimée  par  les  400,000  pétitionnaire-^  de  1829. 

Le  comte  de  Lichtervelde  s'edorce  ensuite  de  résoudre  le 
problème  tant  de  fois  agité  :  «  Quel  fut  au  Congrès  national 
le  parti  dominant?  Qui  des  catholiques  et  des  libéraux  a  pu  se 
flatter  de  former  la  majorité?  »  Après  avoir  fort  judicieuse- 
ment discuté  des  témoignages  contradictoires  des  contempo- 
rains et  analysé  les  votes  de  l'assemblée,  il  conclut  que  catho- 
liques et  libéraux  étaient  en  nombre  sensiblement  égal  au 
Congrès  et  que  la  majorité  était  formée,  tantôt  dans  un  sens, 
tantôt  dans  l'autre,  par  uti  tiers  environ  des  députés  qui 
échappaient  à  une  classification  précise  et,  à  défaut  d'autres 
vocables,  devaient  être  qualifiés  d'unionistes.  Les  tendances  et 
les  sympathies  de  ce  groupe  sont  très  clairement  étudiées.  De 
même,  l'auteur  réduit  à  leur  véritable  importance  le  parti 
orangiste  et  le  parti  français  et  insiste  sur  ce  point  particu- 
lièrement intéressant  que  «  à  mesure  que  la  situation  diploma- 
tique se  compl  quait  davantage,  on  vit  au  Congrès  la  ligne  de 
démarcation  entre  les  partis  devenir  de  moins  en  moins 
nette  ».  Les  problèmes  nationaux  concentrèrent,  lattention  et 
rejetèrent  au  second  plan  les  divergences  de  vues  qui  sépa- 
raient les  hommes  de  droite  des  hommes  de  gauche. 

Deux  chapitres  sont  consacrés  au  rôle  joué  au  Congrès  par 
deux  classes  sociales  que  l'on  eût  pu  croire  imbues  des  idées 
politiques  et  religieuses  de  l'ancien  régime  :  la  noblesse  et  le 
clergé.  A  très  juste  titre,  l'auteur  insiste,  une  fois  de  plus,  sur 


554  COMPTES    RENDUS 

les  différences  trop  ignorées  du  grand  public  qui  séparaient 
nos  anciennes  institutions  de  celles  de  la  monarchie  française 
et  montre  comment,  au  Congrès,  les  nobles  et  les  ecclé- 
siastiques surent  comprendre  les  exigences  de  leur  temps  et 
firent  preuve,  en  toute  matière,  d'un  esprit  large  et  tolérant. 

L'auteur  aborde  les  grands  problèmes  relatifs  à  la  politique 
internationale  dans  les  chapitres  intitulés  :  le  Congrès  tt 
V Angleterre  et  le  Congrès  et  la  Défense  nationale.  Avec 
raison,  il  n'hésite  pas  à  écrire  que  «  la  plus  grave  erreur  que 
l'on  puisse  reprocher  aux  hommes  de  1830,  c'est  l'étrange 
incompréhension  qu'ils  eurent  de  la  politique  de  l'Angle- 
terre »,  et  il  démontre  d'une  façon  irréfutable  tout  ce  que  nous 
coûta,  au  point  de  vue  diplomatique,  la  faute  commise  par 
notre  gouvernement  en  cherchant  du  côté  de  la  France  un 
appui  exclusif.  Ces  pages  seraient  utiles  à  lire  pour  beaucoup 
de  nos  politiciens  d'aujourd'hui  !  De  même,  la  singulière 
inconséquence  des  membres  du  Congrès  national,  qui  s'ima- 
ginaient pouvoir  tenir  tête  à  l'Europe,  tout  en  négligeant  de 
doter  le  pays  d'une  véritable  force  militaire,  et  qui  préci- 
pitèrent ainsi  le  pays  dans  la  catastrophe  de  1831,  est  éner- 
giquement  mise  en  relief.  Là  aussi,  les  pages  du  comte  de 
Lichtervelde  abondent  en  précieux  enseignements. 

Il  était  cependant  au  Congrès  national  un  homme  qui  avait 
vu  clair  et  qui  avait  compris  le  rôle  que  notre  pajs  devait 
jouer  dans  la  politique  européenne.  Cet  homme  fut  Joseph 
Lebeau  !  Après  avoir  analysé  son  caractère,  ses  idées  et  son 
œuvre  et  après  l'avoir  comparé  à  ses  contemporains  :  Rogier, 
Gendebien,  Van  de  Weyer  et  de  Gerlache,  le  comte  de 
Lichtervelde  n'hésite  pas  à  le  proclamer  le  «  grand  homme  de 
la  Révolution  »;  et  tout  le  monde,  après  la  lecture  de  cette 
magistrale  étude  de  psychologie  politique,  se  ralliera  à  cet 
avis. 

Enfin  un  dernier  chapitre  étudie  V unité  de  la  patrie,  telle 
que  le  Congrès  l'a  unanimement  proclamée  au  détriment  de 
l'ancien  particularisme  et  telle  qu'il  l'a  défendue  au  cours  de 
ses  travaux. 

Ces  pages  sont  à  la  fois  instructives  et  réconfortantes.  Car 
le  comte  de  Lichtervelde  a  su  éviter  l'écueil  auquel  se 
heurtent  trop  souvent  ceux  qui  veulent  étayer  une  thèse  au 
moyen  d'arguments  d'ordre  historique.  \\  est  toujours  resté 


COMPTES    RENDUS  555 

strictement  objectif,  il  a  exi)Osé  les  faits  avec  clarté  et  ne 
cherche  pas  à  en  tirer  des  conclusions  d'une  portée  exagérée. 
La  similitude  qu'il  expose  entre  la  situation  internationale  de 
la  Beli^ique  en  1R30  et  relie  de  notre  pays  en  1919  est  basée 
sur  des  éléments  scientifiquement  incontestables,  et  ainsi  il  est 
parvenu  à  tirer  de  notre  histoire  une  judicieuse  et  utile 
leçon. 

Cii.  Terlinden. 


Rafaël  Ballester.  hibUonrafïa  de  la  li/storia  de  Kspana.  Cutn- 
logo  metodico  y  cronolôgico  de  las  fuoites  y  ohras  princi- 
pales relatiras  a  la  histor'/a  de  Espaha  desde  los  ori(/enes 
hasta  vj'estros  dms.  Gerona,  1921.  Barcelona.  Sociedad 
gênerai  de  publicaciones.  In-S",  xvi-297  p..  pesetas  7.50. 

L'auteur  de  ce  manuel  bibliographique  a  pris  comme 
modèles  Monod,  Biblionraphie  de  l'h/stoire  de  France  (1888), 
et  PiRENNK,  Bibliographie  de  l'histoire  de  Belgique  i2^  édit., 
1902).  Son  livre  est  subdivisé  de  la  même  manière  :  une 
première  partie  donne  les  Collections  et  ouvrages  généraux 
(I,  Sciences  auxiliaires.  U,  Sources.  IH,  Etudes  historiques 
proprement  dites  [travaux  de  seconde  main].  IV.  Périodiques); 
une  seconde  partie  est  consacrée  à  V Histoire  par  époques. 

Certaines  critiques  ont  été  formulées  contre  ce  plan.  On 
pourrait  en  effet  prétendre  que  certains  ouvrages  classés  dans 
la  première  partie  seraient  m  eux  à  leur  place  dans  la 
seconde.  Mais  Monod,  dans  sa  préfai  e  (p.  ix),  avait  répondu 
d'avance  à  ces  critiques.  La  classification  des  ouvrages  ne  peut 
toujours  ètie  absolument  rigoureuse;  d'autre  part,  des  renvois 
judicieux  aident  le  lecteur  dans  ses  recherches.  Au  reste, 
pareille  bibliographie  n'est  pas  une  machine  à  distribution 
automatique;  elle  doit  être  maniée  avec  souplesse. 

Le  choix  des  ouvrages  cités  a  été  fait  par  M  Ballester 
selon  les  principes  de  ses  prédécesseurs.  11  nous  donne  1399 
numéros,  prenant  28U  pages;  certains  titres  sont  suivis  d'indi- 
cations complémentaires.  Un  index  de  17  pages,  sur  deux 
colonnes,  termine  le  volume. 

Le  travail  de  M.  Ballester  aura  la  plus  grande  utilité;  il 
sera  particulièrement  apprécié  en  Belgique.  Il  est  digne  des 


556  COMPTES    RENDUS 

précédents  ouvrages  du  savant  professeur,  dont  la  série  fut 
ouverte  par  ses  Fuentes  narratiras  de  la  Histor'ia  de  Espana 
durante  la  Edad  Media  [417-1474). 

AuG.  Vincent. 


Henri  Berr.  L'histoire  traditionnelle  et  la  synthèse  historique. 
Paris,  Alcan,  1921,  16%  x-146  \).  (Bibliothèque  de  Philo- 
sophie contemporaine). 

L'histoire  a  été  longtemps  considérée  comme  une  œuvre  de 
littérature.  Depuis  quelques  années  la  façon  dont  il  faut  faire 
de  l'histoire  est  devenue  l'objet  de  savantes  discussions.  Le 
directeur  de  la  Revue  de  synthèse  historique  réunit  dans  le 
présent  volume  quatre  études.  Il  passe  en  revue  les  formes  du 
travail  historique  qui  s'opposent  à  la  synthèse,  réfute  les 
objections  des  historiens  traditionalistes  à  une  conception 
synthétique  de  histoire,  et  précise  la  notion  de  synthèse.  La 
première  étude  est  consacrée  à  un  représentant  de  l'esprit 
d'analj^se,  Philippe  Tamizey  de  Larroque,  type  des  prépara- 
teurs qui  accumulent  les  documents  et  s'arrêtent  trop  au 
détail.  Les  deux  études  suivantes  sont  des  discussions  avec  un 
historien  «  historisant  »,  Louis  Halphen,  et  avec  un  théoricien 
de  l'histoire  «  historisante  »,  l'historien  roumain  A.  D.  Xènopol. 
L'histoire  «  historisante  »,  provisoirement  nécessaire,  expose, 
explique  quelquefois,  mais  elle  regarde  tro])  l'histoire  comme 
une  science  du  «  particulier  ».  Enfin  l'auteur  étudie  l'œuvre 
histoi'ique  et  l'évolution  d'un  théoricien  de  l'histoire-science, 
Paul  Lacomhe.  La  préoccupation  dominante  de  cet  historien 
était  de  donner  aux  études  historiques  leur  statut  de  science. 
Il  élimine  l'événement,  le  fait  unique,  l'accidentel,  pour  ne 
considérer  que  l'institutionnel  ou  les  faits  généraux  de  l'his- 
toire. Il  oppose  l'histoire  institutionnelle,  sociologique,  à 
l'histoire  narrative,  événementielle. 

Le  présent  volume  constitue  un  utile  complément  à  la 
i>ynthèse  en  histoire  du  même  auteur.  M.  Berr  nous  montre 
que  la  synthèse  historique,  qui  doit  se  constituer  sous  la 
double  forme  de  la  théorie  guidant  le  travail  et  de  la  construc- 
tion explicative,  est  la  seule  forme  scientifique  de  Ihistoire. 

G.  Van  Langendonck. 


COMPTES    RENDUS  557 

Georges  Cornil.  Droit  romain.  Aperçu  historiqtœ  sommaire. 
Bruxelles,  Impr.  niédic.  et  scientif.,  1921,  in-8°,  746  p. 

L'enseignement  du  droit  romain  a  subi  en  ces  dernières 
années  de  nouvelles  attaques.  Mieux  que  toute  discussion  aca- 
démique, la  publication  d'œuvres  telles  que  celle  de  notre 
savant  collègue  peut  servir,  auprès  des  esprits  réfléchis,  à 
dissiper  les  malentendus  et  les  préjugés.  La  méthode  histo- 
rique dont  s'inspire  M.  Cornil  restitue  au  droit  romain  sa  phy- 
sionomie vivante  :  et  pour  ceux  —  il  s'en  trouve  —  qui  regret- 
teraient la  méthode  exclusivement  juridique  de  jadis,  faut-il 
redire  que  l'exposé  d'un  système  juridique,  ancien  ou  moderne, 
dans  sa  réalité  concrète,  aura  toujours  une  valf-ur  de  formation 
bien  supérieure  au  jeu  brillant  et  subtil  des  constructions 
abstraites  ? 

La  méthode  de  l'auteur  se  marque  dès  l'abord  dans  le  plan 
même  de  l'ouvrage.  La  ]M'emière  partie  est  consacrée  au 
Droit  national  romain,  depuis  la  fondation  de  Rome  jusque 
vers  l'an  .'^50  av.  J.-C,  où  commence  l'ère  des  grandes 
conquêtes.  La  deuxième  partie  s'intitule  :  «  Formation  et  épa- 
nouissement (lu  Droit  classique  »,  et  nous  mène  jusqu'à  la  fin 
du  iii^  siècle  ap.  J.-C.  La  troisième  partie  traite  du  Droit 
byzantin.  On  ne  peut  que  se  féliciter  de  l'importance  des  iléve- 
loppements  accordés  par  M.  Cornil  à  cette  dernière  période 
du  Droit  romain.  Son  œuvre  contraste  à  cet  égard  fort  heu- 
reusement avec  les  manuels  les  plus  justement  réputés;  elle 
leur  apporte  un  complément  utile,  à  notre  sens,  même  indis- 
pensable. Quant  au  principe  de  la  division  tripartite  adoptée 
par  l'auteur,  à  l'exemple  de  MM.  Cuq  et  v.  Mayr,  il  peut,  au 
point  de  vue  purement  didactique,  ofîrir  quelques  inconvé- 
nients. Ce  n'est  point  sans  motifs  que  M.  Cuq,  dans  son 
Manuel  de  lîHT,  a  renoncé  à  une  pareille  segmentation 
de  la  matière.  Mais  il  faut  convenir  qu'elle  marque  on  ne 
peut  mieux  les  étapes  essentielles  de  l'évolution  juri  lique. 
Au  reste,  l'extension  exceptionnelle  que  M.  Cornil  donne  à  la 
deuxième  période  (plus  de  six  siècles)  contribue  dans  une  très 
large  mesure  à  en  atténuer  les  désavantages.  L'indicaiiou  des 
sources  (dont  on  trouvera  une  table  chronologique  en  fin  de 
l'ouvrage)  est  particulièrement  riche,  aussi  complète  qu'on  le 
peut  désirer  dans  un  manuel,  et  révèle  partout  un  ch-ix  fort 


558  COMPTES    RENDUS 

judicieux.  Mais  qu'il  nous  soit  permis  de  déplorer  l'absence 
de  toute  référence  bibliographique.  On  en  éprouve  d'autant 
plus  de  regrets  qu'en  toutes  matières  l'auteur  se  révèle  parfai- 
tement au  courant  des  travaux  les  plus  récent:?  et  en  posses- 
sion d'une  documentation  extrêmement  étendue.  Dans  sa  trop 
modeste  préface,  M.  Cornil  se  borne  à  renvoyer  aux  manuels 
de  MM.  Girard  et  Cuq;  mais  ceux-ci  ne  lui  apportent  pas  tout 
le  complément  désirable,  particulièrement  pour  la  période 
byzantine.  Nous  émettons  l'espoir  de  voir  combler  cette 
lacune  dans  une  prochaine  édition. 

Ces  observations  générales  faites,  nous  relèverons  dans 
chacune  des  trois  parties  de  l'ouvrage  quelques  points  qui  ont 
surtout  attiré  notre  attention  —  en  nous  excusant  d'avance 
d'un  choix  forcément  arbitraire. 

En  ce  qui  conceri«e  l'origine  des  notions  fondamentales  du 
droit  des  choses,  M.  Cornil  adopte  très  lai'gement  les  hypo- 
thèses qui  les  font  dériver  des  conceptions  délictuelles.  C'est 
ainsi  que  la  rindicatio,  sanction  du  droit  réel,  aurait  eu  pri- 
m  tivement  le  caractère  d'une  action  délictuelle  (p.  45).  La 
notion  d'obligation  serait  apparue  avec  le  système  des  compo- 
sitions volontaires,  où  le  pacte  entre  la  victime  et  le  coupable 
aurait  engendré  le  type  le  plus  ancien  d'obligation  contrac- 
tuelle, le  régime  des  compositions  légales  faisant  ensuite  sur- 
gir l'obligation  délictuelle.  Combiné  avec  la  distinction  entre 
l'idée  d'engagement  (Haftung)  et  celle  de  devoir  (Schuld),  ce 
processus  est  décrit  par  l'auteur  avec  une  ampleur  et  une 
clarté  remarquables  (v.  aussi  Cornil,  Mélanges  Girard,  1, 
p.  199-263).  En  dépit  de  la  faveur  que  ces  théories  ont  rencon- 
trée, nous  ne  pouvons  dissimuler  les  hésitations  où  elles  nous 
laissent.  Ainsi,  dans  le  système  des  compositions  volontaires, 
le  pacte  n'est  dans  son  principe  que  le  rachat  du  droit  de  ven- 
geance, et  non  une  source  d'obligation.  Et  quant  au  régim^^ 
des  compositions  légales,  tout  poi'te  à  croire  qu'avant  de 
fonder  une  créance  au  profit  de  la  victime  il  ne  fournit  pen- 
dant longtemps  qu'une  faculté  légale  de  rachat  pour  le  cou- 
pable. En  sorte  que,  dans  le  système  délictuel  lui-même,  la 
notion  d'obligation  n'aurait  fait  qu'une  apparition  assez  tar- 
dive, à  une  époque  où  rien  n'empêche  d'admettre  l'existence 
de  conventions  étrangères  à  tout  fait  délictueux.  Si  l'on  tient 
compte,  d'autre  part,  des  particulaiités  qui  distinguent  l'obli- 


COMPTES    RENDUS  55& 

gation  délictuelle  à  Tépoque  historique,  il  y  a  bien  quelque 
raison  de  penser  que  les  obligations  ex  contractu  et  Genès- 
es delicto  procèdent,  tant  au  point  de  vue  historique  que  juri- 
dique, de  sources  parfaitement  indépendantes.  —  A  la  base  du 
développement  historique  de  la  procédure  civile  romaine, 
l'auteur  place  résolument  une  forme  d'arbitrage  privé  (p.  81). 
Les  témoignages  médiocres  et  d'ailleurs  discordants  de  Denys 
d'Halicarnasse  et  de  Gicéron  ne  sauraient  prévaloir  contre 
cette  conception  qui  seule  rend  explicables  les  traits  fonda- 
mentaux de  Vordo  iudiciorum  privatorum.  La  position  prise 
à  cet  égard  par  M.  Gornil  nous  parait  préférable  à  celle  de 
M.  Girard  (Organisalion  judiciaire,  p.  22,  n°  1,  23),  qui 
n'admet,  pour  l'époque  royale,  le  renvoi  de  l'affaire  à  un  juré 
qu'à  titre  de  simple  faculté.  L'exercice  direct  de  la  justice 
royale  dans  les  litiges  d'ordre  privé  fut  sans  doute  toujours 
considéré  comme  excédant  les  limites  de  Vimperium  leyiti- 
mum,  et  les  garanties  concédées  ou  prises  à  cet  égard  suf- 
fisent parfaitement,  selon  nous,  à  expliquer  les  légendes  qui 
représentent  la  division  de  l'instance  en  ses  deux  phases 
comme  une  réforme  démocratique  de  Servius  TuUius  ou  même 
des  premiers  temps  de  la  République. 

Dans  le  vaste  ensemble  que  forme  l'exposé  du  Droit  clas- 
sique (p.  95-425),  nous  signalerons  comme  particulièrement 
instructif  et  caractéristique  de  la  méthode  de  l'auteur,  le  cha- 
pitre consacré  au  "  rôle  de  l'écriture  dans  l'activité  juri- 
dique )).  à  loijposition  entre  les  professiones  ou  testationes^ 
simples  procès- verbaux  d'actes  accomplis  oralement,  et  les 
chirograplia  empruntés  à  la  pratique  grecque,  aux  instru- 
menta publice  conf'ecta,  etc.  Bien  rares  sont  les  manuels  qui 
fournissent  à  cet  égard  des»  données  suHisantes,  pourtant 
indispensables  à  quiconque  veut  saisir  le  mécanisme  de  la  vie 
juridique  romaine.  Les  précisions  dans  lesquelles  l'auteur 
entre  à  cet  égard  nous  paraissent  entièrement  justifiées.  — 
L'évolution  de  l'action  en  revendication,  depuis  la  forme 
double  qu'elle  revêt  dans  la  L.  A.  per  sacramenturu  jusqu'à 
la  formula  pelitoria,  est  excellemment  décrite.  Pourtant  nous 
eussions  souhaité  voir  au  moins  mentionner  la  règle  invitai 
nemo  rem  cogitur  defendere  (D.  50,  17,  fr.  156,  1)  dont 
l'importance  a  été  si  justement  mise  en  lumière  par  Wlassak 
et  Lenel.  C'est  dans  cette  règle  que  la  revendication  classique. 


560  COMPTES    RENDUS 

SOUS  une  forme  visiblement  empruntée  aux  actions  person- 
nelles, manifeste  sa  nature  essentiellement  réelle  et,  comme 
le  disent  encore  les  Instituies  de  Justinien,  copiant  sans  doute 
quelque  texte  classique,  son  caractère  de  controversia  de  re 
cum  eo  qui  nullo  jure  (nobis)  obligatus  est  (IV,  6).  De  plus,  ce 
principe  permet  de  reconnaître  la  fonction  originaire  et  prin- 
cipale de  Vactio  ad  exhibendum,  qui  ne  nous  parait  pas  pré- 
cisément avoir  été  de  rendre  possible  une  mndicatio  ou  une 
action  noxale  (p.  371  et  s.),  mais  plutôt  de  permettre  au 
demandeur  une  ductio  iussu  praeioris  en  présence  d'un  refus 
d'accepter  l'action  de  la  part  du  défendeur.  —  En  ce  qui  con- 
cerne la  question  si  controversée  de  la  date  d'apparition  des 
contrats  consensuels,  M.  Cornil  montre  une  réserve  prudente 
(p.  293)  qui  contraste  fort  avec  l'opinion  si  tranchée  de 
M.  Girard.  Tenant  compte  des  vues  développées  par  l'auteur 
touchant  la  nature  du  ius  gentium  (p.  97-98,  439),  dont  les 
institutions  forment  une  partie  du  droit  national  romain  et 
sont  également  accessibles  aux  citoyens  et  aux  pérégrins,  peut- 
être  M.  Cornil  ne  ferait-il  point  difficulté  d'admettre  la  vali- 
dité de  ces  contrats  entre  citoyens  dés  avant  la  lex  Aebutia. 
Mais  dés  lors  la  nécessité  n'apparaît  plus  guère  de  faire  surgir 
entre  la  vente  réelle  per  aes  et  libram  et  la  vente  consensut41e, 
ce  chaînon  purement  conjectural  et  d'une  si  fâcheuse  construc- 
tion juridique  de  la  vente  formée  de  deux  stipulations 
(p.  337).  —  Quant  aux  origines  du  système  formulaire, 
M.  Cornil  les  rattache  à  une  pratique  grecque  que  les  gouver- 
neurs romains  auraient  rencontrée  en  Sicile;  la  nouvelle  pro- 
cédure aurait  passé  de  là  à  la  juridiction  du  préteur  pérégrin 
pour  être  finalement  adoptée  par  le  ius  civile  en  vertu  de  la 
lex  Aebutia  (p.  419).  Cette  hypothèse,  que  M.  Fliniaux  a  par- 
ticulièrement développée  (Nouv.  Rev.  Hist.  1909,  p.  538-545), 
est  absolument  repoussée  par  M.  Cuq  (Manuel,  p.  850,  n.  2). 
En  tout  cas,  il  ne  paraît  guère  possible  d'admettre  le  ratta- 
chement de  la  dicarum  scriptio  sicilienne  soit  à  l'usage  égyp- 
tien (lu  KaTaxujpiaïaôç,  soit  à  la  TPC^'Î  ^îki-jç  attique  (Mitteis, 
Grundzuge,  37,  n,  i2;  Carcopino,  La  loi  de  Hléron  et  les 
Romains,  1919,  p.  124  et  s.). 

La  dernière  partie  consacrée  au  Droit  byzantin  est  assuré- 
ment la  plus  neuve  et  la  plus  originale  de  l'ouvrage  L'oi'ga- 
nisalion  judiciaire  et  la  procédure,  le  droit  des  personnes  y 


COMPTES    RENDUS  561 

occupent  naturellement  une  place  prépondérante.  Ce  sont  les 
domaines  que  les  transformations  politiques  ei  sociales  de 
l'Empire  romain  devaient  le  plus  profondément  affecter.  On 
trouverait  difficilement  meilleuie  introduction  à  l'étude  de 
la  vie  Juridique  du  monde  byzantin  que  l'excellent  chapitre 
qui  traite  de  la  variété  el  de  l'immobilisation  des  conditions. 
Les  personnes  juridiques,  d'autre  part,  font  l'objet  d'une 
étude  très  fouillée  et  d'un  intérêt  à  la  fois  historique  et  juri- 
dique considérable.  L'auteur  y  retrace  comment,  sous  l'in- 
fluence de  causes  économiques,  les  corporations  profession- 
nelles de  l'époque  classique  se  transformèrent  graduellement 
en  corporations  officielles,  obligatoires  et  héréditaires.  Au 
reste,  le  régime  juridique  de  ces  corporations  demeure  singu- 
lièrement hybride,  et  l'on  y  voit  subsister,  à  côté  du  patri- 
moine propre  à  la  corporation,  des  droits  et  des  obligations 
sociales  de  ses  membres  vis  à  vis  des  tiers.  C'est  ainsi  que  les 
collegtati  ou  corporali  se  partagent  les  successions  testamen- 
taires et  les  legs  déférés  à  la  corporation,  et  d'autre  part 
répondent  sur  leur  patrimoine  propre  de  l'accomplissement 
du  service  public  imposé  à  la  corporation.  D'autres  para- 
graphes traitent  de  la  personnalité  juridique  de  l'Eglise,  de 
l'administration  et  de  l'autonomie  des  établissements  chari- 
tables, des  fondations,  etc. 

Nous  abuserions  de  la  place  qui  nous  est  faite  en  prolon- 
geant cette  analyse.  Ces  brèves  indications  suffiront  à  montrer 
avec  quelle  maîtrise  et  quelle  largeur  de  vues  l'auteur  a  em- 
brassé son  vaste  sujet.  Ajoutons  que  sous  les  préoccupations 
de  l'historien  du  droit  se  révèlent  constamment  celles  du  pro- 
fesseur, toujours  soucieux  d'éveiller  chez  ses  auditeurs  et 
lecteurs,  avec  le  sens  général  du  droit,  celui  de  sa  perpétuelle 
évolution.  L'œuvre  de  M.  Cornil  est  de  celles  dont  la  science 
juridique  be'ge  peut  légitimement  s'honorer. 

Ferxand  De  Vissciier. 

Gabriel  Millet.   L'ancien    art  serbe.   I.   Les  Églises.   Paris, 
Picard,  1919,  in-4°,  208  p. 

Dans  ce  luxueux  volume,  admirablement  illustré,  l'auteur 
étudie  avec  sa  maîtrise  coutumiére  l'architecture  ecclésias- 
tique de  l'ancienne  Serbie.  Durant  trois  cents  ans,  du  xii«  au 
xiv  siècle,  les  Serbes  dominèrent  l'ouest  de  la  péninsule  des 

30 


562  COMPTES    RENDUS 

Balkans  et  ils  y  fondèrent  un  empire  qu'enrichit  le  commerce 
et  où  fleurirent  les  œuvres  de  la  civilisation.  Plus  tard,  sous 
l'oppression  turque,  ils  refluèrent  vers  le  nord  et  peuplèrent 
le  sud  de  la  plaine  hongroise.  Placés  entre  les  Latins  et  les 
Grecs,  ils  subirent  dans  l'ancienne  Dalmatie  l'influence  de 
Venise,  dans  la  région  du  Vardar  celle  de  Gonstantinople,  et 
adoptèrent  d'un  côté  le  style  lombard,  de  l'autre  le  style 
byzantin.  Mais  dans  la  Serbie  propre,  ils  surent  combiner 
avec  goût  les  deux  traditions  et  créer  des  types  architectu- 
raux qui  leur  furent  propres.  Montrer  dans  le  détail  l'origina- 
lité de  cette  combinaison,  indiquer  comment  un  peuple  qui 
a  beaucoup  construit,  a  modifié  les  modèles  dont  son  éclec- 
tisme s'inspirait,  et  faire  valoir  ainsi  son  mérite  artistique, 
telle  est  la  tache  ardue  dont  M.  Millet  s'est  acquitté  avec 
une  aisance  lucide  servie   par  une  vaste  érudition. 

La  série  des  églises  que  reproduisent  les  belles  planches  de 
son  volume  et  dont  un  commentaire  substantiel  analyse  les 
éléments,  apportera  à  beaucoup  de  lecteurs  une  révélation 
et  apprendra  quels  maîtres  architectes  produisit  une  nation 
dont  nous  avons  coutume  d'apprécier  surtout  les  qualités 
guerrières.  F.  Gumont. 

Nicola  Turchi.   Storia  délie  religioni.   Turin,   Bocca,   in-8°, 
ix-658  p. 

L'histoire  des  religions  éveille  en  Italie  un  intérêt  croissant: 
Les  chaires  qui  lui  sont  consacrées  se  multiplient,  les  publica- 
tions qui  s'y  rapportent  augmentent  de  nombre  et  de  valeur. 
M.  Nicola  Turchi,  qui  enseigne  cette  science  nouvelle  à  l'uni- 
versité de  Rome,  a  vu  s'épuiser  rapidement  une  première 
édition  de  son  manuel;  il  nous  en  donne  aujourd'hui  une 
seconde,  fortement  augmentée.  Sauf  le  judaïsme  et  le  chris- 
tianisme, qu'ont  fait  exclure  des  raisons  d'opportunité,  toutes 
les  croyances  religieuses  de  l'humanité  passée  et  présente  ont 
trouvé  place  dans  ce  gros  volume,  qui  condense  une  quantité 
énorme  de  renseignements. 

Après  avoir  défini  la  religion,  l'auteur  expose  les  systèmes 
qui  ont  tenté  d'en  expliquer  l'origine  et  l'évolution,  puis  il 
traite  de  celle  des  non-civilisés  et  de  la  préhistoire,  passe  en 
revue  celles  de  l'Extrême-Orient  (Chine  et  Japon),  puis  celles 


COMPTES   RENDUS  563 

de  l'Egypte  et  du  monde  sémitique  depuis  BabjMone  jusqu'à 
l'Islam,  enfin  celles  des  Aryens  (Indiens,  Perses,  Grecs, 
Romains,  Celtes,  Lithuaniens  et  Slaves).  L'exposé  est  sobre, 
nourri  et  lucide,  et  l'auteur  s'est  efforcé  de  tenir  compte  des 
dernières  recherches  sur  le  vaste  domaine  qu'embrasse  son 
érudition.  Chaque  chapitre  est  suivi  d'une  bibliographie,  qui 
n'est  pas  une  accumulation  confuse  de  titres  disparates,  mais 
un  choix  judicieux  de  références  à  des  ouvrages  équitablement 
appréciés.  Un  copieux  index  facilitera  l'usage  de  ce  livre 
considérable  aux  lecteurs,  qui  trouveront  en  lui  un  guide  siîr 
et  bien  informé.  F.  Cumont. 

E.  H.  Van  Heurck.  Les  drapelets  de  pèlerinage  en  Belgique  et 
dans  les  pays  raisins.  Contribution  à  l'iconographie  et  à 
r/iistoire  des  pèlerinages.  Anvers,  Buschmann,  19<i2,  in-4°, 
xx-529  p.,  160  illustrations  dont  4  planches  et  une  trichro- 
mie hors  texte. 

Au  moyen  âge,  les  pèlerins  rapportaient  des  lieux  de  pèle- 
rinage des  enseignes  consistant  en  lamelles  d'argent,  d'étain 
ou  de  plomb  à  l'effigie  du  saint  ou  de  la  sainte  qu'ils  avaient 
honorés. Ces  pieuses  enseignes  se  fixaient  à  la  coiffure  ou  aux 
vêtements.  En  Belgique,  dès  le  xv^  siècle,  les  enseignes  de 
métal  furent  remplacées  par  des  drapelets  de  papier  imprimés 
sur  des  bois  gravés.  Ces  drapelets,  montés  sur  bâtonnet, 
affectent  généralement  la  forme  triangulaire.  Leur  usage  s  est 
maintenu  jusqu'à  nos  jours.  Les  fidèles  qui  accomplissent  un 
pèlerinage  ont  soin  d'acquérir  des  drapelets.  De  retour  chez 
eux,  ils  en  décorent  la  chambre  familiale,  le  mur  de  l'étable 
ou  de  récurie.  En  Campine  et  dans  le  Hageland,  il  n'est  pas 
une  chaumière  où  l'on  n'aperçoive  sur  la  cheminée  un  drapelet 
de  pèlerinage  voisinant  avec  quelque  humble  statuette  de 
Notre-Dame.  La  plupart  de  ces  drapelets  sont  intéressants 
par  la  vue  des  monuments,  des  personnages  saints,  des  armoi- 
ries, des  ex-voto  et  autres  détails  qu'on  y  a  représentés. 
Certains  offrent  en  outre  une  réelle  valeui'  artistique. 

C'est  l'histoire  détaillée  de  cette  branche  impoi'tante  de 
l'imagerie   populaire  et  de   notre  folklore  national  {^)   que 


(1)  L'usayc  (les  drapelets  (if  ]ièlennage  est   s])écial  à   iidlrc  pays,   on   pou 
s'en  faut,  lui  l'ranoe,  il  u'exisle  (juo  dans  la  Flandre,  en  llolhiiide  dans  le  |{ia- 


564  COMPTES    RENDUS 

M.  E.  V.  H.  nous  retrace  avec  une  rare  compétence.  L'émi- 
nent  folkloriste  anversois  était  tout  désigné  pour  mener  à 
bonne  fin  une  telle  entreprise.  On  sait  qu'en  1910  il  a  publié 
avec  la  collaboration  de  M.  G.  Boekenoogen un  grand  ouvrage, 
très  apprécié,  sur  l'imagerie  populaire  flamande  (').  De  plus, 
comme  le  remarque  M.  Van  Schoor  dans  la  lettre-préface, 
M.  V.  H.  a  l'heureuse  fortune  d'être  le  beatus  possfdens  de 
la  plus  riche  collection  de  drapelets  de  pèlerinage  qu'on 
puisse  trouver.  Il  n'en  possède  pas  moins  de  500  exemplaires 
différents. 

A  s'en  tenir  au  titre  du  présent  ouvrage  on  pourrait  supposer 
que  l'auteur  se  borne  à  une  simple  étude  iconographique.  Il 
n'en  est  rien.  M.  V.  H.  est  de  ceux  qui  donnent  plus  qu'ils 
ne  laissent  entendre.  En  réalité  son  gros  volume  se  compose 
d'une  introduction  de  vingt  pages,  excellentes,  consacrées  au 
drapelet  de  pèlerinage  en  général,  puis  d'une  série  de  mono- 
graphies, très  fouillées,  sur  les  pèlerinages  anciens  et  moder- 
nes rappelés  par  des  drapelets.  Ces  monographies  sont 
rédigées  suivant  un  plan  uniforme.  Chacune  d'elles  débute 
par  une  description  minutieuse  du  drapelet  :  tj^pes,  variantes, 
époque,  nom  du  graveur,  s'il  y  a  lieu,  avec  renseignements 
biographiques,  éditeurs,  etc.  Vient  ensuite  un  résumé  suc- 
cinct de  la  vie  ou  de  la  légende  locale  du  saint  ou  de  la  sainte, 
puis  l'historique  du  pèlerinage  lui-même  avec  la  relation  des 
fêtes,  processions,  cortèges,  auxquels  il  donne  lieu.  Les  rites 
si  anciens  qui  se  pratiquent  d'ordinaire  autour  de  la  fontaine 
sacrée,  de  l'arbre  bénit,  de  la  châsse  ou  de  la  sainte  image 
sont  notés  avec  soin  et  précision,  d'une  façon  purement  objec- 
tive, sans  ces  commentaires  ou  réflexions  qui  déparent  si 
souvent  les  ouvrages  des  folkloristes.  L'auteur  se  place  uni- 
quement au  point  de  vue  scientifique  et  les  rapprochements 
qu'il  tente  ne  sont  pas  basés  sur  de  simples  apparences.  Enfin 
chaque  monographie  se  termine  par  une  bibliographie  indi- 
quant les  ouvrages,  brochures,  articles,  etc.,  qui  de  prés  ou 


bant  s<'|)teiitrional  et  le  Limbourg  fancieniies  |)rovinces  belges).  En  Allemagne, 
seule  i|ucl(|ues  villes  voisines  de  noire  frontière  possèdent  des  drapelets 
de  ce  genre. 

(1)  IHslolre  de  l'imiii/erie  populaire  jlamande.  Anvers,  Buschniann,  1010, 
in-i",  composé  eu  caractère  elzévir  sur  vélin  teinté  fin,  739  p.,  342  illus- 
trations. 


COMPTES    RENDUS  565 

de  loin  s'occupent  du  pèlerinage  en  question.  Toutes  les  mono- 
graphies sont  rangées  d'à  pi'és  l'ordre  alphabétique  des  loca- 
lités. Environ  250  pèlerinages  sont  ainsi  étudiés,  15U  drape- 
lets  sont  reproduits  dont  plusieurs  hors  texte.  Il  en  est  de 
ravissants.  A  signaler  en  frontispice  une  planche  suggestive 
relative  aux  ex-voto  en  fer  forgé  ou  en  tôle  d'Huyssinghen, 
d'Eppeghem  et  de  Léau,  et,  entre  autres  illustrations  dans  le 
texte,  p,  40,  la  reproduction  de  la  couronne  en  fer  forgé  de 
Grimde  que  les  bonnes  gens  se  placent  sur  la  tête  afin  d'obte- 
nir la  guérison  de  névralgies.  Que  de  légendes  charmantes  et 
naïves,  d'usages  curieux,  d'étranges  survivances  M,  V.  H. 
nous  expose  dans  une  langue  élégante,  simple  et  claire!  Son 
ouvrage  est  d'une  richesse  étonnante  au  point  de  vue  docu- 
mentaire. Il  fera  date  dans  l'histoire  du  folklore  en  Belgique. 
Tous  ceux  qui  s'intéressent  au  «  savoir  du  peuple  »  devront  y 
recourir  sans  cesse.  Les  historiens  y  trouveront  à  glaner  ;  il 
y  a  là  tout  un  côté  de  la  vie  populaire  qui  leur  a  échappé. 
Pour  ce  qui  touche  à  l'exécution  typographique  et  iconogra- 
phique, le  volume  est  vraiment  superbe  :  papier,  impression, 
illustrations  sont  impeccables,  Bref.ce  magistral  ouvrage  fera 
aussi  la  joie  des  bibliophiles.  Félix  Rousseau. 

Nieuw  Nederlandsch  Biografîsch  Woordenboek,  onier  redactie 
van  D"'  P.  C.  Molhuysen,  prof.  D'"  P.J.  Blok  en  prof. 
D'  L.  Knappert,  met  medewerking  van  tal  van  geleerden. 
Vijfde  deel.  Leiden,  A.  W.  Sijthoffs  Uitgevers-Maat- 
schappij,  1921,  gr.  in-H",  de  1,312  colonnes,  dont  1,188  de 
texte,  le  restant  pour  la  table. 

Au  début  de  cette  année,  le  cinquième  volume  de  la  nou- 
velle biographie  néerlandaise  a  vu  le  jour,  c'est-à-dire  plus  de 
trois  ans  après  le  quatrième.  Un  mot  d'introduction  signé  par 
MM.  Knappert  et  Blok  en  donne  la  cause  :  l'obligation  dans 
laquelle  M.  Molhuysen  s'est  trouvé  de  se  retirer  du  comité  de 
rédaction,  sa  nouvelle  charge  (bibliothécaire  en  chef  de  la 
Bibliothèque  Royale  de  La  Haye)  ne  lui  permettant  plus  de 
consacrer  son  temps  à  cette  vaste  entreprise. 

L'avant  propos  nous  informe  encore  que  l'ouvrage  en  entier 
comptera  dix  volumes;  les  cinq  volumes  parus  renferment 
déjà  15,0U0  biographies! 


566  COMPTES    RENDUS 

On  sait  que  pour  ce  dictionnaire  biographique  un  nouveau 
S3''stéme  a  été  adopté,  par  lequel  chaque  volume  comprend 
des  noms  de  A  jusqu'à  Z.  Il  n'entre  pas  dans  nos  intentions  de 
discuter  ici  la  valeur  de  ce  système,  mais  il  est  certain  qu'il 
contribue  puissamment  à  la  rapidité  du  travail. 

A  la  fin  de  chaque  volume  une  table  alphabétique  donne  la 
liste  de  toutes  les  biographies  parues  dans  tous  les  volumes 
précédents. 

Nous  trouvons  dans  ce  cinquième  volume  une  collection 
de  biographies  des  plus  intéressantes,  dont  nous  ne  citerons 
que  quelques-unes.  Celles  de  Charles-le-Téméraire  et  des 
différents  personnages  de  son  époque,  par  Kooperberg; 
Charles-Quint,  par  Brùnner  (un  jeune  historien  hollandais)  ; 
le  prof.  Blok  s'occupe  surtout  des  figures  connues  de  la 
seconde  moitié  du  xvi*  siècle  :  François  de  la  Noue,  Louis  et 
Charles  de  Boisot,  Charles  van  der  Noot,  Sonoy,  Wesem- 
beke,  etc.  L'historien  Haak  donne  entre  autres  une  étude  fort 
détaillée  sur  Oldenbarnevelt.  Les  historiens  sont  traités  par  le 
prof.  Brugmans;  les  savants  par  le  prof.  Knappert  (Perizo- 
nius),  Bloi  iSalmasius),  le  prof.  Allen  d'Oxford  (Erasme),  le 
prof.  Holwerda  (Scaliger)  ;  les  littérateurs  par  le  prof.  Cohen 
(de  Schélandre,  Théophile  de  Viau,  auxquels  le  savant  pro- 
fesseur a  consacré  son  dernier  volume  sur  les  Français  en 
Hollande  au  xvii^  siècle).  On  y  trouve,  en  outre,  les  biogra- 
phies de  Voltaire  (durant  son  séjour  en  Hollande),  des 
peintres  Rembrandt,  Jan  Steen  et  Vermeer  de  Delft,  toutes 
écrites  par  des  spécialistes.  Une  très  large  place  est  réservée 
aux  ecclésiastiques  et  théologiens,  tant  catholiques  que  pro- 
testants; citons  au  hasard  :  Otton  1,  II  et  III,  évêques 
d'Ctrecht  (par  Blok),  S.  Eloy,  S.  Lebuin,  Godebald,  évêque 
d'Utrecht  (par  Dom  de  France),  Cisterciens,  Chartreux,  Béné- 
dictins par  Fruytier),  frères  de  la  Vie  commune  (par  Brin- 
kerink),  Wessel  Gansfort  (par  van  Rhijn),  Petrus  Canisius 
(par  van  Miert),  Rj'thovius  (par  Fruytier),  etc.,  etc. 

Ce  rapide  aperçu  suffira  à  donner  une  idée  du  grand 
nombre  de  documents  que  renferme  ce  nouveau  volume  qui 
intéressera,  sans  aucun  doute,  tous  les  historiens. 

H.  Obreen. 


BIBLIOGRAPHIE 


Livres  nouveaux 


OUVRAGES    BELGES 

Académie  (L')  royale  de  Belgique  depuis  sa  fondation  (1772-1922). 
Bruxelles,  Lamertin,  1922,  in-H'\  34:^  p. 

Augustinus.  Xaar  een  internationale  taal.  Met  een  ^voord  ter 
inleiding  door  J.  A.  Veraart.  Antwerpen,  Veritas  [1922],  in-8">, 
68  p  ,  3  fr.  (Opvoedkundige  brochurenreeks,  7) 

Baix  (F.).  Alfred  Caucliie.  Charlcroi,  éd.  de  la  ((  Terre  wallonne» 
(1922),  in-8",  29  p. 

Briey  (R.  de).  Le  Rhin  et  le  problème  d'Occident,  Avec  deux 
cartes,  2«  édition.  Bruxelles,  Dewit(1922^,  in-8»,  225  p.,  7  fr.  50. 

Catalogas  codicum  Astrologorum  graecorum.  Codicum  Parisino- 
rum  ])artem  quartam  descripsit  P.  Boudreaux,  edidit  appendice 
suppleta  F.  Cumont,  tomi  VIII,  pars  IV,  Bruxelles,  Lamertin, 
1922,  gr.  in-8o,  vii-283  p.,  25  fr. 

Gauchie  (A.).  Godefroid  Kurth  (1847-1916).  Le  patriote,  le  chré- 
tien, l'historien.  Bruxelles,  «  La  lecture  au  foyer  »,  1922,  in-8o, 
142  p.,  1  portr.,  3  fr   50. 

CoUard  (F. t.  Histoire  de  la  pédagogie.  Bruxelles,  De  Boeck, 
1922,  gr.  in-8°,  640  p.,  15  fr. 

Dechamps  (Julesi.  Sainte-Beuve  et  le  sillage  de  Napoléon.  Liège, 
Vaillant-Carmanne,  1922,  in-8°,  117  p.  {Bibl.  de  la  Far.  de  phi- 
los, et  lettres  de  l'Uniu   de  Liège,  fasc.  XXX.) 

Delatte  < A.).  Essai  sui-  la  politi([ue  pythagoricienne.  Liège,  Vail- 
laiit-Carniaiine,  1922,  in  8%  xi  295  p.,  25  fr.  {Bibl.  de  la  Fac.  de 
j)hilos.  et  lettres  de  VUniv   de  Liège,  fasc.  XXIX.) 

Delehaye  (H.).  The  Avork  of  the  Bollandists  through  three  cen- 
turies, 1615  1915.  From  the  original  French.  Princeton  Uui- 
versity  Press,  London,  Milford.  1922.  in-8°,  269  p. 

De  Reul  (Paul).  L^cuvre  de  Swiuburne.  Bruxelles,  Sand,  1922^ 
in-S»,  502  p  ,  portr.,  pi  ,  30  fr.  {Coll  de  la  Fondation  unirersi- 
taire  do  Belgique.) 

Des  Marez  (G.).  L'abbaye  de  la  Cambre.  Avec  (luin/.e  illustra- 
tions dont  cinci  hors-texte.  Bruxelles,  1922,  in  8",  38  p. 


568 


BIBLIOGRAPHIE 


D'Harvé  (G.-O.).  Parlons  mieux  !  Nouvelles  recherches  et  trou- 
vailles lexicologiques.  Amélioratious.  Bruxelles,  Office  de 
Publicité,  1922,  in  8»,  414  p, 

Dupréel  (Eugène).  La  légende  socratique  et  les  sources  de  Pla- 
ton. Bruxelles,  Sand,  1922,  in-8»,  450  p.,  30  fr.  {Fondation  uni- 
versitaire de  Belgique.) 

Gauchez  (Maurice).  Histoire  des  lettres  françaises  de  Belgique 
des  origines  à  nos  jours.  Bruxelles,  édition  de  «  La  Renaissance 
d'Occident  »  (1922),  in-8°,  340  p.,  30  fr. 

Graindor  (Paul).  Chronologie  des  Archontes  athéniens  sous 
l'Empire.  Bruxelles.  Haye/,  1922,  in-4°,  313  p.,  15  fr.  {Acad. 
roy  de  Belff  ,  cl.  des  lettres  et  des  se.  morales  et  polit.  Mém., 
coll..  in-8»,  2«  s.,  t.  YIII,  fasc.  2.) 

Graindor  (Paul).  Marbres  et  textes  antiques  d'époque  impériale. 
Gand,  Van  Rysselberghe,  1922,  in-8°,  97  p.,  4  pi.  (Uniu.  de 
Gand.  Rec.  de  trau.  publ.  par  la  Fac.  de  philos,  et  lettres, 
50<=  fasc.) 

Ivliani  (Imp.  Caesaris  Flavii  Claudii).  Epistolae  Leges  Poema- 
tia  Fragmenta  Varia  collegervnt  recensver\Tit  1.  Bidez  et 
F.  Cumont.  Paris,  «  Les  Belles  Lettres  ».  1922,  in-S",  xxvi-328  p. 
(Nouv.  coll.  de  textes  et  documents  publiée  sous  le  jjatron.  de 
l'Association  Guillaume  Budé. 

Iulianus.  Édit.  J.  Bidez  et  F.  Cumont.  London,  Milford,  1922, 
in-8°,  328  p..  12  s.  6  d.  {Oxford  classical  texts.) 

Lahaye  (L.).  Inventaire  analj'tique  des  chartes  de  la  collégiale 
de  Saint-Jean  l'Evangéliste  à  Liège.  Tome  premier.  Bruxelles, 
Kiessling,  1922,  in-8',  450  p.  {Comm.  roy.  d'hist  ) 

Liannoy  (Charles  de).  L'alimentation  de  la  Belgique  par  le 
Comité  national.  Novembre  1914  à  novembre  1918.  Bruxelles, 
Lebègue,  1922,  in-8°,  xii-422p. 

Lefèbvre  (B  ).  L'érection  de  Mont-Saint-Guibert  par  le  duc  de 
Brabant  en  1123.  Gembloux,  Duculot,  1922,  in-8»,  49  p.,  1  fr.  50. 

Leurs  (C).  L'architecture  romane  dans  l'ancien  duché  [de  Bra- 
bant]. Bruxelles,  Vromant,  1922,  in-8°,  233  p.,  pi.,  fig.,  25  fr. 
{jL^es  origines  du  style  gothique  en  Brabant.  Première  partie  : 
«  L'architecture  romane  »,  t.  II.) 

Ligne  (Prince  de).  Lettres  à  Eugénie  sur  les  spectacles.  Édition 
critique  par  Gustave  Charlier.  Bruxelles,  Annales  prince  de 
Ligne,  1922,  in-8°,  LXi-138  p.,  portr. 

Pirenne  (H  ).  Ce  que  nous  devons  désapprendre  de  l'Allemagne. 
Discours  prononcé  à  l'ouverture  des  cours  de  l'Université  de 
Gand,  le  18 octobre  1921.  Gand,  Vanderpoorten,  1922,  in-8».  19p. 

Poncelet  (Ed.).  Inventaire  analytique  des  chartes  de  la  collé- 


BIBLIOGRAPHIE  569 

giale  de  Sainte-Croix  à  Liège.  Tome  second.  Bruxelles,  Kiess- 
ling,  1912,  in-8°,  551  p.  [Comm.  roy.  d'hist.) 

Rubben^(E.). Edouard  Ducpétiaux,  1804-1868.  Tome  I.  Bruxelles, 
Dewit.  1822.  in-8  -,  xviii-2S5  p.,  20  fr. 

Solvay  (Lucien).  L'évolution  théâtrale,  dramatique  et  lyrique. 
Bruxelles,  Van  Oest,  1922,  2  vol.  in-8».  800  p  .  30  fr. 

Université  de  Liège.  Ouverture  solennelle  des  cours  le  18  octo- 
bre 1921.  Discours  de  M.  le  recteur  Eugène  Hubert  :  L'édit  de 
Joseph  II  sur  les  kermesses.  Liège,  Poncelet,  1921,  in-8°,  204  p. 

Van  Cauwenbergh  (Etienne),  Les  pèlerinages  expiatoires  et 
judiciaires  dans  le  droit  communal  de  la  Belgique  au  moyen  âge. 
Louvain,  Ceuterick,  1922,  in-8°,  viii-244  p.  [Univ.  de  Louoain. 
Rec.  de  trav.  puhl.  par  les  membres  des  Cunfér.  d'iiist.  et  de  phil. 
48«fasc.; 

Van  der  Essen  Léon  .  Atlas  degéograjîhie  historique.  Feuille  12. 
La  Belgique  dans  le  royaume  des  Paj'S-Bas.  Feuille  13.  La 
Belgique  d'après  les  traités  du  15  novembre  1831  et  du 
19  avril  1839.  Bruxelles,  Van  Oest.  1922,  f». 

Van  Heurck  (Emile  H-i.  Les  drapelets  de  pèlerinage  en  Bel- 
gique et  dans  les  pays  voisins.  Contribution  à  l'iconographie 
et  à  l'histoire  des  pèlerinages  Anvers,  Buschmann,  1922,  inf", 
xx-529  p.,  1  pi.  en  couleurs,  pi.,  154  ill. 

Verkooren  (Alph  ).  Inventaire  des  chartes  et  cartulaires  du 
Luxembourg  (comté.  i)uis  duché).  Tome  V.  Bruxelles,  F.  (Juj'ot, 
1921  (  =  1922),  in  8",  543  p.  (Inoentuires  des  arch.  de  lu  Belgique, 
publiés  par  ordre  du  gouvernement  sous  la  dir.  des  Arch.  gén. 
du  Royaume.) 

Witterijk  (A.-J).  Woorden  van  Fransche  afkomst,  verzameld  en 
verklaart.  Steeubrugge,  De  Lusthof,  1922,  in-8o,  40  p.,  0  fr.  50. 
(Reisboekerij,  2.) 


Bibliographie  de  l'Histoire  des  Pays=Bas. 

Travaux  publiés 

depuis  octobre  1914  jusqu'en  avril  1922. 

Abréviations  : 
BHG  =  Bijdragen  en  Mededeelingen  van  het  Historisch  Genout- 

schap,  gevestigd  te  Utreclil.  Publication  annuelle. 
BVG  =^  Bijdragen  voor   Vaderlandsche  Gesehiedenis  en  Oudheid- 

kunde,  onder  redactie  van  D'   P.  ,1.   Blok  en   D""  M.  .Tapikse  ; 

5®  série.  Le  chiffre  romain  iudiiiue  le  volume  de  cette  série. 
RGP  =  Rijks  Gesehiedkiindige  Piiblicatiën. 


570  BIBLIOGRAPHIE 

WHG  =    Werken  van  het  Historisch   Genootschap,  gevestigd   te 

Utrecht. 
cdp  —  Ouvrages  en  cours  de  publication.  • 

Les  chiffres  romains  qui  suivent  les  sigles  indiquent  le  numéro 
du  volume.  Sauf  indication  contraire,  tous  les  ouvrages  men- 
tionnés sont  du  format  in-8». 


Historiographie.  —  Étude  des  sources 
S.  J.  VAN  PEN  Bkkg.   Opgave  van  documenten,    vermeld   in  de 

Reports  of  the  Royal  Commission  of  Manuscripts,  voor  zoover 

van  belang  voor  onze  geschiedenis.  BVG,  III,  IV.  V. 
H.    Kampinga.    Opvattingen    over    onze   oudere   vaderlandsche 

geschiedenis  bij  de  Hollandsche  historici  der  xvi«  en  xvii^  eeuw. 

La  Haye.  1917. 
H.  C.  A.  Mur,LER.  Hugo  de  Groot's  Annales  et  Hisforiae.  Thèse 

Utrecht.  Utr.,  1919. 
A.  C.  BouMAN.  Over  de  oudste  oorkonden  voor  de  abdij  Mariën- 

weerd.  BVG,  VII. 
O.  Oppermann.  Untersuchungen   zur  nordniederlandischen   Ge- 

schichte  des  x.  bis  xiii.  Jahrhunderts.  3  vol.,  Utr.,  1920-1922. 

Vol.  I  :  Die  Egmonder  Falschungen;  vol.  II  :  Die  Grafschaft 

Holland  und  das  Reich  bis  1256;  vol.  III  :  recueil  de  facsimilés. 
H.  P.  CosTER.  De  kroniek  van  Johannes  de  Beka,  haar  bronnen 
en  haar  eerste  redactie.  Thèse  L^tr.  Utr.,  1914. 
—  Beka,   Chronicon  Tielense  en  Annales  Tielenses. 

BVG,  IV. 
DE   Savornin  Lohman.    Groen's  reis    naar   Parijs   en   Besançon 

in  1836  ton  behoeve  der  «  Archives  ».  BHG,  42. 
Regels  voor  het  uitgeven  van  historische  bescheiden,  vastgesteld 

door  het  Bestuur  van  het  Historisch  Genootschap.  Utr.,  1915. 
S.  MuLLER  FzN.,  J.  A.  Feith  en  R.  Fruin.  Handleidiug  voor  het 

ordenen  en  beschrijven  van  archieven.  2<=  éd.,  Gron.,  I92I. 
Inventaires  d'archives 
Verslagen  van  's  Rijks  oude  Archieven.   La  Haye,   1914  et  suiv. 

Annuel. 
Nederlandsch  Archievenblad.  Groningue,  1914  et  suiv 
A.  Martens.  Archief  van  het  kapittel  van  St.  Maria  op  het  Hof 

te  's  Gravenhage.  La  Haj'e,  1915. 
S.  Drossaers.  De  archieven  van  de  Delftsche  Staten-Kloosters. 

La  Haye,  1917. 
J.  Sernée    De  archieven  der  kloosters  en  andere  stichtingen  in 

Delfland.  La  Haye,  1920 
N.  Drescfi.  De  archieven  der  collèges,  die  over  Schiedam  recht- 


BIBLIOGRAPHIE  571 

spraak  hebben  geoefend,  en  (1er  notarisseu,  1344-1811.  Schicd, 

1918. 
Lasonder  en  Mekrkamp  van  Embdkn.  De  arcliieven  van  de  recht- 

banken,  weeskamers  en  notarissen,  die  over  bet  tegenwoordig 

grondgebied  der  provincie  Zeeland  gefungeerd  bebben.  Vol.  1. 

De   Zeeuwsclie   eilanden,   1456-1811.  La    Haye,    1915;  vol.  II. 

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C.  DE  Waaud.  Regestenlijst  van  de  cbarters  van  de  Zeeuwsche 

Rekenkamer,  1525-1784.  Middelb.,  1918. 
S.  MuLLER.  Catalogus  van  bet  arcbief  der  Staton  van  Utrecbt. 
Utr.,  1915. 
—         Regesten  van  bet  arcbief  der  bisscboppen  van  L' trecht 

(722-1528),  3  vol.  Utr.,  1917-1920. 
Frui.:  en  de  Bussy.  Catalogus  van  bet  arcbief  der  beeren  van 

Montfoort.  Utr.  1920. 
L.  SoRMANi.  Inventaris  van  bet  arcbief  der  weesbuizen  te  Xij- 

megen.  Ximègue,  1915. 
A.  Martexs.  Het  arcbief  van  bet  Collège  tôt  de  beneficieëring 

van  Xeder-Rijn  en  Ysel.  La  Haye,  1916. 
J   Berxs.  De  arcliieven  van  Franeker.  Leeuwarden,  1919. 

—        De  arcliieven  van  bet  liof  en  van  de  gerecbten,   ste- 

den,  etc.  van  Friesland.  Leeuwarden,  1919. 
Histoire  politique. 
Sources. 
S.  Muixer  en   A.   C.   Bouman.   Oorkoudenboek    van  bet   Sticlit 

Utrecbt  tôt  1301    Utr.,  1921  et  suiv.,  cdp,  in-4°. 
Alperti    Mettexsis,    De   Diversitate    temporura,    éd.    Hulsbof. 

WIIG,  3"  série,  n°  37. 
Briefwisseling-  tusseben  Margaretba   van  Parma  en  Cbarles  de 

Brinieu.  graaf  van  Megen,  stadbouder  van  Gelderland,   15G0- 

1567,  éd.  J.  S.  van  Veen.  Arnbem,  1914. 
Goiidsche  Vroedschapsresolutiën  betrefl'ende  dagvaarten  der  Staten 

van  Ilollaud  en  der  Staten-Generaal,  1501-1572,  éd.  RoUia  Cou- 

querque  et  Meerkamp  van  Embden.  BIIG,  vol.  37,  38,  39. 
X.  Japiksk.    Resolutiën    der   Staten-Generaal.  RGP.  La  Haye, 

1915,  et  suiv.  cdp.  Cinq  volumes  ont  paru,  ils  contiennent  les 

années  1576  à  1587. 
Notulen  der  Staten  van   Zeeland.   La   Haye,   1915  et  suiv.,  éd. 

K.  Heeringa,  cdp,  in-4''.  Deux  vol.  ont  paru,  de  1574  jusqu'au 

mois  d'oct.  1579. 
De  briofiuisselinî;-   van    Constantijn    Huygens,    éd.  .T.    A    Worp. 

RGP,  cdp. 
Brieven    aan  .lohau    de   Witt,    éd.    .Tapikse,    deux    vol  ,    WHG, 

3"=  sér. 


572  BIBLIOGRAPHIE 

De  gedenkschriften  van  Adriaan  van  Borssele  van  der  Hooghe 
(env.  1G72  à  1702).  Éd.  K.  Heeringa  dans  Archief,  uitgegeven 
door  het  ZeeuAvsch  Genootschap  van  Wetenschappen.  1916. 

Archives  ou  correspondance  inédite  de  la  Maison  d'Orange-Xas- 
sau,  éd.  Kraemer.  Leyde,  1915  et  siiiv.,  IY«  série,  vol.  III  et  IV, 
suppl.  V  série,  vol.  Il  et  III.  cdp. 

Gedenkschriften  van  G.  J.  van  Hardenbroek,  1717-1787,  éd.  Krae- 
mer et  van  der  Meulen.  De  cette  publication  de  l'Historisch. 
Genootschap  d'Utrecht,  les  vol.  IV,  V  et  VI,  qui  achèvent 
l'ouvrage,  ont  paru. 

Brieven  van  J.  P.  van  Berckel  (le  premier  ambassadeur  des  Pro- 
vinces-L'nies  aux  États-Unis  d'Amérique).  Éd.  de  HuUu  dans 
Bijdragen  voor  Taal-,  Land-  en  Volkenkuude  van  Nederlandsch 
Indië,  vol.  75. 

Gedenkstukken  tôt  de  Algemeene  Geschiedenis  van  Nederland, 
1795-1840,  éd.  Colenbrander.  RGP.  Plusieurs  volumes  de  cet 
important  ouvrage  ont  vu  le  jour. 

Gedenkschriften  van  AP  Ph.  van  den  Broeke,  1807  à  1817  et  1830 
à  1832,  éd.  J.  N.  Pattist  dans  Archief,  uitgegeven  door  het 
Zeeuwsch  Genootschap  van  "Wetenschappen,  1919. 
Ouvrages  généraux. 

Nieiiiv  Nederlandsch  Biografisch  Woordenboek.  Vol.  IV,  Leyde, 
1918;  vol.  V,  Leyde,  1921. 

DE  BiE  eu  LoosjES.  Biographisch  woordenboek  van  Protes- 
tantsche  Godgeleerden  in  Nederland.  Utr.  Les  lettres  A-G  ont 
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Historische  Aoonden,  3®  série.  Gron.,  1916. 

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Haye,  1917. 
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1818.  La  Haye,  1918. 

—  Oost-Indië's  geldmiddelen,  den  Japanschen 

en  den  Chineeschen  handel  van  1817  op 
1818.  La  Haye,  1919. 

—  Sumatra  in  1818.  La  Haye,  1920. 
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cdp.  Deux  vol.  ont  paru 
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nijverheid.  E.GP.  Six  volumes  ont  paru,  cdp. 
Adviezen  uitT  1663  betreffende  de  textielnijverbeid  in  Holland  ; 

éd.  Posthumus.  BHG,  37. 
Posthumus.  Bescheiden  betreffende  de  provinciale  organisatie 

der  HoUandsche  lakenbereiders.  WHG.  3^  série  n°  38. 
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PoELMAN.  Bronnen  tôt  de  geschiedenis  van  den  Oostzee-handel. 

Deux  vol.  La  Haje,  RGP. 
Unger.  Het  handelsboek  van  Eustace  Caigniart,  wljnhandelaar 

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C.  LiGTEXBERG.  Willem  Usselinck.  Utrecht,  1914. 
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bankwezen,  1866-1876.  La  Haye.  1921. 
P.  Aai,berse.  Een  onbekende  enquête  naar  de  arbeidstoestanden 

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586  BIBLIOGRAPHIE 

J.  Justice.   Dictionnaire   des  marques  et  monogrammes   de  la 

faïence  de  Delft,  2«  éd.  La  Haye,  1915. 
C.  SciiAUM.  Geschiedenis  der  tuinkunst.  Zutphen,  1916. 
Th.  Molkenboer.  De  Nederlandsclie  nationale  kleederdrachten. 
Amst.,  1917. 

Histoire  des  Sciences. 
F.    M.   Jaeger.    Historisclie   studiën.   Geschiedenis  der  natuur- 
wetenschappen  in  Nederland  in  de  xvi«  en  xvu«  eeuw.  Gron., 
1919,  in-16. 
E.  Baumanx.  De  dokter  en  de  geneeskunde.  Deux  vol.  Amst..  1915. 

Généalogie. 
La  famille  del  Court  van  Krimpen,  réfugiés  de  Verviers.  Leur  rôle 
dans  l'industrie  drapière  en  Hollande  aux  xvii'=  et  xviii^  siècles 
et  leur  place  dans  la  magistrature.  Arnliem,  1916. 
E.  VAN  BiEMA.  Les   Huguetans   de   Mercier   et  de  Vrijhoeven. 
Histoire  d'une  famille  de  financiers  huguenots.  La  Haye,  1918, 
in-4°. 
P.  C.  Bloys  VAX  Tresloxg  Prins.  Genealogische  en  lieraldische 
gedenkwaardigheden  in  de  kerken  der  provincie 
Utrecht.  TJtr.,  1919. 
—  Genealogische  en  heraldische  gedenkwaardigheden 

in  de  kerken  der  provincie  Zeelaud.  Utr.,  1919. 
Topographie. 
C.  't  Hooft.  Het  ontstaan  van  Amsterdam.  Amst,,  1916. 
J.  Terpstra.  Xijmegen  in  de  middeleeuwen.  Thèse  Amsterdam. 

Amst.,  1917. 
Z.  Sxeller.  Walcheren  in  de  xV  eeuw.  Utr.,  1917. 

A.  Hoelestelle.  Geschied-  en  waterstaatkundige  beschrijving 
van  het  eiland  Tholen,  2''  éd.  Tholeu,  1920. 

B.  VAX  DER  Kloot  Meyburg.  De  economische  ontwikkeling  van 
een  Zuid-Hollaudsch  dorp  (Oudshoorn).  La  Haye,  1920. 

On  consultera  également  les  annuaires  historiques  (jaarboek) 
des  villes  d'Amsterdam,  Rotterdam,  La  Haye,  Leyde,  Gro- 
ningue,  e.  a. 

Géographie . 

Jacob  van  Deventer.  Xederlandsche  sleden  in  de  xvi"  eeuw. 
Plattegronden .  Facsimile-uitgave,  met  een  inleiding  van 
R.  Fruin,  algemeen  Rijksarchivaris.  In  de  kleuren  der  oude 
teekeningen.  La  Haye,  in-fol.,  cdp. 

Geschiedkundige  Atlas  van  Nederland.  La  Haj'e.  in-fol.,  cdp. 

Henri  Obreen. 


PERIODIQUES 


INDEX  SOMMAIRE 

Linguistique.  —  22.  26,  43,  48 

Philologie.  Généralités.  -  13,  26.  43,  47.  48. 

—  indo-européenne.  —  47,  48. 

—  grecque.  —  3,  9,  It.,  21,  40,  46,  48. 

—  latine.  —  2,  6,  9.  36.  42,  46,  48. 

—  romane  (gén.).  —  29,  42,  43. 

—  espagnole.  —  6,  30.  31,  42,  47. 

—  portugaise.  —  6. 

—  italienne.  —  3,  20,  47. 

—  française.  —  3,  6,  40,  41,  42.  43,  47. 

—  roumaine.  —  3,  4. 

—  germanique  fgén.).  —  48. 

—  allemande.  —  2,  22,  43,  47,  48. 
—  anglaise.  —  10,  22,  29. 

—  néerlandaise.  —  5,  8,  17,  22,  45 

—  slave.  —  3,  4,  48.  ' 
Littérature.  Généralités.  —  11.  18,  19,  33,  41. 

—  grecque.  —  9,  11.  14,  18.  21,  39,  43.  46. 

—  latine.  -  2,  3,  9,  11.  13.  14,  16,  21,  22.  24,  28,  29,  34, 

46. 

—  latine  du  moyen  âge  et  des  temps  modernes.  —  1.  2, 

3,  6.  7,  16,  30,  .36.  39. 

—  espagnole.  —  3,  6,  17,  19,  30,  41. 

—  portugaise.  —  29,  31. 

—  française.  —  1.  3,  6,  7,  8,  13,  19,  22,  23,  25.  26.  29, 

30,  32,  33,  34,  37,  40,  41,  42,  43,  47. 

—  italienne  (sauf  Dante).  —  1,3,  20,  22,  29.  42.  43.  45. 

—  —         (Dante).  —  1.  16,  17,  18,  20,  26,  29,  32,  36, 
39,  43. 

—  roumaine.  —  4. 

—  allemande.  —  1,  2,  11.  17.  22.  23,  29. 


588  PÉRIODIQUES 

Littérature  anglaise   —  1,  7,  16.  22.  26.  29,  30.  45. 

—  néerlandaise.  —  5,  8,  17.  18,  19,  45. 

—  Scandinave.  —  18,  29,  47. 

—  slave    —  16,  22,  25. 
Histoire.  Généralités.  —  39,  44. 

—  de  l'antiquité.  —  2,  7,  9,  10,  11,  12,  14,  15,  21,  36,  46. 
du  moyen  âge.  —  1.  2,  3,  6,  10,  12,  16,  17,  18,  23,  26,  28, 

35,  36,  38,  39.  44,  45 

—  moderne.  —  1,  4,  6,  7,  8,  10,  17,  26,  28,  29,  32.  33,  35,  36, 

37,  40,  44. 

—  contemporaine.  —  1,  7.  19,  20,  25,  27.  32,  33,  35,  37,  38, 

41. 

—  économique  et  sociale.  —  5,  7,  14,  18.  21,  23,  26,  27,  28, 

30,  36,  38,  41,  45. 

—  des  mœurs.'—  7,  14,  17,  18,  20,  35,  36,  45. 

—  des  sciences.  —  1,  3.  9,  10,  12,  32,  35,  37,  39,  41,  45. 

—  de  l'art   —  1,  3,  11,  17,  18.  19.  2U,  25,  28,  32,  34,  37,  41 

45. 
Archéologie   —  1,  12,  13,  15,  18.  24. 
Autres  sciences  auxiliaires  de  l'histoire   —  1,  9,  12,  37. 


1.  —  Nuova  Antologia.   LVII,  1922,  1. 

A.  Speranz.\.  Nel  centenario  di  Sisto  V.  67. 

M.  Vaccaro.  Antichi  fasti  e  presenti  condizioni  délia  Sicilia.  89. 
R.  Barbiera.  Il  villagio  del  Parini  e  il  poeta  Alessandro  Arna- 
boldi.  235. 

A.  Benedetti.  Un  poeta  inglese  :  William  Ernest  Henle3^  243. 
S.  SoxNixo.  Béatrice.  318. 

N.  Vaocalluzzo.  Alessandro  Manzoni,  l'uni  ta  d'Italia  e  la  ques- 

tione  romana.  345. 
LVII,  1922,  2.        A.  Mancini.  11  nuovo  figlio  di  Dante.  33. 

B.  Xogara.  Etruria  e  Roma.  46. 

F.  d'Ovidio.  Fece  dunque  bene  Firenze  a  sbandire  Dante?!  !  97. 

A.  Fradeleto.  Enrico  Castelnuovo.  201. 

J.  M.  Pal.marini.  Le  scoperte  archeologiche  del  prof.  Innocenzo 

Dall'osso  a  monte  Mario.  253. 
A.  Bertoldi.  Vinceuzi  monti  e  il  principe  di  Carignano.  268. 
A.  Zardo.  Xel  teatro  del  Goldoni.  297. 
U.  DA   Coma.    Contributo  alla  storia  délie  origini   del  Risorgi- 

mento.  330. 
1922,  3.  —  S.  DI  GiAcoMo.  Casanova  a  Napoli.  3. 
E.  BuoNAiNTi.  Filosofia  e  religione  nel  medio  evo.  San  Tommaso 

e  Sigeri  di  Brabante.  32. 


PÉRIODIQUES  589 

V.  LuGLi.  John  Galsworthy.  43. 

M.  PoRENA.  Verismo,  verita  e  fantasia  nell' arte  di  Giacomo  Leo- 
pardi.  114 

F.  Olivero.  Un  umorista  inglese  :  G.  K.  Chesterton.  138. 

E.  R.  La  leggenda  di  Napoleone  in  una  lettei-a  iuedita  di  Cai'lo 
Botta.  153. 

G.  Mazzoni.  La  questions  malispiana.  193. 

O.  GoGALA.  Poeti  tedeschi  in  Italia.  Federico  Hebbel.  232. 

L.  Rava.   I  difensori  di  Roma  al  Gianicolo  :  Paolo  Xarducci  e 

Oreste  Regnole.  307. 
M.  Ortiz.  La  poesia  di  Francesco  Gaeta.  314. 

F.  M.  Massimo.  Su  le  origini  di  Roma.  325. 

A.  Castagnou.  Louis  Le  Cardonnel.  329. 

2.  —  Neues  Archiv  der  Gesellschaft 
fiir  altère  deutsche  Geschichtskunde.  XLIII,  1922. 
K.  Strecker.  Studien  zu  karolingischen  Dichtern.  477. 

B.  ScnMEiDi.ER  und  f  G.  Schwartz  Klcine  Studien  zu  den  Titen 
des  Bischofs  Anselms  und  zur  Ge-^^chichte  des  Investiturstreits 
in  Lucca.  513. 

M.  Taxgl.  Xeue  Forscliungen  iiber  den  Liber  Cancellariae  Apos- 

tolicae.  551. 
L.  Gross.    Ein   Fragment   eines  Registers   Karls   lY.    aus   dem 

.Tahre  1348.  579. 

E.  Perels.  Zur  Wiederanffindung  verschollener  Handschriften 
der  Bibliotheca  Vallicelliana.  605. 

F.  Liebermanx.  Zur  Geschichte  der  Groszgriifin  Mathilde  von 
Tuscien.  609. 

W.  Erbex.  Zu  den  Xekrologien  von  Mattsee.  610. 

O.    Aller.   Johannes   Kungstein,  der   Verfasser   des   Cbronicon 

Moguntinum.  613. 
XLIV,  1922    —  E.  Seckei,.  Die  Aachener  Synode  vom  Januar 

819.  11. 
E.  Perels.  Eine  Denkschrift  Hinkmars  von  Reims  im  Prozesz 

Rothads  von  Soissons.  43. 

G.  Frenkex.  Eine  neue  Hrotsvithandschrift    101. 

E.  Stengei,.  Die  Heiraat   des  Bischofs  Xikolaus  von  Butrinto. 

115. 
ScHMiDT.  Ein  altes  Handschriftfragment  der  «  Viri  illustri  »  Isi- 

dors  von  Sevilla.  125. 
K.  Strecker.  Ist  der  Parisinus  266  der  von  Lothar  dem  Kloster 

Priim  gesehenkte  Codex?  135. 
S.  Hellmanx.  Zu  den  «  Gesta  Treverorum  ».  137. 
P.  Kehr.  Michacl  Tangl.  Ein  Naohruf.  139. 


590  PÉRIODIQUES 

3.  —  Archivum  Romanicum  V,  1921 . 
G.  Bertoni.  La  «  Legge  fouetica  ».  1. 

G.  Bertoni.  Il  a  Microcosme  »  di  Tommasiiio  d'Ai-maunino.  19. 
J.  J.  Aebisciikr.  Trois  mots  :  frauc,  somart,  savart  ;  esp.  senara.  29. 
G.  Bertoni.  Etimologieitaliane.  53. 
G.  ViTAi.KTTi.  La  Cauzone  del  Castra.  55. 
G.  Bertoni.  Il  testamento  di  Frate  Alberico  Manfredi  e  Ugolino 

Buzzola.  70. 
C.  Frati.  Il  volgarizzamento  dei  «  Commeutarii  »  di  G.  Cesare 

fattodaPier  Candido  Decembrio.  74. 
M.  Catalano.  Il  matrimonio  del  Boiardo  e  la  cronologia  délie  sue 

ecloglie  volgari.  80. 
G.  Bertoni.  Une  récolta  di  canzonette  spagnuole  posseduta  da 

Giulia  d'Esté.  89. 
G.  Battelli.  Segreti  di  magia  e  medicina  médiévale  cavati  da  uu 

codice  del  «  Tesoro  ».  149. 
G.  BoRGiiEzio.  Poesi  musicali  latine  e  francesi  in  un  codice  igno- 

rato  délia  Biblioteca  eapitolare  d'Ivrea  (Toriuo).  173. 
A.  Broxarski.  Le  petit  Jehan  de  Saintré.  Une  énigme  littéraire 

(Contribution  aux  études  sur  Antoine  de  Sales  )  187. 
G.  Bertoni.  Brevi  giunte  al  vocabulario  bormino.  239. 
G.  Pascu.  Étude  de  sémasiologie  roumaine.  I.  Les  noms  du  diable. 

244. 
P.  Skok.  Pôculica.  252. 
G.  Bertoni.  Boto  da  Vigevano.  258. 

L.  Frati.  Guglielmo  Arcivescovo  di  Rouen  ed  Arnaldo  da  Villa- 
nova.  260. 
G.  Bertoni.  Un  sonetto  per  la  morte  di  un  buffone  degli  Estensi. 

263. 

4.  —  Arhiva.  XXIX,  1922. 
J.  Barbulescu.  Originea  celor  mai  vechi  cuvinte  si  institutii  slave 

de  Bomînilor.  1. 
G.  Pascu.   Introducere  in   istoriea   literaturii  romine   din   seco- 

lul  XVII.  11. 
G.  GiiiBANESCU.  Divanurile  domnesti  din  Moldava  si  munteniadin 

secol   XVII  a  (1670-1679).  34,  207. 
A.  Scriban.  Etimologii  romincsti.  49,  238. 
J.  Barbulescu.  Originea  «  Chestiei  ucrainiene  »  e  îu  Rusia  nu  în 

Austria.  50. 
M.  Stefanescu.  Alte  cuvinte  ruse.sti,  de  nuantâ  ruteanà,  în  topo- 

nimia  romineasca   64,  372. 
V.  Vasiliu.  Stirile  de  istoria  muuteana   din  cronica  lui  Ureche 

pana  la  sfàrsitul  sec.  xv.  75. 


I 


PÉRIODIQUES  591 

A.  ScRiBAN.  Asemânârile   de    la  liotare   (relativ  la  vorbirea  (lin 

sudul  moldovei).  113. 
J.  Bârbulescd.  Sufixiil  —  uç  indicîud  originea  locala.  122 

—  Cuvîntul  prag  eu  în^elcs  de  «  cascada  ».  123. 

—  Inceputurile  sciierii  cirilice  în  Daeia  Traiaua.  161. 
G.  Pascu.  Influenta  cronicarilor  moldoveni  asupra  celor  munteni 

din  secolul  XVJI  :  Const.  Cantacuziuo.  195. 
J.  JoKDAN.  Notiunea  «  munca  »  în  limbile  romaniee.  217. 
J.  B.\RBUi.Escu.  L'âge  du  suffixe  roumain  -escu.  270. 

—  L'origine  de  la  nasale  dans  les   mots  roumains 
cinste  et  mincu.  273. 

J.  B.\RBULESCU.  Nasterea  individualita^ii  limbii  romîne  si  elemeu- 

tal  slav.  321. 
E.  SiMioxESCu.  Viata  Sfîutului  Autonie.  339. 
J.  HuDiTA.  Memoriile  baronuliu  de  Tott.  355. 
J.  Jordan.  Suffixe  si  etimologii  romîue.sti  :  -ar  sinonim  eu  -ean. 
429. 

—  Brinzà  zburâtà.  430. 

—  Deditei.  431. 

5.  —  Het  Boek   XL,  1922. 
H.  LoGEMAN.  Een  raadsel  in  de  Xederlandsche  Holberg-biblio- 

grafie  9. 
W.   DE   Vreese.    Een  Xoordnederlandsche    historié  met   «  ver- 

lichterieu  ))  uit  het  midden  der  xV^  eeuw.  51,  141. 
K.  G.  Gallas.  De  rubriek  «  Philadelphie  »  in   de   xvii^'    ceuw. 

(±1770.)  63. 
G.  Meri.ier.  Een  handschrift  kronijkje  eu  eigenaarsrijmpjes  65. 
C.  P.  BuRGER.  Een  verzameling  xvi"  eeuwsche  boekjes  en  frag- 
menten.  81. 
—  Een  disputatio  van  Xicolaas  Witsen  in  het  Amster- 

damsch  muséum.  114. 
P.  Leendertz.  Het  registreeren  van  eigenuamen.  117. 
J.    W.    E.NscHEDE.    De    steendrukkunst    in    Xederland    tôt    om- 

streeksch  1840.  114. 
Fr.  Kossmaxn.  De  refereyn-  en  lic<lb()ckjes  van  de  Antwerpsche 

lotei-ij  (1574).  129. 
C.  E.  II.  en  C.  P.  B.  «  Coornhert  ».  183. 
G.  E.  Meule.man.  Een  almanakje  van  1713.  195. 

6.  —  Bulletin  hispanique.  XXIV.  1922. 
J.  Barizi.    Le   problème    des    citations   sfrij)tuaires  en    langue 

latine  dans  l'œuvre  de  saint  Jean  de  la  Croix.  18. 
J.  Matmorez.  Notes  sur  la  })énétration  des  Espagnols  en  France 

du  xii^  au  xv!!*"  siècle  40. 


592  PÉRIODIQUES 

E.  Mêle.  Don  Luis  de  Avila,  su  «  Comentario  »  et  los  Italianos. 

97. 
J.  J.  A.  Bertrand.  Masson.  120. 
J.  Sarrail.  Don  Diego  Clemeuciu.  125. 
L.  La  jjaj^sanne  dans  le  roman  de  Palacio  Valdès.  131. 
A.  MoREL  Fatio.  Une  lettre  retrouvée  de  sainte  Thérèse.  163. 
Bataillon.  Influences  antiques  en  Espagne.  164. 
G.  CiROT.  Fernand  Gonzalez  dans  la  chronique  léonaise.  183. 
E.  A.  Peers.  Periodical  contributions  of  Sevilla  to  romanticism. 

198. 
G.  CiROT.  Recherches  sur  les  juifs  espagnols  et  portugais  à  Bor- 
deaux. 103. 
DE  ToRso  GiSBERT.  Un  trou  dans  le  dictionnaire  de  l'Académie 

espagnole.  225. 

7.  —  Eigen  Haard.  XLVIII,  1922. 
JoH.  H.  Been.  Den  Briel  zijn  oude  wapen  terug?  19. 
E.  D.  Pijzel.  Het  Proverbiorum  libellus  van  Ewaldus  Kist.  56. 
M.  van  Wesel.  Molière's  driehouderdjarige  geboorte  aandenking. 

72. 
H.  Ch.  j.  van  der  Mandere.  Een  oud  en  merkwaardig  vaartuig 

(H.  M.  S.  «  Victory  »,  het  oude  vlaggeschip  van  Lord  Xelson, 

gemeerdin  de  haven  van  Portsmouth.)  72. 
H.  A.  Bitter.  De  aanslag  o]}  Prius  Maurits.  200. 
J.  Stamperius.  1  April  1572.  236. 

P.  .T.  Blok.  De  beteekenis  der  verrassiug  van  den  Bi'iel.  237. 
De  Bas.  Brielium  vitrix.  239. 

E.  DuDOK  VAN  Heel.  De  invloed  van  de  inneming  van  den  Briel 
op  de  toenmalige  volksweerbaarheid.  247. 

P.  H.  Mees.  Het  prehistorische  huis  in  West-Europa.  332. 

H.  A.  E.1TTER.  Het  rampjaar  van  onze  groote  Republiek  (1672j. 

344. 
P.  G.  VAN  Slogteren.  Volkstellingen  in  Egypte.  353. 
M.  D.  H.  Bklonje.  Het  land  van  Dickens.  364. 

8.  —  Groot-Nederland.  1921,  I. 

F.  H.  Fischer.  Het  gi-oote  hervormingsjaar  1520.  102. 
P.  Yalkiiofe.  De  jeugd  van  Flaubert.  330. 

1921,  II.  —  RoEL   HouwiNK.   De    historische    beteekenis    van 
Jacques  Perk  voor  onze  letterkunde.  182. 

J.  L.  Walcu.  Garrick  en  de  fransche  Tooneelsiîeelkunst.  286. 

1922,  I.  —  Walch.  De   grootsche   comediant.   Een  woord  van 
herdenking  bij  Molière's  300s'«°  geboortedag.  227. 

M.  .1.  SciioENMAEKERs   Klaukwaarde  van  het  woord.  340. 
.7.  Saks.  Multatuli  en  zijn  Vorstensrhool.  447,  735. 


PÉRIODIQUES  593 

P.  Valkhoff.  De  drie  «  Verzoekingen  »  van   Gustave  Flaubert. 

607,  705. 

9.  —  Hermès.  LVI,  1921. 
A.  Weinreich.  Zu  Tibull,  I,  1.  11-24.  :«7. 
A.  Gerche.  Der  neue  Tyrtaios.  346. 

E,.  Philippson.  Zu  Pliilotlems  Schrift  iiber  die  Frommigkeit.  .'^55. 
W.  A.  Baeiiuex.  Literarhistorische  Keitrage  :  VI.  Zu  den  unten 

Suetons  !Na:î::eii  uberlieferten  verborum  differentiarum.  411. 
K.  Praeciiter  Der  fiinfte  Anacharsis  Brief.  427. 
f  TiiALKEiM.  Zu  Deuiosthenes.  432. 
W.    Spii;gei,ber(}.     Herodots     Charakterislik    der    agyptischen 

Schrift.  434 
M.  MoREL.  Epigraphisches.  438. 
O.  Wagner.  Zu  Cornélius  Xepos.  439. 
K.  Praechter.  Julian.  Or.  6,  p.  238,  3  ff.  441. 
W.  A.  Baeiiren.  Pacatus.  443. 
L.  Deubner.  Xachtrag  zu  S.  314.  445, 
LiVII,  1922.  —  K.  Barwick.  Die  Gliederung  der  rhetorischen 

TEXNH  und  die  Horazische  Epistula  ad  Pisones.  1. 
E.  HowAi.i).  EIKQI  AOrOZ.  63. 

E.  Preuxer.  Ampbiaraia  und  Panathenaia.  80. 

G.  Jachmaxn.  Zu  Menanders  Héros  und  Epitrepontes.  107. 
K.  J.  Beloch.  Die  Sonnenfinsternis  des  Ennius  und  der  vorju- 
lianische  Kalender.  119. 

F.  MÛNZER.  Consulartribunen  und  Censoren.  134. 
E.  Hedicke.  Zu  Xonius.  150. 

Hii.ler  v.  Gaertrixgen.  Die  Perseussage  von  Aigeaiiu  Kilikien. 
155. 

E.  Taubler.  Naeviana.  156. 

F.  Beciitei..  Zum  Inventar  von  Agnone.  160. 

■j-  C.  Robert.  Die  Parodos  der  Aischyleisclien  Septem.  161,  172. 
F.  Lambert.  Zur  Erkenntnislehre  der  spiiteren  Stoa.  Ptolemaios 

TTepi  KpiTripïou  Km  hycmovikou   10,  11-13,  13  II.  171, 
F.  Thedixga.  Plotin  oder  Xumenios,  III.  189. 

F.  Atenstadt.  Zwei  Quellen  des  sogenannten  Plutarch  de  Flu- 
viis.  219. 

W.  Capelle.  Zur  hippokratischen  Frage.  247. 
A.  VON  Premerstein.  Alexandrinische  und  jtidische  Gesaudte  vor 
Kaiser  lladrian.  266. 

G.  Jachmaxn.  Zu  Vergils  catalepton.  317. 

f  C.  Robert.  Eine  verkannte  Ilias-illustrations.  320. 

10.  —  History  N.  S.  VII,  1922. 
W.  Miller.  Democracy  at  San  Marine.  1. 

38 


594  PÉRIODIQUES 

D.  G.  E.  Hall.  Anglo-French  relations  under  Charles  II.  17. 
A.  Mawer.  a  survey  of  English  place-names.  33,  106. 

W.  R.  Halliday.  a  Herodotean  épisode  in  the  historj-  of  Nov- 
gorod. 35. 

P.  Xewton.  Historical  révisions  XX.  Christopher  Columbus  and 
his  great  enterprise.  38. 

E.  Barker.  History  and  philosoplij-.  81. 

li.  B.  IIepple.  The  monastery  school  of  Jari-ow.  92. 
M.  Cary.  Historical  revisions  XXI.     The  origius  of  the  Punie 
wars.  109. 

11.  —  Neue  Jahrbticher  fiir  das  klassische  Altertum. 
XLVIII,  1921. 
O.  Immisch    Ueber  eiue  volkstûmliche  Darstellungsform  in  der 
klassischen  Literatur.  409. 

F.  DoRNSEiFF.  Buchende  synonimik.  422. 

W.  DoRPFELD.  Zum  urspriinglichen  Plane  des  Erechteions.  Eine 

Entgegnuiig.  433. 
O.  OsTERTAG.  Schiller  der  Befreier.  439. 
XLIX,   1922.  —  H.  Leisegang.  Xeue  Wege  zum   klassischen 

Altertum.  1. 
A.  KôRTE.  Die  Tendenz  von  Xenophous  Auabasis.  15. 
R.  Reitzenstein.  Horaz  als  Dichter.  24. 

E.  Kornemanx.  p.  Quinctilius  Varus.  42. 
H.  DÛTSCHKK.  Lessings  Xalhan.  63. 

Schneider.  Zui"  Entwicklungsgeschichte  der  klassischen  Alter- 
tumswissenschaft  in  Deutschland.  89. 

G.  Jachmann.  Die  dichterische  Technik  in  Vergils  Bukolika.  101. 
C.  Clemen.  Die  Totung  des  Vegetationsgeistes.  120. 

W.  Nestlé.  Intellektualismus  und  Mystik  in  der  griechischen 

Philosophie.  137. 
J.  Kromayeh.  llej^ublik  und  Monarchie  im  Altertum  und  bei  uns. 

157. 
J.  KÔRNER.  Literaturgeschichte  und  Literaturwissenschaft   166 

F.  KuNTZE.  «  Aliis  inserviendo  consumor.  »  189. 

K.  LoEWER.  «  Rettet  euer  Bild  in  meiuer  Seele.  »  190. 

—  Fausts  Erdenrest.  191. 

K.  ZiEGLER.  Solon  als  Mensch  und  Dichter.  193. 
E.  Maas.  Die  Lebenden  und  die  Toten.  205. 

P.  Fischer.  Anderthalb  Jahre  Xampf  ura  den  Altonaer  «  Joseph  »  . 
218. 

12.  —  The  Antiquairies  Journal.  II,  1922. 
E.  C.  Armstroxg.  Some  Irish  antiquities  of  unknown  use.  6. 
CuxNiNGTON.  A  village  site  of  the  HallsLatt  period  in  Wiltshire.  12 


PÉRIODIQUES  595 

W.  Seton.  The  scottish  Ke<ïalia  aiul  Dunnottar  Castle.  20. 

G.  M.  KiNDKRSLKY.  Roinau  remaiiis  at  Wehvyn,  29. 

O.  G.  S.  Prehistoric  inva.siou  of  Englaud.  27. 

W.  Hawi,ey.  Second  report  on  thc  excavation  at  Stouehenge.  3G. 

O.  M.  Dalton.  lloinan  si)oons  from  Dorchester.  89. 

R.  Smith.  On  some  récent  exliibits.  93. 

Oh.  Butciier.  A.  lioard  of  bronze  discovered  at  Grays  Tliurrock. 

105. 
Passmore.  Tlie  Aveburj^  ditch.  109. 
J.  Rkii)  Moiu.  Four  Suffolk  flint  implements.  114. 
W.  L.  IIiLDiiuRGii.  Sonie  examples  of  Catalan  médiéval  stampcd 

sheet-metalwork.  118. 
H.  Peake.  Arclieological  finds  in  the  Kennet  gravels  near  New- 

bury. 125. 
T.  Zammit.  Excavation  in  Mal  ta.  131. 

13.  —  The  GeographicalJournal.  1921.  I. 
E.  Glkichen.  The  permanent  Committee  on  geograpliical  names. 

36. 
R.  T.  GouLD.  The  history  of  the  chronometer.  253. 
E.  IIeawood.  The  world  mai)  before  and  after  Magellan'.s  voyage. 

4:u. 

1921,  II.  —  R.  E.   Gordon  George.  Le  «  Courier  de  l'Orient  » 
de  l'abbé  Carré  (1672-1674).  133. 

1922,  I.  —  H.  O.  FoRBES.  The  topography  of  Caesar's  last  eam- 
paign  against  the  Bellovaci.  195. 

O.  G.  S.  Crawfori).  Archaeology  and  the  Ordnance  survey.  245. 

14.  —  American  Journal  of  Philology.  XLIII,  1922. 

R.  B.  Steei-e.  Some  roman  éléments  in  the  tragédies  of  Seneca.  1. 
M.  Radix.   Secare  patris  :   the   early   roman    law   of   exécution 

against  a  debtor.  32. 
W.  P.  Mustard.  Illustrations  of  Tibullus.  49. 
M.  B.  OcLE.  Horace,  Epistle  1.  XIX,  28-29.  55. 
E.  S.  MacCartney.  Sex  détermination  and  sex  control  in  Anti- 

quity.  62. 
D.  RoDiNsox.  Notes  on  two  munuscrijjts  from  Sinope.  71. 
W.  F.  Albright.  a  misunderstood  Syrian  placename  Dana  and 

Tyana.  74. 

15.  —The  Journal  ofhellenic  studies.  XLI,  1921,  II. 
P.  X.  Ure.  When  was  Themistocles  last  in  Athens?  163. 

G.  II.  Macurdy    Hermès  Chthonios  as  Epouym  of  the  Sko]»adae. 

179. 
Hoi.leaux.  Ptolemaios  epigonos.  183. 
P.  W.  Haslick.  The  crypto-christiansof  Trebizoud.  199. 


596  PÉRIODIQUES 

E.  DouGLAls  VAN  BuREN.  Archaic  terra-cotta  Agalmata  in  Italy 

and  Sicily.  203. 
A.  E.  R.  BoAK.  An  overseer's  day-book  from  the  Fayoum.  217. 
C.  D.  BiCKNEi.L.  Some  vases  in  the  Lewis  collection.  222. 
G.  Bagnani.  Helleuistic  sculpture  from  Cyrene.  232. 
A.  Evans.  On  a  Minoan  group  of  a  galloping  buU  and  acrobatie 

figure  from  Crète.     With  glyptic  comparisons  and  a  note  on 

the  Oxford  relief  showing  the  Taurokathapsia.  247. 
16.  —  The  Journal  of  theological  studies.  XXII,  1920-1921. 
C.  H.   TuRNER.  A  Laou  Ms.  in  190G  and  1920.   Sermo  de  fluxu 

sanguinis  (cod.  113.  fol.  36  b.).  1. 
J.  HuGH  MiCHAEr,.  The  meaning  of  eEriYn^^ctTo  in  St.  John  i  18.  14. 
St.  J.  D.  Seymour.  The  bringing  forth  of  the  soûl  in  Irish  lite- 

rature.  16. 

E.  C.   Butler.  Palladiana:  The  Lausiac  History.  Questions  of 
text.  21,  138,222. 

H.  W.  Sheppard.  Variants  in  the  consonantal  text  of  G.  1.  in  the 

Books  of  Samuel  and  Kings.  36. 
C.  H.  Turner.  La  tradition  manuscrite  de  la  correspondance  de 

saint  Basile.  105. 

F.  H.  CoLSON.  AnAPEM0ATOI.  156. 

R.  H.  Charles.  The  date  and  place  of  writing  of  the  slavonic 

Enoch.  161. 
A.  Souter.  a  supposed  fragment  of  the  lost  Codex  fuldeusis  of 

Tertullian.  163. 
C.  B.  Armstrong.  The  Synod  of  Alexandria  and  the  Schism  of 

Antioch  in  A.  D.  36:^.  206,  347. 
V.  Bartlet.  The  Didache  reconsidered.  239. 
J.  Baxter.  The  Homilies  of  St.  Peter  Chrysologus.  250. 
R,.   H.  CoNNOLLY.  The  prologue  to  the    Apostolic    Tradition    of 

Hipxjolytus.  356. 
E,  Watson.  The  «  De  habitu  Virginum  ».  of  St.  Cyi^rian.  361. 
XXIII,  1921-1922.  —  W.  H.  Reade.  Dante.  1. 
C.  Tlr.ner.  I.  The  «  Blessed  presbyters  »  who  condemned  noetus. 

II.  MaKapioç  as  a  techuical  term.  28. 
C.  L.  Feltœ.   Toga  and  togatus  in  ihe  Books  of  the  Mozarabic 

rite.  57. 
J.  M.  Creed.  Josephus  on  John  the  Baptist.  59. 
C.  H   DoDD   Notes  from  Papyri.  60. 
R.  BuRN.  Adversaria  in  Gregorium  Xysseuum  et  in  Macarium 

Magnetem.  64. 

17.  —  De  Katholiek.  CLIX,  1921. 
W.  Lampen.  Oude  liturgische  gebruikeu  in  Sj^anje  en  Portugal. 

141. 


PÉRIODIQUES  597 

P.  SÉJOURNÉ.  Oorkendenboek  van  liet  sticlit  Utrecht  tôt  1301 .  195. 
M.  HÛFFER.  Icts  over  de  keuze  van  een  Kijnsburgsche  abdis  in 

de  XIV*  eeuw.  291. 
■\V.  Mi:ldi:k.  Rondom  het  conciliarisme  in  do  xiV  eeuw.  337. 
CLX,  1921.  C.  NuYKN.  II.  Theresia's  lied  van  extase.  G9. 
J.  ^loM-KR.  Josef  von  Gorres  en  de  Roman tiek.  H8. 
A.  E.  RiENTJKNS.  Geert  Groote  en  de  domtorenvan  Utrecht.  113. 
V.  VAN  Wyck.  lets  over  appellatieven  in  onze  taal.  120. 
J.   V.  DE  Groot.   Geloof   en   liartstoclit   in    het  zieleleven    van 

Dante.  185. 
A.  VAN  Delft.  11  monte  dilettoso,  een  proof  van  Dante'.s  proble- 

matisclie  dichtdidaktiek.  223. 

F.  J.  A.  Werners.  Oude  vormen  van  rozenkrans-gebed  uit  onze 
literatuur.  23G. 

W.  NoLET.  Codex  en  universiteit.  337. 

18.  —  Elzevier's  geïUustreerd  Maandschrift.  1921,  II. 
Maurits  ISabbi:.  De  Autwerpsche  Ommegaug.  17. 
Romand  Guarnieri.  De  kunst  van  Dante  en  in  Dante.  97. 
R.  VAN  Marle.  Kunstlievende  vorsten  uit  Italien's  verleden  II.  De 

eerste  koningen  van  Napel.s  uit  het  huis  van  Anjou.  235,  302. 
A.    P.   C.    PoELHEKKE.    Francesca    da    Rimini    als    draniatische 

materie.  383. 
1922,  II.  —  LuNS  (HuiB  ).  De  bouwvallen  van  Villers.  9. 
M.  EisLER.  De  "Weensche  Gobelins.  14,  8S. 
L.  Lacomblk.  Henrik  Ibsen's  Grimstadtijd.  153. 
J.  DE  Gruyïer.  In  het  British  Muséum,  de  Grieken.  I.  Yôôr  de 

groote  eeuw.  228. 
C.  Veth.  Nadere  notities  over  Nederlandsches   caricatuur.  De 

humor  van  Jacob  Smies  (1765-1833)  en  zijn  tijdgenooten.  296. 
P.  Brom.mer.  Homerus.  370. 
P.  H.  Plantkn(;a.  Chartres.  378. 

19.  —  Mercure  de  France.  1922. 
CLIII.  —   .T.   Gaument  et  Chouville.    Xinon,     Molière    et    les 

dévots.  36. 
L.  Paschal.  La  question  flamande  en  Belgique,  exposé  historique 

et  parlementaire.  81. 
C  PiTOLLET.  L'affaire  Fualdès.  111. 

G.  Brunet.  Le  comique  de  Molière.  289. 

D""  E.  Leurat.  Le  cas  du  Malade  imai;inaire.  387. 
G.  d'Aui-an.  L'œuvre  critique  de  Remy  de  Gourmont.  594. 
G.  LoTE.  —  Voltaire  et  la  déclamation  théâtrale.  669. 
CLiIV.  —  P.  Levy.  La  lutte  pour  l'allemand  en  Alsace  et  eu  Lor- 
raine de  1870  à  1918.  95. 
G.  Cartier.  Un  pi-oblème  d'histoire  et  de  cryptographie.  116. 


598  PÉRIODIQUES 

H.  Gauthier- ViLLARS.  La  nouvelle  ijoésie  gréco-païenne.  289. 
E.  Raynaud.  Un  ami  de  Baudelaire.  402. 
Iv.  i)K  Sainte-Croix  Blasco  Ibanez.  595. 

CLV.  —  P.  DuiAY.  Des  buveurs  d'eau  à  la  Vie  de  Bohème.  5. 
H.  BuFFENoiR   Concours  ouvert  sous  la  Révolution  pour  un  monu- 
ment en  l'honneur  de  J.  J.  Rousseau.  93. 
G.  Brunet.  Sur  la  critique.  289. 

20.  —  Minerva.  XXXI,  1921. 

Postula  etimologica.  5,  3G,  68,  100,  132,  1G4,  196,  228,  2G1,  291, 
323,  35G,  389,  420,  452,  484,  TJG,  549,  580,  611,  644,  676,  707,  740. 
A.  ScARi.ATTi.  Ancora  un  po'  d'Inferno  e  di  Paradiso   25. 

—  Dante  commentato  da  Palestrina.  36. 

—  Le  bruttezze  di  Dante.  151,  186. 

—  Dante  ladro!  216. 

—  Epigrafi,  epigrammi,  ej^italami  ed  ej^itaffi.  251. 

—  Le  parodie  del  5  Maggio.  279. 

—  Xapoleone  è  veramente  esistito?  314. 

—  I  recitatori  di  Dante.  379 
A.  ZoRi.i.  Pape  Satan  Aleppe.  419. 

A.  ScARi.ATTi.  Disse!  408,  442,  472 

—  I  «  disse  »  storici.  507. 

—  I  «  Cavalli  di  ritorno  »  e  Dante.  600. 

—  Iscrizioni  di  cimeteri.  665. 

21.  —  Mnemosyne.  L,  1922. 

J.  VAN  BiNSBERGEN.  Juris  Romanli  studiorum  vindicatio.  113. 
J.  J.  H.  Ad  Plut.  V.  Tiberii  Gracchi.  123. 

B.  A.  VAN  GroninCxEN.  'OMOAOrOI    124. 

J.  S.  PiiiLi.iMORE.  De  Horati  artis  poeticae.  11,  120.  138 

H.  Wagenvoort.  Aiîuleiana.  140. 

P.  H.  Damsté.  Ad  llutilium  Namatianum.  147. 

—  Pollux  IX,  115.  167. 

G.  Yoi.i.GRAFF.  Ad   Aristotelis   librum   De  republica  Athenien- 

sium.  169. 
J.  J.  Hartman.  Propertiana.  184. 

G.  Voi.i.GRAFF.  De  origine  hypothecae  in  iure  attico.  213. 
G.  V.  Ad  inscriptionem  argivam.  223. 

22.  —  Germanische-Romanische  Monatschrift.  IX,  1921. 
O.  Heuer.  Das  Frankfurter  Goethemuscum  in  Not.  257. 
R.  Bi.iiMEL.  Ist  die  Grammatik  im  Redit,  oder  die  Sprache?  261. 
E.  Ociis.  Rumold.  287. 
W.  Fischer.  Charlotte  Williams  ^Yynn  in  ihren  Beziehungen  zu 

Varnhagen  von  Ense  und  Richard  Monchton  Milnes.  292. 
K.  îloi.L.  Ein  Faustproblem.  309. 


PÉRIODIQUES  599 

E.  Sauer.  Joseph  Ludwig  StoU.  319. 

H.  ScHRoDER.  Ilyperkoi-rekte  Foriiien  vortoniger  Silben  in  Deut- 

sclien  und  Xiederlandischen.  321. 
J.  DE  Yries.  Die  Brautwerbungssagcn.  330. 
W.  HoRN.  Die  Wort- und  Koiistruktionsmischungim  Englisclien. 

342. 
A.  EiCHLER.  Shakespeares  Begriff  des  Gentleman.  358. 
G.  V.  Amoretti.  Alfieris  Saul  und  der  Wendepunkt   der    alfie- 

ri.schen  Tragôdie.  370. 
X,  1922.  —  F.  R.  Schrudkr.  Xeuere  Runenforschung.  4. 
A.    IIklsi.kr.   Ueber  die  Balladendichtung  des  Spiitmittelalters 

namentlich  im  skandinavischen  Xorden.  10. 
J.  de  Vries.  Die  Brautwerbungssagen,  II.  31. 
V.  Klemperer.  Maurice  Barrés.  45. 
G.  WissowA.  Tacitus'  Germania  ini  zusammenhange  der  antiken 

Ethuograi)Iiie  auf  (irund  der  neuesten  Forschung.  55. 
E.  SciiRoDKR.  Frauki'urt  uiul  Salzwodel.   Etwas  von  deutschen 

Furtnamen.  65. 
J.  Risse.  Immermann  und  die  neueren  Forscliungen.  81. 
G.  Hubexer.  Scliolastik  und  neuenglisehe  Hoclisprache.  88. 
E.  Rexax.  Ernest  Renan  im  modernen  Urteil.  101. 
G.  FiTTBOGEX.  Gleims  und  Ewald  von  Kleists  poetischer  Blut- 

durst.  113 

E.  ZiTEL.MAXx.  Za  Faust,  3.  Akt.  9843-9850.  117. 

23.  —  Le  Moyen  Age.  XXXII,  1921. 

F.  Lot.  Conjectures  démographiques  sur  la  France  au  ix«  siècle. 
1,  109. 

M.  Ferkaxd.  Origines  des  justices  féodales.  28. 
Ch.    Porée.   Notes   sur  Pèlerin    Latinier,   premier    sénéchal   de 
Beaucaire  1226  1238).  58. 

G.  HuET.    Notes  d'histoire  littéraire.  V.   La   chronologie   dans 
l'œuvre  de  Robert  de  Boron.  138. 

L.  Levillaix.  De  quelques  lettres  de  Loup  de  Ferrières.  193. 
J.  ViARD.  Philippe  VI  de  Valois;  la  succession  au  trùne.  218. 
M.  Prixet.  Les  armoiries  françaises,  dans  le  Tournoi  de  Nantes, 

de  Conrad  de  Wurtzbourg.  223. 

24.  —  Musée  belge.  XXVI,  1922. 
J.  Meunier.  Les  sources  de  hi  monographie  d'Arrien  sur  l'Inde.  5. 
J.  H.  Ba.\ti:r.  Corrigcnda  et  addenda  Thesauro  Ling.  Lat.  53. 
A.  RoERscii.  Ad  Joannem  secundum.  55. 

J.  P.  Waltzing.  Inscriptions  latines  de  la  Belgique  romaine.  57. 
A.  Vitale.  La  Storia  délia  Versione  dei  Settanta   e  l'antichità 

délia  Biblia  nelT  Apologetico  di  TertuUiano.  63. 


600  PÉRIODIQUES 

25.  —  La  Pologne.  II,  1921. 

Omer  Neveux.  La  colonisatiou  allemaucle  en  Pologne.  109,  173, 

316. 
G.  Lacour-Gayet.  Napoléon  et  la  Pologne.  625. 
P.  Kleczkowski.  Napoléon  dans  la  poésie  polonaise.  G58. 
Général  du  Muriez.  Le  centenaire  de  Najioléon  en  Pologne.  793 

II,  1921,  2.  —  P.  Kleczkowski.   Koclianowski  et  Ronsard.  97. 
G.  d'Ostoya.  Somo-Sierra.  525. 

III,  1922.  — M.  Toussaint.  L'humanisme  et  la  Pologne,  531. 

26.  —  The  Dublin  Review.  CL.XVIII,  1921. 
L.  Smith.  The  canonization  of  kiug  Henry  VI.  41. 
C.  H.  Vellacott.  Kinsfolk  of  St.  Thomas  of  Canterbury,  54. 

C.  W.  Barry.  The  Gold  of  Dante.  180. 

P.  NoL.\N.  The  évolution  of  the  pound  sterling.  248. 

V.  J   B.  Torr.  Local  records  of  the  Elizabethan  settlement.  60. 

O.  Browning.  Dante  and  the  Islam.  192. 

E.  Romanes.  Sir  Walter  Scott.  237. 

CLXX,   1922.   —  J.   S.   Phillimore.    Scripture    versions    and 

variants.  20. 
B.  HoLLAND.  Race  and  language.  54. 
H.  Grierson.  The  grauddaughter  of  St.  Chantai.  121. 
B.  Windle.  The  religion  of  the  prehistoric  man.  230. 
B.  HoLLAND.  Was  Charles  the  First  a  martj'r?  241. 
M.  Ryan.  Louis  Le  Cardonnel.  2ôG. 

27.  —  The  American  Historical  Review.  XXVII,  1922. 

D.  Perkins.  Europe,  Spanish  America,  and  the  Monroe  doctrine. 
207. 

H.  N.   Gay.   Garibaldi's   Siciliau   campaign  as  reported  by  an 

American  Diplomat.  219. 
H.  D.  FoRSTER.  Webster's   seventh   of   march   speech   and  the 

sécession  movemeut,  1850.  245. 

28.  —  The  English  Historical  Review.  XXXVII,  1922. 
J.  H.  Round.  The  legend  of  «  Eudo  Dapifer  ».  1. 

R.  Graham.  a  pétition  to  Boniface  VIII  from  the  Clergy  of  the 

province  of  Canterbury.  35. 
G.  Davies.  Council  and  Cabinet.  1679  1688.  47. 
C.  H.  Wai.iier.  Sheriffs  in  the  Pipe  RoU  of  31  Henry  I.  67. 
H.  E.  Salter.  Henry  of  Blois,  bishop  of  Winchester.  79. 

E.  F.  Jacob.  A  proposai  for  arbitration  between  Simon  de  Mont- 
fort  and  Henry  lll  in  1260.  80. 

R.  C.  FowLER.  Early  notes  of  Fines.  82. 
V.  H.  Galbraith.  a  Visitation  of  Westminster  in  1444.  83. 
H.  DE  Vocut.  Excerpts  from  the  Register  of  Louvain  University 
from  1485  to  1527.  89. 


PÉRIODIQUES  601 

W.  P.  M.  Kennedy.  A  gênerai  court  of  tlie  merchant  adventurers 
in  1547. 105. 

D.  Dawson.  The  archduke  Ferdinand  Maximilian  and  the  crown 
of  Greoce,  18G3.  107. 

W.  A.  Morris.  Tlie  sheriffs   and  the  administrative  System   of 

Henry  I.  161. 
W.  T.  Waugh.  The  great  statute  of  Praemunire.  173. 
G.  Unwin.  The  transition  of  the  facto ry  System.  206. 

E.  Barker.  Lord  Bryce.  219. 

F.  M.  Stenton.  St.  Bennet  of  Holme  and  theNorman  conquest.  22."). 
W.  T.  LuNT.  The  text  of  the  ordinance  of  1184  concerning  an  aid 

for  the  Holy  Land.  235. 

H.  G.  RiCHARDSON.  Law  merchant  in  London  in  1292.  242. 

H.  F.  Salter.  The  Stamford  Schism.  249. 

C.  L.  ScoFiELD.  The  capture  of  Lord  Rivers  and  Sir  Anthony 
Woodville  in  1460.  253. 

W.  P.  M.  Kennedy.  A  déclaration  before  the  ecclesiastical  com- 
mission in  1562,  256. 

C.  H.  Mayo.  The  social  statutes  of  the  clergy  in  the  seventeenth 
and  eighteentli  centuries.  258. 

29.  —  The  modem  language  Review.  XVII,  1922. 

R,  S.  Crane,  The  critical  origius  of  Spencer's  diction.  1. 

—  Richardson,  Warburton  and  French  fiction.  17. 

R.  S.  LooMis.  Tristram  and  the  House  of  Anjou.  24. 

W.  Smith.  Giovan  Battista  Andreini  as  a  theatrical  innovator.  31. 

K.  Hayexs.  Heine.  Hazlitt  and  Mrs.  Jameson.  42. 

G.  Waterhouse.  The  Sources  of  Grillparzer's  (  Weli  dem,  der 
lûgt...  ».  50. 

P.  G.  Thomas.  «  Beowulf  »  Ll.  1604-1605,  2085-2091.  63. 

—  Xotes  on  «  cleanness  ».  64. 

G.  G.  CouLTOX.  The  authorslii])  of  «  Ancren  Riwle  ».  66. 

—  «  The  owl  aud  the  nightingale  ».  69. 

C.  R.  Baskervill.  Queen  Elizabeth  in  agame  of  «  Truth  ».  72. 

J.  PuRVES.  ((  Shakespeare  —  the  english  Aeschylus  ».  73. 

J.  HuiziNGA.  An  early  référence  to  Dante's  canzone  «  Le  dolce 
rime  d'Amor  »  in  England.  74. 

A.  F.  Bell.  Dante  in  portuguese  literature.  78. 

E.  Weekly.  «  Mystère  d'Adam  »  1.  482.  79. 

E.  TuTTLE.  Roraanic  etymologies.  79. 

R.  Priebsch.  Zum  ((  Wiener  Hundesegen  ».  80. 

M.  AsHDOAVN.  The  single  combat  in  certain  cycles  of  English  and 
Scandinavian  tradition  and  romance.  113. 

G.  WiLLCOCK.-  A  hitherto  uncollated  version  of  Surrey's  trans- 
lation of  the  fourth  book  of  the  «  Aeneid  ».  131. 


602  PÉRIODIQUES 

A.  H.  Krappe.  Pierre  de  Rousard's  «  Hj-mne  de  la  mort  »  and 

Plutareh's  «  Consolatio  ad  Apolloniain  ».  150. 
M.  Howic.  Achim  von  Ariiira  and  Scotland.  157. 
T.  N.  ToLLER.  Additions  to  the  supplément  of  tlie  Bosworth- 

Toller  ((  Anglo-Saxon  dictionaiy  ».  165. 
W.  J.  Lawuknce.  The  autliorsliip  of  «  The  Costelie  Whore  ».  167. 
M.  E.  Seaton  Milton  and  the  myth  of  Isis.  168. 
J.  N.  Raamsdonk.  ((  Le  mystère  d'Adam  »,  63.  170. 
H.  G.  FiEDLER.  Ein  Goethe-brief.  171. 
A.  Scott.  Lessing's  «  Philotas  »  and  Crébillon.  173. 

