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of 


Stephen  B.  Roman 


From  the  Library  of  Daniel  Binchy 


REVUE  CELTIQUE 


TOME  IX 


Digitized  by  the  Internet  Archive 

in  2011  with  funding  from 

University  of  Toronto 


http://www.archive.org/details/revueceltiqu09pari 


^\  FONDEE  f        J 

►  >  PAR  \j 


^       ~  H.    GAIDOZ  V/ 

^V  1870-1885  ^>* 


PUBLIEE   SOUS   LA   DIRECTION   DE 

H.    D'ARBOÏS    DE    JUBAINVILLE 

Membre  de  l'Institut,  Professeur  au  Collège  de  France 
AVEC   LE   CONCOURS   DE 

J.    LOTH  E.   ERNAULT 

Professeur  à  la  Faculté  Professeur  à  la  Faculté  des 

des  lettres  de  Rennes  lettres  de  Poitiers 

ET    DE    PLUSIEURS    SAVANTS    DES    ILES    BRITANNIQUES    ET    DU    CONTINENT 

G.    DOTTIN 
Secrétaire  de  la  rédaction 

Tome  IX 


PARIS 

F.    VIEWEG,    LIBRAIRE-ÉDITEUR 

E.      BOUILLON     ET     E.     VIEWEG,     SUCCESSEURS 

67,  rue  de  Richelieu,  67 


TABLE   DES   MATIÈRES 

Pages. 
ARTICLES  DE  FOND. 
La  légende  de  la  conception  de  Cûchulainn,  par  Louis  Duvau.      .      .  i 

The  voyage  of  Snedgus  and  Mac  Riagla,  edited   and    translated   by 

Whitley  Stokes 14 

Légendes  des  monnaies  gauloises,  par  A.  de  Barthélémy 26 

Recherches  sur  l'origine  de  la  propriété  foncière  et  des  noms  de  lieu  en 

France,  par  H.  d'Arbois  de  Jubainville  (suite  .  ...  36,  208,  301 
Notes  on  Welsh  Consonants  (premier  article),  by  Dr.  M.  Nettlau.  .  64 
Sur  quelques  inscriptions  de  Saintes  contenant  des  noms  gaulois,  par 

R.  Cagnat 77- 

Un  monument  inédit  de  la  liturgie  celtique,  par  F.-E.  Warren.   .      .         88 
La  création  du  monde,  mystère  breton,  publié  et  traduit  par  l'abbé  Eu- 
gène Bernard 149,   322 

On  the  materia  medica  of  the  mediaeval  Irish,  by  Whitley  Stokes.     .       224 
Etudes  bretonnes.  VI.  La  conjugaison  personnelle  et  le  verbe  avoir, 

par  Emile  Ernault 245 

La  procession  dite  de  la  Lunade  et  les  feux  de  la  Saint-Jean  à  Tulle. 
La  fête  du  solstice  d'été  et  le  commencement  de  la  période  diurne  chez 

les  Gaulois,  par  M.  Deloche 425 

The  voyage  of  Mael  Duin,  edited  and  translated  by  Whitley  Stokes.  .       447 

MÉLANGES. 

Zimmeriana,  by  Whitley  Stokes 97 

Corrections  of  a   récent  édition  of  the  Wùrzburg  glosses,  by  Wh. 

Stokes 104 

Mamurra,  par  H.  d'Arbois  de  Jubainville 109 

Marc'h  bonal,  par  J.  Loth 110 

Saint  Patrice  et  Sen  Patrice,  par  H.  d'Arbois  de  Jubainville.       .      .  1  1 1 
Saint  Germain,  évêque  de  Paris,  dans  le  F  élire  Oengusso,  par  H.  d'Ar- 
bois de  Jubainville 117 

Le  Feiire  Oengusso,  le  martyrologe  hiéronyir.ien  et  la  liturgie  gallicane, 

par  H.  d'Arbois  de  Jubainville 118 

Luguselva,  par  H.  d'Arbois  de  Jubainville 267 

Le  jeûne  du  mercredi  et  du  vendredi  chez  les  Irlandais  du  moyen  âge, 

par  H.  d'Arbois  de  Jubainville 269 

Swllt,  soit,  sout,  par  J.  Loth 272 

Un  cas  de  provectior.  inédit,  par  J.  Loth ...  273 

Rhegddofjdd,  rh-gofydd,  par  J.  Loth 274 

Provection   de   moyennes  en  spirantes  sourdes  en  breton  armoricain, 

par  J.  Loth 354 

L'expression  nevez  imprimet  dans  le  titre  du  Grand  Mystère  de  Jésus  et 

du  Mystère  de  sainte  Barbe,  par  J.  Loth 356 

Do  (de,  da)  particule  verbale  en  breton  armoricain,  par  J.  Loth.  .      .  357 

De  la  prononciation  des  noms  en  -iac  en  bas-vannetais,  par  J.   Loth.  358 
Du  pronom  suffixe  de  la  troisième  personne  du  pluriel  et  du  pronom 

possessif  de  la  troisième  personne  du  singulier  en  gallois,  par  J.  Loth.  360 
Un  cas  de  génitif  du  pronom  de  la  troisième  personne  du  singulier  en 

gallois,  par  J.  Loth 362 


vi  Table  des  Matières. 

Note  on  the  personal  appearance  and  death  of  Christ,  his  apostles  and 

others,  by  Whitley  Stokes 364 

Notes  on  the  Wùrzburg  glosses,  by  Whitley  Stokes 36$ 

Notes   bretonnes  à   propos  du  volume  VII    de  la  Revue  Celtique,  par 

E.  Ernault 370 

Notes  sur  le  volume  VIII  de  la  Revue  Celtique,  par  E.  Ernanlt.    .      .  382 
Le  char  de  guerre  des  Celtes  dans  quelques  textes  historiques,  par  H. 

d'Arbois  de  Jubainville 387 

Une  version  inédite  du  Peredur  gallois,  par  H.  Gaidoz 393 

E.  Ernault,  Table  des  mots  étudiés  dans  le  tome  IX  de  la  Revue  cel- 
tique   501 

BIBLIOGRAPHIE. 
Max  Nettlau,  Battage  zum  cymrischen  Grammatikl  (Einleitung  und  Vo- 

calismus) - 119 

Charles  Toubin,  Dictionnaire  étymologique  cl  explicatif  de  la  langue  fran- 
çaise   120 

E.  Ernault,  Du  parfait  en  grec  et  en  latin 122 

T. -S.  Muir,  Ecclesiological  notes  on  some  of  the  islands  of  Scotland .    .  123 

E.  Ernault,  Le  mystère  de  sainte  Barbe 124 

R.  Atkinson,  The  passions  and  the  honi  lies  from  Leabhar  Breac.  .  127 

K.  Meyer,  Peredur  ah  Efrawc 136 

W. -G.  Wood-Martin,  History  ofSligo  county  and  town 138 

H.  Kiepert,  Manuel  de  géographie  ancienne 277 

A.  Scheler,  Dictionnaire  d'étymologie  française.  .     *.      .            .  280 
J.  Rhys  and  J.-G.  Evans,  The  textofthe  Mabinogio.i  from  the  Red  Book 

0/  Hergest 283 

R.  Mowat,  Notice  épigraphique  de  diverses  antiquités  gallo-romaines .    .  287 

Margaret  Stokes,  Early  Christian  Ai t  in  Ireland 39$ 

E.  Windisch,  Ueber  die  Verbalformen  mit  dtm  Charactcr  r  im  Arischen, 

ItalischenundCeltiscb.cn 397 

W.-M.  Hennessy,  Annals  of  Ulsler 402 

Mélusine 406 

E.  Mùntz,  Etudes  iconographiques  et  archéologiques  sur  le  moyen  âge.   .  40S 

Th    von  Grienberger,  Ueber  romamsche  Ortsnamen  in  Salzburg  .      .      .  409 

J.  Lecœur,  Esquisses  du  bocage  normand 410 

Sir  Herbert  Eustace  Maxwell,  Studies  in  the  topography  of  Galloway . .  410 

CHRONIQUE. 

Académie  royale  d'Irlande.  Ses  publications  de  facsimilés  ....  295 

Acta  sanctorum  Hiberniae 290 

Allmer,  noms  de  divinités  celtiques 148 

Analecta  Bollandiana 416,  496 

Annales  de  Bretagne 139,  289,  412 

Annales  Cambriae. .  416 

Annals  of  Ulster 300 

Archaeological  Review  (The) 299,   300  413 

Ascoli,  étymologie  de  glaive  et  d'orteil,  146;  ms  irlandais  de  l'Ambro- 

sienne,  Dictionnaire  du  vieil  irlandais 415,  497-498 

Atectorigiana  ala.      .      . 293 

Atkinson  (critiqué  par  Mac  Carthy),  294;  discours  de  M.  Atkinson  à 

l'Académie  royale  d'Irlande 296,  297 

Borderie  (A.  de  lai,  hagiographie  bretonne 291 

Brat  da  ta 29$ 

Brehons  en  Irlande  au  xvn°  siècle 143 


Table  des  Matières.  vu 

Brieuc  (vie  de  saint) 416 

Brizeux 499 

Buhot  de  Kersers,  note  sur  un  char  de  guerre  gaulois 423 

Bulletin  de  la  Société  archéologique  du  Finistère 419,  498 

Bulletin  mensuel  de  la  Faculté  des  Lettres  de  Poitiers 292 

Livre  noir'de  Carmarthen 297 

Cantique  irlandais  sur  le  jugement  dernier 413-415 

Celtic  Magazine  (1887-1 888) 144,   293,  418,  497 

Char  de  guerre  gaulois  en  Berry 423 

Contes  bretons 145,  295,  419,  498 

Corpus  inscriptionum  latinarum.      .      .     .   (t.  XIV),  145;  (t.  XII).  417 

D  barré 295 

Dareste,  études  sur  le  droit  irlandais 141 

Evan  Davies,  notice  nécrologique 41.5 

Derdriu  (légende  de) 293 

Droit  irlandais;  degrés  de  parenté 141 

Duns  Scott  (étude  sur) 145 

Ecosse  (littérature  épique  de  I') 144,   293,  418,  497 

Ernault,  critique  de  M.  G.  Guiilemaud,  292  ;  le  Parfait  en  grec  et  en 

latin;  Glossaire  moyen  breton 423 

Evans  (Silvan),  Dictionnaire  gallois 413 

Glossaire  comique 499 

(Evans)  Gwenogfryn,  Autotype  facsimilé  of  the  Black  Book  of  Carmar- 
then   297 

Facsimilés  de  mss.  irlandais 295 

Gabhra  (poème  gaélique  sur  la  bataille  de) 293 

Catien  de  Tours  (évangéliaire  de  saint) 298 

Gilbert  (J.-T.l,  discours  à  l'Académie  royale  d'Irlande 295 

Gelder  (H.  van),  Galatarum  res  in  Graecia  et  Asia  gestae  .     .      .    148,  299 

Germanique  (mots  d'origine)  en  irlandais 420,  499 

Gloses  bretonnes  dans  le  ms.  Ashburnam  45 419 

Guénolé  (vie  de  saint) 496 

Guiilemaud  (critique  de  M.  G.) 292 

Hayne,  Observations  on  the  state  of  Ireland  in  1600 143 

Hennessy,  Annals  of  Ulster 300 

Héron  de  Villefosse,  Communicationssur  diverses  inscriptions  gauloises.  293 

Hogan  (E.),  publication  des  Hayne's  observations 143 

Inscription  grecqued'Asie  Mineure  contenant  un  nom  de  peuple  gaulois.  299 

Irlandais  (Etudes  sur  le  vocabulaire) 422 

Journal  ofthe  royal  historical  and  archasological  Association  of  Ireland.  419,  499 

Judicael  (vie  de  saint) 416 

Kerviler  (R.),  Bibliographie  bretonne 145 

Légende  bretonne 295 

Longnon,  Atlas  historique  de  la  France  (2e  livraison) 418 

Loth  (J.),  Chrestomathie  bretonne 139,  289,  413 

Luzel,  contes  bretons 145,419,  498 

Macbain,  études  sur  la  littérature  épique  de  l'Ecosse.      144,  293,  418,  497 

Mac  Carthy,  critique  de  M    Atkinson 294 

Martins-Sarmento,  Os  Argonautas 146 

Masson  (Donald),  traduction  d'un  cantique  irlandais  de  1 571 ,      .      .  414 

Meath  (préséance  de  l'évêque  de) 419 

Melorus  (vie  de  saint) 416 

Mercure  gaulois 290 

Merlin  (roman  de) 147 


vin  Table  des  Matières. 

Meven  (vie  de  saint) 416 

Meyer  (Kuno),  traduction  du  Tochmarc  Emere 299,  413 

Monceaux  (P.).  études  archéologiques 290 

Montréal  (Société  celtique  de) 148 

Morlaix,  représentation  de  sainte  Tryphine 292,418 

Mowat,  étude  d'inscriptions  gauloises 29  j 

MùllenhofT,  Deutsche  Altertumskunde. 146 

Mythologie  celtique  dans  la  littérature  galloise,  292  ;  divinités  gau- 
loises   148 

Nettlau,  articles  sur  le  verbe  gallois 419 

Noms  de  lieu  celtiques 418 

O'Grady,  critique  de  M.  Zimmer,  294;  critique  de  M.  Donaid  Masson.  414 

Ossianiques  (poésies) 14$,  293 

Paris  (G.)  et  J.  Ulrich,  Merlin,  roman  en  prose  du  xii0  siècle.      .      .  147 

Passif  en  r 293,  497 

Patrice  (Vie  tripartite  de  saint) 291 

Pietés,  peuple  celtique 294 

Piuzanski,  essai  sur  la  philosophie  de  Duns  Scott 145 

Revue  anthropologique 29$ 

Revue  épigraphique 148 

Revue  des  traditions  populaires 294,  498 

Rhys,  Lectures  on  the  origin  and  Growth  of  Religion,   as  illustrated 

by  Celtic  Heathendom " 292 

Richey,  A  short  history  of  the  Irish  people 147 

Ch.  Robert,  notice  nécrologique 140 

W.-H.  Roscher,  Lexicon  der  griechischen  und  roemischen  Mythologie.  1 46 

Salmanticensis  codex 290 

Samson  (vie  de  saint).      . 416 

Sauvé,  le  cimetière  des  saints,  conte  breton 145 

Serinent  par  l'épée 144 

Société  des  traditions  populaires,  annuaire  pour  1887 145 

Stèles  funéraires  galates  à  Alexandrie ' 417 

Stokes  (Whitley) 291,  496,  498,  499 

Tain  bo  Chualnge  en  Ecosse 418,  497 

Thurneysen  (R.),  Report  on  Celtic  philology 143 

Tochmarc  Emere.            .            299,   300,  413 

Transactions  of  the  Gaelic  society  of  Inverness 293 

Tryphine  (représentation  du  mystère  de  sainte) 292,  418 

Tudual  (trois  vies  de  saint) 291 

Usnech  (mort  des  fils) 144 

Versification  irlandaise 143 

Vieweg  (F.),  nécrologie 500 

Windisch  (E.) 293,  421,  496 

Volney  (prix) 423 

Wood-Martin  (W.-G.),  Article  sur  les  monuments  de  pierre  non  polie 

en  Irlande 419,  499 

Zeitschrift  fur  vergleichende  Sprachforschung 420 

Zimmer,  Eludes  i°  surles  éléments  germaniques  en  irlandais,  420;  sur 

le  vocabulaire  et  la  grammaire  irlandaise 422,  497 

Yves  (saint).  .                 29; 

Errata • 148,  300,  424,  514 


LA  LEGENDE 


DE   LA 


CONCEPTION    DE   CUCHULAINN 


M.  Windisch  a  publié  l  trois  versions  de  la  légende  irlan- 
daise connue  sous  le  nom  de  Compcrt  Concidaind,  «  la  con- 
ception de  Cûchulainn  ».  De  ces  trois  versions,  l'une  nous  a  été 
conservée  par  le  Lcbor  na  hUidre  (ms.  de  l'an  noo  environ), 
les  deux  autres  par  le  manuscrit  Egerion  1782  (xve  siècle)  du 
British  Muséum.  Nous  réservons  pour  la  désignation  des  ma- 
nuscrits les  sigles  LU  et  Eg.,  ordinairement  employés,  et  nous 
désignerons  les  différentes  versions  de  la  légende  par  les  let- 
tres U  (pour  la  version  conservée  par  LU),  E  et  e  (pour  les 
deux  versions  conservées  par  Eg.). 

Pour  arriver  à  déterminer  d'une  façon  certaine  les  rapports 
des  différentes  versions  de  la  légende  entre  elles,  il  faudrait 
avoir  entre  les  mains»  tous  les  manuscrits  qui  renferment  l'his- 
toire de  la  conception  de  Cûchulainn.  Mais,  avec  les  textes 
publiés  par  M.  Windisch,  on  peut  déjà,  croyons-nous,  arriver 
à  quelques  résultats  assez  précis.  Une  analyse  succincte  per- 
mettra de  s'en  rendre  compte. 

Versions  U  et  E.  —  Une  troupe  d'oiseaux  merveilleux  vient 
un  jour  dévaster  la  plaine  d'Emain.  Conchobar  monte  sur  son 
char  avec  sa  sœur  Dechtiré,  pour  leur  donner  la  chasse  ;  et, 
accompagné  de  ses  guerriers,  il  les  poursuit  jusqu'à  la  nuit. 

1.  Irische  Texte,  p.  134-145.  —  Cf.  p.  324  s.  quelques  variantes  d'un 
autre  manuscrit. 

Revue  Celtique,  IX  1 


2  Louis  Duvau. 

Là,  il  s'arrête  avec  ses  compagnons  dans  une  maison  isolée, 
habitée  seulement  par  un  homme  et  une  femme.  La  iemme 
met  au  monde  un  enfant,  que  Dechtiré  emmène  avec  elle  à 
Émain  Mâcha.  Au  bout  de  quelque  temps,  l'entant  meurt,  et 
après  différents  événements,  Dechtiré,  devenue  la  femme  de 
Sualdam,  met  au  monde  un  fils,  Setanta,  nommé  plus  tard 
Cûchulainn. 

Jusqu'ici  la  version  U  ne  présente  avec  E  aucune  différence 
essentielle  :  mais  le  récit  de  la  naissance  de  Setanta,  qui  termine 
la  version  E,  est  suivi,  dans  U,  d'une  discussion  entre  les  prin- 
cipaux guerriers  d'Ulster  qui  prétendent  tous  a  l'honneur  d'élever 
l'enfant.  Cette  seconde  partie  se  retrouve  à  peu  près  exactement 
dans  e  :  mais  les  détails  qui  précèdent  sont  fort  différents. 

Version  e.  —  Dechtiré,  sœur  de  Conchobar,  a  disparu  depuis 
trois  ans  avec  cinquante  autres  jeunes  tilles  d'Ulster.  Un 
jour,  elles  viennent  toutes,  sous  forme  d'oiseaux,  dévaster  la 
plaine  d'Emain.-  Conchobar  et  ses  guerriers  les  poursuivent 
jusqu'à  la  nuit  :  alors  les  oiseaux  disparaissent,  et  les  guerriers 
trouvent  un  abri  dans  une  petite  maison  habitée  seulement 
par  un  homme  et  une  femme.  La  maison  s'agrandit  de  taçon 
à  permettre  à  tous  les  guerriers  d'y  trouver  place  avec  leurs 
chars.  Ils  apprennent  que  c'est  l'habitation  de  Dechtiré  et  de 
ses  compagnes.  Pendant  la  nuit,  Dechtiré  accouche  d'un  fils, 
Setanta.  Puis  vient  le  récit  de  la  discussion  entre  les  guerriers 
d'Ulster,  qui  se  trouve  aussi  dansU. 

Les  versions  U,et  E  n'ont  entre  elles  d'autre  différence  essen- 
tielle que  la  présence  ou  l'absence  de  la  discussion  qui  suit  la 
naissance  de  Setanta.  Or,  dans  U,  cette  discussion  a  été  arti- 
ficiellement soudée  à  la  première  partie  :  elle  a  été  empruntée 
à  la  version  c,  qui,  par  conséquent,  existait  déjà  avant  l'an  i  ioo, 
époque  à  laquelle  a  été  copié  le  Lebor  mi  hUidre.  Les  vers  sui- 
vants l  intercalés  au  milieu  du  récit  de  la  discussion  nous  sem- 
blent le  prouver  d'une  façon  évidente  : 

«  Célèbre,  belle,  pauvre, 

«   Bonne  fut  pour  moi  Dechtiré. 

I.  Windisch,  lrischc  Texte,  p.  140,  1.  10-13,  27-30. 


Légende  de  la  Conception  de  Cùchulainn.  } 

«  Elle  me  protégea  avec  mes  sept  chars  ; 

«  Elle  chassa  le  froid  de  mes  chevaux. 

«  Elle  nous  restaura  avec  tous  les  guerriers. 

«  Puis  un  trésor  nous  est  venu,  Setanta  i. 

Ces  paroles  de  Conchobar  ne  s'expliquent  pas  dans  la  ver- 
sion U  :  Dechtiré  n'a  pas  donné  abri  chez  elle  aux  guerriers 
d'Ulster  avec  leurs  chars  et  leurs  chevaux  ;  elle  était  avec  eux, 
et  cherchait  elle-même  un  abri.  Dans  la  version  e,  c'est  au 
contraire  une  allusion  très  naturelle  à  l'hospitalité  qu'elle  a 
donnée  à  son  frère  et  à  sa  suite. 

La  première  partie  de  U  et  E  tout  entier  sont  à  peu  près 
homogènes.  Pourtant,  vers  la  fin,  E  contient  une  allusion  évi- 
dente x  au  début  de  e,  allusion  qui  se  retrouvait  peut-être  à 
l'origine  dans  la  version  U,  mais  qui,  dans  cette  dernière, 
aura  disparu  au  moment  de  la  soudure  des  deux  parties  hétéro- 
gènes que  nous  y  avons  reconnues.  Le  passage  en  question  2 
dit  de  Setanta  qu'il  était  «  l'enfant  des  trois  années  »,  allusion 
à  l'absence  de  Dechtiré,  qui  avait  duré  trois  ans,  et  dont  il 
n'est  question  que  dans  e. 

Une  autre  allusion  à  e  se  retrouve  îi  la  fois  dans  U  et  dans  E. 
Le  dieu  Lug  révèle  à  Dechtiré  >  que  c'est  lui  qui  l'a  enlevée 
avec  ses  compagnes,  ce  dont  ni  U  ni  E  n'avaient  fait  mention 
auparavant. 

Les  indications  qui  précèdent  expliquent  pourquoi  nous 
suivrons  dans  notre  traduction  des  textes  publiés  par  M.  Win- 
disch  un  ordre  différent  de  celui  qu'avait  adopté  le  savant 
éditeur.  La  version  e  étant  indépendante  des  deux  autres,  qui, 
par  contre,  supposent  son  existence,  c'est  par  elle  que  nous 
commencerons.  La  base  de  la  traduction  sera  le  texte  du  ms. 
Egerton,  unique  pour  la  première  partie,  et  seul  suffisant, 
étant  donné  le  mauvais  état  du  Lebor  na  hUidre,  pour  la  se- 
conde; les  variantes  importantes  de  ce  dernier  manuscrit  se- 
ront indiquées  quand  il  y  aura  lieu. 

i.  Signalée  pour  la  première  fois  par  M.  Windisch,  Irische  Texte,  p.  140. 

2.  lr.  Texte,  p.  140,  1.  14. 

3.  Ir.  Texte,  p.  139,  1.  4s.  et  21  s. 


4  Louis  Duvau. 

Pour  les  deux  autres  versions  (E  et  première  partie  de  U) 
nous  traduirons  d'après  le  manuscrit  le  plus  ancien,  leLeborna 
hUidre,  en  nous  servant  du  texte  récent  donné  parEg.,  souvent 
meilleur  que  celui  de  LU,  chaque  fois  que  nous  le  jugerons 
nécessaire. 

L'insuffisance  actuelle  des  documents  ne  permet  pas  de  re- 
constituer la  légende  sous  sa  forme  primitive.  On  peut  seu- 
lement entrevoir  quelques-uns  de  ses  éléments  essentiels  : 
l'enlèvement  de  Dechtiré  et  de  ses  cinquante  compagnes,  par 
exemple,  qui  est  le  trait  le  plus  caractéristique  de  la  version  e, 
et  sans  lequel  rien  ne  s'explique  ;  l'apparition  du  dieu  Lûg, 
qui  fait  si  bien  suite  au  récit  de  l'enlèvement  et  du  retour  de 
Dechtiré,  et  qui  par  un  singulier  hasard  ne  se  trouve  racontée 
que  dans  U  et  E,  où  elle  devient  inintelligible.  Il  ne  serait 
pas  difficile  de  multiplier  ces  exemples  ;  nous  n'avons  voulu 
qu'indiquer  deux  des  plus  typiques.  Un  travail  d'ensemble  ne 
sera  pas  possible,  tant  qu'on  ne  disposera  pas  d'un  plus  grand 
nombre  de  documents. 


I. 


(VERSION    e   ET    DEUXIÈME    PARTIE    DE    LA    VERSION    U). 

Ci-dessous,  l'histoire  de  La  Conception  de  Cûchulainn,  aussi 
appelée:  La  Fête  de  la  Maison  peu  riche1. 

Dechtiré,  sœur  de  Conchobar,  s'enfuit  un  jour  avec  cin- 
quante jeunes  filles,  sans  demander  la  permission  des  Liâtes 
ni  de  Conchobar;  on  ne  trouva  aucune  trace,  aucun  indice,  et 
on  resta  ainsi  trois  ans  sans  rien  savoir  d'elles.  Elles  vinrent 
alors  sous  forme  d'oiseaux  dans  la  plaine  d'Emain  ;  et  là, 
elles  dévorèrent  tout,  ne  laissant  pas  un  brin  d'herbe  sur  la 
terre.  Grand  fut,  à  cette  vue,  le  chagrin  des  Ulates.  Ils  atte- 
lèrent neuf  chars  pour  poursuivre  les  oiseaux  ;  car  la  chasse  des 


i .  Ir.  Texte,  p.  143  ss. 


Légende  de  la  Conception  de  Cùchulainn.  5 

oiseaux  était  en  usage  chez  eux.  Il  y  avait  là  Conchobar  et 
Fergus,  Amorgin  et  Blai  Briuguig,  Senchus  et  Bricriu. 

Les  oiseaux  volèrent  devant  eux  vers  le  sud,  au  delà  de  Sliab 
Fuait,  par  Ath  Lethan,  par  Ath  Garach  et  Mag  Gossa,  entre 
Fir  Roiss  et  Fir  Ardai.  Puis  la  nuit  tomba  sur  les  guerriers 
d'Ulster  ;  la  troupe  des  oiseaux  disparut  :  les  Ulates  dételèrent 
leurs  chars.  Fergus  se  mit  en  quête  d'un  abri,  et  arriva  à  une 
petite  maison.  Dans  cette  maison,  il  trouva  un  homme  et  une 
femme,  qui  lui  souhaitèrent  la  bienvenue...1.  «  Tu  viendras 
dans  la  maison  avec  tes  compagnons,  et  ils  seront  les  bien- 
venus. »  Fergus  sortit  alors  et  les  rejoignit;  puis  il  les  ramena 
tous  avec  lui,  les  hommes  avec  leurs  chars,  et  ils  entrèrent 
dans  la  maison. 

Bricriu  sortit  ensuite 2,  et  entendit  quelque  chose,  une 
plainte  faible.  Il  entendit  ce  bruit,  et  ne  sut  ce  que  c'était.  Il 
vint  alors,  guidé  par  le  bruit,  vers  la  maison,  et  la  vit  devant 
lui,  grande,  belle,  magnifique.  Il  se  dirige  vers  une  porte  qu'il 
remarque  dans  la  maison,  et  jette  un  coup  d'œil  à  l'intérieur?. 
Il  aperçoit  le  maître  de  la  maison.  Celui-ci,  jeune  guerrier, 
beau,  à  l'air  noble,  lui  adresse  la  parole  4.  «  Entre  dans  la 
maison,  Bricriu,  lui  dit-il  ;  pourquoi  regardes-tu  de  ce  côté  ?  » 

—  «  Pour  moi,  certes,  dit  la  femme,  tu  es  ici  le  bienvenu.  » 

—  «  Pourquoi  ta  femme  me  salue-t-elle  ?  »  dit  Bricriu.  — 
«  C'est  à  cause  d'elle  que  je  te  souhaite,  moi  aussi,  la  bien- 
venue, dit  l'homme.  Est-ce  qu'il  ne  vous  manque  personne  à 
Emain  ?»  —  «  Certes,  si,  dit  Bricriu.  Il  nous  manque  cin- 

1 .  Ici  vient  une  phrase  certainement  altérée  (le  verbe  manque)  :  Fergus 
(demande)  delà  nourriture  ;  il  n'en  trouva  pas  à  cause  de  {pour?)  ses  compagnons, 
qui  étaient  dans  ta  plaine. 

2.  La  suite  du  récit  n'est  pas  parfaitement  claire.  Quelle  est  cette  grande 
maison  que  Bricriu  voit  devant  lui?  Ce  devrait  être,  semble-t-il,  la  petite 
maison  subitement  agrandie  ;  mais  les  détails  qui  suivent  s'accordent  mal 
avec  cette  hypothèse  :  Bricriu,  après  avoir  vu  l'homme  et  la  femme,  sort 
pour  rejoindre  ses  compagnons.  Mais  comment  ceux-ci  n'avaient-ils  pas 
déjà  vu  les  habitants  de  la  maison  qui  avaient  reçu  Fergus  ?  Tout  cela  est 
fort  embrouillé.  Je  serais  porté  à  croire  que  tout  ce  qui  vient  d'être  dit  de 
Fergus  est  ajouté  ou  au  moins  transposé. 

3.  Ce  membre  de  phrase  se  trouve,  dans  le  texte,  après  les  paroles  de  la 
femme. 

4.  Cette  phrase  suit  immédiatement,  dans  le  texte,  le  membre  de  phrase 
que  nous  avons  déplacé. 


6  Louis  Duvau, 

quante  jeunes  filles,  et  depuis  plus  de  trois  ans.  »  —  «  Est-ce 
que  tu  les  reconnaîtrais,  si  tu  les  voyais  ?  »  dit  l'homme.  — 
«  Si  je  ne  les  reconnaissais  pas,  dit  Bricriu,  c'est  que  trois  ans 
de  plus  ou  de  moins  nous  empêchent  de  reconnaître,  ou  nous 
font  hésiter.  »  —  «  Cherche  à  les  reconnaître,  répondit 
l'homme  ;  les  cinquante  jeunes  filles  sont  dans  cette  maison  ; 
cette  femme  qui  est  ici  en  mon  pouvoir  est  leur  maîtresse  :  son 
nom  est  Deehtiré.  Ce  sont  elles  qui,  changées  en  oiseaux, 
sont  allées  à  Émain  Mâcha,  pour  engager  les  Ulates  à  venir 
ici.  »  La  femme  donna  à  Bricriu  un  manteau  de  pourpre  à 
franges  d'or  ;  et  il  sortit  pour  aller  rejoindre  ses  compagnons. 
Bricriu,  pendant  le  trajet,  songe  ainsi  dans  son  esprit  :  «  Con- 
chobar  donnerait  des  trésors  considérables  pour  retrouver  les 
cinquante  jeunes  filles  perdues.  Je  vais  lui  cacher  que  je  les  ai 
retrouvées  avec  sa  sœur.  Je  dirai  seulement  que  j'ai  vu  une 
maison  avec  de  belles  femmes,  et  rien  de  plus.  »  Conchobar 
demanda  à  Bricriu  des  nouvelles  de  son  exploration.  «  Quelles 
nouvelles  rapportes-tu  J,  ô  Bricriu  2  ?  »  —  «  Je  suis  arrivé  à 
une  maison  brillante,  belle  (?),  répondit-il.  J'ai  vu  une  reine, 
noble,  gracieuse,  d'allure  vraiment  royale,  avec  de  belles 
boucles  de  cheveux  ;  puis  une  troupe  de  femmes,  belles,  bien 
parées  ;  et  le  maître  de  la  maison,  généreux  et  brillant.  — 
«  C'est  mon  vassal,  dit  Conchobar;  cet  homme  dépend  de- 
moi,  il  habite  sur  mon  territoire.  Que  sa  femme  vienne  cette 
nuit  dormir  avec  moi.  »  Mais  on  ne  trouva  personne  pour  se 
charger  de  cette  négociation,  sinon  Fergus.  Celui-ci  exposa  la 
demande  qu'on  l'avait  chargé  de  taire.  On  lui  souhaita  la  bien- 
venue, et  la  femme  vint  le  trouver  :  elle  se  plaignit  d'être  en 
mal  d'enfant.  Fergus  revint  dire  à  Conchobar  qu'elle  deman- 
dait un  délai'.    Puis  chacun  des  Ulates  se  mit  au  lit  avec  sa 


i.  Littéralement  «  Comment  es-tu  (te  tiouves  tu)  de  cela  (de  ton  explo- 
ration) ?  » 

2.  Nous  lisons  a  au  lieu  de  al. 

3.  Il  était  de  principe  en  droit  irlandais  que  le  roi  avait  ce  que  les  juris- 
consultes du  continent  ont  appelé  en  latin  fus  prima  noctis,  en  français 
0  droit  du  seigneur  s.  De  plus,  le  roi,  voyageant  dans  ses  Etats,  avait  le 
droit  de  coucher  avec  la  femme  de  chacun  de  ses  vassaux,  à  moins  qu'elle 
ne  fût  grosse.  Voyez  dans  la  Revue  archéologique,  t.  XLII  (1881),  p.  331-334. 
un  article  intitulé  :  «  Le  droit  du  roi  dans  l'épopée  irlandaise  •.  Le  file  Ai- 


Légende  de  la  Conception  de  Câchulainn..  7 

femme,  et  tous  s'endormirent.  Quand  ils  se  réveillèrent,  ils 
virent  quelque  chose  :  un  petit  enfant  qui  avait  les  traits  (?) 
de  Conchobar  I. 

«  Prends  cet  enfant  avec  toi2,  Finnchoem  3  »,  dit  Con- 
chobar. 

Finnchoem  vit  l'enfant  auprès  de  Conchobar.  «  Mon  cœur 
aime  déjà  ce  petit  enfant,  dit-elle  ;  il  sera  pour  moi  un  autre 
Conall  Cernach.  »  —  «  Il  y  a  peu  de  différence  entre  eux,  dit 
Brieriu  ;  cet  enfant  est  fils  de  ta  propre  sœur  Dechtiré  :  car 
c'est  ici  que  sont  les  cinquante  jeunes  filles  absentes  d'Emain 
depuis  trois  ans  L  »  Et  alors  Conchabar  chanta  ce  qui  suit  S  : 

«   Célèbre,  puissante 6,  quoique  pauvre, 

«  Bonne  fut  pour  moi  Dechtiré. 

«  Elle  me  protégea  avec  mes  sept  7  chars, 

«  Elle  chassa  le  froid  de  mes  chevaux. 

a  Elle  nous  restaura  avec  tous  les  guerriers. 

«  Puis  un  trésor  nous  est  venu,  Setauta.  » 

«  Prends  s  l'enfant   avec  toi,   Finnchoem,    »   répéta  Con- 


thirne,  qui  avait  la  prétention  d'exercer  les  droits  rovaux,  ne  respectait 
même  pas  les  femmes  en  couches.  Voir  un  article  de  M.  Whitley  Stokes, 
Revue  Celtique,  t.  VIII,  p.  48-49. 

1.  Ici  commence  la  seconde  partie  du  récit,  conservée,  comme  nous 
l'avons  dit  plus  haut,  par  le  ms.  Egerton  et  par  le  Lebor  na  hUidre  (Ir.  Texte, 
p.  140'',  1.  20  ss.  ;  p.  140 ',  1.  1  ss.).  Nous  suivons  le  texte  dums.  Egerton, 
en  indiquant  les  principales  variantes  de  LU. 

2.  On  sait  que,  d'après  la  coutume  irlandaise,  l'enfant  n'est  jamais  élevé 
chez  ses  parents. 

3.  Finnchoem,  mère  de  Conall  Cernach,  était  sœur  de  Conchobar. 

4.  Cette  phrase,  depuis  les  mots:  car  c'est  ici...,  manque  dans  LU;  mais 
elle  doit  appartenir  à  la  version  primitive.  Dans  la  version  U,  elle  n'avait 
plus  aucun  sens,  aussi  a-t-elle  été  supprimée.  Mais  le  reste  même  des  paroles 
de  Brieriu,  c'est-à-dire  la  révélation  de  la  présence  de  Dechtiré  dans  la 
maison,  ne  se  comprend  bien  que  si  l'on  admet,  comme  nous  l'avons  fait 
pour  d'autres  raisons  encore,  que  cette  partie  du  récit  était  primitivement 
indépendante  de  la  version  U.  —  Après  cette  phrase  vient  dans  Eg.  une 
phrase  peu  claire,  qui  manque  dans  LU  :  ni  fil  briç  sin  Ira,  ol  Concobur. 

5.  Cette  phrase  manque  dans  Eg. 

6.  Au  lieu  de  brig  «  puissante  »,  LU  lit  brec  «  tachetée  (=r  belle?)  ». 

7.  Les  deux  mss.  portent  bien  sept,  quoique  plus  haut  ils  se  soient  ac- 
cordés tous  deux  à  parler  de  neuf  chars. 

8.  A  partir  de  cet  endroit  le  Lebor  na  hUidre  est  mutilé  et  beaucoup  de 
mots  sont  devenus  illisibles. 


8  Louis  Duvau. 

chobar  à  sa  sœur.  —  «  Ce  n'est  pas  elle  qui  Pélèvera,  dit 
Senchus  ;  c'est  moi.  Car  je  suis  fort,  je  suis  adroit  r,  je  suis 
habile  au  combat.  Je  suis  un  savant,  je  suis  un  sage,  je  ne  suis 
pas  oublieux.  Je  parle  à  n'importe  qui2  devant  le  roi.  Je  veille 
sur  sa  parole  3.  Je  juge  les  combats  du  roi  devant  Conchobar 
victorieux.  Je  suis  juge  des  Ulates  ;  mais  ce  n'est  pas  moi  qui 
exécute  mes  décisions.  Personne  n'a  le  droit  de  me  disputer 
la  tutelle,  que  Conchobar.  »  —  «  Si  c'est  moi  qui  élève  l'en- 
fant, dit  Blai  Briuguig,  il  n'aura  à  souffrir  ni  négligence,  ni 
manque  desoins.  Ce  sont  mes  messagers  qui  accomplissent  les 
désirs  de  Conchobar.  Je  convoque  les  guerriers  de  tout  un 
royaume  -*  d'Erin.  Je  puis  les  nourrir  Jurant  une  semaine,  ou 
même  pendant  dix  jours.  Je  m'occupe  de  leurs  affaires  et  de 
leurs  querelles.  Je  secours  leur  honneur,  je  venge  leurs  in- 
sultes. »  —  «  Quelle  impudence,  répondit  Fergus  s  ;  ...  c'est 
moi  qui  élèverai  l'enfant.  Je  suis  fort,  je  suis  habile.  Je  suis 
le  messager  du  roi.  Personne  ne  peut  lutter  avec  moi  d'hon- 
neurs ni  de  richesses.  Je  suis  endurci  aux  combats  et  à  la 
guerre.  Je  suis  bon  ouvrier.  Je  suis  digne  d'avoir  des  pupilles. 
Je  suis  le  protecteur  de  tous  les  malheureux.  Je  suis  la  terreur 
des  forts,  le  soutien  des  faibles.  »  —  «  Eh,  quoi  ?tu  vas  main- 
tenant nous  écouter,  dit  Amorgen,  puisqu'enrin  tu  te  tais.  Je 
suis  capable  de  nourrir  mes  pupilles  comme  des  rois.  On  loue- 
en  moi  les  honneurs,  la  bravoure,  le  courage,  la  sagesse  ;  on 
vante  mon  bonheur,  et  mon  âge,  mon  éloquence,  mon  éclat,  la 
vaillance  de  ma  race.  Quoique  guerrier,  je  suis  poète.  Je  suis 
digne  de  la  faveur  du  roi.  Je  triomphe  de  tous  les  guerriers 
combattant  sur  leurs  chars.  Je  ne  rends  grâce  à  personne,  qu'à 
Conchobar;  je  n'obéis  à  personne  qu'au  roi.  »  — -  «  ...6  Que 

1 .  Ces  trois  mots  manquent  dans  Eg. 

2.  Nous  lisons  nech  avec  LU;  Eg.  porte  rig. 

3.  Senchus  est  le  conseiller  du  roi. 

4.  Les  mots  imprimés  en  italique  manquent  dans  LU. 

>.  A  partir  d'ici,  LU  fait  entièrement  défaut.  Le  texte  de  Eg.  est  très 
altéré  et  souvent  peu  intelligible,  sans  ce  qui  suit.  La  phrase  qui  vient  im- 
médiatement après  celle-ci  est  particulièrement  obscure;  littéralement,  elle 
signifie  :  «  il  a  choisi  près  de  lui  (un  homme)  fort.  »  Il  semble  que  Fergus 
dise  que  Conchobar  doit  le  choisira  cause  de  sa  grande  force. 

6.  Les  premiers  mots  de  Senchus  sont  inintelligibles.  Littéralement  ils 
signifient  :  «  Ne  fut  donc  ceci  ». 


Légende  de  la  Conception  de  Cuchulainn.  9 

Finnchoem,  dit  Senchus,  garde  l'enfant  jusqu'à  ce  que  nous 
soyons  à  Emain;  Morann  prendra  une  décision  à  son  sujet 
lorsque  nous  serons  arrivés.  » 

Les  Ulates  partirent  alors  pour  Emain,  Finnchoem  ayant 
l'enfant  avec  elle.  Et  après  leur  arrivée,  Morann  prononça  le 
jugement:  «  C'est  à  Conchobar,  dit-il,  de  rendre  l'enfant  il- 
lustre :  car  il  est  proche  parent  de  Finnchoem.  A  Senchus  de 
lui  enseigner  la  parole  et  l'éloquence  ;  à  Blai  Briuguig  de  se 
charger  de  sa  nourriture  ;  à  Fergus  de  le  porter  sur  ses  ge- 
noux J.  Amorgin  sera  son  tuteur  ;  il  sera  élevé  avec  Conall 
Cernach  2  :  Finnchoem,  la  mère  de  Conall  a  deux  mamelles. 
L'enfant  sera  loué  de  tous,  conducteurs  de  chars  et  guerriers, 
rois  et  savants  ;  car  il  sera  aimé  d'une  foule  d'hommes.  Cet 
entant  vengera  toutes  vos  injures  ;  et  il  combattra  sur  vos 
gués  ;  il  combattra  tous  vos  combats.  »  Et  ainsi  fut  fait. 
Amorgin  et  Finnchoem  emportèrent  l'enfant,  qui  fut  élevé 
dans  la  forteresse  de  Breth,  dans  la  plaine  de  Murthemné.  Fin. 


IL 

(version  E  et  première  partie  de  la  version  U). 

Ci-dessous^,  l'histoire  de  la  Conception  de  Cuchulainn ■+,  tirée  du 
Livre  au  dos  de  neige. 

1.   Un  jour  que  les  nobles  d'Ulster  étaient  réunis  autour  de 

1 .  On  remarquera  la  correspondance  assez  exacte  du  rôle  de  chacun  avec 
les  aptitudes  dont  il  s'est  vanté  plus  haut.  Le  fait  est  frappant  pour  Senchus 
qui  «  veille  sur  la  parole  du  roi  »,  et  pour  Blai  Briuguig  qui  peut  nourrir 
pendant  dix  jours  tout  le  royaume  d'Ulster. 

2.  Dans  la  version  U,  Conall  Cernach  est  déjà  un  homme  fait  (voir 
p.  10,  j  i,  ai  fin.}.  Cela  prouve  une  fois  de  plus  que  le  récit  de  la  discussion 
au  sujet  de  la  tutelle  de  l'enfant  est  artificiellement  soudé  à  la  version  U 

dans  le  Lébor  na  hUidre. 

3.  Ir.  Texte,  p.  136  ss.  —  Les  mots  imprimés  en  italique  sont  em- 
pruntés au  ms.  Egerton.  Les  autres  variantes  de  ce  ms.  qui  peuvent  être 
importantes  pour  la  classification  des  sources  déjà  connues  ou  encore  à  décou- 
vrir seront  indiquées  en  note  ;  les  moins  importantes  sont  entièrement  passées 
sous  silence. 

4-  La  suite  du  titre  manque  dans  Eg. 


io  Louis  Duvau, 

Conchobar  à  Émain  Mâcha,  une  troupe  d'oiseaux  s'abattit 
dans  la  plaine  d'Emain,  et  dévora  tout,  ne  laissant  sur  la  terre 
ni  la  racine  d'une  seule  plante  ni  un  seul  brin  d'herbe.  Les 
Ulates,  désolés  de  voir  dévaster  leur  pays,  attelèrent  neuf 
chars  pour  poursuivre  les  oiseaux  le  jour  même  :  car  ils  avaient 
l'habitude  de  la  chasse  des  oiseaux.  Conchobar  s'assit  donc 
dans  son  char  :  avec  lui  était  sa  sœur  Dechtiré,  déjà  grande 
fille.  C'était  elle  qui  servait  de  cocher  à  son  frère1.  Les  autres 
guerriers  Ulates  étaient  aussi  dans  leurs  chars  :  il  y  avait  là 
Conall  Cernacb,  et  Fergus^filsde  Roch,  et  Loégairé  le  Victorieux, 
et  Celtchair,  fils  d'Uithecar,  et  tous  les  autres.  Bricriu  était 
aussi  avec  eux. 

2.  Ils  chassèrent  devant  eux  les  oiseaux,  à  travers  l'espace 
désolé,  au  delà  de  Sliab  Puait,  au  delà  de  Muirthemne,  et  d'Ed- 
mann  et  de  Breg.  —  En  ce  temps-là,  il  n'y  avait  en  Erin  ni 
fossé,  ni  clôture,  ni  mur  autour  de  la  terre  ;  et  ce  fut  ainsi 
jusqu'au  temps  des  fils  d'Aéd  Slàné  :.  il  n'y  avait  que  la  plaine 
tout  unie.  C'est  alors  qu'à  cause  du  grand  nombre  des  fa- 
milles, ils  entreprirent  de  tracer  les  limites  des  champs  en 
Erin2.  —  Gracieuse  et  belle  était  la  troupe  d'oiseaux...  k  Ils 
étaient  neuf  fois  vingt,  et  réunis  deux  à  deux  par  une  chaîne 
d'argent  :  ils  allaient  par  groupes  de  vingt,  et  il  y  avait  neui 
de  ces  groupes  ;  et  en  tète  de  chaque  groupe  volaient  deux 
oiseaux  au  plumage  multicolore,  réunis  par  un  joug  d'argent  '. 

i.  Cette  phrase  manque  dans  Eg.,  où  se  trouvent  quelques  mots  dont  le 
sens  est  obscur. 

2.  Cette  longue  parenthèse  manque  dans  Eg.  Elle  n'appartenait  évi- 
demment pas  à  la  rédaction  primitive  de  notre  Légende  :  c'est  sans  doute 
une  note  marginale  de  quelque  lecteur  érudit,  introduite  ensuite  par  erreur 
dans  le  texte.  —  Selon  Tigernach,  les  fils  d'Aéd  Slàné,  Diarmaid  et  Blath- 
mac  auraient  régné  de  654  à  665  ;  d'après  le  Chronicum  Scotorum,  ils  seraient 
morts  en  661  (H.  d'Arbois  de  Jubainville.  Le  Cycle  mythologique  irlandais, 
p.  296). 

3.  Ici  vient  dans  les  deux  mss.  une  phrase  inintelligible.  On  peut  seule- 
ment comprendre  que  dans  Eg.  il  s'agit  du  chant  des  oiseaux. 

4.  «  Par  une  chaine  d'or  rouge  »  selon  Eg.  —  La  version  e  ne  donne 
pas  tous  ces  détails,  qui  sont  bien  peu  vraisemblables,  quand  il  s'agit  d'oi- 
seaux venus  pour  dévaster  la  plaine  d'Émain.  Les  Ulates  ne  se  seraient  sans 
doute  pas  mis  aussi  facilement  à  leur  poursuite  s'ils  avaient  vu  ces  signes 
merveilleux.  La  description  tout  entière  doit  être  empruntée  à  une  des  nom- 
breuses légendes  irlandaises  analogues  (voir  d'Arbois  de  Jubainville,  op.  rit.. 
passim). 


Légende  de  la  Conception  de  Cûchulainn.  1 1 

Trois  oiseaux  volèrent  séparément  jusqu'à  la  nuit  :  ils  allèrent 
devant  les  chasseurs  jusqu'à  l'extrémité  de  la  contrée.  Et  là  la 
nuit  arriva  sur  les  guerriers  d'Ulster.  Il  tombait  une  neige 
épaisse  l.  Conçhobar  dit 2  à  ses  gens  de  dételer  les  chars  et  de 
se  mettre  à  la  recherche  d'une  habitation. 

3 .  Conall  Cernach  et  Bricriu  se  mirent  en  quête,  et  trou- 
vèrent une  maison  toute  neuve.  Ils  y  entrèrent  3  et  y  virent 
un  homme  et  une  femme  qui  leur  souhaitèrent  la  bienvenue. 
Ils  retournèrent  vers  leurs  compagnons  4.  Bricriu  dit  qu'il 
n'était  pas  digne  d'eux  d'aller  dans  cette  maison,  où  ils  ne 
trouveraient  ni  manteaux,  ni  vivres  ;  elle  était  de  toute  façon 
insuffisante  S . 

Ils  y  allèrent  cependant,  et  amenèrent  leurs  chars  avec  eux. 
A  peine  furent-ils  dans  la  maison  avec  leurs  chars,  et  leurs  che- 
vaux et  leurs  armes,  qu'il  leur  vint  toute  sorte  de  biens,  et  des  mets 
ordinaires  et  extraordinaires,  connus  et  inconnus  :  de  sorte  qu'ils 
n'eurent  jamais  de  meilleure  nuit.  Et  alors  ils  virent  quelque 
chose  :  un  jeune  guerrier,  très  beau,  à  la  porte  de  la  cuisine, 
devant  eux.  Et  il  leur  dit  :  «  Quand  vous  plaira-t-il  défaire  les 
parts?  »  — ■  «  Il  y  a  longtemps  que  cela  nous  plairait  »,  dit 
Bricriu". 

Ils  reçurent  à  manger  et  à  boire;  et  après  cela  ils  furent 
ivres,  et  ils  lurent  rassasiés.  L'homme  dit  alors  aux  Ulates 
que  sa  femme  était  à  la  cuisine,  dans  les  douleurs  de  l'enfan- 
tement :  Deçhtiré  alla  la  trouver  ;  la  femme  accoucha  d'un  fils. 
A  la  porte  de  la  maison  était  une  jument,  qui  mit  au  monde 
deux  poulains.  Les  Ulates  prirent  l'enfant7;  le  père  lui  donna 
les  poulains  pour  s'amuser.  Deçhtiré  éleva  l'enfant. 

4.  Lorsque  vint  le  matin,  ils  virent  quelque  chose  :  ils  étaient  là 


i .   Cette  phrase  manque  dans  Eg. 

2.  En  style  direct  dans  Eg. 

3.  Ces  trois  mots  manquent  dans  Eg. 

4.  «  Et  leur  parlèrent  de  la  maison  »,  Eg. 

5 .  Le  texte  de  la  fin  du  paragraphe  est  très  corrompu  dans  LU  ;  des 
mots  et  des  irembres  de  phrase  ont  été  oubliés  par  le  copiste.  Le  texte  de 
Eg.  est  mieux  conservé. 

6.  Au  lieu  de  ce  dialogue,  LU  porte  simplement  :  «  Quand  il  fut  temps 
de  leur  apporter  la  nourriture,  il  leur  fut  fait  bon  accueil,  etc.  ». 

7.  Ces  cinq  mots  manquent  dans  Eg. 


i  2  Louis  Durait. 

sans  maison,  sans  les  oiseaux,  à  l'orient  du  pays.  Ils  retournèrent 
à  Emain  Mâcha,  emmenant  l'enfant,  et  la  jument  avec  ses  pou- 
lains1. Là  fut  élevé  l'enfant;  il  devint  grand.  Une  maladie  -  le 
saisit  alors.  Il  en  meurt.  On  célèbre  ses  funérailles.  Grande 
fut  la  tristesse  de  Dechtiré  à  la  mort  de  son  pupille. 

5.  Elle  demanda  à  boire  en  revenant  des  funérailles;  elle 
demanda  à  boire  dans  un  vase  d'airain.  On  lui  apporta  à 
boire.  De  quelque  manière  qu'elle  portât  le  vase  à  ses  lèvres, 
elle  sentait  une  petite  bète  venir  avec  la  boisson.  Et  lorsque  la 
bête  était  éloignée  de  ses  lèvres,  personne  ne  voyait  plus  rien. 
Enfin,  la  bète  sauta  tout  à  coup,  entraînée  par  l'haleine  de 
Dechtiré. 

Dechtiré  dormit  ensuite,  et  pendant  la  nuit  elle  vit  quelque 
chose  :  un  homme  vint  près  d'elle  et  lui  adressa  la  parole  K 
Il  lui  dit  qu'elle  était  enceinte  de  lui.  C'était  lui  qui  l'avait 
emmenée  avec  ses  compagnes!  dans  le  pays 5  ;  c'est  par  lui  qu'elles 
avaient  été  conduites  sous  forme  d'oiseaux.  C'était  lui  l'enfant 
qu'elle  avait  élevé;  et  maintenant  c'était  lui  qui  allait  dans  son 
ventre6,  et  qui  prendrait  le  nom  de  Setanta  ".  Lui-même  était 
Lug,  fils  d'Ethniu  8. 

6.  La  jeune  fille  devint  donc  enceinte.  Il  y  eut  à  ce  sujet 
une  grande  discussion  chez  les  Ulates,  car  on  ne  lui  con- 
naissait point  de  mari.  Ils  craignaient  que  Conchobar,  dans 
un  moment  d'ivresse,  n'eût  rendu  sa  sœur  enceinte  :  car 
elle  couchait  auprès  de  lui.  Conchobar  fiança  alors  sa  sœur 
à   Sualdam,  fils  de  Rôg.    Grande   fut   sa    honte,    d'aller  vers 

1.  Tout  le  début  de  ce  paragraphe  est  traduit  sur  le  texte  d'Eg.  ;  les  mê- 
mes détails  se  retrouvent  à  peu  de  chose  près  dans  LU,  mais  en  desordre. 

2.  «  Une  grande  maladie,  »  Eg. 

5.  Les  paroles  qui  suivent  sont  en  style  direct  dans  Eg. 

4.  Le  texte  de  LU  et  celui  de  Eg.,  quoique  tous  deux  altérés,  semblent 
bien  signifier:  «  elles  ont  été  (vous  avez  été)  emmenées  »  (au  pluriel).  Il  y  a 
donc  ici  une  allusion  à  l'enlèvement  de  Dechtiré  et  de  ses  cinquante  com- 
pagnes, enlèvement  qui  n'est  raconté  que  dans  la  version  e. 

>.  La  région  éloignée  où  Conchobar  a  été  conduit  par  les  oiseaux  mer- 
veilleux. 

6.  Avalé  en  même  temps  que  la  boisson. 

7.  C'est-à-dire  que  l'enfant  qui  naîtrait  porterait  le  nom  de  Setanta. 

8.  LU  ajoute  :  «  et  que  furent  nourris  les  poulains  de  l'enfant  ».  Cette 
phrase  ne  doit  pas  être  ici  à  sa  place  :  déplus,  la  construction  des  deux  der- 
niers mots  din  mac  présente  quelque  difficulté. 


Légende  de  la  Conception  de  Cûchulainn.  i } 

son  mari,  étant  enceinte.  Elle  alla  alors  à  l'arbre  de  lin  (?)  ; 
elle  vomit,  et  perdit  le  germe  qu'elle  portait  dans  son  sein  r  ; 
et  ainsi,  redevint  vierge.  Elle  alla  ensuite  vers  son  mari,  et 
devint  de  nouveau  enceinte.  Elle  mit  au  monde  un  fils  ;  et  ce 
fils  était  l'enfant  des  trois  années2.  Et  il  porta  le  nom  de  Setanta 
jusqu'à  ce  qu'il  eût  tué  le  chien  de  Culann  le  forgeron  :  c'est  seule- 
ment alors  qu'il  fut  nommé  «  le  chien  de  Culann  »,  Cûchulainn. 
Fin  5 . 

Louis  Duvau. 


i .  Le  texte  des  deux  mss.  est  altéré  et  en  partie  inintelligible. 

2.  Nouvelle  allusion  à  la  version  e  (manque  dans  LU)  ;  cf.  ce  que  nous 
avons  dit  dans  l'introduction. 

3.  Au  lieu  du  passage  ici  imprimé  en  italique,  LU  porte  la  phrase  sui- 
vante destinée  à  raccorder  à  ce  récit  la  deuxième  partie  de  la  version  e  :  »  Les 
Ulates  étaient  réunis  à  Émain  Mâcha  au  moment  de  la  naissance  de  l'en- 
fant. Ils  discutèrent  pour  savoir  qui  d'entre  eux  élèverait  l'enfant,  et  firent 
décider  la  chose  par  (littéralement:  «  allèrent  en  jugement  de  »)  Conchobar.  1 
Suit  le  récit  de  la  discussion. 


THE  VOYAGE 

OF   SNEDGUS   AND   MAC  RIAGLA 


The  text  of  the  following  story,  now  for  the  first  time 
printed,  is  taken  froma  transcript  which  I  madein  1871  from 
the  onlv  known  copy,  that,  namely,  in  columns  391-395  of 
H.  2.  16,  a  manuscript  of  the  fourteenth  century  preserved  in 
thelibrary  of  Trinity  Collège,  Dublin,  and  commonly  called 
theYellow  Book  ofLecan.  The  story  is  oneof  a  ckiss  of  sagas 
called  Imrama,  ot  which  only  three  other  spécimens  arc  known 
to  cxist,  and  on  which  Dr  Schirmer  of  St  Gallen  is  about  to  pu- 
blish  a  treatise.  Like  the  best  known  ol  thèse  sagas,  the  Imrom 
Maele  Duin,  our  story  is  twofold,  each  part  of  it  being  iirst 
told  in  prose  and  then  in  verse,  which  is  mil,  as  usual,  of 
chevilles,  is  often  obscure,  and  is  sometimes  obviously  corrupt. 
In  the  présent  édition  the  verse  is  omitted. 


Imrum  Snedhghusa  ochs  Mic  Rîagla  andso  sis. 

1.  Bai  dochraite  mor  for  FeraibRois  iarndith  Domnaill  mic 
/Edha  mic  Ainmireach,  7  ba  he  fochond  a  ndochraide.  Iar 
ngabail  Erind  do  mflcaib  Mael  Goba  tareis  Domnaill  batar  111/c 
Domnaill  ir-righi  Chenéoil  Conaill  7  Fer  Rois  .i.  Dondchud  7 
Fiacho  ;  Dondchad  ar  tir  Conaill  7  Fiachû  ar  feraib  Rois. 


The  Voyage  af  Sengus  and  Mac  Riagla.  i  ) 

The  Voyage  of  Snedgus  and  Mac  Riagla  (or  Mac  Riaguil)  fias 
been  analysed  hy  O'Curry  in  his  Lectures,  pp.  333,  and  is 
quoted  by  him  in  his  Manner s  and  Customs,  III,  385,  asgiving 
two  instances.of  the  rare  word  sianan,  some  kind  of  vocal  mu- 
sic.  Other  such  words  are  cuilefaid  =  culebad  (gl.  flabellum)  r, 
faut  «  hollow  »,  borrowed  from  the  Welsh  pant  :  comgaire 
«  vicinity  »  :  braga  (dat.  pi.  braigtih)  «  prisoner  »,  aile, 
«  fence  »;  mesrugud  «  adjudication  »,  forbas  «  siège  »,  ci  si  es 
«  neglect  ».  The  phrase  dia  bliadna,  literally  «  (tliat)  day  of 
(the  following)  year  »,  and  the  act.  redupl.  future  pi.  3  gébtait 
may  also  be  noted. 

Some  of  the  persons  named  in  our  taie  are  historical  cha- 
racters  of  theseventh  century.  King  Domnall  son  of  Aed,  son 
of  S.  Colomb  cille's  rlrst  cousin  Ainmire,  died  A.  D.  642  (or 
639  according  to  the  Four  Masters).  His  successors,  Mael- 
coba's  sons,  Conall  Cael  and  Cellach,  reigned  jointly  till  A. 
D.  659  (or  656).  The  middle  of  the  seventh  century  may 
therefore  be  fixed  roughly  as  the  date  of  the  incidents  of  the 
taie. 

The  Men  of  Ross,  whose  vengeful  act  gives  rise  to  the 
story,  wereatribe  whose  territory  (according  to  O'Donovan2) 
«  comprised  the  parishes  of  Carrickmacross  and  Clonany,  in 
the  county  of  Monaghan,  and  parts  of  the  adjoining  counties 
ofMeath  and  Louth  ». 


The  Voyage  of  Snedgus  and  Mac  Riagla  hère  below. 

1 .  The  Men  of  Ross  were  under  great  oppression  after  the 
decease  of  Domnall  son  of  Aed  son  of  Ainmire  ;  and  tins  was 
the  cause  of  their  oppression.  When  Ireland  was  taken  by  Mael 
Coba's  sons  after  Domnall,  Domnall's  sons,  even  Donnchad 
and  Fiacha,  were  in  the  sovranty  of  Cenél  Conaill  and  the 

1.  See  the  Karlsruhe  gloss  on  the  Soliloquia  of  S.  Augustini,  éd.  Win- 
disch,  gl.  86. 

2.  Topographicàl  Poems,  Dublin,  1862,  p.  xxn,  n°  126. 


\G  Wliitley  Stokes. 


2.  Ba  mor  a  ndochraidi-s/Je  ic  Fiacho,  ar  ni  leicthi  arm  na 
hedach  datha  ic  neoch  dib,  ar  nîptar  riaraîgh  do  rig  riam  reme 
sin,  7  ha  hadbul  meit  a  foghnoma. 


3.  Bliadain  do  Fiacho  ar-righi  forro.  D\ab\iad)ia  tic  Fiachtf 
co  hlnber  mBoinne  7  gaîrmthir  chuice  Fini  Rois.  Asbert  friu  : 

«  Dénaid  '  foghnom  beos  ». 

«  Ni  foil  ocoinn  ni  as  mo  »,  ar  siat. 

Asbm  som  friu  :  «  Tabraidh  uar  sele  uile  for  mo  dernaind.  » 

Doberad,  7  ba  hamlaid  bai  an  scie,  7  a  leth  di  mil. 

4.  Asbcrt-somandsidhe  :  «  Ni  fuil.uar  foghnom  techta  foraib 
beos,  ar  ni  mil  uile  an  saile.  Cuiridh  2  na  tulcha  isna  fantaib 
corop  tir.  Clandaid  5  fedha  isna  muighib  cor'bad  caillte.  » 

5.  Ba  handsin  do  eirigh  os  allaid  a  comgaire  doib.  Eirgid 
uile  muindtfr  in  righ  andiaidh  ind  ois.  Ba  handsin  gabsat  Fir 
Rois  a  armo  fén  don  righ,  ar  ni  raibe  arm  ic  neoch  dibseom, 
7  romarbsat  he  iarom. 

6.  Ba  holc  la  brathair,  la  Dondchad,  an  gnim-sin,  7  dothrct 
7  gabais  ar  braigtib  car  uile,  7  dober  i  n-oentech  dia  loscodh. 

7.  B;i  andsin  asbert-som  fesin  :  «  Ni  coir  dam  an  gnim-so 
do  denom  cen  chomairle  frim  anmeharait,  fri  Colum  cille.  » 

8.  Tiaghar  uadh  co  Colum  cille.  Ticc  Snedhghus  7  Mac 
Riaghla  0  Cholum  cille,  co  comairle  léo  dô  .i.  sesca  lanamna 
do  chor  dib  isan  fairrge  7  co  rucad  Dia  a  breith  forro. 


1.  Ms.  denaig. 

2.  Ms.  Cuirigh. 

3.  îsls.  clandaig. 


The  Voyage  of  Snedgus  and  Mac  Riagla.  17 

Men  of  Ross,  —  Donnchad  over  Tir-connell  and  Fiacha  over 
the  Men  of  Ross. 

2.  Great  was  their  oppression  under  Fiacha,  for  neither 
weapon  nor  coloured  raiment x  was  allowed  to  any  of  them  ; 
(and  they  felt  this  the  more)  since  they  had  never  before  that 
been  subject  to  a  king;  and  exceeding  was  the  soreness  of  their 
servitude. 

3.  A  year  was  Fiacha  in  sovranty  over  them.  At  the  end  of 
the  year  cornes  Fiacha  to  Boyne-mouth,  and  the  Men  of  Ross 
are  summoned  to  him.  He  said  to  them  :  «  Do  service  still 
more.  » 

«  We  cannot  do  more  »,  say  they. 

Said  he  to  them  :  «  Let  each  and  ail  of  you  put  your 
spittle  on  my  palm.  » 

It  was  put,  and  thus  was  the  spittle,  half  of  it  (composed) 
of  blood. 

4.  Then  he  said  :  «  Your  service  is  not  proper  y  et,  for  ail 
the  spittle  is  not  blood.  Cast  the  hills  into  the  hollows  that 
they  may  be  (level)  land.  Plant  trees  in  the  plains  that  they 
may  be  forests  !  » 

5.  It  was  then  thatadeer  passed  near  them.  Ail  the  kirig's 
household  go  after  the  deer.  Then  the  Men  of  Ross  took  his 
own  weapons  from  the  king,  for  none  of  them  had  a  weapon, 
and  so  they  killed  him. 

6.  That  deed  was  evil  in  his  brother  Donnchad's  eyes,  and 
he  came  and  took  them  ail  prisoners,  and  puts  them  into  one 
house  to  be  burnt  alive. 

7.  Then  he  himself  said  :  «  It  is  not  meet  for  me  to  do 
this  deed  without  counsel  from  my  soul-friend,  from  Colomb 
cille  ». 

8.  So  he  sends  messengers  to  Colomb  cille.  And  Snedgus 
and  Mac  Riagla  corne  from  Colomb  cille,  having  (this)  counsel 
for  Donnchad,  to  wit,  to  cast  sixty  couples  of  the  Men  of  Ross 
on  the  sea,  and  that  God  would  pass  His  judgment  upon  them. 


1 .  Compare  the  tradition  about  Eochaidh  Eudgadhach  (Four  Masters, 
A.  M.  3664)  aendath  i  n-edoighibh  moghadh  «  one  colour  in  the  clothes  of 
slaves  ». 


Revue  Celtique,  IX 


18  Whitley  Stokes. 

9.  Doberar  eathair  becadoib  7  cuirter forsin  fairge,  7  tiaghar 
dia  coméd  cona  ristais  arculo. 

ro.  IMpait  forculo  Snêdgus  7  Mac  Riaghuil  do  dol  co  Hi, 
co  Colum  cille. 

1 1 .  Amal  batar  ina  curoch  imraidhset  eturro  dul  assa  ndeôin 
isand-ociân  n-imechtrach  a  n-ailitZ/ri,  amal  dochotar  in  ses'cala- 
namna,  cencop  assa  ndeôin  docliotar  sidhe. 

12.  Impaaid  iarum  desel,  7  nodô-séiti  gxth  sel  siartûaidh 
isan  n-ocian  n-imechtrach. 

13.  Iar  tredhinwj  doib  iarom  nos-geib  ellsgodh  itad  moire, 
cor'bo  difulaing  doib. 

14.  Ba  handsin  airchisis  Crisi  doib,  7  dos-ber  for  sruth 
somblass  amal  lemnacht,  7  sassaither  dhe.  Atlaighit  buidhe 
do  Dia,  7  asbtvfrtjt  :  «  Lecam  ar  n-imrum  do  Dia,  7  tabrum  ar 
rama  inar  nôi  ».  Ocus  leac[ad]  iarsin  a  n-imrom  aaenur,  7  do- 
berad  a  rama  ina  nôi,  [col.  392];  7  iar  tiachtain  doib1  is  and 
asbert  an  fer  dana  : 


Snedhghus  7  Mac  Riaghuil 
do  munntir  Coluim  chilli 


15.  Doss-corathar  iarsin  co  hindsi  n-aile,  7  aile  airgid  dara 
medon,  7  cora  éisc  indti,  7  ba  stiall  archapur  d'airged  an  cora- 
sain,  7  nolingdis  frisin  coraid  ecne  mora.  Ba  medithir  colp- 
thaigh  firend  cech  eicne  dib,  7  sastai-seom  dib. 

16.  Imraised  iarsin  docum  indsi  aile,  7  oie  imda  aracind 
isin  indsi  sin  co  cendaib  cat  forro.  Aenôcloch  goidhelach  indti, 
7  dothasd  isin  traigh  7  ferais  failte  friu,  7  asbert  friu  :  «  Di 
feraib  Gaideal  damsa  »,  ol  se.  «  Tancamar  lucht  curaigh2 
sund,  7  ni  mair  dib   acht  missi  m'xnur.   Dochotar  martra  la 


1 .  Somcthing  seems  omitted  hère. 

2.  M  s.  curaidh. 


The  Voyage  of  Snedgus  and  Mac  Riàgla.  19 

9.  Small  boats  are  given  to  them,  and  they  are  set  upon  the 
sea  l,  and  men  go  to  watch  them,  so  that  they  should  not 
return. 

10.  (Then)  Snedgus  and  Mac  Riaghla  turn  back  to  go  to 
Iona,  to  Colomb  cille. 

1 1 .  As  they  were  in  their  coracle  they  bethought  them  of 
wending  with  their  own  consent  into  the  outer  océan  on  a 
pilgrimage,  even  as  the  sixty  couples  had  gone,  though  thèse 
went  not  with  their  own  consent. 

12.  So  they  turn  right-hand-wise ;  and  wind  wafts  them 
for  a  while  north-westwards  into  the  outer  océan. 

1 3 .  After  a  space  of  three  days  a  longing  of  great  thirst 
seizes  them,  insomuch  that  they  could  not  endure  it. 

14.  It  was  then  that  Christ  took  pity  on  them,  and  brings 
them  to  a  stream  well-tasting  like  new  milk,  and  therewith 
they  are  satisfied.  They  render  thanks  to  God  and  say  :  «  Let 
us  leave  our  voyage  to  God,  and  let  us  put  our  oars  into  our 
boat.  »  And  thereafter  their  voyage  was  left  alone2,  and  their 
oars  were  put  into  their  boat  ;  and  after  the}-  arrived,  then 
said  the  poet  : 

Snedgus  and  Mac  Riagla 

Of  Colomb  cille's  community,  etc. 


15.  Then  they  are  sent  to  another  island,  with  a  fence  ol 
silver  over  the  midst  thereof,    and  a  fish-weir  therein  ;  and 

that  weir  was  a  plank  of  silver,  and  againstthe  weir  huge 

salmon   were  leaping.    Bigger   than  a  bull-calf  was  each  of 
thèse  salmon,  and  thereof  they  were  satisfied. 

16.  Thereafter  they  voyaged  to  another  island,  and  in  that 
island  they  found  many  warriors  with  heads  of  cats  upon 
them.  One  Gaelic  champion  was  therein,  and  he  came  down 
to  the  strand  and  made  them  welcome,  and  said  to  them  : 
«  Of  the  men  of  the  Gael  am  I,  »  saith  he.  «  We  came  hère 


1.  Compare  the  punishment  infiicted  by  S.  Patrick  on  Maccuil,  Book  of 
Armagh,  fo.  6  a  2.  Tripartite  Life,  p.  222. 

2.  i.e.  they  drifted. 


20  Whitley  Stokes. 

hechtrandu  aitreabaid  in  n-innsi-seo  ».  Ocus  dober  biadh  doib 
issin  curach,  7  facbait  bewnachtain  7  berait  bendachtain. 


17.  Nodo-séite  an  gaeth  iarsin  co  hinnsi  a  mbûi  crand  mor 
co  n-enlaith  alaind.  Bûi  en  mor  uaso  co  cind  6ir  7  co  n-etib 
argait,  7  tndisid  scela  tossaigh  domain  doib,  7  indisid  gein 
Crist  6  Mairi  ôigh,  7  a  bathais  7  a  césadh  7  a  eiseirghi. 
Ocwj  indisidh  scela  Bratha;  7  ba  handsidhe  notuairctis  an  en- 
laidi uile  cona  n-eitib  a  taebo  co  siltis  a  mbrauni  toîo  assa  tae- 
buib  ar  omun  airdhe  mBratha.  Ba  comnai  7  ba  cretra1  in  fuil- 
sin.  Ocus  doKv  an  t-én  duillind  do  duillib  an  craind-sin  dona 
cleirchib,  7  meit  seched  daim  môir  an  dulind-sin.  Ocus  asbert 
forsna  [col.  393]  clcircib  a  tabairt  léo  for  altôir  Coluim  cille  na 
duille-sin,  conid  hi  cuilefaid  Col//////  cille  andiu  :  a  Cenandus 
ata-sà/c. 


18.  Ba  bind  ceol  ina  n-cn-sin  ic  gabail  tsalm  7  cantaci  ic 
moludh  in  Choimdhidh,  ar  ba  henlaith  muigi  nime  eat,  7  ni 
crina  corp  na  duille  an  craind-sin. 

19.  Bennachsat  iarsain  dona  henaib,  7  imrait  co  tir  n-uath- 
muiri  mbatar  daine  co  cendaib  con,  co  mongaib  ceatra  foraib. 
Dothajd  clereach  chucu  asinn  indsi,  la  forcongra  nDé,  dia  fori- 
thin,  ar  ba  gabudh  doib  and  cen  biadh;  7  dober  doib  iasc  7  tin 
7  cruithnecht. 

20.  Imrait  iarsin  co  rancatar  tir  a  mbatar  doine  co  cendaib 
mucc  forro  7  siad  [  ],  7  meithle  mora  acco  ic 
buain  inn  arba  a  medon  an  tsamraidh2. 

21.  Dolotar  ass  iarsin  ina  curach,  7  gabait  a  salmo  7  gui- 
dhit  Dia,  co  rancatar  tir  a  mbatar  dine  d'feraib  Gaedhel,    7 

1.  A  coinmon  phrase  (=  commun  ocus  cretair,  Rev.  Celtique,  VIII,  150) 
meaning  something  very  blessed  and  precious.  Comnai  or  commun  is  horro- 
wed  from  Lat.  communia,  and  cretra  irom  creatura. 

2.  Ms.  tsamraigh. 


The  Voyage  of  Snedgus  and  Mac  Riagla.  21 

a  boat's  crew,  and  thereof  remaineth  none  save  me  alone.  They 
were  martyrised  by  the  outlanders  who  inhabit  this  island  ». 
And  lie  puts  food  for  them  (the  clerics)  into  the  boat,  and  they 
leave  a  blessing  and  take  a  blessing. 

q  _  o 

17.  Thereafter  the  wind  wafts  them  to  an  island  wherein 
was  a  great  tree  with  beautiful  birds  (on  its  branches).  Atop 
ofit  was  a  great  bird  with  a  head  of  gold  and  with  wings  ot 
silver;  and  he  tells  them  taies  of  the  beginning  of  the  world, 
and  tells  them  of  Christ' s  birth  from  Mary  Virgin,  and  of  His 
Baptism  and  His  .Passion  and  His  Résurrection.  And  he  tells 
tidings  of  Doom  ;  and  then  ail  the  birds  used  to  beat  their 
sides  with  their  wings,  so  that  showers  of  blood  dropt  out  of 
their  sides  for  dread  of  the  signs  of  Doom.  «  Communion 
and  Créature  »  was  that  blood.  And  the  bird  bestows  on  the 
clerics  a  leaf  of  the  ieaves  of  that  tree,  and  the  size  of  the  hide 
of  a  large  ox  was  that  leaf.  And  the  bird  told  the  clerics  to  take 
that  leaf  and  place  it  on  Colomb  cille' s  altar.  So  that  is  Co- 
lombcille's  flabellum  to-day.  In  Kells  it  is. 

18.  Melodious  was  the  music  of  those  birds  a-singmg 
psalms  and  canticles,  praising  the  Lord.  For  they  were  the 
birds  of  the  Plain  of  Heaven,  and  neither  trunk  nor  leaf  ot 
that  tree  decays. 

19.  Thereafter  the  clerics  bade  farewell  to  the  birds,  and 
they  voyage  to  a  fearful  land,- wherein  dwelt  men  with  heads 
of  hounds,  with  mânes  of  cattle  upon  them.  By  God's  com- 
mand,  a  cleric  came  to  them  out  of  the  island  to  succour 
them,  for  they  were  in  danger  there,  without  food  ;  and  he 
gives  them  fish  and  wine  and  wheat. 

20.  Thereafter  they  voyage  till  they  reached  a  land  whe- 
rein dwelt  men  with  heads  of  swine  upom  them  ;  and  they  . . . 
and  they  had  great  bands  of  reapers  reaping  the  corn  in  the 
midst  of  the  summer. 

21.  Afterwards  they  went  thence  in  their  boat,  and  sing 
their  psalms,  and  pray  to  God,  till  they  reached  a  land  where- 


22  Whitley  Stokes. 

gabsad  mua  na  hindsi  sianan  doib  focetoir,  7  ba  bind  lasna 
cleirchiu. 

«  Canaid  l  beous  »,  ol  an  clereach,  ar  se  :  «  sianan  na 
hErcnn  andso  ». 

«  Tiagham,  a  cliarcho  !  »  ar  na  mna,  «  co  teagh  rig  na 
hindsi,  ar  ron-bia  failte  7  lcsugud  and  ». 

22.  Tiagait  na  mna  7  an  clcirigh  isan  teach,  7  ferais  an  ri 
failte  frisna  cleircho,  7  cuirit  a  sciss  and,  7  iarfaigis  doib  : 
«  Can  bar  cenel,  a  clerco  ?  » 

«  D'feraib  Erend  duind,  »  ar  an  cleirich,  «  ocus  do  muintir 
Colaim  cille.  » 

«  Cinnus  atathar  a  n-Erind  ?  »  ol  se,  «  ocus  cia  lin  mac 
[col.  394]  as  beo  do  Domnall  ?  »  ar  an  ri. 

Freacrais  an  cleireach  :  «  It  bi  tri  me'ic  do  Domnall  ;  7  do- 
rochair  Fiacha  mac  Domnaill  la  Fini  Roiss,  7  rocuirit  sesca 
lanamna  dib  forsin  fairrgi  issan  gnim-sin.  » 

«  IS  fir  duib,  a  cleirchiu,  an  sccl  sin.  As  messi  romarb 
mac  rig  Temrach,  7  as  sindi  rocuiredh  isin  fairrgi,  7  as  dunn 
as  maith,  ar  bem  sund  noco  ti  an  mesrugudh  T,  ar  is  maith 
atam  cen  pecadh,  cen  col,  cen  gail  ar  cinadh.  Maith  an  inis  a 
tam,  ar  is  indti  atâ  Hele  7  Énocc,  7  as  ûasal  in  teghdais  a  foil 
Eile.  » 

23.  Ocus  dorigne  failte  moir  frisna  cleirchib  7  adbert  : 
«  Atait  da  loch  isin  tir-seo,  loch  uisce  7  loch  tened,  7  ric- 
fadis  o  cianaib  for  Erind  mani  padh  Martain  7  Patraic  oc  guidhi 
leo  ». 

«  Ropad  maith  lind  Enoc  d'taicsin,  »  ar  an  clerich. 
«  Ata  i  n-inud  diamair  cor-risam  uile  [don  cath]  il— lo  an 
messa  ». 

24.  Imrait  iarsin  on  tir-sin  co  mbatar  for  tondgor  an  mara 


1.  Cf.  ragait  fochctôir  cen  mcsrugud  etir  ibrro  dochom  niffrind,  ragait 
fochetoir  cen  mesrugùd  etir  dochum  nimi,  Revue  Celtique,  IV,  250. 


The  Voyage  of  Snedgus  and  Mac  Riagla.  23 

in  dwelt  a  multitude  of  men  of  the  Gael  ;  and  the  women  of 
the  island  straightway  sang  a  sianan  to  them,  and  the  clerics 
deemed  it  melodious. 

«  Sing  ye  still  »,  saith  the  cleric,  saith  he  ;  «  hère  is  the 
sianan  of  Irelarid  !  » 

«  Let  us  go,  O  clerics  !  »  say  the  women,  «  to  the  house 
of  the  King  of  the  island,  for  therein  we  (leg.  ye  ?)  shall  hâve 
welcome  and  refreshment.  » 

22.  The  women  and  the  clerics  enter  the  house;  and  the 
king  made  thé  clerics  welcome,  and  they  put  away  their 
weariness  there,  and  he  asked  them  :  «  What  is  your  race,  O 
clerics  ?  » 

«  Of  the  men  of  Ireland  are  we  »,  say  the  clerics,  «  and 
of  Colomb  cille' s  community.  » 

«  How  fares  it  in  Ireland  ?  »  saith  he,  «  and  how  many 
sons  of  Domnall  are  alive  ?  »  saith  the  King. 

The  cleric  answered  :  «  Three  sons  of  Domnall' s  are  alive; 
and  Fiacha  son  of  Domnall  fe  11  by  the  Men  of  Ross,  and  for 
that  deed  sixty  couples  of  them  were  set  on  the  sea.  » 

«  That  taie  is  true  for  you,  O  clerics  !  It  is  I  that  killed  the 
son  of  the  King  of  Tara,  and  we  it  is  that  were  set  on  the 
sea.  And  well  for  us  was  that,  for  we  shall  abide  hère  till  the 
Judgment  shall  corne;  for  good  are  we  without  sin,  without 

wickedness,    without of  our  crime.    Good   is   the  island 

wherein  we  are,  for  in  it  are  Elijah  and  Enoch,  and  noble  is 
the  dwelling  wherein  is  Elijah.  » 

2  3 .  And  he  made  the  clerics  very  welcome,  and  said  : 
«  There  are  in  this  land  two  lakes,  a  lake  of  water  and  a 
lake  of  fire,  and  they  would  hâve  corne  long  ago  over  Ire- 
land had  not  Martin  and  Patrick  been  praying  for  them  (the 
Irish).  » 

«  We  would  fain  see  Enoch,  »  say  the  clerics. 

«  He  is  m  a  secret  place  until  we  shall  ail  go  to  the  battle, 
on  the  Day  of  Judgment.   » 

24.  Thereafter  they  voyage  from  that  land,  and  were  in 


24  Whitley  Stokes. 

fri  re  ciana  co  wdorala  furtacht  mor  o  Dia  doib,  ar  roptar  sci- 
tha,  co  n-acatar  inis  moir  n-aird,  7  ba  haibind  7  ba  noemda  bis 
indti. 

25.  Ba  maith  an  ri  bûi  isin  insi,  7  ba  noemda  7  ba  firian, 
7  ba  mor  a  sluag,  7  ba  huasal  teghdhais  an  rig-sin,  ar  boi  cet 
dorus  isin  tigh-sin,  7  altoir  oc  gach  doruss,  7  fer  graid  ic  cach 
altoir  ic  idpuirt  chuirp  Christ. 

26.  Dolotar  iarum  isan  tegh-sin  an  chleirig,  7  bendachais 
cach  dib  dia  chele,  7  dolotar  uile  iarsin,  ct/r  mnai  7  fer,  an 
sluag  mor  sin  do  laim  occonn  aifriunn. 

27.  Dakar  fin  forro  iarsin,  7  adber  in  ri  frisna  clércho  : 
«  Apraidh  »,  ar  se,  «  fri  fini  Erind  dos-fil  digal  mor  foruib. 
Dosn-icbad  allmaraigh  dar  muir  7  trebfaid  cô  leth  an  n-indse, 
7  gebtait  forbais  foraib,  7  is  ed  dober  doib  an  dighal  sin,  a 
meit  doberat  eislis  for  timna  nDé  7  fora  forcetol.  Mi  for  blia- 
dain  atathi  for  fairrgi  7  rosessidh  :  inlan  2,  7  indisid  bar  scela 
uile  d'feraib  Eirind  ». 


1 .  Ms.  rosessigh. 

2.  Ms.  leg.  imlan?  ■ 


The  Voyage  of  Snedgus  and  Mac  Riagla.  25 

the  roaring  waves  x  of  the  sea  for  a  long  time,  until  great  re- 
lief came  to  them  from  God,  for  they  were  weary.  And  they 
beheld  a  great  lofty  island,  and  ail  therein  was  delightful  and 
hallowed. 

25.  Good'was  the  King  that  abode  in  the  island,  and  he 
was  holy  and  righteous  ;  and  great  was  his  host,  and  noble 
was  the  dwelling  of  that  King,  for  there  were  a  hundred 
doors  in  that  house,  and  an  altar  at  every  door,  and  a  priest 
at  every  altar  offering  Christ's  Body. 

26.  So  the  clerics  entered  that  house,  and  each  of  them 
(host  and  guests)  blessed  the  other  ;  and  thereafter  the 
whole  of  that  great  host,  both  woman  and  man,  went  to 
communion  at  the  Mass. 

27.  Then  wine  is  dealt  out  to  them,  and  the  king  saith  to 

the  clerics  :  «  Tell  the  men  of  Ireland,  »  saith  he,  «  that  a 

great  vengeance  is  about  to  fall  on  you.  Foreigners  will  corne 

over  sea  and  inhabit  half  the  island  ;  and  they  will  lay  siège  to 

you2.  And  this  is  what  brings  that  vengeance  upon  them  (the 

Irish),  the  great  neglect  they  shcw  to  God's  Testament  and  to 

His  teaching.  A  month  and  a  year  ye  shall  be  at  sea,  and  ye 

shall  arrive  safely  ;  and  (then)  tell  ail  your  tidings  to  the  men 

of  Ireland.  » 

Whitley  Stokes. 
16  Sept.  1887. 


1 .  Literally  •  the  wave-voice  » . 

2.  This  probably  refers  to  the  Anglo-norman  invasion. 


LÉGENDES 


DES 


MONNAIES  GAULOISES 

(1887). 


Il  y  a  seize  ans,  dans  le  premier  volume  de  la  Revue  Celtique, 
j'ai  publié  un  travail  dont  celui-ci  n'est,  par  le  fait,  qu'une 
nouvelle  édition  ;  mais  je  ne  crains  pas  que  mes  lecteurs  m'en 
sachent  mauvais  gré.  Depuis  1871,  des  monnaies,  jusque-là 
inédites,  ont  été  recueillies;  des  observations  judicieuses  ont 
été  présentées  par  plusieurs  de  mes  confrères,  principalement 
par  MM.  Hucher  et  Muret;  j'ai  pu  reviser  avec  soin  les  lectures 
faites  par  ceux  qui  sont  mes  devanciers  dans  l'étude  de  la  nu- 
mismatique gauloise.  Le  recueil  que  je  publie  aujourd'hui,  aug- 
menté de  légendes  nouvelles,  débarrassé  de  lectures  fautives, 
peut  être  considéré  comme  aussi  complet  que  possible  et  au 
courant  des  recherches  scientifiques  faites  jusqu'en  1887. 

Si  on  n'y  trouve  pas  certaines  légendes  répétées  un  peu 
partout,  principalement  dans  les  livres  déjà  anciens,  c'est  que 
ces  légendes  ne  sont  plus  admises  ;  des  exemplaires  mieux 
conservés,  un  examen  plus  attentif,  ont  permis  de  les  faire 
disparaître.  En  effet,  dans  une  énumération  de  ce  genre,  des- 
tinée à  être  consultée  par  les  savants  qui  s'occupent  de  philo- 
logie celtique,  il  importe  de  ne  faire  figurer  que  des  formes 
certaines.  J'ai  dû  omettre  certaines  légendes  encore  incom- 
plètes ;  espérons  que,  plus  tard,  elles  pourront  prendre  place, 
avec  de  nouvelles  découvertes,  dans  un  supplément. 


Légendes  des  Monnaies  gauloises.  27 

On  remarquera  que  les  légendes  monétaires  paraissent  assez 
tard  sur  les  monnaies  gauloises  ;  les  ethniques  y  sont  assez 
rares  ;  ils  se  lisent  surtout  dans  le  Midi,  au  premier  siècle 
avant  l'ère  chrétienne,  ainsi  que  dans  la  Belgique,  mais,  pour 
cette  région,  après  la  conquête  ;  les  noms  propres  d'hommes 
sont  en  très  grande  majorité,  quelquefois  accompagnés  de  mots 
dans  lesquels  des  numismatistes  autorisés  voient  des  titres  ou 
des  indications  de  fonctions  :  vercobretos,  arcanlodan.  Quel- 
quefois on  lit  des  mots  qui  ont  un  sens  géographique  :  San- 
tonos,  Turenos,  par  exemple  ;  les  monnaies  qui  les  portent  ne 
se  trouvent  pas  sur  le  territoire  de  la  Saintonge  et  de  la  Tou- 
raine  de  manière  à  permettre  d'y  reconnaître  une  monnaie  lo- 
cale :  serait-ce  un  souvenir  de  lieu  d'origine  attribué  à  un  per- 
sonnage, appelé,  hors  de  son  pays,  à  remplir  certaines  fonctions  ? 

J'ai  dû  résister  au  désir  de  rechercher  dans  les  grands  re- 
cueils épigraphiques  les  noms,  et  il  y  en  a  plus  d'un,  qui 
sont  gravés  sur  les  monnaies  ;  il  m'a  semblé  que  j'aurais  em- 
piété sur  le  domaine  des  philologues  ;  il  appartient  à  des 
érudits,  comme  le  Directeur  de  la  Revue  Celtique,  de  faire  un 
pareil  travail  et  d'en  tirer  toutes  les  conséquences  qui  peuvent 
servir  à  la  science. 

A.  de  B. 

Ouvrages  consultés  :  ' 

Annuaire  de  la  Société  française  de  numismatique. 

L'Art  gaulois,  ou  les  Gaulois  d'après  leurs  médailles,  par  E.  Hucher. 

C.  I.  L.,  Corpus  inscriptionum  lalinaruiu. 

Duchalais,  Description  des  médailles  gauloises  faisant  par  lie  de  la  collection  de 
la  Bibliothèque  royale. 

Evans  (J.),  The  coins  of  the  ancient  Britons. 

Gaule  éSarb.,  Numismatique  de  la  Gaule Narbonnaise,  par  L.  delà  Saussaye. 

Heiss  (Aloiss).  Description  générale  des  monnaies  antiques  de  l'Espagne. 

Lambert  (E.),  Essai  sur  la  numismatique  gauloise  du  nord-ouest  de  la  France. 

Lagoy  (marquis  Rog.  de),  Essai  de  monographie  d'une  série  de  médailles 
gauloises  d'argent,  imitées  îles  deniers  consulaires  au  type  des  dioscures ;  avec  un 
supplément. 

1 .  Dans  cette  courte  bibliographie  nous  avons  voulu  simplement  indiquer 
les  ouvrages  les  plus  récents  auxquels  renvoie  la  liste  qui  suit.  Il  nous  a 
paru  inutile,  pour  ce  travail,  de  mentionner  les  nombreuses  publications  qui 
ont  précédé  et  dont,  par  le  fait,  les  indications  sont  relatées  dans  les  livres 
et  dans  les  brochures  énumérés  ici. 


28  A.  de  Barthélémy. 

Lelewel  (Joachim),  Etudes  numismatiques  et  archéologiques  :  type  gaulois  ou 
celtique. 

Nutn.  chron.,  Numismatic  chroniclc 

Pevghoux,  Essai  sur  les  monnaies  des  .-h  verni. 

Rev.  arch.,  Revue  archéologique. 

R.  n.  f.,  Revue  numismatique  française. 

R.  u.  b.,  Revue  belge  de  numismatique. 

Robert  (Ch.),  Numismatique  de  la  province  de  Languedoc:  la  période  an- 
tique (extr.  du  t.  2  de  la  nouvelle  édition  de  l' Histoire  générale  du  Languedoc). 

La  Sizeranne  (le  comte  de),  Le  trésor  de  Laveyron  (extr.  du  Bulletin  de  la 
Société  d'archéologie  de  la  Drôme). 


*  ABALLO.   Voy.  Caballos. 
AbVCATO,  or.  Rev.  num.  fr.  1836,  pi.  2. 

On  a  proposé  de  lire  Abugato. 

ABVDOS,  ABVDS,  or,  br.  Lelewel,  pi.  7, 
44;  Art  gaulois,  1"  partie,  pi.  79,  1. 

ACEDOMAPAT1S,  GAIV.Ii,  ar .Rev.  num. 
1862,  pi.  1,  6;   1883,  1,  s 

[A]CINCOVEPVS-PETRVCORl  OU  PER- 
RVCORl,  ar.  Art  gaulois,  Ve  partie, 
pi.  80,  2.  La  Saussaye  et  Longpérier 
lisaient  Petrucori,  ce  qui  est  contesté. 

*  ACVNO.    Lambert,    2e  partie,  pi.    17, 

1 1.  Voy.  Acussros. 

ACVSSROS,  br.  R.  n.  f.   1838,  pi.  21. 

ACVTIOS,  br.  Art  gaulois,  pi.  52,  2. 

ADDEDOMAROS,  ADDIDOM,  or.  Bre- 
tagne, J.  Evans,  pi.  14,  1  à  9;  Num. 
Chron.,   1856,  p.  1 50. 

ADIETVANVS:   REX    ADIETVANVS    FE- 

SOTIOTA,  ar.  Art  gaulois,  pi.  90,  2. 
ADNAMATI,  ar.  Pannonie,  Lelewel,  pi.  3, 

12.  Suse,  ADNAMA  TROVC1LL1  F.,C. 
/.  L.,  V,  2"  p.,  7269.  Cisalpine. 

AESV,  ar.  Bretagne.  J.  Evans,  pi.  15,  8. 

AFHA,  br.  R.  n.  f.  1844,  p.  365. 

*AIAOYIN.  voy.  vinpia. 

AINORIX,  ar.  Pannonie,  Cab.  imp.  de 
Vienne. 

*ALABBOAIIOS.  Voy.  le  suivant. 

ALABPOAIIOC-NIDE,  ar.  Lelewel, 
pi.  6,   12  ;  Duchalais,  p.  18. 

ALAV,  ALAVCOS,  br.  Art  gaulois,  ir0  par- 
tie, pi.  19,  2,  2"  partie,  17  h. 

AMBACTVS;  AMBACTVS-ARC,  br.  Lele- 
wel, pi.  9,  9.  Bretagne,  Mon.  gaul. 
inédites  de  Strasbourg,  1882.  (Extr. 
des  Mémoires  delà  Soc.d'arch.  lorraine). 

AMBILIEBVRO  ;  AMB1LO-EBVRO,  ar. 
Lelewel,  pi.  6,  17. 


47 


Voy. 
Lelewel, 


*  AMBIORIX.  Voy.  Ambili. 

AMEN,    or.     Salasses.    R.    n.  f.   1861, 

P-  344- 

AMIûRIX,    or.     Pannonie.     Cabinet   de 

France. 
AMM1,  billon.  R.  n.  fr.  1884,  pi.  s,  40. 
AM,     AMM1,     AMMINVS-DVN,    ar.,    br. 

Bretagne,  J.  Evans,  pi.  5,  1  et  2. 
AMYTO    BA(5'.Xc'j;),  br.  Cab.  de  France. 

*  AND.   Voy.  C  IND. 

*  ANDECA.    Lelewel,    pi.    14, 

le  suivant. 

ANDECOMBO-ANDECOM,    ar. 
pi.  S,  44  et  4$;  4,  47. 

ANDOBRV.   Voy.  Garmanos. 

AND,  ANDO,  ANDOCO,  or,  ar.,  br.  Bre- 
tagne. J.  Evans,  pi     5,  4  à  6. 

ANDV,  ar.  Cabinet  de  France. 

ANDVGOVONI-CEL1ICORIX,     ar.     Dict. 
d'arch.  celt.,  n"  68. 

ANNAROVECI,  hr.R.  n.b.  1862,  pi.  4,  1. 

ANNICOIOS,  ANNICCOIOS,  br.  Lelewel, 
pi.  9,  23. 

ANORBO.   Voy.  Dubnoreix. 

ANSALI,ar.  Pannonie,  Art  gaulois,  2"  par- 
tie, 72 

ANTE0,   ANTED  ;    ANTEDR1GV,    or, 
ar.  Bretagne,  J.  Evans,  pi.    1,7  et  8; 

ANÎ in  AÉn  -11'  AHM,  ar.   Gaul. 

narbonnaise,  pi.  n"!  11  à  17. 
AOPA,  br.  R.  n.  f.   1863,  p.   159- 
AOYEN1AO;   AOYE,    AYE,  ar.    Lelewel, 

pi.  S,  17.  br.  Cab.  de  France. 
AftAMOC-LMVNAT,  br.  Mil.  de 

Num.,  1,  p.  326. 
AP  (en  monogramme),    or.  Art  gaulois, 

pi.  101,  8  et  9. 
ARC,  br.   Voy.  Ambactu. 


1.   Ou  AGEDOMAPATIS. 


Légendes  des  Monnaies  gauloises. 


29 


ARKANT,  ARCANTODAN,  ARCANTO- 
DAN-ROVECA,  ARCANTODA-MAV- 
FENN,  br.  R.  n.  f.  1860,  p.  352  ;  Art 
gaulois,  ire  partie,  pi.  48,  1  ;  Bull,  de 
la  Soc.  d'agriculture  de  la  Sarthe, 
1857;  R.  n.  /.,  1862,  pi.  9,  1,  1  bis 
et  4. 

ARDA,  or,  br.  Lelewel,  pi.  9,  ?  1  a  34. 
R.  n.f.,  1885,  pi.  6,  14. 

AREC.  Voy.  Volcae. 

*  AREMAC10S.  Voy.  le  suivant. 
AUEM AGIOS,  br.  Art  gaulois,  pi.   182,   1. 
APHT0IAM02-NAMAY,  br.  Du- 

chalais,  p.  81  et  85. 
ARIVOS.  Voy.  Santonos. 
ARTOS,  br.  R.  n.f.,  1842,  pi.  21. 

*  ARTVE-COMVN.  Monnaies  de  Paestum 

de  Lucanie. 
ARVS.  Voy.  Segvsia. 
*ACTICO.  Voy.  KowmAo. 
?  ATAV,  or.  Bull,  de   la  Soc.  d'agr.  de  la 

Sarthe,  1857,  p.  107. 
ATECTORI,  br.  Lelewel,  pi.  9,  24. 
A0IIDIACI-A.  HIR.  IMP,  br.  Dict. 

d'arch.  celt.,    nn  120;  R.  n.f.,   18)8, 

p.  443. 
ATEPILOS.  Voy.  Tovtobocio. 
ATESOS,  br.  Mil.  de  Numismatique,  t.  1. 
ATEVLA-VLATOS,    ar.    Lelewel,    pi.   3, 

43  ;  5,  10.  ATVLA.  Inc.  chr.  Crémone. 

C.  /.  L.  V,  r"  partie,  41 17.  Cisalp. 
À0EN,  br.  Cab.  de  France. 
*A0HPIAC.  Voy.  A0HDIACI. 

ATH1RIMP.    Voy.  A0HDIACI. 

ATISIOS.  Toy.  Remos. 

*A0ORI.  Voy.  Addedomarus. 

AITIII,  or.  Cab.  de  Fr. 

ATP1LLIF.  Voy.  Orgetûrix. 

ATPI,  Gaul.  Narb.,  pi.  1,  32. 

ATTA,    ar.    Pannonie.    Ann.   de  la   Soc. 

Num.  1868.  ATTA.  1ns.  chrét.  à  Milan. 

C.  I.  L.  V,  2e  partie,  6183.  Cisalpine. 
ATVLLOS,  or.  Pannonie. 
*.AVAR1IC0  ou  AVACIICO,  ar.  Lelewel, 

pi.  7,  72  ;    Duchalais,    p.   7.  Lectures 

très  incertaines. 

*  [AVJARICI.  Voy.  Viriciu. 

*  [AlVARICO.  Voy.  Vaciico. 
AVAVCIA,  br.  Lelewel,  pi.  9,  26. 

*  AVDA1ACOS.   Voy.  Durnacos. 
AVDOS,  br.   R.  n.f.  1S47,  pi.   II. 
AVGII,  ar.  R.    n.    b.    1885,  pi.     13,  5. 

AVGE.  Vérone.  Cl.  L.  V,  ir"  partie, 
3398,  1927,  2 S9 1 ,  8342  Cisalp. 
AVLERCOS.  AVL1RCV;  AVLIRCO-EBV- 
ROVICO,  br.  Art  gaulois,  2"  partie, 
p  5 4  et  j  s  ;  Lelewel,  pi.  9,  46  et  47. 
—  Une  légende    lue  Aulercos,   Lamb. 


i.re  partie,    pi.   8,  25    est  de  Nercod; 

voy.  ce  nom. 
AVLOIV.  Voy.  LLWAOIB. 
AVN,  ar.  br.  Bretagne,  J.  Evans,  pi.  17, 

8. 
AVOT  on  TOVA,  br.  Cabinet  de  France. 

*  AVRATO.  Voy.  Cassisuratos. 

AVRC,  ar.  Art  gaulois,   p.   75  ;  Lelewel, 

pi.  1,  10. 
*AVRO,  Lelewel,  1,  10.  Voy.  le  précédent. 
AVSC,     AVSCRO,     AVSCROCOS,     AVS- 

CROCVS.  Voy.  Durnacos. 

BAO,  br.  R.  n.  f.  1859,  pi.  2,  n. 
BILINOS,  BHINOC,    ar.  Lelewel,    pi.  7, 

4;  Duchalais,  p.  J9;  Lambert,  r"1  p., 

pi.   11,   16. 
BHTAPPAT1C,  br.  Ch.  Robert,  pi.  4,  20. 
BIATEC,  ar.    Pannonie,  Lelewel.    pi.   1, 

4;  3,  IJ- 

BIRAGOS,  ar.  R.  n.  f.  1860,  pi.  8,  n. 

*BISO,  br.  R.  n.f.  1837,  p.  491  ;  Lele- 
wel, pi.  7,  73.  Cette  légende  n'existe 
pas. 

BITOYIOC  BACIAEY,  br.  Ch.  Robert, 
pi.  iv,  16. 

B1TOYCOC  BACI,  br.  Ch.  Robert,  p.  $8. 

BODVO,  BODVOC,  or,  ar.  J.  Evans, 
p.  135,  pi.  1,  2  et  3. 

BOIO,  ar.  Cab.  imp.  de  Vienne. 

B12KIOC.   Voy.  AoYYO<7TaX7]Ttov. 

*  BOYIBILON.  Voy.  le  suivant. 
BOYIB1TOY,     ar.    Lambert,    ira   partie, 

pi.  9,  16  ;  Art  gaulois,  pi.  73,  n"  54. 

*  BPI1NOS,  ar.  Lecture  très  douteuse. 
BRICA,  br.  Coll.  Ledain,  à  Metz. 
BRI-BRI:    BRIG-COMAN;     BRI-COMA; 

BRICO-COMA,  ar.  Lagoy. 
BRIGIOS,  br.  Art  gaulois,  pi.  98,  1. 
BVGIOS.  br.  Ait  gaulois,  2"  partie,  p.  $t- 
BVSV,  BVSSV,  BVSSVMARVS,  ar.  Pan- 
nonie, Lelewel,    pi.  3,    14.  Cab.  imp. 
de  Vienne. 

CABaLLOS,  br.  R.  n.f.  1855,  pi.  8,  4. 
CABE  COL,  CABE-LEPI,  ar.,  br.  Cabel- 

lio  colonia,    Lelewel,   pi.    8,    14,  26; 

Num.  de  la  Gaule  narbonnaise,p\.  7. 
CA-1VR  ou  AVR,ar.  Art  gaulois,   p.  75. 

*  CACIAC-CII.  Voy.  Caliagiiic. 
CAL-MOR  ou  ROVV,  ar.  R.   n.f.  1860, 

p.  417.  Quelques  personnes  pensent 
que  Cal  est  l'abrégé  de  Calitix. 

CALEDV,  CALEDV-SENODON,  ar  R. 
n.  f.  1847,  pages  167,  1677,  et  178, 
187.  Lelewel,  pi.  3,  5 1  ;  R.  n.  f.  1860, 
p.  188. 

CALIIDV,  br.  Lelewel,  pi.  7,  1 1  ;  Art 
gaulois,  p.  5 1  . 


3° 


A.  de  Barthélémy. 


CALIACI1S,  br.  R.  n.  f.  1855,  p.  365 . 
CAL1TIX.  Voy,  Cosii. 
CALLE.  Voy.  Eppil. 
CALMINOXOV,  br.  Cab.  de  France. 
*CAAOY,  CAAOYA-MAN,  br.  Lec- 
tures inexactes  d'une  légende  très  dif- 
ficile à  déchiffrer  dans  laquelle  Saulcy 
croyait  retrouver  le  nom  de  Galba,  roi 
des  Suessions.  R.  n.f.  1859,  p.  401. 
CAM,  ar.    Lelewel,    pi.    8,  2  ;  R.   n.  f. 

1836.pl.  8,   11. 
*  CAMaON.  Voy.  Cambil 
CAMBIL,  br.  Dict.  d'arch.  celt.,  n"  135. 
CAMBOTRE,    ar.     Lelewel,    p.    $,    11; 

Art  gaulois,  pi.  64.  2. 
CAMVL-CVN0BEL1N1  ;  CAMV-CVNO  ; 
CAMVLODVNO-CVNO,  or,  ar.,  br. 
Bretagne,  Lelewel,  pi.  8,  51,  5?  à  $6; 
J.  Evans,  pi.  9,  1  à  3  et  14  ;  1 1,  i  à 
4  ;  12,  9  à  14  •.  13,  1  à  4.  —  Voyez 
aussi  Cunobelini. 
CAMVLO,  or.    R.  n.  f.  1863,   p.    501  ; 

Art  gaulois,  pi.  101,  6. 
CAND,  ar.  Art  gaulois,  p.  82.  Il  se  pour- 
rait  que   cette   légende  lue   à   rebours 
DNAC,  fut  une  abréviation  àzDumac; 
le  type  autorise  cette  hypothèse. 
CANT0R1X.  Voyez  Turonos. 
CARMaNOS.  Voyez  Garmanos. 
CARS1CI0S-|C0|MMI0S,    ar.   Duchalais, 

n°  45- 
CASouGAS,  or.  R.  n.f.    1863,    pi.  16. 

2.   1848,  p.  1  so. 
CASSISVRATOS-. .  .  LANTCS,  ar.  R.  n.f. 

1883,  pi.   1,  7. 
CATAL,  br.  Art  gaulois,  pi.  5,  1  et  2. 
*CATAV.  Voyez  Catal. 
CATTI,   or.    Bretagne.    Lelewel,   pi.  8. 

17  :  J.  Evans,  1,  4. 
CATTOS.  Voyez  Cisiambos. 
'  CAV.   1       r  Cal  et  ,\rsc. 
?  CAVLN,   ar.  R.  n.  f.     1860,    p.    2(9. 
Ann.  de  la  Soc.  de  r.um.  1867.  Lecture 
très  conjecturale  de  Saulcy. 
"CAVNG  ou  CNVO.   Voyez  Cn.  Vol. 
CELIIGORIX.  Voyez  Andugovoni. 
CELNVM-ZE,    or.    Pannonie,    Art  gau- 
lois, p.  24. 
'CEVARIX.  Voyez  Varixce. 
CICIIDVBRIIIPAD,  br.  Duchalais,  n»  $; 

Art  gaulois,  pi.  20,  2. 
C1CVTAN0S,  br.  R.  n.  f.  1883,  pi.   1,4. 
CIECIM.  or.  Pannonie.  Art  gaulois,  p.  i\. 
'C1NCVNV.   Voyez  Caliagiis. 
CISIAMBOS;    CJSIAMBOS  CATTO  VER- 
COBRETO,  br.  R.  n.  f.  1837,  p.  12  ; 
1857,  p.   403:    1861,    p.   165;    1862, 
p.  177;  Lelewel,  pi.  8,  41  et  42  ;  Art 
gaulois,  pi.  56,   1. 


'CISIARECO.  Voyez  Cisiambos. 

'CISIARIX,  id. 

C.I.V,br.  Colonia  Julia  Viennensis,  Num. 

de  la  Gaule  Narb.,  pi.  1  s,  2. 
CN.VOL.  Voyez  Volvnt. 
COBROVOMARVS.  ar.  Pannonie.   R.    n. 

f.  1840,  pi.   19,  9.  Duchalais,  p.  406. 

Ann.  de  la  Soc.  de  Num.  1868. 
"COGESTIVS.  Voy.  le  suivant. 
COGESTLVS,     ar.     Pannonie,     Lelewel, 

pi.  7,  38.  Ann.  de  la  Soc.  de  numism. 

1868. 
C010S.   Voyez  Orgetorix. 
'  COISA,  ar.  Pannonie,  Cab.  de  France. 
s.  Voyez  Cose,  Bric,  Coom,  Ved. 
M10S.  Voyez  Garmano,  Tino,  Viri, 

Verica,  Carsicios  ? 
COMMIOS.    or.     Bretagne.     J.     Evans, 

pi.  1.  10. 
COMVX,  or.  Bretagne.  J.  Evans,  pi.  1,  5. 
"CONA.  Voyez  Conta. 
CONAT,  br.  R.  n.f.  1859,  pi.  13,  18. 
CONE.    .D,    br.    Lambert,    r"    partie, 

pi.  10,  4.  R.  n.  f.  1865,  p.   148. 
CONGE,  CONGESA,  ar.  Ann.  de  la  Soc. 

de  Num.  Lelewel,  p.  2S2. 
CONTA  ou  CONTVA,  ar.   R.  n.f.  1844, 

p.  404;  18.47,  p.  266. 
CONNO.  EPILLOS-SEDVLVS,  br.   R.  n. 

f.  186$,  p.  137. 
'CONTOVIOS.  Voyez  Contovtos. 
CONTOVTOS,  br.  Art  gaulois,  pi.  20,   1. 
COOM-COMAN,  ar.  R.  n.f.  1860,  p  417. 
COPO,    ar.   Ami.    de    la    Soc.   de   num. 

1868,  p.  7. 
CORIARCOC     [CIIVICOVI]     —   A.    H1R. 

IMP,  br.  R.  n.  f.  1858,  p.  144. 
'CORILISSOS.  Voyez  Coriarcos. 
C0SI1-CALITIX,  3f.  R.  n.  f.  185 1,  pi.  I, 

6;   1860,  p.  417.  Art  gaulois,  p.  81. 
COSII-CONIAN,  ar.  Art  gaulois,  p.  81. 
COVED,  COVEDJM.    ar.    Num.  de  Lan- 

guedoc,  pi.  3,  14  à  17. 
COVNOS,  ar.  Ann.  de  la  Soc.  de  Num., 

1868. 
COVRA  ou  COLRA,  ar.   Num.    du   Lan- 
guedoc, pi.  III,  20  et  21. 
CRAB,  ar.  Bretagne,  J.  Evans,  pi.  5,3. 

*  CRAMITOS.  Voyez  Karnitos. 
CRIf.R,CRICRV,CRICIRO,  CRICIRONI, 

CRICIRV,  or,  ar.,  br.  R.  n.  f.  188$, 
pi.  6. 

*  CRITVRIX.   Voyez  INECRITRVIX. 
CVBIIO,  br.  R.  n.  f.  1868.  pi.  1,  13. 
CVBIOS,  ar.  R.  n.  f.  1866,  p.  248. 
CVNOBELI-CVN;CVNO-SOLIDV;CVNO- 

BEL1NVS  REX-TASC;  CVNOBELINI- 
TASC10;  CVNO-TASCF;  CVNO-TAS- 
CIO;  CV.N0BIL-TASC.F1L;  CVNOBE- 


Légendes  des  Monnaies  gauloises. 


ii 


LINI-TASCIOVANI.F;     CVNOB-TAS- 

CIIOVAMT1S,  or,  ar.,  br.  Bretagne.  J. 

Evans,  pi.  20,    1  à   14;    il,  e>  à   (4; 

12,  1  à  7. 
'CVNVANOS.   Voyez  Dcanaunos. 
CVPlNACIOS-VL,ATOS,  br.   Mèm.  de  la 

Soc.     des    Antiq.    de   l'Ouest,    t.    37, 

n°*  41  et  42. 

DARA.  Voyez  Diarilos. 

DCANAVNOS,  DCANAOS,  br.  Art  gaulois, 

p.  89. 
AEIOYGIIAGOC,  br.  R.  n.f.  i8S4, 

p.  85;  18J9,  pi.    13,   2;  Art  gaulois, 

p.  68. 

*  AEIOYN,  AEIOYIX.  Voyez  le  nom 
précédent. 

DEVIL,  ar.  Pannonie,  Cab.  de  France. 

*  DIAOVLOS.  Voyez  Diasulos. 
DIARILOS-DARA,    ar.    Art  gaulois,     pi. 

86,  1. 
D1ASVLOS,    ar.    R.  n.f.   1852,  p.    28; 

Rev.  arch.  1868,  p.  130. 
*AIAY.  AIAVGOS.  Voyez  alaucos. 

*  DICOMJ  pour  DICOI,    DIKOA,   ar.  Ci- 

salpine. R.  n.f.   1861,  p.  333  et  345. 
DNAC.  Voyez  Cand  et  Durnac. 
DOC1  ;  Q.  DOCI-SAMF,  ar.,  br.  R.  n.  f. 

1860,  p.  179  ;  1861.  p.   88  ;  Art  gau- 
lois, p.   107. 
DOMISA.  ar.  Pannonie. 
DONNADV,  br.  Péghoux,  n°  38. 
DONNVS-ESlANNIIou  ESIANNIF,ar.  Art 

gaulois,   p.   83.   C'est  par  erreur  que 

l'on  a  joint  ce   nom  à  celui  de  Dur- 

nacus. 
AOYBXO,  ar.  R.  n.f.  1866,  p.    237; 

Art  gaulois,  p.  132. 
DRVCCA;  DRVCCA-TVRONA,   br.  R.  n. 

f.  1846,  pi.  7,  3  et  4. 
DVBXOCOV.   Voyez  Dubnoueix. 
DVBNOREIX-DVBNOCOV;   DVBNORJX- 

ANORBOS;    DVBNORI,   ar.  R.   n.  f. 

18^3,  P-  S  J  '866,  p.  244. 
DVBN,      DVBNO,    DVBNOVHLLAVNOS, 

ar.     Pannonie   et    Bretagne.    Lelewel, 

pi.  8,  20;  J.  Evans,  pi.  IV,  6  à  12. 
DVMN-TIG1PSENO,     or.     Bretagne,    J. 

Evans,  pi.  17,  3. 
DVMNOCOVEROS,   Voyez  Vousios. 
DVMNOVEROS.  or.  Bretagne,  J.  Evans, 

pi.  17,  2. 
DVN.  Voyez  Amminus. 
DVRaT-IVLIOS,  ar.  Art  gaulois,  pi.  90, 

1  ;  Lelewel,  pi.  7,  12. 

*  DVRATO.  Voyez  Cassisurato. 
DVRNACOS-AVSCRO,  AVSCROCOS,  DVR- 

NAC-EBVRO      et     EBVROV,     DVRN- 
AVSC,  DVRNAC-AVG1I,   DVRNACVS- 


DONNVS,  DVRNACVS-AVSCROCVS, 
ar.  R.  n.  f.  1862,  p.  9;  1853,  P-  5  ; 
1869,  p.  2  ;  R.  n.  b.   186c,  pi.  13,  5. 

*  DVRNOCOV    Voyez  Dvbnocov. 

EAB1ARI,  ar.  Pannonie.  Ann.  de  la  Soc. 

de  Num.  1868. 
?IIARO,  br.  Art  gaulois,  p.  76.   Lecture 

très  douteuse. 
EBVRO,   EBVROV.  Voyez  Ambilli,  Dvr- 

nacos  et  RlCANT. 
EBVROV1CO.  Voyez  avlircvs. 
ECCAIOS,    ECCAIO.   1ICCA10,    ar.,    br. 

R.n.f.   1867,  p.   173  ;  Pannonie.  Ann. 

de  la  Soc.  de  Num.  1868. 
ECEN,    ECE,    br.     Bretagne,    J.    Evans, 

pi.  15,  1  à  5 
HCOYArEn,    br.    r.    n.  f.    1865, 

p.  151. 

*  IICVIX.  Lambert,    r"  partie,  pi.  9,  1. 

Voyez  Ibruix. 
EDV1S-ORGETIRI,    ar.    R.  n.   f.    1860, 

P    97- 
'EINOONNDOC.  Voy.  IlevvoouivSoç. 
EIVICIAC,  br.  R.  n.f.  1868,  p.  407. 
EKPITO,  br.  R.n.f.  1868,  p.  409. 
EIOJTIAICO,  or.  R.  n.f.  1852,  p.  201. 
HAIKIOY  MA2S,  br.  Cab.  de  Fr. 

*  ELIOCAOI.  Voyez  Veliocathi. 
EAKESOOYIS-TASGIITIOC,  br. 

R.  n.  f.    1864,   p.   25 1.  Art  gaulois, 

pi.  2,  1. 
ELViOMAR,   ar.   Pannonie,   Ann.  de   la 

Soc.  de  Num.  1868. 
EMBAV,  br.  Cab.  de  France. 

*  EMB1TO  ou  EMPITO.  Voyez  Ekrito. 
EPAD,    ar.,    br.    Art  gaulois,  pi.    3,  2; 

2"  partie,  p.  9$.  IIPAD.  Voyez  Cicimu- 
Bri. 

Ei'AïI,  TASC.1F-EPATICCV,  or,  ar.  Bre- 
tagne, J.  Evans,  pi.  8,  12  à  14. 

EPENOS,  EPENVS-EniINOC, 
EIIHN,  br.  R.  n.f.  18J9,  p.  81  et  10. 

EPI.  br,  Mil.  de  Num.,  1878. 

EPILLOS.  Voyez  Conno. 

IIPOS,  br.  Cab.  de  France. 

EI1IIA,  br.  Lagoy,  Not.  pi.  n°  2. 

EPP1L  COMF,  EPPILLVS  COMF,  EPPI 
COMF,  EPP  REX  CALLE,or,  ar.,  br. 
Breiagne,  J.  Evans,  pi.  3,  8  à  13,  4, 
2  à  5. 

I1POMIIDVOS,  ar.  R.  n.  f.  1843,  P-  4'  G 
1864,  p.  349. 

*  IIPOM11AOS.  Voyez  Epomedvos. 

*  ERCOD.  Voyez  Nercod. 
ESIANNI.  Voyez  Donnvs. 

IISVPAS.  Bretagne.  Art  gaulois,  2e  par- 
tie, p.  149. 


32 


A.  de  Barthélémy. 


ESV10S,  ar.  Mil.  de  Num.,  t.  I,  p.  }ll; 
R.  n.  188} .  pi.  I,  3. 

EVOIVRIX,  ar.    Pannonie.   Ann.   de  la 

Soc.  de  Num. 
EVORNOS,  br.  R.  n.  f.  1886,  pi.   Il,  2. 

*  FABIARI.  Voyez  Eabiari. 

GARMANOS-COMIOS  ou  COMMIOS,  ar. 
Art  gaulois,  pi.  62,  2,  et  2"  partie, 
p.  100. 

GARMANO--ANDOBRV,  br.  Art  gaulois, 
p.   162. 

"GELISVC.  Voyez  Segisuc. 

GERMANVS-INDVT1LLIF,  br.  Art  gau- 
lois, pi.  $0,  2. 

G1AMILOS,  GIAMILO-SIINVI,  ar..  br. 
Art  gaulois,  pi.  82,  2.  Bull,  de  la  Soc. 
des  Antiq.  de  l'Ouest,  1877. 

rAANIKON,  ar.  Lelewel,  pi.  3,  8. 

GOTT1NA,  or.  Lelewel,  pi.  4,  25. 

Hirtius.  A.  HIR.  1MP.  br.  Voyez  Athe- 

DIACI,  COS.1ARCO,    INECRITVRIX. 
IBRVIX. 

*  1CRITVR1X.  Voy.  Iniicritvrix. 

*  IEMEP.  Voyez  Smer. 
IFELITOVES1,    IFLKOVESI,    IFNKOVE, 

ar.  Cisalpine,  Lelewel,  pi.  7,  8. 

*  1LENTOS.   Voyez  Cassisvrato. 

?  IMIOC1,  ar.  R.  n  f.  1862,  p.  22.  Cette 
légende,  très  douteuse,  pourrait  être, 
suivant  M.  Ch.  Robert,  KwKOCHX  '. 

INAM,  or.  Bretagne.  J.  Evans,  p.  149. 

INDVTILL1F.  Voyez  Germanvs. 

INIICRITVRIX.  A.  HIR.  IMP.  br.  R.  n. 
f.  1858,  p.  144. 

IOTVRIX,  ar.  Pannonie. 

?  IOVERC,  br.  R.  n.  b.  1864,  p.  437. 
Duchalais,  page  269. 

[RAVSCI,  ar.  Pannonie. 

?  1RNERIX,  ar.  Lelewel,  pi.  6,  n. 

ISVNIS,  br.  Dict.  d'arch.  celt.,  n°  147. 

IVLIOS.  IVLIV,  1VLIVS.  Voyez  Dvrat, 
Acedomapatis,  Togirix. 

KABAAA,  or.  Cabinet  de  France. 
KABE  (Cavaillon\  br.  Art  gaulois,  p.  128. 
KAIANTOAOY    BASfAEÛS,    br. 

Robert,    Num.   du    Lang.,  pi.    4,    18 

et  io. 
KAINIKHTÛN,  ar.  Lelewel,  pi.  3,9. 
KAA,  KAAETEAOY,  ar.   R.  n.   f. 

1858,  p.  281  ;   Lelewel,  pi.  4,  40    et 

41.  Art  gaulois,  pi.  58,  i  à  4. 
KARI0A,  br.  Ait  gaulois,  pi.  18,  2. 

*  KAPNITOC  ou  KAPONTOC.  Voyez  To- 

GICA10T0S. 


KASILOI,   or.  Salasses.    R.    n.  f.   1861, 

P-  Î44- 

KaSIOS,  ar.  Cisalpine.  Cab.de  France. 

KACTIAO  (T.  TAAY),  M.  Voyez 
Samnaget. 

KAT,  or.  Salasses,  ibid. 

?  KENVEIA,  br.  Lelewel,  pi.  4,  JJ.  Lec- 
ture très  incertaine. 

KEKVA,  br.  Cab.  de  France. 

*  KERA,  KERATIX.  Voyez  Epat,  Epati. 
KOIIAKA.  br.  R.  n.  f.    1863,  pi.   16,  j. 
K0I10C,  ar.  Cab.  de  France. 
KcoKOCIÔC.  Voyez  Imioci. 
KONAT,  br.  R.  n.  f.  18J9,  P-  404. 
KRACCVSrREMOS?   br.  R.  n.  f.    1851, 

pi.  1,  5;  Art  gaulois,  p.  131.  Mil.  de 
Num.  t.  I"',  p.  163. 

*  KP  AMI  TOC.  Voyez  Karnitoc. 
KPISSOou  KPISSO,   br.  R.    n.  f. 

1866,  pi.  13,  1,  et  1869,  p.  10. 

AAKVAQN,  ar.  Num.  de  la  Gaule 
Narb.  pi.  1 ,  20. 

LAVOMARVS.  ar.  Pannonie.  Ann.  de 
la  Soc.  de  Num.  1868,  p.  20.  Ducha- 
lais avait  lu  LANORVIARVS. 

LEMISOEXSC,ar.  Mil.  de  Num.,  t.I.p.  86. 

LEXOVIO  (Semissos  Lexovio  publico,  Si- 
missos  publicos  I.ixovio),  br.  Art  gau- 
lois, p.  $6,  1  ;  R.  n.  f.  1861,  p.  l6j; 
1862,  p.  177. 

'LIAVS1I.  Voyez  Ravit. 

*  LICVTANOS.  Voyez  Cicvtanos. 

*  L1H0VI-MACCA.  Voyez  MaaaaX'.rjwv. 

*  L1PEK0.  Voyez  Pirvcos. 

*  LISCVS.  Lelewel,    1,   16.  —  Mauvaise 

lecture. 

LIT  A,  LITAV,  L1TAVICVS,  ar.  R.  n.  f. 
1860,  pi.  4  et  5. 

LIXOVIATIS,  br.  R.  n.  f.  1862,  pi.  6, 
S  et  8  bis. 

AOrrOCTAAHTQN-BQKIOC,  ou 
AOYKOTÎOC;  AOrrOSTAAH- 
PAVRP,  br.  Num.  du  Languedoc. 

AOM,  br.  R.  n.f.  i856,  p.  416. 

AOSS,  br.  Type  massaliète.  Cab.  de 
France. 

AOYKOTIOC.  Voyez  Longostaleti. 

LVCIOS,  LVCCIOS,  ar.  A',  n.  f.  1862, 
p.  25;  Art  gaulois,  p\.  22,  2  et  2" par- 
tie, p.  98. 

LVCOTIOS,  ar.  R.  n.  f.  i86j,  pi.  2, 
140  et  14 1 . 

LVCVDVNI,  ar.  Duchalais,  p.  136. 

LVXTI1RI0S,  ar.,  br.  Duchalais,  p.  13; 
Revue  celtique,  t.  4,  p.  317.  Quelques 
personnes  croient  qu'il  faut  lire  LVX- 
TIIKIOS. 


Légendes  des  Monnaies  gauloises. 


n 


M,  MA,  ar.  Num.  de  la  Gaule  Narbon- 
naise.  MA,  br.  R.  n.  f.   1860,  p.  166. 

"MADVBI1N0S.  Voyez  Matvcenos. 

MAGVRIX,  br.  Art  gaulois,  p.  45. 

?  MAGVS,  ar.  R.  n.  f.  1840,  p.  16. 
L'authenticité  de  cette  pièce  est  très 
douteuse. 

MACCA,  MASSA.  MAS2AAIH- 
TQN,  ar.  Num.  de  la  Gaule  Narb. 

MATVCIINOS  ou  MATVGIINOS,  br.  Le- 
lewe!,  pi.  6,  45. 

MAV,  br.  R.  n.  f.  1856,  pi.  3,  13. 

MAVC.  Voyez  Ninno. 

MAVFENN1VS.  Voyez  Arcantodan. 

MEDIO,  MEDIOMA,  br.  Lelewel,  pi.  6, 
41  et  42. 

MOR.  Voyez  Volvnt. 

MOTV1DIAC,  br.  Cab.  de  France. 

MVNAT  (L.  Munatius).  Voyez  apamos. 

MVR,  MVRI110,  ari  R.  n.  f.  1847, 
pi.  13,  8;  1868,  p.  416.  Ann.  delà 
Soc.  de  Num.  1867. 

?  MVRINO.  Voyez  le  nom  précédent  :  lec- 
ture très  douteuse. 

NAMA.  Voyez  Aretoilmos. 

NAMASAT,  br.  Num.  de  la  Gaule  Narb. 

pi.  19,  2  à  4. 
*  NEIOVIOOAIIAAOC.  voyez  p™- 

NOOVINDOS. 

NEMAY,  NEM  COL,  ar.,  br.  Num.  de  la 

Gaule  narb. 
NERCOD-NERCOD,  ar.    Mèm.  de  la  Soc. 

des  Antiq.  de  l'Ouest,  t.  37,  n°  jç. 
NEDENCN     ou   NERENCN,    en    caract. 

celtib.,  br.  Dict.  d'arch.  celt.,  n°  30;  A. 

Heiss.  p.  434. 
N1DE.  Voyez  Alabrodeos. 
NINNO-MAVSAIIOC,  ar.  Bull,  de  la  Soc. 

d'agr.  de  la  Sarthe,  1857  ;  Art  gaulois, 

P-  67. 
NIREI  MVTINVS,  br.  Cab.  de  France. 
NONNO,  NONNOC,  NONNOS,   ar.    Pan- 

nonie.  Ann.  de  la  Soc.  de  Num.  1868. 
?  NOVIIOD,  ar.  R.  n.  f.  1859,  pi.  13,  6. 

Légende  douteuse. 
'NVCOTNVIOS,  mauvaise  lecture  de  Ar- 
cantodan. 

'ODCODRIL-SIIGIIDI.  Voyez  Orcopril- 

Sesedu. 
'OBDVRV.   Voy.  Oltvba. 
OIOIXVO,  ar.  R.  n.f.  1863,  p.  15s. 
*OISAM,br.  Lelewel,  p.  7,  47.  Mauvaise 

lecture  pour  Q.  SAM. 
*OAAIOS.  Lelewel,  pi.  3,  13.  Voyez 

NONNOS. 

OLTIRIO,  ar.  Salasses.  R.  n.f.  1861. 
OLTVBA,  ar.  Cab.  de  France.    Peut-être 

Revue  Celtique,  IX 


la  même  pièce  que  celle   lue  OBDVRV 

par  M.  de  la  Sizeranne. 
'OMOPATIS.   Voyez  Acedomapatis. 
OMAOS   ou   OMAOS,    br.    Duchalais, 

n.  550. 
POMONOION    ou   OMONDON,    or.    Art 

gaulois,  ire  partie,  pi.  101,  2.  Lecture 

très  douteuse  ;    on   a    proposé    aussi 

...DMONSON. 
ONN1N.  Voyez  Ninno. 
ONOBA,  ar.  Cab.  de  France. 
ORCOPR1L-SIIS1IDI,    ar.  R.  n.  f.  1884, 

pi.   V,   1. 
ORGET,  ORGETIR1X-ATPILLIF,  ORCII- 

TIRIX-COlOS,       ORGETIRIX-EDVIS, 

ORETIR-ATPILLIF,  ar.,  br.   R.    n. 

1860,  p.  97. 
OSNAll,  br.  Bull,  de  la    Soc.   d'agr.  de 

la  Sarthe,  1857,  p.  109. 
OY1   KY.  ar.  Ait  gaulois,  p.  73. 

*  OVACIA.  Voy.  Macca. 
'OVANDIL.  Voyez  Vindia. 
OYOAE.  or.  Cab.  de  France. 

*  OX1B11.  Voyez  Oltirio. 

*  n.VROS.  Voyez  iiapos. 

PARP  ou  PAVRP.  Voyez  Longostaleti. 
nAVLOIB-SOLIM,  or.  Art.  gaulois, 

pi.  72,  2. 
PENNILE-RVP1L,  ar.  R.     n.  f.    1883, 

pi.  1,  16. 
IIENNOOVINAOC,  ar.  Art   gaulois, 

pi.  76,  2. 
PETRVCORI.  Voyez  Acincovepvs 
4>IAinnOY,    or.    Statères    arvernes. 

Cab.  de  France. 
P1CT1LOS,      ar.     P1XTIL,     PIXTILOC, 

P1XT1LOS,  br.  Art  gaulois,  pi.   36,  2; 

3,  1,  23,  1  et  2,  26,  1  et  i,  32,  1  et 

2,  33,  2,  $6,  2,  101,  5. 
P1RVKOS  ou    P1RAKOS,    ar.    Cisalpine. 

Journal  des  Savants,   1877,  p.  63  j  e/ 

seq. 
PIRVKOI,  ar.  Salasses.  R.  n.  f.    i86i,t 

P-  345. 
T.  POM-SEX.    F.    br.    R.    n.  j.    1860, 

p.  175,  1866,  p.  S7- 
PRIKOV,   or.  Salasses.  R.   n.    f.   1861, 

P-  H3- 

0^.  D0C1.  Voyez  Doci. 
Q_  SAM.  Voyez  Sam. 

RATVMACOS-SVTICOS,  br.  Art  gaulois, 

pp.  4S  et  48. 
RAVIS,  ar.  Pannonia.  Art  gaulois,p.  J2- 
REMO-REMO,  br.  Art  gaulois,  p.   103. 
REM0S-ATIS10S,  br.  Lelewel,  pi.  7,  10. 
PirANTIKO,  br.   Lelewel,  7,  36;  .R. 

> 


34 


A.  de  Barthélémy, 


n.  f.  i  S  s  6.  p.  3.  Num.  du  Languedoc, 

pi.  4,   19. 
RICANT-EBVRO,ar.  A\  n.  f.  1860, p.  415. 
RICOA,  ar.  Cisalpine.   Num.  de  la  Gaule 

Narb.,  pi.  14. 

*  RICOM,  ar.   Voy.  Epomedvos.  R.  n.  f. 

1843,  p.  411. 
RICON.  Voyez  Tascio. 
RICOV, ar. Salasses.  R.  n.  f.  1861,  p.  34$. 
ROVECA-ARCANTODAN,  br.   —  ROVE- 

CA,  POOY1KA,    or,    ar.   Bull,   de    la 

Soc.    d'agr.  de  la   Sarthe,    18 $7;  Art 

gaulois,  pi.  jo,  1,  et  66,  2. 
?  ROV1CV,  or.  Cab.  de  Saint-Germain. 
ROVV,  ROM  ou  MOR.  Voyez  Volvnt. 
RVB1VS,    br.    R.    n.    b.     1865,  pi.    4, 

n"*  169  et  173. 
RVFI,    RVFS,    br.   Bretagne.   J.  Evans, 

pi.  7,  12  et  14  ;  8,  n°  1. 

*  RVS  (col.  Rus).  Mauvaise  lecture  d'une 

monnaie  de  Berytus  de  Phénicie. 

SA.  or.  Art  gaulois,  pi.  41,  I. 

SACTO,   SACTNOS,  br.    R.  n.  f.    1853, 

pi.  1,7. 
SAEMV    ou   SAFMV,    ar.   Bretagne.   J. 

Evans,  pi.  15,  7. 
SAM  F.  Voyez  Q\  Doci.  —  Q.  SAM.  R.n. 

f.  1838,  p.  1;  1861,  p.  87. 
LAMNArHT-r.   KAAV.   KACTI- 

KO;ÏÏAM,  br.  R.n.f.  1863,  p.  I S 3- 
SANTONOS,  SANTONO-ARI  VOS,  ar.  Art 

gaulois,  pi.  40,,  1  ;  2"  partie,  p.  72. 
SEDVLLVS.    Voyez  Conno  Epillos. 
SEGO.  TASC10-SEGO,  or,  ar.  J.  Evans. 

pi.  8,  10  et  11. 
CÉrOBI,  ar.  Num.  de  la  Gaule  Narb., 

pi.   14. 
SEGVSIAVS-ARVS,     ar.     Art     gaulois, 

pi.  7,  2. 
SEL1SV,  br.  Lelewel,  pi.  7.  4S  ;  Art  gau- 
lois, pi.  28,  2. 
SEMISSOS,  S1MISSOS.  Voyez  Lexovio. 
SUN  ou  NUS,  or.  Statère  arverne  ;  Cab. 

de  France. 
SENAS,  ar.  Lelewel,  pi.  9,  1  et  2. 
SENODON.  Voyez  Caledv. 
SI  IN  VI.  Voyez  Giamilos. 
SENV,    SIINVS,    br.    R.   n.  fr.    1863, 

p.  297.  Voyez  Giamilos. 
SEQVANOIOTVOS,  ar.  Artgaulois,  pi.  78, 

2. 
CES1COV,  br.  R.  n.  f.  1883,  pi.  1,  10. 
SETV,  ar.  Cab.  de  France. 
S  EX  F.  Voyez  Pom. 

*  SIRATOS.  Voyez  Stratus. 
SLAMB-GIANTOS,  br.  Art  gaulois,  p.  90. 

La  légende  du   revers   pourrait  être  la 
fin  du  nom  Togiantos.  Voyez  ce  mot. 


CEMEP,  br.  R.  n.  f.  1857,  p.  389,  1866, 

p.  41  j .  Artgaulois,  p.   120. 
'  SOBISOVOMARVS.     Voyez     Cobrovo- 

marus. 
SOBIVS.   Voyez  Togiant. 
SOLIDO.  Voyez  Cuno. 
SOLIMA,   COLIMA,   or,  ar.  Artgaulois, 

pi.  70,  1  et  2,  et  2'    partie,  p.  134. 

Voyez  aussi  Pauloib 
SOLLOS-SOLLOS,    br.    R.    n.  f.     1844, 

p    85.  Rev.  arch.  1884.pl.  3,  16. 
SONA,  SONCAT,   SONTCa,   br.  Cabinet 

de  France. 
SOSO,  br.  Cab.  de  France. 

*  SOSTI.  Voy  Epos. R.n.f.  1857,  pi.  11,4. 
SOTIOTa.  Voyez  Adietvanvs. 
STRATOS,   br.   Art  gaulois,   p.    187.    Il 

n'est  pas  sûr  que  l'on  doive  lire  Stratos 

ou  Siratos. 
SVEI,  br.  Bretagne.  J.  Evans,  pi.   1,  9. 
SVICCA,  ar   Pannonie.  Ann.    de  la  Soc. 

de  Num.  1868. 
SVT1COS,    SVT1COS.    Voyez  Ratumacos 

et  Veliorathi. 

*  TAMBIL.  Voyez  Ambili. 

TASCIO.  Voyez  Cvnobelinvs,  Sëgo,  Epat- 
ticu,  Ver. 

TAS,  TASC,  TASCIA,  TASCIA,  TASCIA- 
VA,  TASCIOVAN,  TASCIO  VRICON, 
TASCIRICONI  TAXCI.  or,  ar.,  br.  Bre- 
tagne, J.  Evans,  pi.  5,  7  à  14;  6,  }  à 
9  ;  8,  6  à  9. 

TASGET1,  br.  R.  n.f.  1864,  p.  251.  — 
TASGI1T10S.  Voyez  Elkesooviz. 

TAT1NOS,  br.  Duchalais,  p.  110. 

TEVT,  br.  Cab.  de  France. 

TIGIPSENO.  Voyez  Dumn. 

TINC-COMMIF,  TIN-COMF,  TINC-C.F, 
TIN-COM,  or.  Bretagne,  J.  Evans, 
pi.  1,  1  à  14;  2,  1  à  8. 

T1NDV,  or.  J.  Evans,  pi.  1,  10. 

TOC-TOC,  br.  Art  gaulois,  p.  106. 

TOCIANTou  TOGIANT-SOBIVS,  br.  Art 
gaulois,  p.  j6.  Ce  nom  semble  accom- 
pagner sur  une  autre  pièce  celui  de 
Slamb. 

TOriKAIOITOC,  br.  Mil.  de  Num.. 
1878. 

TOGIRIX-TOGIRI,  1VLIV  TOG1R,  ar., 
br.  R.  n.  f.  1802,  p.  12. 

tovaii.  Voyez  avot. 

TOVTOBOC10-ATEPILOS,  br.  Art  gau- 
lois, pi.  59,  2. 

TR1CCOS.  Vo)c  Tvronos. 

TRIKO,  TRI.  ar.  Art  gaulois,  p.  124; 
R.  n.  f.    1863,  p.  1  n- 

TVROCA-VIRODV,  ar.  A',  n.  f.  1869, 
p.  4. 


Légendes  des  Monnaies  gauloises. 


35 


TVRONA.  Voyez  Drugca. 
TVRONOS-TR1CCOS,  TVRONOS,   CAN- 

TORIX,  br.  Art  gaulois,  pi.  $4,  1  et  2  ; 

Lelewel,  pi.  4.  $8  et  <,,  12. 

VACIICO,  br.  Lelewel,  pi.  7,  72  ;  Du- 
chalais,  pi.    1 ,  n°  2. 

*  VACCA,  Voyez  Massa. 
VADNIILOS,  VADNAIILOS,  VANDIILOS, 

VANDHAIOS,  VANDIIAI.OS,  br. 
Art  gaulois,  pi.  10,  1  et  2e  partie, 
p.  71. 

"VANESIA.  Voyez  Vadnelos. 

PVALETIAC,  br.  Ann.  de  la  Soc.  de 
Num.,  1867.  Légende  très  douteuse. 

'  VAHE.  Lelewel,  pi.  4,  5.  Voyez  Vad- 
nelos. 

*  VARIXCE.   Voyez  le  suivant. 
VARTICE,  br.  R.  n.  f.  1847,  p.  324. 

*  VBIOS.  Voyez  Cubios. 

*  VCCETIO.  Voyez  Tasgetio. 
'VDECOM.  Lelewel,  pi.  3,44  et  4$.  Voy. 

Andecom. 
VJ1D-COMA,  ar.  Art  gaulois,  p.  88. 

*  VEDANTOS.    Voyez    Cassisvratos  ;    la 

légende  incomplète   ne   laisse   deviner 

que  ...LANTOS. 
•VIIGOTAL.   Voyez  Verotalo. 
VELIOCA0I-SVTICCOS,  br.  Arîgaulois, 

p.  103. 
'VENEXTOS,  br.  R.  n.  f.  1858,  p.  437 

et  1868,  p.  406.  M.  Hucher  propose  de 

lire  YiLXE'XTOC  ™  YIIANEX- 

TOC. 
VEP-CORF, or.  Bretagne.  J.  Evans,  pi.  17,. 

5  à  6. 
VERCINGETOR1XS,    or.     Art    gaulois, 

pi.  59,  1. 
VERCOBRETO.  Voyez  Cisiambos. 
VERGa,  br.  Art  gaulois,  pi.  36,  1. 
VERIC-COMF     REX,    VERICA-COMMIF 

REX,  or,  ar.  Bretagne.  J   Evans,  pi.  2, 

n  et  12  ;  3,  3,  5  et  6. 
V11RICO,  br.  Bull,   de  la  Soc.  d'agr.  de 

la  Sarthe,  1857. 
VER,    VER-DIAS,    VER-TASCIA,    VER- 

LAMIO,    VIIR,    V-TAS,    or,  ar.,    br. 

Bretagne,  J.  Evans,   pi.  6,  11,    12  et 

14;  7,  i,  2,  3,  7  à  11. 


*  yerosdymno.  Voyez  Dvmnoveros. 
YIIPOTALO,  ar.   Art  gaulois,  pi.  22,   1; 

86,  2  et  2"  partie,  p.  46. 
VIND1A,  br.  Duchalais,  p.  289. 
VIREDISOS,  VIREDIOS,  VIRETIOS,  br. 

Art  gaulois,  pi.  30,  2. 
V1RICOF.  VIRRE    COM-F,  VIR  COMF, 

YI-COMF,    VI RI.    or,    ar.    Bretagne. 

J.  Evans,  pi.  1,  9,  10,    11,  13  et  14; 

3,  1,  2  et  4. 

VIRICIV,  br.  Art  gaulois,  p.  102. 

*  VIRINN.  Voyez  Viretios. 

VIRO,  VIROT,  br.  R.n.  f.  1860,  pi.  6,7. 
VIRODV.   Voyez  Tvroga. 
VIROS-VIROS,  or.  R.  n.  b.  1864.  pi.  23, 

120  à  126. 
VIRRI-EPPICOMF.br.  J.  Evans,  pi.  3, 7. 
VITRIHA,  A.  Hirtiu.  retourné. 
VLATOS.  Voyez  Atevla  et  Cvpinacios. 
VLKOS,    or.    Salasses.    R.   n.  f.    1861, 

p.  !44. 
VLLVCCI,  VLLVCCIS.br.  R.  n.  f.   1859, 

pi.  2,  12. 
VOCARANA,  or.  R.    n.    b.   i86j,   pi.  2, 

138  à  141. 
VOCORIX  ou  V0C0R10,    or.    J.  Evans, 

pi.   1,  6. 
V0CVN1LI0S,  br.  Cab.  de  France. 

*  VOCVNT.  Voyez  Volvntillvs. 
•VOCONTII.  Lambert,  ir"  partie,  pi.  10, 

4.  Voyez  Conno  Eppillos. 

VOL,  VOLCAE-AREC,  VOLC,  VOLC- 
AR,  ar.,  br.  Num.  de  la  Gaule  Narb., 
pi.  18. 

VOLISIOS-DVMNOCVVEROS,  or.  Bre- 
tagne, J.  Evans,  pi.  17,  1. 

Volvntillvs.  ROVV  ou  MOR-VOLVNT, 
ROVV  ou  MOR-CN.VOL.  ar.  Lagoy, 
Notice,  1847,  pp.  7  et  8  ;  R.  n.  f. 
1860,  p.  43s. 

VOOC,  ar.  Num.  delà  Narb.  pi.  16. 

V0S11N0S,  OR.  Bretagne,  J.  Evans, 
pi.  4,  H  et  14. 

*  VOTOMOPATIS.  Voyez  Acedomapatis. 

?  VOVERC,  br.  Duchalais,  n°s  641  et 
642  ;  lu  VEROIO  par  Lelewel,  pi.  1,  8. 

YILVEXTOC.  Voyez  Venextos. 

VRDO-RE,  ar.  R.  n.  f.  1862,  p.  177; 
1869,  p.  8. 

VRIPPANOS,  br.  Art  gaulois,  p.  98. 


REC  H  E  RC  H  E  S 

sur  l'origine  de 

LA    PROPRIÉTÉ    FONCIÈRE 

ET  DES  NOMS  DE  LIEU  EN  FRANCE 

Troisième  article 


Malliacus,  plus  tard  Maillé,  puis  du  nom  de  ses  ducs,  de- 
puis le  xvnL'  siècle,  Luynes,  avait  au  temps  de  Grégoire  de 
Tours,  c'est-à-dire  au  VIe  siècle,  un  monastère  entouré  de  vieux 
édifices  en  ruines1.  Un  autre  Malliacus,  situé  dans  le  Berry, 
à  deux  milles  du  Cher,  apparaît  dans  un  diplôme  faux  que  le 
roi  Dagobert  Ier  aurait  donné  à  l'abbaye  de  Saint-Denis,  en  635-. 
Un  troisième  Malliacus  au  pays  d'Arcis,  Aube,  tut  donne  .1  la 
cathédrale  de  Châlons-sur-Marne  par  un  bienfaiteur  dont 
Charles  le  Chauve  confirma  la  libéralité  en  859  ï. 

