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Full text of "Revue catalane"

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REVUE  CATALANE 

TOME  XIII   —  ANNÉE   «919 


I 


NNÉE  1919 

Tome  XIII 


IEVUE 
CATALANE 


I 


GANE  DE 
SOCIÉTÉ 

:tudes  M 

TALANES 


IMPRIMERIE   COMET 
PERPIGNAN 


/y\ 


367 


Z^; 


Table  des  Matières 


Liste  des  Membres,    i  . 

Nécrologie,  230. 

Pages  choisies,   146. 

Edmond  Rostand,  28. 

Le  canon  de  Lerida,  28. 

La  visite  de  Joffre.  34. 

Les  revues  locales,  52. 

El  bon  Pedric,  52. 

Compte  rendu  des  séances,  56,  88,   170. 

La  Catalogne  reconnaissante,  59. 

Nos  adeptes,  j5. 

Institut  d'Estudis  Catalans,  76. 

Els  morts,  76. 

Pourpres  et  ors,  76. 

La  question  de  l'Université,    1  18. 

Curiositats,   1  5o. 

Nacionalitat  de  flors,  arbusts  i  arbres,   i53. 

Publicacions  de  l'Ensenyança  Catalana,   164. 

Les  félibres  pyrénéens  et  le  maréchal  Foch,   184. 

L'hommage  du  Roussillon  à  Joffre-le-Grand,  201. 

La  fondation  d'une  Maintenance  du  Félibrige  en  Roussillon,  îo3. 

La  Cigala  i  el  Cucut,  209. 

Le  maréchal  Joffre  président  des  Jeux  Floraux  de  Barcelone  en  1920,  237. 

Une  fête  de  la  Langue  catalane  à  Perpignan,  239. 

Le  professeur  Jean  Amade  à  l'Université  de  Montpellier,  240. 

Bibliographie,  25). 

Aragon  (Henry).  —  Joffre  et  la  Marne,  5. 

Documents  historiques  sur  la  ville  de  Perpignan  (suite)  : 

XV.  Document  relatif  à  la  circulation  des  monnaies  d'or  et  d'ar- 
gent, sous  le  roi  Martin,   17. 

XVI.  L'embellissement  des  bords  de  la  Basse,  au  commencement 
du  xvii'  siècle,  20. 


XV]].  Ordonnance  du  roi  concernant  la  saisie  d'un  navire  perdu 
en  mer.   Prises  de  bonne  guerre.    Vente  d'esclaves.   Saisie  de 
barques  dans  les  mers  de  France,  "iy. 
XVUl.    La   maison   de    Bernard    Xanxo,    mercader.    L'immeuble 

Sancho  de  Llupia.  La  Loge  de  l'Union.  Le  Cercle,  60,  90. 
XIX.  L'alignement  du  lit  de  la   Basse  et  de  la  Tet,  à  Perpignan, 

au  xiv*  siècle,   119,   140,   154,   174. 
Les  vendangeurs  du  Roussillon,  45. 
Amade  (Jean).  —  Testament,  9. 

Pels  pobres  morts  tant  estimats,  35. 
La  poésie  catalane  en  Roussillon,  77. 
Bergue  (Paul).  —  Goigs,  55. 

Sur  le  banc  de  pierre,   187. 
Calmette  (J.).  —  L'Université  de  Perpignan,  87,  i65. 

Une  date  de  l'histoire  du  Roussillon  :    Le  tournant  de  865,  217. 
Chanty  (A.).  —  Cris  de  la  Rue,  de  Charles  Grando,  27. 
Francis  i  Ayrol  (P.).  —  El  bon  Pedriç,  de  J.-S.  Pons,  5* 

Les  poèmes  de  Rabindranath  Zagore,  76. 
Gibernau  (Joseph).  —  L'ametller,  72. 

Gibrat  Joseph).  —  La  seigneurie  et  la  paroisse  de  Serralongue  (suite),  10, 
48,  72,   102. 
La  seigneurie  et  la  paroisse  du  Soler,  210,  228. 
Grando  (Charles).  —  J  offre  a  casa  seva,  33. 
Llum,  149. 

J  offre  (cançô  popular),   1  85. 
Janicot  (Albert).  —  Un  jeune  :  Just  Calveyrach,  200. 
Lacvivier  (R.  de).  —  Quelques  noms  de  plantes  et  synonymes  (suite),  23, 

5o,  68,  99,   127,  144,   1 58,  171,  198. 
Mestres  (  ApelesJ.  —  Y  no  heu  passât  1  58. 
Muchart  (Henry).  —  Renaissance,    142. 
Pastre  (Louis).  —  Le  Provençal  au  Lycée,  222. 

Leçons  bilingues  pour  l'enseignement  simultané  du  Français  et  du 
Catalan,  242. 
Pons  (J.-S.).  —  D'un  monument  a  Canigô  per  Mossen  Cinto,  6. 
Somnis  de  Rossellô,  i3. 
Lletra  a  n'en  Père  Butxareu,  26. 
Nadal,  43. 

Un  Poeta  Canigonenc,    110.  ,, 

El  Ram  nuvial,    1  37. 
Llevant  de  taula,   147,   162,   177,  233. 
L'article  EL  ou  LO,  1  5  1 . 
Un  timo  senzillet,  238. 


—  111  — 

Pons  (J.-S.)  (suite).  —  Al  terrisser  de  Sant-Marti,  238. 

Minyona,  vé  l'abril,  239. 
Real  (Caries  de  la).  —  Les  Jeux  Floraux  de  Barcelone,   1  14. 

La  Tradition,   1  1  5. 

Hommage  au  Pastorellet,   1  16. 

Nos  musiciens  et  nos  artistes,   1  17, 

Un  hommage  posthume  à  Joseph  Aladern,   1  18. 

Belleses  artistiques,   1  18. 

La  bibliothèque  de  Castel  Roussillon,   1  18. 
Riols  (F.).  —  En  Joffre  y  el  Català,  48. 

Nos  poètes  roussillonnais,  160. 

Diction  et  chants  catalans,   160. 
_        Musique  et  danses  catalanes.   160. 

Série  locale  du  Coq  Catalan,   161. 
Salvat  (Fr.  ).  —  Quadret,   161. 
Sarrète  (Jean).  —  L'Université  de  Perpignan,  29,  200. 

La  vie  catalane  en  Roussillon,    io5. 

Le  problème  de  la  Renaissance  universitaire  à  Perpignan,   129. 

A  propos  d'un  cours  de  provençal  au  lycée  de  Marseille,   181. 

La  Confrérie  du  Rosaire  en  Cerdagne,   194,  21  3,  23o. 

Le  D'  Sole  y  Pla  chevalier  de  la  Légion  d'honneur,   199. 

Mort  du  majorai  J.  Soulet,    199. 

A  propos  du  récent  Congrès  régionaliste,  204. 

Des  professeurs  bénévoles  de  Catalan  pour  nos  collèges,  225. 

J.-M.   Brutails  à  l'Institut,  25o. 


ILLUSTRATIONS 


Maison  gothique  de  la  rue  de  la  Main-de-Fer. 


Les    V\anu-;rus   non   insères 
ne  son;  oas  :enaii» 


13  Année     N    147  15  Janvier  1919 

REVUE 

L.-s   Àrti .-les    parus  dans   a.   Revue  #"  ~*     ^^    ^^^    j\     1  ^^     l*k,l  TT 

n'engagent  oue  ieurs  auteurs.  ^■^4» •    A    A    a»  A^A ■•  ^  «Bt^ 

Organe  de  la  Société  d'Etudes  Catalanes.  —  Cotisation  :  10  fr.  par  an 

LISTE 

DES  MEMBRES  DE  LA  SOCIÉTÉ 

au  i  "  Janvier  1919. 

MM. 
«qo8.    Abat.    11,  rue  d'Alésia,  Paris. 
1900.    Aibar  Félix,  chef  de  bataillon  en  retraite,  place    Gretry,   Perpignan. 

—  "Amade  Jean,  professeur  au  lycée  de  Montpellier. 

—  *Aragon  Amédée,  rue  Saint-Dominique,  4,  Perpignan. 

1914.   'Aragon  Henri,  propriétaire,  à  Chàteau-Roussillon,  prés  Perpignan. 

—  •  Arqués  Ramon.  notaire.  Les  Borges  d'Urgell  (Lleydai. 

1917.  Artus  Georges,  place  du  Marché-Neuf,  Perpignan. 

—  Aspar  Jean,  rue  de  l'Enfer,  4.   Perpignan. 

J910.  Auriol  George,  banquier,  rue  Font-Froide,  Perpignan. 

1908.  Aymar  Joseph,  chanoine  honoraire,  curé-archiprétre  de  Prades. 

190b.  Badua  J.,   192,  boulevard  de  Charonne,  Paris. 

—  Baille  Léon,    architecte,  rue  de  la  Fusterie,  Perpignan. 

1912.    Batlle  Antoine,  propriétaire,  place  de  la  Liberté  (gare),  Perpignan. 

1918.  Batlle,  ébéniste,  rue  des  Augustins,  Perpignan. 

1917.  Bausil  Albert,  infirmier,  hôpital  militaire  d'  Amelie-les-Bains. 

—  Bauby  Charles,  35,  rue  des  Lois,  Toulouse. 
Blamc  Jean,  rue  Mailly.   18,  Perpignan. 

1908.    Bergue  Paul,  conducteur  principal    faisant  fonctions  d'ingénieur  des 
Travaux  publics,  a  Hanoï  1  Tonkin). 

1906.  Bibliothèque  Municipale,  Perpignan. 
1912.    Bibliothèque  de  l'Université.   Montpellier. 

—  Bibliothèque  Populaire,  Céret. 

1907.  Blancou  Gabriel,  avocat,  rue  des  Trois-Rois,   3o,  Perpignan. 
1900.    "Boix  Emile  1  docteur),  avenue  Mozart,  0,  Paris. 

1918.  Boixo  Edmond,  ingénieur  a  Vernet-les-Bains. 

Le»  noms  précédé*  d'un  astérisque  sont  ceux   des  membres  du  Conseil  d'administration. 


—    2    — 

iqo6.   *Bonafont  Joseph,  chanoine  honoraire,  Félibre  Majorai,  curé-doyen 

d'Ille-sur-Tet,  V\ce-V  résident. 
1907.    Brial  Pierre,  chanoine  honoraire,  curé-doyen  de  Millas. 
1917.    Bringmier  (M""i,  Directrice  de  l'Ecole  Normale  d'ln<;titutrices,  rue 

Valette,  Perpignan. 
1914.    Brousse  Emmanuel,  député  des  Pyrénées-Orientales,  Paris. 
jqo8.   de  Çagarriga  Henri,  propriétaire,  château  de  la  Grange,  Saint-Génis- 

des-Fontaines. 
1906.    Calmette  Joseph,    professeur  à  la  Faculté  des  Lettres,  Toulouse. 
-1918.   Calveyrach  Just,  boulevard  des  Pyrénées,  maison  Parés,  Perpignan. 
1906.   *Campanaud    Laurent,    propriétaire,    rue    Petite-la-Réal,    Perpignan, 

■    'Président. 
1917.    Cantagrill  rM'"),  institutrice,  Espira-de-1'Agly. 

—  Capdevjlle  (M'"),  institutrice. 

1916.  Carcassonne  Henri,  rue  Cloche-d'Or,  Perpignan. 

1906.  de  Carsalade  du  Pont  Jules  (Mgr),  évèque  de  Perpignan. 

Caseponce  Etienne  (abbé),  collège  «  La  Salle  »,   carrer   Universilat, 

52,  20,  2a,  Barcelone  (  Espagne). 

1917.  Castanyé  1  Prat,  55.  Vallirana,  pr'\   Barcelone. 
1909.  Catel  Jean,  Bagnols-sur-Cèze  (Gard). 

1918.  Chavanette,  s/lieutenant,   1  53' d'infanterie,   i"C.  M..  Secteur  211. 
J906.  *Comet  Joachim,  Imprimerie  Catalane,  rue  de  la  Poste,  Perpignan. 
1912.  Créance,  avocat,  68,  rue  des  Martyrs,  Paris. 

1909.  Cuillé  Joseph,  propriétaire,  rue  Manuel,  Perpignan. 
ioj  1.  Dalbiez  Victor,  député  des  Pyrénées-Orientales,  Paris. 

1910.  David  d'Orimond,  3i,  quai  de  Lorraine,  Narbonne. 
1917.  Delfau  Louis,  artiste  peintre,  rue  du  Théâtre,  Perpignan. 

1907.  Delmas  Joseph,  capitaine  au   100'  d'infanterie.  Tulle  (Corrèze). 

—  Drancourt  Emile,  avenue  de  la  Gare,  Perpignan. 
J912.  Dumayne,  pharmacien,  quai  Vauban,  Perpignan. 

1906.    Durand  Laurent,  agent  d'assurances,   Rue   Grande-la-Réal,   28,   Per- 
pignan. 

1917.  Elèves  de  l'Ecole  Normale  d'Institutrices,  Perpignan. 

191 8.  Escarra  Jean,   maréchal  des  logis,  88'  rég.  A.  L.,  4"  groupe,  8'  b", 

par  B.  C.  M..  Paris. 
1910.    Espie  (M""  A.  d'),    femme  de  lettres,   rue   Hégésippe-Moreau,    i5, 
Paris. 

1908.  Estève  de  Bosch    Xavier,    général    de   brigade,    rue    du    Mail,    83, 

Angers. 
1017.  Fabre.  aide-major  médecin-chef,  dépôt  de  remonte  B,  Secteur  8. 
1908.    Falcon,  chef  de  bataillon  en  retraite,  place  Arago,  Perpignan. 
1917.    Fouché,  professeur  à  Saint-Louis,  Perpignan. 
1916.    Foyer  du  Soldat,  2'  étage  du  Castillet,  Perpignan. 


-  3  — 

i  q  i  5 .    'Francis  P.,  5,  rue  de  l'Avenir,  Perpignan,  Trésorier. 
1906.    Freixe  Jacques,  homme  de  lettres,  Le  Perthus. 

—  Gibrat  Joseph  (abbé),  cure-doyen  de  Prats-de-Mollo. 

1  pi  2.  'Grando  Charles,  rue  des  Augustins,  3j ,  Perpignan.  Secrétaire  général. 

1910.  Granier  (abbe,  cure  de  Lamanère. 

1900.  Gravas  Charles,  notaire,  Prades. 

—  Guiu  Charles,  percepteur,  Latour-de-France. 
1913.  Henry  Alphonse  (abbe).  à  llle-sur-Tet. 

1917.    Institut  d'Etudes  Méridionales,  Université  des  Lettres,  Toulouse. 

1913.  Janicot  Albert,  employé  a   la  grande  vitesse,   48,  route  de  Prades, 

Perpignan, 
ipob.   de  Lacvivier  Raymond,  propriétaire,  Elne. 

1917.  Laudié  Louis,  sergent  vaguemestre,   i  2' d'infanterie,  Secteur  174. 

1918.  de  Lamer,  rue  Saint-Jean,  2,  Perpignan. 

1917.  Lanquine-  Clément,  principal  du  Lycée  d'Epernay  1  Marne). 

1918.  Lazerme  de  Lon  (Comte  de)»  rue  de  l'Ange,  Perpignan. 

1917.  Manalt  Célestin,  sculpteur.  Pont-rouge,  Perpignan. 
1906.    Marie  Emile,  propriétaire,  Prades. 

1914.  Maséras  Alfons,  homme  de  lettres,  Casanova,   195,  Barcelone. 
1906.   Massot  Joseph  (docteur),  place  d'Armes,  Perpignan. 

1918.  Massot  Joseph-Paul,  avocat,  Le  Boulou. 

—  Massotte,  officier  d'administration  principal,  Santé,  Armée,  S.  160. 

1906.  Morel  Marcel,  négociant,  rue  Grande-la-Real.  Perpignan. 
1910.    Muchart  Henri,  avocat,  avenue  du  Vernet.  Perpignan. 
191b.    Nérei.  Léon,  député  des  Pyrénées-Orientales,  Paris. 

1  907.    Pages  Raymond,  domaine  des  Garrigues-d\i-Tanary,  Palau-del-Vidre. 
1917.    Pmllissé  Eugène,  sous-lieutenant,   1  i  3'  d'artillerie  lourde,  8' pièce, 
Secteur  77. 

1907.  Pams  Jules,  ministre  de  l'Intérieur,  sénateur  des  Pyr.-Or.,  Paris. 
«917.    Pams  François,  avenue  de  la  Gare,  70,  Perpignan. 

190b.  'Pastre   Louis,   instituteur,   école  Paul-Bert,    Perpignan,  archiviste. 

—  'Payré  Joseph,  avoue,  rue  de  la  République,  Perpignan. 
1910.  Peix  Victor,  industriel,  Millas. 

—  'Pépratx  Justin,  notaire,  rue  Alsace-Lorraine,  Perpignan. 

1906.  Pons  Joseph,   agrégé  d'Espagnol,  professeur  au  lycée  d'Angoulème, 

à  llle-sur-Tet. 
1917.    Portet,  éditeur  de  musique,  rue  Argenterie,  26,   Perpignan. 
1910.   Pujet  Eugène,  cité  Bartissol,  Perpignan. 

1907.  Puic  Joseph,  directeur  des  établissements  Vallaert  Frères,   64,   bou- 

levard Sébastopol,  Paris. 
191b.    Rameil  Pierre,  député  des  Pyrénées-Orientales,  Paris. 
—      Respaui    Georges,    Ambulance   chirurgicale,   automobile   n"    11,   par 
rue  Pinel,  2  1 ,  Paris. 


—  4  — 
9>o.   Rjbeill,  contrôleur  des  douanes.  Cerbère. 
916.    Ripert  Emile,   1"  Sous-Intendance,  Constantine. 
912.    Rocaries,  avocat,  quai  Vauban,  Perpignan. 
918.    Roger   Marcel,    sergent,    10'  bataillon   Sénégalais,    10'  C'e,    Guercif 

(  Maroc  oriental  . 
918.    Rousse  Isidore,  épicier,  route  de  Saint-Estève,  Perpignan. 
914.   T^oussillon  (l'Amicale  le),    1,  rue  St-Denis.,  Brasserie  Dreher,  Paris. 

908.  Rozès  Numa,  propriétaire,  Saint-Hippolyte. 

910.  Saisset  Léon,    juge   d'instruction,    avenue    du    Chemin    de    fer,   3o, 

Fontainebleau  1  Seine-et-Marne  . 
916.   SalgasiM""),  institutrice,  Rivesaltes. 

906.  Salsas  Albert,  receveur  de  l'Enregistrement,  Castres  (Tarn). 

909.  Salvat  Louis,  curé  de  Trouillas. 

916.  Salvat  François,  Amélie-les-Bains. 

91  8.   Sarrète  (abbé),  aumônier  du  Bon-Pasteur,  av.  du  Vernet,  Perpignan. 

917.  Société  Agricole,  Scientifique  et  Littéraire,  Perpignan. 

911.  Sole  y  Pla  Joan  (doctor  ),  Ronda  de  San  Père,  6,  Barcelone  (Espagne). 
916.   Soubielle,  professeur  d'espagnol,  rue  Vauban,  Perpignan. 

918.  Subiros  Robert,  négociant  en  vins,  avenue  du  Vernet,  Perpignan. 

907.  Sudria,  lieutenant  d'Artillerie,  26,  rue  de  Staël,  Paris  (XV). 

909.  Suzanne  François,  69,  rue  de  Richelieu,  Paris. 
916.   Taix  Sauveur,  rue  Jean  Dupuy,  74,  Hanoï  (Tonkin). 

906.  Tisseyre  Jacques,  rue  Grande-la-Réal,  35,  Perpignan. 

910.  Thomas  Romain,  professeur  en  congé,  Collioure. 

907.  Todesco  Venanzio,  professor,  Bassano,  Vicenza  (Italie). 

906.  Tresserre  François,  mainteneur   des  Jeux   Floraux,  65,  rue  Alsace- 
Lorraine,  Toulouse. 
—      'Vidal  Pierre,  bibliothécaire  de  la  Ville,  rue  Petite-la-Réal,  Perpi- 
gnan. 

1618.   Vieu  Louis,  sergent  mitrailleur,    164'  d'infanterie,  C.  M.   1,  S.  157. 

1907.   Vilar   Edouard,    sénateur  des  Pyrénées-Orientales,   7,  rue  Faustin- 
Hélie,  Paris-Passy. 

1910.   Villeneuve  (Marquis  Charles  de  1,  75,  rue  de  Prony,  Paris. 

1906.   'Violet  Gustave,  sculpteur,  Prades,  Vice-Président. 

1910.   Violet  (M""  Veuve  Lambert),  à  Thuir. 

1906.    *de  Wittwer  de  Froutiguen  Jules,  le   Boix-Saint-Sauveur,  Prats-de- 
Mollo.  \ 


J  offre  #  la  Marne 

Son  plan  génial 


Le  génie  est  avant  tout  le  pouvoir  de  créer.  Joffre  a  eu  ce 
génie  :  il  a  su,  par  cette  supériorité  de  puissance  de  perception, 
créer  un  plan  formidable  qui  a  arrêté  net  l'avalanche  des  hordes 
barbares. 

Le  génie,  a  dit  Buffon,  n'est  qu'une  longue  patience,  mais, 
ajoutons,  ia  patience  invincible  à  la  poursuite  d'un  même 
but,  unie  à  la  persistance  de  la  méditation  sur  une  même  idée, 
sur  un  même  plan  qui  a  pour  effet  de  donner  à  la  pensée  par 
cette  concentration  même,  une  puissance  qu'elle  n'aurait  jamais 
atteinte  sans  cela. 

En  concentrant  l'effort  intellectuel  sur  un  point  circonscrit, 
Joffre  est  arrivé  à  cette  manœuvre  qui  dénote  ce  je  ne  sais  quoi 
de  génial,  de  spontané,  d'instinctif,  dont  la  réalisation  absolue  s'im- 
pose dans  les  œuvres  de  génie,  et  où  l'on  trouve  comme  une 
intuition  lumineuse  de  la  personnalité  même  du  grand  chef  de 
l'Armée  française. 

Comme  tous  les  hommes  de  génie,  en  vertu  de  cette  supério- 
rité intellectuelle,  Joffre  a  échappe  à  la  domination  des  passions 
mesquines  et  basses' de  l'égoïsme  et  de  la  vanité,  et  s'est  trouvé 
naturellement  porté  dans  des  régions  plus  hautes  :  il  s'est  voué  à 
la  France  tout  entière.  «  L'homme,  s'écriait  Mirabeau,  qui  com- 
«  bat  pour  la  patrie  ;  celui  qui  a  conscience  d'avoir  bien  mérité 
«  de  son  pays,  et  de  lui  être  utile  ;  celui  que  ne  rassasie  pas  une 
«  vaine  célébrité  et  qui  dédaigne  les  succès  d'un  jour  pour  la 
a  véritable  gloire...  cet  homme  porte  avec  lui  la  récompense  de 
«  ses  services,  le  charme  de  ses  peines  et  le  prix  de  ses  dangers  ; 
«  il  ne  doit  attendre  sa  moisson,  sa  destinée,  ia  seule  qui  i'inté- 
«  resse,  la  destinée  de  son  nom,  que  du  temps,  ce  juge  incor- 
«  ruptible  qui   fait  justice  à  tous  ». 

Joffre,  par  ce  plan  merveilleusement  conçu,  par  cette  œuvre 
qui  est  son  œuvre,  a  su  nous    faire    voir    quelle    était    ia    mesure 


—  6  — 

exacte  de  la  valeur  de  l'homme,  et  quelle  fut  sa  puissance  créa- 
trice au  moment  opportun  et  décisif,  à  l'instant  le  plus  critique 
et  le  plus  périlleux,  à  l'heure  la  plus  troublante  et  la  plus  angois- 
sante où  se  jouaient  les  destinées  de  la  France. 

En  exécutant  la  manœuvre,  en  démasquant  même  Paris,  Joffre 
a  fait  une  action  géniale  :  son  plan,  le  plan  qui  a  sauvé  la  France 
de  l'invasion  barbare,  c'est  lui-même,  élevé  à  sa  plus 
haute  expression. 

Joffre  a  eu  ce  génie!  Nous  devons,  nous  tous  Français  et 
Alliés,  éternellement  lui  savoir  gré  d'avoir  sauvé  la  France  au 
moment  du  péril  le  plus  émouvant. 

Gloire  à  Joffre,  Maréchal   de  France. 

Henrv  Aragon. 


D  un  monument  a  Canigo 

per  Mossen  Cinto 


Dîes  passats  (es  dir  â  la  vetlla  d'agost  1914),  en  Joseph  Ala- 
dern,  el  catalanista-missionari  del  camp  de  Tarragona,  m'adreçava 
un  numéro  de' la  Vustraciô  Calalana,  prou  intéressant  pels  rossel- 
lonesos,  doncs  algunes  planes  venien  consagrades  â  la  reproducciô 
de  les  terres  cuites  d'en  Violet,  «  l'Escamot  de  Moltons  â 
entrada  de  fosc  »  i  «  El  pastor  d'Urbanyâ  »,  i  ademés,  un  arti- 
cle, firmat  pel  mateix  Aiadern,  portava  el  tîtol  ben  agradôs  :  En 
Gustau  Violet  i    l  monument  d  Verdaguer. 

Diu  el  nostre  bon  amie  —  el  nostre  entusiasta,  i  ai  !  malagua- 
nyat  amie  —  qu'en  Violet  ha  concebut  la  manera  la  mes  ennobli- 
dora  d'honorar  el  record  del  poeta  de  Folgueroles,  somniant  d'al- 
sarli  una  estâtua  sobre  una  enlairada  roca  de  Canigo,  la  quai 
domina  la  vall  de  Vernet  i  '1s  cingles  de  Cadî.  Vetaqui,  segons 
l' Aiadern,  les  paraules  de  l'esculptor  de  Prades  :  «  Lo  cap  amb 
son  front  séria  énorme,  lo  ces  colossal,  i  la  sotana  caurîa  â  plecs 
penya  avall  com  la  vestidura  d'un  gegant  de  l'Atlântida.  A  la  una 


—  7  - 
ma  tindrîa  un  llibre,  son  poema  Canigô,  i  amb  l'altra,  senyalarîa 
lo  cami  de  les  congestes  i  de  les  altes  cimes,  teatre  de  ses  Uegen- 
des.  Aixis  sa  figura  serîa  eterna,  duraria  tant  com  durarâ  la  mun- 
tanya,  i  ningû  podria  pujar  â  Sant-Martî  sensé  maravellarse  en  la 
contemplaciô  de  la  colossal  figura  de  l'excels  poeta.  » 

]  â  manera  de  conclusiô  afegeix  el  bon  prosista  de  la  Geni  del 
Llamp  :  «  Ben  cert  que  l'obra  séria  costosa  i  atrevida,  perô  rés  hi 
ha  impossible  per  Catalunya,  quan  se  tracta  d'honorar  una  figura 
com  la  de  Mossen  Jaeinto  Verdaguer  ;  mes  va  fer  ell  per  Cata- 
lunya, i  ^era  un  home  sol.  » 

'Amb  tôt  el  respecte  que  se  mereix  la  simpâtica  personalitat 
d'en  Joseph  Aladern,  que  'm  sia  permés  d'observar  que  '1  seu 
projecte  peca  per  io  grandies  i  desmesurat.  Fins  m'atreviria  â  dir 
qu'amb  sa  luxuriant  imaginaciô  de  fill  de  la  costa  llevantina,  ha 
modificat  un  tant  les  paraules  d'en  Violet  ;  ô  d'altra  manera  sera 
que  'n  Violet,  un  bon  xic  visionari  en  l'escalfor  d'una  amistosa 
conversa  estiuenca,  s'haura  divertit  amb  alguna  «  galéjade  ».  Perqué 
de  Provença  â  Rossellô  fem  compte  que  sols  hi  ha  un  pas  ;  mes 
també  arriba  que  l'autor  de  «  galéjades  »  se  les  estima  de  cor  ;  i 
tôt  mirât,  jo  crée  qu'ara  es  el  cas.  Siga  com  se  vulga,  el  projecte 
sembla  mes  barceloni  que  rossellonés.  No  s'estranyarâ  del  nostre 
parer  el  qui  haji  vist  â  Barcelona  algunes  arquitectures  d'estil 
misticament  sumptuôs,  les  quais,  si  no  agradaren  molt  à  n'en  Pio 
Baroja,  nosaltres  les  dariem  totes  plegades  per  conservar  l'atri 
severament  clâssic  de  Ylnslitut  d'Estudis  Catalans. 

No,  no  es  pas  per  falta  d'entusiasme  que  rebutjariem  tal  pro- 
jecte ;  per  lo  demés,  repetirém  les  encertades  paraules  de  l'Ala- 
dern  :  «  Mes  va  fer  en  Verdaguer  per  Catalunya,  i  era  un  home 
sol.  » 

L'idea  d'un  monument  à  Verdaguer  viu  en  l'esperit  de  molts 
rossellonesos  ;  ja  fa  anys,  lo  Pastorellet  de  la  Vall  d'Arles  me 
paria  d'un  bust  del  poeta  que  's  volia  erigir  â  la  Font  del  Comte, 
prop  de  l'abadîa  de  Sant-Marti,  alla  ont  l'acciô  del  poème 
«  Canigô  »  té  '1  seu  principi  i  '1  seu  desenllaç.  Aixis  presentada, 
l'idea  guarda  una  significaciô  mes  fonda  e  inspiradora. 

El  lector  de  la  7{evue  Catalane  ja  sab  que  vaig  recullir  aquèt 
somni  en  un  numéro  de  1911,  demanant  sa  realisaciô  ;  mes,  siga 
que  mes  paraules  fossin  les  d'un  neôfit,  6  per  tais  judicades,  siga 


_  8  — 

encara  que  '1  catalanisme  sencer  no  haji  fet  â  Rossellô  tôt  el  cami 
que  se  desitiaria,  ma  veu  fou  senziilament  perduda,  sens  desvetllar 
un  pohre  ressô  en  nostrcs  vails  ;  mon  escrit  trobâ  sepuitura  en  la 
7(evue  Caialane.  Ai,  amies,  desconfiém  de  les  Revistes  que  son 
sépultures  ben  amanides,  i  si  les  idées  son  bones,  "fem-les  florir, 
i  fruitar,  i  granar  ! 

Si  hi  hâ  en  la  terra  un  Hoc  ont  en  Verdaguer  ha  d'esser  glori- 
ficat,  prou  sera  aqueil  troc  de  la  serra  canigonenca,  ja  que 
l'Atlàntida  es  malhauradament  una  illa  imaginaria.  Aqui,  sobre  '1 
granit,  s'aixecaria  sa  c'ara  fosa  en  bronze,  d'esguard  mélancolie 
i  dolcîssim  ;  aqui  viuria  el  poeta,  en  l'ambient  mitjeval  i  religrôs 
de  les  llegendes,  no  molt  lluny  de  la  rumba  de)  Comte  Guifre, 
rebent  l'aie  de  les  neus,  oint  el  degotadiç  de  la  Font  del  Comte, 
degotadiç  no  tant  régalât  com  la  melodia  de  sos  cants. 

En  aquells  penyataguers  el  saludarien  sempre  amb  mes  afecte 
els  romeus  de  Sant-Marti  ;  el  seu  nom  se  faria  mes  i  mes  popu- 
lar,  repetint-lo  eis  pastors,  i  les  dones  de  Castell,  anant  â  arre- 
plegar  gersos  pels  caminets  frescals  i  arriscats  de  la  serralada  ;  fins 
jo  crée  que  faria  miracles,  amparant  i  servant  el  nostre  musical 
dialecte  nord-pirenenc. 

Prou  fora  just  que  la  mateixa  T{evue  Catalane  s'emprendès  de 
tal  projecte,  i  prineipaiment  els  «  verdaguerians  »  que  no  esca- 
sejen  en  la  nostra  encontrada.  No,  no  es  pas  Barcelona  qu'ha 
d'alçar  â  Sant-Marti  el  bust  d'en  Verdaguer  ;  son  els  matei.xos 
fil  1  s  de  Canigô,  lliurantseaxis  d'un  deute  espiritual,  ja  que  Ver- 
daguer, en  sos  viatges  â  Rossellô,  desvetllâ  les  fonts  estroncades 
de  la  poesîa  popular.  1  aquest  monument,  l'hem  de  considerar 
com  una  obligaciô  moral,  un  homenatge  d'agraîment  al  pare  i 
senyor  de  la  nostra  humil  renaixença. 

Erigintîb,  ens  encomanariem  â  la  mes  alta  cordialitat  dels  Cata- 
lans d'Espanya  i  donariem  una  mostra  de  la  vitalitat  d'aquesta 
«  Société  d'Etudes  Catalanes  »  ;  vetaqui  perqué  estic  confiât  que 
sabrân  donar  l'impuls  necessari  al  projecte  els  nostres  directors, 
i  aixis  mateix  el  mes  «  verdagueriâ  »  dels  fills  de  Rossellô,  senya- 
lant  amb  sa  croça  bisbal   els  airejats  camins  de  la  patria. 

Joseph-S.   Pons. 


Testament 

*&* 

Si  la  mort  aviat  me  crida, 
Vuli,  amies,  que    i  meu  pensament 
Amb  vosaitres  resti  présent 
Com  ho  som  avuv  dins  la  vida. 


Continuant  lo  bon  combat, 
Lligats  per  la  meteixa  ideya, 
Tôt  lo  meteix  que  jo  vos  deya 
Ho  fereu  com  al  .temps  passât  ; 

Y,  dihent  amb  veu  amorosa 
Mon  nom,  aymat  del  vostre  cor, 
Conservereu  lo  meu  recort 
Cuan  dormiré  sota  una  llosa... 

En  la  fredor  del  camp  sagrat, 
Ont  vetlla  lo  geni  de  l'ombra, 
Arribarâ  fins  â  ma  tomba 
L'ardor  de  la  vostra  amistat. 


Si  poc  sentir  aixis,   encare, 
L'impuls  del  vostre  cor  germa, 
Un  somris  belleu  florirâ 
Sus  de  la  meua  pobra  cara  ; 

Y.   dels  pahis  llunyâ  dels  morts, 
Per  que  mes  sana,  viva  y  forta, 
Maduri  la  fruyta  dins  l'horta,  — 
Benehiré  lo  vostre  esforç... 

Joan  Amade. 


La  seigneurie  $  la  paroisse  de  Serralongue 

~&fcli^        ,  (SUITE) 

777.  —  JSloms  des  prêtres  qui  ont  paru  à  un  titre  quelconque 
dans  la  paroisse  de  Serralongue. 

Fortaner  Lana,  jq  septembre  1593.  Il  signe  :  prêtre  y  altre 
dels  domers  de  Prals. 

Antoine  Augaro,    16  novembre   i5o,3. 

Pierre  Anglada,  8  mai  1596,  prêtre  et  domer  servint  en  Ser- 
rallonga. 

Gaudérique  Finot,   1  q  mai   1596,  prêtre  et  paborde  du  Coral. 

Hue    Bésairia,  29  juillet  3596  —  26  septembre  1601   —   1602. 

Antoine  Augaro,  28  mai   1597. 

Guillaume  Manaut,    14  mai   1600,  vicaire  et  curé. 

Jacques  Xambo,  prêtre  et  curé  du  Tech,  fait  un  baptême  à  Ser- 
ralongue le  7  décembre   i6o3. 

Jérôme  Tintayna,   19  janvier  1606,  prêtre  et  curé. 

Fortaner  Lana,  prêtre  et  domer  de  Prats-de-Mollo,  fait  un 
baptême    le  5  avril   1606,  en  l'absence  du  vicaire  de  Serralongue. 

Laurent  Moragues,  17  juin  1609,  prêtre  y  en  canons  licenciât, 
curé  de  Serralongue.  li  donne  la  bénédiction  nuptiale  dans 
l'église  de  cette  paroisse  a  Antoine  Llensa  pages  et  à  Marie  Sue- 
gas,  en  présence  de  Gabriel  Llensa,  baille  de  Serralongue. 

Jérôme  Tintayna,    1"  juin   1610,  prêtre  et  curé  de  Serralongue. 

Jean  Galangau,  domer  de  Prats-de-Mollo,  fait  un  mariage  le 
24  juin   16]  1 . 

Jean  Lacosta,  161  1.  11  donne  la  sépulture  au  Rnd.Huc  Bésairia, 
prêtre,  natural  de  Trança.  11  devient  curé  de  Serralongue  le 
24  juin  16]  2  :  «  Jo  Joan  Lacosta,  prêtre,  obienint  la  cura  d'esta  igle- 
sia  de  Cabrens  ».  En  161  3,  il  se  montre  encore  à  Serralongue  : 
«  Servint  la  iglesia  de  Serrallon°a  ». 

Onofre  Puig,  vicari-cural  (/  616-16/  y)  :  «A  24  de  mars  1616,  jo 
Onofie  Puig,  prebere  y  vicari  de  Cerrallonga,  he  batejat  à  Anioni 
Paul,  fil!  de  Senyerè  Juan  de  la  Setnpena  fargayra  y  de  Margarida 
sa    muller  ».     Cet    acte    de    baptême    est    précédé  de  cette  note  : 


«  Baptisma  de  Antoni  Pau  Senlena  a  dega  de  la  caledral  de  Barce- 
îona  »  (  i  ) . 

Pierre  Font.  En   161 5,  il  signe  vicari. 

Jacques  Llensa,  6  février  1018,  soi  vicari  de  Serrallonga.  Le 
b  juin,  ce  prêtre  signe  :  prêtre  et  vicaire. 

Antich  Altamaso,  6  mai   1619. 

Narcisse  Colomer,  7  septembre   1626. 

Michel  Trinxaria,  fc>  septembre   1 633. 

Michel  Debadia,  20  juillet  1 656,  prêtre  et  curé  de  Serra- 
longue,  servint  dita  recioria  per  la  7^".'  Communilal  de  Prals-de-Mollo. 

François  Canal,  11  mai  1671,  prêtre,  et  curé.  Cette  même 
année  apparaît  Gabriel   Poch,  qui  signe  :  prêtre  de  Serrallonga. 

Le  10  janvier  1674,  Antoine  Boxeda,  curé  du  Tech,  fait  un 
baptême  à  Serralongue  avec  la  permission  du  curé  de  ce  lieu. 

Gaudérique  Santen,    1"  mai   1669. 

André  Faig,  9  juillet  1670,  «  capella  de  animas  »  :  il  fut  inhumé 
dans  le  cimetière  de  Serralongue. 

(1)  Antoine  Paul  Sentena  se  fit  prêtre  et  devint  doyen  de  l'église  cathé- 
drale de  Barcelone.  Sa  vertu  fut  si  exemplaire  qu'il  fut  inhumé  dans  un 
tombeau  de  la  cathédrale  sur  lequel  on  a  gravé  cette  inscription  qu'on  a 
reproduite  a  côté  de  l'acte  de  baptèms  dans  le  registre  de  catholicité  de  l'an 
1  fa  1 1>  :  «  Escrivio  tambien  esta  docta  y  erudita  pluma  a  pétition  de  la  véné- 
rable congregacion  de  la  escuela  de  Christo  de  Barce'"  la  austera  y  prodi- 
giosa  vida  del  doctor  Antonio  Pablo  Centena,  natural  de  Serrallonga,  villa 
en  el  obispado  de  Elna,  degan  de  la  cathedral  de  Bar'",  de  quion  avemos 
hecha  mension.  Est  vénérable  cuerpo  descansa  en  el  coro  de  su  santa  iglesia, 
y  en  su  alaud,  dentro  de  un  bien  cerxado  vidrio,  mando  poner  el  muy  illus- 
tre cabildo,  para  recreado  de  la  posteritad,  la  inscription  siguente  : 

Anlonius  Paulus  Centena 

Sanctx  Theologix  Doctor, 

Tiujus  almx   ecclesix   decanus. 

Vir 

Vita  conspicuus,  pœnitentia  stylita  : 

Aller  Anlonius  ; 

TJovus  solitarius  in  civilate. 

Paulus  moritur  mundo. 

Vivil  in  ccelo, 

Pia  credulitale. 

Obiit  die  77  décernons  M.VC.XC1 

C'est  le  Père  Antoine  Minuart,  grand  augustin,  qui  a  écrit  sa  vie  :  elle 
fut  imprimée  à  Barcelone  en  1744. 


12     — 

Pierre  Valat,  27  juin  1674. 

Miche!  Boxeda,  21   mai    1677. 

Jérôme  Ortet,  7  juillet  jb8o.  11  était  encore  curé  le  18  mars 
1684,  puisqu'il  bénit  la  chapelle  de  saint    Sébastien. 

Pierre  Valat  apparaît  de  nouveau  le  7  mai  1684.  Il  s'annonce 
lui-même  en  ces  termes  :  «  Jterum  incipit  Pelrus  Valat  prebere  y 
curât  ».  Le  17  juin,  il  signe  :  prêtre  y  reclor  de  la  Verge  Maria  del 
lloch  y  terme  de  Serrallonga. 

Joseph  Molins,  27  février  1688. 

Raphaël  Xatart,  21  mai  1705.  Il  signe  curé,  «  curai»  le 
28  avril   1706  et  le  7  mai   1719. 

Biaise  Ortet,  4  juin  1720. 

Grégoire  Bassas,  curé  du  Tech,  se  montre  à  S.erralongue  en 
1724(1). 

Le  domer  Costa,  archiprètre,  en  1744. 

Jean  Tibaut,  29  octobre  1750. 

Julia  Lacome,  2  février  1757  —  '759. 

Ange  Barresa,  29  octobre  1763. 

Pierre  Boix,   1  764. 

Jean  Gineste,  6  septembre  1767. 

Thomas  Matheu,  29  septembre   1777. 

Vidal,  4  septembre  1785. 

J.  Talrich,  8  décembre  1801. 

IV .  —  Coutumes 

Les  troupeaux  étrangers  qui  étaient  pris  paissant  dans  le  terri- 
toire de  Serralongue  devaient  payer  une  amende,  e;  le  produit 
de  cette  amende  était  employé  à  acheter  de  l'huile  pour  l'entre- 
tien de  la  lampe  du  sanctuaire.  L'autorité  seigneuriale  le  voulait 
ainsi  et  l'autorité  civile  et  locale  la  secondait  avec  fidélité  :  «  Dich 
jo,  Jaume  Planas,  farrer  del  lloch  de"  Serrallonga,  baciner  de  la 
lluminari  del  Santissim  Sagrament,  que  tinch  rebut  del  honorable 
Joseph    Poch,    batlle    del    mateix    lloch,   la   suma   y    quantitat    de 

(j)  Ab  hic  (10  mai  1729)  jncipit  regere  curam  animarum  ecclesiae  parro- 
chialis  Bt:P  Mari»  loci  de  Serrallonga  de  Cabrensio  R'lMS  Gregorius  Bassas 
presbyter  ad  hoc  nominatus  et  deputatus  a  R'1'  Communitate  presbyterorum 
ecclesiae  parrochialis  Sanctorum  Justae  et  Rufinae  Pratorum  de  Mollione. 


trenta  y  un  rai  y  vint  diners  losquals  ha  cobrat  dit  senyor  batlla 
de  Serrailonga  junt  ab  los  senyors  consols  de  las  entradas  del  bes- 
tiar  foraster  que  han  penyorat,  y  per  ser  la  veritat  fas  la  présent 
rebtida.  Losquals  cobro,  jo  Jaume  Planas,  per  comprar  oli  à  la 
llantia  del  Santissim  Sagrament.    Vuy,  als  25  de  juny  1699.  B 

Les  troupeaux  étrangers  payaient  aussi  un  droit  d'entrée  en 
faveur  de  l'oeuvre  :  «  Que  qualsevol  persona  que  voldra  tenir  bes- 
tiar  foraster,  tant  gros  com  menut,  en  dit  terme  de  Serrailonga 
y  Falgons  sera  obligada  dins  très  dias  denuntiar  lo  dit  bestiar  al 
batlle  o  consols  de  dit  lloch  y  al  arrendador  de  la  dita  egregia 
S  affi  de  tenirne  notitia  per  y  cobrar  lo  dret  se  deu  pagar  com 
es  un  real  y  mitg  plata  per  cent  de  bestiar  menut  y  altre  real  y 
mitg  de  deu  en  deu  de  bestiar  bohiner  que  se  acostuma  à  pagar  à 
la  obra  de  la  iglesia  de  dit  lloch  ultra  lo  delme,  çots  pena  de  deu 
lliures  plata  per  quiscun  y  quiscuna  vegada  sera  trobat  fer  lo  con- 
trari  aplicadora  com  ait  esta  dit  ». 

(^  suivre)  Joseph  Gibrat. 

Somnis  de  Rossello 


A  Déodat  de  Sévérac. 
I.  Rotllo  del  carrer 

El  rotllo  blanc,  el  rotllo  rosa, 

el  rotllo  blanc, 
mireu  com  es,  com  es  formosa 

aquesta  infant. 

Les  fresques  mans  encadenant,    . 

el  rotllo  rosa, 
son  espardehya  mai  reposa, 

el  rotllo  blanc. 


—    i4  — 

Tira  d'assî,  sus  la  plasseta, 

tira  d'alla  ; 
corre  un  xic  mes,  la  petiteta,   , 

dona  ta  ma. 

L'ombra  té  por  quan  el  sol  brilla 

en  el  carrer  ; 
tremola  i  fuig  com  una  guilla, 

puja  al  graner... 

Al  bosc  floreix  patimanetes, 

sota  '1  ruixat  ; 
salteu,  salteu,  espardenyetes, 

com  el  ruixat  ! 

El  rotllo  blanc,  el  rotllo  rosa. 

el  rotllo  blanc, 
mireu  com  es,  com  es  formosa 

aquesta  infant,  ! 

Flor  de  la  parra,  flor  de  l'ametlla, 

flor  d'ametller, 
oli   d'oliva,  mel  de  l'abella, 

vi  del  celler... 


El  rotllo  blanc,  el  rotllo  rosa, 
el  rotllo  blanc... 


Jul.  17. 


II.  La  nit  rossellonesa 

L'aire  dels  flaviols  de  la  Festa-Major, 

l'aire  dolç,  l'aire  agut  pels  tculats  de  la  plaça, 

es  ma  sola  musica  i  tota  l'iHusiô, 

i  el  goig  franc  i  nerviôs  ont  se  complau  ma  raça. 


—   i5  — 

Les  velles,  assi  i  alla,  s'assenten  su  '1  graô, 
testa  un  xic  acatada  i  mirada  un  xic  lassa, 
mes  quin  ruixat  de  maig,   quina  alegre  abundor 
en  el  ram  escullit  de  minyones  que  passa  ! 

L'espardenya  lligada  al  cim  del  clavillâ, 
vetaqui  la  Maria  i  la  Joana  i  l'Elena, 
guapa  com  una  rosa  a  punt  de  s'esfullar, 
i  un  impuis  concertât  a  la  dança  les.  mena. 

El  teu  devantal  groc,  Elena,  bé  me  plau, 
quan  dançes,  bé  me  plau,  l'espardenya  que  gira, 
quan  dançes,  ta  faldilla,  Elena,  té  un  vol  blau. 
Quin  sera  el  sentiment  que  ta  dança  m'inspira  ? 

La  Joana  es  la  morena  i  té  al  Uavi  un  clavell, 
es  una  moselluda  i  una  alegre  minyona  ; 
la  Maria  es  la  fina  i  baixa  su  '1  clatell 
la  blanca  netedat  de  sa  cofa  rodona. 

Les  fanaletes  fan  un  joc  de  tôt  coior, 
part  d'assi,  part  d'allâ,  tremoloses  a  l'aire, 
llûm  porprada  i  nocturn.  L'ombra  clou  al  cantô, 
sécréta  pels  bertols  qu'ha  parât  el   fringaire. 

Com  un   pastor  bruxot  el  flaviol  burlaner 
su  '1  prestatge  refila,  i  sab  mil  malifetes, 
i  s'en  riu  !  i  s'en  riu  !  i  si  li  ven  â  bé, 
satura  amb  una  frase  aixis  com  els  poètes, 

una  frase  ample  ont  puja  un  cor  enyoradiç  ! 
Sona,  sona,  flaviol  !  Ara  el  goig  ens  deslliga  ; 
el  llavi  perfumat  de  vi  ranci  i  d'anis, 
un  vell  rumia  encare  â  la  Vénus  antiga. 

Quan  dançes,  blanca  Elena,  amb  un  aire  posât, 
quan  gires  l'espardenya  i  quan  tothom  te  mira, 
quan  dançes,  ignorant  ta  fresca  voluptat, 
quin  sera  el  sentiment  que  ta  dança  m'inspira  ? 


_  ,6  — 

La  cobla  ara  s'aplica  à  flautejar  el  Pardal, 
l'aire  que  plau  e)  mes  al  cor  de  nostra  raça, 
i  ont  viu  i'amor  secret  j  dolç  del  Riberal, 
i  per  l'oir  tothom  s'atura  sus  la  plaça. 

Ont  es  aquêt  Pardal,  Elena,  i  ont  fa  remor? 
Els  teulats  pels  carrers  deixen  llur  ombra  caure, 
i  dançen  els  estels  pcis  cims  de  Canigô, 
i  algûn  pastor  isolât  descuida  d'anar  â  jaure. 

Les  fanaletes  fan  un  joc  de  tôt  color  ; 
l'una  tremola  un  xic  i  l'altre  eau  encesa  ; 
pels  carrers  tôt  es  nit,  clariaina,  iHusiô... 
oh  clars  records  de  ma  vida  rossellonesa  ! 


III.  Estels  a  muntanya 

La  vida  la  mellor  es  vida  de  pastor  ; 
ho  he  llegit  en  un  llibre,  i  gairebé  ho  creurîa 
qu'hom  retroba  l'humil  i  antiga  poesia, 
vetllant  â  la  serena  al  ras  de  Canigô. 

N'hom  ou  l'aigua  llisar  dintre  la  fondalada, 
i  com  una  musica  en  tota  la  foscor. 
La  cabrada  es  al  jaç  ;  corre  un  xic  de  fredor, 
i  al  demunt  dels  roquers  tremola  l'estelada. 

La  nit  deixa  pujar  sa  gran  respiraciô... 

No  ho  penses  qu'alla  dalt  rumia  algûn  pastor, 

i  que  l'ha  visitât  el  somni  dels  poètes  ? 

No  ho  penses  qu'alla  dalt  l'ha  visitât  l'anhel, 
ample  i  desconegut  de  régir  les  cabretes, 
com  set  gotes  de  rou  suspeses  en  el  cel  ? 

Joseph-Sebastiâ  Pons. 
[L'Estel  de  VEscamol) 


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DOCUMENTS  HISTORIQUES 

sur  la  Ville  de  Perpignan 


SUITE) 


XT ' .  "Document  relatif  à  la  circulation  des  monnaies  d'or  et  d'argent  sous  le  roi 
Martin  (19  février  1409). 

11  sera  intéressant  de  rappeler,  dans  quelques  lignes,  quelle  fut, 
au  xv'  siècle,  l'importance  de  la  lauîa  de  cambi,  dans  laquelle  on 
déposait  les  monnaies,  joyaux  et  divers  objets.  La  situation  de 
dépôt  privilégié  de  cette  banque  pour  toutes  les  richesses  moné- 
taires, métalliques  et  artistiques,  l'interdiction  aux  autres  ban- 
quiers d'émettre  de  la  monnaie  de  banque,  et  l'obligation  où  ils 
étaient  de  déposer  chaque  semaine  à  la  lauîa  les  fonds  dont  ils 
étaient  dépositaires,  donnèrent  à  cet  établissement  une  vigueur  et 
une  multiplicité  d'action  surprenantes  (1). 

La  taula  devait  jouer  un  jour  un  rôle  très  actif  dans  toutes  les 
opérations  financières  :  elle  mit  en  circul?tion  les  petites  pièces 
de  cuivre,  ardits,  sous,  sixains  et  deniers  menus,  et  les  rem- 
boursa contre  du  numéraire  légal,  à  la  demande  des  détenteurs. 
Plus  tard  (2),  pour  remettre  les  finances  de  la  ville  sur  pied,  la 
taula  était  déclarée  d'utilité  publique. 

Voici  un  document  du  commencement  du  xv'  siècle,  relatif  à 
la  circulation  des  monnaies  d'or  et  d'argent  et  à  l'établissement 
d'une  banque  pour  le  change  (laula  de  cambi).  Ces  criées  furent 
faites  au  nom  du  roi  Martin  (existente  personaliter  in  castro  ville 
Perpiniani)  suspenda.':t  les  ordonnances  qui  défendaient  de  rece- 
voir les  écus  ^t  les  blancs  de  France,  seuls,  Manques  e  tola  autra 
moneda  d'or  e  d'argent,  jusqu'à  ce  que  l'on  frappât  à  Perpignan 
des  florins  d'or  en  grand  nombre  (que...    sia    batuda    moneda    de 

(1)  Voir,  à  ce  sujet,  Desplanque,  Recherches  sur  la  dette  et  les  emprunts  de 
la  Ville  de  Perpignan,  page  i3  :  0  una  taula  de  cambi  en  la  quai  diverses  per- 
sones  deposarien  e  tindrien  monedes,  joyells  e  altres  cescs.  1  (Livre  mineur, 
♦5a.) 

2)   18  octobre  1573,  Madrid.  (Livre  vert  majeur,  f    3i6.) 


—   .8  — 

florins  e  de   barchinens  copiosament   en    la  vila  de  Perpenya),  et 
qu'il  y  fût  établi  une  banque  pour  le  change. 

Cette  ordonnance  fut  faite  à  la  requête  des  consuls  François 
Grimaud,  Guiihem  Blanca.  Bernard  Raseres,  Sernin-  Adela, 
Arnald  Montilia,  consuls  de  Perpignan,  par-devant  les  témoins 
Jacques  Pallarès  et  Manuel  de  Raiadello,  conseillers  du  roi. 
L'acte  fut  rédigé  par  Jean  de  Leytage,  notaire   royal. 

19  février  1406 

[De  monedes  stranyes  tant  de  or  com  de  argent,  que  hom  les 
puscha  traure  dels  comtats  de  Rossello  e  de  Cerdanya]. 

Noverint  universi  quod  anno  a  nativitate  Domini  millesimo 
quadringentesimo  sexto,  videlicet  die  veneris  que  computabatur 
décima  nona  mensis  februarii,  illustrissimo  ac  magniffico  principe 
et  domino  domino  Martino  Dei  gratia  rege  Aragonum,  Valencie, 
Majoricarum,  Sardinie  et  Corsice,  comiteque  Barchinone,  Rossi- 
lionis  et  Ceritanie,  existente  personaliter  in"  castro  ville  Perpi- 
niani,  multum  honorabiiis  et  providus  vir  Petrus  de  Bergua,  con- 
siliarius  et  negotiorum  curie  ipsius  domini  régis  promotor  ac  ejus 
cancellariam  regens,  ex  parte  ejusdem  domini  régis,  presentibus 
me  notario  et  testibus  infrascriptis,  mandavit  Bernardo  Croells, 
crida  publico  ville  Perpiniani,  presenti,  ut,  per  loca  publica  dicte 
ville,  cum  tubis  clangentibus,  sollempniter,  ut  est  moris,  publicaret 
quandam  preconitzationem  seu  cridam  que  fuerat  per  consilium 
regium  ordinata  juxta  quandam  ordinationem  per  dictum  dominum 
regem  factam,  cujus  quidem  preconitzationis  sive  cride  ténor 
sequitur  sub  hiis  verbis  : 

«  Ara  ojats  que  notiffica  lo  molt  ait  senyor  Rey  à  tots  general- 
ment  que,  jatsia  lo  dit  senyor,  sobre  lo  afforament  de  les 
monedes  stranyes  axi  d'or  com  d'argent,  haja  fêta  certa  pracma- 
tica  sanccio,  e  haja  prohihit  e  fet  publicar.  ab  veu  de  publica 
crida  que  neguna  persona,  de'  qualsevol  stament  o  condicio  sia, 
no  gos  traure  alcuna  moneda  d'or  ni  d'argent  de  sos  règnes  e 
terres,  sots  certes  e  grans  pênes  en  la  dita  pracmatica  coritengudes  ; 
e  mes  avant,  en  lo  contracte  célébrât  entre  lo  dit.  senyor,  de  una 
part,*  e  En  Berenguer  dez  Tortell  e  P.  Torrent,  moneders  de 
Barchinona,    de    la    part    autra,  les  arrendaments  de  les  seques  e 


—    iq    — 

bâtiments  de  moneda  dels  ditz  sos  règnes  e  terres,  lo  dit  senyor 
naja  proniés  de  fer  exequtar  ia  dira  pracmatica  sanccio  e  manar  e 
ordonar,  segons  ha  manat  e  ordonat,  que  neguna  pcrsona  no  gos 
pendre  scut  d'aur  de  França  sino  à  raho  Je  xv  ssous,  vu  diners,  e 
blanques  à  raho  de  vi  diners  malia  per  peça,  e  autres  monedes 
Der  so  que  valen  d'aur  et  d'argent  tant  soJament  ;  la  aual  ordi- 
nacio  ha  fêta  pubiicar  ab  veu  de  cri.ia  en  la  vila  de  Perpenya. 
Empero,  corn  per  part  de  la  universitat  de  la  dira  vila  sia  stat  à 
la  sua  excelieneia  reverentment  exposât  que  les  dites  inhibicions 
eren  fêtes  e  publicades  en  gran  prejudici  e  lesio  de  la  dita  vila  e 
universitat  e  priviiegis  a  aquella  autrepatz  e  altres  terres  dels 
comtatz  de  Rossello  e  de  Serdanva  per  moites  e  diverses  rahons 
per  part  de  la  dita  universitat  aiieguades,  lo  dit  senyor  Rey,  ate- 
ses  les  rahons  desus  dites,  de  les  quais  e  dels  priviiegis  desus  dits 
enten  à  fer  légitima  discusio  e  retre-hi  la  justicia  que  s'  perta- 
nverâ,  e  à  suolicacio  de  la  dita  universitat  ha  manat,  ordonat  e 
autrejat  que,  revocades  les  crides  sobre  les  dites  coses  en  la  dita 
vila  fêtes  e  publicades,  sia  legut  à  cascuna  persona  stranya  e  pri- 
vada,  de  qualsevol  ley,  stament  o  condicio  sia,  pendre  scuts,  blan- 
ques e  tota  àutra  moneda  d'or  e  d'argent  dins  la  dita  vila  e  '1s 
comtats  desus  ditz  en  auuell  for  que  s'  volrân,  per  spasi  de  hun 
any  primer  vinent  comptador  del  présent  dia  en  avant.  Axi 
empero  que  per  lo  dit  senyor  o  per  los  dits  arrendadors  de  les 
seques  sia  batuda  moneda  de  florins  e  de  barchinens  copiosament 
en  la  vila  de  Peroenva  e  tenguda  taula  o  taules  de  cambi  en  les 
quais  se  puixen  copiosament  trobar  florins  e  barchinens  à  cambi, 
los  quais  bâtiment  de  moneda  o  posament  de  taula  hagen  a 
començar  dins  spasi  de  un  meses  primers  vinentz  e  continuar  per 
lo  dit  any.  E  si  dins  los  dits  mi  meses  no  sera  començat  lo  dit 
bâtiment  de  moneda  o  posament  de  taula,  los  huyts  meses  res- 
tantz  del  dit  any  no  comensen  à  correr  fins  que  sia  començat  con- 
tinuant-ho,  segons  es  i:ir.  E  no  res  menys  ha  atorguat  lo  dit 
senyor  a  la  universitat  de  la  dita  viia  que  cascuna  persona  de 
aquella  e  dels  dits  comtatz,  de  qualsevol  stament,  lev  o  condicio 
sia  puixa  traure  deis  dits  comtars  liberament  e  fronça  à  sa  volen- 
tat  totes  e  qualsevol  monedes  d'aur  e  blanques  sens  encorriment 
de  al;una  pena  per  spasi  de  1  anv  primer  vinent  comptador, 
segons  desus  es  dit.   Per  que  lo  dit  senyor  notiffica    a    tots  e  sen- 


—    20    — 

gles  les  coses  desus  dites,  per  tal  que  alcun,  d'aci  avjint,  no  puixa 
ignorancia  alleguar.  » 

Quo  manciato  facto,  incontinent!  Ffranciscus  Grimaudi,  Guiller- 
mus  Blartcha,  Bernardus  Raseres,  Serninus  Adela,  Arnaldus  Mon- 
tiliani,  consules  ville  Pe'rpiniani,  requisiverunt  me,  infr?scriptum 
notarium,  ut  de  hiis  eis  et  universitati  ville  Perpiniani  publicum 
sive  publica  instrumentum  et  instrumenta  cor.ficerem,  tôt  quot  eis 
et  universitati  predicte  fuerint  necessaria  ac  etiam  opportuna. 
Que  quidem   instrumenta  dictus  honorabilis  regens  fieri  concessit. 

Testes  qui  premissis  interfuerunt  s'unt  honorabilis  Jacobus  Pal- 
laresii,  et  Manuel  de  Raiadello,  consiliarii  dicti  domini  régis. 

Postea  autem,  die  sexta  décima  martii  anno  predicto,  in  pre- 
sencia  mei  notarii  et  testium  infrascriptorum,  retulit  se  dictus 
Bernardus  Croells,  preco  publicus  dicte  ville  Perpiniani,  una  cum 
eis  consociis,  tubantes  predictam  preconitzationem  publicasse  per 
dictam  villam  Perpiniani  per  loca  asueta  ville  préambule,  ut  est 
moris,  die  décima  octava  menssis  februarii  proxime  retrolapsi. 

Testes  qui  relation!  predicte  interfuerunt  sunt  Raymundus  Fer- 
rer, notarius  ville  Perpiniani,  et  Gabriel  Roscet,  scriptor  domini 
régis. 

Sig.-(s.  manuel)-num  mei  Johannis  de  Leytago^  scriptor  dicti 
domini  régis,  notariique  publici  auctoritate  regia  per  totam  terram 
et  dominationem  suam  qui  predictis  omnibus  interfui  eaque  scribi 
feci  et  clausi,  cum  raso  et  ablato  in  xm"  linea  continuant  (i). 


XVI.    L'embellissement  des  bords  de  la  "Basse  au  commencement  du  xvn'  siècle. 

Au  commencement  du  xvn'  siècle,  les  règlements  qui  concer- 
naient la  police  de  la  ville  devinrent  plus  sévères. 

On  cherchait  à  donner  à  Perpignan  une  nouvelle  parure  et  prin- 
cipalement à  l'assainir  et  faire  de  cette  poblacio  une  cité  modèle. 
Un  document  du  commencement  du  xvn'  siècle,  17  septembre  1608, 
nous  renseigne  précieusement  sur  ces    nouvelles    ordonnances   qui 

(ij  Archives  comm.  de  Perpignan,  A  A.  3,  livre  vert  mineur,  tome  1", 
P  358  v\  359. 


avaient  pour  but  d'embellir  ic  principal  quartier  de  la  ville  (i), 
en  l'assainissant  avec  méthode.  Un  privilège  de  i3ii  (2)  faisait 
aux  consuls  une  ici  de  réviser  chaque  année  les  ordonnances  (ordi- 
nacions)  ue  police,  de  reformer  celles  qui  étaient  défectueuses  et 
inutiles  et  de  les  remplacer  par  des  règlements  plus  pratiques  et 
utiles  :  cette  revision  concernait  le  bailli. 

Criées  publiées  devant  les  maisons  des  tanneurs,  en  dehors  des 
remparts  de  Pemignan  (3)  et  relatives  au  lavage  et  séchage  de  la 
laine  dans  la  rivière  de  la  Basse,  depuis  ie  Ponidel  Tqro  jusqu'au 
Boulevard  de  Saint-François.  —  Interdiction  de  couper  les 
roseaux,  d'enlever  ces  pierres  ou  du  sable  du  lit  de  ce  ruisseau, 
d'y  jeter  des  immondices,  d'y  laisser  vaguer  des  poules,  oies,  etc.  ; 
défense  de  faire  des  plantations  d'arbres,  de  semer  ce  terrain  et 
de  faire  du  jardinage  ;  en  cas  d'infraction,  amende  de  trois  livres, 
monnaie  de   Perpignan. 

17  septembre   1  608 

Preconium  pro  grava  del  Toro. 

Ara  hoyats  tothom  gcneralment  de  part  del  molt  illustre  senyor 
don  Johan  de  Liunia,  donzell  en  la  vila  de  Perpinya  domiciliât, 
substituit  en  lo  ofici  de  Procurador  Reai  e  Feudal  en  los  comptats 
de  Rossello  y  Cerdanya,  per  lo  molt  illustre  senyor  don  Gabriel 
de  Llupia,  conseller  de  la  Sacra,  Cesarea  y  Real  Majestat  del 
Rey  nostre  Senyor,  e  Procurador  Real  et  Feudal  en  los  dits 
comptats,  que,  inseguint  la  provisio  .'cta  per  lo  magnifich  micer 
Montserrat  Arquer,  doctor  en  drets  lit  la  vila  de  Perpinya.  jutge 
ordinari  de  la  cort  del  Real  Patrimoni  en  dits  comptats,  a  ins- 
tancia  e  requesta  del  Procurador  fiscal  patrimonial,  per  lo  interés 
del  Real  patrimoni,  e  de  Père  Vera,  brasser,  habitant  de  la  vila 
de  Perpinya,  arrendador  de  les  graves  que  son  desde  )'  pont   del 

(1)  Ces  deux  rives  de  la  Basse  (la  Tasss.),  le  long  desquelles  sont  cons- 
truits les  quais,  qui  doivent  plus  tard  se  prolonger  jusqu'il  la  gare,  consti- 
tuent l'un  des  principaux  quartiers,  où  l'on  voit  de  beaux  immeubles  (Pré- 
fecture, hôtel  Ecoifher.  etc.)  et  qui  mené  à  la  belle  promenade  des  Platanes. 

121  Livre  ver  mineur,  f    ç5. 

(3)  Les  tanneries,  au  commencement  du  xvn'  siècle,  étaient  donc  situées 
en  dehors  de  l'enceinte  de  Perpignan,  «r  extra  menia  Perpiniani  ». 


—  1ï  — 

Thoro(i)  fins  al  baluari  dit  de  Sant-Francesch  (2),  per  son  interés  ; 
ab  ténor  de  la  présent  pubiica  crida  se  diu,  notifica  y  fa  à  saber 
à  totes  y  qualsevol  persones,  de  qualsevol  grau,  stat  o  condicio 
sien,  que  no  gosen  ni  presumescan  rentar  ni  fer  rentar  lianes  en 
la  ribera  de  la  Bassa,  ço  es  del  dit  Pont  del  Thoro  fins  al  baluart 
dit  de  Sant-Francesch,  ni  exugar  ni  fer  exugar  aquelles  en  la 
dita  grava  ;  réservât  enpero  que  lo  dit  arrendador  haja  de  donar 
lloch  als- aluders  de  la  dita  yilade  Perpinya  per  lo  rentar  y  exu- 
gar de  ilurs  lianes  tos  temps  y  quant  per  dits  aluders  los  sera 
.demanat,  e  no  altrament  ;  lo  quai  lloch  los  haja  de  donar  dit  arren- 
dador  sempre  que  li  sera  demanat,  no  havent-hi  lianes  de  aba- 
ners  (?)  o  altres  qui  tinguessen  tota  la  dita  grava  occupada. 

Item,  diu  v  mana  à  totes  y  qualsevol  persones  que  de  assi  al 
devant  no  gosen  ni  presumescan  traure  o  fer  traure  pedra  ni  arena 
de  la  dita  grava  ni  canye's  dels  canyissos  de  aquella,  ni  llansar 
algunes  immundicies  en  la  dita  grava,  ni  tenir  algunes  gallines, 
ochas  ni  avets  que  vagen  per  dita  grava,  havent-hi  llana,  à  fi  que 
no  s'  posen  entre  dita  llana,  ni  fer  plantadcs  de  arbres,  ni  sem- 
brar,  ni  fer  ortalissas  en  aquella  ;  e  asso  sots  pena  de  très  lliures 
moneda  de  Perpinya  per  cascuna  vegada  que  serân  trobats  fer  lo 
contrari.  De  la  quai  pena  e  ban  haurâ  lo  denunciador  la  tersa 
part,  e  les  restants  dues  parts  serân  aplicades  als  cofreus  del  Real 
Patrimoni.  E  per  que  no  s'  puga  ignorancia  allegaf,  mana  la  pré- 
sent esser  publicada. 

Die  xvn  mensis  septembris  M.D.C.V111.  Perpiniani. 

Jacobus  Sargatal,  preco  publicus  et  juratus  ville  Perpiniani, 
retulit  et  fidem  fecit  michi  Juillermo  Domenech,  notario  eo  scribe, 
se,  die  presenti,  publicasse  preinsertum  preconium  alta  et  intelli- 

(  ■  )  Le  Pont  del  Toro,  connu  plus  tard  sous  le  nom  de  Pont  del  Portai  de 
la  Sal,  avait  été  construit  sur  la  Basse  en  1327,  près  du  Toro.  par  l'archi- 
tecte qui  avait  construit  «  le  Pont  de  Perpignan».  L'inondation  de  i55o 
le  renversa  ;  il  fut  relevé  en   168a. 

(2)  C'est  cette  partie  du  bastion  Saint-François  que,  plus  tard,  Vauban 
faisait  démolir  :  «  raser  le  vieux  rempart  et  revestement  compris  entre  deux, 
et  au  lieu  de  cette  fortification  qui  est  naturellement  la  plus  deffectueuse  de  la 
Place,  exécuter  le  dessein  d'agrandissement  marqué  au  plan...  »  C'était  la 
ville  neuve  qui  devait  se  relier  aux  bastions  du  Castillet  et  de  Saint-François. 


-     23     — 

gibili  voce,  sono  tube  emisso,  in  dicta  grava  ante  domos  blanque- 
riorum,  extra  menia   Perpiniani  (i). 

Testes,  honorabiiis  Franciscus  Carrera,  mercator,  Joannes  Fer- 
ranao,  braseerius,  et  ego  Guillermus  Domenech,  notarius  et 
scriba  (i). 

(A  suivre)  Henry  Aragon. 

(\)  C'est  dans  ce  quartier  (faubourg  des  Tanneries)  que  Jacques  1"  de 
Majorque  avait  relègue  les  blanquers  ou  tanneurs  de  la  ville  en  i3o2.  A  cette 
époque,  ce  faubourg  était  considérable,  car  il  englobait  toute  la  poblacio  des 
tanneurs  et  teinturiers  réunis.  Ces  derniers,  sous  le  roi  Pierre  IV,  en  1374, 
s'établirent  dans  la  rue  des  Bains  (carrer  dels  Banys),  actuellement  rue  du 
Bastion  Saint-Dominique. 

(2)  Archives  des  Pvr.-Or.,  B.  439.  Manuale  Curie,  registre  XXXVI,  f *  1  5  1 . 

Quelques  noms  de  plantes  #  synonymes 

Catalans-Français  #  Français-Catalans 

<e£#3^  (SUITE) 

T 

talabard.  —  voir  boixerica. 

tamariu  (et  tamarill,  tamarit,  tamarisc,  tamarell),  tamarin.  — 

gateil. 
tatiarida  (et  tanavell),    ranaisie.  —  herba    dels    verms,    herba  de 
santa  Maria. 

taparera,  câprier. 

taronger,  oranger. 

tarongifia,  mélisse,  cilronelle.  —  citrô,    citronella,    herba    de  citrô, 

cidrac. 
tarra.  —  voir  morterol. 
tarrec.  —  voir  lletresa. 
té  bort.   épiaire.   —  herba  de  ia  feridura. 

té  de  muntanya,  véronique  officia 
teix,  if. 

tell  (et  tey).  —  voir  tindarell. 


—   24   — 

tiler,  tiller,  tila,  tilia,  tilleul.  —  tarot. 

timÔ.  —  voir  farigola. 

tim0SSri,  lavande  slœchas.  —  caps  de  borro,  cardigases,  tomanyi, 

tomani. 
tindarell  (et  tintorell),  daphné-garou.  —  mata-poils,   astruc,    tell, 

tey. 
tirabec.  —  voir  pesol. 
tofona,  truffe.  —  trufa. 

tomani  (et  tomanyi.  —  voir  timossa. 

tomata  (et  tomatec,  tomaquet),  tomate.  —  poma  d'amor. 
tora,  aconit.  —  herba  de  les  tores,  mata-llops. 

»     pudcnt.  —  voir  givertassa. 
toronger,  torongina.  —  voir  taronger,  tarongina. 
trava=CavaIlS.  —  voir  passa-camî. 
tramUSSOS.  —  voir  llovins. 
transflorina.  —  voir  trescam. 
trapadella.  —  voir  esparcet. 

traspic,  thlaspi.  —  herba  del  passarell,  bolseta  de  pastor. 
traUCa=perolS.  —  voir  aladern. 
traUCa=SaCS.  —  voir  espigadella. 
trèmol  (et  trèmbol),  tremble. 
trencaiÔS,  sceau  de  Salomon. 
trenca=l*OCS,  saxifrage. 
trescam   (et   trescames,  treSCalam),  millepertuis.   —  transflorina, 

pingell,  pericô  groc,  herba  de  Sant-Joan. 

trevol  (et  trivolet),  trèfle. 

trigoneila,  trigonelle,  fenugrec.   —  banya  de  cabra. 

troana.  —  voir  olivella. 

tfumfa,  pomme  de  terre.     —  patana. 

turbît.  —  voir  coscoll. 

U 

llll  de  boil,  chrysanthème  des  moissons. 

>  de  cavall,  inule.   —  herba  de  l'ala. 

»  de  perdiu,  adonis. 
Ullastre.  -     voir  ollastre. 
Ulmaria,  ulmaire,  spirée,  reine  des  prés.   —   herba  del  pobre  home. 


—     25    - 

V 

Valeriatia,  valériane. 

vediella.  —  voir  vidiella. 

VeleS'J,  jusquiame.  —  hcrba  caxaiera,  herba  de    era,   herba   de    la 

ira,  mata-gallincs. 
velluts,  amarantbe,  crête  de  coq. 
Veratre.  ellébore  blanc.    - 
Verbena,  verveine.    —  herba  berbera. 

verdolaga,  pourpier. 

VermcllÔ-    —   voir  campanetes. 

,Vem,  aulne.    —  arbre  nègre. 

veSSa,  vesce,    —  pedrassa,  arvelles. 

Vidalba     (et     vidailba).     clématite     des    haies.  —  vidarsa,  ridorta, 

ridolta,  herba  de  Job,  herba  de   les   llagues. 
vidarsa.  —  voir  vidalba,  ci-dessus. 
Vidailla  (et  vidaura),  houblon.  — esparguls,  llupol,  lupol,  cervesa, 

piraoues. 
Vidiella  (et  vidriell a),  clématite    flammeite.     —    vediella,  viadella, 

badieila,   jassemi  de  borro. 

\ina=ine*querrer.  —  voir  morterol. 

\'ii)la,  violette.  —  viola   boscana. 

»        de  pastor.  —  voir  calabruxa. 
violer,  violier,  giroflée. 
Viîica=pcrvinca.  —  voir  pervinca. 
vim,  osier.  —  vimen. 
VÎmet,  saule  osier.  —  sarga,  sarguera. 
VÎUda,  villdeta,  scabieuse. 
VOlivarda.   —  voir  olivarda. 


Xeixa,  blé  froment. 

xerevia  (et  xaravia,  xirivia),  chervis. 
xeringuilla,  seringa. 

XerumpJUS.  —  voir  caps  biaus. 
XiCOVa  (et  XÎCOyra),  chicorée.  —  agon. 
XÎpell  (et  xiprell).  —  voir  sepell  et  bruc. 
Xiprer,  cyprès. 


—    26    — 

xifipis,  ortie.  —  estrigol,   ortiga,  ortigol. 

xirivides,  salsifis. 

XiSpet,  fétuque. 
XOp.  —  voir  poil. 
XUClarnel.  —  voir  mareselva. 

Z 

zizenia  (et  zizania,  zitzania),  ivraie.  —  jull,  margail. 

(Tin  de  la  première  partie) 

Lktra  a  n'en  Père  Butxareu 

Redactor  de  La  Veu  de  Calalunya 

Benvolgut  i  distingit  senyor, 

Ja  fa  alguns  dies  que  he  tornat  d'Alemanya  al  nostre  bell  pais 
catalâ  de  Rossellô  ;  i  he  sabut  que,  a  la  requesta  de  mos  amies  i 
companys  de  la  T\evue  Catalane  de  Perpinyâ,  1'  «  Associaciô  de  la 
Prensa  Diaria  de  Barcelona  »,  utilitzant  l'influencia  que  exerceix, 
havia  fet  tôt  lo  possible  Dcr  retirarme  ciels  camps  de  repressalies 
de  Curlanda. 

Aquesra  proba  de  germanor,  aquest  interés,  que  per  cert  no 
mereixien  encare  mos  trebails,  m'han  enlleugerit  les  pênes  i  afanys 
de  la  captivitat  en  el  pais  dels  Barbres.  He  après  que  tots  els 
socis  de  la  vostra  Associaciô  s'havien  unit  en  mon  favor,  prescin- 
dint  de  tota  tendencia.  Als  uns  i  als  altres  jo  dire  mercès,  encare 
que  amb  mes  afecte  i  mes  emociô  als  vertaders  amies  de  la  França, 
perqué  tots  ells  han  obrat  amb  l'empenta  del  sentiment  idéal  qui 
els  inspira.  1  aixô,  apreciat  senyor,  val  molt  mes  que  ma  petita 
personalitat. 

]  ara,  si  voleu  una  proba  de  la  poca  fiança  que  es  mereixen  els 
Embaixadors  oficials  del  govern  alemany,  vetaqui  un  détail  his- 
torié. 

La  vostra  lletra  del   i"  de  setembre  de  1916,  publicada  per  la 


J^evue  Calalame  de  Pcrpinyà,  anuncia  que  la  vostra  demanda  havia 
sigut  atesa  pel  govern  germànic,  i  que  havia  sigut  tret  dei  camp 
de  repressalies  de  Curlanda  i  trasladat  à  un  campament  urbà.  1 
doncs,  aquesta  noticia,  tal  com  vos  l'han  donada,  es^falsa  de  cap 
a  peus.  Sols  pel  desembre  del  mateix  any  tornava  al  campament 
urba  de  Dùlmen,  amb  mos  companys.  i  pel  nevar  cap  d'any  de 
iqij  figurava  encare  el  meu  nom  sobre  una  llista  de  noves  repres- 
salies. Del  carâcter  d'aquestes  repressalies  i  del  concept?  que  es 
mereixen  els  qui  les  regien,  no  s'en  parli. 

Ja  es  massa  llibertat  la  que  m'he  presa.  Bé  me  plau  saber  que 
la  «  Prensa  Catalana  »  no  descuida  el  llaç  qui  ens  lliga,  tots  els 
catalans,  d'eniia  i  d'ensâ  de  l'Aibera. 

Avui    que    per    la   vostra    gran    ciutat  i  per  tota  Catalun\a   sona 

mes  febrosa   e    inauieta    l'hora    de    les    reivindicacions    politiques, 

rebeu,  vos  i  la  vostra  noble   Associaciô,    mes   fervents   salutacions 

i  merces,  amb  tôt  i'entusiasme  que    'm   dona    la   vista    de    Canigô, 

el  nostre  pare  i  el  nostre'  conseiier. 

Joseph-Seb.    Pons. 
111a.  6  de  janer   loiq. 


Cris  de  la  Rue 

par  Charles  Grando 

Notre  confrère  La  Renaissance  Catalane  inaugure  une  série 
d'éditions  roussiiionnaises  par  la  réédition  de  i'œuvre  curieuse  et 
attrayante  de  notre  estimé  collaborateur,  M.  Charles  Grando, 
publiée,  il  v  a  quelques  années,  par  la  Revue  Catalane  :  Les  Cris 
de  la  T{ue. 

Nous  ne  d'outons  pas  que  cette  2'  édition,  complètement  remise 
à  jour,  n'obtienne  le  même  succès  qui  couronna  ia  première  et 
valut  à  i'auteur  du  Clam  Roig  et  des  Monolegs  T(ossellones'os  ies  féli- 
citations des  maîtres  Aureli  Canmanv.  A^cics  Mestrc  Ins- 
titut d'Estudis  Cataians  et  de  l'Arxiu  de  Folk-lore  de  Barceione. 

A.   Chanty. 


Perpignan  Pittoresque  :  Cris  de  la  T(ue ,    avec   les   notations   musicales. 
2*  édition  revue  et  augmentée.  Editions  de  la  Renaissance  Catalane.  Priv  i  fr. 


MÔND    ROSTAND 

Amb  la  mort  ci-  l'Edmond  Rostand,  !a  Fiança  acaba  de  perdre  una  de 
les  figrurcs  mes  représentatives  del  seu  teatee.  Maigrat  que  la  seva  pro- 
duccio  escenica  no  es  de  bon  tros  de  les  mes  abundoses  ni  de  les  mes  for- 
tes, el  seu  nom  esdevingué  popular  a  tôt  el  mon  :  en  ressuscitar,  escenificant- 
la,  ia  figura  del  famés  Cyrano  de  Bergerac,  assoli  un  dels  triomfs  teatrals 
mes  formidables  que  mai  oap  autor  hagi  obtingut. 

Rostand  nasque  a  Marsella  I'any  .1808,  en  1892  estrenâ,  a  la  Comèdia 
Francesa,  ia  seva  primera  obra  dramatica,  titulada  Les  Romanesques  :  en 
1895  ia  Sara  Bernhard  li  ëstrenâ  La  princesa  Lointaine,  i  en  1896  obtingué 
un  sorollôs  àxit  amb  La  Samaritana.  Parlant  de  l'estrena  d'aquesta  obra  un 
critic  parisenc,  referint-se  a  l'autor.  advertia  als  seus  llegidors  :  «  Reteniu 
ben  bé  aquest  nom,  puix  dia  vindrà  que  sera  un  grand  nom.  » 

La  profecia  del  critic  no  trigà  gaire  a  realitzar-se,  puix  el  28  de  desem- 
bre  de  1897  al  teatre  de  la  Porte-Saint-Martin  s'estrenava,  enmigde  clamo- 
roser.  ovacions,  els  famôs  Cyrano  de  "Bergerac. 

Uns  quants  anys  mes  tard  donava  al  public  el  célèbre  CharJecler,  obra  que 
si  be  es  cert  crue  no  va  afegir  res  a  la  seva.giôria  d  autor,  va  tenir  el  do 
d'intrigar  el  mon  durant  un  pareil  d'anvs  abans  que  es  veies  damunt  de  les 
taules,  i  va  donar  Hoc  a  que  els  empresaris  de  la  Porte-Saint-Martin  bates- 
sin  el  record  de  la  propaganda  i  fessin  la  «  réclame  »  d'una  estrena,  la  mes 
formidable  que  mai  nos'hagi  vist  al  mon. 

Le    :anon  de  Lérida 

De  tous  les  châteaux  de  Catalogne,  c'est  le  château  de  Lérida 
nui  a  été  de  tout  temps  le  plus  abandonné,  le  plus  dépourvu  de 
ut  . 

Un-  iour,  un  général,  faisant  son  entrée  dans  la  cité,  fut  très 
étonné  de  constater  que  la  forteresse  ne  lui  rendait  pas  les  hon- 
neurs qui  lui  étaient  dûs  en  tirant  les  coups  de  canon  indiqués 
par  les  règlements. 

En  proie  à  une  grancie  co)ère,  le  général  pénétra  dans  la  for- 
teresse et  s'adressant  au  gouverneur  iui  dit  : 

—  Pourquoi  n'a-t-on  pas  tiré  la  salve  réglementaire  ? 

—  Pour  plusieurs  motifs,  mon  général,  répond  tranquillement 
le  gouverneur. 

—  Dites-les  tout  de  suite  !  riposta  le  général   furieux. 

—  Le  premier,  mon  générai,  est  peut-être  le  plus  important: 
nous  n'avons  plus  de  coudre...  Le  second... 

—  Taisez-vous!  ça  me  suffit,  interrompit  le  général  complète- 
ment apaisé. 

\.t  Gérant,   COMET    .    —   Imprimerie  Catalane,   CÛMET,   rue  de  la   Poste,    Perpignan 


13"  Année   N'  148  15  Février  1919 


Le\    Manuscrits  non  insères 
ne  son:   oas  rendu» 


REVUE 


Lti   ÀrnJes    parus  aans   ia    Revue  ff  "*     ^^    w  ■  '    ^^     1  j\    ^W|   f| 

n  env'agenr  aue  leurs  auteurs.  ^B^A    A    A     A    BA»A    J»  A  ^  ^m& 

Organe  de  la  Société  d'Etudes  Catalanes.  —  Cotisation  :  10  fr.  par  an 

UN  FOYER  DE  VIE  CATALANE 

L'Université  de  Perpignan 

Un  moyen  très  efficace,  très  profitable  au  pays,  fécond 
en  ressources  de  vitalité  catalane,  serait  la  renaissance  de 
l'Université  littéraire,  que  Perpignan  possédait  autrefois 
dans  l'établissement  qui  sert  aujourd'hui  de  Musée.  Fon- 
dée, en  1349,  Par  Pierre  IH  d'Aragon,  cette  célèbre  insti- 
tution fut  la  dispensatrice  unique,  la  gardienne  jalouse  de 
la  science,  conférant  seule  des  grades,  sanction  suprême  de 
son  droit  d'enseignement,  accordant  le  baccalauréat  et  le 
doctorat  en  théologie,  en  droit,  en  médecine,  ainsi  que  la 
maîtrise  ès-arts,  mais  non  toutefois  la  licence.  Quelle  efflo- 
rescence  de  vie  intellectuelle  et  morale  n'apporterait  donc 
pas,  dans  notre  ville,  la  reconstitution  de  cette  Université, 
avec  ses  facultés  de  droit,  de  médecine,  de  philosophie,  de 
belles-lettres  et  de  beaux-arts  ! 

Quand  disparut,  en  1804,  l'Université  de  Perpignan,  les 
regrets  furent  grands  parmi  les  roussillonnais.  «  Compa- 
rant le  présent  au  passé,  ils  désespérèrent  un  instant  de 
l'avenir  intellectuel  de  notre  pays.  »  C'est  ce  qu'exprimait 
en  ces  termes,  en  1806,  M.  Jaume,  qui  fut  l'un  des  plus 
illustres  professeurs  de  ce  corps  enseignant. 

«  Toutes  ces  pertes,  dit-il,  ont  fait  le  malheur  et  la  ruine 
de  cette  province  du    Roussillon. ..    Comment   pourra-t-ellç 


-  3o  — 

pourvoir  à  l'éducation,  à  l'instruction,  à  la  formation  de 
ses  enfants  »  ?  Comment  ceux-ci,  à  peu  de  frais  ou  gratui-. 
tement  même,  pourront-ils  acquérir  une  instruction  solide, 
«  se  rendre  utiles  au  public,  se  procurer  le  moyen  de  pour- 
voir à  leur  honnête  subsistance,  se  faire  un  bon  nom  et 
une  bonne  réputation  ?  » 

—  «  Alors,  ajoute  M.  Jaume,  les  enfants  des  pauvres 
«  familles  de  cette  province  pouvaient  s'y  vouer  et  s'y 
«  vouaient,  parce  qu'ils  trouvaient  à  Perpignan  des  parents 
«  ou  des  amis  qui  se  prêtaient  volontiers  à  les  loger  et  à 
«  les  nourrir  chez  eux  gratuitement  ou  sous  de  très  modi- 
«  ques  pensions.  Jlu  lieu  qu'à  présent  ceux  qui  voudront 
«  embrasser  quelqu'un  de  ces  états  (avocat,  médecin,  etc.) 
«  devront  se  transporter  ou  à  Toulouse,  ou  à  Montpellier, 
«  ou  à  quelque  autre  ville  de  "France,  où  il  y  ait  des  collèges 
«  et  des  Universités  pour  y  étudier  pendant  plusieurs  années,  et 
«  y  apprendre  les  sciences  propres  aux  états  auxquels  ils  se 
«  destineront  et  y  recevoir  leurs  grades.  Ce  qui  leur  coûtera 
«  des  sommes  considérables  pour  les  voyages,  le  logement,  la 
«  nourriture,  les  habillements  et  entretiens  nécessaires  ;  de  sorte 
«  qu'il  n'y  aura  que  les  jeunes  gens  nés  de  parents  riches  qui 
«  pourront  suivre  leur  penchant,  leur  désir,  leur  vocation  ;  tan- 
«  dis  que  ceux  nés  de  parents  pauvres  ou  hors  d'état  de  four- 
ni nir  à  ces  dépenses  ne  le  pourront  absolument  pas,  quoique 
«  doués  de  talents  propres  à  ces  différents  états.  »  (  i  ) 

Sans  doute,  «  les  établissements  publics  et  privés  d'ensei- 
gnement secondaire,  la  facilité  des  communications,  la 
création  de  nombreuses  bourses  ont  en  partie  pallié  les* 
funestes  effets  occasionnés  par  la  disparition  de  l'Univer- 
sité. 11  n'en  restera  pas  moins  vrai  cfue,.  faute  d'enseigne- 
ment supérieur,  notre  ville  est  comme  découronnée,  n'a  plus 
la  vie  intellectuelle  d'autrefois,  l'instruction  ayant  perdu  en 
intensité  ce  qu'elle  a  gagné  en  extension.  Tel   est   l'aveu  d'un 

(i)  Ph.  Torreillbs,  L'Université  de  Perpignan,  pp.  i  10-1  i  i  ;  Ch.  Latrobe, 
1892, 


—  3i    — 

historien  roussillonnais,  fort  compétent  en  matière  d'ensei- 
gnement, M.  le  chanoine  Torreilles  (j).  Nul  ne  contredira 
à  ce  jugement  aussi  impartial  que  vrai. 