30.  —  The  Romanic  Review.  XIII,  1922. 
C.  Fabre.  Deux  poèmes  de  Peyre  Cathala.  1. 
Ch.  Haskins   Some  early  treatises  on  falconry.  18. 
C.  Ruutz-Rees.  Renée,  a  sixteenth-eentui'y  nun.  28. 
M.  B.  Ogle.  The  orchard-scene  in  Tydorel  and  Sir  Gowther.  37. 
C.  E.  Faunham.  American  travellers  in  Spain.  The  Sjîanish  inns, 

1777-1787.  44. 
A.  St.  Clair  Sloax.  The  pronouns  of  address  in  Don  Qaijote.  65. 
E.  Sheldon.  Two  strings  to  one's  bow.  77. 
R.  Temple  House.  Lope  de  Yega  and  «  Un  drama  nuevo  ».  84. 

31.  —  Revista  de  filologia  espanola.  VIII,  1921. 
A.  Castro.  Unos  aranceles  de  aduanas  del  siglo  XIII.  325. 
P.  H.  Urena.  Observaciones  sobre  el  espanol  en  America.  357. 
R.    Menendez  Pidal.    Sobre    la   traducciôn    portuguesa    de    la 

«  Cronica  gênerai  de  Espana  de  1344  ». 
H.  Schuchardt.  Problemas  etimolôgicas.  400. 
L.  Spitzer.  Soccus  en  espagnol.  403. 
S.  GiLi.  «  Sonruir  ».  405. 
A.  Castro.  «  Manjar  blanco  ».  406. 

32.  —  La  Revue  générale.  LIV.  1921,  I. 
Emile  Banxixg.  Aperçu  sur  l'histoire  territoriale  de  la  rive  gauche 

du  Rhin.  41,  207. 
Hugues  Lamy    «  11  Purgatorio  »  dans  la  divine  comédie  de  Dante 

Alighieri.  401. 
LIV,   1921,  II.  —  Comte   L.  de   Lichtervelde.  Le  clergé    au 

Congrès  national.  133. 
Comte  L  de  Lichtervelde.  Les  élections  du  3  novembre  1830.  577. 
LV.  1922,  I.  —  V.  Giraud.  Le  naturalisme  de  Molière.  3,  159. 
E.  Yerlant.  Les  tableaux  espagnols  au  Musée  de  Bruxelles.  198, 

301 
Ch.  Terlinden.Uu  grand  savant  catholique.  Le  chanoine  Cauchie. 

331. 
P.  Veriiaegen.  Le  procès  de  Werbrouck  et  de  l'octroi  d'Anvers 

(1813).  381. 


I 


PÉRIODIQUES  603 

G.  GoYAU.  L'influence  de  la  Bel^'ique  catholique  au  xi-X"^  siècle 

sur  les  destinées  du  catholicisme  français.  497. 

33.  —  La  Revue  hebdomadaire   X,  1921. 
P.  Capifali.  a  travers  1  histoire.  L'origine  corse  de  Christophe 

Colomb.  237. 

XI,  1921.  —  M.  Poètl;.  Le  Paris  de  Xapoléon.  208. 

M.  TiXAiRi;.  Deux  portraits  de  femme.  1.  L'impératrice  Joséi^hine. 

259. 
II.  Massis.  Anatole  France  ou  l'humanisme  inhumain.  329. 

XII,  1921.  —  A.  Thibaudet.  La  jeunesse  de  Flaubert.  259,  396, 
53L 

P.  ViGUiÉ.  Le  premier  maître  de  ^I^"''  de  Maintenon.  323. 

J.  DE  NoiRMOXT.   Le  dernier  duc  de  Bourgogne    Louis-.Toseph- 
Xavicr  de  France  (1751-1761).  427. 

XXXI.  1922,  I.  —  Fr.  Ruffini.  Une  muse  du  Cénacle  roman- 
tique :  Mélanie  Waldor  et  Alexandre  Dumas.  135. 

A.  Thibaudet.  Gustave  Flaubert  (IVj   Le  laboratoire  de  Gustave 
Flaubert.  158. 

R.  Benjamin.  A  propos  du  tricentenaire  de  Molière.  Courteline 
et  Sacha  Guitry.  259. 

A.  Thibaudet.  Gustave  Flaubert  (V-VI)  «Madame  Bovary».  301, 
454. 

L.  Mouton.  Un  demi-roi  :   le  duc  d'Épex"non   et    «  l'Entreprise 
d'Angoulème  n.  431. 

XXXI.  1922,  II.  —  M.  DoNNAY.  Molière  et  nos  amis  les  Anglais. 
30. 

A.  Thibaudet.  Gustave  Flaubert  (VIT)  «  Salambô  ».  74. 

—  —  (Vtll)    «  L'éducation  sentimen- 

tale ».  208,  344. 

G.  DE  PouRTALÈs.  De  «  l'esprit  européen  »  dans  la  littérature.  278. 

G.  Constant.  Une  rivalité  franco-allemande  en  conclave.  —  L'élec- 
tion de  Jules  III.  333. 

34.  —  Revue  de  l'histoire  littéraire  de  la  France. 
XXVIII,  1921. 

G,  Truc.  La  psychologie  dans  les  sermons  de  Bossuet   481. 

P.  Dorbec.  Les  premiers  contacts  avec  l'atelier  du  peintre  dans 
la  littérature  moderne.  501. 

M.  Blu.m.  Un  lien  entre  les  sujets  de  Corneille.  523. 

R.  Dezei.meris.  Annotations  inédites  de  Michel  de  Montaigne  sur 
le  «  De  rébus  gestis  Alexandri  Magni  »  de  Quinte-Curce.  528. 

L.  Bourquin.  La  controverse  sur  la  comédie  au  xviu"^  siècle  et  la 
lettre  à  d'Alembert  sur  les  spectacles.  549. 

P.   BoNNEFON.   Victor  Jac(iuemont  annoté   par   .Stendhal  ci   par 
Mérimée.  575. 


604  PÉRIODIQUES 

P.  DE  Lapparext.  Rabelais  et  le  basque.  591. 

XXIX,  1922.  —  R.  SoRG.  Le  secret  de  Ronsard.  1. 

A.  MouGLOND.  Au  pays  de  la  Vénus  d'Ille    Mérimée  et  Jaubert 

de  Passa.  17. 
G.  MoxGRÉDiEN.  Les  poésies  de  Tallemant  des  Réaux.  47. 
II.  Patry.  L'épilogue  du  procès  des  u  Fleurs  du  mal  ».  Une  lettre 

inédite  de  Baudelaire  à  l'Impératrice  (1857).  67. 
Ch.  h.  Boudhors.  Divers  propos  du  chevalier  de  Méré  en  1674- 

1675.  76. 

35.  —  Revue  historique.  CXXXVIII,  1921. 
L.  Batiffol.  Richelieu  et  la  question  de  l'Alsace.  161. 
R.  Vivier.  La  grande  ordonnance  de  1351  :  les  mesures  anticorpo- 
ratives et  la  liberté  du  travail.  201. 
Commandant  "Weil.  Saint-Jean  de  Latran.  La  Chapelle  de  Sainte- 

Pétronille  et  les  privilèges  de  la  France,  214. 
CXXXIX,  1922.  —  Ch.  Terlixden.  La  politique  économique  de 

Guillaume  I«^  roi  des  Pays-Bas,  en  Belgique  (1814-1830).  1. 
L.  Frati.  La  mort  du  général  Biron  (16)2).  40. 
Commandant  Herlaut.   Les   enlèvements  d'enfants  à  Paris   en 

1720  et  1750.  43,  202. 
R.  Michels.  Étude  sur  les  relations  historiques  entre  la  France 

et  les  pays  du  Rhin.  161. 
E.  Maugis.  Un  plan  d'enseignement  historique  en  1787.  221. 

D.  Pasquet.    Bulletin  historique.   Histoire  des  États-Unis.  232. 
36.  —  Nouvelle  revue  historique  de  droit  français.  1921. 

E.  Lesme.  Les  origines  des  droits  de  régal  à  l'époque  carlovin- 
gienne.  5. 

G.  Le  Bras.  Le  «  Liber  de  misericordia  et  justitia  »  d'Albert  de 

Liège.  80. 
A.  AxDRÉADÉs.  La  vénalité  des  offices  à  Constantinople.  232. 
ViARD.  Tribunaux  de  famille  à  Dijon  (1790-1792).  242. 
E.  Jordan.  Dante  et  la  théorie  de  l'Empire.  353. 
J.  DE  LA  Mo.meraye.  Le  régime  féodal  et  les  classes  rurales  dans 

le  Maine  au  xvin«  siècle.  165,  397. 
P.  Thibault.  Observations  sur  le   titre  de  mig-rantibiis  de  la  loi 

salique.  449. 
E.  Meynial.  Études  sur  Thistoire  financière  du  xvi''  siècle.  459. 
Levy-Bruhl.  La  fonction  du  très  ancien  testament  romain.  634. 

37.  —  La  Revue  latine.  V,  1922. 
Baron  Kervyx  de  Lettexhove.  Les  archiducs  Albert  etisabelle.  5. 
J.  CuvELiER.  Deux  autographes  d'Albert  et  Isabelle.  30. 
Comtesse  de  Villermont.  L'infante  Isabelle.  34. 
L.  VAX  der  Essex.  Les  ai'chiducs  Albert  et  Isabelle  et  les  origines 

de  la  Légation  belge  auprès  du  Vatican.  41. 


PÉUIODIQUES  605 

Ch.  Teri, index.  L'archiduc  Albert  et  la  guerre  contre  les  Pro- 
vinces Unies.  47. 
A.  CouNsoN.  La  littérature  belge  sous  les  archiducs.  G3. 
J.   CuvELiER   et   le  comte   d'Aksciiot.  Les  premières  académies 

belges.  70 
J.  Destkée.  Les  arts  sous  les  archiducs  Albert  et  Isabelle.  79. 
L.  CiiEVAijjEK.  Les  archiducs  et  l'abbaye  de  Bonne-Espérance. 

111. 
R.  DouMic.  Si  Molière  revenait  parmi  nous.  133. 
C  Bellaigue.  Molière  et  la  musique.  177. 
Ch.  Terlinden.  Le  régime  politique  et  économique  de  l'Escaut  à 

travers  les  âges.  241 

38.  —  Revue  du  Nord.  VII,  1921. 
Ph.  Sagnac.  La  (juestion  belge.  1. 
M.  Bruchet.  L'invasion  et  l'occupation  du  département  du  Xord 

par  les  Alliés.  1814-1818  (suite).  30. 
C.  Richard.  La  fabrication  des  armes  dans  le  district  d'Abbeville 

sous  la  Convention.  89. 
A.  Lefas.    La  juridiction    consulaire    de   Lille  et  le   j)rotocole 

d'Adrien  Bâillon.  169,  258. 
VIII,  1922.  —  Z.  W.  Sneli.er.  Le  dévelopi)ement  du  commerce 

entre  les  Pajs-Bas  septentrionaux  et  la  France  jusqu'au  milieu 

du  xv*  siècle.  5. 
A.  Baillox.   La   juridiction  consulaire   de  Lille  et  le  protocole 

d'Adrien  Bâillon.  33. 
Ph.  Sagxac.  La  crise  européenne  de  1887.  Léopold  II,  roi  des 

Belges,  et  la  défense  nationale.  89. 
F.  Gaxshof.  Les  «  homines  de  gênerait  placito  »  de  l'abbaj'e  de 

Saint- Waast  d'Arras.  119. 
39.  —  Revue  néo-scolastique  de  philosophie.  XXXIII,  1921. 
E.  Dupréel.  Les  thèmes  du  «  Protagoras  »  et  les  «  Dissoi  Logoi  ». 

26. 
M.  De  Wulf.  La  formation  du  tempérament  national  dans  les 

philosophies  du  xiii''  siècle.  59. 
P.  Charles.  Dante  et  la  mystique.  120. 
A.  Pei.zer.  Les  versions  latines  des  ouvrages  de  morale  conservés 

sous  le  nom  d'Aristote  en  usage  au  xui^  siècle.  316,  378. 
A.  Bacci.  Philosophie  et  poésie  dans  le  poème  de  Dante.  422. 
XXXIV,  1922.  —  C.  H.  Graxdgext.  Dante  scholar  and  philo- 
sopher. 5. 
R.  Kre.mer.  La  connaissance  historique.  Son  objet  et  sa  natui-e. 

92. 
A.  de  Poorter.  L'n  traité  de  pédagogie  médiévale  :  Le  «  Do  modo 

addisccndi  »  de  Guibert  de  Tournai,  O.  F.  M.  195. 


606  PÉRIODIQUES 

40.  —  Revue  du  seizième  siècle.  IX,  1922. 
P.  Spaak.  Jean  Lemaire  des  Belges.  Sa  vie  et  son  œuvre.  II.  1. 
E.  Dkrmexghem.  Un  ministre  de  François  I*"".  La  grandeur  et  la 

disgrâce  de  l'amiral  Claude  d'Annebault.  34. 
L.  DiiLARuiiLLE.  L'étude  du  grec  à  Paris  de  1514  à  1530.  I.  51. 
A.  Vagaxay.  De  Rabelais  à  Montaigne.  Les  vocables  en  -en,  éen, 

-ien.  I.  51. 
H.   Ci.ouzoT.    Un  émule  de   Jacques   du  Fouilloux.    Robert   de 

Salmore.  73. 
J.  NÈvE.  Sesquipedalia  verbà  :  Silozontizationibiis.  76. 
M.  Gauchie.  Les  origines  du  comédien  Floridor.  77. 
J.  Plattard.  Une  œuvre  inédite  et  nouvellement  découverte  du 

grand  rbétoriqueur  J.  Bodchet  :  «  Les  cantiques  et  oraisons 

contemplatives  de  l'âme  pénitente  traversant  les  voies  jiéril- 

leuses.  »  80. 

41.  —  Revue  universelle.  VIII,  1922. 
E.  Picard.  L'œuvre  de  P.  Duhem  en  histoire  et  en  philosophie 

des  sciences.  16. 
G.  Goyau.  Saint  Louis.  37. 

L.  Bertrand.  La  Lorraine  dans  l'œuvre  de  François  de  Curel.  273. 
J.  Maritain.  Ernest  Psichari.  609. 
A.  Thérive.  La  langue  française  et  ses  périls.  706. 
IX,   1922.  —  A.    BoscHOï.    Un   créateur  de   Fopéra-comique  : 

Monsigny.  295. 
M.  Denis.  Les  maladies  de  la  monnaie.  603. 
A.  Thérive.  Les  styles  littéraires  d'aujourd'hui.  693. 

42.  —  Romania.  XLVIII,  1921. 
J.  BÉDiER.   Les  assonances   en  -é  et  eu  -ié  dans  la  Chanson  de 

Roland.  465. 
J.  JuD.  Mots  d'origine  gauloise.  (Deuxième  série.)  481. 
A.  L-^NGFORS.  Le  miroir  de  la  vie  et  de  la  mort,  par  Robert  de 

rOmme  (1266),  modèle  d'une  moralité  wallonne  du  xvi"  siècle. 

511. 
P.  KoKSETii.  La  diphtongaison  en  catalan.  532. 
J.  Haust.  Etymologies  wallonnes  et  françaises.  547. 
G.  Bertoni.  *Capsea.  579. 

L.  FouLET.  Pour  le  commentaire  de  François  Yillon.  5S0. 
II.  K.iKr.i,MAN.  Sur  deux  épisodes  de  Gautier  de  Coinci.  588. 
XLVIII,  1922.  —  E.  Philipon.   L'a  médiéval  posttonique  dans 

les  langues  romanes.  1. 
P.  Marchot.  Xotes  critiques  sur  les  plus  anciens  textes  français 

et  provençaux.  32. 
M.  Roques.  Sur  deux  particularités  métriques  dans  la  Vie  de 

suint  Georffoire  en  ancien  français.  41. 


PÉRIODIQUES  607 

E.  HoKFFNER.  Date  et  composition  métrique  des  jeux  dramaticiues 
de  Chantilly.  G2 

A.  Jeaxroy.  Boceace  et  Christine  de  Pisan  :  le  De  claris  nuilio- 
ribiis,  principale  source  du  Liure  delà  Cité  des  Dames.  'J3. 

P.  Champion-.  Remarques  sur  un  recueil  de  poésies  du  milieu  du 
XV»  siècle  (B.  X.  fr.  922:^).  lOG. 

P.  Mahchot.  Lut.  vulg.  *rucciuus  «  cheval  de  charge  ».  115. 

J.  Leite  de  Vascon'cellos.  Apotamentos  filologicos.  117. 

G.  L.  Hamilton.  Les  sources  du  Tinndclct.  124. 

43.  —  Die  Neueren  Sprachen.  1921. 

K.  Glaser.  Zum  Bedeutungswandel  im   Frauzosischen.  241.  347. 

W.  KoxKi.  «  Wenn  »  mit  «  wûrde  ».  301. 

F.  Karpee   Syntaxstudien.  280,  322. 

E.  Lerch.   Mehr  Wissenschaft  in  neusprachlichem    Unterricht. 
Entgegnung  dazu  von  Th.  Zeiger.  379. 

G.  Haack.  Der   spanische  Unterricht  an  den  hoheren  Schulen 
der  Vereinigten  Staaten,  Frankreichs  und  Englands.  402. 

XXX,  1922.  -    E.  Wkciishler.  Der  Bildungswert  des  Franzô- 

sischeu  fur  die  deutsche  Schule  und  den  deutschen  Geist.  1. 
Deutschbeix.  Infinitiv  und  Gerundium.  12. 
AV.  Bakrwoi.ff.  Racine  und  Euripides.  17. 
L'rtei,.  Das  Malerische  bei  Gwy  de  Maupassant.  34. 
T.   Tranaas.    Remarques   sur    les    propositions    interrogatives 

directes  dans  le  français  parlé  et   populaire.   Ton  père  est-il 

malade?  55. 
E.  Mackel   Die  Sprache  im  Dienste  der  Auslandkunde.  97. 
R.  RiEGLKR.  Leber  =  Seele  im  Romanischen.  124. 
W.  KiiCHLER   Jean-Arthur  Rimbaud.  127. 
A.  VON  Martin.  Der  Sinu  der  Commedia.  134. 
V.  Amoretti.  Profili  di  scrittori  Ttaliani  contemporanei.  149. 
L.  Spitzkr.  Zur  proiiominalen  Verwendung  von  des.  169. 
AV.  RiCKEX.  Xachtrage  zur  Lehre  vom  Subjonctif.  172. 

44.  —  Transactions  of  the  Royal  Historical  Society. 

IV,  1921. 

C.  AV.  C.  O.MAN.  Some  mediaeval  conceptions  of  ancient  history.  1. 

AV.   Hunsox.   Status  of  «  villani  »  and   other  tenants  in   Danish 

East  Anglia  in  pre-conquest  time   23. 
Family-,  court-  and  state-archives  'Haus-,  Hof-  und  Staats-Archiv) 

at  A'ienna.  49. 
C.  A.  J.  SiiEEL.  The  Council  of  the  AVest.  62. 
A.  H.  Tiio.MAS.  Illustrations  of  the  mediaeval  municii^al  history 

of  London  from  the  (iuildliall  records.  81. 
Fr,  av.  X.  FixciiAM.  Xotes  from  ilie  ecclesiastical  court  records 

at  Somerset  House.  103 


608  PÉRIODIQUES 

M.  L.  Bazeley.  The  exteut  of  the  Englisli  forest  in  the  tliirteenth 

century.  141. 
A.  BuGGE.  The  Xorse  settlements  in  the  British  Islauds.  173. 
45.  —  Verslagen  en  mededeelingen 
der  Koninklijke  Vlaamsche  Académie.  1921. 
E.  Gaillard.  Kleine  verscheideuheden.  447,  520,  572,  584,  602, 

656,  685,  719,  760,  784,  80G,  860,  932. 
Kam.  Am.  Joos.  De  volksraadsels  in  de  seliool.  467. 
A.   FiERENS.  De  vaderlandsche  geschiedenis  in  ous  middelbaar 

onderwijs.  500,  778. 
L.  WiixEMS.  Het  volksboek  «  van  den  thien  esels  ».  573. 
M.  Sabbe.  Vondel,  Balthasai-  Moretus  II,  Leonardus  Marius  eu 

Hendrik  Barentsen.  605. 
M.  Sabbe.  Bij  de  400*'*  verjaring  van  L.  Giucciardini's  gebooi'te- 

dag.  625. 
Kam.  Am.  Joos.  Onze  onomatopeeën.  657. 
G.  Segers.  De  taal  van  de  school  en  van  het  volk.  674. 
Kam.  J.  Muyldermaxs.  Sprokkelingen.  Volksliedjes  op  heteinde 

der  xvm*  en  't  begin  der  xixe  eeuw.  688. 
Is.  Teirlinck.  lets  over  grammatische  terminologie.  745. 
A.  Fierens.  0ns  prebendenwezen  onder  de  pauzen  van  Avignon. 

809. 
O.  Wattez.  Van  niuziek  tôt  toonkunst.  865. 
G.  Segers.  Het  mengelwerk  in  onze  dag-  en  weekbladen.  903 
L.  Willems.  Lexicografische  sprokkelingen.  I.  915. 

—  Margriete  van  Looren.  929. 

1922.  —  L.  Willems.  De  bibliografie  van  Starter's  :  «  Frieschen 

Lusthof  ».  25. 
Kam.  a.  Joos.  De  volksvergelijkingen  in  de  school.  39. 
E.  Gaillard.  Kleine  verscheidenheden.  52,  86,  194,  230,  252,  312» 

360,  394. 
G.  Segers.  Vondel,  onze  vlaamsche  Dante.  Shakespeare's  derde 

eeuwfeest  (1616-1916).  53. 
A.  Van  de  Velde  en  Chr.  De  Bruyker.  Bijdragen  tôt  de  woorden- 

schat.  Een  chemische  woordenlijst,  89. 
J.  Gessler.  Die  Pierts.  Topographische,  taal-  en geschiedkundige 
aanteekeningen   over  en   om    het    Peertshuis    in   de    Peerts- 
demerstraat  te  Hasselt,  149. 
J.  MuYLDERMANs.  De  Historie  van  sieur  Anneesens    197. 
M   Sabbe.  Uit  den  humanistenkring  rondom  Plantijn.  253. 

—         Heeft  Vondel  Zuid-Nederland  bezocht  ?  265. 
L.  Willems.  Lexicografische  sprokkelingen.  II.  269. 
J.  Jacobs   De  «  Middeluederlandsche  »  schrijf-  en  spreektaal. 
A.  Van  de  Velde.  De  brieveu  1  tôt  27  van  Antoni  van  Leeuwen- 


PÉRIODIQUES  609 

hoek  (Delft  24  Oktober  1G32,  7  2G  Augustus  1723)  den  stichter 

der  micrographie.  323. 

46.  —  Philologische  Wochenschrift.  XLII,  1921. 
G.  WoLTKRSToHi-i'.  Zu  lUa.s,  Il    02(5.  22 
A.  WiLHELM.  H'YXPOAOYZIOA.  23. 

—  Zuni  Edikt  des  M.  Petronius  Mamertinus.  24. 

M.  Wallies.  Textkritisches  zu  Platons  Staat.  41. 
Fr.  Bock.  Plutarch  uud  die  Schrift  De  educandis  pueris.  GG. 
Fr.  Stûrmkr.  Die  Rahmeuteclmik  in  der  Hius.  91. 
C.  RiuiKR.  Zu  I)omostheiU'.s'  Kede  XIII  irepi  ouvTdEeuuç.  116. 
A.  V.  Prkmkkstein.  Zum  Monumentum  Ancyranum.  135. 
A.  KuRFELS.  Zur  Frage  der  Echtheit  der  Epislalae  ad  Caesarem 

senem  de  re  publica.  165. 
J.  SiEVKKiXG.  Zum  myronischen  Diskobol.  167. 
A.  KuNZE.  Zu  eXaqppoç  als  Stilbegriff.  18U. 
S.  Lii.i.iKDAHL.  Cato,  De  ai>r.  e.  IV.  18i). 
E.  MvIller-Graupa.  Der  aaTOYaXoPoXoç  des  Polyklet.  208, 
"W.  Sternkopf.  Zu  Tacitus  Germania.  c.  30.  237. 
Th.  O.  Achems.  Eine  Cicero-Ileminiscenz  bei  Winckelmann.  239. 
A.  SûFSKAXD.  Aischylos'  Hiketiden.  341  f.  261. 
A.  Kunze.  Zu  Ilor.  Sat.  II,  6,  89.  2G3. 

E.  Orth   Cicero  :  De  legibus,  l,  3,  10.  287. 

O.  GÛTHLING.  Zu  Xenophons  Cjnegeticus.  307. 
W.  MoRKL.  Zu  Katalepton  6  uud  12.  308. 
M.  ScHUSTER.  Zum  Dativ  bei  Properz.  310. 
A.  Klotz.  Erwideruug.  312. 
Th.  BiRT.  Zu  den  Axamenta  der  Salier.  332 

A.  PoTï.  Eine  Wende  in  der  Textkritik  desXeuen  Testamentes.  357. 

F.  "Wai.ter.  Zu  Catull,  Tacitus  und  Ammianus  Marcelliuus.  381. 
O.  Wa(;ner.  Textkritisches  zu  Cornélius  Xepos.  403. 

B.  Lauxx.  Kein  («iroverkebr  bei  athenischeu  Banken.  427. 
A.  ZiMMERMAXN.  Zu  Hesiod.  451. 

J.    ToLKiEHN.    Der    Titel    des    ersten    religionsgeschichtlichen 

Schrifts  Ciceros.  477. 
A.  L.  Maver.  Virgo  m    479 

A.  ZiEHEx.Textkritische  Bemerkungen  zu  den  Briefen Ciceros.  499. 
47.  —  Zeitschrift  fiir  Romanische  Philologie.  XLII.  1922. 
L.  Spitzer.  Aus  Anlass  von  Gamillschegs  «  Franzosischen  Etymo- 

logien  ».  5. 
H.  Xeuxkirchen.  Zur  Teilungsformel  im  Provinzalischen.  35. 

G.  RoHi,Fs.  Ein  problem  der  vergleichende  Lautgeschichle.  68. 
E.  Lewy.  Zur  Wesensgestalt  des  Franzosischen.  71. 

A.  Zauner.  Zur  Grammatik.  75. 

G.  Roni.Fs.  Zur  «  halben  n  Xegatiou.  80. 

30 


610  PÉRIODIQUES 

G.  DE  Gregorio.  Il  piu  antico  vocabulario  dialettale  italiano.  89. 

Segl.  Spanisclie  Etymologien.  97. 

St.  Hofer.  Zum  Yderroman.  108. 

O.  MÛLLER.  Zur  handschriftlichen  Uberlieferung  des  Poème 
moral.  109. 

48.  —  Zeitschrift  fiir  vergleichende  Sprachforschung. 
L,  1922. 

O.  Grûnenthai,.  Der  westslavische  Akzeat.  1. 

F.  HiLX>ER  V.  Gaertringen.  0apv-.  Eine  Frage  an  die  Sprach- 
forschung. 12, 

J.  Endzelin.  Zur  baltischen  Deklination  der  «  ablautende  o  (O/o- 
Stâmme.  13. 

R.  Thurneysen.  Zum  Lydischen.  35. 

J.  Pokorny.  Hibernica.  1.  Indogerm  n  im  Irischen  2.  Ir.  lae 
('  Tag  ».  3.  Idg.  b{h)l  im  Irischen  4.  Alir.  dru  «  Niere  »  5.  Zur 
monophtongierung  von  ai  und  oi.  41. 

L.  Spitzer.  Zu  dieser  Zeitschrift  XLIX,  95.  53. 

St.  Mladenov.  Altarm.  ul  «  epiqpoç  ».  54. 

H.  Jensen.  Geschlechtswechsel  von  lit.  kiaûlè  «  Schwein  n.  55 

E.  SiTTiG.  Eine  elliptische  Konstruktion  in  deu  indogerm. 
Sprachen.  56. 

R.  Trautmann.  Ueber  die  Behandlung  der  Anlautgruppe  spr  im 

Urslavischen.  66. 
W.  Prellwitz.  AaOTrXfiTiç  'Epivuç.  68.  . 

F.  Bechtel.  Parerga,  59-66.  69 

WoLF  Krause  Die  Wortstellung  in  den  zweigliedrigen  Wort- 
verbindungen  untersucht  fur  das  Altindische,  Awestische, 
Litauische  und  Altnordisclie.  74. 

W.  Preliavitz.  'OXoqpÛJÏoç.  129. 

W.  Schulze.  Vom  Stammeln.  129. 

E.  Hermann.  Ergiinzungen  zum  elliptischen  Dual  und  Kontami- 
nation  in  den  indogermanischen  Sprachen.  130. 

F.  HoLTHAUSEX.  Etymologien.  141 . 

J.  ScHRiJNEN.  Zur  indogermanischen  Benennung  der  Augenbraue. 

144. 
A  Bezzenberger.  Eine  germanische-baltische  Gruszform.  146.  . 
A.  ZiMMERMAXN.  Lateinlsche  Kinderworte  als  Verwandtschafts- 

bezeichnungen,  147. 
A.  Bezzenberger.  Altpreuszisches.  151. 
S.  Si.MONYi.  Knie  und  Geburt.  152. 
W.  Kaspers.  Etj'mologien.  155. 
A.  Bezzenberger.  Aus  litauischen  und  lettischen  Kriegsbriefe.  158 . 


CHRONIQUE 


Société  pour  le  Progrès  des  Études  philologiques 
et  historiques. 

Séances  du  14  mai  1922,  à  Bruxelles. 

Secli(}n  de  philologie  classique  et  romane. 

La  séance  est  ouverte  à  10  1/2  heures  sous  la  présidence  de 
M.  Em.  Boisacq.  Secrétaire  :  M.  Jean  Baugniet. 

La  section  entend  quatre  communications  : 

I.  M.  Vannkrus  parle  d'abdrd  d'une  ancienne  traduction  alle- 
mande du  suffixe  -sier,  au  sujet  duquel  maintes  discussions  ont 
déjà  surgi  entre  toponj^mistes.  Godefroid  Kurth  en  faisait  un 
suffixe  germanique,  et  penchait  à  y  voir  le  -statt  allemand 
(le  stede  flamand);  c'est  là,  en  somme,  la  conclusion  à  laquelle 
M.  Feller  a  également  abouti  en  1904. 

En  1913,  M.  Lue.  Roger  a  déclaré  admettre  l'opinion  de  Kurth 
et  de  Feller  comme  vraisemblable.  Toutefois,  se  basant  sur  la 
traduction  allemande  de  Commanster,  Gommels,  il  a  suggéré  une 
nouvelle  interprétation  :  Gommels  pouvant  s'expliquer  par 
*Gommen-holz,  on  peut  supposer  que  ster  signifie  «  bois,  forêt  », 
ou  plutôt,  qu'il  est  l'équivalent  de  «  sart  »  (cf.  Ducange  :  «  styrpiis 
=  silva  exstirparta,  idem  quod  exartus  »)  ;  le  ster  wallon  a  donc 
pu  venir  de  exstirpiis  >  stirpiis.  Malheureusement  pour  le  raison- 
nement de  M.  Roger,  Gommels  n'est  pas  un  nom  en  -holz,  mais 
bien  en  -liaiisen;  en  effet,  M.  Vannérus  a  trouvé  deux  documents 
allemands,  où  Commanster  est  appelé  Gommel.slmyscn  en  1402  et 
Gummelsbusen  en  1470;  une  graphie  moderne  de  1750  fournit  une 
forme  contractée,  absolument  régulière  :  Gommelsen.  Quant  à  la 
première  partie  du  nom,  Gommel{s)  ou  Gummel{s),  ce  ne  peut  être 
qu'un  nom  germanique  de  personne  du  groupe  Gtima  (Forsteniann). 

Cette  traduction  de  ster  par  -liausen  permet  de  donner  à  ce 
suffixe  le  sens  général  d'  «  habitat  humain  »,  concordant  absolu- 
ment avec  l'explication  du  ternie  par  statt  ou  -stelle. 


612  CHRONIQUE 

II.  M.  Vaxxérus  met  ensuite  les  membres  de  la  section  au 
courant  des  recherches  qu'il  a  faites  à  propos  du  nom  de  Spa. 

Ses  investigations  doivent  encore  être  poursuivies,  mais  les  don- 
nées déjà  réunies  le  portent  à  admettre  que  ce  nom  (1276.  Spaas  ; 
1308,  Spasse;  1315,  Spa:z;  1371,  1421,  Spausse;  1382,  Spaulx)ne  se 
rattache  pas,  ainsi  que  d'aucuns  le  pensent,  à  spatium  («  espace  » 
défriché  dans  un  bois,  pour  être  mis  en  culture),  mais  bien  à  un 
radical  primitif  germanique,  caractérisé  par  les  consonnes  ini- 
tiales sp  ;  ces  consonnes,  qui  se  retrouvent  dans  l'allemand 
speien  (intensif  :  speuzen),  <(  cracher  »,  et  même  dans  le  latin  spiio, 
expriment  la  force  d'explosion  de  l'eau  qui  sourd.  Spa  devrait 
donc  son  nom  à  ses  sources  caractéristiques. 

m.  M.  KuGENER  propose  une  étymologie  très  attrayante  du 
mot  Geaiuoqpôpia.  Après  avoir  exposé  brièvement  le  rite  de  la  fête 
des  Thesmophories,  et  rappelé  les  différentes  hypothèses  émises 
au  sujet  de  la  signification  du  nom  de  cette  fête,  M.  Kugener 
propose  de  voir  dans  les  Thesmophories  soit  la  fête  «  où  l'on 
porte  des  Geajuoî  »  soit  plutôt  la  fête  en  l'honneur  de  la  divinité 
«  qui  produit  les  6ea)uoî  » .  Rattachant  avec  M.  Boisacq  le  mot  Beafiôç 
au  verbe  xiGriiui,  mais  donnant  à  ce  verbe  le  sens  de  «  planter  » 
qu'il  a  dans  V Économique  de  Xénophon  et  dans  les  Géoponiques 
où  il  alterne  avec  le  verbe  qpuTeûuu,  M.  Kugener  suppose  que  le 
mot  9ea|u6ç  a  dû  avoir  anciennement  le  sens  de  «  plant,  j^lante  ». 
Il  fait  remarquer,  à  l'appui  de  son  hypothèse,  que  les  verbes 
instituere,  constituere,  statuera  qui  ont  donné  institutio,  insti- 
tutum,  constitutio,  statutum  ont  le  sens  de  «  planter  »  {instituere 
olera,  constituere  arbustum,  statuere  arborem)  et  qu'en  allemand 
les  mots  Gesetz  «  loi  »  et  Setzling-  ((  plant  »  se  rattachent  tous  les 
deux  au  verbe  setzen  «  placer  ». 

IV.  M.  Carnoy  tente  de  nous  donner  un  aperçu  de  la  préhistoire 
de  quelques  noms  de  rivières  du  Brabant.  Il  a  soin  de  nous  pré- 
venir que  c'est  là  le  domaine  de  l'incertitude,  et  que  lorsqu'on  se 
trouve  en  face  de  la  plus  vieille  forme  du  nom,  on  ne  peut 
qu'émettre  des  hypothèses  donnant  satisfaction  au  point  de  vue 
de  la  linguistique  et  que  l'on  étaye.  en  outre,  au  mojen  d'ana- 
logies de  sens  et  de  formation  aussi  nombreuses  que  possible. 

La  Dyle  serait  la  rivière  sale.  (Cf.  Dijl,  Thiel,  rapproché  du 
àt.  tyrai  «  marais  herbeux  »,  v.  slav.  ti-le-ti  «  se  jjutréfier  »  et 
grec  TÎ\oç  ((  excrément  liquide  ».) 

La  Senne  aurait  été  originairement  la  rivière  brillante,  de 
même  que  ses  affluents  la  Sennette  et  la  Zuene  (celt.  *sunnos 
«  brillant  »). 

La  Démer  devrait  sou  nom  à  une  épithète  signifiant  «  sombre, 


CHRONIQUE  613 

noirâtre  ».  Au  celtique  Tuniera,  on  peut  en  effet  comi)arer  le 
ser.  timira  u  obscur  » . 

Le  Dendre  serait  la  «  bruyante  »  :  gall.-rom.  Tenera  <  germ. 
^Thencru,  cf.  gall.  Tanarus  «  qui  fait  du  bruit,  retentissant, 
tonnant  ». 

L'Yssche  (cf.  celte  esc,  gall.  uisc,  «  eau  »)  serait  simplement 
«  l'eau  ». 

La  Liasne  serait  la  rivière  aux  eaux  abondantes  (germ.  Laenen 
=  lat.  Lana  fxiii'^  siècle)  <  celt.  *</j>  lûnos  «  plein  »),  et  enfin 
les  Dion  (rivières  près  de  Wavre  et  de  Beauraing)  tireraient  leur 
nom  de  l'appellation  fréquemment  donnée  par  les  Celtes  aux 
rivières  pour  les  diviniser  :  la  divine. 

La  séance  est  levée  à  12  1/2  heures. 


Section  de  philologie  germanique. 

La  séance  est  ouverte  à  10  1/2  heures.  Président  :  M.  P.  De  Reul. 
Secrétaire  :  M.  Collet. 

I.  M.  Bkckeniiaupt  fait  une  communication  sur  le  Paysage 
dans  Goethe.  —  Le  paj'sage  de  l'Urfaust  marque  vis-à-vis  du 
bric-à-brac  pittoresque  du  Gotz  un  progrès  vers  la  concentration 
expressive.  Malgré  ses  tendances  lyriques  sa  forme  reste  scé- 
nique.  La  scène  «  "Wald  und  Hohle  »  annonce  un  paysage  intérieur, 
muable,  émancipé  des  préoccupations  théâtrales  ;  ce  style  se 
confirme  dans  la  «  Walpurgisnacht  »,  qui  se  déroule  en  glissement 
continu  selon  les  nécessités  expressives.  Dans  la  dernière  période 
(à  partir  du  «  Prolog  im  Himmel  »)  le  paj'sage  devient  purement 
représentatif  et  tend  à  exprimer  les  idées  cosmiques  de  Coethe. 

La  séance  est  levée  à  12  heures. 

* 
*     * 

Section  d'hi.stoire. 

La  séance  est  ouverte  à  10  1/2  heures.  Président  :  M.  Vander 
Linden.  Secrétaire  :  M.  Ganshof. 

M.  le  Président  rend,  au  nom  de  la  section,  un  hommage  ému 
à  la  mémoire  de  deux  savants  confrères  décédés  depuis  la  précé- 
dente réunion  :  M.  le  chanoine  Cauchie  et  M.  P.  Hamélius. 

I.  M.  Hans.w  fait  une  communication  sur  A lludium,  liber  homo 
et  honxo  de  casa  Dei,  à  Liège,  à  la  fin  du  xii'  siècle  et  au  commen- 
cement du  xiii^  siècle  (*)  (suite  aux  connnunications  de  M.  Gans- 


(')  M.  Hîinsay  se  proposant  de  développer  sa  communication  sous  forme 
d'un  article  dans  cette  Heine,  nous  nous  bornerons  ici  \\  un  résumé  des  idées 
directrices. 


614  CHRONIQUE 

hof  dans  la  séance  de  mai  1921  et  à  celle  de  M.  Hansay  dans  celle 
de  novembre  1921  ;  cf.  Bulletin  philologique  et  historique,  1921, 
p.  20-21  et  p.  G9-70). 

M.  Hansay  admet  le  sens  de  ministeriales  pour  tous  les  textes 
du  XIII''  siècle  où  M.  Gansbof  {Revue  belge  de  Philologie  et  d'His- 
toire, 1922,  p.  306-310)  a  relevé  l'emploi  du  terme  homines  de  casa 
Dei  dans  cette  acception. 

Par  contre,  il  se  refuse  à  croire  avec  M.  Ganshof  que  dans  la 
charte  de  Philippe  de  Souabe  de  1208,  à  l'article  12  (éd.  Kurth 
dans  Bulletin  de  VInstitut  archéologique  liégeois,  t.  XXXV,  1905, 
p.  304-309),  il  soit  question  de  cives  de  casa  Dei.  qui  constitue- 
raient au  sein  de  la  population  liégeoise  un  groupement  de  des- 
cendants de  l'ancienne  familia  jouissant  de  privilèges  en  matière 
judiciaire.  Dans  ce  texte  il  faut,  d'après  M.  Hansay,  rattacher 
de  casa  Dei  à  liberi  homines.  Ces  liberi  homines  de  casa  Dei 
seraient  des  ministeriales  en  train  de  passer  dans  la  noblesse. 

M.  Hansay  pense  —  comme  M.  Ganshof  —  que  l'alleu  liégeois 
est  originairement  une  tenure.  Mais  il  estime  que  la  transforma- 
tion de  la  tenure  en  alleu  a  commencé  à  une  époque  plus  reculée. 
Se  basant  sur  l'article  15  de  la  charte  de  Brusthem  de  1175  (BoR- 
MANS,  Ordonnances  de  la  Principauté  de  Liège,  l^^  série,  t.  I,  p  24), 
il  fait  remonter  cette  allodiation  au  milieu  du  xii''  siècle. 

II.  M.  Rousseau  parle  ensuite  des  «  liberi  homines  dans  le 
Xamurois  ».  Pour  M.  Rousseau,  on  ne  peut  au  xii*  siècle  identi- 
fier les  liberi  homines  et  les  nobiles.  Les  premiers  sont  des  francs 
hommes,  des  hommes  libres  assez  riches  pour  être  restés  proprié- 
taires d'alleux.  Quant  aux  nobiles,  ils  constitueraient  la  classe 
noble,  formée  au  xii®  siècle  par  la  fusion  de  ces  liberi  homines 
avec  les  chevaliers  de  la  familia  comtale,  qui  comprenait  à  la  fin 
des  libres  et  des  non-libres. 

M.  Rousseau  développe  sa  pensée  en  étudiant  les  lignages  de 
francs  hommes  de  Falmagne  et  de  Vierte,  ainsi  que  le  morcelle- 
ment de  leurs  alleux.  M.  Rousseau  se  i^ropose  de  préciser  son 
point  de  vue  dans  une  étude  sur  le  lignage  de  Falmagne  que 
publiera  notre  Revue  (v.  plus  haut). 

Ces  deux  communications  ont  été  suivies  d'un  échange  de  vues 
auquel  ont  pris  part  MM.  Hansay,  Rousseau,  Van  der  Linden, 
Fairon,  Verriest,  Lyna  et  Ganshof. 

III.  La  section  a  entendu  ensuite  un  certain  nombre  de  courtes 
communications  : 

1°  De  M.  Van  der  Lindkx,  au  sujet  d'un  passage  d'une 
lettre  (1197)  d'Etienne  de  Tournai  (éd.  Desilve,  i).  331). 

Il  y  est  question  de  «  barbares  »  de  diverses  origines,  qui 
assiègent  Tournai  :  i^armi  eux  on  cite  des  hommes  originaires 


CHRONIQUE  615 

d'uu  pays  que  Wauters  a  pris  pour  l'Irlande  (Hibernie)  et  l'abbé 
Besilve  pour  Anvers  {Aurpie  pour  Antoerpie).  En  réalité  l'analyse 
paléograpbique  montre  qu'il  faut  lire  Haspie,  forme  assez  fré- 
quente de  Ilasbanie  :  il  s'agit  donc  de  la  Hesbaye. 

2°  De  M.  Ganshof,  qui  signale  à  la  section  que  le  cartulaire  de 
Harnes  (France,  départ,  du  Noi'd),  dépendance  de  l'abbaye  de 
Saint- Pierre,  de  Gand,  récemment  entré  aux  Archives  nationales 
à  Paris,  est  étudié  en  ce  moment  par  M.  H.  Xowi':,  qui  se  proi)Ose 
de  le  publier. 

3°  De  M.  L.  Vkrriest,  (jui  porte  à  la  connaissance  de  la  section 
que  la  Société  des  Bibliophiles  l'a  chargé  de  publier  le  Vieil  Ren- 
tier d'Audenarde  et  qu'il  a  l'intention  d'accompagner  cette  publi- 
cation d'une  étude  sur  l'organisation  domaniale  et  seigneuriale 
des  sires  d'Audenarde. 

La  séance  est  levée  à  12  12  heures. 


Assemblée  générale. 

La  séance  est  ouverte  à  14  12  heures,  dans  la  grande  salle  du 
Palais  d'Egmont,  sous  la  présidence  de  M.  Yan  der  Linden,  pré- 
sident de  la  Section  d'histoire.  Secrétaire  .  M.  O.  Grojean,  secré- 
taire-général. 

M.  le  Président  adresse  un  dernier  adieu  aux  deux  membres 
éminents  que  vient  de  perdre  la  Société  :  M.  le  chanoine  Gauchie 
et  M.  P.  Hamélius. 

M.  V.  Tourneur,  trésorier,  empêché  d'assister  à  la  séance, 
adresse  une  copie  des  comptes  de  1921  : 

Encaisse,  boni  de  1920 fr.  174.61 

Recettes,  cotisations,  abonnements 1,488.70 

Total,     .fr.       1,663.31 

Dépenses  : 

Carnet  de  re(;us  et  timbres fr.  66.30 

Impression  du  Bulletin,  convocations,  cartes  pour  la 

Revue 1,246.2.") 

Frais    d'expédition    des    volumes    aux    auteurs    des 

comptes  rendus 14. S3 

Secrétariat  du  Bulletin 6.60 

Au  concierge  de  l'Université  (deux  séances)     ...  50.00 

Total,     .fr.       l,J83.ys 


616  CHRONIQT'E 

Balance  : 

Encaisse  et  recettes •     .     .     ,     .  fr.      1.6G3.31 

Dépenses 1,383.98 

Boni  en  1921.     .  fr.         279.33 

Ces  comptes  sont  approuvés  par  l'assemblée.  La  cotisation  est 
fixée  à  5  francs  pour  1922. 

M.  Viî^CEXT,  secrétaire  de  la  Revue,  donne  quelques  explica- 
tions relatives  à  l'administration  de  celle-ci. 

M.  G.  Des  Marez  fait  ensuite  une  attachante  causerie  sur 
Yorîgine  et  les  destinées  de  Vabbaye  de  la  Cambre,  monastère  de 
Cisterciennes,  fondé  en  1201.  Les  bâtiments  ont  subsisté  dans  une 
grande  mesure,  et  c'est  en  vue  de  leur  défense  et  de  leur  restau- 
ration que  s'est  créée,  en  mai  1921,  la  Ligue  des  Amis  de  la 
Cambre,  dont  M.  Des  Marez  est  l'actif  vice-président. 

Après  la  causerie,  M.  Des  Marez  fait  aux  membres  de  la  Société 
les  honneurs  de  l'exposition  organisée  par  la  Ligue  dans  le  Palais 
d'Egmont.  Cette  exposition  comprenait  deux  salles  historiques  : 
dans  l'une  étaient  réunis  les  titres  et  privilèges  de  l'abbaye 
depuis  1202  ;  on  y  remarquait  aussi  l'Atlas  des  biens  de  1711  ;  dans 
l'autre  salle  étaient  exposés  des  objets  provenant  de  l'abbaye  : 
la  châsse  de  saint  Boniface,  exécutée  vers  1670;  un  reliquaire  du 
xviir*  siècle,  un  magnifique  ostensoir  de  1640,  qui  se  trouve 
aujourd'hui  à  Alsemberg;  des  portraits  d'abbesses,  notamment  de 
la  dernière,  Séraphine  Snoy  ;  un  sermonaire  du  xvi''  siècle,  renfer- 
mant le  sermon  prêché  à  la  Cambre  en  1555  par  un  frère  Récol- 
let, etc.  Dans  les  autres  salles,  plus  de  120  tableaux,  dus  au  talent 
de  nombreux  artistes  contemporains,  reproduisaient  les  sites  les 
plus  pittoresques  de  l'abbaye. 

Les  membres  de  la  Société  ont  emporté  le  meilleur  souvenir  de 
cette  exposition,  qui,  évoquant  toute  une  page  de  l'histoire  de 
Bruxelles,  mettait  si  bien  en  valeur  les  titres  historiques  de  l'an- 
tique abbaye,  son  multiple  intérêt  archéologique  et  les  problèmes 
d'esthétique  urbaine  qu'elle  fait  naître,  et  que  l'effort  énergique 
de  la  Ligue,  succédant  à  des  tentatives  isolées,  se  proi)Ose  de 
résoudre  rapidement. 

La  visite  a  pris  fin  vers  18  heures. 


La  troisième  session  de  l'Union  académique  internationale. 

Bruxelles,  25-27  mai   1922. 

La  troisième  session  du  Comité  de  l'Union  académique  interna- 
tionale (U.  A.  I.)  s'est  tenue  à  Bruxelles  au  Palais  des  Académies 


CHRONIQUE  617 

du  25  au  27  mai  dcrnior,  sous  la  présidence  de  M.  Pirenne.  Les 
corps  savants  de  quatorze  pays  y  étaient  représentés  (Belgique, 
Danemark.  Espagne,  États-Unis,  France,  Grande-Bretagne, 
Grèce,  Italie,  Japon,  Norvège,  Pays  Bas,  Pologne,  Russie  et 
Royaume  des  Serbes,  Croates  et  Slovènes). 

Des  divers  travaux  ])atronnés  par  l'Union,  deux  ont  atteint 
déjà  la  période  des  réalisations. 

1.  Corpus  (les  lyases  antiques.  —  La  peinture  de  vases  étant, 
avec  la  littérature,  «  la  source  la  plus  riche  de  nos  connaissances 
sur  toutes  les  formes  de  la  vie  antii^ue  et  sur  les  sentiments  de 
l'âme  des  Grecs,  en  même  temps  que  la  révélation  la  plus  spon- 
tanée et  la  plus  variée  de  leur  génie  artistique,  une  telle  publica- 
tion, quelle  que  doive  être  l'énormité  du  labeur  et  de  la  dépense, 
est  de  celles  qui  s'imposent  aujourd'hui.  La  science  archéologique 
se  préoccupe  de  plus  en  plus  dos  recueils  généraux,  des  Corpus, 
formant  des  répertoires  aussi  complets  que  possible.  Ce  que  le 
siècle  passé  a  fait  pour  les  inscriptions,  le  siècle  présent  doit  le 
réaliser  pour  la  science  des  monuments  figurés  et  déjà  plusieurs 
entreprises  de  ce  genre  sont  en  bonne  voie  (')  (Corpus  des  mon- 
naies antiques.  Corpus  des  reliefs  grecs  funéraires,  Corpus  des 
sarcophages  romains.  Corpus  des  mosaïques  romaines,  etc.)  ». 
Celle-ci  a  pour  initiateur  et  pour  directeur  général  l'homme  le 
plus  compétent,  M.  E.  Pottier.  Comme  il  a  été  décidé  que  chaque 
nation  participante  s'occuperait  elle-même  de  son  Corpus,  l'état 
d'avancement  du  travail  est  très  variable,  suivant  que  tel  ou  tel 
pays  a  pu  réunir  ou  non  les  fonds  dont  il  avait  besoin.  Pour  la 
Belgique,  le  Danemark,  la  France  et  la  Hollande,  on  se  trouve 
devant  des  préparations  assez  poussées  déjà.  Xotamment,  en  ce 
qui  nous  concerne,  M.  Capart.  directeur  régional,  assisté  de 
M.  Maj'ence,  se  propose  de  i)ublier  d'abord  tous  les  vases 
antiques  du  ^lusée  du  Cinquantenaire,  et  il  donnera  l'année  pro- 
chaine un  fascicule  composé  de  deux  séries,  l'une  comprenant  des 
vases  égyptiens,  l'autre  des  vases  grecs.  Pour  le  Danemark, 
M.  Blinkenberg  reproduira  en  premier  lieu  les  séries  du  Musée 
national  de  Copenhague,  en  suivant  l'ordre  chronologique  et  en 
commençant  par  conséquent  jiar  les  vases  égyptiens  et  mycé- 
niens. En  Hollande,  M.  Six  prendra  d'abord  les  vases  d'une  col- 
lection particulière  de  La  Haj-e.  En  France,  M.  Pottier  donne 
naturellement  la  ])remière  place  au  Louvre,  mais  il  a  amorcé 
également  la  publication  des  vases  du  Musée  de  Compiègne,  qui 
sont   fort   intéressants.    Aux    reproductions  pliototj'piques  des 


(')  Voir  la  brochure  piihiiée  par  11".  A.  1.  sur  rnrpanisatinn   du    C.tirpus 
Yasorum  antiqunriDii.  Pai'is,  GJiampion,  111:21. 


616  CHRONIQUE 

vases  seront  jointes  de  très  courtes  descriptions,  avec  une  biblio- 
graphie aussi  complète  que  possible. 

M.  Pottier  s'est  adressé  à  quelques  spécialistes  j>our  obtenir 
une  série  de  brèves  notices  sur  le  classement  des  vases  des 
diverses  régions  (Egypte,  Syrie,  Anatolie,  Chypre,  Crète,  Sicile, 
Thrace  et  Scythie,  Macédoine,  Thessalie,  etc.).  Ces  notices  sont 
destinées  à  constituer  un  volume  qui  rendra  les  plus  grands  ser- 
vices aux  archéologues  et  formera  un  complément  très  digne  du 
Corpus.  Des  félicitations  ont  été  votées  à  M.  Pottier  pour  la  per- 
fection de  la  méthode  de  reproduction  phototypique  qu'il  a 
patiemment  et  ingénieusement  constituée. 

2.  Le  Catalogue  des  manuscrits  alchimiques  (i),  édité  par 
MM.  Bidez,  Cumont  et  Heiberg,  est  destiné  à  former  une  suite 
au  Catalogue  des  manuscrits  astrolog-iques,  dont  l'élaboration  a 
eu  pour  résultat,  notamment,  de  transformer  nos  idées  sur  les 
rapports  de  la  Grèce  avec  l'Orient.  Ce  nouveau  catalogue  est, 
sinon  le  plus  vaste,  du  moins  le  plus  avancé  des  travaux  entrepris 
sous  le  patronage  de  l'Union.  Un  premier  fascicule,  décrivant  les 
manuscrits  grecs  des  Iles  Britanniques,  est  déjà  sorti  des  presses, 
et  l'on  commence  à  imprimer  les  deux  volumes  les  plus  impor- 
tants de  la  série,  ceux  où  seront  inventoriés  les  Parisini  et  les 
Marciani.  Quant  aux  manuscrits  latins,  deux  volumes  sont  en 
préparation.  L'inventaire  des  textes  conservés  dans  les  autres 
langues  ne  sera  entamé  qu'après  l'achèvement  de  la  section 
grecque. 

Le  Comité  de  l'Union  académique  s'est  occupé  ensuite  de  divers 
projets  de  publications  qui  sont  encore  à  l'étude. 

1.  La  vaste  enquête  sur  le  droit  coutumier  de  l'Indonésie,  que 
l'Académie  d'Amsterdam  i^atronne  spécialement,  n'a  guère  avancé 
jusqu'ici,  les  principaux  des  pays  intéressés  (Angleterre,  France 
et  Japon)  n'ayant  point  encore  fourni  les  fonds  nécessaires. 
Néanmoins,  M.  van  Vollenhoven  a  déjà  présenté  un  spécimen 
excellent  de  lexique  des  mots  indonésiens  se  rapportant  au  droit 
coutumier,  et  le  comité  envisage  la  possibilité  de  composer  assez 
prochainement,  d'après  un  plan  analogue,  un  dictionnaire  com- 
plet, dont  la  Hollande  ferait  les  frais  pour  un  tiers  au  moins. 

2.  Quant  à  la  réédition  du  glossaire  latin  de  du  Cange,  proposée 
par  l'Académie  Royale  de  Belgique,  les  travaux  préparatoires 
ont  fait  un  nouveau  et  très  sensible  progrès.  La  Commission  qui 
s'en  occupe  a  décidé  de  se  borner  d'abord  aux  périodes  mérovin- 


(1)  Sur  la  nécessité  de  ce  travail,  le  progranniio  des  rechcrclies  à  faire,  etc., 
cf.  J.  BiDEZ,  Bulletins  de  l'Académie  Royale  de  ISelgifjne,  classe  des  Lettres, 
1919,  p.  422  ss.  et  G77  ss. 


CHRONIQUE  619 

gienne  et  carolingienne,  en  laissant  aux  corps  savants  de  chaque 
paj's  le  soin  de  déterminer  la  daie  exacte  où  ils  s'arrêteront. 
Prochainement,  un  Comité  général,  constitué  par  les  divers 
membres  de  l'U.  A.  I.,  se  réunira  à  Paris  pour  fixer  le  pro- 
gramme des  recherches  et  les  organiser.  Ce  Comité  s'adjoindra 
des  savants  qui  ont  particulièrement  étudié  le  côté  technique  de 
la  préparation  d'un  dictionnaire,  et  il  aura  à  s'occuper  d'une 
série  de  questions  préalables  :  répartition  du  travail  entre  les 
différents  pays;  sort  ù  faire  aux  mots  étrangers  non  latinisés; 
désignation  d'un  directeur  et  d'un  secrétaire  général  de  la  rédac- 
tion ;  détermination  du  type  à  adopter  pour  les  fiches  et  du  sys- 
tème à  employer  pour  les  citations,  etc.  Enfin,  sur  la  proposition 
de  l'Académie  Royale  de  Belgique,  il  a  été  décidé  que  l'on  com- 
mencerait sans  retard  à  publier  un  Bulletin,  où  les  collaborateurs 
du  nouveau  dictionnaire  pourraient  faire  connaitre  immédiate- 
ment les  plus  marquantes  de  leurs  découvertes. 

3.  L'année  dernière,  M.  le  sénateur  Lanciani,  délégué  de  l'Aca- 
démie des  Lincei,  avait  annoncé  la  présentation  d'un  projet  de 
carte  archéologique  de  l'Empire  romain  et  de  complément  au 
Corpus  des  inscriptions  grecques  et  latines.  Ces  deux  projets  ont 
donné  lieu  à  des  débats  fort  intéressants.  Tout  d'abord,  il  a  été 
entendu  que  chaque  pays  dresserait  pour  son  compte  des  cartes 
archéologiques  de  la  partie  du  monde  romain  dont  il  est  déten- 
teur, avec  toute  liberté  pour  le  choix  des  échelles,  et  l'on  a  émis 
le  vœu  que  ces  cartes  partielles  puissent  préparer,  quand  les  cir- 
constances le  permettront,  la  confection  d'une  carte  générale  à 
échelle  uni(iue  du  monde  romain  tout  entier.  Quant  au  Corpus 
des  inscriptions,  sur  la  ])roposition  de  M.  de  Sauctis,  qui  parlait 
au  nom  des  Académies  des  Lincei  et  de  Turin,  tout  d'abord  on  a 
écarté  l'idée  d'une  entreprise  collective,  x^uis  on  a  décidé  de 
recommander  aux  corps  savants  intéressés  une  méthode  adoptée 
déjà  en  Italie  et  dans  plusieurs  autres  pays.  Cette  méthode  com- 
porte, ((  suivant  les  circonstances,  et  en  raison  de  l'importance 
plus  ou  moins  grande  des  découvertes  récentes,  tantôt  une  réfec- 
tion totale  des  recueils  antérieurs,  tantôt  de  simples  suppléments, 
destinés  à  être  constamment  tenus  à  jour  ».  En  Angleterre,  on  a 
déjà  décidé  de  rééditer  en  totalité  les  inscriptions  latines  de  la 
Bretagne  romaine;  à  Si)alato,  M»''"  Bulic  a  recueilli  plus  de 
2,000  inscriptions  qui  manquent  dans  le  Corpus  de  Berlin  et  il  se 
propose  de  les  publier  dans  un  recueil  nouveau;  pour  la  Grèce, 
l'abondance  des  trouvailles  empêche  de  songer  pour  le  moment  à 
faire  autre  chose  que  les  publier  au  jour  le  jour  dans  les  revues 
éiwgraphiques;   en  France,  le  premier  volume  des  Inscriptions 


620  CHRONIQUE 

latines  de  V Algérie  (avec  4,000  textes)  vient  de  paraître,  et  l'on  a 
déjà  préparé,  mis  en  train  ou  sous  presse  des  Suppléments  pour 
la  Tunisie  et  le  Maroc. 

4.  Reprenant  et  développant  une  proposition  de  M.  Mikami,  les 
délégués  de  l'Académie  impériale  de  Tokyo,  MM.  Inouyé  et 
Minobé.  ont  obtenu  le  patronage  de  l'Union  pour  les  recherches 
que  les  historiens  du  Japon  voudraient  entreprendre  dans  les 
bibliothèques  des  pays  occidentaux,  notamment  en  Hollande,  en 
Angleterre,  en  France  et  en  Italie,  afin  d'examiner  les  documents 
relatifs  aux  missions,  aux  relations  commerciales  et  diploma- 
tiques, et  notamment  aux  ambassades  jaiionaises  de  1585,  1614 
1615  et  1617. 

5.  Ensuite,  le  Comité  de  l'U.  A.  I.  a  abordé  l'étude  d'un  système 
de  transcription  phonétique  et  de  translittération  proposé  par 
MM.  Jespersen  et  Salverda  de  Grave.  11  s'agit  «  de  trouver,  d'une 
part,  des  signes  propres  à  exprimer  avec  clarté  et  simplicité  les 
sons  des  langues  les  plus  diverses,  et  d'autre  part,  un  système 
pratique  qui  jiermette  soit  de  rendre  plus  accessibles  les  textes 
écrits  dans  un  alphabet  étranger,  soit  de  faciliter  l'étude  des 
langues  qui  n'existent  qu'à  l'état  d'idiome  parlé  ».  Divers  spécia- 
listes seront  consultés  sur  ce  projet  et  invités  à  dire  dans  quel 
sens  il  devrait  être  modifié  ou  développé  pour  tenir  compte  des 
particularités  de  la  langue  dont  chacun  d'eux  s'occupe. 

6.  Enfin,  sur  la  proposition  de  Sir  Fred.  Kenyon,  de  la  British 
Academy,  le  Comité  a  établi  le  texte  d'une  série  de  recommanda- 
tions à  faire,  au  nom  de  l'Union  académique,  aux  administrations 
des  antiquités  dans  les  pays  à  mandat  ou  assimilés.  Je  me  borne 
à  en  reproduire  ici  les  articles  les  plus  importants  : 

«  V.  Quiconque  découvre  une  antiquité  doit  en  faire  la  décla- 
ration dans  le  plus  court  délai  possible  au  Service  archéologique 
ou  à  l'autorité  la  plus  proche.  Sous  cette  réserve  et  à  condition 
de  la  conserver  avec  le  soin  requis,  l'inventeur  peut  être  autorisé 
à  la  garder. 

«  VI.  Le  détenteur  régulier  d'une  antiquité  a  le  droit  de  la 
vendre  ou  de  l'aliéner,  mais  uniquement  dans  les  formes  prévues 
par  la  loi  des  antiquités  et  avec  le  consentement  du  Service 
archéologique. 

«  VII.  Aucune  antiquité  ne  peut  être  exportée  sans  une  autori- 
sation expresse  du  Service  archéologique. 

«  VIII.  En  cas  de  vente  à  l'intérieur  ou  au  dehors,  l'administra- 
tion des  antiquités  se  réserve  le  droit  de  préemption,  conformé- 
ment à  la  procédure  déterminée  pour  la  fixation  des  prix  par  la 
loi  des  antiquités. 


CHRONIQUE  621 

«  X.  Aucune  fouille  ne  i)eut  être  entreprise  sans  une  pcrmis- 
gion  régulière  des  autorités,  après  avis  du  Service  arcliéologi(iue. 

«  XI.  La  permission  ne  peut  être  accordée  qu'à  des  institutions 
savantes  reconnues  ou  à  des  personnes  dûment  (jualifiées  et  cau- 
tionnées par  de  telles  institutions. 

((  XII.  A  l'achèvenient  des  fouilles,  tous  les  objets  découverts 
sans  exception  sont  remis  au  Service  archéologique  dans  le  local 
désigné  par  lui. 

«  Les  pièces  mobiles  d'une  importance  historique  ou  artistique 
capitale  sont,  par  les  soins  du  Service  archéologique,  réunies  dans 
un  musée  central  ou  local,  au  mieux  de  leur  sécurité  et  des  faci- 
lités de  l'étude,  et  de  manière  à  représenter  aussi  complètement 
que  possible  la  civilisation  du  pays. 

«  Le  musée  une  fois  doté,  le  Service  archéologique  aura  qualité 
pour  attribuer  au  fouilleur  une  part  des  découvertes  accomplies 
par  celui-ci....  Cette  part  consistera  éventuellement  dans  les 
doubles,  ou  eu  objets  assimilables  à  des  doubles.  Elle  variera 
suivant  les  lieux  et  circonstances,  et  pourra  s'élever  jusqu'à  la 
moitié  des  découvertes  lorsque  1  abondance  du  matériel  archéolo- 
gique le  permettra  ou  que  pourront  le  recommander  les  difficultés 
de  la  conservation  surplace  ou  les  intérêts  généraux  de  la  science. 
Eu  égard  aux  mêmes  intérêts,  on  s'efforcera  que  la  part  faite  au 
fouilleur  soit,  elle  aussi,  autant  que  faire  se  pourra,  représenta- 
tive de  la  civilisation  du  i^ays  auquel  il  aura  consacré  ses  dépenses 
et  sou  labeur. 

«  XIII.  L'autorisation  de  fouilles  comportera,  pour  l'institu- 
tion savante  ou  la  personne  compétente  qui  eu  aura  bénéficié, 
l'obligation  de  publier,  dans  un  délai  raisonnable  et  court,  uu 
rapport  suffisamment  détaillé  sur  la  marche  des  travaux,  la 
nature,  la  date  et  le  lieu  des  découvei-tes  principales.  On  inili<iue- 
rait  aussi,  à  l'occasion,  la  destination  définitive  qu'elles  auraient 
reçue  dans  le  pays  ou  au  dehors. 

«  XIV.  Toute  institution  savante,  toute  personne  dûment  qua- 
lifiée et  cautionnée  peuvent  concoui'ir  pour  les  autorisations  de 
fouilles,  qu'elles  appartiennent  ou  non  aux  iiuissanccs  manda- 
taires. 

«  Entre  puissances  mandataires  les  relations  archéologiques 
seront  soumises  au  régime  des  réciprocités  dans  les  limites  défi- 
nies par  la  présente  convention.  » 

On  le  voit,  l'Union  académique  démontre  sa  vitalité,  non  seu- 
lement par  les  travaux  qu'elle  organise  ou  patronne,  nuiis  aussi 
par  l'entente  ([u'elle  parvient  à  établir  entre  ses  membres,  là  où 
l'idée  d'une  publication  collective  doit  être  écartée,  et  où  il  faut 


622  CHRONIOL'E 

laisser  une  pleine  autonomie  aux  corps  savants  des  divers  pays. 
Dans  ces  cas-là,  elle  exerce  une  influence  précieuse  comme  inter- 
médiaire et  coordinatrice,  et  le  bon  esprit  —  fait  de  confiance,  de 
cordialité  et  de  sincérité  —  qui  règne  chez  elle  a  exclu  jusqu'ici 
même  l'ombre  d'un  dissentiment. 

J.  BiDEZ 


V^  Congrès  International  des  Sciences  Historiques. 

(Bruxelles,    Pâques   1923.) 

Le  Comité  organisateur  du  Congrès  s'est  réuni  à  Bruxelles,  le 
dimanche  28  mai,  sous  la  présidence  de  M.  Pirenne.  Plu- 
sieurs savants  étrangers  avaient  bien  voulu  assister  à  la  séance  : 
MM.  Homolle,  membre  de  l'Institut,  administrateur  de  la  Biblio- 
thèque Nationale;  Haskins,  professeur  à  Harvard  University  ; 
Shotwell,  professeur  à  Columbia  University  ;  Koht,  professeur 
à  l'Université  de  Christiania;  Kochanowsky  et  de  Halecki, 
professeurs  à  l'Université  de  Varsovie. 

Après  avoir  appris  que  S.  M.  le  Roi  daignait  accorder  au 
Congrès  son  haut  patronage,  l'assemblée  a  fixé  la  liste  des  per- 
sonnalités appelées  à  constituer  le  Comité  d'Honneur  des  grandes 
assises  historiques  de  l'an  prochain. 

Le  Comité  a  pris  ensuite  un  certain  nombre  de  mesures  impor- 
tantes au  sujet  de  l'organisation  proprement  dite  du  Congrès. 

Il  a  décidé  qu'en  principe,  celui-ci  se  tiendrait  entre  le  8  et 
le  15  avril,  soit  donc  à  partir  du  lundi  suivant  l'octave  de  Pâques. 

La  cotisation  des  participants  sera  de  50  francs. 

Il  a  paru  utile  au  Comité  de  donner  —  au  moins  à  titre  provi- 
soire —  un  cadre  aux  travaux  du  Congrès.  Sous  réserve  de 
modifications  ultérieures,  la  création  des  sections  suivantes  a 
donc  été  décidée  : 

I.  Histoire  de  l'Orient.  II.  Histoire  grecque  et  romaine, 
m.  Etudes  byzantines  IV.  Histoire  du  moyeu  âge.  V.  Histoire 
moderne  et  contemporaine  (y  compris  l'histoire  coloniale). 
VI.  Histoire  religieuse  et  ecclésiastique.  VII  Histoire  du  droit. 
VIII  Histoire  économique.  IX.  Histoire  de  la  civilisation  (philo- 
sophie, sciences,  conceptions  politiques  et  sociales,  enseignement). 

X.  Histoire  de  l'ai-t  et  archéologie  (y  compris  la  préhistoire). 

XI.  Méthode  historique  et  sciences  au.xiliaires  de  l'histoire  (y 
compris  la  géographie  historique).  XII.  Documentation  sur 
l'histoire  du  monde  pendant  la  guerre.  XIII.  Archives  et  publi- 
cations de  textes. 


CHRONIQUE  623 

Cliaeune  de  ces  sections  pourra,  d'ailleurs,  si  elle  le  juge  utile, 
se  subdiviser  en  plusieurs  sous-sections  pour  tout  ou  partie  de  la 
durée  du  Congrès. 

Dès  à  présent  le  Comité  est  assuré  de  la  collaboration  active  de 
plasieurs  historiens  étrangers  des  plus  légitimement  réputés. 

Une  première  circulaire,  dont  on  trouvera  le  texte  plus  loin, 
est  envoyée  en  ce  moment  à  toutes  les  Académies,  Universités  et 
Sociétés  savantes,  ainsi  qu'aux  historiens  individuellement,  pour 
faire  connaître  la  tenue  du  Congrès. 

Le  Secrétariat  fixé  à  Bruxelles,  12,  rue  Jacques  Jordaens 
(M..  r.-L.  (Janshof),  se  tient  à  la  disposition  des  intéressés  pour 
leur  fournir  tous  renseignements  utiles. 

G. 


Actes  des  anciens  Etats-Généraux  des  Pays-Bas. 

On  sait  que  la  Commission  royale  d'histoire  de  Belgique  avait 
décidé,  plusieurs  années  avant  la  guerre,  de  procéder  à  la  publi- 
cation des  Actes  de  nos  anciens  États-Généraux.  L'occupation 
allemande  a  empêché  la  préparation  de  ce  travail  confié  à 
MM.  Pirenne  et  Cuvelier.  Mais,  à  présent,  on  n'attend  plus  que 
la  liquidation  des  nombreuses  publications  interrompues  par 
la  guerre  pour  commencer  l'impression  des  Actes  des  Etats- 
Généraux. 

A  ce  propos,  il  est  intéressant  de  remarquer  que  l'Italie  aussi 
s'était  occupée,  j^eu  de  temps  avant  la  guerre,  d'entreprendre 
une  publication  similaire.  Elle  avait  même  institué  une  Commis- 
sione  per  la  piiblicuzione  degli  atti  délie  assemblée  costituziunali 
italiane  dal  medio  evo  al  1S31.  Mais,  comme  il  n'y  eut  jamais  en 
Italie  de  véritables  Etats-Généraux  semblables  à  ceux  des  Pays- 
Bas,  on  a  décidé  de  publier  séparément  les  Actes  des  divers 
Etats,  Piémont,  Sicile,  Sardaigne,  Xaples,  Venise,  etc.,  qui 
dejîuis  ont  constitué  l'Italie. 


Œuvre  Nationale  pour  la  Reproduction  de  Manuscrits 
à  Miniatures  de  Belgique 

Sous  les  auspices  de  la  Société  des  IJibliophilos  et  Iconophiles 
de  Belgique  vient  d'être  créée,  à  Bruxelles,  VŒuvre  nationale 
pour  la  Reproduction  de  Manuscrits  à  Miniatures  de  Belgique. 

Le  but  de  l'G'Aivre  est  de  faire  mieux  connaître  une  partie 
importante  tie  notre  patrimoine  artisti(iue   en  donnant,  i)ar  des 


624  CHRONIQUE 

procédés  d'une  exactitude  minutieuse,  la  reproduction  eu  couleurs 
des  plus  beaux  manuscrits  existants  en  Belgi([ue  ou  d'origine 
belge. 

L'intérêt  d'une  pareille  entreprise  ne  peut  échapper  à  personne. 
Tous  ceux  qui  s'intéressent  à  l'histoire  de  l'art  savent  quel 
précieux  instrument  de  travail  constituent  les  nombreuses  collec- 
tions de  documents  obtenus  par  un  procédé  photographipue, 
d'après  les  monuments  de  la  peinture,  de  la  sculpture,  de  l'archi- 
tecture. Seuls,  dans  ce  mouvement  de  diffusion  artistique,  les 
manuscrits  à  miniatures  ont  été  jusqu'ici  négligés.  Ce  n'est  guère 
que  depuis  une  vingtaine  d'années  que  l'on  parait  se  préoccuper 
sérieusement  de  mettre  en  valeur  ces  miniatures  qui,  tant  pour 
l'histoire  des  origines  de  la  peinture  que  pour  celles  des  mœurs 
et  du  costume,  constituent  une  source  inépuisable  de  renseigne- 
ments. On  s'est  rendu  compte  qu'il  était  inadmissible  que  ces 
admirables  documents  restassent  plus  longtemps  cachés  dans  les 
bibliothèques  publiques  et  les  collections  privées,  connus  seule- 
ment de  quelques  érudits  et  de  quelques  amateurs  d'art. 

Le  congrès,  réuni  à  Liège  en  1905,  à  l'initiative  du  Gouver- 
nement belge,  en  vue  d'établir  une  entente  internationale  pour  la 
reproduction  des  manuscrits,  a  mis  en  lumière  tous  les  aspects 
du  problème.  D'excellents  rapports  y  furent  présentés,  et  ils 
donnèrent  lieu  aux  résolutions  les  plus  généreuses. 

Ce  bel  élan  d'enthousiasme  ne  rencontra  malheureusement  pas 
l'appui  des  gouvernements.  L'initiative  privée  de  plusieurs 
conservateurs  de  bibliothèques,  à  Paris,  Londres,  Bruxelles, 
nous  valut  la  reproduction  de  quelques  manuscrits  précieux; 
mais  aucun  plan  d'ensemble  ne  fut  élaboré  qui  pût  donner  aux 
travailleurs  l'espoir  prochain  d'une  documentation  sagement 
ordonnée  et  méthodiquement  poursuivie. 

Ce  n'est  qu'en  1911  que  la  Société  française  de  Reproduction 
de  Manuscrits  à  Peintures  mit  sur  pied  son  projet  de  Corpus 
picturarum  manuscriptorum  codicum,  projet  admirable  qui 
recueillit  aussitôt  l'adliésion  des  érudits  et  des  amateurs  du 
monde  entier  et  dont  la  mise  à  exécution  ne  tarda  pas  à  donner 
les  meilleurs  résultats. 

Outre  un  Bulletin,  qui  paraît  deux  fois  par  an,  accompagné  de 
nombreuses  planches  de  phototypie,  la  Société  française  a  déjà 
publié  trois  gros  volumes  consacrés  à  la  reproduction  intégrale 
d'une  splendide  Bible  moralisée  du  xiii*  siècle,  et  un  autre,  moins 
important,  qui  rej)roduit  les  plus  belles  miniatures  des  Heures  à 
l'usage  d'Angers. 

C'est  beaucoup,  si  l'on  tient  compte  des  difficultés  matéi'ielles 
d'une  pareille  entreprise  ;  c'est  trop  peu,  si  l'on  considère  dans 


CHRONIQUE  &2Ô 

SOU  ensemble  l'œuvre  à  accomplir.  Celle-ci  est,  semble-t-il,  assez 
vaste  et  d'un  intérêt  suffisamment  urgent,  pour  (^ue  chaque  ija3S 
puisse,  sans  esprit  de  rivalité,  prendre  sa  part  de  la  tâche 
commune.  C'est  dans  cette  pensée  que  la  Société  des  Bibliophiles 
et  Iconophiles  de  Belgique  a  estimé  ([u'il  était  de  son  devoir,  au 
lendemain  du  catacljsme  qui  a  mis  en  péril  l'existence  de  tant 
d'œuvres  d'art,  de  créer  un  organisme  qui  eût  pour  mission  de 
faire  mieux  connaître,  en  en  rendant  l'étude  accessible  à  tous,  les 
plus  beaux  manuscrits  à  miniatures  de  nos  collections  publiques 
et  privées. 

LTA'uyrc  nutionale  pour  lu  Rcpruiluctiuii  de  Manuscrits  à  Minia- 
tures de  Belgique  s'est  tracé  \\\\  programme  précis.  Son  activité 
se  limitera  aux  œuvres  existant  en  Belgique  ou  d'origine  belge, 
son  choix  se  portant  sur  les  plus  précieuses  et  les  plus  significa- 
tives au  point  de  vue  de  l'iiistoire  artistique  de  notre  pays.  Elle 
en  assurera  la  reproduction  intégrale  en  couleurs  —  le  texte  seul 
pouvant  être  excepté  lorsqu'il  n'offrira  i)as  d'intérêt  suffisant  — 
par  le  pi'Océdé  de  la  quadrichromie  (Quelque  coûteux  qu'il  soit, 
ce  procédé,  arrivé  aujourd'hui  à  un  rare  degié  de  perfection,  est 
le  seul  qui  puisse  donner  une  image  fidèle  de  l'original. 

Pour  mener  à  bonne  fin  la  réalisation  de  ce  programme,  KKu- 
vre  a  besoin  de  ressources  considérables.  L'exécution  des  clichés 
en  quadi'ichromie  réclamant  les  soins  les  plus  attentifs  et  les  plus 
minutieux,  l'élaboration  des  publications  sera  forcément  assez 
lente.  L'Œuvre  doit  donc  pouvoir  disposer  d'un  capital  important 
(jui  lui  permette  de  poursuivre  ses  travaux  sans  interruption,  et 
sans  avoir  à  escompter  la  vente  d'une  publication  pour  eu  entre- 
prendre une  autre 

L'Œuvre  compte  sur  l'appui  de  tous  ceux  qui  ont  à  cœur 
d'assurer  la  sauvegarde  et  la  diffusion  des  richesses  artistiques 
de  notre  i)a3s.  Elle  espère  qu'il  lui  sera  donné  de  trouver  parmi 
eux  les  cinquante  membres  protecteurs  cjui,  par  un  versement 
immédiat  de  5,000  francs,  constitueront  la  i)remière  mise  de  fonds 
indispensable.  Les  membres  protecteurs  recevront  de  droit  un 
exemplaire  de  toutes  les  publications  de  l'CEuvre. 

Pour  la  première  do  ses  publications,  l'tKuvre  a  i)orté  son  choix- 
sur  l'un  des  joyaux  les  plus  précieux  des  collections  de  la  Biblio 
thèque  royale  de  Belgique,  le  fameux  livre  d'heures  dit  Heures 
de  Notre-Dame  de  Hennessy  Les  cinquante  sept  feuillets  enlu- 
minés qui  font  de  ce  manuscrit  l'une  des  œuvres  les  plus 
intéressantes  de  l'Ecole  ganto-brugeoise  de  miniaturistes,  seront 
reproduits  inlégralemeut  dans  leur  grandeur  originale,  et  accom- 
pagnés d'un  commentaire  de  M.  Joseph  Destrée,  le  savant 
conservateur  honoraire  des  Musées  du  Cinquantenaire. 

40 


626  CHRONIQUE 

L'Œuvre  espère  que  cette  publication  lui  vaudi-a  Tapprobation 
de  tous  les  amis  de  l'Art  et  du  Livre  et  qu'elle  contribuera  à  lui 
assurer  les  concours  dont  elle  a  besoin  pour  mener  à  bien  l'entre- 
prise à  laquelle  elle  a  décidé  de  dévouer  son  activité. 

Pour  tous  renseignements,  s'adresser  au  Secrétaire  de  l'Œuvre, 
M.  Camille  Gaspar,  conservateur  des  manuscrits  à  la  Biblio- 
thèque royale  de  Belgique,  rue  du  Musée,  Bruxelles. 


Philolog-ica. 

Xous  avons  reçu  le  premier  fascicule  (149  p.,  1921)  d'une  nou- 
velle revue  Philologica.  Journal  of  comparative  Philolog-y, 
organe  de  la  Pliilological  Society  de  Londres,  et  éditée  par  Jos. 
Baudis,  professeur  de  philologie  comparée  à  l'Université  de 
Prague  et  L.  C.  Wliarton  secrétaire  de  la  Philological  Society. 
(Adresse  ;  31,  Greville  Road,  London  N.  W  6.)  Outre  des  articles 
relatifs  à  la  grammaire  de  l'égyptien  (Gardinerj,  aux  inscriptions 
lépontiennes  et  lydiennes  (Pedersen),  à  l'arabe  (Kuzicka),  au  dia- 
lecte du  Xepal  Turner),  au  gallois  (Baudis),  le  fascicule  dontient 
notamment  une  très  curieuse  étude  de  Jesperseu  sur  la  valeur 
symbolique  de  la  voj'elle  /,  une  note  de  A.  Meillet  sur  quelques 
formes  du  parfait  latin,  une  analyse  de  la  phi-ase  de  Cicéron  au 
point  de  vue  de  l'emphase  logique  et  l'hétorique  (H.  J.  Rose). 


La  population  de  Rome  à  travers  les  âges. 

A  loccasion  du  recensement  tout  récent,  qui  assignera  à  la 
ville  de  Rome  une  population  d'un  peu  plus  de  700,000  âmes. 
M.  Lanfranco  Marvi  publie  dans  le  Bolletino  delV  Ufficio  Munici- 
pale del  Lauoro  une  curieuse  étude  statistique  sur  les  variations 
du  nombre  de  ses  habitants  à  travers  les  siècles.  La  légende  veut 
que  le  premier  recensement  ait  été  fait  par  Servius  TuUius  et 
l'on  en  connaît  75  jusqu'à  l'année  826.  On  ne  s'étonnera  pas  d'ap- 
prendre que  leurs  résultats  ne  soient  pas  toujours  d'une  précision 
absolue.  Les  évaluations  concordantes  des  auteurs  modernes 
attribuent  à  la  capitale  de  TP^mpire  au  début  de  notre  ère  environ 
un  million  d'habitants,  mais  ce  chiffre  était  tombé  sous  Romulus 
Augustule  à  200,000.  Pour  le  moj-en  âge  les  éléments  statistiques 
sont  fournis  par  les  registres  paroissiaux,  et  ce  n'est  qu'à  partir 
de  Clément  Vil  (1527)  (lu'on  dispose  de  dénombrements  plus 
précis;  mais  les  calculs  qui  peuvent  être  faits  montrent  le  dépé- 
rissement continu  de  la  grande  cité  jusqu'aux  iv*^  siècle  :  en  476, 


CHRONIQUE  627 

SOUS  Théodoric,  120,000  :  en  774  sous  Désiré  l'oi  des  Lombards 
50.(100,  en  902  sous  Jean  XII,  40,000  ;  en  1197,  sous  Innocent  III, 
35,000.  Puis  vint  le  transfert  du  siège  pontifical  à  Avignon 
et  l'exode  qui  l'accompagna.  Quand  Grégoire  XI  fit  retour  dans 
la  Ville  Eternelle,  elle  était  réduite  à  une  population  de  17,000 
âmes.  Entourée  d'une  cam])ague  déserte,  ravagée  chaque  année 
I^ar  la  malaria,  sans  commerce  et  sans  industi-ie,  elle  ne  survécut 
que  parce  qu'elle  était  le  siège  de  la  papauté.  L'accroissement  de 
Rome  est  déjà  sensible  sous  Léon  X  qui  la  vit  passer  de  40,000  à 
60,000  habitants.  Le  sac  terrible  de  1527  la  fit  retomber  à  33,000, 
mais  déjà  elle  en  comptait  109,729  en  1600.  En  1700  elle  en  avait 
141,784  et  en  1797,  166,280.  La  révolution,  puis  la  captivité  du 
pape  provoquèrent  une  nouvelle  période  de  dépression  démogra- 
phique. De  147,026  âmes  en  1799,  le  chef-lieu  du  département  du 
Tibre  tombe  en  1812  à  117.882.  Depuis  lors  l'ascension  a  été 
continue  ;  les  chiffres  sont  de  176.002  en  1853,  de  226,022  eu  1870 
à  la  veille  de  l'occupation  italienne.  La  capitale  du  nouveau 
roj'aume  prit  un  rapide  essor  :  elle  avait,  en  1901,  462,783  habi- 
tants et  en  compte  actuellement,  par  suite  de  1'  «  afflux  urbain  », 
provoqué  par  la  guerre  dans  tous  les  pays,  plus  de  700,000. 


Paul  Hamélius. 

(26  avril  1868-23  février  1922.) 


L'LTniversité  de  Liège  et,  peut-on  dire,  la  science  belge  tout 
entière,  viennent  de  faire  une  perte  des  jilus  sensibles  en  la  per- 
sonne de  M.  Jean-Paul  Hamélius,  décédé  à  Liège,  après  une  courte 
maladie,  le  23  février  1922. 

Paul  Hamélius  naquit  le  26  avril  1868  à  Ypres,  où  son  père, 
médecin-major  de  régiment,  se  trouvait  alors  en  garnison  Mais 
ses  attaches  familiales  étaient  luxembourgeoises.  Ayant  perdu 
son  chef  très  jeune  encore,  la  famille  alla  s'établir  à  Metz,  et 
c'est  là  que  le  jeune  Paul  fit  ses  premières  études  au  gymnase 
impérial  allemand.  En  1880,  il  revint  en  Belgique  et  fut  successi- 
vement élève  des  athénées  d'Arlon  et  de  Bruxelles.  Dès  l'âge  de 
treize  ans,  une  vocation  précoce  lui  avait  fait  décider  qu'il  serait 
professeur.  Il  entra  à  l'Ecole  normale  des  Humanités  de  Liège 
en  1884  et  en  sortit  avec  le  titre  de  professeur  agrégé  en  18S8. 
Surveillant  à  l'athénée  de  Tournai  (18SS-1891),  professeur  aux 
athénées  de  Charleroi  (1891-1894)  et  dixelles  (1894-1904).  il  suc- 
céda à  son  vieux  maître  Oswald  Orth  dans  la  chaire  d'anglais  de 
l'Université  de  Liège  le  20  octobre  1904.   11  était  docteur  spécial 


6i?8  CHRONIQUE 

en  philologie  germanique  de  Liège  depuis  le  19  février  1898.  Son 
enseignement  s'accrut  successivement  des  cours  d'histoire  appro- 
fondie de  la  littérature  anglaise  (6  novembre  1905)  et  de  notions 
sur  les  littératures  modernes  (30  octobre  1906)  ;  ce  dernier  lui  fut 
attribué  lors  de  la  retraite  de  G.  Kurth,  qui  en  était  titulaire. 
Professeur  extraordinaire  en  1910,  il  reçut  Tordinariat  en  1919. 

Hamélius  parlait  et  écrivait  l'anglais  à  la  perfection  ;  non  pas 
avec  la  perfection  relative  dont  se  contente  un  étranger,  mais 
comme  un  indigène  instruit  et  cultivé.  C'avait  été  l'une  des 
grandes  ambitions  de  sa  vie  d'arriver  à  une  maîtrise  complète 
de  cette  langue  difficile  entre  toutes  quand  on  veut  en  posséder 
le  détail  infiniment  complexe,  et  les  efforts  qu'il  avait  consacrés 
à  cette  acquisition  durant  une  partie  de  sa  jeunesse  et  toute  sa 
maturité  avaient  été  couronnés  d'un  plein  succès.  Il  n'était  pas 
moins  à  l'aise  en  français  et  en  allemand.  Parlant  depuis  l'enfance 
le  dialecte  de  ses  parents,  Luxembourgeois  l'un  et  l'autre,  ayant 
de  par  ses  solides  études  au  gymnase  une  ancienne  familiarité 
avec  la  belle  littérature  classique  allemande,  il  lui  en  était  resté 
ce  goût  jîour  la  j)oésie,  propre  à  tous  ceux  qui  ont  touché  en 
quelque  manière  au  romantisme  germanique.  De  jilus,  quand  il 
employait  l'allemand,  l'élégance  et  la  pureté  de  sa  diction 
faisaient  l'admiration  des  Allemands  qu'il  rencontrait.  Mais 
Metz  n'était  pas  plus  en  1875  qu'aujourd'hui  une  ville  allemande. 
S'il  y  fréquenta  les  écoliers  prussiens  amenés  par  l'occuiiatiou,  il 
garda  aussi  de  son  séjour  en  Lorraine  le  goût  et  le  culte  de  la 
langue  française  qu'il  parla  toute  sa  vie  avec  un  accent  très  fran- 
çais, légèrement  teinté  de  lorrain.  Et  ce  dernier  trait  achevait  de 
donner  sa  physionomie  particulière  à  ce  Belge  luxembourgeois, 
si  anglais  à  la  fois  et  si  français,  qu'on  en  oubliait  que  sa  langue 
maternelle  était  un  parler  allemand  et  qu'une  partie  de  son  éduca- 
tion avait  été  allemande.  Ajoutons,  enfin,  qu'il  apprit  le  flamand 
relativement  tard  pendant  son  séjour  à  Tournai,  mais  d'une 
manière  très  approfondie,  qu'il  savait  l'italien  et  le  suédois  et 
lisait  couramment  l'espagnol. 

L'étude  des  langues  était  pour  Hamélius  un  moyen  plutôt 
qu'un  but.  Parmi  ses  maîtres,  c'était  G.  Kurth  qui,  par  ses 
immenses  lectures  et  sa  connaissance  encyclopédique  de  toutes 
les  littératures,  avait  eu  le  plus  d'influence  sur  sa  formation.  A 
son  exemple,  Paul  Hamélius  rêvait  d'embrasser  dans  son  esprit 
l'ensemble  des  lettres  européennes  depuis  le  moyen  Age.  Mais  ces 
deux  hommes  étaient  néanmoins  bien  différents.  Kurth  était  un 
romantique  par  instinct  plus  encore  que  par  système.  Il  est 
moins  aisé  de  définir  le  credo  littéraire  d'Hamélius,  mais  il  fut  à 
peine  effleuré  par  le  romantisme.  Très  indépendant,  très  éclec- 


CHRONIQUE  6-9 

tique,  très  accessible  aux  qualités  de  la  forme  sans  oublier  celles 
du  fond,  il  aurait,  je  crois,  affirmé  son  désir  de  ne  juger  l'œuvre 
qu'au  point  de  vue  exclusif  de  la  beauté  littéraire.  Quoi  qu'il  en 
soit,  sa  connaissance  de  la  littérature  anglaise,  fondée  sur  une 
vie  d'études,  son  commerce  ancien  avec  les  classiques  allemands, 
sa  familiarité  avec  les  vieilles  littératures  du  Noi-d,  la  littérature 
flamande  ancienne  et  moderne,  plus  tard  d'immenses  recherches 
dans  les  lettres  fran<;aises  et  anglaises  du  moyen  âge.  avaient  fait 
de  lui  un  des  hommes  les  plus  compétents  en  histoire  littéraire. 
Xotre  collègue  n'arriva  à  l'Université  qu'après  seize  ans  d'en- 
seignement moyen.  Conscient  de  sa  valeur  et  désireux  de  se  pro- 
duire sur  un  théâtre  digne  de  ses  talents  et  de  son  travail,  il 
avait  passé  ces  seize  années  à  parfaire  sa  préparation  par  un 
labeur  opiniâtre,  y  consacrant  ses  veilles  et  ses  nuits  quand  la 
journée  ne  suffisait  pas.  Nous  reparlons  plus  loin  de  ses  publica- 
tions de  début  dont  plusieurs  sont  d'un  maître.  Déjà  alors,  l'excès 
de  travail  faillit  compromettre  une  santé  qui  ne  fut  jamais  bien 
robuste  et  lui-même  nous  racontait  que  quand  on  le  vit  jjartir  en 
cure  pour  Aix-les-Bains,  en  1902,  son  aspect  était  celui  d'uu 
homme  tellement  épuisé  par  la  maladie  que  plus  d'un  craignit  de 
ne  plus  le  voir  revenir.  11  n'en  fut  rien  heureusement.  Mais 
Hamélius  était  un  consciencieux.  S'il  se  croj-ait  le  droit  de 
réserver  ou  de  prendre  du  temps  pour  ses  études  personnelles, 
jamais  il  ne  pensa  négliger  ses  devoirs  professionnels,  ni  s'ac- 
corder quelque  facilité  qui  eût  été  aux  dépens  des  élèves  A 
l'athénée  comme  à  l'université,  ce  fut  toujours  le  même  souci  de 
bien  faire,  de  faire  mieux  le  lendemain  que  la  veille.  Indifférent 
aux  considérations  de  famille  et  de  concurrence  scolaire,  ayant 
un  dédain  supérieur  pour  la  paperasse  administrative,  il  cher- 
chait, non  à  être  un  rouage  docile  dans  la  machine  enseignante, 
mais  à  former  des  élèves,  à  leur  faire  part  de  ce  qu'il  savait  lui- 
même.  Il  discutait  volontiers  sur  les  méthodes  concrètes  d'ensei- 
gnement, aimait  à  entendre  l'avis  de  collègues  et  sollicitait 
fréquemment  leur  jugement  sur  le  choix  des  auteurs,  des  lectures, 
des  méthodes  de  travail.  Cela  ne  l'empêchait  du  reste  pas  d'en 
agir  à  sa  guise.  Ceux  de  ses  amis  qui  l'ont  connu  avant  son 
arrivée  à  Liège  pourront  mieux  que  nous  apprécier  ce  qu'il  fut 
comme  professeur  d'athénée  ;  mais  son  impeccable  conscience 
professionnelle,  sa  haute  probité  pédagogique  étaient  des  qua- 
lités trop  innées  en  lui  pour  qu'on  puisse  en  reporter  la  genèse  à 
ses  débuts  universitaires.  Homme  de  devoir,  il  le  fut  toute  sa 
vie;  s'il  tomba  jeune  encore  au  champ  d'honneur  de  la  science, 
le  seul  excès  qu'il  eût  à  se  reprocher  fut  de  n'avoir  pas  assez 
ménajjré  ses  efforts  dans  le  labeur-. 


630  CHRONIQUE 

Le  11  novembre  1904,  Hamélius  faisait  à  l'Université  de  Liège 
sa  leçon  d'ouverture,  une  causerie  brillante  et  spirituelle  sur 
Shakespeare,  qui  fut  fort  remarquée.  Il  avait  aloi'S  trente-six 
ans.  Son  allure  alerte,  la  mobilité  de  sa  phj^sionomie,  sa  parole 
vive  et  animée  suscitèrent  chez  ses  premiers  auditeurs  un  vif 
mouvement  de  curiosité  ;  bientôt  ils  se  rendirent  compte  de 
l'étendue  et  de  la  sûreté  de  ses  connaissances  et  ce  fut  alors,  parmi 
les  hiches  et  les  mous,  une  espèce  d'épouvante.  Il  ne  tarda  pas, 
pour  beaucoup  d'élèves,  à  devenir  le  professeur  terrible;  c'est 
que,  comme  Kurth,  il  croj-ait  que  le  niveau  de  l'université  doit 
être  réellement  supérieur  et  il  était  impitoyable  pour  toutes  les 
nullités  qui  s'j-  hasardaient.  Rien  n'était  plus  éloigné  de  son 
caractère  qu'une  mesquine  vanité  de  pion  en  mal  de  faire  sentir 
sa  férule.  Tout  en  estimant  beaucoup  ses  anciens  maîtres,  avec 
lesquels  il  garda  jusqu'à  la  fin  d'excellentes  relations,  il  ne  pou- 
vait s'empêcher  de  sentir  combien  il  leur  était  supérieur,  de  se 
rendre  compte  des  lacunes  qu'ils  avaient  laissées  dans  sa  forma- 
tion. L'ancienne  Ecole  normale  des  Humanités  avait  vécu  et  se 
trouvait  remplacée  par  un  nouveau  doctorat  en  philosophie  et 
lettres  divisé  en  multiples  sections,  à  l'horaire  surchargé,  au 
programme  encyclopédique.  Hamélius  était  loin  de  se  sentir  à 
l'aise  dans  ces  cadres,  trop  étroits  et  trop  rigides  à  son  avis  (<)  ; 
cela  ne  l'empêcha  pas  néanmoins  de  s'atteler  de  toutes  ses  forces 
à  une  réforme  des  études  en  attendant  qu'il  pût  songer  à  celle 
des  programmes.  La  multiplicité  des  matières,  déjà  sensible  pour 
les  élèves  dautres  sections,  était  écrasante  pour  les  étudiants 
germanistes  obligés  de  mener  de  front  l'étude  de  trois  langues 
modernes  et  celle  de  nombreux  cours  d'histoire  et  de  philoso- 
phie .  Hamélius  faisait  de  son  mieux  en  intervenant  auprès  de 
ses  collègues  pour  alléger  quelque  peu  la  charge  de  ses  élèves 
surmenés:  il  faisait  valoir  que  la  formation  spéciale  est  impos- 
sible si  les  cours  de  formation  générale  occupent  tous  les  loisirs 
de  l'élève.  D'autre  part,  il  suivait  de  très  près  les  étudiants, 
veillait  aux  leçons  qu'il  leur  faisait  faire,  s'occupait  méticuleuse- 
ment  de  leurs  dissertations  doctorales.  A  ses  yeux,  un  professeur 
d'anglais  ne  peut  se  contenter  d'une  étude  théorique  de  la  langue  ; 
il  exigeait  des  élèves  qu'ils  allassent  passer  au  moins  une  fois 
leurs  vacances  en  Angleterre.  Du  reste  lui-même  ne  parlait  à  ses 
auditeurs  que  l'anglais  depuis  la  rentrée  d'octobre  jusqu'à  la  fin 
de   l'année.    Il   est   difficile    d'estimer  jusqu'à   quel  point   cette 


(1)  Il  prit  on  19-20  rinitiMlivo  d'un  pian  de  réforme  et  surtout  de  sinipiificn- 
tion  de  ce  programme  trop  touffu.  La  mort  ne  lui  permit  pas  de  poursuivre 
l'achèvement  de  ces  projets. 


CHROMQi  E  631 

réforme  radicale  dans  les  habitudes  de  la  section  gerniani<iue  a 
porté  des  fruits,  vu  le  ])etit  nombre  d'années  qui  s'écoula  entre  les 
débuts  d'IIamélius  et  la  grande  crise  de  1914,  la(iuelle  bouleversa, 
avec  bien  d'autres  choses,  les  conditions  normales  de  l'enseigne- 
ment. Mais  il  est  certain  qu'il  fut  désormais  impossible  pour  des 
élèves  hâtivement  préparés  par  une  teinture  su])erficielle  des 
hmgues  modernes  de  se  pi-ésenter  aux  examens  avec  quelque 
chance  de  succès.  Il  fut  entendu  que  tenter  les  études  germa- 
niques sans  une  sérieuse  préparation  pour  l'anglais,  c'était  courir 
au  devant  d'un  échec  certain. 

Hamélius  ne  fut  jamais  un  pédagogue  au  sens  classique  du 
mot.  Son  esprit  primesautiei-,  volontiers  emporté  par  l'inspira- 
tion du  moment,  s'astreignait  malaisément  à  suivre  une  voie 
jalonnée  d'avance.  11  ne  sut  pas  toujours  exactement  laquelle  de 
ses  heures  devait  s'appeler  «  explication  d'auteurs  »  et  laquelle 
«  exercices  ».  A  tout  moment,  à  propos  de  tout,  à  propos  de  rien, 
il  faisait  de  la  grammaire,  de  la  métrique,  de  la  phonéti(iue,  de 
l'histoire  littéraire.  Son  enseignement  était  admirablement  sug- 
gestif, il  était  vivant,  il  ébranlait  profondément  les  facultés  de 
l'élève,  si  bien  que  pas  une  des  possibilités  qu'il  portait  en  lui 
n'échappait  à  la  secousse.  Mais  la  méthode,  au  sens  i)ropre  du  mot. 
lui  faisait  défaut.  Ceux  à  qui  man([ue  toute  originalité  et  (jui 
n'ont  pour  eux  que  leur  méthode,  je  veux  dire  celle  qu'ils  ont 
achetée  avec  leur  manuel  chez  le  libraire,  pourront  lui  jeter  la 
pierre.  Pour  nous,  qui  constatons  le  vide  immense  que  laisse  sa 
disparition  dans  le  corps  enseignant  de  Liège,  nous  ne  pouvons 
que  regretter  le  petit  nombre  de  ces  maîtres  dépourvus  de 
méthode,  si  l'on  veut,  mais  qui  savent  si  bien  donner  le  goût  de 
l'étude  aux  élèves  qu'ils  forment. 

Sociable  par  nature,  ayant  toujours  le  besoin  de  sentir  autour 
de  lui  le  contact  de  camarades  à  qui  communiquer  l'activité  de  sa 
pensée.  Hamélius  rêvait  à  son  arrivée  à  Liège  d'une  espèce  de 
cercle  où  les  jeunes  professeurs  d'une  ou  de  plusieurs  facultés  se 
fussent  retrouvés  régulièrement  chaque  sema  ne  pour  causer  de 
leurs  lectures  et  de  leurs  travaux.  Pendant  un  peu  plus  dun  an. 
un  certain  nombre  de  jeunes  chargés  de  cours  se  retrouvèrent 
chatiue  vendredi  dans  le  «  quartier  »  d'IIamélius.  rue  Méan.  On 
y  fit  peu  de  savants  travaux,  mais  on  apprit  à  se  connaître  et  à 
s'estimer,  et  ces  réunions,  trop  tôt  interrompues,  ont  laissé  à  tous 
ceux  qui  y  prirent  part  le  meilleur  souvenir.  Néanmoins.  Hamé- 
lius ne  réussit  point  à  créer  le  foyer  de'  vie  intellectuelle  cju'il 
rêvait  et  l'échec  lui  fut  jiénible.  Arrivé  à  Liège  débordant  de 
généreux  enthousiasme,  d'ardeur  i)Our  la  recherche  et  l'enseigne- 
ment, il  ne  demandait  que  de  donner  à  ce  double  idéal  tout  son 


63-2  CHRONIQUE 

temps  et  toutes  ses  forces.  11  lui  fut  véritablement  douloureux 
(le  constater  qu'il  était  presque  seul  à  poursuivre  sa  noble  chi- 
mère Les  intérêts  de  famille,  de  politique,  des  préoccupations 
personnelles,  que  sais-je,  absorbaient  chez  d'autres  une  grande 
part  de  l'activité  qu'il  eût  voulu,  lui,  ne  consacrer  qu'à  la  science. 
Ses  désillusions,  du  reste,  si  elles  enlevèrent  quelque  chose  à 
l'éclat  de  son  jeune  enthousiasme,  ne  purent  jamais  en  éteindre 
complètement  la  flamme  Jusqu'au  soir  de  sa  vie,  la  passion 
d'apprendre  et  de  découvrir  le  posséda  tout  entier.  Rarement  on 
le  vit  las  d'enseigner;  jamais  il  ne  s'avoua  fatigué  de  chercher 
et  de  s'instruire. 

L'œuvre  d'Hamélius  porte  un  cachet  bien  personnel  (').  Elevé 
en  partie  au  loin,  il  aimait  beaucoup  la  Belgique.  Il  resta  cepen- 
dant toute  sa  vie  très  étranger  à  nos  petites  querelles  intestines 
et  c'est  en  quelque  sorte  du  dehors  qu'il  les  jugeait  Ce  trait  est 
nettement  sensible  dans  son  Histoire  politique  et  littéraire  du 
mouvement  flamand  (1894).  Cet  ouvrage  d'un  jeune  homme  de 
26  ans  restera.  Venu  après  d'autres  critiques  belges,  hollandais, 
allemands,  Hamélius  y  fait  preuve  d'une  sûreté  de  jugement  et 
de  goût  littéraires  qui  n'ont  peut-être  pas  assez  été  remarqués. 
Oubliés  par  la  grande  critique  qui  ne  s'attache  guère  aux  langues 
peu  répandues  ni  aux  auteurs  de  second  plan,  trop  louanges  i)ar 
leurs  amis  et  collaborateurs,  nos  écrivains  flamands  trouvent  eu 
Hamélius  un  juge  équitable  et  bienveillant  qui  sait  discerner 
leurs  qualités  et  leur  assigner  les  rangs  divers  qu'ils  méritent. 
Ses  appréciations  politiques  sur  une  question  toujours  actuelle 
en  Belgique  sont  encore  intéressantes  à  relire  après  trente  ans 
de  date.  Hamélius  avait  un  goût  très  vif  pour  tout  ce  qui  touchait 
à  la  politique  II  lisait  passionnément  les  journaux  et  s'intéres- 
sait surtout  à  la  politique  internationale  pour  laquelle  sa  con- 
naissance des  langues  et  ses  voyages  lui  donnaient  une  compé- 
tence spéciale.  Néanmoins,  sauf  de  rares  exceptions,  ses  travaux 
ultérieurs  sont  consaci'és  exclusivement  aux  recherches  litté- 
raires. 

L'un  des  plus  importants  (en  allemand)  a  pour  objet  la  critique 
dans  la  littérature  anglaise  des  xvii^etxviiie  siècles.  Ce  travail  lui 
servit  de   thèse   lors  de  son  doctorat  spécial,  passé  devant   la 


{*)  La  hsle  des  publicalions  que  nous  donnons  à  la  tin  de  celte  notice  n'est 
certainement  pas  coniidète.  Étranger  à  tout  vanité  personnelle,  Hamélius 
oubliait  lui-mt'me  ses  travaux  au  fur  et  à  mesure  qu'il  en  entreprenait  de  nou- 
veaux et  il  ne  songea  jamais  à  tenir  à  jour  sa  bibliographie.  Il  serait  .souhai- 
table que  l'on  signalât  les  lacunes  et  les  inexactitudes  de  celle  que  nous 
soumettons  au  lecleui'. 


CHRONIQUE  633 

Faculté  de  philosophie  et  lettres  de  l'Univci'sité  de  Liège,  le 
19  février  lîSDH.  Ce  doctorat  fut  ti'ès  remar([ué  A  la  soutenance, 
le  jeune  docteur  spécial  répondit  avec  une  ])arfaite  aisance  en 
fran(;ais.  en  flamand,  on  anglais,  en  allemand,  à  tous  les  objec- 
tants. On  sut  dès  lors  que  Liège  comptait  un  germaniste  de  pre- 
mière force  et  que  le  jour  où  une  chaire  serait  vacante,  il  saurait 
dignement  l'occuper. 

La  Kritik  in  der  englischen  Litcraiiir  soumet  à  un  examen  très 
serré  les  appréciations  courantes  sur  les  influences  dominantes 
de  la  littérature  anglaise  moderne.  Le  mouvement  néo-classique, 
dont  l'initiateur  est  Ben  Jonson,  ne  fut  jias  créé  par  l'influence 
française,  il  lui  est  antérieur;  cette  influence,  qui  est  réelle,  a  été 
fortement  exagérée.  Si,  avec  Hamélius,  on  appelle  romantisme 
l'ensemble  des  courants  antérieurs  au  classicisme,  qui  subsis- 
tèrent concurremment  avec  celui-ci  et  reprirent  une  nouvelle 
vigueur  après  le  début  du  xviii'^  -iècle,  on  admettra  avec  lui  (jue 
le  romantisme  ne  fut  jamais  éclipsé  complètement  en  Angleterre 
par  le  classicisme  et  que  notamment  les  théoriciens  de  la  critique 
lui  restèrent  fidèles,  alors  que  les  poètes  sacrifiaient  en  masse  au 
préjugé  classique.  L'avènement  du  romantisme  proprement  dit  en 
Europe  s'explique  ainsi  par  les  conditions  spéciales  de  la  littéra- 
ture anglaise. 

C'est  encore  au  problème  du  romantisme,  envisagé  spécialement 
au  point  de  vue  de  la  comédie  et  de  l'essence  du  comique,  (jue 
Hamélius  s'attaque  dans  TIw  Theory  of  Roniuntic  Comecly. 
«  C'est  un  exposé  très  intelligent  des  théories  jiar  lescjuelles  des 
esthéticiens  allemands  tels  que  Hegel,  Schlegel,  Vischer  ont 
justifié  la  comédie  fantai-siste  de  Shakespeare,  la  comédie  (jui 
n'a  aucun  dessein  moral  précis. aucune  tendance  —  par  oppositionà 
la  comédie  de  mœurs  (Plante,  Térence,  Molière)  (')  »  On  voit  ici 
combien  Hamélius  avait  profité  de  son  éducation  allemande.  En 
particulier,  l'esthétique  de  Hegel,  pour  lequel  il  professait  une 
grande  admiration,  lui  fournit  la  base  d'un  sj'stème  logique  sur 
lequel  appuyer  ses  raisonnements  ;  c'est  ce  qui  lui  donne  d'em 
blée  une  grande  supériorité  sur  les  critiques  anglais  qu'il 
combat. 

C'est  éga'cment  le  xvu''  siècle  anglais  qui  l'occupe  dans  ses 
études  sur  Southern  {The  Source  of  Soiithern's  Fatal  Murriasçe) 
dont  il  édita  avec   des  notes  très  complètes  une  j)ièce  à  clé  The 


(^)  r.i'tto  n])prfci;ili(m  1res  exacte  est  due  a  iikhi  eollr^nie  de  Ui'iixellcs, 
M.  P.  (le  Keiil.  ([iii  a  hieii  voulu  me  cnunnuiiitu'er  des  iioles  personuelies  sur 
les  publieatioiis  d'IIaniélius.  Je  lui  en  exprinio  ici  ma  vive  gratitude. 


634  CHRONIQUE 

Loyal  Brother.  Il  y  démêle  avec  beaucoup  de  sagacité  les  mul- 
tiples allusions  politiques  et  autres  que  contient  la  pièce. 

Parmi  ses  autres  travaux,  il  faut  faire  une  place  à  part  au  Man- 
deville  et  au  Robin  Hood,  inachevés  l'un  et  l'autre;  ils  marquent 
une  étape  dans  l'évolution  de  sa  pensée  et  affirment  sa  maîtrise 
dans  des  questions  de  plus  en  plus  vastes  de  littérature  comparée. 
Son  dernier  article, jjaru  quelques  jours  avant  sa  mort  :  «  La  Litté- 
rature des  proscrits  en  Angleterre  »,  donne  une  idée  de  l'ampleur 
d'un  problème  embrassant  toute  une  littérature  internationale, 
depuis  les  ballades  du  moyen  âge  anglais  jusqu'à  l'Hernani.  Les 
conversations  de  notre  ami  durant  les  derniers  mois  de  sa  vie 
nous  tenaient  au  courant  des  immenses  recherches,  le  plus  sou- 
vent infructueuses,  que  lui  occasionnait  l'insaisissable  Robin 
des  Bois.  Pour  Mandeville,  au  contraire,  il  était  arrivé  à  une 
conclusion  ferme.  L'opinion,  exprimée  avant  lui,  que  l'auteur 
anglais  connu  sous  le  nom  de  Sir  John  Mandeville  n'est  autre 
que  notre  Jean  d'Outremeuse,  cette  opinion  était  devenue  pour 
lui  une  conviction,  qu'il  défendait  en  s'aj^puyant  sur  une  étude 
très  approfondie  du  texte.  Aussi  n'hésite-t-il  pas  à  publier  son 
édition  très  soignée  (dans  la  série  Early  English  Texts)  sous 
le  titre  Mandevillé's  Travels,  translated  from  the  Frencli  of 
Jean  d'Outremeuse.  (Vol.  I.  Text.  1919.)  Une  deuxième  partie 
comprenant  l'introduction  et  les  notes  reste  encore  à  paraître. 

Dans  son  dernier  ouvrage  paru  quelques  semaines  avant  sa 
mort,  Hamélius,  sans  quitter  la  littérature  comparée,  revient  aux 
lettres  belges.  Son  Introduction  à  Vhistoire  de  la  littérature  fran- 
çaise et  flamande  de  Belgique  a  son  origine  dans  des  conférences 
faites  en  Angleterre  dans  un  but  de  propagande  nationale.  Comme 
tous  les  Belges  qui  ont  beaucoup  résidé  au  dehors,  Hamélius  se 
rendait  compte  de  la  difficulté  que  l'on  éprouve  à  donner  à  des 
étrangers  une  idée  de  ce  qu'est  la  Belgique.  Aussi  son  ouvrage 
est-il  très  différent  des  manuels  d'histoire  ou  de  littérature  en 
usage  dans  nos  écoles.  Nulle  part  il  n'est  plus  personnel  que 
quand  il  parle  du  moyen  âge,  des  Quatre  fils  Aymon,  du  Cheva- 
lier au  Cygne,  de  Jean  d'Outremeuse.  Dans  les  siècles  suivants 
on  remarque  le  portrait  très  en  relief  du  prince  de  Ligne  et  une 
touche  très  personnelle  aussi  dans  les  études  sur  Ch.  De  Coster 
et  Gezelle.  Si  l'on  en  croyait  ravant-proi)()s  du  livre,  ce  ne  serait 
guère  qu'un  ouvrage  de  vulgarisation.  Il  faut  s'entendre  :  Hamé- 
lius y  expose  ses  vues  sans  étalage  d'érudition  et  sans  notes  jus 
tificatives;  ce  que  l'auteur  «  vulgarise  »  ici,  ce  sont  ses  idées  à 
lui,  pour  une  bonne  part  encore  inédites,  et  fondées  sur  une  étude 
très  personnelle  des  textes.  Ce  n'est  pas  précisément  ce  (lue  l'on 
entend  d'ordinaire  par  vulgarisation. 


CHRONIQUE  635 

A  la  fin  de  sa  vie,  Hamélius  était  de  plus  en  plus  convaincu  que 
l'on  a  tort  de  considérer  comme  issues  du  ^énie  du  ])euple  les 
œuvres  même  les  plus  populaires  du  moyen-âfre.  C'est  à  Ovide 
qu'il  rattache  la  légende  du  Chevalier  au  Cygne  C'est  dans  l'anti- 
quité classique  aussi  qu'il  recherche  les  premières  origines  de  la 
rime,  cet  élément  caractéristique  de  la  métrique  des  langues 
modernes  'Bijdraffc  tôt  de  îieschiedenis  van  het  rijm).  Il  ne  croyait 
pas  davantage,  en  étudiant  Robin  Ilood,  découvrir  des  créations 
spontanées  de  la  muse  populaire.  Malgré  l'indéniable  affinité 
intellectuelle,  malgré  la  très  réelle  symjiathie  qui  unissait  Hamé- 
lius à  Kurth,  on  voit  ici  combien  le  disciple  s'était  éloigné  des 
idées  du  nmître.  Entre  Vllistoire  poétique  des  Méroning-iois  et  les 
Légendes  épiques  de  M.  .T.  Tîédier,  Hamélius  affirmait  nettement 
ses  préférences  pour  le  second  ouvrage. 