Mallius  est  un  gentilice  souvent  confondu  avec  Manlius. 
Cn.  Mallius  fut  consul  l'an  105  avant  notre  ère.  L'ortho- 
graphe exacte  de  son  nom,  —  écrit  Manlius  et  Manilius  chez 
certains  auteurs,  tandis  que  d'autres  écrivent  Mallius  1,  —  est 
donnée  par  une  inscription  de  Pouzzoles,  aujourd'hui  con- 
servée au  musée  de  Naples,  en  tête  de  laquelle  on  lit  :  P.  lvu- 

1.  Grégoire  de  Tours,  De  gîoria  conf essor um,  c.  21,  chez  Bordier,  Les 
livres  des  miracles,  t.  II,  p.  384;  édition  Arndt  et  Krusch,  p.  760,  1.  18. 
Cf.  Longnon,  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle,  p.  277. 

2.  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  36.  Pertz,  Diplomatum  imperii  lomus 
pri m u s,  p.   155,  ligne  43. 

3.  D'Arbois  de  Jubainville.  Pouillé du  diocèse  de  Troyes,  p.  312.  Cf.  Bou- 
tiot  et  Socard,  Dictionnaire  topographique  du  département  île  l'Aube,  p.  90. 

4.  Corpus  inscriptionum  latinarum,  t.  I,  pages  536-337. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  57 

tilio,  Cn.  Mallio  cos1.  Cicéron,  dans  son  discours  pro  Cn. 
Plancio,  parle  de  Cn.  Mallius  avec  le  plus  profond  mépris: 
C'était,  dit-il,  un  homme  sans  mérite  ni  talent  et  d'une  vie 
honteuse2.  Un  autre  Mallius  était  centurion  et  partisan  de 
Catilina3.  Ce  gentilice  se  rencontre  dans  les  inscriptions  de 
l'époque  impériale.  On  a  trouvé  à  Worms  une  dédicace  à  Ju- 
piter par  Mallius  Fofio-i.  Deux  inscriptions  d'Espagne  nous 
fournissent  les  noms  de  l'affranchie  Mallia  Galla  S  et  de  P. 
Malius  Fortunatus6.  Dans  ce  dernier  monument,  Malins  est 
écrit  avec  une  seule  /.  On  trouve  la  même  orthographe  dans 
l'épitaphe  de  Malia  Severa,  récemment  trouvée  à  Allègre, 
Gard  ~. 

Outre  le  nom  de  Mailly,  Aube,  dont  nous  avons  parlé  déjà, 
MaJJiacus  a  donné  à  la  France  moderne  les  noms  de  com- 
munes suivants:  trois  Maillé,  Indre-et-Loire,  Vendée,  Vienne; 
un  Mailley,  Haute-Saône;  huit  Mailly:  les  départements  de  la 
Côte-d'Or,  de  la  Marne,  de  Meurthe-et-Moselle,  de  Saône-et- 
Loire  en  possèdent  un  chacun  ;  il  y  en  a  deux  dans  la  Somme 
et  autant  dans  l'Yonne  ;  en  ajoutant  Mailhae,  Aude,  et  Mailhac, 
Haute-Vienne,  on  trouve  en  France  seize  communes  dont  le 
nom  remonte  à  un  primitif  Malliacus.  Maillanne,  Bouches- 
du-Rhône,  est  une  ancienne  villa  Malliana. 

Maxciacus,  nom  d'une  villa  donnée  à  la  basilique  de  Saint- 
Germain  du  Mans,  en  615,  par  le  testament  de  l'évèque  Ber- 
tramne8,  a  dû  s'écrire  primitivement  *Mantiacus. 

Ce  nom  de  lieu  dérive  du  gentilice  Mantius.  Sur  une 
pierre  découverte  près  de  Ventimille,  on  lit  les  noms  de  O. 
Mantius  Placidus,  édile,  duumvir,  et  prêtre  de  Lanuvium  9.  A 
Saint-Pons,  Alpes-Maritimes,  se  trouve  l'épitaphe  de  G.  Man- 


1 .  Corpus,  t.  I,  n°  577:  X,  n°  1781. 

2.  Pro  Cn.  Plancio,  c    5,  §  12. 

3.  Première  Catilinaire,  c.  3,  §  7.  Cf.  Salluste,  Catilina,  c.  30. 

4.  Brambach,  881. 

5.  Corpus,  II,  358. 

6.  Corpus,  II,  4970,  292. 

7.  Allmer,  Revue  èpigraphique,  t.  II,  p.  78,  n°  515. 

8.  Pardessus,  Diplowata,  t.  I,  p.  209. 

9.  Corpus,  V,  7814. 


3 S  H.  d'Arbois  de  Jubainville. 

tins  Paternus,  duumvir,  et  flamine1.  Le  musée  de  Tebessa,  en 
Algérie,  possède  une  inscription  qui  contient  une  dédicace  à 
Jupiter,  et  dans  laquelle  on  lit  le  nom  de  O.  Mantius2.  Il 
existe  à  Lambessa  l'épitaphe  de  la  femme  du  légionnaire  Man- 
lius  Hispanus  faite  aux  frais  de  L.  Mantius  Caecilianus,  son 
fils  ?  et  l'épitaphe  de  L.  Mantius  Victorinus*. 

Mantiacus  est  probablement  la  forme  primitive  du  nom  des 
communes  de  Maincy,  Seine-et-Marne,  Mancey,  Saône-et- 
Loire,  Mancy,  Marne. 

*  Marcelliacus,  dont  le  dérivé  Marcelliacenses  se  lit  dans  un 
diplôme  attribué  à  Domnolus,  évêque  du  Mans  au  VIe  siècle, 
(diplôme  certainement  interpolé)  S,  se  rapporte  probablement 
dans  ce  texte  à  Marcillé,  Mayenne.  On  trouve  plus  souvent 
Marciliacus  ou  Marcilliacus. 

Ainsi  une  vie  de  saint  Didier,  évêque  de  Cahors,  écrite  au 
viic  siècle,  raconte  la  fondation  de  l'-abbaye  de  Marcillac  qu'elle 
appelle  Marciliacense  coenobium6.  En  834,  un  diplôme  de  Louis 
le  Débonnaire  nous  montre  aux  environs  de  Langrcs  une  villa 
appelée  Marcilliacus'/ ,  aujourd'hui  Marcillv,  Haute-Marne. 

Marciliacus  est  le  nom  d'une  dépendance  de  l'abbaye  de 
Moissac,  dans  un  diplôme  de  Pépin  II,  roi  d'Aquitaine, 
en  844 8.  En  867,  un  diplôme  de  Charles  le  Chauve  men- 
tionne une  villa  Marciliacus  parmi  les  localités  où  l'abbaye  de 
Saint-Armand  de  Tournay  était  propriétaire  9. 

De  ces  trois  orthographes,  Marcelliacus,  Marcilliacus  et  Mar- 
ciliacus, la  plus  ancienne  est  Marcelliacus.  Ce  nom  dérive  du 
gentilice  assez  rare  Marccllius  qui,  lui-même,  est  dérivé  du 
cognomen  Marcel  lus  illustré  par  plusieurs  membres  de  la  gens 


1 .  Corpus,  V,  7913. 

2.  Corpus,  VIII,  1839. 

3.  Corpus,  VIII,  2939. 

4.  Corpus,  VIII,  3886. 

5.  Pardessus,  Diplomata,  t.  I,  p.  134. 

6.  Dom  Bouquet,  III,  531  c. 

7.  Dom  Bouquet,  VI,  595  e.  Cf.  Sicktl}Acta  Karolinorum,  t.  II, p.  183, 
n<>  322. 

8.  Dom  Bouquet,  VIII,  357  a. 

9.  Dom  Bouquet,  VIII,  604  a. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  39 

Claudia.  Le  musée  de  Milan  possède  une  dédicace  à  Hercule 
par  0.  MarceUius  Ru  fi 11  us1.  Une  inscription  de  Novare  nous 
fournit  les  noms  de  MarceUius  Marcel linus2.  Ce  gentilice  ap- 
paraît au  génitif  Marcelin  dans  une  inscription  de  Milan?.  On 
a  trouvé  à  Echagnieu  Pépitaphe  de  Marcellia  Catta  posée  par 
ordre  de  son  père  et  de  sa  mère  MarceUius  Ingéniais  et  Mar- 
cellia Petroniana  4. 

MarceUiacus  est  devenu  en  France  Marcillac,  Marcillat, 
Marcillé,  Marcilly  et  Marsilly.  Il  y  a  sept  communes  de  Mar- 
cillac, savoir  :  deux  dans  la  Corrèze,  et  une  dans  chacun  des 
cinq  départements  de  l'Avevron,  de  la  Charente,  de  la  Dor- 
dogne,  de  la  Gironde  et  du  Lot  ;  deux  communes  de  Mar- 
cillat, l'une  dans  l'Allier,  l'autre  dans  le  Puy-de-Dôme  ;  trois 
communes  de  Marcillé  dont  une  dans  la  Mayenne  et  deux 
dans  l'Ille-et-Vilaine  ;  dix-sept  communes  de  Marcilly  dans  les 
départements  suivants,  savoir  :  Côte-d'Or,  Eure,  Loir-et-Cher 
et  Saône-et-Loire  qui  en  contiennent  chacun  deux  ;  Aube, 
Cher,  Indre-et-Loire,  Isère,  Loire,  Loiret,  Manche,  Haute- 
Marne,  Rhône,  Seine-et-Marne  qui  en  contiennent  une  chacun. 
Marsilly,  Charente-Inférieure,  a  la  même  origine  ;  cela  fait 
trente  communes  dont  le  nom  primitif  est  MarceUiacus.  Les 
trois  communes  de  Marseillan,  Gers,  Hérault,  Hautes-Pyrénées, 
doivent  être  d'anciens  fundi  Marcelliani,  avec  la  désinence  ro- 
maine -anus  au  lieu  de  la  désinence  eallo  romaine  -acus. 

De  *Marciacus  dérive  l'adjectif  marciacensis,  épithète  de 
domus,  et  qui,  chez  Grégoire  de  Tours,  désigne  une  localité 
de  l'Auvergne  ;  il  s'y  trouvait  une  chapelle  de  la  Vierge  où 
l'historien  Grégoire  de  Tours  raconte  qu'il  alla  prier  5.  C'est 
aujourd'hui  Marsat,  Puy-de-Dôme 6,  qu'on  reconnaît  aussi 
dans  la  villa  Marciagus...  in  pago  Arvernico,  d'un  diplôme  de 


1.  Corpus  inscriptionum  latinarum,  t.  V,  p.  1085,  n°  5642. 

2.  Corpus,  V,  6543  a- 
3  .  Corpus,  V,  6038. 

4.  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  III,  p.  449. 

5 .  Degloria  martyrum,  c.  9;  Bordier,  Les  livres  des  miracles,  1. 1,  pp.  28,  29; 
chez  Arndt  et  Krusch,  c.  8,  p.  493,  1.  20. 

6.  Longnon,  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle,  p.  504. 


40  H.  d'Arbois  Je  Jubainville. 

Pépin  I,  roi  d'Aquitaine,  en  828  I  et  dans  le  Marciaciis  d'un 
diplôme  de  Charles  le  Chauve  en  869  2.  Une  villa  arcia- 
censis  qui,  comme  nous  l'apprend  Grégoire  de  Tours,  était  de 
son  temps  située  dans  le  territoire  de  Bordeaux,  et  qui  avait 
une  église  dédiée  à  saint  Martin,  a  été  reconnue  identique  à 
Marsas,  Gironde 3.  Un  ager Marciacensis,  en  Maçonnais,  figure 
en  892  dans  une  charte  de  l'abbaye  de  Clunv  >.  Dans  les 
textes  de  la  basse  latinité,  il  n'y  a  pas  de  distinction  à  faire 
entre  l'orthographe  Marciaciis  par  un  c  qu'on  trouve  dans  les 
documents  précités  et  l'orthographe  Martiacus  par  un  /  qu'on 
rencontre  dans  la  vie  de  saint  Melaine,  êvêque  de  Rennes,  con- 
temporain du  roi  Clovis  Ier.  Dans  cette  vie,  Maillants  est  le 
nom  d'un  castrum  situé  dans  le  Vannetais  >  ;  on  prononce  au- 
jourd'hui Marsac  ;  c'est  un  village  qui  fait  partie  de  la  com- 
mune de  Carentoir,  Morbihan6. 

Marciaciis  ou  Martiacus  dérivent  du  gentilice  Marcius  ou 
du  gentilice  Marti  us. 

On  trouve  dans  les  textes  latins  ces  deux  gentilices.  Marcius 
est  le  plus  ancien  des  deux  ;  il  dérive  du  prénom  Marcus  et  il 
est  le  seul  qu'on  rencontre  dans  les  inscriptions  antérieures  à 
la  période  impériale".  Parmi  les  nombreux  Marcius  dont  l'his- 
toire de  la  république  romaine  nous  a  conservé  le  souvenir, 
nous  citerons  C.  Marcius  Rutilus,  quatre  fois  consul,  de 
l'an  357  à  l'an  342  avant  J.-C.  Il  était  d'origine  plébéienne, 
ce  qui  ne  l'empêcha  pas  d'être  élevé  à  la  dictature  et  d'être  élu 
censeur,  dignités  auxquelles  aucun  plébéien  n'était  parvenu 
avant  lui8.  Il  obtint  deux  fois  les  honneurs  triomphaux 9.  Un 


1  .  Dom  Bouquet,  VI,  666  e. 

2.  Dom  Bouquet,  VIII,  613  b. 

3.  De  virtutibus  sancli  Martini,  liv.  III,.  c.  33  ;  chez  Bordicr,  Les  livres 
des  miracles,  t.  II  ,p.  234  ;  Arndt  et  Krusch,  p.  640,  1.  16.  Cf.  Longnon, 
Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle,  p.  547. 

4.  Brucl,  Recueil  des  Charles  de  l'abbaye  de  Cluny,  t.  I,  p.  72-73. 

5.  Dom  Bouquet,  t.  III,  p.  395. 

6.  Longnon,  Atlas  historique  de  la  France,  texte  explicatif,  première  li- 
vraison, p.  29. 

7.  Voyez  les  exemples  réunis  dans  le  Corpus,  t.  I,  index,  p.  383,  col.  3 . 

8.  Tité-Live,  liv.  VII,  c.  16,  17,  21,  22,  28,  38.  Cf.  Corpus,  t.  I, 
pp.  510-313- 

9.  Corpus,  t.  I,  p.  455. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  41 

autre  C.  Marcius  Rutilus,  consul  en  3101,  fut  nommé  pontife 
en  300  2;  censeur  quelques  années  plus  tard,  il  fit  avec  son 
collègue  le  dix-neuvième  recensement  de  la  population  de 
Rome.  C'était,  en  293  3.  Un  autre  membre  de  la  gens  Marcia, 
Q.  Marcius  Tremulus,  consul  en  306,  battit  les  Herniques,  et 
obtint  les  honneurs  du  triomphe 4.  A  une  date  moins  éloignée, 
Q.  Marcius  Philippus  fut  deux  fois  élevé  au  consulat  :  la  pre- 
mière en  186,  la  seconde  en  169).  Battu  honteusement  par 
les  Ligures,  il  laissa  son  nom  au  théâtre  de  sa  défaite,  Saltus 
marcius6.  Il  y  a  une  monnaie  romaine  frappée  à  son  nom 7. 
D'autres  monnaies  portent  le  nom  de  C.  Marcius  Censorinus, 
consul  l'an  8  avant  J.-C.  8. 

Le  gentilice  Marcius  est  des  plus  répandus  dans  les  ins- 
criptions du  temps  de  l'empire.  On  en  a  trouvé,  sans  compter 
les  femmes,  vingt-sept  exemples  en  Espagne,  trente-neuf  en 
Afrique,  quatre  en  Grande-Bretagne.  On  le  rencontre  aussi 
en  Gaule  ;  le  musée  de  Lyon  possède  une  inscription  que  Q. 
Marcius  Donatianus  fit  graver  en  l'honneur  d'un  procurateur 
des  provinces  de  Lyonnaise  et  d'Aquitaine  ;  il  était  attaché  à 
ce  personnage  en  qualité  â'eques  cornicularius9.  Une  inscription 
de  Grésy-sur-Isère,  Savoie,  est  Pépitaphe  que  s'est  fait  graver  de 
son  vivant  T.  Marcius  Taurinus,  tribun  militaire  de  la  sixième 
légion  victrix I0.  Les  noms  de  Marcius  Modestus  sont  con- 
servés par  une  inscription  de  Gebensdorf,  en  Suisse11.  On  a 
trouvé  près  d'Aix-la-Chapelle  une  inscription  qui  rappelait  la 
construction  d'un  temple  par  L.  Marcius  Similis  I2.  Le  musée 
de  Bonn  possède  une  inscription  provenant  des  environs  de 


1.  Tite-Live,  liv.  IX,  c.  33. 

2.  Tite-Live,  liv.  X,  c.  9. 

3.  Tite-Live,  liv.  X,  c.  17. 

4.  Tite-Live,  liv.  IX,  c.  42,  43.  Corpus,  t.  I,  pp.  456,  515. 

5.  Tite-Live,    liv.    XXXIX,    c.    6;    liv.    XL1II,    c.    13.    Corpus,   t.    I, 
pp.  326-529. 

6.  Tite-Live,  liv.  XXXIX,  c.  20. 

7.  Corpus,  t.  I,  p.   133,  n°  3  >4- 

8.  Corpus,  p.  137,  nJ  432.  Cf.  pp.  346,  547. 

9.  Boissieu,  Inscriptions  de  Lyon,  p.  236. 

10.  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  II,  p.  229. 

1 1.  Mommsen,  Inscriptiones  helveticae,  11°  254. 

12.  Brambach,  n°  637. 


42  H.  d'Arbais  de  Jubainville. 

Cologne  qui  rappelle  l'acquittement  d'un  vœu  par  L.  Marcius 
Verecundus,  légionnaire  r. 

Quelques  inscriptions  nous  offrent  l'orthographe  Martius. 
Telle  est,  en  Alsace,  celle  qui  nous  apprend  que  Q.  Martius 
Optatus  avait,  par  son  testament,  fait  élever  une  colonne  et 
une  statue  pour  rendre  honneur  à  la  maison  impériale,  au 
génie  du  vicus  Canabbarum  et  a.uxvicaniCanahbenses2.  Des  ins- 
criptions du  musée  de  Mayence  nous  conservent  les  noms  de 
Martius  Marcellus3  et  de  Martius  Severus-*.  Il  existe  au  musée 
de  Bonn  une  inscription  datée  de  l'an  2 30  et  qui  est  une  dé- 
dicace à  Jupiter  par  Martius  Victor,  porte-étendard  de  la  légion 
trente Severiana  A lexandrictf .  Uneépithaphede  Yirieu-le-Grand, 
Ain,  a  été  gravée  par  l'ordre  de  Martius  Saturnus6. 

L'orthographe  Martius  ne  peut  s'expliquer  dans  les  textes 
les  plus  anciens  que  par  un  dérivé  du  nom  du  dieu  Mars.  Car 
dans  les  monuments  de  la  bonne  latinité  la  confusion  entre- 
les  groupes  du  et  tin  est  impossible.  Il  me  semble  difficile 
d'admettre  que  cette  confusion  ait  été  faite  dans  l'inscription 
d'Iglitza,  aujourd'hui  à  la  Bibliothèque  nationale  de  Paris,  qui 
se  place  entre  les  années  161  et  169  et  où  nous  lisons  les 
noms  d'un  lieutenant  impérial,  au  génitif  Marti  Veri.  Il  s'agit 
de  P.  Martius  Yerus  qui  fut  consul  en  179/". 

DeMarciaciis  ou  Martiacus  viennent  les  noms  de  communes 
suivants  :  Marçav,  Indre-et-Loire,  Marçay,  Vienne  ;  Marcé, 
Indre-et-Loire,  Marcé,  Maine-et-Loire,  Marcé,  Manche  ;  Mar- 
cey,  Orne;  Marciac,  Gers;  Marcieu,  Isère;  Marcieux,  Savoie; 
deux  Marcy  dans  l'Aisne,  autant  dans  le  Rhône,  un  dans  la 
Nièvre;  sept  Marsac,  Charente,  Creuse,  Dordogne,  Loire-In- 
férieure, Puy-de-Dôme,  Hautes-Pyrénées,  Tarn-et-Garonne  ; 
trois  Marsas,  Drôme,  Gironde,  Hautes-Pyrénées.;  Marsac, 
Tarn  ;  Maxey-sur-Vaize,  Meuse,  appelé  Marcey  au  xive  siècle8; 

1 .  Brambach,  n"  541. 

2.  Brambach,  n°  1891.  Cf.  Corpus,  t.  III,  p.  183,  n°  1008. 

3.  Brambach,  n°  1330. 

4.  Brambach,  n°  1331a. 
5  .  Brambach,  n°  202. 

6.  Allmcr,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  III,  p.  399. 

7.  Corpus,  III,  dido. 

5.  Liénard,  Di  graphique  du  département  delà,  Meuse,  p.  143. 


Propriété  fancière  et  noms  de  lieu  en  France.  43 

Maxey-sur-Meuse,  Vosges  ;  deux  Mercy,  Meurthe-et-Moselle 
et  un  Mercy,  Lorraine  allemande,  pour  lesquels  on  a  l'ortho- 
graphe plus  ancienne  Marciacus  et  Marceium  r.  On  peut  donc 
aussi  rattacher  à  la  même  origine  Mercy,  Allier,  Mercy, 
Yonne,  et  les  trois  Mercey  de  l'Eure,  du  Doubs  et  de  la 
Haute-Saône.  Nous  avons  ainsi  en  France  trente-quatre  noms 
de  communes  qui  supposent  un  primitif  Marciacus  ou  Mar- 
ti aciis. 

La  forme  romaine  de  cet  adjectif,  marcianus  ou  martianus 
nous  est  donnée,  au  féminin  pluriel,  par  le  nom  de  Mar- 
chiennes,  Nord  (c'est-à-dire  a  l'accusatif  villas  ou  domos  mar- 
çianas  ou  martianas);  au  masculin  singulier,  par  Marsan,  Gers, 
à  l'accusatif  fundum  marcianum  ou  martianum.  Les  Romains 
disaient  aussi,  comme  nous  l'apprend  Tite-Live,  salttts  mar- 
c'uts,  en  transformant  le  gentilice  en  adjectif,  et  en  le  faisant 
accorder  avec  un  nom  commun.  Maixe,  Meurthe-et-Moselle, 
dont  la  prononciation  vulgaire  est  Mâche,  en  donnant  à  ch  le 
son  de  gutturale  spirante,  s'est  écrit  Marches  du  xne  siècle 
au  xvL'2  et  peut  s'expliquer  par  un  primitif  Marciae,  sous-en- 
tendu domus  ou  vïllae.  L'.v  a,  dans  ce  mot,  la  même  valeur 
que  dans  Maxey-sur-Meuse  et  Maxey-sur-Vaize. 

Mariacus  est  le  nom  d'une  villa  où  Raoul,  archevêque  de 
Bourges,  avait  des  propriétés  qu'il  donna  à  l'abbaye  de  Dèvre, 
près  Yierzon,  Cher,  comme  nous  l'apprend  un  diplôme  de 
Charles  le  Chauve  3.  Un  lieu  appelé  Mariacus,  dans  le  'pavs 
de  Nîmes,  est  mentionné  dans  un  diplôme  de  Charles  le 
Chauve  en  845  4.  Un  autre  Mariacus,  situé,  soit  en  Franche- 
Comté,  soit  en  Suisse,  soit  dans  les  environs  de  Lyon,  apparaît 
en  866  dans  un  diplôme  de  Lothaire,  roi  de  Lorraine  5. 

Mariacus  est  dérivé  de  Marins,  gentilice  romain,  illustré 
par  le  vainqueur  des  Cimbres.  Il  fut  très  répandu  en  Gaule 


1 .  Bouteiller,  Dictionnaire  topographique  du   département  de  la  Moselle, 
pp.  165,  166. 

2.  I.epage,  Dictionnaire  topographique'du  département  de  la  Meurthe,  p.  84. 

3.  Dom  Bouquet,  t.  VIII,  p.  447  b.  " 

4.  Dom  Bouquet,  t.  VIII,  p.  467  b. 

5.  Dom  Bouquet,  Ylll,  412  d. 


44  H.  iïArbols  de  Jubainville. 

comme  l'atteste  le  savant  recueil  des  inscriptions  antiques  de 
Vienne,  par  M.  Allmer,  où  Ton  en  voit  réunis  neuf  exemples. 
Trois  nous  sont  fournis  par  une  inscription  du  musée  de 
Vienne  où  sont  mentionnés  l'édile  Sex.  Marins  Navus  '  et 
deux  personnages  dont  la  qualité  n'est  pas  indiquée  et  qui 
s'appelaient  tous  deux  D.  Marius  Martinus2.  A  Aix-les-Bains 
on  a  conservé  l'épitaphe  de  M.  Marius  Taracio>.  Sur  une 
épitaphe  de  Lyon  on  lit  les  noms  de  T.  Marius  Tiro4,  etc. 

C'est  de  Mariacus  que  vient  une  partie  des  noms  des  com- 
munes appelées  Maire,  Mairv,  Maray,-  Marey,  Mariac,  Méré, 
Merey,  Méry.  Ces  communes  sont  au  nombre  de  vingt-quatre, 
savoir  :  deux  Maire,  Deux-Sèvres,  Vienne  ;  trois  Mairy,  Ar- 
dennes,  Marne,  Meurthe-et-Moselle  ;  Maray,  Loir-et-Cher  ; 
trois  Marey,  dont  deux  dans  la  Côte-d'Or  et  Un  dans  les 
Vosges;  Mariac,  Ardèche;  deux  Méré,  Seine-et-Oise,  Yonne; 
trois  Mérey,  dont  deux  dans  le  Doubs,  un  dans  l'Eure  ;  neuf 
Méry,  deux  dans  le  Cher,  un  dans-  chacun  des  départements 
de  l'Aube,  du  Calvados,  de  la  Marne,  de  l'Oise,  de  la  Savoie, 
de  Seine-et-Marne  et  de  Seine-et-Oise.  Plusieurs  de  ces  noms 
de  lieux  ont  dû  perdre  une  dentale  avant  IV  et  doivent  s'ex- 
pliquer par  un  primitif  *  Maiviacus,  écrit  Madriacus  dès 
l'époque  mérovingienne,  comme  l'attestent  les  diplômes  relatifs 
au  pagus  madriacensis.  Dans  cette  catégorie  se  place  Méré, 
Yonne  5.  *  Matriacus  est  dérivé  de  Mai  ri  us,  gentilice  connu 
par  une  inscription  de  S.  Gennano,  près  du  mont  Cassin,  où 
est  mentionné  le  duumvir  juridicundo  L.  Matrius6.  Cest 
aussi  à  Matriacus  que  nous  font  remonter  certainement  Merry- 
la-Vallée  et  Merry-le-Sec,  Yonne  7  ;  et  probablement  Merry- 
sur- Yonne,  même  département  ;  Merrey,  Aube  ;  Merrey, 
Haute-Marne  ;  Merri,  Orne. 

MARINIACUS  est  une  curtis  située  dans  le  royaume  des  Bur- 

i  .  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  II,  p.  261. 

2.  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  II,  p.  261. 

3.  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  III,  p.  5 II. 

4.  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  III,  p.  29. 

5.  Quantin,  Dictionnaire  topograpbique  du  département  de  V Yonne,  p.  81. 

6.  Corpus,  X.  51 59. 

7 .  Quantin,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  /'  Yonne,  p.  81 ,  82. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  4  5 

gondes  suivant  un  diplôme  qui  aurait  été  donné  par  le  roi  Si- 
gismond  en  523  et  dont  l'authenticité  est  contestée1.  En  667, 
Leodebodus,  abbé  de  Saint-Aignan  d'Orléans,  donne  à  cette 
abbaye  une  portion  de  terre  appelée  Mari  11  ici  en  s  et  située  dans 
le  territoire  de  Bourges  2.  Une  villa  iiiariniacus  est  donnée  à  la 
cathédrale  d'Autun,  par  saint  Léger,  évêque  de  cette  ville,  aux 
termes  d'un  testament  qui  daterait  de  676,  mais  qui  a  dû  être 
fabriqué  au  ixe  siècle'.  Ce  Mariniacus  enlevé  à  cette  église  lui 
est  rendu  en  883  par  le  roi  Karloman  ■*,  et  le  pape  Jean  X,  dans 
une  bulle  de  l'année  919,  comprend  Mariniacus  parmi  les 
propriétés  de  la  cathédrale  d'Autun  5.  Il  s'agit  probablement  de 
Marigny,  Saône-et-Loire.  Un  autre  Mariniacus  est  mentionné 
dans  l'acte  de  fondation  .de  l'hôpital  de  Pont-sur-Seine  par 
Alcuin,  vers  l'année  8046.  C'est  aujourd'hui  Marigny-le-Chàtel, 
Aube. 

Mariniacus  dérive  de  Marinius,  gentilice  romain,  dérivé 
lui-même  du  surnom  Marinas.  Marinius,  qu'on  ne  trouve  pas 
à  Rome  dans  les  documents  du  temps  de  la  république,  se 
rencontre  quelquefois  en  Gaule  sous  l'empire.  On  a  trouvé  à 
Vienne  Pépitaphe  du  grammairien  L.  Marinius  Italicensis 
dont  le  fils  s'appelait  Marinius  Claudianus  7.  A  Lyon,  a  été 
découverte  l'inscription  du  monument  élevé  par  Marinius  De- 
metrius  à  sa  sœur  Marinia  8.  Un  légionnaire  d'origine  proba- 
blement gauloise,  L.  Marinius  Mariniacus,  éleva  sur  la  rive 
droite  du  Rhin,  non  loin  de  Mayence,  une  stèle  en  l'honneur 
de  la  maison  impériale  et  du  dieu  gaulois  Apollon  Toutiorix  9. 

C'est  par  un  primitif  Mariniacus,  dérivé  de  Marinius,  que 
s'expliquent  probablement  la  plupart  des  trente-trois  noms  de 
communes  suivants  :  cinq  Marignac,  dont  deux  dans  la  Haute- 

1 .  Pardessus,  Diplomate,  t.  I,  p.  70. 

2.  Pardessus,  DipIomata,t.  II,  p.  143. 

3.  Pardessus,  Diploinata,  t.  II,  p.  174. 

4.  Dom  Bouquet,  IX,  430  c. 

5.  Dora  Bouquet,  IX,  215  a. 

6.  Mabillon,  Acta  sanctorum  ordinis  sancti  Benedicti,  sxc.  IV,  partie  I, 
p.  177.  Migne,  Patrologia  latina,  t.  C,  col.  71  b  ;  t.  CI,  col.  1432  c.  Cf. 
Mabille,  La  pancarte  noire  de  Saint-Martin  de  Tours,  pp.  153,  228. 

7.  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  II,  p.  537. 

8.  Boissieu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon,  p.  516. 

9.  Brambach,  n°  1529. 


46  H.  d'Arbois  de  Jubainville. 

Garonne,  et  les  trois  autres  dans  la  Charente-Inférieure,  la 
Drôme  et  Tarn-et-Garonne  ;  deux  Marigna,  Haute-Garonne, 
Jura  ;    deux    Marigné,    Maine-et-Loire,    Sarthe  ;    Marignier, 

Haute-Savoie  ;  dix-sept  Marigny  ;  il  y  en  a  deux  dans  la  Côte- 
d'Or,  deux  dans  la  Nièvre  et  deux  dans  la  Vienne  ;  un  dans 
chacun  des  départements  suivants  :  Aisne,  Allier,  Aube,  Deux- 
Sèvres,  Indre-et-Loire,  Jura,  Loiret,  Manche,  Marne,  Saône- 
et-Loire,  Haute-Savoie  ;  trois  Mérignac,  Charente,  Charente- 
Inférieure,  Gironde  ;  Mérignas,  Gironde  ;  deux  Mérignat,  Ain, 
Creuse  ;  Mérigny,  Indre. 

Toutefois,  parmi  ces  noms  modernes,  un  certain  nombre 
peut  s'expliquer  par  un  primitif  Matriniacus,  tout  aussi  bien 
que  par  Mariniacus.  En  regard  du  gallo-romain  Mariniacus, 
se  place  l'adjectif  latin  mariniamts  dont  nous  avons  parlé  plus 
haut1. 

De  Martixiacus,  dérive  l'adjectif  mari i ni icensis,  qui  sert 
d'épithète  à  villa,  dans  un  passage  de  Grégoire  de  Tours  où 
ces  deux  mots  désignent  une  localité  située  près  de  Tours2, 
aujourd'hui  Martignv,  commune  de  Fondettes,  Indre-et- 
Loire?.  Une  autre  villa  Martiriiacus  est  donnée  par  Hadoind, 
êvêque  du  Mans,  à  la  basilique  Saint-Pierre  et  Saint-Paul  de 
cette  ville,  en  642  4.  Une  troisième  localité  appelée  Marti- 
niacus,  située  dans  le  Cotentin,  est  mentionnée  dans  un  acte 
du  commencement  du  vin1-'  siècle,  qui  nous  a  été  conservé 
parle  cartulaire  de  Saint-Florent-le-Vieil,  au  diocèse  d'Angers*. 
Une  monnaie  mérovingienne  porte  en  légende  le  nom  de  lieu 
Martiniaco6.  Plus  tard Martiniacus  est  une  des  villae  dans  les- 
quelles l'église  cathédrale  du  Mans  a  droit  de  dîme,  suivant  un 
diplôme  donné  par  Charlemagne  en   802  7.   Dans  le  pays  de 


1.  Revue  Celtique,  t.  VIII,  p.  131. 

2.  De  ghria  confessorum,  §  8;  chez  Bordier,  Les  livres  des  miracles,  t.  II, 
p.  358;  chez  Arndt  et  Krusch,  p.  753,  1.  16-17. 

3.  Longnon,  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle,  p.  279. 

4.  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  70. 

5.  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  450. 

6.  Barthélémy,  dans  la  Bibliothèque  de  l'Ecole  des  Chartes,  t.  XXVI,  p.  458. 

7.  Dom  Bouquet,  V,  769  a.  Cl".  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  67, 
n'  181. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  47 

Nîmes  il  y  avait,  en  845,  une  colonial  appelée  à  la  fois  Aman- 
tianicus  et  Martiniacus  qui  appartenait  alors  à  l'abbaye  de 
Psalmodi,  suivant  un  diplôme  de  Charles  le  Chauve1. 

Le  gentilice  Martinius,  d'où  vient  Martiniacus,  est  rare.  On 
en  a  cependant  recueilli  quelques  exemples.  L'un  nous  est 
fourni  par  le  cachet  de  l'oculiste  Sp.  Martinius  Ablaptus, 
trouvé  à  Vieux,  Calvados,  et  conservé  au  musée  de  Caen2. 
Une  femme,  appelée  Martinia  Martiname,  figure  dans  une 
inscription  votive  de  l'an  276  de  notre  ère;  ce  monument  a 
été  découvert  à  Mayence  et  il  est  conservé  au  musée  de  cette 
ville  3.  Les  noms  de  Mar[ti]nius  Senocondus  se  lisent  sur  une 
table  de  marbre  qui  appartient  au  même  musée  4.  Une  épi- 
taphe  trouvée  à  Lvon  a  été  gravée  par  ordre  d'une  femme  ap- 
pelée Martinia  Lea>.  Ce  gentilice  dérive  du  cognomen  beau- 
coup plus  fréquent,  Martinus.  Un  exemple  du  procédé  nous 
est  offert  par  une  inscription  de  Worms  :  c'est  l'épitaphe  de 
C.  Candidius  Martinus;  sa  fille  y  est  nommée;  elle  s'appelle 
Candidia  sive  Martinia  Dignilla  6. 

C'est  par  Martiniacus  que  s'expliquent  en  France  quatorze 
noms  de  communes  :  Martigna,  Jura  ;  Martignas,  Gironde  ; 
Martignat,  Ain  ;  trois  Martigné,  Ille-et- Vilaine,  Maine-et- 
Loire,  Mayenne  ;  et  huit  Martigny,  savoir  :  deux  dans  l'Aisne, 
deux  dans  les  Vosges  et  les  quatre  autres  dans  les  quatre  dé- 
partements du  Calvados,  de  la  Manche,  de  Saône-et-Loire  et 
de  la  Seine-Inférieure.  Nous  citerons  hors  de  France  Mar- 
tigny, Valais.  Quant  à  Martignac,  variante  méridionale  de 
Martigny,  rendue  célèbre  par  un  homme  politique  français 
qui  donna  son  nom  au  ministère  du  4  janvier  1828,  ce  n'est 
pas  un  nom  de  commune.  Le  dictionnaire  des  postes  indique 
deux  Martignac  ;  ce  sont  deux  hameaux,  l'un  du  département 
de  l'Ariège,  l'autre  de  celui  du  Lot. 


1 .  Dom  Bouquet,  VIII,  467  b. 

2.  Héron  de  Villefosse  et  Thédenat,  Cachet:  d'oculistes  romains,  t.   I, 
pp.  116,  117. 

3 .  Brambach,  n°  1 130. 

4.  Brambach,  n°  1330. 

5 .  Boissieu,  Inscriptions  de  Lyon,  p.  424. 

6.  Brambach,  n°  904. 


48  H.  d'Arbois  de  Jubainville. 

*Matriacus  paraît  être  le  nom  primitif  d'une  localité  qui 
donna  son  nom  au  pagits  madriacensis,  mentionné  dans  quel- 
ques documents  du  VIIIe  siècle,  tels  sont  un  jugement  rendu 
par  Pépin  le  Pref  vers  75 1  ',  un  diplôme  de  Karloman  en  771 2, 
deux  diplômes  donnés  par  Charlemagne,  l'un  en  774  î,  l'autre 
en  7754.  Il  est  question  de  cepagus  dans  divers  documents  posté- 
rieurs. Lepagus  Madriacensis  était  situé  entre  la  Seine  et  l'Eure. 

*  Matriacus  est  dérivé  de  Matrius,  gentilice  rare  qui  nous 
est  conservé  par  une  inscription  datée  de  l'an  714  de  Rome, 
50  av.  J.-C.  et  trouvée  à  Saint-Gennano,  près  du  mont  Cassin. 
Elle  nous  apprend  qu'à  cette  date  L.  Matrius  était  duumvir 
juri  dicundo  du  municipe  deCasinumï.  Matriolae,  Marolles, 
semble  être  un  autre  dérivé  du  même  gentilice. 

Mauriacus  est  le  nom  de  la  localité  où  Attila  fut  battu  par 
Aétius  en  451.  La  première  mention  se  trouve  dans  une  loi 
•burgonde  écrite  probablement  entre  488  et  490 6.  Une  se- 
conde mention  apparaît  au  siècle  suivant  chez  Grégoire  de 
Tours".  Nous  en  lisons  une  troisième  au  vnc  siècle  dans  la 
compilation  connue  sous  le  nom  de  Frédégaire8.  On  a  émis 
l'hypothèse  que  Mauriacus  devait  être  reconnu  dans  Moirev 
qui  a  été  au  moyen  âge  le  chef-lieu  d'une  paroisse  au  diocèse 
de  Troyes  ;  son  emplacement  est  aujourd'hui  compris  dans  le 
territoire  de  la  commune  de  Dierrey-saint-Julien,  Aube  9.  Un 
autre  Mauriacus,  que  l'on  croit  être  Mon',  Seine-et-Marne, 
commune  de  Mitry,  est  compris  en  982  dans  une  liste  des 
domaines  de  la  cathédrale  de  Paris  I0. 


1.  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  45,  col.  2. 

2.  Dom  Bouquet,  V,  721  b.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  15,  n°  12. 

3 .  Dom  Bouquet,  V,  726  e.  Sickel,  Acta  Karolinorum, t.  II,  p.  2s,  n"  ^  }. 

4.  Dom  Bouquet,  V,  734  a.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II.  p.  28,  n"  43. 

5.  Corpus,  X,  5159. 

6.  Lex  Burgundionum,  t.  17,  §  1,  chez  Dom  Bouquet,  IV,  261  c.  Pertz, 
Leges,  t.  III,  p.  540,  1.  10.  Cf.  Binding,  Dus  burgunaisch-romanisebe  Koeni- 
greich,  t.  I,  pp.  26,  43,  46. 

7.  Historia  ecclesiastica  Francorum,  liv.  II,  c.  7,  chez  Dom  Bouquet, 
t.  II,  p    162  a:  Arndt,  p.  69,  1.  13. 

8.  Dom  Bouquet,  II,  462  d. 

9.  Longnon,  Géographie  de  !■:  Gaule  au  sixième  siècle,  pp.  334-340. 

10.   Cartulaire  de  Notre-Dame  de  Paris,  t.  I,  p.  273  ;  t.  IV,  pp.  396,  401. 


Propriété  foncière  et  noms  de\lieu  en  France.  49 

Mauriac  us  dérive  de  Maurius,  gentilice  conservé  par  une 
inscription  d'Ain-Temuschent,  en  Algérie,  qui  est  l'épitaphe 
d'un  personnage  appelé  Maurius  Cocidius1.  Maurius  vient  lui- 
même  de  Mourus,  surnom  plus  fréquent  qui  a  donné  plusieurs 
autres  dérivés  tels  que  Mauriuus  et  Maurentius. 

Mauriacus  est  la  forme  primitive  de  treize  noms  de  com- 
munes :  deux  Mauriac,  Cantal  et  Gironde  ;  un  Mauriat,  Puy- 
de-Dôme  ;  Moreac,  Morbihan,  appelé  Moriacum  dans  un  acte 
de  l'année  1008  2  ;  quatre  Morey,  Côte-d'Or,  Meurthe-et-Mo- 
selle, Haute-Saône,  Saône-et-Loire  ;  deux  Mory,  Oise,  Pas- 
de-Calais  ;  Moiré,  Rhône  ;  Moirey,  Meuse  ;  Moiry,  Ardennes. 

Melliacus  est  une  potestas  que  Leodebodus,  abbé  de  Saint- 
Aignan  d'Orléans,  raconte  avoir  achetée,  et  dont  il  fait  do- 
nation par  acte  de  l'année  6675.  Ce  nom,  qui  doit  ici  désigner 
une  localité  située  près  d'Orléans,  paraît  identique  à  celui  de 
Miliacus,  porté  par  un  fisc  royal  du  pays  de  Béziers,  qui  de- 
vint propriété  de  l'abbaye  d'Aniane,  suivant  un  diplôme  émané 
en  807  de  Louis  le  Pieux,  alors  roi  d'Aquitaine  4,  et  comme 
nous  le  rappellent  trois  autres  diplômes  donnés  par  le  même 
prince  après  son  élévation  à  l'empire  5. 

Melliacus,  où  17  a  été  probablement  doublé  pour  compenser 
l'abrègement  de  Ye,  est,  comme  Miliacus,  dérivé  de  Mœlius, 
gentilice  romain,  connu  à  la  fois  par  les  auteurs  et  par  les  ins- 
criptions.. 

En  l'année  439  avant  notre  ère,  le  chevalier  Sp.  Maelius, 
un  des  plus  riches  habitants  de  Rome,  fit  distribuer  du  blé 
au  peuple  et,  accusé  pour  cette  raison  d'aspirer  à  la  royauté, 
fut  tué  par  le  maître  de  la  cavalerie6.  P.  Maelius,  son  fils, 
devint  deux  fois   tribun  militaire  avec  puissance  consulaire  : 


1.  Corpus  inscriptionum  latinarum,  t.  VIII,  n°  9814. 

2.  Rosenzweig,  Dictionnaire  topographique  du  département  du  Morbihan, 
p.  183. 

3 .  Pardessus,  Diplomata,  t.  II.  p.  144. 

4.  Dom  Bouquet,  VI,  454  b  ;  Sickel,  ActaKarolinorum,  t.  II,  p.  86,  n°  2. 

5.  i°  814,  Dom  Bouquet,  VI,  457  a;  2°  822,  Dom  Bouquet,  VI,  527  c!; 
3°  837,  Dom  Bouquet,  V,  616  a;  Sickel,  Acta  Karoh'norum,  t.  II,  pp.  86, 
137,  194,  n"s  8,  177,  355. 

6.  Tite-Live,  liv.  IV,  c.  13,  14. 

Revue  Celtique,  IX  4 


jo  H.  d'Arbois  de  Jubainville. 

d'abord  l'an  400,  ensuite  l'an  396  avant  J.-C.  l.  Q.  Maelins  était 
tribun  du  peuple  en  320  2. 

Ce  gentilice  se  répandit  dans  les  provinces  où  nous  le  mon- 
trent les  inscriptions  du  temps  de  l'empire.  Telles  sont  en 
Espagne  l'épitaphe  de  Maelia  Tcrtulla  3  et  celle  qui  était  gravée 
sur  le  monument  que  Maelia  Martialis  avait  élevé  à  sa  mère 4. 
Sur  une  tuile  trouvée  près  de  Verceil,  en  Italie,  on  a  lu  les 
noms  de  M.  Maelius  Attiacus  5.  En  France,  les  noms  de  Maelia 
Secundina  nous  sont  fournis  par  une  inscription  de  Chazey6. 
Ceux  de  Cn.  Maelius  Pudens  et  de  Cn.  Maelius  Flavus  par  une 
inscription  de  Camoins-les-Bains,  Bouches-du-Rhône  7. 

Quelques  monuments  nous  offrent  l'orthographe  Melius, 
par  e  au  lieu  d'ae  :  Melius  Zosimus  à  Lyon  8  ;  Melius  Marti- 
nianus,  qui,  étant  augure  de  la  colonie  de  Vienne,  Isère,  dédia 
à  Mercure  un  autel  conservé  encore  aujourd'hui  près  d'Am- 
blagnieu,  Isère  9;  Melia  Anniana,  dans  une  inscription  de 
Zara,  Dalmatie  I0  ;  Q.  Melius  Auetus  dans  une  épitaphe  re- 
cueillie près  de  Vérone  ". 

Melliacus  ou  Miliacus  pour  Macliacus  est  devenu  en  France 
Meilhac,  Haute-Vienne;  Meillac,  Ille-et-Vilaine  ;  Meilly, 
Côte-d'Or  ;  Milhac,  noms  de  deux  communes  de  la  Dordogne 
et  d'une  commune  du  Lot  ;  Millac,  Vienne  ;  Milly,  nom  de 
six  communes,  Manche,  Meuse,  Oise,  Saône-et-Loire,  Seine- 
et-Oise,  Yonne. 

Montiniacus,  nom  d'une  villa  donnée  à  l'église  du  Mans 
par  l'évèque  Bertramme  en  615  I2,  doit  probablement  être  re- 
connu dans  Montigné,  Mayenne.  Au  même  siècle,  Berchaire, 


1 .  Corpus,  t.  I,  p.  502. 

2.  Tite-Live,  liv.  IX,  c.  8. 

3 .  Corpus,  II,  121. 

4.  Corpus,  II,  385. 

5.  Corpus,  V,  8110,  393. 

6.  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  III,  p.  416. 

7.  Allmer,  Revue èpigraphique,  t.  II,  p.  78,  n°  515. 

8.  BoissicLi,  Inscriptions  de  Lyon,  p.  513. 

g.  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  II,  p.  285. 

10.  CoipllS,  III,    2C)22. 

1 1 .  Corpus,  V,  3680. 

12.  Pardessus,  Diplomala,  t.  I,  p.  211. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  5 1 

abbé  de  Montier-en-Der,  avait  une  propriété  dans  une  localité 
appelée  Montiniacus,  et  située  au  sud-ouest  de  la  Loire1.  Une 
monnaie  mérovingienne  a  été  frappée  dans  un  lieu  appelé  Mon- 
tiniacus que  l'on  suppose  être  Montignac,  Creuse  2.  Une  église 
Saint-Christophe  de  Montiniacus  appartenait  en  819  à  l'abbaye 
de  Conques,  Aveyron,  comme  nous  le  voyons  par  un  diplôme 
de  Louis  le  Débonnaire  3.  C'est  aujourd'hui  Montignac,  com- 
mune de  Conques,  Aveyron.  En  830,  une  autre  villa  Monti- 
niacus, située  dans  le  pays  de  Meaux,  appartenait  à  l'abbaye  de 
Charroux,  Vienne,  ainsi  que  nous  l'apprend  une  confirmation 
émanée  de  Louis  le  Pieux  et  de  Lothaire,  son  fils  4. 

Avant  de  prononcer  Montiniacus,  on  a  dû  dire  Montaniacus 
en  plaçant  après  le  t  un  a  qui  s'est  plus  tard  assimilé  à  1'/  de 
la  syllabe  suivante.  C'est  l'orthographe  de  la  chronique  de 
Bèze  écrite  au  xne  siècle,  mais  probablement  à  l'aide  de  do- 
cuments plus  anciens,  et  elle  désigne  par  le  nom  de  villa  mou- 
taniacus'y,  Montagny-lès-Seurre,  Côte-d'Or6. 

Montaniacus  dont  Montiniacus  est  une  variante  est  un  dérivé 
de  Montanius,  gentilice  rare,  mais  dont  l'existence  est  cons- 
tatée. On  le  trouve  dans  une  inscription  de  la  Dacie  7.  Une 
épitaphe  découverte  à  Milan  nous  fait  connaître  les  noms  de 
M.  Montanius  Primus8;  une  inscription  de  Cagliari,  en  Sar- 
daigne,  ceux  de  Q.  Montanius  Pollio  9.  Le  gentilice  Montanius 
est  dérivé  du  cognomen  Montanus,  très  fréquent  dans  les  ins- 
criptions. Ce  surnom  était  déjà  usité  au  siècle  d'Auguste.  Ju- 
lius  Montanus,  poète  élégiaque  et  en  même  temps  épique,  est 
mentionné  par  Ovide  et  par  les  deux  Sénèque10.  De  Montanus 


1 .  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  159. 

2.  A.  de  Barthélémy  dans  la  Bibliothèque  de  l'Ecole  des  Chartes,  vingt- 
sixième  année,  p.  459,  n°  444. 

3.  Gustave  Desjardins,    Cartulaire  de  l'abbaye  de  Conques,  p.  410.  Dom 
Bouquet,  VI,  517  d.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  123,  n°  135. 

4.  Dom  Bouquet,  VI,  )66d;Sickel.  Acta  Karolinoi  um, t. II, p.  167,^271. 

5 .  Migne,  Patrologia  latina,  t.  CLXII,  col.  866  a. 

6.  Garnier,  Nomenclature  historique  des  communes,  etc.,  du  département  de 
la  Côte-d'Or,  p.  200,  n°  438.  Cf.  p.  109,  même  numéro. 

7.  Corpus,  t.  III,  n°  792. 

8.  Corpus,  V,  6043. 

9.  Corpus,  X,  7580. 

10.  Teuffel,  Geschichte  der  rœmischen  Literatur,  troisième  édition,  p.  539. 


52  H.  d'Artois  de  Jubainville. 

est  dérivé  *  Montanacus,  aujourd'hui  Montenay,  Mayenne, 
tandis  que  Montanius  a  donné  Montaniacus  et  Montiniacus . 

De  Montaniacus  sont  venus  les  vingt-quatre  noms  de  com- 
munes suivants  :  six  Montagnac,  savoir  :  deux  dans  la  Dor- 
dogne,  deux  dans  le  Lot-et-Garonne,  un  dans  les  Basses-Alpes, 
un  dans  l'Hérault  ;  deuxMontagna,  Jura;  un  Montagnat,  Ain; 
deux  Montagney,  un  dans  le  Douhs,  l'autre  dans  la  Haute- 
Saône  ;  deux  Montagnieu,  Ain,  Isère  ;  onze  Montagny,  savoir  : 
trois  dans  Saône-et-Loire,  deux  dans  la  Côte-d'Or,  autant 
dans  l'Oise,  un  dans  chacun  des  départements  de  la  Loire, 
du  Rhône,  de  la  Savoie  et  de  la  Haute-Savoie. 

C'est  par  Montiniacus  que  s'expliquent  les  noms  de  qua- 
rante-neuf communes  :  sept  Montignac,  savoir  :  deux  dans  la 
Charente,  autant  dans  Lot-et-Garonne  ;  un  dans  la  Dordogne, 
autant  dans  la  Charente  et  les  Hautes-Pyrénées  ;  cinq  Mon- 
tigné,  savoir  :  deux  dans  Maine-et-Loire,  un  dans  chacun  des 
trois  départements  de  la  Charente,  delà  Mayenne  et  des  Deux- 
Sèvres  ;  quarante-neuf  Montigny,  savoir  :  six  dans  l'Aisne, 
cinq  dans  la  Côte-d'Or,  trois  dans  chacun  des  départements 
d'Eure-et-Loir,  de  la  Nièvre  et  de  Seine-et-Marne  ;  deux  dans 
les  Ardennes,  autant  dans  le  Jura,  dans  Meurthe-et-Moselle, 
dans  la  Meuse,  dans  le  Nord,  dans  la  Haute-Saône,  dans 
Seine-et-Oise  et  dans  la  Somme  ;  un  dans  chacun  des  dépar- 
tements de  l'Aube,  du  Calvados,  du  Cher,  du  Loiret,  de  la 
Manche,  de  la  Haute-Marne,  de  la  Marne,  de  l'Oise,  du  Pas- 
de-Calais,  de  la  Sarthe,  de  la  Seine-Inférieure,  des  Deux- 
Sèvres  et  de  l'Yonne. 

Ainsi,  au  total,  les  noms  de  soixante-treize  communes  dé- 
rivent du  çentilice  Montanius. 


&* 


Musciace  est  le  nom  d'un  vicus  qui  avait  une  église,  et, 
dans  cette  église,  un  personnage  arverne,  nommé  Nunninus, 
qui  vivait  dans  la  seconde  moitié  du  vie  siècle,  déposa  une  re- 
lique de  saint  Germain  d'Auxerre;  c'était  un  fragment  du  tom- 
beau de  ce  saint1. 

i.  Grégoire  de  Tours,  De gloria  coufessorum,  c.  41.  Chez  Bordier,  Les 
livris  des  miracles,  t.  II,  pp.  422-425  Arndt  et  Krusch,  p.  773,  1.  20.  Cf. 
Longnon,  Géographie  de  la  Gaule  an  sixième  siècle,  pp.  506-507. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  $  3 

Muscicae,  sous-entendu  domus,  au  singulier  Musciacus,  sous- 
entendu  vicus,  et  plus  anciennement  fundus,  est  probablement 
aujourd'hui  Moissat,  Puy-de-Dôme.  Parmi  les  localités  situées 
au  sud-est  de  la  Loire,  et  qu'en  673  Berchaire  donna  à  l'ab- 
baye de  Montier-en-Der,  se  trouve  un  certain  Musciacus1.  Le 
monasteriuiu  musciacum  qui  fut  l'objet  des  libéralités  de  Louis 
le  Débonnaire  2  était  situé  à  Moissac,  Tarn-et-Garonne. 

Musciacus  s'explique  par  le  gentilice  Mustius.  C.  Mustius 
Tettianus  fit  deux  dédicaces,  l'une  à  Jupiter,  l'autre  à  Epona, 
qui  ont  été  trouvées  à  Cilly,  en  StyrieS.  Les  inscriptions 
d'Afrique  nous  font  connaître  plusieurs  Mustius  :  à  Lambessa, 
C.  Mustius  Fortunatus4  ;  à  Sadjar,  Q_.  Mustius  5  ;  à  Arsacal, 
G.  Mustius  Rusticus6;  à  Beni-Ziad,  A.  Mustius  7.  Mustius  a 
donné  le  dérivé  *Mustiacus  dont  Musciacus  n'est  qu'une  va- 
riante orthographique. 

De  Musciacus  viennent  les  noms  de  communes  suivants  : 
trois  Moissac,  Lozère,  Tarn-et-Garonne,  Tarn  ;  Moissat,  Puy- 
de-Dôme  ;  Moissey,  Jura  ;  Moissieu,  Isère  ;  Moissy,  Seine-et- 
Marne,  Nièvre  ;  peut-être  Moussac,  Gard,  et  Vienne;  Moussey, 
Aube  et  Vosges  ;  enfin  probablement  six  Moussy,  dont  deux 
dans  Seine-et-Marne  et  un  dans  chacun  des  quatre  départements 
de  l'Aisne,  de  la  Marne,  de  la  Nièvre  et  de  Seine-et-Oise. 
Moussy,  Aisne,  est  appelé  Musceium  dans  la  vie  anonyme  de 
saint  Rigobert,  archevêque  de  Reims,  mort  en  749 8.  Le 
groupe  se  que  nous  offre  cette  orthographe  est  d'accord  avec 
Pétymologie  que  nous  proposons.  Cette  étymologie  est  con- 
tredite par  l'orthographe  MuJciacum,  Molcàum,  du  nom  de 
Moussey,  Aube,  dans  des  textes  du  xne  siècle  9  ;  mais  cette  or- 
thographe est  peut-être  le  résultat  d'une  hypothèse  étymolo- 

1.  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  159. 

2.  Vie  de  ce  prince  par  l'Astronome,  chez  Dom  Bouquet,  t.  VI,  p.  95  c. 
Constitutiodemonasteriis,  en  817,  ibid.,  409  a. 

3.  Corpus,  III,  5175,  5176. 

4.  Corpus,  VIII,  2949,  3204. 

5.  Corpus,  VIII,  6022. 

6.  Corpus,  VIII,  6152. 

7.  Corpus,  VIII,  6532. 

8.  Matton,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  l'Aisne,  p.  194. 

9.  Boutiot  et  Socard,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  V Aube, 
p.  109. 


J4  H.  d'Arbois  de  Jubainville. 

gique,  plutôt  que  le  reflet  de  la  tradition.  Cependant  Mul- 
ciacum  peut  s'expliquer  par  un  primitif  *  Molliciacus  qui  déri- 
verait de  Mollicius,  gentilice  connu  par  quelques  inscriptions1. 

Une  colonica  du  nom  de  Noniacus  appartenait  à  l'abbé  Aridius, 
qui  vivait  au  vie  siècle  ;  elle  était  probablement  située  en  Li- 
mousin. Voilà  ce  que  nous  apprend  une  vie  de  ce  personnage 
attribuée  à  Grégoire  de  Tours2.  Cette  localité  est  encore  men- 
tionnée dans  le  texte  qu'on  nous  a  conservé  du  testament  du 
même  Aridius  3. 

Nonius  est  un  gentilice  romain  qu'on  rencontre  quelquefois. 
En  l'an  50  avant  notre  ère,  M.  Nonius  Suffenas  était  pro- 
préteur  de  Crète  et  de  Cyrène  4-.  Un  sénateur  du  nom  de  No- 
nius fut  proscrit  par  Antoine'.  Auguste  gratifia  d'un  collier 
d'or  Nonius  Asprenas6.  Deux  ou  trois  Nonius  Asprenas  figu- 
rent dans  la  liste  des  consuls,  aux  années  6,  29  et  38  après 
notre  ère".  Ce  gentilice  fut  porté  chez  nous  par  M.  Nonius 
Gallus  qui  fut  gouverneur  de  la  Gaule  transalpine  en  l'an  29 
avant  notre  ère,  et  qui  soumit  les  Treveri  ;  il  reçut  pour  cette 
raison  le  titre  à'imperator^.  Deux  inscriptions  de  Lyon  con- 
tiennent le  nom  de  Nonius  précédé  du  prénom  Caius  et  suivi 
dans  l'une  d'elles  du  surnom  Euposius9.  Une  inscription  de 
Trêves  nous  offre  l'orthographe  Nonnius  avec  deux  //  et  le 
surnom  Germanus10. 

Nogna,  Jura,  suppose  un  plus  ancien  Noniacus. 

Noviacum  castrnm  fut  en  752  donné  à  l'abbaye  de  Prùm 
par  le  roi  Pépin  le  Bref11. 

1 .  Mollicius,  Corpus,  III,  341,  342  ;  V,  1305  ;  Mollicia.  X,  6501. 

2.  Vita  sancti  Aridii  abbatis,  c.  vin,  chez  Bordier,  Les  livres  des  miracles, 
t.  IV,  p.   175. 

3.  Pardessus.  Diphmata,  t.  I,  p.  138.  On  y  lit  Konniacus  avec  deux  n; 
cf.  Longnon,  Géographie  delà  Gaule  au  sixième  siècle,  p.  527. 

4.  Cicéron,  A.  Atticus,  liv.  VI,  lettre  1. 

5.  Pline,  Histoire  naturelle,  liv.  XXXVII,  c.  81. 

6.  Suétone,  Auguste,  c.  43. 

7.  Joseph  Klein,  Fasti  consulares,  pp.  17,  27,  30. 

8.  Voyez  Desjardins,  Géographie  historique  et  administrative  de  la  Gaule  ro- 
maine, t.  III,  pp.  40,  45. 

9.  Boissieu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon,  pp.  18,  53. 

10.  Brambach,  n°  833.  ' 

11.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  2,  11"  4. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  5  5 

Les  auteurs  et  les  inscriptions  nous  font  connaître  de  nom- 
breux exemples  du  gentilice  Novius.  Tels  sont  le  poète  co- 
mique Q.  Novius  qui  vivait  au  commencement  du  Ier  siècle 
avant  notre  ère  x.  En  58  avant  notre  ère,  L.  Novius  était  tribun 
du  peuple  comme  nous  l'apprend  Asconius2.  Novius  Niger 
était  questeur  au  temps  de  la  conjuration  de  Catilina  en  l'an  56 
avant  J.-C.  >.  Ce  nom  se  répandit  dans  les  provinces.  Deux 
inscriptions  de  Spalatro,  l'ancienne  Salona,  nous  font  connaître 
les  noms  de  Novius  Persicus  et  de  P.  Novius  Laurus4.  Dans 
une  inscription  des  environs  de  Bude,  on  lit  les  noms  du  lé- 
gionnaire Novius  Provincialis  5 .  Une  inscription  de  Worms 
rappelle  un  vœu  de  Novia  Prisca6.  A  Schwanden,  dans  le  Pa- 
latinat,  on  a  trouvé  l'épitaphe  d'une  femme  appelée  Novia". 
Nous  nous  bornons  à  ces  exemples,  dont  il  serait  facile  d'aug- 
menter le  nombre. 

De  Novius  est  dérivé  Noviacus  qui  est  devenu  Neuvy,  dans 
dix-neuf  noms  de  communes,  savoir  :  trois  dans  le  Cher,  deux 
dans  l'Eure-et-Loir  et  dans  l'Indre  ;  un  dans  chacun  des  dépar- 
tements de  l'Allier,  des  Deux-Sèvres,  de  l'Indre-et-Loire,  de 
Loir-et-Cher,  du  Loiret,  de  Maine-et-Loire,  de  la  Nièvre,  de 
l'Orne,  de  Saône-et-Loire,  de  la  Sarthe  et  de  l'Yonne.  A  la 
même  origine  se  rattachent  Neufvy,  Oise  ;  Novy,  Ardennes  ; 
et  probablement  les  deux  Nevy,  du  Jura. 

Au  ixe  siècle,  la  véritable  étymologie  de  Noviacus  était  ou- 
bliée, et  on  considérait  ce  mot  comme  un  dérivé  de  Fadjectii 
latin  novus.  C'est  pour  cela  que  Jérémie,  archevêque  de  Sens, 
imagina  d'appeler  Noviacus  l'abbaye  qu'il  fonda  en  818,  à 
Mauriacus,  en  Auvergne  8.  Mais  cette  dénomination  nouvelle, 
qu'une  erreur  avait  inspirée,  ne  fut  pas  adoptée  par  la  popu- 
lation, et  l'ancien  nom  de  Mauriacus  persiste  encore,  à  peine 
modifié,  dans  celui  de  Mauriac,  Cantal. 

1.  Teuffel,  Geschichte  der  rœmischen  Literalur,  3  e  édition,  p.  243. 

2 .  Asconius,  Sur  le  Pro  Milone  de  Cicérou. 

3.  Suétone,  César,  c.  17. 

4.  Corpus,  III,  251 1,  2552. 
5  .  Corpus,  III,  3556. 

6.  Brarnbach,  n°  907. 

7.  Brarnbach,  n°  1765. 

8.  Chronique  de  Saint-Pierre-le- Vif  àe  Sens;  chez  Dom  Bouquet,  VI,  237  a. 


$6  H.  d'Arbois  de  Jubainville. 

La  villa  Novilliacus  fut  donnée  à   l'église  cathédrale   de 
Reims  par  le  Roi  Karloman  en  771,  et  Charlemagne  confirma 
cette  libéralité.  Les  diplômes  aujourd'hui  perdus  sont  analysés 
dans  l'appendice  à  Flodoard,  écrit  vers  la  fin  du  xe  siècle1.  Ce 
nom  de  lieu  est  assez  fréquent,  mais  le  plus  souvent  altéré.  On 
le  trouve  écrit  avec  une  seule  1,  Noviliacus.  Ainsi  Grégoire  de 
Tours  écrit  Noviliacus  le  nom  de  deux  vici  qui  auraient  été, 
suivant  lui,  fondés,  c'est-à-dire  probablement  dont  les  paroisses 
auraient   été   créées  par  les  évéques  Injuriosus  et  Baudinus, 
tous  deux  ses  prédécesseurs,  l'un  de  529  a  546,  l'autre  de  546 
à  552  2.  On  remarque  la  même  orthographe  dans  le  diplôme 
de  Clotaire  III  pour  l'abbaye  de  Bèze,  en  664,  tel  que  nous 
l'a  conservé  la  chronique  de  cette  abbaye  3  ;  dans  la  charte  ori- 
ginale contenant  les  donations  faites  par  Wandmir  et  Ercam- 
berte  a  diverses  églises  en  689  -*  ;  dans  les  diplômes  donnés  en 
705  par  Childebert  III  a  l'abbaye  de  Saint-Serge  et  de  Saint- 
Médard  d'Angers 5;  en  802,  par  Charlemagne6,  en   832,  par 
Louis  le  Débonnaire,  à  la  cathédrale  du  Mans  7.  Au  lieu  de 
Noviliacus,  on  a  écrit  quelquefois  Nobiliacus  iwcc  un  b  au  lieu 
d'un  v,  phénomène  fréquent  dans  la  basse  latinité.  Cette  or- 
thographe se  rencontre  dans  certains  manuscrits  de  Grégoire 
de  Tours  8,  dans  un  diplôme  de  l'année  680  en  faveur  de  l'ab- 
baye de  Saint-Waast  d'Arras  9,  et  dans  la  vie  de  Louis  le  Dé- 
bonnaire dite  de  l'Astronome,  où  l'abbaye  de  Saint-Yaast  est 
appelée  monasterium  nobiliacum  I0. 

1.  Dom  Bouquet,  t.  V,  p.  362  b  c;  cf.  t.  VI,  p.  216  c  d;  Sickel,  Acta 
Karolinorum,  t.  II,  p.  380. 

2.  Historia  ecchsiastica  Francorum ,liv.  X,  c.  3 1,§  15,  édition  Arndt,  p.  447, 
lignes  13-20.  Cf.  Longnon,  Géographie  delà  Gaule  au  sixième  siècle,  p.  282. 

3.  Pertz,  Diplomatum  imperii  tomus  primus,  p.  40,  1.  25. 

4.  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  637,  col.   1. 

<j .   Pertz,  Diplomatum  imperii  tonius primus,  p.  65,  1.  44. 

6.  Dom  Bouquet,  V,  768  e.  Cf.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  67, 
n°  181. 

7.  Dom  Bouquet,  VI,  585  e.  Cf.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  179, 
n°  308. 

8.  Voyez  les  notes  placées  par  Arndt  au  bas  de  la  page  447  citée  plus 
haut.  Cf.  De gloria  conjessorum,  c.  7.  Chez  Bordier,  Les  livres  des  miracles, 
t.  II,  p.  358. 

9.  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  181. 
10.  Dom  Bouquet,  VI,  93  c. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  $7 

Le  gentilice  d'où  est  dérivé  le  nom  de  lieu  qui  se  présente 
dans  les  textes  sous  ces  trois  formes  a  été  porté  sous  le  règne 
de  l'empereur  Tibère  par  Novellius  Torquatus,  de  Milan,  qui 
devint  préteur  et  proconsul  et  qui  dut  une  grande  notoriété, 
non  à  l'habileté  avec  laquelle  il  s'acquittait  de  ses  hautes  fonc- 
tions, mais  au  talent  qu'il  avait  de  boire  d'un  trait,  en  se  con- 
formant à  toutes  les  règles  de  l'art,  trois  congés,  c'est-à-dire 
environ  neuf  litres  de  vin.  Pline,  dans  son  Histoire  naturelle, 
s'étend  avec  détails  sur  les  faits  qui  attestent  combien  Novellius 
s'acquittait  consciencieusement  de  cette  tâche  glorieuse,  vraie 
merveille  dont  l'empereur  lui-même  fut  témoin1.  D'autres  No- 
vellius, moins  célèbres,  nous  sont  connus  par  les  inscriptions. 
Tels  sont  Novellius  Optatus,  dont  Pépitaphe  a  été  trouvée 
près  de  Salzbourg2;  Novellius  Aequalis  >,  Novellius  Agilis, 
Novellius  Euodius  dont  les  épitaphes  ont  été  recueillies  à 
Milan-*.  Il  serait  trop  long  d'énumérer  tous  les  autres  exemples 
de  ce  gentilice  que  l'Italie  nous  offre.  Nous  nous  bornerons  à 
la  Gaule.  Nous  citerons  C.  Novellius  Amphio  dans  une  ins- 
cription de  Genève  S  L.  Novellius  Hispelo6  et  M.  Novellius  7 
au  musée  de  Mayence. 

*  Novell iacus,  Noviliacus,  dérivé  de  Novellius,  peut  se  re- 
connaître dans  trente-sept  noms  de  communes  :  Neuillac,  Cha- 
rente-Inférieure, Neuillay,  Indre,  deuxNeuillé,  Indre-et-Loire, 
Neuillé,  Maine-et-Loire,  Neuilli,  Orne  ;  vingt-trois  Neuilly, 
savoir  :  deux  dans  chacun  des  départements  de  l'Allier,  du 
Calvados,  du  Cher,  de  la  Haute-Marne,  de  l'Oise,  de  Seine- 
et-Oise  et  de  la  Somme  ;  un  seulement  dans  chacun  des  dépar- 
tements suivants  :  Aisne,  Côte-d'Or,  Eure,  Indre-et-Loire, 
Mayenne,  Nièvre,  Orne,  Seine,  Yonne  ;  Neulliac,  Morbihan  ; 
Neuvilley,  Jura  ;  Neuvilly,  Meuse,  et  Neuvilly,  Nord  ;  trois 


1 .  Pline,  Histoire  naturelle,  liv.  XIV,  §  144-146. 

2.  Corpus,  t.  III,  n°  5626. 

3 .  Corpus,  V,  6051. 

4.  Corpus,  V,  6054. 

5.  Mommsen,  Inscriptiones  confédéral  iouis  helveticae,  n°  92;  Allmer,  Ins- 
criptions antiques  de  Vienne,  t.  II,  p.  31g. 

6.  Brambach,  n"  1201. 

7.  Brambach,  n°  12 16. 


58  H.  d'Arbois  de  Jubainville. 

Nuillé,  dont  un  dans  la  Sarthe  et  deux  dans  la  Mayenne  ;  enfin 
Nully,  Haute-Marne. 

De  ces  noms  de  lieux  il  faut  distinguer  Nouaillé,  Vienne, 
au  vme  siècle  Novaliacus,  comme  nous  l'apprend  un  diplôme 
émané  en  794  de  Louis  le  Débonnaire,  alors  roi  d'Aquitaine1. 
Novaliacus  suppose  un  gentilice  *  Novalius  dérivé  de  l'adjectif 
novalis. 

Piciacus  est  le  nom  d'une  localité  située  dans  le  Perche  et 
où  saint  Avit,  mort  vers  l'année  527,  mena  la  vie  érémitique, 
comme  nous  l'apprend  une  vie  anonyme,  à  peu  près  contem- 
poraine2. On  ignore  où  était  l'emplacement  précis  de  Piciacus. 

Ce  mot  est  dérivé  de  Pitius.  On  a  trouvé  à  Veglia,  île  voi- 
sine de  la  côte  de  Dalmatie,  l'épitaphe  du  décurion  P.  Pitius 
Marullus  ^7;  à  Petronell,  en  Autriche,  celle  de  l'affranchi  C. 
Pitius  Hilarus4.  On  conserve  à  Ebersdorf,  Autriche,  celle  de 
l'affranchi  C.  Pitius  Jucundusî. 

De  Pitius  on  a  tiré  *  Pitiacus,  puis  par  effet  de  Passibilation 
et  avec  substitution  du  c  au  t,  Piciacus.  Peut-être  ce  nom  ex- 
plique-t-il  celui  de  Pécy,  Seine-et-Marne.  On  doit  aussi  pro- 
'  bablement  le  reconnaître  dans  les  deux  Pessac  du  département 
de  la  Gironde  ;  dans  Pessat,  Puy-de-Dôme  ;  dans  Pissy, 
Somme  et  Seine-Inférieure.  Pissy,  Somme,  est  vraisembla- 
blement le  Pisciacus  qu'un  diplôme  émané  de  Pépin  le  Bref 
en  751  met  dans  le  pagus  Anibiauciisis6.  Mais  cette  ortho- 
graphe peut  être  le  résultat  d'une  étymologie  populaire  qui 
rapprochait  le  nom  de  lieu  Pissy  du  latin pisàs,  poisson,  bien 
connu  à  une  époque  où  depuis  longtemps  le  gentilice  Pilius 
était  oublié.  Nous  terminerons  par  Pizy,  Yonne,  qui,  suivant 
M.  Quantin,  s'est  appelé  Piciacuiu  au  vne  siècle  7. 


1 .  Dom  Bouquet,  VI,  452  c.  Cf.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  84, 
n°  1. 

2.  Dora  Bouquet,  t.  III,  p.  439  b.  Cf.  Longnon,  Géographie  de  la  Gaule 
au  sixième  siècle,  pp.  328,  329. 

3.  Corpus,  III,  3128. 

4.  Corpus,  III,  4518. 

5 .  Corpus,  III,  4602. 

6.  Pertz,  Diplomatum  imperii  tomus  primas,  p.   109,  1.  16. 

7.  Dictionnaire  lopographique  du  département  de  l'Yonne,  p.  99. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  59 

Pociacus  est  le  nom  d'une  des  vil  lac  qui,  au  vine  siècle,  ap- 
partenaient à  l'abbaye  de  Saint-Martin,  de  Tours.  Nous  l'ap- 
prenons par  un  diplôme  de  Charlemagne  qui  remonte  à  l'an- 
née 775  r.  La  situation  de  Pociacus  est  inconnue. 

Ce  mot  peut  être  dérivé  du  gentilice  Paucius,  dérivé  lui- 
même  de  l'adjectif  paucus.  Une  inscription  de  Bénévent  con- 
tient le  nom  du  décurion  Q_.  Paucius2. 

Poissy,  Seine-et-Oise,  appelé  dans  les  textes  latins  Pisciacus 
dès  le  xi°  siècle  3,  peut  être  un  ancien  * Pauciacus,  plus  tard 
Pociacus. 

Pompeiacum  est  le  nom  d'un  castrum  où,  suivant  les  actes 
du  martyre  de  saint  Vincent  d'Agen,  le  corps  de  ce  saint  mis 
à  mort  sous  Dioclétien  aurait  été  transféré  et  serait  devenu 
l'objet  d'un  culte  vers  le  milieu  du  Ve  siècle-*.  Ce  castrum  était 
situé,  suivant  M.  Longnon,  au  Mas  d'Agenais,  Lot-et-Ga- 
ronne 5.  En  829,  Pépin  Ier,  roi  d'Aquitaine,  confirma  l'abbaye 
de  Saint-Maur-les-Fossés  dans  la  possession  du  quart  d'une 
propriété  que  son  diplôme  appelle  Ponpeiaci  villa  6.  La  vie  de 
saint  Theuderius,  abbé  de  Vienne,  Isère,  au  vie  siècle,  écrite 
trois  siècles  plus  tard,  met  dans  le  voisinage  de  Vienne,  Isère, 
alors  bien  fortifiée,  cinq  forts  destinés  en  cas  de  guerre  à  tenir 
l'assiégeant  à  distance  ;  un  de  ces  forts  s'appelait  Pompciacusi . 

Pompeiacus  dérive  du  gentilice  d'abord  obscur  Pompeius, 
qui  est  d'origine  ombrienne  et  dérive  du  nom  de  nombre 
*  pompe  =  quiuqitc,  cinq.  D'abord  à  peu  près  inconnu  avant 
les  deux  consuls  Cn.  Pompeius  Strabo  et  Q_.  Pompeius 
Rufus,  investis  de  la  première  magistrature  de  Rome  l'un, 
l'an  89,  l'autre,  l'an  88  avant  J.-C,   ce  nom  d'homme  dut 


1.  Dom  Bouquet,  V,  737  c.  Cf.  Sickel,  Acta  Carolinorum,  t.  II,  p.  27, 
n°  42.  Cf.  Mabille,  La  pancarte  noire  de  saint  Martin  de  Tours,  pp.  69,  106, 
107. 

2.  Corpus,  IX,  1653. 

3.  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  164,  col.  1. 

4.  Voir  les  Actes  du  martyre  de  saint  Vincent,  dans  les  Bollandistes, 
t.  II  de  juin,  pp.  166-168. 

5.  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle,  pp.   549-552. 

6.  Tardif,  Monuments  historiques,  n°  121,  p.  84,  col.  1. 

7.  Dom  Bouquet,  t.  III,  p.  470  b. 


6o  H.  d'Arbois  de  Jubainville. 

surtout  sa  célébrité  au  fils  du  premier  des  deux,  Cn.  Pom- 
peius,  surnommé  le  Grand.  Entre  autres  affaires  importantes 
dont  il  fut  chargé,  une  des  plus  graves  lut  la  guerre  contre 
Sertorius,  en  Espagne.  Elle  l'occupa  de  77  à  72,  et  pendant  ce 
temps  il  paraît  avoir  exercé  l'autorité  suprême  en  Gaule,  alors 
administrée  sous  ses  ordres  par  le  propréteur  Fonteius1.  C'est 
à  cette  date  que  paraît  remonter  l'introduction  en  Gaule  du 
gentilice  Pompeius.  Un  des  monuments  antiques  les  plus  cu- 
rieux de  la  France  est  la  porte  d'entrée  de  la  sépulture  d'une 
famille  Pompeia,  à  Aix,  en  Savoie.  L:  Pompeius  Campanus  la 
fit  construire  de  son  vivant,  et  les  épitaphes  d'un  certain 
nombre  de  ses  parents  s'y  lisent  encore  aujourd'hui2.  Nous 
citerons  ensuite  Sex.  Pompeius  Macrinus,  connu  par  une 
inscription  de  Novairy  3  ;  Ponpeius  Octavmnus,  dont  l'épi- 
taphe  a  été  trouvée  près  de  Chozeau,  Isère  4;  Q.  Pompeius 
Adjutor,  dont  les  noms  se  lisent  dans  une  inscription  d'An- 
necy 5;  Pompeia  Dativa,  dont  l'épitaphe  vient  d'être  décou- 
verte a  Arles6;  une  autre  Pompeia  dont  le  musée  de  Bordeaux 
possède  l'épitaphe".  Je  me  bornerai  à  ces  exemples  qui  suffi- 
sent pour  expliquer  l'origine  du  nom  de  lieu  Pompeiacus. 

De  Pompeiacus  viennent  les  noms  de  Pompejac,  Gironde,  et 
Pompiac,  Gers. 

Poxciacus  est  une  villa  dépendant  de  l'église  du  Mans,  aux 
termes  d'un  diplôme  de  Louis  le  Débonnaire  en  832  8.  C'est 
probablement  aujourd'hui  Poncé,  Sarthe. 

Ce  nom  de  lieu  dérive  du  gentilice  Pont i us  qui  est  latin, 
mais  d'origine  samnite9  et  vient  du  thème  ombrien  * ponlo- 

1 .  E.  Desjardins,  Géographie  de  la  Gaule  romaine,  t.  II,  pp.  330-334,  347. 

2.  E.  Desjardins,  Géographie  de  la  Gaule  romaine,  t.  III,  p.  118.  Cl. 
Allmer,  Inscriptions  antiques  de  Vienne,  t.  III,  p.  312-317. 

3.  Allmer,  Inscriptions  antiques  de  Vienne,  t.  III,  p.  245. 

4.  Allmer,  Inscriptions  antiques  de  Vienne,  t.  III,  p.  182. 

5.  Allmer,  Inscriptions  antiques  de  Vienne,  t.  III,  p.  3^0. 

6.  Allmer,  Revue  èpigraphique,  t.  I,  p.  268,  n°  298. 

7.  Allmer,  Revue  èpigraphique,  t.  II,  p.  22,  n 

8.  Dom  Bouquet,  VI,  586  a;  Sickel,  Acta Karolinorum,  t.  II,  p.  179. 

9.  Corssen,  Ueber  Aussprache,  Vokalismus  und  Betonung  àer  lateinischen 
Sprache,  .seconde  édition,  t.  I,  p.  116.  Ponto-  est  pour  * Pomp-to-  comme 
Ouintus  pour  *  Quinqu-tus. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  6 1 

identique  au  thème  latin  *  quinto-  du  nom  de  nombre  ordinal 
signifiant  cinquième.  C'est  la  forme  ombrienne  du  gentilice 
latin  Quintius  ou  mieux  Ouinctius.  Le  plus  célèbre  personnage 
de  ce  nom  que  l'on  rencontre  dans  l'histoire  de  la  république 
romaine  est  C.  Pondus,  fils  d'Herrennius,  qui  commandait  les 
Samnites  quand  ils  firent  l'armée  romaine  prisonnière  aux 
Fourches  Caudines,  l'an  321  avant  J.-C1.  Ce  gentilice  avait 
pénétré  à  Rome  de  fort  bonne  heure  ;  dès  le  siège  de  Rome 
par  les  Gaulois  en  l'an  390  avant  notre  ère,  un  jeune  et  ardent 
patriote  romain,  Pontius  Cominius,  rendit  son  nom  histo- 
rique par  l'heureuse  audace  avec  laquelle,  trompant  la  sur- 
veillance des  assiégeants,  il  pénétra  dans  le  Capitule2.  Plus 
tard,  L.  Pontius  Aquila  fut  du  nombre  des  meurtriers  sous  les 
coups  desquels  César  perdit  la  vie,  l'an  44  avant  notre  ère  3. 
Enfin  tout  le  monde  connaît  le  nom  du  procurateur  de  Judée, 
Pontius  Pilatus^. 

On  rencontre  ce  gentilice  dans  les  inscriptions  de  Rome  et 
des  provinces,  Q.  Pontius  Severus,  à  Tarragone  5  ;  P.  Pontius 
Blandus,  P.  Pontius  Pontianus,  P.  Pontius  Secundinus,  dans 
une  inscription  de  Hongrie6.  On  a  trouvé  nombre  de  fois  en 
Gaule  et  en  Grande-Bretagne  la  marque  du  potier  Pontius. 

De  Pontius  on  a  fait  *  Politiciens,  écrit  Ponciacus  au  moyen 
âge.  De  là  probablement,  outre  le  nom  de  Poncé,  Sarthe,  déjà 
cité,  ceux  de  Pontiacq,  Basses-Pyrénées,  Poinchy,  Yonne, 
Poincy,  Seine-et-Marne,  et  Poncey,  Côte-d'Or.  Poncey-lez- 
Pellerey,  autre  commune  du  même  département,  paraît  devoir 
s'expliquer  par  un  primitif: 

Podentiacus  7,  lisez  Pudentiacus  dérivé  de  Pudentius  qui 
est  encore  un  gentilice  romain,  probablement  d'assez  basse 
époque  :  Pudentius  Maximinus,  vétéran,  fit  à  Hercule  une  dé- 

1.  Tite-Live,  liv.  IX,  c.  1  et  suivants. 

2.  Tite-Live,  liv.  V,  c.  46. 

3.  Suétone,  César,  c.  78;  édition Teubner-Roth,  p.  32,  1.  3-4. 

4.  Tacite,  Annales,  liv.  XV,  c.  44. 

5 .  Corpus,  II,  4937. 

6.  Corpus,  III,  6271. 

7.  Cartulaire  de  Saint-Seine  cité  par  Garnier,  Nomenclature  historique,  etc., 
du  département  de  la  Côte-d'Or,  p.  5 1 . 


Gi  H.  d'Arbois  de  Jubainville. 

dicace  trouvée  près  de  Salzbourg1.  C'est  aussi  le  nom  d'un 
saint  qui  fut  martyrisé  à  Alexandrie  et  dont  on  célèbre  la  fête 
le  29  avril 2. 

Pouancay,  Vienne,  et  Pouancé,  Maine-et-Loire,  peuvent 
être  d'anciens  Pudentiacus. 

Posthimiagus  est  le  nom  d'un  locus  de  situation  inconnue 
donné  à  l'abbaye  de  Limours,  Seine-et-Oise,  aux  termes  de 
l'acte  de  fondation  par  Gammon  en  697  5.  Un  diplôme  de 
Charles  le  Gros  en  faveur  de  l'abbaye  de  Saint-Etienne  de 
Dijon  en  885  nous  donne  le  même  nom  de  lieu  avec  l'ortho- 
graphe un  peu  plus  archaïque  Postumiacus*  ;  il  s'agirait  ici  de 
Potangey,  commune  d'Aiserey,  Côte-d'Or,  suivant  M.  Gar- 
nier,  le  savant  archiviste  de  ce  département  5. 

Postbumiacus  vient  de  Postumius.  La  gens  Postumia  était  pa- 
tricienne. Elle  atteignit  de  très  bonne  heure  aux  plus  hautes 
magistratures  de  Rome.  Le  premier  consul  qu'elle  donna  à  la 
république  romaine  fut  P.  Postumius  Tubertus,  élevé  à  cette 
dignité  d'abord  l'an  249  de  Rome  (avant  J.-C.  505)  puis  en 
252-503,  et  qui  obtint  deux  fois  les  honneurs  du  triomphe6. 
Quelques  années  plus  tard  (en  496  avant  J.-C),  le  dictateur 
A.  Postumius  Albus,  fils  du  précédent,  battait  les  Latins  près 
du  lac  Régille  et  en  triomphait/.  Nous  nous  bornons  à  ces 
deux  exemples.  La  gens  Postumia  donna  son  nom  à  un  des 
plus  anciens  monuments  de  la  législation  de  Rome,  une  des 
lois  somptuaires  attribuées  à  Numa8.  Le  même  nom  fut  aussi 
porté  par  une  des  grandes  routes  de  la  Gaule  Cisalpine,  la  via 
postumia  construite,  à  ce  que  l'on  croit,  par  le  consul  Sp.  Pos- 

1 .  Corpus,  III,  5531. 

2.  Bollandistes,  avril,  t.  III,  p.  617. 

3.  Pardessus,  Diplomata,  t.  il,  p.  244. 

4.  Dom  Bouquet,  IX,  336  c. 

3.  Garnier,  Nomenclature  historique  des  communes  du  département  de  la 
Côte-d'Or,  p.  19. 

6.  Ïite-Live,  livre  II,  c.  16;  Pline,  livre  XV,  §  125  Cf.  Acta  trium- 
phorum  capitolina  dans  le  Corpus,  t.  I,  p.  434.  Fastes  consulaires,  ibid., 
p.  486-487. 

7.  Tite-Live,  livre  II,  c.  19,  20,  et  Acta  triumphorum  capitolina  dans  le 
Corpus,  t.  I,  p.  454.  . 

8.  Pline,  livre  XIV,  §88. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  63 

tumius  Albinus,  l'an  148  avant  notre  ère1.  Le  gentiliee  Pos- 
tumius  persista  sous  l'empire  ;  ainsi,  au  second  siècle  de  notre 
ère,  Postumius  Festus  fut  célèbre  par  son  éloquence2.  On 
trouve  ce  nom  fréquemment  dans  les  inscriptions  d'Espagne?, 
d'Afrique 4,  d'Italie  5,  de  Grande-Bretagne6,  etc.  7.  Nous  si- 
gnalerons en  Gaule  deux  exemples  :  l'un  est  une  dédicace  à 
Diane  par  Q.  Postumius  Potens  ;  elle  a  été  trouvée  près  de 
Trêves8;  l'autre  qui  existe  encore  dans  la  ville  d'Avenche,  en 
Suisse,  est  aussi  une  dédicace  à  des  dieux  ;  ses  auteurs  sont 
Q_.  Postumius  Hyginus  et  Postumius  Hermès  9. 

H.  d'Arbois  de  Jubaixville. 
(A  suivre). 


1 .  Voyez  ce  que  dit  de  cette  route  M.  Mommsen  dans  le  Corpus,  t  V. 
p.  827. 

2.  Aulu-Gelle,  livre  XIX,  c.  13.  Comparez  le  passage  de  Fronton  cité  par 
Teuffel,  Geschichte  der  roemischcn  Literatur,  troisième  édition,  p.  848. 

3  .    Corpus,  1.  II,  index,  p.  728,  col.  4. 

4.  Corpus,  t.  VIII,  index,  p.   1012,  col.  2. 

5.  Corpus,  t.  V,  index,  pp.    1123,  col.   4,   1124,  col.   1;  t.  IX,   index, 
p.  723,  col.  1  ;  t.  X,  p.  1032,  col.  2,  1065,  col.  4. 

6.  Corpus,  t.  VII,  index,  p.  320,  col.  1. 

7.  Corpus,  t.  III,  index,  p.  1082,  col.  2. 

8.  Brambach,  n'  844. 

9.  Mommsen,  Inscriptiones  helveticae,  n°  164. 


NOTES 

ON 

WELSH    CONSONANTS 

BY    DR.    M.    NETTLÂU 


(Vienna,  III,  Rennweg,  2.  May  28,  1887) 

Introductory  Remarks. 

As  to  information  about  the  manuscripts  and  books  quoted 
in  the  following  notes  I  refer  the  reader  to  the  introduction 
of  my  «  Beitràge  zur  cymrischen  grammatik.  I  (einleitung 
und  vocalismus).  Leipzig,  Marz-April  1887,  79  pp.  8°  » 
(p.  4-33).  The  following  abbreviations  are  used  for  some  ot 
the  more  frequently  cited  sources  : 

Manuscripts  :  A  :  the  oldest  Ms.  of  the  Venedotian  Law- 
code,  printed  in  «Ancient  Laws  and  Institutes  of  Wales...  éd. 
by  Aneurin  Owen»  London,  1841,  fol.  («  Beitr.  »,  p.  11). 

B  :  Ms.  Cott.  Tit.  D  2,  Venedotian  Code  (1.  c,  p.  12). 

Cleop.  B  j  :  a  Gwentian  15 th.  cent.  Ms.  (1.  c,  p.  16). 

E  :  Addit.  Ms.  1493  1,  Venedotian  Code  (1.  c,  p.  12). 

B.  of  Herg.  :  the  Red  Book  of  Hergest  ;  the  parts  of  this 
Ms.  edited  by  John  Rhys  and  J.  Gwenogfryn  Evans  (Oxford, 
1887,  vol.  I)  hâve  been  principally  quoted;  on  other  edited 
and  not  edited  parts  see  1.  c,  p.  13-15. 

Hgt.  202  :  a  i4th.  cent.  Ms.  edited  by  E.  B.  Phillimore  in 
YC,  vol.  VII. 

les.  Coll.  141  :  a  late  1 5 tli.  cent.  Ms.  (1.  c,  p.   14). 

L  :  Cott.,  Tit.  D  9,  printed  in  Owen's  Ancient  Laws  (Di- 
metian  Code). 


Notes  on  Welsh  Consonants.  65 

Lczu.  Dwnn  :  the  autograph  of  a  part  of  L.  D.'s  heraldic 
visitations,  printed  in  the  first  volume  of  «  Heraldic  Visi- 
tations  of  Wales  and  the  Marches  in  the  time  of  Queen  Eli- 
sabeth' and  James  I  by  Lewis  Dwnn,  éd.  by  Sir  Samuel  Rush 
Meyrick,  1846  »  (1.  c,  p.  21). 

Ll.  Achau  :  Llyfr  Achau,  printed  in  the  Ilnd  volume  of  the 
Heraldic  Visitations;  cf.  p.  58:  «  by  me  Hopkin  ab  Eignon 
of  Breknock  in  y  Countie  of  Brcknock,  painter,  finished  y 
ffirst  of  November  Anno  Dni  1602  »  (1.  c,  p.  21). 

Ll.  Gw.  Rh.  :  Llyfr  Gwyn  Rhydderch,  parts  of  which  are 
edited  in  the  Ilnd  volume  of  Robert  Williams'  Sélections  from 
Hengwrt  Manuscripts  (1.  c.  p.  16). 

S  :  Add.  Ms.  22356,  a  Cardiganshire-manuscript  of  the  Di- 
metian  Code  (1.  c,  p.  13). 

777.  D  22  :  a  Cottonian  manuscript,  parts  of  which  are 
printed  in  Rees  «  Lifes  of  the  Cambro-British  Saints,  »  1853 
and  in  YC.  vol.  III  and  VIII  (éd.  by  Powel)  (1.  c,  p.  16). 

Y  S.  Gr.  :  Y  Seint  Greal,  éd.  by  R.  Williams,  1876  (1. 
c,  p.  16). 

Addit.  Ms.  14913:  a  i6th.  and  iyth.  cent.  Southwclsh 
Ms.,  containing  médical  tracts,  etc. 

I4p2r:  a  i6th.  cent.  Gwentian  Ms.,  containing  a  trans- 
lation of  John  Maundeville's  travels  (fragment)  (1.  c,  p.  33). 

1497}  :  a  Soutlrwelsh  Ms.  (about  1640),  in  which  amongst 
many  other  texts  poems  of  Rees  Prichard  (author  of  Cann- 
wyll  y  Cymry)  occur  (1.  c,  p.  20). 

14986  :  a  r6th.  cent.  Ms.,  containing  two  religious  In- 
terludes (1.  c,  p.  19-20). 

19709  :  a  14-15 th.  cent,  historical  Ms.  (Gwentian  dialect) 
(1.  c.  p.  16). 

Add.  Mss.  14909,  14923,  14944,  14945  and  others  :  gram- 
matical and  lexical  collections  by  Lewis  Morris  and  his  bro- 
thers  (1.  c,  p.  29-30). 

Several  other  manuscripts  are  referred  to  occasionally  ;  ail 
quotations  giving  the  folio  of  the  Ms.  I  hâve  seen  myself. 

Books  :  C.  fw.  T.  :  Caban  fewythr  Tomos  gan  William 
Rees,  1853  (Merionethsh.  dialect). 

C.  y.  C.  :  Cannwyll  y  Cymry,  1672  (1.  c,  p.  20). 
Revue  Celtique,  IX  5 


66  Nettlau. 

D.  S.  Evans,  llythr.  :  Llythyraeth  yr  iaeth  Gymraeg  gan  D. 

S.  Evans,  1 86 1 . 

Hom.  1606  :  Pregethau  a  osodwyd  allan  txwy  awdurdod... 
(translated  bv)  Edward  James  (1.  c,  p.  24). 

Hughes,  1S22  :  An  essay  on  the  ancient  and  présent  state  ot 
the  Welsh  language,  with  particular  référence  to  its  dialects, 
being  the  subject  proposed  by  the  Cambrian  Society  for  the 
year  1822  (l.  c,  p.  26). 

Gl.  Gif.  G.  :  Llyfr  Gweddi  Gyffredin,  the  book  of  Com- 
mon  Prayer  in  Welsh,  extracts  of  \yhich  are  reprinted  in 
Y  Traeth.  (1.  c,  p.  24). 

Ll.  y  Res.  :  Llyfr  y  Resolution  (Parson's  Christian  Resolu- 
tions)     (translated  bv)  J.  D.   (se.  John  Davies),  2i684, 

containing  in  the  appendix  a  dialectal  glossary  (1.  c,  p.  28). 

S  al  lex.,  N.  T.,  prou.  :  William  Salesbury's  Welsh  dictio- 
nary  (1547,  reprinted  1877),  Testament  Newydd,  1567  and 
on  english  pronunciation   (reprinted    in    Ellis'    Early  Engl. 

Pron.). 

Sp.  :  William  SpurreH's  Welsh  dictionaries  (1859,  1861). 
Sweet  :  Sweet's  Spoken  Northwelsh  in  Transactions  of  the 
Philological  Society,  1882-4. 

Y  drych  Christ.  :  Y  drych  Christianogawl.  Ed.  bv  Rosier 
Smith,  1585  (1.  c,  p.  23-24). 

Periodicals  :  Yr  A  nu.  :  Yr  Arweinydd  sel  Newyddiadur 
wythnosol,  Pwllheli,  1856-9  (1.  c,  p.  32). 

Y  Bed.  :  Y  Bedyddiwr,  Caerdydd  1849  sqq. 

Y  Gen.  :  Y  Geninen,  Caernarfon  (vol.  III,  1884-5). 

Y.  C.  :  Y  Cymmrodor,  the  Magazine  of  the  Hon.  Society 
of  Cymmrodorion.  London,  1877  sqq. 

Y  Giuyl.  :  Y  Gwyliedydd,  Bala,  vol.  VI,  1828  containing 
a  dialectal  glossary  (1.  c,  p.  31). 

S.  C.  :  Seren  Cymru,  Newyddiadur  Teuluaidd  Pythefnosol, 
Caerfyrddin,  1856-60. 

Y  Traeth.  :  Y  Traethodydd,  Dinbych,  Treflynnon,  1845,  etc. 

Y  T.  a'r  G.  :  Y  Tywysydd  a'r  Gymraes,  Llanelli,  1852,  etc1. 


1.  The  weekly  \Velsh  periodicals  not  being  entered  in  the  General  Cata- 
logue of  the    British   Muséum  (Yr  Arweinydd   however  is),   I  stated  in 


Notes  on  Welsh  Consonants.  67 


I.    —    I    AXD    W    (j    AND    Y),    CHW. 

1 .  J  is  of  îuost  fréquent  occurence  in  ail  the  Brythonic  lan- 
guages  before  a  number  of  suffixes  (Welsh  -iaeth,  -ion, 
-iad,  etc.)  ;  in  most  of  the  cases  it  is  of  no  etymological  value 
but  only  spread  by  analogy.  I  hâve  not  to  discuss  hère  whence 
this  analogy  first  sprang  from,  as  this  is  a  pre-Cymric  ques- 
tion. The  dialects  of  North-  and  Southwales  greatly  differ 
as  to  the  pronunciation  of  this  secondary  j  ;  it  is  said  to  suffer 
from  the  North  to  the  South  a  constant  loss  in  strength  of 
sound,  culminating  in  its  dropping  in  the  southern  dialects, 
in  which  it  is  very  often  not  expressed  in  writing.  No  détails 
of  the  description  and  délimitation  of  the  intermediate  sounds 
hâve  as  yet  been  given,  and  so  it  isvery  difficulttoform  a  pro- 
per  opinion  on  thèse  Southwelsh  orthographies.  J  may  either 
hâve  never  been  transferred  into  thèse  forms  or  owing  to  its  pro- 
nunciation being  very  feeble  and  perhaps  only  palatalising  the 
consonant  upon  which  it  follovs  it  was  not  written.  For  a 
number  of  j's  before  suffixes  existed  certainly,  as  is  shown  by 
the  Dimetian  plural  sgidshe,  the  Eastern-gwentian  scitshia  (so 
occuring  in  popular  texts,  see  §  5)  =  esgid-iau;  also  unstressed 
u  and  y  before  vowels  are  becoming  j,  and  t  is  palatalised  into 
sh  by  them,  cf.  sha  =  tu  a  ;  so  the  phonetic  altérations  on 
which  Zeuss,  gr.  C.2,  p.  1 69-1 71  (de  zetacismo)  treats  with 
regard  to  the  Cornish  and  Breton  languages  are  not  absent 
in  Welsh.  J  is  said  to  be  inserted  in  Northwelsh  dialects  in 
«  wrong  »  places  by  improper  extension  of  his  usage.  In  mé- 
diéval southern  Mss.  too,  such  extraordinary  insertions  of  j 
occur  as   in  eidyaw,    tr6ydya6,    d6ylya6,  idia6,    etc.  ;    it  is 


a  Beitr.  »  p.  31,  that  they  were  mostly  not  kept  in  this  library.  Thisis  a 
mistake,  since  they  are  entered  in  the  spécial  Catalogue  of  British  News- 
papers,  received  at  the  Muséum.  If  I  had  known  this  before,  I  might  hâve 
spared  much  tirae  which  I  spent  in  looking  over  nearly  the  buïk  of  the 
monthly  papers,  characterised  1.  c.  and  might  hâve  found  much  information 
about  dialects.  I  am  now  going  to  use  tbis  source  of  information  too. 
Cf.  The  Periodical  Literature  of  Wales  during  the  Présent  Century,  in 
Trans.  of  the  Cardif  Eisteddf.  (held  1883),  pp.  214-236.  [30.11.87.] 


68  Nettlau. 

probable  to  me  that  thèse  js  were  only  inserted  in  writing  by 
the  Southwelsh  scribes,  who  themselves  pronounced  theletter 
very  feebry  or  not  at  ail  and  inserted  it  therefore  sometimes 
where  it  had  no  place.  In  the  contrary  in  the  Venedotian  Ms. 
A  ot  the  Howelian  Laws,  doython  occurs  besides  doythyon  ; 
this  must  be  compared  with  the  $rd  sing.-ws  and  with  ona- 
dunt  etc. in  this  text,  thèse  being  later  only  Southwelsh  too 
and  want  a  spécial  examination ;  on  onadunt  sec  YC.  Mil, 
p.  135  squ._ 

2.  The  following  références  illustrate  the  above  said.  D.  S. 
Evans,  llvthvriaeth,  §  189  has  :  Xorthw.  tewion  —  Southw. 
tewon,  etc.  Some  Middlewelsh  forms  differing  from  the  mo- 
dem literary  language  are  :  L  p.  176,  offeirat,  p.  178  kein- 
na6c,  kyureitheu  a  breinheu  ;  U  p.  336  keissa6,  p.  337 
arîeitheu,  p.  342  keina6c,  p.  348  eidon,  etc.,  but  y  (j)  is  also 
written  very  often  in  the  same  Mss.  A  careful  scribe  dénotes 
still  an  indistinctly  pronounced  j,  which  another  omits  alto- 
gether.  Each  Ms.  must  be  separatelv  examined  on  this  point, 
as  single  examples  cannot  décide  the  question  where  j  is  due 
to  the  dialect  and  where  to  the  scribe. 

3 .  Rhys  points  out  in  his  Welsh  loanwords  (Arch.  Cambr.), 
s.  v.  cera^ium,  that  the  insertion  of  j  before  terminations 
commencing  with  a  vowel  is  «  carried  to  an  extensive  extent 
in  some  of  the  dialects  of  Northwales  »  and  gives  jachjau, 
hirjaethu,  ceirjos  1  —  Southw.  ceiros  (cerasium),  etc.;  effiei- 
thio  is  mentioned  Y  Traeth  II,  p.  34  (Th.  Charles). 

4.  From  Mss.  cf.  ynyaléch  a  diffieitbéch  didram6yeit,  Red 
B.  otHerg.,  col.  655  (Mab.);  eidyawis  of  fréquent  occurence, 
cf.  my  article  on  the  Welsh  pronouns  in  Y  Cymmrodor  \lll, 
p.  140,  where  also  tr6ydya6  and  even  d6ylya6,  occuring 
several  times  in  Didrefn  Casgliad  are  quoted.  I  add  from  S 
(Addit.  Ms.  22356)  :  A  g6edy  liynny  dylbdatty  neb  ae  benn- 

1.  Besides  ceirios  (the  literary  form  given  by  Spurrell,  dict.)  exists  the 
later  surian,  pi.  suriain  (Sp.)  from  engl.  cheriy.  Cf.  sirianen  a  chery,  Sa- 
lesbury,  lex.  1547;  E.  Lhuyd,  Arch.  Brit.  1706  s.  v.  cerasuni  :  Southw. 
Keiroesen  (pron.  keirosen?  )  —  Northw.  sirianen;  Hughes  essay  1822: 
Northw.  sirion  —  Southw.  ceirios  (i  from  the  lit.  form).  Breton  qeresen, 
qirisen  (Rostr.);  Corn,  not  in  Jago  ;  gael.  sirist;  manx.  shillish;  ir.  shilin, 
Lluyd,  silîn  (Begley,  Foley). 


Notes  on  Welsh  Consonants.  69 

ffygia6d  ida6  acheissiaô  gantaô  dyfod  y  6rantu  y  march  idiaê 
neu  daly  y  da  yr  benffygi6r  f.  100  a;  a  oes  vn  anifieil  f. 
82  b  (enifeil,  anefeil  f.  89  b);  idiav  Ms.  T,  Medd.  Myddfai, 
1,  §  129.  Y  Seint  Greal  :  aelyodeu  §  2,  twrneimyeint  §  20,  21 
(see  Zeuss2,  p.  86),  mi  a  wasanaethyeis  §  19,  haedyeist 
§  15,  etc.;  it  is  just  this  manuscript  in  which  forms  like 
oedvwn,  aethyost,  wydyem,  doethyant  occur  oftener  than  in 
anv  other  published  hitherto  ;  on  thèse  forms  see  Rhys,  Rev. 
Celt.,  VI,  p.  47  n.,  who  compares  corn,  wothyen  to  cymr. 
wydywn,  gwyddyat,  etc.;  at  an}r  rate  the  pleonastic  use  of  y 
in  this  text  discrédits  somewhat  this  comparison  as  far  as  re- 
gards to  this  text,  the  other  reasons  in  its  favour  and  against 
it  remaining  of  course  unaltered  by  this  fact.  —  en  er  eidial, 
Cleop.  B  5,  f  3  b,  4  a,  tu  ar  eidial  f.  2  b;  Addit.  Ms.12193 
(15 10),  translation  of  a  work  of  Rolewinck  :  i  wladychv  yr 
Eidial  f.  13  b,  Eidial  f.  35  b  (Eidal  f.  38  b,  40  b,  etc.): 
ynydywyssyrçraeth,  E,  Addit.  Ms.  1493 1,  f.  1  a,  etc.;  iyth 
cent.  :  Jachiawdwr,  Add.  Ms.  15005,  f.  63  a. 

5 .  As  to  the  Southwelsh  altération  of  t  — {—  j  before  vowels 
intosh,  cf.  Lewis  Morris,  Addit.  Ms.  14923,  f.  134a:  Southw. 
sïwnti  beyond  =  Northw.  tuhwnt  i  ;  he  intends  to  dénote 
sh  by  sï  as  is  proved  by  Southw.  issïel  ==  isel  (ib.  f.  133  b), 
cf.  gwishgo  in  modem  dialects,  s  before  and  after  slender  vo- 
wels and  j  becoming  sh  in  Sôuthwales  ;  shwnti  from  *  tj-wnti, 
*  ti-wnti,  u  and  i  being  nearly  identical  in  Southw.  pronun- 
ciation,  see  «  Beitr.  »  §  67,  70.  Cf.  S.  C.  (dimet.)  ac  fe  a'th 
shag  adre  I,  p.  292  ;  pwy  newy  sy  sha  Llunden  yna  'nawr  I, 
p.  232  ;  gai  ffordd  glir  i  fyned  shag  adre  I,  p.  271,  mynd  sha 
gadre  I,  p.  332,  etc.  (=  tu  ag  adref)  ;  sgidshe  I,  p.  449,  etc. 
(=  esgidiau),  from  *sgidje.  Y  Gen.  (gwent.)  sha'r  Hen- 
dra  III,  p.  19  in  Eastèrn  Glamorganshire  =  tu  a'r  Hendref, 
sha'r  Bont,  scitsha(—  esgidiau).  S.  C.  be'sharnati  I,  p.  272,  be 
sharnat  ti  I,  p.  291  (=_pa  beth  sydd  arnat  ti)  ;  sharnat  from 
*sj-arnat,  *sy-ârnat.  —  R.  Williams,  lex.  Cornubr.  remarks 
to  modem  corn,  jawl,  jowl  (E.  Lhuyd  :  dzhiawl)  =  cymr. 
diawl,  that  ofthis  pronunciation  of  dj  «  are  traces  in  collo- 
quial  Welsh  »  (p.  102  b),  but  he  gives  no  further  particulars. 

6.  In  Middlewelsh  Mss.,  even  in  those  written  in  Southw. 


70  Nettlau. 

dialects  e  is  not  seldom  used  to  dénote  y  (j)  ;  see  Rhys, 
lect. 2,  p.  234.  It  is  not  clear  to  me  whether  e  is  the  ortho- 
graph  of  a  dialect  in  which  j  was  distinctly  pronounccd  and 
of  nearly  syllabic  value  or  whether,  e  being  used  in  northern 
Mss.  for  the  obscure  sound  of  y  (henny  =  hynny,  etc.)  it 
wasalso  written  by  transcribers  for  y  =].  In  S  =  Addit.  Ms. 
22356  also  u  is  used  for  j  :  dydueu,  f.  17  a  (dvdieu  ib.),  since 
in  this  Ms.  u  and  i  as  vowels  are  nearly  identical,  cf.  «  Beitr.  » 
§  67,  bigel  f.  54  b,  r6ùmedic  f.  7  b,  etc. 

7.  Cf.  B  —  Tit.  D  2  deneon  f.  30  b,  kynedeon  f .  5  a  (ib. 
canes  f.  19  b,  ene  f.  26  a,  etc.)  ;  Hgt  Ms.  406  (B.  Gruff.  ap. 
Cyn.),  Arch.  Cambr.  1866  :  weitheon,  p.  34,  meibeon,  p.  36, 
deneon,  p.  42  (ib.  yd  adeihvs,  y  kerdus,  emchuelus,  arannwt, 
a  dothoedent,  urth,  etc.,  Southwelsh  forms  and  very  old  or- 
thographs,  cf.  u  for  w  ;  on  the  text  sec  «  Beitr.  »  p.  15,  7). 
B.  of  Herg.  tri  hualogeon,  hualogyon  col.  595  (Y  Cymmr. 
III).  Ll.  G\v.  Rh.  Keinneadaeth  p.  io.  Y  S.Gr.  redeat  §  12, 
ot  oedewch  §  68.  Tit.  D  22  medeant  f.  1  b.  Cleop.  B  5  wei- 
theon, y  eithaueoed  f.  98  a,  medeant  f  103  a,  ymplith  y  rei- 
duseon  f.  104  a,  areant  f.  106  a,  tAwyssogeon  f.  10S  a,  etc. 

In  Sal.  lex.,  1547  arean  and  anean  occur  ;  hère  e  certainly 
tends  to  express  the  thick  syllabic  sound  of  j  in  a  northern 
dialect. 

8.  Initial  j  before  e,  i,  u  and  w  before  u  in  English  loan- 
words  and  in  the  vulgar  English  spoken  by  native  Welshmen 
are  not  pronounccd  ;  et  =  yet,  ood  =  wood,  etc.  Cf.  Rhys 
in  Report  of  the  schools  inspected,  etc.  (Academy,  9,  9., 
1876)  :  ood,  ooman,  ee  (wood,  woman,  ye)  in  Carnarvon- 
shire.  In  the  English  of  Llanidloes  in  Powvs,  on  which  sec 
Collections...  relating  to  Montgomerys.,  vol.  X,  'et,  'ee,  'u, 
'eeld  (yet,  ye,  you,  yield)  p.  311  and  'ool,  'ood,  'ooman 
(wool,  etc.)  p.  309  are  used.  For  Southwales  cf.  The  Red 
Dragon,  vol.  II,  p.  38-40;  also  Ellis,  Early.  E.  Pron.  in  a 
note  to  Sal.  pron.,  1547  :  ye-,  woo-  becomes,  ï,  û. 

9.  This  peculiarity  dates  from  Middlewelsh.  Cf.  Red  B.  of 
Herg.  ac  wtward  y6  ary  koet  h6nn6,  col.  630.  wdward=wood- 
ward  is  given  in  the  index  of  English  loanwords  in  Dafydd  ab 
Gwilym's  Poems  (Llundain,  1789).  In  the  often  edited  1 5 th 


Notes  on  Welsh  Consonnants.  7 1 

cent.  English  Poem  in  Welsh  orthography  J  printed  by  Ellis, 
Trans.  Phil.  Soc.  1880  from  a  Hengwrt  Ms.  wld  occurs  1.  60 
besides  ei  would  1.  15,  wi  wowld  1.  67.  —  In  Lewis  Dwnn's 
Herald.  Visitât.  (Eg.  Ms.  2585)  occur:  off  Wlffsdal  (Wolfs- 
dale)  I  p.  163  (éd.  Meyrick),  off  Wdstok  p.  163,  off  Wdstock 
p.  146,  v(erch)  Robart  off  The  Wd  ap  Gibon  Wd  p.  126,  etc. 


10.  Pre-Cymric  v  in  inlaut  between  vowels  is  altered  in 
Welsh  in  two  différent  ways,  on  which  see  Zeuss2,  p.  106, 
128  ;  the  resuit  of  v  and  the  vowel  before  it  is  au,  ou  or  aw, 
e\v  (av,  ev)  ;  also  besides  final  -eu  in  historié  welsh  (keneu) 
-aw-  occurs  in  inlaut  (kenawon),  see  Zeuss2,  p.  129.  This 
différence  is  of  difficult  explanation.  I  shall  give  hère  the  ma- 
terials  I  collected  towards  its  illustration  and  a  few  susses- 
tionsasto  conditions  etc.  of  thèse  doublets,  skr.  yuvaçds  =  in- 
doeurop.  juv;/kôs,  lat.  juvencus  (gaul.  Jovincillus  etc.,  Zeuss2, 
p.  128)  becomes  in  Welsh  *  jovanc- jouanc,  jeuanc  and  *je- 
wanc,  hence  *iwanc,  ifanc. 

1 1 .  The  following  forms  of  this  word  and  its  dérivâtes  are 
worthof  attention  :  Cleop.  B  5  gwas  ieuwanc  f.  60  a  (ieuang 
f.  68  b)  ;  this  form  is  supported  by  deuwei  etc.  in  ony  deu- 
wei  f.  75  a,  ny  deuwei  ib.,  o  deuwant  f.  61  a;  beuwyd  f .  3  a 
for  bywyd  looks  very  strange,  but  also  deuheu  occurs  in  this 
Ms.,  on  which  see  «  Beitr.  »  §  84,  where  o  Ddeuheubarth, 
Her.  Yisit.  II,  p.  246  (1685)  may  be  added  ;  eu  seems  writ- 
ten  for  e,  as  final  —  eu  was  pronounced  —  e  ;  so  beuwyd  is 
for  bewyd,  bâwyd  ?  then  ieuwanc  would  be  =  *iewanc.  Ll. 
Gw.  Rh.  gwreic  yangk  dec.  p.  139  Y  S.  Gr.  ieueyngtid  §  30; 
S  iegtid,  Owen  p.  296  ;  Jes.  Coll.  141  plur.  jeueink  f.  60  b. 

1.  Cf.  Cambrian  Register  II,  p.  299-304;  The  Cambro  Briton  ;  Hyna- 
iion  Cymreig  p.  13-16  ;  Arch  Cambr.  II,  1,  p.  304-7  ;  Trans.  Phil.  Soc. 
(reprinted  in  Arch.  Cambr.)  ;  Wilkins,  lit.  ofWalesp.  106  squ. —  InAddit. 
Ms.  14866,  f.  23a  is  a  copy  of  it,  beginning  :  0  meichti  ladi  owr  leding 
tw  haf,  at  hefn  owr  abeiding,  whilst  Ellis'  Ms.  (Hgt.  Nr.  294)  runs  thus  : 
O  michdi  ladi  our  leding  to  haf  at  hefn  owr  abeiding  etc.,  so  that  an  édition 
from  the  Addit.  Ms.  would  be  of  interest.  It  is  said  there,  f  25  a  ;  Jeuan 
ap  hywel  Swrdwal  ai  cant.  medd  eraill  Jevan  ap  Rytherch  ap  Joan  Lloyd. 


-2  Nettlau. 

12.  Sal.,  N.  T.  ieunctit  f.  310  b,  ieuntit  f.  319  a,  ifieugtit 
f.  314  a;  (R.  Davies)  ieuanc  f.  313  a,  plur.  ievainc  f.  314  a. 
Addit.  Ms.  14913,  i6th.  cent.,  southw.  yviengtit  f.  53  a; 
Addit.  Ms.  14986,  i6th.  cent,  iyfangc  f .  8  a  ;  Addit.  Ms. 
14973,  1640  iengtid  f.  73  a,  ientit  f.  69  a;  Addit.  Ms.  14987 
(Powys)  om  hienc/d  f.  81  b;  Add.  Ms.  15005  gwr  ifenge  f. 
74  a,  yr  ifenge  f.  132  a;  Jfieintid  f.  40  b,  Jfieintid  f.  53  a, 
jfieintid  f.  79  b;  Addit.  Ms.  15059,  18  th.  cent,  ifiengtyd 
f.  212  a,  ifiengedd  f.  225  a.  Ll.  Dwnn,  Her.  Vis.  I,  iengetyd 
p.  9,  iangafp.  113,  134,  135,  etc.  (more  than  14  times), 
ianngafp.  170;  (iengav  vol.  II  p.  123,  1685);  jevank  p.  21, 
ievank  p.  171  ;  jevaf  p.  157  ;  ifonk  p.  153,  190.  Llyfr  Achau, 
1602,  Breconsh.  ieyangk  p.  57,  ieanck  p.  36,  yeia  p.  47, 
ivank  p.  16,  ifank  p.  11,  57,  ifanck  p.  26.  Davies,  lex.  1621 
(and  Richards  lex.  1753)  gives  ieuange  —  iau,  ieuangach  — 
ieuaf,  passim  ifaf  ;  E.  Lhuvd,  Arch.  Brit.  uses  ivange  (dimet. 
dial.). 

In  modem  dialects  :  S.C.  (dimet.)  yn  ifenc  (plur.)  I, 
p.  373,  ie'nctyd  I,  p.  292,  331.  Carnarvonsh.  ifangk,  jengach 
(Sweet).  Merionethsh.  i'r  bobol  ifinc,  Cab.  few.  T.  p.  258, 
hogenod  ifinc  p.  290,  plurals  like  bychin,  erill,  llvgid  being 
used  in  the  northern  dialects. 

13.  The  w  =  v  in  *  iewanc,  the  doublet  of  ieuanc  became 
f,  like  w  in  cenafon  besides  cenawon  etc.,  see  below.  *iefanc 
becarne  ifanc  like  Ithel  from  Judhael  etc.  jenctyd  seems  to 
corne  from  jeuenc-tyd  by  dropping  the  first  unstressed  vowel  : 
j(eu)énctyd,  like  cylodi,  *cfodi,  codi,  see  below.  jang  is  per- 
haps  a  secondary  abstraction  from  iengtyd,  forms  like  gwan 
and  gwendid  etc.  being  the  model.  —  The  loanword  Jo- 
hannes  (Iwovvtîç)  exhibits  the  same  double  altération  of  a  form 
*Jovan-,  vie.  Jeuan,  Jouan,  Jevan,  Jfan,  Jwan,  as  the  forms 
are  given  in  the  pref.  to  Ll.  G\v.  G.,  1586.  See  also  Rhys, 
Arch.  Cambr.,  loanwords  s.  v.  :  Jowan  (L.  Land.  Jouhan), 
Jeuan  (now  only  used  as  a  hardie  name),  Ifan  (engl.  Evan), 
Jeian  (in  common  use  until  a  récent  time)  ;  Ifan  and  Jwan 
in  Cardiganshire. 

14.  Cl.  funher  peues  and  powys  (state  of  rest),  Zeuss -, 
p.   128;  deual,  3.  sing.  daw  and  Southwelsh    dawaf  want  a 


Noies  on  Welsh  Consonnants.  7  3 

spécial  inquiry;  see  my  article  on  the  verb  (YC,  vol.  IX). 
In  the  oldest  texts  deuaf,  3 .  sing.  daw  and  doaf  are  the  only 
forms  used;  in  Cleop.  B  5  deuwei  etc.  occurs,  see  §  11.  Dawaf 
is  fréquent  in  Southwelsh  texts  sinceSal.  N.  T.  (dawaf,  dewi, 
daw,  dawn,  dewch,  dawant).  I  think,  dawaf  is  a  new  form, 
based on  the  3rd  sing.  daw;  the  older  forms,  showing  the  proper 
treatment  of  an  aw  in  pretonic  syllables  (tlawd,  tlodion)  are 
doaf  etc.  So  deuaf  and  daw  only  rest  and  appear  to  be  the 
exact  counterparts  of  trawaf,  3.  sing.  tereu  (Ll.  Gw.  Rh. 
p.  53),  adawaf,  ef  a  edeu  ib.  p.  87,  gwrandawaf,  y  gwerendeu 
p.  38  etc.,  see  Zeuss2,  p.  129.  The  forms  of  the  other  Bry- 
thonic  languages  prove  the  composition  of  a  verb  with  do- 
in  deuaf  to  be  preCymric.  In  older  Welsh  forms  of  the  verb 
subst.  with  do-  in  the  sensé  of  «  to  corne  »  are  fréquent  ;  cf. 
dybu  ;  a  dvui  Tal.  205  ;  Richards  lex.  1753  says,  that  ië  dybi, 
«  it  is  to  be  sure  »  is  still  used  in  Glamorganshire.  deuaf, 
daw  would  permit  to  be  brought  from  *  dov-,  *  dob-  ;  the 
form  of  the  verb  subst.  can  not  be  ascertained,  since  the  or- 
dinary  termination  -af  lias  been  introduced.  Deuaf  could 
also  possibly  corne  from  *do(a)gaf,  cf.  doeth,  see  below;  but 
daw  would  then  rest  unexplained,  eu  from  *og  not  being 
elsewhere   treated  like  eu  from  *  ov. 

15.  Ceneu  and  cenaw,  cub  whelp  (Zeuss2,  p.  129)  :  plur. 
kynawon,  a,  chynawon  B.  ofHerg.,  col.  722;  cenawon,  im- 
perite  cenafon  (cynghanedd  :  cynfyn)  Davies  lex.  ;  kena,  Sweet 
p.  42 5 .  —  In  «  Beitr.  »  §  93  I  gave  examples  of  gewvn  : 
geuyn,  Uysewyn  :  Llyseuyn  and  of  eisieu  :  eisio,  to  which 
may  be  added  :  giewyn,  B.  of  Herg.  col.  760  ;  this  is  said  by 
Rhys  (Y  C.  MI,  p.  19)  to  be  still  used  in  a  part  of  North- 
wales,  cf.  gï-en  gi-au.  Llessewyn,  Ll.  Gw.  Rh.  p.  244,  llyse- 
wyn p.  73  ;  llyseuoed  p.  50.  The  Northwelsh  eisio  I  think 
now  to  be  like  taro,  gaddo  (Sweet  p.  425)  identical  with  an 
older  eisiaw,  the  doublet  of  eisieu,  like  *giaw  (giewyn)  :  gieu. 
Of  this  obscure  word  note  also  eissev,  eissywed  B.  of  Carm. 
p.  45,  eissiwet  B.  of  Herg.  col.  819,  830,  eissvwedic  col.  820; 
Ll.  Gw.  Rh.  eissywed igy on  p.  110,  eissydedic  p.  223  (?  ; 
d  =  dd,  1  from  w  ?)  diessiwau,  dieissiwau  Ms.  A,  p.  66.  — 
Cf.  also  clowed,  clywed  and  cigleu,  *elov-. 


74  NettLw. 

16.  Ceiri  is  said  by  Rhys  to  be  the  plural  of  cawr  (giant) 
in  the  Carnarvonshire  dialect  ;  rhiw  geiri  o  ddynion  occurs  in 
a  local  newspaper,  cf.  the  références  in  «  Beitr.  »  §  ioo.  On 
cawr  sec  Zeuss 2,  p.  129  and  of  late,  H.  d'Arbois  de  Jub.  in 
Mém.  de  la  Soc.  de  Ling.  de  Paris,  V,  p.  121-123,  where 
the  respective  Gaul.  names  are  fully  given.  I  think  ceiri  can 
be  explained  thus  :  *eavaro-  is  to  be  compared  in  structure 
with  trigaranus  (:ycp2Vo;),  Welsh  taradr  (:  -i^i-zy/)  etc.; 
*cava-  cf.  skr.  çâvi-ra-  and  cura-,  *  KevA-  and  *KvA  (de 
Saussure,  Mém.  p.  260).  *cavaro-  resulted  in  Welsh  into  the 
doublets  *cawar-  and  *cauar-,  who  lost  the  a  probably  by 
an  earlier  stress-shift  in  the  declination.  ceiri  then  is  *ceuri 
from  *caur,  the  doublet  of  cawr. 

17.  Pre-Cymric  b  and  m  between  vowèls  became  either  f 
or  with  the  preceding  vowel  eu,  cf.  neuadd,  hall,  Old- Welsh 
nouodou  (M.  Cap.),  ir.  nemed,  vejj.e-cov  ;  y  newad  occurs  B. 
of  Herg.,  col.  689,  a  strange  form,  as  w  for  u  (i'i)  is  not 
used  in  this  Ms.  (cf.  new  =  neu,  Calig.  A  13  etc.),  if  it  is 
no  error;  cf.  *iewanc  etc.  —  Goreu,  best  seems  to  be  a  super- 
lative and  -eu  :  -af  is  to  be  explained  like  edeu  :  edaf,  Old-W. 
etem,  Zeuss2,  p.  821. 

18.  To  ir.  claidhebh  correspond  Welsh  cleddyf  and  cleddeu, 
given  both  by  Spurrell.  Cf.  B.  of  Herg.  ae  gledeu  col.  559; 
Ll.  Gw.  Rh.  cledeu  p.  136(3),  138,  148,  264,  282;  Sal.  N. 
T.  cleddey  (marg.  cleddyf),  f.  388  a  (Huet).  Other  forms  of 
this  word  are  :  plur.  clefvdeu  :  B.  of  Herg.  a  thvnnu  clefvdeu 
ac  ymfFust  col.  644,  moess6ch  attafi  a6ch  clefvdeu  col.  644, 
645  ;  in  Yst.  de  Car.  M.  clefvdeu  col.  420,  clevydeu  col.  423, 
klevydeu  col.  450;  Ll.  Gw.  Rh.  cleuydeu  p.  70,  torof  a 
chleuvdeu  p.  253.  Cleddyddeu  :  Llyfr.  IIuw  Llyn  (written  it 
is  said  by  Guttyn  Owain,  the  herald  bard  of  the  abbeys  of 
Basingwerk  and  Ystrad  Flur,  late  I5thcent.):  kleddyddav  f. 
129  b  r;  jes.  Coll.  141  kleddyddav.  f.  40  b,  cleddyddeu  f.  61 
a  (kleddei  1.  40  b).  Cf.  Peredur  penwetic,  B.  of  Carm.  p.  30 
and  Pwyll  bendeddig  Dyved,  Ll.  Achau,  1602,  p.  64,  and 
see  below. 

19.  I  think  the  suffix  denoting  the  instrument  and  the  agent 
of  any  thing,  the  modem  form  of  which  is  -ai  (cf.  arwyddai 


Notes  on  Welsh  Consonants.  75 

ensign,  cymhellai  spur,  nofai,  clepai,  cecrai,  meddalai  etc.)  is 
an  old  m-suffix,  the  doublet  ofwhich  is  -yf,  cf.  oldcorn.  ne- 
dim,  gl.  ascia,  Zeuss2,  p.  821  and  W.  neddai  et  neddyf  dola- 
bella  ;  naddu  asciare,  dolare  (Davies)  ;  neddei  i  naddy,  an 
addys  (adze),  Sal.  lex.  Spurrell  has  also  ulai  hydrogen  and 
ulyf,  the  remains  of  anything  burnt  ;  carbon.  —  (Atter  this 
had  been  written  in November  1886  I  first  saw  in  March  1887 
the  article  of  E.  Ernault  in  Revue  Celt.  VII,  4,  p.  311,  who 
notes  similar  doublets  in  Breton.  They  want  fuller  considé- 
ration, than  I  can  bestow  upon  them  in  this  article  restricted 
to  the  Welsh  language). 


20.  Some  w  between  vowels  are  dialectically  changed  into  f. 
Cf.  Northw.  llifo,  brifo  =  lliwo,  briwo,  D.  S.  Evans,  llythr., 
index  ;  llifio  =  lliwio  colorare  (lliw),  Davies  ;  brifo  Swoet 
p.  429  to  break  (briwo).  Southw.  kawad  =  Northw.  kafod, 
E.  Lhuyd,  Arch.  Br.  s.  v.  imber,  see  «  Beitr.  »  §  60  and 
ga[e]af  kawada6c  Hgt  202,  f.  25  bi.  cenafon  see  §  15.  Da- 
vies :  berywon  =  barcuttanod  milvi  ;  beryfon  ;  (bery,  -on 
kite,  Sp.).  dwvwol,  dwyfol,  ib.  (cf.  Devardoeu  Dubr  duiu, 
meuddwyetc,  Rhys  Lect2.  p.  407-412).  bvfolieth,  biography 
C.  f'ew.  T.  p.  106  ;  gorfadd  =  gorwedd,  Sweet  p.  429.  On 
ifanc  and  Ifan  see  §  12,  13.  —  cvrafol,  cyrafon  serviceberries  ; 
cyrawol  the  same,  cyrawel,  -en  berries  Sp.  ;  ib.  rhafon  servi- 
cetreeberries,  rhawol  cluster,  bunch  ;  cerddin,  id.  quod  criafol, 
opulus  arbor  Davies  ;  criafol  and  cvriafol  ;  criafonllwyn  cwrf 
vnlliw,  Gutto  'r  Glynn,  ib.;  E.  Lhuyd,  Arch.  Br.  :  Southw. 
pen  crawel  ;  L.  Morris,  Addit.  Ms.  14923  Southw.  crawol, 
white  thorn  berries  =  Northw.  ogfaen,  f.  133  b. 

W.  Salesbury,  pron.  1547  (in  Ellis  Early  Engl.  Pron.) 
says  s.  lit.  w.  :  Northw.  tavlu  or  tarlu  (iacio).  —  Southw. 
tavvly  ;  in  South  welsh  «  they  résolve  v  into  their  wonted  vo- 
wel  vv  »  ;  the  reverse  was  the  case  in  Southw.  devnvdd  or 
defnydd,  substantia,  «  and  some  corrupters  denvydd  »  = 
Northw.  deunydd;  s.  lit.  f  :  in  Southw.  «  they  use  rather  v, 
Northw.  writers  commonly  occupye  f».  Davies  lex.  gives  def- 
nydd et  deunydd  materia,  passim  denfydd  ;  Y  Traeth.    II, 


76  Nettlau. 

p.  34  denfydd  is  also  mcntioned.  On  tawlu,  towlu  =  taflu, 
see  «  Beitr.  »  §  97. 

21.  Sometimes  w  betwecn  vowels  is  omitted  in  Mss.,  es- 
pecially  in  n.  pr.  ;  particulars  from  the  living  dialccts  must  be 
expected,  before  the  phonetic  value  of  thèse  orthographs  can 
be  discussed.  Cf.  Loarch  lien,  Vesp.  A  14,  f.  lia  (de  situ 
Brecb.);  na6  niarnod  S  (Addit.  Ms.  22356),  f.  73  b,  deesb6yd 
f.  70  a  (d6esb6yd  often)  ;  Hoell,  Hoel,  Ll.  Achau  (nearly  al- 
ways).  Rhys,  Y  Traeth.  1884,  479  conneets  the  n.  1.  Llifon, 
Llion,  Lliwon  or  Lliwan  with  llif,  lli  and  Llyn  Llion  (tria- 
des), ffrydiau  Lliw  or  Llyw  (Mab.  K.  ac  Ol.)-" 

22.  On  initial  gw  -f-  r,  1  see  Zeuss  2,  p.  130.  Initial  g\v  -f-  r, 
1,  n  are  pronounced  in  Northw.  grw,  glw,  gnw  («  rw  :  the 
two  conss.  being  uttered  simultaneously  »  Swet,  p.  418, 
grwaig),  in  Southw.  gr,  gl,  gn. 

Cf.  glwâd,  gnwico,  grwaig  in  Carnarvonsh.,  Sweet,  p.  410. 
Such  orthographs  occur  in  the  Venedot.  Ms.  A  :  grueic 
p.  40,  grueyc  p.  38  (thrice),  gruaget  p.  48  besides  greyc 
p.  38  (twice),  eny  greickao  p.  38,  guedy  e  greycaho  p.  38, 
graget  p.  49;  gluatTp.  59,  o  gluad  arall  p.  125  besides  gla- 
doet  p.  50,  gleduchu  p.  4,  gluan  (fleece)2  p.  132. 

In  the  iyth  cent.  Battledoor  (1660)  nwithur,  a  nwaid 
(=  wnaeth),  nwithir,  grwaig,  ir  gwr  ac  ir  nvaig  occur 
p.  3,  4,  6  ;  but  otherwise  thfs  text  is  Gwentian.  In  Southw. 
texts  cf.  gl6b6r,  Tit.  D  22  (see  YC.  III),  —  gwlybwr,  dial. 
glybwr  (Powel).  In  modem  dialects  :  graig,  grando  (Hughes, 
1822);  ygneithetc,  S.  C.  —  gnythyr  often  in  Addit.  Ms. 
14921  (16  cent.). 

(A  suivre).  Nettlau. 

1.  Rhvs  remarks  in  Pennants  Jour  II,  p.  21$,  that  gwladhad  now  only 
the  sensé  of  rus  ;  gwledig  rusticus.  In  Hanes  y  ffvdd,  x6~j  Northwelsh 
gwladaidd  is  explainedin  the  glossary  bycywilyadus  (scandalous). 

2.  Flannel  is  held  by  Thurnevsen  also  Wedgwood  etc.,  to  be  of  Celtic 
origin  ;  on  tliis  point  see  also  Schuchardt.  Lit.  blatt  f.  g.  u.  rom.  Phil., 
1885,  p.  118.  It  is  curions  to  note  flannen,  whicli  is  given  in  Byegones, 
1880-81,  p.  160  from  the  English  of  Towyn,  Merionethsh.  of  1678  and 
said  to  be  still  used  ;  it  is  not  a  hvbrid  form  between  flannel  and  gwlanen 
to  ail  apparence,  as  it  is  said  to  occur  in  older  English  generallv.  Remera- 
bering  graget  in  Ms.  A  *gl.  and  not  lll  would  be  expected  in  an  English 
loanword. 


SUR   QUELQUES  INSCRIPTIONS  DE  SAINTES 

CONTENANT    DES    NOMS    GAULOIS 


Les  fouilles  heureuses  que  conduit  en  ce  moment,  à  Saintes, 
M.  le  chanoine  Julien-Laferrière,  ont  fait  connaître  un  certain 
nombre  d'inscriptions  latines,  quelques-unes  d'autant  plus  in- 
téressantes qu'elles  remontent  au  commencement  du  Ier  siècle 
de  notre  ère.  Curieux  à  plus  d'un  titre,  ces  textes  épigra- 
phiques  ont  ceci  de  caractéristique  qu'ils  contiennent  plusieurs 
noms  propres  gaulois  ;  le  fait  ne  peut  guère  étonner  dans  une 
ville  qui  possède  un  arc  de  triomphe  élevé  par  C.  Julius  Ru- 
jus,  C.  Juli  Otuaneuni  filins,  C.  Jnli  Gedemonis  ncpos,  Epot- 
sorovidi  prouepos1  ;  mais  il  n'en  est  pas  moins  utile  à  signaler. 

Ces  inscriptions  ont  déjà  été  publiées  pour  la  plupart,  soit  par 
les  archéologues  du  pays,  soit  à  Paris,  à  la  suite  de  communi- 
cations faites  à  l'Académie,  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres 
ou  à  la  Société  des  Antiquaires  de  France.  Ayant  eu  l'occasion 
d'étudier  sur  place  le  texte  de  ces  monuments  épigraphiques 
dont  quelques-unes  soulèvent  des  difficultés  de  détail  non  en- 
core résolues,  je  ne  crois  pas  inutile  d'y  revenir  afin  d'élucider 
certains  points  qui  intéressent  l'onomastique  gauloise.  Si  je 
suis  assez  heureux  pour  y  apporter  quelque  lumière,  les  Cel- 
tistes  pourront,  peut-être,  y  trouver  quelque  intérêt. 

I. 

Le  plus  beau  document  épigraphique  qui  ait  été  rencontré 
dans  les  fouilles  est  une  grande  inscription  provenant  d'un 

i .  Wilmanns,  885. 


78  R.  Cagnat. 

monument  funéraire  qui  a  dû  être  considérable1.  Le  texte  se 
compose  de  six  lignes  dont  la  première  est  à  moitié  illisible  à 
cause  des  accidents  qui  sont  arrivés  à  la  pierre.  Les  autres,  au 
contraire,  sont  très  profondément  gravées  et  ne  donnent  lieu  à 
aucun  doute  de  lecture.  On  peut  les  développer  ainsi: 

Sant(oni),  duplicario  alae  Atectorigiana[é\,  stipendi(i)s 

emeritis  XXXII,  aère  incisso,  evocat[o]  Gesatorum  sexcentorum 
Raetorum  castello  Ircavio,  clup[eo],  coronis,  aenulis  (sic)  aureis 
donato  a  commiliton[ib(usj],  Julia  Matrona  f(ilia) ,  C.  Jul(ius) 
Primulus  l(ibertus),  h(eredes),  e(x)  t(estatnento)  [p(osuerunt)]. 

Cette  partie  de  l'inscription,  sur  laquelle  il  y  aurait  beau- 
coup à  dire,  si  je  ne  tenais  à  me  renfermer  dans  les  limites 
que  je  me  suis  tracées,  contient  deux  noms  propres  qui  ne  sont 
pas  romains,  Atectorix  déjà  connu  par  les  monnaies  2,  et  Ir- 
cavium,  ethnique  que  je  n'ai  rencontré  nulle  part. 

La  première  ligne,  que  j'ai  omise  à  dessein  dans  la  trans- 
cription que  je  viens  de  donner,  est  ainsi  conçue  : 

V.IVLIU    AUL   )lL'~-'  'rtMALRU 

c'est-à-dire  qu'après  le  prénom  et  le  nom  du  personnage  qui 
s'appelait  C.  Julius,  ayant  reçu  la  cité  romaine  de  César  ou 
d'Auguste,  viennent  une  suite  de  lettres  à  demi-brisées  ou  ef- 
facées, suivies  elles-mêmes  de  sept  lettres  environ  complè- 
tement illisibles.  La  fin  de  la  ligne  AMACRO  contient  cer- 
tainement le  surnom  du  personnage  :  Macro. 

L'A  qui  précède  ne  me  paraît  pouvoir  appartenir  qu'au  nom 
de  la  tribu  où  C.  Julius  était  inscrit,  puisqu'il  ne  peut  faire  partie 

i .  Cette  inscription  a  été  signalée  pour  la  première  fois  par  M.  Héron 
de  Villefosse  au  Comité  des  Travaux  historiques  du  Ministère  de  l'Instruc- 
tion publique  et  ensuite  à  l'Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres, 
et  plusieurs  fois  reproduite  depuis.  Cf.  Espérandieu,  Note  sur  les  inscrip- 
tions de  Saintes,  p.  13  ;  Hild,  Bulletin  de  la  Société  de  Poitiers,  1887,  p.  295; 
Audiat,  Revue  de  Saintonge  et  d'Aunis,  1887,  p.  346  et  suiv.  ;  Mommsen, 
Korrespondenjblatt   der   Westd.  Zeitschrift,  VI,  p.  205. 

2.  Ch.  Robert,  Monnaies  gauloises,  p.  43  ;  Revue  Celtique,  1881,  p.  116; 
Revue  Archéologique,  1878  (XXXV),  p.  18S.  Cf.  Revue  Celtique,  1887,  p.  137. 


Sur  quelques  inscriptions  de  Saintes.  79 

ni  de  son  surnom,  ni  de  sa  filiation;  il  faut  pourtant  remarquer 
que  dans  certaines  des  inscriptions  analogues,  trouvées  à 
Saintes1,  la  tribu  n'est  pas  indiquée,  mais  ce  n'est  pas  là  un 
argument  décisif,  puisqu'elle  figure  dans  certaines  autres.  Reste 
à  trouver  le  nom  de  cette  tribu.  Si  le  graveur,  suivant  les  usages 
habituels,  l'avait  écrit  en  abrégé,  et  en  supposant  que  l'abré- 
viation fût  conforme  aux  règles  établies,  nous  n'avons  à 
choisir  qu'entre  deux  tribus,  la  tribu  Claudia  et  la  tribu  Scaptia, 
les  seules  dont  l'abréviation  se  termine  par  un  A  (CLA,  SCA)2. 
La  tribu  Claudia  peut  être  éliminée  sans  hésitation  ;  car  elle 
ne  convient  ni  à  un  citoyen  romain  qui  tenait  le  droit  de  cité 
de  César  ou  d'Auguste,  ni  à  un  habitant  de  Saintes.  On  ne 
peut  être  aussi  affirmant  pour  la  tribu  Scaptia,  qui  fut  peut- 
être  celle  à  laquelle  Auguste  appartenait  avant  son  adoption 3; 
cependant  on  ne  voit  pas  que  les  citoyens  qui  reçurent  le 
droit  de  cité  de  lui  ou  de  son  père  adoptif  aient  été  inscrits 
dans  cette  tribu.  Les  C.  Julii  sont  rangés  dans  la  tribu  Fabia4. 
Il  y  a  donc  de  sérieuses  difficultés  à  admettre  ici  la  présence 
de  l'abréviation  SCA. 

On  peut  se  demander,  dans  ces  conditions,  si  le  nom  de  la 
tribu  n'était  pas  écrit  en  toutes  lettres  comme  il  arrive  parfois. 
En  ce  cas  on  doit  songer  avant  tout  à  la  tribu  Voltiuia  à  la- 
quelle appartiennent  les  autres  C.  Julius  de  Saintes  5  et  qui 
paraît  avoir  été  la  tribu  réservée  à  la  ville.  Mais  le  mot  Vol- 
tiuia, même  en  supposant  des  ligatures,  remplirait  complè- 
tement, dépasserait  même  la  lacune  qui  existe  à  la  première 
ligne  de  l'inscription,  de  sorte  qu'on  n'aurait  plus  la  place  né- 
cessaire pour    compléter  la  filiation  du  personnage.    Voltiuia 

1 .  Cf.  par  exemple  l'inscription  de  l'arc  de  triomphe  rappelée  plus  haut. 

2.  Si  l'abréviation  de  la  tribu  était  irrégulière,  il  y  aurait  plusieurs  noms 
qui  conviendraient  :  Galeriu.  (GA),  Horatia  (ORA),  Papiria  (PA).  Cf.  Ku- 
bitschek,  De  romanarum  tribuum  origine  ac  propagatione,  p.  3  5  et  suiv.,  mais 
on  ne  peut  sainement  raisonner  dans  cette  hypothèse. 

3.  Suét.,  Oct.,  40.  Cf.  Kubitschek,  op.  cit.,  p.  118,  et  Mommsen, 
Epbem.  epigr.,  III,  p.  232.  Peut-être  même  est-ce  la  tribu  à  laquelle  ap- 
partenait César.  Cf.  Mommsen,  Eph.  epigr.,  IV,  p.  222. 

4.  Cf.  Kubitschek;  op.  cit.,  p.  116  et  suiv. 

5.  Cf.  Audiat,  Epigraphie  Santone,  p.  18;  Mowat,  Revue  Celtique,  1881, 
p.  113,  et  les  inscriptions  publiées  par  Espérandieu,  op.  cit.,  p.  6  et  §,  et 
Audiat,  Fouilles  dans  les  remparts  gallo-romains  de  Saintes,  p.  9  et  10. 


So  R.  Cagnat. 

doit  être  abandonné,  à  son  tour.  Peut-être  faut-il  admettre 
Fabia  qui  n'est  pas  impossible  à  restituer,  ainsi  qu'il  résulte 
de  ce  que  nous  avons  dit  quelques  lignes  plus  haut,  et  dont  la 
longueur  conviendrait  assez  pour  l'espace  disponible,  mais  on 
ne  saurait  être  plus  affirmant. 

Cette  question,  qui  semble  n'avoir  aucun  rapport  direct  avec 
le  point  particulier  auquel  je  veux  m' attacher  dans  cette  note, 
est  au  contraire  très  importante  à  résoudre.  Car  de  la  longueur 
du  mot  qui  précède  Macro,  dépend  en  grande  partie  la  lon- 
gueur de  celui,  qui  suivait  Julio,  c'est-à-dire  du  nom  gaulois 
sous  lequel  le  père  de  C.  Julius  Macer  était  ici  désigné.  Faute 
de  pouvoir  déterminer  la  tribu,  nous  ne  pourrons  être  fixés 
d'une  façon  certaine  sur  ce  nom.  On  peut  pourtant  arriver  à 
une  demi-solution. 

Si  l'on  réserve  avant  le  mot  Fabia,  que  j'admets  provisoi- 
rement, la  place  nécessaire  pour  la  lettre  F,  indiquant  la  filia- 
tion du  personnage,  qui  précédait  le -nom  de  la  tribu  —  FIL 
serait  trop  long  avec  FABIA,  et  ne  pourrait  être  restitué  que  si 
l'on  admet  SCA  —  on  voit  qu'il  ne  peut  manquer  que  deux 
lettres  après  le  dernier  L  \isible  du  nom  gaulois  que  nous 
cherchons  :  LI  conviendrait  fort  bien  ;  ce  qui  nous  donnerait 
la  terminaison  Mus,  fréquente  dans  les  noms  propres  de 
Gaule  l.  D'un  autre  côté,  le  caractère  qui  précède  le  groupe  IL 
est  un  O  ou  un  D  ;  la  première  lettre  nous  conduit  à  un  mot 
comme  AGLOILLI  qui  serait  tout  à  fait  nouveau,  la  seconde 
au  contraire  au  nom  AGEDILLI  qui,  non  seulement,  contient 
un  élément  AGED 2  déjà  rencontré  en  composition^,  mais 
même  que  l'on  a  lu  en  entier  sur  des  inscriptions -t.  Ainsi  il  est 

i.  Zeuss,  Gramm.  celt.,  p.  767.  Cf.  des  noms  analogues  comme  AbJu- 
cillus,  Toutillus,  Troue Mus,  Exeingilla,  Caravillus,  MogetiXla,  Carantillus,  etc. 

2.  'Ayrjo  se  lit  sur  des  monnaies  grecques  (Revue  Je  Numismatique,  IX, 
p.  365)  ;  cf.  de  Longpérier,  Rev.  de  philologie,  II,  p.  336;  Gluck,  Keltisch. 
Namen,  p.  16,  et  Zeuss,  Gramm.  celt.,  y.  36. 