On  a  tenté  plus  d'une  fois,  notamment  sous  la  Restau- 
ration, de  rétablir  l'Université  de  Perpignan.  On  n'y  a  pas 
réussi.  Mais,  puisque  les  Etudiants  de  Montpellier  se 
préoccupent,  en  ce  moment,  de  fonder  en  cette  ville  des 
chaires  d'histoire  et  de  langue  catalanes,  où  iraient  étudier 
les  jeunes  gens  du  Roussillon,  ne  serait-il  pas  plus  naturel, 
plus  logique,  que  les  dons  publics  et  privés  de  la  charité 
roussillonnaise  fussent  sollicités  pour  le  rétablissement  de 
notre  ancienne  Université  perpignanaise,  où  la  création  de 
ces  mêmes  chaires  serait  également  très  naturelle  et  très 
logique  ?  Pas  ne  serait  alors  besoin  de  voyager  et  de  séjour- 
ner, au  prix  de  frais  énormes,  à  l'étranger,  pour  y  appren- 
dre une  langue  de  notre  propre  pays,  que  tout  le  monde 
parle  chez  nous,  que  nous  avons  sucée  avec  le  lait  mater- 
nel. Nul  professeur  exotique,  eût-il  tous  les  diplômes  du 
monde,  ne  nous  apprendra  jamais  mieux  notre  propre 
langue  que  ceux-là  mêmes  qui  l'ont  parlée  dès  l'enfance, 
qui  en  ont  appris  sur  place  les  dialectes  et  les-  nuances,  soit 
de  nos  vieilles  chartes  catalanes,  soit  des  lèvres  mêmes  du 
peuple,  car  c'est  lui  qui  est,  avec  nos  mères,  ainsi  que  l'a 
dit  très  poétiquement  notre  Pastorellet,  «  Je  meilleur  maître 
ès-langue  catalane  »  (2).  Il  en  va  pareillement  de  l'histoire 
et  de  l'art  de  notre  pays.  L'art  catalan  est  en  effet  tellement 
autonome,  qu'il  demande,  pour  être  étudié  et  compris  sans 
erreur  aucune,  un  tempérament  du  terroir  et  des  connais- 
sances locales,  d'analyse  et  de  comparaison,  qu'à  distance  le 
plus  docte  étranger  ne  saurait  posséder,  qu'il  ne  saurait 
même  bien  acquérir  que  fort  difficilement.  De  même  qu'en 
art  chrétien  il  faut  une  âme  de  théologien  pour  le  com- 
prendre,   de    même    il   faut,  en  art    catalan,  une  âme  cata- 

(1)  Op.  cit.,  toc.  cit. 

(2)  -Ay  y  Albades.  p.   14,  Cornet,  Perpignan,    1914. 


—     32     — 

lane  pour  en  saisir  les  secrets  et  les  nuances.  Combien, 
pour  ma  part,  je  connais  de  savants  archéologues  des 
grandes  écoles  de  la  capitale  qui,  sollicités  de  se  pro- 
noncer sur  un  document  d'art  catalan  de  notre  pays, 
peinture,  sculpture,  vieilles  inscriptions  lapidaires,  mon- 
naies antiques,  se  sont  trompés,  quand,  déclinant  leur 
compétence,  ils  n'ont  point  eu  recours  aux  lumières  des 
professionnels  de  notre  province  pour  plus  ample  informé  ! 
Que  d'erreurs  ne  relèvé-t-on  pas  aussi  en  certaines  études 
de  nos  monuments  historiques,  parce  que  leurs  auteurs 
n'ont  pas  suivi  les  règles  que  prescrit  toujours  en  l'occur- 
rence M.  Brutails,  le  plus  compétent  des  archéologues  en 
art  catalan,  et  qu'il  n'a  cessé  de  rappeler  aux  Marignan, 
aux  Molinier,  ses  non  moins  doctes  confrères. 

Le  Roussillon  est  assez  riche  en  hommes  —  nul  n'ignore 
le  haut  talent  des  Calmette,  des  Vidal,  des  Brutails,  le 
toujours  catalan  par  le  cœur,  — -  pour  qu'à  eux  seuls  ils 
ne  puissent,  en  notre  Université  restaurée,  enseigner  avec 
une  maîtrise  que  nul  étranger  n'aurait,  l'histoire,  la  langue, 
le  droit  et  l'art  catalans.  11  ne  s'agirait  que  de  trouver  les 
ressources  nécessaires  pour  la  fondation  de  ces  quatre  chai- 
res. Les  représentants  légaux  du  département,  nos  conseils 
généraux  et  municipaux,  auraient  la  tâche  facile,  s'ils  vou- 
laient bien  obtenir  les  crédits  et  les  subventions,  à  ce  néces- 
saires, des  pouvoirs  publics  et  de  leurs  administrations  res- 
pectives. Les  dons  privés  afflueraient  ensuite.  L'Université 
revivrait  alors.  Quel  beau  renom  s'acquerrait  ainsi  le  Rous- 
sillon et  quelle  abondance  de  vie  catalane  circulerait  en  lui  ! 
La  meilleure  Académie  roussillonnaise,  dont  rêvent  plusieurs 
fervents  du  régionalisme  catalan,  la  voilà  :  ïîiniversité 
Perpignanaise  renaissante.  Puisse  sur  ce  programme  se  faire 
l'union  de  tous  les  catalanistes  du  Roussillon  et  de  tous  les 
amis  de  la  petite  patrie  ! 

Jean  Sarrkte. 


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J  offre  a  casa  se  va 

*** 

El  Nostre  Joffre,  el  pare  dels  peluts,  ha  tornat  a  casa  seva,  ha 
petjat  de  bell  nou  el  sol  de  la  pàtria  catalana. 

Quina  gloria  pel   Rosseliô  ! 

Terra  fecunda  y  benehida,  mare  estimada  que  tants  preuhats 
trésors,  que  tant  de  be  de  Deu  has  portât  y  portes  en  ta  falda, 
ets  tu  que  has  donat  al  mon  eix  nou  tità. 

Tenies  unes  montanyes  régalades,  una  costa  admirada,  un  cel 
encantador  ; 

Tenies  un  passât  insigne,  y  prou  ho  demostrerï  les  barres  de 
sang  del  teu  escut  ; 

Tenies  fills  valents  y  forts  ;  eis  campions  de  França  de  1914, 
cayguts  gayrebé  tots  per  la  Llibertat,  eren  fills  teus  ; 

Tenies  força,  virtut,  grandesa,  magnificencia. 

Mes  en  ton  bressol  florit  no  s'havia  may  esbadellat  tan  preciosa 
poncella  ;  no  havies  criât  encare  l'home  unie  que  s'havia  d'alçar  a 
la  gloria  eternal  d'un  nou  Messies. 

Aqueixa  gloria  d'En  Joffre  te  cobreix  avuy  de  ses  aies  blaves, 
terra  de  Rosseliô,  de  tes  blanques  piques  de  Cerdanya  a  ta  costa 
vermelia  regalenta  de  sol  ;  y  ets  alabada  a  tôt  arreu  del  mon  com 
lo  pessebre  espiendorôs  de  la  Humanitat  redimida. 

El  Canigô  ha  trobat  un  paladi  digne  de  la  seua  grandesa,  digne 
del  primer  Jofre  lo  Pelut  que  s'hi  mesura. 

Ja  poden  tornar  a  repicar  les  campanes  de  Sant-Marti  ;  jà 
podem  fer  al  Nostre  Joffre  la  mes  entusiasta  acullida,  puix  may 
no  li  agrahirem  prou  la  pagina  d'honor  que  va  escriure  un  dia, 
amb  son  espasa,  enfront  de  l'Historia  del  Rosseliô. 

Catalans,  saluclem  aqueix  gran  Compatrici  ! 

Caries  Grandô. 


La  visite  de  Joflre 


Le  6  février,  Perpignan  a  reçu  la  visite  du  Maréchal  Joffre. 

Sur  le  désir  même  de  notre  compatriote,  la  réception  devait 
être  simple. 

Mais  notre  population  catalane,  par  reconnaissance  et  aussi  par 
une  légitime  fierté,  avait  tenu  à  fêter  le  vainqueur  de  la  Marne  et 
s'était  massée  aux  abords  de  l'Hôtel-de-Ville  pour  l'acclamer  au 
passage. 

Accompagné  de  M.  Lambry,  préfet  des  Pyrénées-Orientales, 
et  des  autorités  du.  département,  le  Maréchal  parcourut  à  pied 
les  rues  de  la  Préfecture  et  de  la  Loge.  Sa  prestance  et  sa  sou- 
riante bonhomie  enthousiasmèrent  la  foule. 

Dans  la  salle  des  mariages  de  l'Hôtel-de-Ville,  M.  Denis, 
maire,  vivement  ému,  souhaita  la  bienvenue  au  héros  roussillon- 
nais,  dont  la  gloire  rayonne  au-dessus  de  toutes  les  intrigues  ; 
M.  le  Préfet  salua  le  Maréchal  au  nom  des  populations  roussil- 
lonnaises. 

Et  celui  qui,  calme  sous  la  responsabilité  la  plus  lourde,  endi- 
gua avec  des  moyens  de  fortune  le  flot  envahisseur,  cet  homme 
de  génie  qui  fit  cette  victoire  qu'on  qualifia  de  miracle,  répondit 
simplement,  modestement,  en  s'excusant  de  ne  pas  être  orateur, 
et  pour  dire  qu'il  aimait,  lorsqu'il  rencontrait  des  soldats  du  pays, 
parler,  avec  eux,  notre  belle  langue  catalane. 

«  Joffre,  dit  notre  confrère  Le  Coq  Catalan,  préfère  la  conduite 
de  Cincinnatus  à  une  attitude  théâtrale.  » 

Cette  modestie,  après  le  plus  haut  des  triomphes,  est  d'une 
grandeur  admirable. 

Une  conscience  pure  et  ferme,  un  génie  que  nulle  gloire  n'a  pu 
griser,  une  âme  qui,  au  fil  des  heures  terribles  de  1914,  n'a  pas 
connu  le  vertige,  était  seule  capable  de  grandes  choses. 

Joffre  fut  cette  conscience  froide,  cette  âme  inébranlable,  ce 
génie  puissant.  11  incarna  la  Patrie  à  la  minute  tragique  ;  il  fut 
l'homme  du  moment.  Joffre  sauva  et  la  France  et  l'Humanité, 
avec  quoi  ?  Répondez,  détracteurs  jaloux  qui  trembliez  honteuse- 
ment. La. Marne  est  une  victoire  du  monde. 

Gloire  éternelle  à  l'immortel  vainqueur,  au  grand  Catalan  ! 

La  T^evue  Catalane. 


Pels  pobres  morts  tant  estimats 

Tornarem  a  veure  dins  d'una  altra  vida, 
Si  tal  recompensa  nos  hem  mereixida, 

Los  que  s'en  anaren,  nos  deixant  aquî, 
Sus  d'aqueixa  terra  de  dolor  sens  fi... 

Quin  goig  per  nosaltres,  cuan  podrem  encare 
Tenir  prop  la  nosrra  la  Uur  dolça  cara  ; 

Ohir,  clara  y  tendra,  montar  la  llur  veu, 
Entre  recordances,  al  devant  de  Deu  ; 

Sentir  batre  y  batre  llur  sanch  preciosa, 
Jova  com  una  alba,  fresca  com  la  rosa  ; 

Amb  ells  nos  estrenyer  d'un  abraç  mes  fort 
Qu'el  mal  de  la  terra,  que  '1  vent  de  la  mort  ! 


Es  una  Hum  nova,  mes  serena  y  pura, 
Qu'alla  vos  espéra,  flor  de  sepultura. 

Es  la  llum  eterna  que  lluheix  per  tu, 
Mort  cubert  de  terra  sota  l'aixado  ; 

Mort  que  sepuitaba  lo  pobre  fossayre 
Tôt  cantant  sa  copia  que  vola  dins  l'ayre  ; 

Mort  qu'entre  la   fosca  tôt  sol  va  deixar, 
Tançant  be  la  porta  fins  â  l'endemà... 

Vetllat  per  la  lluna,  per   la  bona  estrella, 
Per  la  nit  qu'obria  sa  lenta  parpella, 

Cuan  la  pau  ditxosa,   com  un  vel  sagrat, 
Pertot  s'estenia,  baixant  uel  serrât, 


—  36  — 

Cuan  l'aucell  dormia,  cuan  l'aucell  callaba 
En  la  rama  quieta  plena  d'ombra  blava... 

Ton  cos  reposaba  dins  del  clôt  humit  : 
Ha  près  sa  volada  lo  teu  esperit, 

Cap  â  l'altra  vida,  cap  â  Deu  qu'espéra 
L'anima  que  monta  com  flama  lleugera. 

Cuan  canta  la  pluja  su    1  fullam  dels  horts, 
Que  pensa  la  terra  que  guarda  los  morts  ? 

Quin  secret  terrible  la  terra  conserva 
Cuan  lo  sol  desperta  l'insecte  dins  l'herba, 

Cuan  la  melodîa  del  rossinyol   fi 
Alegra  los  boscos  y  '1  cor  del  fadri  ?... 

Lo  pesât  silenci  de  la  terra  obscura 
No  fa  solitaria  cada  sepultura  ; 

No  fa  que  se  callin  per  la  nostra  fé 
Parauies  divines  qu'en  ella  conté  ; 

No  te  fa  mes  freda,  tû,  cendra,  que  dormes 
Per  anys  y  per  segles  al  mon  de  les  formes. 

Per  dessus  s'aixeca  lo  ser  immortal 

Com  branca  espejlida  su  l'avbre  mes  ait... 


No  miris  la  tomba,  de  pois  emplenada, 
Sens  pensar  que  s'obre  sota  l'estelada  ; 

Que  també  n'es  plena  del  cel  infinit, 

Y  que  Deu  la  toca  del  seu  esperit  ; 

Que,  cuan  el  fossayre  la  cubre  6  la  tança, 
Ses  mans  hi  fan  creixer  com  una  flor  blanca  ; 

Y  que  l'esperança  qu'hi  va  fer  son  niu 
Desplegarâ  l'ala  per  l'etern  estiu... 

Joan  Amade. 


DOCUMENTS  HISTORIQUES 

sur  la  Ville  de  Perpignan 

&&$^  (SUITE) 

XTH.  Ordonnance  du  roi  concernant  la  saisie  d'un  navire  perdu  en  mer  et  la 
remise  intégrale  de  toutes  les  marchandises  contenues  dans  la  barque.  — Prises 
de  bonne  guerre.  Tente  d'esclaves.  —  Saisie  de  barques  dans  les  mers  de 
"France. 

Document  relatif  à  la  perte  du  navire  Sainte-Claire,  à  Port- 
Vendres,  dont  le  patron  était  Parcial  Vento,  de  Marseille,  et  qui 
contenait  de  nombreuses  marchandises,  des  munitions  et  une 
somme  importante  d'argent,  le  tout  saisi  par  En  Polit  Frigola, 
lieutenant  du  Procureur  royal  de  Collioure  :  demande  en  restitu- 
tion de  ces  objets  qui  doivent  revenir  en  partie  au  patron  de  la 
barque,  en  partie  à  Adam  Ventos,  négociant  à  Marseille,  frère  du 
dit  postulant,  qui  a  pris  comme  caution  l'honorable  Pierre  Coro- 
nat,  médecin  à  Perpignan.  Ordonnance  du  Roi  au  sujet  de  toutes 
ces  marchandises  (las  mercaderias  e  monicions,  e.  artilarie  e  areus 
que  en  dite  nau  eren)  qui  seront  remises  au  possesseur  et  aux 
héritiers  du  dit  navire. 

i  2  mars  i532 

Die  XI 1  mensis  marcii  DXXX11 

Existens  personaliter  constitutus  Adam  Vento,  mercator  civi- 
tatis  Massilie,  qui  tam  nomine  suo  proprio  quam  actorio  seu  pro- 
curatorio  Joannis  Vento,  fratris  sui,  heredes  universales  nobilis 
Parcivalis  Vento,  eorum  patris  constituto  a  domina  )oanneta  de 
Monte-Elmo,  uxore  relicta  dicti  nobilis  Parcivalis  Vento,  eorum 
matre,  ut  tutrice  seu  curatrisse  dicti  Joannis  Vento,  prout  de  sua 
actoria  constat  instrumento  acto  Massilie  anno  incarnationis 
Domini  millesimo  quingentesimo  tricesimo  primo,  die  septima 
mensis  marcii,  clauso  et  subsignato  per  discretum  Petrum  Mor- 
lani,  civi  (?  sic)  dicte  civitatis  Massilie,  ubique  terrarum  aposto- 
lica  et  regia  auctoritatibus  notarium,  et  etiam  nomine  procuratorio 
Jacobi  Brecardi,  mercatoris    dicte    civitatis,    prout    de    dicta    sua. 


—  38  — 

procuratione  constat  instrumente  acto  Massilie  anno  a  nativitate 
Domini  millésime»  quingentesimo  tricesimo  secundo,  die  vero 
octava  presentis  mensis  marcii,  clauso  et  subsignato  per  discre- 
tum  (i)  Vincencium  Rotundi,  apostolica  et  regia  aucto- 

ritatibus  notarium  publîcum  Massilie,  ac  etiam  procurator  hono- 
rabilium  Pétri  Boehardi  et  Bernardi  Gymbaot,  mercatorum  dicte 
civitatis  Massilie,  prout  de  dicta  potestate  constat  instrumento 
acto  in  dicta  civitate  Massilie,  anno  incarnationis  Domini  mille- 
simo  quingentesimo  tricesimo  primo,  die  octava  mensis  marcii, 
recepto- et  clauso  per  discretum  Joannem  Dedena,  apostolica  et 
regia  [auctoritatibus]  notarium  dicte  civitatis  ;  ante  presentias 
honorabilium  et  magnifficorum  honorabilis  Gabrielis  Vilar,  locum- 
tenentis  in  officio  Regii  Procuratoris  et  Joannis  Del  Passu,  utrius- 
que  juris  doctoris,  regentis  judicaturam  Regii  Patrimoniï  dicto- 
rum  comittatuum,  personaliter  inventorum  et  repertorum  intus 
archivum  domus  Procurationis  Régie,  qui,  dicto  nomine,  verbo 
exposuit  sequentia  : 

«  Ço  es  que,  com  en  dies  passats,  en  lo  Port  Vendres  de  Cop- 
liure,  se  sie  perduda  una  nau  nominade  Sancla  Clara,  de  la  quai 
Parcial  Vento,  son  pare,  ère  patro  e  senyor  de  aquella,  en  la 
quai  havie  moites  mercaderies,  ferramenta,  arnesos,  bonbardes, 
farcia  e  altres  areus  de  dite  nau  e  axi  mateix  quantitats  de  peccu- 
nies  tant  del  dit  son  pare  quant  encare  dels  sobre  dits  principals 
seus  ;  las  quais  mercaderies,  ferramenta,  arnesos  e  artillaria  e 
monicions  de  dite  nau  son  stades  apreses  per  la  major  part  per  lo 
honorable  En  Polit  Frigola,  de  Copliure,  com  a  loctinent  de  Pro- 
curador  Real  en  dite  ville  ;  e  com  dites  mercaderies  e  monicions 
de  dite  nau,  per  la  mitât  pertanguèn  à  ell,  y  per  l'altre  mitât  al" 
dit  son  germa,  com  hereters  del  dit  llur  pare,  segons  de  la  heren- 
cia  de  aquell  apar  per  letras  certifficatorias  emanadas  de  la  cort 
de  Massele,  ab  lo  segell  de  dite  cort,  e  signades  de  ma  de 
Nicholau  Vincent,  jutge  de  dite  cort  de  Masselle,  dad.es  à  Mas- 
selle  à  nou  de  marc,  any  mil  sinch  cens  e  trenta  e  hu  ;  y  per  lo 
semblant  los  sobredits  principals  seus,  dels  quais  ell  es  procu- 
rador,  com  dit  es,  tinguessen  algunes  robes  e  mercaderies  en  dite 
nau,    las  quais,  ensemps  ab  les  que  se  pertanyen  à  ell  y  al  dit  son 

(i)  Ici,  un  blanc. 


_  3c,  - 

germa,  ensemps  ab  las  monicions  de  dite  n'ai!  ;  supplique  que  per 
vostres  magnifficencias  sia  provehir  que  dites  mercaderies  e  moni- 
cions, tant  d'ell  en  dit  nom  corn  dels  sus  dits  principals,  li  sien 
restituhides  e  tornades  per  la  présent  cort,  com  en  aquellas  la 
présent  cort  no  tingue  interés  aigu.  » 

Et  dicti  domini  locumtenens  et  regens  judicaturam,  visis  supe- 
rius  calendatis  instrumentis,  providerunt  quod  dicta  bona,  res  et 
merces  in  dicta  nave  existentia  et  illius  munitiones  desliberentur 
dicto  Adam  Vcnto,  prestita  cautione  de  restituendo  illa,  casu  quo 
appareret  dicta  bona  et  merces  et  monitiones  existentia  in  dicta 
nave  non  pertinere  ad  se  dicto  nomine  nec  eorum  principa- 
libus,  et  firmata  apocha. 

Die  X  mensis  aprilis  DXXX11,  dictus  Adam  Vento,  tam 
nomine  suo  proprio  quam  procuratorio  nominatorum  in  dicta  supe- 
rius  comparutione,  gratis  etc.  convenit  et  promisit  curie  Regii 
Patrimonii  quod  si  in  futurum  bona  eidem  desliberata  per  présen- 
tent curiam  per  aliquos  peterentur,  quod  illa,  in  casu  restitutionis 
restituet  dicte  curie  ad  ordinationem  dicte  curie.  Et  inde  obligavit 
bona,  etc.  ;  et  quia  minor  XXV  annis,  major  vero  decem  octo, 
renunciavit  beneficio  minoris  etatis,  etc.  ;  et  pro  majori  premis- 
sorum  securitate  dédit  in  fidejussorem  (i)  honorabilem  Petrum 
Coronat,  medicum  ville  Perpiniani,  presentem. 

Unde  dictus  Coronat,  precibus  et  amore  dicti  Adam.se  consti- 
tua fidejussorem  pro  premissis,  et  inde  obligavit  bona,  etc. 
renuntians  auctentice,  etc. 

Testes,  discretus  Johannes  Mercer,  notarius,  Petrus  Morer, 
loci  de  Thoyrio,  et  ego  notarius. 

Dicto  die,  dictus  Vento  dictis  nominibus  f[ecit  ou  firmavitj  ins 
trumentum  indempnitatis. 

En  Gabriel  Viiar,  loctinent  en  lo  offici  de  Procurador  Real 
en  los  comptats  de  Rossello  e  Cerdanya,  e  en  Joan  Del  Pas,  doc- 
tor    en    quiscun    dret,    régent    la    judicatura   de  la  cort   del    Real 

Suivant  la  judicieuse  remarque  de  M.  Brutails,  «  en  Roussillon  les 
cautions  sont  très  fréquentes  dans  les  affaires  contentieuses  ;  mais  dans  les 
contrats,  les  parties  fournissent  elles-mêmes  la  garantie,  qui  prend  parfois 
le  nom  de  retorn.  »  (A.  Brutails,  Elude  sur  la  condition  des  populations  rurales 
en  T^oussillorx.  chap.  vi,  page  93.) 


—  4°   — 

Patrimoni  en  los  sobredits  comtats.  Als  honorables  lo  balle  de 
la  vila  de  Copliure  e  loctinent  de  Procurador  Real  de  dite  vile  e 
à  son  loctinent,  salut  e  honor.  Sapiau  com  de  e  sobre  las  merca- 
derias  e  monicions  que  eren  en  la  nau  nominade  Sancte  Clare, 
patronejade  per  Parcial  Vento,  de  Masselle,  que  s'  perde  en 
Port  Vendres  de  dita  vila  pochs  dies  ha  ;  las  quais  son  stades 
preses  per  vos,  loctinent  de  Procurador  Real  de  aqui  ;  e  es  com- 
paregut  devant  nos  Adam  Vento,  mercader  de  Masselle,  per  lo 
quai,  tant  en  nom  seu  propri  quant  encare  com  actor  de  Joan  Ven- 
to, son  germa,  fills  del  dit  Parcial  Vento,  e  axi  mateix  com  à 
procurador  de  Jaume  Brecardi  e  Père  Boehardi  e  Bernât  Gym- 
beot,  mercaders  de  Massella,  segons  de  dites  actorie  e  procures 
à  nos  es  stade  fêta  fe  per  occular  hostensio  de  aquellas,  som  stats 
suplicats  de  paraule  que  aquellas  li  manassem  restituhir  e  tornar, 
com  en  aquellas  la  présent  cort  no  tingue  dret  aigu.  E  nos,  vehent 
la  dite  supplicacio  esser  justa  e  consonant  à  raho,  es  stade  per 
nos  fêta  la  provisio  de  justicia.  Per  tant,  instant  e  requerint  lo 
dit  Adam  Vento  en  dits  noms,  de  part  de  la  Cesarea  e  Regia 
Magestat,  e  per  auctoritat  dels  officis  dels  quais  usam,  vos  dihem 
e  manam  que  encontinent  las  présents  vistes,  de  vostre  part  res- 
tituhigan  e  restituhir  fassan  al  dit  Adam  Vento  en  dits  noms  las 
mercaderias  e  monicions  e  artilaria  e  areus  que  en  dite  nau  eren, 
tant  del  dit  son  pare  quant  dels  sobre  dits  principals  seus,  fer- 
made  primer  apocha  à  la  présent  cort  de  aquelles. 

E  no  res  menys  fareu  restituhir  al  dit  instant  en  dits  noms  las 
mercaderias  e  monicions  que  serân  stats  (sic)  apresas  per  qual- 
sevol  persones  de  aqui,  compellint  aquellas  per  los  remedis  de 
justicia  que  restituhesquen  aquellas  al  dit  instant,  ab  cominacio 
que  si  aquellas  recusserân  restituhir,  sera  per  vos  procehit  contra 
aquellas  en  fer-las  la  execucio  per  aquellas. 

Dades  en  Perpinya,  à  XXJJ  de  marc  any  mil  DXXXU  (i). 

Document  relatif  à  la  vente  de  cinq  esclaves,  évadés  de  l'île 
de  Majorque,  achetés  par  Pierre  Jauset  et  François  Andreu,  de 
Perpignan,  et  amenés  en  Roussillon  dans  une  barque  conduite  par 

(i)  Archives  des  Pyr.-Or.,  B.  424.  Manuale  Curie,  registre  XX,  f™  191  v\ 
192. 


—    4'    — 

Paul  Mir,  de  Valence,  patron  de  la  dita  galiota,  qui  alléguait 
qu'un  de  ces  esclaves,  d'origine  turque,  qu'il  avait  acheté,  lui 
appartenait  de  plein  droit. 

j  Pro  translato  habeturj 

Item  met  en  rehuda  lo  dit  Procurador  la  quantitat  de  fora 
posada(i)  per  preu  de  hun  sclau  appellat  Luch,  de  linatge  de 
Turchs,  que  s'  reta  per  son  servir,  lo  quai  lo  dit  Procurador  prés 
per  dret  de  quint  al  senyor  Rey  pertanyent  de  aquells  sinch 
sclaus  que  foren  quintats,  los  quais  en  Père  Jauset  e  en  Ffran- 
cesch  Andreu,  de  Perpinya  havien  comprats  de  la  xurme  de 
una  galiota  d'En  Paul  Mir,  de  Valencia,  que  arribâ  en  les  mars 
de  Rosselio,  ab  la  quai  lo  dit  Paul  Mir  havia  preses  los  dits 
sinch  sclaus  ensemps  ab  altres,  segons  se  dehia,  en  les  mars  de 
Barberia,  en  una  barcha  ab  la  quai  los  dits  e  altres  sclaus  eren 
fugits  de  la  illa  de  Mallorques  e  ab  aquella  s'en  anaven  en  Bar- 
baria  ;  e  la  dita  xurma  de  la  dita  galiota  lansaren  lo  dit  Parul  Mir, 
senyor  e  patro  de  aquella  en  la  dita  illa,  e  fugiren  ab  los  dits 
sclaus  que  preses  havien  e  arribaren  en  les  dites  mars  de  Ros- 
selio, hon  veneren  aquells,  segons  es  dit.  E  fou  déclarât  per 
jutge  de  Patrimoni  haver  loch  dret  de  quint  en  los  dits  sclaus.  E 
es  veritat  que  lo  senyor  del  dit  Luch,  que  es  de  Mallorques,  e 
lo  dit  Pau  Mir,  cascun  per  si,  ha  fets  protests  molts  e  requestes 
per  recobrar  lo  dit  Luch,  e  han  posada  demanda  de  aquell  devant 
lo  senyor  Rey  e  devant  micer  Johan  Navarro,  jutge  per  lo  dit 
senyor  Rey  assignat  en  lo  dit  fet,  allegant  lo  dit  hom-  de  Mallor- 
ques qui  s'  diu  senyor  del  dit  Luch,  que  à  ell  e  no  al  dit 
Paul  Mir  ni  altre  se  pertany  lo  dit  Luch,  puys  no  ère  arribat  en 
terra  de  Barbaria,  mes  ère  stat  prés  en  la  mar  e  per  conseguent 
ère  ell  romas  tostemps  en  lo  domini  ne  li  troura  (ou  nourra)  la 
declaracio  de  jutge  de  Patrimoni,  com  no  y  sia  stat  citât  ne 
appellat  ;  e  lo  dit  Paur  Mir  allegant  que  de  la  xurma  qui  li  havia 
furtat  e  la  dita  galiota  e  los  dits  sclaus  no  havien  pogut  vendre, 
aquells  per  conseguent  deure-li  esser  restituhits. 

E  per  ço,  lo  dit  Procurador,  obstant  la  pendencia  del  dit  plet, 
ha  duptat  fer  la  présent  rebuda  tro   ara  que  '1s  posa,  ab  protesta- 

(i)  En  marge  :  l  lliures. 


—  4*  — 
cio  empero  que  si  lo  dit  sclau   li   sera   evençut   per    justicia,    que 
abans  de  restituhir  aquell,  li  sia  restituhida  la  dita  quantitat. 

Presens  partita  recepte  fuit  sumpta  a  quodam  libro  seu  com- 
poto  papireo  cohoperto  corio  virido  intus  archivum  domus  Pro- 
curationis  Régie  comitatuum  Rossilionis  et  Ceritanie,  intitulato  : 
«  Si  se  compte  de  resebudes  e  dates  fêtes  per  En  Barthomeu 
Miralles,  procurador  real  e  feudal  en  los  comtats  de  Rossello  e 
de  Cerdanya,  de  hun  any,  finit  per  tôt  juny  M.CCCC.XXU  », 
et  cum  eodem  comprobata  per  me  Franciscum  Glassat,  notarium 
et  scribam  dicte  Procurationis  Régie,  hec  propria  manu  scriben- 
tem  et  meum  manuale  hic  apponentem  sig-(s.  manuel)-num  (j). 

Document  relatif  à  la  saisie  de  deux  barques  naviguant  dans 
les  eaux  de  Provence  de  France  et  d'Aigues-Mortes  (saisie  faite 
par  Raymond  Correger  de  Collioure,  patron,  et  Bernard 
Anthoine,  capitaine  de  navigation)  ;  amenées  au  port  de  Col- 
lioure, comme  prises  de  bonne  guerre,  et  vendues  à  l'encan,  au 
profit  du  Roi,  pour  le  prix  net  de  12  livres,  i3  sous,  3  deniers, 
"déduction  faite  de  tous  frais. 

1"    juillet    1422 

[Pro  translato  habetur] 

Item  met  en  rebuda  lo  dit  Procurador,  los  quais  rehebé 
per  ell  lo  dit  loctinent  sou,  xn  lluires  xm  s.  ni  al  senyor  Rey 
pertanyents  pèr  raho  del  quint  de  dos  barques  e  alguna  quantitat 
de  forment  qui  foren  preses  per  en  Ramon  Correger  de  Copliure, 
patro  de  nau,  e  per  en  Bernât  Anthoni,  capita  de  la  nau,  e  per 
altres  companyons  en  les  mars  de  Prohensa  e  en  les  mars  de  Ffrance 
e  d'Aygues-Mortes,  e  les  quais  foren  amanades  al  port  de  Cop- 
liure e  après  foren  menades  de  Port-Vendres  al  port  d'amont  de 
Copliure,  e  per  lo  loctinent  o  jutge  de  parimoni,  presa  primera- 
ment  informacio,  foren  judicades  esser  preses  de  bona  guerra  e 
après  venudes  en  l'encant  publich  per  preu  de  lxvi  lliures  v  s.  : 
ço  es  la  una  barcha  qui  era  nova,  per  preu  de  xvn  1.  v  s.,  e  altre 
barca  vella,  per  preu  de  vin  1.  v  s.,  e  '1  forment,  per  preu  de 
xxxx  I.,  e  la  civada,  per  preu  de  xv   s.  ;    de   les  quais,    deduhides 

(  1  )  Archives  des  Pyr.-Or.,  B.  a8o,  f*  5  v". 


_  <3  - 

les  messions  qui  monter»  dos  lliures  xvni  s,  vi  d.,  ço  es  de  Port- 
Vendres  amenar  les  barques  à  Copliure  v  s.,  e  als  homens  qui  y 
havien  jagut  una  nit  per  gordar-les  v  s.,  e  al  crida  que  les  vene, 
per  son  dret,  xi  s.  n  d.,  e  al  dret  de  la  imposicio  de  m  diners  per 
liura  xvi  s.  vi  d.,  e  al  dret  del  General  per  les  barques  un  s. 
nu  d..  e  al  dret  de  les  marques  xvi  s.  vi  d.,  de  les  quais  quanti- 
tats,  deduhides  les  messions,  restaren  quitis  al  scnyor  Rey  les 
dites  xu  lliures  xni  s.  m  d.  ;  scrit  endentes  vu  entz  viiii". 

Hujusmodi  translatum  recepte  fuit  sumptum  a  quodam  libro 
papireo  cohoperto  corio  virido  (sic)  intitulato  «  Sete  Libre  de 
Resebudes  fêtes  per  lo  honorable  En  Barthomeu  Miralles,  Pro- 
curador  Real  e  des  Feus  en  'los  comtats  de  Rossello  e  de  Cer- 
danya,  lo  quai  comensa  lo  primer  die  de  juliol  del  any  Mil 
CCCC.XXJ1  e  feneixs  per  tôt  lo  mes  de  juny  del  any 
M.CCCC.XX111  »,  intus  archivum  Procurationis  Régie  dictorum 
Comittatuum  recondito,  et  cum  eodem  comprobatum  per  me  Fran- 
ciscum  Glassat,  notarium  et  scribam  dicte  Procurationis  Régie, 
hec  propria  manu  scribentem  et  meum  manuale  hic  apponentem 
sig-(s.  manuel)-num  (1). 

(A  suivre)  Henry  Aragon. 

(i)  Archives  des  Pyr.-Ot.,  B.  280,  P  5. 

Nadal 

Jt  na  Joana  Amade,  boi  espellida... 

Els  angels  canten  : 
La  Verge  ha  parit  l'infant  ; 

i  se  decanten, 
humils,  l'ase  i  el  bou  vetllant. 

Oh  nit  tranquila  ! 
Els  pastors  van  de  cami  ; 

si  l'un  refila, 
l'altre  joga  el  violi. 


—  44  — 

Diu  el  missatge 
un  este!  de  gran  claror  ; 

duen  formatge 
blanc  com  gebre  en  el  sarrô. 

Duen  espigues 
guardades  des  de  l'estiu, 

i  un  desc  de  figues, 
ous  i  olives  de-  l'oliu. 

En  l'establîa 
els  pastors  han  pénétrât. 

Ave  Maria  ! 
j  tots  s'han  agenollat. 

Somriu  la  mare 
quan  li  va  rajant  la  llet, 

i  en  sa  ma  clara 
té  l'infant  assentadet. 

Penjen  del  sostré 
dalles,  forques  i  rastells  ; 

l'aranya  mostra 
rod-olant,  sos  devanells. 

L'ase  régira 
una  orella  en  la  foscor  ; 

i  l'estel  mira 
alla,  al  cap  del  finestrô. 

Una  espigueta 
alça  l'infant  dolçament 

en  sa  ma  dreta, 
l'espigueta  de  froment. 

En  l'establia 
passa  un  somni  iHuminat. 

Verge  Maria, 
tôt  mitg-riu  :  Jesûs  es  nat  ! 
24  febrer  de  1919.  Joseph-S.  Pons, 


Les  Vendangeurs  du  Roussillon 

Maquette  de  Célestin  Manalt 
\ 


La  théorie  des  Vendangeurs  que  l'esprit  inventif  et  fécond  de 
Manalt  a  conçue,  nous  fait  songer  aux  antiques  défilés  des  Oscho- 
phores  dans  les  murs  ae  l'Acropole,  quand  ils  portaient  dans  leurs 
larges  corbeilles  les  grappes  productives  du  vin  rubis  qui  devait 
couler  dans  les  pressoirs. 

On  songe,  en  voyant  ce  rustique  tableau,  à  ia  pompe  solennelle 
des  fêtes  champêtres,  à  Bacchus,  le  dieu  de  la  vigne,  qui  règne 
au  milieu  de  ses  compagnons  parmi  les  couronnes  de  fleurs,  et 
qui  s'efforce  d'animer  la  marche  joyeuse  au  son  du  chalumeau, 
pour  faire  naître  les  ris  folâtres  et  dissiper  les  noirs  soucis. 

On  voit  s'avancer,  au  milieu  des  rameaux  garnis  de  leurs  feuil- 
lages et  tressés  avec  des  branches  de  vigne  et  de  lierre  enlacées, 
tous  les  personnages  de  la  fête  qui  portent  le  thyrse  et  les  divers 
fruits. 

Nous  nous  trouvons  au  milieu  des  fêtes  rurales  de  la  vendange 
dans  lesquelles  le  cortège  joyeux  paraît  se  rendre  vers  l'autel  ou 
le  temple  de  Dionysos. 

Dans  l'antiquité,  en  l'honneur  de  ces  fêtes,  des  jeunes  filles 
portaient  sur  leur  tète,  dans  des  corbeilles,  les  ustensiles  du  sacri- 
fice et  des  gâteaux  pour  les  offrandes  ;  on  apportait  aussi  des 
vases  pleins  de  vin,  des  paniers  de  figues,  des  pommes.  Ces  fêtes 
agraires  de  la  vendange  étaient  célèbres  à  Mitylène  ;  à  Andros, 
le  vin  coulait  d'une  source  merveilleuse  ;  la  dorienne  mais  volup- 
tueuse  Tarente  était  tout  entière  exaltée  pendant  les  Dionysies. 

Ce  tableau  de  Manalt  rappelle  bien  les  fêtes  Athéniennes  qui 
furent  les  plus  importantes  de  toutes  celles  de  Dionysos:  on 
céiébra  d'abord  les  humbles  fêtes  de  la  campagne  des  cantons  de 
la  Diacrie,  particulièrement  favorables  à  1î<  culture  de  ia  vigne. 
Dans  les  fêtes  dlcaria,  l'expression  de  la  joie  fut  dominante  ; 
entre  autres  divertissements,  les  vignerons  dansaient  sur  des 
outres  gonflées  d'air  et  enduites  d'huile  :  ces  joyeuses  fêtes  de  la 


-  46  - 

campagne  avaient  lieu  l'hiver  ;  on  y  goûtait,  sur  le  lieu  de  produc- 
tion, le  vin  nouveau  déjà  fermenté. 

Le  sculpteur  roussillonnais  ne  s'est-il  pas  inspiré  des  souvenirs 
antiques  se  rattachant  à  ces  fêtes  brillantes  qui  servaient  de  pré- 
lude aux  vendanges,  et  dans  lesquelles  on  portait  en  procession 
des  pampres  garnis  de  grappes?  D'après  Piutarque,  deux  éphèbes 
revêtus  de  costumes  féminins  portaient  les  ceps  chargés  de  fruits: 
c'étaient  les  Oschopbores.  lis  s'avançaient  les  premiers  et  ils  étaient 
suivis  par  sept  compagnons,  les  sept  garçons  traditionnels  ;  le  hui- 
tième annonçait  le  retour.  La  procession  s'avançait  en  chantant 
des  chants  oschophoriques  et  se  rendait  du  temple  de  Dionysos 
à  Athènes.  Pendant  ce  long  trajet,  il  y  avait  des  courses  ;  les 
éphèbes  luttaient  deux  à  deux  ;  la  libation  était  accompagnée  des 
cris  de  douleur  et  de  joie. 

De  nombreuses  fêtes  avaient  lieu  en  l'honneur  des  vendanges, 
où  les  plaisanteries  libres,  les  propos  alertes  égayaient  la  foule 
heureuse  des  vendangeurs. 

Manalt  a  su  largement  s'inspirer  de  ces  fêtes  locales  d'un  carac- 
tère enthousiaste  et  pathétique  à  la  fois  :  les  mouvements  variés 
des  vendangeurs  s'enrichissent  sous  ses  doigts  d'une  infinité  de 
détails. 

Grâce  à  la  puissance  d'expression,  par  l'exactitude  et  la  belle 
eurythmie  des  mouvements  des  hommes  et  des  femmes  emmenant 
leurs  enfants  après  une  dure  journée  de  travail,  ce  sujet  réjouit 
les  yeux  du  spectateur  et  constitue,  en  ce  qui  concerne  la  ven- 
dange, un  décor  vivant  et  animé. 

Manalt  a  su  donner  à  son  tableau  le  tour  nécessaire  qui  anime 
ses  personnages  :  à  la  joie  contenue  de  tous  ces  travailleurs  cata- 
lans qui  viennent  de  terminer  la  cueillette,  vient  s'ajouter,  sur  leurs 
visages  épanouis  et  fiers,  le  gain  heureux  de  la  belle  vendange, 
fruit  d'une  longue  et  rude  année  de  labeur. 

Le  style  -de  Manalt  (et  ici  je  m'étends  sur  certaines  de  ses  œu- 
vres exposées)  est  à  la  fois  familier,  intime  et  tendre,  comme  ce 
peuple  de  vendangeurs  naturellement  humain  et  bon. 

Quand  la  forme  apparaît,  surtout  la  forme  nue,  dans  ses  œu- 
vres principales,  l'artiste  semble  avoir  suspendu  en  lui  toute  sa  vie 
pour  ne  laisser  rayonner  de  son  cœur  qu'une  lumière  spirituelle 
qui  n'éclaire  que  les  sommets  élevés  du  souvenir    et   de  la  sensa- 


—  47   - 
tion.  Ce  qui  sort  de  son  être  est  animé  de  la  vie    même  de   son 
être  :  ce  que  Manalt  conte,  c'est  sa  vie  même. 

On  peut  dire,  au  sujet  de  ses  vendangeurs,  que  cette  composi- 
tion est  un  schéma  sûr.  décisif,  précis  et  tressaillant:  toutes  ces 
silhouettes  remuent  et  vivent  avec  fierté  ;  tous  leurs  contours, 
toutes  les  lignes  dénoncent  un  sens  discret  et  fort  de  la  masse  et 
du  mouvement. 

En  somme  Manalt,  s'inspirant  des  ouvrages  anciens  et  fouil- 
lant consciencieusement  les  secrets  de  leur  technique,  a  modelé 
gracieusement  ce  bas-relief  décoratif  où  la  lumière  et  l'ombre 
s'emparent  de  la  forme  pour  la  plier  aux  volontés  sentimentales 
du  sculpteur.  Manalt  a  su  discrètement  faire  entrevoir  les  saillies 
à  peine  indiquées  dans  son  œuvre  :  la  caresse  timide  de  ses 
doigts  passe  et  fuit  sur  les  formes  encore  imprécises  de  la  foule 
des  vendangeurs  roussillonnais. 

Parmi  les  principales  œuvres  du  sculpteur  Manalt,  dont 
M.  Horace  Chauvet  a  fait  tout  récemment  une  judicieuse  criti- 
que pleine  d'intérêt,  il  convient  de  signaler  la  Pieta,  VEnfant  à 
l'épine,  le  7{apl,  la  Tuile,  VExode,  le  Jeune  Captif,  Y  Hiver  de  ta  vie, 
etc.  Qu'il  me  soit  permis,  en  dehors  des  principales  œuvres  de 
Manalt,  qui  sont  empreintes  d'un  réalisme  poignant,  de  signaler 
à  l'attention  des  critiques  son  Méprisé,  attrayant  dans  sa  forme 
stable,  par  sa  charpente  perpendiculaire,  où  l'on  entrevoit  les  fais- 
ceaux charnus  des  bras  et  des  jambes  dont  les  ondulations  nettes 
accusent  ou  masquent  le  squelette,  par  son  ventre  étroit,  sa  poi- 
trine déployée  et  sonore,  le  cercle  des  clavicules  et  des  omopla- 
tes portant  énergiquement  la  colonne  du  cou,  la  tête  ronde  au 
regard  attristé  qui  continue  ce  buste  sans  un  arrêt.  Dans  ses 
étroits  pieds  nus  plaqués  au  sol,  son  bras  nerveux,  ses  doigts 
ouverts,  dans  ses  épaules  musculeuses,  son  cou  rigide,  ses  yeux 
tristement  fixes  et  pensifs,  son  crâne  rond,  chez  ce  Méprisé, 
j'allais  dire  ce  déshérité,  tout  se  tient. 

Une  œuvre  maîtresse,  qu'il  faut  également  signaler,  c'est  la 
Mère  :  dans  cette  œuvre,  nous  sentons  avec  Manalt  une  indi- 
cible, une  irrésistible  douleur  nous  envahir,  en  voyant  cette  Mère 
prosternée  aux  pieds  de  son  fils  mort,  soulevant  péniblement  de 
sa  main  son  corps  exsangue,  à  jamais  figé  dans  la  mort. 

Henry  Aragon. 


En  Joffre  y  cl  Calalà 


El  nostrc  Joffre  se  complau  a  parlar  català  y  prou  ne  dona 
proves,  a  tôt  arreu,  desde  que  ha  tornat  a  respirar  els  ayres  de 
la  mare-terra. 

Amb  motiu  del  darrer  emprestit  de  guerra,  ja  acabava  la  seva 
lletra  amb  aqueixa  frasa  :  Els  Catalans  sempre  enclavant. 

Ara,  sobretot  a  Rivesaltes,  nos  ix  amb  uns  trencats  que  verda- 
derament  nos  alegren  com  :  T"  quina  una  en  [as  ? 

L'altre  dia  va  respondre  en  català  an  una  nena,  la  petita 
Razouls,  que  venia  de  fer-li  aqueix  bell  compliment  en  rossel- 
lonès  : 

Visca  lo  Nostre  J offre  ! 

No  han  passât  los  Alemanys,  y  aixô  ho  ha  fet  tôt  primer  la  batalla  de  la 
Marne.  Aixis  es  que  'ls  Catalans  s'empresen  de  la  gloria  del  Nostre  Joffre 
que,  desprès  de  l'Aragô,  es  l'home  mes  illustre  de  Rossellô. 

Tota  la  gent  de  Rivesaltes  que  vos  estimen  y  que  vos  admiren  vos  donen 
la  benvinguda. 

Visca  lo  Nostre  Joffre  qu'ha  salvat  la  França.  Visca  lo  Nostre  Joffre  que 
se  '1  miren  de  pertot  del  mon.  A  tôt  lo  nostre  poble  li  es  un  galàn  pler  de 
vos  dir  que  seu  lo  Salvador  de  la  Pàtria. 

Bona  sort  tingui  la  senyora  Mariscala,  y  a  ne  vos,  Mariscal  Joffre,  per 
molts  anys  ! 

Es  llàstima  que  ningû  no  hagi  tingut  l'eyma  de  notar  lo  que 
respongué  el  Mariscal.  Séria  un  document  historich  mort  apreciat 
aqueix  diseurs  català  d'un  Mariscal  de  França.  Riols. 

La  seigneurie  #  la  paroisse  de  Serralongue 

■~*D4*>  {SUITE) 

V.  —  Procession  à  la  chapelle 
de  Saint-Michel  du  Château  de  Cabrenç 

Cette  chapelle  existait  certainement  en  1267.  Le  4  des  nones 
d'août  de  cette  année,  Guillaume-Hugues  de  Serralongue,  avant 
de    partir  pour  la  croisade,  fit  son  testament   et,    en   vertu  de  ses 


-   49   — 
dispositions    testamentaires,    il  accordait  des  aumônes  à  différentes 
églises  :  ia  chapelle  de  Saint-Michel  de  Cabrenç  était  du  nombre. 

Une  pieuse  coutume  existait  depuis  un  temps  immémorial. 
Tous  les  ans,  le  8  mai,  les  habitants  de  Serralongue  et  de  Lama- 
nère  se  rendaient  en  procession  à  Saint-Michel  de  Cabrenç.  Avec 
le  temps,  des  abus  s'étaient  introduits.  L'on  se  permettait  de  dan- 
ser et  de  faire  d'autres  jeux  peu  honnêtes,  incompatibles  avec  une 
ecremonie  religieuse.  L'autorité  ecclésiastique,  informée  de  ces 
désordres,  intervint  :  elle  essaya  de  les  réprimer  et  de  ranimer  la 
ferveur  des  anciens  jours.  En  effet,  l'abbé  Grau,  docteur  en  théo- 
logie, ayant  eu  connaissance,  en  cours  de  visite,  des  inconvenances 
licencieuses  qui  se  produisaient  pendant  la  procession  au  château 
de  Cabrenç,  porta  l'ordonnance  suivante  :  «  Manam  à  las  perso- 
nas  de  un  sexo  y  de  l'altre  que  tots  anys  acostuman  anar  per 
sant  Miquel  de  maig  à  las  torres  de  Cabrenys  ab  professo  que 
d'esta  hora  al  devant  no  se  atrevescan  ballar  ni  fer  altres 
jochs  desonestos  en  ditas  professons  sots  pena  de  excommuni- 
catio,  attes  que  nos  ha  constat  aver  molt  gran  irreverentia  y  desa- 
cato  del  lignum  crucis  y  demes  reliquias  se  aportan  en  dita  pro- 
fesso. —  Dat  en  Prats  à  20  de  mars  1645,  Grau,  visitador  prebere 
y  doctor  en  sagrada  theologia  ». 

Cette  chapelle  n'avait  pas  de  revenus.  Le  maître,  ayant  aban- 
donné le  château,  avait  aussi  abandonné  la  chapelle.  Aussi  la 
pluie  et  le  vent  la  mirent  peu  a  peu  dans  un  état  de  délabrement 
qu'il  fallait  réparer  d'urgence  si  on  ne  voulait  pas  voir  l'édifice 
s'écrouler  bientôt.  Comment  faire  ?  On  demande  à  l'autorité 
ecclésiastique  la  permission  de  passer  un  bassin  dans  la  chapelle 
et  dans  l'église  paroissiale  de  Serralongue.  L'abbé  Parés,  chanoine 
d'Elne,  autorise  ce  bassin  à  la  condition  que  le  quêteur  rendrait 
compte  de  son  administration  :  «  Per  quant  nos  ha  constat  y 
consta  la  deu*  es  en  la  capella  de  Sant-Miquel  de  las  torres  de 
Cabrenys  à  la  quala  temm  relatio  que  tots  anys  se  va  del  présent 
lloch  ab  devota  professo  per  fer  alla  certes  dévotions,  per  astar 
aquella  pobra  y  poder  acuair  als  gastos  necessaris,  nos  es  estât 
suplicat  verbo  nos  dignassam  concedir  licentia  per  que  en  la  dita 
capella  y  en  la  iglesia  parroquial  del  présent  lloch  se  pogués 
posar  un  plat  o  baci  que  per  augment  de  aquella  vaja  accaptant. 
E  vist  per  nos  ser  la  petitio  légitima  concedim  lo  plat   o   baci  ab 


—  5o  - 

conditio  que  la  persona  que  dit  plat  portara  e  administrara  porte 
comptes  de  las  entradas  y  exidas  de  aquell  —  18  mars  1648  — 
Parés  Gabriel,   prebere   y  canonge  de  la  santa    Iglesia    d'Elna  ». 

La  note  suivante  nous  apprend  les  usages  que  l'on  observait  à 
l'occasion  de  la  procession  à  Saint-Michel  de  Cabrenç  :  «  8  maig, 
professo  à  Sanf-Miquel  de  las  torras.  Sen  porta  la  capa  pluvial 
y  la  deixa  à  Casa  minorra  ahont  la  rapren  quant  torna.  Antes  de 
la  primera  torra  diu  quatre  Evangelis,  fa  la  benedictio  del  pa  y 
desprès  va  à  Sant-Miquel  haont  diu  offici  ;  y  solan  fer  dir  com- 
plétas :  no  donan  sino  36"  8d.  Quant  torna,  à  Casa  bastida  comença 
lo  Te  Deum  ». 

Aujourd'hui,  la  chapelle  de  Saint-Michel  de  Cabrenç  est  tom- 
bée en  ruines  :  il  n'en  reste  qu'un  mur  latéral  que,  de  loin,  on 
prend  pour  une  tour.  Par  conséquent,  la  procession  à  cette  cha- 
pelle n'a  plus  lieu.  A  quelle  époque  a-t-elle  cessé  ?  La  réponse 
n'est  pas  facile.  Cependant,  il  y  a  à  peine  quelques  années,  la 
paroisse  de  Serralongue  se  rendait,  le  8  mai,  à  la  chapelle  de 
Saint-Michel  de  la  métairie  del  Taig;  tandis  que  les  paroissiens  de 
Lamanère  vont  à  la  chapelle  de  Sainte-Christine. 

(#  suivre)  Joseph  Gibrat. 

Quelques  noms  de  plantes  #  synonymes 

Catalans-Français  tf  Français-Catalans 

<Zè%3&  (SUITE) 

Deuxième  Partib.  —  FRANÇAIS-CATALAN 

A 

abricotier.  —  albercoquer,  abricoter. 

abrotane.  —  botja,  broida. 

absinthe.  —  donzell.  Voir  aussi  armoise. 

acanthe.  —  herba  carnera,  herba  de  la  ma  de  l'home. 

ache.  —  api,  apit. 

achillée.  —  mil    fulles,  herba  del  tall,  herba  de  les  nou  camises. 

aconit.  —  tora,  herba  tora,  herba  de  les  tores,  mata  llops. 


—  5.   _ 

âCtée.  —  herba  de  sant  Cristofol. 
adonis.  —  ull  de  perdiu. 

agaric.  —  bolet. 

agave.  —  etzevara,  atzavara,  agau,  pita,  pitalassa. 
agneau  Chaste.  —  voir  gattilier. 

agrostide.  —  gespa. 

aigremoine.  —  agrimônia,  cerverola,  herba  de  sant  Guillem. 

ail.  —  ail. 

ail  civette.  —  ciboleta. 

ail  Sauvage.  —  ail  bort,  ayassa. 

airelle=myrtille.  —  abaixonera,  naviù,  rahim  de  pastor. 

ajonc  épineux.  —  argelac,  argelaga,  argentina,  gatosa. 

alaterne.  —  voir  nerprun.  / 

alberge.  —  «lbargo. 

alcée.  —  voir  rose  trëmière. 

alchimille.  —  estelada,  herba  argentana,  herba  botera. 

alisier.  —  selvier  de  muntanya,  pomer  de  sant  Joan,   subrà. 

alliaire.  —  aliène. 

aloës.  —  acebre,  cevér. 
aloiste.  —  escayoia. 
alvsSC  —  herba  de  les  lîune'tes. 
amandier.  —  ametiier,  atmelier. 

amaranthe.  —  velluts. 

ancolie.  —  espenalier,  campanes. 

anémone  des  bois-  —  ranuncle  blanca,  buxol,  herba  del  fetge. 

aneth.  —  fenoll,   fonoll. 

angélique.  —  angelica,  coscoll,  turbit,  herba  dels  corns. 

aniS-  —  matafaluga. 

anthémide.  —  bolitg,  bulitg,  bulit. 

ansérine.  —  sarrons,  espinac  de  muntanya,  herba  del  corc. 

aphyllante.  —  joncosa. 
arachide.  —  cacauet. 

arbousier.  —    arbosser,    llipoter,    boixerola,     boixar,    faringola, 

moixa,  barruixa. 
arbre  blanc.  —  alber,  poil  blanc. 
aristoloche.  —  adzari,  axari,  llengua  rodona,  herba  de  les  gotes, 

herba  de  la  goda. 

armoise.  -*-  altimira,  artemega,  donzell  fais,  herba  de  les  mens- 
trues. 


—  5i  — 
amica.  —  herba  de  l'espant,  aleo,  alop,  arnica. 

arroche.  —  blet. 

artémise.  —  voir  armoise. 

artichaut-  —  carxofa,  alcarxofa. 

arum.  —  voir  gouet. 

asperge.  —  esparrec. 

asphodèle.  —  porrassa,  porranissa,  porreca,  gamonet. 

aspic  —  voir  lavande. 

atrope.  —  belladona. 

aubépine.  —  ars  blanc,  cirerer  de  la  Mare   de   Deu,  cirerer    de 

pastor. 
aubergine.  —  albergina,  asberginia. 
aulne.  —  vern,  arbre  nègre. 
aunée-  —  olivarda. 
aurone.  —  voir  abrotane. 
avoine-  —  civada. 

>         folle.  —  cogula,  cugula. 
azalée.  —  saleia. 
azerolier.  —  azaroler,  adzaroller,  oronia.  (M  suivre) 

Les  Revues  locales 

Une  revue  parisienne,  récemment  jouée  au  Castillet,  nous  a 
bien  fait  regretter  la  T^evue  locale,  de  nos  collaborateurs  et  bons 
camarades  P.  Francis  et  Jean  Balle,  donnée  quelques  jours  aupa- 
ravant. 

Quelle  est  la  scène  montmartroise  qui  présentera  le  charme 
prenant,  toute  la  poésie  de  l'Apothéose  de  la  Reine  du  Canigou, 
du  ballet  des  Fleurs  du  Square  et  de  la  chanson  des  Clochers 
perpignanais  ? 

Ah  !  comme  l'art  local  est  bien  au-dessus  des  burlesques  exis- 
tions des  impresarii  de  passage. 

£1  Bon  Pedriç 

Le  volume  de  poésies  catalanes  de  notre  ami  Joseph-S.  Pons,  "El  Bon 
Pedriç,  paraît  cette  semaine  en  librairie. 

Il  a  été  tiré  de  cet  ouvrage  dix  exemplaires  sur  papier  de  Hollande,  au 
prix  de  6  fr.  ;  les  bibliophiles  pourront  les  demander  dès  maintenant  à  l'Im- 
primerie Catalane,  J.  Cornet,  rue  de  la  Poste,  Perpignan. 

Le  Gérant,  COMET   .  —  Imprimerie  Catalane,  COMET,  rue  de  la  Poste,   Perpignan 


13  Année.   N'  149  15  Mars  1919 


Les    Manuscrit»  non   insetei 
ne  sont   Das  rendu» 


REVUE 

CATALANE 


Les    Article»   parus  a»ns   la   Revue 
n'engagent  que  ieurs  auteurs 

Organe  de  la  Société  d'Etudes  Catalanes.  --  Cotisation  :  10  fr.  par  an 

El  bon  Pedriç 

de  J.-Sebastiâ  Pons 
_•»*■» 

Au  lendemain  de  la  grande  convulsion  qui  l'a  diminuée  des 
meilleurs  de  ses  fils,  la  race  catalane,  spontanément  et  sans  repren- 
dre haleine,  affirme  sa  vitalité. 

C'étaient  hier  les  jeunes  éphèbes  à  maillot  sang  et  or  qui,  sor- 
tant de  la  mêlée  sanglante,  constituaient  la  mêlée'sportive,  posant 
leurs  pieds  nerveux  sur  les  foulées  de  leurs  frères  défunts. 

C'est  aujourd'hui  le  barde  roussilionnais  J.-Sebastiâ  Pons, 
encore  tout  pâle  d'une  captivfté  douloureuse,  qui,  .dès  l'arrivée, 
saisit  nerveusement  sa  lyre  et  pousse  un  cri  d'amour  et  de  recon- 
naissance â  la  petite  patrie. 

Le  bon  fils  du  T^iberal,  de  tout  son  cceur,  de  toute  son  âme, 
veut  que  chacun  sache  ce  qu'il  y  a  de  délicieusement  tendre  et 
poétique  dans  la  mare-terra,  et  il  nous  l'exprime  en  strophes  déli- 
cates, en  une  douce  causerie,  avec  sa  voix  pleine  de  nuances,  de 
sonorités  indéfinissables,  par  une  de  ces  après-midi  ensoleillées, 
parmi  les  pierres  grises  d*  1  lie,  sur  le  pedriç,  El  bon  Pedriç. 

E/  bon  Pedriç  est  une  succession  de  tableaux  brossés  avec  une 
délicatesse  infinie,  des  tableaux  dont  la  touche  vient  d'une  source 
pure,  celle  du  coeur;  car  Pons  est  un  sensitif  impressionniste  qui 
promène  son  état  d'âme  un  tantinet  nostalgique  dans  des  décors 
roussilionnais. 

Il  n'est  pas  un  bruit  qui  ne  l'émeuve,  pas  un  coin  qui  ne  lui 
suscite  un  vers  : 

...  i  s'ou  la  cogullada, 
entre    1s  cirerers  blancs,  al  demati  cantar. 


-  54  - 

Son  particularisme,  qui-  est  extraordinaire,  fait  que  sa  poésie, 
unique,  frappe  immédiatement  le  lecteur,  tant  par  la  richesse  du 
vocabulaire  que  par  la  familiarité  des  sujets  champêtres.  Et  c'est 
par  là  que  Pons  est  compris  de  tout  roussillonnais,  c'est  par  là 
qu'il  est  le  chantre  national,  puisque  sa  poésie  trouve  toujours  un 
écho  «  al  mull  dels  ossos  catalans  ». 

Une  odeur  forte  du  terroir  monte  de  ce  livre,  plus  vaste  et 
plus  fouillé  que  Ttyses  i  Xiprers  ;  du  pedriç  j'entends  le  carillon 
de  l'église  médiévale  dont  les  notes  se  perdent  le  long  de  ce 
7{iberal  qui  est  le  nôtre,  près  de  nos  colomines,  de  nos  olivèdes  aux 
troncs  âpres  et  déchiquetés. 

Le  poète  a  dédaigné  le  convenu,  il  a  voulu  que  ses  chants 
ressemblassent  à  un  homme,  à  une  race. 

«  Infortunés,  nous  écrivait-il  un  jour,  les  poètes  qui,  nés  en 
Roussillon,  ne  possèdent  pas  assez  de  cceur  pour  sentir  la  musi- 
que, le  rythme  du  catalan. 

«  La  langue  catalane,  la  poésie  populaire,  la  langue  de  nos 
pères  sont  des  instruments  suffisamment  sonores  pour  traduire 
notre  vie  intimeN. 

Et  quelle  autre  langue  mieux  que  la  nôtre  pourrait  nous  émou- 
voir, soit  dans  sa  rudesse,  soit  dans  sa  familiarité  joyeuse,  dans 
son  tour  nerveux  ? 

El  bon  Pedriç  est  un  coffret  qui  renferme  toutes  les  harmonies, 
toutes  les  assonances  familières  de  notre  vieil  idiome  ;  c'est  encore 
un  album  colorié  dont  on  tourne  avec  émotion  les  p?ges  ;  un 
T^eliquiari  à  la  Francesch  Matheu,  où  nous  retrouvons  nos  joie 
et  nos  tristesses  locales. 

Et  c'est  pourquoi  nous  éprouvons  une  immense  sympathie  pour 
notre  bon  camarade  de  l'Ecole  Roussillonnaise,  le  meilleur  et  le 
plus  délicat  artisan  de  notre  Renaissance. 

P.  Francis  i  Ayrol. 


• 


GOIGS 

a  l'alabança  dels  gloriosos  soldats  rossellonecchs 
morts  a  la  guerra 


Amb  el  cor  tôt  endolat 

de  lamarga  despedida, 

prega  el  pais  désolât 

als  Morts  que  li  han  dat  la  vida. 

De  son  ser  han   escolat 

tôt  goig  recances  sens  mida. 

Puix  n'heu  patit  mort  tant  greu, 

victimes  de  la  Gran  guerra, 

com  bons  àngels  ampareu 

]a  França  i  la  mare-terra  ! 

De  la   Patria  dignes  fills 
i   Rossellonencs  de  mena, 
fôreu  de  nobiesa  espiils. 
Per  ruda  que  fôs  la  faena, 
heu  fet  cara  a  tots  perills, 
ni  a  la  mort  girant  l'esquena, 
També  en  mil  segles  sereu 
honor  del  plà  i  de  la  serra. 
O  bons  angels  ampareu 
la  França  i  la  mare-terra  ! 

La  febre  ardent-vos  la  sang, 
sensé  llençol,  sensé  roba, 
dormieu  drets  dins  del  fang 
o  arrudits  en  una  cova. 
Bruts  i  tôt,  bell  nimbo  blanc 


T^ecord  piadàs  als  pîorals  nebodets, 
caiguts  a  les  ultimes  embeslides. 

voltava-us  com  la  Hum  nova. 
l,un  jorn,  amb  sobercmenyspreu 
"deixàreu  vostra  desferra.    ■ 
O  bons  àngels,  ampareu 
la  França  i  la  mare-terra  ! 

Bé  n'heu  vist  de  camps  i  esplets 

matxucats  per  la  metralla  ! 

En  trons,  brams,  grunys  i  xisclets 

el  mon  fet  un  foc  de  palla  ! 

Heu  vist  cap*irâ  als  poblets 

com  aufais  sota  la  dalla  ; 

clavada  la  terra  en  creu 

dos  lladres  a  dreta  i  a  esquerra. 

O  bons  àngels,  ampareu 

la  França  i  la  mare-terra. 

Vos  que  negades  en  plors 

heu  deixat  viudes,  niçagues 

i  mares  de  set  dolors, 

que  haguessin  les  vostres  plagues 

volgut  trasmudar  en  flors 

amb  totes  ses  mans  manyagues, 

la  pena  immensa  cureu 

que  '1s  cors  dels  vivents  esguerra  ! 

O  bons  àngels,  ampareu 

la  França  i  la  mare-terra  ! 


Feu  que  '1  gran  dol  a  polit 
s'apagui,  a  copia  de  dies. 
Ens  torni  el  ce!  espellit, 
quïetut,  sinô  alegrîes  ! 
No  caureu  perxô  en  oblit. 
Puix  desde  ses  primeries 
us  faltà  la  vida  breu, 
corn  a  l'infant  que  's  desterra, 
O  bons  àngels  ampareu 
la  Franca  i  la  mare-terra  ! 


56  — 

Beneïu  el  sant  treball  ! 
A  vostre  braç  tant  esqueia  ! 
Sega,  poda,  vrema,  dall, 
a  pertot  el  vostre  ull  reia. 
Senteu-vos  en  cada  rail  ! 
Coses  ben  dolces  s'hi  deia  ! 
En  la  Uar  pairal  entreu, 
que  tôt  cor  fidel  s'hi  aferra. 
O  bons  àngels,  ampareu 
la  Franca  i  la  mare-terra  ! 


Voltant  l'atzur  català, 

tôt  Hum,  tôt  cant  i  tôt  flaire, 

ànimetes,  pel  cel  clâ 

bellugueu,  l'ala  d'escaire. 

Oïréu  el  dolç  parla 

que  en  vostra  llaor  s'enlaira. 

Oïréu  com  su  '1  conreu 

vers  vos  la  calandra  xerra. 

O  bons  àngels,  ampareu 

la  Franca  i  la  mare-terra  ! 

Hanoï,  janer  1919. 


1,  passant  els  tendres  dits 
sobre  l'ull  que  no  se  tança, 
calmeu-nos  les  llargues  nits  ! 
Si,  de  nou,  la  vida  arranca 
son  vol  de' dos  sers  units, 
vigileu  J'alcoba  blanca  I 
Per  que  esborri  tôt  arreu 
la  Pau  els  mais  de  la  Guerra, 
O  bons  àngels,  ampareu 
la  Franca  i  la  mare-terra  ! 

Pau  Berga. 


Compte-rendu  des  Séances 

Séance  du  10  mars  1919 

Présidence  de  M.  Laurent  Campanaud,  président 

•La  séance  est  ouverte  à  8  h.  1/2,  sous  la  présidence  de 
M.  L.  Campanaud,  président. 

Jeux  "Floraux  du  Jtyussillon.  L'éventualité  d'une  organisation  de 
Jeux  Floraux  en  août  prochain  est  examinée.  Un  projet  est  soumis 
par  M.  Joseph  Pons.  L'assemblée  estime  que  les  Jeux  Floraux 
doivent   être   organisés  par   la   Société   d'Etudes   Catalanes   elle- 


-  57  - 

même,  qui  aura  à  nommer  un  Comité  d'honneur  et  un  Jury.  Les 
membres  du  Jurv  et  du  Comité  d'honneur  pourront  être  pris  en 
dehors  de  la  Société. 

La  question  sera  définitivement  examinée  dans  la  prochaine 
séance. 

Questions  diverses,  M.  Ch.  Grando  rend  compte  de  son  voyage 
a  Barcelone,  où  il  a  été  reçu  par  diverses  personnalités  et  Sociétés 
littéraires.  11  rapporte  pour  la  T(evue  Catalane  la  Médaille  d'hon- 
neur des  Volontaires  Catalans,  accompagnée  de  la  lettre  suivante 
au  D    Sole  y  Pla,  président  de  cette   noble   phalange   de  héros  : 

Comité  de  Germanor  amb  els  Voluntaris  Catalans 

Aïs  homes  qu'escriuen  en  la  «  J^evista  Catalana  »  de  Perpinyà. 

A  vosaltres,  nobilissims  ciutadans  de  la  ciutat  germana  ; 

A  vosaltres  que  haveu  escrit  tant  belles  planes  en  honor  de  nostres  ger- 
mans  que.  antes  dels  homes  d'altres  nacions,  van  correr  arreu  a  allistarse  en 
els  régiments  francesos  i  en  la  marina  anglesa  per  a  combatre  per  la  llibertat 
de!  mon  i  en  defensa  de  la  Raô  i  de  la  Justicia,  abrassades  en  vostres  senyeres, 

A  vosaltres,  vos  agraïm  una  volta  per  totes  los  mots  de  gloria  i  germanor 
vessats  en  honor  de  nostres  morts  que  desde  l'Yser  a  Macedonia  sembren 
la  terra. 

En  penyora  d'amistat  i  agraïment,  dediquem  a  la  J^evisla  Catalana  una  de 
les  medalles  que  el  Comité  de  Germanor  amb  els  Voluntaris  Catalans  dedica 
en  nom  de  Catalunya  a  nostres  Voluntaris  que  tornen  i  als  amies  de  França 
que  d'ells  s'han  recordat  per  a  honrarles. 

Molts  anys  de  vida  a  vostra  Revista  i  a  vosaltres. 

En  nom  del  C.  V.  C, 
Joan  Sole  i  Pla. 

Barcelona,  7  de  marc  de  1919. 

L'assemblée  remercie  chaleureusement  Je  Comité  de  Germanor 
avec  les  Volontaires  Catalans  et  prie  son  Secrétaire  de  lui  trans- 
mettre l'hommage  de  sa  bien  vive  gratitude. 

Les  membres  de  l'Institut  d'Estudis  Catalans  ont  reçu  en  ses- 
sion le  Secrétaire  de  la  Société  d'Etudes  Catalanes  et  lui  ont 
offert  un  dîner.  Le  Secrétaire  est  également  prié  de  remercier, 
au  nom  de  la  Société,  MM.  les  membres  de  J'institut  d'Estudis 
Catalans. 

Des  remerciements  sont  également  adressés  aux  maîtres  Apeles 
Mestres,   A.   Guimera,  qui  ont  bien  voulu  nous  adresser  leur  salut, 


—  58  — 

à  MM.  les  présidents,  directeurs  et  membres  de  l'Arxiu  d'Etno- 
grafia  y  de  Folk-lore,  dels  Amies  de  França,  du  Comité  Pro- 
Alliats,  de  l'Associaciô  Protectora  de  l'Ensenyança  Catalafia,  de 
l'Orfeo  Català,  Veu  de  Catalunya,  Ibéria,  et  surtout  à  M.  Alcan- 
tara,  pour  le  bienveillant  accueil  qu'ils  ont  réservé  au  délégué  de 
la  Société  d'Etudes  Catalanes. 

Prochaine  séance.  La  prochaine  réunion  est  fixée  au  jeudi 
jo  avril,  au  siège  de  la  Société  Agricole,  Scientifique  et  Litté- 
raire, à  8  h.   1/2  du  soir. 

Le  Président,   L.  Campanaud. 


Un  poème  inédit  d'Apeles  Mestres 

L'illustre  auteur  de  Tlors  de  Sang  a  eu  l'extrême  amabilité  de 
remettre  à  M.  Ch.  Grande  lors  de  sa  visite  à  Barcelone,  l'auto- 
graphe du  poème  inédit  suivant,  qui  est  le  digne  pendant  du 
célèbre  TVo  passareu  ! 

La  rédaction  de  ia  J^evue  Catalane  est  heureuse  d'offrir  à  ses 
lecteurs  la  primeur  de  ce  beau  poème. 

Y  NO  HEU  PASSAT! 

«  No  passareu  !  »  vos  vaig  cridar, 
malgrat  la  rabia  ab  que  embestiau  ! 
Ja  us  ho  vaig  dir,  sens  may  dubtar, 
que  malgrat  tôt  no  passariau  ! 
Y  com  a  llops  vos  heu  llançat, 
mes  no  heu  passât  ! 

Haveu  fet  arma  del  terror, 
la  crudeltat,  la  traidoria  ; 
no  hi  ha  hagut  frau,  ni  crim,  ni  horror 
que  no  us  dictés  la  tirania, 
y  heu  enrunat,  cremat,  talat, 
mes  no  heu  passât  ! 


-  5q  - 

Si  com  a  feres  heu  matât, 
com  a  moltons  heu  fet  matarvos, 
tal  per  complaure  a  un  insensat 
qu'en  el  perill  va  abandonarvos _! 
Per  xô  quatre  anys  heu  bataliat  !... 
Mes  no  heu  passât  ! 

Jamay  mes  dura  humillaciô 
castigà  al  monstre  de  la  guerra  ; 
potser  de  Deu  tingueu  perdo, 
no  l'espreu  may  de  la  terra  ! 
Vida  y  honor  vos  heu  jugat, 
mes  no  heu  passât  ! 

Si  un  altre  Atila,  a  sang  y  a  foch, 

vos  desfermés,  clamant  venjança, 

trobareu  sempre  al  mateix  lloch 

una  muralla  redressantse  : 

Es  dira  Joffre,  's  dira  Foch, 

es  dira  Marne,  's  dira  França... 

Mes  tant  se  val  !   Per  mes  que  feu, 

No  passareu  ! 

Apeles  Mestres. 
Desembre  1918. 

La  Catalogne  reconnaissante 

Le  Comité  de  Germanor  amb  els  Voluntaris  Catalans  a  décidé 
d'attribuer  la  médaille  d'honneur  aux  couleurs  sang  et  or  à  diverses 
personnalités  de  notre  ville  :  MM.  Joseph  Denis,  maire  de  la 
ville  de  Perpignan  ;  E.  Brousse,  député  ;  Mgr  de  Carsalade  du 
Pont  ;  MM.  de  Lavenne  du  Choulot,  Commandant  d'armes  ; 
Brousse  Jean,  publiciste  ;  L.  Campanaud,  Ch.  Grando,  P.'  Francis, 
L.  Pastre,  Joseph  Fabregas,  de  la  Société  d'Etudes  Catalanes, 
et  a  la  T(evue  Catalane. 


DOCUMENTS  HISTORIQUES 

sur  la  Ville  de  Perpignan 

*^^>  (SWTE) 

JCTTll.  La  Maison  de  Bernard  Xanxo,  mercader  (j5c>7),  (carrer  del  Procu- 
rador  T^eal,  rue  Main-de-fer).  —  h' immeuble  Sancho  de  Lîupia.  —  La  Loge 
de  l'Union.  —  Le  Cercle.  —  (1507-1919). 

Le  gracieux  immeuble  bâti  par  l'armateur  Sanxo,  au  commen- 
cement du  xvi1  siècle,  après  avoir  appartenu  pendant  près  d'un 
siècle  et  demi  à  Une  société  civile,  change  de  maître  et  probable- 
ment de  destination  (1). 

Cet  élégant  joyau  d'architecture  gothique,  dont  une  main  pro- 
fane a  mutilé  la  coquette  façade,  «  encadrée  de  pilastres  à  bossa- 
ges d'un  goût  particulier  »,  a  toute  une  histoire  ;  il  renferme  tous 
les  secrets  inviolables  des  Loges,  et  ceux  non  moins  respectables, 
mais  discrets  du  Cercle,  qui  pendant  cent  trente-cinq  ans  se  sont 
dissimulés  puis  enfouis  dans  ces  murailles  de  brique  impénétrables. 

Nous  esquisserons  prudemment  les  principaux  faits,  le  seul 
objet  de  cette  étude  ne  comprenant  que  des  détails  de  pure  archi- 
tecture, les  origines  de  propriété  de  la  maison  de  Sanche,  avec 
une  vision  rapide  du  passé. 

La  façade  n'a  donc  pas  été  respectée.  Pour  donner,  sans  doute, 
plus  de  jour  à  une  pièce  nouvellement  disposée,  on  a  eu  la  sotte 
pensée  de  détruire  la  fenêtre  à  meneaux  symétrique  (2)  que  l'archi- 
tecte de  Sancho,  suivant  une  règle  immuable,  avait  tracée,  et  de 
la  remplacer  par  deux  larges  fenêtres  carrées,  rompant  ainsi  la 
régularité,  et  dégradant  le  gracieux  bandeau  symbolique  qui  cou- 
rait élégamment  le  long  de  la  façade  et  au-dessus  de  la  porte 
principale  de  l'immeuble.  11  ne  reste  plus  aujourd'hui  qu'une  fai- 
ble   partie    de    ce    bandeau,    dont  on    peut   à  peine  distinguer  les 

(1)  Par  suite  de  mineurs  parmi  les  familles  des  actionnaires,  ceux-ci  font 
obligés  de  vendre  cet  immeuble  devant  le  Tribunal. 

(2)  On  voit  sur  la  gravure  la  façade  telle  qu'elle  existait  encore  en  1834. 
C  était  l'art  gothique,  à  cette  époque  si  improprement  appelée  de  la  Renais- 
sance, où  cet  art  se  rajeunissait  sans  cesse  d'une  manière  admirable. 


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—   6i    — 

dessins,  qui  sépare  le  rez-de-chaussée  du  premier  étage,  et  sur 
lequel,  d'après  M.  Vidal,  «  la  gaîté  de  nos  pères  s'est  traduite 
avec  une  liberté  passablement  réaliste  »  (i). 

L'intérieur  a  été  plus  respecté,  et  la  grande  salle  capitulaire, 
avec  son  splendide  plafond  à  caissons,  a  conservé  son  aspect  gran- 
diose, tout  son  luxe  éblouissant,  toute  son  imposante  beauté. 

Une  cheminée  monumentale,  il  est  vrai,  rappelant  les  oeuvres 
de  Vauban,  a  dû  remplacer  un  monument  de  l'époque  ;  mais,  si 
l'on  a  le  droit  d'en  critiquer  le  style,  on  peut  cependant  se  ren- 
dre compte  qu'elle  s'adapte  merveilleusement  aux  vastes  propor- 
tions de  cette  salle  luxueuse.  Un  projet,  dont  j'ai  le  plan,  ainsi 
que  les  conventions  formelles  pour  l'exécuter,  ne  fut  pas  adopté  (2). 

Faut-il  le  regretter?  J'ai  le  dessin  en  mains,  et  je  puis  dire, 
certes,  qu'il  n'aurait  pas  déparé  la  belle  salle,  et  qu'il  aurait  été 
toujours  plus  en  harmonie  avec  le  style  flamboyant  de  ce  petit 
palais. 

Pour  nous  éclairer  sur  les  origines  de  cet  immeuble,  nous  aurons 
recours  aux  érudits  de  notre  siècle,  à  M.  de  Saint-Malo,  à  Puig- 
gari  et  principalement  à  Alart  qui  a  pu,  dans  ses  minutieuses 
recherches,  en  découvrir  toute  la  genèse.  L'archéologue  roussil- 
lonnais  nous  dit,  en  effet,  que  d'après  Içs  papiers  terriers,  les 
Capbreu  catalans,  cette  maison,  qui  était  désignée  sous  le  nom  de 
maison  Je.  mossen  JCanxo,  avait  été  acquise  par  Don  Luis  de 
Liupia,  qui  avait  été  élevé  à- la  charge  de  Procureur  Royal  en 
•  547.  Mais  les  mêmes  terriers  nous  apprennent  qu'elle  n'était  pas 
construite  encore  en  i5o5,  puisque,  a  cette  époque,  son  emplace- 
ment était  occupé  par  cinq  maisons  appartenant  à  différentes  per- 
sonnes. On  peut  donc  affirmer  que  cet  immeuble  fut  bâti  après 
cette  date,  par  un  particulier  appelé  Mossen  Xanxo. 

Voici  la  note  (3)  que  publiait,  en   1 83 3,  Renard  de  Saint-Malo 

(ï)  P.  Vidal,  Perpignan,   1898,  p.  193. 

(2)  D'après  un  acte  et  suivant  telles  conventions,  M.  Lacombe,  marbrier, 
avait  été  chargé,  en  1873,  de  faire  ce  travail  qui  avait  été  évalué  à  1  1  00  fr. 
Le  marbre  faisant  défaut,  M.  Lacombe  ne  pouvant  utiliser  que  le  marbre 
de  Viilefranche,  le  contrat  fut  rompu.  Ce  fut  M.  Selva,  ingénieur  de  la 
ville,  qui  a  fait  le  plan  de  la  cheminée  monumentale  actuelle. 

(3)  Publicaleur  du  24  oct.  1  833 .  —  Cette  note  vient  d'être  publiée  parla 
J{enat$sanc*  Catalane.  Je  la  reproduis  pour  les  lecteurs  de  la  T^evue  Catalane, 


-     6i     — 

qui,  en  1816,  avait  commencé  les  fouilles  de  Ruscino,  et  à  qui 
échut  en  partage  «  un  petit  vase  entier  »,  au  cours  des  fouilles 
sommaires  que  l'on  fit  à  cette  époque,  sous  l'impulsion  de  M.  de 
Villiers  du  Terrage(i). 

Renard  de  Saint-Malo  se  demande  quel  était  l'état,  quelle 
était  la  profession  de  cet  individu  :  «  L'édifice  dont  il  s'agit,  écri- 
vait-il en  1 833,  soit  par  sa  solidité,  soit  par  les  ornements  qui 
embellissent  sa  façade,  semble  annoncer  l'hôtel  d'un  gen- 
tilhomme opulent,  ou  l'habitation  d'un  plébéien  possesseur  d'une 
grande  fortune.  Mais  il  est  à  remarquer  qu'il  n'existe  dans  le  pavs, 
concernant  le  dit  Sancho,  aucune  tradition  nobiliaire,  aucun  sou- 
venir héraldique  ;  car  personne,  je  pense,  n'osera  de  nos  jours 
voir  un  titre  d'illustration  chevaleresque  dans  la  qualification  de 
Mossen...  C'est  donc  à  toute  autre  classe  qu'à  celle  de  la  noblesse 
qu'appartenait  le  particulier  ci-dessus  mentionné.  Après  avoir 
constaté  le  fait,  je  ne  puis  m'empêcher  de  rappeler  ici  que,  pos- 
térieurement à  l'an  i5o5,  la  ville  de  Perpignan  comptait  parmi 
ses  habitants  un  nommé  Bernard  Sancho,  inscrit  en  )5jo,  à  l'hôtel 
de  ville,  comme  bourgeois  de  Perpignan  ;  et  Capmany  nous 
apprend  qu'un  gros  navire  du  dit  Bernard  Sancho,  chargé  de  mar- 
chandises du  levant,  fit  voile  d'Alexandrie  en  j5î3.  A  son  arrivée 
à  Messine,  la  peste  s'étant  manifestée  dans  l'équipage,  l'on  se 
vit  obligé  de  décharger  la  cargaison.  Or  je  demande  :  ne  serait-ce 
point  ce  riche  bourgeois,  ce  célèbre  et  entreprenant  armateur  qui 
aurait  fait  construire  la  maison  de  la  main  de  fer  ?  (2)  ». 

Il  est  certain  que  cet  habitant  de  Perpignan  a  dû  jouer  un  rôle 
assez  important  dans  nos  annales  commerciales,  à  l'époque  où  il  fit 
construire  ce  remarquable  monument  de  notre  architecture  civile. 

Du  reste,  Puiggari,  dans  une  note,  nous  apprend  que  «  Bérenger 
Xanxo  était  le  père  de  ce  riche  armateur  Bernard  de  même  nom, 
qui  se  fit  bâtir,  sur  un  modèle  pris  en  Italie,  la  maison  de  la  Maxn 
de  fer  en   i5o7(3)».    C'est    ce    même   Bérenger  Xanxo   qui   avait 

(  1  )  Voir  le  "Bilan  des  fouilles,  page  j  2  1 . 

(2)  Renard  de  Saint-Malo,  Le  Publicateur  du  2  nov.   1  83 3. 

(3)  Note  de  P.  Puiggari  :  Cette  date  paraît  concorder  avec  la  note  de 
Saint-Malo  qui  dit  qu'en  i5o5,  à  l'emplacement  même  de  cette  construction, 
il  y  avait  5  maisons  distinctes.  (P.  Puiggari,  Bulletin  de  la  Société  Agricole, 
1845,  11"  partie  du  tome  vi,  p.  3a5.) 


-  63  — 

fondé  la  chapelle  où  est  placé  le  tableau  de  la  Sainte-Trinité  (1489), 
auprès  du  joli  retable  gothique  de  N.-D.  de  Pitié,  qui  en  fait 
l'ornement. 

Alart.  continuant  ses  laborieuses  et  patientes  recherches  à  son 
sujet,  nous  dit  oue  «  malgré  sa  phvsionomic  un  peu  étrange,  le 
nom  de  Xanxo  est  bien  d'origine  catalane,  et  c'est  la  forme  vul- 
gaire  vie  l'ancien  Sancliolus  ».  On  le  trouve,  à  diverses  époques, 
dans  plusieurs  communes  du  Roussillon,  notamment  à  Bouicter- 
nerc. 

Mais  comme  l'avait  conjecturé  M.  de  Saint-Malo,  Mossen  Xanxo 
ne  se  rattachait  à  aucune  famille  nobiliaire  de  notre  province  ;  il 
n'appartenait  même  pas  à  cette  classe  de  bourgeois  honorés  que 
ies  transformations  sociales,  et  surtout  les  révolutions  politiques, 
avaient  fait  surgir  dans  la  population  de  Perpignan...  Quant  aux 
Xanxo  de  Perpignan,  je  trouve  que  le  19  juin  1457,  sept  ans 
après  la  reconnaissance  officielle  des  bourgeois  honorés  de  cette  ville, 
Bcrcnger  Xanxo  vendant  pour  le  prix  de  68  livres  une  esclave 
de  21  ans,  baptisée,  blanche  et  de  race  Tcherkesse  (de  génère 
Xarquesiorum)  ne  prend  pas  d'autre  qualité  que  celle  de  tisserand 
ou  tisseur  (1)  [Iextor)  de  la  ville  de  Perpignan,  et  c'est  la  seule  qu'il 
se  donne  encore  à  la  fin  de  ses  jours,  le  i3  juin  1475.  Un  autre 
membre  de  cette  famille,  Jean  Xanxo,  se  dit  tisserand  de  lin  (iextor 
Uni)  Je  la  ville  de  Perpignan,  a  la  date  du  20  juillet,  1473.  Cette 
famille  se  trouve  donc  réléguée  dans  la  main  moyenne,  dans  une 
des  classes  inférieures  de  la  population  de  Perpignan.  11  y  a 
même  lieu  de  croire  qu'à  cette  époque  elle  avait  son  domicile 
dans  la  paroisse  Saint-Jacques,  puisque  Bérenger  Xanxo  fut  élu, 
le  24  juin  1469,  en  qualité  de  cinquième  Consul  de  Perpignan,  et 
l'on  sait  qu'en  vertu  d'un  ancien  privilège  (2),  cette  charge  devait 
être  alternativement    réservée    à    un   tisserand  ou  à  un  jardinier  du 

1     Tixedor. 

;  Cf.  mon  étude  "L'organisation  municipale  de  Perpignan,  2'  période 
118  février  1 3 1 2  —  a3  août  1402).  page  33.  Suivant  un  mandement  de 
Pierre  IV,  roi  d'Aragon,  du  16  novembre  1346,  les  conseillers  nommés 
chaque  année  pour  la  main  mineure  (sub  mtnori  manu),  de  ma  menor.  ne  pour- 
ront être  pris  que  dans  les  divers  métiers  qu'ils  doivent  représenter,  afin, 
dit  la  charte,  que  tous  les  métiers  puissent  avoir  à  leur  tour  des  sujets  et  des 
représentants  dans  les  charges  municipales. 


-  64  - 

Puig  Saint-Jacques,  où  ces  deux    professions   étaient   fixées   dans 
l'origine. 

Vient  ensuite  Bernard  Xanxo,  celui-là  même  qui  fit  construire 
la  marson  de  la  Main  de  fer,  mais  il  n  exerçait  plus  la  profession 
de  ses  ancêtres.  Il  se  montre  avec  la  qualification  de  mercader  qui 
le  maintenait  encore  dans  la  main  moyenne  (1)  de  la  population 
de  Perpignan  ;  car  les  mercaders,  admis  dans  la  main  majeure  en 
i345  (2),  en  avaient  été  rejetés  en  1449  P)  pour  faire  place  aux 
juristes.  Bernard  Xanxo  se  livra  à  de  vastes  opérations  com- 
merciales dans  les  dernières  années  du  règne  de  Charles  Vlll, 
et  il  acquit  une  immense  fortune.  Le  29  octobre  1491,  en  qualité 
d'obrer  de  Saint-Jean,  il  fit  une  concession  de  sépulture  dans  les 
cloîtres  de  la  nouvelle  église  en  faveur  de  la  famille  Moner.  Son 
nom  ne  figure,  le  plus  souvent,  que  dans  des  actes  relatifs  à  des 
opérations  commerciales  ou  financières,  dans  un  emprunt  négocié 
le  14  août  1493,  dans  une  expédition  de  draps  de  Perpignan  à 
Valladolid  peu  de  temps  après,  etc.  Le  26  juin  i5o8.  de  concert 
avec  les  nobles  François  Raxach  et  Gaspar  dez  Vivers,  seigneur 
d'Alenya,  Thomas  de  Vilanova  et  Bernard  Alenya,  mercaders  de 
Perpignan,  Bernard  Xanxo  servait  de  caution  à  Bernard  de 
Llupia  qui  avait  affermé  à  Barcelone  le  droit  de  bulle  de  la  Table 
ou  banque  de  Perpignan  (4),  à  raison  de  75c  pacifies  d'or  par  an. 
Comme  on  le  voit,  Bernard  Xanxo  se  trouvait  dès  lors  en  rap- 
ports continuels  avec  les  familles  nobles  ou  avec  les  bourgeois 
honorés  de  la  province,  mais  il  ne  reçoit  jusque  là  et  ne  se  donne 

(1)  De  ma  mijana  (de  manu  mediocri). 