La  déclaration  de  guerre  d'août  1914  trouva  Hamélius  à  Liège. 
Comme  pour  beaucoup  d'autres,  la  grande  crise  lui  révéla  à  lui- 
même  combien  il  était  patriote,  et  son  tourment  pondant  les  heures 
du  siège  fut  de  se  demander  quel  service  il  pourrait  bien  rendre 
à  son  pays.  La  description  très  sobre  qu'il  a  donnée  des  brèves 
heures  de  la  résistance,  puis  de  l'entrée  des  Allemands  (*).  se  lit 
encore  avec  intérêt  aujourd'hui.  Aussitôt  qu'il  lui  fut  possible,  il 
quitta  la  ville  et  le  territoire  envahi  i)our  se  retirer  à  Bruxelles 
d'abord,  puis  en  Angleterre.  Les  quatre  années  de  guerre  qu'il 
passa  à  Londres  se  partagèrent  entre  le  travail  scientifique,  qu'il 
n'abandonna  jamais,  et  la  collaboration  à  l'œuvre  de  la  défense 
nationale.  D'un  côté,  par  ses  connaissances  de  poh'glotte  il  se 
rendait  éminemment  utile  dans  les  offices  de  renseignements; 
d'autre  part,  par  la  parole  et  par  la  plume,  par  des  conférences  et 
cours  publics,  il  travaillait  à  faire  conuaitre  notre  pays  en  Angle- 
terre et  rendait  à  ceux  de  nos  compatriotes  qui  y  étaient  réfugiés 
de  multiples  services.  Ce  séjour  prolongé  en  Angleterre  acheva 
de  donner  à  Hamélius  la  conscience  de  sa  pleine  posses.sion  de  la 
langue  anglaise.  Mais,  chose  remarquable,  lui  qui  avait  toujours 
été  un  nomade  et  un  déraciné,  il  s'ancra  désormais  dans  son  pays 
belge  et  ne  demanda  plus  qu'à  y  couler  en  paix  des  années  (lu'il 
pouvait  espérer  être  encoi-e  nombreuses. 

Pendant  longtemps,  en  effet,  Hamélius  avait  aimé  à  vivre 
comme  l'oiseau  sur  la  branche.  Ce  n'est  (ju'en  1910  qu'il  eut  son 
habitation  à  Hermalle-sous-Argenteau,  qu'il  échangea  en  1912 
pour  la  maison  de  l'avenue  des  Thermes,  à  Liège,  où  il  mourut. 

Jusciu'à  ce  moment,  son  pèlerinage  sur  cette  terre  avait  été 
véritablement  un  voyage  perpétuel.  Il  connaissait  la  France  et 


(')  The  Siège  of  Lièf/e,  191  i. 


636  CHRONIQUE 

rAllemagiie,  avait  séjourné  en  Suéde,  visité  à  diverses  reprises 
l'Italie,  il  avait  poussé  jusqu'en  Espagne  et  fait  le  voyage  de 
Constantinople  ])ar  Vienne  et  Budapesth.  Je  ne  parle  pas  de  la 
Grande- H retagne  où  il  allait  plusieurs  fois  tous  les  ans.  Ce  n'était 
pas  fantaisie  de  grand  seigneur,  car,  sans  fortune  x^ersounelle,  il 
ne  disposait  que  des  maigres  économies  qu'il  pouvait  faire  sur 
son  budget  de  professeur.  Mais  Hamélius  était  de  ces  curieux 
que  le  .spectacle  du  monde  ne  rassasie  jamais.  Dès  l'enfance,  il 
avait  ce  goût  et  cette  joie  de  voir  :  «  J'étais  comme  au  théâtre  » 
disait-il  de  ses  impressions  d'écolier  suivant  curieusement  les 
gestes  et  les  paroles  du  maiti'e,  épiant  le  manège  espiègle  dfs 
élèves.  Tant  qu'il  fut  professeur  à  Ixelles,  c'était  pour  lui  une 
grande  jouissance  d'habiter  une  grande  ville,  de  pouvoir  suivre 
la  vie  des  théâtres  et  des  concerts,  de  fréquenter  les  expositions 
et  les  musées.  Tableaux  ou  sculptures  tout  le  passionnait  égale- 
ment. 11  était  fort  intéressant  de  se  promener  avec  lui  dans  la 
capitale.  Il  savait  vous  montrer  sur  les  places  et  dans  les  jardins 
publics,  dans  des  coins  perdus  ou  peu  connus,  non  pas  les  œuvres 
cataloguées  par  les  guides  Bcedeker,  mais  tel  marbre  ou  bronze, 
telle  statuette,  tel  relief,  qui  avait  ses  i^réfcrences.  Ce  n'était  pas 
non  plus  le  côté  archéologique  qui  avait  le  dessus  chez  lui.  Xon, 
il  vous  faisait  les  honneurs  des  pièces  de  son  choix  comme  un 
amateur  éclairé  et  intelligent  dans  sa  collection  personnelle 

Hamélius  était  un  membre  assidu  de  la  Société  pour  le  progrès 
des  études  philolog-iques  et  historiques  ;  il  y  attirait  le  plus  pos- 
sible ses  anciens  élèves.  Deiiuis  deux  ans,  il  présidait  la  section 
de  philologie  germanique.  En  novembre  1921,  il  dirigea  les  débats 
de  l'assemblée  générale.  Là  comme  ailleurs  sa  disparition  laissera 
un  vide  qui  ne  sera  pas  comblé. 

Dans  le  caractère  d'Hamélius  deux  facultés  dominaient  surtout  : 
l'intelligence  et  l'imagination.  La  première  frappait  par  sa  viva- 
cité, sa  mobilité,  sa  puissance  d'intuition  rapide  et  complète.  Ce 
n'était  pas  un  de  ces  méditatifs  qui  n'arrivent  à  une  conclusion 
qu'après  de  longues  réflexions.  Il  concluait  immédiatement, 
quitte  à  réformer  la  conclusion  d'hier  par  celle  de  demain.  Xul 
n'était  lilus  éloigné  de  «  l'homme  absurde  qui  ne  change  jamais  », 
Quant  à  son  imagination,  elle  était  le  charme  de  sa  vie  et  la  joie 
de  ses  amis.  En  un  clin  d'œil  il  échafaudait  une  théorie  littéraire 
ou  politique,  brossait  le  tableau  d'une  aventure  réelle  ou  supposée, 
racontait  une  histoire  authentique  ou  fictive,  mais  toujours 
également  attrayante.  Pour  lui  l'imagination  n'était  pas  seule- 
ment la  folle  du  logis  ;  c'était  la  puissante  faculté  constructive  qui 
permet  au  savant  de  voir  d'emblée  les  conclusions  auxquelles  le 
raisonnement  ne  peut  encore  atteindre;  il   avait  l'imagination 


CHIîONIQLE  637 

créatrice  des  inventeurs,  de  ceux  qui  laissent  après  eux  des 
œuvres  durables.  Ce  don  rare  fait  souvent  du  tort  à  celui  qui  le 
possède.  Dès  l'Ecole  Xormale,  les  camarades  d'Hamélius.  voj'ant 
surtout  en  lui  un  fantaisiste  et  un  original,  se  demandaient  ce 
<ju'uu  esprit  aussi  peu  équilibré  produirait  en  manière  de  disser- 
tation. A  leur  grand  ébahissenient,  la  thèse  ([u'il  présenta,  une 
étude  de  28  pages  seulement,  recueillit  les  suffrages  unanimes 
du  jury  :  c'était  un  travail  très  original,  très  bien  composé  et  très 
bien  raisonné  sur  le  poète  allemand  Leisewitz  Plus  d'une  fois 
dan.s  sa  vie.  Hamélius  étonna  de  même  les  observateurs  super- 
ficiels, (jui  ne  voyaient  en  lui  qu'un  original,  un  u  hurluberlu  »  '). 
En  fait,  son  œuvre  montre  bien  que  chez  lui  récjuilibre  resta 
parfait  entre  ses  facultés  et  que  si,  dans  la  conception,  l'imagina- 
tion jouait  le  premier  rôle,  il  ne  manquait  ni  de  jugement  ni 
d'esprit  critique  pour  s'apprécier  lui-même,  (iràce  à  un  ensemble 
de  dons,  dont  le  moindre  n'était  pas  une  excjuise  sensibilité  artis- 
tique, il  était  très  accessible  au  beau  sous  toutes  ses  formes  et 
vibrait  à  toutes  les  émotions  esthétiques.  Il  fallait  l'entendre  lire 
une  page  qui  lui  plaisait,  déclamer  un  sonnet  de  Keats  ou  de 
Wordsworth,  s'extasier  devant  une  toile  ou  un  marbre!  Mais  il 
gardait  à  travers  tout  la  claire  vue  critique  qui  analyse  les 
ressorts  cachés  de  l'œuvre  sans  cesser  de  l'admirer.  Pour  ceux 
qui  l'ont  beaucoup  fréquenté,  il  est  intéressant  de  comparer  la 
touche  discrète,  toujours  très  sobre,  de  ses  jugements  définitifs, 
tels  qu'on  les  trouve  dans  ses  ouvrages,  avec  1'  «  emballement  » 
dont  sa  conversation  ordinaire  donnait  de  nombreux  exemples  et 
les  effusions  Ij-riques  de  certaines  de  ses  admirations. 

Hamélius  était  de  ceux  qui  vivent  dans  le  présent  plus  que  dans 
le  passé:  la  politique  contemporaine  l'intéressait  plus  que  l'his- 
toire; l'immobilité  des  siècles  périmés  l'attirait  moins  ([ue  la 
variété  changeante  de  l'instant  actuel.  Aussi  n'avaitil  pas  préci- 
sément le  génie  pliilosophi<iue.  Sa  philosophie,  s'il  en  avait  une, 
ressemblait  à  ce  nihilisme  doctrinal  si  bien  défini  par  Tourguenef. 
«  Le  nihiliste  considère  tout  du  point  de  vue  critique...  C'est 
l'homme  ([ui  ne  s'incline  devant  aucune  autorité,  qui  n'admet 
aucun  i)rincipe  comme  article  de  foi,  de  quchpie  respect  que  soit 
entouré  ce  principe.  »  S'il  comprenait  les  systèmes,  s'il  les  étudiait 
avec  intérêt,  c'était  plutôt  en  esthète  qu'en  adepte  de  telle  ou 
telle  école.  Dans  une  doctrine  philosophique  bien  assise,  il 
admirait  plus  l'agencement  ingénieux  des  parties  qu'il  ne  croyait 


(•)  «  Cet  liurluliorln  (l'H.iméliiis!  »  II  s';>p|ili(iii:iit  volontiers  cotte  épilliéte  à 
lui-même,  sachant  qu'il  avait  dautres  tiualités  plus  ai>preciées. 


638  CHRONIQUE 

à  la  valeur  de  l'eusemble.  D'autre  part,  son  éducation  de  nomade 
et  les  circonstances  qui  l'avaient  déraciné  de  toute  attache 
patriale  pi'ofonde,  avaient  contribué  à  l'éloigner  de  toute  croyance 
religieuse  positive.  Mais  s'il  n'était  pas  croyant,  il  était  encore 
beaucoup  moins  un  militant  de  l'anticléricalisme;  il  repoussait 
avec  indignation  l'idée  de  s'embrigader  dans  quelque  secte  ou 
franc  maçonnerie  que  ce  fût.  Cette  indépendance  est  caractéris- 
tique autant  qu'exceptionnelle  pour  un  homme  de  son  jiaj^s  et  de 
sa  génération. 

Tel  est  l'homme  que  nous  avons  connu  pendant  près  de  dix-huit 
ans,  vivant  simplement  et  modestement,  uniquement  préoccupé 
de  sou  travail.  C'était  comme  une  mission  sacrée  qu'il  avait  reçue. 
Il  n'admettait  pas  qu'une  considération  quelconque  vînt  l'en 
détourner,  il  en  avait  fait  le  but  de  sa  vie,  la  raison  déterminante 
de  ses  efforts.  Laisser  derrière  lui  une  œuvre  durable,  c'était  la 
seule  chose  qu'il  ambitionnât.  D'autres  eussent  employé  les  dons 
qu'il  avait  à  améliorer  leur  situation  matérielle;  mais  Hamélius 
n'avait  aucun  besoin  d'argent.  Les  honneurs  ne  l'attiraient  pas 
davantage  et  c'est  avec  stupeur  que  ses  collègues  et  amis  consta- 
tèrent, au  lendemain  de  sa  mort,  qu'il  ne  faisait  i:)artie  d'aucune 
académie  (i)  1  On  peut  dire,  sans  blesser  personne,  que  plus  d'un 
académicien  méritait  moins  que  notre  collègue  disparu  le  fau- 
teuil et  les  honneurs  des  assemblées  savantes. 

C'est  à  sa  table  de  travail  solitaire  que  la  maladie  vint  le  sui'- 
prendre  d'une  façon  foudroyante.  Le  3  février,  il  commença  à  se 
sentir  indisi^osé  ;  bientôt  les  médecins  constatèrent  qu'il  leur  était 
imi)OSsible  de  lutter  contre  l'urémie  qui  se  manifestait  avec 
une  gravité  exceptionnelle.  La  famille  et  quelques  amis  purent 
encore  le  visiter  pendant  les  rares  instants  de  répit  que  le  mal 
lui  laissa.  Il  était  déjà  fort  changé  après  quelques  jours.  Tou- 
jours très  doux,  très  patient,  très  reconnaissant  pour  les  soins 
qu'il  recevait,  les  beaux  traits  de  sa  personne  morale  s'affir- 
maient en  raison  même  de  son  affaissement  physique.  Mais 
dès  ce  moment  tout  espoir  de  le  voir  se  rétablir  entièrement 
devait  être  écarté.  Le  23,  après  une  longue  agonie,  il  s'éteignit 
doucement  (juclques  instants  avant  minuit. 

Les  funérailles  d'IIamélius  furent  simples  comme  l'avait  été  sa 
vie.  Trois  discours  furent  prononcés  à  la  mortuaire,  l'un  par  le 
recteur  de  l'Université,  M,  Dejace;  le  second  par  nous,  au  nom  de 
la  Faculté;  le  troisième  i)ar  un  élève  d'IIamélius,  M.  Lebeau. 


(ij  Ceci  n'est  pas  tout  à  fait  exact.  Mon  coll('f;ue,  M.  Vaiidcr  Linden,  m'ap- 
prend (|u'naini'liiis  l'ut,  au  tours  de  la  guerre,  élu  membre  de  la  Rayai  Uislor- 
ival  Sdciitji  de  Londres, 


CHRONIQUE  6;)9 

Après  le  service  à  rép:lise  de  Cointe  là  Liège),  son  corps  fut  trans. 
porté  au  cimetière  de  Salnt-.Tosse-ten-Xoode,  à  Bruxelles,  où  deux 
de  ses  plus  vieux  amis,  M  Hombert,  professeur  à  l'Université 
de  Gand  et  M.  Vercruysse,  directeur  général  au  Ministère  de 
l'Industrie  et  du  Travail,  adressèrent  encore  (juclques  ])arolos 
d'adieu  à  sa  dépouille.  Tous  deux  exprimaient  avec  une  poignante 
sincérité  la  stupeur  douloureuse  que  sa  mort  causa  à  tous  ses 
amis.  Comment  s'imaginer  qu'une  vie  aussi  pleine,  aussi  exubé- 
rante, pût  être  brisée  d'une  manière  aussi  soudaine?  Combien 
d'entre  nous  s'aperçurent  avec  une  douloureuse  amertume  qu'il 
fallut  la  mort  de  Paul  Ilamélius  pour  nous  révéler  tout  ce  qu'il 
prenait  de  i)lace  dans  notre  vie  et  nos  affections!  Jeune  de  cœur 
et  denthousiasme  à  cinquante  ans,  Paul  Hamélius  laisse  les 
regrets  qu'on  a  pour  ceux  qui  sont  emportés  à  la  fleur  de  l'âge. 

Joseph  Maxsiox. 


Publications  de  Paul  "Hamélius. 

Histoire  politique  et  littéraire  du  mouvement  flamand,  Bru- 
xelles. Ch.  Rozez  (1894),  in-8°,  2:^9  pages.  (Bibliothèque  belge 
des  connaissances  modernes.) 

Die  Kritik  in  der  englischen  Literatur  der  17.  und  18  Jalir- 
liuuderts.  Groitsch,  Reicliardt,  1897,  in-8'',  208  pages.  (Bibl.  delà 
Fac.  de  Phil.  et  L.  de  1  Univ.  de  Liège,  fuse    III.' 

La  crisi  attuale  délia  litteratura  fiamniinga  (extrait  de  la 
Rivista  moderna  di  cultura).  Florence  1898. 

Van  Bree  en  Willems.  Betrekkingen  tusschen  Vlaamsche  scliil- 
derkunst  en  letterkunde.  Bruxelles,  1898  (extrait  de  Germania). 

Wns  dachte  Shakespeare  iiber  Poésie?  Bruxelles,  1899,  in  8", 
31  pages. 

Théodore  Watts.  Bruxelles,  1899  (extrait  de  la  Revue  de  Bel- 
gique). 

Arthur  Wiug  Pinero  und  das  englische  Drama  der  Jetztzeit. 
Bruxelles,  1900  (l(i  pages). 

The  Tlieorj-  of  Romantic  Comcdy.  Bruxelles  (1902),  in-8'', 
47  pages. 

De  Théorie  van  het  romantische  Blijspel.  1903  (extrait  de  Van 
Xu  en  Straks). 

De  dood  van  Kaïnin  de  Engelschemysteriespelen  van  Coventry 
(extrait  de  Volkskunde,  1903,  11  pages  . 

Le  Congrès  archéologique  de  Bath  (extrait  des  Annales  de  la 
Société  d' archéologie  de  Bruxelles,  11  pages),  1905. 


640  CHRONIQUE 

Rapport  sur  les  études  de  philologie  germanique  dans  les 
Facultés  de  philosophie  et  lettres  {Congrès  dexpansion  mondiale 
de  Mons),  1905. 

The  Rhetorical  Structure  of  Layaraon's  Verse  {Mélanges  Gode- 
froid  Kurth,  II,  p.  341-349).  Liège.  1908 

La  genèse  de  TUlenspiegel  de  Charles  De  Coster  (extrait  de  la 
Belgique  artistique  et  littéraire),  1908 

The  Source  of  Southern's  «  Fatal  Marriage  »  (extrait  de 
Modem  Language  Review,  lY,  p.  352-356).  1909. 

Sommaire  de  l'histoire  des  littératures  étrangères.  Bruxelles, 
111-8",  (31  pages 

Tliomas  Southern's  Loj^al  Brother,  a  Play  on  the  Popish  Plot, 
edited  with  Introduction  and  Notes.  Liège  (Bibliothèque  de  la 
Faculté  de  philosophie  et  lettres.  XX),  1911,  131  pages. 

Bijdrage  tôt  de  geschiedeuis  van  liet  rijm  MIandelingeii  van  liet 
tweede  Vlaamseh  Philologencongres  te  Gent  1913,  p.  2l6-224) 

The  Siège  of  Liège.  A  jjersonal  narrative. London,  1914,  in  12, 
79  pages. 

The  Travels  of  Sir  John  Mandeville.  (Quarterly  Review,  1917.) 

AnglO'Belgian  Relations  past  and  présent,  Londres,  1918 
(117  pagesi.  En  collaboration  avec  H.  Vaiider  Linden. 

Mandeville's  Travels,  edited  froni  Ms.  Cottoii  Titus,  c.  XVI  in 
the  British  Muséum,  Vol.  I.  Text  (Early  Engiish  Text  Society, 
Original  Séries  No.  153).  Londres,  1919. 

Introduction  à  la  littérature  française  et  flamande  de  Belgique. 
Bruxelles,  Office  de  Publicité,  1921,  in-8",  316  pages. 

La  littérature  des  proscrits  en  Angleterre  i Revue  belge  de 
philologie  et  d'histoire,  I,  p.  59-69),  1922. 


ERRATUM 

C'est  par  suite  d'une  inadvertance  que  la  note  intitulée  «  Sinio- 
nide  »,  i)ubliée  dans  le  u"  2,  p.  335-336,  a  été  insérée  dans  la  Revue. 


i 


Les  noms  de  lieu  gaulois 
en  «  =auos,  =aua,  =auon  » 


Une  latHiue  des  plus  ap])areutes  dans  Les  nunis  de  lieu 
de  la  France,. de  Longnon,  est  celle  dont  pâtissent  les  noms 
de  lieu  terminés  par  le  suffixe  -aiios.  L'auteur  ne  dit  que 
quelques  mots,  et  tout  à  fait  incidemment,  de  ce  suffixe 
«  (réduit  de  bonne  heure  à  -ans),  qu'on  trouve  dans  certains 
noms  de  lieu  de  la  Gaule,  tels  Andelaiis,  Merlaviis,  Verta- 
viis,  et  notamment  Viminaiis  (')  et  TellaiiH,  ces  deux  der- 
niers noms  désignant  des  régions...,  le  Vimeu  et  le 
Talou  »  (2). 

Tous  ces  exemples  cités  pai'  Longnon  ne  sont  d'ailleurs 
que  des  reconstructions  de  l'auteur,  au  moins  en  ce  qui 
concerne  la  finale,  car  les  ])lus  anciennes  formes  histo- 
riques de  ces  noms  ne  datent  que  de  l'époque  mérovin- 
gienne ou  carolingienne  et  se  terminent  en  -ao,  -ans. 

La  plus  ancienne  est  un  Andehio  qu'on  trouve  dans  Gré- 
goire de  Tours  à  la  date  de  o87  et  qui  désigne  une  localité 
Andelot  de  la  Haute-Marne  (3);  elle  est  du  reste  aussi  la 
forme  primitive  à  laquelle  il  faut  faire  remonter  deux 
autres  AndeloL  un  Andelot-en-Montagne  et  un  Andelot- 
lès-Saint-Amour,  tous  deux  dans  le  Jura  {■*).  Pour  Merlu- 
DUS  et  ]^ertai)ns,  ce  sont  des  noms  auxquels  il  faut  ratta- 
cher, au  premier  Merlanl  (Marne)  et  Merlonx  (Saône-et- 
Loire)  (^),  au  second  Verton  (Loire-Inférieure)  {^).  Quant 
aux  deux  autres  noms  qui  restent,  Mniinans  et  Tellaus.  (|ui 


(1)  Une  coiiiiilh'  a  l'ail  iiiipiiiiuM'  Vitilniiins 

(2)  p.  il. 

(•')  Hoi.iiKK,  op.  cit.,  I,  1 14. 

{*)  lu.,  ilml.,  m,  (iJ4. 

(5)  Id.,  ibid..  Il,  .-JT-i. 

(6)  Id.,  ibid.,  m,  -248. 


-Il 


642  p.   MARCHOT 

désignent  les  régions  du  Vimeu  et  du  Talon,  il  suffira  de 
rappeler  que  ce  sont  des  dérivés,  à  l'aide  du  suffixe,  des 
noms  de  deux  cours  d'eau  arrosant  ces  régions,  Vimina,  la 
Vismes,  et  Telia,  la  Telle  (de  nos  jours  la  Béthune). 

Un  toponymiste  qui  a  essayé  une  étude  systématique  du 
suffixe  -aiios  est  le  chanoine  Roland  dans  sa  Toponymie 
namuroise  (*).  Mais,  comme  nous  le  verrous  plus  loin,  il 
n'a  connu  tout  au  plus  que  deux  des  emplois,  sur  trois,  du 
suffixe,  bien  que  le  troisième  emploi  eût  été  déjà  claire- 
ment expliqué  par  Holder  Je  vais  résumer,  de  façon  aussi 
brève  et  aussi  simple  que  possible,  la  manière  de  voir  de 
Roland,  qu'il  y  aura  lieu,  par  la  suite,  de  compléter,  et 
même  à  l'occasion  de  rectifier.  Roland  débute  par  l'exposé 
concis  de  son  point  de  vue,  en  prenant  immédiatement 
position  :  «  Le  suffixe  -aus  (-au,  -ao),  peu  étudié  jusqu'ici, 
sert  à  former,  non  seulement  des  noms  de  personnes 
[Caiiaiis,  Divitaiis,  Liccaiis,  Maccaus,  Pravaiis,  Samaiis, 
Segisiaus,  Sennaiis,  Simaiis,  Tanaiis),  mais  aussi  des  noms 
de  régions  et  de  localités.  ;»  Il  y  a  bien,  dit-il,  quelques 
noms  de  localités  qui  démontrent  que' le  suffixe  s'est  par- 
fois adapté  à  des  mots  communs  (appellatifs)  de  la  langue 
latine,  par  exemple  Stavelot  qui  vient  de  Stahulaus  (sta- 
biiliim)  et  Taverneiix  (comm.  de  Mont,  prov.  de  Luxem- 
bourg) qui  vient  de  Tabernaiis  (taberna),  mais,  essentielle- 
ment et  dans  la  norme,  le  thème  nominal  qui  sert  à  former 
un  nom  en  -ans,  soit  de  région,  soit  de  localité,  est  le  nom 
du  cours  d'eau  qui  traverse  le  pays  ou  arrose  la  localité. 
Ainsi,  dit-il,  on  a  des  pag'i  dénommés  Viminaiis,  Tellaiis, 
IJa<>inauH  (le  Hainaut,  de  Hagina,  la  Haine)  et  des  lieux 
habités  dénommés  Ledernaus  (Lierneux.  prov.  de  Liège, 
de  Lederiia,  la  Lienne)  et  Ernaus  (Yernawe,  comm.  de 
Saint-Georges,  prov.  de  Liège,  de  Erna,  l'Yerne).  Et  «  con- 
trairement au  suffixe  -aciis,  ajoute-t-il  explicitement,  le 
suffixe  -aus  ne  s'attache  pas  à  des  noms  d'hommes  pour 
former  des  noms  de  lieux  «.  Quant  au  plus  ancien  exemple 
historique  de  l'emploi  toponymique  du  suffixe  -aus,  il 
serait  fourni  par  un  nom  de  région,  un  pag-us  Vellaus  cité 
dans  une  inscription  votive  trouvée  à  Birrens  (Ecosse),  qui 

(»J  1,  |..  46()  i7l. 


I 


à 


NOMS  DK  LIKi;  GAULOIS  EN  «  -AUOS   »  643 

mentionne  ([ue  le  jiag-us  Velluus  inilitaiis  cohorte  II  l'un- 
groriim  a  dédié  rinscriptiou  à  une  déesse  du  nom  de  Rica- 
gambeda.  (*).  Ce  pagiis  est  l'aetael  Vellinve,  contrée  de  la 
Gueldre.  Aussi,  conclut  le  chanoine  Roland,  a  nous  préfé- 
rons nous  en  tenir  an  thème  -ans  (non  -avii.s],  puisque  nous 
le  découvrons  déjà  à  l'époque  gallo-romaine  ». 

I^'oxposé  méthodique  et  systématique  de  la  vie  et  du 
fonctionnement  du  suffixe  -aiios  fera  voir,  mieux  qu'une 
controverse  et  une  critique,  en  quoi  le  chanoine  Roland  a 
été  incomplet  et  en  quoi  il  s'est  trompé. 

Tout  d'abord,  il  y  a  lieu  de  remarquer,  comme  a  fait 
Roland,  que  le  suffixe  s'est  employé  dans  deux  domaines 
bien  distincts,  dans  l'anthroponomastique  et  dans  la  topo- 
nomastique. 

En  réalité,  c'est  un  suffixe  servant  essentiellement  à  for- 
mer des  adjectifs  en  s'ajoutant  à  des  thèmes  nominaux, 
adjectifs  qui  en  viennent  rapidement  à  s'employer  absolu- 
ment, c'est-à-dire  substantivement.  Comme  suffixe  d'adjec- 
tifs, -ail os  peut  revôtii-  naturellement  les  trois  genres 
{-auos.  -aiia,  -niion).  Car  il  est  manifeste  qu'il  donne  lieu 
aussi  à  des  formations  féminines,  tant  dans  le  domaine  de 
l'anthroponomastique  que  dans  celui  de  la  toponomastique, 
sorte  de  formations  que  Roland  a  ignorées  complètement. 
Sa  fonction  unique,  dans  les  deux  domaines  indistincte- 
ment, est  de  marquer  clairement  l'appartenance,  la  subor- 
dination 

En  anthroponomastique,  il  s'ajoute  à  des  noms  d'homme 
gaulois  ou  gallo-romains  et  paraît  avoir  servi  à  former  des 
noms  d'homme  ou  de  femme  désignant  des  serviteurs  ou 
(les  servantes  (vassi),  ou  bien  des  «clients»  (ambacti).  Voici 
huit  exemples,  quatre  masculins  et  quatre  féminins,  qui 
démontrent,  ce  semble,  d'une  façon  claire,  la  manière  de 
fonctionner  du  suffixe  (sauf  appel  en  note,  tous  les  noms 
cités  se  trouvent  enregistrés  par  Holder  à  leur  i)laee  alpha- 
bétique) : 

Noms  d'Iionimo.  Noms  d'Iiomine  ou  dt'  IV'iiiiiu'. 

Maccus,  Maccaiis, 

Saiiius,  Samaiis, 


(M  CIL,  VII.  1072.  lUihind  imprima  ;"i  tori  Hivinntietki. 


644  p.    MARCHOT 

Noms  (riioinmtv  .Noms  (l'homme  ou  de  l'emme. 

Scnnus  Sennaiis, 

Amnins  (^  .  Ainmaiis  i*)  et  Ainmaou  (^j, 

Du^iiis.  Dugiava, 

Avilis  C).  Ariava  i/^), 

Maniif!.  Manava  (6). 

En  toponymie,  il  faut  distinguer  deux  grands  modes 
essentiels  d'emploi  du  suffixe  -anos,  selon  qu'il  s'adapLe  à 
dos  noms  d'homme  ou  à  des  noms  de  chose. 

Dans  le  premier  cas,  il  s'ajoute  à  des  noms  d'homme 
gaulois  ou  gallo-romains  pour  désigner  le  domaine,  l'habi- 
tation du  propriétaire;  le  terme  gaulois  qui  était  sous- 
entendu  était  vraisemblablement  magus  «  champ  (et  par 
extension,  culture,  petite  exploitation)  ».  C'est  cet  emploi 
du  suffixe  -aiios  que  le  chanoine  Roland  a  complètement 
méconnu,  bien  que  l'emploi  soit  expressément  indiqué  et 
expliqué  à  suffisance,  appuyé  d'exemples,  par  Holder,  qui 
dit  que  le  suffixe  sert  «  unter  der  romischen  herrschaft 
auch  zur  bildung  A^on  ableitungen  von  M[ânnernamen], 
gentille,  und  cogn.  oder  peregrinnamen  »  (').  Tous  les 
exemples  donnés  par  Holder  ne  sont  pas  également  pro- 
bants, mais  dans  le  nombre  il  en  est  qui  ne  sauraient 
être  contestés.  Voici,  au  reste,  une  demi-douzaine  de  cas 
qu'on  peut  regarder  comme  décisifs,  dont  les  trois  der- 
niers sont  déjà  des  exemples  de  Holder.  Dans  ceux-ci  il 
s'en  trouve  un  de  formation  féminine  en  -ava  ;  il  est  pro- 
bable que  dans  des  exemples  de  ce  genre,  l'appellatif  gau- 
lois qui  était  sous-entendu  était  bona  «  fondation,  établis- 
sement ». 

Noms  d'homme.  Noms  de  lieu.  Premiers  exemples  historiqufs. 

Barrus  Barrou  (Indre-et-Loire)        Barrao  (Gr.  de  Tours)  (") 

Verus.  cognoineii  Vraux  (Marne)  Verox  Verons  (1124-30)  (9) 

Verelus  Vertou  (Loire-Inférieure)      Ver/ai'MJw(Mir.S.Mart.)("^) 

Andelus  .\ndelot  (Haute-Marne)         Andelao  (587)  (»*) 

(1)  III,  598.  —  (2)  III,  :m.  —  (:J)  III,  596.  —  (<)  III.  68(5.  —  (S)  m,  083. 
—  (6)  III,  766.  —  C)  I,  316. 
(8)  Holder,  op.  cit.,  I,  407. 
(®)  LoNG.voN,  Dût.  top.  du  dcp.  de  la  Marne,  303. 
(«0)  Holder,  Und.,  III,  243. 
(»«)  Id.,  il>id.,L  144. 


NOMS  DK  LIEU  GAULOIS  KN  <<  -AUOS   »  645 

Noms  iriiomme.  Noms  de  lieu.  l'rt^miei's  exemples  histori(|ues, 

Merula,  cognomeii  Merlaiit  (Mariio)  Merlans  (878j  (*) 

*.4n<«nn7f«,  cotînoinen     Antonaves  (liaiites-Alpos)     Cefla  Antonnava  (96S)(2), 

Dans  la  dérivation  du  suffixe  -nuos  se  combinant  avec 
des  noms  de  chose,  l'essentiel  a  déjà  ctc  dit  ])ar  Longnon 
dans  son  Dictionnaire  t()j)()^-raphi<}ii('  du  (lcj>.  de  la 
Marne  (^)  :  «  Le  suffixe  -anus  se  combine  pai'fois,  dit  l'au- 
teur, avec  un  nom  jjropre  de  l'ordre  topograpliique,  parfois 
aussi  avec  un  nom  commun  emprunté  au  règne  végétal.  » 
Longnon  n'a  pas  cru  utile  d'étayer  ses  affirmations 
d'exemples;  il  ne  sera  i)as  malaisé  de  combler  cette  lacune. 
Et  il  y  a,  en  outre,  à  compléter  les  indications  de  Longnon 
en  faisant  remarquer,  avec  Roland,  que  des  constructions 
de  la  main  de  l'homme,  i)ropres  à  retenir  l'attention, 
donnent  également  lieu  à  des  dérivations  en  -aiios.  Ainsi 
les  grandes  écuries  officielles  de  l'Empire,  les  hôtelleries 
le  long  des  grandes  voies,  les  temples  bâtis  à  la  romaine 
devaient  attirer  l'attention  et  avaient  probablement  intro- 
duit dans  la  laoïgue  gauloise  leurs  appellations  spécifiques  : 
stahiilain,  tabcrna,  ieinpluni.  Quoi  qu'il  en  soit,  ces  mots 
donnent  des  dérivés  en  -auos. 

Voici,  pour  ces  trois  catégories  de  noms  de  chose,  les 
deux  indiquées  par  Longnon  et  celle  comprenant  des  noms 
d'ouvrages  construits  par  l'homme,  des  exemples  de  déri- 
vations en  -aiios,  dont  les  trois  dernieis  n'ont  pas  encore 
été  invoqués  en  toponymie  : 

Premiers 
Noms  (le  chose.  Noms  de  Heu.  exemples  tiistori(iues. 

L«/er«rt. cours  d'eau  Lionieux  (prov.  de  Liège)  Ijedernans  (862)  [*) 

VYw/r?rt,  cours  d'eau  le  Vimeu,  région  Vinuiao  (vers  Toi)  (^) 

yyenia,  aulne  Vornou-s.-15reiMie  (Indro-et-L.I  IVrwflo  (Gr.  de  Tours)  (6) 

alxdio,  ponuuier  [Paitcasile  in  C.umberland]  Ahnilava  (") 

templnm  Templonx  (prov.  de  Naniiir)  Temphis  (xi''  siècle)  (*)• 


(1)  Loxr.NON,  iip.  cit.,  163. 

(*)  RoMAX,  Dict.  top.  (lu  drp.  ilcs  lliiiitrs-Alpes,  .'i.  Il  y  a  un  ;mlrc  Anloiiaves 
(commune  de  Méreuil). 

(■')  V.  V.  Et  encore  :  «  Dans  deux  de  ces  vocaldcs,  .Merhiul  el  Vranx,  la 
racine  est  certainement  un  eognomen  latin.  Merufa  {•{  Vrnts  » 

(*)  Roland.  Topon.  naniuroise,  I,  i8i. 

(5)  Id.,  î7m/.,.i67. 

(6)  Hoi.i.KH,  np.  cit.,  III,  -IIH. 
0)  CIL.  VII.  I"2ni. 

C)  l{or  AMI,  op.  rit.,  I.  i8(>.  Il  y  ;i  de  nicnif  un  Tenipleux  (Somme)  qui  est 
Templous  en  1^30  {ihid.,  487». 


646 


V.    MARCHOT 


L'appellatif  gaulois  qui  se  trouvait  sous-entendu  avec 
ces  dérivations  devait  être  magiis  pour  celles  dugenre  mas- 
culin et  bona  pour  celle  du  genre  féminin.  Le  fait  que  les 
dérivations  tirées  des  noms  de  cours  d'eau  donnent  lieu 
tantôt  à  des  noms  de  localité,  tantôt  à  des  noms  de  région 
(souvent  noms  de  pagi  francs),  provient  du  double  sens 
que  possédait  magus  en  gaulois.  Il  signifiait  «  champ, 
culture  »,  par  conséquent  «  petite  exploitation  rurale  », 
mais  aussi  :  «  ])laine,  campagne,  grande  étendue  de 
terre  »  (^). 

Un  mot  maintenant  sur  le  nom  pagiia  Vellaiis  (le  Vel- 
luwe,  dans  la  Gueldre)  d'une  inscription  d'Ecosse,  que 
Roland  a  considéré  comme  le  plus  ancien  exemple  qui 
nous  est  fourni  du  suffixe  -aiios,  mais  que  Lougnon  s'est 
prudemment  abstenu  d'invoquer  dans  ses  brèves  indica- 
ti(ms  sur  le  suffixe  -auos  de  ses  A'oms  de  lien  de  la 
France.  La  Gueldre  était  de  l'autre  côté  du  Rhin,  en  terre 
germanique,  habitée  en  grande  partie  par  les  Chamavi, 
peuplade  franque  dont  étaient  voisins  les  Batavi,  autre 
l)euplade  germanique.  Il  est  donc  probable  que  le  pagus 
Vellaiis  était  un  pag'iis  conquis,  peuplé  par  des  Germains 
dits  *Vellavi.  De  même  pour  le  nom  ethnique  Batavi,  il  y 
a  un  adjectif  qualificatif  batavus,  -a,  -uni,  fréquemment 
usité  dans  Tacite  notamment.  Mais  la  preuve  évidente  de 
la  germanicité  des  gens  du  pagus  VelUuis  qui  rendirent 
hommage  à  la  déesse  Ricagambeda,  on  peut  la  fournir  par 
le  nom  même  de  la  déesse.  De  ce  nom,  Holder  (2)  a  déjà 
dit,  mais  à  une  date  postérieure  à  celle  de  l'ouvrage  de 
Roland,  «  ist  germanisch  »,  sans  toutefois  eu  rechercher 
l'origine.  Celle-ci  n'est  pas  difficile  à  trouver  pour  qui 
a  des  notions  des  anciens  dialectes  germaniques;  c'est 
un  surnom  laudatif,  une  épithète  servant  à  désigner  une 
déesse,  dont  le  nom  principal  n'est  pas  donné  dans  l'in- 
scription. En  ancien  frison,  rike  agèn  bëde  veut  simple- 
ment dire  «  riche  (libérale)  vis-à-vis  de  la  prière  »  ;  agèn 
corresi)ond  à  l'anglais  again;  en  anglo-saxon,  on  dirait 
rica  geân  bédii  (^);  en  franc,  vika  gagan  bëda;  en  ancien 


(*)  Holder  doniu-  les  deux  sens,  ainsi  ((iio  Dottin,  Lu  tangue  (/aîiloise,Sîi. 

(■i)  II,  118-2. 

(3)  Bëdu  étant  un  Icniinin. 


NOMS  DE  r.IEr  GAULOIS  EN  «  -AUOS   »  647 

haut  allemand,  rihha  gagen  bëia.  De  cela,  il  résulte  que 
les  Vellavi  étaient  des  Germains  qui  parlaient  soit  un 
frison,  soit  un  saxon  prélittéraire. 

Pour  finir,  il  ne  sera  pas  sans  intérêt  de  faire  remarquer 
qu'il  est  des  cas  où  un  nom  de  lieu  ou  un  nom  de  région 
formé  par  la  dérivation  en  -aiios  peut  faire  retrouver  le 
nom  du  cours  d'eau  arrosant  le  lieu  ou  la  région,  si  le  nom 
de  ce  cours  d'eau  est  venu  à  disparaître  au  cours  du 
tem])s. 

Voici  un  cas  typique  à  cet  égard. 

Orgeo  (en  patois  oiirdjà)  est  une  grosse  commune  de  la 
province  de  Luxembourg,  située  au  bord  d'une  rivière 
qu'on  appelle  de  nos  jours  la  Vierre  ou,  de  façon  plus  i)ré- 
cise,  la  Vierre  occidentale,  une  autre  rivière,  plus  à  l'est, 
étant  regardée  comme  étant  une  des  deux  branches  de  la 
Vierre,  môme  la  plus  importante  des  deux.  Orgeo  est  évi- 
demment une  formation  en  -aiios,  comme  l'attestent  des 
formes  anciennes  Uriaii  fisco  en  878,  Urio  en  888  (^),  qu'il 
faut  naturellement  lire  Urjaii  et  Urjo.  Ni  Kurth,  ni  Roland 
ne  peuvent  rendre  compte  de  l'étymologie  d'Orgeo;  le  pre- 
miei'  part  bizarrement  d'un  Uriaciim,  le  second  pense  timi- 
dement à  une  rivière  Urls,  qu'il  fait  suivre  d'un  point  d'in- 
terrogation (-  .  Comme  Ovge  est  un  nom  de  rivière  en 
France  (3),  il  est  probable  que  c'était  là,  dans  le  très 
haut  moyen  âge,  le  nom  du  cours  d'eau  qui  arrose  Orgeo. 
Et  la  question  est  résolue  affirmativement,  sans  doute 
possible,  par  l'existence  d'un  bois,  à  o  kilomètres  au  nord- 
ouest  d'Orgeo,  qui  porte  le  nom  de  «  Bois  d'Autrouge  », 
c'est-à-dire  le  bois  d'  «  outre  Ourge  n.  On  sait  que,  dans 
l'ancien  wallon,  une  expression  telle  que  oltve  Ourge  doit 
normalement,  d'aj)rès  les  lois  phonétiques,  laisser  tomber 
et  1'/  de  oltre  et  l'r  de  Ourge.  Le  bois  d'Autrouge,  partie 
de  la  forêt  de  Luchj%  se  trouve,  du  côté  oriental,  limité 
par  le  cours  de  la  rivière  qui  baigne  Orgeo  (anciennement 
rOurge),  et  se  trouve  donc  ainsi,  par  rapport  à  la  localité, 
«  outre  Ourge  »  (au  delà  de  l'Ourge). 


(')  KvRTH,  La  lioriticir  iiiifjinstiijitc.  I,   i',-2. 
(-)  Topun.  namiir.,  I,  tOT. 
(3)  L'Orgo,  alU.  do  l:i  Seine. 


648  p.    MARCHOT 

Quant  au  nom  de  rivière  Ourge,  il  se  dérive  de  Urbial^). 

Un  gros  hameau  attenant  à  Orgeo  s'appelle  Biourge, 
dont  la  forme  ancienne,  en  1363.  est  Biourge  {Jehan  de 
Biourge)  {^).  C'était  vraisemblablement  un  Bituriges  (les 
Rois  du  Monde),  comme  Bourges,  ohef-lieu  du  Cher.  De 
petites  tribus  gauloises,  infimes,  portaient  parfois  des 
noms  qui  ne  sont  parvenus  jusqu'à  nous  que  très  acciden- 
tellement, par  la  toponymie;  par  exemple,  un  Artigeni 
«  les  Fils  de  l'Ours  »  a  donné  un  nom  de  lieu  en  Pro- 
vence (^). 

Paul  Marchot. 

Post-Scriptum.  —  Dans  le  deuxième  fascicule  des  Noms 
(le  lieu,  qui  vient  de  paraître,  Longnon,  aux  n"^  H57-H60, 
tij'e  le  suff.  -aus,  en  tant  que  suffixe  de  noms  de  région 
seulement  {Vimeu,  Talou,  Hainaut,  etc.),  du  germanique 
(cf.  Chamavus,  Batavus.  etc.).  Cette  thèse,  assez  inatten- 
due de  la  part  de  Longnon,  qui  a  admis  ailleurs  des  forma- 
tions gallo-romaines  en  -avus  avec  des  cognomina,  des  for- 
mations avec  noms  propres  de  l'ordre  topographique  et 
noms  communs  de  végétaux,  doit  être  rejetée  Précisément, 
les  noms  de  ces  régions  {pagi  francs)  se  trouvant  en  bor- 
dure de  la  frontière  linguistique  germanique  sont,  dans  les 
langues  germaniques,  formés  avec  un  ancien  mot  gouwi, 
qui  veut  dire  «  contrée,  région  »  :  ainsi,  pour  Hainaut.  on 
a  en  flam.  Henegouw,  en  ail.  Hennegau,  ce  qui  serait 
incompréhensible,  si  -avus  était  germanique  dans  des 
noms  (îomme  jingus  Haginaus. 

P.  M 


(1)  Urhia,  lOrge,  dans  Grégoire  de  Tours,  Holdeb,  op.  cit.,  111,  30. 

(2)  GoFKiNET,  CartnI.  de  l'abbaye  d'Orval,  696. 

(3)  DoTTiN,  La  langue  gauloise,  88. 


Etymologies  wallonnes  et  françaises 

(suite  et  l'm). 


Gauraais  handë. 

Ce  mot,  (]ui  ne  s'emploie  guère  qu'au  pluriel,  désigne  sur 
la  Semois  supérieure,  notamment  à  Tintigny,  «  les  linges 
des  enfants  au  maillot  et,  rarement,  par  extension,  tous 
autres  linges  et  vêtements  :  rIcz  r'cude  lès  handên,  allez 
recueillir  le  linge  qu'on  a  mis  à  sécher  ;  il  r  ro  mins  ses  bons 
handës,  il  a  encore  mis  ses  bons  vôtements  »  (^).  J'ai  noté 
andës  a  habits  »  à  Allesur-Semois.  Labourasse  donne  le 
meusien  «  andie.  linge  d'enfant,  lange  »,  et  Jaclot  le  mes- 
sin «  handée,  chiffon  ».  On  ne  trouve  nulle  part  l'explica- 
tion de  ce  mot,  qui  est  un  diminutif  en  -ellum.  L'aspirée 
initiale,  caduque  dans  certaines  régions,  atteste  une  ori- 
gine germanique,  de  môme  d'ailleurs  que  l'habitat  du  mot. 
Dès  lors,  le  radical  ne  peut  être  que  l'ail,  hem  d  (chemise), 
ancien  fi-isou  haïucdc,  dérivé  de  l'aiu'.  h.  ail.  hamo  (enve- 
loppe) (''). 

W  .  horon. 

D'après  les  dictionnaires  liéi^eois  (Canibresier.  Remacle. 
Hubert,  Forir,  Duvivier),  horon  signifie  <(  madrier. 
planche  épaisse  de  chêne  ».  A  Malmedy,  Stavelot,  Treni- 
bleur,  Neuville-sous-Huy,  etc.,  on  entend  par  là  tme 
«.  dosse,  la  première  et  la  dernière  planche  d'un  tronc  qu'on 
l'efend  »;  tel  est  aussi  le  sens  (pie  j'ai  note  près  de  Houlfa- 


(')  Ed.  Liégeois,  in  HSW  37,  ]>.  337.  Voy.  aussi  Bki.neai  ,  Ent/inHe,  I.  îmi. 

C*)  On  sait  tlanU'e  part  que  lo  has  ail.  ham-,  hninel  «  arriére-faix  »  a  donne 
le  liéjj.  Iidinlète  «  coiffe  que  ecrloins  enfants  |)orlenl  à  leur  nnissam-e»;  rf.  (i., 
I.  270,  3.j7,  il,  <)0i;  et  surtnul  liKiiuK.Ns,  Iteifn'if/e.  p.  120. 


650  J.    HAUST 

lize  (^).,  où  l'on  prononoe  choron.  Enfin,  d'antres  anteurs 
(Lobet,  Body,  Rouveroy)  donnent  les  deux  acceptions. 
Pour  G.,  I,  305,  horoii  appartiendrait  à  la  même  famille 
que  le  terme  de  batellerie  hore  (^=  fr.  écore,  de  l'anglo- 
saxon  score).  Sans  doute,  l'ancien  liégeois  xhorroii  et 
Tard,  choron  i)ostulent  un  primitif  ayant  se-  à  l'initiale; 
mais  la  suggestion  de  G.  paraît  des  plus  contestables.  Je 
préfère  invoquer  un  type  *ex-cor-onem,  dérivé  du  lat. 
oor  «  cœur  »,  à  l'aide  du  suffixe  diminutif  -on  {^).  Un 
horon,  c'est,  suivant  le  point  de  vue,  ou  bien  la  croiîte,  la 
partie  extérieure  détachée  du  tronc,  de  façon  qu'il  reste 
l'intérieur  ou  cœur  de  l'arbre  (une  dosse),  ou  bien  une 
partie  tirée  de  ce  cœur  même  (un  madrier).  Ainsi  s'expli- 
querait l'hésitation  entre  les  deux  acceptions  tradition- 
nelles. 

Liég.  hoùr,  anc.  fr.  heulle. 

A  côté  du  liég.  hoiïr.  nam.  oiïr,  m.,  «  tréteau  de  scieur 
de  long,  etc.  »,  dont  l'origine  n'a  rien  de  mystérieux  (3),  on 
connaît  à  Liège  un  autre  mot  hoùr,  m.,  «  dos  (d'un  cou- 
teau) »,  que  l'on  n'a  pas  encore  éclairci  jusqu'à  présent, 
G.,  I,  312,  le  rapproche  de  l'anc.  fr.  hoole,  qui  a  le  même 
sens,  et  du  w.  hoiir'lè  a  talus  ».  Ce  dernier  n'a  rien  à  voir 
ici  (^),  mais  l'autre  indication  esta  retenir.  Du  mot  ancien 
français  nous  avons  trois  formes  différentes  :  «  le  hiile 
d'un  coutel  »  dans  le  Ménag-ier;  «  le  heulle  d'une  hache  » 
en  139o;  «  le  hoole  d'un  coustel  »  en  1426  [^).  Ces  textes  du 
moyen  âge  doivent  avoir  mieux  gardé  le  t^^pe  primitif  que 
le  dialecte  moderne;  je  tiens  donc  hoùr  pour  une  altéra- 


(')  A  Boniierne  et  à  Buret .  I.a  prcmirrc  [)l;iti('li(!  après  le  r/ioro/i  s'appelle 
H  vwrzine,  puis  viennent  lès plaidcliea  dr  miltin.  A  Clierain,  on  prononce  aussi 
choron.  A  Laroclie  lioron. 

(-)  Pour  le  ra(li(;al,  comp.  l'anc.  fr.  coral  «  cœur  de  chêne  »:  w.  corn,  t.  de 
liouill..  «  bois  de  renfort  placé  dans  certains  boisages  »  (.i  Seraing;  (^f.  |{ody> 
Voc.  des  charnms,  v»  àhon).  —  Pour  le  sullixe,  conij).  le  w.  et  anc.  fr.  coron 
(boutj,  dérivé  de  l'anc.  fr.  cor,  corn,  w.  rwèr,  lat.  cornu.  —  A  Ilalleu.x  (d'après 
BoDY,  ihid.,  V"  horon),  on  dit  horion,  avec  un  suftixe  -ion,  fr.  -illon;  voy- 
«i-dessus  une  note  à  l'ar-t.  cakklù. 

(^)  C'est  le  fr.  hoitrd,  d'origine  germanique  ;  voy.  le  IHc/.  ymëral . 

{*)  Sm-  hoiir'lt;,  voy.  mon  article  dans  Romaniit,  l.  XLV  (1919),  p.  181-189. 

(^)  Voy.  Godefroy,  v"  heulle.  Die/.,  koiling,  iMeyer-Lid)ke  n'en  i>arlent  pas. 


ETYMOLOGIES  651 

tion  de  *hoùl  (•).  Or  Schaermans  enregistre  le  riuiuaiKl 
hoesel,  m.,  «  dos  d'un  couteau  »  (2).  qui  serait,  d'après  lui, 
le  môme  mot  que  homhel.  Aux  germanistes  de  nous  dire 
s'il  a  raison.  Quoi  qu'il  en  soit,  le  flamand  hoesel  (pro- 
noncé hoùs'l)  rend  un  ('om])te  parfait  de  l'anc.  fr.  hiile,  etc., 
et,  partant,  du  mot  liégeois. 

Liég.  mayeté. 

G.,  I,  243,  se  contente  d'enregistrer  grimaicté  «  bigarré», 
où  il  soupçonne  la  présence  de  g'ris;  mais  on  eherclie  vai- 
nement, dans  son  dictionnaire  et  dans  ceux  de  Forir,  de 
Hubert,  etc..  un  article  muyetc.  Il  faut  écrire  <>-ris  niHyctc', 
de  même  que  neùr  nuiyetc,  bleu  mayeté,  rodje  mayeté 
«  [pigeon]  gris,  ou  noir,  ou  bleu,  ou  rouge  brun,  présen- 
tant un  mélange  de  teintes  claires  et  foncées  »  (^).  D'après 
Forir,  mayeter  signifie  «  mailleter,  marteler  »;  mais  ce 
verbe  doit  être  mis  hors  cause.  Il  est  sûi*  que  nous  avons 
ici  affaire  à  la  forme  wallonne  de  l'anc.  fr.  maillenier 
a  tacber,  souiller  »,  lat.  *maculentare.  Le  sens  propre  de 
mayeté  est  donc  ((  tacheté,  tiqueté  ».  Pour  la  sj^ncope  de  la 
protonique  non  initiale,  comparez  ditarté  (anc.  fr.  desta- 
lenté);  spaiv'ter  «.  épouvanter»;  apah'tcr  lanc.  fr.  apaisan- 
tér)  a  apaiser  »  ;  flam'ter  (*flamanter,  baragouiner  en  fla- 
mand), fîèm'ter  (Blegny-Trembleuri  «  tailler  au  fièr'mint 
(courbet)  ». 

Ijiég   préhale 

D'après  (J  ,  II,  255,  le  liég.  prélude,  prihéle  {*),  pvihyéle, 
dérive  de  pris  (=  caillé).  La  phonétique  contredit  cette 
assertion  :  on  aurait  eu  "prézale,  'prizale.  comme  on  a  j)rè- 
zeiire,  prizeùve  «  présure  ».  Au  reste,  il  suffira  de  complé- 
ter les  données  de  G.  pour  ([ue  l'étyraologie  se  dégage 
d'elle-même. 


(*)  Comparez  pu/iùle  (Liège)  =  pàhùre  (Huy)  «  paisible  ». 

(*)  De  même  De  Bo  doune  hoesel,  oesel  (an  Flandre  fraiii,aise  -z-i. 

(3)  J.  Defrecheu.x.  Yoc.  (les  noms  iv.  d'tmimitii.r.  v*  colon.  —  On  dit  aussi 
toi  mayeté  «  tout  liqueli'  « . 

{■•)  G.  écrit  il  tort  priliilc.  Si  l'i'ltt'  Iociih'  cxistf.  ci'  lU'  pcul  r-lre  (luo  p.ii"  uiic 
laussc  uii;ilo;rif  avpc  /»/  ihna  :  prison. 


652  J.    HAUST   - 

Outre  les  trois  formes  susdites,  dont  les  deux  dernières 
surtout  existent  avec  le  sens  de  «  fromager  »  à  Liège,  Visé^ 
Verviers,  Tliimislcr-Clermont  (ED.,  1910,  p.  o2,  55).  il  faut 
considère!-  :  ])rchyale  (Faymonville),  prévale  (Malmedy, 
Stavelot)  «  cuvelle  »  (');  prèhale  (Huy),  t.  de  vigneron 
«  récipient  avec  trous  qu'on  place  au-dessus  du  pressoir  »  ; 
prèchale  (Awenne),  prihyèle  (Thimister)  «  presse  pour 
extraire  le  jus  des  fruits  dont  on  fait  le  cidre,  le  vinaigre 
et  le  ])oiré  »  i}).  Cette  dernière  acception  éclaire  suffisam- 
ment l'origine  de  notre  mot  :  une  prèhale,  c'est  tout  d'abord 
un  instrument  pour  pressurer  les  fruits  ou  le  fromage  {^)  ; 
c'est  ensuite  le  récipient  de  la  presse,  et  enfin  une  sorte  de 
cuvelle. 

On  objectera  que  le  diminutif  de  presse  serait  *prèssale. 
Cela  est  vrai  on  du  moins  vraisemblable  (4).  Mais,  en  tenant 
compte  surtout  de  prèhyale,  qui  est  assurément  la  forme 
la  plus  ancienne,  nous  pouvons  invoquer  un  type  latin 
*pressia,  qui  lève  toute  difficulté  (&). 

Normalement  le  groupe  -hy-  devient  ch  au  sud  et  perd 
son  élément  ]ialatal  y  en  liégeois-verviétois  i^^)  :  prèhyale, 
jirihyèle  se  réduisent  ainsi  kprèhale,  prihèle.  Reste  la  sin- 
gularité de  prihyèle.  Je  crois  que  cette  forme  provient  de 
prèhyale,  dont  la  finale  s'est  modifiée  sous  l'influence  de 


(*)  Villers  écrit  prkile  (G.,  Il,  2oo):  mais  on  pronoiici*  prri/dli'.  La  chute  de  h 
est  remarquable. 

(^)  La  quantité  pressée  s'appelle  la /)?'èc/i7«ye  à  Awenne. 

(3)  On  peul  comparer  Meyer-Lubke,  n°  3037.  Je  ne  sais  d'où  cet  auteur  a 
pris  le  w.  frehal  (.'),  qu'il  rattache  au  lat  fiscella  «  fromager  »,  anc.  fr.  feisscUe. 
Il  y  a  sans  doute  erreur  de  lecture  pour  prelial,  c'est-à-dire  prèhnie. 

{*)  Le  wallon  présente  toutefois  des  exemples  curieux  de  s.*  traité  comme  ssi/. 
Tels  ces  diminutifs  de  hosse  et  de  fosse  :  hochale  (  Awenne)  «  avoine  dressée  et 
liée  à  la  tête  seulement  »  [hossale  à  Marche-en-Famenne]  ;  —  fnhalc  (G.,  II  520) 
«  partie  creuse  d'une  ondulation  de  terrain  >>  [f'ocfinle,  m.  s.,  à  Marche-en-Fam., 
tandis  que  fossale  y  signilie  <(  fossette  a  la  joue  »].  En  revanche  .r  >.«  dans  : 
assi,  massafe,  pa.ssc.  passon,  tesson  (axilem,  maxillam,  *paxellum, 
*paxonem,  taxonem). 

(5)  Le  ty|)e  *pressia  (presse,  cohue)  est  dans  Meyer-Liibke,  n°  074;},  pour 
expliquer  l'italien  prescta.  Gomp.  *crassi  a  (graisse)  =  w.  crâhe  ;  *grossia  ' 
anc.  fr.  graisse;  ■*latia:  am;.  fr.  /««.se,- *spissia  (anc.  fr.  espeisse)  =^  w. 
spMic  (Stavelot)  «  épaisseur  d'un  bois,  fourre  »,  d'où  le  nom  de  famille 
Delsupex/ie. 

(«>)  Voy.  ci-a[)rés  l'arliiMe  n-nfirlp. 


i 


ETYMOr.OGIES  653 

hyèle  (écuelle);  la  protonique  à  son  tour  sera  devenue  /  par 
(lissimilation  et  aussi  sous  l'influence  de  pris  (comp.  />/è- 
zenre  :  prizeiire). 

^^^  sot-dwérmant  ((loir  ». 

G.,  II,  377,  note  laconiquement  <(  sot-doirmunt  :  loir,  à 
Liège  et  à  Xamur  »,  comme  si  le  mot  s'expliquait  assez  de 
lui-même  {^).  La  Faune  wallonne  de  J.  Defrecheux  dit  bien 
que  le  loir  s'engourdit  pendant  l'hiver  et  que  de  là  vient  le 
nom  wallon  de  cet  animal  ;  mais  on  peut  se  demander  pour- 
quoi une  telle  particularité  lui  vaut  l'épithète  de  sot.  En 
réalité,  et  cela  mérite  d'être  remarqué,  .so  est  altéré  de  se  et 
re])résente  le  fr.  sept.  On  sait  combien  fut  populaire  au 
moyen  âge  la  merveilleuse  aventure  des  «  Sept  Dor- 
mants »,  de  ces  jeunes  gens  d'Ephèse,  qui.  arrêtés  au 
m*  siècle  comme  chrétiens,  réussirent  à  se  réfugier  dans 
une  caverne,  où  ils  s'endormirent  pour  ne  se  réveiller  que 
deux  siècles  plus  tard.  Un  souvenir  de  la  légende  pieuse  a 
survécu  dans  l'ail.  Siebcnschliifcr  et  le  néerl.  zeuenslaper, 
qui  désignent  proprement  «  un  des  sept  dormants  »,  puis, 
au  figuré,  «  un  grand  dormeur  »,  et  enfin  a  un  loir  ».  Le  w. 
so-divcrniant  n'a  conservé  que  cette  dernière  signification, 
le  terme  s'étant  altéré  chez,  nous  par  étymologic  ])opulaire 
et  aussi  par  dissimilation.  On  a  dit  d'abord  sèt'  duH-rmants, 
puis,  comme  dans  d'autres  composés  traditionnels  (^),  le 
t'  s'est  anuiï;  enfin  la  voyelle  è  do  la  syllabe  initiale  est 
devenue  o,  comme  dans  sersai  (Lobet,  p.  534)  -^  sor.sai 
(Hubert)  «  halo  (de  la  lune)  »,  que  nous  écrirons  cèrcè, 
çorcè  (=•  cerceau,  lat.  circellus);  sèrdjani  =  sordjani 
a  sergent  »;  Dlè-ivade  =  Dio-wàde  ((  Uieu  (vous]  garde!  » 
(G.,  I,  2o4)  ;  anè  (Malmedy)  =  ènè  (Faymonville)  =  onv 
(Liège)  ((anneau»:   *Hèlogne   =  solo^-nc    (Liège»    u  chéli- 


(')  Le  loir  s'appelle  so-duirtnatit  (;'i  Lifge;  -ont  à  Hiiy):  Mt-dwarmant  a 
Wavrc,  >;miur,  DoriiineiPirsDiil  (Utiiiio  lo  11:1111.  nordwitnnaul.  luriiic  peu  sûre); 
son-tlwar  niant  à  Slave,  AUe-sur-Semois;  sou-donnant  à  NfiilVliàteaii  :  loii- 
dnrmanl  à  Virton  ;  rat  liridr  à  C.harlcini,  Tlmiii.  (If.  Hoi.i.ami.  l'unnr  i><ip.  dr  In 
France,  VII,  p.  iti. 

(-)  Coinp.  as  sv-fmv  «aux  sept  luHros  »  1.  d.  de  Neuvil!e-e»-<;on(!n«i  ; 
aliarin    t.  de  liouill.,  propremciil  n'abat'  rin  iHD.,  IIH  i-1910,  p.  <)8i. 


654  J.    HATST 

doiue  ))  ;  etc.  Le  changement  inverse  est  dn  reste  tout  aussi 
fréquent  :  sofoker,  sèfoker  «  suffoquer  »;  Tchodôre,  Tchè- 
dôre  «Théodore»;  èstèner  «  étonner»;  paturon  «poti- 
ron »;  popioûle  fà  Liège,  comme  les  mots  précédents) 
=  pèpioûle  (Sprimont)  «  têtard  »,  proprement  «  petite  pope 
ou  poupée  »  ;  corwèye  (liég.)  =^-  kèrwêy'e  (Esneux)  «  cor- 
vée »;  pèrlôdje  (liég.)  (c  chaire  de  vérité  (lat.  prolo- 
gi  um),  etc. 

W,  totènaveûte,  tanawéte,  etc. 

G.,  II,  4o6,  laisse  inexpliquée  cette  expression  singu- 
lière, dont  il  cite. quatre  formes  avec  trois  sens  différents. 
Voici,  là-dessus,  le  résumé  de  ce  que  j'ai  recueilli  dans  nos 
dialectes.  Le  chiffre  qui  suit  la  localité  renvoie  au  tableau 
des  significations. 

Formes  dialectales.  —  A)  totènawète  .Todoigne  4;  totanaivète 
nam  (G.)  1,  3;  Vtanawè.te  Sainte-Marie-Geest  lez-Jodoigne  3*, 
d{i)  tènawète  (')  en  Famenne,  Beauraing,  Namiir  (  Wérotte,  p.  xxx),^ 
Xeuville-sous-Huy  1  ;  d{i)  tanawéte  Awenne  1  ;  tènawète  Marche- 
en-Fameiine.  Beii-Ahin,  Audenne,  Ciuey.  Fosse-la-Yille.  Far- 
cieunes  1  :  ^a;ia«?fi/e  Namur^Pirsoul),  Bande,  Vonêche,  Fiorenville. 
Amberloup,  Jodoigne,  Gougnies  1  ;   tanawè  Bouffioulx  1. 

B)  totènauète  Robertville  2,  Faymonville  3,  Liège  5(2):  tofna- 
veùte  Liège  (Remacle,  2«  éd.,  \°  naveûtt)  3,  5;  tofnaviite  Liège? 
(G.)  L  3;  totènaoite  Stavelot,  Malraedy,  Cherain  3;  tot'navite 
Stavelot.  Vielsalm,  Bovigny  3  ;  /o/'/îauufe  Yillers-Ste-Gertrude  3. 

Significations  :  1.  parfois,  de  temps  en  temps  (sens  le  plus 
usité  avec  le  3«)  ;  —  2.  à  l'improviste  (relevé  seulement  à  Robert- 
ville  lez-Malmedy  :  i-acora  totènaoite;  totènavite  i  vëv.  il  accourut, 
il  vint  à  l'improviste;  —  3.  tantôt  (dans  l'avenir),  un  de  ces  jours, 
d'un  moment  à  l'autre,  dans  un  certain  temps  (plus  indéterminé 
que  quand  on  dit  tôt  rade)\  — 4.  tantôt  (dans  le  passé),  il  y  a  uu 


fi)  La  syllabe  tôt  (tout)  perd  sa  voyelle  après  syllabe  masculine  et  devient 
l'f-;  (le  là,  par  confusion  avec  di  (de),  ttanaiorfa  s'est  corrompu  en  di  tanaici'te 
après  .syllabe  féminine  ;  par  exemple  à  Awenne  :  i  vint  t'tanawrte  ;  ylif/nà  i'oùy 
di  tanawéte  (il  vient  parfois;  cligner  l'œil  de  temps  en  temps);  et  en  namurois  ; 
dirf  di  tènaivi-fe  une  pâtir.  Des  auteui's  liégeois  ont  rarement  usé  de  la  locu- 
tion namuroise  qu'ils  écrivent  di  tène  awôte  (=  «  de  temps  en  temps  »)  ;  mais 
en  rcalitt'  elle  n'est  pas  liégeoise. 

C^)  D'après  Hubeht,  IHct.,  v"  navett,  et  l'archaïsant  G.  MAGNt:E  (Annitairg 
Soc.  Litt.  watt.,  3,  p.  1:22),  lequel  écrit  aussi  totènaveûte  (BSW,  27,  p.  40). 


i 


KTYMOLOGIES  655 

iiistiint  (seulement  à  Jodoi^iic.  djins  une  j)ièce  d'Edu).  Etienne  : 
nos  dijin  totènawète...  n  nous  disions  tout  à  l'heure...  »  ;  BW'S.  35 
j).  223);  —  5.  toutefois,  néanmoins  ^seulement  dans  le  groupe  B 
et  d'après  les  dictionnaires  liégeois  de  Remacle  et  de  Hubert; 
sens  disparu  aujourd'hui  avec  l'expression  elle-même). 

Cette  diversité  sémautique,  on  le  voit,  est  presque  aussi 
(•()mi)liquée  que  les  variations  ])lionétiques  de  (;ette 
curieuse  locution.  Essayons  de  nous  retrou vei-  dans  ce 
dédale.  Le  type  le  mieux  conservé,  à  mes  yeux,  c'est  le 
totènmvèle  de  Jodoigne,  qu'il  faut  décomposer  eu  tot-èn- 
awète.  J'j^  vois  le  représentant  dialectal  d'un  anc.  fr.  *tot 
en  aoite,  expression  qu'on  n'a  pas  encore  rencontrée  dans 
les  textes  du  moj^en  âge  et  qui  devait  signifier  «  tout  de 
surcroît  ».  J'ai  montré  ailleurs  [Bull,  du  Dict.  wnllon,  I9l!2, 
p.  o())  que  le  w.  rainète  «  surcroît,  petit  supplément  gratuit 
de  marchaudise  »  vient  du  latin  *re-adaucta  et  que  le 
simple  ad  au  et  a  survit  dans  le  namurois  d'awète  «  de  sur- 
croît ».  Nous  avons  ici,  dans  une  locution  de  frappe  origi- 
nale, une  autre  survivance  de  l'anc.  fr.  aoite,  avoite  «  aug- 
mentation», participe  féminin  du  verbe  ao/re  (*a  dan  g  ère). 

D'après  des  renseignements  encore  très  incomplets, 
notre  expression  n'est  connue  que  dans  une  grande  partie 
de  la  moitié  orientale  de  la  Wallonie.  La  limite  qu'on  j)eut 
tracer  ])rovisoirement  serait  une  ligne  partant  des  envi- 
rons de  Wavre,  écornant  légèrement  le  Hainaut  (Far- 
ciennes,  Bouffioulx,  (îougnies),  sautant  à  Beauraing- 
Vonêclie  (au  suil  de  Dinant),  \nùs  à  Floren  ville. 

Les  deux  groupes  présentent  des  altérations  distinctes. 
Le  groupe  A  altèi-e  surtout  la  syllabe  initiale  toi,  qui  se 
réduit  à  t't-  et  même  au  simple  /  final  (*j;  mais  la  tonique 
-wète  se  conserve  remarquablement  intacte  (-).  Au  con- 
traire le  groupe  B  —  com])renant  à  l'extrême  nord-est  une 
bande  limitée  à  peu  près  par  Liège,  Villers-Saintc-Ger- 
trude,  Cherain,  Bovigny,  Vielsalm  et  Malmedy —  respecte 


(^)  Sur  la  corruption  d{i)t-,  voyez  lavant-dcMMiicir  note.  —  .\  la  deuxième 
syllabe,  cerlaiiiei.  formes  ont  a  au  lieu  de  /■;  sur  le  trailcnienl  du  lai.  in  prép. 
ou  prélixo,  on  peut  voir  (îriiinauf»,  Phoncf.  de  rouest-irallori.  ^  36  (BSW,  t.  50, 
p.  417). 

C^)  Sauf  il  Hontliouk  :  tnnairr  in  rnp  «  de  leinp.>*  en  temps  un  coup  ».  d'après 
(ÎKn;Nvrtii.  op.  cit..  ^  131. 


656  J.    HAIST 

le  preiuier  éléiuent  et  uièiiie  eu  général  le  second  (^);  mais 
partout  le  troisième  élément  devient  méconnaissable  :  w,  si 
bien  conservé  dans  rawète,  passe  à  u  (*)  et  la  voyelle  è  se 
dégrade  en  /,  eu,  eu,  ii,  û  sous  certaines  influences  analo- 
giques (3)  ;  è  ne  subsiste  que  sur  deux  points  de  la  frontière 
linguistique  à  l'est  de  Malmedy, 

A  première  vue,  la  filiation  sémantique  offre  bien  des 
obscurités.  Comment  rattacher  à  l'étymologie  proposée  les 
sens  énumérés  ci-dessus?  En  fait,  ce  n'est  i)as  l'exi^ression 
isolée  «  de  surcroît  «  qui,  par  un  processus  logique  et  indé- 
pendant, a  engendré  ces  diverses  significations  ;  c'est  le 
contexte  de  la  phrase  qui  parait  la  revêtir  d'acceptions 
api)aremment  si  i^eu  conciliables.  Ce  que  l'on  vous  donne 
de  surcroît,  on  ne  vous  le  doit  pas  et  j)roprement  vous  ne 
l'attendez  pas.  De  là  :  il  vient  nous  voir  de  surcroît  (=  en 
plus  des  visites  convenues,  quand  on  ne  l'attend  pas)  a  pu 
signifier  «  parfois,  de  temjjs  en  temps  »  (sens  1),  ou  «  à  l'im- 
proviste  »  (sens  2,  rare).  De  même  :  je  viendrai  vous  voir 
de  surcroît  (=  quand  vous  ne  vous  y  attendrez  pas)  a  pu 
signifier  «  un  de  ces  jours  »  (sens  8).  Si  cette  analyse  paraît 
subtile,  voici  une  autre  raison  :  l'ellipse.  L'expression  com- 
plète est  .  a  par  surcroît  une  fois  (ou  certaines  fois)  »  ;  ainsi 
tanawè  on  côj),  à  Bouffioulx;  taiiawète  (et)  dès  caps  qii'i- 
gn-a,  à  Jodoigne.  Dans  l'usage  courant,  on  supprime  les 
derniers  mots,  en  réalité  les  plus  significatifs,  et  le  sens 
assez  pauvre  de  tanawète  s'enrichit  de  ce  qu'on  sous- 
entend.  Le  sens  4  résulte  évidemment  d'une  confusion  for- 
melle avec  nawère  «naguère  »  (^j.  Enfin,  dans  la  phrase  :  il 


(^)  La  syncopi-  de  la  proloiiiquc  non  iniliale,  qui  réduit  toU^  à  lot'  est  ici 
normale;  compare/,  iiam.  holèdji,  Ichèrpèti  =  liég.  boVdji,  tcfièp'li,  fr.  hou- 
langer,  charpenlier. 

(2)  Probablement  sous  l'influence  de  navette.  On  a  perdu  de  vue  la  parenté 
de  rawète  et  de  tot-rn-awète.  Comparez  malm.  mvh',  a  l'awir  =  liég.  aivei'ir 
(*agurium,  heur),  a  l'avir  (au  petit  bonheur). 

(•*)  Notamment  vite  a  déteint  sur  tot'nuvite,  et  rèimte  «  laps  de  temps  » 
(à  Villers-Sainte-Gertrude)  sur  totnavnte. 

{*)  A  Viesville,  au  nord-ouest  de  Cliarleroi,  lènawée  .signifie  «  naguère  » 
(d'après  M.  Oscar  Pecqueur)  ;  ici  le  croisement  a  dénaturé  la  forme  autant 
que  le  sens  ;  je  n'en  ai  pas  fait  état  ci-dessus,  parce  que  notre  expression,  dont 
il  ne  reste  qu'un  débris  (tè-)  est  sûrement  importée  de  l'est.  Je  relève  encore 
<lans  un  texte  de  Malmedy  ce  curieux   exemple  :    il  avéve  hin   i  dotance 


1 


ETYMOLOGIES  657 

se  peut  que  vous  n'ayez  rien  à  craindre,  i)ar  surcroît  prenez 
vos  précautions,  coula  s'pout,  tot'navcùle  loiikiz  a  vos  (*), 
on  voit  qu'un  «  toutefois  »  est  sous-entendu  entre  les  deux 
propositions.  Le  sens  propre  de  tot'naveûte  s'étant  obli- 
téré, on  a  pris  cette  expression  pour  un  synonyme  de  «  tou- 
tefois ». 

Liég.  wadje,  watche 

Ce  mot  désigne  la  bretelle  ou  bricole  servant  à  soutenir 
les  bras  d'une  brouette  ou  d'une  civière;  les  deux  bouts  ont 
une  ouverture  par  où  passe  l'extrémité  de  chaque  bras  du 
véhicule  :  //'  loaichc  est  trop  streùte,  aie  mi  cèpe  lès  spales. 
Certains,  comme  Forir,  le  font  du  masculin,  sans  doute 
sous  l'influence  de  l'homophone  wadje  a  gage  ».  G.,  II,  474, 
qui  le  donne  au  pluriel,  suggère  la  comparaison  avec  l'ail. 
wage  ce  balance  ». 

Dans  une  enquête  sur  le  langage  du  bouilleur  à  Seraing, 
j'ai  relevé  ce  qui  suit  :  la  biirtèle  de  hèrtcheû  à  batch,  bre- 
telle ou  harnachement  du  hercheur-bac,  est  formée  de  deux 
bandes  de  forte  toile,  lès  watches  dèl  burtèle,  qui  se  placent 
sur  les  épaules  et  passent  sous  les  bras  ;  sur  le  bas  des 
reins,  les  watches  se  réunissent  à  une  manote  («  menotte  » 
ou  poignée  de  fer)  qui  porte  un  crochet  {^).  Je  crois  que  le 
langage  archaïque  de  nos  bouilleurs  a  conservé  le  sens 
X)remier  du  mot  et  je  définirai  wadje  ou,  comme  on  pro- 
nonce, watche  :  large  bande  de  très  forte  toile,  servant 
notamment  à  faire  la  bretelle  du  hercheur,  du  ])orteur  de 
civière,  du  conducteur  de  brouette,  ou  même  le  licou  d'un 
cheval. 

Partant  de  là,  on  s'adressera  au  radical  germanique 
"VNad-,  dont  le  sens  primitif  est  «  tissu  »,  d'où  :  a  vêtement, 
lien,  câble  »,  etc.  (^);  comparez  l'ail,  archaïque  wat,  f., 
pièce  d'habillement  (anc.  saxon  wàd;  anc.  et  moy,  h.  ail. 


qu  tot-èn-mvère  ilafdve  nos  qiviîer  (Armonac  du  i  Saméne,  1889,  p.  60);  ici  le 
croisement  affecte  seulement  la  forme;  le  sens  reste  :  «  bient»M,  un  de  ces 
jours  »  (sens  3). 

(1)  Kxom|)le  donne  par  IIkmaci.e,  Dict.  toaltori,  :2«écl.,  v"  naveùtt. 

(2)  Voyez  la  ligure  dans  le  Huit,  clv  Dict.  wallon,  101  i,  p.  82. 
(3j  Je  dois  cette  suggestion  à  l'obligeance  de  M.  .1.  Vercoullie. 

42 


658  J.    HAUST 

imit)',  et  le  néerl.  g- ewaad vêtement,  lijnwaad  linge,  lijkwade 
linceul  (').  Le  \v.  inadje  s'expliquerait  par  un  diminutif  fla- 
mand *wadje  signifiant  «  petite  pièce  de  tissu  ».  De  même 
le  w.  bodje  vient  du  fl.  beiikje;  le  w.  bondje,  rouchi  bonge, 
botte,  faisceau,  du  fl.  bondje  (^);  le  nam.  deùtche  (G.,  I,  165), 
du  fl.  duitje;  etc. 

Ane.  fr.  wage,  waghe. 

Dans  son  Glossaire  des  poésies  de  Froissart,  Sclieler 
note  trois  exemples  de  wages,  s.  f.  pi.,  cité  parmi  les  pièces 
d'habillement  que  mettent  les  bergers  :  «  solers  takenés..., 
wans,  wages,  chaperons  petis  »  {^).  «Je  ne  saurais,  ajoute- 
t-il,  en  préciser  le  sens;  peut-être  sont-ce  des  hauts-de- 
chausse,  des  houseaux,  lesquels  mots  ne  paraissent  pas 
dans  les  passages  cités  ».  Dans  une  énumération  ana- 
logue, une  scène  pastorale  du  xv^  siècle,  d'origine  liégeoise, 
que  M.  Cohen  a  éditée  récemment,  contient  le  mot  waghe ^ 
que  l'éditeur  interprète  par  «  haut-de-chausse  »  (^).  Je 
crois,  pour  ma  part,  qu'il  s'agit  plutôt  de  houseaux. 

On  trouve  en  moyen  néerlandais  waggeii  «  péronés, 
fasciae,  fr.  guettres  »  (Plantin);  wagge  «  tibiale,  pero  » 
'Dict.  teiitoniciim,  Antverpiae.  1667);  et,  dans  les  dialectes 
modernes  d'Anvers  et  du  Brabant  :  wag,  wagge  a  over- 
kous,  slofkous,  fr.  guêtre  »  (Schuermans).  L'anc.  fr. 
wag{h)e,  qui  se  prononçait  sans  doute  wagiie  et  qui  ne  se 
rencontre  que  dans  de  rares  textes  de  nos  provinces  wal- 
lonnes, provient  manifestement  de  cette  source  thioise. 
Il  a  laissé  en  Ardenne  française  le  diminutif  wagates 
[=  *waguettes],  s.  f.  pL,  «  sorte  de  jambières  dont  se 
servent  les  ouvriers  ardoisiers  »  (^).  —  Il  résulte  de  là  que 
l'anc.  fr.  wag{h)e  n'a  rien  de  commun  avec  le  liég.  wadje 
dont  il  est  question  ci-dessus. 


(')  Voy.  "Wcigand,  wat;  Franck-van  Wyk,  gewaad. 

C^)  Behrens,    Beitrdqe,    p.    27.    Stir   hndje,    voy.    Homania,   XLVII    (1921), 

p.  "m. 

(•*)  II,  319,  28.  —  Godcfroy  donne  les  deux  autres  passages  et  traduit  sans- 
hésitation  :  «  haut  de  chausse,  houseau  ». 

{*)  Myslhes  et  Moralités  du  ms  617  de  Chantilh/  (Champion,  1920,  p.  87). 
(5)  BuLNEAU,  Étude  phonétiffuc  des  patois  d' Ardenne,  p.  lOi. 


ETYMOLOGIES  659 

AA'.  wahéte  (Verriers,  Malmedyi. 

La  variole  s'appelle  à  Liège  lès  pokes  («  poches, 
ampoules  »)  ou  pokètes  ;  à  Namur  plokca  ou  plokètes  (ave<t  / 
épenthétique).  Près  de  la  frontière  allemande,  cette  mala- 
die porte  un  nom  qui  n'a  pas  encore  reçu  d'explication  : 
lès  wahètes,  Malmedy  :  Villers,  1793;  G.,  Il,  47u;  Ver- 
viers  :  Lobet  (i);  wahyètes,  Francorchamps,  Vielsalm; 
wachètes,  Bovigny,  Lutrebois,  Sibret,  Wardin  lez-Bas- 
togne  (2);  wèhyotes,  Faymonville  :  aueûr  lès  wèhyotes 
«  avoir  la  petite  vérole  »,  inète  lès  ivèhyotes  a  vacciner  »  ; 
une  wèhyote,  c'est  un  bouton,  une  petite  pustule  arrondie 
(J.  Bastin,  Vor.  de  Faym.). 

De  ces  quatre  formes,  la  dernière  se  rapproche  le  plus 
du  radical  primitif.  Nous  y  reconnaissons  en  effet  le  lat. 
pop.  *vessica,  d'où  le  fr.  vessie,  malmédien  vèhie  (le  liég. 
vèssèye  est  emprunté  du  fr.).  Le  diminutif  *vèhyèle,  -oie 
(=  anc.  fr.  uesciette  :  pustella)  a  subi  le  changement  de  o 
initial  en  w  (^).  Le  groupe  -hy-  devient  normalement  eh  au 
sud;  il  se  réduit  à  h  en  verviétois  (comp.  d'hindeà  côté  de 
d'hyinde  et  voy.  l'art,  prèhale).  Quant  à  l'altération  de  la 
protonique  è  en  a,  les  exemples  abondent. 

Une  wcihète,  c'est  donc  une  vésicule,  une  «petite  vessie». 
Au  pluriel,  c'est  la  i^etite  vérole  qni,  en  meusien,  s'appelle 
de  môme  les  vissies,  alors  que  chez  nous  le  terme  roman  a 
]>resque  partout  cédé  devant  poke,  d'origine  germanique. 

Anc.  w.  waneal  II,  crait  (!),  etc. 

Le  glossaire  de  l'ancien  Métier  des  Drapiers  liégeois, 
parBormans,  a  l'article  suivant,  qui  renferme  autant  d'er- 
reurs que  de  mots  ('*)  : 


(*)  Forir  donne  aussi  ce  mot  qui,  toutefois,  est  inconnu  à  Liège. 

(-)  Entendu  à  Bovigny  :  lès  neùres  wac/u-les  a  variole  hémorragique  »,  li's 
pfokes  d'êwe  ou  di  tchin  «  varicelle»;  et  à  Wardin  :  Irs  ivav/iites  di  tchin, 
c'est  dès  p'tits  hotons  qri  Jès-èfants  atrapant  co  hin  SDvinf,  sans  doute  une 
sorte  d'urticaire  boutonneux. 

(■')  Comp.  le  liég.  rapenr  ou  wupeûr  ;  vafic  ou  wuliè  (vasccllunii  <<  cer- 
cueil »,  et  voy.  l'article  suivant. 

(*)  BSW,  9,  |>.  2!U.  Voyez  aussi  G.,  II.  till,  v»  rniilz.  «lodefroy,  v<>  u-aneal. 
reproduit  larlicle  de  Uormans  en  supprimant  les  deux  [loinls  d'inlerrogalion. 


660  J.   HAUST 

■wanealx  de  craitz,  s.  m.?  (Suranné.)  Suint,  laine  graisseuse 
du  dos  du  mouton,  et  qui  attire  les  mites?  (Charte  des  Drapiers, 
de  1527,  clans  le  Recueil  des  Chartes  et  Privilèges  des  Métiers  de 
Liège,  t.  I.  p.  232). 

Au  texte  de  la  Charte  de  io27  (^),  comparons  une  for- 
mule analogue  qui  api^araît  un  peu  plus  tard,  dans  les 
Articles  additionnels  de  1542  (p.  245  du  même  Recueil).  Il 
s'agit  de  «  fausse  draperie  »  ou  de  drap  fabriqué  sans  avoir 
observé  les  règlements  : 

1527  :   que  personne  ne  pré-  1542  :  [ces  draps]  se  deveront 

sume  doresnavant  faire  draps  faire  de  bonnes  et  loyales  laines 

de  laine  de  deux  foixhes  de  Re-  et  étoffes  sans  aucune  falcité, 

tondeur,  de  wanealx  de  craitz,  comme  de  laines  de  deux  for- 

de    flockons,    de    noppes,     de  ches  de  traits  de  flockons,  nop- 

retaillons,   ne    d'autres    laines  pes    et  retaillons,    ne    autres 

desei'ables...  laines  deserables... 

Les  mots  en  italique  manquent  dans  la  seconde  colonne  : 
cette  omission,  fortuite  ou  voulue,  est  suggestive,  comme 
on  le  verra.  De  plus,  nous  n'aurons  pas  à  tenir  compte  de 
la  ponctuation  fantaisiste  des  deux  textes. 

Les  règlements  défendent  d'user  de  déchets  de  toute 
espèce  dans  la  fabrication  du  drap.  Flocons,  nopes,  retail- 
lons se  comprennent  d'emblée  (^j;  mais  la  détermination 
des  autres  matières  prohibées  ne  va  pas  sans  peine. 

1.  Que  veut  dire  laine  de  deux  foixhes  (forches)?  Le  lié- 
geois (èj/u^è/îes  répond  au  fr.  forces,  lat.  forfices.  D'après 
Bormans,  p.  259.  les  efoixhes  désignent  «  les  grands 
ciseaux  avec  lesquels  on  tond  les  draps  »,  ce  qui  est  vrai, 
mais  incomplet;  il  se  demande  si  laine  de  deux  foixhes  de 
retondeur  (sic)  signifie  :  «  laine  restée  dans  les  ciseaux  du 
retondeur  à  la  deuxième  tonte  [du  drap]  ».  Pour  moi,  dans 
les  textes  de  1527  et  1542,  il  faut  mettre  une  virgule  après 
foixhes  ou  forches,  et  comprendre  qu'il  s'agit  des  «  ciseaux 
à  tondre  les  moutons  ».  La  bonne  laine  est  fournie  par  la 
tonte  des  moutons  qui  se  fait  au  printemps.  L'expression 
singulière  laine  de  deux  foixhes  désigne  apparemment  la 


(*)  On  ne  connaît  ceUe  charte  que  par  le  très  médiocre  Recueil  de  1730, 
qui  fourmille  de  fautes.  Sur  la  façon  dont  il  fut  composé,  on  peut  voir 
BSW,  5,  p.  iOl. 

(2)  Voj.  BoKMANs,  /.  c,  p.  268,  275,  28i;  nope  est  dans  le  Dict.  gênerai. 


à 


ETYMOLOGIES  661 

laine  obtenue  par  une  deuxième  tonte  pratiquée  en  été.  De 
fait,  au  dire  de  Bormans  lui-même  (p.  141),  on  ne  pouvait 
employer  que  pour  faire  des  étoffes  de  doublure  (')  ou  des 
draps  de  lit,  la  laine,  trop  courte,  des  moutons  tondus 
entre  le  1"  juin  et  le  1"  octobre  ou  fête  de  saint  Remy  i'-;; 
le  mouton  ainsi  tondu  s'appelait  tozê  :  agneau,  jeune  brebis 
de  l'année  (3).  Je  signale,  à  ce  propos,  Y  article  soiirtonture 
de  Godefroy,  dont  la  définition  :  «  les  extrémités  les  moins 
fines  des  toisons  »  paraît  suspecte.  Godefroy  cite  notam- 
ment un  texte  de  1377  où  l'on  parle  de  «  seiirtoiitiire 
d'aig-nelins  et  autres  mauvaises  matières  [à  faire  draps]  ». 
Logiquement,  surtontiire  doit  désigner  le  produit  de  la 
<(  surtonte  »  ou  tonte  supplémentaire  de  l'année.  Ce  serait, 
dès  lors,  l'équivalent  de  notre  «  laine  de  deux  forces  ». 

2.  Les  mots  de  Retondeur,  de  ivanealx  doivent  se  lire, 
en  supprimant  la  virgule  :  de  retondeiircs  de  amvenLx.  Ce 
dernier  est  une  variante  de  walhewea.1  (1437  :  BSW.,  6, 
II,  p.  113),  waiilweal  (J.  de  Stavelot,  p.  49o),  veleweal 
(J.  dOutrem.,  IV,  o2)  et  autres  formes  wallonnes  de  l'anc. 
fr.  veliiel  {\ixt.  *villutellum  «velours»),  qu'on  trouvera 
dans  Godefroy,  v°  velvel.  Bormans  ('')  a  cru  que  retondeur 
désigne  iei  «  l'ouvrier  qui  retond  ».  En  réalité,  ce  mot  est 
du  féminin  pluriel  et  désigne  a  les  poils  que  l'on  (retond 
sur  le  drap  ».  Le  règlement  défend  de  faire  du  drap  «  de 
(re)tondures  de  velours  »  (^).  Notez  qu'ici,  comme  souvent 
en  wallon,  le  préfixe  re-  n'a  pas  de  valeur  sensible. 


('*)  Ceci  peut  expliquer  l'article  <le  Godefroy  :  «  touset,  sorte  d'étofle  (une 
liupplande  fouree  de  toiizez  :  1453,  Tournai)  ». 

(^)  La  même  défense  existait  ailleurs.  Du  Cange,  v°  tondeho,  cite  ce  texte 
d'Abheville  (omis  par  Godefroy)  :  «  (jne  nuls  ne  puist  dra|)per  de  graluse  ne 
de  pelicli  fait  depuis  Tondisons  jusqiics  a  le  S.  Remy  ». 

{^)  Bormans,  p.  :292,  v»  tositi;  voy.  aussi  agneVni,  p.  :210,  et  dans  Godefroy. 
Le  \v.  lozi'  (lat.  *tonselluni)  signifie  proprement  «  petit  [mouton]  tondu  ». 
Comparez  l'anc.  fr.  tonsel  «  jouvenceau  »,  touse  «  jeune  fille  ».  Meyer-Liibkc, 
n"  878."),  dit  que  l'on  ignore  la  raison  de  cet  emploi  de  timsus.  Le  \v.  tozv, 
dont  il  ne  fait  pas  mention,  ne  résout-il  pas  la  ditlieullé?  Touse  aurait  désigné 
d'abord  une  «  brebis  tondue  »,  puis,  comme  terme  d'amitié,  une  jeune  tille. 
Comp.  Meyer-Liibke,  n"  2256. 

(■*)  Suivi  par  Godefroy,  v»  retondeik. 

(^)  Coni(iarez,  dans  le  même  sens,  l'anc.  fr.  tondures  de  drap  (li>88),  dans 
Godefroy,  et,  pour  la  forme  liégeoise  :  djondeùre,  pondei'ire  «  jointure,  picp^ire  » 
(de  djonde,  ponde  -.  joindre,  poindre).  Notre  mot  se  retrouve  dans  la  charte 


662  J.   HAUST 

3.  Le  lecteur  aura  déjà  corrigé  de  lui-même  craitz  (^)  en 
traitz,  d'après  le  texte  de  1542,  qu'il  faut  ponctuer  ainsi  : 
(c  forches,  de  traits,  de...  w.  Il  va  de  soi  que  de  traitz  est 
indépendant  de  wavealx.  On  défend  de  faire  du  drap  de 
traits,  c'est-à-dire  «  de  bouts  tirés  ou  ploqués  ))  (cf.  Bor- 
mans,  p.  292).  Traits  est  synonyme  de  bouts,  queues  ou 
pennes  «  déchets  de  la  cluiine  ou  de  la  rame  »  {^)  ;  toutefois, 
on  le  rencontre  rarement  dans  ce  sens. 

Reste  l'expression  «  laines  deserables  »,  qui  n'a  pas 
encore  été  signalée.  G.,  II,  582,  explique  l'anc.  w.  «  playe 
deserauble  »  (^j  par  «desserrer».  On  pourrait  aussi,  à  la 
rigueur,  y  voir  un  dérivé  de  l'anc.  fr.  désirer  (déchirer)  ou 
encore  de  deseuvrer  (deaseyrer;  comp.  Bormans,  p.  255); 
mais  l'explication  de  G.  se  recommande  par  sa  simplicité. 
Il  s'agit  en  tout  cas  de  laines  qui  peuvent  se  relâcher  et  se 
rompre  trop  facilement. 

W.  warbo. 

G.,  II,  480,  a  l'article  suivant  : 

warbau  (mau,  gribouri  :  ver  d'où  vient  le  hanneton),  uam.  wa- 
ribau  (ver  bouvier).  Composé  de  war  —  ver  (comp.  warglèse  :  ver- 


des  Flockeniers  en  1639  :  «  tous  draps  de  laine,  où  y  auroit  chaînes  ou  filets 
d'esse,  des  poillages,  flockons  plocus,  des  noppes[,]  des  mains  [,]  des  reton- 
deios,  des  pillaines,  des  nokies,...  »  (Recueil  des  chartes  des  Métiers,  II,  321)  ; 
«  [défense  d']  emplir  coussins  d'ancienne  [corr.  aucunne]  sorte  [,]  de  poillages 
avec  77iais  [,]  de  Retondeurs  de  draps,  ou  noppes  ou  nockes,  pareillement  île 
toutes  telles  denrées,  comme  d'oreilliers,  tatelettes  [corr.  tikelettes?],  ou 
semblables...  »  {ihid.,  p.  324).  Lire  relondeures,  comme  soyeures  (p.  321)  : 
sciures.  Oua»t  à  mains,  mais,  ce  sont  des  grapiiies  défectueuses  pour  maltaing 
défaut,  tare,  vice,  licg.  mod.  mèliin  (voy.  God.,  v^  meshain;  Bormans,  in 
BSW,  9,  p.  272). 

(')  Scheler  (ap.  G.,  Il,  .^71,  n.)  voudrait  lire  dans  le  texte  de  1527  :  crais 
(=  graisse!)  au  lieu  de  craitz.  Godefroy,  qui  cite  ce  texte,  v«  uetondeuk, 
complique  l'altération  en  transcrivant  croitz. 

(2)  Voy.  Bormans,  p.  2i2,  279,  282;  et  Remeu,  Histoire  de  l' Industrie  drapière 
an  pays  de  IAe(/e,  p.  217.  Ce  dernier  ouvrage,  estimable  à  certains  points  de 
vue,  ne  nous  a  été  d'aucune  utilité  dans  notre  examen  criticpie.  L'auteur  se 
fait  réclio  des  explications  fantaisistes  de  Bormans,  notanunent  p.  230  et  242. 

C^)  Dans  le  Hèglemcnl  de  1424  ;  «  iiuicontiues...  quasserat  gens  à  playe 
ovierle  [ou]  descrauble;  lat.  :  laedet  vulnere  aperto  seu  aperibili  »  (Louvrex, 
I,  35).  Godefroy,  \°  deserable,  ne  cite  que  ce  texte  de  J.  de  Slavelot,  p.  550  ; 
«  et  ly  fiseiit  une  plaie  deserable  en  la  tiesle  ».  Voyez  aussi  G.,  II,  580, 
déférables  (lire  ;  deserables). 


i 


ETYMOLOGIES  663 

glas)  et  de  bau  ^  bœuf?  Ou  modification  de  vennaii.  (jui  en  rouclii 
■et  en  picard  signifie  la  même  chose?  [Note  de  Scheler  :  «  Le 
thème  warb-  ne  serait-il  pas  =  hiirb  =  acurb  (comp.  escarbot)  «  i] 

D'après  la  Ftiiuic  wallonne  de  J.  Defrecheux,  warbô 
•désigne  la  larve  de  différents  insectes  et  surtout  celle  du 
hanneton.  En  général,  cependant,  les  campagnes  des  pro- 
vinces de  Brabant,  de  Namur  et  de  Luxembourg  réservent 
•ce  nom  au  ver  bouvier  ou  larve  de  l'œstre  des  bovidés. 

Les  formes  dialectales  que  nous  avons  recueillies  sont 
assez  nombreuses  :  wèrbë  Faymonville;  -â  Érezée;  warbê 
Malmedj'^  (Scius);  -ê  Awenne;  -ô  Malmedy  (Villers),  Liège, 
Verviers,  Heure-en-Famenne;  wârbô  Namur  (Pirsoul), 
Jodoigne,  Marilles,  Noduwez  ;  waribô  Namur  (G);  wèrabô 
Bovigny  ;  warobia  Vonéclie  ;  waraba  Lutrebois;-ë  Oisj^ 
Gros-Fays,  Chairière,  Alle-sur-Semois;  -o  Neufcliâteau, 
Léglise,  Bertrix,  Sainte-Marie-sur-Semois.  Dorinne;  nuya- 
rabù  Etalle  :  influence  de  noir  ou  prosthèse  de  (u)n? 

La  charpente  du  mot  est  d'une  constance  remarquable; 
les  variations  vocaliques  de  l'initiale  n'ont  guère  d'impor- 
tance; celles  de  la  tonique  peuvent  s'expliquer  en  général 
par  l'influence  de  suffixes  bien  connus  :  -elhim  {-è,  -ë,  -/a), 
-ald  (-o),  -ard  (-â),  -aclum  (-a). 

Les  conjectures  étymologiques  de  G.  et  de  Scheler  ne 
supportent  pas  la  discussion.  Notre  mot  est  d'origine  ger- 
manique; on  doit  en  effet  s'adresser  !«  à  l'anglais  warblc 
(ver  bouvieri,  qui  a  de  multiples  formes  :  wavblet,  warback, 
warbie,  wavbeetle,  warniul,  etc.;  'i" îi  l'ail,  iverbel,  (acker)- 
werbel  (taupe-grillon,  courtilière). 

Au  surplus,  le  \v.  warbô  a  des  affinités  indéniables  avec 
l'italien  du  Nord  barbel  (charançon)  et  avec  le  fr.  dialectal 
guéribé,  garibet,   (h)urebe(\    hubert,    heurebeiif,    etc.   (^), 


(')  Voyez  Ant.  Thomas,  Mt'laufjes,  p.  9:2;  Godefuoy  :  lieureheuf  (herboz, 
€u  1400,  .i  Fribourg,  =«  ver  bouvier»);  Littrk  :  hubert,  hnreliec,  urehei . 
Coiiifjare/,  de  plus  ;  garbou  (Roi.i.vno,  Faune  pop.,  XIII,  p.  179),  qui  désigne 
en  Bigorre  une  larve  qu'on  trouve  sur  ou  sous  la  peau  des  moutons  ;  barbnu 
{ib.,  p.  113),  courtilière,  dép.  de  l'Allier;  varanbon  {ib.,  p.  179),  ver  bouvier, 
env.  d'Annecy;  véranbi  (ib.),  id.,  env.  de  Belfort  ;  verblé  {ib.,  p.  180),  id.,  à 
Boulogne-sur-Mer  et  à  Saint-Pol.  Littré,  Suppl.,  donne  le  norm.  verbleil 
(larve  du  hanneton),  qu'il  explique  par  uer  et />/<■'(!),  alors  que  c'est  visible- 
ment l'angl.  warblet  (ver  bouvier).  Ajoutez  le  vosgien  bvncbù  (ver  bouvier  : 
lliMJHK,  Vov.  de  la  Bresse). 


664 


J.    HAUST 


désignant  un  insecte  qui  ronge  la  vigne,  le  peuplier,  le  bou- 
leau, etc.  Pour  expliquer  ces  différents  termes,  M.  Schu- 
chardt  (*)  suppose  un  type  germanique  *werribel  (=  ail. 
werbel),  qui  serait  formé  par  croisement  de  l'ail,  werre^ 
grillon,  et  wiehel,  charançon.  M.  Scliuchardt  ne  parle  pa& 
du  groupe  wallon  dont  nous  nous  occupons;  cependant  le 
type  primitif  s'y  montre  plus  clairement  que  dans  les 
autres  dialectes  français,  où  les  altérations  sont  innom- 
brables (2).  Jean  Haust. 


TABLE 


1.  *GABA  et  ses  dérivés  wallons  djève,  gawe,  badjawe.     .  445 

2.  chestrolais  anêoè,  dus nêuè;  gaumais  anâvèy,  dènâoèy  .  447 

3.  liég.  bak'neiire,  fr.  teehn.  bacnure 448 

4.  liég.  canabûse 449 

5 .  w.  cakèdo  et  heûpon  «  gratte-cul  » 449 

6.  malm.  dêve,  dëoe 450' 

7.  fr.  s'ébrouer,  anc.  fr.  esprohev,  liég.  sprognî     ....  451 

8.  anc.  fr.  gistel;  w.  custèl,  cristal;  rouchi  aguistiller    .     .  454 

9.  w.  gô,  gôti;  gaum.  djô,  djwôti;  fr.  mugot,  mijoter     .  456 

10.  liég.  gossê 461 

11.  gaum.  handë 649 

12.  w.  horon 649 

13     liég.  hoûr,  anc.  fr.  heulle 650 

14.  liég.  mayeté 651 

15.  hég.  prèliale 651 

16.  w.  sot-dwèrmant  «  loir  » 653 

17.  w.  totènaoeûte,  tanawète,  etc 654 

18.  liég.  wadje,  ivatche 657 

19.  anc.  fr.  wage,  waghe 658 

20.  w.  u;a/iè/e  (Verviers,  Malraedy) 659 

21.  anc.  w.  waneal{!),  crait{!),  etc 659 

22.  w.  warbô 662 


(1)  Zeilsckrift  f.  rom.  Phil.,  XXVI,  395;  Ulriï,  n»  2419. 

(2)  Je  signale  ici  le  w.  warhia  (Nainur  :  G.,  II,  480),  wèrina  (Huy)  «  lamprillon, 
petite  lamproie  »,  dont  j'ignore  l'origine.  Serait-ce  une  altération  de  *tv<rmia 
(*vermellum)? 


La  tombe  de  Tauler 


Les  documents  établissant  que  le  Frère  Joliannes  Tau- 
ler mourut  en  dehors  de  son  couvent  (^)  seront  peut-être 
récusés  par  quelques  esprits  sceptiques,  du  fait  qu'ils  sont 
de  beaucoup  postérieurs  à  cet  événement  (2).  Pourtant 
l'imagination  se  complaît  à  se  représenter  le  cortège 
funèbre  des  Pères  Dominicains,  drapés  dans  leurs  amples 
chapes  noires  qui  recouvrent  le  froc  de  bure  blanche,  con- 
duisant leur  frère  à  sa  dernière  demeure  à  travers  les  rues 
de  Strasbourg.  Des  bords  de  l'Inn  jusque  tout  près  de  la 
cathédrale,  dont  maître  Gerlach  (^)  construisait  alors  le 
troisième  étage  de  la  tour,  on  aime  à  se  figurer  une  foule 
disparate  se  pressant  sur  le  passage  des  restes  mortels  de 
cet  homme  au  verbe  étrange.  De  son  vivant,  d'aucuns 
avaient  ri  de  cet  «illuminé  »;  à  ceux-là  mêmes  il  avait 
inspiré  une  crainte  mystérieuse.  Les  autres,  ses  pénitents 
ou  simplement  des  amis  de  Dieu,  révéraient  en  lui  l'apôtre 
de  la  vie  intérieure  et  le  fils  privilégié  du  Très  Haut.  Tous 
s'accordaient  aujourd'hui  à  proclamer  que  ce  religieux 
était  mort  en  odeur  de  sainteté,  ciini  faina  saiictitatis. 

De  tout  cela  l'histoire  ne  nous  dit  rien  :  elle  nous  affirme 
bien  sobrement  que  Johannes  Tauler  fut  enterré  dans  ce 
couvent,  dont  il  avait  répandu  au  loin  la  renommée  par  sa 
prédication,  —  sans  s'en  douter  presque  — ,  et  dont  il  était 
la  plus  lumineuse  illustration,  —  bien  malgré  lui.  Déjà  un 


(*)  Dans  un  pavillon,  silué  au  Umd  dii  jardin  des  Dominicaines  do  Saiiit- 
Nicolas-aux-Ondes. 

(')  Sciin.TEu  (1H3:2-I70o),  Anmcrkungen  :n  Kiniigahofcn,  p.  Ili'.t.  —  Sk». 
MiEG,  CoUeclaneen  iiher  die  Strassburger  Kirchen  und  Klnster,  fol.  77''  (ce 
recueil  a  étf  détruit  par  l'incendie  du  :2i  aoftt  1870).  Voyez  Demfi.e,  Taiders 
Beke/irung,  p.  33. 

P)  Sou  nom  est  cité  en  1311  ;  la  iilatofonnc;  fut  achevée  en  13(m. 


066  A.  L.  coniN 

veut  délétère  de  mondanité  et  de  libertinage  soufflait  dans 
cette  maison  et  ils  étaient  bien  rares,  sans  doute,  ceux  qui 
eussent  pu  comi)rendreles  aspirations  et  le  langage  du  con- 
templatif et  plus  d'un  haussait  peut-être  les  épaules  à  ses 
paroles  divines.  Ils  comprirent  pourtant  qu'ils  devaient 
perpétuer  le  souvenir  de  celui  dont  la  vogue  temporaire 
n'avait  pas  manqué  d'être  profitable  au  couvent  tout  entier. 
Ou  bien  est-ce  à  sa  famille,  qui  vivait  dans  l'aisance,  à 
ses  pénitents,  parmi  lesquels  on  comptait  le  banquier 
R.  Merswin,  que  revient  l'iionneur  d'avoir  eu  la  pieuse  pen- 
sée de  recouvrir  d'une  pierre  tombale  la  fosse  de  l'humble 
fils  de  Dominique? 


En  tête  de  sou  étude  sur  Johannes  Tau  1er  de  Stras- 
bourg, Cari  Schmidt(i)  donna  le  pi-emier  une  reproduction, 
imparfaite  d'ailleurs,  de  cette  pierre  tombale.  C'est  une 
lithographie  d'E.  Simon  de  Strasbourg.  L'historien  y  joi- 
gnit une  description  sommaire  et  d'une  exactitude  peu 
rigoureuse  (-). 

Cette  dalle  funéraire  avait,  au  reste,  été  mentionnée 
longtemps  avant  lui.  La  chronique  strasbourgeoise  de 
Jacques  de  Kônigshoven,  éditée  par  Schilter  en  1698,  en 
l)arle  eu  détail  et  donne  une  interprétation  très  correcte 
de  l'épitaphe.  «  Johannes  Tavlerus,  y  lit-on,  est  enterré 
au  couvent  des  Dominicains  entre  la  première  classe  et 
l'ancien  Auditoire  près  de  la  porte  de  la  classe  opposée  à 
l'Auditoire,  sous  une  pierre (^)  » 

Ceux  qui  ont  renseigné  Quétif  et  Echard  C*),  quidam 
nostri  viri  (graves  Argentinae  anno  11 14  agentes,  en  con- 
naissaient l'existence  et  l'avaient  vue  (sic  me  monueruni 
EX  visu),  mais  combien  mal  ils  l'avaient  observée! 


(')  C.  Scii.Mim,  Joliunncs  Tavier  von  Strasshurg.  Hambiirg,  Perthes,  1841. 
La  lithoçrapliM'  csl  reprocluite  en  plus  foncé,  sans  indication  de  source,  dans 
l'édition  modernisée  des  Servums  de  Tau/cr  de  W.  Lkhmann.  lena,  1913. 

{■i)  L.c,  p.  63. 

(^)  Jacob  von  Kuyu.swnEy,  Strasslniif/er  C/ironirkc,  1698,  |).  1119.  -Johan- 
nes Tavlerus,  isl  hegraben  in  den»  Closler  zu  den  Predigeiu  |  zwiselien  der 
ersten  Classe  und  dcm  alten  Audilorio  an  der  Class-Thiir  gegen  dem  Audito- 
rio  ùber  |  untcr  eineni  Sleia  mit  diesem  Epilapbio  :  ...  » 

(*)  Scriptores  Ont.  Prnedicat.,  1719,  1,  p.  678. 


à 


TOMBE  DE  TAULER  667 

Edel  (^)  enfin  publia,  eu  1825,  une  monographie  sur 
l'ancienne  église  des  Dominicains,  où  il  parle  des  vicissi- 
tudes de  la  pierre  tombale;  il  en  indique  l'emplacement 
primitif  dans  le  dallage  du  cloître  à  peu  près  dans  les 
mêmes  termes  que  Konigshoveu  :  «  dans  le  cloître  du  cou- 
vent des  Dominicains  entre  l'ancienne  troisième  classe  du 
gymnase  ^)  (protestant)  «  et  le  petit  auditoire  »,  l'ancienne 
salle  du  chapitre.  Vers  l'an  1740,  elle  fut  incrustée  dans 
une  muraille  du  «  Grand  Auditoire  »,  bâti  en  1590  sur  l'em- 
placement de  l'ancienne  chapelle  Sainte-Elisabeth  au  nord 
du  chœur.  C'est  sans  doute  cette  salle  que  les  viri  graves 
de  Quétif  et  Echard  parent  du  titre  de  odeiim  templi  {^)  ». 

La  pierre  funéraire  fut  encore  déplacée  vers  la  fin  du 
xviii*^  siècle  :  elle  fut  alors  dressée  dans  le  temple  même  et 
encastrée  dans  la  paroi  d'un  des  bas-côtés;  à  l'époque 
d'Edel  elle  se  trouvait  tout  contre  le  monument  de  Blessig, 
pasteur  et  professeur  de  théologie  protestante  (1747-181G). 
M.  Fries  (3),  architecte  de  la  ville  de  Strasbourg,  l'a  vue, 
avant  l'incendie  de  la  nuit  du  24  août  1870,  «  à  l'extrémité 
ouest  de  la  petite  nef  du  sud,  à  fleur  du  mur  », 

Par  miracle,  elle  sortit  presque  indemne  de  ce  sinistre 
qui  détruisit  l'église  et  la  bibliothèque  ('')  :  d'une  large  bri- 
sure dans  le  bas  de  la  pierre,  que  montre  déjà  la  lithogra- 
phie de  Simon,  rayonnent  maintenant  trois  fêlures  nou- 
velles; de  plus  le  coin  supérieur  gauche  est  ébréché.  On  la 
déposa  dans  les  caves  du  gymnase  protestant  (l'ancien  cou- 
vent) jusqu'à  ce  que  la  construction  du  nouvel  édifice  fût 
achevée. 


Actuellement  elle  est  appuyée  contre  le  pan  occidental 
de  la  petite  nef  du  nord,  c'est-à-dire  à  gauche  de  la  porte 
d'entrée  principale,  dans  un  coin  assez  obscur,  en  retrait 
d'un  monument  en  marbre  blanc  à  la  mémoire  de  Reds- 


(')  Die  neue  Kirc/ie  in  Strasshurg ,  182.^,  p.  "20. 

(2)  Cf.  Du  Gange',  .f.  r.  odeum. 

(')  hyll.  de  la  Soc.  pour  la  conserr.  des  monuiu.  Iiisi .  de  l'Alsace,  II*  si'i'ie. 
g^-vol.,  I871-187.-),  p|).  1-28-133. 

(*)  Quant  à  l'ancicii  couveiil.  Ip  feu  lavait  ilrliuit  en  juin  I8t>0.  Voyez  Fries, 
/.  c,  p.  13-2. 


66s  A.   L.   CORIN 

lob  (1770-1834),  pasteur  et  j^rofesseur  de  théologie  protes- 
tante à  l'Université  de  Strasbourg. 

Il  a  fallu  l'art  consommé  d'un  photographe  expérimenté 
pour  réussir  le  cliché  que  nous  reproduisons  (*)  et  qui  pour 
la  première  fois  donne  une  image  fidèle  de  la  seule  relique 
matérielle  que  nous  ait  laissée  le  «  docteur  illuminé  ». 

C'est  un  bloc  de  grès  rose  {^),  épais  de  15  centimètres, 
haut  de  2  m.  03  et  large  de  95  centimètres.  Il  repose  contre 
le  mur  sur  un  socle  de  la  hauteur  de  la  plinthe,  soit  32  cen- 
timètres. Les  deux  rainures  d'encadrement,  profondes  de 
3.5  millimètres,  sont  distantes  l'une  de  l'autre  de  13  5  à 
14  centimètres  {^)  et  les  caractères  gothiques  de  I'épitaphe 
mesurent  de  8  à  10  centimètres  ;  ils  sont  taillés  à  anglets  de 
profondeur  variable  ;  ceux  d'en  haut  6  à  8  millimètres,  les 
autres  environ  3  millimètres.  Pour  l'historien,  cette 
inscription  est  sans  contredit  la  partie  la  plus  importante 
du  monument.  Elle  nous  fournit,  en  effet,  une  des  très 
rares  certitudes  de  la  biographie  de  Tauler  :  la  date  de  sa 
mort.  Et  on  s'étonne  qu'on  ait  si  longtemps  tâtonné  pour 
fixer  celle-ci,  alors  qu'on  possédait  cette  pièce  d'état-civil  l 
Les  déclarations  de  Quétif  et  Echard  sont  bien  de  nature  à 
nous  inspirer  une  salutaire  défiance  à  légard  des  auteurs 
anciens;  elles  méritent  d'être  épinglées  : 

«  Nobis  certain  est  Taulerum  ....  in  odeo  sepiiltiim  siib 
«  lapide  effi^ieni  ejiis  referente  ciii  insculpta  haec  etiam- 
((.  num  leg-enda  épigraphe  :  anno  1376  obiit  Frater  Johan- 
«  nés  Tauler  us...  » 


(1)  Je  le  dois  à  l'entremise  de  M.  Jules  Baltzer,  de  Strasbourg.  C'est  égale- 
ment de  lui  que  je  tiens  plus  d'un  renseignement  utile.  Aussi  j'aime  à  rendre 
hommage  à  son  obligeance  inlassable. 