3.  Il  est  entré  dans  le  nom  de  ville  bien  connu  Agedincum,  et  dans  le 
nom  propre  Agedomapas  admis  par  M.  Robert  (Monnaies  gauloises,  p.  38  ; 
cf.de  Barthélémy,  Revue  numismat.,  1884,  p.  177  et  suiv.). 

4.  C.  I.  L  ,  II,  4436  avec  un  commentaire,  et  VII,  1356,  24.  Cf.  la 
liste  de  noms  gaulois  tirés  des  inscriptions  publiée  dans  la  Revue  Celtique, 
1887,  p.  133  et  suiv.  et  le  complément  qu'en  donne  actuellement  M.  l'abbé 
Thédenat  (ibid.,  1887,  p.  180).  Il  signale  la  forme  AGISILLVS. 


Sur  quelques  inscriptions  de  Saintes .  8 1 

plus  que  probable  que  le  père  de  C.  Julius  Macer  se  nommait 
Agedillus  .La  première  ligne  du  texte  peut  donc  se  lire  C.  Julio, 
Âgedil[li  f(ilio) ,  Fabi  ?  ?]a  Macro  ouC.  Julio,  AgediJ[U  Jil(io), 
Sc]a(piia)  Macro. 

IL 

Une  seconde  inscription  qui  remonte  aussi  certainement  au 
début  de  l'empire  porte,  en  lettre  de  o  m,  15  et  o  m,   10: 

CIVLIOCON 

PATIS  •  NEPOTI  •  P 
ROMAE-ET-  AVG 

On  voit,  du  premier  coup  d'œil,  qu'il  s'agit  dans  ce  texte 
d'un  prêtre  de  Rome  et  d'Auguste,  s' appelant  C.  Julius,  dont 
le  père  devait  porter  un  nom  commençant  par  Cou,  tandis  que 
celui  du  grand-père  se  terminait  en  pas. 

Or,  le  musée  de  Saintes  possède  un  fragment  découvert 
«  dans  la  partie  du  mur  du  jardin  de  l'hôpital  demeurée  in- 
tacte »,  c'est-à-dire  dans  le  rempart  qui  taisait  suite  à  celui 
qu'on  démolit  actuellement.  Chaudruc  de  Crazannes  l'a  fait 
connaître  le  premier1,  et  plusieurs  auteurs  l'ont  reproduit 
après  lui2.  La  copie  que  j'en  ai  prise  porte  : 

ONNETODVBNI 

FECTO  •  FABRVM  ■  TRIBV 
1 1  •  AD  ■  CONFLVENTEM  ■  C  ■ 

Les  deux  fragments,  aujourd'hui  rapprochés  l'un  de  l'autre 
au  musée,  se  raccordent  parfaitement  pour  la  hauteur  des  let- 


1 .  Rev.  Arch.,  III,  p.  246. 

2.  Cf.  par  exemple  Magasin  encych,  1817,  p.  230;  Jouannet,  Bulletin 
monumental,  X,  p.  540;  Audiat,  Epigr.  Santone,  p.  15  :  Espérandieu,  op. 
cit.,  p.  10. 

Revue  Celtique,  IX  6 


82  R.  Cagnat. 

très,  la  disposition  des  caractères  et  la  gravure  ;  il  y  a  seule- 
ment entre  les  deux  pierres  une  petite  lacune  qui  se  comble 
aisément.  Réunies,  ces  deux  pièces  offrent  l'inscription  sui- 
vante, mutilée  gravement  à  droite  : 

C  ■  IVLIO  •  CON  .ONNETODVBNI 

PATIS -NEPOTI-  P/wFECTO-FABRVM  -TRIBV 
ROMAE  -ET-  AVGusil  '  AD  •  CONFLVENTEjM  •  C' 

Le  nom  du  père  est  Conconnetodubnus,  qui  était  déjà  connu, 
au  moins  sous  la  forme  Conconnetodumnus  l,  et  qui  a  été  lon- 
guement étudié  par  Gluck 2  ;  nous  le  retrouverons  encore  plus 
bas. 

Le  nom  de  l'aïeul  se  terminait  en  pas  (gén.  patis).  Il  est 
difficile  de  le  déterminer,  le  nombre  de  lettres  qui  se  lisaient  à 
la  fin  de  la  ligne  étant  presque  impossible  à  fixer  exactement 
et  le  surnom  de  C.  Julius  étant  inconnu.  La  fin  de  la  se- 
conde ligne  était  certainement  : 

no  militum  sacerdoti, 

mais  ces  mots  pouvaient  être  abrégés.  Militum  était  peut- 
être  écrit  mil  ou  milit  ;  sacerdoti  se  présentait  peut-être  sous 
les  formes  sac  ou  sacerd.  Cependant,  aucun  des  autres  mots 
de  l'inscription  n'est  abrégé  ;  c'est  un  fait  à  retenir.  De  plus, 
à  la  fin  de  la  troisième  ligne,  on  lisait  le  nom  de  celui  qui  a 
élevé  le  monument,  probablement  Julius,  peut-être  Jul,  son 
surnom  qui  ne  pouvait  guère  avoir  moins  de  quatre  lettres, 
un  qualificatif  comme  libertus  ou  hères,  peut-être  les  deux,  puis 
le  verbe  fecit  (F)  précédé  ou  suivi  de  quelqu'une  des  formules 
qui  l'accompagnaient  d'habitude  en  pareil  cas.  Je  serais  donc 
assez  disposé  à  croire  que  la  seconde  ligne  ne  comportait  pas 
plus  d'abréviation  que  les  autres,  ce  qui  fixe  le  nombre  des 
lettres  disparues  à  la  fin  de  chacune  d'elles  à  dix-huit  environ. 

i.   Caes,  Bel.  Gai,  III,  7. 
2.   Keltisch.  Kamen,  p.  63-83. 


Sur  quelques  inscriptions  de  Saintes.  8} 

En  en  retranchant  les  cinq  qui  composent  le  mot  filio,  com- 
plément nécessaire  de  Conconnetodubni  —  nepoti  étant  écrit  en 
entier,  il  faut  supposer  qu'il  en  était  de  môme  de  filio  —  il 
reste  douze  ou'  treize  lettres  qu'il  faut  répartir  entre  le  cog- 
nomcn  du  personnage  et  le  début  du  nom  de  son  aïeul1.  Si  le 
premier  était  long,  le  second  devait  être  court  ;  dans  ce  cas, 
un  mot  comme  \Uni\patis2  conviendrait;  si,  au  contraire,  le 
cognomen  de  C.  Julius  ne  comprenait  que  peu  de  lettres,  le 
nom  de  l'aïeul  devait  en  renfermer  un  plus  grand  nombre,  et 
il  faudrait  songer,  par  exemple,  à  [Agcdoma]patis>.  Enfin  on 
peut  croire  que  le  nombre  de  lettres  dont  nous  disposons  était 
également  partagé  entre  les  deux  ;  [Esumo]  patis  ou  tel  autre 
de  la  même  longueur  ne  serait  pas  alors  déplacé.  De  toute 
façon,  on  ne  peut  arriver  à  un  résultat  certain. 

Pourtant  il  ne  faut  pas  désespérer  de  voir  la  question  résolue 
quelque  jour.  En  premier  lieu  la  pierre  qui  forme  la  fin  de 
cette  inscription  peut  se  retrouver  dans  le  mur  que  l'on  va 
continuer  à  démolir.  Mais  même  si  elle  a  été  détruite,  tout 
espoir  n'est  pas  perdu.  Il  est  possible,  en  effet,  que  l'inscription 
du  fils  de  Conconnetodubnus  ait  été  deux  fois  répétée  sur  les 
faces  de  son  monument  funéraire.  On  peut,  il  semble,  le 
conjecturer  d'après  un  fragment  découvert  autrefois,  lui  aussi, 
dans  les  fouilles  de  l'hôpital 4  et  publié  par  Chaudruc  de  Cra- 
zannes  : 


C    1VL 
PATI 
SAC 


Il  paraît  bien  que  ce  début  d'inscription  est  la  première 
partie  d'un  texte  identique  à  celui  qui  fait  l'objet  de  ce  para- 

i .  Je  ne  fais  pas  entrer  en  compte  le  nom  de  la  tribu,  parce  qu'il  n'est 
pas  certain  qu'elle  ait  été  inscrite  (cf.  l'inscription  de  l'arc  de  triomphe)  ; 
mais  on  pourrait  aussi  songer  à  la  faire  figurer  avant  le  surnom. 

2.  Héron  de  Villefosse,  Répertoire  des  travaux  historiques,  1882,  p.  50. 

3.  Robert,  Monnaies  gauloises,  p.  58. 

4.  Antiq.  de  Saintes,  p.  34,  pi.  IV,  fig.  3  ;  Audiat,  Epigr.  Santone,^.  26 
d'après  Bourignon.  Celui-ci  donne  PATR  à  la  deuxième  ligne. 


84  R.  Cagnat. 

graphe  ;  la  disposition  seule  de  la  seconde  et  de  la  troisième 
ligne  y  aurait  été  légèrement  modifiée.  Peut-être  verrons- 
nous  prochainement  sortir  du  mur  les  autres  fragments  de 
cette  inscription.  On  peut  espérer,  en  tout  cas,  quelle  que  soit 
la  trouvaille  que  l'avenir  nous  réserve,  que,  d'une  façon  ou 
de  l'autre,  nous  serons  fixés  sur  le  début  du  mot  dont  il 
semble  que  nous  possédions  deux  fois  la  terminaison  :  patis. 
L'épitaphe  de  C.  Julius,  Conconrietodubni  filins...  peut  sug- 
gérer, relativement  aux  noms  du  personnage,  une  dernière  re- 
marque. On  sait  que  d'habitude,  dans  la  suite  des  dénomi- 
nations des  citoyens  romains,  le  surnom  ne  figure  qu'après  la 
filiation,  même  quand  celle-ci  comprend  la  désignation  de 
l'aïeul  et  du  bisaïeul.  Ici,  au  contraire,  le  nom  de  l'aïeul  suivi 
du  mot  nepoti  était  certainement  rejeté  après  le  cognomen.  Il 
en  était  de  même  dans  l'inscription  de  l'arc  de  triomphe  où 
on  lit  :  C.  Julius,  C.  Juli  Otuancitn-i  f.,  Rufus,  C.  Juli  Gede- 
monis  nepos,  Epotsorovidi  pron(epos) x .  Il  y  a  là  une  irrégularité, 
qui  tient  sans  doute  à  des  habitudes  locales  et  à  l'ignorance 
relative  où  l'on  était  des  usages  de  la  capitale.  Dans  une  autre 
épitaphe  de  Saintes,  le  nom  même  du  père  est  rejeté  après  le 
cognomen  du  fils2.  L.  Aemilio  Paterno,  Verteri  f(ilio)  suisque 
posteris ;  M.  Acm(ilius)  Palcrnus  et  L.  Aemil(ius)  Scvcrus  fe- 
cerunt.  Au  reste,  des  irrégularités  de  cette  nature  pourraient 
être  relevées  dans  toutes  les  parties  de  l'empire  romain. 


III. 

Le  nom  Conconnctodubnus  se  retrouve  aussi  sur  une  ins- 
cription honorifique  élevée  à  Néron  que  l'on  a  rencontrée 
dans  les  mêmes  fouilles;  elle  a  été  bien  publiée  par  MM.  Espe- 
randieu  >  et  Audiat  -*  : 


1.  Willmanns,  885. 

2.  Audiat,  Epigraphit  Santone,  p.  6: 

3.  Op.  cit.,  p.  8. 

4.  Op.  cit.,  p.  10. 


Sur  quelques  inscriptions  de  Saintes.  8  5 

n       e       r       0       n        i 
c      l      a      a      d      i      0 

d     r     V  S  O  •  G  E    r 

M   A   N    I    C    O 

c     A    E     S    A     R     I  (an  51/54) 

c  .////?I  VS-CONCO 
hi'/oDVBNI  •  F  •  VOLT 

Au-dessous  de  cette  ligne  la'  pierre  est  brisée. 

On  a  voulu  rapprocher  de  ce  piédestal  mutilé  par  le  bas 
une  autre  pierre  dépourvue  de  sa  partie  supérieure  et  où  on  lit 
seulement,  au  ras  même  de  la  cassure  : 

GIDVBNVS1, 

La  conséquence  de  ce  rapprochement  est  que  le  dédicant  se 
serait  appelé  C.  fulius  \C6\gidubnus .  Ce  dernier  nom  est  bien 
connu2.  Je  ne  pense  pas,  pour  mon  compte,  après  avoir  exa- 
miné de  près  l'original  avec  M.  le  chanoine  Julien-Laferrière, 
que  ces  deux  morceaux  fassent  partie  du  même  monument.  On 
remarquera  d'abord  que  l'usure  de  la  pierre  avant  GIDVBNVS 
n'est  que  superficielle  et  que,  par  suite,  il  serait  possible  de 
saisir  quelques  traces  de  lettres,  s'il  en  avait  jamais  existé  à 
cet  endroit  ;  or  on  ne  distingue  absolument  rien.  Le  début  de 
ce  nom  gaulois,  qui  est  indubitablement  Cogidubnus,  devait 
donc  être  gravé  à  la  fin  de  la  ligne  précédente,  ce  qu'il  est 
impossible  d'admettre  pour  la  dédicace  à  Néron,  puisque  le 
mot  VOLT  touche  l'angle  extrême  de  la  pierre.  Un  second 
argument,  plus  décisif  encore,  peut  se  tirer  de  la  largeur  des 
deux  fragments  de  base  ;  celui  qui  porte  la  dédicace  à  Néron 
mesure  o  m,  70  ;  l'autre  où  se  lit  Gidubnus,  o  m,  78. 

Celui-ci  fait  partie  d'un  autre  piédestal,  peut-être  élevé  à  un 
personnage  de  la  famille  impériale  de  la  même  époque.  C'est 
ce  que  la  suite  des  fouilles  nous  apprendra  sans  doute. 

1.  Espérandieu,  loc,  cil. 

2.  C.  I.  L.;  VII,  11  ;  Tac,  Agric,  14;  Gluck,  Keltiscb.  Namen,  p.  71. 


86  R.  Cagnat. 

On  a  voulu  identifier  l'auteur  de  la  dédicace  à  Néron,  en- 
core César,  à  celui  dont  l'épitaphe  fait  le  sujet  de  l'article  pré- 
cédent ;  cette  assimilation  paraît  peu  probable  si  l'on  songe 
que  ce  dernier,  dont  le  père  n'était  pas  citoyen  romain  —  il 
ne  porte  pas  le  nom  de  C.  Julius,  sur  la  pierre  funéraire  de  son 
fils  —  avait  vraisemblablement  reçu  la  cité  romaine  de  César 
ou  d'Auguste  ;  il  était  donc  sans  doute  mort  en  l'an  5 1. 


IV. 

Je  rapporterai,  pour  terminer,  une  épitaphe  trouvée  égale- 
ment à  Saintes,  antérieurement  aux  travaux  actuels.  Elle  vient 
aussi  du  mur  de  l'hôpital,  d'où  elle  a  été  envoyée  au  musée 
en  1862.  Mais  elle  y  était  placée  de  telle  sorte  qu'on  ne  pou- 
vait la  voir.  C'est  en  transportant  les  objets  de  l'ancien  local 
dans  les  salles  qui  viennent  d'être  mises  à  la  disposition  du 
conservateur,  qu'on  l'a  pour  ainsi  dire  remise  au  jour.  M.  le 
chanoine  Julien-Laferrière  a  eu  l'amabilité  d'en  faire  à  mon 
intention  un  excellent  estampage.  Je  la  rapporterai  en  entier, 
car  le  texte  n'en  a  été  publié  qu'une  fois  r. 

Haut,  des  lettres  :  ire  ligne  :  o  m,  09  ;  les  autres,  o  m,  05 . 

CVS    CAIIIVSSI 

OMNERTI  FIL' VIVO 
M  CAPPI  •  COMNERTI  FILI  L 
CVNDINAE  •  FILIAE  ■  VIXSIT  ■  V 
XX  •  ITEM  '  MEMORIAE  ■  IVLIA 
CONIVGI- CARISSIMAE  •    M 

[Mar]cus?  Cappius.  Si \C\ommrti  fil(io),  vivo;  [et  inc- 

moriac M.  Cappi,  Comncrti  frfi(i),  L ,  [item  memoriae 


1.  Audiat,  Bpigr .  Sanione,  p.  4: 


Sur  quelques  inscriptions  de  Saintes.  87 

Se]cundinae  filiae  :  vixsit XX;  item  memoriae  Juîia[e 

conjugi  carissimae.  M... 

Bien  qu'il  soit  impossible  de  restituer  les  lacunes  de  cette 
épitaphe  et  même  de  fixer  exactement  la  longueur  des  lignes, 
on  voit  que  c'était  un  monument  élevé  probablement  par  un 

homme,  [Mar]cus?  Cappius  Si ,  à  l'intention  de  plusieurs 

personnes,  l'une  désignée  à  la  seconde  ligne,  encore  vivante, 
les  autres  mortes,  puisque  les  noms  sont  au  génitif,  et  pré- 
cédés de  la  formule  memoriae.  L'âge  de  l'un  des  défunts  est 
même  indiqué. 

Tout  l'intérêt  du  texte  est  dans  le  nom  Comnertus  qui  s'y 
lit  par  deux  fois.  A  vrai  dire,  dans  les  deux  cas,  et  par  un 
fâcheux  hasard,  la  lettre  qui  suit  leR  n'est  point  nette,  de  telle 
sorte  que  l'on  pourrait  lire  un  I  aussi  bien  qu'un  T,  ce  qui 
donnerait  Comneri;  pourtant,  sur  l'estampage,  il  paraît  bien  y 
avoir  un  T  dans  le  mot,  surtout  à  la  troisième  ligne. 

Comnertus  est  aussi  inconnu  que  Comnerius  ;  mais  ce  ne 
peut  être  qu'une  forme  de  Cobncrtus  qui,  lui,  est  fréquent1. 
Nous  avons  vu  plus  haut  un  exemple  de  la  permutation  du  b  et 
du  m  devant  la  consonne  n,  dans  les  mots  Conconnctodubnus 
et  Conconncîoditnmiis ;  le  nom  Comnertus  nous  en  fournirait  un 
nouveau.  L'assimilation  que  ces  échanges  de  lettres  trahissent 
est  de  toutes  les  langues  et  s'est  déjà  souvent  rencontrée  dans 
les  noms  gaulois. 

Cobnertns  se  retrouve  dans  les  inscriptions  sous  les  formes 
Covinertus2,  Covnertus  ou  Counertusî  et  Conertus^. 

R.  Cagnat. 


1  .  CI.  L.,  III,  6010,  66  ;  laser.  Helvet.,  351,  7  ;  C.  I.  L.,  VII,  1336, 
324,  325  et  1337,  21  ?;  Bramb.,  1027  et  1902  ;  Rev.  èpigr.,  1885,  p.  152. 
Cf.  Gluck,  Keltisch.  Kamcn,  p.  81  et  168. 

2.  CI.  L.,  III,  4999. 

3.  Ibîd.,  4778,  4901,  4988,  4902,  etc. 

4.  Ibid.,   5646. 


UN    MONUMENT   INÉDIT 

DE  LA  LITURGIE  CELTIQUE 


Les  litanies  suivantes  se  trouvent  à  la  fin  d'un  Psautier 
du  xc  siècle,  conservé  dans  la  bibliothèque  du  «  Dean  and 
Chapter  of  Salisbury  ».  On  le  croit  d'origine  française. 

Nous  v  ajoutons  une  description  tirée  du  catalogue  imprimé, 
par  M.  Maunde  Thompson,  œuvre  exacte  de  référence. 

N°   180 

«  Vellum  15  1/4X12  3/4  inches.  173  ff.  in  double  col. 
«  France.  X  century. 

«  Psalterium  ;  a  double  version,  the  Gallican  and  Hebrew 
of  Jerome's  translation,  written  in  parallel  columns  preceded 
by  the  préface  of  Hieronymus,  Epistles  of  Damasus  and 
:<  Hieronymus,  and  other  introductory  matter  (ff.  1-17)  and 
(  followed  by  the  Psalm  «  Pusillus  »  (t.  164  a)  Canticles 
(  (f.  164  b)  «  Ymnus  ad  matutinum  diebus  Dominicis  »  the 
c  Te  Deum  (f.  168  b)  «  Ymnus  in  diebus  festis  ad  missam  » 
Gloria  in  excelsis  (f.  169  a)  Lord's  Prayer  and  Apostles 
Creed  (f.  169  b)  Fides  Catholica  or  Athanasian  Creed 
(f.  169  b)  Litany  and  Prayers  (f.  170  b)  The  Psalter  begins 
(  imperfectly  in  Ps.  ii.  2.  The  Litany  contains  the  names 
of  mahy  Breton  Saints.  The  last  leaf  is  an  addition  of  the 
XI  century.  There  are  some  [Latin]  marginal  comme  ntaries. 
Ornemental  initial  letters  are  added  with  twisted  designs, 
pendent  leaves  ée.  Some  are  in  the  form  offishes  and  some 
are  coloured  red.  » 


Un  monument  inédit  de  la  liturgie  celtique. 


89 


Plusieurs  saints  bretons  parmi  les  Confesseurs,  dans  cette  Li- 
tanie qui  n'a  jamais  été  publiée,  ne  se  trouvent  pas  ailleurs,  et 
pour  leur  identification,  j'ai  fait  d'inutiles  recherches.  Les 
courtes  «  Oraisons  »  ou  «  Prières  »  qui  suivent  les  Litanies 
sont  gallicanes  de  forme  et  de  diction.  Les  savants  liturgistes 
seront  sûrement  bien  reconnaissants  envers  la  direction  de  la 
Revue  Celtique  si  elle  les  fait  imprimer. 

Qui  sont  les  «  rex  et  regina  »  (xe  siècle)  pour  lesquels  on 
demande  les  prières  ?  Où  était  le  monastère  (monâsteriuni, 
p.  94)  dans  lequel  ces  prières  étaient  dites  ? 


(Fol.  170  b). 
Incipiunt  letanias. 
Kyrri  eleison. 
Christe  eleison. 
Kyrri  eleison. 
Christe  audi  nos. 
Sancta  Maria,  ora  pro  [nobisj. 
Sancte  Michael  — 

—  Gabriel  — 

—  Raphaël  — 

Oranes  Sancti  Angeli.  orate  pro'Lnobis] 

—  Sancîi  Archangeli.  — 

—  Sancte  Uirtutes.  — 

—  Sancti  Throni.  — 

—  Sanctae  Dominationes.     — 

—  Sancti  Principatus.  — 

—  Sanctae  Potestates. 

—  Sancta;  Sedes.  — 

—  Sancti  Cheruphim.  — 

—  —  Zeraphim.  — 

—  —  OrdinesCaelorum. — 
'  —  —   Patriarche.  — 

—  —  Prophète.  — 
Sancte  Petre.              ora  pro  fnobis] 

—  Paule. 

—  Andréa.  — 

—  Iohannes  (f.  171  a  a).    — 

—  Philippe. 

—  Bartholomee.  — 

—  Mathee.  — 

—  Thoma.  — 

—  Iacobe.  — 

—  Tathee.  — 


Sancte  Symon, 

—  Iacobe. 

—  Mathia. 
Omnes  Sancti  Apostoli. 
Sancte  Iohannes  Baptista 

—  Marce. 

—  Luca. 

—  Barnaba. 

—  Stéphane. 

—  Line. 

—  Clete. 

—  Anaclete. 

—  Ignati. 

—  Clemens. 

—  Sixte. 

—  Hermas. 

—  Corneli. 

—  Cypriane. 

—  Laurenti. 

—  Ippolite. 

—  Ualeriane. 

—  Fabiane. 

—  Sebastiane. 

—  Geruasi  (f 

—  Protasi. 

—  Iohannes. 

—  Paule. 

—  Cosnia. 

—  Damiane. 

—  Félix. 

—  Adriane. 

—  Dionisi. 

—  Rustice. 


ora  pro  [nobis] 


171  a  b).      — 


9o 


F.-E.  Warren. 


SancteTite.  0ra  pro  [nobisj 

—  Ambacuc.  

—  Timothee.  

—  Eleut(h)eri.  _ 

—  Uincenti.  

—  Maurici.  

—  Crispine.  

—  Crispinianc.  

—  Saturnine.  

—  Marcelle.  

—  Romane.  

—  Donatiane.  

—  Rogatiane.  — 

—  Uitalis.  

—  Ciriace.  

—  Quintine.  

—  Albane.  

—  Pancrati.  

—  Quirine.  

—  Proti.  

—  Iacincte  (f.  171  a  c).      — 

—  Processi.  _ 

—  Martiniane.  

—  Nicostrate.  

—  Georgi.  

—  Fortunate.  

—  Exsuperi.  

—  Candide.  

—  Eustachi.  

—  Uictor.  

—  Simphoriane.  — 

—  Hermès.  

—  Felicissime.  

—  Audacte.  

—  Froiecte.  

—  Eusebi.  

—  Ualeri.  

—  Luci.  

—  Quiriace.  — 

—  Neree.  

—  Achillee.  

—  Iuuenalis.  

—  Alexander.  

—  Euenti.  __ 

—  Gordiane.  

—  Prime.  


Sancte  Feliciane. 

—  Naboris. 

—  Basilidis. 

—  Agapite. 

—  Gereon  (f.  171  ad). 

—  Fiorenti. 

—  Leodegari. 

—  Bonefaci. 

—  Luciane. 

—  Faustine. 

—  Uictorine. 

—  Martialis. 

—  Iuliane. 

—  Urbane. 

—  Simplicis. 

—  Menna. 

—  Nicomedis. 

—  Crisogone. 

—  Théodore. 

—  Arnulfe. 

—  Claudi. 

—  Albine. 

—  Antonine. 

—  Theodosi. 
Omnes  Sancti  Martires. 
Sancte  Léo. 

—  Siluester. 

—  Innocenti. 

—  Cirille 

—  Donate. 

—  Euchœri. 

—  Hieronime. 

—  Augustine. 

—  Columbane. 

—  Paule  (f.  171  a  e). 

—  Antoni. 

—  Machari. 

—  Effrem. 

—  Basili. 

—  Bénédicte. 

—  Gregori. 

—  Hylari. 

—  Martine. 

—  Brici. 

—  Remegi. 

—  Anniane, 


ora  pro  [nobisj 


Un  monument  inédit  de  la  liturgie  celtique. 


ora  pro  [nobisl 


Sancte  Atanasi. 

—  Florenti. 

—  Germane. 

—  Filiberte. 

—  Uedastc 

—  Amande. 

—  Ricari. 

—  Gutborte. 

—  Launomare. 

—  Audomare. 

—  Namnetis. 

—  Medarde. 

—  Albane. 

—  Trudo. 

—  Landebcrte. 

—  Pauline. 

—  Sulpici. 

—  Seuere. 

—  Honorate  (f.  171  b  a) 

—  Cirine. 

—  Appollonaris. 

—  Ambrosi. 

—  Isidore. 

—  Eusebi. 

—  Postomiane. 

—  Anastasi. 

—  Paterne. 

—  Melani. 

—  Samson. 

—  Gilda . 

—  Brioce. 

—  Caoce. 

—  Macloue. 

—  Meuinne. 

—  ludicale. 

—  Tutgucde. 

—  Paule. 

—  Guidguale. 

—  Gacv.vualoe. 

—  Courentine. 

—  Leutierne. 

—  Guenîeue. 

—  Ediunete. 


91 

Sancte  Iunanaue.        ora  pro  [nobisj 

—  Indoce.  — 

—  Guinnoce.  — 

—  Di(r)cille.  — 

—  larnhobri.  — 

—  Bachla  (f.  171  b  b).        — 

—  Mitnna.  — 

—  G  nid  noue.  — 

—  Gulhuinne.  — 

—  Conocane.  — 

—  Iliaue.  — 

—  Hoeiardone.  — 

—  Hocianiuiue.  — 

—  Toconoce.  — 

—  Hoeargnouc.  — 

—  Iaboine.  — 

—  Tearnmaile.  — 

—  Pat r ici .  — 

—  Columcille.  — 

—  Augustine !.  — 

—  Dauid.  — 

—  Théodore  '.  — 

—  Laurenti  ' .  — 

—  Cutbercte.  — 

—  Columbane.  — 

—  Iltute.  — 

—  Catoce.  — 

—  Brangualadre.  — 
Omnes  Sancti  Confessores.  — 
Sancta  Maria.  — 

—  Regina  mundi.  — 

—  Saluatrix  mundi.  — 

—  Redemptrix  mundi.        — 

—  Félicitas.  — 

—  Perpétua.  — 

—  Petronella  (f.  17  b  c).    — 

—  Agnes.  — 

—  Agatha.  — 

—  Cecilia.  — 

—  Sauina.  — 

—  Prudentiana.  — 

—  Anastasia.  — 

—  Iustina.  — 


1 .  Premier,  septième   et  deuxième  archevêques  de  Cantorbéry.  Voyez 
Stouv  Missal,  fol.  31  b. 


92 


F.-E.  [Varren. 


SanctaTecla.  ora  pro  [nobis] 

—  Columba.  — 

—  Sophia.  — 

—  Margarita.  — 

—  Scholastica.  — 

—  Soteris.  — 

—  Praxidis.  — 

—  Genetrudis.  — 

—  Prisca.  — 

—  Lucia.  — 

—  Beatrix.  — 

—  Gaudentia.  — 

—  Candida.  — 

—  Basilissa.  — 

—  Affra.  — 

—  Chionia.  — 

—  Benedicta.  — 

—  Balbina.  — 

—  Maria.  — 

—  Blandina.  — 

—  Formosa.  — 

—  Iuliana.  — 

—  Benigna  (f.  171  b  d).     — 

—  Casta.  — 

—  Helena.  — 

—  Brigitta.  — 

—  Martina.  — 

—  Potentiana.  — 

—  Susanna.  — 

—  Daria.  — 

—  Eulalia.  — 

—  Ninnoca. 

—  Eugenia.  — 

—  Cristina.  — 

—  Corona.  — 

—  Uictoria.  — 
Omnes  Sanctae  Uirgincs.  — 

—  Uidue.  — 
■ —            Continentes.      — 

Omnes  Sancti,  orate. 

Propitius  esto,  libéra  nos,  Domine. 

—  parce  nobis  — 
Ab  omni  malo,  libéra  nos,  — 
Ab  hoste  —  — 
Ab  insidiis  diabolî  —  — 
A  morbo  malo         —         •    — 


Ab  omni  temptatione  diaboli. 

Ab  omni  inpugnatione  diaboli. 

Ab  omni  aduersitate  libéra. 

Ab  omni  cogitatione  mala. 

Ab  omni  iniquitate,  libéra  nos,  Do- 
mine. 

Ab  omni  tribulatione,  libéra  nos, 
Domine. 

(F.  172  a  a).  Ab  omni  inmundicia 
cordis  et  corporis. 

Ab  omni  pestilentia  et  famé. 

Ab  omni  clade,  libéra  nos,  Domine. 

A  captivitate  — 

A  morte  perpétua  — 

A  periculo  mortis  — 

Ab  instantibus  pcriculis  — 

Per  natiuitatem  tuam      — 

Percircumcisionemtuam — 

Per  baptismum  tuum       — 

Per  ieiunium  tuum  — 

Per  crucem  tuam  — 

Per  resurrectioncm  tuam  — 

Per  ascenscionem  tuam  — 

Peccatorcs,  te  rogamus,  audi  nos. 

Ut  pacem  nobis  donare  digneris,  Do- 
mine ihesu,  te  rogamus,  audi  nos. 

Ut  auertas  iram  tuam  a  nobis,  Do- 
mine ihesu,  te  rogamus,  audi  nos. 

Ut  nobis  miseris  peccatoribus  mise- 
reri  digneris,  Domine  ihesu,  te  ro- 
gamus, audi  nos. 

Ut  spatium  penitentie  nobis  donare 
[digneris  Domine  ihesu]  te  ro- 
gamus [audi  nos). 

Ut  remissionem  peccatorum  nostro- 
rum  nobis  dones,  te  rogamus, 
audi  nos. 

Ut  nos  in  omni  tribulatione  nostra 
exaudire  digneris,  domine  ihesu, 
te  rogamus. 

Fili  dei,  te  rogamus,  audi  nos.  iii. 

Agne  dei,  qui  tolhs  peccata  mundi, 
exaudi  nos,  domine. 

Agne  dei,  qui  tollis  peccata  mundi, 
libéra  nos  domine. 

(F.  172  a  b),Agne  dei,  qui  tollis  peç- 


Un  monument  inédit  de  la  liturgie  celtique.  93 

cata  mundi,  parce  nobis  domine.       Christe  audi  nos.  iii. 
Agne  dei,  qui  tollis  peccata  mundi,       Kyrie  eleison,  iii. 
miserere  nobis.  Christe  eleison,  iii. 

Oratio  communis. 

Pie  et  exaudibilis  domine  deus  noster  ihesu  christe,  cle- 
mentiam  tuam  cum  omni  supplicatione  deposcimus  ut  per  in- 
teruentum  et  [meritum  beatae  marias  gloriosse  semperque  uir- 
ginis,  et  omnium  sanctorum  angelorum  ac  archangelorum, 
omniumque  ordinum  celestium,  necnon  patriarcharum,  pro- 
phetarum,  apostolorum,  martyrum,  confessorum,  uirginum, 
monachorum,  et  omnium  ciuium  supernorum,  ecclesiaa  tuae 
sanctce  catholicse  fidem  augeas,  pacem  rectoribus  nostris  tri- 
buas,  remissionem  et  indulgentiampeccatorum  nostrorum  nobis 
concédas,  infirmantibus  salutem,  lapsis  reparationem,  naui- 
gantibus  atque  iter  agentibusfidelibus  iter  prosperum  acsalutis 
portum  tribulantibus  gaudium,  oppressis  releuationem,  cap- 
tiuis  uinctis  et  peregrinis  remissionem  atque  absolutionem,  et 
ad  patriam  reuersionem,  orfanis,  uiduis,  pupillis  sustenta- 
tionem  simul  et  consolationem,  discordantibus  mutuam  cari- 
tatem,  infidelibus  ueram  fidem,  et  defunctis  fidelibus  nostris 
amicis,  omnibusque  in  christo  quiescentibus  requiem  sempi- 
ternam  propitius  donare  digneris,  qui  cum  pâtre  et  spiritu 
sancto  uiuis  et  régnas. 

(f.  172  b  a).  Oremus  pro  omni  gradu  ecclesiastico,  et  pro 
omnibus  sacerdotibus,  et  pro  omnibus  fratribus  et  sororibus 
nostris  spiritalibus  [ut  près  ?]  tet  illis  deus  in  ordine  ecclesias- 
tico [cas  ?]  te  uiuere  et  in  caritate  et  in  castitate  perseuerare 
concédât.  R.  Amen. 

Oremus  pro  regibus  et  principibus  et  omni  populo  chris- 
tiano,  ut  rex  regum  et  dominus  dominantium  tribuat  illis  pa- 
cem et  tranquillitatem  in  terra  diebus  ac  [temporibus  nostris  ?] 
dignetur  resistere  omnibus  gentibus  paganis  et  hereticis,  ut 
non[arripiant  ?]  potestatem  nec  uictoriam  super  ecclesiam  dei, 
nec  super  populum  christianum  in  tempore  nostro.  R.  Amen. 

Oremus  pro  rege  nostro  ut  dextera  domini  sua  clementia 
dignetur  eum  defendere  de  manibus  inimicorum  omnium,  de 
gladio   maligno,    et    de   omni   periculo,    donet    ei   auxilium 


94  F.-E.  Warren. 

contra  omnes  aduersarios  eius,  concédât  illi  uitam  et  spatium 
ad  eius  salutem  et  nostram  consolationem.  [R.  Amen]. 

Oremus  pro  regina  nostra  ut  pietas  domini  sua  clementia 
dignetur  saluare,  et  custodire  animam  eius  et  corpus,  et  liberet 
eam  de  periculo  et  de  peccato,  et  conseruet  eam  in  omnibus 
operibus  bonis.  R.  Amen. 

Oremus  pro  pastore  nostro  ut  dominus  qui  est  omnium 
pastorum  pastor  lumine  claritatis  suoe  cor  illius  illustret, 
(f.  172  bb)  uirtutibus  quoque  celestibusin  presenti  corroboret, 
pariterque  cum  clero  aut  plèbe  per  uiam  iustitie  dirigat,  et  in 
futuro  ad  superna  uitas  cœlestis  pascua  féliciter  cum  omnibus 
sanctis  peruenire  concédât.  R.  Amen. 

Oremus  pro  omnibus  fratribus  nostris  presbiteris,  diaco- 
nibus,  subdiaconibus,  acolitis,  exorcistis,  lectoribus,  [ostijariis 
defunctis  ut  in  œterna  *  illos  mereamur  cognoscere  participes 
cum  electis  dei.  R.  Amen. 

Oremus  *  *  is  fratribus  qui  nobis. assidue  deseruiunt,  et 
quicumquein  nostras  nécessitâtes  succurrunt,  et  pro  omnibus 
seruientibus  *  *  ,  et  uirtus  domini  illos  defendat  de  gladio  ma- 
ligno,  et  de  omni  periculo  ;  deleat  illorum  peccata  pro  illis  la- 
boribuset  iniuriis  multis  quas  pro  nobis  sustinent.  [R.JAmen. 

Oremus  pro  nostris  elemosinariis,  et  pro  omnibus  benefac- 
toribus  et  pro  omni  populo  christiano  in  hoc  mundo  elemo- 
sinam  facientibus,  ut  dominum  ihesum  christum  nostrum 
habeant  retributorem  bonorum  omnium  in  hoc  seculo,  et  in 
futuro  perpetuo  pro  cuius  amore  et  timoré  elemosinas  nobis 
pauperibus  christi  largiuntur.  [R.]  Amen. 

Oremus  pro  isto  manasterio,  et  omni  populo  habitanti  in  eo, 
uel  qui  conveniunt,  ut  dominus  liberet  eos  ab  omnibus  malis 
atque  periculis,  et  qui  négligentes  sunt  deus  conuertat  corda 
illorum  ad  uiam  ueritatis,  et  dignetur  illuminare  ad  uiam  sa- 
lutis.  R.  Amen. 

(f.  173  a  a)1  Oremus  pro  nobis  inuieem,  ut  deus  qui  cunc- 
torum  est  uia  et  uita  uolentibus  remeare  dignetur  respicere  et 
miserer,  deleat  omnia  nostra  peccata  sicut  se  promisit  peten- 
tibus  exaudire,  et  in  precibus  eorum  adesse  ;  illi  enim  soli  de 

1 .   Cette  dernière  page  a  été  écrite  en  caractères  du  xic  siècle. 


Un  monument  inédit  de  la  liturgie  celtique.  95 

omnibus  curas,  eo  quod  omnium  dominus  est,  liberet  nos  de 
percussionibus  diaboli,  de  uariis  languoribus,  de  incendio,  de 
manibus  omnium  inimicorum,  prestet  nobis  bonam  perseue- 
rantiam  in  suo  sancto  seruitio,  finem  pacificum  christianumque. 
R.  Amen. 

Oremus  pro  his  qui  nos  blasphémantes  et  calumniantes  sunt, 
ut  dominus  ihesus  christus,  mediator  dei  et  hominum  tribuat 
nobis  ueram  patientiam  et  ueram  indulgentiam  eontra  illos,  et 
illis  ueram  emendationem  de  illorum  uitiis.  R.  Amen. 

Oremus  et  pro  his  (qui)  in  tribulationibus  huius  seculi  cons- 
tituti  sunt,  egrotis,  captiuis  peregrinis,  orfanis,  pupillis,  uiduis, 
et  his  qui  in  uera  pœnitentia  sunt,  et  nomen  domini  nostri 
ihesu  christi  inuocent,  auxiliatorem  omnium  deum  sentiant,  et 
pro  nauigantibus  in  bono  iter  agentibus  ut  deus  portum  pietatis 
sue  prestet  innocantibus  nomen  sanctum  suum.  R.  Amen. 

Oremus  pro  omnibus  animabus  defunctorum  christianorum, 
quorumcumque  elemosinam  recepimus,  uel  in  quorum  (f.  173 
a  b)  memoria  fuimus,  ut  ueniant  in  memoriam  ante  dominum 
ihesum  christum,  gaudium  et  letitiam  sempiternam  possideant 
cum  suis  sanctis  electis.  R.  Amen. 

Oremus  ut  misericordia  domini  nos  potius  perueniat  quam 
ira,  et  propter  admirabilem  pietatem  per  quam  nos  fecit, 
ignoscat  peccantibus,  ut  opéra  manuum  suarum  non  faciat  in- 
terire  pestilentia  et  famé,  et  propitius  auertat  a  nobis  hanc  tri- 
bulationem,  ut  ab  ipso  mereamur  inuenire  consolationem.  R. 
Amen. 

Oremus  domini  clementiam,  ut  terrain  quam  uidemus  nos- 
tris  iniquitatibus  tabescentem  a  peste  et  famé  replere  dignetur 
abundantia  ubertatis,  ut  necessaria  humani  generis  bénéficia 
eam  sua  gratia  fructificare  faceat  in  augmentum.  R.  Amen. 

Mis[erere  m]ei  deus  secundum. 

Deus,  qui  caritatis  dona  per  gratiam  sancti  spiritus  tuorum 
cordibus  fidelium  infudisti,  da  famulis  tuis,  pro  quibus  tuam 
deprecamur  clementiam  salutem  mentis  et  corporis,  ut  te  tota 
uirtute  diligant,  et  que  tibi  placita  sunt  tota  dilectione  perfi- 
ciant.  Per. 


96  F.-E.  Warren. 

Il  paraît  que  le  dernier  en  date  des  Saints  à  qui  on  s'adresse 
dans  cette  litanie  est  saint  Boniface,  qui  mourut  en  775. 

L'ornementation  du  manuscrit  n'offre  aucun  caractère  spé- 
cial dont  on  pourrait  se  servir  pour  rattacher  les  litanies  à  une 
localité  particulière. 

Le  manuscrit  est  écrit  d'un  bout  à  l'autre  en  doubles  co- 
lonnes parallèles,  mais  dans  fol.  171  a  il  y  a  cinq  colonnes,  et 
dans  fol.  171  b  quatre  seulement. 

F.-E.  Warren. 

Frenchay  Rectory,  Bristol.  Oct.  1887. 


MÉLANGES 
I. 

ZIMMERIANA. 

London,  16  September  1887. 

I  visited  the  Bodleian  yesterday,  and,  after  finishing  some 
more  important  work,  I  collated  with  the  original  mss.  (Raw- 
linson  B.  512  and  Rawl.  B.  502)  the  extracts  from  those  mss. 
which  Prof.  Zimmer  has  published  in  the  Gœttingischc  Gelehrte 
An^eigen,  for  1  Mardi  1887. 

As  in  the  case  of  his  publications  from  the  Old-Irish  mss. 
at  Wùrzburg  and  Carlsruhe  r,  St-Gallen  and  Berne 2,  and  the 
Middle-Irish  Liber  Hyiiinorum?,  I  found  his  work  untrust- 
worthy,  from  the  linguistic,  aswell  as  from  the  palaeographical, 
point  ofview. 

At  p.  182  of  the  Gœtt.  Gel.  An^eigen  lie  gives  the  title  of  a 
taie  in  Rawl.  B.  512,  fo.  101  a,  thus  : 

<(  Incip(it)  dihaih  inscail  inso  arslicht  hisenlib(ur)  Duibda- 
leitius  .1.  coarpa  Patr(aic)  ». 

Hère  lie  lias  made  no  less  than  four  mistakes.  The  title 
stands  thus  in  the  codex  : 

Incip//di  Baile  inScail  inso  arslicht  hsenlibwzVDuibda  leithi 
.i.  co(;w)arpa4  Patrafr,  literally  «  Incipit  of  the  Champion's 
Frenzy  this,  according  to  (the)  old  book  of  Dub-da-lethe,  to 
wit,  a  successor  of  Patrick  ». 

1.  Literarisches  Centralblatt,  24  Nov.  1883,  col.  1672-1675. 

2.  The  Academy,  2  Oct.  1886,  p.  228. 

3.  Revue  Celtique,  VI,  264. 

4.  Thisword  is  on  the  top  margin,  and  the  m  (a  curved  Une  over  0)  has 
been  eut  off  by  the  bookbinder. 

Revue  Celtique,  IX  7 


98  Mélanges. 

Hère  arslicht  is  a  nominal  préposition  governing  the  gene- 
tive,  and  infecting  the  following  consonant.  Prof.  Zimmer  s 
arslicht  hisenlibÇur)  is  not  Irish,  nor  indeed  any  other  lan- 
guage.  He  obviously  was  not  familiar  with  the  occasional  use 
of  hs  for  the  aspirated  s:  so  by  inserting  without  notice  an  i 
he  turns  the/;  into  the  proposition  «  in  »,  and  then,  wantinga 
dative,  he  extends  the  following  compendium  as  -ur.  His 
«  Duibdaleitius  »  is  due  to  ignorance  of  the  common  fashion 
of  writing  hihy  h  with  an  i placed under,  and  connected  with, 
the  second  downstroke. 

P.  183.  Hère  he  quotes  from  the  same  Ms.  fo.  101,  1, 
laithiu  as  an  example  of  an  Old-Irish  ace.  plural.  This  shews 
that  Prof.  Zimmer  supposes  laithe  to  be  a  masc.  stem  in  io. 
But  it  is  a  neuter  ï'o-stem  (G.  C2.  232),  and  its  ace.  pi.  is 
laithe.  The  passage  from  which  he  quotes  laithiu  is  :  ni  sluind- 
fid  dou  co  cenn  .L.  laithiu  «  to  the  end  of  fifty  days  »,  where 
laithiu  is,  not  an  accusative,  but  a  côrrupt  Middle-Irish  gen. 
plural. 

I  now  proceed  to  Rawl.  B.  502,  which  he  quotes  in  p.  1S4 
of  the  Gœit.  Gel.  Anqeigen.  Hère  there  are  so  many  mistakes 
that  I  must  resort  to  parallel  columns. 


Prof.  Zimmer 

P.  184,  1.  4,  Ccrbail. 

—  1.  8,    Geir.ein.un    Fin.!    mec 
Cumaill. 

—  1.  15,  Orguin...  Mœlodran. 

—  1.  16,  muilend  (gen.  sg.) 

—  1-33)  Cainecb. 

—  1.  34,  innorthainnse...  Cai- 
necb. 

—  1-  35»  dorigne. 

—  1.  42,  ondfein  icortln. 
P.  185,  1.  2,  indu{sc\). 


Codex 

Cerbaill. 

Genemain  Find  meic  huma/1. 


muilinn. 

Cainnech. 
innorthainse. 


Cainnech. 


dorigw. 

ond  fein  icoirthi. 
indusa. 

11.  4,  5,  Hère  the  following  verse  is  mistaken  for  prose  andprinted 
as  such  : 

Fuitt  cobrath. 

ismo  in  donenn  arcach.  (leg.  edeh) 

is  ob  cach  etrice  an, 

is  loch  lan  cacb  âth. 


Mélanges.  99 

a  Cold  till  Doom  !  Greater  is  the  storm  on  every  one.  Every  fiery  fur- 
row  is  a  river.  Every  ford  is  a  full  lake  » . 


P.  185,  1.  7,  laatbracb. 

—  1.8,  sncchtai  Fini.  [«  Find's 
snows  »]. 

—  1.  15,  oui. 


lattrach. 

snechta  finn.  [«  white  snow 

cuy. 


Of  thèse  mistakes  the  penultimate  is  the  most  instructive. 
The  poem  in  which  the  words  snechta  finn  («  white  snow  ») 
occur  is  a  description  of  a  wintry  night,  and  the  half-quatrain 
is  as  follows  : 

na  helta  ni[co]sta  din  : 
snechta  finn  fir  doroich  tôin. 

i.  e.  «  the  flocks,  they  hâve  no  shelter  :  pure  white  snow 
reaches  up  to  the  breech  ».  Professor  Zimmer  not  under- 
standing  the  poem,  but  having  made  out  from  the  easy  prose 
préface  thatFind  son  of  Cumal  had  something  to  do  with  it,  mis- 
takes the  epithet_/zn«  for  a  proper  name,  and  spells  it,  accor- 
dingly,  with  an  initial  capital.  He  seems,  indeed,  to  hâve  Find 
(whom,  like  Macpherson,  he  miscalls  Fingal)  on  the  brain, 
for  in  p.  173  of  his  paper,  1.  15,  he  prints  the  an-Oilfinn  («  in 
Elphin  »)  ofthe  ms.  as  anoil  Finn,  and  in  p.  170  of  his  paper, 
1.  13,  he  makes  the  following  quotation  from  the  margin  cf 
the  Franciscan  manuscrip't  of  the  Dialogue  of  the  Old  Men  : 
Mo  mheallacht  ort  aPhinn,  and  then  gives  this  amazing  commen- 
tary  «  Wenn  man  bedenkt,  dasz  zahlreiche  Episoden  des  Textes 
von  den  galanten  Abenteuern  des  Finn  Mac  Cumail,  Oisin, 
Cailte  und  anderer  Helden  handeln,  dann  wird  man  begreifen, 
wie  ein  streng  denkender  Klosterbruder,  in  asketischem  Eifer 
sich  zu  den  Worten  «  Sei  verflucht  o  Fingal  »  konnte  hin- 
reiszen  lassen  ». 

It  is  hardly  necessary  to  say  that  the  Irish  words  are  clearly 
in  the  ms.  mo  mhallacht  ort  a  phinn  :  that  they  are  the  scri- 
be's  imprécation  on  one  of  his  tools  :  that  they  mean  «  My 
curse  on  thee,  o  pen  !  »  that  the  learned  Celtologue  has  mis- 
taken  a  phinn,  the  voc.  sing.  oîpenn  l  (which  is  masculine  in 

1 .  I  am  indebted  to  Mr.  S.  H.  O'Grady  for  pointing  this  out.  See  now 
theAcADEMY,  Oct.  8,  1887,  pp.  236,  237. 


100 


Mélanges. 


modem  Irish),  for  the  name  of  Ossian's  famous  father  ;  and 
that,  accordingly,  the  «  streng  denkender  Klosterbruder  »,  the 
«  ascetic  zeal  »  and  ail  the  rest  of  it,  pass  (to  use  the  pathetic 
phrase  of  one  of  his  own  poets  *)  «  afay  in  de  Ewigkeit  !  ». 

Pages  172,  173,  are  nearly  filled  with  the  titles  of  69  Os- 
sianic  poems  contained  in  this  codex.  Of  thèse  titles  Prof.  Zim- 
mer  has  given  fifty  one  inexactly.  I  hâve  only  room  to  give  a 
few  spécimens  (for  which  I  am  indebted  to  Mr  S.  H.  O'Grady) 
of  the  mistakes  hère  referred  to  : 


Codex 
sgribhinn  [«  scriptionem  »]. 

buidc  cas. 
Lorcâin. 
trfar. 

cuill  [«  of  holly  »]. 
as. 

ffionn. 
Gulbain. 
fir  moir. 

a  bhend  na  nuabharr  ccruthach  [O 
hillof  thebrightshupelysummits!]. 
do  bhi. 


Prof.  Zimmer 

P. 172,  11.  17,  38,  sgribh  inn  [«  scri- 
be nos  »  !] 

—  1.  27,  buidecas. 

—  1.  40,  Lorchâin. 

—  1.  42,  triâr. 
P.  173,  1.  1,  cuti  [a  of  incest  »]. 

—  1.  18,  is. 

—  1.  19..  fionn. 

—  1.  22,  GulbÇen). 

—  1.  24,  firmoir.  » 

—  1.  2y,abend  nanuabhar  [«  O 
hill  of  the  prides!  »]. 

—  1.  30,  dabî. 

Prof.  Zimmer's  récent  contributions  to  Kuhn's  Zcitschrift 
fur  vergl.  sprachforschung  now  require  notice  : 

Zeitschr.  XXVII,  461,  note  2:  Hère  Prof.  Z.  quotes  the 
gloss  dutiagat  muir  gobuilind,  Ml.  45  d  12,  and  says  :  «  heisst 
da  etwa  :  adeunt  [se.  aquae]  mare  ut  sint  in  eo  ?  Dann  wàre 
gobuil  =  neuir.  go  bh-fuil  und  der  redendste  beweis  fur  das 
vorhandensein  der  eclipsis  nasalis  im  altirischen.  » 

Hère  muir-gobuil  is  a  compound  noun,  meaning  «  séa-iniets  » 
or  «  friths  »,  «  aestuaria  »  ;  and  gobuil  (for  gôbcuil  ?)  is  the  pi. 
nom.  of  O'Clery's  goibél  .1.  bel  na  fairrge.  O'Clery  also  has 
gô  .1.  muir  no  fairrge,  and  goaïts  gen.  sg.  occursibid.  s.  v.  nim. 

Zeitschr.  XXVII  467  note.  Hère  braflacc  (G.  C2.  XXI, 
note)  is  rendered  by  «  colaphum  in  oculum  (schlag  ins  auge)  » 
and  for  lebennib  in  tige  coiteenn  by  «  in  circuitu  monasterii  ». 

braflacc  (a   cferivative    of    brafal   »    treachery,    deceit    », 


1 .  Hans  Breitmann. 


Mélanges.  i  o  i 

O'Reilly,  from  *  mrathal,  *  m  ratio-)  means  a  pitfall  (fovea).  It 
occurs  also  in  the  Tripartite  Life,  p.  186, 1.  25,  of  my  édition, 
as  brathlang. 

lebennib  is  the  pi.  dat.  of  lebenn,  a  common  word  mea- 
ning,  «  scaffold,  platform,  deck  ». 

tige  coitcenn  is  the  gen.  sg.  of  tech  coitchenn,  lit.  domus  com- 
munis,  the  Italian  luogo  commune,  «  a  privy  »  (latrina). 

Prof.  Zimmer  obviously  has  not  a  notion  of  the  meaning  of 
the  note  in  which  the  words  in  question  occur.  It  records  a  prac- 
tical  joke  played  upon  its  writer  by  the  scoloca  of  a  continental 
monastery,  who  had  arranged  the  platforms  of  the  monastic 
privy  so  that  he  tumbled  with  the  planks  into  the  subjacent 
faeces.  Like  a  true  patriot,  he  consoles  himself  with  thethought 
that  the  stercus  had  been  produced  by  his  own  countrymen 
(sed  grattas  ago,  nec  mer  sus  sum  in  stercore  Francorum  !). 

Zeitschrift  XXVIII.  3  13-376.  This  seems  to  me  a  really  va- 
luable  essay,  and  I  frankly  admit  the  force  of  Prof.  Zimmer's 
arguments  against  the  existence  of  preterites  in  b  and  u.  It  is, 
however,  to  be  regretted  that  so  good  a  paper  should  be  de- 
formed,  not  only  by  vulgar  insolence  to  Prof.  Windisch,  but 
by  many  omissions  and  mistakes  shewing  that  Prof.  Zimmer's 
knowledge  of  the  Irish  vocabulary  and  grammar  is  by  no 
means  as  profound  as  he  himself  believes.  For  instance  : 
P.  349,  1.  8,  7  mobrô  is  left  untranslated.  It  means  «  and  my 

quern  ». 
P.  355,  1.  10,  mar  râdit  sium   «  wie  sie  gesagt  wurden   ». 

This  means  «  wie  sie  saçen  »• 
P.  366,  1.  19,  Hère  gessa  «  er  wurde  gebeten  »  is  made  the 
prêt.  part,  passive  of  guidim.  This  seems  to  me  pho- 
netically  impossible.  Gessa  is  the  prêt.  part.  pass.  of 
gessim,  whence  dia  ngessid-si  Ml.  53b  19,  and  the 
passive forms  ngesar  (gl.  orari)  Ml.  51*  17,  and  isgessi 
(gl.  adorandus)  Ml.  26b  3 .  The  cognate  personal  noun 
is  gessid,  gen.  gessedo,  pi.  n.  gessidi.  The  prae-Celtic 
form  of  gessim  may  hâve  been  * ghedhsô,  cognate  with 
8é<y<yacj0ai.  See  Brugmann,  Grundriss,  §  429. 
P.  367,  1.  8,  testa  is  hère  rendered  by  «  wurde  zerstreut  »  (ei- 
gentl.   ausgegossen   zu  tessmim)  and  in  p.  370,  1.  2 


1 02  Mélanges. 

Zimmer  asserts,  that  it  stands  for  ba  testa.  It  means 

fehlte  (do-es-ta),  and  is  simply  the  third  sg.  prêt,  of  a 

common  compound  of  the  root  tel  =  stâ. 
P.  370,  note,  fidehuaich,  LL,  108  a  3  1,  is  rendered  by  «  methbe- 

chers  »  —  «  worin  sehr  intéressant  die  tônende  labialspi- 

rans  —  hier  aus  m  entstanden    ».  The  word  means 

«  wald  kukukes,  i.  e.  habichtes  »,  fid  =  Eng.  zuood. 

The  nom.  sg.  fidehuach,  occurs  in  LL.  251  b.   |  |. 
P.  371,  1.  14,  in  caich  cath  «  in  jeder  schlacht  ».  The  ms.  has 

in  cach  cath. 
Zeitschrift  XXVIII,  417  et  seq.  Thisessây  is  more  valuable 
from  the  literary,  than  from  the  linguistic  point  ofview.  Take 
the  following  instances  : 
P.  422,  last  line,   «  einen  kleinen  knaben  in  der  dulbrôc  des 

Concubar  ».  The  word  meant  is  ulbroc.  Thed  belonçs 

to  the  preceding  article. 
P.  425,  note  1,  1.  4,  nogellis.  Ms.  nogeltis. 
Pp.  433,  434.  There  are  nine  mistakes  in  the  passage  hère  quo- 

ted  from  LL.  245  a. 
P.  434,  11.  15,  16,  in  ba  mebor  ko  «  ob  sie...  wùssten  »,  should 

be  «  ob  sie  erinnerten  ». 
P.  489,  1.  10,  «  iarnarailîu  [slicht]  ».  The  ms.  is  right  :  iar- 

n-arailin  means  «  secundum  alios  ». 
P.  498,  1.  p.  24,  in  pet  ta  11-eoin  is  rendered  by  «  den  zahmen 

vogel  ».  It  means  «  den  Zartelvogel  »,  in  English,  li- 

terally,  «  the  pet  of  a  bird  ». 
Pp.  516,  517,  bairendlecca  is  rendered  by   «   die  zornsteins- 

tùcke  »,  and  forbarendclochaib  by  «  vor  den  zornfel- 

senstûcken  ». 

Prof.  Zimmer  has  hère  confounded  bar  a  «  anger  », 

gen.   barann,  with  barend  or  bairend,  now  boireauu, 

«  rock  »  :  barcnd-Jecc  means  «  rock-flag  »,  barend-clocb 

means  «  rock-stone  ».  Compare  bairne  nadoch,  To- 

gail  Troi  (H.    2.    16),    lines    1481,    1S66,    and    see 

O'Don.  Supp.  s.  v.  Boireann. 
P.  544,  11.  6,   7,   «   resislog  doididnad   ».   This  is  not  Irish, 

though  it  is  in  the  facsimile  of  L.  U.  57b.  Read  :  re- 

siw  slôg  do  iwididnad. 


Mélanges.  j  05 

P.  564,  11.  19,  2,  «  ôruc  buaid  rlg  alathûatbi1,  rendered  by  «  da 
er  den  sieg  ùber  den  Kônig  eines  fremden  volkes... 
brachte  ».  Read  ô  rue  buaid  rig  A  la  Clûathi,  d.  h.  «  da 
er  den  Sieg  ùber  den  Kônig  von  Ail  Clûade  (Dum- 
barton)  brachte  ». 
P.  565,  1.  10,  adainther,  read  adainter. 

—     1.  13,  hintenid,  read  hitenid. 
P.  565,  1.  1,  «for  Dat  coinaltac  Conairi  »,  sagte  Dat,  der  pfle- 

çebruder  Conaire's  ». 
P.  566,  1.  26,  «  hier  [LU.  8515  n]  heisst  er  Dat  mac  Duind 

Dêsa  «  Dat  der  sohn  des  Dond  Desa  » . 
PP.  574,  11.  22,  23,  for  Daf  mac  Duind  Desa. 

Thèse  three  last  are  perhaps  the  most  amusing  of  the  Pro- 
fessons blunders.  In  each  place  the  ms.  h&sfordat  unie  «  say 
(the)  sons  »,  i.  e.  the  seven  or,  according  to  one  recension, 
the  three  sons  of  Donn  Desa,  Conaire's  fosterbrothers. 

Fordat,  LU.  85b  11,  87*  42,  =  ordat  LU.  8c>b  22,  is  the 
pi.  3  of  the  imperfect  verbforÇd),  or(d)  inquit,  cognate  with 
the  Latin  verbum  from  *verfum}  *verdbuni,  cognate  also  with 
the  Eng.  word,  German  zuort.  Prof.  Zimmer's  «  Dat  »  may 
take  its  place  beside  «  gadtar  »,  «  doairchntais  »,  «  adgladstàr  », 
and  other  beautiful  vocables  with  which  lie  has  eniïched  the 
Old-Irish  vocabulary. 

P.  577,  note  1,  ((  inairiur  Breg  «  im  hafen  von  Breg  »,  was 
in  zusammenhang  Unsinn  giebt.  Es  ist  zu  bessern 
inairthiur  Breç  «  im  osten  von  Breg  ».  No  «  besse- 
rung  »  is  needed,  as  inairiur  Breg  means  «  in  the  ter- 
ritory  of  B.  »  airiur  being  the  dat.  sg.  oîairer  «  ter- 
ritory,  district  »,  a  common  word  which  we  hâve  in 
Ar-gyle  (Airer  Gôidel). 
P.  593,  11.  8,  10,  dîamis  «  nach  einen  Monat  ».  Ms.  dia  mis 

«  that  day  month  » . 
PP.  616,  1.  38,  679,  1.  3,  Lebor  Bude  testo  as  incarcair  «  das 
gelbe  buch  des  zeugnisses  aus  dem  kerker   ».  Hère 
Prof.  Zimmer   has  mistaken  a  verb  (=  testa  supra, 
p.  102)  for  the  gen.  sg.   of  test  =  testis.  The  words 

1 .   Sic  in  MS. 


104  Mélanges. 

mean  :  «  the  Yellow  Book  which  was  missing  (or  ab- 
sent) from  the  Prison  ». 

P.  617.  Lebor  Bude  Slanc  «  das  gelbe  Buch  der  errettung  ».  It 
means  «  the  Yellow  Book  of  Slane  »,  a  little  town 
in  the  county  Meath. 

P.  653,1.  11.  Hère  Prof.  Zimmer  sneers  at  Windisch,  for  gi- 
ving  in  lus  Wôrterbuch  lahnaiJc  with  the  meaning  of 
«  irdisch  ».  In  tins,  as  usual,  Windisch  is  right  and 
Zimmer  ludicrously  wrong.  Take  the  following  exam- 
ples from  Lebar  Brecc  19811:  O  rogenir  immorro  rig 
nime  for  talmain  rofuasnaiged  in  rig  talmaide,  uair 
is  énirt  cech  flaith  talmaide  i  n-aithfégad  flaithiusa 
nemdai  «  Now  when  Heaven's  King  was  boni  on 
earth  the  earthly  king  was  perturbed,  for  every  ear- 
thly prince  is  strengthless  in  comparison  with  a  hea- 
venly  princedom  ».  sce  also  LB.  i75h:  ni  ni  talmaide 
110  collaide  iarraim  «  nothing  earthly  or  carnal  do  I 
seek  ». 

Whitley  Stokes. 

II. 

CORRECTIONS  OF  A  RECENT  EDITION  OF  THE 
WUERZBURG  GLOSSES. 

TO  THE  DIRECTOR  OF  THE  RôVUÔ  CeltiqilC. 

Dear  Sir, 

In  tins  Revue,  t.  VIII,  p.  532,  note  2,  you  were  kind 
enough  to  print  for  me  two  corrections  of  typographical  er- 
rors  in  the  hrst  part  of  my  édition  of  the  Old-Irish  Glosses 
on  the  Wùrzburg  Codex  Paulinus.  I  hâve  now  to  beg  you  to 
publish  the  following  corrections  oi  several  mistakes  in  that 
book,  which  are  due,  not  to  the  printer,  but  to  my  own  inad- 
vertence  or  ignorance.  I  am  far  from  believing  that  my  list  is 
complète;  and  I  shall  gratefully  acknowledge  any  further  cor- 
rections which  Celtic  scholars  may  send  me  before  I  go  to 
press  with  the  index  verborum. 
P.     17,  1.  1  ofgioss,  for10,  read8. 


Mélanges.  105 

P.     23,  gl.  4  d  26,  read  êcen  taniccside. 

P.     37,  gl.  7  a  14,  rard  «in  Iudeam. 

P.  239,  1.  12,  for  13.  What  rtW  that  quod  facit  alius . 

32,  /or  hominis  raz^  hominum. 
P.  242,  1.  S,  /or  lie  is  gracious  His  razd  it  is  a  grâce,  He. 

32,  for  toward  read  with. 
P.  243,  11.  3,  4,  /cr  excess  established  itself,  read  it  was  com- 
)letely  established. 
.  10,  for  in  razi  For. 

.  n,  for  «  Passione  .  There  »,  read  «  Passione  there  ». 
.  20,  for  ye  are  read  be  ye. 
P.  244,  11.  20,  21,/orcovenant  rcadway  of  life  (consuetudo  : 

cornai rbirt  for  comairbirt  HutJj). 
P.  245,  gl.  3d  8,  /or  it  is  part  lie  finds,  read,  itis  a  slight  incli- 
nation :  (airic  gen.  sg.  oîairec  «  désire,  impulse,  in- 
clination »,  O'Don.  Supp.  to  O'Reilly). 

—  1.  26,  after  justification  insert  which. 
P.  246,  1.  22,  for  lie  read  it. 

P.  247,  1.  20,  for  from  it  read  from  us. 

(ônni  for  the  more  usual  ûanni  «  a  nobis  »,  24  a  32). 
P.  249,  1.  3,  for  live  read  be. 

—  1.  14,  for  should  escape  read  would  rise  again. 

—  1    14,  for  should  escape,  read  would  hâve  repented. 

—  1.  24,  for  As  to  read  Unto. 

—  11.  30,  31,  for  besides  he  came  not  ofnecessity,  read 
it  is  not  necessary  :  besides  he  hath  corne. 

P.  250,  1.  23,  for  believed  read  would  believe. 

P.  252,  11.  26,  27,  for  he  deservingness  read  to  boast  of 

his  merit  helpeth  no  one  there. 

—  1.  35,  for  disposition,  read  hidden  meaning  Qathar  À. 
gach  ciail  inchkithe,  O'Cl.). 

P.  255,  1.  3,  for  firstfruits  (?)  read  is  to  be  perceived. 

(some  word  seems  omitted    after  arigthi,    which  is 

lut.  part,  passive  oiairigini). 
P.  259,  1.  7,  for  Gentiles  are  nurtured  read  foreigners  [pro- 

selytos]. 


1 .   Literally  «  a  share  (cuit)  of  inclination  » .  So  cuit  adill,  cuit  eperte,  cuit  pêne. 


io6 


P.  260, 
P.  261, 
P.  262, 


P.  268, 

P.  273, 

P.  277, 

P.  281, 

P.  283, 

P.  287, 

P.  287, 


P.  288, 

P.  289, 

P.  290, 

P.  291, 


P.  292, 
P.  293, 
P.  294, 


Mélanges. 

ailithir-genti  is  a  noun   compounded  of  ailither 

anàgentin.  pi.  ofthe  prêt.  part.  pass.  oî  genim. 
1.  32,  for  minds  read  souis. 
1.  21,  for  of  read  to. 

I.  27,  for  scumrcad excréments  (purgamenta)  (octarche 
for  ochîrache,  pi.  nom.  of  ochlrach,  Ml.  129e  2,  later 
oirach) . 

II.  14,  23,  for  unclean  read  common. 
1.  2,  for  they  read  ye. 

1.  13,  for  from  which  I  deem  it  désirable  read  since  I 
hâve  a  désire. 

1.  24,  for  His  own  body  which  receives  every  seed  read 
its  own  body  which  every  seed  receives. 
1.  26,  for  yours  [is]  read  theirs  [was]. 
1.  2,  for  «  mortem,  and  »  /m/  «  vilain,  and  ». 
1.  21,  /or  he,  Paul,  deems  it  meet  to  receive  a  mes- 
sage read  fitting  seems  to  him  (God)  to  send  us  on 
missions. 

(fait,  dat.  sg.  ond  fait  (gl.  misione)  Ml.  34  a  6, 
iania  esfôit,  Ml.  44  a  10). 
1.  22,  23,  for  it  is  in  ...  transgression  read  it  avenges 
lis  sin  on  every  onc,   and   there  is  punishment  in 
futuro  through  transgressing  it. 

10,  for  ...  who  read  Israël,  or  ail  who. 
9,  for  may  overcome  read  might  corne  over. 
25 ,  for  it  seems  to  us  désirable  read  we  bave  a  désire. 
24,  for  who  is  not  with  thee  read  which  thou  hast 
not. 

.  26,  for  him...  from  read  it...  with. 
.  3,  for  that  read  the. 
.21,  l'or  asking  read  lauding. 
.  22,  for  deem  it  désirable  read  bave  a  désire. 
.  25,  for  say  read  should  say. 
1.  36,  37,  for  according  to  the  measure  (appointed 
to  read  in  comparison  with. 
1,  dclc  which. 
.  9,  for  worst  oîread  worse  to. 
Cancel  note  1. 


Mélanges.  107 

P.  295,  1.  13,  for  it  protected  [Paul]  read  pannier. 

ainches  (gl.  fiscina)  Sg.  37b=  *  ani-cista,  where  ani 
from  (p)ani  may  be  cognate  with  Latin  /MZffû  and  penus. 

P.  296,  1.  22,  for  ihem  read  y  ou. 

P.  297,  1.  I9>  for  lecture  read  study. 

—  1.  29,  for  first  razd  prior. 

P.  298,  1.  6,  for  making  them  unclean(?)  read  living  in  com- 

mon  with  them. 
P.  299,  1.  1,  for  prophesied  read  promised. 
P.  300,  1.  29,  for  désire  read  covetousness. 

—  1.  34,  for  there  be  read  thou. 
P.  309,  1.  3,  for  this  is  read  ye  are. 

—  L30,  for  against  read  according  to. 

P.  311,1.  2,  for  out  of  fellowship  read  when  ye  communicate 
(a  confodli\d\) . 

—  1.  19,  for  paet  of  read  little. 

P.  313,1.  4,  for  our  being  raïd  that  we  were  to  be. 

—  1.  19,  for  it  is  to  abound  in  love  read  the  abounding 
in  love  is  for  this. 

P.  314,  1.  1,  for  who  read  they. 

—     -1.  8,  for  that  nv/a'  :  it. 
P.  316,  11.  22,  25,  26,  /or  He,  His,  Him  read  he,  his,  him. 
(the  référence  is  to  Antichrist). 

—  1.  27,  for  on  high  read  on  the  spot. 

(airt=  a'pv.r). 
P.  317,  1.  27,  for  penance  read  penance  for  it. 
P.  318,  gl.  26  b.  30,  let  you  hâve  peace  with  every  one,  and 
(let)  everyone  (hâve  peace)  with  you. 

—  gl.  26  b.  31.  So  that  this  below  hère  was  written 
that  it  might  be  well  known  to  them.  In  every  epistle 
stands  that  spécial  sign  (salutatio). 

P.  320,  1.  10,  read  couches. 

—  1.  17,  for  the  heresy  read  this  burden. 

—  1.  23,  for  this  read  the. 

P.  324,  1.  2i,  for  evil-speakers  read  slow  of  speech. 

(dulbair  opposite  to  sulbair). 
P.  325,  11.  29,  30,  for  if  there  be  anything  for  which  read  if 
so  be  that. 


108  Mélanges. 

P.  328,  1.  9,  for  no  ...  read  no   happiness  (accur,  of  which 

O'Reillv's  an-acar  «  affliction  »  is  the  opposite). 
P.  332,  1.  7,  /<?r  utter  razJ  follow. 

—      1.  10,  for  mendicancy  or  of  rtad  begging  the. 

For  most  of  the  above  corrections  I  ara  indebted  to  one  or 
other  of  the  following  scholars  :  Prof.  Ascoli,  Prof.  Windisch, 
Rev.  E.  Hogan  S.  J.,  of  St  Stanislaus'  Collège,  Tullamore, 
and  the  Rev.  Thomas  Olden,  of  Ballyclough  Vicarage,  Mallqw. 
Mr  Hogan  further  points  out  that  in  the  gloss  2  b  22  the  ré- 
férence is  to  Ezechiel  xxxvi,  26,  that  in  4  d  25  the  référence  is 
to  Deut.  xxx.  12,  that  in  8  d  22  the  référence  is  to  Jeremias 
xyii,  16  and  that  in  25  b  26  the  référence  is  to  1  Cor.  xv.  52. 
And  Prof.  d'Arbois  de  Jubainville  lias  referred  me  to  the  fol- 
io wing  passage  in  Dom  Calmet's  commentai'}'  on  2  Thess. 
ii.  7,  which  to  some  extent  explains  the  gloss  26  a  12  (p.  150 
of  my  édition)  : 

«  D'autres  en  plus  grand  nombre  et  mieux  fondez,  ont  cru 
que  les  hérétiques  sont  des  Ante-Christs,  qu'ils  sont  des  sup- 
pôts, des  ministres  de  cet  homme  de  péché,  qui  commencent 
des-à-présent  le  mystère  d'iniquité  dans  l'Eglise  de  JESUS- 
CHRIST  par  les  erreurs  qu'ils  y  répandent,  par  le  scandale 
qu'ils  y  causent,  par  l'apostasie  de  plusieurs,  qu'ils  attirent 
dans  leur  parti.  Les  Pères  appellent  communément  les  héré- 
tiques précurseurs  de  l'Ante-Christ  ». 

On  a  cursory  inspection  of  Dr  Swete's  édition  of  Théo- 
dore of  Mopsuestia's  Commentaries  on  the  Minor  Epistles 
of  St.  Paul,  vol.  I.  Cambridge,  1880,  it  seems  to  me  pro- 
bable that  those  commentaries  also  will  throw  light  on  our 
Irish  glosses.  That  Theodore's  commentaries  were  known  to 
the  Irish  Church  of  the  ninth  century  is  tolerably  certain, 
first,  because  Sedulius  Scotus  Junior,  at  Gai.  IV.  25,  copies 
from  Théodore,  and,  secondly,  because  this  Sedulius  is  now 
believed  to  hâve  flourished  about  the  year  818.  He  is  pos- 
sibly  the  scribe  of  a  Gneco-Latin  psalter  of  the  ninth  century 
preserved  in  the  library  of  the  Arsenal  in  Paris,  which  is  said 
to  bear  the  inscription  CIIAYAIOO  CKOTTOC-  EPar 
ErPA^FA. 

Whitley  Stokes. 


Mélanges.  109 


III. 

MAMURRA. 

Une  des  causes  qui  ont  amené  le  succès  de  César  dans  la 
guerre  des  Gaules  a  été  la  supériorité  des  Romains  dans  les 
travaux  qui  se  rattachent  au  génie  militaire.  Quand  on  lit  les 
Commentaires,  il  semble  que  c'est  à  César  que  revient  l'hon- 
neur d'avoir  dirigé  ces  travaux  si  bien  conçus.  Diodore  de  Si- 
cile, qui  était  à  peu  près  contemporain,  parle  avec  admiration 
du  pont  jeté  par  ordre  de  César  sur  le  Rhin  et  paraît  rap- 
porter exclusivement  au  général  romain  la  gloire  de  cette  en- 
treprise hardie.  Mais  nous  savons  par  Pline,  Histoire  Naturelle, 
1.  XXXVI,  §  48,  le  nom  de  l'ingénieur  dont  César  a  eu  soin 
de  taire  le  nom  et  auquel  il  doit  en  grande  partie  ses  succès. 
C'était  le  chevalier  romain  Mamurra  :  Primum  Romae  pa- 
rietes  crusta  marmoris  operuisse  totos  domus  suae  in  Caelio 
monte  Cornélius  Nepos  tradit  Mamurram  Formiis  natum, 
equitem  Romanum,  praefectum  fabrum  C.  Caesaris  in  Gallia, 
ne  quid  indignitati  desit  tali  auctore  inventa  re.  Hic  namque 
est  Mamurra  Catulli  Veroniensis  carminibus  proscissus  quem, 
ut  res  est,  domus  ipsius  clarius  quam  Catullus  dixit  habere 
quidquid  habuisset  comata  Gallia  I. 

On  connaît  les  vers  de  Catulle,  XXIX,  1-4  : 

Quis  hoc  potest  videre,  quis  potest  pati, 
Nisi  impudicus  et  vorax  et  aleo, 
Mamurram  habere  quod  comata  Gallia 
HabeBat  ante  et  ultima  Britannia  ? 

Cf.  XLI,  4;XLIII,  5  etLVII,  4. 

M.  E.  Benoist  a  inséré  une  savante  étude  sur  Mamurra 
dans  le  Catulle  de  M.  Rostan  (t.  II,  p.  440  et  suivantes),  qui 
a  été  publié  à  Paris  en  1882  2  et  dont  la  fin  paraîtra  bientôt. 

1 .  Edition  Teubner  Jahn,  t.  V,  p.  114.  Un  critique  m'a  fait  observer  qu'au 
temps  où  écrivait  Pline,  l'expression  C.  Caesar  désignait  Caligula.  Cette  ex- 
pression n'a  pas  la  même  valeur  au  temps  de  Cornélius  Nepos,  mort  vingt- 
quatre  ans  avant  notre  ère,  et  auquel  Pline  emprunte  ce  renseignement. 

2.  Marquardt,  Handbucb  der  roemischen  Alterthùmcr,   t.   V  (Roemische 


no  Mélanges. 

Nous  la  devrons  à  M.  Emile  Thomas,  professeur  à  la  Faculté 
des  Lettres  de  Lille,  connu  par  de  remarquables  travaux  sur 
le  grammairien  Servius  et  sur  deux  discours  de  Cicéron. 

H.  d'A.  dej. 

IV. 

MARCH-BONAL. 

La  forme  exacte  de  ce  mot  est  actuellement  non  pas  mac'h- 
bonal,  comme  je  l'ai  écrit  dans  mon  vocabulaire  vieux-breton, 
mais  marc  h  bondi;  tout  rapprochement  avec  mach  «  caution  » 
est  donc  impossible.  Le  r  suivi  de  c'h  en  bas-vannetais  et 
dans  une  partie  de  la  haute  Cornouailles  a  pris  un  son  guttural 
qui  permet  très  difficilement  de  le  percevoir  nettement.  Sa 
présence  ne  se  fait  même  souvent  sentir  que  par  la  plus 
grande  brièveté  de  la  voyelle  précédente.  Pour  march-bonal, 
il  n'y  a  aucune  hésitation  à  avoir  ;  on  dit  pour  une  entremet- 
teuse ka^ek  dimignow.  Pour  l'entremetteur,  on  dit  indiffé- 
remment marc'h  bonal  ou  march  dimignow  ou  simplement  er 
marc'h.  Cette  expression  viendrait  de  ce  que,  particulièrement, 
le  deuxième  ou  le  troisième  jour  des  noces,  l'entremetteur 
doit  faire  le  bouffon,  gambader,  se  livrer  à  des  contorsions  ; 
on  lui  met  des  os  sur  le  chapeau  ou  autour  du  cou  ;  on  lui  fait 
même,  m'a-t-on  dit,  quelquefois  porter  un  licol.  Au  Faouët, 
en  haute  Cornouailles,  on  dit  au  lieu  de  ober  er  marc'h  «  faire 
le  cheval  »,  «  être  l'entremetteur  »  :  ober  er  aor  «  faire  la 
chèvre  ».  L'expression  potred  er  bihier  bonal  (les  gars  aux  bâtons 
de  genêt)  pour  «  entremetteurs  »  est  encore  connue  en  bas- 
vannetais,  mais  peu  usitée.  L'équivalent  vannetais  du  léonard 
ba~-valan  eût  été  bac'h-vonal.  Il  me  semble  d'autant  plus  diffi- 
cile d'admettre  avec  M.  Ernault  que  mach  est  pour  bach  =  ba~ 
«  bâton  »,  que  le  mot  bac' h  existait  seul  et  que  le  peuple  con- 
naissait parfaitement  le  sens  des  deux  termes  composants,   à 

Staatsverwaltung.  t.  II,  deuxième  édition,  p.  $15,  note  6)  est  un  peu  bref 
sur  Mamurra.  Dans  l'introduction  au  De  belh  gallico  de  Kraner,  onzième 
édition,  p.  50,  §  22,  Die  Fabri,  le  nom  même  de  Mamurra  n'est  pas  men- 
tionné. Outre  les  textes  cités  plus  haut,  on  peut  consulter  sur  Mamurra,  Ho- 
race, Satires,  I,  5,  37;  Cicéron,  Ad  Atticum,  VII,  7,  et  Suétone,  César,  73. 


Mélanges.  1 1 1 

tel  point  même  qu'il  en  a  fait  deux  mots  séparés.  De  plus  il 
faudrait  supposer  une  autre  confusion  aussi  peu  vraisemblable 
entre  mac  h,  bach  et  marc  h  «  cheval  ».  M  initial  pour  b  ou  b 
pour  m  peut  s'admettre  pour  les  mots  dont  la  consonne  ini- 
tiale varie  syntactiquement.  Ce  phénomène  s'est  produit  pour 
des  mots  commençant  par  d'autres  consonnes.  J'ai  observé  le 
passage  de  b  initial  en  m  également  dans  deux  cas  :  i°  dans  le 
groupe  moderne  initial  mr  pour  br  :  Merlevene~,  commune 
du  Morbihan,  en  1370  Brelevenez  ;  2°  par  dissimulation,  ex.: 
Banenberen,  13 91,  aujourd'hui  Manenberen,  village  en  Lan- 
guidic,  Morbihan  r. 

J.   LOTH. 

V. 

SAINT  PATRICE  ET  SEN  PATRICC. 

Il  y  a  deux  saints  Patrice,  apôtres  de  l'Irlande  :  l'un  est  le 
saint  Patrice  de  l'histoire,  l'autre  celui  de  la  légende.  Du  pre- 
mier, nous  avons  deux  écrits,  la  Confessio  et  l'épître  à  Coroticus. 
Le  saint  Patrice  de  l'histoire  arriva  en  Irlande  sous  le  règne  de 
Loegaire,  fils  de  Niall2,  vers  l'année  432  de  notre  ère  3.  Il 
mourut  deux  ou  cinq  ans  avant  Loegaire.  Or,  le  règne  de  Loe- 
gaire paraît  avoir  duré  trente-six  ans  4,  avoir  fini  par  consé- 
quent au  plus  tard  trente-six  ans  après  l'arrivée  de  saint  Pa- 
trice, c'est-à-dire  en  468. 

Si  l'on  met  en  468  la  fin  du  règne  de  Loegaire  (et  c'est  la 
date  la  plus  rapprochée  de  nous  qu'on  puisse  adopter),  la 
mort  de  saint  Patrice  (personnage  historique  s'entend)  a  dû 

1 .  Voir  Annales  de  Bretagne,  juillet  1887,  n°  4,  pp.  523,  526. 

2.  Vie  de  saint  Patrice  par  Muirchu  Maccumactheni  dédiée  à  Aed,  évê- 
que,  mort  en  698,  édition  donnée  par  le  P.  E.  Hogan  dans  Analecta  Bollan- 
diana,  t.  I,  p.  545,  1.  2  ;  cf.  p.  542,  1.  25-27. 

3.  Cronicnm  Scotorum,  édition  donnée  par  M.  Hennessy,  p.  20-23. 

4 .  Voilà  ce  que  nous  lisons  dans  les  notes  de  Tirechan  qui  reproduisent 
les  enseignements  donnés  tant  par  écrit  que  de  vive  voix  par  l'évèque  Ultan 
mort  en  656.  La  formule  deux  ou  cinq  ans  dénote  une  source  écrite  et  non 
orale:  u  —  «  cinq  »  ressemble  à  il  —  a  deux  ».  Voyez  l'édition  de  Tire- 
chan donnée  par  E.  Hogan  dans  les  Analecta  Bollandiana,  t.  II,  p.  36,  11.  15- 
17.  Sur  l'époque  où  vivait  Tirechan,  voyez  les  observations  du  même  E.  Ho- 
gan :  Analecta,  t.  I,  p.  543,  11.  4-8. 


1 1 2  Mélanges . 

arriver  soit  deux  ans, soit  cinq  ans  avant  468  :  la  date  extrême 
de  cette  mort  est  donc  ou  463  ou  466  au  plus  tard.  Mais  pour 
atteindre  l'une  ou  l'autre  de  ces  deux  dates,  il  faut  supposer  que 
saint  Patrice  est  arrivé  en  Irlande  la  première  année  du  règne 
de  Loegaire;  on  atteint  un  chiffre  moins  élevé,  si  on  fait  com- 
mencer la  mission  de  saint  Patrice  un  an  ou  plus  d'un  an 
après  l'avènement  de  Loegaire.  Suivant  plusieurs  historiens 
irlandais,  Loegaire  n'a  survécu  que  trente  ans  au  début  de  la 
mission  de  saint  Patrice  r.  Ce  prince  aurait  donc  commencé  à 
régner  six  ans  avant  l'arrivée  de  saint  Patrice  en  Irlande.  Il 
aurait  ainsi  terminé  ses  trente-six  ans  de  règne  en  cessant  de 
vivre  en  462.  Par  conséquent,  saint  Patrice  mourant  soit  deux, 
soit  cinq  ans  plus  tôt  que  Loegaire,  aurait  quitté  cette  vie  soit 
en  460  si  Loegaire  lui  a  survécu  deux  ans,  soit  en  457  si  Loe- 
gaire lui  a  survécu  cinq  ans.  La  date  de  457  est  celle  à  laquelle 
nous  conduit  un  passage  du  Cronicum  Scotorum  :  on  voit  dans 
ce  document  que  l'épidémie  connue  sous  le  nom  de  Buide 
Conaill  commença  deux  cent  trois  ans  après  la  mort  de  saint 
Patrice  :  A  morte  Patricii.  Or,  il  résulte  des  calculs  chronolo- 
giques faits  par  le  savant  éditeur  M.  Hennessy  que  cette  ma- 
ladie commença  en  660  :  donc  saint  Patrice  était  mort  deux 
cent  trois  ans  avant  660,  c'est-à-dire  en  457  -. 

Cette  date  s'accorde  avec  celle  de  la  mort  des  premiers  suc- 
cesseurs du  saint  évèque  sur  le  siège  épiscopal  d'Armagh.  Bé- 
nignus,  le  premier  d'entre  eux,  mourut  en  465  3  ou  en  4674; 
Iarlaith,  le  second,  mourut  en  481  >. 

Ainsi  457  est  la  date  où  probablement  a  dû  mourir  le  saint 
Patrice  de  l'histoire.  Le  saint  Patrice  de  la  légende  est  mort 


1 .  Tel  est  en  premier  lieu  l'auteur  du  traité  intitulé  :  Do  fhlaithcsaib  octis 
amseraib  Erend  iar  creitim  dans  le  livre  de  Leinster,  p.  24,  col.  1,  11.  45,  4b. 
Nous  citerons  ensuite  le  Cronicum  Scotorum,  p.  20,  et  les  Annales  des 
Quatre  Maîtres,  édition  d'O'Donovan,  185 1,  t.  I,  p.  144. 

2.  Cronicum  Scotorum,  p.  98-99.  Bède  nous  apprend  que  cette  épidémie 
pénétra  en  Grande-Bretagne  et  y  sévit  en  664.  Historia  eccksiastica,  livre  III, 
c.  27;  Pétrie,  Monumenta  historien  hritannica,  p.  204-205. 

3.  Cronicum  Scotorum,  p.  26-27. 

4.  Annales  des  Quatre  Maîtres,  t.  I,  p.  146-147;  cf.  Harris,  The  works 
of  sic  James  Jl'are  concerning  Ireland  (1759),  t-  I,  p.  34- 

5.  Ibidem,  p.  1 50-151;  cf.  Harris,  t.  I,  p.  35- 


Mélanges.  1 1 3 

en  489  :  ou  en  493  2,  à  l'âge  de  cent  vingt'  ou  même  cent 
vingt-deux  ans  4. 

Cette  longévité  extraordinaire  est  le  résultat  du  procédé  lit- 
téraire qui  a  fourni  plusieurs  traits  de  la  légende  de  saint  Pa- 
trice. Les  hagiographes  irlandais  des  premiers  temps  du  moyen 
âge  n'ont  pas  puisé. dans  leur  imagination  tous  les  détails  à 
l'aide  desquels  ils  ont  créé  peu  à  peu  le  récit  fantastique  que 
nous  trouvons  déjà  avant  la  fin  du  vne  siècle  dans  la  compi- 
lation de  Muirchu  Maccumactheni  et  dont  la  vie  tripartite  et  la 
vie  composée  par  Jocelin  sont  les  rédactions  les  plus  complètes. 
Ils  ont  souvent  fait  usage  d'une  méthode  plus  simple  :  ils  ont 
copié  ou  imité.  Et  de  quoi  ont-ils  pris  copie  ?  Qu'ont-ils 
imité  ?  Ils  avaient  peu  de  vies  de  saints  à  leur  disposition.  Ils 
ont  difficilement  pu  faire  comme  tant  d' hagiographes  conti- 
nentaux qui  ont  embelli  si  souvent  une  vie  de  saint  en  y  in- 
tercalant des  miracles  tirés  d'une  autre  vie  de  saint. 

Je  dis  qu'ils  avaient  peu  de  vies  de  saints  à  leur  disposition. 
On  peut  s'en  assurer  en  lisant  le  Martyrologe  d'Oengus. 
L'auteur  de  ce  martyrologe  a  consacré  un  quatrain  à  chaque 
jour  de  l'année.  Il  avait  sous  les  yeux  un  martyrologe  hiéro- 
nymien,  c'est-à-dire  un  martyrologe  qui  ne  contenait  qu'une 
liste  de  saints  sans  autre  indication  sur  chacun  d'eux  que  leur 
qualité  d'évêque,  confesseur,  diacre,  etc.,  et  la  mention  du 
lieu  de  leur  mort  ;  à  ces  indications,  il  n'a  su  rien  ajouter  que 
des  amplifications  de  rhétorique  r> . 

A  quelles  sources  se  sont  donc  adressés  les  biographes  de 
saint  Patrice  pour  suppléer  à  l'insuffisance  de  leur  imagination  ? 
Une  de  leurs  principales  sources  a  été  la  Bible. 

Les  cent  vingt  ans  attribués  à  saint  Patrice,  c'est  l'âge  de 
Moïse  quand  il  mourut  :  Dcutèronome,  chap.  34,  v.  7. 

1.  Cronicum  Scotorutn,  p.  32-33. 

2.  Annales  des  Quatre  Maîtres,  p.  158-159.  Cf.  Harris,  t.  I,  p.  22; 
Todd,  S1  Patrick  apostle  of  Ireîand,  p.  494  et  suivantes. 

3.  Vie  de  saint  Patrice  par  Muirchu  Maccumactheni,  livre  II.  c.  6; 
dans  Analecta  Bollandiana,  t.  I,  p.  581,  1.  3.  Notes  deTirechan,  ïbià.,  t.  II, 
p.  (y,  11.  3  et  8.  Cf.  Nennius.  c.  62,  chez  Giles,  History  of  the  ancient  Evi- 
tons, t.  II,  p.  333  ;  chez  Pétrie,  p.  72  D. 

4.  Annales  des  Quatre  Maîtres,  p.  156-157;  Cronicum  Scotorum,  p.  32-33. 

5.  Je  dois  cette  observation  à  M.  l'abbé  Duchesne,  le  savant  professeur 
de  Flnstitut  catholique  et  de  l'Ecole  des  Hautes  Etudes. 

Revue  Celtique,  IX  8 


1 1 4  Mélanges. 

L'ange  Victor  adressa  la  parole  à  Patrice  au  milieu  d'un 
buisson  ardent J.  Voyez  Exode,  chap.  3,  v.  2. 

La  lutte  de  Patrice  contre  les  Druides 2  est  un  arrangement 
irlandais  du  chapitre  7  de  Y  Exode. 

Le  soleil  s'arrête  le  jour  de  la  mort  de  saint  Patrice  3.  C'est 
un  emprunt  au  livre  de  Josué,  chap.  10,  y.  12-13. 

Patrice  est  comme  Moïse  législateur.  Le  Senchus  Môr  est 
rédigé  sur  sa  demande  par  une  Commission  de  neuf  membres 
dont  il  est  le  premier  4. 

De  même  que  tous  les  héros  des  légendes  hagiographiques, 
le  saint  Patrice  légendaire  est  sur  quelques  points  supérieur  à 
ses  modèles.  Certains  auteurs  le  font  vivre  plus  longtemps 
que  Moïse.  Le  saint  Patrice  historique  n'avait  pu  convertir  le 
roi  Loegaire  5  ;  Moïse  n'avait  pas  eu  plus  de  succès  près  du  roi 
d'Egypte  :  le  saint  Patrice  de  la  légende  parvint  à  convaincre 
le  roi  Loegaire  et  le  baptisa6,  etc.,  etc. 

Le  saint  Patrice  légendaire  était  à  peu  près  complètement 
formé  dans  les  dernières  années  du  vne  siècle.  On  le  trouve 
déjà  dans  les  notes  de  Tirechan  dont  quelques  traits  seulement 
nous  ramènent  au  Patrice  historique  ;  et  ces  notes  ont  été 
écrites,  paraît-il,  peu  après  l'année  656.  La  légende  règne  en 
maîtresse  dans  la  vie  composée  par  Muirchu  Maccumactheni 
qui  a  été  rédigée,  semble-t-il,  au  plus  tard  en  698.  L'hymne 
attribué  à  Fiacc,  et  qui  chante  le  Patrice  légendaire,  est  proba- 
blement l'œuvre  d'un  contemporain  de  Muirchu,  sinon  elle  a 
été  écrite  quelque  temps  après. 

Cet  hymne  nous  offre  un  détail  très  amusant  et  qui  nous 
montre  dans  quel  embarras  se  trouvaient  les  écrivains  irlandais 
du  temps  entre  leurs  deux  saints  Patrice,  c'est  la  rencontre  de 
ces  deux  personnages  :  on  ne  pouvait  identifier  ces  deux  bien- 


1.  Hymne  de  Fiacc,  vers  47-48.  Windisch, Irische  Texte,  p.  15.  Muirchu 
Maccumactheni,  livre  II,  c.  4:  Analecta  Bollandiana,  t.  I,  p.  5S0,  1    10-19. 

2.  Muirchu  Maccumactheni,  1.  II,  c.    15-17,   19;  Analecta  Bollandiana, 
î.  I,  p.  562-564,  566-568. 

3 .  Hymne  de  Fiacc,  vers  55-60;  Windisch,  Irische  Texte,  p.  15.  Muirchu 
Maccumactheni,  livre  II,  c.  7;  Analecta  Bollandiana,  t.  I,  p.  581,  11.  5-13. 

4.  Ancient  laivs  of  Ireland,  t.  I,  p.  14-17. 

5.  Notes  de  Tirechan,  c.  12;  Analecta  Bollandiana,  t.  II,  p.  41,  1.  1-9. 

6.  Muirchu  Maccumactheni,  1. 1,  c.  20;  Analecta  Bollandiana,  t.  I,  p.  568. 


Mélanges.  1 1 5 

heureux,  puisque  celui  de  l'histoire,  qui  n'avait  pas  vécu  cent 
vingt  ans,  était  mort  plus  de  trente  ans  avant  celui  de  la 
légende.  Un  hasard  heureux  avait  fait  trouver  aux  savants  ir- 
landais  du  moyen  âge  la  solution  de  la  difficulté. 

Vers  la  fin  du  vie  siècle  ou  le  commencement  du  vne,  il 
était  arrivé  de  Gaule  en  Irlande  un  exemplaire  du  Martyrologe 
Hiéronymien  :  dans  cet  exemplaire  avaient  pénétré  certains 
saints  français,  tels  que  saint  Agrippin,  évoque  d'Autun,  mort 
en  5  5 8  x,  et  le  roi  Gontran,  mort  en  593  2. 

Or  ce  martyrologe  mentionnait  deux  saints  Patrice.  L'un 
était  l'apôtre  de  l'Irlande,  mort  le  17  mars?;  l'autre  était  un 
certain  abbé,  inconnu  d'ailleurs,  mort  le  24  août  4.  Suivant 
une  rédaction  ce  serait  à  Nevers  qu'aurait  eu  lieu  son  décès  S. 
De  ce  personnage  obscur  une  leçon  irlandaise  en  fait  deux  : 
Patrice,  abbé  et  évêque  de  Rosdalla  ;  Patrice,  portier  et  abbé 
d'Armagh6.  D'autres  Irlandais  imaginèrent  que  le  Patrice, 
mort  le  24  août,  était  un  évêque  de  Glastonbury  7.  Mais  au 
milieu  de  ces  divergences  de  détail  une  idée  prévalut  en  Irlande, 
c'est  que  le  Patrice  du  24  août  était  un  prédécesseur  du  grand 
saint  de  môme  nom. 

Les  hagiographes  irlandais  mettant  à  la  date  historique  du 
1 7  mars  la  mort  de  leur  apôtre  légendaire,  supposèrent  que  leur 
Patrice  historique,  mort  en  457  sans  avoir  converti  le  roi  Loe- 
gaire,  était  celui  dont  le  martyrologe  plaçait  la  fête  au  24  août. 
Le  Patrice  historique,  étant  mort  le  premier,  devint  le  vieux 

1.  On  célébrait  sa  fête  le  ipr  janvier.  Voir  le  Martyrologe  de  Tallacht 
dans  le  livre  de  Leinster,  p.  355,  col.  3  :  Agripini.  Cf.  l'article  correspon- 
dant chez  Migne,  Patrologia  Latina,  t.  XXX,  col.  438. 

2 .  On  célébrait  sa  fête  le  28  mars  Voyez  Migne,  Patrologia  Latina,  t.  XXX, 
col.  449  C.  Dans  le  Martyrologe  de  Tallacht,  livre  de  Leinster,  p.  357,  col.  6, 
le  copiste  a  fait  du  nom  de  ce  roi  deux  articles  :  Guntari.  Mini,  régis. 

3 .  In  Scotia  Patrici  episcopi.  Bibliothèque  Nationale  de  Paris,  ma- 
nuscrit latin  10837  (vin  siècle).  —  Depositio  Patricii  episcopi  confessons. 
Patrologia  Latina,  t.  XXX,  col.  448  C.  —  Patricii  episcopi.  Martyrologe  de 
Tallacht,  dans  le  livre  de  Leinster,  p.  357,  col.  2. 

4.  Patrici  abbatis.  Bibliothèque  nationale,  manuscrit  latin  10837. 

5 .  Neverno  civitate  depositio  Patricii  abbatis.  Migne,  Patrologia  Latina, 
t.  XXX,  col.  472  B. 

6.  Patricii  abbatis  et  episcopi  Ruisdela.  Patricii  hostiarii  et  abbatis  Aird- 
mache.  Martyrologe  de  Tallacht,  dans  le  livre  de  Leinster,  p.  361,  col.  7. 

7.  Cronicum  Scotorum,  p.  24-25.  Cf.  Cormac,  suh  v°  Mogheime. 


1 16  Mélanges. 

Patrice,  Sen-Patricc,  quoique  mort  le  plus  jeune  des  deux  ;  le 
vieux  Patrice  avait  dû  être  le  maître,  et  le  grand  Patrice,  le 
Patrice  légendaire  était  son  élève1.  Scn  Patrice,  le  vieux  Pa- 
trice, avait,  dit-on,  cessé  de  vivre  en  457  2  le  24  août.  Patrice, 
archevêque  et  apôtre  légendaire  de  l'Irlande,  était  passé  de  vie 
à  trépas  en  493  3  le  17  mars.  Le  vieux  Patrice  avait  donc, 
suivant  l'ordre  exigé  par  la  chronologie  historique,  précédé 
l'autre  dans  le  tombeau.  Quand  l'apôtre  légendaire  arriva  au 
ciel,  avant  d'aller  se  présenter  au  bon  Dieu,  il  commença  par 
faire  visite  à  son  homonyme,  le  vieux  Patrice  ou  le  Patrice  de 
l'histoire,  qui  était  entré  avant  lui  dans  le  Paradis,  et  les  deux 
Patrice  se  présentèrent  ensemble  au  fils  de  Marie  4. 

H.  d'A.  de  J. 

PIÈCE  JUSTIFICATIVE. 

IncipzY  do  f/;lait/;esaib  ocus  awseraib  hErend  \ar  creitim. 

Loegaire  mac  Néill  xxx  annos  regnww  Hib^rniae  porf  ad- 
ventuw  P^ricii  tenuit.  Ardmac/?a  fundata  est.  Secundi/zw5  et 
senex  Vatnùus  qwiewruwt.  DorochazV  Loegaire  i  taeb  C/;asseS 
et  caetera. 

AïWill  Molt,  mac  Dathi,  xx  bliadna,  co  torebair  i  cat/;  Oc/;a 
la  Lugaid,  mac  Locgairij  ocus  Mur chertach,  mac  Erca  ;  ocus  la 
Ferg/fj"  Cerbél,  mac  Cowaill  Cremthainne;  ocus  la  Fiac/;raig 
Lond,  mac  Caelbad,  rig  DaiWaide  ;  ocus  la  Crimthand,  mac 
Ennai,  rig  Lagen6. 

Eogan  mac  Neil  moritur.  Qwies  Bmgni,  secundî  episcopi. 
Mors  Cowaill  Chremthaind  maie  Neill.  Qwies  Iarlat/;i  terûi 
episcopi.  Bcllum  OcIja  in  quo  eccidit  Aill///  [Molt]  7. 

Lugaid,  mac  Loegairi,  xxii  [annos],  co   torebair  \n  Ac/;ud 


1 .  C'est  la  doctrine  que  nous  trouvons  dans  le  Martyrologe  d'Oengus,  à  la 
date  du  24  août  :  Sen-Phatraicc  cing  catha,  coem-aite  ar-srotha  :  édition 
Whitley  Stokes,  p.  cxxv. 

2.  Cronicum  Scotorum,  p.  24-25. 

3.  Ibid.,  p.  32-33. 

4.  Hymne  de  Fiacc,  v.  65-66  ;  Windisch,  Irische  Texte,  t.  I,  p.  16. 

5.  En  458  suivant  les  Quatre  Maîtres. 

6.  En  478  suivant  les  mêmes. 

7.  En  478  comme  nous  venons  de  le  dire. 


Mélanges.  1 1 7 

¥orcba  dum  tre  mirbail  Patrie1.  Muridac/?  mac  Eogain  mo- 
nter. Bellum  Cell  Osnaid2.  P atncius  Scottor um  episcopus  quievit. 

Cormac  iprimus  abbas.  Qjà?s  Ibari  episcopi. 

Murchmac/;  mac  Erca  XXIIII  [annos]?. 

L.  L.  p.  24,  col.  1-2. 

VI. 

SAINT  GERMAIN,  ÉVÊQUE  DE  PARIS,  DANS  LE 
FELIRE  OENGUSSO. 

La  Gaule  au  moyen  âge  a  eu  deux  évêques  du  nom  de  Ger- 
main qui  ont  été,  chacun,  vénérés  comme  saints  et  ont  acquis 
une  grande  notoriété.  Le  premier  est  un  évêque  d'Auxerre, 
mort  en  448,  et  dont  on  célèbre  la  fête  le  3  1  juillet.  Le  se- 
cond est  un  évêque  de  Paris,  mort  en  576  et  dont  la  fête  a 
lieu  le  28  mai. 

Tous  deux  figurent  au  martyrologe  hiéronymien  publié 
par  Migne  dans  le  t.  XXX  de  sa  Patrologia  latina  : 

Pridie  kalendas  augusti  (31  juillet)...  Autisiodero,  sancti 
Germani,  episcopi  et  confessons  (col.  468-469). 

V.  kalendas  junii  (28  mai)...  In  civitate  Parisius  depositio 
sancti  Germani  episcopi  et  confessons  (col.  459). 

Nous  ne  pouvons  dire  en  quels  termes  le  martyrologe  de 
Tallacht  parlait  de  ces  deux  fêtes.  Au  milieu  de  ce  martyrologe, 
il  y  a  une  lacune  qui  va  du  20  mai  au  Ier  août.  Le  martyro- 
loge de  Tallacht  mentionnait-il  la  fête  de  saint  Germain 
d'Auxerre  au  3  1  juillet?  Nous  n'en  savons  rien.  Mais  ce  que 
nous  pouvons  considérer  comme  certain,  je  crois,  c'est  que  le 
martyrologe  de  Tallacht  parlait  de  saint  Germain,  évêque  de 
Paris,  sous  la  date  du  28  mai.  En  effet,  le  Felire  Oengusso  con- 
sacre à  ce  saint  son  quatrain  du  28  mai  :  «  Puisse  nous  pro- 
«  téger  jusqu'au  séjour  des  anges,  de  cette  troupe  si  aimable 
«  et  si  heureuse,  Germain,  soleil  de  nos  sages,  père  nourricier 
«  de  Patrice  d'Armagh  (éd.  de  Whitley  Stokes,  p.  lxxxi)  ». 

1.  En  503  suivant  les  Quatre  Maîtres. 

2.  Livrée  en  489  suivant  les  Quatre  Maîtres. 

3 .  Son  avènement  en  504  suivant  les  Quatre  Maîtres. 


1 1 8  Mélanges. 

Ce  qu'il  v  a  de  curieux  ici  et  qui  montre  combien  les  savants 
irlandais  du  haut  moyen  âge  connaissaient  mal  l'hagiographie, 
c'est  que  l'auteur  du  Felire  confond  ici  saint  Germain  de  Paris 
avec  saint  Germain  d'Auxerre.  C'est  de  saint  Germain 
d'Auxerre  que  saint  Patrice  a  pu  recevoir  les  leçons.  Il  n'a 
pas  reçu  celles  de  saint  Germain  de  Paris  mort  plus  d'un 
siècle  après  lui.  Ceux  qui  douteraient  que  le  saint  Germain  du 
28  mai  soit,  comme  nous  le  disons,  saint  Germain  de  Paris, 
peuvent  consulter  les  martyrologes  :  de  Bède  (Patrologia  latina, 
t.  XCIV,  col.  929);  d'Adon  de  Vienne  (Ibid.,  t.  CXXIII, 
col.  271  B),  et  d'Usuard  (Ibid.,  t.  CXXIV,  col.  95-96). 
Quant  à  la  fête  de  saint  Germain  d'Auxerre,  le  31  juillet,  le 
Felire  ne  la  mentionne  même  pas1. 

H.  D'A.  de  J. 

VII. 

LE  FELIRE  OENGUSSO,  LE  MARTYROLOGE 
HIÉRONYMIEN  ET  LA  LITURGIE  GALLICANE. 

On  trouve  dans  le  Felire  Oengusso  comme  dans  le  martyro- 
loge hiéronymien  plusieurs  des  caractères  distinctils  de  la  li- 
turgie gallicane  signalés  par  M.  l'abbé  Duchesne,  Les  sources 
du  martyrologe  hiéronymien,  p.  43.  La  Passion  et  la  Résurrection 
de  J.-C.  sont  des  fêtes  fixes  célébrées  l'une  le  25  et  l'autre  le 
27  mars.  Le  Ier  janvier  on  célèbre  la  Circoncision  de  J.-C. 
et  non  l'octave  de  Noël.  Tandis  que  les  calendriers  de  Rome 
et  de  Carthage  ne  contiennent  aucune  fête  de  la  Vierge,  le  mar- 
tyrologe hiéronymien  en  a  une  le  18  janvier.  Le  plus  caracté- 
ristique peut-être  est  la  fête  fixe  de  la  Résurrection  le  27  mars. 
Grégoire  de  Tours  la  mentionne  dans  l'abrégé  qu'il  donne  du 
calendrier  de  son  église  au  livre  X,  c.  3  1  de  son  Histoire  des 
Francs,  édition  Arndt,  t.  I,  p.  445,  1.  15  ;  ci.  Felire  Oengusso, 
édit.  Whitley  Stokes,  p.  lviii. 

H.  D'A.  deJ. 

1 .  Outre  la  fête  de  saint  Germain  d'Auxerre  qui  se  célèbre  le  31  juillet, 
il  yen  avait  une  autre  le  r'1' octobre  ;  celle-ci  se  trouve  dans  le  Felire,  p.  cmlix, 
cliv.  qui  l'a  prise  dans  le  Martyrologe  hiéronymien  {Patrologia  latina, 
t.  XXX,  col.  477  D;  ci.  Martyrologe  deTallacht,  dans  le  Livre  de  Leinster, 
p.  363,  col.  4,  ligne  2). 


BIBLIOGRAPHIE 


Beitraege  zur  cymrischen  grammatik  I  (Einleitung  und 

vocalismus),  von  Max  Nettlau,  Dr  phil.  Leipzig,  1887,  2  mark. 

Le  titre  exact  de  cette  première  partie  du  travail  de  M.  Nettlau 
serait  :  Recueil  de  matériaux  pour  l'étude  des  particularités 
dialectales  du  gallois  dans  les  textes  en  gallois  moyen  et  mo- 
derne. A  ce  point  de  vue,  son  travail  a  une  réelle  valeur. 
M.  Nettlau  connaît  bien  les  sources  imprimées  et  manuscrites 
du  gallois  ;  il  est  facile  de  voir  qu'il  a  été  à  bonne  école  et 
qu'il  a  eu  des  guides  expérimentés.  Il  est  d'autant  plus  singu- 
lier qu'il  n'ait  pas  senti  que  son  travail  manquerait  de  solidité 
et  d'une  base  indispensable,  s'il  ne  commençait  par  étudier 
sur  place  le  gallois  parlé.  Il  est  impossible  aujourd'hui,  et  cela 
ressort  clairement  même  des  études  de  M.  Nettlau,  de  se  faire 
une  idée  exacte  du  gallois  parlé  d'après  les  livres  et  à  plus 
forte  raison  de  ses  nombreuses  variétés  dialectales  ;  les  maté- 
riaux écrits  sofit  absolument  insuffisants.  Or,  M.  Nettlau  part, 
et  avec  raison,  du  gallois  moderne  pour  pénétrer  des  particu- 
larités dialectales  du  moyen  gallois.  Il  est  juste  de  reconnaître, 
à  la  décharge  de  M.  Nettlau,  qu'une  étude  des  dialectes  gallois 
actuels  demanderait  plusieurs  années  de  séjour  dans  le  pays. 

Il  est  regrettable  aussi  que  M.  Nettlau  n'ait  pas  étudié  plus 
sérieusement  les  particularités  dialectales  du  breton  armoricain  ; 
il  y  eût  trouvé  de  précieuses  indications  pour  l'explication  de 
certains  phénomènes  gallois.  M.  Nettlau  a  été  obligé  lui-même 
d'avoir  recours  au  breton  et  au  comique  pour  établir  la  relation 
de  Voi,  vieux  gallois,  oe  moyen  gallois,  au  gallois  moderne 
wy.  Il  est  vrai  que  pour  le  breton  armoricain  lui-même  les 


120  Bibliographie. 

livres  ne  suffiraient  pas.  L'orthographe  dissimule  encore  sou- 
vent la  valeur  phonétique  réelle  des  sons,  par  exemple  pour  Ye 
dans  les  mots  vannetais  koer,  koct.  Koer  «  cire  »  =  léonard 
koar  =  gall.  cwyr  se  prononce  Jcoér;  coèt  se  prononce  coet  abso- 
lument comme  en  gallois  ;  boed  se  prononce  en  haut-vannetais 
huit,  en  bas-vannetais  boet  avec  e  muet  français.  Quelle  est  la 
raison  de  ces  variations  de  prononciation  ?  Elle  doit  être  cher- 
chée en  partie  dans  la  diversité  d'origine  étymologique,  partie 
dans  l'influence  de  la  voyelle  de  la  syllabe  suivante,  partie 
dans  l'accent. 

M.  Nettlau  adopte  l'hypothèse  de  M.  Rhys  qu'au  vnc  siècle 
la  tribu  bretonne  des  Ordovices  aurait  bretonnisé  les  tribus 
des  Silures,  Demètes,  des  Vencdotiens  et  des  habitants  du  ter- 
ritoire qui  a  porté  plus  tard  le  nom  de  Powys.  En  supposant 
que  ce  fait  fût  établi,  et  il  ne  l'est  pas  le  moins  du  monde, 
tant  s'en  faut,  on  ne  voit  pas  bien  quelle  influence  il  aurait  pu 
avoir  sur  la  constitution  des  quatre  principaux  dialectes  gallois  : 
Powys,  Gwent,  Dyved,  Gwynedd. 

J.  Loth. 

Dictionnaire  étymologique  et  explicatif  de  la  langue  fran- 
çaise, et  spécialement  du  langage  populaire,  par  Charles  Toubin,  offi- 
cier de  l'instruction  publique.  Paris,  Leroux,  1SS6,  gr.  in-S,  xv-775  p. 

Il  semble  que  depuis  quelques  années,  certaines  études  cel- 
tiques qui  procèdent  des  ouvrages  du  fameux  La  Tour  d'Au- 
vergne aient  un  regain  de  nouveauté.  La  publication  de  la 
Grcmuuatica  ccltica  n'a  pas  fait  disparaître  en  France  la  race  de 
ces  intrépides  celtologues  qui  donnaient  le  breton  armoricain 
pour  fondement  aux  études  romanes.  Depuis  le  siècle  dernier, 
la  théorie  n'a  point  changé  :  le  celtique  est  toujours  la  langue 
qui  doit  expliquer  les  noms  de  lieu  et  les  mots  du  dictionnaire 
français.  La  forme  seule  de  la  doctrine  est  un  peu  modifiée. 
Les  nouveaux  celtologues  citent  la  Gnviuiiatica  ccltica  en  tète 
de  leurs  ouvrages  ou  au  bas  de  leurs  pages,  et  les  plus  hardis 
substituent  au  breton  de  France  l'irlandais  comme  représentant 
plus  fidèle  de  la  langue  des  Gaulois  et  de  la  nôtre. 

Nous  avons  eu  l'occasion  de  parler  dans  cette  Revue  de 
quelques  ouvrages  de  ce  genre,  dans  lesquels  les  noms  de  lieu 


Bibliographie.  i 2 1 

s'expliquaient  facilement  par  le  breton  moderne,  avec  l'aide 
d'une  phonétique  spéciale.  Le  livre  considérable  dont  nous 
rendons  compte  aujourd'hui  nous  offre  l'application  à  la  plu- 
part des  mots  du  langage  populaire,  de  la  théorie  des  nou- 
veaux celtologues. 

M.  T.,  s' appuyant  sur  les  raisons  suivantes,  d'ordre  différent 
et  de  valeur  plus  ou  moins  contestable,  —  savoir  :  que  la  Bo- 
hême a  conservé  sa  langue  sous  la  domination  autrichienne, 
que  les  Espagnols  ne  parlent  point  arabe,  et  que  les  Irlandais 
annexés  à  l'Angleterre  conservent  leur  langue,  sœur  de  la  nôtre, 
aussi  vivace  qu'aux  jours  de  leur  indépendance,  —  M.  T. 
conclut  que  les  choses  n'ont  pu  se  passer  autrement  dans  la 
Gaule  romaine,  et,  dès  lors,  ajoute-t-il,  «  il  parait  impossible 
«  que  le  celtique  ait  dans  le  français  une  part  aussi  restreinte 
«  que  celle  que  lui  assigne  l'école  étymologique  actuelle.  » 

M.  T.  applique  surtout  cette  thèse  aux  mots  populaires 
pour  lesquels  nous  n'avons  point  les  équivalents  latins.  C'est 
ainsi  que  par  suite  de  la  ressemblance  relative  et  fortuite  de 
mots  gaéliques  et  de  mots  français,  croquemort,  gosse,  rou- 
blard, etc.,  se  trouvent  venir  du  celtique.  Cf.  irl.  crochard 
«  brancard  »,  gall.  givas  «  garçon  »,  gaél.  ro,  augmentatif,  et 
brath  «  trompeur  ».  Malheureusement,  en  général,  les  mots 
celtiques  provenant  du  dictionnaire  gaélique  d'Armstrong,  du 
dictionnaire  irlandais  d'O'Reilly  et  du  dictionnaire  gallois 
d'Owen  Pughe,  ressemblent  en  général  assez  peu  aux  mots 
français,  à  moins  que  ces  mots  celtiques  ne  soient  empruntés 
au  latin.  Dans  ce  dernier  cas,  M.  T.  triomphe  aisément.  Mais 
s'il  n'y  a  point  de  mot  celtique  ressemblant  au  mot  français  en 
question,  M.  T.  est  forcé  de  se  rejeter  sur  le  sanscrit  où,  par 
suite  de  la  grande  richesse  du  vocabulaire,  il  trouve  facilement 
un  mot  qui  offre  à  l'œil,  dans  un  système  particulier  de  trans- 
cription, une  identité  suffisante  avec  le  mot  français.  C'est  ce 
qui  arrive  le  plus  fréquemment,  et  si,  en  théorie,  M.  T.  tire  le 
français  du  celtique,  en  pratique,  il  le  fait  dériver  du  sanscrit. 

Aussi  n'avons-nous  relevé  dans  ce  livre  qu'un  petit  nombre 
d'exemples  où  l'irlandais  se  trouve  seul  en  face  du  mot  fran- 
çais auquel  il  est  censé  avoir  donné  naissance.  Le  premier 
terme  de  bacca-lauréat  s'expliquerait  par  bcag,  irl.  mod.  «  petit  », 


122  Bibliographie. 

qui  pour  M.  T.  est  à  peu  près  la  même  chose  que  bu-guel, 
armor.  primitivement  «  bouvier  »,  cf.  fio'j-xâXoç.  Cela  suffit  à 
donner  une  idée  de  la  phonétique  propre  à  M.  T.,  laquelle 
d'ailleurs  est  exposée  aux  pages  41-54  de  son  livre.  Ajoutons, 
pour  satisfaire  la  curiosité  du  lecteur,  que  le  second  terme 
de  baccalauréat  est  le  latin  laurea. 

Il  est  triste  de  constater  en  finissant  comme  les  idées  de  lin- 
guistique historique  ont  peu  pénétré  dans  le  public.  M.  T.  ne 
songe  pas  à  séparer  les  mots  empruntés  des  mots  appartenant  au 
fond  même  de  la  langue.  Il  applique  aux- uns  et  aux  autres  la 
même  phonétique.  D'autre  part,  la  Revue  des  Deux-Mondes 
s'est  réjouie  de  la  publication  du  livre  de  M.  Toubin  qui  aurait 
au  moins  le  résultat  d'inquiéter  les  linguistes  sur  la  solidité  de 
leurs  positions.  Enfin,  un  éminent  critique  dramatique  com- 
mençait ainsi  très  sérieusement  son  compte  rendu  de  l'œuvre  de 
M.  T.  :  «  Je  serais  bien  ingrat  si  je  ne  remerciais  pas  M.  Tou- 
«  bin  des  bonnes  heures  qu'il  me  donne  en  ce  moment.  »  Cet 
exorde  peut  nous  servir  de  conclusion. 

G.  Dottix. 

Bibliothèque  de  l'Ecole  des  Hautes-Études.  Soixante-septième  fascicule.  Du 
parfait  en  grec  et  en  latin,  par  Emile  Èrnault,  chargé  de  confé- 
rences à  la  Faculté  des  Lettres  de  Poitiers.  Paris,  Vieweg,  1886;  gr.  in-8, 
vi-200  p. 

M.  E.,  en  étudiant  spécialement  l'histoire  du  parfait  grec  et 
latin,  n'a  pas  négligé  les  rapprochements  avec  les  langues  con- 
génères. Parmi  ces  langues,  le  celtique,  comme  on  pouvait  s'y 
attendre,  occupe  une  place  assez  considérable  dans  la  thèse  de 
M.  E.  Si  la  doctrine  de  l'unité  gréco-italo-celtique  que  soutient 
l'auteur  peut  être  contestée  dans  certains  cas,  dans  la  question 
du  parfait,  cette  doctrine  est  plus  vraisemblable.  L'irlandais  a, 
en  général,  mieux  conservé  que  le  latin  le  parfait  indo-euro- 
péen, et  donne  lieu  parfois  à  d'intéressantes  comparaisons  avec 
le  grec  :  l'auteur  ne  paraît  pas  admettre  la  doctrine  suivent  la- 
quelle l'a  du  parfait  irlandais,  au  lieu  d'être  identique  à  Vo 
grec,  serait  une  voyelle  irrationnelle. 

La  deuxième  personne  du  singulier  du  prétérit  gallois,  ex. 
clyweis-t  «  tu  as  entendu  »,  amène  M.  E.  à  expliquer  quel- 


Bibliographie.  1 2  3 

ques  formes  du  prétérit  irlandais  en  -s.  A  la  3e  p.  du  s.  de 
ce  prétérit,  on  a,  à  côté  de  la  forme  conjointe  car,  la  forme 
absolue  caris  ou  carats.  Les  langues  bretonnes  qui  ont  con- 
servé pour  les  autres  personnes  de  ce  temps  la  forme  conjointe 
(ire  p.  s.  caris  =  irl.  carus)  nous  offrent  pour  la  3e  p.  du  s. 
caris,  caras,  formes  correspondant  à  la  forme  irlandaise  ab- 
solue caris  ou  carats.  D'autre  part,  on  trouve  au  futur  en  -s, 
temps  qui  offre  en  irlandais  les  mêmes  désinences  que  le  pré- 
térit sigmatique,  quelques  exemples  de  troisièmes  personnes 
du  singulier  en  -si,  ex.  ainsi-um  «  il  nous  protégera  ».  Il  de- 
vrait de  même  avoir  existé  au  prétérit  irlandais  une  3e  p.  du 
s.  en  -si,  *  car si  «  il  a  aimé  »,  cf.  cr-ceiçsi,  et  cette  forme  se- 
rait absolue  et  identique  à  la  2e  p.  absolue  du  s.  car  si  «  tu  as 
aimé  »,  cf.  rcstçatç.  Or  la  forme  employée  comme  absolue  à 
la  3e  p.  du  s.,  caris,  se  trouve  identique  à  la  deuxième  per- 
sonne conjointe,  caris.  Il  est  donc  assez  vraisemblable  qu'à 
l'origine  caris  «  il  a  aimé  »  était  une  forme  conjointe,  et 
qu'il  existait  à  côté  une  forme  absolue  *carsi.  La  troisième  per- 
sonne conjointe  caris,  qu'on  ne  pouvait  distinguer  de  la  se- 
conde personne  conjointe  caris  a  disparu,  par  raison  de  clarté, 
de  la  conjugaison  conjointe  pour  remplacer  dans  la  conju- 
gaison absolue  *carsi  qui  prêtait  aussi  à  une  confusion  avec  la 
seconde  personne  absolue,  mais  caris  a  subsisté  dans  les  lan- 
gues bretonnes.  Les  langues  du  rameau  gaélique  auraient  alors 
crée  une  troisième  personne  conjointe,  car. 

Cet  exemple  suffit  pour  montrer  l'intérêt  de  la  thèse  de 
M.  E.  au  point  de  vue  des  études  celtiques..  Signalons  encore 
en  terminant  une  note  (p.  64-65)  sur  la  double  représentation 
.en  celtique  par  ci  et  î  de  Yë  indo-européen  :  rî  à  côté  de  roc, 
hir  à  côté  de  hwyr,  sil  à  côté  de  hocdl. 

G.  D. 

Ecclesiological  notes  on  some  of  the  islands  of  Scotland, 

by  T.-S.  Muir.  Edinburgh.  David  Douglas,  1885,  xii-316  p.  et  55  pi. 

Ce  volume  est  un  recueil  de  notes  archéologiques  sur  les 
monuments  religieux  de  quelques  îles  de  l'Ecosse.  La  plupart 
de  ces  notes  avaient  déjà  été  publiées  dans  des  brochures,  tirées 
à  un  très  petit  nombre  d'exemplaires  et  distribuées  seulement 


1 24  Bibliographie. 

aux  amis  de  l'auteur.  En  tête  de  ces  notes,  M.  T. -S.  Muir  a 
placé  une  longue  introduction,  où  il  examine  rapidement  les 
principales  îles  de  l'Ecosse  qui  renferment  des  édifices  religieux 
intéressants  au  point  de  vue  archéologique. 

L'ouvrage  est  donc  divisé  en  deux  parties.  La  première 
partie,  Notices  générales,  occupe  les  pages  1-79.  Quatre-vingts 
îles  environ  y  sont  successivement  passées  en  revue.  La  seconde 
partie  (p.  79-309)  est  divisée  en  treize  chapitres,  chaque  cha- 
pitre traitant  d'une  île  ou  d'une'  portion  d'île.  Le  plus  im- 
portant article  est  consacré  aux  îles  Shetland  (p.  1 19-174). 

Comme  l'indique  le  titre,  l'auteur  n'a  point  suivi  de  plan 
méthodique;  la  forme  qu'il  a  adoptée  est  celle  d'un  journal  de 
voyage.  Les  préoccupations  archéologiques  ne  l'empêchent 
point  d'exprimer  ses  sentiments  personnels.  Le  savant  est 
doublé  d'un  touriste  qui  ne  se  refuse  pas  le  plaisir  d'admirer 
un  paysage  avant  d'examiner  en  détail  un  monument.  Les  des- 
criptions techniques  sont  d'ailleurs  rendues  vivantes  par  de 
nombreuses  gravures  dans  le  texte  et  trente-cinq  planches  hors 
texte,  reproduites  d'après  les  dessins  mêmes  de  l'auteur. 

Un  index  très  complet  facilite  les  recherches.  Nous  y  re- 
marquons une  longue  et  intéressante  liste  de  saints  celtiques 
auxquels  sont  dédiés  divers  sanctuaires  des  îles  écossaises. 

Le  livre  de  M.  T. -S.  Muir  est  une  œuvre  considérable,  sa 
première  notice  par  ordre  chronologique  est  du  9  sep- 
tembre 1850;  la  dernière  est  datée  du  mois  de  juillet  1871. 
Le  rapprochement  de  ces  deux  dates  suffit  pour  montrer  com- 
bien a  été  long  le  travail  dont  ce  précieux  recueil  est  le  résultat. 

G.  D. 

Le  Mystère  de  Sainte  Barbe,  tragédie  bretonne,  texte  de  1557  pu- 
blié avec  traduction  française,  introduction  et  dictionnaire  étymologique 
du  breton  moyen,  par  Emile  Ernault,  professeur  à  la  Faculté  des  Let- 
tres de  Poitiers.  Paris,  Thorin,  1887  ;  in-4,  xu-404  p. 

L'ouvrage  de  M.  E.  se  compose  de  deux  parties  bien  dis- 
tinctes :  le  mystère  de  sainte  Barbe  (p.  1-187),  et  le  diction- 
naire du  moyen  breton  (p.  193-400).  Il  contient  en  outre 
une  introduction,  p.  i-xn,  et  un  errata,  p.  400-404. 


Bibliographie.  1 2  <; 

La  première  édition  connue  du  mystère  de  sainte  Barbe  a  été 
imprimée  à  Paris  en  1557.  M.  de  La  Villemarqué  a  pu  en  faire 
la  copie  sur  un  exemplaire  incomplet  appartenant  à  un  parti- 
culier. C'est  cette  copie  que  M.  E.  publie  aujourd'hui  en  com- 
blant les  lacunes  qu'elle  présente  au  moyen  d'une  seconde  édi- 
tion parue  en  1647  chez  Ian  Hardovyn,  à  Morlaix1.  M.  E.  a 
reproduit  pour  les  bibliophiles  le  texte  de  l'édition  de  1557.  Les 
fautes  de  ce  texte  sont  corrigées  en  note  pour  les  celtistes.  Les 
variantes  de  la  seconde  édition  (1647)  sont  reproduites  éga- 
lement en  notes.  Peut-être  .pouvons-nous  regretter,  en  qualité 
de  celtiste,  que  M.  E.  ne  nous  ait  pas  donné  une  véritable 
édition  du  mystère  de  sainte  Barbe,  en  faisant  passer  dans  le 
texte  les  bonnes  leçons  de  l'édition  de  1647  et  les  corrections 
qu'il  nous  propose,  et  en  réservant  pour  les  notes  les  variantes 
peu  importantes  de  l'édition  de  1647  ou  les  leçons  fautives  de 
l'édition  originale. 

Il  est  intéressant  de  rapprocher  le  mystère  breton  de  sainte 
Barbe  des  deux  mystères  français  du  même  nom,  l'un  ma- 
nuscrit, l'autre  imprimé,  qui  se  trouvent  à  la  Bibliothèque 
nationale2.  Le  mystère  français  manuscrit,  en  cinq  journées, 
est  beaucoup  plus  développé  que  le  mystère  breton,  il  n'a  point 
le  même  plan  et  contient  un  grand  nombre  d'épisodes  qui  ne 
se  rencontrent  point  dans  ce  dernier.  Le  mystère  français  im- 
primé, au  contraire,  se  rapproche  beaucoup  du  mystère  breton. 
Cependant  le  mystère  breton  n'est  pas  dérivé  du  mystère  fran- 
çais imprimé  tel  que  nous  le  possédons.  Le  mystère  français 
imprimé  et  le  mystère  breton  dérivent  d'une  source  commune 
qui  n'est  pas  la  source  du  mystère  français  manuscrit.  Le  plan 
est  à  peu  près  le  même  dans  les  deux,  et  la  plupart  des  épisodes 
leur  sont  communs.  Mais  le  mystère  breton  et  le  mystère 
français  contiennent  chacun  un  certain  nombre  d'innovations. 

Les  personnages  du  maître  d'école,  d'Origène,  de  Valentin, 
de  la  Conscience,  ne  figurent  point  dans  le  mystère  français. 
Les  noms   des  tyrans,   comme  les  noms  de  bergers,  ne  sont 

1 .  Cette  édition  se  trouve  à  la  Bibliothèque  nationale  ;  elle  est  cotée  Y. 
6186.  Réserve. 

2.  Le  manuscrit  est  coté  fr.  976,  ancien  7299,  3.  Cangé  11.  L'imprimé 
est  coté  acquisitions  29234.  Réserve. 


I26  Bibliographie. 

point  les  mêmes  dans  le  mystère  français  et  dans  le  mystère 
breton.  D'autre  part,  le  mystère  français  contient  plusieurs 
épisodes  qu'on  ne  retrouve  point  dans  le  mystère  breton,  tels 
que  la  scène  entre  les  trois  suivantes  de  Barbe  qui  jouent  aux 
cartes,  et  des  personnages  nouveaux  :  la  reine,  l'empereur 
Marcian,  la  folle  femme. 

Au  point  de  vue  littéraire,  le  mystère  français  est  bien  su- 
périeur au  mystère  breton  pour  la  vivacité  du  dialogue  et 
l'originalité  de  l'expression.  Le  mystère  français  est  débarrassé 
de  toutes  les  longueurs  qui  gâtent  les  plus  belles  scènes  du 
mystère  breton.  Le  long  discours  pédantesque  que  dans  le 
mystère  breton  Barbe  tient  à  son  père,  lorsqu'elle  est  sur  le 
point  de  mourir,  est  remplacé  dans  le  mystère  français  par 
quelques  paroles  touchantes.  Au  lieu  de  réfuter  logiquement 
les  raisons  que  lui  donne  son  père  et  de  le  couvrir  d'injures 
quand  elle  voit  qu'elle  ne  peut  le  fléchir,  Barbe,  dans  le 
mystère  français,  invoque  pour  toute  raison  les  liens  du 
san<*  :  «  Pitié  devez  avoir  de  moi  qui  suis  issue  de  votre 
nature  ».  Les  détails  réalistes  du  martyre  de  sainte  Barbe 
sont  encore  exagérés  dans  le  mystère  breton  qui,  sur  les  points 
communs  aux  deux  mystères,  est  en  général  une  amplifi- 
cation assez  maladroite  du  mystère  français. 

Quoi  qu'il  en  soit  de  la  valeur  littéraire  du  mystère  breton 
de  sainte  Barbe,  son  importance  est  considérable  au  point  de 
vue  de  l'étude  du  moyen  breton. 

Le  dictionnaire  étymologique  qui  accompagne  la  vie  de 
sainte  Barbe  est  tiré  pour  la  plus  grande  partie  des  mystères 
moyen  bretons  imprimés  jusqu'ici  et  du  Catholicon.  Il  ne  con- 
tient pas  le  relevé  des  mots  que  l'on  rencontre  dans  les  cartu- 
laires  du  moyen  âge.  C'est  ainsi  qu'on  peut  s'étonner  de  ne 
pas  y  trouver  le  mot  trev  «  territoire  d'une  succursale  »,  qui 
est  très  commun  dans  les  chartes. 

Mais  si  on  excepte  les  quarante-deux  pages  de  glossaire 
mises  par  M.  Wh.  Stokes  à  la  fin  de  ses  Middle  Breton  hours, 
c'est  la  première  fois  qu'un  dictionnaire  breton  contient  des 
rapprochements  scientifiques  avec  les  autres  langues  indo-euro- 
péennes. Ces  rapprochements  sont  en  général  heureux,  et  quel- 
ques-uns sont  nouveaux.  Ainsi  M.  E.   compare  avec  raison 


Bibliographie.  1 27 

l'irlandais  airde  =  *  arevidion  au  breton  argoe%  «  intersigne  »  ; 

le  breton  argourou  «  dot  »  =  ar-go-b\e]rou  au  grec  çepvrç,  etc. 

Nous  soumettrons  néanmoins  quelques  critiques  à  l'auteur. 

P.  238,  au  mot  cadarn.  Le  point  d'interrogation  que  se  pose 

M.  E.,  après  avoir  comparé  catus  et  yipw,  me  semble 

fort  bien  placé. 
P.  248,  au  mot  cleçeff.  L'irlandais  claideb  représente  non  pas 

cladivo-s  mais  *  cladibos,  gallois  cleddyf. 
P.  250.  M.  E.  cite  au  mot  œil  «  perte  »  le  gaélique  caill.  Il 

aurait  aussi  pu  rapprocher  l'irlandais  œil  qui  semble 

bien  être  le  même  mot  que  le  breton  coll. 
Peut-être  pourrait-on  encore  regretter  la  fâcheuse  disposition 
typographique  du  dictionnaire.  Des  mots  absolument  diffé- 
rents se  trouvent  confondus  dans  le  même  article,  sans  doute 
pour  ne  pas  perdre  de  place.  L'emploi  des  caractères  gras  pour 
distinguer  les  mots  qui  font  l'objet  d'un  article  ne  remédie 
qu'en  partie  à  cet  inconvénient.  De  plus,  le  même  mot  n'est 
pas  répété  plusieurs  lois  s'il  a  plusieurs  orthographes.  Il  est 
quelquefois  difficile  de  trouver  rapidement  un  mot  dans  une 
de  ces  grandes  pages. 

Comme  on  le  voit,  nos  critiques  ne  portent  que  sur  quel- 
ques points  de  détail.  La  publication  de  M.  Ernault  n'en  est 
pas  moins  une  œuvre  considérable  qui  a  fait  entrer  la  lexicogra- 
phie bretonne  dans  une  voie  nouvelle  et  vraiment  scientifique. 

G.  D. 

Royal  Itish  Academy.  Todd  lecture  séries.  Vol.  II,  part.  11.  The  pas- 
sions and  the  homiîies  from  Leabhar  Breac  :  text,  transla- 
tion and  glossary,  by  Robert  Atkinson,  M.  A.,  LL.  D.,  professor  of 
Sanscrit  and  Comparative  Philology  in  the  University  of  Dublin  and 
Royal  Irish  Academy 's  Todd  Professor  of  the  Celtic  Languages.  Lon- 
dres, Williams  and  Norgate,  1887;  gr.  in-8,  vi-958  p. 

Ce  volume,  dont  l'utilité  ne  peut  être  contestée,  se  com- 
pose de  trois  parties  principales  :  i°  reproduction  de  textes  ir- 
landais, p.  41-275  ;  2°  traduction  anglaise  de  ces  textes, 
p.  277-514;  30  glossaire  irlandais-anglais  des  mots  compris 
dans  les  textes  qui  composent  la  première  partie,  p.  515-950. 
On  trouve  en  outre  une  préface,  p.  iii-iv;  une  table  des  ma- 


1 28  Bibliographie. 

tières,  p.  v-vi  ;  une  introduction,  p.  1-40;  un  index  des  noms 
propres,  p.  951-957;  et  un  errata,  p.  958.  La  plus  grande 
partie  de  l'introduction  a  été  déjà  publiée  sous  le  titre  de 
Irish  Lexicography ,  et  il  en  a  été  rendu  compte  dans  la  Revue 
critique1.  Nous  allons  ici  la  laisser  de  côté  et  nous  occuper 
des  trois  sections  fondamentales  du  livre  de  M.  Atkinson  : 
textes,  traduction,  glossaire.1 

Les  textes  appartiennent  tous  sans  exception  à  la  littérature 
ecclésiastique.  Le  but  que  s'est  proposé  l'éditeur  en  les  pu- 
bliant a  été  d'offrir  aux  débutants  un  sujet  d'étude  qui  leur 
présente  peu  de  difficultés.  Il  est  certain  que  ces  textes  sont 
plus  aisés  à  comprendre  que  les  documents  réunis  par  les  sa- 
vants auxquels  nous  devons  les  Irische  Texte.  Le  défaut  des 
pièces  que  nous  donne  M.  Atkinson  est  de  manquer  d'origi- 
nalité. Il  les  a  classés  en  deux  sections  :  les  passions,  au 
nombre  de  quinze  ;  les  sermons,  au  nombre  de  vingt-un  ;  or, 
aucun  de  ces  morceaux  ne  concerne  un  saint  irlandais.  Les 
auteurs  ont  été  inspirés  par  des  documents  latins  composés 
sur  le  continent.  M.  Atkinson  indique  lui-même  une  partie  de 
ces  documents  latins  en  tête  de  ses  traductions2. 

Comme  le  titre  l'annonce,  M.  A.  s'est  borné  à  reproduire 
un  seul  manuscrit;  il  s'est  cependant  préoccupé  de  la  ques- 
tion de  savoir  si  les  documents  qu'il  publie  ne  nous  auraient 
pas  été  conservés  ailleurs  que  dans  le  Leabhar  Breac,  et  ses  re- 
cherches à  ce  sujet  lui  ont  appris  que  dans  les  manuscrits  : 
i°  du  British  Muséum,  Egerton  91',  92-+,  136^;  20  du  col- 
lège de  la  Trinité  de  Dublin,  H.  2.  16  (Livre  jaune  de  Lc- 
can) 6,  enfin  dans  le  Book  of  Fermoy  de  l'Académie  royale 
d'Irlande  7  se  trouvent  d'autres  copies  ou  d'autres  rédactions 
des  morceaux  conservés  par  le  Leabhar  Breac.  Il  nous  donne, 
p.  948,  quelques  variantes  des  mss.  Egerton.  Il  réserve  pro- 
bablement les  autres  variantes  pour  une  publication  supplé- 

1.  Voir  année  18S6,  p.  95-96. 

2.  P.  277,  286,  293,  29s,  300,  304,  309,  313-314,  324,  329>  359»  392- 

3.  Voyez  p.  293,  300,  304,  309,  313,  329  du  livre  de  M.  A. 

4.  P.  293  du  livre  de  M.  A. 

5.  P.  300  du  livre  de  M..  A. 

6.  P.  304  et  359  du  livre  de  M.  A. 

7.  P.  314  du  livre  de  M.  A. 


Bibliographie.  129 

mentaire.  Je  ne  suis  pas  d'ailleurs  convaincu  que  M.  Atkinson 
donne  l'indication  complète  des  manuscrits.  Ainsi,  à  propos  des 
Passions  de  Jésus-Christ  publiées  p.  113  et  suiv.  et  dont  on  trouve 
la  traduction  'à  partir  de  la  page  3  59,  le  savant  éditeur  ne  dit  rien 
du  manuscrit  H.  2.  17  du  collège  de  la  Trinité  de  Dublin,  recueil 
de  fragments  du  xve  et  du  xvie  siècle.  Or,  dans  ce  manuscrit,  p.  99, 
col.  2,  il  y  a,  suivant  la  copie  du  catalogue  d'O'Donovan  que  je 
possède,  le  commencement  de  :  «  an  account  of  the  passion  of 
Christ  »  qui  se  termine  inachevé  p.  1 10  b.  Si  je  m'en  rapporte 
aux  notes  que  j'ai  prises  autrefois  à  Dublin  et  qui  m'ont  attiré 
une  si  verte  semonce  de  M.  Zimmer,  le  titre  de  ce  document 
est  ainsi  conçu  :  Incipit  do  pais  Crist  andso  sis.  On  retrouve 
encore  la  Passion  de  Jésus-Christ  dans  le  même  manuscrit, 
p.  400-422.  Quel  rapport  y  a-t-il  entre  ces  morceaux  et  la 
Pacio  XPI  secundum  Bernardum  conservée  par  le  manuscrit 
Egerton  1781,  fol.  38,  ou,  si  l'on  veut,  p.  75  ?  Je  suis  très 
mal  placé  pour  contrôler  les  recherches  de  M.  A.  lorsqu'il 
s'agit  de  manuscrits  conservés  dans  les  Iles  Britanniques. 
Mais  ce  que  je  crois  pouvoir  dire  est  que,  lorsqu'on  voudra 
donner  une  édition  définitive  des  textes  publiés  par  M.  A., 
on  fera  bien  de  consulter  à  la  Bibliothèque  nationale  le  ma- 
nuscrit fonds  celtique,  n°  1 .  On  peut  dresser  le  tableau  de 
concordance  suivant,  qu'une  étude  plus  approfondie  pourra 
compléter  ou  même  rectifier1. 


TITRE 


Pages  de  l'édition     Folio  du  ms.  fonds 
de  M.  A.  celtique  n°  i 

Sermon  sur  la  Cène 181                 109  r° 

Sermon  sur  la  Pénitence 220                 104  v° 

Sermon  sur  l'Oraison  Dominicale 259                   87  v° 

Sermon  sur  la  Mort  (dialogue  du  corps  et  de 

l'âme) 266  12  v°  et  72  v°  * 

Sermon  sur  le  Jeûne 274                  15  r° 

Je  suis  loin  d'avoir  collationné  avec  le  fac-similé  du  Lea- 

1 .  Le  manuscrit  fonds  celtique  n°  1  étant  actuellement  sorti,  je  n'ai  pu 
faire  entre  ce  manuscrit  et  l'édition  de  M.  Atkinson  la  collation  à  laquelle 
j'aurais  procédé  s'il  m'avait  été  possible  d'emprunter  ce  manuscrit. 

2.  Dans  le  fonds  celtique  n°  1,  ce  document  commence  ainsi  :  Domine 
quis  habitabit  in  tabemaculo  tuo  aut  quis  requiescet  in  monte  sancto  tuo. 

Revue  Celtique,  IX  9 


i  jo  Bibliographie. 

bhar  Brcac  la  totalité  de  l'édition  donnée  par  M.  A.  Mais  à  en 
juger  par  les  vérifications  que  j'ai  faites,  le  nombre  des  erreurs 
commises  par  lui  ne  dépasse  pas  ce  qui  est  inévitable.  Je  si- 
gnalerai par  exemple  à  la  page  259,  ligne  7831,  le  génitif 
deiuna  de  l'infinitif  dénum  ;  il  est  écrit  avec  un  apex  sur  Yc  : 
dénma.  Cet  apex  manque  dans  le  fac-similé,  p.  248,  col.  1, 

1  59-.  . 

Voici  une  critique  un  peu  plus  sérieuse  :  M.  A.  a  adopté  un 

système  qui  me  semble  dans  un  certain  nombre  de  cas 
changer  sans  avantage  aucun  la  forme  '  des  documents  qu'il 
publie.  Souvent,  comme  les  prédicateurs  catholiques  mo- 
dernes, l'auteur  du  document  irlandais  cite  en  latin  des  pas- 
sages de  la  Bible,  puis  il  donne,  immédiatement  après,  la  tra- 
duction irlandaise  de  ces  textes  latins.  M.  A.  retranche  ces 
textes  latins  des  documents  irlandais  et  les  rejette  dans  sa  tra- 
duction anglaise  où  il  les  intercale,  et  il  croit  inutile  de  nous 
dire  en  anglais  comment  en  irlandais  ces  textes  ont  été 
traduits. 

Il  y  a  pourtant  des  circonstances  où  il  pourrait  être  inté- 
ressant de  savoir  comment  un  texte  biblique  a  été  compris  au 
moyen  âge  par  les  théologiens  irlandais.  J'en  emprunterai  un 
exemple  à  un  morceau  bien  connu  de  tous  les  chrétiens.  C'est 
le  premier  membre  de  phrase  de  saint  Mathieu,  c.  VI,  ver- 
set 13,  c'est-à-dire  l'avant-dernier  article  de  l'oraison  domi- 
nicale :  ym  [ayj  ebsviyy.Y];  r^aç  el;  zeipaspiv  ;  dans  la  Vulgate  :  et 
ne  nos  inducas  in  tentationem.  Je  crois  qu'il  n'y  a  pas  beaucoup 
de  passages  de  la  Bible  qui  ait  davantage  attiré  l'attention  des 
théologiens.  La  Vulgate  est  simplement  un  calque  du  texte 
grec  ;  on  peut  en  dire  autant  de  la  traduction  française  vul- 
gaire :  «  et  ne  nous  induisez  point  en  tentation  ».  La  traduction 
irlandaise  du  Lcabhar  Breac,  p.  248,  col.  1,  1.  54-55  :  ocus  ni- 

Ro  fiarsaid  Daibit  mac  Iase.  C'est  le  début  du  morceau  publié  par  M.  At- 
kinson,  p.  266.  Dans  le  manuscrit  H.  2.  16  du  collège  de  la  Trinité  de  Du- 
blin, col.  851,  sur  la  dernière  ligne,  on  trouve  le  titre  :  Akalla/w  in  chuirp 
acus  na-hanma  anso.  Puis  se  trouve,  col.  852-857,  un  traité  que  termine  la 
date  de  1391  inscrite  par  le  scribe  auquel  nous  devons  cette  copie.  Ce  traité 
est-il  le  même  que  celui  qu'a  publié  M.  Atkinson  ?  Si  je  comprends  bien  mes 
notes,  le  texte  du  ms.  H:  2.  16  commencerait  par  les  mots  :  Unicuique  ani- 
mae  duo  exercitus  occurrunt.  A  vérifier. 