(2;  Cf.  mon  étude  "L'organisation  municipale  de  "Perpignan,  charte  de 
Pierre  IV,  roi  d'Aragon,  pp.  33-37-  ^es  'ettres  patentes  du  16  des  calendes 
de  décembre  de  l'an  1346,  du  roi  d'Aragon  Pierre  IV,  concernent  le  mode 
de  nomination  des  consuls  et  conseillers  de  la  ville  et  la  division  de  la  popu- 
lation en  trois  classes  ou  mains  :  les  mercaders  faisaient  partie  à  ce  moment 
de  la  main  majeure  :  sub  manu  majori  comprehendantur  burgenses  et  mercatores... 
(op.  cit.,  p.  35.) 

(3)  Le  18  août  J449,  la  reine  Marie  sanctionnait  un  autre  mode  d'élec- 
tions consulaires  et  des  changements  notables  dans  le  gouvernement  muni- 
cipal... Les  conseillers  de  la  seconde  main,  ou  main  moyenne,  seront  tous  les 
mercaders  ayant  occupé  les  fonctions  de  3"  et  4*  consuls,  etc.  (Voir  mon  étude. 
op.  cit.,  4*  période,  pp.  80-87.) 

(4)  La  taula. 


—  65   — 

jamais  d'autre  titre  que  celui  de  mercader.  et  selon  M.  de  Saint- 
Malo,  il  ne  fut  inscrit  qu'en  i5io  dans  la  classe  des  bourgeois 
honorés, 

«  J'ai  cru  devoir  insister  sur  l'origine  de  Bernard  Xanxo,  et 
pour  ainsi  dire,  plaider  la  roture  en  sa  faveur,  pour  faire  voir 
que  le  goût  et  la  protection  des  Beaux-Arts  ne  furent  point, 
parmi  nous  du  moins,  le  privilège  exclusif  de  la  noblesse  cheva- 
leresque. En  effet,  la  maison  du  descendant  des  tisserands  du 
Puig  est  encore  aujourd'hui  la  seule  construction  civile  que  l'on 
puisse  citer  comme  un  monument  remarquable  dans  la  ville  de 
Perpignan  qui,  pendant  les  trois  derniers  siècles,  fut  habitée  par 
les  nobles  familles  del  Viver,  de  Taqui,  de  Çagarriga,  de  Cruylles, 
d'Oms,  de  Blanes,  d'Ortafa,  etc..  Enfin  la  noble  famille  de 
Llupia  ne  dédaigna  point  de  s'allier  à  celle  de  l'ancien  mercader 
et  de  s'établir  dans  sa  maison  (i).  » 

Voilà  donc  le  bel  hôtel  du  riche  mercader  armateur  qui  devient, 
par  l'alliance  du  noble  d<*  Llupia  à  la  riche  famille  du  mercader 
Mossen  Xanxo,  la  propriété  de  cette  noble  famille. 

Sans  remonter  à  l'illustre  origine  des  Llupia  dont  les  ancêtres 
avaient  été  conseillers  du  roi  de  Majorque  Jacques  11,  et  avaient 
possédé  plusieurs  seigneuries  et  châteaux,  entre  autres  le  château 
et  lieu  de  Maureillas,  la  vicomte  de  Casteilnou,  la  seigneurie  de 
Bages,  le  château  de  Saint-Jean-Pla-de-Corts.  Un  des  ancêtres, 
Raymond  de  Llupia,  avait  été  le  conseiller  et  le  chambellan  du 
roi  Martin  1".  Nicolas  de  Llupia,  chevalier,  détenait  la  seigneu- 
rie de  Canet,  en   1403,  au  nom  de  Louis  XI. 

Celui  qui  nous  intéresse  le  plus  est  Gelabert  de  Llupia, 
damoiseau  de  Perpignan,  qui  avait  refusé  de  reconnaître  la  domi- 
nation de  Louis  XI  en  Roussillon.  Ses  domaines  furent  mis  sous 
séquestre  et  attribués,  en  1476,  à  Pierre  Ylari,  homme  d'armes. 
«  Geiabert  de  Llupia  avait  épousé  en  premières  noces  Jacmina, 
fille  du  chevalier  François  Ça  Ribera.  En  1494.  il  rentre  de  nou- 
veau en  possession  de  ses  biens  ;  il  vendit  en  i507  î>a  maison 
située    dans    la    rue    de    la    Main-de-Fer   à   Bernard     Xanxo. 


Ai  kk  1  ,   Note  lue  à  la  Société  Agricole  des  Pyr.-Or. ,  le  1  7  avril  1  8b  1 
Publiée  récemment  dans  la  Renaissance  Catalane,  n"  7  et  8.    iqiq. 


i 


—  66  — 

mercader  de  Perpignan  (i).  Gelabert  de  Llupia  eut  pour  fils 
Pierre,  son  successeur.  Ceiui-ci  donna  le  jour  a  François  Gela- 
bert qui  vivait  en   i5i3. 

François  de  Lluoia,  fils  de  Jean  de  Llupia,  seigneur  de  Llupia 
et  de  Vilarmilar.  «  unit  ses  destinées  à  celles  d'Angèle,  fille  unique 
et  héritière  du  riche  négociant  roussillonnais,  Bernard  Xanxo,  et  de 
sa  femme  Elisabeth  (î)  ».  François  de  Llupia  fut  nommé,  en  i  535, 
procureur  royal  des  Comtés  de  Roussillon  et  de  Cerdagne  ;  il 
vint  se  fixer  dans  cette  demeure  opulente  que  Xanxo  avait  fait 
construire,  vers  i5io.  «  Elle  servit  d'habitation  à  ses  descendants 
qui  furent  ses  successeurs  dans  la  même  charge.  Elle  s'appela 
désormais  la  maison  de  Mossen  "Llupia,  et  la  rue  porta  aussi  'le 
nom  de  Carrer  del  Procurador  real  (3).  François  de  Llupia  reçut  de 
Charles  Quint  une  lettre  qui  conférait  privilège  de  noblesse  pour 
lui  et  ses  descendants.  En  i55c>,  il  se  démit  de  son  office  en 
faveur  de  son  fils  Louis.  Outre  cet  enfant,  il  avait  eu  deux  filles: 
Lucrèce,  mariée  à  Galcerand  de  Vallgornera,  et  Elisabeth,  femme 
de  F.  Grimau  ». 

Le  petit  fils  de  Bernard  Xanxo  était  aussi  devenu  armateur; 
abbé  commendataire  de  l'abbaye  de  Saint-Pierre  de  Rodes, 
«  Thomas-  de  Llupia  avait  équipé  une  galère  appelée  «  galera 
Lupiana  »,  qu'il  commandait  en  personne  et  qui  faisait  la  traver- 
sée de  la  Méditerranée.  Elle  échoua  une  fois  près  de  Méiila 
(Maroc).  A  la  mort  de  l'abbé  Thomas  de  Llupia,  survenue  en 
i58o,  ce  navire,  dont  l'équipage  se  composait  de  quatre-vingt- 
quatre  esclaves  ou  forçats,  devint  la  propriété  de  son  petit  neveu 
Gabriel  de  LluDia.  Plus  tard,  il  fut  acquis  par  la  couronne  d'Es- 
pagne. Thomas  de  Llupia  fut  inhumé  dans  la  chapelle  de  Notre- 
Dame  dels  Correchs,  située  dans  le  vieux  Saint-Jean  de  Perpignan, 

(i)  Arch.  des  Pyr.-Or.,  B.  302-41  1  ;  J.  Capejlle,  Dict.  de  biogr.  rouss., 
p.  33o  :  Sur  son  emplacement  et  sur  le  terrain  occupé  par  quatre  maisons 
contiguës,  ce  riche  commerçant  perpignanais  construisit  le  magnifique  hôtel 
gothique  qu'on  admire  de  nos  jours  dans  la  rue  de  la  Main-de-fer. 

(2)  J.  Capeille,  op.  cit.,  p.  33  1. 

(3)  19  sept.  1619.  Mém.  de  Saint-Jacques:  Com  tenian  de  passar  per 
plassa  del  oli,  paseren  per  lo  carrer  del  Procurador  real,  per  ocasio  que  lo 
duch  de  Feria,  virrey  de  Catalunya,  se  troba  en  Perpinya  y  estava  en  la 
casa  del  Procurador  real. 


-  6y  - 

et    où    se    Trouvait  le  caveau  de   famille.  11  eut  pour  héritier  son 
neveu  Louis  de  Liupia,   procureur  royal  (i)  ». 

Ceiui-ci,  fils  de  François  de  Liupia  et  d'Angèle  Xanxo,  s'était 
marié  à  Yolande  de  Saragosse  ;  il  fut  enseveli  dans  ce  caveau  de 
famille  Xar.xo,  creusé  sous,  la  chapelle  de  Saint  Bérenger,  située 
dans  l'église  Saint-)acques  de  Perpignan. 

Son  fils  Gabriel  de  Liupia  avait  pris,  le  5  février  i58o,  le  com- 
mandement de  la  galère  Lupiana,  dont  il  se  dessaisit  plus  tard  en 
faveur  de  ia  couronne  d'Espagne.  Après  avoir  été  nommé  gou- 
verneur intérimaire  des  Comtés  de  Roussiilon  et  de  Cerdagne, 
il  fut  nommé,  en  1621,  par  Philippe  111,  à  l'office  de  lieutenant- 
général  en  Roussiilon,  en  Cerdagne  et  dans  l'Ampourdan. 

Gabriei  de  Liupia,  fils  aîné  de  Jean  Liupia,  avait  été  nommé  à 
l'aleavdie  au  Castillet  de  Perpignan.  Comme  il  avait  adopté  le 
parti  de  l'Espagne,  «  ses  biens  furent  donnés  à  Joseph  de  Biure 
de  Margarit,  marquis  d'Aguilar.  Les  domaines  de  son  père 
furent  attribués  a  Isabelle  Dulac,  épouse  de  Pierre  La  Cavalleria. 
Celle-ci  posséda,  à  ce  titre,  l'hôtel  de  la  rue  de  la  Main 
de  fer.  Devenue  veuve,  elle  convola  en  secondes  noces  avec 
Pierre  Talon,  surintendant  et  commissaire-général  des  vivres  des 
armées  de  France.  Le  10  avril  1060,  lors  du  séjour  que  Louis  XIV 
et  sa  cour  firent  à  Perpignan,  la  Reine  mère  Anne  d'Autriche 
occupa  la  maison  des  Liupia,  a  la  façade  ornementée  dans  le 
stvle  gothique  fleuri.  Le  roi  logea  dans  la  maison  Bosch,  occu- 
pée plus  tard  par  le  gouverneur  de  la  Province,  sur  la  place  de  la 
Laine,  la  place  d'Armes  (2)  actuelle  (3). 

11  est  indéniable  que  Sancho  avait  fait  construire  cette  maison" 
pour  lui,  au  commencement  du  xvi'  siècle  (et  l'on  peut  aujour- 
d'hui préciser  la  date),  exactement  en  i5oy,  à  une  époque  où  le 
commerce  des  draps  avait  pris  une  extension  considérable,  à  un 
moment  où  la  renommée  de  la  fabrication  de  cette  marchandise  à 


(1  )  J.  Capeille,  Biogr.  rouss.,  p.  3 3  1  :  Arch.  des  Pyr.-Or..  B.  375-378- 
480,  E. 

(2)  Aujourd'hui  place  Gambetta. 

(3)  J.  Capeille,  Biogr.  rouss.,  p.  333  ;  Arch.  des  Pyr.-Or.,  B.  388. 
390,  394,  445  ;  Victor  Aragon.  Le  r\oussillon  aux  premiers  temps  de  son 
annexion  a  la  Trance. 


_  68  — 

la    marque    mondiale    «  Perpenya  »  (>)    s'étendait    au    delà    des 
mers. 

Cet  élégant  immeuble  princier  avait  été  construit  pour  attirer 
les  regards  :  ce  fut  au  commencement  du  xix'  siècle  que  nos 
ancêtres  en  firent  l'acquisition,  s'y  réunirent  et  fondèrent  la  Loge 
de  «  l'Union  ». 

(A  suivre)  Henry  Aragon. 

(i)  L'industrie  et  le  commerce  des  draps  étaient  déjà,  sous  les  rois  d'Ara- 
gon, très  florissants.  On  sait  que  Jean  1",  en  date  du  22  octobre  1  388,  sur 
la  demande  des  consuls  de  la  ville,  avait  créé  le  Consulat  de  mer  en  considé- 
ration de  la  prospérité  de  ce  commerce  :  Perpignan  expédiait  déjà,  en  1  329, 
des  draps  directement  à  Constantinople  ;  en  i33î,  la  ville  comptait  349  maî- 
tres tisserands  en  laine,  confinés  tous  dans  la  paroisse  Saint-Jacques.  —  Voir 
plus  haut,  chup.  X  :  Droit  de  rêve  et  de  haut  passage  (1284),  pp.  1 13-12S: 
a  tous  les  draps  recevaient  la  marque  de  fabrique  qui  était  imprimée  sur  la 
pièce  elle-même  »,  p.  114  (tirage  à  part). 

Quelques  noms  de  plantes  #  synonymes 

Catalans-Français  tf  Français-Catalans 

<«$^  (SUITE) 


bagtienaudier.  —  espanta-ilops. 

balsamine.  —  aybret,  arbret,  balsemina. 

bardatie.  —  lleparassa,  llepassa,  llepassera,  repalassa,  gafets. 

basilic*  —  alfabrega,  aufabrega,  aufadia,  enfalga. 

belladone.  —  belladona. 

benoîte-  —  herba  de  sant  Benêt,  rèvola. 

berle    —  crexenera. 

berSC  —  pampes,  panaces,  canô. 

bétoine-  —  betonica. 

bette.  —  bleda. 

betterave.  —  bleda-rave,  remolatxa. 

bistorte.  —  voir  renouée  persicaire. 

blé.  —  blat,  xeixa. 


—    6c,    - 

blette-  —  voir  bette. 

bleuet,  bluet-  —  caps  blaus,  llums,  angelets,  anjalits. 
bOUCage.  —  pampes. 
bouillon  blanc  —  voir  molène. 
bouleau.  —  bès,  bedôll,  abedôll. 
bourrache.  —  borrayna,  borratxa. 
bousserole.    —  voir  arbousier. 

bouton     d'or.     —     g°'g<     francessilla,     botô    daurat.    Voir    aussi 
renoncule. 

brachipode.  —  llisté. 

brize.  —  balladora,  bellugadissa. 

brOCOli.  —  voir  chou-fleur. 

brome.  —  espigadella,  escanya-cavalls,  trauca-sacs,  ordi  salvatge. 

brunelle.  —  herba  del  trahidor,  herba  del  balsém. 

bruyère.     —    bruc,.    bruga,    bruguera,    brossa,    jusbarba,    sepell, 

xipell,  xiprell,  aidissa.  erica,  eritja. 
bryone.  —  carbassina,  brionva. 
bugle.  —  herba  de  sant  Llorens. 
bugloSSC   —  buglosa,  ilengua  de  béu. 
bugrane.  —  adruls,  gahons. 
buis.  —  boix,  buix.  / 


Caillerait.  —  voir  gaillet. 
Calebasse.  —  ravequet. 
Callune.  —  voir  bruyère. 
Calville.  —  camosina,  camosa. 
Camélée.  —  olivereta,  garuppa. 
Camomille.  —  camamilla,  mançanilla,  camilla. 
Campanule.  —  campanes. 
Capillaire.  —  falsia,  falzia. 
câprier.  —  taparera. 

Capselle.  —  sarrô  de  pastor,  sarronet,  herba  del  pastorell. 
Cardavelle.  —  voir  carline. 
Cardère.  —  carda,  cardet. 

Cardon.  —  card,  cart,  cart  coler.   herha-col.   herba   colera,  herba 
formatgera. 


—  7°  — 
Carlinc  —  carlina,  carnunquera. 
Carotte.  —  pastanaga,  bufanaga,  safanoria. 

»         Sauvage.  —  voir  ravenelle. 
Caroubier.  —  garrofer,  algarrofer. 
CaSSiS  Odorant.  —  aromer. 
Cataire.  —  herba  dels  gats,  nepta. 

caucalide.  —  cadells. 

Céleri.  —  apit,  api. 

»       Sauvage.  —  voir  cresson  faux. 
Cédratier.  —  cédrat,  punsemer,  poncemer,  pomer  d'Adam. 
Centaurée.  —  centaura,  capbossada,  herba  del  tarau. 
»  bleuet.  —  voir  bleuet. 

»  ChaUSSe=trappe.   —   floravia,    caga-tripa,    caga-trepa, 

sagatrepa,  cart  estrellat,  brassera. 
»  petite.     —    centaura     borda,     caxalagua,     herba     de 

Santa-Margarita,  pericô  vermeil,  fel  de  la  terra. 
Cerfeuil.  —  cerfull,  serfull. 
Cerisier.  —  cirerer. 
Céterac.  —  voir  doradille. 
Chalef.  -—  arbre  argentat,  arbre  del  Paradis. 

champignon.  —  bolet. 
chanterelle.  —  ginestrola. 

Chanvre.  —  canem,  canam. 

Chardon.  —  cardô,  cardot,  escardot,  esquerdot,  carxofa  de  borro, 
cart. 
i        Volant.  —  voir  panicaut. 
Chardonnette.  —  voir  carline. 
Châtaignier.  —  castanyer. 

Chélidoine.  —  herba  saloni,  de  les  morenes,  de  les  verrugues. 
Chêne.  —  roure. 

»       kermès.  —  garric,  garrulla,  garolla,  carrasca. 

»        liège-  —  siure,  surô,  surer,  alzina  surera. 

»        Vert-  —  alzina,  aulet. 
cheneviS-   —  caramuixa. 
ChénOpode.  —  pix  de  cà,  herba  pudenta. 
CherviS-  —  xerevia,  xirivia,  xaravia. 

Chèvrefeuille.    —    mare-selva,     selva-mare,     lliga-bosc,     potes     i 
manetes. 


—  7«   — 

Chicorée.   —   xicoya,  xicoyra,  agon.  Voir  aussi  "endive. 

»  Sauvage.  —  cosconia.  cosconilla,  cusconia. 

Chiendent-  gram.  agram. 

Chou.  —  col,  broquil. 
Ch0U=fleur.    —  col  i  flor,  brocoli. 

j  santhème  des  moissons.  —  ull  de  bou. 

ciboule.  —  ciboleta. 

CigUe.  —  givertassa,    tora    pudent,    fenoll   de  bou,  fenoll  de  gri- 
pau,  calamac. 
>        petite.   —  givert  bort. 
circée.  —  herba  de  les  encantades,  herba  de  Sant  Esteva. 
CÎrse.   —  calcida,  carsus. 

Ciste.  —  estepa,   estrepa,   stepa,   argent),   moixera,   bordiol,  cist. 
citronelle.  —  citro,  herba  de  citrô,  citronella,  cidrac,  tarongina. 
Citronilier.  —  ilimoner. 
citrouille.  —   carbassa,  carabassa. 

Clématite  flammette.    —    vidiella,    vidriella,    vediella,    badiella, 
viadella,  jassemi  de  borro. 

»  des    haies.  —  herba    de    Job,    herba   de    les    llagues, 

ridolta,  ridorta,  vidalba,  vidauba,  vidarsa. 

»  droite.  —  herba  vormera. 

COgnaSSier.  —  codonyer. 
Colchique.   —  colquic,  colxic. 
COlza.  —  rap. 

Concombre.  —  cogombre,  cobrombuls.  Voir  aussi  cornichon. 
COnopode.   —  anyols. 

COnSOUde.   —  consolda,  herba  puntera,  llengua  de  vaca. 
Coquelicot.  —  roella,  rosella,  babol,  badabadocs,  paparola. 
COqueret-  —    bufeta  de  ca,  alicacabi. 
Coriandre.  —  celiandria. 
Cormier.  —  selvier,  server,  cervera. 
Cornichon.  —  pepino.  Voir  aussi  concombre. 
Cornouiller.   —  sanguinyol,  sarguinyol,  sangrell,  sanguinella,  sàn- 

gonella,  corneller,   corner,  peralloner. 
COrroyère.  —  redo,  redon,  rodô,  roldé,  fustet. 
COUdrier.  —  voir  noisetier. 
COUrge.   —  voir  citrouille. 
CreSSOn.   —    crexens,  crexem,  morritort  d"aigua. 


—  7i  — 

CreSSOn  alénois-  —  morritort. 

»         taUX-  —  caxals,  caxals  de  borro,  apit  bort,  crexens  bort. 
Crête  de  COq.  —  voir  amaranthe. 
CUSCUte.  —  pels,  cabells,  rebul. 
Cyprès.  —  xiprer. 
Cytise.  —  balac,   balec.  (M  suivre) 

LAMETLLER 


Ametller  florit 
pareil  a  una  nit 
amb  el  cel  teixit 
d'estels  que  s'encenen. 
Quan  l'hivern,  son  vel 
desplega,  de  gel, 
tu  també  ets  un  ce! 
de  flors  que  corprenen. 

En  els  jorns  incerts, 
els  braços  oberts 
tens  de  flors  coberts 
que  amb  goig  l'ull  admira. 


Ets  talment  un  far 
lluminôs  i  clar 
on  hi  cerca  ampar 
el  cor  que  suspira. 

Ametller  nevat 
de  fécond  esclat, 
joiell  cisellat 
rie  en  pedreria 
Enmig  la  fosebr 
tens  en  cada  flor 
un  punt  de  claror, 
un  bri  d'alegria. 

Josep  Gibernau. 


La  seigneurie  $  la  paroisse  de  Serralongue 


VI.  —  Actes  de  catholicité 


[SUITE) 


En  compulsant  les  actes  de  catholicité,  on  glane  des  rensei- 
gnements qui  ont  leur  importance. 

j"  Le  î3  décembre  1 593 ,  un  baptême  a  lieu  dans  l'église 
paroissiale  de  Serralongue  :  l'honorable  Thomas  Ricart,  batllc  de 
Prats-de-Mollo,  fut  parrain  :  a  Fonch  paciri  1  honorable  Thomas 
Ricart,  batlle  de  Prats-de-Mollo  ». 

1'  Le  27  mai   1597,  Eléonore  Frexe,   fille   légitime   de    Pierris 


-  73  - 

Frexe,  est  baptisée,  étant  parrains  la  dame  Eléonore  de  Roca- 
berti  de  Pcgucra  et  Guillaume  Montestrut,  batlle  de  Vilamulaca  : 
4  Essent  pares  spirituals  de  la  illa  S"  dona  Eleonor  de  Rocaberti 
y  de  Peguera  y  lo  magnifie  S"  Guillem  Montestrut,  batlle  de 
Vilamulaea  »  per  mi  Anthonius  Augarau. 

3'  En  1609  :  «  Je  Llorens  Moragues,  prêtre  et  licencié  en 
droit  canon  (en  canons  licenciât),  curé  de  l'église  paroissiale  de 
Serralonga,  ai  donne  la  bénédiction  nuptiale  à  Antoine  Llensa, 
pages  de  Serralonga,  et  à  Montserrada  Suejas  en  présence  de 
Gabriel  Llensa,  batlle  de  Serralonga. 

4'  Mariage  entre  Jean  Gilles  et  Marguerite  Crémadells  :  «  Ce 
vingtième  janvier  mille  sept  cent  quarante  cinq,  Don  Joseph  de 
Copons,  prêtre  et  chanoine  de  l'église  cathédrale  d'Elne,  docteur 
en  théologie,  vicaire  général  de  don  François  de  Cordevach  de 
Gouy,  evêque  d'Elne,  en  la  dite  qualité  avons  assisté  au  mariage 
célébré  en  l'égjise  paroissiale  de  Notre-Dame  de  Serralonga 
après  une  publication  de  bans  faite  dans  les  paroisses  respectives 
des  contractants,  ayant  dispense  des  deux  autres  pour  des  raisons 
à  nous  connues,  entre  M.  Jean-Alexis  Gilles,  conceller  procureur 
du  Roy  aux  cours  royales  de  Roussillon  et  Vallespir,  juge  de  la 
Monnaye  de  Perpignan,  d'une  part,  et  la  dame  Marguerite  Cré- 
madells et  Faig,  veuve,  âgée  environ  de  trente-trois  ans,  fille  du 
sieur  André  Crémadells,  bourgeois  noble,  et  de  la  dame  Agnès 
Faig  et  Caball,  et  leur  avons  donné  la  bénédiction  nuptiale.  Ont 
été  témoins  :  don  Antoine  de  Pages  de  Copons,  don  Michel 
de  Pages  de  Copons,  Antoine  Roudiere  et  Jean  Lanquine,  qui 
ont  tous  signé  avec  M'  Gaffard,  procureur  fondé  de  Madame 
Gilles  et   Rubc  » . 

5'  Nota  :  «  Té  obligatio  lo  rector  de  Serrallonga  tots  anys  en 
fer  una  professo  dia  y  festa  de  la  Assumptio  que  es  als  quinze 
de  Agost  despres  Vespres  ab  la  mateixa  solemnitat  com  si  fos  lo 
dia  del  Roser,  en  la  mateixa  forma  que  axi  es  la  voluntat  de  nos- 
tre  Rey  christianissim  que  Deu  guarda,  y  lo  diumenge  antes  la 
publicara,  exortara  lo  S"  batlle  y  eonsois  y  ios  demes  delà  parro- 
quial  assistencia  en  la  dita  solemnitat  segons  com  consta  ab  unas 
lletras  de  mandato  de  nostre  illustrissim  vicari  gênerai  Bonaven- 
ture  Cabanes  fêtas  als   i3  de  agost  1682  ». 

b'  «  Als  vingt  agost  1744  mori  en    est    Uoch   de  Serrallonga  lo 


—  74  — 
Révérend  Galdarich  Hortet,  prebere  y  bénéficiât  de  Prats-de- 
Mollo,  lo  cadaver  delqual  fonch  transportât  à  Prats-de-Mollo  ais 
21  de  dit  mes  y  sepultat  en  la  tomba  dels  sacerdots  als  22  de  dit 
mes.  Se  ly  feu  enterro  y  honras  ab  la  solemnitat  acostumada  als 
demes  confrares  de  la  Révérend  communitat.  —  Bl.  Hortet 
prebere  y  curât  ». 

7'  «  Notes  des  fondations  Hortet  contenues  dans  l'acte  de 
fondation  au  pouvoir  de  Trinxaria,  notaire  de  Prats,  mois  de 
novembre  1748. 

1*  Lo  offici  del  glorios  Sant  Blazi  :  als  3  de  fabrer,  ab  dos 
sacerdots,  complétas  al  die  antes.  Tertia  cantada  antes  de  l'offici, 
y  la  benedictio  de  pa  y  fruita  cantant  à  la  fi  de  l'offici,  ab  dos 
ciris  à  las  Complétas  y  tertia,  y  quatre  à  l'offici.  Vint  y  sinch 
sous  Francia  à  quiscun  saeerdot  y  mitg  rai  al  campaner.  2'  als  26 
juny,  anniversari  par  Thérésa  Hortet  ab  dos  sacerdots,  20  sous  à 
cadaiï  y  mitg  rai  per  lo  tocar  al  campaner  bagant  las  campanas. 
3"  als  29  agost,  offici  ab  dos  sacerdots  y  al  die  antes  Complétas  à 
honra  y  gloria  de  Sant  Joan  Baptista,  très  rais  y  mitg  à  cade 
saeerdot,  célébrant  los  dos  la  missa  per  lo  fundador  y  los  seus, 
mitg  rai  al  campaner  per  dos  tochs  trillar  yalçar  la  campana  more 
solito.  Dos  ciris  à  las  Complétas  y  quatre  à  l'offici.  Lo  pa  veneyt 
fornira.  4  als  i5  octobre,  offici  à  honra  y  gloria  de  Santa  Thérésa 
verge  com  per  Sant  Blazi.  Per  memoria  ». 

8"  «  Le  premier  mai  1600  mourut  la  femme  de  Roquisern,  et 
elle  fut  enterrée  dans  l'église  de  Serralongue.  »  —  Cette  note 
laisse  supposer  avec  raison  qu'il  y  avait,  dans  l'église  de  Serralongue, 
d'autres  tombes  que  celle  des  barons  de  Cabrenç  :  le  carrelage 
les  cache.  Toutefois,  le  corps  de  la  majorité  des  habitants  était 
enseveli  dans  le  cimetière  commun. 

VU.  —  Cimetière 

Primitivement  il  devait  entourer  l'église  paroissiale.  Aujourd'hui, 
devant  l'entrée  de  l'église,  est  une  petite  place  où  les  paroissiens 
se  réunissent  en  attendant  las  pelttas,  c'est-à-dire  les  trois  coups 
de  cloche  annonçant  que  la  cérémonie  religieuse  commence. 

1"  «  Als  4.  juliol  de  l'any  1670  fonc  enterrât  en  lo  sementiri  de 
esta  parroquial  un  tinent  de  la  companya    de    Mussen    la    Chano 


-  75  - 

dcl  régiment  de  Montagut.  Tambe  hi  enterra  très  soldats,  lo  hu 
rehc  los  sagraments,  los  altres  no,  perque  los  mataran   ». 

2*  o,  juiiol  1070  fonch  enterrât  -lo  Révérend  Andrcu  Faig 
capella  de  animas  :  rebé  tots  los  sagraments. 

3'  «  Vuv  a!s  quatre  de  mars  del  any  mii  sept  cents  quaranta  sinch 
es  estât  sepuitat  lo  cadaver  de  Thomas  Cazellas,  mestre  d'escola(i) 
de  dît  lloch  de  SerraiJonga  de  edat  de  vuytanta  y  sis  anys.  Essent 
nat  à  Sant  Joan  de  Mondaru  bisbat  de  Solsona  als  24  juny  de  1  65o. 
Ha  rebut  los  sagraments  y  han  assistit  en  sa  funeraria  4  sacerdots, 
y  entre  altres  dos  testimonis  que  foren  Francisco  Cicra  son  fillas- 
tra,  Joseph  Llensa  y  Joseph  Faig  brassers  —  Blazi  Hortet 
curât  » . 

(%  suivie)  Joseph  Gibrat. 

i  On  constate,  à  Scrralongue,  la  présence  d'un  maître  d'école  en  1  685 . 
Parmi  les  témoins  d'Un  acte  de  mariage  de  cette  année  figure  «  Jaume  Saja- 
loli,  mestre  de  minyons  de  Serrallonga  ». 

Nos  adeptes 

Un  catalaniste  doublé  d'un  travailleur  consciencieux,  que  nous 
pouvions  jusqu'à  ce  jour  qualifier  de  «  solitaire  »,  est  venu  à  nous 
dans  ;e  but  louable  de  grossir  la  colla  de  ceux  qui  travaillent  à 
rénover  la  langue.  C'est  M.  Etienne  Canal  qui,  sous  le  pseudo- 
nyme de  YTzsieva  Ti,  a  déjà  livré  au  public  quelques  bonnes  pro- 
ductions. Au  cours  de  la  dernière  réunion  de  la  Société,  M.  Canal 
a  délicatement  uit  un  poeme  dédié  à  la  Société  d'Etudes  Catala- 
nes, dont  nous  donnons  la  dernière  strophe. 

Tant  l'estiu  com  la  primavera. 
Cavaliers,  mon  cor  dira, 
Fins  a  la  gota  darrera  : 
Visca  sempre  el  Català  ! 

Toutes  nos  sympathies  au  nouveau  venu.  Coratge,  amie,  i  avant 
sempre,  pel  Rosseilô,  per  sa  llenguaî 


ECHOS 

Les  Poèmes  de  Rabindranath  Zagore,  poète  bengali 

Notre  excellent  ami  Joseph-Ma  Batista  y  Roca,  de  la  Société 
d'Etudes  Catalanes,  vient  de  libérer  un  livre  qui  mérite  d'être 
signalé  à  l'attention  des  lecteurs,  et  plus  particulièrement  des 
poètes  des  deux  versants. 

11  s'agit  d'un  remarquable  travail  de  traduction  et  d'adaptation 
des  poèmes  de  Rabindranath  Tagore,  le  poète  bengali,  travail 
agrémenté  d'une  préface  qui  nous  dépeint  cet  Indou  vraiment 
extraordinaire,  dont  la  pensée  se  manifeste  en  des  chants  pleins 
d'exotique  et  originale  fraîcheur. 

Notre  ami,  qui  joint  à  une  rare  finesse  de  style  une  profonde 
érudition,  est  l'auteur  d'oeuvres  diverses  qui  sont  l'expression  d'un 
réel  talent. 

Nous  saluons  avec  une  joie  sincère  sa  nouvelle  production  qui 
non  seulement  honore  notre  Société,  mais  enrichit  encore  d'un 
nouveau  joyau  la  littérature  catalane.  P.  F.  i  A. 

Institut  d'Estudis  Catalans 

Ha  sigut  nomenat  membre  d'aquesta  entitat  l'ilustre  autor  de 
Marines  y  boscatges,  En  Joaquin  Ruyra. 

Els  Morts 

El  délicat  poeta  Joaquin  Folguera,  una  de  les  figures  mes  sim- 
patiques  de  la  Joventut  literaria  Catalana,  y  M"  Clascar,  autor 
de  versions  precioses  y  d'estudis  de  gran  valor,  venen  de  morir. 

Pourpres  tf  Ors 

Le  jeune  et  déjà  brillant  poète  René  Grando,  frère  de  notre 
excellent  Secrétaire,  vient  de  publier  ses  Pourpres  et  Ors,  d'une 
valeur  incontestable.  Certains  poèmes  comme  La  Mer,  Dis-moi 
pourquoi,  L'Oiseau  de  France,  Au  Roussillon,  etc.,  sont  d'une 
délicatesse  exquise,  d'une  formule  rythmique  qui  charme  le  lec- 
teur. Cet  ouvrage  est  l'un  des  meilleurs  de  la  jeune  école  rous- 
sillonnaise.  Nos  félicitations  les  plus  vives. 

Le  Gérant,  COMET  .  —  Imprimerie  Catalane,  COMET,  rue  de  la  Poste,  Perpignan 


13"  Année   H'  150  15  Avril  1919 


Les    Manuscrits   non   insère» 
ne  sont  oas  rendu». 


REVUE 


Les   Articles   parus  a»ns  la    Revue  M  ^    ^^    w  W  "*    ^^     1  ^^    TWl    ^4* 

It'cnglgciu  que  leurs  auteurs  ^m^A «•    JL     A    AA^A    ■■   VM 

Organe  de  la  Société  d'Etudes  Catalanes.  —  Cotisation  :  10  fr.  par  an 

La  poésie  catalane  en  Roussillon 

El  Bon  Pedriç,  de  Joseph-S.  Pons  H 

Un  intervalle  de  près  de  huit  années  sépare  la  publication  de 
7{oses  y  Xiprers  et  celle  d'E/  bon  Pedriç.  Mais  ce  dernier  recueil 
était  déjà  prêt  à  paraître  au  mois  d'août  1914  :  il  a  dû  attendre 
la  fin  du  vaste  conflit  et  le  retour  de  son  auteur,  prisonnier  en 
Allemagne.  Celui-ci  s'est  contenté  d'y  ajouter  une  seconde  pré- 
face :  il  nous  le  donne  aujourd'hui  tel  qu'il  l'avait  laissé  lors  de 
la  mobilisation. 

Joseph-S.  Pons  sait-ii  avec  quelle  joie  nous  l'avons  vu  revenir? 
Son  nouveau  livre  ne  peut,  à  cette  heure,  que  nous  être  double- 
ment agréable...  En  l'absence  du  poète,  nous  reprenions  ses 
Ttyses  y  Xiprers,  et  leur  lecture  nous  procurait  un  peu  l'illusion  de 
sa  chère  présence.  Mais,  par  bonheur,  les  mauvaises  heures  ne 
sont  plus  ;  et,  puisqu'il  ne  veut  pas  lui-même  que  nous  en  rappelions 
l'amertume,  nous  parlerons  sans  plus  tarder  de  sa  poésie,  laquelle 
doit  être  et  sera  pour  lui  désormais  la  meilleure  des  consolations. 

Quand  on  a  tenu  dans  ses  mains  pendant  quelques  heures  un 
livre  de  vers  comme  celui  de  Joseph-S.  Pons,  on  en  garde  le 
coeur  tout  embaumé,  l'âme  toute  pleine  de  soleil.  C'est  le  privilège 
des  belles  oeuvres  de  la  littérature  méridionale.  La  pensée  en  jaillit 
sous  forme  de  sensations  ;  mais  ces  sensations  sont  d'une  essence 
rare,  et  il  n'est  pas  possible  de   se  méprendre  sur  la  profondeur 

Perpinya,  Jmprempta  Catalana  d'En  J.  Cornet,  MCMX1X. 


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de  l'émotion  esthétique  qu'elles  suscitent.  La  nature  et  l'art  s'y 
rejoignent  et  s'y  confondent,  comme  la  forme  et  la  mission 
végétale  dans  l'arbrisseau.  Un  barbare  seul  est  capable  de 
demeurer  étranger  à  l'ordre  inaltérable  de  ces  choses  et  d'oser 
en  disputer  la  vertu. 

Dès  que  j'eus  reçu  El  bon  Pedriç,  je  résolus  de  le  lire  dehors, 
au  plein  épanouissement  des  forces  vivantes  et  sereines  ;  et  je 
choisis,  pour  ce  régal,  un  bouquet  d'oliviers  doucement  épanoui 
sur  un  aimable  coteau,  que  le  printemps  déjà  touchait  de  sa  pre- 
mière grâce.  L'amandier  en  fleur,  incliné  vers  ce  coin  d'azur, 
l'annonçait  en  un  léger  frisson...  Cadre  et  atmosphère  qui  con- 
venaient admirablement  à  ces  vers,  d'une  inspiration  si  «naturiste», 
d'une  ferveur  «  terrienne  »  si  fidèle  I 

Ils  sont  bien,  avant  toute  chose,  comme  le  chant  de  la  lumière, 
le  chant  du  jour  bienheureux  qui  répand  la  vie  sur  le  monde,  le 
chant  des  couleurs  infinies  par  quoi  ies  objets  prennent  une  âme, 
deviennent  des  idées  ou  des  dieux.  On  peut  dire  qu'il  n'y  a 
presque  pas  un  seul  de  ces  poèmes  qui  ne  soit,  à  sa  manière,  un 
hymne  de  reconnaissance  au  grand  dispensateur  des  grâces  uni- 
verselles qu'est  notre  père  le  soleil.  Mais  rien  de  déclamatoire, 
ou  d'un  romantisme  facile,  débordant  et  désordonné,  comme  celui 
de  certains  contemporains  :  la  retenue  poétique  (qui  n'exclut  pas, 
d'ailleurs,  elle  non  plus,  l'intensité  de  l'émotion)  est  chez  Joseph- 
S.  Pons  une  des  formes  de  la  pudeur.  Et  nous  aimons  qu'il  en 
soit  ainsi...  Mieux  que  des  hymnes,  ces  poèmes  seraient  donc 
comme  des  prières  ;  et  si,  dans  la  dernière  partie  du  livre,  le 
poète  se  défend  de  passer,  avec  tant  d'autres,  le  seuil  accueillant 
de  la  foi,  il  n'en  reste  pas  moins  que  ces  sortes  d'invocations 
païennes  s'imprègnent  d'une  «  religiosité  »  dont  le  développement 
nous  promet,  pour  les  oeuvres  à  venir,  des  constatations  intéressantes. 

Me  parles,  oh  terra,  un  llenguatge  sagrat, 

com  si  fora  ta  Hum  la  mes  blava, 
muntanya  arrelada  en  el  cor  exilât, 

en  mes  venes  hi  corre  ta  sava... 

En  Hoc  no  s'hi  veu  el  color  de  ton  plà, 

el  color  de  ta  mar  soleiosa, 
mes  pura  muntanya  à  ponent  s'allargar, 

amb  son  aigua  en  vessants  remorosa... 


—    yq   — 


L'ivern.  corn  el  sol,  en  la  gran  sercnor, 

fa  lluir  serra  amunt  les  geleres  ! 
Que  es  guapa  ta  plana,  quan  l'or  de  tardor 

va  enjoyant  del  cami  les  moreres  ! 

]  quan  espelleixen  els  blancs  ametllers 

acatats  en  renglera  armoniosa  ! 
Afymoses  i  vinyes,  masies,  vergers, 

amb  el  fons  de  l'Albera  blavosa... 

(Imne  de  T{ossellô.) 

J'imagine  volontiers  que  certains  aveugles,  dont  les  yeux  con- 
nurent jadis  la  joie  suprême  de  contempler  la  nature,  trouvent  le 
même  accent  de  nostalgie  et  d'admiration  résignée  à  parler  des 
radieuses  montagnes  ou  des  floraisons  printanières.  Ils  savent  bien, 
ces  pauvres  aveugles,  que  leurs  regards  ne  peuvent  plus,  hélas  1 
les  atteindre  et  que  pour  eux,  dans  la  nature  visuelle,  tout  n'est 
qu'un  rêve  désormais.  Et  c'est  pourquoi  sans  doute  leur  voix 
chantonne  et  psalmodie  quand  ils  en  parlent  :  la  prière  des  aveu- 
gles nous  rend  plus  cher  encore  le  bonheur  de  voir  et  plus  chères 
aussi  les  choses  que  nous  voyons.  «  Ah  !  si  je  pouvais  au  moins, 
soupire  Adalaisa  dans  1'  «  Escolium  »  de  Joan  Maragall  ÇEnlld), 
—  cette  Adalaisa  qui  est  pur  esprit  dans  l'au-delà  sans  forme  ni 
couleur,  au  pays  des  ombres  errantes,  selon  la  fiction  du  poète  — 
ah  !  si  je  pouvais  au  moins  voir  le  soleil  et  les  montagnes,  les 
choses  qui  resplendissent  sous  le  ciel  bleu  !  (j)  »  «  11  n'est  rien 
comme  de  voir  le  soleil  !  (2)  »  ajoute-t-elle  encore,  et  tout  notre  être 
l'approuve  et  la  suit  en  ce  vaste  et  immortel  désir  de  la  vue  cor- 
porelle !  «  Ils  sont  si  beaux,  les  yeux  au  front,  lorsque  le  regard 
y  brille  ;  il  est  si  bon  pour  l'âme,  amoureuse  de  clartés  de  toute 
sorte,  de  voir  le  monde  et  le  mouvement  de  tout  ce  qui  vit  !  (3)  » 

(1)  Veges  al  menys  el  sol  i  les  montanyes, 
les  coses  resplendint  sota  '1  cel  blau... 

(2)  No  hi  ha  res  com  veure  '1  sol  !... 

(3)  Son  tan  bells  els  ulls  al  front 
quan  hi  brilla  la  mirada, 

fa  tan  bo  de  veure  '1  mon 

per  l'anima  enamorada 

de  clarors  de  tota  mena 

y  el  moures  de  tôt  quant  viu... 


chantait    encore    Maragall    dans   son    a  Oraciô   à   Santa    Llucia  », 
protectrice  des  regards  humains  (Les  Disperses). 

Pour  un  poète  comme  Joseph-S.  Pons,  le  plus  grand  malheur 
ici-bas  serait  assurément  de  perdre  l'usage  de  la  vue,  à  laquelle 
jl  doit  tant  de  hautes  satisfactions  et  des  inspirations  si  pures  ; 
grâce  à  Dieu,  sa  vision  artistique  est  toujours  claire  et  pénétrante. 
-Mais  je  suis  sûr  de  ne  lui  être  point  désagréable  en  disant  qu'on 
aime  à  goûter  chez  lui  la  douceur  du  regret  qui  pleure  dans  la 
voix  des  aveugles.  Tous  ces  paysages,  tous  ces  rayons  sur  la  vie, 
dont  ses  vers  sont  pleins,  ont  quelque  chose  de  lointain  comme 
un  paradis  perdu...  Ah  î  le  lointain  î  que  de  poésie  ne  lui  devons- 
nous  pas  I  L'éloignement  dans  le  temps  aussi  bien  que  dans  l'es- 
pace 1  Sortilège  du  souvenir,  celui  du  cœur  comme  celui  de  la 
vision  !  Et  l'éloignement,  même  dans  la  vision  présente,  n'est-il 
pas,  lui  aussi,  pareil  à  un  souvenir?  11  en  a  les  formes  veloutées 
et  moelleuses  dont  s'enchante  une.  âme  privilégiée...  Les  poésies 
de  Joseph-S.  Pons  sont,  comme  les  souvenirs  ou  les  rêves  (1),  enve- 
loppées d'une  vapeur  subtile  qui,  rendant  la  lumière  moins  crue 
et  moins  vive,  sans  lui  enlever  aucune  de  ses  valeurs,  fait  naître 
les  fécondes  perspectives  et  baigne  surtout  d'on  ne  sait  quel 
mystère  les  plus  simples  réalités.  Presque  tout  le  poème  «  Serres 
de  Canigô  »  mériterait  d'être  cité  à  cet  égard  : 

Serres  de  Canigô,  altures  tant  hermoses, 
dolç  estatge  de  pau, 
damunt  de  les  pinoses, 
en  un  reaime  blau. 

Torres  d'evori  clar,  oh  serres  de  puresa, 

blanques  divinitats, 
retallant  en  el  cel  ivernenc  llur  nuesa, 
protectores  d'estanys  i  pobles  descuydats... 

Guardeu  el  marbre  roig  de  primitives  venes 

d'ont  l'esculptor  treurâ 
la  tumba  d'una  jova  que  planyen  les  sirènes 
o  filles  à  la  font  amb  el  poal  a  la  ma... 

(j  )  11  dit  dans  sa  poésie  «  l'Abril  blanc  »  : 

1  tôt  guardant  els  ulls  obertS, 

vaig  somniant...  etc.. 

Somni  lleuger  !  Vaig  somniant... 


—  81    — 

)  pasturen  l'herbàm,  vora  l'abajonera 

en  aquells  plans  d'amunt, 
Plâ-Guilhem  i  Cadi.  Balatj  i  Prat-Cabrera, 
les  tranquiles  vacades  vingudes  qui  sab  dont. 

]  quan  punteja  l'alba  à  ran  de  la  caréna, 

i  de  la  solitut. 
desquelles  d'escamots  la  comalada  es  plena, 
i  la  cascada  canta  la  pastoral  quietut. 

]  la  pentecostera  de  rosa  flor  pulposa 

abriga  dolçament 
les  abelles  dels  cims  ;  i  la  neu  lluminosa 
guarda  fines  petjades  de  perdius  de  l'ivern... 

De  perdius  de  l'ivern  i  de  cabres  selvatges, 

alçant  el  front  banyut, 
al  pas  de  la  portella  ont  tenen  pasturatges 
i  fonts  de  trenes  d'or,  lluny  de  la  servitut  !... 

C'est  en  partie  pour  cette  raison,  je  suppose,  que  le  regretté 
poète  catalan  Joan  Maragall  (à 'l'endroit  duquel  l'auteur  de  Ttyses 
y  Xiprers  et  d'E/  bon  PeJriç  professe  une  si  touchante  admiration, 
après  avoir  débuté  lui-même  à  l'école  du  grand  Jacinto  Verdaguer) 
trouvait  dans  les  vers  de  Joseph-S.  Pons  «  l'accent  de  l'ineffable  »(i). 
Mais  n'est-ce  pas  là  justement  la  véritable  poésie  ?  N'est-ce  pas 
à  cet  accent  de  l'ineffable  qu'on  reconnaît  les  vrais  poètes  ?  Or 
l'ineffable,  l'intimité  seule  nous  le  fait  découvrir  autour  de  nous 
comme  en  nous-mêmes.  Et  il  conviendrait  d'abord  de  définir  ce 
qu'on  doit  entendre  par  «  intimité  ».  Il  y  a  l'intimité  un  peu  vul- 
gaire et  superficielle  qui  se  contente  d'un  rapprochement  momen- 
tané, en  s'abaissant  aux  êtres  et  aux  choses.  Mais  il  y  a  l'intimité 
profonde  et  de  chaque  instant:  celle-ci  est  une  totale  pénétration, 
et  l'on  en  revient  toujours,  quand  on  est  un  artiste,  comme  de  ce 
puits,  évoqué  par  le  poète  dans  sa  première  préface,  qui  garde  en 
ses  entrailles  mystérieuses  les  eaux  les  plus  pures  de  la  terre. 

11  n'échappe  pas  à  l'auteur  d'Etbon  Pedriç  que  la  chanson  po- 
pulaire porte  en  soi  cet  «  accent  de  l'ineffable  ».  Aussi  la  poésie 
de  Joseph-S.  Pons  représente-t-elle  une  facile  et  heureuse  adap- 
tation de  l'art  savant,    conscient    et   raffiné  à   la  nature  primitive, 

(i  )  Cf.  7{evut  Catalane,   i  5  juin  1911,  «  Carta  d'En  Joan  Maragall  », 


—    82    — 

instinctive  et  innocente  :  on  pourrait  même  dire  qu'il  s'agit,  en 
l'espèce,  d'une  identification  presque  constante  de  cet  art  avec 
cette  nature,  tant  le  don  du  poète  est  ici  sûr  et  plein.  Sa  poésie 
a  quelque  chose  de  mieux  encore  que  la  «  juvénilité  »  ou  l'ingé- 
nuité :  et  c'est,  comme  dans  les  mélopées  du  peuple  catalan,  la 
virginité  de  la  sensation.  Elle  perçoit  le  monde  comme  si  elle 
ouvrait  les  yeux  sur  la  vie  pour  la  première  fois,  ou  comme  si  la 
nature  était  pour  elle  encore  telle  qu'au  premier  jour  de  la  créa- 
tion. Et  ceci,  à  tout  bien  considérer,  ne  vient  pas  contredire  ce 
qui  a  été  dit  plus  haut  de  l'impression  d'éloignement  qu'elle 
produisait  et  qui  suppose  toujours  un  recul  ou  un  passé,  c'est-à- 
dire  déjà  une  durée,  un  commencement  du  «  vieillir  ».  Ses  images 
frappent,  ravissent  et  émeuvent  par  leur  régulière  exactitude,  par 
la  justesse  des  correspondances  qu'elles  éveillent.  Cette  poésie 
«  épouse  »  Véritablement  le  réel  :  jamais  je  n'ai  mieux  compris  ce 
terme  charmant  d'«  épouser  »,  dont  le  langage  courant  a  peut-être 
affaibli  la  belle  force  métaphorique.  L'esprit  rhétorique  et  «  li- 
vresque »  est  presque  absent  d'un  art  pareil,  toujours  vivant  et 
expressif,  allant  en  droite  ligne  comme  un  clair  rayon...  11  faut 
relire  les  strophes  délicieuses  de  la  «  Driade  de  l'oliu  »,  ou  bien 
encore  «.v  Melodia  dels  Morts  »,  «  Infinit  del  Mon  »,  et  surtout 
«  A  un  Eixâm  d'Abelles  »  qui  est  un  chef-d'œuvre  : 

-  Oh  joventut  !  Les  fontanelles 
als  roquissers  relliscaràn, 
Ueugeres...  tôt  murmurejant 
flota  un  feliç  eixâm  d'abelles. 

Somriu  la  porpra  de  les  flors 
demét  dels  côrrecs  de  muntanya. 
El  meu  salut  us  acompanya, 
abelles  del  maig  générés. 

He  sentit  vostra  melodia 
des  de  '1  replâ  del  meu  jardî, 
omplint  tôt  l'aire...  1  avui  en  mi 
l'eixâm  dels  somnis  se  congria. 

s  En  la  delicia  del  matî 

aneu  vos  penjolar,  brunzentes, 

oh  gaspa  alada  i  respkndenta,  , 

â  l'ametller  d'un  hort  vei. 


—  83  — 

Mos  somnis  fan  mes  llarc  viatge  : 
ondejen  à  ran  dcl  cel  rôs 
fins  un  terrer  mes  amorés. 
ont  solen  trobar  llur  hostatge. 

Alla  ont  l'Albera  ha  desplegat 
ses  penyes  color  de  viola, 
l'eixâm  de  mos  somnis  tremola, 
i  flota  en  Taire  il-luminat  ! 

Les  strophes  catalanes  de  Joseph-S.  Pons  ont  l'air  de  faire 
ainsi  partie  de  la  nature  qu'elles  célèbrent.  Le  cœur  simple  et 
familier  du  bon  poète  s'est  associé  si  étroitement  aux  fêtes  inti- 
mes de  la  vie,  il  s'est  abreuvé  avec  tant  de  ferveur  aux  sources 
profondes  de  la  terre,  que  l'harmonie  de  ses  battements  s'est 
réglée  sur  celle  des  choses  qui  l'entourent  et  celle  du  monde  où  le 
créateur  le  fixa.  Le  balancement  du  rythme  obéit,  à  n'en  pas  dou- 
ter, à  celui  des  ondoyants  cyprès  de  la  campagne  roussillonnaise, 
et  chaque  phrase  descriptive  s'épanouit  avec  la  même  délicate  et 
confiante  spontanéité  que  les  pêchers  des  vergers  d'ille.  Et  il  n'y 
a  point,  ici  non  plus,  désaccord,  si  Ton  veut  bien  y  prendre  gar- 
de, entre  le  naturisme  panthéistique  de  ces  transpositions  immé- 
diates et  la  forme  de  rêve  ou  de  souvenir  que  revêt  l'inspiration 
poétique  de  Joseph-S.  Pons. 

Dans  quelle  langue  pouvait-il  chanter  le  Roussillon,  béni  des 
dieux,  aimé  des  muses,  si  ce  n'est  dans  la  langue  même  du  pays? 
Elle  est  pétrie,  en  effet,  de  cette  terre  :  elle  en  a  les  parfums, 
les  couleurs  ;  elle  garde  la  saveur  de  ses  fruits.  Elle  s'infléchit 
aux  contours  des  choses  et  suit  tous  les  frémissements  des  êtres 
animés.  Echo  de  la  vie  ambiante,  elle  en  prolonge  la  musique 
intérieure  ;  émanation  directe  de  ces  paysages,  elle  seule  est 
vraiment  capable  d'en  dire  toute  la  beauté  ;  instrument  naturel 
d'expression  pour  le  peuple  de  ce  coin  de  terre,  elle  seule  peut 
aider  le  poète  à  rendre  fidèlement  son  âme  rustique. 

Peut-être  se  représenterait-on  assez  bien,  en  le  voulant  vrai- 
ment, la  parole  humaine  des  premiers  âges.  Elle  traduisait  spon- 
tanément (et  sans  ces  déformations  ou  ces  confusions  innombrables 
que    la    civilisation,    la    culture,    les    vicissitudes    de    tous    ordres 


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ont  à  la  longue  provoquées)  les  phénomènes  de  la  nature,  les 
mouvements  des  êtres  et  des  choses,  leurs  formes  individuelles  ou 
collectives,  qui  sont  des  mouvements  accomplis  ou  en  train  de 
s'accomplir  ou  bien  encore  en  puissance,  et  représentent  sans 
doute,  pour  le  langage,  l'un  des  premiers  degrés  de  l'abstraction... 
Eh  bien  !  nos  dialectes  populaires  et  régionaux  sont  restés  encore 
tout  près,  aussi  près  qu'il  se  peut,  des  forces  universelles,  con- 
formément à  leurs  origines.  Adam  et  Eve,  dans  le  paradis  terres- 
tre, devaient,  a  dit  un  jour  quelqu'un,  nommer  tout  objet,  tout 
animal,  par  son  vrai  nom,  par  celui  qui  répondait  le  plus  exacte- 
ment à  sa  nature.  Joseph-S.  Pons  a  préféré  choisir  l'idiome  qui  lui 
rappelait  le  mieux  les  conditions  linguistiques  où  se  trouvaient 
placés  de  si  vénérables  ancêtres,  —  lesquels  se  perdirent,  ainsi 
que  l'on  sait,  pour  une  pomme,  ce  qui  prouve  tout  au  moins 
qu'il  y  avait  déjà,  en  ces  temps  éloignés,  quelques  charmants  ver- 
gers comme  on  en  voit  encore  à  111e. 

C'est  dans  ce  sens  donc  que  notre  poète  vient  à  parler,  au 
cours  de  l'une  de  ses  préfaces,  du  «  miracle  »  de  la  langue  cata- 
lane çt  des  «  acquisitions  revivifiantes  »  qui,  par  elle,  sont  obte- 
nues. Et  cette  langue  est,  sans  conteste,  le  «  clair  miroir  de  la 
race  ».  La  magie  de  l'artiste  ne  serait  peut-être  pas  suffisante,  en 
effet,  à  restituer  aux  gens  de  sa  terre  ce  souffle  et  cette  agitation 
qui  sont  la  preuve  matérielle  de  l'existence,  si  l'idiome  ne  l'avait 
aidé  en  cette  œuvre  de  seconde  création.  Loué  soit  donc  un  tel 
idiome,  par  la  vertu  duquel,  autant  que  par  celle  d'un  prestigieux 
talent  d'évocateur,  nous  voyons  vivre  sous  nos  yeux,  «  faisant 
cortège  au  poète  »  ainsi  qu'une  «  masse  chorale  »,  comme  il  se 
plaît  à  le  proclamer  lui-même,  les  types  les  plus  caractéristiques 
du  Roussillon,  depuis  les  pâtres  des  sommets  de  l'Albère  ou  les 
vieilles  femmes  au  seuil  des  portes  jusqu'aux  travailleurs  de  la  terre 
brûlés  par  le  soleil,  et  ces  filles  harmonieuses  dont  la  blanche  et 
légère  espadrille  scande  si  joliment  le  rythme  des  vers  !...  Et  à 
leur  suite,  ou  plutôt  autour  d'eux,  voici  l'accompagnement  des 
animaux  rustiques,  celui  des  objets  intimes  ou  des  éléments  natu- 
rels, qui  peuplent,  soutiennent  et  consolent  sa  solitude.  Mistral 
et  Verdaguer  ont  déployé  de  ces  fresques  animées,  colorées  et 
parlantes,  où  se  dressent  en  pleine  vie,  en  pleine  force,  une  pro- 
vince, un  peuple  entier... 


—  85  - 


*>*• 


Le  recueil  de  vers  précédent,  J^oses  y  Xiprers,  nous  avait  fami- 
liarisés déjà  avec  ces  êtres  et  ces  choses,  avec  ces  paysages  et 
cette  lumière.  On  les  retrouve  encore  dans  El  bon  Pedriç,  et 
c'est  un  plaisir  renouvelé.  Mais  nous  ne  saurions  justement  cacher 
notre  secrète  prédilection  pour  le  premier  des  deux  recueils,  mal- 
gré toutes  les  qualités  de  l'autre.  Nous  l'avons  aimé  et  nous  l'ai- 
mons encore  pour  sa  belle  et  attendrissante  sincérité,  la  plénitude 
aussi  de  son  émotion.  El  bon  Pedriç  est  d'une  forme  plus  parfaite, 
d'un  art  déjà  beaucoup  plus  sûr  de  lui  ;  mais,  dans  le  domaine 
du  sentiment,  J^oses  y  Xiprers  nous  donnaient,  semble-t-il,  une  note 
personnelle  plus  vraie  et  plus  profonde.  Du  cceur,  où  les  poè- 
mes de  ce  recueil  avaient  pris  la  plupart  naissance,  il  y  a  eu,  à  ce 
qu'il  peut  paraître,  ascension  graduelle  vers  l'esprit  :  c'est  celui- 
ci  surtout  qui  préside  aux  jeux  poétiques  d'El  bon  Pedriç.  Le 
cœur  cependant  y  parle  à  ses  heures,  et,  quand  il  y  parle,  on  est 
heureux  de  revenir  par  lui  aux  meilleures  inspirations  du  premier 
ouvrage.  Témoin  cette  admirable  «  Ciariaina  »,  ou  encore  «  Aires 
de  Nadal  »,  et  trois  ou  quatre  autres  poèmes. 

S'estava  quietament  sota  l'espés  fullam, 
duyent  en  el  côs  blanc  mantellina  aixerida... 


Parlava  dels  records  de  la  casa  payral, 

del  masos  de  la  terra  que  tant  lluny  hem  deixada. 

D'un  carrer  d'ombra  i  sol  s'alsava  la  visiô, 
y  amb  el  murmuradiç  d'alguna  font  llunyana, 
hi  havia  en  ses  paraules  la  sabor  catalana. 

Hj  havia  en  ses  paraules  l'encant  de  Rossellô, 
y  l'humil  mantellina  que  li  dava  noblesa 
guardava  de  la  nit  en  son  front  la  puresa. 


Sempre  te  veig,  oh  mort  silenciosa  i  terrosa  ! 
Avives  de  ma  nit  l'amarga  voluptat, 
i  passa  com  estel  cada  peto  sagrat... 


—  86  — 

S'han  callat  els  xiprers  amb  una  pau  divina  ; 
la  nit  es  infinita  en  el  mon  encantat... 

Té  el  seu  repos  august  cada  aibre  rubillat, 

corn  si  portés  el  bés  de  l'immortalitat. 

Oh  nit  clara,  oh  nit  clara,  oh  nit  asserenada  !... 

(Ctariaina.) 

Pourquoi  ne  pas  l'avouer  ?  Nous  préférons  ce  genre  de  vers  aux 
méditations  philosophiques  assez  confuses  et  contradictoires  où  le 
poète,  malgré  de  très  belles  images  et  un  ingénieux  vocabulaire, 
n'arrive  pas  à  bien  dégager  sa  pensée,  et  où  sa  langue  se  montre 
parfois  rebelle  au  point  de  l'abandonner  quelque  peu  çà  et  là. 
C'est  plutôt  le  genre  élégiaque,  à  la  manière  de  la  seconde  partie 
de  l'ouvrage  (elle  porte  le  nom  d'une  femme  aimée,  «  Elena  »), 
ou  le  genre  bucolique  et  familier  à  la  façon  de  la  première,  ou, 
pour  mieux  dire,  c'est  l'intime  pénétration  de  ces  deux  éléments 
qui  caractérise  le  mieux  le  talent  poétique  de  Joseph-S.  Pons  et 
détermine  le  plus  favorablement  son  originalité. 

J'ai  idée  que  le  prochain  recueil,  annoncé  déjà  sous  son  joli 
titre  VEsîel  de  VEscamot,  restituera  au  cœur  tous  ses  droits,  après 
les  épreuves  douloureuses  du  temps  de  captivité.  11  est  devenu 
banal  de  le  dire  :  la  souffrance  engendre  les  grands  poèmes.  Et 
si  l'affreuse  guerre  a  pu  avoir,  malgré  tant  de  cruautés  et  tant  de 
désastres,  tant  de  peines  et  tant  de  deuils,  quelque  heureuse 
influence  sur  le  développement  de  la  poésie,  c'est  assurément  par 
cette  force  mystérieuse  et  cette  tragique  beauté  rendues  aux  cho- 
ses du  sentiment  et  de  la  passion.  A  une  telle  influence  Joseph- 
S.  Pons  n'aura  pas  échappé,  comme  beaucoup  d'autres  ;  et  c'est 
pourquoi  nous  atlendons,  confiants  et  impatients,  cette  troisième 
œuvre  poétique  qui  nous  a  été  promise  par  lui. 

Jean  Amade. 

Nos  morts 

Nous  apprenons  avec  tristesse  la  mort  de  l'illustre  romancière 
catalane  Na  Dolors  Monserdâ  de  Maciâ,  fondatrice  de  la  Société 
d'Etudes  Catalanes. 


UN  FOYER  DE  VIE  CATALANE 

L'Université  de  Perpignan 


Toulouse,   1 9  mars  1919. 
Monsieur  le  Secrétaire, 

La  J^evue  Catalane  du  i5  février  dernier  publie,  en  tète  du 
numéro,  un  très  intéressant  article  sous  la  signature  de  M.  Jean 
Sarrète,  envisageant  une  renaissance  de  l'ancienne  Université  de 
Perpignan,  plus  spécialement  dans  le  cadre  du  régionalisme  et 
des  études  locales.  Je  tiens  à  dire  combien  j'approuve  les  idées 
qui  sont  exprimées  dans  cet  article  et  combien  je  regretterais 
qu'elles  ne  fussent  point  «  réalisées  ».  A  cette  heure  où  la  pensée 
et  l'action  se  renouvellent  en  France,  l'occasion  est  propice  :  il 
ne  faut  pas  la  laisser  échapper. 

Je  partage  entièrement  l'appréciation  de  l'auteur  de  l'article, 
lorsqu'il  estime  que  l'institution  d'un  enseignement  supérieur  cata- 
lan serait  la  meilleure  façon  de  promouvoir  le  culte  de  la  langue, 
de  l'histoire  et  de  la  littérature  de  la  petite  patrie. 

Je  sais  également  que  nos  compatriotes  feraient  fausse  route 
s'ils  songeaient  à  créer  un  tel  enseignement  ailleurs  qu'à  Perpi- 
gnan. Créer  des  chaires  à  Montpellier  ou  à  Toulouse  serait 
exclure  dans  un  cas  comme  dans  l'autre  les  catalanisants  de  l'un 
des  deux  centres  universitaires  qui  ont,  par  leur  situation  géogra- 
phique et  par  leur  histoire,  des  droits  égaux  à  s'intéresser  à  la 
terre  catalane.  Et  de  fait,  ils  s'y  intéressent  tous  deux.  En  outre, 
des  cours  faits  en  Languedoc  n'intéresseraient  que  quelques  étu- 
diants d'origine  roussillonnaise,  alors  que  c'est  le  grand  public 
roussiJlonnais  qu'il  convient  d'atteindre. 

La  vraie  solution  consiste  donc  évidemment  en  une  fondation 
perpignanaise  où  puissent  se  concentrer  les  maîtres  locaux,  et 
ceux  des  trois  centres  universitaires  convergents  :  Montpellier, 
Toulouse,  Barcelone. 

On  peut  concevoir  cette  fondation  soit  comme  création  offi- 
cielle et  conjointe  des  Universités  de  Montpellier  et  de  Toulouse, 


-88-- 

(à  l'instar  de  l'Institut  de  Madrid  créé  par  Toulouse  et  Bordeaux), 
soit  comme  une  Faculté  libre  subventionnée,  par  conséquent  auto- 
nome, et  faisant  appel  aux  concours  auxquels  j'ai  fait  allusion. 

Quelle  que  soit  la  modalité  choisie,  il  faudrait  d'abord  consti- 
tuer un  Comité  d'initiative  comprenant  des  représentants  de  tous 
les  groupements  intellectuels  de  la  province  et  des  diverses  bran- 
ches de  l'activité  sociale  :  politique,  commerce,  agriculture,  etc., 
de  façon  à  placer  l'entreprise  au-dessus  de  toutes  les  considéra- 
tions de  classes  ou  de  partis.  Ce  comité  réunirait  les  concours 
nécessaires   et   les  ressources  indispensables  à  une  «  réalisation  ». 

J'ai  la  conviction  que  Perpignan  pourrait  offrir  un  bel  exemple 
de  décentralisation  universitaire  et  donner  vie  à  un  organisme 
dont  les  résultats  dépasseraient  peut-être  l'attente  la  plus  optimiste. 

Je  serai  personnellement  tout  acquis  à  l'œuvre,  si  l'on  décide 
de  l'entreprendre. 

Agréez,  Monsieur  le  Secrétaire,  l'assurance  de  mes  sentiments 
bien  dévoués.  J.  Calmette, 

Professeur  à  la  Faculté  des  Lettres,  Toulouse. 


Compte-rendu  des  Séances 

Séance  du  10  avril  1919 

Présidence  de  M.  Laurent  Campanaud,  président 

La  séance  est  ouverte  à  8  h.  1/2,  sous  la  présidence  de 
M.  Laurent  Campanaud,  président. 

Jeux  "Floraux.  —  Pour  répondre  à  divers  souhaits  et  ménager  des 
convenances  légitimes,  il  est  unanimement  décidé  que  la  fête  sera 
remise  au  printemps  de   1920. 

Orthographe.  —  L'assemblée  déclare  qu'elle  n'impose  aucun 
système  orthographique.  En  effet,  si  les  Normes  de  l'Institut  d'Es- 
iudis  Catalans  paraissent  conformes  aux  exigences  de  la  philologie 
moderne,  le  maintien  de  l'orthographe  traditionnelle  répond  au 
contraire  à  des  convenances  d'ordre  littéraire,  infiniment  respec- 
tables. L'oeuvre  de  la  Renaissance  littéraire  du  Roussillon  doit 
avoir  assez  d'élan  pour  s'élever  au-dessus  d'un  simple  conflit 
d'ordre  0  formel  ». 


-  89  - 

Vœu.  —  M.  Joscph-S.  Pons  exprime  le  vœu  suivant,  qui  est 
adopté  :  Que  les  réunions  de  la  Société  d'Etudes  Catalanes  soient 
plus  fréquentes,  qu'elles  aient  un  caractère  littéraire,  c'est-à-dire 
qu'il  v  soit  rendu  compte  de  travaux  d'ordre  intellectuel,  et 
qu'il  v  soit  donne  lecture  de  compositions  inédites. 

Maintenance  du  Tfyussitton.  —  Lors  de  la  reconstitution  des 
Maintenances,  la  région  roussillonnaise  a  été  rattachée  à  la  Main- 
tenance de  Languedoc.  Or,  il  est  évident  que  si  cette  fusion  est 
explicable  au  point  de  vue  géographique  et  au  point  de  vue  poli- 
tique, elle  est  arbitraire  et  inefficace  à  d'autres  égards.  Des 
poètes  de  langue  catalane  ne  sauraient  être  représentés  par  des 
félibres  de  dialecte  languedocien  ;  les  directions  littéraires  et  le 
problème  linguistique  ont  un  caractère  éminemment  particulier  en 
Roussillon.  I)  est  donc  désirable  que  soit  créée  une  Maintenance 
particulière  pour  le  Roussillon.  Ainsi,  dans  le  corps  félibréen,  la  lan- 
gue catalane  serait  honorée  à  l'égal  des  autres  dialectes  romans  du 
Midi.  D'autre  part,  s'il  paraissait  que  le  Roussillon  fut  trop  res- 
treint pour  constituer  à  lui  seul  une  c  Maintenance  »,  nous  for- 
mons le  vœu  que  le  Consistoire  du  Félibrige  ne  néglige  pas 
certaines  raisons  de  «  qualité  ».  On  ne  saurait  nier,  en  effet, 
que  la  Maintenance  Catalane  du  Roussillon  serait  le  lien  naturel 
entre  la  Catalogne  latine  et  le  Midi  latin.  Et  ce  fut  l'une  des 
premières  préocupations  des  fondateurs  du  félibrige  que  de  nouer 
cette  fraternité. 

'Félicitations  à  Apeles  Mesires.  —  L'assemblée  vote  l'adresse 
suivante  :  El  socis  de  la  Societat  d'Estudis  Catalans  de  Perpinyâ, 
reunits  en  assemblada  el  dijous  10  d'abril  1919,  envien  les  mes 
corals  felicitacions  al  noble  poeta  Apeles  Mestres  per  sa  poesia 
«  Y  no  heu  passât  »,  amb  la  quai  ha  vingut  â  honrar  les  planes  de  la 
J^evue  Catalane.  Aquesta  poesia,  ont  ressona  magnificament  l'ener- 
gia  de  la  iiengua  catalana,  es  l'admirable  expressiô  del  patriotisme 
francés,  i  ens  plau  â  tots  els  catalans  de  França  qu'un  iHustre 
poeta  de  la  veina  Catalunya  se  n'haji  fet  el  portaveu. 

L'Université  de  Perpignan.  —  M.  Charles  Grando  donne  lecture 
d'une  intéressante  lettre,  que  nous  publions  d'autre  part,  de 
M.  le  professeur  J.  Calmette,  de  la  Faculté  des  Lettres  de  Tou- 
louse ;  l'assemblée  en  approuve  unanimement  les  termes  et  félicite 
l'éminent  professeur. 

—  Lecture  est  également  donnée  d'une  communication  de  la 
Ligue  d'Action  Régionaliste  qui  a  organisé  pour  les  20  et  2  1  avril 
un  grand  congrès  3  Lyon. 

La  séance  est  levée  à   10  h.   1    2. 

Le  Président,   L.  Campanaud. 


>^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^^vïY>rïr'*r'* 


DOCUMENTS  HISTORIQUES 

sur  la  Ville  de  Perpignan 

4^3^»  .    {ST41TE) 

La  maison  de  Sanche,  avant  d'être  achetée  par  les  actionnaires 
de  l'Union,  avait  appartenu  à  une  dame  Thérèse  Baresqut,  qui 
affermait  une  partie  de  l'immeuble,  suivant  le  bail  daté  du  25  fri- 
maire, 5'  année  de  la  République.  «  Nous  sous  signés  avons  con- 
venu ce  qu'il  suit  :  sçavoir  :  je  Etienne  Bartes,  fondé  de  procura- 
tion de  la  Citoyenne  Thérèze  Baresqut,  ballons  en  afferme  une  partie 
de  maison  size  à  la  rue  qui  confronte  avec  le  département  consistant  : 
en  un  res  de  chaussée  —  les  caves  —  écuries  et  magazins  et  dépan- 
dans,  les  apa'rtemens  et  greniers  de  dite  maisson  ma  propriété 
respective  pour  l'espace  de  quatre  années  révolues  pour  le  pris 
et  somme  de  trois  cents  francs  en  numéraire  metalique,  etc.  (i)  » 

Les  actionnaires  et  la  Loge 

Quelques  années  plus  tard,  vers  l'an  12,  l'immeuble  passait 
entre  les  mains  des  «  actionnaires  de  la  maison  de  la  main 
de  fer  ». 

Dès  le  début  de  cette  acquisition,  ceux-ci  affermèrent  aux  mem- 
bres de  la  Loge  «  l'Union  »  ce  local  à  raison  de  six  cents  francs 
par  an,  suivant  reçu  fait  par  M.  Laplante,  caissier  des  action- 
naires, le  1"  messidor,  an  2. 

Voici  une  pièce  authentique  qui  précise  l'époque  de  l'achat  de 
l'immeuble  et  de  l'installation  dans  ce  local  des  membres  de  la 
Loge. 

«  Entre  les  soussignés  Paul  Régi,  Jacques  Serra,  François 
Auberge,  Louis  Lavigne  et  François  Gagnon,  d'une  part,  et  Lau- 
rens  Astruc,  Sauveur  Jaume,  André  Grosset,  Joseph  Picas, 
Antoine  Saisset,  Palégri  aîné  et  Joseph  Laplante  —  chargés  de 
l'administration    de    la    Société   établie   suivant   notre    mandat   du 

(1)  Copie  de  l'acte  authentique. 


—   91    — 

onze  messidor  dernier  pour  la  propriété  de  la  maison 
appelée  Main  de  fer,  d'autre  part,  il  a  été  convenu  ce  qui 
suit  : 

Primo,  ces  derniers  pour  et  au  nom  de  la  Société  qu'ils  repré- 
sentent, baillent  à  titre  de  loyer  et  pour  l'espace  de  dix  ans  qui 
commenceront  le  premier  nivôse  prochain  pour  finir  à  pareille 
époque  de  l'an  vingt-deux,  aux  sus  nommés  la  dite  maison  qu'ils 
possèdent  en  cette  ville  à  la  rue  qui  conduit  de  la  halle 
au  bled  à  l'église  Saint-Jean,  confrontant  avec  MM.  Saint- 
Hilaire,  Serra,  et  autres  aux  conditions  suivantes. 

2*  Les  locataires  jouiront  de  la  dite  maison  en  bons  ménagers 
et  pères  de  famille,  et  la  tiendront  en  bon  état  de  réparations 
purement  locatives,  portes  et  fenêtres  bien  fermantes,  et  devront 
la  rendre  dans  l'état  qu'elle  leur  sera  remise,  et  pour  pouvoir  le 
constater  en  tout  tems,  et  que  la  dite  obligation  soit  remplie,  il 
sera  dressé  un  état  détaillé  des  lieux,  effets,  portes  ferrementes 
et  vitrages. 

3"  Les  bailleurs  étant  tenus  à  faire  les  grosses  réparations,  les 
preneurs  ne  s'opposeront  pas  à  ce  qu'on  les  fasse,  si  pendant  le 
cours  du  bail  les  actionnaires  jugent  à  propos  d'en  faire,  sans 
cependant  rien  changer  à  la  disposition  actuelle  des  appartemens. 

4*  Les  Preneurs  et  les  Bailleurs  se  devront  une  indemnité 
mutuelle  de  la  somme  de  six  cents  francs,  en  cas  d'inexécution  du 
présent  bail...  etc. 

Fait  double  à  Perpignan,   le  trente  frimaire,  an  douze. 

A  cette  époque,  «  les  membres  composant  la  Société  sous  le 
titre  de  l'Union  fermière  de  la  maison  dite  de  la  main  de  fer  »  n'oc- 
cupaient qu'une  partie  de  l'immeuble,  et  avaient  loué  le  rez-de- 
chaussée,  ainsi  qu'il  résulte  du  bail  fait  le  3o  pluviôse,  an  12,  à 
Perpignan  :  «  Entre  les  soussignés,  Antoine  Saisset,'  fils  aîné, 
demeurant  à  Perpignan,  commissaire  nommé  à  l'effet  du  présent 
par  les  membres  composant  la  Société,  en  force  des  délibérations 
de  la  dite  Société  du  9  vend,  et  29  pluviôse,  an   12,  d'une    part. 

Et  M.  Antoine  Cantaloup,  négociant,  domicilié  en  la  dite  ville, 
d'autre  part,  a  été  convenu  ce  qui  suit  : 

1  Le  dit  Antoine  Saisset,  en  sa  dite  qualité,  baille  à  titre  de 
loyer   au   dit    Cantaloup   pour  .l'espace    de   quatre  années  qui  ont 


-  9*  — 
commencé  le  i"  nivôse  dernier,  un  magasin  de  la  dite  maison  ayant 
issue  à  la  vue  et  à  la  confrontation  de  M.  Saint-Jîylaire. 

1°  Le  dit  Cantaloup  s'interdit  la  faculté  d'entreposer  dans  le 
dit  magasin  des  laines  en  suin. 

3°  Pour  le  prix  du  loyer,  le  dit  Cantaloup  s'oblige  de  compter 
chaque  année  à  la  dite  Société  ou  à  son  chargé  de  pouvoirs  la 
somme  de  soixante-douze  francs...  etc. 

Fait  double  à  Perpignan,  le  3o  pluviôse  an  12  (1). 

Cette  Loge,  régulièrement  constituée  sous  le  titre  distinctif  de 
YUnion  à  l'Orient  de  Perpignan  (2),  par  la  G.  L.  de  France,  l'an 
5758  (3),  renouvelée  par  la  dite  Loge,  en  5772  (4),  et  reconsti- 
tuée par  le  Grand  Orient  de  France,  le  2  5  juin  du  3'  mois  58oi  (5), 
s'appela  d'abord  Loge  de  l'Union  (6)  et  voici  une  de  ses  pre- 
mières délibérations  : 

«  En  1802,  exactement  le  5  thermidor,  an  10,  ère  vulgaire,  la 
Loge  de  Saint-Jean,  sous  le  titre  distinctif  de  Frères  Réunis  2 
l'Orient  de  Perpignan,  vint  «  se  joindre  aux  autres  atteliers  déjà 
en  vigueur,  pour  concourir  et  contribuer  par  la  propagation  des 
principes  de  leur  ordre  au  bien  général  de  la  Société  qui  est  le 
principal  but  de  l'Institution  maçonnique.  »  En  conformité  de  la 
Délibération  prise  dans  la  séance  «  du  ij'  jour  du  courant  »,  la 
Loge  des  Frères  Réunis  régulièrement  convoquée  et  fraternellement 
réunie,  s'unit  à  la  R.  L.  de  Saint-Jean,  qui  avait  le  titre  distinctif 
de   YTAnion  et  de  la  Vraie  T\ègle,  l^oges  Sœurs  (7)  :  Là,  on  discuta 

(t)  Timbré  à  o  fr.  2 5.  Rép.  franc.  Adm.  des  Dom.,  de  l'Enreg.  et  du 
Timbre.  Rép.  franc. 

(2)  La  charte  constitutionnelle  de  la  Loge  est  de  1752. 

(3)  ,758. 

(4)  '772- 

(5)  L'immeuble  a  dû  être  acheté  par  les  actionnaires  vers  l'an  1  2,  car  à  ce 
moment,  exactement  le  9  ventôse,  an  12,  il  existe  un  contrat  de  résiliation 
de  bail  d'un  immeuble  loué  à  un  sieur  F.  Jalabert,  consistant  en  une  maison 
et  jardin,  confrontant  avec  l'arsenal. 

(6)  P.  Tastu.  Le  tableau  des  membres  composant  la  Loge  de  Saint-Jean 
sous  le  titre  distinctif  de  l'Union  a  été  imprimé  par  P.  Tastu,  à  Perpignan. 

(7)  11  y  avait,  en  1801  ,  deux  Loges  à  Perpignan  :  la  Loge  de  Saint-Jean, 
sous  ce  titre  distinctif  des  Jlmis  de  la  Parfaite  Union  (lettres  adressées  au 
citoyen  J.  P.,  homme  de  loi  à  Perpignan)  et  la  Loge  des  Arts  de  la  J{égula- 
rité  (lettres  adressées  à  M.  G.,  directeur  de  la  "Poste  aux  Lettres). 


_  93  - 

«  l'harmonie  qui  doit  régner  entre  toutes  les  Loges  et  les  liens 
de  fraternité  qui  doivent  unir  tous  les  membres  d'un  ordre  aussi 
auguste  (i  ).  » 

Il  est  certain  qu'à  cette  époque,  les  membres  faisaient  preuve 
d'une  vraie  justice  :  l'harmonie,  l'union,  la  douce  fraternité  prési- 
daient à  toutes  les  réunions  de  nos  aïeux.  C'était  un  fait  notoire 
que  les  membres  qui  étaient  à  la  tète  de  cette  Société  étaient 
des  personnes  au-dessus  de  toute  considération,  et  universellement 
estimées,  ainsi  que  la  lettre  suivante  en  fait  foi  :  «  Composée 
uniquement  de  propriétaires,  d'hommes  de  loi  et  de  militaires, 
officiers  supérieurs,  la  Loge  de  l'Union  occupe  depuis  iS  ans  un 
superbe  local  qui  lui  appartient  ;  la  plus  parfaite  harmonie  et  la 
plus  grande  sagesse,  fruit  d'une  éducation  distinguée,  ont  toujours 
présidé  à  ses  travaux,  n'admettant  à  les  partager  que  des  person- 
nes qui  présentent  toutes  les  garanties  qu'il  convient  d'exiger  pour 
l'honneur  et  le  bien  de  l'ordre...  (2)  » 

En  1804,  les  deux  Loges  qui  paraissaient  un  instant  s'être  désu- 
nies, se  solidarisèrent  à  nouveau.  Voici  la  pièce  relative  à  cette 
fusion  :  «  La  Loge  de  Saint-Jean  sous  le  titre  distinct  de  la 
Sociabilité  à  la  L.  de  YUnion  :  «  Notre  attélier  qui  a  été  très  sen- 
sible à  l'insigne  faveur  qu'il  a  reçue  du  vôtre,  désirant  y  corres- 
pondre d'une  manière  satisfaisante,  jaloux  de  conserver  et  cimen- 
ter cette  fraternité  qui  est  notre  mutuel  partage,  et  désirant  vous 
en  donner  des  preuves  non  équivoques  pour  le  jour  signalé  de 
votre  auguste  cérémonie,  s'est  fait  un  devoir,  dans  la  séance  du  iS 
du  présent,  de  nommer  pour  être  représenté  à  ce  jour  mémorable 
les  frères  Delpas  Saint-MARSAL,  orateur,  Çagarrjqa,  trésorier  et 
Coste,  secrétaire-adjoint.  Flattés  de  trouver  des  occasions  pour 
pouvoir  vous  donner  des  preuves  certaines  de  notre  amitié,  nous 
n'avons  pas  moins  la  faveur  d'être  avec  les  sentiments  de  la  plus 
tendre  et  sincère  amitié,  etc.  (3)  ». 

En  effet,  quelques  jours  plus  tard,  une  députation  composée  de 
cinq  membres  était  chargée  «  de  présenter  le  tableau  des  membres 

(1)  Cette  délibération  fut  arrêtée  dans  un  lieu  très  éclairé,  très  régulier 
et  très  fort,  où  régnent  l'union,  la  paix  et  l'harmonie,  les  jours,  mois  et  an 
avant  dits. 

(1)  Lettre  du  29'  jour  du  10'  mois  de  1  8  1  q. 

(3)  Lettre  avec  le  timbre  et  le  sceau  admirablement  conservé,  (F.  Llaro.j 


—  94  — 
composant  la  R.  L.  à  la  R.  L.  Saint-Jean  de  l'Union,  comme  un 
gage  assuré  de  la  confraternité   qu'elle   désire  entretenir  avec  le 
R.  AN.  (i)  ». 

Solennités  historiques  célébrées  à  Perpignan  (1804-1850) 

Les  membres  de  YUnion  célébraient  également  les  fêtes  patrio- 
tiques et  affichaient  hautement  leurs  opinions  ;  on  retrouve  dans 
les  archives  des  documents  dans  lesquels  ils  commémorent  le  jour 
fameux  où  Bonaparte,  revenu  d'Egypte,  renversa  le  Directoire. 
C'était  au  moment  où  Napoléon  était  à  l'apogée  de  la  gloire,  où 
la  France  encore  toute  puissante  paraissait  enivrée  par  ses  victoi- 
res et  conquêtes,  et  dominait  l'Europe  entière. 

Dans  une  réunion  générale  et  extraordinaire,  «  les  atteliers  à 
l'unanimité  et  avec  la  plus  grande  satisfaction  »  votent  la  célébra- 
tion de  la  fête.  Voici  l'extrait  de  cette  mémorable  séance  qui  eut 
lieu  à  Perpignan,  le  27e  jour  du  V'  mois  i8o5  (5  brumaire,  an  14)  : 

«  11  a  été  arrêté  que  l'anniversaire  de  la  mémorable  journée 
du  18  brumaire,  qui  a  fixé  la  Paix  dans  l'intérieur  de  la  France, 
serait  célébré  en  Assemblée  Générale  et  extraordinaire,  à  laquelle 
succéderait  un  banquet  fraternel,  durant  lequel  l'attelier  ferait 
retentir  la  voûte  sacrée  du  Temple  de  toasts  pareils  à  ceux  qui 
furent  tirés  à  l'époque  de  la  fête  célébrée  en  commémoration  du 
jour  de  la  naissance  heureuse  pour  la  France  de_  son  Auguste 
Souverain,  Empereur  et  Roi,  dans  sa  séance  du  28  thermidor 
dernier,   16'  jour...  etc.  (2) 

Les  membres  de  l'Union  s'empressèrent  de  répondre  à  ces  pro- 
jets de  manifestation  publique. 

Voici  l'extrait  de  la  délibération  du  17  brumaire,  an   14. 

«  La  Loge  des  Amis  de  la  Vraie  T{ègle,  charmée  de  pouvoir  par- 
ticiper à  la  solennité  d'une  fête  que  doivent  célébrer  tous  les 
Français  et  pour  répondre  à  la  faveur  signalée  qu'elle  a  reçue  de 
la  R.  de  l'Union,    a    nommé    pour    représenter  les  T.  C.  F.  qui 

(1)  Pièce  avec  sceau;  en  tête,  un  éusson  :  Notre  force  est  dans  notre 
union. 

(2)  Pièce  timbrée  et  portant  le  sceau.  En  post-scriptum  :  «  On  aura  la 
faveur  de  vous  faire  passer  une  planche  indicatrice  de  l'heure  et  de  la  quo- 
tité du  banquet. 


-  q5  - 

sont  chargés  de  témoigner  aux  VV.  FF.  qu'ils  visitent  la  sensi- 
bilité dont  la  Loge  est  pénétrée,  l'amitié  qui  l'unit  aux  F.  de 
l'Union,  et  l'attachement  qu'elle  a  voué  depuis  longtemps  au 
grand  héros  qui  a'  rendu  a  la  France  la  splendeur  et  la  gloire  que 
lui  avaient  enlevées  dix  années  de  Barbarie  ». 

En  j8io,  le  24  juin,  une  délibération  semblable  avait  eu  lieu  : 
on  devait  fêter  la  Saint  Jean  qui  était  la  fête  de  l'ordre.  «  Con- 
sidérant, dit  le  registre  (j),  qu'à  cette  fête  se  joint  encore  le 
désir  de  fêter  la  naissance  du  roi  de  Rome...,  que  ce  jour-là  était 
une  des  grandes  fêtes  de  l'ordre  et  une  des  grandes  fêtes  de 
l'empire...,  par  ces  motifs,  la  Loge  déclare  l'affirmative  de  la 
question.  » 

Non  seulement  les  membres  fêtaient  solennellement  les  faits  les 
plus  mémorables  du  commencement  d'un  siècle  où  la  France 
paraissait  devoir  dominer  le  monde,  mais  ils  recevaient  avec 
pompe  des  personnages  de  marque.  Certains  collègues  firent 
cependant  des  difficultés  pour  ce  genre  de  solennités. 