(-)  Je  dois  ce  détail  et  les  renseignements  qui  vont  suivre  à  M.  J.  Gérock, 
de  Strasbourg,  et  je  liens  à  l'en  remercier. 

«  Ce  grès  rose  provient  probablement  de  la  carrière  de  la  Mossig,  aux  envi- 
«  rons  de  Wasselonne...  C'est  la  seule  pierre  employée  à  Strasbourg  comme 
«  pierre  de  taille  et  la  cathédrale  entre  autres  eu  est  entièrement  bâtie...  C'est 
«  un  grès  siliceux  à  pâte  fine  et  très  égaie,  lité  en  gros  bancs,  mais  sujet  à 
«  feuilleter...  Il  est  composé  de  grains  d'acide  silicique  (quartz)  cimenté  par 
«  une  proportion  assez  faible  d'une  argile  un  peu  micacée...  C'est  l'oxyde  de 
«  fer...  avec  des  proportions  plus  faibles  d'oxydes  de  manganèse,  qui  donne  à 
«  tous  ces  grès  leur  aspect  coloré  (blanc,  jaune,  rose,  rouge  vif,  gi'is,  violacé, 
«  brunâtre)... 

(3)  A  gauche,  1  i  cent.  ;  en  haut,  13.7  cent.  ;  à.droite,  13.5  cent. 


I 


TOMBE   DE  TAULER  669 

Pour  lire  comme  elles  l'ont  fait,  les  autorités  des  historio- 
graphes de  l'ordre  de  Saint-Dominique,  «  vlri  graves  », 
ont  dû  faire  abstraction  des  cinq  mots  qui  suivent  les 
chiffres  romains  et  lire  ceux-ci  en  bloc  en  omettant  le  I 
qui  sépare  les  deux  X  ! 

MCCC  LXXVI  pour 
MCCG  LXI    XVI 

Que  dit  donc  en  réalité  l'épitaphe? 

Elle  commence  dans  l'angle  supérieur  gauche  :  voici  ce 
qu'il  en  reste,  et  ce  qu'on  pourra  lire  sur  le  cliché  : 

o  ÂXO  o  DÔÏ   o  M  o  CCCo  (') 
en  haut,  dans  la  traverse  de  l'encadrement;  puis  dans  le 
montant  de  droite  : 

LXoIo  XV  =  lo  KL'  JVNII  CJRICI 
GT  =  JULIce  («) 

Une  première  fêlure,  qu'on  a  comblée  de  ciment,  a 
emporté  le  deuxième  jambage  de  l'U;  la  deuxième  fêlure 
plus  large  s'intercale  ici.  Dans  la  lithographie  de  Simon, 
qui  date  d'avant  l'incendie,  la  pierre  ne  semble  pas  enta- 
mée à  cet  endroit  et  ne  porte  pourtant  aucun  caractère. 
L'espace  libre  est  juste  suffisant  pour  une  lettre,  semble- 
t-il.  Comme  on  attend  «  obiit  »,  il  faudra  conjecturer  le 
sigle  0.  C'est,  en  effet,  ce  qu'avait  lu  Kônigshoven;  chez 
lui  ce  signe  est  suivi  d'un  point,  comme  toutes  les  autres 
abréviations.  Une  gravure  (le  n°  5277)  du  musée  Rohan  de 
Strasbourg  (^),  fort  mal  réussie  d'ailleurs,  porte  :  O'  (cp. 
KL'  =  kalendis). 

La  ligne  s'achève  par  les  lettres  FR. 


(*)  Chez  SciiMiDT,  la  barre  de  TA  manque. 

i-)  ScHMiDT  a  un  0  dans  le  y  de  XVI;  il  omet  la  barre  de  l'€  do  €T;  dans 
Julite  il  écrit  un  0  à  la  place  du  T,  qui  est  composé  de  deux  arcs  opposés  sur 
montésd'un  sejïinent  plus  jR-lit  ;  comme  précédemment,  il  écrit  C  au  lieu  de  6. 

(•')  M"'«  S.  H.vcKE.NSCHMiDT,  dc  Strasbourp.  supi)ose  que  les  trois  gravures  con- 
servées en  ce  musée  ont  été  faites  daprés  le  même  dessin  original  qui  pourrait 
être  de  la  main  de  S.  Z.  Arhardt  (f  167i).  L'une  d'elles  sert  de  frontispice  au 
livre  :  Des  hocherleucliteten  Lehrers  Joliannis  Thauleri  Sc/iriflen.  Franc- 
fort 1692.  Une  deuxième  plus  petite  se  trouve  dans  un  ouvrage  intitulé  :  Die 
sonderhare  chedesse/i  weUhekaitnte  Historh'  iless  (heuren  uml  fioc/icrlt'ticltlt'teti 
Maïuies  Johnnnes  Taitleri.  Liuiebourg,  iCSU.  Je  suis  très  oblige  ;'i  >!">*  Uacken- 
schmidl  de  ces  renseignements. 


670  A.   L.   CORIN 

La  traverse  inférieure  nous  présente  les  lettres  à  l'en- 
vers :  c'est  qu'à  l'origine  la  pierre,  recouvrant  la  fosse, 
gisait  horizontalement. 

Cette  partie  de  dessous  est  fort  abîmée  et  quel  dommage, 
car  c'est  elle  qui  portait  le  nom  !  Or  ,que  trouvons-nous  sur 
la  partie  intacte?  Ceci  : 

lOh'  o  CA  (^),  puis  un  espace  qui  aurait  pu  porter  trois 
lettres  (VLE),  et  enfin  un  semblant  de  lettre  d'un  trait  plus 
grêle,  non  plus  taillée  à  anglet,  mais  gravée  à  fleur  de 
pierre,  ce  qui  suffit  pour  nous  la  faire  considérer  comme 
apocryphe.  Chez  Schmidt  le  vide  n'est  que  de  deux  lettres 
et  on  lit  distinctement  GR  (2)  pour  finir. 

Konigshoven  donne  pour  toute  la  partie  abîmée 
O  e  Fil  o  JOH  o  TAVLER 
et  la  gravure  du  musée  R-ohan  : 

O'  FR  lOH  o  CAVL 

Au  point  de  vue  épigraphique,  remarquez  les  deux 
espèces  de  T  :  le  T  en  tau  de  nos  caractères  d'imprimerie 
et  le  Z  rond  {^)  qui  a  donné  la  majuscule  courante  de  notre 
alphabet  écrit.  Ce  mélange  se  trouve  également  dans  des 
inscriptions  funéraires  du  xiii®  siècle  reproduites  dans  le 
deuxième  volume  du  Dictionnaire  d'épig-raphie  chrétienne 
de  Migne  (■*).  Ici,  comme  là,  on  a  employé  indifféremment 
U  et  V,  (.JULIT6  —  JVNII),  J  et  I  (&)  (CJRICI,  lOH, 
JULITe). 

Voici  finalement  quelle  serait  la  teneur  de  l'épitaphe 
après  la  résolution  des  sigles  et  en  admettant  les  conjec- 
tures proposées  : 

AiVNO  BOMINI  MCCC  LXI  XVI  KAJ^ENDIS  JVNII 

CJRICI   ET  JULITE  [0^7/7']    FUATER   lOKANNES 

TA[VLE]R  (?)  ou  TA[VLER]. 


(*)  Schmidt  représente  le  T  par  Ô,  un  0  sunnonlé  d'un  Irait;  il  omet  encore 
la  barre  transversale  de  l'A,  qui  n'est,  il  est  vrai,  qu'ébauchée. 

(*)  Cette  fois  !'€  a,  chez  Schmidt,  les  apparences  d'un  0  barré  :  0. 

(3)  Schmidt  le  représente  tantôt  par  0  tantôt  par  O. 

(*)  Paris,  1852,  pp.  1223  et  suiv. 

(^)  V  et  U,  I  et  J  sont  déjà  mêlés  dans  plusieurs  inscriptions  du  recueil  de 
Kraus,  11,  184, 1.  28,  29,  123,  17ri. 


Strasbourg. 


PIERRE   TOMBALE    DE   J.   TAULER  O.   Pr. 


TOMBE  DE  TAULER  671 

En  traduction  fran<;aise  : 

«  L'an  de  grâce  1801 .  le  iii  juin,  (jour  de)  Cyr  et  Juliette, 
«  mourut  le  Frère  Jean  Tauler.  (*)  » 

La  fête  du  petit  martyr  et  de  sa  mère  se  célèbre,  en  effet, 
le  10  juin,  et,  quant  à  l'emploi  abusif  de  calendae  pour  (lies 
KoNiGsuovEN  (*  (SciiiLTER)  rcnvovait  déjà  au  glos.saire 
latin  de  du  Fresne.  Du  ('ange,  III,  963,  note  :  Kalenda, 
pro  qnovis  die. 

Pour  compléter  cet  acte  de  décès  «  lapidaire  »,  n'hésitez 
pas  à  y  joindre  les  mots  qui  se  trouvent  en  haut  sous  les 
premières  lettres  de  l'épitaphe,  à  savoir  :  =IoN  et  les  deux 
noms  de  N  -S.  inscrits  l'un  et  l'autre  dans  un  cercle  en 
traits  corrompus  qui  est  sans  doute  l'ébauche  d'un 
nimbe  : 


n  ...Obiit  Fr.  Johannes  Tauler  in  Christo  Jesii  »,  locu- 
tion consacrée  que  notre  langue  connaît  aussi  sous  cette 
forme  un  pen  différente  : 

«  Le  16  juin  1361  le  Fr  J.  Tauler  s'est  endormi  dans  le 
Seigneur.  » 

Le  Klant  (')  a  relevé  l'expression  obiit  in  xpo  sur  une 
épitaphe  de  l'an  TJST.  On  peut  en  rapprocher  le  verset  13  du 
chap.  XIV  de  V Apocalypse  déclarant  bienheureux 

qui  in  Domino  nioriunlur. 


(')  Formule  usuelle  :  voyez  Krvis,  M,  51. 

(-')  L.c,  p.  mit. 

(3)  Manuel  d'épigraphie  chn-'lieniir,  Paris,   1869.  p.  50.  Voyez  aussi  Krais. 

II,  318.  La  simple  formule  in  Deo,  itt  Chriato,  sans  plus,  apparaît  des  les  pre- 
miers temps-,  voyez  Bes.mer,  Catncomhe.t  rinniihics,  iOOi),  p.  175. 

(*)  Plusieurs  exemples  de  muno^cr munes  du  Ciu'ist  (  ^'- )  act-ompa^ines  par- 
fois dt'  TA  et  Q,  daus  Khals,  i,  i'il,  â(J-2,  ^88:  Ii8,  lîlO,  303  ;  II,  4.  Voyez  aussi 
Le  Blast,  l.  r.,  p.  83.  Le  moncgrauune  est  parfois  inscrit  dans  un  ou  deux 
eerdes  ou  dans  une  couronne  :  l,  Ki,  il,  59,  88.  101,  105,  IH>.  87.  I4h,  15-2. 
190,  212,  287,  etc.  Ce  n'e.st  jamais  le  cas  pour  lllN  :  Vt.ycz  encore  Cabhoi  ^ 

III.  2170. 

42* 


672  A.    L.    CORIN 

Le  montant  de  gauche  est  ])resque  entièrement  occupé 
par  une  colonne  reposant  sur  une  base  composée  d'un 
mince  tore  et  d'un  listel,  et  couronnée  d'un  chapiteau 
réduit  à  une  simple  échine,  pendant  exact  de  la  base.  Sa 
hauteur  totale  est  de  1  m.  62.  On  pourrait  croire  que  le 
tailleur  ait  exécuté  son  inscription  sans  prendre  ses 
mesures  et  que  n'ayant  plus  rien  à  mettre  il  ait  voulu  atté- 
nuer l'impression  de  vide,  d'incomplet  que  laissait  le  blanc 
de  ce  montant,  en  y  traçant  quelques  lignes  ornementales. 
Ce  n'est  pas  mon  opinion  :  il  me  parait  bien  plutôt  qu'il 
faille  attribuer  à  cette  colonne  la  signification  symbolique 
qu'elle  a  eue  dès  les  premiers  âges  chiétiens  et  dont  l'em- 
ploi métaphorique  est  encore  courant  aujourd'hui.  Il  s'ap- 
puie sui-  un  verset  de  VApocaIyf}se  (ehap.  III,  v.  12). 

Qui  vicerit,  faciam  illiim  columnam  in  iemplo  Dei  mei... 

«  Celui  qui  vaincra,  j'en  ferai  une  colonne  dans  le  temple 
de  mon  Dieu.  » 

Tauler  s'en  est  souvenu,  sans  doute,  quand  il  termine 
par  ces  paroles  un  de  ses  sermons  pour  l'Ascension,  dont 
je  souligne  en  passant  la  signification  pour  l'étude  de  sa 
propre  vie  intérieure  : 

L'homme  qui  parvient  à  opérer  le  retour  de  sa  syndérèse 
vers  son  origine  divine,  celui  là  «  devient  véritablement 
un  homme  divin,  et  ces  hommes-là  sont  les  piliers  du 
monde  et  de  la  Sainte  Eglise  »,  «  die  sûlen  der  welte  und 
der  heiligen  kirchen  »  (*) 

N'avait-il  pas  lui-même,  mieux  que  tout  autre,  suivi  la 
voie  qu'il  traçait  alors  à  ses  auditeurs?  Lui,  le  moine,  dont 
dès  1336  le  Bienheureux  Venturini  espérait  qu'il  réi)an- 
drait  le  nom  du  Christ  en  Allemagne  (2);  lui,  le  contem- 
platif, l'homme  que  Dieu  aimait  le  mieux  sur  terre  (^),  en 


(>)  Vettkh,  p.  80,1.  t8-19.  Ms.  devienne,  2739,  fol.  103a  :«  edil  suie  der 
werildc  ». 

(2)  «  Undc  et  le  rogo  qiiod  duni  videbis  illuni  tmini  et  otiani  nicuin  dilec- 
tum  Joanneni  Taideriuni  me  apii<l  illum  excuses,  el  rngos  ut  niilii  seribat, 
quia  illum  suscepi  lecuui  iu  visceribus  cliarilalis,  sperans  per  illnm  et  per  te, 
et  per  alios  quorum  noniiua  sunl  in  libro  vitae,  nomen  C/iristi  in  Tlieotoniae 
dilalari.  »  Lettre  au  Fr.  Eeenolf  d'Ehenbeim,  datée  de  Provence  le  jeudi, 
lendemain  du  jour  des  Cendres  de  l'an  1336,  citée  par  Quétif  et  Ecliard,  /.  c. 

(3)  ctesse  M.  DE  YiLi.ERMO.N»-    Un  groupc  mystique  allemand,  p.  i36. 


TOMBE  DE  TAULER  673 

qui  11  8e  complaisait  comme  en  un  doux  jeu  de  harpe  (*  et 
qu'il  comptait  parmi  ceux  ([ui  avaient  enflammé  la  terre 
par  leurs  paroles  de  feu  (-)  ! 

Ce  prédicateur,  qui  avait  si  bien  justifié  les  paroles  du 
Bienheureux  Venturiui,  pouvait,  à  juste  titre,  être  consi- 
déré par  ses  contemporains  comme  un  pilier  de  son  ordre 
et  de  l'É^'Use  toute  entière. 


L'effigik  en  pied  de  Tauler,  de  grandeur  naturelle, 
occupe  tout  le  panneau  central  :  elle  mesure  1  m.  073;  elle 
est  tracée  au  trait  (^)  et  à  fleur  de  pierre. 

bans  vouloir  prétendre  qu'elle  soit  un  portrait  d'une  res- 
semblance parfaite,  on  peut  admettre  pourtant  que  le  lapi- 
■cide  se  soit  évertué  à  reproduire  les  traits  les  plus  caracté- 
ristiques :  frère  du  couvent  ou  sculpteur  de  la  cathédrale, 
il  ne  pouvait  manquer  d'avoir  vu  souvent  le  célèbre  prédi- 
cateur. 

Celui-ci  nous  apparaît  de  taille  élevée,  émaciée,  bien 
qu'entre  sa  stature  totale  et  la  tête  règne  la  proportion 
classique.  Le  long  manteau  traînant  des  Dominicains  ne 
contribue  pas  peu  à  le  grandir.  Le  corps  est  représenté 
tourné  de  trois  quarts  vers  la  gauche.  L'ample  chape 
retroussée  sous  le  bras  droit  qu'elle  prend  comme  une 
écharpe  forme  godet  plus  bas  que  la  hanche,  étoffant  ainsi 
la  silhouette  trop  mince  ;  puis  elle  retombe  en  une  double 
draperie  d'assez  belle  allure  pour  s'évaser  autour  des  pieds. 
Du  côté  gauche  qui  s'efface  on  n'aperçoit  que  le  premier  de 
ces  plis  drapés. 

Sous  son  ampleur  le  manteau  découvre  le  scapulaire  plus 
court.  La  capuce  moule  des  épaules  étroites  et  tombantes 
et  semble  descendre  plus  bas  dans  le  dos,  tandis  que  le 
bord  de  son  capuchon  remonte  très  haut  dans  la  nuque. 
Par  contre  la  tunique  laisse  bien  à  découvert  la  gorge.  Sur 
la  poitrine,   immédiatement  sous  la  capuce,   très  courte, 


(!)  Eod.  /.,  p.  «8. 

(2)  Eod.  L,  p.  i37. 

(3)  Le  Irait  esl  profond  do .{  millimotros;iii  j,'i;iiiil  iii;i\imiiiu. 


4:-i 


674  A.   L.   COtllN 

à  la  place  du  fermail  de  la  chape,  une  couronue  à  trois 
fleurons,  entre  lesquels  sont  intercalées  deux  pointes  :  le 
fleuron  du  milieu  est  trilobé,  les  deux  extrêmes  sont  tracés 
en  profil. 

A  l'origine  symbole  du  martyre,  la  couronne  devint  plus 
tard  aussi  l'attribut  des  confesseurs,  des  élus  en  général  ; 
déjà  dans  la  Vision  de  Jean,  le  message  du  Seigneur  à 
l'église  de  Smyrne  contenait  ces  paroles,  Ap.,  II,  iO  : 

Esto  fidelis  iisque  ad  mortem,  et  dabo  tibi  coronam  vitae. 

«  Sois  fidèle  jusqu'à  la  mort  et  je  te  donnerai  la  cou- 
ronne de  vie.  » 

Elle  surmonte  ici  le  nom  de  Tauler;  car  c'est  à  tort,  je 
crois,  que  Schmidt  voit  dans  ces  trois  lettres  le  mono- 
gramme du  Christ  :  IHS.  Au  lieu  de  l'S  la  pierre 
porte  c(  (*);  on  ne  peut  contester  que  le  monogramme  de 
Jésus  s'écrivît  parfois  IHC;  mais  il  faudrait  expliquer  la 
répétition  du  même  nom  et  son  alliance  avec  le  T  qu'il 
surmonte.  J'incline  plutôt  à  voir  dans  le  dernier  caractère 
un  £  imparfait.  Mais,  que  ce  soit  un  S  ou  un  E,  l'interpré- 
tation correcte  du  sigle  ne  peut  être  que  ^ 

lOHANNES  (^); 

c'était  d'ailleurs  déjà  celle  de  Kônigshoven. 

Cela  étant  admis,  il  n'y  a  plus  d'hésitation  pour  le  T  eu 
forme  de  tau  gravé  sous  le  nom.  Un  interprète  ingénieux 
aurait  pu  sinon  y  voir  le  signe  de  la  croix  qui  avec  le  nom 
de  Jésus  formerait  la  marque  des  élus  dont  parle  V Apoca- 
lypse, le  sceau  de  Dieu  (^).  Mais  non;  ce  n'est  tout  bonne- 
ment que  l'initiale  du  nom  de  famille  Tauler. 

De  la  main  droite,  longue  et  effilée,  quatre  doigts  singu- 
lièrement inégaux  sont  visibles  :  trois  sont  plies  dans  la 
paume,  l'index  montre  l'Agneau  de  Dieu  nimbé  et  porte- 


(')  Les  caractères  sont  profonds  de  A  millimètres,  le  T,  de  5.5  millimètres. 

(2)  Kraus  note  les  abréviations  suivantes  pour  Johannes  :  lOHKS  :  II,  571  ; 
lOÏiS:  11,332;IHËS:  II,  311. 

(3)  Voyez,  entre  autres,  Apoc,  XIV,  1  :  «  habentes  nomen  ejus  et  nomeii 
Patris  eius  scripUim  in  fronlibus  suis.,.  »;  cf.  Besmer,  p.  205  :  «  le  tau  T  qvf 
rappelle  la  croix  ». 


TOMBE  DE  TAULER  675 

étendard  (*).  La  patte  droite  antérieure  levée.  Il  est  debout 
sur  un  livre  (les  Saints  Evangiles?)  que  tient  la  main 
gauche. 

La  lithographie  de  Simon  figure  cinq  doigts  dont  les  der- 
nières phalanges  se  recourbent  pour  saisir  la  Bible.  Cette 
faute  de  dessin  est  parfaitement  admissible;  pourtant  je 
crois  distinguer  de  gauche  à  droite  d'abord  un  fermoir, 
puis  quatre  doigts,  dont  le  dernier  pourrait  bien  n'être  pas 
replié  comme  les  autres  et  se  trouver  sous  le  second  fer- 
moir, peu  distinct. 

Ces  emblèmes,  les  Livres  Saints  et  l'Agneau  de  Dieu, 
conviennent  bien  à  l'interprète  illuminé  du  Verbe  Divin 
et  au  zélé  prédicateur  du  Saint  Sacrement  ;  peut-être 
suffit-il  d'ailleurs  de  rappeler  que  dès  les  premiers  temps 
chrétiens,  saint  Jean,  dont  Tauler  porte  le  nom  (2),  était 
représenté  avec  l'un  au  moins  de  ces  attributs  :  Johannes 
agnifeviis. 

La  figure,  vers  laquelle  l'Agneau  divin  semble  élever 
ses  regards  avec  complaisance,  répond  bien  à  l'image  que 
nous  aurions  pu  nous  faire  des  traits  du  mystique  :  malgré 
les  gaucheries  du  dessin,  elle  est  expressive.  Contraire- 
ment au  corps,  la  tête  est  tournée  de  trois  quarts  vers  la 
droite;  la  couronne  des  fils  de  saint  Dominique  ceint  un 
crâne  large.  Les  yeux,  dont  les  amandes  sont  soulignées 
d'un  trait  prononcé,  ont  un  regard  doux,  un  peu  mélanco- 
lique; le  nez  presque  droit  est  formé  de  deux  lignes  paral- 
lèles qui  se  continuent  dans  les  arcades  sourcilières .  la 
bouche  est  petite  à  l'excès  ;  les  pommettes  saillantes 
donnent  à  la  face  une  apparence  émaciée,  renforcée  par  le 
puissant  menton  carré,  signe  d'une  grande  volonté. 

Dualité  d'expression  remarquable  que  cette  énergie 
alliée  à  une  douceur  un  peu  triste;  elle  n'est  pas  pour 
déplaire  chez  ce  mystique  qui  insiste  tant  sur  les  vertus 
d'humilité,  de  patience,  de  bonté  et  qui  par  son  vouloir 
persévérant  est  parvenu  aux  plus  hauts  so.mmets  de  la  vie 
spirituelle  que  l'âme  puisse  atteindre  ici -bas. 


(*)  Cf.  Reisens,  Archc'ol.  rlm-t..  p.  fll,  aj,Mieaii  =  N.  S.  J.  C. 

(2|  Mais  c'est  saint  Joaii-IJa|»tiste  (|u'oii  appelle  agnifenis  el  c'est  sans  doute 
de  rKvangcliste  que  Tauler  tient  son  nom  ;  car  dès  les  premiers  temps,  celui-ci 
était  fort  en  bouneur  chez  les  Dominicains. 


676  A.    L.    COHIN 

Mais  alors,  c'est  qu'en  dépit  de  sa  technique  rudimen- 
taire,  l'artiste,  pour  maladroit  qu'il  fût,  aurait  attrapé  la 
ressemblance  réelle  du  pieux  moine!  On  se  prend  à  croire 
à  ce  miracle  :  on  voit  revivre  Tauler  dans  cette  image 
fruste,  qu'un  autre  miracle  a  sauvée  de  la  démolition  et  de 
l'incendie. 

Achevé  le  jour  de  saint  Cyr  et  de  sainte  Juliette, 
le  lidO'  îuinivcisaiie  de  la  mort  de  Johannes  Tauler. 

Liège.  s  A.  L.  Couin. 


1 


Le  style  des  paysages  dans  Faust 


Le  i)aysage  dans  l'œuvre  gœthéenne  est  lyrique,  il  tra- 
duit l'état  intérieur  du  poète.  Il  fait  revivre  les  élans  de 
sa  jeunesse  forte  et  tumultueuse  dans  les  joies  sauvages  de 
la  tempête  ('),  la  mélancolique  douceur  d'une  amitié  amou- 
reuse dans  les  brumes  lunaires  des  nuits  de  j^rintemps  (2); 
la  haute  sérénité  de  son  cœur  dévoué  à  la  contemplation 
spinosienne  et  à  l'amour  de  l'humanité  se  peint  dans  les 
vastes  horizons  et  les  neiges  pures,  qui  enveloppent  de 
limi)idité  les  cimes  du  Ilarz  (^).  Mais  le  mot  lyrisme  ne 
sani-ait  définir  le  style  de  ces  paysages,  qui  sont  l'œuvre 
d'un  observateur  attentif  de  la  réalité.  L'antithèse  des 
paysages  symboliques  et  descriptifs  n'existe  pas  pour 
Gœtlie  qui  doit  autant  à  l'analj^se  qu'à  la  synthèse.  Son 
œuvre  est  un  effort  ingénu  vers  l'expression.  On  a  beau 
classifier  les  éléments  de  son  style,  jamais  on  n'établira  la 
prédominance  du  sentiment  ou  de  l'observation,  qui  se 
sont  fondus  en  une  vision  embrassant  l'ensemble  de  l'im- 
})ression  poétique. 

Mais  si  l'examen  esthétique  établit  l'union  indissoluble 
de  l'émotion  et  du  paysage,  l'étude  de  la  genèse  établira 
peut-être  une  chronologie  des  éléments.  L'histoi'ien  du 
style  pourrait  bien  voir  le  problème  définitif  de  ses 
recherches  dans  ces  questions  :  le  poète  est-il  tourmenté 
par  un  sentiment,  une  idée  qui  choisit  parmi  les  formes  du 
monde  extérieur  sa  mati-rialisation,  son  organe  symbo- 
lique? Ou  ne  serait-ce  pas  plutôt  le  spectacle  de  la  nature 


(*)    iVdnrlerers  Shirnilied. 

('^)  An  den  Moml. 

(3)  Hdizreùe  i»t   tt'inli'r. 


678  C.    BECKENHAUPT 

qui  réveille  en  lui  les  joies  et  les  tristesses  qu'il  a  ressen- 
ties dans  sa  vie  passionnelle  et  émotive?  Une  personnalité 
ingénue  comme  celle  de  Goethe  —  cela  est  évident  par 
intuition  —  est  incapable  de  se  perdre  dans  les  ternes 
reclierclies  d'un  style  illustratif.  Charmée  par  la  couleur, 
la  suavité,  la  vie  des  choses,  hantée  par  la  sonorité  du 
monde,  elle  retrouve  son  moi  dans  toute  la  création  : 
Gœthe  se  sent  relié  de  toutes  parts  au  grand  Tout  dont  il 
n'est  lui-même  qu'une  très  humble  i)artie.  Il  n'a  que  rare- 
ment l'orgueil  autoritaire  de  l'artiste  ingénieur,  qui  manie 
habilement  les:pièces  de  son  assemblage  et  qui  choisit 
judicieusement  ses  effets.  Il  n'a  guère  la  possibilité  du 
choix.  La  nature  lui  parle,  il  n'a  qu'à  écouter.  Aucune 
intention  préconçue  n'est  en  lui,  il  n'est  ni  symbolique,  ni 
descriptif.  Il  est  expressif,  lyrique,  créateur.  Il  resj^ecte  la 
vie,  il  dédaigne  les  cadavres  sublimes  des  formes  pures. 

Les  paysages  de  Faust  sont  issus  de  ce  style  essentielle- 
ment lyrique.  Ils  ne  sont  pas  un  local  que  le  poète  aménage 
pour  les  scènes  de  son  drame.  Il  y  a  encore  de  ces  artifices 
dans  Gôtz  von  Berlichingen  où  les  effets  crus  d'une  mise 
en  scène  illustrative  se  font  souvent  péniblement  remar- 
quer. Le  paysage  y  est  tendancieusement  pittoresque  et 
tout  au  plus  suggestif  :  les  nombreuses  auberges,  les 
repaires  de  bohémiens  et  autres  lieux  communs  se  classent 
facilement  dans  le  vaste  «  Raritâtenkasten»,  qui  est  l'idéal 
scénique  du  jeune  Gœthe.  Mais  dès  les  premières  scènes 
du  Faust  cela  change  :  le  poète  ne  se  contente  plus  d'être 
pittoresque,  il  n'abandonne  plus  l'ambiance  locale  de  ses 
scènes  à  l'ingéniosité  du  peintre  et  du  régisseur;  il  con- 
struit lui-même  autour  de  ses  personnages  un  ^espace 
coloré  et  expressif,  qui  contribue  essentiellement  àlUnten- 
sité  de  la  scène.  Les  décors  deviennent  superflus  :  \%  poète 
évoque  la  vision  de  l'entourage  par  la  force  de  son  style. 
La  sonorité  intime  de  la  scène,  où  Faust  et  Margarethe, 
Mephistopheles  et  Frau  Marthe  se  font  des  confidences  en 
tournant  autour  des  platebandes  et  en  cueillant  des  mar- 
guerites, tient  essentiellement  au  paysage  intérieur  que 
Gœthe  fait  surgir  ;  petit  jardin  bourgeois,  enfermé  dans 
des  murs,  qui  de  tous  côtés  obligent  l'homme  à  revenir  sur 
ses  pas,  le  rejettent  sur  son   moi  et  ses  préoccupations 


PAYSAGES    DANS    FAUST  679 

intimes.  Kt  ce  jardin  est  noyé  dans  les  lueurs  difluses  du 
crépuscule  :  c'est  l'heure  où  l'âme  a  besoin  de  s'épancher  : 
la  tendresse  de  Marguerite  comme  son  ironique  pendant, 
hi  sentimentalité  blette  de  Frau  Marthe,  sortent  des 
nuances  chaudes  et  étouffées  du  soir  et  des  vieux  murs  qui 
enferment  les  hommes  dans  leur  paisible  et  rigide  inti- 
mité. 

11  y  à  même  parmi  les  scènes  primitives  du  Faust  une 
vision  qui  dénote  une  tendance  à  faire  prévaloir  la  disso- 
lution lyrique  vis  à  vis  de  la  tension  dramatique.  Cette 
scène,  où  Faust  et  Mephistopheles  sur  leurs  chevaux  noirs 
sont  emportés  à  travers  la  nuit  comme  un  orage,  est  nulle 
au  sens  dramatique  :  l'élément  de  l'action,  la  personnalité 
des  cavaliers,  est  absorbée,  effacée  par  l'unité  expressive 
du  paysage.  Ils  deviennent  des  facteurs  de  «  Stimmung  », 
un  nuage  expressif,  un  tourbillon  lyrique.  Ils  expriment 
riiorreur  du  lieu  maudit,  évoquent  la  danse  macabre  des 
sorcières  autour  de  la  pierre  où  les  corbeaux  viennent  se 
gorger  de  la  chair  des  suppliciés.  On  peut  évidemment 
ratta(Orer  cette  scène  au  style  pittoresque  de  certaines 
situations  dans  Gôtz  von  Berlichingen  (au  tribunal  secret, 
par  exemple)  :  mais  ce  rapprochement  nous  fera  recon- 
naître*4ue  s'il  y  a  continuité  pittoresque  dans  l'horreur,  il 
n'y  a  plus  aucun  rapport  entre  cette  scène  et  celles  qui 
pourraient  lui  ressembler  dès  qu'on  observe  sa  significa- 
tion poétique,  sa  valeur  styliste.  Car  la  Sainte-Vehme 
reste  solidement  ancrée  dans  l'évolution  dramatique,  elle 
■est  mèiÀe  un  point  culminant,  une  des  sanctions  tragiques 
de  l'œl^vre;  la  vision  du  Faust,  par  contre,  n'a  aucune 
valeur  Itogi que  dans  l'évolution,  elle  interrompt  la  cohé- 
rence d*amatiquo  par  un  flux  d'horreurs  exi)ressives.  On 
ne  peutl"  définir  son  style  qu'en  empruntant  à  la  musique 
un  terme  idoine  :  cette  scène  est  symphonique.  Elle  élargit 
le  style  dramatique  en  lui  donnant  une  profondeur  atmo- 
sphérique, cosmique,  démoniaque. 

Les  scènes  précédentes,  quoiqu'elles  dénotent  assez  sou- 
vent des  intentions  poétiques  étrangères  au  théâtre,  main- 
tiennent en  somme  le  caractère  essentiel  de  l'art  drama- 
tique. Il  y  a  certainement  dans  l'Urfaust  des  impressions 
imagées  qui  vivent  d'une   vie  absolue   et    qui  défient  le 


680  C.    BECKENHAUPT 

régisseur  de  rehausser  leur  sonorité  visuelle  par  la  mise 
en  scène  et  ses  illusions.  Mais  cette  puissance  imaginative 
est  bien  dramatique  parce  que  la  parole  humaine  suffit  à 
tout  et  évoque  à  côté  des  effets  purement  intérieurs  toute 
la  plénitude  de  l'ambiance  et  la  participation  de  l'entou- 
rage muet;  l'action  découle  dans  l'espace  tout  aussi  bien 
que  dans  le  temps  :  on  ne  saurait  reprocher  à  l'auteur  dra- 
matique de  nous  faire  sentir  la  répercussion  des  événe- 
ments dans  l'ordre  cosmique.  Il  se  contente  en  effet  de 
faire  surgir  en  nous  une  impression  d'espace  toute  scé- 
nique,  absolument  subordonnée  aux  intentions  drama- 
tiques, coordonnée  aux  buts  émotifs  de  la  situation  inté- 
rieure et  nuancée  de  son  sentiment  particulier.  Je  rap- 
pelle cette  chambre  gothique,  qui  s'édifie  autour  de  Faust 
à  mesure  qu'il  fait  surgir,  comme  autant  de  symboles  de 
son  accablement,  les  murs  cintrés,  les  vitraux  ternis,  les 
alambics,  les  piles  de  livres  vermoulus  et  maculés  de  pous- 
sière. Toute  l'intensité  des  impressions  visuelles  est  sou- 
mise à  l'art  dramatique;  elle  ne  fait  qu'organiser  dans  le 
temps  et  l'espace  les  événements  psychiques  qu'elle  a  pour 
mission  de  traduire.  Le  style  imagé  de  l'Urfaust  est  essen- 
tiellement dramatique  :  il  vise  à  la  représentation  inté- 
grale et  immédiate  de  la  vie,  qui  est  l'essence  même  du 
théâtre. 

Nous  rencontrons  parmi  les  parties  primitives  du  drame 
une  seule  scène  qui  s'éloigne  de  ce  style  :  l'apparition  fan- 
tomatique des  cavaliers  dans  la  nuit.  Peut-être  serait-on 
tenté  au  premier  coup  d'œil  de  retrouver  des  velléités 
semblables  dans  la  scène  «  Landstrasse  »  :  les  indications 
scéniques  très  développées  pour  une  apparition  si  fugi- 
tive (1)  et  je  ne  sais  quel  parallélisme  intérieur  avec  la 
situation  «  Nacht.  Offen  Feld  »  font  qu'on  se  sente  tenté 
d'établir  entre  les  deux  un  rapport  de  style.  Mais  les 
paroles  des  promeneurs  devant  le  crucifix  ne  peuvent 
qu'accentuer  le  caractère  ironique  de  Mephistopheles; 
elles  donnent  par  l'aveu  pudibond  d'un  fonds  de  sentimen- 
talité chrétienne  une  tournure  piquante  à  sa  philosophie 


(')  «  Ein  Kreuz  am  Weege,  redits  au)'  dem  Hugel  oiii  ailes  Schloss,  in  der 
Kerne  ein  Bauernbùttgcn  ». 


PAYSAGES   DANS   FAUST  HSl 

satanique.  Et  nous  n'avons  nullement  devant  nous  un 
thème  richement  orchestré  comme  dans  la  chevauchée 
nocturne,  qui  projette  dans  les  profondeurs  de  la  nuit  et 
du  monde  démoniaque  les  angoisses  du  héros. 

Mais  le  style  de  cette  vision  ne  nous  oblige  nullement  de 
voir  en  elle  la  première  manifestation  d'une  tendance  nou- 
velle de  l'œuvre  entière.  Son  caractère  est  justifié  par 
l'ambiance  démoniaque  du  Faust  et  ses  traditions  légen- 
daires :  elle  s'apparente  par  exemple  à  certaine  sorcellerie 
plus  truculente  dans  «  Auerbachs  Keller  »  et  sa  puissance 
Imaginative,  sou  prestige  mystérieux  est  plutôt,  semble- 
t-il,  l'effet  d'un  heureux  hasard  que  d'une  intention  artis- 
tique. Elle  apparaît  cependant  comme  la  première  réalisa- 
tion de  conceptions  poétiques  qui  prendront  plus  tard  une 
importance  extraordinaire.  Elle  ne  suppose  plus  un 
paysage  restreint,  délimitable  dans  la  réalité,  traduisible 
par  des  impressions  purement  visuelles  :  elle  est  essentiel- 
lement irréelle,  visionnaire,  elle  suggère  par  les  chevaux 
fantômes  l'immensité  de  l'espace  et  un  mouvement  infer- 
nal ;  elle  a  l'optique  intensifiée,  transparente  des  rêves, 
qui  élimine  si  nettement  tous  les  détails  pour  accentuer  la 
valeur  psychique  de  la  vision.  Elle  contient  à  l'état  virtuel 
la  tendance  de  substituer  au  lieu  unique,  stable,  scénique, 
une  suite  de  lieux,  une  transformation  insensible  et  pro- 
gressive du  paysage  par  le  mouvement  des  acteurs. 

Il  y  a  loin  évidemment  de  cette  apparition  nocturne  au 
glissement  continu  du  paysage  dans  la  Walpui'gisnacht. 
Malgré  toute  la  furie  du  galop,  le  mouvement  pivote  autour 
du  gibet  et  nous  donne  l'impression  d'un  tourbillon,  dont 
le  centre  reste  rivé  au  champ  macabre.  Un  dernier  élément 
de  concentration  scénique  subsiste  donc,  taudis  que  le 
sabbath  des  sorcières  se  déroule  dans  une  substitution 
ininterrompue  des  lieux.  Ce  paysage  fuit  dans  un  sens  de 
continuité  longitudinale  ou  i)lutôt  successive.  On  pouri-ait 
parler  de  oerspective  cinématographique,  si  ce  mot  ne  con- 
tenait je  ne  sais  quel  élément  irritant  de  réalisme  cru;  je 
me  permets  de  l'employer,  parce  qu'il  déploie  dans  le  sens 
optique  un  jeu  continu  de  lumières  et  d'ombres  et  que  la 
transparence,  le  mouvement  fluide  et  dématérialisé,  <iui 
sont  ses  éléments  esthétiques,  lui  donnent   un  aspect  dt' 


682  C.    BECKENHALPT 

vision  et  de  rêve.  Le  s>iie  de  la  Walpurgisuaclit  s'émancipe 
de  toute  localisation  dans  un  paj'^sage  stable;  il  n'est  plus 
scénique,  il  ne  se  réalise  que  dans  l'imagination,  qui  seule 
est  capable  de  livrer  la  suite  ininterrompue  de  ses  paysages 
visionnaires. 

Ijù.  chevauchée  de  l'Uifaust  n'indique  donc  pas  encore  le 
point  de  départ  du  style  nouveau,  du  paysage  intérieur, 
mouvant,  illimité;  mais  elle  nous  lait  comprendre  que  ce 
facteur  d'expression  ne  surgit  pas  subitement  dans  l'œuvre 
du  poète;  il  existait  en  lui  de  tout  temps  et  n'attendait  que 
son  heure  pour  prendre  dans  le  Faust  toute  sa  valeur. 


L'évolution  vers  ce  style  expressif,  souple,  sympho- 
nique,  qui  permet  à  l'entourage  de  changer  de  nuances  et 
de  lignes  selon  les  variations  du  sentiment  et  les  besoins 
poétiques,  ne  s'accomplit  que  lentement,  les  parties  du 
drame  qui  ont  été  écrites  entre  l'Urfaust  et  la  Walpurgis- 
nacht  sont  localisées  et  disposées  dans  l'espace  déterminé 
et  immuable  tout  comme  les  scènes  de  l'Urfaust.  11  n'y  a 
guère  dans  le  «  Fragment  »  de  1790  que  la  scène  «  Wald 
und  Hohle  »,  qui  constitue  son  ambiance  locale  par  un 
mouvement  imaginatif  et  un  glissement  continu  d'impres- 
sions visuelles.  Il  est  vrai  que  l'indication  scénique  semble 
indiquer  un  cadre  rigide;  mais  dans  cette  situation  essen- 
tiellement lyrique  il  est  évident  qu'au  tableau  scénique  se 
substitue  le  spectacle  intérieur  des  paysages  successifs. 
Nous  voyons  d'abord  la  nature  placide  :  des  buissons,  des 
étangs,  un  ciel  chaud  et  couvert,  qui  abritent  de  leur  clé- 
mence la  vie  multiple  des  créatures  humbles  et  craintives; 
puis  c'est  la  tempête  ravageant  les  bois,  la  chute  des  troncs 
géants,  qui  abattent  les  arbres  voisins  et  enfin  la  vaste 
intimité  des  rochers,  qui  s'élèvent  au-dessus  des  bosquets 
de  la  plaine  et  baignent  dans  la  paix  pure  de  la  lune.  Un 
régisseur  qui  essayerait  de  rendre  les  intentions  de  Gœthe 
par  des  effets  de  théâtre  détrairait  la  poésie  de  ce  paysage  : 
il  ne  s'agit  pas  de  trois  plans  ou  coulisses  superposées,  ni 
des  panneaux  d'un  triptyche,  mais  de  trois  phases  succes- 
sives d'expression  différente,  d'un  paysage-àme  évoluant 
dans  le  temps,  d'un  jeu  de  physionomie  paysagiste  inac- 


PAYSAGES    DANS    FAI  ST  683 

cessible  au  peintre.  Son  charme  est  tout  dans  son  glisse- 
ment aisé  qui  baigne  dans  le  temps,  c'est-à-dire  dans  l'élé- 
ment même  de  l'âme.  Ce  paysage  respire  :  les  étangs,  les 
airs,  les  buissons  vivent  du  rythme  doux  et  craintif  d'in- 
nombrables haleines  animales,  les  forts  poumons  des  bois 
râlent  et  les  rochers,  les  bosquets  exhalent  sous  la  lune 
un  soupir  de  langueur.  Nous  tenons  dans  ce  mouvement 
varié  et  expressif  l'essence  même  du  style  :  il  est  psy- 
chique. Cela  tient  à  l'émotion  lyrique  de  la  scène,  qui  n'est 
qu'une  fervente  prière  panthéiste.  Elle  reflète  les  senti- 
ments très  intenses  et  très  personnels  du  poète,  lors- 
qu'en  1784  il  accomplit  pour  la  troisième  fois  le  pèlerinage 
du  Harz  qui,  cette  fois  encore,  confirme  sa  valeur  initia- 
trice en  lui  révélant  les  mystères  panthéistes  de  la  nature. 
L'essai  minéralogique  «  Der  Granit  «  du  18  janvier  1784, 
tout  vibrant  d'émotion  religieuse  devant  les  forces  créa- 
trices de  la  nature,  se  range  immédiatement  à  côté  de  cette 
scène  du  Faust  et  affirme  sa  signification  très  personnelle. 

Nous  sommes  arrivés  ici  à  un  point  décisif  de  l'évo- 
lution. L'Urfaust,  essentiellement  dramatique,  tendait 
à  établir  une  situation  nette  et  unique,  un  conflit  tra- 
gique, qui  gravite  autour  de  Margarethe.  Car  ses  parties 
lyriques  (comme  le  monologue  initial,  le  dialogue  dans  le 
jardin  de  Frau  Marthe)  restaient  toutes  enchaînées  dans 
l'évolution  du  drame.  Mais  la  prière  de  Faust  dans  l'antre 
au  fond  des  bois  ne  contribue  pas  à  la  concentration  tra- 
gique, elle  ne  veut  pas  même,  comme  la  chevauchée  noc- 
turne, élargir  et  orchestrer  le  mouvement  intérieur  du 
drame.  Elle  est  un  élément  de  pur  lyrisme,  un  élément  de 
diffusion.  Elle  indique  dans  l'évolution  génétique  du 
poème  une  direction  nouvelle  :  elle  annonce  la  forte  accen- 
tuation de  la  tendance  du  Faust  à  recueillir  tous  les  élé- 
n)ents  qui,  en  traversant  la  vie  intérieure  de  Gti^the, 
prennent  poui-  lui  une  valeur  personnelle.  Le  Faust  devient 
à  i^artir  de  cette  scène  le  grand  poème  lyrique  (jui  a  ])0ur 
mission  de  traduire  l'âme  de  l'homme  riche  de  tous  ses 
mystères.  Il  s'émancipe  du  drame. 

La  vision  panthéiste  du  «  Fragment  »,  la  vie,  l'intensité, 
l'expression  toute  mystique  de  ce  spectacle  cosmique  ont 
donné  un  élan  nouveau  au  génie  :  il  lui  sera  impossible  de 


684  C.    BKCKKNHAl  PT 

retourner  vers  les  paysages  figés.  Le  mouvement  visuel  et 
symbolique  s'accentue  et  quand  en  1797  il  reprend  l'œuvre 
qui  sera  l'expression  intégrale  de  sa  volonté  poétique,  le 
monde  extérieur  sur  lequel  il  projettera  ses  scènes  ne  sera 
plus  1p  petit  monde  pittoresque  et  intime  qu'il  s'est  complu 
à  dépeindre  dans  les  premiers  jmysages  du  Faust.  Le 
«  Prolog  im  Himmel  »  nous  place  résolument  dans  l'im- 
mensité et  nous  voyons  s'accomplir  la  mar(;he  majestueuse 
du  soleil  à  travers  les  chœurs  des  globes  célestes.  Toute 
l'intensité  de  ce  style  se  dégageant  d'effets  purement 
visuels  pour  arriver  à  la  plénitude  de  la  vie,  se  révèle  dans 
le  mot  «  Donnergang  •>■>  qui  par  l'interversion  des  fonctions 
auditives  et  optiques  nous  ramène  aux  perceptions  élé- 
mentaires si  fortes,  si  drues,  que  nous  ne  nous  rendons 
pas  compte  par  où  elles  pénètrent  en  nous.  Le  poète  nous 
réduit  à  l'état  primitif  de  réceptivité  absolue  et  au  moyen 
d'organes  inconscients,  latents,  nous  buvons  la  vie  dans 
toute  son  ampleur  inexprimable. 

Ce  style  prendra  dans  la  deuxième  partie  du  Faust  une 
intensité  vertigineuse.  Le  poète,  libéré  de  toute  préoccu- 
pation étroitement  dramatique,  appartient  désormais  à 
l'immensité  des  spectacles  intérieurs.  Son  Faust  devient 
un  mythe  grandiose  ;  la  vie  du  jioète  s'amplifie  de  toute  la 
puissance  éternelle  du  monde  et  sa  volonté  créatrice  plane 
au-dessus  du  chaos,  auquel  d'un  mot  magique  et  impérieux 
il  communique  la  puissance  obscure,  véhémente,  insa- 
tiable de  la  vie.  Cette  vie  s'élance  d"un"jet  assourdissant, 
aveuglant,  en  torrents,  en  étincelles,  en  tonnerres,  en 
trombes,  en  fanfares,  en  un  mouvement  si  intense  que  le 
bruit  devient  silence  et  que  les  feux  solaires  nous  donnent 
rimx)ression  de  l'obscurité  absohie. 

Horchet,  liorcht  dem  Sturm  der  Horen  1 
Tonend  wird  fiir  Geisteroliren 
Schon  der  neue  Tag  geboren. 
Felsentore  kuarreiid  ras.selnd, 
Phobus  Riider  roUen  prasselnd, 
Welch  Getose  bringt  das  Licht! 
Es  drorametet,  es  posaunei. 
Auge  blinzt  und  Ohr  erstauiiet, 
Unerhortes  liort  sicli  nicht. 


PAYSAGES    DANS    FATST  685 

Sclilvipfet  zu  cl  en  Blumonkroiieii, 
Tiefer,  tiefer.  still  zu  wohneu, 
In  die  Felsen,  unters  Laub. 
Trifft  es  euch,  so  seid  ihr  taub. 

Mais  en  essayant  de  montrer  les  conséquences  de  c<' 
style  et  en  m'attaquant  audacieuseinent  à  ses  révélations 
les  plus  sublimes  j'ai  dépassé  le  i)oint  historique,  où 
m'avait  conduit  l'examen  de  son  évolution.  Revenons  donc 
au  théâtre  cosmique  du  ce  Prolog'  ini  Himmel  »  et  cherchons 
parmi  les  scènes  qui  lui  succèdent  dans  la  genèse  poétique 
celles  qui  confirment  les  nouvelles  concei)tions  La  Wal- 
purgisnaeht.  ébauchée  à  une  époque  très  rapprochée  de  ce 
prologue,  lui  est  en  même  temps  apparentée  par  sa  signifi- 
cation :  elle  est  dans  le  monde  satanique  la  conséquence 
immédiate  de  la  manifestaticm  des  puissances  divines  et 
créatrices  dans  le  royaume  des  cieux.  Et  comme  l'harmo- 
nie des  sphères  célestes  et  leur  rythme  éternel,  comme  le 
tourbillon  infini  des  tempêtes  sont  l'élément  expressif  qui 
donne  au  prologue  sa  vie  et  sa  sonorité,  ainsi  dans  le  Sab- 
bath  des  sorcières  la  suite  ininterrompue,  le  mouvement 
véhément  des  paysages  fait  que  l'ensemble  des  scènes 
allume  en  nous  des  visions  ardentes  et  s'illumine  des  fetix 
de  l'enfer. 

La  fuite  des  fragments  visuels  (^nlrainc  dans  son  allure 
démoniaque  des  paysages  flottant  dans  la  pénombre  diffuse 
d'une  nuit  de  printemps.  Elle  fait  surgir  tantôt  la  silhouette 
sombre  et  gigantesque  des  rochers,  scintille  d'autres  fois 
en  ruisseaux  innombrables  à  travers  de  i)aisibles  prairies, 
elle  rase  à  perte  de  vue  l'étendue  vague  de  mornes 
bruyères,  se  perd  dans  les  fines  dentelures  des  bouleaux 
printaniers  et  illumine  enfin  d'un  éblouissant  jet  de  lueur 
le  vaste  ijalais  des  bois.  Mais  ce  n'est  qu'un  éclair  jailli  des 
plus  profonds  abîmes  de  la  terre,  où  grouillent  cachés  les 
feux  magnifiques  et  i)ei  fides  des  enfers.  Un  mouvement 
fou,  hallucinatoire,  nous  entraîne  :  rélément  visuel  de  la 
représentation,  déjà  compliqué  de  perceptions  motrices,  se 
mêle  à  des  sentiments  i)his  mystérieux  :  nous  saisissons  au 
vol  des  rapports  intimes,  inaccessibles  à  la  définition. 
Tandis  que  le  fracas  de  la  tcm])ête  et  des  fragments  de 
mélodies  de  flûte  rcMii)lissent  l'oreille,  des  angoisses  et  des 


686  C.   BECKENHAUPT 

joies  ataviques  se  heurtent  en  nous,  des  souvenirs  ances- 
traux  d'une  vie  intimement  mêlée  à  la  nature  se  réveillent. 
Nous  remontons  aux  sources  les  plus  occultes  de  l'âme  qui 
prend  conscience  d'elle-même  en  s'opposant  la  terreur  des 
forces  élémentaires,  des  puissances  hostiles  si  intimement 
mêlées  à  sa  propre  essence,  si  i)arfaitement  humaines  et 
comme  animées  de  la  même  âme. 

Ce  qui  donne  une  importance  particulière  aux  paysages 
de  la  Walpurgisnaelit,  c'est  l'étendue  qu'ils  occupent  dans 
l'ensemble  du  poème  et  l'accélération  intense  du  mouve- 
ment cinématographique  qui  les  développe.  Après  s'être 
révélé  avec  une  telle  vigueur  ce  style  symi)honique  devient 
un  élément  essentiel  du  poème,  La  promenade  du  jour  de 
Pâques  écrite  en  février  1801,  nous  mène  à  travers  des 
sites  très  vastes,  très  variés,  évoquant  des  impressions 
cosmiques  :  ils  inspirent  â  Faust  les  sentiments  les  plus 
divers  :  retour  à  la  vie  et  à  la  joie  en  longeant  les  rivières 
délivrées  de  leur  prison  de  glace;  humilité  et  douceur,  sen- 
timent de  fraternelle  compassion  j)our  les  pauvres  esclaves 
d'un  obscur  labeur,  en  contemplant  la  ville  lointaine  et  ses 
portes  sombres;  joie  champêtre  sous  les  tilleuls  du  village 
et  enfin  :  l'extase  devant  les  plaines  bleues,  où  glissent  des 
rivières  d'or,  devant  les  cimes,  qui  s'embrasent  sous  les 
lueurs  du  soir,  devant  les  horizons  qui  au  loin  se  perdent 
dans  les  mers  incertaines,  langoureuses,  irréelles,  pleines 
de  promesses  et  berçant  sur  leurs  flots  le  mirage  de  pays 
plus  chauds  et  plus  heureux.  Et  avec  les  bandes  de  grues 
volant  vers  leur  patrie  mystérieuse,  avec  l'aigle  planant 
au-dessus  des  derniers  pins  des  plus  hautes  cimes,  le  sen- 
timent s'exalte  vers  les  régions  les  plus  spirituelles  :  la 
puissance  lyrique  du  paysage  atteint  ici  les  dernières 
limites  de  l'âme. 

Après  avoir  déployé  ainsi  toute  son  intensité  expressive 
le  paysage  symphonique  est  prêt  à  se  libérer  d'un  dernier 
lien  qui  l'enchaînait  dans  des  attaches  étrangères  à  son 
essence  poétique.  Cette  essence,  c'est  l'expression  pure,  le 
sentiment  absolu,  la  «  Stimmung  »,  qui  évolue  selon  ses 
propres  lois,  lois  d'ordre  tout  psj^chique.  rythmes  inté- 
rieurs, affinités  purement  musicales.  Car  la  Walpurgis- 
nacht  comme  la  promenade  de  Pâques  laissent  subsister 


PAYSAGES   DANS   FAUST  687 

un  deinier  élémeut  iiiatéiiel  et  explicatif  clans  leur  oran- 
diose  mouvement  visuel  :  les  différentes  phases  du  paysage 
restent  rivées  aux  mou\ements  de  Faust,  nous  apercevons 
—  malgré  leur  parfaite  continuité  musicale  —  les  diffé- 
rents sites  dans  un  ordre  topograpliique,  tels  qu'ils  se  pré- 
sentent successivement  à  Faust  durant  sa  promenade.  On 
retrouve  même  dans  ce  i)aysage  visionnaire  des  détails 
d'origine  réaliste  ;  les  environs  de  Strasbourg  ont,  semble- 
t-il,  livré  les  éléments  matériels  de  cette  scène. 

Un  dernier  effort  mène  le  poète  au  style  parfaitement 
musical  qui  est  la  conséquence  du  lyrisme  immanent  de 
son  poème.  Il  s'affranchit  de  la  logique  matérielle  et  des 
attaches  qui  lient  le  mouvement  symphonique  aux  causes 
extérieures  :  les  visions  glissent  librement,  s'élancent  en 
harmonies  absolues  avec  l'aisance  et  le  détachement,  avec 
toute  l'autonomie  esthétique  du  rêve.  Dans  la  seconde 
partie,  dès  la  scène  initiale  du  i)remier  acte,  la  libre  orga- 
nisation thématique  s'affirme  dans  le  rythme  mélodieux  et 
riche  en  contrastes,  qui  est  l'âme  de  ces  paysages.  Faust 
s'endort  au  milieu  des  champs  sous  une  pluie  printanière 
de  pétales,  puis  les  voiles  du  créjjuscule  rétrécissent  le 
paysage,  l'enfei-ment  dans  la  paisible  intimité,  dans  la 
douce  coexistence  des  choses  qui  voisinent  dans  l'espace 
rétréci,  la  scène  offre  à  la  contemplation  l'intensité  des 
détails,  les  teintes  saturées,  tout  le  charme  du  rapproche- 
ment visuel.  Puis,  sous  les  larges  couches  d'ombres  de  la 
nuit  les  lignes  s'allongent,  les  surfaces  s'étendent  et  enfin, 
quand  Faust  se  réveille,  le  paysage  devient  héroïque  :  un 
horizon  de  cimes  altières  guide  l'œil  vers  un  océan  de  feu, 
d'où  s'élèvent  en  gerbe  les  flammes  du  soleil.  Un  torrent 
tonne  (l'intention  expressive  est  soulignée  par  le  fait  que 
vers  le  milieu  de  la  scène  le  sommeil  trouve  son  symbole 
visuel  dans  les  eaux  somnolentes  du  lac  où  se  mirent  les 
étoiles)  et  enfin  tous  les  accords  s'unissent  dans  la  courbe 
majestueuse  et  immatérielle  de  l'arc-en-ciel,  qui  dans  sa 
l)ure  mélodie  relie  les  choses  terrestres  aux  profondeurs 
de  l'éternité. 

Quand  il  voudra  évoquer  dans  la  Klassische  Walpurgis- 
nacht  le  paysage  tantôt  idyllique,  tantôt  tragique,  tantôt 
grotesque  des  champs  de  Plnirsale,  où  revivront  toutes  les 


688  C.    BECKENHAUPT 

nobles  tendresses  de  l'âge  d'or  et  toutes  les  antiques  hor- 
reurs des  sortilèges  thessaliens,  Gœthe  aura  donc  à  sa 
disposition  un  style  souple,  épuré  de  toute  logique  rigide 
et  matérielle,  un  style  immédiat,  purement  expressif 
comme  la  musique,  un  stj^le  qui  en  même  temps  sera  haute- 
ment dramatique,  parce  qu'il  permet  à  l'élément  essentiel 
<lu  drame,  a  la  parole  humaine,  de  créer  ime  ambiance 
expressive,  vaste,  nuancée,  l.a  matérialité  elle-même 
prend  ainsi  part  au  mouvement  intime  du  drame,  elle  le 
suit  librement,  selon  les  lois  maîtresses  d'une  musique 
visuelle,  elle  devient  action  et  vie. 

Le  lyrisme,  première  cause  de  la  participation  intime  du 
paysage  à  la  situation  dramatique,  devient  par  la  suite  un 
moyen  d'expression  indépendant,  qui  finit  par  donner  au 
drame  lui-même  un  style  nouveau.  La  vie  Imaginative,  sa 
tendance  créatrice  et  cosmique  fait  craquer  dans  tous  ses 
gonds  la  conception  primitive  du  F'aust,  où  tout  gravite 
autour  du  sort  d'une  âme  humaine.  Le  poème  tend  mainte- 
nant à  la  représentation  immédiate  du  cosmos  gœthéen,  il 
abandonne  souvent  le  spiritualisme  des  situations  essen- 
tiellement psychiques  pour  s'oublier  devant  la  profondeur 
plastique  et  atmosphérique  du  monde.  Cette  intention 
purement  représentative  s'émancipe  quelquefois  de  toute 
subordination.  Le  besoin  de  créer  uniquement  pour  la 
joie  de  la  création  fait  quelquefois  oublier  l'ensemble  de 
l'œuvre  :  il  est  par  exemple  la  seule  raison  d'être  du  pay- 
sage arcadique  au  troisième  acte.  Et  nous  ne  saurions 
autrement  nous  exjDliquer  le  commencement  du  quatrième, 
on  le  poète  succombe  à  la  tentation  de  répéter  l'acte  créa- 
teur qui  dressa  vers  les  cieux  les  cimes  et  les  arêtes  des 
montagnes.  Il  se  plaît  à  reproduire  un  paysage  des  pre- 
miers jours  en  pleine  formation  et  met  en  mouvement  les 
flots  du  déluge  et  les  feux  souterrains,  qui  ont  édifié  le 
monde. 

Mais  ces  dernières  manifestations  du  style  représentatif 
sont  déjà  des  signes  de  diffusion  :  le  jet  créateur  de  l'ima- 
gination dépense  sa  vigueur  en  jeux,  en  promenades 
visionnaires.  Le  poète  finit  par  retrouver  le  véritable  sens 
(le  sou  style  symphonique  dans  la  richesse  intense  des 
scènes  finales.  Nous  y  retrouvons  toute  sa  concentration 


PAYSAGES    DANS    FAUST  6H9 

sonore  :  dans  l'unité  absolue  de  la  représentation  et  de 
l'émotion  qui  caractérise  ses  visions,  nous  retrouvons 
toutes  ses  vertus  dramatiques.  La  suite  continue  des  pay- 
sages nous  mène  de  la  morue  grandeur  des  torrents,  des 
rochers,  des  déserts  ascétiques  à  la  sérénité  spirituelle  des 
cieux,  dans  un  paysage  printanier  de  nuages,  dans  les  jar- 
dins rose  et  or  de  l'aube  mystique  et  euiin  dans  l'immensité 
lumineuse,  dans  les  mers  de  soleil  et  de  félicité  éternelle. 
Gœthe,  par  l'effort  génial  et  inlassable  qui  aboutit  à  un 
style  aussi  spirituel  et  intense,  a  bien  mérité  d'entrer  en 

paradis. 

» 

«     » 

J'ai  essayé  de  montrer  l'évolution  et  la  continuité  des 
conceptions  esthétiques  et  des  tendances  humaines  dans  le 
paysage  du  Faust.  Mais  ne  faut-il  pas  tenir  compte  des 
influences  extérieures  qui  auraient  pu  contribuer  à  former 
ce  style  si  touffu  et  si  fécond?  Sa  première  manifestation 
dans  la  chevauchée  de  l'Urfaust  —  toute  embryonique  du 
reste  —  pourrait  nous  faire  supposer  que  des  affinités  litté- 
raires ne  seraient  pas  étrangères  à  son  développement. 
Cette  scène   doit  beaucoup  à  Gottfried  August  Biirger; 
dès  1808  ce  Bôttiger,  que  Gœthe  a  ironisé  dans  le  Servi- 
bilis  de  la  Walpurgisnacht,  fait  malicieusement  ressortir 
le  rapport  entre  cette  vision  et  Lenore  qui,  emportée  à 
travers  la  nuit  par  un  cavalier  fantôme,  assiste  aux  rites 
sataniques   des  sorcières  dansant  autour  du  gibet.   Mais 
seule  la  matérialité  de  la  scène  appartient  à  Biirger  :  sa 
tendance  styliste  est  toute  différente  chez  les  deux  poètes. 
Dans  la  ballade  elle  est  toute  coordonnée  à  l'ensemble  des 
effets    fantasmagoriques.   Gœthe  lui    donne    une    valeur 
d'expression  nouvelle  :  apparition  subite  et  violente,  elle 
éclate  au  milieu  d'une  situation  toute  lourde  de  misère 
humaine.  Les  remords,  les  angoisses  de  Faust,  l'accable- 
ment  farouche  de  Margarethe  sont  par  ce  motif  reliés  au 
monde  nocturne  et  démoniaque,  dont  les  décisions  sont 
sans  appel.  Et  la  précipitation  inouïe  du  mouvem(;nt,  la 
simplicité  des  moyens  extrêmement  réduits  sont  bien  dif- 
férentes du  style  de  la  ballade,  qui  accumule  les  détails 
pittoresques  et  les  onomatoj)ées   suggestives.    La   valeur 
expressive  du  style  ai)parti('nt  bien  à  Gœthe. 

44 


690  PAYSAGES   DANS   FAUST 

Nous  voyons  que  le  poêle  tire  parti  des  éléments  visuels 
de  la  ballade  :  il  y  voit  ce  qu'aurait  pu  lui  montrer  une 
peinture,  un  dessin  :  aussi  retrouverons-nous  dans  les 
détails  de  certains  paysages  postérieurs  des  souvenirs  pic- 
turaux, qui  sont  du  reste  quelquefois  contestés  par  Morris 
dans  son  étude  :  «  Gemâlde  und  Bildwerke  im  Faust  », 
.l'ajouterais  volontiers  aux  impressions  dues  à  la  peinture» 
que  la  critique  a  établies  (ou  contestées),  un  élément  nou- 
'veau  :  l'influence  qu'auraient  bien  pu  avoir  sur  le  choeur 
des  esprits  enchanteurs  les  fresques  de  Botticelli,  de 
Signorelli,  de  Ghirlandajo  à  la  Sixtine  et  celle  de  Benozza 
Gozzoli  au  Camposanto  de  Pise  (').  Mais,  quoi  qu'il  en  soit, 
Gœthe  dispose  arbitrairement  de  ses  souvenirs  picturaux, 
les  réduit  à  une  impression  très  discrète  et  en  fait  des  fac- 
teurs subordonnés  :  ils  n'existent  poétiquement  que  par  la 
valeur  expressive  qu'il  sait  leur  donner,  par  la  sonorité 
très  personnelle  des  accords  où  il  les  fait  entrer. 

Il  en  est  de  même  pour  les  influences  littéraires  :  maint 
détail  nous  fait  songer  à  la  Bible,  au  Dante,  à  Milton.  Mais 
ce  sont  des  détails,  qui  sont  sans  rapjjort  avec  la  tendance 
essentielle  du  style.  Ce  style  est  expressif  et  lyrique.  Tout 
style  qui  mérite  ce  nom  est  essentiellement  personnel.  Il 
est  la  nuance  que  l'individualité  communique  à  toutes  se& 
manifestations  sans  avoir  le  choix  de  lui  préférer  une 
autre.  Il  y  a  toujours  nécessité  dans  le  style,  il  est  le  résul- 
tat d'un  mouvement  antérieur,  d'une  évolution  humaine. 
On  ne  saurait  parler  de  style  si  Gœthe  avait  employé  une 
recette  que  le  passé  ou  l'ambiance  littéraire  lui  offraient. 
Le  style  n'existe  que  quand  son  auteur  est  inventif., 
expressif,  personnel. 

Ce  caractère  de  spontanéité,  s'il  ne  se  révélait  pas  dans 
la  fraîche  jeunesse  des  paysages,  il  se  montrerait  dans  la 
poussée  vigoureuse  des  conceptions.  Il  y  a  un  élan  unique 
dans  la  spiritualisation  progressive  du  lyrisme  que 
dénotent  les  trois  phases  du  paysage-scène,  du  paysage- 
âme  et  du  paysage- monde.  L'enracinement  de  ce  style  dans 
la  personnalité  du  poète  est  préexistant.  En  fait  le  pa3'sage 


(1)  G(Fthe  n'a  jamais  été  à  Pise,  mais  il  a  étudié  les  fresques  dans  le  recueil. 
dcLasinio.  (Friedlaendkr,  Deutsche  Rundschau,  janv.  1881.) 


PAYSAGES   DANS   FAUST  691 

symphonique  existe  de  tout  tem])s  en  Gœtlic  II  est  lié  aux 
éléments  de  son  génie  qui  restent  inaccessibles  à  l'analyse 
età  l'explication.  Dès  ses  précoces  manifestations  lyriques, 
l'entourage  du  poète  api)araît  comme  un  élément  essentiel 
de  l'émotion  :  il  communie  avec  l'âme  de  Goethe  dans  ses 
nuaDces  et  ses  lignes  variables,  dans  ses  phases  expres- 
sives. «  Eingrauer,  trùber  Morgen  »,  une  des  premières 
offrandes  i)our  Friederike  Brion,  développe  déjà  le  mou- 
vement symphonique,  qui  s'accentue  dans  «  Wanderers 
Sturmlied  »  et  apparaît  en  splendide  éi)anouissement  dans 
«  Mahomets  Gesang  »,  dans  «  Ganymed  »,  dans  ((  Ilarz- 
reise  im  Winter  ». 

Mais  si  le  paysage  dramatique  est  la  conséquence  du 
lyrisme  paysagiste,  comment  se  fait-il  que  les  scènes  du 
Faust,  qui  sont  à  peu  près  contemporaines  de  ces  i)oésies, 
ne  développent  pas  encore  le  mouvement  expressif  et  sym- 
phonique du  paysage  intérieur? 

Le  jeune  poète  croit  encore  à  la  valeur  poétique  de  cer- 
taines formes  établies  :  comment  se  douterait-il  qu'un  pay- 
sage intérieur,  non  scénique,  eût  droit  à  entrer  dans  un 
drame?  C'est  quand  il  prend  connaissance  de  soi-même, 
quand  il  s'aperçoit  que  la  véritable  forme  de  la  poésie  est 
l'entité  psychique,  quand  il  reconnaît  l'essence  lyrique  de 
son  génie,  c'est  alors  qu'il  comprend  les  possibilités 
expressives  du  paysage  symphonique.  Ce  mouvement 
s'épanouit  à  l'époque  où  il  se  rend  compte  que  sa  poésie 
reste  irréductiblement  lyrique  dans  les  formes  tout  hétéro- 
gènes du  drame  et  du  roman.  Un  fait  biographique  illustre 
curieusement  cette  évolution  :  le  lyrisme  intense,  qui 
absorbe  le  Faust  vers  1784  (dans  la  scène  Wald  und  ITuhle), 
est  contemporain  du  poème  épique  «  Die  Geiieimnisse  » 
qui  dans  l'intention  du  poète  représentait  son  moi  vu  à 
travers  les  grands  symboles  de  l'humanité.  Le  lyrisme  de 
ce  roman  en  vers  est  si  pur  que  Goethe  en  a  pu  détacher 
les  quatorze  premières  stances  et  les  placer  à  la  tête  de  ses 
poésies  lyriques  sous  le  titre  de  «  Zueignung  ». 

Son  style  ne  se  déploie  dans  toute  son  ampleur  que  dans 
les  scènes  postérieures  au  voyage  d'Italie.  Cela  tient 
encore  à  l'histoire  intime  du  poète.  Son  lyrisme,  avant  le 
départ,  reste  penché  vers  la  vie  intérieure,  il  est  inquiet, 


692  C.    BECKENHAUPT 

mystique,  égotiste  :  la  prière  panthéiste  de  Faust  est 
lourde  des  joies  mélancoliques  de  la  méditation.  Ce  n'est 
qu'à  Rome  qu'il  se  dégage  : 

O  wie  fiihl  ich  in  Rom  micli  so  froh  !  gedenk  ieh  der  Zoiten. 
Da  mich  ein  graulicher  Tag  binten  im  Norden  umfing, 
Triibe  der  Himmel  und  scbwer  aul"  meine  Scheitel  sich  seukte, 

Farb-  und  gestaltlos  die  Welt  um  den  Ermatteten  lag, 
Und  ich  iiber  mein  Ich,  des  unbefriedigten  Geistes 

Diistre  Wege  zu  spâhn.  still  in  Betrachtung  versank. 

Seul  un  Ij^risme  affranchi  de  l'éternel  tourment  du  moi, 
riche  de  tout  l'apport  d'un  monde  extérieur  reconquis, 
était  capable  de  créer  la  forte  tonalité  des  symphonies  cos- 
miques que  sont  la  Walpurgisnacht,  l'Osterspaziergang, 
le  rêve  de  Faust  au  commencement  de  la  seconde  partie  et 
le  paradis  des  dernières  scènes.  Les  paysages  de  Faust 
viennent  nous  rappeler  que  dans  la  vie  de  Gœthe  rien  ne 
reste  isolé,  que  toutes  les  forces  de  sa  personnalité 
obéissent  à  l'impulsion  maîtresse  de  son  âme  :  de  s'oublier 
soi-même,  de  s'identifier  en  un  pieux  recueillement  pan- 
théiste à  l'âme  sublime  de  l'univers. 

Charles  Beckenhaupt. 


The  Edict  of  Qalerius 
(311  A.  D.)  re=considered. 


Galerius,  as  it  is  generally  kuoNvii,  proclaimed  liis 
famous  edict  of  toleration  in  April,  311.  Perhaps  tlie  best 
explanation  of  its  origin  is  still  that  of  Gibbon  (/)  :  «  the 
fréquent  disappointments  of  his  ambitious  views,  tbe 
expérience  of  six  years  of  persécution,  and  the  salutarv 
reflections  which  a  lingering  and  painful  distemper  sug- 
gested  to  the  mind  of  Galerius,  at  length  convinced  him 
that  the  most  violent  efforts  of  despotism  are  insuffi cient 
to  extirpate  a  whole  i)eople  or  to  subdue  their  religions 
préjudices.  »  Scholars  hâve  interpreted  the  edict's  motiv- 
ation in  most  varied  fashion.  Some,  as  Schultze(2), 
Hiille  (^),  Uuchesne  (■*),  and  Linsenmayer  (^),  follow  Lac- 
,tautius(6)  and  Eusebius  C)  in  ascribing  Galorius's  volte- 
face  to  the  superstitions  panic  which  his  last  illness  had 


(1)  The  Ilist.  of  the  liecline  and  Fall  of  the  Roman  Empire  (éd.  J.  B.  Hiiiy, 
Londoii,  1896),  vol.  11.  p.  13-2. 

(2)  In  Haick-Herzog,  Healemi/klopriJie  (3'"'^  éd.,  1898).  s.  v.  Oinkietian. 

(3)  Die  Toleranzerliisse  rom.  /vV/istr  (Berlin,  1895),  p.  41  :  «die  letzle  Hoftiuiiig 
eines  fast  Verzweifelteii,  der  mil  dem  Willeii  zu  leben  sich  unaurhaltsam  eineni 
jainmerlicliei»  Tode  ciitgegeneiieii  sah  und  nuii,  da  Gotter  nnd  Menschen  Uni 
im  Stich  pelassoii  halteii,  deii  Gedaiikcii  orgrilV,  dass  aiii  Kiide  der  bislicr 
verfoigte  Christengott  nocli  helfeii  koiiiie.  » 

(*)  Hisl.  anv.  de  l'Ki/llse,  II-,  ]>.  20  :  f(ialeriiis)  «  fatiguant  les  médecin.*;  de 
ses  plaintes  et  les  dieux  de  ses  inutiles  supplication.s.  Enfin  lui  vint  l'idic  la 
plus  étranf,'e,  celle  tlinléresser  à  sa  santé  les  chrétiens.  » 

(^)  Die  Bnkiimpfunff  des  Christentums  durch  den  nimischcn  Staat  hi.<  ziim 
Tode  des  Kaisers  Jiilian  (Munich,  190.'>),  p.  -2-2 \ . 

(6)  De  mort,  pers.,  33  led.  Brandt  I.aubmann,  in  CSEL), 

n  Hist.  ealcs.,  VIII.  17,  I  (éd.  S<-li\varli,  in  GCS). 


694  J.    H.    KNIPFING 

caused.  Others,  as  Schiller  ('),  Schwartz  (2),  Geffcken(3), 
Bury  (*),  and  Firth  (^)  bring  into  relief  the  political  motives  : 
that  an  alliance  between  Constantine  and  Maxentius 
against  Galerius  and  Maximinus  Daja  was  pending;  that 
Galerius  induced  the  latter  to  make  the  Christians  con- 
cessions so  that  Constantine  might  be  placated  (indeed^ 
Schwartz  would  even  give  Constantine  the  crédit  for  the 
edict's  issuance);  that  the  emperor  and  his  colleagues 
came  to  realize  the  abject  failure  of  their  polic^  of  per- 
sécution (6).  With  greater  perspicuity  and  plausibility, 
Duchesnei'')  andBatiff()l(^)  hâve  indicated  tlie  présence  and 
influence  of  Licinius  at  Sardica  at  the  time  of  publication  ; 
a  theorj^  the  more  reasonable  in  the  light  of  the  attitude 
which  Licinius  later  assumed,  in  conjunction  with  Con- 
stantine, friendly  toward  the  Christians  and  against  tho 
intransigeance  of  Maximinus  Daja.  Two  other  writers, 
Bihlmeyer  [^]  and  De  Bacci  Venuti  {^^),  hâve  urged  other 
explanations  :  the  one,  by  the  présence  oE  Neoplatonist 
influences  as  shown  in  certain  expressions  (as  instituta 
veteriim  and  secia  parentiun)  contained  in  the  text  —  a 
rather  fruitful  suggestion  ;  the  other,  by  the  improbable 


(1)  Geschichte  der  rnmischen  Kaizerzeit  (Gotha,  1883-1887).  H,  pp.  182-183. 

(^)  In  GG^,  phil.  Iiist.  Klasse,  1904,  pp.  527-S28. 

(^)  Der  Ausgang  des  firiechisch-riimiitchen  Heideiitunts  (Heidelberg.  1920), 
p.  91. 

(*)  History  of  Freedom  of  Tfionglit  (Londoii,  1913).  p.  iO. 

(^)  Cnnstantmc  llie  Great  (Ntnv-York,  1903),  pp.  137-liO. 

(6)  The  tlieory  of  Constantino's  pending  alliance  with  Maxentius  is  entirely 
belied  by  the  fact.s  :  (1)  the  death  of  Maximian,  falher  ol  Maxentius,  al  the 
instigation  of  Constantine  in  310;  (2)  the  testimony  of  Eusebius  {Hisl.  eccl.. 
VIII.  14,  7)  that  Maxentius  secretly  allied  vvilh  Maximinus;  and  (3)  absenee 
of  coin  émissions  in  honor  of  Constantine  al  Home  for  310-311,  —cf.  Mairick, 
Numismatique  ronstnntiuienne.  I  (Paris,  1908),  pp.  191-194. 

C)  Uist.  anc.  de  l'Eglise,  II.  27. 

(^)  La  paix  amslan/inienne  (Pnvis,  1914),  181.  Cp.  Fekkero,  La  ruine  de  la 
civilisation  antique  (Paris,  1921),  p.  157  (i.  e.  edict  was  resuit  of  union,  lo 
forestall  civil  war  of  Galerius,  Licinius  and  Constantine,  against  Maxentius 
and  Maximinus). 

(9)  K  Das  Edict  von  Galerius  ).,  in  Theol.  Quarlalsrltrift,  XCIV  (1912), 
pp.  .^i59-.")63. 

(•0)  Dalla  grande  persrcuziime  alla  vitlorin  del  cristianesimn  (Milan,  1913), 
pp.  130-131. 


EDICT  OF  GALERIUS  695 

idea  tliat  Galerius's  resolution  to  proclaiui  the  edict  was 
caused  in  part  by  weakness  and  exhaustion  from  his  drun- 
ken  and  dissolute  débauches. 

The  edict  is  verbally  cited  in  its  original  Latin  form  by 
Lactantius  in  the  De  mortihus  perseciitoriini  (ch.  34),  after 
the  copy  posted  on  April  30,  3H  in  Nicomedia  (but  with 
the  list  of  emperors  missing,  in  whose  nanie  the  decree 
was  issued),  and  in  the  version  of  a  Greek  translation  by 
Eusebius  in  the  Historia  ecclesiastica  {VllI.  17,  1-10).  The 
heading  of  the  edict  can  be  restored  on  the  basis  of  the 
manuscript  tradition  of  Eusebius  and  the  inscriptions; 
it  included  the  naines  of  the  four  emperors,  with  their 
titles  in  the  followiug  order  ;  Galeries,  Licinius,  Maximinus 
Daja  and  Coustantine  (^). 

The  text  itself,  with  the  Latin  of  Lactantius  and  an 
English  translation  given  in  parallel  columns,  reads  thus  : 

luter  cetera  {-)  quae  pro  rei  Among  other  steps  whicb  we 

publicae  seniper  comniodis  at-  are  ahvays  taking  for  the  ser- 
que  utilitate  disponimus  (' ,  nos      vice  and  advantage  of  the  state, 


(1)  ScHWAUTZ  (ce  Eusebius  Werke  »  in  GCS,  II,  2,  p.  792,  note  to  1,  9  ;  II,  3, 
pp.  xLvu,  I.),  shows  that  llie  iiame  and  titles  of  Licinius  were  iiichided  in  the 
inanuscii|tts  of  the  3'^''  édition  (ca.  317),  but  exciuded  on  ground  of  damnatio 
memoriae  froni  the  i^h  (after  324).  The  sanic  fate  inust  hâve  caused  Eusebius's 
omission  of  Maxiininus's  name.  Restoralion  of  heading,  based  on  Seeck 
(in  Rhein  Mus.,  xi.vni  (1893),  p.  199  et  ss.),  but  wilh  positions  of  Licinius  and 
Maximinus  reversed  is  as  follows  :  'AuTOKpÔTUjp  Kaîaap  fa^épioç  OùaXépioç 
MaZimavoç  eùaePriç,  eûTuxnç  dvÎKnToç  ZePaarôç,  dpxiepeùç  luéYiOToç, 
fepMaviKÔç  juéfiaToç,  éEdKiç  Aî^uTixiaKàç  fiëTiOToç,  0r|3aÏKÔç  luéYioxoç, 
Xap.uaTiKÔç  jLiéYiaTGÇ  nevTdKiç,  TTepaûjv  uéYiOToç  biç,  SpexTaviûv  luéYiOToç 
biç,  KdpiTuuv  \xi-^\0T0C,  éEdKiç,  'Ap.ueviujv  luéyiOToç,  Mi^buiv  luéyiaToç, 
'AbmPnvuJv  liéfiOToç,  briiuapxiKnç  éEouoîaç  tô  eÎKoaTÔv,  tô  évveoKai 
béKaTov,  aÙTOKpdTUjp  tô  éweaKaib^KOTov  t6  eÎKoaTÔv,  uiraToç  tô  ÔYboov, 
iraTrip  ^TaTpi^oç.  dvOÙTraToç.  Kai  'AÛTOKpdTUjp  Kaîaap  OuaXépioç  Aikiv- 
viavôç  AïKivviaç  eûaePnç  eÙTuxnç  dvÎKriToç  lepaOTÔç,  dpxiepeùç  \ii-^\aToc„ 
briMcipxiKfiç  éSouoiaç  tô  T^TapTov,  aÙTOKpdTuup  tô  TpÎTOv,  îjiraToç,  traTrip 
iraTpiboç,  àv6ÙTTaTOÇ.  xai  'AuTOKpdTujp  Kaîaap  râïoç  OuaX^pioç  MaEiuîvoç 
eûaepnç  eÙTuxnç  ùvÎKriToç  I*!PaaTÔç,  dpxiepeùç  liéYiOToç,  brmapxiKnç 
^Eouaîaç,  aÙTOKpÔTujp,  uttotoç,  iroTrip  iraTpîboç,  dvBÛTraToç.  Koi  'Auto- 
KpdTUjp  Kaîaap  OXaùioç  OuaXepioç  KujvaTavTÎvoç  eôaepnç  eÙTuxnç  dvÎKriToç 
ZepaOTÔç,  dpxiepeùç  li^YiOToç,  bnnapxixnç  éEouoiaç,  aÙTOKpdTUjp  tô 
né^iTTov,  unaToç,  TiaTnp  naTpiboç,  dveùnaToç. 

(2)  In(er  cetera,  badiy  rendcred  in  Elsebils  :  lueTaEù  tûiv  Xoittiùv. 

(3)  semper...  disponimus,  given,  simply  as  biaTunoÙMCBa  by  Ki  skrii  -; 


696 


].     H.    KNIPFING 


quidem  volueramus  antehae, 
iirxta  leges  veteres  et  publicain 
disciplinam  (0  Romanorum, 
cuncta  corrigere  atque  id  pro- 
videre,  ut  etiam  Christiani,  qui 
parentum  suorura  reliquerant 
sectam  ad  bonas  mentes  redi- 
rent (').  Siquidem  quadam  ra 
tione  tan  ta  eosdem  Christianos 
voluntas  invasisset  et  tan  ta 
stultitia  occupasset  (3),  ut  non 
illa  veterum  institua  sequeren- 
tur(*),  quae  forsitan  primumis) 
parentes  eorundem  constitue- 
rant,  sed  pro  arbitrio  suo  atque 
ut  isdem  erat  libitum  ita  si- 
bimet  leges  lacèrent  quas  ob- 
servarent  (")  et  per  diversa 
varios  populos  congregarent(^). 
Denique  cum  eiusmodi  nostra 
iussio  (8)  extitisset,  ut  ad  vete- 
rum se  instituta  eonferrent, 
multi  periculo  subiugati,  multi 


\ve  liad  heretofore  wisbed  to 
set  ail  things  right  according 
to  tbe  ancient  laws  and  public 
order  of  tbe  Romans.  We  desir- 
ed  tbat  tbe  Christians  too,  who 
bad  abandoned  tbe  religion 
of  tbeir  own  fatbers,  sbould 
returu  to  sound  reason.  For 
tliesevery  Christians  bad  some- 
bow  become  possessed  of  sucb 
wilfulness  and  folly,  tbat  in- 
stead  of  foUowing  those  institu- 
tions of  tbe  ancients.  whicb 
percbance  tbeir  own  ancestors 
bad  first  establisbed.tbey  were 
arbitrarily  making  and  observ- 
ing  laws  of  tbeir  own  liking, 
and  were  assembling  in  différ- 
ent régions  peoples  of  différent 
nationalities.  After  we  bad 
decreed  tbat  tbey  sbould  again 
observe  tbe  ancient  institu- 
tions,   manj'    in    view    of    tbe 


(1)  disciplinam  —  éniaTriiuriv  in  Eisebus.  Not  a  iaulty  Iranslalion  as 
HÛLLE  (np.  cit.,  io-46)  and  Heikei.  («  Eiisebius  Weri^e  »,  I  (1902),  in  GCS, 
p.  i-xxvnij  coMtend.  We  liave  the  same  translation  from  Tertullian's  Apology 
in  EusEB.,  Hist.  écoles.,  III,  33,  3.  See  now  Schwaktz,  in  c<  Eusebiiis  Werke  », 
II,  3  (GCS,  Leipzig.  1909),  p.  177,  s.v.  éTTiOTniun- 

(2j  Christiani...  redirent,  oi  XpiOTiavoî,  oÏTiveç  TÛJv  fovéïuv  tôjv  éauTÛJv 
KaTa\e\oiTTaaiv  Tf\v  aïpeoiv,  eiç  àYatirjv  npôOeaiv  éTTavé\0oi€v. 

(3)  Tunt .  stultitia  occupasset,  translaled  as  xaTeaxnKei  Kai  dvoia  in  Srfi  éd. 
(317)  but  omitted  in  4th  éd.  of  EtsER.  Hisl.  écries.  See  Schwartz  [loc.  cit.), 
p.  LI  :  «  der  gef<en  die  Chrislen  gerichtete  Vorwurl"  des  Toleran/.edicts  sollte 
offenhar  abgeschwiifiil  wonlen,  weil  Constantin  fiir  dies  Edict  mit  vor- 
antwortlicli  war.  » 

{*)  primum.  I)adly  rendered  as  irpÔTcpov. 

(^)  parentes  enrundcm  constitnerani ,  oî  Toveîç  aÙTiûv  f|aav  KaTaoxrioavTeç. 

/*)  qnas  ohservarenl ,  addition  to  nianuscri|)t  reading  of  De  mort  pers.  by 
editors  Brandt  and  Laubmanit,  on  basis  of  Eusebiiis  :  Kai  toùtouç  irapa- 
qpuXdoaciv. 

(")  per  diversa  varios  populo.'^  conyregarent,  inaccurateiy  translaled  in 
EtSEnii  s  :    év  biaqpôpoiç  bidq)opa  TiXriBr]  auvàyciv. 

{*}  iiissio,  •apoOTÔf  (iOToç, 


EDICT  OF  GALERIUS 


697 


etiam  deturbati  {<)  sunt;  atque 
cum  plurimi  in  i)roposito  (-) 
perseverarent,  ac  videremus 
nec  diis  (3)  eosdeni  cultum  ac 
religiouem;*)  debitain  exliibere, 
nec  Chrislianoruni  devxni  ob 
servare,  contemplatione  (s)  mi- 
tissimae  nostrae  clementiae  in- 
tuentes  ac  consuetudinem  sem- 
piternam,  qua  solemus  cunctis 
honiinibus  veniam  indulgere. 
proniptissimam  in  his  quoque 
indulgentiam  nostram  credidi- 
mus  porrigeudam,  ■  t  denuo 
sint  Christiani  et  conventicula 
sua  conii)onaut,  ita  ut  ne  quid 
contra  disciplinam  agant  C^) . 
Per  aliam  autem  epistolam 
iudicibus  significaturi  sumus. 
quid  debeant  observare.  Unde 
iuxte  banc  indulgentiam  nos- 
tram debebunt  deum  suum 
orare  pro  salute  nostra,  et  rei 
publicae,  ac  sua,  ut  undique 
vcrsum  res  publica  praestetur 
incolumis,  et  securi  vivere  in 
sedibus  suis  possint  (7). 


danger  submitted,  but  muny 
also  were  discomfited.  YeL 
wlien  great  numbcrs  persistcd 
in  tbeir  purpofc.  and  \ve  saw 
tbat  tbey  neither  gave  worsbip 
and  due  révérence  to  tbe  gods. 
nor  practiced  tbe  worsliij)  of 
tbe  Cliristian  (iod,  \ve  tbere- 
fore  in  consideratitm  of  our 
most  miUl  clemcncy  and  of  tbe 
custom  from  tinio  immémorial 
to  grant  pardon  to  ail  men, 
bave  decided  to  ex  tend  our 
speediest  indulgence  to  tbem 
also,  so  tbat  tbey  may  a  gain 
exist  as  Cbristians.  and  re-esta- 
blisb  cburcb  buildings  and 
nieetings,  provided  tbat  tbey 
do  notbing  contrai-y  to  tlie 
public  order.  By  anotber  letter 
we  sball  indicate  to  tbe  magis- 
trates  bow  tbey  sbould  proceed. 
"Wberefore,  in  accordance  witb 
tbis  indulgence  of  ours,  tbe 
Cbristians  will  be  bound  to 
pray  for  our  well-being.  tbat  of 
tbe  State,  and  tlieir  own.  tbat 
tbe  State  may  endui-e  on  every 
side  unbarmed.  and  tbat  tbey 
tliemselves  may  live  securelj' 
in  tbeir  bornes. 


(»)  multi...  deturbati  sunt,  j^iveii  as  :  TrXeîOToi  bè  TopaxBévTeç  TTuvxoiouç 
GavïTouç  ÙTTÉqpepov.  Noie  tlu*  irXcîaToi  lor  imilli,  uiid  llie  arhitrary  gloss, 
TiavToiouç  GavuTouç. 

('-'j  propositu,  t'xpanded  m  Iraiislalioii  inlu  :  xf)  aÙTf)  dTTovoiu. 

(3)  dits  —  Kiisebius  had  to  [iiil  lliein  in  hoaveii  :  toîç  Oeoîç  toîç  ènov- 
pavîoiç. 

(*)  nillitin  ac  relitjionem  —  Eusobius  inerely  traiislalcd  llic  (irst  :  0pi;)aKeiav. 

(5)  conlftiiplationr...  seinpiternrDii,  dqpopiî)VT€ç  €(ç  Tr)v  f\u€T(pav  cpiXov- 
9piuTTiav  Kai  Tr)v  biriveKfj  avvi\8e\av. 

(6j  ni  denuo  sint  Christiani...  ar/ant,  i'va  aùeiç  liaiv  XpiOTiavoi  Kai  Toùç 
OÏKOUÇ  iv  oîç  auvpYovTo,  auvBuuoiv  oÙTuiç  ÙJOTe  mi^^v  ÙTTevaVTÎOV  TflÇ 
^■rtiOTrmnÇ  aûToùç  TrpdTT€iv.  Noie  especially  llic  toùç  oÏkouç...  auv6u)aiv, 
for  riinrentirula  compunant. 

{">)  ut  undiijiie...  possint,  i'va  kotô  irdvTa  xpoTTov  Kai  xà  br\\xôa\a  na- 
paaxeQf)  ÛYifi  Kai  dja^piiuvoi  Zlfiv  é\  xr|  èuuxiùv  éaxia  buvriBiùoi.  Tlie 
extrême  awkwardness  of  lliis  tianslalion  of  Kuseliius  lias  iiidinrd  llcikei 
{loc.  cit.)  to  iiiclude  :  «  so  sclilc<;hl  iibeisel/.l  isl  keiiie  l  rkiuule  der  Vila 
(i.  e.  of  CoDstnntinc)  ». 


698  J.     R.    KNIPFING 

The  edict,  it  will  be  seen,  ooiumences  with  an  attempt 
to  justify  or  at  least  explain  the  origin  of  the  persécution 
euactmeuts  of  Diocletian,  Galerius,  aud  their  colleagues  : 
the  emperors,  in  their  détermination  to  iniprove  the 
internai  conditions  of  tlie  empire,  undertook  to  restore 
the  Roman  virtues  of  old  by  a  strict  application  of  the 
ancient  laws  aud  a  careful  supervision  of  social  customs(*). 
This  work  of  political  and  social  régénération  encountered 
the  opposition  of  the  Christians,  who,  althougli  primarily 
a  religious  group,  failed  to  observe  the  principle  of  Roman 
law  that  ail  foreign  ciilts  should  be  national  and  not  com- 
posed  of  différent  nationalities(2).  The  Christians  too  as 
such  had  a  much  shorter  history  than  the  Romans,  in 
wliose  empire  they  lived  as  subjects,  and  yet  thej^  had 
presumed  to  create  and  live  by  a  set  of  principles  and 
practices,  which  rivalled  and  opposed  Roman  law,  tradi- 
tional   l'cligion,  and  social  practice(^).     Indeed,  some  of 


(*)  TLe  opening  phrase,  inler  cetera...  dispunimus,  is  of  course  simply  a  sel 
chancellory  expression,  but  Ihe  clause  follovving  {nos  (/uidem...  corrigere)  is  a 
référence  to  tbe  vast  program  of  political,  social,  économie  and  religious 
régénération  undertaken  by  Diocletian. 

(-)  This  I  take  to  be  the  implied  nieaning  of  the  lebuke  of  the  Christians 
intended  by  the  words  :  per  diversa  varias  populos  congregarent.  So  Hiille 
{op.  cit.,  p.  57)  and  Gwatkin  (in  Cambridge  Médiéval  History,  I  (I9H),  p.  3), 
who  says  the  edict  of  Galerius  «  was  given  on  the  heathen  principle  that  every 
god  is  entitled  lo  the  worship  of  his  own  people  ».  The  Greek  translation  of 
Eusebius  is  faulty  :  populos  should  hâve  been  rendered  'éQvr\  and  not  irXrjBri 
(this  is  rather  équivalent  to  turhae).  On  the  Roman  légal  practice  of  recogniz- 
ing  only  religions  which  were  national,  and  Roman  objections  to  Chrislianily 
on  this  score,  see  Mommsex,  Rômiscfies  Strafrecht  (1899),  p.  572;  and  Toiitain, 
Les  cultes  païens  dans  l'empire  romain,  I  (1907),  pp.  235-238. 

(^)  This  interprétation  is  a  combination  of  the  three  clauses,  ut  ctiam 
C/irisfiani...  redirent,  ut  nonilla...  seiiiierentur,  and  sed...  ohservarent .  The 
thought  of  parentum  suoriim  and  illa  veterum  institîita  lias  been  dill'erently 
interpieted  by  schoiars  :  (1)  some  as  Maso.v  {The  Persécution  of  Diocletian. 
London.  1876,  pp.  298-302),  Gorres  (s.  v.  «  Toleranzedicte  »,  in  Krahs'  Realen- 
cyklopddie  der  christlichen  Altertûmer,  Freiburg  i.  B.,  1882  ff,  Bd.  Il,  p.  897), 
Allard  {La  pers.  de  Dioctétien,  II,  p.  164),  and  Giobbio  {Chiesa  c  Stato  nei 
priini  secoli  del  Cristianesimo,  Milan,  1914,  p.  223  et  sec].)  refer  thèse  clauses 
to  the  primitive  Christians  (i.  e.  the  anceslors)  and  allirm  that  «lalerius  Ihus 
m  )livated  his  persécution  by  his  purpose  to  re-establish  the  Christian  religion 
in  its  primitive  purity  ;  olhers  as  Keim  {Theol.  Jahrbiicher,  1852,  p.  214) 
and  BiHi.MEVEii  {loc.  cit.,  pp.  .551  5i>3),  aiso  think  tiiat  the  Christians'  Christian 


KDICT  OF  GAI.KKIl  S  699 

thèse  very  Christian»  with  their  new  laws  and  customs 
might  be  the  descendants  of  those  early  Romans,  who  had 
founded  the  state  and  its  vénérable  institutions  (*). 

The  emperors  had  therefore  issued  an  edict  (in  303). 
designed  to  bring-  tlie  Christians  into  harmony  with  tliis 
ancient  Roman  tradition  {veterum  insiituta)  (-).  Tlie 
effects  were  not  those  desired  nor  anticipated,  for  tlie 
number  of  Christians  brought  back  into  the  pagan  fold 
or  eliminated  (by  the  death  sentence,  imprisonment, 
exile,  etc.)  by  no  means  equaled  the  total  of  those  who 
continued  to  survive,  firm  in  the  faith  (^).  Futhermore, 
the  affairs  of  state  during  the  interval  of  persécution  had 
not  prospered  as  well  as  they  might  hâve  :  civil  wars, 
usur|)ations,  and  conspiracies  had  occurred,  the  state 
finances  were  in  a  bad  way,  an  économie  dépression 
existed.  and  the  very  life  of  the  senior  Aiig'ustus  was 
threatened  bv  long-continued  diseaseï'*).  One  of  the  causes 


ancestors are  priiiiarily  lueaul,  but  tbat  Galeiius's  avowed  purpose  was  lo  end 
the  set'tarian  divisions  among  the  Christians  and  re-establish  Christian  church 
Mnity  ;  and  olhers,  as  McI^iffert  («  The  Church  Hist.  of  Eusebius  »,  transi,  in 
PNF,  New- York.  1905.  |)  .339,  u.  3),  Hulle  (op.  cit.,  II,  p.  o5),  Llnsenmayer 
(»p.  (il.,  p.  222,  n.  Ij,  DrcHESXE  {op.  cit.,  Il,  p  27),  Schwaktz  {Kai.<er  Const., 
p.  63).  and  Batikkoi,  (La  paix  const.,  p.  I82j  interprète  (as  we  hâve)  parcnttun 
suoriim  as  llie  pagan  aneestors  of  the  Christians.  Costa  (L'impero  romano  e  il 
Cristiancxiino,  Rome,  191.^i,  p.  43,  n.  2)  refers  tlie  clause  i<  al  |)eri(id(i  giudaieo 
del  Crislianesinio  ». 

(')  ifitae  forsitan...  rnnaiil itérant.  The  expression  again  refers  lo  tlie  pagan 
aiiceslors  of  the  Christians.  Forsitan  would  be  entirely  superfluous  if  the 
clause  meant  the  Christian  institutions  founded  by  the  ancestors  of  the 
Christians  of  Galerius's  day.  Cf.  McGiffert,  loc.  cit. 

(')  Hatiffoi.  [La  paix  con.<it.,  p.  182)  limits  the  vetenim  inslilttta  to  w  cultes 
ollieiels  ».  I  hold  lo  the  broader  meaning,  Ihat  Ihe  Christians  had  ceased  lo 
be  good  Romans  politically,  legally,  and  socially,  as  well  as  religionsly. 

(^)  niidfi  pericnlo...  pcmeverarenl.  .Vu  ouen  avowal  of  the  incllectiveness 
of  Ihe  persécution  and  its  niethods.  The  pas.sage  is  entirely  overlooked  or 
iiiisunderslood  by  .Vi.i.ahi»  iop.  cit.,  |>.  161),  who  clainis  Ihal  Galerius  po^ed  as 
a  reformer  and  not  as  a  persecutor.  Batiffoi.  (loc.  rt/.)too  uiijustly  nmarks  : 
<c  il  voudrai!  laisser  croire  que  l'édit  n'a  opéré  (jue  |)ar  intimidation  ». 
Cf.  KiKTH,  Consfantine  the  Great  (IQO.'i),  pp.  1.39-1  iO. 

(*)  It  will  be  seen  Ihat  I  regard  Galerius's  illness  as  merely  one  of  the 
conditioniiig  circumstan'-es  of  the  edict's  publication.  Modem  writers  havc 
greatly  over-eniphasized  this  faclor  in  the  inotivaiion  of  the  decree  —  misled  by 
the  exaggeraled  efforts  of  Kiisebius  and  Laetanlius  to  prove  that  the  Lord  had 
Ihe  most  horrible  of  fates  in  store  for  ail  perseculors  of  tlie  Christians.     See 


700  J.     I!.    KMPFING 

ol"  this  sud  State  of  afi'airs  was  certaiuly  tUe  présence  in 
the  empile  of  such  a  considérable  number  of  non-worsliip- 
ing-  Cliiistians,  beeorae  to  ail  intents  and  purposes  godless, 
since  they  showed  cuit  dévotion  neither  to  the  pagan  gods, 
as  the  terras  of  the  edicts  had  prescribed,  nor  to  tlieir  ow  n 
Christian  God,  because  of  the  persécution  (').  This  is  a 
raost  singular  admission  on  the  part  of  Galerius,  for  he 
hereby  concèdes  a  certain  efficacy  of  power  to  the 
Christian  God  (2)  ;  the  conception  is  still  polytheistic,  but 
not  irreconcilable  with  the  henotheistic  and  syneretistic 
tendeQ'îies  then  curreiit  nnder  the  influence  of  the  Neo- 
platonists  (^).  Galerius  thus  recognized  the  divine  au- 
thority  of  the  Christian  God  and  the  pagan  deities,  but 
maintained  them  as  separate  concepts.  Later  Licinius 
aiid  Constantine  carried  the  development  a  step  farther 
b}'  combining  them,  and  by  showing  dévotion,  in  a  manner 
somewhat  rerainiscent  of  Plotinus  (*),  to  an  unnamed 
and  impersonal  deity,  —  variouslj'^  called  snminus  deiis, 
siimma  diuinitas,  mens  dlvina,  —  who  was  not  the  exclus- 
ive property  of  the  Christians  or  any  sect,  but  might  be 
commoa,  to  ail  religions  faiths,  although  differing  in 
aspect  and  émanation  to  each  and  every  faith  (^). 


Ihe  sane  statement  of  Biïkckhakdt  (Die  Zeit  Cnnstantin'x  des  Grnsxen^  {[880/, 
p.  316)  :  Wir  wollen  den  Lactantius  in  dem  von  Wiirniei'n  zerfressenen 
Unlerlcib  (of  llie  sick  Galerius)  nach  Herzensliisl  wùlilcn  lassen  ». 

fi)  videremus . . .  deum  ohservare.  On  the  charge  of  atheisin  proferred  against 
Ihe  Christians  by  tlie  pagan  philoso|)hers,  see  llie  fragment  (from  KrsEBris, 
(Praep.  evmuj.jl,  2, 1  froni  Porphyrys  Kaxà  tuùv  XpiOTiaviJùv  cilcd  by  Harnack, 
«  Porpiiyrius  «  Gegen  die  Christen  »,  15  Biicher  Zeugnisse  Fragmente  und 
Referale  »,  in  SitzmujslierùlUe  d.  kgl.  Pr.  Akad.  d.  IViss.,  1910,  p.  -iij  :  îtûjç 
b'oû  TravTOxôeev  ôuaaePeîç  dv  eîev  Koi  âBeoi  ci  tUjv  iraTpûuv  é9(Jùv 
diTOOTdvTeç.  Cf.  aiso  Harnack,  Der  Yorœiirf  des  Atheismusin  dendrci  crsten 
Jalirlmnderten,  Texte  und  Untersueliungcn,  XXVIII,  i(190ol;  cp.  Hui.le,  «/>. 
cit.,  p.  oo. 

('■')  Cf.  McGiKKERT.  lor.  cil. 

C)  See  EicKEN  on  the  views  of  Ploliiuis  in  Dir  Lehensanschanungen  der- 
grossen  Dvnker  (G^'"  éd.,  Leip/ig,  190o),  p.  i2i;  Harnack  on  Porphyry  in 
his  Histurg  of  Dogmit,  (transi..  Bichman  1905),  pj).  352-353. 

(*)  Cf.  Pi.oTiM  Enneades  (éd.  Midier,  Berlin,  1878-1880),  II,  9,  9  :  beî...  toîç 
h'âWoiç  vo)LxiEeiv  eivai  xd)pav  irapà  tlù  Oeiù  Kai  \ir\  oûtôv  )u6vov  lucTéxeivov 
TÛEavTa. 

(Sj  (>f.  Batiffol's  sludy  of  aiintmus  dent  as  an  évidence  of  pagan  muno- 
theistic  tendancies  on  the  eve  of  Constantine's  conversion  to  Christianity.  in 
La  pni.r  nmsi.,  pp.  188-201. 


EDICT  OF  GAI.ERirS  701 

Thèse  were  tlie  reflections  wliich  induced  Galerius  to 
«xercise  in  behalf  of  the  Christians  his  wonted  mildness 
and  clemency,  —  a  set  chancellery  form,  —  by  orderiug 
the  immédiate  cessation  of  the  persécution,  and  pardoning 
(i.  e.  indul^eiiticun)  the  Christians  for  their  disobedience 
to  the  impérial  laws  and  customs  in  the  past,  and  by 
implication  for  the  future  also(').  For  Galerius  procèdes 
to  lay  down  the  légal  principle,  whioh  forms  tbe  décisive 
feature  of  the  edict,  ut  denuo  sint  Christiani  et  conventi- 
ciila  coinponant ,  ita  ut  ne  quid  contra  disciplinani  ag-nni. 
By  declaring  tliat  the  Christians  might  again  exist  as  such, 
Galerius  had  in  mind  the  de  facto  status  of  the  Christians 
before  303.  But  this  very  juridical  ruling  of  Galerius 
made  the  légal  status  of  Christianity  after311  différent 
from  that  in  opération  before  303.  For  the  first  time  in 
the  empire's  history  the  Christians  were  specifically  and 
legalh'  granted  the  right  of  professing  tlieir  faith  and 
practicing  their  cuit  (2);  that  is,  they  were  officially  recogn- 
ized  as  belonging,  just  as  the  Jews,  to  a  religio  licita,  or 
perhaps  more  correctiy  to  collegia  licita  (^  .  The  Christ- 
ians were  also  permitted  to  re-establish  their  conveniicula, 
namely.  their  meetings  and  their  ehureh-buildiugs  C*).  In 
other  words,  to  the  right  of  association  already  conceded, 
Galerius  added  tho  right  of  assemblv.  Both  concessions 
^vere  made  with  the  proviso,  ne  <juid  contra  discij)linam. 
agant       Venuti  [^)  and  others  hâve  overemphasized   the 


(1)  SciiwvRTZ  (Kaiser  Constantin,  p.  63)  is  iiiijustified  iii  holdiiii;  llial  «es  (i.  e. 
the  edict)  war  nocli  keiiie  Anerkeiinuiig,  sonderii  iiur  eine  liididgenz,  die  der 
Kirche  gewidirt  wiirdc  ».  The  reoognilioii  of  (Christianity  coiiies  in  th(>  very 
ncxl  clause  df  the  edict. 

(°)  Cf.  B1HL.MKYEK,  lue.  cil.,  p.  .08.^;  and  HiiLi.E,  op.  cit.,  p.  06.  Wai.tzi.ng 
(S.  V.  «  coUegia  »,  in  bict .  d'arch.  chrét.  et  lit.,  lasc.  XXXI  (1914).  col.  -213!») 
altributes  to  the  so-called  EdicI  of  Milan  of  313  ail  the  légal  viiliies  lliat  1 
heie  altrihute  to  the  EdicI  of  Galerius. 

(•')  Sec  E.  ScHiiKEK,  CiBschichte  des  Jiidischen  Votkesim  Zeitatter  Jestt  Christi- 
(1886-1890),  11,  p.  5:2:j,  note  13-2;  W.  LiEnE.v\M.  Znr  GescMchtc  nnd  Oriinni- 
sation  des  roinisc/ien  Verei7>siL'esen  (Leipzig,  1890),  pp.  268.  270.  2" t. 

(*)  See  DccHESSE  (op.  cit.,  II,  27,  n.  3)  :  «  il  faut  remarquer  que  le  ternie 
conventicultcni  signifie,  comme  le  mot  eccleaia,  et  l'assemblée  et  le  Imal  où 
elle  se  tient  ». 

(5)  Op.  cit.,  pp.  308-309.  t;f.  Li.NSK.NM.wER,  op.  cit.  p.  223. 


702  J.    R.    KNIPFING 

arbitrariness  and  possible  contingency  of  tliis  condition, 
for  as  AVissowa  (*)  lias  shown,  tlie  Roman  state  was 
accustomed  to  exact  of  its  citizens  in  tlieir  private  worsliip 
and  of  their  non-citizens  in  tlieir  public  worship  tlie 
condition  that  nothing  be  donc  against  good  order,  tlie 
government,  tlie  law,  and  public  morals.  Tliis  seems  to 
be  the  significance  of  disciplina.  If  tlie  elasticity  of  tlie 
expression  enabled  Maximinus  Daja  subsequently  to 
burden  Christianity  with  restrictions,  it  is  to  be  noted 
that  it  might  per  contra  not  handicap  Constantine  and 
Licinius  in  their  libéral  application  of  the  edict's  provis- 
ions within  their  own  territories.  Besides,  one  can  fairly 
conclude  from  the  conventicula  componant  that  Galerius 
intended  the  decree  to  recognize  ail  ecclesiastical  property 
riglits  of  the  Christian  s  as  légal,  which  had  not  been 
confiscated  by  the  impérial  fiscus  up  to  the  time  of  the 
edict's  promulgation,  or  which  might  be  acquired  by  the 
Christian  Church  subsequently,  for  otherwise  the  con- 
cession to  them  of  the  rights  of  association  and  assembly 
would  become  inoperative  and  a  farce.  It  was  certainly 
contrary  to  lus  intention  to  make  a  wholesale  restitution 
of  the  real  and  personal  property  of  the  Church  taken 
over  during  the  persécution,  for  such  an  important  con- 
cession would  hâve  been  specifically  mentioned  in  the 
contents  of  the  decree  (2).  Yet  it  is  equally  certain  that 
most  of  the  cliurches  would  hâve  to  be  restored  to  the 
Christians  forthwâth,  for  they  were  necessary  to  make 
effective  Galerius's  earnest  désire  that  the  Christians 
should  directly  dévote  their  divine  services  and  prayers  in 
partto  the  welfare  of  their  riilers  and  the  Roman  state  {^). 
Possibly  it  was  Galerius's  intention  to  deal  more  concretely 


(1)  Religion  nnd  Ktillus  (1er  Rome?-  (2"d  éd.,  Munich  î9i2),  pp.  87-88. 

(*)  Cf.  De  Bacci  Venuti,  Dalla  f/rande  perseciizione,  p.  309,  n.  1. 

(3)  Cf.  Crivelixcci,  «  L'ediUo  di  Milano  »,  in  Stadi  slorici,  I,  (1892), 
pp.  243-244.  I  am  fuUy  in  accord  with  Batiffol  (p.  184)  in  the  inlcrpretatioii 
of  the  clause,  debebunt  deum  siium...  pussint  -.  «  on  y  verra  que  le  législateur 
y  parle  un  langage  très  impersonnel,  et  que  d'ailleurs  ledit  porte  le  nom 
de  Constantin  et  de  Licinius  à  la  suite  du  nom  de  Galère».  The  name  of 
Maximinus  Daja  should  be  added.  (Cf.  Seeck,  in  R/iein.  Mniieu)n,  XLVllI  (1893), 
p.  199  et  seq. 


EDICT  OF  GALKUIUS  "03 

with  ihis  phase  ol"  the  problem  in  a  supplementai  y  letter 
(i.  e.  j)er  aliain  aiiteni  epistolani  iiidicibus  si<>nificutiiri 
siimiis,  qiiid  debeant  observare)  to  the  provincial  luagis- 
trates.  It  is  highly  problematic  whetlier  Galerius  ever 
issued  such  a  letter  of  instructions  for  Lactantius  (*)  tells 
us  that  his  death  occurred  very  soon  after  the  edict 
was  published.  Keim  (2),  Crivellucci  (^),  Sesan  (**).  and 
De  Bacci  Venuti  (5),  are  agreed  in  denying  its  existence. 
Even  though  its  dispatch  were  to  be  considered  an  «  his- 
torical  probability  »,  as  Hiille  {^)  avers,  it  by  no  means 
follows  that  the  letter  contained  the  «  many,  hard  condi- 
tions »  to  which  the  Eusebian  introduction  of  the  so-called 
Edict  of  Milan  refers,  and  in  connection  ^vith  which  many 
scholars  C)  believe  that  the  Christians  were  restricted  in 
the  observance  of  worship,  the  propagation  of  faith,  and 
the  acquisition  and  disposition  of  property.  Restrictions 
of  such  a  nature  would  scarcely  comport  with  the  whole- 
hearted  jubilation  with  which,  as  Eusebius  (8)  and  Lac- 
tantius (^)  relate,  contemporary  Christians  liailed  and 
celebrated  the  cdict's  proclamation.  Then  too  such  a 
theory  seems  compromised  by  our  knowiedge  of  the  manner 


(')  De  mort  pers.,  34.  Batipfol  (La  paix  consf.,  p.  ISI)  witliout  Ihe  citation 
of  the  sowrco-proof  (uuknuwn  to  me)  gives  May  oth  as  the  date  of  his  death. 

(-J  Der  Veliertritt  Constantins  des  (irossen  zum  Clirislenttnn  (Zurich,  1862), 
p.  81. 

(•»)  Loc.  cit.,  \).  213. 

{*)  Kirclte  nnd  Stant  im  romisch-byzantischen  Reirhe  seil  Konstnntin  dem 
Grossen  und  bis  zum  Falle  Knnstanlinnpcls,  I  (Czeniowitz,  1911),  p.  220. 

(5)  Op.  cit.,  p.  309. 

(6)  Op.  cit.,  p.  94. 

C)  So  HuNZiKER,  Ziir  Regientnr/  und  Chrislenverfol'^unfi  des  Kai.'<ers  Diocle- 
tians  und  seiner  yachfoUjer.  303-313  (1868),  p  246,  ii.  2;  Zahn,  Knnstmitin 
der  Grosse  und  die  Kirche  (1876),  p.  34;  Mason,  The  Perseottion  itf  Diorletian, 
p.  327,  n.  1  ;  Hii.t;ENKEi.n,  in  Zeittclirift  f.  wiss.  Ilieol.,  XXVII  (1885).  p.  511  ; 
GÔRRES,  ibid.,  XXXV  (1892),  p.  283;  Linsenmayeu,  op.  cit..  p.  227,  n.  6; 
Kriiger,  llandimch  der  Kirclicnfjescliicfite  fiir  Studiennde,  I,  Teil  (Tiihiiigen, 
1911),  ch.  26,  n.  3;  De  Bacci  Vencti,  op.  cit.,  p.  320;  BniiMEVER,  in  Tlieol. 
Qiiartahchr.,  \CWl  (1912),  pp.  217-222;  Batiffoi..  in  Bulletin  d'anc.  litt.  et 
d'urc/u'ol.  chrct.,  III  (1913),  p.  248;  and  Manaresi.  L'impero  romarin  e  il 
Crislianesimo  (Turin,  1914),  p.  496. 