Bibliographie.  1 5 1 

r-lecea  sinà  in.-am.us  n-dofulflf/;/ai  :  «  et  nous  abandonnez  pas 
dans  une  tentation  insupportable  »  est  un  véritable  commen- 
taire, d'une  valeur  bien  supérieure  à  celle  de  la  vieille  version 
française  que  me  signale  M.  Samuel  Berger  :  «  ne  souffrez 
mie  que  nous  soyons  conduits  en  tentation  ».  Or,  en  consé- 
quence du  système  que  nous  venons  de  signaler,  M.  A.  n'a 
pas  traduit  l'irlandais  :  ocus  ni-r-lecea  siwd  in-amw  n-dofu- 
lacbtai.  Dans  sa  traduction  anglaise,  à  la  page  495,  au  lieu  de 
la  traduction  du  passage  irlandais  que  nous  venons  de  citer, 
nous  trouvons  reproduit  le  texte  latin  enlevé  du  texte  irlandais 
où  il  était  intercalé  :  et  ne  nos  inducas  in  temptationem. 

Les  parties  de  la  traduction  anglaise  que  j'ai  lues  jusqu'à 
présent  m'ont  satisfait.  Il  me  semble  qu'en  un  certain  nombre 
de  cas  on  pourrait  en  français  serrer  le  texte  de  plus  près,  je 
n'oserais  dire  qu'en  anglais  ce  soit  la  même  chose.  Il  y  a  une 
circonstance  où  je  prends  le  parti  de  M.  A.,  auteur  de  la  tra- 
duction, contre  M.  A.,  auteur  du  dictionnaire.  Dans  la  Pas- 
sion de  saint  Philippe,  on  voit  qu'avant  de  mourir  saint  Phi- 
lippe convoqua  les  prêtres,  les  diacres  et  les  évêques  des  cités 
voisines  et  leur  dit  :  «  Rappelez-vous  l'enseignement  de  Jésus- 
Christ  ».  Biid  siu  cuim[n]igt/;i  \-iorcet\A  i;z-c6imded  Lu  Crist. 
(Leabhar-Breac ,  p.  180,  col.  1,  ligne  dernière,  col.  2,  1.  1  ; 
cf.  Atkinson,  p.  112,  1.  2.537-2538).  La  traduction  de  M.  A. 
est:  «  Remember  ye  the  teaching  of  the  Lord  »  (p.  357). 
«  Rappelez-vous  l'enseignement  du  seigneur  (j'aurais  ajouté 
Jésus-Christ).  Dans  son  glossaire,  p.  620,  col.  1,  au  mot 
cuindrigim,  M.  A.,  revenant  sur  sa  première  impression,  qui 
était,  je  crois,  la  bonne,  propose  de  corriger  cuim[n]igtbi  en 
cuinrigthi  et  de  traduire  :  «  be  ye  chastened  in  the  instruc- 
tion of  the  Lord  ».  C'est-à-dire  :  soyez  châtiés  dans  l'ensei- 
gnement du  Seigneur  ».  Il  aurait  mieux  fait  de  placer  cuim- 
\_n\igthi  à  la  page  précédente  (619)  dans  l'article  consacré  au 
mot  cuimnigim,  en  comprenant  que  les  paroles  mises  dans  la 
bouche  de  saint  Philippe  sont  une  répétition  abrégée  du  ver- 
set 17  de  Pépitre  de  saint  Jude  :  'Yjjieïç  ci  ôyoïcirjToi  |A9ifc(h[te xm 
pY](xaTO)V  twv  7:pos'.Cï][jt.iva}7  Otto  twv  ^7:c7icXoi)v  toD  y.'jptcu  vj^ûv  'Iy]-cj 
Xpiarou. 

Le  glossaire  sera,  je  crois,  la  partie  du  livre  qui  rendra  le 


Ij2  Bibliographie. 

plus  de  services.  C'est  du  reste  celle  qui  a  donné  le  plus  de 
peine  à  l'auteur.  Ce  glossaire  comprend  436  pages  à  deux  co- 
lonnes, de  48  lignes  chacune.  Celui  que  M.  Windisch  a  mis  à  la 
fin  du  tome  premier  des  Irische  Texte  et  qui  a  fait  faire  aux 
études  celtiques  un  si  grand  progrès  est  aussi  à  deux  colonnes, 
il  n'a  que  110  pages  de  plus.  Chaque  page  doit  contenir  à 
peu  près  la  même  quantité  de  matière  ;  car  si  M.  Windisch  a 
dans  ses  pages  six  lignes  de  plus  que  M.  Atkinson,  les  lignes 
de  M.  A.  contiennent  quelques  lettres  de,  plus  que  celles  de 
M.  Windisch. 

Le  glossaire  de  M.  A.  est  loin  de  renfermer  tous  les  mots 
qui  sont  dans  celui  de  M.  Windisch,  mais  par  compensation 
il  en  donne  un  certain  nombre  qui  manquent  chez  M.  Win- 
disch. Ainsi  je  signalerai  à  la  page  521  de  M.  A.  le  mot  Abb- 
daine  «  abbotship  »,  «  supremacy  »  qui  manque  chez  M.  W.  ; 
on  le  trouve,  il  est  vrai,  chez  O'Reilly ,  mais  avec  un  sens  er- 
roné «  the  religious  belonging  to  an  abbey  ».  A  la  môme  page 
de  M.  A.  le  mot  abstanait  (abstinentia)  fait  également  défaut 
chez  M.  W.  *.  Dans  certains  articles  dont  le  correspondant 
existe  chez  M.  W.,  M.  A.  ajoute  quelques  bonnes  observations 
à  celles  que  M.  W.  a  déjà  faites.  Ainsi  M.  Windisch,  p.  338, 
col.  2,  dans  le  savant  article  qu'il  consacre  au  pronom  pos- 
sessif de  la  troisième  personne  du  singulier  a  «  son  »,  fait 
observer  que,  joint  à  l'infinitif,  ce  pronom  désigne  l'objet.  La 
règle  donnée  par  M.  A.,  p.  516,  col.  2,  est  plus  complète: 
«  It  is  in  very  common  use  before  infinitives  to  dénote  the 
subject  or  the  object  ofthe  verb,  accordingas  itis  intransitive 
or  transitive  ».  Quand  le  verbe  est  transitif,  a  désigne  l'objet  ; 
quand  le  verbe  est  intransitif,  a  désigne  le  sujet. 

Chez  M.  W.,  p.  343,  col.  1,  on  lit  acarb  =  latin  acerbus. 
M.  A.,  p.  521,  col.  2,  nous  dit:  «  acarb,  probably  ath-garb, 
with  admixture  of  Latin  acerbus  ».  Il  y  a  là  une  légère  erreur. 
Le  préfixe  tonique  aîh-  n'existe  pas.  Le  savant  celtiste  a 
voulu  écrire  ad-;  *  ad-garb  donne  accarb  avec  deux  c  (Revue 
Celtique,  VI,  136).  Dans  son  article  Acarb,  M.  A.   a  réuni 

1 .  On  trouve  ces  deux  mots  dans  les  excellents  Indices  de  MM.  Gùterbork 
et  Thurneysen,  mais  sans  traduction. 


Bibliographie.  i  j  j 

trois  exemples  de  la  variante  accarb  avec  deux  c.  Le  latin  acer- 
bus  donnerait  acharb  en  irlandais  ;  comparez  acher  =  latin 
acer,  Windisch,  p.  343,  col.  2.  On  peut  donc  croire,  contrai- 
rement à  4a  doctrine  de  M.  Windisch,  que  l'irlandais  acarb 
est  un  composé  d'origine  irlandaise. 

Nous  venons  de  signaler  dans  cet  article  acarb  une  petite 
erreur,  th  pour  à.  Les  formules  dont  M.  A.  se  sert  manquent 
quelquefois  de  précision  ou  même  d'exactitude.  Ainsi,  p.  521, 
à  l'article  acall-  :  «  the  enclitic  form  is  from  the  root  ad- 
glad-  ».  Il  n'y  a  pas  de  racine  ad-glad  et  s'exprimer  ainsi  est- 
dangereux  devant  de  jeunes  étudiants.  A  la  page  578,  col.  1, 
M.  A.  prétend  que  cengul  est  l'infinitif  de  cenglaim.  Il  serait 
plus  exact  de  dire  que  cenglaim  est  un  verbe  dénominatif  dé- 
rivé de  cengul  qui  est  le  latin  cingulum.  Cornus  «  power  », 
p.  606,  col.  1,  vient  non  pas  de  la  racine  mid  par  i,  comme  le 
dit  M.  A.,  mais  de  la  racide  med,  pars.  Le  simple  mess,  p.  800, 
col.  1  (d'où  cornus,  grâce  au  préfixe  accentué  com-}  =  *med- 
tu-  et  non  *mid-tu-.  *  Mid-tu-  donnerait  miss  comme  *bitu-, 
bith  ;  *-vidu-,  fid. 

Je  penche  à  croire  que  le  verbe  aichnim  «  to  commend  », 
p.  526,  col.  2  (L.  B.,  p.  162,  col.  2,  1.  57;  p.  167,  col.  1, 
1.  41),  n'existe  point  et  qu'il  faut  lire  aithnim  par  un  t.  Ce  verbe 
estle  même  que  le  verbe  aithnim  «  to  order  »,  p.  535,  col.  2, 
qui  a  été  étudié  par  M.  Thurneysen,  R.  C,  t.  VI,  p.  137, 
et  par  M.  Windisch  dans  son  glossaire,  p.  357.  Cf.  timna  chez 
Windisch,  p.  824,  825,  et  chez  Atkinson,  p.  921,  col.  21. 

Je  terminerai  par  une  observation  qui  a  rapport  à  un  des 
grands  progrès  que  les  études  celtiques  ont  faits  dans  ces  der- 
niers temps.  Il  s'agit  de  la  loi  de  l'accent  déjà  en  partie  saisie 
par  M.  Windisch  à  l'époque  où  il  a  rédigé  son  excellente 
grammaire  élémentaire  du  vieil  irlandais  (1879),  mais  qui  a 
été  pour  la  première  fois  exposée  avec  tous  les  développements 
qu'elle  mérite  cinq  ans  plus  tard,  par  M.  Zimmer  dans  la  se- 
conde livraison  de  ses  Keltische  Studien  et  par  M.  Thurneysen 


1.  Aithnc  veut  dire  à  la  fois  «  dépôt,  mandat  et  commandement  ».  Le 
vieil  irlandais  confond  ces  trois  idées,  que  la  langue  plus  précise  du  droit 
romain  et  du  droit  moderne  distingue  nettement. 


134  Bibliographie. 

dans  le  tome  VI  de  la  Revue  Celtique.  Ces  deux  savants  ont 
fait  d'une  manière  indépendante  chacun  les  mêmes  décou- 
vertes. M.  A.  a  voulu  profiter  de  leurs  travaux  si  remarquables. 
On  sait  maintenant  qu'en  général,  sauf  les  verbes  dénomi- 
natifs, tous  les  verbes  composés  se  présentent  en  vieil  et  moyen 
irlandais  sous  deux  formes,  l'une  accentuée  sur  le  premier 
terme  et  l'autre  accentuée  sur  le  second  et  que  la  chute  de  la 
voyelle  posttonique  rend  quelquefois  très  difficile  la  constata- 
tion de  la  communauté  d'origine  de  ces  deux  formes. 

M.  A.  paraît  s'être  proposé  pour  but  de  réunir  en  un  seul 
article  les  deux  formes  de  chaque  verbe  ;  malheureusement  il 
met  cet  article  unique  tantôt  à  la  place  où  l'ordre  alphabétique 
appelle  la  forme  accentuée  sur  le  second  terme,  tantôt  à  la 
place  qu'exige  la  forme  accentuée  sur  le  premier  terme. 
Ainsi,  à  la  page  644,  col.  1,  nous  trouvons  diluigim  «  to  for- 
give  »  forme  accentuée  sur  le  premier  terme,  et  l'article  com- 
prend un  exemple  de  forme  accentuée  sur  le  second  terme  : 
dollogfailher.  On  chercherait  inutilement  a  la  page  667  doluigim 
dont  doUogfaither  est  le  futur  passif  à  la  troisième  personne 
du  singulier. 

Mais  ce  n'est  pas  le  procédé  ordinaire  de  M.  A. 
'  Ordinairement,  quand  M.  A.  a  recueilli  dans  ses  textes  les 
deux  formes  d'un  verbe,  l'article  qui  concerne  ce  verbe  se  ren- 
contre à  l'endroit  où  l'ordre  alphabétique  appelle  la  forme 
dont  le  premier  terme  est  atone  ;  et  quand  on  arrive  à  l'en- 
droit où,  suivant  l'ordre  alphabétique,  la  forme  accentuée  sur 
le  premier  terme  se  présente,  on  trouve  un  renvoi  à  la  pre- 
mière forme,  par  exemple  sous  dogniin,  p.  665-666,  on  trouve 
dènahn,  etc.  ;  sous  doberim,  p.  661-662,  tabair,  etc.  A  la 
p.  634,  l'article  délia  consiste  en  un  simple  renvoi  à  dognim  ; 
à  la  p.  890,  l'article  tabair  se  borne  à  nous  renvoyer  a  do- 
berim. 

Mais  fort  souvent  M.  A.  n'a  relevé  dans  ses  textes  que  la 
forme  accentuée  sur  le  premier  terme,  et  alors  l'article  se 
trouve  là  où  l'ordre  alphabétique  exige  la  présence  de  cette 
forme.  M.  A.  a  donc  suivi  deux  systèmes  de  classement,  il  ex- 
pose par  là  ses  lecteurs  à  des  pertes  de  temps  qu'il  leur  au- 
rait évitées  en  adoptant  toujours  l'ordre  alphabétique  demande 


Bibliographie .  135 

par  la  forme  qui  porte  l'accent  sur  le  premier  terme,  sauf  à 
renvoyer,  s'il  y  a  lieu,  de  l'autre  forme  à  celle-là.  . 

M.  A.  a  cru  devoir,  en  certains  cas,  renvoyer  aux  Keïtische 
Studien,  II,  de  M.  Zimmer,  et  au  t.  VI  de  la  R.  C.  (article 
de  M.  Thurneysen)  où  sont  réunis  de  nombreux  exemples  des 
deux  formes  verbales  tirées  de  textes  vieil  irlandais.  Ainsi, 
à  l'article  diluigim,  cité  plus  haut,  nous  trouvons  le  renvoi  à 
R.  C,  VI,  141,  et  à  K.  St.,  II,  42  et  suivantes,  où  ce  verbe 
est  savamment  étudié  ;  de  même  à  l'article  acall-,  M.  A.  ren- 
voie à  R.  C,  VI,  136,  et  à  .Zimmer  [II],  17,  68.  Je  ne  puis 
deviner  pourquoi  à  l'article  condaigïm,  il  n'est  rien  dit  de  K. 
St.,  II,  87-89;  ni  de  R.  C,  VI,  140;  —  pourquoi  à  l'article 
conicim,  il  n'est  pas  mention  de  K.  St.,  II,  74-80,  ni  de  R. 
C,  VI,  140;  —  pourquoi  à  l'article  dobcrim  manque  le  renvoi 
à  K.  St.,  II,  112-114;  et  à  R.  C,  VI,  147-148;  —  pourquoi 
à  l'article  dognim  il  n'est  pas  question  de  K.  St.,  II,  98-108; 
ni  de  R.  C,  II,  140-141  ;  —  pourquoi  à  l'article  tormaig,  le 
silence  est  gardé  sur  K.  St.,  II,  44;  et  sur  R.  C,  VI,  149,  etc. 

Ce  qui  me  parait  surtout  singulier,  c'est  de  voir  dans  un 
nombre  considérable  de  cas  M.  A.  renvoyer  à  la  R.  C,  VI, 
c'est-à-dire  à  l'article  de  M.  Thurneysen  et  ne  rien  dire  des 
K.  St.  Pour  mon  goût,  je  préfère  de  beaucoup  le  mémoire  si 
judicieux  de  M.  Thurneysen  à  celui  de  M.  Zimmer  qui  mêle  à 
une  science  et  à  une  verve  incontestables  des  fantaisies  gram- 
maticales et  historiques  souvent  si  étranges,  mais  ce  n'est  pas 
une  raison  pour  refuser  de  rendre  justice  à  ce  savant.  Si,  une 
fée,  d'un  coup  de  baguette,  faisait  de  moi  un  jeune  homme  à 
marier,  changeait  M.  Zimmer  en  une  jeune  et  jolie  fille  pour 
me  l'offrir  en  mariage,  je  n'hésiterais  pas  un  instant  à  répondre 
par  un  refus  ;  mais  cela  ne  m'empêche  pas  de  constater  que 
dans  K.  St.,  II,  47-49,  air  mini  est  étudié  plus  complètement 
que  dans  la  R.  C,  VI  [136],  à  laquelle,  p.  533,  M.  A.  renvoie. 
Même  dans  les  cas  où  MM.  Zimmer  et  Thurneysen  ont  re- 
levé le  même  nombre  d'exemples  et  dans  ceux  où  M.  Thur- 
neysen a  la  supériorité,  il  me  semble  qu'à  la  place  de  M.  At- 
kinson  je  les  aurais  cités  tous  les  deux. 

Ces  quelques  critiques  ne  portent  que  sur  des  détails  acces- 
soires, et  il  ne  faut  pas  hésiter  à  féliciter  M.  Atkinson  de  son 


1 36  Bibliographie. 

intéressante  et  utile  publication.  Elle  rendra  grand  service  à 
bien  des  celtistes,  débutant  ou  non  ;  elle  sera  trouvée  bien 
commode  par  les  personnes  pour  lesquelles  les  traductions  al- 
lemandes de  M.  Windisch  sont  un  épouvantail.  Hélas  !  la 
vieille  maxime  est  toujours  vraie  :  graecum  est,  non  legiiur  :  et 
même  en  France  on  ne  dit  pas  cela  de  l'anglais. 

H.  d'Arbois  de  Jubain ville. 

Peredur  ab  Efrawc,  edited  with  a  glossary,-  by  Kuno  Meyer.  Leip- 
zig, Hirzel,  1887;  in-8,  iv-84  p. 

Ce  volume  se  compose  de  trois  parties  principales  :  le  texte, 
p.  1-39,  les  remarques  grammaticales  sur  le  texte,  p.  40-44, 
le  glossaire,  p.  45-82.  Il  contient  aussi  un  index  des  noms 
propres,  p.  83,  et  une  liste  de  corrections,  p.  84. 

Le  texte  publié  par  M.  Kuno  Meyer  est  établi  d'après  une 
collation,  faite  par  lui  en  1884,  du  manuscrit  original  avec 
l'édition  de  Lady  Guest.  Il  est  regrettable  que  M.  Kuno 
Meyer  n'ait  pu  profiter  à  temps  de  la  reproduction  du  livre 
rouge  d'Hergest  publiée  par  M.  Gwenogfryn  Evans.  M.  Kuno 
Meyer  a  dû  se  borner  à  donner  dans  sa  prélace  une  liste  de 
corrections  où  il  substitue  à  son  texte  les  leçons  de  l'édition 
de  M.  Gwenogfryn  Evans  quand  ces  leçons  ne  sont  pas  des 
fautes  manifestes  du  scribe.  Ainsi  dans  Peredur  (édition  Kuno 
Meyer,  p.  36,  1.  5),  la  reproduction  du  livre  rouge  porte 
chfranc  (éd.  Evans,  p.  238,  1.  20)  ;  ce  mot  a  été  corrigé  avec 
raison  en  chyfranc  par  M.  K.  M. 

Dans  les  remarques  grammaticales,  M.  Kuno  Meyer  relève 
soigneusement  les  différentes  notations  orthographiques  du 
même  son  qui  se  rencontrent  dans  le  texte,  et  signale  les  prin- 
cipales particularités  de  la  déclinaison  et  de  la  conjugaison.  Il 
donne  les  équivalents  en  gallois  moderne  des  tonnes  du  gal- 
lois moyen. 

Le  glossaire  est  la  partie  la  plus  intéressante  du  livre  de 
M.  Kuno  Meyer.  Les  mots  y  sont  relevés  avec  renvoi  aux 
passages  où  ils  se  trouvent.  L'étymologie  des  mots  est,  s'il  y 
a  lieu,  sommairement. indiquée.  L'irlandais  et  le  latin  tiennent 
la  première  place  parmi  les  langues  qui  donnent  lieu  à  d'in- 


Bibliographie.  1 37 

téressants  rapprochements.  Ces  rapprochements  sont  en  gé- 
néral exacts.  Nous  ferons  cependant  quelques  critiques  à 
l'auteur. 

P.  47.  M..  K.  M.  compare  l'irlandais  ansa,  v.  i.  anse  =  *an- 
asse  au  gallois  anaivdd  «  difficile  ».  Il  semble  bien  pourtant 
que  ces  deux  mots  n'aient  aucun  rapport  entre  eux.  L'irlandais 
asse  est  peut-être  parent  du  gothique  a%éts  par  lequel  on  ex- 
plique le  français  aisé.  Quant  au  mot  gallois,  faut-il  le  recon- 
naître dans  le  premier  terme  de  l'irlandais  sâd-aile  «  ease  »  ? 

P.  58,  au  mot  di-anc.  On  attendrait  pour  le  second  terme 
la  comparaison  avec  l'irlandais  icim,  parfait  anac.  Le  gallois 
anc  nous  offrirait  la  forme  faible  de  la  racine. 

P.  73.  Nés  «  plus  près  »  est  identique  à  l'irlandais  nessa 
auquel  M.  K.  M.  ne  renvoie  point. 

P.  59.  Au  mot  diwarnaivt  M.  Kuno  Meyer  ne  cite  point  le 
latin  diurnata,  participe  féminin  de  diurnare.  Il  est  pourtant 
intéressant  de  constater  que  le  mot  gallois  vient  du  latin  et 
n'est  point  emprunté  du  français  journée,  plus  anciennement 
joméde. 

P.  77.  De  même  M.  K.  M.  ne  dit  pas  que  le  gallois  ryfel 
est  vraisemblablement  emprunté  au  bas  latin  rebellum  ou  même 
à  l'adjectif  latin  classique  rebellis. 

P.  51.  Le  mot  cann  est  expliqué  par  le  latin  canere.  Il  est 
bien  difficile  de  ne  pas  considérer  comme  d'origine  celtique 
l'irlandais  canim  dont  M.  K.  M.  ne  dit  rien  et  qui  a  fourni 
de  nombreux  composés. 

P.  73.  Il  est  de  même  assez  invraisemblable  que  nos  soit  la 
transcription  galloise  du  latin  nox,  puisque  ce  mot  existe 
dans  les  autres  dialectes  celtiques.  L'irlandais  nocht  représen- 
terait un  cas  oblique  celtique  à  rapprocher  du  latin  noctem  et 
de  même  nos  représenterait  le  nominatif  celtique  qui  corres- 
pond au  nominatif  latin  nox.  On  trouve  le  cas  indirect  dans 
l'adverbe  composé  he-no  (p.  67)  dont  M.  K.  M.  n'a  pas  cité 
l'équivalent  irlandais  innocht. 

P.  72.  Enfin,  bien  que  M.  K.  M.  s'abstienne  de  citer  le 

breton  de  France,  il  peut  être  nécessaire  néanmoins  de  donner 

la  forme  armoricaine  quand  elle  est  mieux  conservée  que  la 

forme  galloise.  C'est  ainsi  qu'au  mot  mynydd  M.  K.  M.  aurait 

Revue  Celtique,  IX  9. 


1 38  Bibliographie. 

pu  citer  le  vieux  breton  monta  que  l'on  trouve  comme  second 
terme  du  composé  Win-monid  dans  une  charte  de  852  (Car- 
tulaire  de  Redon,  p.  367). 

Ces  critiques  ne  portent  en  général  que  sur  des  omissions 
d'importance  secondaire.  Le  livre  de  M.  Kuno  Meyer  est  une 
excellente  publication  qui  rendra  de  grands  services  aux  étu- 
diants et  contribuera  à  faciliter  l'étude  du  gallois  moyen. 

G.  D. 

History  of  Sligo  county  and  town  from  the  earliest  âges 
to  the  close  of  the  reign  oî  queen  Elisabeth,  by  W.-G.  Wood- 
Martix.  Dublin,  Hodges,  Figgis  and  Co.  1882.  in-8,  xiv-411  pages, 
avec  planches  et  cartes. 

Cet  ouvrage,  qui  nous  arrive  un  peu  tardivement,  est  écrit 
avec  talent.  On  le  lit  avec  plaisir.  Bien  que  l'auteur  soit  re- 
monté aux  sources,  il  a  composé  un  ouvrage  de  littérature 
plutôt  qu'un  livre  d'érudition.  A  la  page  153,  ce  savant  re- 
produit une  inscription  publiée  par  Miss  Margaret  Stokes, 
Christian  inscriptions  in  the  Irish  language,    t.    II,  p.    15,   et 

pi.  IX,    n°    17,    Omit  DO  MUREDACH   HU   ChOMOCAIM   —  HIC 

dormit.  «  Priez  pour  Muredach,  petit-fils  de  Comocan.  Il  dort 
ici  ».  M.  Wood  Martin  traduit  hù  Chomocain  «  petit-fils  de 
Comocan  »  par  «  grandson  of  Chomocain  ».  Les  lois  de  la 
grammaire  irlandaise  veulent  que  Comocan  soit  mis  au  génitif 
et  que  son  initiale  devienne  spirante  ;  mais  ces  lois  n'existent 
pas  en  anglais.  L'éminent  archéologue  n'est  pas  linguiste.  En 
m'envoyant  son  livre,  il  m'a  demandé  un  coup  de  scalpel,  le 
voilà. 

H.  D'A.  de  J. 


CHRONIQUE 


SOMMAIRE  :  I.  Les  Annales  de  Bretagne  ;  —  II.  Mort  de  M.  Charles  Robert;  —  III.  Mémoire 
de  M.  R.  Dareste  dans  le  Journal  des  Savants  sur  le  droit  irlandais;  —  IV.  Rapport  de  M.  Thur- 
neysen  sur  la  Philologie  Celtique;  —  V.  Hayne's  observations  ou  the  slate  ofïreland;  — VI.  The 
Celtic  Magasine  et  la  littérature  irlandaise  en  Ecosse  ;  —  VII.  Thèse  de  M.  Pluzanski  sur  Duns 
Scot;  —  VIII.  Le  Répertoire  de  bio-bibliographie  bretonne  de  M.  Kerviler  ;  —  IX.  La  société 
des  traditions  populaires  ;  —  X.  Le  tome  XIV  du  C.  I.  L.  et  l'étymologie  du  nom  d'Avenav 
(Marne)  ;  —  XI.  Le  dictionnaire  de  mythplogie  grecque  et  romaine  de  M.  Roscher  ;  —  XII.  L.: 
Deutsche  Altertumskunde  de  K.  Mùllenhoff;  —  XIII.  Le  livre  de  M.  Martins  Sarmento  sur  les  Argo- 
nautes ;  —  XIV.  Nouvelles  étymologies  celto-romanes  par  M.  Ascoli  ;  —  XV.  Etudes  de  M.  G. 
Paris  et  de  ses  élèves  sur  le  cycle  de  la  Table  Ronde  ;  —  XVI.  Une  œuvre  posthume  de 
M.  Richey  ;  —  XVII.  Les  noms  des  divinités  gauloises  du  midi  de  la  France  ;  —  XVIII.  Une 
thèse  de  doctorat  sur  les  Galates  ;  —  XIX.  La  Société  celtique  de  Montréal. 

I. 

Le  tome  II  des  Annales  de  Bretagne  publiées  par  la  Faculté  des  Lettres  de 
Rennes  (novembre  1886  à  juillet  1887)  contient  de  nombreux  articles  inté- 
ressant la  philologie  celtique  qui  sont  dus  pour  la  plupart  à  notre  savant 
collaborateur,  M.  Lolh. 

M.  Loth  avait  commencé  dans  le  tome  premier  des  Annales  de  Bretagne 
la  publication  d'une  chrestomathie  bretonne  (Armoricain,  Gallois,  Cor- 
nique)  ' .  Après  avoir  donné  dans  ce  volume  une  introduction  traitant  des 
changements  phonétiques  causés  par  le  déplacement  de  l'accent  en  breton, 
et  un  examen  des  principales  particularités  du  vieux  celtique  (gaulois  du 
continent  et  des  Iles-Britanniques),  M.  Loth  publie  dans  le  tome  II  les  plus 
importants  documents  écrits  en  vieil  armoricain  et  commence  l'étude  du 
breton  moyen  par  des  extraits  de  documents  antérieurs  au  XVe  siècle.  Les 
documents  du  vieil  armoricain,  outre  une  dizaine  d'inscriptions  lapidaires 
qui  ne  comprennent  guère  que  des  noms  propres  et  sont  pour  la  plupart 
d'une  lecture  douteuse,  comprennent  les  gloses  armoricaines  (p.  54-62);  la 
liste  alphabétique  des  principaux  noms  bretons  contenus  dans  les  vies  des 
saints  (p.  227-234)  et  dans  les  chartes    p.  234-254,  378-436). 

M.  Loth  ne  donne  dans  sa  Chrestomathie  que  les  plus  importantes  des 
gloses  et  celles  dont  la  lecture  ou  le  sens  ne  sont  point  douteux.  La  liste 
des  noms  contenus  dans  les  vies  des  saints  et  dans  les  chartes  est  d'une  im- 
portance considérable  pour  nos  études.  Elle  rectifie  sur  un  grand  nombre  de 
points  des  leçons  fausses  ou  des  lectures  mauvaises.  Les  vies  des  saints  qui 
ont  servi  de  base  à  ce  travail  sont,  par  ordre  chronologique,  celles  de  saint 
Samson,  saint  Paul-Aurélien  (Revue  Celtique,  V,  413),  saint  Winwaloe, 
saint  Ninnoc,  saint  Gildas,  saint  Brieuc. 

1 .    Voir  Revue  Celtique,  t.  VII,  pp.  285,  449. 


140  Chronique. 

Les  chartes  consultées  sont  celles  du  Cartulaire  de  Redon  et  du  Cartulaire 
de  Landévennec.  M.  Loth  a  mis  aussi  à  profit  une  charte  originale  du 
xi<=  siècle  publiée  par  M.  de  la  Borderie  dans  les  Mémoires  de  la  Société  ar- 
chéologique d'IUe-et-V Haine,  t.  XVII,  1885,  p.  17-19.  M.  Loth  a  collationné 
le  Cartulaire  de  Redon  et  nous  fournit  de  nombreuses  et  utiles  corrections  au 
texte  de  l'édition  donnée  par  M.  de  Courson.  C'est  ainsi  qu'il  lit  Halanau 
dérivé  de  Alan  (p.  237)  le  nom  écrit  à  tort  Balandu  par  M.  de  Courson 
Les  erreurs  de  ce  genre  sont  fort  nombreuses  dans  l'édition  de  Courson,  et 
nous  devons  savoir  gré  à  M.  Loth  de  nous  donner  un  texte  sûr  pour  les 
mots  bretons  du  Cartulaire  de  Redon,  en  attendant  que  nous  possédions 
une  édition  correcte  de  ce  document. 

Jusqu'au  xve  siècle,  l'armoricain  moyen  n'a  d'autres  monuments  que  des 
chartes.  Les  mots  publiés  par  M.  Loth  (p.  516-570)  sont  tirés:  1"  du  Car- 
tulaire de  Quimperlé  (xne-xinc  siècles)  ;  2"  des  trois  Cartulaires  de  Quimper 
(xinc  et  xive  siècles)  ;  3°  du  Cartulaire  de  l'abbaye  de  Prières  (xme  siècle)  ; 
enfin  de  différents  autres  recueils  appartenant  soit  à  des  particuliers,  soit  à 
des  églises,  et  du  Dictionnaire  topographique  du  département  du  Morbihan,  par 
M.  Rosenzweig. 

Outre  la  Chresloniathie  de  M.  Loth,  les  Annales  de  Bretagne  contiennent  en- 
core quelques  articles  de  philologie  bretonne.  M.  Loth  donne  (p.  255)  un 
extrait  d'un  poème  inédit  en  moyen  breton,  qui  est  actuellement  possédé 
par  Mesdemoiselles  de  Kerdanet,  et  dont  l'existence  a  été  signalée  par  M.  de 
la  Villemarqué.  Voici  le  titre  exact  de  ce  poème  :  Le  mirover  de  la  mort,  eu 
breton,  auquel  doctement  et  dcuotement  est  trecté  des  quatre  fins  de  l'home  :  c'est  à 
scauoyr  de  la  mort,  du  dernier  jugement,  du  iressacre  Paradis  et  de  l'horible 
prison  de  l'Enfer  et  ses  infinis  Tourments. 

En  Maru,  en  Barn,  en  Iffern  yen 
Preder  map  den,  ha  na  enoe  ; 
Ha  nepret  nep  lech  ne  pechy, 
Gant  lacquat  da  spy  en  ty  Doe. 

Imprimet  e  S.  Frances  Cuburien  1575. 

Ce  livre  a  été  composé  en  l'an  1 5 19  par  maître  Jehan  le  vieil  archer  de  la 
paroisse  de  Ploegonuen.  Espérons  que  bientôt  le  livre  entier,  qui  compte 
environ  3360  vers,  pourra  être  reproduit.  En  attendant,  M.  Ernaulta  pu  le 
mettre  à  profit  pour  son  Dictionnaire  étymologique  du  moyen  breton. 

Ajoutons  que  les  Annales  de  Bretagne  ont  donné  (p.  63)  quelques  chan- 
sons bretonnes  inédites  communiquées  par  MM.  Luzel  et  Loth.  Enfin,  à  la 
page  299,  commence  la  publication  des  lettres  celtiques  de  M.  Hugo  Sehu- 
chardt  traduites  en  français  par  M.  J.  Firmery.  G.  Dottin. 

II 

Au  moment  de  mettre  sous  presse,  nous  apprenons  avec  douleur  la  mort 
de  notre  savant  collaborateur,  M.  Charles  Robert.  Néà  Bar-le-Duc  en  181 2, 


Chronique.  141 

il  fut  admis  à  l'Ecole  Polytechnique,  devint  officier  du  génie,  professeur  à 
l'Ecole  d'application  de  l'artillerie  et  du  génie  de  Metz,  puis  passa  dans 
l'intendance  où  il  termina  sa  carrière  militaire  en  qualité  d'inspecteur  général 
après  avoir  été  intendant  en  chef  de  l'armée  de  la  Loire  en  1871.  Les  ins- 
criptions romaines  et  la  numismatique  furent  d'abord  pour  lui  un  sujet  de 
distraction,  plus  tard  elles  devinrent  son  occupation  principale  et  lui  ouvri- 
rent les  portes  de  l'Académie  des  Inscriptions.  Nous  signalerons,  dans  l'ordre 
de  nos  études,  son  Epigraphie  romaine  de  la  Moselle,  un  volume  in-4  dont  la 
dernière  livraison  est  sous  presse  ;  son  Mémoire  sur  les  inscriptions  de  Bor- 
deaux renfermant  des  noms  gaulois  {Bulletin  épigraphique,  t.  I,  p.  149);  ses 
dissertations  intitulées  Sirona  (Revue  Celtique,  t.  IV,  p.  133,  cf.  pp.  265, 
479),  et  L'inscription  de  Voltino  et  ses  interprétations  (Ibid.,  t.  VII,  p.  436). 
M.  Robert  apportait  dans  ses  travaux  archéologiques  la  haute  intelligence 
et  le  sens  droit  qui,  dans  une  carrière  bien  différente,  l'avaient  élevé  au  plus 
haut  degré  de  la  hiérarchie.  Il  est  mort  subitement  à  Paris  le  1  $  dé- 
cembre 1887. 

III. 

M.  R.  Dareste,  conseiller  à  la  Cour  de  Cassation  et  membre  de  l'Aca- 
démie des  Sciences  Morales  et  Politiques,  publiedepuis  1878  dans  le  Journal 
des  Savants  une  série  d'articles  fort  remarquables  consacrés  à  l'exposition 
des  caractères  les  plus  saillants  que  nous  offrent  les  anciennes  législations 
de  divers  peuples.  Il  a  d'abord  traité  du  droit  criminel  athénien,  1878,  puis 
des  anciennes  lois  suédoises,  1880;  des  anciennes  lois  du  Danemark,  de  la 
Norvège,  de  l'Islande,  1881  ;  du  code  musulman,  1882;  des  papyrus  gréco- 
égyptiens,  de  la  loi  salique,  1883  ;  des  anciens  codes  brahmaniques,  du 
code  rabbinique,  1884  ;  des  anciennes  lois  des  Slaves,  1885-1886;  de  celles 
des  Arméniens,  des  Géorgiens,  des  Ossétes,  et  enfin  des  Irlandais,  en  1887. 
De  ce  dernier  mémoire,  nous  extrayons  le  passage  suivant  : 

«  Un  des  traités  les  plus  importants  de  tout  ce  recueil  [des  Anciennes 
lois  de  l'Irlande]  ...  est  celui  des  divisions  de  la  famille  ou,  si  l'on  veut, 
des  degrés  de  parenté  '  ■ 

«  En  le  combinant  avec  quelques  données  fournies  par  le  livre  d'Aicill, 
on  peut  se  faire  une  idée  delà  famille  irlandaise.  Au  premier  abord  la  chose 
paraît  assez  difficile,  et  les  savants  anglais  et  américains  qui  ont  abordé  la 
question,  M.  Sumner  Maine,  M.  Mac  Lennan,  M.  Sullivan,  ont  donné  des 
explications  différentes  et  peu  satisfaisantes.  Leur  tort  commun  consiste, 
selon  nous,  en  ce  qu'ils  ont  cherché  une  création  originale  dans  une  insti- 
tution qui  est  évidemment  empruntée  au  droit  canonique  et  qui  ressemble 
aux  institutions  analogues  des  autres  branches  de  la  race  indo-européenne. 
Elle  consiste  en  ceci  :  la  parenté,  en  Irlande,  comprend  dix-sept  personnes 
qui  forment  quatre  groupes.  Le  premier,  composé  de  cinq  personnes,  s'ap- 
pelle geiljine,  c'est-à-dire  la  parenté  de  la  main  ;  le  second,  derbhfine,  com- 


1.   Ancient  laivs  of  Ireland,  t.  IV,  p.  282-293. 


142  Chronique. 

prend  quatre  personnes.  Il  en  est  de  même  du  troisième,  iarfine,  et  du  qua- 
trième et  dernier,  indfine.  Chacun  de  ces  trois  derniers  groupes  répond  à 
l'une  des  phalanges  des  quatre  doigts  (le  pouce  excepté).  Au  delà  la  pa- 
renté cesse...  Le  texte  ajoute  que  le  premier  groupe  de  la  parenté,  geilfine, 
comprend  les  plus  jeunes,  et  que  le  dernier  groupe,  indfine,  se  compose  des 
plus  âgés.  Cette  constitution  de  la  famille  sert  de  base  à  l'attribution  des 
droits  de  succession  et  à  la  répartition  du  prix  du  sang. 

«  Reste  à  expliquer  le  système.  Les  savants  anglais  qui  ont  abordé  le  pro- 
blème sont  tous  partis  de  cette  supposition  que  les  dix-sept  personnes  dont 
parle  le  texte  sont  dix-sept  individus,  supposition  qui  paraît,  au  surplus, 
avoir  été  admise  par  la  glose.  Mais  c'est  là  une  erreur  fondamentale,  qui 
conduit  aux  conséquences  les  plus  extravagantes.  En  effet,  si  chaque  groupe 
ne  peut  se  composer  que  d'un  nombre  fixe  d'individus,  il  faut  admettre  que 
la  survenance  d'un  nouvel  individu  dans  un  des  groupes  fait  reculer  dans  le 
groupe  ultérieur  l'individu  qui  se  trouve  désormais  en  trop.  La  parenté  se 
trouverait  ainsi  dans  une  incertitude  et  une  fluctuation  perpétuelles.  Com- 
ment n'a-t-on  pas  vu  que  le  mot  personne  a  un  sens  abstrait,  et  signifie 
tous  les  individus,  quel  qu'en  soit  le  nombre,  qui  sont  désignés  sous  un 
même  nom  dans  le  tableau  de  la  parenté?  Ainsi  le  fils  est  une  personne,  le 
frère  en  est  une  autre.  Peu  importe  le  nombre  des  frères  ou  des  fils.  C'est, 
au  surplus,  le  langage  du  droit  romain,  qui  comptait  quatre  personnes  au 
premier  degré,  douze  au  second,  trente-deux  au  troisième,  quatre-vingts  au 
quatrième,  cent  quatre-vingt-quatre  au  cinquième,  quatre  cent  quarante- 
huit  au  sixième,  et  enfin  mille  vingt-quatre  au  septième.  Le  jurisconsulte 
Paul,  qui  nous  donne  ces  calculs,  nous  montre  bien  que  chaque  personne 
peut  se  composer  de  plusieurs  individus.  «  Primo  gradu  cognationis  »,  dit- 
il,  «  sunt  susum  versum  duo,  pater  et  irater,  deorsum  versum  duo,  filius 
et  filia  :  qui  tamen  et  plures  esse  possunt  '  ». 

«  De  tout  temps  on  a  cherché  à  se  représenter  la  parenté  d'une  manière 
sensible,  en  la  comparant  aux  membres  du  corps  humain.  Chez  les  Ro- 
mains, on  considérait  le  corps  entier.  Dans  le  miroir  de  Souabe,  comme 
dans  le  droit  irlandais,  c'est  le  bras  et  la  main  jusqu'à  l'ongle  qui  servent 
de  type. 

«  Cela  posé,  il  n'est  pas  très  difficile  de  reconstruire  tout  le  système  ir- 
landais. Chacun  des  quatre  groupes  répond  à  ce  qu'on  appelait,  au  moyen 
âge  et  en  droit  canonique,  une  parentèle,  parentiïla.  Le  premier  groupe 
comprend,  outre  le  de  cujus,  quatre  descendants  en  ligne  directe,  à  sa\oir 
le  fils,  le  petit-fils,  l'arrière-petit-fils  et  le  fils  de  l'arrière  petit-fils.  Le  second 
groupe  comprend  le  père,  le  frère,  le  fils  du  frère  et  le  petit-fils  du  frère,  le 
troisième  groupe  comprend  l'aïeul,  l'oncle,  le  fils  et  le  petit-fils  de  l'oncle. 
Enfin  le  quatrième  groupe  se  compose  du  bisaïeul,  du  grand-oncle,  du  fils 
et  du  petit-fils  de  ce   dernier.   Ces  quatre  groupes  s'emboîtent  en  quelque 


i.    L.  io,  §  12.  au  Digeste,   livre  XXXVIII.  titre  X,  De  gradibus  et  ad- 
finibus  et  nominibus  corum. 


Chronique.  143 

sorte    l'un  dans  l'autre,    et  le  premier  comprend  effectivement   les  plus 
jeunes,  le  dernier  des  plus  âgés. 

«  Il  ne  s'agit,  bien  entendu,  que  de  l'agnation,  c'est-à-dire  de  la  parenté 
par  les  mâles.  » 

IV. 

Les  Transactions  delà  PUlological  Society  pour  1885-1886  contiennent, 
p.  3 s 6 - 3 9 3 ,  unfort  intéressant  bien  que  trop  court  rapport  de  M.  R.  Thur- 
neysen  sur  les  travaux  concernant  la  philologie  celtique  qui  ont  paru  de 
1880  à  1886.  Le  savant  auteur  constate  comme  nous  qu'en  dépit  des  vio- 
lentes attaques  de  M  H.  Zimmer,  le  glossaire  de  M.  E.  Windisch  dans  ses 
Irische  Texte  occupe  le  premier  rang,  parmi  les  travaux  lexicographiques 
"dont  l'irlandais  a  été  l'objet.  Contrairement  à  l'opinion  de  M.  Zimmer,  qui 
considère  la  versification  irlandaise  comme  un  héritage  indo-européen, 
M.  Thurneysen  maintient  que  cette  versification  tire  son  origine  de  la  versi- 
fication populaire  latine  dont  le  type  nous  est  donné  par  le  vers  célèbre  : 

Caesar  Gallias  subégit,  Nicomedes  Caésarem  '. 

On  sait  que  les  grammairiens  ont  cru  reconnaître  dans  ce  vers  le  tétra- 
mètre  catalectique  trochaïque  des  Grecs  2.  On  regrette  que  le  savant  profes- 
seur ne  songe  pas  à  nous  donner  l'étude  annoncée  par  lui  sur  les  Amra  qui 
sont  probablement  le  dernier  vestige  d'une  versification  irlandaise  indépen- 
dante de  la  versification  latine  ;. 

Nous  avons  lu  avec  plaisir  l'éloge  donné  par  M.  Thurneysen  à  l'étude  de 
notre  savant  collaborateur,  M.  Gaidoz,  surle  Dieu  gaulois  du  Soleil;  notre 
devoir  est  d'ajouter  que  dans  cet  écrit,  suivant  l'érudit  professeur  allemand, 
l'ancien  directeur  de  la  Revue  Celtique  a  marché  sur  un  terrain  plus  solide 
que  ne  l'a  fait  le  directeur  actuel  dans  son  livre  intitulé  :  Le  Cycle  mytholo- 
gique irlandais. 


Dans  the  Irish  ecclesiastical  Record,  numéro  de  décembre  1887,  le  révérend 
E.  Hogan,  S.  J..  a  publié  le  commencement  d'un  document  très  intéressant 
pour  l'histoire  de  l'Irlande  :  Hayne' s  observation:  on  the  state  of  Ireland  in  1600. 
L'auteur  de  ce  document  prétend  qu'une  des  causes  de  la  situation  déplo- 
rable où  se  trouve  l'Irlande  A  l'époque  où  il  écrit  est  le  respect  des  Ir- 
landais pour  la  loi  des  Brehons.  Ainsi  :  lorsqu'un  meurtre  est  commis,  un 
brehon  intervient,  fait  payer  par  le  meurtrier  une  certaine  somme  aux  pa- 
rents du  mort,  et  moyennant  cela,  le  meurtre  reste  impuni  ;  les  dignités. 

1 .  Havet  et  Duvau,  Cours  élémentaire  de  métrique  grecque  et  latine,  2e  édi- 
tion, p.  88-89,  et  180,  §  80,  178. 

2.  Suétone.  Divus  Julius,  49. 

3 .  Revue  Celtique,  VI,  347.  je  connais  trois  Amra,  celui  de  Columba  et 
celui  de  Senan,  tous  deux  publiés,  celui  de  Cûroi  qui  est  inédit. 


144  Chronique. 

héréditaires  ailleurs,  sont  électives,  le  détenteur  à  vie  ne  peut  les  transmettre 
à  ses  héritiers  et  les  successeurs  ne  se  considèrent  pas  comme  liés  par  les 
engagements  que  leurs  prédécesseurs  ont  pris^p.  1114)  ;  le  chef  de  famille 
est  responsable  de  tous  les  crimes  commis  par  les  membres  de  la  famille 
(p.  1 120).  On  savait  bien  déjà  que  la  loi  des  Brehons  était  encore  appliquée 
en  Irlande,  malgré  les  Anglais,  au  commencement  du  XVIIe  siècle,  mais 
les  documents  qui  établissent  la  persistance  de  cette  vieille  législation  dans 
les  temps  modernes  seront  toujours  lus  avec  intérêt. 

Hayne  croyait  que  la  loi  des  Brehons  n'était  pas  écrite  et  qu'elle  se  trans- 
mettait exclusivement  par  tradition.-  Suivant  lui,  elle  avait  quelquefois 
une  grande  apparence  d'équité  ;  mais  en  beaucoup  de  choses,  ajoute-t-il, 
elle  ne  s'accorde  ni  avec  la  loi  divine,  ni  avec  la  loi  humaine. 

Une  des  observations  les  plus  curieuses  de  Hayne  est  que  les  Irlandais 
avaient  coutume  de  jurer  par  leurs  épées  «  they  sweare  by  their  Swordes  » 
(p.  1121).  Cet  usage  est  très  ancien  et  il  explique  le  passage  du  Serglige 
Conculainn,  §  2,  chez  Windisch,  Irische  Texte,  t.  I,  p.  206,  1.  1-2,  où  on 
voit  l'épée  des  Irlandais  qui  mentent  se  tourner  contre  eux.  Ces  menteurs 
ont  juré  sur  leur  épée,  quoique  le  texte  n'en  dise  rien.  Les  anciens  Ger- 
mains juraient  l'épée  à  la  main  ou  sur  leur  épée  :  J.  Grimm,  Deutsche  Rechts- 
allerthûmcr  (Einl.,  chap.  IV,  §  U  1;  1.  VI,  t.  VII,  §  C,  3  ;  deuxième  édi- 
tion, p.  166,  896)  a  réuni  un  certain  nombre  de  textes  sur  ce  sujet  si  curieux. 

VI. 

Nous  avons  sous  les  yeux  les  livraisons  du  Celtic  Magasine  de  novembre 
et  décembre  1887  et  de  janvier  1888.  Cette  revue  continue  à  être  fort  inté- 
ressante, et  ce  qui  nous  semble  avoir  surtout  une  grande  valeur,  c'est  l'étude 
commencée  par  le  directeur,  M.  Alex.  Macbain,  sur  la  littérature  épique  ir- 
landaise en  Ecosse.  Le  titre  adopté  par  lui  est  :  The  hero  taies  ofthe  Gael  (p.  1-7, 
69-77,  129-138).  Le  savant  auteur  constate  que  jusqu'à  la  Réforme,  au 
xvie  siècle,  les  Irlandais  et  les  Gaëls  d'Ecosse  ne  formaient  au  point  de  vue 
littéraire  qu'une  seule  nation,  dont  la  Réforme  a  détruit  l'unité.  Le  centre 
était  en  Irlande.  C'était  en  Irlande  que  les  poèmes  épiques  étaient  composés 
et  écrits.  C'était  d'Irlande  que  les  trouvères  néo-celtes  apportaient  dans  les 
High'ands  de  l'Ecosse  leurs  récits,  leurs  chants  et  leurs  manuscrits.  Le  der- 
nier de  ces  poètes  nomades  a  été  Aonghus  nan  aoir  qui  vivait  dans  la  se- 
conde moitié  du  xvi'  siècle.  Depuis  lors,  l'Ecosse  est  restée  étrangère  au 
mouvement  littéraire  irlandais.  Ainsi  des  trois  histoires  tristes  qui,  dans  la 
littérature  irlandaise  moderne,  forment  une  sorte  de  trilogie  :  la  mort  des 
fils  d'Usnech  (autrement  dit  mort  de  Derdriu).  la  mort  des  fils  de  Ler,  et  la 
mort  des  fils  de  Tuirend,  la  première  seule  a  pénétré  en  Ecosse.  M.  Alexander 
Macbain  donne  de  la  première  de  ces  compositions  une  rédaction  recueillie 
dans  la  tradition  orale  gaélique  d'Ecosse  ;  un  point  curieux  à  établir  serait 
de  déterminer  d'une  façon  précise  quelle  relation  existe  entre  le  texte  écrit 
et  la  version  orale.  Le  conteur  avait-il  lu  le  texte  écrit  ?  ou  tenait-il  sa  re- 
lation de  quelqu'un  qui  l'avait  lu  ?  —  ou  y  a-t-il  entre  le  narrateur  et  le 
texte  écrit  un  nombre  plus  considérable  d'intermédiaires  ? 


Chronique.  14$ 


VII. 

M.  Pluzanski,  professeur  de  philosophie  au  lycée  de  Rennes,  a  soutenu 
avec  succès  devant  la  Faculté  des  lettres  de  Paris,  il  y  a  quelques  mois,  une 
thèse  sur  les  doctrines  d'un  philosophe  qui  a  eu  au  moyen  âge  une 
grande  célébrité.  Il  s'agit  de  Duns  Scot  mort  à  Cologne  le  8  novembre  1 308. 
Harris,  The  history  of  the  writers  qf  Ireland,  Dublin,  1764,  p.  78-81,  le  place 
dans  sa  liste  des  écrivains  irlandais  ;  Alfred  Webb  le  mentionne  dans  son 
Compendium  of Irish  Biography.  Mais  ni  l'un  ni  l'autre  ne  peuvent  dire  avec 
certitude  où  il  est  né.  M.  Pluzanski  n'a  pas  davantage  éclairci  la  question  1. 

VIII. 

M.  René  Kerviler  fait  paraître  à  Rennes,  librairie  générale  de  J.  Plihon 
et  L.  Hervé,  un  répertoire  général  de  bio-bibliographie  bretonne  qui  sera 
beaucoup  plus  complet  que  la  biographie  bretonne  de  M.  Levot.  La  lettre  A 
forme  un  volume  in-8  de  417  pages  qui  a  paru  en  trois  fascicules;  le  der- 
nier de  ces  fascicules  comprend,  outre  la  fin  de  la  lettre  A,  les  cent  douze 
premières  pages  de  la  lettre  B. 

IX. 

La  Société  des  traditions  populaires  a  publié  un  annuaire  pour  1887  dans 
lequel  nous  trouvons  deux  contes  bretons  :  Le  cimetière  des  saints,  p.  20 
(Sauvé);  La  princesse  enchantée,  p.  53  (Luzel).  De  la  revue  publiée  par 
la  même  société,  il  a  déjà  été  question  dans  le  tome  VIII  de  la  Revue  Cel- 
tique, p.  190.  Nous  nous  arrêtions  au  numéro  de  mars  1887.  Dans  les 
numéros  suivants,  nous  signalerons  :  Jeanne  Cotjc,  légende  de  la  Basse-Bre- 
tagne (Sauvé),  p.  267  ;  Payer  le  tribut  à  César,  conte  breton  (Luzel),  p.  346; 
quatre  chansons  bretonnes  publiées  par  l'abbé  Abgrall,  p.  3 10-3 11,  397- 
599  ;  une  étude  sur  les  héros  d'Ossian  par  Loys  Brueyre,  p.  385-396, 
444-45  5- 

X. 

En  attendant  que  nous  voyions  enfin  paraître  les  tomes  du  Corpus  ins- 
criptionuui  latinarum  relatifs  à  la  Gaule,  les  savants  éditeurs,  pour  nous 
faire  prendre  patience,  nous  ont  mis  entre  les  mains  le  tome  XIV  qui  con- 
tient les  inscriptions  du  Latium.  Je  signalerai,  parmi  les  gentilices  réunis  dans 
l'index,  Abenna  ;  ce  n'est  pas  que  je  considère  ce  mot  comme  celtique;  mais 
dans  le  tome  VIII  de  la  R.  C. ,  p.  393 ,  j'ai  parlé  du  nom  de  lieu  écrit  Avenna- 
cum  au  ixe  et  au  xe  siècle,  aujourd'hui  Avenay,  Marne,  et  je  l'ai  rattaché  à  une 
variante  hypothétique  Avennus  d'Avenus  ou  d'Avena  (Corpus  inscript ionum 


1.  La  thèse  de  M.  Pluzanski  a  paru  à  Paris,  chez  Thorin,  sous  ce  titre: 
Essai  sur  la  philosophie  de  Duns  Scot,  1887,  in-8,  296  pages. 


1 46  Chronique. 

latinarum,  IX,  2379  ;  V,  33S2).  Avennaoum peut  s'expliquer  tout  aussi  bien 
par  Abenna,  XIV,  331 1. 

XI. 

Le  dictionnaire  de  mythologie  grecque  et  romaine  (Ausfûhrliches  Lexicon 
der  griechischen  und  rœmischen  Mythologie,  qui  se  publie  à  Leipzig  chezTeub- 
ner,  sous  la  direction  de  M.  W.-H.  Roscher,  vient  d'atteindre  sa  douzième 
livraison  et  sa  colonne  2 112  avec  l'article  Hera.  Dans  ce  savant  recueil  on 
n'a  pas  négligé  les  divinités  celtiques.  Nous  citerons  par  exemple  les  articles 
Belatucader,  Bikinis  (col.  7  >  5)  ;  Bdisama  (col.  757);  Camulus  (col.  850); 
Cemunnos  (col.  866);  Esus  (col.  1386). 

XII. 

M.  Max  Rcediger  vient  de  faire  paraître  à  la  librairie  Weidmann,  de 
Berlin,  le  second  volume  de  la  Deutsche  Altertumskunde,  de  feu  K.  Mùllenhoft, 
dont  le  premier  volume  avait  été  mis  en  vente  dès  1870.  Ces  deux  volumes 
nous  donnent,  malgré  leur  titre,  beaucoup  plus  de  renseignements  préc<ssur 
l'histoire  des  Gaulois  que  sur  celle  des  Germains.  On  y  trouve  peut-être 
l'étude  la  plus  approfondie  qui  ait  été  faite  jusqu'ici  de  la  plupart  des  textes 
historiques  les  plus  anciens  relatifs  à  la  race  celtique. 

XIII. 

M.  F.  Martins  Sarmento.  auquel  on  doit  une  étude  sur  la  partie  de  YOra 
maritima  de  Festus  Avienus  qui  concerne  la  Gallice  et  le  Portugal  ',  vient 
de  publier  sous  le  titre  de  :  Os  Argonautas  subsidios  para  antigua  historia  do 
Occidente,  un  volume  in-8  de  xxxi-292  pages,  consacré  à  des  études  géo- 
graphiques sur  les  dixième  et  onzième  travaux  d'Hercule  (Géryon  et  les 
pommes  des  Hespérides),  sur  les  voyages  d'Ulysse  et  sur  l'expédition  des 
Argonautes.  Le  onzième  chapitre  de  cet  ouvrage  :  O  occidente  no  tempo 
dos  Argonautas  ;  questôes  ethnographicas  ;  et  le  douzième  :  A  civiliçao  do 
Occidente  no  tempo  dos  Argonautas,  traitent  un  sujet  très  intéressant  qui 
est  inséparable  de  la  plus  ancienne  histoire  des  Celtes. 

XIV. 

Dans  la  dernière  livraison  de  son  Archivio  gbttoîogico  (t.  X,  p.  270-273), 
M.  Ascoli  propose  d'expliquer  les  mots  français  :  «  glaive  et  orteil  »  en  leur 
supposant  une  origine  gauloise.  Les  mots  gaulois  d'où  ils  viendraient  se- 
raient ceux  dont  la  forme  en  vieil  irlandais  est  claideb,  orddu  =  or  tu. 
Claideb  traduit  gladiitm,  dans  le  ms.  de  Wurzbourg,  fol.  6  a,  glose  13  (éd. 
"Whitley   Stokes,   p.  31).    Orddu  lâtnae,  littéralement  «  gros  doigt  de  la 

1 .  R.  Festus  Avienus,  Ora  maritima...  Estudo  deste  poema  na  parte  res- 
pectiva  a  Galliza  e  Portugal.  Porto,  Antonio  José  da  Silva  Teixeira,  1880, 
in-8,  93  pages  et  une  carte. 


Chronique.  1 47 

main  »  est  la  traduction  de  poîlex  dans  le  Priscien  de  Saint-Gall,  fol.  68  b, 
glose  13,  édition  donnée  par  M.  Ascoli,  p.  62  '.  D'après  le  même  savant 
(Arch.  glottologico,  t.  X,  p.  260-269)  le  type  gallo-romain  «  seuv  »  =r  sêbo, 
«  suif  »,  que  les  Gaulois  auraient  prononcé  sèbu,  serait  dû  à  l'influence 
d'une  loi  phonétique  celtique,  celle  qui  donne  à  l'irlandais  binr  —  beru  ;  au- 
trement dit:  seuv  est  à  stbu  comme  biur  à  beru. 


XV. 

La  Société  des  anciens  textes  français  vient  de  publier  sous  la  date  de  1886 
une  rédaction  en  prose  du  roman  de  Merlin  composé  au  début  du  xme  siècle 
par  Robert  de  Boron  et  une  suite  à  ce  roman*  d'après  un  ms.  inédit  2.  Les 
éditeurs  sont  MM.  G.  Paris  et  Jacob  Ulrich.  L'introduction,  datée  du 
14  juillet  1887,  est  signée  G.  Paris  ;  elle  intéressera  vivement  ceux  qui  dé- 
sirent savoir  quelle  est  l'origine  des  fictions  qui  composent  le  cycle  de  la 
Table  Ronde.  C'est  un  complément  aux  savantes  études  sur  les  romans  de  la 
Table  Ronde  que  M.  G.  Paris  et  plusieurs  de  ses  élèves  ont  publiées  dans  le 
tome  XV  de  la  Remania,  p.  1-24,  481-602,  en  1887,  sous  la  date  fictive  de 
1886,  imaginée  sans  doute  pour  consoler  tous  les  éditeurs  des  revues  qui 
paraissent  avec  un  retard. 

XVI. 

M.  Alexander  George  Richey,  professeur  de  droit  féodal  et  de  loi  anglaise 
à  l'Université  de  Dublin  est  mort  dernièrement.  Il  avait  été  chargé  de  la  pu- 
blication des  anciennes  lois  irlandaises  ;  il  partage  avec  Th.  O'Mahony  la 
responsabilité  des  tomes  III  et  IV. 

Nous  venons  de  recevoir  un  volume  qui  sera  pour  M.  Richey  un  meilleur 
titre  à  la  renommée.  Ce  volume  est  intitulé  :  A  short  history  ofthe  Irish pcople 
dùiun  to  the  date  oj "the plantation  of  Ulster  3.  Sa  publication  est  due  aux  soins 
pieux  de  M.  Robert  Romney  Kane,  élève  de  l'auteur  défunt.  Les  cinq  pre- 
miers chapitres  qui  traitent  de  l'histoire  d'Irlande  depuis  les  temps  les  plus 
anciens  jusqu'à  l'invasion  anglo-normande  (p.  4-125),  manquent  un  peu 
d'originalité;  mais  des  dernières  années  du  XIIe  siècle  au  commencement  du 
xviie  où  le  récit  se  termine  (p.  126-619),  M.  Richey  marche  sur  un  terrain 
qu'il  connaît  bien  ;  le  professeur  de  droit  féodal  et  anglais  expose  avec  talent 
l'histoire  de  la  législation  oppressive  qu'il  était  chargé  d'enseigner,  mais 
dont  l'iniquité  froissait  sa  conscience  d'honnête  homme  et  sa  loyauté  de 
jurisconsulte. 

1 .  Le  renvoi  donné  par  la  Gr.  C*.,  p.  765,  est  inexact. 

2.  Merlin,  roman  en  prose  du  xiiic  siècle,  publié  avec  la  mise  en  prose 
du  poème  de  Merlin  par  Robert  de  Boron  d'après  le  ms.  appartenant  à 
M.  Alfred  H.  Huth  par  Gaston  Paris  et  Jacob  Ulrich,  deux  volumes  in-8  de 
xci-280  et  308  pages. 

3.  Un  volume  in-8  de  x-623  pages  chez  Longmans,  Green  and  Co., 
Londres. 


148  Chronique. 


XVII. 

Les  cinq  dernières  livraisons  (janvier-décembre  1887)  de  la  Revue  èpigra- 

phiquc  du  midi  de  la  France,  publiée  à  Lyon  par  M.  Allmer,  contiennent  une 
liste  de  noms  de  divinités  celtiques  relevés  dans  les  inscriptions  de  la  France 
méridionale  (p.  262-264,  284-286,  298-299,  316-320,  337-338).  Cette  liste 
comprend  soixante-quinze  noms,  la  plupart  géographiques  ;  plusieurs  étaient 
peu  connus  jusqu'ici.  Ce  travail  sera  continué. 

XVIII. 

Le  17  janvier,  M.  Hendrik  van  Gelder  soutiendra  à  l'Université  d'Ams- 
terdam une  thèse  de  doctorat  sur  l'histoire  des  Galates  en  Grèce  et  en  Asie 
jusqu'au  milieu  du  second  siècle  avant  J.-C.  Cette  thèse,  rédigée  en  latin, 
est  un  volume  in-octavo  de  303  pages.  L'auteur  connaît  les  sources  et  n'a 
pas  négligé  l'étude  des  livres  modernes  où  son  sujet  a  été  traité. 

XIX. 

Il  s'est  formé  à  Montréal  au  Canada,  en  1883,  une  société  celtique  qui 
paraît  considérable,  à  en  juger  par  le  nombre  de  ses  fonctionnaires;  elle  en 
a  quatorze  ;  la  liste  commence  par  le  président  honoraire  qui  n'est  rien 
moins  qu'un  ancien  gouverneur  de  l'Ontario  et  elle  finit  par  le  barde.  Cette 
savante  compagnie  vient  de  publier  un  recueil  des  principaux  mémoires  lus 
en  ses  séances  pendant  les  deux  années  1884-1883  et  18S5-1 886  :  ils  for- 
ment un  volume  de  231  pages,  dont  139  sont  dues  à  la  plume  du  professeur 
Campbell.  Ce  docte  personnage  a  découvert  que  le  célèbre  texte  ombrien 
des  Tables  Eugubines  s'explique  très  facilement  par  l'irlandais  moderne,  que 
les  Khéta  des  bords  de  l'Oronte  sont  des  Ibères,  c'est-à-dire  des  Basques, 
que  les  inscriptions  étrusques  d'Italie  et  les  inscriptions  runiques  de  l'île  de 
Man  ont  été  rédigées  en  basque.  La  jeune  société  celtique  de  Montréal, 
dans  une  introduction  placée  en  tête  de  son  volume,  ne  peut,  malgré  sa 
modestie,  s'empêcher  de  dire  combien  elle  est  fière  de  jeter  un  flot  de  lu- 
mière «  flood  of  light  »  sur  des  questions  d'ethnographie  et  de  linguistique 
si  mal  traitées  jusqu'ici  par  les  savants  de  la  vieille  Europe  !  !  ! 

H.  D'A.  deJ. 

Erratum  :  page  33  colonne  1,  lignes  28-29,  au  ''cu  ^e  Pennoovtndos 
avec  deux  0  avant  le  v,  lisez  Pennovixdos  avec  un  seul  0  avant  le  ;p. 


Le  Propriétaire-Gérant  :  F.  VIEWEG. 


Chartres.  —  Imprimerie  DURAND. 


LA  CRÉATION    DU    MONDE 

MYSTÈRE  BRETON 


La  littérature  celtique  ne  comprend  guère,  dans  la  péninsule 
armoricaine,  que  des  œuvres  se  rattachant  aux  genres  lyrique, 
élégiaque  et  dramatique.  Ce  sont  à  peu  près  les  seules  com- 
positions qui  aient  un  caractère  original  ;  les  autres  doivent 
leur  naissance  à  l'inspiration  et  surtout  à  l'imitation  française. 

M.  de  La  Villemarqué  dans  le  Bar%as-Breis}  et  M.  Luzel 
dans  les  Chants  populaires  de  la  Basse-Bretagne,  ont  recueilli  les 
chants  bretons  qui  respirent  l'ardeur  guerrière,  qui  rappellent 
le  tumulte  des  camps  ou  le  fracas  des  armes;  ils  y  ont  joint 
les  guer%pu  et  les  soniou  qui  expriment  les  joies,  les  espérances 
de  l'amour,  les  tristesses  de  l'absence,  les  lamentations  de  la 
douleur. 

Xous  avons  sous  les  yeux  quelques  échantillons  de  la  poésie 
dramatique  :  dix  ou  douze  mystères  bretons  ont  déjà  vu  le 
jour,  grâce  aux  soins  intelligents  qui  les  ont  livrés  à  l'im- 
pression. Ce  sont  :  la  Vie  de  sainte  Nonne,  Sainte  Trvphine 
et  le  roi  Arthur,  Jacob,  Sainte  Geneviève  de  Brabant,  Saint 
Guillaume  du  Poitou,  les  quatre  Fils  Avmon,  Louis  Eunius, 
Sainte  Hélène,  la  Naissance,  la  Passion  et  la  Résurrection  de 
Notre  Seigneur.  Mais  la  Bibliothèque  nationale  renferme  dans 
la  collection  de  ses  manuscrits,  des  trésors  jusqu'à  ce  jour 
inexplorés. 

M.  D'Arbois  de  Jubainville  nous  a  engagé  à  profiter  de 
notre  connaissance  de  la  langue  bretonne,  pour  passer  en  revue 
ces  richesses  encore  inconnues,  rassemblées,  en  grande  partie, 
par  les  patientes  recherches  de  notre  compatriote  M.  Luzel, 

Revue  Celtique,  IX  io 


150  L'abbé  Eug.  Bernard. 

et  léguées  à  la  postérité  par  sa  généreuse  libéralité.  La  tâche 
nous  a  été  rendue  facile  par  la  bienveillance  de  M.  Léopold 
Delisle,  et  par  la  grâce  parfaite  du  conservateur,  M.  Deprez. 

Les  Mystères  bretons  déposés  au  Cabinet  des  Manuscrits, 
sont  au  nombre  de  soixante-huit  ;  ils  se  partagent  en  deux 
classes  :  les  compositions  religieuses,  comme  la  Création  du 
monde,  Moyse,  Sainte  Anne,  Saint  Jean-Baptiste,  Saint  Pierre  et 
Saint  Paul,  Saint  Antoine,  Saint  Martin,  Saint  Guénolé,  etc.; 
les  pièces  chevaleresques,  comme  Charlemagne,  la  Jérusalem 
délivrée,  Pierre  de  Provence,  Huon  de  Bordeaux,  Robert  le 
Diable,  etc.  Les  premières  mettent  en  scène  un  sujet  emprunté 
à  l'Ecriture-Sainte  ou  à  l'Histoire  ecclésiastique.  Ce  sont  les 
plus  nombreux.  En  les  parcourant,  notre  attention  s'est  portée 
sur  le  Mystère  de  la  Création  du  Monde,  qui  s'y  trouve  natu- 
rellement en  première  ligne  sous  le  titre  de  :  Istoir  d'eus  a 
Création  ar  bel r.  La  pièce  embrasse  l'espace  de  temps  qui  s'est 
écoulé  depuis  le  commencement  du -monde  jusqu'à  la  mort  de 
Noé.  On  la  jouait  en  deux  journées;  elle  se  divise  en  sept 
actes,  cinq  pour  le  premier  jour  et  deux  pour  le  second  : 
chaque  acte  est  précédé  d'un  prologue;  chaque  journée  se  ter- 
mine par  un  épilogue.  Elle  est  écrite  en  vers  de  douze  syl- 
labes ;  plusieurs  scènes  sont  en  vers  de  huit  syllabes;  on  ren- 
contre par-ci  par-là  quelques  vers  de  dix  syllabes. 

Nous  lisons  dans  la  savante  Introduction  dont  M.  E.  Picot  a 
fait  précéder  le  Mistèredu  Fiel  Testament,  dédié  par  M.  le  baron 
James  de  Rothschild  aux  membres  de  la  Société  des  Anciens 
Textes2:  «  Trois  pièces  celtiques  nous  offrent  la  représentation 
dramatique  de  la  création.  La  première,  qui  remonte  au 
xv1-'  siècle,  Y  Ordinale  de  Origine  Mundi,  est  une  sorte  de  Créa- 
tion abrégée,  c'est-à-dire  un  résumé  très  rapide  de  l'Ancien 
Testament.  On  n'y  voit  pas  figurer  les  anges  rebelles,  bien 
que  l'auteur  ait  accordé  une  large  place  à  d'autres  traditions 
apocryphes  :  le  Voyage  de  Seth  et  l'Aventure  de  Maximilla?. 
Le  second  mystère,  qui  appartient  aussi  à  la  Cornouaille,  se 

1.  Biblioth.  nat..  fonds  celtique,  rr  12,  in-fol.  de  175  pages  écrit  par 
Jean  le  Moullec  de  Loguivv-lès-Lannion. 

2.  Le.  Mistère  du  Viel .Testament,  Introduction,  p.  xlviii. 

3.  The  ancient  Cornish  Drama,  Oxlord,  1859,  1  vol.  in-8. 


La  Création  du  monde.  1 $ 1 

rapproche,  au  contraire,  de  notre  grand  drame.  Il  contient 
l'histoire  de  la  création  des  anges  et  de  l'homme  et  s'étend 
jusqu'au  déluge1.  Cette  pièce  a  été  imprimée  d'après  un  ma- 
nuscrit daté  de,  161 1,  mais,  comme  l'a  remarqué  déjà  M.  Ede- 
lestand  du  Meril,  elle  est  probablement  plus  ancienne.  Il  en 
est  de  même  de  Y  Histoire  de  la  Création,  qui  se  trouve  dans  un 
des  manuscrits  recueillis  en  Bretagne  par  M.  Luzel,  et  dont  la 
copie  appartient  au  xixe  siècle2.  Cette  Histoire  a  la  même  étendue 
que  le  texte  successivement  publié  par  MM.  D.  Gilbert  et  W. 
Stokes  :  il  serait  curieux  de  l'en  rapprocher.  » 

La  perspective  de  voir  notre  peine  récompensée  par  quelque 
découverte  intéressante,  nous  a  conduit  à  étudier  ce  mystère 
celtique,  et  nous  avons  eu  le  plaisir  de  constater  qu'il  porte 
les  marques  d'une  originalité  particulière,  qu'il  se  distingue 
par  des  caractères  essentiellement  bretons,  empruntés  aux 
mœurs,  aux  coutumes,  aux  travaux,  à  la  religion  de  l'Armo- 
rique. 

Une  observation  nous  a  semblé  digne  d'être  mise  en  lumière, 
parce  qu'elle  répond  à  la  pensée  de  M.  Picot  :  c'est  qu'il  nous 
a  été  facile  de  noter  certaines  analogies,  vraiment  curieuses  à 
établir,  entre  le  drame  comique  The  Création  of  the  World,  et 
la  pièce  bretonne  Istoir  d'eus  a  Création  ar  bet.  Les  deux  auteurs 
ont  évidemment  puisé  aux  mêmes  sources,  ou  bien  la  muse 
de  l'un  a  certainement  aidé  l'imagination  de  l'autre.  Les  liens 
de  parenté  qui  les  unissent,  se  retrouvent  dans  la  série  des 
noms  donnés  par  Adam,  sur  l'ordre  de  Dieu,  aux  différents 
animaux  delà  création.  L'idée  de  nomenclature  est  commune: 
toutefois  l'auteur  comique  ne  rappelle  que  quelques  noms  de 
mammifères,  d'oiseaux  et  de  poissons,  tandis  que  le  poète 
breton  y  ajoute  encore  le  nom  des  plantes,  et  qu'engagé  dans 
cette  voie,  il  épuise  ses  connaissances  dans  la  faune  et  dans  la 
flore  armoricaines. 

Les  textes  comique  et  breton  présentent  les  mêmes  traits  de 
ressemblance  dans  les  passages  qui  se  rapportent  à  la  tentation 
d'Eve,    au   serpent,    qu'ils  placent  dans  l'arbre  de  vie,   à   la 


1.  The  Création  of  the  World,  a  Cornish  mystery,  London,  1864,  in-8. 

2.  Origines  du  théâtre  moderne,  p.  34. 


i  j2  L'abbé  Eug.  Bernard. 

création  de  la  Mort,  au  sacrifice  de  Gain  et  d'Abel,  au  voyage 
de  Seth  au  Paradis  terrestre,  aux  trois  pépins  à  déposer  dans 
la  bouche  et  dans  les  yeux  d'Adam  après  sa  mort. 

Le  poète  armoricain  avait  pris  connaissance  des  mystères 
venus  du  pays  de  France.  Divers  emprunts  attestent  une  lecture 
approfondie,  sans  que  l'on  puisse  attacher  à  l'imitation  l'épi— 
thète  de  servile.  L'inspiration  française  apparaît  dans  la  révolte 
des  anges,  dans  l'expression  de  l'orgueil  de  Lucifer,  dans  le 
conseil  tenu  par  les  démons,  à  l'effet  d'amener  la  chute  de  nos 
premiers  parents,  dans  les  répugnances  de  Caïn  à  offrir  son  blé 
en  sacrifice  à  l'Eternel.  Ailleurs,  les  traces  de  similitude  sont 
plus  effacées,  et  ne  se  laissent  apercevoir  que  dans  certaines 
réminiscences  du  mystère  français. 

Le  manuscrit  breton  que  nous  avons  entre  les  mains,  n'ac- 
cuse pas  une  haute  antiquité,  puisqu'il  ne  date  que  de  1825  : 
mais  ce  n'est  ici  qu'une  copie  écrite  sous  la  dictée,  et  elle  sup- 
pose l'existence  d'un  original  beaucoup  plus  ancien.  Ce  mys- 
tère avait  été  confié  à  la  garde  d'une  mémoire  fidèle,  confor- 
mément à  l'usage  pratiqué  de  tout  temps  chez  nos  ancêtres, 
par  les  Druides  et  par  les  Bardes.  Il  s'est  conservé  dans  ces 
conditions  renouvelées  des  anciens  Aèdes,  qui  nous  ont  ainsi 
transmis  les  poèmes  d'Homère.  Parvenu  à  notre  connaissance 
grâce  à  ce  procédé  mnémonique,  Je  drame  breton,  assurément 
postérieur  au  mystère  français  du  Fiel  Testament,  est-il  anté- 
rieur à  la  pièce  comique  ?  A  quelle  époque  en  faut-il  taire  re- 
monter la  composition  ?  Le  problème  est  difficile,  pour  ne  pas 
dire  impossible  à  résoudre.  Notre  manuscrit,  dû  à  la  plume 
de  plusieurs  scribes  écrivant  des  vers  qu'on  leur  récitait  de 
vive  voix,  nous  donne-t-il  l'Histoire  de  la  Création  du  monde 
telle  qu'elle  fut,  à  l'origine,  jouée  sur  la  scène,  devant  la  foule 
religieusement  recueillie  de  nos  aïeux  ?  Le  drame  ne  s'est-il 
pas  modifié  dans  sa  forme  primitive,  altérée  par  suite  d'une 
longue  série  de  représentations  successives  ?  N'a-t-il  pas  subi 
des  suppressions  amenées  par  le  défaut  de  mémoire,  ou  des 
augmentations  introduites  par  un  acteur  en  verve  et  jaloux  d'y 
mettre  un  peu  du  sien,  comme  nous  le  constatons  dans  les 
différentes  versions  du  Mistère  du  Fiel  Testament? 

Le  manuscrit  comique  est  de    161 1  :  est-ce  lui  qui  a  cm- 


La  Création  du  monde.  1 5  5 

prunté  au  breton  les  caractères  de  ressemblance  qu'ils  pré- 
sentent l'un  et  l'autre  ?  Le  mystère  français  ne  paraît  pas  re- 
monter plus  haut  que  1550  :  c'est  lui  quia,  sans  aucun  doute, 
fourni  au  breton  les  analogies  qu'il  est  facile  de  surprendre 
dans  le  dialogue  et  dans  le  caractère  des  personnages. 

La  légende  de  Seth  allant  au  paradis  terrestre  chercher  l'huile 
de  miséricorde  pour  Adam  vieilli  et  à  la  veille  de  terminer  sa 
carrière,  est  fort  ancienne  dans  l'histoire  littéraire1,  et  elle  dé- 
rive d'un  livre  apocryphe,  célèbre  au  moyen  âge  sous  le  titre 
de  Pénitence  d'Adam2;  mais  le  poète  breton  a  su  rajeunir  le 
vieux  récit  par  la  pensée  d'introduire  Seth  dans  le  Paradis, 
dont  il  lui  fait  explorer  les  différentes  parties,  sous  la  conduite 
et  avec  les  explications  du  Chérubin.  Est-ce  là  une  réminiscence 
de  Virgile  parcourant  les  Champs-Elysées,  ou  de  Dante  accom- 
pagné du  poète  latin,  puis  de  Béatrix,  à  travers  les  diverses 
régions  de  l'autre  monde  ? 

La  haine  de  Lucifer  contre  Dieu  se  donne  un  libre  cours 
dans  la  pièce  celtique  :  ce  langage  si  énergique,  si  violent  et  si 
vrai  dans  la  bouche  de  l'archange  rebelle,  est-il  un  emprunt 
fait  à  Milton,  dans  le  Paradis  perdu,  ou  bien  a-t-il  été  inspiré 
au  poète  anglais  par  le  dramaturge  breton  ?  L'idée  d'attri- 
buer à  Dieu  la  création  de  la  Mort  est  commune  aux  mystères 
breton  et  comique;  elle  se  retrouve  également  dans  Milton. 
Auquel  des  trois  auteurs  faut-ii  renvoyer  le  mérite  de  cette  in- 
vention ? 

L'auteur  de  YHistoire  de  la  Création  a  su  imprimer  à  son 
œuvre  un  cachet  d'originalité,  par  le  soin  qu'il  a  pris  de  dé- 
velopper le  texte  du  livre  de  la  Genèse,  en  suivant  le  conseil: 
«  Non  nova,  sed  nove  ».  Ce  souci  éveille  son  imagination  ;  cette 
préoccupation  lui  lait  créer  des  incidents,  des  épisodes,  des 
développements  appropriés  au  tempérament  des  auditeurs,  qui 
viendront  assister  à  la  représentation  de  sa  pièce.  Ainsi  il  doit 
à  son  invention  personnelle  le  rôle  très  actif  qu'il  attribue  aux 
démons  dans  le  cours  du  drame,  le  personnage  effrayant  qu'il 

1 .  Voyage  de  Seth  au  Paradis  terrestre.  Migne,  Dictionnaire  des  Apocryphes, 
t.  I,  p.  .387. 

2.  Livre  de  ta  Pénitence  ou  du  Conduit  d'Adam.  Aligne,  Dictionnaire  des 
Apocryphes,  t.  I,  p.  289. 


1 54  L'abbé  Eug.  Bernard. 

fait  jouer  à  la  Mort  dans  sa  création  par  Dieu,  sa  visite  à  Adam 
et  à  Eve  dans  la  vallée  d'Hébron,  sa  présence  auprès  de  la 
couche  où  Eve  va  mettre  au  monde  ses  deux  jumeaux,  Caïn 
et  Abel,  dans  sa  première  manifestation  devant  le  cadavre 
d'Abel  tué  par  son  frère  Caïn  ;  toutes  ces  apparitions  sont 
autant  de  témoignages  lugubres  que  la  Mort  donne  de  sa  puis- 
sance sur  le  genre  humain,  quand  aux  yeux  des  spectateurs 
saisis  d'effroi,  elle  se  montre  sur  la  scène,  pour  frapper  succes- 
sivement Abel,  Adam,  Eve,  Seth,  Làmech  et  Noé. 

La  couleur  locale  de  notre  mystère  s'éclaire  de  plus  en  plus, 
par  le  rapprochement  d'une  multitude  de  détails:  les  uns  ont 
trait  au  culte  des  morts  et  à  la  coutume  de  se  rendre  en  masse 
aux  cérémonies  de  l'enterrement,  manifestation  religieuse  spé- 
ciale à  la  Bretagne  ;  les  autres  nous  font  assister  aux  travaux 
des  champs  usités  chez  les  Bretons  :  semailles,  moisson,  bat- 
tage, vannage  et  mouture;  ceux-ci  se  rapportent  aux  soins  du 
ménage,  aux  divertissements  de  la  vie,  ceux-là  rappellent  cer- 
tains métiers,  les  occupations  des  artisans  et  la  manière  de  les 
payer  de  leur  peine  dans  la  Basse-Bretagne.  Les  outils  sont 
bretons,  les  instruments  de  labour  sont  bretons,  les  ustensiles 
de  ménage  sont  bretons,  les  vêtements  sont  bretons  ;  les  fruits 
nommés  par  Ada  et  par  Sella  sont  particuliers  à  la  Bretagne, 
et  les  exercices  de  la  lutte  auxquels  se  livrent  les  deux  bergers 
sur  la  scène,  sont  disposés  pour  conquérir  la  faveur  d'un  au- 
ditoire breton,  admirateur  enthousiaste  de  ces  sortes  de  joutes. 
Tout  est  bien  breton,  tout,  jusqu'à  la  bonne  amie,  ho  mestres, 
dont  parle  le  courtisan,  que  le  paysan  de  Léon,  de  Cornouailles, 
de  Vannes  et  de  Tréguier,  doit  rencontrer  sur  son  chemin, 
aux  jours  de  foire,  aux  aires  neuves  ou  aux  pardons. 

La  seule  inspection  du  texte  manuscrit,  jointe  à  l'examen 
de  l'orthographe  phonétique  employée  par  le  copiste,  suffit 
pour  établir  qu'il  écrivait  sous  la  dictée.  Peut-être  plusieurs 
personnes  ont-elles  prêté  le  concours  de  leur  mémoire  :  à  coup 
sûr,  des  mains  différentes  s'y  sont  employées,  comme  il  est 
aisé  de  s'en  convaincre  par  la  diversité  des  écritures.  De  là 
naissent  les  variantes  qui  se  laissent  apercevoir  dans  l'ortho- 
graphe :  quencouls  et  quercouls,  pehet  et  pec'het,  sivoas  et  siouas, 
nemert  et  ne  met,  arru  et  a  ni,  etc.  ;   mais  elles  prouvent  que 


La  Création  du  monde.  i  )  5 

le  scribe  s'ingéniait  à  toujours  fixer  sur  le  papier  le  son  qui 
venait  frapper  son  oreille. 

Ce  procédé,  n'est  pas  sans  donner  lieu  à  de  nombreuses  con- 
fusions. Ainsi  a  préposition,  a  troisième  personne  du  singulier 
de  l'indicatif  présent  du  verbe  mont,  aller,  a  particule  et  ha 
conjonction,  ha  signifiant  le  pronom  relatif,  s'écrivent  tous  de 
la  même  façon  :  a. 

La  particule  e,  la  préposition  e,  la  conjonction  e,  e  troisième 
personne  du  singulier  de  l'indicatif  présent  du  verbe  besa,  être, 
et  ht  pronom  personnel,  he  pronom  possessif,  ht  première 
partie  du  pronom  démonstratif  he-man  se  trouvent  également 
tous  écrits  de  la  même  manière  :  e. 

Le  mot  i,  deuxième  personne  du  futur  du  verbe  mont,  aller, 
et  hi  pronom  personnel  s'écrivent  sans  aucune  différence  :  i. 

La  particule  0,  la  conjonction  0,  la  préposition  0  et  ho  pro- 
nom personnel,  ho  pronom  possessif,  s'écrivent  sans  distinc- 
tion :  0. 

Par  suite  de  cette  façon  d'entendre  l'orthographe,  nous  ren- 
controns ane  pour  ha  ne  et  pour  anhe,  abréviation  de  aneshe; 
eue  pour  en  ht;  eno  pour  en  ho  ;  1110  pour  m' ho;  po  pour  p'ho;  do 
pour  d'ho  ;  don  pour  d'hon. 

La  préposition  oc' h,  la  conjonction  oe'h,  oc  h  seconde  per- 
sonne du  pluriel  du  présent  de  l'indicatif  du  verbe  besa,  être, 
et  hoe'h  pronom  personnel  s'écrivent  simplement  0,  tandis  que 
l'aspiration  est  reportée  sur  le  mot  suivant  :  0  heva,  en  buvant, 
pour  oc  h  eva  ;  0  htus,  vous  avez,  pour  hôc'h  eus. 

Cette  orthographe  phonétique  se  dénonce  presque  à  chaque 
vers  du  manuscrit.  C'est  ainsi  que  nous  lisons  amtus  pour  am 
eus,  émeus  pour  em  eus,  eneus  pour  en  eus,  neueus  pour  n'en  eus, 
paineus  pour  p'am  eus,  esint  pour  es  int,  mason  pour  ma  s-ouu, 
en  nevo  pour  en  euvo,  da  loenet  pour  d'al  loenet,  a  ranet  pour 
ar  ranet,  a  nos  pour  au  nos,  alun  pour  a!  luu,  eu  lijion  pour 
eul  lijion,  gant  an  ueut  pour  ga ni  au  hent. 

Le  scribe  écrivant  sous  la  dictée  et  ne  tenant  compte  que  de 
la  prononciation,  ne  prend  aucun  souci  de  séparer  les  procli- 
tiques ou  les  enclitiques,  du  mot  sur  lequel  ces  particules  doi- 
vent s'appuyer.  C'est  pourquoi  il  écrit  evoelas  pour  t  voelas, 
otont  pour  0  tout,  ehai  pour  e  ai,  thin  pour  e  in,  evi  pour  e  vi, 


156  L'abbé  Eug.  Bernard. 

pandocb  pour  pan  d-oc'h  et  pan  d'boc'b,  ous  cvout  pour  011s  hen 
vont,  se  nevê  pour  se  ne  ve,  aracse  pour  ha  rac  se,  boni  acl  pour 
l)on i  a  heîl. 

Pour  la  même  raison,  des  mots  bien  distincts  se  trouvent 
n'en  plus  former  qu'un,  comme  radit  pour  ra  d'il,  nebon  pour 
neb  aon,  oloneus  pour  bail  bon  eus,  selan  pour  sell  ban,  bace- 
veso  pour  bac  e  veso,  dabu  pour  d'ac'b-bu,  èveltan  pour  evcl  t-ban, 
incarnons  pour  me  am  eus,  abomc  pour  ain  bo  nie,  ouscrec'b  pour 
ous  crcc'b.  D'autres  mots,  au  contraire,,  voient  leurs  parties  in- 
tégrantes disjointes  et  écrites  séparément,  de  manière  à  ne  plus 
présenter  aucun  sens,  par  exemple  e  vel  pour  evel,  a  darepouï 
adarre,  a  lèse  pour  alèse,  quer  couls  pour  qucrcouls,  a  banonip 
pour  acbanomp,  e  me  pour  cuic,  dis  Ical  pour  dislcal,  a  ri  pour 
arri. 

L'insuffisance  du  scribe  n'a  pas  commis  que  ces  seules 
fautes  ;  elle  se  manifeste  encore  dans  la  transcription  de  quel- 
ques vers  de  huit  syllabes,  dont  il  lui  arrive  de  réunir  deux 
en  un  seul  :  dans  la  manière  fantaisiste  qu'il  met  à  écrire  des 
mots  dont  il  ne  parvenait  pas  à  rendre  l'assonance,  ainsi  nia 
scro  pour  ma  %ro,  jurubin,  cbeurubin,  churubin,  jerubin  pour 
chérubin,  ou  bien  qu'il  entendait  prononcer  de  différentes  laçons, 
comme  bopret  et  bepret  :  corner,  cerner  et  quemer  :  gle  et  die  : 
guesal  et  beageal  :  bcllomp  et  guellomp. 

Son  inexpérience  éclate  dans  la  structure  de  certains  vers, 
dont  il  fait  les  uns  trop  longs  et  les  autres  trop  courts.  A 
moins  toutefois  de  dire  à  sa  décharge,  que  ces  irrégularités  sont 
amenées  par  la  prononciation  particulière  à  celui  qui  dictait, 
selon  le  soin  qu'il  prenait  de  taire  lui-même  eu  de  laisser  faire 
les  élisions  et  les  contractions  si  nombreuses  dans  la  langue 
celtique. 

Ces  négligences  retombent  sur  le  scribe  qui  s'en  est  rendu 
coupable;  mais  l'examen  du  manuscrit,  sa  forme  matérielle, 
l'aspect  de  ses  pages  suffisent  pour  indiquer  souvent  que  la 
mémoire  de  celui  qui  dictait  s'est  trouvée  en  défaut.  De  là  des 
mots  d'abord  passés  sous  silence,  ensuite  rétablis,  des  expres- 
sions répétées,  puis  corrigées  ;  de  là  des  vers  à  demi  ou  entiè- 
rement effacés,  pouf  être  transportés  plus  loin  ;  de  là  certains 
passages  d'abord  insérés  dans  le  dialogue,  puis  supprimés  pour 


La  Création  du  monde.  i $  7 

être  reportés  ailleurs,  là  où  ils  se  rencontraient  véritablement 
à  leur  place. 

Faut-il  attribuer  à  cette  transmission  mnémonique  du  drame 
breton  le  grand  nombre  de  mots  français,  habillés  à  la  bre- 
tonne, qu'il  est  facile  de  relever  au  courant  de  la  pièce,  alors 
que  l'expression  celtique  entrait  parfaitement  dans  la  mesure 
du  vers  ?  Ces  mots  se  sont-ils  multipliés  suivant  le  tour  d'es- 
prit de  ceux  qui  conservaient  le  drame  gravé  dans  leur  mé- 
moire ?  Les  ont-ils  employés  en  raison  /les  progrès  accomplis 
par  la  langue  française  dans  des  différentes  régions  de  l'Armo- 
rique  ?  Il  y  a  mieux  :  le  mot  français  se  trouve  quelquefois  à 
côté  de  l'expression  bretonne,  néanmoins,  couscoude  :  adieu  a 
lavarau,  sans  adieu,  couscoude.  Etait-ce  une  marque  de  savoir, 
de  distinction,  d'élégance,  de  mêler  ainsi  le  français  au  breton  ? 
Si  dans  leurs  pièces  farcies,  les  auteurs  de  la  langue  d'oïl  et 
de  la  langue  d'oc  se  montraient  heureux  d'unir  le  latin  au 
texte  français,  peut-être  ne  déplaisait-il  pas  aux  Bretons  d'as- 
socier dans  leurs  œuvres  le  français  et  le  celtique. 

La  pensée  ne  nous  est  pas  venue  de  restituer  le  manuscrit 
breton  dans  une  forme  plus  correcte  en  certains  endroits, 
moins  défectueuse  en  d'autres.  Nous  avons  voulu  conservet 
le  drame  celtique  tel  qu'il  a  été  dicté,  tel  qu'il  a  été  reproduir 
par  les  scribes.  En  le  transcrivant,  nous  nous  sommes  permis 
de  corriger  les  consonnances  impropres  ou  vicieuses,  de 
rompre  les  alliances  illégitimes,  de  supprimer  les  séparations 
impossibles,  et  dans  ces  cas-là  seulement,  nous  avons  rétabli 
la  véritable  orthographe,  afin  d'éviter  au  lecteur  les  embarras 
où  nous  nous  sommes  trouvé  pour  l'intelligence  du  texte,  dont 
le  sens  ne  se  précisait  souvent  qu'à  la  lecture  de  la  phrase 
entière. 

Ces  difficultés  s'augmentaient  encore  par  l'absence  complète 
de  toute  ponctuation,  qui  rend  la  lecture  du  manuscrit  exces- 
sivement pénible.  Cet  enchaînement  extravagant  de  pensées 
qui  se  succèdent  sans  pauses  et  sans  arrêts,  nous  semble  une 
nouvelle  preuve  à  l'appui  de  notre  opinion  que  Y  Histoire  de  la 
Création  a  été  dictée  de  mémoire  et  transcrite  ainsi  par  la 
main  des  scribes.  Nous  ne  dissimulerons  pas  que  ce  manque 
absolu  de  ponctuation  nous  a  parfois  mis  l'esprit  à  une  rude 


iç8  L'abbé  Eug.  Bernard. 

épreuve.  L'intelligence  du  texte,  entendu  de  telle  ou  telle  façon, 
selon  la  place  occupée  par  un  point  ou  par  une  virgule,  n'était 
pas  sans  nous  causer  certaines  inquiétudes,  sans  nous  suggérer 
quelques  scrupules  sur  la  vérité  de  la  traduction  que  nous 
nous  préparions  à  adopter.  Afin  de  couper  court  à  ces  hésita- 
tions et  pour  empêcher  nos  lecteurs  de  tomber  dans  les  mêmes 
incertitudes,  nous  nous  sommes  décidé  à  rétablir  la  ponctuation 
qui  fait  défaut.  Avons-nous  toujours  réussi  à  déterminer  le  sens 
exact  et  vrai  ?  Il  y  aurait  présomption  à  le  penser  et  surtout  à 
le  dire.  Nous  aimons  mieux  nous  en  rapporter  humblement  à 
l'avis  des  critiques  plus  fins,  plus  déliés,  plus  initiés  aux  déli- 
catesses de  la  langue  bretonne. 

Nous  n'avons  fait  qu'effleurer  ces  questions  d'antiquité, 
d'originalité,  d'imitation  auxquelles  l'Histoire  de  la  Création  du 
monde  fournit  prétexte  et  matière.  Nous  aurons  occasion  de 
les  reprendre,  lorsque  le  texte  et  la  traduction  auront  été  pu- 
bliés entièrement.  Nous  pourrons  alors  y  renvoyer  le  lecteur, 
et,  lui  mettant  les  pièces  en  mains,  nous  le  laisserons  en  der- 
nier ressort  juge  de  nos  appréciations. 

M.  Petit  de  Julleville,  avec  la  science  qui  le  distingue  en  ces 
matières,  a  épuisé,  on  peut  le  dire,  la  vaste  question  des  mys- 
tères à  l'origine  de  notre  théâtre.  Il  a  merveilleusement  expliqué 
la  nature  de  ces  compositions  dramatiques,  leur  caractère  reli- 
gieux, la  place  importante  qu'elles  occupaient  au  moyen  âge, 
dans  la  société,  dans  les  mœurs,  dans  la  littérature.  Poursuivant 
ses  études  sur  ce  sujet  si  intéressant  et  si  divers,  il  écrit 1  :  «  Il 
n'est  pas  de  ville  qui  n'ait  tenté  un  jour  de  monter  un  mystère; 
il  n'est  presque  pas  de  bourg  où  l'on  n'ait  maintes  fois  joué  des 
farces.  Comment  se  donnaient  ces  spectacles  ?  Etait-ce  aux  frais 
des  villes,  des  confréries,  des  particuliers  ?  Quels  acteurs  y  te- 
naient les  rôles  ?  Des  comédiens  de  profession  ou  des  artisans, 
des  bourgeois  s'offrant  pour  la  circonstance?  Où  s'élevait  le 
théâtre  et  comment  se  réglait  la  décoration,  la  mise  en  scène 
de  ces  interminables  mystères?  Quels  auteurs  les  écrivaient, 
comment  étaient-ils  rétribués,  et  quelle  part  prenaient-ils  de 
leur  personne  à  la  représentation  ?  Comment  se  composait  l'as- 

i .  Petit  de  Julleville,  Les  Mystères,  t.  I,  p.  15. 


La  Création  du  monde.  1 59 

sistance  ?  Le  spectacle  était-il  gratuit,  ou  payait-on  sa  place  ? 
Enfin  quelle  faveur  obtenait  le  théâtre,  et  comment  était-il 
jugé  ?  Quel  objet  se  proposaient  les  princes,  les  prélats,  les 
abbés,  les  échevins  qui  instituaient  ou  protégeaient  les  repré- 
sentations ?  Ce  sont  là  autant  de  questions  difficiles  qu'il  n'est 
pas  possible  de  résoudre  encore  entièrement.  Trop  de  docu- 
ments restent  inconnus,  enfouis  dans  les  registres  des  conseils 
de  ville,  dans  les  minutes  des  notaires,  dans  les  livres  de  comptes 
ou  les  mémoires  particuliers  encore  inédits.  »  Nous  serons  heu- 
reux de  cueillir  au  courant  du  mystère  celtique  Istoir  d'eus  a 
Création  ar  bel,  dans  les  prologues  surtout  et  dans  les  épilogues, 
les  réponses  fournies  par  le  poète  breton  aux  nombreux  points 
d'interrogation  qui  se  sont  posés  à  l'esprit  du  savant  professeur 
à  la  Sorbonne. 

L'abbé  Eug.  Bernard, 
docteur  es  lettres  et  en  théologie,  lauréat  de  l'Académie  française. 


6o  L'abbé  Eug.  Bernard. 


ISTOIR   D'EUS   A  CREATION   AR   BET-MAN 

AR  FORMATION  AN  DEN  HAC  HE  VUE 

AR    HENTAN    PHILOSOF    A    VOA    ADAM,   .HAC    HE    VARO 
HA  BUE  AR  PROF  ET  HENOC  HAC  EUI 

AN  DILUJ 

HA  BUE  NOE  HAC  HE  VARO 


Ar  proloc  a  comans  breman. 

Compagnones  santel,  p'hoc'h  eus  bet  madeles 
Bean  deut  d'hon  hlevet  hirie  holl  assambles, 
Nin  a  represanto  d'ec'h  Création  ar  bet, 
Bue  an  tat  Adam,  hac  Eva,  lie  briet. 
5   Mes  quent  avansi  davantaj  ma  bomso, 
Em  eus  hoant  da  çoulen  assistans  an  envo, 
Presantin  ma  regret  dirac  an  Eternel, 
Da  goulen  diont-han  eur  gras  particulier. 

Ma  avanser  er  creis  voar  lie  saoulin  ha  ma  coms. 

Ma  Doue,  ma  Hrouer,  me  houl  ho  assistans, 
10  Ho  penediction,  ho  cras,  ho  puissans, 

Ma  hellomp  discleria,  en  antier,  voar  he  het. 
An  istoir  pehini  bon  deus  antreprenet. 
Ma  savo  en  lie  sa. 

Guelet  hoe'h  eus  guesall  acteurien,  tut  vaillant, 
Subtil  voar  ho  theat,  ha  guisquet  excelant  : 


La  Création  du  monde.  161 


HISTOIRE  DE   LA  CRÉATION   DE   CE  MONDE 

LA  FORMATION  DE  L'HOMME  ET  SA  VIE 

LE    PREMIER    PHILOSOPHE    FUT    ADAM,    SA    MORT 
LA  VIE  DU  PROPHÈTE  HÉNOCH  ET  CELLE  D'ELIE 

LE  DÉLUGE 

LA  VIE  DE  NOË  ET  SA  MORT 


Le  prologue  commence. 

Sainte  compagnie,  puisque  vous  avez  eu  la  complaisance 
de  venir  nous  entendre  aujourd'hui,  tous  ensemble,  nous  vous 
représenterons  la  Création  du  monde,  la  vie  de  notre  père 
Adam  et  celle  d'Eve,  son  épouse. 

Mais  avant  de  poursuivre  mon  discours,  je  veux  implorer 
l'assistance  du  Ciel,  offrir  mes  regrets  à  l'Eternel  et  solliciter 
de  lui  une  grâce  particulière. 

Il  s'avance  au  milieu  de  la  scène,  se  met  à  genoux  et  continue. 

Mon  Dieu,  mon  Créateur,  je  demande  votre  assistance, 
votre  bénédiction,  votre  grâce,  votre  puissance  !  Qu'il  nous 
soit  donné  de  raconter  dans  son  ensemble  et  dans  ses  détails, 
l'histoire  que  nous  avons  entrepris  de  retracer. 

Il  se  lève  debout. 

Autrefois  vous  avez  vu  sur  votre  théâtre,  des  acteurs  au 
cœur  vaillant,  à  l'esprit  délié  et  revêtus  de  magnifiques  cos- 


;62  Vabbé  Eug.  Bernard. 

15   Elocans  ar  re-se  hac  ho  c'habacite, 

A  ra  d'in  coll  ar  coms  an  devoes  a  hiric. 
Tut  omp  d'eus  ar  hanton,  goût  a  ret  lion  doare, 
Nin  a  rei  hon  possipl  gant  ar  gras  a  Doue, 
Evit  rentin  contant  sperejo  pep-hinin, 

20  Dre  eurs  an  actoret,  se  eo  lion  fantasi  ; 
Ret  eo  avanturin,  mar  be  caer  an  amser, 
Ar  voellan  ma  hellomp,  e  reomp  lion  deveur. 
Ebars  er  bla  presant  hon  deus-hi  composet, 
Tennet  divoar  ar  Bipl,  e  verio  bresonec. 

25   Trivoac'h  cant  pemp  voar  n'uguent  bla,  aboe  ma  teuas 
Ar  protêt  et  bet-man,  hanvoet  ar  Messias, 
Da  guemer  quic  humen  en  corf  santés  Mari, 
Da  prenan  ar  bec'herien,  e  teuas  d'en  eum  incarnin. 
Pevoar  mil  bla  diaroc  e  voe  erouet  ar  bet, 

30  An  env  hac  an  douar,  licol,  loar  hac  ar  steret  : 
An  de  da  sclerian,  an  nos  da  reposin, 
An  han  hac  ar  gouan,  ha  quement  so  en-hi. 

Doue  holl  puissant,  en  euvo  inspiret, 
Da  ocmantin  he  hloar,  e  crouas  an  Elet. 

35   Lucibel  voa  ar  chef,  prins  ar  Cherubinet, 
Dre  hloar  ha  vanité  cm  rentas  reprouvet 
Dre  ma  voa  un  El  caer,  leun  a  superbite, 
E  fellas  d'ehan  pignal  quen  huel  ha  Doue, 
Ha  bean  gant  ar  re-all  bep  amser  enoret, 

40  Evel  ar  guir  Doue  lien  defoa  ho  hrouet. 
Sperejo  malurus,  a  soupson  miliguet 
A  tromplas  en  antier  eul  lijion  Elet. 
Ho  Hrouer,  pa  santas  ho  sonj  freneusius, 
O  tout  d'ho  miligan,  ho  rentas  malurus. 

45   Er  mes  ar  Barados  e  voent  cren  sexvenet, 
En  calon  an  douar  e  voent  holl  distolet  : 
Satan  ha  Belsebut,  Lucifer  miliguet, 
So  breman  diaoulien  en  Ifern  anfonset. 
Pa  voelas  ar  Hrouer  videt  ar  sigeno, 

50  Eul  lijion  Elet  sortiet  voar  un  dro, 

E  tisquennas  ous  traon,  hac  e  formas  ar  bet, 
Dre  vertu  he  pouer,  hep  aretin  quamet. 


La  Création  du  monde.  i6j 

tûmes.  Au  souvenir  de  leur  éloquence  et  de  leurs  talents,  en 
ce  jour  la  parole  me  fait  défaut.  Nous  sommes,  nous,  des  ha- 
bitants du  canton  ;  vous  nous  connaissez.  Nous  mettrons  notre 
peine  avec  la,  grâce  de  Dieu,  pour  vous  contenter  les  uns  et 
les  autres.  Par  ordre  des  acteurs,  puisque  tel  est  notre  dessein, 
nous  allons  tenter  l'aventure,  si  le  temps  est  beau.  Nous  fe- 
rons de  notre  mieux  pour  remplir  notre  tâche. 

Cette  pièce  a  été  composée  par  nous,  dans  le  courant  de 
l'année;  nous  en  avons  emprunté  le  sujet  à  la  Bible,  et  nous 
l'avons  mis  en  vers  bretons.  Dix-huit  cent  vingt-cinq  ans  se 
sont  écoulés  depuis  que  le  prophète  par  excellence  est  descendu 
sur  cette  terre  ;  il  s'appelait  le  Messie,  et  revêtit  la  nature  hu- 
maine dans  le  sein  de  la  Vierge  Marie  :  il  s'incarnait  pour  ra- 
cheter les  pécheurs. 

Quatre  mille  ans  auparavant,  le  monde  avait  été  créé,  le  ciel 
et  la  terre,  le  soleil,  la  lune  et  les  étoiles,  le  jour  pour  éclairer, 
la  nuit  pour  se  reposer,  l'été,  l'hiver  et  tout  ce  que  renferme 
l'univers. 

Dieu  tout-puissant  eut  dans  les  hauteurs  des  Cieux  la  pensée 
d'augmenter  sa  gloire,  il  créa  les  Anges.  Lucibel  était  le  chef, 
le  prince  des  Chérubins,  par  orgueil  et  par  vanité,  il  devint 
réprouvé.  Parce  qu'il  était  un  ange  parfait,  plein  d'une  audace 
superbe,  il  voulut  s'élever  aussi  haut  que  Dieu,  et  recevoir  en 
tout  temps  les  hommages  des  autres  Anges,  comme  le  vrai 
Dieu  qui  l'avait  créé.  Esprits  malheureux,  toute  une  légion 
d'Anges  fut  déçue  par  cette  espérance  criminelle.  Le  Créateur 
n'eut  pas  plus  tôt  saisi  leur  projet  insensé,  qu'il  les  maudit  et 
leur  enleva  ainsi  le  bonheur.  Ils  furent  à  l'instant  chassés  du 
Paradis  et  précipités  tous  dans  les  entrailles  de  la  terre.  Satan, 
Beelzébut  et  Lucifer  maudit  sont  maintenant  des  diables 
plongés  dans  l'enfer. 


Lorsque  le  Créateur  vit  les  places  vides  et  une  légion 
d'Anges  d'un  coup  expulsés,  il  descendit  du  Ciel,  et  en  vertu 
de  sa  puissance,  il  forma  l'univers  sans  un  instant  d'arrêt. 


1 64  L'abbé  Eug.  Bernard. 

«  Chetu,  eme  Doue,  sigeno  disoloet 

«  Gant  ar  re  valurus  en  deus  ma  ofancet  : 
55   «  Me  deui  d'ho  ramplissan,  evel  ma  s-oun  Doue, 

«  Rac  an  den  a  formin  breman,  corf  hac  ine  ». 
Da  guentan  e  teuas  da  formin  ar  sclerijen, 

Ha  da  henvoel  anhan  plijadures  an  den-. 

Neuse  an  heol  a  formas  a  so  illuminant, 
60  Hac  a  ro  sclerijen  dious  ar  firmamant  ; 

Neuse  hanvoas  an  nos  pehini  so  tefal, 

Hac  en  deus  al  lumier  dious  steret  ha  loar  : 

An  nos  dre  lie  vertu  a  so  tevalijen, 

Hac  a  ro  an  amser  da  repos  da  bep  den. 
65       Separet  voa  neuse  an  nos  dious  an  de, 

Ha  d'al  loenet  brutal  e  roas  liberté. 

Neuse  e  cafas  mat  rein  ho  hano  d'esho, 

Ha  goude  e  formas  an  holl  elemancho. 

Al  km  eo  ar  hentan,  ar  meurs,  ar  merher,  ar  iaou, 
70  Ar  guener,  ar  sadorn,  ha  neuse  ar  sulio. 

Ha  neuse  e  formas  an  holl  anevalct, 

Al  loenet  en  douar,  er  mot  bras  ar  pesquet, 

Ar  ranet  en  dour  dous  da  ganan  meulodi 

Dre  ho  moes  ravissant,  da  dont  d'he  enorin. 
75   Neuse  e  formas  an  den  henvel  ous  he  poltret, 

Démens  un  tam  douar  :  Adam  e  voe  hanvet. 
«  Adam,  eme  Doue,  saf  en  sa  prontamant  : 

«  Me  am  eus  da  crouet  cm  imaj  excelant, 

«   Voar  loenet  an  douar  e  vi  victorius, 
80  «  Goude-se  te  a  veso  en  envo  eùrus. 

«  Te  a  so  ma  mignon,  hac  a  viquen  e  vi, 

«  Rac  se  toll  eves  mat  da  dont  d'am  ofancin. 

«  Er  Barados  terestr  me  ro  d'it  liberté 

«   Quercouls  voar  ar  freus  mat  ha  voar  al  loenet  goue. 
85    «  An  douar  dre  natur,  a  deui  da  broduin 

«   A  bep  sort  louson  mat  evit  da  substantin. 

«  Quement  a  vo  formet  er  bet  antieramant 

«   A  vo,  eme  Doue,  d'id-de  obéissant. 

«   Debr  hac  cf,  ma  mignon,  ar  sort  goût  a  guéri, 
90  «  Ar  voeen  a  vue,  hon-nes  a  reservi. 


La  Création  du  monde.  16$ 

«  Voici,  dit  le  Seigneur,  des  places  abandonnées  parles  mi- 
ce  sérables  qui  m'ont  offensé  :  je  les  ferai  occuper,  aussi  vrai 
«  que  je  suis  Dieu,  car  je  vais  maintenant  façonner  l'homme, 
«  corps  et  âme.  » 

Dieu  commença  -par  créer  la  lumière,  et  il  l'appela  la  joie 
de  l'homme,  puis  le  soleil  qui  resplendit,  et  qui  répand  la  lu- 
mière du  haut  du  firmament.  Il  nomma  la  nuit  qui  est  obs- 
cure, qui  reçoit  la  clarté  de  la  lune  et  des  étoiles,  la  nuit  qui 
par  elle-même  n'est  que  ténèbres,  et  qui  fournit  à  chacun  le 
temps  de  se  reposer. 


La  nuit  fut  séparée  du  jour,  et  Dieu  donna  la  liberté  aux 
bêtes  féroces,  auxquelles  il  trouva  bon  d'attribuer  des  noms. 
Il  créa  ensuite  tous  les  éléments.  Le  Lundi  fut  le  premier  jour, 
après  se  succédèrent  le  Mardi,  le  Mercredi,  le  Jeudi,  le  Ven- 
dredi, le  Samedi  et  le  Dimanche.  Alors  il  fit  sortir  du  néant 
tous  les  animaux,  les  bètes  sur  la  terre,  les  poissons  dans  la 
grande  mer,  dans  l'eau  douce  les  grenouilles  pour  chanter  ses 
louanges  et  l'honorer  par  leurs  voix  ravissantes.  Puis  il  forma 
l'homme  d'un  peu  de  terre,  à  sa  ressemblance,  et  l'appela 
Adam. 


«  Adam,  dit  Dieu,  lève-toi  promptement.  Je  t'ai  créé  à 
«  mon  image  :  sur  les  animaux  de  la  terre  tu  exerceras  ton 
«  empire,  et  dans  la  suite  tu  seras  heureux  au  Ciel.  Tu  es 
«  mon  ami,  tu  le  seras  à  jamais,  prends  donc  bien  garde  de 
«  m'offenser.  Le  Paradis  terrestre  sera  ton  séjour,  tu  y  vivras 
«  libre,  et  les  meilleurs  fruits  aussi  bien  que  les  bêtes  sauvages 
«  seront  à  ta  disposition.  La  terre,  par  sa  fécondité,  produira 
«  toute  espèce  de  plantes  pour  te  sustenter.  Tout  ce  qui 
«  sera  créé  au  monde,  tout  sans  exception,  sera,  dit  le  Sei- 
«  gneur,  soumis  à  tes  lois.  Bois  et  mange,  mon  ami,  tout  ce 
«  qui  flattera  ton  goût,  l'arbre  de  vie  seul,  celui-là,  tu  n'y 
«  toucheras  pas. 


Revue  Celtique,  IX  1 1 


1 66  L'abbé  Eug.  Bernard. 

«  Te  a  vo  immortel  entre  ma  vi  em  graço, 
«  Hac  hallo  jouissan  a  bep  sort  deliço  ». 

—  «  Ma  Mest,  eme  Adam,  me  ho  trugarequa 
«   Evit  ma  bean  crouet  er  bet-man,  a  netra  ; 

95    «  Ha  rac-se,  ma  Doue,  me  bromet  ho  caret, 
«  Ha  bout  obéissant  da  guement  a  leret  » . 

—  «  P'am  eus,  eme  Doue,  ho  laquet  voar  ar  bet, 
«  Da  vean  evurus  a  viquen,  ma  queret, 

«  Quement  a  so  crouet  et  bet  .bete  vreman, 
ioo  «  E  comandan  d'cshe  d'ac'h-hu  obeissan. 
«  Reit  d'eshe  ho  hano  er  feson  ma  queret, 
«   Obéissant  voint  d'ar  pes  a  comandet. 
«  Me  am  eus  ho  confirmet  gant  pep  sort  carante, 
«  Beet  obéissant  bepret  d'ho  guir  Doue  ». 
105       —  «  Ma  Doue,  eme  Adam,  p'hoc'h  eus  bet  ma  crouet, 
«  Ha  ma  laquet  da  vest  voar  quement  so  er  bet, 
«  Me  rai  d'he  ho  hano  herve  ma  bolante, 
a  Ha  houi  da  bep  amser  glorifiet  gant-he  ». 
Neuse  e  ai  Adam  da  henvoel  al  loenet 
no  Quement  a  so  er  bet,  nac  a  so  da  donet  ; 
Quement  a  so  er  bet  crouet  gant  ma  Doue, 
Hon  tat  quentan  Adam  a  hanvoas  neuse. 

Doue  a  concilias  dre  liras  ar  Speret  gloan, 
He  vignon  bras  Adam,  ous  lien  vont  e-unan, 

1 1 5   Dont  da  formin  eur  verh  da  vean  d'ehan  priet, 
Dre  er  memeus  natur  da  dont  d'en  eum  garet. 
Ha  pa  bedas  Adam  da  repos  er  jardin, 
Ha  da  asten  he  corf  voar  un  tam  lousou  fin, 
Voar  ben  ma  tifunas  e  cafas  chanchamant, 

120  E  voelas  he  briet  eur  feumeulen  vaillant. 
Pa  reposas  Adam,  Doue  a  ies  d'hen  caet, 
Evel  ma  e  subtil,  ha  n'hen  difunas  quet: 
A  eur  gosten  d'ehan  en  eus  formet  he  bar, 
Quercouls  evel  Adam,  d'eus  un  ternie  douar. 

125       Ha  pa'n  defoa  subtilament  tennet 

Eur  gosten  da  Adam,  e  formas  he  briet  : 
«  Sao  alèse,  groec  veo,  hac  e  voeli  da  par, 


La  Création  du  monde.  \6~j 

«  Tu  seras  immortel,  tarit  que  tu  conserveras  ma  grâce,  et  tu 
«  pourras  jouir  de  toute  sorte  de  délices.  » 

«  Mon  maître,  répond  Adam,  je  vous  remercie  de  m' avoir 
«  en  ce  monde  créé  de  rien.  C'est  pourquoi,  mon  Dieu,  je 
«  promets  de  vous  aimer  et  d'obéir  à  tout  ce  que  vous  direz.  » 

«  Je  vous  ai  mis  sur  la  terre,  dit  Dieu,  pour  être  toujours 

«  heureux,  si  vous  le  voulez.  A  tout  ce  qui  jusqu'à  présent  a 

«  été  créé  dans  l'univers,  à  tout,  je  commande  de  vous  obéir. 

«  Donnez-leur  des  noms,  de  la  façon  qui  vous  conviendra,  et 

«  ils  seront  soumis  à  vos  ordres.  Mon  amour  pour  vous,  vous 

«  assure  tous  ces  biens,  soyez  donc  toujours  obéissant  à  votre 

«  Dieu.  » 

«  Mon  Dieu,  reprend  Adam,  puisque  vous  m'avez  créé  et 
«  constitué  maître  sur  tout  ce  qu'il  y  a  au  monde,  je  donnerai 
«  à  chaque  être  son  nom  suivant  mon  bon  plaisir,  et  vous, 
«  puissiez-vous  être  par  eux  à  tout  jamais  glorifié  !  » 

Adam  s'en  ira  distribuer  des  noms  aux  animaux,  à  ceux  qui 
existent  et  à  ceux  qui  naîtront  à  la  vie,  et  à  tout  ce  qui  a  été 
créé  par  Dieu  sur  la  terre. 


Dieu  décida  par  la  grâce  de  l'Esprit  Saint,  de  créer  pour  son 
grand  ami  Adam,  par  cela  qu'il  était  seul,  de  créer  une  jeune 
fille,  de  la  lui  donner  pour  épouse,  et  de  les  faire  s'aimer  l'un 
l'autre,  en  vertu  de  leur  commune  nature.  Il  invita  donc 
Adam  à  se  reposer  au  jardin,  et  à  étendre  ses  membres  sur 
une  poignée  d'herbes  odoriférantes. 

A  son  réveil,  Adam  trouva  du  changement,  il  se  vit  en  face 
de  son  épouse,  une  superbe  vierge.  Pendant  qu'Adam  reposait, 
Dieu  s'en  approcha,  et  comme  il  est  esprit,  il  n'éveilla  pas  le 
dormeur.  Il  lui  enleva  une  côte,  pour  en  former  la  première 
femme,  comme  il  avait  créé  le  premier  homme  d'un  peu  de 
terre. 

Quand  d'une  côte  d'Adam  doucement  arrachée,  son  épouse 
eût  été  ainsi  formée,  «  Lève-toi,  femme  vivante,  dit  Dieu, 
«  lève-toi,  et  tu  verras  ton  pareil.  Son  corps  repose  encore, 


i68 


130 


135 


140 


145 


L'abbé  Eug.  Bernard. 

He  corf  hoas  o  repos,  sell-han  voar  an  douar. 
Deus  da  drugarequat  neuse  ar  guir  Doue, 
Ous  da  vean  crouet  er  bet,  corf  hac  ine, 
Ha  te  laquet  memeus,  herve  he  naturel, 
Da  vout,  corf  hac  ine,  evel-t-han,  immortel. 
Houi  a  rejouisso  breman  er  Baradoes. 

<  Teulet  evoes  ouspen  petra  a  laran  hoas  : 
Ma  crouadurien  pur,  eme  an  Autro  Doue, 
Me  am  eus  ho  crouet  er  memeus  dignité  ; 
Mes  deus  da  exantin  ar  voeen  a  vue. 
Voar  ar  re-all  er  bet  me  ra  d'it  liberté  : 

:<  Hon-nes,  eme  Doue,  ar  voeen  immortel, 
Hac  ma  touchet  ont-hi,  e  teuet  da  vervoel, 
Houi  a  gollo  ma  graço,  ha  privet  d'eus  ma  gloar, 

<  A  retorn  adarre  en  poult  hac  en  douar. 

<  Pa  m'eus  ho  piniguet  ha  laquet  ho  taou  par, 
Creet,  multipliet  da  peuplin  an  douar. 

Ha  houi  ive,  Eva,  gant  ar  fres  a  douguet, 
Houi  a  voelioudou  hac  a  poan  exantet. 


CONCLUSION. 


Mar  beet  atantif,  em-berr  e  remerquet 

A  représentation  ar  pes  am  eus  laret. 

Breman  houi  a  voelo  un  darn  dimeus  ma  gloar, 
150  Doue  hac  an  Elle  a  comans  an  istoir, 

Evit  an  act  quentan  a  voelan  finisset. 

Prologo  so  da  bep  act  ;  en  seis  es  int  laquet, 

A  vo  represantet,  mar  bermet  an  amser  (ho  silans). 

Beet  atantif  guen-imp,  o  prestan  ho  silans. 
155        Quent  avans  davantaj,  cm  eus  hoant  da  guentan, 

Da  houlen  dian-ec'h  ar  pes  a  disiran. 

Nen  d-oun  quet  dificil,  mar  be  ho  polante, 

Ne  garac'h  ma  refus  evit  quen  neubeut-se, 

Ne  houlennomp  netra  na  gleomp  da  gaet  : 
160  Recevet  ahanomp  en  ho  pasiantet, 

Balamour  da  Doue  ;  comprenet,  en-hi 

Ho  prolit  a  reet  ha  non  pas  hon  hini. 

Me  eo  ar  simplan  den  a  speret,  mes  holl  en  eum  doutomp, 


La  Création  du  monde.  169 

«  vois-le  étendu  à  terre.  Viens  à  l'instant  remercier  le  vrai 
«  Dieu  de  t'avoir  créée  corps  et  âme,  et  même,  dans  sa  bonté, 
«  de  t'avoir  faite,  corps  et  âme,  immortelle  comme  lui.  Main- 
ce  tenant  vous  serez  la  joie  du  Paradis.  De  plus,  prenez  bien 
ce  garde  à  ce  que  je  vais  dire.  Vous  êtes  mes  créatures,  dit  le 
ce  Seigneur  Dieu,  je  vous  ai  créés  en  possession  d'une  égale 
ce  dignité.  Mais  je  me  réserve  l'arbre  de  vie.  Sur  tout  le  reste 
ce  au  monde,  je  vous  donne  pouvoir.  Cet  arbre  seul,  dit  Dieu, 
ce  cet  arbre  est  immortel,  et  si  vous  y  goûtez,  vous  mourrez, 
ce  Vous  perdrez  ma  grâce,  et  dépouillés  de  ma  gloire  vous 
ce  retournerez  en  terre  et  en  poussière.  Maintenant  que  je  vous 
ce  ai  bénis,  et  fait  de  vous  deux  époux,  croissez,  multipliez 
ce  pour  peupler  la  terre.  Et  vous,  Eve,  avec  les  fruits  que  vous 
ce  engendrerez,  vous  serez  à  l'abri  des  douleurs  de  l'enfan- 
ce tement.  » 


CONCLUSION. 

Si  vous  êtes  attentifs,  vous  verrez  tout  à  l'heure  la  mise  en 
scène  de  ce  que  je  vous  ai  exposé  en  paroles.  Maintenant 
vous  allez  admirer  une  partie  de  ma  gloire,  Dieu  et  ses  Anges 
commencent  l'histoire  au  premier  acte,  dont  j'ai  bientôt  ter- 
miné l'exposition.  Un  prologue  précède  chaque  acte  :  il  y  en 
a  sept  qui  seront  représentés,  si  le  temps  le  permet.  Gardez 
donc  le  silence  et  prêtez-nous  votre  attention. 

Avant  de  terminer,  j'ai  envie  de  vous  dire  ce  que  je  sou- 
haite. Je  ne  suis  pas  difficile,  et  votre  bonne  volonté  aidant, 
vous  ne  voudrez  pas  me  refuser  pour  si  peu  de  chose.  Nous 
ne  demandons  rien  que  nous  ne  devions  obtenir.  Accueillez- 
nous  avec  patience,  pour  l'amour  de  Dieu,  et  comprenez  que 
ce  sera  plus  à  votre  profit  qu'à  notre  avantage. 


Je  suis  l'homme  le  plus  simple  d'esprit  :   mais  tous,  nous 


170  L'abbé  Eug.  Bernard. 

Rac-semar  manquomp  dre  ignorans,  na  gleomp  da  gaet  spont 
165   Pardonet  ahanomp,  mar  be  ho  polante, 
Ha  nin  a  bedo  Jésus,  m' ho  pardono  ive. 
An  nep  a  ve  ressan  voar  lie  gondition, 
A  vanc  avoijo  pa  ve  ar  brassan  compt. 

En  eum  den  a  goste  a  gafan  e  poent  d'in, 
170  Re  bell  es-on  chomet,  comans  a  ret  nehin 
Pa  ne  deu  ar  re-all  ;  a  bliche  d'ho  speret, 
Me  gare  e  rafent,  allas  !  me  ne  ran  quet. 
Escus  a  houlennan,  rac  me  ia  d'ho  quitat, 
Da  rein  plas  da  antren  breman  Doue  an  Tat. 


Senxe  I 


Doue  an  Tat  ous  he  Elle. 


175   Me  am  eus  crouet  an  env,  heol,  steret  ha  loar, 
Quercouls  ar  firmamant,  ar  mor  hac  an  douar  : 
Me  gomant  d'an  douar  donet  da  broduin 
Pep  tra  en  he  seson,  evel  ma  comandin. 
Ha  quercouls  ar  mor  bras,  daouest  d'he  violans, 

180  A  renco  chom  bepret,  d'in  vo  obéissant. 

Ha  houi,  ma  holl  Elle,  me  am  eus  ho  crouet 
Evit  ma  enorin,  ha  ma  meulin  bepret. 
D'ar  re-all  e  vo  fin,  mes  d'ec'h  na  vo  james, 
Houi  a  vo  bepret  guen-in  em  Baradoes. 

185   Rac-se,  me  ho  supli,  canet  joaiissamant 

Meulodi  d'ho  Crouer,  gant  eur  voes  trionfant. 

An  Elle  a  gano  tout  assambles. 

Nin  a  rent  graço  joaùssamant 
Breman  da  Roue  ar  firmamant, 
Pehinin  en  eus  hon  hrouet, 
190  Ma  veso  drei-omp  enoret  ! 

Da  veso  meulet  ma  Doue, 
Bepret  ha  het  an  éternité  ! 


La  Création  du  monde.  171 

doutons  de  nos  forces,  c'est  pourquoi  s'il  nous  arrive  de  pécher 
par  ignorance,  nous  ne  devons  pas  nous  en  effrayer.  Par- 
donnez-nous donc,  si  vous  le  voulez  bien.  Nous  prierons 
Jésus  pour  vous,  qu'il  vous  pardonne  aussi.  Quiconque  est 
trop  susceptible  en  ce  qui  touche  à  sa  condition,  se  trouve 
parfois  en  faute  quand  il  a  le  plus  grand  compte  à  rendre. 

Il  est  maintenant,  je  pense,  temps  de  me  retirer  à  l'écart.  Je 
me  suis  trop  attardé,  vous  commencez  à  regretter  de  ne  pas 
voir  paraître  les  autres  acteurs.  Qu'ils  plaisent  à  vos  esprits,  je 
le  désire  pour  eux;  hélas!  je  n'ai  pas  ce  bonheur.  Excusez-moi, 
je  vous  prie,  je  quitte  la  place  pour  laisser  entrer  Dieu  le  Père. 


Scène  I. 

Dieu  le  Père  parle  à  ses  Anges. 

J'ai  créé  le  ciel,  le  soleil,  la  lune  et  les  étoiles,  et  aussi  le 
firmament,  la  terre  et  la  mer.  J'ordonne  à  la  terre  de  produire 
chaque  chose  en  son  temps,  selon  mon  commandement,  et  la 
grande  mer,  en  dépit  de  ses  fureurs,  devra  s'apaiser,  et  tou- 
jours me  demeurer  obéissante. 

Vous  tous,  mes  Anges,  je  vous  ai  créés  pour  m'honorer  et 
pour  célébrer  mes  louanges.  Les  autres  êtres  auront  une  fin  : 
pour  vous  il  n'y  en  aura  jamais,  vous  serez  toujours  avec  moi 
dans  mon  Paradis.  Aussi  je  vous  y  convie  :  que  vos  voix 
■triomphantes  chantent  avec  allégresse  les  louanges  de  votre 
Créateur. 

Les  Anges  chantent  en  chœur. 

Nous  rendons  avec  joie  grâces  au  Roi  du  firmament,  qui 
nous  a  créés  :  qu'il  soit  par  nous  honoré  !  Que  notre  Dieu 
soit  loué  toujours  et  pendant  toute  l'éternité  ! 


1 7 2  L'abbé  Eug.  Bernard. 


Doue  an  Tat  a  coms. 


Sur,  ma  crouadurien,  me  m'eus  contantamant, 
Rejouisset  e  oun  giien-ec'h  breman  er  firmamaiït  ; 

195  Jubile  a  reet  holl,  mar  deut  d'am  enorin, 

N'en  eus  na  droue  na  vat,  me  voar,  hep  laret  d'in. 


An  El  sant  Michel  a  coms. 

Me  a  rent  d'ac'h  graço,  Prins,  Auteur  souveren, 
D'am  besan  bet  crouet  gant  ho  crouadurien, 
Hac  a  rent  d'ac'h  graço  gant  eur  galon  joaùs, 
200  Hac  ho  trugarequa  d'am  bout  groet  cvurus. 

An  El  sant  Gabriel  a  coms. 

Nin  a  rent  graço  en  pep  amser 
D'ec'h-hu,  Doue,  hon  guir  crouer, 
D'hon  bean  groet  caer  dreist  pep-hinin, 
Hac  ho  meulodi  netra  ne  desti. 

An  El  Rafaël  a  coms. 

205  Pa  consideromp  Roue  ar  firmamant, 

Holl  hon  eus  dre  ho  cras,  pep  sort  contantamant  ; 
Nin  ho  trugarequa,  hac  ha  rent  d'ec'h  graço, 
Demeus  a  pep  faveur,  dre  hon  meulodio. 

An  El  Chérubin  a  coms. 

Prins  hac  Auteur  ar  bet  demeus  a  pep  amser, 
210  Nin  a  rent  omaj,  pa'n  d-oc'h  hon  guir  Croirer, 
Ha  quement  lijion  hoc'h  eus  breman  crouet, 
Gant-he,  en  pep  amser,  e  veet  enoret. 

An  El  Séraphin  a  coms. 

O  Doue,  ma  Crouer,  peguer  bras  sclerijen  ! 

Na  peguement  a  joa  am  eus  en  ho  quichen  ! 

215    Houi  rent  d'ho  crouadur  pep  sort  contantamant, 

Houi  hell  bean  enoret  partout  er  firmamant. 


La  Cféation  du  monde.  173 

Dieu  le  Père. 

Certainement,  Anges  créées  par  moi,  je  suis  satisfait,  et  vous 
me  réjouissez  dans  les  splendeurs  du  firmament.  Vous  ferez 
tous  fête,  si  vous  venez  me  rendre  hommage.  Il  n'y  a  ni  bien 
ni  mal  que  je  ne  sache,  sans  que  vous  me  le  disiez. 

L'Ange  saint  Michel. 

Je  vous  rends  grâces,  Prince,  Auteur  souverain,  de  m'avoir 
donné  l'être  avec  vos  autres' créatures,  je  vous  rends  grâces  le 
cœur  rempli  de  joie,  et  je  vous  remercie  de  la  félicité  dont 
vous  me  comblez. 

L'Ange  saint  Gabriel. 

Nous  vous  rendons  grâces  en  tout  temps,  à  vous,  Dieu, 
notre  Créateur,  de  nous  avoir  créés  plus  beaux  que  tous  les 
autres  :  nous  vous  bénissons,  et  rien  ne  saurait  arrêter  nos 
louanges. 


'5* 


L'Ange  Raphaël. 

Quand  nous  vous  contemplons,  Roi  du  firmament,  tous 
par  votre  grâce,  nous  jouissons  d'un  bonheur  parlait.  Nous 
vous  disons  merci,  et  par  nos  louanges,  nous  vous  rendons 
grâces  de  tous  vos  bienfaits. 

Un  Chérubin. 

.  Prince,  et  de  tout  temps  Auteur  du  monde,  nous  vous  ren- 
dons hommage  à  vous,  notre  Créateur.  Que  chaque  légion 
d'Anges  créés  à  cette  heure  par  vous,  ne  cesse  jamais  de  vous 
honorer  ! 

Un  Séraphin. 

O  Dieu,  mon  Créateur  !  Quelle  lumière  éclatante  !  Quelle 
joie  nous  goûtons  auprès  de  vous  !  Vous  donnez  à  vos  créa- 
tures une  félicité  sans  bornes,  et  vous  méritez  d'être  honoré 
dans  toute  l'étendue  des  Cieux. 


174  L'abbé  Eug.  Bernard. 


Lucibel  a  coms. 

Gant  reson  bras  d'in  em  spi  a  disqucr  : 

Me  a  so  scier  ha  fin  ha  dign  d'eus  al  lumier, 

Me  so  caer  ha  puissant  ha  savet  tout  antier, 
220  Ne  n'eus  El  groet  en  env  evel  d'oun,  en  eur  guer; 

Me  a  so  El  groet  en  env,  esper  a  guemeran 

Da  sevel  huelloc'h,  em  eus  avis  breman. 

Me  a  bretant  monet  en  quefer  Doue  an  Tat, 

Pa'n  d'oun  quen  caer  hac  hen,  se  a  voelet  erfat  : 
225  Pa'n  d'oun  caer  ha  subtil,  gentil,  abil  ha  net, 

E  in  en  lie  quichen,  reson  eo  d'in  monet. 
Me  so  scier,  me  so  dign,  me  so  illuminant, 

Me  a  so  caerran  El  so  crouet  er  firmamant, 

Me  a  gle  quentan,  ia,  ne  doutet  quet, 
230  Bean  oun  pur  savant,  e  dlean  bout  enoret, 

Hac  evel  un  Doue  me  a  gle  bout  puissant, 

Ha  dreist  an  holl  Elle  me  die  bout  trionfant. 
A  nep  ardeur  na  ve  formet, 

Quen  caer  ha  me  ne  cafet  quet. 
235   Me  a  ia  huel,  hac  em  guelet, 

Gant  ho  cusul  ive  guiriec. 

Hervé  ho  santimant  hac  ho  tiscretion, 

Arhele,  deut  d'am  spi  ha  d'am  ompinion. 

Me  a  rai  ma  folis  pur,  hac  herve  ar  reson, 
240  Dirac  Doue  en  eur  si,  da  vout  en  lie  quichen. 

Me  a  tell  d'in  bean  en  quefer, 

Er  plas-se,  hep  si,  em  gueler. 
Me  eo  Lucibel,  arc'hel  mat, 

A  ia  da  roue  gant  Doue  an  Tat. 
245   Cos  Elle  glan!  me  ia  ous  crec'h, 

Na  chommin  mui  aman  guen-ec'h. 

Me  a  hell,  certen,  hep  doutans, 

P'am  eus  speret  ha  puissans, 

Monet  ous  crec'h  en  fors  Doue, 
250  Ha  bout  enoret  couls  hac  hen. 

Deut  holl  breman  da  contemplin 


La  Création  du  monde.  1 7  $ 


Lucibel. 


J'ai  grande  raison  de  me  le  bien  mettre  dans  l'esprit  :  je 
suis  brillant,  intelligent  et  digne  de  toute  splendeur.  Oui,  je 
suis  beau,  puissant,  merveilleusement  doué,  et,  en  un  mot, 
au  Ciel  il  n'y  a  pas  un  Ange  a  m'égaler.  Ma  place  est  au  Ciel, 
et  j'ai  l'espoir  de  monter  plus  haut;  j'en  arrête  maintenant  le 
dessein.  Je  prétends  m'élever  auprès  de  Dieu  le  Père,  car  je 
suis  aussi  beau  que  lui,  vous  le  voyez  parfaitement.  Puisque 
je  suis  beau,  intelligent,  gracieux,  habile  et  sans  tache,  je  mon- 
terai m'asseoir  a  ses  côtés. 

Je  suis  brillant,  parfait,  resplendissant,  je  suis  l'Ange  le  plus 
beau  créé  au  firmament,  je  dois  être  le  premier,  oui,  n'en 
doutez  pas,  je  suis  un  vrai  savant,  je  dois  être  honoré  comme 
tel;  comme  un  Dieu  je  dois  être  puissant,  et  au-dessus  de  tous 
les  Anges,  je  dois  poser  en  triomphateur. 

Aucune  flamme  ne  pourrait  donner  naissance  à  un  Ange 
aussi  beau  que  moi  ;  mon  pareil,  vous  ne  sauriez  le  trouver. 
Je  vais  monter,  et  vous  en  serez  témoins,  suivant  vos  conseils 
dictés  par  la  vérité.  Laissez-vous  conduire  par  votre  sentiment 
et  par  votre  sagesse,  Archanges,  rangez-vous  à  mon  avis  et  à 
mon  opinion.  Je  réaliserai  ma  folle  idée,  et,  en  toute  justice, 
je  vais,  d'un  bond,  m'élancer  devant  Dieu,  m'asseoir  à  ses 
côtés.  Je  veux  être  auprès  de  lui,  et,  sans  peine,  on  me  verra 
occuper  cette  place. 

Je  suis  Lucibel,  le  brillant  Archange,  je  vais  partager  la 
royauté  de  Dieu  le  Père.  Pauvres  Anges  !  je  monte  plus  haut, 
je  ne  reste  pas  davantage  ici,  avec  vous.  Je  peux  assurément, 
sans  aucun  doute,  puisque  j'ai  esprit  et  puissance,  m'élever 
envers  et  contre  Dieu,  et  recevoir  les  mêmes  honneurs  que 
lui. 


Venez  tous  maintenant  me  contempler  dans  la  gloire  qui 


176  L'abbé  Eug.  Bernard. 

Ebars  er  gloar  a  recevin. 
Me  ia  da  cresquin  ma  joaio, 
Hac  em  quichen  me  ho  plaço. 

Saut  Michel  a  coms. 

255   Ah!  Lucibel,  pes  esperans 

So  deut  d'it  ?  M'oud-de  hep  doutans  ? 
Toll  plet  o  tont  d'en  eum  avans, 
Ne  raes  fot  dre  arogans. 

Ar  quentan  El  fall  a  coms. 

D'en  eum  avans  na  douj  reson, 
260  Da  jujin  arri  n'e  quistion. 

Gant  Doue,  hep  si,  birviquen, 
Hac  evurus  en  he  quichen. 

Lucibel  a  coms. 

Me  ia  da  sevel  d'a-vreman, 
Gant  Doue,  en  degré  huellan. 
265  Ha  pebes  ébat  am  bo-me, 
Pa  vesin  hanval  ous  Doue  ! 

An  El  Gabriel  a  coms. 

Elle  direson,  hep  gonit, 
Dout  bras  am  eus  na  viet  evit. 
Rebelant  oc'h  ous  ho  Roue, 
270  En  deus  ho  crouet,  couls  ha  me. 

An  eil  El  fall  a  coms. 

Arsa  !  sao,  ha  groa  da  profit, 
Me  lar  es  eo  gaou  a  lar  d'it. 
Te  a  so  quer  savant  ha  ma  e  Dont, 
Pa'n  d'out  caer,  jolis  er  guis-se  : 
275   Quen  caer  ha  Doue  as  crouas, 
Out,  certen,  dre  ordrenans  vras. 
Goure,  ha  deus,'  ne  aret  quet, 
El  lec'h  ma  vi  çlorifiet. 


La  Création  du  monde.  177 

m'attend  :  je  vais  accroître  ma  félicité,   et  je  vous  donnerai 
place  auprès  de  moi. 

Saint  Michel. 

Ah  !  Lucibel  !  Quelle  espérance  est  la  tienne  ?  N'as-tu  pas  de 
crainte  ?  Prends  garde  ;  en  voulant  avancer,  tu  pourrais  tomber 
par  orgueil. 

Le  premer  Ange  mauvais. 

D'avancer  rien  ne  saurait  l'empêcher.  De  le  juger  une  fois 
arrivé,  il  n'en  est  pas  question.  Sans  peine,  à  tout  jamais,  il 
sera  avec  Dieu  et  a  ses  côtés  éternellement  heureux. 

Lucibel. 

Je  vais  m'élever  à  l'instant  même  à  la  plus  haute  place, 
auprès  de  Dieu.  Quels  ne  seront  pas  mes  transports  d'allé- 
gresse, lorsque  je  serai  semblable  à  Dieu  ? 

L'Ange  Gabriel. 

Anges  insensés,  je  crains  bien  que  vous  ne  vous  en  tiriez 
sans  succès.  Vous  vous  révoltez  contre  votre  Roi  qui  vous  a 
créés  aussi  bien  que  moi. 

Le  second  Ange  mauvais. 

Or  çà  !  Lève-toi  et  fais-en  ton  profit  :  tout   cela  n'est  que 
mensonge.  Tu  es  aussi  savant  que  Dieu.  Tu  es  beau,  gracieux 
dans  tes  manières  ;  aussi  beau  que  Dieu  qui  t'a  créé,  tu  l'es 
certes,  par  une  disposition  merveilleuse.  Monte  donc,  et  viens, 
sans  arrêter,  à  la  place  où  tu  seras  glorifié. 


78  L'abbé  Eug.  Bernard. 


An  El  Rafaël  a  coms. 

Lucibel,  se  ne  ve  quet  mat  : 
280  Houi  a  deu  da  ofansiu  Doue  an  Tat. 
Teulet  evoes,  daouest  d'ho  gloar, 
Na  goesac'h  en  profont  an  douar. 
Daouest  d'as  cheonin,  nac  ive  d'as  guenet, 
Teulet  plet,  mar  queret,  n'en  eum  cafac'h  tromplet. 

An  trivet  El  fall  a  coms. 

285  Te  a  so  mat,  hanvat  natur, 
Te  a  so  jentil  ha  bel  ha  fur. 
Me  a  lar  d'it,  mar  credes  d'in, 
E  helles  ober  hep  doutin. 

Lucibel  a  coms. 

Hanvat  oun  en  natur,  assur,  ha  pur  ha  net, 
290  Na  quen  caer  gant  Doue  biscoas  ne  voe  crouet. 
Avis  a  ra  guen-en,  demeus  a  sclerijen 
Carguet  ar  Barados,  assur,  divoar  ma  len. 
Rac-se,  me  ho  pet  holl,  pa'm  guelet  o  sevel, 
Ha  me  prest  da  pignal  voar  an  tron  éternel, 
295   Houi  a  veso  presant,  pa  vesin  curunet 
Da  Doue,  da  roue  gant  an  holl  enoret. 
Clevet  ous  ma  feden,  mar  queret  ma  senti n  : 
Ar  sigen  huellan,  credet,  so  gleet  d'in, 
Rac  em-berr  em  guelet,  gleet  eo  d'in  se, 
300  En  eur  gador  excelant,  ha  me  prins  ha  Doue. 
Breman  me  ia  ractal,  pelloc'h  ne  dartin  quet, 
Deut  guen-en  assambles  da  vout  glorifiet. 

Ar  hentan  fos  El  a  coms. 

Quen  caer  pep  quentel  a  voelan, 
Evel  an  Doue  advouan  : 
305   Ha  mar  d'out,  pign  pa  guéri, 
Me  a  so  prest  d'as  segondin. 


La  Création  du  monde.  179 


L'Ange  Raphaël. 

Lucibel,  ce  ne  serait  pas  bien  !  Vous  allez  offenser  Dieu  le 
Père.  Gardez-vous,  en  dépit  de  votre  gloire,  de  tomber  au 
plus  profond  de  la  terre.  Malgré  votre  beauté,  malgré  votre 
splendeur,  prenez  garde,  si  vous  m'en  croyez,  de  vous  trouver 
déçu. 


Le  troisième  mauvais  Ange. 

Tu  es  bon,  très  bon  par  nature.  Tu  es  gracieux.  Tu  es 
beau,  tu  es  sage.  Je  te  le  dis,  si  tu  veux  m'en  croire,  tu  peux 
agir  sans  hésiter. 


Lucibel. 

Je  suis  très  bon  par  nature,  c'est  vrai,  et  brillant,  et  sans 
tache.  Jamais  rien  d'aussi  beau  ne  fut  créé  par  Dieu.  Il  me 
semble,  en  vérité,  que  le  Paradis  est  tout  resplendissant  de  la 
lumière  qui  rayonne  sur  ma  tète.  Aussi,  je  vous  en  prie  tous, 
lorsque  vous  me  verrez  m' élever,  et  prêt  à  monter  sur  le  trône 
de  l'Eternel,  soyez  présents  à  mon  couronnement,  quand, 
Dieu  et  Roi,  je  recevrai  tous  les  hommages.  Rendez-vous  à 
mon  invitation,  si  vous  voulez  m'obéir.  La  plus  haute  place, 
croyez-le,  m'est  bien  due.  C'est  pourquoi,  dans  un  instant 
vous  me  contemplerez,  oui,  cela  m'est  bien  dû,  assis  sur  un 
siège  étincelant,  et  je  serai  Prince  et  Dieu.  J'y  vais  de  suite, 
je  ne  différerai  pas  davantage  ;  venez  tous  avec  moi  afin  d'être 
glorifiés. 