Le  19  mai  1812,  la  Loge  s'assemblait  sous  la  présidence  du 
vénérable  Costa,  et  l'un  des  membres  demanda  à  la  R.  L.  «  de 
prêter  son  local  pour  demain  et  après-demain  à  raison  des  fêtes 
qu'on  se  propose  de  donner  à  M.,  le  premier  président  de  la  Cour 
Impériale  séant  à  Montpellier  ». 

a  La  proposition  est  mise  aux  voix  et,  les  voix  recueillies,  il  en 
est  résulté  ia  délibération  suivante  :  «  Considérant  que  la  Loge 
ayant  déjà  plusieurs  fois  prêté  son  local  pour  des  fêtes,  les  indi- 
vidus qui  désirent  fêter  le  premier  président  seraient  surpris  d'un 
refus, 

«  Que  néanmoins  il  est  inconvenant  de  prêter  ainsi  le  local 
pour  des  fêtes  profanes, 

«  La  Loge  arrête  que  la  fête  qu'on  se  propose  de  donner  à 
M.  .le  Baron  Duveyrier  pourra  l'être  dans  le  local,  le  temple 
excepté,  mais  qu'à  l'avenir  toute  demande  de  pareille  nature  sera 
écartée  par  l'ordre  du  jour...  » 

La  Loge  de  l'Union  ne  resta  point  étrangère  aux  divers  évé- 
nements politiques.  Après  avoir  célébré  la  naissance  du  roi  de 
Rome  et  le  retour   d'Egypte   de    Napoléon  renversant    le    Direc- 

(  1  )  Registre  des  délibérations  du  a:  mai   1809  au  10  juillet  1  8  1  3. 


-  96- 

toire,  le  18  brumaire,  an  vni,  la  Loge  saluait,  en  i83o,  le  nouveau 
roi  Citoyen. 

«  Nous  avons  vu,  nous  avons  appris  avec  la  plus  vive  satisfac- 
tion, mais  sans  étonnement,  l'enthousiasme  qu'avaient  fait  naître 
ces  glorieuses  et  mémorables  journées  de  j83o...  et  l'avènement 
du  7^0/  Citoyen  Louis-Philippe  1"...  » 

A  ce  moment,  les  concours  littéraires  étaient  en  faveur  : 
l'Union  eut  à  coeur  de  faire  '  connaître  que  le  but  de  ces  études 
littéraires  était  fort  louable  :  «  Notre  Société  laisse  en  paix  les 
opinions  et  les  consciences  ;  nous  ne  nous  mêlons  ni  de  contro- 
verses religieuses,  ni  de  discussions  politiques.  Nous  n'avons 
qu'une  loi,  obéir  aux  lois;  qu'une  pensée,  faire  le  bien  ;  qu'une 
bannière,  celle  de  l'humanité  (1).  » 

Les  sujets  de  ces  concours  étaient  fort  intéressants  :  je  puis,  à 
titre  de  curiosité,  en  citer  quelques-uns  :  «  Néron  et  les  mystères 
de  Cérès  Eleusine  :  Lorsque  Néron  vint  en  Grèce,  il  n'osa  pas 
se  présenter  aux  mystères  de  Cérès  Eleusine,  dont  la  voix  du 
héraut  écartait  les  impies  et  les  scélérats  (2).  Dans  un  autre  con- 
cours (1824)  on  donna  comme  sujet  :  «  Néron  repoussé  des  mystères 
d'Eleusis  ».  En  1817,  le  sujet  était  Vlmitation  de  Voltaire,  «  l'apôtre 
infatigable  de  la  tolérance  et  de  l'humanité,  qui  en  1778,  chargé 
de  gloire  et  d'années,  vint  à  Paris  triompher  et  mourir  ». 

Ces  concours  littéraires,  en  dehors  de  l'instruction,  avaient  Un 
double  but  :  «  faire  progresser  les  études  et,  au  point  de  vue 
moral,  abattre  le  despotisme  intransigeant  qui  régnait  sur  la 
France  ». 

De  plus,  ces  travaux  ouvraient  «  une  vaste  carrière  aux  consi- 
dérations morales,  économiques,  législatives,  aux  recherches  his- 
toriques, aux  développements  oratoires  (3)  ». 

11  est  hors  de  doute  que  tous  les  membres  de  l'Union  étaient 
très  secourables,  ainsi  qu'il  résulte  des  innombrables  lettres  que 
j'ai  parcourues  dans  cet  intéressant  dossier.  Aumônes,  souscrip- 
tions abondent  suivant  leur  principe  invariable  qu'ils  mettaient  en 

(1)  Cette  lettre,  relative  aux  travaux  littéraires,  était  adressée  à  M.  A. 
Coll.  Hôtel  de  l'Union  (10  juillet  i8î3).  C'est  la  première  fois  que  les  lettres 
adressées  à  la  Loge  mentionnent  «  Hôtel  de  l'Union.  » 

(2)  Créyier,   Tiist.   des  Emp.,  livre   10,  §  3.  Concours  du  10  juillet  i8î3. 

(3)  Sujet  proposé  au  concours  de  1817  :  Prose  :  Discours  sur  le  Travail. 


—  97  — 
pratique  :  «  Secourir  l'infortune,  consoler  le  malheur,  tarir  toutes 
les  larmes»,  tel  est  le  but  que  tous  les  membres  cherchaient  à 
atteindre  ».  Secours  demandes  pour  des  veuves,  «  sans  état,  sans 
fortune,  accablées  d'une  nombreuse  famille  ».  Secours  pour  un 
officier  «  patriote  distingué,  sans  ressource  ».  Appel  fait,  en  1840, 
à  la  suite  des  inondations  qui  ravagèrent  la  France  et  laissèrent 
«  des  familles  laborieuses,  sans  abri,  sans  vêtements,  sans  pain,  à 
l'entrée  de  l'hiver...  » 

A  partir  de  1840,  il  y  a  peu  d'événements  à  signaler  :  c'est 
l'époque  de  transformation,  la  période  de  transition.  On  adresse 
les  lettres  au  Président  de  la  Loge  de  l'Union  (1),  lettres 
d'affaires,  sans  intérêt. 

Le  14  juin  1840,  M.  Saisset  père,  avocat,  recevait  une  lettre 
relative  au  départ  du  préfet,  M.  Pascal,  nommé  à  la  préfecture  de 
l'Ariège,  qui  quittait  le  pays,  «  plein  de  la  plus  vive  reconnais- 
sance pour  toutes  les  preuves  d'amitié  dont  Perpignan  l'avait 
comblé,  et  bien  touché  du  bienveillant  accueil  qu'il  avait  reçu  dans 
nos  murs  que  je  quitte,  écrivait-il,  croyez-le  bien,  avec  un  cceur 
vraiment  roussillonnais  ». 

Le  10  janvier  184],  le  préfet  et  M""  Hénaut  prient  Messieurs 
les  membres  de  la  Société  de  l'Union  de  leur  faire  l'honneur 
de  venir  passer  chez  eux  les  soirées  du  mercredi  1  3  janvier  et  des 
mercredis  suivans  (2). 

Depuis  cette  époque,  les  lettres  qui  étaient  adressées  depuis 
10  ans  a  M.  Coll,  cadet,  peseur,  sont  envoyées,  depuis  le 
3ojuin  1841,  à  M.  Eugène  Durand  (3),  négociant,  place  Laborie. 

Deux  faire-part  (4)  du  10  février  1 85 1  et  du  2  mai,  mention- 
nent pour  la  première  fois  le  nouveau  titre  l'Hôtel  de  l'Union  : 

«  10  février  1 85 1 .  Les  membres  de  l'Union  prient  M.  et 
M  Blay  de  leur  faire  l'honneur  de  venir  au  bal  qui  aura  lieu  le 
samedi  11  février.   Hôtel  de  l'Union,  rue  de  la  main  de  fer. 

«  1  mai  1 85 1 .  Les  membres  de  l'Union  prient  MM.  de  leur 
faire  l'honneur  de  venir  assister  au  tirage  de  la  Loterie  des  Dames 

(  1  )  Lettres  du  5  mars  1  834,  Méric  à  M.  Saisset.  Lettres  à  M.  M.  Saisset 
père,  avocat,  président  de  la  Loge. 

l     Invitations  adressées  à  Messieurs  les  Membres  de  la  Société  Je  {"Union. 

(3)  Le  frère  du  riche  banquier  Justin  Durand,  ancien  député  des  Pyr.-Or. 

(4)  Imprimerie  de  J.-B.  Alzine. 


-  98  - 
de  Charité,  qui  aura  lieu  le  mardi  6   mai,   à  huit  heures  du   soir, 
Hôtel  de  l'Union. 

Les  Dames  Patronnesses  de  l'œuvre  recevront  avec  reconnais- 
sance les  lots  qu'on  voudra  bien  leur  offrir. 

Les  lots  seront  exposés  dans  le  salon  du  dit  Hôtel,  à  partir  de 
dimanche  4  mai,  de  dix  heures  à  6  heures  de  l'après-midi. 

Madame  de  Lamer  et  Edmond  Jaubert  de  Passa  recevront,  au 
nom  de  l'œuvre,  les  objets  qui  seront  offerts. 


La  Loge  a  disparu,  ne  laissant  que  de  lointains  souvenirs.  Le 
Cercle  resplendissant  qui  remplaçait  l'ancienne  Loge  en  sommeil 
ouvrait  larges  toutes  ses  portes  à  tous  les  bals,  à  toutes  les  céré- 
monies du  monde.  Les  pauvres  de  Perpignan  ne  furent  pas 
oubliés  dans  ces  solennités  mondaines. 

Il  continua  à  prospérer  jusqu'à  ce  jour. 

Pendant  plus  d'un  demi-siècje,  le  Cercle  fut  florissant  :  réu- 
nions intimes  où  régnait,  comme  autrefois,  la  vraie  solidarité 
oarmi  tous  les  membres.  Mais  les  faits  récents  ne  nous  intéres- 
sent plus  ;  ceux  qui  sont  plus  éloignés  ne  nous  laissent  que  d'agréa- 
bles souvenirs. 

Tous  les  Roussillonnais  se  rappelent,  comme  si  on  venait  de  les 
narrer  ou  de  les  écrire,  tous  les  bals  superbes,  toutes  les  fêtes  de 
charité  si  brillantes,  et  les  soirées  de  gala  qui  eurent  lieu  pendant 
plus  de  quarante  ans,  au  milieu  d'un  luxe  éblouissant,  dans  ce 
salon  princier,  où  tout  Perpignan  mondain  avait  accouru. 

En  regardant  cette  maison  moyenâgeuse,  et  en  la  considérant 
dans  son  architecture  intacte,  telle  qu'elle  fut  intégralement  con- 
çue en  i5oy,  nous  y  trouvons  une  sorte  d'attrait  philosophique, 
une  satisfaction  de  curiosité  psychologique,  parce  que  ce  qui 
nous  frappe  et  nous  séduit  dans  cette  œuvre  d'art,  après  plus  de 
quatre  siècles,  ce  que  nous  admirons  dans  cette  expression  artis- 
tique de  la  vie  morale  et  physique,  c'est  non  pas  cette  vie  elle- 
même,  mais  la  grâce  et  l'originalité  avec  laquelle  l'architecte  a 
rendu  l'impression  qu'elle  a  dû  faire  sur  lui  et  la  manière  dont 
il  en  a  compris  toutes  les  manifestations,  en  lui  donnant  ainsi 
l'occasion  d,e  faire  voir  ses  facultés  purement  esthétiques. 

Bien  que   le  plaisir  des  yeux  ne  soit  pour  l'architecture,  selon 


-  99  — 
l'expression  même  de  Véron  (i),  «  qu'un  but  secondaire  dans 
la  plupart  des  cas  »,  l'architecte  de  Xanxo  n'en  a  pas  moins  fait 
oeuvre  d'art  parce  qu'il  s'est  docilement  conformé  aux  conditions 
qui  ont  résulte  du  milieu,  du  climat,  de  la  nature  des  matériaux 
et  de  la  destination  de  l'édifice. 

On  peut  dire,  pour  la  maison  de  Xanxo,  que  la  demeure  du 
riche  mcrcaJier  a  été  appropriée  à  sa  destination,  ce  qui  lui  donne, 
au  point  de  vue  architectural,  du  caractère  :  ce  qui  ajoute  à  la 
beauté  et  à  la  grâce  du  monument. 

Aujourd'hui  la  guerre  sinistre  a  éloigné  plusieurs  membres.  D'au- 
tres cercles  plus  nouveaux   ont   détrôné  celui-ci  :  noblesse  oblige. 

Reste  l'ossature  :  tout  ce  qu'il  y  avait  de  vivant,  d'intelligent 
n'est  plus. 

Mais  le  joyau  demeure  tel  qu'il  est,  malgré  sa  façade  mala- 
droitement mutilée.  Nous  devons  espérer,  —  et  tous  les  action- 
naires avec  moi  formuleront  ce  vceu,  —  que  l'heureux  acquéreur 
de  cet  immeuble  saura  conserver  à  ce  bijou  toute  sa  parure  que 
plus  de  quatre  siècles  ont  pieusement  respectée,  comme  si  une  loi 
prescrivait  que  le  beau  est  intangible,  inviolable,  parce  qu'il 
charme  nos  regards  toute  la  vie,  et  que  l'on  s'incline  toujours 
devant  la  beauté  architecturale  qu'on  admire  sans  cesse  avec  une 
sincère  émotion. 

Henry  Aragon. 

Ce  27  février  1919. 

())  E.  Véron,  L'Esthétique,   1878,  chap.  n,  p.  219. 

Quelques  noms  de  plantes  #  synonymes 

Catalans-Français  çr  Français-Catalans 

**è%3*  (SUITE) 


dactyle.  —  cucurulla  (de  la  Mare  de  Deu),  capadella. 
daphné'gafOU.  —  tindarell,  tintorell,  mata-poils,  astruc,  tell,  tey. 
dattier.  —  voir  palmier. 


lOO 


datura.  —  pudent,  herba  de  les  talpes,  herba  taupera. 

dauphinelle.  —  espuela. 

dentelaire.  —  herba  cremadora. 

digitale.  —  didalera. 

dompte  venitl-  —  herba  del  bri,  herba  de)  cor. 

doradille.  —  dauradilla,  doradella,  falguera  de  roca. 

dOUCe  amère.  —  voir  morelle. 

E 

échalotte.  —  escalunya,  ceba  escalunya. 

églantier.    —    gavarrera,    garravera,    gavarra,     despulla-belitres, 

roser  de  marge,  tapa-cul. 
ellébore.  —  baladre,  ballestera,  cebadilla,  herba  vomitoria. 
»         fétide.  —  marxivols,  roser  de  Nadal,  peu  de  llop. 
»  blanc  —  veratre. 

endive.  —  escarola. 
épeautre.  —  espeltra. 

épervière.  —  herba  del  cancer,  orella  de  rata. 
épiaire.  —  herba  de  la  feridura,  té  bort. 
épilobe.  —  herba  de  Sant  Antoni. 
épinard.  —  espinac. 
épine*vinette.  —  berberis,  coralets. 
érable.  —  acs,  euro,  auru,  blada,  blasera,  azerà,  acer. 
euphorbe.  —  lletresa,    lletatresa,    croca,    caga-moixa,    carmuixa, 

mal  d'ulls,  tarrec. 


fenouil.  ■*•*■  fenoll,  fonoll. 

fenugrec.  —  trigonella,  banya  de  cabre. 

férule.  —  canya-ferla. 

fétuque.  —  gispet,  xispet. 

»         élevé.  —  fenas. 
fève.  —  fava,  favo. 
ficaire.  —  voir  chélidoine. 
ficoïde  glaciale.  —  herba  de  cristall. 
figuier.  —  figuera. 

»        de  Barbarie.  —  figuera  de  mahô,  de  moro,  d'india. 

folle  avoine.  —  cogula,  cugula. 


—     101     — 

fougère  —  falguera. 

fragOfl.  —  voir  houx  (petit). 

fraisier.  —  maduixera,   fraga,   fraula,  araques. 

framboisier.    —    corsera,    gerdera,  jordô,  morera  de  Sant  Joan, 

gers,  gcrr,  gerd. 
frêne.  —  freixe,  fraxina. 
fumeterre.  —  fumosterra,  fumaria,  galleret,  colomina,  herba  del 

colom. 


gaillet    —  apegalôs,  gafetets,  sannua  longa. 

galactite.  —  cardet  bort. 

garance.  —  roja,  grana,  gransa,  grans. 

garOU.  —  voir  daphné. 

gattilier.  —  aloc,  barde,  herba  de  les  xinxes. 

gailde.  —  gauda,  herba  de  la  gauda,  galda,  gualda. 

genêt-  —  ginesta,  escoba. 

»      lentisque.  —  llitja. 

>  velu.  —  ginestella,  balec,  balac. 
genévrier.  —  ginebre,  sabina,  sivina. 
gentiane.  —  gensana,  llensana. 

géranium.  —  gerani,  agulles,  bec  de  grua,    retorcits,    forquetes. 
germandrée.  —  alzineta,    camadrea,    camedri,    herba    daufinera, 

herba  de  Sant  Domenec. 
geSSC  —  guixa. 
giroflée.  —  violer. 
glaieul-  —  bruyol,  canissos,  espases. 

>  des  moissons.  —  Hiri  de  blat,  contell  vermeil, 
gland    —  aglan,  bellota,  ballaruga. 

globulaire.  —  fuxarda,  fusellada,  regollada,  ascallades. 

glouterOD.  —  voir  bardane. 

gOUet-  —  candela,  sarriasa,  gujol,  grujol. 

grateron.  —  voir  gaillet. 

grémil-  —  granadura,  mill  del  sol. 

grenadier.   —  manglaner,  mangraner,  magraner. 

groseiller.  —  groseller,  agrason,  riber,  ribes. 

gueule  de  loup.  —  voir  muflier. 

guimauve.  —  malvi,  frcgadé.  (^  suivre) 


La  seigneurie  #  la  paroisse  de  Serralongue 

•Zfy:^  {SUITE  er  TTN) 

A  quarante  pas  environ,  au-dessus  du  cimetière  et  de  l'église, 
se  trouve  une  position  remarquable  qui  domine  tout  le  village. 
Evidemment  c'est  sur  ce  puig  que  se  dressait  la  tour  rasée  en  1270. 
On  ne  sait  en  effet  pour  quel  motif  le  seigneur  de  Serralonga 
avait  fait  raser  une  tour  construite  par  ses  ancêtres  dans  leur 
seigneurie  et  dont  le  suzerin  exigeait  plus  tard  la  reconstruction  (1  ). 

On  a  construit  sur  ce  puig  un  édifice  carré  possédant  quatre 
ouvertures,  cet  édifice  porte  le  nom  de  conjurador.  Le  curé  y 
récitait  les  quatre  Evangiles  lorsque  l'orage  descendait  de  la 
montagne  et  menaçait  d'emporter  les  récoltes.  Presque  toutes  les 
églises  de  la  montagne  et  de  la  plaine  avaient  autrefois  un  conju- 
rador. 

VTU.  —  JVom  des  visiteurs  apostoliques  venus  à  Serralongue 

]"  20  mars  1645,  Grau,  docteur  en  théologie. 

2'  i8  mars  1648,  Gabriel  Parés,  chanoine  d'Elne. 

3*  Mgr  Louis  Habert  de  Montmor,  évêque  d'Elne. 

4*  22  octobre  1686,  le  docteur  Jean  Noguer,  curé  de  Néfiach. 

5*  François  Codina. 

6'  9  février  1689,  Boria. 

7*  i5  octobre  1692,  le  domer   Pujol,  «  prêtre  et  archiprêtre  ». 

8°  i5  septembre  1697,  Mgr  Jean  de  Flamenvila,  evêque  d'Elne. 

90  20  mars  1703,  Jean  de  Roja,  docteur  en  théologie. 

io"  22  septembre  J721,  Charles  de  Ortega,  chanoine  d'Elne, 
«  sede  episcopal  vacant  ». 

il"  9  mai  1727,  Mgr  de  Gramont  de  Lanta,  évêque  d'Elne. 
Voici  son  procès-verbal  de  visite  :  «  Nos  don  Joan  Mathias  de 
Barthélémy  de  Gramont  de  Lanta,  per  la  gracia  de  Deu  y  de  la 
Sta  Sede  apostolica  bisbe  d'Elne,  habem  vistos  y  examinats  los 
comptes  donats  per  los  obrers  de  Serrallonga  de  l'any  1721  fins 
lo  any   1726,  losquals   habem   trobats  bé   y   degudament   passats  : 

(j)  Alart,  'Notices  Historiques,  11"  partie,  p.  161. 


-    io3    - 

per  ço  les  aprobam  y  definim  posant-hi  nosrre  décret.  Fet  en  lo 
curs  de  nostra  visita  als  c>  maitg  1727-  Ordenam  als  debitors  de 
l'obra  de  la  iglesia  de  pagar  dins  un  mes  los  deutes  tenen  à  dita 
obra,  tant  los  débitons  cum  los  demes  deutes,  à  pena  de  desobe- 
diencia.  Manam  al  senor  batlle  y  demes  officiais  de  tenir  la  ma  à 
la  executio  del  présent  décret  per  obligarlos  à  pagar  dins  lo  dit 
terme  ». 

Le  même  évèque  revint  à  Serralongue  quatre  ans  après,  le  ;o 
septembre  1731.  Cette  fois,  il  approuve  simplement  les  comptes 
trouvés  exacts.  Au  mois  d'août  1736,  il  se  trouvait  à  Saint-Laurent 
de  Cerdans.  Comme  les  marguiiliers,  en  fonctions  l'année  1731, 
avaient  seulement  rendu  compte  de  leur  administration,  le  prélat 
les  approuva,  mais  il  enjoignit  aux  marguiiliers  des  années  1732, 
1733,  1734,  1735,  de  régler  leurs  comptes  en  présence  du  curé 
sous  peine  d'excommunication.  Le  10  mars  1741,  le  même  évèque 
était  de  nouveau  en  cours  de  visite  a  Serralongue.  11  administre 
le  sacrement  de  confirmation. 

\i'  1744,  le  domer  Costa,  archiprètre. 

1  3'  1  7  août  1746,  Mgr  Charles  de  Cardevac  de  Gouy  d'Avin- 
court.  Le  4  août  1756,  cet  évèque  confirme  à  Serralongue  deux 
cents  personnes.  Voici  le  nom  de  quelques  personnes  qui  furent 
confirmées  :  Ferriol  Trescases,  Michel  Trescases,  Jean  Llensa, 
Michel  Poch,  Jacques  Vilanova,  François  Coderch,  Thomas  Cicre, 
Pierre  Panicot,  Michel  Panicot,  Gabriel  Panicot,  François  Villa- 
longa,  Joseph  Villalonga,  Baptiste  Llensa,  Jean  Llensa,  Margue- 
rite-Anne Surroca,  Rose  Hours,  Rose  Poch,  Marie  Poch, 
Thérèse  Poch,  Thérèse  Vilanova.  Marie  Coderch  mère,  Marie 
Coderch  fille,  Thérèse  Cicre,  Rose  Panicot  (j). 

IX.  —  Pierre  Talrich 

Pierre  Talrich  naquit  à  Serralongue  en  1810.  Privé  de  bonne 
heure  de  ses  parents,  il  quitta  son  village  natal  et  se  rendit  à 
Paris.  Il  travailla  avec  ardeur  et  acquit  en  peu  de  temps  une 
belle  situation.  Il  fonda  le  cercle  Lo  Pardal,  où  ks  enfants  du 
Roussiilon  se  réunissaient  pour  parier  leur  langue  maternelle.  Au 
mois  de  décembre   1 885 ,   il  reçoit  à  la  gare  l'Tzstudianiina  Calalana 

(1)  11  nrrest  doux  de  remercier  M.  l'abbé  Michel  Ferrer  qui  a  daigné  me 
communiquer  des  renseignements  précieux. 


—    104    — 

et  la  Cobla  des  Malies  qui   venaient   assister  à  la  fête  du  Soleil:  il 
leur  souhaite  la  bienvenue  de  façon  exquise  : 

Vosaltres  que  veniu,  ab  tota  l'armonia 
Del  nostre  bel  parlar,  nos  portar  l'alegria, 
Infants  de  Perpinya,  vos  obrim  nostre  cor  : 
Pel  nostre  Rossello  es  tôt  omplert  d'.amor. 

Pierre  Talrich  composa  en  vers  catalans  un  ouvrage  intitulé  : 
T^ecorts  del  Ttysselh.  Ces  strophes  émues,  pleines  de  mélancolie, 
de  lumière  et  de  fraîcheur,  chantent  avec  amour  le  sol  natal  : 

Lluny  de  tu,  Vallespir.  lo  desti  m'exila. 

Fa  mes  de  cincuanta  anys,  à  l'altra  extrem  de  França, 

Hont  tinch  mitj  olvidat  ton  sonant  catalâ. 

Digas,  conta  al  teu  fill,  oh  !  ma  serra  estimada, 

A  ton  fil)  qui  't  sopira  en  sa  presô  del  Nort, 

Lo  que  t'ha  succehit  entre  eixa  temporada  ; 

De  tos  monts,  de  tas  valls,  desperta'm  lo  recort. 

Lo  lladoner  (1)  del  meu  vilatge 

(Quan  jo  vaig  naixer  era  molt  vell  !) 

Ha  conservât  tôt  son  brancatje, 

Hi  fa  cada  any  son  niu,  l'aucell  ? 


Digas,  tas  torres  esquerdadas, 
Massana,  Mir,  Cos  y  Cabrens, 
Han  apagat  las  flameradas 
Que  movian  tos  somatens  ? 

Vallespir, 

Dois  sospir  ! 

Quina  alegria 

Mon  cor  somia 
Qu'un  dia  hauré  per  darrer  llit 
Quatre  lloses  del  teu  granit. 
Si    m  nega  Deu  eixa  esperansa, 
Si  sota  un  altre  cel  de  Fransa 
Mon  jorn  suprem  ha  de  venir, 
De  mi  conserva  eix  sovenir  : 
No  moriré  pas  de  vellesa, 
Ay,  no  !  moriré  de  tristesa, 

Vallespir, 

Dois  sospir  ! 


Pierre  Talrich  mourut  à  Paris  le  28   février    1889.   Son  buste, 
œuvre  d'Alexandre  Oliva,  est  au  musée  de  Perpignan. 

Joseph  Gibrat. 

(1)   Cet  arbre  se  trouve  toujours  sur  la  place  publique  de  Serralongue. 
Le  Gérant,  COMET.  —  Imprimerie  Catalane,  COMET,  rue  de  la  Poste,   Perpignan 


13'  Année.   N'  151  15  Mai  1919 

Les    Manuscrits   non   inscrct  ^h^    —     .    »    W   <   W  \ 

ne  «ont  Das  rendu»  B^T    m^      ^M     I  m^ 

Les    ArticJci    Darus  Clans   la    Rc\ut  #"  "*     ^k     ^T^    j^     1  J%    TWl     ■"! 

n'engagent  que  leurs  auteurs  ^ba^A    A    A    4    &AiA    •!  1   ^   / 

Organe  de  la  Société  d'Etudes  Catalanes.  --  Cotisation  :  10  fr.  par  an 

la  Vie  Catalane  en  Roussillon 

Au  souffle  du  «  Principe  des  Nations  »  qui  vient  de  sur- 
gir des  pays  de  l'Entente  victorieuse,  une  vague  de  régio- 
nalisme a  subitement  envahi  la  France.  Depuis  longtemps 
déjà  ce  flot  décentralisateur  bouillonnait  au  sein  de  notre 
Midi,  mais  à  l'état  latent,  sans  pouvoir  éclater  au  dehors. 
Les  événements  du  jour  ont  favorisé  son  irruption.  Il  a 
ainsi  gagné  le  Nord,  puis  les  autres  provinces  de  la  France, 
pareil  à  ces  grands  courants  de  civilisation  chrétienne  qui, 
dès  le  premier  siècle  de  notre  ère,  du  pays  des  «  Saintes- 
Marie  »  et  par  la  voie  du  Rhône,  montèrent  vers  le  Nord, 
se  répandirent  à  travers  toutes  les  Gaules  et,  sur  le  monde 
romain  et  barbare,  instaurèrent  une  vie  nouvelle,  malgré 
les  préjugés  de  l'époque. 

11  ne  semble  pas  que,  sous  la  pression  de  l'opinion  géné- 
ralement acquise  aux  doctrines  régionalistes,  les  frontières 
artificielles  qui  séparaient  nos  provinces  de  même  race,  et 
les  préjugés  d'avant-guerre  qui  implacablement  s'opposaient 
à  l'indépendance  de  ces  divers  pays,  puissent  désormais 
résister  au  flot  montant  des  doctrines  régionalistes.  D'autant 
que  celles-ci  ont  des  chefs  convaincus  dont  les  disciples, 
non  moins  résolus,  sont  aujourd'hui  légion.  Le  Roussillon 
s'honore  pour  sa  part  de  se  ramifier  à  ces  groupements  ; 
il  compte  dans  son  sein  une  belle  phalange  d'intellectuels, 
désireux  de  faire  triompher  leurs   légitimes   revendications. 


—   io6  — 

Les  pouvoirs  publics  s'en  préoccupent  et  semblent  vouloir 
donner  satisfaction  à  de  telles  aspirations.  Sans  doute,  il  ne 
s'agit  encore,  dans  les  projets  officiels,  que  de  questions 
économiques.  Mais  l'idée  est  en  marche,  elle  fera  son 
rapide  chemin,  si  les  organisations  provinciales  savent,  dans 
les  limites  du  droit,  mener  leur  pacifique  combat. 

Que  demandent-ils  donc  les  régionalistes  d'aujourd'hui 
et  que  demandent  ceux  du  Roussillon  ?  Ils  ne  réclament  rien 
autre  chose  que  le  droit  sacré  de  vivre  et  de  faire  rayonner 
au  grand  jour,  librement,  légalement,  leur  antique  Vie 
provinciale,  avec  tout  ce  qui  en  constitue  le  patrimoine  par- 
ticulier, c'est-à-dire  la  langue,  les  coutumes,  les  usages,  Jes 
traditions,  l'histoire,  l'art,  les  libertés,  les  franchises. 

Tel  fut  le  rêve  des  premiers  Félibres  de  Provence.  Tel 
est  encore  celui  de  tous  les  Verdaguer,  de  tous  les.  Pasto- 
relleh  du  Roussillon.  Leur  Félibrige  —  comme  l'a  défini 
Mistral  (i)  —  n'a  d'autre  but  que  de  conserver  longtemps 
à  la  Terre  Catalane  de  France  «  sa  langue,  son  caractère, 
sa  liberté  d'allure,  son  honneur  national  et  sa  hauteur  d'in- 
telligence ».  Ce  serait  «  sacrilège  »  que  de  toucher  à  leurs 
coutumes,  à  leurs  franchises,  à  leurs  traditions.  Us  veulent 
que  toujours  leur  noble  langue  catalane  se  maintienne,  se 
parle,  soit  enseignée  en  terre  roussiJlonnaise,  attendu  que 
leurs  ancêtres  «  se  sont  librement,  mais  en  toute  dignité, 
fondus  dans  la  généreuse  France,  c'est-à-dire  en  réservant 
leur  langue,  leurs  coutumes,  leurs  usages».  Il  ne  s'agit 
donc,  d'après  leur  programme,  que  d'un  régionalisme  admi- 
nistratif, intellectuel,  artistique  et  littéraire,  économique  et 
social.  Nulle  arrière-pensée  de  séparatisme  ne  saurait  y 
trouver  prise.  Comme  Mistral  (2),  les  Catalans  du  Rousil- 
lon  aiment  la  France  tout  court,  à  l'égal  de  leur  petite  patrie. 

(1  )  "Discours,  p.   1 1 . 

(2)  Almanacb  provençal  de  1  855. 


—   107  — 

Ils  sont  bien  Français  depuis  1659:  «  Nos  pères  —  disertt- 
ils  avec  le  grand  poète  —  se  sont  alors  librement  don/iés  à 
la  France.  Voilà  qui  fut  à  coup  sur  une  bonne  chose.  Puis- 
sions-nous le  demeurer  toujours  et  toujours  le  drapeau 
français  resplendir  sur  toute  la  terre  !  » 

J'aime  ma  province  plus  que  toute  autre  province  ; 
J'aime  mon  village  plus  que  tout  autre  village  ; 
J'aime  la  France  plus  que  tout. 

Voilà  le  cri  du  cœur  de  tout  bon  catalan  de  France  ! 
Si  nul  d'entr'eux  ne  vise  à  menacer  la  patrie  française 
indivisible,  s'iJs  sont  fiers  et  respectueux  de  cette  belle 
unité,  qu'ont  réalisée  nos  anciens  rois  de  France  en  ratta- 
chant notre  cher  Roussillon  —  avec  ses  divers  antiques  com- 
tés :  Vallespir,  Confient,  Cerdagne  —  à  la  France,  les 
Catalans  roussillonnais  ne  peuvent  s'empêcher  de  déplorer 
comme  nçfaste  toute  «  guerre  radicale  et  systématique  à 
«  toutes  les  organisations  sociales  traditionnelles,  faite  au 
«  profit  d'une  prétendue  émancipation  de  l'individu,  laquelle 
c  n'est  en  réalité  pour  lui  que  la  perte  de  ses  soutiens  natu- 
«  rels  et  laisse  affaibli,  désorienté,  au  milieu  d'une  société 
«  énorme,  sans  cohésion,  dispersée  infiniment,  l'affaiblisse- 
«  ment  de  la  famille  et  de  l'hérédité  par  l'individualisme  du 
«  Code  civil,  la  méconnaissance  des  variétés  naturelles  de  la 
«  France  et  des  besoins  variés  qui  y  correspondent,  nivel- 
«  lement  général  de  la  vie  sous  l'autorité  d'un  Etat  con- 
«  traire  à  tout  les  milieux  où  règne  un  esprit  d'indépen- 
«  dance  et  aux  traditions  qui  l'entretiennent»  (1). 

Joseph  de  Maistre,  Auguste  Comte,  Le  Play,  Proudhon, 
Taine,  Renan  et  bien  d'autres  grands  critiques  ont  exprimé 
les  mêmes  idées  à  ce  sujet. 

Levés  ces  obstacles,  la  nation  s'accroîtrait  elle-même  de 
la  vie  intense  qu'elle  permettrait  à  chacune  de  ses  pro- 
vinces-filiales de  vivre  ainsi,  dans  les  limites  de   leurs   fron- 

(1)  Mistral,  par  Pierre  Lasserre,  p.   1  5 3 . 


—    »o8  — 

tièrcs  particulières  ;  elle  bénéficierait  largement  des  fruits 
de  libre  expansion  qu'elle  leur  permettrait  de  prendre  dans 
tous  les  domaines;  elle  s'enrichirait  de  toutes  les  lumières, 
de  toutes  les  gloires  qui,  dans  chaque  petit  pays,  se  mon- 
treraient au  grand  jour. 

J'ai  écrit  la  Vie  Catalane  en  J^oussillon  et  non  point  «  en 
Espagne  »,  ou  «  en  Catalogne  Grande  »,  et  c'est  à  dessein, 
car  il  apparaîtrait  à  plusieurs  que  les  aspirations  des  Cata- 
lans d'Espagne  différeraient  sensiblement  de  celles  des 
Catalans  de  France. 

Qu'il  y  ait  en  Catalogne  espagnole  des  catalanistes  sépa- 
ratistes, travaillant  à  rendre  leur  Province  absolument 
indépendante  de  leur  gouvernement  de  Madrid,  nul  fran- 
çais n'y  contredira.  C'est  affaire  à  eux. 

Quant  aux  Roussillonnais,  ils  sont  trop  fiers  et  se  trou- 
vent trop  bien  d'appartenir  à  leur  si  nobie  et  si  «  doulce  » 
France,  pour  que,  un  seul  instant,  il  leur  vienne  en  pen- 
sée de  la  vouloir  renier,  et  de  tenter  jamais  de  s'en  déta- 
cher par  la  violence.  Les  liens  qui  les  unissent  à  leur  mère- 
patrie  sont  d'une  telle  force,  qu'ils  empruntent  à  la  péren- 
nité des  siècles  leur  infrangible  solidité.  Ces  liens  ne  vont- 
ils  pas  se  prolongeant  dans  l'histoire  jusque  par  delà  la  date 
diplomatique  de  1659?  C'est  une  chaîne,  dont  le  premier 
anneau  est  marqué  au  coin  de  son  auteur,  l'immortel  Char- 
Jemagne  ;  les  autres  portent  chacun  l'empreinte  d'un  de  nos 
rois  de  France,  depuis  Louis  le  Débonnaire  jusqu'à 
Louis  XIV.  A  l'illustre  Charlemagne,  la  Catalogne  doit  son 
éclosion  dans  le  monde  de  l'histoire.  La  nationalité  catalane 
ne  connaît  point  d'autres  origines  ;  celles-ci  se  confondent 
avec  l'annexion  du  Nord  hispanique  à  la  couronne  de 
France.  Cette  annexion  s'était  opérée  sans  violence,  sans 
heurt,  au  gré  des  nouveaux  sujets  de  France,  grâce  au 
génie  plein  de  sagesse  du  grand  empereur.  Aussi  bien, 
mieux  que  l'ambassadeur  d'Espagne  à  Louis  XIV,  les  Cata- 


1  OC)     — 

lans  des  Marches  espagnoles  auraient-ils  pu  dire  au  redou- 
table vainqueur  des  Maures  :  «  Les  Pyrénées  sont  fondues, 
puisque  de  l'Ebre  à  l'Elbe  vous  avez  fait  se  lever  le  soleil  de 
France.  »  Si  grande  fut  la  puissance  et  si  continue  la  diplo- 
matie des  successeurs  de  Charlemagne,  que,  sauf  de  rares 
intermittences,  les  Pyrénées  ne  se  redressèrent  plus  entre 
l'Espagne  et  la  France  jusqu'à  la  date  du  traité  des  Pyré- 
nées, 1659.  Politiquement  et  religieusement,  la  Catalogne, 
tout  en  conservant  ses  privilèges  particuliers,  ses  usages  et 
ses  traditions,  était  demeurée  jusqu'à  cette  dernière  date 
annexée  à  la  France,  ou  du  moins  rattachée  à  sa  monarchie 
par  l'hommage  de  vassalité  que  les  rois  d'Aragon,  comme 
ses  anciens  Comtes,  durent  prêter  au  roi  de  France. 

Voilà  un  point  essentiel  d'histoire  que  nos  amis  d'Espa- 
gne connaissent  assurément,  mais  qu'ils  ne  devraient  point 
perdre  de  vue.  Ce  ne  sont  donc  point  les  Catalans  d'Espa- 
gne qui  seraient  bien  venus  à  revendiquer  l'annexion  du 
Roussillon  à  leur  Province.  Mais  c'est  plutôt  nous,  Rous- 
sillonnais,  qui  serions  dans  la  logique  de  l'histoire,  si  nous 
réclamions  l'annexion  de  toute  la  Catalogne  espagnole  à  la 
France,  telle  que  la  réalisa  jadis  notre  puissant  Charlema- 
gne. Nous  ne  nous  laissons  point  cependant  hanter  par  de 
tels  rêves.  Nous  n'y  pensons  aucunement. 

Quoiqu'il  en  soit,  tous.  Catalans  d'Espagne  en  Espagne, 
Catalans  de  France  en  France,  travaillons  ardemment,  au 
mieux  des  intérêts  de  notre  respective  patrie,  à  réaliser 
l'inaltérable  fraternité  de  la  France  et  de  l'Espagne,  ces 
deux  nations-sœurs  que  jamais  l'ombre  d'un  désaccord  ne 
devrait  séparer.  Frères  par  la  race,  par  la  langue  et  par  la 
foi,  en  deçà  comme  au-delà  des  Pyrénées,  les  uns  et  les 
autres  nous  pourrons  ainsi  mieux  faire  revivre,  dans  nos 
Provinces-sœurs,  l'antique  Vie  Catalane  vers  laquelle  vont 
nos  communes  aspirations  de  catalanistes,  loyaux  et  sincères. 

Jean  Sarrkte. 


Un  Poêla  Canigonenc 
*** 

Mossén  Jampy  :  Lliris,  J{oses  y  Violes 

Deia  Mossén  Jacinto  Verdaguer  en  una  de  ses  Hêtres  al  senyor 
Agusti  Vassal,  aquelles  Hêtres  tant  reveladores  de  sa  religiosat 
angelisada  :  «  ara  mateix  estic  escribint  una  poesîa  per  cada  dia 
del  mes  de  Maria,  simbolisada  6  recordada  en  una  flor,  que,  si  â 
Deu  plau,  publicaria  l'any  vinent,  ab  lo  titol  de  «  Flors  de  Maria  », 
iHustrades  per  un  nostre  primer  dibuixant  i  pintor  de  flors,  senyor 
Alexandre  de  Riquer.  »  Tal  propôsit  ha  tingut  i  ha  réalisât 
Mossén  Marti  Jampy,  rector  de  Labastida,  en  una  régie  prou 
enlairada  i  purificada  pel  vent  del  nevâs.  Ha  seguit  la  serra  amb 
sa  desqueta  de  vims  i  ha  aplegat  sos  «  Lliris,  Roses  y  Violes  », 
cullits  en  les  muntanyes  de  Canigô  y  oferts  â  Maria  Santissima. 
]  els  présenta  l'estimât  Pastorellet  de  la  Vall  d'Arles,  amb  un 
prôlec  ben  digne  de  son  titol  de  majorai. 

Per  primera  vegada  la  substancia  poética  d'en  Verdaguer  forma 
l'esperit  d'un  poeta  de  Rossellô.  Els  poemets  de  Mossén  Jampy 
son  intimament  verdaguerians,  tant  per  la  visiô,  el  misticisme, 
l'ingenuitat,  el  murmuri'de  la  paraula  suavitzada  entre  resplen- 
dors  de  ciris  com  per  l'amor  gairebé  femenf  de  la  flora  munta- 
nyenca. 

Repetiu-ho,  rossinyolets,  entre  satalies  :  en  Verdaguer  ha  trobat 
un  deixeble  en  les  valls  de  Canigô. 

Temps  era  temps  que  mon  pare  tornava  de  les  jasses  de  Cadï, 
de  Noedes  6  de  la  vall  d'Eyne,  la  cara  cremada  pel  vent  geliu 
de  la  portella  i  la  reverberaciô  del  sol.  Obria  aleshores  sa  caixa 
de  botanista  i  parava  sobre  el  pedriç  i  les  taules  unes  plantes  de 
formes  estranyes,  armades  de  pues,  encara  florides  d'esteles  esgro- 
gueides,  tota  la  balsâmica  gloria  dels  herbolaris  (i).  Les  apuntava 
cuidadosament   dins  uns  grans   fulls   de  paper  groc,  color  de  pel 

(i)  Docteur  Simon  Pons,  Tierbarium  J(osarum. 


de  llebre,  aquelles  filles  uc  la  congesta,  i  aixis  s'omplia  tota  la 
casa  d'un  pénétrant  perfum  de  lliseres  i  molleres  i  herbâms  i 
aiguals  de  Canigô,  d'una  recordança  d'estiu  muntanyés  !  Oh 
riquesa  i  amor  de  les  plantes  !  1  doncs,  es  la  mateixa  impressiô 
d'arômes  de  muntanya  que  se  rénova  en  mi,  llegint  mes  tard  el 
Canigô  de  Verdaguer  —  i  ara  l'he  retrobada,  mes  real  i  primi- 
tiva,  en  aquèt  llibret  de  Mossén  Jampy. 

El  vocabulari  de  la  botânica  ningû  el  coneixia  millor  que 
Mossén  Cinto,  i  mes  que  tôt  altre  â  Rossellô,  Mossén  Jampy  ha 
entés  les  lliçons  del  poeta  muntanyés,  enriquint  aixis  sa  poesia 
amb  uns  noms  de  natural  bellesa,  corn  ho  son  el  jonc  del  molleriu, 
el  clavell  de  poeta,  la  groga  orella  d'ôs,  la  rosa  de  Nadal.  Mara- 
vellosa  flora  refrescada  pels  salts  d'aigua,  abrigada  per  les  esblom- 
bades  roques  de  Carença,  corriols  amunt  !  Véritablement  no  es 
poeta,  aquell  qui  no  sab  pas  tots  els  noms  de  les  plantes  i  tots 
els  noms  dels  ocells.  Aquells  noms  de  plantes  inconegudes, 
recuilides  en  l'etzar  d'una  excursiô,  guarden  per  nosaltres  una 
senzilla  novetat,  una  evocaciô  de  belleses  somniades,  i  ens  ena- 
moren  d'allô  mes  ;  jo  no  se  quina  clara  delicia  ne  regala  sempre. 
1  tant  mateix  sentim  com  l'obra  de  tôt  poeta  catalâ  es  obra  de 
botanista.  Tots  nosaltres  hem  d'herboritzar  en  nostres  encon- 
trades,  que  aixis  m'ho  encomanava  en  Joaquim  Ruyra,  i  cada 
paraula  nova  que  troba  el  poeta  pels  glebers  nadius,  l'aplega  i  la 
reculi  en  son  catâlec.  Aquest  afany  de  ]o  inconegut,  aquest  encis 
de  la  paraula  nova  bé  prou  explicarien  l'afecte  que  portém  tots  â 
la  nostra  llengua  !  1  encara  hi  ha  gent  de  cultura  que  s'estranyen 
quan  escribim  catalâ.  Deixem  que  corrin  enlluernats  mon  enllâ, 
quan  nosaltres  pujem  pel  nostre  Canigô,  enraonant  amb  els  bos- 
cassaires,  donant  â  les  flors  de  marge  el  llur  nom  catalâ. 

En  aquèt  llibret  de  versos,  Mossén  Jampy  no  descriu  la  terra 
geologicament  ;  io  que  mes  i'atrau  es  la  seducciô  végétal,  enmi- 
raiiada  en  els  côrrecs,  el  cântic  deis  perfûms.  Tenen  ses  obretes 
el  desordre  i  les  vives  coloraines  de  les  miniatures  mitjevals,  i  en 
llur  essencia  la  mateixa  ingenuitat  religiosa.  Ens  ofereix  el  primer 
raig  de  poesia  canigonenca,  el  primer  dall  del  nostre  herbâm,  i 
algunes  de  ses  estrofes  rajen  amb  un  murmuri  de  cascatelles  i  de 
golets  : 


—     112    

Al  cap  d'aquella  llisera. 
Corn  molî  llensoï,  la  gèlera 
Deixa  caure  una  filera 
De  cristallins  rierons... 

Algunes  demostren  una  observaciô  directa  del  paisatge,  i  aquestcs 
no  son  pas  de!  tôt  verdaguerianes,  ja  que  el  paisatge  de  Verdaguer 
ens  sembla  una  deformaciô.  Amb  tôt,  fora  ben  extraordinari  que 
l'esperit  verdagueriâ,  tant  isolât  i  distintiu,  se  rénovés  essencial- 
ment  en  el  seu  deixeble  de  Rossellô. 

Tota  l'originalitat  de  Mossén  Jampy  li  pervé  de  la  flora  mun- 
tanyenca  i  d'alguns  paisatges  ben  observats,  fresquivols  i  prima- 
verencs  : 

...  Una  castanyareda  ombreja 

La  vora  mes  alta  d'un  prat  ; 

De  cucuts  amaga  un  clapat 

Qu'un  vol  d'abelles  petoneja... 


De  la  penya  ix  un  garguinyol 
D'aiguës  xerraires  entre  greixes. 

L'herba  hont  l'onada  mança  i  llarga 
Corria  sota  el  bés  del  vent, 
Dins  un  marge  prop  del  torrent 
Es  apilotada  en  pallarga. 

Somnïeu,  muscs  de  Rossellô,  amb  aquestes  delicioses  i  canigo- 
nenques  acuareles  !  Vetaquî  un  poeta  que  ha  vist  la  primavera 
florida  de,  cucuts  i  violes,  i  la  tardor  â  muntanya,  i  devant  del 
mas  perdut,  en  un  rep!â,  les  pallargues,  com  gegantes  i  estranyes 
caputxes  d'or.  1   canta  lo  qu'ha  vist. 

A  vegades  també  mira  el  poeta  amb  els  ulls  clars  d'en  Père  de 
Ronsard,  dient  de  la  Rosa  de  vinya  que 

una  armada  de  formigues 
â  sos  peus  se  fâ  '1  sender. 

Ja  es  ben  cert  que  en  Ronsard  es  un  bon  mestre,  i  l'hem  tots 
d'estimar,  els  poètes  de  l'humil  pléiade  rossellonesa,  que  volem 
renovar  i  realçar  una  llengua.  Pertant,   ho  cal    dir   francament,  la 


- —  i  1  â 

poesia  rossellonesa  ha  de  lluitar  amb  les  influencies  rîtmiques  de 
França.  Cal  que  el  poeta  resisteixi  â  tais  influencies  amb  la  deu 
de  la  musica  interior  i  la  modulaciô  del  catalâ(j).  D'altra  manera, 
no  escriuria  poésies  catalanes,  encare  que  ho  fossin  totes  les 
paraules.  Conreuar  la  llengua  catalana  es  molt  més'dificil  â  Ros- 
sellô  que  en  altres  parts  de  Catalunya,  sigui  perqué  la  clara  i 
aguda  llengua  francesa  té  una  força  de  penetraciô  que  no  assoleix 
pas  la  castellana,  mes  estantissa  i  material,  sigui  perqué  observem 
.en  nostra  terra  un  estât  fonétic  que  no  correspôn  pas  sempre  al 
català  literari.  Accentuaciô  i  sintâxis,  ho  hem  de  restaurar  tôt  — 
hî  hâ  prou  feina  trassada  —  boi  servant  la  musical  inflexiô  del 
dialecte  nord-pirenenc.  Aixis  ho  vol  amb  nosaltres  Mossén  Jampy. 
Es  ben  nostre,  es  ben  muntanyés  el  seu  vocabulari  nou  i  colorât. 
No  l'ha  escullit  en  els  llibres  ;  l'ha  trobat  sobre  els  Davis  dels 
boscairols  i  masovers,  èntorn  de  l'isolada  capella  de  la  Trinitat, 
dolça  corona  dels  Aspres. 

]  amb  tais  paraules  ha  fet  ses  obres  de  poesia,  en  alabança  de 
Maria  Santissima  ;  i  ho  ha  fet  bé  perqué  la  Verge  ja  fa  segles 
qu'es  acostumada  al  nostre  llenguatge,  i  li  plau  mes  i  mes,  en  les 
pobres  ermites  de  muntanya.  Tant  per  son  vocabulari,  muntanyés 
com  per  sos  paisatges  i  llegendes  celestiais,  i  l'afany  de  Uuminosa 
idealitat  amb  la  quai  ens  parla  sempre,  Mossén  Jampy  mereix  el 
nom  de  poeta.  Ara  per  ara,  es  el  mes  verdaguerià,  el  mes  cani- 
gonenc  dels  felibres  de  Rossellô,  i  quan  senyoreji  son  violi  aquêt 
jutglar  de  Nostra-Senyora,  bé  ho  veureu  que  sera  el  mes  deiicat 
dels  miniaturistes,  perqué  ja  regala  del  seu  cor  un  doll   suavissim 

de  poesia, 

en  la  seu  de  les  muntanyés, 
â  mitg  cami  del  ce!  blau. 

Joseph-S.  Pons. 

Illa.    1914. 

(  1  )  Gran  part  de  la  poesia  catalana  d'Espanya  ve  escrita  amb  la  modulaciô 
etpanyola  —  qu'es  pitjor. 


ECHOS 

Les  Jeux  Floraux  de  Barcelone 

Un  hommage  à  Mgr  de  Carsalade  du  Pont,  évêque  de  Perpignan 

La  grande  fête  des  fleurs  a  eu  lieu,  comme  le  veut  l'usage,  le 
premier  dimanche  de  mai. 

Le  Palais  de  la  Musique  Catalane  présentait  une  animation 
brillante  et  les  costumes  clairs  des  jeunes  filles  ajoutaient  un  ton 
vraiment  printanier  à  la  cérémonie. 

Les  lauréats  furent  acclamés  comme  de  coutume.  Parmi  eux  de 
vieilles  connaissances  :  le  poète  J.-M.  Guasch  remporte  la  flor 
natural  ;  il  l'offre  à  son  épouse  qui  est  proclamée  Reine  de  la 
fête.  Lluis  Via  obtient  le  i"  accessit. 

L'Eglantine  d'or  est  décernée  à  un  poète  majorquin,  J.-M.  Tous. 
Notre  ami  Joseph  Massé  Ventés  obtient  le  i"  accessit  et  l'abbé 
Lluis  Pla,  de  Gérone,  le  2'. 

La  Violette  est  réservée.    La   coupe  d'honneur  est  attribuée  à 

E.  Girbal  Jaume  et  c'est  Joan  Alcover,  l'inspiré  poète  des  Poè- 
mes Biblichs,  qui  remporte  le  prix  Fastenrath. 

Nous  avons  réservé  pour  la  fin,  à  dessein,  le  compte-rendu  du 
discours  présidentiel,  magistralement  écrit  par  Frédéric  Rahola  et 
lu,  en  l'absence  du  président  retenu  3u  lit  par  une  affection  grip- 
pale, par  J.  Cabot  Rovira. 

Ce  discours  est  une  merveille  de  style.  11  constitue  un  vrai 
discours  académique  et  le  sujet  n'est  autre  que  l'éloge  de  feu 
Antonin  Pelaez,  archevêque  de  Tarragone,  qui  devait  présider  les 
Jeux  Foraux  de  1919. 

Un    point    caractéristique    du    discours    est    le     parallèle    que 

F.  Rahola  établit  entre  Mgr  Pelaez  et  Mgr  de  Carsalade  du 
Pont.  Voici,  entr'autres  citations,  un  passage  concernant  notre 
bisbe  calalà  qui  ne  manquera  pas  d'intéresser  nos  lecteurs  : 

La  seva  figura  intéressant  esdevé  per  nosaltres  quelcom  meravellôs, 
quan  arriba  el  moment  que  fou  anomenat  metropolità  de  Tarragona.  Allavors 
la  seva   personalitat  es  révéla  amb  tota  la  puresa  i  brill  de  les  animes  privile- 


—   i.5  — 

giades.  No  pue  menys,  amb  tal  motiu,  que  pensar  en  son  pario.  En 
Juli  Carsalade,  el  bisbe  de  Perpinyà,  que  ofereix  una  gran  semblança  moral 
amb  e)  difunt  arquebisbe  de  Tarragona.  Ambdos  son  homes  representatius 
de  l'amor  sencer  que  inspira  la  terra  d'altri.  quan  un  hom  s'hi  sent  portât  a 
viure-hi  i  a  exercir  en  ella  autoritat,  mes  encara  quan  aquesta  autoritat  es 
fonament  espiritual.  Endebades  es  vol  penetrar  en  l'anima  d'un  poble  si  no 
portem  dins  nostre  el  flam  de  son  amor  i  el  nostre  enteniment  no  es  corn 
l'intim  espill  de  ses  ale^gries  i  ses  tribulacions. 

El  bisbe  Carsalade.  aqui  mateix  l'any  14,  ens  deia,  omplint-nos  d'emociô  : 
«  jo  em  vaig  trobar  un  jorn,  per  una  gracia  especial  de  Deu,  de  gascô  que 
era  convertit  a  català.  Deu  s'havia  dignat  escollir-me  per  confiar-me  el 
conreu  religiôs  d'un  trocet  de  Catalunya.  Eli  havia  fet  de  jo  el  Bisbe  de 
l'antiga  i  illustre  diocesi  d'Elna.  El  dia  de  la  meva  consagraciô,  quan  pros- 
ternât en  el  paviment  de  la  Seu  Metropolitana  d'Aux  vaig  rebre  la  unciô 
episcopal,  a  mesura  que  els  rits  sagrats  es  complien  i  que  la  gracia  divina  em 
penetrava  i  em  revestia  del  caracter  episcopal,  sembla  que  una  transformaciô 
estranya  s'operava  en  mi,  que  rebia  un  carisme  particular  que  era  com  un 
nou  baptisme  i  que  amb  aquest  carisme  una  nova  sang  s'infondia  dins  les 
meves  venes,  un  nou  esperit,  un  nou  gust  penetraven  en  la  meva  intelligencia. 
Quan  me  vaig  alçar  dels  peus  de  l'Arquebisbe  consagrador,  era  Bisbe  català. 
Vaig  sentir  que  ténia  una  nova  pàtria,  venia  d'esser  fet  català  per  la  gracia 
de  Deu  ». 

Al  nostre  Antolin  Lopez  Pelaez  li  va  passar  quelcom  de  paregut.  Aixi  que 
fou  cridat  a  régir  la  Seu  Metropolitana  de  lEspanya  Tarragonina,  va  sen- 
tir-se  apoderat  de  la  terra  que  el  cridava  a  tan  august  Ministeri.  I,  com  el 
bisbe  de  Perpinvà,  que  de  gascô  es  va  sentir  transformat  en  català,  ell  de 
gallec  va  devenir  català  en  el  fons  de  la  seva  anima.  La  revelaciô  es  feu  pel 
respecte  i  amor  que  tôt  d'una  va  mostrar  a  la  nostra  llengua.  Talment  es 
diria  un  miracle,  al  cap  de  pocs  jorns  d'esser  a  Catalunya,  donava  goig  sen- 
tir-lo  ja  barbotejant  la  nostra  parla,  endolcida  per  l'accent  gallec,  que  recor- 
dava  la  cadença  italiana.  Quin  contrast  el  seu  amb  el  de  moltissims  que  tots 
coneixem,  que  han  passât  la  seva  vida  a  Catalunya,  i  moren  sensé  haver  par- 
lât mai  el  nostre  idioma  ! 

La  Tradition 

La  veille  de  Pâques  nous  avons  eu  la  joie  d'entendre,  par 
deux  groupes  de  chanteurs,  nos  vieux  et  populaires  Goigs  dels  Ous. 

L'un  de  ces  groupes  avait  été  organisé  par  notre  ami  Antoine 
Batlle. 

Le  second  était  constitué  par  les  membres  du  Chor  Català,  au 
nombre  de  70  environ,  coiffés  de  la  vermelîa  barrelina. 

Pour  inaugurer  sa  première  sortie,  le  Chor  Català  se  rendit, 
sous  la  direction  du  maestro  Fontbernat,  chez  les  autorités  et  nota- 


—   u6   - 

bilités  de  la  Ville  ;  une  grande  animation  régna  durant  toute  la 
soirée  sur  la  Loge  et  les  rues  avoisinantes,  où  les  chanteurs  cata- 
lans interprétèrent  La  Marsellesa  en  catalan,  L'Tzmpordà  du  maître 
Morera,  Trança  et  quelques  autres  choeurs  de  choix. 

Par  une  délicate  attention,  la  Société  d'Etudes  Catalanes  avait 
été  conviée  à  cette  manifestation  d'art  et  nos  collaborateurs 
Ch.  Grando  et  P.  Francis  nous  y  représentèrent. 

Hommage  au  Pastorellet  de  la  Vall  d'Arles 

La  collection  d'auteurs  Catalans  Inclura  Popular,  publiée  sous 
les  auspices  de  VJllusiracià  Calahna  de  Barcelone,  vient  de  consa- 
crer son  numéro  3o8  à  un  recueil  de  poésies  du  poète  roussillon- 
nais  Joseph  Bonafont,  l'estimé  Pastorellet  de  la  Vall  d'Arles. 
Voici  l'éloge  que  Lectura  Popular  fait  de  notre  cher  majorai  : 

«  Lectura  Popular  paga  tribut  a  un  dels  mes  inspirats  cantayres 
del  Rossellô,  el  popularissim  Pastorellet  de  la  Vall  d'Arles,  ô 
sia  '1  Canonge  Joseph  Bonafont,  actual  degà  d'Ule-sur-Tet,  que 
nasqué  '1  18  d'abril  de  ]854,  d'una  familia  de  pagesos  del  Soier, 
prop  de  Perpinyà. 

«  Môlt  podriem  dir  pel  nostre  compte  a  propôsit  d'aquest  exce- 
lent  dexeble  de  Mossèn  Cinto,  que  ha  ferhonor  a  nostra  Hengua, 
escampant  articles  y  poésies  en  peridiôchs  y  revistes  corn  le  Ttyus- 
sillon,  la  Croix  des  Pyrénées,  la  Semaine  Religieuse,  la  Revue  Cata- 
lane, la  V eu  del  Cantgô,  Ruscino,  etc.  Emperô  ab  tôt  lo  que 
diguessim  no  fariem  mes  que  corroborar  el  parer  d'eximis  critichs 
francesos  dels  quais  son,  en  substancia,  les  apreciacions  segùents  : 

«  Estableix  En  Bevez  que  mossèn  Bonafont  ha  ennoblit  la  seva 
missiô  de  poeta  prenent  part  activa  en  el  desvetllament  de  l'anima 
rossellonesa  y  donant  a  sos  compatriotes,  ab  poésies  d'una  gracia 
corprenedora,  el  gust  de  la  llengua  catalana.  Edita  les  obres  del 
malaguanyat  Antoni  Joffre,  afeginthi  les  cinq  belles  Refilades  de 
Lo  Pastorellet  (1882^  ;.  publicà  desprès  l'antologia  Garbera  Cata- 
lana (1884)  ;  mes  tart,  l'aplech  d'élégies  flys  (1887)  ;  posterior- 
ment,  un  estudi  sobre  los  Goigs  (1907)  y,  per  ûltim,  al  ésser 
nomenat  Telibre  majorai,  publicà  sa  obra  Ays  y  Albades  (1914). 

«  Es,  segons  Jean  Amade,  el  poeta  mes  éloquent  y  mes  délicat, 
el  mes  vigorôs  y  '1  mes  sensible   que   hagi    produhit   el    Rossellô. 


—  "7  — 
Eli,  en  la  terra  rossellonesa,  personifica  la  renaxença  catalana. 
Sovint  amplifica  la  seva  inspiraciô,  dexant  les  cançons  populars  y 
les  pagines  descriptives  de  bells  paysatges  comarcals,  per  a  evo- 
car  dramàtichs  episodis  de  la  historia  patria,  6  sublims  poèmes 
evangèlichs  ;  mes  en  tota  ocasiô  '1  poeta  escolta  la  veu  def  propi 
sentiment,  ab  preferencia  a  tota  altra  veu  ;  y,  creyent  fervorôs, 
troba  sempre  en  la  fè  '1  suprem  consol. 

«  El  citât  Bevez,  en  Les  Poètes  du  Terroir  (Paris  1914),  manifesta 
son  admiraciô  per  la  llengua  de  la  quai  ha  sabut  servirse  Lo  Pas- 
torellet  en  ses  plasmacions  poétiques  ;  y  al  preguntarse  quins  élé- 
ments eren  els  de  que  disposava. 

«  Mossèn  Bonafont,  no  pot  menys  de  reconèxer  la  seva  pacien- 
cia  y  la  seva  erudicio,  perô  creu  que  es  el  poble  qui  li  aportà 
directament  el  millor  bagatge  car,  segons  afirmaciô  del  mateix 
Bonafont  en  el  prefaci  de  sos  Mys,  «  el  poble  r*ecull  y  guarda  ab 
gran  cura  '1s  termes  que  tan  sovint  ens  manquen  ».  El  poble, 
doncs,  ajudà  de  ben  prop  a  son  natural  enginy  y,  d'un  xich  mes 
lluny,  els  Catalans  d'Espanya  l'han  ajudat  també,  6  millor  dit, 
aquesta  vella  llengua  catalana,  comuna  a  les  dues  vessants  dels 
Pirenèus,  les  varietats  dialectals  de  la  quai  donen  tanta  vigoria  a 
la  musa  pintoresca  de  nostre  biografiat.  » 

Nos  musiciens  tf  nos  artistes 

Au  cours  d'un  concert  organisé  le  22  avril  dernier  à  Barcelone, 
par  VAssociaciô  de  Mûsica  de  Caméra,  au  Palau  de  la  Mûsica  Cata- 
lana, l'éminent  pianiste  catalan  Ricard  Vines  a  interprété  avec 
grand  succès  une  composition  de  notre  grand  ami  cérétan  Déodat 
de  Sévérac  :  Les  muletiers  devant  le  Christ  de  Llivia. 

Notre  compatriote  M""  Alice  Cornés,  de  l'Opéra-Comique,  a 
obtenu  deux  grands  triomphes  au  Théâtre  Municipal  de  Perpi- 
gnan, dans  ses  interprétations  très  personnelles  de  Carmen  et  de 
Charlotte  de  Werther. 

Le  ténor  Angel,  d'Elne,  après  une  tournée  triomphale  à  Lyon- 
Perpignan-Bordeaux,  est  sur  le  point  d'être  engagé  à  l'Opéra- 
Comique. 

On  nous  annonce  également  la  nouvelle  rentrée  à  l'Opéra  de 
Mathilie  Comès,  sceur  aînée  d'Alice  Cornés. 


-   n8  — 
Un  hommage  posthume  à  Joseph  Aladern 

Le  Comité  pro-Aladern  a  décidé  de  perpétuer  le  souvenir  de 
l'excelJent  écrivain,  qui  fut  notre  collaborateur  et  notre  ami,  en 
apposant  une  plaque  commémorative  sur  la  maison  où  il  naquit, 
au  village  d'Alcover. 

Le  même  jour  sera  inaugurée,  dans  cette  même  ville,  la  place 
qui  doit  porter  le  nom  de  Cosrrie  Vidal,  vrai  nom  d'Aladern  ;  un 
numéro  extraordinaire  de  XTiérall  de  Catalunya  lui  sera  dédié. 

Nous  nous  associons  de  tout  cceur  à  cet  hommage. 

Belleses  artistiques 

Le  numéro  de  mars  de  la  revue  catalane  à'Act,  dalla  publie 
sous  ce  titre  deux  magnifiques  clichés  :  L'abbaye  de  Saint-Martin 
du  Canigou  et  une  vue  du  Canigou  prise  du  chemin  du  grand 
étang. 

La  bibliothèque  de  Castel-Roussillon 

Notre  collaborateur,  M.  Henry  Aragon,  vient  de  compléter 
sa  magnifique  série  d'ouvrages  sur  l'antique  Ruscino  et  sur 
Château-Roussillon  par  deux  nouveaux  volumes,  du  plus  haut 
intérêt  : 

La  Seigneurie  de  Casiel-Ttyussillon  (Toulouse,  Ed.  Privât,  édi- 
teur), La  Céramique  de  Ttyscino,  Fouilles  1909-1913. 

C'est  tout  un  fonds  d'une  richesse  incomparable  que  M.  Henry 
Aragon  découvre  et  nous  lègue,  et  nous  ne  saurions  trop  renou- 
veler nos  éloges  au  laborieux  et  infatigable  érudit. 

Caries  de  la  Real. 

La  question  de  l'Université 

M.  Calmette  -nous  prie  d'informer  nos  lecteurs  qu'il  donnera, 
dans  l'un  de  nos  prochains  numéros,  toute  explication  susceptible 
de  satisfaire  les  correspondants  qui  l'ont  questionné  au  sujet  de 
son  article,  et  auquels  il  ne  peut  répondre  individuellement  par 
une  dissertation  étendue. 


'£££££££rV£^££££$$$£££#£££££$£$£$£#££f 

DOCUMENTS  HISTORIQUES 

sur  la  Ville  de  Perpignan 

&gQ^*  (SUITE) 

XIX.  L'alignement  du  lit  de  la  Basse  et  de  la  Tel,  à  Perpignan,  au  xiv'  siècle. 
Procès-verbaux  des  travaux  concernant  ces  rivières.  Sentence  du  bayle  et  des 
consuls  de  Perpignan.  Procès-verbal  de  l'alignement  du  lit  de  la  Tet,  depuis  la 
"Basse  jusqu'à  Castel  J^oussillon  (avril   i335-février  1378). 

lin  des  actes  les  plus  anciens  qui  a  trait  aux  inondations  des 
rivières  de  la  Basse  et  de  la  Tel  (1),  et  aux  moyens  projetés  pour 
écarter  ce  fléau,  a  été  rédigé  vers  la  première  moitié  du  xiv'  siè- 
cle :  ce  document  fort  intéressant  relate  les  conditions  dans  les- 
quelles les  habitants,  exposés  aux  diverses  inondations,  étaient 
imposés  d'après  l'avis  et  la  délibération  des  prohomens  de  Perpi- 
gnan. On  peut  déjà  reconnaître  là  l'influence  que  devait  prendre 
plus  tard  cette  corporation. 

I.  —  Par  un  mandement  en  date  du  i3  avril  ï  335,  Jacques  11, 
roi  de  Majorque,  venait  d'autoriser  la  démolition  des  maisons 
(ou 'hospices)  qui  étaient  construites  à  Perpignan  sur  le  Thor  (2), 
au  milieu  de  la  Basse  et  des  ouvroirs  des  drapiers,  et  qui  gênaient 
la  ville  :  il  s'agissait  de  l'intérêt  public  (3),  de  l'élargissement  des 
rues  de  la  cité  qui  commençait  à  prendre  de  l'importance  :  il  fal- 
lait donc  éliminer  tout  ce  qui  pouvait  être  un  obstacle  pour  les 
inondations  futures.  Les  consuls  avaient  été  chargés  de  faire  exé- 
cuter ce  règlement  concernant  la  destruction  radicale  des  immeu- 
bles qui  pouvaient  être  un  danger  constant  pour  la  ville  (4),  dans  le 
cas  d'une  crue  subite  de  la  rivière  (5). 

(1)  Ceci  nous  amènera  à  l'étude  si  intéressante  relative  aux  ordonnances, 
mandements,  arrêts,  etc.  rendus  par  les  intendants  du  Roussillon,  au 
xv.  1 1 1  "  siècle,  pour  atténuer  les  effets  des  inondations  qui  ont  ravagé  la  plaine 
du  Roussillon.  (Cette  étude  paraîtra  dans  le  Bulletin  historique.) 

2  Super  Thororum.  inler  aquam  Vasse  et  tiradoria  paratorum.  Arch.  des 
Pyr.-Or.,  livre  vert  mineur,    1  1  8 5 - 1  4. 1  3 ,  P  j  3  2 . 

(3)  Pro  ulilitate  rey  publice  ville  Perptniani.  Arch.  des  Pyr.-Or.,  ibidem. 

(4)  SuppHccatum  ul  dicta  hedifficia  usque  ad  parielem  dirui  mandaremus... 

(5)  Voir  appendice,   xxvn,   §  1.    Mandement  de   Jacques  11    autorisant   la 


~    110  -aa 

i.  —  Trois  ans  plus  tard,  un  procès-verbal  était  dressé,  ail 
sujet  des  travaux  à  faire  au  mur  (la  paret)  construit  en  avant  du 
Tinct  (i)  et  de  l'église  Sainte-Marie  du  Pont  à  Perpignan,  pour 
arrêter  les  inondations  de  la  Ter  et  de  la  "Basse,  et  l'on  délimitait 
les  propriétés  formant  la  limite  de  la  Grava  ou  lit  de  la  dite 
rivière,  tel  qu'il  devait  être  établi  au-dessus  du  Pont,  avec  une 
largeur  de  60  canes  de  Montpellier. 

6  des  ides  d'avril   1 335 

Translai  de  la  sententia  donada  conlra  lois  aquells  qui  son  te-nguts 
pagar  e  conlribuir  en  les  mecions  de  la  parei  fêta  al  Pont  de  la  Pera 
per  custodia  de  lurs  possessions  e  de  les  senyories  d'aquelles. 

Le  document  a  été  fidèlement  transcrit  de  l'acte  authenthique 
(c'est  ce  que  nons  avons  indiqué  dans  d'autres  études  (2)  et  exa- 
miné sous  la  forme  de  vidimus)  ;  en  voici  la  teneur  (3)  : 

Les  habitants  de  la  rue  des  Teinturiers (4) 1,  de  Perpignan,  avaient 

démolition  des  maisons  :  quod  de  domibus  super  Toronum  dtruatur  quod  fuerit 
diruendum.  Palma,  20  mars  i33;. 

(1)  Le  faubourg  (lo  Tint)  a  dû  se  former  vers  le  milieu  du  xin'  siècle  :  il 
s'appelait  ainsi  parce  que  des  pareurs  et  des  teinturiers  étaient  venus  s'éta- 
blir entre  la  Tet  et  la  Basse.  11  n'y  avait  pas  de  fours  au  Tint,  et  c'est  sans 
doute  pour  le  desservir  que  les  Templiers  firent  construire  les  «  fours  neufs  » 
dans  les  anciers  murs,  sur  la  rive  droite  de  la  Basse,  sur  l'emplacement  de 
la  maison  actuelle  du  Bon  Pasteur.  (P.  Vidal,  Perpignan,  1898.) 

(2)  Voir  mon  étude  "La  seigneurie  de  Castell  T(psseUo  :  capbreu  et  vidimus. 
Ed.  Privât,,  Toulouse,  «917. 

(3)  Je  reproduis  à  la  fin  de  cette  étude  le  document  écrit  en  latin,  appen- 
dice xxvii,  §  2. 

(4)  Les  teinturiers  (lincturerii),  comme  les  maîtres  pareurs  (paralores, 
parayres),  avaient  eu  primitivement  leurs  tiradors  près  de  l'église  Sainte- 
Marie  du  Pont,  au  faubourg  du  Tint  (actuellement  rue  de  la  Tet),  et  ensuite 
dans  le  carrer  dels  Bayns  (actuellement  rue  du  Bastion  Saint-Dominique). 

D'après  les  documents  les  plus  anciens  (je  remonte  à  i25o),  on  peut 
affirmer  qu'il  y  avait  eu,  avant  i25o,  des  teinturiers  et  des  pareurs  établis 
entre  la  Basse  (Vâssa)  et  la  Tet,  et  que  tout  ce  quartier  avait  réuni  une 
population  considérable  sous  les  rois  de  Majorque  ;  cependant,  à  l'époque 
de  la  convention  de  1247  avec  l'ordre  du  Temple,  sous  le  roi  Jacques,  au 
sujet  des  fours  de  la  nouvelle  poblacio,  établie  en  dehors  des  murs  de  l'an- 
cienne ville,  les  habitants  de  ce  quartier  devaient  être  peu  nombreux,  puis- 
que les  Templiers  n'avaient  pas  encore  construit  de  fours  ;  ce  ne  fut  que 


—   lai    — 

plusieurs  fois  sollicité  du  roi  de  Majorque,  Jacques  II,  comte  de 
Roussillon  et  de  Cerdagne,  seigneur  de  Montpellier,  la  faveur 
de  faire  consolider  et  agrandir  le  mur  situé  le  long  de  la  rivière 
de  la  Tet,  afin  d'éviter  le  redoutable  fléau  des  inondations,  en 
imposant  tous  ceux  qui  devaient  contribuer  à  ces  travaux.  C'est 
dans  ce  but  que  l'on  fit  connaître  les  décisions,  avis,  et  déclara- 
tions des  habitants  des  dits  lieux  au  chancelier  Pierre- Raymond 
de  Montbrun  et  à  André  Giter,  conseiller  du  Roi. 

Voici  la  requête  qui  fut  adressée  aux  deux  représentants  de  la 
royauté  par  les  habitants  de  la  rue  des  Teinturiers  et  des  rues 
avoisinantes,  à  seule  fin  de  faire  exhausser  et  de  consolider  le  mur 
qui  était  construit  le  long  de  la  rivière  de  la  Tet,  et  de  faire 
exécuter  les  travaux  et  plantations  nécessaires  pour  s'opposer  aux 
ravages  causés  par  les  eaux  de  la  dite  rivière. 

On  réunit  tous  les  habitants  de  ce  quartier,  ainsi  que  tous  les 
propriétaires  des  immeubles  situés  dans  l'île  où  était  bâtie  la  cha- 
pelle de  "Noire-Dame  du  Pont,  qui  possédaient  des  terrains  jus- 
qu'au Couvent  des  "Frères  Mineurs  (i),  de  Perpignan,  y  compris 
toutes  les  personnes  alentour  qui  devaient  contribuer  aux  répara- 
tions de  ce  mur,  pour  éviter  le  dommage  considérable  que  pour- 
rait occasionner  le  débordement  simultané  de  la  Tet  et  de  la 
Basse. 

plus  tard  que  ceux-ci,  pour  desservir  la  population  du  quartier  du  Tint, 
firent  construire  les  forns  nous,  dans  les  anciens  murs  et  sur  la  rive  droite  de 
la  Basse,  sur  l'emplacement  de  la  maison  actuelle  dite  du  Bon  Pasteur.  On 
sait  que  le  vieux  Perpignan,  compris  dans  l'enceinte  des  anciens  murs  et  dans 
la  paroisse  primitive  de  Saint-Jean,  avait  conserve  seul  le  nom  de  ville  et  que 
tout  le  reste  fut  designé  d'abord  sous  le  nom  de  Ville  neuve  hors  les  murs  ; 
jusqu'au  xiv*  siècle,  tous  les  pobladors  établis  en  dehors  des  anciens  murs 
furent  englobés  dans  la  paroisse  primitive  de  Saint-Jean.  Cf.  à  ce  sujet 
Alari,  Privilèges  et  titres,   1878  ;  Jacques  ]",  roi  d'Aragon,  page  i63. 

(  1  )  Le  couvent  des  Frères  Mineurs,  connu  sous  le  nom  de  couvent  de 
Saint-François  (convent  de  Sant  Francesch),  et  qui  existait  dès  l'an  ia35, 
aurait  été  établi  dans  la  partie  du  faubourg  où  se  trouvait  la  chapelle  de 
Sainte-Marie  des  Anges  appartenant  à  la  famille  Grimau  qui,  dit-on,  l'offrit 
a  saint  François  d'Assise,  de  passage  à  Perpignan,  vers  l'an  1219.  (Cf. 
P.  Vidal,  Perpignan,  1898.)  Par  un  acte  de  1286,  le  roi  Jacques  1"  de 
Majorque  fit  prendre  une  partie  du  jardin  des  "Frères  Mineurs  (couvent  de 
Saint-François),  que  les  c  clavaires  de  la  cisa  »  (officiers  de  police)  occupè- 
rent pour  faire  la  muraille  de  la  ville,  le  long  de  la  Basse.  (  P.  Vidal,  op.  cit.) 


—    122     — 

A  cet  effet,  on  procéda  à  l'élection  de  six  probomens  (j)  de  Per- 
pignan, Bernard  Roure,  Arnald  Jaufre,  Maillol  Cadany,  Pierre 
Erbussol,  Guilhem  Bonet  et  Guilhem  Adalbert  :  ceux-ci  allèrent 
visiter  les  lieux  et  vinrent  .rendre  compte  au  Roi  de  leur  mission 
relative  à  la  construction  et  à  la  réparation  projetées  de  ce  mur, 
ainsi  qu'aux  charges  qui  incomberaient  à  chaque  contribuable  pour 
l'entreprise  de  ces  travaux. 

Voici  la  déclaration  qui  fut  faite,  d'un  commun  accord,  par  les 
dits  commissaires,  après  l'inspection  des  locaux  en  question  : 
d'abord,  ils  décidèrent  que  le  mur  était  de  toute  nécessité,  et 
devait  être  maintenu  en  bon  état  pour  écarter  à  l'avenir  tout  dan- 
ger d'inondation  ;  de  plus,  ce  mur  serait  exhaussé  et  atteindrait 
le  niveau  du  mur  du  jardin  de  Jean  Calmes,  jusqu'à  la  partie 
récemment  construite,  sur  une  longueur  de  trente-trois  cannes  de 
Montpellier  :  cette  portion  de  bâtisse  devrait  être  un  tant  soit 
peu  plus  élevée  que  l'autre  partie  du  dit  mur. 

On  proposa  également  de  supprimer  complètement  l'ouverture 
du  portail  qui  servait  d'entrée  au  jardin  situé  au-dessus  de  la 
rivière  de  la  Tet,  et  de  renforcer  à  l'intérieur  la  partie  du  mur 
comprise  entre  le  colombier  de  Raymond  de  Vernet  et  le  jardin  de 
Pierre  Aulomar  ;  en  cas  de  dommage  causé  par  les  eaux,  chacun  de- 
vrait contribuer,  suivant  l'étendue  du  mal,  à  la  réfection  de  ce  mur. 

Pour  la  construction  et  les  réparations  indispensables  à  faire  à 
ce  mur,  dans  la  partie  comprise  entre  le  jardin  de  Jean  de  Cal- 
mes et  celui  de  Pierre  Aulomar,  d'une  contenance  de  96  cannes 
de  Montpellier,  les  propriétaires  des  immeubles  situés  dans  l'île 
où  est  bâtie  la  chapelle  de  Noire-Dame  du  Pont  (2)  et  les  posses- 
seurs des  moulins  dits  d'En  Vernel  devraient  payer  une  contribu- 
tion de  six  deniers. 

(i)  Les  probi  homines  étaient  les  principaux  habitants  de  la  ville  en  102 5  ; 
en  1  145,  on  retrouve  ces  personnages  revêtus  de  pouvoir  politique  ou  civil. 
Voir  à  ce  sujet  mon  étude  :  L'organisation  municipale  de  Perpignan,  imp. 
Barrière,   1919. 

(2)  Cette  église  dédiée  à  Noire-Dame  du  Pont  de  la  Tet  se  trouvait  au  fau- 
bourg du  Tint.  «  C'était  d'abord  un  oratoire  transformé  un  peu  plus  tard 
en  chapelle,  vers  1265.  »  Les  teinturiers  partis,  ce  quartier  perdit  son  nom 
et  prit  celui  de  Notre-Dame.  Voir  à  l'appendice,  xxvi,  la  charte  de  Pierre  II , 
donnant  une  partie  du  rivage  de  la  Tet  aux  frères  et  procureur  de  l'œuvre 
du  Pont  de  la  Tet  à  Perpignan. 


-   \il  — 

Les  propriétaires  des  jardins,  bosquets  (i)  et  des  locaux  des 
moulins  de  l'Hôpital  (2),  situés  en  contre-bas  des  jardins  du  Cou- 
vent des  Frères  Prêcheurs  (3),  ainsi  que  tous  ceux  qui  possédaient 
un  terrain  entre  le  dit  jardin  et  la  rivière  de  la  Tet,  seraient 
assujettis  à  une  contribution  de  quatre  deniers. 

Les  propriétaires  des  hospices  et  des  terrains  des  nouveaux 
liradors  contigus  à  ces  hospices,  qui  sont  situés  tout  le  long  de 
la  rivière  de  la  Tet  et  confrontent  le  sol  (4)  même  de  la  Tet, 
paieraient  pour  ces  travaux  une  redevance  de  quatre  deniers  à  la 
livre  (5). 

Les  riverains  de  la  Basse,  dont  les  immeubles  étaient  situés  au- 
dessus  des  hospices  déjà  désignés  jusqu'à  la  fontaine  dite  du 
Toro  (6),  seraient  imposés  pour  une  somme  de  deux  deniers. 

Tous  les  habitants  possesseurs  de  jardins  et  vergers  sis  entre 
la  dite  fontaine  du  Thoro  (7)  et  les  vergers  (8)  de  Vital  Grimald, 
bourgeois  de  Perpignan,  et  Bugarell,  dont  les  terres  sont  très 
exposées  aux  inondations  de  la  Tet,  devraient  payer  une  contri- 
bution d'un  denier  à  la  livre. 

(1  )  Viridaria. 

(2)  Ces  moulins  del  Spiial  ont  été  détruits  au  xyii*  siècle,  lorsqu'on  agran- 
dit les  fortifications  de  la  ville. 

(3)  Voir  à  l'appendice,  xxvi,  §  3,  Yinstrumentum  fratrum  predicatorum  Perpi- 
niani,  2  des  calendes  de  juin,   1279.  Arch.  Corn.,  AA.  3,  livre  vert  mineur, 

F  48-49- 

C'est  dans  la  maison  des  Frères  Prêcheurs  que  les  principaux  actes  du  roi 
Jacques  1"  ou  de  l'infant  héritier  se  faisaient,  lorsqu'ils  se  trouvaient  à  Per- 
pignan. A  ce  moment,  la  construction  du  château  royal  était  commencée, 
mais  il  est  probable  que  cette  demeure  était  encore  inhabitable.  D'après  la 
chronique  de  Bernard  Dez  Clôt,  la  famille  royale  ne  fut  installée  qu'en 
1  284  au  château  royal. 

(4)  Affrontant  in  grava. 

(5|  La  législation  catalane  admettait  le  taux  de  4  deniers  à  la  livre  et  au 
mois  ;  Jacques  I"  avait  prescrit  ce  taux  en  1  224,  dans  un  article  fondamental  : 
Cerfs  de  Tarragone,  art    20,  Corls  de  Girone,  art.    1   :  Constitutions. 

(6)  La  fontaine  del  Torô  (toro,  mamelon,  tertre)  était  dans  le  quartier 
des  tanneries,  à  côté  du  Pont  del  Torô  qui  s'ouvrait  dans  l'ancienne  muraille 
du  xii*  siècle,  au  bout  de  la  rue  dite  carrer  del  Toro.  ou  del  Portai  del  Torô 
ifonlem  vocatum  lo  Toro). 

(7)  Lo  Thoro. 

(8)  Viridaria. 


—     124    — 

Les  propriétaires  de  terrains  situés  entre  le  manse  (i)  dit  d'En 
Alomar,  de  la  ville  de  Perpignan,  et  la  cure  de  Saint-Jean  de 
Perpignan,  ainsi  que  tous  ceux  qui  possédaient  le  dit  manse, 
exposé  aux  inondations,  seraient  tenus  de  payer  un  impôt  d'un 
denier.  De  même  ceux  qui  avaient  des  terrains  situés  entre  le 
manse  ci-dessus  désigné  et  le  jardin  du  Couvent  des  Trères 
Mineurs  (2),  suivant  une  équitable  estimation  de  ces  biens,  devraient 
payer  une  contribution  d'une  obole. 

Quant  aux  tenanciers  de  terres  en  directe  seigneurie,  qui 
n'étaient  assujettis  seulement  qu'aux  droits  de  foriscap,  ceux-ci 
devraient  payer  intégralement  les  impôts  pour  la  réfection  du  dit 
mur,  suivant  l'usage  des  paiements  faits  par  les  fermiers  censi- 
taires. 

11  fut  décidé  que  les  travaux  de  la  portion   du  mur  qui  s'étend 
depuis    le    jardin    de    Pierre    Allomar   jusqu'au  pont   dit  pont  de- 
Saint-Augustin  (3),  dans  le  cas  où  il  serait  agrandi,  reconstruit  ou 
réparé,  n'incomberaient  qu'aux  seuls  propriétaires  de   l'île  où  est 
située  Notre-Dame  du  Pont. 

En  outre,  les  dits  commissaires  se  réservèrent  le  droit  de  dis- 
cuter ce  qui  pourrait  être  décidé  en  cas  d'élargissement  ou  d'em- 
piétement du  lit  de  la  Basse,  et  ce  qui  serait  convenu  au  sujet  de 
l'enlèvement  des  arbres  et  de  la  suppression  des  immeubles  qui 
pourraient  être  un  obstacle  pour  le  cours  d'eau.  Us  se  réservèrent 
également  le  droit  de  discuter  quelle  serait  la  quote-part  afférente 
à  chaque  habitant  imposé  en  cas  d'agrandissement  ou  de  répara- 
tion de  ce  mur. 

En  cas  de  contestation  ou  de  difficultés  quelconques  de  la  part 
des  propriétaires  imposés,  on  résoudrait  les  questions  au  mieux 
des  intérêts  généraux.  . 

Cette  déclaration  fut  faite  à  Perpignan,  au  domicile  du  Chance- 
lier du  roi,  le  6  des  Ides  d'avril  de  l'an  i  335,  en  présence  des 
témoins,  le  donzell  Jean  Rigau,  Jean  Baudos  et  Volo,  peaussiers, 
Rubée  Amillot,  clerc,  Pierre  Giter,  de  Torreilles,  Bernard 
Pages,  François  Gaucerand   et  Jacques  Vital,    scribes,    Raymond 

(1)  Le  manse  ou  mas  en  catalan. 

(2)  Jnter  mansum  et  ortum  fratrum  minorum  conventus  Perpiniani. 

(3)  Ponlem  vocatum  Sancti  Auguslini. 


-  ni  - 

Pensa,    Guilhem    de    Puig-Auluch,   de    Perpignan,    et    Perpignan 
Imbert,  notaire. 

L'acte  fut  rédigé  par  François  Gaucerand,  témoin  ci-dessus 
désigné,  en  remplacement  du  notaire  public,  Pierre  Montaigu, 
qui  l'a  souscrit  et  signé  de  son  seing  manuel  (i). 

3.  —  Sentence  du  baile  et  des  consuls  de  Perpignan  sur  l'ali- 
gnement   de  la   Tet,    dont    la   largeur    fut   fixée  à  60  cannes  de 

Montpellier  (2). 

18  des  kalendes  de  mai   1  338. 

Le  18  des  calendes  de  mai  de  l'an  1 338,  une  supplique  fut 
adressée  au  roi  de  Majorque  et  à  son  conseiller  qui  la  retourna 
au  vénérable  et  discret  Pierre  Guilhem  de  Seignobos,  bayle  de 
Perpignan.  En  voici  la  teneur  : 

a  Les  soussignés  Pierre  Mir,  directeur  de  l'Hospice  des  pau- 
vres, Jacques  Sabater,  Pierre  Raymond,  Pierre  Mora,  Pierre 
Guasch,  Jean  d'Aldicard  et  dame  Gil,  veuve  de  Maître  Gil,  ancien 
chirurgien  du  roi,  au  nom  de  tous  les  propriétaires  des  jardins 
et  immeubles  sis  en  deçà  de  la  rivière  de  la  Tet,  du  côté  de  la 
ville,  sous  les  moulins  du  dit  hôpital,  adressent  au  roi  cette  sup- 
plique, le  priant  de  vouloir  bien  les  autoriser  à  enlever  le  gravier 
et  arracher  tous  les  bois  et  jeunes  plantations  d'arbres  qui  se 
trouvaient  entre  les  jardins  des  intéressés  et  la  rivière,  pour  sau- 
vegarder leurs  propriétés,  donnant  à  comprendre  que  toute  cette 
partie  de  terrain  est  composée  de  tuf,  et  que  c'est  là  que  doit 
passer  le  lit  de  la  rivière.  Ceux-ci  prient  le  roi  de  faire  visiter 
les  lieux  par  le  bayle  de  Perpignan  avec  son  assesseur,  les  con- 
suls et  les  prohomens.  » 

La  requête  une    fois  remise  à    Pierre  Guilhem  de  Stagnobos, 

(1)  Voir  appendice,  $  2,  document  in  extenso.  Archives  des  Pyr.-Or., 
B.  276,  f"  178-179.  Erection  en  chapelle  de  l'oratoire  construit  près  du 
Pont  de  la  Tet,  sous  réserve  des  droits  de  la  paroisse  Saint-Jean.  21  octo- 
bre i2b5.  Instrumentum  ecclesie  Ponlis. 