(S)  Uist.  eccles.,  I.  I,  2  and  Mil.  16,  1-2;  De  miirt.  Pulett.,  13,  14. 

(3)  De  m4}rt.  pers.,  35. 


J.    R.    KNIPFING 


of  enforcing  the  edict  of  Galerius  even  in  the  territory  of 
their  most  relentless  enemy,  Maximinus  Daja,  where  the 
Christians  a  called  togetlier  their  congrégations  in  every 
city,    thronged    the    meetings    for    divine    service,    and 
observed  the  cérémonies  of  established  usage  »  (^)  ;  and  by 
the  additional  évidence   of  Eusebius  (')  that  Maximinus 
«  allowed  this  to  go  on  in  this  way  for  almost  six  months  », 
If  such  a  favorable  interprétation  of  the  clauses  of  the 
Galerian  decree  actually  operated  within  the  territory  of 
Maximinus,  it  is  not  illogical  to  suppose  that  the  more 
friendly   disposed   emperors,   Oonstantine   and   Licinius, 
conceded  less  to  the  Christians  of  their  respective  terri- 
tories.     It  is  even   possible   that  Constantine,  at  least, 
interpreted  the  conventicula  componant  in  such  a  gênerons 
fashion  as  to  return  to  the  Christian  Church  whatever  of 
its  real  property,  —  eonfiscated  in  the  course   of  Dio- 
cletian's  persécution,  —  still  remained  in  the  possession 
of  the  impérial  fiscus,     This  fact  would  explain  the  other- 
wise  inexplicable  mystery,   that  none    of  the   law-codes 
or  the    Christian  historical  tradition  of  the  period  hâve 
transmitted  the  knowledge  of  any  such  législative  enact- 
ment  of  Constantine  for  Gaul,  Spain  and  Britain,  providing 
for  the  restitution  of  the  eonfiscated  church  property  in 
his  domains. 

From  the  foregoing  analysis  it  will  be  observed  that  we 
attach  much  greater  importance  to  the  edict  of  Galerius 
in  its  juridical  aspects  than  lias  generally  been  its  lot  at 
the  hands  of  historical  scholarship.  Tillmont  (^),  for 
instance,  lias  dismissed  it  with  a  few  contemptuous  liiies 
in  his  monumental  Mémoires.  But  Eusebius,  it  seems  to 
me,  judged  more  wisely,  in  his  belief  that  the  edict  marked 
an  epoch  and  turning-point  in  the  history  and  destinies  of 
the  Christian  Church  by  undertaking,  iramediately  tliere- 
after,  the  first  éditions  of  his  Church  History  and  the 
Martyrs  of  Palestine  ['*}.    With  this  législation  of  Galerius 


(1)  Cf.  KisKitiis,  Hisl.  écries.,  IX,  1,  8. 
(ïj  Ihid.,  IX,  2. 

(•'')  Mémoires  pour  servir  à  l'histoire  ecctésiastitpie,  W.  p.  44. 
(■*)  Cf.  SciiwAHTZ,  Eusebius  tVerke,  11,  3(1909),  p.  LVii;  aiul  û/.,  s.  v.  Elsebios, 
in  Pauly-Wissown,  Bd.  VI  (1909),  col.  1403. 


F.DICT  OF  GALKlill'S  Tor, 

the  old  légal  i'onmila,  non  licct  esse  chrisliunos,  wiih  del'ini- 
tively  sholvcd,  Cliristianity  became  a  toleiated  cuit  aiid 
rcli^io  liciia  on  a  par  willi  .Indaisni,  \\\th  its  riglits  of 
association,  assejubly,  conscience,  cnlt,  and  of  future 
property  legally  safeguarded.  With  it  toc  began,  as  Wis- 
so\va(^')  acutely  observes,  a  genuine  religions  i-evolution 
among  tlie  Romans,  \\liicli  was  to  lead  in  but  tlirec  généra- 
tions' time  to  the  complète  destruction  of  the  Roman 
state-religion. 

John    R.    Ivmi'I-ino. 

Oliio  Staie  Univprsity 
("olumbus.  Ohio,  U.  S.  A. 


(')  Hrlifiid)!  iniil  htilliis  tirr  IHiiinr''  Miuicln'ii,  l!il:>  .  p.  '.Mi. 


45 


Les  sources 

de  l'histoire  du  Congo  antérieurement 

à  l'époque  des  grandes  découvertes 


A  partir  de  la  découverte  du  Congo  en  1482  par  le  navi- 
gateur portugais  Diogo  Câo,  il  y  a  eu  des  essais  de  péné- 
tration à  l'intérieur  du  pays  et  des  essais  d'évangélisation 
constamment  renouvelés  avec  plus  ou  moins  de  succès 
durant  les  xvi' ,  xvii«  et  xv!!!*^^  siècles.  Le  pays  est  resté,  au 
moins  nominalement,  sous  l'obédience  des  rois  de  Portugal 
qui  cherchaient  des  points  d'api)ui,  tantôt  à  San  Salvador, 
capitale  du  royaume  indigène  du  Congo,  tantôt  à  Loanda, 
future  capitale  de  la  colonie  actuelle  d'Angola. 

L'historique  de  ces  tentatives  de  colonisation  a  déjà 
séduit  ])lus  d'un  chercheur.  Citons  particulièrement  : 

Paiva-Manso  (V^*^  de).  —  Ilistoria  do  (!onf>-o.  Documentes, 
Lisboa,  1877.  (Renferme  surtout  des  documents  emprun- 
tés aux  archives  de  Lisbonne.) 

EucHER  (0.  F.  M.).  —  Le  Congo.  Essai  sur  l'histoire  leli- 
i>-ieiise  de  ce  pays  depuis  sa  découverte  (  If^l)  jusqii'n  nos 
Jours,  Huy,  1894.  (Intéressant,  mais  trop  peu  critique.) 

Ravensteix.  —  The  strange  adventures  of  Andrew  Battel 
of  Leigh  in  An<>ola  and  adjoinin<>;  régions,  Lou- 
don,  litOI.  (La  publication  de  la  relation  de  Battel  est 
suivie  d'une  coui'te,  mais  précise  histoire  du  Congo.) 

AvELOT  (R.).  Les  g-rands  inouoeinents  des  peujdes  en 
Afrique.  Jaga  et  Zinxba.  «.  Hull.  de  géographie  histo- 
rique »,  1912,  p    7o-2l()  (Important  pour  les  migrations.) 

SiMAR  (Th.).  —  Le  <^ong<)  au  XVL  siècle  d'après  la  relation 
de  Lopez-Pigafetta  («  Revue  congolaise  »,  1911,  p.  266  et 
suiv.,  tiré  à  part,  Bruxelles.  1919.  Etude  critique  de  la 
l)lus  ancienne  relation  connue). 


708  TH.    SlMAt^ 

Zi:ure(E.  p.).  —  Rome  en  Congo.  Ouer  Kon'>(>'s  hekeering-s 
g-e.schiedcnis  noor  de  XVIII'  ceiun  («  Onze  Kongo  »,  1912, 
bl.  322  en  volg.).  (Intéressant,  mais  se  borne  aux  généra- 
lités.) 

PiKENNK  (J.).  —  Coup  d'd'il  sur  riiisloire  du  (À)ngo, 
Bruxelles,  llt21.  (Tiré  à  part  d'une  esquisse  historique 
accompagnant  les  rapports  du  Congrès  colonial  de  1920.) 
(Récit  forcément  bref  mais  précis.) 

R.  P.  Van  Wing  (S.  J).  —  Études  liakongo  Histoire  et 
sociologie,  Bruxelles,  1921.  (Bibliothèque  «  Congo  », 
vol.  III.)  L'histoire  de  la  période  envisagée  forme  l'intro- 
duction à  la  sociologie  des  Bakongo.  C'est  le  meilleur 
travail  sur  la  matière,  car  l'auteur  connaît  à  fond  le  pays, 
ses  habitants,  leur  langue  et  leurs  traditions  unces- 
trales. 

Malheureusement,  pour  qu'une  synthèse  d'ensemble 
puisse  être  entreprise  avec  quelque  chance  de  succès,  il 
impoiterait  d'avoir  à  sa  disposition  les  nombreux  docu- 
ments inédits  qui  se  trouvent  épars  dans  diverses  biblio- 
thèques ou  dépôts  d'archives. 
Nous  n'avons  pas  la  prétention  de  cataloguer  ici  toutes 
.  ces  sources.  Nous  signalerons  simplement  ce  que  nous 
ont  révélé  de  rapides  et  superficiels  coups  de  sonde  jetés 
çà  et  là  au  hasard  d'autres  recherches  ou  de  voyages 
d'études. 

Les  deux  dépôts  les  plus  importants  se  trouvent  viai- 
semblablement  à  Lisbonne  et  à  lionie. 

Lisbonne.  —  Les  riches  archives  de  Lisbonne  (Torre  do 
Tombo)  ont  déjà  livré  plus  d'un  secret,  grâce  aux  publica- 
tions du  vicomte  de  Paiva-Manso,  Ilistoria  do  Congo, 
citée  ci-dessus,  de  Luciano  Cordeiro  (Meniorias  do  Ultrn- 
niar.  Viagens  e.xjtlorucôes  e  (•on(]uistHs  de  Portuguezes. 
Collevùo  de  Docnnienios;  Lisboa.  împr.  nac,  1881),  d'au- 
teurs anonj'^mes  (Bolet ini  du  Sociednde  de  (ieogr:\])hia  de 
Lisboa,  1883  et  Alguns  docunicntos  do  urchiuo  nacional  da 
Torre  do  Tombo  acerca  das  navegacoes  e  conquistas  Portu- 
guezes. Lisboa,  Impr.  nac,  1892  et  1902). 

(Cf.  aussi  Anuario  de  Escola  Colonial.  liisboa,  année 
1919-1920.) 


soT'ncES  DF  l'histoihk  m   congo  709 

Mais  rien  ue  prouve  que  tout  ait  été  mis  à  jour,  ni,  sur- 
tout, que  tout  ait  été  inventorié  On  voudra  bien  se  rappe- 
ler que  la  pln})art  de  ces  documents  ont  été  i)ubliés  à  une 
époque  où  le  Portugal  disputait  à  lAssociation  interna- 
tionale africaine  la  possession  du  bassin  du  Congo  et  où  il 
avait  intérêt  à  faire  valoir  ses  droits  historiques.  Or.  ces 
publications,  composées  en  temps  de  polémique,  pèchent 
souvent  par  quelque  endroit.  Il  est  au  moins  permis  de  la 
sui)poser  et,  le  cas  échéant,  de  le  vérifier.  Une  exploration 
minutieuse  de  l'Archivo  de  Marinha  e  Ultramar  s'impose 
donc. 

Roiiic.  Aichiocs  vndcnncs.  —  On  y  trouve  notamment 
divers  brefs  des  Souverains  Pontifes  aux  rois  du  Congo, 
un  récit  détaillé  des  négociations  entamées  par  Dnarte 
Lopez  à  l'effet  d'intéresser  le  pape  Sixie  V  à  la  mission  du 
Congo  {Xiinzintiira  di  Spagiia,  t.  XXXVIIl,  f"  241  seq.), 
différentes  questions  et  réponses  sur  la  situation  géogra- 
phique, l'état  social  et  religieux  de  ce  royaume,  ilhid.. 
Archiv.  Borghese,  ser.  II,  23-24,  186  et  suiv.) 

A  signaler  aussi  une  relation  intéressante  intitulée  De 
stuiu  rcgni  Congi  (publiée  par  Th.  Simar,  «  Une  relation 
inédite  sui-  le  Congo  »,  dans  Mélanges  (Charles  Moeller. 
Louvain,  liM4,  vol.  II.) 

Toute  une  liasse  {Fonda  Borghese,  sér.  I,  t.  721, 
p.  368-3S6)  contient  le  récit  de  la  réception  à  Rome  d'un 
ambassadeur  extraordinaire  du  roi  Alvaie  à  Sa  Sainteté, 
en  1G08,  de  sa  mort  inopinée  et  de  ses  funérailles.  (V.  à  ce 
sujet  princesse  de  Caraman-Chimay-Horghèse,  Belges  et 
Africains.  Rome,  1910. 

Le  texte  des  instructions  remises  i)ar  le  roi  Alvare  11  à 
son  ambassadeur,  don  Antonio  Emannele.  au  moment  de 
son  départ  de  San-Salvador,  le  17  août  l()04.  est  renfermé 
dans  Arm.  XV,  n°  101.  f»  47-oU. 

Signalons,  entre  autres  i)ièces,  une  lettre  de  J.  B.  Vives, 
ambassadeur  du  roi  du  Congo,  à  l'empereur  d'Ethiopie 
(Reg.  lat.,  387.  f"  188,  du  \H  avril  1017).  Vives  propose 
au  roi  d'Abyssinie  de  s'entendre  avec  le  roi  du  Congo 
pour  la  création  d'une  voie  d'accès  vers  ri<]thiopie  par  le 
Congo.    Les  coi-respondances   d'Lthiopic   anivcroiu   plus 


710  TH.    SIMAR 

aisément  à  Rome  et  vice  versa  ;  des  secours  parviendront 
plus  rapidement  à  l'empereur,  s'il  est  attaqué  par  les 
Turcs. 

Ceci  nous  indique  une  des  préoccupations  principales  de 
la  Cour  de  Rome  quand  elle  prenait  tant  à  ca>ui-  les  intérêts 
de  la  chrétienté  au  Congo.  Elle  songeait  à  la  croisade 
contre  les  Turcs.  D'après  les  cartes  de  l'époque,  on 
croyait,  en  effet,  à  une  liaison  fluviale  aisée  entre  le  Congo 
et  l'Abyssinie,  et  on  pensait  ainsi  attaquer  l'Islam  par  der- 
rière en  concluant  une  alliance  entre  les  Eiats  d'Euro])e 
et  les  chrétiens  d'Abyssinie. 

Archives  de  lu  PropH^HiKle.  —  Elles  se  i-ai)j)ortent 
presque  exclusivement  à  la  mission  des  Capucins,  depuis 
ses  origines  (i64o)  jusqu'à  son  extinction  dans  le  courant 
du  XIX*  siècle. 

Les  documents  sont  contenus  dans  les  registi'cs  les  i)lus 
divers  :  lettres  écrites  à  la  Propagande,  brefs  et  décrets, 
Scrittiirc  riferite  nei  coni>rcssi.  Atti  f>enei'ali  e  jmriico- 
lari,  etc. 

Nous  axons  feuilleté  particulièrement  les  volumes  des 
Lettere. 

Il  y  a  quelques  pièces  au  vol  liiO  conceniant  la  Perse, 
l'Egypte,  l'Ethiopie,  les  Indes  et  l'Afrique;  au  vol.  247 
{AfricH  e  (hn^o)  Mais  le  vol  250  tout  entier  est  consacré 
à  notre  mission. 

Nous  signalons  au  fo  53  et  suiv.  une  relation  fort  inté- 
]-essante  sur  le  Congo  et  les  pays  avoisinants.  Au  f''  75, 
une  autre  relation  imi)ortante  par  les  renseignements  géo- 
graphiques et  ethnographiques  qu'elle  donne.  Elle  est 
accompagnée  d'une  carte  assez  i)récise  que  nous  avons 
reproduite  autrefois  dans  la  Revue  eont>olaise,  1913-1914. 
(Cf.  Archives  conf>;()laises.  p   24  du  tiré  à  part.) 

F"  267  et  suiv.  Relation  de  la  conversion  de  la  reine 
Ginga  (Nzinga)  (pii  fit  grand  bruit  à  cette  époque. 
(Cf.  Gioia,  La  maravi^liosa  conuersione  ulla  saule  fecle  di 
Cristo  délia  regiiia  (jinga,  Napoli,  1660.) 

Parmi  les  Scritlure  riferite  nei  (longressi,  nous  avons  ]>u 
examiner  les  deux  premiers  volumes  àWfricae  Congo  et 
une  partie  du  troisième. 


SOURCES   DE   l'histoire  DU   CONGO  711 

A  signaler  une  relation  extrèmeiiu'nt  vivante  d'un  voyage 
apostolique  dans  l'Angola  lait  en  1684  par  le  1*.  l'raucesco 
da  Monteleone  (\o\.  I,  1°  777-790).  Un  mémoire  sur  l'état 
des  missions  dejniis  leur  début,  dressé  par  le  P  Fruiicesco 
Maria  de  Pavia,  en  1700  (vol  III,  t»  loH-IBo).  Un  mémoire 
du  même  genre,  dressé  à  Loanda,  en  1707,  figure  au  \f)l.  I 
des  .Srr/f/«/-e.  M36-142. 

C'est  tout  ce  que  nous  connaissons,  à  l'heure  actuelle,  des 
archives  de  la  Propagande. 


Des  relations  inédites  d'autres  missionnaires  existent 
encore  ailleurs  qu'à  Rome.  Il  y  aurait  à  la  Bibliothèque 
nationale  de  Pai'is  une  notice  d'un  jésuite  portugais,  inti- 
tulée Kelaçoes  de  Angola  tirnilas  do  Cartorio  do  Collegio 
dos  Padres  dn  Compmihin,  loo9  à  lo86. 

La  bibliothèque  de  Rimini  renferme  une  relation  écrite 
jjar  des  Carmes  déchaussés  (P.  IV,  Miscell.  n°  3l5i. 

La  famille  Bisi  de  Coreggio  i)ossède  un  mémoiie  manu- 
scrit du  P.  Giacinto  da  Yetralla,  analysé  sommairement 
par  G.  Simonetti.  (Cf.  Bull.  Soc.  geog.  ital.,  VIII,  i-o, 
1907,305-322,369-381.) 

Le  P.  da  Caltanissetta  a  aussi  laissé  un  récit  de  son 
voyage  au  Congo  en  1701.  (Cf.  M.  Natale,  Une  relnzionc 
îneditii  snl  Congo  scritta  da  P.  Luca  da  Caltanissetta 
nel  1701.  Caltanissetta,  1906.) 

Le  P.  U.  d'Alençon.  dans  son  «  Essai  de  bio-bibliogra- 
phie capucino-congolaise  •»  [Xeerlandia  franciscana,  vol.  1, 
1914  et  II,  1919),  indique  également  plusieurs  manuscrits 
contenant  des  relations  de  missions  et  disséminés  cà  et  là 
surtout  dans  les  bibliothèques  italiennes. 

Il  n'est  pas  douteux  non  plus  que  les  archives  hollan- 
daises n(>  recèlent  de  i)récieux  renseignements,  car  les 
Hollandais  occupèrent  un  instant  Loanda  et  se  firent 
envoyei-  des  notes  très  précises  sur  les  possibilités  éc(mo- 
miqnes  du  pays.  iCf.  la  relation  de  Dapper  dont  nous  pai- 
lons  ci-dessous.) 

Après  la  reclierche  i>atiente  des  archives  manuscrites,  il 
y  aurait  lieu  de  rechercher  les  cartes  anciennes  d'Afi-i(|ue 
et  spécialement  du  centre  africain. 


719  TH.    SIMAR 

Jusqu'ici  on  n  l'ait  très  peu  d'investigations  sérieuses  en 
dehors  du  xvi''  siècle.  Nous  avons  donné  une  notice  sur  la 
colleotion  des  cartes  anciennes  d'Afrique  catalogué«;s  à  la 
Bibliothèque  du  Ministère  des  Colonies,  dans  VAuniiHirc 
lie  la  Socictc  <lcs  bibliophiles  ci  iconophiles  de  Belgique 
pour  l'J'>(). 

Il  im])orterait  de  touiller  à  cet  cgai-d  les  grands  dépôts 
cartographiques  de  la  Bibliothèque  nationale  à  Paiùs,  du 
British  Muséum  de  Londres,  des  Bibliothèques  de  Munich 
et  de  Vienne,  etc. 

A  côté  des  relations  manuscrites,  il  existe  natui-ellcnient 
des  relations  iini)riniées  dont  quelques-unes  sont  très 
rares    Voici  les  pi-incipales  : 

Celle  du  Portugais  D.  Lopez,  intitulée  lielatione  ciel 
Reame  di  Congo  e  délie  circonvicine  coût  rade  traita  dalli 
scritti  c  rag-ionanieuti  di  Odoardo  Lojtez  per  Filippo  Piga- 
fetta,  Ronia,  loUI.  (Cf.  notre  étude  critique  sur  cette  rela- 
tion, Bruxelles,  1919,  indiquée  ci-dessus.) 

Celle  de  Samuel  Brun  {Samuel  Bruns  Schiffarten) 
publiée  en  1914  par  S.  L.  Honoré  Naber. 

Celle  d'O.  Dapper  {Nauwkeurigebeschrijuiug  der  Afri- 
kaansche  gewesteu,  Amsterdam,  KJfiSj. 

Celles  des  PP.  Capucins  Cavazzi  (importante  :  Istorica 
desrrizzione  degli  tre  regui  Congo,  Angola  et  Matamba, 
Bologna,  1687),  Francesco  Romano  (1648),  Merolla  (1692), 
Zucchelli  (1712)  et  d'autres.  (Cf.  une  bibliogi-aphie  très 
détaillée  par  le  P.  U.  d'Alençon,  dans  Xeerlandia  francis- 
cana,  I,  1914,  p.  33-42,  251-265,  II,  1919,  101-126.) 

Nous  pensons  qu'il  serait  utile  de  les  rééditer  pour  en 
l'aire  une  collection  coloniale  analogue  à  celles  qui  sont 
publiées  en  France,  en  Angleterre  et  en  Hollande. 


L'intérêt  qu'offre  la  publication  de  tous  ces  documents 
ne  peut  échapper  à  quiconque  s'occupe  directement  ou 
indirectement  de  choses  coloniales. 

Tout  d'abord,  il  y  a  là  pour  nous  Belges,  un  intérêt 
national.  Désormais  l'histoire  du  Congo  J'ail  partie  de 
l'histoire  belge.  Nos  exi)lorateurs,  nos  officiers,  nos  mis- 
sionnaiics   continuent  l'œuvre   de   civilisation    entreprise 


SOURCES   DK    r.'HISTOIRE   DU   CONGO  713 

plusieurs  siècles  aui)arîiviiiit  i)ar  les  j)r('iniei's  pionniers  de 
roccu])atiou  (lu  Bas  Cone^o.  Nous  reirouvons  ])aruii  eux  des 
compatriotes  tels  que  les  Capucins  Georges,  de  (iheel  ; 
Jiasile,  de  Caïubiai;  Félix  «  Fiamingo  ■>■>  Felicissinio.  d'An- 
vers; François  Marie,  de  Hnixclles  ('). 

Les  Portugais  avaient  corai)ris  eux-niêuies  le  parti  à 
tirer  de  l'occupation,  même  précaire,  du  vaste  territoire 
qui  s'étend  de  l'embouchure  du  Congo  à  Saint-Paul  de 
Loauda.  Si  notre  immense  colonie  ressemble  à  un  récipient 
bombé  nu  goulot  ti'op  étroit,  si  nous  sommes  pour  ainsi 
dire  embouteillés  entre  l'Afrique  équatoriale  Iraneaise  et 
l'Angola  portugais,  c'est  à  l'histoire  que  nous  le  devons. 
Loi-s  du  partage  définitif  du  centre  africain,  les  Portugais 
ont  fait  état  de  leur  occupation  séculaire  pour  se  faire 
attribuer  toute  cette  partie  de  territoire  qui  forme  poni- 
tant  l'hinterland  naturel  de  nos  ])orr  côtiers.  Borna  et 
Matadi. 

La  publication  hàti\e  de  Vllistoii-c  du  (lon^o  pai-  Païva- 
Manso  n'eut  pas  d'autre  but  que  de  prou\  er  aux  i)uissances 
eui'opéennes  le  bien-fondé  des  réclamations  portugaises. 
Les  Portugais  poussèrent  même  leurs  ])rétentions  beau- 
cou])  plus  loin.  Ils  se  basaient  sur  les  cartes  du  xvi'  et  du 
xvii'siècle  pour  soutenir  que  leui-s  explorateui-s  avaient  par- 
couru tout  le  centre  africain  jiis({u'à  la  région  des  Grands 
Lacs  Toute  une  conti'overse  politico-géogra])hi(iue  s'enga- 
gea à  cette  époque  entre  notre  compatriote  A.-.I.  ^\'auters 
et  l'érudit  Luciano  Cordeiro.  Cette  dispute  ne  s'est  jamais 
complètement  ajjaisée.  Des  études  récentes  montr<'ut  que 
certains  savants  croient  encore  aux  randonnées  des  pion- 
niers poi-tugais  jusqu'au  cœur  même  de  l'Afrique,  randon- 
nées demeurées  inconnues  jusqu'au  xix®  siècle,  mais  dont 
les  résultats  aui'aient  été  portés  sur  les  cartes  anciennes 
de  l'Afrique.  F]n  fait,  on  démontre  aisément  que  les  con- 
naissances géographiques,  aux  xvi"'  et  xv!!*"  siècles,  n'ont 
pas  dépassé  le  Stanley-Pool  et  le  Kwaugo  et  que  les  docu- 
ments cartographiques  de  l'époque  ont  mêlé  à  des  notions 
dignes  de   foi  sui-  le  Congo,  l'Angola,  le    Mozambicjue  et 


('>   Cl.  I'.  VvN    Win...  Khiil,s  l!,dn„</<,.  |,.  C.K. 


714  TH.   SIMAR 

l'A b^'ssinie,  des  réminiscences  historiques  dues  à  Ptolémée 
et  aux  géographes  arabes  (i). 

Quoi  qu'il  en  soit,  il  y  a  un  intérêt  évident,  même  en 
dehors  d'une  simple  curiosité  intellectuelle,  à  faire  une 
étude  critique  de  ces  nombreuses  cartes. 

La  publication  des  archives  congolaises  soulève  ensuite 
des  problèmes  d'expérience  coloniale  et  relève  aussi  de 
l'histoire  générale  de  l'expansion  européenne.  Elle  montre 
que  ni  la  recherche  des  métaux  précieux,  ni  le  trafic  des 
esclaves  ne  peuvent  servir  de  base  à  une  colonisation 
sérieuse.  L'occupation  portugaise  a,  somme  toute,  préci- 
pité la  décadence  de  l'ancien  emjnre  congolais  plutôt 
qu'elle  ne  l'a  empêchée 

Que  serait-il  advenu,  si  ces  embryons  de  formations 
politiques  nègres  avaient  pu  être  développées,  cimentées, 
fortifiées  par  une  intervention  adroite  et  expérimentée? 

Que  l'on  nous  entende  bien  cependant.  Nous  ne  nions 
pas  que  la  Couronne  de  Portugal  n'ait  été  animée  à  l'égard 
des  indigènes  des  meilleures  intentions.  Xous  applaudis- 
sons de  tout  cœur  à  ce  revirement  qui  s'opère  à  l'heure 
présente  en  faveur  des  méthodes  coloniales  des  Espagnols 
et  des  Portugais.  Les  peuples  qui  ont  conquis  à  la  culture 
latine  les  immenses  provinces  de  l'Amérique  centrale  et 
méridionale  ne  sont  pas  des  peuples  incapables.  Ils  sont, 
eux  aussi,  des  «  bâtisseurs  d'empires  »,  dont  le  grand 
mérite  sera  d'avoir  fait  prévaloir  dans  l'expansion  des 
principes  d'ordre  spirituel  et  moral.  Nous  aurons  bientôt 
l'occasion  de  nous  en  expliquer  franchement  dans  notre 
future  Histoire  des  doctrines  coloniales.  Malheureusement 
les  colonies  du  Congo  et  d'Angola  n'ont  pas  été  exploitées 
pour  elles-mêmes.  Elles  servaient  de  réservoir  pour  la 
tratie  des  nègres  qu'on  envoyait  par  milliers  travailler 
dans  les  mines  et  plantations  d'Amérique,  depuis  que  les 
énergiques  réclamations  des  missionnaires  avaient  réussi 


(*)  Cf.  à  ce  sujet  iiolrc  Nofc  sur  les  cartes  anciennes  irA/niiue  du  Miiiislt're 
des  Colonies,  p.  7-8  du  tii  i-  à  i)!irt  :  Laxœn.mmku,  «  Die  Darstellun^  dor  Zeii- 
Iralnrrikanischeu  Scenregion  von  Ptolenuieus  l)i.s  d'Anvilie  »,  Pelenn.  Mitteil., 
1010  cl  UiASiTTi,  c(  La  carta  dell'  Afiica di  G.  Gaslaldi  (I5i5-1.^6i)  e  lo  suiluppo 
dclla  cartografia  africana  nei  soc.  xvi  c  xvii  ».  (lioll.  Itraic  Soc  Gcof/r.  ital., 
H»20,  p.  .3-27-3 i(5  et  3.=î7-i36.) 


SOURCES  DE  L'hISTOIHE   DU   CONGO  7  I  i3 

à  empêcher  l'exploitation  (lew  Indiens  et  rextinction  eoni 
plète  do  leur  race. 

Las  Casas,  estimant  qu'entre  deux  maux  il  laut  choisir 
le  moindre,  avait  toléié  l'envoi  de  la  maiu-d'd'us  re  noire 
en  Araéri(]ue  L'Angola  et  le  Congo  devinrent  donc,  pour 
leur  malheur,  des  colonies  à  esclaves.  On  trouve,  à  cette 
époque,  chose  toute  naturelle,  cet  esclavage  qui  nous 
paraît  si  odieux  La  plupart  des  publicistes,  des  philo- 
sophes et  des  juristes  admettent  sa  légitimité,  à  ])arl 
(pielques  exceptions.  Xous  devons  attendre  les  apostrophes 
gén('reuses  de  Montesquieu  [)Our  que  le  monde  civilisé  se 
demande  enfin  si  l'esclavage  est  on  non  confoime  aux  exi- 
gences de  la  morale  et  de  l'humanité.  La  Couionne  de  Por- 
tugal croit  donc  avoir  assez  i'ait  pour  les  nègres  en  leur 
envoyant  des  prêtres  et  des  missionnaires  qui  les  haptisent 
et  leur  assurent  le  salut  éternel.  Cette  situation  délicate 
entrave  aussi,  cela  se  conçoit,  l'œuvre  des  missions.  Il  y  a 
là  un  si  criant  contraste  entre  l'enseignement  chrétien  et 
les  pratiques  esclavagistes  qu'à  un  certain  moment,  la 
Propagande  i)rend  directement  en  mains,  et  sans  passer 
pour  ainsi  dire  par  l'intermédiaire  du  gouvernement  civil, 
l'évangélisation  de  ces  lointaines  contrées. 

Mais  cette  procédure  devient  alors  la  source  d'ennuis  de 
tout  genre.  La  Couronne  ne  soutient  pas  les  nouveaux 
veiuis.  Le  clergé  régulier,  évoque  en  tête,  les  voit  de  mau- 
vais œil,  quand  il  ne  leur  suscite  pas  des  difficultés,  et 
dans  ce  dédale  d'intrigues  sournoises,  les  i)etits  potentats 
indigènes  se  jouent  avec  une  habileté  souveraine,  soute- 
nant tantôt  les  uns,  tantôt  les  autres^  et  n'aj'ant  au  (ond 
qu'un  seul  but  :  l'expulsion  des  uns  et  des  autres. 

De  là,  les  résultats  lamentables  des  essais  d'évangélisa- 
tion,  les  efforts  infiuctueux  des  apôtres  les  plus  infati- 
gables—  et  Dieu  sait  s'il  y  en  eut  jjarmi  cette  hcroïipie 
])halange  — ,  les  tentatives  sans  cesse  abandonnées,  puis 
renouvelées,  sansesj)rit  <lc  suite  et  sans  cohcsion. 

L'union  intime  du  pouvoir  civil  et  du  pouvoir  religieux 
est  une  nécessité  absolue  (luand  on  veut  rcussii-  aux  colo- 
nies. Le  missionnaire  et  le  commerçant  tloivcnt  sui-.i'c 
l'officier  et  non  pas  se  passer  de  lui.  Le  polititjue  aiguille 
à  la  fois  réconomi(]ue  et   le   religieux,   'l'elie  est  la  let;on 


710  TH.    SIMAR 

capitale  qu'a  donnée  au  monde  notie  édueatrice  commune, 
Rome,  qui  s'y  entendit  à  bâtir  des  empires  durables. 

Mais  dans  le  cas  qui  nous  occupe,  le  vieil  esprit  romain, 
bien  ((ue  représenté  par  la  monarchie  portugaise  et  l'Église 
catholique,  ne  pouvait  triomi)her.  Le  pouvoir  politique  est 
trop  faible  d'abord.  Les  Portugais,  pas  plus  ici  qu'en  Inde, 
n'ont  réussi  à  s'implanter  solidement.  Et  puis,  pour  les 
raisons  que  nous  avons  dites,  ils  ne  soutiennent  pas  nette- 
ment, ouvertement,  le  pouvoir  religieux 

Eu  outre,  nos  missionnaires  manquent  d'expérience.  Les 
fièvres  tropicales  font  de  terribles  ravages  dans  leurs 
rangs.  Les  uns  meurent,  les  autres  reviennent  atteints  de 
maladies  incurables.  Et  ils  ne  possèdent  pas  les  moyens  de 
prophylaxie  modernes. 

De  plus,  au  début,  ils  se  servent  d'interprètes.  Ils  ne 
connaissent  pas  la  langue  des  indigènes;  ils  ne  com- 
prennent pas  les  mentalités  que  le  fétichisme  de  la  coutume 
a  façonnées  et  détournées  des  sentiers  du  simple  raisonne- 
ment. Ils  s'étonnent  des  rechutes  continuelles  de  leurs 
ouailles.  Ils  se  mettent  en  colère,  brisent  les  fétiches, 
excitent  contre  eux-mêmes  les  «  partisans  des  coutumes 
ancesti'ales  »  Hâtons-nous  de  dire  cependant  que  les  leçons 
reçues  portent  leurs  fruits.  On  voit  apparaître  bientôt  des 
ouvrages,  des  catéchismes  eu  langue  fiote.  Les  mission- 
naires ont  compris!  Malheureusement,  dès  que  les  affaires 
l)rennent  une  bonne  tournure,  uue  catastrophe  arrive,  il 
faut  tout  recommencer.  Odj'^ssée  à  la  fois  lamentable,  glo- 
rieuse et  tragique. 

Les  historiens  coloniaux  ne  trouveront  pas  seuls  d'utiles 
leçons  dans  ces  documents.  Les  sociologues  en  tireront 
aussi  des  enseignements.  D'ordinaire,  ils  ont  une  tendance 
à  regarder  les  peuples  primitifs  comme  des  peuples  sans 
histoire,  moulés  par  leur  milieu  physique  et  social,  inca- 
pables d'en  sortir,  par  défaut  d'individualité.  Vue  autre 
école  prétend  même  que  la  mentalité  primitive,  baignée 
sans  cesse  dans  une  causalité  mystique,  est  privée  du  pou- 
voir d'abstraction  et  imperméable  à  l'expérience. 

Or.  nos  documents  prouvent  que  si  les  primitifs  n'ont 
pas  d'histoire,  c'est  tout  simplement  parce  que,  neuf  fois 
siii-  dix,  nous  ne  la  connaissons  pas.   En  l'espèce,  on  voit 


SOinCKS  DE  L'HISI'OIHK  du  CONGO  717 

nettement  un  t>mpire  assez  vaste  puisqu'il  sCtcnd  ^ur  toute 
la  région  sise  entre  le  nord  du  Congo  jusciu'au   Kwango, 
s'effriter  lentement  par  l'effet  de  causes  internes  :  l'affai- 
blissement du  pouvoir  central  et  l'esprit  d'indépendance 
des  vassaux.  L'arrivée  des  l'ortugais  accélère  encore  cette 
décadence,  aussi  bien  que  l'invasion  des  Bayaka  (pii  des- 
cendent des  plateaux  du  Kwango  et  ravagent  tout  sui  leur 
passage.  Tout  cela,  c'est  bel  et  bien  de  l'histoire  (jui  pour- 
rait,   imiUitis    mulHiidis,    être    comparée    à    l'histoiie    de 
nos  États  européens  modernes.    Nous   voyons   en  même 
temps    les    individualités    à    l'œuvre   :   ces    vassaux   qui 
cherchent  à  substituei-   leur  autorité  à  celle  du  roi,  qui 
donnent  cours  à  leur  esprit   d'intrigue  lors  de  l'élection 
d'un  nouveau  souverain,  ces  loitelets  eux-mêmes,  avisés 
et  retors,  habiles  à  pratiquer  toutes  les  finesses  de  la  poli- 
tique, tout  cela  nous  indique  que  nous  avons  affaire  à  des 
personnalités  qui  pensent  comme  nous  et  qui  se  débar- 
rassent aisément  de  leur  mystique  coutumière  quand  leurs 
intérêts    personnels    sont    en    jeu.    Ces    chefs    potentats 
jouissent  d'un  prestige  incomparable  vis-à-vis  de   leurs 
sujets.   Les  missionnaires  catholiques  l'ont  bien  compris, 
puisqu'ils  s'efforcent    de   les  convertir  avant   tout   autre 
essai    d'évangélisation    dans    la    masse.    Et    parfois    ils 
obtiennent  des  résultats  surprenants,  tels  que  la  conver- 
sion des  rois  Alfonso  1  ou  Alvare  II.  S'il  y  avait  eu  une 
succession   ininterromj^ue  d'Alfonso  ou  d' Alvare,  et  si  la 
traite    n'avait    pas    sévi   avec    tant    d'intensité,    tout    le 
Bas- Congo   était   probablement   évangélisé  au   milieu    du 
XVII*  siècle 

(ycs  motifs  suffisent,  croyons-nous,  à  justifier  la  publi- 
cation—  aussitôt  (jue  possible  —  des  documents  relatifs 
iiux  anciennes  missions  du  Bas-Congo. 

Vu.  Si  M  \K. 


MELANGES 


*Abellanetum,  avellanetum 
«  bois  de  coudrier  »,  corylus  avellana  L. 

Le  latin  classique  ne  connaît  (iiie  l'adjectif  abellana, 
(jualifiant  niix.  Abelln  est  une  ville  de  Campanie.  Comme 
le  coudrier  est  commun,  cette  épitliète  localisatrice  indi- 
quait une  variété  à  fruits  plus  tendres,  ou  plus  longs,  ou 
d'écorce  moins  dure  à  croquer,  ou  elle  provenait  de  ce  (jue 
c'étaient  les  paysans  des  environs  d'Abella  qui  fournis- 
saient Rome  d'avelines.  —  F rbund  traduit  ^/jf/Zana  fit i/.v; 
par  «  grosse  noix  »,  wallonisme  doublé  d'une  erreur. 

Pour  le  latin  du  moyeu  âge,  Uu  Cange  inscrit  diverses 
formes  :  1°  avellanetum  et  2"  auellaneta,  a  locus  avella- 
nis  arboi'ibus  consitus  »;  8°  une  variante  anelleiuita,  avec 
deux  exemples;  variante  née  du  déplacement  des  deux 
A'oyelles  e  et  a,  tolérable  par  son  analogie  avec  les  substan- 
tifs participiaux  en  -a/a,  comme  maisonnée,  chambrée,  voi- 
turée;  -i"  un  habellaïuctiiin  d'une  charte  italienne  de  860 
(apud  De  Blasio,  ser.  princ.  Salern.,  n°  95)  :  «  arbusta,  cas- 
tanieta,  habellanieta,  ftam]  in  njontes  (piam  et  in  pla- 
num...  ».  Le  h  parasite  provient  de  l'analogie  de  liahilus, 
habere  ;  ic  pour  e  peut  être  dû  à  un  mouillement  de  n,  mais 
je  crois  plutôt  qu'il  provient  directement  des  substantifs 
castanea  et  aoellancu,  dont  le  premier  est  classi(j[ue  et  le 
second  médiéval;  o°  un  ancUaloriiiin,  pour  l'explication 
duquel  on  renvoie  indûment  à  l'article  aiwlot  du  glossaire 
français  annexé.  A  l'article  anctot  on  traduit  dubitative- 
ment par  «  lieu  planté  de  noisetiers  »  et  on  renvoie  à  anel- 
latorinm  :   ('y  un   aulancrium    glosé   jnir   corylctiiin.  C'ette 


120  MÉLANGES 

forme  bas-latine  a  dû  être  fabriquée  dans  le  Midi,  pour 
*:u)('llnncuriiun  :  en  Auvergne  l'aveline  est  nommée  niihi- 
nic;  la  Provence  possède  niilanit.  noisette,  de  Hvcllima, 
un'hnw,  et  nulitiihn,  de  uveliiiiien,  noisetier.  Auhtncriiiin 
est  une  rétroversion  de  niilfinier,  qui  désigne  le  eoudiier 
et  non  la  coudraie,  et  qui  est  issu  de  uoclliincu. 

Dans  les  langues  romanes,  les  collectils  en  -ctiim  du 
radical  iei  traité  se  limitent  à  la  région  du  Sud-Ouest.  Le 
Nord  emploie  des  dérivés  de  corylii.s.  L'Italie,  qui  dit  ;»>('/- 
lanu,  iiocella,  nocciiioki  pour  noisette,  corilo,  avcllano, 
nocciiwlo  pour  noisetier,  n'a  que  corileto  pour  noiseraie. 
En  certains  dialectes  italiens,  l'adjectif  déjà  cité  ctocllancH, 
qui  signifiait  ((  en  bois  de  coudrier  »,  —  nouvelle  formation 
latine  en  -en  pour  laquelle  nous  renverrons  à  Meyer- 
LiiiJKK,  (ji-Hinm..  Il,  ^  403,  et  à  Antoine  Thomas,  Xou- 
veaiix  essais  de  philol.  franc.,  p.  171  — ,  est  devenu  sub- 
stantif pour  désigner  le  bois  du  coudrier,  puis  l'arbuste; 
il  est  resté  en  tarentin,  déformé  en  alohe  pour  olahe,  et, 
dans  une  autre  région  non  identifiée  (que  MEYER-LiiiiKE 
cite  sous  la  forme  abrégée  ^'ilh.)  on  trou^  c  olafio  ;  mais  ces 
termes  ne  semblent  a\oir  produit  aucun  collectif  en  -etiuu. 
Au  contraire,  en  Espagne,  nous  rencontrons  avellanedo  et 
aoellaneda,  concurrencés  il  est  vrai  par  avellanal  et  avella- 
nar.  Ces  noms  ont  été  assez  populaires  pour  devenir  des 
noms  de  lieux  et  de  personnes  :  Aoellaneda  est  le  pseudo- 
nj^me  que  prit  un  plagiaire  de  ('ervantès  pour  publier  à 
Tarragone  en  1614  une  suite  de  sa  façon  à  la  première  par- 
tie du  Don  Quichotte.  Une  poétesse  espagnole  de  Cuba 
(1810-1878)  j>orte  le  nom  de  Gertrude  d'Avellaneda.  Le 
français  proprement  dit  n'a  point  de  collectif  de  ce  radical. 
Godefroy  n'a  que  avelin  adjectif,  et  avelaine  traduit  par 
alabandine.  Cotgrave,  Nicot,  Oudin,  Duez  présentent  en 
effet  cette  forme  en  -aine  correctement  issue  de  aoellana; 
en  outre  on  trouve  avelane  dans  Monet  et  Cotgrave,  aoel- 
laine  dans  Oudin.  Quant  à  la  forme  aveline  usitée  aujour- 
d'hui, elle  est  d'origine  dialectale,  elle  a  subi  par  méprise 
un  changement  de  suffixe,  on  ne  la  trouve  employée  la  pre- 
mière fois  en  français  qu'au  xv"  siècle.  De  ces  formes 
diverses  sont  nés  les  dérivés  avelai^nier  (Oudin,  Gctgrave, 
Duez),  ai)elaif>ner  (Oudin,  Cotgrave);  \h\\h  anellanier  dans 


MÉLANGES  7-21 

Godefroy,  Supitlciiicnl.  que  i)Ostiile  également  nu  noclhi- 
nuriiis  de  Du  Cange;  enfin  uuelinicr,  forme  en  comparai- 
son plus  moderne,  bien  qu'elle  semble  plus  ancienne 
que  1751,  date  à  laquelle  le  DicUoniuiirc  ^('-nrnil  la  signale 
dans  VEncyclojH-dic. 

C'est  dans  le  midi  de  la  France  qu'on  rencontre  le  plus 
de  variétés  de  coudriers  et  de  variantes  dialectales.  En 
Provence  on  trouve  noehum,  noisette,  à  Nice  (Alpes  Mari- 
times), avclnno  à  Marseille  et  dans  le  département  des 
Bouelies-du- Rhône  où  l'on  vend  Vuoelaiio  toouredo,  noi- 
sette grillée;  plus  au  nord,  dans  la  Franche-Comté,  on  dit 
iwelunc  dans  le  Jura,  cwiyoïw  dans  la  Haute-Saône.  Mis- 
ti'al  fournit  encore  broco  d'auelanie,  baguette  divinatoire 
de  coudrier,  où  le  nom  désigne  l'arbuste  et  vient  du  dérivé 
nveUuien.  Mais  toutes  les  foi-mes  ne  sont  pas  aussi  recon- 
naissables;  ave-  peut  devenir  abc-,  il  peut  se  simplifier 
en  iiv-  qui  devient  aoii-,  ouii-,  au-,  o  :  d'où  ooulano,  noisette, 
aoulaniè,  noisetier,  en  limousin;  aulanha.  noisetier,  en 
provençal,  de  auelaiiea;  aurânii>  pour  aiilâiiio  dans  le 
Queyras  (Hautes- Alpes);  ola^nier,  noisetier,  dans  la  même 
région;  ici  s'encadre  le  niilaiiicr  relevé  par  Du  Cange, 
v^  aulancriuin.  A  l'Ouest,  en  Eéarn  (Basses-Pyrénées)  on 
trouve  aujourd'hui  abera,  aura,  qui  proviennent  de  formes 
anciennes  à  suffixe  -av.  -al  comme  en  Espagne  et  en  Portu- 
gal. *Ai)eratiar  y  a  perdu  Vn  intervocalique  Meyer-Iiiibke. 
I ,  S  450)  et  1'/"  final,  donnant  averav  puis  avéra,  abera,  aura. 
En  Armagnac  (Gers)  aueraii,  contracté  auran,  noisette, 
vient  de  anclano.  A  Arrenz  (Hautes-Pja'énées)  existe  un 
dérivé  aberagnade  qui  signifie  «  abondance  de  noisettes  ». 
D'autres  déformations  se  montrent  dans  la  région  intermé- 
diaire :  aougraiiero,  noisetier,  dans  l'Albret  ^Landes),  aou- 
gogne  dans  la  Lozère,  onglono  dans  l'Aveyron. 

Ces  données  nous  permettent  de  nous  orientei'  en  topo- 
nj'-mie  et  d'y  retrouver  quelques  noms  collectifs  qui  nous 
auraient  échappé  sans  elles.  Nous  reconnaissons  mainte- 
nant abera  dans  Abcre  (Basses-Pyrénées);  avelano,  ave- 
rano  dans  Aulan  (Drôme),  Averan  (Hautes-Pyrénées),  les 
Aoelas,  deux  hameaux  de  l'Ardèche,  Aulas  (Gard);  anelaua 
dans  le  pluriel  AulaincH  (Sarthe);  avelanea  dans  Auragne 
(Haute -Garonne);  des  dérivés  eu -arius  dans  l'Aulagnier. 


722  MÉLANGES 

hameau  de  la  commune  de  Saint-Bonnet-en-Cliampsaur 
(Hautes-Alpes),  dans  Laulagnier,  hameau  de  la  commune 
de  Saint- Yoy  (Haute-Loire),  dans  Aulagny,  hameau  de  la 
commune  de  Lapte  (Haute-Loire).  Voici  enfin  cinq  dérivés 
en  -ctiiiu  :  Abélanet,  en  Languedoc  (Roland,  Flore  pop.,  X, 
p.  220),  Liwéraët,  près  de  Marciac  en  Béarn  (Gers),  Lave- 
lanet,  commune  de  l'Ariège,  Lauelanet,  commune  de 
Haute- Garonne,  Lauraët,  commune  du  Gers.  Malgré  les 
apparences,  ce  dernier  nom  ne  peut  être  rattaché  à  hiiire- 
tiim,  il  revient  à  avellanetiini,  quoiqu'il  faille  admettre  à 
la  fois  l'agglutination  de  l'article,  la  réduction  de  ave- 
à  an-,  le  changement  de  /  en  r  et  la  disparition  de  n.  Heu- 
reusement Laveraét  cité  plus  haut  forme  un  chaînon  inter- 
médiaire tout  à  fait  probant. 

Nous  n'avons  pas  trouvé  de  collectif  féminin  du  type 
avelanède.  Il  existe  bien  en  français  un  mot  avelanède,  mais 
il  est  facile  de  prouver  qu'il  n'a  rien  de  commun  avec  avel- 
laneta.  Ce  mot  sert  à  désigner  dans  le  commerce  la  cupule 
du  gland  du  qiierciis  aegilops  L.,  le  chêne  velani,  dont  la 
patrie  est  l'Orient,  d'où  sou  nom  de  cerriis  macedonica 
dans  l'ancienne  nomenclature.  Les  cupules  de  cette  espèce 
de  chêne  sont  employées  pour  le  tannage  des  cuirs,  et  le 
commerce  de  cet  article  doit  remonter  au  moyen  âge, 
témoin  les  formes  vallanio,  valania  que  donne  Du  Gange. 
Les  variantes  du  mot  sont  nombreuses  :  nalanède,  vela- 
nède,  vallonée,  velonée,  uelonie  {Belon,  loo5),  vallon  et  gal- 
lon (Furetière,  1708),  velani  (Trévoux,  1752);  on  trouve 
avelanède  dans  Savary  des  Brnslons  dès  1688;  le  diction- 
naire de  l'Académie  ne  donne  plus  que  cette  forme 
depuis  1798.  C'est  la  plus  mauvaise  qui  a  triomphé  officiel- 
lement, puisque  le  mot  vient  du  grec  PaXavibi.  Avelanède 
est  sorti  de  l'expression  «  de  la  velanède  ».  Edmond  About, 
La  Grèce  conieinporaine,  p.  48,  emploie  valanède  :  «  Les 
glands  doux  du  chêne  valanède  ne  sont  pas  un  trop  mau- 
vais manger.  » 

J.  Feller. 


1 


MÉLANGES  723 

Une  petite  addition  au  livre  de   M.  Brunot  : 
«  La  Pensée  et  le  Langage  ». 

Diderot  a  dit  dans  sou  Purudoxe  sur  le  coincdicn  :  <(  Dans 
l'écrivain  le  plus  clair,  le  plus  précis,  le  i)lus  énergique,  les 
mots  ne  sont  et  ne  peuvent  être  que  des  signes  approchés 
d'une  pensée,  d'un  sentiment,  d'une  idée,  signes  dont  le 
mouvement,  le  geste,  le  ton,  le  visage,  les  yeux,  la  cir- 
constance donnée,  complètent  la  valeur  ».  Cette  observa- 
tion est  profondément  vraie,  et  le  beau  livre  de  M.  Brunot 
la  confirme  en  une  foule  d'endroits.  De  cette  imperfection 
(le  la  parole  écrite  il  résulte  que  la  même  forme  de  phrase 
peut,  selon  les  circonstances,  selon  les  intentions  de  celui 
qui  parle,  exprimai'  des  modalités  d'idées  bien  différentes. 
Ainsi  la  phrase  :  «  Vous  ignorez  ce  qui  s'est  passé  »  sera 
tantôt  renonciation  d'un  fait  positif,  tantôt  l'ordre  ou  le 
conseil  de  feindre  d'ignorer  ce  qui  s'est  passé.  Ce  dernier 
cas  est  fréquent  dans  la  conversation  familière,  dans  le 
dialogue  dramatique,  dans  le  roman.  En  voici  quelques 
exemples  qui  pourront  s'ajouter  à  la  riche  documentation 
de  M.  Brunot. 

Stendhal,  La  Chartreuse  de  Parme,  X  :  «  Raconte-lui  le 
mariage  de  la  sœiir;  quand  il  saura  qu'elle  va  être  duchesse, 
il  te  trouvera  bien  plus  a])Ostolique.  Du  reste,  lu  ii>nores 
tout  ce  que  le  comte  vient  de  te  confier  sur  ta  future  nomi- 
nation. » 

Prosper  Mérimée,  Carmen  :  «  Carmen  me  dit  aussitôt  en 
basque  :  Tu  ne  sais  j)as  un  mot  d'espagnol,  tu  ne  me  con- 
nais pas .  » 

Guy  de  Maupassant,  V Héritage  :  «  Mon  cher  collègue, 
je  suis  heureux  de  vous  annoncer  que  le  Ministre,  sur  la 
proposition  de  notre  directeur  et  de  notre  chef,  a  signé 
hier  votre  nomination  de  commis  principal.  Vous  en  rece- 
vrez demain  la  notification  officielle.  Jusque-là  vous  ne 
savez  rien,  n'est-ce  pas?  » 

Abraham  Dreyfus,  Petites  annonces,  se.  I  :  a  ("est  liou! 
ne  dites  rien...;  vous  ne  m'avez  pas  vue.  »  Ibid.,  se.  II  : 
K  Ne  lui  dites  rien,  n'est-ce  pas  ï  vous  ne  m'avez  pas  vu.  » 

Passons  au  latin. 


724  MÉLANGES 

Térence,  Eiin.,  721-722  :  Tu  pol,  si  sapis,  Qnod  sois 
nescis,  neque  de  eunueho  nequo  de  vilio  virgiuis   » 

(On  s'étonne  qu'un  philologue  de  la  valeur  de  Madvig 
ait  prétendu  corriger  nesci.s  en  iicsci.) 

Heaut.,  748  :  «  Tu  nescis  id  qiiod  scis.  Dromo,  si  sapies  » 

Dans  tous  ces  exemples,  il  y  a  deux  idées  qui  ne  sont  pas 
notées  par  l'écriture,  mais  qui  sont  indiquées  parle  ton  et 
Ijar  la  situation  :  1"  celle  d'ordre  ou  de  conseil;  2»  celle 
de  feinte,  de  dissimulation. 

Dans  les  exemples  suivants,  la  première  idée  prend  une 
forme  grammaticale  (impératif,  subjonctif),  la  seconde 
seule  est  sous-entendue. 

Paul  Bourget,  Mensonges  :  «  Soyons  très  aimable  et 
iVayons  rien  vu.  » 

Térence,  Ad.,  530  :  «  Hisce  opéra  ut  data  sit.  » 

(L'esclave  Syrus  suggère  au  jeune  Ctésiphon  le  moyen 
de  tromper  son  père  en  disant  qu'il  a  dû  rendre  service  à 
des  amis  de  la  famille.) 

P.  Thomas. 


Note  concernant  l'apparition 
de  la  propriété  allodiaie  au  pays  de  Liège 

On  sait  qu'au  paj's  de  Liège,  sous  l'ancien  régime,  les 
immeubles  étaient  divisés  sous  le  rapport  légal  en  censaux, 
féodaux  et  allodiaux.  A  l'époque  où  Hemricourt  écrivit 
son  Patron  de  la  Temporalité,  c'est-à-dire  vers  la  lin  du 
XIV*  siècle,  on  appelait,  à  Liège,  alleu,  franc  alleu  ou  bien 
allodial,  un  immeuble  libre  par  sa  nature  de  toute  charge 
ou  redevance,  non  sujet  au  relief  et  se  partageant  égale- 
ment entre  les  enfants  en  cas  de  décès,  à  moins  que  le 
possesseur  n'en  eût  disposé  autrement  ('), 

Concernant  l'origine  de  ces  alleux  liégeois,  deux  hypo- 
thèses ont  été  proposées  : 

1°  Ce  sont  d'anciens  alleus  francs,  c'est-à-dire  des  pro- 
priétés libres  remontant  à  l'époque  de  la  conquête  franque 
au  v*^  siècle  et  ayant  persisté  jusqu'au  xiv*. 


(*)  Voir  BoK.MA.NS,  Les  xeiyneitries  afiodinics  du  priifs  de  lAiyc.  Iiilroductioii, 


MÉLANC.ES  725 

2"  ("e  sont  des  ail  eus  de  stjie  nouveau,  c'est-à-dire 
d'anciennes  tenuies,  d'anciennes  censives  devenues  pro- 
priétés entièrement  libres.  C'est  la  thèse  que  Wohhvill  a 
formulée  il  3'  a  longtemps  déjà,  thèse  à  laquelle  MM.  Des 
Marez,  Kurth  et  Pirenne  se  sont  ralliés  et  que  récemment 
M.  Ganshof  est  venu  confirmer  en  la  précisant  (•). 

Pour  ce  qui  est  du  moment  où  l'on  voit  dans  les  textes, 
pour  la  i^remière  lois,  ces  propriétés  libres  se  substituer 
à  des  tenures  dérivées,  Wohlwill  propose  la  fin  du 
xiii*  siècle,  M.  Ganshof,  le  milieu  du  même  siècle. 

Je  ne  viens  pas  ici  refaire  l'histoire  de  l'alleu  liégeois, 
mais  simplement  signaler  l'importance  d'un  texte  dont 
personne  jusqu'ici  n'avait  remarqué  ([u'il  intéressait  l'his- 
toire de  cet  alleu. 

Il  s'agit  du  paragraphe  13  de  la  charte  d'affranchisse- 
ment de  Brusthem  en  1175,  laquelle  charte  reproduit 
purement  et  simplement  les  stipulations  du  droit  urbain 
liégeois  (^). 

Ce  i)aragraphe  poi-te  que  le  créancier  qui  n'a  pas  obtenu 
satisfaction  dans  les  délais  voulus  est  autorisé  à  i-éclamer 
l'appropriation  du  gage  immobilier  dont  il  est  nanti;  si 
c'est  une  hereditas,  on  lui  en  fera  l'investiture  ;  si  c'est  un 
nllodiiim,  il  en  aura  V affectât io  (3). 

Il  en  résulte  donc  qu'à  Brusthem  et  à  Liège,  en  1 175.  il 


(•)  Ganshof,  «  Les  «  buiuines  de  rasa  Dei  »  du  1res  ancien  droil  liéf^eois  », 
dans  Ret'uc  belge  de  p/iilologie  el  d'/iisloire.  I.  I,  p.  303  et  suiv. 

(•)  Voir  le  texte  nirnie  de  la  charte  en  (juestion  dans  Borma.ns,  Rei-ueit  des 
<ii(btntuntces  dr  la  piincipaiilr  de  L'èye,  !'«  série,  t.  I.  [>]>.  i2  et  -2o  .  k  legeui, 
jus  el  liherlateni  Leodiensem  sii'ut  ab  ipsis  |)iudenlioribus  I.eodii  viris  per 
probos  nostros  lidelcs  vims  didicinius...  :  si  ijuid  de  jure  Leodiensi  in  har 
cliarta  est  prelennissuin  quod  pdsiea  pDtesl  adjicere  {lise:  adjiei)  hoc  bénigne 
«oncediinus  liabere...;  hujus  larti  fucrunt  etiani  lestes  probi  cl  lionesti  viri 
cives  Le<»dienses,  hujus  Icjfis  et  liberlatis  dictalores  el  ordinalores  ». 

(■*)  BoRMANS,  Recueil  des  nrdonrinnces  de  la  principauté  de  Lièye,  i^"  si-rie, 
t.  I,  p.  a  :  u  Si  qiiispiain  allodium,  liereditaleni  vel  domum  in  vadio  habuerit, 
nec  tenere  ultra  vuiuerit, ...  judicabilurquod  affeetationeni  ai-cipiet  de  allodio, 
invostitui'ani  auleni  de  hercdilale  vel  doino  ». 

-Nous  devons  à  VvMiEUKiNnKRE  d'avoir  appelc  raltention  sur  ce  texte.  Voir 
son  élude  intitidce  «  Liberté  ei  propriété  en  Flandre  du  ix''  au  xn<^  siècle  ». 
dans  Ridl  de  IWind.  nti/.  de  itrlf/ii/Uf,  l!K)ti,  pp.  lrt.">-lt»().  Seulement,  il  a 
échîippé  ;i  I  éniinenl  historien  (pie  l.i  cliarle  de  Iti  u-lliem  repri.duis:iil  les 
stipulations  du  droit  urbain  lié^^eois. 


726  MÉLANGES 

se  rencontrait  deux  types  de  biens  immobiliers  :  4°  Vhere- 
ditaSy  tenure  dérivée  puisqu'un  tiers  en  a  le  tréfonds  et 
doit,  en  cas  de  transmission,  intervenir  pour  faire  l'in- 
vestiture; 2°  Vallodiiim,  propriété  vraiment  libre  puisque, 
en  cas  de  transmission,  elle  passe  directement  par  affec- 
tatio  des  mains  du  propriétaire  dans  celles  du  nouvel 
acquéreur. 

Je  ne  m'occupe  pas  de  V heredilas  qui  est,  ici,  manifeste- 
ment, la  censive,  mais  de  Vallodium.  S'agit-il  d'un  ancien 
alleu  franc  qui  a  persisté,  ou  d'un  alleu  de  style  nouveau, 
d'une  censive  transformée  en  propriété  pleinement  libre? 

On  sait  que  l'église  de  Saint-Lambert  à  Liège  était,  dès 
le  haut  moyen  âge,  j^ropriétaire  du  territoire  de  la  ville  de 
Liège  avec  ses  environs  ainsi  que  des  domaines  que  des 
donations  successives  y  avaient  ajoutés.  L'ensemble  de 
ces  terres  constituait  l'alleu  de  Saint-Lambert,  Il  était 
réparti  en  tenures  occupées  i^ar  des  membres  de  la  familia 
ou,  plus  exactement,  par  des  ministeriales  de  l'Eglise  de 
Liège  (^).  Il  va  de  soi  qu'en  cas  de  transmission  elles 
étaient,  comme  il  convient  à  des  tenures  dérivées,  sou- 
mises à  la  formalité  de  l'investiture  {^). 

Un  jour  vint  où,  en  même  temps  que  se  relâchaient  les 
liens  personnels  qui  rattachaient  à  l'Eglise  de  Liège  les 
détenteurs  de  ces  tenures,  ces  tenures  mêmes  tendirent  à 
se  libérer  des  entraves  du  droit  domanial  et  à  se  con- 
stituer en  propriétés  libres.  Cela  eut  lieu,  a-t-on  dit,  soit 
à  la  fin  du  xiii^  siècle,  soit  vers  le  milieu  d\\  même  siècle. 

Je  me  demande  si  cette  évolution  n'a  pas  commencé  à  se 
manifester  beaucoup  plus  tôt.  Je  la  vois  en  train  de  s'ac- 
complir dans  le  domaine  de  l'abbaj^e  de  Saint-Trond  dès  la 
première  moitié  du  xii^  siècle  (^)  et  je  suis  tenté  de  croire 


(1)  Ces  tenures  «'Haieiit,  vers  le  milieu  du  xw  sièele,  qualiiiées  alleus.  Ce 
terme  est  impropre,  mais  il  s'expliipie  si  l'on  considère  cpui,  pour  désigner 
ces  tenures,  on  s'était  placé  au  point  de  vue,  non  pas  du  tenancier,  mais  de 
l'Église  de  Liège  dont  elles  étaient  l'alleu  (Voir  notamment  (iANSHOF.  art.  cité 
p.  303). 

(2)  Voir  p.  727,  note  3,  le  passage  relatif  à  la  transmission  de  Vlicreditas. 

(3)  Voir  le  fait  divers  suivant  que  j'emprunte  au  Gesta  abbatnm  Trudonen- 
sium,  édil.  de  Borman,  I.  I,  pp.  ()7.  l(>(i-167  et  272;  t.  Il,  p.  28-29  el  Piot. 
Carlulaire  de  Suinl-Trond,  I.  I,  pp.  33-3i  :  Pendant  la  guerre  des  Investitures, 
vers  l'année   lOO.'î.  l'ahbé  intrus   llérinian,   chassé  de  l'abbaye,  se  réfugia  à 


MÉLANGES  727 

qu'il  en  aura  été  de  même  dans  le  domaine  de  l'église  de 
Saint-Lambert,  tout  proche  de  celui  de  Saint-Trond  et  où 
les  conditions  juridiques  et  sociales  étaient  identiques. 

Et,  pour  en  revenir  à  la  charte  de  Brusthem  de  1175, 
n'est-il  pas  fort  vraisemblable  que  l'alleu  qui  s'y  trouve 
mentionné  est,  non  un  alleu  franc,  comme  le  prétend  ^'an- 
derkindere  (voir  ci- dessus),  mais  une  tenure  de  luinisle- 
riulis  transformée  en  propriété  libre? 

S'il  en  était  ainsi,  l'allodialité  des  terres  ayant  primiti- 
vement api)artenu  à  l'église  de  Liège  aurait  commencé  plus 
tôt  qu'on  ne  l'a  cru  jusqu'ici,  et  on  en  trouverait  des  traces 
dans  les  documents  un  siècle  environ  avant  la  date  la 
plus  récente  fixée  par  l'érudition  (le  milieu  du  xtit''  siècle. 
d'ai)rès  M.  Ganshof). 

A.    H  ANS  A  Y. 


L'ancienneté  du  droit  urbain  liégeois. 

Les  érudits  sont  d'accord  pour  admettre  que  le  droit 
urbain  liégeois  est  bien  antérieur  à  sa  consignation  dans 
la  fameuse  charte  de  I2')8;  mais  leurs  avis  diffèrent  quand 
il  s'agit  de  savoir  s'il  faut  en  faii-e  remonter  les  origines 

Haeleii  auprès  du  maire,  et  tous  doux,  |ieiulaul  plus  d'un  an,  dilapidèrent  les 
revenus  de  la  rillti.  Hérinian  vint  ii  paitir,  mais  le  maire  continua  ses  dépréda- 
tions. Pendant  dix  ans,  il  dévasta  les  biens  de  l'abhave,  forêts,  terres  cultivées, 
pêcheries;  il  sempara  d'un  alleu,  donation  pieuse  des  comtes  de  Duras  et 
prétendit  le  tenir  en  lief.  Lablié  Rodolphe  (MOT  1188)  parvint  linalement  :i 
lui  enlever  ses  fonctions,  son  lief  et  son  liénélice  et  à  le  replacer  dans  la 
pdieslas  de  l'abbaye,  entendez  dans  l'étal  de  dépendance  personnelle  où  il  se 
trouvait  vis-à-vis  de  celle-ci.  .Mais  un  an  et  demi  ne  s'est  pas  écoulé  depuis  la 
déposition  du  maire  que  son  fils  reçoit  la  mairie  et  l'héritage  paternel.  Lu 
aussi  veut  s'approprier  cette  terre  de  Meldert  que  .son  (tére  avait  convoitée 
et,  comme  son  père  encore,  mérite  par  ses  exacli(tns  ((u'on  la  lui  eidève. 
Néanmoins,  en  11  io,  il  apparaît  à  nouveau  en  qualité  de  maire  de  Haelen;  il 
a  fortilié  sa  demeure,  l'a  entourée  de  fosses  et  coniinue  ses  déprédations. 
Heureusement  pour  l'alibaye,  l'abi)c  est  ahirs  le  frcre  d'Othon  de  Duras, 
I  a\oué.  Celui-ci  vient  à  Haelen,  expulse  le  maire,  sa  femme  et  ses  enfants  et, 
ne  pouvant  le  faire  venir  à  résipiscence,  fait  combler  ses  fosses,  abattre  ses 
tours  et  raser  sa  maison.  Kt  pourtant,  en  1 1  IGdéjà,  il  est  rentré  en  possession 
de  la  mairie  et  la  charte  qui  fixe  ses  droits  lui  reconnaît  la  possession  de  cette 
terre  de  Meldert  depuis  si  loii^Memps  convdilee. 


72«  MÉLANGES 

antérieurement  à  la  cliarte  de  liberté  de  Hu3'  de  l'an- 
née 1066. 

Je  me  trompe  fort,  ou  bien  l'examen  plus  attentif  des 
textes  rend  plus  vraisemblable  l'opinion  de  ceux  qui  sont 
pour  l'affirmative. 

Le  paragraphe  J  de  la  charte  liégeoise  de  12U8  porte 
qu'en  temps  de  guerre  les  bourgeois  de  Liège  ne  sont  tenus 
de  se  rendre  à  l'appel  de  l'évèque  que  quinze  jours  après 
les  chevaliers,  les  bourgeois  et  les  vilains  {^].  En  d'autres 
termes,  l'évèque  convoque  d'abord  ses  milices  féodales, 
les  bourgeois  non  privilégiés  des  villes  et  les  vilains;  les 
bourgeois  de  Liège,  si  besoin  est,  suivent  quinze  jours 
après. 

Les  bourgeois  de  Huy,  d'après  la  charte  de  10(i6,  ne  sont 
tenus  de  suivre  la  milithi  arninin  que  liuit  jours  après  les 
Liégeois  (^'j.  Or,  la  militin  armutii,  qu'est-ce,  sinon  le  gros 
de  l'armée,  ces  milites,  oppidani  et  villani  dont  parle  la 
rhartede  1208? 

A  mon  sens,  voici  comment  les  choses  se  sont  passées  : 
à  l'origine,  l'évèque,  en  temps  de  guerre,  convoquait  ses 
vassaux  {iniliies),  les  bourgeois  des  villes,  les  vilains.  Vers 
le  milieu  du  xi®  siècle,  avant  1066  en  tout  cas,  les  Liégeois 
obtinrent  de  ne  se  rendre  à  l'appel  de  l'évèque  que  quinze 
jours  après  les  troupes  féodales  précitées,  les  bourgeois 
non  privilégiés  et  les  vilains.  Va\  J066,  les  Hutois,  à  leur 
tour,  reçurent  un  privilège  :  ils  ne  devaient  se  mettre  en 
marche  que  huit  jours  après  les  Liégeois  ou,  pour  mieux 
dire,  ils  ne  devaient  suivre  le  gros  de  l'armée  féodale,  la 
miliiia  armata,  que  huit  jours  après  les  bourgeois  de  Liège. 
Le  délai  qui  était  de  quinze  jours  pour  les  Liégeois  était 
donc  de  trois  semaines  pour  eux. 

(1)  c(  Secl  si  ttlit/uod  ntslrum  Ecclesie  vel  doiiius  dcfoisalis  oh.sessa  n-l  ait 
/lonlilius  ()C( lijuilo  fueril,  episcopus  prinimn  prr  i/uinileciin  dies.  <am  inuiliis 
itis,  niilildin.s,  oppidanis  et  villanis  ad  repellemlos  fiitsfe.s  movelnt  arma  et 
ante  laslrum  vel  dominn  nedehit.  Infra  tainrn  lios  qnindciim  dies  dchct  epis- 
copus rem  etnegotium  nitntiare  civihus  Leodiensihiis  et  mandare  ut  sint  parut i 
et  si  opus  fiterit ,  posl  Itns  quindecim  dies  in  aucilium  ventre  ». 

(-)  a  Praedictis  adjectiim  est  f/uod  lloi/en^es  urmatam  mifitiam  nulla tenus 
seipianlur  nisi  Leodienses  a  prae/i.ro  die  belli  usquc  in  octavaiii  eos  praeeesse- 
rint  ».  M.  Pirennc,  Les  Anciennes  d'nnocraties  (iii-r  Pays-lliis.  p.  78,  fait  ciToiir 
«•Il  lixaril  il  (luin/c  jours  lo  délai  aicordé  aux  lliilois. 


MÉLANGES  729 

Je  suppose  qu'il  m'est  accordi-  que  les  Liégeois  ont.  eu 
matiève  de  service  militaire,  été  privilégiés  avant  les 
Hutois.  Il  est  \  raisemblable  alors  d'admettre  que  ce  privi- 
lège ne  fat  pas  le  seul  et  que  les  libertés  dont  nous  voyons 
par  les  chartes  de  Brustliem  de  1175  et  de  Liège  de  1208 
que  les  bourgeois  de  Liège  jouissaient,  n'étaient  appaiem- 
ment  que  la  confirmation  et  le  développement  de  libertés 
qui  leur  avaient  été  accordées  vers  le  milieu  du  xi'=  siècle, 
antérieurement  en  tout  cas  à  la  charte  de  lluy  de  lUGf). 

A.    ILVXSAY. 


COMPTES  RExNDUS 


Otto  Jespersen.  Latiguaije,  Us  nature,  developnient  and  origUi. 
London.  G.  Allen  &  Unwin  (i92i),  in-8°,  448  p. 

La  science  du  langage,  qui  passe  pour  allemande,  est  aussi 
quelque  peu  danoise.  A  preuve,  les  nomsdeRask,  Bredsdorff, 
Madvig,  Thomsen,  auxquels  il  convient  d'ajouter  ceux  de 
Nyrop  et  d'Otto  Jespersen,  le  ph- uéticien.  l'auteur  de 
Progress  ni  Langcage  et  de  cette  magistrale  grammaire 
historique  de  l'anglais  qui  bouleverse  les  catégories  tradition- 
nelles comme  le  fait,  cette  année  même,  pour  le  français. 
M.  F.  Brunot  dans  ce  bel  ouvrage  qui  ne  répond  pas  tout  à 
fait  à  son  titre,  Le  Langage  et  la  Pensée. 

Le  Langage  de  M.  Jespersen  se  compare  mieux  au  Langage 
d'un  autre  professeur  en  Sorbonne,  M.  Vendryes,  paru  l'aji 
dernier.  Moins  théorique,  moins  systématique  à  la  française, 
et  moins  bien  construit,  le  livre  du  professeur  danois  est  plus 
original,  plus  vivant,  plus  vécu.  Ces  qualités  se  manifestent 
en  particulier  dans  les  chapitres  sur  le  langage  enfantin  et 
jusque  dans  le  stj'le  par  des  images  vives  et  familières  Vou- 
lant montrer  que  l'effort  d'articulation  consiste  moins  dans 
l'énergie  que  dans  la  précision  des  mouvements,  l'autour  dira 
qu  il  faut  «  moins  d'effort  pour  couper  du  bois  que  pour  opé- 
rer une  cataracte  ». 

Tout  n'est  pas  nouveau  dans  ce  livre.  La  ipiatriéme  ou  der- 
nière partie  notamment  ne  fait  que  remanier  et  mettre  au 
point  les  théories  développées  jadis  par  l'auteur  dans  son 
Progress  iii  Language. 

La  première  partie.  Histoire  de  la  Linguistique,  ne  pouvait 
guère  êtie  la  [dus  originale.  Cependant  M.  .Iesi)€rsen  a  le 
mérite  de  remettre  en  honneur  certains  «  oubliés  »  :  .lenisch 
qui  dès  1706  instituait  une  «  Comparaison  de  quatorze  langues 


73'iJ  COMPTES     RENDUS 

anciennes  et  modernes  »  au  point  de  vue  de  la  richesse,  de  la 
clarté,  de  l'euphonie  ;  Rapp,  dont  la  Physiologie  der  Sprache, 
en  1836,  prélude  à  la  Phonétique;  Bredsdorff  qui  étudie, 
en  1821,  les  causes  générales  de  l'évolution  linguistique; 
surtout  Rask,  le  véritable  auteur  de  la  «  loi  de  Grimm  », 
dont  Grimm  connaissait  les  travaux  et  qui,  s'il  avait  publié 
plus  tôt,  et  dans  une  langue  autre  que  le  danois,  passerait  pour 
le  véritable  fondateur  de  la  science  linguistique  moderne. 

L'auteur  admire  surtout  chez  Grimm  les  études  syn- 
taxiques. Grimm  était  à  la  fois  linguiste  et  philologue  et 
M  Jespersen  ne  répudie  nullement  cette  alliance.  Très  éclec- 
tique, nullement  «  unilatéral  »,  il  n'observe  pas  moins  les 
finesses  d'une  langue  hautement  cultivée  que  les  phénomènes 
les  plus  primitifs  et  dans  son  discours  présidentiel  à  la 
Modem  Hamanities  Research  Association,  il  se  félicitait, 
l'an  dernier,  que  beaucoup  d'universités  attribuent  au  même 
titulaire  l'histoire  de  la  langue  et  de  la  littérature.  M.  Jes- 
persen étudie  longuement  l'œuvre  de  Schleicher,  indique  le 
rôle  de  ce<  deux  vulgarisateurs  ennemis,  Max  Millier  et 
Whitney,  rend  pleine  justice  à  Hermann  Paul,  parmi  les 
néo-grammair:ens. 

On  regrette  qu'il  n'ait  pas  donné  plus  d'importance  aux 
nouveaux  venus,  se  borne  à  citer  Van  Ginneken,  Bally, 
(le  Saussure,  Meillet,  etc  ,  et  ne  cite  même  pas  V Atlas  linguis- 
tiqîie  de  Gilliéron,  qui  jette  pourtant  un  jour  imprévu  sur  la 
dialectologie. 

Le  corps  de  l'ouvrage  est  formé  par  les  deuxième  et 
troisième  parties  intituléeà  VEnfant  et  l'Individu  et  le  Monde 
qu'unit  un  même  problème,  celui  de  l'interaction  linguistique 
de  l'homme  et  de  la  société 

La  deuxième  partie,  riche  d'expérience  paternelle,  engage 
les  parents  à  «jouer  au  langage  »  avec  les  petits,  à  faire  écho 
à  leurs  créations  verbales  et  d'auti'e  part  à  ne  pas  corriger 
trop  vite  leur  langage  appris.  L'auteui'  note  de  curieuses 
fluctuations  :  des  sons  comme  Vh  se  perdent  pendant  plusieurs 
semaines,  puis  reparaissent  (p.  150)  ;  il  étudie  certaines  inven- 
tions de  mots  (p.  153)  et  même  une  langue  presque  entièrement 
nouvelle  chez  deux  enfants  jumeaux  séparés  de  leur  mère, 
élevés  par  une  viei  le  femme  sourde,  qu'il  a  pu  observer  aux 
environs  de  Copenhague  en  1903  (p.  187).  Chez  d'autres,  il 


COMPTES    HKNDl  S  7S.'; 

note  des  cas  bien  amusants  de  fausse  analogie  grammaticale, 
des  confusions  (parfois  durables)  dans  les  noms  de  parenté  et 
l'usage  des  pronoms  personnels.  Le  père  appelle  sa  femnie 
«  Maman  »;  il  dit  je,  puis  demande  â  l'enfant  :  «  Veux-/i<  du 
lait?  »  Pour  que  l'enfant  s'embrouille,  il  n'est  pas  nécessaire 
de  supposer,  à  l'alleniande,  qu'il  «  ne  distin^uie  pas  \e  moi 
du  no)i-moi  ». 

Pourquoi  l'enfant  apprend-il,  d'ailleurs,  si  facilement  sa 
langue  maternelle!^  C'est  qu'on  ne  le  décourage  pas  en  se 
moquant  de  lui,  c'est  que  ses  tentatives  sont  liées  à  la  réali- 
sation de  ses  désirs  les  plus  chors  et  que  les  leçons  de  mots 
sont  toujours  pour  lui  des  leçons  de  choses.  Ce  qu'il  faut 
retenir  pour  l'enseignement  des  langues  étrangères. 

Les  filles  sont  plus  réceptives  que  les  garçons  et  la  principale 
influence  est  celle  des  autres  enfants,  plutôt  que  celle  des 
parents  et  des  bonnes. 

Ceci  amène  une  question  fort  intéressante  :  dans  quelle 
mesure  riniitation  imparfaite  des  parents  [lar  les  enfants,  ou 
plus  exactement  d'une  génération  par  une  autre,  contribue- 
t-elle  aux  variations  du  langage?  Sur  ce  point,  Paul  et  Sweet 
restent  indécis.  Meringer  sous  évalue  l'influence  des  enfants. 
Hei^zog  l'exagère  en  supposant  que  la  bouche  plus  petite  des 
enfants  imprime  aux  sons  une  déformation  qui  augmente  à 
chaque  génération  nouvelle  M.  Jespersen  distingue  entre  les 
changements  graduels  qui  exigent  plusieurs  générations  et 
les  changements  brusques  de  son  ou  de  sens,  changements 
«  acoustiques  »  par  exemple  de  dentale  en  labiale  [Site-soif, 
feodu-fief,  gladiu-glaive),  changements  par  «  métanalyse  ou 
fausse  interprétation  grammaticale  »  singulier  pca,  chi'rrii, 
tirés  (\q  pense,  cherrys  supposés  pluriels^,  amputation  par  la 
fin  des  mots  {Bella  pour  Arabella,  Sander  pour  Alexander) 
où  la  transmission  imparfaite  d'un  individu  à  l'autre  et 
notamment  les  «  fautes  »  non  corrigées  des  enfants  purent 
jouer  leur  rôle.  Ajoutez  une  influence  indirecte,  l'imitation 
des  enfants  par  les  parents,  d'où  la  tixa(ii.)U  de  beaucoup  do 
diminutifs  (oreille  de  auricula,  oi'SQdiW  de  aricellus)  et  d'ap- 
pellations comme  «  la  main  droUe  »,  c'est-à-dire  «  la  bonne 
main  »  (anglais  riglit,  allem   redit,  de  même,  i).  I8<>). 

La  troisième  partie,  F  Individu  et  le  Monde,  se  compose 
d'une  série  de  chapitres  que  relie  un  lien  assez  làclie.  L'auteur 


734  COMPTES    RENDIS 

discute  «  l'influence  du  substiatum  »  dans  le  cas  de  Vu  fran- 
çais et  de  Vu  espagnol  (remplaçant  f  latin)  expliqués  par 
Ascoli  comme  provenant  de  dialectes  celtes  et  ibères  sous- 
;acents  au  latin.  Il  ne  conteste  pas  que  des  mélanges  ne 
contribuent  à  la  diversité  des  langues,  mais  ne  veut  pas  qu'on 
généralise  l'explication,  qui  ne  rend  pas  compte,  par  exemple, 
de  la  différenciation  du  norwégien  en  Islande  (p.  206).  Il 
étudie  des  cas  typiques  de  langues  mixtes  comme  le  Pidgin.  et 
le  Beach-la-Mar  qui  servent  de  langues  communes  en  Chine  et 
dans  le  Pacifique  occidental.  Il  combat  l'idée  popularisée  par 
Whitney  qu'il  ne  saurait  y  avoir  mélange  de  grammaires, 
et  croit  au  contraire  aux  etïets  permanents  que  produit,  sous 
ce  rapport,  la  traduction  habituelle  d'une  langue  étrangère 
telle  que  le  latin  (p   215). 

M.  Jespersen  consacre  au  langage  de  la  femme  un  chapitre 
qui  intéresse  surtout  la  psychologie  féminii.e.  Beaucoup  plus 
importants,  selon  nous,  sont  les  deux  derniers  chapitres  sur 
les  causes  générales  de  la  variabilité  linguistique. 

Quant  à  la  rapidité  des  changements,  l'auteur  attache  une 
importance  nouvelle  (pp.  181,  26U)  aux  périodes  troublées  où 
les  enfants  sont  laissés  à  eux-mêmes  par  l'absence  ou  la  mort 
des  parents  (guerres,  épidémies),  par  le  travail  des  mères  aux 
champs,  par  le  travail  des  enfants  dans  les  usines  (développe- 
ment de  r«  anglais  vulgaire  »  au  xix^  siècle,  et  encore  aux 
époques  où  les  liens  se  relâchent  entre  une  colonie  et  sa  métro- 
pole (langues  romanes  à  la  fin  de  l'Empire  romain,  anglais 
d'Amérique  au  xiii''  siècle). 

A  propos  des  «  lois  phonétiques  »  nous  retrouvons,  sous 
l'autorité  de  M.  Jespersen,  des  idées  que  nous  avions  nous- 
même  soutenues,  il  y  a  vingt  ans,  dans  un  travail  peu  répandu , 
que  cite  pourtant  Van  Ginneken  dans  ses  Principes  de  Lin- 
guistique psychologique  (1907).  Nous  ne  connaissions  pas 
alors  un  article  antérieur  de  M.  Jespersen.  La  correspondance 
des  vues,  chez  des  esprits  indépendants,  fournit  une  présomp- 
tion en  faveur  de  leur  justesse  et  nous  l'avons  retrouvée  depuis 
chez  Oei'tel,  Meringer  et  d'autres. 

En  ce  temps-là,  les  partisans  de  l'école  aujourd'hui  vieillie 
des  neo-grammairiens  déclaraient  avec  une  exagération  qui 
annonce  les  «  Freudiens  »  de  nos  jours,  que  les  lois  phonétiques 
n'ont  pas  d'exceptions  ou  que  ces  exceptions  du  moins  s'ex- 


COMPTES    RENDUS  735 

pliquent  toujours  par  l'analogie  grammaticale  Cependant, 
ouvrez,  au  chapitre  des  changements  phonétiques,  n'importe 
quelle  grammaire  historique,  vous  trouverez,  à  côté  du  ca-;  le 
plus  fréquent  érigé  en  «  loi  »,  des  exemples  hors  série,  géné- 
ralement imprimés  en  «  petit  texte  »  que  l'analogie  ne  suffit 
pas  à  expliquer. 

La  doctrine  simpliste  envahit  les  manuels  et  nous  en  trou- 
vons l'écho  jusque  chez  M.  Meillet  quand  il  dit  que  «  dans  la 
France  du  Nord,  les  enfants  sont  nés,  à  partir  d'un  certain 
moment,  différents  pour  chaque  localité,  (de  1858  à  1860), 
incapables  de  prononcer  17  mouillée  (*).  »  Sans  compter  que 
17  mouillée  subsiste,  ou  i)eu  s'en  faut,  dans  Molière,  milieu, 
talion,  l'expression  «  nés  incapables  »  rappelle  dangereuse- 
ment ces  néo-grammairiens  qui  justifiaient  la  «  régularité 
fatale  »  de  leurs  lois  par  des  causes  obscures,  mais  supposées 
anatomiques  ou  physiologiques. 

Les  observations  de  l'abbé  Rousselot  sur  les  mouvements 
phonétiques  de  son  village  de  Gellefrouin,  «  débutant  par  les 
mots  d'un  usage  plus  commun...  avançant  et  reculant,  mais 
enfin  effaçant  toutes  les  inégalités  comme  s'ils  a  valent  triomphé 
d'un  seul  coup  »,  auraient  dû  faire  deviner  à  leur  auteur  le 
rôle  de  l'imitation,  c'est-à-dire  d'un  automatisme  psycholo- 
gique ni  plus  ni  moins  fatal  que  celui  qu'on  trouve  dans 
l'analogie,  en  sorte  qu'il  n'y  avait  pas  lieu  de  dresser  une 
barrière  entre  l'analogie  et  les  lois  phonétiques. 

On  accorde  que  le  principe  de  V Aiisnahmlosigkeit  a  rendu 
des  services  à  l'étymologie  comme  stimulant  et  formule  de 
travail.  Mais  ici  encore,  il  ne  faut  exagérer.  M.  .Tespersen 
nous  soumet  une  remarque  aussi  élémentaire  que  frappante  : 
l'affinité  de  son  et  de  sens  entre  deux  mots  est  parfois  si 
évidente  que  les  savants  les  plus  sévères  admettent  leur 
parenté  en  dépit  de  la  loi.  Exemples  :  gothique  azgo  avec 
consonne  sonore  et  anglais  ash,  allem.  asche,  dan.  ashe,  avec 
sourde;  allem.  neffe  avec  voyelle  brève  et  moyen-aliem.  nere : 


(1)  Meii.i.et.  Introil.  à  t'élude  comparative  des  tangues  indo-européennes. 
->e  édition,  1908,  p.  7.  Même  notion,  peut-être  tirée  de  là,  dans  le  bon  livre  de 
M.  Vendryes,  te  Langage,  Paris,  1021  (p.  U).  M.  Vendryos  reconnaît  d'ailleurs, 
en  une  formule  très  jtiste,  que  les  lois  phonétiques  ne  sont  tjue  des  moyennes 
dans  l'espace  et  le  temps  et  rejette,  d'un  sourire,  la  phrase  d'Oslholï  :  Dir 
Laiifgesetzr  wirt;en  hlind  wir  Saturgesetzr. 


736  COMPTES    RENDUS 

anglais  pebble  et  vieux-anglais  papal,  rescae  et  moyen-anglais 
rescoire,  flagon  et  français  flacon  (pp.  295-296).  On  ne  peut 
donc  exiger  que  l'étymologiste  procède  toujours  comme  si  les 
lois  n'avaient  pas  d't  xceptions.  Tout  ce  qu'on  peut  dire,  conclut 
M.  Jespersen,  c'est  qu'une  telle  étymologie  ne  sera  formelle- 
ment j9/"ouree  que  lorsqu'on  aura  découvert  un  cas  parallèle. 

Et  puis,  il  y  a  les  phénomènes  que  l'ancien  dogmatisme 
laissait  de  parti-pris  dans  l'ombre,  en  sorte  que  le  fameux 
principe  devenait  un  impédiment.  M.  Van  Ginneken  protesta  : 
«  Je  délaisse  le  postulat,  la  formule  apprise  à  l'école,  pour  la 
vérité  qui  m'est  imposée  par  les  faits!  »  [Op.  cit.,  p.  483.) 

Ainsi,  vu  l'opposition  qu'on  mettait  entre  les  lois  phonétiques 
et  l'analogie,  c'était  une  hérésie,  une  énormité,  ein  UruUng, 
que  de  parler  d'  «  analogie  phonétique  ».  M.  Jespersen  entre 
dans  cette  voie  quand  il  étudie  l'extension  de  certains  change- 
ments de  sons  à  des  séries  de  plus  en  plus  larges.  Le  passage 
de  in  à  'Il  par  exemple  en  anglais  commence  après  un  r  [true, 
rude),  continue  après  un  l  [blue,  due)  puis,  avec  des  oscilla- 
tions, après  .s,  z  {Susan,  résume),  en  sorte  que  c'est  une  cause 
très  comparable  à  l'analogie  qui  fait  qu'on  parle  après  coup 
d'une  loi  :  jii  devient  u  (p.  2fXJ). 

M.  Jespersen  ose  encore  envisager  l'influence  conservatrice 
de  la  signification  sur  le  son.  La  préposition  anglaise  on,  par 
exemple,  d'après  lui,  n'a  pas  été  affaiblie  dans  la  prononciation 
comme  to,  for,  of,  ai  (pron.  te,  fer,  ef,  et  avec  voyelle  neutre) 
parce  qu'une  confusion  en  aurait  résulté  avec  l'article 
indéfini  an. 

En  d'autres  endroits  qu'on  peut  rapprocher  de  celui-ci, 
l'auteur  montre  que  la  distinction  des  finales  sourdes  et  sonores 
dans  l'anglais  cab,  cap,  etc.,  tend  à  empêcher  une  confusion 
par  excès  d'homonymes  qui  ne  se  produirait  pas  au  même 
titre  en  allemand.  Il  croit  également  que  les  désinences  anglo- 
saxonnes  -a,  -u,  n'auiaient  pas  cédé  aussi  vile  à  l'altération 
phonique  si  elles  n'étaient  devenues  d'avance  inutiles  et  même 
gênantes  en  grammaire  par  les  confusions  qui  en  pouvaient 
résulter. 

En  résumé,  pas  de  cloison  étanche,  pour  M.  Jespersen, 
entre  le  son  et  le  sens,  les  changements  phonétiques  et  non- 
phonétiques.  L'action  réciproque  du  son  et  du  sens  fait  l'objet 
du  séduisant  chapitre  sur  le  «  Symbolisme  sonore  »  (Sound 


COMPTES  f<f:ndus  737 

SyinboUsm)  où  il  essaie  de  démontrer,  entre  autres,  que  la 
voyelle  i  sert  en  plusieurs  langues  à  indiquer  ce  qui  est  petit, 
léger,  futile  ou  sans  valeur. 

Le  chapitre  sur  l'Etymologie  que  l'auteur  a  rejeté  dans  la 
dernière  partie  du  livre  devrait  logiquement  se  placer  ici.  Un 
«  pédantisme  phonétique  »  force  Paul  et  Klugeà  déclarer  que 
l'anglais  mit  et  l'allem,  nuss  n'ont  rien  de  commun  avec  le 
latin  nuœ,  noix,  alors  qu'il  vaudrait  mieux  chercher  un  rap- 
prochement (p.  311).  D'autre  part,  les  étymologistes  montrent 
une  confiance  extrême  quand  ils  rapportent  l'allem.  Krieij  â 
une  forme  aryenne  -uirlglio-,  l'anglais  hopcà  une  racine  ■  K-u, 
alors  que  les  mots  germaniques  n'apparaissent  pas  dans  les 
textes  avant  le  moj'-en  âge  (p.  309). 

Les  mêmes  étymologistes  font  preuve  d'une  com|)laisaiice 
excessive  quand  il  s'agit  de  filiation  sémantique  et,  par 
exemple,  on  lit  que  le  grec  thugater  vient  d'une  racine  duli, 
qui  veut  dire  traire.  M.  Jespersen  demande  qu'on  soit  plus 
exigeant  sur  les  rapports  de  signification.  Il  entrevoit  des 
possibilités  nouvelles,  croit  à  des  «  croisements  »  de  mots 
comme  allem.  shcmm,  de  st/ll  x  diimm  (p.  311),  il  revient, 
avec  prudence,  à  l'idée  platonicienne  d'un  rapport  entre  le 
sens  et  le  sou,  suggère  l'origine  Oï\omi\io\)è\q\\e  (\e  plu mbww 
(plomb)  et  l'origine  interjectionnelle  de  1'/^/  dans  inais 
(holl.  maar,  danois  men,  voyez  l'explication,  plus  ingénieuse 
peut-èti-e  que  décisive,  à  la  p.  3 If)). 

La  mise  au  point  que  l'auteur  apporte,  eu  S'-s  derniers 
chapitres,  à  ses  idées  anciennes  sur  le  «  progrès  »  et  l'origine 
du  langage,  n'implique  aucune  rétractation.  Une  des  langues 
Bantu  dont  la  grammaire  est  connue  depuis  deux  cents  ans 
(p.  365)  lui  fournit  un  nouvel  exemple  de  ce  passage  de  la 
synthèse  à  l'analyse  où  se  marque,  selon  lui,  la  courbe  A\\ 
progrès  linguistique.  Je  ne  connais  point  toutes  les  langues, 
conclut  M.  Jespersen,  mais  toutes  celles  dont  l'histoire  nous 
est  accessible  présentent  la  même  tendance  progressive  à 
l'analyse  et  à  l'abstraction  On  peut  ajouter  ici,  avec  M.  "Veu- 
dryes,  que  le  progrès  est  relatif,  dépend  des  besoins  intellec- 
tuels des  sujets  parlants,  et  peut  toujours  être  renversé  par 
quelque  cataclysme  politique  ou  social.  Cette  partie  du  livre 
atteste  l'indépendance  de  M.  Jespersen.  Tandis  que  la  Société 
de  linguistique  de   Paris  «  n'admet  aucune  communication 


738  COMPTES     RENDUS 

concernant  soit  l'origine  du  langage,  soit  la  création  d'une 
langue  universelle  »,  M.  Jespersen  est  favorable  à  Vldo  et 
relève  la  question  de  «  l'origine  »  du  discrédit  où  elle  était 
tombée.  Par  la  multiplicité  comme  par  la  hardiesse  des  vues, 
il  nous  ramène  à  l'âge  héroïque  de  la  science  du  langage  qui 
semblait  clos  depuis  W.  de  Humboldt.  Phonéticien,  M.  Jes- 
persen n'entend  pas  que  la  phonétique  «  déshumanise  »  l'étude 
des  langues.  Il  n'exclut  aucune  route  vers  la  vérité,  ne  s'em- 
prisonne dans  aucune  méthode,  n'adopte  aucun  parti-pris.  Il 
ouvre  des  fenêtres,  aère  de  toutes  parts  la  science  qu'il  illustre 
depuis  trente-six  ans  et  qui  attend  encore  beaucoup  de  lui. 
Plusieurs  points,  indiqués  dans  la  préface,  n'ont  pas  été  traités 
dans  ce  livre,  d'autres  ne  sont  pas  épuisés.  Nous  souhaitons 
que  M.  Jespersen  termine  d'abord  cette  Grammaire  anglaise 
qui  sera  i^eut-ètre  son  chef  d'œuvre  et  que  cette  œuvre  achevée 
lui  laisse  le  loisir  de  donner  du  Langage  une  édition  aug- 
mentée, complète,  organisée,  définitive. 

Paul  de  Reul. 

Juvénal,  Satires,  texte  établi  et  traduit  par  Pierre  de  La- 
BRiOLLE  et  François  Villeneuve.  Paris,  Société  d'édition 
«  les  Belles  Lettres  »,  1921,  in-8°,  xxxir-200  pp.  Prix:  16  fr. 
(Collection  Guillaume  Budé.) 

On  lira  avec  plaisir  V Introduction  et  les  notices  qui  accom- 
pagnent les  différentes  satires.  Le  texte  est  établi  avec  soin. 

Je  ne  puis  malheureusement  accorder  le  même  éloge  à  la 
traduction.  Celle-ci  est  d'un  tour  aisé,  vif,  élégant;  mais  elle 
porte  les  traces  d'une  fâcheuse  précipitation  et  abonde  en 
inexactitudes  de  tout  genre.  Je  relève  celles-ci  : 

Sat.  I,  V.  5  :  sumiyii  plena  iam  margine  libri,  «  qui  remplit 
jusqu'en  haut  les  marges  du  volume  »,  alors  que  summi 
=  ecctremi  (Friedlànder  d'ailleurs  s'y  est  aussi  trompé).  — 
V.  51  :  Venusina  digna  hwerna,  «  dignes  du  flambeau  du 
poète  de  Venouse  ».  Lucerna  est  la  lampe  de  travail.  —  V.  61  : 
puer  Automedon,  «  tel  le  jeune  Automédon  ».  Automédon 
n'était  pas  si  jeune  que  cela.  Le  sens  est  :  «  ce  blanc-bec  fai- 
sant l'Automédon  ».  —  V.  81  :  nimbis  tollentibus  aequor,  «  les 
eaux  que  soulevait  la  tempête  »,  au  lieu  de  :  «  les  averses 
élevant  le  niveau  de  la  mer  ».  —  V.  91-92  :  dispensatore... 


COMPTES     RENDUS  739 

armigero,  «  devant  le  croupier  dispensateur  de»  munitions />, 
au  lieu  de  :  «  son  caissier  lui  passant  les  munitions  *  (m.  à  m. 
«  lui  servant  d'écuyer  »).  -  V.  137  :  orbilmn,  «  plateaux  », 
au  lieu  de  «  tables  rondes  ».  —  Sat.  III,  v.  204  :  ornantentum 
abaci,  «  ornement  de  sa  table  »,  au  lieu  de  «  ornement  de  son 
buffet  ».  —  Y.  220  :  «  un  modium  (!)  d'argent  »,  au  lieu  de 
«  un  modlus  d'argenterie  ».  —  V.  268  :  alla  ac  f/nx>rsa  peri- 
cula  noctis,  «  la  variété  des  autres  périls  nocturnes  »,  au  lieu 
de  «  les  périls  d'une  autre  espèce  auxquels  on  est  exposé 
pendant  la  nuit  »  (par  opposition  ;i  ceux  qu'on  court  pendant 
le  jour).  —  V.  278  :  ebriita  ac  petulans,  «  un  ivrogne  en 
gaieté  »,  au  lieu  de  «  un  ivrogne  batailleur  »  (cet  ivrogne, 
loin  d'être  «  en  gaieté  »,  est  de  fort  mauvaise  humeur/.  — 
V.  288  :  la  rixa  n'est  pas  «  une  querelle  »,  mais  une  rixe  (on 
en  vient  aux  coups).  -—  Sat.  IV,  v.  4  :  viduas,  «  les  veuves  », 
au  lieu  de  :  «  les  femmes  non  mariées  ».  —  V.  42  :  glacies 
Maeotica,  <  la  glace  des  Méotides  ».  Qu'est-ce  que  c'est  que 
les  Mèotides? —  V.  79-80  quamquam  va  avec  temporibus 
diris,  et  non  avec  putabat  :  quoiqu'on  fût  sous  le  régne  de  la 
terreur,  Pégasus  répugnait  aux  mesures  sanguinaires.  — 
V.  109  :  nudics  ne  signitie  pas  «  nu  »,  mais  «  sans  armure,  en 
simple  tunique  ».  De  même  Sat.  VI,  fragment  de  Windstedt, 
V.  12 (p.  73).  —  V.  118  :  devexae,  «  qui  en  gravissent  la  pente». 
C'est  tout  juste  le  contraire.  —  Sat.  V,  v.  5  :  Qaamvis  iurato 
')neticam  tibi  credere  testi,  «  quand  bien  même  tu  me  l'atteste- 
rais, je  ne  voudrais  pas  te  croire  ».  Vieux  contresens.  — 
V.  32  :  cardiaco,  «  qui  souffre  de  l'estomac  ».  Le  cardiacui 
morbus  n'est  pas  une  gastrite.  —  V.  35  :  fuligine,  «  moisis- 
sure »,  au  lieu  de  «  suie  ».  On  exposait  les  vins  à  la  fumée 
pour  les  faire  mûrir  plus  vite.  Cf.  Horace,  Car/n.,  III,  8, 11  : 
amphoram  fumwm  bibere  institutam.  — V.  120-121  ;  chiro- 
nomunta  est  un  participe  coordonné  à  saltanteyn  et  ne  désigne 
pas  un  personnage  différent  du  structor.  —  Sat.  VI,  v.  106  : 
secto  lacerto,  «  un  bras  de  moins  »  (!),  au  lieu  de  «  un  bras 
tailladé  ».  —  V.  177  :  scrofa  alba,  «  une  truie  blanche  »,  au 
lieu  de  «  la  truie  blanche  »  (celle  dont  parle  Virgile,  Aen., 
III,  390-392;  VII,  43-45  et  82-83).  -  V.  249  :  omnes  implet 
numéros,  «  à  remplir  tous  les  numéros  du  programm,e  »,  au 
lieu  de  «  à  exécuter  tous  les  commandements  du  maître 
d'armes».  — V.  366  :  leHbus  atliletis,  «des  athlètes  imberbes  », 


740  COMPTES     RENDUS 

au  lieu  de  *  des  athlètes  frottés  d'huile  »  (de  ceroma).  — 
Sat.VII,  V.8  :  Pieria...  inumbra,  «à  l'ombre  des  Piérides  ». 
Les  Muses  sont  donc  des  arbres?  —  Sat.  VIII,  v.  7:  7HUlta 
virga,  «  avec  une  baguette  rallom/ée  plusieurs  fois  ».  Qu'est-ce 
que  cela  veut  dire  ?  —  Sat.  X.  v.  45  :  nimos,  «  en  robe  nei- 
geuse ».  La  toge  était  donc  une  robe  ?  —  V.  88  :  cervice 
obstricta,  «  la  corde  au  cou  ».  La  corde  n'était  pas  en  usage  à 
Rome  pour  traîner  un  inculpé  devant  le  magistrat.  —  V.  258  : 
incolumi  Troia.  «  si  Troie  fût  restée  sauve  ».  au  lieu  de 
«  avant  la  ruine  de  Troie  ».  —  V.  261  :  primos  edere  planc- 
tus,  «  exhaler  ses  premières  plaintes  »,  au  lieu  de  «  donner  le 
signal  des  lamentations  ».  Au  v.  suivant  Polyxena  est,  comme 
Cassandra,  sujet  de  inciperet.  —  V.  270  :  fastiditus,  «  oublié  », 
au  lieu  de  «  dédaigné  ».  — V.  291  :  usque  ad  delicias  votorum, 
«  les  vœux  les  plus  niais  »,  au  lieu  de  «  des  vœux  d'une  pré- 
tention excessive  ».  —  Sat.  XI,  v.  69  :  la  vilica  n'est  pas  une 
«  fermière  »,  pas  plus  que  le  fossor  (v.  80)  n'est  un  «  fossoyeur  » 
ni  le  ligo  (v.  89)  une  «  bêche  ».  —  V.  70  :  «  de  gros  œufs  encore 
tout  chauds  du  foin  tordu  ».  Bizarre  !  —  V.  123  :  Je  ne  me 
représente  pas  bien  des  pieds  de  table  «  aux  extrémités  supé 
rieures  en  forme  de  léopards  ».  —  V.  189  :  vultmn  auremque 
calentem,  «  un  visage  et  une  haleine  enriammés  ».  Les  tra- 
ducteurs ont  donc  confondu  aurem,  «  oreille  »,  avec  auram, 
<  souffle  »  ! 

Arrêtons-nous  ici  :  en  voilà  assez  pour  l'édification  du 
lecteur  II  est  à  souhaiter  que  de  pareilles  erreurs  et  de- 
pareilles  négligences  soient  évitées  à  l'avenir  dans  une  coUec 
tion  mise  sous  le  patronage  du  grand  nom  de  Budé.  C'est  à 
regret  que  je  formule  un  jugement  aussi  sévère  sur  l'œuvre 
de  deux  savants  connus  par  d'autres  travaux  fort  estimables; 
mais  la  critique  a  ses  devoirs,  et  le  premier  de  tous  est  la 
sincérité.  P.  Thomas. 

Commentarius  in  M.  Manilii  Astronomica.  Scripsit  Jacobus  van 
Wageningen.  (Verhandelingen  der  Koninhlijhe  Ahadetnie 
van  Wetenschappen  te  Amsterdam.  Afdeeling  Lctter- 
hunde,  nieuv-ereehs.)  1921,  gr.  in-S**,  348  pp.  Planches. 

L'astrologie,  de  même   que    l'alchimie,   reléguée   par  la 
science  moderne  au  rang  des  aberrations  de  l'esprit  humain, 


COMPTES    RENDUS  7  »  1 

est  tombée  dans  le  niépi-is.  Aussi  peut-il  semi)lei'  étrange  de 
voir  des  savants  distingués,  comme  MM.  Bouché-Leclercq, 
Boll,  P'ranz  Curaont,  Oliviei'i  et  une  foule  d'autres,  s'intéresser 
à  des  théories  aujourd'hui  discréditées  et  consacrei-  leurs 
veilles  à  l'étude  des  anciens  astrologues. 

Ce  serait  pourtant  juger  l%érement  les  choses.  D'abord  une 
croyance  (jui  a  régné  pendant  tant  de  siècles  a  droit  à  l'atten- 
tion du  penseur,  et  son  histoire  forme  un  des  plus  curieux 
chapitres  de  l'histoii'o  des  idées;  ensuite  on  peut  recueillir 
chez  les  astrologues  grecs  et  romains  des  notions  scientifiques 
et  des  renseignements  historiques  qui  ont  leur  prix;  enfin 
cei'tains  de  leurs  ouvrages  ont  une  valeur  littéraire  qui  les 
sauve  de  l'oubli  :  tel  est  le  cas  pour  le  poème  de  Manilius 
intitulé  Astronomica. 

Malheureusement  la  lecture  de  ce  poème  est  hérissée  de 
difficultés  de  toute  espèce.  A  l'obscurité  de  la  matière  s'ajoute 
celle  d'un  style  souvent  pénible,  bizarre  et  contourné;  dans 
l'exposé  même  du  système,  Manilius,  qui  n'est  pas  un  savant 
mais  un  vulgarisateur,  tombe  dans  des  erreurs  et  des  contra- 
dictions qui  nous  déroutent;  et,  pour  brocher  sur  le  tout,  le 
texte  a  été  horriblement  maltraité  par  les  copistes. 

Grâce  aux  efforts  de  i)hilologues  érudits  et  perspicaces, 
parmi  lesquels  il  convient  de  citer  en  première  ligne  Scaliger 
et  Bentley,  grâce  aux  progrès  incessants  de  la  critique  et  de 
l'exégèse,  beaucoup  de  fautes  ont  été  corrigées,  beaucoup  de 
passages  embarrassants  élucidés.  Le  temps  était  venu  de 
condenser  les  résultats  acquis  et  de  nous  donner  un  commen- 
taire «  perpétuel  »  de  Manilius.  M.  van  Wageningen,  à  qui 
nous  devions  déjà  une  édition  critique  et  une  traduction 
néerlandaise  de  notre  poète,  s'est  chargé  de  cette  lourde  tâche. 

Les  Prolegomena  comprennent  cinq  chapitres  :  l.  De  astro- 
logia;  II.  De  M.  Manilii  nita  ;  III.  De  Matnlii  Astronomi- 
corum,  fonVbns;  IV.  De  carminis  orna  tu  pnetico:  V.  De 
Manilii  imitatoribus .  On  y  trouvera  résumé  avec  netteté  et 
précision  ce  que  nous  ])onvons  savoir  sur  ces  différents  points. 

Le  commentaire  est  copieux,  bien  ordonné,  d'une  clarté 
parfaite.  Aucune  difficulté  nesl  passée  sous  silence;  le  lecteur 
est  pour- ainsi  dire  conduit  pai'  la  main  à  travers  les  ronces  et 
les  broussailles.  Peut-être  même  re[)rochera-t-on  à  M.  v.  W. 
de  le  traiter  un  peu  comme  un  écolier  et  d'avoir  |trodigué  les 


742  COMPTES     RENDUS 

notes  élémentaires;  mais  ne  soyons  pas  ingrats  envers  un 
guide  si  complaisant  :  en  pareille  occurrence,  le  trop  vaut 
mieux  que  le  trop  peu.  Il  est  inutile  de  dire  que  M.  v.  W. 
connaît  à  fond  son  auteur  et  les  travaux  dont  il  a  été  l'objet. 
Dans  le  choix  des  leçons  et  dans  l'explication  des  passages 
controversés,  il  est  généralement  heureux  ;  je  dis  «  générale- 
ment »,  car  dans  certains  cas  (d'ailleurs  relativement  peu 
nombreux)  il  est  permis  de  faire  des  réserves. 

Manilius  a  des  parties  de  grand  écrivain  ;  son  œuvre  ren- 
ferme des  traits  frappants,  des  morceaux  descriptifs  remar- 
quables, des  tirades  philosophiques  d'une  inspiration  élevée. 
En  contribuant  à  faire  mieux  connaître  ce  poète,  qui  rappelle 
parfois  Lucrèce,  M.  v.  W.  a  rendu  un  incontestable  service 
aux  amis  des  lettres  latines. 

Pour  ne  pas  m'en  tenir  à  des  généralités  et  pour  prouver 
que  j'ai  lu  le  travail  de  M.  v.  W.  avec  l'attention  qu'il  mérite, 
je  présenterai  quelques  remarques  de  détail. 

L.  I,  V.  70-72.  Pour  la  négation  dTTÔ  koivoO,  cf.  ma  note  sur 
Apulée,  Metam.,  VI,  13  {Observât,  ad  script.  Latin,  p.  50). 
Ajouter  Culex,  v.  63-66.  —  L.  V,  v.  13  :  qui  nunc  quoque 
navigat  astris  =  qui  nunc  quoque  navigat,  scilicet  (in)  astris. 
Pour  cet  emploi  de  quoque,  cf.  mes  Obserii.  ad  script.  Lat., 
p.  48-49.  Ajouter  Manilius,  V,  369-370  :  Ipse  quoque,  etc.  — 
Ib.,  V.  18  :  divorum  dépend  plutôt  devotum,.  il  y  a  un  dédou- 
blement de  l'idée  :  Olympus  (=  divi)  solvit  divorum  votum, 
au  lieu  de  :  diri  sua  vota  solverunt.  —  Ib.,  v.  2^.  Il  n'eût  pas 
été  inutile  de  dire  que  invisae  =  non  oisae.  —  Ib.,  v.  45  : 
Tiphyn...  trementem,  cf.  Sidon.  Apollin,  Carm.,  XI,  5  :  tre- 
pidus  Tiphys.  —  Ib.,  v.  48  :  et  appulsam  terris  méritait  une 
explication  (voy.  Scaliger).  —  Ib.,  v.  50  :  Vera  Syracusis 
Salamis.  Ne  faudrait-il  pas  lire  :  Versa  (=-  eversa)  Syracusis 
Salainis  ?  —  Ib.,  v.  64.  Une  note  sur  habitabit  n'eût  pas  été 
superflue.  —  Ib.,  v.  117.  M.  v.  W.  semble  confondre  la 
fîstula  («  chalumeau,  flûte  de  Pan  »)  avec  les  tibiae,  qui 
n'étaient  pas  employées  par  les  pasteurs.  —  Ib.,  v.  120.  J'in- 
terprète in  nullo  sunt  otia  fructu  par  otio  frui  nequeunt, 
otio  minime  delectantur.  -  Ib.\.  151  :  odisse  viruni  =^  odisse 
mrilitatem  suam.  —  fb  ,  v.  324  :  scaenae  mollior  arte  ne 
veut  pas  dire  :  «  etia?n  facilius  se  movens,  cum  in  scaena 
agit  »,  mais  arti/icibus  scaanicis  mollior  :  ce  grave  person- 


COMPTES    RENDUS  743 

nage,  lorsqu'il  fait  la  débauche  et  se  met  à  danser,  reni^jorte 
sur  les  acteurs  de  profession.  —  //>.,  v.  314.  La  variante  de  G  : 
rel  (leicere  devait  être  prise  en  considèi'ation  :  le  verbe  deiceri' 
va  bien  avec  auruentia.  —  Ib.,  v.  437-438.  L'explication  de 
Bentley  est  la  bonne;  celle  de  M.  v.  W.  ne  s'accorde  pas  avec 
ce  qui  suit  :  (v.  439)  :  Adnumeres  etiam.  —  II/.,  v.  457  :  prae- 
leu'tae  lege  a  été  bien  interprété  par  Scaliger  («  lare  aetatis  »). 
—  76.,  V.  553.  La  note  sur  rruœ  virginea  ne  fait  pas  sentii- 
la  force  de  l'expression.  —  Ih.,  v.  573.  Lire  avec  les  anciens 
éditeurs  in  Andromeda  est  {Androrneda  pest  devenu  dans  les 
vcis's.  Andromède).  —  Ih.,  v.  593.  Lire  avec  Jacob  </«'«. s-.s7'.s—  alis 
au  lieu  de  quaniis  —  a  Us  :  lopposition  entre  les  «  grandes  » 
ailes  de  Persée  et  la  petite  taille  d'Andromède  {rjua7itula 
praeda  maris)  serait  du  dernier  mauvais  goût. 

P.  Thomas. 


Albert  Dauzat.  Essais  de  gêotiraphie  linguistique.  Noms  d'ani- 
maux. Paris,  Champion,  1922,  in-S^",  xii-136  p.,  12  cartes 
dont  8  en  couleurs. 