Le  premier  Ange  mauvais. 

Tu  es,  pour  tout  dire,  aussi  beau  que  Dieu,  je  le  vois. 
Oui,  je  te  reconnais  Dieu.  Si  tu  l'es  en  vérité,  monte  quand 
il  te  plaira,  je  suis  prêt  à  te  soutenir. 


1 8o  Vabbè  Eug.  Bernard. 

An  eil  ios  El  a  coms. 

Pignet,  pa  gueret,  Lucibel, 
En  quefer  an  Tat  Eternel  ; 
Houi  a  so  dign  evit  monet, 
310  Ha  bean  guen-imp-ni  enoret. 

Lucibel  a  coms. 

Arsa  !  ma  lijion  choaset, 
Ha  houi  a  so  eta  preparet  ? 
Houi  am  eus  choaset  gratius 
Da  vean  guen-en  evurus. 

Sant  Michel  a  coms 

315   Lucibel  drouc  a  studies, 

Hac  ous  gual  cusul  e  sentes  :  • 
Me  a  lar  d'it  hoas  divoallan, 
Rac  Doue  a  liell  da  punissan. 

An  trivet  ibs  El  a  coms. 

Lucibel,  breman  na  lequet  si, 
320  Groet-hu  breman  ho  fantasi. 
Houi  a  verit  bean  enoret 
Gant  an  heol,  loar  ha  steret. 

An  El  Séraphin  a  coms. 

O  Doue,  ma  Crouer,  houi  die  bean  enoret 
Gant  quement  so  breman,  nac  a  veso  er  bet. 

325   Mes  breman  me  a  voel  ho  crouadur  méchant 
Enep  ho  polante,  sivoas  !  so  rebelant. 
Mes  houi  en  deus  pouvoir  voar  quement  mat  a  so, 
Quencouls  et  firmamant  hac  er  planedenno, 
Hac  a  hell  punissan  an  holl  criminalet 

330  A  so  o  concluin  aman  holl,  ho  enep. 

An  El  Chérubin  a  coms. 
Clevet  hoas,  Lucibel,  me  ho  pet  a  galon, 


La  Création  du  monde.  181 

Le  second  Ange  mauvais. 

Montez,  Lucibel,  montez  quand  vous  voudrez,  auprès  du 
Père  Eternel;  vous  êtes  digne  d'aller  y  prendre  place,  et  vous 
méritez  que  chacun  de  nous  vous  rende  ses  hommages. 


Lucibel. 

Or  ça  !  ma  légion  d'élus,  êtes-vous  prêts  ?  Je  vous  ai  choisis 
par  faveur,  pour  partager  avec  vous  ma  félicité. 


Saint  Michel. 

Lucibel,  c'est  mal  ce  que  tu  entreprends,  et  tu  suis  de  mau- 
vais conseils.  Je  te  le  redis  encore,  prends  garde,  Dieu  pour- 
rait te  châtier. 


Le  troisième  Ange  mauvais. 

Lucibel,  à  présent  ne  vous  mettez  plus  en  peine,  et  faites 
donc  à  votre  fantaisie.  Vous  méritez  d'être  entouré  d'honneurs 
par  le  soleil,  la  lune  et  les  étoiles. 


L'Ange  Séraphin. 

O  Dieu,  mon  Créateur,  vous  devez  être  honoré  par  tout  ce 
qui  est  et  qui  sera  dans  le  monde.  Et  en  ce  moment,  je  vois 
vos  créatures  perverses  se  révolter,  hélas  !  contre  votre  volonté. 
Mais  vous  avez  puissance  sur  tout  ce  qui  existe,  vous  régnez 
au  firmament,  vous  commandez  sur  les  planètes,  vous  pouvez 
punir  tous  les  coupables  unis  ici  pour  comploter  contre  vous. 


L'Ange  Chérubin. 

Ecoutez  encore,  Lucibel,  du  fond  du  cœur,  je  vous  en  prie. 
Revue  Celtioue,  IX  12 


1 8 2  L'abbé  Eug.  Bernard. 

En  eu  m  strinquet  d'an  daoulin,  evit  goulen  pardon 
Ous  an  Tat  Eternel,  en  deveus  ho  crouet, 
Hac  ho  groet  ar  caerran  demeus  an  holl  Elet. 

Lucibel  a  coms. 

335   Caer  hoc'h  eus,  Chérubin,  parlant  pelloc'h  ous-in  : 
Er  sigen  huellan  breman  eo  e  pignin  ; 
Me  a  prêtant  penos  e  vesin  enoret 
Couls  ha  Doue  an  Tat  en  deveus  ma  crouet, 
Ha  bean  evurus  couls  hac  hen  en  envo, 

340  Hac  me  gret  e  vin  mest  voar  ar  planedenno... 
Houi  a  so  prest,  preparet,  ma  mignonet, 
Da  dont  da  choas  plas  en  pales  an  Drindet  ? 
Me  a  rei  d'ac'h  eno  pep  a  curun  neve, 
Nemet  m'anaveet  evit  ar  guir  Doue. 

345       Demp  breman  assambles,  ha  ne  aretomp  quen  : 
Me  voel  Doue  an  Tat,  hac  a  ia  d'he  quichen. 

Ar  fos  Elle  ha  Lucibel  a  ia  da  gaet  Doue  an  Tat. 

Doue  an  Tat  a  coms. 

Aret,  aret,  crouadur  disleal  ! 

Me  a  so  mest  hac  auteur  d'ar  gloar, 

Hac  a  verit  ive  ma  vesin  enoret 
350  Gant  quement  mat  ara  eus  crouet. 

Ma  carjes  te  a  voa  em  presans  evurus, 

Ha  breman  te  a  vo  birviquen  malurus  ; 

Te,  ha  da  lijion,  assambles  a  goeo 

En  profont  an  Ifern,  en  tan  hac  er  flamo. 
355   En  pep  sort  deliço  te  poa  contantamant  : 

Birviquen,  m'es  assur,  n'as  pe  nemet  tourmant. 

Da  hano  am  boa  laquet  em  presans,  Lucibel  : 

Mes  te  a  vo  birviquen  Lucifer. 

Te  am  boa-de  lequet  an  enoran  am  lijion  : 
360  Te  vo  an  teruplan  a  vo  en  Ifern  don. 

Me  am  boaroet  d'it  pep  sort  contantamant, 

Mes  birviquen  pelloc'h  n'as  pe  nemet  tourmant. 


La  Création  du  monde.  183 

Jetez-vous  à  genoux  et  demandez  pardon  au  Père  Eternel  qui 
vous  a  créé,  et  a  fait  de  vous  le  plus  beau  de  ses  Anges. 


Lucibel. 

Tu  as  beau  parler,  Chérubin  :  inutile  d'insister  davantage 
près  de  moi.  Je  vais  maintenant  monter  à  la  place  la  plus 
élevée.  Je  prétends  être  honoré  tout  comme  Dieu  le  Père  qui 
m'a  créé,  être  tout  comme  lui,  heureux  au  Ciel,  et  j'entends 
même  étendre  mon  empire  sur  les  planètes... 

Et  vous,  mes  amis,  êtes-vous  préparés  ?  Etes-vous  prêts  à 
venir  choisir  vos  places  dans  le  palais  de  la  Trinité  ?  Là,  je 
vous  distribuerai  à  chacun  une  belle  couronne,  à  condition 
toutefois,  que  vous  me  reconnaissiez  pour  vrai  Dieu. 

Allons  à  l'instant  tous  ensemble,  ne  tardons  pas  davantage. 
Je  vois  Dieu  le  Père,  et  je  monte  m'asseoir  à  ses  côtés. 
Lucibel  et  les  Mauvais  Anges  se  dirigent  vers  Dieu  le  Père. 

Dieu  le  Père. 

Arrête,  arrête  !  Créature  déloyale  !  Je  suis  maître  ici,  je  suis 
l'auteur  de  la  gloire,  je  mérite  aussi  d'être  honoré  par  tout  ce 
qui  existe,  par  tout  ce  que  j'ai  créé.  Quant  à  toi,  si  tu  l'avais 
voulu,  tu  aurais  en  ma  présence,  joui  d'une  félicité  sans  limites, 
et  maintenant  tu  seras  à  jamais  malheureux.  Toi  et  toute  ta 
légion  d'Anges,  vous  serez  précipités  au  fond  des  Enfers,  au 
milieu  du  feu  et  des  flammes.  Toutes  sortes  de  délices  étaient 
ton  partage  et  te  donnaient  pleine  satisfaction  :  désormais,  je 
te  l'affirme,  tu  n'auras  que  tourments.  Je  t'avais  appelé  Lu- 
cibel pour  te  tenir  en  ma  présence  :  désormais  ton  nom  sera 
Lucifer.  Je  t'avais  créé  le  plus  beau  de  tous  mes  Anges  :  tu 
seras  le  plus  terrible  habitant  des  Enfers.  Je  t'avais  accordé 
toute  espèce  de  joies  :  désormais  tu  ne  vivras  que  pour  souffrir. 


184  L'abbé  Eug.  Bernard. 

Me  a  laqua  eur  chaden  dira-out,  da  voelet 
Birviquen  na  ve  fin  d'as  tourmancho  calet. 
365   llac  se  me  gomant  d'ac'h  breman,  incontinant, 
Da  goean  voar  da  pen  en  crois  ar  flam  ardant  ; 
Te  disquenno  ebars,  quencouls  da  lijion, 
Me  ro  guen-it  breman  ma  malédiction. 

Aman  e  coeont  tout  en  Ifern,  ha  ma  criont  tout. 

Fors  !  fors  !  ar  goms-man,  assur,  a  so  poner  ! 
370  Ar  valediction  diant  un  Doue  éternel. 

Gant  eur  goms  hep  mui  quen,  en  deus  bon  strinquet 
Da  goean  er  poanio  brassan  a  oufet  da  gaet. 

Doue  an  Tat  a  corns  ous  an  Elle  mat. 

Goude,  ma  holl  Elle,  goude  an  devoes  bras, 

Hae  ar  maleur  arri  voar  nep  am  ofansas, 
375   Memeus  dre  ho  ourgouil  hae  ho  superbite, 

Ho  deto  an  tan  flam  entre  ma  vin  Doue. 

Mes  houi,  ma  mignonet,  père  so  bet  fidel, 

Am  anevet  bepret  evit  ho  guir  crouer. 

Me  ho  confirm  breman,  Elle  gloan  ;  hep  anvi, 
380  Ha  gras  ar  Speret  gloan,  groet  can  ha  meulodi, 

Rentet  graço  laouen,  quen  certen  pep-hinin, 

D'ho  Crouer,  d'ho  Doue,  ho  mir  bac  ho  casti. 

Guelet  hoc' h  eus  suplis  an  nep  n'am  anve  quet  : 

Mes  houi  so  bet  fidel,  perseveret  bepret. 
385   Concluet  em  eus,  dre  gras  ar  Speret  gloan, 

Da  lemel  pep-hinin  a  danjer  bac  a  poan  ; 

Birviquen,  m'ho  assur,  na  veso  ataquet 

Nicun  er  Barados,  gant  ourgouil  na  pec'het; 

Disquaret  am  eus  tout  soursen  ar  vanité, 
390  M'ho  conservo  bepret,  evel  ma  oun  Doue. 

An  Elle  a  cano. 

Drindet  santel,  Auteur  ar  gloar, 
Crouer  d'an  env  ha  d'an  douar, 
Nin  gant  joa,  a  voir  galon, 
A  rai  meulodi  da  Roue  au  trou, 


Llî  Création  du  monde.  18$ 

Devant  toi  j'attache  une  chaîne  pour  montrer  qu'il  n'y  aura 
pas  de  fin  à  tes  tortures.  Maintenant  donc,  à  l'instant,  sur 
mon  commandement  tombez  la  tête  la  première  au  milieu  des 
flammes  ardentes,  toi,  Lucifer,  avec  tous  tes  partisans,  et  je 
vous  donne  ma  malédiction. 

Ici  ils  tombent  tous  en  Enfer,  et  tous  crient: 

Malheur  !  Malheur  !  Que  cette  parole  est  écrasante  !  La  ma- 
lédiction d'un  Dieu  éternel  !  D'un  mot  seul  il  nous  a  préci- 
pités et  plongés  dans  la  souffrance  la  plus  grande  qui  se  puisse 
imaginer. 

Dieu  le  Père  s'adresse  aux  bons  Anges. 

Mes  Anges,  après  ce  grand  jour  où  j'ai  châtié  tous  ceux  qui 
m'ont  offensé  par  leur  audace  et  leur  orgueil,  les  flammes  ar- 
dentes seront  leur  séjour  tant  que  je  serai  Dieu.  Mais  vous, 
mes  amis,  vous  qui  m'êtes  restés  fidèles,  reconnaissez  toujours 
en  moi  votre  véritable  Créateur. 

Esprits  célestes,  je  vous  confirme  maintenant  en  grâce. 
Sans  hésiter  et  par  la  vertu  de  l'Esprit-Saint,  chantez  en  chœur, 
célébrez  mes  louanges,  rendez  grâces,  tous  sans  exception, 
d'une  voix  joyeuse,  a  votre  Créateur,  à  votre  Dieu,  qui  vous 
garde  et  qui  vous  corrige.  Vous  avez  été  témoins  de  la  puni- 
tion de  ceux  qui  ne  me  reconnaissaient  point.  J'ai  décidé,  par 
la  grâce  de  l'Esprit-Saint,  de  vous  soustraire  tous  à  la  peine  et 
au  danger.  Jamais,  je  vous  le  jure,  aucun  de  vous  ne  sera  sol- 
licité au  Paradis  par  une  tentation  d'orgueil  ou  d'autre  péché. 
J'ai  séché  toutes  les  sources  de  la  vanité.  Je  vous  sauvegar- 
derai toujours,  vrai,  comme  je  suis  Dieu. 


Les  Anges  chanteront  en  chœur. 

Trinité  sainte,  Auteur  de  la  gloire,  Créateur  du  ciel  et  de 
la  terre,  tous  ensemble,  avec  grande  joie  et  de  bon  cœur, 
nous  célébrons  les  louanges  du  Roi  tout-puissant, 


1 86  L'abbé  Eug.  Bernard. 

395  En  deus  bon  hrouet  a  netra, 

Hac  hon  miret  ous  estrenvoa. 


An  El  sant  Michel  a  coins. 

Doue  éternel,  da  vout  meulet  ! 

Nin  so  guen-ec'h-hu  beniguet, 

Nin  a  so  caer  ha  livrin  ha  sinet, 
400  Hac  a  viquen  leun  a  henet. 

Hon  holl  respet  eo  guelet  Doue, 

Evel  hon  Crouer,  hon  Roue. 
Me  eo  Michel,  prins  an  Elle, 

D'ec'h,  Doue  an  Tat,  e  credan  se, 
405  A  rent  graço,  joaio  neve, 

Pa'n  d-omp,  certen,  en  levene. 

Chérubin  a  coms. 

Tat  éternel,  na  doutomp  quet, 
Houi,  sur,  a  gle  boutenoret; 
Rac  dre  ho  puissans  divin, 
410  Houi  en  deus  hon  laquet,  hep  lin, 
Da  jouissan  pep  meulodi, 
Hep  caet  tourmant  nac  anvoi. 

Séraphin  a  coms. 

Goudt  an  holl  disir  an  Drindet. 
Presant  gant  Doue  nin  so  crouet, 

415   Hac  ous  pep  piril  divoallet, 
Hac  Elle  glan  ha  biniguet. 
Rac-se  rentomp  d'ehan  graço, 
D'hon  bean  crouet  en  envo, 
Hon  preservet  ous  an  danjer 

420  A  so  arriet  gant  Lucifer. 


La  Création  du  monde.  187 

qui  nous  a  créés  de  rien  et  préservés  de  la  perdition. 


L'Ange  saint  Michel. 


Dieu  éternel,  soyez  loué  !  Votre  bénédiction  s'est  répandue 
sur  nous,  nous  sommes  brillants,  joyeux,  confirmés  en  grâce 
et  pour  toujours  resplendissants  de  beauté.  Tout  notre  bon- 
heur est  de  voir  Dieu,  notre  Créateur  et  notre  Roi. 


[e  suis  Michel,  prince  des  Anges.  A  vous,  Dieu  le  Père,  à 
vous,  en  qui  je  crois  fermement,  je  rends  grâces  par  de  nou- 
veaux cantiques  d'allégresse,  puisque  nos  cœurs  sont  assuré- 
ment tous  dans  la  jubilation. 

Un  Chérubin. 

Père  éternel,  nous  n'en  doutons  pas,  vous  êtes  digne  de 
tout  honneur.  Par  un  effet  de  votre  puissance  souveraine, 
vous  nous  avez  constitués  pour  chanter  perpétuellement  vos 
louanges,  sans  crainte,  sans  ennui. 


Un  Séraphin. 

Tel  est  l'unique  désir  de  la  sainte  Trinité.  Dieu  nous  a 
créés,  il  nous  a  protégés  de  tout  péril,  et  bénis  comme  Anges 
sans  tache.  C'est  pourquoi  rendons-lui  grâces  de  nous  avoir 
placés  au  Ciel  et  préservés  du  danger  où  a  succombé  Lucifer. 


1 88  L'abbé  Eug.  Bernard. 

Senne  II. 
An  diaoulien  a  antre  en  eur  grial  ous  ar  bet. 

Satanas  a  coms. 

I  [aro  !  ha  gant  ar  fin  hac  araj  arajet  ! 
Chede  nin  d'eus  an  envo  en  douar  discaret, 
Da  soufrin  an  tan  flam,  ar  cruellan  poanio  : 
Ha  ma  carjemp  e  voamp  evurus  en  envo. 

Berit  a  coms. 

425   Satanas  miliguet,  gant  da  holl  vanité, 

Dre  ma  voas  ar  caerran  demeus  an  holl  Elle. 
Sell  breman  da  figur,  quencouls  hac  hon  hinin  : 
Ha  hoas  beout  er  flam  birviquen  o  lesquin. 

Astarot  a  coms. 

Satanas  miliguet,  mallos  ar  firmamaut 
430  Da  goeso  hoas  voar-n-out  !  te  so  caus  d'han  tourmant, 
Mar  carjes,  nin  a  voa  o  c;\n;\n  meulodi  : 
Ha  chede  nin  breman  en  Ifern  o  lesquin. 

Belsibut  a  coms. 

Mil  malédiction  a  ran  d'it,  Satanas, 
Rac  te  a  so  quiriec  d'hon  tourmancho  divlas, 
435   A  rencomp  da  soufrin,  hep  caet  esperans 
Da  garet  mui  Doue,  na  guelet  he  presans. 

Asmode  a  coms. 

Satanas,  ha  te  a  so  breman  contant 
Bout  renoncet  d'ar  firmamaut  ? 
Te  a  lare  bout  eur  veach  curunet 
440  En  envo  huellan,  ha  voar  an  holl  Elet  : 
Collet  eo  guen-it  da  curun, 
Ha  te  cr  poanio  disaun. 


La  Création  du  monde.  189 

Scène  II. 
Les  diables  entrent  en  criant  malédiction  contre  le  monde. 

Satan. 

Haro  !  Et  pour  tout  dire,  fureur  et  rage!  Nous  voici  préci- 
pités du  Ciel  dans  les  abîmes,  pour  souffrir  au  milieu  des 
flammes  ardentes,  les  plus  cruels  supplices.  Et  si  nous  l'avions 
voulu,  nous  serions  encore  heureux  au  Ciel  ! 

Berit. 

Satan,  maudit  sois-tu  avec  tout  ton  orgueil,  parce  que  tu 
étais  le  plus  beau  des  Anges.  Regarde  maintenant  ta  figure 
aussi  bien  que  la  nôtre.  Et  de  plus,  être  condamnés  à  brûler 
éternellement  dans  les  flammes  ! 

Astarot. 

Satan  maudit,  que  la  malédiction  du  ciel  tombe  encore  sur 
toi  !  Tu  es  la  cause  de  notre  ruine.  Si  tu  l'avais  voulu,  nous 
serions  au  Ciel  à  chanter  des  hymnes  de  louantes.  Et  nous  voici 
maintenant  en  Enfer,  où  nous  brûlons  au  milieu  des  flammes. 

Beelzébut. 

Mille  malédictions  sur  toi,  Satan,  car  c'est  toi  la  cause  des 
intolérables  tourments  qu'il  nous  faut  endurer,  sans  plus  avoir 
l'espérance  d'aimer  Dieu,  de  jouir  de  sa  présence. 

Asmodée. 

Satan,  dis,  es-tu  content  d'avoir  quitté  le  Ciel  ?  Tu  te  van- 
tais d'être  couronné  là-haut,  à  la  place  la  plus  élevée,  au- 
dessus  de  tous  les  Anges.  Tu  as  perdu  ta  couronne,  et  tu  es 
tombé  en  proie  à  des  tortures  éternelles. 


190  L'abbé  Eug.  Bernard. 

Jupiter  a  coms. 

Mallos  ar  steret  hac  al  loar, 
Mallos  an  env  hac  an  douar, 
445   D'an  nep  so  caus  ma  s-omp  collet, 
Hac  a  bresans  Doue  ha  da  vean  privet  ! 

Mahom  a  coms. 

Oh  !  pa  consideran  en  joaio  an  envo, 
Chetu  nin  quitet  demeus  a  hon  plaço  ! 
O  vont  bet  rebelant  a  enep  an  Drindet  ; 
450  Birviquen  na  oufemp  bout  gant-han  pardonet. 

Satanas  a  coms. 

Guir  a  leres  ;  certen,  achu  eo  quement-se, 

Birviquen  nep  pardon  n'hon  bo  digant  Doue. 

Groeomp  goassan  hellomp,  rac  soufrin  a  so  ret. 

Birviquen  me  veso  adversour  d'an  Drindet  : 
45  5   Ma  hallen  eur  veach  antren  er  Baradoes, 

Nin  raë  ar  bresel  da  Doue,  d'an  Eles. 

Pa  ne  hallomp  monet  da  jouissan  he  gloar, 

Beomp  adversourien  d'ehan  voar  an  douar. 

Mallos  Doue  an  Tat  hac  an  elemancho, 
460  Voar-n-hoc'h,  ma  consortet,  a  viquen  ho  peso. 

Houi  a  consantas  guen-in  e  voa  mat  ma  avis, 

Ha  breman  e  omp  holl  en  araj,  en  suplis. 


Senne  III. 


Doue  an  Tat  a  coms. 


Chetu  ar  sigeno  ar  voes-man  disoloet 
Gant  ar  re  valurus  en  deus  ma  ofancet. 
465   Me  deui  d'ho  ramplissan,  evel  ma  oun  Doue, 
Rac  an  den  a  formin  memeus  corf  hac  ine. 
Ret  eo  d'in  da  guentan  formin  ar  sclerijen, 


La  Création  du  monde.  191 

Jupiter. 

Malédiction  des  étoiles,  malédiction  de  la  lune,  malédiction 
du  Ciel,  malédiction  de  la  terre,  sur  celui  qui  est  cause  si  nous 
sommes  perdus,  et  à  jamais  privés  de  la  présence  de  Dieu  ! 

Mahom. 

Ah  !  lorsque  je  reporte  mes  regards  vers  les  joies  du  Ciel, 
je  vois  que  nous  sommes  chassés  de  ce  délicieux  séjour,  pour 
nous  être  révoltés  ^contre  la  Trinité.  Non,  jamais  nous  ne 
pourrons  obtenir  notre  pardon  ! 

Satan. 

Tu  dis  vrai.  Certes,  c'est  bien  fini,  jamais  Dieu  ne  nous 
pardonnera.  Faisons  donc  le  plus  de  mal  qu'il  nous  sera  pos- 
sible, puisque  nous  sommes  condamnés  à  souffrir.  Je  veux  être 
à  jamais  l'adversaire  de  la  Trinité.  S'il  nous  était  donné  d'en- 
trer une  fois  encore  au  Paradis,  nous  ferions  la  guerre  à  Dieu 
et  à  ses  Anges.  Puisqu'il  nous  est  interdit  de  retourner  jouir 
de  sa  gloire,  soyons  ses  ennemis  sur  la  terre.  La  malédiction 
de  Dieu  le  Père,  la  malédiction  des  éléments  pèsera  sur  vous, 
camarades,  pendant  toute  l'éternité.  Vous  avez  été  de  mon 
avis  pour  trouver  bon  mon  projet  de  révolte,  maintenant  nous 
sommes  tous  voués  à  la  rage  et  aux  supplices. 


Scèxe  III. 


Dieu  le  Père. 


Voilà  les  places  cette  fois  abandonnées  par  les  malheureux 
qui  m'ont  offensé.  Je  les  ferai  occuper,  aussi  vrai  que  je  suis 
Dieu,  car  je  vais  créer  l'homme  de  rien,  son  corps  et  son  âme. 

D'abord,  je  veux  créer  la  lumière,  qui  s'appellera  la  joie  de 


192  L'abbé  £u£.  Bernard. 

Hac  a  veso  hanvoet  holl  plijadures  an  den, 

Hac  an  heol  memeus  a  so  illuminant, 
470  Hac  a  rei  sclerijen  ebars  ar  firmamant. 

Goude  e  hinvoin  an  nos  pehini  so  tefal, 

Hen  defo  al  lumier  dious  steret  ha  loar  : 

An  nos  dre  lie  vertu  a  so  tefalijen, 

En  amser-man  a  rai  he  repos  da  bep  den... 
475        Separet  eo  breman  an  nos  dious  an  de, 

Ha  d'al  loenet  brutal  e  roan  liberté. 

Breman  e  quefin  mat  rein  ho  hano  d'an  deio, 

Ha  goude  e  formin  an  holl  planedenno  ; 

Al  lun  eo  ar  hentan,  ar  meurs,  ar  merher,  ar  iaou, 
480  Ar  guener,  ar  sadorn,  hac  ive  ar  sulio. 
Ha  breman  e  formin  an  holl  anevalet, 

Ad  labouset  nij  en  er,  er  mor  bras  ar  pesquet, 

Ar  ranet  en  dour  dous,  da  ganan  meulodi, 

Dre  ho  moes  ravissant  a  deui  d'am  enorin. 
485       Me  ia  da  formin  an  den  em  imaj  diviset, 

Demeus  a  un  tam  douar,  Adam  e  vo  hauvoet  : 

Voar  loenet  an  douar  e  vo  victorius, 

Goude  hen  a  veso  en  envo  evurus. 

Doue  a  disquenno  d'eus  he  tron  er  Barados  terest.  hac  a  formo  an  den,  ha 

ma  coms. 

Adam,  me  as  conjur  da  sevel  prontamant, 
490  Rac  te  a  so  crouet  em  imaj  excelant. 

Te  a  so  ma  mignon,  ha  birviquen  e  vi  : 

Hogon  toll  evoes  mat  da  dont  d'am  ofanci. 
■   Er  Barados  terest  me  ro  d'it  liberté, 

Quercouls  voar  ar  fres  mat,  ha  voar  loenet  goue. 
495   An  douar  dre  he  natur,  a  deui  da  produin 

A  bep  sort  lousou  mat  evit  da  recrein. 
Quement  a  so  crouet  er  bet  antieramant, 

A  veso,  ma  mignon,  d'id-de  obéissant. 

Debr  hac  ef,  ma  mignon,  ar  sort  goût  a  guéri, 
500  Ar  voeen  a  vue  so  ret  da  exantin. 

Te  a  so  immortel  entre  vi  em  graço, 

Te  hallo  jouissan  a  bep  sort  deliço. 


La  Création  du  monde.  19? 

l'homme,  le  soleil  dans  les  deux  pour  illuminer  tout  et  pour 
répandre  la  lumière  à  travers  le  firmament.  Ensuite,  je  don- 
nerai son  nom  à  la  nuit  qui  est  obscure,  et  qui  empruntera  sa 
clarté  à  la  'lune  et  aux  étoiles.  La  nuit  par  sa  nature  est  té- 
nèbres, et  en  ce  temps-ci,  elle  procurera  le  repos  à  chacun... 


La  nuit  et  le  jour  sont  maintenant  séparés,  et  je  mets  en 
liberté  les  animaux  féroces.  Il  me  plaît  d'appeler  les  jours  par 
leurs  noms,  après  quoi  je  créerai  toutes  les  planètes.  Le  Lundi 
est  le  premier  jour,  puis  suivront  le  Mardi,  le  Mercredi,  le 
Jeudi,  le  Vendredi,  le  Samedi  et  le  Dimanche. 

A  cette  heure,  je  veux  créer  tous  les  animaux,  les  oiseaux 
qui  volent  dans  l'air,  les  poissons  dans  la  grande  mer,  dans 
l'eau  douce  les  grenouilles,  pour  chanter  mes  louanges,  et  me 
rendre  honneur  par  leurs  concerts  ravissants. 

Je  vais  former  l'homme,  le  laçonner  à  mon  image,  le  tirer 
d'un  peu  de  terre  :  il  s'appellera  Adam.  Il  aura  puissance  sur 
les  animaux  de  l'univers,  et  dans  la  suite,  il  sera  heureux  au 
Ciel. 

Dieu  descendra  de  son  trône,  dans  le  Paradis  terrestre,  et  formera  l'homme. 
Ensuite  il  parle. 

Adam,  je  te  l'ordonne,  lève-toi  piomptement.  Je  t'ai  créé 
ressemblant  à  mon  image  divine.  Tu  es  mon  ami,  et  tu  le 
seras  toujours,  mais  prends  bien  garde  de  te  laisser  aller  à 
m'offenser.  Au  Paradis  terrestre  je  te  donne  la  libre  disposition 
des  fruits  de  choix  et  des  animaux  sauvages.  La  terre,  de  sa 
nature,  produira  toute  espèce  de  légumes  pour  ta  nourriture. 


Tout  ce  qui  existe  au  monde,  tout,  mon  ami,  sera  soumis 
à  tes  lois.  Mange  et  bois,  mon  ami,  ce  qui  te  fera  plaisir  :  à 
l'arbre  de  vie  seul,  tu  ne  toucheras  pas.  L'immortalité  est  et 
sera  ton  partage,  tant  que  tu  resteras  en  état  de  grâce,  et  tu 
pourras  jouir  de  toutes  sortes  de  délices. 


194  L'abbé  Etog.  Bernard. 

Adam  a  coms. 

Ma  Mest  ha  ma  Autro,  me  ho  trugarequa 
Evit  ma  bout  crouet,  me  a  voel,  a  netra, 
505   Ha  ma  bean  laquet  en  pep  sort  deliço  : 

Demeus  a  bep  amser  me  a  rent  d'ac'h  graço, 
Hac  a  promet  aman,  ma  Doue,  ho  caret, 
Ha  bout  obéissant  da  guement  a  leret. 

Doue  an  Tat  a  coms. 

Adam,  houi  eo  ar  hentan  am  eus  laquet  er  bet, 
5 10  Da  vean  evurus  a  viquen,  ma  queret  ; 

Me  'm  eus  ho  confirmet  gant  pep  sort  carante, 
Beet  obéissant  bepret,  d'ho  guir  Doue. 
Quement  a  so  crouet  er  bet  bete  vreman, 
Me  a  gomant  d'eshe  d'ec'h-hu  obeissan  : 
5 1 5   Reit  d'esho  ho  hano  er  feson  ma  queret, 
Obéissant  voint  d'ar  pes  a  comandet. 

Adam  a  coms,  0  rein  ho  hano  d'al  loenet. 

O  Doue,  ma  Crouer,  p'hoc'h  eus  bet  madeles 
Da  ma  laquât  mest  voar  quement  so  er  bet, 
Me  ro  ho  hano  d'he,  herve  ma  bolante, 

520  Ha  houi  da  bep  amser  glorifiet  gant-he  ! 
Me  a  hanvo  ar  goulm  a  so  loen  dereat, 
Pa  'm  eus  bet  ar  hras  diant  Doue  an  Tat, 
Ha  neuse  an  estic  gant  he  voes  ravissant, 
A  enoro  bepret  Roue  ar  rirmamant, 

525  Ar  vran  hac  ar  piquet,  ar  pabor,  ar  gueguin, 
Ar  voualc'h,  ar  golven,  hac  ive  ar  pincin  : 
Goude  an  eunic-glas  veso  ar  peroquet, 
Neuse  ar  glujuri,  hac  ar  hefeleguet  : 
Goude  ar  guenili  hac  an  ehoederet, 

530  Ar  sparfel  hac  ar  scoul  hac  an  tursunelet  ; 
N'en  d-eo  quet  necesser  holl  o  represantin, 
Ha  nep  en  eum  servijo,  a  hanvo  pep-hinin. 
Goai  hac  houidi  a  hanvoan  tout  espres, 


La  Création  du  inonde.  195 


Adam. 


Mon  Maître  et  mon  Seigneur,  je  vous  remercie  de  m'avoir, 
je  le  vois,  créé  de  rien,  et  de  m'avoir  placé  dans  ce  jardin  de 
délices,  c'est  pourquoi  je  vous  rendrai  grâces  en  tout  temps. 
Je  vous  promets  ici,  mon  Dieu,  de  vous  aimer  et  d'obéir  à 
tout  ce  que  vous  ordonnerez. 


Dfeu  le  Père. 

Adam,  tu  es  le  premier  que  j'ai  mis  sur  la  terre  pour  être  à 
jamais  heureux,  si  tu  le  veux  bien.  Je  t'ai  entouré  de  témoi- 
gnages d'affection  :  sois-moi  donc  toujours  obéissant,  à  moi, 
ton  Dieu  véritable.  A  tous  les  êtres  créés  au  monde  jusqu'à 
présent,  je  commande  de  t'obéir  sans  hésiter  ;  donne-leur  des 
noms  comme  il  te  conviendra,  et  chacun  s'empressera  de  5e 
soumettre  à  tes  ordres. 


Adam  donne  des  noms  aux  animaux. 

O  Dieu,  mon  Créateur,  puisque  vous  avez  eu  la  bonté  de 
me  constituer  maître  sur  tous  les  êtres  de  la  création,  je  vais 
les  appeler  du  nom  qui  me  plaira.  Puissent-ils,  Seigneur,  vous 
glorifier  à  jamais  ! 

Je  nomme  la  colombe,  c'est  un  oiseau  gracieux,  en  vertu  du 
pouvoir  que  m'a  donné  Dieu  le  Père,  le  rossignol,  dont  la  voix 
mélodieuse  chantera  toujours  les  louanges  du  Roi  des  Cieux, 
le  corbeau,  la  pie,  le  bouvreuil,  le  geai,  le  merle,  le  moineau, 
le  pinson,  le  martin-pêcheur,  le  perroquet,  la  perdrix,  la  bé- 
casse, l'hirondelle,  l'alouette,  l'épervier,  le  milan,  la  tourte- 
relle. Il  n'est  pas  nécessaire  de  les  représenter  tous,  celui  qui 
s'en  servira  les  nommera  l'un  après  l'autre.  J'appelle  aussi  ex- 
pressément de  leur  nom  les  oies  et  les  canards, 


1 96  L'abbé  Eug.  Bernard. 

Patin,  coc  ha  iar,  hac  ive  ier  Indes, 
535   Ha  breman  ar  gaouen,  Iierve  lie  naturel, 
Pa  'm  eus  bet  ar  hras  digant  an  Eternel. 
Breman  e  hinvoin  hoas  hep  mar,  an  houperic, 
Un  eunic  a  so  bail,  lie  hano,  an  estic  : 
Ar  vilvoit  hac  an  dret  hac  a  craperic-gue, 
540  Bete  ar  gasec-coat,  me  ro  ho  hano  d'he. 
Breman  e  hanvoan  hoas  an  eunic  Canaper, 
Ar  gudon,  ar  guïoch,  couls  an  eun  linaer, 
An  austruch  hac  ar  grue  hac  ar  grifon  cruel, 
Ar  iar-dour,  so  mui  quen  a  so  ret  da  henvoel  : 
545   Hac  ar  foeteric-dour,  quencouls  hac  ar  fidan, 
Ar  molegan,  ar  haoil,  neuse  al  laouenan  : 
Ar  hefeleguet-mor  hac  an  houidi-goue, 
Ar  garheis  pesqueter,  me  ro  ho  hano  d'he  : 
Hac  an  toreric-craon  a  hinvoin  hoas  breman, 
550  Davantaj  ar  bic-spern  hac  ar  straqueric-lan, 
Ar  boru-buric,  ar  sign,  budor  hac  al  levren. 

Breman  e  hinvoin  hoas,  pa  e  d'in  comandet, 
Al  loenet  violant  so  gant  Doue  crouet  : 
Al  leon  hac  an  ours,  an  tigr  hac  al  licorn, 
555   Daouest  d'ho  holl  furi  a  chom  dindan  ma  dorn  ; 
Ar  haro,  ar  iourc'h,  ar  blei  hac  an  heies, 
Ar  hat  hac  al  louarn,  ha  consort  assambles, 
Bete  ar  goniflet,  ar  broc  n,  an  ermini, 
A  renc  obeissan  d'ar  pes  a  comandin. 
560  Breman  e  hanvoan  hoas  chatal,  saout  ha  quesec, 
Ar  mul  hac  an  asen,  moe'h  hac  ohenet, 
Ar  re-se  a  veso  da  servi j  in  an  den, 
A  vo  e  pep  amser  voar-n-eshe  souveren  : 
Ha  neuse  levrini,  dogueset,  so  hoas  bras, 
565   Hac  al  leopardet,  chas  munut,  ar  re  vras, 
Ar  merien  a  douar,  hac  a  bep  sort  houillet, 
Ar  fubu,  ar  helien,  hac  ive  ar  prevet. 
Breman  e  hinvoin  hoas  ive  ar  sardonen, 
Ar  guenan,  ar  goespet,  queonit,  ha  garlosten, 
570  Ha  neuse  davantaj  gueor,  lampereset, 

Ar  busuc,  ar  bolbos,  ar  melvet,  ar  scrillet: 


La  Création  du  monde.  !  97 

le  paon,  le  coq  et  la  poule,  les  dindons,  le  chat-huant,  selon 
sa  nature,  puisque  l'Eternel  m'a  chargé  de  ce  soin.  Je  nomme 
encore,  sans  arrêter,  la  huppe,  un  petit  oiseau  qui  porte  une 
tache  blanche  au  front,  c'est  le  rossignol  de  muraille,  la  grive, 
l'étourneau,  le  grimpereau,  le  pivert.  Je  nomme  également 
le  chardonneret,  le  pigeon-ramier,  la  bécassine,  la  linotte, 
l'autruche,  la  grue,  le  griffon  cruel,  la  poule  d'eau,  il  n'en 
reste  plus  à  nommer.  Encore  la  bergeronnette,  le  bruant,  le 
verdier,  la  caille,  le  roitelet,  le  courlis,  le  canard  sauvage,  le 
héron,  qui  vit  de  poisson,  le  .casse-noisette,  la  pie-grièche,  le 
landier,  le  rouge-gorge,  le  cygne,  le  butor  et  la  cigogne. 


Maintenant,  pour  accomplir  les  ordres  que  j'ai  reçus,  je 
nomme  les  bètes  féroces  créées  par  Dieu,  le  lion,  l'ours,  le  tigre, 
la  licorne  :  malgré  leur  instinct  sauvage,  ils  me  resteront  sous 
la  main  ;  le  cerf,  le  chevreuil,  le  loup,  la  biche,  le  lièvre,  le 
renard  et  leurs  pareils  jusqu'au  lapin,  le  blaireau,  l'hermine, 
qui  doivent  obéir  à  mon  commandement.  Je  nomme  encore 
les  troupeaux,  vaches  et  chevaux,  mulets,  ânes,  cochons, 
bœufs  ;  ceux-là  seront  attachés  au  service  de  l'homme  qui  les 
tiendra  toujours  en  sa  puissance  ;  puis  les  lévriers,  les  dogues 
qui  sont  de  taille,  les  léopards,  les  chiens,  grands  et  petits; 
les -fourmis  de  terre,  les  hannetons  de  toute  espèce,  les  mou- 
cherons, les  mouches,  les  vers;  et  encore  les  frelons,  les 
abeilles,  les  guêpes,  les  araignées,  les  perce-oreilles,  les  cigales, 
les  sauterelles,  les  vers  de  terre,  les  mites,  les  limaces,  les 
grillons  ; 


Revue  Celtique,  IX  1 3 


198  L'abbé  Eug.  Bernard. 

Breman  an  défont,  ar  marmous,  an  denvet, 
Neuse  ar  bouc'h,  ar  haor,  ive  an  haerelet, 
GouJe  an  uruson,  memeus  ar  guiveret, 

575   An  aer  hac  an  aspic,  ar  sourt,  hac  an  tonsec. 
Breman  e  hanvoan  hoas,  pa'n  e  d'in  comandet, 
Scorpion  ha  quiger,  basilic,  serpantet, 
Ar  goet,  al  logot,  hutugan,  morsellet, 
Groahet,  voalet,  tavoan,  malvinier  ha  raset, 

580       Ha  breman  er  mor  bras  e  eus  lies  pesquet, 
Ar  balam,  ar  seren,  silio  ha  touilhet, 
Ar  moroe'h,  ar  somon,  goan,  var  ha  moruet, 
Neuse  ar  bresili,  pladis  hac  harinquet, 
Ha  neuse  ar  marc'h-mor  hac  ar  hoariellet, 

585   Ar  raë,  an  dofin,  ar  horp,  hac  ar  brohet, 
Sardinet  hac  ormel,  hac  hist  croguillec, 
Brinic  ha  tousec-mor,  ha  neuse  ar  groahet. 

Breman  hoas  en  dour  dous  e  hanvoan  glesqueret, 
Glasardet  ha  quirelaouen,  ha  neuse  ar  ranet. 

590       A  bep  sort  natur  a  so  crouet  gant  Doue, 
Me  ro  ho  hano  d  ne,  herve  ma  bolante. 
Quement  bete  vreman  so  crouet  gant  Doue, 
Goude  eur  som  amser,  a  veso  fin  d'eshe  ; 
N'en  deus  nemert  an  den,  hen-nes  so  immortel, 

595   En  deveus  bet  ar  riras  diant  an  Eternel. 

Breman,  Drindet  santel,  chetu  acomplisset 
An  holl  ordrenanço  ho  poa  d'in  comandet  : 
Roet  'm  eus  ho  hano  d'he,  herve  ma  bolante, 
Bepret  evit  ho  gloar  me  veinteno  anhe. 

600       Breman  hoas  e  hanvoin  a  bep  sort  frejo  mat, 
Al  lousou  er  jardin  so  crouet  délicat, 
Ar  resin,  ar  figues,  an  avalo,  ar  per, 
A  reit  d'in,  ma  Doue,  demeus  a  bep  amser  : 
Queres,  babioles,  bete  prun  ha  groegon, 

605   Ar  spezet,  ar  framboes,  castrilles  hac  oignon, 
Goude-se  ar  histin,  craon-gallec,  ar  re  coat, 
Ar  re  alamandes,  a  so  holl  frejo  mat, 
Ar  pèches,  ar  hivig,  ar  mouar,  an  illin, 
Me  ro  ho  hano  d'he  abeurs  an  Tat  divin  : 


La  Création  du  monde.  !  99 

j'ajoute  l'éléphant,  le  singe,  les  moutons,  le  houe,  la  chèvre, 
la  belette,  le  hérisson,  l'écureuil,  la  couleuvre,  l'aspic,  la  sala- 
mandre, le  crapaud  ;  je  termine  par  le  scorpion,  l'orvet,  le 
basilic,  les  serpents,  les  taupes,  les  souris,  les  loirs,  les  mulots, 
les  cloportes,  les  tiques,  les  taons,  les  papillons  et  les  rats. 


Dans  la  grande  mer  il  y  a  nombre  de  poissons,  la  baleine, 
l'esturgeon,  le  congre,  les  roussettes,  le  marsouin,  le  sau- 
mon, le  turbot,  le  bar,  la  morue,  les  maquereaux,  les  plies,  les 
harengs,  le  cheval  de  mer,  les  rougets,  la  raie,  le  dauphin,  le 
thon,  les  mulets,  la  sardine;  puis  les  ormeaux,  les  huîtres  à 
coquilles,  les  patelles,  le  crapaud  de  mer  et  les  vieilles. 


Dans  l'eau  douce,  je  nomme  les  grenouilles,  les  lézards,  les 
sangsues,  les  reinettes. 

Dieu  a  formé  les  êtres  de  toute  espèce,  je  donne  à  chacun 
son  nom  selon  ma  volonté.  Tous  les  êtres,  jusqu'à  présent 
créés  par  Dieu,  auront  une  fin  après  un  certain  temps  ; 
l'homme  seul  est  immortel,  il  en  a  reçu  la  grâce  de  l'Eternel. 


Trinité  sainte,  j'ai  maintenant  exécuté  les  ordres  que  vous 
m'avez  transmis,  j'ai  nommé  tous  les  êtres  comme  j'ai  voulu  ; 
je  vous  promets  de  les  faire  servir  toujours  à  votre  gloire. 

•Je  veux  encore  distribuer  des  noms  aux  fruits  de  choix  et 
aux  plantes  créées  dans  le  jardin,  le  raisin,  les  figues,  les 
pommes,  les  poires  que  vous  me  donnez,  mon  Dieu,  depuis  le 
premier  moment,  les  cerises,  les  guignes,  les  prunes  et  les  be- 
losses,  les  groseilles,  les  framboises,  les  castilles  et  les  oignons, 
les  châtaignes,  les  noix,  les  noisettes,  les  amandes,  qui  tous 
sont  fruits  excellents,  les  pèches,  les  sorbes,  les  mûres  et  les 
prunelles,  je  les  nomme  tous  au  nom  du  Tout-Puissant. 


200  L'abbé  Eug.  Bernard. 

6 io  Goude  ar  col  pome,  trinchin  ha  col  commun, 
Petes  ha  saladen,  ar  re-se  so  commun, 
Ar  pouraches,  neuse  munudic  ha  sourcil, 
Bout  bras,  ar  re  vunut,  ha  goude-se  pouril, 

Turcantin,  marjolcn,  ha  lavant  cotonnec, 

615   Neuse  ar  genofle,  hac  al  lavant  musquet: 
Foudrelis  a  so  hoas,  ha  ros  ru,  ar  re  voen, 
Quereouls  ar  fao,  ar  pis,  a  servijo  d'an  den  : 
Neuse  ar  basfilic,  tulipes,  pempis  glas, 
Arvoat,  hac  ar  sivi,  fanvoil  ha  col  choas, 

620  Parpic,  buglose,  hac  ar  bascantes, 

Trao  mat,  hac  ho  die  bout  hanvoet  tout  espres. 
Breman  e  hinvoin  hoas  serfil  hac  silles, 
Seliri  ha  cors-noir,  panes  ha  carotes, 
Passe-ros,  viollie,  levren, 

625   Neuse  trantefeilles,  hac  an  éternel  guen. 

Breman  e  hinvoin  hoas  an  dero  so  coat  mat, 
Ha  goude-se  an  til,  ar  fo,  ar  hoat  sab, 
Goude  spern,  ar  beus,  halec  hac  an  evor, 
Couls  ar  hoat  greneres,  hoat  sab  an  Nord, 

630  Me  ia  da  henvoel  hoas  palm,  cedrus,  olivet, 
Ar  vercus  hac  al  lore  musquet. 

Anfin,  en  gênerai,  quement  mat  so  formet 
Gant  an  Tat  éternel,  am  eus  breman  hanvoet. 


Doue  an  Tat  a  coms. 


Concluet  em  eus,  dre  gras  ar  Speret  glan, 
635   Ma  mignon  bras  Adam  so  du-hont  e-hunan, 

Ret  eo  formin  eur  verc'h  da  vont  d'ehan  priet, 

Hervé  ho  naturel,  da  dont  d'en  eum  garet... 
Adam,  me  as  pet  breman,  da  repos  er  jardin, 

Ha  da  asten  da  corfvoar  un  torch  lousou  tin. 
640  Voar  bars  natii'uni,  c  quiii  chanchamant, 

E  voeli  da  briet,  eur  feumeulen  vaillant. 


La  Création  du  inonde.  201 

Je  veux  y  joindre  les  choux-pomme,  l'oseille,  les  choux  ordi- 
naires, les  bettes,  la  laitue,  tout  cela  est  commun,  la  bourrache, 
le  serpolet,  le  souci,  les  navets,  grands  et  petits,  le  poireau,  le 
thym,  la  marjolaine,  la  lavande  cotonneuse,  les  giroflées,  la 
lavande  musquée,  les  lis,  les  roses  rouges  et  blanches,  les  ha- 
ricots, les  pois  qui  seront  à  l'usage  de  l'homme,  le  basilic,  les 
tulipes,  la  quinte-feuille  verte,  la  tanaisie,  les  fraises,  le  fenouil 
et  les  choux  frisés,  le  persil,  la  bugloseet  les  asperges,  plantes 
excellentes  qui  méritent  d'être  expressément  nommées  ;  ensuite 
le  cerfeuil,  les  ciboules,  le  céleri,  le  radis  noir,  les  panais  et  les 
carottes,  les  passe-roses,  les  violiers,  le  lilas,  la  trentefeuille  et 
la  blanche  immortelle. 


Je  veux  aussi  nommer  le  chêne,  qui  est  un  bon  bois,  l'or- 
meau, le  hêtre,  le  pin,  l'aubépine,  le  buis,  le  saule,  la  bour- 
daine, le  tremble  et  le  sapin  du  Nord.  J'y  ajoute  encore  le 
palmier,  le  cèdre,  l'olivier,  le  myrte  et  le  laurier  parfumé. 


Enfin,  tout  ce  que  le  Père  éternel  a  créé,  tout  a  maintenant 
de  moi  reçu  un  nom  particulier. 


Dieu  le  Père. 


J'ai  décidé  ceci  avec  le  concours  de  l'Esprit-Saint.  Mon 
grand  ami  Adam  est  là-bas  tout  seul,  il  faut  que  je  forme  une 
jeune  fille  pour  devenir  son  épouse,  et  suivant  leur  nature,  ils 
s'aimeront  l'un  l'autre. 

Adam,  je  t'invite  à  présent  à  te  reposer  dans  le  jardin,  à 
étendre  ton  corps  sur  un  fiisceau  d'herbes  choisies.  Lorsque 
tu  t'éveilleras,  tu  trouveras  du  changement,  tu  verras  ton 
épouse,  une  femme  superbe. 


202  L'abbé  Eug.  Bernard. 


Adam  er  jardin  a  coms. 


Ma  Doue,  ma  Crouer,  n'ioun  petra  eo  se  ; 
Hoant  am  eus  da  repos,  me  lar  gant  guirione, 
Me  a  strinquo  aman,  voar  un  torch  lousou  tin. 
645   En  cousquet,  en  difun,  me  ofr  d'ec 'h  ma  feden. 

Doue  an  Tat  a  coms. 

Reposet  eo  Adam...  Me  a  ia  d 'lien  caet..., 
Me  ielo  quen  subtil,  ha  ne  difuno  quet  ; 
Me  denno  eur  gosten,  hac  a  formo  lie  bar, 
Quercouls  evel  Adam,  d'eus  un  tamic  douar. 

Ma  tisquen,  ma  a  da  caet  Adam,  ma  ten  eur  gosten  d'eshan,  ma  continuo 

da  coms. 

650  Adam  ma  difun  quet...  Me  rai  quen  exeelant 

Aman  da  voir  briet,  quen  caer  ha  quer  charmant, 
Ma  vevoent  assambles  d'eur  memeus  union, 
Ma  vo  rejouisset  an  douar  hac  an  tron... 
Chetu  costen  Adam  subtilamant  tennet  : 
655   Er  memeus  calite  me  a  form  lie  briet... 

Sao  alesse,  groee  veo,  hac  e  voeli  da  par, 
He  corf  hoas  o  repos,  sell-han,  voar  an  douar. 

Eva  a  savo  hac  a  coms. 

Auteur  ar  firmamant,  houi  eo  sur  an  Drindet, 

Da  vout  crouet  ma  corf,  hac  ive  ma  speret, 
660  Ha  ma  laquet  memeus,  herve  an  naturel, 

Da  vout,  corf  hac  ine,  evel-d-hoc'h  immortel. 

Breman,  ma  gouir  Crouer,  me  a  rent  d'ec'h  graço, 

Dimeus  a  voir  galon,  em  holl  actiono. 

Da  guement  a  leret,  me  vo  obéissant, 
665   Rac  me  eneo  es  oc'h  Crouer  ar  firmamant. 

Doue  an  Tat  a  coms. 

Ma  crouadures  pur,  pa'm  eus  bet  ho  crouet, 
Ma  mignon  bras  Adam  ho  peso  da  briet  : 


La  Création  du  monde.  20$ 

Adam  au  jardin. 

Mon  Dieu,  mon  Créateur,  je  ne  sais  ce  que  cela  veut  dire. 
J'ai  envie  de  me  reposer,  je  le  dis  en  vérité  ;  je  vais  m'étendre 
ici,  sur  une  gerbe  d'herbes  parfumées.  Que  je  dorme,  que  je 
veille,  je  vous  offre  ma  prière. 

Dieu  le  Père. 

Adam  repose...  Je  vais  le  trouver...  J'irai  si  doucement 
qu'il  ne  s'éveillera  pas.  Je  tirerai  une  de  ses  côtes  et  j'en  for- 
merai sa  compagne,  tout  comme  Adam,  que  j'ai  créé  d'un 
peu  de  terre. 

Il  descend,  va  trouver  Adam,  lui  enlève  une  côte  et  continue  : 

Adam  ne  s'éveille  pas...  Je  veux  lui  créer  une  épouse  si 
parfaite,  si  belle,  si  charmante,  qu'ils  vivront  ensemble  dans 
une  douce  union  qui  réjouira  la  terre  et  les  cieux... 

Voici  la  côte  d'Adam  délicatement  enlevée  :  j'en  forme  pour 
lui  une  épouse  de  même  nature... 

Lève-toi,  femme  vivante,  et  tu  verras  ton  pareil.  Son  corps, 
regarde-le,  repose  encore  sur  la  terre. 

Eve  s'étant  levée  parle. 

Auteur  du  firmament,  vous  êtes  sans  doute  la  Trinité.  Vous 
avez  créé  mon  corps  et  aussi  mon  esprit  ;  vous  me  destinez 
même,  suivant  ma  nature,  à  être,  corps  et  âme,  immortelle 
comme  vous.  Maintenant,  mon  Créateur,  je  vous  rends,  du 
fond  du  cœur,  grâces  en  toutes  mes  actions.  A  tout  ce  que 
vous  direz,  je  me  montrerai  obéissante,  car,  je  le  reconnais, 
vous  êtes  le  Créateur  des  Cieux. 


Dieu  le  Père. 

Vous  êtes  bien  l'ouvrage  de  mes  mains,  et  si  je  vous  ai 
créée,  c'est  pour  que  vous  soyez  l'épouse  de  mon  grand  ami 


204  L'abbé  Eus.  Bernard. 

Houi  veso  unisset  d'eur  memeus  bolante, 
Rae-se  en  eum  gueret  an  cil  hac  eguile. 


Eva  a  coms. 

670  Ma  Doue,  ma  Crouer,  me  nâ  refusin  quet, 
Me  a  obeisso  da  guement  a  leret. 
Houi  en  deus  ma  crouet  en  pep  sort  deliço, 
Reson  eo  observin  ho  holl  ordrenanço. 

Doue  an  Tat  a  coms. 

Adam,  Adam,  ditun  !  Chede  compagnones! 

675   Houi  a  rejouisso  breman  ar  Baradoes. 

En  eum  gueret  ho  taou,  ha  credet  en  Doue, 
Ho  freus  a  ramplisso  sigeno  an  Elle. 
Lucibel  gueasall,  en  env  am  boa  crouet 
Ar  caerran  crouadur  a  guement  a  gafet  : 

680  Pa  deuas  d'am  ofansin,  hen  strinquis  ous  traon 
Hac  hen  dihollis  cren  en  creis  an  Ifern  don. 
Ha  nep  vo  rebelant  enep  ma  bolante, 
A  veso  punisset,  evel  ma  s-oun  Doue. 

Adam  a  coms. 

Me  am  eus  cals  a  joa,  Créateur  ar  steret, 
685   Pa  voelan  ar  vroec-man,  es  oun  rejouisset. 
Hou-man  so  eur  presant  dian-ec'h,  ma  Doue, 
Pa  ret  d'in  eur  priet  quen  caer  evel  an  de  ; 
Dcmeus  a  voir  galon  breman  he  recevjn, 
Hac  e  teuomp  hon  daou  breman  d 'ho  enorin. 

Eva  a  coms. 

690  Ha  me,  ma  guir  Autro,  gant  eur  galon  parfet, 
A  comeran  Adam  evit  ma  guir  briet. 
P'hoc'h  eus  hon  crouet  er  bet-man  pur  ha  net, 
Exant  dimeus  a  boan  ;  na  tomder,  nac  anvoet, 
Xac  ilboet,  na  sehet  na  santomp  er  plas-man  : 

695   Me  am  eus  dian-ec'h  ar  goût  a  disiran. 


La  Création  du  monde.  205 

Adam.  Vous  serez  unis  dans  une  même  volonté.  Aimez-vous 
donc  l'un  l'autre. 


Eve. 

Mon  Dieu,  mon  Créateur,  je  ne  m'y  refuserai  pas.  J'obéirai 
toujours  à  tout  ce  que  vous  direz.  Vous  m'avez  créée  au  milieu 
de  toutes  sortes  de  délices,  il  est  raisonnable  que  j'observe 
tous  vos  commandements. 

Dieu  le  Père. 

Adam,  Adam,  éveille-toi.  Voici  de  la  compagnie.  Vous  ferez 
maintenant  la  joie  du  Paradis.  Aimez-vous  l'un  l'autre  et 
croyez  en  Dieu.  Votre  race  occupera  les  places  perdues  par  les 
Anges.  Lucifer,  jadis  au  Ciel,  je  l'avais  créé  le  plus  bel  être 
qu'il  fût  possible  d'imaginer.  Il  m'offensa,  je  le  précipitai  dans 
les  abîmes  et  le  plongeai  d'un  trait  au  plus  profond  de  l'Enfer. 
Quiconque  se  révoltera  contre  ma  volonté  sera  puni,  vrai, 
comme  je  suis  Dieu. 


Adam. 

Mon  cœur  tressaille  de  joie,  Créateur  des  étoiles,  et  en 
voyant  cette  femme,  je  me  sens  bien  heureux.  C'est  là  un 
présent  digne  de  vous,  ô  mon  Dieu,  de  me  donner  une  épouse 
belle  comme  le  jour.  Je  la  reçois  de  bon  cœur,  et  tous  deux 
nous  ne  cesserons  pas  de  vous  honorer. 


Eve. 

Et  moi,  mon  Seigneur,  c'est  avec  un  consentement  parfait 
que  je  prends  Adam  pour  mon  époux  ;  et  puisque  vous  nous 
avez  créés  en  ce  monde,  sans  tache  et  sans  défaut,  exempts  de 
toute  peine,  nous  ne  sentirons  ici  ni  chaleur  ni  froidure,  ni 
faim,  ni  soif.  J'ai  de  vous  tout  ce  que  je  désire. 


206  L'abbé  Eug.  Bernard. 

Doue  an  Tat  a  coms. 

M'ho  peso  birviquen  entre  veet  em  graço, 
Rac-se  teulet  evoes  eur  vech,  ous  ma  comso  : 
Me  deu  da  exantin  ar  voeen  a  vue, 
Voar  ar  re-all  er  bet  me  ro  d'ec'h  liberté  ; 
700  Rae-se  teulet  plet  mat,  hon-nes  so  immortel, 
Ha  mar  touchet  ont-hi  e  teufet  da  vervoel  : 
Houi  a  gollo  ma  graço,  ha  privet  d'eus  ma  gloar, 
A  retorn  adarre  en  poult  hac  en  douar. 

Doue  an  Tat  a  vinic  aneshe  er  Barados  terest,  ha  goude  e  comso. 

Breman,  Adam,  Eva,  me  ho  pinic  quefret, 
705   Me  ho  confirm  ho  taou,  rac-se  perseveret. 
Groet  multipliai!  da  peuplin  an  douar, 
Bete  ar  firmamant  da  ocmantin  ma  gloar, 

Adam  houi  so  den  fur;  çhetu  houi  biniguet, 
Rac  se  teulet  plet  mat  d'ar  pes  am  eus  laret. 
710  Ha  houi  ive,  Eva,  gant  ar  fireus  a  douguet, 
Houi  a  voelioudou  hac  hep  poan  exantet 
Entre  veet  em  graço.  Me  ro  d'ec'h  liberté, 
Baleet  ha  reposet  hac  en  nos  hac  en  de. 

Doue  a  sorti. 


La  Création  du  monde.  207 

Dieu  le  Père. 

Et  vous  l'aurez  toujours,  tant  que  vous  serez  en  état  de 
grâce.  C'est  pourquoi,  faites  bien  attention  à  mes  paroles.  Je 
réserve  l'arbre  de  vie.  Sur  tous  les  autres  au  monde  je  vous 
donne  pouvoir,  vous  êtes  libres  d'en  disposer.  Prenez  donc 
garde,  cet  arbre  est  immortel,  et  si  vous  y  touchez,  vous 
mourrez.  Vous  perdrez  ma  grâce,  et  privés  de  ma  gloire,  vous 
retournerez  en  terre  et  en  poussière. 


Dieu  le  Père  les  bénit  dans  le  Paradis  terrestre,  ensuite  il  dit  : 

Maintenant,  Adam  et  Eve,  je  vous  bénis  de  compagnie.  Je 
vous  confirme  tous  deux  dans  mes  bonnes  grâces,  vous  n'avez 
qu'à  persévérer.  Croissez,  multipliez  pour  peupler  la  terre,  pour 
augmenter  ma  gloire  jusques  aux  sommets  des  deux. 

Adam,  vous  êtes  un  homme  sage  :  vous  voilà  béni,  prenez 
donc  bien  garde  à  ce  que  je  vous  ai  dit.  Et  vous,  Eve,  les 
fruits  que  vous  porterez,  vous  les  mettrez  au  monde  sans  dou- 
leurs, tant  que  vous  serez  en  grâce  avec  moi.  Allez,  vous  êtes 
libres  ;  marchez,  reposez-vous  à  votre  gré,  et  la  nuit  et  le  jour. 


Dieu  sort. 


RECHERCHES 

sur  l'origine  de 

LA    PROPRIÉTÉ    FONCIÈRE 

ET  DES  NOMS  DE  LIEU  EN  FRANCE 

Quatrième  article 


Pontiliacus  est  le  nom  d'un  palais  d'où  Charles  le  Chauve 
data  en  873  un  diplôme  en  laveur  des  églises  Saint-Mammès 
de  Langres,  et  Saint-Etienne  de  Dijon1.  C'est  aujourd'hui 
Pontailler-sur-Saône,  Côte-d'Or.  La  forme  latine  correspon- 
dant à  ce  nom  de  lieu  gallo-romain  est  Pontilianus,  nom  d'une 
villa  située  dans  le  Roussillon,  comme  nous  l'apprend  un  di- 
plôme du  roi  Lothaire  donné  en  982  2. 

Pontiliacus  et  Pontilianus  sont  dérivés  de  Pontilius,  genti- 
lice  romain  dérivé  lui-même  de  Pou  lins.  Le  plus  ancien 
exemple  de  Pontilius  nous  est  offert  par  une  inscription  re- 
cueillie en  Espagne,  près  de  Carthagène?.  On  le  trouve  deux 
fois  répété  dans  une  inscription  d'Afrique*.  Il  apparaît  dans 
plusieurs  inscriptions  d'Italie  5. 

Primiacus  est  une  villa  mentionnée  dans  un  diplôme  donné 


1.  Dom  Bouquet.  VIII.  643  d. 

2.  Dom  Bouquet,  IX,  649  b. 

3 .  Corpus,  I,  [478;  11,-3-43  5 . 

4.  Corpus,  VIII,  8799. 

5.  Corpus,  IX,  5799 ;  X,  47,  363,  364. 


Propriété  foncière  et  noms  de  Heu  en  France.  209 

en  834  par  Louis  le  Débonnaire  en  faveur  d'Albéric,  évêque 
de  Langres1.  C'est  aujourd'hui  Prangey,  Haute-Marne.  Une 
autre  villa,  du  nom  de  Primiacus,  tut  donnée  en  866  par  Lo- 
thaire,  roi  de  Lorraine,  à  sa  femme  Theodeberge2. 

Ce  nom  de  lieu  dérive  de  Primius,  gentilice  tiré  du  surnom 
Primus,  et  qu'une  inscription  découverte  en  Autriche  nous 
montre  dans  le  nom  de  femme  Primia  Honorata  5 .  Nous  le 
retrouvons  dans  une  inscription  du  musée  de  Mannheim  qui 
débute  par  le  nom  de  femme  Primia  Accepta  -+  ;  dans  une  ins- 
cription d'Oppenheim,  en  Hesse,  qui  nous  fait  connaître  le 
nom  de  femme  Primia  AmmillaS.  On  a  découvert  à  Mevlan,  ' 
Isère,  l'épitaphe  de  L.  Primius  Valerius  gravée  par  ordre  de 
son  fils  Primius  Vassillus  et  de  sa  fille  Primia  Valeria  6.  On  a 
recueilli  à  Lyon  l'épitaphe  de  M.  Primius  Secundianus,  sévir 
augustal,  gravée  par  les  soins  de  M.  Primius  Augustus,  son 
fils  75  et  celle  de  P.  Primius  Eglectianus,  affranchi  de  P.  Pri- 
mius Cupitus 8. 

Le  nom  Prcmiacus  d'une  localité  située  dans  le  pagus  aure- 
lianensis  suivant  un  diplôme  de  l'année  6S9  9  paraît  être  une 
variante  orthographique  de  Primiacus.  C'est  par  un  primitif 
Primiacus  que  semble  devoir  s'expliquer  le  nom  des  trois  com- 
munes de  Pringy  situées  dans  les  départements  de  la  Marne, 
de  la  Haute-Savoie  et  de  Seine-et-Marne. 

Prisciacus  est  une  villa  d'Auvergne  donnée  à  l'église  Saint- 
Etienne,  de  Châlons-sur-Marne,  par  Elaiîus,  évêque  de  la 
même  ville,  en  565  I0.  Un  autre  Prisciacus,  dans  le  pays  de 


1 .  Dom  Bouquet,  VI,  596  a.  Cf.  Sickel,  Acta  Karolinorum,\..  II,  p.  183, 
n°  322. 

2.  Dom  Bouquet.  VIII,  412  d. 
3  .   Corpus,  III,  3606. 

4.  Brambach,  n°  868. 

5 .  Brambach,  n°  917. 

6.  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  III,  p.  176. 

7.  Boissieu,  pp.  203,  204. 

8.  Boissieu,  p.  49/]. 

9.  Tardit,  Monuments  historiques,  p.  637.  Cf.  Pardessus,  Dipiomata.  t.  II, 
p.  209. 

10.   Pardessus,  Dipiomata,  t.  II,  p.  423. 


210  H.  d'Arbois  de  Jubainville. 

Chambly,  Oise,  apparaît  dans  un  diplôme  de  l'année  689  :. 
Une  villa  Prisciacus  qui  forme  aujourd'hui  deux  communes, 
Précy-Notre-Dame  et  Précy-Saint-Martin,  Aube,  appartenait 
au  IXe  siècle  à  l'abbaye  de  Montier-en-Der,  comme  nous  l'ap- 
prennent deux  diplômes  de  Charles  le  Chauve  donnés  l'un 
en  845,  l'autre  en  854 2.  Une  villa  Prisciacus,  située  dans  le 
Poitou,  fut  donnée  pour  partie  à  l'abbaye  de  Noirmoutier  par 
Charles  le  Chauve  en  8545.  Une  villa  Prisciacus,  dans  l'Au- 
tunois,  apparaît  dans  une  charte  de  Cluny  au  commencement 
du  xe  siècle  4. 

Prisciacus  est  dérivé  du  gentilice  Priscius,  venant  lui-même 
de  Prise  us,  usité  d'abord  comme  surnom  :  P.  Servilius  Priseus 
fut  consul  l'an  495  avant  J.-C>.  T.  Numicius  Priseus  rem- 
plit la  même  fonction  en  469  e.  Priscius  est  beaucoup  plus  ré- 
cent, et  nous  n'en  avons  pas  constaté  l'existence  avant  réta- 
blissement de  l'empire.  On  conserve  près  de  Klagenfurt,  en 
Stvrie,  l'épitaphe  de  C.  Priscius  Surio/.  On  a  recueilli  près 
de  Leibnitz,  dans  la  même  province,  l'épitaphe  de  Priscia 
Albina8. 

Prisciacus  parait  être  la  forme  ancienne  du  nom  :  i°  de  huit 
communes  appelées  aujourd'hui  Précy,  savoir  :  deux  dans 
l'Aube,  deux  dans  l'Yonne,  et  une  dans  chacun  des  quatre  dé- 
partements du  Cher,  de  la  Côte-d'Or,  de  l'Oise  et  de  Seine- 
et-Marne  ;  2°  des  deux  communes  de  Pressy,  Pas-de-Calais, 
Saône-et-Loire  ;  enfin  des  communes  de  Précey,  Manche  ; 
Pressac,  Vienne  ;  Prétieux  et  Preyssac,  Dordogne  ;  total,  qua- 
torze communes,  dont  le  nom  actuel  tient  lieu  d'un  primitit 
Prisciacus. 


1.  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  637,001.2.  Pardessus,  Diplomata, 

t.  Il,  p.  210. 

2.  Dora  Bouquet,  VIII,  477  a,  329  e. 

3.  Dom  Bouquet,  VII,  344  a  ;  VIII,  529  a. 

4.  Bruel,  Recueil  des  Chartes  de  l'abbaye  de  Cluny,  t.  I,  p.  164. 

5.  Denvs  d'Halicarnasse,  1.  VI,  c.  23.  Corpus,  t.  I,  p.  4S7. 

6.  Tite-Live,  1.  II,  c.63;  Denys  d'Halicarnasse,  1.  IX,  c.  36.  Cf.  Corpus, 
t.  I,  p.  491. 

7.  Corpus,  III,  4951. 

8.  Corpus,  III,  5362.     ' 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  2  1  1 

De  *Priscixiacus  dérive  ïad]ect'ûprisciniacensis  employé  avec 
le  substantif  viens  par  Grégoire  de  Tours,  pour  désigner  un 
bourg  de  son  diocèse  dans  l'église  duquel  il  mit  des  reliques 
de  saint  Nizier,  évêque  de  Lyon,  mort  en  573  r.  Il  s'agit  soit 
du  Grand-Pressigny,  soit  du  Petit-Pressigny,  Indre-et-Loire2. 
Un  second  Prisciniacus,  aujourd'hui  Pressagny-1' Orgueilleux, 
Eure,  était  situé  dans  le  Yexin,  et  dès  le  VIIe  siècle  appartenait 
pour  moitié  à  l'abbaye  de  Saint-Denis,  comme  l'atteste  une 
charte  donnée  en  682  ou  683  î.  Un  troisième  Prisciniacus  dé- 
pendait de  l'abbaye  de  Saint-Martin,  de  Tours  ;  c'est  aujour- 
d'hui Précigné,  Sarthe-*;  il  en  est  question  pour  la  première' 
tois  dans  un  diplôme  donné  par  Charlemagne  en  775  >.  Xous 
le  retrouvons  mentionné  dans  des  diplômes  de  Charles  le 
Simple  en  903  6,  en  9047  et  en  919  8  et  dans  un  diplôme  du 
roi  Raoul  en  931  9.  Un  quatrième  Prisciniacus  dépendait  de 
l'abbaye  de  Saint-Ouen  de  Rouen,  comme  nous  le  voyons 
dans  un  diplôme  donné  par  Charles  le  Chauve  en  876  I0.  Un 
cinquième  Prisciniacus  appartenait  à  l'église  d'Orléans,  ainsi 
qu'il  résulte  d'un  diplôme  du  roi  Louis  Y,  daté  de  979  IX. 

Ce  nom  de  lieu  dérive  du  gentilice  Priscinius  qui  nous  est 
connu  par  une  inscription  de  Neuss  où  l'on  trouve  mentionné 
le  vétéran  Priscinius  Florus  I2.  Priscinius  vient  lui-même  du 
surnom  Priscinus  qui  est  plus  fréquent  lK 

Les  communes  dont  le  nom  moderne  parait  tenir  lieu  d'un 


1.  Vitae  patrum,  c.  VIII,  §  11.  Bordier,  Les  livres  des  miracles,  t.  III, 
p.  250.  Edition  Arndt  et  Krusch,  t.  II,  p.  700,  1.  15. 

2.  Longnon,  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle,'  pp.  285,  286. 

3.  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  19,  col.  2.  Marquis  de  Blosseville, 
Dictionnaire  topographique  du  département  de  l'Eure,  p.  175. 

4.  Mabille,  La  pancarte  noire  de  saint  Martin  de  Tours,  p.  231. 

3.  Dom  Bouquet,  V,  737  c.  Cf.  Sickel,  Acta  Carolinorum,  t.  II,  p.  27, 
n°  42.  Cf.  Mabille,  La  pancarte  noire  de  saint  Martin  de  Tours,  pp.  67,  106- 
107. 

6.  Dom  Bouquet,  IX,  497  b. 

7.  Dom  Bouquet,  IX,  311  c.  Mabille,  La  pancarte  noire,  p.  88,  n°  XLV. 

8.  Dom  Bouquet,  IX,  343  b.  Cf.  Mabille,  La  pancarte  noire,  p.  58,  n°  VII. 

9 .  Dom  Bouquet,  IX.  374  e.  Cf.  Mabille,  La  Pancarte  noire,  p.  57,  n°  VI. 

10.  Dom  Bouquet,  VIII,  630  e. 

1 1 .  Dom  Bouquet,  IX,  660  d. 

12.  Brambach,  n°  263. 

13.  Corpus,  VIII,  9476;  IX,  338,  3,  36;  2132,  2153,  3180. 


212  H.  d'Artois  de  Jubainville. 

primitif  Prisciniaciis  sont  au  nombre  de  neuf,  savoir  :  Précigné, 
Sarthe,  et  Pressagny,  Eure,  déjà  cités  ;  deux  Pressignac,  Cha- 
rente et  Dordogne,  et  cinq  Pressignv,  sur  lesquels  deux  dans 
l'Indre-et-Loire,  dont  il  a  été  déjà  question,  et  les  trois  autres 
dans  les  départements  du  Loiret,  de  la  Haute-Marne  et  des 
Deux-Sèvres. 

Romaniacus,  chez  Grégoire  de  Tours,  est  un  adjectif  qui 
sert  d'épithète  au  substantif  campus  et  qui  désigne  un  endroit 
où,  en  l'année  560,  deux  armées  de  sauterelles  se  livrèrent 
bataille,  dit-on,  non  sans  éprouver  de  part  et  d'autre  de 
grandes  avaries1.  C'est  aujourd'hui  Romagnat,  Puy-de- 
Dôme2. 

La  variante  Rominiacus,  avec  i  pour  a  dans  la  seconde  syllabe, 
nous  est  fournie  par  un  diplôme  de  Charles  le  Chauve  pour 
l'abbaye  de  saint  Médard  de  Soissons^.  C'est  aujourd'hui  Ro- 
meny,  Aisne,  au  xvie  siècle  Romigni,-Roumigny4.  La  forme 
romaine  de  ce  nom  est  écrite  Romagnanus  pour  *  Romanianus 
en  899  dans  un  diplôme  de  Charles  le  Simple  où  elle  désigne 
une  villa  située  dans  le  comté  de  Besalu,  en  Catalogne). 

*  Romanianus  et  Romaniacus  dérivent  de  Romauius,  gentilice 
dérivé  lui-même  du  cognomeu  Romauus  et  qui  existait  déjà  au 
commencement  de  l'empire,  comme  l'atteste  le  nom  de  Ro- 
manius  Hispo,  délateur  et  rhéteur  souvent  cité  par  Sénèque 
le  rhéteur  et  dont  la  première  mention  datée  remonte  à  l'an  14 
de  notre  ère6.  D'autres  Romanius  nous  sont  connus  par  les 
inscriptions,  par  exemple  L.  Romanius  Justus,  dans  une  ins- 
cription de  Patras  en  Grèce";  M.  Romanius  Encolpus,  dans 
une  inscription  d'Hermannstadt,  en  Hongrie s;  Q.  Romanius 


1.  Bistoria  Francorum,  1.  IV,  c.  20;  édition  Arndt,  p.  157,  1.  12. 

2.  Longnon,  Géographie  de  la  Gaule  au  sixième  siècle,  p.  510. 

3.  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  136. 

4.  Matton,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  V Aisne,  p.  235. 
3 .  Dom  Bouquet,  t.  IX,  484  b. 

6.  Tacite,  Annales,  liv.  I,  c.  74.  Voir  l'édition  de  Sénèque  le  Rhéteur 
donnée  chez  Teubner  par  Kiessling,  p.  351  (Index). 

7.  Corpus,  III,  503. 

8.  Corpus,  ÏII,  161 3. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  2  1 5 

Verecundus,  dans  une  inscription  de  Gebensdorf  en  Suisse  '  ; 
Q.  Romanius  Probus,  dans  une  inscription  du  musée  de  Mann- 
heim2;  C.  Romanius  Capito  dans  une  inscription  du  musée 
de  Mayence3  ;  T.  Romanius  Epictetus^et  Romanius  Sollemnis5 
dans  des  inscriptions  de  Lyon.  On  a  trouvé  à  Saint-Aubin-sur- 
Gaillon,  Eure,  le  cachet  de  l'oculiste  Sex.  Romanius  Sym- 
forus  6. 

A  Romaniacus  remontent  les  huit  noms  de  communes  sui- 
vants :  Romagnat,  Puy-de-Dôme  ;  Romagné,  Ille-et-Vilaine  ; 
Romagnieu,  Isère;  Romagny,  Manche  et  territoire  de  Béfort; 
Romigny,  Marne;  Rumigny,  Ardennes  et  Somme. 

Romiliacus  est  une  villa  où,  en  629,  le  roi  Dagobert  Ier 
répudia  Gomatrude,  sa  femme,  et  la  remplaça  parNanthilde7. 
On  doit  probablement  reconnaître  le  même  nom,  malgré  la 
différence  d'orthographe,  dans  un  locus  rumliacus  sis  au  pays 
de  Thérouanne  et  acheté  par  l'abbaye  de  Saint-Bertin,  en  7048. 
On  lit  Rumeliqcus  dans  un  diplôme  de  Charles  le  Chauve  en 
842  9,  Rumiliacus  dans  un  diplôme  de  Louis  de  Germanie 
en  875  I0,  tous  deux  en  laveur  de  l'abbaye  de  Saint- Arnoud, 
de  Metz,  et  dans  ces  deux  documents  il  s'agit  de  Remillv, 
Moselle,  aujourd'hui  Alsace-Lorraine11. 

Romiliacus,  Rumiliacus,  Rumcliacus,  Rumliacus  dérivent  de 
Romilius  ou  Romulius,  un  des  plus  anciens  gentilices  romains 
qui  donna  son  nom  à  une  tribu,  du  nombre  des  rustiques  ;  le 
territoire  de  cette  tribu  était  au  nord  du  Tibre.  A  cette  cens 


1.  Mommsem  Inscriptiones  helveticae,  n°  254. 

2.  Brambach,  n°  600. 

3 .  Brambach,  n°  1229. 

4.  Boissieu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon,  p.   189. 
>.    Boissieu,  ib'nl.,  p.  477. 

6.  Héron  de  Villeibsse  et  Thédenat,  Cachets  d'oculistes  romains,   t.  I, 
pp.  193-198. 

7.  Frédégaire,  c.  38,  chez  Dom  Bouquet,  t.  II,  p.  436   b.  Gesta  Dago- 
bert i  I    c.  22,  ibid.,  p.  383  c. 

8.  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  263. 

9.  Dom  Bouquet,  VIII,  430  b. 

10.  Dom  Bouquet,  VIII,  424  c. 

11.  De  Bouteiller,  Dictionnaire  topographique  de  l'ancien  département  de  la 
Moselle,  p.  215. 

Revue  Celtique,  IX.  14 


2i4  H.  d'Artois  de  Jubainville. 

appartenait  T.  Romilius  ou  Romulius  consul  l'an  455  avant 
notre  ère,  décemvir  en  451  I.  Ce  nom  se  rencontre  rarement 
depuis.  Cependant  Tacite  parle  d'un  centurion  appelé  Romilius 
Marcellus  qui,  en  70,  lors  de  l'insurrection  par  laquelle 
Galba  fut  renversé,  défendit  en  vain  les  images  de  ce  prince 
contre  les  soldats  révoltés2.  On  a  trouvé  en  Hongrie  une  dé- 
dicace à  Jupiter  par  L.  Romulius  Quintus'.  Une  inscription 
recueillie  aux  environs  de  Milan  nous  fait  connaître  les  noms 
de  C.  Romilius  Calla4. 

Romiliacus  ou  *  Romuliaeus  est  la  forme  primitive  des  dix- 
sept  noms  de  communes  qui  suivent  :  Romillé,  Ille-et-Vilaine; 
cinq  Romilfy,  sur  lesquels  deux  dans  l'Eure  et  un  dans  chacun 
des  trois  départements  de  l'Aube,  d'Eure-et-Loir  et  de  Loir- 
et-Cher;  quatre  Rumilly,  Aube,  Nord,  Pas-de-Calais,  Haute- 
Savoie  ;  sept  Remilly,  sur  lesquels  deux  dans  les  Ardennes, 
autant  dans  la  Côte-d'Or,  et  trois  dans  chacun  des  départe- 
ments de  la  Manche,  de  la  Nièvre  et  du  Pas-de-Calais. 

Rufiacus  ou  Ruffiaeus  est  une  villa  où  étaient  situés  des  biens 
qui  lurent  donnés  en  715  à  l'abbaye  de  Saint-Bénigne,  de 
Dijon5.  C'est  aujourd'hui  Ruffey-lez-Echirey,  Côte-d'Orb. 
Une  monnaie  mérovingienne  a  été  frappée  à  Ritfiaeu,  que  l'on 
croit  être  Roufiac,  Cantal  ~.  Une  église  de  Rufiae  apparaît  en 
860  ou  866  dans  le  Cartulaire  de  Redon8.  La  paroisse  de 
Rufiae,  plebs  Rufiae,  est  mentionnée  dans  une  autre  charte  du 
même  Cartulaire  en   867.  Cette  paroisse  est  aujourd'hui  la 


1 .  Voyez  les  textes  cités  par  Mommsen,  Corpus,  t.  I,  pp.  492,  493. 

2.  Tacite,  Histoires,  1.  I,  c.  56. 

3 .  Corpus,  III,  1352. 

4.  Corpus,  V,  6026. 

5 .  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  300.  Voir  aussi  sur  la  même  localité  la 
Chronique  de  saint  Bénigne,  chez  Dom  Bouquet,  VII,  830  d,  elle  nous  offre 
l'analyse  d'un  diplôme  de  Charles  le  Chauve  dont  on  trouve  le  texte  chez 
Dom  Bouquet,  VIII,  618. 

6.  Gamier,  Nomenclature  historique  des  communes  du  département  de  la 
Côte-d'Or,  p.  8. 

7.  Deloche,  cité  par  M.  de  Barthélémy  dans  la  Bibliothèque  de  l'Ecole 
des  Chartes,  t.  XXVI,  p.  460. 

8.  De  Courson,  Cartulaire  de  l'abbaye  de  Redon,  p.  106. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  2 1 5 

commune  de  Ruffiac,  Morbihan1.  La  même  année,  Charles  le 
Chauve  donne  un  diplôme  dans  la  villa  Rufiacus  dont  on 
ignore  la  situation2.  Rufiacus  a  une  variante  Rofiacus;  un 
fundus  rofiacus  apparaît  en  575  dans  le  testament  du  fondateur 
de  l'abbaye  de  Saint-Yrieix,  Haute-Vienne  3.  Il  est  question 
d'une  villa  Rofiacus  en  891  dans  une  charte  de  l'abbaye  de 
Cluny.  Cette  villa  était  située  dans  le  Maçonnais  4. 

Le  gentilice  Rufius  est  rare  sous  la  république.  Cependant 
une  inscription  qui  le  mentionne  et  qui  a  été  trouvée  près  de 
Pérouse  paraît  antérieure  à  la  période  impériale  5.  Sous  Claude, 
le  chevalier  Rufius  Crispinus  fut  préfet  du  prétoire  6  ;  élevé  à 
la  préture  par  cet  empereur  7,  il  devint  sous  Néron  le  mari  de 
la  trop  célèbre  Poppée 8.  Ce  gentilice  est  très  fréquent  dans  les 
inscriptions.  On  le  trouve  notamment  en  Gaule  :  à  Genève, 
une  inscription  nous  a  conservé  les  noms  de  Rufia  Aquilina9; 
à  Chazey,  Ain,  on  voit  encore  l'épitaphe  de  M.  Rufius  Cas- 
siolus IO  ;  à  Murs,  Ain,  celle  de  Rufius  Catullus  IX  ;  à  Uriage, 
celle  de  M.  Rufius  Marcianus12.  L'/  est  quelquefois  doublé; 
deux  exemples  de  cette  orthographe  nous  sont  fournis  par 
l'épitaphe  du  gladiateur  Ruffius  Ruffianus  J3.  Le  double/ se 
rencontre  aussi  dans  une  marque  du  potier  Ruffi  m[anu] T-*. 

De  Rufiacus  ou  Rufjiacus  viennent  les  dix-neuf  noms  de 
communes  suivants  :  Roffey,  Yonne  ;  Roffiac,  Cantal  ;  sept 
Rouffiac,  sur  lesquels  deux  dans  l'Aude  et  cinq  dans  chacun 


1.  De  Courson,  ïbid.,  pp.  106,  747. 

2.  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  129,  col.  2.  Cf.  Dom  Bouquet, 
VIII,  602  c,  603  a.  M.  Matton,  Dictionnaire  topographique  du  département  de 
V.Aisntj  p.  238,  émet  l'hypothèse  que  ce  serait  Rouy,  commune  d'Amigny, 
Aisne. 

3.  Pardessus,  Diplomata,  t.  I,  p.  138. 

4.  Bruel,  Recueil  des  Chartes  de  l'abbaye  de  Cluny,  t.  I,  pp.  51,  52. 

5.  Corpus,  t.  I,  n°  1394. 

6.  Tacite,  Annales,  liv.  XI,  ci. 

7.  Tacite,  ïbid.,  liv.  XI,  c  4. 

8.  Tacite,  ibid..  liv.  XIII,  c.  43. 

9.  Mommsen,  Inscriptiones  helveticae,  n°  76. 

10.  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  III,  p.  417. 

11.  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  III,  p.  435. 

12.  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  IV,  p.  479. 

13.  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  III,  p.  397. 

14.  Boissieu,  Inscriptions  de  Lyon,  p.  435,  n°  119. 


2 1 6  H.  d'Arbois  de  Jubainville. 

des  cinq  départements  du  Cantal,  de  la  Charente,  de  Charente- 
Inférieure,  de  Haute-Garonne  et  du  Lot  ;  Rouffy,  Marne  ; 
deux  Ruffec,  Charente,  Indre  ;  trois  Ruffey,  sur  lesquels  deux 
dans  la  Côte-d'Or,  un  dans  le  Jura;  deux  Ruffiac,  Lot-et-Ga- 
ronne, Morbihan;  Ruffieu,  Ain;  Ruffieux,  Savoie.  Vou  de 
Rouffiac  et  de  Rouffy  s'explique  par  le  redoublement  de  Vf 
qui  compensait  l'abrègement  de  Vu  primitivement  long  du 
latin  Ritfiis,  Rufius.  Nous  avons  cité  plus  haut,  d'après  des 
textes  qui  remontent  à  l'époque  romaine,  trois  exemples  de  ce 
redoublement  de  Vf,  dans  le  nom  Rujjius  et  dans  son  dérivé 
R'ijfianus.  Quant  à  l'orthographe  française  Ruffec,  Ruffey, 
Ruffiac,  Ruffieu  et  Ruffieux  par  double/,  elle  est  défectueuse, 
Vu  de  ces  mots  suppose  en  latin  un  u  long  suivi  d'un /simple, 
Rufiacus  dérivé  de  Rufius,  ce  qui  est  la  bonne  orthographe 
latine. 

Rulliacus  est  un  agellus  situé  dans  le  territoire  de  Troyes 
et  mentionné  en  635  dans  une  charte  de  Palladius,  évêque 
d'Auxerre  I.  On  suppose  que  c'est  Rouilly-Saint-Loup,  Aube2. 
Un  autre  Rulliacus  apparaît  en  877  dans  un  diplôme  de 
Charles  le  Chauve  pour  l'abbaye  de  Marchiennes>.  L'ortho- 
graphe Ruilliacum  nous  est  offerte  par  un  diplôme  faux,  attribué 
au  roi  Dagobert  Ier  +.  On  lit  Rulliacus  dans  un  diplôme  de 
Louis  le  Débonnaire  pour  l'église  du  Mans  en  832  >.  La  va- 
riante Roliacus,  qui  nous  est  donnée  deux  fois  dans  la  vie  de 
Charlemagne  par  le  moine  d'Angouléme,  appartenait  à  l'ab- 
baye de  Saint-Cybard-lez-Angoulème.  Dans  un  passage  où  est 
résumé  un  diplôme  de  Charlemagne  en  faveur  de  cette  abbaye, 
il  est  question  de  deux  localités,  appelées  l'une  Roliacus6, 
l'autre  Roliacus  minorl.  Elles  reparaissent  dans  un  diplôme  de 

1.  Pardessus,  Diplomata,t.  II,  p.  37. 

2.  Boutiot  et  Socard,  Dictionnaire  topographique  au  département  de  l'Aube, 
p.  138. 

3.  Dom  Bouquet.  VIII,  667  c. 

4.  Pertz,  Diplomatum  imperii  totnus primus,  p    163,  1.  20. 

j.  Dom  Bouquet,  VI,  586  a.  Ci.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  179, 
n°  308. 

6.  Dom  Bouquet,  V,  184  e. 

7.  Dom  Bouquet,  V,  185  a. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  217 

Charles  le  Chauve  en  852  et  y  sont  appelées  l'une  Roliacus 
super  Noir am,  et  l'autre  Ruïiacus  Minor1. 

On  voit  que  ce  nom  de  lieu  a  été  écrit  tantôt  avec  double  / 
et  probablement  a  bref,  tantôt  avec  /  simple  et  probablement 
a  long.  L'orthographe  étymologique  est  avec  double  /.  Le 
gentilice  RitUius,  d'où  le  nom  de  lieu  dérive,  est  lui-même 
un  dérivé  de  l'adjectif  rullus,  rural,  rustique,  employé  quel- 
quefois comme  surnom.  Le  plus  ancien  exemple  du  gentilice 
RuUius  nous  est  offert  par  une  inscription  du  temps  de  la  ré- 
publique, qui  a  été  découverte  à  Aquino,  en  Italie.  On  y  lit  le 
nom  de  M.  RuUius  M.  filins2.  Nous  trouvons  ensuite  C.  Ral- 
lias Commuais,  à  Capoue 5 ;  Rail  lus  Celer,  à  Formies^;  Rallia 
Galla,  a  Aquilée';  Cn.  RuUius  Calais,  à  Isernia6;  P.  Rallias 
Faustus,  en  Afrique  7. 

Rallias,  avec  double  /,  a  donné  le  dérivé  RulUacus  d'où, 
en  France,  Roilly,  Côte-d'Or;  Rouillac,  Charente  et  Côtes- 
du-Nord  ;  Rouillé,  Vienne  ;  deux  Rouilly,  Aube  ;  un  troisième, 
Seine-et-Marne.  De  la  variante  Rnlius  par  u  long  et  simple  / 
est  venu  Ruïiacus  également  par  a  long  et  simple  l,  en  fran- 
çais de  l'ouest,  Ruillé,  nom  de  quatre  communes,  deux  dans 
la  Sarthe  et  autant  dans  la  Mayenne  ;  ailleurs  Rully,  nom  de 
trois  communes  :  Calvados,  Oise,  Saône-et-Loire.  Ainsi  le 
nombre  des  communes  qui  tirent  leur  origine  du  gentilice 
Rallias,  Ralias,  est  de  quatorze. 

Sabiacus  est  une  villa  qui,  dès  l'année  769,  appartenait  à 
l'abbaye  de  Saint-Aubin,  d'Angers,  comme  l'atteste  à  cette 
date  un  diplôme  de  Charlemagne8.  Ce  nom  de  lieu  a  proba- 
blement la  même  origine  que  celui  de  Saviacus  porté  par  une 


1.  Dom  Bouquet.  VIII.  321  e. 

2.  Corpus,  I,  1 181. 

3 .  Corpus,  X,  4319. 

4.  Corpus,  X,  6097. 

5 .  Corpus,  V,  1 170. 

6.  Corpus,  IX,  2682. 

7  .  Corpus,  VIII,  1533. 

8.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  p.  17,11°  4;  Dom  Bouquet,  V,  717  b. 


2 1 8  H.  d' Ai  lois  de  Jubainville. 

localité  des  environs  de  Lyon  où  étaient  situés  deux  manscs 
qu'en  878  Louis  le  Bègue  donna  à  l'église  de  Màcon  l. 

Ces  noms  de  lieux  supposent  un  gentilice  Sapins,  en  basse 
latinité  Sabius  ou  Savius.  Sapins,  adjectif  signifiant  sage,  qui 
se  rencontre  dans  le  composé  nesapius  «  dépourvu  de  sagesse 
ou  de  science  »,  a  été  employé  comme  gentilice,  exemple:  M. 
Sapius  Maximus  dans  une  inscription  de  Turin2.  La  variante 
par  b  =  p  est  constatée  par  le  nom  de  femme  Sabia  Optata 
portée  par  une  affranchie  de  Sabius  Plaetor  dans  une  inscrip- 
tion d'Aquiléeî. 

De  Sapius,  Sabius  ou  Savius  est  venu  Sapiacus,  Sabiacus  ou 
Saviacus.  De  Sabiacus  ou  Saviacus  sont  venus  probablement  en 
français  Savy,  nom  de  deux  communes,  l'une  dans  l'Aisne, 
l'autre  dans  le  Pas-de-Calais,  et  Sagy,  aussi  nom  de  deux  com- 
munes, Saône-et-Loire  et  Seine-et-Oise.  Quant  à  Sapiacus, 
c'est  de  cette  forme  que  paraissent  venir  Sache,  Indre-et-Loire, 
et  Sachy,  Ardennes. 

Saciagus  est  le  nom  d'une  villa  dont  Vigile,  évêque 
d'Auxerre,  dispose  par  une  charte  de  l'année  670  4.  C'est  au- 
jourd'hui Sacy,  Yonne.  Saciacus,  variante  archaïque  de  ce 
nom,  désigne  un  locus  du  Beauvaisis  dans  une  charte  de  Pépin 
le  Bref,  en  faveur  de  l'abbaye  de  Saint-Denis,  en  751  5.  Dans 
un  diplôme  de  Charles  le  Chauve  pour  l'abbaye  de  Compiègne, 
en  877,  apparaît  une  villa  Sacciacus,  également  située  en 
Beauvaisis,  qui  est  probablement  différente  6.  En  892,  un  di- 
plôme de  Louis,  roi  de  Provence,  nous  montre  l'église  de 
Lyon  en  possession  d'une  Saciacus  villa,  près  de  Valence  7. 
En  912,  une  charte  de  l'abbaye  de  Cluny  mentionne  une  villa 
Saciagus  dans  le   Maçonnais s.    En  926,    une    Saciacus   villa 


1 .  Dom  Bouquet,  IX,  411e. 

2.  Corpus,  V,  7192. 
3  .  Corpus,  V,  1359. 

4.  Pardessus,  t.  II,  p.  154. 

5.  Pertz,  Diplomatiun  itnperii  tomus pritnus,  p.  109,  1.  9. 

6.  Dom  Bouquet,  VIII,  660  c. 

7.  Dom  Bouquet,  IX,  674  e. 

8.  Bruel,  Recueil  des  Chartes  de  l'abbaye  de  Choix,  p.  175. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  219 

appartenait  à  l'église  Saint-Bénigne,  de  Dijon,  comme  nous 
l'apprend  une  charte  du  roi  Raoul1. 

De  ce  nom  de  lieu,  l'orthographe  la  plus  ancienne,  bien 
que  nous  n'en  ayons  rencontré  qu'un  exemple,  paraît  être  Sac- 
ciacus,  dérivé  du  gentilice  Saccius,  conservé  par  l'inscription 
d'Igel,  près  Trêves,  où  se  lisent  les  noms  de  L.  Saccius  Mo- 
destus2.  Saccius  a  donné  le  dérivé  Sacciarius  employé  comme 
cognomen  dans  une  inscription  de  Leybach^.  Il  est  dérivé  de 
Saccus,  autre  cognomen  porté  par  un  chrétien  d'Afrique  qui  fut 
martyrisé  et  dont  le  culte  est  célébré  le  27  mai.  Le  cognomen 
Saccus  est  probablement  identique  au  nom  commun  signifiant 
sac.  De  Saccus  vient  le  dérivé  Sacco  employé  à  titre  de  cognomen 
dans  une  inscription  de  Terracine  4,  d'où  le  gentilice  Sacconius 
dans  deux  inscriptions,  l'une  de  Naples>,  l'autre  de  Lyon6. 

De  Sacciacus  viennent  les  noms  de  Sacé,  Mayenne,  Sacey, 
Manche,  et  de  quatre  communes  de  Sacy,  deux  dans  l'Oise, 
les  deux  autres  dans  la  Marne  et  l'Yonne. 

Salviacus,  où  l'abbaye  de  Saint-Denis  posséda  une  église 
dédiée  à  saint  Martial  et  que  mentionnent  deux  diplômes  faux, 
l'un  de  Dagobert  Ier  7,  l'autre  de  Clovis  II8,  est  aujourd'hui 
Saujat,  commune  de  Montluçon,  Allier  9. 

Le  gentilice  Salvius,  d'où  Salviacus,  remonte  à  la  période 
de  la  république,  comme  le  prouve  l'épitaphe  de  C.  Salvius 
Cassiae  gn[atus]  I0  et  l'inscription  de  Pescina  qui  nous  a  con- 
servé les  noms  de  A.  Salvius  Cledus11.  Ce  gentilice,  d'abord 
obscur,  fut  rendu  célèbre  par  l'empereur  Othon,  dont  le  règne 
éphémère  appartient,  comme  on  le  sait,  à   l'an  70  de  notre 

1.  Dom  Bouquet,  IX,  570  c. 

2.  Brambach,  nr'  830. 

3.  Corpus,  III,  3874. 

4.  Corpus,  X,  6394. 

5 .  Corpus,  X,  2198. 

6.  Boissieu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon,  p.  241. 

7.  Pertz,  Diptomatum  imperii  lonius primas,  p.   159,  I.   36. 

8.  Pertz,  Diplomatum  imperii  tomits  primas,  p.  180,  1.  45. 

9.  Longnon,  Examen  géographique  du  tome  premier  des  diphmata  imperii , 

P-  33- 

10.  Corpus,  I,  1383. 

11 .  Corpus,  I,  1541  a. 


220  H.  d'Arbois  de  Jubainville. 

ère.  Ce  prince  s'appelait  M.  Salvius  Otho.  Son  père,  L.  Sal- 
vius  Otho  Titianus,  avait  été  consul  en  52,  et  son  grand-père 
avait  été  préteur1.  Un  certain  Salvius  fut  chargé  du  gouver- 
nement de  l'Aquitaine  avec  titre  de  légat  sous  l'empereur  Ha- 
drien, 1 17-138.  Xous  avons  encore  l'analyse  d'un  rescrit  que 
lui  adressa  cet  empereur2.  On  pense  que  ce  Salvius  est  iden- 
tique au  célèbre  jurisconsulte  Salvius  Julianus '.  Le  gentilice 
Salvius  n'est  pas  rare  dans  les  inscriptions  du  temps  de  l'em- 
pire-K  Ce  gentilice  pénétra  en  Gaule,  comme  l'atteste  l'épitaphe 
de  C.  Salvius  Mercurius,  trouvée  à  Fourvières  et  conservée  au 
palais  des  Arts,  à  Lyon  >. 

De  Salviacus,  la  forme  moderne  dans  les  régions  méridio- 
nales de  la  France  est  Salviac,  Lot  ;  Sauviac,  Gers,  Gironde  ; 
Sauviat,  Puy-de-Dôme,  Haute-Vienne;  Saujac,  Aveyron,  sept 
noms  de  communes,  sans  compter  les  écarts;  parmi  ceux-ci, 
nous  citerons  Saugey,  Savoie  et  Haute-Savoie  qui  nous 
offrent  une  forme  septentrionale  de  ce  nom;  la  variante  ro- 
maine est  Sdlvianus,  qui  a  donné  Sauvian,  Hérault. 

Salviniacus  est  une  villa  du  Tonnerrois  qui  appartenait  au 
ixe  siècle  à  l'abbaye  de  Montier-la-Celle,  comme  nous  l'ap- 
prend un  diplôme  de  Charles  le  Chauve6. 

Salvinius,  d'où  Salviniacus  dérive,  n'est  pas  un  gentilice 
commun  ;  on  l'a  trouvé  dans  une  inscription  de  Constantine 
qui  nous  apprend  les  noms  de  P.  Salvinius  Arat[or]  ".  Salvi- 
nius est  dérivé  de  Salvinus,  qui  acte  employé  comme  surnom, 
exemple  :  Ulpius  Salvinus  dans  une  inscription  de  Karlsbourg8. 

1.  Tacite.  Histoires,  1.   II,  c.    50.   Cf    Josephus  Klein,  Fasti  consuîares, 

P-  35- 

2.  Callistrate.  livre  \  de  cognitionibus ,  passage  reproduit  au  Digeste, 
ivr.  XLVIII.  titre  III.  loi  12. 

3.  Desjardins,  Géographie  historique  et  administrative  de  là  Gaule  romaine, 
"t.  III,  p.  2)3.  Voir  Teuffel.  Geschichte  der  rœmischen  Literatur,  3e  édition, 
p.  817. 

.| .  ~\  ovez  les  index  du  Corpus,  t.  II,  p.  729,  col  3  :  t.  III,  p.  1083, 
col.  2;  t.  V,  p.  1 1 3 3 .  col.  4;  t.  VII,  p.  370,  col.  1;  t.  VIII,  p.  1013, 
col.  3  ;  t    IX.  p.  724.  col.  2  :  t.  X,  p    1034,  col    1 . 

3.    Boissieu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon,  p.  184. 

6.  Dom  Bouquet.  VIT.  642  e. 

7.  Corpus,  VIII,  7706.  • 

8.  Corpus,  III.  I  143. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  22  1 

Salvinus,  nom  d'un  évêque  de  Vérone  mort  vers  562,  et  d'un 
évêque  de  Verdun  qui  vivait  au  siècle  précédent,  n'est  autre 
chose  que  ce  cognomen  dont  le  gentilice  Salvinius  est  un 
dérivé l . 

De  Salviniacus  viennent  les  noms  de  communes  suivants  : 
Sauvignac,  Charente  ;  deux  Sauvigney,  Haute-Saône  ;  et 
quatre  Sauvigny,  sur  lesquels  deux  dans  l'Yonne  2,  un  dans 
la  Meuse  >,  un  dans  la  Nièvre 4. 

Sansiacus  est  le  nom  d'une  des  propriétés  de  l'abbaye  de 
Saint-Ouen,  de  Rouen,  aux  termes  d'un  diplôme  donné  par 
Charles  le  Chauve  en  876  5.  Sansiacus  tient  probablement  lieu 
d'un  plus  ancien  *  Sanctiacus,  dont  la  forme  romaine  était 
Sanctianus  ;  ce  dernier  mot  a  conservé  son  t  dans  l'ortho- 
graphe Santianac,  d'un  nom  de  lieu  que  mentionne,  vers 
l'année  846,  un  diplôme  de  l'empereur  Lothaire  en  faveur 
d'un  archevêque  de  Lyon6. 

Ces  noms  de  lieux  dérivent  du  gentilice  Sanctius  dont  un 
exemple  nous  est  conservé  par  une  inscription  de  la  Bavière 
rhénane  où  figure  un  personnage  appelé  Sanctius  Honoratus  ' . 
On  en  trouve  un  autre  exemple  dans  une  dédicace  conservée 
au  musée  de  Genève  et  qui  a  pour  auteur  L.  Sanctius  Marcus  8. 
Ce  gentilice  est  lui-même  dérivé  du  cognomen  Sanctus,  plus 
fréquent. 

*  Sanctiacus  a  donné  à  la  géographie  moderne  de  la  France 
les  huit  noms  de  communes  suivants  :  deux  Sansac,  Cantal  ; 
Sansais,  Deux-Sèvres;  Sanssac,  Haute-Loire  ;  Sanssat,  Allier, 
Sanxay,  Vienne  ;  Sanzay,  Deux-Sèvres,  et  Sanzey,  Meurthe- 
et-Moselle.  *  Sanctianus  a  donné  Sansan,  Gers. 

1 .  Ces  évêques  ont  été  placés  au  nombre  des  saints  ;  leurs  fêtes  ont  été 
mises  l'une  au  12  octobre,  l'autre  au  4  septembre. 

2.  Salvigniacum,  1217,  Quantin,  Dictionnaire  topographique  de  l'Yonne, 
p.  121 . 

3.  Salviniaco,  S46,  Liénard,  Dictionnaire  topographique  delà  Meuse,  p.  219. 

4.  Salviniacum,  817,  Soultrait,  Dictionnaire  topugniphique  de  la  Nièvre, 
p.  172. 

5.  Dom  Bouquet,  VIII,  650  e. 

6.  Dom  Bouquet.  VIII,  384  a. 

7.  Brambach,  1764. 

8.  Mommsen,  Inscriptiones  helveticae,  n°  73. 


222  H.  d'Arbois  de  Jubainville. 

Secundiaca  est  le  nom  d'une  cors,  c'est-à-dire  d'une  villa 
mentionnée  dans  le  diplôme  de  fondation  de  l'abbaye  de  la 
Sainte-Trinité,  de  Poitiers,  vers  l'année  962  r.  Cette  localité 
était  située  près  de  Melle,  Deux-Sèvres. 

Secundiacus  est  dérivé  de  Secundius,  gentilice  qui  n'est  pas 
rare  dans  les  inscriptions  et  qui  est  dérivé  du  surnom  plus  fré- 
quent encore  Secundus.  Nous  citerons  :  Secundius  Crispus, 
dans  une  inscription  de  Trêves 2  ;  Secundius  Ursio,  au  musée 
de  Bonn  3  ;  Secundius  Agricola,  à  Wiesbaden-J  ;  M.  Secundius 
Saturninus,  M.  Secundius  Acceptus  dans  une  inscription  de 
Lyon  5. 

De  Secundius  est  venu  Secundiacus  qui,  dans  le  midi  de  la 
France,  a  donné  Segonzac,  Charente,  Corrèze  et  Dordogne. 
Quant  à  Secondigné  et  Secondigny,  Deux-Sèvres,  ils  suppo- 
sent un  primitif  *Secundiniacus,  dérivé  de  Secundinius  qu'on 
trouve  dans  la  dédicace  lyonnaise  a  Mithra,  par  Aur.  Secun- 
dinius Donatus6,  et  dans  plusieurs  autres  inscriptions  7.  Il  peut 
se  faire  que  dans  le  diplôme  cité  plus  haut  on  ait  imprimé  Se- 
cundiacus pour  Secuiidiniacus,  et  que  la  localité  mentionnée 
soit  Secondigné,  Deux-Sèvres,  arrondissement  de  Melle. 

Securiacus  est  un  locus  situé  en  Brabant,  comme  nous  l'ap- 
prennent deux  diplômes,  l'un  de  Louis  le  Débonnaire,  qui 
parait  dater  de  l'année  822 8,  l'autre  de  Charles  le  Chauve 
en  8479.  Dans  un  diplôme  de  Charles  le  Simple,  en  899,  Se- 
curiacus est  qualifié  de  villa  I0. 

Ce  nom  de  lieu  dérive  du  gentilice  Sccurius  qui  paraît  très 
rare.  Le  seul  exemple  rigoureusement  certain  que  nous  en 

1 .  Dom  Bouquet,  t.  IX,  p.  626  d. 

2.  Brambach,  n"  825. 

3 .  Brambach,  n°  846. 

4.  Brambach,  n"  1526. 

5.  Boissieu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon,  p.  521. 

6.  Boissieu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon,  d.  40. 

7.  Voyez  les  Index  du  Corpus,  t.  III,  p.  1083,  col.  2;  t.  V,  p.  1 126, 
col.  1. 

8.  Dom  Bouquet,  VI,  530e.  Cf.  Sickel,  Acla  Karolinorum,  t.  II,  p.  138, 
n°  180. 

9.  Dom  Bouquet,  VIII,  488  e. 
10.   Dom  Bouquet,  IX,  474  b. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  223 

puissions  signaler  se  rencontre  dans  une  dédicace  à  Jupiter 
trouvée  près  de  Mayence.  L'auteur  de  cette  dédicace  est  le  lé- 
gionnaire Securius  Carantus1.  On  suppose  que  le  même  gen- 
tilice  était 'inscrit  dans  une  épitaphe  recueillie  à  Neumayer, 
Prusse  rhénane.  Cette  épitaphe  aurait  été  gravée  par  les  soins 
de  Securius  Novellus  ;  mais  quand  a  été  trouvée  cette  ins- 
cription aujourd'hui  perdue,  le  commencement  de  la  ligne  où 
ce  nom  avait  été  gravé  manquait,  et  dans  cette  lacune  était 
comprise  la  lettre  initiale  s  de  Securius 2. 

* Silvaniacus  est  probablement  l'orthographe  primitive  du 
nom  de  lieu  écrit  Selvaniacus  dans  un  diplôme  accordé  par 
Louis  le  Débonnaire  à  l'abbaye  de  Conques,  en  8195.  En 
effet,  nous  trouvons  le  même  nom  de  lieu  écrit  à  l'ablatif  Sil- 
vaniago,  avec  un  i  à  la  première  syllabe,  dans  une  charte  du 
xie  siècle  conservée  par  le  cartulaire  de  Conques  4.  Le  nom 
actuel  de  cette  localité  estt  Savignac,  c'est  une  dépendance  de 
la  commune  d'Asprières,  Aveyron. 

Silvaniacus  est  dérivé  du  gentilice  Silvanius,  dérivé  lui- 
même  du  surnom  Silvanus.  L'épitaphe  de  Silvanius  Fortu- 
natus  existe  encore  à  Vienne,  Isère 5.  Les  noms  deL.  Silvanius 
Probus  nous  ont  été  conservés  par  une  inscription  de  Rheïn- 
zabern,  en  Bavière  rhénane6. 


(A  suivre). 


H.  d'Arbois  de  Jubainville. 


1 .  Brambach,  n°  921. 

2.  Brambach,  n°  858. 

3.  Dom  Bouquet,  VI,  717e.  Gustave  Desjardins,  Cartulaire  de  l'abbaye 
de  Conques,  p.  410. 

4.  Desjardins,  Cartulaire  de  Conques,  p.  81. 

5.  Allraer,  Inscriptions  antiques  de  Vienne,  t.  III,  p.  6. 

6.  Brambach,  nu  181 4. 


ON   THE  MATERIA  MEDICA 

OF  THE  MEDIAEVAL  IRISH. 


The  first  of  the  following  lists  of  articles  employée!  in  the 
practice  of  medicine  by  the  mediaeval  Irish  is  taken  from 
Additional  15,403,  a  small  vellum  manuscript  in  the  British 
Muséum,  to  whieh  my  attention  was  directed  by  M.  Gaidoz's 
notice  in  the  Revue  Celtique,  VII,  165,  166.  This  ms. 
contains  72  folios  in  a  hand  of  the  fourteenth  or  fifteenth 
century,  and  is  a  treatise,  in  the  Irish  language,  not  only  on 
the  healing  properties  of  various  plants,  but  on  those  ot 
various  trees,  metals,  gums  and  stones,  of  sait,  eggs,  milk, 
butter,  leaven  :  of  hare-flesh  and  cantharides  ;  bran  and 
acorns,  etc.,  etc.  So  that,  instead  of  calling  it  an  «  Herbier 
médical  »,  it  should  be  described  as  a  treatise  on  materia 
medica. 

The  second  of  thèse  lists  is  taken  from  the  pharmacological 
treatise  in  H.  2.  17,  a  ms.  belonging  to  Trinity  Collège,  Du- 
blin, and  described  in  Irische  Texte,  zweite  série,  I.  Helt,  p.  1. 

As  most  of  the  names  are  given  both  in  Latin  and  in  Irish, 
and  many  of  the  Irish  words  are  not  found  in  the  published 
dictionaries,  thèse  treatises  are  important  both  for  Irish  lexico- 
graphers  and  for  students  of  mediaeval  latinity.  Their  value 
for  the  historian  of  Irish  medicine  can  only  be  determined  by 
a  man  likeDr.  Norman  Moore,  equally  skilled  as  a  leech  and 
a  linguist,  from  whom  Celtic  scholars  would  gratefully  receive 
an  édition  of  both  Works.  Hère  I  can  only  give  the  titles  of  the 
sections  into  which  thev  are  divided.  In  explaining  the  Latin 
names  I  hâve  bcen  aided  chiefly  by  Mr.  Mowat's  éditions,  in  the 


On  the  Irish  Matai  a  medica.  22^ 

Anccdota  Oxoniensia,  of  the  Sinonoma  Bartbolomei,  1882,  and 
the  Alphita,  1887.  Of  thèse  books,  the  former  will  bedenoted 
by  S.  B.,  the  latter  by  A. 

In  explaining  the  Irish  names  I  hâve  been  helped  chieflv 
by  Peter  O'Connell's  ms.  dictionary,  of  which  there  is  a  copv 
by  John  O'Donovan  in  the  library  of  the  British  Muséum. 

ADDITIOXAL    15,    403 

Fol.    3b  Auripimentum  l  arsenicum2  .i.  anman«a  in  airged- 

\à\l)l  3. 

4a  Arracia4  atriplex  5  .i.  in  clctreog6. 

Argentum  uiu[u]m  .i.  in  t-airget  beo7. 
5a  Asufetida8  .i.  guwcroin«9. 
5b  Aristoloia  longa.  Avistoloia  rotunda  I0  .i.  in  sdoinsi 

cruintt  7  in  sdoinsi  fada11. 
6b  Artemecia  mater  herbanw»12  .i.  in  buafallan  liathx>. 
7a  Atanasia  ^  tanesctumT>  .i.  lus  na  frange16. 

COMMENTARY 

1.  auripigmentum  «  orpiment  »,  yellow  sulphuret  of  ar- 
senic. —  2.  auri  pigmentum,  S.  B.  11.  —  3.  «  names  of  the 
airgedlam  »  (?) 

4.  =  arache.  —  5.  the  explanation  of  atriplex,  S.  $.  12, 
and  probably  the  Eng.  ôrach  «  wild  spinach  ».  —  6.  eletreog 
=  O'Reilly's  «  elefleog  s.  f.  stinking  orach  ;  artiplex  [leg. 
atriplex]  olida  ». 

7.  «  the  live  (quick)  silver.  »  W.  arian  byiu. 

8.  assa-toetida.  —  9.  «  gum  of  a  tree.  » 

10.  aristologia  =  zpianokcyix  «  birthwort  »  ? —  ri.  «  the 
round  stoinsi  and  the  long stoinsi  ».  P.  O'Connell  gives  stoinnse 
as  synonymous  with  copôg  nimhe  «  bestort  the  greater,  or 
snakeweed  ». 

12.  Artemisia«  mugwort». — 13.  the grey  buafallan,  O'Reil- 
ly's «buafanân  liath,  mugwort;  Artemisia  vulgaris».  Fr.  ar- 
moise commune.  Buabhall  ragweed.  P.  O'C.  dimin.  buabhlan. 

14.  àOovasia.  —  15.  tanacetum  A.  16.  s.  v.  atanasia.  — 
16.  «  the  herb  of  the  Franks  »  =  O'R.'s  «  lus  na  ffranc  com- 
mon  tansey  ». 


226  Whitley  Stokes. 

7h  Athasar1/  pole[giu]m  régule18  .i.  puliol  ruighel1?. 

8a  Auancia  gariofilata20  .i.  in  wacall". 

8b  Auellana  nux  barua22  .i.  in  chnu  gaeidhiluch2?. 

Auena  .i.  in  coirce2^. 
9a  Auricala  mûris2)  .i.  in  liathlus  .i.  in  liathlus  beag26. 

Auram2"  .i.  in  t-or28. 

9b  Balanon  29  glans  adhon  mesoga  na  n-darach  5°. 

Balsamum  .i.  gum  croinn  fhasas  isiw  baibiloi//  e?1. 
ioa  Barba  filicana?2   plantagho  maigher33  .i.  in  cruach 

patraic  34. 
iob  Barba  [u]rsina35  .i.  lus  nalaeghî6. 

ij.  athasar?  — 18.  pulegium  regale  (A.  150). —  19.  trom 
which  puliol  ruighel  is  borrowed,  though  the  u  in  Ir.  ruighel 
is  strange.  Puliol  re-occurs  fo.  6$h. 

20.  avencia,  avens  caryophyllata.  —  21.  O'Reilly's  «  mâ- 
chai l  ftadhain  common  avens,  herb  bennet,  geum  urbanum  ». 
P.  O'C.  has  machall  coille  wood  avens,  machall  uisce  water 
avens.  W.  mabcoll. 

22.  avellana  est  coruli  fructus,  S.  B.  12  :  «  barva»  forparva. 
—  23.  «  the  Irish  nut  »  the  hazel  nut.  A  au't  francach  oc- 
curs  infra  fol.  58b. 

24.  the  oat:  coirche=  W.  ceirchen,  pi.  ceirch. 

25.  auriculus  mûris,  S.  B.  12,  auricula  mûris,  A.  17,  Fr. 
pilosellc.  Eng.  creeping  mouse-ear.  —  26.  lit.  «  the  grey  plant, 
the  little  grey  plant  ».  The  cognate  Cornish  lot-les  glosses 
artemisia.  And  according  to  P.  O'C.  the  Irish  liathlus  môr  is 
artemisia,  while  liathlus  beag  is  the  mouse-ear. 

27.  aurum.  —  28.  «  the  gold  ». 

29.  (3iXavoç.  —  30.  «  to  wit,  the  acorns  of  the  oaktrees  ». 

31.  «  gum  of  a  tree  which  grows  in  Babylon  it  (is)  ». 

32.  «  Barba  filicana  »  seems  a  synonym  for  plantago 
major.  —  34.  P.  O'C. 's  cruach  Phàdraic,  Ô'R.'s  cruacb-pha- 
druig  s.  the  herb  plantain  Plantago  latifolia. 

35.  barba  ursina  (hircina),  eng.  buckestonge,  A.  21.  — 
36.  «  the  plant  of  the  calves  ».  O'R.  explains  lus  na  laogh  by 
1.  orpine  (sedum  telephium).  2.  golden  saxifrage. 


On  the  Irish  Materia  medica.  227 

na  Barba  siluana?"  .i.  in  glasair  œ'ûled^. 

nb  Barba  iouis  semptv  uiua  39  adho/;  111  teneacaH0. 

Bardana^1  .i.  in  weacun  tughaw42. 
I2a  Branca  ursina43  .i.  in  gallfothan«an44. 
i2b  Betaetpleta45  etsicla46  .i.  trihanman«ainbiatM5a47. 
i3a  Blionia  molena48  adhon  in  coinweall  muire49. 

Bolus  arminicw^  >°  .i.  uir  sleibhi  armewiaî1. 
i3b  Borax  .i.  gum  cro'mn  e52. 

Betonica. 
I4a  Bursa  pastoris  adhon  lus  in  sparai«>3 

37.  «  barba  siluana  »  I  hâve  not  found  elsewhere.  — 
38.  =  O'K.'s  glasair  coille  «  wood  betony  ». 

39.  barba  Iovis,  Fr.  ioubarbe,  Eng.  houseleek,  semperviva, 
Fr.  sempervive.  —  40.  in  teneacal  =  in  tenecal  infra  fo.  46  . 
P.  O'C.'s  kincagal. 

41.  Bardana,  farfara,  ungula  equina  A.  21.  — 42.  meacun 
tughan  is  =  O'R's  mcacân  tuan  great  common  burdock,  P. 
O'C's  mcacan  tua. 

43  .  sic  A.  25 .  Fr.  branche-ursine  «  acanthus  mollis  »,  Littré. 
—  44.  lit.  «  the  foreign  thistle  »  (fothanmîii).  This  is  P.  O'C's 
gallfôthadân  and  gallfôthanân  the  herb  bearsbreech  or  bear's 
foot. 

45.  beta  major  vel  bleta  uel  bletis,  atriplex  agrestis  vel  do- 
mestica  idem.  Gall.  arache  blanc,  A.  22.  — 46.  sicla  .i.  beta 
maior,  A.  171.  —  47.  «  Three  names  of  the  betony  ». 
«  biatas,  biatuis,  s.  m.  betony;  beetroot,  sea-beet,  beta  mari- 
tima  »,  O'R.  W.  beatus. 

48.  Blionia  is  perhaps  for  brionia  «  briony  »  :  molena  is 
obscure  to  me.  —  49.  lit.  «  the  candie  of  (the  B.  V.)  Mary  ». 
according  to  P.  O'C.  the  herb  mullen,  torchweed  or  high 
taper,  Lat.  ver  base  uni. 

50.  bolus  armenicus,  «  quedam  uena  terre  que  in  Armenia 
reperitur  [et]  per  centum  annos  potest  seruari  »  A.  24.  — 
5 1  «  mould  of  a  mountain  of  Armenia  ». 

52.  «  gum  of  a  tree  it  (is).  » 

53.  «  to  wit,  the  plant  of  the  purse  ».  Eng.  shepherd's 
purse. 


228  Whitley  Stokes. 

Betonica  .i.  [i]n  bitoine  54. 
i5a  Balsamita  '  >  .i.  in  cardan?/)6. 

Burneta  57  .i.  in  lus  crée  58. 
i6a  Bibolca>9  .i.  in  fochlug60. 
i6b  Butirum61  .i.  in  t-im62. 

i7a  Calamentum 63  .i.  an  cailement6*. 

i7,J  Ciclamen  malum  [in  top  marg.  terrae]  .i.  inculard//6>. 

i8a  Cameactis  ebulwj66  .i.  in  ualabort67. 

i9a  Cardinis68  beneàictus  [in  top  tmrgin :  labrwm  venins] 

.i.  an  torcd//69. 

54.  «  the  betony  ». 

55.  «  balsamita,  salmentica,  sisimbrium,  menta aquatica  ». 
A.  19. 

56.  «  the  water-mint  »,  O'R's  cartloinn. 

57.  «  burnet  »,  A.  25. 

58.  «  the  herb  of...  «  luscre  maie  speedwell  ;  Veronica  of- 
ficinalis  »,  O'R. 

59.  obscure  to  me.  —  60.  «  the  brooklime  »  ?  a  kind  of 
veronica. 

61.  butyrum. — 62.  «  the  butter »,imm, imb=-\it.  unguen. 

63.  calamintha,  naXajx(vGYj.  —  64.  «  the  calamint  ». 

65.  cyclamen,  malum  panis  terrae  (ms.  terra  pans)  porcin//^ 
calsamus(?)  i.  e.  the  earth-apple  ?  O'R.  has  cularain  «  cu- 
cumbers  »,  and  in  Irish  Glosses  N°  cularan  glosses  cucuiiier. 
But  P.  O'C.  explains  cularan,  clorân  by  earthchestnut,  earth- 
nut,  pignut,  Connecting  it  with  W.  cular.  Bret.  koJoren,  keler 
«  noix  de  terre  »,  Legon. 

66.  Cameactis  [yx\).x:x/-r„  Diosc.  RT,  172]  interpretatur  hu- 
milis  sambucus  [i.  actis  (ày.t^)  enim]  ebulus  dicitur,  gallice 
eble,  anglice  wellewort  uel  walwort,  A.  28.  —  67.  the  wal- 
wort  or  ground-elder.  The  Ir.  ualabort  is  borrowed  from  the 
English.  P.  O'C.  gives  it  as  ualuârd,  balbhârd  and   malbhàrd. 

68.  sic,  i.  e.  Cardo  benedictus  A.  24,  the  Eng.  groundsel. 
—  69.  I  know  not  whèther  we  hâve  hère  orcàn  or  torcân  :  P. 
O'C. 's  organ  seems  borrowed  from  lat.  origânum  wild  marjo- 
ram  :  for  groundsel  Mac  Curtin  eives  çronnlus. 


On  the  Irish  Materia  tnedica.  229 

Camedreus7°  [in  righi  margin:  quercula  minor  ger- 

mandrea]  .i.  mdairgiw  bcg/1. 
20a  Camapiteus  72  [in  top  margin  :  germa'ndrea  quercula 

rriaior]  .i.  in  dairghiw  môr/5. 
2ob  Camâmilla  [in  top  margin  :  antehum  atenis  bebonici"4] 

.i.  lus  75. 
2ia  Campora   [in  top  margin:  canabus  canabum76]    j 

lus  77. 

2ib  Camolea  quinq//cfolium78  .i.  in  coicldhach  79. 

22a  Caniculata  [in  top  margin  :  simponica  'uisyamus  casi- 

lago  insana8°]  .i.  \n  gabfan/;8r. 
23*  Cantarides  .i.  nacuile82. 

Cantubrum83   [in  top  margin:  furfur   tritici]    .i.    \n 

bran  84. 


70.  i.e.  chamaedrys  yx[j.x(opj;,  camedreos  A.  28.  —  71.  the 
great  dairgin  «  the  lesser  germander  ?  » 

72.  yx[j.x:-:.-j;  camepiteos  A.  28.  —  73  «  the  greater  ger- 
mander ».  dairghin  na  subh,  a  kind  of  berry-bearing  shrub', 
P.  O'C. 

74.  antenum  and  atenis  seem  corruptions  of  ôvOejw*  :  bebonici 
is  obscure  to  me.  —  75.  «  a- plant  ». 

76.  «  canabaria  similis  est  in  foliis  canabo  »  A.  30,  where 
Mr.  Mowat  conjectures  that  canabaria  may  be  v.rny.y.:  âypîa, 
of  which  Diosc.  III,  156  says  -.'y.  Il  çj'/j.y.  ojjwta  -ft  r^.izu).  But 
our  campora  may  be  camphora  A.  33. 

78.  camolee  [yxj.i/.y.'.y],  quinquefolium,  pentaphilon  [icevca- 
s'jXXov]  idem,  A.  27.  —  79.  «  the  cinquefoil  ». 

80.  caniculata,  iusquiamus  [i>z;  v.jy.y.î:],  cassilago,  simpho- 
nita  [leg.  -ica  ?  cf.  srxç-wr.r/.r,]  dens  caballinus  idem.  —  81. 
«  the  henbane  »,  O'R.'s gafann  henbane;  hyoscyamus  niger. 
This  is  the  gahen  (gl.  simphoniaca)  of  the  Cornish  Vocabu- 
Iary. 

82.  cantharides  .i.  e.  the  (spanisli)  Aies  »  :  cuil  (W.  cylioii) 
cognate  with  Lat.  culex. 

83.  cantabrum  furfur  tritici  A.  33.  —  84.  «  the  bran  »  : 
bran  chaff,  O'R.,  bran,  P.  O'C. 

Revue  Celtique,  IX.  15 


2  jo  Whitley  Stokes. 

23 b  Canopodium  pes  corui85  [in  top  margin  :  apiuw  ema- 

roidarwra]  .i.  in  gairgiw  86. 
24*  Caprifolium  mater  silua[e]  [in  top  margin  :  uolubilis 

maior87  gorrgiola88]  .i.  duilk  feithi 89. 
24b  Carui  [in  top  margin:  cemella  bipmla  ameos9°]  .i. 

an  carabûaidb^1. 
Cacia  fistula92. 

25b  Diegreidium93  .i.  sugh  luibe 9-4. 

i6a  Dens  leonis94  .i.  in  serban  mue 95. 

Diuretieam  .i.  gach  luibh  a  fuil  brigb  togairmthi  in 
fuail  7  briste  na  cloch  mar  ata  sil  melo;/es  7  si- 
tfuilli  7  cucurmis  7  cicurbit  7  sil  fenel  7  merse  7 
ainis  7  persil  h'  7  elestront  7  prema  herrimi  7  milbh- 


85.  Perhaps  this  should  be  Chenopodium,  cf.  -/t^otzo'j; 
«  goosefoot  ».  Apium  emaroidarum  (i.  e.  haeniorrhoidarum) 
pes  corui,  A.  ri.  —  86.  «  the  crowfoot  »,  O'R's gairgin. 

87.  «  caprifolium...  mater  siluana,  uolubilis  maior  idem  ». 
A.  29.  —  88.  gorrgiola  must  mean  «  honeysuckle  »  or 
«  woodbine  »  ;  but  I  hâve  never  met  the  word  elsewhere. 
—  89.  «  the  woodbine  ». 

90.  carui  agreste  cumnella  ameos,  A.  30,  where  the  editor 
connects  carui  with  -/.xp;;  and  ameos  with  a;;.;;.-.,  Diosc.  III,  59, 
63.  Our  cemella  must  be  =  the  cumnella  of  A.  Our  biperda  is 
obscure  to  me.  —  91.  «  the  caraway  »,  arab.  al-karavia  from 
lat.  careum  (D'iezyo).  Aïter carabiiaidh the  Irish  author writes : 
et  adubairt  Au.  Cum  caraui  carui  nunecum  [i.  e.  nunquam] 
sine  febre  fui  .i.  anfad  dobadhus  can  carabuaidh  dochaithim 
nir  sgarus  re  fiabras.  —  92.  cassia  iistula,  A.  35,  S.  B.  14. 

93.  diagridium  scamonia  idem,  A.  50.  «  diacridium  id  est 
scamonea  preparata  acridium  antiquitus  dicebatur  scamoneâ», 
Matth.  Silv.  cited  ibid.  211.  —  94.  «  juice  ofan  herb  ». 

94.  dandelion. —  95.  literally  «  the  pigs'oats  ».  dandelion 
«  succory  ».  P.  O'C.  serban  À.  coirce,  O'Cl.  serban  .i.  cenel 
n-arba,  7  ba  doig  co  mbad  e  in  corci,  O'Mulc.  H.  2,  16, 
col.  121. 


On  the  Irish  Mater ia  medica.  231 

bocain  7  b'ûur  7  sil  raideogi  7  fuil  bocai//  [i6h]  7 
casra  eighin;/  na  crand  7  g//rmaille  96. 

26b  Diptan/z/^-  pulegium97  martis  .i.  da  ainm  in  eli- 
t/*onta98. 

27*  Dragantum99  .i.  in  copnrrus100. 

28a  Ebulus  cameactis.  adhon  da  ainm  in  ualuaird101. 

29a  Edera  arborea  adhon  eigheand  na  cran/z102. 

29b  Edera  tearrastris  .i.  in  t-eigen//  talma?/I03. 

30a  Eliborus  nigher  .i.  in  t-athabha  dubhI04. 

30b  Endiuia. 

3ia  Elena  campana  [superscribed  Enula  ca///pana]   .i.  in// 

eillin// 10>. 

3ib  Epaitica  .i.  £eabund106, 

96.  Diureticum  .i.  e.  every  herb  in  which  there  is  power  of 
calling  forth  the  urine  and  breaking  the  stones,  such  as  melon- 
seed  and  pumpkin1,  and  cucumber,  and  gourd,  and  fennel- 
seed,  and  smallage,  and  anise,  and  parsley,  and  iris  (?),  and 
roots  of  ...  and  mallow,  and  cress,  and  myrtle-seed,  and  blood 
of  toadstool,  and  the  berries  of  tree-ivy,  and  gromwell  (Fr. 
grémil,  W.  gromiî). 

-97.  «  Diptannum  multi  dicunt  pulegium  agreste  ».  A.  — 
98.  «  The  two  names  of  the  elitront  »  (?)  A  ms.  in  the  Royal 
Irish  Academy  has  Diptano  .i.  in  elitronda. 

99.  Dragantum,  uitriolum  A.  48.  —  100.  copperas,  P. 
O'C.'s  copras,  W.  copras,  Fr.  couperose,  cupri  rosa,  -/%i:/.t^k 

10 i.  Ebulus  and  chamacactis,  to  wit,  the  two  names  of  the 
walwort. 

102.  (i  the  ivy  of  the  trees.  »  eighenn,  gen.  eighinn,  infra 
fol.  26%  should  be  eidhenn.  W.  eiddew. 

103.  «  Hedera  terrestris  i.  e.  the  ground  ivy.  » 

104.  «  Helleborus  niger  i.  e.  the  black  hellébore.  » 

105.  «  the  elecampane.  » 

106.  Hepatica  «  livenvort  »  :  ae  aband  would  mean  «  hepar 
amnis  ». 

1 .  sitruiïli  —  Fr.  citrouille. 


232  Whitley  Siokes. 

Epitimen  .i.  blath  iw  timeI07. 
32a  Esula  .i.  in  esbeorna108. 
32'*  Euforbium  .i.  gum  croind  I09. 
33a  Es  ustum  .i.  umha  lo'isgtbe 1I0. 

Ematites  .i.  cloch  IIJ. 
3  3b  Emblici112  .i.  toradh  cro'mnhsus  anwsa  dowan  mor11*. 
34a  Eruca  .i.  in  cerrbocan  "4. 

34a  Ferrum  ferrugo  et  -scama  ferri  .i.  in  t-iaranw  7  in 
slaidhi  7  in  tuirennir>.     - 


107.  Iiuî8'j[ji.ov  i.  e.  the  flower  of  the  thyme. 

108.  Esula  «  petty  spurge  ».  esbeorna  is  obscure.  The  R.  I. 
Academy  ms.  above  cited  lias  Asula  et  sebran(?)  .i.  da  hainm 
na  hespcoma. 

109.  eùçôpôtov  i.  e.  gum  of  a  tree. 

110.  Aes  ustum  i.  e.  burnt  brass  (xexaufiivoç  yz/.v.ï;). 
ni.  Haematites  i.  e.  a  stone  (x[j.y.-i-rt;  Xftfeç). 

112.  Emblici  sunt  fructus  crescentes  ultra  mare,  purgant 
flegma  et  malencoliam,  et  est  species  mirabolanorum.  A.  55. 
—  113.  «  fruit  of  a  tree  which  grows  in  the  great  world  (the 
Continent,  «  ultra  mare  »). 

1 14.  «  the  colewort  ? cerr-bocan,  cf.  mill-bocaïn,  fuil-bocain  ». 
P.  O'C.  has  cearbhacân  a  skirwick  or  skirret  (=  Mid.  En- 
glish  skirwhit,  S.  B.  20),  and  O'R.  has  cearracan  «  carrot  », 
which  may  possibly  be  a  modem  corruption  of  our  cerrbocan. 

115.  «  the  iron,  and  the  iron  rust,  and  the  spark  from  an 
anvil  »  iarann  =  O.  Ir.  iarn,  slaidhi  (slaigbi?)  cf.  slaighthech 
infra  :  tuirenn  =  O'R's  tuireann.  This  woird  occurs  in  the 
following  verse  quoted  by  Dr.  Todd  (Lib.  Hymn.  90)  from 
the  Betham  MS.  22  a  : 

Geibidh  tennehair  caor  nduibhdheirg 
ima  ndregaid  alla  uird. 
sceinnidh  tuireann  ar  gach  leith, 
imasech  seinnid  na  builg. 

i.  e.  Tongs  grasp  a  black-red  bar  whereon  huge  sledges  con- 


^ 


On  the  Irish  Materia  medica.  23  ; 

5  5a  Ferrarium II6  .i.  in  ladh  bis  a  n-ir/;/ar  an  umair  ina 
mbaiter  in  t-iarand  "7. 

Flamula  .i.  in  seibheall  ulsgi II8. 

Feriugregum  .i.  pis  gregach  IJ9. 
35b  Fragaria120  .i    luss  na  subh  tûman  I21. 
36*  Fraxinus  .i.  in  fuin/zseog I22. 

Farinum  ordi  .i.  in  min  eornaI23. 
37a  Feniculus  .i.  in  fenelI24. 
37b  Feniculus  porcinus  adhcw  fenel  muc125. 

tend I    A  spark  springs  up  on   evcry    side  :  ail   around   the 
bellows  sing. 

116.  Ferra[r]ium  est  quod  invenitur  in  trunco  in  quo  faber 
réfrigérât  forcipes,  unde  illa  aqua  dicitur  ferraria  ;  et  illa  aqua 
mundata  ualet  contra  opilaciones  splenis  et  epatis  cum  herbis 
contra  illam  egritudinem  coctis.  A.  64.  —  117.  «  the  ladbÇty 
which  is  in  the  bottom  of  the  vessel  wherein  the  ironisdipt  ». 

118.  Flammula  is  some  plant  which,  when  chewed,  burns 
the  tongue  :  see  A,  63.  The  Irish  œibheall  means  «  a  spark  »  : 
uisci  is  the  gen.  sg.  of  uiscc  «  water  »  :  so  that  œibheall  uisci 
must  mcan  some  waterplant  with  acrid  juice.  P.  O'C.  renders 
aoibheal  uiscc  by  marshpenny-wort  (a  hvdrocotvle). 

119.  «  Faenum-graecum  i.  e.  a  Greek  pea.  »  O'R.  hssfenéil 
griagach. 

120.  Fragaria,  gall.  fresere,  angl.  st[r]auberie,  cuius  succus 
uel  fructus  ualet  contra  telam  in  oculo,  A.  63.  —  121.  «  an 
herb  or  a  strawberry  »  :  sub  talman  is  exactly  the  German  Erd- 
bcerc.  With  sub  cf.  W.  svjî  (fraga),  sg.  syfien. 

122.  «  the  common  ashtree  ». 

123.  «  Farina  hordei  .i.  e.  the  meal  of  barley.   » 

124.  «  the  fennel  ».  O'R's  fencul,  fenéil  griagach. 

125.  «  to  wit,  sow-fennel  »  also  called  fciucal  srâide,  P. 
O'C.,  who  gives  names  for  three  other  kinds  of  fennel,  viz. 
feinealcûrda  sweet  fennel,  feintai  fathaigh  giant  fennel,  feineal 
muirc  flixweed.  W.  ffenigl  y  môch. 

1.  dreagaid  À.  comraicid,  Stowe  Ms.  XIX. 


« 


2}4  Whitley  Stokes. 

38*  Fermentum  .i.  laibhin  7  do  plur  cruithner/;/a  do- 
nner e  7  d'uisoi  7  do  thshakz«n  I26. 

Fel  .i.  domblas  a;  gach  ainmidhe  I27. 

Filipendula. 
38b  Fumus  terrae  .i.  in  fuimitora  "8. 
39a  Fu  ualeriana  .i.  in  caerthanw  curruidh  I29. 
39b  Fugha  demonum  I?°  .i.  in  bithnwad1?1. 

Fructus  iuniperi  .i.  caera  an  ibhuir  craigi1*2. 
40a  Ficus  .i.  na  figdaI33  (the  à  is  written  over  the  ,<,T). 

40b  Galbanum  adhon  sugh  luibhi  e  r34. 
4ia  Galanga  .i.  gailingan1^. 

Galitricum  .i.  in  exin  cir  co'ûlig1^. 
411'  Gladiolus  .i.  soilestrach  T37. 


126.  «  leaven;  and  it  is  made  of  the  flour  of  wheat,  and  of 
water  and  of  sait  » . 

127.  «  bitterness  of  every  animal's liver  »,  v.Ir.  Gl.  n°975. 

128.  Fr.  fumiterre,  Eng.  fumitory. 

129.  caerîhann  is  a  common  word  for  «  rowan  »  ;  and 
curruidh  is  toi'  curraigh,gtn.  sg.  of  currach:  caerthann  curruidh 
(=  coerthand  curruigh,  infra  note  170)  is  P.  O'C.'s  caorthann 
curraigh  the  herb  valerian,  polemonium  caerultum,  in  English 
Bl ne  Jacob' s  ladder. 

130.  Fuga  demonum  ypericon  idem,  A.  68,  78.  ûicipeix.ov 
St.  John  s  Wori.  —  131.  literally  «  the  ever-new  ».  P.  O'C.'s 
biothnuaidh  and  beathnuaidh. 

132.  «  berries  of  the  Juniper  »,  or,  literally  «  of  the  yew 
of  the  crag».  Compare  one  of  O'R.'s  wordsfor  Juniper,  iubhar 
beinne,  lit.  «  yew  of  the  peak  ». 

133.  «  the  figs  » . 

134.  «  to  wit,  the  juice  of  an  herb  it  (is)  ». 

135.  «  galingale  ».  gaïleanga,  gaileangan,  P.  O'C. 

136.  «  the  bright  cock's-comb  »,   crista galli,  sometimes 

called  in  England  yellow  rutile,  from  the  colour  ot  the  flower 
and  the  rattling  of  the  seeds  in  the  capsule. 

137.  gladiolus  is  the  English  sword-lily.  Soi  lest  rach  is  a  de- 


On  the  Irish  Materia  medica.  23  5 

42a  Gariofilns  in  clobus  :38. 
42''  Genciana  .i.  coirci  lacha[n]  r39. 

43a  Guimi  .i.  gum  7  intan  adcrar  gu///  a  focul  coitcen/z 
is  do  gum  araibi  is  coir  a  tuicsin1*0. 
Git  .i.  in  cogal1-*1. 
43b  Genestula  .i.  m  gilcach1**2. 

44a  He[r]modactuli  .i.  in  tene  talman1^. 
44b  Herba  sancti  pétri  .i.  in  sobairgin  r+4. 
45a  Hipia  madior  .i.  in  flidh  r45. 
Hipia  minor  .i.  rind  ruisg1^6. 

45 b  Isopus  .i.  isoip  x47. 


rivative   of  soilestar  (gl.  gladiolum)   Ir.   Gl.   n°  775,  O'R.'s 
soiliosdar.  P.  O'C.'s  sëileastar  or  feileastar.  W.  clcstr. 

138.  jtapuôçuXXov  «  theclove  ».  clobhas,  P.  O'C.  W.  clowsen. 

139.  «  gentiana  i.  e.  duck's  oats.  » 

140.  «  gummi  i.  e.  gum;  and  when  «r  gum  »  is  said  as  a 
common  word  «  gum  arabic  »  is  to  be  understood.  » 

141.  ^//7;  (A.  75)  the  corn-cockle  (agrostemma  githago)  : 
the  Irish  word  is  borrowed  from  the  English,  or  from  A.  S. 
coccel,  coccl. 

142.  «  the  broom.  »  P.  O'C.  lias  giolcach  sléibhe  «  broom  » 
and  giolcach  nimbe  «  butcher's  broom  ». 

143.  Hcrmodactilis,  A.  82,  and  so  in  H.  2.  17,  p.  282,  tene 
talman  (gl.  hermodactilis).  Perhaps  meadow-saffron.The  Irish 
words  literally  mean  «  fire  of  earth  ». 

144.  «  the  cowslip  »  (primula  veris). 

145.  «  Hippia  major,  i.  e.  the  pimpernel  »  (anagallis?). 

146.  «  Hippia  minor,  i.  e.  chickweed.  »  The  Irish  glosses 
seem  tohave  been  transposed,  for  flidh  (=  W.  gzulydd')  is  chick- 
weed :  so  perhaps  rindruisg,  lit.  «  eye's  point  »,  may  be  pim- 
pernel. P.  O'C.,  however,  explains  rinn  cuise  bv  «  eyebright  » 
(euphrasia). 

147.  hyssop.  iosôip,  P.  O'C.  W.  isop. 


2]G  Whitley  Stokes. 

46a  Ipoquisdidos  .i.  lus  na  meacan1'*8. 
46b  louis  barba  .i.  in  temral  x49. 
47a  Iris  .i.  gloriam  Iî°. 

Ipofila  .i.  bi\nr  muirc  tSI. 

47b  Lac  .i.  in  bainwe1*2. 

48a  Lactuca  .i.  letw*1*?. 

48b  Laudanum. 

49a  Lapa[ciu]m  acutum  ,i.  in  corrcopôg  *S4. 

49b  Lapis  laxuili  .i.  cloch1^. 

Lapis  maighnetis  À.  cloch  darab  ainwi  maighnes  I>6. 
50a  Langciolata  .i.  in  slanlus1'^. 
5ob  Lauriola  .i.  crand1*8. 
5ia  Lenticula  acaitica  .i.  in  ros  lachan  Iî9. 


148.  j-;/.'.7t(:  «  tbe  fungous  excrescence  growing  from  the 
root  of  the  dogrose,  A.  86  s.  v.  ipoquistidos.  The  Irish  words 
mean  «  the  plant  of  the  roots  ». 

149.  «   the  house-leek.   » 

150.  gloriam,  P.  O'C.'s  gloiriam  «  swordgrass  »,  must  be 
a  loan,  but  from  what  ? 

151.  The  Latin  word  is  obscure  to  me  :  the  Irish  means 
«  Mary's  cress  ».  O'R.  explaius  it  by  «  brooklime  ;  veronica 
beccabunga  ».  bilur  also  occurs  supra  n°  26a  and  infra  to.  57*. 

152.  «  the  milk  ». 

153.  «  lettuce  »,  from  winch  word  the  Irish  is  borrowed. 

154.  «  lappacium  acutum,  parella,  paradella  idem  ge  paiele, 
anglice  reddokke  »  A.  94  (red  dock)  —  seems  Rumex  sangiu- 
neus.  But  the  Irish  cqrr-chopôg,  literally  a  dock  (copôg)  with 
pointed  leaves  (corr  snout,  bill,  beak,  O'R.),  means  «  the 
great  waterplantain  »,  P.  O'C. 

155.  Lapis  lazuli,  i.  e.  a  stone. 

r)6.   Lapis  magnetis,  a  stone  named  magnes. 

157.  «  Lanceolata,  i.  e.  the  ribgrass,  ribwort  plantain: 
Plantago  lanceolata  »,  O'R. 

158.  «  Laureola.(A.  95),  i.  e.  a  tree. 

159.  Lenticula  aquatica,  i.  e.  the  (iesser)  duckweed  (Jcinna 


On  the  Irish  Matériel  medica.  2  $7 

)ib  Leuisticus  .i.  lubh  l6°. 