(2)  Je  reproduis  in  extenso  le  document  en  latin,  à  la  suite  de  l'acte  pré- 
cédent. Appendice,  xxvn,  §  3.  Sentencia  e  declaracio  fêta  per  lo  batlle  e  con- 
sols  de  Perpenya  per  vigor  de  commissio  reyal,  per  la  quai  apper  que  lo  lit 
de  la  Tet  o  termens  d'aquell  deu  haver  lx  canes  d'ample.  Arch.  des  Pvr- 
Or.,  B.  276,  f"  173-174. 


~     !î6    — 

damoiseau,  bayle  de  Perpignan,  celui-ci,  accompagné  de  Jacques 
Jaufre,  maître  de  la  juridiction  de  la  curie  du  dit  bayle,  de  Béren- 
ger  Fava,  de  Dominique  Seigneur,  de  Ricolf  Olibe  et  de  Jacques 
Armengaud,  consuls  de  la  ville  de  Perpignan,  se  rendit  sur  les 
lieux,  objets  de  ce  débat  ;  et  l'on  décide,  après  avoir  inspecté  les 
lieux  et  pris  l'avis  de  chaque  consul,  que  des  borties  soient  placées 
suivant  une  ligne  droite,  depuis  la  partie  du  sol  composé  de  tuf 
qui  se  trouve  en  amont  du  bois  de  François  d'Oms  jusqu'au  colom- 
bier d'En  Vernet,   où  commence  le  mur  du  Tincl  de  Perpignan. 

D'un  commun  accord,  les  consuls  et  le  bayle  donnèrent  l'ordre 
de  faire  planter  aux  endroits  sus  indiqués  des  bornes  en  pierre, 
de  façon  à  ce  qu'elles  pussent  résister  aux  inondations  de  la  Tet. 
Ce  travail  fut  confié  à  Bernard  de  Vernet,  menuisier  de  Per- 
pignan et  François  d'Orle,  jardinier  de  Perpignan,  qui,  en  vertu 
de  ce  mandat,  placèrent  ces  bornes,  et  même  plantèrent  sur  le 
franc-bord  de  la  rivière  des  pieux  près  de  ces  bornes,  afin  de 
pouvoir  repérer  l'emplacement  du  lit  même  de  la  rivière. 

Un  mois  après  environ,  le  14  des  kalendes  de  juin  de  la  même 
année,  Pierre  Borro  et  André  Guiter,  conseillers  du  roi  de 
Majorque,  le  damoiseau  Pierre  Guilhem  de  Stagnobos,  bayle  de 
Perpignan,  Jacques  Jaufred,  juge  de  la  curie  du  dit  bayle,  sur  la 
demande  faite  par  certains  héritiers  possesseurs  de  terrains  le  long 
de  la  rivière,  et  sur  le  désir  exprimé  par  le  seigneur  Pierre  de 
Fonollet,  vicomte  d'Ule  (i)  et  lieutenant  du  roi  de  Majorque,  se 
rendirent  sur  les  lieux  où  l'on  avait  placé  les  bornes  et  les  pieux. 
Après  avoir  constaté  que  ces  pieux  pourraient  être  facilement 
emportés,  ce  qui  pourrait  être  à  l'avenir  la  cause  de  fréquents  pro- 
cès et  de  contestations  au  sujet  de  la  plus  ou  moins  grande  lar- 
geur du  lit  de  la  rivière,  tous  décidèrent  que'  l'on  fît  disparaître 
le  jardin  de  Guilhem  Cogombre,  jardinier  de  Perpignan,  dont  les 
terres  étaient  comprises  dans  cette  portion  de  tuf,  de  façon  à  ce 
que  le  lit  de  la  rivière  soit  définitivement  fixé  à  soixante  cannes  de 
Montpellier. 

(j  )  Pierre  de  Fenouillet  avait  été  le  premier  vicomte  d'Ule,  en  i  3  1  5.  Ct 
fut  Sanche,  roi  de  Majorque,  qui  érigea  cette  vicomte.  C'était  le  père  d'An- 
dré de  Fenouillet,  vicomte  de  Canet,  dont  j'ai  transcrit  l'acte  de  vente 
important  concernant  les  tenures  sises  au  terroir  de  Castel  Roussillon 
(5  mars  1 357). 


-  ai  - 

Les  dits  commissaires  décidèrent  également  qu'une  ligne  droite 
devait  partir,  invariablement,  de  ce  tuf  jusqu'au  colombier  d'En 
Vernet,  en  conservant  toujours  une  largeur  de  60  cannes  d'une  rive 
à  l'autre,  espace  dans  lequel  il  était  interdit  de  planter  quoi  que 
ce  soit.  On  chargea  François  d'Orles  et  Raymond  Seguer,  jar- 
diniers, de  faire  ce  bornage  dans  les  terrains  ci-dessus  men- 
tionnés. 

(%  suivre)  Henry  Aragon. 

Quelques  noms  de  plantes  #  synonymes 

Catalans-Français  #  Français-Catalans 

<fe$3^  (SUITE) 

H 

iiaricot-  —  mongeta,  fasol,  bajoca. 

hellébore.  —  voir  ellébore. 

hépatique-  —  herba  del  fetge,  ranuncle  blanca,  buixol. 

herniaire.  —  granalluda,  cent  en    granes,   herba   turca,  herba  de 

la  pedra. 
herse.  —  voir  tribule. 

hêtre.  —  faig. 

hièble.  —  ebol,  ebul,  carnosa.  Voir  aussi  sureau. 

houblon.   —   vidaula,   vidaura,   esparguls,    llupol,   lupo),    cervesa, 

piragues. 
h0UX.  —  grèvol,  boix-grèvol,  agrifoli. 

»        petit.  —  galzeran,  gatzeram,  gallarà,  boix  mascle,   brusca, 

mata-aranyes. 

hysope.  —  hisop. 

I 

if.  —  teix. 

immortelle.  —  perpetuina,  sempreviva. 
impératoire.  —  herba  de  Santa-Catarina. 
inule.  —  ull  de  cavall,  herba  de  l'ala. 
iris.  —  bruyol,  lliri  blau. 


—   iî8  — 

iris  faux-acore.  —  Hiri  groc,  contell  groc,  ribaner. 
ÎVette.  —  iva,  mirambeil,  hcrba  flatera. 
ivraie.  —  jull,  zizania,  margall. 


jasmitl-  —  jassemi,  gessami,  llessami,  englantina. 
jonc    —  jonc,  aldisia. 
jonse    —  voir  souchet. 
joubarbe.  —  mai-morrà. 
jujubier.  —  ginjoler,  arbre  de  vida. 

jusquiame.  —  velesa,  mata-gallines,  herba  caxalera,    herba  quei 
xalera,  herba  de  la  ira,  herba  de  era. 


laiterOU.  —  lletissô,  Uetsô,  llacsô,  herba  lletera,  Ueterola. 
laitue.  —  lletuga,  enciam. 
lampourde.  —  herba  a  très  claus. 
larmes  de  Job.  —  mariera. 
laurier.  —  llorer,  bacalia. 

»         Cerise.  —  llorer  real,  llorer  cirerer. 

».         rose.  —  baladre. 

»  tifl.  —  llorer  bort,  marfull. 

lavande  aspic.  —  aspit,  barballô,  espigol. 

>  Stœchas.  —  timossa,  tomani,  tomanyi,  cardigases, 

caps  de  borro. 
lenticule.  —  voir  lentille  d'eau. 
lentille.  —  llentia,  nantilla. 

>  d'eau.  —  ballarida. 

lentisque.  —  Uentiscle,    Uentrisca,    festuc,    cornicabra,    mata   de 

cabrit,  mata,  llampadona.  Voir  aussi  genêt  lentisque. 
liège.  —  voir  chêne-liège. 
lierre.  —  elra,  eura,  edra,  cendrosa. 

lilas-  —  lilà. 
lin.  —  Hi. 

lis.  —  Hiri,  llir. 

>     martagOU.  —  Hiri  morat,  marcoris,  marcolic. 
liseron.  —  campanetes,  vermellons,    fanalets,  enredadora,  corret-' 

jola,  corritxola. 
lunaire.  —  pecetes,  herba  de  la  plata. 
lunetière.  —  herba  de  les  llunetes. 
lupins.  —  llovins,  Uohissos,  tramussos. 

luzerne.  —  auzerda,  aufals,  alfals,  melgô,  melga,  meuca,  rasçlet. 
lyCOperdon.  —  pet  de  Hop,  lluFa.  (M  suivra 

Le  Gérant,  COMET.  —  Imprimerie  Catalane,  COMET,  rue  de  la  Poste,  Perpignan 


13"  Année.   N    152  15  Juin  1919 

Les   Manuscrits  non  insères  ^^    »     ,   —    v«r  4  ■     ^ 

ne  sont  oas  rendu».  M^ta  mT«  ^»     I  mT» 

Les   Articles   oarus  aans   la   Revue  M  "*     J^     ^B^    /V     I  /%     iWl    M>é 

n'engagent  que  ieurs  auteurs.       f  %^AA    A     *TL  A^<ftjLX^  JL»/ 

Organe  de  la  Société  d'Etudes  Catalanes.  —  Cotisation  :  10  fr.  par  an 

LE  PROBLÈME 

de  la  Renaissance  universitaire 

à  Perpignan 

D'après  les  échos  qui  en  sont  à  tous  déjà  parvenus,  l'idée  d'une 
renaissance  de  notre  antique  Université  perpignanaise  a  été  très 
favorablement  accueillie  dans  les  milieux  intellectuels  roussillon- 
nais.  Au  lendemain  même  de  la  parution  à  la  7{evue  Catalane  de 
mon  modeste  article  sur  ce  projet,  M.  le  chanoine  Joseph  Bona- 
font,  curé-doyen  d'Ille-sur-Tet,  le  très  compétent  Majorai  des 
Félibres  roussillonnais,  m'écrivit,  tout  le  premier,  son  enthou- 
siaste et  entière  adhésion,  tandis  que,  peu  après,  paraissait  dans 
la  même  J^evue  une  lettre,  également  approbative,  d'un  des  non 
moins  autorisés  de  nos  compatriotes,  M.  Joseph  Calmette,  profes- 
seur à  la  Faculté  des  Lettres  de  Toulouse.  Ce  document  de  tout 
premier  ordre,  émanant  très  spontanément  d'un  si  haut  talent  et 
d'un  si  distingué  technicien  des  Universités,  parut  être  à  plusieurs 
comme  la  première  pierre  posée  à  la  restauration  de  la  future 
Aiwa  mater  roussillonnaise.  11  enthousiasma  les  fervents  et  ranima 
les  timorés.  Notre  excellent  périodique  régional,  L'Eclair  de 
Montpellier,  le  publiait  aussitôt  intégralement  dans  ses  colonnes. 
La  revue  catalaniste  de  Perpignan,  Monlanyes  T^egalades,  lui  don- 
nait récemment  son  entière  adhésion  par  la  voix  de  son  directeur. 
Enfin,  la  Semaine  T(eligteuse,  qui  est  le  miroir  fidèle  de  la  pensée 
de  notre  évêque  diocésain,  Monseigneur  de  Carsalade  du  Pont, 
—  somme  toute  l'insigne  promoteur,  depuis  quatre  lustres,  de 
la    Renaissance    Catalane    en    Roussiilon,    et    dont    une    plume   on 


-    ,3o   — 

ne  peut  plus  érudite  de  la  capitale  m'écrivait  naguère  que 
nous  avions  en  lui  «  un  historien,  un  prélat  éminent»,  ce  que 
tout  roussillonnais  n'ignorait  point  déjà,  —  lui  octroyait,  en  ter- 
mes laudatifs,  sa  consécration  on  ne  peu^t  plus  autorisée.  De  tels 
encouragements  ne  doivent  pas  être  dédaignés.  Us  prouvent  que 
l'entreprise  ne  saurait  être  considérée  comme  une  utopie.  Si  l'on 
veut  réellement  assurer  à  notre  petite  patrie  un  renouveau  de 
bien-être  intellectuel,  moral,  industriel  et  commercial,  on  ne 
saurait  assez  faire  pour  accréditer,  auprès  des  masses  populaires 
autant  qu'auprès  des  professionnels  de  l'étude,  la  possibilité  et 
les  immenses  avantages  d'une  telle  œuvre.  Quand  les  hautes  com- 
pétences et  les  «  techniciens  de  nos  modernes  Universités  » 
s'évertuent  à  nous  en  assurer  le  succès,  eu  égard  aux  modalités  que 
les  mœurs  actuelles  seraient  susceptibles  de  lui  faire  subir,  on-  ne 
peut  pas  hésiter  à  mettre  au  service  d'une  si  belle  cause  les 
meilleures  volontés  et  les  crédits  indispensables. 

De  cette  possibilité  on  se  convaincra  d'autant  plus  que,  préci- 
sément dans  une  nouvelle  lettre,  à  moi  directement  adressée 
depuis  peu,  —  sur  demande  de  renseignements  complémentaires, 
—  M.  Calmette  répond  par  avance  aux  quelques  objections  que 
certains  pessimistes  seraient  portés  à  soulever  contre  le  projet  en 
question. 

Tant  est  grande  l'autorité  qui  s'attache  au  moindre  des  écrits 
de  l'éminent  professeur  universitaire  de  Toulouse,  que  je  ne  puis 
me  défendre  des  pressantes  invitations  qui  me  sollicitent  de  livrer 
à  la  publicité  cette  importante  lettre,  malgré  qu'elle  n'y  fut  point 
intentionnellement  destinée. 

Toulouse,  le  28  avril  1919. 
Monsieur  l'Abbé  et  cher  Confrère, 
Je  réponds  sans  retard  à  votre  aimable  lettre,  désirant  me  mettre  entière- 
ment à  la  disposition  de  tous  ceux  qui  veulent  donner  une  réalité  aux   idées 
lancées  par  vous  et  précisées  par  moi. 

Une  enquête  peut  avoir  son  intérêt,  surtout  pour  saisir  le  public  ;  mais 
l'essentiel  est  de  constituer  le  Comité  d'initiative  dont  j'ai  parlé  et  qui,  réu- 
nissant les  bonnes  volontés,  doit  être  l'armature  de  la  réalisation.  En  adhé- 
rant au  Comité,   les    intellectuels  auxquels  vous  faites  allusion  répondraient 


—  i  3 1   — 

par  le  fait  même  à  l'enquête  et  leur  avis  développe  ne  pourrait   que   toucher 
aux  modalités.   On    peut   réussir   sans   l'enquête,    mais   non  sans  le  Comité. 

Celui-ci  peut  se  former  d'abord  d'un  petit  noyau  de  personnalités  variées, 
—  telles  que  celles  que  vous  me  nommez,  —  autour  desquelles  saggrège- 
ront  ensuite  celles  qui,  jugées  nécessaires  et  sollicitées  de  se  joindre,  accep- 
teront cette  sorte  de  patronage  de  l'entreprise. 

C'est  une  fois  ce  premier  pas  accompli  qu'on  pourra  songer  aux  mesures 
à  prendre  et  aux  moyens  à  adopter. 

Personnellement,  je  suis  tout  prêt  à  répondre  aux  questions  qui  pour- 
raient mètre  posées  et  à  jouer  le  rôle  d'une  sorte  de  «  Conseil  technique  » 
du  Comité,  étant  professionnellement,  je  crois  bien,  le  mieux  placé  pour 
apercevoir  la  solution  lorsqu'un  problème  surgirait. 

Le  local,  comme  vous  le  dites,  serait  assez  facile  à  trouver,  et  comme  vous, 
j'aurais  un  faible  pour  la  traditionnelle  Université  qui  garde,  dans  l'onomas- 
tique locale,  le  souvenir  de  ce  qu'il  s'agit  de  ressusciter,  en  la  transposant 
bien  entendu  suivant  la  donnée  contemporaine. 

Un  point  important  sera  le  problème  financier,  sans  la  solution  duquel 
aucun  autre  ne  serait  à  envisager  et  qu'il  faut  bien  placer  à  son  plan.  Il  y 
aurait  un  minimum  de  ressource»  à  prévoir  hors  desquelles  rien  ne  naîtrait 
qui  fut  viable.  Mais  j'ai  la  conviction  que  ce  minimum  est  à  portée  et  qu'on 
ne  sera  pas  arrêté  par  une  telle  considération.  D'autres  villes  ont  des  Ecoles 
de  Médecine  qu'elles  entretiennent  et  qui  représentent  des  frais  sans  com- 
paraison aucune  avec  la  dotation  qu'il  faudrait  à  l'Université  perpignanaise 
dans  le  cadre  où  nous  la  concevons. 

Si  les  choses  en  arrivent  à  la  phase  du  positif,  je  n'hésiterai  pas,  malgré 
mes  très  pressantes  et  absorbantes  occupations  actuelles,  à  venir  passer  une 
journée  à  Perpignan  pour  examiner,  avec  les  tenants  de  la  fondation  proje- 
tée, les  éléments  primordiaux  dont  il  y  aurait  lieu  de  faire  état. 

Croyez,  Monsieur  l'Abbé  et  cher  Confrère,  à  l'assurance  de  mes  senti- 
ments très  cordiaux  et  dévoués. 

Joseph  Calmette. 

<&>&> 

Il  me  paraît  utile  de  rappeler  ici,  ne  serait-ce  que  pour 
mémoire  plus  fidèle  au  passé,  la  JMotice  historique  sur  le  rétablisse- 
ment de  l'Université  de  Perpignan  sous  la  domination  française,  que, 
en  j85j,  publia  l'érudit  archiviste  des  Pvrénées-Orientales, 
M.  Morer(j),  afin  d'en  dégager  quelques  enseignements  fort  uti- 
les a  la  solution  du  problème  qui  nous  préoccupe.  L'histoire  est 
un  perpétuel  recommencement  de  calamités  et  d'héroïsme  de 
toute  sorte.  L'époque  que  nous  vivons    a    un    tel    rapprochement 

(  i  )  Cf.  Bulletin  de  la  Société  Agricole,  Scientifique  et  Littéraire  des  Pyrénées- 
Orientales,    VU  1'  vol.  .    I  85  I  ,   pp.    201     200. 


-    i3a  — 

avec  celle  que  traversèrent,  vers  1659,  les  tenants  de  la  restaura- 
tion universitaire  en  Roussillon,  que,  aux  mêmes  maux  on  peut 
encore  opposer  les  mêmes  remèdes  et  aux  mêmes  difficultés  les 
mêmes  moyens  de  succès. 

«  Le  Roussillon,  —  dit  la  charte  de  fondation  de  l'Université 
de  Perpignan  (i),  —  est  remarquable  non  seulement  par  la  ferti- 
lité du  sol,  mais  aussi  par  les  hommes  de  mérite  qu'il  produit  ». 
Notre  pays,  en  effet,  à  l'égal  de  celui  de  l'Ariège,  «  ne  produit 
pas  seulement  du  fer,  mais  des  hommes».  11  en  est  aujourd'hui 
comme  il  en  fut  dans  tous  les  temps. 

Les  guerres  franco-espagnoles  qui,  au  xvn'  siècle,  de  1640  sur- 
tout à  1659,  avaient  ravagé  notre  Roussillon  et  finalement  abou- 
tirent à  l'annexion  diplomatique  de  notre  province  à  la  France, 
par  le  traité  des  Pyrénées,  1659,  avaient  tellement  mis  la  pertur- 
bation dans  toute  notre  contrée,  que  le  goût  des  sciences  et  des 
lettres  avait  presque  entièrement  disparu.  «  Les  esprits,  inces- 
samment préoccupés  de  luttes  sanglantes  qui  mettaient  en  ques- 
tion la  fortune  et  l'avenir  de  leur  pays,  oubliaient  dans  le  bruit 
des  armes  les  beaux-arts,  enfants  de  la  paix.  Le  peuple,  ruiné  et 
forcé  de  se  battre,  n'avait  plus  le  temps  de  se  livrer  à  l'étude  ; 
et  les  hommes  d'élite  se  retiraient  bien  loin  du  tumulte,  ou  cher- 
chaient dans  l'enceinte  du  cloître  le  calme  nécessaire  à  leur 
bonheur  et  à  leurs  travaux. 

«  Après  l'occupation,  la  France  devait  surmonter  de  grands 
obstacles  pour  ramener  à  elle  l'esprit  des  habitants  ;  car  il  ne. 
faudrait  pas  croire,  par  une  vaine  illusion,  que,  dès  les  commen- 
cements, les  Roussillonnais  aient  embrassé  avec  ardeur  la  cause 
des  Français  :  ils  restaient  toujours  Catalans  au  fond  du  coeur,  et 
vaincus,  mais  non  soumis,  leurs  secrètes  pensées  étaient  pour  l'an- 
cien gouvernement...  Ce  n'est  que  peu  à  peu,  et  lorsque  les  usa- 
ges et  les  moeurs  de  la  nouvelle  patrie  s'implantaient  par  le  con- 
tact au  cœur  du  Roussillon,  que  la  France  put  être  assurée  de 
posséder  réellement  cette  province. 

«  Pour  hâter  cet  heureux  résultat,  le  moyen  le  plus  simple 
était    de    rétablir    l'Université  et  de  familiariser  ainsi  le  peuple, 

(1)  L'Université  de  Perpignan  avait  été  canoniquement  érigée,  à  la  prière 
du  roi  d'Aragon,  par  l'antipape  d'Avignon,  Clément  VU,  en  1379,  puis 
reconnue  par  les  papes  légitimes. 


—    .33    - 

par  l'enseignement,  à  une  nouvelle  langue.  Louis  XIV  le  comprit  ; 
et,  peu  de  temps  après  la  conquête,  il  ordonna  aux  consuls  de  la 
très  fidèle  ville  de  Perpignan,  et  autres  villes  de  la  Province,  d'es- 
tablir  des  écoîles  royales  en  chiscune  des  diites  villes  pour  apprendre 
aux  enfants  la  langue  françoise,  la  doctrine  chrestienne,  à  lire  et  à 
écrire.  Cet  enseignement  devait  être  gratuit  ;  et  c'était  aux  villes 
et  communautés  à  pourvoir  au  logement  et  au  salaire  des  profes- 
seurs. 

«  L'Université  fut  en  même  temps  réorganisée  pour  les  hautes 
études.  On  y  enseignait  la  philosophie,  la  théologie,  le  droit 
canon,  le  droit  civil  et  la  médecine.  On  y  ajouta  successivement 
plusieurs  autres  cnaires. 

Les  revenus  annuels  de  l'Université  ne  dépassaient  pas 
3ooo  livres  ou  9000  fr.  de  notre  monnaie  d'avant-guerre,  et  les 
appointements  des  professeurs  200  livres  ou  600  francs  de  notre 
monnaie  d'avant-guerre.  Au  reste,  les  exigences  de  ces  maîtres 
ne  s'élevaient  pas  plus  haut  que  leurs  besoins,  tout  étant  relatif  à 
une  époque  où  chacun  savait  se  constituer  dans  son  logis  une 
«  médiocrité  dorée  ».  Aussi  bien  est-il  particulièrement  instructif 
de  signaler  ici,  avec  M.  Morer,  «  le  noble  désintéressement  de 
l'homme  savant  et  dévoué  à  son  pays,  de  ce  recteur  qui,  en  1743, 
parlant  en  son  nom  et  au  nom  de  tous  les  professeurs,  disait  au 
ministre  de  Louis  XV  :  «  Je  ne  vous  demande  rien,  ni  pour  moi,  ni 
pour  les  professeurs  :  nous  serons  contents,  pourvu  que  nous  ayons  un 
bâtiment  convenable  pour  y  faire  nos  exercices  littéraires,  et  que  nous 
puissions  voir  notre  Université  rétablie.  »  Ce  recteur,  que  M.  Morer 
ne  nomme  pas,  est  sans  nul  doute  Pierre  Garriga,  qui  exerçait  les 
fonctions  de  rectorat,  en  1739,  et  dont  le  successeur,  en  1750, 
fut  Joseph  de  Gaffard  (1). 

L'Université  était  alors  en  effet  dans  une  situation  précaire. 
Comme  on  avait  installé  dans  ses  locaux  —  rue  Petile-de-la-Monnaie 
actuelle  —  l'Hôtel  des  Monnaies,  les  professeurs  n'eurent  pour 
y  faire  leurs  classes  qu'une  maison  sombre,  humide  et  insuffisante  ; 
force  fut  aux  professeurs  de  droit  de  demander  asile  à  l'Hôtel 
de  Ville  pour  leurs  cours  ;  la  classe  de  médecine  fut  même  sup- 
primée, faute  de  local. 

(  1)  Livre  det  quatre  claus,  ms.,  liste  des  recteurs  ;  Bibliothèque  de  la  Ville 
de  Perpignan. 


-    ,34  - 

Ce  pénible  état  de  choses  traîna  en  durée.  Ce  que  ne  purent 
faire  des  Roussillonnais,  par  manque  de  ressources,  d'initiative  ou 
bonne  volonté,  il  fut  donné  à  un  illustre  étranger  de  le  réaliser. 
Cet  homme  de  haut  talent  et  de  haut  crédit  auprès  des  pouvoirs 
publics  fut  le  Maréchal  Comte  de  Mailly,  que  le  gouvernement 
de  Louis  XV  avait  envoyé  à  Perpignan,  en  1749,  comme  gouver- 
neur particulier  du  Roussillon,  tandis  que  le  Comte  de  Noailles 
en  était  gouverneur  général,  lui  aussi  très  dévoué  à  la  cause  de 
l'Université. 

De  bonne  heure,  le  Comte  de  Mailly  s'était  identifié  avec  les 
intérêts  du  pays,  il  en  comprit  les  besoins  et  le  caractère  très 
attachant.  «  Toujours  actif  et  vigilant  comme  un  père,  pour  tout 
ce  qui  concernait  le  Roussillon,  il  intercéda  :  grâce  à  cette  puis- 
sante intervention,  l'Université  fut  entièrement  reconstituée  »,  à 
l'endroit  même  où  se  trouvent  aujourd'hui  le  Musée  et  la  biblio- 
thèque de  la  Ville. 

La  pose  de  la  première  pierre  eut  lieu  le  27  juin  1760  et  la 
bénédiction  solennelle,  par  Mgr  de  Gouy  d'Avrincourt,  chan- 
celier-né de  l'Université,  le  10  janvier  1763. 

Les  anciennes  Facultés  :  1°  de  Théologie  (Ecriture  sainte,  dogme 
et  morale)  ;  2'  de  Droit  (romain,  français,  droit  canon  et  civil)  ; 
3°  de  Philosophie  ou  des  Arts;  4°  de  Médecine  (chirurgie,  médecine) 
reprirent  leurs  classes  avec  un  renouveau  d'entrain.  On  y  ajouta 
même  un  Muséum  d'histoire  naturelle,  un  jardin  des  plantes, 
des  cours  de  botanique,  de  physique,  de  chimie,  de  mathémati- 
ques, un  cours  gratuit  d'accouchement  pour  les  sage-femmes. 

Toutes  les  classes  de  ia  société  rivalisèrent  de  zèle  pour  le  bon 
fonctionnement  de  l'oeuvre.  Grâce  aux  générosités  du  roi,  de 
l'évêque  diocésain,  de  la  municipalité,  du  comte  de  Maill-y,  du 
comte  de  Noailles  et  d'autres  nombreuses  personnalités,  ecclé- 
siastiques et  laïques,  dont  certaines  archives  testamentaires  nous 
ont  conservé  les  noms,  les  revenus  annuels  de  l'Université  montè- 
rent, dès  1759,  de  3ooo  livres  à  24.000,  c'est-à-dire  à  j  20.000  fr. 
environ  de  notre  monnaie  d'après-guerre.  Le  traitement  des  pro- 
fesseurs s'éleva  lui  aussi  de  3oo  livres  à  5oo  et  même  à  1000, 
c'est-à-dire  à  5ooo  fr.  environ  de  notre  monnaie  actuelle  (d'après- 
guerre).  Encore  faut-il  remarquer  que,  pour  augmenter  leurs 
honoraires,  ces  professeurs  pouvaient  cumuler  avec    d'autres   trai- 


-    i35   - 

tements  ;  c'est  ainsi  que  les  ecclésiastiques  étaient  en  même  temps 
ou  chanoines,  ou  simples  feenéficiers,  et  jouissaient  de  ce  fait 
d'une  double  prébende.  Les  laïques,  professeurs  de  droit,  de 
médecine  et  de  chirurgie,  exerçaient,  d'un  cours  à  l'autre,  leur 
métier  respectif  en  ville  ;  leur  renommée  d'universitaires  ne  fai- 
sait qu'y  augmenter  d'autant  le  nombre  de  leurs  clients  et  le  chif- 
fre de  leurs  revenus.  Les  professeurs  de  sciences  faisaient  mar- 
cher de  pair  leurs  classes  du  collège  avec  leurs  cours  de  l'Univer- 
sité. Par  où  l'on  voit  quelle  pourrait  être  aujourd'hui  la  marche  à 
suivre,  soit  pour  le  recrutement  des  professeurs,  soit  pour  l'éta- 
blissement de  leurs  moyens  d'existence,  dans  la  nouvelle  Univer- 
sité dont  rêvent  les  amis  du  Roussillon. 

Quant  au  chiffre  des  élèves,  il  se  maintint,  comme  par  le  passé, 
entre  3oo  et  400,  de  1759  à  1789.  Us  se  recrutaient  non  seule- 
ment en  Roussillon,  mais  encore  en  Catalogne  espagnole  et  dans 
tout  ie  Midi  français,  tant  était  universelle  la  bonne  renommée 
de  leurs  professeurs. 

Une  si  bienfaisante  et  si  utile  institution  ne  devait  point  survi- 
vre, hélas  !  à  la  révolution  de  89.  S'il  est  vrai  qu'elle  fut  rem- 
placée par  d'autres  «  qui  ont  produit  d'immenses  résultats  »,  il 
faut  convenir  cependant,  avec  M.  Morer,  <i  que  sous  le  rapport 
scientifique  et  littéraire,  nos  pertes  ne  sont  pas  encore  toutes  répa- 
rées. Autrefois,  les  enfants,  après  avoir  reçu  une  instruction  gra- 
tuite au  milieu  de  leurs  familles,  pouvaient  encore,  au  sortir  de 
leurs  premières  études,  embrasser  la  carrière  libérale  la  plus 
convenable  à  leurs  goûts  et  à  leur  capacité  ».  Us  y  étaient  d'ail- 
leurs admis  à  peu  de  frais,  et,  quand  ils  étaient  indigents,  gratui- 
tement. «  Des  professeurs  habiles  et  presque  fous  nés  dans  le  pays 
se  livraient  avec  succès  à  l'enseignement,  et  toutes  les  branches 
des  sciences  avaient  un  interprète.  Aussi  ce  vide  a-t-il  été  vive- 
ment senti  !  »  Sans  doute,  —  ajouterai-je,  en  suivant  la  pensée  de 
M.  Morer,  —  malgré  la  disparition  de  notre  Université,  il  y 
eut,  —  il  y  a  encore  de  nos  jours,  —  chez  nous,  des  hommes 
éminents,  voués  de  coeur  à  la  prospérité  du  pays,  travaillant  sans 
relâche  au  perfectionnement  de  l'industrie,  à  l'agrandissement 
du  domaine  intellectuel  et  civilisateur.   Par  leurs  talents,  par  leur 


—   i 36  — - 

zèle,  par  l'opiniâtreté  de  leurs  efforts,  ils  ont  prouvé  que  la 
science  et  l'amour  du  progrès  avaient  trouvé  en  eux  de  dignes 
représentants,  susceptibles  de  soutenir  la  comparaison  avec  l'élite 
intellectuelle  des  autres  provinces  françaises. 

Par  ailleurs,  si  l'on  pouvait  aujourd'hui  douter  de  la  générosité 
des  Roussillonnais  à  l'égard  de  la  future  Université  dont,  au  fond 
du  cœur,  ils  souhaitent  certainement  tous  la  renaissance,  il  n'y 
aurait  qu'à  se  ressouvenir  des  largesses  immenses  que,  au  cours 
des  deux  derniers  siècles,  leur  pays  a  prodiguées  au  bénéfice 
d'ceuvres  humanitaires,  industrielles,  sociales  ou  autres,  multiples 
et  grandioses,  soit  dans  la  vaste  étendue  du  département,  soit  au 
centre  de  son  chef-lieu.  Ces  dons  et  ces  charités  de  toute  sorte 
proclament  de  la  manière  la  plus  éloquente,  par  eux-mêmes,  et  le 
génie  de  la  race,  et  la  fécondité  de  la  terre  catalane,  et  l'inlassa- 
ble générosité  de  ses  valeureux  fils.  11  ne  saurait  venir  en  pensée 
à  quiconque  les  a  vus  et  admirés  de  près,  de  méconnaître  non 
plus  l'héroïsme  des  catalans  du  Roussillon,  au  cours  de  ces 
quatre  dernières  années  de  guerre,  sur  les  champs  de  bataille  où 
le  devoir  les  appela.  Pas  davantage,  on  ne  peut  fermer  les  yeux 
sur  les  merveilles  accomplies,  durant  ces  années  terribles,  par  la 
charité  roussillonnaise  en  faveur  de  la  patrie  et  de  ses  héros. 
Bien  osé  serait-on  à  prétendre  dresser  le  bilan  minutieux  des 
millions  catalans  qui,  amoureusement,  anonymement  parfois,  se 
sont  penchés  sur  les  infortunes,  innombrables  et  cruelles,  que 
créèrent  ces  tragiques  événements.  Autant  vaut  aussi  renoncer  au 
dénombrement  des  multiples  miracles  de  charité  pieuse,  dont  les 
murs  et  les  églises,  tant  du  Roussillon  que  des  pays  dévastés, 
porteront  à  tout  jamais  l'empreinte,  -sans  préjudice  des  villages- 
martyrs  adoptés  par  elle. 

C'est  justement  dans  cet  envol  sublime  de  tous  les  cœurs  rous- 
sillonnais vers  un  si  haut  idéal,  charitable  et  patriotique,  qu'il 
sied  en  définitive  de  fonder  les  plus  fermes  espérances  pour  l'heu- 
reuse restauration  de  l'antique  Université  perpignanaise.  Le  passé 
et  le  présent  sont  le  plus  sûr  garant  du  succès  à  venir,  dans  le 
plus  troublant  des  problèmes  qui  puisse  surgir,  en  ce  moment, 
celui  de  la  question  financière,  comme  on  le  devine.  11  ne  s'agit, 
avant  tout,  que  de  se  mettre  à  l'œuvre  avec  confiance,  sans  retard, 
par  l'organisation  préalable  d'un  Comité  a"  initiative,  ainsi  que  nous 


-    ,37   - 

y  convie  le  professeur  Calmette.  Nu)  autre  que  lui-même  n'en 
saurait  être  la  cheville  ouvrière.  A  tous  les  amis,  à  tous  les 
enfants  de  la  petite  patrie  de  se  mettre  maintenant  sur  les  rangs 
et  de  répondre  a  l'appel  d'un  tel   «  maître  ». 

Jean  Sarrète. 


El  Ram  nuvial 

A  na  J^enée  Llech. 

Avui,  tothom  te  mira  al  cantô  del  carrer, 

i  sota  el  lladoner  murmureja  la  vella  : 

Que  es  guapa,  angel  del  cel  !  La  Verge  del  Roser 

passa  amb  el  manto  estes.  Quina  flor  de  donzella  ! 

L'angel  agenollat,  bressolant  à  la  ma 
l'encenser  cisellat  i  de  plata  anunciava 
l'hora  plena  de  gracia,  i  l'has  vist  â  l'altar, 
aquell  angel  daurat  i  la  Verge  tant  blava. 

Desitjaria  aixis  que  tingués  el  meu  cant 

una  virtut  de  prometençes  misterioses  ; 

6  bé  me  veurâs  tû,  si  no  pue  reixer  â  tant, 

escampillar  à  tos  peus  un  fresc  eixâm  de  roses. 

I  ara  doncs  vetaqui  mon  primer  ramellet  ; 
com  una  neu  es  blanc  â  Nadal  esbandida  ; 
l'he  escapçat  en  l'honor  de  l'abundosa  llet 
que  ens  feia  regalar  una  mateixa  dida. 

A  la  dida,  ja  i  tal  !  li  plau  un  ta!  record  ; 
i  te  somnia  encar,  menuda  i  primadeta, 
quan  penjava  al  bressol  la  cirera  de  l'hort 
envermellida,  que  arrapava  ta  maneta. 

Tôt  aquell  bonic  temps  no  l'ha  pas  descuidat  ; 
i  avui,  prou  presumida  amb  sa  cofa  planxada, 
té  â  la  vora  en  Tia,  son  home,  cap-al^at, 
valent,  dret  com  un  fus,  content  de  sa  llaurada. 


—    .38  — 

Eli  es  l'exemple  ferm  del  brau  treballador 
que  va  conjuminant  les  cullites  segures  ; 
ella,  amb  son  ampla  teta  i  plena  de  saô, 
ni  un  sol  dia  ha  parât  de  criar  criatures. 

1  lo  que  en  die,  ja  ho  se,  no  s'ho  pendràn  per  mal, 
que  sempre  ens  han  mirât  com  la  propria  mainada  ; 
i  tu  els-hi  tornarâs,  amb  complaença  igual, 
en  honor  de  la  llet  una  rosa  nevada. 

La  llet  es  lo  primer  que  te  cal  desitjar 
pel  nodriment  d'infants,  corona  de  la  dona, 
i  la  dida  ho  veurâs  que  un  dia  te  dura 
les  ametlles  que  fan  la  llet  mes  fina  i  bona. 

Un  segôn  ramellet  encare  t'he  lligat, 

als  marges  corbeirancs  ;  i  es  tôt  de  satalies, 

per  que  no  oblidis  mai,  Nuvia,  en  ton  nou  estât, 

que  en  els  mateixos  rams  altre  temps  les  cullies. 

Esbraven  dolçament  un  baume  enyoradiç  ; 
neixen  en  els  roquers,  tôt  entorn  de  Corbera, 
i  pinten  coma  aval!  un  troc  de  paradis, 
i  pujen  pels  graons  de  Ilosa  à  Graolera. 

Se  repenjen  damunt  l'aigua  de  Sant  Juliâ, 
quan  floreixen  oiius  i  riuen  cogullades  ; 
i  a  Corbera  de  Dalt  tôt  enrunat  n'hi  hâ 

demét  de!  pedruscall  de  les  cases  nafrades. 

Quan  corries  pels  cims  i  els  aires,  sens'  afanys, 
morena,  blanc-vestida,  i  la  trena  desfeta, 
amb  tota  la  bondat  de  la  claror  dels  anys, 
engalanaven  el  teu  ces,  oh  minyoneta  ! 

Aixis  guardis  tôt  temps  l'amor  del  teu  pais, 
l'humilitat,  la  senzillesa  i  l'alegria  ; 
i  si  algûn  fill  t'endressa  el  seu  primer  somriç, 
que  floreixi,  tôt  nu,  com  una  satalia  ! 


-   ,39    - 

Oh  Nuvia,  res  no  val  aquêt  clôt  muntanyés, 
l'ombrivola  ciureda  al  cami  de  Corbera, 
el  castell  que  estén  l'ombra  en  la  penya.  Mai  mes 
ho  dcscuidis,  si  vas  en  terra  forastera. 

En  tos  somnis  veurâs  Sant  Maurici  enclotat, 
sa  terrada  en  planiol  i  la  font  rubillosa, 
el  corriol  esquerp  que  va  â  la  Trinitat, 
i  l'iglesia  d'amunt  daurada  i  silenciosa. 

A  l'iglesia  d'amunt,  ont  resaven  avans, 

arrimats  â  l'altar,  tos  avis  i  mos  avis, 

un  dia  t'hi  veurém,  rodejada  d'infants, 

que  de  pensar  en  els  vells  els  tornarâ  mes  savis. 

Ensenya-els  sobretot  nostra  llengua  pairal  !, 
que  la  fassin  rajar  dels  llavis,  fresca  i  neta, 
que  sapigan  llegir  mon  aire  nuvial. 
]  aixô,  mira-t'hi  prou,  qu'es  mon  vot  de  poeta. 

Doncs,  ara  he  prou  parlât.  No  era  tant  sols  per  mi, 
que  la  dida  amb  ma  veu  te  feia  enraonfa. 
Tôt  el  senzill  Corbera  avui  t'ha  volgut  dir 
sa  primitiva  i  embalsemada  poesia. 

Mes  no  t'he  fet  flairar  tôt  el  ram.  Tant  se  val  ! 
El  mes  bonic  sancneja  amb  la  rosa  pororada  ; 
ja  la  sabra  triar  dins  l'ombra  nuvial 
el  teu  mestre  i  senyor  al  qui  t'haurâs  lligada. 

Joseph-S-  Pons. 
Maig  1919. 


DOCUMENTS  HISTORIQUES 

sur  la  Ville  de  Perpignan 

<^^  SUITE) 

Le  huit  des  calendes  de  juin  de  la  même  année,  les  nommés 
François  d'Orles  et  Raymond  Seguer,  en  vertu  du  mandat  qu'ils 
avaient  reçu  des  dits  délégués,  se  rendirent  au  jardin  de  Martin 
de  Morella,  où  ils  placèrent  le  long  de  ce  terrain  une  borne  en 
pierre,  distante  de  trois  cannes  et  demie  de  Montpellier  d'un  cer- 
tain pieu  placé  sur  le  bord  de  la  dite  rivière.  Cette  borne  en 
pierre  fut  scellée  dans  le  jardin  même  du  dit  Martin  à  une  dis- 
tance d'une  canne  de  Montpellier. 

De  là,  les  délégués  allèrent  au  chemin  qui  était  attenant  au 
jardin  de  Raymond  d'Orles,  où  l'on  avait  déjà  placé  une  borne 
en  pierre,  distante  du  lit  de  la  rivière  de  quatre  cannes  de  Mont- 
pellier. 

Après  avoir  vérifié  l'emplacement  de  la  borne  située  sur  la 
limite  du  bien-fonds  de  Bernard  Pollestres,  mercier  de  Perpi- 
gnan, on  mesura  la  distance  qui  existait  entre  le  franc-bord  de  la 
rivière  et  la  dite  borne,  qui  se  trouvait  être  à  une  distance  de 
trois  cannes. 

On  prit  également  les  distances  des  bornes  placées  le  long  des 
biens  de  Raymond  Sera  et  Jacques  Narbonès,  jardiniers,  évaluées 
à  trois  cannes  de  Montpellier.  Sur  les  terrains  de  Jacques  Narbo- 
nès et  d'En  Arnat,  la  distance  était  de  cinq  cannes;  sur  les  biens 
de  Pierre  Raymond  et-  de  Guilhem  André,  la  distance  était  de 
trois  cannes.  La  borne  qui  séparait  les  biens  de  Guilhem  André 
et  de  l'Hôpital  des  pauvres  de  la  ville  de  Perpignan  était  distante 
du  lit  de  la  rivière  de  huit  cannes  et  demie  ;  celle  qui  séparait  le 
bien  de  Pierre  Mir  et  du  dit  Hôpital  était  distante  du  lit  de  dix- 
sept  cannes. 

Les  bornes  de  Pierre  Guasch  et  Pierre  Mora,  jardiniers,  étaient 
distantes  du  lit  de  la  rivière  de  20  cannes  ;  celles  de  Pierre  Ray- 
mond et  de  la  veuve  Jeanne  Gil  étaient  distantes  de  19  cannes 
de  Montpellier. 


—  141    - 

Les  biens  de  Guilhem  Maso,  de  la  famille  du  roi  de  Majorque 
et  Jean  d'Aldiard,  négociant  de  Perpignan,  se  trouvaient  à  une 
distance    de  onze  cannes. 

Le  bornage  une  fois  terminé,  tous  les  clavarii  de  Perpignan, 
ainsi  que  les  jardiniers  Jean  Aicard,  Pierre  Raymond,  Pierre 
Guasch,  Pierre  Mora  et  tous  les  propriétaires  riverains  de  la 
Tet  prièrent  le  juge  de  rédiger  un  acte  relatif  à  cet  accord  et 
d'en  délivrer  un  à  chaque  intéressé. 

Cet  acte  fut  rédigé  par  Bernard  Brandi,  en  présence  des 
témoins  Jacques  Vaquer,  de  Bason,  Guilhem  Olibe,  roulier, 
Pierre  Boule  de  Saint-Estève,  Arnald  Magench,  boucher,  Ber- 
nard Brandi,  scribe,  et  Bérenger  Jean,  nonce  de  la  curie  du  bayle 
de  Perpignan. 

L'acte  fut  souscrit  par  Bernard  de  Lillet,  scribe  de  la  curie  du 
bayle  de  Perpignan,  qui,  à  la  requête  des  parties  contractantes,  a 
apposé  son  seing  manuel. 

A  la  suite  de  ce  document,  d'une  écriture  postérieure  d'un  siè- 
cle environ,  on  désigne  en  catalan  toutes  les  propriétés  qui  furent 
délimitées  à  cette  époque. 

En  aquesta  carta  son  nomanades  les  possessions  que  lavores 
foren  termanades  e  en  aquelles  posades  pedres  biaves,  et  quantes 
canes  deu  haver  de  les  dites  pedres  fins  al  terma  de  les  lx  canes 
del  lit  de  la  Tet  en  la  orta  de  Mayoles  (i). 

4.  —  Remise  faite  par  Raymond  Serda,  jurisconsulte,  lieute- 
nant du  Procureur  Royal,  aux  deux  «  ouvriers  »  de  l'alignement 
de  la  Tet,  de  tout  le  droit  appartenant  au  Roi  sur  l'ancien  et  sur 
le  nouveau  lit  de  cette  rivière,  moyennant  quatre  cents  florins 
Aragonais. 

1Q  mars   1  378  (1) 

(Remissio  fêta  per  lo  Lochtinent  de  Procurador  Reyal  del  lit 
de  la  Tet  veyll  e  novell.) 

Suivant    l'acte    dressé    a    Perpignan,    le  20,  décembre   1378,  et 

(  1  1  Archives  des  Pyr.-Or.,    B.  276,  f"'  173-174. 

(2)  Le  document  en  latin  est  intégralement  reproduit  a  lu  fin  de  cette 
étude,  a  la  suite  des  autres  pièces  justificatives  :  appendice  xxvii,  $  4.  Arch. 
des  Pyr.-Or.,  B.  376,  f'  174. 


—    i42    — 

reçu  par  André  Romei,  notaire  public  de  Perpignan,  Raymond 
Serda,  avocat  de  Perpignan,  lieutenant  de  Bérenger  de  Maga- 
role,  procureur  royal  dans  les  Comtés  de  Roussillon  et  de  Cer- 
dagne,  fit  la  remise  de  tout  le  droit  appartenant  au  Roi  sur  le 
nouveau  et  sur  l'ancien  lit  de  la  rivière  à  Jean  Magench  et 
Guilhem  Vidal,  qui  avaient  procédé  à  l'alignement  du  fleuve  de 
la  Tel,  au  nom  de  tous  les  propriétaires  des  terrains  situés  dans 
la  Salanque,  en  Roussillon,  du  côté  du  château  de  Bompas,  qui 
possédaient  des  biens  fonds,  des  cens  et  honneurs  dans  la  dite 
Salanque. 

Le  dit  Serda  reconnaît  avoir  reçu,  des  dits  ouvriers  ci-dessus 
désignés,  une  somme  de  400  florins  d'or  aragonais,  dont  cent  flo- 
rins ont  été  payés  comptant,  et  le  solde,  soit  trois  cents  florins, 
ont  été  déposés  et  devront  être  payés  par  les  diverses  personnes 
qui  devaient  contribuer  aux  différents  travaux. 

Après  avoir  approuvé  et  confirmé  la  dite  transaction,  relative 
au  nouveau  tracé  de  la  rivière,  faite  par  le  chevalier  Raymond  de 
Périllos,  Gouverneur  des  dits  Comtés  de  Roussillon  et  de  Cerda- 
gne,  le  dit  Raymond  Serda  déclare  réserver  les  droits  du  Roi 
intégralement. 

L'acte  fut  passé  à  Perpignan,  le  19  mars  1378  (année  de  la 
Nativité),  et  approuvé  par  Raymond  Serda  qui  l'a  signé,  en  pré- 
sence des  témoins  Bernard  Oltzina,  bayle  de  Prade,  Raymond 
Girone,  avocat,  et  François  Blanquet,  notaire  (1). 

(^  suivre)  Henry  Aragon. 

(1)  Arch.  des  Pyr.-Or.,  B.  276,  P  174. 

Renaissance 

Au  grand  poète  catala  J.-Sebastia  Pons. 

D'autres  avaient  sculpté  les  cueilleuses  d'olives 

Aux  profils  sarrasins, 
Les  vignerons  velus,  fumants  de   pourpres  vives. 

Qui  foulaient  des  raisins  ; 


-    ,43   - 

Le  pâtre  de  montagne  en  son  manteau  de  bure 

Et,   dans  l'air  qui  brûlait, 
Le  muletier  chargeant  des  blocs  de  neige  pure 

Au  dos  de  son  mulet. 

Us  avaient,  dans  le  bois,  tailJé  de  sombres  Vierges, 

Des  Christ  au  dur  dessin, 
Gémissant,  pieds  cloués,  sous  les  flammes  des  cierges, 

Le  jour  du  Jeudi-Saint 

Mais  le  marbre  des  vers  d'où  naissent  leurs  sculptures 

Sous  le  ciseau  qui  mord, 
Comme  leur  bois  vermillonné  d'enluminures 

Leur  arrivent  du  Nord. 

Us  peignent  leur  français  de  couleurs  catalanes, 

Quand  vous,  Sébastia, 
Vous  demandez  son  buis  amer  à  Marquixanes 

Et  son  marbre  à  Ria. 

C'est  pourquoi  votre  strophe  a  ce  parfum  agreste 

A  nul  autre  pareil 
Et  pourquoi  votre  marbre  est  si  vivant  qu'il  reste 

Attiédi  de  soleil. 

Il  est  rose  et  veiné  comme  une  chair  surprise 

Qu'un  dieu  pétrifia, 
Et  la  Nvmphe  captive  en  l'olivette  grise 

Renaît,  Sébastia, 

Si,  d'un  arbre  tordu  fouillant  la  rude  écorce, 

Vous  sculptez  sans  dessein, 
Au  gré  du  bois  noueux,  la  cambrure  d'un  torse, 

Ou  la  grâce  d'un  sein, 

Ainsi,  quand  vous  taillez  ces  fraîcheurs  verdissantes, 

La  sève  y  perle  encor, 
Mais  nous,  les  bûcherons  des  langues  vieillissantes, 

Nous  coupons  du  bois  mort 

Et,  pour  vous  seulement  que  la  Dryade  accueille, 

Refleurit,  à  l'écart, 
Le  renaissant  laurier  qui  ceignit  de  sa  feuille 

Les  tempes  de  Ronsard. 

Henry  Muchart. 


Quelques  noms  de  plantes  $  synonymes 

Catalans-Français  #  Français-Catalans 

<^$S^  [SUITE) 

M 

mâche.  - —  dolceta,  benc. 

maïs.  —  blat  d'india,  blat  de  moro,  mil)  gruà,  dacsa. 
marguerite.  —  margarida,  margarideta,  margaridoya. 
marjolaine.  —  majorana,  moraduix,  marduix. 
marronnier.  —  castanyer  d'india,  castanyer  bort. 
marrube.  —  malrubi,  malroig,  marreus,  mata-porcs,  col  de  may- 
natge. 

martagon.  —  voir  lis. 

massette.  —  boga,  bova,  balca. 

matricaire.  —  camamilla  borda. 

mauve.  —  malva. 

mélie.  —  arbre  sant. 

mélilot.  —  almegô,  corona  de  rei,  herba  de  les  abelles. 

»  bleu.  —  herba  de  ventura. 

mélisse.  —  voir  citronelle. 

melon.  —  meiô. 

»        d'eau.  —  sindria. 
menthe.  —    menta,     mentorala,     rementola,     rementerola,    herba 
bona,  herba  sana. 
»  COq.  —  voir  tanaisie. 

»  Sauvage.  —  mentastra,  mentrasta,    menta   borda,    menta 

de  borro.  Voir  aussi  pouliot. 
mercuriale.  —  morterol,   murtarol,    malcoratge,    tarra,    vina-me- 

querrer. 
merisier.  —  cirerêr. 
micocoulier.  —  lladoner. 

millepertuis.  —  trescam,  trescames,  trescalam,  transflorina,   pin- 
gell,  pericô  groc,  herba  de  Sant-Joan. 

millet  (petit).  —  mill. 

>       (gros).  —  voir  maïs. 


-    »45   - 

molène.  —  blenera-candeiera,  candelera,   juvénal. 

momordique.  —  cogombre  boig. 

morelie  d0UCe=amère.  —  solana,  moreila  de  marge. 

morille  —  mûrgula,  rabassoia. 

mouron.  —  morrellô,  picapoll,  pic  de  gallina. 

moutarde.  —  mostarda.  mostassa,  mostaga. 

muflier.  —  badelis,  conillets,  gos,  gingoll. 

mûrier.  —  morera,  amorera. 

muSCUri.  —  ail  de  colobra,  barralets,  calabruxes,  viola  de  pastor. 

myrte.  —  murtra. 

myrtille.  —  voir  airelle. 

N 

îiard.  —  nart. 

nasitort.   —  voir  cresson  alénois. 

navet.  —  nap. 

néflier.   —  nespler,  nesprer. 

népète.  —  herba  dels  g?ts,  nepta. 

nerprun.  —  aladern,  lladern,  acader,  ivreta,  trauca-perols,  grana 

d'Avinyô. 
niella.  —  nielle. 
nigelle.  —  aranyes. 
noisetier.  —  avellaner,  auran. 
noyer.  —  noguer  (pacana). 

o 

œillet-  —  clavell,  clavelliner. 
Oignon.  —  ceba. 
Olivier.  —  oliu,  olivera. 

>         Sauvage.  —  ollasrre,  ullastre. 

ombellifères.  —  pampes. 

Ombilic.  —  barrer  de  capellà,  orella  de  monja. 

OphryS-  —  abelles,  mosques  d'ase. 

Oranger-   —  taronger. 

OTCanette.  —  roja  marina,  raspeta.     I 

OrchiS-  —  pentecosta. 

Orge.  —  ordi. 

>      Sauvage.  —  voir  brome. 


—   J46  — 

Origan.  —  orenga.  Voir  aussi  marjolaine. 

OrmCSU,  orme.  —  olm,  om,  olmissà,  olmisser,  aumisser. 

Orobanche.  —  orobanca,   frare,  cap  de  frare,  margalida. 

oronge.  —  oriol. 

Orpin.  —  crespinell,   bona  ventura,  herba  de  la  cremadura. 
Ortie.  —  estrigol,  ortiga,  ortigol,  xiripia. 
Oseille.  —  agrella,  agreta. 
OSier.  —  vim,  vimen. 

>        Saille.  —  vimet,  sarga,  sarguera. 
OSyriS.  —  ginestola,  retrama.  [M  suivre) 


Desesper 


Pel  pis  rost 
d'un  torrent, 
a  sol  post 
vaig,  gement 
i  plorant 
davallant. 


A  on  vaig  i 
Se  me'n  duu, 
com  un  raig 
de  vent  cru, 
l'aspre  horror 
del  dolor. 


M'ha  trait 
mon  amor, 
i  en  la  nit 
del  meif  cor 
xiscla  fer 
desesper. 


Vora  el  tronc 
d'un  pi  bord, 
que  amb  un  ronc 
llarg  i  sord 
l'aire  bat, 
m'he  aturat. 


1  aîli,  mut, 
test,  fred,  groc, 
assegut 
sobre  un  roc, 
l'alba  ha  vist 
mon  cos  trist. 


Joaquim  Ruyra. 


«*"'•» 


Llevant  de  taula 

Nous  recevons  la  T^evista  du  i"  juin  1919  (any  V).  (Corts  Cata- 
lanes, 61  3,  Baixos,  Barcelona.)  —  Cette  même  revue  a  édité,  en 
janvier,  un  Mlmanac  de  la  7{evista  pour  l'année  1919,  qui  est  très 
curieux,  qui  recueille  les  diverses  directions  de  la  pensée  et  de 
l'art  barcelonais  et  est  illustré  de  reproductions  de  tableaux  et 
sculptures  de  l'école  moderne  ;  nous  y  avons  notamment  remarqué 
«  La  Femme  Assise  »,  du  sculpteur  roussillonnais  Aristide  Maillol. 

♦ 

Dans  ce  numéro,  Ferran  Soldevila  signale  une  nouvelle  orien- 
tation des  études  historiques,  ce  qu'il  appelle  une  «  Restauraciô 
de  Valors  ».  Les  historiens  espagnols,  les  historiens  étrangers  à 
leur  suite,  considéraient  la  couronne  catalano-aragonaise  comme 
un  royaume  sans  histoire  ;  ils  en  faisaient  une  «  Coronilla  de« 
Aragon  ».  Sur  les  livres  de  classe,  en  auréole  autour  des  cartes 
de  la  Péninsule,  les  images  des  rois  primitifs,  mais  nulle  effigie 
du  «  Conqueridor  »  ou  du  «  Cérémonies  ».  Aujourd'hui,  et  même 
à  l'étranger,  on  donne  à  l'histoire  une  orientation  plus  juste  et 
plus  sincère.  Ferran  Soldevila  cite  :  Die  Jlùssere  Politik  Alfcnsus  777 
von  Aragonen  (Berlin,  Leipzig,  1911-12)  de  Lûdwig  Kiiipfel  et 
The  J^ise  of  Ihe  Spanish  Empire  (New- York,  1918)  de  Roger  Bige- 
low  Merriman,  professeur  à  l'université  de  Harvard.  11  extrait  de 
ce  dernier  ouvrage  une  page  où  sont  comparés  le  génie  catalan 
et  le  génie  aragonais.  Les  catalans  sont  plus  audacieux  et  plus 
cosmopolites  ;  les  aragonais  plus  obstinés  et  conservateurs.  F.  Sol- 
devila aurait  pu  justement  se  souvenir  des  travaux  de  l'école  fran- 
çaise, de  l'œuvre  de  notre  collaborateur  Joseph  Calmette,  pro- 
fesseur à  la  faculté  de  Toulouse,  et  de  la  Junte  Supérieure  de 
Catalogne  de  G.  Desdevises  du  Dézert,  doyen  de  la  faculté  de 
Clermont-Ferrand  (New-York,  Paris,  1910.)  D.  du  Dézert  établit, 
dans  le  même  esprit,  une  comparaison  entre  la  Junte  aragonaise 
réunie  à  Teruel  en  1809  et  la  Junte  catalane,  et  il  dit  :  «  la  Junte 
catalane  ne  déploie  pas  tant  d'éloquence,  elle  est  plus  pratique  et 
plus  simple  et  fait  sa  besogne  sans  inutile  fracas  ». 


-   148  — 

Nous  reproduisons  une  notule  de  cette  même  T(evista. 

«  CAL  ESMENTAR  —  Que  à  Catalunya  han  tingut  els  fran- 
cesos  les  mes  vives,  generoses  i  eficients  simpaties  d'Espanya,  tôt 
el  temps  de  la  guerra. 

]  a  desgrat  de  la  comprensiô  catalana,  podem  veure  per  vota- 
cions  com  les  del  llibre  La  Hiiéraiure  de  guerre  de  Jean  Vie,  que 
la  bibliografia  francesa  des  de  l'agost  de  1914  a  l'agost  de  1916 
no  ofereix  ni  una  sola  donada  un  xic  per  damunt  de  les  espanyo- 
lades  de  Blasco  Jbanez  i  de  reciprocitat  amb  el  sentit  espiritual 
de  Catalunya.  » 

Contentons-nous  d'observer  que  cette  exacte,  attentive  et  cour- 
toise réciprocité  était  difficile,  surtout  de  1914  à  1919.  La  plu- 
part de  nos  écrivains  étaient  au  front.  Mais  nous  croyons  pouvoir 
annoncer  que  l'un  de  nos  collaborateurs  prépare  un  ouvrage  sur 
l'Espagne  et  la  guerre.  Nous  espérons  que  les  sympathies  de  la 
Catalogne  y  seront  mentionnées. 

♦ 

Joaquîm  Ruyra  nous  annonce  une  nouvelle  édition  de  ses  Tulles 
Venlisses.  Il  publiera  incessamment  un  nouveau  recueil  de  nou- 
velles ;  nous  lirons  avec  joie  ces  pages  de  l'auteur  de  Marines  y 
'Boscalges,  l'un  des  maîtres  de  la  prose  catalane. 

Notre  ami  Caries  Riba,  qui  a  traduit  les  Eglogues  de  Virgile, 
nous  promet  également  son  Primer  Llibre  d'Estances. 

♦ 

Nous  apprenons  que  le  Docteur  Joseph  Fallen  a  été  nommé 
«  capoulié  »  par  le  Consistoire  du  Félibrige.  Nous  espérons  que 
Je  nouveau  «  capoulié  »  sera  favorable  à  la  cause  de  notre  Main- 
tenance ;  Valère  Bernard,  Je  bel  artiste  que  nous  aimons  tous  ici, 
nous  écrivait  d'ailleurs,  le  18  mai  J919,  à  propos  de  cette  même 
Manienenço  Telibrenco  dou  7{oussihoun  :  «  Es  peréu  un  de  mi  grand 
desi  e  sariéu  urous  de  la  vèire  s'ourganisa  souto  li  darnié  jour  de 
moun  gouvêr  »  ...  «  N'en  parlarai  à  noste  acamp  counsistourian 
de  la  Santo-Estello  que  celebraren  per  Pandecousto  à  Marsiho.  » 
Cette  Maintenance  pourrait  être  organisée  si  elle  réunissait 
vingt-cinq  adhérents. 

g  J.-S.  P. 

Le  Gérant,  COMET.  —  Imprimerie  Catalane,  COMET,  rue  de  la  Poste,   Perpignan 


13'  Année.  N'  153  15  Juillet  1919 


Les   Manuscrits  non  insères 
ne  son:  dis  rendu*. 


REVUE 

Les  Articles   Darus  dans  ia   Revue  M  "*    ^^    ^T^    J^L     |  ^%     I^J    B^" 

n'engagent  que  leurs  auteurs  \/*»    A    i»J^iH™  A^* 

Organe  de  la  Société  d'Etudes  Catalanes.  —  Cotisation  :  40  fr.  par  an 

«>i<S«^c8J^t  taTNi.t8J^«K8(^i  «^Ni.tS'ïvi.  c8fa^.  W^S»  «SJtnS.  <8fa^.<8f>ic8f'»^  <8j^Ni-  «j'^i.  «r>^ 

LLUM 

Fiat  lux  ! 

Joguinejant  sus  la  ventalla  closa, 
un  raig  de  sol  llisca  per  una  escletxa 
y  triomfadora  en  la  cambra  s'en  entra 

sa  fletxa  d'or. 

Els  miralls  s'en  estranyen, 
mes  la  claror  una  anima  los  torna 
y  tota  cosa  ara  sembla  renaixer 

a  la  llum  pura. 

Aixî  en  ton  anima,  o  dolça  Catalunya, 
poguès  el  sol  de  gloria  y  de  justicia, 
d'un  raig  sagrat  de  llum  Uibertadora, 

llevar  el  vel  nègre  ; 

y  aixis  ton  digne  poble 
poguès,  de  nou,  sentir  en  ses  entranyes 
encendre's  flama  santa  y  nova  vida 

amb  eixa  aurora. 


Y  l'oraciô  per  l'infinit  s'en  munta 
de  la  llum  nostra  : 

O  llum  serena  y  benfactora, 
eterna  mare, 
llum  creadora, 


—    1 5o   — 

jà  que  '1  mateix  sol  per  tots  brilla, 

pels  forts  y  '1s  dèbils, 
fes  que  Uiurament  poguem  viure 
y  morir  sus  d'aquesta  terra, 
o  Hum  eterna,  esguard  de  dalt, 
y  que  la  nit  s'esvanaeixi 

del  cor  dels  homes, 

del  cor  dels  pobles, 
y  cayguin  totes  les  cadenes, 

y  mori  el  mal. 
Llum  serena,  Hum  d'idéal, 

ix-nos  de  l'ombra  ! 
♦ 
Que  s'esbatani  la  ventalla, 
de  bat  a  bat  que  s'obri  el  cor, 
y  que  '1  sol  inondi  la  cambra, 
y  que  la  llum  nos  torni  forts, 
y  que  dels  esperits,  mes  cultes, 
s'en  munti  l'oraciô  d'amor 
a  la  llum  santa,  a  la  llum  d'or. 

Llum  serena,  llum  d'idéal, 
ix-nos  de  l'ombra  ! 

Caries  Grando. 

Curiositats 

Heusaqui  els  anys  que  van  viure  uns  quants  escriptors  immortels  : 
Ariost,  l'autor  de  Orlando  furiôs,  poeta  italiâ,  5o.  anys  ;  Balzac, 
novelista  francés,  5)  anys  ;  Boileau,  poeta  francés,  j5  anys; 
Byron,  l'autor  del  Don  Joan,  poeta  angles,  63  anys  ;  Camoens,  de 
Os  Lusiades,  portugués,  en  va  viure  55  ;  Cervantes,  69  ;  Corneille, 
trâgic  francés,  78  anys  ;  Dant  Alighieri,  el  gran  autor  de  la 
Divina  comedia,  italiâ,  56  anys  ;  Dikens,  novelista  angles,  58  anys  ; 
Gœthe,  autor  del  Tausl,  poeta  alemany,  va  viure  83  anys  ; 
Petrarca,  el  cantor  de  Laura,  italiâ,  70  anys  ;  Shakespeare,  l'autor 
de  Tiamlel,  angles,  52  anys  ;  Milton,  l'autor  del  Paradis  perdui,  66. 


L'article  EL  ou  LO  ? 

Le  titre  de  £/  Bon  Pedriç  a  été  régulièrement  corrigé  Lo  Bon 
Pedriç  par  la  vaillante  revue  Montantes  T\egalades  et  le  non  moins 
vaillant  Coq  Catalan.  Ce  souci  de  purisme  ne  me  déplaît  pas.  On 
m'apprend  donc  qu'il  existe  deux  formes  de  l'articie  défini  en 
catalan.  M.  Pierre  Vidal,  qui  aime  et  qui  lit  les  manuscrits  et  les 
vieux  textes,  et  dont  nous  connaissons  tous  la  haute  compétence, 
est  partisan  de  cette  forme  lo.  11  faut  reconnaître  qu'elle  réunit 
presque  tous  les  suffrages  en  Roussillon.  Il  n'en  est  pas  de  même 
en  Catalogne,  où  la  plupart  des  écrivains,  et  même  les  érudits, 
par  exemple  Miquel  y  Planas,  le  fastueux  éditeur  de  nos  clas- 
siques, ont  adopté  la  forme  el. 


Il  est  certain  que  l'article  lo,  los  est  la  forme  normale  du  vieux 
catalan.  11  est  non  moins  certain  que  l'article  el,  els,  est  la  forme 
normale  actuelle,  chez  les  écrivains.  Que  dit  le  peuple  ?  La  forme 
lo  est  presque  perdue  à  Barcelone  ;  elle  subsiste  en  Roussillon 
concurremment  avec  la  forme  el  ;  les  majorquins  disent  es,  sa,  au 
pluriel  es,  ses.  Mais  les  poètes  des  Baléares,  partisans  de  l'unité, 
oublient  cette  forme  insulaire  dans  leurs  poèmes.  C'est  là  d'ail- 
leurs une  facile  concession,  mais  encore  faut-il  la  signaler.  En  Rous- 
sillon, Mossén  Caseponce,  qui  a  voulu  écrire  du  langage  vivant, 
a  adopté  la  forme  el,  tout  simplement  parce  qu'il  l'entendait 
autour  de  lui  (El  Ferrer  de  Figueras  —  Els  Reis  d'Orient  — 
Els  très  Conseils).  Si  donc  i'écrivain  roussillonnais  veut  écrire  un 
langage  vivant,  s'il  a  le  souci  des  normes  actuelles  du  catalan  lit- 
téraire, toutes  ses  faveurs  iront  à  cette  dernière  forme. 


Halte-la!  Et  la  Tradition?  Et  la  leçon  de  nos  chroniqueurs? 
Vous  voulez  attaquer  le  génie  lui-même  de  la  langue  ?  —  Le 
moins  du  monde  !  Mais  une  langue  est  un  organisme  vivant,  une 
langue  évolue.  Vous  ne  prétendez  pas  rénover  la  morphologie  du 


—     .52    — 

vieux  français  ?  Vous  acceptez  la  morphologie  d'Anatole  France  ? 
Pourquoi  donc,  lorsque  vous  écrivez  catalan,  changez-vous  d'opi- 
nion et  préférez-vous  Ausias  March  à  Joan  Maragall  ? 


11  est  évident  que  l'article  el  est  plus  euphonique  que  l'article 
lo.  L'ancien  catalan  connaissait    d'ailleurs,  lui  aussi,   la  forme   el  : 

e  scondudament  el  Rey  de  Granada  havia  endreçat...  (j) 

[Cr.  Jacme.] 

Mais  il  l'employait  surtout  après  la  conjonction  copulative,  ou 
après  la  préposition  en  [en  lo  =  el]  : 

E  eh  bisbes  e  els  richs  homens  qui  vengueren  ab  ele,  vezren. 

[Cr.  Jacme.] 

Parfois  même  cette  conjonction  n'était  pas  indiquée,  mais  il 
faut  reconnaître  que  el  avait  encore  la  valeur  de  e  el  : 

Vos  pregam  per  la  amor  que  vos  nos  devets,  el  be  queus  havem  feyt,  el 
deute  que  es  entre  vos  e  nos.  [Cr.  Jacme.] 

Cette  existence  de  l'article  el  dans  la  chronique  de  Jacme  nous 
prouve  que  sa  généralisation  actuelle  n'est  pas  due,  comme  on  le 
craint,  à  l'influence  du  castillan.  S'il  est  peut-être  possible  d'ad- 
mettre que  le  castillan  a  favorisé  cette  généralisation,  il  faut  tou- 
jours observer  que  el  est  conforme  au  génie  de  la  langue  catalane, 
qu'il  est  le  résultat  normal  d'une  contraction,  qu'il  devait  fatale- 
ment s'étendre  par  analogie. 

L'ancien  catalan  réduisait  encore  l'article  neutre  lo  après  une 
voyelle  : 

Fer  mes  de   I  possible  [Tirant  lo  blanck.] 

Natura  havia  fet  tôt  lo  que  fer  podia,  que  en  res  no  havia  fallit  quant  al 
gênerai  e  molt  menys  en  lo  particular.  [Tirant.] 

Aujourd'hui,  dans  les  deux  cas,  nous  emploierions  l'article  neu- 
tre lo  ;  mais  les  partisans  de  la  tradition  inamovible  devraient  le 
réduire  après  une  voyelle  ;  je  ne  crois  pas  qu'ils  se  soumettent  à 
cette  loi. 

(i)Cet  exemple  et  ceux  qui  suivent  sont  tirés  de  la  belle  grammaire 
catalane  de  Pompeu  Fabra. 


-    1 53  — 

♦ 

En  résumé,  on  respecte  aussi  bien  la  tradition  en  écrivant  el 
qu'en  écrivant  lo.  On  respecte  aussi  la  naturelle  évolution  de  la 
langue.  Enfin,  on  se  soumet  à  la  norme  actuelle  du  catalan  litté- 
raire. Certes,  nous  avons  droit  à  un  certain  particularisme  dans 
la  syntaxe,  j'en  conviens.  Et  nous  nous  y  soumettons,  à  ce  parti- 
cularisme, afin  d'être  compris  de  nos  lecteurs,  afin  d'assurer  la 
diffusion  de  notre  langue  (i).  Nous  savons  qu'il  est  des  conces- 
sions nécessaires,  mais  nous  connaissons  aussi  la  logique  de  l'unité. 
Or,  cette  logique  de  l'unité,  l'exemple  du  peuple  et  la  tradition 
bien  comprise  nous  indiquent  sûrement  l'emploi  de  l'article  el. 
D'ailleurs,  que  l'on  emploie  l'une  ou  l'autre  de  ces  deux  formes, 
les  œuvres  d'art  seront  toujours  des  œuvres  d'art.  C'est  le  privi- 
lège des  artistes  de  s'élever  au-dessus  de  ces  discussions  gramma- 
ticales, de  ne  pas  confondre  la  forme  et  l'essence. 

11  serait  regrettable  que  les  catalanistes  du  Roussillon  se  sépa- 
rent les  uns  des  autres  pour  une  semblable  querelle,  pour  la  forme 
d'un  article  (el  ou  lo),  l'écriture  d'une  préposition  (amb  ou  ab), 
ou  d'une  conjonction  (i  ou  y  —  pourquoi  pas  e  ?),  la  suppression 
d'une  lettre  parasite  (h)...  11  me  semble  que  nos  idées,  notre 
amour  de  la  terre  et  d'une  langue  savoureuse  et  bien  construite, 
dominent  ces  signes  et  ces  conventions  orthographiques.  7-a  T{evue 
Catalane  l'a  heureusement  ainsi  compris.  Elle  a  récemment  déclaré 
n'imposer  aucun  système  d'orthographe  ;  elle  demeure  ouverte  à 
tous  nos  écrivains.  Ainsi,  tous  ceux  qui  placent  Tes  soins  de  notre 
cause  commune  au-dessus  de  querelles  d'un  ordre  différent  nous 
comprendront.  J.-S.   P. 

|  i  Les  partisans  de  LO  par  tradition  devraient,  dans  le  même  esprit, 
toujours  postposer  le  pronom  complément.  Ils  ne  le  font  pas.  Pourquoi  ? 

Nacionalitat  de  flors,  arbusls  i  arbres 

El  clavell  prové  d'italia  ;  el  Uiri,  de  Siria  ;  la  marguerida,  de 
Xina  ;  el  tulipàn,  d'Assia  ;  el  llorer.  de  la  illa  de  Crcta  ;  la  rosa 
cornu.  d'Europa  ;  la  de  cent  fuiles.  del  Càucas  ;  el  narcis,  d'italia  ; 
la  hortensia,  de  Xina  ;  l'heliotrop,  del  Perù  ;  la  sempreviva.  de 
Orient  ;  el  jacinto,  de  Turquia  ;  la  lila,  de  India  ;  el  mirt,  d'Assia  ; 
la  olivera.  de  Grecia  ;  el  taronger,  de  Xina  ;  cl  girassol,  del  Pcru  ; 
la  resella.  d'Arabia  ;  el  xiprer.  de  Tartaria  ;  el  geçami.  de  India  ; 
l'acacia,  de  Berberia. 


DOCUMENTS  HISTORIQUES 

sur  la  Ville  de  Perpignan 

^^^»  (SUITE) 

Procès-verbal  de  Valïgnemeni  du   lit  de  la   Tel 

depuis  la  "Basse  jusqu'à  Casie!-T(oussillon  (i) 

j378 

5.  —  Ordinatio  fêta  sobre  la  reparacio  de)  llit  de  la  Tet,  del 
cap  de  la  Vassa  an  avall  tirant  a  la  volta  de  la  Salancha. 

Con  esperientia  nos  mostra  que  lo  fluvi  del  aygua  appellada  la 
Tet  ha  trencat  de  nou  en  vers  les  costes  de  Bajoles  e  de  Castell 
Rosseylo  ;  per  la  quai  cosa  es  estât  tractât  e  rahonat  moites  e 
diverses  vegades  entre  los  hereters  de  la  part  de  vers  Bonpas  e 
de  la  Salancha  d'una  part,  e  los  hereters  de  la  part  de  les  costes 
damunt  dites,  d'altre,  de  venir  a  concordia  ;  e  a  fi  que  la  dita 
Tet  tenga  via  dreta  vers  les  parts  de  Bajoles  e  de  Castell  Ros- 
sello,  com  sia  pus  profitos  que  lixar-la  axi  com  esta,  ni  encare 
mudar-la  per  altre  part  ;  em  per  amor  d'ayso  l'onrat  mossen 
Ramon  de  Perellos,  cavalier,  governador  en  los  comtats  de  Ros- 
sello  e  de  Cerdanya  per  lo  molt  ait  senyor  Rey,  ab  conseil  del 
honrat  misser  P.  Comte,  assessor  seu,  qui  à  hull  han  vista  la  dita 
aygua,  volents,  présents,  requirents  e  consentents  les  parts  d'avall 
scrites,  ordona  sobre  les  causes  damunt  dites  e  d'aval!  scrites,  per 
la  manera  seguent  : 

Primo,  vol  e  ordona  que  aquells  devers  la  Salancha  pusquen 
mètre  l'aygua  de  la  Tet  en  esta  manera  :  ço  es  que  del  cap  de  la 
Vassa  en  dret  lo  lit  de  la  aygua  al  cap  del  ort  d'En  Boffill  vers 
la  tremuntana,  e  d'aqui  a  dreta  linya  vers  la  torra  de  Castell- 
Rossello  dins  lo  correch  qui  es  devant  los  albans  d'En  Perestor- 
tes,  a  dreta  linya  xxxx  canes  de  lit  entro  e  dins  lo  dit  correch 
davant  los  dits  albans,  e  del  dit  correch  entro  a  la  mara  veyla, 
fora  de  la  mota  de  Castell-Rossello,  e  x  canes  de  bosch    de   cada 

(i)  Je  reproduis  dans  une  autre  étude  la  traduction  d'une  partie  de  ce 
document,  cette  traduction  se  trouvant  également  dans  les  archives. 


—    i  55 

part  per  fortalici  del  dit  lit  ;  e  tôt  ço  que  s'  pendra  per  lit  de  la 
dita  aygua  e  per  padincs  (?)  (i)  o  fortalici  del  dit  lit,  se  prena  e 
sia  estimât  en  franch  aiou. 

Item,  que  si  trench  o  trenchs,  ribella  o  ribelles  se  fasien,  de 
les  quais  ho  per  les  quais  lo  moli  d'En  P.  Macip  (2)  ho  rech 
d'aquell  e  aquells  qui  han  possessions  dins  los  dechs  (?)  contenguts 
en  lo  présent  capitol,  hagués  dampnatge  are  ho  en  temps  ende- 
venidor,  del  lavador  de  Bajoles  tro  a  la  volta  qui  pren  lo  rech 
dejos  lo  dit  moli,  que  aquells  de  la  part  devers  la  Salancha  sien 
tenguts  de  pagar  les  dos  parts  de  la  messio  que  s'  faria  per  ado- 
bar  e  reparar  los  dits  trench  o  trenchs,  ribella  o  ribelles,  e  '1  dit 
moli  o  els  hereters  d'aquell  la  romanent  tercera  part. 

Item,  que  atés  que  En  P.  Macip  hi  ha  millor  causa  e  major 
que  negun  altre,  e  axi  matex  que  pren  de  présent  major  damp- 
natge que  negun  altre,  en  espéra  mes  à  pendre  per  ço  cor  li  par- 
tex  hom  sa  possessio,  ordona  lo  dit  mossen  lo  governador  que 
aytant  com  pendràn  de  les  sues  possessions  als  o  bones  o  correchs 
per  mètre  la  dita  aygua  o  lit  o  padmes  (?)  que  sien  scituades  axi 
com  les  millors  qui  sien  dins  la  estima  que  s'  fara  per  lo  dit  lit  o 
padmes  (?). 

Item,  que  de  les  x  canes  de  padmes  les  quais  serân  ordonades 
de  la  part  vers  les  costes  e  de  la  part  vers  la  Salancha,  aytant 
quant  te  la  possessio  o  frontera  d'En  Appia  e  de  son  nabot, 
En  Catalâ,  al  dit  P.  Macip  sien  donades  ad  acapte,  axi  com  als 
autres  aytantes  com  voira  ni  mester  n'aura  per  conservacio  del  dit 
seu  moli. 

Item,  que  de  les  dites  x  canes  que  seràn  per  barreres  estien  e 
hajen  à  estar  tost  temps  en  bosch  e  assocades  del  ait  de  mija  cana. 

Item,  que  les  x  canes  d'ample  de  cascuna  part  sien  dades  novella- 
ment  ad  acapte  en  franch  alou  als  frontalers,  si  pendre  ho  volien, 
sino  ad  altres  persones,  exceptât  ço  que  voira  penre  en  P.  Macip  ; 
e  que  ells  sien  tenguts  de  tenir  les  piantades  e  assocades  tost 
temps  del  ait  de  miga  cana,  e  que  tôt  so  que  s'aura  dels  dits 
acaptes   sia   e   déjà   esser   d'aquells  de  la  part  de  Bonpas  e   de  la 

(1)  Probablement  :  francs-bords.  On- peut  lire  :  padines,  padmes,  padnes, 
padiveres. 

(i)  En  Macip  était  propriétaire  du  moulin  de  Castell-Rossello.  Voir  mon 
étude  Caslell-T^ossello  au  moyen-âge.  11'  série,  pp.  "Q-8 - . 


—   i56  — 

Salancha,  en  ajutori  de  la  dita  obra,  pusque  ells  les  compren,  e 
que  sien  tenguts  de  plantar  la  dita  frontera  per  tôt  aquest  ivern 
qui  ve,  aytant  com  sera  bo  à  plantar. 

Item,  que'ls  frontalers  de  la  dita  Tzt  qui  pendrân  ad  acapte  de 
cascuna  part  les  dites  deu  canes  d'ample  que  serân  en  bosch  plan- 
tades  per  padiveres  (?)  del  dit  lit  de  la  Tet  fasedor,  que  si  aybres, 
lenyes,  fustes  o  rebugades  se  posaven  dins  les  dites  xl  canes  del 
lit  de  la  Tet,  que  aquelles  los  dits  frontalers  livarân  o  livar  farân 
de  présent  à  lurs  propries  messions  e  despeses,  per  tal  manera 
que  en  Io  dit  lit  de  les  dites  xxxx  canes  no  haja  algun  empatxer, 
e  que  les  dites  lenyes  e  fustes  sien  dels  dits  frontalers,  si  donchs 
aquells  de  qui  serien  no  volien  pagar  la  messio  e  1'  dampnatge 
que  les  dites  lenyes  e  fustes  haurien  donats. 

Item,  que  los  dits  compradors  arrancarân  e  arrancar  farân  tots 
aybres,  plantes  qui  sien  dins  lo  dit  llit  de  xxxx  canes,  qui  serân 
ordonades  per  les  persones  en  aço  eletes. 

Item,  que  dins  lo  dit  llit  fasedor,  segons  que  sera  mesurât  e 
assignat  per  les  persones  qui  s'i  deuen  elegir  segons  la  forma  desus 
dita,  que  en  aquell  lit  de  xl  canes  se  haja  à  fer  rech  o  rechs  per 
on  passas  l'aygua  de  la  Tet  una  vegada  tan  solament,  a  coneguda 
dels  stimadors  qui  hi  serân  per  abdos  les  parts  elegits. 

Item,  que  à  l'aygua  qui  va  à  Tayneres  no  sia  empatxada  ne 
tapada,  fins  que  1'  lit  de  la  dita  Tet  fahedor  sia  complit  e  acabat, 
à  coneguda  de  les  persones  que  serân  sobre  aço  eletes. 

Item,  que  les  dites  xl  canes  de  Mont  Peyler  d'ample,  e  aytan- 
tes  con  sera  de  lonch,  de  la  boca  de  la  Vassa  fins  fora  la  terra 
de  Castell-Rossello,  les  quais  pendra  hom  per  lit  e  padineres  de 
ia  dita  Tet,  sien  stimades  per  nu  bons  homens,  dos  de  cascuna 
part,  elegidors  so  es  per  la  part  deves  Bajoles  en  Perpenya  Boys, 
en  G.  Laurador,  ortolâs,  e  per  la  part  de  la  Salancha  Jacme 
Bajoles  e  Bernât  Spert,  ortolâs  ;  e,  en  cas  que  no  s'avenguessen, 
per  terser  en  Johan  Nom-de-Deu.  E  que  tots  los  nu  bons  homens 
elegits  per  les  dites  parts  e  i'  tersser  fassen  e  sien  tenguts  de  fer 
segrament  e  homenatge,  en  poder  nostre,  que  be  e  lialment  se 
haurân  en  les  coses  damont  dites  e  d'avall  scrites. 

Item,  que  1'  lit  vell  e  padines  (?)  sia  e  haja  à  romandre  als 
compradors  del  lit  nou,  ço  es  en  aquells  qui  y  contriburân  à 
pagar  al  lit  nou,  e  que  aquells  lo  puguen  vendre  e  dar  ad   acapte 


-  ,57  - 

per  ço  que  d'aço  que  s'en  haura  se  ajue  de  pagar  ço  que  costarâ 
lo  lit  nou  de  fer,  e  la  compra  d'aquell  ;  e  que  els  hereters  de  la 
part  de  les  Costes  de  Bajoles  e  de  Castell  Rossello  hajen  a  deffi- 
nir  e  remetre  tôt  dret  que  en  aquell  haguessen,  per  tal  manera 
que  la  remissio  valla  e  tenga  a  coneguda  d'un  savi. 

Empero  que  si  l'aygua  de  la  dita  Tet  se  mudava  per  altre  part, 
que  lo  dit  lit  nou  fasedor  de  présent  fos  d'aquells  de  la  part  de 
ves  Bompas  e  de  la  Salancha. 

Item,  que  les  pagues  dels  preus  de  les  possessions  qui  s*  pen- 
drân per  lo  lit  e  padmes  de  la  Tet  se  paguen  pusque  estimades 
serân,  ço  es  del  dia  que  s'  començarâ  la  obra  a  très  meses 
seguents,  la  mitât  à  les  persones  de  qui  s'  pendrân  les  dites  pos- 
sessions, e  l'altre  meytat  del  dia  que  s'  començarâ  la  dita  obra  à 
cinch  meses  prop  seguents.  E  si  persones  misérables,  pobres  hi 
havia,  que  sien  pagades  de  présent  con  la  obra  sera  començada, 
à  coneguda  nostra. 

Item,  que  totes  persones  qui  profit  pendrân  del  dit  mudament 
de  Tet,  à  coneguda  de  les  damunt  dites  persones  eletes,  pagarân 
al  dit  mudament  are  de  présent  fasedor  segons  mes  e  menys,  ad 
arbitre  dels  damunt  dits  :  e  aço  sens  tota  appellacio. 

Item,  que  si  negun  hereter  d'aquells  de  qui  hom  pendra  de  lurs 
possessions  per  fer  lo  lit  e  padmes  (?)  de  la  Tet  noveilament  fase- 
dor no  volia  ço  que  li  sobraria  de  la  dita  possessio.  que  en  aquell 
cars  ho  haguessen  à  pendre  los  vesins  o  vesi  d'aquell,  à  coneguda 
de  les  persones  damont  elegides,  e  aquelles  haguessen  à  pagar  an 
aquell  de  qui  pendrien  la  terra  o  ço  que  sobraria  de  la  dita  pos- 
sessio, ço  que  séria  estimât  per  los  dits  elets. 

Es  entencio  nostra  que  per  aquesta  présent  ordinacio  no  ente- 
nem  perjudicar  en  res  als  senyors  de  Castell  Rossello  e  de  Bajo- 
les, ni  a  d'altres  senyors  qui  dins  los  termens  de  Bajoles  e  de 
Castell  Rossello  hajen  senyories,  en  res  ;  ans  d'aytant  dampnatge 
con  pendrân  dins  lo  lit  e  padmes  (?)  noveilament  fasedora,  sia 
satisfet  à  ells,  à  coneguda  nostra  e  dels  elets  ;  e  si  profit  ne  pre- 
nen,  que  sia  comtat  à  coneguda  nostra  e  dels  elets. 

(%  suivre)  Henrv  Aragon. 


(i)  Archives  des  Pyr.-Or.,  B.  276,  f"  175-176. 


Quelques  noms  de  plantes  tf  synonymes 

Catalans-Français  tf  Français-Catalans 

«^$3^  (SUITE) 


paliure.  —  arn,  espi,  espinavessa,  espinavis. 
palmier  dattier.  —  palmer,  palmera. 

»         nain.  —  bargallô,  margalio,  fasser. 
panacée.  —  voir  berse. 
panais.  —  pastanaga  salvatge. 
panic.  —  sarrcig,  sarrell,  potes  de  gallina. 
panicaut.  —  panicalt,   penical,  espinacalt,   espinacart,  cart  corre- 

dor,  cent  caps. 
paniS-  —  voir  setaire. 
pâquerette.  —  voir  marguerite. 
pariétaire.  —  morella  roquera,  herba  de  paret,  herba  de  la  Mare 

de  Deu,  herba    de    Nostra   Dona,  granadella,  camaroja,   cama- 

roig. 
passerage.  —  herba  de  la  fluxiô. 
passiflore.  —  passionera,  flor  de  la  Passio. 
pastel.  —  pastell. 

patience.  — «paciencia,  panadella  (et  aussi  llengua  de  béu). 
paumelle.  —  pàmula,  palmula. 
pavie.  —  pavia. 

pavot.  —  cascall,  herba  dormidora. 
pêcher.  —  presseguer.  Voir  aussi  alberge  et  pavie. 
pensée.  —  pensament,  herba  de  la  Trinitat. 
persicaire.  —  sanguinari,  pebre  d'aigua. 
persil.  —  givert,  julivert. 
pervenche.  —  pervinca,  herba  de  primavera,  vinca-pervinca. 

petit  poivre.  —  aloci 

peuplier.   —  poil,  pull,  pollanc,  pollancre,  xôp. 

»  blanc  —  alber,  poil  blanc,  arbre  blanc. 

phlomiS  blanche.  —  salvia  d'Arago. 
phytolaque.  —  arbre  de  tinta,  rahims  de  borro. 


—   1 59  — 
picridie-   —  voir  chicorée  sauvage. 

pied  d'alouette.  —  espucla. 

>      de  COQ-   —  voir  panic. 
piloselle.  —  pelosella. 
piment-  —  voir  poivron, 
pimprenelle.  —  pimpinella,  pantinella. 
pin.  —  pi,  pinatell. 
pissenlit-  —  pixallit,  masteguera,    mastec,    dent    de    lleé,    llacsô 

d'ase,  colitx. 
pivoine.    —    ebutiscla,    peonia,    llamponi,    llampudul,    herba    de 

Santa  Rosa. 
plantagO-  —  matifôc. 
plantain.  —  plantatge. 

i  pucier.  —  seragatona,  herba  de  les  puces,  pucera. 

poireau.  —  porre,  porro,  cevallot. 
poirée.  —  voir  blette. 
poirier.  —  perer. 
poiS-  —  pesol,  peso,  tirabec. 