«  Le  magistral  Atlas  linguistique  de  la  France  doit  servir 
de  base  à  toute  étude  de  géographie  linguistique  gallo-romane. 
Mais  il  ne  saurait  suffire  à  tout,  et  il  est  utile  de  reprendre 
l'édifice  en  sous-œuvre,  chacun  dans  sa  région,  pour  le  com- 
pléter, comme  ont  tenté  de  le  faire  notamment  MM.  0.  Bloch 
pour  les  Vosges,  Bruneau  pour  les  Ardennes.  Millardet  pour 
les  Landes,  Terracher  pour  l'Angoumois.  » 

M.  A.  Dauzat,  qui  avait  déjà  publié  trois  ouvi-ages  sur  la 
dialectologie  de  la  Basse-Auvergne,  resserre,  dans  celui-ci. 
les  mailles  du  filet  de  V Atlas  sur  les  noms  d'animaux  de  la 
même  région, 

La  première  partie  est  consacrée  aux  animaux  d'élevage. 
L'auteur  étudie  successivement  les  noms —  souvent  extraordi- 
nairement  variés  dans  une  aire  si  réduite  —  désignant  cer- 
tains mâles  :  le  tavreai'  (11  noms  pour  le  midi  de  la  P'rance). 
le^ars  (12  noms  principaux  et  plusieurs  substituts),  le  bélier 
(6  noms),  et  certaines  femelles  :  \aju)r/enf  1 12  noms  pour  la 
France),  la  truie  (S  noms  principaux  pour  le  sud-est),  la  bre- 


744  COMPTES    RENDIS 

bis  (3  noms  principaux  pour  la  Gaule),  Vr/gnrlle  {6  noms),  la 
poîile. 

La  seconde  partie  fait  connaître  et  explique  l'étonnante 
diversité  de  noms  désignant  certains  reptiles  et  batraciens  :  le 
lézard  gris  (15  noms),  l'orvet  (3  n(^m-<),  le  fêtard  (24  noms),  et 
quelques  insectes  :  la  guêpe  (14  noms  principaux  en  Gaule),  la 
fourmi  (7  types),  le  hanneton  (20  noms),  le  rer -luisant 
(16  types). 

Pour  la  plupart  de  ces  animaux,  on  trouve,  à  la  fin  du 
volume,  une  carte  clairement  dressée,  s'étendant  souvent  bien 
au  delà  des  limites  de  la  Basse- Auvergne. 

De  cette  étude  minutieuse,  basée  sur  les  relevés  exécutés 
par  M.  D.,  se  dégagent  des  conclusions  qui  confirment  et  pré- 
cisent celles  que  l'on  a  déjà  établies  sur  le  même  groupe  de 
noms  en  utilisant  l'^^^ft.s-. 

On  remarque  une  grande  uniformité  dans  les  termes  dési- 
gnant les  animaux  de  trait  ou  de  boucherie.  Le  nom  du 
jeune  devient  très  souvent  celui  de  l'adulte,  pour  des  l'aisons 
d'intérêt  commercial.  Le  nom  d'un  mâle  peut  s'appliquer  à 
d'autres  espèces,  et  mémo  à  des  animaux  n'ayant  guère  de 
similitude  avec  le  premier  (nom  de  l'oie  mâle  donné  au 
taureau). 

La  variété  des  termes  appliqués  à  un  même  animal  aug- 
mente en  raison  de  la  rareté  de  leur  usage.  Les  aumaux  qui 
ne  sont  ni  utiles  ni  nuisibles  ne  frappent  l'attention  que  par 
int-^rmittences,  et  sont  désignés  par  des  noms  très  divers. 

Mots  et  formes  ont  constamment  voyagé,  suivant  les  grandes 
voies  de  communication,  se  déplaçant  avec  les  objets  dési- 
gnés. Les  grands  cours  d'eau  non  pourvus  de  ponts  s  opposent 
nettement  à  ces  déplacements.  Les  pays  de  montagnes  sont  le 
mieux  â  l'abri;  à  l'exception  des  régions  naturellement 
pauvres,  où  l'émigration  est  intense,  et  est  suivie  du  retour 
des  indigènes  enrichis. 

Enfin,  les  études  détaillées  comme  celle  de  M.  D.  mettent 
en  lumière  certains  caractères  des  patois,  la  complexité  du 
langage  dans  une  même  localité,  la  non-concordance  des  aires 
phonétiques  et  des  aires  morphologiques,  le  degré  et  la  nature 
de  la  résistance  des  divers  patois  aux  actions  internes  et  à 
l'attaque  de  la  langue  littéraire. 

A.  ViNCENr. 


COMPTES    RENDUS  74.% 

Joseph  Angiade.  Histoire  sommaire  de  la  littéraiure  méridio- 
nale au  moyen  âge  (des  origines  à  la  fin  du  XV'  siècle), 
Paris,  E.  deBoccard.  1921,  I  vol  in-8°,  ix -274  pa^es. 

Il  semble  que  M.  Anglaile  se  soit  donné  pour  tâche  de  doter 
les  romanistes  français  d'une  série  de  manuels  pour  lesquels 
ils  demeuraient  jusqu'ici  tributaires  de  l'Allemagne.  Le  des- 
sein est  trop  louable  pour  qu'on  n'y  applaudisse  pas  de  tout 
cœur.  Aussi  bien,  après  une  Grammaire  élémentaire  de  l'an- 
cien français  —  qui  n'a  d'autre  défaut,  à  nos  yeux,  que  d'être 
«  élémentaire  »  à  l'excès  — ,  après  une  excellente  Grammaire, 
de  Vancien  'provençal,  où  triomphe  sa  science  profonde  de 
«  provençalisant  »,  il  nous  offre  aujourd'hui  une  Histoire 
sommaire  de  la  littérature  raéridionale  au  moyen  âge,  qui 
sera  certes  la  bienvenue. 

Destiné  à  remplacer  l'antique  Grundriss  de  Bartsch,  ce 
manuel  nouveau  est  toutefois  conçu  sur  un  plan  assez  difïé- 
rent.  Une  première  partie,  de  loin  la  plus  copieuse,  comme 
bien  on  pense,  est  consacrée  à  un  inventaire  raisonné  de  la 
poésie  lyrique  en  langue  d'oc.  On  retrouve  dans  ces  pages 
l'auteur  judicieux  et  bien  informé  du  meilleur  livre  de  vulga- 
l'isati'tn  que  nous  possédions  sur  les  troubadours.  Ici  toutefois 
«  la  disposition  des  matières  est  nouvelle  ».  M.  .\nglade  s'est 
eftorcé  de  mettre  un  peu  d'ordre  dans  ce  lyrisme  abondant  et 
touflfu  en  rangeant  par  provinces  les  poètes  des  origines  et  du 
xii"  siècle.  Pour  le  xiir,  il  adopte  un  autre  principe  de  clas- 
sement et  rattache  les  œuvres  poétiques  à  certains  grands 
faits  d'ordre  politique,  comme  la  croisade  des  Albigeois  et 
l'établissement  du  pouvoir  royal  dans  le  Midi.  Il  ne  faut  évi- 
demment voir  là  qu'un  simple  procédé  d'exposition,  mais 
notre  auteur  en  tire,  dans  l'ensemble,  un  heureux  parti. 

Sa  deuxième  partie  traite  de  la  poésie  non  lyrique  :  didac- 
tique, morale  et  religieuse,  épique  ou  narrative,  qui  avait 
droit,  elle  aussi,  à  une  place  dans  son  exjiosé.  Il  la  lui  accorde, 
en  la  lui  mesurant  toutefois  avec  une  sage  discrétion.  On  peut 
en  dire  autant  de  sa  troisième  et  dernière  partie,  qui  examine 
les  œuvres  en  prose.  Leur  manque  oi'dinaire  d'intérêt  justifie 
ici  une  brièveté  plus  gi-ande  encore.  Sans  doute  les  sim]i|ps 
lettrés  négligeront-ils  ces  pages  finales.  Les  spécialistes,  par 
contre,  se  féliciteront  d'y  trouxei-  {maw  la  pi'emiére  fois  ras- 


746  COMPTES    RENDUS 

semblés  et  mis  au  point  des  renseignements  épai-s  et  souvent 
difficiles  à  réunir.  Il  faut  donc  louer  M.  Anglade  de  n'avoir 
pas  exclu  de  son  livre  les  xiv'et  xV  siècles.  En  dépit  de  leur 
médiocrité  artistique,  de  leur  incontestable  décadence,  les 
lettres  provençales  du  moyen  âge  finissant  n'en  constituent  pas 
moins  un  anneau  essentiel  dans  la  chaîne  un  peu  lâche  qui 
relie  le  moderne  félibrige  aux  troubadours  de  l'époque  clas- 
sique. D'un  point  de  vue  historique,  elles  gardent  une  impor- 
tance qui  justifie  assfz  leur  présence  dans  un  tableau  d'en- 
semble de  la  production  littéraire  du  Midi  médiéval. 

La  sûreté  d'information,  la  clarté  et  la  méthode  dans  l'ex- 
posé sont  les  qualités  nécessaires  d'un  manuel  de  ce  genre. 
On  peut,  sans  hésitation,  les  reconnaître  à  notre  auteur  :  il 
a  mené  à  bi-n  une  synthèse  malaisée.  S'î  science  est  profonde 
et  sa  doctrine  d'excellent  aloi.  Tout  au  plus  pourrait-on  lui 
reprocher  certaine  tendance  à  admettre  trop  facilement 
l'existence  hypothétique  d'œuvres  perdues  et  de  manuscrits 
disparus.  (Cf.  surtout  p.  226  sqq.)  Je  sais  bien  qu'il  reflète  à 
tels  endroits  l'opinion  d'un  maître  des  études  provençales. 
C'est  Chabaneau  qui,  dans  une  célèbre  suite  d'articles  de  la 
Revue  des  langues  romanes,  dressa  jadis  l'imposant  bilan  des 
pertes  subies,  au  cours  des  âges,  par  la  littérature  en  langue 
d'oc.  Mais  Chabaneau  appartenait  à  une  époque  encore  teintée 
de  romantisme  érudit,  et  qui  se  plaisait  à  ne  trouver  dans  les 
œuvres  conservées  que  l'écho  d'œuvres  antérieures  et  plus 
belles,  mais  englouties  par  le  temps.  Contre  cette  tendance,  à 
laquelle  Gaston  Paris  lui-même  n'avait  pas  échappé,  s'élève 
aujourd'hui  le  réalisme  critique  d'un  Bédier,  et  peut-être  les 
vues  de  Chabaneau  mér  teraient-elles,  à  cet  égard  du  moins, 
une  attentive  revision. 

On  pourrait  regretter  aussi  que  M.  Anglade  n'ait  pas  déve- 
loppé davantage  la  partie  bibliographique  de  son  ouvrage. 
Certes,  les  indications  qu'il  donne  en  bas  de  page  sont  détail- 
lées déjà.  Mais  elles  ne  sont  pas  complètes,  et  il  en  eût  peu 
coûté  pour  qu'elles  le  fussent.  Très  au  fait  de  la  production 
scientifique  française,  l'auteur  néglige  parfois  un  peu  celle  de 
l'Italie  et  de  l'Allemagne,  tout  au  moins  pour  les  dix  dernières 
années.  Ceci  dit,  reconnaissons  volontiers  qu'il  est  difficile  de 
prendre  en  défaut  ce  spécialiste  averti.  Les  r-eproches  qu'on 
peut  lui  adresser  sont  menus  et  véniels.  Si  nous  en  notons 


COMPTES    RENDUS  747 

quelques-uns  ci-aprés,  c'est  surtout  en  vun  d'une  réédition  — 
que  nous  souhaitons  prochaine  —  de  son  utile  et  savant 
manuel. 

P.  25,  note  5.  Pour  éviter  toute  déconvenue  aux  débutants. 
il  aurait  fallu  indiquer  que  le  livre  de  Trojel  est  écrit  en 
danois.  —  P.  28.  Pourquoi  faire  suivre  symphonie  (Vwn  point 
d'interrogation?  Il  s'agit  de  l'instrument  de  musique  connu 
dans  le  Nord  sous  le  nom  de  ch/fonie  ou  cifonie,  sorte  de  vielle 
dont  on  peut  voir  une  reproduction,  d'après  un  chapiteau  de 
Saint-Georges  de  Bocherville,  dans  Viollet-le-Duc,  Diction- 
naire du  mobilier,  t.  II,  p.  3(>9.  (La  définition  de  Godefroy, 
v  citonie,  est  inexacte.)  —  P.  191,  note  2.  Il  eiit  été  bon  de 
signaler  que  l'étude  de  Schulz-Gora  est  à  consulter  de  préfé- 
rence dans  la  traduction  italienne,  qui  cont  ent  des  additions 
de  l'auteur.  —  P.  230,  note  2.  L'édition  de  1621  des  prétendus 
mémoii'es  de  Geoffroy  de  Val  belle  est  peut-être  moins  rare 
qu'on  ne  le  dit.  Aux  «  trois  ou  quatre  exemplaires»  signalés,  il 
faut,  en  tout  cas,  en  ajouter  un  autre  :  celui  que  la  Biblio- 
thèque Royale  de  Bruxelles  possède  sous  la  cote  IL  55204, 
n"  3,  4°. 

Gustave  Chari.ier. 

G.  Aussems  et  J.  Fleuriaux.  Chrestomathie  française  illustrée, 
a  l'usage  des  Athénées,  des  Collèges  et  des  Ecoles  moyennes 
4*^  édition,  Gand.  Vanderpoorten,  1921,  in-8°,  xxx-72n,  p. 

Dans  une  notice  consacrée  à  la  première  édition  de  cet 
ouvrage  {Revue  de  V instruction  publique,  1913,  p.  351).  j'en 
ai  dit  tout  le  bien  que  je  pensai^  et  j'ai  cru  pouvoir  annoncer 
que  le  livre  serait  favorablement  accueilli  parles  professeurs 
de  l'enseignement  moyen.  Le  succès  a  dépassé  mes  prévisions, 
puisque,  malgré  le-;  circonstances  défavorables,  les  auteurs 
sont  déjà  arrivés  ii  un  quatrième  tirage. 

Naturellement  les  événements  de  ces  dernière>  années 
devaient  occuper  une  large  place  dans  la  nouvelle  édition; 
aussi  y  remarque-t-on  une  nouvelle  rubrique  intitulée  :  «  La 
Grande  Guerre  de  1914-1918  »;  et  plusieurs  morce.iux  ont  été 
ajoutés  dans  la  partie  relative  à  la  «  Formation  morale  ».  à 
laquelle  les  maîtres  doivent  veiller  aujourd'hui  plus  que 
jamais. 


748  COMPTES     RENDUS 

Je  dois  dire  que  les  morceaux  relatifs  à  la  Grande  Guerre 
ne  s'imposaient  pas  tous  ;  quelques  uns  auraient  été  avantageu- 
sement remplacés  par  d^s  extraits  bien  choisis  des  grands 
romans  de  la*  guerre,  le  Feu,  Les  Croiœ  de  bois,  etc.  Dans  un 
autre  ordre  d'idées,  il  est  permis  de  regretter  que  le  chef  de  la 
Pléiade  ait  été  absolument  écarté,  alors  que  ses  disciples  Baïf 
et  Vauquelin  de  la  Fresnaye  sont  représentés.  De  Chénier,  le 
seul  morceau  des  deux  Rats;  de  J.-M.  de  Hérédia,  un  seul  son- 
net; rien  de  nos  poètes  Van  Lerberghe,  V.  Gille,  F.  Séverin 
et  d'autres.  On  me  répondra  sans  doute  que  de  telles  critiques 
sonttoujouis  fort  aisées.  Aus-i  je  me  garderai  bien  d'insister; 
et  je  louerai  plutôt  la  méthode  des  auteurs,  si  propre  à  former 
le  goût  littéraire  des  élèves  et  à  développer  leurs  facultés  de 
discernement  :  au  lieu  de  signaler  en  passant,  au  hasard  des 
notes,  des  rapprochements  à  établir  entre  les  textes,  ils  juxta- 
posent divers  fragments  traitant  le  même  sujet  ou  faisant  voir 
ses  différents  aspects,  et  permettent  ainsi  de  constater  par 
quelle  diversité  de  procédés  les  écrivains  obtiennent  des 
résultats  identiques. 

Ce  qui  constitue  en  même  temps  la  supériorité  de  ce  livre 
sur  les  ouvrages  similaires,  comme  je  l'ai  dit  antérieurement, 
ce  sont  les  nombreuses  illustrations  en  rapport  direct  avec 
les  extraits  et  reproduisant  quelques  beaux  coins  et  monu- 
ments, ainsi  que  des  chefs-d'œuvre  de  peinture  et  de  statuaire 
des  principaux  musées.  Les  élèves  s'intéressent  à  un  manuel 
qui  leur  présente  des  gravures  artistiques  et,  quand  ils  dis- 
posent d'un  moment  de  loisir,  ils  se  plaisent  à  le  feuilleter  et 
prennent  ainsi  le  goût  de  la  lecture  personnelle.  Deux  appen- 
dices leur  seront  fort  utiles  :  ils  donnent  un  exposé  succinct 
de  l'évolution  de  la  littérature  française  au  xix*  siècle  et  de 
courtes  notices  biographiques  sur  les  auteurs  cités. 

J.  HOMBERT. 

J.  Morris-Jones.  An  Elementary  Welsh  Grammar.  Part.  1. 
Phonology  and  Accidence.  Oxford,  at  the  Glarendon  Press. 
1921,  in  12°,  XVI- 197  p.,  3  sh. 

Cette  grammaire  galloise  est  relative  à  la  langue  moderne 
écrite. 

La  période  moderne  de  la  littérature  galloise  commence  au 
xiv"  .siècle,  avec  les  cywyddau  de  Dafydd  ap  Gwiljan  qui 


COMPTKS     RENDUS  74U 

rompit  avec  le  style  artificiel  et  archaïque  des  anciens  bardes. 

L'œuvre  capitale  est  la  traduction  de  la  Bible  «lu  D'  Mor^^an, 
parue  en  1588.  Celui-ci  adopta  la  forme  littéraire  qui  était 
employée  par  les  bardes  avec  une  grande  pureté,  mais  il  se 
laissa  influencer  par  certaines  théories  étyuiolo<,nques;  il 
altéra  certaines  formes  traditionnelles,  ce  qui  rendit  sa  langue 
artificielle  et  l'éloigna  de  la  langue  parlée. 

La  langue  écrite  a  été  faussée  non  seulement  pai-  l'in- 
fluence de  théoi'ies  étymologirpies  inexactes,  mais  encore  par 
la  substitution  de  formes  dialec'ales  aux  formes  littéraires. 

C'est  la  langue  de  la  tradition  dont  M.  Morris-Jones  expose 
la  phonétique  et  la  morphologie  dans  ce  petit  livre. 

Celui  ci  est  écrit  avec  une  conscience  véritablement  rare 
dans  les  travaux  de  l'espèce  :  toutes  les  sources  où  ont  été 
puisés  les  exemples  cités  sont  mentionnées  avec  précision. 

C'est  l'heureux  développement  (Je  la  pai'tie  consacrée  au 
gallois  moderne  dans  la  Welsïi  (rrannnar,  historical  and 
comparatii^e,  que  le  même  auteur  publia  en  4^M3. 

Y.    TODRNEDU. 


Paul  Graindor.  Chronologie  des  archontes  atliéniens  sous 
l'Empire  {Mémoires  publiés  par  la  Classe  des  lettres  et  des 
sciences  morales  et  politiques  de  r Académie  royale  de  Bel- 
giciue,  2®  série,  t.  VIII).  Bruxelles,  M.  Lamertin,  li)22, 
in-4°,  312  pages. 

M.  P.  Graindor,  après  des  études  préliminaires  qui  témoi- 
gnaient d'une  patiente  recherche,  orientée  dans  une  même 
direction,  nous  donne  aujourd'hui  une  chronologie  qui  fait 
suite  à  celle  de  W.  Kolbe  (Die  attischen  Arrhonten  non 
293  29'2-:ill30  r.  J.-C,  Berlin,  1908)  et  nous  mène  avec 
d'inévitables  lacunes  jusqu'à  la  fin  du  iv*  siècle  ap.  J.-C. 
Pour  le  v^  siècle,  nous  n'avons  que  deux  noms,  tous  deux 
connus  par  des  textes  littéraires,  qu'on  y  puisse  rappoi'fer 
avec  certitude  :  Théagénés,  qui,  en  son  enfance,  vit  encore 
célébi'er  les  Panathénées;  Nikagoras,  sous  l'archontat  de  qui 
mourut  le  philosophe  Pi-oklos  (484-485). 

On  ne  disposait  jusqu'à  présent,  pour  l'époque  impériale, 
que  de  la  liste  dressée  par  V.  von  SchoefiFeren  18W)  (Knn/clo- 


750  COMPTES    RENDUS 

pèdie  de  Pauly-Wissowa,  II,  .v.  v.  Archontes,  p.  593-598). 
Gomme  il  arrive  souvent,  en  dépit  même  de  l'auteur  qui  mul- 
tiplie en  vain  les  signes  d'incertitude,  une  liste,  où  en  face  de 
chaque  année  est  inscrit  un  nom,  induit  en  erreur  l'érudit  qui 
ne  la  contrôle  point,  parce  qu'il  ne  se  doute  pas  de  l'ampleur 
des  approximations.  J'ai  pu  m'aperce  voir  jadis  que  deux 
archontes,  datés  par  v.  Schoeffer  de  19-18  et  15-14,  devaient 
être  remontés  de  prés  d'un  siècle  (cf.  Graindor,  n*'  209  et  210) 
et  M.  Graindor  a  constaté  que  bien  peu  d'archontes,  même 
parmi  ceux  dont  la  date  était  donnée  comme  certaine,  demeu- 
raient en  la  place  qui  leur  avait  été  assignée.  Il  nous  donne, 
lui  aussi,  une  table  par  ordre  chronologique  (p.  291  et  suiv.); 
mais  comme,  dans  les  pages  précédentes,  il  nous  fournit  toutes 
les  pièces  du  procès,  on  n'aura  nulle  excuse  si  l'on  en  fait  un 
usage  maladroit. 

Pour  arriver  à  ce  classement,  même  approximatif  et  dont 
on  ne  se  dissimule  pas  les  incertitudes,  il  a  fallu  un  énorme 
labeur.  Le  tome  III  des  Inscriptiones  graecae,  où  W.  Ditten- 
berger  a  recueilli,  en  1878  et  1882,  \q's,  inscriptiones  atticae 
aetatis  romanae,  est,  à  première  vue,  quelque  peu  rebutant  : 
peu  de  décrets,  des  dédicaces  et  surtout  dos  catalogues,  parmi 
lesquels  d'interminables  catalogues  éphébiques  où  des  homo- 
nymies répétées  déroutent  et  énervent.  Il  s'y  ajoute  les 
inscriptions  exhumées  depuis  à  Athènes,  et  aussi  à  Delphes  et 
à  Délos,  et  quelques  textes  litéraires.  M.  Graindor  a  procédé  à 
une  révision  totale  de  tous  les  documents  et  il  a  dressé 
(p.  307-308)  une  liste  significative  de  toutes  les  inscriptions 
qu'il  a  restituées  ou  corrigées.  Il  a  dû  ensuite  utiliser  et 
éprouver  ces  matériaux  et  en  extraire  tous  les  indices  qu'ils 
pouvaient  fournir  pour  la  tâche  précise  qu'il  se  proposait. 

Pour  critiquer  utilement  une  étude  de  ce  genre,  il  faudrait 
refaire  le  travail  et  ce  serait  peine  inutile,  car  la  méthode  de 
M.  Graindor  nous  offre  toute  sécurité.  On  s'attarde  avec  plai- 
sir aux  pages  d'introduction,  où  il  nous  fournit  d'intéressants 
renseignements  sur  l'archontat  à  l'époque  impériale.  L'ar- 
chonte élu  est  à  l'ordinaire  un  riche  personnage  qui  doit  faire 
face  à  de  multiples  dépenses  :  mais  les  Athéniens  fortunés  esti- 
maient que  l'exercice  de  la  magistrature  suprême  valait  bien 
quelques  sacrifices.  Sans  doute  il  y  a  d'assez  fréquentes  dvap- 
xiai,  six  connues  de  83  au  début  du  iir  siècle,  mais,  à  tout 


COMPTES    RENDUS  TT.I 

prendre,  Athènes  s'en  tire  mieux  que  bien  des  cités  de  Grèce 
ou  d'Asie  Mineure.  De  nobles  étrangers  tiennent  à  honneur 
d'y  devenir  magistrats  éponjmes  :  Domition,  Hadrien.  Gai- 
lien,  les  princes  thraces  Kotys  et  Rhœmetalkas  (n"'^  10  et  39), 
sans  compter  le  célèbre  Philopappos  (no  66). 

Nous  voyons  ainsi  qu'Athènes  jouit  encore  d'un  grand  ])res- 
tige.  A  une  époque  qui  n'est  pas  très  lointaine,  on  en  arrêtait 
l'histoire  à  la  bataille  de  Chéronée.  Après  cette  date,  «  Ath'iies 
s'en  va  »,  s'écriait  pathétiquement  V.  Duruy,  et  M.  A.  Croiset 
écrit  encore  dans  son  étude  sur  les  Démocraties  antiques  : 
«  Athènes  nest  plus  que  l'ombre  d'elle-même.  Elle  continue 
de  nommer  des  archontes  et  de  tenir  des  assemblées;  mais  elle 
n'est  alors,  en  réalité,  qu'un  musée  et  une  école.  »  M.  Fergu- 
son  nous  a  enseigné  que  l'Athènes  de  l'époque  hellénistique 
méritait  bien  d'être  étudiée  :  mais  il  s'arrêta  à  la  prise  de  la 
ville  par  Sylla,  comme  si  tout  était  fini  après  ce  qu'on  appelle 
volontiers  le  dernier  soubresaut  du  «  nationalisme  »  athénien. 
Voici  que  M.  Graindor  attire  notre  attention  sur  «  la  vieillesse 
encore  verte  d'une  cité  qui,  dans  la  mesure  de  ses  forces,  con- 
tinue à  transmettre  aux  générations  suivantes  l'éclat  le  sa 
grandeur  passée».  11  souhaite  que  son  étude  chronologique 
«  facilite  les  recherches  relatives  à  l'histoire  d'Athènes  sous 
l'Empire  ».  Cette  histoire,  nous  espérons  qu'il  ne  laissera  à 
nul  autre  le  soin  de  l'écrire. 

P.  Roussel. 

A.  Lesmaries.  Dimkerque  et  la  plaine  maritime  aux  temps 
anciens.  Introduction.  Avec  une  lettre  préface  de  M.  Ca- 
mille JuLLiAN.  Dunkerque.  Imprimerie  du  Nord  Mari- 
time, 1922,  in  8'J,  vi-132  pp. 

Deux  considérations  préliminaires  s'imposent  en  tète  de  ce 
compte-rendu.  La  première,  c'est  que  le  gros  de  l'ouvrage  est 
encoresur  le  métier.  En  effet.  M.  L.  ne  nous  donne  ici  qu'une 
introduction  à  l'histoire  de  Dunkerque  et  de  la  plaine  irari- 
time  (dunkerquoise)  aux  temps  anciens.  Quoiqu'il  ne  nous 
indique  nulle  partie  terminus  ad  quciêi  de  son  travail,  on 
peut  inférer  de  certaines  allusions  à  de^  faits  de  date  tout  à  tait 
récente  (les  élections  belges  de  1921  par  exemple)  qu'il  compte 
étendre  ce  passé  jusqu'à  nos  jours.  La  seconde  considération. 


7£)-  COMPTES     RENDUS 

c'est  que  l'auteur  possède  de  solides  qualités  d'historien  local  ; 
cette  introduction  prouve  amplement  qu  il  est  de  force  à 
mènera  bonne  fin  le  travail  entrepris.  Dans  ces  circonstances 
ne  sui>-je  pas  autorisé  à  parler  en  toute  Irauchise  des  défauts 
de  méthode  qui  menacent  de  compromettre  gravement  la 
valeur  de  son  œuvre? 

Cet  opuscule  se  divise  en  deux  parties,  la  première  traitant 
du  passé,  du  milieu,  de  la  formation  géologique  de  la  plaine 
dunkerquoise;  la  seconde  de  l'origine  ethnographique  des 
habitants  qui  s'installèrent  sur  le  sol  abandonné  par  les  flots. 
Pour  la  première  partie  l'auteur  pouvait  se  servir  de  travaux 
de  première  valeur  —  i.  a.  ceux  de  MM.  Blanchard,  Cornet, 
Massart  et  Rutot  —  qui  d'un  point  de  vue  plus  large  avaient 
étudié  les  problèmes  qu'il  devait  exposer.  M.  L.  l'a  fait  de 
façon  consciencieuse  et  intelligente,  ne  leur  empruntant  que 
les  informations  d'intérêt  réel  pour  la  zone  restreinte  qu'il 
traite,  complétant  ci  et  là  leur  documentation  par  des  données 
locales  nouvelles.  C'est  de  façon  simple  et  claire  que  l'auteur 
décrit  d'après  les  travaux  les  plus  récents  et  les  plus  scienti- 
fiques la  formation  géologique  du  sol  dunkerquois,  depuis 
l'âge  silurien  Jusqu'à  l'apparition  des  dunes  pleistocènes  de 
Ohyvelde  et  la  constitution  des  alluvions  tourbeuses,  le 
premier  des  dépôis  modernes.  Il  aban  lonue  donc  le  sol  au 
moment  où  l'homme  pourra  établir  son  habitat  sur  la  plaine 
tourbeuse  qui  a  pris  la  place  du  «  golfe  de  Dunkerque  ». 

La  seconde  partie  est  intitulée  :  «  Les  antiques  légendes  et 
les  variations  de  l'histoire  ».  Comme  le  titre  l'indique  suffi- 
samment, l'auteur,  dans  son  exposé  concernant  les  origines 
et  la  race  de  la  population  dunkerquoise,  procède  par  la 
négative,  par  l'absurde.  En  réalité  il  ne  fait  que  déblayer  le 
terrain,  mais  il  le  fait  avec  conviction,  ne  ménageant  pas  ses 
coups  de  balai. 

Dés  les  premières  lignes  de  cette  partie  les  défauts  auxquels 
je  faisais  allusion  tantôt  sautent  aux  yeux.  Tout  d'abord 
M.  L.  fait  du  travail  à  thèse,  ostensiblement  même,  car  il 
renchérit  à  plaisir  sur  la  force  des  arguments  en  recourant 
au  sarcasme  et  au  ton-haut.  M.  L.  n'admet  pas  la  théorie  des 
races.  Je  serai  le  dernier  à  lui  jeter  la  pierre  à  ce  propos. 
Après  les  brillants  travaux  de  Deniker,  Brunhes,  Jullian, 
Flach  et  autres  savants  que  l'auteur  connaît  et  cite  à  bon 


COMPTES     RENDUS  753 

droit,  qui  n'admet  que  le  rôle  de  la  race  dans  la  causalité 
historique  n'ait  été  démesurément  exagéré,  dans  des  buts 
politiques  parfois,  souvent  même,  d'autres  fois  pour  satisl'aire 
à  la  mode  régnante  dans  l'historiographie  de  l'époque?  Mais 
était-il  vrai  ment  nécessaire  à  propos  de  l'histoire  deDunkerque 
de  s'appesantir  tellement  sur  cette  question  compliquée  des 
races?  Fallait-il  exposer  et  réfuter  à  grands  mots  toutes  les 
légendes,  même  les  plus  fantaisistes,  créées  au  cours  des  siècles 
par  quelqu(^  imagination  féconde  ou  facile,  toutes  les  hypo- 
thèses, même  les  plus  grotesques,  qui  depuis  le  moyen  âge 
jusqu'à  nos  joui's  furent  émises  au  sujet  de  l'origine  des 
Belges,  des  Celtes,  des  Germains?  Depuis  Pline,  Strahon, 
Suétone,  jusqu'à  M.  Barrés,  A.  France,  L.  Pierard,  Rudiger 
et  le  député  allemand  Breitscheid,  quelle  suite  hétéroclite  de 
témoins  cités  au  banc  de  l'accusation  pour  donner  le  coup  de 
grâce  aux  légendes  pernicieuses,  aux  hypo'hèses  méchantes  ! 
Que  des  sciences  auxiliaires  aient  osé  donner  l'appoint  de 
leurs  conclusions  favorables  à  l'une  ou  l'autre  de  ces  théories, 
il  ne  leur  fallait  pas  davantage  pour  être  immédiatement 
répudiées  par  l'auteur.  Et  au  milieu  de  cet  exposé  et  de  cette 
démolition  de  légendes,  ou  doit  se  demander  si  l'auteur,  en 
poursuivant  la  démonstration  de  sa  thèse  favorite,  n'a  pas 
oublié  qu'il  fait  œuvre  d'historien  local,  car  à  peine  une  ou 
deux  légendes  sont  plus  spécifiquement  dunkerquoises. 

Je  ne  ferai  pas  à  M.  L.  l'injure  de  croire  que  c'est  incon- 
sciemment qu'il  combat  des  moulins  à  vent  et  que  dans  ce  but 
il  outrepasse  les  limites  géographiques  restreignant  le  champ 
de  ses  investigations  historiques.  Je  crois  plutôt  qu'il  a  sacrifié 
à  sa  nature  combattive,  à  un  besoin  instinctif  de  faire  du  jour- 
nalisme. Sans  doute  peut-il  invoquer  l'excuse  —  plus  com- 
préhensible que  justifiable  —  d'avoir  rédigé  ce  chapitre  sous 
l'impression  encore  toute-puissante  des  jours  douloureux  de 
guerre.  Il  n'aurait  plus  d'excuse  s'il  faisait  du  thème  déve- 
loppé dans  ces  chapitres  le  leitmotiv  de  toute  son  (puvre. 
Que  M.  1>.  se  convainque  donc  bien  que  l'histoire  n'est  ni  de 
la  politique  combattive  ni  du  journalisme  tapageur.  Quil  .'^e 
l'ésigne  à  s'acquitter  simplement  de  sa  tâche,  modeste  peut  être, 
mais  combien  compliquée,  d'historien  local,  sans  se  laisser 
entraîner  désormais  à  des  considérations  et  des  diatribes  qui 
sentent  la  presse  ou  la  tribune.   Qu'il  i-enonce  a  tous  hoi-s 

48 


754  COMPTES    RENDUS 

d'œuvre  et  se  pénétre  des  limites  géographiques,  chronolo- 
giques et  scientifiques  dans  lesquelles  il  doit  se  cantonner  : 
alors  l'œuvre  qu'il  nous  fournira  sera  une  contribution  pré- 
cieuse à  l'histoire  de  sa  patrie  et  du  comté  de  Flandre. 

Un  second  défaut  sur  lequel  il  faut  bien  attirer  l'attention, 
quoiqu'il  soit  plus  facilement  remédiable,  se  reflète  déjà  dans 
la  première  partie  de  cette  introduction.  C'est  le  mode  d'emploi 
et  de  référence  des  sources.  Il  n'est  pas  recommandable  de 
rejeter  les  notes  bibliographiques  à  la  fin  de  chaque  chapitre, 
encore  beaucoup  moins  de  les  classer  suivant  l'ordre  alphabé- 
tique des  noms  d'auteurs.  Pour  qui  veut  contrôler  les  sources 
utilisées,  n'est-il  pas  énervant  de  ne  pas  en  trouver  l'indica- 
tion au  bas  ou  en  marge  de  la  page  elle-même  et  de  les  voir 
citées  sans  ordre  numérique  ?  Qu'on  prenne  une  page  au 
hasard  et  les  notes  viendront  dans  l'ordre  suivant,  par 
exemple,  5U,  3,  22,  lU,  20.  Il  n'y  a  pas  que  le  mode  de  renvoi 
aux  sources  qui  soit  défectueux,  le  mode  d'indication  et  d'em- 
ploi des  sources  appelle  également  certaines  critiques.  Quelle 
incurie  dans  la  transcription  des  noms  d'auteurs  !  (Ligebert 
de  Gembloùrs,  Repsaet,  Gheldor/f,  G^selle,  Fortucatus,  von 
Schrieck,  etc.).  Que  de  travaux  cités  de  seconde  main  (dans 
certains  chapitres  50  p.  c),  et  encore  cités  d'après  des  travaux 
vieillis,  dépourvus  de  critique,  même  d'après  des  comptes 
rendus,  voire  des  journaux  !  C'est  le  Figaro  qui  documente 
l'auteur  sur  le  Frontpartij  et  le  XIX'  Siècle  (sicj  qui  le  ren- 
seigne sur  la  FlamenpoUtiU  de  Rudiger,  car  sans  recours  au 
mouvement  activiste  peut-on  expliquer  les  origines  ethnogra- 
phiques de  la  population  dunkerquoise  ?  C'est  un  ouvrage  sur 
l'Ethnogénie  qui  lui  fournit  les  stipulations  de  la  loi  salique, 
tandis  que  Maurevert  lui  transmet  des  phrases  lapidaires 
d'Anatole  France. 

.Je  pourrais  multiplier  les  exemples.  Ils  suffisent  pour 
prouver  qu'il  y  a  ici  de  l'incurie,  inadmissible  dans  un  ouvrage 
sérieux,  d'autant  plus  regrettable  qu'elle  se  serait  en  grande 
partie  évitée  de  soi-même,  si  l'auteur  n'avait  pas  brisé  le 
cadre  qu'il  s'était  tracé  lui-même  et  avait  maintenu  l'objecti- 
vité, indispensable  à  toute  œuvre  historique. 

Il  ne  tient  qu'à  M.  L.  de  nous  donner  un  travail  solide  et  du 
meilleur  aloi.  Il  a  de  l'heuristique;  il  possède  une  biblio- 
graphie bien  fournie;  il  a  vu  quantité  de  documents;  il  a 


COMPTES     RENDIS  755 

l'esprit  de  travail,  il  a  le  talent  de  bien  grouper  ses  données 
et  d'exposer  son  sujet  avec  clarté.  A  chacun  sa  tâche.  Je 
regrette  que  la  mienne  fût  si  ingrate.  Que  l'auteur,  dans  le 
prochain  fascicule,  obvie  aux  défauts  qu'à  mon  grand  regret 
i'ai  dû  signaler  ici.  Il  me  rendra  ma  tâche  moins  pénible  et 
assurera  à  son  travail  l'accueil  bienveillant  que  ses  fortes 
qualités  méritent. 

Henri  E.  de  Sagher. 


Ch.  Bémont  et  G.  Monod.  Histoire  de  l'Europe  aie  moyen  âge 
(.395-1270),  nouvelle  édition  refondue.  Paris,  Alcan,  1921, 
in-l^î,  xxvii-456  pages. 

La  nouvelle  édition  de  cet  excellent  manuel  se  présente  sous 
une  forme  un  peu  plus  abrégée  et  avec  un  plan  simplifié, 
mieux  adapté  à  la  suite  et  au  groupement  des  faits,  l.e  fond 
même  n'a  guère  subi  de  modifications  :  l'histoire  des  institu- 
tions et  des  mœurs  occupe  toujours  une  large  place  et  le  haut 
moyen  âge  est  traité  avec  un  soin  spécial.  Après  une  esquisse 
de  l'empire  romain  et  du  monde  barbare  à  la  fin  du  iv*  siècle, 
on  trouve  exposées  en  détail  les  grandes  invasions.  Quel  jues 
pages  sont  consacrées  à  l'empire  romain  d'Orient  au  vi®  et  au 
viP  siècle  et  à  l'expansion  des  Arabes  et  de  l'islamisme.  Le 
rôle  des  Carolingiens  est  fortement  mis  en  relief  et  les  causes 
de  la  décadence  carolingienne  sont  bien  détaillées.  Le  régime 
féodal  fait  ensuite  l'objet  de  plusieurs  chapitres  solides  et  inté- 
ressants. 

L'histoire  de  l'Allemagne  et  de  l'Italie  du  x""  au  xiii''  siècle 
se  résume  essentiellement  dans  la  lutte  entre  l'Empire  et  la 
Papauté.  L'orient  chrétien  et  musulman  est  étudié  surtout  au 
point  de  vue  de  ses  rapports  avec  l'Europe,  de  sorte  que  les 
croisades  font  l'objet  d'un  récit  continu  et  instructif. 

Une  atteution  toute  particulière  est  accordée  à  l'évolution 
de  la  France  du  xi°  au  xiir  siècle,  tandis  que  les  principaux 
faits  qui  ont  marqué  les  autres  pays  de  l'Europe  au  xiii"  siècle 
tiennent  en  quelques  paragraphes  synthétiques.  Le  manuel  se 
termine  par  un  aperçu  de  l'organisation  et  des  tendances  de 
l'Église  romaine  au  xiir  siècle  et  par  une  vue  générale  de  la 
civilisation  chrétienne  et  féodale. 


756  COMPTES    RENDUS 

En  tête  de  chaque  chapitre  important  figure  la  liste  des 
principales  sources  et  des  ouvrages  à  consulter,  et  le  volume 
comprend  en  outre  une  bibliographie  générale,  en  guise  d'in- 
troduction, et  un  répertoire  alphabétique  des  institutions  qui 
rendra  de  réels  services  au  lecteur  désireux  de  suivre  l'évolu- 
tion de  tel  ou  tel  phénomène  historique  ou  de  procéder  à  des 
comparaisons. 

H.  Vander  Linden. 

Gabriel  Hanotaux.  histoire  de  la  Nation  Française;  tome  III: 
Histoire  politique  des  origines  à  1515,  par  P.  Imbart  de 
LA  Tour.  Paris,  s.  d.  [1921],  in-4°. 

Pour  donner  une  Histoire  de  la  nalion  française,  M.  G.  Ha- 
notaux s'est  adressé  à  des  collaborateurs  de  grande  valeur.  Si 
l'on  en  juge  d'après  le  volume  que  nous  avons  sous  les  yeux 
leur  œuvre  est  à  la  hauteur  de  leur  réputation. 

S'il  nous  était  toutefois  permis  de  reprocher  quelque  chose 
à  M.  Hanotaux,  nous  exprimerions  des  regrets  au  sujet  du 
plan  auquel  il  s'est  arrêté.  Des  volumes  séparés  confiés  à  des 
érudits  différents  traitent  successivement  :  la  géographie 
humaine,  l'histoire  politique,  l'histoire  militaire,  l'histoire 
coloniale  et  diplomatique,  l'histoire  religieuse,  l'histoire  éco- 
nomique et  sociale,  l'histoire  des  arts,  des  lettres  et  des 
sciences.  Ces  distinctions  ont  quelque  chose  d'artificiel;  elles 
ont  le  grand  inconvénient  de  ne  pas  permettre  l'exposé  d'un 
problème  sous  ses  diverses  faces  et  dans  toute  son  ampleur. 
En  faut-il  un  exemple?  Que  le  lecteur  lise  attentivement  le 
chapitre  —  très  remarquable,  d'ailleurs,  à  bien  des  égards  — 
consacré  par  M.  Imbart  de  la  Tour  à  1'  «  Emancipation  popu- 
laire >.  Pour  n'avoir  pu  traiter  résolument  le  problème  sous 
i^on  aspect  économique  l'auteur  n'a  pas  réussi  à  donner  des 
origines  et  de  l'évolution  des  constitutions  ui  haines  un  tableau 
complet  et  qui  se  tienne. 

Le  volume  de  M.  Imbart  de  la  Tour,  qui  seul  doit  nous  occu- 
per ici,  a  de  très  grands  mérites.  Nous  en  louerons  la  docu- 
mentation abondante  et  sûre,  la  clarté  de  la  conception,  l'esprit 
de  synthèse,  la  langue  élégante,  qualités  dont  ne  s'étonneront 
pas  ceux  qui  ont  pratiqué  les  ouvrages  antérieurs  de  l'auteur. 
Disons  aussi  combien  il  faut  apprécier  chez  un  érudit  qui  se 


COMPTES    RENDUS  757 

réclame  visiblement  de  la  docti-ine  providentielle  de  l'his- 
toire une  volonté  constante  d'impartialité.  Sans  doute  on 
songe  en  le  lisant  aux  Gesta  Dei  per  FrcDicos,  mais  pas  une 
fois  nous  n'avons  surpris  l'historien  à  «solliciter  doucement 
les  textes  »,  pour  parler  avec  Renan.  La  lecture  s'achève  sur 
une  impression  de  science  et  de  probité  intellectuelle. 

Il  y  a  néanmoins  dans  le  volume  dont  nous  rendons  compte 
plus  d'une  opinion  qui  appelle  des  réserves;  ces  réserves  sont 
d'autant  plus  indispensables  que  même  lorsque  M.  Imhart  de 
la  Tour  développe  les  idées  qui  lui  sont  le  plus  personnelles, 
il  ne  s'en  explique  jamais  en  note. 

C'est  ainsi  que,  par  exemple,  l'auteur  professe  une  doctrine 
originale  en  ce  qui  concerne  les  subdivisions  territoriales  de 
l'Etat  franc  :  à  l'époque  mérovingienne  il  voit  dans  la  cité, 
l'ancienne  cii'itas  romaine.  «  l'unité  cellulaire  de  l'État  » 
(p.  lt)2),  la  circonscription  administrative  par  excellence.  Les 
cités  paraissent  à  ses  yeux  s'être  transformées  en  comtés  à 
l'époque  de  Charlemagne;  \es,  pagi  qu'il  distingue  des  comtés 
auraient  été  des  subdivisions  des  cités,  administrées  par  des 
vicarii  (p.  220). 

C'est  là  une  conception  assurément  toute  nouvelle  et  l'on 
aimerait  connaître  les  sources  qui  lui  servent  de  base.  Nous 
avions  toujours  considéré  pagus  comme  sj'^nonjme  de  comî- 
tatus  et  nous  pensions  que  dès  l'époque  mérovingienne,  beau- 
coup de  cités  s'étaient  déjà  décomposées  en  plusieurs  comtés. 

Nous  nous  demandons  aussi  s'il  est  bien  juste  d'écrire 
comme  le  fait  M.  Imbart  de  la  Tour  (pr  230-232)  que  «  Charle- 
magne appartient  à  la  France  ».  On  n'aime  guère  ces 
annexions  rétrospectives  sous  la  plume  d'un  historien.  Rien, 
d'ailleurs,  n'est  moins  national  que  le  pouvoir  et  l'empire  de 
Charlemagne! 

Est-ce  aussi  l'endre  exactement  la  notion  juridi  |ue  du  fief 
que  parler  de  «  propriété  conditionnelle  »  (p.  304)  et  est-il 
exact  d'écrire  les  mots  «dédoublement  du  droit  de  propriété  » 
à  propos  du  domaine  éminent  et  du  <ioinaine  utile  ip.  268)? 
Nous  ne  le  pensons  pas  :  quand  une  terre  est  concédée  en  fief 
ou  en  tenure  roturière,  il  y  a  «  démembrement  de  la  pro- 
priété »  :  celui  qui  concède  la  tenure  et  qui  tient  en  alleu  la 
terre  dont  il  a  le  domaine  éminent,  est,  à  nos  yeux,  seul 
«  propriétaire  ».  Le  tenant,  vassal  ou  censitaire,  n'a  que  le 


758  COMPTES     HEND[iS 

domaine  utile,  un  certain  droit  de  jouissance,  ii  est  une 
manière  de  «  possesseur  »,  mais  il  ne  nous  paraît  en  aucune 
façon  titulaire  d'un  droit  de  propriété. 

Arrêtons  ici  nos  critiques  pour  signaler  au  lecteur  certains 
passages  où  M.  Imbart  de  la  Tour  nous  semble  avoir  insisté 
d'une  manière  heureuse  sur  quelques  idées  particulièrement 
justes  :  notamment  (p.  205  et  ss.)  le  caractère  religieux, 
presque  ecclésiastique  à  certains  égards,  de  la  monarchie  de 
Gharlemagne  (p.  206  :  «  l'Etat  n'est  que  la  société  chrétienne 
politiquement  organisée  »).  Citons  encore  les  pages  au  cours 
desquelles  l'auteur  se  refuse  à  reconnaître  dans  les  races,  des 
lacteurs  déterminants  de  l'histoire  de  France(p.  136, 137, 237). 
Citons  surtout  vers  la  fin  du  volume  l'excellent  chapiti'e  inti- 
tulé Le  Souverain  et  consacré  aux  ti'ansformations  de  la 
monarchie  au  xiV*  siècle,  de  Philippe  le  Bel  à  Charles  V. 
L'influence  exercée  par  le  droit  romain  sur  cette  évolution  est 
développée  avec  un  véritable  talent. 

Le  volume  de  M.  Imbart  de  la  Tour,  s'il  contient  des  parties 
qui  appellent  une  prudente  réserve,  n'en  rendra  pas  moins  de 
très  réels  services.  Il  a  le  grand  mérite  d'être  un  livre  à  idées, 
un  livre  qui  fait  penser.  L'historien  le  lira  avec  profit  et  —  ce 
qui  ne  gâte  rien  —  il  le  lira  avec  plaisir. 

François  L.  Ganshof. 

Marc  Bloch.  Rois  et  Serfs.  Un  chapitre  d'histoire  capétienne. 
Paris,  Champion,  1920,  in-8%  224  p. 

11  existe  dans  l'histoire  du  droit  un  nombre  assez  considé- 
rable de  questions  essentielles  qui  n'ont  point  fait  l'objet 
d'études  approfondies,  mais  à  propos  desquelles  circulent 
quelques  idées  simples  que  se  transmettent  scrupuleusement 
les  manuels;  tout  le  monde  les  admet,  alors  qu'en  réalité 
elles  manquent  de  tout  fondement.  Telle  l'idée  que  Louis  X 
le  Hutiu  et  Philippe  V  le  Long  aui'aient,  par  deux  ordonnances 
célèbres  du  3  juillet  1315  et  du  23  janvier  1318,  affranchi  tous 
les  serfs  du  domaine  royal. 

C'est  en  passant  ce  lieu  commun  au  crible  de  la  critique 
que  M.  Bloch  a  été  amené  à  nous  donner  un  travail  d'ensemble 
sur  la  politique  des  rois  capétiens  vis-à-vis  de  leurs  serfs. 
Proclamons  tout  de  suite  que  cette  étude  constitue  une  contri- 


COMPTES    RENDUS  l'>9 

biition  de  premiep  ordre  à  l'histoire  de  la  condition  des 
personnes  et  en  particulier  des  classes  rurales  en  France  aux 
XIII»  et  xiv  siècles.  Elle  se  recommande  par  l'inliexible 
rigueur  de  la  méthode  et  la  prudence  des  hypothèses;  l'infor 
mation  est  abondante,  siire,  originale,  puisée  pour  une  p:irt 
très  considérable  dans  des  documents  d'archives  inédits 
(Trésor  des  Chartes,  Registres  du  Parlement,  débris  au  dépôt 
de  la  Chambre  des  (Comptes,  etc.)  ;  la  limpidité  de  la  langue 
rend  particulièrement  aisée  la  lecture  de  ce  volume. 

Avant  d'aborder  l'exposé  même  de  la  politique  servile  des 
rois  de  France,  M.  Bloch  s'est,  avec  raison,  préoccupé,  dans 
un  premier  chapitre,  de  définir  le  servage  et  d'analyser  les 
principales  charges  personnelles  qui  pesaient  sur  lui  ;  cliemge 
(dit  aussi  capltation),  fonnariage,  mainmorte,  ce  dernier 
droit  étant  seul,  de  tous  les  droits  domaniaux,  exploité  en 
régie  au  xiii*  siècle. 

Les  ressources  que  ces  redevances  procuraient  aux  Capé- 
tiens se  révélèrent  tout  à  fait  insuftisantes  dés  que  la  monar- 
chie dut  faire  face  à  des  dépenses  nombreuses  :  c'est-à-dire 
à  partir  des  règnes  de  Philippe- .\uguste,  et  surtout  de  Saint- 
Louis  :  le  développement  de  l'administration  et  la  grande 
politique  royale  exigeaient  des  revenus  plus  abondants.  Il 
y  avait  un  moj^en  commode  de  se  les  procurer  :  c'était  de 
vendre  la  liberté  aux  serfs  du  domaine.  Le  moment,  d'ailleurs, 
était  favorable:  les  classes  sociales  prennent  au  xiii''  siècle 
un  caractèi'e  plus  rigide  qu'auparavant,  ce  qui  ne  pouvait 
manquer  d'inciter  les  serfs,  conscients  de  leur  condition 
inférieure,  à  secouer  «  le  vilain  joug  de  servitude  ».  D'autre 
part,  l'accroissement  de  la  richesse  dans  les  villes  et  la  prospé- 
rité des  campagnes  devaient  fournir  aux  serfs  désireux 
d'acquérir  la  liberté,  de  nombreux  bailleurs  de  fonds  en  quête 
d'une  opération  intéressante.  Tant  il  est  vrai,  comme  le  dit 
M.  Bloch(p.  48),que  «  le  nombre  des  affranchissements  fut,  en 
dernière  analyse,  fonction  des  conditions  économiques  du  lieu 
et  du  moment  ». 

S'il  y  eut,  ;i  partir  de  Louis  VL  Louis  VII  et  surtout  de 
Philippe-Auguste,  non  seulement  des  affranchissements  indi- 
viduels, mais  quelques  mesures  collectives,  ce  n'est  guère 
cependant  que  sous  le  règne  de  S  »int-Louis  que  l'on  peut  parler 
d'une  véritable  poliliijue  royale  en  celte  matièi'e. 


760  COMPTES     RENDUS 

De  1246  à  1263,  M.  Bloch  relève  et  analyse  quatre  srandes 
manuraissions  générales  :  l'une  dans  les  environs  de  Paris 
(1246-1263),  la  seconde  en  Beauce  (1262),  la  troisième  portant 
sur  87  villages  de  la  Châtellenie  de  Pierrefonds  (1255,  sept.), 
la  dernière  sur  41  villages  du  Laonnois  (1258-1260).  On 
aurait  tort  de  voir  en  elles  des  œuvres  de  piété;  M.  Bloch 
nous  paraît  avoir  établi  de  manière  indiscutable  leur  carac- 
tère d'opérations  financières.  Il  a  même  eu  la  bonne  fortune 
de  pouvoir  établir  dans  deux  cas  le  prix  de  l'afiranchis- 
sement  :  5  p.  c.  de  l'ensemble  de  la  fortune  pour  les  serfs 
roj'^aux  de  la  Châtellenie  de  Pierrefonds;  10  p.  c.  de  l'en- 
semble des  biens  meubles  pour  les  serfs  royaux  de  Paray  en 
Laonnois. 

On  n'ignore  pas  que  Philippe  le  Bel  connut  des  beso'ns 
d'ai'gent  infiniment  plus  considérables  que  ses  prédécesseurs. 
Pour  y  faire  face  les  légistes  de  son  entourage  orientèrent  la 
politique  financière  dans  un  double  sens  :  recourir  d'une  façon 
plus  régulière  aux  finances  extraordinaires,  exploiter  plus 
intensivement  les  produits  réguliers  da  domaine  D'où  la 
perception  en  régie  des  droits  de  mainmorte  et  de  formariage 
par  des  fonctionnaires  spéciaux.  D'où,  également,  de  véri- 
tables campagnes  d'affranchissements. 

L'activité  des  collecteurs  des  mainmortes  et  fortnariages 
—  qui  apparaissent  dès  1282  —  n'assui'a  qu'un  rendement  très 
faible.  Plus  de  18  p.  c.  du  produit  étaient  d'ailleurs  absorbés 
par  les  frais  de  perception,  sans  compter  les  frais  de  justice 
éventuels. 

Ce  fut  seulement  en  leur  vendant  la  liberté  que  le  roi  tira 
des  serfs  du  domaine  des  ressources  sérieuses. 

Ces  affranchissements  firent  sous  Philippe  le  Bel  et  sous  ses 
fils  l'objet  de  campagnes  correspondant  généralement  à  une 
période  de  crise  politique.  Des  commissaires  spéciaux  choisis 
parmi  les  fonctionnaires  importants  de  l'administration 
royale  étaient  envoyés  dans  les  provinces  :  leurs  lettres  de 
commission  leur  assuraient  les  pouvoirs  nécessaires  pour 
accorder  aux  serfs  la  liberté,  voire  même  pour  leur  imposer 
une  contribution  spéciale  s'ils  préféraient  conserver  leur 
condition  première.  Des  compagnies  de  banquiers,  tels  les 
Floi'entins  Biccio  {Biche)  et  Musciato  (MoucliC)  Guidi  dei 
Francesi,  assurèrent  parfois  le  recouvrement  des  deniers  et 


COMPTES    RENDUS  761 

leur  versement  au  trésor  royal,  notamment  lors  des  nianu- 
missions  dans  le  Vermandois  entre  1291  et  1296. 

Malgré  l'état  fragmentaire  des  soni-ces  (quelques  lettres  de 
commission  et  des  analyses  de  comptes),  M.  Bloch  a  pu  étudier 
un  certain  nombre  de  ces  campagnes  de  manumission 
entreprises  dans  un  but  fiscal  par  les  derniers  Cajjétiens 
directs. 

Sous  Philippe  le  Bel  :  celle  de  1291  à  1296  dans  le  Verman 
dois;  la  tentative  sans  doute  avortée  de  1299  dans  les  séné- 
chaussées d'Albi  et  de  Toulouse  (taux  de  l'aifranchissement  : 
33  p  c.  de  l'ensemble  des  biens!);  la  campagne  de  13U2  (à  la 
suite  de  la  bataille  de  Courtrai),  dont  M.  Bloch  a  retrouvé  les 
traces  pour  le  bailliage  de  Caen,  les  sénéchaussées  de 
Toulouse,  Carcassone,  Beaucaire,  A.gen,  du  Rouergue,  de 
Gascogne,  et  pour  la  Champagne. 

Sous  Louis  X  :  les  campagnes  de  1315  dans  les  bailliages  de 
Sentis  et  du  Vermandois. 

Sous  Philippe  V  :  la  campagne  de  1318  dans  le  bailliage  de 
Senlis 

C'est  à  ces  campagnes  que  se  rapportent  les  textes  célèbres 
qui  passent  pour  avoir  affranchi  en  1315  et  en  1318  lous  les 
serfs  du  domaine  royal. 

En  rapprochant  ces  deux  textes  de  quelques  au:res  textes 
et  notamment  du  célèbre  Inventaire  de  Robert  Mignon, 
M.  B  och  a  pu  établir,  de  la  manière  la  plus  certaine,  que  ces 
soi-disant  ordonnances  étaient  simplement  des  lettres  de 
commission. 

Celles  du  3  juillet  1315  (Ordonnances  des  Rois  de  France, 
I,  p.  583)  étaient  données  à  Nicolas  de  Braye  et  Saince  de 
Ghaumont,  commis  pour  traiter  des  affranchissements  dans 
le  bailliage  de  Senlis.  Le  même  jour  (Bloch  :  op.  cit.  P.  J. 
N"  IV)  de^  lettres  tout  à  fait  analogues  étaient  remises  à 
deux,  clercs  royaux,  Philippe  le  Convers  et  Michel  Maucon- 
duit,  commis  aux  affranchissements  dans  le  bailliage  de 
Vermandois. 

La  soi-disant  ordonnance  du  23  janvier  132S  [Ordonnances, 
],  p.  653)  n'était  autre' chose  que  de  nouvelles  lettres  données 
aux  clercs  royaux  Anseau  de  Morienval  et  Nicolas  de  Braye 
pour  l'affranchissement  des  serfs  royaux  dans  le  bailliage  de 
Senlis. 


762  COMPTES    RENDUS 

Ces  textes  célèbres  que  l'on  s'était,  avec  Guizot,  accoutumé 
à  considérer  comme  un  acte  de  politique  presque  libérale  et 
dont  la  portée  s'étendait  à  tout  le  domaine,  sont  donc  ramenés 
à  leurs  véritables  proportions  :  simples  pouvoirs  accordés  à 
des  commissaires  chargés  d'une  mission  fiscale  dans  deux 
régions  bien  déterminées. 

Que  l'on  ne  se  laisse  pas  tromper  par  les  préambules  de  ces 
actes  :  M.  Bloch  les  analyse  avec  une  remarquable  précision. 
Simples  arengae  sans  rapport  avec  le  dispositif,  conçues 
dans  la  rhétorique  chère  aux  clercs  de  l'époque,  leur  caractère 
général  n'est  dii  qu'à  des  emprunts  faits  à  Ulpien  ou  à  des 
formulaires  dont  l'auteur  retrace  l'histoire.  Il  est  impossible 
d'en  tirer  un  enseignement. 

L'exposé  —  bien  imparfait  —  des  idées  directrices  de  Rois 
et  Serfs  permettra,  nous  l'espérons,  de  saisir  tout  l'intérêt  de 
l'ouvrage  et  toute  l'importance  de  ses  conclusions  Ce  n'est  pas 
seulement  un  aspect  important  de  l'histoire  du  droit  que 
M.  Bloch  a  contribué  à  mieux  faire  connaître,  mais  aussi  — 
et  peut-être  surtout  —  un  chapitre  essentiel  de  l'histoire 
financière  de  la  royauté  capétienne  qui  nous  est  révélé  pour 
la  première  fois.  Il  convient  d'en  être  reconnaissant  à  l'auteur. 

Celui-ci  ne  nous  en  voudra  cependant  pas  de  lui  adresser 
une  critique  et  un  souhait.  Dans  l'exposé  rapide  de  ce  qu'était 
le  servage,  placé  par  M.  Bloch  au  début  de  son  volume,  il 
nous  paraît  présenter  la  société  rurale  française  «  au  temps 
des  Capétiens  »  sous  un  aspect  un  peu  simpliste.  Il  la  divise 
en  «  deux  grandes  espèces  d'hommes  :  des  hommes  libres  et 
des  serfs  ».  Nous  avons  l'impression  que  la  série  des  condi- 
tions juridiques  comporte  plus  de  nuances  entre  l'homme 
entièrement  libre  et  le  serf  qui  se  trouve  tout  au  bas  de 
l'échelle  desdemi-libres.il  nous  paraît  que  l'on  peut  distinguer 
plusieurs  états  intermédiaires.  C'est  un  fait  que  l'on  remarque 
surtout  aux  xi^  et  xir  siècles,  mais  qu'il  est  certainement 
possible  de  constater  encore  au  xin*^. 

Sans  doute  était-il  difficile  de  traiter  de  façon  complète  de 
la  condition  des  personnes  dans  un  chap.tre  d'introduction, 
forcément  sommaire.  M.  Bloch,  nous  en  sommes  convaincu, 
reviendra  sur  la  question  dans  l'important  ouvrage  qu'il  nous 
laisse  espérer  sur  Les  populations  rurales  de  l'Ile  de  France 
à  l'époque  du  sercage.  On  y  trouvera  aussi,  espérons-le,  une 


COMPTES    RENDIS  763 

étude  approfondie  de  l'origine  des  redevances  personnelles, 
chevage,  formariage,  mainmorte.  Le  talent  et  l'érudition  avec 
lesquels  l'auteur  nous  parle  de  ces  redevances  aux  xiii'  et 
XIV®  siècles  nous  font  attendre  avec  impatience  des  vues  aussi 
originales  et  aussi  lumineuses  sur  les  origines  de  ces  charges 
serviles. 

Pour  conclure,  nous  n'hésitons  pas  à  qualifier  le  volume  de 
M.  Bloch  de  travail  de  premier  ordre.  Quelques  pièces 
justificatives  inédites  —  peu  nombreuses  et  importantes  —  le 
rendent  plus  précieux  encore  et  un  excellent  index  alphabé- 
tique en  facilite  considérablement  la  consultation. 

François  L.  Ganshof. 

Dénombrements  des  feux  des  duché  de  Luxembourg  et  comté 
de  C/unij.  Tome  1.  iJocuments  fiscaux  de  1306  à  1537  réunis 
par  Jacqdes  Grob,  publiés  avec  des  additions  et  corrections 
de  Jules  Vanneru^.  Bruxelles,  Kiessling  et  Imbreghts, 
1921,  in-4°.  xi-7^'6  pages.  {Commission  royale  d'Histoire.) 

Comme  toutes  les  institutions  officielles,  la  Commission 
royale  d'histoire  a  dû  ralentir  considérablement,  depuis  la 
gueiTe,  sa  remarquable  activité  d'antan  en  matière  'le  publi- 
cations. La  modicité  de  ses  ressources  l'a  obligée  momentané- 
ment à  renoncer  à  toute  entreprise  nouvelle  et  à  se  consacrer 
entièrement  â  la  liquidation  du  passé,  à  l'achèvement  des 
travaux  dont  l'impression  avait  été  arrêtée  eu  1914.  C'est  ainsi 
qu'en  1921  elle  n'a  pu  livrer  à  la  publicité  qu'un  seul  volume, 
celui  qui  fait  l'objet  de  ce  compte  rendu. 

Comme  le  titre  l'indique,  il  est  principalement  l'œuvre  de 
Jacques  Gi'ob,  l'ancien  curé  de  Bivingen  (Grand  duché  de 
Luxembourg),  un  érudit  qui  avait  consacré  de  longues  années 
aux  recherches  d'histoii^e  luxembourgeoise.  Sans  la  guerre, 
il  est  certain  qu'il  aurait  pu  mettre  lui-même  la  dernière  main 
à  son  œuvre  dont  l'impression  était  arrivée  à  la  page  6l0 
(commencement  de  la  table  onomastique). 

Le  pauvre  Grob  mourut  un  an  après  le  début  des  hostilités 
et  11  Commission  royale  d'histoire  dut  faire  appel  h  la  bonne 
volonté  d'un  de  ses  collaborateurs  pour  achever  le  travail. 

A  vrai  dire,  elle  ne  fut  pas  embarrassée  longtemjjs  pour 
trouver  ce   collaborateur.   Depuis  longtemps,   elle  avait  pu 


764  COMPTES    RENDUS 

s'assurer  de  la  compétence  particulière  qu'avait  acquise  en  la 
matière  M.  Jules  Vannérus.  Indépendamment  d'un  rapport 
préliminaire  sur  la  publication  des  dénombrements  luxem- 
bourgeois qu'il  avait  présenté  à  la  Commission  en  1901, 
M.  Vannérus  s'était  signalé  par  tant  de  travaux  méritoires 
sur  l'histoire  de  l'ancien  duché  qu'il  n'y  eut  qu'une  voix  pour 
l'appeler  à  prendre  la  succession  de  M.  Grob.  Il  accepta  sans 
hésiter,  ne  se  doutant  pas,  à  ce  moment,  que  la  succession 
était  quelque  peu  obérée. 

C'est  une  tâche  désagréable  pour  un  critique  que  celle  qui 
consiste  à  se  montrer  sévère  pour  un  mort.  Mais  il  ne  servirait 
à  rien  de  vouloir  cacher  la  vérité.  La  maladie  dont  M.  Grob 
était  atteint  depuis  longtemps  ne  lui  permit  pas  de  donner 
tous  les  soins  voulus  à  la  revision  de  ses  épreuves.  Les  cent 
pages  d'additions  et  de  corrections  que  M.  A^'annérus  a  dû 
ajouter  au  texte  de  M.  Grob  démontrent  à  satiété  l'imperfection 
de  l'œuvre  primitive  et  le  dévouement  éclairé  de  celui  qui  a 
assumé  le  rôle  ingrat  du  continuateur. 

Ceci  dit,  jetons  un  coup  d'œil  sur  le  contenu  du  volume. 

Il  comprend,  naturellement,  avant  tout,  des  dénombrements 
de  feux,  destinés,  en  resfiéce.  à  servir  de  base  à  la  répartition 
des  aides  accordées  au  souverain  par  les  Etats  de  Luxembourg. 
Au  nombre  de  sept,  ils  s'échelonnent  sur  les  années  1473 
à  1537.  Faisons  observer  cependant  que  le  relevé  de  1473  n'est 
pas  un  dénombrement  proprement  dit.  Ce  n'est  qu'une  répar- 
tition de  l'aide,  donnant  pour  chaque  localité,  comme  le  docu- 
ment qui  nous  a  servi  pour  fixer  le  nombre  des  foyers  du  Bra- 
bant  en  1492,  l'irnoort  de  la  contribution.  La  taxe  due  pour 
chaque  feu  étant  de  12  sols,  il  a  suffi  d'une  simple  division 
pour  obtenir  le  nombre  de  feux  de  chaque  coaimunauté. 

11  semble  établi  d'ailleurs  que  le  sens  du  mot  feu  ait  pris  de 
bonne  heure  dans  le  Luxembourg  le  sensd'wmYe  d'imposilion. 
Alors  qu'en  Brabant,  pendant  tout  le  xV  et  même  pendant  la 
première  moitié  du  xvi"  siècle,  le  feu  ou  foyer  correspond  à 
la  maison,  l'apparition,  dès  15U1,  dans  les  dénombrements 
luxembourgeois  de  demi  ménages  démontre  clairement  que 
ces  documents  ont  perdu  dés  lors  leur  valeur  démographique 
pour  ne  conserver  que  leur  importance  fiscale. 

Aux  dénombrements  proprement  dit»,  l'abbé  Grob  a  ajouté 
des  documents  de  deux  espèces  :  1°  ceux  que  l'on  peut  con- 


COMPTES    RENDUS  765 

sidérer  comme  des  annexes  directes  des  dénombrements,  des 
pièces  justificatives,  nominations,  ordonnances,  sentences  ou 
extraits  des  comptes  rendus  par  les  receveurs;  ou  bien  encore 
des  déclarations  particulières  dressées  dans  les  diflérentes 
localités  par  les  seigneurs  ou  par  des  commissaires  désignés 
par  le  Conseil  de  Luxembourg  pour  servir  de  base  au  dénom- 
brement. Ces  déclarations  qui  constituent  des  listes  d'habitants 
n'existent  que  pour  les  dénombrements  de  1528  et  de  1531  et 
sont  loin  d'être  au  complet.  2°  Des  documents  très  intéressants, 
mais  qui  ne  présentent  —  sauf  un  seul  sub  e  —  qu'un  rapport 
indirect  ou  très  éloigné  avec  les  dénombrements  de  (eux. 
Citons  notamment  :  a)  le  compte  d'une  aide  ecclésiastique 
accordée  au  souverain  par  le  pape,  en  1531,  sur  tous  les 
bénéfices  du  clergé;  b)  le  relevé  des  revenus  du  comte  de 
Luxembourg,  dressé  de  1306  à  1317,  avec  l'indication  partielle 
des  charges  grevant  ces  revenus  ;  c)  une  liste  des  feudataires 
des  comtes  de  Luxembourg,  dressé  en  l'an  1314,  qui  nest,  on 
somme,  que  le  relevé  des  vassaux  luxembourgeois  dont  les 
actes  de  relief  ou  d'hommage  sont  insérés  dans  un  ancien 
cartulaire;  c^lle  compte  de  la  taille  jetée  sur  les  francs-hommes 
en  1374  et  ceux  des  aides  accordées  au  duc  Wenceslas  en  1374, 
1375  et  1378;  e)  le  «  chasse-ménage  »  de  la  prévôté  de  Bastogne 
dressé  en  juillet  1469;  f)  l'état  des  fiefs  mouvant  du  marquisat 
d'Arlon  en  février  147U;  g)  un  relevé  donnant  la  répartition 
de  la  contribution  du  clergé  régulier  dans  l'aide  accordée  au 
duc  de  Bourgogne  en  14/2.  La  publication  de  ces  documents 
se  justifiait  d'autant  moins  ici  qu'elle  avait  déjà  été  faite,  pour 
la  plus  grande  partie,  par  Wiirth-Paquet,  Van  Werveke  et 
J.  Vannérus. 

Chacun  des  documents  publiés  par  M.  Grob  est  précédé 
(l'une  courte  introduction,  où  on  lit  des  détails  sur  les  circon- 
stances dans  lesquelles  furent  accordées  les  aides  et  dressés  les 
dénombrements.  Ces  commentaires  sont  loin  d'être  dépourvus 
d'intérêt,  mais  nous  croyons  qu'ils  auraient  gagné  à  être 
réunis  et  coordonnés  dans  une  introduction  générale,  que 
M.  Grob  n'a  probablement  pas  eu  le  temps  de  rédiger. 

En  somme  ces  dénombrements  constituent  des  documents 
statistiques  d'autant  plus  intéressants  qu'ils  se  rapportent  ii  un 
pays  frontière  dont  les  nombreuses  vicissitudes  politiques  ont 
compliqué   l'histoire  territoriale,  et  qui   a    laissé   beaucoup 


766  COMPTES     RENDUS 

moins  d'archives  que  la  plupart  de  uos  autres  principautés 
territoriales. 

Souhaitons,  pour  terminer,  que  la  Commission  royale 
d'histoire  puisse  bientôt  remettre  à  l'imprimeur  la  copie  du 
tome  II  et  dernier  des  Dèno^nbrements  luxembourgeois. 
Celui-ci  sera  entièrement  l'œuvre  de  M.  Vannérus  et  on  peut 
être  certain  qu'il  donnera  à  cette  édition  les  soins  auxquels 
il  nous  a  habitués  de  longue  date.  Il  nous  sera  particulièrement 
agréable  de  lire  dans  l'introduction  l'étude  d'ensemble  qu'il 
nous  annonce,  les  documents  statistiques  anciens  ne  pouvant 
être  mieux  interprétés  que  par  celui  qui  a  dû  les  étudier  en 
vue  de  leur  pablication. 

J.    CUVELIER. 


Klein  Plakhaatboeh  van  Nederland.  —  Verzameling  van 
ordonnantiën  en  plakkaten  betreffende  regeeringsvorm, 
kerk  en  rechtspraak  (xiv^  eeuw  tôt  1749)  bijeengebrach 
door  M''  A.  S.  de  Blécourt,  hoogleeraar  te  Leiden,  en 
D""  N  Japikse,  directeur  van  het  bureau  voor  's  Rijks 
Geschiedkundige  Publicatiën.  Groningue  et  La  Haye, 
J.  B.  Wolters,  1919,  in-8°,  viii-353  pages. 

Nos  voisins  du  Nord  ne  possèdent  pas  d'organisme  officiel 
comparable  à  notre  Commission  des  anciennes  lois  et  ordon- 
nances et  ce  n'est  que  vers  1880  que  l'initiative  privée  a  com- 
blé cette  lacune  en  créant  la  «  Vereeniging  tôt  uitgaaf  der 
bronnen  van  het  oud-vaderlandsche  recht  ».  Cette  société  a 
publié  depuis  lors  une  série  déjà  respectable  de  sources,  mais 
celles-ci  ne  se  rapportent  en  majeure  partie  qu'au  droit  urbain 
et  territorial  du  mo3'"en  âge;  elle  ne  s'est  pas  occupée  des  textes 
de  l'époque  de  la  République  et  des  institutions  de  celle-ci, 
pour  lesquels  les  historiens  doivent  encore  toujours  avoir 
recours  aux  formidables  in-folios  (les  Placcaetboeken)  des 
xvii^  et  xviii*  siècles. Mettre  à  la  portée  de  ceux  qui  s'inté- 
ressent à  ces  textes,  surtout  à  celle  des  étudiants,  les  princi- 
pales sources  de  l'histoire  des  institutions,  voilà  le  but  louable 
que  se  sont  fixés  MM.  de  Blécourt,  le  savant  professeur  de 
l'histoire  du  droit  à  l'Université  de  Leyde,  et  Japikse.  l'érudit 
directeur  de  la  C  R.  H.  hollandaise,  dans  leur  livre  qu'ils 


COMPTES    RENDUS  767 

dénomment,  d'après  ses  grands  prédécesseurs  :  Klein  Plak- 
haatboek. 

Ou  y  trouve  cinquanto  textes,  publiés  avec  friand  soin, 
d'après  les  meilleures  sources.  Citons  en  quelques-uns.  En 
tout  premier  lieu  le  Grand  Privilège  de  Marie  de  Bourgogne 
pour  les  Etats  Généraux,  du  11  février  1477  (V),  connu  jus- 
qu'ici que  par  une  édition  gantoise  de  1787  (  Verzameling  van 
24  origineele  charters)  et  dont  Pirenne  réclamait  depuis  long- 
temps {^Hist.  de  Belg.,  III,  p.  9,  note  2)  une  édition  moderne. 
Parmi  les  pièces  archi-connues  et  très  importantes,  nous  trou- 
vons ensuite  :  le  Traité  d'Augsbourg  (1548),  la  Pragmatique 
Sanction  (1549),  la  Pacification  de  Gand  (1576),  la  première 
Union  de  Bruxelles  (1577),  l'Union  d'Uirecht  (1579),  l'Abjura- 
tion de  Philippe  II  (1581',  l'Édit  perpétuel  de  1667  e.  a.  A  côté 
de  ceux-ci  les  auteurs  ont  publié  un  grand  nombre  de  pièces 
servant  à  expliquer  le  fonctionnement  si  compliqué  du  gou- 
vernement de  la  République  des  Provinces-Unies,  en  prenant 
d'abord  les  ordonnances  de  Charles  V  et  de  Philippe  II,  modi- 
fiées ensuite  après  la  séparation  avec  l'Espagne.  En  voici  les 
principales  :  instructions  pour  le  Conseil  d'État  (1531  et  1555), 
pour  les  Cours  de  Justice  d'Utrecht  (1529),  de  Hollande  (1531) 
et  de  Gueldre  (1547),  ordonnances  de  Philippe  II  sur  la  justice 
criminelle  (1570), ■  instructions  i)Oui'  le  Grand  Conseil  de  Hol- 
lande (1582),  pour  le  Conseil  d'Ktat  des  Provinces-Unies  (1588 
et  1651),  pour  le  Conseil  de  Brabânt  (lo91),  des  règlements 
concernant  les  églises,  etc. 

Comme  on  le  voit,  ce  livre  est  appelé  à  rendre  des  services  à 
de  nombreux  historiens  et  nous  devons  remercier  les  deux 
auteurs  de  nous  avoir  procui'é  un  instrument  de  travail  très 
.précieux.  Henri  Obrern. 

Alph.  Verkooren,  Inventaire  des  chartes  et  cartulaires  du 
Luxembourg  [Comté,  puis  Duché).  Tome  V.  Bruxelles, 
E.  Guyot,  1921,  in-8",  543  pages. 

Avec  une  ardeur  infatigable,  M.  Verkooren  poursuit  la 
publication  de  ses  inventaires. 


(M  It  est  tout  il  f:iit  incompréhensible  à  la  siiito  de  quelle  erreur  les  édi- 
tenrs  lui  assignent  la  date  du  !  t  mars  1 177. 


768  COMPTES     RENDUS 

Dans  le  tome  V  de  son  répertoire  des  chartes  luxembour- 
geoises, il  nous  fournit  les  analj'ses  de  468  documents 
(n"^  1885  à  2352),  s'étendant  de  1467  à  1555. 

Ce  volume  se  recommande  des  mêmes  grandes  qualités, 
mais  se  signale  aussi  par  les  mêmes  défauts  que  ses  prédé- 
cesseurs. 

Le  répertoire  de  M.  V.  constitue  un  excellent  instrument 
de  travail  ;  ses  analyses  sont  dressées  consciencieusement  ;  les 
différentes  parties  de  chaque  notice,  consacrées  à  la  date,  à 
l'analjT'se  de  l'acte  proprement  dit  et  de  ses  annexes  éven- 
tuelles, à  la  description  matérielle  du  document  (des  sceaux, 
surtout),  se  présentent  clairement,  selon  un  plan  très  métho- 
dique. La  disposition  typographique  du  texte  concourt,  avec 
une  table  alphabétique  fort  détaillée,  à  rendre  très  aisée  la 
consultation  de  ce  recueil. 

Ce  sont  là  les  qualités,  réelles  et  très  appréciables,  qui 
distinguent  tous  les  inventaires  de  l'archiviste  général 
adjoint. 

A  mon  vif  regret,  toutefois,  car  je  pri.-e  très  haut  la  persé- 
vérance avec  laquelle  M.  Verkooren  continue  à  faciliter  aux 
chercheurs  l'exploitation  des  riches  mines  que  constituent  les 
collections  de  chartes  du  Brabant  et  du  Luxembourg,  je  dois 
tempérer  mes  éloges,  très  sincères,  de  quelques  réserves 
sérieuses,  relatives  à  l'identification  des  noms  propres. 

Evidemment,  dans  toutes  les  publications  de  ce  genre,  il  se 
glisse,  à  propos  des  noms  de  personnes  et  de  localités,  des 
erreurs  que  seuls  peuvent  éviter  les  éditeurs  familiarisés  avec 
les  circonstances  topographiques  locales,  ou  encore  ceux  qui 
se  sont  spécialisés  dans  l'histoire  d'un  pays  déterminé. 

Le  volume  de  M,  Verkooren  ne  pouvait  échapper  à  ce 
danger  ;  je  n'insisterai  donc  pas  trop  sur  des  erreurs  comme 
celle  consistant  à  identifier  Beaurepart  et  Flammesoul  avec 
Berwar  et  Falmignoul,  alors  qu'il  s'agit  en  réalité  de Berbourg 
et  de  Flamisoul. 

Ailleurs,  l'éditeur  propose  avec  hésitation  des  noms  qu'il 
faut  écarter  résolument,  par  exemple  Norrenhusen,  Schadech 
et  Rehanvaulœ  n'ont  rien  à  voir  avec  Noerdange,  Schoderhoff 
et  Rechrival,  mais  désignent  tout  si  pie  ment,  sans  consteste 
possible,  Nagem,  Schadeck  et  Renval  lez-Bastogne.  Par 
contre,  il  est  des  cas  où  peut  tomber  le  point  d'interrogation 


COMPTES    RENDUS  ~<)î» 

dont  M.  Vei'kooren,  trop  prudent,  a  fait  suivre  ses  identifica- 
tions :  c'est  ainsi  que  Betlîngen  et  (rKrfesî^tor/* désignent  bien 
Bettiugen-sur-Pi'ùm  etGiesdorf,  proposés  seulement  de  (aron 
dubitative.  D'autres  fois,  au  contraii-e,  des  identifications 
admises  catégoriquement  méi'iteraient  un  mot  de. justification, 
telle  l'équation  Kauiere  ^-^  Koking. 

Où  j'aurais  également  pi-éiéré  que  M.  Verkooren  ne  i-estàt 
pas  aussi  laconique,  c'est  à  propos  des  erreurs  de  lecture, 
fort  fréquentes  dans  certains  descartulaires  dépouillés.  Si  des 
erreurs  aussi  grossières  que  Perlerme  pour  Pnlerrnr  sautent 
aux  yeux  du  premier  venu,  les  initiés  seuls  n'ont  pas  besoin 
qu'on  leur  explique  des  formes  comme  Lifi/sf/ic  pour  Luysche 
=  Wasserliesch  et  Thokia  ^ouv  Tholeia  -—  Tholey. 

Dans  le  même  ordre  d'idées,  il  est  regrettable  que  M.  Ver- 
kooren ne  fasse  pas,  en  reproduisant  les  variantes  anciennes 
données  par  les  textes,  la  distinction,  si  importante  au  point 
de  vue  toponymique,  entre  les  formes  fournies  par  l'original 
et  celles  provenant  des  copies;  dans  l'analyse  n°  2052.  par 
exemple,  quelles  sont  les  graphies  de  l'original  :  Aiz,  Ayez, 
Ayz  ou  Ai.r  ^  Jamodinne  ou  Jainonflinne  ^ 

Enfin,  je  voudrais,  pour  terminer.  lelever  la  tendance  <ju'a 
l'éditeur  de  chercher  à  identifier  les  noms  de  personnes, 
pi'énoms  aussi  bien  que  noms  de  famille. 

Ksi-\\  utile,  est  il  même  bien  exact  d'identifier  les  prénoms 
de  Jamynet  (n"  1955),  Watlè{n.''  2128),  liaallin  et  Baadesson 
(n°  22j2i  avec  ceux  de  Jacques,  Gauthier,  Raoul  (ou  Rodolphe) 
et  Baudouin,  dont  ils  sont,  les  diminutifs?  Est-il  également 
nécessaire,  n'est-il  même  pas  fort  dangereux  de  chercher 
à  expliquer  les  prénoms  Ma.rc  ou  MaLr  {n"'  2051  et  2270)  et 
Brian  in"  2202)  par  Thomas  et  Brillon;  de  traduire  Gof>rl 
û»  2351)  par  Godetroid  i 

Les  mêmes  observations  peuvent  être  faites  à  propos  des 
noms  de  famille. 

Pourquoi  moderniser  Baeckelaer  en  Beukelaer,  [Mrdfnoij 
en  l'Ardennois,  Bracqueniez  en  Braquenierî'  Pourquoi  vou- 
loir traduire  Clais  RolUnger  par  Nicolas  de  Raville  et 
recherchei' si  der  Aide  Schiiddeharnisch  doit  se  rendre  par 
«  le  Vieux  Brise-harnais»  ou  par«  le  Vieux  BoufTon-Harnais»? 
Pourquoi  transformer  Jean  //•  Waille  en  Jean  de  Walle. 
Cl. -H.  Aloffeeu  Cl. -H.  Adolphe^ 

4<.> 


770  COMPTES    RENDUS 

Gomme  on  n'a  pas  toujours,  pour  les  noms  de  personnes, 
autant  d'éléments  d'appréciation  que  pour  les  noms  de  lieux» 
la  plus  grande  prudence  s'impose  à  leur  égard  et  il  vaut  mieux, 
souvent,  les  laisser  tels  quels  (^).  M.  Verkooren  est-il  bien  sûr 
que  Jean  de  Dompmarien  ou  Dommarien  soit  un  Jean  de 
Domprix  ? 

Le  danj,'er  qu'il  3^  a  à  vouloir  identifier  des  noms  de  famille 
est  illustré  on  ne  peut  mieux  par  le  cas  de  cet  habitant  de 
Vance  que,  trompé  par  la  lecture  des  Ornelles,  M.  Verkooren. 
appelle  Guillaume  d'Ornel  :  or,  il  s'agit  en  réalité  d'un  Guil- 
laume de  Sorvelles,  c'est-à-dire  de  Strainchamps  (Sauerfeid). 

J.  Vannérus. 


Victor  Fris.  Bibliographie  de  l'histoire  de  Gand  depuis 
l'an  1500  jusqu'en  1850,  1"  fascicule.  (Publication  extraor- 
dinaire n"  'S  de  la  Société  d'Histoire  et  d'Archéologie  de 
Gand).  Gand,  1924,  in-8». 

Tous  ceux  qui  s'occupent  d'histoire  de  Belgique  ont  eu 
l'occasion  d'utiliser  et  d'apprécier  l'excellente  Bibliographie 
de  l'histoire  de  Gand  depuis  les  origines  jusqu'à  la  fin  du 
XV*  siècle,  publiée  en  1907  par  M.  V.  Fris.  L'auteur  vient  de 
rendre  un  nouveau  service  aux  sciences  historiques  en  don- 
nant une  suite  à  ce  volume. 

Seul  un  premier  fascicule  de  258  pages  a  vu  le  jour  jusqu'à 
présent  On  y  trouve  l'analj^se  de  l'ensemble  des  sources  pour 
cette  période  et  celle  des  écrits  modernes  concernant  l'histoire 
générale,  politique,  juridique,  économique  et  sociale  de  Gand. 

Ce  répertoire  se  signale  par  les  mêmes  qualités  que  celui 
qui  l'a  précédé  :  il  est  très  complet  et  il  est  sûr.  Une  notice 
succincte  donne  au  lecteur,  à  propos  de  chaque  source  et  de 
chaque  ouvrage,  de  précieuses  indications  au  sujet  de  sa  valeur 
et  de  son  contenu. 


(*)  Ce  qui  n'empêche  naturcllemeiil  pas  de  corriger  les  erreurs  évidentes 
des  anciens  textes  :  par  exemple,  <c  le  seigneur  Jean,  baron  de  Keck  »,  cité 
au  n"  2.31  i,  n'est  autre  que  le  célèbre  général  Jean  (de)  Beck,  tandis  que 
"  le  docteur  Beck  »  du  n»  2.32i  est,  vice  versa,  le  conseiller  Jean  Keck,  docteur 
en  droit  (r;f.  n»  2.32.^). 


COMPTES     RENDUS  771 

Le  rôle  historique  de  Gand  est  tel,  qu'une  bibliographie  cri- 
tique aussi  largement  compi-ise  qu'elle  l'a  été  par  M.  Fris, 
déborde  forcément  le  cadre  qui  lui  a  été  assigné.  Rien  n'est 
plus  caractéristique  à  cet  égard  que  la  deuxième  partie  consa- 
crée aux  sources  narratives, et  particulièrementaux  mémoires 
et  aux  pamphlets,  si  nombreux,  si  essentiels  pour  l'époque 
moderne  et  d'une  utilisation  si  délicate.  Il  y  a  là  134  pages  dfe 
première  impoi-tance  pour  l'histoire  de  la  Belgique  entière  et 
qui  rendront  notamment  les  plus  grands  services  à  l'étude  de 
la  révolution  du  xvi«  siècle  et  à  celle  de  la  révolution  braban- 
çonne. 

Il  serait  très  désirable  que  d'autres  historiens  consacrent  à 
d'autres  villes  belges  des  bibliographies  critiques  aussi  com- 
plètes et  aussi  bien  conçues  que  celle  que  Gand  doit  à  M.  Fris. 

François  L.  Ganshof. 

R.  Parisot.  Histoire  de  Lorraine.  Tome  II  (1552-1789).  Paris, 
Picard,  1922,  in-8",  vi-847  pages. 

Le  savant  professeur  d'histoire  de  l'Est  de  la  France  à 
rUnivei'sité  de  Nancy,  associé  de  l'Académie  de  Belgique, 
continue,  dans  ce  volume,  à  décrire  le  passé  de  la  Lorraine, 
du  Barrois  et  des  Trois-Évèchés.  Un  troisième  et  dernier 
volume  sei-a  consacré  au  pays  lorrain  depuis  les  débuts  de  la 
Révolution  française  jusqu'au  traité  de  Versailles  qui  en  a 
rétabli  l'unité  détruite  en  1871 . 

On  retrouvera  dans  ces  pages  la  clarté,  la  méthode,  la  riche 
documentation  et  la  rigoureuse  impartialité  qui  caractérisent 
le  premier  volume  de  V Histoire  de  Lorraine.  M.  Parisot 
étudie  successivement  l'histoire  extérieure  et  l'histoire  inté- 
rieure de  la  Lorraine  de  1552  à  1624,  de  1624  â  1697,  de  1607 
à  1737  et  de  1737  à  1789,  ces  coupures  correspondant  en  eflet 
à  des  faits  décisifs.  Puis  il  analyse  le  mécanisme  et  les  trans- 
formations des  institutions  de  1552  à  1 789,  tant  pour  les  duchés 
que  pour  les  évêchés.  Il  passe  ensuite  en  revue,  pour  la  même 
période,  les  principaux  aspects  de  la  vie  économique  et  de  la 
vie  intellectuelle;  il  consacre  enfin  un  chapitre  à  l'tlglise  et  à 
son  action  sur  les  mœurs. 

Un  fait  domine  toutes  les  constatations  de  l'auteur  : 
l'influence  de  la  France  a  été  prépondérante,  et  croissante. 


772  COMPTES     RENDUS 

dans  la  région  lorraine  de,  1552  à  1789,  influence  politique, 
littéraire,  artistique,  même  économique,  malgré  la  situation 
de  province  «  d'étranger  effectif»  gardée  par  Ja  Lorraine,  le 
Barrois,  Metz,  Toul  et  Verdun.  Les  ducs  ont  imité  —  à  tort 
—  le  roi  de  France  en  faisant  prévaloir  dans  leurs  Etats  un 
régime  absolutiste.  Les  écrivains  français  du  xvir  et  surtout 
du  xviir'  siècle  ont  exercé  une  grande  action  sur  les  esprits 
lorrains.  A  la  veille  de  la  Révolution  les  idées  et  les  modes 
françaises  dominaient  dans  la  région  lorraine,  à  qui  l'Alle- 
magne était  devenue  étrangère. 

M  Parisot  ne  croit  pas  que  sous  ses  derniers  ducs  nationaux 
jusqu'en  1737  la  Lorraine  ail  joui  d'un  bonheur  parfait.  Mais 
il  est  certain  que  l'annexion  de  1766  à  la  France  empira  sa 
situation  (lourds  impôts,  service  militaire,  administration 
étrangère).  Seule  la  noblesse  trouva  son  avantage  dans  la  réu- 
nion au  royaume.  Et  ce  n'est  qu'à  la  Révolution  de  1789  qu'il 
faut  attribuer,  par  la  suppression  de  la  monarchie  absolue  et 
des  privilèges,  cette  profonde  amélioration  des  conditions  maté- 
rielles de  leur  existence  qui  a  si  fortement  attaché  les  Lorrains 
à  la  France,  devenue  peureux  au  xix*  siècle  une  patrie. 

L.  Leclére. 


Albert  Waddington.  Histoire  de  Prusse,  tome  II  :  Les  deux  pre- 
miers rois  (1688-1740).  Avec  quatre  portraits  Paris,  Pion, 
1922,  in-8%  508  pages. 

11  est  des  livres  très  érudits,  très  savants  même,  qu'on  est 
heureux  de  posséder  dans  sa  bibliothèque,  pour  les  consulter, 
mais  dont  on  ne  parvient  pas  à  lire  vingt  pages  de  suite,  11  en 
est  d'autres,  tout  aussi  bourrés  de  science,  qu'on  voudrait 
pouvoir  lire  d'une  haleine,  tant  ils  sont  intéressants  par  le 
fond  et  attrayants  par  la  forme.  Celui  dont  le  titre  figure 
ci-dessus  est  de  ce  nombre. 

Dans  le  tome  I"  de  son  Histoire  de  Prusse,  M.  Wadding- 
ton  avait  retracé  les  destinées  de  la  Marche  de  Brandebourg 
et  de  ses  annexes,  depuis  les  origines  jusqu'à  la  mort  du  (irand 
Électeur  (1688)  11  l'avait  fait  avec  une  compétence  et  une 
objectivité  qui  avaient  rallié  tous  les  suffrages,  même  en  Alle- 
magne. 


COMPTES     RFNDTS  77H 

«  Depuis  lors,  dit  M.  Waddiiigton,  dans  un  avant- propos  de 
quelques  lignes,  de  ci-uels  événements  se  sont  produits  ..  J'ai 
fait  taire  les  révoltes  intimes  que  légitimaient  mes  chagrins 
de  Français  et  de  père,  pour  ne  laisser  entendre  que  la  voix  de 
riiistorien  impartial.  » 

Cette  déclaration  n'est  pas  une  vaine  parade.  A  voir  la 
sérénité  avec  laquelle  ce  Français  parle  de  la  politique  anti- 
française de  l'électeur  Frédéric  III  (Frédéric  1"  comme  roi)  et 
de  son  ministre  Danckelmann;  à  lire,  d'autre  part,  le  juge- 
ment qu'il  émet  sur  l'élection  de  Guillaume  de  Furstenberg,  le 
candidat  français  à  l'archevêché  de  (Pologne;  à  considérer  au 
surplus  la  manière  dont  il  rectifie  à  j)lusieurs  reprises  les  juge- 
ments trop  sévères  de  Frédéric  II  sur  son  grand-pére;  ou  à 
constater  combien  il  sait  rendre  justice  aux  qualités  d'adminis- 
trateur du  roi-sergent  Fi-édéric-GuilIaume  I'',  malgi-é  «  les 
côtés  soit  repoussants,  soit  ridicules  du  personnage...  »,  on 
serait  tenté  de  se  demander  si  le  souci  de  l'impartialité  n'a  pas 
amené  M.  Waddington  à  taire  preuve  de  trop  de  bienveillance. 
Nous  ne  le  croyons  pas,  car  il  y  a  effectivement  un  côté  admi- 
rable dans  l'histoire  de  l'État  brandebourgeois-prussien  sous  le 
régne  de  ses  deux  premiers  rois.  M.  Waddington  n'est  pas  le 
premier  historien  français  qui  s'en  soit  aperçu  et  qui  l'ait  <lit 
sans  ambages.  M.  Lavisse  notamment,  dans  ses  Etudes  sur 
l'histoire  de  Prusse,  l'a  fait  avant  lui.  Mais  nous  ne  pensons 
pas  qu'aucun  historien,  en  n'importe  quelle  langue,  l'ail  fait 
avec  une  aussi  juste  mesure,  en  un  langage  aussi  adéquat  et 
aussi  distingué,  et  en  s'appuyant  sur  une  documentation  aussi 
complète. 

Ce  tome  II  de  VHistoire  de  Prusse  est  divisé  en  six  livres. 
Le  premier  s'occupe  de  l'électeur  Frédéric  111  avant  son  éléva- 
tion à  la  dignité  royale  (168'^-1700).  On  y  voit  d'abord  le  por- 
trait de  ce  prince  faible  et  indécis,  plus  raffiné  que  son  prédé- 
cesseur, moins  brutal  que  son  successeur,  et  qui  parait  plutôt 
sympathique  malgré  son  aniou  exagéré  pour  les  litres,  les 
cordons  et  l'étiquette  L'administration  intérieui-e  «le  l'Etat 
brandebourgeois-prussien,  durant  cette  première  période,  ne 
manque  pas  d'une  certaine  grandeur,  ^rràce  surtout  a  li  ges- 
tion de  Danckelmann.  C'est  un  personnage  caractéristique  que 
ce  Westphalien,  sujet  de  la  maison  d'Orange-Nassau,  engage, 
comme  beaucoup  d'autres  condottieri  tant  civils  que  niilitaires 


774  COMPTES    RENDUS 

de  l'époque,  au  service  d'un  prince  étranger  chez  qui  il  y 
avait  à  récolter  gloire  et  richesses.  Danckelmann  toutefois  fut 
mal  récompensé  de  ses  services  par  son  maître.  Renversé  par 
une  intrigue  de  cour,  il  fut  jeté  en  prison  et  y  resta  durant  de 
longues  années,  pour  ainsi  dire  sans  pouvoir  se  défendre. 
Après  la  chute  de  Danckelmann,  commence  l'administration 
de  Wartenberg,  le  premier  des  trois  W.  C'est  ainsi  que  la 
rumeur  publique  désignait,  par  une  allusion  au  mot  WeJt  ou 
fléau,  le  sinistre  triumvirat  Wartenberg,  Wittgenstein  et 
Wartensleben.  Leur  rapacité  désola  pendant  quinze  ans  les 
États  de  la  maison  de  HohenzoUern. 

La  politique  extérieure  de  Frédéric  III,  pendant  cette 
période,  pour  n'être  pas  sans  mérite,  fut  cependant  sans 
gloire.  L'humiliation  qu'il  dut  subir  aux  négociations  de 
Ryswyck  (1697),  où. Louis  XIV  refuse  de  le  considérer  comme 
partie  contractante,  après  qu'il  eut  été  un  des  principaux  bel- 
ligérants, montre  combien  l'État  brandebourgeoisprussien  se 
trouvait  encore  confondu  dans  la  foule  anonyme  des  petits 
États.  Durant  la  guerre  de  la  ligue  d'Augsbourg,  il  est  d'ail- 
leurs traité  en  inférieur  par  ses  propres  alliés,  comme  un  ami 
pauvre  qui  est  à  leur  solde. 

Le  livre  II  est  consacré  à  l'acquisition  de  la  royauté,  but 
suprême  de  la  politique  extérieure  de  Frédéric  III.  M.  Wad- 
dington  émet  des  considérations  bien  intéressantes  et  souvent 
neuves  sur  les  origines  psychologiques  du  «  grand  dessein  ». 
Le  rôle  du  père  jésuite  Wolf  est  particulièrement  mis  en  relief 
dans  la  réalisation  du  projet.  A.  côté  de  lui  deux  autres  prêtres 
catholiques,  le  P.  Vota  et  l'évêque  d'Ermeland,  Zaluski,  s'in- 
génièrent également,  sans  y  avoir  un  intérêt  personnel  direct, 
à  servir  l'électeur  auprès  de  l'Empereur,  auprès  du  roi  de 
Pologne,  auprès  du  Pape.  «  Quelle  était  donc  la  cause  de  cette 
sorte  de  conspiration  catholique  en  faveur  d'un  protestant? 
Le  problème  a  été,  depuis  plus  de  soixante  ans,  tourné  et 
retourné  en  tous  sens,  et  une  foule  de  documents  ont  été 
publiés  :  le  résultat  reste  celui  qu'on  avait  primitivement  indi- 
qué, à  savoir  que  ces  trois  prêtres  se  flattaient  secrètement  de 
convertir  un  jour  au  catholicisme,  soit  Frédéric,  soitsa  femme, 
soit  ses  descendants.  La  propagande  du  Saint-Siège  en  Alle- 
magne était  plus  active  et  plus  heureuse  que  jamais  depuis 
quelques  années  :  sur  neuf  électeurs,  sept  étaient  catholiques. 


COMPTES    RENDUS  775 

Le  pape  Inuocent  XII  (1691-1700).  qui  déjà  peut-être  n'avait 
pas  été  étranger  à  la  conversion  d'Auguste  de  h'axe  —  dont 
M.  Waddington  trace,  en  un  l'accourci  vigoureux,  un  portrait 
remarquable  (p.  91) — crut  qu'on  pourrait  faire  acheter  â 
l'électeur  de  Brandebourg  la  couronne,  au  pi-ix  de  sa  reli- 
gion; il  était  encourajié  par  la  réputation  d'indifférence  en 
matière  religieuse  dont  jouissait  Sophie-Charlotte  (la  pre- 
mière reine),  ainsi  que  sa  mère  Sophie  (p.  115110).  »  Le 
caractère  de  ces  deux  princesses  —  disons-le  en  passant —  est 
analysé  avec  une  grande  finesse  dans  un  chapitre  spécial,  con- 
sacré à  la  cour  du  premier  roi  de  Prusse,  et  dans  lequel  il  y  a 
<ies  pages  tout  à  fait  charmantes,  celle  notamment  où  il  est 
question  de  la  charge  de  «  maîtresse  du  roi  »  qui  fut  exercée 
nominalement  parla  comtesse  de  WarLenberg(p.  149). 

Mais  revenons  à  la  politique  intérieure  de  Frédéric  III.  La 
poursuite  et  la  réalisation  du  «  grand  dessein  »  ont  été  très 
diversement  appréciées  par  les  historiens  de  l'Electeur,  notam- 
ment par  son  petit-fils  Frédéric  IL  M.  Waddington  met  les 
choses  au  point  dans  ces  quelques  lignes  :  «  On  a  pu  jepro- 
cher  à  Frédéric  III,  et  encore  plus  à  son  favori  Wartenberg, 
d'avoir  subordonné  à  l'acquisition  de  la  dignité  ro}ale  tous  les 
intérêts  du  Brandebourg,  d'avoir  renoncé  pour  cela  ?.  des 
avantages  plus  précieux.  Peut-être,  en  s'alliant  aux  ennemis 
de  la  Suéde,  l'Electeur  eût-il  pu  conquérir  dés  ITOoles  bouches 
de  l'Oder;  mais  peut-être  aussi  eût-il  échoué,  attirant  sur  ses 
États  des  maux  incalculables.  On  se  trouve  là  en  pleine  con- 
jecture. Par  contre,  le  «  grand  dessein»  a  fini  pai'  .se  ri^aliseï', 
et  il  faut  reconnaître  qu'il  a  puissamment  servi  la  fortune  du 
Bi'andebourg  (p.  95).  » 

Le  livre  III  retrace  la  cai-riére  de  Frédéric  111  devenu  roi 
sous  le  nom  de  Frédéric  L'  (1701-1713)  Nous  avons  déjà  lait 
allusion  au  rôle  néfaste  des  trois  W.  Et  cependant  «  l'admi- 
nistration de  Frédéric  I"  ne  fut  pas  en  tout  et  pour  tout 
fâcheuse  :  avec  des  faiblesses  et  de  grande-  fautes,  elle  ne  laissa 
pas  d'atteindre  certains  résultats  ».  Ce  fut  le  cas  notamment 
dans  le  domaine  de  l'enseignement.  La  Prusse  prend  même  à 
ce  moment  la  dii'ecti(»n  du  mouvement  intellectuel  en  Alle- 
magne. Mais  en  matière  administrative  et  économique,  les 
résultats  obtenus  furent  médiocres.  Lorsque,  après  1711,  le 
roi  prit  la  résolution  degouverner  seul,  sans  |)remierniinistre. 


776  COMPTES    RENDUS 

à   la  manière  de   Louis  XiV,  les  choses  n'en  allèrent  pas 
mieux. 

En  ce  qui  concerne  la  politique  extérieure  de  cette  période, 
M.  Waddingion  la  résume  comme  suit  :  «  Frédéric  l'^  s'est 
proposé  au  dehors  trois  objectifs  principaux.  D'abord,  il 
s'efforça  d'obtenir  des  divers  États  européens  la  reconnais- 
sance de  sa  dignité  royale.  Ensuite,  il  se  préoccupa  du  côté  de 
l'Ouest,  non  seulement  de  remplir  ses  obligations  envers  l'Em- 
pereur, mais  de  gagner,  en  consacrant  ses  forces  à  combattre 
la  France,  les  bonnes  grâces  des  puissances  maritimes,  dont 
il  attendait  des  avantages  de  toute  sorte.  Enfin,  placé  à  l'Est 
en  face  d'une  lutte  acharnée  dont  ses  possessions,  surtout  la 
Prusse  proprement  dite  et  la  Pomérauie,  faillirent  devenir  le 
théâtre,  il  chercha  de  son  mieux  à  maintenir  sa  unutralité  en 
embi-assant  des  ]>rojets  d'agrandissemeut,  aussi  séduisants 
qu'irréalisables.  »  Dans  la  poursuite  de  ces  divers  objectifs,  on 
peut  distinguer  trois  périodes  :  1°  de  170i  à  1706  les  affaires 
de  l'Ouest  priment  celles  de  l'Est;  2°  de  1706  à  1709  les  succès 
foudroyants  de  Charles  XII,  dans  la  grande  guerre  du  Nord, 
préoccupent  le  roi  de  Prusse  presqu'autant  que  les  victoires 
remportées  par  les  alliés  sur  Louis  XIV  ;  3°  de  17U9  à  1713  ce 
sont  ses  intérêts  sur  les  rives  de  la  Baltique  qui  prennent  le 
dessus. 

Tel  est  en  substance  le  rôle  du  premier  roi  de  Prusse,  avant 
et  après  l'acquisition  de  la  royauté. 

Dans  les  livres  IV,  V  et  VI.  M.  Waddiugton  refait  à  larges 
traits  l'histoire  de  Frédéric-Guillaume  I",  le  roi-sergent 
(1713-1740).  Peu  de  personnages  des  temps  modernes  ont 
retenu  autant  que  celui-ci  l'attention  des  historiens.  Son  carac- 
tère, ses  qualités  d'administrateur  et  ses  m  mies  de  tourmen- 
teur  d'hommes  sont  trop  connues  pour  que  nous  y  insistions 
dans  ce  compte  rendu.  Même  après  tant  d'historiens,  dont 
quelques-uns  sont  illustres,  ne  citons  que  Ranke  et  Schmoller, 
qui  se  sont  occupés  des  faits  et  gestes  du  roi-sergent,  M.  Wad- 
dington  a  réussi  à  nous  en  donner  une  image  originale, 
dépouillée  des  légendes  et  des  exagérations  dont  l'admiration 
des  uns  et  le  sai'casme  des  autres  l'avaient  atl'ublée. 

La  politique  extérieure  de  ce  fruste  fut  naturellement  plus 
active  qu'habile...  et  le  plus  souvent  incohéiente.  On  peut 
néanmoins   établir  quatre    périodes   dans    cette    politique  : 


COMPTES    RENDUS  777 

1»  de  1713  à  1721.  c'est  la  liquidation  du  passé,  la  signature 
de  la  paix  avec  la  France  qui  met  fin  à  la  «guerre  de  l'Ouest, 
l'arrangement  des  affaires  du  Nord,  après  huit  ans  de  diffi- 
cultés, par  une  sorte  de  démembrement  de  la  Suède  vaincue; 
2°  de  1721  à  1728,  la  Pi'usse  passe  à  tour  de  rôle  dans  les  deux 
sj^rand s  partis  en  lut  e  pour  la  pi'épondérance  en  Europe,  tan- 
tôt du  côté  de  la  France  et  de  l'Angleterre,  tantôt  du  côté  de 
l'Empereur:  c'est  la  période  de  l'incohérence;  3"  de  1728 
à  1738,  le  roi  s'étant  décidé  pour  l'alliance  impériale,  lui 
demeure  fidèle  durant  dix  ans,  uialgré  de  cruels  déboires; 
4"  enfin,  de  1738  à  1740,  après  avoir  été  outrageusement  dupé 
par  l'Autriche  qui  abuse  de  son  loyalisme  germanique  et  de  sa 
crédulité,  Frédéric  Guillaume  se  retourne  vers  la  I'"rance;et 
au  moment  de  sa  mort  il  est  sur  le  point  de  conclure  avec 
Louis  XV  une  alliance  étroite.  Ce  revirement  m  extremis 
détermine  un  changement  radical  dans  la  politique  prus- 
sienne. 

Somme  toute  le  roi-sergent  laisse  à  son  successeur,  le  grand 
Frédéric,  un  bel  héritage  :  «  un  royaume,  encore  ti'ès  |)etit 
(120,230  kilomètres  carrés),  mais  déjà  centralisé;  un  i)euple 
encore  peu  nombreux  (2  raillions  et  demi  de  sujets,  au  plus), 
mais  discipliné  et  laboiieux,  une  bureaucratie  sévèrement 
dressée  à  servir  l'intérêt  public,  un  trésor  bien  garni,  une 
armée  permanente  de  plus  de  80.000  hommes.  »  Et  malgré  les 
travers  odieux  ou  ridicules  du  personnage  «  il  faut  reconnaître 
qu'il  a  été  dans  la  vieille  Prusse  des  Hohenzollern  le  |ilus 
grand  souverain  en  ce  qui  concerne  l'administration  inté- 
rieure. La  figure  du  roi-sergent  apparaît  encore  de  nos  jours 
comme  la  figure  de  la  Prusse  même  »  (p.  573-574). 

Dans  le  résumé  forcément  incomplet  du  volume  dont 
M.  M^addincrton  vient  d'enrichir  la  littérature  historique,  il 
nous  a  été  impossible  de  signaler  tout  ce  qu'il  apporte  de  neut" 
sur  un  sujet  qui,  au  premier  abord,  semble  avoir  été  épuisé 
par  ses  prédécesseurs.  Signalons  cependant  les  renseigne- 
ments ini'dits  qu'il  a  puisés  dans  les  archives  de  Berlin  -ur  la 
vie  intellectuelle  (voir  notamment  les  p.  49-50,  243,  251  2fô, 
271,  557,  500-566),  sur  les  réfiiu^iés  français  (p.  40  et  suiv.  et 
509  et  suiv.),  sur  l'oppression  des  paysans  par  lesJnnker(p.  42 
et  222).  Dans  le  domaine  de  la  politique  extérieure,  les 
archives  du  Ministère  des  .\ft'aires  étrangères  à  Paiis  lui  ont 


778  COMPTES    RENDUS 

permis  de  rectifier  ou  de  compléter  nos  connaissances,  notam- 
ment en  ce  qui  regarde  l'histoire  de  l'alliance  hoUando-prus- 
sienne  de  1688  (p.  14-15)  et  le  traité  de  Wusterhausen  du 
12  août  1726  entre  la  Prusse  et  l'Autriche  (p.  414j.  D'ailleurs, 
au  point  de  vue  de  l'histoire  diplomatique,  les  travaux  anté- 
rieurs de  M.  Waddington  nous  garantissaient  d'avance  une 
œuvre  de  premier  ordre. 

Naturellement,  dans  un  livre  de  600  pages  qui  embrasse 
deux  régnes  aussi  importants  que  ceux  des  pi'emiers  rois  de 
Prusse,  il  ne  sera  pas  difficile  aux  spécialistes  de  l'histoire 
religieuse,  de  l'histoire  militaire,  de  l'histoire  économique,  de 
trouver  des  lacunes.  Pour  notre  part,  nous  aurions  été  heu- 
reux de  voir  étudier  l'histoire  économique  de  ces  deux  régnes, 
surtout  l'histoire  des  corporations  de  métiers  et  des  manufac- 
tures privilégiées,  d'un  point  de  vue  moins  abstrait  ou  moins 
exclusivement  prussien  (p.  44,  233-236,  503-510).  Quelques 
vues  d'ensemble  sur  les  réformes  qui  s'opèrent  au  même 
moment,  dans  le  même  domaine,  dans  les  autres  pays  de  l'em- 
pire, en  France  et  dans  les  Pays-Bas,  auraient  été  les  bien- 
venues. Les  travaux  de  Schmoller  et  de  von  Below  en  Alle- 
magne, de  Pribram  en  Autriche,  de  Levasseur,  Hauser  et 
G.  Martin  en  France,  auraient  rendu  la  chose  assez  facile. 
Mais  M.  Waddington  semble  vouloir  éviter  à  dessein  les  rap- 
prochements, non  seulement  en  cette  matière,  mais  dans  tous 
les  domaines  indistinctement.  On  ne  trouve  chez  lui  aucune 
tendance  à  construire  des  systèmes,  ni  même  à  contribuer  ù 
leur  construction.  Dans  le  volume  que  nous  venons  d'ana- 
lyser, il  n'a  prétendu  faire  que  l'histoire  de  Prusse.  Mais  il 
faut  avouer  qu'il  l'a  faite  avec  une  maîtrise  incomparable. 

H.  Van  Hodtte. 

Comte  Renaud  de  Briey.  Le  Rhin  et  le  problème  d'Occident. 
Avec  deux  cartes.  Bruxelles,  Dewit  ;  Paris,  Pion,  1922, 
in-8°,  225  p. 

Bien  que  cet  ouvrage  relève  plus  des  sciences  politiques  que 
des  disciplines  historiques,  il  importe  cependant  de  le  signaler 
à  l'attention  de  ceux  qui  cherchent  dans  les  leçons  du  passé 
la  clef  des  problèmes  actuels.  En  effet,  les  trois  premiers 
chapitres  de  ce  livre  ont  un  caractère  presqu'exclusivement 


COMPTES    RENDUS  771) 

historique  et  le  comte  de  Briey  y  expose,  dans  une  vaste  syn- 
thèse, les  antécédents  de  la  question  rhénane  aii  si  que  les 
liens  séculaires  qui  unissent  notre  pays  à  In  Rhénanie. 

L'auteui'  débute  en  exposant,  d'une  façon  à  la  fois  claire  et 
complète,  l'histoire  diplomatique  de  la  question  rhénane  on  la 
rattachant  à  la  politique  continentale  de  l'Angleterre.  En 
utilisant  judicieusement,  les  meilleures  sources,  il  expose  le 
projet,  formé  à  Londres  en  1813,  de  créer  un  État  bel^ço- 
l'hénan,  projet  trop  vite  abandonné  pour  faire  place  à  l'union 
de  la  Belgique  et  de  la  Hollande  et  â  l'établissement  de  la 
Prusse  sur  la  rive  gauche  du  Rhin,  double  faute  dont  les  con- 
séquences furent  désastreuses  pour  la  paix  européenne  et  que 
l'expédient  de  la  ui  utralité  belge,  imaginé  en  1831,  ne  parvint 
pas  à  réparer. 

Du  point  de  vue  international  général,  le  comte  de  Briey 
passe  au  point  de  vue  spécial  en  étudiant  les  liens  qui,  dans  le 
passé,  ont  uni  la  Belgique  à  la  Rhénanie  et  en  montrant,  à  la 
lumière  des  incidents  de  183.),  1388  et  1848,  la  résistance  des 
Rhénans  au  régime  prussien. 

A  ce  p(»int  de  vue,  les  lettres  inédites  du  comte  Camille  de 
Briey.  ancien  ministre  des  Affaires  étrangères  belges,  jettent 
un  jour  nouveau  sur  l'état  d'esprit  de  l'Allemagne  catholique 
au  milieu  du  xix°  siècle  et  méritent  de  retenir  tout  spéciale- 
ment l'attention  (^). 

Poussant  son  étude  jusqu'à  l'époque  la  plus  récente, l 'auteur 
étudie  la  situation  depuis  la  guerre  et  montre  la  signification 
que  l'on  peut  donner  aux  discussions  de  la  constitution  de 
'Weimar. 