Lepus  .i.  in  mil  maigelèl. 
52a  Lapis  agaptis  .i.  cloch  agapitis162. 
52b-  Licium  .i.  gum  crainwl63. 
53a  Lilium  .i.  in  lili  l64. 

Linga  auis  pigla  .i.  tenga  enainl6$. 
53b  Litairgerum  .i.  shïghtecb  in  airgid l66. 
54a  Licricia  .i.  licoiris16/. 

Lapa  .i.  in  chopog  l68. 
54b  Linga  bouina  .i.  in  t-oghradh  l69. 

55a  Mas. 

Maculta  treisfolium  .i.  in  eachsemar  I/°. 

minor).  This  is  the  third  ross  mentioned  in  Cormac's  Glossary, 
as  found  only  on  stagnant  water  (jiibî  acht  for  marb-uisce). 

160.  Levisticus  (Engl.  lavage)  i.  e.  an  herb. 

161.  «  the  hare  »  (lit.  «  the  beast  of  the  plain  »). 

162.  Lapis  agapis  (A.  90)  i.e.  (the)  stone  agapitis  (?) 

163.  /.jv.-.cv  i.  e.  gum  of  a  tree,  succus  caprifolii,  A.  99. 

164.  «  the  lily  ». 

165.  Lingua  avis,  pigula  (idem),  stitchwort.  The  Irish 
words  mean  literally  «  little  bird's  tongue  ». 

166.  «  XtôâpYupoç,  i.  e.  the  slaighthech  of  the  silver  ».  Litharge 
(lat.  spuma  argentt)  is  the  vitrified  lead  collected  in  the  pro- 
cess  of  separating  lead  from  silver.  P.  O'C.  has  also  slaigh- 
theach  air,  slaightheach  stain,  slaightheach  luaighe  (leg.  luaidhè). 

167.  liquiritia  i.  e.  liquorice. 

168.  lappa  i.  e.  the  dock  :  ci.  corr-chopôg  supra. 

169.  The  Latin  seems  =  Lingua  bovis,  bugloss  :  the  Irish 
is  obscure.  It  is  written  odrad  in  L.  B.  101  cited  infra. 

170.  Maculatum  trifolium  ?  i.  e.  the  horse-clover,  P. 
O'C. 's  seamar  chapall.  The  name  of  this  plant  occurs  in  the 
gen.  pi.  in  Lebar  Brecc,  101,  in  the  lower  margin  :  Denam 
bechlossa  .i.  L.  mur  7  echsemmar  7  duille  na  sub  talmaw 
7  na  sub  craeb  7  murdraigèn  7  odrad  nir  bun  7  barr  7 
druchtain  na  monad  7  mindt//s  7  cammamilla  7  coerthand 
curraig  7  duillebflr  chrànd  cumra  7  erand  plima  7  imm  lôci 


2?8  Whitley  Stokcs. 

55b  Manna. 

56a  Malagranta  .i.  na  hubhla  grainneacha I7I. 

56b  Marubium  .i.  in  t-orafunt T"2. 

57a  Nasturcium  adhon  in  bilur  uisgiJ7>. 

Napeum  sinapium  .i.  da  ainm  in  musdàrdl74. 
57b  Nenufar  .i.  blath  na  raibhi  uisgi  x75. 
)8a  Nepta  .i.  in[n]eipt I/6. 
58b  Nox  magna  .i.  in  chnu  frangcach x77. 
59a  Nus  muscata  .i.  nutamuic  I78. 
59b  Nux  longa  .i.  almont  milis  I/9. 

6ob  Olibanum. 

6ia  Opoponax  7  is  inann  opoisi//  g/eig7sugh  7  isinanw 

ponax   isiw  tengaidh  cétna  7   luib  oir  sudh  luibhi 

e  l8° 
6ib  Oua  .i.  na  huisjhi lSl. 


belltaine  7  loei  feil  na  croche  7  na  luibe  do  buain  laa  belltaine. 
Hère  murdraigen  means  agrimonv. 

171.  mala granata  (A.  108)  ,i.  e.  the  graniferous  apples. 

172.  marrubium  (A.  110)  ,i.  e.  the  orafunt  horehound  ? 

173.  «  to  wit,  the  water-cress  ». 

174.  «  the  two  names  of  the  mustard  ». 

175.  nénuphar  flos  ungule  caballineaquatice  idem  (A.  124), 
«  the  rlower  of  the  water-rue  ».  raibh,  rue  P.  O'C. 

176.  nepeta  «  the  catmint  ». 

177.  nux  magna  (A.  126)  i.  e.  the  French  nut  »  (\V.  meuen 
ffrengig),  a  walnut. 

178.  nux  muscata  (A.  124)  i.  e.  nutmeg»  {noix  muguette). 
Th.  Irish  nutamuic  is  a  loan  trom  the  Earlv  En^lish  note- 
muge. 

179.  «  a  sweet  almond  ». 

180.  z-z-hx"-  «  and  opo  in  the  Greek  is  the  saine  as  «  juice  » 
and  in  the  same  tongue  ponax  is  the  same  as  «  herb  »  ;  for  it 
(is  the)  juice  of  an  herb.  » 

181.  «  the  eggs  ».  (^T  a  neut.  i-stem,  pi.  n.  uigc. 


On  the  Irisk  Materia  medica.  239 

62a  Os  de  cerui  corde  .i.  in  cnai///  bis  a  craidhi  in  fia- 

dha182. 
62b  Ordiam  [superscribed  :  ordiuw]  .i.  ineorna18?. 

Paninus  [corrected:  Pawpinus]  .i.  duilk  na  finemh- 
m  l84. 
63*  Pes  accipidris  .i.  columbi/z  l85. 

Petrosellinum  .i.  prrsilli l86. 
63b  Pulegi[um]  muntanum  .i.  puliol  muntan  lS7. 

Piper  nighrum  .i.  pibwr  dubh  l88. 
64b  Pullicaria  .i.  in  millsen  monadh  l89. 

Paritaria  .i.  paratari T9°. 
65*  Polipoidium  .i.  in  sgim^1. 
65 b  Pipinella  .i.  in  t-ecnmJ92. 
66*  Politricum  .i.  gne  don  dubhcosach^s. 

Porrum  .i.  in  lus  ^4. 


182.  «  the  bone  that  is  in  the  heart  of  the  deer.  » 

183.  «  bordeum  ,i.  e.  the  barley.  » 

184.  pampinus  ,i.e.  the  leaf  of  the  vine. 

185.  pes  accipitris,  i.  e.  the  columbine. 

186.  pclrosclinmn,  i.  e.  parsley.  P.  O'C.'s peirsille.W '. persli. 
1S7.  brotherwort.  The  Ir.  puliol  is  borrowed  from  English 

or  French. 

188.  «  black  pepper  ». 

189.  «  the  bog  lîoney-suckle  »,  according  to  O'R.  P.  O'C. 
bas  milséan  nuira  a  sort  of  sweet  scaweed. 

190.  parictaria  wall-pellitory; 

191.  polypodium  .i.  e.  «  the  polypody  »,  a  kind  of  fern. 
So  in  scim  (gl.   polepodium)    H.  2.    17,  p.  297.   P.  O'C.'s 
sceamh. 

192.  pimpinella  .i.  e.  the  pimpernel  :  ecrim,  P.  O'C.'s 
eigrim,  the  herb  burnet  or  stone  parsley. 

193.  «  polytricum  (.i.  adiantum  »,  A.  147  a)  .i.  e.  a  kind 
of  the  black  maidenhair,  in  dubcosach(g\.  capillus  Veneris)  H. 
2.  17,  p.  286. 

194.  «  the  leek  ». 


240  Whitley  Stokes. 

67*  Pingedo  .i.  methrad^). 

Pira  .i.  na  iperedha.  I96. 
6jh  Plumbum  .i.  in  luaidhe1??. 

Quercus  .i.  in  dair^8. 

68a  Rafanos  adhon  ragam  r99. 

68b  Ros  marina  .i.  ross  marina200. 

69a  Reubarbarum. 

6<)h  Rosa  rubia  .i.  in  ros  d^rg201. 

70a  Rubia  maior  .i.  in  ///adra202. 

70b  Ruta  .i.  ruibh2°3. 

7ia  Repercusiua  .i.  gach  ni  ina  fuil  bn^  frithbuailt&:& 2a* . 

Sambucus  adhon  trom20'. 
7ib  Sal  .i.  salunw206. 
72a  Sarca  colla  .i.  guw  cfain«207. 

Scamonia. 
72b  Sateiria  .i.  sabhr...i  2°8  ? 

195.  pinguedo  «  fatness  ». 

196.  «  the  pears  ». 

197.  «  the  lead  ». 

198.  «  the  oak  ». 

199.  raphanus  «  horse-radish  ».  So  in  ragum  (gl.  rafanus), 
H.  2.  17,  p.  280. 

200.  «  rosemary  ».  W.  rhosmari. 

201.  «  the  red  rose  ». 

202.  «  the  madder  ». 

203.  «  the  rue  ». 

204.  «  everything  in  which  there  is  a  repercussive  force.  » 

205.  «  to  wit,  an  elder-tree  ». 

206.  «  sait  ». 

207.  zxo-Azv.i'tXx  ,i.  e.  gum  of  a  tree.  » 

208.  satureia.  The  Irish  word  I  cannot  decipher. 


On  the  Irish  Materia  medica.  241 


H.   2.    17 


The  pharmacological  tractate  in  H.  2.  17  begins  thus  : 
Circa  presens  negocium  in  simplicibus  medicinis  mundum 
uersatur  pre[p]ossitum...  Simplex  medicina  est  quae  talis  na- 

tura  precedit. 

P.  279.  Flamula  .i.  in  ibell1. 

P.  280.  Cuscute  .i.  claman  in  lin...  7  iderar  ris  fos  potagra 
lirii,  ar  is  e  bus  im  cois  in  lin2. 

Rafanus  .i.  in  ragum.3. 

Uiola  .i.  in  uioiH. 

Malua  .i.  in  leamach  muighiJ. 

r.  a  mistake  for  ôibell  or  àibell,  W.  ufel-yn. 

2.  Cuscuta  («  dodder  »  a  parasitical  plant  allied  to  the  con- 
volvulus)  «  i.  e.  the  mange  of  the  flax,  and  it  is  also  called  po- 
dagra  Uni,  for  it  is  at  the  foot  of  the  flax.  »  O'R.  h  as  «  clamaiu 
in  lin  dodder,  witherwind  ».  P.  O'C.  has  clamhan  dodder, 
clamhan  dearg,  red  dodder. 

3.  «  horse-radish  »,  ragam  =  racine,  radicina,  with  the 
regular  medialization  of  c,  and  change  of  n  to  hard  ni,  as  in 
membmmm  =  membrana.  So  in  Welsh  :  latwm,  offnum,  saf- 
frwm,  Beitr.  v.  219. 

4.  The  gen.  sg.  uiola  occurs  in  H.  2.  17,  p.  289,  col.  1  : 
ola  na  uiola  7  na  roisi  do  cur  isin  mortel,  «  the  oil  of  the  vio- 
let and  of  the  rose  to  be  put  into  the  mortar  ».  W.  fioled. 

5.  «  the  mallow  of  the  rield  ».  O'R.  has  «  leamhadb  marsh 
mallows.  Althaea  ».  P.  O'C.  has  leamhach  bhuidhe  marsh  mallow. 


242  Whitley  Stokes. 

P.  281.  Aurotanus  .1.  liat[h]lus  mara6. 

P.  282.  Argentum  uiu[u]m  .i.  in  t-airged  beo. 

Linga  auis  .i.  in  teanga  enan. 

Hermo  dactilis  .i.  in  tene  talman  .i.  in  gairgin  7. 

Striguum,  morella,  solatrum.  domnidhi   .i.  aenluib 
inand  sin  8. 
P.  283.  Sulfur  .i.  in  traif9. 

Siloes  siler  mondtanus  .i.  in  rait I0. 
P.  284.  Petrosilinum  .i.  ptrsilli. 

Iarus  barba  .i.  in  gegar". 

Cicuta  .i.  bindmer12. 
P.  285.  Enula  .i.  in  ellend. 
P.  286.  Cuminum  .i.  in  cuimin. 

Capillus  Ueniris  .i.  in  dubcosach. 

Accetum  [.i.]  in  finegra  r3. 

6.  literally  «  sea  mugwort  ». 

7.  a  gairgin  crowfoot  »,  O'R.  Gairgin  P.  O'C. 

8.  Striguum  (a  scribal  error  for  Strignum  i.  e.  uxpjyvsç), 
morella,  solatrum  (nigrum),  a  kind  oflupine.  Domnidhi  is  obs- 
cure to  me. 

9.  in  t[f\raif,  where  sraifis  possibly  ==  the  sraib  in  O'Da- 
voren's  sraibtine  do  neim  À.  an  Une  saighnein,  the  lightning, 
and  thesrop  in  srop-tenid,  LB.  215  a  15.  Probablya  loan  (with 
metathesis  ot  r)  from  Fr.  soufre  from  Lat.  sulphur. 

10.  Siloes  perhaps  for  Sisclcos,  which  seems  in  A  169,  171, 
to  be  a  synonym  of  siler  montanùm  (oui*  «  mondtanus  »).  Si- 
ler is  said  to  be  a  kind  of  brook-willow.  rait,  P.  O'C. 's  raid 
bog-myrtle,  bog-poppv,  wild  myrtle,  sweet-gale. 

11.  Iarus,  and  Barba  [Aron]  are  given  in  A.  84  as  syno- 
nyms  of  gigarus,  whence,  or  from  the  Ital.  gigora,  the  Ir.  ge- 
gar is  borrowed.  It  is  said  to  be  the  English  cokkowespitte  (now 
cuckoospittle  ?),  Fr.  pied  de  veau. 

12.  bindmer  «  hemlock  »  is  =  O'R. 's  minmhear  common 
hemlock  :  Conium  maculatum.  He  also  lias  minnbear  «  hem- 
lock ». 

13.  «  the  vinegar  »,'  finegra  (W.  gwinegr)  borrowed  from 
Fr.  vinaigre. 


On  the  Irish  Miïeria  medica.  24} 

P.  288.  Artimesia  .i.  in  buafallan  liath. 

Acasia  .i.  sugh  na  n-airnedh  n-anabaidh  I4. 

Alumen  .i.  in  atramail  *>. 
P.  289.  Plumbum  .i.  in  luaidhi. 

Pix  .i.  in  picc  l6. 

Olibanum  ditius  .i.  gumi  croind  l7. 
P.  290.  Pomum  citrinum  .i.  in  t-ubull  buidhi l8. 

Semper  uiua  .i.  in  tenegul  *9. 

Rubus  .i.  in  feirdris  2°. 
P.  291.  De  absintico  .i.  donn  aibsint21. 
P.  292.  De  uritica  .i.  don  neandtoig22. 

P.  294.  Cosc  ar  carraigi  .i.  ruse  feithlinde  [7]  in  eidhind  7 
scertar  a  forrusc  de  7  brister  go  min  iat  7  berbthar 
ar  finegra  7  cu'mcr  'mon  cheand23. 

Menta  .i.  in  mima24. 
P.  295.  Epitimum  .i.  in  duilli  fetha2$. 

14.  Acacia  (.i.  succus  dessiccatus  prunellarum  agrestium 
immaturarum,  A.  1)  «  the  juice  ofthe  unripe  sloes  ». 

15.  atramail  :  the  gen.  sg.  na  hatramaili  occurs  in  the  ms. 
four  Unes  below  the  gloss.  I  hâve  not  met  tliis  word  else- 
where. 

16.  picc,  like  W.  pyg,  is  borrowed  from  an  oblique  case  ot 
Lat.  pix. 

17.  «  gum  of  a  tree  »,  frankincense. 

18.  «  the  yellow  apple  ». 

19.  Semper  uiua  is  houseleek. 

20.  feirdris  is  O'R.5 s  féirdhris  a  bramble,  briar,  P.  O'C.'s 
eirrdhris  feirrdhris  the  dogbriar,  buckbrier  or  wild  rose,  a  com- 
pound  oîdris  «  briar  »,  and  some  word  obscure  to  me. 

21.  «  of  the  absinth  » . 

22.  «  de  urtica  ofthe  nettle  »  (nenntog). 

23.  «  Coscar[leg.  Coscar?]  carraigi  i.  e.  the  bark  of honey- 
suckle  and  of  the  ivy,  and  its  rind  (?)  is  separated  from  it, 
and  they  are  broken  small  and  boiled  in  vinegar,  and  put 
round  the  head  ». 

24.  «  the  mint  ». 

25.  «  the  leaf  of  honeysuckle  ». 


244  Whitley  Stokes. 

P.  297.  Polepodium  .i.  in  scim26. 
P.  298.  Fraxinus  .i.  in  uindsend. 

Sambucus  .i.  in  trom. 

De  uomitis  .i.  don  sceat[h]raidh 27. 

Calmentum  .i.  in  émir  sleibi 28. 
P.  300.  Ros  [ms.  Rosa]  marinus  .i.  in  ros  muiridi29. 

26.  Poly podium  is  a  kind  of  fern. 

27.  «  of  the  vomitings  ».  Scethrad  a  noun  of  multitude, 
from  sctth,  W.  chwyd,  vomitus. 

28.  literally  «  the  mountain  émir  »  (calamint  ?) 

29.  «  the  rosemary  ». 


ÉTUDES   BRETONNES 


VI 


LA  CONJUGAISON  PERSONNELLE  ET  LE  VERBE   «    AVOIR    » 

i.  Les  six  conjugaisons  bretonnes. 

Il  y  a  six  façons  de  conjuguer  les  verbes  bretons  à  l'indicatif 
actif.  Ce  sont  : 

i°  La  conjugaison  personnelle,  avec  formes  verbales  dis- 
tinctes pour  chaque  personne;  exemple,  kanafi  «  je  chante  » 
(latin  cano)  ; 

2°  La  conjugaison  impersonnelle,  où  chaque  temps  a  pour 
forme  verbale  unique  celle  qui  est  la  troisième  du  singulier 
dans  la  conjugaison  personnelle  :  nie  a  gan  ou  me  'gan  «  je 
chante  »  (=  *  ego  canif)  ; 

3°  La  conjugaison  avec  l'auxiliaire  «être  «variable,  le  verbe 
restant  au  participe  présent  :  o  kanah  on,  'kanah  on,  etc.  «  je 
chante  »  =  canens  su  ni  ; 

'  4"  La  conjugaison  avec  l'auxiliaire  «  être  »  à  l'infinitif,  le 
verbe  se  mettant  au  personnel  :  léonnais  be^a  e  kanann  «  je 
chante  »  =  *  esse  cano  ; 

5°  La  conjugaison  avec  l'auxiliaire  «  faire  »  au  personnel, 
le  verbe  restant  à  l'infinitif:  kaua  'rah  «  je  chante  »  =  *  canere 
facio. 

6°  La  conjugaison  du  verbe  avec  lui-même  comme  auxi- 
liaire :  goud  a  ou^on  «  je  sais  »  =  * scire  scio. 

La  première  de  ces  conjugaisons  (personnelle,  kanafi)  est  la 
plus  ancienne,  et  encore  aujourd'hui  la  plus  usitée. 

Revue  Celtique,  IX  16 


246  E.  Ernaull. 

La  deuxième  (impersonnelle,  me  (a)  gan)  dérive  de  la  pre- 
mière; ce  sont  les  deux  plus  importantes,  les  quatre  dernières 
s'y  rattachent  quant  à  la  forme  des  éléments  qu'elles  combi- 
nent de  diverses  façons. 

Dans  la  troisième  (0  kanan  on,  etc.),  l'auxiliaire  «  être  »  peut 
avoir  n'importe  quelle  forme  et  se  mettre  avant  ou  après  le 
verbe;  il  peut  aussi  en  être  séparé  par  un  ou  plusieurs  mots. 
Cette  conjugaison  répond  aux  locutions  anglaises  comme 
zuhat  is  he  doing  ?  et  françaises  comme  Qu'est-ce  qu'il  est  à  faire? 
en  breton  de  Tréguier  Pesoni  email  'c'h  ober?  ou  'Sord  'mah 
'h  ober  ?  Les  grammairiens  l'ont  omise  ;  elle  existe  pourtant 
aussi  en  Léon  et  se  trouve  déjà  en  breton  moyen.  Il  serait 
souvent  impossible  de  la  rendre  littéralement  en  français,  aussi 
bien  que  les  expressions  anglaises  correspondantes.  Exemples  : 

Trécorois  'mah  'tout  «  il  vient  »,  «  le  voilà  qui  vient  »  = 
angl.  he  is  coming ; 

Léonnais/>#  oann  'sevel  var  gorre  V  ros  «  comme  je  montais 
au  sommet  de  la  colline  »  (chanson  populaire,  Mélusine,  III, 
572)  =  angl.  when  I  was  ascending,  etc.  ; 

Breton  moyen  :  Tut  Jesu  so  o~  concluaf  «  les  gens  de  Jésus 
veulent  (nous  déshériter)  »,  Sainte  Barbe,  25  ;  tut...  so  ou^  e 
heul  pepret  «  des  gens  le  suivent  toujours,  sont  toujours  à  le 
suivre  »,  Grand  Mystère  de  Jésus,  17  b,  cf.  11,  61  b,  Poèmes 
bretons  du  moyen  âge,  35,  Sainte  Catherine,  33,  34,  etc. 

Comparez  les  expressions  galloises  comme  y  mae  (efe)  yn 
dysgu,  et  dysgu  y  mae  efe  «  il  apprend  ». 

La  quatrième  conjugaison  (be%a  e  kanann)  est  très  peu 
connue  en  trécorois.  Je  n'en  ai  pas  trouvé  d'exemple  certain  en 
moyen  breton.  Elle  est  donnée  dans  la  grammaire  de  Le  Go- 
nidec,  et  dans  celle  du  P.  Grégoire  de  Rostrenen,  Rennes, 
1738  :  be~a  e^carah  «  j'aime  »,  etc.,  p.  115  et  suiv.,  cf.  108, 
132,  etc.  Autre  exemple  ancien  :  be-a  e  tleoinp  «  nous  devons  », 
Introduction  d'ar  viu\  dévot,  Quimper,  chez  Derrien,  p.  350, 
et.  279;  les  approbations  de  cet  ouvrage  sont  datées  de  1710. 

La  cinquième  conjugaison  (kaua  'raïi)  répond  à  l'anglais  / 
do  sing.  Elle  est  très  usitée.  Quelquefois  elle  est  accompagnée 
d'un  changement  dans  la  forme  infinitive. 

Ainsi   certaines   localités  de   Cornouaille  qui,  par  ailleurs, 


Etudes  bretonnes. 


247 


préfèrent  la  terminaison  -0  pour  l'infinitif,  lui  donnent  plutôt 
une  désinence  -ek  quand  il  est  suivi  de  l'auxiliaire  «  faire  »  et 
aussi  quand  il  se  trouve  de  même,  mais  pour  une  autre  raison, 
au  commencement  de  la  phrase  :  c'boar~ek  a  ra  «  il  rit  »  ;  la- 
bour eh  a  so  red  «  il  fout  travailler  »,  à  Saint-Maveux,  etc.  (Voir 
Etude  sur  le  dialecte...  de  Bat^,  p.   15). 

En  petit  Tréguier,  on  emploie  souvent,  à  cette  cinquième 
conjugaison,  la  racine  verbale  sans  aucune  terminaison,  lors 
même  que  cette  forme  d'infinitif  est  par  ailleurs  tout  à  fait  inu- 
sitée :  gwel  ë  raù  et  gwelet  ë,ran  «  je  vois  »,  ~ell  et  %elled  ë  ran 
«  je  regarde  »,  klev  et  klevet  ë  ran  «  j'entends  »,  ker~  et  ker~et 
ë  ran  «  je  marche  »,  gouvé  et  gouvéed  ë  ran  «  je  sais  »,  anav, 
auaved  et  arivè  ë  raù  «  je  connais  »,  gall  et  galled  ë  raù  «  je 
puis  »,  iv  ë  raù  et  ivan  raù  «  je  bois  »,  joùj  et  joùjal  ë  raù  «je 
pense  »  ;  mais  on  _dit  toujours,  par  exemple,  red  e  gwelet,  Rel- 
ief, etc.  «  il  faut  voir,  regarder  »,  etc.  Notons  l'expression 
deu  'ra  «  il  vient  »,  plus  spéciale  aux  cas  comme  deu  'ra  jist 
«  il  vient  du  cidre  (du  robinet)  »  ;  par  ailleurs  on  dit  mieux 
dohd  ë  ra  ou  don  'ra  (et  toujours  red  e  dont). 

Cette  cinquième  conjugaison  existait  en  moyen  breton,  non 
seulement  à  l'indicatif,  mais  aussi  à  l'impératif,  ce  qui  n'a  plus 
lieu  aujourd'hui  :  ma  sintij  groa  «  obéis-moi  »,  Sainte  Barbe, 
225,  gret  e  aeren  «  liez-le  »,  Gr.  Myst.  de  Jésus,  82,  etc.  Elle 
existe  aussi  en  gallois  :  gwnaethxm  ddysgu  «  j'appris  »  ;  et  en 
comique:  11a  wra  ladhê  «  ne  tue  pas  ». 

La  sixième  conjugaison  (goud  a  ou~on)  rappelle  les  expres- 
sions hébraïques  comme  «  mourir  tu  mourras  »,  Genèse,  chap.  il, 
vers.  17.  Les  grammairiens  bretons  n'en  parlent  pas.  Elle  ne 
se  trouve  que  dans  un  petit  nombre  de  verbes,  en  breton  mo- 
derne et  en  breton  moyen  : 

goud  a  owçpn  «  (savoir)  je  sais  »,  cf.  goût  a  ouïe  a  elle  sa- 
vait »,  P.  D.  de  Goësbriand,  Fables  choisies  de  La  Foulai  ne  tra- 
duites eu  vers  bretons,  Morlaix,   1836,  p.  6  ; 

gallout  ellet  «  (pouvoir)  vous  pouvez  »,  Me~ellour  au  Ineo, 
Saint-Brieuc,  185  1,  p.  1 6 7,  gallout  ellont  «  ils  peuvent  »,  153, 
gallout  a  it les  «  tu  peux  >>,  Tragédien  ar  hiniveles  ar  uiabic  Jésus, 
manuscrit  dont  je  dois  communication  à  l'obligeance  de 
M.  Bureau  (scène  entre  les  enfants  et  Hérode),  etc.  ; 


248  E.  Ernault. 

donet  a  duy  «  (venir)  il  viendra  »,  Sainte  Nonne,  v.  291 
(Rev.  Oit.,  VIII,  260)  ; 

be%a  ei  on  «  (être)  je  suis  »,  bc^a  c~  eus  «  (être)  il  est,  il  y 
a  »,  be%a  am  eus  «  (avoir)  j'ai  ».  Ceci  pourrait  paraître  rentrer 
dans  la  troisième  conjugaison  (be^ae  kanaiï);  mais  le  trécorois, 
à  qui  elle  est  étrangère,  emploie  ces  locutions  :  beau  on  «  je 
suis  »,  bean  'm  eus  «  j'ai  »,  etc.  On  lit  dans  le  Dict.  et  Col- 
loque, Morlaix,  1690,  be~a  eo  «  il  est  »,  p.  124;  besa  es  eus  «  il 
y  a  »,   122;  be^a  on  eus  «  nous  avons  »,  97; 

en  devout  e  lm\  hui  «  (avoir)  avez-vbus  »,  Guyot-Jomard, 
Manuel  (vannetais)  1867,  p.  122;  =  *illi-esse  vobis-est  (cf. 
Rev.  ait.,  VIII,  43). 

Ober  a  rah  «  (faire)  je  fais  »  rentre,  au  contraire,  parfaite- 
ment dans  la  cinquième  conjugaison  (kana  'raîi)  et  ne  repro- 
duit que  par  hasard  le  type  de  la  sixième,  comme  l'anglais 
how  do  you  do?  et  le  français  je  vais  aller. 

Les  deux  premières  conjugaisons  bretonnes  (personnelle  et 
impersonnelle)  ont  un  seul  point  commun  :  la  troisième  per- 
sonne du  singulier.  Il  y  a  à  ce  principe  deux  sortes  d'excep- 
tions : 

i°  Le  choix  des  divers  mots  qui  veulent  dire  «  il  est  » 
n'est  pas  indifférent,  au  point  de  vue  des  deux  conjugaisons  en 
question  :  par  exemple  me  eo  signifie  «  c'est  moi  »,  et  me  ^0 
«  je  suis  »  ;  eo  est  toujours  de  la  conjugaison  personnelle,  le 
mot  précédent  ne  peut  pas  être  son  sujet. 

2°  En  léonnais  surtout,  et  déjà  en  moyen  breton,  on  met 
souvent  un  i  ou  un  y  devant  l'imparfait  impersonnel  du  verbe 
«  être  »  et  devant  tous  les  temps  de  l'indicatif  du  verbe  «  aller  », 
ce  qui  ne  se  fait  pas  au  personnel  :  me  a  ioa  «  j'étais  »,  me  a  ia 
«  je  vais  »,  etc.  Cela  n'a  guère  lieu  en  trécorois  que  dans  me 
ias  ou  me  (a)  ie%  «  j'allai  »,  et  me  iei  «  j'irai  ».  La  forme  de 
futur  iel,  ielo  est  exclusivement  propre  à  l'impersonnel  ;  c'est 
la  seule  qui  n'ait  pas  au  personnel  de  correspondant  sans  i 
initial. 

Ces  deux  catégories  d'exceptions  ne  sont  pas,  d'ailleurs,  tout 
à  fait  absolues.  La  différence  entre  eo,  e,  etso,%p,  par  exemple, 
ne  tient  pas  toujours  à  la  conjugaison  employée.  Ainsi pred  e 
veut  dire  «  il  est  temps  »  ;  am%er  %pu  «  il  y  a  du  temps  »;  me 


Etudes  bretonnes.  249 

gond  'h  e  pred  «  je  crois  qu'il  est  temps  »  ;  me  gond  \ou  am^er 
«  je  crois  qu'il  y  a  du  temps  ».  Dans  cette  dernière  phrase, 
~ou  est  employé  avec  sens  personnel,  et  cela  peut  lui  arriver 
quand  il  signifie  «  il  y  a  »,  et  qu'il  a  pour  attribut  un  subs- 
tantif et  non  un  adjectif. 

Quant  à  1'/  de  me  a  ioa,  etc.,  on  le  trouve  parfois  dans  des 
formes  personnelles  :  léon.  me  ne  iann  «  je  ne  vais  pas  » 
(chanson  populaire,  Mélusine,  III,  572)  ;  ne  ieas  ket  «  il  n'alla 
pas  »,  A.  Drezen,  Bue~  Dont  Michel  Noblet^  (1879),  p.  232  ; 
pa  ieas  «  quand  il  alla  »,  -Kanaouennou  santel,  Saint-Brieuc, 
1842,  p.  106;  vann.  eit  ma  veiu  «  pour  que  j'aille  »,  Bnhé  er 
sœnt,  Vannes,  1839,  p.  14  (cf.  p.  vm,  18,  24),  etc. 

2.  Emploi  des  deux  principales  conjugaisons  {personnelle 
et  impersonnelle). 

La  conjugaison  personnelle  règne  à  peu  près  sans  partage  à 
l'impératif,  même  dans  le  dialecte  de  Batz  (presqu'île  du 
Croisic,  Loire-Inférieure)  où  par  ailleurs  cette  conjugaison  a 
presque  complètement  péri. 

L'impératif  s'accorde  donc  avec  le  sujet,  que  celui-ci  soit 
avant  ou  après,  ou  sous-entendu.  Exemples  : 

An  peoryen  be~ent  ...  soutenet  «  que  les  pauvres  soient  se- 
courus »,  Sainte  Nonne,  618;  ar  rc  père  0  devais  grague^,  lè- 
vent evel  pa  no  deffe  quel  «  que  ceux  qui  ont  des  femmes  vivent 
comme  s'ils  n'en  avaient  pas  »,  Introduction  d'ar  vue%  dévot 
(17 10),  p.  349,  =  trécorois  ar  re  en  eus  grague,  béent  evel 
p'ha  n'ho  defe  quet,  Testamant  neve,  Guingamp,  1853,  P-  3^5  ; 
ar  re  père  en  cm  servich  eus  ar  bet-mâ,  ...  bevent  evel  pa  n'eu  an 
lervichcnt  quet  aneçàn  «  que  ceux  qui  se  servent  de  ce  monde 
vivent  comme  s'ils  ne  s'en  servaient  pas  »,  Introd.  d'arv.d., 
p.  350. 

Lequeaut  eve~  ni  ad  ann  eneou  pur-^e  «  que  ces  âmes  pures 
prennent  bien  garde  »,  ibid.,  p.  217. 

Cependant  il  vaut  mieux  mettre  le  singulier  dans  ce  dernier 
cas,  comme  cela  a  lieu  aussi  au  subjonctif  et  à  l'indicatif  pour 
tout  verbe  qui  précède  son  sujet  de  la  troisième  personne  plu- 
rielle, à  moins  que  ce  sujet  ne  soit  le  pronom  «  ils,  elles  »  : 


2  $o  £.  Ernault. 

na  vé%et  két  diner~et  da  ^aouarn  «  que  tes  mains  ne  se  relâchent 
point  »,  Le  Gonidec,  =  gallois  na  laesed  dy  ddwylaw  (Sopho- 
niaSj  III,  i6);vann.  deèt  en  61  speredeu  «  viennent  tous  les  es- 
prits »,  B.  er  s.  41;  ci.  Sainte  Nonne,  vers  1644. 

Le  Dictionnaire  et  colloque  françois  et  breton  de  G.  Quiquer, 
de  Roscoff,  Morlaix,  1690,  donne  à  la  page  173  le  paradigme 
suivant  : 

Té  bés        sois 

é  biset        qu'il  soit 

ny  besé       soyons 

c'huy  bèsit  soyez 

v  besent      qu'ils  soient 

Il  v  a  là  une  seule  forme  impersonnelle,  c'est  ny  besé 
«  sovons  »  dont  le  correspondant  personnel  est  bé^émp-ny 
«  sovons  »,  Grammaire  du  P.  Grégoire,  Rennes,  1758,  p.  128 
(—  vann.  béemb  «  sovons  »,  Grammaire  française-bretonne  de 
Guillome,  Vannes,  1836,  p.  43). 

Un  autre  mode  où  domine  aussi  la  conjugaison  personnelle 
est  le  subjonctif,  qui  a  d'ailleurs  de  grandes  affinités  avec  l'im- 
pératif. Ce  mode  est  précédé  des  particules  verbales  ra  et  da, 
emplovées  de  même  en  moyen  breton,  et  identiques  aux  pré- 
rixes du  vieil  irlandais  ro  et  do  :  Doué  d'ho  conduo  «  Dieu  vous 
conduise  »,  Doué  da  roi  no%  mat  deoe'h  «  Dieu  vous  doint  bon 
soir  »,  Dict.  et  coll.  de  Quiquer,  1690,  p.  14,  deut  mat  da  viei 
«  sovez  le  bien  venu  »,  p.  20,  ci.  p.  37,  etc.  (voy.  mon  édi- 
tion de  Sainte  Barbe,  p.  260,  403)- 

On  trouve  pourtant  parfois  le  personnel  après  la  particule  ra 
précédée  du  sujet:  huy  ra  ve  «  que  vous  soyez  »,  Gr.  Myst. 
de  Jésus,  183  b,  huy  raue,  SB  514,  me  pet  drouc  darnnou  ...  ra 
disquenno,  293  «  je  souhaite  que  quelques  tuiles  (vous)  tom- 
bent »,  et  merafonto  «  que  je  fonde  »,  Gwer%.  Br.-I;.,  II,  12, 
sont  dans  le  même  cas  que  ux  besé  cité  plus  haut.  Nous 
avons  vu  aussi  que,  par  suite  d'un  principe  qui  domine  tout 
le  verbe  breton,  on  dit,  par  exemple,  au  singulier,  ra  véxp  berréet 
hé  çeisiou  «  que  ses  jours  soient  abrégés  »  =  gall.  ychydig  fyddo 
ei  ddyddiau  (Ps.  cvin,  v.  8  de  la  Vulgate). 

Exemples  de  l'application  de  cette  règle  à  l'indicatif:  léon. 


Etudes  bretonnes.  2$  i 

é-c'hî~  ma  ni  ar  bilpou^ed  «  comme  font  les  hypocrites  »,  tréc. 
evel  ma  raan  hypocrited,  gall.fel  y  gwnay  rhagrithwyr,  Matth., 
VI,  2. 

Voici  un' passage  où  elle  n'a  pas  été  suivie  :  evel  a  résout  bobl 
Israël  père  a  gollas  couraich  pa  oaut  arru  «  comme  fit  le  peuple 
d'Israël,  qui  perdit  courage  quand  il  était  arrivé  »,  Instructionou 
christen,  Quimper,  1824,  p.  104.  Ce  pluriel  du  verbe  parait 
d'autant  plus  singulier  que  le  sujet  n'est  qu'un  collectif,  pobl 
(cf.  Ste  Cath.  25). 

A  l'indicatif,  la  conjugaison  personnelle  s'emploie  : 

i°  Quand  il  y  a  négation  :  ne  ganah  ket  ou  'ganah  ket  «  je 
ne  chante  pas  ». 

C'est  seulement  dans  ce  cas  que  le  dialecte  de  Batz  fait  usage, 
à  l'indicatif  et  très  rarement,  du  reste,  des  quelques  débris  de 
la  conjugaison  personnelle  qu'il  a  gardés,  en  dehors  des  verbes 
«  être  »  et  «  avoir  »  (Etude  sur  le  dialecte...  de  Bat^,  p.  23  et 
suiv.). 

Cependant  le  moyen  breton  met  parfois  l'impersonnel  avec 
la  négation,  après  le  sujet  :  an  re  nen  care  «  ceux  qui  ne  l'ai- 
maient pas  »,  Gr.  Myst.  de  Jésus,  84;  a  tenu  cret  «  ne  crois-tu 
pas  »,  ibid.,  74  b;  a  te  na  goar  «  ne  sais-tu  pas  »,  Sainte 
Barbe,  614;  huy  naguel,  Gr.  Myst.  de  /..  147  b  (mais  a  huy  na 
guelet,  S.  B.,  479).  On  lit  encore  ha  c'hui  na  vel  «  ne  voyez- 
vous  pas  »,  dans  X Introduction  d'ar  vue%  dévot,  p.  158,  276; 
et  dans  l'ouvrage  de  Le  Bris  intitulé  Instruction  var...  ar  Ra- 
sera (Quimper,  chez  Perier),  2e  partie,  p.  79;  à  c'huy  naoar 
«  ne  savez-vous  pas  »,  Quiquer,  1690,  p.  59;  c'houi  na  ielo 
kel  «  vous  n'irez  pas  »,  Bar~.  Br.,  1867,  p.  428,  col.  1; 
c'houi  na  ici  ket,  290;  ar  re  nagomçpket  «  ceux  qui  ne  parleront 
pas  »,  A  hnanach  de  Léon  et  de  Comouaille,  Brest,  1877,  p.  53. 

2°  Après  la  plupart  des  conjonctions  :  kridign  c  ra  e  kanaii 
«  il  croit  que  je  chante  »,  pa  ganafi  «  quand  je  chante  »,  mar 
kanan  «  si  je  chante  »,  etc. 

On  lit  pourtant  mar  d'ar  re  he  gass  huit  a  ~o  bugale  de-hau 
«  si  ceux  qui  le  chassent  sont  ses  entants  »,  A.  Drezen,  Bue^ 
Dom  Michel  Noblet^  (1879),  p.  208,  ce  qui  semble  un  galli- 
cisme, comme  pa  hegofa  \o  «  quand  son  ventre  est  »,  Sauvé, 
Proverbes  et  dictons,  n°  241. 


252  E.  Ernault. 

Il  y  a  des  conjonctions  comme  «  et,  mais,  car  »,  etc.,  qui 
sont  plutôt  suivies  de  l'impersonnel,  et  qui  ne  prennent  même 
!.  personnel  qu'en  se  faisant  accompagner  de  e,  particule  ver- 
bale signifiant  proprement  «  que  »  :  ha  me  rei  ou  bag  e  reign 
«  et  je  ferai  »;  er  me  goar  «  car  je  sais  »,  Sainte  Barbe,  28,  etc. 

On  trouve  rarement  la  5e  conjugaison  au  lieu  delà  première  : 
pa  en  em  laçai  a  ra  (et  pa  en  em  laça)  «  quand  il  se  met  »,  Instr. 
christ.,  96. 

Le  subjonctif  n'a  pas  de  formes  spéciales  :  c'est  le  futur  ou 
un  des  conditionnels,  auquel  on  préfixé  ordinairement  ra  ou 
da,  comme  en  français  «  que  »,  et  c'est  pour  cela  que  ce  mode 
est  régulièrement  personnel. 

30  Après  la  particule  verbale  t'~  ou  e,  qui  s'emploie  d'ordi- 
naire quand  la  proposition  commence  par  un  attribut,  un 
complément  indirect  ou  une  proposition  incidente  :  joaus  c  ha- 
nah  «  je  chante  joyeux,  joyeusement  »  ;  'nid-out  e  kanah  «  je 
chante  pour  toi  »,  pa  veah  joaus  e  kànan  «  quand  je  suis  gai, 
je  chante  ».  Dans  tous  ces  cas,  on  peut  dire  aussi  avec  l'im- 
personnel, et  surtout  en  poésie,  joaus  me  (a) gan}  etc.  \aman... 
me  chomo  «  ici  je  resterai  »,  Sainte  Nonne,  525  ;  alors  on  ne 
met  pas  la  particule  c,  f~.  On  peut  aussi  dire  me  (a)  gan 
joaus,  etc.  Mais  s'il  va  un  mot  interrogatif  (sauf  ha  «  est-ce 
que  »),  on  est  obligé  de  le  placer  en  tète  de  la  proposition,  et 
si  ce  mot  n'est  pas  sujet,  le  verbe  sera  nécessairement  per- 
sonnel ;  e,  e-  peut  être  exprimé  ou  sous-entendu.  Exemples  : 

Da  biv  c  hom^ei  ?  «  A  qui  parlez-vous  ?  »  Peno%  e  ret?  «  com- 
ment vous  portez-vous  »,  littéralement  «  comment  faites- 
vous  »,  comme  en  anglais  ;  léon.  ne  ouçonn  ket  peleac'h  e~  it 
«  je  ne  sais  pas  où  vous  allez  »,  etc. 

Cette  dernière  phrase  est  en  petit  Tréguier  n'onn  ke'  p'iac'h 
'h  et  ;  'h  est  ici  pour  ecb,  variante  de  <'~.  Une  autre  forme  équi- 
valente  est  en,  qui  s'emploie  devant  un  pronom:  livirit  devait 
en  é  trugarecan  «  dites-lui  que  je  le  remercie  »,  Dict.  et  coll. 
de  Quiquer,  1690,  p.  41,   cl.    no,   1.    7,   11,  et  Rev.   Celt., 

vin,  u-46, 82, 83. 

4°  Après  la  particule  verbale tf,  exprimée  ou  sous-entendue, 
quand  celle-ci  suit  le.  complément  direct  du  verbe  :  cur  ~on  a 
ganan  0  je  chante  une  chanson  ».  On  peut  dire  aussi,  avec  le 


Etudes  bretonnes.  253 

personnel,  me  (a)  gan  eur  ^on,  et  même  (surtout  en  poésie) 
eur  %on  me  a  gan.  Mais  le  personnel  est  obligatoire  dans  les 
expressions  telles  que  petra  'larah  «  que  dis-je  ?  »,  na  oi<~oîit 
ket  petra  'rcoùt  «  ils  ne  savent  ce  qu'ils  font  »,  etc. 

5°  Le  verbe  (e)m(a)oh,  (e)m(a)oud,  (e)ma  ou  (e)man  «  je 
suis  (actuellement)  »,  etc.,  peut  commencer  une  phrase;  il 
en  est  de  même,  en  trécorois,  du  moins,  de  quelques  autres 
formes  du  verbe  «  être  »,  et  du  verbe  «  aller  »  :  'Man  'tiski  hi 
gentel  «  il  apprend  sa  leçon  »,  (gall.  y  mac  yn  dysgu)  ;  'h  an 
'rok  «  je  pars  »,  7;  a  'glâ  d'aùpdt  «  la  pluie  va  augmenter  » 
(an pat  —  *amplaat  «  devenir  abondant  »,  du  franc,  ample); 
'h  a  'glâ  d'ober  «  il  va  taire  de  la  pluie  »  ;  'h  é%  de  gousket  ?  «  tu 
vas  te  coucher  ?  »  ;  7;  èr  ie  «  on  va  aussi  »  (se  dit  quand  on 
rencontre  quelqu'un  sur  la  route)  ;  'ver  leinan  «  on  déjeune  » 
(en  entrant  dans  une  maison  où  l'on  est  à  table)  ;  'ver  gaht-hi 
«  on  y  est  »  ;  7;  er  d'ei  «  on  y  va  »  ;  'oc  h  gaht-hi  «  vous  êtes 
avec  elle  »  et  aussi  «  vousv  êtes  »  ;  'omp  paoues  merniah  «  nous 
venons  de. dîner  (à  midi)  »,  etc.;  Oant  «  ils  étaient  »,  Emgann 
Kcrgidu,  II,  287;  de  même  Eller  «  on  peut  »,  Ahn.,  1877, 
p.  31,  12,  d.  27,  1.  19;  33,  1.  30. 

6°  Quand  on  veut  affirmer  une  chose  qui  vient  d'être  niée 
ou  révoquée  en  doute,  on  emploie  le  verbe  au  personnel,  sous 
sa  forme  radicale  (sans  mutation  initiale),  ce  qui  prouve  qu'il 
n'y  a  pas  de  particule  verbale  sous-entendue,  contrairement  à 
ce  que  nous  avons  vu  jusqu'ici.  On  peut  aussi,  comme  en 
gallois,  répondre  par  l'auxiliaire  «  faire  »,  traité  de  la  même 
façon.  Exemples  : 

'Ver  ket.  —  Ber  «  on  n'est  pas.  —  Si,  on  est  »  ;  'oann  ket. 

—  Boa^  a  je  n'étais  pas.  —  Tu  étais  !  »  ;  'veign  ket.  —  Bi  ou 
béet  «  je  ne  serai  pas.  —  Tu  seras!  ou  vous  serez!  »;  beign 
«  si,  je  serai   »,  bomnt  «   si,    ils  seront  »,  etc.  ;  (yévou  ket). 

—  Bévou  «  si,  il  vivra  »,  etc. 

Les  troisièmes  personnes  du  singulier  boa,  bou,  bije,  répon- 
dent non  seulement  à  une  négation  de  la  personne  corres- 
pondante du  verbe  «  être  »,  mais  aussi  à  celle  d'une  personne 
quelconque  du  verbe  «  avoir  »  ;  ainsi  bou  veut  dire  à  la  fois 
«  si,  il  ou  elle,  ou  cela  sera  »,  «  si,  j'aurai  »,  «  si,  tu  auras  », 
«  si,   il  ou  elle  aura  »,  etc.  :  7  ou  ked  'vara?  —  Bou  «  Ne 


254  £•  Ernault. 

veux-tu  pas  (littéralement  n'auras-tu  pas)  de  pain  ?  —  Si, 
j'en  veux  »  ;  'm  ou  ket.  —  Bon  «  je  n'aurai  pas.  —  Si,  tu 
auras,  ou  vous  aurez  »,  'm  a  ket.  —  Boa  «  je  n'avais  pas.  —  Si,  tu 
avais,  ou  vous  aviez  »,  etc.,  proprement  non  mihi  trot.  — 
Erat  !  Cette  décomposition  exacte  de  syllabes  aussi  usées  que 
mou  =  cm  bon  «  mihi  erit  »,  témoigne  que  la  langue  n'a  pas 
perdu  conscience  de  leur  formation.  Le  b  de  boa  (pour  oa)  est 
dû  sans  doute  à  l'influence  des  formes  comme  bon,  où  il  est 
primitif. 

Autres  exemples  :  N'ouvées  ket.  —  Gouvéan  «  tu  ne  sais  pas. 

—  Si,  je  sais  »  ;  (na  oar  ket).  —  Goar  «  si,  il  sait  »  (n'alli 
ket).  —  Galicien  «  si,  je  pourrai  »  ;  'rei  ket.  —  Grci  «  il  ne 
fera  pas.  —  Si,  il  fera  «.Nous  avons  vu  que  ce  dernier  verbe 
peut  en  remplacer  un  autre  :  Ne  dal  quet  quement-sé.  —  Gra 
sur.  «  H  ne  vaut  pas  tant.  —  Si  fait  »,  Dict.  et  coll.  de  Qui- 
quer,   1690,  p.  78;  riarriou  ket.  —  Grci  «  Il  n'arrivera  pas. 

—  Si,  il  le  fera,  il  arrivera  ».  Plusieurs  verbes  commençant 
par  une  voyelle  peuvent,  en  pareil  cas,  prendre  par  analogie 
un  g-  initial  ;  ainsi  on  dit  non  seulement  arriou  «  si,  il  arri- 
vera »,  mais  aussi  garriou.  On  dit  le  plus  souvent  gah  «  si,  je 
vais  »,  geign  «  si,  j'irai  »,  gofi,  gond,  gc  «  si,  je  suis,  tu  es,  il 
est  »,  etc.,  pour  an,  eign,  on,  oud,  è,  etc.  De  même  gens  «  si, 
il  v  a  »,  et  aussi  «  si,  j'ai,  tu  as,  il  a  »,  etc.,  parce  que  ce  mot 
répond  aussi  bien  à  la  négation  de  '///  eus  ket  «  je  n'ai  pas  », 
littéralement  «  il  n'y  a  pas  à  moi  »,  etc.,  qu'à  n'eus  ket  c<  il 
n'y  a  pas  (en  général)  »  ;  c'est  le  même  fait  que  nous  avons 
vu  plus  haut  pour  bon,  boa,  etc. 

Ce  g  initial  se  trouve  déjà  chez  le  P.  Grégoire,  qui  donne 
eo,  gueo,  vannetais  gueii,  guiv  «  si,  si  lait  »,  et  dans  le  Dic- 
tionnaire vannetais  de  L'A.,  qui  a  gihuë  «  si  ».  De  même  le 
vannetais  gués,  P.  Grég.,  ghis,  gbc's,  D.  Le  Pell.,  «  si  »,  cor- 
respond au  trécorois  gens  «  si,  il  y  a  »,  etc. 

Une  autre  circonstance  fait  apparaître  aussi  l'initiale  primi- 
tive de  verbes  qui,  par  ailleurs,  subissent  presque  toujours  une 
mutation;  c'est  lorsque  ces  verbes  sont  précédés  de  mar  «  si  » 
(conjonction)  :  mar  be  «  s'il  est  »,  mar  groa,  mar  gra  «  s'il 
fait  »,  mar  gallan  «  si  je  puis  »,  etc.  Les  additions  analogiques 
qui  viennent  d'être  signalées  ont  souvent  lieu  encore  ici  :  mar 


Etudes  bretonnes .  2^5 

boa  «  s'il  en  était,  s'il  y  en  avait  »  ;  tréc.  niar  gon  «  si  je 
suis  »,  mar  gan  «  si  je  vais  »,  mar  ga  «  s'il  va  »,  mar  garri 
«  s'il  arrive  »;  mar  guerru,  id.,  Introd.  d'ar  vut~  dévot, 
p.  279.  Ce'  g  se  montre  même  en  dehors  des  deux  cas  en 
question,  dans  me  ga  «  je  vais  »,  etc.  (vannetais  et  dialecte  de 
Batz),  tréc.  na  gueondi  quel  «  n'iront-ils  pas  »,  Testatnani  neve 
Guingamp,  1853  (Luc,  vi,  39);  ne  ges  «  il  n'y  a  pas  »,  me 
goua  «  je  donne  »,  dial.  de  Batz,  synonyme  de  me  ra,  par 
suite  de  l'analogie  de  la  forme  groa  «  il  fait  »,  restée  en  van- 
netais et  en  trécorois,  dans  certaines  locutions. 

Les  mots  eo  «  si,  il  est  ou  cela  est  »,  et  eus  «  si,  il  y  a  », 
ont  subi  en  vannetais,  outre  la  préfixation  du  g-,  qui  n'est  pas 
spéciale  à  ce  dialecte,  l'addition  de  la  syllabe  -an;  ce  qui  a 
donné  guéouann  (L'A.),  gheouan  P.  Grèg.,  «  si  »,  =  g-eo-an; 
et  gut\an  «  si  »,  «  oui  »,  ne  gue%an  I  «  nenni  »,  P.  Grég.  ; 
gheqân  «  si  »,  ne ghe^ân  «  non  fait  »,  selon  D.  Le  Pelletier,  qui 
dit  qu'on  prononce  g~àn  ;  =  g-eus-an.  Cette  svllabe  -an  se 
trouve  aussi  dans  un  autre  mot  vannetais  d'emploi  analogue 
aux  précédents  ;  c'est  pa^ann  «  non  »,  que  l'auteur  du  diction- 
naire de  L'A.  nous  dit,  p.  vu,  être  du  mauvais  breton  usité 
à  Gran-Champ,  au  lieu  de  nonpass  (==  français  non  pas)  ;  pa- 
~ann-=: pas-an.  Ce  suffixe  bizarre  vient  peut-être  de  l'analogie 
du  synonyme  breton,  nann  «  non  ». 

La  conjugaison  impersonnelle  est  rarement  obligatoire,  en 
dehors  du  dialecte  de  Batz.  On  ne  peut  guère  citer  que  le  cas 
où  le  sujet  est  un  mot  interrogatif  du  pluriel,  comme  dans 
père  a  Jeu  ?  «  Lesquels  viennent  ?  »  Il  faut  rappeler  aussi  qu'un 
verbe  est  nécessairement  à  l'impersonnel  lorsqu'il  précède  un 
sujet  de  la  troisième  personne  du  pluriel,  autre  que  le  pronom 
«  ils  »  ou  «  elles  »  :  Perak  na  deuont-hi  ?  «  Pourquoi  ne  vien- 
nent-ils pas  ?  »  Perak  na  deu  ket  ho  preudeur  ?  «  Pourquoi  vos 
frères  ne  viennent-ils  pas  ?  »  Encore  lit-on  ne  ve^int  quel  ar  seuri 
tud  se,  «  (qui  pourrait  croire)  que  ces  gens-là  ne  seront  pas  », 
Instr.  christ.,  117,  118;  littéralement,  sans  doute,  «  qu'ils  ne 
seront  pas,  ces  gens-là  ». 


1.   Cf.    plus  haut  ne  ges  «  il  n'y  a  pas  >■ .  me  ga  «  je  vais   ».  dial.   de 
Batz.  etc.  Le  g  a  fini  ici  par  faire  corps  avec  la  racine. 


256  E.  Ernault. 

On  peut  dire  qu'en  général  quand  le  sujet  est  placé  avant 
un  verbe  affirmatif,  ce  verbe  doit  être  conjugué  à  l'imper- 
sonnel. Mais  nous  avons  vu  une  exception,  à  l'impératif.  Il 
faut  ajouter  que,  si  le  sujet  est  un  peu  long  et  de  la  troisième 
personne  du  pluriel,  le  verbe  se  trouve  quelquefois  au  per- 
sonnel ;  exemples  : 

Hac  ar  groague  a  ve  poagnet,  en  poan  a  vugale, 
Hac  a  laqueio  0  fianç,  a  vo  guir  quement-se, 
A  delho  mat  dar-lizer,  scrivet  gant  hoû  Salver  ; 
In  on  gafoint  delivret,  en  eur  momet  anizer. 

«  Et  les  femmes  en  mal  d'enfant,  qui  auront  confiance  en 
la  vérité  de  ceci,  et  qui  tiendront  à  la  lettre  écrite  par  notre 
Sauveur,  elles  se  trouveront  délivrées  à  l'instant  »,  Récit...  var 
sujet  eur  mirael  arruet,  Guingamp,  chez  Jollivet,  str.  20  (par 
Yan  ar  Guen). 

Ar  mann  a  vreine  founuz,  ken  ar  re  a  felle  deze  hen  miret 
euz  an  eil  de  d'egile,  hen  kevent...  leun  a  gontron,  «  la  manne 
se  corrompait  si  vite,  que  ceux  qui  en  voulaient  garder  d'un 
jour  à  l'autre  (ils)  la  trouvaient  pleine  de  vers  ».  Histoariou, 
27,  28. 

Cf.  Sauvé,  Prov.  433  ;Alni.  1877,  p.  30, 1.  12;  39, 1.  7,  etc.; 
et  même  sans  que  le  sujet  soit  éloigné  du  verbe  :  hor  tiéien  a 
réont  «  nos  cultivateurs  font  »,  p.  30,  et.  25,  1.  13  ;  29,  1.  15; 
p.  45,  46,  47,  48,  51. 

}.  Origine  de  la  conjugaison  impersonnelle. 

Une  expression  comme  Doue  a  gar  a  à  la  fois  quatre  sens  : 
«  Dieu  aime  »  (conjugaison  impersonnelle)  ;  «  il  aime  Dieu  » 
(conjugaison  personnelle);  «  Dieu  qui  aime  »  (impers.),  et 
«  Dieu  qu'il  aime  »  (pers.). 

Le  sens  impersonnel  «  Dieu  aime  »,  dérive  de  l'autre  sens 
impersonnel  «  Dieu  qui  aime  »  ;  nie  a  gar  Doue  =  «  moi  qui 
aime  Dieu  »,  d'où  «  j'aime  Dieu  »  ;  on  voit  que  le  verbe 
«  être  »  est  sous-entendu  dans  la  seconde  construction  :  Dens 
(est)  qui  amat  et  *ego  (est)  quiamat  «  (c'est)  Dieu  qui  aime  », 
«  (c'est)  moi  qui  aime  Dieu  ». 


Etudes  bretonnes.  257 

La  locution  complète,  en  deux  propositions  dont  la  pre- 
mière contient  le  verbe  «  être  »,  se  trouve,  par  exemple,  dans 
pan  ve  huy...  bon  lesse,  Gr.  Myst.  de  Jésus,  72  b  «  si  vous  nous 
laissiez  »,  littéralement  «  si  c'était  vous  qui  nous  laissât  »; 
ma~  vête  a  ayiaffe  «  si  c'était  toi  qui  connût  »,  «  si  tu  connais- 
sais »,  Sainte  Catherine,  §  4,  Rev.  Celt.,  VIII,  78  r.  Quelquefois 
même,  le  verbe  «  être  »  est  répété  :  mar  be  huy  ve  a  rahe, 
Sainte  Barbe,  548,  «  si  vous  faisiez  »,  mot-à-mot  «  si  c'était 
vous  que  ce  fût  qui  fit  »,  cf.  Gr.  Myst.,  72  b.  Des  tournures 
de  ce  genre  sont  fréquentes  en  vieil  irlandais;  M.  Loth  a  signalé 
cette  analogie  et  montré  ainsi  l'origine  de  la  conjugaison  im- 
personnelle, Mémoires  de  la  Société  de  Linguistique  de  Paris,  1 880, 
t.  IV,  p.  366,  367  ;  Essai  sur  le  verbe  néo-celtique,  Paris,  1882, 
p.  87,  88. 

Il  y  a  là  trois  phénomènes  grammaticaux  :  i°  l'addition  du 
verbe  «  être  »  ;  2°  la  suppression  de  ce  mot;  et  30  la  généra- 
lisation de  la  troisième  personne  du  singulier,  au  second  verbe. 
Exemple  :  breton  primitif  *is  mi  a  caram;  gallois  mi  a  garaf  ; 
breton  armoricain  meagar,  nie  'gar  «  j'aime  ». 

i°  Le  français  présente  des  analogies  remarquables  avec  les 
constructions  comme  *is  mi  a  caram  =  «  c'est  moi  qui  aime  » 
pour  «  j'aime  ».  Exemples: 

C'est  la  mère  Michel  qui  a  perdu  son  chat, 

Qui  crie  par  la  fenêtre  qui  est-ce  qui  le  lui  rendra  ; 

C'est  le  père  Lustucru  qui  lui  a  répondu. . . . 

C'était  une  bergère. . .  qui  gardait  ses  moutons. 

(Chansons  populaires). 

Les  enfants  emploient  familièrement  cette  tournure  dans  les 
phrases  exclamatives  comme  «  c'est  moi  qui  sais  un  beau 
nid!  »  «  C'est  lui  qui  a  une  belle  toupie!  »,  etc. 

On  peut  citer,  dans  le  style  élevé  : 

Vingt  ans  il  fut 
Celui  que  portait  la  victoire 
Sur  un  affût. 

Victor  Hugo. 

1 .  La  note  1,  Rev.  Celt.,  VIII,  83,  est  à  corriger  en  conséquence  :  «  quand 
ce  serait  toi  qui  fût  » . 


25 S  E.  Ërnaalt. 

Mais  pour  sauver  ta  tête  du  trépas, 
S'il  ne  fallait  qu'une  seule  parole, 
Je  suis  celui  qui  ne  parlerais  pas. 

Creuzé  de  Lesser,  La  Table  ronde,  4e  éd.  Paris,  1829,  p.  97. 

Quant  à  la  répétition  du  verbe  «  être  »,  on  peut  comparer 
le  français  «  qu'est-ce  que  c'est  que  cela?  »  «  qu'est-ce  que 
c'est  qu'il  a  dit?  »,  etc.  • —  Cf.  J.  Rhvs,  Rev.  Ccll.,  VI,  5  S,  54. 

2°  Le  phénomène  contraire,  la  suppression  du  verbe  «  être  » 
dans  le  gallois  mi  a  garaf  et  dans  le  breton  Doue  a  gar  «  Dieu 
aime  »,  se  trouve  aussi  en  français  très  familier,  par  exemple 
dans  la  chanson  C'était  une  bergère  : 

Le  chat  qui  la  regarde. .  .  et  rit  d'un  air  fripon. 

30  Enfin  le  changement  de  mi  a  garaf,  ego  qui  cano,  en  me  a 
gar  =  *ego  qui  canit  a  lieu  également  dans  plusieurs  langues. 

En  allemand,  par  exemple,  on  peut  dire  (///  der  krank  isi  = 
«  toi  qui  est  malade  ».  En  français,  les  grammairiens  n'ap- 
prouvent pas  des  phrases  comme  «  ce  ne  serait  pas  moi  qui 
se  ferait  prier  »,  bien  que  Molière,  Racine  et  Voltaire  s'en 
soient  servis  (cf.  Littré,  s.  v.  qui,  40)  ;  mais  le  peuple  les  em- 
ploie. En  voici  un  exemple  tiré  du  journal  La  Caricature,  du 
15  octobre  1887.  C'est  la  légende  d'un  dessin  relatif  à  «  La 
sécurité  au  théâtre  »,  et  qui  représente  un  pompier  trouvant 
un  monsieur  avec  une  actrice  ornée  de  bijoux  :  «  Si  c'est  vous 
qu'a  donné  ces  diamants,  faut  filer  d'ici,  M'sieu,  les  gens  qu'a 
de  la  braise,  n'en  faut  plus  dans  les  coulisses  ».  On  pourrait 
rendre  littéralement  «  les  gens  qu'a  de  la  braise  »,  en  petit 
Tréguier,  par  ami  dud  eu  eus  luteq  (////<'</  veut  dire  à  la  fois 
«  chandelle  de  résine  »  et  «  argent,  monnaie  »,  cf.  Rev.  Celt., 
IV,  161). 

4.  Le  verbe  «  avoir  ». 

L'idée  d'«  avoir  »  est  très  souvent  exprimée,  dans  toutes 
les  langues  néo-celtiques,  par  des  tournures  avec  le  verbe 
«  être  ». 

Dans  l'irlandais  rotbiat  ...  âinige  «  tu  auras  des  honneurs  », 
le  verbe  est  au  pluriel  et  le  mot  âinige  au  nominatif,  ce  qui 


Etudes  bretonnes. 


259 


montre  que  c'est  bien  le  sujet  ;  littéralement  «  tibi  erunt  ho- 
nores »  (Stokes,  The  neo-ceîtic  verb  substantive,  p.  34).  On  peut 
voir  dans  cet  intéressant  travail,  p.  34  et  39,  d'autres  formes 
irlandaises  de  ce  genre,  qui  rappellent  fortement  le  breton  : 
par  exemple  manim-bc  «  à  moins  que  je  n'aie  »,  cf.  bret.  ma 
nain  bc. 

De  même  le  gallois  pcditar  mab  ar  hugeint  am  bu  «  j'eus 
vingt-quatre  fils  »,  ms.  de  Herghest  (H.  de  la  Villemarqué, 
Les  bardes  bretons,  p.  150)  est  analogue  au  breton  pewar  mab 
war-n-ugent  am  boe. 

Mais  c'est  seulement  en  breton  et  en  comique  que  ces  lo- 
cutions se  sont  développées  de  façon  à  donner  lieu  à  un  verbe 
nouveau,  ayant  une  conjugaison  à  part.  Bien  que  cette  con- 
jugaison soit  restée  souvent  impersonnelle,  l'analogie  des  au- 
tres verbes  lui  a  fait  donner  en  breton  comme  en  comique 
des  formes  plus  ou  moins  complètement  personnalisées,  que 
nous  allons  passer  en  revue. 

i,c  pers.  sing. 

bain  be~if  «  que  j'aie  »,  Gr.  Myst.  de  Jésus,  p.  198,  v.  ri, 
littéralement  «  mihi  sim  »,  au  lieu  de  bain  be%o  «  mihi  sit  », 
forme  ordinaire,  cf.  Sainte  Nonne,  302,  448,  etc.  C'est  pro- 
prement une  première  personne  d'impératif,  et  nous  avons  vu 
que  la  conjugaison  personnelle  domine  à  ce  mode. 

em  bijenn-me  «  j'aurais  »,  abbé  Henry,  Kanaouennou  santel, 
Saint-Brieuc,  1842,  p.  3,  1.  4;  au  lieu  de  em  bije. 

ne  beh  keit  «  je  n'aurai  pas  »,  dialecte  de  Batz;  la  forme  or- 
dinaire est  me  bon  keit.  Le  mot  beh  est  identique  au  moyen 
breton  be~if  dans  bam  beçif;  le  pronom  régime  a  disparu. 
Dans  ce  dialecte,  les  formes  du  verbe  «  être  »  qui  commen- 
çaient originairement  par  un  b  ont  toujours  cette  initiale  dans 
le  sens  d'x  avoir  >>,  même  après  la  particule  verbale  a,  et 
prennent  /  (venant  de  v,  mutation  de  b)  quand  elles  expri- 
ment l'idée  du  verbe  substantif. 

Comparez  le  comique  a  m  bef,  am  beff  «  habui  »,  nain  buef 
«  non  habui  »;  am  been  «  quod  haberem  »,  nain  vetben  «  ut 
haberem  »,  Grainm.  celt.,  2e  éd.,  568.  Ces  formes  correspon- 
dent au  moyen  breton  bam  be%if. 


2  6o  E.  Ernault. 

2e  pers.  sing. 

hopysy  dans  l'Avocat  Pathelin,  Rev.  Celt.,  IV,  454,  lisez  e 
pyxy  «  tu  auras  »  ?  Ce  serait  la  seconde  personne  de  ham  be%if, 
qui  pour  la  forme  est  un  futur  employé  comme  subjonctif. 

ha%ue%  «  aie  »,  Catholicon,  s.  v.  Crist  ;  =  vann.  bé-vé  dans 
hé-véoupé  cbonge  «  souviens-toi  »,  L'A.  Ceci  est  un  impératif, 
et  par  conséquent  fait  suite  à  ham  be^if  ;  de  *  a%  bi\,  avec  affai- 
blissement de  b  en  v  ;  cette  lettre  a  été,  au  contraire,  renforcée 
en  p,  dans  le  léonnais  a%  pe%,  e%pe%  «  aie  »,  Le  Gonidec  ;  epe 
«  aye  »,  Le  Jeune,  Rudiment  du  Finistère,  Brest,  chez  Ma- 
lassis, an  VIII,  p.  34. 

ha  pcès  «  aie  »,  en  vann.,  Grammaire  de  Guillome,  p.  52, 
hapèes,  Manuel bret.  fr.  de  Guyot-Jomard,  2e  éd.,  p.  28,  etc., 
de  *a%  be^ès,  avec  une  terminaison  de  conditionnel.  Les  im- 
pératifs en  -£(  sont  fréquents  en  trécorois. 

da  ve\  «  aie  »,  Middle-Breton  Hoitrs,  p.  20,  da-ve,  Expli- 
cation an  doctrin  christen,  Guingamp,  1838,  p.  89  ;  de  * àa\  be~, 
d'où  aussi  dape%,  P.  Grég.,  da  pe,  P.  Maunoir,  =  «  tibi  sis  ». 
La  forme  régulière  de  l'impératif  se  trouve  aussi  quelquefois  : 
na%  be^et  «  n'aie  »,  Sainte  Barbe,  636,  nave%et}  Sainte  Cath., 
27  (cf.  18),  etc.,  —  «  ne  tibi  sit  ». 

b&\  «  aie  »;  tréc.  bè,  bê,  Gramm.  de  Hingant,  p.  57;  be;, 
Bar~.  Br.,  502,  v.  13.  Le  pronom  manque,  comme  dans;/*' 
beh  keit,  etc. 

e  pe^-te  «  que  tu  aies  »,  Histor...  sante^  Barba,  chez  Ledan, 
p.  6;  pour  efo)  pe-te,  cf.  cm  bijenn-mc. 

Comparez  le   comique  a  fus  «  quam  habuisti   »,   ny  fyes 

«   non  haberes  «,    Z2,   568,    569,    formes    qui  répondent    à 

be\,  etc. 

3e  pers.  sing. 

ho  deu^-bi  dirogei  «  elle  les  a  déchirés  »,  Gwer^iou  Breiç- 
I^el,  IT,  18,  de  deui  «  elle  a  »,  forme  personnelle,  +  bi,  sujet 
redondant;  la  forme  régulière  est  e  d-eùs-bi  «  elle  a  »,  ibid., 
II,  402;  ho  est  le  complément  du  participe  suivant,  dirogei. 
C'est  l'inverse  de  la  construction  régulière  am  boa-han  planlel 
Qtplantet  am  boa  'n  eban  «  je  l'avais  planté  »,  ibid.,  II,  436. 

On  trouve  de  même,  sans  que  le  complément  indirect  du 


Etudes  bretonnes .  261 

verbe  «  être  »  soit  exprimé  d'aucune  manière,  m  'ho  pije  laket 
«  je  vous  aurais  mis  »,  ibid.,  II,  22  ;  ni  er  bije  miret  «  nous 
l'aurions  gardé  »,  Bue%  ar  pêvar  mab  Emon,  Morlaix,  1866, 
p.  209  ;  cf.  comique  y  11  berna  «  (je  te  dirai  comment)  je  l'ai 
eu  »,  Z2  568. 

besel  «  qu'il  ait  »,  Le  Jeune,  Rudiment  du  F.,  34. 

bc~o,  béo  «  qu'il  ou  qu'elle  ait  »,  Hingant,  Gramm.,  57. 
Pour  l'emploi  à  l'impératif  de  cette  terminaison  -0  de  futur, 
cf.  Dict.  et  coll.,  1690,  y  ho  déveso  «  qu'ils  ayent  »,  p.  171, 
et  na  deffoto  à  netra  «  qu'il  n'ait  faut(e)  de  rien  »,  p.  108; 
bè%p  «  qu'il  soit  »,  Sauvé,  Prov.  127. 

irR  pers.  plur. 

'm  eus-om  «  nous  avons  »  :  tréc.  gwelloc'h  \uit  'm  eus-om 
<rroet  «  mieux  que  nous  ne  l'avons  fait  »  ;  meuzom,  An  disput... 
entre  diou  plac'h,  veuve  Le  Goffic,  p.  2.  Ce  mot  est  formé  de 
'm  eus  «  j'ai  »,  =  «  mihi  est  »,  et  de  la  terminaison  -omp  de 
kanomp  «  nous  chantons  ». 

n'eusomp  «  nous  avons  »,  Disput  cire  Jake~  Lamrog,  etc., 
Brest,  p.  15,  48,  56  (en  cornouaillais).  Ici  on  est  parti,  non 
de  la  première  personne,  mais  de  la  troisième,  'n  eus  «  il  a  », 
=  «  illi  est  »,  et  on  a  imité  le  rapport  de  kan  «  il  chante  », 
à  kanomp. 

meump  «  nous  avons  »  :  ur  buguel  meump  garni  «  un  enfant 
que  nous  avons  mis  au  monde  »,  Givei\.  Br.-Izcl,  II,  496  ; 
dalek  ma  meump  «  du  moment  que  nous  avons  »,  Histoariou 
ha  parabolenou...  Saint-Brieuc,  1857,  p.  7;  hirie  am  meump 
«  aujourd'hui  nous  avons  »,  p.  202,  ar  pt\  a  meump  «  ce 
que  nous  avons  »,  18.  Cette  forme  est  fréquente  en  trécorois. 
On  l'emploie  même  après  le  pronom  sujet  ni  :  ni  meum  «  nous 
avons  »  ;  ni  meump,  Giver^.  Br.-I^.,  II,  350,  ni  a  meump,  I, 
50.  Il  est  vrai  que  ni  am-eump  équivaut  à  la  forme  ordinaire 
ni  hon-cus,  où  bon  eus  est  aussi  relativement  personnel.  Les 
Vannetais  et  les  Trécorois  disent  aussi  ni  en  eus,  ni  en  des, 
avec  la  troisième  personne  du  singulier,  c'est-à-dire  l'imper- 
sonnel, ce  qui  est  plus  conforme  aux  règles  générales.  Am- 
eump,  'm-ewnp  ne  doit  pas  être  une  contraction  de  'm  eus-om, 
contraction  qui  serait  très  peu  conforme  à  la  phonétique  tré- 
Revue  Celtique,  IX  17 


262  E.  Ërnault. 

coroise;  c'est  plutôt  une  imitation  analogique  du  rapport  des  au- 
tres formes  de  ce  genre  ayant  un  /;/  au  commencement,  comme 
mamp,  am  ocuip,  etc.,  avec  le  singulier  'ma,  am  oc,  etc. 

a  m'oamp  «  nous  avions  »,  Hisloariou,  191  ;  m'amp,  Chan- 
son neve  var  sujet  eur  bromese...,  veuve  Le  Goffic,  str.  22. 

am  oemp  «  nous  eûmes»,  Testamant  neve,  Guingamp,  1853, 

P-  334- 

c  incomp  «  nous  aurons  »,.  Lecoat,  Ar  govesion,  Lannion, 
1881,  p.  4;  momp  »  nous  aurons  »,  Chanson...  an  evere^et,  Le 
Goffic,  str.  7;  betek  ma  momp  «  pourvu  que  nous  ayons  », 
Hisloariou,  ij  ;  na  momp  ket  «  nous  n'aurons  pas  »,  HisL, 
230;  in'omp  «  que  nous  ayons  »,  Quimiad  goasset...  Rou- 
douakc,  chez  Haslé,  str.  10  ;  petit  Tréguier  'm  011m  «  nous 
aurons  ».  Ces  formes  paraîtraient  doublement  étranges  en 
Léon,  où  la  première  personne  plurielle  du  futur  est  en  -imp; 
mais  les  Trécorois  disent  e  vcom(p)  «  nous  serons  »,  etc.  (ci. 
vcomp,  Hist.,  233),  de  sorte  qu'ils  n'ont  pas  eu  à  changer  la 
voyelle  du  singulier  'm  0,  'm  ou  «  j'aurai  ». 

va  cm  bemp  «  habeamus  »,  Dumoulin,  Grammatica  îatino- 
ccllica,  Prague,  1800,  p.  83  ;  ememp  «  (je  voudrais)  que  nous 
ayons  »,  Vie  de  David,  ms.  à  M.  Bureau  (1850),  p.  6;  ha 
m'emp  ket  «  nous  n'aurions  pas  »,  Hist.,  178. 

cm  bijcmp  «  que  nous  eussions  »,  Lecoat,  Testamant  neve^, 
1883  (Actes,  ch.  m,  v.  12);  petit  Trég.  cm  ijemp. 

m'  hor  homp  «  que  nous  ayons  »,  Chanson  an  dançou,  chez 
Ledan,  p.  5.  Ici  commence  une  nouvelle  série,  où  les  formes 
personnelles  proviennent  directement  des  formes  imperson- 
nelles correspondantes  :  m'hor  bomp  «  ut  nobis  simus  »  est 
pour  m'hor  bo  «  ut  nobis  sit  ». 

m' or  bemp  «  que  nous  ayons  »,  en  cas  ni  or  bemp  «  en  cas 
que  nous  ayons  »,  à  u\  bon  bemp  «  ô  si  nous  eussions  »,  Dict. 
et  coll.  de  Quiquer,  1690,  p.  171;  =  vann.  l.uir  bemb 
«  ayons  »,  Livr  bugale  Mari,  Rennes,  1881,  p.  253,  431. 

hun  béemb  «  ayons  »  (vann.),  Gramm.  de  Guillome,  p.  52; 
Manuel  de  Guyot-Jomard,  p.  28;  hur  béemb,  B.crs.  43.  Ceci 
est  la  forme   qui  correspond  à   la   2e  pers.   du  sing.  ha  pecs 
«  aie  »,  tandis  que  hur  bemb  répond  à  hc-vc. 
pa  nom  boum  «  quand  nous  n'avions  pas  »,  Vie  de  David. 


Etudes  bretonnes.  263 

bon  defem-ni  «  (vous  voulez)  que  nous  ayons  »,  Enig.  Ker- 
gidu,  II,  63. 

bé~omp,  béomp  «  ayons  »,  en  trécorois,  Hingant,  Grain  m., 
57;  léon.  bexpmp,  I.-M.  Lejean,  Parosian,  Rennes,  1874, 
p.  953.  Le  pronom  est  supprimé,  comme  au  singulier  be% 
«  aie  »,  etc. 

betnp  «  ayons  »,  Maro  kriann  AotroneDone...  1875,  dernière 
strophe,  v.  1  et  2  (trécorois),  cf.  vann.  hurbemb. 

niar  bijemp  «  si  nous  avions  »,  A.  Durand,  Ar  fei?  hag  ar 
vro,  p.  337. 

Comparez  comique  nam  beyn  «  ne  habeamus  »,  Z2,  568, 
569. 

2e  pers.  plur. 

ho  poac'h-hu  «  aviez-vous  »,  Mis  maë...  gat  G.  L...  curé 
Tanlé,  Brest,  1836,  p.  254,  258;  id.}  dans  l'édition  de  1854; 
cf.  plus  haut  cm  bijenn-me,  c  pe^-te,  bon  defem-ni;  et  la  forme 
régulière  no  pise  bu  quel  «  n'auriez-vous  pas  »,  P.  Maunoir, 
Te  m  pi  consacre! ...,  p .  159. 

m%o  pijet  «  si  vous  aviez  »,  bo  pi  jet  »  vous  auriez  »,  Avan- 
turiou  eiiuu  Jeu  yaouanq,  Morlaix,  Lanoc,  p.  21. 

bo  pe%id  «  avez  »,  P.  Grég.,  Gramm.,  Rennes,  1738,  p.  92; 
bopexit,  Vocabulaire  nouveau,  6L'  éd.,  Quimper,  1778,  p.  120; 
Lejean,  Parosian,  p.  945,  '946,  949,  952,  954,  etc. 

Le  trécorois  bopet  «  ayez  »  et  le  vann.  hou  péet,  Gramm.  de 
Guillome,  52,  Manuel  de  Guyot-Jomard,  28,  peuvent  s'expli- 
quera la  fois  par  ho  pe%et  =  ho  pexit  (personnel)  et  par  bo  pe~et 
—  «  vobis  sit  »,  cf.  ho  be%et,  Nouelou,  562,  bo  bel,  542;  no~ 
be%et,  Sainte  Nonne,  321. 

be~it  «  ayez  »,  Parosian,  939,  949  ;  Lescour,  Telenn  Given- 
gani,  256;  Récit  circonstanciel  var...  ar  nialeurioit  ...er  bloa 
1833,  chez  Lédan,  p.  5  ;  tréc.  bèid,  bed,  Hingant,  Gramm., 
57  ;  be%et,  Hist.,  13  ;  on  dit  aussi  beet. 

pi-re  boe'b  hui?«  Lesquels  aurez-vous  ?  »  (dialecte  deBatz). 

Comparez  le  comique  asbetheugh  wby  «  quam  habebitis 
vos  ».  Z2  567,  où  -betheugh  why  =  le  breton  boe'h  hui. 

3e  pers.  plur. 
eu%_  int  «  ils  ont  »,  Congrès  celtique,  Saint-Brieuc,    1868, 


264  E.  Ernault. 

annexes,  p.  9  ;  d'am   nao  a  vugaligou  N'eu^-int  bel  «  à  mes 

neuf  entants  qui  n'en  ont  pas  eu  (de  pain)  »,  Bar^a~  Brei\, 
p.  400  (dialecte  de  Cornouaille). 

n'eusont  «  ils  ont  »,  Disput...  Jàke^,  p.  50,  a  n'eu%pnt}  id.} 
p.  56.  Cette  forme  cornouaillaise  correspond  à  n'eusomp  «nous 
avons  ». 

en'eunt  «  ils  ont  »,  Chanson  neve%  var  sujet  ar  bre%el}  1871, 
chez  J.  Haslé,  Morlaix,  str.  28;  par  Louis  ar  Pouenot,  de 
Gourin;  qitcn  n'uni  «  jusqu'à  ce  qu'ils  .ont  »,  Quimiad  goas- 
scl...  Roudoualec,  str.  12.  Ceci  répond  au  trécorois  incuinp 
«  nous  avons  ». 

en  devoant  «  ils  avaient  »,  Bai\.  Br.,  495,  v.  5. 

en  cas  men  deffeni  «  en  cas  qu'ils  ayent  »,  Dict.  et  coll.  de 
Quiquer,   1690,  p.   173. 

n'i^ent  «  ils  auraient  »,  Disput...  Jake~,  54. 

ho  âevont  «  ils  auront  »,  Chanson...  an  evere^et,  str.  9.  Ceci 
ne  vient  plus  de  la  3e  pers.  du  sing.,  mais  de  celle  du  pluriel, 
ho  devo  «  ils  auront  »,  =  Mis  erit.  La  terminaison  -ont  est 
usitée  en  trécorois  en  même  temps  que  -ouint1,  à  la  3e  pers. 
plur.  du  futur  :  «  ils  ne  seront  pas  »  se  dit  na  vouint  ou  r.a 
vont,  ou  même  na  vohlc  (cf.  ordinal  e  vonq  «  ils  seront  tou- 
jours »,  Récit...  var...  eur  mirael,  Guingamp,  chez  Jollivet, 
str.  18). 

ho  dijent  «  ils  auraient»,  Chanson...  var...  ar  bre~el,  str.  11. 

ho  be^énd,  0^  be~eaud  «  qu'ils  ayent  »,  P.  Grég.,  Grainin., 
p.  92. 

pliget  gant  Doue  mar  ô  defent  «  Dieu  veuille  qu'ils  ayent»,  Dict. 
et  coll.,  1690,  p.  171;  ho  deffént  «  qu'ils  ayent  »,  P.  Grég., 
Gram ni.,  p.  92,  0  deffent,  Le  Jeune,  p.  34,  hô  défeht,  Le  Go- 
nidec,  Grainin.,  1807,  p.  82  ;  y  0  deueçent,  id.,  Dictionnaire  et 
colloque  de  Quiquer,  Saint-Brieuc,  chez  Doublet,  1640;  vann. 
ou  deent  «  qu'ils  aient  »,  Guillome,  Graniin.,  52;  Guyot-Jo- 
mard,  Manuel,  28.  L'expression  y  0  deueçenl  rappelle  ni  meump 
«  nous  avons  »  ;  mais  on  a  vu  plus  haut  qu'à  l'impératif  un 

1  .  Cf.  crescoiiit  1  ils  accroîtront  n .  Tragédien  sacr,  par  Cadec,  natif  en 
Escopty  Treguer,  Brest  (approbation  de  165 1),  p.  6;  bèoint  «  ils  seront  », 
èoint  «  ils  iront  >,  Elémens  de  la  langue  des  Celtes,  par  Le  Brigant,  avocat  à 
Tréguier,  Strasbourg,  1779,  p.  1 3  ;  Rev.  Celt.,  V,  488,  Mélusine,  III,  477,  etc. 


Etudes  bretonnes.  265 

verbe  quelconque  peut  rester  à  la  3epers.  du  pluriel  après  son 
sujet. 

défaut  «  ils  avaient  »,  Bar^a^Brei^,  338,  388  (Cornouaille); 
doant,  id.,  Ouimiad  goasset...  Roudoualec,  par  N.  Naour,  str.  9. 

ma  faotred  défini  «  mes  fils  auront  »,  Bar~.  Br.,  319  (en 
cornouaillais).  Remarquons  le  changement  de  voyelle  :  defint 
est  pour  ho  defo,  cf.  ho  devant,  d'après  kaniht  «  ils  chanteront.  » 

bé%pnt,  béont  «  qu'ils  aient  »,  Hingant,  Grain  m.,  57. 

Infinitif. 

L'infinitif  régulier  du  verbe  avoir  est  endevezput,  endevout 
«  avoir  »,  mot  de  même  formation  que  par  exemple  le  future 
deve^o,  en  devo  «  il  aura  » .  Cette  troisième  personne  du  sin- 
gulier endevexput,  endevout  «  illi  esse  »,  s'est  généralisée  et  ap- 
pliquée aussi  aux  autres  personnes,  excepté  dans  le  dialecte  de 
Vannes,  où  cet  infinitif  se  conjugue  (cf.  Granun.  de  Guil- 
lome,  p.  53;  Rcv.  Celt.,  VIII,  43):  cm  bout  ou  m  cm  bout 
«  mihi  esse  »,  cf.  cm  eus  et  m'em  eus  «  j'ai  »,  ha  pout  «  tibi 
esse  »,  endevout  (Manuel,  29),  en  dout  «  avoir  (à  lui)  »,  bidout 
«  avoir  (à  elle)  »  ;  hun  bout,  hur  bout  (Gucr~cnncu  cid  ol  ci- 
blai, Vannes,  1864,  p.  45),  «  nobis  esse  »,  hou  pout  «  vobis 
esse  »,  ou  devout  (Choége  nehué  a  gannenneu,  Vannes,  1829, 
p.  57),  ou  dout  «  illis  esse  »,  même  avec  l'auxiliaire  «  faire  »  : 
hur  bout  e  retmb  «  nous  avons  »,  B.  cr  s.  49  =  *  nobis  esse  faci- 
mus,  cf.  59,  62,  etc.  Dans  en  devout  c  rehê  m'anemisèd,  Rcv.  Celt., 
VIII,  43,  n.  2,  l'infinitif  est  au  singulier,  comme  son  auxi- 
liaire; =  * illi-esse-faceret  (i.  e.  haberent)  met  inimici. 

Mais  à  côté  de  ces  infinitifs  impersonnels,  où  le  verbe  garde 
le  sens  primitif  d'«  être  »,  il  y  en  a  un  autre  qui  correspond 
aux  formes  personnelles  comme  beh  «  j'aurai  »,  bé~  «  aie  », 
bè%p  «  qu'il  ait  »,  bèxpmp  «  avons  »,  bé~it  «  ayez  »,  bc~onl 
«  qu'ils  aient  ».  C'est  bc~a  «  avoir  ».  En  léonnais,  keu%  am 
r//~  da  ve~a  laeret,  veut  dire  à  la  fois  «  je  regrette  d'être  volé  » 
=  vann.  de  vont  lairet  et  «  ft avoir  volé  »  =  vann.  d'em  bout 
lairet.  En  léonnais  et  déjà  en  moyen  breton,  un  pronom  qui 
précède  /'(•,;</  est  le  complément  du  participe  suivant  :  /.y//-  am 
eus  d'ho  pe~u  laeret  «  je  regrette  de  vous  avoir  volé  »,  en  vann. 
d'em  bout  hou  lairet;  oe'h  t~be%a  gret  «  pour  l'avoir  faite  »,  (e 


266  E.  Ernaulî. 

«  elle  »,  la  prière)  Introd.  d'ar  v.  dévot,  344,  dam  beçaf  noue! 
«  de  m'avoir  extrémisé  »,  Sainte  Nonne,  13 11;  cf.  plus  haut 
(p.  261)  les  expressions  comme  m' ho  pi  je  laket  «  je  vous  au- 
rais mis  »,  etc. 

D'autres  locutions  impersonnelles  ont  donne  lieu,  comme 
em  eus  «  mihi  est  »,  à  des  formes  personnelles;  exemple  :  moy. 
bret.  nem  deur  «  je  ne  veux  pas  »,  gall.  nymdawi ,  nymtâwr  «  peu 
m'importe  »,  ==  peut-être  *ni-m  tâ-r  «  non  meum  est  »  (dépo- 
nent), cf.  v.  irl.  nïmthâ;  d'où  l'imparfait  gall.  ni  ddorwn,  hret. 
r;\'~fui  qet,  ne  deurvan  qet  «  je  ne  veux  pas  »,  etc.,  P.  Grég., 
lia  t-éurvesit  quel  «  ne  veuillez  pas  »,  Quiquer,  1690,  p.  56.  L'im- 
personnel huy  0:  deur  «  vous  voulez  »,  SB  226,  c'huy  ôteurQ_ 
1690,  p.  35,  86,  chuy  0  teur  68,  c'huy  ho-teur  103,  chuy  oteur  79, 
est  devenu,  par  assimilation, c'hui euteur,  Vocab.,  1778,  p.  105. 
De  l.i  diverses  méprises  de  la  langue  :  c'hui  a  euteur  9 1 ,  c'huy  a  eu- 
teur Grég.  s.  v.  daigner  ;  ne  euteur  qet  «  il  ne  daigne  pas  »  ;  euteur- 
vout  «  daigner  »  (=  * vobis-estur-essel),  part,  euteurvëet,  ib.; 
Euteur,  absolument,  sans  c'hui,  «  voulez-vous  ?  »  Voc.  nouv. 
119;  Hurleur  (par  assimilation  plus  complète),  «  voulez- 
vous?»,  82,  91,  101,  102,  130,  131,  138,  139,  c'hui  a  eurteur 
82.  Ajoutons  c'huy  a  deurve;,  c'huy  deurv,  c'huy  deur  Grég., 
c'hui'teur,  Voc.  nouv.  116.  Cf.  vutur  fontan  «  je  veux  tondre 
(comme  beurre,  si  ...)  »,  coll.  Penguern;  l'expression  revient 
deux  fois,  comme  merafonto,  id.,  G.  B.  I.,  II,  12. 

On  trouve  en  d'autres  langues  le  passage  de  l'impersonnel 

au  personnel  :  je  me  souviens  de  il  nie  souvient,  je  m'ennuie  de  il 

m'ennuie,  je  me  repens  de  lat.  ///('  (re)pœnitet;  misereor  =  me  nii- 

,  [j.i-y.[j.i).:[j.y.'.  —  \).~y.\>X/>ï.  y.:'.,  angl.  will  you phase  -=-  will  il 

phase  you,  etc. 

E.  Ernault. 


MÉLANGES 


.    i. 

LUGUSELVA. 

Tous  les  savants  qui  s'occupent  des  origines  de  notre  his- 
toire connaissent  le  précieux  recueil  auquel  M.  Allmer  a  donné 
le  titre  de  Revue  épigraphique  du  midi  de  la  France.  Dans  le 
tome  Ier,  p.  14.  de  cette  publication  savante,  ce  compétent 
érudit  a  donné  sous  le  n°  23  le  texte  d'une  inscription  du 
musée  de  Périgueux  qui  est  très  intéressante  pour  l'histoire  du 
culte  du  dieu  Lugu-s  chez  les  Celtes  du  continent.  C'est  l'épi- 
taphe  d'une  femme  appelée  Julia  Lugu-selva.  Lugu-selva  veut 
dire  «  propriété,  possession.de  Lugu-s  »,  «  celle  qui  appartient 
à  Lugu-s  ».  On  peut  comparer  le  nom  propre  grec  'Sii-zzj'/.z; 
«  esclave  de  Dieu  »  et  le  nom  propre  franc  Anse-deus  «  esclave 
des  Anses  »  c'est-à-dire  «  des  dieux  ».  Selva  est  identique  au 
vieil  irlandais  selb,  prononcez  selv  ou  selw,  thème  féminin  en 
a  qui  veut  dire  «  propriété,  possession  ».  En  gallois,  helw, 
qui  a  le  même  sens,  est  le  même  mot,  avec  cette  seule  diffé- 
rence qu'il  est  masculin.  L7;  initial  de  helw  tient  lieu  d'une  s 
primitive.  Julia  Lugu-selva  à  Périgueux  fait  pendant  à  Valerius 
Luguadicus.,  dont  le  fils  Valerius  Anno,  né  à  Osma,  en  Es- 
pagne, nous  est  connu  par  son  épitaphe  conservée  à  Ségovie  '. 
Lugu-selva  est  un  composé  dont  Lugu-s  est  le  premier  terme. 
Luguadicus  est  un  dérivé  de  Lugu-s.  Le  suffixe  -adicus,  dans 
Lugu-adicus,  peut  être  considéré  comme  identique  au  suffixe 

1  .   Corpus  inscriptionum  lalimirum,  t.  II.  n°  2732. 


268  Mélanges. 

-aticcus  dans  Epaticcus.  Epaticcus  a  été  signalé  dans  une  légende 
monétaire  de  la  Grande-Bretagne T  et  dans  les  inscriptions  du  tré- 
sor de  Bernav 2.  Epaticcus  est  presque  le  même  mot  que  l'irlandais 
Eochaid  =  *  Equatex,  génitif  Echdach  =  *  Equalcc-os.  L'irlandais 
a  aussi  un  nom  propre  Lugaid  =  *  Luguatex,  génitif  Lugdach  = 
* Luguatecosî .  Lugaid  est  à  Luguadicus  l\  peu  près  comme  Eo- 
chaid h  Epaticcus.  Eochaid  est  presque  le  même  mot  que  le  latin 
eques,  equit-is  «  cavalier  ».  Luguadicus  peut  être  comparé  aux 
noms  propres  grecs  dérivés  de  noms  divins  tels  que  Ir^.r-y.z:, 
AtovJfftsç,  Iloçe'.âawoç,  Krr.aviç,  Epp^aiavoç.  Les  Grecs  n'avaient 
pas  le  monopole  des  noms  dérivés  de  noms  divins.  Les  Gaulois 
en  formaient  aussi.  Tel  est  Esuvius  d'Esus.  Esuvius  a  été- 
rendu  célèbre  par  les  deux  empereurs  gaulois  Tetricus  dont  il 
était  le  gentilice-K  Nous  citerons  encore  le  gentilice  Camulinius 
dérive  de  Cauiulus  dans  une  inscription  du  musée  de  Trêves  \ 
et  de  ce  gentilice  on  peut  rapprocher  le  gentilice  Camullius 
dans  une  inscription  du  musée  de  Vaison.  Cette  inscription  a 
été  publiée  par  M.  Allmer  dans  son  excellente  Revue  épigra- 
phiquek  laquelle  il  faut  souvent  revenir  lorsque,  dans  les  ques- 
tions celtiques,  on  veut  établir  les  saines  doctrines  sur  des  bases 
solides6. 

Quant  à  des  noms  d'hommes  gaulois  composés  dont  le 
premier  terme  est  un  nom  divin,  on  peut  comparer  à  Lugu- 
selva  :  Esu-ucrlus  «  celui  qui  a  la  force  d'Esus  »/,  Esu-magius^ 
«  celui  qui  est  puissant  comme  Esus  »,  Totati-gens  «  fils  de 
Teutates  »  9. 

H.  d'Arbois  de  Jubainville. 


i.    A.  de  Barthélémy  dans  Revue  Celtique,  t.  IX,  p.  31,  col.  2. 

2.  R.  Mowat,  Notice èpigraphique,  p.  \b6. 

3 .  Lugudeccas  dans  une  inscription  ogamique  citée  par  Whitley  Stokes, 
Celtic  Declension,  2-  édition,  p.  87. 

4.  Voir  l'article  que  leur  a  consacré  Vincent  De-Vit.  Onomasticon,  t.  II. 
p.  76}. 

5 .  Brambach,  n'  825. 

6.  Revue  èpigraphique,  t.  I,  p.  269,  n°  300. 

7.  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  III,  246. 

.S.    Revue  archéologique-,  nouvelle  série,  t.  IV  (1861),  p.  138. 
9.   Corpus  inscriptionum  latinarum,  t.  VI,  n°  2407. 


Mélanges.  269 

II. 

LE  JEUNE  DU  MERCREDI  ET  DU  VENDREDI  CHEZ 
LES  IRLANDAIS  DU  MOYEN  AGE. 

En  irlandais,  au  onzième  siècle,  le  mercredi,  dont  le  nom 
liturgique  est feriaquarta,  s'appelle  cet-ain,  c'est-à-dire  «  premier 
jeûne  »  r.  On  écrit  aujourd'hui  dia  ceadaoin.  Le  vendredi  s'ap- 
pelait en  irlandais  à  cette  date  «  dernier  jeûne  »  àin-didin. 
Nous  n'avons  pas  d'exemple  de  cette  formule  avant  le  on- 
zième siècle  2.  Mais  on  a  signalé  dans  le  manuscrit  irlandais  de 
Milan,  qui  peut  dater  du  huitième  siècle,  la  formule  équiva- 
lente dia  oine  didine  «  jour  du  dernier  jeûne  »  >.  L'expression 
irlandaise  moderne  est  aoine.  De  là  pour  le  jeudi  le  nom  de 
jour  «  entre  les  deux  jeûnes  »  dardôen*  ou  dardâin*»  au  moins 
dès  le  xie  siècle;  aujourd'hui  diardaoin  pour  dia  dardaoin  qui 
suppose  un  plus  ancien  dia  elar  dâ  ôin. 

L'usage  auquel  ces  expressions  se  réfèrent  est  constaté  par 
le  document  le  plus  ancien  que  nous  possédions  sur  la  disci- 
pline ecclésiastique  irlandaise.  La  collection  canonique  publiée 
par  M.  Wasserschleben  consacre  au  jeûne  son  livre  XII  et  on 
y  trouve  reproduit  au  c.  xi  un  fragment  de  saint  Paul  aux  Ro- 
mains, chapitre  xiv,  verset  5  :  Nain  alius  judicat  diem  inter 
diem,  alius  judicat  omnem  diem.  L'auteur  de  la  collection  ca- 
nonique explique  les  mots  diem  inter  diem  par  deux  jours  dans 
la  semaine,  tandis  que  suivant  luiomnem  diem  veut  dire  absti- 

1.  Bèdede  Vienne,  fol,  1,  v°,  col.  1;  chez  Whitley  Stokes,  Goidelica, 
deuxième  édition,  p.  32;  Zimmer,  Glossae  hibernicae,  y.  255  ;  — Psautier  de 
Southampton,  fol.  39  a;  chez  Zimmer,  Glossae  hibernicae,  p.  209;  chez  Whit- 
ley Stokes,  Goidelica,  deuxième  édition,  p.  38.  Le  premier  de  ces  deux  do- 
cuments parait  dater  du  xr  siècle,  et  le  second,  du  xe  ou  du  XIe.  Cf.  At- 
kinson,  The  Passions,  p.  628,  au  mot  dardâin. 

2 .  Epîtres  de  saint  Paul  de  Vienne,  chez  Zimmer,  Glossae  hibernicae,  p.  284. 
On  disait  au  génitif  âin-didine,  Atkinson,  The  Passions  and  homilies,  p.  143. 
1.  3726;  à  l'accusatif  et  au  datif  àin-didin  ou  oindidin,  ibid.,  p.  81,  1.  1439. 

3.  Manuscrit  de  Milan,  fol.  113  c.  dans  un  article  de  M.  H.  Zimmer, 
Zeitschrift  fur  vergleichende  Sprachjorschung,  t.  XXVII,  p.  461. 

4.  Chronique  de  Marianus  Scotus,  fol.  33  a,  chez  Zimmer,  Glossae  hiber- 
nicae, p.  274. 

3.  Saint  Paul  de  Vienne,  1'  141  a,  chez  Zimmer,  Glossae  hibernicae, 
p.  284;  cf.  Atkinson,  The  Passions,  p.  30,  1.  327  ;  p.  628,  au  mot  dardâin. 


270  Mélanges. 

nence  perpétuelle1.  Et  de  quels  jours  dans  la  semaine  s'agit- 
il  ?  On  trouve  la  réponse  au  livre  quarante-six,  de  ratione  ma- 
trimonii  dont  le  chapitre  onze  est  intitulé  de  temporibus  in  qui- 
bus  continere  se  debent  conjugati.  Le  synode  irlandais  a  décidé 
que  ce  serait  i°  pendant  les  trois  carêmes,  2°  le  dimanche,  le 
mercredi  et  le  vendredi2.  La  continence  est  gardée  le  dimanche 
par  respect,  le  mercredi  et  le  vendredi  par  mortification. 

Le  jeûne  du  mercredi  et  du  vendredi  est  une  des  plus  an- 
ciennes coutumes  de  l'église  chrétienne.  On  peut  voir  dans 
le  glossaire  de  Ducange  à  l'article  intitulé  jejunium  feriae 
quartae  et  sextae  l'indication  des  principaux  textes  qui  la  cons- 
tatent. Mais,  au  commencement  du  Ve  siècle,  le  jeûne  du  mer- 
credi disparut  à  Rome  et  fut  remplacé  par  celui  du  samedi. 
Or,  il  est  intéressant  de  faire  observer  que  l'église  irlandaise 
du  moyen  âge  conservait  sur  ce  point  les  usages  de  l'église 
primitive  qui,  à  Rome,  avaient  été  grandement  modifiés. 

Ces  usages  sont  constatés  au  111e  siècle  par  Tertullien3. 
Dans  la  langue  ecclésiastique  du  ive  siècle,  chez  Rufin,  ils  por- 
tent le  nom  de  jeûnes  légaux,  jejunia  légitima*.  De  là  l'ex- 
pression de  légitimité  feriae  pour  désigner  le  mercredi  et  le 
vendredi  dans  un  Pénitentiel  attribué  à  Théodore,  archevêque 
de  Canterbury  >,  668-690,  mais  qui  parait  être  une  compilation 
faite  en  France  au  ixe  siècle  6. 


1 .  Id  est  aut  duos  dies  in  ebdomada,  aut  abstinentiara  usque  ad  mortem. 
Deuxième  édition  de  Wasserschleben,  p.  36. 

2.  In  tribus  quadragesimis  anni,  et  in  dominica  die  et  in  feriis  quartis  et 
in  sextis  feriis  conjuges  continere  se  debent.  Deuxième  édition  de  Was- 
serschleben, p.  187. 

3 .  Sic  etapostolos  observasse,  nullum  aliud  imponentes  jugum  certorum 
et  in  commune  omnibus  obeundorum  jejuniorum  ;  proiode  nec  stationum 
quae  et  ipsae  suos  quidem  dies  habebant  quartae  feriae  et  sextae.  De  jeju- 
niis,  c.  2;  chez  Migne,  Patrologia  latina,  t.  II,  col.  956. 

4.  Jejunia  sane  légitima,  id  est  quarta  et  sexta  feria  monebat  non  esse 
solvenda.  nisi  grandis  aliqua  nécessitas  fieret,  quia  quarta  feria  Judas  de  tra- 
ditione  Domini  cogitaverat  et  sexta  feria  crucifixus  sit  Salvator.  -  Recom- 
mandations faites  par  un  certain  abbé  nommé  Apollonius.  Rufin,  Historia 
monachorum,  c.  7;  chez  Migne.  Patroïogia  latina,  t.  XXI.  col.  419. 

5 .  Feria  quarta  et  sexta  quae  legitimae  sunt,  c.  17,  §  1  ;  Ancieni  laws  and 
institutes of  England,  t.  II,  p.  12.  Cum  legitimis  t'eriis,  c.  19,  §  7;  ibid., 
p.  17;  —  c.  23,  §  19  ;  ibid  .  p.  29. 

6.  Arthur  West  Haddan  and  William  Stubbs.  Connais  and  ecclesiastical 
documents  retating  to  Great  Britain  and  Irelaud,  t.  III,  p.  173,  col.  2. 


Mélanges.  271 

Vers  la  fin  du  ive  siècle  ou  environ,  l'usage  s'introduisit  à 
Rome  chez  les  gens  très  pieux  de  jeûner  non  seulement  le 
mercredi  et  le  vendredi,  mais  encore  le  samedi1.  Le  pape  Inno- 
cent I,  402-4Ï7,  trouva  cette  mortification  exagérée,  et  il  ré- 
duisit ces  trois  jours  de  jeûne  à  deux,  qui  furent  le  vendredi 
et  le  samedi2.  Dès  lors  l'église  romaine  ne  conserva  plus  le 
jeûne  du  mercredi  que  pour  les  Quatre-Temps  3 . 

Ce  n'est  pas  la  discipline  de  l'église  gallicane  au  Ve  et  au 
vie  siècle,  telle  que  nous  la  connaissons  par  le  règlement  de 
l'archevêque  de  Tours,  Perpetuus,  464-494;  ce  règlement  était 
encore  en  vigueur  au  temps  de  Grégoire  de  Tours,  573-5 95  > 
qui  Ta  reproduit  dans  son  Histoire  des  Francs.  Suivant  ce  rè- 
glement, l'usage  de  jeûner  trois  fois  par  semaine  est  spécial 
au  carême  de  la  saint  Martin  qui  commence  le  1 1  novembre 
et  se  termine  à  Noël.  Le  jeûne  le  plus  fréquent  est  celui  qui 
se  pratique  deux  fois  par  semaine,  le  mercredi  et  le  vendredi, 
savoir  :  de  la  Pentecôte  au  24  juin,  du  Ier  septembre  au  1 1  no- 
vembre, et  du  13  janvier  au  milieu  de  février -L 

Il  faut  rapprocher  de  ce  règlement  de  l'église  de  Tours,  le 
pénitentiel  gallican  du  IXe  siècle  attribué  à  tort  à  l'archevêque 
Théodore  de  Canterburv,  011  comme  nous  l'avons  dit,  le  mer- 
credi et  le  vendredi  sont  appelés  légitimité feriae. 

Ainsi,  la  coutume  irlandaise  de  jeûner  le  mercredi  et  le 
vendredi  pendant  toute  l'année  est  la  continuation  d'un  usage 
général  de  l'Eglise  avant  le  pape  Innocent  I,  402-417,  et  qui, 
modifié  par  ce  pape,  s'est  cependant  maintenu  en  théorie  dans 
l'église  gallicane  au  moins  jusqu'au  ixe  siècle.  —  H.  d'A.  de  J. 

1  .  Christianus  qui  quarta  et  sexta  et  ipso  sabbato  jejunare  consuevit, 
quod  fréquenter  rornana  plebs  facit  Lettres  de  saint  Augustin,  1.  II,  ep.  36, 
c.  4,  j  S  ;  chez  Migne,  Patrologia  latina,  t.  XXXIII,  col.  139. 

2.  Lettre  du  pape  Innocent  I  à  l'évêque  Decentius,  ch.  4,  dans  le  Codex 
canonum  ecclesiasticorum  et  constitutorutn  sanctae  sedis  apostolicae  quesnellianus, 
c.  23,  chez  Migne,  Patrologia  latina,  t.  LVI,  col.  516.  Cf.  Collectio  decreto- 
rum  pontificum  romanorum,  par  Denis  Petit,  chez  Migne,  t.  LXVII,  col.  239. 

3 .  Annua  nobis  est  dilectissimi  jejuniorum  celebranda  festivitas  quam 
mensis  septimi  solemnis  recursus  indicit.  Quarta  igitur  et  sexta  feria  succe- 
dente,  solitis  eamdem  conventibus  exsequamur.  Liber  sacramentorum  du  pape 
Léon  le  Grand,  440-461,  cap.  XXVII,  chez  Migne,  Patrologia  latina,  t.  LV, 
col.  iO).  Cf.  col.  109  D  et  col.  41  A,  43  B. 

4.  Historia  Francorum,  I.  X,  c.  31  ;  édition  Arndt,  p.  445. 


272  Mélanges. 

III. 
SWLLT,  SOLT,  S  DUT. 

Swllt  a  eu  en  gallois  non  seulement  le  sens  actuel  de  shel- 
ling,  mais  aussi  celui  de  trésor;  ex.  ac  ynteu  a gerdawd  byd  yg 
Kaerwyni  lie  y  doed  swllt  y  brenhim  ac  vrenhinolyon  oludoed 
(Brut  y  Tvwysogion,  Myv.  Archael.,  2  e  éd.,  p.  606,  col.  r) 
«  et  lui,  il  alla  jusqu'à  Winchester  où  était  le  trésor  du  roi  et 
ses  richesses  royales  ».  On  rencontre  dans  les  chartes  bre- 
tonnes un  terme  identique  comme  origine  au  mot  gallois  :  cart. 
de  Landevennec,  éd.  Le  Men  et  Ernault  :  Soit  Hinuarn,  18  ; 
Soit  Gneuer  (probabL^/tv/tr  ?),  14.  L  devant  /  s'est  vocalisée  : 
Soult-alarun,  cart.  de  Quimperlé,  p.  44,  aujourd'hui  trans- 
formé en  Sant-Alarun  en  Guiscriff,  Morbihan;  Sout-Wenhaes 
(in  il  la  parte  perochie  que  sont  (sic)  Wenhaes  vnlgariter  nun- 
cupatur  (en  Kerfeunteun,  près  Quimper),  cart.  de  Quimper, 
Bibl.  nat.  9891,  fol.  35  r°,  année  1228.  Ce  sont  tous  des 
noms  de  lieu.  Si  on  songe  au  sens  de  swllt  en  moyen  gallois, 
on  est  amené  à  supposer  un  sens  analogue  dans  le  terme 
breton.  Soif,  sont  a  évidemment  la  valeur  de  fi  sens  de  l'époque 
carolingienne.  Le  Fiscus  était  un  ensemble  de  biens  fonds  ap- 
partenant à  un  même  propriétaire,  soumis  à  un  même  svstème 
de  redevances  ;  quand  il  se  composait  de  plusieurs  territoires, 
il  y  avait  un  chef-lieu.  Les  Fisci  étaient  de  grandeur  inégale 
(v.  Guérard,  Polyptique  d'Irminon,  chap.  III,  p.  39).  La  glose 
socitl  du  manuscrit  d'Orléans  est  sur  Jiscns,  mais  il  est  impos- 
sible d'identifier  soeul  avec  soit,  sont,  si  on  ne  suppose  une  er- 
reur du  scribe  ou  un  mot  incomplet  (la  glose  est  de  seconde 
main  et  postérieure  d'un  siècle  au  moins,  selon  toute  probabi- 
lité, à  celles  de  première  main).  On  peut  supposer  socnl[t]  ou 
soeut.  L'orthographe  oc  présente  une  sérieuse  difficulté.  On 
trouve  cependant  poe  pour  pou  =  pagus  dans  le  cart.  de  Quim- 
per :  Banadloc  in  poe  Carnoet,  Bibl.  nat.,  9S90,  fol.  6  r°,  à 
l'année  1216.  Il  est  vrai  qu'ici  poe  est  en  quelque  sorte  encli- 
tique et  que  oc  peut  fort  bien  indiquer  une  prononciation  eu 
français  (ô).  Swllt,  soit  viennent  de  solidus  ou  plutôt  de  soldus. 

J.    LOTH. 


Mélanges.  27  3 


IV. 


UN  CAS  DE  PROVECTION  INÉDIT. 

Tout  récemment,  au  Faouët,  paroisse  aujourd'hui  du  dio- 
cèse de  Vannes,  mais  avant  la  Révolution  du  diocèse  de 
Quimper,  et  parlant  le  dialecte  de  la  haute  Cornouailles,  avec 
des  particularités  des  plus  remarquables,  je  fus  frappé  du  trai- 
tement que  subissent  les  explosives  sonores,  ou  moyennes  b 
d  g,  après  le  pronom  possessif  féminin  hi.  Si  tous  les  dialectes 
breton,  gallois,  comique,  armoricain,  changent  en  spirantes 
sourdes  les  ténues  ou  explosives  sourdes  p  t  k  après  ce  pro- 
nom, tous  aussi  laissent  intactes  après  lui  les  explosives  sonores  : 
hi  fenn,  hi  dont.  Au  Faouët,  on  suit  bien  la  règle  générale  pour 
les  ténues,  mais  on  change  les  moyennes  en  ténues  :  tout  le 
monde  dit  :  hi  torn  «  sa  main  »,  hi  car  «  sa  jambe  »,  hi  prec  7; 
«  son  bras  ».  La  théorie  la  plus  répandue  aujourd'hui  attribue 
à  l'influence  d'un  s  disparu  le  changement  des  ténues  en  spi- 
rantes et  au  contraire  la  conservation  des  moyennes.  Le  fait 
curieux  que  je  cite  vient  à  l'appui  de  cette  théorie.  La  provec- 
tion  des  moyennes  en  ténues  a  eu  lieu  avant  la  disparition  de 
Ys  ;  Y  s  a  disparu  ensuite.  C'est  un  fait  analogue  à  celui  qui 
s'est  produit  en  breton  après  o~  «  votre  »,  devenu  os  comme  le 
montre  encore  le  vannetais  hos  (prononcez  s  sourd)  dans  des 
expressions  comme  hos  un  1er  «  votre  autel  ».  Us  de  os  après 
avoir  produit  la  provection  de  la  moyenne  en  ténue  s'est  assi- 
milé à  la  ténue  puis  a  disparu  :  ho%_  breuy,  hos  preur,  ho  preur 
(d.  Ebel,  Cornica,  Beitrâge,  V,  p.  145  et  suiv.).  Le  langage 
de  Faouët  présente  beaucoup  de  traits  curieux,  qui  demandent 
une  étude  détaillée.  Le  fait  de  provection  que  je  viens  de  si- 
gnaler me  paraît  général  dans  la  partie  cornouaillaise  du  can- 
ton de  Faouët,  c'est-à-dire  celle  qui  est  sur  la  rive  droite  de 
l'Ellé;  il  ne  franchit  pas  l'Ellé  et  est  inconnu  aux  gens  du  Bro- 
werec  ou  vannetais  breton  sur  la  rive  gauche. 

J.  LOTH. 


274  Mélanges. 


V. 


RHEGDDOFYDD,  RHEGOFYDD. 

Lady  Guest,  qui  a  souvent  corrigé  dans  sa  traduction  les  dé- 
fectuosités de  son  texte,  ne  me  paraît  pas  avoir  été  aussi  heu- 
reuse dans  le  début  du  curieux  récit  de  Kulhwch  et  Clwen. 
La  femme  du  prince  Kilvdd,  père  de  Kulhwch,  à  son  lit  de  mort, 
appelle  près  d'elle  son  mari  et  lui  dit  :  manu  uydaf  i  o'r  cleuyi 
hii'iiii.  A  giureic  arall  a  uynny  ditheu.  A  recdouydyni  y  gwraged 
weithon.  Drive  yw  itti  hagen  llygru  dy  uab.  Lady  Guest  traduit  : 
«  Of  this  sickness  Ishall  die,  andthou  wilt  take  another  wife. 
Xow  wives  are  the  gift  of  the  Lord,  but  it  would  be  wrong 
for  thee  to  harm  thy  son  ».  La  réflexion  de  cette  femme  mou- 
rante et  qui  va  user  d'un  artifice  ingénieux  pour  empêcher  son 
mari  de  se  remarier,  que  les  femmes  sont  un  présent  du  ciel, 
est  au  moins  bizarre.  Le  weithon  qui  signifie  «  en  ce  moment  » 
ne  s'explique  pas  bien  non  plus.  La  solution  de  la  difficulté 
est  dans  recdouyd.  Les  auteurs  de  vocabulaires  l'ont  traduit  les 
uns  par  «  présent  de  Dieu  »,  les  autres,  tellement  ce  sens  leur 
paraissait  peu  naturel,  par  «  malédiction  de  Dieu  ».  Le  sens  vé- 
ritable est  «  maître,  arbitre  des  présents  »,  et  il  faut  traduire  : 
«  Je  vais  mourir  de  cette  maladie,  et  toi  tu  voudras  une  lemme. 
â  présent,  ce  sont  les  femmes  qui  sont  les  arbitres  des  largesses 
(qui  tiennent  les  clefs  en  quelque  sorte);  ce  serait  mal  à  toi 
cependant  de  faire  tort1  à  ton  fils  ».  Ree  douyt  ou  avec  l'ortho- 
graphe moderne  rheg-ddofydd  est  la  même  expression  que 
rheg-ofydd  que  j'ai  relevée  plusieurs  fois  dans  les  poésies  im- 
primées dans  le  Myv.  archœology.  Le  poète  Cyndelw  (1150- 
1200)  en  parlant  de  Cadwallawn  qu'il  vient  de  perdre,  dit  : 

Recouit 2  oetwn  oe  daioni 

Gan  gyueisor  por,  pawb  ae  gwely. 


1.  Pour  llygru  dans  ce  sens,  cf.  Ancient  laïus,  éd.  Oven,  p.  152,  292. 

2.  =regov\dd  d'après  l'orthographe  habituelle  de  ces  poésies;  de  même 
pour  mit  dans  le  Livre  Noir. 


Mélanges.  275 

«  J'étais  le  distributeur,  l'arbitre  des  présents,  de  son  bien 
avec  un  seigneur  qui  me  faisait  son  égal,  chacun  le  voyait  » 
(Myv.  arch.,  p.  159,  col.  2). 

Ibid.,  p.  227,  col.  2  ;  en  parlant  de  la  Vierge  Marie  : 

hi  yn  uam  uy  tliad 
hi  yn  uvry  heb  uad 
hi  yn  rec  ouyt 
hi  yn  hollaul  rad 

«  Elle  qui  est  mère  .de  son  père, 
Elle  qui  est  vierge  sans  contestation 
Elle  qui  est  ['arbitre  des  présents, 
Elle  toute  grâce.  » 

Ibid,  p.  231,  col.  1,  Duw  douyt  recouyi  «  Dieu  le  maître, 
l'arbitre  des  grâces  »  ; 

Ibid.,  p.  181,  col.  2,  Judea  rex  regovyd  hygar,  id.,  p.  239, 
col.  2. 

On  trouve  ofydd  avec  bien  d'autres  mots:  Myv.  arch.,  p.  164, 
col.  1.  Hil  Kedwyn  cad  ouyt  «  la  race  de  Kedwyn,  maîtresse 
des  combats  »  ;  cred  ouyd,  Myv.,  p.  179,  col.  2;  nwyl  ouyt, 
p.  249,  col.  1;  cf.  Livre  noir,  llid  ouit,  cred  ouii  cités  par 
J.  Rhys,  Lectures,  p.  293-294.  M.  Rhys  voit  dans  Ofydd  un 
vieux  celtique  *ogmios,  vieux  gallois  *  ogmidd,  *  omydd,  iden- 
tique à  l'irlandais  ogma.  Il  me  semble  qu'il  y  a  à  ce  rappro- 
chement séduisant  une  double  difficulté  :  1'///  n'eût  pas  dû  de- 
venir spirant,  étant  précédé  de  g,  et  l'accent  avant  été  après 
///  :cf.  les  dérivés  en  men  (y.  Whitley  Stokes,  The  verb  substan- 
livc,  p.  31);  Yo  bref  eût  dû  être  infecté  :  cf.  newydd  =  *novio; 
niynxdd,  en  vieil  armoricain  monid,  etc.  Quoi  qu'il  en  soit, 
regdofydd  doit  être  rapproché  de  galltovydd  «  mécanicien,  ar- 
tiste en  mécanique  ».  On  trouve  en  effet  les  formes  galltovydd, 
galldovydd  etgallovydd.  ]la  forme  galldovydd  n'est  pas  correcte 
comme  l'a  fait  remarquer  M.  Rhys;  on  reste  en  présence  de 
galltovydd  et  gallovydd.  Le  t  de  galltovydd  peut  s'expliquer  par 
un  Ij  primitif;  gai  lu  est  en  effet  de  la  même  origine  que  le  li- 
thuanien galiù  «  je  puis  »  (Rhys,  Lect.,  p.  203).  Pour  l'ab- 
sence de  /  on  peut  comparer  ferylliaeth  et  ferylltiaeth  «  al- 


276  Mélanges. 

chimie  et  chimie  »,  dérivés  de  Fferyttt  =  Fergiljus.  Mais  on 
ne  saurait  donner  la  même  explication  pour  les  deux  formes 
recdouyd  et  recovyd.  On  peut  songer  à  une  erreur  du  scribe 
dans  les  Mabinogion,  et  lire  reg-ovydd  (c'est  ce  que  j'avais  fait 
d'abord);  on  peut  aussi  supposer,  sans  erreur  du  scribe,  une 
influence  analogique  de  gaïltovydd  et  gallovydd,  mais  on  res- 
terait toujours  en  face  d'un  ovydd  inexplicable,  * ogmios  étant 
rejeté.  Je  serais,  pour  ma  part,  très  disposé  à  voir  dans  les  for- 
mes en  ovydd  ou  le  nom  du  poète  Ovidius  ou  plutôt  une  évo- 
lution de  dovydd  par  analogie  sous  l'influence  â'ovydd.  On  ap- 
pelait ovydd  un  gradé  dans  la  hiérarchie  des  lettrés  qui  n'était 
ni  barde  ni  druide.  Ovide  a  été  aussi  célèbre  au  moyen  âge 
que  Virgile  qui  a  donné  son  nom  à  l'alchimie.  Ojydd,  le  poète, 
est  à  chaque  instant  cité  ou  rappelé  par  des  bardes  qui  ne 
l'avaient  sûrement  jamais  lu  en  latin,  comme  Dalydd  ab 
Gwilym  ;  son  nom  est  devenu  synonyme  d'  «  homme  habile, 
maître  dans  l'art  de  ...  ».  Petit  à  petit  ovydd  est  devenu  l'équi- 
valent du  mot  très  gallois  de  dovydd.  Dofydd  est  une  expres- 
sion qui  accompagne  très  fréquemment  le  nom  de  Dieu  et  doit 
être  rapproché  du  gallois  dof  «  apprivoisé  »,  et  ses  congénères 
vieux  breton  dometic  «  domito  »,  latin  domare,  etc.  Dofydd 
suppose  un  vieux  celtique  domios  et  signifierait  «  le  domp- 
teur »,  le  maître  en  tous  sens;  cL  dominiis  à  côté  de  domitus. 
L'o  serait  long  (=  â  vieux  celtique),  et  n'aurait  pas,  à  ce 
titre,  été  influencé  par  -j.o  :  on  peut  comparer  l'irlandais  dàrri 
«  barde  »  (Windisch,  Irische  Texte,  Wort.)  ;  irl.  mod.  daim 
(daimh)  «  poet,  learned  man  »,  O'Reilly.  Dans  les  composés, 
dovydd  aurait  été  peu  à  peu  influencé  et  supplanté  par  ovydd  qui 
avait  le  même  sens. 

J.  Lotii. 


BIBLIOGRAPHIE 


Henri  Kiepert.  Manuel  de  géographie  ancienne,  traduit  par 
Emile  Ernault,  maître  de  conférences  à  la  Faculté  des  Lettres  de  Poitiers, 
ouvrage  accompagné  d'un  avant-propos  et  remanié  en  ce  qui  concerne 
la  Gaule,  par  Auguste  Longnon,  membre  de  l'Institut.  Paris,  Vieweg, 
1887  ;  in-8,  vii-365  p. 

On  doit  à  M.  Henri  Kiepert  deux  traités  élémentaires  de 
géographie  ancienne  :  l'un,  intitulé  :  Lehrbuch  der  alten  Geo- 
graphie  qui  a  paru  à  Berlin  en  1878,  est  un  volume  in-8  de 
xvi-544  pages;  l'autre,  abrégé  du  premier,  est  intitulé  Leitfaden 
der  alten  Géographie  et  n'a  que  vni-279  pages;  il  est  destiné  aux 
élèves  des  gymnases.  M.  Vieweg  a  voulu  mettre  cet  ouvrage 
à  la  disposition  des  élèves  de  nos  lycées  et  de  nos  collèges, 
voilà  pourquoi  il  en  a  demandé  une  traduction  à  notre  savant 
collaborateur  M.  Ernault.  Toutefois,  pour  les  Français,  la 
partie  de  ce  livre  consacrée  à  la  Gaule  était  trop  succincte,  en 
sorte  que  M.  Ernault  dans  sa  traduction  a  substitué  à  la 
Gaule  du  Leitfaden  celle  du  Lehrbuch  qui  est  plus  développée. 
Enfin,  depuis  1878,  la  géographie  de  la  Gaule  a  été  l'objet 
d'importants  travaux  qui  ont  modifié  l'état  de  nos  connais- 
sances; aussi  M.  Vieweg  a-t-il  prié  M.  Longnon,  dont  la  com- 
pétence est  si  connue,  de  reviser  la  description  due  à  M.  Kie- 
pert et  de  la  mettre  au  courant.  C'est  ainsi  que  Acunum,  An- 
conne,  Lehrbuch,  §  438,  note  1,  p.  508,  est  devenu  Acunum, 
Aygu,  Manuel,  note  1  de  la  p.  279,  §  260;  que  de  la  même 
note  ont  été  retranchés:  AJbici,  Aulps,  et  Vediantii,  Venee, 
qui  ont  été  remplacés  par  Vinàasca,  Venasque,  et  par  Vorda, 
Gordes.  A  la  n.  3  du  paragraphe  439,  p.  509,  du  Lehrbuch 
qui  est  devenue  la  n.  1  de  la  p.  280  du  Manuel,  §  261,  ont  été 
Revue  Celtique,  IX  18 


278  Bibliographie. 

ajoutés  les  noms  tfAlbinnum,  Albens;  Bergusium,  Bourgoin; 
Bovis  riras,  Le  Bœuf;  Luminis  pagus,  Limonv;  Turedonnum, 
Tourdan.  La  note  6  du  paragraphe  440,  p.  510  du  Lehrbuch 
est  devenue  la  note  2,  p.  282,  §  262  du  Manuel  ;  Ambrussum, 
traduit  par  Ambroix  dans  l'original,  est  rendu  par  Pont  Am- 
bruis  dans  la  traduction;  Vindomagus  qui,  suivant  Kiepert, 
serait  Le  Vigan,  n'a  pas  d'équivalent  moderne  connu  jusqu'ici 
d'après  M.  Longnon  ;  et  celui-ci,  à  la  nomenclature  du  savant 
allemand,  ajoute  dans  cette  note  Andusia,  Anduze  ;  Aramo, 
Aramon;  Mesua,  Mèze;  TreviJum,  Trêves;  etc.,  etc.. 

Si  j'ai  une  critique  à  adresser  à  M.  Longnon,  elle  sera  de 
n'avoir  pas  fait  dans  le  texte  original  plus  de  corrections. 
Ainsi  il  n'est  pas  vrai  qu'en  Gaule  existât  l'usage  de  faire 
monter  sur  le  char  de  guerre  trois  hommes,  deux  combattants 
et  un  conducteur,  Lehrbuch,  §  433,  note  4,  p.  503  ;  Mit  miel, 
note  1  de  la  page  272,  §  255.  Le  texte  qui  a  inspiré  cette  as- 
sertion, Pausanias,  livre  X,  c.  19,  §  9-12,  édition  Didot, 
p.  516-517,  ne  parle  ni  de  chars  ni  de  conducteurs  de  chars; 
il  v  est  question  de  trois  guerriers  à  cheval.  D'ailleurs  ce- 
texte  appartient  au  récit  d'une  expédition  en  Grèce,  et  il  n'est 
nullement  prouvé  que  l'armée  gauloise  envahissante  vint  des 
pays  situés  à  l'ouest  du  Rhin. 

M.  Kiepert,  Lehrbuch,  §  434,  p.  503  ;  Manuel,  §  256,  p.  273, 
dit  qu'en  Gaule  les  terres  se  partageaient  annuellement.  Cette 
assertion  est  le  résultat  d'une  confusion.  C'est  aux  Germains 
et  non  aux  Gaulois  que  César  attribue  cet  usage,  De  bello  gal- 
lico,  livre  VI,  c.  22,  §  2. 

Au  même  paragraphe  434,  p.  504  du  Lehrbuch,  §  526, 
p.  273  du  Manuel,  M.  Kiepert  prétend  que  les  Druides  avaient 
dans  chaque  cité  un  chef  élu  à  vie  qui  souvent  remplaçait  les 
rois.  Ce  n'est  point  le  sens  du  passage  de  César  relatif  à  l'élec- 
tion du  chef  des  Druides.  Dans  ce  passage,  De  bello  gallico, 
livre  VI,  c.  13,  §  8,  il  s'agit  d'un  chef  unique  élu  pour  tous 
les  Druides  de  la  Gaule. 

Dans  le  Lehrbuch,  §  448,  note  1,  p.  5 17,  et  dans  le  Manuel, 
p.  294,  note  2,  §270,  on  trouve  reproduite  l'opinion  généra- 
lement admise  que'  l'ile  de  Sena  (Pomponius  Mêla,  livre  III, 
§  48;  éd.  Teubner-Friek,  p.  66,  1.  28)  est  identique  à  l'ile  de 


Bibliographie.  279 

Sein,  canton  de  Pont-Croix,  arrondissement  de  Quimper,  Fi- 
nistère. Cette  doctrine  ne  peut  s'accorder  avec  le  nom  breton  de 
l'île  de  Sein,  en  breton  Si~mi,  au  xie  siècle  Seidhun,  dans  le  Car- 
tulaire  de  Landévennec.  Voyez  l'index  placé  par  M.  Ernault  à  la 
suite  de  son  Cartulaire  de  Landévennec  (Mélanges  publiés  dans 
les  Documents  inédits  sur  l'histoire  de  France,  t.  V,  p.  296,  col.  2). 
Un  passage  du  texte  de  Kiepert  a  été  l'objet  d'une  correc- 
tion fort  légitime,  mais  qui  ne  me  paraît  pas  suffisante.  Zeuss, 
Die  Deittschen,  p.  168,  après  avoir  parlé  des  Ibères  et  des  Li- 
gures établis  au  Ve  et  au  ive  siècle  sur  les  côtes  aujourd'hui 
françaises  de  la  Méditerranée,  ajoute  :  «  à  cette  époque  primi- 
«  tive  les  Celtes  étaient  encore  loin  de  ces  peuples  maritimes. 
«  On  n'en  trouve  point  dans  la  liste  des  auxiliaires  d'Amilcar 
«  chez  Hérodote,  livre  VII,  c.  165  ».  Puis  il  reproduit  le  pas- 
sage d'Hérodote  où  sont  mentionnés  les  Ibères,  ensuite  les 
Ligures,  enfin  les  Helisyci  et  les  Sardonii,  les  premiers,  Ibères 
ou  Ligures,  les  seconds,  probablement  Ibères.  C'était  en  480. 
Avec  ces  troupes  Amilçar  vint  en  Sicile  assiéger  Himère  (cf. 
Diodore  de  Sicile,  livre  XI,  c.  20).  Or  voici  comment  Kie- 
pert, Lehrbuch,  §  433,  note  2,  p.  503,  rend  la  doctrine  de 
Zeuss  :  «  Il  y  avait  déjà  des  mercenaires  celtes  au  ve  siècle 
«  dans  les  armées  carthaginoises  en  Sicile;  vraisemblablement 
«  ils  avaient  été  enrôlés  en  Espagne,  car  les  Celtes  ne  touchaient 
«  point  alors  à  la  Méditerranée.  »  M.  Ernault  s'est  aperçu 
qu'il  y  avait  là  une  doctrine  sujette  à  caution  et  il  a  retranché 
la  date,  Ve  siècle.  Il  aurait  mieux  fait  de  supprimer  complè- 
tement cette  note  {Manuel,  §  255,  p.  271,  note  1).  Telle 
qu'elle  est  rédigée  maintenant,  elle  reste  inexacte.  Elle  pourrait 
permettre  à  un  critique  malveillant  de  supposer  qu'elle  s'ap- 
plique aux  mercenaires  gaulois  employés  par  les  Carthaginois 
dans  la  première  guerre  punique,  par  exemple  au  siège  de  Li- 
lybéeen  249  av.  J.-C.  (Polybe,  1. 1,  c.  43,  §  4,  édition  Didot, 
p.  34;  cf.  Mommsen,  Roemische  Geschichte,  6e  édition,  t.  I, 
p.  526  et  suiv.  ;  Amédée  Thierry,  Histoire  des  Gaulois,  livre  II, 
c.  m).  Or  il  n'y  a  aucune  preuve  qu'en  249  les  Gaulois 
n'eussent  pas  atteint  les  côtes  françaises  de  la  Méditerranée, 
qu'incontestablement  ils  occupaient  au  début  de  la  seconde 
guerre  punique  en  218  (Tite-Live,  XXI,  26). 


280  Bibliographie. 

Nous  espérons  qu'on  trouvera  dans  ces  critiques  la  preuve 
de  l'intérêt  que  nous  portons  à  la  savante  publication  de 
MM.  Longnon  et  Ernault,  et  de  l'attention  avec  laquelle 
nous  l'avons  lue.  L'ouvrage  de  M.  Kiepert  est  une  des  plus 
utiles  publications  qu'on  doive  à  un  des  plus  savants  géo- 
graphes de  notre  temps.  Cet  ouvrage,  grâce  à  la  collaboration 
de  MM.  Longnon  et  Ernault,  est  mis  à  la  portée  des  étudiants 
français  avec  des  modifications  qui  le  rendent  beaucoup  su- 
périeur à  l'original. 

H.    D'A.    DE  J. 

Dictionnaire  d'étymologie  française  d'après  les  résultats 
de  la  science  moderne,  par  Auguste  Scheler;  troisième  édition. 
Paris,  Vieweg,  1888;  gr.  in-8,  527  p. 

L'ouvrage  de  M.  Scheler  est  le  plus  considérable  qui  existe 
dans  ce  genre.  C'est  une  compilation  où  sous  chaque  mot 
français  on  trouve  l'indication  des  différentes  explications  éty- 
mologiques dont  il  a  été  l'objet.  Un  recueil  ainsi  constitué 
rendra  toujours  de  grands  services,  quand  même  l'auteur, 
faute  d'une  science  personnelle  suffisante  et  d'une  critique  un 
peu  rigoureuse,  aurait  été  souvent  dans  l'impossibilité  de  taire 
un  choix  entre  des  solutions  diverses  issues  de  systèmes  con- 
tradictoires. 

Ici  nous  n'avons  à  apprécier  ce  livre  qu'au  point  de  vue  cel- 
tique. Il  est  fort  regrettable  que  l'érudit  belge  croyant  nous 
donner,  comme  il  dit,  «  les  résultats  Je  la  science  moderne  » 
n'ait  pas  connu  le  savant  mémoire  publié  en  1884  par 
M.  Thurneysen  sous  le  titre  de  Keltoromanïsehes.  Ce  mémoire 
a  dû  paraître  environ  trois  ans  avant  le  jour  d'octobre  1887 
où  Al.  Scheler  a  écrit  sa  préface. 

Voici  quelques  exemples  des  cas  où  M.  Scheler  aurait  bien 
fait  de  consulter  Al.  Thurneysen. 

Au  mot  ambassade,  p.  21,  AI.  Scheler  renvoie  au  mot  fictif 
ambact  qu'il  explique  par  l'allemand  ambacht  (?)*,  par  le  go- 
thique and-bahti  et  par  le  vieux  haut-allemand  am-paht,  aujour- 


1 .   Il  voulait  dire,  je  suppose:  par  le  substantif  neutre  vieil  allemand  am- 
baht  ou  ambabti. 


Bibliographie.  281 

d'hui  ami  ;  et  il  ne  paraît  pas  se  douter  des  difficultés  de  son 
sujet.  L'embarras  est  grand  quand  on  veut  donner  du  mot  alle- 
mand am-baht,  ami,  une  étymologie  germanique,  même  si  l'on 
adopte  comme,  primitive  la  forme  gothique.  En  effet,  cette 
forme  gothique  qui  résout  la  difficulté  pour  le  premier  terme 
en  remplaçant  am-  par  and-,  la  laisse  subsister  pour  le  second, 
qui  reste  inexplicable  r.  Avec  les  langues  celtiques,  on  est  plus 
heureux.  On  y  trouve  les  deux  termes  du  composé  gaulois 
amb-actus  qui  a  été  connu  des  Romains.  Le  premier  terme  est 
ambi  «  autour  de  »,  qui  existe  à  la  fois  en  gaulois  et  dans  les 
langues  néo-celtiques.  Le  second  est  *acto-s,  participe  passé 
d'une  racine  ag  que  le  vieil  irlandais  possède  en  commun  avec 
le  latin.  César  avait  présent  à  l'esprit  le  sens  du  premier  terme 
quand  il  écrivait  :  plurimos  circum  se  ambactos  clientesquehabet2. 
Il  est  difficile  de  ne  pas  tenir  compte  enfin  de  deux  faits  ; 
l'un  est  que  le  mot  ambactus  a  été  employé  par  Ennius,  or 
Ennius  est  mort  l'an  169  avant  J.-C,  c'est-à-dire  à  une  date 
antérieure  aux  premières  relations  de  Rome  avec  les  Ger- 
mains. Le  second  fait  est  que,  suivant  Festus,  le  mot  ambactus 
est  gaulois  3.  La  question  a  été  traitée  par  M.  Thurneysen, 
Keltoromanisches ,  p.  29-30,  avec  quelques  développements  de 
plus  que  nous  n'en  donnons  ici.  Nous  avons  ajouté  à  ce  qu'a 
dit  le  savant  romaniste  quelques  indications  secondaires  qui 
confirment  sa  doctrine  restée  inconnue  à  M.  Scheler. 

Au  mot  balai,  M.  Scheler  cite  le  breton  balan  «  genêt  »  ; 
mais  balan  tient  lieu  d'un  plus  ancien  *banadl.  Le  Balandu, 
relevé  dans  l'index  du  Cartulaire  Je  Redon,  doit  être  corrigé  en 
Halanau,  comme  l'a  constaté  M.  Loth.  L'étymologie  du  mot 
balai  reste  donc  à  expliquer.  Ce  sujet  a  été  traité  par 
M.  Thurneysen,  mémoire  cité  plus  haut,  p.  89. 


1.  Fr.  Kluge,  Etymologisches  IVœrterbuch  der  deidschen  Sprache,  3e  édition, 
p.  7. 

2.  De  bello  galhco,  livre  VI,  c.  15,  §2.  Comparez:  Dumnorigem.  .  . 
magnum  numerum  equitatus  suo  sumptu  semper  alere  et  circum  se  habere. 
Ibid.,  livre  I,  c.  18,  §  3,  3.  Les  équités  dont  il  s'agit  dans  ce  passage  étaient 
les  ambacti  de  Dumnorix. 

3 .  Voici  les  passages  de  l'abrégé  de  Festus  par  Paul  Diacre  :  ambactus 
apud  Ennium  lingua  gallica  servus  appellatur.  —  Am\b\  prepositio  loquc- 
laris  signiflcat  circum,  unde  supra  servus  ambactus,  id  est  circumactus  dicitur. 


282  Bibliographie. 

Chemise  vient  du  mot  latin  camisia.  Le  plus  ancien  exemple 
de  ce  mot  paraît  se  trouver  chez  saint  Jérôme,  epistula  LXIV, 
de  veste  sacerdotali,  §  11  :  «  Soient  militantes  habere  lineas  quas 
camisias  vacant,  sic  aptas  membris  et  adstrictas  corporibus,  ut 
expediti  sint  vel  ad  cursum,  vel  ad  praelia,  dirigendo  jaculo, 
tenendo  clypeo,  ense  vibrando,  et  quoeumque  nécessitas  tra- 
xerit.  Ergo  et  sacerdotes,  parati  in  ministerium  Dei,  utuntur 
hac  tunica1  ».  Saint  Jérôme  a  écrit  ces  mots  en  396  ou  en  3972. 
Le  mot  camisia  se  trouve  chez  Paul  Diacre  dans  son  abrégé 
de  Festus;  mais  c'est  une  glose  étrangère  au  texte  original 
et  qui  appartient  en  propre  à  l'abréviateur.  Il  n'y  a  pas  de 
preuve  qui  établisse  que  ce  mot  ait  existé  en  latin  avant 
l'époque  où  saint  Jérôme  l'a  employé,  c'est-à-dire  avant  les 
dernières  années  du  IVe  siècle.  Les  prêtres  contemporains  de 
ce  docteur  qui  ont  évangélisé  l'Irlande  y  ont  porté  l'usage  sa- 
cerdotal de  la  camisia  constaté  par  le  fragment  de  Y  epistula  LXIV 
cité  plus  haut.  C'est  en  qualité  de  mot  savant  et  emprunté  que 
l'irlandais  caimmse  a  conservé  son  s.  Si  ce  mot  était  d'origine 
celtique,  cet  s  placé  entre  deux  voyelles  n'aurait  pu  subsister. 
Cette  observation  est  de  M.  Thurneysen,  ouvrage  précité, 
p.  51.  M.  Scheler  a  écrit  son  article  chemise  sans  se  douter  de 
la  difficulté  signalée  par  le  savant  professeur  de  Fribourg. 

Nous  terminerons  par  le  mot  lai,  genre  de  poésie.  M.  Sche- 
ler nous  dit  que  ce  mot  est  d'origine  celtique.  Il  cite  d'abord 
le  gallois  liais  qui  ne  peut  être  qu'emprunté  au  français,  puis, 
l'irlandais  laoith,  lisez  laoidh  ;  il  serait  préférable  de  parler  du 
vieil  irlandais  laid,  signalé  depuis  longtemps  dans  un  des 
petits  poèmes  du  manuscrit  904  de  Saint-Gall,  p.  203  :ixe  siè- 
cle). Du  mot  irlandais,  M.  Scheler  rapproche  d'après  Die- 
fenbach  le  verbe  dérivé  gothique  Huhtôn,  lisez  liuthôn.  Il  ne  se 
doute  pas  de  la  difficulté  qu'offre  la  différence  de  dentale; 
liuthôn  suppose  un  thème  germanique  leutha-,  avant  la  pre- 
mière substitution  des  consonnes  leitla  qui  est  nécessairement 
le  primitif  de  l'allemand  Liedl.  Pour  attribuer  à  ce  mot  la 
même  origine  que  l'irlandais  lôid,  il  faut  admettre  un  emprunt 

1.  Migne,  Patrologia  latina,  t.  XXII,  col.  614. 

2.  Migne,  Patrologia  latina,  t.  XXII,  col.  lxvi. 

3 .  Thurneysen,  KettoYomanisches,  p.  104. 


Bibliographie.  28$ 

du  celtique  au  germanique,  quand  celui-ci  avait  déjà  opéré 
la  première  substitution  de  consonnes.  Nous  aurions  donc 
un  celtique  *  leudi-s  venant  du  germanique  *  leutha-s.  Le  tb  de 
la  seconde  syllabe  du  mot  germanique  aurait  été  traité  par  la 
race  celtique  comme  le  tb  initial  du  nom  propre  sugambre 
Theudorix  écrit  par  Strabon  \ulzzCz l  au  commencement  du 
premier  siècle  de  notre  ère.  On  constate  le  même  phénomène  au 
VIe  siècle  dans  le  leudos  de  Fortunat 2.  Le  celtique  *  levais  est  de- 
venu régulièrement  *  louais,  *lôdis,  en  irlandais  /c'/V/(ixe  siècle), 
enfin  laid  (vers  1100)  d'où  viendrait  le  mot  français. 

Je  me  bornerai  à  ces  exemples  pour  montrer  ce  qui  manque 
à  la  publication  d'ailleurs  estimable  et  utile  de  M.  Scheler. 

H.  d'Arbois  de  Jubain ville. 

The  t'ixt  of  the  Mabinogion  and  other  Welsh  Taies  from 
the  Red  Book  of  Hergest,  edited  by  John  Rhys,  M.  A.,  and  J. 
Gwenogfryn  Evans,  xx-355  p.  in-8,  Oxford,  1887  (Issued  to  subscribers 
onlv). 

Le  point  de  départ  de  la  philologie  historique  est  dans  les 
bons  textes.  De  toutes  les  littératures  anciennes  que  l'on 
étudie,  la  littérature  galloise  est  peut-être  la  plus  mal  partagée 
à  cet  égard,  et  celle  où  l'esprit  critique  de  notre  temps  a  été 
le  plus  lent  à  se  répandre.  Nous  ne  voulons  pas  pour  cela  ra- 
baisser le  mérite  de  Gallois  patriotes  dont  les  œuvres  brillent 
comme  des  phares  dans  l'histoire  de  la  littérature  galloise,  les 
auteurs  de  la  Myfyrian  Archaiology  (1801),  Ladv  Charlotte 
Guest  et  ses  Mabinogion,  et  les  éditeurs  des  volumes  de  la 
Welsl)  Tt'.xl  Society.  Ils  publiaient  leurs  textes  comme  on  le 
faisait  généralement  de  leur  temps,  c'est-à-dire  par  à-peu-près, 
se  préoccupant  du  sens  plus  que  des  mots,  ne  se  gênant  pas 
pour  rétablir  le  texte  suivant  leurs  présomptions,  sans  avertir 
le   lecteur  de  ces  restitutions.   Ce  défaut   était  celui  de  leur 


1     Livre  VII,  cl,  5  4;  éd.  Didot,  p.  242,  1.  52.  —  Cf.    Maroboduus 

("Tacite,  Annales,  II,  26)  prononciation  gauloise  du  germanique  Maràbatu-s. 

2.   Fortunat.  Carmina.  1    VII,  8.  vers  69,  éd.  Léo.  p.  163   (cf. praefatio, 

p.  2,  1.  14)  :  Nos  tibi  versiculos,  dent  barbara  carmina  leudos. 


284  Bibliographie. 

époque  plus  que  le  leur  propre;  il  serait  injuste  de  le  leur  re- 
procher; car  pour  nous,  modernes,  qui  nous  sommes  instruits 
à  leur  école  et  profitons  tous  les  jours  encore  de  leurs  travaux, 
ce  serait  (pour  reprendre  la  comparaison  d'un  écrivain  fran- 
çais) ressembler  à  ces  entants  qui,  devenus  drus  et  forts  du 
lait  de  leur  mère,  battent  le  sein  qui  les  a  nourris. 