»       chiche.  —  ciurô,  cigrô,  sairô. 
poivron.  —  pebrot,  pebrina,  bitxo. 
pomme  de  terre.  —  patana,  trumfa. 
pommier.  —  pomer.  Voir  aussi  calville. 
potentille.  —  agram  de  porc,  cinc  en  rama, 
potiron.  —  voir  citrouille. 
pOUliot.  —  poliol,  puliot,  purriol. 
pourpier.  —  verdolaga. 

prêle.  —  sannua,  aspereta,  aspreta,  cua  de  rata,  cua  de  cavall. 
primevère.   —  cucut,  herba  del  cucut,   herba   de   Sant   Pau,  pri- 

mavera,  primula. 
prunelier.  —  ars  nègre,  aranyoner. 
prunier.  —  pruner,  prunera. 
pSOralier.  —  cabruna,  herba  cabrera. 
pulicaire.  —  herba  de  Sant  Roc. 
pulmonaire.  —  herba  pulmonera,  pulmonaria. 
pyrèthre.  —  pelitre.  A  suivre) 


Repichs 

CÇO 

Nos  poètes  roussillonnais 

Notre  Secrétaire  Général,  M.  Charles  Grande»,  vient  de  rem- 
porter un  beau  succès  aux  Jeux  Floraux  de  l'Ateneu  du  District  11 
de  Barcelone.  Son  envoi  :  Llum,  que  nous  donnons  dans  le  pré- 
sent numéro,  a  obtenu  le  i"  accessit  à  l'Eglantine  (premi  de  la 
Pàtria). 

Diction  et  chants  catalans 

Nous  constatons  avec  joie  que  la  langue  catalane  est  toujours 
en  honneur  dans  nos  fêtes. 

Au  grand  Concert-bal  de  la  Fédération  des  Groupes  Amicaux 
des  Pyrénées-Orientales,  le  jeune  Noguès  a  interprété  avec  talent 
des  poésies  et  monologues  de  nos  auteurs  roussillonnais. 

Le  groupement  choral  des  Caniayres  Catalans  a  prêté  son  con- 
cours à  la  Conférence-Exposition  organisée  par  l'Œuvre  des 
Eglises  dévastées.  Les  œuvres  exécutées,  parmi  lesquelles  figu- 
raient La  Cofa  Catalana  de  Batlle  et  "ElJSostre  ]  offre  de  P.  Francis, 
ont  obtenu  un  vif  succès. 

Les  Cantayres  Catalans  d'Antoine  Batlle  ont  également  parti- 
cipé à  la  grande  fête  scolaire  du  6  juillet  et  ont  été  fort  applaudis. 
Un  fait  à  retenir  :  les  élèves  de  l'Ecole  Normale  de  jeunes  filles 
ont  chanté  à  trois  voix  le  choeur  catalan  Montantes  régalades.  C'est 
la  première  fois  qu'une  institution  d'enseignement  public  inter- 
prète publiquement  un  chant  catalan.  Nous  adressons  à  Mesdemoi- 
selles les  Elèves-Maîtresses  de  l'Ecole  Normale  de  Perpignan  nos 
plus  sincères  éloges. 

Musique  et  danses  catalanes 

Les  petits  danseurs  catalans  ont  reparu  à  l'occasion  de  la  fête 
des  Platanes  et  ont  évoqué  à  nos  yeux  de  bien  agréables  souve- 
nirs d'enfance. 

11  n'est  pas  jusqu'aux  sardanes,  organinées  par  le  Chor  Català, 
qui  ne  nous  aient  longuement  captivés,  autant  par  le  charme  ber- 


—    loi    — 

cêur  de  leur  rythme  que  par  la  belle  leçon  qu'elles  offrent  éri 
spectacle.  La  sardana  est  le  symbole  de  l'union  des  classes  dans 
un  idéal  commun  d'harmonie  et  de  beauté. 

Signalons  enfin  le  succès  obtenu,  aux  fêtes  de  Céret,  par  la 
Mascarade  d'Héliogabale,  avec  partition  d'instruments  catalans, 
de  notre  ami  le  compositeur  Déodat  de  Sévérac. 

Série  locale  du  Coq  Catalan 

Nous  applaudissons  de  tout  cœur  à  l'initiative  de  notre  excel- 
lent confrère  Le  Coq  Catalan  qui  inaugure  une  série  de  numéros 
sur  les  coutumes  locales  et  le  folk-lore  roussillonnais.  Le  premier 
numéro,  auquel  ont  collaboré  la  plupart  de  nos  écrivains  catalans, 
est  consacré  à  la  Cuisine  Catalane.  F.  Riols. 


Quadret 


Quenouille,  de  Pallas  la  compagne  et   l'amie... 

Aime-laine,    aime-fil,    aime-estaim,    maisonnière, 
Longue,  palladienne,  enflée,  chansonnière. 
Ronsard. 


Sota  els  dits  de  l'avia,  l'antiga  filosa 

fa  '1  seu  molinet. 
La  nina,  a  sa  vora,  broda,  silenciosa, 

estrany  ramallet. 

El  fil  se  desrotlla...  floreix  una  rosa 

su    1  mocadoret... 
Un  poal  d'aygua  fresca  es  sus  d'una  liosa 

per  cas  de  la  set. 

La  filosa  gira  y  '1  seu  torn  ganyida. 

L'avieta  arrufida 
canta  amb  sa  veu  flaca  ayre  anyoradiç... 

Aixis,  altre  temps,  la  meua  padrina 

sus  del  vell  pedriç, 
y  també  ma  mare  quan  n'era  una  nina. 

Fr.  Salvat. 
Makedonia,    1918. 


Llevant  de  Taula 

Nous  nous  voyons  dans  l'obligation  de  renvoyer  à  l'un  de  nos 
plus  prochains  numéros  le  compte-rendu  d'un  recueil  de   poésies 
t  de  Lopez-Picô,  Les  absencies  Paternals. 

♦ 

On  lit  avec  plaisir  dans  la  T^evue  Catalane  un  glossaire  de  notre 
Botanique.  11  nous  est  agréable  de  nous  familiariser  toujours 
davantage  avec  les  noms  des  herbes,  des  oiseaux,  de  tous  les 
rustiques.  Il  serait  curieux  aussi  d'en  déterminer  les  étymologies. 
Bien  souvent  leur  origine  est  métaphorique,  et  de  gracieux  rap- 
ports ont  suscité  ces  beaux  noms.  Ici  l'étymologiste  et  le  folkio- 
riste  se  rejoignent.  Un  oiseau  d'automne,  l'oriol...  oriol  veut 
dire  :  oiseau  d'or.  11  est  appelé  horloge  d'or  en  Espagne  :  oro- 
péndola.  Le  français  dit  :  loriot  ;  et  le  mot  est  composé  par  une 
agglutination  de  l'article  [cf.  lierre,  elra  (cat.)].  L'alouette  huppée 
est  chez  nous  la  cogullada,  et  le  mot  catalan  contient  la  méta- 
phore [cf.  cogul,  cornu].  Le  chardonneret  et  la  cardina  volent  aux 
chardons.  Un  insecte,  le  cloporte,  fait  de  son  corps  une  boule 
[clausus  porcus]  ;  il  est  d'ailleurs  connu  sous  le  nom  de  goret, 
dialectalement,  et  de  porcellana  chez  nous,  sans  doute  parce  qu'il 
vit  dans  l'humidité  de  la  terre.  La  fouine,  fagina,  reçoit  son  nom 
du  hêtre.  La  musaraigne  porte  sa  moustache  comme  une  araignée 
[mus-aranea]  ;  le  catalan  réserve  une  semblable  métaphore  à  la 
belette  [fr.  :  petite  belle  ;  comadreja  (esp.),  petite  commèrej  ;  elle 
est  chez  nous  le  rat  étoile  [mus-stella].  On  constate  donc,  avec 
Remy  de  Gourmont  \"Esthétique  de  ta  Langue  "Française],  que  ces 
métaphores  sont  souvent  les  mêmes  dans  les  langues  novolatines. 
Mais  si  une  étude  plus  approfondie  établissait  ces  concordances, 
elle  noterait  aussi   des  métaphores   particulières  à  chaque  langue. 

Quant  aux  noms  de  plantes,  il  n'est  pas  douteux  que  certains 
sont  connus  en  Roussillon  et  ignorés  en  Catalogne  espagnole.  Il 
est  des  littérateurs  qui  écrivent  :  rododendràn,  vinya  selvatge,  pour 
pentecostera,  llambrusca.  Us  emploient  le  mot  savant  et  non  le  mot 
populaire.  Il  serait  bien  imprudent   d'écrire  oliu  selvatge  lorsque 


—    io3   — 

le  latin  oleaster  nous  a  légué  un  mot  si  virgilien  :  ollaslre.  Le  mot 
marjolaine  est- il  vraiment  traduit  moraduix  ou  marduix  par  nos 
paysans  ?  E.  Boix  a  employé  majorana  dans  sa  fière  Cantate  au 
Roussillon.  Je  lis  dans  une  poésie  de  J.  Carner  : 

...  ja  sembla  coberta  —  d'un  moraduix  escampat  d'Himeneu. 

(J.  Carner,  JHonljoies.) 

Le  mot  est  de  provenance  arabe  (almoraduj,  en  espagnol)  —  mora- 
duix, et  par  suppression  de  a  prétonique,  morduix,  ou  mieux 
marduix.  On  sait  qu'il  ne  faut  pas  abuser  de  l'influence  arabe. 
Mais  les  arabes,  qui  étaient  jardiniers,  ont  baptisé  les  plantes 
d'Allah  et  parfois  les  simples  des  vieux  couvents  d'Espagne. 

♦ 

fllmanac  de  la  Poesia,  1919,  Barcelone  :  obsequi  de  l'impressor 
F.  Altés  .Alabart  als  seus  clients  i  amies.  F.  Altès  i  Alabart  est 
vraiment  un  aimable  imprimeur.  Voilà  plusieurs  années  qu'il  nous 
donne  ce  poétique  almanach,  où  il  recueille  «  les  vibrations  des 
livres  originaux  et  des  traductions  catalanes  ».  On  y  lira  des 
extraits  de  traductions  de  la  Divine  Comédie,  par  N.  Verdaguer 
Callis  ;  des  fables  de  La  Fontaine,  par  le  très  souple  J.  Carner; 
du  Cantique  des  Cantiques,  par  Frédéric  Clascar  ;  des  poésies  de 
R.  Dehmel,  et  de  Hermann  et  Dorothée,  par  josep  Lleonart  ; 
des  Poèmes  et  Sonnets  de  John  Keats,  par  Maria  Manent  ;  de 
VTznéide,  par  Llorenç  Riber  ;  et  des  Géorgiques  Chrétiennes  de 
Francis-Jammes,  par  Maria-Antonia  Salvâ. 

Voici  comment  J.  Carner  traduit  La  Cigale  et  la  Fourmi. 

La  Cigala  i  la  Formiga 

La  cigala,  tôt  cançô 
en  el  temps  de  la  calô, 
no  es  trobà  gens  endegada 
quan  vingué  la  fredorada  : 
;  ni  un  trosset,  en  son  xopluc, 
de  mosqueta  o  be  de  eue  ! 
Entera  de  sa  fadiga 
sa  veïna  la  formiga  : 
l  per  manlleu  li  donarà 
ta!  vegada  un  poc  de  gra 
fins  que  el  temps  es  giraria  ? 
—  Jo  —  diu  ella  —  pagaria 


—   164  — 

ans  d'Agost  (fe  d'animal  !) 
interès  i  capital. 
Cap  formiga  es  deixadora  : 
el  deixar  no  se    1s  adiu. 

—  ]  que  feies  a  l'istiu  ? 
digue  a  l'enmanllevadora. 

—  Dia  i  nit,  tota  gaubança, 
hi  cantava  a  bell  esclat. 

—  Cantaves,  no  es  veritat  ? 
Esta  be.  doncs  ara  dansa. 

Josep  Carner. 

Il  nous  est  agréable  que  J.  Carner  ait  traduit  notre  fabuliste. 
11  n'est  pas  de  plus  belle  langue  que  celle  de  l'auteur  de  Philé- 
mon  et  Baucis.  La  Fontaine  avait  déjà  été  traduit  en  catalan.  On 
se  souvient  des  savoureuses  versions  de  Paul  Bergue,  l'ingénieux 
traducteur  qui  ne  recule  pas  devant  les  Epîtres  de  Clément  Marot. 
Mais  ce  n'est  pas  tout.  On  nous  annonce  une  nouvelle  traduction, 
écrite  par  un  conteur  roussillonnais.  Car  on  peut  aimer  à  la  fois 
Perrault  et  La  Fontaine,  les  Anciens  et  les  Modernes.  J'ai  encore 
remarqué  dans  ce  friand  recueil  une  charmante  poésie  de  Narcîs 
Massé  i  Valenti,  Temps  de  "Nadal,  et  L'alia  Llibertat  de  Clemen- 
tina  Arderiu,  et  Pisa,  de  Josep  Aragay.  11  me  semble  que  ces 
trois  poètes  ont  du  talent. 

♦ 

Nous  avons  appris  que  J.  Bofill  i  Matas  avait  été  élu  député 
à  la  Mancomunitat  catalane.  Bofill  i  Matas  obtint  le  premier  prix 
aux  Jeux  Floraux  du  Roussillon,  et  on  n'a  pas  oublié  ici  ses  poé- 
sies d'une  expression  toujours  ingénieuse,  d'une  virtuosité  toujours 
élégante.  Nous  adressons  à  Bofill  i  Matas  nos  félicitations  rous- 
sillonnaises,  convaincus  qu'il  saura  transposer  dans  son  nouvel 
office  la  clarté  de  sa  strophe.  J.-S.  P. 

Publicacions  de  l'Ensenyança  Catalana 

Jlritmètica  i  Geometria,  d'En  Josep  Gali  Fabra 

Havem  rebut  aquest  volum  nou  que  ve  a  enriquir  la  coHecciô  dels  publi- 
cats  per  l'Associaciô  Protectora  de  l'Ensenyança  Catalana,  per  mitjâ  de  la 
seva  Secciô  Editoral. 

Es  un  llibre  que  es  fa  notar  entre  els  destinats  als  infans  per  la  claretat  de 
l'exposiciô,  iHustrada  amb  forses  gravats  i  al  ensems  per  la  seva  honestadat 
cientinca,  i  la  encertada  ponderaciô  del  contigut. 

i,«  Gérant,  COMET.  —  Imprimerie  Catalane,  COMET,  rue  de  la  Poste.  Perpignan 


13'  Année    S'  154  15  Août  1919 


Les    Manuscrits   nor.   inserci  ^^^  V*%4V   W   4  V^ 


IV 


CATALANE 


Les  Articles   Darus  aaas  iz   Revue 
n'engagent  aue  leurs  auteurs 

Organe  de  la  Société  d'Etudes  Catalanes.  --  Cotisation  :  10  l'r.  par  an 


UN  FOYER  DE  VIE  CATALANE 

L'Université  de  Perpignan 

La  T\evue  Catalane  a  bien  voulu  me  servir  d'intermédiaire  pour, 
faire  patienter  les  nombreux  compatriotes  qui  m'avaient  fait  l'hon- 
neur de  m'écrire  au  sujet  de  la  lettre  publiée  sous  ma  signature 
dans  le  numéro  du  i5  avril,  et  précisément  sous  le  titre  que  je 
reprends  aujourd'hui. 

Il  s'agit  du  problème  de  «  l'Université  de  Perpignan  »  soulevé 
par  la  T\evue  Catalane  et  mis  par  elle  a  l'ordre  du  jour  des  préoc- 
cupations locales.  En  présence  de  cette  initiative,  je  m'étais 
empressé  de  donner  mon  avis.  "Mes  correspondants  m'ont  adressé 
à  ce  propos  des  questions,  —  quelques  objections  aussi,  —  j'ai 
le  devoir  d'y  répondre.  Je  n'ai  pu  le  faire  plus  tôt,  a  cause  des 
occupations  multiples  aune  fin  d'année  scolaire  couronnée  par  la 
session  d'examens  la  plus  lourde  que  les  fastes  toulousains  aient 
jamais  eu  a  enregistrer  :  je  m'excuse  et  j'entre  immédiatement 
dans  le  vif  de  la  question. 

«  L'institution  d'un  enseignement  supérieur  catalan,  —  ai-je  dit, 
—  serait  la  meilleure  façon  de  promouvoir  le  cuite  de  la  langue, 
de  l'histoire  et  de  la  littérature  de  la  petite  patrie.  »  Par  là 
même,  j'entendais  définir  ce  que  doit  être,  de  nos  jours,  le  centre 
d'une  université  roussiiionnaise  ;  au  coeur  de  cet  organisme  doit 
se  placer  cette  triple  fonction  :  langue,  littérature,  histoire  du 
Roussillon. 


—   i66  — 

Le  Roussillon  a  une  langue,  une  littérature,  une  histoire  qui 
lui  sont  propres  ;  et  cette  langue,  cette  littérature,  cette  histoire 
ne  sont  enseignées  nulle  part  en  France.  Or,  le  Roussillonnais 
est  légitimement  attaché  a.  sa  langue,  à  sa  littérature,  à  son  his- 
toire. 11  a  droit  à  les  connaître. 

Beaucoup  de  villes,  sièges  d'Université,  ont  créé  des  cours 
pour  faire  connaître  l'histoire  et  la  littérature  locale  ou  régionale. 
A  Toulouse,  à  côté  d'une  chaire  d'histoire  méridionale  à  domaine 
étendu,  des  subventions  locales  ont  permis  de  créer  une  chaire 
de  langue  et  littérature  méridionale,  et  un  cours  municipal  d'histoire 
populaire  de  Toulouse  a  été  parallèlement  institué  ;  enfin  un  ensem- 
ble d'enseignements  a  été  constitué  sous  le  titre  d'Jnsiitut  d'études 
méridionales,  comprenant  philologie,  lettres,  histoire,  art  et  archéo- 
logie, droit,  paléographie  et  diplomatiaue.  A  Dijon,  une  chaire 
d'histoire  de  la  Bourgogne  et  de  l'art  bourguignon  a  été  fondée  par 
les  soins  combinés  du  Conseil  Général  de  la  Côte-d'Or  et  d'une 
Société  privée  dite  Société  des  Amis  de  ïlluiversité,  largement 
subventionnée  elle-même  par  la  Ville.  En  outre,  une  libéralité 
récente  a  flanqué  cette  chaire  d'un  cours  régulier  de  littérature 
bourguignonne.  La  plupart  des  capitales  de  nos  vieilles  provinces 
sont  dotées  de  façon  analogue. 

Certes,  dans  ces  villes,  l'existence  d'une  Faculté  facilite  de 
telles  initiatives.  Mais  est-il  indispensable  que  des  Facultés  offi- 
cielles existent  pour  que  la  culture  locale  soit  possible  ?  Autre- 
ment dit,  la  culture  locale  doit-elle  être  et  rester,  en  France,  un 
privilège  exclusif  des  chefs-lieux  d'Académie  ? 

Pareil  privilège  ne  serait  nullement  fondé  en  raison.  Le  passé 
roussillonnais  a  autant  de  titres  à  servir  d'objet  d'étude  et  d'ensei- 
gnement que  le  passé  lillois  ou  dauphinois,  et  les  Perpignanais 
ne  s'intéressent  pas  moins  à  leur  pays  que  les  Auvergnats  ou  les 
Poitevins. 


Aussi  bien,  à  cette  heure  où  les  bienfaits  qu'un  régionalisme 
intelligent  peut  prodiguer  semblent  enfin  apparaître  à  tous,  la 
connaissance  du  passé  local  prend  une  signification  nouvelle.  Pour 
que  la  région  vive,  il  faut  qu'elle  ait  conscience  d'être.  Et  la 
région  n'est  pas  seulement  un   être  matériel,  un  organisme  pure- 


—   1 1>7  — 
ment  économique,  —  autant  dire  animal,  —  la  région  a  une  àme  : 
cette  àme  lui   vient  de  son  sol   et   de   son   passé.    Mieux    elle    se 
connaîtra,  plus  intensément  elle  vivra.  Le  passé  éclaire  le  présent 
et  assure  l'avenir. 

Quelle  que  soit  la  grande  région  officielle  dont  fera  partie  demain 
le  Roussillon,  il  sera  toujours,  à  lui  seul,  une  région  dans  la 
région  ;  il  sera  un  tour  en  soi,  parce  qu'ainsi  le  veulent  la  géogra- 
phie et  l'histoire  ;  parce  que,  s'il  a  son  sol,  il  a  son  histoire  et  sa 
langue. 

Ainsi,  le  problème  d'un  enseignement  supérieur  local  n'est  pas 
seulement  digne  de  passionner  des  érudits  et  des  curieux,  il  est 
digne  de  promouvoir  l'action  des  dirigeants,  de  tout  homme 
réfléchi,  de  quiconque  veut  que  le  Roussillon  subsiste  avec  sa 
personnalité  et  sa  force  propre  dans  la  France  puissante  de 
demain. 

L'enseignement  de  notre  passé  historique  et  artistique,  de  notre 
langue  et  de  notre  littérature  doit  donc  être  organisé,  et  c'est 
là  précisément  le  centre  d'une  Université  locale  transposée  dans 
la  donnée  moderne. 

Autour  de  ce  centre,  des  enseignements  de  culture  générale 
seraient  tout  indiqués  :  histoire  de  France,  littérature  française, 
art  français  au  premier  plan  ;  puis,  suivant  les  occasions  ou  les 
possibilités,  telle  ou  telle  autre  matière  propre  à  élargir  l'horizon 
intellectuel  d'un  auditoire  désireux  d'avoir  «  des  clartés  de  tout  ». 

Car,  la  région,  si  elle  a  sa  personnalité  et  sa  vie,  n'en  est  pas 
moins  une  partie  d'un  ensemble.  L'unité  française  n'a  rien  à 
redouter  du  régionalisme.  Bien  au  contraire.  Plus  vibrera  la 
région,  mieux  resonnera  la  voix  de  la  France.  C'est  la  combinai- 
son de  régions  merveilleusement  complémentaires  qui  fait  l'admira- 
ble et  féconde  unité  française,  comme  l'accord  parfait  en  musique 
doit  sa  sonorité  et  sa  richesse  à  des  notes  pourtant  bien  nettement 
différenciées  de  la  gamme. 

Et  c'est  justement  pourquoi  la  crainte  qu'un  enseignement  local 
ne  nuise  à  l'intérêt  national  ne  saurait  être  retenue.  La  leçon 
finale  qui  ressortira  de  l'histoire  du  Roussillon  sera  précisément 
celle  d'une  vocation  lointaine  et  irrésistible  vers  la  France  :  ce 
n'est  pas,  au  demeurant,  la  patrie  de  Rigaud,  d'Arago  et  de  Joffre 


—   j68  — 

qui  a  besoin  de  jeter  un  voile  sur  son  passé  pour  se  sentir  plus 
française. 

Croirait-on  plus  national  de  dire  au  Roussillonnais  :  si  tu  veux 
connaître  ton  passé  et  ta  langue,  va  donc  à  Barcelone  ? 

Au  surplus,  l'histoire  de  Barcelone  n'est  la  nôtre  que  pendant 
quelques  siècles,  —  et  encore  pour  partie,  —  et  quant  à  la  lan- 
gue, celle  de  Barcelone  commence  à  n'être  plus  la  nôtre  tout  à 
fait  :  le  T^pussillonnais,  plus  pur  à  bien  des  égards  que  le  Barcelo- 
nais trop  empreint  de  castillan,  vaut  d'être  étudié,  cultivé  et  per- 
pétué tel  quel. 

I 

Voici  donc,  en  gros,  comment  j'imaginerais  une  Université 
répondant  aux  besoins  que  j'ai  essayé  de  définir. 

Au  centre,  nous  plaçons  V enseignement  proprement  local  : 

i   cours  d'histoire  du  Roussillon  ; 

i  cours  de  langue  et  littérature  catalane  ; 

j   cours  d'archéologie  et  histoire  de  l'art  en  Roussillon  ; 

1   cours  de  sciences  auxiliaires  de  l'histoire. 

En  second  lieu,  l'enseignement  de  culture  générale  comprend  au 
moins  : 

i   cours  de  littérature  française  ; 

î  cours  d'histoire  de  la  France  et  de  l'art  français. 

Autour  de  ces  enseignements  (qu'ils  soient  semestriels  ou 
annuels)  s'adjoindraient  des  cours  occasionnels,  réguliers  ou  libres, 
qui  pourraient  varier  de  semestre  à  semestre  ou  de   mois    à  mois. 

Les  enseignements  que  je  viens  d'énumérer  se  définissent 
d'eux-mêmes.  Seul  celui  que  j'intitule  Sciences  auxiliaires  exige 
peut-être  une  explication.  Il  s'agit  surtout  de  la  paléographie  et 
de  la  diplomatique  appliquées,  sciences  nécessaires  à  la  lecture  et 
à  l'interprétation  des  documents.  Toutes  les  villes  d'Université 
possèdent  ce  cours,  en  sorte  que  les  éludiants  et  les  amateurs  ont 
la  possibilité  de  s'exercer  au  déchiffrement  et  au  commentaire 
des  textes.  ]]  est  indispensable  que  nos  compatriotes  aient  la 
même  possibilité. 

Un  tel  ensemble  d'enseignement  —  qu'il  soit  un  peu  plus  ou  un 
peu  moins  développé  dans  les  débuts  —  peut  être  facilement  mis 
sur  pied.   11  suffit  de  faire  fonds  sur  les  compétences  qui   se    sont 


—   J  69   — 

révélées  sur  place  et  de  demander  le  concours  de  quelques  pro- 
fesseurs de  Toulouse  ou  de  Montpellier,  —  voire  de  Barcelone, 
—  pour  quelques  leçons  soit  plus  générales,  soit  plus  spéciales. 
Les  dépenses  qu'entraînerait  cette  organisation  seraient  aisément 
équilibrées  en  faisant  appel,  comme  on  l'a  fait  ailleurs,  aux  bon- 
nes volontés  locales  et  à  la  générosité  éclairée  des  corps  élus.  A 
coup  sûr,  nos  conseillers  ne  seraient  pas  moins  soucieux  de  la  cul- 
ture locale  que  leurs  collègues  des  villes  auxquelles  j'ai  fait  allu- 
sion. 

Reste  la  question  de  l'auditoire.  A  qui  s'adresserait  l'enseigne- 
ment ? 

Ce  n'est  pas  avant  d'avoir  serré  de  plus  près  l'organisation  pra- 
tique et  concrète  qu'il  convient  de  se  demander  s'il  y  aurait  lieu 
de  distinguer  des  cours  publics  et  des  conférences,  comme  on  le 
fait  dans  nos  Facultés.  Du  moins,  j'aperçois  tout  de  suite  une 
catégorie  d'auditeurs  tout  désignés  :  les  futurs  curés  de  nos  parois- 
ses, les  futurs  maîtres  de  nos  écoles.  Savoir  ce  qu'est  le  pays  où  ils 
exerceront  les  uns  leur  ministère,  les  autres  leurs  fonctions,  c'est  ce 
qui  leur  convient  au  premier  chef.  Nul  doute  que  ceux  qui  prési- 
dent a  leur  formation  ne  les  y  engagent  ;  s'il  est  nécessaire  de 
l'invoquer,  le  précédent  existe  dans  les  Facultés. 

A  côté  de  ces  ecclésiastiques  et  de  ces  universitaires  — 
dont  la  rencontre  serait,  ici  aussi,  d'un  bel  exemple,  —  et  qui 
représenteraient  pour  ainsi  dire  les  professionnels,  tous  ceux  et 
celies  qui  le  désirent  pourraient  suivre  l'enseignement  à  des  condi- 
tions a  déterminer.  Volontiers  j'imagine  que  bien  des  jeunes  filles 
y  prendraient  goût,  a  en  iuger  par  l'affluence  de  celles  qui  fré- 
quentent nos  cours  toulousains.  Encore  ici,  le  privilège  du  chef- 
iieu  académique  n'est  point  un  dogme  et  le  droit  à  la  culture  est 
égal. 

<&*± 

Mais,  dira-t-on,  l'enseignement  ainsi  esquissé,  s'il  ne  manque 
ni  d'attrait,  ni  même  de  cohésion,  manque  pourtant  d'un  appoint 
très  appréciable  :  il  n'aura  point  de  sanctions.  Celui  qui  l'aura  suivi 
le  plus  consciencieusement  du  monde  n'en  emportera  même  pas  la 
preuve.   Les  Facultés  délivrent  des  diplômes,  l'enseignement  rous- 


—    170   — 

sillonnais  en  sera  privé.  L'inconvénient  n'est-il  point  d'importance  ? 
11  est  aisé  d'y  parer.  A  feuilleter  seulement  Y  Annuaire  de  l'Uni- 
versité de  Toulouse,  j'y  relève  au  moins  deux  diplômes  qu'il  est 
très  facile  d'adapter  à  l'enseignement  dont  j'ai  tracé  l'ébauche  et 
auxquels  cet  enseignement  peut  préparer  de  la  façon  la  plus  satis- 
faisante :  l'un  de  ces  diplômes  est  un  diplôme  d'Etat,  le  diplôme 
d'études  supérieures  d'histoire  ;  l'autre  un  diplôme  d'Université,  le 
diplôme  supérieur  d'études  méridionales.  L'enseignement  roussillon- 
nais  ne  sera  donc  en  aucune  manière  dépourvu  de  sanctions  :  ceux 
des  auditeurs  —  disons  maintenant  étudiants,  -  qui  en  auraient 
l'ambition,  n'auraient  qu'à  postuler  l'un  ou  l'autre  des  titres  que 
je  viens  d'énoncer. 

11  me  paraît  bon  de  me  borner  pour  l'instant  aux  précisions  qui 
précèdent  :  elles  répondent,  me  semble-t-il,  aux  points  d'interro- 
gations que  j'ai  sous  les  yeux.  Les  modalités  d'exécution  et  les 
mises  au  point  ne  pourront  être  examinées  que  par  le  Comité  d'ini- 
tiative dont  j'ai  souhaité  la  formation  et  qui,  sous  ce  titre  ou  sous 
tout  autre,  pourra  se  constituer  lorsque  seront  suffisamment  expli- 
cites les  adhésions  aux  principes  fondamentaux  qui  viennent 
d'être  posés.  J.  Calmette, 

Professeur  à  la  Faculté  des  Lettres 
de  l'Université  de  Toulouse. 


Compte-rendu  des  Séances 

J(éunion  du  Bureau  du  10  août  1919 

Présidence  de  M.  Laurent  Campanaud,  président 

Le  Bureau  de  la  Société  d'Etudes  Catalanes  s'est  réuni  le 
dimanche  10  août,  à  10  heures  du  matin,  au  Siège  de  la  Société, 
pour  statuer  sur  une  proposition  de  M.  Calmette,  professeur  à 
l'Université  de  Toulouse.  Jl  s'agit  de  rétablir  l'ancienne  Univer- 
sité de  Perpignan. 


—   i7»   — 

Lecture  est  donnée  de  cet  intéressant  mémoire  qui  sera  repro- 
duit dans  la  J(evue  Catalane.  Le  Bureau  est  d'avis  de  constituer 
un  Comité  d'initiative  dont  ses  membres  feront  tous  partie  et 
auquel  pourront  s'adjoindre  les  personnes  qui  désirent  faire  revivre 
ce  foyer  de  vie  catalane.  Le  mémoire  leur  sera  adressé,  ainsi 
qu'à  toute  personne  qui  en  fera  la  demande  au  Siège  de  la  Société. 

M.  Grando  prie  l'assemblée  de  vouloir  bien  désigner  un  succes- 
seur pour  les  fonctions  de  Secrétaire,  qu'il  est  dans  l'impossibi- 
lité matérielle  d'assurer  désormais  pour  un  temps  assez  long. 

Le  Bureau,  reconnaissant  le  bien  fondé  de  la  demande  de 
M.  Grando,  le  remercie  du  dévouement  apporté  à  la  revue  et  à 
la  Société  pendant  les  cinq  années  de  guerre  et  nomme  à  l'unani- 
mité :  Secrétaire  Général  :  M.  le  professeur  Calmette  ;  Secrétaire 
Adjoint  :  M.  l'abbé  Sarrète. 

Le  Président  :  L.  Campanaud. 

Quelques  noms  de  plantes  #  synonymes 

Catalans-Français  tf  Français-Catalans 

<«£$£»  (SUITE) 


râdi§.  —  rave,  ravec.  . 

raifort-  —  voir  radis. 

raiponce.  — Yepunxô,  rapuntic,  nap  bort.  Voir  aussi    herba   del 

moro. 
raisin   d'OUrS.  —  voir  arbousier. 
ravenelle.  —  ravenissa,  ravell. 
redoul.  —  voir  corroyère. 
réglisse.  —  regalicia. 

reine  des  prés.  —  voir  spirée. 

renoncule.   —  ranuncle. 

>  flammette.  —  mata-anyells. 

»  flottante.  —    herba  de  les  granyotes. 


—     1J2    — 

renOllée.  —  passa-cami,  herba  caminadora,  herba  caminaire, 
herba  de  cent  nusos,  trava-cavalls,  estira-velles,  escanya-velles, 
presseguera. 

renouée  persicaire.  —  voir  persicaire. 

réséda.   —  herba  del  amor,  marduji. 

>  raiponce.  —  herba  del  moro. 

>  gaude.  —  gauda,  herba  de  la  gauda. 
rhododendron.  —  boixerica,  pentecostera,  talabard,  gavet,  boix 

de  la  Mare  de  Deu,  muixereta,  salaberta,  naret. 
rhubarbe.  —  rabarbre,  ruibarbre. 
Hein.  —  figuera  del  dimoni,  enfiter. 
romarin.  —  romani. 
ronce.  —  romaguera,  arsa,  sarsa,  esbarzer,  aristôl,  roser  de  pas- 

tor,  morera  saivatge. 

roquette.  —  ruca. 

roseau.   —  canya. 

»        Sauvage.  —  canyavera,  canyota,  canyoca,  canoca,  càrritx. 

rose  trémière.  —  malva-rosa. 

rosier.  —  roser,  satalia. 

rue.  —  ruda. 

rutnex.  —  voir  patience. 

S 

Sadrée.  —  voir  sarriette. 

safran.  —  safrà. 

Sainfoin.  —   esparcet,    esparceta,    esparsa,    trepadella,    pellagra, 

pepirigall. 
Salicaire.  —  meca  de  pioc. 

Salicorne.  —  salicorn,  herba  de  salobre,  saiat.  Voiï  aussi  soude. 
Salsepareille.  -  -  sarsa-parella,  arinjol,  aritja,  aritjo),  mata-vellcs. 
Salsifis.  —  saisifis. 

»  des  prés.  —  barballa,  barba  de  cabra,  cuxa-barba,   apa- 

gallums. 
»         noir.  —  voir  scorsonère. 
Sanguinaire.  —  sanguinari. 
Sanicle.  —  sanicula,  herba  de  Sant-Llorens. 

Santoline.  —  espernallac,  botja  de  Sant-Joan,  herba  cuquera, 
guarda-roba. 


-   ,73  - 

Sapin.  —  abet,  bet,  pibet. 

Saponaire.  —  saboneta,  herba  sabonera. 

SaiTazin.   —  fajol,  blat  nègre. 

Sarriette.  —  sarrieta,  satureya,  siretja,  sajulida,  sejulida. 

SaugC  —  sàlvia,  cresta,   madrona,  gallo. 

Saule.  —  salze,  salser,  saulà,  salie,  salit,  salguer,  salguera. 

>        OSier.   —  voir  osier. 

»        petit.  —  gatsalzer. 
Saxifrage.  —  trenca-rocs. 
SCabieuse.  —   viuda,    viudeta,    escabiosa.    Voir    aussi    herba    de 

J'enaigament. 
SCandix.  —  pinta,  agulles  de  pastor. 

sceau  de  Salomon.  —  trencaios. 

SCille.  —  cebeta,  ceba  marina,  escilla. 

Scolopendre.   —  herba    de  la  melsa,    herba  melsera,    llengua   de 

cervo. 
Scorsonère.  —  escorsonera. 
Scrofulaire.  —  setja,  herba  de  les  scrofules. 
Seigle.  —  segol,  segle. 
Séné-  —  senet. 

Séneçon.  —  herba  cana,  herba  de  les  cardines. 
Sénevé.   —  sanabre,  senabre. 
Seringa.  —  xeringuilla. 

Serpolet-   —  serpoli,  serpol,  salsa  de  pastor.  Voir  aussi  cerfeuil. 
Setaire.   —  paniça,  paniçoia. 

Silène.  —  colitxos,  esclafidôs,  patacs,  coniveiles. 
Sinaigrette.  —  herba  del  coté. 
SmilaX.  —  voir  salsepareille. 
Soleil-    —  voir  tournesol. 
Sorbier.  —  seivier,  server,  servera. 
SOUChet-  —  jonsa,  junsa,  castanyola. 

^OUCÎ-  —  garronada,  boixacs,  maravelles,  goyets,  graujets. 
SOUde.  —  sosa.  barrella,   espinadella.  Voir  aussi  salicorne. 

spartier.  —  espart. 

Spergule.  —  voir  mourron. 

Spirée.  —  herba  del   pobre  home,  ulmaria. 

Staphysaigre.  —  paparra,  herba  dels  poils,  cibadella. 

SUmaC  —  voir  corroyère. 

Sureau.  —  saiic,  saùquer,  sabuquer.  [M  finir) 


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DOCUMENTS  HISTORIQUES 

sur  la  Ville  de  Perpignan 

«^$^a  (SUITE) 

Traduction  partielle  de  la  transaction  passée  entre  les  tenan- 
ciers des  terroirs  de  Bajoles  et  Castel-Roussillon,  et  ceux  de 
la  Salanque,  homologuée  par  Raymond  de  Périllos,  gouverneur 
de  la  province,  touchant  le  nouveau  cours  de  la  Tet,  sa  largeur, 
l'indemnité  à  fournir  aux  propriétaires  intéressés. 
14  (?)  4  février  1 3y8 

«  Titre  concernant  le  cours  de  la  rivière  de  la  Tet  ». 

Pactes  contenus  dans  la  transaction  faite  entre  les  tenanciers 
du  terroir  de  Bajples  et  Castell-Rossello  d'une  part,  et  ceux  de 
Bompas,  de  Vilielongue  et  de  la  Salanque  d'autre  part,  Je 
14  février  1378  ;  Jes  dits  pactes  faits  et  accordés  par  le  Gouver- 
neur de  la  Province. 

Premièrement  il  est  ordonné  que  l'eau  de  la  rivière  de  la  Tet 
sera  conduitte,  sçavoir  que  son  lict  sera  tiré  droit  du  bout  du  ruis- 
seau appelé  la  Basse  au  bout  du  jardin  de  Bofii  vers  la  tramon- 
tane ;  et  de  là  en  droite  ligne  vers  la  tour  de  Castell-Rossello, 
dans  le  correch  ou  le  ravin  qui  est  devant  les  Albans  de  Peres- 
tortas,  avec  quarante  cannes  de  lict  et  dix  cannes  de  chaque 
costé  plantées  en  bois  pour  renfermer  ledit  lict  ;  pour  raison  de 
quoy,  tout  ce  que  l'on  prendra  sera  estimé  en  franc-aleu. 

Que  s'il  se  faisoit  quelqu'ouverture  par  laquelle  le  moulin  de 
Pierre  Massip,  ou  le  ruisseau  d'iceluy,  et  de  ceux  qui  ont  des 
propriétés  dans  le  terrain  mentionné  au  présent  article,  souffri- 
roient  du  dommage  à  l'avenir,  depuis  le  territoire  de  Bajolas  jus- 
qu'au détour  que  prend  le  ruisseau  dessous  ledit  moulin,  ceux 
de  la  Salanque  seroient  tenus  de  payer  les  deux  tiers  des  frais 
qui  se  feroient  pour  réparer  lesdites  ouvertures,  et  les  proprié- 
taires dudit  moulin  l'autre  tiers. 

Qu'attendu  que  Pierre  Massip  contribue  et  souffre  plus  du 
dommage  que  tout  autre,  en  ce  que  l'on  luy  partage  la  propriété, 


-   '75  - 
il  est  ordonné  qu'autant  de  terre  qui    luy    sera   prise,   soit    bonne 
ou  faisant  partie   de  celle   dudit  ravin,    sera   estimée    sur  le   pied 
des  meilleures  terres. 

Que  les  dix  cannes  qui  seront  marquées  des  deux  costés  pour 
les  bords  de  ladite  rivière,  seront  en  emphiteose  au  dit  Pierre 
Massip  comme  aux  autres  particuliers,  et  qu'il  en  pourra  prendre 
autant  qu'il  en  aura  besoin  pour  la  conservation  de  son  dit 
moulin. 

Que  ces  dix  cannes  de  bords  seront  plantées  et  resteront  à  per- 
pétuité en  bois  et  en  souches  de  la  hauteur  de  demy  canne. 

Que  ces  mêmes  dix  cannes  de  bords  seront  données  en  emphi- 
théose  en  franc-aleu  aux  confrontans  qui  en  voudront,  sinon  à 
d'autres  (excepté  néantmoins  ce  que  ledit  Pierre  Massip  voudra 
en  prendre),  lesquels  seront  tous  obligés  de  tenir  les  bois  et  sou- 
ches de  la  hauteur  de  demy  canne,  et  que  tout  ce  qui  proviendra 
desdites  emphitéoses  appartiendra  aux  habitans  de  Bonpas  et  de 
la  Salanque,  pour  les  ayder,  en  considération  de  ce  qu'ils  les 
acheptent  et  doivent  faire  cet  ouvrage  ;  qu'au  surplus  ces  bois 
seront  plantés  dans  l'hiver  prochain. 

Que  lorsqu'il  se  trouvera  dans  ce  lict  de  ladite  rivière  des 
arbres,  bois,  broussailles  et  autres  embaras,  lesdits  confrontants 
seront  obligés  de  faire  nettoyer  à  leurs  frais  quarantes  cannes  de 
lict.  au  moyen  de  quoy  lesdits  bois  et  arbres  leur  appartiendront, 
à  moins  que  les  maîtres  des  arbres  et  bois  ne  voulussent  payer  les 
frais  et  dommages  qu'ils  auroient  pu  faire. 

Que  lesdits  achepteurs  seront  obligés  de  faire  arracher  tous  les 
arbres  et  boisages  qui  seront  dans  l'espace  des  quarante  cannes  qui 
seront  marquées  pour  le  lict  par  les  personnes  à  cet  effet  nom- 
mées. 

Que  dans  ledit  lict  de  quarante  cannes  qui  sera  mesuré  par  les- 
dites  personnes  qui  seront  choisies,  il  sera  fait  un  ou  plusieurs 
ruisseaux  ou  fossés,  par  où  l'eau  de  la  Tet  puisse  passer  une  fois 
seulement. 

Que  l'eau  qui  va  à  Taineras  (  i  )  ne  sera  point  arrestée  ny  détour- 
née, jusqu'à  ce  que  le  lict  de  ladite  rivière  soit  achevé. 

Que  les  susdites  soixante  cannes   de   largeur    qui   seront    prises 

(  i  ;  Saint-Genis  de  Tanyères.  Le  document  en  catalan  porte  a  à  Tayneres  ». 


—  1 76  — 

pour  faire  le  lict  et  les  bords  de  cette  rivière,  et  tant  qu'il  s'y  en 
Trouvera  ie  long  au  bord  de  la  Basse  et  jusques  hors  la  terre  de 
Casteli-Rossello,  seront  estimées  par  quatre  hommes  (i),  et  s'ils 
ne  pouvoient  convenir,  par  un  tiers,  qui  seront  tenus  de  prester 
serment. 

Que  le  vieux  lict  et  ses  bords  appartiendront  à  ceux  qui  con- 
tribueront a  payer  le  nouveau  lict.  et  qu'ils  pouront  le  vendre  et 
donner  en  emphitéose  ;  auquel  effet  les  habitants  des  Costes  de 
Bajolas  et  Casteli-Rossello  seront,  obligés  de  leur  céder  et  remet- 
tre tout  le  droit  qu'ils  pouroient  y  avoir  ;  et  s'il  arrivoit  que  le 
cours  de  l'eau  de  ladite  rivière  de  la  Tet  vinst  à  changer,  ledit 
Jict  nouveau  qui  doit  se  faire  appartiendra  aux  habitans  et  voisins 
de  Bonpas  et  de  la  Salanque. 

Que  le  prix  des  propriétés  que  l'on  prendra  pour  faire  le  dit 
lict  et  ses  bords  sera  payé  après  que  l'estimation  aura  esté  faite, 
scavoir  la  moitié  dans  trois  mois  à  compter  du  jour  que  l'on  com- 
mencera à  v  travailler,  l'autre  moitié  cinq  mois  après  ;  et  que  s'il 
y  a  quelques  personnes  pauvres,  elles  seront  payées  sur  le  champ. 

Que  toutes  personnes  qui  retireront  quelque  proffit  dudit  chan- 
gement qui  doit  se  faire,  seront  tenues  de  payer  plus  ou  moins  à 
l'arbitrage  des  personnes  cy-dessus  nommées,  sans  appel. 

Que  si  quelque  possesseur  des  propriétés  que  l'on  prendra  ne 
vouloit  pas  garder  ce  qui  en  restera,  en  ce  cas  les  voisins  seront 
obligés  de  les  prendre,  et  d'en  payer  la  valeur  au  dire  des  mes- 
mes  experts  (2). 

Henry  Aragon. 

(1)  Le  document  dit  :  les  deux  bons  homens  élus,  pour  la  rive  du  côté  de 
Bayoles,  sont  :  En  Perpenya  Boys  et  en  G.  Laurador.  jardiniers  ;  pour  la 
partie  de  la  Salanque,  Jacques  Bajoles  et  Bernard  Spert  ;  en  cas  de  contes- 
tation, en  Jean  Nom-de-Deu. 

2)  Archives  des  Pyr.-Or.,  C.  1204.  —  Cette  transaction,  ainsi  qu'on 
l'a  vu  dans  le  texte,  sî  termine  par  des  considérants  intéressants  qui  stipu- 
lent qu'en  faisant  cet  accord,  on  n'a  point  l'intention  de  porter  le  moindre 
préjudice  aux  seigneurs  de  Castell  Rossello  et  de  Bajoles,  ni  aux  autres  sei- 
gneurs qui  possèdent  des  seigneuries  dans  le  terroir  de  Bajoles  et  de  Castell 
Rossello. 


Llevant  de  Taula 

T^uscino  (janv.-déc.   1918) 

Nous  remarquons  dans  ce  numéro  d'intéressantes  pages  de 
Joseph  de  Copons  sur  Prosper  Mérimée  et  la  Vénus  d'ille.  La 
documentation  en  est  sûre.  Cependant,  nous  ne  croyons  pas  que 
cette  iegende  à  la  fois  païenne  et  scolastique  ait  inspiré  Juan 
Vaiera  et  le  prodigieux  critique  qu'est  Marcelino  Menéndez  y 
Pelayo.  Par  contre,  nous  signalerons  à  M.  Joseph  de  Copons 
une  version  très  savoureuse  dans  les  Conies  "Espagnols  de  Jean 
Richepin.  Le  sujet  suscite  de  nombreux  problèmes  d'histoire 
littéraire. 

M.  l'abbé  Pierre  Fouché  continue  son  Essai  de  Grammaire 
Historique  de  la  Langue  Catalane.  Nous  sommes  heureux  qu'un 
roussiilonnais  ait  entrepris  ce  travail  philologique.  Il  est  mené 
avec  une  méthode  sûre  et  une  patience  qui  n'exclut  pas  la  viva- 
cité. Au  lieu  de  grouper  les  consonnes  en  initiales,  intérieurs, 
finales,  de  les  relier  par  les  lois  générales,  l'abbé  P.  Fouché 
étudie  séparément  les  divers  traitements  de  chaque  consonne. 

Page  Si  :  à  propos  de  l'origine  du  changement  de  S  initial  en 
(î)  :  syringa,  xiringa  (cast.  jeringa),  écarte  comme  peu  sérieuse 
l'explication  de  Menéndez  v  Pidai,  qui  veut  qu'elle  provienne 
d'une  influence  arabe.  Cependant,  Menéndez  y  Pidal  dit  «  Les 
Maures  prononçaient  toujours  x  :  «  xean  llevadox  todox  estox  » 
\El  Poema  de  Y ûçuf.  7{evista  de  Archivos,  vi,  p.  117),  et  son 
observation  est  donnée  pour  certains  mots  espagnols.  L'argument 
historique,  fondé  sur  les  graphies,  ne  nous  paraît  pas  dénué  de 
valeur.  Bourciez  \Elémenis  de  ling.  romane]  donne  la  même  expli- 
cation. 

Le  travail  de  l'abbé  P.  Fouché  est  très  complet.  A  propos 
des  groupes  initiaux  se,  st,  sp,  signale  l'apparition  d'une  voyelle 
accessoire,  variabie  dans  nos  dialectes.  Nous  savons  que  le  latin 
vulgaire  possédait  déjà  cette  voyelle,  comme  en  témoignent  les 
inscriptions.  Pourquoi  M.  l'abbé  P.  Fouché  croit-il  ne  pas  devoir 
nous  donner  des  exemples?  [Speculu-espill  . 

Page  85,  au  contraire,  pourrait  grouper  5'  SP  et  6'  ST,  puis- 


_  !78  — 

que  le  traitement  est  identique.  —  Nous  relevons  dans  l'étude 
du  consonantisme  des  observations  qui  appartiennent  aux  para- 
digmes, ce  qui  nous  fait  penser  que  le  travail  est  terminé.  — 

Page  95,  est  bien  insuffisant  en  déclarant  que  D  semble  s'être 
amuï  de  très  bonne  heure  dans  le  roussillonnais  [Vay  :  vadeo]. 

Nous  sommes  pleinement  d'accord  avec  l'abbé  P.  Fouché  lors- 
qu'il constate  l'abus  de  h  graphique,  et  note  la  tendance  générale 
a  n'employer  que  h  étymologique.  Après  notre  ami  Paul  Bergue, 
l'abbé  P.  Fouché  s'engage  dans  une  voie  très  sûre  et  nous  l'en 
félicitons.  Nous  apprenons  d'autre  part  que  le  présent  travail  de 
P.  Fouché  n'est  qu'une  esquisse,  et  sans  doute  nos  précédentes 
observations  sont-elles  inopportunes.  Nous  retiendrons  toutefois 
un  fait  capital  :  élève  de  M.  Joseph  Anglade,  P.  Fouché  en 
applique  les  leçons  à  l'étude  du  catalan,  et  il  démontre  ainsi  à  tel 
ou  tel  philologue  de  Barcelone  ou  des  Baléares  que  toute  science 
des  choses  romanes  n'est  pas  l'apanage  exclusif  des  séminaires 
d'outre-Rhin.  C'est  par  une  collaboration  de  plus  en  plus  étroite 
de  Barcelone  et  de  nos  centres  universitaires  du  Midi  que  l'étude 
de  la  philologie  catalane  deviendra  féconde  et  agissante  ;  il  appar- 
tient en  effet  aux  philologues  de  jouer  un  rôle  vraiment  actif.  Le 
peuvent-ils  ? 

Lorsque  collaboreront  cigales  et  fourmis,  ce  sera  un  beau  jour 
de  «  soulel  d'or  »  sur  les  belles  rives  du  Rhône  et  de  la  Garonne. 
Les  savants  et  les  jeunes  gens  étonnés  commenceront  à  vraiment 
découvrir  l'œuvre  d'un  fin  poète  qui  s'appelait  Frédéric  Mistral 
de  Maillane. 

♦ 

Messidor  (juny-juliol  1919)  Barcelone 
Messidor,  «  revue  latino-anglo  saxonne,  admet  toute  collabora- 
tion en  langues  néo-latines  ainsi  qu'en  langue  anglaise  ».  Cette 
confusion  des  langues  que  l'on  remarquait  à  la  Conférence  de 
Paris,  dans  les  revues  de  philologie,  dans  le  Poesia,  organe  de 
Marinetti  et  du  futurisme,  nous  la  retrouvons  dans  Messidor.  Est- 
ce  un  bien?  Forse  che  si,  forse  che  no.  Mais  les  rédacteurs  de 
Messidor  n'avaient  pas  prévu  un  article  très  curieux  de  M.  Jean 
Bonnafous  sur  YOrtografia  Caialana,  écrit  en  dialecte  quercynol. 
Un  beau  dialecte,  d'ailleurs,  celui  de  notre  cher  Antonin  Perbosc. 
M.  Jean  Bonnafous  y  défend  l'idée  d'une   orthographe   propre  à 


—  179  — 
réconcilier  tous  les  dialectes  du  Midi,  aquitains  et  provençaux.  11 
s'insurge  contre  certaines  particularités  de  la  langue  catalane,  et 
l'emploi  du  quercynol  donne  à  sa  phrase  un  joli  mouvement.  Il 
rougirait  d'employer  l'article  el  pour  lo.  Ah  !  le  beau  sujet  de 
querelle  grammaticale  !  Il  considère  comme  de  véritables  mons- 
tres les  formes  es  (per  s')  =  se,  ens  (per  n's)  ==  nos.  Ils  sont 
terribles,  en  effet,  si  on  les  considère  au  microscope.  On  sait  que 
ces  pronoms  atones  deviennent  asyllabiques  après  un  mot  terminé 
par  une  voyelle.  Cette  attraction  explique  l'emploi  de  l'apostrophe 
prépositive  (que  's  —  que  'ns)  ;  l'adjonction  de  la  voyelle  e  est 
une  façon  tout  aussi  commode  d'indiquer  l'attraction.  On  trouve 
dans  les  vieux  textes  quens,  en  un  seul  mot.  N'est-ce  pas  mons- 
trueux ?  Quant  à  la  graphie  n's,  j'en  voudrais  bien  voir  des  exem- 
ples. Elle  me  paraît  un  peu  compliquée.  Au  fait,  pourquoi  ne 
représenterair-on  pas  par  une  apostrophe  toute  disparition  d'une 
voyelle  atone  à  l'intérieur  d'un  mot?  Ce  serait  charmant.  La  forme 
composée  HA  estât  pour  ES  estât  me  parait  également  irrépro- 
chable. En  tout  cas,  ce  monstre  aurait  été  introduit  par  notre 
premier  maître,  par  Ramôn  Lull,  qui,  employant  sa  langue  natu- 
relle, pouvait  se  faire  entendre  à  Montpellier. 

On  remarquera,  dans  ce  numéro  de  Messidor,  deux  ou  trois 
pages  de  A.  Schneeberger  intitulées  «  La  Sensibibité  chez  les 
jeunes  poètes  catalans  ».  L'auteur  y  cite,  traduits  en  français, 
quelques  extraits  de  l'œuvre  d'Aifons  Maseras  et  de  M.  Perez- 
Jorba,  mais  ils  ne  suffisent  pas  à  nous  faire,  connaître  leur  sensi- 
bilité. 

♦ 

M.  Emile  Ripert,  belle  cigale  de  Provence,  a  dit  toutes  les 
gloires  du  Roussillon  dans  son  Au  Pays  de  Joffre.  11  a  parcouru 
nos  principales  vallées,  avec  un  esprit  barrésien.  Mais  pourquoi 
dit-il  que  le  retable  de  Saint-Jean  évoque  toute  l'Espagne  ?  Ce 
retable  est  d'un  pur  goût  italien.  Pourquoi  écrit-il  que  l'un  des 
premiers  romans  du  moyen  âge,  «  Gérard  de  Roussillon  »,  a  pris 
naissance  dans  notre  pays  ?  Ce  Roussillon  n'est  qu'un  village, 
situé  quelque  part,  peut-être  même  dans  la  vallée  du  Rhône.  Ces 
confusions  sont  inévitables,  et  l'hommage  d'Emile  Ripert  n'en  est 
pas  moins  lumineux,  enthousiaste  et  fièrement  provençal. 


—  léô  — 

Le  félibre  Jousèp  Soûler  a  écrir  sur  Cerre  un  livre  débordant 
de  joie  félibréenne,  intituleras  Cansous  (Ressouns  Cetoris)  (1917), 
et  illustré  par  Ed.  Marsal.  On  ne  saurait  jamais  trop  louer  la 
bonhomie  et  l'enthousiasme  des  félibres.  Jousèp  Soulet  nous  dit 
dans  son  A-propos  :  «  Save  bé  que  s'avièu  pas  publicat  aquestas 
cansous,  la  terra  auriè  toujour  virât.  »  Sans  doute,  mais  avec  de 
telles  chansons  la  terre  tourne  et  vire  heureusement.  Et  je  com- 
mence à  croire  que  la  bonne  humeur  est  préférable  à  la  poésie, 
et  que  les  félibres  ne  sont  pas  des  poètes,  comme  on  le  croit 
communément,  mais  de  véritables  philosophes.  Voici  un  précepte 

cettois  : 

Lous  ancians  disièn  : 
Per  èstre  urous,  te  eau  très  causes  : 
Saches  pas  jamai  quand  es  d'ouras, 
Ni  quant  as  begut  de  cops, 
Ni  quant  as  d'argent  dins  la  pocha. 

Il  faut  signaler  dans  ce  recueil  deux  illustrations  :  la  première 
nous  présente  les  félibres  Cettois  qui  gravissent  la  colline  de 
Saint-Clair,  bannière  en  tête.  La  seconde  nous  les  montre  vêtus 
de  blanc,  célestes,  accueillis  grâce  à  leurs  bonnes  œuvres  par  le 
portier  du  Paradis.  Aixi  sia. 

Les  Contes  Populaires  de  la  Vallée  du  Lambon,  recueillis  par  la 
Société  traditionniste  de  Comberouger,  traduits  par  M.  Antonin 
Perbosc,  bibliothécaire-archiviste  de  la  ville  de  Montauban,  for- 
ment un  ouvrage  agréable  et  exemplaire,  et  viennent  nous  révéler 
les  humbles  trésors  du  félibrige.  Tout  y  est  merveilleux.  D'abord, 
cette  Société  traditionniste  de  Comberouger,  qui  groupair  de 
simples  écoliers  «  dans  le  but  de  recueillir,  dans  la  commune, 
tout  ce  qui  se  rapporte  à  1  histoire  et  particulièrement  au  tradi- 
tionnisme  ».  En  s'adressant  à  des  enfants,  dont  la  mémoire  est 
claire,  M.  Antonin  Perbosc  a  pu  contrôler  toutes  les  variantes 
ou  altérations  d'un  même  conte  populaire.  En  leur  faisant  obser- 
ver tout  ce  qui  les  entourait,  il  leur  apprenait  l'amour  du  terroir. 
11  est  certain  que  ces  enfants  doivent  se  souvenir  d'un  tel  maître. 
Ecole  rustique  de  Comberouger,  la  plus  belle   école   de   France  ! 

J.-S.  P. 

lc  Gérant,  COMET.  —  Imprimerie  Catalane,  COMET,  rue  de  la   Poste,   Perpignan 


13'  Année.   N'  155  15  Septembre  1919 

Les    Manuscrits  non  insères  ^_^    I»    <.  tl    W   4  ^r^ 

ne  sont  oas  rendu».  Ï^T    B'      ^^w     I  ■' 

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n'engagent  que  leurs  auteurs.  \^AA    A     A    &JLi^    JL  A  ^  JL^ 

Organe  de  la  Société  d'Etudes  Catalanes.  —  Cotisation  :  10  fr.  par  an 

A  propos 

d'un  Cours  de  Provençal 

au  Lycée  de  Marseille 

De  source  autorisée,  on  annonçait,  dans  la  première  quinzaine 
du  mois  d'août  dernier,  que  le  ministre  de  l'Instruction  publique 
avait  décidé  la  création  d'un  cours  de  «  provençal  »  au  lycée  de 
Marseille,  devant  fonctionner  dès  la  rentrée  d'octobre.  Je  ne  sais 
si  les  Roussillonnais  ont  prêté  toute  l'attention  nécessaire  à  ces 
quelques  lignes  qu'ont  publiées,  en  petite  dépêche,  les  journaux 
régionaux  et  certains  autres  de  notre  département. 

C'est  une  «  heureuse  innovation  »,  écrit  un  très  distingué  féli- 
bre  provençal,  M.  Jules  Véran,  dans  VEclair  de  Montpellier 
(18  août  1919). 

«  Jusqu'ici,  —  dit-il,  —  l'étude  du  provençal  était  réservée  à 
l'enseignement  supérieur.  Encore  faut-il  s'entendre.  Le  provençal 
n'était  enseigné,  dans  les  Facultés  des  Lettres,  que  comme  une 
branche  des  langues  romanes  et  une  branche  morte.  On  l'étudiait 
dans  sa  formation,  dans  les  formes  qu'il  avait  aux  xif  et  xni'  siècies  et 
dans  la  littérature  des  troubadours.  Sans  doute  le  plus  illustre  de 
nos  romanistes,  Gaston  Paris,  a-t-ii  laissé  un  livre  excellent  sur 
Mistral,  et  sans  doute  encore  les  revues  spéciales  nous  ont-elles 
offert  plus  d'une  étude  sur  le  parler  actuel  de  tel  et  tel  coin  du 
Midi.  Mais,  dans  les  chaires,  il  n'était  et  il  n'est  question  que  du 
provençal  mort,  jamais  du  provençal  vivant. 

«  Récemment  M.  André  Lefèvre,  député  d'Aix-en-Provence, 
déposait  une  demande  de  crédits  pour  la  création  d'une  chaire  de 


—     l82     — 

provençal  à  la  Faculté  des  Lettres  de  cette  ville.  Car,  chose 
incroyable,  l'Université  de  Provence,  l'Université  qui  a  son  siège 
dans  l'ancienne  capitale  de  la  Provence,  n'a  pas  de  chaire  de 
provençal.  Un  professeur,  M.  Léopold  Constans,  y  faisait  bien 
un  cours  de  provençal,  mais  de  sa  propre  initiative,  car  il  était 
titulaire  de  la  chaire  de  latin.  Depuis  la  mort  de  cet  excellent 
homme,  survenue  il  y  a  deux  ou  trois  ans,  ce  cours  n'a  pas  été 
repris.  M.  André  Lefèvre  a  eu  donc  une  excellente  idée.  Mais 
il  entend,  et  il  l'a  dit  à  la  Chambre  et  au  ministre,  qu'on  ensei- 
gne à  Aix  le  provençal  de  Mistral,  le  provençal  qu'on  parle 
aujourd'hui  et  non  celui  de  Bertrand  de  Born  et  du  xm'  siècle. 

«  En  causant  avec  lui  de  son  projet,  auquel  le  ministre  s'est 
d'ailleurs  montré  pleinement  favorable,  je  lui  ai  fait  observer  que 
l'enseignement  supérieur  avait  un  caractère  spécial  et  un  but  spé- 
cial :  il  est  consacré  à  la  critique  scientifique  et  il  doit  former 
des  travailleurs  ;  nos  Facultés,  même  celles  des  Lettres,  sont  des 
laboratoires,  où  on  travaille  à  la  fois  au  progrès  de  la  science  et 
à  la  formation  des  professeurs.  Un  jeune  homme  quelconque,  un 
homme  du  monde  peut  lire  et  étudier  Mistral  en  lui-même,  et  il 
y  trouvera  plaisir  et  profit,  mais  un  étudiant  d'enseignement 
supérieur  doit  être  muni,  pour  aborder  ce  sujet,  de  connaissances 
spéciales  parce  qu'il  doit  l'étudier  de  façon  spéciale. 

«M.  André  Lefèvre  confondait  l'enseignement  supérieur  avec 
l'enseignement  secondaire.  Au  lycée,  les  études  sont  toutes  diffé- 
rentes. Pourvu  que  les  élèves  aient  des  connaissances  générales, 
cela  suffit.  On  ne  leur  demande  pas  d'être  des  savants  :  il  suffit 
qu'ils  soient  instruits.  11  serait  tout  à  fait  exagéré  de  leur  appren- 
dre la  grammaire  du  provençal  du  moyen  âge  et  d'exiger  qu'ils 
sachent  lire  les  troubadours  dans  le  texte.  Mais  on  peut  leur 
enseigner  la  littérature  provençale,  y  compris  celle  des  trouba- 
dours, et  on  doit  leur  faire  lire  nos  grands  poètes  et  prosateurs 
modernes  de  langue  d'oc.  C'est  pitié  de  voir  ces  richesses  cachées 
à  nos  jeunes  gens.  C'est  une  honte  pour  notre  enseignement  public 
de  laisser,  à  la  porte  des  écoles,  des  poètes  qui  sont  admirés  par 
le  monde  entier  et  traduits  dans  toutes  les  langues. 

«  La  création  de  l'enseignement  provençal  au  lycée  de  Mar- 
seille met  fin  à  cet  ostracisme  impie.  Le  mouvement  est  donné  ; 
il  s'étendra  ». 


*  18*  - 

Presque  au  même  moment  où  paraissaient  les  si  justes  réflexions 
de  notre  distingué  confrère  de  Montpellier,  voici  qu'un  non 
moins  avisé  félibre  de  Toulouse,  M.  Rozès  de  Brousse,  lui  fai- 
sait écho,  en  réclamant  le  même  privilège  pour  la  capitale  lan- 
guedocienne. 

«  Il  serait  vivement  à  souhaiter,  écrivait-il  dans  Le  Télégramme 
de  Toulouse,  à  la  date  du  16  octobre  1919,  qu'un  cours  de 
ce  genre  fut  organisé  à  Toulouse  pour  le  languedocien.  On  sait 
que  l'enseignement  de  nos  dialectes  occitans  facilite,  par  leur 
communauté  d'origine,  l'enseignement  conjugé  du  latin  et  du 
français. 

«  Comme,  en  outre,  il  est  souverainement  ridicule  que  les  jeu- 
nes gens  de  Toulouse  et  du  Languedoc  ignorent  la  langue,  la 
littérature,  l'histoire  de  l'art  de  leur  patrie  locale,  nous  deman- 
dons la  création,  au  lycée  de  Toulouse,  d'un  cours  secondaire  de 
langue,  de  littérature  et  d'art  occitans.  Cela  est  d'autant  plus 
logique  que,  pour  l'enseignement  supérieur,  des  cours  de  ce  genre 
existent  à  la  Faculté  des  Lettres  de  Toulouse,  a  la  section  dite 
«  Institut  des  Etudes  Méridionales  »,  où  enseignent  avec  éclat 
les  professeurs  J.  Anglade,  majorai  du  Féiibrige,  Graillot  et 
Calmetre.  » 

Nous  avons  tenu  à  mettre  sous  les  yeux  des  lecteUfs  de  là 
T{evue  Catalane  ces  appréciations  si  autorisées,  pour  mieux  leur 
donner  une  idée  exacte  et  complète  du  grana  mouvement  qui  se 
produit,  a  l'heure  présente,  en  vue  de  la  décentralisation  intellec- 
tuelle et  au  bénéfice  de  nos  parlers  régionaux,  trop  longtemps 
tenus  en  suspicion.  Et  comme  nous  avons  les  mêmes  raisons  que 
nos  confrères  et  amis  des  pays  de  Mistral  et  de  Clémence  Isaure 
pour  faire  valoir  notre  si  belle  langue  maternelle,  nous  reclamons, 
nous  aussi,  pour  le  catalan,  la  même  faveur  que  les  fèlibres  de 
Marseille  ont  obtenue  pour  leur  chère  langue  provençale.  En 
d'autres  termes,  nous  demandons  qu'un  Cours  Je  Catalan  soit  créé 
au  lycée  ^collège  actuel)  de  Perpignan. 


-   ,«4_ 

Ce  cours  secondaire  ne  nuirait  aucunement  à  ceux  qui,  simul- 
tanément, seraient  faits  à  la  future  Université  de  cette  ville.  U 
serait  au  contraire  une  excellente  et  nécessaire  préparation  à  l'en- 
seignement supérieur  qui  serait  donné  en  celle-ci. 

Nous  aimons  à  espérer  que,  grâce  au  bienveillant  appui  des 
députés  et  des  sénateurs  du  département,  et  de  toutes  les  autori- 
tés compétentes,  Monsieur  le  Ministre  de  l'Instruction  publique 
daignera  sans  délai  faire  droit  à  la  demande  de  la  Société  d'Etu- 
des Catalanes  de  Perpignan  :  la  création  d'un  cours  de  «  Catalan  » 
au  lycée  de  Perpignan.  C'est  logique  et  de  toute  première  néces- 
sité. Jean  Sarrète. 

Les  Félibres  Pyrénéens  et  le  Maréchal  Foch 

Les  félibres  de  VEscolo  deras  Pireneos  ont  organisé,  le  mois 
dernier,  une  fête  à  Valentine  (Haute-Garonne),  à  l'occasion  de  la 
pose  d'une  plaque  commémorative  sur  la  maison  natale  du  maré- 
chal Foch.  Ce  fut  un  beau  jour  pour  l'illustre  vainqueur  dé 
France  et  le  félibre  pyrénéen. 

Devant  la  maison  désormais  historique  où,  très  aimablement, 
la  sceur  aînée  du  maréchal  reçut  les  félibres,  des  discours  furent 
prononcés  par  MM.  Adoue,  maire  de  Valentine,  au  nom  de 
VEscolo  ;  Armand  Praviel,  de  l'Académie  des  Jeux  Floraux  ; 
Rozes  de  Brousse,  majorai  du  Félibrige  ;  Moudon,  président  de 
la  Société  des  Etudes  de  Cominges. 

Après  un  banquet  auquel  assistèrent  les  plus  hautes  personna- 
lités du  Félibrige  du  Midi,  eurent  lieu  les  Jeux  Floraux  sous  la 
présidence  de  Mademoiselle  Foch,  qui  avait  accepté  le  titre  de 
Reine  du  Félibrige  pyrénéen  décerné  par  VEscolo  deras  Pyreneos. 
Le  rapport  avait  été  présenté  par  M.  Sarrien,  capiscol,  auquel 
revient  pour  une  grande  part  le  succès  de  cette  fête. 

Les  Catalans  du  Roussillon  s'associent  de  tout  cœur  au  beau 
geste  de  leurs  sympathiques  confrères  de  VEscolo  deras  Pyreneos  ; 
ils  se  disent  tout  heureux  de  saluer  du  beau  titre  de  Théine  du 
Félibrige  pyrénéen  la  très  distinguée  M"'  Foch,  en  même  temps 
qu'ils  adressent  à  l'illustre  maréchal,  a  l'éminent  académicien 
J'hommage  de  leur  patriotique  et  reconnaissante  admiration. 


*        **«$**•       •»«^§S?*«*     *»«*3k?*»*     *»«Çff*«* 


JOFFRE 


Quan  jogava  an  el  taller 
de  son  parc  toneller, 

—  are  mireu  qui  s'hi  fia  — 
al  coneixer  tan  petit, 
aquells  dies  qui  haguès  dit 
que  tan  gran  séria  un  dia  ! 

—  L'àvi,  vos  en  recordeu  ? 

—  Qui  no  se  n  recordaria  1 


Cançô  popular 

Polytechnica  '1  vegé 

lo  ninet  del   «  Taronger  », 

lo  gran  fili  de  Rivesaltes  ! 

Y,  ascendit  de  cim  en  cim, 

fins  a  generalissim 

coneix  les  glories  mes  altes. 


—  L" 


avi,  ja  vos  animeu 


Fillets,  mon  cor  sobresalta. 


Jo  anavi  al  Col'legi  amb  ell  : 

aixurit  com  passarell, 

era  alegra  companyia  ; 

s'estimava  Perpinyà 

y  parlava  català 

mes  soviny  que  s'hi  valia. 

—  L'àvi,  vos  en  alegreu  ! 

—  Qui  no  se'n  alegraria  ! 


Y  van  arriva  '1s  mais  anys  : 
pochs  soldats  y  prou  afanys 
y...  de!  Maine  la  Yicloria... 
D'un  cop  mestre  ben  donat, 
en  salvant  I'humanitat, 
Joffre  entre  viu  dins  YHistoha  ! 

—  L'àvi,  jà  no'n  recordem. 

—  Fills,  serveu-ne  la  memoria. 


Avuy,  nins,  quan  passarà, 

giteu  llorer  càtaià, 

nines,  giteu-li  floretes, 

y  com  riurà,   envieu-li 

petonets  de  serafi 

amb  vostres  blanques  manetes  ! 

—  Per  vos  ii   farem  un  bès. 
- —  Per  lot  Ttyssellô,  ninetes  ! 

Caries  Grandô. 


SUR  LE  BANC  DE  PIERRE 

Lettre  au  poète  J. -S.  Pons,  auteur  de  «  El  Bon  Pedriç  » 

Mon  cher  Ami, 

Je  ferme  maintenant  votre  livre  ;  je  l'ai  assez  lu,  assez  creusé  ; 
j'en  suis  comme  imprégné  ;  il  me  sera  facile  d'exprimer  l'émotion 
profonde  qu'il  me  cause,  et  vous  ne  serez  ni  surpris,  ni  mécon- 
tent si  je  le  fais  souvent  en  réminiscences  de  vos  vers  délicieux. 

Comme  il  devait  vous  tarder,  et  que  vous  êtes  heureux  de  vous 
rasseoir  chaque  jour,  à  l'heure  où  le  soleil  mourant  dore  les  toits, 
sur  le  banc  de  pierre  qui  entoure  le  vieil  ormeau  du  village  natal  ! 
Combien  je  vous  envie  !  Le  Canigou,  là-bas,  se  teinte  de  violet, 
dans  la  ligne  de  lumière  qui  le  découpe  ;  les  paysans  s'en  revien- 
nent avec  leur  faulx  ;  l'on  entend  le  chant  amical  des  rainettes. 
C'est  par  hasard  que  vous  vous  êtes  assis  sur  ce  banc  de  pierre, 
dites-vous?  Non.  Il  est  votre  ami,  comme  il  est  le  mien.  Tout 
comme  le  bon  paysan,  à  la  rude  poigne,  nous  avons  le  droit  d'y 
prendre  place.  Il  nous  sera  accueillant,  parce  qu'il  sait  que,  nous 
aussi,  nous  fouillons  et  ramenons  au  baiser  du  soleil  la  glèbe 
maternelle,  et  que,  le  bras  sur  la  bêche,  nous  savons  aussi  goûter 
la  douce  contemplation  de  la  montagne  bleue.  Certes  le  vin  que 
nous  buvons  à  la  régalade,  entre  deux  «  juntes  »,  est  bien  le  vin 
nôtre.  Mais  notre  frère  de  la  terre  se  blase  peu  à  peu,  par  l'ac- 
coutumance, à  ce  spectacle  émerveillant  du  royaume  des  cimes 
calmes,  alors  que,  vous,  il  vous  a  fallu  lui  donner  la  vie  de  la 
pensée  dans  vos  exils  intermittents  de  la  carrière  universitaire  ou 
dans  l'affreux  et  long  cauchemar  de  votre  glorieuse  captivité.  Elle 
a  besoin  d'être  bien  puissante,  cette  vitalité  de  l'imagination  poé- 
tique, pour  vaincre  ainsi  l'épuisement  corporel  !... 

Pour  une  fois,  asseoyons-nous  donc  côte  à  côte  sur  le  banc  de 
pierre  qui  garde  votre  seuil.  La  journée  est  belle  et  nous  parle  à 
tous  deux  le  même  langage.  Toutes  vos  peines  seront  miennes  ; 
toutes  vos  joies  seront  mes  joies.  Cette  vieille  église  qui  vous 
charme,    je   la    connais,    quoique   je  n'y  entre  plus  guère  qu'à  la 


_    ,87   - 

poursuite  des  souvenirs  de  l'enfance  ;  je  l'aime,  l'église  poudreuse, 
avec  son  brillant  retable  qui  montre  en  scènes  compliquées  votre 
patron  lardé  de  flèches  cruelles,  avec  ses  autres  saints  écarquillant 
leurs  paupières  d'or,  avec  son  étrange  Christ  endormi  les  pieds 
meurtris  bien  joints,  avec  sa  Vierge  d'avril  qui  regarde  comme 
une  amie. 

Non  ;  il  fait  trop  beau  ;  allons  par  les  rues  du  village,  par  les 
rues  que  relie  leur  étroitesse  et  qui  montent,  inégales,  entre  les 
maisons  noircies.  C'est  le  gai  matin.  Les  toits  à  peine  rougis,  où 
flotte  harmonieusement  la  première  clarté  du  jour,  vont  bientôt 
s'offrir  comme  un  brasier  à  tout  le  bleu  d'un  lumineux  foyer.  Les 
treilles  noueuses  dégoulinent  sur  les  passants.  Il  glisse  un  souffle 
d'air  qui  rêve.  Ah  !  voici  une  brave  vieille  sur  sa  chaise  basse,  au 
pas  de  la  porte,  avec  le  foulard  noué  encadrant  sa  face  recuite, 
et  ses  deux  mains  reposant  sur  les  genoux.  Sur  la  fenêtre  une 
fleur  s'ouvre,  dans  un  toupin  écaudé.  Déjà  des  cheminées  la  fumée 
bleue  monte.  Là-bas,  l'eau  court  parmi  l'herbe,  les  houes  brillent 
dans  le  feuillage  des  vergers,  et  les  ânesses  vont  et  viennent  avec 
leur  bât.  Là-haut,  par  le  fenestron  béant  d'un  grenier,  on  voit  le 
maïs  jouer  avec  le  soleil.  Ah  !  cher  grenier  ;.  grenier  des  vieux 
outils,  crible,  quenouille,  meubles  désuets  et  robustes  ;  grenier 
des  provisions  rustiques,  tas  d'avoine,  olives  et  figues  sèches  ; 
grenier  traditionnel  !  L'hirondelle  est  ta  familière,  car  tu  es  tout 
clarté.  Tu  retentis  du  chant  des  cloches.  Et  ton  fenestron  est  si 
propice  pour  contempler  la  montagne  neigeuse,  pour  recevoir  le 
baptême  de  la  bonne  terre! 

Mais  des  femmes  reviennent  déjà  du  frais  Ribéral,  aussi  fraî- 
ches que  lui,  jambes  nues,  yeux  vifs  et  figure  hàlée.  Quel  noble 
balancement  de  hanches  !...  Nous  voici  sur  la  place  !  Ce  n'est 
pas  un  ormeau,  mais  un  micocoulier  centenaire  qui  l'ombrage  ;  il 
v  a  bien  le  banc  de  pierre.  Feuillage  clair,  tu  renfermes  tout  un 
regret  du  passé...  Voici  encore  des  femmes  ;  elles  s'asseoient  à 
l'ombre  et  se  mettent  à  repriser,  à  babiller  aussi.  Et  il  y  a  une 
fillette  en  jupon,  avec  des  yeux  d'alicante... 

Maintenant  des  jeunes  filles  s'avancent,  une  à  une,  attentives  à 
leurs  pas  ;  les  bras  haut-levés,  elles  portent  sur  un  plateau  trois 
cabas,  ou  repose  le  trésor  de  la  pâte  du  pain.  Cependant,  à  la 
fontaine,    les    cruches    coupent,    chacune   à  son  tour,  le  jet  clair. 


—   .88   - 

Quel  lumineux  silence  !  Qu'on  est  bien,  à  rêver  sur  ce  fruste  banc 
de  pierre  !  Qui  donc  fait  un  si  beau  corps  à  nos  jeunes  vierges 
latines  allant  puiser  aux  sources  !  A  votre  avis,  cher  poète,  c'est 
le  vent  salé  de  la  mer,  ce  vent  salutaire  qui  saute  par  dessus  la 
crique  d'opale  où  reposent  les  toits  teintés  d'oranger,  par  dessus 
le  village  enchaîné  dans  un  noble  silence,  par  dessus  les  pierres 
des  coteaux  qui  semblent  en  contemplation,  par  dessus  la  plaine 
verte.  C'est  lui,  le  vent  salobre.  Ainsi  de  ce  banc  de  pierre  notre 
rêverie  s'évade  un  moment  jusqu'à  la  mer  salée. 

Mais  la  campagne  nous  appelle.  Les  parfums  de  la  luzerne 
montent  dans  le  vent.  Où  aller  d'abord  ?  Par  le  Ribéral  aux  bois 
mystérieux,  où  la  libellule  pose  son  vol  sur  les  aulnes  ou  sur  les 
bouleaux  qui  bruissent  comme  un  rêve  ?  Non,  montons  vers  la 
garrigue.  C'est  l'avril,  le  mois  léger,  pureté  et  honneur  du  ver- 
ger blanc,  l'avril  de  Rémi  Belleau,  le  mois  plein  du  bourdonne- 
ment des  abeilles,  de  clairs  arbres  et  de  sources.  O  sérénité  du 
matin  !  La  bergeronnette  chante  entre  les  blancè  cerisiers.  Voici 
la  bonne  terre  d'argile  où  l'olivier  et  le  grenache  s'ensoleillent 
parmi  le  genêt.  Salut,  oliviers  antiques,  semés  parmi  les  terrains 
d'abeilles  !  Oliviers  qui  chantez  partout  la  paix  sereine  et  magni- 
fique, le  poète  vous  salue.  Sa  pensée  est  un  chant  qui  a  la  terre 
pour,  racine  ;  c'est  l'haleine  de  la  feuille  sous  le  ciel  ;  le  noyer 
est  son  frère  ;  mais  c'est  à  toi  surtout  qu'il  ressemble,  olivier 
ami,  tranquille  et  joyeusement  feuillu.  Serein  commue  un  dieu,  le 
poète  étale  sa  divine  frondaison. 

Vous  aussi,  salut,  amandiers  noirs  et  noueux,  qui  vous  pom- 
ponnez de  blanc,  inclinés  sur  le  versant  rougeâtre  en  rangée  har- 
monieuse !  Cette  terre  de  la  garrigue  nous  parle  au  cœur,  comme 
une  épouse  ou  comme  une  sœur  câline. 

Du  haut  de  ce  coteau  tapissé  de  vigne  et  d'oliviers  suivons  le 
cours  des  saisons.  L'aube  d'août  luit,  silencieuse  et  sûre.  C'est  la 
moisson.  Bien  plus  belle  elle  est  sur  la  montagne.  Sur  la  monta- 
gne nous  irons  plus  tard  voir  lier  les  gerbes  devant  les  crêtes  et 
les  cols  dressés  dans  la  lumière. 

L'automne  approche.  Son  or  pare  déjà  de  joyaux  les  mûriers 
du  chemin.  Le  jaune  muscat  pend  au  soleil  sur  le  bord  des  ravi- 
nes. Oh  !  le  doux  temps  des  vendanges  î  La  libellule  émaillée 
est  défunte.  Tout  le    monde   est   au   travail    sur    le   versant   de   la 


—  ,89  — 

garrigue  hàiée,  non  loin  des  ruines  de  l'église  romane  où  vibrent 
les  oliviers  au  feuillage  tranquille.  Laissons,  ô  ami,  laissons  san- 
gloter les  Drvades.  Vous  croyez  à  ces  divinités  ?  Notre  mytho- 
logie, c'est  la  vibration  de  notre  àme  devant  la  nature.  Plus  de 
nymphes  riant  sur  la  mousse,  ni  de  sirènes  accroupies  au  fond  de 
la  mer  enchantée.  La  terre  et  la  mer  sont  si  belles  par  elles- 
mêmes,  par  la  communion  de  notre  àme  !... 

L'automne  est  venu.  Ciel  de  verrière,  rouilleux  ou  d'un  bleu 
de  languison.  La  feuille  tombe  lentement.  La  source  pleure  et 
pleure.  La  maraîchère  saute  les  flaques  d'eau.  La  tristesse  appro- 
che. Mais  non  ;  l'hiver  lui-même  aura  ses  joies.  La  troupe  d'oli- 
verelles  arrive  sur  le  coteau  ;  elle  étend  un  drap  au  pied  de  l'ar- 
bre généreux  ;  les  échelles  sont  dressées  et  les  mains  se  trémous- 
sent. La  Dryade  n'est  pas  morte  ;  je  vous  l'accorde,  en  faveur 
de  ce  curieux  rythme  de  ai  syllabes  en  7  anapestes,  que  vous 
avez  si  artistement  renouvelé  du  grand  Maragall.  L'olivier  une 
fois  dépouillé,  cette  Dryade  va  apparaître,  pour  montrer  ses  char- 
mantes formes,  je  veux  bien  cela  aussi  ;  et  elle  enseignera  encore 
aux  jeunes  filles  le  chant  de  la  brave  Terre  qui  se  dépouille  pour 
renaître.  C'est  fini  ;  les  oliverelles  s'en  reviennent.  La  plus  jeune 
s'arrête  près  de  l'amandier  pour  rêver  et  laisser  s'exhaler  son  nou- 
vel amour,  telle  la  violette  déployant  sa  capuche  bleue. 

Que  ne  dit-elle  pas  à  nos  âmes,  la  terre  du  Ribéral  et  de  la 
garrigue  ?  Mais  les  montagnes  de  Canigou  brillent  là-haut,  dans 
leur  paix  et  leur  sérénité.  Elles  nous  appellent,  ces  blanches  dées- 
ses découpant  leur  nudité  sur  le  ciel.  O  chère  montagne,  si  bien 
enracinée  dans  le  coeur  de  l'exilé,  au  pied  de  tes  larges  versants, 
la-bas,  loin,  brillent  les  ermitages  désolés,  aux  dalles  de  schiste, 
les  ermitages  qui  plaisent  au  rêve  parce  qu'ils  ont  de  mystérieu- 
ses voix  antiques... 

La  montagne,  c'est  votre  doux  pèlerinage  d'amour,  cher  jeune 
poète.  Comme  je  vous  ai  suivi  avec  tendresse,  avec  la  oeur  de 
troubler  votre  enchantement  !  Vous  nous  dites,  avant  tout,  votre 
passion,  votre  dévotion  aux  pins  solitaires,  qui  découpent  le  soir 
dans  le  silence  blanc  leur  majestueuse  ténèbre.  Leur  feuillage 
mouvant  vous  parle  du  ciel  bleu  du  passé.  A  leur  pied,  vous 
attendiez,  adolescent,  la  nymphe  au  corps  potelé,  qui  ne  venait 
toujours  pas. 


—   190  — 

Et  tout  de  suite  commencent  les  intimes  rendez-vous.  La  pluie 
chante.  Vous  voici  tous  deux  innocemment  sous  un  figuier.  Mais 
il  n'y  en  a  pas  dans  la  montagne  !  Sans  doute  :  c'est  encore 
au  Ribéral.  Le  ruisseau  coule,  endormi,  sous  les  noyers  épais.  11 
pleut  ;  et  comme  c'est  gai,  cette  pluie  !  Oh  !  les  doux  distiques  ! 
On  dirait  de  poétiques  litanies. 

Plou,  plou  ;  la  pluja  es  sanitosa 
]  te  dona  un  color  de  rosa. 


Si  tant  trigues,  que  te  diran  ? 
Pare  i  mare  te  renyaran. 

Mes  deixa  fer,  que  es  ta  mirada 
De  blavor  nova  il-luminada. 

Veuràs  en  el  cel  espellir 

El  gai  arquet  de  Sant  Marti. 

Mai  t'havia  vist  tant  hermosa  ; 
Ton  llavi  es  moll  com  una  rosa. 

Le  soleil  de  Montalba  n'a  pas  besoin  de  luire  ;  il  est  dans  vos  cœurs. 

Une  autre  fois  elle  est  de  blanc  vêtue,  l'amie  aux  cheveux 
blonds.  Vous  allez  sur  la  garrigue  guetter  les  premiers  grains  mûrs 
du  raisin  et  le  vol  bruyant  de  la  perdrix  dans  les  pentes  en  ter- 
rasse. Comme  l'arbre  au  vent,  elle'chante  la  joie  infinie  de  l'ado- 
lescence. Matin  de  Saint-Roch  !  Les  cloches  font  leurs  trilles. 
Allons  cueiilir  les  figues-fleurs  !  De  la  solitude,  cette  garrigue  ? 
Voyez  :  les  airs  font  la  fête.  Les  arbres  sont  grêles,  mais  ce  sont 
de  bons  amis.  La  bien-aimée  trotte  de  ci,  de  là  :  une  amande 
oubliée  ;  une  rose  ;  et  son  bras  lumineux  s'allonge  ;  et  le  soleil 
baise  sa  joue.  Cependant  le  panier  reste  vide  de  figues  ;  elles 
sont  encore  vertes...  comme  les  illusions. 

La  jeunesse  éclot.  C'est  le  vrai  matin.  Le  chant  s'est  fait  fort 
comme  la  montagne,  blanc  comme  les  glaciers.  La  vigne  bour- 
geonne ;  pêchers  et  cerisiers  sont  en  fleurs  ;  tout  chante,  les  clo- 
ches et  le  vent  ;  les  ruisselets  courent,  les  fraises  embaument. 
Doux  matin  de  la  montagne  et  de  la  garrigue  !  La  tendre  blonde 
aux  yeux  d'eau  bleue,  le  fruit  plein  de  saveur,  la  jarre  de  miel 
fin,  vous  l'avez  enfin  pressée  sur  votre  poitrine  ;  douces  lèvres 
humides  ;  coeur  battant  ;  bras  mollement  étendu  ;  tresse  détressée. 
O  parfum  de  printemps  ! 


—    19»    — 

L'idylle  exquise  se  prolonge.  Comment  se  lasser  de  l'amou- 
reuse au  corps  d'argile  fine,  de  clarté  de  neige,  belle  pèche  mûre, 
août  doré,  de  ce  corps  si  doux  a  la  sève  roussillonnaise  ?  11  fait 
si  bon  être  assis  sur  le  banc  de  pierre,  toujours  seuls  !  C'est  un 
soir  d'août,  au  silence  blanc... 

Vienne  septembre,  le  mois  de  la  clarté  !  Hymne  triomphant  du 
vent  qui  secoue  le  grand  cyprès  et  bruit  dans  les  roseaux.  Doux 
temps  pour  les  folies  d'amour  !  Avec  le  rythme  de  son  corps  elle 
vous  dit  toute  la  pureté  du  soir  dans  un  grand  baiser  voluptueux. 