Les  relations  artistiques,  littéraires  et  religieuses  furent 
aussi  intenses  que  les  relations  politiques  entre  la  Belgique  et 
la  Rhénanie.  Le  comte  de  Briey  tire  de  nombreux  ai'guments 
de  ces  affinités. 

«  Les  similitudes  de  l'inspiration  artistique,  dit-il  très  jus- 
tement, sont  un  indice  d'autant  plus  sûr  de  la  communauté  des 
aspirations  ethniques  qu'elles  apparaissent  à  l'éclosion  même 
du  sentiment  e!>tliétique  et  avant  d'èti-e  faussées  par  des 
influences  étrangères.  » 


(')  Voir  sur  ct'Ue  Lories|niiiil;iiici-  r(iiiM;ij.;i'  du  luiiilc  Hinmi'  m  Hkim. 
L'Allemagne  et  lavenir  de  l'Evrope.  P;iris.  Hcrpor-Sernuill  ;  Hnixolit's.  LanuT- 
tiii,  1951. 


780  COMPTES    RENLJS 

En  quelques  pages  d'un  vif  intérêt,  l'auteur  rappelle  les 
caractères  communs  de  l'art  rhénan  et  de  l'art  raosan,  s'ex- 
primant  tant  dans  les  monuments  que  dans  les  objets  mobi- 
liers, jusqu'au  triomphe,  au  xiii^  siècle,  dans  nos  provinces 
comme  en  Rhénanie,  de  l'art  gothique  d'importation  fran- 
çaise. 

Une  aussi  grande  similitude  d'inspiration  s'affirme  entre 
l'école  flama  de  et  l'école  rhénane  dés  la  fin  du  xiv*  siècle  et 
l'étude  des  diverses  manifestations  des  arts  plastiques  permet 
au  comte  de  Briey  de  faire  sienne  l'opinion  exprimée,  dès 
1910,  par  un  critique  allemand  que  l'art  rhénan  n'est  qu'  «  un 
rayon  de  l'art  flamand  ». 

L'étude  des  lettres  mène  à  semblables  conclusions  :  qu'il 
s'agis-^e  de  l'origine  des  chansons  de  geste  ou  de  la  diffusion 
de  la  Renaissance,  les  liens  intellectuels  entre  la  Belgique  et 
le  Rhin  restent  étroits  et  même,  lorsque,  aux  xyii"^  et 
xviii^  siècles,  l'inff  luence  française  domine  la  vie  intellectuelle, 
la  Rhénanie  ne  cesse  de  s'opposer  à  l'Allemagne  du  Nord  et 
conserve  une  telle  originalité  que  Henri  Heine  n'hésite  pas  à 
écrire,  en  1838,  que  «  les  Rhénans  ne  sont  ni  des  Allemands, 
ni  des  Français,  ce  sont  des  Belges  ». 

Enfin  l'élément  religieux  se  joint  encore  à  tous  les  autres, 
pour  apparenter  étroitement  la  Belgique  et  la  Rhénanie. 
Missionnaires  des  premiers  siècles,  évêques,  moines  et  écri- 
vains religieux  du  moyen-âge,  furent,  dit  l'auteui",  les  nobles 
ambassadeurs  du  génie  rhénan  dans  notre  pays. 

Il  est  des  éléments  que  nous  nous  étonnons  de  voir  négliger 
par  un  écrivain  aussi  averti  que  le  comte  de  Briey:  ce  sont  les 
éléments  d'ordre  ethnographique  et  linguistique.  Ti  eût  pu 
cependant  tirer  de  puissants  arguments  pour  sa  thèse  en  rap- 
pelant la  lointaine  communauté  d'origine  entre  les  Francs 
Saliens,  qui  colonisèrent  notre  pays,  et  les  Francs  Ripuaires, 
qui  restèrent  fixés  sur  les  rives  du  grand  fleuve  frontière  entre 
la  Gaule  et  la  Germanie.  De  même,  il  eût  pu  utilement  insis- 
ter plus  qu'il  ne  le  fait,  sur  l'étroite  parenté  entre  le  pat(Ois 
des  bords  du  Rhin  et  la  langue  parlée  par  la  majorité  de  nos 
concitoyens.  Encore  aujourd'hui,  dans  certaines  régions 
rurales  de  la  Rhénanie,  un  Belge  se  fera  mieux  comprendre 
en  parlant  le  flamand  que  ne  pourrait  le  faire  un  Prussien 
parlant  le  haut-allemand. 


COMPTES    RENDUS  7«l 

Le  comte  de  Briey  néglige  trop  les  leçons  de  l'histoire  éco- 
nomique. Le  chapitre  fort  intéressant  et  bien  documenté  qu'il 
consacre  à  «Anvers  et  le  Rhin  »  eût  gagné  à  être  précédé  d'un 
aperçu  des  efforts  continus  de  nos  anciens  princes,  deimis  les 
ducs  de  Brabant  jusqu'aux  Archiducs,  pour  s'assurer  la  maî- 
trise des  voies  de  communications  entre  la  vallée  du  Rhin  et 
le  bassin  de  l'Escaut.  Il  eût  ainsi  fait  voir  comment,  de  tout 
temps,  la  Belgique  a  considéré  son  expansion  économique 
vers  l'Est  comme  un  des  plus  impérieux  besoins  de  son  exis- 
tence. 

En  dépit  de  ces  lacunes,  l'ouvrage  du  comte  de  Briey  reste 
fort  intéressant  à  lire,  même  pour  les  historiens  de  métier.  Si 
l'auteur  écrit  «  ad  probandum,  non  ad  narrandum  )>,  il  n'en 
a  pas  moins  prouvé  qu'il  savait  utiliser  judicieusement  les 
documents  et  en  tirer  habilement  les  arguments  favorables  à 
une  thèse  qui  ralliera  bien  certainement  les  sympathies  de 
tous  les  patriotes  belges. 

C'h.  Terlinden. 


i 


BIBLIOGRAPHIE 


Livres  nouveaux 

OUVRAGES    BELGES 

Aristote.  Ti-aduetions  et  ctudes.  —  La  Métai)h,v.si(iue.  Livres  II 

el  III.  Traduction  et  commentaire  par  Gaston  Colle.  Louvaiu, 

Institut  supérieur  de   Philosophie,   1922,  in  8°,  xxxix-299  p.. 

12  fr.  {Collection  publiée  par  VInstitut  siipérieur  de  Philosophie 

de  l'Vninersilé  de  Loiwuin. 
Cartulaire  de  la  commune  de   Namui-.   recueilli  et  annoté  ])ar 

D.-D.  lîrouwers.  Tome  cinquième.  1621-1692  Xaniur,  Wesmael 

Charlier,  1922,  in-8»,  "281  p.  (Documents  relatifs  à  l'histoire  de  lu 

prorince  de  Namur,  publiés  par  ordre  du  Conseil  prooincial.) 
De  Schepper  (R  ).  Inleidinj^-  tôt  de  studie  der  Kerkj,'eschiedenis. 

Tweede  herziene  druk    Brugge,  Beyaert.  1922.  in-S",  viii  146  p., 

6fr. 
De  W^ulf  (Maurice)    Philosophy  and  civilization  in  the  middle 

agcs     Princeton   University  Press.   1922,   in-8".    x  .313    p.,   3  $ 

[Louis  Clark  Vanuxem  Foundation). 
Etienne  Servais;   Le  genre  romanesque  en  France  depuis  l'appa- 
rition  de  la  ((  Nouvelle   Héloïse  »  jusqu'aux  iipijroches  de   la 

Révolution.  Paris,  Colin,  1922,  in-8°,  440  p.,  30  fr 
Hadewijch.  De  vizioenen.  In  hedendaagsch  Xederlandscli  ovor- 

gebracht  door  Albert  Verwez.  Antwerpen,   De  Sikkel  [1922]. 

in  8".  107  p.,  8  fr.  50. 
Hoop  (Alfred  d').  Inventaire  général  des  archives  ecclésiastiques 

du  Brabant.  Tome  III.   Abbayes    Bruxelles,   Guyot,  1922.  gr. 

in  8°.   505  p.  {Inventaires  sommaires  des  Archives  de  VEtat  en 

Belgique.) 
Kreglinger  Richard).  La  religion  d'Israël.  Bruxelles.  Lamertin. 

19:22,  in-8°,  335  p.    Études  sur  l'origine  et  le  développement  de  lu 

vie  religieuse,  III.) 
Ligne  Princesse  Ch.  de  ,  née  princesse  Lubomirskn.  Souvenirs, 

Pages  détacliét's   de  ses   cahiers.    Bruxelles,  Van    Oest.   1922. 

in-8'',  405  p..  portraits  hors  texte.  20  fr. 


784  BIBLIOGRAPHIE 

Nieuwe  Yde.  Un  village  disparu  de  la  côte  flamande.  Baron  de 
Loë.  Partie  archéologique.  J.  Vannérus  Partie  historique 
Bruxelles,  Impr.  médic  et  scientif.,  1922,  2  br  in-8°,  10,32  p., 
fig.,  carte. 

Poulet  (Charles).  Guelfes  et  Gibelins.  I.  La  lutte  du  Sacerdoce  et 
de  l'Empire  1152-1250).  Bruxelles.  Vromant,  1922,  in-16,  240  p., 
carte  (Coll.  Lovanium,  V). 

Sévère  d'Antioche.  Les  homiliae  cnthedrale.s  i suite).  Homé- 
lie LXXVII.  Texte  grec  édité  et  traduit  en  français,  versions 
syriaques  publiées  pour  la  première  fois,  par  M. -A.  Kugener 
et  Edg.  Triffaux.  [Paris,  Firmin-Didot.  1922],  in-8^  p.  765-864, 
9  fr    60  {Patrologia  orientali.s,  t.  XVI,  fasc.  5). 

Vlietinck  (Ed.).  Wat  is  de  wijsbegeerte  der  geschiedenis?  Ant- 
werpen,  Dirix-Van  Riet,  1922,  in-8»,  29  p. 


Délos 

NOTES  BIBLIOGRAPHIQUES  (1). 

A   —  Ordre  topographique  et  chronologique 

I.    -  CARTOGRAPHIE. 

u)  Histoire  des  cartes  :  L.  Gallois*  (1910). 

b)   Cartes  :  1.  Ardaillon*-Convert,  au  1/2  000(1893-1894). 

2.  L.  Cayeux*,  au  1  10,000  (1906  et  1908). 

3.  A.  Bellot*,  au  1/10.000  (1907-1908). 


(1)  A  Délos,  connue  dans  le  reste  de  hi  Grèce,  j'ai  (^liercln'  avant  tout  à 
prendre  connaissance  des  résultats  acquis.  On  voudra  donc  bien  ne  considérei' 
les  Nole.<!  (jui  suivent  que  comme  un  résumé  incomplet  pouvant  servir  <i'aido- 
mémoire  à  un  voyageur  pressé.  Jai  inlentionnellement  laissé  de  côté  tout  ce 
qui  a  trait  à  l'épigrapliie  (»roprcnient  dite  et  à  certaines  questions  particulières, 
par  exemple  celle  de  l'omphalos,  dont  je  m'occuperai  ailleurs. 

Quelque  modeste  que  .soit  cette  contribution  à  l'élude  de  l'île  d  Apollon, 
je  me  fais  un  devoir  d'exprimer  ici  ma  reconnaissance  à  M.  Cb.  Picard  qui  l'a 
rendue  possible,  en  m'ouvranl  la  bibliotliè(|ue  de  l'Kcole  française  d'Atbènes 
et  en  m'accordant  l'iiospitalité  à  Délos. 

*  L'astérisque  renvoie  ii  l'ordre  alphabétique. 


BIBLIOGRAPHIE 


II.   —    FOriLLES. 


Plan  archéologique  :  M.  Replat  a  levé  et  dessiné,  de  l'Jl4  à  IDIK, 
un  grand  plan  archéologique  qu'il  tient  constamment  au  courant. 
Echelle  de  1  1,000.  On  ne  sait  encore  ni  quand  ni  comment  ce  plan 
sera  mis  dans  le  commerce.  En  191G,  .T.  Paris*.  A.  Plassart*  et 
P.  Roussel*  en  ont  déjà  donné  des  réductions. 

Histoire  des  fouilles  :  G.  Radet,  Ilist.  de  l'Ec.  fr.  d'Alhàiies 
(1901),  p.  331-340. 

F  oui  lien. 

a)  HiÉROx  d'Apollon. 

Trois  temples  d'Apollon,  Téménos  d'Ariémis.  Coji.striictions 
naxiennes  .  notes  de  F.  Courby*  (1921). 

Monument  ù  abside  à  l'ouest  de  la  A'oie  Sacrée  :  F.  Courby* 
(1913)  y  voit  lautel  des  cornes  . 

Base  du  colosse  :  S.  Reinach*  donne  une  revue  de  témoignages, 
sans  plus,  en  1893. 

M.  Replat  pense  que  cette  base  reposait  primitivement  près  de 
l'angle  du  portique  de  l'esplanade:  Bull.  corr.  hell..  1921,  p.  533. 

Base  au.\  trophées.  A.  J.  Reinach*  (191.'1  fig.  3-4)  :  monceau  de 
boucliers  macédoniens  ;  sur  la  face  supérieure,  traces  delà  statue 
de  bronze  d'un  Romain    général  vainqueur  de  rusurj)ateur  Phi 
lippe  Andriskos  en  148-146  av.  J.-C.  =  Q.  Caecilius  Metellus?). 

Sanctuaire  des  Taureaux.  En  1884,  Th.  HomoUe*  pla(;ait  l'autel 
des  cornes  dans  le  sanctuaire  des  taureaux.  Cf.  Monument  à 
abside. 

Reconstruction  de  la  charpente  par  G.  Poulsen*  (1913).  Coupe 
d'ai)rès  Xénot  :  Ducati.  Arte  classicn  (1920),  p.  460,  fig.  450  — 
J.  Svoronos*  y  voit  le  hall  d'un  navire  sacré  :  Bull.  curr.  hell  , 
19211,  p.  399.  1921,  p.  270. 

Côté  oriental  du  Téménos  Fouilles  de  L  Bizard*  en  1904-1907  : 
Plan  (pi,  XIY);  trois  exèdres  découvertes  ])ar  G.  Fougères  en  1886 
(fig.  14);  Dionysiou  (fig.  16).  Autres  photographies  :  fig.  1-2.  7.  9. 
11,  13,  15.  Monument  chorégique  de  Karystios  :  Bizard*-Leroux 
(1907,  fig.  18-20  et  pi.  Xlll).  Près  du  sanctuaire  de  Dionysos,  une 
base  de  statue  porte  la  signature  d'Iphicartidcs  que  Th.  Honiolle* 
(1888,  pi    XIII)  place  au  début  du  vi*  siècle. 

Portique  d'Antigone  :  consacré  lors  de  la  première  fête  des 
Antigoneia  254/252  (F.  Courby*.  1914). 

Monographie  de  F.  Courby*  en  1912. 

Tombeau  mycénien.  F.  Courby*  '1912  ,  j».  <î;;-74.  tig.  83  :  d'Oi)is 
etd'Argé  ^cf.  Hdt.  IV,  35). 

Prytnnee.   au  sud-ouest  du  sanctuaire  des  taureaux.  Identifie 

50 


786  BIBLIOGRAPHIE 

par  p.  Roussel*.  Cf.  Rev.  ardu,  1911,  II,  p.  86,  Délos.  col.  ath., 
p.  47,  n.  6. 

Agora  du  Sud.  Fouilles  de  F.  Durrbach*,  en  1902  (juill.sept  )  : 
le  ((  portique  Tétragone  ))  a  reçu  sa  forme  définitive  vers  130  av. 
J.-C.  Plan  :  pi.  II-III. 

M.  Vallois  a  préparé  une  étude  sur  plusieurs  monuments  du 
hiéron.  Cf.  Bull.  corr.  hell.,  1920,  p.  398. 

b)  Aphrodision.  p.  Roussel*,  Délos.  col  ath.,  p  240-242  :  exhumé 
en  1912.  au  nord-est  du  (quartier  du  théâtre,  peut  avoir  été 
construit  à  la  fin  du  iv^  siècle,  cf.  Avezou*  (1913),  j).  120. 

c)  l'Inopos  et  le  Sanctuaire  des  Cabires.  Fouilles  de  S.  Rei- 
nach*,  en  1882  :  découverte  de  nombreuses  inscriptions  et  d'un 
monument  interi^rété  récemment  par  les  architectes  danois 
G.  Poulsen  et  S.  Risom  :  sorte  de  trésor  ou  de  portique  votif 
consacré  par  Hélianax,  j)rêtre  des  Cabires,  à  Mitliridate  V,  aux 
rois  Antiochus  VIII  de  S^yrie,  Ariarathès  VI  de  Cappadoce, 
Arsakès  VU  des  Parthes,  et  à  j)lusieurs  officiers.  Cf.  Ex-voto 
d'Aegos-Potamos  à  Delphes.  M.  Replat  est  prêt  à  faire  la  restau- 
ration (Th.  Homolle*,  1913).  Cf.  P.  Roussel*,  Délos,  col.  ath., 
p.  68,  229-233  :  1)  petit  temple  de  la  fin  du  iv«  siècle  ;  2)  temple 
dédié  en  101/100  par  Hélianax  aux  Grands  Dieux  ;  3)  Hérakleion. 

d)  Sanctuaire  des  dieux  étrangers  :  Fouilles  de  Hauvette*- 
Besnault,  en  août-sept.  1881,  au  Sarapieion  ;  de  P.  Roussel*, 
en  1909-1912,  aux  sanctuaires  égyptien  et  syrien,  au  quartier  de 
l'Inopos  et  à  l'ancien  sanctuaire  égj^ptien  [C.  r.  Acad.  Inscr.,  1910); 
en  1911,  à  l'Héraeon,  qu'on  prenait  pour  un  temple  de  Sérapis. 
(Cf.  Délos,  col.  ath.,  p.  245,  et  infr.  MUSÉE).  Restauration 
(P.  Roussel-Replat)  d'un  petit  temple  d'Isis  :  Avezou*  (1913), 
p.  117,  fig.  2.  Fouilles  de  1913  au  téménos  des  dieux  syriens  : 
i6id.,p.  118. 

L'essentiel  est  repris  par  P.  Roussel*,  Cultes  ég-ypt.,  1916  : 
Sarapieion  A  (pi.  I,  fig.  1-3),  B  (pi.  II,  fig.  4-6),  C  (pi.  III,  fig.  8-10). 
Résumé  :  Délos,  col.  ath.,  p.  249-270;  p.  259,  théâtre  d'Hagné 
Aphrodite,  dédié  quelques  années  après  108/107. 

Synagogue  Juive,  près  du  stade.  En  1912  et  1913,  fouilles  de 
A.  Plassart*  (1914)  :  phot.  p.  524-525;  présence,  dans  les  murs,  de 
marbres  pris  au  gymnase  ;  or,  le  gymnase  a  été  pillé  au  cours 
de  la  campagne  des  amiraux  de  Mithridate  (88)  ;  l'aménagement  de 
la  synagogue  se  place  donc  dans  les  années  qui  suivirent.  Cet 
édifice  a  été  abandonné  dans  le  j)remier  quart  de  siècle  av.  J.-C. 
(Avezou*,  1913,  p.  128-129). 

e)  Le  Mont  Cvnthe  :  Lebègue*  y  a  conduit  ses  premières 
fouilles,  dès  1872  :  temple  primitif  d'Apollon  et  téménos  de  Zeus  et 


KIBLIOGHAI'HIE  787 

(l'Athéna  Cyuthiens.  Tout  récemment,  M.  Plassart  y  a  (U'-couvcrt 
des  restes  d'habitations  préliistoriques  et  a  étudié,  avec  M .  Replat, 
les  ruines  abondantes  de  temples  en  vue  d'une  restauration. 
Cf.  P.  Roussel*,  Délos,  col.  ath.,  p.  434,  et  conférence  de  M.  Plas- 
sart sur  les  sanctuaires  du  Cynthe,  21  février  1920.  Cf.  Bull.  corr. 
hell.,  1920,  p.  3G9,  1921.  p.  534. 

Terrasse  à  l'est  de  la  cime   sud  :    fouilles  de   M.    Demaugel 
en  1920.  Sanctuaire  du  v«  siècle.  Cf.  Bull.  corr.  hell  ,  1920,  j).  3W. 

f)    VlM-K    COM.MERCIALK. 

Agora  des  Italiens  ou  synode  des  Hermaïstes.  Établissement 
aménagé  à  la  fin  du  ii^  siècle  av.  J.-C.  On  y  a  laissé,  à  l'ouest,  la 
statue  de(iaius  Ofellius,  un  inconnu,  signée  des  artistes  Dionysios 
et  Polyclès  (Th.  Homolle*,  1881,  pi.  XII,  J.  Hatzfeld*,  1921, 
p.  484).  —  M.  Replat  a  relové  deux  colonnes  garnies  de  leur  enta- 
blement et  placé  sur  le  stylobate  quelques  tambours  de  colonnes. 
M.  Laumonier  entreprendra  probablement  l'étude  de  ce  synode 
qui  présente  surtout  deux  difficultés  :  1)  reconstituer  les  inscrip- 
tions (cf.  J.  Hatzfeld*,  1921);  2)  expli(iuer  la  liaison  des  propy- 
lées et  du  portique  dorique  surmonté  dun  premier  étage  ionique. 
Les  fouilles  exécutées  dans  l'immense  cour  centrale  ç'ont  abso- 
lument rien  rapporté  (M.  Replat). 

Indication  des  recherches  successives  :  P.  Roussel*,  Délos,  col. 
ath.,  p.  303,  n.  2. 

Synode  des  Poseidoniastes.  Fouilles  de  S.  Reinach*,  en  1882. 
Exploration  reprise  en  1904  (P.  Roussel*,  Délos.  col.  ath.,  p.  90), 
et  complétée,  en  1910,  par  Ch.  Picard*  {Délos,  fasc.  VII,  1921). 
La  partie  historique  est  traitée  dans  un  article  écrit  en  1911  et 
remis  au  point  eu  1920.  Quelc^ues  conclusions  :  dans  la  première 
cella  ou  chapelle  se  trouvait  la  Dea  Roma,  dans  la  seconde, 
la  statue  de  Poséidon,  œuvre  de  Mévavbpoç  MéXavoç;  dans  la  troi- 
sième, l'Astarté  phénicienne;  dans  la  quatrième,  l'Héraklès 
tyrien.  —  Durée  approximative  de  l'Établissement  :  de  110/109 
à  69  environ  avant  notre  ère. 

Lac  sacré.  M.  Replat  le  placerait  plutôt  sur  la  hauteur,  à 
l'endroit  où  il  y  a  un  réservoir.  L'ancienne  ligne  des  quais  est 
encore  visible  sur  le  côté  ouest  du  lac  actuel  et  de  l'agora  des 
Italiens  Les  sondages  de  L.  Cayeux*  ont  découvert  l'ancien  lit 
de  l'Inopos  (jui  aboutissait  à  l'angle  sud-est  de  cette  même  agora. 
(Cf.  Ch.  Picard*,  1911,  p.  847,  fg.  1-2,  et  Avczou*,  1913  p.  120). 
Les  établissements  maritimes. 

a  les  magasins.  Fouilles  de  A.  Jardé*  en  1903  (BCII,  1905)  : 
plan  de  trois  magasins  (pi.  V)  ;  plan  du  magasin  des  colonnes 
(pi.  VIII)  —  et  en  1904  {BC/I,  lOOtî)  :  baignoire  dans  le  vestibule 
du  magasin  6  (fig-  2);  gr()Ui)e  g  (fig.  8) 


788  BIBLIOGRAPHIE 

b)  les  ports  :  J.  Paris*  (1916)  résume  ou  rectifie  quelques  études 
(par  ex.  Ardaillou*,  en  1896  :  fouilles  de  juin  à  sept.  1894)  et 
propose  des  explications  nouvelles  :  pi.  I-IV  (carte).  Cf.  Reo. 
et.  gr.,  1920,  p  316 

La  salle  hypostyle.  Monographie  de  G.  Leroux* '1909)  :  un  grand 
plan  (pi.  I). 

Nouvelles  recherches  de  R.  Vallois*  il914)  en  1911  :  étendue  et 
structure  du  lanterneau;  grande  vue  d'ensemble  :  pi.  IV. 

Le  Synode  des  Apolluniastes  serait  le  monument  à  soubasse- 
ments de  tuf  situé  au  sud-est  de  la  salle  hypostyle  (pseudo- 
porinos  oikos). 

g-)  ViiJ.K  BOURGKOisE  (indication  des  i-echerches  successives  : 
P.  Koussel*.  Délos,  col.  ath.,  p.  307,  n.  1). 

Maison  des  dauphins  :  découverte  en  juillet  1883  par  P.  Paris* 
(1884,  pi.  XXI),  doit  son  nom  aux  quatre  groupes  de  dauphin.s 
chevauchés  par  des  Eros  qui  ornent  les  angles  de  la  mosaïque 
de  l'impluvium 

Cinq  maisons  gréco  romaines  des  second  et  premier  siècles 
av.  J.-C.  fouillées  par  L.  Couve*  (1895),  en  1894  (juillet-sept.)  : 

1.  Maison  au  nord  du  Lac  Sacré  (pi.  III;. 

2.  Maison  de  la  colline  (pi    V). 

3    iV/a/son  rfu  ^/v'rfenf  mosaïque  du  péristyle)  :  pi    Y. 

4.  Maison  de  V Inopos  (pi    V). 

5    Maison  du  Diadumène  (v.  infr.  MUSÉE)  pi.  IV. 

Maison  dite  de  Kerdon  :  dégagée,  en  1903.  par  A.  Jardé* 
(pi.  Xl-XII)  qui  y  a  trouvé  une  stèle  funéraire  au  nom  de  Kerdon 
(pi.  XIII).  Ce  nom,  dit  L.  Bizard*  (1907,  p  471,  n.  3),  n'était  sûre- 
ment pas  celui  du  propriétaire  D'ailleurs  cet  immeuble  comprend 
deux  maisons. 

Maison  du  Diony.sos  ila  mosaïque  de  l'impluvium  l'eprésente 
Dionysos  chevauchant  un  tigre i  :  découverte  eu  1904  (BCH, 
190G,  plan  -.  pi.  XI),  par  J.  Chamonard*  qui  a  déblayé  la  rue  du 
théâtre  (i)lan  :  pi  X).  On  attend  de  cet  archéologue  une  étude 
d'ensemble  sur  le  quartier  du  théâtre. 

Maisons  à  l'est  du  stade  :  fouilles  de  A.  Plassart*  en  1912-1913 
{BCIL  1916.  cf   Avezou*,  1913,  p    126  128i. 

Peintures  murules  publiées  en  1908,  par  M.  Bulard*  qui  prépare 
une  i^tudc  sur  les  revêtements  peints  de  V époque  hellénistique 
(BCH,  r.'21,  p.  5.34). 

a)  i)einlurcs  d'un  caractère  liturgi<iue  orilinairement  au  voisi- 
nage de  la  porte  d'entrée,  tandis  qu'à  Pompéi  les  peintures 
liturgiques  sont  le  plus  souvent  exécutées  soit  dans  l'atrium,  soit 
dans  une  des  salles  qui  en  dépendent. 


BIBLIOGRAPHIE  789 

PI.  I  (=  Safjflio,  Dicl.,  fig.  7443)  :  i)eiiiture  d'autel  décoviverte 
on  1904  à  l'ouest  de  la  maison  des  dau]>hins,  ciiuiuicnie  couche,  in 
situ  (fragment  de  la  quatrième  couche  au  musée,  fig.  7  Restes  de 
douze  revêtements  superposés.  M.  Bulard  discute  longueineut 
l'interprétation  de  ces  peintures.  Résumé  :  sacrifice  offert  devant 
un  autel  par  plusieurs  i)ersonnages  (putcr  f'uniilius  et  membres  de 
la  famille)  enveloppés  dans  un  long  vêtement  dont  un  pan  leur 
recouvre  la  tète  et  la  nuque  :  la  victime  est  un  porc  que  conduit 
un  personnage  (le  popa)  vêtu  à  la  légère  (du  limus)  et  de  plus 
petite  taille  que  les  personnages  sacrifiant.  Monument  consacré 
par  les  habitants  de  la  maison  au  culte  du  (Jenius  :  inscription 
Agat[hodaimoni]  sur  un  autre  fi-agment  (fig.  8.  au  musée)  ;  or, 
Agathodaimon  ~-=  Genius.  Sur  les  côtés,  luttes  (d'esclaves?)  (jui 
avaient  lieu  dans  les  vici,  aux  ludi  conipitalicii,  le  jour  de  la 
principale  fête  des  Lares,  les  Compitalia  ;  amphore  et  palme  =  prix 
de  la  lutte.  Évolution  :  fidèles  en  train  d'honorer  la  divinité 
'fJenius.  Lares),  puis,  aune  époque  relativement  récente  cf.  Pom- 
péi  :  Genius  seul),  la  divinité  même  :  sacrifice  offert  à  l'intention 
des  membres  de  la  famille  par  le  Genius  assisté  de  deux  Lares. 
Impossible  de  fixer  des  dates,  mais  antériorité  des  monuments 
de  Délos  par  rapport  à  ceux  de  Pompéi. 

PI.  V,  A  :  peinture  du  magasin  des  colonnes,  au  musée. 

PI.  VI,  C.  et  fig.  49  :  peinture  de  la  maison  des  dauphins  : 
groupes  d'Eros  se  livrant  à  divers  jeux  et  occupations  de  la  vie 
courante.  Cf.  troisième  stj'le  pompéien  Cmaison  des  Vettii). 

A.  Plassart*  (BCH,  1916.  cf.  Reu.  et.  gr.,  1920.  p.  310.  4221  a 
découvert  de  nombreuses  peintures  dans  le  quartier  du  stade  :  à 
droite  de  l'entrée  de  l'habitation  C  (fig.  10,  16i  ;  autel  de  l'habita- 
tion C  (fig  11,  13-15);  autel  de  l'habitation  D  (fig  28-32)  ;  la  plus 
belle  est  une  «  tête  radiée  de  Phoibos,  de  face,  le  visage  et  le 
regard  tournés  légèrement  à  gaucho  »  fig  19  et  p.  191).  trans- 
portée au  musée;  elle  ressemble  étonnamment  à  un  buste  de 
Phoibé.  bas-relief  de  marbre  trouvé  en  1910.  au  nord-est  de  la 
baie  de  Phourni  (fig.  20  et  p.  191.  n.  2). 

6)  Peintures  décoratives  cf.  premier  style  pompéien  :  Saglio. 
Dict.,  fig.  0755-0757). 

-l/osajgues  publiées  aussi  en  1908  par  M.  Bulard*  :  ni  musiviim 
opiis  revêtement  mural  en  mosaï(iue)  ;  ni  o/nis  si^^nirunt  (pave- 
ment d'une  extrême  dureté  en  ciment),  mais  : 

1.  opus  barbaricum  I ciment  oh  l'on  insère  de  simj)lcs  cailloux 
roulés),  ex.  :  maison  à  l'ouest  de  celle  des  Poseidoniastes. 

2.  opus  segmentnium  cailloux  remplacés  par  des  fragments  en 
marbre,  aux  arêtes  vives),  dans  un  grand  nombre  d'habitations; 
ex.  :  vestibule  de  la  maison  des  (laui>hins  (p.  192-193,  fig.  ri8-fi9), 


790  BIBLIOGRAPHIE 

sorte  d'apotiupaioii  qu'on  retrouve  sur  un  fragment  de  lampe 
(destiné  à  écarter  les  mauvaises  influences  qui  peuvent  s'intro- 
duire dans  l'intérieur  de  la  maison  :  explication  de  Ed.  Meyer  qui 
rapproche  la  mosaïque  de  l'hiéroglyphe  égyptien  de  la  vie  :  f  ) 

3.  opus  vermiculatiim  (les  fragments  de  matière  dure  sont  de 
forme  et  de  dimensions  très  différentes,  suivant  la  finesse  des 
détails  qu'il  s'agit  de  rendre);  ex.  :  pi.  X,  A  :  amphore  panathé- 
naïque;  pi.  XII  :  mosaïque  des  dauphins,  in  situ.  Signature  : 
'AaKXamdbriç  'Apctbioç  ëTioiei;  pi.  XIV-XV  :  mosaïque  trouvée  en 
1904,  Dionysos  chevauchant  un  tigre  (Cf.  mosaïque  de  Pompéi, 
Ruesch,  Guida,  p  57,  n°179:  Saglio,  Dict.,  s.  v  Musivum  opus, 
fig.  5239  ) 

Aucun  indice  chronologique  n'est  relevé. 

h)  Monuments  divers. 

1.  Théâtre,  du  iii«  siècle.  J.  Chamonard*  {BCH,  1896),  p.  257: 
«  L'orchestre  et  les  bâtiments  de  la  scène,  eniouis  sous  les  décom- 
bres, ont  été  pour  la  première  fois  l'objet  de  recherches  en  1882. 
A  cette  date,  M.  S.  Reinach*  [BCH,  1889]  déblaya  Vorchestra, 
les  trois  premiers  rangs  de  gradins  du  kuilon  et  les  dalles  servant 
de  bases  aux  colonnes  du  proskénion.  Dans  les  fouilles  reprises 
en  1892  et  1893,  ou  a  pu  retrouver  le  tracé  de  l'analemma,  le 
diasôma,  les  différentes  portes  d'accès  du  koilon,  les  paradai, 
l'ensemble  des  bâtiments  de  la  scène,  et  lever  le  plan  complet  du 
théâtre.  »  Plan  =  pi.  XIX-XX,  coupe  =  pi.  XXIII,  phot.  = 
pi.  XXI-XXII.  /6  ,  p.  307  :  «  Je  n'hésite  pas  à  voir  dans  la  scène 
de  Termessos,  —  et  des  autres  théâtres  analogues,  —  la  tran- 
sition entre  la  scène  du  théâtre  grec  du  iv*  et  du  m»  siècle 
(Epidaure  ou  Délos)  —  issue  elle  même  du  logeion  de  bois  du 
v^  siècle.  — et  la  scène  proprement  romaine  (Athènes,  Aspendos).  » 
Ib.,  p.  312  :  «  Le  théâtre  de  Délos,  tant  par  les  dimensions  du 
proskénion  et  les  comparaisons  auxquelles  il  peut  donner  lieu  que 
par  les  renseignements  que  l'on  trouve  dans  les  inscriptions,  me 
paraît  donc  fournir  de  solides  arguments  en  faveur  de  l'existence 
du/og-eio/i.  »  Cf. Th.  Homolle*  (1894),  et  Xavarre,  Dionysos  (1895), 
p.  310-312. 

Réponse  de  Doerpfeld*  (1896),  p.  580  :  «  Le  plan  de  la  skénè,  et 
particulièrement  le  prolongement  de  la  colonnade  sur  les  quatre 
côtés  de  la  skénè  —  la  division  du  proskénion  avec  ses  panneaux 
peints  (irivaKeç)  en  trois  compartiments  qui  pouvaient  représenter 
trois  maisons  distinctes  —  enfin  la  mention  dans  les  inscriptions 
d'un  double  décor,  celui  du  bas  et  celui  du  haut,  —  sont  autant 
de  preuves  qu'à  Délos,  comme  en  général  dans  les  théâtres  grecs, 
les  acteurs  et  le  chœur  jouaient  ensemble  dans  Vorchestra.   » 


BIBLIOGRAPHIE  T'.M 

Cf.  BCH,  1894.  p.  1G7,  et  M.  Biebci-,  Tlit-ittrrwvscn  (li)20),  j».  28, 
fif?.  24-26,  pi.  12. 

M.  Replat  étudie  en  ce  moment  le  kuilon  et  Vnnulenimu  et 
M.  Vallois  la  scène  (Reo.  et.  /,••/•  ,  191'.).  \t.  247.  liCII.  i;»20.  p.  :W8, 
1921,  p.  534). 

Les  grandes  citernes  :  Avezou*  (1913),  p.  115,  fig.  1. 

2.  Gymnase.  Fouilles  de  G.  Fougères*  (BCH,  1891».  et  de 
A.  Plassart*,  en  1910-1911  {BCH,  1912  :  inscriptions). 

3.  Stade.  Fouilles  de  A.  Plassart*  en  1912  {BCH,  1910;  cf.  Ave- 
zou*,  1913,  p.  124  et  fig.  5). 

MM.  Replat  et  Pippas  ont  déblayé  une  partie  de  la  rue  qui 
reliait  le  hiéron  au  stade  (BCH,  1921.  p.  r)32). 

4.  Hippodrome.  M.  Replat  a  découvert  récemment  la  tribune 
au  nord-est  du  musée  {BCH.  1921.  p  532).  Il  a  aussi  reconstitué 
le  tracé  complet  du  mur  de  défense  élevé  en  69  av.  J.-C.  par  le 
légat  Triarius.  (Cf.  Avezou*.  1913,  p.  122  et  G.  Fougères,  C.  r. 
Acad.  Inscr.,  1918,  p.  368). 

5.  Palestre  du  Lac  et  Palestre  de  i;-riinit.  Avezou*  (191!î).  p.  120 
et  suiv.  : 

Palestre  de  granit  :  antérieure  au  m*  siècle  (p.  121,  fig.  4). 
Palestre  du  Lac.  Cf.  Ch.  Picard*  (1911),  p   855.  fig.  4-5. 

6.  Terrasse  des  lions.  G.  Leroux*  (1908)  :  on  a  trouvé,  en  1906, 
plusieurs  des  lions  archaïques  (jui  étaient  au  moins  neuf.  L'un 
d'entre  eux  avait  été  transporté  à  l'Arsenal  de  Venise  (fig.  3). 
Du  VII*  siècle  et  d'origine  naxienne  comme  le  sphinx. 

ni.  —  MUSÉE. 

a)  Marbres. 

Artémis  en  forme  de  Eôavov,  dédiée  par  Xicandra,  fin  du  vii"  s., 
trouvée,  en  1878,  près  du  temple  d'Apollon  :  Th.  Homolle*, 
BCH,  1879.pl.  I.  Cf.  Perrot-Chipiez.  VIII  (1903).  p.  148,  Duoati, 
A  rie  cl  ,  p.  159.  Transportée  au  musée  d'Athènes.  Staïs.  Guide, 
I  (1910),  p.  2. 

Niké  archaïque  dite  {BCH,  1901,  p.  496.  n.  1)  d'Arrhermos, 
VI*  siècle  ,  trouvée,  en  1877,  près  du  temple  d'Artémis.  Th.  Ho- 
molle*, BCH,  1879.  p.  393-399,  pi.  VI-VII.  Cf.  Perrot-Chipiez, 
VIII,  p.  299-307,  Ducati.  Arte  cl.,  p.  163  Musée  d  Athènes, 
Staïs,  I,  p.  5. 

Artémis  archaïque,  debout,  trouvée  en  juillet  1884  :  P.  Paris*. 
BCH,  1889.  pi    VII    Musée  d'Athènes,  Staïs.  1,  p.  13. 

Th.  Homolle*  {De  ant.  I).  sim.,  1885l  clas.se  les  statues  ar- 
chaïques d'Artémis  en  deux  séries  qui  se  placent  au  vu"  et  au 
v*  siècle  et  entre  lesquelles  s'ouvre  une  lacune.  Cf.  G.  Perrot*, 
Journ.  San  ,  18S7,  Perrot-Chipiez.  VIII.  p.  313-317,  Staïs,  I.  p.  13. 


792  BIBLIOGRAPHIE 

Têtett,  découvertes  et  publiées  par  Th.  Homolle*  :  1.  Apollon 
archaïque  (BCH,  1879,  pLVIII,  1880.  p.  35).  —2.  Déméter  voilée, 
du  iV  siècle,  trouvée  eu  1877  {BCII,  1879,  p.  516,  pi.  XVI, 
1880.  p.  38-41)  ;  musée  d'Athènes,  Staïs,  I,  p.  35  —  3  4.  Diony.sos 
barbu  (BCH.  1881,  pi  X).  —  5  Personnage  inconnu  Ub.,  pi.  XI). 
—  6.  Portrait  d'un  ami  ou  d'un  successeur  d'Alexandre  {BCH, 
1885,  p.  253.  pi.  XVII).  —  7.  Portrait  d'un  souverain  ou  d'un 
vainqueur  (/6..  pi.  XVI,  1).  —  8.  Dionysos  barbu  Ub  ,  pi.  XVI.  2)- 
Fragments  des  groupes  placés  aux  deux  acrotères  de  faîtes  du 
temple  des  Athéniens  Restaurations  de  Furtwângler*  (1882)  : 
à  l'ouest,  Eos  enlève  Céphale  (fig.  p.  338  -  Roscher.  I,  p.  1277)  ; 
à  l'est  Borée  enlève  Orithyie  (fig  p.  339  =  Roscher,  1,  p.  811). 
Guerrier  Trouvé  en  août  1882  (S.  Reinach^^  1889,  pi.  II). 
Musée  d'Athènes.  Staïs,  1.  p.  82. 

Conclusions  négatives  de  G.  Leroux*  (1910)  :  il  s'agit  d'un 
guerrier  galate  (casque  sculpté  sur  la  plinthe).  Xi  l'œuvre  d'Aga- 
sias  d'Ephèse  (S,  Reinach),  ni  l'œuvre  de  Xikératos  (P.  Wolters). 
Anonyme.  Une  tête  de  Galate  trouvée  à  Délos  après  1895 
(pi.  IX-X;  musée  de  Délos)  est  trop  petite  pour  ai^partenir  à  la 
statue.  (De  même  :  S  Reinach,  Reo.  arch.,  1909,  II,  p.  465-4G6). 
Une  autre  tête  de  Galate  découverte  en  190ô  dans  l'agora  des 
Italiens  (fig.  6-7  ;  musée  de  Délos)  diffère  à  tous  égards  de  la 
statue.  —  Hypothèse  nouvelle  de  J.  Six*  (BCH,  1913)  :  Myron  de 
Thèbes  à  Pergame,  v.  '240)  serait  l'auteur  du  guerrier  de  Délos. 

Diadiimène,  découvert,  en  août  1894,  par  L.  Couve*  {BCH. 
189.5  ;  Mon.  Piot,  1896;  :  la  plus  fidèle  de  toutes  les  répliques  con- 
nues du  chef-d'œuvre  de  Polyclète;  ir  siècle  ou  premières  années 
du  I"  siècle.  Musée  d'Athènes,  Staïs.  1,  p.  84. 

Athlète,  trouvé  en  môme  temps  que  le  Diiiduniène  :  L.  Couve, 
BCH,  1895.  p.  481-482,  fig.  12.  Haut.  2-"25.  Musée  d'Athènes, 
Staïs.  I.  p.  82. 

Jeune  fille  en  Artémis,  statue  acéphale  trouvée,  en  1894,  par 
L.  Couve*  (1895,  fig  11).  dans  la  maison  du  Diadumène.  C'est  là 
aussi  que  A.  Plassart*  a  décovivert  la  tête  en  1916  :  «  C'est  une 
mortelle  que  le  sculpteur  du  i*'''  siècle  avant  notre  ère  a  figurée 
avec  ses  attributs  divins  —  une  mortelle,  disons  mieux,  une  jeune 
morte...  Une  tombe  de  Rhénée  sans  doute  eût  dû  s'orner  de 
cette  effigie  juvénile,  à  l'expression  de  douce  et  mélancolique 
gravité.  »  (p.  356).  Musée  d'Athènes,  n"  1829. 

Statue  de  femme.  L.  Couve*  1895,  pi.  Vil  et  1S97,  pi.  XII 1)  : 
restes  de  polychromie  :  tunique  peinte  en  bleu,  manteau  en  rose, 
semelle  de  la  sandale  en  rouge,  cheveux  en  rouge-brun  assez  vif. 
Époque  hellénistique.  «  N'a  pas  de  sœur  plus  ressemblante  qu'une 


HIItLIOGIlAl'HIE  193 

(luelconque   dos    mignoiines   lij>;urinc'S   i\o   Tanagra.  i»    Miisf'f-    de 
Délos. 

Aplirudite  et   i'iin,  j^n-oujjc  en  marbre  de  l'aros  découvert  dans 
l'Etablissement   des    Poscidoniastes,    le    20    juin    1904.    Aucune 
réplique    exacte   :    M.    Kulard*    (1900,    pi.    XlIl-XVI).     Musée, 
d'Athènes. 

Muses  :  F.  Ma3'euce+-(;.  Leroux  (1007.  pi.  XV-XVI).  Musée  de 
Délos. 

Dionysos  assis:  L.  Rizard*-(j!.  Leroux  1907,  fig  20-21).  Musée 
de  Délos. 

Silènes  debout  ■  L.  Bizard*-G.  Leroux  (1907,  ])1.  X-XI).  Musée 
de  Délos. 

Héniklès  debout,  statuette  de  marbre  blanc.  Se  rattache  à  la 
tradition  lysippéenne;  cf.  Héraklès  d'Aequum  :  L.  Couve*  (1895, 
l'ig.  4|.  Musée  de  Délos. 

Hermès  déjeune  satyre:  buste  en  marbi-e  blanc  trouvé  par 
A.  Plassart*,  dans  l'habitation  D  à  l'est  du  stade.  Musée  de 
Délos.  fAvezou*,  1913,  p.  129,  fig.  9.) 

Deux  colonnes  surmontées  d'un  spiiinx.  Reconstitution  de 
MM.  Replat-Poulsen-Ilisom  au  moyen  de  fragments  conservés 
au  musée  de  Délos  (Tli.  lIomolle=i^.  1913).  Cf.  colonne  des  .Naxieus 
à  Delphes. 

Bas-relief  ootif  ù  Esruluiw,  trouvé  en  1889:  Doublet*  (1892, 
id.  VI). 

Bas-relief  se  rapportant  au  culte  des  Lares,  trouvé  à  l'agora  des 
Compétaliastes.  M.  Buiard*.  Peint.  (1908),  p.  45,  n.  2  .•  n  Pour  des 
raisons  d'ordre  historique,  le  bas-relief  que  reproduit  la  figui-e  14 
[cf.  p.  40-41]  semble  devoir  se  placer  aux  environs  de  l'année  100 
av.  J.-C.  Voir  Jouguet,  BC7/,  189W,  ]).  fiO  et  suiv.  ))  Mu.sée  de 
Délos. 

Bas-relief  se  rapportant  au  culte  d'Agathodaimon  :  M  Hulard* 
(1907,  fig  24)  :  Isis-Tyché,  Agathodaimon,  Sérapis.  Musée  de 
Délos. 

Deux  bas-reliefs  publiés  par  L.  Bizard*-C.  Leroux  1907. 
pi.  XIII  et  fig.  2:-i). 

Bas  relief  de  Rhénée.  .\L  Besnier  a  établi  qu'un  bas-relief  du 
musée  d'Aix  a  été  trouvé  vers  1705  à  Rhénée  (S.  Reinach,  Reo. 
arch.,  1913,  I,  p.  87). 

Le  cataloguo  des  reliefs  votifs  du  musée  de  Délos  h  éU'  confié 
à  M.  Demangel  {BCII,  1921.  j).  5:^.0). 

Neuf  ou  dix  marbres  ronscrnés  au  Lourre.  Miclion*  (1911  : 
Vlnopos  (pi.  X;  cf.  Collignon,  Se.  gr.,  II.  p.  43:<.  n.  2  :  «  sans 
doute  un  Alexandre  idéalisé  -),  v.  supr.  Tcles,  n'  fi\  une  statuette 


794  BIBLIOGRAPHIE 

de  femme  (fig.  1).  une  stèle  funéraire  de  P.  Licinius  Anius  (fig.  2i, 
deux  autels  (fig.  3-4),  un  et  probablement  deux  fragments  d'archi- 
tecture (fig.  5),  trois  inscriptions. 

b)  Vases  et  terres  cuites.  [Tous  les  vases  ti'ouvés  à  Rhénée 
par  StavropouUos  (1898-1900)  sont  au  musée  de  Mykonos.  Cf.  Per- 
rot-Chipiez,  IX.  p.  474-479.  L'éphore  Rhomaios  et  l'épimélètc 
Pippas  les  publieront  d'ici  un  an  ou  deux.  Cf.  Bull.  corr.  helL, 
1920,  p.  367,  n.  2.  —  Sur  un  grand  vase  à  figures  rouges,  M.  Val- 
lois  voit  la  fameuse  danse  sacrée  du  Yépavoç.  Cf.  Saglio,  Dicl., 
s.  v.  Délia,  n.  14.] 

Vases  archaïques.  Poulsen*-I)ugas  (1911): 

I.  Vases  géométriques  des  Cyclades  (fig.  1-49); 

II.  Vases  déliens  orientalisants  (fig.  50-66)  ; 

III.  Vases  méliens  (fig.  67-80). 

I  Fragment  damphore  funéraire,  étudié  par  Fr.  Poulsen*  (1909) 
et  par  Perrot,  IX,  p.  480-482. 

Vases  des  VII'  et  F/*  siècles.  Ch.  Dugas*  (1912)  :  P.  Roussel  a 
mis  au  jour,  en  1911.  dans  l'Héraeon,  «  une  quantité  considérable 
[cinq  cents  pièces  au  moins]  de  poteries  peintes  et  de  masques  en 
terre  cuite,  appartenant  aux  vu"  et  vi*  siècles  ».  Plusieurs  dédi- 
caces à  Héra.  Vases  corinthiens  de  beaucoup  les  plus  abondants. 
Quelques  vases  méliens  et  rhodiens.  Parmi  les  échantillons  de  la 
céramique  attique,  deux  lécythes  à  figures  noires  ;  1.  Ménades  ; 
2.  Achille  traînant  le  cadavre  d'Hector  (cf.  //.,  24,  16). 

M.  Dugas  doit  publier  cette  riche  collection. 

Vases  hellénistiques  :  lagynoi.  Étude  importante  de  G.  Leroux* 
(1913),  comptes  rendus  de  S.  Reinach  (Rev.  arch.,  1913,  I, 
p.  259),  de  Pottier  (Rev.  et.  g-r.,  1914,  p.  344)  et  remarques  de 
Ch.  Picard*  (1913). 

Vases  à  reliefs.  F.  Courby*  (1913)  :  fabriqués  à  Pergame  entre 
150  av.  et  env.  50  ap.  J.-C,  reproductions  de  vases  métalliques. 

Statues  de  terre  cuite.  Grande  tète  en  terre  cuite  trouvée, 
en  1910,  par  Ch.  Picard*  {C.  r.  Acad  Inscr.,  1911,  p.  871.  fig.  7-8), 
à  l'est  du  lac.  Cf.  Avezou*  (1913),  p.  131  :  fin  du  iir  s.  av.  J.-C. 

M.  Laumouier  doit  compléter  le  mémoire  de  M.  Déonna  sur  les 
terres  cuites  [BCII,  1921,  p.  535). 

Réchauds  en  terre  cuite.  F.  Mayence*  (1905)  :  plus  de  850  à  la 
fin  de  la  campagne  de  1904.  Deux  parties  du  réchaud  (exemplaire 
complet  dans  Conze,  lahrb.  d.  arch.  Instituts,  1890,  fig.  p.  137, 
cf.  Saglio.  fig.  3128-3130)  : 

a)  Inférieure  :  cylindre  évasé  par  le  bas  =  pied  =  réceptacle 
pour  cendres  ; 

b)  Supérieure  .foyer  =  récipient  hémisphérique,  profond  d'en- 
viron 20  centimètres  et  percé  de  trous  qui  augmentent  le  tirage. 


BIHI.IOGKAPIIIK  795 

Sur  le  bord  circulaire  :  trois  appendices  quadraiigulaires,  surface 
plane  à  l'extérieur,  saillie  obli(iue  vers  l'intérieur.  Supports  de 
réchauds  =:  les  appendices  munis  de  ces  saillies  intérieures  (plus 
de  600  à  Délos  en  lOO.")  ;  caisses  remplies  dans  les  magasins  du 
musée).  Décoration  :  têtes  mitrées,  couronnées  de  lierre,  surmon- 
tées du  foudre;  tètes  sans  couronne  de  lierre  ou  à  chevelure 
hérissée. 

Lampes.  \\ .  Déonna*  (1908)  :  sur  2.00O  environ,  une  dizaine  au 
plus  en  bronze  ou  en  plomb. 

c)  Bronzks. 

Tête  virile.  Trouvée  dans  la  palestre  de  granit,  le  13  sept.  11)12  : 
Ch.  Avezou*  (1913),  p.  130-132,  fig.  10.  Publiée  par  Ch.  Picard* 
(1920)  ;  portrait  d'homme  inconnu,  u"  siècle  av.  J.-C,  technique 
hellénique  —  Musée  d'Athènes,  n°  14612  Plâtre  au  musée  de 
Délos. 

Figurines  d'envoûtement.  Aux  31  figurines  déjà  connues, 
Ch.  Dugas*  (1915)  en  ajoute  4  en  bronze,  découvertes  à  Délos.  On 
peut  voir  aussi  au  musée  quelques  figurines  minuscules  en  plomb, 
au  cou  muni  du  carcan. 

Bas-relief  tTOU\é,  en  1908,  dans  la  fontaine  Minoé  :  F.  f'ourby*. 
Mon.  Piot,  1910,  pi.  VI.  Explication  nouvelle  de  R.  Val- 
lois*  (1921)  :  Artémis  Trupqpôpoç  allume^e  feu  de  l'autel  de  Dio- 
nysos. 

IV.  -   LÉGENDE  ET  HISTOIRE. 

a)  LÉGENDE  :  Hymn.  Hom.  à  Apollon,  éd.  Allen-Sikes  (  Londres, 
1904),  p.  70,  et  Callimaque,  ^  Délos,  éd.  Cahen  (Paris,  1922),  \k  66. 

6)  Histoire.  Elle  repose  surtout  sur  des  documents  éjiigra- 
phiques  (F    Durrbach*,  1912,  1921). 

Th.  Homolle-  (1887,  cf.  liCH,  1887,  p.  302)  :  archives  de  lin- 
tendance  sacrée  de  315  à  166  av,  J.-C. 

M.  Lacroix*  (1914)  :  architectes  et  entrepreneurs  de  314  à  24U 

G.  Glotz*  (1916)  :  prix  de  la  poix  (*)  :  40  dr.  le  métrète  en  279 
(invasion  dos  Celtes);  9  dr.  le  métrète  en  179  (bons  rapports  avec- 
la  Macédoine). 

F.  Durrbach*  (1916)  :  chronologie  des  archontes  déliens.  Dates 
extrêmes  pour  la  liste  de  Lysixéuos  à  Anektos  :  301  et  168. 

Ziebarth*  (1917)  :  durée  et  valeur  des  fondations  pieuses. 


\})  1.  iiuporlaiite  loi  qui  rcgleineiitait  la  \eiile  tlii  liois  et  «in  i-li.irl)i>ii 
(seconde  moitié  du  ni»  siècle)  niérile  aussi  d'être  eitee  :  ScHim-.K  Hi  TEn> 
BuU.  rorr.  hell..  I!»07.  p.   KM»3. 


796  BIBLIOGRAPHIE 

La  période  romaine  a  été  étudiée  sérieusement,  pour  la  pre- 
mière fois,  par  Th.  Ilomolle*  (1884).  Depuis  lors  la  question  a 
été  traitée  à  plusieurs  reprises,  entre  autres  par  J.  Hatzfeld* 
(1912),  mais  le  livre  de  P.  Roussel*  (1916)  offre  la  plus  riche  et  la 
plus  sûre  documentation  : 

Délos  devient  colonie  athénienne  en  166  av.  J  -C.  (Polybe, 
XXX,  20).  Son  ijort  est  déclaré  franc  :  1.  àréXeia  :  plus  de  taxes 
sur  les  étrangers,  libre  accès  de  l'agora  ;  2.  expulsion  des  Déliens. 

Traits  généraux  de  son  histoire  après  166  :  Strabon,  X,  5,  4; 
XIV,  5,  2 

I.  —  Population. 

u)  Athénienne:  clérouques  qui  ne  sont  pas  tous  pauvres; 
PouXri,  éKKXriaia,  prytanie,  proédrie,  comme  à  Athènes;  monnaie  de 
bronze.  —  «  Après  140  environ,  les  anciens  clérouques  ont  presque 
tous  disparu;  la  plupart  de  ceux  qui  leur  ont  succédé  ne  résident 
point  dans  l'île  d'une  manière  continue.  » 

b)  Xon  athénienne  :  1.  les  'Piu)aaîoi  :  très  nombreux  après  la 
ruine  de  Corinthe,  majorité  d'affranchis;  'EpiumoTai,  'AttoWuj- 
viaOTaî,  TToaeibujviaOTai,  Ko|UTT€Ta\iaaTa(.  —  2.  les  Eévoi  ou  "EWr^veç  : 
Koivov  Tûjv  Tupiuuv  'HpaK\eiaTuùv...,  tô  koivôv  BnpuTÎuuv  TToaeibuuviaaTuùv..., 
synagogue  juive,  association  gréco-égyptienne.  Les  Alexandrins 
et  les  Syriens  étaient  trfs  nombreux,  mais  ne  formaient  proba- 
blement pas  d'association  (aucune  dédicace) . 

II.  —  Administration  athénienne. 

1.  Epimélète  éponjme  et  annuel:  choisi  dans  les  meilleures 
familles;  àpxn  mal  définie. 

2.  Administrateurs  des  biens  sacrés  :  les  deux  hiéropes  men- 
tionnés dans  les  textes  de  la  fin  de  l'indépendance  ont  été  rem- 
placés par  un  collège  unique  de  deux  magistrats  qui  exerçait 
annuellement  l'une  et  l'autre  fonction  :  ém  Tr)v  qpuXoKrjv  tûv  iepôiv 
XPnMciTujv  et  ém  Tàiepci  (Homolle  admettait  :  deux  collèges  de  deux 
magistrats).  Contrôle  du  KexeipoTovriiLiévoçéTTiTriv  brmoaiav  rpdneZav, 
préposé  à  la  banque  publique. 

Revenu  des  propriétés  (Délos,  Rhénée,  Mykonos)  :  7,600  dr. 
en  179;  des  maisons  .sacrées  (pour  les  années  315-166,  cf.  S.  Moli- 
nier*,  1914)  :  503  dr  ,  en  282,  1,735  dr.,  en  179,  5,000  dr.,  en  156. 

3.  Epimélètes  de  l'emporion  (un  collège  de  trois  membres,  puis 
epimélète  unique);  Agoranomes  (trois,  puis  deux). 

4.  Un  gj'mnasiarque  et  deux  paidotribes. 

m.  —  Cultes  et  sacerdoces. 

1.  Divinités  helléniques  :  triade  apoUinienne ;  llestia,  Rome; 
Zeus  et  Athéna;  Dioskures-Kabires,  Héraklès,  Dionysos,  Her- 


BIBLIOGKAPHIE  797 

mes,  Pan;  Asklépios  ;  Aphrodite;  Déinéter.  Koré;  liera;  Agathe 
Tyché. 

2.  Divinités  étrangères  :  égyptiennes  (Siirapis  (<),  Isis,  Anou- 
bis;  Harpokratès),  syriennes  Hladad.  'A^vn 'AqppobÎT»!  'ATcip^aTiç) . 

3  Associations  (Héraklès  =  Melkaith  tyrien  ;  Poséidon  sémi- 
tique; eeôç  Ov|;iaToç  — Tahveh...  ;  Lares  Compitalos)  et  cultes  pri- 
vés (Agathodaimon,  Lares). 

IV.  —  Constriictiuns  de  Vépoquc  nthi'iuenne  (peu  de  marbre, 
mesquinerie I  : 

1.  Nouveaux  propylées;  2.  entrées  est  et  nord  du  hicron  ; 
3.  petit  sanctuaire  dionysiaque;  4.  temple  annexe  du  Kabeiron 
(101-100);  .").  remaniements  au  sanctuaire  du  C'yntlie;  (>.  j,M'ande 
partie  du  sanctuaire  égyptien  ;  7.  sanctuaire  syrien;  8.  remanie- 
ments au  gymnase;  9.  galerie  parallèle  au  stade  (111/100);  10.  por- 
tique annexé  au  portique  de  Philippe;  11.  agora  des  Italiens; 
12.  établissement  des  Poseidoniastes;  13.  maisons  (chronologie 
incertaine). 

V.  —  Catastrophes  de  88  et  de  69.  Décadence 

a)  En  88  :  Délos  se  déclare  pour  Rome,  contre  Mithridate; 
Athènes  veut  reprendre  l'île  (échec  d'Apellikon;,  Mithridate  la 
fait  saccager  (Paus.,  III,  23,  3)  ;  victoire  de  Sylla. 

6)  En  69  :  pillage  par  les  pirates  d'Athénodoros.  Mur  de  Tria- 
rius.  Victoire  de  Pompée  (Cic,  Pro  leg:  M  an.,  18l. 

c)  La  décadence  commence  dès  88.  Crise  commerciale  de  jiKis 
en  plus  forte.  ((  Il  est  incontestable  qu'une  petite  agglomération 
urbaine  a  existé  à  Délos  dans  les  premiers  siècles  de  l'ère  chré- 
tienne. » 

Construction  de  thermes  :  celui  de  l'Agora  du  Sud  au  milieu  du 
ir  siècle  ap.  .T.-C. 

Les  Athéniens  mettent  l'ile  eu  vente,  mais  il  ne  se  présente  pas 
d'acheteur  (Philostr.,  Vit.  Sophist.,  I,  23).  —  Paus.,  VIII,  33,  2  : 
f]  Af|\oç...  eprjMÔÇ  ^otiv  àvGpdcmjuv.  Cf.  IX,  34,  (!. 

H.  —  Ordre  alphabétique. 

E.  Aruah.i.o.n,  Rapport  sur  les  foiiHles  du  port  de  Di-lo.s,  liull  rorr. 

hell..  1896,  p.  428-445,  pi.  II-III  (=  plan). 
E.  Ardaim.on-H.  Convkut,    Carte  nrchèulo^ique  de  l'ilr  de  Délos 

levée  en  1S9H-1894.  Échelle  de  1  2,000. 
Charles  AvEZOU,  Fouilles  de  V Érule  friini^aise  d'Athènes  ù  Délos 


(1)  Poème  (le    Maiistas   sur  iiiic   inluiiiie  de  iiuiilui»  lilaiir  :  V.  Kiusskl*. 
Çidl.iUj.,  i>.  7l-a;i  fip.  1-2. 


79K  BIBLIOGRAPHIE 

(1909-1913),  Rev.  de  fort  ancien  et  moderne,  XXXIV,  1913, 
p.  113-132. 

Ch.  Avezou-Cu.  Picard,  La  palestre  et  le  mur  de  Triarius  à  Délos, 
Mélang-es  Holleaux  (Paris,  Picard,  1913),  p.  1-16,  pi.  I. 

A.  Bellot,  Carte  de  Vile  de  Délos  levée  en  1907  et  1908,  avec  un  com- 
mentaire explicatif .  Échelle  de  1  10,000.  État  d'avancement  des 
fouilles  au  mois  de  juillet  1908.  (Exploration  archéologique  de 
Délos  par  l'Ecole  française  d'Athènes,  introduction),  Paris, 
Fontemoing,  1909. 

Léon  Biz.\ud,  Fouilles  de  Délos.  Le  côté  oriental  du  Téménos 
d'Apollon,  I.  Description  des  ruines,  Bull.  corr.  hell  ,  1907, 
p.  471-503. 

L  BiZARD-G.  LiîROUX,  Id.,  II.  Monuments  de  sculpture.  Monu- 
ment chorégique  de  Karystios,  ibid.,  p.  504-525. 

Marcel  Bulard,  Aphrodite,  Pan  et  Eros.  Groupe  en  marbre, 
Bull.  corr.  hell.,  1906,  p.  610-631. 

—  Bas-relief  se  rapportant  au   culte  d'Agathodai- 

mon,  Bull.  corr.  hell.,  1907,  p.  525-529,  fig.  24. 

—  Peintures  murales  et  mosaïques  de  Délos,  Monu- 

ments Piot,  XIV,  Paris,  Leroux,  1908. 
Lucien  Cayeux,  Description  physique  de  l'île  de  Délos,  Paris,  1911. 
Ouvrage  accompagné  de  trois  cartes  :  I.  Carte  géologique 
dressée  en  1906  et  1908.  Échelle  de  1/10,000.  État  d'avancement 
des  fouilles  au  mois  de  juillet  1908.  {Exploration  archéologique 
de  Délos  par  l'École  française  d'Athènes,  introduction). 

II.  Carte  des  carrières  antiques,  id. 

III.  Carte  des  points  d'eau, id. 

J,  Chamoxard,  Théâtre  de  Délos,  Bull.  corr.  hell.,  1896,  p.  256-318, 
pi.  XIX-XXIIl. 
—  Fouilles   de   Délos.    Fouilles   dans  le   quartier  du 

théâtre,  Bull.  corr.  hell.,  1906,  p.  485-606. 
Chronique  des  fouilles  et  découvertes  archéologiques,  Délos,  Bull. 

corr.  hell.,  1920,  p.  398-399,  1921,  p.  531-535. 
H.  CoNVERï-E.  Ardaillon,  voir  Akdaillon. 

P.  L.  CouciiouD-J.  SvORONOS,  Le  monument  dit  «  des  Taureaux  » 
à   Délos  et   le  culte  du    navire    sacré,   Bull.    corr.  hell.,    1921, 
p.  270-294,  fig.  1. 
Fernand  Courby,  Sacrifice  à  Hécate,  relief  en   bronze  trouvé  à 
Délos,  Monuments  Piot,  XVIII  (Paris,   1910), 
p.  19-35,  pi.  VI. 
—  Exploration  archéologique  de  Délos,  Le  portique 

d'Antigone  ou  du  nord-est  et  les  constructions 
voisines,  Paris,  1912. 


BIBLIOGRAPHIE  799 

Fernand  Courby,  L'autel  de  cornes  ù  Délos,   Mélnn^-.'s  Ilolleau.x 
(Paris,  Picard,  1913),  p.  59-68. 

—  Vases  avec  reliefs  appliqués  du  musée  de  Délus, 

Bull.  corr.  hell.,  1913,  p.  418-442. 

—  Xotesur  la  date  du  portique  d'Antigune  à  Dêlos, 

Bull.  corr.  hell.,  1914,  p.  290-299. 

—  Notes  topographiques  et  chronologiques  sur  le 

sanctuaire  d'Apollon  délien,  Bull.  corr.  hell., 
1921,  p.  174-241,  pi.  I-VII. 
Louis  Couve,  Fouilles  à  Délos,  Bull.  corr.  hell.,  1S95,  p.  460-516. 

—  Diadumène,    Statue  de   marbre    trouvée    à    Délos, 

Monuments  Piot.  Ill  (Paris,    1896),  p.  137-153, 
pi.  XIV-XV. 

—  Note  sur  une  statue  de  femme  trouvée  à  Délos,  Rev. 

arch.,  1897,  II,  p.  23-27.  pi.  XIII. 
W.  Dkonxa,  Les  lampes  antiques  trouvées  à  Délos,  Bull.  corr.  hell., 

1908,  p.  133-176,  pi.  I-II. 
Chari-i;s    Diehi.,    Excursions    archéologiques    en    Grèce,     9*^   éd. 
(Paris,  A.  Colin,  1919).  p.  125-188  (Les  fouilles  de  Délos,  1873- 
1888). 
AViMiKi.M  DoERPFELD.  Le  théâtre  de  Délos  (communication),  Bull, 
corr.  hell.,  1894,  p.  167-168. 
—  Le  théâtre  de  Délos  et   la  scène  du  théâtre 

grec,  Bull.  corr.  hell.,  1896,  p.  563-580. 
G.  Doublet,  Bas-relief,  Bull.  corr.  hell.,  1892,  p.  148-150,  pi.  \l . 
Charles  Dugas,  Un  trésor  céramique  à  Délos,  Rev.  de  fart  ancien 
et  moderne,  XXXI,  1912,  p.  338-352. 

—  Figurines  d'envoûtement  trouvées  ù  Délos.  Bull. 

corr.  hell,,  1915,  p.  413-427. 
Ch.  Dugas-Fr.  Poulsen,  voir  Poulsen. 
Félix  Durrbach,  Fouilles  de  Délos.  Le  portique  Tétragone,  Bull. 

corr.  hell  ,  1902,  p.  480-553.  pi.  II-III. 

—  Inseriptiones  Dell  dans    Jnscripliones  graecae, 

XI,  2,  Berlin,  1912. 

—  La  chronologie  des  archontes  déliens,  Bull.  corr. 

hell.,  1916,  p.  298-352. 

—  Choix  d'inscriptions  grecques  de  Délos,  avec  tra- 

duction et  commentaire,  t.  1.  l""  fasc.  Pai'is, 
Leroux,  1921. 
G.  Fougères,  Fouilles  de  Délos,  Bull.  corr.  hell.,  1887.  p.  246  24S. 

—  Fouilles   au   gymnase   de    Délos,    Bull.  corr.   hell., 

1891,  p.  238-288. 
A.  Fi-RTWANGLER,  Von  Dclos.  Arch.  Zeil..  XL.  1SS2.  p.  321-367. 


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logique  de  Délos  par  r Ecole  française  d'Athènes,  introduction), 
Paris.  Fontemoing,  1910. 

G.  Glotz,  L'histoire  de  Délos  d'après  les  prix  d'une  denrée,  Rev. 
des  études  grecques,  1916,  p.  281-325. 

J.  Hatzfeld,  Les  Italiens  résidant  à  Délos,  Bull.  corr.  hell.,  1912, 
p.  5-218. 

—  Les  dédicaces  des  portiques  de  l'Agora  des  Italiens 

à    Délos,   Bull.    corr.    hell.,    1921,    p.    471-486, 

pi.  XVIII-XXV. 
Hauvette-Besnaui.t,  Fouilles  de  Délos.   Temple  des  dieux  étran- 
gers, Bull.  corr.  hell.,  1882,  p.  295-352,  470-503. 
Th.  Homoli,e,  Statues  trouvées  à  Délos,  Bull.  corr.  hell.,   1879, 

p.  99-100. 

—  Sculptures  décoratives  provenant  des  frontons  d'un 

temple,  ibid.,  p.  515-526,  pi   X-XII. 

—  Sur  quelques  monuments  figurés  trouvés  à  Délos, 

ibid.,  p.  393-399  et  1880,  p.  29-43. 

—  ,  Fouilles  exécutées  à  Délos,  Rev.   arch.,    1880,   II, 

p.  85-95,  pl.  XV. 

—  Statue  de  Gains  Ofellius,  Bull.  corr.   hell.,    1881, 

p.  390-396,  pl.  XII. 

—  Notes  sur  trois  têtes  de  marbre  trouvées  à  Délos, 

ibid.,  p.  507-511,  pl.  X-XI. 

—  L'île  de  Délos,  Bull,  de  la  Soc.  de  géogr.  de  l'Est, 

1881,  p   13-36. 

—  Les  fouilles  de  Délos,  Monuments  grecs,  t.  I,  n"  7, 

Paris,  1882  [1879]. 

—  Les    Romains    à    Délos,     Bull.    corr.    hell.,    1884, 

p.  7.5-158. 

—  L'autel    des    cornes    à    Délos,    ibid.,    p.    417  438, 

pl.  XVIl-XTX. 

—  Note  sur  irois  têtes  de  marbre  trouvées  h   Délos, 

Bull.  corr.  hell.,  1885,  p.  253-257,  pl   XVl-XVIl 

—  De  antiqui.ssimis  Dinnae  simulacris  Deliacis,  thèse, 

Paris,  1885. 

—  Les  Archives  de  l'Intendance  sacrée  ù  Dé/os  (315-166 

av.  J.-C),  Paris,  Thoriii,  1887. 

—  Rapport  sur  une  mission  archéologique  dans  l'île 

de    Délos,    extr.     des     Archives    des    Missions, 
IIP  série,  t.  13,  Paris.  1887. 

—  Sur  une  base  de  statue  portant  une  signature  d'ar- 

tiste et  décorée  de  reliefs,  Bull.  corr.  hell  ,  1888, 
p.  463-479,  pl.  XIIT. 


BIHLIOGKAPHIF.  801 

Tu.  HoMOLLi;,  Les  travaux  de  l'École  frunçuiae  d'Alhènea  dans 
Vile  rfe />>é/o.s- (Coiifércuces  de  l'exjjosition  univer- 
selle internationale  de  1889),  Paris,  1890,  i>l.  I 
(plan). 

—  s.    V.   Délia,   Darembkrg-Saglio.    Dirl  ion  nuire  des 

antiquités,  II.  1,  1892,  p.  55-59. 

—  Le  théâtre  de  Délos  (communication),  liull.    corr. 

hell.,  1894.  p.  162-167. 

—  Comptes   rendus  de    V Académie  des    inscriptions, 

30  mai  1913.  Cf.  Reo.  arch.,  1913,  11,  p.  120 
A.   Jardk,  Fouilles  de    Délos-,   Bull.    corr.  hell.,    1905,    p.    5-54  : 
I.    Le   quartier    marchand    au    sud    du    sanctuaire 
(pi.  V-A'II).  11.   Le  magasin  des  colonnes  (pi.   Vlll- 
Xbis)   m.  La  maison  de  Kerdon  (pi   XI-XII;. 
—         Fouilles  dans  le  quartier  marchand,  Bull,  corr    hell., 
1906,  p.  632-664,  pi.  XII. 
M.  Lairoix,  Les  architectes  et  entrepreneurs  à  Délos  de  314  à  240, 

Reo.  philol..  1914,  p.  303-330. 
A.  Lebègue,  Recherches  sur  Délos,  thèse,  Paris,  1876. 
G.  Leroux,  Les  lions  de  Délos,  Rev.  de  l'art  ancien  et  moderne, 
XXIII,  1908.  p.  177-186. 

—  Exploration  archéologique  de  Délos,  La  salle  hypo- 

style,  Paris,  1909. 

—  Le  guerrier  de  Délos,  Bull.  corr.  hell..   1910,  j).  478- 

500. 

—  Lag-ynos.  recherches  sur  la  céramique  et  V art  orne- 

mental hellénistique,  Paris,  Leroux    1913. 
G.  Leroux-L.  Bizard,  voir  Bizaru. 
G.  Leroux-F.  Mavexce,  voir  Mavkxce. 
F.  Mayence,  Fouilles  de  Délos,  Les  réchauds  en  terre  cuite,  Bull. 

corr.  hell.,  1905,  p.  373-404. 
F.  Mayence-G.  Leroux,  Remarques  sur  quelques  statues  de  Délos, 

Bull.  corr.  hell.,  1907.  p.  389-419,  pi.  XV-XVl. 
Etienne   Michon,   Les    marbres   antiques  de    Délos  cou  serrés   un 

musée  du  Louvre,  Bull.  corr.  hell.,  1911,  p.  288-349. 
Sylvain  Molinier.  Les  «  Maisons  sacrées  »  de  Délos  au   ifiiij>s  de 

l'indépendance  de  l'île  {3\:S-\m  ô  iiv.  J.-C),  Paris,  .Mcan.  1914. 
J.  Paris,  Contribution  à  l'étude  des  ports  antiques  du  monde  g^rec, 
Bull.  corr.  hell.,   1916,  p.   5-73  :   II.   Les  établissements  mari- 
times de  Délos. 
Pierre  Paris.  Fouilles  de  Délos.  .Mmsons  <nt   II'  siècle  av.  J.-C, 
Bull.  corr.  hell.,  18S4.  p.  473-496. 
—  Statue  archaïque  de  Délos,  Bull.  corr.  hell.,    1889, 

p.  217-225. 

51 


802  BIBLIOGRAPHIE 

Georges   Perrot,    Les   statues   de   Diane  à   Délos.  Journal  des 

Savants,  1887,  p.  104-113,  125-135,  229-240. 
Ch.  Picard,  Travaux  exécutés  dans  Vile  de  Délos  pendant  Van- 
née i9l0.  C.  r.  Acad.  Inscr.,  1911,  p.  845-877. 

—  Questions  de   céramique   hellénistique,    Rev.    arch., 

1913,  II.  p.  161-192. 

—  Fouilles  de  Délos  (1910),  Observations  sur  la  société 

des  Poseidoniastes  de  Bérytos  et  sur  son  histoire, 
Bull.  corr.  helL,  1920,  p.  262  311. 

—  Portrait  d'homme  inconnu.  Monuments  Piot,  XXTV 

(Paris,  1920),  p.  83-100,  pi.  III-IV. 

—  Exploration  archéologique  de  Délos,  L' établissement 

des  Poseidoniastes  de  Bérytos,  Paris,  1921. 
Ch.  Picard-Ch  Avezou,  voir  Avezou. 

A.  Plassart.  Fouilles  de  Délos.  Inscriptions  du  gymnase.  Bult, 
corr.  hell.,  1912,  p.  387  435,  661-666.  pi.  V  VII. 

—  La  synagogue  juive  de  Délos,   Mélanges  Holleaux 

(Paris,  Picard.  1913).  p.  201-215.  pi.  Y.  XII. 

—  La  synagogue  juive  de  Délos,  Rev.  biblique,  1914, 

p.  523-534. 
—  Fouilles  de  Délos.   Quartier  d'habitations  privées  à 

Vest  du  stade,  Bull.  corr.  hell.,   1916,  p.  145-256, 
pi.  V-VII  (plan). 

—  Fouilles  de  Délos,  Statue  d'une  jeune  fille  représentée 

en  Artémis,  Bull.  corr.  hell.,  1916.  p    353-356. 

Frederik  Poulsen,  Fragment  d'un  grand  vase  funéraire  décou- 
vert à  Délos,  Monuments    Piot.    XVI  (Paris.   1909).    p.    25-37» 

pi   III. 

Fr.  Poulsen-Ch.  DiiGAS.  Vases  archaïques  de  Délos,  Bull.  corr. 
hell.,  1911,  p.  350-422. 

Gerhardt  Poulsen.  Note  sur  la  couverture  du  sanctuaire  dit  des 
Taureaux  à  Délos,  Mélanges  Holleaux  (Paris,  Picard,  1913). 
p.  225-232. 

G.  PouLSKN-R  Vali.ois,  voir  Vallois. 

A.  .T.  Reinach,  La  base  aux  trophées  de  Délos  et  les  monnaies  de 
Philippe  Andriskos,  Journal  international  d'Archéologie 
numismatique,  XV,  1913,  p.  97-142. 

Salomon  Reinach,  L'Jnopus  et  le  sanctuaire  des  Cabires,  Bull. 
cor/-.  /leZ/..  1883,  p.  329-373. 

—  Fouilles  de  Délos.  I.  Temple  des  Poseidoniastes 

ibid.,  p.  462-464.  II.  Statues,  ibid.,  p.  464-466. 

—  Monuments  figurés   de  Délos,  Bull.  corr.  hell. y 

1884,  p.  167-187. 


BIBLIOGRAPHIE 


803 


Salomon  Rkinach,  Le  guerrier  de  Délus  el  le  Guiilois  bleasé  du 
Louvre,  Bull.  corr.  Iiell.,  1889,  p.  113130, 
pi.  I-II. 

—  Antiquités   découvertes   au    tliéâtre    de   Délos, 

ibid.,  p.  369-378,  pi.  XIl-XIII. 

—  Le  colosse  d'Apollon  à  Délos,  Bull.  corr.  hell., 

1893.  p.  129-144,  pi.  V-Vl. 
Pierre  Roussel.    Fouilles   de  Délos,    C.   r.   Acud.    In.scr..    1910, 
p.  289-314,  521-524. 

—  Hestia    à    Vomphalos,    Rev.    arch  ,    1911,    II, 

p.  86-91. 

—  Règiements  rituels,  Mélanges  Holleaux  (Paris, 

Picard,  1913),  p.  265-279. 

—  Les    cultes    égyptiens    à     Délus    du    III^    au 

I""  siècle  av.  J.-C,  Paris,  Fonteraoing,  1916. 

—  Délos,  colonie  athénienne,  Paris,  Fonteraoing, 

1916. 
V.  VON  SCHOEFFER,  De  Dell  insulae  rébus,  Berliner  Studien,   IX, 
1889. 
—  s.  V.  Delos,  Paui-y-Wissowa,  Real  Encyclo- 

pédie, IV,!1901,  col.  2459-2502. 
J.  Six,  Myron  de  Thèbes,  Bull.  corr.  hell.,  1913,  p.  359-377. 

J.   SVORONOS-P.  L.  COUCHOUD,  VOir  COI'CIIOUD. 

R.  Vallois,  Le  bas-relief  de  bronze  de  Délos,  Bull.  corr.  hell., 

1921,  p.  242-269,  fig.  1-2. 
R.    Vallois-G.   Poulsen,    Exploration    archéologique   de    Délos, 

Nouvelles  recherches  sur  la  salle  hypostyle.  Paris.  1914. 
Erich  Ziebarth,  Delische  Stiftungcn.  Hermès.  1917,  p.  425-441. 

Mars  1922.  H.  Phii.ippart. 


PÉRIODIQUES 


INDEX  SOMMAIRE 


Linguistique.  —  7,  13,  14. 
Philologie.  Généralités.    -  6,  14. 

—  indo-européenne.  —  7,  13. 

—  grecque.  —  5,  7,  9,  12,  13,  14,  l(i,  18,  24,  32,  34. 

—  latine.  —  7,  9,  13,  14.  15,  18,  32,  33,  36. 

—  espagnole.  —  14,  34. 

—  française.  —  6,  14,  19,  30,  33. 

—  italienne.  —  32.  33. 

—  roumaine.    -  4. 

—  germanique  (gén.).  —  7.  13,  36 

—  allemande.  —  3,  7,  12,  36 

—  néerlandaise.   —  G.  30 

—  Scandinave.  —  36. 

—  slave.  —  4,  7,  24. 

Littérature.  Généralités    —  6,  12,  13.  16,  19,  27. 

—  grecque.  —  7.  9,  12,  13.  14,  15,  16,  18,  32,  34. 

—  latine.  -  7,  9,  12.  13,  15,  16,  18,  32,  34. 

—  latine  du  moyen  âge  et  des  temps  modernes.  —  1,8, 

12,  13,  15.  16,21,27.  34. 

—  espagnole.  —  27,  35. 

—  française.  —  2   6,   12,  14,   17.  19,  22.  23,  25.  27.  28, 

31,  32.  35. 

—  italienne.  —  2.  8,  12.  13,  27. 

—  portugaise.  —  22. 

—  allemande   —  3.  12,  17.  27.  36. 

—  anglaise.  —  13.  14.  17,  19.  21.  2:<,  27.  34. 

—  néerlandaise.        2.  6,  27,  35. 

—  Scandinave.  —  27 

—  slave.  —  2,  23.  24.  27.  30. 


806  PÉRIODIQUES 

Histoire.  Généralités.  —  11,  22. 

—  de  l'antiquité.  —  5,  9,  10,  16,  24,  28,  32,  33,  34. 

—  du  moyen  âge.  —  1.  2,  10.  11,  20,  21,  28,  29,  30. 

—  moderne.  —  1,  2,  4,  8,  10,  11,  20,  21,  22,  26,  29,  30,  31, 

35. 

—  contemporaine.  —  3,  11,  20,  22,  25,  26,  27,  29,  .30,  31. 

—  économique  et  sociale.  —  9,  10,  20,  21,  23,  26,  29,  30,  31. 

—  des  mœurs.  —  1,  9,  10,  16,  17,  18,  21,  22,  27,  30,  31. 

—  des  sciences.  —  1,  2,  12,  15,  20,  22,  26,  36. 

—  de  l'art.  —  5,  22,  25,  27,  35 
Archéologie.  —  5,  15,  16,  36. 

Autres  sciences  auxiliaires  de  l'histoire.  —  1,4,  12,  15,  18,  30. 


1.  —  Annales  de  la  Société  d'Émulation  de  Bruges.  Revue 
trimestrielle  pour  l'étude  de  l'histoire  et  des  antiquités  de 
la  Flandre.  LXV,  1915-1922. 

A.  De  Pookter  et  M.  Alliaume.  Catalogue  des  manuscrits  mathé- 
matiques et  astronomiques  de  la  Bibliothèque  de  Bruges.  13. 

A.-C.  De  Schrevel.  Le  traité  d'alliance  conclu  en  1339  entre  la 
Flandre  et  le  Brabant  renouvelé  en  1578.  51. 

A.  De  Poorter.  Poésies  latines  du  moyen  âge  à  la  Bibliothèque 
de  Bi'uges.  113. 

E.  Coppieters-Stochove.  Le  ])oêle  du  Service  des  échevius 
d'Ypres  tués  en  1303.   127. 

V.  PiL.  De  laatste  jaren  der  abdij  van  Zonnebeke.  131. 
Bibliographie    de    l'histoire    de    l'ancien    Comté    de    Flandre. 
[1914-1922].  1*. 

2.  —  Nuova  Antologia.  LVII,  1922. 
CCXIX.  —  N.  Tamassia.  Per  il  VII  centenario  dell'   Universita 

di  Padova.  12. 
T.  Mantovani.  Paolo  Ferrari.  Xel  centenario  délia  nascita.  44. 
G. -P.  GoBBi.  La  casa  e  la  villa  di  Alessandro  Manzoni.  58. 
L.  Landucci.  Il  settimo  centenario  dell'  Univei'sita  di  Padova. 

107. 

F.  Picco.  Italianisants,  che  scompaiono  :  Emile  Picot.  148. 
N.  TcHiLEPE.  Vasoff  e  la  letteratura  bulgara.  154. 

G.-N.  Garibaldi.  Rievocazioni  storiche  :  Cecco  Angiolieri.  160. 

G.  Mexasci.   Pierre  de  Nolhac.  222. 
L.  Frati.  Casanova  a  Bologua.  244. 

CCXX.  —  C.  Ricci.  Giacomo  Leopardi  a  Ravenna.  3. 
G.  ijALisTi.   L'attentato  di  Anagni  e  una  laude  di  Jacopone  da 
Todi.  71. 


t>ÉRIODIQUES  807 

C.  Levi.  La  figura  del  «  Giornulista  »  nel  teatro  italiano.  110. 

F.  Bastiaanse.   Caraterri   e   figure   délia   leLteratura    luoderua 
olaudese.  145. 

3.  — Archiv  ftir  ôsterreichische  Geschichte.   109,  1922. 
J.  Tarnellkr    Die  Hofuameii  ini  Unteru  Eisacktal.  1. 
M.  Ledkrkk.  Ileinrich  Joseph  von  Collin  uud  sein  Kreis.  15;{. 
V.  BiBL.   Die  Religionsreforniation  K     iiudolfs  II,  in  Oberuster- 

reich.  373. 
M.  HussAREK.   Die  Verliandlung  des  Konkordats  vom  18.  August 

1855   447. 

4    —  Arhiva.  XXIX,  1922. 
I.  Bârbulescc.  Nasterea  individualituliilimbii  romînesielemeutul 

slav.  457. 
A.  ScRiBAX.  Edmologii  roniiuesti   475 

G.  GhIb.ïnescu.  Divanurile  domnesti  din  Moldova  si  Munteuia 
din  secolul  xvii-a.  1686-1692.  478.  ' 

G.  Pascu.  Axintie  Uricariul  »i  Xeculai  Costin.  489. 

M.  Stefànescu.  Toponimice  rominesti  eu  termiuatiunea  —  âuli. 
499. 

5.  —  Bulletin  de  Correspondance  hellénique.  XIjVI,  1922. 

A.   Philadelpheus.   Bases  archaïques  trouvées  dans  le  mur  de 

Théiuistocle  à  Athènes.  1. 
P.  Peudrizet.  Etudes  amphij)olitaines.  .36. 
li.    Dananget.    Fouilles    de   Délos.    Un    sanctuaire    d'Artémis- 

Eileithyia  à  l'est  du  Cynthe.  58. 
R.  V.   L'  «  Agalma  »  des  Dionysies  de  Délos,  94. 
L.  Renaudin.   Vases  i)réhelléniques  de  Théra  à  l'École  française 

d'Athènes.  113. 
A.  Salac.  ZEYI  KAIIOI    160 

Ch.  Picard.   Un  oracle  d'Apollon  Clarios  à  Pergame    190. 
E.  CucQ.   L'inscription  bilingue  de  Délos  de  l'an  58  avant  J-C. 

198 

6.   —  Leuvensche  Bijdrag-en    XIV,  1922. 
J.   Kt,i:yxt.iexs  et  .)     Corxelissex.  Collacie   uit  den   Kriug  der 

Moderne  Deiwtie.  1 . 
B -M.  Woodbridce    Le  mélange  coupable.  10. 
P.  Marciiot    L'idiotisme  wallon.  Ci  n'est  qu'eu-  boluns  ou  qu'eir 

et  but  uns  ou  qu';)  cir  butons.  13 
J.    Mansiox.  De  huidige  stand  van  iiel  toponymisch  ouderzoek 

vooi-al  in  België.  15 
Bijblad.  —  L.  Grootaers.  1.  Dialectisch  kleingoed.  2.  Bak  taud. 

3.  Xavel.  4.  Eigenaai'dige  samenstellingen.  1. 
L.  (Jrootaers.  Taalgeographisch  onderzoek.  4. 

—  Phonetica.  Uitspraakleer  eu  spreekonderwijs.  25. 


808  PÉRIODIQUES 

7.  —  Indogermanische  Forschungen.  XL.  1922. 
N.    VAN  Wyck    Zum  baltisclien  und  slaviscben  Akzentverschie- 

bungsgesetz.  1. 
H.  Reichei.ï.  Die  Labiovelare.  40. 

E.  Fraexkel.  Griecbisches,    Lateinisches    und   Baltisch-Slavis- 
ches.  81. 

A.  Nehring.  Die  Seele  als  Wasserblase.  100. 

A.  Debrunnek.  Homericall,  und  III.  107. 

J.-B.  Hoffmann.  Nochmals  passiviscbes  amantissinuis.  112. 

M.  Leumann    Das  lat.  Suffix  — Imciis.  116. 

G-  Neckel.  Die  dreisilbigen  Akzentlypen  des  Germaniscbeu.  123. 

V.    Grienberger.    Ortsnamenmaterial    und   Spracbvergleicbung. 

135. 
M.  Vasmer.  Die  Flexion  von  altbulg.  kyj::  'qui,.  139. 
G.  Iljinsky.  Kirclienslavisch  ovostz 'Frucbt,.  144. 
V   D.  Ostexsacken   Das  litauiscbe  langvokalische  Priiteritum  im 

seinen  Verbaltnissen  zum  Infiiiitiv  und  Pi-iisens.  145. 

F.  Krcek.  Talokus  bei  Bretkuu.  160. 

E.  KiECKERs    Imperativisches  in  indikativiseber  Bedeutung  im 

Xeubochdeutscben.  160. 
R.  Back.  Meiiiziniscb-Spraclilicbes.  162. 
O.  Behagel.  Die  2  Pers.    Sg.   Ind.  Priit.   st.  Flexion  im  West- 

germ.  167. 

8.  —  Giornale  storico  de  la  letteratura  italiana 

LiXXIX,  1922. 

R.  Oktiz.   La  materia  epica  di  cielo  classico,  nella  lirica  italiana 

délie  origini.  1. 
Ci,.  Gatti.   Gli  scritti  di   Veronica   Giviliani.  Il  dramma  di  un' 

anima  religiosa.  161. 
Fer.  Nero.  11  "  De  sanetis  »  et  la  critica  francese.  219. 
P.  Carli   Guido  da  Montefeltro  nell'  episodio  dell'  Inferno  dan- 

tesco.  264. 

G.  Jaxxone.  Xoterelle  dantcscbe  di  .\lessandro  Poerio  290. 
LiXXX,  1922.  —  L.  DI  Francia.  Alla  scoperta  del  vero  Ban- 

dello(ll).  1. 
U.  BENATri.  Il  Frugoni  o  i  Rezzonico.  Letteratura  e  politica  in 

una  corte  italiana  del  settecento.  95. 
L.  CiiiAPPELLi.  Cino  da  Pistôia  di  parte  «  Bianca  ».  120. 
F.  Patetta.  Il  viaggiatore  torinese  Faeino  Corri  e  la  sua  descri- 

zioni  del  sepolcro  di  Dante.  13.3. 

9.  —  Hermès.  LXXV,  1922. 
0.  Robert.  Apboristiscbe  Bcinerkungen   zu  den    Ekklesiazusen 

des  Aristophanes.  321. 


PÉKIODIQI  ES  HOU 

R.  Reitzenstkin.   Philologisclie   K.leiiiifj:keiten,  ")    Vax    Wovw/.  uud 

CatuU.  357. 
F.  Jacoby.  \9.  KAAAI0YEIIA.  3GB. 
L.  Webkk.  Perikles  sainische  Leiclienrede.  375. 
M.  WEi.iiMANN.  Der  Verl'a.sser  des   .Aiionyinus   Loiidiniciisis.  39tj. 
F.   Graei-'E.   Kleine    Studien    zur     Mariiiej^escliiclite     des    Alter- 

tums.  430. 
O.   ScHRODER.    Keitnige  zur   Wicdcilierstolluiif»;    des   Hyperides- 

textes.  450. 
K.  MuNSCHER.  Zu  Deiuosthenes.  465. 
St.  Brasloef.  Zum  Pap.  liai.  1,  219  sq. 
J.  G.  E.  HoMTius.  Hipjnas  oder  Ilipparchos.  475. 
O,  Weinreich.  Zu  Ptolemaios  Chenuos  VIT,  1.  479. 
10.  —  Hespéris.  Archives  berbères  et  Bulletin  de  l'Institut 

des  Hautes  Etudes  marocaines,  I,  1921. 
Brunot   Noms  de  récipients  à  Rabat.  IM. 
MiCHAUx-BEr.i,AiRE.    Essai    sui-   l'iiistoiie    des    confréries   niaro- 

caiues    141. 
Renaud.  Recherches  historiques  sur  les  épidémies  au  Maroc.  La 

peste  de  1799.  IGO. 
Laoust.  La  littérature  des  Berbères.  194. 

Id.      Noms  et  cérémonies  des  feux  de  joie  chez  les   Berbères 

du  Haut  et  de  l'Anti-ALlas   253,  387. 
Gour.VEN.    Notes  sur   les    origines   anciennes    des    Israélites   au 

Maroc.  317. 
HuGUET.  Le  diplomate  Chénier  au  Maroc  (1767-1782).  343. 

11.  —  History.  N.  S.,  VII,  1922. 
A. -F.  PoLi.AKi).  .Vu  apology  for  liislurical  i-esearch.  161. 
N.  RoDOLico.  The  struggle  for  the  right  of  association  in  four- 

teeuth-century  Florence.  178 
Historical  Revisions. 

XXII.  —  J.-A.  Wii.MAMsoN.  The  Pilgrim  Fathers.  196. 

XXIII.  —  G. -M.    Tkevklyan.    The    uumber   of   casualties  at 
Peterloo.  200. 

12.  —  Neue  Jahrbûcher  fur  das  klassische  Alterlum. 
XXV,   1922. 
J.  Ilberg.  llermann  Diels.  2.'i3. 

H.  DiEEs.  llimmels   und  Hollenfahrten  von  llonier  liis  l)antc.  239. 
K    BiRDACH.  Die  Lehre  des   Platonischen  Tiinaïos    40  H)  von  der 

kosmischen  Stellung  derErde.  254. 
H    WocKE.  Dcr  Aekernianu  aus  Bohnieu.  279. 
A.  Nathaxskv.  Spitteler  und  die  AnliUc.  288. 
Fr    MiiNZEU.  Otto  Seeck:  Olto  Mirschfeld.  302 


810  PÉRIODIQUES 

A.  ScHEiNDLER.  Die  Théorie  der  Widerspriiche  in  der  hohereu 

Homerkritik.  307. 
K.  Hartmann.  Eskimos  in  der  autiken  Literatur  ?  309. 
E.    Edelmann.    Kleists    Amphitryon    und     sein    Verhâltnis   zu 

Molière.  310. 
A.  KÔRTE.  Griechische  Verskunst.  313. 
Pr.  Drexel.  Altes  und  neues  von  Tropaeum  Traiani.  330. 
E.  Castens.  Wilhem  Meisters  theatralische  Sendung.  344. 
E.  Henning.  Das  Eridanusriitsel.  364. 

13.  —  American  Journal  of  Philology,  XLIII.  1922. 
R.-J.  Deferrari.  St-Augu-stine's  metliod  of  composing  and  deliv- 

ering  sermons.  97,  193. 
A. -G.  Laird.  When  is  generic  M  H  particular?  124. 
E.-W.  NiCHOLS.  Single  word  versus  phrase.  146. 
F. -A.  Wright.  Two  passages  in  Pindar.  164. 
W.-F.  Ai-BRiGHT.  The  origin  of  tlie  name  Cilicia.  166. 
G.-B.  DoLSON.  Emprisoned  English  authors  and  the  Consolation 

of  Philosophy  of  Boëtius.  168 
E.-II    Tutti, K   The  dcrivate.s  of  sanskrit  ïïAvj.  170. 
A.  Roseth.  Die  Eutstehung  des  absoluten  Infinitivs  im  Griechi- 

schen.  220. 
H.-C.  LiPSCOMB.  Virginia  Georgics.  228. 
P.  Haupt.  Biblical  studies.  238. 
K.  Allen.  The  Fasti  of  Ovid  and  the  Augustaii  propaganda.  250. 

14.  —  Neuphilologische  Mitteilungen    XXIII,  1922. 
E.  Oehmann.  Hermaun  Paul  in  memoriam.  1. 

H.  Almark.  English  in  our  secundary  schools.  3. 

L    Spitzer.  Zu  aNeuphilologische  Mitteilungeu  ».  XXll.  113-117, 

Entgegnung.  31. 
Ph.-A.  Becker.  Clément  Marot  uud  Lukian.  57. 
L.  Spitzer.  Wortmi.szellen  :  enclenque,  esciielh,  vecancanilla.   85. 
J.  Brûch.  Wortmiszellen  :  balai,  biais,  blond.  90. 

15.  —  Le  Musée  belge.  XXV,  1922. 
A.  Delatte.  L'Atlantide  de  Platon.  77. 
P.  Graindor.   Une  stèle  funéraire  béotienne.  95. 
P.  Rolland.  Une  inscrijjtion  romaine  de  Tournai.  101. 
J.  DoBiAS.  Prétendues  inscriptions  relatives  à  Dulgubni.  109. 
P.  Marchot.  Noms  de  lieux  belgo-romains  dans  la  forêt  d'Arden- 

ne.  121. 
A.  RoERSCH.   Liévin  Algoet,  humaniste  et  géographe.  127. 
E.  Merchie.  Confiteor  crrorem,  Sidoine  Apollinaire,  Epist.  III, 

12.  2.    145. 
A    Dklattk.   Senex  pavidus  futuri  ?  151. 


PÉRIODIQUES  Hll 

G.  HiNNisDAKLs.  Les  ti'iivaux  arclu'-ologiques  de  l'Ecole  française 

d'Athènes.  1919-1921.   154. 
16.  —  Le  Muséon.  Revue  d'études  orientales.  XXXIV.  1921. 

A.  Carnoy.  L'idée  du  c  Royaume  de  Dieu  »  dans  l'Iran.  Si. 
J.-B.  Chabot.  Mélanges  épigrai)lii<[ues  et  archéologifjues.  107. 
P.   Cruveilhikr     Etude    sur  les   fragments  d'un  code  pré  liam- 

mourabien  eu  rédaction  sumérienne.  117. 
Th.  Lefort.  Analecta  philologica  [graeca].  173. 
H.  Dkvis.  Homélie  cathédi-ale  de  Marc,  patriarclie  d'Alexandrie. 

179. 
R.  Pki-issier.  Alien  races  of  East  Russia.    Among  tbe   Wotjaks, 

251. 
E.  DE  Zacharko.  Usages  des  Tartares  de  l'Abakan.  261. 

B.  Belpaire.  Une  récente  histoire  de  la  Chine.  27.'^, 

17.  —  Modem  Language  Notes.  XXXVII.  1922. 
W.  SiLZ.    Ratioual    and   emotional     éléments    in     lleinnch    von 

Kleist.  321. 
A.  Schaffer.   The  «  Trente-six  ballades  joyeuses  »  of  Théodore 

de  Banville.  328. 
E.  C.  KxowLTox.  Causality  in  «  Sanison  Agonistes  »  333. 
G.  C   VoGT.   «  The  Wife  of  Bath's  Taie  »,   «  Women  pleased  », 

and    «  La   fée    Urgèle  »  :  A  study   in   the    transformation    of 

folk-lore  thèmes  in  drama.  339. 
A.  M.  BiERST.vDT.  Unacknowledged  ])oems  by  Thomas  Campbell. 

343. 
W.  F.  Tamblvn.  Xotes  on  «  King  Lear  ».  346. 
P.  F.  Baum.  The  mare  and  the  wolf.  350. 
W.  A.  Eddy.  a  source  for  Gulliver's  First  Voyage.  353. 

18.  —  Philologus.   1922. 
^I.  RoTiiSTEiN.  Catull  und  Lesbiji.  1. 
W.  AxDREAE  Die  philosophischen   Problème  in  den  Platonischen 

Briefe.  34. 
J.  F    Beusel.    lIipi)Ocratis   qui    fertur    De   medico    libellus    ad 

codicum  fidem  recensitus.  88. 
S.  Brandt.  Zii  Lactanz.  131. 
W.  Siisz.   Ueber  antike  Geheimscbreibmethoden  und  ibr   Nach- 

leben. 142. 
W.  ScHMiD.  ApiZriXoç  BepeviKu.  176. 
Fr.  Wai/i'her.  Zu  den  Dialogen  Senecas    180. 
S.  EiTREM    C  Gracchus  und  die  Fiirien.  183. 

19.  —  Modem  Philology.  XX.  1922. 
G.  L.  \'ax  Roosbroi;ck.  Corneille's  (linnn  and    the  Cuiisi)ir;tti()n 

des  Dames.  1. 


812  PÉRIODIQLES 

II.  S.  Hugues.  Fielding's  iudebtedness  to  James  Rali)h.  19. 

F.  A.  G.  CowPER.  The  sources  of  Ille  et  Galeron.  35 

W   S.  Hendrix.  Military  tactics  in  the  Puem  of  tlie  Cid.  45. 

A.   TuALKR.    Minor  actors  and   emploj-ees    in    the   Elizabethan 

theater.  41). 
A.  Taylou.  The  three  sins  ot  the  hermit.  61. 
M.  T.  Holmes,  Jr.  Some  proveneal  etymologies.  95. 

20.  —  The  American  Historical  Review.  XXVII.  1922 

C.  Beckkr.  .V  U'tter  from  Danton  to  Marie-Antoinette.  24. 
J.  J.  JussERAND.  The  school  for  Jiuibassadors   426 

S.  F.  Bemis   .Tay's  ireatj-  and  the  northwest  boundary   gap.    465. 

J.  T.  Adams.  On  the  term  «  British  Empire  »  485. 

J.  T.  FizPATRiCK.   A  rough  secret  journal    ol'    the    Continental 

Congress.  489. 
Lord    Sackville's    papers    relating    to    the    Virginia    Company. 

493,  738. 
Ch.  h.  Haskins.  Science  at  the  Court  of  the  Emperor  Frederick  II, 

669. 
X.  S.  B.  Gras.   The  developmeut   of   metropolitan  economy    in 

Europe  and  America.  695. 
L.  M.  Sears.  Slidell  and  Buchanan.  709. 

D.  C.  MuNRO.   Did  the  empei'or  Alexius  1    ask  for  aid    at   the 
Couneil  of  Piacenza.  1095  ?  731. 

W.  X.  Allison.  The  first  endowed  lirofessorship  of  history   and 
its  first  incumbeiit.  733. 

21.  —The  English  Historical  Review,  XXXVII,   1922. 
H.  C.  Chew.  Scutage  under  Edward  I.  321. 

A.  F.  PoLLARD.  Couneil,  Star  Chamber,  and  Privy  Couneil  under 

the  Tudors.  337. 
C.  L.  KijNGSFORD.  The  Highlaud  Couneil  in  the  «  Fourty  Fivc  ..» 

361. 

G.  Unwin.  The  transition  to  the  factory  System.  Il,  383. 
Ch.  Askins.  «  Jving  Harolrt's  Books  ».  398. 

C.  W.   Prévité  Arïon.   Annales   Radingeses   Posteriores,    1135- 

1264.  400 
G.  H.  FowLER.  Some  lost  pleas  of  1195.  403. 
J.  Wake    Coramunitas  villae.  406. 
M.  R.  James.  Twelve  médiéval  ghost-stories.  413. 
P.  VAN  Dyke.  Tlie  mission  of  cardinal  Pôle  to  enforce  the  liull 

of  déposition  against  Henry  VIII.  422 

22   -  The  Fortnightly  Review.   1922. 
H.  Spender.  Oxford  after  niany  days.  52. 
A.  A.  Baumann.  Lord  Salisbury  and  Disraeli.  84. 
W.  B.  Kempling    Shakcspeai'e  mojmments  in  London    137, 


PKRIODIQl  ES  813 

W.  S.  Stepiiens.  Women  and  tlie  Clubs  of  tho    Freiich   Kevoln- 
tion.  219. 

Ch.  Russel.  .Fohnson  tlxe  Jacobite.  229. 

R.  Gkey.  Concerriiiig  Emma  Bovary.  309. 

\V.  S    Sparrow.  Captaiu  Coignet  and  Napoléon    (>14 

G.  Aston.  Lessons  from  tlie  wars  of  Marlborough.  S27. 

A.  F.  G.  Bell.  Some  aspects  of  portuguese  literature,  1008. 

II.  —  G.  Thomas    «  The  divine  i)oet  ».  08. 

W.  Permkwan.  Political  corruption,  old  and  new.  299. 

23.   —  North  American  Review    CCXV.  1922. 

.T.  CoLLiNS.  Feodor  Dostoievsky  tragedist,  prophet  and  psycho- 
logist.  66. 

Ch,  a.  Herrick.  The  Americanism  of  Lincoln.  179. 

S.  YouNG.  Molière  :  comediau  of  society.  241, 

L.  LocKERT   Some  of  Mr.  Galsworthy's  heroines,  2.54. 

R.  Aldington.  Charles  Dufresny.  o*^0. 

K.  YouNG.  The  Shakespeare  skeptics.  382. 

R.  S.  Phelps.  Dante  and  his  English  readers.  500. 

H.  T.  Baker.  Lamb  and  the  periodical  essay.  518. 

J.  W.  Thojipson.    Ilamlet    and  the   mystery   of   Amy    Robsart. 
657. 

M.  J.  MosES.  American  plays  of  our  forefathers.  770. 

CCXVI.  —  G.  Slaughter.  Percy  Bysshe  Shelley.  67. 

J.  W.  Beacu,  The  English  sentimentalists.  89. 

R.  Aldingtox.  Marivaux  and  marivaudage.  256. 

H.  H    Furxess.  ((  Hanilet  and  Amy  Robsart  ».  A  reply.  357. 

A.  WooLLCOTT.  Charb  s  Dickens,  the  side-tracked  actor.  51.!. 
24.  —  Revue  des  Études  slaves    II.  1922. 

M.  RosToVTZEFE.  L'originc  de  la  Russie  kiévienne   5. 

L,    NiEDERLE.    Des   théories   nouvelles   de   Jan  Peisker  sur   les 
anciens  Slaves.  19. 

A.  Meillet.  Des  innovations  t^u  verbe  slave.  38. 

St.  RoMANSKi.  —  Slave  commun  et  grec  ancien.  47. 

J.  Endzelin.  Des  intonations  lettonnes.  56. 

A.    Bélu'.    Principes   du   classement   des    substantifs  en  serbo- 
croate.  69 
M.  Ikovic.  La  chute  du  n  dans  les  parlers  de  la  Macédoine  occi- 
dentale. 80. 

J.  IvANov.  Un  jjarler  bulgare  archaï(iue.  86. 

J.  PoLiVKA.  Du  surnaturel  dans  les  contes  slovaijues  :  les  êtres 

surnaturels.  104. 
J.  Patouillet.  L'histoire  du  théâtre  russe.   Essai  île  bibliogra- 
phie critique.  125. 


814  PÉRIODIQUES 

25.  —  Revue  des  Études  napoléoniennes.  I.  1922. 

Fr.  Masson    Les  complots  jacobius  au  lendemain  de  Brumaire,  i. 

G.  Lacour-Gayet.  ISapoléon  à  Berlin  en  1806.  29. 

E.  Driault  Napoléon  au  centenaire  de  sa  mort  (1921).  Étude 
bibliographique.  49,  81. 

H.  BuFFENOïK.  Napoléon  et  J.-J.  Rousseau.  91. 

G.  Vautiiier.  Les  princes  espagnols  à  Valençay.  101. 

P.  Marmottan.  La  mis.sion  du  général  Hédouville  à  Lucques  en 
juin-juillet  1805.  123. 

G.  Caudrillier.  La  découverte  du  complot  de  l'An  XII.  161. 

E.  Gachot.  Un  régicide  allemand.  Frédéric  Staps.  181. 

A.  Francastei,.  Ingres  et  Napoléon.  204. 

E.  Peyron.  Qui  est  l'auteur  du  «  Manuscrit  venu  de  Sainte- 
Hélène  ))?212. 

G.  BouRGiN.  Les  journaux  de  Bonaparte  en  Italie.  225, 

1922,  II.  —  G.  Cassi.  Napoléon  et  la  défense  de  l'Italie,  sur  la 
Piave.  5. 

E.  BoRTCHAK.  Napoléon  et  l'Ukraine.  24. 

G.  Lacour-Gayet.  Napoléon  à  Fontainebleau  en  1814.  41. 

G. -H.  DuFESTRE.  La  manœuvre  de  Boulogne  et  les  conséquences 
de  son  échec.  81. 

J.  d'Ivray.  La  première  occupation  anglaise  en  Egypte.  1807.  110. 

M.  Lhéritier.  Napoléon  à  Schœnbrunn.  119. 

E.-C.  CoRTi.  Les  idées  de  l'impératrice  Eugénie  sur  le  redresse- 
ment de  la  carte  de  l'Europe,  d'après  des  rapports  du  prince 
Richard  de  Metternich.  147. 

Ch.  Barband  et  L.  Carbo.  Le  x-etour  d'Egypte,  e.scale  à  Ajaccio  : 
une  semaine  ignorée  de  la  vie  du  général  Bonaparte.  161. 

F.  DuTACQ.  Napoléon  et  l'autonomie  communale.  199. 
J.  Dechamps.  U  y  a  cent  ans.  Propos  stendhaliens.  203 
A.  Francastel.  Le  berceau  du  roi  de  Rome.  213. 

DE  PiRQUET.  Un  dessin  et  deux  billets  du  roi  de  Rome.  218. 
E.-C.  CoRTi.  Napoléon   III  après  Sadowa,  d'après  des  rapports 

du  prince  Richard  de  Metternich.  221. 
'  26.  — Revue  d'histoire  économique  et  sociale   X.  1922. 
C.-J.    GiGNoux.   L'abbé    Galiani   et   la   querelle   des    grains    au 

xviii'=  siècle.  17. 
H.-E    Barraui-t.  L'idée  d'évolution  dans  la  science  économique 

Observations  sur  la  méthode  et  les  idées  directrices  de  l'histoire 

des  doctrines  économiques.  38. 
A.  CuviLLiER.  Les   doctrines   économiques  et  sociales   en    1840, 

d'après  un  journal  d'ouvriers.  84. 
E.  Blu.m.  Une  délibération  au  Conseil  royal  des  Finances  à  la  fin 

du  règne  de  Louis  XIV.  171. 


PÉRIODIQUES  815 

A.  Choulguine.  L'organisation  capitaliste  existait-elle  en  France 

à  la  veille  de  la  Révolution?  219. 
G   Wexlersse.  Sully  et  Colbert  jugés  par  les  Physiocrates.  234. 

E.  Hai-évy.  Comment  fut  votée  la  loi  anglaise  des  fabriques 
de  1833.  252. 

R.  Pic.\RD.  Les  Contrudictiuns  économiques  et  la  doctrine 
proudhonienne.  266. 

27.  —  Revue  de  littérature  comparée    II.  1922. 

F.  Baldenspekckr.  Où  l'Orient  et  l'Occident  s'affrontent.  5. 

p.    de   Nolh.\c.    Un    poète   rhénan    ami    de    la   Plé'iade     Pierre 

Mélissus.  30.  513. 
P.  ToLDO.  Le  «  Moine  bridé  »  :  à  propos  d'un  conte  de  Piron    54. 
J.  Lescoffier.  Une  adaptation  de  Victor  Hugo,  par  Bjornson.  ^0. 
P.    Trahard     Les    soui-ces   de    1'    «    .\mour   africain    »    dans   le 

«  Théâtre  de  Clara  (iazul  ».  73. 
F.  Bull.  L'n  grand  disciple  de  Molière  :  Ludwig  Holberg    161. 
W.  FoLKiERSKi.  Molière  en  Pologne.  175. 
J.-A.  Bertrand.  Guillaume  Schlegel,  critique  de  Molière.  201. 

E.  La.mbert.  La  «  Juive  de  Tolède  »,  de  Grillparzer,  étude  sur  la 
composition  et  les  sources  de  la  pièce.  238. 

li.  Galland.  Un  poète  errant  de  la  Renaissance  :  Jean  Van  der 
Noot  en  Angleterre.  337. 

J.  Dresch.  Borne  et  son  histoire  inédite  de  la  Révolution  fran- 
çaise. 351. 

H,  Girard.  Comment  Shelley  a  été  révélé  à  Victor  Hugo  :  la 
«  Grève  de  Samarez  ».  de  Pierre  Leroux.  369. 

J.  Hankiss.  Petofi  et  les  poètes  français.  386. 

F.  Chambon.  Mérimée  et  la  société  anglaise.  396. 

L.  Witt.mer.  Au    temps  des   bergerades   :   Gessner  et  Watelet, 

d'api-ès  des  lettres  inédites.  537. 

P.  Martixo.  Le  «  Del  Romansicismo  nelli  Arti  »,  de  Stendhal. 
578. 

Stendhai,.  Du  Romanticisme  dans  les  beaux-arts    581. 

P.  Tkahard.  Cervantes  et  Mérimée.  602. 

28.  —  La  Revue  de  Paris,  XXIX,   1922. 

I.  — E.  Magne.  Une  amie  inconnue  de  Molière    191. 
A.  TaiBAUDET.  Le  Rire  de  Molière.  312.  / 

J.  Mariejol.  Marguerite  de  Valois  en  (îascogne.  503.  773. 
F.  DE  CuREL.  Historicjue  de  «  l'Ame  en  folie  ».  673. 

II.  —  P.  .\rbelet.  Les  Origines  de  la  «  Chartreuse  de  Parme  ». 
356,  581. 

III.  —  V.  DU  Bled   Le  Salon  de  M"'*  Aubernon.  154. 

D""  Cabanes.  La  puissance  de  suggestion  chez  Napoléon    753. 
A.  Albert-Petit.  Comment  meurt  une  civilisation.  841. 


816  PÉRIODIQUES 

IV.  —  M.  L.  Pailleron.  Les  Blaze  de  Bury  et  l'Autriebe.  126 
G.  Simon.  Victor  Hugo  et  les  critiques.  268. 