Les  éditeurs  de  notre  temps  sont  plus  justiciables  de  la  cri- 
tique. M.  Skene,  dans  son  livre  The  four ancieni  BoohsofWales 
(1868),  — livre  qui,  malgré  ses  défauts,  reste  une  œuvre  con- 
sidérable dont  on  doit  savoir  grand  gré  à  l'érudit  écossais,  — 
M.  Skene  s'était  proposé  de  reproduire,  lettre  pour  lettre,  le 
texte  Je  ces  mss.  L'intention  était  excellente;  malheureu- 
sement M.  Skene  a  souvent  mal  lu  ses  mss.,  et  l'édition  pro- 
chaine que  M.  Gwenogfryn  Evans  annonce  du  Black  Booh  of 
Carmarthen  va,  pour  un  de  ces  mss.,  corriger  l'œuvre  de 
M.  Skene.  Le  ms.  étant  de  lecture  difficile,  et  un  unicum, 
M.  Gwenogfryn  Evans  désarme  par  avance  la  critique  en  le 
reproduisant  par  la  photographie.  Solem  quis  dicere  falsum 
audeat  ? 

Dans  cette  histoire  de  la  philologie  galloise,  M.  Robert  Wil- 
liam serait!  moins  aisément  innocenté  avec  ses  Welsh  Texts 
(1874  et  années  suivantes).  A  cette  date,  les  règles  de  la  pu- 
blication d'un  texte  étaient  connues  :  marquer  d'une  façon 
précise,  avec  cote,  le  ms.  que  l'on  publie,  établir  sa  date,  in- 
diquer dans  l'édition  les  feuillets  correspondants  du  ms.,  dis- 
tinguer les  différentes  mains  des  copistes,  donner  en  note  le 
texte  original  du  ms.  lorsqu'on  le  modifie...  M.  Robert  Wil- 
liams ne  s'est  pas  strictement  attaché  à  ces  règles,  et  il  n'est 
même  pas  sûr  qu'il  ait  toujours  exactement  copié  ses  mss.  Sa 
publication,  restée  inachevée,  est  cependant  utile  pour  l'his- 
toire générale  de  la  littérature;  car,  formée  de  textes  traduits 
pour  la  plupart  du  latin  ou  du  français,  elle  permet  de  suivre 
le  gulf-stream  de  la  littérature  du  moyen  âge,  mais  elle  ne 
fournit  pas  de  textes  sûrs  aux  philologues,  de  textes  qui  ap- 
portent leurs  preuves  avec  eux-mêmes. 

C'est  cet  état  de  désordre  de  la  philologie  galloise  qui  a  ins- 
piré à  MM.  Gwenogfryn  Evans  et  Rhys  l'idée  d'une  publi- 
cation dont  les  Mabpnogiàn  du    Livre  Rouge  de  Hergest  for- 


Bibliographie.  285 

meut  le  premier  volume.  Le  titre  général  de  la  collection  est 
Diplomatie  Reproductions  of  Old-Welsh  Texts,  et  une  série  de 
neuf  volumes  est  annoncée  du  même  coup  comme  étant  en 
préparation.  Le  système  adopté  par  MM.  Gwenogfryn  Evans 
et  Rhvs  aboutit  à  de  nombreux  doubles  emplois.  Ainsi  après 
avoir  reproduit  dans  le  premier  volume  le  texte  des  Mabino- 
gion  d'après  le  Livre  Rouge,  on  donnera  dans  le  troisième  vo- 
lume une  autre  version  de  plusieurs  d'entre  eux  d'après  un 
autre  ms.  ;  puis  les  volumes  V  et  VI  seront  consacrés  à  un 
«  Texte  critique  des  Mabinogion  ».  Pour  nous,  ces  volumes 
V  et  VI  auraient  suffi,  surtout  si  nous  avions  en  note  les  le- 
çons des  divers  mss.  ;  c'est  ainsi  que  sont  faites  les  éditions 
critiques  des  textes  grecs  et  latins,  et  leurs  éditeurs  gardent  gé- 
néralement pour  eux-mêmes  les  copies  qu'ils  ont  faites  des 
mss.  originaux.  Les  éditeurs  des  Welsh  Tcxts  ont  préféré 
n'épargner  ni  leur  papier  et  leur  temps,  ni  l'argent  de  leurs 
souscripteurs.  D'un  excès  de  négligence,  la  philologie  galloise 
passe  ainsi  à  un  excès  de  minutie.  Cette  critique  taite  sur  le 
plan  de  l'œuvre,  nous  devons  reconnaître  que  le  plan  choisi  a 
été  admirablement  exécuté. 

A  la  fin  du  siècle  dernier  ou  au  commencement  de  celui-ci, 
le  célèbre  Owen  Pughe  avait  préparé  une  édition  et  une  tra- 
duction des  Mabinogion,  et  nous  sommes  étonné  qu'on  n'ait  pas 
rappelé  ce  fait  dans  la  prélace  du  volume  que  nous  annon- 
çons; car  l'hommage  rendu  aux  ancêtres  ne  diminue  pas  le 
mérite  des  nouvelles  générations.  Cette  édition  est  restée  iné- 
dite dans  les  papiers  de  la  famille  Owen  (voir  Cambrian 
Journal,  t.  IV,  1857,  p.  158,  197  et  285).  Ce  fait  explique 
pourquoi  dans  son  dictionnaire  Owen  Pughe  a  donné  de 
nombreux  exemples  pris  aux  Mabinogion,  alors  inédits.  Le 
premier  tiers  du  Mahinogi  de  Pwyll,  prince  de  Dyfed,  a  été 
publié  (texte  et  traduction)  dans  le  Cambrian  Register  (vo- 
lumes de  1795  et  1796,  sans  signature;  mais  il  a  été  réim- 
primé avec  le  nom  de  Pughe  dans  le  Cambro-Briton,  t.  II 
(1821),  p.  271  et  suivantes1. 

1  .  Notons  aussi  que  le  Mahinogi  de  Math,  fils  de  Mathonwy,  avait  été 
publié,  texte  gallois  et  traduction  anglaise,  dans  le  Cambrian  Quarterly  Ma- 
ga^itie,  t.  I  (1829),  mais  sans  aucun  nom  d'auteur 


286  Bibliographie. 

Quoiqu'il  en  soit,  l'édition  de  Lady  Guest  (années  1838 et 
suiv.)  peut  être  regardée  comme  l'édition  princeps  des  Mabi- 
nogion  ;  une  traduction  anglaise  qui  se  lit  avec  autant  de 
charme  qu'une  œuvre  originale,  et  un  commentaire  excessi- 
vement riche  et  intéressant  au  point  de  vue  de  l'histoire  litté- 
raire, en  font  une  œuvre  que  rien  ne  remplacera;  et  le  nom 
de  Lady  Guest  sera  indissolublement  attaché  à  la  perle  de  la 
littérature  galloise.  Mais  malgré  le  soin  avec  lequel  le  texte 
avait  été  copié  pour  Lady  Guest  par  le  Rév.  John  Jones  (Te- 
gid),  il  contenait  des  erreurs  évidentes,  et  ces  erreurs  ren- 
daient défiant  pour  le  reste  (voir  Zeuss,  Grammatica  Celtica, 
2e  éd.,  p.  139).  Or  ce  texte  est,  jusqu'ici,  le  plus  important 
que  l'on  possède  pour  l'histoire  du  gallois-moyen. 

L'édition  de  MM.  Rhys  et  Gwenogfryn  Evans  supplée  à  ces 
imperfections;  elle  est  faite  pour  les  philologues  et  vise  à  leur 
donner  une  représentation  du  texte  aussi  fidèle  qu'on  peut  l'at- 
teindre sans  recourir  à  la  photographie  ou  au  fac-similé.  Pour 
rendre  les  diverses  particularités  de  l'écriture,  les  éditeurs  ont 
eu  recours  à  neuf  sortes  de  caractères.  Du  moment  qu'on 
voulait  donner  une  édition  diplomatique,  cette  minutie 
n'était  pas  de  trop;  car  la  forme  des  lettres  (dans  des  mss. 
où  plusieurs  signes  sont  employés  pour  représenter  la  même 
lettre)  est  un  élément  important  pour  les  restitutions  de  la 
critique  verbale.  Le  système  suivi  par  M.  Gwenogfryn 
Evans  est  assez  compliqué  et  a  dû  lui  demander  une  grande 
peine  d'exécution  ;  mais  il  a  pour  résultat  de  donner  une  édi- 
tion après  laquelle  un  m  s.  peut  périr  sans  que  le  dommage 
soit  irréparable. 

Cette  édition  étant  faite  au  point  de  vue  philologique,  nous 
n'avons  pas  à  parler  ici  des  Mabinogion  au  point  de  vue  litté- 
raire. Pourtant  nous  pouvons  faire  remarquer  que  la  nouvelle 
édition  contribuera  à  mieux  faire  apprécier  et  connaître  ces 
poétiques  récits.  D'abord,  il  y  a  un  index  des  noms  propres 
d'homme  et  de  lieu,  ce  qui  comble  une  lacune  de  l'œuvre  de 
Lady  Guest  et  permet  de  mieux  suivre  l'histoire  et  les  actions 
des  personnages.  Ensuite,  un  texte  plus  correct  améliore  le 
sens  en  plusieurs  endroits  ;  nous  n'en  donnerons  qu'un  exemple 
emprunté  au  début  de  Kulhwch  et  Ohven.  La  reine,  mère  du 


Bibliographie.  287 

héros,  est  sur  le  point  de  mourir.  Je  cite  maintenant  la  tra- 
duction de  Lady  Guest. 

«  Je  te  recommande,  dit-elle  à  son  mari,  de  ne  pas  te  re- 
«  marier  jusqu'à  ce  que  tu  voies  un  églantier  avec  deux  bou- 
«  tons  sur  ma  tombe.  »  Il  le  lui  promit.  Après  cela,  elle  le 
«  pria  de  faire  nettoyer  sa  tombe  tous  les  ans  pour  que  rien 
«  n'y  pût  pousser.  La  reine  mourut.  Le  roi  envoyait  un  ser- 
«  viteur  chaque  matin  pour  voir  si  quelque  chose  poussait  sur 
«  la  tombe  ». 

Lady  Guest  a  traduit  exactement  le  texte  qu'elle  donne  ; 
mais  dans  ce  texte  une  demi-ligne  avait  été  passée,  et  celle-ci 
rétablie,  on  a  ce  sens  : 

«  Il  le  lui  promit.  Après  cela,  elle  rit  appeler  son  confesseur, 
«  et  le  pria  de  foire  nettoyer  sa  tombe,  etc.  » 

Tout  de  la  sorte  devient  clair  et  raisonnable,  autant  du 
moins  qu'il  peut  être  raisonnable  chez  une  femme  de  vouloir 
empêcher  son  mari  veuf  de  se  remarier. 

Nous  aurions  beaucoup  à  dire  sur  le  fonds  même  des  Ma- 
binogion,  aujourd'hui  surtout  que  la  littérature  comparée  a  fait 
tant  de  progrès  et  que  la  science  des  contes  est  en  train  de  se 
constituer.  Des  études  délicates  et  approfondies  de  M.  Alired 
Nutt  ont  déjà  montré  l'intérêt  de  ces  recherches.  Nous  ne  de- 
vons pas  allonger  davantage  cet  article.  Il  nous  suffit  d'avoir 
montré  la  valeur  et  l'originalité  de  cette  publication  de  textes. 
Si  MM.  Gwenogfryn  Evans  et  Rhys  peuvent  achever  toute  la 
série  qu'ils  projettent,  ils  auront  rendu  un  grand  service  à  la 
fois  à  la  philologie  galloise  et  à  la  littérature  comparée. 

H.  Gaidoz. 

Notice  épigraphique  de  diverses  antiquités  gallo-ro- 
maines, accompagnée  de  sept  planches  et  de  quarante  figures  dans  le 
texte,  par  Robert  Mowat.  Paris,  Champion,  1S87;  in-8,  178  pages. 

M.  Mowat  a  réuni  dans  ce  volume  cinq  mémoires,  tous 
fort  intéressants,  qui  avaient  été  précédemment  publiés  par  lui 
dans  le  Bulletin  monumental  et  dans  le  compte  rendu  du  Congres 
archéologique  de  France  de  1879.  Les  deux  premiers  de  ces  mé- 
moires concernent  le  culte  de  Mercure  en  Gaule;  le  troisième. 


288  Bibliographie. 

les  inscriptions  romaines  du  Maine;  le  quatrième  contient  un 
recueil  de  vingt  et  une  inscriptions  pointillées  sur  des  objets 
votifs  en  bronze;  le  cinquième  est  une  étude  sur  les  inscriptions 
des  trésors  d'argenterie  de  Bernay  et  de  Notre-Dame  d'Alençon. 

On  sait  que  sur  le  Puy-de-Dôme  il  y  avait  un  temple  de  Mer- 
cure,  Mercurius  Dumias1.  On  a  supposé  que  là  s'élevait  la  statue 
colossale  de  Mercure  due  au  sculpteur  grec  Zénodore  :  «  Om- 
nem  amplitudinem  statuarum  ejus  generis  vicit  aetate  nostra 
Zenodorus  Mercurio  facto  in  eivitate  Galliae  Arvernis  »  2.  La 
statue  de  Zénodore  paraît  avoir  été  connue  sous  le  nom  de 
Mercurius  Arvernus,  qui  semble  avoir  désigné  le  même  objet 
que  Mercurius  Dumias,  et  on  a  recueilli  tant  en  Bavière  que 
dans  la  Prusse  rhénane  et  en  Hollande  cinq  dédicaces  au 
Mercure  Arverne.  Une  de  ces  inscriptions,  celle  de  Hollande, 
trouvée  à  Horn,  est  placée  au-dessous  d'un  bas-relief  qui,  pro- 
bablement, reproduit  la  statue  exécutée  par  Zénodore.  Le  Mer- 
cure Arverne  de  Horn  est  assis,  tel  devait  être  celui  de  Zénodore. 

Dans  les  inscriptions  du  Maine,  on  peut  signaler  quelques 
noms  celtiques,  par  exemple  ceux  des  potiers  :  Banvius  dérivé 
d'un  nom  commun  signifiant  «  cochon  »,  en  breton  bauo,  en 
gallois  banw,  en  irlandais  banbh;  Atepomarus,  nom  composé  de 
trois  éléments  bien  connus,  aie,  epo-,  uiâro-. 

Parmi  les  noms  contenus  dans  les  inscriptions  pointillées, 
on  peut  remarquer  les  noms  d'homme  Vindoinîssa,  Romogil- 
Uns,  etc.,  et  les  noms  divins  Ounio-rix,  Segomo,  Ad-smerius, 
Alisanus,  Dexsiva. 

Le  trésor  de  Bernay  contient  plusieurs  dédicaces  au  dieu 
Mercurius  Kanetonnessis.  Kanetonnessis  est  probablement  dérivé 
de  Caueloiuiuiu,  qui  doit  être  un  nom  de  lieu.  On  remarque 
parmi  les  noms  d'hommes  et  de  femmes,  Camulp-gnata  (fémi- 
nin), Combaro-marus,  Epaticcus,  Germanissa,  Sacco,  etc. 

H.  D'A.  DE  J. 


i  .  Revue  archéologique,  t.  XXVIII  (1874).  p.  332;  t.  XXIX  (1875),  p.  33. 
Paul  Monceaux,  Le  Grand  temple  du  Puy-de-Dôme,  dans  la  Revue  histo- 
rique, t.  XXXV  (1887),  p.  225-262;  et  t.' XXXVI  (1888).  p.  1-28. 

2.    Pline,  Histoire  naturelle,  1.  XXXIV,  §  45. 


CHRONIQUE 


SOMMAIRE:  I.  Publications  de  MM.  Loth  et  Luzel  dans  les  Annales  de  Bretagne.  —  II.  Etude 
de  M.  Paul  Monceaux  sur  le  Mercure  gaulois.  —  III.  Les  Acla  sanctorum  Hibemiae.  —  IV.  Vie 
tripartite  de  saint  Patrice  et  documents  sur  ce  saint  publiés  par  M.  Whitley  Stokes.  — V.  Nou- 
velles publications  de  M.  de  la  Borderie.  —  VI.  Les  leçons  de  M.  Rhys  sur  la  mythologie  cel- 
tique. —  VII.  Deux  mystères  bretons  au  théâtre  de  Morlaix.  —  VIII.  Critique  par  M.  Ernault 
du  mémoire  de  M.  Guillemaud  sur  les  inscriptions  gauloises. —  IX.  Communications  Je  M.  Hé- 
ron de  Villefosse  à  la  Société  des  Antiquaires  de  France  et  à  l'Académie  des  Inscriptions  : 
Camulogenus,  wuvol  et  l'ala  Atcclorigiana.  — X.  Le  Celiic  Magasine.  —  XI.  La  société  gaélique 
d'Inverness.  —  XII.  Réplique  de  M.  Standish  O'Grady  à  M.  Zimmer.  —  XIII.  Critique  de 
M.  R.  Atkinson  par  le  Rev.  B.  Mac  Carthy.  —  XIV.  La  Revue  des  traditions  populaires.  — 
XV.  La  Revue  anthropologique.  —  XVI.  Observations  de  M.  Mowat  sur  le  d  barré  et  sur  le 
mot  bratoude.  —  XVII.  L'Académie  d'Irlande  et  les  facsimilés  des  manuscrits  irlandais.  — 
XVIII.  Facsimilé  du  Livre  noir  de  Carmarthen.  —  XIX.  L'évangéliaire  irlandais  de  Saint- 
Gatien  de  Tours.  —  XX.  La  Society  for  the  préservation  of  the  Irish  language.  —  XXI.  l'n  nom 
de  peuple  gaulois  dans  une  inscription  grecque  d'Asie  Mineure.  —  XXII.  La  thèse  de  M.  H. 
van  Gelder  sur  les  Galates.  —  XXIII.  The  archaehgical  Review.  —  XXIV.  Les  Annales  d'Uhter 
éditées  par  M.  W.  M.  Hennessv. 

I. 

Au  mois  de  novembre  1887,  les  Annales  de  Bretagne  sont  entrées  dans 
leur  troisième  année. 

La  Chrestomathie  de  M.  Loth  continue  à  être  dans  cette  revue  la  partie 
qui  intéresse  plus  spécialement  les  lecteurs  de  la  Revue  Celtique.  Après  avoir 
étudié  les  principaux  cartulaires  qui  nous  ont  conservé  des  mots  bretons  (cf. 
Revue  Celtique,  IX,  1 39-140),  M.  Loth  aborde  les  textes  suivis.  Nous  n'avons 
pour  le  breton  armoricain  aucun  document  de  ce  genre  qui  soit  antérieur 
à  la  fin  du  XVe  siècle.  M.  Loth  donne  d'abord  des  extraits  de  tous  les  ou- 
vrages en  moyen  armoricain  qui  nous  sont  parvenus.  Il  laisse  de  coté  quel- 
ques fragments  par  trop  mutilés  et  altérés. 

Pour  le  xv2  siècle,  nous  avons:  la  vie  de  sainte  Nonn  {Annales  de  Bre- 
tagne, t.  III,  p.  59-72)  •'  et  l'inscription  bretonne  de  Sainte  Triphine  déjà 
étudiée  dans  la  Revue  Celtique  (VII,  277-279)  2. 

Du  xvie  siècle  datent  les  textes  publiés  par  M.  Wh.  Stokes  sous  le  titre 
de  Middle-Breton  hours  et  qui  comprennent  :  r  les  heures  proprement  dites 

1 .  Ce  texte  aétépublié  dans  la  Revue  Celtique,  VIII,  p.  230-301,  406-491. 

2.  Le  texte  de  cette  inscription  doit  être  rétabli  comme  il  suit  :  an  ma- 

TERI  A  STUDIAFF,  IHS,  p'e  PREDERAF  A  CAFAF  GARU  :   GOUDE  HO.\  HOLL  FET 
EN  BET  MAN,  DIVEZ  PEB  VNAN  EU  AN  MARU. 


290  Chronique. 

(Annales  de  Bretagne,  p.  73-78);  2°  un  extrait  du  Missel  de  Léon  de  1526 
(ibid.,  p.  78-79);  30  un  catéchisme  imprimé  en  ï^j6(ibid.,  p.  79-81).  Puis 
viennent  :  le  Grand  Mystère  de  Jésus  (ibid.,  p.  81-87)  ;  tr°is  poèmes  publiés 
par  M.  de  la  Villemarqué  sous  le  titre  de  Poèmes  bretons  du  moyen  âge 
(ibid.,  p.  205-214);  le  mystère  de  sainte  Barbe  (ibid.,  p.  214-224)  '  ;  la  vie 
de  sainte  Catherine  (ibid.,  p.  224-231)2  ;  le  Miroir  de  la  mon  (ibid.,  p   231- 

233)- 

Les  textes  du  xvne  siècle  que  nous  fait  connaître  M.  Loth  dans  le  numéro 
de  janvier  des  Annales  de  Bretagne  sont:  le  Miroir  de  la  confession,  imprimé 
à  Morlaix  en  1621  (ibid.,  p.  233-235);  la  Doctrine  des  chrétiens,  Morlaix, 
1622  (ibid.,  p.  235-238).  le  Dictionnaire  et  colloques  français  et  breton. 
Morlaix,  1626  (ibid.,  p.  238-250). 

Comme  on  le  voit,  la  Chrestomathie  de  M.  Loth  donnera  une  idée  très 
exacte  des  textes  bretons  qui  nous  sont  parvenus.  La  première  partie  de  sa 
Chrestomathie  était  intéressante  au  point  de  vue  phonétique,  la  seconde  partie 
peut  surtout  donner  matière  à  des  rapprochements  littéraires.  Malheureu- 
sement le  plus  souvent  nous  n'avons  point  les  textes  français  ou  latins  qui 
ont  servi  directement  à  la  rédaction  du  texte  armoricain.  Aussi  est-il  assez 
difficile  de  déterminer  quelle  part  d'originalité  revient  à  l'imitateur  breton. 

Le  tome  III  des  Annales  de  Bretagne  contient  encore,  à  côté  d'intéressants 
articles  historiques  ou  littéraires  5,  un  logogriphe  breton  français  de  la  fin 
du  xvie  siècle,  publié  par  M.  Loth,  et  une  chanson  bretonne  inédite,  Pen- 
11ères  Coadale\  recueillie  et  traduite  par  M.  Luzel  (p.  251-260). 

G.  D. 
II. 

La  Revue  historique,  n°s  de  novembre-décembre  1887  et  de  janvier-fé- 
vrier 1888,  a  publié  une  étude  très  instructive,  de  M.  Paul  Monceaux  sur 
le  grand  temple  gallo-romain  du  Puy-de-Dôme  et  sur  le  culte  du  Mercure 
gaulois.  Nous  constatons  avec  satisfaction  le  succès  d'un  écrivain  de  talent 
qui  a  étudié  les  travaux  de  l'érudition  celtique  et  qui  les  fait  connaître  dans 
un  monde  près  duquel  d'ordinaire  elles  passent  inaperçues.  Nous  ferons 
cependant  des  réserves  sur  quelques  étymologies  un  peu  risquées  (n#  de 
janvier-février,  p.  14-17;  ou  p.  51-53  du  tirage  à  part). 

III. 

La  Société  de  Saint-Augustin,  Lille-Bruges,  vient  de  faire  paraître  sous 
la  date  de  février  18S8  un  catalogue  où  se  trouve  l'annonce  suivante: 

«  Acta  sanctorum  hiberniae  ex  codice  Salmanticensi  nunc  primum 
«  intègre  édita  opéra  Caroli  De  Smedt  et  Josephi  De  Backer,  S.  J.,  hagio- 
«  graphorum  bollandianorum,  impensis  Joannis  Patricii  Marchiouis  Bo- 
«  thae.  In-40,  IV-975. 

1.  Voyez  Revue  Celtique,  IX,  124-127. 

2.  Ce  texte  a  été  publié  dans  la  Revue  Celtique,  VIII,  76-95 . 

3.  Nous  signalerons  par  exemple  l'étude  de  M.  J.  Duchesne  intitulée: 
Un  premier  maître  de  La  Fontaine  découvert  à  la  bibliothèque  de  Rennes. 


Chronique.  291 

«  Le  Codex  Salmanticensis  est  un  manuscrit  du  xivc  siècle  renfermant 
«  des  vies  de  saints  d'Irlande  ;  il  porte  ce  nom  parce  qu'il  vient  du  collège 
«  des  Irlandais  de  Salamanque;  il  se  trouve  aujourd'hui  à  la  Bibliothèque 
«  de  Bourgogne  à  Bruxelles. 

«  Les  Bollandistes  avaient  eu  souvent  l'occasion  de  s'en  servir;  ils  vien- 
«  nent  de  l'éditer  intégralement  sur  l'initiative  et  aux  frais  du  noble  marquis 
«  de  Bute  qui  s'intéresse  d  une  manière  si  intelligente  aux  antiquités  irlan- 
«  daises.  Le  texte  a  été  reproduit  avec  la  fidélité  la  plus  scrupuleuse  ;  chaque 
«  document  est  analysé  à  la  marge  avec  une  grande  exactitude  ;  les  variantes 
«  sont  indiquées  au  bas  des  pages.  Un  triple  index  des  noms  de  personnes, 
«  des  noms  de  lieux  et  des  vies  des  saints  en  facilite  l'usage  aux  travailleurs. 

«  L'ouvrage  est  imprimé  sur  beau  papier  in-4,  à  deux  colonnes,  avec 
«  double  filet  rouge  ;  tel  qu'il  se  présente,  ce  volume  est  digne  du  Mécène 
«  qui  l'a  fait  exécuter  et  des  savants  qui  lui  ont  donné  leurs  soins  ». 

Ce  volume  se  vend  quatre-vingt-dix  francs.  Par  faveur  spéciale,  on  fait 
aux  travailleurs  une  remise  de  dix  pour  cent  ;  net  :  quatre-vingt-un  francs. 
Les  historiens  de  l'antiquité  ne  nous  ont  pas  dit  quel  prix  le  Mécène  authen- 
tique faisait  payer  aux  amateurs  de  poésie  les  œuvres  d'Horace. 

IV. 

Nous  recevons  à  l'instant  l'ouvrage  depuis  longtemps  annoncé  et  si  impa- 
tiemment attendu  de  notre  savant  collaborateur,  M.  Whitley  Stokes  :  The 
Triparti  te  Life  of  Patrick  with  other  Documents  relating  to  that  Saint,  deux  vo- 
lumes in-8  de  cxcix  et  676  pages.  Cette  publication  est  de  tous  points  digne 
de  l'auteur  et  du  sujet.  Nous  en  ferons  à  loisir  ultérieurement  un  compte 
rendu  détaillé.  En  attendant,  nous  féliciterons  l'auteur  de  l'indépendance 
d'esprit  dont  il  a  fait  preuve  en  écrivant  p.  cxxxv  :  «  Patrick  aimait  et  res- 
v  pectait  l'église  de  Rome  :  il  n'y  a  pas  de  raison  pour  refuser  de  croire  à 
«  son  désir  d'obtenir  pour  sa  mission  l'appui  de  l'autorité  romaine  ;  on  au- 
«  rait  tort  de  mettre  en  question  l'authenticité  de  ses  décrets  portant  que, 
«  lorsqu'il  s'élèverait  en  Irlande  des  questions  difficiles,  elles  seraient  en 
«  dernier  ressort  portées  au  siège  apostolique  ». 

V. 

M.  de  La  Borderie  a  fait  sur  l'hagiographie  bretonne  deux  travaux  im- 
portants dont  la  Revue  Celtique  a  rendu  compte:  un  mémoire  sur  deux  saints 
Caradec  (R.  C,  t.  V,  p.  501),  et  une  édition  d'une  vie  de  saint  Malo  (R. 
C,  t.  VI,  p.  384).  Les  Monuments  originaux  de  l'histoire  de  saint  Yves,  an- 
noncés dans  notre  tome  VIII,  p.  393,  contiennent  de  lui  une  savante  intro- 
duction de  lxxvi  pages  '.  Il  vient  de  se  créer  de  nouveaux  titres  à  la  recon- 
naissance des  érudits  en  faisant  paraître  chez  Champion  :  Les  trois  anciennes 
vies  de  saint  Tudual,  texte  latin  et  commentaire  historique,  1887,  in-8,  134  pa- 
ges. Nous  espérons  qu'il  terminera  prochainement  son  édition  du  précieux 

1 .  Elle  a  été  tout  récemment  réimprimée  dans  le  volume  intitulé:  Etudes 
historiques  bretonnes,  Paris,  Champion,  1888,  in-8,  vi-237  pages. 


292  Chronique. 

manuscrit  de  la  bibliothèque  de  Quimper  qui  contient  la  vie  de  saint  Gué- 
nolé  et  le  cartulaire  de  l'abbaye  de  Landévennec. 

VI. 

Une  note  insérée  dans  le  t.  VII  delà  R.  C,  p.  392-393,  a  prévenu  nos 
lecteurs  qu'en  1886  notre  savant  collaborateur.  M.  J.Rhys,  avait  été  chargé 
des  leçons  connues  sous  le  nom  de  H ibbert- Lectures,  et  elle  a  donné  le  pro- 
gramme de  ces  leçons  qui  avaient  pour  objet  la  mythologie  celtique,  étudiée 
principalement  dans  la  littérature  galloise.  Ces  leçons  ont  été  publiées  aux 
frais  de  la  fondation  Hibbert.  Le  volume  qui  les  contient  vient  de  paraître 
à  la  librairie  Williams  and  Norgate  de  Londres  qui  l'annonce  sous  le  titre 
suivant  :  Lectures  on  thc  Origin  and  Growih  of  Religion  as  illustrated  by  Celtic 
Heatbendom . 

VIL 

M.  Paul  Sébillot,  si  connu  par  ses  travaux  sur  les  traditions  populaires, 
nous  apprend  la  nouvelle  suivante,  extraite  par  lui  d'un  journal  breton,  qui 
l'a  publiée  sous  la  date  du  28  février  dernier  : 

«  Des  fêtes  seront  données  à  l'occasion  de  l'inauguration  du  théâtre  en 
«  construction  à  Morlaix. 

«  Une  troupe  de  curieux  artistes  bretons,  découverts  aux  environs  de 
«  Plouaret  et  qui  jouent  en  breton  des  façons  de  mystères  moyen  âge,  prê- 
«  teront  leur  concours  à  ces  fêtes.  C'est  désormais  chose  entendue.  Ils  sont 
«  quatorze;  ils  joueront  leur  répertoire  en  costumes  appropriés  aux  sujets 
«  des  pièces.  Deux  représentations  seront  offertes  au  public  morlaisien 
«  dans  l'ancien  théâtre. 

«  Elles  auront  lieu,  la  première,  le  soir  de  l'inauguration  de  la  nouvelle 
«  salle,  simultanément  avec  le  spectacle  donné  rue  de  Brest,  la  seconde  en 
«  matinée  le  15  avril,  c'est-à-dire  dans  le  courant  de  la  journée. 

«  Des  livrets  en  français  seront  mis  à  la  disposition  des  spectateurs  et  don- 
ce  neront,  pour  les  personnes  peu  familières  avec  le  langage  de  ces  pitto- 
«  resques  acteurs,  la  traduction  des  pièces  bretonnes  représentées.  » 

VIII. 

Le  Bulletin  mensuel  de  la  Faculté  des  Lettres  de  Poitiers  contient,  t.  V, 
p.  391-396,  une  critique  des  travaux  de  M.  J.  Guillemaud  sur  les  inscrip- 
tions gauloises  dans  la  Revue  archéologique.  M.  E.  Ernault,  auteur  de  cette 
critique,  commence  par  féliciter  M.  J.  G.  de  la  découverte  par  lui  faite  d'une 
inscription  gauloise  à  Nîmes  (Revue  archéologique,  18S6.  t.  VIII,  p-  360- 
363).  Il  passe  ensuite  à  l'étude  d'ensemble  de  M.  G.  sur  les  inscriptions 
gauloises  découvertes  jusqu'ici  (Revue  archéologique,  1887,  t.  IX,  p.  210- 
229;  299-316;  t.  X,  p.  217-228).  Il  est  d'accord  avec  nous  pour  constater 
la  déplorable  faiblesse  de- cette  dissertation  grammaticale,  écrite  par  un  ar- 
chéologue qui  n'a  pas  de  la  grammaire  celtique  la  plus  élémentaire  notion. 


Chronique.  29$ 

IX. 

M.  Héron  de  Villefosse  a  apporté  à  la  Société  des  Antiquaires  de  France, 
dans  la  séance  du  8  février  dernier,  une  casserole  d'argent  découverte  à  Has- 
tings,  près  Douvres,  et  qui  porte  l'inscription  suivante  tracée  à  la  pointe: 

NVMZfl*  AVGVS//  DEO  Marti  ROMVLVS  CAMVLOGEKI  FILÏUS  POSVIT. 

Il  est  intéressant  de  trouver  en  Grande-Bretagne  sous  la  domination  ro- 
maine un  nom  d'homme  identique  à  celui  d'un  chef  Aulerque,  qui  com- 
battit contre  les  Romains  et  perdit  la  vie  en  défendant  contre  eux  l'indépen- 
dance gauloise,  l'an  52  av.  J.-C.  (De  bello  gàllico,  VII,  57,  59,  62). 

Dans  le  tome  XV  (1887),  p.  251-255,  des  Comptes  rendus  des  séances  de 
l'Académie  des  Inscriptions,  on  pourra  lire  la  note  de  M.  Héron  de  Ville- 
fosse  sur  les  inscriptions  qui  contiennent  le  mot  gaulois  avvot  ou  avot. 
Dans  le  même  tome,  p.  307-308,  on  verra  le  résumé  de  sa  note  sur  l'épi— 
taphe  d'un  soldat  de  ïala  atectorigiana.  Il  a  été  question  de  ces  deux  com- 
munications dans  notre  vol.  VIII,  p.  536-537,  et  le  texte  de  l'épitaphe 
dont  nous  venons  de  parlera  été  publié  par  M.  Cagnat  dans  la  dernière  livrai- 
son de  la  Revue  Celtique,  p.  78. 

X. 

Le  Celtic  Magasine  de  février  dernier  contient  entre  autres  mémoires  : 
i°  un  résumé  par  M.  Thomas  Cockburn  de  la  savante  dissertation  de 
M.  Windisch  sur  le  passif  en  r  dont  un  de  nos  collaborateurs  nous  a  pro- 
mis un  compte  rendu  et  que  jusqu'à  présent  nous  nous  sommes  bornés  à 
annoncer,  t.  VIII,  p.  529  ;  —  20  un  poème  gaélique  sur  la  bataille  de  Gabhra  ; 
ce  poème  a  été  dicté  en  1868  par  un  vieillard  âgé  de  quatre-vingts  ans; 
l'éditeur  est  le  Rev.  J.  Campbell  ;  on  sait  que  ce  morceau  appartient  à  la  litté- 
rature ossianique,  et  qu'un  poème  irlandais  qui  porte  le  même  titre  a  été  pu- 
blié dans  les  Transactions  qf  tbe  Ossianic  Society  for  theyear  1853  (vol.  1);  — 
3°  une  étude  sur  les  versions  diverses  de  la  légende  de  Derdriu  par  M.  A. 
Macbain;  comparez  à  la  rédaction  gaélique  publiée  par  le  même  érudit,  Celtic 
Magasine  de  décembre  1887  (p.  69-77)  et  de  janvier  1888  (p.  129-138)  les 
leçons  données  par  MM.  E.  Windisch  et  Whitley  Stokes  dans  les  1. 1,  p.  67- 
81,  et  II,  p.  109-184,  des  Irische  Texte. 

XI. 

La  Société  gaélique  d'Inverness  vient  de  faire  paraître  le  tome  XIII  de 
ses  transactions.  On  y  trouve  plusieurs  mémoires  intéressants  ;  mais  ce  qui 
en  première  ligne  nous  a  semblé  digne  d'attention,  c'est  (p.  241-257)  le 
texte  original  de  la  légende  de  Derdriu,  dont  M.  A.  Macbain  a  donné  la 
traduction  dans  le  Celtic  Magasine.  L'éditeur  de  ce  texte  est  M.  Carmichael 
qui  l'a  recueilli  il  y  a  vingt  ans  de  la  bouche  d'un  vieillard  âgé  de  quatre- 
vingt-trois  ans.  —  Nous  signalerons  ensuite  la  dissertation  du  prévôt  Mac 
Andrew  sur  les  Pietés  (p.  230-240);  cette  dissertation  a  déjà  paru  dans  le 
Celtic  Magasine  de  mai  et  juin  1887,  et  la  même  revue  a  donné  quatre  ar- 
ticles de  M.  A.  Macbain  sur  le  rrême  sujet  dans  les  numéros  suivants  : 

Revue  Celtique,  IX  19 


294  Chronique. 

juillet,  août,  septembre  et  octobre.  —  Nous  n'avons  pu  dans  notre  chro- 
nique parler  de  ces  numéros  qui  nous  sont  parvenus  avec  plusieurs  mois  de 
retard.  —  La  conclusion  du  prévôt  Mac  Andrew  est  que  les  Pietés  étaient 
un  peuple  celtique  du  rameau  gaélique.  M.  A.  Macbain  soutient  que  les 
Pietés  devaient  parler  un  dialecte  du  rameau  gaulois  fort  proche  parent  du 
gallois.  —  Le  Rev.  Alex.  Cameron  a  communiqué  un  recueil  de  ballades 
ossianiques,  p.  269-300,  et  le  Rev.  D1'  Stewart  un  recueil  de  chansons  gaé- 
liques inédites,  p.  301-312.  —  Nous  terminerons  en  mentionnant  un  mé- 
moire de  M.  Liddall,  sur  le  verbe  en  gaélique  d'Ecosse,  p.  8-42,  et  une 
étude  de  M.  A.  Macbain,  éditeur  du  Celtic  Magasine,  sur  les  contes  popu- 
laires en  général,  p.  103-122. 

XII. 

Nous  ne  savons  quelle  distraction  nous  a  fait  oublier  dans  notre  dernière 
chronique  le  n°  de  YAcademy  du  8  octobre  1887  et  la  lettre  qu'y  a  insérée 
M.  St.  O'Grady  à  l'adresse  de  notre  aimable  confrère  M.  H.  Zimmer.  Le  sa- 
vant irlandais  constate  que  le  professeur  allemand  s'est  exprimé  sur  son  compte 
en  termes  tels  qu'en  fait  d'impertinence  on  ne  pourrait  désirer  mieux. 

Entre  autres  choses,  M.  Z.  a  traité  d'ignorant  ce  pauvre  M.  St.  O'Grady. 

M.  O'Grady  a  été  chez  les  Franciscains  de  Dublin  vérifier  l'exactitude 
des  citations  faites  par  M.  Z.  de  deux  mss.  ossianiques,  l'un  du  xve,  l'autre 
du  XVIIe  siècle.  Voici  entre  autres  choses  ce  qu'il  a  constaté.  Le  second  des 
deux  mss.  contient  soixante-neuf  poèmes.  M.  Z.  a  copié  les  commencements 
de  chacun,  et  sur  les  soixante-neuf,  cinquante  et  un  sont  copiés  de  travers. 
M.  O.  Grady  ajoute  :  M.  Zimmer  a  imprimé  un  grand  nombre  de  gloses 
marginales  de  ces  deux  mss.,  j'en  ai  traduit  une  pour  lui  ;  je  le  mets  au  défi 
de  traduire  les  autres  sans  se  faire  aider,  soit  par  ce  bon  M.  Hennessy,  soit 
par  tel  autre  qui  réellement  sache  l'irlandais. 

XIII. 

Dans  YAcademy  du  31  décembre  1887,  p.  442,  col.  2-3,  a  paru  une  lettre 
du  Rev.  B.  Mac-Carthy,  successeur  de  M.  R.  Atkinson  comme  TodJ- 
Professor.  Le  savant  ecclésiastique  irlandais  constate  que  M.  Atkinson,  Todd- 
Lectures,  II,  p.  87,  1.  1630,  a  lu  itathalaind  Juil  au  lieu  de  i-tert  kalaind  Iuiî 
(Leabhar  Breac,  p.  172,  col.  2,  1.  67),  en  sorte  que  M.  A.,  p.  330  de  sa 
traduction,  a  mis  la  fête  de  saint  Pierre  et  saint  Paul  au  i<=r  juillet  au  lieu 
du  29  juin.  M.  B.  Mac  Carthy  est  dans  son  droit  en  relevant  ce  lapsus  ;  en 
le  faisant  il  nous  rend  service;  mais  il  manque  de  mesure  dans  sa  critique, 
il  paraît  oublier  qu'en  matière  d'études  celtiques  comme  ailleurs,  et  même 
plus  que  partout  ailleurs,  irrare  humanum  est.  Pour  ne  pas  écrire  d'erreurs, 
il  n'y  a  qu'un  procédé,  c'est  de  ne  rien  écrire  du  tout. 

XIV. 

La  Revue  des  Traditions  populaires,  dans  son  numéro  de  janvier  1888,  a 
donné,  p.  45-51,  un  article  de  M.  Le  Calvez  sur  les  usages  relatifs  aux  fu- 


Chronique.  295 

nérailles  et  au  culte  des  morts  en  Basse   Bretagne.  Dans  le  n°  de  février, 
p.  103,  M.  J.-M.  Comault  a  publié  :  Lechâleau  sous  lamer,  légende  bretonne. 

XV. 

La  Revue  anthropologique  dirigée  par  le  docteur  Topinard  a  publié  pendant 
l'année  1887  quelques  articles  qui  touchent  plus  ou  moins  directement  aux 
études  celtiques.  Tels  sont  les  mémoires  de  M.  Pompeo  Castelfranco  :  i°sur 
les  fonds  de  cabane;  21  sur  les  villages  lacustres  et  les  terramare  en  Italie, 
p.  182-200,  p.  607-619:  ceux  de  MM.  Julien  Fraipont  et  Ivan  Braconier 
sur  la  poterie  en  Belgique  à  l'âge  du  mammouth,  p.  385-407.  Enfin  le 
n  du  15  janvier  1888  contient,  p.  59-72,  un  résumé  par  M.  Deniker  des 
travaux  les  plus  récents  sur  les  monuments  préhistoriques  de  l'Allemagne. 
Ces  mémoires  donnent  de  précieuses  indications  sur  les  peuples  qui  ont 
précédé  la  race  celtique  dans  les  régions  occupées  par  elle  aux  temps  histo- 
riques. 

XVI. 

M.  Mowat,  dans  le  Bulletin  critique  du  1er  septembre  dernier,  a  renou- 
velé deux  observations  déjà  faites  mais  auxquelles  les  celtistes  ne  paraissent 
pas  donner  assez  d'attention  :  i°  Lei  barré  de  l'épigraphie  gauloise  a  été 
remarqué  dans  l'inscription  Pélignienne,  n°  11  (p.  19).  du  recueil  de  Zve- 
taieff.  Inscriptiones  Italiae  inferioris  dialecticae  ;  2°  l'inscription  vestine,  nn  9 
(p.  15.  cf.  p.  85-86).  du  mèmerecueil,  nous  offre  une  formule  brat  da  ta,  qui 
présente  une  singulière  ressemblance  avec  le  bratoude  de  la  Gaule  méridio- 
nale :  P.  VIITIO'DVNO  'DIDIIT  !  HERCLO  ||  IOVIO  |]  BRAT  [|  DA 
TA.  P.  Vetins  dono  dédit  Hcrculi  Jovio  brat  da  ta. 

XVII. 

Le  23  janvier  dernier,  l'Académie  royale  d'Irlande  a  tenu  une  séance  où 
un  de  ses  membres  les  plus  autorisés  a  fait  une  motion  d'une  haute  gravité. 
Ce  membre  est  M.  J.-T.  Gilbert,  auteur  de  la  savante  publication  intitulée 
Facsimiles  of  national  manuscripts  oflreland,  cinq  volumes  grand  in-folio  ;  il 
a  donné  dans  la  collection  du  Maître  des  Rôles,  en  1870,  Historié  and  muni- 
cipal Documents  of  Ireland,  from  the  Archives  of  the  city  of  Dublin,  1 1 72-1 3  20  ; 
en  1884  et  1885.  Chartularies  o/St.  Mary' s  abbey,  Dublin,  etc.,  prescrved 
in  the  Bodkian  Library  and  British  Muséum,  deux  volumes  in-8  Ce  n'est 
qu'une  partie  de  ses  ouvrages;  une  liste  complète  serait  trop  longue  ici. 

Il  a  fait  observer  que  les  quatre  volumes  de  facsimiles  de  manuscrits  ir- 
landais publiés  par  1"  Académie,  Leabhar  na  h-Uidre,  Leabhar  Breac,  Livre  de 
Leinster,  Livre  de  Ballymote,  n'étant  pas  accompagnés  de  traductions  an- 
glaises, restaient  sans  utilité  pour  la  masse  du  public.  En  conséquence,  il  a 
proposé  à  l'Académie  d'inviter  son  conseil  à  mettre  à  l'étude  la  question  de 
savoir  si  l'on  pourrait  faire  faire  et  publier  des  traductions  de  ces  manuscrits 
en  y  employant  les  quatre  cents  livres  (10.000  francs)  que  la  Chambre  des 
Communes  alloue  annuellement  à  l'Académie  pour  des  travaux  concernant 
les  manuscrits  irlandais.  On  pourrait  même,  a-t-il  ajouté,  consacrer  à  cet 
objet  une  partie  des  intérêts  de  la  fondation  Cunningham. 


296  Chronique. 

*  C'est  moi,  a-t-il  continué,  qui,  il  y  a  bien  des  années,  voulant  donner 
une  impulsion  aux  études  celtiques,  ai  proposé  à  l'Académie  de  reproduire 
en  facsimilé  la  totalité  du  contenu  de  quelques-uns  de  ses  principaux  ma- 
nuscrits irlandais.  Mes  propositions  ont  étéacceptées  et  on  a  toutlieu  d'être 
satisfait  des  résultats.  Ces  résultats  n'ont  pas  été  seulement  la  production  de 
quatre  beaux  volumes.  De  ces  quatre  volumes,  il  n'existait  d'abord  qu'un 
seul  exemplaire  exposé  à  beaucoup  d'accidents  et  accessible  seulement  à 
Dublin.  Maintenant,  d'exacts  facsimilés  de  ces  livres  existent  en  grand 
nombre  et  chacun  peut  se  les  procurer  dans  toutes  les  parties  du  monde.  Ils 
contiennent  les  leçons  les  meilleures  et  les  plus  authentiques  des  œuvres 
composées  par  les  anciens  auteurs  irlandais  sur  l'histoire  et  la  littérature  de 
leur  pays  avant  l'établissement  des  Anglo-Normands.  Ces  œuvres  n'ont  ja- 
mais été  traduites,  et  il  est  clair  que  tant  qu'elles  n'auront  pas  été  rendues 
accessibles  par  des  traductions  anglaises,  les  Irlandais  ne  pourront  avoir  au- 
cune connaissance  exacte  de  leur  île  et  de  ses  habitants  dans  les  temps  an- 
ciens. La  publication  des  facsimilés  de  l'Académie  et  l'étude  des  gloses  en 
vieil  irlandais  conservées  sur  le  continent  a  donné  à  d'actifs  érudits  en  Ir- 
lande et  hors  d'Irlande  le  moyen  d'éclaircir  les  obscurités  des  anciens  écrits 
irlandais  et  d'en  publier  des  spécimens  qui  ont  une  haute  valeur  pour  l'étude 
du  vocabulaire.  Les  noms  de  ces  éditeurs  sont  bien  connus  dans  le  monde 
des  lettres,  et  j'ai  des  raisons  de  croire  qu'ils  donneraient  avec  joie  leur 
concours  à  l'Académie  pour  publier  les  documents  qui  seraient  plus  spécia- 
lement de  leur  compétence.  Suivant  moi,  l'Académie  devrait  se  mettre  en 
rapport  avec  les  savants  qui  par  leurs  éditions  de  vieux  textes  irlandais  ont 
attesté  leurs  connaissances  spéciales  dans  cette  branche  de  la  science.  On 
les  inviterait  à  faire  connaître  les  titres  des  pièces  historiques  contenues 
dans  les  facsimilés  qu'ils  voudraient  traduire  et  publier  avec  des  glossaires. 
Ces  glossaires  réunis  fourniraient  les  matériaux  d'un  dictionnaire  général 
du  vieil  irlandais  qui.  par  l'emploi  de  ce  procédé,  acquerrait  plus  de  valeur 
que  par  tout  autre  mode  de  préparation,  puisqu'on  y  trouverait  réunis  les 
résultats  de  la  mûre  expérience  et  de  l'érudition  des  principaux  celtistes  de 
notre  temps.  Chaque  traduction  et  chaque  glossaire  serait  publié  avec  le 
nom  de  l'auteur,  par  ses  soins  et  sous  sa  responsabilité.  La  rémunération 
pourrait  être  réglée  d'après  le  tarif  établi  par  l'Académie  pour  la  traduction 
des  Annales  d'Ulster.  Elle  serait  payée,  comme  les  frais  d'impression,  sur 
les  fonds  alloués  annuellement  par  le  Parlement  à  l'Académie  pour  des  tra- 
vaux relatifs  à  la  langue  irlandaise.  Par  le  moyen  que  j'indique,  l'Académie 
pourrait,  dans  une  période  relativement  courte,  faire  traduire  et  publier  les 
principaux  monuments  qui  subsistent  de  la  vieille  histoire  et  de  la  littérature 
de  l'Irlande.  Elle  repousserait  ainsi  le  reproche  de  n'avoir  pas  su  porter  la 
lumière  sur  les  vénérables  et  intéressants  écrits  qui  concernent  les  annales 
du  pays  et  de  la  race  à  laquelle  ses  membres  appartiennent.   » 

Des  applaudissements  accueillirent  cette  motion.  Le  docteur  Atkinson 
parla  dans  le  sens  contraire.  Suivant  lui,  il  était  inutile  de  traduire  aux  frais 
de  i' Académie  les  anciens  monuments  delà  littérature  irlandaise;  car  un 
grand  nombre  de  savants,  dans  toute  l'Europe,  avaient  entrepris  de  les  tra- 


Chronique.  297 

duire  gratuitement.  Il  ne  voyait  donc  pas  l'utilité  de  la  dépense.  C'était  la 
seule  raison  qu'il  eût  pour  s'opposer  à  la  motion.  Certainement,  tout  le 
monde  admettrait  qu'il  désirait  autant  que  n'importe  qui  concourir  au  pro- 
grès des  études  irlandaises. 

Malgré  ces  observations,  la  motion  de  M.  Gilbert  a  été  adoptée. 

La  question  posée  devant  l'Académie  d'Irlande  est  de  savoir  si  l'on  pu- 
bliera ou  non  le  facsimilé  du  Livre  de  Lecan.  Il  est  certain  que  dans  ce 
manuscrit  comme  dans  le  Leabhar  Breac  et  dans  le  Livre  de  Ballymote,  à 
côté  de  documents  d'une  importance  considérable,  il  s'en  trouve  un  certain 
nombre  d'un  intérêt  secondaire.  La  littérature  irlandaise  est  partie  originale, 
partie  une  imitation  de  la  littérature  du  continent.  La  première  catégorie 
mérite  beaucoup  plus  que  la  seconde  l'attention  des  érudits.  Le  gros  volume 
qu'a  publié  tout  dernièrement  M.  Atkinson  rendra  de  grands  services  à  ceux 
qui  veulent  étudier  la  langue  irlandaise,  mais  les  documents  qui  y  sont 
réunis  manquent  tout  à  fait  d'originalité.  Ce  qui  fera  prendre  un  jour  à  l'Ir- 
lande une  place  dans  l'histoire  littéraire  de  l'Europe,  ce  sont  ses  monuments 
épiques  et  ses  traités  de  droit.  Les  traités  de  droit  sont  l'objet  d'une  publi- 
cation dont  nous  n'avons  rien  à  dire  ici,  puisque  l'Académie  d'Irlande  n'en 
est  point  chargée.  Ce  que,  suivant  nous,  l'Académie  devrait  entreprendre, 
c'est  la  publication  des  monuments  de  la  littérature  épique.  Mais  elle  ne  de- 
vrait pas  pour  cela  renoncer  d'une  façon  absolue  à  donner  des  facsimilés.  Bien 
au  contraire. 

Voici  un  exemple.  Supposons  que  l'Académie  décide  la  publication 
de  l'épopée  qui  porte  le  titre  de  Orgain  Bruidne  ui  Derga.  Le  plus  ancien 
manuscrit  est  le  Leabhar  na  h-Uihdre,  p.  83-99,  rnais  le  commencement  fait 
défaut.  11  y  a  cinq  autres  manuscrits  du  xive  au  xvie  siècle.  L'Académie 
devrait  publier  en  facsimilés  la  partie  de  chacun  de  ces  manuscrits  qui  con- 
cerne ce  document;  elle  mettrait  ainsi  un  éditeur  à  même  d'établir  un  texte 
critique  et  dont  tout  le  monde  pourrait  contrôler  les  variantes.  Ce  serait  une 
dépense  incomparablement  moins  élevée  que  de  publier  le  livre  de  Lecan. 
et  elle  donnerait  un  résultat  immédiat.  L'éditeur  pourrait  en  toute  sécurité 
accompagner  son  texte  d'une  traduction.  Une  fois  ce  document  publié, 
on  entreprendrait  une  opération  identique  pour  un  autre  document  de 
même  catégorie  et  de  même  valeur  :  ceux  qui  connaissent  les  publications 
d'O'Curry  n'auraient  que  l'embarras  du  choix. 

XVIII. 
Le  Ier  mars,  fête  de  saint  David,  le  grand  évêque  gallois,  notre  savant 
collaborateur.  M.  Gwenogfryn  Evans  a  mis  en  distribution  le  facsimilé  du 
Livre  noir  de  Carmarthen,  le  plus  ancien  manuscrit  de  la  littérature  lvrique 
galloise,  xnc  siècle.  Le  titre  de  cette  publication  est  :  Autotype  facsimilé  of 
the  Black  Book  of  Carmarthen.  On  la  trouve  chez  l'éditeur,  7,  Clarendon 
Villas,  Oxford.  Il  en  a  été  tiré  250  exemplaires,  dont  100  grand  in-8  à 
52  shillings  1/2  et  1 50  in-8  ordinaire  à  33  shillings. 

XIX. 

On  sait  que  grâce  à  la  science  et  à  la  persévérante  habileté  de  M.  Léopold 


298  Chronique. 

Delisle,  administrateur  de  la  Bibliothèque  nationale,  la  France  vient  de 
rentrer  en  possession  d'environ  deux  cents  numéros  de  la  bibliothèque  de 
lord  Ashburnham  enlevés  à  diverses  bibliothèques  françaises,  un  peu  avant 
le  milieu  du  siècle  courant,  par  des  voleurs  dont  le  principal  est  Libri.  Un 
de  ces  manuscrits  est  le  numéro  VI  de  la  Notice  sur  les  manuscrits  disparus 
de  la  bibliothèque  de  Tours,  publiée  en  1883  par  M.  Delisle  dans  le  t.  XXXI, 
première  partie,  p.  19-22  de  la  collection  intitulée:  Notices  et  extraits  des 
manuscrits.  C'est  un  évangéliaire  du  vir  ou  du  vm  siècle  qui  appartenait 
avant  la  Révolution  à  l'église  cathédrale  Saint-Gatien  de  Tours  et  qui  de  là 
était  passé  dans  la  bibliothèque  de  la  ville.  Les  bénédictins  auteurs  du  Nou- 
veau traité  de  diplomatique  le  considéraient  comme  anglo-saxon.  Mais  il 
semble  plutôt  irlandais.  Les  peintures  qui  ornent  la  première  page  de  chacun 
des  quatre  évangiles  paraissent  l'œuvre  d'une  main  irlandaise.  L'abré- 
viation de  Vm  est  conforme  à  l'usage  des  scribes  irlandais.  Le  doublement 
de  \'s  dans  les  mots  comme  quassi,  possita,  la  réduction  du  double  5  à  un  seul 
s,  rcmisius  pour  remissius,  est  une  faute  constante  dans  les  manuscrits  ir- 
landais. Le  nom  du  scribe,  Holcundus,  n'a  pas  été  signalé  en  Irlande  à  notre 
connaissance,  mais  s'expliquerait  par  un  composé  irlandais  oll-chond  dont 
le  premier  terme  signifierait  «  beaucoup,  très,  »  et  dont  le  second  serait  le 
terme  technique  pour  désigner  la  personne  sui  juris:  oll-chond,  écrit  Hol- 
cundus dans  la  souscription  du  manuscrit,  voudrait  dire  optimo  jure  vir. 

Le  manuscrit  de  Saint-Gatien  de  Tours  est  un  de  ceux  dont  Sabatier  et 
Blanchini  ont  fait  usage  dans  leurs  travaux  sur  les  anciennes  versions  de  la 
Bible.  Mais  s'il  est  bien  établi  que  ce  manuscrit  est  irlandais,  et  non  anglo- 
saxon,  il  peut  en  résulter  des  conséquences  intéressantes  pour  l'histoire  du 
texte  latin  de  la  Bible  dans  les  Iles  Britanniques. 

Ce  ras.  se  compose  de  onze  cahiers  formant  un  total  de  ni  feuillets 
numérotés.  Chaque  cahier,  sauf  le  dernier,  porte  à  la  fin  une  signature 
consistant  en  une  lettre  capitale  de  l'alphabet  latin;  la  première  est  A,  la 
dernière  K. 

XX. 

Le  28  février  dernier,  M.  Mac  Sweeney  a  lu  en  séance  de  la  Society  for 
the  préservation  of  the  Irish  language  son  rapport  sur  les  travaux  de  cette 
compagnie  et  sur  les  résultats  obtenus  par  elle  en  1887.  Le  nombre  des  en- 
fants qui  passent  avec  succès  l'examen  pour  la  langue  irlandaise  dans  les 
écoles  nationales  d'Irlande  augmente  lentement,  mais  d'une  façon  continue. 
Il  était  de  321  en  1886,  il  a  été  de  371  en  1887.  Vingt-six  maîtres  d'école 
ont  reçu  en  1887  le  certificat  d'aptitude  à  l'enseignement  de  l'irlandais. 

XXI. 

La  Chronique  d'Orient  de  M.  Salomon  Reinach,  dans  la  Revue  archéologique 
de  janvier-février  dernier,  publie  d'après  VEphêmeris  d'Athènes  du  iuraoùt 
1887  l'inscription  suivante  trouvée  à  Héraclée  du  Pont.  On  y  trouve  la 
mention  de  la  7:0X1;  OùXoxâas'.vo;. 


Chronique.  299 

Comparez  le  pagus  Vilcassinus  '  ou  Velcassinus 2  des  documents  méro- 
vingiens. Vihassinus  ou  Velcassinus,  en  français  Vexin,  est  un  adjectif  dé- 
rivé du  nom  de  peuple  Veliocasses  (Debello  gallico,  II,  4;  VIII,  7),  Velio- 
cassi  (De  bello  gallico,  VII,  65)'  ou  probablement  plus  exactement  *  Velio- 
cassis,  au  génitif  pluriel  Véliocassiutn  dans  une  inscription  5. 

Voici  le  texte  du  monument  qui  vient  d'être  découvert  : 

Saêivto  xw  TOfopwvt 

é^'jtoj  x,aTe<jxeûaaa[ç] 

TO   XaTO[JLlOV  £"/.  TtoV 

èauTOîî.'  Aefyejûvoç 
~£U)-y;ç  Mewep6[t]as 
fpou[xevTaptç,  A'j- 
YOUjtoç  /wpaç  Aou- 
(âo-jvou.  XaTpe  rcoXïta 
rSkeoa;  OùXoxaîï- 

fflVOU. 

XXII. 

Dans  notre  précédent  numéro,  nous  avons  annoncé  que  le  17  janvier 
dernier,  M.  H.  van  Gelder  soutiendrait  une  thèse  sur  l'histoire  des  Ga- 
lates.  Cette  thèse  a  paru  à  Amsterdam,  chez  J.-M.  de  Bussy.  C'est  un  vol. 
in-8  de  302  pages.  Son  titre  est  :  Galatarum  res  in  Graecia  et  Asia  gestae 
usque  ad  médium  saeculum  secundum  ante  Christum. 

XXIII. 

Au  moment  de  donner  le  bon  à  tirer  de  cette  chronique,  nous  recevons 
la  première  livraison  du  recueil  périodique  intitulé  :  The  archaeological  Review, 
a  Journal  of  historié  and  prehistoric  Antiqnities  ;  elle  est  datée  de  mars  1888  et 
vient  de  paraître  chez  David  Nutt,  à  Londres.  M.  G.  Laurence  Gomme, 
directeur  de  cette  publication,  a  mis  en  tête  un  avertissement  destiné  à  faire 
connaître  le  but  de  son  œuvre  ;  il  veut  créer  un  trait  d'union  entre  les  diffé- 
rentes sociétés  archéologiques  de  la  Grande-Bretagne.  Nous  sommes  heu- 
reux de  signaler  dans  sa  première  livraison  deux  articles  qui  intéressent  les 
celtistes:  l'un,  p.  48-54,  est  une  étude  de  M.  C.  Elton  sur  les  Pietés  de 
Galloway  ;  l'autre,  p.  68-75,  est  le  commencement  d'une  traduction  de  la 
composition  épique  irlandaise  connue  sous  le  nom  de  Tochmarc  Emere  «  De- 

1 .  Testament  du  fils  d'Idda  vers  690,  chez  Tardif,  Monuments  historiques, 
n°  26,  p.  21,  col.  1  et  2. 

2.  Testament  précité  du  fils  d'Idda,  chez  Tardif,  ibid.,  p.  21,  col.  2;  et 
jugement  rendu  vers  751  par  Pépin,  maire  du  palais,  ibid.,  p.  45,  col.  2. 

3.  Gluck,  Die  keltischen  Namen,  p.  161 -163. 


300  Chronique. 

mande  en  mariage  d'Emer  par  le  héros  Cûchulainn  ».  L'auteur  de  cette 
traduction  est  M.  Kuno  Meyer.  Des  mss.  de  ce  document  un  seul  a  été 
publié,  c'est  en  facsimilé,  et  personne  ne  l'avait  traduit  jusqu'ici. 

XXIV. 

Le  bulletin  d'annonces  (Advertiscments)  qui  accompagne  la  première  li- 
vraison de  V  Archacological  Revieiu  nous  apprend  la  mise  en  vente  du  pre- 
mier volume  d'un  ouvrage  dont  la  publication  était  annoncée  comme  pro- 
chaine il  y  a  quelques  mois  (Revue  Celtique,  t.  VIII,  p.  529).  Ce  sont  les 
Annales  d'Ulster  par  M.  Hennessy.  En  voici  le  titre  complet  :  The  Annals 
of  Ulster,  a  Chronical  of  Irish  Affairs  from  A.  D.  431  to  A.  D.  1 540,  edited 
with  a  translation  and  index  par  W.  M.  Hennessy,  M.  R.  I.  A.  Vol.  I.  — 
Dès  que  cet  ouvrage  sera  parvenu  à  Paris,  la  Revue  Celtique  en  rendra  compte, 
en  y  donnant  l'attention  que  méritent  les  travaux  du  savant  auteur. 

Paris,  le  20  mars  1888. 

H.  d'Arbois  de  Jubain ville. 


ERRATA  DE  LA  LIVRAISON  PRECEDENTE. 

Page  9,  ligne  21,  au  lieu  de  Livre  au  dos  de  neige,  lise%  Livre  de  Druim- 
snechta  (nom  de  lieu). 

P.  15,  note  1,  au  lieu  de  Augustini,  lise%  Augustine. 
P.  25,  1.  14,  au  lieu  de  then,  lise%  thereafter. 
1.  16,  après  come,  insère^  to  them. 
1.  20,  au  lieu  de  His,  lise%  its. 
P.  88,  1.  25,  au  lieu  de  ornemental,  Hse%  ornamental. 
P.  91,  1.  36,  au  lieu  de  Tudgucde,  lese\  Tutguale. 
P.  100,  1.  16,  au  lieu  de  holly,  lise\  hazel. 
P.  105,  1.  3,  devant  that,  insère^  10. 

1.  23,  à  supprimer. 
P.  132,  note  1,  au  lieu  de  Gùterbork,  lise\  Gùterbock. 

W.  S. 

ERRATUM  DE  LA  PRÉSENTE  LIVRAISON. 
P.  153,  ligne  3,  au  lieu  de  1550,  lise\  1450. 

Le  Propriétaire-Gérant  :  F.  VIEWEG. 


Chartres.  —  Imprimerie  DURAND. 


RECHERCHES 

sur  l'origine  de 

LA    PROPRIÉTÉ    FONCIÈRE 

ET  DES  NOMS  DE  LIEU  EN  FRANCE 

Cinquième  article  (a) 


Les  noms  de  lieux  dérivés  du  gentilice  Silvanius  offrent  une 
grande  analogie  avec  ceux  qui  sont  tirés  de  Silvinius,  et  il 
doit  être  souvent  difficile  de  les  en  distinguer. 

Silviniaçus  est  le  nom  d'une  villa  dépendant  de  l'abbaye 
de  Saint-Aubin  d'Angers,  comme  on  le  voit  par  un  diplôme 
émané  de  Charles  le  Chauve  en  851  I.  Une  autre  villa  Silvi- 
niaçus était  située  dans  le  Tonnerrois  et  dépendait  de  l'abbaye 
de  Montier-la-Celle,  Aube,  à  laquelle  elle  fut  donnée  en  85  e 
par  le  même  roi 2.  Un  troisième  Silviniaçus  appartenait  à 
l'église  d'Autun  et,  à  la  fin  du  IXe  siècle,  était  possédé  à  titre 
de  précaire  par  une  femme  noble  ;  le  roi  Eude  la  maintint 
en  possession  de  ce  bien  en  890?.  En  979,  le  roi  Louis  V 
comprend  un  quatrième  Silviniaçus  dans  la  nomenclature, 
qu'il  donne,  des  propriétés  de  l'église  d'Orléans  4, 

La  forme  romaine  de  ce  nom   de  lieu  est  Silvinianus,  et 


(a)  Voyez  t.  VIII,  p.  96  et  302;  t.  IX,  p.  36  et  208. 

1.  Dom  Bouquet,  VIII,  518  b. 

2.  Dom  Bouquet,  VIII,  547  c. 

3.  Dom  Bouquet,  IX,  454  b. 

4.  Dom  Bouquet,  IX,  660  e.  661  a 

Revue  Celtique,  IX,  20 


502  H.  d'Arbois  de  Jubainvdle. 

nous  la  trouvons  en  814  dans  un  diplôme  de  Louis  le  Débon- 
naire concernant  une  abbaye  située  à  Brescia,  et  une  autre 
abbaye  à  Nonantola,  près  de  Modène  l. 

Silviniacus  est  dérivé  de  Silvinius.  Une  femme  dont  l'épi1 
taphe  a  été  trouvée  à  Lyon  avait  pour  mari  un  certain  Silvi- 
nius Balbinus  2.  Une  dédicace  par  L.  Silvinius  Respectus  est 
conservée  au  musée  de  Cologne  ? .  On  a  recueilli  dans  la  Ba- 
vière rhénane  une  autre  dédicace  par  deux  Silvinius  surnommés 
l'un  Justus  et  l'autre  Dubitatus^. 

De  Silviniacus  vient  Selvigny,  nom  d'une  commune  du  dé- 
partement du  Nord. 

Sentiacus,  aujourd'hui  Sinzig,  près  de  Coblenz5,  est  une 
localité  où  se  trouvait  un  palais  d'où  Pépin  le  Bref  a  daté  un 
diplôme  en  762  6.  Sentiacus  est  aussi  mentionné  dans  un  autre 
diplôme  du  même  prince  et  de  la  même  année  7.  L'empe- 
reur Lothaire  y  fit  un  séjour  en  842,  et  en  nous  rapportant  ce 
fait,  les  Annales  de  Saint-Bertin  se  servent  de  l'expression  Sen- 
tiacuni  palatium8,  les  Annales  de  Fulde  emploient  celle  de  villa 
sentiaca9.  Mais  la  forme  masculine  était  la  plus  usitée  :  en  876, 
nous  la  retrouvons  encore;  Louis,  fils  de  Louis  le  Germa- 
nique, allant  d'Andernach  à  Aix-la-Chapelle,  passe  à  Sin- 
ciacus  I0. 

La  forme  romaine  de  ce  nom  est  Sent ia nus,  nom  d'une 
station  de  l'Italie  méridionale,  non  loin  de  Bénévent11. 

1.  Migne,  Patrologia  latina,  t.  CIV,  col.  1007.  Sickel,  Acta  Karolinorum, 
t.  II,  pp.  87,  88,  n»  12. 

2.  Boissieu,  Inscriptions  de  Lyon,  p.  (313. 

3 .  Brambach,  nJ  406.. 

4.  Brambach,  n°  1790. 

5.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  x.  II,  p.  4S3.  Cf.  Mabillon,  De  re  diploma- 
tica,  liv.  IV,  §  cxxxi. 

6.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  6,  n°  19. 

7.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  6,  n°  20.  Migne,  Palrologia  latina, 
t.  XCVI,  col.  1539  d- 

8.  Dora  Bouquet,  VII,  60  d. 

9.  Dom  Bouquet,  VII,  160  a. 

10.  Migne,  Patrologia  latina,   t.  CXXV,   col.    1280  b;  Annales  de  Saint- 
Bertin,  chez  Dom  bouquet,  VII,  122  e. 

11.  Itinéraire  d' Antonin,  édition  Parthev  et  Pinder,   p.   112;  cf.  Corpus, 
t.  IX,  p.  637. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lien  en  France.  303 

Sentiacus  dérive  du  gentilice  romain  Sentius.  Le  préteur 
C.  Sentius,  connu  surtout  parce  que,  comme  le  raconte  Var- 
ron,  il  ne  buvait  de  vin  de  Chio  que  par  ordonnance  de  mé- 
decin I,  fut  battu  par  les  Thraces  l'an  89  avant  notre  ère  2.  On 
lit  sur  des  monnaies  romaines  les  noms  de  L.  Sentius  C. 
filius?.  C.  Sentius  Saturninus  obtint  les  honneurs  consulaires 
l'an  19  avant  J.-C.  4.  Un  autre  C.  Sentius  fut  préteur  de  Syrie 
trente-huit  ans  plus  tard).  Ce  gentilice,  fréquent  dans  les 
inscriptions  de  la  période  impériale  6,  pénétra  en  Gaule.  Un 
certain  C.  Sentius  apparaît  dans  une  inscription  du  musée  de 
Mayence?;  Sentius  Ursio,  dans  une  inscription  de  Cologne8; 
Sentius  Successianus  dans  une  épitaphe  trouvée  à  Fully,  près 
Martigny,  en  Suisse  9  ;  C.  Sentius  Diadumenus,  médecin,  lit  à 
Mars  une  dédicace  dont  on  signale  l'existence  à  Yverdun  dans 
le  même  pays  I0. 

Sentiacus,  dérivé  de  Senîius,  n'a  pas  laissé  en  France  de 
traces  certaines.  Il  est  cependant  possible  que  Sincey,  Côte- 
d'Or,  soit  un  ancien  Sentiacus11.  En  général,  on  peut  croire 
qu'en  français  Sentiacus  s'est  confondu  avec  *  Sancliacus,  traité 
plus  haut. 

Severiacus  est  le  nom  d'une  villa  située  près  de  Tours  et 
qui  appartenait  à  l'église  de  Paris  au  vie  siècle,  comme  nous 
le   voyons  par  la   vie    de  saint    Germain,   évêque  de   Paris, 


1  .   Pline,  Histoire  naturelle,  livre  XIV,  §  96. 

2.  Tite-Live,  epitome  du  livre  LXX.   Cf.    Cicéron,  in   Verrem,  II,   93  ; 
in  Pisonem,  34;  et  Mommsen,  Histoire  romaine,  sixième  édition,  t.  II,  p.  285. 
•3 .   Corpus,  I,  409. 

4.  Corpus,  t.  I,  nos  742,  743,  pp.  346,  547;  c'est  sous  son  consulat  que 
mourut  Virgile.  Voyez  les  fragments  de  Suétone  dans  l'édition  de  cet  au- 
teur donnée  par  L.  Roth  chez  Teubner,  p.  796. 

5.  Tacite,  Annales,  II,  74. 

6.  Corpus,  t.  V,  p.  1126,  col.  1  et  2  ;  t.  VIII,  p.  ion,  col.  1  ;  t.  X, 
p.  1054,  col.  3  et  4;  p.  1063,  col.  4. 

7.  Brambach,  n&  78. 

8.  Brambach,  n°  361. 

9.  Mommsen,  Inscriptiones  helveticae,  n"  13. 

10.  Mommsen,  ibid.,  n°  136. 

1 1 .  Cette  hypothèse  n'est  pas  admise  par  Garnier,  Nomenclature  historique 
des  communes,  etc.,  du  département  de  la  Côte-d'Or,  p.  171,  n''  677. 


304  H.  d'Arbois  de  Jubainville. 

qu'écrivit  Fortunat1.  Des  documents  de  l'époque  carlovin- 
gienne  et  du  commencement  de  la  période  capétienne  con- 
servés par  le  cartulaire  de  l'abbaye  de  Conques,  Aveyron,  nous 
font  connaître  trois  Severiacus  situés  dans  le  voisinage  de  ce 
monastère2. 

Severiacus  est  dérivé  de  Severius,  gentilice  romain  dérivé 
lui-même  du  cognomen  plus  ancien  Sereins  >.  Le  gentilice 
Severius  se  trouve  en  Italie  ;  on  a  recueilli  par  exemple  à 
Milan  l'épitaphe  de  Q.  Severius  Saturianus4.  Ce  nom  pénétra 
en  Gaule.  Le  musée  de  Nîmes  possède  l'épitaphe  de  L.  Seve- 
rius Severinus,  édile  de  la  colonie  de  Nîmes  5.  Celui  d'Avi- 
gnon, l'épitaphe  de  Severius  Viator  6.  On  a  trouvé  à  Die  l'épi- 
taphe de  Severius  Myron  7.  Le  musée  de  Genève  possède  une 
dédicace  au  dieu  Liber  par  P.  Severius  Lucanus.  Elle  a  été 
trouvée  à  Saint-Prex,  dans  l'ancien  territoire  de  la  colonie  de 
Noviodunum,  aujourd'hui  N}ron8.  L.  Severius  Martius  fit  faire 
à  sa  femme  une  épitaphe  découverte  il  y  a  plus  de  deux  siècles 
près  d'Avenche,  en  Suisse  9.  Non  loin  de  là,  à  Wifelsburg,  on 
a  lu  jadis  une  épitaphe  que  Severius  Marcianus  fit  graver  pour 
sa  sœur10.  Le  musée  de  Chalon-sur-Saône  possède  l'épitaphe 
de  Severia  Severa11.  Une  seconde  Severia  Severa  figure  dans 
une  autre  épitaphe  trouvée  à  Lyon  I2.  L'épitaphe  de  Severia 
Fuscina  existe  au  palais  des  Arts,  à  Lyon1?.  M.  Germer  Du- 
rand a  lu,  il  y  a  quelques  années,  les  noms  de  L.  Severius  Se- 


1.  Vita  sancti  Germani parisiensis  episcopi,  c.  64;  Migne,  Patrologia  latina, 
t.  LXXXVIII,  col.  474  c;  éd.  de  Fortunat  donnée  par  B.  Krusch  dans  les 
Monumenia  Germaniae,  in-40,  t.  II,  p.  24.  Cf.  Longnon,  Géographie  de  Li  Gaule 
au  sixième  siècle,  p.  292. 

2.  Desjardins,  Cartulaire  de  l'abbaye  de  Conques,  p.  55,  155,  136,  185, 
192,  505. 

3.  Voyez  par  exemple  Corpus,  t.  I,  n"  1422. 

4.  Corpus,  V,  5962. 

5.  Herzog,  Galliae  Xarboncnsis  . .  .  historia,  t.  II,  p.  35,  n"  140. 

6.  Herzog,  ibid..,  p.  74,  n"  337. 

7.  Herzog,  ibid.,  p.  98,  n°  461. 

8.  Mommsen,  Inscriptiones  belvelicae,  n»  113. 

9.  Mommsen,  ibid.,  n"  191. 

10.  Mommsen,  ibid.,  n"  202. 

11.  Boissieu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon,  p.  217. 

12.  Boissieu,  ibid.,  p.  421. 

13.  Boissieu,  ibid.,  p.  523. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  30$ 

verus  dans  une  inscription  de  Bruges,  commune  de  Palhers, 
Lozère  l. 

Suivant  M.  Longnon,  le  Severiacus  dont  parle  Fortunat,  au 
vie  siècle,  est  Civray-sur-Cher,  Indre-et-Loire.  Le  même  dé- 
partement contient  une  autre  commune  dont  le  nom  s'ex- 
plique par  la  même  étymologie,  c'est  Civray-sur-Esve.  Il  y  a 
encore  en  France  deux  autres  communes  de  Civray,  l'une 
dans  le  Cher,  l'autre  dans  la  Vienne,  et  le  nom  de  chacune  a 
probablement  la  même  origine.  Dans  le  Midi,  Severiacus  a 
donné  Civrac;  on  compte  dans  la  Gironde  trois  communes  de 
Civrac  ;  ailleurs,  la  désinence  -acus  est  devenu  -ieux  ou  -y  : 
nous  citerons  deux  Civrieux,  Ain,  Rhône  ;  quatre  Civry, 
Côte-d'Or,  Eure-et-Loir2,  Seine-et-Oise,  Yonne  3.  Dans  tous 
ces  noms,  IV  initial  a  été  supplanté  par  un  c.  Us  persiste  dans 
les  suivants  :  Sevrai,  Orne;  Sevrey,  Saône-et-Loire  ;  Sévrv, 
Cher;  deux  Séverac  dans  l'Aveyron-L 

On  pourrait  expliquer  aussi  par  Severiacus  le  nom  de  six 
communes  de  Sivrv,  parmi  lesquelles  deux  dans  la  Meuse  et 
quatre  dans  les  départements  des  Ardennes,  de  la  Marne,  de 
Meurthe-et-Moselle  et  de  Seine-et-Marne. 

Toutefois,  le  nom  d'une  de  ces  communes  remonte  à  une 
autre  origine.  Sivry-sur-Meuse,  dans  le  département  de  la 
Meuse,  s'est  appelé  superiacus  au  xe,  au  xie  et  au  xne  siècle. 
Uu  de  la  première  syllabe  n'a  commencé  à  se  prononcer  i 
qu'au  xiiie  siècle,  comme  l'établit  M.  Liénard  dans  son  Diction- 
naire topographique  du  département  de  la  Meuse,  page  224.  Supe- 
riacus est  dérivé  de  Superius,  gentilice  que  nous  fait  connaître 
une  épitaphe  africaine,  celle  de  Superius  Flavianus  >.  On  ne 
peut  donc  comprendre  Sivry-sur-Meuse  dans  la  liste  des  noms 
de    communes  qui  offrent  la   forme  moderne  d'un   primitif 


1.  Bulletin èpigraphique,  t.  I,  p.  74. 

2.  Siveriacum  vers  1230.  Lucien  Merlet,  Dictionnaire  topographique  du  dé- 
partement d'Eure-et-Loir,  p.  49. 

3.  Sivriacum  en  11 70.  Quantin,  Dictionnaire  topographique  du  département 
de  l'Yonne,  p.  36. 

4.  Ce  sont  deux  des  Severiacus  du  Cartulaire  de  Conques.  Severac,  Loire- 
Inférieure,  suppose  un  ancien  *  Severacus  dérivé  de  Severus  ;  voyez  Cartulaire 
de  Redon,  p.  314. 

5.  Corpus,  t.  VIII,  n°  9639. 


jo6  H.  d'Artois  de  Jubainville. 

Severiacus.  Il  en  reste  vingt-trois.  Il  est  possible  que  dans  le 
nombre  quelques-uns  soient,  comme  Sivry-sur-Meuse,  d'an- 
ciens Snperiacus,  cependant  le  gentilice  Superius  étant  beau- 
coup plus  rare  que  le  gentilice  Severius,  le  dérivé  Severiacus  a 
dû  être  plus  fréquent  que  le  dérivé  Superiacus. 

*Sexciacus  est  un  nom  de  fundus,  d'où  vient  le  nom  du 
viens  sexciacensis  situé  dans  le  Bigorre,  c'est-à-dire  probable- 
ment dans  le  département  des  Hautes-Pyrénées.  Vers  la  fin  du 
vic  siècle,  Grégoire  de  Tours  nous  rapporte  que  là  fut  enterré 
le  prêtre  saint  Justin  et  que,  dans  une  dépendance  de  ce  viens, 
le  prêtre  saint  Sévère  fit  bâtir  une  église1.  *Sexciacus  est  une  or- 
thographe de  basse  époque  pour  *Sextiacus.  L'orthographe  plus 
altérée  encore,  Sessiacus,  nous  est  offerte  en  854  par  un  di- 
plôme de  l'empereur  Lothaire  pour  l'abbaye  de  Saint-Claude2. 

Ces  noms  de  lieux  sont  dérivés  du  gentilice  romain  Sexlius, 
porté  par  une  famille  plébéienne.  Dès  l'an  339  avant  notre  ère, 
L.  Sextius  était  tribun  du  peuple  à  Rome?.  Un  autre  L.  Sex- 
tius,  tribun  du  peuple  en  377,  se  rendit  célèbre  par  l'ardeur  et 
le  succès  de  sa  lutte  contre  les  patriciens  •+ ;  il  fut  le  premier 
plébéien  élevé  au  consulat,  l'an  366  avant  notre  ère>.  C.  Sex- 
tius Calvinus,  consul  l'an  124  avant  notre  ère6,  porta  ce  nom 
en  Gaule  ;  il  y  fut  proconsul  les  deux  années  qui  suivirent  son 
consulat,  et  y  fonda  la  ville  à'Aqucte  Sexliae,  aujourd'hui  Aix 
en  Provence,  le  premier  établissement  des  Romains  dans  la  ré- 
gion qui  est  devenue  la  France".  On  a  recueilli  quelques  ins- 
criptions qui  attestent  l'existence  en  Gaule  du  gentilice  de  ce 
consul  :  telles  sont  l'épitaphe  de  M.  Sextius  Atticus,  trouvée  à 
Yerenay,   Rhône8;  les  marques  de  fabrique  de  C.    Sex[tius] 


1.  De  ghria  confessorum,  c.  49,  50;  Bordier,  Les  livres  des  miracles,  t.  II, 
pp.  436,  438;  éd.  Arndt  et  Krusch,  c.    |<S.  49,  p.  777,  1.  3,  11. 

2.  Dam  Bouquet,  VIII,  394  a. 

3  .    Tite-Live.  liv.  IV,  c.  49,  §  6. 
4.    Tite-Live,  liv.  VI,  c.  33. 
3     Tite-Live,  liv.  VII,  c.   1. 

6.  Corpus,  t.  I,  pp.  334,  333.  Cf.  n"  632. 

7.  Voyez  l'étude  faite  sur  lui  par  M.  E.  Desjardins,  Géographie  historique 
et  administrative  de  la  Gaule  romaine,  t.  II,  pp.  271-273. 

8.  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  III,  p.  5. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  307 

Eutvches r,  et  de  C.  Sext[ius]  Post[umus]  au  musée  de 
Vienne  (Isère)2.  Une  inscription  de  Lyon  nous  a  conservé 
les  noms  de  P.  Sextius  Florus  5  ;  une  inscription  d'Ingweiler, 
Alsace,  ceux,  de  L.  Sextius  Marcianus4;  une  inscription  d'Hut- 
tich,  en  Hesse,  ceux  de  L.  Sextius  PerwincusJ. 

C'est  d'un  primitif  *  Sextiacus  que  viennent  probablement 
les  noms  de  deux  communes  de  Sexey,  Meurthe-et-Moselle, 
appelées  chacune  Sessiacum  en  105  o6.  Sissy,  Aisne,  est  aussi 
appelé  Sessiacum  en  11 68".  Peut-être  Cessey,  Doubs,  et  Ces- 
sieu,  Isère,  ont-ils  la  môme  origine.  On  explique  autrement 
le  nom  de  Cessey-sur-Tille,  Côte-d'Or8,  et  de  Cessy-les-Bois, 
Xicvre  9. 

Siliacus  est  un  locus  dépendant  de  Lagny-le-Sec,  Oise,  aux 
termes  d'un  diplôme  de  Thierry  III  qui  remonte  à  688  io.  Un 
diplôme  de  Charlemagne  pour  l'abbaye  de  Saint-Calais,  en  774, 
nous  transporte  dans  le  Maine  «  in  condita  siliacense  ».  Dans 
cette  condita  se  trouve  une  villa  appelée  curte  Bosane11.  Un  di- 
plôme de  Charles  le  Gros,  en  faveur  de  l'abbaye  de  Saint- 
Etienne  de  Dijon,  en  885,  nous  montre  en  Bourgogne  un  autre 
Siliacus  situé  «  in  comiîatu  uscarensi  »,  c'est-à-dire  un  peu  au 
sud  de  Dijon  I2. 

Siliacus  vient  de  Silius,  gentiliçe  qui  apparaît  dans  les  der- 
niers temps  de  la  république  romaine,  et  qui  n'était  pas  rare 


1.  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  IV,  p.  9. 

2.  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  IV,  p.  194. 

3.  Boissieu,  Inscriptions  de  Lyon,  p.  194. 

4.  Brambach,  Inscriptiones  rhenanae,  n°  1878. 

5.  Brambach,  n°  1088. 

6.  Lepage,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  la  Meurthe,  p.  129. 

7.  Matton.  Dictionnairi  topographique  du  département  de  l'Aisne,  p.  261. 

8.  Saciacus.  Garnier,  Nomenclature  historique  des  communes,  etc.,  du  dépar- 
tement de  la  Côte-d'Or,  p.  20,  n°  80. 

9 .  Sassiacense    monasterium,  cenobium  Saxiacense.  Souhrait,   Dictionnaire 
topographique  du  département  de  la  Nièvre,  p.  32. 

10.  Pardessus.  Diplomata,  t.  II,  p.  20S  :  Tardif,  Monuments  historiques, 
p.  20,  col.  2.  Pertz.  Diplomatum  imperii  tomus primas,  p.  51,  ligne  32.  Cf. 
Longnon,  Examen gèograpliique,  p.  26. 

11.  Dom  Bouquet,  V,  724  b.  Cf.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  22, 
n°  22. 

12.  Dom  Bouquet,  IX,  336  c. 


508  H.  d'Arbois  de  Jubainrille. 

sous  l'empire.  Ainsi,  sous  la  république,  P.  Silius  Nerva,  élevé 
à  la  préture  l'an  59  avant  notre  ère,  fut,  quelques  années 
après,  avec  le  titre  de  propréteur,  chargé  de  l'administration 
de  la  Bithynie  et  du  Pont.  C'était  un  des  amis  de  Cicéron1. 
Le  grand  orateur  eut  des  relations  d'affaires  avec  un  autre  Si- 
lius  dont  le  prénom  était  Aulus  2.  Sous  l'empire,  on  trouve 
dans  les  fastes  consulaires,  en  l'an  20  avant  J.-C,  P.  Silius 
Nerva  s.  P.  Silius  fut  consul  suffectus  en  l'an  3  après  J.  C.4 
C.  Silius  parvint  au  consulat  en  l'an  13  de  notre  ère  5.  P.  Si- 
lius Nerva  obtint  la  même  dignité  en' l'an  28  6.  Sous  Claude, 
C.  Silius,  consul  désigné,  dut  une  célébrité  scandaleuse  à  son 
mariage  avec  Messaline7.  Le  poète  Silius  Italicus  acquit  par 
ses  vers  d'autres  titres  à  la  notoriété  ;  il  n'était  pas  seulement 
homme  de  lettres,  il  obtint  les  honneurs  consulaires  en  l'an  68 
de  notre  ère  8. 

Les  noms  de  lieux  que  nous  avons  cités  attestent  que  ce 
gentilice  pénétra  en  Gaule.  Nous"  ignorons  si  ce  fut  par  l'in- 
fluence de  l'un  des  personnages  que  nous  venons  de  .men- 
tionner; ce  que  nous  savons,  c'est  que  le  C.  Silius,  consul  en 
l'an  13,  commanda  l'armée  de  la  Germanie  supérieure,  avec 
titre  de  légat,  pendant  sept  ans,  de  l'an  14  à  l'an  21  de  notre 
ère  9. 

Siliacus,  dérivé  de  Silius,  est  devenu  dans  le  Midi  Silhac  ; 
c'est  le  nom  d'une  commune  du  département  de  l'Ardèche; 
dans  le  Nord,  d'autres  formes  modernes  de  Siliacus  nous  sont 
offertes  par  Sillé,  nom  de  deux  communes  de  la  Sarthe  ; 
Silley,  nom  de  deux  communes  du  Doubs  ;  Silli,  nom  d'une 
commune  de  l'Orne  ;  Silly,  nom  porté  par  trois  communes, 


1.  Cicéron,  Ad  jamiliares,  liv.  VII,  ep.   21;  Uv.    IX,  ep.   16;   liv.  XIII, 
ep.  61,  62,  63,  64,  65. 

2.  Ad  Atticum,  liv.  XII,  ep.  24-31,  35,  }$. 

3.  Corpus,  t.  I,  pp.  540,  547.  Josephus  Klein.  Fasti  consuîares,  p.  9. 

4.  Corpus,  t.  I,  p.  548.  Josephus  Klein,  p.   13. 

5.  Corpus,  t.  I,  pp.  330,  351,  n°s  762,  763.  Josephus  Klein,  p.  20. 

6.  Josephus  Klein,  p.  2b. 

7.  Tacite,  Annales,  liv.  XI,  c.  26,  27. 

8.  Josephus  Klein,  p.  41. 

9.  E.  Desjardins,  Géographie  historique  et  administrative  delà  Gaule  ro- 
maine, t.  III,  p.  248. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  309 

deux  dans  l'Oise,  une  dans  l'Aisne.  Le  nombre  total  de  ces 
communes  s'élève  à  neuf. 

Silviagus,  orthographe  de  basse  époque  pour  Silviacus,  est 
le  nom  d'un  viens  où  étaient  situées  des  vignes  qu'en  615 
Bertramne,  évêque  du  Mans,  donna  à  la  basilique  de  Saint- 
Germain,  fondée  par  lui  près  de  la  ville  du  Mans1.  La  légende 
Silviaco  se  lit  sur  une  monnaie  mérovingienne 2,  et  nous 
ignorons  où  était  située  la  localité  que  désigne  cette  légende 
monétaire.  Mais  il  est  vraisemblable  que  le  Silviacus  inscrit 
en  832  dans  la  liste  des  villae  et  des  vici  dépendant  de  l'église 
du  Mans  que  nous  a  conservée  un  diplôme  de  Louis  le  Débon- 
naire 3  est  identique  au  Silviagus  du  testament  de  Bertramne. 
Un  autre  Silviacus  est  aujourd'hui  Servais,  Aisne  4;  les  empe- 
reurs carlovingiens  y  avaient  un  palais  dont  il  est  question 
pour  la  première  fois  sous  le  règne  de  Louis  le  Débonnaire. 
Ce  prince  data  du  palais  royal  de  Silviacus  deux  diplômes,  le 
premier  en  820  >,  le  second  en  830  6.  Plusieurs  diplômes  de 
Charles  le  Chauve  ont  été  donnés  au  palais  de  Silviacus  en 
846  7,  en  847  8,  en  872  9.  On  peut  considérer  comme  défec- 
tueuse l'orthographe  Silvaico  palatio,  dans  un  diplôme  du 
même  roi  en  850  I0,  et  l'orthographe  Silvacus  employée  pour 
désigner  le  nom  du  lieu  où  aurait  été  promulgué  aussi  par 
Charles  le  Chauve  un  célèbre  capitulaire  de  l'année  853  ri.  Un 
troisième  Silviacus,  situé  dans  une  tout  autre  partie  de  la 
France,   dépendait  en   967  du   monastère  de  Saint-Pierre  de 


1.  Pardessus,  Diphmata,  t.  I,  p.  209. 

2.  A.  de  Barthélémy,  Bibliothèque  de  l'Ecole  des  Chartes,  t.  XXVI,  p.  462, 
n°  599- 

3.  Dom  Bouquet,  VI,  585  e.  Cf.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  179, 
n°  308. 

4.  Manon,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  l'Aisne,  p.  260. 

5.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  132,  n°  162. 

6.  Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  166,  n°  270. 

7.  Dom  Bouquet,  VIII,  484  e. 

8.  Dom  Bouquet,  VIII,  492  b. 

9.  Dom  Bouquet,  VIII,  636  d. 

10.  Dom  Bouquet,  VIII,  508  e. 

11.  Dom  Bouquet,  VII,  613    c.   Comparez  Mabillon,  De  rc  diplomatica, 
livre  IV,  c.  132. 


3 1  o  H.  d'Arbois  de  Jubainvillc. 

Vienne,  Isère;  nous  l'apprenons  par  un  diplôme  de  Conrad  le 
Pacifique,  roi  de  Bourgogne  transjurane  et  de  Provence1. 

Silvius,  d'où  Silviacus,  est  un  nom  qui  appartient  d'abord 
à  l'histoire  mythologique  de  Rome.  Le  fils  d'Ascagne,  fils  lui- 
même  d'Enée,  s'appelle  Silvius,  règne  sur  les  Latins,  et  après 
lui,  Silvius  devient  un  surnom  commun  à  ses  successeurs  2. 
C'est  dans  les  inscriptions  du  temps  de  l'empire  que  le  genti- 
lice  Silvius  apparaît.  La  Gaule  nous  en  offre  quelques  exem- 
ples. Le  musée  du  mont  Saint-Bernard  contient  une  dédicace 
à  Jupiter  Poeninus  par  Q_.  Silvius  Perennius,  iabellarius  de  la 
colonie  des  Séquanes  3.  Une  inscription  d' Yverdun  nous  a  con- 
servé les  noms  de  T.  Silvius  Similis  4.  Ceux  de  Q_.  Silvius 
Spe[ratus],  centurion  de  la  première  cohorte  des  Belges,  nous 
sont  connus  par  une  inscription  de  l'île  de  Brazza  sur  la  côte 
de  Dalmatie  >.  On  a  trouvé  plusieurs  fois,  tant  en  Gaule  qu'en 
Angleterre,  la  marque  du  potier  Silvius  6. 

Simplicciacus  est  le  nom  d'une  villa  placée  dans  le  Maine 
en  658  par  un  diplôme  de  Clotaire  III 7.  Elle  reparait  en  862 
dans  un  diplôme  de  Charles  le  Chauve  où  son  nom  est  écrit 
sans  doublement  du  c  de  la  troisième  syllabe,  Siiupliciaco8. 

Siniplicius,  d'où  Simpliciacus  est  dérivé,  est  un  gentilice  peu 
fréquent,  mais  usité  en  Gaule  ;  ainsi  on  a  trouvé  en  Gueldre 
deux  dédicaces  émanées  de  personnages  qui  avaient  ce  genti- 
lice. L'une  a  pour  auteur  Siniplicius  Superus,  decurio  alae  Vo- 
contiorum  dans  l'armée  de  Bretagne  9;  on  sait  que  lesVocontii 
habitaient  Yaison,  Yaucluse  et  les  environs.  L'autre  dédicace 
a  été  faite  par  Siniplicius  Ingenuus  I0.  L'épitaphe  de  Simplicia 


1.  Dom  Bouquet.  IX,  702  b. 

2.  Tite-Live,  liv.  I.  c.  3.  §  6,  7,  8    Cf.  Virgile.  Enéide,  VI.  705.  769. 

5.  Corpus,  Y,  6887    Mommsen.  Inscriptiones  Helvelicae,  n1  42. 
4.  Mommsen.  Inscriptiones  helvelicae,  n°  13S. 

) .  Corpus,  III.  5093. 

6.  Schuermans.  Siglesfigulins,  p    248,  n0i  5240-3240. 

7.  Tardif.  Monuments  historiques,  p.   13,  col.    1.   Pertz.  Diplomatum  im- 
perii  tomus primus,  p    35.  lignes  40.  41. 

8.  Tardif.  Monuments  historiques,  p.  117.  col.  2. 

9.  Brambach,  n°  b~. 
10.  Brambach,  n°  97. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  3 1 1 

Acutilla,  conservée  à  Milan  I,  nous  offre  encore  un  exemple 
du  gentilice  Simplicius.  Dans  d'autres  monuments  c'est  un 
cognomen. 

Sociacus  est  une  villa  qu'un  testament,  écrit  vers  l'année  690, 
met  en  Vexin  2.  Un  autre  Sociacus,  qualifié  de  colonia,  appar- 
tenait à  l'église  Saint-Martin  de  Tours,  en  862,  comme  on  le 
voit  par  un  diplôme  de  Charles  le  Chauve  3.  On  croit  que 
c'est  Sausay,  commune  de  Montrichard,  Loir-et-Cher. 

Sociacus  est  dérivé  de  Sociits,  gentilice  peu  commun  dont  la 
forme  féminine  nous  est  conservée  par  une  inscription  de 
Pola,  en  Istrie,  où  on  lit  les  noms  de  Soda  Maximal  La  va- 
riante Soccius  résulte  d'une  inscription  de  Cherasco  où  l'on 
trouve  les  noms  de  Soccia  Modesta>. 

Un  gentilice  qui  présente  avec  celui-là  une  grande  ressem- 
blance de  son,  et  qui  a  été  beaucoup  plus  fréquent,  est  Sosius, 
nom  par  exemple  d'un  des  deux  partisans  d'Antoine  qui,  à  la 
bataille  d'Actium,  commandaient  sa  flotte6. 

Dç  Sosius  on  a  pu  tirer  le  nom  de  lieu  dérivé  Sosiacus  qui, 
à  une  basse  époque,  devait  se  confondre  avec  Sociacus.  C'est 
par  l'un  ou  l'autre  que  doivent  probablement  s'expliquer  les 
noms  des  trois  Soisy  du  département  de  Seine-et-Oise  ;  de 
Soisy,  Seine-et-Marne;  de  Soizé,  Eure-et-Loir;  Soizy,  Marne. 

De  *  Solle.mxiacus,  par  abus  * Solemniacus,  dérive  l'adjectif 
solemniacensis ,  épithéte  d'un  ager  situé  en  Limousin,  suivant 
l'acte  de  fondation  de  l'abbaye  de  Solignac,  Haute-Vienne, 
par  saint  Eloi,  en  631  7.  Solignac  est  une  forme  moderne  de 
.Solemniacus* .  Un  autre  ager  solemniacensis,  situé  dans  le  Ton- 

1 .  Corpus,  V,  6093. 

2.  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  21,  col.    1. 

3.  Dora  Bouquet,  VIII,  573  a.  Cf.  Mabille,  La  pancarte  noire  de  Saint- 
Martin  de  Tours,  p.  63,  n°  XIV,  p.  139,  n°  61,  p.  235. 

4.  Corpus,  V,   141 . 

3 .    Corpus,  V,  7678. 

6.  Velleius  Paterculus,  liv.  II,  c.  83,  §  2.  Cf.  c.  86,  §  3. 

7.  Fardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.   11. 

8.  Voir  sur  la  même  abbaye  un  diplôme  de  Louis  le  Débonnaire  en  817, 
Dom  Bouquet.  VI,  504.  Son  nom  est  écrit  avec  deux  /  :  Sollemniacus .  Cf. 
Sickel,  Acta  Karolinorum,  t.  II,  p.  117,  n°  ni. 


312 


H.  d'Arbois  de  Jubainville. 


nerrois,  est  mentionné  dans  un  acte  de  Vigile,  évêque 
d'Auxerre,  en  faveur  de  l'abbaye  de  Notre-Dame,  fondée  par 
lui  près  de  cette  ville  en  670  r.  Une  villa  Sollemniacus,  située 
en  Anjou,  fut  donnée  à  l'abbaye  de  Saint-Maur-sur-Loire,  par 
Charles  le  Chauve  en  850 2. 

Solcmiiiacus,  ou  mieux  Sollemniacus,  dérive  de  Sôllemnius, 
gentilice  assez  rare.  Une  inscription  d'Arabie  nous  a  conservé 
les  noms  de  Cl.  Sollemnius  Pac[atianus],  légal  us  Àugusti  pro 
praetoreî.  On  a  trouvé  dans  une  inscription  de  la  Bavière  rhé- 
nane, la  mention  d'une  femme  appelée  Sollemnia  Justa*.  L'épi- 
taphe  de  Solemnius  Fidus  paraît  exister  encore  à  Lyon  5. 

A  l'exception  de  Solignac,  Haute-Vienne,  nous  ne  pouvons 
affirmer  avec  certitude  quelles  sont  les  localités  de  la  France 
moderne  dans  lesquelles  on  doit  reconnaître  d'anciens  Sollem- 
niacus. 

*Soliacus  est  le  nom  de  lieu  que  suppose  l'adjectif  solia- 
censis  dans  le  livre  second  des  miracles  de  saint  Benoît  écrit 
au  temps  d'Archambauld  de  Sully,  archevêque  de  Tours,  981- 
1005  6.  Ce  castrum  est  aujourd'hui  Sully-sur-Loire,  Loiret.  Un 
autre  Soliacus,  moins  connu,  aujourd'hui  Souillac,  Lot,  est 
mentionné  en  962  dans  le  testament  de  Raimond  I,  comte  de 
Rodez/. 

Soliacus  paraît  dériver  de  Solius,  gentilice  conservé  par  une 
inscription  du  musée  de  Mannheim  qui  nous  apprend  les 
noms  de  P.  Solius  Suavis8.  Cependant,  l'orthographe  la  plus 
fréquente  est  Sollius  par  deux  /.  L.  Sollius  Secundo,  dans  une 
inscription   de  Vérone  9;  M.   Sollius  Atticus,  dans  une  ins- 


1.  Pardessus,  Diplomata,  t.  Il,  p.  153. 

2.  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  103,  col.  2. 

3.  Corpus,  t.  III,  n°  94;  Additamenta,  p.  969. 

4.  Brambach.  n°  1764. 

5.  Boissicu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon,  p.  299. 

6.  E.  De  Certain,  Les  miracles  de  suint  Beno't,  p.   107.  Cf.   Dom    Bou- 
quet, IX,  140  c. 

7.  Dom  Bouquet,  IX,  727  c. 

8.  Brambach,  1382. 

9.  Corpus,  Y,  3469. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  3 1 3 

cription  de  Nereto,  Italie  centrale1;  Sollia  Salvia,  à  Milan2; 
G.  Sollius  Marculus  et  G.  Sollius  Marcus,  à  Grenoble  3  ;  Sex. 
Sollius  Demosthenianus,  à  Cheyssieu,  Isère-*  ;  M.  Sollius  Mar- 
cellus  et  G.  Sollius  Verus,  à  La  Chapelle-Blanche,  Savoie.  5 
Soliacus  ou  *  Solliacus,  dérivés  de  Solius  ou  de  Sollius,  a 
donné  les  noms  de  communes  :  Souillac,  Lot,  dont  le  dimi- 
nutif est  Souillaguet,  même  département  ;  Souillé,  Sarthe  ; 
Souilly,  Meuse6;  enfin  six  Sully,  savoir:  deux  dans  le  Loi- 
ret, les  autres  dans  les  départements  du  Calvados,  de  la  Nièvre, 
de  l'Oise,  de  Saône-et-Loire. 

Tauryacus  est  le  nom  d'une  villa  située  en  Orléanais  et 
donnée  à  l'abbaye  de  Saint-Denis,  par  Dagobert  I,  en  635  7. 
Un  second  Tauriacus,  situé  dans  le  Maine,  est  mentionné 
dans  un  diplôme  donné  par  Clotaire  III,  en  658,  et  qui  nous 
apprend  que  c'était  une  villa,  propriété  de  l'abbaye  de  Saint- 
Denis  et  détenue  indûment  par  un  tiers  8.  Ce  Tauriacus  est 
peut-être  le  même  que  celui  dont  il  est  question  en  615,  dans 
le  testament  de  Bertramne,  évèque  du  Mans  9.  Un  troisième 
Tauriacus  appartenait  à  l'abbaye  de  Saint-Martin  de  Tours. 
Nous  en  trouvons  la  première  mention  dans  un  diplôme  de 
Charlemagne  en  775  io.  Son  nom  reparaît  dans  deux  diplômes 
de  Charles  le  Chauve  en  862.  L'un  de  ces  diplômes  nous  ap- 
prend que  cette  villa  était  située  en  Touraine11.  Une  quatrième 
villa  de  ce  nom  appartenait  à  l'abbaye  de  Sainte-Colombe  de 

1 .   Corpus,  IX,  5155. 
2  .    Corpus,  V,  6094. 

3.    Allmer,  Inscriptions  antiques  de  Vienne,  t.  I,  p.  329. 
•     4.   Allmer,  ibid.,  t.  III,  p.  100. 

5.  Allmer,  ibid.,  t.  III,  p.  470. 

6.  M.  Liénard,  Dictionnaire  topographique  du  département  de  la  Meuse, 
p.  227,  propose  de  rapporter  à  Souilly  la  monnaie  mérovingienne  où  l'on 
trouve  la  légende  Sauliaco  vico.  Mais  dans  tous  les  autres  textes  qu'il  cite  le 
nom  de  Souilly  est  écrit  avec  0  et  non  au. 

7.  Pertz,  Diplomatum  imperii  tomus primus,  p.  18,  1.  22. 

S.   Pertz,  Diplomatum  imperii  tomus  primus,  p.  33,  11.  41,  44. 
9.    Pardessus,  Diplomata,  t.  I,  p.  210. 

10.  Dom  Bouquet,  V,  737  c,  où  l'on  a  imprimé  Tauciacus.  Cf.  Mabille, 
La  Pancarte  noire  de  Saint-Martin  de  Tours,  p.  69,  n°  xvm  ;  p.  151,  n°  18; 
p.  236,  col.  1. 

11.  Dom  Bouquet,  VIII,  576  e.  Cf.  573  a. 


314  H.  d'Arboïs  de  Jubainville. 

Sens,  comme  le  constate  un  diplôme  de  Louis  le  Débonnaire 
en  83 6  x.  Un  cinquième  Tauriacus  était  situé  dans  le  diocèse 
de  Rodez;  l'abbaye  de  Joncelle  y  avait  une  église  dans  la  pos- 
session de  laquelle  elle  lut  confirmée  par  un  diplôme  du  roi 
Raoul  en  891  2. 

Tauriacus  dérive  de  Taurins.  Ce  gentilice,  bien  qu'assez 
rare,  apparaît  déjà  avant  la  fin  de  la  république  romaine,  dans 
une  inscription  de  Carthagène,  où  se  lisent  les  noms  de  L. 
Taurius  Aefolan[us],  c'est-à-dire  originaire  d'Aefula,  dans  le 
Latium.3.  P.  Taurius  Secundus  figure-  dans  une  inscription 
trouvée  près  d'Aquilée4;  C.  Taurius  Ursinus,  dans  une  ins- 
cription des  environs  d'Esté  5.  Une  épitaphe  trouvée  à  Viel- 
Arzew,  en  Afrique,  nous  fait  connaître  les  noms  de  Taurius 
Senecio6. 

Tauriacus  est  devenu  dans  le  midi  de  la  France  Tauriac, 
nom  de  quatre  communes,  savoir  :  deux  dans  l'Aveyron,  un 
dans  chacun  des  départements  de  la-  Gironde  et  du  Lot.  On 
doit  probablement  attribuer  la  même  origine  aux  deux  Thoiré 
du  département  de  la  Sarthe  ;  aux  trois  Thoiry  de  l'Ain,  de 
la  Savoie  et  de  Seine-et-Oise  ;  à  Thoré,  Loir-et-Cher  ;  à  cinq 
Thorey,  dont  trois  dans  la  Côte-d'Or,  un  dans  chacun  des 
deux  départements  de  Meurthe-et-Moselle  et  d'Yonne  ;  à  deux 
Thoury,  Loir-et-Cher,  Seine-et-Marne  ;  à  Thuré,  Vienne  ; 
Thurey,  Doubs,  Saône-et-Loire;  à  cinq  Thury,  sur  lesquels 
deux  dans  l'Oise,  un  dans  chacun  des  départements  du  Cal- 
vados, de  la  Côte-d'Or  et  de  l'Yonne  7;  enfin  trois  Toury  dont 
un   dans  l'Eure-et-Loir 8,  les   deux   autres  dans    la   Nièvre  9. 


1.  Dom  Bouquet,  VI,  611  a.  Cf.  Sickel,  Acta Karolinarum,  t.  II,  p.  191, 
no  347. 

2.  Dom  Bouquet,  IX,  456  a. 

3.  Corpus,  t.  I,  p.  564,  n°  1535;  t.  II,  n°  3408. 

4.  Corpus,  V,  8253. 
5  .   Corpus,  V,  2702. 

6.  Coi-pus,  VIII,  9765. 

7.  Thury,  Yonne,  s'est  d'abord  appelé  Tauriacus.  Quantin,  Dictionnaire 
topographique  du  département  de  l'Yonne,  p.  12S. 

8.  Thauriacus,  vers  1020,   Merlet,  Dictionnaire  topographique  du  départe- 
ment d'Eure-et-Loir,  p.  180. 

9.  Toury-sur-Abron,  Nièvre,  est   appelé  Tauriacus  par  une  charte   de 
l'année  1103.  Soultrait,  Dictionnaire  du  département  de  la  Nièvre,  p.  181. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  3 1 5 

Cela  forme  un  total  de  vingt-huit  noms  de  communes  dérivés 
du  gentilice  Taurins  qui  paraît  avoir  été  fort  répandu  en  Gaule 
à  l'époque  romaine. 

Tauricci'acus  est  une  villa  mentionnée  dans  un  jugement 
du  roi  Clotaire  III,  en  638  I. 

Tauricciacus  dont  le  c  a  été  doublé  pour  représenter  le  double 
son  qu'avait  pris  le  c  en  s'assibilant,  dérive  de  Tauricius,  gen- 
tilice conservé  par  une  inscription  dédicatoire  qui  a  été  jadis 
trouvée  dans  un  endroit  inconnu,  sur  les  bords  du  Rhin  infé- 
rieur, où  on  lit  les  noms  de  C.  Tauricius  Verus2,  et  par  une 
inscription  de  Lyon  où  se  trouvent  les  noms  de  L.  Tauricius 
Florentius  >. 

De  Tauricius  on  forma  le  dérivé  Tauriciacus ,  par  lequel 
s'expliquent  les  noms  de  trois  communes  appelées  Torcé,  Ille- 
et-Vilaine,  Mayenne,  Sarthe;  de  Torcieu,  Ain;  de  neuf  com- 
munes du  nom  de  Torcy  :  deux  dans  l'Aube,  deux  dans  la 
Seine-Inférieure  ;  les  cinq  autres  dans  l'Aisne,  la  Côte-d'Or,  le 
Pas-de-Calais,  Saône-et-Loire,  Seine-et-Marne  ;  Torsac,  Cha- 
rente ;  Torciac,  Haute-Loire  ;  Torxé,  Charente-Inférieure.  Le 
total  de  ces  noms  s'élève  à  seize  4. 

Taurisiacus ,  nom  d'un  viens  du  diocèse  de  Tours  où  une 
église  aurait  été  construite  par  ordre  de  l'archevêque  Euphro- 
nius,  556-573  5  est  vraisemblablement  une  variante  de  Tauri- 
ciacus. 

Tauriniacus  est  un  nom  de  lieu  mentionné  vers  l'année  700 
dans  le  testament  d'Erminthrude  qui  est  daté  de  Paris6  et  qui 
paraît  concerner  des  biens  situés  à  peu  de  distance  de  cette 


1.  Tardif,  Monuments  historiques,   p.  12,  col.  2.  Pertz,  Diplomatum  im- 
perii  tomus  prunus,  p.  32,  1.  44. 

2.  Brambach,  n°  1993. 

3.  Boissieu,  Inscriptions    de  Lyon,  p.  239. 

4.  Cf.  Longnon,  Examen  géographique  du  tome  premier  des  diplomata  im- 
per ii,  p.  36. 

5.  Grégoire  de  Tours,  liv.  X,  c.   3 1  ;  édition  Arndt,  p.   44S,  1.  3.   Les 
précédents  éditeurs  avaient  préféré  la  variante  Tauriacus. 

6.  Pardessus,   Diplomata,  t.  II,  pp.  236,  237.  Tardif,    Monuments  histo- 
riques, p.  33. 


3 1 <5  H.  d' Artois  de  Jubainville. 

ville.  Vers  la  même  époque,  c'est-à-dire  en  692,  Aiglibert, 
évêque  du  Mans,  dispose  des  dîmes  de  plusieurs  églises,  entre 
autres  Tauriniacus,  qui  paraît  ici  être  le  nom  d'une  paroisse 
de  son  diocèse  l. 

Tauriniacus  dérive  du  gentilice  Taurinius  dont  nous  ne 
pouvons  citer  qu'un  exemple,  c'est  l'épitaphe  de  Taurinius 
Montanus,  à  Augsbourg2.  Taurinius  est  dérivé  de  Taurinus, 
surnom  que  l'on  rencontre  quelquefois  ;  par  exemple  dans  une 
inscription  de  Fontaine  près  Grésy-sur-Isère  3. 

Tauriniacus  est  le  nom  primitif  de  dix  communes  de  France; 
cinq  Thorigné,  Ille-et-Vilaine,  Maine-et-Loire,  Mayenne  4, 
Sarthe,  Deux-Sèvres  ;  quatre  Thoriguy,  Seine-et-Marne, 
Deux-Sèvres,  Vendée,  Yonne;  Torigny,  Manche. 

La  forme  romaine  correspondant  au  gallo-romain  Tauri- 
niacus est  Taurinianus,  nom  de  lieu  mentionné  en  871  dans 
un  diplôme  de  Charles  le  Chauve  qui  approuve  la  fondation 
du  monastère  de  Saint-André  au  diocèse  d'Elne,  Pyrénées- 
Orientales  5.  C'est  peut-être  Taurinya,  Pyrénées-Orientales. 
Le  nom  des  deux  communes  de  Taurignan,  Ariège,  est 
mieux  conservé. 

Turiliacus  est  le  nom  d'un  vïllart  situé  en  Vexin  et  donné 
à  l'abbaye  de  Saint-Denis  vers  l'année  690  par  le  testament  du 
filsd'Idda6. 

Turiliacus  est  dérivé  de  Turdius,  gentilice  rare,  mais  dont 
on  rencontre  les  variantes  TureUius  et  Turillius.  Un  certain 
Turelius  Flavinus  était,  en  l'an  188  de  notre  ère,  curiale  à 
Savaria,  aujourd'hui  Stein-am-Anger,  en  Hongrie".  L'épi- 
taphe de  M.  Turellius  Maximus  a  été  trouvée  à  Guelma,  en 

1 .  Pardessus,  Diplomata,  t.  II,  p.  226. 

2.  Corpus,  III,  5820. 

3.  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  II,  p.  227. 

4.  M.  L.  Maître,  Dictionnaire  topographique  du  département  delà  Mayenne, 
p.  512,  donne  deux  exemples  de  la  diphtongue  au  à  la  prennère  syllabe  du 
nom  de  ce  village;  Tauriniacus,  XIIe  siècle,  Taurigné,  1217.  Turiniacus,  802, 
est  probablement  une  mauvaise  leçon. 

5.  Dom  Bouquet,  VIII,  637  a. 

6.  Tardif,  Monuments  historiques,  p.  21 ,  col.  2.  Pardessus,  Diplomata,  t.  II, 
p.  211. 

7.  Corpus,  III,  4150. 


Propiété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  3 17 

Algérie  I  ;  celle  de  Turillius  Caeso  est  conservée  au  musée  de 
Vérone  2;  celle  de  Tuiàllius  Amiantus  a  été  trouvée  à  Monte- 
lione,  dans  l'Italie  méridionale  3. 

C'est  par  •  Turiliacùs,  dérivé  de  Turelius,  que  s'expliquent 
les  noms  de  Tourliac,  Lot-et-Garonne,  et  de  Tourly,  Oise. 

Victoriacus  est  le  nom  d'une  forteresse,  castrum,- qui  servit 
de  retraite  à  Munderic  prétendant  à  la  royauté  vers  532  •*. 
M.  Longnon  pense  que  ce  castrum  est  Vitry-le-Brûlé,  Marne  s. 
Un  second  Victoriacus  était,  situé  près  d'Arras  ;  c'était  au 
vie  siècle  une  villa  publica  servant  quelquefois  de  résidence 
aux  rois  des  Francs.  Clotaire  I  y  épousa  sainte  Radegonde 
en  5 3 8 ô .  Sigebert  I  y  fut  assassiné  en  575  par  deux  émissaires 
de  Frédégonde  7.  En  584,  Chilpérie  donna  Tordre  d'y  élever 
son  fils  nouveau-né  8.  Un  troisième  Victoriacus  était  situé  près 
de  Brioude;  il  est  qualifié  de  castrum  en  825,  dans  un  diplôme 
de  Louis  le  Débonnaire  9. 

Victoriacus  dérive  de  Victorius,  gentilice  qui  existe  déjà  sous 
la  république.  En  l'année  194  avant  notre  ère,  Q.  Victorius, 
centurion  de  la  seconde  légion,  se  distingua  dans  une  bataille 
contre  les  Gaulois10.  Sous  l'empire,  vers  la  fin  du  premier 
siècle  de  l'ère  chrétienne,  Quinti-lien  dédia  à  Victorius  Mar- 
cellus  ses  douze  livres  Inslilulionis  oraioriac.  Ce  gentilice  se 
rencontre  dans  les  inscriptions.  On  a  trouvé  à  Altenbourg,  en 

1 .  Corpus,  VIII,  5466. 

2.  Corpus,  V,  882S. 

3 .  Corpus,  X,  85. 

4.  Historia  Francorutn,  livre  III,  c.  14;  M.  Arndt,  p.  120,  1.  24,  a  im- 
prime Victuiiaci  castri,  au  génitif,  pour  Victoriaci  castri,  avec  Vu  tenant 
lieu  à'o  qu'on  rencontre  si  souvent  à  l'époque  mérovingienne. 

5.  Géographie  de  ta  Gaule  au  sixième' siècle,  pp.  409.  410. 

6.  Fortunat,  Vie  de  sainte  Radegonde,  liv.  I,  c.  2.  Dom  Bouquet,  t.  III, 
p.  456  c;  édition  Krusch,  t.  II,  p.  39,  1.  8. 

7.  Villam  cui  nomen  est  Victuriacon.  Grégoire  de  Tours,  Historia  Fran- 
corutn, 1.  IV,  c.  51;  édition  Arndt,  p.  186,  1.  13.  Cf.  liv.  V,  c.  1,  ibid., 
p.  191,  1.  14.  Jonas,  Vila  sancti  Columbani,  c.  3 1  ;  Dom  Bouquet,  t.  III, 
p.  478  b  c. 

8.  Grégoire  de  Tours,  Historia  Francorutn,  liv.  VI,  c.  41  ;  édition  Arndt, 
p.  28 1 ,  11.  19,  20. 

9.  Dom  Bouquet,  VI,  547  b.  Cf.  Sickel,  Acla  Karolinorum,  t.  II,  p.  149 
n°  216. 

10.   Tite-Live,  liv.  XXXIV,  c.  46. 

Revue  Celtique,  IX.  21 


3 18  H.  d'Arbois  de  Jubainville. 

Hongrie,  l'épitaphe  du  vétéran  G.  Victorius  Urso  r.  Le  musée 
de  Wiesbaden  possède  une  dédicace  à  Jupiter  par  G.  Victorius 
Januarius 2  ;  le  musée  de  Trêves,  une  dédicace  à  la  déesse 
Calva,  par  M.  Victorius  Pollentinus,  monument  gravé  l'an  124 
de  notre  ère  3.  On  a  trouvé  à  Huttich,  en  Hesse  rhénane, 
l'épitaphe  du  vétéran  Victorius  Cassianus-*.  Une  inscription 
de  Lyon  nous  a  conservé  les  noms  de  deux  femmes  qui,  toutes 
les  deux,  avaient  le  gentilice  Victoria;  elles  y  joignaient,  l'une, 
un  surnom  commençant  par  les  trois  lettres  Lam...;  la  se- 
conde, fille  de  la  première,  le  surnom  de  Novella  >. 

Le  nom  de  lieu  Victoriacus,  dérivé  de  Victorius,  paraît 
avoir,  dès  le  ixe  siècle,  perdu  dans  la  prononciation  Yo  de  la 
seconde  syllabe,  témoin  les  distiques  d'Ermoldus  Nigellus 
dans  son  poème  sur  Louis  le  Débonnaire  : 

Aurelianenses  sensim  dehinc  visitât  agros, 
Victriacum  villam  jam  pius  ingreditur  b. 

En  règle  générale,  dans  la  langue  moderne  de  la  France, 
Victoriacus  perd  Yo  de  la  seconde  syllabe.  Il  devient  Vitrac 
dans  le  Midi.  C'est  le  nom  de  cinq  communes,  Aveyron, 
Cantal,  Charente,  Corrèze,  Dordogne,  Puy-de-Dôme.  Dans  le 
Nord,  la  désinence  varie  :  Vitray  est  le  nom  d'une  commune 
du  département  de  l'Orne;  on  compte  deux  communes  de  Vi- 
tray dans  l'Eure-et-Loir,  une  dans  l'Allier  ;  il  y  a  une  com- 
mune de  Vitré  dans  l'Ille-et-Vilaine,  une  autre  dans  les  Deux- 
Sèvres  ;  le  Jura  nous  offre  la  variante  Vitreux  ;  Meurthe-et- 
Moselle  et  la  Haute-Saône  ont  chacun  une  commune  de  Vitrey. 
La  forme  la  plus  fréquente  est  Vitry.  Ce  nom  est  porté  par 
douze  communes  :  trois  dans  chacun  des  départements  de  la 
Marne  et  de  Saône-et-Loire ;  deux  dans  la  Haute-Marne;  les 
quatre  autres  dans  l'Aube,   le  Loiret,   le  Pas-de-Calais  et  la 


1 .  Corpus,  III,  4489. 

2.  Brambach,  n°  1452. 

3.  Brambach,  n°  853. 

4.  Brambach,  n°  1064. 

5.  Boissieu,  p.  507,  n°  xxiv. 

6.  De  rébus gestis  Lvdovici  Pu,  liv.  III,  vers  275,  276.  Dom  Bouquet, 
VI,  43  b.  Il  s'agit  de  Vitry-aux-Loges,  Loiret. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  3 1 9 

Seine.  Le  nombre  total  des  communes  dont  le  nom  offre  une 
forme  moderne  du  primitif  Victoriacus  es.t  de  vingt-six. 

ViNCiACLfs  est  un  locus  situé  aux  environs  de  Cambrai  et  où 
Charles-Martel  battit  Chilpéric  II  et  Rainfroi,  maire  de  Neustrie 
en  717  I.  La  même  localité  reparaît  dans  un  diplôme  faux  de 
Dagobert  I2.  C'est  aujourd'hui  Vincy,  commune  de  Crève- 
cœur,  Nord?. 

Le  bas  latin  Vinciacus  est  dérivé  de  Vintius  ou  de  Vencius. 
Une  inscription  de  l'Italie  méridionale  nous  fait  connaître  les 
noms  de  l'affranchi  M.  Vintius  Acceptus  et  de  sa  patronne 
Vintia  Saturnia4;  et  une  inscription  de  Die,  ceux  de  Sex.  Ven- 
cius Juventianus  5. 

Il  y  a  en  France  trois  communes  dont  le  nom  dérive  du 
bas  latin  Vinciacus.  Ce  sont  Vincey,  Vosges,  Vincy,  Aisne, 
et  Vincy,  Seine-et-Marne. 

Vindiciacus  est  le  nom  d'une  localité  d'Auvergne  où  l'on 
battit  monnaie  à  l'époque  mérovingienne  ainsi  que  l'atteste  la 
légende  monétaire  Vindiciaco  6.  Ce  nom  de  lieu  a  donné  le  dé- 
rivé vindiciacensis,  épithète  de  doinùs  dans  un  manuscrit  des 
Vitae  patrum  de  Grégoire  de  Tours  7.  Dans  le  passage  de  Gré- 
goire de  Tours  dont  il  s'agit  ici,  c'est  encore  d'une  localité 
d'Auvergne  qu'il  est  question. 

Vindiciacus  est  dérivé  de  Vindicius.  Vindicius  est  le  nom  de 
l'esclave  qui,  en  l'année  509  avant  notre  ère,  découvrit  une 
conspiration  pour  le  rétablissement  de  la  royauté8.  Vindicius, 


1 .  Continuation  de  Frédégaire,  c.  106.  Chez  Dom  Bouquet,  II,  454  a. 
Cf.  Paul  Diacre,  De  Gestis  Langobardorum ,  liv.  VI,  c.  42;  ibid.,  p.  639  a. 

2.  Pertz,  Diplomatum  imperii  tomus  primus,  p.  168, 1.  21.  Cf.  Pardessus, 
DipJomata,  t.  II,  p.  58. 

3.  Longnon,  Examen  géographique,  p.  39. 

4.  Corpus,  X,  431. 

5.  Herzog,  Galliae  Narbonensis  ...  historia,  t.  II,  p.  97,  n°  453. 

6.  A.  de  Barthélémy  dans  la  Bibliothèque  de  l'Ecole  des  Chartes,  t.  XXVI, 
p.  464,  n«  707. 

7.  C.  12,  §  3.  Bordier,  Les  livres  des  miracles,  t.  III,  p.  296.  Comparez 
Arndt  et  Krusch,  p.  713,  1.  33,  et  Longnon,  Géographie  de  la  Gaule  au 
sixième  siècle,  p.  517. 

8.  Tite-Live,  liv.  II,  c.  5,  §  10. 


320  H.  d'Arbois  de  Jubainville. 

sous  l'empire,  est  un  gentilice  que  l'on  rencontre  dans  quel- 
ques inscriptions  ;  par  exemple,  en  Afrique,  dans  les  noms  de 
femme  Vindicia  Theodora1,  Vindicia  Victorina2;  à  Lyon, 
Vindicia  LupercaS.  On  trouve  aussi  le  nom  d'homme  P.  Vin- 
dicius4. 

Vindecy,  Saône-et-Loire,  est  probablement  un  ancien  Vin- 
diciacus. 

Certains  manuscrits  de  Grégoire  de  Tours  écrivent  vixdia- 
censis  l'adjectif  dérivé  dont  nous  avons  cité  la  leçon  vindicia- 
censis.  Vindiacensis  suppose  un  nom  de  lieu  Vindiacus,  dérivé 
lui-même  de  Vindius.  Tandis  que  Vindicius,  dérivé  de  lriudex, 
est  d'origine  latine,  Vindius  paraît  d'origine  gauloise  et  dérivé 
de  l'adjectif  vindos  qui,  dans  cette  langue,  a  dû  signifier 
«  blanc  »,  et  par  extension  «  beau,  heureux  ».  On  a  trouvé  à 
Vérone  une  inscription  votive  à  Hercule  par  l'affranchi  C. 
Vindius  Prisais  5.  Une  inscription  de  Pavic  nous  conserve  les 
noms  de  Vindia  Secunda6. 

Vindey,  Marne,  paraît  être  un  ancien  Vindiacus. 

Wariacus  est  le  nom  d'un  locus  situé  dans  le  pagus  Tellau, 
aujourd'hui  compris  dans  le  département  de  la  Seine-Inférieure. 
Ce  locus  appartenait  à  l'abbaye  de  Saint-Denis  en  775,  comme 
on  le  voit  par  un  diplôme  de  Charlemagne  7.  Ce  même  nom 
est  écrit  Guariacus  dans  un  jugement  rendu  par  Pépin  le  Bref 
en  faveur  de  l'abbaye  de  Saint-Denis  vers  l'année  75  1,  et  où  il 
s'agit  évidemment  de  la  même  localité  8. 

Wariacus  ou  Guariacus  tiennent  lieu  d'un  primitif*  Variacus, 
dérivé  du  gentilice  Varius,  déjà  usité  à  Rome  au  premier  siècle 
avant  notre  ère.  On  trouve  déjà  six  Varius  mentionnés  dans 
les  œuvres  de  Cicéron.  Le  plus  connu  est  Q.  Varius  Hybrida, 

I  .  Corpus,  VIII,  1 12. 

2.  Corpus,  VIII,  323. 

3.  Boissieu,  Inscriptions  antiques  de  Lyon,  p.  527. 

4.  Allmer,  Revue  èpigraphique,  t.  I,  n°  209. 

5 .  Corpus,  Y,  3 2 2 S. 

6.  Corpus,  V,  6457. 

7.  Dom  Bouquet,  V.  73  |  a.  Sickel,  Acta  Karoliuoruni.X.  IL  p.  28,11045. 

8.  Fcrtz.  Diplomatum  impeni  tomus primus,  p.  109,  1.  14.  Tardif,  Monu- 
ments historiques,  p.  45,  col.  2. 


Propriété  foncière  et  noms  de  lieu  en  France.  321 

tribun  du  peuple  l'an  91  avant  notre  ère,  grand  orateur,  très 
influent,  et  qui,  après  avoir  commis  deux  assassinats,  finit  par 
le  dernier  supplice1.  Le  poète  tragique  L.  Varius  Rufus  fut 
contemporain  de  César  et  d'Auguste  et  se  rendit  célèbre  par 
sa  pièce  intitulée  Thyestes,  plus  encore  peut-être  par  sa  liaison 
avec  Virgile  et  Horace2.  Un  des  premiers  Romains  qui  por- 
tèrent ce  nom  en  Gaule  fut  le  propréteur  Varius  Cotylo,  c'est- 
à-dire  «  le  buveur  »,  légat  d'Antoine  en  Gaule,  l'an  43  avant 
notre  ère^.  Une  inscription  gravée  sur  un  rocher  à  Groslée, 
Ain,  nous  apprend  qu'un  certain  L.  Varius  Lucanus  a  fait 
dès  la  période  romaine  les  travaux  de  canalisation  qui  four- 
nissent encore  aujourd'hui  de  l'eau  de  source  aux  habitants  de 
ce  village 4.  M.  Varius  Capito,  étant  préteur  et  duumvir  à 
Narbonne,  dirigea  avec  son  collègue  des  travaux  publics  dont 
une  inscription  conservée  au  musée  de  cette  ville  perpétue  la 
mémoire  5.  Inutile  de  citer  les  nombreux  exemples  qui  attes- 
tent combien  ce  gentilice  fut  répandu  dans  les  provinces  au 
temps  de  l'empire  6. 

De  Varius  on  a  fait  le  dérivé  *  Variacus  d'où  les  noms  de 
communes  Vayrac,  Lot;  Vairé,  Vendée;  et  Verry,  Meuse,  ou 
mieux  Véry,  qui  est  en  outre  le  nom  de  trois  hameaux,  Loire, 
Haute-Savoie,  Vaucluse.  La  variante  Guéry,  correspondant  à 
l'orthographe  Guariacus  du  diplôme  de  Charlemagne  cité  plus 
haut,  est  conservée  par  le-  nom  de  deux  hameaux,  Cher,  Lot- 
et-Garonne. 

H.  d'Arbois  de  Jubainville. 


1  .   Cicéron,  De  Oratore,  liv.  I,  c.  !  5,  §  117;  Brutus,   c.  62,  §  221  ;  De 
natura  Débrum,  liv.  II,  c.  33,  §  81. 

2.  Teuftel,  Geschichte  der  rœmischm  Literatur,  troisième  édition,  pp.  453, 
4)4- 

3 .  Voyez  les  textes  réunis  par  M.  E.  Desjardins,  Géographie  historique  et 
administrative  de  la  Gaule  romaine,  t.  III,  p.  34. 

4.  Allmer,  Inscriptions  de  Vienne,  t.  III,  p.  441. 

3.   Herzog,  Galliae  Narbouensis  ...  historia,  t.  II,  p.  8,  n°  16. 

6.   Voir  les  Index  du  Corpus,  t.  III,  t.  V,  t.  VII,  t.  VIII,  t.  IX,  t.  X. 


522  L'abbé  Eug.  Bernard. 


ISTOIR  D'EUS    A    CREATION  AR  BET-MAN 

AR  FORMATION  AN  DEN  HAC  HE  VUE 

AR    HENTAN    PHILOSOF   A   VOA    ADAM,    HAC    HE   VARO 
HA  BUE  AR  PROFET  HENOC  HAC  ELI 

AN  DILUJ 

HA  BUE  NOE  HAC  HE  VARO 
(Suite). 


An  eil  proloc  a  comans. 

Breman,  assistantes  en  eil  act  e  voelet 
715   Hon  tat  quentan  Adam  hac  Eva  he  priet, 
O  tonet  assambles  d'en  eum  antreteni 
An  eil  gant  eguile,  dre  bep  sort  materi. 

Adam,  compagnones,  gant  pep  rejouissans, 
En  defoa  bet  pep  tra  en  he  obeissans  ; 
720  E  voant  en  eur  plas  brao,  en  ho  hontantamant, 
Voar  bep  sort  deliço  hi  a  voa  trionfant. 
Crouet  voant  gant  Doue,  caer  ha  delicius, 
Da  vean  birviquen  assambles  evurus  : 
Lequet  e  voaint  gant-han  en  pep  sort  deliço, 
725   M'ho  devije  heuliet  rcs  he  gourhemeno. 
Mes  an  diaoul  ifernal  ,so  en  anvi  bepret, 
A  enep  un  Doue  hac  he  holl  vignonet. 


La  Création  du  monde.  32} 


HISTOIRE  DE   LA  CRÉATION   DE   CE  MONDE 

LA  FORMATION  DE  L'HOMME  ET  SA  VIE 

LE    PREMIER    PHILOSOPHE    FUT    ADAM,    SA    MORT 

LA  VIE  DU  PROPHÈTE  HËNOCH  ET  CELLE  D'ELIE 
LE  DÉLUGE 

LA  VIE  DE  NOÉ  ET  SA  MORT 
(Suite). 


Le  second  prologue  commence. 

Assistants,  le  second  acte  va  maintenant  se  dérouler  sous 
vos  yeux.  Adam,  notre  premier  père,  et  Eve,  son  épouse, 
viennent  ensemble  s'entretenir  sur  différents  sujets. 

Adam,  mes  amis,  goûtait  un  bonheur  parfait  et  voyait  toutes 
choses  rangées  sou?  son  obéissance.  Avec  Eve,  il  se  trouvait 
dans  un  lieu  charmant;  ils  avaient  tout  à  souhait,  et  pouvaient, 
à  leur  gré,  savourer  toute  sorte  de  délices.  Dieu  les  avait  créés 
beaux  et  intelligents,  pour  être  ensemble  heureux  à  jamais:  il 
leur  avait  promis  une  félicité  sans  bornes,  s'ils  étaient  fidèles  à 
observer  ses  commandements.  Mais  l'esprit  infernal  est  toujours 
dévoré  d'envie  contre  l'Eternel  et  contre  ses  amis  :  il  cherche 
nuit  et  jour  l'occasion  de  tenter  en  ce  monde  les  serviteurs  de 
Dieu. 


m 


L'abbé  Eug.  Bernard. 


730 


E  man  o  clasq  an  tu  ordinal,  nos  ha  de, 
Da  denti  er  bet-man  servicherien  Doue. 

Pa  quitaas  Doue  ar  jardin  a  Eden, 
Hac  Adam  da  cousquet  dindan  sqeut  eur  voeen, 
E  teuas  an  aërouant  da  vean  consultet  *, 
Da  ataquin  Eva,  a  guefent  imparfet. 
En  tri  form  diferant  teu  d'en  eum  presantin 
735   Da  Eva,  er  jardin,  evit  he  ataquin  : 

En  guis  eul  leopart  e  teu  ar  voes  'quentan, 
Evit-han  he  laquât  gant  eston  da  spontan; 
An  eil  gués  ma  teuas,  voa  en  guis  d'eur  minist, 
En  feson  un  den  cos,  ma  rentas  Eva  trist  ; 
740  En  tervet  gués  ma  teuas,  en  guis  da  eur  serpant, 
Da  saludin  aneshi  dre  gomso  eloquant, 
Oc 'h  houlen  diont-hi  :  «  Feumeulen,  d'in  e  leret 
Ha  houi  eo  an  auteures,  pa 'n  d-och  ous  ho  miret, 
Ar  freus  caer,  excelant,  hac  ar  plantiso, 
Ar  fleurio  délicat  hac  an  holl  deliço  ?  » 
Ma  respontas  Eva  :  «  Salocroas,  n'en  d-oun  quct, 
Créateur  an  envo  eo  en  deus  he  crouet  : 
Hen-nes  eo  an  auteur  a  bep  sort  materi, 
Ha  n'en  deus  nemert-han  conditor  voar  'neshi.  » 
«  —  Itron,  me  ar  serpant,  houi  a  so  puissant 
Voar  quement  so  crouet  ebars  er  firmamant  : 
Ne  ousoe'h  quet  an  nombr,  me  Iar  d'ec'h  guirione, 
Perac  eo  excelant  ar  voeen  a  vue. 
En  istant  ma  tepret,  houi  deui  da  possedi 
Ebars  er  Barados,  a  bep  sort  materi; 
Houi  a  goufeo  an  holl  deio  da  donet, 
Evel  ar  guir  Doue  en  deveus  ho  crouet. 
Doue  en  defoa  aon  na  vijac'h  re  savant, 
Ha  na  vijac'h  mestres  ebars  er  firmament. 
Rac-se,  me  ar  serpant,  me  lar  d'ec'h  guirione, 
Mar  credet  ahanon,  houi  debro  ar  treus-se.  » 
Eva  deu  da  houlen  ous  ar  serpant  neuse  : 


745 


/) 


/)) 


760 


1  .  L'élision  de  a  dans  an,  que  le  scribe  n'a  point  laite,  donne  à  ce  vers 
treize  syllabes.  Cet  accident  se  renouvelle  si  souvent  que  nous  n'y  revien- 
drons pas. 


La  Création  du  monde.  525 


Lorsque  ,1e  Seigneur  eut  quitté  le  jardin  d'Eden,  Adam 
s'était  couché  à  l'ombre  d'un  arbre.  L'Enfer  tint  conseil,  et 
Satan  fut  chargé  de  diriger  une  attaque  contre  Eve,  qui  pa- 
raissait moins  capable  de  résister.  Il  se  présenta  donc  à  elle  au 
jardin,  sous  trois  formes  différentes,  pour  l'entraîner  au  mal. 
La  première  fois,  il  vint  semblable  à  un  léopard  pour  l'étonner 
et  l'effraver  :  la  seconde,  il  prit  les  airs  d'un  ministre,  l'aspect 
d'un  vieillard,  qui  rendit  Eve  toute  triste  :  la  troisième  fois, 
il  parut  sous  la  figure  d'un  serpent,  et  la  salua  en  termes  flat- 
teurs, lui  demandant  :  «  Femme,  dites-moi  si  c'est  vous  qui 
«  avez  créé,  puisque  vous  en  avez  la  garde,  ces  fruits  su- 
«  perbes,  exquis,  ces  plantes,  ces  fleurs  délicates,  et  toutes  ces 
«  merveilles  délicieuses  ?  » 


Eve  répondit  :  «  Non,  ce  n'est  pas  moi.  Le  Créateur  du 
Ciel  les  a  tirés  du  néant  :  c'est  lui  l'auteur  de  toute  chose,  et 
il  n'y  a  que  lui  qui  soit  maître  de  la  création.  » 

«  Madame,  reprit  le  serpent,  vous  avez  puissance  sur  tout 
ce  qui  est  créé  au  monde,  mais  vous  ne  savez  pas,  je  vous  le 
dis  en  vérité,  pourquoi  les  fruits  de  l'arbre  de  vie  sont  excel- 
lents ?  A  l'instant  où  vous  en  auriez  mangé,  vous  entreriez 
en  possession,  au  Paradis,  d'avantages  de  toute  sorte.  Vous 
connaîtriez  la  suite  des  jours  à  venir,  aussi  bien  que  Dieu  qui 
vous  a  créée.  Il  craignait  que  vous  ne  fussiez  trop  savante,  et 
que  vous  ne  devinssiez  maîtresse  au  firmament.  C'est  pour- 
quoi, ajouta  le  serpent,  je  vous  le  dis  en  vérité,  si  vous  m'en 
croyez,  vous  mangerez  de  ce  fruit.  » 


Eve  interroge  alors  le  serpent  :  «  D'où  es-tu  ?  Tu  ne  viens 


326 


L'abbé  Eug.  Bernard. 


765 


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800 


<  Pe  a  nation  oud-de  ?  N'out  quet  a  beurs  Doue, 
:<  Pa  fell  d'it  e  torren  cren  he  hourhemen. 

:<  Mes  caer  ac'h  eus  presec,  birviquen  ne  rafen. 

<  Hon-nes,  eme  Eva,  so  eur  freus  immortel, 

:<  Ha  mar  touchomp  ont-hi,  e  teufomp  da  vervoel, 
Ha  ma  fried  Adam,  quencouls  hon  bugale, 
Ha  hoas  bean  privet  demeus  a  gras  Doue.  » 
«  —  Tevet,  neb  aon,  Eva,  mervoel  na  reet  quet. 
Hac  ho  priet  ha  houi,  hardiamant  debret, 
Hac  e  veet  égal  d'ho  Crouer  beniguet.  » 
—  Evel,  eme  Eva,  en  eum  gafan  er  bet, 

<  Pa 'n  d-oun  impaleres  voar  quement  so  crouet. 
Me  so  groet  a  netra,  hac  assuret  breman 
Voar  quement  so  crouet  er  bet,  bete  breman. 
Me  am  eus,  eme  Eva,  ha  squiant,  ha  guenet, 
Doue  ho  roas  d'in  aboe  en  heur  ma  voan  crouet  : 
Mes  bean  hueloc'h  ebars  er  firmamant, 
Goût  an  deio  da  donet,  a  se  e  ven  contant.  » 
«  —  Neb  aon,  me  ar  serpant,  n'ho  peso  drouc  a-bet, 
Houi  veso  ar  vestres  en  pales  an  Drindet. 
Dalet  an  aval-man,  he-man  so  excelant, 
Queset  lot  d'ho  priet  breman,  presantamant.  » 
Donet  a  ra  Eva  da  guemer  an  aval, 

Ha  cas  lot  d'he  friet,  mont  d  ne  cafet  ractal, 

Ha  laret  da  Adam  voa  an  excelantan 

En  defoa  taleet  biscoas  voar  ar  bet-man. 

«  Eva,  eme  Adam,  petra  eo  quement-se  ? 

«  N'en  d-eo  quet  ar  sort-se  a  debromp  d'ar  beure. 

«  Eur  vorhet  vras  am  eus  n'en  d-oe'h,  siouas  !  tentet 

«  Gant  an  drouc  Satanas,  ha  n'hoc'h  eus  transgresset.  » 

Cals  a  boan  e  defoa  Eva,  pa  intentas 
Adam,  he  guir  briet,  da  dibrin  an  aval  glas  : 
Mes  hi  lare  bopret  :  «  N'ho  peset  nep  doutans, 
«  Debret  quercouls  ha  me,  n'ho  peso  nep  ofans.  » 

«  —  Me  so  groet,  eme-han,  gant  Doue  puissant, 
«  A  so  Prins  hac  Autro  dindân  ar  firmamant: 
«  Monet  d'he  ofansi  evit  un  tam  aval, 
«  A  ve  ur  gourmandis,  lec'h  d'eshan  d'am  tamal.  » 


La  Création  du  monde.  327 

pas  de  la  part  de  Dieu,  puisque  tu  veux  me  faire  transgresser 
ses  commandements  ;  mais  tu  auras  beau  prêcher,  tu  n'y  réus- 
siras pas.  Ce  fruit,  continue  Eve,  est  immortel,  et  si  nous  y 
touchons,  il  nous  faudra  mourir,  et  Adam,  mon  époux,  et 
nos  enfants,  et  de  plus,  nous  serions  privés  de  la  grâce  de 
Dieu.  » 

«  Taisez-vous,  et  n'ayez  pas  peur,  Eve,  vous  ne  mourrez 
pas,  ni  vous,  ni  votre  époux  :  mangez  hardiment,  et  vous  se- 
rez l'égale  de  votre  divin  Créateur.  » 

«  Comme  je  le  suis  déjà  en  ce  monde,  réplique  Eve,  puis- 
que je  règne  en  impératrice  sur  tout  ce  qui  existe.  Je  suis  faite 
de  rien,  et  mon  pouvoir  est  assuré  sur  tout  ce  qui  a  été  créé 
jusqu'à  présent.  Je  possède,  ajoute-t-elle,  la  science  et  la 
beauté  ;  Dieu  me  les  a  données  au  moment  même  où  il  me 
forma.  Mais  me  voir  placée  plus  haut  dans  le  Ciel,  connaître 
les  jours  à  venir,  cela  ne  me  déplairait  point. 


» 


«  Ne  craignez  rien,  reprit  le  serpent,  vous  n'aurez  aucun 
mal,  et  vous  serez  maîtresse  au  palais  de  la  Trinité.  Prenez 
cette  pomme,  elle  est  excellente,  et  portez-en  immédiatement 
sa  part  à  votre  époux.  » 

Eve  cueille  la  pomme,  et  pour  la  partager  avec  son 
mari,  se  dirige  aussitôt  vers  lui,  disant  que  c'était  le  fruit  le 
plus  exquis  que  jamais  elle  eût  goûté  sur  la  terre.  «  Eve, 
s'écrie  Adam,  qu'est-ce  que  cela  signifie  ?  Ce  n'est  pas  de 
cette  espèce  de  fruit  que  nous  avons  mangé  ce  matin.  J'ai 
grand'peur,  hélas  !  que  vous  n'ayez  été  tentée  par  Satan, 
l'esprit  du  mal,  et  que  vous  n'ayez  désobéi.  » 

Eve  eut  beaucoup  de  peine  à  décider  Adam,  son  époux,  à 
manger  la  pomme  ;  mais  elle  répétait  sans  cesse  :  «  Ne  crai- 
gnez donc  rien,  mangez  comme  moi,  il  ne  vous  arrivera 
aucun  mal.  » 

«  Je  suis,  dit  Adam,  l'ouvrage  du  Dieu  puissant,  prince  et 
seigneur  de  ce  qui  existe  sous  le  firmament  :  risquer  de  l'of- 
fenser pour  un  morceau  de  pomme,  serait  une  gourmandise 
qu'il  aurait  raison  de  me  reprocher.  » 


28  L'abbé  Eug.  Bernard. 

«  —  Adam,  eme  Eva,  na  veet  quet  tamalet  : 
«  Debret  hardiamant,  rac  me  am  eus  debret. 
«  Me  lar  d'ec'h,  eme-s-hi,  mar  debret  an  tam-se, 
«  E  vesot  qucn  savant  ha  quen  fur  ha  Doue.  » 

805        Dont  a  ra  d'he  data,  ha  laret  d'he  briet  : 

«  Me  ho  car  fidelamant,  dreist  quement  so  er  bet, 
«  Pa  laret  d'in  eta,  me  ia  da  acceptin, 
«  Pa  n'en  deus  nep  doutans,  eouls  ha  houi,  da  dibrin.  » 
O  maleur  detestabl  d'anveouf  tentation  ! 