Mais  l'amour  n'est  pas  toujours  gai.  Elle  est  venue,  aussi  belle 
que  jamais,  avec  sa  démarche  plus  divine  qu'une  danse,  avec  la 
grâce  sereine  des  pêchers  ;  et  ses  baisers  furent  une  pluie  de 
pétales  que  vous  recueillîtes  comme  une  jarre  d'argile.  Lasse,  elle 
s'est  affalée  à  l'ombre  des  cyprès,  ces  cyprès  au  noir  de  velours 
et  qui  sont  une  tristesse  douce  de  notre  Ribéral.  C'est  l'heure  où 
le  bleu  du  jour  s'étiole  sur  la  montagne.  La  Douleur  fait  son 
entrée  sournoise.  Quelle  douleur  donc  ?  Le  tendre  mal  qui  la 
pâlit,  et  la  fait  plus  nette  et  plus  noble  :  l'Annonciation  radieuse  ! 

Cela  va  se  préciser  plus  loin.  Au  milieu  du  paysage  reposant, 
au  bord  du  ruisseau  qui  mire  une  grande  fleur  rose,  sous  le  noyer 
qui  s'émerveille  de  l'ombre  qu'il  projette,  elle  dort,  l'épouse 
adorée,  la  joue  au  creux  de  la  main,  le  tablier  plié  sous  la  nuque  ; 
elle  écrase  l'herbe  sous  le  poids  de  son  corps,  comme  la  caille 
fait  là-haut  dans  la  prairie.  L'enfant  frémit  dans  le  sein  maternel. 
Et  toute  la  montagne  en  exhale  un  suave  murmure. 

Et  dorénavant  vous  guetterez  avec  tendresse  tout  geste  de  la 
future  mère.  Elle  s'est  encore  endormie.  Vous  aimez  tant  la  con- 
templer ainsi  !  Mais  le  sommeil  ressemble  si  bien  à  la  mort  !  Oh  ! 
cette  mort  de  silence  et  de  terre  !  Maudit  Baudelaire,  qui  évo- 
quez si  àprement  ces  images  affreuses  !...  Non,  non.  La  lumière 
s'épanouit  entre  les  arbres,  et  notre  cœur  s'apaise  soudain  devant 
cette  sérénité. 

C'est  que  vous  aimez  tout  ce  qui  est  clair,  tout  ce  qui  est 
calme.  Le  clair  de  lune  vous  enchante  ;  c'est  votre  idéal.  Ainsi 
doit  être  l'au-deià,  pensez-vous  :  tout  lune  sainte  et  rythme  pro- 
fond, mélodie  muette,  aérienne,  amicale,  afin  que  la  pensée  ne 
soit  plus  esclave  et  que  la  haute  pureté  d'un  ciel  à  peine  bleu  air 
l'accueil  d'une  idéale  épouse. 


—   19Î  — 

Tel  est  votre  rêve,  noble  rêve  de  calme  et  de  sérénité.  Je  relis 
votre  incomparable  Pregaria  de  la  tarde,  où  vous  invoquez  Jésus, 
le  Jésus  en  qui  vous  cessâtes  de  croire,  mais  dont  la  vertu  vous 
est  chère,  ce  Dieu  des  ancêtres,  ce  Dieu  oublié,  ce  voyageur 
mystérieux  qui  vient  le  soir  prendre  humblement  place  sur  le  banc 
de  pierre  du  village.  Jésus  qui  donnais  à  nos  aïeux  consolation 
pour  toute  peine,  sois  loué  alors  que  tu  ne  serais  que  l'impossi- 
ble désir  du  cœur  humain  ! 

Que  de  fois  vous  y  revenez,  à  ce  rêve  de  paix  sereine  !  Ce 
que  vous  voudriez,  c'est  avoir  la  sève  de  l'arbre,  la  luminosité  de 
la  mer,  l'ensoleillement  des  cimes.  Ce  que  vous  demandez  à  la 
terre,  c'est  de  vous  conseiller  la  joie  et  de  vous  verser  l'illusion, 
en  ne  gardant  en  vous  que  la  clarté  de  la  pensée,  telle  la  lueur 
nocturne  d'une  étoile  entre  le  feuillage. 

Ce  rayon  de  soleil,  cette  étoile,  c'est  aussi  la  branche  de  rosier 
qu'abrite  le  mur  du  mas  abandonné.  Oh  !  la  triste  demeure  des 
hauteurs,  qui,  dans  l'austère  solitude,  contemple  le  silence  clair  de 
l'espace  !  Et  cette  ombre  des  pins  qui  l'entoure,  le  long  du  sol  ! 
Ombre  hallucinante  : 

And  my  soûl  from  out  that  shadow  that  lies  floating  on  the  floor 
Shall  be  lifted  —  néver  more. 

Jamais  plus!  Le  papillon  noir  bat  funèbrement  des  ailes.  Jamais 
plus  la  vie  de  la  foi  ne  renaîtra  dans  ce  mas  abandonné  :  ni  le 
dressoir  aux  plats  de  faïence  peints  de  fleurs  et  d'oiseaux,  et 
l'éclair  humide  des  cruches  rouges  et  vertes  ;  ni  les  pendeloques 
de  raisins  clairs,  et  les  beaux  rires  d'enfants,  et  l'ondulation  des 
troupeaux.  Les  amandiers  aux  blanches  promesses -sont  plus  secs 
que  la  roche.  Jamais  plus  !... 

Qu'importe?   La    nature  est  si    belle    au    dehors!    Sans    doute 

l'automne  de  la  vie  arrive.  L'arbre  endormi  dans  l'oubli   du   frais 

i 

matin,  avec  l'offrande  d'or  de  son  feuillage,  c'est  le  bon  repos 
pour  cette  âme  désaccoutumée  de  croire.  Avec  une  épouse  chasie 
et  un  bel  enfant,  le  jour  va  se  lever  plus  harmonieux.  L'amour, 
l'amour  conjugal,  l'amour  paternel,  tout  est  là.  Hors  de  là,  point 
de  vraie  science. 

Venez  donc,  tendre  épouse  au  corps  blanc,  avec  l'enfant  au 
bras,  fleur  hâtive.  C'est  le  temps  des  parfums  :  l'amandier,  ô  joie  ! 


-  ,93  - 

commence  à  refleurir;  la  violette  énamourée  agite  son  encensoir  ; 
l'abeille  blonde  vole  avec  un  murmure  enivré.  Qu'un  baiser 
fécond  scelle  chacune  de  vos  paroles  !  Charmanl  pêcher  rose, 
l'eau  de  la  vanne  t'arrosera  bien  doucement.  Ils  ne  sont  même 
point  de  trop,  là,  tout  auprès,  les  noirs  cyprès  contemplatifs, 
rangée  austère  qui  est  comme  suspendue  en  l'air  ;  ils  donnent  le 
goût  de  l'Infini... 

Et  voilà  le  mas  définitivement  ensoleillé... 

Livre  de  calme  et  de  sérénité,  et  livre  d'exquises  peintures 
rurales,  tel  est  votre  Bon  Pedriç,  noble  poète  et  cher  ami.  La 
pensée  sereine  s'y  mêle  aux  touches  du  pavsage  vers  par  vers, 
pour  ne  faire  qu'un,  en  une  communion  que  vous  avez  d'ailleurs 
admirablement  définie.  Poursuivez  donc  dans  la  paix  recouvrée 
votre  oeuvre  si  belle.  Vos  chants  ont  déjà  trouvé  de  l'écho  dans 
la  langue  maternelle  renouvelée,  et  d'autres  écoutent  votre  voix, 
en  souhaitant  ardemment  toujours  l'entendre. 

Quand  vous  dormirez  votre  sommeil  dans  la  glèbe  schisteuse 
de  la  garrigue,  au  tintement  des  clochettes  des  chéores,  tout  près 
de  la  source  au  constant  murmure,  au  pied  du  figuier  dont  l'om- 
bre suit  l'heure  fidèlement,  l'épouse  tendre  ne  sera  pas  seule  à 
venir  vous  y  parler...  Mais  non.  Chasssons  ces  tristes  pensées 
Mussétiennes.  L'amandier  est  en  floraison.  Aussi,  désormais,  lors- 
que nos  rêves  à  nous  iront,  comme  un  essaim  d'abeilles  flottant 
dans  le  firmament  lumineux,  iront  là-bas  où  l'Albère  déploie  ses 
roches  violettes,  lorsque  la  pluie  fine  de  mai  sous  un  ciel  d'ar- 
doise viendra  remouiller  nos  souvenirs  d'enfance,  ce  sont  vos 
vers  qui  chanteront  dans  notre  mémoire.  Certes  nous  la  voyions 
déjà  bien  belle,  notre  terre  de  Roussillon.  Vous  nous  l'avez  mon- 
trée plus  noblement  belle,  et  plus  sereinement,  et  plus  clairement, 
car  elle  l'est  sans  limites.  Aussi,  n'ayez  crainte,  a  Toute  la  terre 
que  mon  cœur  aime  »,  comme  a  dit  Verdaguer,  surtout  la  garri- 
gue, le  figuier  et  la  source  parleront  à  jamais  pour  vous. 

Paul   Bergue. 
Hanoï,  8  juin   1919. 


La  Confrérie  du  Rosaire 

A  ESTAVAR  (1607) 

L'une  des  plus  anciennes  Confréries  du  Rosaire  que  nous  con- 
naissions en  Cerdagne  française,  en  dehors  de  la  Confrérie-mère 
de  Puigcerda,  est  celle  du  petit  village  d'Estavar. 

Mais  hélas  !  je  n'ai  pu  trouver  le  moindre  document  d'archives 
qui  puisse  nous  renseigner  sur  les  constitutions,  statuts,  fêtes  et 
sur  la  situation  financière  de  cette  mariale  association.  Les  archi- 
ves paroissiales  "d'Estavar  sont  si  pauvres  qu'elles  ne  se  composent 
aujourd'hui  que  de  quelques  cahiers  et  liasses  de  comptes.  C'est 
dans  l'une  de  ces  liasses  que  j'ai  eu  la  bonne  fortune  de  trouver 
la  date  de  fondation  de  la  Confrérie  du  Rosaire.  Celle-ci  fut 
établie  à  Estavar  en  l'année  1607  ;  elle  est  donc  la  plus  ancienne 
que  je  connaisse,  du  moins  à  ce  jour,  en  Cerdagne,  parmi  les 
filiales  de  celle  de  Puigcerda. 

Faute  d'autres  documents,  il  suffira  d'appliquer  à  la  Confrérie 
d'Estavar  ce  que  nous  connaissons  des  statuts  et  ordinations  de 
Bolvir,  d'Osséja  et  d'Enveigt,  pour  avoir  de  la  première  les 
détails  qui,  par  ailleurs,  nous  font  défaut,  attendu  que  ces  sortes 
d'associations  se  ressemblent  toutes  plus  ou  moins  par  l'identité 
même  de  leurs  règles  constitutives. 

A  BOLVIR      (1612-1793) 

Comme  celle  d'Estavar,  la  Confrérie  de  Bolvir  se  réclame 
d'une  origine  fort  respectable,  puisqu'elle  existait  déjà  en  1612. 
En  effet,  dans  un  vieux  manuscrit  conservé  dans  l'église  de  cette 
paroisse,  un  chroniqueur  a  transcrit  la  note  suivante  : 

«  Noto    que    per   les   guerres    del    Principat    de    Cathalunya,  i 

(1)  Village  faisant  aujourd'hui  partie  de  la  Cerdagne  espagnole,  situé  au 
nord-ouest  de  Puigcerda,  à  i  1  i5  mètres  d'altitude,  i3o  habitants.  11  est  cité 
au  ix'  siècle,  dans  une  bulle  du  pape  Jean  XV,  comme  dépendant  de  Saint- 
Michel  de  Cuxa  (Confient). 


-   ,»5- 

contagi,  que  los  secrets  fonc  servit  Nostre  Senyor  enviar  en  lô 
Doc  de  Bolvir,  i  altres  del  Comptât  de  Cerdanya,  en  lo  any  1612, 
entre  altres  coses,  foren  perdudes  moites  escripturas  de  la  iglesia, 
i  comuna  de  dit  Hoc,  i  particularment  los  llibres,  i  comptes  de 
dita  Confraria.  » 

Cette  pieuse  association  fut  réorganisée  le  17  décembre  1617, 
comme  l'indique  l'acte  ci-après  : 

«  En  lo  any  1617,  y  als  17  del  mes  de  dezembre,  lo  Révèrent 
Pare  Fra  Jacinto  Quès,  de  la  Orde  de  Predicadors,  aben  près  sa 
llicentia  y  autoritat  del  molt  Révèrent  Pare  Fra  Joan  del  Valle, 
provincial  de  la  Provincia  de  Arago,  funda  la  Confraria  de  Nostra 
Senyora  del  Roser,  en  la  iglesia  parrochial  de  Santa  Cecilia  del 
lloch  de  Bolvir,  terTa  de  Cerdanya  y  bisbat  de  Urgell,  sent  rec- 
tor  de  dita  parrochia  lo  Révèrent  Mossen  Niubo,  balle  Domingo 
Jordana,  y  consols  ae  dit  lloch  Antony  Sunyer  y  Cosma  Casa- 
mitjana. 

«  Consta  dita  fundacio  ab  acta  autentic  près  per  M'  Domingo 
Montaner,    notari   de.   Puigcerda,   als  17  de  dezembre  1617  (1).  » 


Les  statuts  propres  à  la  Confrérie  du  Rosaire  de  Bolvir  étaient 
basés  sur  les  constitutions  établies  précédemment  par  les  Souve- 
rains Pontifes,  depuis  Sixte  IV,  en  1417.  Ils  ont  trait  à  la 
réception,  aux  obligations  et  privilèges  des  associés,  aux  fêtes  de 
l'association.  Voici  le  texte  de  ces  constitutions  : 

<  Constitucions  y  Ordinations  que  han  de  guardar  los  Confrares 
de  la  Confraria  de  JVostra  Senyora  del  T(oser,  lesquals  son  confirmadas 
ab  autoriiat  aposlolica,  per  Sixte  Quart,  a  3o  de  maig,  any  141  y, 
Innocenlio    Ociau,    en   la  fesla  de   Pentecostes,    any    1484,    i  lois  los 

(1)  Cet  acte  et  le  précèdent  ont  été  transcrits,  d'après  d'autres  vieux 
manuscrits  sauvés  du  désastre  de  1612,  d'un  registre  portant  la  mention 
suivante  :  *  Llibre  en  lo  quai  estan  acenlats  los  Confrares  del  7(oser  de  la  parrc- 
quial  Je  S"  Cecilia  Je  Bolvir.  comensat  al  i3  de  agcst  ibSb,  sent  reclcr  lo 
J^everent  Senyor  Miquel  Pcrlana.  y  preJicaJor  :  lo  levèrent  Paré  Tra  Benel 
Marti,  présentât  de  la  Orde  Je  PreJicaJors  ».  (Arch.  paroiss.  de  Bolvir.)  — 
Tous  les  détails  de  notre  présent  Mémoire,  sauf  indications  contraires,  sont 
extraits  de  ce  même  registre  paroissial. 


-~  196  — . 

Jemes  Ponlificèe  que  à  estôs  han  succeit,   lesquals  constilucions  y  ordi- 
nations son  les  seguénis  ' 

Coristitucio  I 

«  Primerament,  ordenam  que  totes  les  persones  de  qualsevol 
grau  6  condicio  que  sien,  pugan  ser  Confrares  desta  S1'  Confraria, 
fentse  escriura  en  lo  llibre  de  ella  per  algun  religios  de  la  Orde 
de  Predicadors  que  tinga  autoritat  6  licencia  de  religio  à  qual- 
sevol altra  persona  que  tinga  esta  facultat,  laquai,  en  esta  Parro- 
chia,  te  lo  Senyor  Rector  que  vuy  y  en  temps  dsdevenidor  sera  ; 
y  asso  sie  sens  pagar  cosa  ninguna  a  la  entrada,  sino  allô  que 
graciosament  voldran  pagar.  Axi  ho  declararen  lo  Pape  Léo  X, 
en  lo  Breu  que  comensa  Pastoris  Œterni,  y  lo  Sant  Pio  V,  en  lo 
Breu  Jnjunciis  JSJobis. 

Constitucio  2 

«  Mes  avant,  constituim  y  ordenam  que  qualsevol  Confrare 
estiga  obligat  â  dir,  cada  semmana,  un  Rosari  cumplit,  çô  es  : 
cent  sinquante  Ave  Maria,  y  quinze  Pare  nostre  ;  y  si  no  pot  tôt 
junt,  lo  diga  dividit,  y  de  la  manera  que  puga,  avertint  que  la 
semmana  que  aquell  dira,  sera  participant  de  tots  los  bens  y  festi- 
vals, com  son  :  dejunis,  oracions,  almoynes,  penitencias,  sacrificis, 
y  les  demes  bones  obres  que  dins  tôt  lo  mon  faran  los  Confrares 
desta  Santa  Confraria.  Axi  ho  aprova  Léo  X,  en  la  Bulla  Pastoris 
Œterni. 

«  Los  Reverendissims  Gênerais  de  la  Orde  de  Predicadors, 
als  sobredits  Confrares  que  diran  lo  Rosari  de  Nostra  Senyora, 
los  admeten  y  fan  participans  de  totes  les  misses,  merces,  dejunis, 
disciplinas,  officis  divins,  o,  de  totes  les  demes  obres  que  en  tota 
la  Orde  faran  los  religiosos  y  religiosas  de  aquella. 

«  Noto  que,  si  deixan  de  dir  lo  Rosari  no  peccan,  sino  que 
restan  privats  de  tôt  lo  be  espiritual  sobredit,  si  lo  dexar  de  dit 
Rosari  sera  per  culpa  y  propria  negligencia.  Pero,  si  lo  dexar 
de  dirlo,  sera  ab  justa  causa,  y  no  poden  lo  dir,  procurara  que 
altra  persona,  en  son  nom,  lo  diga,  no  restara  privât  de  la  sobre- 
dita  participacio  dels  bens  espirituals. 

Constitucio  3 

«  Item,  ordenam  que,  si  algun   Confrare   voldra   dir   lo  Rosari 


-  197  - 
per  algun  difunt,  primer  lo  fasse  escriure  en  lo  llibre  de  la  Cort- 
fraria,  si  no  es  que  ja  en  ell  antes  estiguera  escrit  ;  y  que  escrit 
en  lo  llibre  de  la  Confraria,  la  semmana  que  per  lo  tal  difunt 
dira  lo  Rosari  enter,  participe  en  lo  Purgatori,  per  tnodum  sufra- 
gii,  lo  que  participan  assi  los  vius,  que  es  la  communicacio  dels 
bens  espirituals,  y  guanye  les  indulgencies,  com  si  personalment 
aquell  difunt  digues  lo  Rosari. 

Constituai)  4 

«  Item,  ordenam  ques  fassen  quatre  anniversaris  per  los  Con- 
frares  difunts  :  lo  primer,  lo  die  seguent  dempres  la  Purificacio 
de  Nostra  Senyora  ;  io  segon,  dempres  la  Annunciacio  ;  lo  tercer, 
dempres  de  la  Assumptio  ;  y  lo  quart,  dempres  de  la  Nativitat  de 
Nostra  Senyora.  Y  âmes  de  estos  quatre  anniversaris,  volem  que, 
quant  algun  Confrare  morira,  los  demes,  y  cada  un  en  particular, 
diga  per  la  anima  de  tal  difunt:  un  Rosari,  loqual  cuidara  lo 
senyor  Rector  amonestar  al  poble,  lo  diumenge,  festa  manada, 
dempres  de  les  demes  cosas  que  amonestara. 

Constitucio  6 

«  Item,  nostre  S.  S.  P.  Gregori  Xlll,  ab  son  motu  propri, 
que  comensa  Monet  Aposîolus,  mana  que  :  en  totas  las  iglesias,  en 
lesquals  estara  fundada  esta  Santa  Confraria,  tots  los  anys,  lo  pri- 
mer diumenge  de  octubre,  se  célèbre  festa  solemnissima,  en  nom 
del  Rosari,  iaquel  se  célèbre  com  doble  major  y  ab  nou  Hissons, 
en  memoria  y  agraiment  de  aquella  insigna  Victoria  que  alcansa, 
en  semblant  dia,  la  Christiandiat  contre  del  Turch  y  del  Moro, 
laquai  Victoria  se  creu  piadosament  ser  alcansada  per  los  merits 
de  Maria  Santissima  y  oracions  del   Rosari. 

Constitucio  7 

«  Item,  ordenam  que  tots  los  anys,  si  no  tindran  predicador, 
lo  dia  de  la  festa  del  Roser,  un  dels  Pabordes  ô  alrre  persona, 
portin  lo  llibre,  en  lo  quai  estan  escrits  los  Confrares,  al  convcnt 
mes  cercant  de  la  Ordc  de  Predicadors,  pera  que  lo  Prior  o 
principal  Président  del  Convent,  aprove  de  nou,  quiscun  anv,  los 
Confrares  escrits,  firmant  alli  son  nom. 

^  suivre)  J.  Sarrète, 


Quelques  noms  de  plantes  tf  synonymes 

Catalans-Français  tf  Français-Catalans 

(SUITE  er  FZ7V) 


tamarin.  —  tamariu,  tamarill,  tamarit,  tamarisc,  tamarell,  gatell. 
tanaisie.  —  tanarida,  tanavell,  herba  deis  vernts,  herba  de  Santa- 

Maria. 
térébinthe    —  voir  lentisque. 

thym.  —  farigola,  frigola,  frigoleta,  frigol,  timô. 
thlaspi  —  traspic,  herba  del  passarell,  bolseta  de  pastor. 
tilleul.  —  tiler,  tiller,  tilà,  tilià,  farot. 
tomate.  —  tomata,  poma  d'amor,  tomaquet,  tomatec. 
topinambour.  —  nyàmara,  nyama. 
tournesol.  —  girassol. 
trèfle.  —  trevol,  tri  volet,  melilot. 

»       incarnat-  —  fe,  alfe,  ferratge. 
tremble.  —  trèmol,  trèmbol. 
tHbule.  —  abriulls,  abrulls,  candells,  rodets,  punxa-claus,    caxals 

de  vella. 
trigonelle.  —  trigonella,  banya  de  cabra. 
troène.  —  olivella,  albena,  alsena,  troana. 
truffe.  —  tofona,  trufa. 
tussilage.  —  peu  (pota)  de  cavall,  de  mula. 
typha.  —  voir  massette. 


u 


ulmaire  —  voir  spirée. 


Valériane.  — ■  va)eriariâ< 
vératre.  —  voir  ellébore. 
Véronique.  —  té  de  muntanya; 
verveine.   —  verbena,  herba  berbera, 
>  Odorante.  —  maria-lluisa. 


—     IQ9    — 

VeSCC  —  vessa,  pedrassa,  arvelles. 

Violette.  —  viola,  viola  boscana. 

violiei*.  —  violer. 

viorne.  —  voir  laurier-tin. 

vipérine.  —  alcansa,  llengua  de  llebre. 

VOliède.  —  voir  pastel. 

Vtllpin.  —  cua  de  guilla,  cua  de  guineu. 


yèble.  —  voir  hièble. 

yeUSC  —  voir  chêne-vert.  R.  de  Lacvivier. 


ECHOS 

Le  Doctor  Sole  y  Pla  Chevalier  de  la  Légion  d'honneur 

Avec  infiniment  de  plaisir,  nous  avons  appris  la  récente  nomi- 
nation du  Doctor  Sole  y  Pla,  le  vaillant  président  des  Volon- 
taires Catalans,  bien  connu  et  apprécié  des  roussillonnais  en  parti- 
culier, à  l'éminente  dignité  de  Chevalier  de  la  Légion  d'Honneur. 

Le  Gouvernement  français  ne  pouvait  mieux  s'honorer  lui- 
même  qu'en  reconnaissant,  comme  il  l'a  si  opportunément  fait, 
les  talents  et  les  mérites  d'une  des  plus  hautes  personnalités  de 
la  francophilie  espagnole  qui,  durant  la  Grande  Guerre,  par  son 
généreux  concours  apporté  à  la  France  amie,  a  si  largement 
contribué  à  sa  définitive  victoire.  C'est  un  honneur  qui  rejaillit 
en  même  temps  sur  tous  ses  généreux  Volontaires  et  un  hommage 
rendu  à  ses  glorieux  morts. 

Que  notre  éminent  ami  et  collaborateur  veuille  bien  trouver 
ici  l'expression  de  nos  plus  confraternelles  félicitations  pour  la 
haute  récompense  dont  il  vient  d'être  si  justement  l'objet. 

Mort  du  Majorai  J.  Soulet 

Le  mois  dernier,  nous  avons  appris  avec  une  profonde  tristesse 
la  mort  du  félibre  majorai  J.  Soulet,  de  Cette  (Hérault),  décédé 
dans  cette  ville  à  l'âge  de  68  ans. 


200    

J.  Soulet  était  le  Capiscol  ou  président  du  groupe  félibréen  de 
Cette,  la  Telibrenca  de  Sent-Cla,  qui  publiait  VArmana  Cetori. 
Cette  petite,  mais  vaillante  Revue  annuelle  en  était  à  sa  i8'  année 
en  1914. 

C'est  le  19  mai  1907,  à  la  Sainte-Estelle  de  Périgueux,  que 
J.  Soulet  avait  été  élu  majorai.  Il  était  titulaire  de  la  Cigalo  de  la 
JVarbouneso,  créée  en  1881  et  tenue  successivement  avec  honneur 
par  Camille  Laforgue  et  Sernin  Santy. 

L'Université  de  Perpignan  tf  la  Presse  locale 

Parmi  les  périodiques  du  département,  déjà  cités,  qui  veulent 
bien  s'intéresser  à  notre  projet  de  rétablissement  de  l'ancienne 
Université  de  Perpignan  et  lui  donnent  leur  entière  adhésion, 
nous  avons  le  plaisir  de  citer  l'Indépendant.  Dans  son  numéro  du 
i3  août  dernier,  M.  Charles  Guiu  a  publié  dans  ce  sens  un  excel- 
lent article  (sur  lequel  nous  reviendrons  prochainement)  sous  la 
rubrique  Choses  du  7{oussilhn,  ayant  pour  titre  :  Perpignan,  centre 
d'Etudes  Supérieures. 

Qu'on  veuille  bien  nous  transmettre  tout  ce  qui  sera  publié  sur 
cette  importante  question.  J.  S. 

• 

Un  jeune  :  Jusf  Calveyrach 

Notre  confrère  la  7{enaissance  Catalane  a  publié  un  beau  poème 
du  jeune  poète  roussillonnais  Just  Calveyrach,  et  ce  poème  est 
une  révélation. 

Mais  le  jeune  poète  écrit  aussi  en  catalan.  Disciple  enthousiaste 
des  maîtres  roussillonnais,  s'inspirant  de  Muchart  et  d'Albert 
Bausil  en  français,  mais  ayant  déjà  une  originalité  qui  lui  est 
propre,  il  va  publier  un  livre  de  vers  catalans  dédié  aux  deux 
jeunes  rénovateurs  du  parler  saint  :  Grando  et  Francis. 

Albert  Janicot. 

Nous  rappelons  aux  auteurs  d'ouvrages  d'histoire,  d'archéologie,  de 
littérature  et  d'art  catalans  qui  voudront  bien  en  adresser  deux  exemplaires 
à  la  7{evue  Catalane,  rue  de  la  Poste,  7,  Perpignan,  qu'il  en  sera  rendu 
compte  en  dite  Revue.  11  en  sera  de  même  des  Revues  ayant  le  même  objet. 

Le  Gérant,  COMET.  —  Imprimerie  Catalane,  COMET,  rue  de  la  Poste,   Perpignan 


13'  Année.   N'  156  15  Octobre  1919 

Les   Manuscrits  non  insères  ,  -»    «r^  W   W   <  W^ 

ne  sont  oas  rendue.  M^^  ml   *  ^m      I  M^* 

Les   Articles    oarus  aans   12    Revue  m^    ^^    T  ■  '    ^^     1  ^^    TWl    B4'* 

n'engagent  que  icurs  auteurs.  ^fc^  A    A    JL    ak    ■■••Al  ^  A^ 

Organe  de  la  Société  d'Etudes  Catalanes.  —  Cotisation  :  10  fr.  par  an 


L'Hommage  du  Roussillon 

à  J  OFFRE-LE -GRAND 


Les  11  et  12  octobre,  le  Roussillon  tout  entier  a  vécu,  à  Per- 
pignan, des  jours  sublimes  et  historiques.  Sublimes,  parce  que, 
d'un  commun  élan  d'enthousiasme  et  d'union  sacrée,  tous  les 
Roussillonnais  se  sont  rencontrés,  au  cœur  même  du  département, 
étroitement  groupés  autour  de  la  personne  de. leur  auguste  com- 
patriote Joffre-le-Grand,  —  ainsi  que  Maurice  Barrés,  son  émi- 
nent  confrère  de  l'Académie,  l'a  surnommé  —  pour  lui  offrir 
l'hommage  public  de  leur  admiration,  de  leur  reconnaissance,  de 
leur  inaltérable  affection.  Historiques,  parce  que,  depuis  que  sur 
son  génie  la  gloire  a  reposé  son  diadème,  notre  Jojfre,  sauveur  de 
la  France  et  sauveur  des  deux  mondes,  est  par  là  même  entré  d'un 
bond  dans  le  domaine  de  l'Histoire  et  de  l'Immortalité.  De  la 
petite  patrie  roussillonnaise,  la  postérité  dira  aussi  que  le  Héros 
rivesaltais  est  la  première,  la  plus  éclatante  des  gloires  histori- 
ques. Quelque  brillante  que  soit  leur  étoile,  les  Joffre  de  Ria 
pâliront  à  tout  jamais  devant  l'incomparable  soleil  de  Joffre  de 
Rivesaltes. 

Aussi  bien,  pour  autant  que  l'on  remonte  dans  les  antiques 
annales  de  notre  histoire  locale  et  provinciale,  il  faut  avouer  que 
jamais  la  fierté  des  Catalans  du  Roussillon  n'avait  eu  lieu  de 
s'affirmer  en  si  haut  point  et  de  s'épanouir  en  de  si  magnifiques 
envolées  que  durant  ces  radieuses  journées  de  l'Hommage  rous- 
sillonnais à  leur  illustre  compatriote  :  le  Maréchal  Joffre,  vain- 
queur de  la  Marne,  de  l'Yser  et  de  Verdun. 


—    202    — 

A  ces  fêtes,  à  ce  tribut  d'hommages,  la  Société  d'Etudes  Catalanes 
s'est  largement  associée.  Elle  a  eu  sa  place  marquée  au  cortège 
officiel,  au  défilé  triomphal  à  travers  les  rues  pavoisées  de  la  ville, 
-A  sur  l'estrade  d'honneur,  aux  Platanes.  Autour  de  son  Président 
et  de  son  premier  Vice-Président,  M.  le  Chanoine  Bonafont, 
Majorai  des  félibres  catalans  et  Curé-doyen  d'Ille-sur-Tet,  tous 
les  membres  du  Bureau  de  notre  honorable  Compagnie  se  sont 
rangés. 

Parmi  les  orateurs  et  ies  poètes  dont  le  talent  a  magnifiquement 
rehaussé  l'éclat  de  ces  solennités,  il  nous  est  agréable  d'en  citer 
plusieurs  qui  font  partie  de  notre  Société  :  Mgr  de  Carsalade  du 
Pont,  l'éminent  évêque  catalaniste  de  Perpignan,  très  applaudi 
aux  Platanes  et  à  l'Hôtel  historique  de  Mossen  Sanche,  MM.  Albert 
Bausil,  Charles  Bauby,  P.  Francis,  Charles  Grando,  J.-S.  Pons, 
professeur  agrégé  au  lycée  de  Carcassonne,  Henry  Muchart, 
délégué  des  Jeux  Floraux  de  Toulouse,  dont  les  poésies,  les  unes 
en  langue  catalane,  les  autres  en  langue  française,  furent  d'un 
charme  exquis.  Ajoutons  à  ces  noms  celui  de  notre  non  moins 
distingué  confrère  et  compatriote,  M.  Jean  Amade,  professeur 
au  Lycée  de  Montpellier  et  titulaire  de  la  chaire  d"Etudes  Méri- 
dionales. Tout  le  monde  a  lu,  dans  les  journaux  du  département 
et  de  la  région,  son  admirable  sonnet  à  «  l'Epée  de  Joffre  », 
Tzspasa  francesa,  îluenta  y  galana,  digne  des  Verdaguer  et  des 
Guimerà,  si   pénétré  de  souffle  patriotique   et  d'ardeur  martiale. 

De  nombreuses  personnalités,  provençales  et  barcelonaises, 
étaient  aussi  venues  associer  leurs  provinces-sceurs  à  l'hommage 
roussillonnais  en  l'honneur  de  notre  illustre  Maréchal.  Les  Pro- 
vençaux lui  ont  offert  une  très  artistique  Epée  d'honneur,  en  argent 
massif  ciselé,  œuvre  du  sculpteur  M.  Valère  Bernard,  ex-capoulié 
de  Provence,  et  présentée  par  M.  Paul  Ruât,  félibre  majorai 
de  Marseille.  Le  docteur  Fallen,  nouveau  capoulié,  lui  offrit  le 
Livre  d'or  du  Félibrige.  Parmi  nos  amis  de  Barcelone  se  trou- 
vaient MM.  Puig  y  Cadafalch,  président  de  la  Mancomunitat, 
et  le  poète  Angel  Guimerà.  Dans  l'impossibilité  de  citer  ici  tous 
les  noms  des  délégués  de  nos  deux  provinces  sœurs,  je  me  con- 
tenterai d'annoncer,  d'ores  et  déjà,  la  parution  prochaine  d'un 
fascicule  particulier  de  la  T\evue  Catalane,  où  il  sera  longuement 
rendu  compte  de  ces  récentes  fêtes.  Nous  y  publierons  in-extenso 


—    20$    — 

tous  les  discours  et  poésies  entendus  à  cette  même  occasion. 
Chacun  aura  ainsi  un  Mémorial  illustré,  très  vivant,  de  ces  inoublia- 
bles journées.  Ce  sera  le  meilleur  souvenir  de  l'éminent  compa- 
triote que  nous,  Catalans,  tant  nous  aimons,  et  qui,  à  de  si  légi- 
times titres,  s'est  acquis  le  droit  d'être  à  tout  jamais  célébré  dans 
l'Histoire,  comme  la  gloire,  la  joie,  l'honneur  —  gloria,  lœtilia, 
bonorificentia  —  de  la  grande  et  de  la  petite  patrie.  Par  lui  enfin, 
tout  le  monde  aura  sous  les  yeux  les  fortes  leçons  de  bravoure, 
de  travail,  de  modestie  et  de  bonté  exquise  dont  l'illustre  guer- 
rier fut  et  demeure  un  exemple  vivant.  Ces  enseignements  seront 
l'évangile  des  grands  comme  des  petits,  de  nos  contemporains 
Comme  des  générations  futures. 

Au  Vainqueur  de  la  Marne,  au  sauveur  de  la  France  et  de  la 
civilisation  latine,  à  l'éminent  Académicien,  au  Catalan  magna- 
nime, Jojfre-le-Grand,  l'hommage  respectueux  de  la  Société  a" "Eludes 
Catalanes  de  Perpignan. 

La  Revue. 

La  fondation  d'une  Maintenance  au  Félibrige 
en  Roussillon 

La  Société  d'Etudes  Catalanes*  a  convenu,  avec  les  délégués 
Provençaux  venus  aux  fêtes  de  Joffre,  de  fonder  à  Perpignan 
une  Maintenance  au  Félibrige  autonome,  qui  serait  toutefois  affi- 
liée à  celle  de  Provence.  Nous  demandons  à  tous  les  membres  de 
notre  Société  de  ne  pas  hésiter  à  donner  leur  adhésion  à  ce  nou- 
veau groupement.  Tous  les  lettrés,  littérateurs,  poètes,  archéolo- 
gues, artistes,  de  l'un  ou  de  l'autre  sexe,  peuvent  en  faire  partie. 
La  cotisation  annuelle  n'est  que  de  3  fr.  On  peut  se  faire  ins- 
crire d'ores  et  déjà,  soit  au  siège  de  notre  Société,  7,  rue  de  la 
Poste,  Perpignan,  soit  en  écrivant  à  M.  Marius  Jouveau,  baïle 
du  Félibrige,  à  Aix  (Bouches-du-Rhône). 

Cette  Maintenance  s'impose  d'autant  plus  que  nous  aurons  à 
organiser  les  Jeux  Tloraux,  que  nos  amis  de  Provence  ont  bien 
voulu  nous  promettre,  par  un  tour  de  faveur,  pour  1921,  à  Per- 
pignan. 


A  propos 

du  récent  Congrès  Régionalisa 

de  Marseille 


On  sait  qu'un  congrès  régionaliste  s'est  tenu  à  Marseille,  fin 
septembre  dernier. 

Les  séances  consacrées  à  l'étude  de  la  discussion  des  rapporls 
se  sont  poursuivies  avec  la  plus  grande  activité.  Elles  ont  abouti 
à  une  série  de  vœux  dont  voici  les  plus  importants  : 

T^égionalisme  administra iif.  -  La  région  doit  être  constituée  par 
le  groupement  des  départements  présentant  entre  eux  des  com- 
munautés d'intérêts  susceptibles  de  créer  la  solidarité  en  s'inspi- 
rant  des  divers  vœux  exprimés  par  les  populations. 

.Les  départements  sont  supprimés. 

L'administration    provinciale  sera  confiée  à  un  préfet    régional. 

Le  Congrès  supprime  les  sous-préfets. 

T^égionalisme  économique.  —  L'organisation  économique  de  la 
région  ne  doit  pas  être  distincte  de    l'organisation  administrative. 

Avant  toute  délimitation  régionale,  il  y  a  lieu  de  laisser  la  vie 
régionale  s'affirmer  dans  une  action  tangible  qui  ne  soit  pas  gênée 
par  des  limites  toujours  discutables  par  quelque  point. 

Les  intérêts  de  la  région  doivent  être  représentés  par  une 
assemblée  régionale  recrutée  sur  la  forme  de  la  représentation 
proportionnelle. 

Dans  cette  assemblée  siégeront  des  représentants  des  Chambres 
de  Commerce  et  d'Agriculture,  des  Syndicats  patronaux  et  ouvriers, 
des  Associations  professionnelles,  des  Chambres  de  propriétaires, 
Syndicats  de  locataires,  de  fonctionnaires,  etc. 

L'assemblée  régionale  doit  être  dotée  des  plus  larges  pouvoirs 
pour  défendre  et  développer  les  intérêts  et  les  besoins  économi- 
ques de  la  région,  et  n'être  soumise  au  contrôle  du  pouvoir 
central  que  dans  la  mesure  indispensable  à  la  sauvegarde  des  inté- 
rêts généraux  de  la  nation. 

Dans  chaque  région,  il  y  aura  un  administrateur    de   la  région. 


205     

Elu  par  l'assemblée,  il  est  chargé  d'exécuter  ses  décisions,  et  le 
préfet,  ou  commissaire  régional,  sera  exclusivement  l'agent  du 
pouvoir  central. 

Section  de  délimitation.  —  Le  Congrès  émet  le  vceu  que,  pour 
constituer  les  régions,  on  s'inspire  des  éléments  suivants  combinés, 
sans  exclusion  d'aucun  d'eux  : 

La  géographie,  l'histoire,  la  question  économique  comprenant 
le  commerce,  l'industrie,  l'agriculture,  le  tourisme,  etc.,  etc., 
enfin  le  vceu  des  populations. 

T(egionalisme  intellectuel  et  artistique.  —  Le  Congrès  forme  le 
vceu  que  l'Université  d'Aix-Marseille  s'appelle  désormais  Univer- 
sité de  Provence. 

Que  les  idiomes  locaux  qui  ont  valeur  de  langue  soient  ,accep- 
tés  comme  langue  à  option  dans  les  examens. 

Qu'il  soit  créé  à  l'Université  de  Provence  une  chaire  de  Pro- 
vençal, comme  il  existe  déjà  une  chaire  de  Breton  à  l'Université 
de  Rennes. 

Que  dans  les  écoles  une  place  importante  soit  réservée  à  l'his- 
toire régionale  et  locale  ainsi  qu'à  l'histoire  de  l'art  régional. 

Qu'il  soit  créé,  dans  chaque  centre  régional,  un  cours  de  décla- 
mation de  l'idiome  local  et  que  les  scènes  subventionnées  soient 
tenues  de  jouer,  une  ou  plusieurs  fois  par  an,  des  pièces  dans  cet 
idiome  ou  s'inspirant  de  l'esprit  régional. 

—  La  section  du  régionalisme  intellectuel  au  Congrès  avait 
pour  président  M.  Pessemesse,  inspecteur  d'Académie,  de  Mar- 
seille, et  pour  vice-président  M.  Emile  Ripert,  professeur  à  la 
Faculté  des  Lettres  d'Aix. 

Le  félibre  Lhermitte-Savinien,  majorai  du  Félibrige,  auteur  de 
nombreux  ouvrages  appréciés  pour  l'éducation  et  l'instruction  des 
jeunes  fils  du  Midi,  a  présenté  et  fait  adopter  par  le  Congrès, 
dans  sa  séance  du  19  septembre,  le  vœu  de  Mistral,  tel  qu'il 
l'avait  formulé  dans  sa  retentissante  requête  de  1900  au  ministre 
de  l'Instruction  publique  :  «  Que  l'étude  comparée  du  français  au 
moyen  des  parlers  de  langues  d'oc  soit  instituée  comme  faculta- 
tive dans  les  écoles  du  Midi  ». 

Ce  vceu  a  déjà  reçu  un  sérieux  commencement  d'exécution,  puis- 
qu'il y  a  des  cours  de  langue  provençale  au  Lycée  de  Marseille 
et  au  Lycée  d'Aix. 

Voilà  qui  est  du  bon  travail. 


îo6   — 


<&hi. 


11  importe  que  les  Roussillonnais  prennent  exemple  des  leçons 
que  d'autres  leur  donnent,  surtout  quand  celles-ci  leur  viennent 
de  frères  par  le  sang  et  par  la  langue,  héritiers  et  gardiens  d'un 
même   patrimoine,    intellectuel,    artistique,   économique  et  moral. 

11  serait  donc  grandement  à  souhaiter  que,  comme  Marseille, 
Perpignan  eut  son  congrès  régionaliste,  sitôt  que  possible,  dès  que 
les  préoccupations  électorales  auront  fait  place  au  calme  à  ce 
nécessaire.  A  ces  assises  solennelles  seraient  convoquées  toutes 
les  sociétés  industrielles,  commerciales,  littéraires,  archéologiques 
et  artistiques,  c'est-à-dire  toutes  les  «  compétences  »  du  Roussil- 
lon,  ainsi  que  les  représentants  des  pouvoirs  publics  et  des  admi- 
nistrations officielles  du  pays,  pour  y  traiter  les  grandes  et  si 
importantes  questions  qui  viennent  d'être  discutées  et  mises  en 
bonne  lumière  à  Marseille.  Les  vœux  qui  y  ont  été  adoptés  me 
paraissent  devoir  être  du  meilleur  effet  pour  notre  décentralisa- 
tion provinciale  et  pour  la  mise  en  valeur  de  nos  Pyrénées,  celles- 
ci  demeurant  encore,  hélas  !  pour  beaucoup  trop  d'étrangers,  ce 
que  M.  Emmanuel  Brousse,  le  très  actif  député  de  notre  dépar- 
tement, a  un  jour  appelé,  dans  son  intéressante  Cerdagne  française, 
les  Pyrénées  inconnues. 

Toutefois,  que  l'on  se  garde  bien  de  donner  dans  l'erreur  de 
certains  qui,  voulant  fixer  les  Régions  naturelles  de  la  Trance  méri- 
dionale, seraient  tentés  d'englober  notre  Roussillon  dans  ce  qu'ils 
appellent  la  Septimanie,  ancienne  et  nouvelle.  Celle-ci,  d'après 
eux,  aurait  pour  frontières  notre  chaîne  pyrénéenne  et  les  rives 
du  Rhône  ;  elle  comprendrait  les  départements  qui  s'échelonnent 
au  nord,  depuis  notre  immortel  Canigou  jusqu'à  Castelnaudary, 
Millau  et  Montélimar.  Qu'au  point  de  vue  administratif  et  éco- 
nomique on  adopte  de  telles  agglomérations  et  de  telles  limites, 
on  pourrait  y  souscrire.  Mais  combien  de  roussillonnais  s'y  refu- 
seront !  Ce  serait  ne  vouloir  que  d'une  décentralisation  amoindrie 
et  prétendre  allier  des  intérêts,  somme  toute  par  trop  étendus  et 
par  trop  divergents.  Quoiqu'il  en  soit,  il  ne  manquera  certaine- 
ment pas  de  personnalités,  fort  compétentes,  pour  discuter  un  tel 
système  de  décentralisation,  administrative  et  économique. 


—   Î07  — 

Jamais  du  reste,  géographiquement  parlant,  le  Roussillon  ne  fit 
partie  ni  du  Languedoc,    ni    de    la    Septimanie  proprements  dits. 

Sous  le  régime  français,  après  son  annexion  à  la  France,  quand 
celle-ci  fut  divisée  en  3î  gouvernements,  le  Roussillon  vécut  somme 
toute  en  province  autonome,  comme  par  le  passé,  conservant  ses 
privilèges  locaux  que  Louis  XIV  déclara  intangibles,  et,  malgré 
une  forte  répression  gouvernementale,  sa  propre  langue  catalane, 
aussi  longtemps  qu'il  put  résister  aux  ukases  royaux,  dans  tous  les 
actes  officiels  de  son  administration. 

Tour  à  tour,  sous  la  domination  espagnole,  le  Roussillon  se 
rattacha  à  la  Catalogne  d'Espagne,  à  l'Aragon,  au  comté  de  Bar- 
celone, suivant  les  époques  et  les  événements. 

Si  l'on  prend  la  Septimanie,  telle  que  les  géographes  nous  la 
présentent  sous  Charlemagne,  on  voit  qu'elle  ne  remontait  pas 
plus  haut  qu'à  Avignon,  comprenant  les  départements  actuels  de 
l'Aude,  de  l'Hérault  et  du  Gard.  Plus  au  nord,  c'était  le  royaume 
d'Aquitaine. 

La  Septimanie  englobait,  il  est  vrai,  le  Roussillon,  sous  les  rois 
Mérovingiens,  mais  c'était  l'époque  où  notre  pays  n'avait  point 
encore  pris  conscience  de  lui-même  et  n'avait  pas  encore  reçu  sa 
nationalité  propre.  Ce  n'est  que  plus  tard  que  celle-ci  s'affirmera, 
c'est-à-dire  quand  notre  langue  catalane  se  sera  cristallisée  pour 
devenir  une  vraie  langue,  celle  des  troubadours,  des  poètes,  des 
littérateurs,  dts  historiens  et  des  prédicateurs.  Ce  fut  l'époque  où, 
se  dégageant  du  latin  barbare  ou  du  bas-latin,  le  catalan  devien- 
dra la  langue  parlée  et  écrite,  la  «  langue  vulgaire  »,  c'est-à-dire 
dès  le  ix'  siècle,  pour  devenir,  au  xni'  siècle,  la  langue  élégante, 
régulière  et  parfaite,  qui  jamais  ne  se  confondit  avec  le  dialecte 
du  Midi  de  la  France,  mais  qui  fut  un  idiome  particulier  et  d'un 
caractère  spécifique.  En  dépit  des  frontières  diplomatiques,  jamais 
le  Roussillon  ne  perdit  ce  caractère  essentiel  à  sa  langue.  On 
voit  par  là  quelles  furent  jadis  et  quelles  devraient  être  les  «  limi- 
tes naturelles  »  du  Roussillon.  Sous  les  réserves  indiquées,  rien 
n'empêche  cependant  aujourd'hui,  par  une  décentralisation  bien 
ordonnée,  de  rattacher  notre  département  à  quelques  autres  dépar- 
tements voisins,  —  sans  trop  en  augmenter  le  nombre,  il  est  vrai, 
—  au  point  de  vue  administratif  et  économique. 

A  plus  forte  raison,    tout    catalan-roussillonnais  se   refusera-t-jl 


—    208    — 

à  vouloir  que,  au  point  de  vue  purement  intellectuel,  le  Roussillon 
fusionne  avec  tous  les  autres  départements  que  l'on  entend  englo- 
ber dans  la  susdite  Septimanie.  Ce  ne  serait  ni  avantageux  pour 
nous,  ni  logique.  Notre  langue  n'est  pas  et  ne  fut  jamais  celle 
que  parlèrent  jadis  et  que  parlent  encore,  qu'écrivirent  et  qu'écri- 
vent aujourd'hui  les  intellectuels  et  le  peuple  des  autres  départe- 
ments voisins,  l'Aude,  l'Hérault,  etc.,  malgré  les  anciens  liens 
d'affinité  qui  nous  rattachent  à  eux.  11  en  est  de  même  de  notre 
art. 

Le  Roussillon  est,  en  effet,  une  entité  qui  eut  et  doit  toujours 
avoir,  —  à  ces  deux  points  de  vue  au  moins,  langue  et  art  —  sa 
personnalité  propre.  Par  ces  deux  caractères  essentiels  à  notre 
race,  notre  province  penche  plutôt  vers  les  pays  d'au-delà  les 
Pyrénées  que  vers  ceux  d'en-deçà.  La  vie  catalane  du  Roussillon 
naquit  en  définitive  à  Barcelone  ;  mais  elle  expire  à  Salses,  limite- 
frontière  de  l'antique  Catalogne,  ou  de  notre  vrai  berceau  familial. 

Notre  langue  catalane,  parlée  dans  toutes  les  provinces  de  la 
Catalogne  espagnole,  est  incomprise  au-delà  des  Corbières,  où 
commence  ce  que  nos  pères  appelaient  par  ironie  le  gavaîch. 
Cela  est  si  vrai  que,  dans  les  cantons  de  Latour-de-France,  de 
Saint- Paul-de-Fenouillet,  de  Sournia,  de  Formiguères,  pays  de 
l'ancienne  France,  la  langue  catalane  n'y  fut  et  n'y  est  jamais 
parlée,  ou  si   mal,   qu'elle  n'est  plus  qu'un  patois  francisé. 

Quant  à  l'art  catalan,  il  suffit  de  l'avoir  quelque  peu  étudié  et 
d'ouvrir  les  quelques  manuels  que  nous  en  possédons,  pour  se 
convaincre  que,  à  lui  seul,  il  constitua  jadis  un  art  autonome, 
circonscrit  dans  les  seules  limites  de  notre  terroir,  et  ayant  son 
école  particulière,  unique,  exclusive  de  tout  art  étranger.  Les 
grands  maîtres  de  l'archéologie,  qui  se  sont  occupés  de  nos  jours 
de  cette  question,  ont  tous  convenu  de  cette  vérité. 

Toutes  ces  raisons  militent  en  faveur  de  notre  thèse  :  le  Rous- 
sillon étant  une  entité  qui  a  sa  vie  propre,  une  langue  et  un  art 
particuliers  à  sa  race,  doit,  en  toute  logique,  demeurer  une  pro- 
vince autonome,  au  moins  au  point  de  vue  de  la  décentralisation 
intellectuelle. 

11  faudrait  donc  :  r  Qu'une  Université  catalane  se  fondât  à 
Perpignan,  où  seraient  enseignées,  comme  le  veut  M.  Calmette, 
la  langue,  l'histoire,   l'art,   l'archéologie,   la  diplomatie,   la  paléo- 


—    2oq   — 

graphie,  la  littérature,  le  droit  catalans,  sans  préjudice  des  sciences 
annexes  :  histoire  et  art  français. 

2'  Que  dans  tous  les  lycées  et  collèges,  dans  toutes  les  écoles 
d'enseignement  secondaire  et  primaire  des  deux  sexes,  du  Rous- 
sillon,  une  place  importante  fut  réservée  à  l'histoire  locale  et 
régionale,  ainsi  qu'à  l'histoire  de  l'art  local  et  régional,  et  à  l'étude 
de  la  langue  catalane. 

3"  Que  la  langue  catalane,  qui  est  une  véritable  langue,  soit 
acceptée  comme  langue  à  option  dans  les  examens. 

4*  Que,  à  Perpignan  en  particulier,  il  soit  créé  un  cours  de 
déclamation  de  la  langue  catalane  et  que  les  scènes  de  théâtre 
subventionnées  soient  tenues  de  jouf.r,  plusieurs  fois  par  an,  des 
pièces  dans  cette  même  langue.  Notre  littérature  catalane  abonde 
en  pièces  de  ce  genre  :  la  Presa  de  VTiori,  Sant  Julia  v  santa  Basi- 
lissa,  Sant  Cosma  y  sant  Damia,  Athalia,  etc.,  etc..  pour  ne  parler 
que  des  plus  connues. 

5'  Que  les  pouvoirs  publics  encouragent  et  subventionnent  tou- 
tes les  initiatives  et  sociétés  ayant  pour  objet  la  langue,  l'histoire 
et  l'art  catalans,  qui  sont  le  meilleur  mode  de  la  mise  en  valeur  de 
notre  département. 

Tels  sont  les  voeux  susceptibles  d'être  adoptés,  au  mieux  des 
intérêts  de  notre  pays,  à  un  prochain  Congrès  régionaliste  qui  se 
tiendrait  à  Perpignan.  Jean  Sarrète. 

La  Cigala  i  el  Cucut 

Diu  que  una  vegada  la  Cigala  i  el  Cucut  tenien  un  camp  de  forment. 
Quan  l'hagueren  segat  en  bona  companyia,  anaren  per  dur  les  garbes  a  l'era, 
o  sia  per  garbejar.  La  Cigala  estava  dalt  de  la  carreta  posant  be  les  garbes. 
i  el  Cucut  les  hi  donava.  Mes  aquest  no  anava  prou  depressa,  i  la  Cigala, 
enfadada,  li  digue  fent  un  revolt  :  «  Puja  tu  a  la  carreta  i  aparella  les  gar- 
bes :  ja  te  les  donare  jo.  »  El  Cucut  hi  pujà,  i  la  Cigala  li  porta  la  primera 
garba  dient-li  :  a  Te  d,  i  tôt  seguit  la  segona  i  la  tercera  :  «  Te,  té,  té.  »  I 
ell,  no  entenent-se  de  feina,  li  responia  llastimosament  :  «  No  pue  !  »  1  la 
Cigala  li  en  duia  mes  :  «  Té,  té,  té,  té,  té,  »  fins  que  el  Cucut,  esglaiat  de 
la  feinada,  fugi  dient  :  «  No  pue  !  No  pue  !  »  1  des  d'aquell  moment  els 
pagesos  de  la  banda  de  Targa  li  diuen  el  No  pue,  i  mai  mes  s'és  vist  des  de 
que  els  segadors  lliguen  la  primera  garba. 

En  canvi  la  Cigala,  com  si  li  donés  encara  dalt  de  la  carreta,  va  dient  tôt 
l'istiu,  i  cada  dia  mes  depressa  :  «  Té-té-té-té-té  ».  (Folklore) 


La  seigneurie  $  la  paroisse  du  Soler 

Les  premières  opérations  que  doit  entreprendre  un  agriculteur, 
lorsqu'il  se  trouve  en  face  d'une  terre  à  l'état  de  nature,  sont  le 
défrichement  et  l'assainissement.  Le  défrichement  dégage  le  sol 
de  toutes  les  plantes  (arbres,  ronces,  herbes,  etc.)  que  la  nature 
y  a  fait  pousser  :  l'assainissement  "le  débarrasse  des  eaux  qui  y 
sont  en  excès. 

A  quelle  époque  ces  grands  travaux  furent-ils  exécutés  sur  le 
territoire  du  Soler  ?  Faut-il  remonter  aux  siècles  lointains  de  la 
première  colonisation  de  notre  Province  ?  Nous  ne  le  pensons 
pas.  Le  défrichement  et  l'assainissement  de  ces  terres  eut  lieu, 
sans  doute,  assez  tard.  Si  les  premiers  colons  de  nos  plaines  s'y 
appliquèrent,  ce  ne  fut  que  partiellement  et  très  imparfaitement  : 
leur  peine  fut  d'ailleurs  perdue  par  le  fait  de  l'invasion  des  bar- 
bares, des  migrations  constantes  des  anciens  peuples,  de  la  pério- 
dicité des  guerres.  Sans  remonter  aussi  haut,  les  anciens  du  vil- 
lage se  souviennent  du  creusement  du  T^ec  nou,  du  canal  de 
Munyas,  du  J^ec  deh  Toulougencs  et  surtout  du  drainage  de  VEula 
par  M.  Denis  Hainaut.  Pour  faire  de  ce  territoire  l'un  des  plus 
beaux  et  des  plus  riches  du  département,  les  anciens  ont  dû 
accomplir  des  travaux  gigantesques  :  le  temps  et  un  labeur  acharné 
ont  seuls  réussi  à  mener  cette  oeuvre  à  bonne  fin. 

Reportons-nous  à  quelques  siècles  en  arrière  et  jetons  un  coup 
d'oeil  sur  ce  coin  charmant  du  Roussillon.  Sur  un  petit  plateau, 
situé  sur  la  rive  droite  de  la  Tet,  s'élevait  un  petit  bourg  fortifié 
ayant  ses  remparts,  ses  portes,  ses  ponts-levis,  son  église,  son 
château  et  ses  tours  :  c'est  le  vieux  Soler.  De  ce  point  élevé  on 
aperçoit  d'abord  la  Tel  qui,  à  cette  époque,  n'était  pas  saignée 
par  les  nombreux  canaux  d'irrigation  greffés  sur  ses  bords  :  elle 
coulait  au  pied  de  ces  murs  ses  eaux  torrentueuses  ;  puis  Pézilla, 
autre  ville  fortifiée,  et  la  riche  plaine  de  la  rive  gauche.  A  l'est 
et  à  l'ouest  s'étend,  parallèlement  à  la  rivière,  une  suite  de  mame- 
lons et  de  tertres  :  ce  sont  les  hauteurs  de  Sainle-Eugénie,  las 
Coronas,  l'Hospitalel  et  Campellanes.   Ces  hauteurs    ont   été,   selon 


—     211     — 

toute  apparence,  les  premiers  points  défrichés  par  les  anciens  et 
leurs  premiers  champs.  La  terre,  de  nature  silico-argileuse,  de 
consistance  moyenne  et  facile  à  travailler,  devait  être  déjà  et  est 
encore  d'une  grande  fertilité. 

Plus  tard,  lorsque  des  défrichements  nouveaux  furent  exécutés 
dans  la  plaine  et  que  la  culture  de  l'olivier  fut  rétablie,  ces  ter- 
rains furent  plantés.  On  les  appelle  encore  les  Olivedes.  La  culture 
de  l'olivier  ayant  fait  son  temps,  ces  terres  furent  transformées  en 
vignes  :  elle  constituent  actuellement  le  meilleur  du  vignoble  du 
Soler.  Il  convient  d'ajouter  que  la  majeure  partie  de  ces  terrains 
a  subi  le  même  sort  que  le  vieux  Soler  :  le  temps,  les  pluies,  les 
gelées,  les  vents  et  la  Tel  y  ont  exercé  leur  action  destructrice  et 
ils  ont  été  entraînés  à  la  mer  avec  les  pierres  qui  avaient  servi 
d'abri  aux  anciens  de  la  localité.  11  en  sera  de  même  du  nouveau 
Soler  et  de  ce  qui  reste  encore  de  ses  terres.  Le  temps  nivelle 
dans  l'éternité  les  existences  les  plus  glorieuses  comme  les  plus 
hautes  montagnes. 

En  se  tournant  vers  le  sud,  on  aperçoit,  attenants  aux  murailles 
du  vieux  Soler,  de  jolis  et  riants  jardins,  els  Tiorls,  puis  une  vaste 
plaine  boisée,  darrera  dels  Jiorts  (i). 

Demandons-nous  tout  de  suite  quelle  est  Yantiquité  du  Soler  et 
quelle  est  son  élymologie. 

Un  document  très  ancien,  que  l'on  suppose  remonter  à  l'an  85o, 
parle  du  Soler  :  «  Jn  comilalu  7{ossilionnensi  allodium  ad  Soler  supe- 
riori  cum  molendinis  »  (2).  A  cette  époque,  le  Soler  n'était  qu'une 
simple  villa  où  divers  propriétaires  possédaient  des  alleux. 

En  959,  Ratefred  et  Richilde,  son  épouse,  donnent  à  Rieulfe, 
évêque  d'Elne,  leurs  alleux  situés  à  Palleian  (Soler),  à  Monner  et 
à  Stagel,  dans  le  comté  de  Roussillon,  avec  les  eaux,  moyennant 
la  cession  d'autres  fonds  appartenant  à  l'église  d'Elne  dans  le  ter- 
ritoire de  Calce,  le  v  des  calendes  de  mai  de  l'an  v'  du  régne  de 
Lothaire  :  «  Alodem  ncslrum  quod  nos  habemus  in  comilalu  T^ossillio- 
nensi  in  villa  Palleiano...  propter  mansum  quem  habel  Sancla  Tzulalia 

(i)  "L'Echo  du  Soler,  mai  1907. 

(1)  Alart,  Cari.  roua.  ms.  t.  1.  p.  212.  —  Extrait  d'un  inventaire  très 
vieux  des  possessions  du  monastère  de  la  Grasse  dépose  aux  Archives  de 
l'Aude.  Cette  pièce  est  probablement  de  85o,  époque  ou  Prades  fut  donné 
à  ce  monastère. 


—    212 


in  villa  Petra  Cake»  (i).  Ce  document  prouve  l'allodialité  des 
héritages  en  Roussillon  au  x' siècle  et  la  propriété  privée  des  eaux 
qui  coulaient  dans  les  terres  possédées  en  alleu.  Le  lieu  de  Pal- 
leian  est  le  même,  que  celui  appelé  aujourd'hui  Soler  (2). 

Quelle  est  donc  l'étymologie  du  mot  Soler  ?  Plaute  et  Térence 
emploient  le  mot  latin  solarium  dans  le  sens  de  terrasse.  Or,  bâti 
sur  le  point  culminant  de  la  plaine,  sur  l'épaisse  couche  d'argile 
qui  domine  la  Tet  et  commande  une  partie  de  la  vallée,  le  Soler 
forma,  en  tout  temps,  comme  aujourd'hui,  une  vaste  terrasse.  11 
fut  donc  assez  naturel  de  lui  en  donner  le  nom. 

Le  mot  Soler  signifie-t-il  cadran  solaire  ?  On  l'a  prétendu.  Ce 
qui  a  contribué  à  accréditer  cette  signification,  c'est  la  décision 
prise  par  le  seigneur  en  créant  son  blason.  Le  seigneur,  en  effet, 
choisit  pour  armes  :  D'azur,  au  besant  d'or,  chargé  d'un  cercle  ou 
cadran  d'argenl,  marqué  de  douze  heures  de  sable,  l'aiguille  de  même. 

Quoi  qu'il  en  soit,  le  Soler  comprenait  deux  agglomérations 
distinctes  :  le  Soler  d'Amont  et  le  Soler  d'Avall.  Chaque  agglomé- 
ration avait  un  seigneur  distinct. 

Le  Soler  d'Amont  était  bâti,  presque  tout  entier,  sur  le  lit  de 
la  Tet  et  confrontait,  au  nord,  le  sol  du  village  actuel.  Les  pluies, 
les  inondations  et  le  vent  ont  fait  disparaître  la  partie  la  plus 
importante  de  cette  localité,  mais  de  belles  ruines  sont  encore 
debout  :  elles  nous  donnent  une  idée  suffisante  de  son  importance 
et  nous  permettent  de  reconstituer  son  aspect  général.  Comme  la 
plus  grande  partie  des  villages  du  Roussillon,  le  Soler  d'Amont, 
au  moyen  âge,  était  fortifié.  11  était  un  castrum,  une  jorcia,  c'est- 
à-dire  un  château-fort  entouré  de  puissantes  et  solides  murailles 
dans  l'enceinte  desquelles  étaient  englobées  l'église,  la  maison  sei- 
gneuriale, l'hôpital  et  quelques  rares  constructions.  Les  maisons 
d'habitation,  qui  s'élevèrent  sans  ordre  et  sans  alignement  en 
dehors  de  l'enceinte  fortifiée  ou  sur  les  abords  du  castrum,  étaient 
placées  dans  le  barri,  c'est-à-dire  dans  le  faubourg.  Les  provi- 
sions, les  cuves  à  vin  se  trouvaient  dans  le  réduit  fortifié,  dans  la 
cellera.  En  contemplant  la  longue  ligne  des  murailles,  qui  relie 
encore  à  la  tour  de  guet  les  ruines  du  Portalel,  il  faut  reconnaître 

(1)  Cartutaire  d'Elne,  f"  120  et   121  v°.   Collection  Moreau,  t.  ix,  p.  y5. 

(2)  Cartutaire  majeur  de  Cuxa,  P  60. 


-     2l3     — 

que  le  casirum  du  Soler  d'Amont  avait  une  étendue  considérable 
et  mesurait  environ  400  mètres  de  front.  Le  chàteau-fort  était 
défendu  suffisamment  au  nord  par  les  profondes  falaises  creu- 
sées à  sa  base  par  la  rivière.  Par  conséquent,  tout  l'effort  de  la 
défense  avait  dû  se  porter  sur  le  point  opposé,  et  c'est  là  préci- 
sément que  l'on  trouve,  avec  l'église  incasleilaia,  le  Porlalel,  les 
substructions  du  château  et  la  tour. 

Le  Soler  d'Avall  a  tout  à  fait  disparu  depuis  plusieurs  siècles, 
et  il  serait  difficile,  même  à  l'aide  des  capbreus  ou  papiers-terriers 
les  plus  anciens,  d'en  fixer  avec  exactitude  l'emplacement.  On 
peut  affirmer  cependant  que  cet  ancien  village  était  situé  sur  le  iit 
actuel  de  la  Tet,  entre  la  briqueterie  et  le  château  de  Sainte- 
Eugénie.  La  chapelle  de  Saint-Pierre,  dont  les  ruines  se  voient 
encore  au  milieu  de  la  vigne  de  las  Capellas,  servait  d'église 
paroissiale  aux  habitants  du  Soler  d'Avall  et  de  Sainte-Eugénie, 
vers  le  milieu  du  xiv'  siècle. 

En  conséquence,  il  importe  de  donner  un  aperçu  historique  sur 
la  seigneurie  et  la  paroisse  du  Soler  d'Amont,  sur  la  seigneurie 
du  Soler  d'Avall  et  de  Sainte-Eugénie. 

(A  suivre)  Joseph  Gjbrat. 

La  Confrérie  du  Rosaire  en  Cerdagne 

~*4^  (SUITE) 

Constituai)  8 

a  Item,  ordenam  que,  si  en  aquest  lloch,  en  lo  quai  esta  fun- 
dada  esta  Santa  Confraria,  en  algun  temps  si  edificava  Convent 
de  la  Orde  de  Predicadors,  que  en  tal  cas,  en  lo  présent,  se 
passe  y  translade  al  dit  Convent  esta  Santa  Confraria,  tots  sus 
émoluments,  mobles  e  immobles,  no  obstant  qualsevol  altra  insti- 
tue i  o  6  concessio  que  en  contrari  sie  obtinguda.  Axi  mana  se  fes 
lo  Sant  Pontifice  Gregori  Xlll,  en  son  Breu  que  comensa  : 
Dudum  Siquidem, 


—    214    — 

Constîtucio  9 

«  Item,  ordenam  y  volem  que  los  pobles,  en  losquals  esta  fun- 
dada  esta  Santa  Contraria,  senyalen  un  dia  en  loqual  quiscun  any 
se  celebrara  y  fara  una  molt  solemne  professo  de  Nostra  Senyora 
del  Rosari,  portant  en  ella  la  sua  Santa  Imatge.  Faran,  en  aquest 
dia,  tots  los  regositjos  y  festas  possibles,  en  honra  y  alabança  de 
Maria  Santissima  y  del  seu  Santissim  Rosari,  peraque  axi,  com 
en  lo  dia  de  Corpus  es  alabat,  engrandit  y  adorât  lo  Fill,  en  esta 
festa  sia  alabada,  engrandida  y  reverada  la  Mare,  ab  les  mostres 
possibles  de  alegria.  » 

Comme,  à  peu  de  chose  près,  ces  Constitutions  étaient  les 
mêmes  pour  toutes  les  associations  du  Rosaire  établies  alors  en 
Cerdagne,  on  voit  combien  la  publication  de  ce  document  est 
importante  pour  nous  faire  mieux  connaître  le  fonctionnement 
des  autres  confréries  de  l'antique  province  dominicaine  d'Aragon. 

♦ 

En  vertu  de  plusieurs  autres  Bulles  pontificales  fort  anciennes, 
les  Confrères  du  Rosaire  jouissaient  encore  de  certains  privilèges 
particuliers  qui,  d'après  le  texte  publié  ci-après,  se  référaient  au 
temps  d'interdit  lancé  quelquefois  par  l'Evêque  sur  tout  ou  partie 
de  son  diocèse. 

«  Cîausula  texlual  de  la  Bulla  6  privilegi,  com  los  Confrares  de 
JVoslra  Senyora  del  7{oser,  en  temps  de  enlredit  posai  per  h  Ordinari, 
poden  oir  missa,  i  esser  sepultats  ab  moderala  pompa. 

«  Lo  Pape  Clément  Sete,  en  la  Bulla  primera  que  despedi  i 
mana  publicar  en  favor  dels  Confraris  del  Roser,  laquai  comensa  : 

Ad  Perpetuam  rei  memoriam,  data  anno  Domini  i5ip,  dedmo 

kalendas  aprilis,  pontificatus  sui  anno  septimo,  concedeix  als  dits 
Confrares  que,  en  temps  de  entredit  posât  per  lo  Ordinari, 
pugan,  si  seran  sacerdots,  celebrar  i  dir  missa  ab  veu  baixa,  tan- 
cades  les  portes  de  la  iglesia,  i  no  tocant  campanes  ;  i,  si  no  seran 
sacerdots,  la  pugan  oir,  aportar  ab  si  â  ella  la  familia  i  criats  que 
en  la  casa  serveixen. 

«  Aixi  mateix,  concedeix  als  dits  Confrares  :  que  pugan  ser 
enterrats  en  la  ecclesiastica  sepultura  ab  honesta  y  moderata 
pompa,  i  asso  hont  se  vulla  ques  trobaran  averhi  entredit. 


—    2l5    — 

«  Les  paraules  ab  que  lo  Pontifice  ho  concedeix,  i  son  les 
mateixes  de  la  Bulla,  son  les  seguents  :  «  Ht  quiîibei  ex  diclis 
Confia  tribus,  qui  ad.  loca  ecclesiastica  inierdicta  Ordinaria  aucloriiale 
supposita  declinaverunt,  in  illis  clauiis  januis,  non  pulsalis  campanis, 
et  submissa  voce,  excommunicatis,  ac  inierdiciis  exclusis,  dummodo  ipse 
causant  hujusmodi  interdicti  non  dederit,  nec  per  iltum,  et  quominus 
interdictum  observetur  et  illi  parcatur  missas  et  alia  divina  officia  in 
sua  et  familiarum  ac  domesticorum  suorum  presentia  per  setpsum  si 
presbiier  fuerit,  aut  proprium  vel  aîium  sacerdoiem  celebrare,  et  cele- 
brare  facere  libéré  et  licite  valeal.  Quodque  si  hujusmodi  interdicto 
durante,  in  loco  ubi  illud  opposilum  fueril  coniingai  ab  humants  disce- 
dere,  illius  corpus  cum  modesla  funerali  pompa  ecclesiaslicx  sepullutx 
iradi  possil  concedimus  non  obsianiibus,  etc.  » 


A  l'occasion  de  la  fondation  de  la  Confrérie  de  Bolvir,  il  fut 
conclu,  entre  les  habitants  de  ce  lieu  et  les  Frères-Prêcheurs  de 
Puigcerda,   l'accord  suivant  que  signèrent  les  parties  intéressées  : 

<  Acte  de  fundacio,  ço  (es)  capitulacio,  fêta  per  los  Pares 
de  Sant  Domingo  de  la  Orde  de  Predicadors  de  la  Vila  de 
Puigcerda,  ab  los  homens,  o,  Comuna  del  Hoc  de  Bolvir,  terra 
de  Cerdanya,  bisbat  de  Urgell,  en  i  sobre  la  institucio  de  la 
Contraria  de  Nostra  Senyora  del  Roser,  en  la  iglesia  parro- 
quial  de  Santa  Cecilia  de  dit  Hoc,  instituida  y  fundada  als 
17  de  desembre  de  1617  (i). 

«  En  i  sobre  la  fundacio,  i  ordinatio  de  la  Confraria  de  Nostra 
Senyora  del  Roser,  fundada  en  la  iglesia  parroquial  de  Santa 
Cecilia  del  présent  Hoc  de  Bolvir,  per  i  entre  los  Pares  i  Con- 
vent  del  monastir  de  Sant  Domingo  de  la  Villa  de  Puigcerda,  i 
los  homens  i  Comuna  de  dit  Hoc  de  Bolvir,  son  estats  fets  los 
capitols  i  pactes  seguents  : 

«  Et  primo,  es  pactat  que  dita  Comuna  se  obligaria,  com  de 
présent  se   obliga,    en   donar,   i   contribuir  a  dit  Convent  i  Pares 

(i)  On  voit  par  là  que  c'est  bien  à  cette  date  que  fut  fondée  à  Bolvir  la 
Confrérie  du  Rosaire,  avec  des  statuts  propres  à  elle,  indépendamment  de 
celle  de  Puigcerda,  qui  était  la  Confrérie-mère  des  sociétés  similaires  de  la 
Cerdagne. 


—    2  l6     — 

de  aquell,  quiscun  any,  mitja  carrega  de  segla  del  que  se  aplegara 
per  dita  Confraria,  o,  del  que  a  dita  Comuna  ben  vist  sera. 

«  Item,  que  dita  Comuna  aja  de  tenir,  i  illuminar  dita  iglesia 
decentment. 

«  Item,  que  en  dita  Confraria,  se  haja  de  crear  un  Prior, 
loqual,  en  absentia  del  Pare  Prior,  qui  vuy  es,  o,  per  avant  sera, 
tinga  carrech  de  scriure  los  Confrares  en  lo  llibre  que  per  dit 
effecte  se  fara,  i  quiscun  any,  passada  dita  festa,  lo  aja  de  aportar 
en  dit  monastir,  pera  donar  compta,  i  raho,  del  que  en  aquel  se 
aura  fet. 

«  Item,  mes  avant  lo  Pare  Fra  Hyacinto  Ques,  usant  per  adeno 
de  la  Uicencia,  i  facultat,  a  ell  concedida  per  lo  Pare  Provincial 
de  dit  monestir,  anomena,  pera  Prior  Provincial  de  dita  Confraria, 
al  Révèrent  M'  Miquel  Niubo,  rector  de  dit  Hoc,  loqual  en  dit 
nom  exercesca  i  fassa  tôt  lo  demun  dit. 

«  Item,  dit  Pare  Fra  Hyacinto  Ques,  usant  de  la  potestat  pre- 
dita,  créa  y  anomena,  per  paborde  de  dita  Confraria  :  a  Domingo 
Jordana,  batlle  de  dit  Hoc,  i  a  Miquel  Bosom,  consol  del  mateix 
Hoc  ;  i  per  ajudants  de  estos  :  a  Jaume  Bosom,  i  a  Valenti  Vaquer, 
fadrins  ;  i  per  pabordessas  :  a  Raphaela  Casamitjana,  i  a  Mada- 
lena  Sunyera  ;  i  per  ajudants  de  estas  :  a  Margarida  Managada, 
i  a  Isabel  Pujola,  fadrinas  ;  tots  losquals  prédits  tingan  carrech, 
i  cuidado,  de  aplegar  per  dita  Confraria  lo  que  poran. 

«  Testium  firma  :  Dominici  Jordana,  bajuli  dicti  loci,  Antonii 
Aimar,  Cosmat  Casamitjana,  consulis  loci  predicti...,  Pétri 
Sunyer...,  Francise!  Sunyer,  omnes  agricolae  dicti  loci  de  Bolvir, 
qui  firmarunt,  die  dominica  17°  decembris  millessimo  sexentessimo 
septimo.  » 

[71  suivre)  J.  Sarrètb. 


Le  Gérant,  COMET.  —  Imprimerie  Catalane,  COMET,  rue  de  la  Poste,  Perpignan 


13'  Année.   N'  157  15  Novembre  1919 

Les   Manuscrits  non  insérer  .  »     m,    ^  —     •••>   ^   ^   ^ 

ne  sont  pas  rendu*.  F^T   J^      ^^/     I  w* 

Les  Articles   parus  aans  ia   Revue  M  "*    ^^    ^T^    ^%    1  ^V     f^J    »4 

n'engagent  que  leurs  auteurs.  ^b^A    •    A    A»JL#*»1™  A^ 

Organe  de  la  Société  d'Etudes  Catalanes.  —  Cotisation  :  10  fr.  par  an 

Une  date  de  l'histoire  du  Roussillon 

Le  tournant  de  865 

Peu  de  chapitres  de  l'histoire  du  Roussillon  ont  été  moins 
étudiés  que  celui  qui  traite  de  l'époque  carolingienne.  En  dehors 
de  la  chronologie  des  comtes  et  de  quelques  problèmes  de  topo- 
graphie, d'onomastique  ou  de  diplomatique,  cette  période  a  été 
singulièrement  négligée  chez  nous.  Certes,  l'étude  en  est  ingrate 
dans  le  détail  ;  l'insuffisance  des  sources,  la  difficulté  extrême  de 
leur  critique,  l'enchevêtrement  des  faits  et  l'émiettement  des  épi- 
sodes, tout  contribue  à  paralyser  les  efforts  des  chercheurs,  à  obs- 
curcir la  vue  des  historiens.  Pourtant,  .nul  âge  n'a  été  plus  fécond, 
plus  riche  en  conséquences  d'avenir.  Et  il  est  au  ix'  siècle  une 
date  qui  tient  peu  de  place  dans  nos  annales  et  qui  marque 
cependant  un  des  plus  graves  tournants  de  notre  évolution  histo- 
rique :  c'est  l'importance  exceptionnelle  de  ce  tournant  de  865 
que  je  voudrais  ici  brièvement  mettre  en  lumière. 

Le  Roussillon  avait  toujours  fait  partie  de  la  Gaule,  car  la  fron- 
tière naturelle  de  la  Gaule  s'appuyait  aux  Pyrénées  sur  toute 
l'étendue  de  la  chaîne.  Le  premier  épisode  nettement  historique 
de  notre  passé  nous  montre  précisément  notre  pays  comme  le 
seuil  même  de  la  Gaule. 

Annibal,  en  218  avant  Jésus-Christ,  après  avoir  pris  et  brûlé 
Sagonte,  ville  alliée  des  Romains,  s'apprêtait  à  passer  d'Espagne 
en  Gaule,  afin  de  marcher  sur  l'Italie  :   le   passage   des   Pyrénée 


—     2l8    — 

et  du  Pas  de  Salces  était  le  premier  point  délicat  de  son  pro- 
gramme. Rome  essaya  d'y  faire  échec.  Cinq  vieux  sénateurs, 
envoyés  en  ambassade,  vinrent  user  sur  nos  rives  leur  éloquence 
à  la  Caton,  s'efforçant  d'exercer  une  pression  sur  les  tribus  qui 
habitaient  notre  sol,  afin  que  le  passage  fût  refusé  aux  Carthagi- 
nois. Mais  Rome  était  loin,  les  Carthaginois  étaient  proches.  La 
mission  échoua.  Annibal  apparaît,  asseoit  son  camp  à  Illibéris 
(Elne)  ;  il  vient  à  Ruscino,  et  le  brillant  chef  d'armée  à  l'aurore 
de  sa  gloire  conclut  sans  peine  un  arrangement  à  son  gré  avec 
ceux  qui  n'ont  pas  craint  d'éconduire  les  graves  sénateurs. 

Dans  cette  aventure,  les  Albères  apparaissent  clairement  comme 
la  frontière  d'Espagne,  et  Ruscino  comme  la  première  étape  de 
la  marche  à  travers  la  Gaule  vers  les  Alpes. 

Les  Romains,  vainqueurs  dans  les  guerres  puniques,  mettent  à 
leur  tour  la  main  sur  le  littoral  de  la  Méditerranée.  Entre  i  54  et 
12)  avant  Jésus-Christ,  toute  la  côte  des  Alpes  aux  Pyrénées  est 
conquise  ;  le  proconsul  Domitius  Ahenobarbus  —  celui  qui 
donne  son  nom  à  la  célèbre  voie  Domitienne  —  organise  la  Pro- 
vence, c'est-à-dire  la  province  (provinfia)  dont  le  nom  officiel  est 
celui  de  Gaule  JVarbonnaise,  avec  la  grande  ville  de  Narbonne 
pour  centre.  Le  pays  de  Ruscino  (pagus  J^uscinencis)  n'est  que  la 
pointe  sud  de  cette  vaste  circonscription,  plus  tard  seulement 
divisée. 

Ainsi,  un  second  fait  capital  s'affirme  au  1"  siècle  avant  notre 
ère  :  la  frontière  pyrénéenne,  ancienne  frontière  gauloise,  reste 
frontière  romaine. 

Mais  voici  que  la  domination  romaine  s'étend.  L'Espagne,  à 
son  tour,  passe  sous  l'autorité  du  Sénat.  Une  province  nouvelle 
est  constituée,  la  Tarraconnaise,  symétrique  à  la  Narbonnaise  de 
l'autre  côté  des  Albères.  La  Cerdagne,  avec  Llivia  pour  cen- 
tre, y  est  annexée.  Ce  fut  la  première  coupure  entre  la  Cerda- 
gne et  le  Roussillon,  coupure  qui  demeura,  d'ailleurs,  purement 
administrative.  La  même  civilisation  se  développait  désormais 
dans  tout  l'occident  latin.  Ruscino  en  était  le  centre  pour  notre 
région,  et  les  belles  fouilles  qui  nous  révèlent  la  vie  intime  de 
cette  humble  mais  intéressante  sous-préfecture  des  temps  impé-, 
riaux  attestent  assez  éloqu'emment  la  pénétration  de  la  latinité 
dans  notre  vieux  sol  gaulois. 


-—    2  JÛ, 


<^Ni 


Les  invasions  barbares  entraînèrent  un  bouleversement  complet 
de  tous  les  cadres  anciens  de  la  géographie  historique.  Au  hasard 
des  dominations  fragiles  qui  s'échaffaudaient  dans  l'entrecroise- 
ment des  migrations,  le  choc  des  guerres  et  le  déchaînement  des 
violences,  les  frontières  mal  tracées  se  déplaçaient  sans  cesse  : 
soumis  successivement  aux  Wisigoths,  aux  Arabes,  aux  Francs, 
notre  pays  fit  partie  d'Etats  éphémères  dont  il  était  tantôt  le  nord 
et  tantôt  le  sud,  et  qui,  dessinés  par  l'épée  seule,  tenaient  aussi 
peu  compte  de  la  configuration  du  sol  que  des  différences  de  races 
ou  des  affinités  économiques. 

Mais,  de  même  que  le  Temps  se  venge,  dit-on,  des  oeuvres 
édifiées  sans  son  concours,  de  même  les  Empires  nés  au  gré  des 
seules  contingences,  au  mépris  des  lois  profondes  et  éternelles 
qui  conditionnent  la  terre  et  les  hommes,  passent  et  s'effacent. 
L'effort  carolingien,  vigoureux,  balaye  le  flot  arabe  et  le  littoral 
méditerranéen  perdu  du  Rhône  aux  Albères  est  à  nouveau 
recouvré  ;  ce  pays,  que  l'on  appelle  maintenant  la  Seplimanie,  se 
reforme  d'un  seul  tenant,  comme  aux  temps  romains.  Puis,  c'est 
la  grande  oeuvre  carolingienne  contre  l'Islam,  c'est  la  reconquête 
espagnole  qui  commence,  c'est  l'Arabe  refoulé  jusqu'à  l'Ebre, 
c'est  la  formation  des  comtés  hispaniques  :  Gérone,  Barcelone, 
Vich,   Urgel,  etc. 

Conformément  au  système  franc,  en  effet,  l'organisation  admi- 
nistrative du  pays  reconquis  s'est  faite  sous  forme  de  comtés.  En 
outre,  comme  il  est  d'usage  alors  au  voisinage  des  frontières,  le 
commandement  militaire  a  été  concentré  entre  les  mains  de  l'un 
des  comtes  de  la  marche  revêtu  du  titre  de  duc  ou  de  marquis, 
termes  rigoureusement  synonymes  dans  la  langue  officielle  du 
temps.  Sous  Charlemagne,  le  puissant  duc  de  Toulouse,  saint 
Guilhem,  cumula  en  un  seul  tous  les  commandements  militaires  du 
Midi  face  aux  Arabes.  Après  lui,  ce  commandement  unique  fut 
décomposé  en  deux.  Parallèlement  au  duché  de  Toulouse,  il  y 
eut  un  duché  dit  de  Septimanie  ou  de  Gothic,  débordant  jusqu'à 
l'Ebre,  et  l'un  des  comtes  de  ce  ressort  nouveau  reçut  la  dighité 
ducale  :  d'abord  Béra,  comte  de  Barcelone  ;  pui--  Rampon,  comte 


de  Girone  ;  Bernard,  comte  de  Barcelone  ;  Gaucelme,  comte  de 
Girone  et  de  Roussillon.  Ces  deux  derniers  étaient  fils  de  saint 
Guilhem.  Sous  Charles  le  Chauve,  les  trois  premiers  titulaires  du 
marquisat  gothique  furent  Sunifred,  comte  d'Urgel,  puis  Aleran 
et  Béranger. 

Or,  en  865,  pour  affaiblir  la  puissance  du  marquisat,  qui  lui 
faisait  ombrage,  Charles  le  Chauve  coupa  en  deux  la  marche 
gothique  (1),  et,  par  une  fâcheuse  méconnaissance  de  l'histoire  et 
de  la  géographie,  au  lieu  de  fixer  aux  A  Ibères  la  limite  des  deux 
nouveaux  commandements,  il  fixa  cette  limite  aux  Corbières  : 
ainsi,  le  sud  composé  des  comtés  hispaniques  et  du  Roussillon 
constitua  la  marche  d'Espagne,  tandis  que  le  nord,  avec  Narbonne 
et  tout  le  pays  jusqu'au  Rhône  formait  la  Gothie  propre. 

Le  geste  de  Charles  le  Chauve  était  infiniment  grave.  11 
croyait  ne  tracer  qu'une  limite  administrative  à  l'intérieur  de  son 
royaume.  En  réalité,  il  opérait  une  coupure  en  pleine  chair  de 
l'ancienne  Gaule.  Le  Roussillon  était  arraché,  du  coup,  à  la  Sep- 
timanie,  à  l'antique  Narbonnaise,  à  la  Proviniia  romaine.  11  était, 
avec  la  Cerdagne,  artificiellement  soudé  à  ce  groupe  des  comtés 
hispaniques  dont  Barcelone  allait  devenir,  à  partir  du  x'  siècle,  le 
centre  de  gravité,  et  qui,  se  séparant  de  la  France,  devait  se  cris- 
talliser sous  la  forme  de  la  Catalogne,  lin  fragment  de  l'ancienne 
Gaule  indépendante,  de  l'ancienne  Gaule  romaine,  était  détaché 
pour  être  accolé  à  l'ancienne  Tarraconnaise.  Le  sort  de  notre 
Moyen  Age  était  fixé. 

Mais  il  y  avait,  dans  l'acte  de  865,  un  vice  originel  inexpiable. 
Le  jx'  siècle  léguait  à  l'avenir  cette  malfaçon,  d'où  surgit  la  ques- 
tion des  Pyrénées.  Le  redressement  de  l'erreur  de  Charles  le 
Chauve  a  beau  avoir  été  ient  et  pénible,  il  n'en  devait  pas  moins 
être  acquis  un  jour  :  le  traité  des  Pyrénées  devait  rétablir  presque 
en  son  intégrité  la  frontière  gauloise  et  romaine. 

La  date  de  865  domine  donc  notre  histoire  locale.  La  signifi- 
cation en  est  claire.  C'est  à  Charles  le  Chauve  que  le  Roussillon 

(i)  Annales  Bertiniani,  anno  865. 


doit  d'avoir  été  catalan.  Mais  il  n'était  au  pouvoir  de  personne 
de  faire  qu'il  ne  fut  point  français,  parce  qu'il  avait  été  gaulois. 
Tout  en  conservant  l'individualité  que  lui  confère  la  perpétuité 
de  sa  qualité  comtale  (i)  jusque  dans  la  monarchie  aragonaise,  le 
Roussillon  n'adopta  pas  seulement  la  langue  catalane,  mais  encore 
il  s'associa  pendant  plusieurs  siècles  aux  élans,  aux  progrès 
sociaux,  aux  épreuves  et  aux  gloires  du  Principat.  Comment 
s'étonner  toutefois  du  retour  des  choses  qui  suit  l'application  des 
maximes  de  Richelieu  ?  Si  le  Roussillon,  s'étant  redonné  à  la 
France  au  xvn'  siècle,  est  devenu  si  facilement  et  si  indestructi- 
blement  français,  c'est  qu'au  fond  il  n'avait  jamais  cessé  de  l'être 
et  que  l'empreinte  de  l'Antiquité  avait  été  trop  forte  pour  jamais 
être  périmée. 

Catalans  et  Français,  à  vrai  dire  la  conciliation  de  cette  double 
qualité  —  nullement  contradictoire  —  résulte  pour  nous  de  l'his- 
toire elle-même.  C'est  au  tournant  de  865  qu'il  faut  se  placer 
pour  voir  se  dérouler  comme  en  un  vaste  panorama  la  série  des 
siècles  antérieurs  au  ix"  et  la  série  des  siècles  postérieurs  ;  alors 
apparaît  nettement  de  quelles  fibres  est  faite  la  trame  de  notre 
passé  ;  alors  s'explique  l'originalité  de  l'âme  Roussillonnaise  : 
car,  demeuré  fraternel  aux  Catalans  d'au-delà  les  Albères,  le 
Roussillonnais  —  fils  de  Gaulois  —  est  naturellement  et  substan- 
tiellement si  Français  qu'en  aucune  province  de  France  nul  ne 
saurait  l'être  davantage. 