J.  Lacourt-Gayet.  Les  origines  de  l'expédition  d'Egypte.  308. 
E.  Renan.  De  l'imitation  de  la  Bible  dans  «  Athalie  ».  449. 
C®  PuiMOLi  La  princesse  Mathilde  et  le  duc  d'Aumale.  464. 
M.  Thiébaut.  Henry  Bataille.  608. 

V.  —  Halpérine-Kaminski.  Un  roman  inédit  de  Dostoiewski.  95. 
C°»  Weil.  L'évasion  de  Ham.  176. 

E.  Maij:.  Les  saints  dans  l'art  du  moyenâge.  502. 

29.  —Revue  des  Questions  historiques.  L,  1922. 
M.   DE   Germixy.    Les    brigandages    maritimes     de    l'Angleterre 

durant  les  premiers  siècles  de  la  Révolution,  d'après  des  docu- 
ments nouveaux.  7. 
A.  Moulu-:.  Les  corporations  drapières  de  la  Flandre  au  moj-en 

âge.  61. 
G.  Gautherot.  Bourmont  à  Waterloo.  94. 

J.  GuiKAUD.  Monseigneur  Duchesne.  Sa  vie  et  son  oeuvre.  130,  350. 
M.  Sépet.  La  politique  religieuse  de  Bonaparte  en  Italie.  151. 
(^tesse  H  DK  Reixach-Foussemagne.  Les  ancêtres  d'Alfred  Mézières 

Les  marquis  de  Vassé.  158. 
M.  DuBRUEL.  La  querelle  de  la   Régale  sous   Louis   XIV.  —  Le 

premier  heurt  (1673-1676).  257. 
H.  de  Landosle.  Le  Congrès  de  Bade  en  Suisse  (1764).  312. 
Fr.  Rousseau.  Un  officier  oblat  au  XVir  siècle.  381. 
P.  A.  Heiberg.  Souvenirs  anecdotiques  sur  la  Campagne  de  1809. 

398. 
G.  Gallavresi.   La  Franc-maçonnerie  et  la  formation  de  l'unité 

italienne.  415. 

30.  —  Revue  de  l'Université  de  Bruxelles. 
XXVIII,  1921-1922. 
H.  DE  HooN.  La  doctrine  de  Monroe.  171. 
L.  Verriest.    L'origine   et  le   développement   de   nos    villes   au 

moj'en  âge.  271. 

F.  VAN  Kai-kex.  Joseph  Lebeau  et  Paul  Devaux.  384. 

A.  Vincent.  L'Escaut.  Etude  toponj'mique.  414. 

B.  BivANKOFF.  Fedor  Michaïlovith  Dostoïevsky.  460. 
J.  Pirenne.  L'histoire  du  droit.  545. 

F.  L.  Ganshoe.   La  juridiction   du    seigneur   sur   son    vassal   à 

répofjue  carolingienne.  566. 
Ch.  Perga.meni.  Un  Bruxellois,  soldat  de  l'Emjjire.  576. 
31.  — La  Révolution  française,  LXXV,  1922. 
A.  AuLARU.  Derniers  moments  et  exécution  de  Danton.  5. 

C.  HuiN.  Une  école  de  village  à  la  fin  de  l'ancien  régime.    L'école 
de  Bacliv,  chàtellenie  de  Lille.  34. 


PÉHIODIQCES  817 

M.  FucHs.   Les   farces   contre-révolutionnaires   en  1S4S.  48,  126. 

238. 
A.  Gain.   L'école  fentnilc  de  la  Meiirtlie  à   Xaney.   l"   Messidor 

An  lY.  115. 
L.  Cahkx.    Condorcet    inédit.  Notes  pour  le  Tnblcmi   ItisUtriqur 

des  progrès  de  l'esprit  humain.  19.3. 
DE  Cardexai,.  L'assistance  ]»ubli<iue  dans  la   Dordogne  pendant 

la  Révolution.  213. 
H.    Bi  ri-EN()U{.    le   (îenévois    H.    A.    Gosse,    un    fidèle  de   .(.-,1. 

Rousseau.  230. 
L.  Cahkn.  Deux  émeutes    révolutionnaires  avant    la  Révolution. 

269. 
32.  —  Rivista    filologica  e  di  Istruzione   classica.  L.  1922. 
C.-O.  ZtUKTTi.  La  lettera  di  Xicia.  rriiuc.  Vil,  ll-lô).  1. 
M.    L.    DE    GuBERNATis.    Studio    sull'    accento    gi'eco  e    latino. 

XII.  Délia  pretesa  sintomia  vocalica   latina  con  geminazione 
consonautica.  12. 

a.  CoRRADi.  L'Asia  minore  e  le  isole  dell"  Kgeo  sotto  i  primi  Seleu- 
cidi.  II.  Antioclie  11  e  la  citta  greclie  dell'  Asia.  20. 

S.  CoNsoi.i.  .Studi  intorno  agli  scolii  di  Giovenale  e  di  Per.sio.  .38. 

L.  CASTUiLioxi.  Studi  Anueani.  TV.  Note  ci-itiche  di  libri  délie 
questione  naturali.  55. 

R.  Sabbadini.  I  doppicmi  lirici  di  Orazio.  67. 

A.  RosT.XGM.  Per  la  critica  dell'  Ibis.  (Riposta  al  signor 
A.  F.  Ilousman).  76. 

^".  CosTANZi.  Il  piu  antico  nome  di  Kmpoli.  145. 

<T.  Ammexdoi.a.  Xote  e  questioni  di  critica  ermeneutica  ad  Aescli. 

Eumenidi.  149. 
C.  Pascal.  Laudica.  172. 
M.   L.    DE  GuBERNATis.    Studio    sull'    accento    greco    e    latino. 

XIII.  L'accentazione  délie  parole  greche  in  latino.  177. 
E.  Stampini   Tereuz.  Andr.  236  e  625,  hôciue  od  liocine?  192. 

B.  Romano.  n  significato  fondamentale  dell'  aoriste  greco  stu- 
diato  negU  'ATTO|Livri|uoveû,ucxTa  di  Senofonte.  li)7,  335. 

A'.  CosTANZi.  La  dura  ta  délia  terza  guerra  messenica.  289. 

<J.  MuNNo.  La  «  Pesca  »  di  Appiano  (Analisi  ed  ap])unti'.  3t)7. 
33.  —  Remania  XLVIII.   1922. 

A.  HoRNixc.  Notes  étymologiques  vt)sgieiines.  ISl. 

P.  BoissoNADE.  Les  personnages  et  les  événements  de  l'histoire 
d'Allemagne,  de  France  et  d'Espagne  dans  l'tcuvre  de  Marca- 
bru  (1129-1150);  essai  sur  la  biographie  du  poète  et  la  clirono- 
logie  de  ses  poésies.  207. 

A.  Fakai,.  Des  V'Huins  ou  Dc.v  XIII  ninnières  <li'  oilnin.s.  24.3. 

G.  Bertoni.  Nota  sul  dialettodi  Fontan  (Alu^^r^Iaritiniesi.  '2i'^T^. 


818  PÉRIODIQUES 

A.  Thomas.  Corneille  (et  ses  dérivés)  au  sens  de  «  diafragrae  » 
dans  quelques  parlers  provinciaux  (Xormandie.  Picardie,  Suisse 
romande).  266. 

V\i.  Bruneau.  Ancien  français  biche.  270. 

E.  Wai,berg.  Capsea  >  x>rov.  caissa,  etc.  273. 

—  L'article  empersonage  de  Godefroy.  274. 
H.  YvoN.  Les  formes  de  l'interrogation.  27G. 

34.  —  Sitzungsberichte  der  Preussischen  Akademie 

der  Wissenschaften .  1922. 

U.    Stuïz.  Kurfiirst   Johann  Higismund  von    Brandenburg  und 

das  Reformationsrecht.  4. 
H.  DiELs.  Lukrezstudien.  V.  46. 
A.  V.  Harxack.  Die  Yerklarungsgeschiclite  Jesu  der  Bei'icht  des 

Paulus  (I,  Kor.  15,  3  ff.)  und  die  beiden  Christusvisionen  des 

Petrus.  63. 
H.  ScHUCHARDT.  Die  iberisclie  Inschrift  von  Alcoj'.  83. 
U.  WiLCKEN.  Alexander  der  Grosse  und  der  korintische  Bund.  97. 

—  TJeber  eine  Inschrift  aus  dem  Asklepieion  von  Epi- 
dauros.  122. 

A.    Brandl.  Zum   dichterischen    Vorstellungsleben  bei   Words- 

worth.  150. 
E.  Stahmeu.  Die  Ueberlieferung  der  Gesetze  Karls  von  Anjou.  162. 

35.  —  Studien.  XCVII,   1922. 
J.  VoGEi.s.  P.  van  Meurs  en  Dr.  Schaepman.  17,  107,  195,  282. 
H  Padberg.  Abr.  Kuyper  als  stylist.  174. 
H.  DuuRKENS.  Alberdingk  Th3'm  en  de  kerkbouw.  301. 
C.   Wessels.   Pedro   Paez,    1622-1922.    Op   weg   naar   .Ethiopie 

(1589-1603).  364. 
L.  V.  MiERT.  Is.  Ignatius'  «  Boek  der  geestelijke  Oefeningen  n 

een  oorspronkelijk  werk.  472. 
XCVIII.  —  C.  Wessels.  Pedro  Paez,  1622-1922.  17. 
J    V.  Ryckevorsel.  Moliére-legenden.  37. 
H.  Ddurkens.  Alberdingk  Thym  eu  de  kerkbouw.  92. 

36.  —  Zeitschrift  fiir  Deutsches  Altertum  und  Deutsche 

Literatur.  LIX,  1922. 

H,  Biener.  Wie  ist  die  nhd.  Regel  iiber  die  Stellung  des  verbums 

entstanden  ?  167. 
E.  ScHKoDKR.  Berchter  und  Berchtung  von  Merau.  179. 
W.  Stammi-er.  Meister  Eckhart  in  Norddeutschland.  181. 

E.  S.  Zu  dem  Fi-agment  eines  nhd.  prosa-romans.  216. 

F.  NiEDXER.  Egils  sonatorrek.  217. 

H.  Patzig.  Zum  stein  von  Eggjum.  235. 

E.  ScHRODKR.  Die  leichenfeier  fiir  Attila.  240. 

E.  S.  Hnrnuscltonr.  244. 


CHRONIQUE 


Conférence  anglo-américaine  des  professeurs  d'histoire. 

Le  Comité  permanent  a  organisé  une  réunion  à  rinstitute  of 
Historical  Research  à  Londres,  le  5  juillet  1922.  Ont  été  invités, 
tous  les  participants  à  la  Conférence  de  1921,  et  tous  les  histo- 
riens et  archivistes  étrangers  qui  se  trouvaient  en  Angleterre 
à  cotte  époque. 

Le  Comité  a  commencé  à  recueillir  des  l'enseignements  sur  la 
façon  dont  le  public  peut  obtenir  des  photographies  de  manus- 
crits dans  les  différents  dépôts  du  pays.  Le  sous-comité,  créé 
l)récédemment,  sous  la  présidence  de  M.  A.  G.  Little,  dans  le  but 
d'établir  les  principes  à  suivre  dans  Védition  des  documents 
historiques,  a  déposé  son  rapport  préliminaire,  concernant  les 
documents  du  moyen  âg'c  écrits  en  latin. 


Objets  restitués  par  l'Autriche  à  la  Belgique. 

Le  28  novembre  1922  a  été  inaugurée  au  Musée  de  la  Porte  de 
Hal  par  M .  le  Ministre  des  Sciences  et  des  Arts  l'exposition  des 
objets  restitués  le  18  octobre  par  l'Autriche  à  la  Belgique  eu  vertu 
du  traité  de  Saint-Germain  : 

l'>  Armes  et  armures  de  l'arsenal  (5  pièces)  ; 

2"  Poinçons  et  matrices  de  Théodore  van  Berckel  (7 1  pièces)  ; 

3°  L'n  des  trois  exemplaires  dessinés  à  la  main  (dits  Carte  de 
cabinet)  de  la  carte  des  Pays-Bas  autrichiens,  par  Ferraris,  à 
réchelle  de  1  11520  (1770-1777). 

Cet   exemplaire  a   appartenu  à   Charles  de   Lorraini'  ;   il    est 
accompagné  de  12  volumes  contenant  des  notes  historiques,  sta- 
tistiques et  géographiques  sur  le  territoire  représenté. 
A  consulter  : 

Ministère  des  Sciences  et  des  Arts.  Guide  ù  re.\j)osition  de.s-  objets 
restitués  par  r  Autriche  ù  la  Belgique  organisée  au  Musée  delà 
Porte  de  Hal  par  Gforges  M.vcoir  et  Victor  Tournei  k.  «lélégués 


820  CHRONIQUE 

du  Gouvernement.  Bruxelles,  28  novembre-31  décembre  1922,  pet. 
in-8»,  23  p.,  pi. 

Ai,B.  TiBERGiiiEN.  La  carte  chorographique  des  Pays-Bas  autri- 
chiens par  le  comte  Jos.  de  Ferraris  (Touriug-Club  de  Belgique, 
Bulletin  officiel.  XXVIIl,  1922,  n»  22,  15  novembre,  p.  524  526;. 

Georges  Macoir.  L'armure  de  parade  de  V archiduc  Albert,  sou- 
verain des  Pays-Bas,  lôOS-lG'Jl  {Ibid.,  u»  23,  1"  décembre, 
p.  .549-551). 


La  Photographie  des  manuscrits  en  Angleterre. 

Le  bureau  permanent  de  la  Conférence  anglo-américaine  des 
professeurs  d'histoire,  dont  le  président  est  M.  le  Professeur 
A.  F.  Pollard,  s'occupe  de  centraliser  les  renseignements 
concernant  la  vente  au  public  de  reproductions  photographiques 
des  manuscrits  conservés  en  Angleterre. 

Le  Britisch  Muséum,  le  Record  Office  et  la  National  Library 
of  Wales  possèdent  un  certain  nombre  de  clichés  ;  à  la  John 
Rylands  Library  à  Manchester,  libotograi^hies  et  rotographies 
sont  prises  par  le  personnel  et  le  public  ne  paie  que  les  frais  de 
matériel.  Ailleurs,  il  faut  encore  passer  x)ar  l'intermédiaire  d'un 
opérateur  local. 

Tous  les  renseignements  concernant  la  manière  de  procéder 
et  les  prix  des  reproductions  pour  les  quatre  dépôts  cités  plus 
haut  ainsi  que  pour  la  Cambridge  Unioersity  Library  seront  four- 
nis sur  demande  par  M.  1.  E.  Narradt,  secrétaire  de  VInstitute 
of  Historical  Research,  Université  de  Londres,  Malet  street, 
W.  C    1. 

La  Bodléienne  a  imprimé  un  prospectus-tarif  qui  peut  être 
obtenu  gratuitement  sur  demande  envovée  au  bibliothécaire. 


Association   belge  des  Femmes  universitaires. 
Siège    social  :    212,    chaussée    de    Wavre,    Bruxelles. 

L'Association  américaine  des  Femmes  universitaires  offre  une 
bourse  de  voyage  d'une  valeur  de  1.000  dollars  pour  l'année 
académique  1923-1924. 

CONDITIONS  : 

1.  —  La  bourse  est  offerte  aux  membres  de  toutes  les  associa- 
tions de  femmes  universitaires  affiliées  à  la  Fédération  inter- 
nationale. 


CHRONIQUE  S21 

2.  —  La  bourse  est  valable  pour  toute  uuivei'sité  ou  iustitution 
officielle  d'un  pays  différent  de  celui  où  la  candidate  a  fait  ses 
études  ou  réside  habituellement.  Les  candidates  s'assureront 
par  avance  que  l'institution  où  elles  désirent  être  iidinises 
offre  des  facilités  pour  les  recherches  qu'elles  veulent  pour- 
suivre. 

',i.  —  Les  demandes  devront  ('tre  adressées  avant  le  !'■'  janvier 
1923  à  la  présidente  du  Comité  des  Relations  internationales, 
4,  rue  de  Ilornes,  Bruxelles 

4.  —  Chaque  candidate  joindra  à  sa  demande  : 
1°  Un  aperçu  de  son  plan  de  recherches  ; 

2"  Une  dissertation  ou  un  autre  travail  public  ; 
',i'>  Toute  autre  preuve  (lu'elle  pourra  donner  de  son  ai)titude 
à  faire  ces  recherches. 

5.  —  Le  nom  de  la  titulaire  sera  annoncé  vers  le  15  mars  1923 
par  le  Comité  des  Bourses  de  l'Association  américaine  des 
Femmes  universitaires. 

6.  —  La  bourse  prendra  cours  le  1"  juillet  1923  et  sera  payée 
en  deux  fois  au  début  de  chaque  semestre;  toutefois  le  paiement 
de  la  deuxième  moitié  est  subordonné  à  l'acceptation  par  le 
Comité  d'un  rapport  prouvant  que  la  boursière  poursuit  les 
recherches   proposées. 

7.  —  A  la  fin  de  son  séjour,  la  boursière  devra  adresser  à  la 
présidente  du  Comité  des  Bourses  de  l'Association  américaine 
des  Femmes  universitaires  un  rapport  sur  son  travail,  et 
l'accompagner  d'une  appréciation  du  professeur  on  de  l'auto- 
rité sous  la  direction  de  qui  se  sont  faites  les  recherches. 

D'autre  part,  la  Fédération  britannique  des  Femmes  univi-i- 
sitaires  offre  une  bourse  d'études  de  100  livres  sterling-,  en  vue 
d'aider  une  femme  universitaire  à  poursuivre  des  études  ou  des 
recherches  sur  un  des  objets  suivants  :  littérature,  histoire, 
sciences  morales  ou  politiques,  droit,  archéologie,  langues,  méta- 
physique, théologie. 

Enfin,  une  bourse  d'études  est  offerte  par  la  Fédération  sué- 
doise des  Femmes  universitaires.  Le  montant,  1,000  Kr..  aidera 
la  bénéficiaire  à  poursuivre  des  recherches  en  sciences  naturelles. 

Les  candidates  devront  être  membres  de  la  Fédération  belge 
des  Femmes  universitaires;  elles  adressei'ont  leur  demande, 
accompagnée  d'un  travail  manuscrit  ou  imprimé  et  d'un  projet 
d'études  ou  de  recherches,  à  M"»  A.  Scouvart,  présidente  du 
Comité  des  Relations  internationales,  4.  rue  de  Hornes,  à 
Bruxelles,  avant  le  28  février  1923  (bourse  britannique)  et  le 
l'""  juin  1923  (bourse  suédoise). 


822  CHRONIQUE 

Le  nom  des  titulaires  sera  annoncé  avant  le  20  mai  1923  (bourse 
britannique)  et  le  l""'  octobre  1923  (bourse  suédoise). 

\.  B.  —  La  Fédération  belge  des  Femmes  universitaires 
groupe  toutes  les  femmes  ayant  au  moins  le  grade  de  candidat 
ou  un  grade  équivalent. 

Prière  d'adresser  les  adhésions  à  M™^  Delcourt-Derscheid, 
docteur  en  médecine.  78.  rue  de  Trêves,  à  Bruxelles. 


La  Civilisation  étrusque. 

Le  nouvel  Institut  royul  d'Archéologie  et  d'Histoire  de  l'art. 
fondé  à  Rome  il  y  a  quelques  mois,  met  au  concours  une  étude 
sur  la  civilisation  étrusque.  Le  prix,  qui  est  de  25.000  lire,  sera 
décerné  en  192.5.  Les  manuscrits  devront  être  remis  au  Secrétaiie 
avant  le  1  "  juillet  1925. 


Bibliog-raphie  de  l'histoire  des  Juifs  aux  Pays-Bas. 

La  Genootschap  ooor  Joodsche  WetenscJiaj)  in  Nederland 
décernera  en  1923  un  prix  de  300  florins  à  la  meilleiu*e  biblio- 
graphie de  l'histoire  des  juifs  dans  les  Pays-Bas.  Les  manuscrits 
peuvent  être  rédigés  en  néei'landais,  français,  allemand  ou 
en  anglais.  Ils  seront  remis  avant  le  1*'  avril  1923  an  secrétaire 
de  la  Société,  M.  Isak  Prins,  Sarphatistraat.  .52.  à  Amsterdam. 


V'  Congrès  international  des  Sciences  historiques 

;Bruxelles,  1923). 

I  —  Réunion  du  Comité  organisateur. 

Le  Comité  organisateur  du  Congrès  s'est  réuni  à  Bruxelles,  le 
dimanche  Ki  juillet  1922,  .sous  la  présidence  de  M.  Pirenne. 

Le  bureau  a  rendu  compte  de  l'état  d'avancement  des  travaux 
préparatoires  et  notamment  des  excellents  résultats  de  la  propa- 
gande faite  en  faveur  du  Congrès  De  très  nombreuses  adhésions 
ont  été  acquises  dès  à  présent. 

Des  comités  spéciaux  constitués  aux  États-Unis,  en  Angleterre 
et  en  Pologne  s'occupent  de  faire  connaître  le  Congrès  dans  ces 
pays. 

Le  Comité,  après  avoir  pris  un  certain  nombre  de  mesures 
d'administration  interne,  a  procédé  à  la  constitution  des  bureaux 
organisateurs  de  chacune  des  sections.  On  en  trouvera  le  tableau 
dans  la  circulaire  que  nous  reproduisons  plus  loin.  Ces  bureaux 


CHHOMQLE  823 

sont  appelés  à  collaborer  avec  le  bureau  central  pour  assurer  de 
nombreuses  communications  à  chaque  section. 

II.  —  Réunion  du  bureau. 

Le  bureau  s'est  réuni  à  Bruxelles,  le  samedi  2'A  septembre  192'J. 
sous  la  présidence  de  M.  Pirenne. 

Il  a  pris  connaissance  de  l'état  des  adhésions  obtenues,  des  com- 
munications promises  et  de  la  situation  financière;  il  en  a  conclu 
<|ue  le  Congrès  ne  pouvait  s'annoncer  sous  de  meilleurs  auspices. 

Le  bureau  a  procédé  ensuite  à  l'établissement  d'un  projet  d'em- 
ploi du  temps  pendant  le  Congrès  et  à  la  rédaction  d'une  circu- 
laire contenant  des  précisions  nouvelles  et  destinée  à  être  lancée 

dans  le  courant  de  novembre. 

♦ 

♦  * 

Nous  croyons  qu'il  ne  sera  pas  inutile  de  reproduire  ici  le  texte 
de  cette  circulaire, 

V  CONGRÈS  INTERNATIONAL  UES  SCIENCES  HISTORIQUES 

(Bruxelles,  1925). 

Sous  le  haut  patronafie  de  S.  M.  le  Roi  des  Belges. 

Comité  d'Honneur  : 

Le  Premier  Ministre;  le  Ministre  des  Affaires  Étrangères;  le 
Ministre  des  Sciences  et  des  Arts;  le  Président  de  l'Académie 
Royale  de  Belgique  ;  le  Recteur  de  l'Université  de  Bruxelles  ;  le 
Recteur  de  l'Université  de  Gand;  le  Recteur  de  l'Université  de 
Liège;  le  Recteur  magnifique  de  l'Université  de  Louvain  ;  le  Pré- 
.sident  de  la  Commission  Royale  d'Histoire. 

M , 

Une  circulaire  antérieure  vous  a  fait  connaître  que  le  V*  Cou- 
grès  international  des  Sciences  historiques  aura  lieu  à  Bruxelles 
du  8  au  15  avril  1923,  les  travaux  du  Congrès  commençant  le 
lundi.  9  au  matin. 

Le  Comité  organisateur  a  dès  à  présent  obtenu  des  promesses 
de  communications  des  historiens  les  plus  en  vue  d'Europe  et 
d'Amérique;  il  a  reçu  des  avis  d'adhésion  très  nombreux  émanant 
de  la  plupart  des  pays  étrangers.  11  lui  est  possible  dans  ces  con- 
ilitions  d'indi(iuer,  dans  la  i)résente  circulaire,  les  traits  itrinci- 
paux  de  l'organisation  du  Congrès. 

* 

*  * 

Sections. 

Conformément  aux  usages  des  Congres  précédents,  les  traxaux 
du  Congrès  se  feront  en  sections.  Chacune  de  celles-ci  est  orga- 


824 


CHRONIQUE 


nisée  par  un  comité  restreint.  Nous  croyons  utile  de  donner  ici 
un  tableau  détaillé  des  sections,  tel  (ju'il  a  été  arrêté  en  séance 
du  16  juillet  1922,  sous  réserve  de  modifications  ultérieures. 

Tableaux  des  sections  et  bureaux  organisateurs. 


I.  Histoire  de  l'Orient  (Histoire  et 
civilisation  des  peuples  de  l'Orient). 


IL  Histoire  grecque  et   romaine 


III.  Études  byzanlines  (Histoire 
et  civilisation  byzantines). 

IV.  Histoire  du  inoyen  âge. 


w  V.  Histoire  moderne  et  contem- 

poraine (y  compris  l'histoire  colo- 
niale). 


VI.  Histoire  des  religions  et  his- 
toire ecclésiastique. 

V'  sous-section  :  Histoire  des 
religions . 


Président  :  M.  J.  Capart.  Con- 
servateur aux  Musées  royaux  du 
Cinquantenaire,  8,  avenue  Roger 
Van  den  Driessche,  Woluwe-Bru- 
xelles. 

Secrétaire  :  M.  Stracmans,  se- 
crétaire de  la  Société  belge  d'orien- 
talisme, lOcS,  r.  Belliard,  Bruxelles. 

Président  :  M.  J.-P.  Waltzing, 
professeur  à  l'Université,  1 1 ,  rue 
Dartois,  Liège. 

Secrétaire  :  M.  G.  Smets,  pro- 
fesseur à  l'Université,  15,  rue  des 
BoUandistes,  Bruxelles, 

Président  :  M.  H.  Grégoire^ 
professeur  à  l'Université,  150,  ave- 
nue Montjoie,  Bruxelles. 

Président  :  M.  L.  Leclère,  pro- 
fesseur  à  l'Université,  54,  avenue 
Longchamp,  Bruxelles. 

Secrétaire  :  M.  L.  Van  der 
EssEN,  professeur  à  l'Université, 
1 24,  boulev.  de  Tirlemont,  Louvain, 

Président  :  M.  P.  Hymans,  Mi- 
nistre d'Etat,  15,  rue  Ducale, 
Bruxelles. 

Seci'étaire  :  M.  F.  Van  Kalken, 
professeur  à  l'Université,  6,  rue 
d'Irlande,  Bruxelles. 


Président  :  comte  Goblet  d'Al. 
viELLA,  Ministre  d'Etat.  10,  rue 
Faider,  Bruxelles. 

Seci'étaire  :  M.  R.  Kregi.inger, 
professeur  ;ï  lUniversité  de  Bru- 
xelles, 22,  avenue  Reine  Elisabeth, 
Anvers. 


CHMONIQUE 


825 


2*  sous-section  :    Histoire   ecclé- 
siastique. 


VII.  Histoire  du  droit. 


VIII.  Histoire  économique. 


IX.  Histoire  de  la  civilisation 
(Philosophie,  sciences,  conceptions 
politiques  et  sociales,  etc.). 


Sous-section  :  Histoire  de  l'ensei- 
gnement. 

X.  Histoire  de  l'art  et  archéologie. 

l""*  sous-section  :  Histoire  de 
l'art. 


2*  sous-section  :  Archéologie   {y 
•ompris  la  préhistoire). 


Président  :  R.  P.  de  Moreau 
S.  J.,  professeur  au  collège  des 
Jésuites,  11,  rue  des  llécollets, 
Louvain. 

Secrétaire  :  abbé  de  Meyer,  pr<>- 
fesseur  à  l'Université,  place  de 
l'Université,  Louvain. 

Président  :  M.  G.  Cornil,  pro- 
fesseur à  l'Université,  40,  rue  Lan- 
geveld,  Uccle-Bruxelles. 

Secrétaire  :  M.  F.  Dk  Visschkr, 
professeur  à  l'Université,  14,  bou- 
levard du  Jardin  zoologique,  Gand. 

Président  :  M.  H.  Vander  Lin- 
DEN,  professeur  à  l'Université  de 
Liège,  62,  boulevard  de  Tirlemont, 
Louvain. 

Secrétaire  :  M.  G.  Bigwood,  pro- 
fesseur à  l'Université,  15,  rue  de 
l'Aqueduc,  Bruxelles. 

Président  :  M.  J.  Ridez,  profes- 
seur à  l'Université,  62,  boulevard 
Léopold,  Gand. 

Secrétaire  :  M.  J.  Pirenne, 
chargé  de  cours  à  l'Université,  23> 
rue  Lesbroussart,  Bruxelles. 

Président  :  M.  Ch.  Pergameni, 
96,  avenue  Emile  Max,  Bruxelles. 

Président  :  M.  G.  Hui.in  de  Loo, 
professeur  à  l'Université,  3,  place 
de  l'Evèché,  Gand. 

Secrétaire  :  M.  L.  Van  Puyvbi.de, 
professeur  â  l'Université.  114,  rue 
de  la  Prairie,  Gand. 

Président  -.  M.  E.  Van  Overlooc, 
conservateur  en  chef  des  Musées 
royaux  du  Cinquantenaire,  6,  ave- 
nue de  l'Armée,  Bruxelles. 

Secrétaire  :  baron  de  Lok,  con- 
servateur aux  Musées  royaux  du 
Cinquantenaire,  82,  avenue  d'Au- 
derghem,  Bruxelles. 


S26 


CHRONIQUE 


Président  :  Dom  Ursmer  Ber- 
LiF.RE  0.  s.  B.,  président  de  la  Com- 
mission royale  d'histoire,  abbaye  de 
Maredsous,  Denée  (prov.  de  Namur). 

Secrétaire  :  M.  V.  Fris,  chargé 
de  cours  à  l'Université,  archiviste 
de  la  Ville,  35,  quai  Terplaeten, 
Gand. 

Président  :  M.  J.  Vannerus,  con- 
servateur des  archives  de  la  guerre, 
105,  rue  Terre-Neuve,  Bruxelles. 

Secrétaire  :  M.  H.  Nélis,  sous- 
chef  de  section  aux  Archives  géné- 
rales du  royaume,  440,  rue  des 
Palais,  Bruxelles. 

Président  :  M.  J.  Ccn'ELIer, 
archiviste  général  du  royaume,  45, 
avenue  des  Rogations,  Woluwe- 
Bruxelles. 

Secrétaire  :  M.  C.  Tihon,  Archi- 
viste aux  Archives  générales  du 
royaume, placedu  Musée, Bruxelles. 

Le  Comité  organisateur  se  réserve  de  créer  des  sous-sections 
au  sein  de  certaines  sections  où  leur  création  n'est  pas  encore 
prévue. 

Il  est  entendu  qu'un  même  congressiste  a  le  droit  de  suivre  les 
travaux  de  plusieurs  sections. 


XI .  Méthode  historiq ue  (méthode, 
historiographie,  philosophie  de 
l'histoire,  etc.),  et  Sciences  auxi- 
liaires de  Vhistoire  (paléographie, 
diplomatique,  épigraphie,  biblio- 
graphie, sigillographie,  numisma- 
tique, héraldique,  géographie  his- 
torique, etc.). 

XII.  Documentation  sur  l'his- 
toire du  monde  pendant  la  guerre 
(mesures  prises  et  à  prendre,  en  vue 
de  la  conservation  et  de  la  mise  en 
oeuvre  des  documents  concernant  la 
guerre  et  ses  effets) . 

Xin.  Archives  et  publications 
de  textes  historiques.  (Organisation 
des  archives,  inventaires,  collec- 
tions de  textes  et  règles  de  publica- 
tion.) 


Communications. 

Le  Comité  organisateur  prendra  des  dispositions  pour  que, 
dans  la  mesure  du  possible,  chaque  section  ou  chaque  sous-sec- 
tion puisse  entendre  et  discuter  trois  ou  quatre  communications 
par  jour  de  travail. 

Chaque  communication  aura  en  principe  une  durée  maximum 
d'une  demi-heure  ;  elle  sera  suivie  d'un  échange  de  vues.  Des  résu- 
més des  communications  seront  imprimés  et  constitueront  un  syl- 
labus  permettant  de  suivre  avec  i)lus  de  fruit  les  travaux  du 
Congrès. 

Conformément  aux  usages  des  Congrès  internationaux  des 
Sciences  historiques,  les  communications  pourront  être  faites  en 
français,  anglais,  îillemand,  italien  ou  espagnol.  Les  nationaux  du 
pays  (jui  reçoit  ont  le  droit  de  parler  leurs  langues  nationales. 


CHRONIQUE  H27 

Il  est  loisible  aux  congressistes  de  faire  plus  d'une  coiumunica- 
tion,  à  condition  toutefois  qu'elles  soient  faites  dans  des  sections 
différentes. 


Excursions. 

Le  Comité  organisateur  prendra  des  mesures  pour  (ju'en  dehors 
des  journéts  vouées  au  travail  en  sections,  deux  journées  soient 
consacrées  à  des  excursions  Y)résentant  un  intérêt  historique, 
archéologique  et  artistique.  Ces  excursions  seront  conduites  par 
les  érudits  belges  les  plus  compétents  en  ce  qui  concerne  chacune 
d'entre  elles. 

Les  congressistes  auront  le  choix  entre  plusieurs  buts  d'excur- 
sion tels  que:  Bruges,  Gand,  Anvers.  Liège,  Xamur,  Tournai. 
Malines,  Louvain,  le  front  belge  de  l'Yser  et  les  ruines  dYpres, 
le  champ  de  bataille  de  Waterloo. 

En  dehors  des  heures  de  séance,  des  visites  aux  musées, 
églises,  monuments  civils  et  établissements  scientifiques  de 
Bruxelles  seront  organisées  sous  la  direction  de  spécialistes. 


Conditions  niutcricllcs. 

La  cotisation  au  Congrès  est  fixée  à  50  francs.  Des  cotisations 
réduites  sont  prévues  pour  les  membres  des  familles  de  congres- 
sistes, qui  désireraient  participer  aux  excursions  et  suivre  les 
séances  du  Congrès  sans  prendre  part  aux  débats. 

Elles  sont  fixées  ainsi  : 

Une  personne  supi)lémentaire,  20  francs: 

Toute  personne  en  plus,  15  francs. 

Les  étadiants  immatriculés  dans  une  université  et  les  élèves 
des  trois  classes  supérieures  des  établissements  d'instruction 
moyenne  paient  une  cotisation  de  10  francs:  ils  ne  pourront 
prendre  part  aux  débats. 

La  cotisation  doit  être  adressée  par  mandat  postal  au  trésuriei- 
M.  Ch.  Terlinden,  61,  avenue  Legrand.  Bruxelles,  ou  versée  soit 
au  compte  chèque  postal  n»  79428  au  nom  du  Congrès  interna- 
tional d'Histoire,  Bruxelles,  soit  au  compte  du  Congrès  intern:t- 
tional  d'Histoire  à  la  Caisse  Générale  de  Reports  et  Dépôts.  11, 
rue  des  Colonies,  à  Bruxelles. 

Le  Comité  organisateur  prendra  des  mesures  i)our  faciliter  aux 
eongressistes  le  logement  à  Bruxelles;  il  s'efforcera  d'obtenir  des 
hôtels  des  conditions  particulièrement  avantageuses. 


«28  CHRONIQUE 

Il  mettra  tout  en  œuvre  pour  rendre  aux  congressistes  le  séjour 
à  Bruxelles  aussi  agréable  que  possible. 


Le  Comité  organisateur  fera  parvenir  ultérieurement  à  toute 
personne  affiliée  au  Congrès  et  même  à  toute  personne  qui  expri- 
mera le  désir  de  les  recevoir,  tous  les  documents  nécessaires  au 
sujet  de  l'organisation  du  Congrès  :  programme  détaillé  des  tra- 
vaux, jîrogramme  détaillé  des  excursions,  renseignements  d'ordre 
matériel,  etc. 

Il  invite  tous  ceux  qui  portent  intérêt  aux  travaux  du  Congrès 
et  qui  n'ont  pas  encore  fait  parvenir  leur  adhésion,  à  renvoyer, 
dûment  rempli  et  signé,  le  bulletin  d'adhésion  ci-ioint  au  secré- 
taire. 

Celui-ci  se  tient  à  la  disposition  des  intéressés  lîour  leur  four- 
nir tous  les  renseignements  qui  leva'  paraîtraient  désirables  et 
pour  recueillir  les  annonces  de  communications. 

Le  bureau  ; 

Président  :  M.  H.  Pirexne,  professeur  à  l'Université,   126,   rue 

Xeuve  Saint-Pierre,  Gand. 
Vice-Présidents  :  R.  P.  Delehavk  S.  .T.,  président  de  la  Société 
des  Bollandistes,  22,  boulevard  Saint-Michel, 
Bruxelles  ; 
M.  F.  CuMONT,  professeur  honoraire  de  l'Univer- 
sité de  Gand,  19,  Corso  d'Italia.  Rome. 
Secrétaire  général  :  M.  G.  Des  Marez,  professeur  à  l'Université, 
archiviste  de  la  Ville,  11.  avenue  des  Klau- 
waerts.  Bruxelles. 
Trésorier  :  M.  Ch.  Terlinden,  professeur  à  l'Université  de  Lou- 

vain,  61,  avenue  Legrand,  Bruxelles. 
Secrétaire  :  M.  F.-L.  Ganshok,  docteur  endroit,  docteur  en  philo- 
sophie   et    lettres.    12,     rue     .Tacques    Jordaens, 
Bruxelles. 


Les  patois  flamands  de  la  Belgique. 

Le  Laboratoire  de  Phonétique  de  l'Université  de  Louvain  orga- 
nise une  enquête  générale  sur  les  patois  flamands  de  la  Belgique, 

11  a  déjà  fait  imprimer,  à  cet  effet,  une  première  liste  de  mots 
(.\-M)  qui  corresi)ond  à  i>eu  près  à  celle  de  van  Ginueken  et 
Schrijnen.  Les  demandes  de  renseignements  doivent  être  adres- 
sées à  M.  L.  Grootaers,  directeur  du  Laboratoire,  chaussée  de 
Namur,  162,  Héverlé-Louvnin. 


CHRONIQUE  829 

Une  uote  plus  détaillée  paraîtra  dans  notre  prochain  numéro. 
A  consulter  : 

L.  Grootaers.  Hoe  staut  lu-t  met  liet  welenschîippelijk  onder- 
jsoek  der  Zuidnederland.scJie  dinlecten'f  (Leziii};  gcliniukn  op  bet 
111"  Vlaamselic  Philologencongres  te  Gent  op  19  Septomlier  1920). 
S.  1.  n.d.,  br.  in-8°.  p.  49-62. 

L.  Grootaers.  Welenschappeli/k-  onderzoek  der  Ziiidncdcr- 
lundsche  dialecten.  (Overdruk  uit  ().  M.  O.  Maandblad  van  den 
Ylaamschen  Leeraarsbond  van  het  Officiecl  Middelbaar  Onder- 
wijs.  N°  9,  December  1921.,  S.  1.  n.  d.,  gr.  in-S".  4  p. 

L.  Grootakrs.  Taalîieoiiraphisch  onderzoek.  (Overgedrukt  uit 
Leuoenache  Bijdrafren,  Bijblad,  XIV,  1922,  1^''  afl.)  S.  1.  n.  d., 
1  feuillet  in  8». 


Le  •■  Spicilegium  Sacrum  Lovaniense  ". 

Le  Spicileginin  Sacrum  Lonaniense.  (Études  et  documents  pour 
servir  à  Vhistoire  def>  doctrines  chrétiennes  dej)uis  la  fin  de  l'âge 
apostolique  jusqu'à  la  clôture  du  concile  de  Trente),  dont  les  pre- 
miers fascicules  sont  sous  presse,  est  l'entreprise  collective  de 
l'Université  Catholique  et  des  Collèges  Théologiques  O.  P.  cl 
S.  J.,  de  Louvain.  Excluant  de  son  cadre  l'histoire  des  religions, 
l'histoire  du  Xouveau  Testament  et  la  théologie  biblique  propre- 
ment dite, il  embrasse  dans  ses  travaux  la  littérature  patristique 
et  la  littérature  ecclésiastique  médiévale,  avec  les  prolongements 
qu'a  eus  cette  dernière  jusque  dans  les  débuts  des  temps 
modernes.  Pour  l'Oi'ient,  le  Spicilegium  embrasse  la  même 
période,  en  faisant  une  place  spéciale  à  la  dogmatique  grecque 
qui  précède  le  schisme  du  xr-  siècle,  et  aux  controverses  gréco- 
byzantines  qui  ont  eu  dans  les  siècles  .suivants  quelque  écho 
en  Occident. 

La  publication  comprend  un  trij^le  genre  de  ti':ivau\  (lui 
paraissent  en  série  unique;  un  système  fort  simple  dindications 
numériques  et  littérales  permet  de  distinguer  aisément  les  trois 
sections  : 

1°  Etudes  'section  A)  :  travaux  d'ordre  critique,  liistori(|ue, 
littéraire  ou  doctrinal,  sur  les  écrivains,  les  œuvres  ou  les  idées 
de  la  période  indi<iuée. 

2°  Textes  (section  B)  :  publication  de  textes  inédits,  originaux 
ou  versions  anciennes,  et  réédition  critique  de  ceux  pour  lesquels 
pareil  besoin  se  fait  sentir,  soit  dans  la  période  patristique.  où 
il  reste  beaucoup  à   gluner,  soit  dans  la  période  médiévale,  qui 


B30  CHRONIQUE 

appelle  un  vaste  défrichement.  Les  écrits  de  l'époque  postpatris- 
tique,  carolingienne  ou  préscolastique,  le  groupe  des  liturglstes, 
des  ascètes  et  des  mj-stiques,  qui  s'échelonnent  du  xii*  au 
xvi^  siècle,  celui  des  canonistes  qui  commentent  la  Concordia  de 
Gratien  ou  les  Libri  Decretalium,  celui  des  commentateurs  des 
Senientiae  ou  de  la  Sacra  Pagina,  les  premiers  essais  de  théolo- 
gie morale,  les  Pénitentiels  et  les  Summae  Confessorum,  les  séries 
des  sermons  à  élément  dogmatique  ou  moral,  les  écrits  polé- 
miques des  pré-réformateurs  ou  des  partisans  des  théories  conci- 
liaires, etc.,  tout  cela  constitue  un  domaine  trop  peu  exploré 
encore  qui  promet  ample  moisson. 

3°  Documents,  ou  Instruments  de  travail  (section  C)  :  travaux 
d'approche,  nécessaires  ou  utiles  à  qui  veut  préparer  l'édition 
d'un  ouvrage,  pénétrer  son  contenu,  ou  api)récier  l'étendue  et  les 
raisons  de  son  influence  et  de  sa  diffusion.  Rentrent  donc  dans 
cette  catégorie  :  les  relevés  méthodiquement  élaborés  des  manus- 
crits théologiques,  ceux  surtout  des  dépôts  négligés  ou  mal  con- 
nus, les  catalogues  médiévaux  des  bibliothèques  monastiques  ovi 
ecclésiastiques,  les  listes  d'incipit  ou  initia,  les  listes  bibliogra- 
phiques des  textes  publiés,  authentiques.  pseudéj)igraphiques 
et  anonymes,  l'étude  des  particularités  paléographiques  des 
groupes  et  des  genres  d'écrits,  les  travaux  lexicographiques 
toujours  précieux  pour  l'intelligence  de  la  langue  d'un  auteur  et 
l'étude  de  son  influence,  etc.,  etc.  La  variété  dans  la  natui'e  de 
ces  sujets  et  de  ces  travaux  appelle  la  collaboration  de  compé- 
tences multiples. 

La  Direction  de  la  publication  se  compose  de  trois  membres 
pris  respectivement  dans  les  trois  Instituts  fondateurs  :  ce  sont 
actuellement  M.  le  Chanoine  Joseph  Lebon,  professeur  de  Patro- 
logie  et  d'Histoire  des  Dogmes  à  l'Université,  le  R.  P.  Raymond 
Martin,  O.  P.,  professeur  de  Théologie  et  Régent  des  Études  au 
Collège  Théologique  O.  P.,  et  le  R.  P.  Joseph  de  Ghellinck, 
S.  J.,  professeur  d'Histoire  des  Dogmes  et  Bibliothécaire  au 
Collège  Théologique  S.  J.  La  Direction  est  aidée  ])ar  un  Conseil 
composé  d'une  dizaine  de  membres  et  présidé  par  Mgr.  P  La- 
deuze,, Recteur  de  l'Université.  Les  attributions  de  chacun  sont 
déterminées  par  les  Statuts,  dans  les  conditions  qu'on  a  crues  les 
plus  aptes  à  assurer  la  valeur  scientifique  des  travaux  eu  même 
temps  que  la  bonne  gestion  matérielle  de  l'entreprise. 

Le  Spicilc'gium  Sacrum  Looaniense  ne  borne  pas  son  activité  à 
la  publication  des  œuvres  jugées  dignes  de  l'impression  par  la 
Direction  et  le  Conseil.  Pour  activer  les  recherches  d'histoire  des 
doctrines  chrétiennes,  il  fournira  une  aide  matérielle  aux  travail- 
leurs par  l'allocation  de  subsides  sagement  répartis  ;  il  jn'endra 


CHRONIQUE  A'A  \ 

à  sa  charge, en  tout  ou  eu  partie,  les  frais  oecusionués  pai-  la 
transcription  des  pièces,  la  photographie  des  manuscrits,  le 
séjour  dans  les  bibliothèques  étrangères.  A  cette  fin,  il  s'est 
assuré  le  concours  bienveillant  de  membres  protecteurs,  dona- 
teurs et  fondateurs,  qui  ont  généreusement  accepté  de  faire  face 
aux  premièx'es  nécessités. 

Les  trois  cents  premiers  souscripteurs  au  Spicileg-ium  ont  droit 
à  une  réduction  de  20  p.  c.  sur  le  prix  fort  de  chaque  fascicule. 
Prière  d'adresser  son  adhésion  de  souscripteur  directement  aux 
Bureaux  de  la  publication  (Louvain,  rue  de  Namur,  40).  La  Direc- 
tion du  Spicileg-iiiin  ose  espérer  que,  pour  les  souscripteurs,  le 
prix  d'un  volume  de  400  pages  environ  ne  déi)assera  guère  la 
somme  de  15  fr.  (port  en  sus). 

Voici  la  liste  des  premiers  travaux  qui  paraîtront  dans  le 
Spicileg-ium  Sacrum  Lovaniense  : 

1  et  2.  Saint  Jérôme  :  I.  Sa  oie.  II.  Ses  œuvres,  2  vol.  par 
F.  C.vv.vLLER.v,  professeur  aux  Facultés  catholiques  de 
Toulouse. 

3.  Pour  l'Histoire  du  mot  «  Sacramentum  ))  ;  I.  Les  Anténicéens, 

étude    lexicographique    par  E.    De  Backer,  .T.  Poukens, 
S.  J.,  F.  Lebacqz,  s.  .7.  et  J.  de  Gheli.inck,  S.  J. 

4.  La  Réform.e  Grégorienne  :  I.  Les  Grégoriens,  par  A.   Fi.kjhe, 

professeur  à  l'Université  de  Montpellier. 

5.  Discours  inédits  d'Eusèbe  d'Emèse  en  latin,  publiés  i)ar   Dom 

A.  WiUMAKT,  ().  S.  B.,  de  l'abbaye  de  Farnborough. 
(5.   Commentaire  critique  et  littéraire  des  «  Sentences  »  de  Pierre 
Lombard,  texte  inédit,  publié  par  J.  Hopmans,  professeur 
à  l'École  Coloniale  Supérieure  d'Anvers. 

7.  Les  œuvres  de  Robert  de  Melun  :  I.    Quaestiones  de  dioina 

pagina  et  Commentaire  sur  saint  Paul,  texte  inédit,  publié 
par  Raymond  Martin,  O.  P. 

8.  Marins  Mercator,  texte  et  étude,  par  J.  Lebon,   i)rofesseur 

à  l'Université  de  Louvain. 

9.  Le  «  Liber  septem  Custodiarum  ».  le  n  Registruni  Angliac  n  ri 

le  ((  Calalogus  n  des  Bibliothèques  Anglaises  de  Ji'an  Boston 
de  Bury  St-Edmond  [1410),  publiés  par  les  Bénédictines 
de  Stanbrooke  Abbey,  avec  introduction  histori(|Uc  i)ar 
MoNTAGUE  Rhodes  James,  d'Eton  Collège. 
10.  La  ((Formula  Spiritualium  Exercitiorum  n,  un  traité  de 
dévotion  moderne  (xv«  siècle)  sur  la  formation  s})irituelle 
des  novices,  publié  par  M.  Viller,  S.  .T.,  professem-  d'His- 
toii-e  ecclésiastique,  à  Eughien. 


83'2  CHRONIQUE 

11.  Traités   pseiidépigraphiques  et   anonymes    restitués   ù   Théo- 

doret  de  Cyr,  étude  critiqvie  par  J.  Lebon. 

12.  Etienne  de  Tournai,  l'écrivain,  le  penseur,  pai*  M.  Warichkz, 

archiviste  de  l'Evêché,  à  Tournai. 

13.  Notes  lexicog-raphiques  sur  les  écrivains  chrétiens  de  l'anti- 

quité, par  P.  DE  Labkioli.e,  professeur  à  l'Université  de 
Poitiers. 

14.  La  «  Summa  »  d'Ognibene,  publiée  par  A.Debii-,  S.  .T.,  profes- 

seur de  Rhétorique  au  Collège  Ste  Barbe,  à  Gand. 

15.  Les  œuvres  de  sainte    Hildegarde    :    ((  Scivias  »    et    «  Liber 

divinorum  Operum  »,  édition  critique  préparée  par  Dom 
L.  Baillkt,  O.  s.  B.,  publiée  par  les  PP.  Bénédictins  de 
St-Paul  de  Wisques. 
16-17.  Pour  l'histoire  du  mot  «  Sacramentum  »  .•  II.  Les  Docteurs 
du  IV^  siècle.  III.  Les  sources  liturgiques  antérieures  au 
X/®  siècle,  étude  lexicographique  par  Dom  Idesbai.d  Van 
IIouTRvvE,  O.  S.  B.,  etc. 

18.  La  tradition  manuscrite  des  sermons  de  saint  Augustin,   par 

Dom  A.  WiLMART,  o.  s.  B. 

19.  Un  commentaire  inédit  sur  Job.  attribué  à  saint  Jean  Chry- 

sostome,  publié  par  J.  Ruwet,  S.  .T.,  professeur  au  Collège 
Théologique  S.  J.,  à  Louvain. 

20.  L'incident   théologique  créé  par  Marre/ rfM/icyre,  étude  par 

J.  Lebon. 

21.  Les  œuvres  de  Robert  de  Melun  :  11.    Summa,   texte  inédit, 

publié  par  Raymond  Martin,  O.  P. 

22 .  Les  œuvres  liturgiques  d'Amalaire,  publiées  par  J.  Hanssens, 

S.  .T.,  professeur  de  Liturgie  à  l'Université  Grégorienne. 

23.  La  consultation  sur  le  baptême,  contenue  dans  le  manuscrit 

116  de  la  Bibliothèque  publique  d'Orléans,  et  autres  textes 
inédits,  publiés  par  le  même. 

24.  Paul  de  Samosate,  étude  historique  par  G.  Bardy,  professeur 

aux  Facultés  catholiques  de  Lille. 

25.  Les    livres   liturgiques  latins  de  Belg-ique,  par  É..  dk  Morkav, 

S.  .T.,  professeur  au  Collège  théologique  S.  .T.,  à  Louvain. 
D'autres  travaux  sont  en  préparation,  comme  les  éditions  du 
traité  de  Nicolas  de  St-Albans  sur  l'Immaculée  Conception,  de  la 
Summa  de  Simon  de  Bisiniano,  de  la  Summa  Canonum  de  Sicard 
de  Crémone,  de  la  Summa  de  Sacramentis  de  Mag-ister  Simon,  de 
diverses  Sommes  de  Sacramentis  du  xii*^  siècle,  de  la  Summu  de 
Pierre  le  Chantre,  de  l'œuvre  théologi<iue  de  Simon  de  Tournai, 
d'Etienne  Laugton^  de  Roland  de  Crémone,  de  Gautier  de  St  Vic- 
tor, des  fragments  exégéti(|ues  de  Sévérien  de  Gabala;  parmi  les 


CHRONIQLE  833 

études,  citons  celles  sut-  la  inulition  manuscrite  des  lioinélifs  de 
rère  i)atristi(|uc,  sur  la  bibliofi;rapIiie  des  couvres  de  (ïuiilaunie 
Occam,  sur  l'œuvre  de  Richai  d  de  Middletown,  sur  les  sermons 
de  la  fin  du  moyen  âge  relatifs  au  culte  :1e  la  Ste  Vierge  ou  à 
l'adininistration  des  Sacrements. 


Les  classiques  de  l'histoire  de  France  au  moyen  âge. 

II  nous  nianciuait  une  collection  de  format  commode  et  de  pi-ix 
abordable  réunissant  tous  les  textes  capitaux  sur  lesquels  est 
fondée  la  connaissance  du  passé  historique  durant  les  siècles 
féconds  du  moyen  âge  où  la  France  s'est  réellement  faite.  C'est 
cette  collection  (jue  la  librairie  Edouard  Champion  se  i)ropose  de 
publier  et  dont  elle  a  confié  la  direction  à  M.  Louis  Halphen, 
pi-ofesseur  à  la  Faculté  des  lettres  de  l'Université  de  Bordeaux. 

Les  textes  seront  édités  suivant  toutes  les  règles  de  la  critique 
érudite,  et  pourvus  d'une  annotation  historique  sobre,  mais 
précise.  Les  textes  latins  et  provençaux  et  ceux  des  textes  en 
vieux  fran(;ais  qui  présenteraient  de  sérieuses  difficultés  d'inter- 
prétation seront  toujours  accompagnés  de  traductions,  ((u'on 
s'efforcera  de  faire  tout  à  la  fois  fidèles  et  élégantes. 

La  nouvelle  collection,  dont  le  titre  rappelle  celui  d'une  autre 
collection  publiée  j^ar  M.  ^lario  Roques  à  la  même  librairie  {Les 
classiques  français  du  moyen  aii'e),  en  formera  le  complément  la 
<'olleetion  de  M,  Roques  continuant  à  se  consaci'er  à  la  publication 
des  textes  proprement  littéraires,  celle  de  M.  Halphen  étant 
réservée  aux  textes  proprement  historiques. 

Le  premier  volume  des  classiques  de  V histoire  de  France  au 
moyen  âge  paraîtra  au  début  de  1923.  La  publication  se  pour- 
suivra ensuite  régulièi*ement  à  raison  de  plusieurs  volumes 
l)ar  an. 

Voici  la  liste  des  premiers  ouvrages  dont  la  publication  est  dès 
maintenant  assurée  : 
Grégoire  de   Tours,  Histoire   des   Francs;  par    L.    Llvim.ain. 

professeur  au  lycée  Janson  de  Sailly. 
Frédégaire,  Chronique  :  par  L.  Levili..\in. 
Fortunat,  Poésies:  par  E.  (;.m,i,ktii;r.  i)rofesseur  à  la  Faculté  des 

lettres  de  Rennes. 
Vies  de  saints  de  l'époque  mérovingienne  (^sainte  Geneviève, 

saint  Rémi,  sainte  Radegonde,   saint  Ouen,   saint  Éloi,  saint 

Léger,  etc.)  ;  par  R.  F.v\vtier,  lecteur  à  ITiiiversité  do  Mau- 

chester. 


S34  CHHOMQl  E 

Égiuhard,  IVc  de  CJiarU'iiuii^iie  ;  par  L.  Halphkn. 

Le  Moine  de  Saint-Gall,  Histoire  de  Clmrlewag-nc  ;  ikw  L.  IIai,- 

l'IlKN. 

Éginhard,   Curre.sponduiuc  ;  ])iiv 'Si""  }\ï .  Bondois,  proïesseur  au 

lyct'c  Molière. 
Éginhard,  Hi.stuirc  de  lu  tranfilatiun  des  reliques  de  saint  Mur- 

cellin  et  de  saint  Pierre;  par  M"»  M.  BoNUOls 
Le  «  Codex  Carolinus  »;  par  L.  Halphen. 
Poésies  tarolinî>iennes  ;  \n\v  E.  Faral,  directeur  d'étude.s  à  l'École 

des  hautes  études. 
Recueil  de  capilulaires  carolingiens  ;   i^ar  G.    Lardé,   chargé  de 

cours  à  la  Faculté  de  droit  de  Nancy. 
L'Astronome,   Vie  de  Louis  le  Pieux;  par  L.    Barrau-Diuigo, 

bibliothécaire  à  la  Bibliothèque  de  la  Sorbonne. 
Ermold  le  Noir,  Poème  sur  Louis  le  Pieux;  par  E.  Faral. 
Paschase    Radbert,    L'épitaphe  d'Arsenius;  par   J.    Calmette. 

professeur  à  la  Faculté  des  lettres  de  Toulouse. 
Nithard,  Histoire  des  fils  de   Louis   le   Pieux;  par  Ph.   Laler, 

bibliotliécaire  à  la  Bibliothèque  nationale. 
Loup  de  Ferrières,  Correspondance  ;  par  L.  Levillain. 
Flodoard,  Histoire  de  V Église  de  Reims;  jîar  Ph.  Lacer. 
Gerbert,  Correspondance;  pai"  F.   Lot,  professeur  à  la  Faculté 

des  lettres  de  Paris. 
Richer,  Histoire,  par  R.  Latouche,  archiviste  du  département 

des  Alpes- Maritimes. 
Helgaud,  Vie  de  Robert  le  Pieux;  par  E.  Martin-Chabot,  archi- 
viste aux  Archives  nationales. 
Fulbert  de  Chartres,  Correspondance  ;  par  R.  Merlet,  archiviste 

honoraire  du  département  d'Eui"e-et-Loir. 
Adémar  de  Chabannes,  Chronique;   par   J.    de    Font-Réaul.\, 

archiviste  du  département  de  la  Drôme. 
Les  Miracles  de  saint  Benoît;  par  R.  Fawtier. 
Les  historiens  de  la  première  croisade  ;  j)ar  L.  Bréhier,  professeui- 

à  la  Faculté  des  lettres  de  Clermont. 
Baudri  de  Bourgueil,  (Euvres  choisies;  par  l'abbé  F.  Duine. 
Dudon  de  Saint-Quentin,  Histoire  des  premiers   ducs  de   Nor- 
mandie ;  par  H.  Prentout,  professeur  à  la  Faculté  des  lettres 

de  Cacn. 
Guillaume   de    Poitiers,    Histoire  de  Cuillaume  le  Conquérant  ; 

\)i\v  II.  Prentout. 
Orderic  Vital,  Histoire  de  Normajidie  ;  par  H.  Omont,  membre 

de  l'Institut,  conservateur  du  département  des  manuscrits  de  la 

Biltliothèque  nationale. 


CHHONIQIE  HMÔ 

Sug-er,  l'jV'.s'  de  Louis  VI  el  de  Louis  VJI  :  ]>:{v  II.  \\  ak^ikt,  îirclii- 
vislc  (lu  (lei)arto]m'nt  du  FinistÏTC 

Guibert  de  Nogent,  Mémoires  ;  pai-  L.  Mm.viuk. 

Ive  de  Chartres,  Correspondance:  pai'  A.  Fi.icm:.  ])r()lt'ssi'ur  à 
la  Faculté  des  lettres  de  Montpellier. 

Les  recueils  épistolaires  de  Suiiil-\'ictor  de  Paris:  ])ar.l.  Poijciiku, 
ineinl)re  de  l'I^coie  i'ran(,'aise  de  Rouie. 

Geoffroi  de  Vigeois,   Chronique ;'irciv  E.  MAiniN-CiiAiior. 

Villehardouin,  La  conquête  de  Constuntinople,  par  H.  I.K.M.^i  ire, 
bihliothéeaire  honoraire  à  la  Bibliothèque  nationale. 

Pierre  des  Vaux-de-Cernay,  Histoire  de  la  croisade  des  Allyi- 
i-eois,  par. T.  Cai-mkttk.  prol'e.ssenr  à  la  Faculté  des  lettres  de 
Toulouse. 

Guillaume  de  Puylaurens,  Histoire  delà  croisade  des  Albigeois  ; 
par  .T.  (Jai.mettk. 

Chanson  de  la  croisade  albigeoise  ;  par  F.  Mart;n-Cii.\bi)T. 

Geoffroi  de  Beaulieu,  Vie  de  saint  Louis:  par  M.  Ri.ocii,  pro- 
fesseur à  la  Faculté  des  lettres  de  Strasbourg. 

Sermonnaires  français  des  XW'-XIII^  siècles  ;  par  M.  Bi.och. 

IJnquêtes  et  documents  sur  la  société  française  au  XIII'  siècle. 
par  A.  DK  BoiiARD,  archiviste  aux  Archives  nationales. 

Textes  relatifs  ù  la  politique  religieuse  de  Philippe  le  Bel  et  à 
l'affaire  des  Templiers;  par  (J.  Lizerand,  professeni"  au  lycée 
Michelet. 

Bernard  Gui,  Guide  de  rinquisiteur,  par  l'abbé  G.  Mollat,  pro- 
fesseur à  la  Faculté  de  théologie  catholique  de  Strasbourg. 

Froissart,  Chroniques,  par  H.  Lk.maîtri:. 

Jean  de  Venette,  Chronique;  par  F.  Funck-Brentaxo,  secrétaire 
général  de  la  Bibliothèque  de  l'Arsenal. 

Jouvenel  des  Ursins,  Chronique;  par  L.  NLirot,  archivisic  aux 
Archives  nationales. 

Monstrelet,  Chronique;  par  L.  Cemer,  arcliivisle  aux  .\rchives 
nationales. 

Chastellain,  Chronique  ;  par  II  Stein,  conservateui"  aux  Aicliives 
nationales. 

Thomas  Basin,  Histoire  de  Charles  VII  el  de  Louis  XI . 

Commynes,  Mémoires  ;  par  J.  Cai,. mette. 

Pamphlets  et  libelles  de  la  guerr(  de  Cent  ans,  pai'  L    Mirot. 

Recueil  de  traités  et  documents  diplomatiques  des  XI IP'.  XIV' et 
AT*"  siècles:  l""'  série  (12591380),  par  J.  Viaru,  conservateur- 
adjoint  aux    Archives    nationales;    2     série   (1380-1422  :    par 

L.   MlROT. 

D'autres    volumes    sont    i)ronns.    notanuncnt    par    M.    Hcnii 
Pirenne,   professeur  à    l'I'niversité   de   Gand  :    ]>ar  Mgr   Lesne, 


H36  CHHONIQLE 

recteur  des  Facultés  catholiques  de  Lille;  par  MM.  P.  Alphan- 
déry,  directeur  d'études  à  l'Kcole  des  hautes  études,  F.  Benoit, 
membre  de  l'École  française  de  Rome,  C.  Bruuel,  professeur  à 
lEcole  des  chartes,  Pierre  Champion,  A.  Dumas,  professeur  à  la 
Faculté  de  droit  d'Aix,  G.  Dupont-Ferrier,  professeur  à  l'École 
des  chartes,  G.  Huisman,  professeur  à  l'École  alsacienne,  etc. 


L'  <(  Atlas  de  Géographie  historique  de  la  Belgique  » 
et  les  critiques  de  M.  Blok. 

L'on  nous  permettra  de  rappeler  que  nous  avons  entrepris, 
sous  la  direction  de  l'un  de  nous  deux,  la  publication  d'un  Atlas 
dp  Géographie  historique  de  la  Belgique  {^),  destiné  à  combler  une 
lacune  dans  la  collection  d'instruments  de  travail  dont  disposent 
les  historiens  et  qui  était  déjà  réclamé  par  les  érudits  belges 
réunis  au  Congrès  historique  et  archéologique  tenu  à  Gand 
en  1913. 

De  cet  Atlas,  trois  fascicules  ont  paru  jusqu'ici,  le  fascicule  5, 
contenant  la  carte  X  :  La  Belgique  en  i786  {Les  Pays-Bas 
autrichiens)  et  le  texte  y  afférant:  le  fascicule  6,  contenant  la 
carte  XI  :  La  Belgique  sous  la  domination  française  (1704-1814). 
avec  son  texte;  le  fascicule  7,  contenant  les  cartes  XII  et  Xlll. 
intitulées  respectivement  :  La  Belgique  dans  le  royaume  des 
Pays-Bas  {18M-:830)  et  La  Belgique  de  1830  à  1839,  avec  le  texte 
explicatif. 

Ces  trois  fascicules  ont  été,  de  la  part  de  M.  P.  J.  Blok,  l'his- 
torien hollandais  bien  connu,  professeur  à  l'Université  de  Leiden, 
l'objet  d'un  compte  rendu,  paru  dans  la  livraison  d'avril  1922  de 
la  revue  Muséum.  Si  nous  employons  le  terme  «  compte  rendu  » 
I)Our  caractériser  les  lignes  que  M.  Blok  a  consacx'ées  à  notre 
entreprise,  c'est  un  pur  euphémisme.  Car  il  s'agit  en  l'occurrence 
moins  d'un  compte  rendu  que  d'une  attaque  violente  faite  par  un 
liomme  savant  et  distingué,  mais  auquel  la  phase  critique  —  heu- 
reusement passée  !  — du  différend  hollando-belge  semble  avoir  fait 
perdre  complètement  le  calme  traditionnel  de  sa  nation.  Xous 
avons  riposté  à  M.  Blok  en  adressant  à  la  revue  Muséum  une 
réponse  détaillée.  Pour  les  raisons  que  l'on  verra  plus  loin, 
M.  Blok  n'a  pas  cru  pouvoir  publier  notre  réi)onse.  C'est  pour  ce 


('i  Atlas  (le  Gi-(t(/ra/)tiif  /nslorii/ue  de  la  Betf/iiiiic,  |>ul)lié  sous  la  diroclioii 
de  Lkon  Va>-  iiek  Kssen,  avec  la  collaboraiion  de  Fraii»;ois  !..  Gaiisliof, 
.1.  Maury,  l'ierre  Notlionib.  Bnixellos  et  Paris,  I.iltraiiio  naliDiiale  d'art  et  d'Iiis- 
toirr-,  G.  Van  Oest  et  (>\  éditeurs. 


CHRONIQUE  .         HJ7 

luotil'  que  nous  en  sommes  réduits  à  j)i'ol'iU'i-  aujoui-d'liui  tie  l'iios- 
pitalité  que  nous  offre  la  Revue  belge  de  philologie  et  tHiisluin' 
et  à  l'aire  .connaître  au  public  des  historiens  les  pièces  du  débat. 
Voici  donc  le  texte  du  «  compte  rendu  »  de  M.  Blok  : 

JuS(jiriii  noiil  paiii  de  cet  ;illas  qiu,'  les  trois  livraisims  iiiciitioniiéfs  ci-di'S- 
stis,  ({iii  me  tuinbèi'ciil  loiil  ici-eiiiiiieiit  t>ntri>  les  mains  et  <|iii  sont  |iri)l)al)l*'- 
iiioiil  très  peu  connues  ici  [en  Hollande]  :  je  n'en  vis  nulli'  pari  inn-  amionre. 
Il  semble  cependant  ijuil  vaut  la  peine  d'y  appeler  l'atlention. 

Le  texte  est  sobre  et  ne  mentionne  (|ue  ce  qui  est  absolument  indispensable. 
Le  tracé  (Maury)  des  quatre  cartes  données  dans  les  fascicules  panis  e.sl  à 
louer  en  tous  points,  il  est  clair  et  apparennnenl  exact.  .\  ce  point  de  vue,  on 
n'aurait  qu'à  dire  du  bien  de  cette  publication.  (.M.  Blok  cite  ensuite  les  titres 
des  caries. J  .Jusipiici  tout  parait  en  ordre,  mais  1'  «  averlissemeni  des  édi- 
teurs» qui  promettent  de  donner  t(uit  latlas  eomplet  encore  en  l'.Mit  —  ce  (jui 
nesl  pas  arrivé;  la  limite  est  déjà  larf^ement  ilépassee  de  deux  années  — 
pousse  de  suite  à  rellèchir.  Il  est  p.u'faitement  vrai  ce  (|ue  l'on  dit  la.  c'est-à- 
dire  qu'il  n'existe  |ias  dallas  liisioi-i(|ue  de  l!el^i'|Ue  convenable  et  que  dans 
ce  jiays  renseignement  en  a  grand  besoin  :  les  rédacteurs  de  nuire  atlas  liislo- 
ri(iue  en  savent  quelque  chose  eu  se  rappelant  comment,  vers  i'JOO,  on  Ut 
appel  à  notre  aide  du  côté  tlamand  et  comment,  lorsque  plus  lard  on  ne 
demanda  plus  cette  aide,  nous  avims  suivi  dès  lors  notre  chemin  —  un  chemin 
non  sans  épines  —  et  que  nous  pensons  atteindre  d'ici  deux  ans  noti-e  but  : 
l'achèvement  d'un  grand  atlas  hisloritiue  scienliliqiie  des  Pays-Bas. 

Mais  ces  «  éditeurs  »  f)  travaillaient  aussi  en  l!H!)  pour  «  la  propagande 
à  l'étranger»,  comme  ils  le  dèclarcnl,  et  furent  d'avis  de  faire  paraître 
d'abord  ces  cartes-ci  «  au  moment  des  négociations  de  la  |)ai\  cl  pour  la  ()ré- 
paration  de  ces  négociations  qui  amèneront  sans  doute  sur  cerl;uns  points  une 
rectification  de  nos  frontières  ».  Ils  avaient  surtout  en  vue  les  u  di|)lomates 
belges  »  qui  avaient  besoin  d'un  «  instimnent  de  travail  sèrieiix,  dressé  scicn- 
tiliquement  et  jouissant  par  la  garantie  de  ses  auteurs  d'une  iriionie^i.ilile 
autorité  ». 

Vritsit  : 

-Vverti  de  la  sorte  au  sujet  de  l'objet  propre  (polilitpie)  de  celle  publica- 
tion, je  regardai  avec  intérêt  et  les  caries  et  le  texte.  J'étais  d'ailleurs  déjà 
averti  par  une  protestation  sérieuse  et  digne  parue  dans  la  livraison  de  janvier 
de  la  revue  anglaise  Hislori/,  de  la  main  de  l'historien  anglais  .Neale.  Kl  que 
trouvé-je?  ('/est  presque  incroyable,  mais  les  cartes  parlent  «ussi  clairenn>nl 
(|ue  possiltl»!  au  sujet  de  ce  (|ui  suil  —  et  c'est  là  au  moins  un  unTile  dans 
cette  très  mauvaise  cause. 

L'objection  n'allecle  jtas  la  carte  de  IT8G  (n'  X)  <|ui  a  bonne  apparence  et 
qui  présente  aussi  de  l'intérêt  pour  nous,  cuire  autres  par  le  carton  concer- 
nant les  situations  de  frontières  changeantes  près  de  l'Kcluse  et  .\ardenburg. 
au  xvin"  siècle.  L'objection  n'alléetc  pas  noji  plus  t.iiit  la  carte  (n"  XL  de  la 


('j  Qu'on  veuille  liiiMi  remari|iier  que  M.  Itlok  indique  ici  lui  nn  ino  qu  il 
s'agit  en  l'occuiTence  d'un  iirospeclus  des  cV/i^ci/r.*.  et  non  du  dirciiiMir  et  des 
collaboi'ateuis  de  l'.itlas,  Oux ci  n diil  jamais  eu  rien  de  commun  avec  ce 
prospectus. 


83s        .  CHRONIQUE 

«  domiiiatioii  IVaiiraise  ».  Il  est  quelque  peu  clriui^^'  {hedeiikclijkj  que  l'on 
parle  lonstaïunieut  de  «  la  Belgique  »,  daus  le  texte  et  la  carte,  alors  qu'on 
aurait  dû  |>arler  des  ci-devaut  «  Pays-Bas  autrieliieiis  ».  consistant  eu  quatre 
parties  séparées  :  la  (uincipauté  ecclésiastique  de  Liège,  les  abJ)ayes  princières 
de  Staveiol  et  de  .Malniedy,  la  partie  prussieiuic  {de  Pruisisclie)  et  les  Pays-Bas 
aulrirliiens  iiropreiuenl  dits.  Mais  c'est  à  i)ardoimei'  :  aussi  sur  notre  carte 
pour  le  moyen  âge,  un  anticipe  déjà  sur  la  République  de  plus  lard,  comme 
ici  on  anticipe  sur  la  Belgique  7/»  n'a  vu  le  jour  (i)  qu'en  1830-1839.  On 
auiait  toutefois  dû  insister  expressément  dans  le  texte  sur  le  fait  que  les  Pays- 
Bas  autricliiens,  Liège,  etc.,  furent  en  1794  simplement  annexés  à  la  France, 
sans  (/it'il  /Vit  créé  aucun  rapport  réciproque  entre  ces  nouveaux  dé|iartements 
français —  tout  à  la  différence  de  ce  qui  se  passa  chez  nous  où,  sous  Lebrun, 
«  la  Hollande  »  resta  de  fait  un  tout  cohérent. 

C'est  à  ces  nouveaux  départements /"rama/s  (non  belges)  que  furent  ajoutés 
la  Flandre  des  États,  cédée  par  nous  en  179')  par  la  paix  de  La  Haye  à  la 
France  (non  à  la  Belgique),  de  même  qiw,  les  pays  de  généralité  de  la  région 
du  Limbourg  avec  Maastricht,  Rurenionde  et  Venlo,  tout  comme  au  printemps 
de  1810  la  partie  occidentale  du  Brabant  septentrional  alors  cédée  à  la  Franc?, 
r  «  arrondissement  «  de  Brcda,  etc.  La  Flandre  des  États  fut  jointe  au  dépar- 
tement de  l'Escaut,  Brcda  à  celui  des  Deux-Nèthes,  Maastricht,  etc.  à  celui  de 
la  Meuse-Inférieure.  Ces  régions  sont  coloriées,  avec  raison,  sur  la  carte  XI  de 
la  même  façon  que  les  départements  fraiiçais  en  question. 

Mais  tout  à  fait  inexacte  —  et  certainement  pas  sans  intention,  étant  donné 
le  but  de  la  publication  —  est  la  représentation  sur  les  cartons  annexés  [à  la 
carte]  de  1'  «  organisation  judiciaire  »  et  «  ecclésiastique  des  départements  de 
la  Belgique»  en  1812,  où  toute  la  Zélande,  le  Brabant  septentrional,  le  Lim- 
bourg et  une  grande  partie  de  la  province  rhénane  sont  coloriés  sans  plus 
dans  le  sens  «  Belgique  »  !  Et  dans  le  texte,  pas  un  mot  pour  éclaii-er  à  ce  sujet 
les  pauvres  «diplomates»!  On  se  rappelle  ici  certains  vœux  exorbitants 
du  fameux  «  Comité  de  politique  nationale  »,  où  le  «  collaborateur  »  Noihonib 
joue  le  premiei'  rôle,  et  l'on  est  porté  à  sourire  au  sujet  de  celte  présentation 
apparemment  innocente. 

Cela  devient  bien  plus  grave  à  propos  des  caries  \il  et  XUI.  La  caitc  Xll 
donne  «  la  Belgique  dans  le  royaume  des  Pays-Bas  (181 1-1830)  ».  Kl  que  voit-on 
làVXon  seulement  que  tout  le  Lindiourg,  jus(jue  Mook,  est  maniiié  comme 
(c  Belgique  »,  comme  «  province  belge  ».  On  pourrait  encore  passer  outre,  en 
souriant.  Inadnussible  {ergerlijk),  au  contraire,  est  le  fait  que  sur  celte  carte  la 
Flandre  zélandaise  et  l'ouest  du  Brabant  septentrional  sont  coloriés  en  jaune, 
avec,  dans  le  texte  et  dans  la  légende,  la  mention  «  perdus  (en  1813-181  i)  ». 
On  donne  donc  la  présentation  inexacte  d'après  laquelle  la  Flandre  zélandaise 
et  Brcda  jusque  près  du  Biesbosch  ont  été  annexés  en  I79i  et  en  1810  par  la 
Belgique,  et  non  par  la  France,  comme  ce  fut  le  cas,  en  réalité.  On  saisit  l'inten- 
tion —  et  elle  est  inadmissible  (ergerlijk)  !  L'auteur  du  compte  rendu  dans  His- 
'torg  emploie  donc  avec  raison  le  mot  «  falsification  »  ('). 


(')  C'est  M.  Blok  (pii  souligne  {eerst  ontstane). 

(^)  Ceci  est  faux.  M.  Blok  a  probablement  oublié  de  contrôler  sa  citation, 
car  .M.  Neale  emploie,  dans  .son  compte  rendu,  à  propos  de  la  couleui'  des 


t:HI!()MUI  K  ^•*'' 

Nous  nous  |)iTiiicll(iiis  (le  p;irh'i-  ici  de  "  lriiiii|ir-l  ii-il  »  ili(icrr/ihrilri>(/)  cl 
nous  sonimos  poiiK'  de  ce  (jiic  ce  lri|)ii|;im;  ((/riloi')  se  fiiil  sous  la  n  dii-rctioii  » 
diiH  savani  csliuiô  coinnic  le  |irolVssonr  V;ui  dci-  Kssen  (M  :i  clr  piildir 
<Mi  1019  «  avoc  les  riicourafrfnMMils  du  ^ouvciiicuirnl  l»el{ço  »  cl  «  lioiion-  d'unt- 
souseriplion  du  .Miiiislèro  des  Allinn's  (''Iranjfcrcs  de  |{ol(îi(|U('  ».  I.'auleur  du 
texte  de  ces  cartes.  M.  i".  (laiislior,  (ju)  luVsl  inconun,  est  la  |ircniière  pcr- 
sonue  responsaltle. 

Ileureusenienl.  la  iiieiilalilc  des  aiiuexiinini.sles  a  niairilciianl  ijocl<pie  peu 
«•liangé  et  nous  i)ouvons  donc  espérer  (pie  ces  doux  caries  XII  et  XIII  soi'oiit 
relin'es,  car  une  faNiliealion  .sclentifi(|ue  couime  celle  <i  ne  jieul  être  tolérée 
plus  loufitenips  :  elle  induirait  les  «  diplomates  »  en  erreur. 

L'honueur  de  la  science  liislori(|ue  en  nelj-Mi|ue,  liiilcrci  de  nos  bonnes 
relalions  récipro(pies  lexificnt  iuipérieusenieiil. 

Puni'  le  resie,  nous  allendnns  volontiers  lescai'les  I  à  l\. 

Leiden.  I'.  .1.  lîmk. 

Voilà  le  réciuisitoire  et  Ton  constatera  qu'il  demande  l'appli- 
cation de  la  peine  capitale,  «  dans  l'intérêt  des  bons  rapjtorts 
entre  la  Belgique  et  la  Hollande  ». 

Xous  avons  l'épondu  à  cette  attaque  par  l'envoi  au  Musniiu  de 
la  letti'e  que  voici,  éci'ite  en  notre  nom  collectif  : 

-Nous  avons  pris  connaissance  avec  une  véritable  stupeur  du  compte  icndu 
crili(|ue  que  M.  P.  .T.  Bi.ok  a  consacre  dans  le  Muséum  du  !<■'"  avril  lit:2:î  aux 
l'ascicules  jtarus  do  VA'Ias  fie  Gcurjrnphie  historique  de  lu  Bvl(ji<iue.  Le  ton  en 
est  si  violenl  et  les  imputations  (|ui  nous  \  sou!  faites  si  blessantes,  (pic  nous 
nous  sommes  considérés  coninie  obligés  d'y  icpoudre. 

Nous  prenons,  chacun  «n  ce  ipii  nous  concerne,  l'enliéi-e  resjionsabililc  du 
texte  et  des  cartes  de  VAllas. 

Nous  avons  conscience  d'avoir  lait  uni(piemenl  œuvre  de  science  sans  tpran- 
cune  considéiMlion  d'ordre  politiipu'  ail  i)U  nous  détourner  de  la  \oic  (h^ 
l'objectivilc. 

(lar  tel  est  le  londs  connnun  des  reproches  (|ue  nous  adresse  .M.  lilok,  et  ipie 
nous  nous  propo.sons  «le  passer  successivement  en  revue  : 

I.  Nous  ne  nous  attarderons  pas  aux  chicanes  (|ue  n;ius  cherche  M.  Hlok  à 
propos  dini  «  averli.ssement  des  ('dileurs»  paru  en  lîHi),  avec  le  premier  fas- 
cicule. Il  croit  y  di-couvrir  la  preuve  (pie  la  piiltlicatinu  est  conçue  e>-eiitie|- 
lemenl  dans  un  but  politicpie. 

A  vr;ii  dire  'S\.  Blok  nous  étonne  ;  deiuiis  i|iiaiid  ju^'^e-1  i>ii  une  oinre  scieu 
titiijiu"  sur  un  prospe-lus  d'éditeurs'.' 

II.  Le  fascicule  V  -  paiii  le  premier  —  coniient  la  carte  (\>  de  la  Rel^'i(pn' 
en  178(5,  avec   le  texte  explicatif.  Il  a  trouvé  '^vi\er  aux  yeux  de  M.  Itlok.  Toiil 


caries,  l'expression  «  su^jjcstio  fais!  »,  ce  (|ui  est  tout  difl'erenl.  et  en  tou> 
cas,  lias  injurieux.  11   nous  sera   permis  de  sij^nalcr,  a  c('ilc  du  compte  rendu 

(le  M.  Neale.  (pii  n'admet  i)as  l'exisl e  d'une  m  |{elj;i(pie  »  antérieure  à  IK;iO 

(piestioii  de  mots  — .  les  comptes  rendus  elo^icux  consacres  a  notic  travail. 

et  Molamnicnt  celui  ou  M.  Aulard.  parlant  de  la  notice  ai(dm|>agnant  la  carte 
.(  la  r>el^i(pic  sous  la  domination  françai.se  »  dit  :  «'  On  ne  peut  ('-Ire  mieux 
(lo(  iinienté  sur  le  sujet,  ni  plus  clair,  ni  plus  insiruclif.  » 


8-10  chkoniq';e 

:>u  plus  MOUS  f;iit-il  observer  qu'il  i'ù(  mieux  valu,  au  lieu  do  |iail('r  de  Belgiiiue 
«  in  tckst  ou  kaarl  »,  parler  des  Pays-Bas  autricliiens,  de  la  principauté  lio 
Liège,  eto. 

Nous  aimons  à  croire  qu'il  y  a  là  de  la  pari  do  M.  Blok  une  siuiiije  iuallen- 
lio»  :  on  lôle  du  texle,  comme  eu  t«Mo  do  la  carlo  ligure  en  dessous  du  titre 
(La  Bei.gioie  en  1781)),  un  SDUS-tilrt!  ainsi  conçu  :  Les  Pai/s-Has  aiilrir/iiens, 
les  itr'mdpautcs  de  Liège  et  de  SluvcJol-MdlmeiUj,  le  thiclié  de  Bouillon... 
Aucune  confusion  u'elail  donc  possible. 

IIL  Le  fascicule  VI  {Lu  Belgii/ue  sous  l((  do)nitiuiioti  fianndse  |179il81i], 
carte  XI  et  texte)  nous  a  valu  quelques  reptoclios  plus  graves  ; 

1.  M.  Blok  nous  fait  grief  de*  ne  j)as  avoir  fait  ressortir  le  fait  que  les  Pays- 
Bas  autrichiens,  Liège,  etc.,  ont  été  annexés  individuellomeni  à  la  Franco 
eu  1794  et  non  pas  en  tant  cpu'  formant  un  ensemble. 

Maniuons  une  nouvelle  fois  notre  clonneinent  devant  la  légèreté  avec  laquelle 
M.  Blok  nous  a  lus  :  pages  \  et  2  du  texle  nous  donnons,  article  par  article, 
l'analyse  de  la  loi  d'annexion  du  î)  vendémiaire  an  IV  (l'""  octobre  1795  —  ol 
non  1791  comme  parait  le  croire  M.  Blok).  On  peut  y  lire  un  article  l*"''  portant 
aiuiexion  des  pays  de  Liège  et  de  Stavelot,  puis  des  articles  2,  3  et  4  portant 
annexion  des  Pays-Bas  autrichiens.  Suit  une  loi  du  -4  brumaii'c  an  IV 
(2(5  octobre  179o)  portant  annexion  de  l'ancien  duché  de  Bouillon.  Le  lecteur 
appréciera  si  les  distinctions  nécessaii'cs  ont  été  faites. 

2.  M.  Blok  éprouve  le  besoin  d'insister  sur  le  lait  que  c'est  à  la  l-'rancc  et 
non  à  la  Belgique  qu'en  1793  et  en  1810  certains  territoires  (Flandre  z(*lan- 
daise.  Pays  niosaus,  arrondissement  de  Bréda)  ont  été  cédés  par  les  Provinces- 
l  iiies  des  Pays-Bas  ou  le  royaume  de  Hollande. 

Ici  encore  cependant  aucune  confusion  n'était  possible  :  M.  Blok,  s'il  s'en 
était  donné  la  peine  —  comme  c'était  son  devoir  —  aurait  pu  lire,  page  3  et 
page  10  du  texte,  des  analyses  des  traités  de  La  Haye  (27  lloreal  an  III 
=  1(5  mai  1793)  et  de  Paris  (16  mars  1810)  oii  il  est  dit  en  toutes  lettres  i.\\w 
les  territoires  dont  il  vient  d'être  question  sont  réunis  à  la  France. 

3.  Enlin  M.  Blok  nous  fait  le  reproche  injurieux  d'avoir,  dans  un  but  jioli- 
tique,  donné  une  représentation  fausse  de  la  situation,  dans  les  cartons  relatifs 
à  l'organisation  judiciaire  et  à  l'organisation  ecclésiasti(|ue  des  «  départements 
de  la  Belgiipie  »  on  1812.  Nous  aurions  colorié  de  la  même  teinte  (|ue  les 
de])artemenls  belges,  la  Zélande,  le  BrabanI  septentrional,  leLimbourg  el  une 
grande  partie  de  la  province  rliénain\  et  cela  sans  un  mot  d'exi)licalion  dans 
le  texte  ! 

Nous  avons  en  elTel  colorié  en  teintes  uniformes  tout  le  ressort  des  cours  de 
Bruxelles  et  Liège  et  une  parti«>  de  celui  de  la  cour  de  iMetz,  tout  le  ressort  de 
la  jtrovince  ecclésiastique  de  .Malines  et  une  partie  de  celle  de  Besançon. 

Mais  le  lecteur  trouvera  aux  pages  11  et  12  du  texte  deux  notes  siu'  l'orga- 
nisation judiciaire  et  ecclésiastique,  dans  lesquelles  la  distinction  est  nette- 
ment faite  au  sein  du  ressort  de  chaiiue  cour  ou  à  l'intérieur  de  chaque 
province  ecclésiasticpie  entre  les  «  déparlements  belges  »  et  les  autres  dèpar- 
lemeuts  souinisà  la  mémo  cour  ou  au  même  archové(pie.  Voilà  M.  Blok  |)risen 
llagrant  délit  de  contre  vérité. 

I)  ailleurs,  les  cailons  figureiil  sur  la  uiênu'  fouille  que  la  carte  des  départe- 
uieiils  de  la  Belgi(pn'  en  1812  :  ceux-ci  ne  c(uuprenanl  ni  la  Zélande,  ni  le  lira- 


CHRONIQUE  X4\ 

liant  scplciiti'ioiial,  ni  la  |ir<iviiirc  rhénane,  il  ne  |)<invail  iiaiire  tie  nmrnsiun 
(|ue  dans  l'esprit  de  eenx  (jni  vnulaienl  la  faire  naître,  l.e  l.iinbinnv  et  l'arrun- 
disseniont  de  IJréda  sont  ici  hors  de  cause  puisiine  —  M.  Mnk  le  leninnuit 
—  ils  étaient  réunis  depuis  17Î).")  et  I8|tl  aux  déiiarlenuMils  de  la  Meuse-Infé- 
rieure et  des  Deux-Nètlies. 

IV.  Le  fascieulo  VU  [eartes  \ll  et  Mil,  avee  textes  :  l.(i  Uclf/iiiur  dans  Ir 
royaume  des  Foi/s-lias  (18I1-I830)  el  Lu  Brlyifpie  de  I8.W  à  IfiH'j].  a  fait 
dépasser  à  M.  Hlok  tonte  nu-sure  —  voire  même  toute  eorroi'lion  —  dan?>  ses 
appréeialions. 

1.  M.  Blok  se  contente  de  soiu'ire  en  voyant  la  province  de  Lindinur^^ 
comptée  de  181  i  à  1880  comme  l'une  des  pr(»vinces  lieljres  du  Royaume  des 
Pays-Bas.  Ce  sourire  est  bien  superlln  :  le  l.imhoury;  fui  compté  comme  pro- 
vince belge  par  la  Loi  fondanu-ntale  de  18l.'i,  le  roi  Guillaume  I  et  sou  ministre 
de  Hogendor|i  icfr.  Loi  fondamentale,  art.  79  et  Colenbiander  :  On/slmin  iler 
Grondicet,  t.  Il,  p.  i.xxvi,  i.xxxi,  151,  :2t5-2t6,  :27i-:27o). 

2.  M.  Blok  se  fàelie  parce  que  dans  la  même  carte,  la  Flandre  zéiandaise  et 
rarrondissemcnl  de  Bréda  sont  coloriés  en  jaune  el  indiiiués  comme  «  iierdus » 
(en  1818-1811)  dans  le  texte  el  la  légende  :  ce  ijui  mériterait,  assure-t-il.  dèlre 
(lualilié  «  boerenbedrog  »  (tromperie  de  paysan)  parce  i|ue  ce  serait  l'aire  croire 
(pie  ces  territoires  auraient  été  reunis  en  17!»")  et  en  I81U  à  la  Uelgique  et  non 
|»as  à  la  France  ! 

Faisons  remanjucr  daboid  que  le  nnil  c(  perdus  »  ((jui  ligure  dans  le  litre 
de  la  carte  el  non  dans  le  texte  el  dans  la  légende,  comme  l'atlinne  erronément 
M.  Blok;  ne  tend  en  aucune  façon  à  faire  croire  ce  que  .M.  Blok  lui  fait  dire. 

Il  ligure  en  ellel  dans  un  sous-titre  ainsi  conçu  :  «  Les  Provinces  belges  du 
Royaume  au  1"^''  janvier  1825  et  les  territoires,  ayant  fait  partie  des  départe- 
ments de  la  Belgique,  perdus  en  181  i  el  I81.'>  ».  Le  mot  «  perdus  »  ne  porte 
pas  ici  sur  «  provinces  he/f/es  ». 

De  plus,  le  lecteur  sait  par  la  carie  jirécédenle  el  le  texte  annexé  qiu'  les 
«  déparlements  de  la  Belgique  »  sont  les  anciens  territoires  belges  réunis  à 
la  France  en  179.'). 

11  sait  aussi  <[uen  I7tl.j  et  en  1810,  Flandre  /.elandaise  el  arrondissement  de 
Bréda  ont  été  annexés  à  la  France  et  reunis  à  deux  de  ces  «  départements  de 
la  Belgique  ». 

L'emploi  de  la  couleur  jaune  el  la  mention  <«  per(iu^  »  .■^onl  d  ailleurs  justiliés 
par  la  légende  oii  il  est  dit  que  celte  couleiu'  indique  les  «  Territoires  ayant 
fait  partie  des  départements  de  l'Kscaut  et  des  Deux  Nèllies,  cl  réunis  à  des 
provinces  liollandaises  du  Royaunu'  des  Pays-Bas  »,  ce  ipii  est  incontestable- 
ment le  cas  pour  la  Flandre  /élaiulaise  el  l'arrondissement  de  Bréda. 

Kniin  la  nuMition  «  perdus  »  trouve  sa  jusliticatinn  couiplcle  dan.^  ces  mots 
que  M.  Blok  aurait  dû  lire,  p.  0-l(i  du  texte  de  la  cane  XII  ; 

«  Conipitri'C  aiir  iifii/'  ilvpartemeuls  i/ii'eUi-  formai/  dann  Ifiii/iirr  friiiuids, 
la  Belgiipie,  dans  le  Royaume  des  Pays-Bas.  a  subi  d'inqiorlantes  anqiulations. 

«  .\u  nord,  la  Flandre  zélandai.se.  raltacliée  au  département  de  TK-scaul,  et 
l'arrondissement  de  Bréda,  qui  faisait  partie  du  département  «les  Deux-Néllies 
depuis  1810,  ont  été  réunis  aux  provinces  Imlland.ii^es  de  Zelande  el  du 
Brabant  septentrional...  ». 


842  CHRONIQUE 

Si  jamais  le  mol  «  perdus  »  a  pu  i)nivo(im>r  un  (IkuIc  dans  l'esprit  d'un 
leficiir,  ce  lexle  doit  le  dissiper,  il  n'y  a  pas  d'and)i^Mnté  possilde.  M.  Hlok 
nous  a  elierclié  une  méeliante  querelle  et  nous  a  eliarj^és  de  sdupcons  injurieux- 
Ceux-ei  ne  peuvent  uuirequ'à  sa  propre  répulalion  d'IiDunue  de  seieiice.  Nous 
ref^rellons  de  rencontrer  eliez  l'auteur  d'cruvirs  léi^ilimement  réputées  tant 
de  légèreté  et  si  peu  de  eonscieneo. 

Nous  vous  prions,  Messieurs,  de  bien  vouloir  insérer  la  présente  réponse 
dans  le  plus  prochain  numéro  du  Mnseiun  et  nous  vous  prions  d'agréer 
l'expression  de  nos  sentiments  les  plus  distingués. 

(signé)  Fr.vnçois-L.  Ganshof.  (^'g'ié)  I-  Van  i>kh  IIsskn. 

Gand.  Louvain. 

7,  avenue  Sainl-DcMiis.  1:21,  Hoidevard  deTirlemont. 

Comme  nous  l'uvous  dit,  M.  Blok  ne  crut  i)as  devoir  publier 
cette  lettre  dans  le  Muséum,  mais  il  inséra  dans  le  numéi-o  de  juin 
de  sa  revue  la  déclaration  suivante  : 

«  Messieurs  Van  der  Essen  et  consorts  <tnt  cru,  et  non  it  tort,  devoir  se 
défendre  contre  mes  observations  au  sujet  de  leur  Allas  (voir  Mus.  l"  avril, 
col.  109  sv.).  Ils  le  firent  dans  une  anli-crilique,  sorte  de  chose  à  laquelle 
nous  ne  pouvons  donner  une  place  dans  notre  revue,  surtoid  lorsqu'elle  est 
aussi  étendue  que  celle  qui  nous  fut  envoyée.  Dans  ce  cas-ci,  où  il  s'agit 
d'étrangers  et  d'une  publication  qui  ne  fut  pas  envoyée  à  la  rédaction,  nous 
croyons  devoii-  mentionner  cette  anti-critique.  Ces  messieurs  ne  se  considéreni 
donc  c(  pas  responsables  »  pour  «  l'averLissement  des  <'dileurs  »  où  le  but 
politi(|ue  delà  pu!)lication  était  si  fortement  mis  à  l'avant-iilan  :  ce  n'est  qu'un 
pi'ospectus,  disent-ils.  Knsuile,  ils  renvoient  à  un  certain  nombres  de  passaiies 
dans  le  texte,  où  la  signilication  de  la  présentation  faite  sur  la  carte,  disent-ils, 
est  nuidue  claire,  et  ils  sont  d'avis  que  ces  jjassages  [irouvent  ipie  les  rédac- 
teurs étaient  loin  d'avoir  une  mentalité  tendancieuse  et  que  les  indications 
des  cartes  sont  totalement  inoffensives.  Par-contre,  ils  m'accusent  de  «  chercher 
querelle  »,  de  «  travestir  intentionnellement  la  vérité  »,  d'  «  être  superficiel  » 
et  antres  incongruités  (narigheden)  de  ce  genre.  Je  ne  m'y  ai'rêterai  pas,  aussi 
parce  que  je  devrais  entrer  dans  trop  de  détails  pour  expliipier  davantage 
mes  griefs  très  sérieux  au  sujet  des  cartes. 

Kspérons  que  les  livraisons  suivantes  —  j'es|)ére  beaucouji  (pTeiles  paraîti'oni 
vite  !  —  pi'ouveronl  que,  malgré  toutes  les  singularités  dans  les  pn'smlrs 
livraisons,  «  le  but  unique  était  [cependant]  de  livrer  du  travail  scientifique  »  : 
pour  les  livraisons  X,  XI  et  XII  je  maintiens  mes  observations  (heiletihi/if/nt): 
tout  on  accordant  ))ien  volontiers  que  le  texte  et  les  cartes  sont  insépaiables, 
je  reste  d'avis  que  1"  «  éclaircissement  »  du  texte  ne  l'ail  aucinienienl  dispa- 
raître les  défauts  des  caries  ». 

Xous  n'ajouterons  aucun  commentaire  à  cette  déclaration  :  nous 
ne  désirons  point  envenimer  le  débat.  Constatons  simplement  que 
M.  Blok  semble  avoir  retiré  le  terme  injurieux  de  «  falsification  » 
et  qu'il  ne  parle  plus,  dans  sa  déclaraticm  actuelle,  que  dos 
((  défauts  »  des  cartes.  C'est  là  une  opinion  (ju'il  a  le  droit  d'avoir. 


CHRONIQUE  843 

quitte  à  on  déiiioiiti'cr  le  bieii-rondé.  Nous  croyons  toutefois  (jue 
tous  ceux  ([ui  auront  lu  le  dossier  «jui  précède  seront  d'accord 
avec  nous  pour  estimer  qu'il  était  nécessaire  de  livrer  s'i  lu 
publicité  la  réponse  que  nous  fîmes  au  «  compte  i-endu  n  du  savant 
biographe  de  Guillaume  le  Taciturne. 

FuAxrois-L    (iANsiioF.  Lkon   \  an  dku   lOssr.N. 


NECROLOG-IE 


Jules  Lameere. 

Jules  Lameere  mérite  d'être  rangé  au  nombre  des  grande 
magistrats  qui  ont  fait  l'bouneur  de  la  Belgique.  Comme  les 
Defacqz,  les  Faider,  les  Kaikem,  les  Laurent,  les  Delecourt,  les 
De  Paei)e,  les  Mesdagli  de  ter  Kiele,  il  a.  par  sa  science  et  son 
caractère,  contribué  à  faire  mériter  à  la  magistrature  la  baut-j 
estime  dont  elle  jouit  légitimement. 

Xé  à  Ypres,  le  19  mai  1837,  Jules  Lameere  entra  dans  la 
carrière  en  1861,  en  qualité  de  substitut  du  ])rocureur  du  roi,  à 
Ypres.  Procureur  général  i)rès  la  Cour  d'ai)pel  do  (iand  do  1880  à 
1890,  il  sut,  dans  des  circonstances  difficiles,  faire  respecter 
l'indépendance  du  ministère  public.  Plus  tard,  sa  profonde 
connaissance  du  droit  et  son  inflexible  conscience  lui  valurent  à 
la  Cour  de  Cassation  —  dont  il  fut  premier  président  —  une  situa- 
tion tout  à  fait  éminente. 

Seule  cependant  l'activité  historique  de  Lameere  doit  nous 
retenir  ici.  On  sait  combien  rares  sont,  dans  notre  pays,  les 
érudits  qui  consacrent  leurs  efforts  à  l'étude  de  notre  ancien 
droit  ;  presijue  seuls  (juelques  magistrats  ont  travaillé  dans  ce 
domaine  peu  défriché.  Lameere  fut  un  de  ceux  ([ui  l'ont  fait  avec 
le  plus  de  distinction. 

C'est  l'ancien  droit  flanuuul  qui  a  princii)aleMieiu  fait  l'objet  do 
ses  recherches.  Lameere  l'avait  étudié  de  très  près  et  sans  se 
limiter  à  la  lecture  des  coutumiers  et  des  auteurs  anciens;  il 
connaissait  les  actes  de  la  praticiuo  judiciaire,  si  importants  jjour 
saisir  ce  qu'était  un  droit  réellement  vivant. 

Ou  se  rend  compte  de  l'étendue  de  sa  science  en  lisant  les 
monographies  dans  lesquelles  il  a  traité  tel  ou  tel  point  d'histoire 
du  droit.  Courtes,  généralement  conçues  sous  la  forme  du  mercu- 
riales ou  d'articles  de  revues,  elles  étudient  le  jjIus  souvent  une 
question  de  procédure  :  elles  méritent  d'être  citées  comme  des 
modèles  au  point  de  vue  de    la    pi-écision.    L'exanu-n  des  notes 


844  CHRONIQUE 

permet  de  se  rendre  compte  de  la  sûreté  de  l'information  de 
l'auteur  En  lisant  ces  études,  on  se  prend  à  regretter  que 
Lanieere  n'ait  jamais  publié  un  ouvrage  d'ensemble  sur  l'histoire 
de  la  ])rocédure  civile  et  criminelle  en  Flandre,  qu'il  était  tout 
particulièrement  qualifié  pour  écrire 

Membre  depuis  1894  et  président  depuis  1911  de  la  Commission 
royale  des  anciennes  lois  et  ordonnances,  J.  Lameere  a  publié 
dans  le  Recueil  des  Ordonnances,  édité  par  ce  corps  savant,  plu- 
sieurs volumes  se  ra])portant  au  règne  de  Charles-Quint.  Ces 
éditions,  comme  ses  dissertations,  témoignent  de  sa  science  et  des 
belles  qualités  de  son  esprit. 

J.  Lameere  était  membre  de  l'Académie  royale  de  Belgique  et 
membre  du  Conseil  d'Administration  de  l'Université  de  Bruxelles. 
Il  prenait  une  part  très  active  aux  travaux  de  ces  deux  corps. 

11  est  mort  le  12  avril  1922,  à  la  fin  d'une  longue  vie  tout 
entière  consacrée  au  droit. 

François-L    Ganshof. 


Bibliographie  des  œuvres  hisoriques  de  J.  Lameere 

1.   Fondation  du  xiv«  siècle;  Belgique  Judiciaire,  1868. 

2    Législation  relative  aux  étrangers,   dans  Patria  Belgi'  a  de 

Van  Bemmel  ;  t.  II  ;  Bruxelles,  1873. 
3.  De  l'autorité  judiciaire  dans  les  communes  flamandes  au  xii' 

et  au  XIII*  siècle;  Belgique  judiciaire,  1878 
4    Institution    dans   les   Universités    de   Hollande   d'un    cours 

d'histoire  du  droit  germanique  ;  Ibid  ,  187'.). 

5.  Du  formalisme  dans  le  droit  flamand   du   moyen  âge;  Ihid. 

1880. 

6.  Le  recours  au  chef  de  cens  dans  le  droit  flamand  ;  Ibid.,  1881. 

7.  Les  communes  vérités  dans  le  droit  flamand  ;  Ibid.,  1882. 

8.  Titres  et  noms  ;  Ibid.,  1883. 

9.  De  l'histoire  du  droit  et  de  son  étude  actuelle  dans  les  Pays- 

Bas  ;  Ibid.,  1884. 

10.  De  la  transmission  du  nom  et  des  titres  ;  Ibid.,  1885. 

11.  De  l'importation  du  jury  sur  le  continent  ;  Ibid.,  1885. 

12.  De  notre  procédure  criminelle  à  la  fin  de  l'ancien   régime  ; 

Ibid.,  1890. 
13    Deux    mémoires  sur  le  ministère   public  en  Belgique   sous 
l'ancien  régime  ;  Ibid.,  1892. 

14.  Dante  à  Oxford  et  en   Flandre;    Revue  de  Belgique,  1893. 

15.  Des    tribunaux    de   l'Inquisition    en   France;  Belgique  Judi- 

ciaire, 1894. 


(HKoMurr;  845 

Ifi.   Le  mariajîc  d'un  clci-c  au  xin"  sic-ck-  ;  [hid.,  1S'.)4. 

17.  Le  Conseil  privé  d'Angleterre  Mjjplicjuant  le  droit  (•un(>ni«|ue 
en  l'ile  de  Chypre;  Ibid  .  18"J5. 

IH.  J.-L.  et  Charles  Laurent  :  Recueil  des  Aiicienues  Ordon- 
nances de  la  Belgique  ;  2*  série  ;  t.  1 1  (L~)20-ir)29)  ;  liruxellcs, 
1898,  f". 

19    Recueil,  etc.,  t.  111  (ir)20- 153(3).   liruxelles,  19U2.  f  ■. 

20.  Les  travaux  d'Adolphe  Dubois  sur  l'histoire  des  institutions 

et  du  droit  ;  Bi'lgi(jii('  jiidiciuirc  ;  1902. 

21.  Léon  Vauderkindere,  Ibid.,  190G. 

22.  J.-L.    et    Henri    Simont  :    Recueil    etc.;    t.    IV     15:17-1543): 

Bruxelles,  1907,  f°. 

23.  Aspects  de   la  preuve   testimoniale  en   Flandre  aux   xiu"  et 

XIV^'    siècles;     liiiUelin   de  l' Académie  Roynlc  de  Jielgique. 
Classe  des  lettres,  1907. 

24  J.-L.  et  Henri  Simont:  Recueil  etc.;   t.   V    1544-1549);   Bru- 

xelles, 1910.  f°. 

25  L'n  document  du  vieux  droit  coutuniier  de  la    Flandre;    Bel- 

gique judiciaire.  1910. 

2G.  Deux  études  sur  l'ancien  droit  de  la  Vlandra,  ILud.,  1914. 

27.  Un  chapitre  du  prêt  à  intérêt  dans  le  droit  belgique  ;  Bulletins 
de  V Académie  Royale  de  Belgique,  Classe  des  lettres.   1920. 

28  De  quelques  enseignements  de  Montes(iuieu  et  de  leur  desti- 
née ;  Ibid.,  1920. 


Paul  Errera. 

Paul  Errera  naquit  à  Laekeu.  le  2:}  juillet  18G0.  Une  inoi't 
brusque  est  venue,  il  y  a  (juelques  mois,  mettre  prématurément 
fin  à  une  vie  qu'il  avait  tout  entière  vouée  au  culte  de  la  science 
et  au  service  de  la  patrie.  Pour  servir  ce  double  idéal  il  avait 
déployé  son  activité  dans  des  domaines  divers  :  pendant  quel- 
ques années,  il  avait  pratiqué  au  barreau  aux  côtés  de  Charles 
Duvivier;  de  1912  à  1921, il  avait  été  bourgmestre  d'Ucde;  mais 
avant  tout,  il  fut  un  grand  universitaire. 

11  ai^partenait  au  corps  professoral  de  l'Université  de  Hruxelles 
depuis  1890;  il  avait  été  recteur  et  il  exerçait  les  importantes 
fonctions  de  vice-président  du  Conseil  d'administration.  .\  partir 
de  1903,  il  professa  le  cours  de  droit  i)ublie  avec  un  éclat  incom. 
parable. 

Errera  était  juriste  dans  l'âme  et  il  jouissait  dans  les  milieux 
juridiciuea  de  Belgique  et  de  l'étranger  d'une  légitinie  niiuta- 
tion.  .Son  Traité  de  droit  public  belge,  publié  à  Paris,  et  traduit  en 


846  CHRONIQUE 

allemand,  l'ait  autoiité  bien  au-delà  nos  frontières  et  passe  à 
juste  titre  pour  un  ouvrage  de  premier  ordre. 

Errera  estimait  avec  raison  «lu'une  étude  vraiment  scientifique 
du  droit  n'est  pas  possible  sans  la  connaissance  de  l'histoire  du 
droit.  Aussi  est-ce  vers  notre  ancien  droit  belge,  que  l'influence 
de  Vanderkindere  et  de   Du  vivier  orienta  ses  premiers  travaux. 

Le  plus  important  est  son  volume  sur  les  Masuirs.  auquel  il 
faut  toujours  avoir  recours  lorsque  l'on  étudie  l'histoire  de  la 
l)ropriété  foncière  dans  nos  provinces.  Il  est  précieux  non  seule- 
ment à  cause  de  l'étendue  des  dépouillements,  mais  encore  à  cause 
delà  clarté  et  de  la  rigueur  des  exposés  synthétiques  du  démem- 
brement du  droit  de  propriété. 

Les  travaux  qui  suivirent  —  en  dehors  du  livre  sur  les  Waré- 
rhai.x  —  relèvent  généralement  d'autres  domaines  de  la  pensée 
juridique  ;  mais  toujours  Errera  continuait  à  porter  aux  études 
historiques  le  plus  vif  intérêt  :  dans  les  derniers  mois  de  sa  vie, 
il  avait  pris  une  part  active  aux  travaux  préparatoires  du 
V«  Congrès  international  des  sciences  historiques. 

Paul  Errera  est  décédé  à  Bruxelles,  le  12  juillet  1922.  S'il  a  été 
enlevé  trop  tôt  à  ceux  qui  l'aimaient  et  l'admiraient,  il  a  cepen- 
dant eu  la  fin  que,  sans  doute,  il  eût  souhaitée,  puisqu'il  est  tombé 
la  plume  à  la  main,  en  pleine. activité,       Frakçois-L   Ganshof. 


Bibliographie  des  oeuvres  historiques  de  Paul  Errera 

1.  Les  Masuirs;  Recherches  historiques  et  juridiques  sur  quel- 

ques vestiges  des  formes  anciennes  de  la  propriété  en  Bel- 
gique. Bruxelles,  1891,  2  vol,  8°. 

2.  Les   Waréchaix;   Étude  de    droit  foncier  ancien.    Bruxelles. 

1894,  8°, 

3.  Cours   de   littérature    française  :  historiens  et  clironiqueurs 

(Syllabus  de  l'Extension  de  l'Université  libre  de  Bruxelles*. 
Bruxelles,  1890,  8°. 

4.  Quelques    historiens    français     (Syllabus,    etc.).     Bruxelles, 

1898,8°. 

5.  Art  et  science  chez  Léonard  de  Vinci,  Reniw  de  V Université  de 

Bruxelles,  1901-1902. 

6.  La  dotation  du  prince  de  Waterloo,  Ibid.,  1911-1912. 

7.  Mil  huit  cent  quarante  huit  à  l'Université  de  Louvain,  Ibid.. 

1911-1912. 

H.   Dante  et  les  Flandres,  Bulletins  de  l'Académie  royale  de  Bel- 
gique, Classe  des  lettres,  1921. 

y.  Encore  Guizzante,  Ibid.,  1922. 


TABLE  DES  MATIÈRES 


Articles  de  fond  et  mélanges. 

Pages. 

Ch.  Beckknhai  l'T.  Le  style  des  i)aysaj>:es  dans  Faust  .     .     .  677 
A.-L.  CoRix.  A  pi'opos  de  la  traduction  française  des  Ser- 
mons de  Tauler  par  le  Père  Hugueny  O.P.  —  Mag-ct 

et  hincfruivc TA 

—     La  tombe  de  Tauler ...  665 

Fi-.  Dk  Lannov.  L'accession  du   Luxembourg  au  Zollvorein 

en  1842 :^17 

II.  Eeij.s.  The  correct  date  for  a  letter  to  Zwingli.     .           .  514 
.F.   Fki.i.kk.  *  a  bel  la  net  uni,  iwellanetiim  «  bois  de  coudrier  » 

corylus  avellana  L 719 

—          Astanetnm 41 

F.-L.  Ganshof.  Les  «  homines  de  casa  Dei  »  du  très  ancien 

droit  liégeois SOli 

P.  Gkaindoh.  Auguste  et  Athènes 429 

—  Inscription  de  Mégaro 335 

—  Notes  épigrai)hiques    ...           113 

II.  Grkc.oiri;.  Notes  d'épigraphie  byzantine 27 

P.  IIa.mi:i-us.  La  littérature  des  proscrits  en  Angleterre.  59 

A.  II.\xs.\Y.  L'ancienneté  du  droit  urbain  liégeois  ....  727 

—  Le  dipb')me  de  Henri  V  jjour  l'église  de  Liège 

en  1107 511 

—  Note   concci'nant   rapparitit>n  de   la   propriété 

allodiale  au  pays  de  Liège 724 

—  La  villa  et  l'oppidum  de  Saint-Trond  ....  87 
.T.  Haust.  Etymologies  wallonnes  et  françaises.  .  .  .445,  (>19 
J.  R.  KxiPKiNG.  Tlie  Edict  of  Galerius  (311   A.   T)  )  re-con- 

sidered 693 

E.  LALontic.  Une  quittance  signée  de  Watteau 116 

L.  Lkci.kre.  Les  limites  chronologitiues  du  moyen  âge          .  69 

Th.  Lekokt.  Xénophon 9 

H    LiEBRiX'iiï.  Les  «  Comédiens  de  cami)agne  n  à  Bruxelles 

au  XVII*  siècle 2(')5 

F.  LvxA.  Onuitgegeven  Kefereinen  (P.russel  H,^.  II.  119).     .  293 


848  TABLF.  DES  MATIÈHES 

P.   MAacHOT.    Le   nom   de    lieu    gaulois   *CAMBOS,    «  La 

courbe» 241 

—  Les  noms  de   lieu  gaulois  en   «  -auos,  -aua, 

-auon  » ...     64;1 

H.  Xéus.  Bâtards  de  Brabant  et  bâtards  de  Bourgogne.     .     337 
—        La  date  dans  les  actes  de  Philippe  le  Bon  (1419- 

1467) 91 

L.  Parmentier.  Notes  sur  deux  passages  d'Euripide    ...         1 
—  Sur    le    sens    méconnu   de   quelques    mots 

homériques  (aiôXoç  et  ses  dérivés)     .     .  417 

H.  PiRENNE.  Mahomet  et  Charlemagne 77 

F.  Rousseau.  Tju  lignage  namurois  au  xii*^  siècle.  Les  Fal- 

magne 463 

P.  E.OUSSEI-.  Le  thème  du  sacrifice  volontaire  dans  la  tragé- 
die d'Euripide 225 

Tu.  SiMAR.  Les  sources  de  Ihistoire  du  Congo  antérieure- 
ment à  l'époque  des  grandes  découvertes 707 

Ch.  Teri.inden.  Le  comte  de  Chambord  à  Anvers  (février  1872)     495 
P.  Thomas.  Une  petite  addition  au  livre  de  M.  Brunot  «  La 

pensée  et  le  langage  » 723 

—  Notes  et  conjectures  sur  les  œuvres  de  l'empe- 

reiir  Julien 15 

V.  Tourneur.  De  la  méthode  à  .suivre  pour  évaluer  en  mon- 
naies modernes  les  valeurs  anciennes  énoncées  dans  les 
textes  historiques  belges  du  xi*'  siècle  au  xvin^    ....     101 
F.  Uzureau.  Pie  VI  et  le  serment  de  Liberté-Égalité  .     .  342 

L.  Yander  Essen.  Jean  d'Ypres  ou  de  Saint-Bertin  (tl383). 
Contribution  à  l'histoire  de  l'hagiographie  médiévale  en 

Belgique 475 

J.  Vannérus.  Les  Chnu mont  germaniques.  Notes  de  topony- 
mie      \     283 

A.  Vincent.  Les  diminutifs  de  noms  propres  de  lieux.     .     .     247 

Comptes  rendus 119,345,521,731 

Bibliographie 141,567,783 

Périodiques 151,377,587,805 

Chronique 201,391,611,819 


'inL'K^CfSt. 


P        Revue  belge  de  philologie 

2  et  d'histoire 

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