J.  Calmette, 
Professeur  à  la  Faculté  des  Lettres 
de  l'Université  de  Toulouse. 

(i)  11  est  remarquable  que,  tous  les  autres  comtés  de  la  Marche  étant 
absorbés  dans  celui  de  Barcelone,  —  témoin  les  formules  de  la  chancellerie 
aragonaise,  —  seuls  les  Comtés  de  J^oussillon  et  de  Cerdagne  restent  qualifiés 
tels,  en  sorte  qu'ils  ne  se  confondent  point  dans  le  Principat,  tout  en  faisant 
administrativement  partie  de  ce  même  Principat  :  trace  curieuse  et  fort 
instructive  de  la  réalité  profonde  dans  ce  formalisme  précieux  que  Paul 
Viollet  appelait  si  justement  «  le  musée  de  l'histoire  ». 


Le  Provençal  au  Lycée 

Les  journaux  nous  apprennent  la  création,  au  lycée  de  Mar- 
seille, d'une  chaire  de  langue  provençale  et  la  nomination  à  cette 
chaire  du  distingué  Capoulié  du  Félibrige,  M.  le  D'  Fallen. 

Ces  quelques  lignes,  dans  un  journal,  cela  ne  constitue  pas  pré- 
cisément, pour  le  grand  public,  ce  que  l'on  est  convenu  d'appeler 
un  fait  sensationnel.  Elles  marquent  cependant  une  véritable  petite 
révolution,  conséquence  logique  de  Yaclion  continue  du  Régiona- 
lisme grandissant.  Elles  marquent  —  disons-le  bien  haut,  dussent, 
les  profanes,  en  sourire  —  un  grand  pas  en  avant  vers  le  Pro- 
grès. Ces  deux  mots  :  action,  révolution,  ne  sont-ils  pas  intime- 
ment liés  à  l'idée  de  marche  en  avant  ?  Sans  action,  pas  de  révo- 
lution, et  sans  révolution,  pas  de  progrès  possible. 

C'est  bien,  en  effet,  par  une  suite  ininterrompue  d'efforts  indi- 
viduels se  groupant,  se  coordonnant,  que  l'action  collective  se 
précise  avec  force  et  produit,  lentement  peut-être,  mais  sûrement, 
la  révolution  désirée.  Et  c'est  bien  par  de  petites  révolutions 
successives,  par  de  petits  renversements  successifs  d'idées  et  de 
choses  existantes  que  s'affirme,  par  étapes,  le  Progrès,  ce  Pro- 
grès toujours  poursuivi,  jamais  complètement  atteint. 

La  création  d'une  chaire  de  Provençal  au  lycée  de  Marseille 
est  une  de  ces  étapes,  une  de  ces  victoires  dont  l'annonce  dans 
un  journal  nous  comble  de  joie,  nous  autres,  régionalistes,  tout 
en  nous  procurant  une  grande  surprise  :  Comment  !  une  chaire  de 
Provençal  dans  un  lycée  ?  Est-ce  bien  vrai  ?  Avons-nous  bien  lu? 
Telles  sont  les  questions  que,  tout  d'abord,  chacun  de  nous  se 
pose  en  présence  d'un  tel  fait. 

Ah  !  qui  l'eût  cru,  il  y  a  cinquante  ans,  quand  le  grand  Mis- 
tral, déplorant  le  peu  d'énergie  des  militants,  disait  : 

Ah  !  si  me  sabien  entendre  ! 
Ah  !  si  me  voulien  segui  1 

Aurait-il  pu  supposer,  notre  regretté  Maître,  qu'à  peine  cinq 
ans  après  sa  mort,  un  de  ses  successeurs  au  Capouliérat  serait 
chargé  d'expliquer  aux  lycéens  de  la  grande  cité  phocéenne  l'im- 


^^     2  2  3     — — 

mortel  poème  de  Mireille  et  de  leur  en  faire  goûter  les  incom- 
parables beautés  ?  Cela  lui  eût  paru  incroyable,  inimaginable,  et 
cependant  cela  est  parce  que  les  régionalistes  l'ont  voulu  et  que, 
par  leur  action,  ils  l'ont  imposé  aux  pouvoirs  publics. 


L'action  pédagogique  félibréenne  avait  eu  d'abord  raison  des 
résistances  officielles  en  ce  qui  concerne  les  Facultés  :  création 
de  chaires  de  langues  romanes,  soutenances  de  thèses  de  doctorat 
en  provençal,  c'était  déjà  un  progrès.  La  voici  maintenant  forçant 
la  porte  du  lycée.  11  ne  lui  reste  plus  qu'à  conquérir  le  droit, 
pour  la  langue  du  peuple,  de  pénétrer  dans  l'école  du  peuple. 

Pénétrer  dans  l'Ecole,  c'est  là  certainement  la  partie  la  plus 
difficile  de  la  grande  tâche.  Mais  le  jour  viendra,  n'en  doutons 
pas,  où  notre  désir,  si  longtemps  exprimé,  se  réalisera  tout  à  coup, 
grâce  à  l'action  méthodique  qui  se  poursuit  inlassablement,  tous 
les  jours  et  un  peu  partout. 

D'ailleurs  le  siège  de  l'Ecole  est  commencé  depuis  longtemps. 
La  lutte  engagée  entre  les  Félibres  et  les  Régionalistes  d'une  part 
et  les  pouvoirs  publics  de  l'autre,  nous  a  déjà  donné  quelques 
résultats  appréciables  qui  méritent  d'être  signalés  : 

i"  résultat.  —  Dans  la  presque  totalité  des  écoles  du  Midi,  les 
maîtres  ne  punissent  plus  les  élèves  qui  parlent  l'idiome  local 
dans  la  cour  de  récréation. 

Ce  changement  de  mentalité  qui,  grâce  à  l'action  des  Félibres, 
se  manifeste  de  plus  en  plus  dans  le  corps  enseignant,  ce  renver- 
sement des  usages  précédemment  établis,  cette  petite  révolution 
qui  supprime  un  article  fameux  du  sacro-saint  règlement  scolaire, 
sans  que  les  chefs  universitaires  essaient  d'élever  la  moindre  pro- 
testation, nous  devons  l'enregistrer  comme  un  réel  progrès  et  nous 
pouvons  en  être  fiers,  car  c'est  notre  œuvre.  Ce  n'est  pas  pour 
rien  que  nos  innombrables  cigales  ont  chanté!... 

2'  résultat.  —  Lés  circulaires  ministérielles  recommandent 
d'adapter  l'enseignement  au  milieu,  c'est-à-dire  au  «  pays  »,  à  la 
«  région  ». 

Pour  obtenir  cette  réforme  pédagogique  dont  on  ne  peut  con- 
tester la  nécessité,  il  a  fallu  que  les  Félibres  et  les  Régionalistes 
se  remuent  pendant  longtemps  et  secouent  la  torpeur  des  bureaux 


—    224     ~ 

du  Ministère  de  l'Instruction  publique.  11  a  fallu  leur  action 
énergique,  opiniâtre,  pour  que  s'opère  ce  renversement  des  prin- 
cipes absurdes  et  cependant  admis  qui  voulaient  que  les  program- 
mes scolaires  fussent  identiques  pour  toutes  les  écoles  de  France 
sans  distinction  de  régions,  au  nord  comme  au  midi,  à  la  monta- 
gne comme  à  la  plaine,  dans  les  régions  où  l'on  cultive  les  céréa- 
les, les  betteraves  ou  les  pommes  à  cidre  comme  dans  le  pays  de 
la  vigne,  du  mûrier  ou  de  l'olivier.  Ce  résultat  est  très  apprécia- 
ble. 11  doit  être  compté  comme  une  victoire  régionaliste. 

3'  résultat.  —  Une  circulaire  ministérielle  ordonne  l'introduction 
dans  les  programmes  scolaires  de  l'histoire  et  de  la  géographie 
locales. 

C'est  là  encore  une  victoire  remportée,  comme  la  précédente, 
par  la  logique  régionaliste  sur  la  routine  administrative. 

Les  confectionneurs  de  programmes  n'avaient  pas  compris 
qu'avant  d'aimer  la  France,  sa  patrie,  l'enfant  aime  d'abord,  et 
tout  naturellement,  son  village  parce  que  c'est  là  qu'il  est  né  et 
que  s'est  écoulée  sa  première  enfance,  dans  un  cadre  familier,  au 
milieu  de  ses  parents  et  de  ses  petits  amis.  Ce  village,  il  l'aime 
à  tel  point  qu'il  le  trouve  plus  beau,  malgré  ses  imperfections, 
que  tous  les  villages  environnants. 

Aymé  moun  vilatje 
May  que  toun  vilatje, 
a  dit  le  poète. 

Pourquoi  donc  ne  pas  enseigner,  tout  d'abord,  à  l'enfant,  l'his- 
toire et  la  géographie  de  cette  «  petite  France  »  qu'il  aime  et  qui 
est  bien  à  lui,  avant  de  lui  parler  de  l'autre,  plus  lointaine  et  plus 
difficile  à  comprendre  ?  N'est-ce  pas  là  l'application  du  fameux 
principe  pédagogique  qui  veut  que  l'on  aille  du  connu  à  l'inconnu, 
du  concret  à  l'abstrait,  du  simple  au  composé?  N'est-ce  pas  là 
de  la  bonne,  de  la  saine  pédagogie  régionaliste?  Oui,  certes.  Et 
cependant  il  a  fallu  que,  sans  se  lasser,  Félibres  et  Régionalistes 
demandent,  chaque  année,  dans  leurs  Congrès,  l'inscription  de 
cette  réforme  dans  les  programmes  de  l'école  primaire.  Que  dis- 
je  !  il  a  fallu  qu'un  Félibre  majorai,  M.  Maurice  Faure,  devienne 
Ministre  de  l'Instruction  publique  pour  que  se  réalise  enfin  un 
vœu  si  longtemps  exprimé. 

Le  Félibrige  est  donc  victorieux  sur  ces  trois  points.  Il  lésera, 


225     

n'en  doutons  pas,  sur  le  quatrième,  le  plus  important  :  l'introduc- 
tion de  la  langue  d'oc  dans  l'école. 

Il  serait,  en  effet,  souverainement  injuste  de  refuser  à  l'ensei- 
gnement primaire  ce  qui  est  déjà  accordé  à  l'enseignement  secon- 
daire. 

N'oublions  pas  cependant  qu'il  faudra  encore  batailler,  qu'il 
faudra  agir  vigoureusement  sur  les  pouvoirs  publics  pour  que  le 
Catalan,  banni  des  écoles  du  7{oussillon  comme  étant  un  obstacle  à  l'en- 
seignement du  Français,  pénètre  dans  ces  mêmes  écoles  comme  étant  le 
meilleur  auxiliaire  de  l'enseignement  de  notre  langue  nationale.  Et  ce 
sera  là  l'ultime  petite  révolution  scolaire  due  à  l'action  bienfaisante 
des  groupements  régionalistes  et  félibréens. 

En  attendant,  et  puisque  nous  avons  un  précédent  à  invoquer, 
occupons-nous  de  l'enseignement  secondaire  et  demandons  la  créa- 
tion d'une  chaire  de  Catalan  au  collège  de  Perpignan  (i). 

Louis  Pastre. 

(i)  A  mon  avis,  la  demande  adressée  au  Ministre  doit  être  faite  sous 
forme  de  pétitionnement  et  le  Bureau  de  la  Société  d'Etudes  Catalanes  doit 
recueillir  le  plus  grand  nombre  possible  de  signatures.  Je  crois  inutile  d'ajou- 
ter que  les  noms  des  sénateurs  et  des  députés  du  département  doivent 
figurer  parmi  les  signataires. 


Des  professeurs  bénévoles  de  Catalan 

pour  nos  Collèges 


A  l'article  ci-dessus  de  M.  Louis  Pastre,  un  vrai  technicien 
de  l'enseignement  français  et  catalan,  nous  nous  permettons 
d'ajouter  les  quelques  lignes  suivantes.  Nous  croyons  qu'on  y 
trouvera  le  meilleur  moyen  pratique  d'assurer,  dès  qu'on  le 
voudra,  l'entrée  du  catalan  dans  nos  collèges  roussillonnais. 

Ce  moyen-là,  nous  l'avons  demandé  à  nos  amis  de  Provence, 
venus  aux  récentes  fêtes  de  Joffre  ;  M.  Paul  Ruât,  le  sympa- 
thique félibre  majorai  de  Marseille,   que  tous  les  catalanistes  du 


226    — 

Roussillon  connaissent  bien,  a  daigné  nous  le  faire  connaître  en 
nous  adressant  les  renseignements  suivants  qui  sont  tout  un 
programme. 

♦ 

«  En  juillet  1918,  lors  de  la  distribution  des  prix  au  grand 
lycée  de  Marseille,  une  chorale  de  cent  cinquante  enfants 
exécuta  des  chants  provençaux  sous  la  direction  du  professeur 
Bloch,  et  ce  fut  une  véritable  merveille  que  d'ouïr  cette  musique 
locale  alliée  à  la  musique  de  la  langue. 

«  Le  proviseur  d'alors,  M.  Maluski,  qui  était  le  promoteur  de 
ces  chants,  avait  l'idée  d'organiser  des  conférences  de  provençal 
à  l'usage  des  professeurs  et  des  candidats  au  baccalauréat,  pour 
bien  démontrer  qu'il  s'agissait  d'une  langue  littéraire  et  non  d'un 
patois,  comme  on  le  croyait  généralement;  mais  M.  Maluski 
fut  appelé  à  la  direction  d'un  lycée  de  Paris  et  remplacé  par 
M.  Brugeas,  proviseur  du  lycée  de  Brest. 

«  Ce  dernier,  qui  arrivait  avec  peut-être  le  regret  qu'il  n'y 
eût  pas  de  cours  de  breton  dans  les  lycées  de  Bretagne,  constata 
que  plus,  de  cent  étudiants  américains  étaient  venus  à  Marseille 
et  à  Aix  pour  perfectionner  leurs  études  de  provençal,  et  qu'il 
n'y  avait,  ni  à  Aix,  ni  à  Marseille,  des  cours  en  cette  langue 
comparables  à  ceux  qui  existent  dans  les  universités  d'Amérique. 

«  Ayant  appris,  d'autre  part,  que  le  Félibrige  réclamait  ces 
cours  depuis  près  de  cinquante  ans  sans  obtenir  de  résultat, 
M.  Brugeas  en  fit  la  demande  à  M.  Laferre,  ministre  de 
l'Instruction  publique  —  demande  appuyée,  sans  doute,  par 
l'inspecteur  Pessemesse  et  le  recteur  Payot  —  et,  au  mois  d'août 
dernier,  arrivait  l'autorisation  d'ouvrir  un  cours  annexe  de 
provençal  au  lycée  de  Marseille. 

«  L'inauguration  en  a  été  faite  le  mardi  28  octobre  ;  il  a  lieu 
le  mardi  et  le  vendredi,  à  4  h.  3o,  et  c'est  M.  le  docteur  Fallen, 
capouiié  du  Félibrige,  qui  en  est  le  professeur  bénévole,  avec  le 
majorai  Ruât  comme  professeur  suppléant. 

«  Ce  cours,  entièrement  facultatif,  est  réservé  pour  le  moment 
aux  élèves  de  quatrième  et  de  troisième.  Le  nombre  des  inscrip- 
tions a  été  tel  qu'on  a  dû  refuser  les  étudiants  le  seconde  et  de 
première  qui  désiraient  y  assister  ;  ce  qui  démontre  qu'un  second 
cours  de  provençal  sera  bientôt  nécessaire. 


«  Dès  la  première  leçon,  les  élèves  ont  été  séduits  par  la 
douceur  de  la  langue  et  aussi  de  la  facilité  des  études  par  la 
comparaison  du  provençal,  langue  intermédiaire,  et  le  français. 
Simplement,  avec  les  mots  cabro,  casleu,  drapeu,  chivau,  on  a 
fortifié  leurs  études  de  latin,  et  la  prononciation  provençale  a 
permis  d'écrire  ces  mots  en  français  sans  faute  d'orthographe. 

«  A  bref  délai  s'imposera  la  création  d'un  cours  de  litté- 
rature provençale  pour  voir  cette  belle  floraison  de  poètes  et 
de  prosateurs  qui  ont  noms  Mistral,  Aubanel,  Roumanille,  Félix 
Gras,  Baptiste  Bonnet,  Don  Xavier,  etc.  Nos  étudiants  pourront 
ainsi  lire  et  commenter  dans  leur  texte  cette  bible  de  l'humanité 
qui  s'appelle  Mireille,  les  exploits  du  pêcheur  Calendal,  de 
Cassis,  l'épopée  du  poème  du  Rhône,  des  Rouges  du  Midi, 
œuvres  illuminées  par  le  soleil  d'or  de  notre  Provence  et  par  le 
doux  parler  de  nos  pères,  qui  fut  celui  des  rois,  des  cours 
d'amour  et  des  troubadours.  » 

♦ 

C'est  donc,  on  le  voit,  par  leur  ténacité  et  leur  concours 
purement  désintéressé,  que  les  Provençaux  de  Marseille  sont 
parvenus  à  faire  reconnaître  comme  classique  leur  langue  mater- 
nelle. 

Qu'il  se  trouve  à  Perpignan  quelques  bonnes  volontés  de  ce 
genre,  et  nous  ne  doutons  pas  que  le  succès  ne  vienne,  sous  peu, 
couronner  la  belle  campagne,  si  vaillamment  menée  depuis  long- 
temps par  M.  Pastre  lui-même,  dans  la  T^evue  Catalane.  Des 
professeurs  bénévoles  pour  l'enseignement  du  catalan  :  langue,  his- 
toire, art,  voilà,  nous  semble-t-il,  le  plus  rapide,  le  plus  efficace 
moyen  de  faire  agréer  cet  enseignement  dans  tous  nos  collèges. 
Le  reste  viendra  par  surcroît.  Envers  de  tels  bienfaiteurs  de  la 
jeunesse  et  de  la  petite  patrie,  les  familles  et  les  pouvoirs  inté- 
resses ne  manqueront  pas,  d'ailleurs,  un  jour,  de  comprendre 
leurs  devoirs  de  reconnaissance  et  d'attachement. 

Jean  Sarrète. 


La  seigneurie  $  la  paroisse  du  Soler 

<Sê%3&  {SUITE) 

Seigneurie  du  Soler  d'Jlmont 

Les  seigneurs  du  Soler  d'Amont  portaient  le  nom  de  cette 
localité. 

En  i  184,  Guillaume  du  Soler,  précepteur  du  Mas  Deu,  reçoit 
de  nombreuses  donations  pour  le  Temple  (1). 

Guillaume  Jorda  du  Soler  est  archidiacre  d'Elne  et  prévôt  de 
Trouillas  en  1212(2).  11  accorde  en  acapte,  le  18  mars  121 3,  à 
la  maison  de  Saint-Sauveur  de  Sira  la  garrigue  dite  de  Comba- 
Auriola,  au  terroir  de  Trouillas  (3). 

Un  frère  de  Guillaume  Jorda,  appelé  Pierre  du  Soler,  est  cha- 
pelain à  Saint-Jean  de  Perpignan  en  1214. 

A  cette  époque,  le  château  du  Soler  existait  dans  ses  vastes 
proportions.  Le  3  des  ides  d'avril  1223,  Guillaume  Jorda  du  Soler, 
archidiacre  d'Elne,  cède  à  l'église  d'Elne  et  à  Arnald  de  Serra- 
longue,  évêque  élu  d'Elne,  les  droits  d'hypothèque  qu'il  avait  sur 
le  château  du  Soler  contre  les  héritiers  de  Ferrand  du  Soler,  son 
frère  :  «  "El  tibi  Mrnaldo  de  Serralonga  Tzlnen.  electo  et  omnibus  suc- 
cessoribus  omnia  jura  et  acliones  tnihi  compétentes  contra  heredem  Ter- 
randi  de  Solerio  fralris  mei  et  res  et  possessiones  ipsius  ratione  1  2  millium 
solidorum  Barcb.  quod  solvi  domui  Tontisfrigidi  nomine  Peiri  Pauci 
quondam,  pro  quibus  denariis  fraier  meus  obligavit  eidem  Pétri  Pauci 
castrum  de  Solerio  cum  suis  juribus  et  pertinenciis  et  bonis...  (4)  Guil- 
laume Jorda  du  Soler  reconnaît  qu'il  a  dépensé  une  somme  impor- 
tante pour  améliorer  le  château,  «  in  melioracione  dicti  casiri »,  et 
les  moulins  qui  en  dépendaient,  «  et  molendinorum  periinentium  ad 
ipsum  castrum  ».  Cette  cession  est  mentionnée  dans  l'épitaphe  de 
Guillaume  Jorda  du  Soler  (1226),  galerie  sud  du  cloître  d'Elne: 

(1)  Cari.  Temp..  P  î58. 

(2)  Cari.  Temp.,  f°  1  2. 

(3)  Cari.  Temp.,  f°  12.  —  Brutails,  "Elude  sur  la  condition  des  populations 
rurales  du  T^oussillon,  p.   i3,  note  2. 

(4)  Fonds  d'Oms.  —  Alart,  "Notices  historiques,  2'  série,  p.   145. 


—    229    — 

«  Qui  dedil  episcopo  et  ecclesix  eînensi  casîrum  de  Solerio  ».  A  partir 
de  cette  époque,  l'évêque  d'Elne  sera  le  seigneur  du  château  et 
même  du  territoire  du  Soler  d'Amont.  Cependant,  la  famille 
seigneuriale  du  Soler  conservera  encore  quelques  droits  et  quel- 
ques fiefs  dans  le  territoire.  Ainsi,  en  1243,  Guillaume  du  Soler, 
chevalier,  «  miles  »,  accepte  en  fief,  pour  lui  et  les  siens,  de 
Jacques,  roi  d'Aragon,  tout  ce  qu'il  possède  dans  l'intérieur  de 
la  villa  du  Soler  d'Amont:  «  inlus  villam  de  Solerio  superiori  »  : 
pour  ce  fief,  il  se  reconnaît  vassal  du  Roi  (1). 

(A  suivre)  Joseph  Gibrat. 

(1)  Liber  feudorum,  C.  f'  68. 

NÉCROLOGIE 

Dans  les  premiers  jours  de  ce  mois  de  novembre,  nous  avons 
eu  à  déplorer  la  perte  d'un  des  membres-fondateurs  et  ancien 
vice-président  de  notre  Société  d'Etudes  Caialanes  :  M.  Amédée 
Aragon,  décédé  à  Perpignan  à  l'âge  de  60  ans. 

Esprit  cultivé  et  très  érudit,  notre  distingué  confrère  était,  en 
outre,  un  fervent  des  belles-lettres  catalanes.  Son  excessive 
modestie  l'empêcha  seule  de  livrer  à  la  publicité  le  fruit  de  ses 
études.  Néanmoins,  sa  "Nadalela  témoigne  hautement  de  sa  grande 
compétence  en  matière  de  vieux  Noëls  catalans.  Il  s'en  était  fait 
une  collection  très  riche  qui,  ajoutée  à  celle  de  nos  vieux  Goigs, 
constitua  la  plus  belle  parure  de  son  inappréciable  bibliothèque 
catalane,  où  il  avait  accumulé  tout  ce  que  l'imprimerie  du  Rous- 
sillon  et  de  la  Catalogne  presque  entière  avait  produit  d'ouvrages 
anciens  et  rares.  Ces  livres  de  la  Terre  catalane  étaient,  en  quel- 
que sorte,  «  ses  plus  beaux  jovaux  »  ;  d'eux  encore,  il  se  plaisait 
à  dire  à  ses  visiteurs,  non  sans  un  sentiment  de  jalouse  fierté  : 
g  Son  les  flors  de  casa.  » 

Nous  adressons  à  sa  famille  et  tout  particulièrement  à  son 
frère,  M.  Henry  Aragon,  notre  si  dévoué  collaborateur,  nos 
condoléances  attristées. 


La  Confrérie  du  Rosaire  en  Cerdagne 

**%?&•*  (SUITE) 

Outre  les  détails  historiques  relatifs  à  la  guerre  et  à  la  peste 
qui  désolèrent  Bolvir  en  1612,  le  registre  de  la  Confrérie  du 
Rosaire  de  cette  paroisse  nous  révèle  plusieurs  noms  de  person- 
nages importants  du  pays  qui  faisaient  partie  de  la  pieuse  asso- 
ciation. C'est:  en  1616,  «  Miquel  Portaria  »,  curé  de  Bolvir,  et 
son  vicaire  «  Joan  Berenguer  ;  Miquel  Niubo  »,  recteur  de  dite 
paroisse  en  1617  ;  «  Père  Calvet,  baille  ;  Maria-Anna  »,  son  épouse 
et  leurs  cinq  enfants  :  «  Gaspar,  Anna,  Hieronima,  Catharina, 
Margarida  »  ;  puis  «  Miquel  Manegat  »,  son  épouse  :  «  Joana- 
Anna  »,  et  leurs  trois  enfants:  «Miquel,  Isidro,  Cecilia». 

Durant  tout  le  xvn'  et  le  xvin'  siècles,  les  Sunyer,  famille  très 
répandue  dans  la  Cerdagne,  et  non  des  moins  notables,  fournis- 
sent à  la  Confrérie  mariale  de  Bolvij  une  suite  ininterrompue  de 
membres  associés.  Tels  sont  :  «  Raphaël  Sunyer,  agricola  dicti 
loci,  Joana  (son  épouse,  et  leurs  enfants):  Anna  (161 6),  Magda- 
lena,  pabordessa,  Francès  (1618);  Père  Sunyer,  paborde  (1660- 
1680);  Pera  Sufier  (sic),  minor  (1687);  Joseph  Palau-y-Suner, 
pages  (1734);  Pere-Joan  Sufier  (1745);  Joseph  Sufier-y-Calvet 
(1763)  ». 

Les  de  Péra  (i)  figurent  comme  membres  de  la  Confrérie  de 
Bolvir,  en  1700,  sous  le  nom  de  Joan  Pera-y-Mir,  son  épouse  et 
ses  enfants. 

Nous  possédons  fort  peu  de  documents  aujourd'hui  sur  l'ancien 
couvent  des  Dominicains  de  Puigcerda  ;  les  très  riches  archives 
de  ce  monastère  ont  disparu  durant  la  tourmente  révolutionnaire 
de  1793  qui  eut  dans  cette  ville,  parmi  les  Espagnols  eux-mêmes, 
de  chauds  partisans  devenus  en  même  temps  vandales  fanatiques 
et  iconoclastes  forcenés.  Cette  regrettable  lacune  est  en  partie 
comblée  par  le  manuscrit  de  la  Confrérie  de  Bolvir  en  particulier. 

(1)  Originaires  d'Osséja.  La  branche  établie  ensuite  à  Palau-de-Cerdagne 
portait  le  titre  de  <r  cavaliers  militars  t.  Une  autre  branche  cadette  se  fixa  peu 
après  à  Bolvir  :  elle  était  alliée  aux  «  de  Canal  »  de  ce  lieu  et  aux  a  de  Mir  » 
de  Caldégas. 


-  ih  - 

Ce  registre  nous  apprend,  en  effet,  que  cette  maison  monastique 
de  Puigcerda  dépendait,  en  1617,  de  la  province  d'Aragon,  dont 
le  Provincial  avait  nom,  à  cette  époque  :  «  Fra  Joan  del  Valle  », 
lequel  conféra  ses  pouvoirs  au  «  R.  P.  Jacinto  Qués  »,  de  Puig- 
cerda, pour  l'érection  canonique  de  la  Confrérie  de  Bolvir. 

Signalons  encore,  dans  le  même  document  déjà  cité,  le  nom  de 
nombreux  dominicains  du  couvent  de  Puigcerda  envoyés  à  Bolvir, 
soit  à  titre  de  prédicateurs  des  fêtes  de  la  Confrérie,  soit  de 
visiteurs  de  la  pieuse  association.  Tels,  les  R  R.  PP.:  «  Fra 
Benêt  Marti  s,  24  septembre  1616  et  i3  août  1 656  ;  «  Fra 
Domingo  Casamitjana  »,  17  décembre  1617  ;  «  Fra  Francés 
Fabre  »,  24  septembre  1618  ;  «  Fra  Thomas  Soler,  lector  en 
santa  theologia,  y  prior  »,  5  septembre  1666  ;  «  Fra  ...  Cotxet, 
1679  ;  Fra  Joseph  Ribot  (1),  prior,  3  setembre  1725  ;  Fra  Jose- 
phus  Bosom,  superior  del  real  convent  de  Predicadors  de  Puig- 
cerda, 5  setembre  1726  ;  Fra  Franciscus  Biel,  sanctae  theologiae 
prior,  6  setembre  1728;  Fra  Joseph  Alabau,  lector  en  sagrada 
theologia  »,  <jui  prêcha,  en  iy55,  le  sermon  du  Rosaire  à  Bolvir, 
«  ab  gran  doctrina,  erudicio  y  zel  ;  Fra  Joseph  Tusdea,  prior, 
5  mars  1756  ;  Fra  Raymundus  Vergés,  prior,  27  dezembre  1756  ; 
Fra  Jacinto  Pallès,  1762  ;  Fra  Bonaventura  Laribal,  prior, 
24  setembre  1770  ». 


Comme  on  le  voit  par  ces  diverses  dates  que  nous  venons  de 
donner,  la  grande  fête  du  Rosaire  de  Bolvir  variait  assez  d'une 
année  à  l'autre.  Ordinairement,  elle  se  célébrait,  il  est  vrai,  le 
premier  dimanche  d'octobre,  primitivement  du  moins  ;  ainsi  le 
prouvent  notamment  les  statuts  établis  en   1617.  Mais  à  partir  de 

(1)  Mossen  Agusti  Puyol  y  Safont  (mort  en  l'année  1903,  curé  d'Alp. 
dans  la  Cerdagne  espagnole)  cite  dans  ses  Tiijos  illustres  de  Cerdana,  p.  1  10, 
le  nom  d'un  autre  P.  José  Ribot,  né  à  Montellâ  (Cerdagne  espagnole)  vers 
la  fin  du  xvu'  siècle  ;  puis,  après  avoir  embrassé  la  carrière  ecclésiastique,  il 
fut  nommé  curé  d'Urtg  et  du  Vilar  ;  il  entra  peu  après  dans  la  Congrégation 
de  Saint  Philippe  de  Néri,  à  Vich,  où  il  composa  deux  ouvrages  de  haute 
spiritualité  qui  furent  imprimés  a  Barcelone,  l'un  en  1729.  1  autre  en  1732. 
—  Cf.  aussi  Diccionarw  critico  de  los  "Escritores  catalanes,  par  Torres  y  Amat, 
édition  de  i83b,  tome  1,  p.  5.+o,  col.   1  et  a. 


23î    — 

1701,  cette  solennité  fut  fixée  au  premier  dimanche  de  septem- 
bre, et  en  1708-1724,  au  dernier  dimanche  de  novembre;  en 
1725,  au  mois  de  septembre,  comme  antérieurement.  Cette  règle 
souffrait  des  exceptions,  selon  que  les  circonstances  de  l'époque 
le  commandaient.  Quelquefois  même,  la  fête  est  supprimée, 
comme  en  1734,  1739,  1740,  1742,  «  per  la  calamitat  del  temps  ». 

Le  jour  de  la  fête  principale  du  Rosaire  avait  lieu  pour  la 
Confrérie  le  règlement  des  comptes  et  le  renouvellement  des 
pabordes  et  pabordesses,  en  présence  des  :  visiteur  canonique,  curé, 
batlle,  consuls  et  dignitaires  anciens  de  la  société  dont  le  mandat 
expirait  à  ce  moment. 

La  liste  des  recettes  et  dépenses  de  l'œuvre  pie  nous  renseigne 
sur  certains  usages,  jadis  en  vigueur  à  Bolvir  et  aussi  dans  toute 
la  Cerdagne.  Ainsi,  à  la  fête,  à  la  procession  du  Rosaire,  assis- 
tent au  moins  huit  prêtres  du  voisinage,  une  cobla  de  musiciens, 
tous  rétribués  par  les  pabordes,  y  compris  le  repas. 

De  plus,  chaque  année,  peu  avant  la  fête  de  la  Confrérie,  les 
pabordesses  font,  dans  le  village,  une  quête  de  blé  ;  elles  en  recueil- 
lent jusqu'à  trois  mesures  ordinairement.  Ce  blé,  remis  aux 
«  flaquers  »  de  Puigcerda,  est  ensuite  transformé  en  délicieux 
gâteaux  —  cocas  —  sortes  de  petits  pains  dans  la  composition 
desquels  entre,  en  outre,  une  certaine  quantité  d'oeufs,  de  sucre. 

Parmi  les  recettes  de  la  Confrérie,  nous  trouvons,  en  1675,  la 
somme  de  9  1.  5  s.  6  d.,  équivalant  à  «  una  dobla,  que  dona  en 
or  lo  Senyor  Duch  de  Mediceloni,  quant  estava  en  Bolvir  ». 

Au  nombre  des  dépenses  figurent,  en  1684,  «  per  fer  lo  pan- 
dero,  23  reals  y  mitg  »  :  2  1.  7  s.  ;  puis,  en  173  j  ,  2  1.  2  s.  pour 
la  rétribution  des  musiciens. 

Les  cérémonies  du  Rosaire  se  célébraient  dans  la  chapelle 
affectée  à  la  Confrérie  et  placée  sous  le  vocable  de  Notre-Dame 
du  Rosaire. 

Ce  sanctuaire,  pratiqué  dans  le  mur  de  droite  —  côté  sud  — 
de  l'église  paroissiale,  sur  l'emplacement  même  de  celui  de  Notre- 
Dame  d'Espérance,  était  en  construction  en  1673.  11  formait  à 
cette  époque  le  bras  droit  du  transept  et  reçut  des  proportions 
assez  vastes,  des  embellissements  nombreux,  grâce  aux  largesses 
des  Confrères  et  des  autres  habitants  de  Bolvir. 

Le   i5   décembre    1673,   les  pabordes  achetèrent  3o  charges  de 


-    a33  — 

chaux,  payèrent  «  una  dobla  al  Senyor  Visitador,  per  la  llicencia 
de  foradar  la  iglesia  de  Nostra  Senyora  de  Esperansa  per  fer 
una  capella  de  Nostra  Senyora  del  Roser».  D'autres  sommes 
sont  mises   en   réserve,   en    1674,   «per   fer   la  capella  de  Nostra 

Senvora  del  Roser  ». 

j 

L'autel  du  Rosaire  s'embellit  d'un  beau  retable  en  bois,  com- 
posé de  quatre  panneaux  représentant  les  mystères  joyeux,  de 
colonnes  avec  anges  et  raisins  héraldiques,  de  deux  gradins  ornés 
de  tètes  d'anges  et  de  roses  symboliques.  Cette  œuvre,  entière- 
ment sculptée  avec  art,  rappelle  les  divers  retables  du  Rosaire, 
nombreux  en  Confient,  Cerdagne,  dans  les  contrées  de  Ribas  et 
de  Vich,  dûs  généralement  au  ciseau  et  à  la  palette  artistiques  de 
nos  Suner  catalans. 

En  1684,  la  Confrérie  de  Bolvir  effectuait  un  paiement  de 
«  2  escuts,  per  fer  pintar  las  imatges  de  N'  S1  del  Roser  »,  et 
d'autres  encore  en  1687,  à  un  peintre  décorateur  dont  le  nom  n.e 
nous  a  point  été  transmis,  pour  son  travail  de  «  pintar  la  mitât 
de  la  capella  »  et  le  a  pâlit  del  Roser  ». 

Cette  chapelle  existe  encore  aujourd'hui,  dans  un  excellent 
état  de  conservation. 

{M  suivre)  J.  Sarrète. 


Llevanl  de  Taula 

L'Art  Régional 
Dans  YJndépendani  du  mardi  21  octobre  1919,  une  chronique 
d'art  de  M.  Jean  Catel,  que  nous  nous  faisons  un  plaisir  de 
signaler.  11  y  est  question  de  M.  André  Masson,  un  jeune  pein- 
tre converti  par  notre  lumière  cérétane.  «  Sa  nature  artiste,  dit 
M.  Jean  Catel,  s'est  précisée  au  toucher  rude  du  Vallespir.  11 
le  sait,  il  le  dit.  »  Et  le  critique  fait  cette  observation  :  «  La  lit- 
térature régionale  trouvera  dans  l'art  de  notre  ami  une  preuve 
qu'on  peut,  en  restant  profondément  français,  traduire  l'àme  du 
sol  et  des  choses  catalanes.  » 

Mais  cette  pensée    mériterait   d'être   précisée.    Pourquoi   est-il 


-    »34- 

question  de  littérature  régionale  à  propos  des  toiles  d'un  nouvel 
artiste?  N'est-ce  pas  une  confusion  de  valeurs?  Et  que  veut-on 
au  juste  nous  prouver?  Que  l'on  peut  traduire  l'âme  catalane  en 
restant  profondément  français  ?  Sans  doute,  car  tout  est  permis. 
On  peut  de  même  traduire  l'âme  italienne  en  restant  profondé- 
ment français,  ou  l'àme  espagnole.  Tout  de  même,  un  Paul  Bour- 
get  à  Barcelone  ne  nous  ferait  pas  sentir  l'âme  catalane  comme 
Joaquim  Ruyra  dans  sa  «  Parada  »  ou  Père  Corominas,  dans  ses' 
a  Gracies  de  l'Empordâ  ».  Le  grand  Manet  à  l'école  de  Goya 
n'a  peut-être  pas  traduit  l'Espagne  et  l'âme  espagnole  comme 
Goya.  Nous  ne  le  pensons  pas.  Jean  Aicard,  écrivain  français, 
n'a  fait  que  singer  Frédéric  Mistral.  Hélas!  Mais  la  Provence 
nous  offre  ce  rare  exemple  d'un  grand  écrivain  qui  est  profondé- 
ment provençal  et  profondément  français.  11  s'agit  d'Alphonse 
Daudet.  Ce  généreux  et  sensible  romancier  connaissait  d'ailleurs 
le  provençal,  et  il  traduisait  au  besoin  les  conteurs  de  Provence. 
Il  n'est  pas  difficile  de  voir  qu'un  même  esprit  jaillit  de  la  même 
source  dans  les  "Lettres  de  mon  Moulin  et  dans  les  Mémoires  et  "Récits 
de  Mistral.  Et  c'est  l'esprit  provençal,  l'un  des  plus  profondé- 
ment français  qui  soient  au  royaume  de  France.  —  Faut-il  une 
conclusion  à  tout  ceci  ?  La  voici  :  Catalans  du  Roussillon,  et  vous 
surtout,  artistes  et  poètes,  ne  dédaignez  pas  notre  langue,  ne  la 
croyez  pas  trop  basse  et  humble.  Montaigne  ne  dédaignait  pas 
le  gascon.  Et  Rabelais  adorait  tous  les  parlers  de  France.  Exer- 
cez en  toutes  choses  ce  don  sacré  de  la  sympathie,  qui  fait  tous 
les  miracles.  Lisez  le  catalan.  Essayez-vous  à  l'écrire,  si  toutefois 
vous  sentez  en  vous  l'âme  de  la  race.  En  vérité  ce  n'est  pas  l'âme 
des  Malgaches  que  reflète  notre  parler  roman.  Non,  c'est  le  beau 
sang  de  nos  ancêtres  qui  jaillit  à  travers  les  mots  catalans.  Et 
nous  croyons  que  M.  Jean  Catel  pense  exactement  comme  nous. 
Dans  le  cas  contraire,  et  s'il  en  voit  la  nécessité,  il  lui  sera  loi- 
sible de  défendre  sa  thèse  ici-même.  Car  un  tel  débat  ne  nous 
déplairait  pas. 

La  Minerve  Française 

Dans  l'un  des  récents  numéros  de  la  Minerve  "Française,  nous 
remarquons  des  poèmes  de  Pierre  Camo,  un  catalan  de  race 
devenu  profondément  français  de  style  à  l'école  de  Racine  et  de 
Chénier. 


—  235  — 

Pierre  Camo  publiera  les  Odes  et  les  Sonnets,  où  nous  sommes 
déjà  assurés  de  retrouver  le  pur  accent  des  "Beaux  Jours  et  i'hori- 
zon  de  l'Albère.  Ce  sera  une  fête  pour  les  rares  amis  de  la  vraie 
poésie. 

Un  sonnet  de  Verhaeren 
Le  parti  de  l'Intelligence 

Nous  transcrivons  pour  nos  lecteurs  la  traduction  catalane  d'un 
sonnet  d'Emile  Verhaeren,  un  grand  poète  français  profondément 
flamand.  Nous  l'avons  recueilli  dans  le  premier  numéro  d'octobre 
de  la  J^evista  et  nous  le  devons  à  Josep  Flo  Termens,  qui  débute 
ainsi  dans  les  lettres  catalanes.  Ce  n  est  pas  un  mauvais  début. 

La  Cuita  del  Pa 

(d'Emile  Verhaeren) 

Pasten  les  noies,  els  dies  de  festa, 
llet  i  farina  de  blat  del  millor, 
nusos  els  côlzers  i  els  rulls  de  la  testa 
tots  empolsats  i  amarats  de  suor. 

Cota  la  faç  pel  treball  enrogida, 
i  ertes  les  gorges  dejûs  els  vestits, 
colguen  els  braços  dessota  l'humida 
pasta,  tôt  fent-ne  rodols  corn  Uurs  pits. 

Son  devinguts  els  tions  brases  roges 
i  adelerades  les  moces,  com  boges 
llancen  al  forn,  a  palades,  els  pans  ; 

mentres  sorgeixen  les  fiâmes  sagnantes 

—  llengiies  de  foc  d'unes  goles  gegantes  — 

per  a  besâ  1s  hi  el  rostre  i  les  mans. 

Josep  Flo  Termens. 

Cette  même  7(evista  a  récemment  publié  la  traduction  d'un  très 
curieux  poème  d'André  Spire.  A  propos  du  manifeste  du  Parti 
de  l'Intelligence,  notre  ami  J.-M.  Lôpez-Picô,  le  poète  spiritua- 
liste  et  pétrarquisant,  écrit  une  belle  page  dont  nous  voulons 
extraire  ces  quelques  lignes  :  «  1  si  França  fou  capdavantera  del 
sacrifici,  ha  volgut  també  fer-se  portantveu  de  tots  els  desigs  que 
criden  l'esdevenidor.  —  Veus  franceses  han  dit  al  mon,  superant 
totes  les  limitacions  i  tots  els  interessos,  la  voluntat  alliberadora 
d'afirmar  la  independencia  de  l'esperit.  —  De  tôt,  el  que  ens  inté- 
ressa mes  es  el    fet   que   hagi    estât    francesa   aquesta   frisança   de 


•  _  236  — 

ultrapassar  la  ceguera  de  l'esdevenidor  i  de  no  voler  anar  a  les 
palpantes.  1  que,  d'esser  francesa,  el  guany  ne  sigui  universal  ». 
Ces  justes  paroles,  pleines  de  mesure,  pleines  de  la  vision  de 
la  France  et  de  son  rôle  historique,  sont  également  un  honneur 
pour  l'intelligence  catalane. 

Une  erreur 

La  Tramontane  de  septembre  et  octobre  1919  publie  une  liste 
des  artistes  roussillonnais  contemporains.  La  liste  est  un  peu  lon- 
gue. Et  afin  de  l'allonger,  on  y  a  ajouté  le  compositeur  espagnol 
Albeniz.  Certes,  Albeniz  était  un  si  bel  artiste...  qu'il  méritait 
d'être  roussillonnais.  Par  ailleurs,  nous  observons  dans  cette  revue 
un  louable  effort  de  régionalisme.  Puisse-t-eile  avoir  la  vigueur 
de  son  beau  titre  I  Xiula,  xiula,  tramontana. 

Emile  Sicard  et  Louis  Codet 

Les  provençaux  et  les  catalans  réunis  dans  le  vieil  hôtel  de  la 
Main-de-Fer  n'oublieront  pas  le  beau  serment  fédéraliste,  le 
serment  de  la  Main-de-Fer,  que  sollicita  M.  Emile  Sicard.  Ce 
fut  le  premier  geste  de  l'idéale  épée  dont  la  poignée  réunit  dans 
un  même  baiser  la  Catalogne  et  la  Provence, 

Emile  Sicard  sait  aimer  le  Roussillon.  11  a  publié  dans  le  Teu 
du  1"  octobte  1919  un  article  intitulé  «  L'Exemple  et  le  Souve- 
nir de  Louis  Codet».  Nous-même  nous  avons  vu  passer  le  sou- 
venir de  Louis  Codet,  du  «  bon  maître  »,  dans  la  belle  maison 
catalane  de  Finestret.  Codet,  blessé  à  Ypres  a  en  secourant  un  de 
ses  hommes  »,  adressait  à  ses  amis,  avant  sa  mort,  de  l'hôpital  du 
Havre,  des  lettres  calmes  et  émouvantes.  Avant  la  guerre,  il  avait 
notamment  écrit  la  Chanson  des  Belles  Taïences,  l'une  des  plus  déli- 
cates poésies  de  la  lyrique  moderne.  11  n'est  rien  de  plus  tou- 
chant que  le  souvenir  d'un  esprit  rare  qui  persiste  dans  la  maison 
de  ses  amis.  Gardons  tous  ce  souvenir  et  cet  exemple. 

J.-S.  Pons. 


Le  Gérant,  COMET.   —  Imprimerie  Catalane,  COMET,  rue  de  la  Poste,    Perpignan 


13*  Année-   N'  158  15  Décembre  1919 

Les    Manuscrits  non  insérés  ,  -»     IL    <,  ■    •■   «  «^^ 

ne  sort:  pas    ..ndu».  M^.  -»J  ^W     I  m7^ 

Les   Articles   Darus  aans   la    Revue  M  "*    y^    ^  ■  '    ^^     1  ^^    TWj   ï< 

n'engagent  auc  leurs  auteurs.  ^b*^A J»    A    A    AA^A    J»  JL  ^  Mmf 

Organe  de  la  Société  d'Etudes  Catalanes.  —  Cotisation  :  10  fr.  par  an 

Le  Maréchal  Jojfre 

président  des  Jeux  Floraux  de  Barcelone  en  1920 

Telle  est  la  nouvelle  que  les  roussillonnais  ont  déjà  apprise  par 
la  voix  de  la  presse.  Nous  nous  empressons  de  la  consigner  dans 
les  pages  de  la  T(evue  Catalane.  Ce  nouveau  titre  de  gloire,  tout 
au  bénéfice  de  l'éminent  Académicien  de  France,  honore  d'au- 
tant sa  petite  patrie  roussillonnaise  que  ceux  qui  ont  eu  la  déli- 
cate pensée  de  le  lui  conférer. 

A  cette  même  occasion,  de  brillantes  fêtes  seront  célébrées  à 
Barcelone,  au  printemps  prochain.  Elles  se  doubleront  de  celles 
qui  auront  pour  objet  la  pose  de  la  première  pierre  du  Monu- 
ment aux  Volontaires  Catalans,  morts  en  combattant  pour  la 
France,  au  cours  de  la  grande  guerre. 

Afin  de  mieux  déterminer  la  part  que  pourraient  prendre  à  ces 
fêtes  les  diverses  sociétés  littéraires,  artistiques  et  musicales  du 
Roussillon,  il  apoartiendrait  tout  d'abord  à  un  grand  Comité  des 
Têtes  de  prendre  des  initiatives. 

La  Société  d'Etudes  Catalanes  sera  toute  heureuse  de  répon- 
dre à  l'appel  qui   lui  sera  adressé. 

N.-B.  —  A  notre  avis,  ce  Comité  devrait  se  composer  des 
membres  du  Bureau  de  toutes  les  Sociétés,  déjà  existantes,  ayant 
un  but  défini  :  littéraire,  artistique,  archéologique,  musical,  etc. 
Il  devrait  être  permanent,  en  vue  des  fêtes  à  venir  dans  notre 
département  ou  ailleurs.  11  serait  temps  d'agir  dans  ce  but,  pour 
marcher  avec  ensemble.  A  quand  YTiâtel  des  Société*  tant  promis  ? 


Poésies 

1.  Un  timo  senzillet 

A  n'en  Trancesc  Salvai. 

Jo  se  que  un  dia  —  oh  Salvat  —  ben  florit, 
penyes  amunt,  en  les  valls  de  l'Albera, 
t'hauràs  quedat  una  mica  entristit 
per  ma  cansô  esfullada  i  presonera, 
lluny  de!  cel  nostre,  en  un  pais  malvat  ; 
j  tu  has  obert  mon  llibret  de  la  rosa 
com  un  record,  oh  bon  amie  Salvat, 
llibret  ont  l'ombra  dels  xiprers  reposa. 
I  tant  se  val  !  L'Albera,  en  un  cel  clar, 
no  la  veus  espellir,  primaverenca, 
tota  bellesa,  â  vora  de  la  mar, 
al  mitg  de  l'abundor  vallespirenca  ? 
Segueix,  amie,  el  corriol  profôn 
que  puja  entre  les  mates  muntanyeses, 
mes  fresc  que  tots  els  llibres  d'aquêt  mon, 
sempre  oferint  les  llibertats  promeses. 
]  veuràs  â  muntanya  que  el  meu  cant 
no  tindrà  mai  l'ennaigadora  flaire 
d'un  timo  senzillet  que  's  va  arrelant, 
el  mes  petit,  d'una  penya  al  bell  caire. 
abril   1919. 

II.  Al  terrisser  de  Sant-Marti 

Bon  amie  terrisser,  faràs  per  mi  un  plat  groc, 

no  gaire  diferent  d'una  antiga  escudella, 

i  que  la  llepissada  armoniosa  del  foc, 

hi  deixi  el  rôs  color  d'una  bresca  d'abella. 

Que  corri  tôt  entorn  un  senzill  filet  blau  ; 
hi  pintaràs  al  mitg  un  ram  d'oliu  selvatge, 
una  mica  argentat.  Ja  que  ha  tornat  la  pau, 
ne  vull  al  meu  devant  sempre  tenir  l'imatge. 


- —  î3c>  — 

Arrapa  en  el  vernis  una  cigala  d'or. 

Si  ho  vols  agafaré  en  la  parra  del  meu  hort 

per  servir  de  model  la  que  mes  atabala. 

Per  l'amplaria  del  plat,  mira,  per  tu  farâs, 
perqué  ni  un  sol  de  mes  dels  pressées  xuclaràs, 
que  els  que  t'hi  oferiràn  l'oliu  i  la  cigala. 

III.  Minyona,  vé  l'abril 

Minyona,  vé  l'Abril...  A  cada  pas  que  hom  fa, 
n'hom  encerta  un  aibret  blanc-florit  que  enamora. 
L'aigua  joga  amb  el  sol  i  mitg-riu  i  mitg-plora, 
i  la  guilla  amb  el  llop  ja  se  volen  casar. 

No  hi  hâ  flor  com  la  flor  del  cirerer  selvatge. 
Sa  rama  estesa  i  nuvial  sol  blanquejar 
damunt  de  la  canal,  i  lluny  de  tôt  mirar, 
amaga  bosc  amunt  son  bonic  donzellatge. 

No  hi  hâ  flor  com  la  flor  del  codonver  tôt  vert, 
escampada  en  els  brancs  ;  son  calze  es  mitg  obert  ; 
rica  d'un  fruit  pesant  es  la  mes  vergonyosa. 

Minyona,  i  que  dirèm  del  presseguer  mullà, 

tant  rosa  en  el  conreu  que  el  bou  s'en  vé  à  Uaurar  ? 

No  hi  hâ  flor  com  la  flor  de  ta  boca  amorosaP 

Joseph-S.   Pons. 
111a,  i5  mars   1919. 

Une  fête  de  la  Langue  Catalane  à  Perpignan 

Elle  vient  d'être  décidée  à  Barcelone.  C'est  une  très  belle 
idée,  de  nature  â  promouvoir  et  à  mieux  propager  l'amour  de 
la  langue  et  de  la  patrie  catalanes.  La  Société  d'Etudes  Catalanes 
de  Perpignan  ne  saurait  être  indifférente  à  de  telles  initiatives. 
Nous  espérons  donc  pouvoir  réaliser,  nous  aussi,  à  Perpignan,  des 
1920,  la  Tête  de  la  Langue  Catalane,  et  nous  comptons,  pour  l'or- 
ganiser, sur  le  bienveillant  concours  de  nos  confrères  en  régiona- 
lisme et  les  dirigeants  de  la  Presse  locale,  sans  distinction  de 
partis.  Un  seul  drapeau  doit  en  cela  rallier  sous  ses  plis  tous  les 
esprits  et  tous  les  coeurs  roussillonnais  :  celui  de  la  petite  patrie 
catalane.  A  ce  prix,  l'union  fera  notre  force  dans  le  succès  a 
venir. 


Le  professeur  Jean  Amade 

à  l'Université  de  Montpellier 


Tous  les  patriotes  roussillonnais  souscriront  des  deux  mains 
au  bel  éloge  que  la  Vie  Montpellier  aine  vient  de  consacrer  à  notre 
éminent  compatriote  et  confrère,  Jean  Amade,  récemment  nommé 
professeur  agrégé  d'espagnol  à  la  Faculté  des  Lettres  de  l'Uni- 
versité de  Montpellier.  Nous  ne  pouvons  mieux  faire  que  de 
reproduire  ici  cette  intéressante  page  d'histoire  locale  : 

«  C'est  un  très  heureux  choix  que  vient  de  faire  la  Faculté 
des  Lettres  de  Montpellier  en  appelant  à  elle  M.  Jean  ftmade, 
professeur  agrégé  d'espagnol  au  Lycée.  Notre  ami  Jean  Amade  n'est 
pas  seulement  un  professeur,  mais  c'est  aussi  un  lettré  délicat,  un 
fin  conteur,  un  poète  sobre  et  discret  et  c'est  aussi  un  nom  qui 
s'inscrit  avec  honneur  dans  les  annales  de  notre  littérature  méri- 
dionale. 

«  Avant  tout,  par-dessus  tout,  J.  Amade  est  un  fils  fidèle  et 
passionné  de  notre  Midi  méditerranéen.  Il  est  né  dans  ce  Rous- 
sillon  où  se  trempent  les  âmes  droites  et  fières  ;  il  a  tiré  d'elle 
cette  fougue  toujours  tempérée  par  un  bon  sens  à  toute  épreuve, 
cette  générosité  d'esprit,  cette  pureté  et  cette  simplicité  de  senti- 
ments, cette  clarté  lumineuse  des  idées  qui  sont  la  marque  essen- 
tielle de  notre  génie  latin.  S'il  en  partage  les  aspirations  et  les 
sympathies,  il  en  épouse  aussi,  comme  le  dit  Alceste,  les  «  haines 
généreuses  ».  Il  ne  serait  pas  Catalan  s'il  n'aimait  ardemment  sa 
petite  patrie,  s'il  ne  haïssait  aussi  fortement  tout  ce  qui  tend  à  offus- 
quer et  à  obnubiler  la  culture  latine  et  française.  Et  c'est  pourquoi 
il  est  bien  l'homme  qu'il  fallait  pour  «  illustrer  »  à  la  Faculté  la 
chaire  de  langue  et  de  littérature  espagnoles  occupée  avant  lui 
par  deux  maîtres  réputés,  MM.  Martinenche  et  Henri  Mérimée. 

«  Qu'il  nous  suffise  de  rappeler  que,  tout  jeune  étudiant,  i] 
publia  dans  la  7(evue  de  Paris  ses  fraîches  et  délicieuses  Arieiies 
Catalanes  ;  qu'il  s'essaya  dans  le  genre  des  contes  en  faisant  cou- 
ronner par  l'Académie  française  son  charmant  recueil  de  Pastoure 


—  24'  — 
et  son  maître,  où,  parmi  tant  de  paysages  si  joliment  évoqués, 
s'exhale  toute  sa  tendresse  pour  sa  terre  catalane.  Dans  le  genre 
sérieux  et  érudit,  il  ne  réussit  pas  moins.  Ses  remarquables  Etu- 
des Je  littérature  méridionale  montraient  à  tous  ceux  qui  étaient 
hypnotisés  par  les  littératures  du  Nord,  qu'il  y  avait  une  littéra- 
ture du  Midi,  espagnole,  catalane,  provençale  —  et  qui  méritait 
non  seulement  l'étude,  mais  l'admiration.  A  l'heure  où  ce  livre 
paraissait,  où  il  était  de  mode,  parmi  les  milieux  intellectuels,  de. 
persifler  le  génie  latin,  de  parler  de  «  crise  du  génie  latin  b,  cette 
étude,  mettant  en  pleine  lumière  la  mesure  et  la  beauté  harmo- 
nieuse de  notre  idéal  latin,  était  presque  un  acte  de  courage. 

«  Et  devant  cet  obscurcissement  de  la  pensée  latine,  par  une 
autre  pensée,  éclose  dans  les  brouillards  du  Nord,  J.  Amade  se 
retournait  vers  le  remède  suprême  qui  devait  effectuer  le  retour 
à  l'esprit  de  notre  race  :  le  "Régionalisme,  le  Régionalisme,  comme 
il  disait,  «  seul  fécond,  source  inépuisable  de  pittoresque  et 
d'originalité  ». 

«  C'est  désormais  vers  le  régionalisme  que  J.  Amade  tendit  de 
toutes  les  forces  de  son  esprit  et  de  son  âme.  Dans  cette  nou- 
velle bataille  littéraire,  politique,  économique,  où  idées  et  théo- 
ries s'entrechoquent  au  grand  soleil  de  notre  Midi,  Amade  fut 
toujours  au  premier  rang,  soit  par  la  plume,  soit  par  la  parole. 
Et  peut-être  les  progrès  continus  et  récents  de  l'idée  régiona- 
liste  en  Roussillon  et  en  Languedoc  sont-ils,  pour  une  bonne 
part,  un  peu  dus  à  son  action  personnelle. 

«  Comme  tant  d'universitaires  que  hante  le  mirage  de  la  capitale, 
J.  Amade  aurait  pu  aller  à  Paris  et  —  transfuge  du  régionalisme 
—  y  faire  de  la  «  décentralisation  sur  place  ».  11  ne  l'a  pas  voulu. 
Il  a  préféré  rester  parmi  nous,  où,  dans  le  milieu  qu'il  s'est  choisi, 
il  fera  œuvre  féconde.  Préférer  Montpellier  à  Paris,  n'est-ce 
pas  là  acte  de  bon  régionaliste  et  tout  à  l'honneur  de  ce  profes- 
seur qui  —  on  ne  saurait  l'en  blâmer  —  a  conformé  ses  actes  à 
ses  théories  ? 

«J.  Amade  est  universellement  aimé  à  Montpellier.  11  ne  se 
connaît  pas  d'ennemis  ;  on  ne  lui  en  connaît  pas.  Sa  physiono- 
mie, empreinte  de  loyauté,  est  le  miroir  de  son  âme.  Ce  profes- 
seur érudit,  poète  exquis  à  ses  heures,  ne  connaît  qu'un  seul  che- 
min dans  la  vie,  celui  de  la  droiture.  Toujours  bienveillant  et 
obligeant  pour  tous  ceux  qui  font  appel  a  lui,  il  est  l'image  du 
parfait  «  honnête  homme  ».  N.  R. 


LEÇONS  BILINGUES 

pour  l'enseignement  simultané  du  Français  et  du  Catalan 

Sous  ce  titre,  notre  collaborateur  et  ami,  M.  Louis  Pastre,  se 
propose  de  publier,  par  fascicules,  un  ouvrage  dont  il  nous  a 
communiqué  le  manuscrit  et  qui  rendra  certainement  de  grands 
services.  Afin  de  donner  à  nos  lecteurs  une  idée  exacte  de  ce  tra- 
vail, nous  insérons  ci-dessous  la  préface  de  l'auteur,  la  marche  à 
suivre  pour  l'emploi  de  la  méthode  et  les  deux  premières  leçons. 

Les  textes  de  ces  leçons  (tous  en  prose)  sont  empruntés  aux 
œuvres  des  meilleurs  écrivains  dans  les  deux  langues.  Parmi  les 
auteurs  catalans  cités,  nous  relevons  les  noms  suivants  :  Jacinto 
Verdaguer,  Victor  Catalâ,  Angel  Guimerâ,  Santiago  Rusinol, 
Joaquîm  Ruyra,  Ramon  Casellas,  Gabriel  Alomar,  Narcis  Oller, 
Joseph  Aladern,  Enrich  de  Fuentes,  Père  Manaut,  Dolors  Mon- 
serdâ  de  Maciâ,  Joseph  Pons,  Paul  Bergue,  Jean  Amade,  Etienne 
Caseponce,  Joseph  Bonafont,  Charles  Grando,  Francis  i  Ayrol, 
Père  de  Fenollet,  J.  de  Sant-Salvador,  etc. 

Parmi  les  auteurs  français  :  Alphonse  Daudet,  Lamartine,  Cha- 
teaubriand, Lamennais,  Fénelon,  Bernardin  de  Saint-Pierre, 
Molière,  La  Fontaine,-  Diderot,  Buffon,  JVV"  de  Sévigné,  Pascal, 
Bossuet,  Elisée  Reclus,  Emile  Zola,  Jean  Racine,  Augustin 
Thierry,  Gustave  Flaubert,  Paul  Arène,  Joseph  Fabre,  Jean 
Richepin,  Victor  Hugo,  Guy  de  Maupassant,  Hector  Malot, 
Balzac,  J.-J.  Rousseau,  Anatole  France,  Michelet,  George  Sand, 
André  Theuriet,  Pjerre  Loti,  Ferdinand  Buisson,  Edmond 
About,  Xavier  de  Maistre,  etc. 

On  peut  juger  de  l'importance  de  l'ouvrage  par  cette  longue 
liste  d'écrivains  à  qui  l'auteur  a  emprunté  plus  de  200  textes  choi- 
sis avec  soin.  Nous  en  reparlerons  ici  même  lors  de  la  publica- 
tion du  premier  fascicule.  J-  S. 


-     243     - 

PRÉFACE 

Le  présent  ouvrage  s'adresse  aux  Catalans  et  aux  Français, 
mais  plus  particulièrement  aux  Catalans  de  Catalogne  immigrés 
en  Roussillon  et  aux  Français  non  Roussillonnais  résidant  dans 
notre  province. 

Il  a  pour  but  d'enseigner  aux  uns  et  aux  autres  la  langue  qui 
leur  est  étrangère,  ou  imparfaitement  connue,  et  de  les  rendre 
rapidement  bilingues,  c'est-à-dire  Roussillonnais. 

Chacune  de  nos  leçons  comprend  un  texte  littéraire  très  court 
et  de  nombreux  exercices  sur  ce  texte  (traduction,  reproduction, 
lecture,  récitation,  conjugaison,  conversation  et  remarques  gram- 
maticales sur  les  deux  langues). 

Cette  méthode  d'enseignement  par  les  textes,  qui  n'est  autre 
chose  que  la  combinaison  de  plusieurs  méthodes  différentes 
employées  jusqu'ici,  fournira  à  ceux  qui  voudront  bien  la  suivre 
le  moyen  d'étudier,  d'une  manière  pratique  et  intéressante,  la 
langue  étrangère  dont  ils  ont  besoin.  ^ 

Elle  leur  procurera  aussi  l'occasion  de  revoir,  en  passant,  et 
par  comparaison,  les  règles  de  leur  propre  langue,  s'ils  les  ont 
oubliées  ;  de  sorte  qu'il  y  aura  double  profit  pour  eux. 

Enfin  elle  permettra  au  Professeur,  et  cela  dès  le  début,  de 
faire  bénéficier  ses  deux  catégories  d'auditeurs  des  avantages 
que  présentent  les  divers  modes  d'enseignement  :  individuel, 
simultané  et  mutuel.  Enseignement  individuel,  quand  l'élève  tra- 
vaille seul  au  tableau  noir,  sous  la  direction  du  Professeur,  pen- 
dant que  ses  camarades  suivent  sur  leur  livre  ;  enseignement 
simultané  ou  collectif,  quand  le  Professeur,  se  servant  des  deux 
langues,  s'adresse  à  tous  les  élèves  ;  enfin  enseignement  mutuel, 
quand  le  Professeur  invite  les  élèves  des  deux  groupes  à  se 
poser  des  questions  et  à  y  répondre  dans  les  deux  langues. 

Telle  est  notre  modeste  tentative.  Nous  la  soumettons  aux 
intéressés  avec  l'espoir  qu'ils  voudront  bien  lui  réserver  bon 
accueil.  Louis  Pastre. 


—  *44   — 

Marche  à  suivre 

A.  —  Pour  les  Français 

I.  —  Lire  le  texte  français  pour  en  bien  saisir  Je  sens 
général. 

II.  —  Relire  lentement  le  texte  français  en  suivant  mot 
par  mot  sur  le  texte  catalan  inconnu. 

III.  —  Parcourir  des  yeux  et  très  attentivement  le  texte 
catalan  et  essayer  de  le  traduire  oralement  en  s'aidant  le 
moins  possible  du  texte  français. 

IV.  —  Traduire  le  texte  catalan  par  écrit  au  tableau  noir 
sans  le  secours  du  texte  français. 

V.  —  Reproduire  le  texte  catalan  par  écrit  au  tableau 
noir  en  suivant  sur  le  texte  français  inscrit  sur  un  autre 
tableau. 

VI.  —  Lire  plusieurs  fois  à  haute  voix  le  texte  catalan 
avec  l'aide  du  Professeur. 

Vil.  —  Apprendre  par  cceur  le  texte  catalan. 

VI II.  —  S'exercer  à  la  conjugaison  des  verbes  catalans 
avec  l'aide  du  Professeur. 

IX.  —  Répondre  en  catalan  aux  questions  posées  par  le 
Professeur  ou  par  les  élèves.  Voir  l'exercice  de  conversation 
catalane  (a). 

X.  —  Trouver  en  catalan  les  questions  correspondantes 
aux  réponses  préparées  d'avance  par  le  Professeur  ou  par 
les  élèves.  Voir  l'exercice  de  conversation  catalane  (b). 


-  î45  - 


Marche  à  suivre 

B.   —   Pour  les   Catalans 

I.  —  Lire  Je  texte  catalan  pour  en  bien  saisir  le  sens 
général. 

II.  —  Relire  lentement  le  texte  catalan  en  suivant  mot 
par  mot  sur  le  texte  français  inconnu. 

III.  —  Parcourir  des  yeux  et  très  attentivement  le  texte 
français  et  essayer  de  le  traduire  oralement  en  s'aidant  le 
moins  possible  du  texte  catalan. 

IV.  —  Traduire  le  texte  français  par  écrit  au  tableau 
noir  sans  le  secours  du  texte  catalan. 

V.  —  Reproduire  le  texte  français  par  écrit  au  tableau 
noir  en  suivant  sur  le  texte  catalan  inscrit  sur  un  autre 
tableau. 

VI.  —  Lire  plusieurs  fois  à  haute  voix  le  texte  français 
avec  l'aide  du  Professeur. 

Vil.  —  Apprendre  par  cœur  le  texte  français. 

VI II.  — "S'exercer  à  la  conjugaison  des  verbes  français 
avec  l'aide  du  Professeur. 

IX.  —  Répondre  en  français  aux  questions  posées  par  le 
Professeur  ou  par  les  élèves.  Voir  l'exercice  de  conversation 
française  (a). 

X.  —  Trouver  en  français  les  questions  correspondantes 
aux  réponses  préparées  d'avance  par  le  Professeur  ou  par 
les  élèves.  Voir  l'exercice  de  conversation  française  (b). 


^ 


—  246  — 
TEXT   CATALA 

El  meu  jardi 

La  meva  cambra  —  té  un  balcô  —  que  dona  a  mig-dia, 
—  sobre  un  jardî  —  on  lçs  plantes  creixen  —  a  son  Uiure 
albir,  —  ufanosament,  —  primitivament,  —  sens  passar  — 
la  crudel  tortura  —  de  les  mans  del  jardiner  ;  —  un  jardî  — 
plé  d'esquisides  roses,  —  blanques,  grogues,  carmesinés,  — 
i  d'uns  estranys  llirs  —  de  color  de  foc,  —  que  baden  — 
amb  voluptat  —  l'esplendor  —  de  son  calze  ■ —  a  totes  les 
papellones  envellutades  —  que  aletegen  vora  d'ells. 

Victor  Catala. 
EXERCIC1S 

1.  11.  Lectura  del  text  catalâ  i  comparaciô  amb  el  text  francés. 

]]].  IV.  V.  VI.  Vil.  Traducciô  (oral  i  escrita),  reproduccié, 
lectura  i  recitaciô  del  text  francés. 

VIII.  Exercici  de  conjugaciô  catalana  :  Verb  tenir. 

Tinc,  tens,  té,  tenim,  teniu,  tenen. 

Ténia,  tenies,  ténia,  teniem,  tem'eu,  tenien. 

Tingui,  tinguéres,  tingué,  tinguérem,  tinguéreu,  tingueren. 

Tindré,  tindràs,  tindrà,  tindrem,  tindreu,  tindràn. 

Tindria,  tindries,  tindria,  tindriem,  tindrieu,  tindrien. 

Té,  tinguem,  teniu. 

Que  tingui,  que  tinguis,  que  tingui,  que  tinguem,  que  tingueu,  que  tinguin 

Q.  tingués,  q.  tinguessis,  q.  tingués,  q.  tinguéssim,  q.  tinguéssiu,  q.  tinguessin. 

Tenir.  Tenint.  Tingut. 

IX.  X.  Exercici  de  conversaciô  catalana  sobre  '1  text. 

a)  Pregunies  del  Professor  (i).  Trobar  les  contestes  corresponents. 

1 .  On  dona  el  balcô  de  la  vostra  cambra  ? 

2.  Sobre  que  dona  aqueix  balco  ? 

3.  Que  hi  ha  en  el  vostre  jardi  ? 

4.  Com  creixen  les  plantes  del  vostre  jardi  ? 

5.  El  jardiner  conresa  les  plantes  del  jardi  1 

b)  Contestes  preparades  pel  Professor.  Trobar  les  preguntes  corres- 
ponents. 

1.  En  el  meu  jardi  tinc  unes  roses  esquisides  i  uns  llirs  estranys. 

2.  Les  roses  del  teu  jardi  son  blanques,  grogues  i  carmesinés. 

3.  Els  llirs  del  seu  jardi  son  de  color  de  foc. 

4.  Els  meus  llirs  baden  son  calze  a  les  papellones  envellutades. 

5.  Les  papellones'aletegen  vora  dels  llirs  del  meu  jardi. 

(i)^O  dels^alumnes. 


—   247   — 
TEXTE  FRANÇAIS 

Mon   jardin 

Ma  chambre  —  a  un  balcon  —  qui  donne  au  midi,  — 
sur  un  jardin  —  où  les  plantes  croissent  —  à  volonté,  — 
vigoureusement,  —  primitivement,  —  sans  subir  —  la 
cruelle  torture  —  des  mains  du  jardinier  ;  —  un  jardin  — 
plein  d'exquises  roses,  —  blanches,  jaunes,  cramoisies,  — 
et  d'étranges  lys  —  couleur  de  feu,  —  qui  entr'ouvrent  — 
avec  volupté  —  la  splendeur  —  de  leur  calice,  —  à  tous 
les  papillons  veloutés  —  qui  voltigent  auprès  d'eux. 

EXERCICES 

1.11.  Lecture  du  texte  français  et  compar.  avec  le  texte  catalan. 
111.  IV.  V.  VI.  Vil.  Traduccion  (orale  et  écrite),  reproduc- 
tion, lecture  et  récitation  du  texte  catalan. 

VI II.  Exercice  de  conjugaison  française  :  Verbe  avoir  (sens  de 
posséder). 

J'ai,  tu  as,  il  a,  nous  avons,  vous  avez,  ils  ont. 

J'avais,  tu  avais,  il  avait,  nous  avions,  vous  aviez,  ils  avaient. 

J'eus,  tu  eus,  il  eut,  nous  eûmes,  vous  eûtes,  ils  eurent. 

J'aurai,  tu  auras,  il  aura,  nous  aurons,  vous  aurez,  ils  auront. 

J'aurais,  tu  aurais,  il  aurait,  nous  aurions,  vous  auriez,  ils  auraient. 

Aie,  ayons,  ayez. 

Que  j'aie,  que  tu  aies,  qu'il  ait,  que  nous  ayons,  que  vous  ayez,  qu'ils  aient. 

Q.  j'eusse,  q.  tu  eusses,  qu'il  eût,  q.  n.  eussions,  q.  y.  eussiez,  qu'ils  eussent. 

Avoir.  Ayant.  Eu. 

IX.  X.  Exercice  de  conversation  française  sur  le  texte. 

a)  Questions  du  Professeur  (î).  Trouver  les  réponses  correspondantes. 

i .  Où  donne  le  balcon  de  votre  chambre  ? 

2.  Sur  quoi  donne  ce  balcon  ? 

3.  Qu'y  a-t-il  dans  votre  jardin  ? 

4.  Comment  croissent  les  plantes  de  votre  jardin  ? 

5.  Le  jardinier  cu!tive-t-il  les  plantes  du  jardin  ? 

b)  Réponses   préparées   par    le    Professeur.    Trouver   les   questions 
correspondantes. 

1  .  Dans  mon  jardin  j'ai  des  roses  exquises  et  des  lys  étranges. 

2.  Les  roses  de  ton  jardin  sont  blanches,  jaunes  et  cramoisies. 

3.  Les  lys  de  son  jardin  sont  couleur  de  feu. 

4.  Mes  lys  entr'ouvrent  leur  calice  aux  papillons  veloutés. 

5.  Les  papillons  voltigent  auprès  des  lys  de  mon  jardin. 

(  1  )  Ou  des  élèves. 


—  248  — 
TEXT  CATALA 

Miniatura 

La  barca  nostra  —  anava  lentament,   —  molt  lentament, 

—  demunt  de  l'aigua  negra,  —  sota  '1  ce)  sensc  lluna.  — 
Els  pals  dels  bastiments  amarrats,  —  i  que  la  mar  breçolava, 

—  brandaven  —  amb  pauses  ritmades,  —  l'un  prop  de  l'al- 
tre,  —  sensé  tocarse  mai,  —  com  braços  d'enamorats  — 
que  's  dalissin  pera  abraçarse  — r-  i  no  goséssin.  —  Els  Uums 
de  les  embarcacions  —  semblaven  ulls  de  dimoni.  —  La 
cantarella  —  endormiscada  —  d'invisible  mariner  —  feia 
pensar  en  el  plany  —  d'un  presoner  de  les  reines   d'aigua, 

—  d'un  ofegat  qu'ai  fons  del  mar  —  patis  vida  d'amor  —  en 
els  llabis  sempre  humits  —  d'una  sirena  assedegada  de 
petons.  Enrich  de  Fuentes. 

EXERC1C1S 

I.  II.  Lectura  del  text  catalâ  i  comparaciô  amb  el  text  francès. 
111.  IV.  V.  VI.  Vil.    Traducciô  (oral  i  escrita),  reproducciô, 
lectura  i  recitaciô  del  text  francés. 

VI II.  Exercici  de  conjugaciô  catalana  :  Verb  breçolar. 

Breçolo,  breçoles,  breçola,  breçolem,  breçoleu,  breçolen. 

Breçolava,  breçolaves,  breçolava,  breçolàvem,  breçolàveu,  breçolaven. 

Breçoli,  breçolares,  breçolà,  breçolàrem,  breçolàreu,  breçolaren. 

Breçolaré,  breçolaràs,  breçolarà,  breçolàrem,  breçolàreu,  breçolaràn. 

Breçolaria,  breçolaries,  breçolaria,  breçolariem,  breçolarieu,  breçolarien. 

Breçola,  breçolem,  breçoleu. 

Q.  breçoli,  q.  breçolis,  q.  breçoli,  q.  breçolem,  q.  breçoleu,  q.  breçolin. 

Que  breçoles,  que  breçolessis,  que  breçoles,  que  breçoléssim,  que  breçolessiu, 

que  breçolessin. 
Breçolar.  Breçolant.  Breçolat. 

IX.  X.  Exercici  de  conversaciô  catalana  sobre  '1  text. 

a)  Preguntes  del  Professer.  Trobar  les  contestes  corresponents. 
1  .  Com  anava  la  barca  nostra  ? 

2.  Com  estava  l'aigua  ? 

3.  Com  estava  el  cel  ? 

4.  Que  feia  la  mar  ? 

5.  Que  feien  els  pals  dels  bastiments  amarrats  ? 

b)  Contestes  preparades  pel  Professor.  Trobar  les  preguntes  corres- 
ponents. 

1 .  Els  pals  dels  bastiments  amarrats  estaven  l'un  prop  de  l'altre. 

2.  Els  llums  de  les  embarcacions  semblaven  ulls  de  dimoni. 

3.  El  mariner  estava  invisible  perqué  feia  nit. 

4.  La  seua  cantarella  endormiscada  feia  pensar  en  el  plany  d'un  presoner  de 

les  reines  d'aigua. 

5.  Els  llabis  de  la  sirena  son  sempre  humits. 


—    249   — 

TEXTE    FRANÇAIS 

JHiniature 

Notre  barque  —  allait  lentement,  —  très  lentement,  — 
au-dessus  de  l'eau  noire,  —  sous  le  ciel  sans  lune.  —  Les 
vergues    des    bâtiments    amarrés,  —  et  que  la  mer  berçait, 

—  oscillaient  —  en  cadence,  —  l'une  près  de  l'autre,  — 
sans  jamais  se  toucher,  —  comme  des  bras  d'amoureux  — 
qui  auraient  envie  de  s'enlacer  —   et  qui  n'oseraient  pas. 

—  Les  lumières  des  embarcations  —  ressemblaient  à  des 
yeux  de  démon.  —  Le  chant  monotone  —  et  somnolent  — 
de  l'invisible  marin  —  faisait  penser  à  la  plainte  —  d'un 
prisonnier  des  reines  de  l'eau  —  d'un  noyé  qui,  au  fond  de 
la  mer,  —  souffrirait  d'une  vie  d'amour  —  sur  les  lèvres 
toujours  humides  —  d'une  sirène  assoiffée  de  baisers. 

EXERCICES 

1.11.  Lecture  du  texte  français  et  compar.  avec  le  texte  catalan. 
111.  IV.  V.  VI.  Vil.  Traduction  (orale  et  écrite),   reproduc- 
tion, lecture  et  récitation  du  texte  catalan. 

VIII.  Exercice  de  conjugaison  française  :  Verbe  bercer. 
Je  berce,  tu  berces,  il  berce,  nous  berçons,  vous  bercez,  ils  bercent. 

Je  berçais,  tu  berçais,  il  berçait,  nous  bercions,  vous  berciez,  ils  berçaient. 
Je  berçai,  tu  berças,  il  berça,  nous  berçâmes,  vous  berçâtes,  ils  bercèrent. 
Je  bercerai,  tu  berceras,  il  bercera,  n.  bercerons,  v.  bercerez,  ils  berceront. 
Je  bercerais,  tu  bercerais,  il  bercerait,  n. bercerions,  v. berceriez,  ils  berceraient 
Berce,  berçons,  bercez. 

Q.  je  berce,  q.  tu  berces,  qu'il  berce,  q.  n.  bercions,  q.  v.  berciez,  qu'ils  bercent. 
Que  je  berçasse,  que  tu  berçasses,   qu'il  berçât,   que  nous  berçassions,  que 

berçassiez,  qu  ils  berçassent. 
Bercer.  Berçant.  Bercé. 

IX.  X.  Exercice  de  conversation  française  sur  le  texte. 

a)  Questions  du  Professeur.  Trouver  les  réponses  correspondantes. 

i.  Comment  notre  barque  allait-elle? 

2.  Comment  était  l'eau  ? 

3.  Comment  était  le  ciel  ? 

4.  Que  faisait  la  mer  ? 

5.  Que  faisaient  les  vergues  des  bâtiments  amarrés  ? 

b)  T(éponses    préparées    par    le    Professeur.    Trouver   les  questions 
correspondantes. 

1.  Les  vergues  des  bâtiments  amarrés  étaient  l'une  près  de  l'autre. 

2.  Les  lumières  des  embarcations  ressemblaient  à  des  yeux  de  démon. 

3.  Le  marin  était  invisible  parce  qu'il  faisait  nuit. 

4.  Son  chant  monotone  et   somnolent  faisait  penser  à  la  plainte  d'un  prison- 

nier des  reines  de  l'eau. 
Les  lèvres  de  la  sirène  sont  toujours  humides. 


J.-M.  Brutails  à  l'Institut 

Nul  n'ignore  l'affection  très  vive  que  l'ancien  archiviste  des 
Pyrénées-Orientales,  aujourd'hui  de  la  Gironde,  n'a  cessé  de 
témoigner  à  notre  petite  patrie  catalane,  où,  quoique  éloigné,  il 
ne  compte  que  des  admirateurs  et  des  amis.  Les  ouvrages  que 
M.  Brutails  a  autrefois  publiés  sur  l'histoire  et  l'archéologie  du 
Roussillon  sont  nombreux  ;  ils  font  autorité  ;  on  y  recourt  sans 
cesse  comme  à  un  fonds  documentaire  et  à  un  jugement  sans 
appel.  Quoique  fixé  à  Bordeaux,  M.  Brutails  n'a  pas  discontinué 
de  publier  de  très  savantes  études  sur  l'archéologie  et  les  beaux- 
arts  en  Roussillon.  Ces  travaux  multiples  témoignent  non  seule- 
ment de  l'activité  et  du  haut  talent  de  notre  ancien  archiviste 
départemental,  mais  encore  de  son  culte  admiratif  pour  l'histoire 
de  notre  province  roussillonnaise  et  pour  les  artistiques  richesses 
qui  en  constituent  «  l'incomparable  joyau  ». 

Tous  les  Roussillonnais  seront  donc  particulièrement  heureux 
d'apprendre  la  nouvelle,  toute  récente,  de  la  nomination  de 
M.  Brutails  à  l'Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres,  et 
en  féliciteront  l'éminent  archéologue-historien.  Une  de  ses  der- 
nières lettres  nous  disait  que  de  tous  les  titres  qui  lui  ont  valu 
un  tel  honneur,  le  Roussillon  en  a  la  plus  large  part.  On  ne  peut 
plus  flatteur  pour  notre  pays,  cet  aveu  n'en  constitue  pas  moins, 
sous  la  plume  d'un  si  haut  talent,  un  excès  de  délicatesse  et  une 
preuve  de  plus  de  sa  grande  affection  pour  la  terre  qui  fut  le 
berceau  de  sa  gloire.  De  si  élevés  sentiments  sont  dignes  d'une 
reconnaissance  sans  égale  ;  c'est  à  quoi  le  Roussillon  ne  faillira 
pas. 

La  Société  d'Etudes  Catalanes  a  le  très  grand  honneur  de 
compter  M.  Brutails  parmi  ses  amis  de  la  première  heure,  et  la 
T^evue  Catalane  parmi  ses  collaborateurs  de  demain.  Ce  nous  est 
donc  une  raison  de  plus  de  lui  offrir  les  respectueuses  félicitations 
et  les  vceux  affectueux  de  tous  les  membres  de  notre  chère  Com- 
pagnie. J.  S. 


Bibliographie 

Nos  Collaborateurs-compatriotes  et  la  grande  Presse 

E/  Bon  PeJriç,  de  J.-S.  Pons 

Dans  sa  chronique  des  Lettres  d'Oc,  Orion,  de  YAction  Fran- 
çaise (i  i  décembre  1919),  fait  ainsi  l'éloge  de  notre  cher  et  dis- 
tingué collaborateur,  J.-S.  Pons,  professeur-agrégé  au  lycée  de 
Carcassonne  : 

...Mais  non,  ô  Joseph-S.  Pons,  pas  n'est  strictement  besoin,  pour  savourer 
votre  beau  recueil  de  poèmes  catalans  :  El  Bon  Pedriç  (le  Banc  de  pierre), 
de  s'en  repaître  en  un  coin  rustique.  Moi,  j'irai  jusqu'à  vous  dire  que  c'est 
chose  infiniment  douce  de  le  lire  —  mais  oui  —  dans  la  grise  atmosphère  de 
Paris.  Quand  on  le  feuillette  sous  nos  mornes  latitudes,  l'atmosphère,  «  la 
fleur  de  vos  songes  »  aidant,  s'enrichit  —  je  vous  jure  —  de  reflets  et  de 
rayons  inconnus,  où  l'on  se  réchauffe  comme  au  flanc  de  quelque  Solana  cer- 
dane,  dont  le  roi  du  jour  dore  les  seigles. 

Après  vous  avoir  lu,  ô  Joseph-S.  Pons,  je  garde  plein  les  yeux  du  sou- 
venir des  bergers  en  vagabondage  au  faîte  des  Albères.  des  belles  filles  de 
chez  vous,  des  vieilles  Catalanes  fripées,  assises  sur  leur  chaise  basse  au  pas 
de  vos  portes,  et  de  vos  gosses  dont  la  petite  langue,  déjà  bien  pendue,  lance 
le  tonnerre  de  vos  r  si  vigoureusement  roulés. 

C'est  un  beau  livre,  que  votre  livre,  ô  Joseph-S.  Pons,  un  beau  livre  d'un 
haut  lyrisme,  où  votre  individualité,  pourtant  forte,  se  blotit  discrètement  à 
l'ombre  des  grands  thèmes  traditionnels,  renonçant  généreusement  à  s'étaler. 
Vous  vous  êtes  souvenu  que  le  lyrisme,  le  vrai,  le  grand,  n'est  pas  forcément 
personnel,  et  que  volontiers  il  célèbre  les  émois  des  vastes  collectivités 
humaines  :  religieuses  ou  nationales.  Tel  fut  celui  de  David,  de  Pindare  et 
de  Mistral. 

Laissez-moi  vous  dire,  ô  Joseph-S.  Pons,  que  vous  suivez  magnifiquement 
la  voie  frayée  par  ces  grands  modèles.  Orion. 

Le  Retour  de  Joffre  au  Pays  de  JoJJ're 

Tel  est  le  titre  de  l'article  maqjstral  que  notre  sympathique 
confrère  de  l'Université  d'Aix-Provence,  Emiie  Ripert,  vient  de 
publier  dans  la  T(evue  Hebdomadaire  du  i5  novembre  dernier. 
C'est  le  compte-rendu,  à  grands  et  larges  traits,  de  l'Hommage 
roussillonnais,    catalan    et    provençal    à    l'illustre    Maréchal.    Les 


—    25*     — 

pensées  en  sont  élevées  et  le  style  tantôt  doux  et  harmonieux 
comme  une  cigale  de  Provence,  tantôt  vibrant  comme  un  clairon 
de  guerre.  D'une  page  à  l'autre,  c'est  toujours  une  musique  qui 
enchante  et  transporte.  A  vrai  dire,  ce  sont  de  ces  «  royautés 
musicales  »  qui,  transportées  sur  le  rythme  de  la  littérature,  vous 
provoquent  en  de  muettes  admirations  et  en  d'incompréhensibles 
saisissements  d'âme.  On  sent,  en  définitive,  que,  entre  le  chantre 
de  la  Terre  des  Lauriers  et  l'artiste  cavaillonnais  Joseph  d'Ortigue 
(grand  ami  et  condisciple  de  notre  illustre  Gerbet),  il  y  a  des 
affinités  de  race,  d'idées  et  de  sentiments  on  ne  peut  plus  étroites. 
Félicitons-nous  donc  que  notre  1  offre  et  notre  «  pays  de  J offre  » 
aient  trouvé,  en  M.  E.  Ripert,  un  ménestrel  de  si  haut  talent. 

J.  S. 

Bulletin  Historique 

Notre  distingué  collaborateur  et  ami,  M.  Henry  Aragon, 
publie  depuis  quelques  mois  une  revue  qui  ne  manque  pas  d'ori- 
ginalité. Au  lieu  de  mettre  les  articles  à  la  suite  l'un  de  l'autre, 
comme  il  est  de  coutume,  chacun  constitue  une  feuille  de  8  pages 
qui  commence  et  finit  où  cela  tombe  :  la  réunion  de  ces  feuilles, 
parues  chaque  mois,  forme  à  la  fin  un  volume  complet  avec  sa 
table,  son  titre,  sa  couverture,  prêt  à  mettre  en  bibliothèque. 

Quelques  travaux  sont  terminés  :  Le  jeu  du  ballon  chez  les  anciens 
et  le  foot-ball  moderne  ;  Une  rue  de  Perpignan  en  1 8oy  ;  M.  Héron 
de  Villefosse  et  les  fouilles  de  T{uscino  ;  JMotes  préhistoriques  :  Sculp- 
tures dans  la  craie  de  Champagne,  la  Chèvre  d'or  de  Ttyscino,  les 
trésors  cachés  du  Veau  d'or. 

D'autres  sont  en  cours  de  publication  :  Un  monument  à  "Robes- 
pierre projeté  sur  le  pic  du  Canigou  ;  Aperçu  historique  sur  l'Abbaye 
d'Arles-sur-Tech  ;  L'flrl  Tiagiologique  en  T^pussillon  ;  Saint-]  ean-pla- 
de-Corls  historique  et  pittoresque  ;  Sainl-Tlippolyie  de  la  Salanque, 
d'après  un  «  Livre  de  raison  »  des  XVffl'  et  "XTX'  siècles  ;  Les  danses 
ei  fêtes  de  la  vie  antique;  danses  catalanes  ;  La  campagne  de  1719 
des  armées  de  T(oussillon  et  d'Espagne. 

Un  certain  nombre  sont  annoncés  pour  paraître  prochainement. 

Inutile  de  dire  que  tous  ces  travaux  présentent  le  plus  vif  inté- 
rêt pour  l'histoire  de  notre  pays,  car  les  auteurs  sont  très  avan- 
tageusement connus  de  tous  les  membres  de  la  Société  d'Etudes 
Catalanes,  comme  collaborateurs  de  notre  Revue. 

On  souscrit  à  l'Imprimerie  Catalane,  rue  de  la  Poste,  à  Perpignan. 

Le  Gérant,  COMET.  —  Imprimerie  Catalane,  COMET,  rue  de  la  Poste,  Perpignan 


BlNDlwu 


^l«v/ 


DJt-  Revue  catalane 

302 

C57R3 

1. 13 


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