810  Blam  a  res  he  briet,  a  voa  bet  ocasion. 

Coll  a  rejont  ar  e'hfas  souden,  incontinant, 
Hep  gallout  jouissan  ar  joaio  trionfant. 
Eva  a  houlenne  mallos  an  holl  Elle 
D'ar  serpant  ifernal,  a  voa  bet  caus  da  se, 

815   Rac  ar  hef  miliguet  a  lavants  d'eshi, 

Hac  he  friet  hac  hi,  hardi,  hellent  dibri. 

«  Nin  a  voa,  eme  Adam,  ar  re  quentan  crouet 

«  Gant  Doue  éternel,  en  he  gras  confirmet  : 

«  Allas  !  hac  es  omp  caus,  sivoas  !  divar  bon  peu, 

820  «  An  holl  quitibunan  a  ielo  d'an  Ifern.  » 

Collet  ar  e'hras  ho  detba,  hi  a  voie  erfat  se  : 
Pa  deunt  d'en  em  sellet  an  cil  ous  cguile, 
En  em  quctjont  en  noas,  gant  ar  contusion, 
Pa  voa  ret  d'eshe  mont  dirac  Roue  an  tron. 

825   Guelet  a  rejont  Doue  o  tonet  d'ho  cafet, 

Ha  moïiet  dirac-han,  gant  mes,  na  eredent  quet. 
Dindan  ar  gue  figues  'n  em  lequejont  ho  daou, 
Evit  en  em  holo  eno,  en  mesq  an  deliou. 
«  Adam,  eme  Doue,  sao  alesse  timat  ! 

830  «  Collet  e  t'eus  breman  graso  Doue  an  Tat, 
«  Maleur  e  voe  d'it  biscoas  ma  beau  ofanset  ! 
«  Gant  reson  competant  te  a  vo  punisset.  » 

«  —  Pardon,  eme  Adam,  ma  Doue,  a  houlennan  ! 
«  P'am  eus  clevet  ho  moes,  es  oun  deut  da  erenan. 

835    «  Pardonet  ma  ine,  n'en  dei  quet  d'an  Itern, 
«  Ha  ma  lequet  en  tu  da  ober  pinijen.  » 

«  —  Adam,  eme  Doue,  perac  ma  out  deut  a-ben 
«  Da  transgressin  breman  quer  cren  ma  gourhemen  ? 


La  Création  du  monde.  329 

«  Il  ne  vous  reprochera  rien,  Adam,  reprend  Eve  :  mangez 
hardiment,  puisque  j'en  ai  mangé.  Je  vous  assure,  continue- 
t-elle,  que  si  vous  mangez  ce  morceau,  vous  serez  aussi  savant, 
aussi  sage  que  Dieu.  » 

Adam  se  laisse  aller  à  manger  en  disant  à  son  épouse  :  «  Je 
vous  aime  de  cœur,  par-dessus  tout  au  monde  ;  puisque  vous 
me  le  dites,  j'accepte  la  pomme,  et  dès  qu'il  n'y  a  rien  à 
craindre,  comme  vous,  je  vais  la  manger.  » 

O  malheur  détestable  d'avoir  cédé  à  la  tentation  !  Adam  re- 
proche à  son  épouse  d'avoir  été  pour  lui  une  occasion  de 
chute.  Ils  perdirent  immédiatement  la  grâce  et  ne  purent  plus 
jouir  des  joies  triomphantes  du  Paradis.  Eve  appelait  les  malé- 
dictions de  tous  les  Anges  sur  le  serpent  infernal  ;  n'avait-il 
pas  été  cause  de  ce  malheur  ?  car  c'était  ce  maudit  qui  lui  avait 
dit  qu'elle  et  son  mari  pouvaient  sans  crainte  manger  la 
pomme.  «  Nous  étions,  disait  Adam,  les  premiers  créés  par 
l'Eternel  et  confirmés  dans  sa  grâce.  Hélas  !  nous  avons  agi  de 
telle  façon  que  par  notre  faute  tout  le  genre  humain  s'en  ira 
en  Enfer.  » 

Ils  avaient  perdu  la  grâce  et  ne  pouvaient  l'ignorer.  Quand 
ils  se  regardèrent  l'un  l'autre,  ils  se  virent  tout  nus,  pleins  de 
confusion  à  la  pensée  qu'il  leur  fallait  se  présenter  devant  le 
Roi  des  Cieux.  Ils  aperçurent  Dieu  qui  arrivait  les  trouver  : 
la  honte  les  empêchait  de  se  montrer  à  lui,  et  ils  coururent 
l'un  et  l'autre  sous  un  figuier,  pour  se  cacher  là  au  milieu  des 
feuilles. 

«  Adam,  dit  le  Seigneur,  lève-toi  et  viens  vite.  Tu  as  main- 
tenant perdu  la  grâce  de  Dieu  le  Père.  Malheur  à  toi  pour 
toujours,  de  m'avoir  offensé!  Tu  seras  puni  comme  tu  le  mé- 
rites. » 

«  Pardon,  s'écrie  Adam,  mon  Dieu  !  Je  vous  demande 
pardon  !  Lorsque  j'ai  entendu  votre  voix,  je  me  suis  senti 
trembler.  Pardonnez  à  mon  âme,  qu'elle  n'aille  pas  en  Enfer, 
et  mettez-moi  en  mesure  de  faire  pénitence.  » 

«  Adam,  demande  Dieu,  pourquoi  es-tu  venu  à  bout  de 
transgresser  si  bien  mon  commandement  ?  Il  te  faudra  mourir, 


5  ]0  L'abbé  Eug.  Bernard. 

«  Te  a  renquo  mervel,  ha  quement  crouadur 

840  «  A  deui  voar  an  douar,  er  bet,  d'eus  da  natur. 

«  —  Ma  Doue,  eme  Adam,  guen-e  mar  permettet, 
«  Ma  friet  a  so  caus,  en  deus  ma  foursivet.  » 

«  —  Eva,  eme  Doue,  perac  m'hoe'h  eus  debret 
«  Demeus  an  aval-se,  ha  roet  d'ho  priet  ?  » 

845        «  —  Ar  serpant,  eme-s-hi,  hen-nes  a  laras  d'in 
«  Quemeret  an  aval,  hardi  heUen  dibrin  : 
«  Ha  me  creguin  en-han  hac  o  tibrin  un  tam, 
«  Hac  e  quessis  ar  rest  d'am  guir  briet  Adam.  » 
Doue  a  deuas  da  vlam  ar  serpant  miliguet  : 

850  «  Te  vo  dindan  an  treit  quement  loen  so  er  bet. 
«  Birviquen,  eme-han,  das  poanio  na  ve  fin, 
«  Hac  hep  na  dorn  na  troat,  quers-se  voar  da  beutrin.  » 

Auditoret  meulabl,  me  gret,  ous  ho  guelet, 
E  carac'h  hep  dale,  guelet  an  actoret, 

855  Pep  hini  en  he  renq,  da  housout  guirione 
Ma  froloc,  hac  lien  a  so  conformet  diont-he. 
Ha  mar  d-oun  bet  tardin,  lia  mar  d-oun  bet  re  bel, 
Quentan  hinin  a  deui,  martese  a  rai  guel. 


Senne  I 


Adam  hac  Eva  antre. 


Adam  a  coms. 


Ha  !  ma  friet  Eva,  gant  pep  rejouissans  ! 
860  Chetu  pep  tra  breman  en  non  obeissans  ! 

Ec'h  omp  en  plas  brao,  leun  a  contantamant, 
Voar  bep  sort  deliço  nin  a  so  trionfant. 

Eva  a  coms. 
Sur,  ma  fried  Adam,  me  am  eus  cals  a  joa, 


La  Création  du  monde.  33 1 

toi  et  tous  les  enfants  qui,  sur  la  terre,  naîtront  de  ta  race.  » 

«  Mon  Dieu,  répond  Adam,  si  vous  le  permettez,  mon 
épouse  Eve  en  est  cause,  c'est  elle  qui  m'a  fourvoyé.  » 

«  Eve,  dit  le  Seigneur,  pourquoi  as-tu  mangé  cette 
pomme,  et  en  as-tu  donné  à  ton  mari  ?  » 

«  Le  serpent,  répond-elle,  c'est  lui  qui  m'a  dit  de  prendre 
hardiment  la  pomme,  que  je  pouvais  la  manger.  Et  moi  de  la 
cueillir,  d'en  manger  un  .morceau,  et  j'ai  porté  le  reste  à 
Adam,  mon  époux.  » 

Dieu  alors  réprimanda  le  serpent  maudit  :  «  Tu  seras,  lui 
dit-il,  sous  les  pieds  de  tout  animal  vivant  sur  la  terre.  Ton 
supplice  n'aura  jamais  de  fin,  et  sans  pieds,  sans  mains,  tu  te 
traîneras  sur  le  ventre.  » 

Vous  tous  qui  m'écoutez,  vous  êtes  dignes  d'éloges  ;  mais 
il  me  semble,  en  vous  observant,  comprendre  que  vous  seriez 
aises  de  voir  sans  délai  apparaître  les  acteurs,  chacun  dans  son 
rôle,  afin  de  constater  la  vérité  de  mon  prologue,  et  de  vous 
assurer  qu'il  est  conforme  à  leurs  personnages.  Si  je  me  suis 
attardé,  si  j'ai  parlé  trop  longtemps,  le  premier  qui  se  présen- 
tera fera  peut-être  mieux. 


Scène  I 


Adam  et  Eve  entrent. 


Adam. 


Ah  !  Eve,  mon  épouse,  quelle  n'est  pas  notre  joie  de  voir 
toutes  choses  maintenant  rangées  sous  notre  obéissance  !  Nous 
sommes  en  un  lieu  charmant,  nous  avons  tout  à  souhait,  nous 
pouvons  à  notre  gré  savourer  toutes  sortes  de  délices. 

Eve. 
Certes,  Adam,  mon  époux,  mon  cœur  est  plein  d'allégresse 


332  L'abbé  Eug.  Bernard. 

Hac  er  mister  bras-man,  pa  hen  consideran  : 
065   Crouet  gant  Doue,  caer  ha  dilicius, 

Da  vesan  birviquen  assambles  eurus  ; 

Chetu  nin  pur  ha  net,  chetu  nin  immortel, 

Rac-se  teulomp  eves  ofansin  hon  C'hrouer. 

Laquet  es  omp  gant-han  en  pep  sort  deliço, 
870  Ha  nin  heuliomp  bepret.  he  holl  gourhemeno. 

Adam  hac  Eva  a  sorti. 

Belsibut  a  antre  e  unan,  hac  a  coms. 

Harao  !  harao  !  Pen  bras  so  hanvet  Satanas  ! 
Berit  ha  Belsibut,  ha  quement  so  el  las, 
Astarot,  Asmode,  Mahom  ha  Jupiter, 
Tostaet  holl  aman  ebars  en  ber  amser. 

An  diaoulien  a  antre. 

Belsibut  a  continu. 

875   Ret  e  d'imp  conferin  :  un  dra  so  a  neve  ; 

P 'ho  peso  clevet  holl,  leret  ho  polante. 

Me  a  so  oc 'h  arajin,  evel  disesperet, 

Ma  ne  cafan  conseil,  ne  ou'nn  pelec'h  monet. 

Stinet  holl  ho  lasso,  ha  divoallet  erfat, 
880  Ar  voes-man  hon  deus  holl  ar  bet  da  evessat. 

Satanas  a  coms. 

Ah  !  Belsibut  disesperet  ! 
Petra  a  neve  so  hoarveet  ? 
Un  dra  benac  hoc 'h  eus,  certen, 
Pa 'n  d-oc'h  deut  aman  evel-hen  ; 
885  Rac-se  lar  d'imp  petra  so  guir, 
Nin  a  so  sperejo  subtil. 

Belsibut  a  coms. 

Me  lar  d'ech,  evit  ma  intentet, 
Adam  hac  Eva  so  crouet, 
Laquet  immortel  gant  Doue, 
890  Hac  int  quer  caer  evel  an  Elle  ; 


La  Création  du  monde.  3  5  3 

en  présence  de  ce  grand  mystère,  lorsque  j'y  réfléchis  ;  Dieu 
nous  a  créés  beaux  et  intelligents,  pour  être  ensemble,  heu- 
reux à  jamais.  Nous  sommes  sans  tache  et  sans  souillure,  nous 
sommes  immortels.  Prenons  donc  garde  d'offenser  notre 
Créateur  :  il  nous  a  placés  dans  un  séjour  de  délices,  à  nous 
d'observer  toujours  tous  ses  commandements. 


Adam  et  Eve  sortent. 


Beelzébut  entre  seul. 


Haro  !  Haro  !  Notre  grand  chef  s'appelle  Satan.  Berit  et 
Beelzébut,  et  vous  tous  qui  êtes  pris  dans  le  filet,  Astarot,  As- 
modée,  Mahom  et  Jupiter,  approchez  tous  dans  le  plus  bref 
délai. 

Les  diables  entrent. 

Beelzébut  continue. 

Il  nous  faut  tenir  conseil.  Voici  une  chose  nouvelle;  lorsque 
vous  la  saurez,  vous  donnerez  votre  avis.  Pour  moi,  j'enrage, 
je  suis  au  désespoir.  Si  je  ne  trouve  un  bon  conseil,  je  ne 
sais  vraiment  de  quel  côté  me  tourner.  Tendez  tous  vos  la- 
cets et  prenez  bien  garde  ;  cette  fois  nous  avons  tous  le  monde 
à  surveiller. 

Satan. 

Ah  !  Beelzébut  au  désespoir  !  Qu'y  a-t-il  donc  de  nouveau  ? 
Vous  avez  sans  doute  quelque  chose  pour  vous  être  ainsi  as- 
semblés en  ce  lieu.  C'est  pourquoi  tu  n'as  qu'à  nous  dire  ce 
qui  est  vrai,  nous  sommes  des  esprits  déliés. 


Beelzébut. 

Je  vous  l'apprends,  afin  que  vous  m'écoutiez  avec  attention  ; 
Adam  et  Eve  ont  été  créés,  Dieu  les  a  faits  immortels,  et  ils 
sont  aussi  beaux  que  les  Anges.  Il  leur  a  dit  que  par  eux  et 

Revue  Celtique,  IX  22 


334  L'abbé  Eug.  Bernard. 

Laret  en  deus  d'eshe  e  vije  ramplisset 
Gant-he  ha  gant  ho  freus,  hor  hadorio  collet. 
Hac  ec'h  ann  en  araj,  evel  eur  hi  arajet, 
Ma  na  veont  tentet  da  goean  en  pehet. 

Berit  a  coms. 

895  Penos  ?  Int  so  en  pep  sort  deliço, 

Ha  nin  a  so  aman  o  soufrin  ar  poanio, 

Me  renoncin  a  gren  d'ar  bet,  ha  d'an  douar, 

Ma  ne  ou'nn  an  adres  d'ho  laquât  en  glahar. 

Astarot  a  coms. 

Ar  voeen  a  vue  so  ont-he  difennet, 
900  Ha  mar  touchont  ont-hi,  e  vesint  holl  collet  : 
Rac-s'e  formin  breman  a  bep  sort  materi, 
Mar  guellomp  voar  nep  guis  da  donet  d'ho  senti. 

Asmode  a  coms. 

Pa  la  tetebiac'h  !  Penos  eshe  a  so  ? 
Poent  e  d'imp  difuna,  ha  monet  voar  ho  sro. 
905   Adam  a  so  den  fin,  a  se  ne  doutet  quet, 

Mes  quen  abil  hac  hen,  a  so  guesall  trompet. 

Satanas  a  coms. 

Mar  guellomp  dont  a-ben  eur  vo'es  d'eus  an  afer-se, 
Ni  hor  bo  ar  bet-man  ebars  en  liberté  ; 
Ha  quement  crouadur  a  deui,  divoar  ho  fen 
910  A  deui  en  eur  vriat  guen-emp-nî  d'an  Itern. 

Berit  a  coms. 

Satanas,  te  eo  ar  finan, 
Rac-se  me  cornant  d'it  breman  : 
Que  ractal  d'ar  Barados  terestr, 
A  goues  erfat  an  adres, 
915   Que  pront  d'ar  voeen  a  vue  : 
Mes  toi  pie  mat  ous  quement-se, 


La  Création  du  monde.  3  5  5 

par  leur  race,  seraient  occupés  les  sièges  que  nous  avons  per- 
dus. Cela  me  met  en  fureur  :  je  suis  comme  un  chien  enragé, 
si  l'on  n'arrive  pas  à  les  tenter  pour  les  faire  tomber  dans  le 
péché. 

Berit. 

Comment  ?  Ils  sont  dans  les  délices  de  toute  sorte,  et  nous, 
nous  sommes  ici  dans  les  tourments.  Je  renonce  net  au 
monde,  à  la  terre,  si  je  n'ai  pas  l'adresse  de  les  plonger  dans 
la  douleur. 

Astarot. 

L'arbre  de  vie  leur  est  défendu,  et  s'ils  y  touchent,  ils  se- 
ront tous  perdus.  Il  faut  donc  maintenant  chercher  de  toute 
manière  comment  nous  pourrons  réussir  à  les  faire  succomber 
à  la  tentation. 

Asmodée. 

Par  la  tête  bleue  !  Comment,  il  en  est  ainsi  d'eux  ?  Il  est 
temps  de  nous  réveiller  et  de  nous  mettre  à  leurs  trousses. 
Adam  est  un  homme  rusé.,  vous  n'en  doutez  pas  :  mais  aussi 
fin  que  lui  s'est  jadis  laissé  tromper. 

Satan. 

Si  nous  pouvons  une  fois  mener  à  bien  cette  affaire,  nous 
aurons  le  monde  à  notre  entière  disposition,  et  toutes  les 
créatures  qui  naîtront,  viendront,  grâce  à  eux,  dans  une  brassée 
avec  nous  en  Enfer. 

Berit. 

Satan,  tu  es,  toi,  le  plus  malin.  Je  te  l'ordonne  donc  à  cette 
heure  :  va  de  suite  au  Paradis  terrestre,  tu  sais  parfaitement 
où  il  est  situé,  va  vite  à  l'arbre  de  vie,  mais  prends  bien  garde 


j  $6  L'abbé  Eug.  Bernard. 

Rac  mar  deus  a-ben  a  Eva, 
Quent  ar  fin  nin  a  raio  un  dra. 

Astarot  a  coms. 

Hen-nes  a  ve  d'imp  un  toi  caer  ! 
920  Que  en  form  eur  serpant,  pe  un  aër, 
Que  da  Eva,  ha  lar  d'eshi, 
E  hell  franchamant  da  gredi  ;    . 
Ma  car  dibrin  un  tam  aval, 
E  vo  mestres  en  env  quercouls  hac  en  douar. 

Satanas  a  coms. 

925   Or  sa  !  Me  ia  ractal  bete  an  tat  Adam, 
An  hini  so  den  pur,  hac  a  behet  divlam; 
Ha  mar  gallan  dre  art,  dont  a-ben  anehan, 
Me  a  veso  ar  mest  partout  voar  ar  bet-man. 
Mes  dious  a  voelin,  ne  d-inn  quet  voar  he  dro, 

930  Ha  d'he  briet  Eva  neuse  me  disclerio. 

Hon-nes  so  frajiloc'h  ;  martese  dre  douster, 
E  hallen  dont  a-ben  da  lormin  ma  matier. 


Senne  II 

Adam  hac  Eva  er  Barados  terestr. 

Adam  a  coms. 

A  drugare  Doue,  ma  Frins  ha  ma  Autro, 
A  so  a  bep  amser  er  gloar  d'eus  an  envo  ! 

935   Ha  me  a  so  aman  gant  pep  contantamant, 

N'em  eus  nac  aon,  na  spont,  nac  anvoi,  na  tourmant. 
Rac-se,  ma  guir  briet,  divoallet  couls  ha  me, 
Ret  veso  exantin  ar  voeen  a  vue  : 
Hou-man  eo  an  hinin  a  voa  bet  difennet 

940  Ous-imp,  a  bep  amser,  d'eus  a  beurs  an  Drindet. 


La  Création  du  inonde.  $37 

à  ceci  :  si  tu  viens  à  bout  d'Eve,  avant  de  terminer  nous  fe- 
rons une  affaire. 

Astarot. 

Ce  sera  là  pour  nous  un  bon  coup.  Va  sous  la  forme  d'un 
serpent  ou  d'une  couleuvre,  va  trouver  Eve  et  dis-lui  qu'elle 
peut  franchement  te  croire,  que  si  elle  veut  manger  un  mor- 
ceau de  pomme,  elle  sera  maîtresse  au  ciel  aussi  bien  que  sur 
la  terre. 


Satan. 

Or  ça  !  Je  vais  à  l'instant  vers  le  père  Adam,  l'homme  sans 
tache  et  sans  péché,  et  si  je  puis  par  artifice,  l'amener  à  mes 
fins,  je  serai  le  maître  en  tous  lieux  dans  ce  monde.  Mais, 
d'après  ce  que  je  verrai,  je  n'irai  pas  m' attaquer  à  lui,  et  alors 
je  m'en  prendrai  à  Eve,  son  épouse.  Elle  est  plus  faible  :  par 
douceur,  je  pourrai  peut-être  réussir  dans  mon  entreprise. 


Scène  II. 


Adam  et  Eve  au  Paradis  terrestre. 


Adam. 


Merci,  mon  Dieu,  mon  Prince  et  mon  Seigneur,  qui  règne 
éternellement  dans  la  gloire  des  Cieux  !  Pour  moi,  je  vis  ici 
au  gré  de  mes  désirs,  je  n'éprouve  ni  peur,  ni  effroi,  ni  en- 
nui, ni  tourment.  Par  conséquent,  ma  chère  épouse,  il  faut 
ne  point  toucher  à  l'arbre  de  vie.  C'est  lui  qui  dès  le  premier 
jour,  nous  a  été  défendu  par  la  Trinité. 


5  3 S  L'abbé  Eug.  Bernard. 

Eva  a  coms. 

Ha  !  ma  fried  Adam,  guir  a  leveret  d'in  : 
Na  vin  quet  quer  frajil  donet  da  transgressin 
Gourhemen  ma  Autro,  en  deveus  ma  c'hrouet. 
Demeus  a  bep  amser  da  vesan  enoret  ! 

Adam  hac  Eva  a  sorti. 

Ar  serpant  en  em  presant,  hac  a  coms. 

945   Guelet  am  eus  Adam,  mes  prest  eo  retornet  ; 
O  clevet  he  comso,  tostat  na  greden  quet. 
Birviquen  am  eus  aon,  evit  he  fantasi, 
Ne  hallan  dont  a-ben  da  donet  d'he  tenti. 


Senne  III 
Eva  e-unan  o  pourmen  er  Barados  terestr.  a  coms. 

O  Doue  éternel  !  Pa  ho  consideran 

950  Ebars  er  blijadur  am  eus  voar  ar  bet-man  ! 
Me  so  impaleres  voar  quement  so  er  bet, 
Mestres,  superiores  voar  quement  so  crouet. 
Ha  me  ne  voan  quen  nemert  un  tam  douar, 
Ec'h  OLin-me  lequeet  gant  Prins,  Roue  ar  gloar, 

955   Un  itron  puissant  voar  quement  so  er  bet. 
Er  mor  hac  en  douar  me  a  so  enoret  : 
An  evnet  nij  en  er,  er  mor  bras  ar  pesquet, 
Hac  al  loenet  brutal  père  a  so  crouet, 
Hac  int  loenet  mortel,  evel  ma  comandin, 

960  Gant  ur  goms  hep  mui  quen,  a  obeïsso  d'in. 
Chetu  ar  frejo  mat,  a  pep  sort  materi  r, 
Me  a  hell  em  souet,  donet  d'ho  fossedi. 

! .   Le  scribe  avait  répété  les  mots  a  pep  sort  ;  il  les  a  effacés  la  première 
fois  pour  les  remplacer  par  mat. 


La  Création  du  monde.  339 

Eve. 

Ha  !  Adam,  mon  époux,  vous  dites  vrai  :  je  ne  serai  pas 
assez  faible  pour  en  venir  à  transgresser  le  commandement  de 
mon  Seigneur,  dont  je  suis  la  créature.  Puisse-t-il  être  éter- 
nellement honoré  ! 

Adam  et  Eve  sortent. 

Le  serpent  se  présente. 

J'ai  vu  Adam,  mais  il  s'est  aussitôt  détourné.  A  l'entendre 
parler,  je  n'osais  pas  approcher.  J'ai  bien  peur,  vu  son  carac- 
tère, de  n'arriver  jamais  à  le  faire  succomber  à  la  tentation. 


Scène  III. 


Eve  se  promène  seule  au  Paradis  terrestre. 

O  Dieu  éternel  !  Un  cri  de  reconnaissance  s'échappe  de 
mes  lèvres,  lorsque  je  vous  contemple  du  sein  de  la  félicité  que 
je  goûte  en  ce  monde.  Je  suis  impératrice  sur  tout  ce  qui 
existe  ;  maîtresse,  souveraine  de  tout  ce  qui  est  créé.  Et  moi 
qui  n'étais  qu'un  peu  de  terre,  je  me  trouve  être,  de  par  le 
Prince,  le  Roi  de  la  gloire,  une  dame  puissante  sur  tout 
l'univers.  Je  suis  honorée  sur  terre  et  sur  mer.  Les  oiseaux 
qui  volent  dans  les  airs,  les  poissons  dans  la  grande  mer,  les 
bêtes  féroces  sorties  des  mains  du  Créateur,  sont  tous  des 
êtres  mortels,  et  suivant  mon  commandement,  ils  m'obéiront, 
sur  une  parole,  sans  plus,  tombée  de  ma  bouche. 

Voici  les  fruits  exquis,  de  différentes  espèces,  je  puis  m'en 
servir  à  mon  souhait.  Rien  ne  m'a  été  défendu  sur  la  terre,  si 


340  L'abbé  Eug.  Bernard. 

N'en  deus  netra  ous-in  er  bet-man  difennet, 
Nemert  ar  voen  a  vue,  pa  e-hi  biniguet, 
965   Ha  ma  touchen  ont-hi,  e  ven  en  danjer  bras 
Da  vesan  tourmantet  gant  supliso  divlas. 

Ar  serpant  er  voen  a  coms. 

Clevet  aman,  Eva  :  houi  a  so  puissant 

Voar  quement  so  crouet  dindan  ar  firmamant. 

Na  ousoc'h  quet  an  holl,  me  lar  gant  guirione, 

970  Perac  ma  eo  exantet  ar  voeen  a  vue  ? 

Me  a  justifi  mar  debret,  houi  deui  da  possedi 
Ebars  er  Barados,  a  bep  sort  materi; 
Houi  a  voeso  an  holl,  tremenet  ha  da  donet, 
Evel  ma  oar  Doue  en  deveus  ho  crouet. 

975   Rac  hen  en  defoa  aon  na  vijac'h  re  savant, 
Ha  ma  vijac'h  mestres  ebars  er  firmamant  ; 
Rac-se,  me  a  lar  d'ec'h  breman  ar  virione, 
Mar  credet  ac'hanon,  houi  rai  ho  polante. 

Eva  a  coms. 

A  pelec'h  oud-de,  pa  gomses  er  guis-se  ? 
980  Me  a  gret  n'out  quet  a  beurs  Doue, 

Pa  fell  d'it  e  torren  breman  lie  hourhemen. 

Mes  caer  ac'h  eus  presec,  ne  raen  birviquen. 

Me  a  lar  d'it,  certen,  hon-nes  so  immortel, 

Ha  mar  touchomp  ont-hi,  nin  a  renquo  mervoel 
985   Ha  ma  friet  ha  me,  quencouls  hon  bugale, 

Ha  hoas  bean  privet  demeus  a  gras  Doue. 

Ar  serpant  a  coms. 

Tevet,  neb  aon,  Eva,  mervoel  na  reet  quet, 
Me  lar  gant  guirione  dira-hoe'h  assurct. 
Hac  ho  prict  ha  houi,  debret  hardiamant, 
990  Hac  e  veet  engal  da  Roue  ar  firmamant. 

Eva  a  coms. 
Me  lar  d'ech  certen,  an  dra-se  na  rin  quet, 


La  Création  du  monde.  341 

ce  n'est  l'arbre  de  vie,  parce  qu'il  est  béni,  et  si  je  venais  à  y 
toucher,  je  serais  en  grand  danger  de  me  voir  précipiter  dans 
des  supplices  insupportables. 


Le  serpent  dans  l'arbre. 

Venez  ici,  Eve,  et  écoutez-moi.  Vous  êtes  puissante  sur 
tout  ce  qui  existe  sous  la  voûte  des  cieux.  Vous  ne  savez  pas 
tout,  je  le  dis  en  vérité  :  pourquoi  l'arbre  de  vie  vous  est-il 
défendu  ?  Je  vous  garantis  que,  si  vous  en  mangez,  vous  ac- 
querrez au  Paradis  terrestre,  toute  sorte  de  connaissances; 
vous  connaîtrez  tout,  le  passé  et  l'avenir,  comme  Dieu  qui 
vous  a  créée.  Il  avait  peur  de  vous  voir  trop  savante  et  arri- 
ver à  être  maîtresse  au  Ciel.  C'est  pourquoi,  je  vous  dis  main- 
tenant la  vérité,  si  vous  m'en  croyez,  vous  ferez  à  votre  guise. 


Eve. 

D'où  es-tu,  toi,  pour  me  tenir  ce  langage  ?  Je  ne  crois  pas 
que  tu  viennes  de  la  part'  de  Dieu,  puisque  tu  voudrais  me 
faire  transgresser  son  commandement.  Mais  tu  as  beau  prê- 
cher, je  n'en  ferai  jamais  rien.  Je  te  le  dis,  sans  aucun  doute, 
cet  arbre  est  immortel,  et  si  nous  y  touchons,  il  nous  faudra 
mourir,  et  mon  époux  et  moi,  et  aussi  nos  enfants,  et  de 
plus,  nous  voir  privés  de  la  grâce  de  Dieu. 


Le  serpent. 

Taisez-vous,  et  n'ayez  pas  peur,  Eve  ;  vous  ne  mourrez 
point,  je  vous  le  dis  en  vérité,  et  l'assure  en  votre  présence. 
Et  votre  époux  et  vous,  mangez  hardiment,  et  vous  serez  les 
égaux  du  Roi  du  firmament. 

Eve. 
Je  vous  le   dis   avec  certitude,   je  ne  ferai  pas  cela.   Dieu 


342  Vabbé  Eug.  Bernard. 

Doue  memeusamant  en  deus-han  difennet. 
Ha  ma  friet  ha  me,  en  deus  groet  promesse 
Da  vout  obéissant  bepret  d'he  Vajeste. 

Ar  scrpant  a  coms. 

995   Me  a  so  un  El  guen  en  deus  chanchet  figur, 
Evit  donet  aman  d'ho  cafet,  an  dra  sur. 
Me  lar  gant  guirione,  ha  d'ec'h,  ha  da  Adam, 
Debret  au  aval-man,  n'ho  peso  quet  a  vlam  ; 
Houi  a  veso  quen  fur  goude  bean  debret, 
iooo  Impalares  dous  evel  heol,  loar  hac  ar  steret. 

Eva  a  coms. 

Me  a  lar  d'ec'h  certen,  neuse  na  greten  quet 
En  eum  presantin  e  nep  guis,  d'am  priet, 
Pehinin  a  garan  evel  d-oun  ma-unan  ; 
Hac  em  eus  aon  goude,  rac  na  ven  pell  en  poan. 

Ar  serpant  a  coms. 

1005   Me  a  lar  d'ec'h  certen,  groet  a  gueret,  Eva  : 
Me  n'ho  poursuivin  mui,  na  na  lerin  netra, 
Nemert  hoc'h  avantaj,  mar  queret  ma  sentiu, 
Voar  an  treo  excelant  houi  a  hell  possedin. 

Eva  a  coms. 

Huel  en  eum  cafan  laqueet  voar  ar  bet, 
10 10  Pa'n  d-oun  impalares  da  guement  so  crouet  : 
Me  so  lequet  mestres,  hac  assuret  breman, 
Da  guement  so  er  bet  crouet  bete  breman  : 
Me,  ne  defot  quet  d'in  na  squient,  na  guenct, 
Doue  ho  roas  d'in  en  heur  ma  voan  crouet. 
1015   Mes  bean  hueloc'h  ebars  er  firmamant, 

Goût  an  deio  da  donet,  a  se  e  ven  contant. 

Ar  serpant  a  coms. 

Neb  aon,  certenamant  n'ho  peso  drouc  a-bet, 
Te  a  vo  ar  vestres  en  pales  an  Drindet. 


La  Création  du  monde.  34$ 

nous  l'a  formellement  défendu.  Et  mon  époux  et  moi,  nous 
avons  promis  d'obéir  toujours  à  sa  Majesté. 


Le  serpent. 

Je  suis  un  ange  du  Ciel  qui  a  changé  de  forme  pour  venir 
ici  vous  trouver,  je  vous  l'assure.  Je  vous  le  répète  en  vérité, 
à  vous  et  à  Adam,  goûtez  cette  pomme,  vous  ne  serez  point 
réprimandée;  après  en  avoir' mangé,  vous  serez  aussi  sage  que 
Dieu,  vous  serez  impératrice,  brillante  comme  le  soleil,  la 
lune  et  les  étoiles. 

Eve. 

Je  vous  le  redis  avec  assurance,  si  je  le  faisais,  je  n'oserais 
en  aucune  façon  me  présenter  à  mon  époux,  que  j'aime  au- 
tant que  moi-même.  Et  j'ai  peur  ensuite  de  me  sentir  long- 
temps en  peine. 

Le  serpent. 

Je  vous  l'affirme  encore,  Eve,  faites  ce  qui  vous  plaira  :  je 
n'insisterai  pas  davantage,  et  je  n'ajouterai  rien.  Je  cherche 
seulement  votre  profit  dans  les  choses  excellentes  que  vous 
pouvez  vous  approprier. 

Eve. 

Je  me  trouve  haut  placée  dans  le  monde,  puisque  je  suis 
impératrice  de  toute  la  création.  J'ai  été  établie  maîtresse,  et 
maintenant  confirmée  dans  ce  rang  sur  tout  ce  qui  existe  dans 
l'univers.  Il  ne  me  manque  ni  science,  ni  beauté  :  Dieu  me 
les  a  données  au  moment  où  il  m'a  formée.  Mais  être  placée 
plus  haut  dans  le  firmament,  connaître  les  jours  à  venir,  cela 
me  ferait  plaisir. 


Le  serpent. 

Soyez  sans  crainte  :  certainement  vous  n'aurez  aucun  mal, 
et  vous  serez  la  maîtresse  dans  le  palais  de  la  Trinité.  Prenez 


344  L'abbé  Eug.  Bernard. 

Quemer  an  aval-man  pehini  so  excelant, 
1020  Quesset  lot  d'ho  priet  bréman  presantamant, 
Leret  d'eshan  dibrin  :  ia,  na  doutet  quet, 
Birviquen  evit  se,  certen,  na  vi  blamet. 

Eva  a  guemer  an  avat  hac  a  coms. 

He-man  so  un  aval  glas,,  mes  brao  eo  dreist  musur, 

Me  a  ia  d'hen  tafan,  me  gret  en  deus  natur 

1025       P'am  eus-han  tafeet,  ha  laquet  em  gueno, 
Me  casso  lot  d'am  priet,  couls  ha  me,  e  tebro. 

Adam  a  antre. 

Eva  a  ia  d'hen  caet,  hac  an  aval  gant-hi  en  he  dorn,  hac  a  coms. 

Adam,  ma  faradur,  me  so  deut  d'ho  caet  breman, 
Me  ho  pet  da  dibrin  dimeus  ar  fresen-man  ; 
Evit-hen  da  vout  glas,  eo  an  excelantan 
1030  Am  boa  biscoas  debret  aboe  ma  s-oun  aman. 

Adam  a  coms. 

Eva,  ma  faradur,  petra  eo  quement-se  ? 
N'en  d-eo  quet  ar  sort-se  a  debromp  d'ar  beure. 
Ha  doutans  vras  am  eus  n'en  d-oc'h  siouas  !  tentet 
Gant  an  drouc  Satanas,  ha  n'hoc'h  eus  transgresset, 
1035   Hac  ar  gomandamant  d'hon  Prins  ha  d'hon  Roue, 
Hen  defoa  difennet  ar  voeen  a  vue. 
Leret  d'in  a  pelec'h  hoc'h  eus-han  comeret  ? 
Ha  teulet  eves  mat  rac  na  vec'h  desevet. 

Eva  a  coms. 

Clevet  hoas,  ma  friet,  n'ho  peset  nep  doutans, 
1040  Debret  quencouls  ha  me,  n'ho  peso  neb  otans, 
Rac  ar  serpant,  certen  en  deus  promettet  d'in, 
Ha  houi  ha  me,  bon  daou,  hardi,  hellimp  dibrin. 

Adam  a  coms. 

Chetu  petra  a  so  :  me  ne  d-oun  quet  quiriec 
Mar  hoc'h  eus  ofanset  bon  Crouer  biniguet  : 


La  Création  du  monde.  345 

donc  cette  pomme,  elle  est  excellente,  portez-en  part  à  votre 
époux,  ne  tardez  pas  et  dites-lui  d'en  manger.  Oui,  n'hésitez 
pas  ;  jamais'  assurément  pour  cela  vous  n'encourrez  de  blâme. 


Eve  prend  la  pomme. 

Cette  pomme  est  verte,  mais  elle  est  merveilleusement 
belle;  je  vais  y  goûter,  car  je  la  crois  de  bonne  qualité... 

Puisque  je  l'ai  portée  à  mes  lèvres,  je  vais  en  faire  part  à 
mon  époux,  et  comme  moi  il  en  mangera. 

Adam  entre. 

Eve  va  vers  lui  tenant  la  pomme  à  la  main. 

Adam,  mon  époux,  je  viens  à  vous  en  ce  moment  pour 
vous  prier  de  goûter  à  ce  fruit;  il  est  vert,  néanmoins  c'est  le 
meilleur  que  j'aie  encore  mangé  depuis  que  je  suis  ici. 


Adam. 

Eve,  mon  épouse,  qu'est-ce  que  cela  signifie  ?  Ce  n'est  pas 
de  cette  espèce  que  nous  avons  mangé  ce  matin.  J'ai  grand' 
peur,  hélas  l.que  vous  n'ayez  été  tentée  par  l'esprit  du  mal, 
par  Satan,  et  que  vous  n'ayez  transgressé  le  commandement 
de  notre  Prince,  de  notre  Roi  :  il  nous  avait  défendu  l'arbre  de 
vie.  Dites-moi  donc  d'où  vous  avez  cueilli  cette  pomme  ? 
Prenez  bien  garde  d'avoir  été  trompée. 


Eve 

Ecoutez  encore,  mon  époux,  et  n'ayez  aucune  crainte, 
mangez  comme  moi,  et  vous  n'aurez  pas  de  mal.  C'est  le 
serpent  qui  m'a  garanti  que  vous  et  moi,  tous  deux,  nous 
pouvions  hardiment  en  manger. 

Adam. 

Voilà  ce  que  c'est.  Je  ne  suis  pas  coupable  si  vous  avez 
offensé  notre  bon  Créateur.  De  cette  pomme  je  ne  mangerai 


346  L'abbé  Eug.  Bernard. 

1045   Me  ne  debrin  hesquen  pa  dlefen  perissan, 

Rac  doutans  vras  am  eus  na  deufe  d'am  lasan. 
Me  so  laquet  er  bet  gant  Doue  puissant, 
A  so  Prins  hac  Autro  dindan  ar  firmamant  : 
Monet  d'hen  ofansin  evit  un  tam  aval, 

1050  A  ve  eur  gourmandis,  lec'h  d'ehan  d'am  samal. 

Eva  a  coms. 

N'ho  peset  quet  a  dout  da  vean  tamalet. 

Debret  neb  aon  ho  lot,  rac  me  am  eus  debret. 

Me  lar  d'ec'h,  ma  friet,  mar  debret  an  tam-se, 

E  veet  quer  savant  ha  quen  fur  ha  Doue, 
1055   Ha  bean  ouspen-se  evurus  evel-t-han. 

Rac-se,  ma  guir  briet,  debret  pa  ho  pedan. 

Nin  so  guir  priedo,  ha  laquet  assambles, 

A  gle  en  eum  garet  ebars  ar  Baradoes  ; 

Rac-se,  m'  ho  pet,  Adam,  debret  an  tam  aval  : 
1060  Birviquen  evit-se  n'ho  peso  nep  scandai. 

Adam  a  coms. 

Certenamant,  Eva,  evel  ma  guir  priet, 
M'ho  car  iidelamant  dreist  quement  so  er  bet. 
E  veet  quer  savant  ha  quen  fur  ha  Doue, 
Ne  oufen  birviquen  donet  da  credin  se. 
1065  Pa  leret  d'in  eta,  me  ia  da  acceptin, 

Pa  n'en  deus  nep  danjer,  couls  ha  houi,  hen  dibrin. 

Ma  teb  an  aval,  ha  goude  e  coms. 

O  maleur  detestabl  da  voelet  dentation  ! 
O  ma  friet  Eva,  te  so  occasion. 
Collet  hon  deus  ar  gras  breman,  incontinant, 
1070  Birviquen  na  jouissomp  er  joaio  montant. 
Chetu  nin  en  noas  beo,  gant  ar  contusion, 
Pa  vo  ret  d'imp  monet  dirac  Roue  an  tron. 

Eva  a  coms. 
Mallos  ar  tirmamant,  ha  couls  an  holl  Elle, 


La  Création  du  monde.  347 

pas  une  miette,  quand  je  devrais  perdre  la  vie,  car  j'ai  bien 
peur  que  Dieu  ne  me  fasse  mourir.  Je  suis  par  lui  placé  sur  la 
terre,  il  est  puissant,  seigneur  et  maître  sous  la  voûte  des 
cieux  ;  risquer  de  l'offenser  pour  un  morceau  de  pomme,  ce 
serait  une  gourmandise,  et  il  aurait  raison  de  m'en  vouloir. 


Eve. 

Il  ne  vous  en  voudra  pas,  ne  craignez  rien.  Mangez  votre 
part  et  n'ayez  point  peur,  car  moi,  j'en  ai  mangé.  Je  vous  le 
dis,  mon  époux,  si  vous  mangez  ce  morceau,  vous  serez 
aussi  savant  et  aussi  sage  que  Dieu,  et  de  plus  aussi  heureux 
que  lui.  C'est  pourquoi,  mon  cher  mari,  mangez,  puisque  je 
vous  en  prie  :  nous  sommes  de  vrais  époux,  destinés  à  vivre 
ensemble,  et  nous  devons  nous  aimer  dans  le  Paradis.  Aussi, 
je  vous  le  demande,  Adam,  mangez  ce  morceau  de  pomme  : 
jamais  pour  cela  vous  ne  recevrez  de  reproche. 


Adam. 

Sans  aucun  doute,  Eve,  comme  ma  chère  épouse,  je  vous 
aime  sincèrement,  et  plus  que  tout  au  monde.  Que  vous 
soyez  aussi  savante  et  aussi  sage  que  Dieu,  je  n'en  croirai  ja- 
mais rien.  Mais,  puisque  vous  me  le  dites,  j'accepte,  et  dès 
qu'il  n'y  a  aucun  danger,  comme  vous,  je  vais  en  manger. 

Adam  mange  la  pomme. 

Il  reprend. 

O  malheur  détestable  d'avoir  cédé  à  la  tentation  !  O  Eve, 
mon  épouse,  c'est  vous  qui  en  êtes  cause  :  nous  avons  main- 
tenant, à  l'instant,  perdu  la  grâce.  Jamais  nous  ne  goûterons 
plus  les  jouissances  dont  nous  étions  comblés.  Nous  voici 
tout  nus,  et  quelle  confusion  pour  nous  quand  il  faudra 
nous  présenter  devant  le  Roi  des  Cieux  ! 

Eve. 

Malédiction  du  Ciel,  malédiction  des  Anges  sur  le  serpent 


348  L'abbé  Eug.  Bernard. 

D'ar  serpant  ifernal  so  caus  da  guement-se  ! 
1075  Rac  ar  hef  miliguet,  hen-nes  a  laras  d'in, 

Ha  ma  friet  ha  me,  hardi,  hcllemp  dibrin 

Un  tam  aval  dimeus  ar  voeen  a  vue. 

Chetu  pe  voar  feson  so  arriet  guen-e. 

Ha  me  voe  quen  liger  donet  da  credin  d'han, 
1080  Ha  breman  e  oun  caus  da  coll  tout  er  bet-man. 

Nin  voa  ar  re  guentan  voa  en  douar  crouet 

Gant  Doue  éternel,  hac  en  gras  confirmet  ; 

Allas  !  ha  ma  oun  caus,  siouas  !  divoar  hon  pen, 

An  holl  quitibunan  a  ielo  d'an  Ifern. 

Doue  an  Tat  a  ia  da  caet  anhe. 

Adam  a  coms. 

1085   He-man  eo  ar  maleur  coet  voar-n-omp  hon  daou, 
Ha  voar  quement,  siouas  !  hon  goude  a  deuiou  ! 
Me  voell  Doue  an  Tat  o  tonet  d'hon  guelet  : 
Me  ia  d'en  em  cusan,  gant  mes  na  creten  quet 
Chom  aman  dira-s-han,  d'he  vesan  ofanset, 

1090  Rac  hor  mes  a  so  bras  balamour  d'hon  pehet. 
Demp  breman  a  goste,  en  toes  an  delio, 
Dindan  ar  gue  figues  da  coach  hon  figurio. 

Doue  an  Tat  a  coms. 

Ma  oud-de  et,  Adam  ?  Me  gret  e  out  coachet. 
Ha  sonj al  a  res-te  n'oufen  quet  da  voelet  ? 
1095   Ma  oud-de  et,  Adam  ?  Sao  alesse  timat. 
Collet  e  t'eus  breman  sraco  Doue  an  Tat. 
Maleur  vo  d'it  biscoas  ma  besan  ofanset  ; 
Gant  reson  competant  e  vesi  punisset. 

Adam  a  coms. 

Pardon,  misericord  houlennan,  ma  Doue! 
1 100  Gant  pep  compassion  ho  pet  ous-in  true  ! 

P'am  eus  clevet  ho  moes,  e  oun  deut  da  grenan, 
Ha  gant  oreur  ha  spont  e  oun  deut  da  goean. 
Me  so  sur  regretant  ha  d'ar  pes  am  eus  groët  ; 


La  Création  du  monde.  349 

infernal  qui  est  cause  de  tout  cela.  Car  c'est  ce  prince  maudit, 
c'est  lui  qui  m'a  dit  que  mon  époux  et  moi,  nous  pouvions 
hardiment  manger  une  pomme  de  l'arbre  de  vie.  Voilà  de 
quelle  manière  la  chose  m'est  arrivée.  Et  moi,  j'ai  été  assez 
légère  pour  croire  à  ses  paroles  !  Maintenant,  par  ma  faute, 
tout  est  perdu  au  monde.  Nous  étions  créés  sur  terre,  les  pre- 
miers que  Dieu  éternel  eût  confirmés  en  grâce,  hélas  !  c'est 
moi  qui  suis  cause  si  tous  les  hommes  ensemble  iront  en 
Enfer. 


Dieu  le  Père  va  les  trouver. 


Adam. 


Quel  malheur  est  venu  fondre  sur  nous  deux,  et  sur  tous 
ceux,  hélas  !  qui  naîtront  après  nous  ! 

Je  vois  Dieu  le  Père  qui  se  dirige  de  notre  côté  :  je  vais 
me  cacher,  j'ai  honte,  je  n'oserais  pas  rester  ici  en  sa  pré- 
sence, après  l'avoir  offensé.  Notre  confusion  est  grande  à  cause 
de  notre  péché.  Retirons-nous  à  l'écart,  au  milieu  des  feuilles, 
sous  les  figuiers,  afin  de  nous  mettre  à  couvert. 


Dieu  le  Père. 

Où  es-tu  allé,  Adam?  Je  crois  que  tu  te  caches.  Penses-tu 
donc  que  je  ne  puisse  te  voir  ?  Où  es-tu  allé,  Adam  ?  Lève-toi 
de.  là  vite.  Tu  as  maintenant  perdu  la  grâce  de  Dieu  le  Père. 
Malheur  à  jamais  pour  toi  de  m'avoir  offensé,  tu  seras  puni 
comme  tu  le  mérites. 


Adam. 

Pardon  !  Miséricorde  !  je  vous  le  demande,  ô  mon  Dieu  ! 
Soyez  compatissant,  ayez  pitié  de  nous  !  Lorsque  j'ai  entendu 
votre  voix,  je  me  suis  senti  trembler;  d'horreur  et  d'épou- 
vante je  me  suis  laissé  tomber.  Je  regrette  amèrement  ce  que 

Revue  Celtique,  IX.  23 


}$o  L'abbé  Eug.  Bernard. 

Queun  am  eus  em  halon  d'ho  pean  ofanset. 
1105   Pardonet  ma  ine!  na  n'  d-inn  quet  d'an  Ifern, 
Ha  ma  lequet  en  tu  da  ober  pinijen. 

Doue  an  Tat  a  coms. 

Lavar  d'in-me,  Adam,  petra  poa  esperet 
Da  dont  da  transgressin  ma  gourhemen  roet  ? 
Te  a  renquo  mervel,  ha  queme.nt  crouadur 
11 10  A  deuio  voar  ar  bet,  ha  dimeus  da  natur. 

Adam  a  coms. 

Me  a  lavaro  d'ec 'h,  ma  Doue,  ia,  mar  pcrmettet, 
Ma  friet  a  so  caus,  he  deus  ma  foursivet. 
Evid-oun-me,  certen,  ne  rajen  birviquen; 
Me  ne  falfoa  quet  d'in  terrin-  ho  courhemen. 

Doue  an  Tat  a  coms. 

11 15   Eva,  lavar  d'in-me  perac  e  t'eus  debret 
Demeus  an  aval-se,  ha  roet  d'as  priet  ? 

Eva  a  coms. 

Autro  Doue,  nep  hor  c'hrouas, 
Ar  speret  ifernal,  hen-nes  hon  desevas, 
O  corner  an  aval,  hoc  o  presanti  d'in, 
1120  Ma  lavaras,  hep  blam  e  haljen  he  sibrin  ; 
Ma  creguis  en  aval,  ha  me  dibrin  un  tam, 
Ha  me  digas  ar  rest  d'am  guir  priet  Adam; 
Allas  !  hac  hen  pedis  dre  ali  Satanas, 
Hac  hen  dibrin  he  lod  dimeus  an  aval  glas. 

Doue  an  Tat  a  coms  ous  ar  serpant. 

1125   Pa  t'eus  groet  quement-se,  serpant,  bes  miliguet! 
Te  vo  dindan  vacsin  quement  loen  so  er  bet. 
Birviquen  coulscoudc  d'as  poanio  na  ve  fin, 
Hac  nep  na  dorn  na  troat,  quers-se  voar  da  beutrin. 

Doue  a  sorti. 
Ar  serpant  cr  voeen  a  gri. 


La  Création  du  inonde.  3  5 1 

j'ai  fait,  j'ai  le  cœur  contrit  de  vous  avoir  offensé.  Pardonnez  à 
mon  âme  !  Que  je  n'aille  pas  en  Enfer,  et  mettez-moi  en  me- 
sure de  foire  pénitence. 

Dieu  le  Père. 

Dis-moi,  Adam,  qu'espérais-tu  donc  en  transgressant  ainsi 
mon  ordre  formel  ?  Il  te  faudra  mourir,  avec  toutes  les  créa- 
tures qui,  de  ta  race,  viendront  au  monde. 


Adam. 

Je  vous  le  dirai,  mon  Dieu,  oui,  si  vous  me  le  permettez: 
mon  épouse  Eve  est  cause,  c'est  elle  qui  m'a  fourvoyé.  Pour 
moi,  assurément,  je  ne  l'aurais  jamais  fait  :  je  ne  voulais 
point  violer  votre  commandement. 

Dieu  le  Père. 

Eve,  dis-moi,  pourquoi  as-tu  mangé  cette  pomme,  et  pour- 
quoi en  as-tu  donné  à  ton  mari  ? 

.   Eve. 

Seigneur  Dieu,  qui  nous  avez  créés,  c'est  l'esprit  infernal, 
c'est  lui  qui  nous  a  trompés.  Il  cueillit  la  pomme  et  me  la 
présenta  en  disant  que,  sans  encourir  aucun  blâme,  je  pouvais 
en  manger.  Je  pris  donc  la  pomme,  j'en  mangeai  un  morceau, 
et  je  portai  le  reste  à  mon  époux  Adam.  Hélas,  je  le  priai  sur 
le  conseil  de  Satan,  et  il  mangea  sa  part  de  la  pomme  verte. 


Dieu  le  Père  au  serpent. 

Puisque  tu  as  fait  cela,  serpent,  sois  maudit.  Tu  seras 
foulé  par  tous  les  animaux  de  la  terre,  jamais  il  n'y  aura  de 
lin  à  ton  supplice,  et,  sans  pieds,  sans  mains,  tu  marcheras 
sur  ton  ventre. 

Dieu  sort. 
Le  serpent  crie  dans  l'arbre. 


3  )  2  L'abbé  Eug.  Bernard. 

Belsibut  a  antre,  hac  a  coms. 

Harao  !  harao  da  Satanas  ! 
1130  Diaoulien  an  Ifern,  deut  holl,  bihan  ha  bras, 
Da  guerhat  ar  serpant,  pa  na  hell  mui  querset, 
Rac  gant  Doue  an  Tat  hen  a  so  miliguet. 

An  diaoulien  a  corhs. 

Diaoulien  an  Ifern,  deut  holl  quitibunan, 
Da  querhat  ar  serpant  a  so  manet  en  poan. 
1 1 3  5   Manet  eo  er  jardin,  cr  voeen  a  vue, 

Mes  laquet  eo  ar  bet  dindan  hon  liberté. 

Astarot  a  coms. 

Cregomp  en-han  breman,  pa  na  hell  quet  querset, 
M'hen  quessomp  d'an  Ifern,  rac-se  ma  sicouret. 


FIX  D  EUS  AN  EIL  ACT. 


La  Création  du  monde.  $5  $ 


Beelzébut  entre. 

Haro  !  Haro  à  Satan  !  Diables  de  l'Enfer,  venez  tous,  petits 
et  grands,  chercher  le  serpent,  puisqu'il  ne  peut  plus  marcher. 
Il  a  été  maudit  par  Dieu  le  Père. 


Les  Diables. 

Diables  de  l'Enfer,  venez  tous  ensemble  chercher  le  serpent 
qui  se  trouve  maléficié.  Il  est  resté  au  jardin,  dans  l'arbre  de 
vie  ;  mais  le  monde  est  désormais  placé  sous  notre  dépen- 
dance. 

Astarot. 

Prenons-le  maintenant  dans  nos  mains,  puisqu'il  ne  peut 
plus  marcher,  et  portons-le  en  Enfer.  Venez  donc  à  mon  se- 
cours. 


FIN    DU   SECOND    ACTE. 


MÉLANGES 


I. 

PROVECTIOX  DE  MOYENNES  EX  SPIRAXTES 
SOURDES  EX  BRETOX  ARMORICAIX. 

Dans  son  admirable  étude  sur  l'effet  des  terminaisons  sur  la 
consonne  initiale  en  comique  (Kuhn  Beitrâge,  V,  p.  162  et 
suiv.),  Ehel  établit  le  parlait  accord  du  comique  avec  le  breton 
armoricain  dans  les  différents  phénomènes  qui  font  l'objet  de 
son  étude,  sauf  en  un  point  :  le  comique  fait  passer  b  à  f,  ;;/ 
à  f  par  l'intermédiaire  de  v  ;  gw  suit  l'analogie  de  g  qui 
peut  passer  à  /;  et  devient  w  et  hiu.  Si  on  prend  l'ensemble  du 
breton  armoricain,  Ebel  a  raison  de  considérer  ces  faits  comme 
propres  au  comique,  mais  cette  mutation  est  loin  d'être  in- 
connue sur  le  territoire  breton.  Je  l'ai  observée  en  bas-van- 
netais  et  en  haute  Cornouailles,  à  Guémené  et  au  Faouët. 
Ainsi  on  ne  dit  pas  dans  ces  régions  :  ma  e  valo  «  il  est  en 
train  de  moudre  »,  mais  ma  c  falo  =  e  ma  o~  valo  ou  valaff 
en  armoricain  moyen.  De  même  on  dira  à  Guémené  ma  efa- 
hatat  anehon  «  il  est  en  train  de  le  battre  »  =  ma  0^  va~atat 
(bahatai  =  léonard  habitat,  de  ba%  bâton),  etc.;  me  gred  e 
ferwa  en  dour  «  je  crois  que  l'eau  bout  »  (Faouët);  eferwa  = 
r~  verwa  ;  de  même  à  Guémené  eferwa  en  daor. 

L'explication  donnée  par  Ebel  pour  ces  phénomènes  en  cor- 
nique  s'applique  naturellement  à  ceux  que  je  signale:  le  ^ 
final  de  c~  par  sa  situation  de  finale  a  passé  à  s,  et  a  assimilé 
la  spirante  suivante  ;  par  son  influence  v  est  devenu  /.  On 
pourrait  expliquer  ces  faits  autrement,  mais  ici  les  choses  se 


Mélanges.  i,  5  ç 

sont  bien  passées  comme  Ebel  l'indique.  Le  x.  du  pronom  pos- 
sessif de  la  2e  personne  du  pluriel  a  été  incontestablement  s 
avant  de  disparaître  ;  ho%  breuzr  «  votre  frère  »  a  passé  par  la 
phase  hos  breuy  avant  de  devenir  ho  preur;le  haut-vannetais  en 
fournit  une  preuve  irrécusable  :  on  dit  en  effet  encore  dans 
cette  zone  du  vannetais  :  ho  us  ciuter  «  votre  autel  »  et  non 
ho%  ctuter  (écrit  hou  ç'auter). 

Ce  fait  dialectal  se  présente  très  fréquemment  dans  le  mys- 
tère de  Sainte  Barbe  ;  en  voici  quelques  exemples  : 

P.  14,  strophe  58  (éd.  Ernault),  pe  effemp  glan  manet  (pe  ef- 

fcmp  =  pe  e~  vemp)  ; 
P.  15,  str.  62  :  dan  amser  maz  querhet,  effe~o  net  commencet 

(effexp  —  ei  ve~o)  ; 
P.  16,  str.  65  :  effixjff  (ez  viziff)  ; 
P.  17,  str.  71  :  ha  me  preder  ...  effe  un  termen  avenant  (effe 

=  e~  ve)  ; 
P.  20,  str.  84  :  pan  guelhe  effe  prêt  (effe  =  e~  ve)  ; 
P.  26,  str.  108  :  ne  cafïarï  quet   ...  effeni  doeou  (effent  =  e~ 

vent)  ; 
P.  34,  str.  140:  certen  ouf  ...  effen  lacaet  ...  dan  maru  (effen 

==  e~  veu)  ; 
P.  37,  str.  152  :  e/foc  =  e%  voe ; 
P.  81,  str.  344:  effioni  =  e~  vient; 
Ibià.,  str.  342  :  effile  =  £~  vi~e; 
P.  93,  str.  402  :  effemp  =  e~ve^o; 
P.  53,  str.  220  :  effe%  =  e~  ve~  (présent  d'habitude). 

Il  y  a  bon  nombre  d'autres  exemples  à  citer.  M.  Ernault 
n'en  a  donné  qu'un  petit  nombre  dans  son  dictionnaire  sous 
e~.  Il  ressort  très  clairement  de  ces  citations  que  l'auteur  pro- 
nonçait partout  fie  v  initial  du  verbe  bout,  be^affen  construc- 
tion avec  e~,  tout  en  l'écrivant  souvent  v  et  qu'il  appartenait  à 
une  zone  où  avaient  lieu  les  phénomènes  que  j'ai  relevés  à 
Guémené  et  au  Faouët.  Il  y  a  tout  justement  à  deux  kilo- 
mètres du  Faouët  un  pèlerinage  célèbre  de  sainte  Barbe.  La 
chapelle  a  été  érigée  à  la  fin  du  xv°  siècle  par  le  seigneur  de 
Toulbodou,  près  Guémené,  qui,  surpris  par  un  orage  épou- 
vantable dans  la  vallée  de  l'Ellé,  avait  fait  vœu  de  construire 


j$6  Mélanges. 

sur  les  lieux  même  une  chapelle  à  la  patronne  de  la  foudre. 
L'auteur  du  mystère  serait-il  de  la  haute  Cornouaillcs  ?  Il  est 
bien  possible,  il  est  vrai,  et  même  probable  que  ces  phéno- 
mènes de  provection  se  produisent  ailleurs  sur  le  territoire 
breton.  On  voit  en  tout  cas  que  le  seul  phénomène  dans  le 
traitement  des  consonnes  initiales  qui  parût  séparer  le  cor- 
nique  du  breton  armoricain  n'est  point  étranger  à  celui-ci. 
Quelques  celtisants  semblent  considérer  le  comique  comme 
une  transition  entre  le  gallois  du  sud  et  le  breton  armoricain. 
En  réalité,  le  comique  est  infiniment  plus  rapproché  de  l'ar- 
moricain que  du  gallois,  et  dans  sa  phonétique  et  dans  ses 
formes  et  dans  sa  syntaxe.  Si  l'on  voulait  établir  des  groupe- 
ments dans  les  langues  bretonnes,  on  devrait  mettre  d'un  côté 
le  gallois  et  de  l'autre  le  comique  et  l'armoricain,  ce  qui  ne 
surprendra  personne  tant  soit  peu  au  courant  de  l'histoire  de 
la  Cornouailles  et  de  l'Armorique.  Une  des  principales  divi- 
sions de  notre  pays  porte  le  même  nom  que  la  Cornouailles 
anglaise;  notre  Kcrnco  —  Kernyw,  nom  que  les  Gallois  don- 
nent encore  à  leurs  voisins  ;  de  plus,  il  y  a  bon  nombre  des 
noms  de  lieux  identiques  dans  notre  Kerneo  et  la  Kernyw  in- 
sulaire. 

J.  LOTH. 

IL 

L'EXPRESSION  NEVEZ  IMPRIMET  DANS  LE  TITRE 
DU  GRAND  MYSTÈRE  DE  JÉSUS  ET  DU  MYSTÈRE 
DE  SAINTE  BARBE. 

La  date  de  l'impression  du  Grand  Mystère  est  de  1530. 
M.  de  La  Yillemarqué  a  argué  de  l'expression  a  neve%  imprimet 
du  titre  qu'il  s'agissait  d'une  reimpression. 

Or,  cette  expression  indique  simplement  une  nouveauté. 
C'est  l'application  à  l'imprimerie,  d'un  idiotisme  breton  bien 
connu  indiquant  une  chanson  nouvelle;  dans  un  très  grand 
nombre  de  chansons,  on  trouve  au  début  :  a  ncvr~  sauet,  a 
iicuc-  composet  «  nouvellement  composée  ».  La  vie  de  sainte 
Nonne  en  fournit  un  exemple  des  plus  clairs.  Le  prêtre  cherche 
en  vain  de  l'eau  pour  baptiser  Devy  ;  une  source  jaillit  sous 


Mélanges.  357 

ses  yeux,  et  il  s'écrie  :  setu  vn  feunteum  eyennet  ...a  neue% 
savet,  credet  sur  «  voici  une  source  qui  a  jailli  ...  fraîchement 
(à  l'instant)' sortie  de  terre,  croyez  bien  ».  Il  n'y  a  donc  aucune 
raison  pour  croire  la  version  bretonne  du  Mystère  plus  an- 
cienne que  1530.  M.  Paul  Meyer  (Revue  celtique,  1866,  p.  210) 
a  montré  que  l'auteur  breton  a  suivi  la  rédaction  d'Arnoul 
Gresban  ou  plutôt  celle  de  Jean  Michel,  jouée  à  Angers  en 
i486  et  bientôt  après  imprimée  par  Vérard. 

Le  titre  du  mystère  de  sainte  Barbe  offre  un  nouvel  exemple 
de  cette  locution.  La  première  édition  de  1557  porte  dans  la 
Bibliographie  bretonne  de  MM.  Gaidoz  et  Sébillot  ce  titre  :  E 
Paris  neue^  imprimet  gant  Bernard  de  leuae.  Imprimet  e  Paris 
euit  Bernard  de  Leau  pehiny  a  chom  e  montroulles  var  pont 
bourret  en  bloaz  MDLVII.  L'édition  de  1647  ne  porte  pas  les 
mots  neue^  imprimet.  Il  est  parfaitement  clair  que  cette  expres- 
sion ici  a  le  même  sens  que  dans  le  titre  du  Grand  Mystère. 
L'édition  de  M.  Ernault  ne  donne  pas  le  titre  complet  de  la 
première  édition  dont  une  copie  a  été  communiquée  à  l'auteur 
par  M.  de  La  Villemarqué. 

J.  LOTH. 

III. 

DO  (DE,  DA)  PARTICULE  VERBALE  EN  BRETON 
ARMORICAIN. 

Zeuss  (Gramm.  Celt.  2,  p.  417)  signale  l'emploi  de  du  (do) 
comme  particule  verbale  à  la  place  de  roen  irlandais.  Mais  per- 
sonne, à  ma  connaissance,  n'en  a  fait  la  remarque  pour  le 
breton  armoricain.  Cela  tient  à  ce  que  l'emploi  de  do  comme 
particule  verbale  est  extrêmement  restreint  et  ne  s'observe  que 
dans  des  formules  de  souhait.  Aujourd'hui,  on  ne  s'en  sert 
que  dans  des  formules  comme  :  Doué  d'o  pennigo  «  que  Dieu 
vous  bénisse  »,  Doué  d'en  bennigo.  Il  est  impossible  de  prendre 
ces  formes  en  0  pour  des  infinitifs,  l'infinitif  n'étant  réguliè- 
rement en  0  qu'en  haute  Cornouailles.  Les  Colloques  de  Qui- 
quer  de  Roscoff  qui  donnent  le  langage  familier  en  offrent  un 
certain  nombre  d'exemples;  je  me  sers  de  l'édition  de  1632, 
imprimée  à  Morlaix,  chez  George  Alliennc  : 


5$8  Mélanges. 

P.  185,  Doué  da  ve~o  meulet  «    Dieu  soit  loué  »,  au  lieu  de 

Doué  ra  vexp  meulet  ; 
P.    70,  nos  mai  da  roi '  Doue  déchu  «  Dieu  vous  doint  bonne 

nuict  »  ; 
P.     16,  Doué  da  roiff1   nos  mal  dech  «   Dieu  vous  doit  (leg. 

doint)  bonsoir,    la  phrase  précédente   est  Doué  r'ho 

conduyo  ; 
P.    31,  Doué  do  benniguo  «  Dieu  vous  bénie  »,  etc. 

L'emploi  de  do  se  bornant  à  ces  formules  optatives,  il  n'y  a 
pas  lieu  de  s'étonner  qu'on  n'en  trouve  pas  d'exemple  dans  la 
Vie  de  sainte  Nonne  ou  le  Grand  Mystère  de  Jésus.  Je  n'af- 
firmerais pas  d'ailleurs  qu'une  lecture  attentive  de  ces  textes 
et  de  ceux  de  la  même  époque  n'en  découvrit  quelques-uns. 

Il  est  à  remarquer  que  da  pour  ra  est  toujours  précédé  du  sujet. 

L'emploi  de  da  avec  le  futur-conjonctif  en  0  se  restreint  au- 
jourd'hui de  plus  en  plus  ;  dans  certaines  parties  de  la  Bre- 
tagne, le  futur  est  remplacé  par  l'infinitif  et  la  forme  en  0 
n'apparaît  que  dans  des  formules  consacrées,  comme  Doué  d'o 
peu  ni  go.  J.  Loth. 

IV. 

DE  LA  PRONONCIATION  DES  NOMS  EN  IAC  EN 
BAS-VANNETAIS. 

Dans  le  n°  1-3  du  tome  VIII  de  la  Revue  Celtique,  p.  113, 
M.  D'Arbois  de  Jubainville  fait  la  remarque  en  passant  que 
«  c'est  un  phénomène  moderne  qui,  dans  Brieç  (au  XIe  siècle 
Britbiac)  a  fait  triompher  sur  la  prononciation  gallo-romaine 
des  bas-temps  la  prononciation  néo-celtique  de  l'a  long  dans 
le  suffixe  âcus,  tandis  que  la  prononciation  gallo-romaine  de  la 
fin  de  l'empire  persiste  dans  Avessac,  Campénéac,  Peillac  ». 

Je  ne  sais  pas  comment,  à  Briec  même,  on  prononce  Yec 
finale.  Il  faudrait,  pour  en  être  sûr,  faire  le  voyage  de  Briec 

1.  On  lit  voit,  faute  d'impression  évidente.  Le  futur-conjonctif  de  ce 
verbe  dans  Quiquier  est  écrit  ordinairement  roiff.  L'ff  n'a  ici  aucune  valeur 
étymologique,  comme  il  est  facile  de  s'en  convaincre  en  feuilletant  les  Col- 
loques. L'ff  ne  se  prononçant  plus  dans  un  grand  nombre  de  cas,  a  été  em- 
ployé à  tort  et  à  travers.  La  forme  de  l'infinitif  de  ce  verbe  est  reiff. 


Mélanges.  359 

même.  Mais  il  existe  des  noms  en  iac  dans  le  bas-vannetais 
que  j'ai  entendu  cent  fois  prononcer,  par  exemple  Priziac  et 
Silfiac  (arrondissement  de  Pontivy).  Ces  noms  ont  conservé 
l'orthographe  traditionnelle,  mais  ils  sont  arrivés  réellement  à 
kcomme  Brithiac;  on  devrait  écrire,  si  on  se  conformait  à  la 
prononciation  :  Prijec,  Sillec  (/  mouillé).  LV  de  ce  dans  ces 
noms  en  iac  se  distingue  très  nettement  de  IV  de  ce  =  âco 
breton  ;  Ye  de  Prijec,  Silice,  se  prononce  très  ouvert  comme  Ye 
de  fer,  père,  mère,  et  s'écrirait  à  la  française  :  Prijec,  Sillèc.  Au 
contraire  Ye  de  ec  =  oc  •=  âco,  se  prononce  comme  l'e  muet 
français  (ô)  bref;  on  prononcerait,  en  bas-vannetais,  Brièc  = 
Brithiac,  mais  on  dit  :  Sam-Briec  (prononcez  Briôc)  «  Saint- 
Brieuc  ». 

Bricc  sortant  de  Brithiac  a  dû  avoir  la  même  histoire  que 
Priziac  et  Silfiac,  mais  en  Cornouailles  l'accent  étant  très  for- 
tement expiratoire  et  énergique  sur  la  pénultième,  il  est  fort 
probable  qu'aujourd'hui  on  prononce  à  Briec  même  Bride  avec 
Yô  très  bref,  peut-être  Brik  avec  l'i  long,  et  un  e  à  peine  per- 
ceptible. Dans  un  récent  voyage  à  Quimper,  j'ai  en  vain  es- 
sayé  d'avoir  la  prononciation  réelle  de  Briec  à  Briec  même. 
Pour  Avessae,  Campénéac,  Peillac,  ils  sont  dans  une  zone  de- 
puis très  longtemps  française.  On  y  prononce  Avessa,  Cam- 
pegna,  Peilla.  C'est  la  prononciation  de  ce  pays  également 
pour  les  noms  bretons  en  avos  :  Saint-Thuria,  Saint-Sulia. 

Cette  prononciation  identique  des  noms  en  âvo-  et  des 
noms  gallo-romains  en  âco  a  même  amené  de  singulières 
erreurs  d'orthographe  :  ainsi  on  écrit  officiellement  Saint-Suliac, 
tandis  que  la  vraie  forme  est  Saint-Suliau. 

Il  y  en  a  eu  de  plus  amusantes  encore  pour  une  raison  ana- 
logue, dans  la  transcription  des  noms  bretons  figés  sous  la 
forme  eue  z=  oc  dans  une  zone  où  le  breton  a  disparu  vers  le 
xil-xne  siècle.  On  prononce  eu  dans  ce  pays  ;  l'orthographe 
officielle  a  fait  de  plusieurs  de  ces  noms  des  noms  en  euf:  ainsi, 
dans  l'Ille-et-Vilaine,  Rotheneuf  dont  l'orthographe  ancienne 
est  Roteneuc,  prononcé  Roteneu.  Tout  récemment,  M.  Orain, 
dans  sa  Géographie  pittoresque  d'Ille-et-Vilaine,  ouvrage  dont 
on  ne  saurait  dire  trop  de  mal,  a  fait  venir  Rotheneuf  de 
rota  nova  !  J.  Lotii. 


360  Mélanges. 


V. 


DU  PRONOM  SUFFIXE  DE  LA  TROISIÈME  PERSONNE 
DU  PLURIEL  ET  DU  PRONOM  POSSESSIF  DE  LA 
TROISIÈME  PERSONNE  DU  SINGULIER  EN  GALLOIS. 

Sous  le  titre  de  Observai  ions  on  ihc  welsh  pronouns,  M.  Max 
Nettlau  a  publié  dans  le  vol.  VIII,  2e  partie,  1887,  des  Mé- 
moires de  la  Société  des  Cvmmrodorion,  un  travail  curieux 
donnant  beaucoup  de  formes  dialectales  qu'on  chercherait  vai- 
nement dans  la  grammaire  de  Zeuss.  M.  Max  Nettlau  a  trouvé 
dans  le  dictionnaire  de  Davies  des  formes  de  la  troisième  per- 
sonne du  pluriel  du  pronom  suffixe  en  -udd  qu'il  déclare  mo- 
destement ne  pas  pouvoir  expliquer  (c'est  une  des  seules 
choses  qu'il  n'explique  pas).  Il  va  même  jusqu'à  mettre  en 
doute  leur  existence.  Sur  ce  dernier  point,  il  ne  saurait  cepen- 
dant y  avoir  de  contestation.  M.  Nettlau  a  eu  le  tort  dans  ses 
recherches  de  laisser  de  côté  la  très  importante  collection  des 
poésies  en  moyen  gallois  de  la  Myvyrian  Arehaeology  of 
Wales.  Les  formes  en  -//  et  en  -udd  y  sont  fréquentes.  Je  re- 
lève dans  la  deuxième  édition  les  suivantes  : 

Je  prends  seulement  les  formes  finales  assonant  en  -udd, 
de  façon  à  ce  qu'il  ne  puisse  y  avoir  de  difficulté. 

P.  169,  col.  2  :  raedut1  «  devant  eux  »  assonant  avec gystui 
(gall.  moderne  gystudd)  ;  dans  la  même  série  :  //////  «  à  eux  »  ; 
kyfryngthut  «  entre  eux  »;  dans  l'intérieur  du  vers  eitut. 

P.  186,  col.  2,  raedut;  ganthutj  arnadut. 

P.  187,  col.  1,  eidut;  trostut. 

P.  220,  col.   1,  avec  une  orthographe  moderne:  ganthudd. 

P.  250,  col.  1,  daw  gant itt  eu  but  (dans  l'intérieur  du 
vers) . 

Les  formes  en  -u  ne  sont  pas  rares.  Comme  personne  ne 
songea  les  rejeter,  je  n'en   cite  pas  (v.  Myv.  Arch.,  p.    193, 

1 .  Le  /  pour  dd  est  la  rèçle  dans  le  Livre  noir  et  est  aussi  très  fréquent 
dans  les  plus  anciens  mss.  des  Lois  et  chez  plusieurs  poètes  de  la  Myv. 


Mélanges.  361 

col.  2;  273,  col.  1).  La  forme  la  plus  ancienne  se  trouve  très 
probablement  dans  les  extraits  du  manuscrit  de  Lichfield,  pu- 
bliés en  appendice  dans  le  Liber  Land,  p.  271  :  ni  be  cas 
igridu;  il  faut,  selon  toute  vraisemblance,  lire  irigdu  et  tra- 
duire :  «  pour  qu'il  n'y  ait  pas  de  haine  entre  eux  ».  Quelle 
est  l'explication  de  ces  formes  suffixées  en  u,  propres  au  gal- 
lois ?  J'en  hasarde  une,  sans  m'en  dissimuler  le  caractère  aven- 
tureux. Il  est  certain  que  les  formes  en  -0  du  breton  armo- 
ricain (de~o,  varne^o,  gurthdo?  Gloses  à  Juv.  :  cf.  irl.  impii) 
sont  des  accusatifs.  Les  prépositions  gouvernaient  tantôt  l'ac- 
cusatif, tantôt  le  datif.  L'armoricain  nous  a  conservé  l'accu- 
satif; le  gallois  dans  ses  formes  en  u  aurait  conservé  le  datif 
pluriel  en  -b  =  vieux  celtique  *bis.  En  partant  d'une  forme 
en  *ù-b,  on  arrive  régulièrement  à  une  forme  u;  comme 
M.  Whitley  Stokes  l'a  montré  pour  ù  accentué  :  ù  -j-  b  devient 
il1:  ex.  du  —  irl.  dub  (ann.  Cambriae,  Cat  Dubgint),  grec 
xuçXéç;  on  peut  ajouter  l'armoricain  Jagû  et  Jegi'i  —  Jacob 
(Jegou  vient  de  Jedegou,  dérivé  àejudic). 

Les  formes  en  -udd  sont  très  probablement  des  formations 
analogues  au  comique  dotho  (haut  vannetais  dehou  —  de^o), 
arm.  dc^etff  (arm.  mod.  cle~au  et  b&s-vannet.  dehori).  Il  est 
vraisemblable  qu'à  une  époque  ancienne  le  gallois,  obéissant  à 
un  instinct  qui  ne  l'a  pas  quitté,  a  ajouté  au  pronom  suffixe 
de  la  troisième  personne  du  pluriel  une  nota  augens,  c'est-à- 
dire  un  pronom  de  même  origine  et  de  même  formation  que 
les  formes  en  du,  à  un  cas  différent.  C'est  la  forme  non  accen- 
tuée qui  naturellement  a  été  suffixée  comme  pour  de^af  = 
do  -f-  dam,  puisqu'à  un  certain  moment  elle  a  été  la  seule  en 
usage  :  du  (*  tûbis)  -f-  di  ?  La  nota  augens  se  serait  peu  à  peu 
soudée  au  pronom  suffixe  :  c'est  l'histoire  de  dam  —  proba- 
blement do  -f-  sam.  La  voyelle  finale,  la  soudure  faite,  aura 
disparu.  Les  pronoms  renforçant  ont  une  tendance  visible  en- 
core à  s'user.  M.  Nettlau  en  a  beaucoup  d'exemples:  hwyn- 
thwy  a  donné  hivyntwy,  yul-wy,  ynbw,  nhiv,  etc.  (v.  Cymm- 
rodor,  VIII,  p.  120,  121). 

Le  haut-vannetais  a  int  comme  pronom  sujet  (cf.  irland.  iat). 

1 .  The  verbsubst.,  p.  23,  26. 


362  Mélanges. 


VI. 


UN  CAS  DE  GÉNITIF  DU  PRONOM  DE  LA  TROISIÈME 
PERSONNE  DU  SINGULIER  EN  GALLOIS. 

Zeuss,  Gr.  Celt.,  2°  éd.,  p.  373,  suppose  un  emploi  du  gé- 
nitif de  la  troisième  personne  du  singulier  dans  l'exemple  sui- 
vant tiré  du  Liber  Landavensis,  p.  113,  114  :  pop  cyfreith  a  vo 
ilx  brennih  Morgannhuc  yn  lys  ou,  ...  tout  droit  qui  sera  au  roi 
de  Glamorgan  dans  sa  cour  (in  aula  ejits).  Le  livre  de  Ta- 
liessin  offre  un  emploi  semblable  de  ou  sous  la  forme  régulière 
en  moyen  gallois  eu  (Four  ancient  books  of  Wales,  II,  p.  189, 
vers  2).  Après  avoir  montré  son  héros  Urien  partout  triom- 
phant, causant  tout  l'émoi  et  les  cris  que  l'on  entend  de 
toutes  parts,  le  poète  ajoute  : 

nac  vn  trew  na  deu 

ny  naivd  y  rac  eu. 

c'est-à-dire  :  «  ni  un  éternuement  ni  deux  ne  sont  une  pro- 
tection devant  lui  ». 

Rac  joue  le  rôle  de  substantif,  y  est  pour  dy.  Ce  passage 
n'a  pas  été  compris  par  Skene  qui  a  traduit  comme  s'il 
y  avait  eu  y  rac  angeu  «  ne  sont  une  protection  devant  la 
mort  »,  ce  qui  violente  le  texte,  la  métrique,  et  n'offre 
aucun  sens.  L'auteur  veut  dire  que  rien  n'arrête  Urien,  qu'il 
ne  se  laisse  arrêter  par  aucune  crainte,  pas  même  par  ['éter- 
nuement. L'éternuement  chez  les  anciens  Gallois,  au  rebours 
des  Grecs  de  Xénophon,  était  considéré  comme  un  présage 
extrêmement  néfaste.  En  voici  deux  preuves.  La  plus  claire 
se  trouve  dans  le  Livre  noir  de  Caermarthcn  (Skene,  Four 
anc.  books  of  Wales,  II,  p.  43).  L'auteur  du  poème  en 
question  se  met  lui-même  en  scène  :  il  part  pour  un  long 
voyage,  pour  Rome,  semble-t-il;  il  entend  un  éternuement  (un 
trev  a  glyuaw),  mais,  armé  de  la  croix,  il  s'écrie  aussitôt: 
«  Ce  n'est  pas  mon  Dieu,  je  ne  le  croirai  pas  »  ;  et  plus  loin: 
«  Où  il  y  a  nez,  il  y  a  éternuement  »  (iiiyn  yd  uo  truin  yduo 
trev).  Le  vers  le  plus  caractéristique  est  le  suivant:  «  ce  n'est 


Mélanges.  363 

pas  un  obstacle  pour  le  brave  qu'un  vain  éternuement  (ny  lut 
ar  lev  trev  direid).  Skene  n'a  rien  compris  à  ce  poème  :  il 
traduit  trev  'tantôt  comme  tref  «  demeure  »,  ce  qui  est  con- 
traire à  l'assonance,  aux  habitudes  orthographiques  du  scribe 
et  au  sens  général,  tantôt  par  éternuement.  Un  autre  passage 
de  Taliessin  (Skene,  II,  p.  20,  v.  25  et  suiv.)  semble  bien 
inspiré  par  la  même  superstition.  Le  poète  se  plaint  de  la 
perte  qu'il  a  faite  en  Cunedda  :  avant  sa  mort,  dit-il  : 

Rymafei  biw  blith  yr  haf 
Rymafei  edystrawt  yr  gayaf 
Rymafei  win  gloyw  ac  olew 
Rymafei  torof  keith  rac  untrew. 

«  il  me  donnait  ?  une  vache  laitière  l'été, 
il  me  donnait  un  coursier  l'hiver, 
.  il  me  donnait  vin  brillant  et  huile, 
il  me  donnait  contre  l'éternuement  ». 

Torof  keith  signifierait  littéralement  une  troupe  d'esclaves. 
Mais  keith  est  très  probablement  une  faute  de  copiste  pour  kerth 
«  sur  » .  Torof  est  ici  bien  extraordinaire  (peut-être  toron  «  man- 
teau »  :  le  copiste  aura  lu  torou  au  lieu  de  toron,  moderne 
torrrî).  En  l'absence  d'un  texte  diplomatique  sûr,  je  m'abstiens 
de  corrections.  Ce  qui  est  certain,  c'est  la  terreur  que  cause 
l'éternuement  au  poète.  L'expression  rag  eu  dans  le  sens  de  de- 
vant me  parait  se  trouver  également  chez  Taliess.,  p.  211,  v.  22  : 

raçeu 

rac  y  va r an r es 

«  devant  lui,  devant  ses  files  de  soldats  ».  Le  passage,  il  est 
vrai,  ne  semble  pas  clair.  Le  proverbe  gallois  de  la  Myv.  Arch., 
2e  éd.,  p.  854,  col.  1  :  nid  a  un  trew  a  dau  i'r  angau  «  un 
éternuement  ni  deux  ne  vont  à  la  mort  »  ne  sont  présages  de 
mort,  semble  une  protestation  chrétienne  contre  cette  vieille 
superstition.  Le  sens  de  eu  dans  le  vers  de  Taliessin  me  semble 
donc  bien  établi.  M.  Whitley  Stokes  a  rapproché  le  pronom 
personnel  irlandais  de  la  troisième  personne  au  génitif  ai  du 
possessif  gallois  ci,  i,  armoricain  he,  hl ;  il  n'a  pas  cité  ou,  eu 
qui  sont  beaucoup  plus  caractéristiques  comme  forme  et  em- 


364  Mélanges. 

ploi.  Ei,  masculin,  comme  il  l'a  fait  remarquer,  égale  le  sans- 
crit asyct;  ei,  i  féminin  =  asyâs.  Ou,  eu  représentent  le  génitif 
irlandais  ai  de  la  façon  la  plus  exacte  ;  cela  tient  à  ce  que  ou, 
eu  ne  sont  pas  proclitiques  comme  i,  ei  ;  de  plus,  leur  emploi 
est  indiscutablement  celui  d'un  génitif. 

J.    LOTH. 

VII. 

NOTE  ON  THE  PERSONAL  APPEARANCE  AND  DEATH 
OF  CHRIST,  HIS  APOSTLES  AND  OTHERS. 

The  following  note  from  the  Yellow  Book  of  Leean, 
col.  332,  may  be  added  to  those  printed  in  this  Revue,  VIII, 
362,  363.  I  transcribe  it  from  a  photograph. 


Christus  folt  dub  et  barba  rufx  longa. 
Petrus  liath  uile.  barba  non  longa. 
Paulus  mael  oisinech  longa  barba. 
Andréas  dub  longa  barba. 
IAcobus  dub  barba  longa. 
dormiuit.  Hiorumnés  folt  dub  sine  barba. 
Pilipus  derg  longa  barba. 
Partholomeus  derg  barba,  non  longa. 
Tomas  cas  dub  derg.  non  longa  barba. 
IAcobus  Alphei  gluinech.  mong  liath  fair  et  barba 

longa. 
IOhannes  bab/ma.  folt  dub  et  barba  longs.. 
Matheus  euangelista. 
Tatheus. 


crux. 
crux. 
gladius. 

crux. 
gladius. 


crux. 
fenwad. 

gladius. 
sonn. 


gladius 
pais. 

lapidés 

crux. 

lapidés 


Simon. 
Zefonus. 


[i.  e.  Stephanus]. 


Wh.  St. 


London,  8  nov.  ii 


VIII. 


NOTES  ON  THE  WUERZBURG  GLOSSES. 

The  following  notes,  in  continuation  of  those  published  in 
this  Revue,  IX,  104-108,  are,  for  the  most  part,  due  to  the 


Mélanges.  365 

Rev.  Edmund  Hogan,  S.  J.  of  St.  Stanislaus'  Collège,  Tulla- 
more,  who  lias  brought  great  acuteness  and  learning  to  bear  on 
the  many  difficult  problems  presented  by  the  Old-Irish  glosses 
on  the  Wùrzburg  Codex  Paulinus. 

A.   CONJECTURAL  EMEXDATIOXS  OF  THE  TEXT. 

5b     1,  for  inii  read  indi  «  they  ». 

6d    6,  read  do  thaidbsiu  as  fir  dia,  «  to  shew  forth  that  God 

is  true  ». 
7e    4,  for  cobriih  read  cobrich  [=  cuibrig  bond]. 
8a    7,  read  argebaid  [ô]inscoI  for  arèli,  «  lor  one  school  will 

overtake  the  other  ». 
na  11,  read  ni  am:A  inni  àsôircc  \aier\  «   not  like  him  who 

beats  the  air  ». 
11e  10,  read  ambith  cenchor\o\in  ished  tfmielare  asbeirsom  «  the 

being  without  a  coronal  tonsure,   this  is  the  uelare 

which  he  mentions  ». 
11e  19,  read  ni  forcain  aiened  «  a  thing  which  nature  teaches  ». 
I2b    8,  read  bore  is  oin  (a)chorp  «  because  its  body  is  one  ». 
131'     1,  read  ...  (doadb)adar  intaidbsiu  hisiu  ira  do(naib)  coic 

cetaib  (fer)  robôi,  etc. 
13e    4,  read  .i.  peccatis  immefolnget  bas  vel  [peccatoribus  qui 

ante  mortem  habebant  baptismi]  uoluntatem. 
13e  17,  caiii  m(ebo)l  lib  ambuid  (li)b  cenprecept  doib  (rûne)  ind 

besséirgi  «  hâve  ye  no  shame  that  they  are  with  y  ou 

without  teaching   them   the  mvstery   of  the  Résur- 
rection ?  » . 
14-'  25,  nipa  ainmith[ig]iu  intain  roniefea  «  it  will  not  be  more 

unseasonable  when  he  shall  corne.  » 
16e  26,  iiipn  lugu  a  chuitsi\dë\  ai  «  not  less  was  his  share  of  it  » 

(i.  e.  the  manna). 
20b    7,  digail  .i.  ad[aig]fether  do  «  vengeance,  i.  e.  it  will  be 

inflicted  upon  him  ».  cf.  atom-aig  adigit  me  iod,  aiaig 

taithbeim  did  claidiub  doib,  Serglige  Coneulainn,  6. 
24e  13,  [cofarjfâiltisi  «  with  your  gladness  »  :  cf.  24b  26  :  co 

failli. 
2)d  10,  isfir\i\on  «  it  is  just  ». 

Revue  Celtique,  IX  24 


366  Mélanges. 

26b  21,  ...  cenbiad  ma(nl)... 

33e    4,  is  hé a\s]sacart  «  it  is  he  who  is  a  priest  ». 


B.    —    CORRECTIONS    OF   THE   TRANSLATION. 

ia    4,  (p.  238)  _/br  that put  acolon(i). 
2b  19,  (p.  241)  storide  (literally  «  historical  »)  is  better  ren- 
dered  by  «  material  »  :  so  in.  i)b  2  (p.  258)  stoirideûd 
«  materiality  ». 
2b  28,  «  his  faith  (is)to  be  justified  ». 
3b    6,  (p.  243)  bad  bii  «  be  ye  alive  ». 
3e  19,  (p.  244)  «  is  it  a  sin  ?  non  ». 
3e  23,  (p.  244)/)/'  acting  rcad  committing  (it). 
4b  13,  (p.  247)  for  He  would  not  hâve  corne  well,  rcad  it 

would  not  hâve  happened  to  Him. 
4b  17,  is  nessa  do  imii  lemm  =  is  nessa  lium  do  inni  (gl.  pu- 
tius)  Ml.  46e  18.  So  in  Ml.  5411  n  :  an  as  nessa  lium 
fréquenter  indas  plerumque. 
4e  38,  (p.  248)  «  those  for  whom  He  destined  mercy  ». 
a    2,  (p.  250)  «  the  teachers  ». 
a  10,  cretim  do  geintïb,  lit.  «  belief  to  the  Gentiles  »,  i.  e. 

that  the  Gentiles  would  believe. 
b  34,  (p.  252)  «  wherein  are  Iudaei,  etc.  ». 
b  40,  (p.  252)  «  for  God  can  do  it  ». 
c  15,  «  no  one  knows  them  ». 
c  23,  (p.  253)  for  every  thing  rcad  anything. 
a  24,  25,  (p.  254)  _/(>/- thee  ;v</J  von. 
d  35,  bid  ados farmbâich  «  there  will  be  success  in  attacking 
(bàch)  you  » . 
5a  35,  (p.  254) for  them  readhim. 
6e     1,  (p.  256)  for  tins  rcad  ye. 

6e  18,  nâch  l'eir  for  nach  u-clc  «  do  not  pass  judgment  on  am- 
odier ». 
6d     2,  (p.  2)6)  for  did  rcad  did  it. 

7e  4,  (p.  258)  lasc  dombeir  dia  cobrich  [vas.  cobrith]  n-occo 
«  when  Godputs  a  bond  upon  him  «  (scil.  Satan)  :  cf. 
Apocal.  XX  2,  et  ligavit  eum  per  annos  mille. 
The  Ir.  cobrich  —cuiiiirig,  ace.  sg.  of  cuimrech. 


Mélanges.  367 

7d    3,  (p.  259)   «  it  is  a  marvel  to  me  the  grâce  of  God 

(which  is)  with  you  ». 
yd    8,  /or  «  his  hatred  »,  ...  «  his  love  »  read  «  hatred  of 

them  »...,  «  love  of  them  ». 
7d  15,  hi  tossuch  «  at  first  »  has  dropt  out. 
8a    7,  (p.  260)  (ubi  sapiens)  apparebit  gentilis  de  Graecis  ?  i.  e. 
itis  a  question  which  he  (Paul)  asked,  for  one  school 
will  overtake  the  other. 
8a  14,  «  that  which  men  cduld  not  do  hy  their  wisdom  till 

it  came  by  His  Cross  »,  etc. 
8b  10,  (p.  261)  «  in  that  wise  hein  whom  isthe  Holy  Spirit 

knows  the  mysteries  of  God  » . 
8e  16,  cotofutaircsi  ■=  co-toh-futhairc-si  «  hewatersyou  »  :  cf. 

fothraicim.  Cancel  the  note. 
8e  18,  «  a  building  is  adjusted  to  the  foundation  ». 
8d    2,  «  he  that  washes  away  (conutu-nig)  minor  sins  ». 
8d     3,  dernum  «  great  injury  »  :  cf.  nom  infra,  at  i6b  6. 
8d  16,  17,  «  the  vita  »  ...  «  the  mors  »  (/i is  the neuter article). 
9b  23,  (p.  264)  for  eating  read  dining. 
9e     3,  (p.  264)  for  they  read  ye. 
9e  10,  (p.  264)  for  them...  they  read  him...  he.  Cancel  the 

note. 
9d     5,  (p.  265)  for,  «  she  strips  it  not  off  read  «  he  leaves  her 

not  then  ». 
9d  19,  for  opérations  raïdfrauds. 
ioa  11,  (p.  266)  amal  fo-n-d-rodil  in  Comdiu  «  as  the  Lord 

distributed  it  ». 
iob     8,  (p.  267)  «  as  if  they  used  not  ». 
10e     3,  6,  for  «  eat,  eats  »,  read  «  use,  uses  ». 
10e  12,  frisor(r)the  «  ye  would  offend  ». 
10e  13,  14,  (p.  269)  diltud,  diltod  «scandai  »  (as  in  5b7):  arna 

derlinn  lest  I  should  scandalize  ». 
1  ia  10,  (p.  270)  is  glé  limsa  rombia  bitaid  «  it  is  clear  to  me  that 

I  shall  hâve  victory  ». 
ua  11,  (p.  270)  for  boxes  read  beats  (the  air). 
nb  14,  15  (p.  271)  for  enjoying  read  partaking  of. 
nb  18,  (p.  272)  ...  «  though  he  hath  a  désire  to  partake  of 
the  foods  let  him  not  consume  (them)  ». 


368 

iic 

4> 

IIe 

10, 

IIe 

H, 

I2a 

i, 

I2a 

H, 

I2a 

22 

Mélanges. 

(p.  272)  «  indulgence  to  the  weak  in  faith  is  glory  to 

God  and  strength  of  faith  ».  Compare  iob  28. 

«  the  being  without  a  tonsure,  this  is  the  vei  are  wh'ich 

he  mentions  ». 

«  it  is  a  sign  of  evading  (the  marriage-)bond  »  éelutha 

gen.  sg.  of  élud. 

(p.  273)  cidcalléic  «  even  at  présent  ». 

«  Christ  hath  one  body,  i.  e-.  sancti  et  iusti  ». 

(p.  274)  «  as  though,  saith  he  (Paul),  it  were  not  of 

the  body;  but  it  is  ofit  ». 
12e  18,  (p.  275)  «  ye  may  teach  ». 
12e  31,  (p.  276)  brig  «  privilège,  advantage  ». 
I2d    4,  5,  (p.  276)  «  in  this  world  ». 
I2d  13,  (p.  277)  »  though  thou  sayest  ». 
I2d  24,  (p.  277)  irmith  «  that  ye-reckon  ». 
I2d  25,  (p.  277)  nis-tuccin  «  Ishould  not  understand  them  ». 

Note  2  should  be  caneelled. 
I2d  39,  (p.  277  «  that  morality  ». 
I3b  24,  (p.  280)  it primiti  «  they  are  first  fruits  »  i.  e.  nomcii 

plurale. 
I4b    7,  (p.  283)  foàlïna  «  supplies  it  ». 
i4b  27,  «  confident  in  nobis  ». 

14e  16,  (p.  284)  no-b-tà  «  which  is  in  store  for  y  ou  ». 
14e  31,  (p.  285)/^  justice  read  truth. 
I4d  10,  (p.  286)  «  it  was  juster  that  I  should  hâve  joy  from 

you  than  grief  » . 
I4d  37,  (p.  287)  ni  dia  môidem  dosom  «  this  is  not  to  boast  of 

him(selt)  ». 
15"    2,  taccit  «  I  affirm  ».  So  in  i9a  17  (p.  298). 
15e  25,  (p.  289)  «  no  facewill  be  covered  », 
I5d  10,  «  we  are  certain  ». 
i)d  12,  aithis  «  reproach  ». 
i5d  20,  (p.  290) ciasberthe  peccatum  di  «  though  it  should  be 

cailed  peccatum. 
1611     7,  iarfir  «  truly  ». 
i6a    8,  9,  nochti,  nocti  «  nakedness  ». 
16*  10,  «we  hâve  a  désire  to  teach  you  teachings.  » 
l6b    6,  (p.  291)  «  there  being  no  damage  (nom),  I  had  no  re- 


Mélanges.  369 

gret  ».  O'Reilly  has  nom  «  destruction  »,  and  der- 
nitni  (gl.  detrimentum)  occurs  in  Wb.  8d  3. 

i6d    4,  (p.  292)  nobertis  «  they  were  bringing  ». 

i7b     1,  (p.  293) \anasberinn  «  what  I  said  ». 

iyb  6,  iar  richte  ni  bar  scéuil-si  «  after  the  arrivai  of  some  ti- 
dings  of  you  ». 

i8a     9,  (p.  295)  indoich  «  is  itlikely?  ». 

i8a  24,  (p.  296)  intan  arallegthar  «  when  itis  read  out  »  (prac- 
legitur) 

i8b     5,  22  (p.  296)  indib,  indibsi  «  in  you  ». 

18e    7,  (p.  296)  «  which  is  nothing». 

I9b  22,  (p.  298)  co  nocomalnide  «  that  it  might  be  fulfilled  ». 

20b  13,  (p.  t,oo)' amafoirenea  for  crabud  «lestyour  pietyshould 
end  ». 

20b  15,  «  take  ye  heed  of  that  » . 

20e    4,  (p.  300)  «  lest  thou  sin  ». 

20e  23,  (p.  301)  «  they  désire  ». 

2ia     9,  (p.  302),  for  elear  rend  keen. 

21e  21,  (p.  303)  «  thay  they  might  understand  it. 

2iJ  1,  (p.  303)  a  comairberi  biuth  «  theirway  of  life  »  begins 
a  new  gloss. 

2id  4,  «  every  créature,  in.heaven  and  on  earth,  which  is 
called  by  the  name  «  father  »,  it  is  from  the  Father 
(the  name  cornes)  to  it  ». 

22a     4,  (p.  304)  «  to  him  ». 

22a  21,  «  it  is  Est  indeed  ». 

22b     5,  tarési  dw  «  in  place  of  God  ». 

22b     7,  (p.  305)  taraessi  «  in  place  of  it  ». 

22b    8,  do  deilb  spir[to]  «  in  the  image  ofthe  Spirit  ». 

22b  14,  na  bad  hed  a  mêit  nâd  mbœ  ri.  This  is  an  instance  in 
Irish  ofthe  use  ofthe  double  négation  in  order  to  in- 
tensify  or  continue  négation.  In  English  the  second 
négative  must  be  omitted  :  «  let  it  not  be  so  much  as 
that  it  should  be  (mentioned),  etc.  Compare  Greek 
phrases  like  si 7.  ïz-':i  cjssv  v.z-J.zz^i  rt  -)ï\).v.  rSkv.. 

22d  2,  (p.  306)  «  so  that  domini  may  be  the  more  obedient 
mandai  is  Dei  ». 

22d     3,  «  since  He  is  présent  with  His  servants,  they  do  no- 


570  Mélanges. 

thing  that  He  will  not  know  ».  In  p.  306,  line  5,  of 
my  translation  «  sure  »  is  a  misprint  for  «  since  ». 

23b  x5>  (P-  3°'/)  <(  f°r  S00^  w^  w- 

23b  26,  Hère  /rï/Zwr  perhapsmeans  «  secret  meaning  »,  as  in  5e  16. 

23e  11,  (p.  308)  saigid  «  he  says  ». 

23 d  27,  28,  (p.  309)  niba,  ni  ba  «  it  is  not  ». 

2)b    4,  (p.  313)  «  for  such  they  are  ». 

26a    9,  (p.  316)  ni  nàch cumdn  lib  «  a  thing  which  ye  remember 

not  ». 
26a  20,  amaldo-n-d-rigénsat  druid  «  as  wizards  hâve  donc  them». 
26b  20,  pennit  dé  «  penance  for  it  ». 

26e     5,  9,  2jb  26,  (pp.  3  18,  320)  «  ofknowledge  »:  dele  note  1. 
26d     2,  (p.  318)  «  so  that  it  is  He  who  »,  etc. 
2jh  16,  (p.  320)  «  the  raiment  ». 
27e     9,  (p.  321)  «  it  is  not  tantum  when  ve  arc  before  (his) 

eye  that  ye  should  do  your  master's  will. 
28a    7,  (p.  323)  «  that  I  might  preach  His  glory  ». 
28b     1,  matchobra  «  if  He  desires  it  ». 
32d  12,  (p.  335)  «  so  that  He  may  forgive  them  their  sin  ». 
33h    li  (P-  33^)  C(  so  tnat  ne  mentions  (the)  name  of  rest 

there  ». 
33d     8,  (p.    337)  «  which  he  has  imparted  hitherto    ».  cf. 
19e  8. 

Whitley  Stokes. 

30  January  1888. 

IX. 

NOTES  BRETONNES  A  PROPOS  DU  VOLUME  VII 
DE  LA  REVUE  CELTIQUE. 

I.  Trois  mots  d'origine  bretonne  dans  l'Ille-et -Vilaine.—  II.  Le  groupe  rm. 
—  III.  Chansons  vannetaises.  —  IV.  Expressions  vannetaises.  —  V.  Un 
^  «  liquide  »  en  moyen  breton. 

/.  Trois  mois  d'origine  bretonne  dans  l'Ille-et-Vilaine. 

Rev.  Ccli.,  VII,  44-  Le  mot  gwammel  «   femme  mariée  », 
en  argot  de  La  Roche,    semble  identique  au    gallo  couamelh 

«  femme  bavarde  »,  usité  à  Rennes  (Glossaire  patois...  d'Ille- 


Mélanges.  371 

et-Vilainc,  par  Ad.  Orain,  Paris,  1886,  p.  130).  Je  crois  que 
l'emprunt  a  eu  lieu  du  côté  du  haut  bret.  ;  et.  Rev.  Cclt.,  II,  141 . 

Le  livre  de.  M.  Orain  contient  quelques  autres  mots  bretons 
passés  dans  le  langage  d'Ille-et- Vilaine,  par  exemple  agouvreux, 
s.  m.  «  ménage  de  la  mariée  qu'on  conduit  chez  le  marié  »  (à 
Bain);  la  p.  186  du  même  ouvrage  donne  une  chanson  où 
ce  mot  est  employé.  Il  vient  du  vannetais  argouvreu  «  dot  » 
=  gallois  argyfreu  ;  le  son  v  a  péri  dans  le  correspondant 
léonnais  ar gourou,  qui  est  déjà  dans  le  Catholicon.  Ce  doublet 
argouvreu-argourou  suppose  une  forme  antérieure  argôbrou  (cf. 
Rev.  Cclt.,  VII,  309),  que  D.  Le  Pelletier  dit  avoir  lue  dans 
plusieurs  imprimés.  Argôbrou  lui-même  doit  provenir  de  *ar- 
cobrou,  * are-co-br-ov(es) ,  même  racine  que  le  grec  ozp-rrn  pro- 
prement «  apport  ».  * Are-vo-qr-oves  (Etudes grammaticales,  17) 
aurait  sans  doute  abouti  à  *arobrou. 

La  finale  vannetaise  à' agouvreux  se  retrouve  dans  un  autre 
mot  du  même  département  :  c'est  bénilleux  «  espèce  de  mu- 
sette »  (Liste  ...  de  ...  mots  en  usage  à  Rennes,  publiée  par  M.  F. 
A.  Le  Mière  de  Corvev,  en  1824,  dans  les  Mémoires  de  la  So- 
ciété royale  des  Antiquaires  de  France,  t.  VI,  p.  238,  cf.  237, 
241,  248,  272);  du  vannetais  benieu  «  cornemuse  ».  Le  même 
auteur  donne  aussi,  p.  238,  la  variante  benilloux,  qui  se  rat- 
tache mieux  à  la  forme  léonnaise  biniou  (pour  IV,  cf.  tréco- 
rois  benio).  Manet  écrit  binyou,  biniou  et  bénigueux,  Hist.  de 
la  Petite-Bretagne,  1834,  I,  213;  plur.  binious,  II,  595. 

Le  mot  biniou,  que  l'Académie  ne  mentionne  pas,  est  bien 
connu  en  haute  Bretagne.  Le  Supplément  de  Littré  et  La- 
rousse le  font  prononcer  bi-ui-ou ;  V.  Hugo  lui  a  donné  aussi 
trois  syllabes,  L'art  d'être  grand-père,  II,  2.  Brizeux,  au  con- 
traire, le  fait  de  deux  syllabes,  Les  Bretons,  chant  VII,  v.  202, 
235  ;  de  même  que  l'auteur  d'une  chanson,  devenue  assez  po- 
pulaire, sur  «  un  biniou  de  cornouiller  ». 

Une  prononciation  plus  amollie  encore  est  biguou,  cf.  le 
journal  de  Paris,  L'Orphéon,  5  avril  1887,  p.  r,  où  se  trouvent 
d'intéressants  détails  sur  cet  instrument.  On  lit  déjà  la  forme 
biguou,  dans  le  Lxcéc  armoricain,  vol.  IX,  Nantes,  1827, 
p.  382,  et  vol.  X,  p.  266. 

Biniou  est-il  un  doublet  de  binviou  «   instruments  »,  avec 


372  Mélanges. 

chute  du  v?  M.  Quellicn,  dans  son  estimable  travail  sur  l'argot 
de  La  Roche,  est  disposé  à  rejeter  cette  explication.  Il  est  pro- 
bable, en  effet,  que  nous  avons  là  deux  racines  différentes. 

i.  Le  Catholicon  donne  le  singulier  benny  «  corne,  lat. 
musa,  cornemus  »,  qui  peut  se  rattacher  à  la  même  racine 
que  le  gallois  ban,  irlandais  benn  «  corne  ».  En  breton  korn- 
boud  est  le  nom  du  gros  bourdon  du  biniou,  et  Brizeux  l'em- 
ploie en  français  pour  l'instrument  tout  entier,  que  lui  rappelle 
la  piva  ou  cornemuse  italienne  : 

Un  jour,  si  le  corn-boud  chante  aux  brouillards  d'Arvor... 

(Histoires  poétiques,  1.  V,  Les  Cornemuses.) 

2.  Le  mot  benhuep  «  instrument,  outil  »,  Catholicon,  van- 
netais,  id.,  léon.  benveh,  m.,  est  identique  au  vieux  comique 
binfic  =  latin  beneficium,  et  au  gallois  benthyg  «  un  prêt  ». 

Le  pluriel  est  en  breton  moyen  binhuyou  «  outils  »,  trois 
syllabes  (par  exemple  Sainte  Barbe,  67,  Grand  Mystère  de 
Jésus,  135  b)  ;  en  léon.  binviou,  tréc.  binwio.  Le  P.  Grégoire 
de  Rostrenen  donne  les  variantes  plus  complètes,  vannetais 
bennhuëcqeù,  léon.  benvijoit.  On  dit  binvijou  à  Gourin  (Cor- 
nouaille). 

Pour  nous  rendre  compte  du  traitement  qu'a  subi  ici  Vf 
latin,  et  aussi  des  rapports  de  ces  formes  plurielles,  examinons 
l'histoire  des  descendants  du  latin  deficio  dans  les  idiomes 
bretons. 

i°  V.  gall.  dificiuou  «  diminutiones  »  ;  -uou  est  une  nota- 
tion défectueuse  du  suffixe  de  pluriel,  cf.  v.  gall.  dameirchin- 
1111011  «  détours  »,  amenée  par  la  combinaison  des  deux  va- 
riantes graphiques  -ou  et  -ito,  cf.  v.  bret.  dadlou  et  dadluo 
«  lieux  de  réunion  ».  Le  vieux  breton  devait  avoir  un  pluriel 
*binficiou  «  bienfaits,  choses  utiles  »  (quatre  syllabes). 

2°  Gall.  diffygio  «  manquer  »,  diffygiol  «  fatigué,  épuisé  »; 
vannetais  dihuiguiêtl  «  épuisé  »,  dihuiguiadurr  «  épuisement 
(de  forces)  »,  Dictionnaire  de  L'A.  Ici  le  son  h  du  latin  de- 
ficio a  été  affaibli  en  g,  entre  lus  deux  voyelles.  Le  degré  cor- 
respondant, pour. la  descendance  de  beneficium,  serait  *binhui- 
guyou  en  trois  syllabes. 

30  Moy.  bret.  diffigo  «■  (le  bien)  manquera,  s'épuisera,  fera 


Mélanges.  37$ 

défaut  »,  Poèmes  bret.,  284,  prononcez  diffijo,  l'avant-dernière 
syllabe  rime  avec  trig  =■  français  triche1.  Nous  voyons  que  les 
sons  igyo  ont  donné  ijo.  Diffigo  a  pour  pendant  le  pluriel  ben- 
vijou  «  instruments  »,  P.  Grég.,  cornouaillais  binvijoit. 

40  Mov.  bret.  diffiet  «  (évêché)  vacant  »,  Sainte  Nonne, 
1742,  3  syll.,  cf.  1277,  =  trécorois diviet «  épuisé,  tari,  lassé  », 
cf.  Rev.  Cclt.,  IV,  151;  c'est  probablement  le  sens  du  nom 
propre  Diviet,  en  1268  (Rev.  Celt.,  III,  408).  Les  deux  syllabes 
igye  sont  devenues  ici  iye,  ie  (deux  syllabes).  Correspondant 
phonétique  :  moy.  bret.  binhuyou,  léon.  binviou,  tréc.  binwio. 
Cf.  moy.  bret.  bekyen  «prêtres  »,  auj.  id.,  de  * baeleguyen. 

Pour  identifier  biniou  avec  binviou,  il  faudrait  admettre  que 
le  singulier  bènny  «  cornemuse  »,  en  moyen  breton,  ait  été  tiré 
du  pluriel  *  bennyou,  qui  lui-même  serait  pour  *  benviou,  de 
*benviguiou,  *benficiou.  Le  seul  argument  qui  puisse  appuyer 
cette  explication,  c'est  le  passage  de  Sainte  Barbe,  str.  369: 
me  benuyo  «  je  ferai  de  la  musique  »,  qui  suppose  un  verbe 
* benùyaff  tiré  de  *benuy'}  singulier  nouveau  extrait  du  pluriel 
binhuyou.  Il  semble  plus  probable  que  benuyo  est  pour  *bennyo, 
du  singulier  benny,  mais  qu'il  a  subi  l'influence  analogique  du 
mot  binhuyou  «  instruments  ». 


//.  Le  groupe  rm. 

Rev.  Celt.,  VII,  150-15 1.  M.  Loth  a  montré,  Rev.  Cell., 
VIII,  172-174,  que  la  seule  forme  bretonne  correspondant  au 
gaulois  Aremori-ca  est  arvor  «  lieu  sur  le  bord  de  la  mer  », 
Anuor  étant  dû  à  l'influence  de  la  prononciation  française;  et 
que,  d'un  autre  côté,  l'unique  forme  gauloise  attestée  par  des 
textes  anciens  était  Arcinorica,  d'où,  plus  tard  seulement,  Ton 
fit  Armorica.  Ce  sont  là  deux  rectifications  importantes,  que  je 
suis  heureux  d'avoir  provoquées  de  la  part  de  mon  savant 
compatriote. 

Mais  je  dois  dire  que  je  ne  vois  pas  encore  l'erreur  de  prin- 


1.  J'ai  donné,  Dict.  ètym.  du  bret.  moy.,  une  autre  explication;  je  me 
rallie  à  celle  de  M.  de  la  Villemarqué  et'  je  crois  maintenant  que  disycb, 
Nouelou  350,  est  une  faute  pour  difych,  «  il  manque  ». 


574  Mélanges. 

cipe  qu'il  y  a  à  croire  que  rm  celtique  peut  donner  phonéti- 
quement à  la  fois  ru  et  rm  en  breton,  par  suite  d'anciens  dou- 
blets avec  rm  et  rmw,  quelle  que  soit  d'ailleurs  la  raison  d'être 
de  ces  doublets.  Examinons  les  faits. 

Quelle  raison  force  à  séparer  le  gallois  gwrm  «  brun  »,  de 
l'irlandais  gorm  ?  Est-ce  Ym  final  ?  Mais  le  nominatif  pluriel 
irlandais  garni  uni,  Irische  Texte,  I,  600,  justifie  cet  m  en  gal- 
lois et  en  breton.  Est-ce  l'existence  de  variantes  worm-,  wrm-, 
dans  ces  deux  langages  ?  Mais  ils  fortt  un  si  grand  emploi 
de  ces  initiales,  qu'un  peu  d'extension  abusive  n'a  rien 
d'étonnant,  même  dans  les  deux  à  la  fois.  Certaines  formes  du 
mot  gaou  «  mensonge  »,  présentent,  en  breton  et  en  comique, 
une  irrégularité  absolument  semblable  (Rev.  Celt.,  VII,  150); 
il  faudrait  donc  aussi  séparer  gaou  de  l'irlandais  go  ?  Il  s'est 
passé  des  phénomènes  analogues  après  une  gutturale  suivie 
d'une  liquide.  Le  tréeorois  hroec'h  «'en  haut  »,  vient  de  farec'h 
pour  cnech,  v.  irl.  enocc.  Il  ne  faut  pas  attribuer  le  son  w  de 
kroec'h  (prononcé  hrwech,  une  syllabe)  à  la  survivance  de  Vu 
du  primitif  *  cuuo-ccos,  mais  bien  à  l'influence  analogique  des 
mots  bretons  comme  grorg  «  femme  »,  où  le  son  w  est  régu- 
lier et  n'a  jamais  péri  entièrement.  L'histoire  du  moderne 
hroec'h  est  la  même  que  celle  du  moyen  breton czpeaff  «  créer  », 
vann.  croue'ein,  L'A.,  léon.  kroui ;  moy.  brut,  croeadur  «  créa- 
ture »,  aujourd'hui  krouadur,  de  *cream}  *creatur}  gall.  creit, 
creadur,  du  lat.  crëare,  creatura1.  L'explication  donnée  de 
croeaff,  Éludes  grammaticales,  9,  ne  tient  pas  compte  de  cette 
analogie  phonétique,  dont  il  y  a  d'autres  exemples  modernes 
et  anciens,  tels  que  vann.  Jcsuss-Croiristt  «  Jésus-Christ  »,  au- 
tres dialectes  et  bret.  moyen  Christ,  du  lat.  Christ  us;  vann. 
scrouïtur,  scruïtur  «  écriture  »,  P.  Grég.,  moy.  bret.  scriptur, 
léon.  skritur ;  moy.  bret.  scruitoer,  scruytouer  «  écritoire  », 
scruiualj  «  écrire  »,  du  lat.  scribere ;  salocroas  «  nenni,  non  », 
litt.  «  sauf  votre  grâce  »,  Quiquer,  1690,  p.  71,  salocroas  106, 
de  salo  crus  81,  salo  graçç  1  > }  ;  salit  ô  grâce,  éJit.   de  1626; 


1 .  Le  Catholicon  donne  en  français  la  forme  croecr  pour  créer,  ce  qui  ne 
peut  être  qu'un  bretonnisme,  de  même  que  haie  —  bret.  bal  «  crachat  »,  de 
*halv,  halo  (liai,  halo,  Grég.)  zz:  lat.  saliva. 


Mélanges.  375 

salv  ho  graç  édit.  i6yi(Loth,  Annales  de  Bretagne,  III,  247); 
vann.  salecrés  etsalecroes,  P.  Grég.;  du  français  grâce.  On  dit 
aujourd'hui .salokras  et,  par  «  étymologie  populaire  »,  salud- 
kroas(=«  salut,  croix»).  Cf.  Rev.  Celt.,  IV,  102. 

Le  gallois  cwlm,  breton  koulm  «  nœud  »,  se  rattache  à  une 
prononciation  semblable  à  celle  du  vieil  irlandais  colmmene. 

Le  breton,  comique  et  gallois  garni  «  cri  »  n'est  pas  de  for- 
mation obscure.  C'est  le  représentant  d'un  celtique  * garmme 
venant  de  * gar-nie  =  v.  irl.  gainn,  qui  sert  d'infinitif  au  verbe 
gairim  «  j'appelle  »,  même  racine  que  yYjpyu>. 

Dira-t-on  qu'il  y  a  contradiction  entre  cette  étymologie  et 
celle  du  gallois  cwrw  «  bière  »  =  gaulois  y.zjzj;..  v.zyj.y.,  v.  irl. 
coirm,  cuinn,  de  *  cur-me  ?  Mais  la  question  est  précisément  de 
savoir  si  cette  contradiction  est  un  fait.  Je  le  crois,  et  cette 
antinomie  me  semble  provenir  de  deux  prononciations  qui 
ont  coexisté  à  une  certaine  époque.  Quant  à  demander  pour- 
quoi le  gallois  n'a  pas  les  variantes  théoriquement  légitimes 
*garw  et  * cwrm,  autant  vaudrait  demander  pourquoi  le  breton 
n'a  pas  mois  «  mouton  »,  comme  le  comique,  à  côté  de 
maout  =  v.  irl.  molt,  tandis  qu'il  a  bols  «  voûte  »,  à  côté  de 
baot,  du  bas  latin  vol  ta  (Rev.  Celt.,  VII,  152),  et  pourquoi 
toutes  les  séries  étudiées  Rev.  Celt.,  VII,  155-157,  ne  sont 
pas  aussi  complètes  que  celle-ci  :  bret.  orgueil,  oryade^  «  amou- 
rette »,  P.  Grég.;  orchaedis  «  galanterie  coupable  »  Sainte 
Barbe,  217. 

Le  vann.  arnierhein  «  ménager  »  —  gall.  arnierthu  «  pour- 
voir »  semble  bien  formé  du  préfixe  ar ;  ci.  léon.  mer^out 
«  apercevoir  »,  diver^  «  imperceptible  »  P.  Grég. 

Voici  quelques  autres  mots  bretons  intéressés  dans  cette 
question  de  l'histoire  de  nn  : 

Helw.oï  «  s'accouder  »,  helmoùer  «  accoudoir  »,  pi.  eu, 
P.  Grég.;  helmoi,  bel/nouer,  m.,  plur.  ou,  Le  Gonidec  ;  cf. 
anglais  elbow  «  coude  »,  elbow-chair  «  fauteuil  »,  allemand 
ell(en)bogeu  «  coude  »,  ellenbogenpolster  «  accoudoir  ».  Le  mot 
breton  semble  d'origine  germanique,  quoique  manquant  aux 
dialectes  celtiques  de  la  Grande-Bretagne  ;  il  serait  ainsi  dans 
le  même  cas  que/;™/-/  «  consoler  »,  Rev.  Celt.,  VII,  153,  et 
scal  «  rasoir  »  Rev.  Celt.,  VIII,  35. 


$76  Mélanges. 

Térmal  «  ahaner  »,  vann.  fermai,  fermein,  P.  Grég..  Pcll., 
auj.  fermai  «  être  essoufflé,  haletant  »  ;  du  français,  cf.  frimer. 

Fourondec  «  fromage  »,  Catholicon  ms  et  éd.  a,  fouloudec 
Cath.  b  et  c  (forme  répétée  deux  fois  dans  chacune  de  ces 
deux  éditions),  du  bas  latin  formai ieitm.  L'm  s'est  ici  vocalisé, 
comme  dans  aluçen  «  aumône  »,  moy.  bret.  al  usai,  gall. 
alwysen,  ehtseu,  du  lat.  eleemosxua. 

III.  Chansons  vannetaises. 

Rev.  Celt.,  VII,  179-180.  Cette  chanson  «  Le  rossignol  » 
est  composée  de  distiques  ;  chaque  vers  a  treize  syllabes,  avec 
césure  à  la  septième. 

P.  189-19 1.  Voici  le  sens  des  premiers  couplets  de  la  chan- 
son «  Les  naufragés  »  : 

1.  Un  bâtiment  de  cinq  cents  tonneaux,  ho!  —  Un  bâti- 
ment de  cinq  cents  tonneaux  —  A  péri  dans  la  rivière  de 
Bordeaux. 

2.  Il  y  avait  à  bord  cinq  cents  matelots,  ho  !  —  Tous  ont 
été  noyés,  sauf  quatre. 

3.  Vous  allez  à  la  maison,  moi  je  n'y  vais  pas,  ho!  — 
Vous  ferez  là-bas  mes  compliments. 

4.  Vous  ferez  mes  compliments,  [ho!]  —  A  ma  douce  Ma- 
rie et  à  ma  sœur  Jeannette. 

Sur  le  troisième  couplet,  M.  Loth  observe  que  «  par  une 
inspiration  fort  hardie  et  dramatique,  le  chanteur  fait  parler 
les  morts  ».  Ce  serait  en  effet  d'autant  plus  hardi  qu'il  le  ferait 
sans  le  dire.  Mais  cette  explication  est  contestable.  D'ailleurs, 
si  le  chanteur  peut  paraître  évoquer  les  morts,  ou  plutôt  un 
mort,  frère  de  Jeannette  et  époux  de  Marie,  c'est  probable- 
ment parce  qu'il  n'a  pas  su  évoquer  ses  propres  souvenirs.  La 
chanson  en  question  n'est,  en  effet,  qu'un  fragment  de  celle 
qui  se  trouve  dans  les  Gwer^iou  Brei^-I^el,  t.  II,  p.  174-181. 
Les  trois  noms  propres  du  texte  vannetais  se  retrouvent,  avec 
des  emplois  différents,  dans  la  version  trécoroise.  Le  navire 
des  «  Naufragés  »  se  perd  dans  la  rivière  de  Bordeaux  ;  Marie 
est  la  femme  et  Jeannette  la  sœur  du  héros  de  la  chanson  ; 
tandis  que  dans  la  rédaction  qu'a  fait  connaître  M.  Luzel,  le 


Mélanges.  377 

navire  est  «  chargé  de  vin  de  Bordeaux  »  (la  traduction  porte, 
par  inadvertance,  du  vin  d'Espagne,  p.  179);  Marie  est  le  nom 
du  navire,  et  Jeannette  la  femme  du  capitaine1.  C'est  ce  der- 
nier, Jean  PArc'hantec,  qui  prononce  ces  pathétiques  adieux 
qui  sont  presque  identiques  dans  les  deux  dialectes.  Il  les  pro- 
nonce à  un  moment  où  il  voit  la  mort  de  près,  mais  où  ce- 
pendant il  est  encore  vivant,  puisqu'il  finit  même  par  arriver 
au  port  sain  et  sauf. 

J'ai  recueilli,  en  1886,  une  variante  léonnaise  de  la  der- 
nière partie  de  cette  chanson  ;  mon  chanteur,  M.  Uguen,  de 
Lesnéven,  âgé  de  vingt-quatre  ans,  n'en  connaissait  que  ce 
fragment  : 

1 .  Martolodet  divar  ar  mor, 
C'houi  ia  d'ar  ger,  me  ne  d-ann  ket. 

2.  C'houi  ia  d'ar  ger,  me  ne  d-ann  ket; 
Grit  va  goulc'hemenou  d'am  priet. 

3  .        Grit  va  goulc'hemenou  da  dud  ann  ti 
Ha  d'am  pried  paour  dreist  pep  hini. 

4.  Lavaret  d'ei  kas  he  map  da  skol, 
Demezi  he  merc'h  d'eunn  den  a  vor, 

5 .  Ma  talc'h  chonch  deus  komehou  he  zad 
A  zo  er  mor  trivac'h  gourât. 

Traduction. 

1.  Matelots  de  sur  la  mer,  —  Vous  allez  à  la  maison,  moi 
je  n'y  vais  pas. 

2.  Vous  allez  à  la  maison,  moi  je  n'y  vais  pas2;  —  Faites 
mes  compliments  à  ma  femme. 

3.  Faites  mes  compliments  aux  gens  de  la  maison,  —  Et  à 
ma  pauvre  femme  plus  qu'à  personne. 

1.  M.  Luzel  cite,  p.  180,  une  variante  tirée  d'une  version  différente  et 
où  il  est  question  d'un  fils  du  capitaine,  qu'on  ne  pourra  empêcher  d'être 
«  homme  de  mer,  comme  son  père  »  ;  comparez  les  couplets  sept  et  sui- 
vants de  la  version  de  M.  Loth. 

2.  Ce  vers  se  trouve  dans  le  Bar^a~Brciz,  éd.  de  1867,  p.  209;  il  manque 
dans  la  version  trécoroise  correspondante  recueillie  par  M.  Luzel  et  publiée 
par  M.  d'Arbois  de  Jubainville,  Bibliothèque  de  l'Ecole  des  Chartes,  1869, 
p.  621  et  suiv. 


378  Mélanges. 

4.  Dites-lui  d'envoyer  son  fils  à  l'école  —  Et  de  marier  sa 
fille  à  un  homme  de  mer. 

5 .  Si  elle  se  souvient  des  paroles  de  son  père  —  Qui  est 
dans  la  mer,  à  dix-huit  brasses1. 

Il  est  probable  que  l' avant-dernier  couplet  est  altère,  et  que 
son  second  vers  dit  le  contraire  de  ce  qu'il  devrait  dire  :  «  Et 
de  [ne  pas]  marier  sa  fille  à  un  homme  de  mer  ».  Je  crois  que 
l'auteur  du  dernier  vers  a  voulu  dire  «  qui  sera  au  fond  de  la 
mer,  alors  »  (quand  on  transmettra  ses  dernières  paroles  à  sa 
famille). 

IF.  Expressions  vannetaises. 

Rev.  Celt.,  VII,  326,  1.  5,  Mistr[ed]  «  maîtres  ».  S'il  man- 
que quelque  chose  ace  mot  mistr,  c'est  un  simple  e  mi-muet. 
La  «  Vie  des  trois  rois  »  est  de  174-5  ;  le  Dictionnaire  françois- 
breton  ...  du  dialecte  de  Vannes,  par  M.  L'A***,  daté  de  Leide, 
1744,  donne  uniquement  au  pluriel  de  mœstre  «  maître  »  les 
formes  meistre  et  inistre  (cf.  Rev.  Celt.,  VII,  101). 

Il  est  dit  (Rev.  Celt.,  VII,  322),  que  les  e  correspondant  à 
Ye  final  français,  dans  le  texte  de  la  Vie  des  trois  rois,  n'exis- 
tent pas  en  réalité  dans  la  prononciation.  Il  serait  plus  exact 
de  remarquer  qu'ils  ne  comptent 'jamais  devant  une  voyelle 
et  pas  toujours  devant  une  consonne.  Ainsi  au  v.  8  (p.  334) 
(ci)  veistre  «  (le)  fiel  »  compte  pour  une  syllabe  devant  une 
consonne;  au  vers  58  (p.  338),  incsire  «  maître  »  pour  une 
syllabe  devant  une  voyelle;  et  aux  vers  11  et  136  (p.  346) 
Mœstre  «  maître  »,  pour  deux  syllabes  devant  une  consonne. 
Les  autres  exemples  de  cette  valeur  d'une  syllabe  donnée  à  IV 
final,  dans  cette  pièce,  sont  :  atwrse  «  rechercher  »,  p.  346, 
v.  150;  douje  «  crains!  »,  p.  336,  v.  46;  cure  «or  »,  p.  344, 
v.  127;  p.  356,  v.  241;  élance  «  encens  »,  p.  354,  v.  215  ; 
inourable  «  honorable  »,  p.  350,  v.  170;  lausque  «  laisse!  », 
p.  344,  v.  117;  poble  «  peuple  »,  p.  356,  v.  238;  a  ~égasse 
«  qui  apporte  »,  p.  340,  v.  84.  Les  cas  où  IV  ne  compte  pas 

1 .  Cf.  Bar~.  Br.,  p.  347,  «  Il  est  à  trente  brasses  au  fond  de  la  mer  »  ; 
le  passage  correspondant  dans  les  Gtveirjou  Brei^-lyt,  t.  1  (Jann.  Skolan) 
contient  une  idée  différente. 


Mélanges.  ^jy 

devant  une  consonne,  dans  le  corps  du  vers,  sont  des  excep- 
tions assez  rares  :  leine  «  lire  »,  p.  334,  v.  9;  élance  «  encens  », 
p.  354,  v.  209;  né  glasque  «  il  ne  cherche  »,  p.  356,  v.  232. 
A  la  fin  de  chaque  hémistiche,  ïe  ne  compte  jamais  (exemples 
à'e  au  premier  hémistiche  :  Mœstre  «  Maître  »,  p.  344,  v.  110; 
autres  mots,  p.  342,  v.  105  ;  p.  350,  v.  168;  p.  352,  v.  188). 
On  sait  que  l'ancienne  poésie  française  avait  la  même  licence. 
Le  son  final  hue  ne  forme  point  syllabe  dans  l'unique  passage 
où  il  n'est  pas  à  l'hémistiche:  arihue  «  arrivé  »,  p.  344,  v.  125. 
Il  compte  pour  une  syllabe,  Bar^a^  Brei~,  p.  369,  1.  4  (piue 
«  qui  »,  deux  lois);  p.  383,  dernière  ligne  (morue  «  mort  », 
rime  en  e);  p.  467,  col.  2,  1.  5  (marne  «  morte  »,  devant  une 
voyelle).  Dans  les  deux  premiers  cas,  il  Faut  écrire  sans  aucun 
doute  pihue  e  bon  konfortai,  pihue  e  rei  ;  dans  le  troisième, 
marhne  peut  être  pour  marhue  e  «  /'/  est  mort  »  ;  dans  le 
dernier,  pour  marhuet. 

Tous  les  exemples  de  la  prononciation  de  cet  e  que  nous 
fournit  la  Vie  des  trois  rois  appartiennent  à  des  mots  qui  ne 
sont  pas  d'origine  celtique.  Il  y  a  là  une  influence  française. 
Les  deux  dernières  syllabes  de  a  ~égasse  «  qu'il  apporte  », 
viennent  de  -casse  «  il  envoie  »,  correspondant  du  français  «  il 
chasse  »,  bas  latin  captiat.-  C'est  une  prononciation  intermé- 
diaire entre  celle  de  chas  «  chiens  »  et  chose  «  chasse  »,  tous 
deux  du  français  chasse  (=  vann.  chasse  «  chiens  »,  chache, 
m.,  «  chasse,  terme  de  marine  »,  casse,  m.,  «  mouvement, 
agitation  »,  L'A.;  c'est  le  français  vulgaire  chasse  «  chaleur, 
rut  »). 

LV  français  mi-muet  donne  aussi  en  breton  a  (Rev.  Celt., 
YIII,  526),  an  /moy.  bret.  mandamant,  familiarament,  Sainte 
Nonne,  49;  enorablement  Sainte  Catherine,  31;  vœna  gloar 
Quiquer,  1690,  p. '166,  moy.  bret.  vaene  gloar;  syra  Sainte 
Nonne,  293,  syr  P.  Grég.,  vann.  sire  L'A  (cf.  comique  sira, 
v.  franc,  sendra,  etc.);  Glanda  Claude,  blavèola  bluet  P.  Grég., 
du  fr.  blavéole  (Littré) ;  moy.  bret.  Indaff,  finesaff  Sainte  Cath. 
10;  tréc.  Annan,  Barbah,  Radegontan,  Jenovefan,  vann.  Anna, 
Barbe,  Radegonde ,  Jeneveu  ;  Basil  a  et  Basil,  «  Basile  »,  P. 
Grég.,  etc. 

P.  330.  A  ^rebiergoug  béd  er  grouiss  veut  dire  «  depuis  le 


$8o  Mélanges. 

cou  jusqu'à  la  ceinture  >>,  et  a  %rebi  er  pœnn  bcd  er  grouiss, 
p.  326  «  depuis  la  tête  jusqu'à  la  ceinture  ».  La  même  expres- 
sion se  trouve  plusieurs  fois  dans  le  Dictionnaire  de  L'A.;  par 
exemple  :  «  (On  prend  la  sardine...  sur  la  côte  de  Bretagne), 
depuis  Belle-Isle  jusqu'à  Brest,  ...  à  Tjebu  er  Guœrvérr  béti 
Breste  »,  s.  v.  sardine.  Elle  est  écrite  encore  a  yebu,  s.  v.  cu- 
lasse (au  supplément);  à-^rebi,  s.  v.  buste,  à  qrebu  et  à  %rebi, 
s.  v.  brisis (au supplément) ;  açrebi  Galile  «  depuis  la  Galilée  », 
Aviel  rêvé  sant  Maheu,  Londres,  1857  (c^-  xxvn,  v.  55). 
Elle  correspond  à  la  locution  vulgaire  en  français  du  depuis  ;  a 
veut  dire  «  de  »,  et  %rebi,  %rebu  vient  par  mutation  de  *drebui, 
emprunté  au  français  depuis.  Pour  l'insertion  de  IV  après  un 
d  initial,  cf.  vannetais  drespétt  =  «  dépit  »,  Rev.  Celt.,  VII, 
334,  v.  5  ;  on  dit  à  Mûr  drillaou  «  feuilles  »,  de  deliou.  Pour 
u  et  i  venant  de  ui  français,  comparez  cundu,  f.  «  conduite  », 
P.  Grég.,  vann.  a  gondi  «  qui  conduit  »,  Rev.  Celt.,  VII, 
334,  v.  18. 

P.  342.  Le  mot  hilguannat  est  une  variante  de  hilguœnnein 
par  lequel  le  Dictionnaire  de  L'A.  traduit  «  tirailler  »  ;  le  sup- 
plément de  ce  même  ouvrage  donne  le  dérivé  hilguœnnereah 
«  tiraillement  ».  Peut-être  pour  *hœlquinnat,  dérivé  de  la 
mesnie  Helquin,  cf.  v.  franc,  herliquiner,  que  M.  Godefroy  sup- 
pose avoir  signifié  «  disputer  ». 

P.  348,  n.  4.  L'emploi  du  présent  au  lieu  du  futur,  avec 
le  mot  «  jamais  »,  est  assez  fréquent  en  breton  moyen  et  en 
breton  actuel  :  bi^huiquen  ne  louenhaff  «  jamais  je  ne  me  ré- 
jouirai »,  Sainte  Barbe,  45  ;  bikenn  n'ho  kwelan  er  bed-tnan 
«  jamais  je  ne  vous  verrai  en  ce  monde  »,  Giver^iou  Brei^- 
I^el,  II,  402.  Dans  ce  dernier  vers,  qui  est  répété  deux  fois, 
la  rime  ne  peut  être  cause  du  changement  de  temps;  cf.  les 
phrases  françaises  comme  «  demain  je  vais  chez  vous  »,  etc. 

D.  Le  Pelletier  cite,  au  mot  bar%,  un  dicton  à  rimes  inté- 
rieures, Birvik,  birviken  Riwal  Far~  ne  chour^  oui  den  «  jamais, 
jamais  Riwal  le  barde  ne  se  moquera  plus  de  personne  ».  Ce 
dicton  fait  allusion  à  un  «  ménestrel  ambulant  »  du  commen- 
cement du  xvie  siècle,  cf.  H.  de  la  Villemarqué,  Bulletin  de  la 
Société  archéologique  du  Finistère,  1883,  p.  14,  15.  Il  faut  lire 
choai\  au  présent.  De  même  dans  Bikenn  n'ho  kwel'  ma  daou- 


M  é  Linge  s.  38 1 

lagad  «  jamais  mes  yeux  ne  vous  reverront  »,  Gwer^iou  Brei~- 
I^el,  II,  398,  kiuel  n'est  pas  par  apocope  pour  huelo. 

Le  présent'  dans  le  sens  du  futur  se  trouve  dans  d'autres 
expressions  comme  seul  ma%  ve~aff  «  tant  que  j'existerai  », 
Sainte  Barbe,  199;  cf.  740,  v.  1;  386,  v.  6,  et  l'anglais  so 
long  as  I  live,  allemand  so  lange  ich  lebe,  etc. 

V.   Un  z  «  liquide  »  en  moyen  breton. 

P.  235,  1.  6,  7.  Ici  l'expression nafizy,  Poèmes  bretons,  261, 
est  expliquée  par  *na%_bi%y  «  tu  n'auras  pas  ».  Le  texte  est  : 
Na  fi^y  pynvi~yc  en  nygun.  M.  de  la  Villemarqué  avait  traduit 
«  Tu  ne  seras  plus  riche  » .  Je  crois  que  le  sens  est  «  Ne  te  fie, 
ô  riche,  à" personne  ». 

Le  vers  doit  avoir,  comme  les  autres  du  même  poème,  huit 
syllabes  ;  il  en  a  une  de  trop,  si  l'on  prend  fi^y  pour  la  2e  per- 
sonne du  singulier  du  futur  de  be^ctff. 

Il  faut  donc  prononcer/^  y  en  une  seule  syllabe,  avec  y  demi- 
consonne  ;  ou  plutôt  fi~'  par  %  mouillé  ou  liquide,  selon  l'ex- 
pression de  Le  Gonidec  dans  sa  Grammaire.  En  effet,  il  y  a 
là  une  première  rime  intérieure  «  Na  f/~'  pynvz'-yc  ».  C'est  un 
ornement  fréquent  dans  cette  versification  savante,  plus  fré- 
quent qu'il  ne  semble  au  premier  abord,  car  il  se  rapporte  à  la 
prononciation,  et  non  à  l'écriture:  ainsi  à  la  strophe  265,  le 
vers  Ouen  co~  bac  ho  tat  ne  patent  «  ils  ne  vivront  pas  aussi 
vieux  que  leurs  pères  »  se  disait  certainement  comme  aujour- 
d'hui «  Ken  ko^  hak  ho  ^at  ». 

Levers  19 15  de  Sainte  Nonne  est  analogue  à  celui  du  poème 
qui  nous  occupe  ;  c'est  Na  fi~i  quel  aman  bed  an  hoa%  «  ne  te 
fie  pas  au  lendemain  ici-bas  ».  Il  doit  avoir  huit  syllabes,  par 
conséquent  Jî~i est  un  monosyllabe,  comme  le^y  en  question. 

Une  troisième  façon  d'écrire  le  même  mot  est  fi~,  qui  se 
trouve  dans  le  Mirouer  de  la  Mort,  f°  3 ,  au  sens  de  «  il  se  fie  » 
(en,  dans)  r. 

E.  Ernault. 

1 .  Je  dois  la  connaissance  d'une  copie  partielle  de  cet  ouvrage  en  moyen 
breton  à  une  obligeante  communication  de  M.  le  vicomte  H.  delà  Ville- 
marqué. 

Revue  Celtioue,  IX.  25 


382  Mélanges. 


X. 


NOTES  SUR  LE  VOLUME  VIII  DE  LA 
REVUE  CELTIQUE. 

P.  16,  n.  1.  Le  gallois  ys gwir  veut  dire  «  c'est  vrai  »,  de 
*iss  wir,  pour  *esti  vtron.  Il  est  impossible  d'identifier  ce  mot 
ys  «  il  est  »,  v.  gall.  iss,  is,  v.  bret.  is,  avec  le  moyen  breton 
e.~,  particule  qui,  placée  devant  un  adjectif,  en  fait  un  adverbe; 
car  le  ^  ici  est  bien  certain.  Il  y  avait  en  moyen  breton  un 
autre  mot  ayant  absolument  la  même  fonction  que  e%;  c'est 
ent,  cf.  le  breton  moderne  end-eùn  «  précisément  »  ;  en  vieux 
breton  int  =  grec  xrJ.  (Stokes).  Le  moyen  breton  e~  vient 
sans  doute  de  *eth  =  *ett  pour,  ent;  comparez  le  doublet 
moyen  breton  e%a  et  enta  «  donc  »  (enta  existe  encore  en  van- 
netais).  C'est  ainsi  qu'en  gallois  ewythr  «  oncle  »  répond  au 
breton  eohtr,  dugaul.  *avuntros=  lat.  avunculus  pour  *avuntlos. 

On  peut  citer,  comme  exemple  d'assimilation  de  nasale, 
donnant  lieu  à  une  aspirée,  le  vieux  breton  truch,  gl.  obtusi, 
d'où  aujourd'hui  troue  ha  «  couper  »,  du  lat.  truncus ;  et  peut- 
être  le  v.  bret.  cofrit  =  moy.  bret.  queffret  «  ensemble  »,  de 
*  copprit  pour  *  comprit  =  moy.  bret.  compret  «  prendre  »  (de 
*com-bri-t,  *com-bre-i).  Le  b  du  v.  gall.  ameibret  =  gall.  mod. 
amgyffred  «  comprendre  »  peut  représenter  ph,  comme  à  re- 
présente th  dans  le  v.  gall.  henoid  «  cette  nuit  »  ;  *-ciphret,  auj. 
cyffred  «  comprendre  »,  de  compret,  équivaudrait  à  v.  gall.  ci- 
thremmet,  gl.  libra,  de  * con-irum-;  gall.  mod.  cythrawl  =  bret. 
kontrol,  v.  bret.  control-,  du  lat.  contrarïus,  etc. 

Au  doublet  breton  enta-c^a  «  donc  »,  on  peut  comparer  en 
gallois  cethrëu  «  pousser  »  —  canre  «  poursuite  »,  cf.  bret. 
cantren,  participe  cantreet  «  courir  ça  et  là  »,  Pell.,  moy.  bret. 
quant ren  «  fureur  »  ;  vann.  cantrecin  «  hanter  »,  L'A. 

P.  30.  Le  correspondant  du  vannetais  maleu  «  béquilles  » 
existe  en  Goello,  à  Pléhédel,  sous  la  forme  malou. 

P.  34.  Le  latin'  âlum  «  ail  sauvage  »,  vient  de  *anshm  se- 
lon M.  Brugmann,  Grundriss  der  vergleichenden  Grammatik  der 
indogermanischen  Sprachen,  t.  I,  Strasbourg,  1886,  p.  177. 


Mélanges.  38$ 

P.  36.  Le  Gonidec  donne  geler,  m.,  plur.  iou  «  tréteaux  (fu- 
nèbres) »,  mais  en  annonçant  qu'il  ne  connaît  ce  mot  que  par 
D.  Le  Pelletier,  qui  l'écrit  ghelher.  J'ai  entendu  ar  c 'bêler,  dans 
une  chanson  populaire  du  Léon  :  Penn  ar  c'heler  eo  daoulinet 
«  il  s'est  agenouillé  près  de  la  bière  ».  Cette  forme  indique 
un  féminin,  genre  du  gallois  (g)elor. 

P.  36,  1.  8,  lisez *callu-ccos. 

P.  80-81,  n.  10;  p.  92,  1.  2.  Le  moyen  breton  onestant  est 
aujourd'hui  enostant  (Trévérec,  etc.)  par  exemple  dans  le  pro- 
verbe 

Enostant  d'ar  vest 
Moderasion  ve  onest 

«  Malgré  la  fête  »  (c'est-à-dire  l'abondance  et  la  bonne  qua- 
lité de  la  nourriture)  «  il  est  bon  de  se  modérer  »  ;  formule 
usitée  à  Saint-Gilles-les-Bois  pour  refuser  poliment  ce  qui  est 
offert  à  table. 

P.  162-163.  Les  curieux  fragments  en  moyen  breton  que 
M.  Loth  fait  connaître  sont  à  peu  près  dans  le  même  état  que 
les  premières  pages  de  Sainte  Nonne,  Rev.  Celt.,  VIII,  230- 
240  ;  c'est  dire  qu'ils  auraient  besoin  d'une  médication  éner- 
gique, mais  d'un  autre  côté  l'absence  d'un  contexte  suffisant 
oblige  à  les  traiter  avec  prudence. 

Il  semble  probable  que  ces  deux  fragments  appartiennent  à 
la  même  pièce,  puisqu'ils  contiennent  tous  les  deux  le  nom 
propre  Jahanic  ;  et  c'est  le  n°  1  qui  devait  terminer  cette  pièce, 
comme  l'indique  la  formule  finale.  Etudions-les  dans  cet 
ordre. 

(II,  1.  1)  nep  bezoet  gay 

..  diffalas  ?  em  casser 

men  :  er  a  ober  joyae 

Il  est  possible  que  nep  bezoet  soit  pour  hep  be^out.  La  seconde 
ligne  est  analogue  à  diblas  en  caset  «  vous  le  haïssez  cruelle- 
lement  »,  Grand  Mystère  de  Jésus,  119,  v.  3;  diffalas  est  pour 
diffalas,  voyez  Dictionnaire  étymologique  du  breton  moyen,  s.  v. 
diblas. 


384  Mélanges. 

Les  lignes  2  et  3  peuvent  ne  foire  qu'un  vers,  la  finale  du 
premier  hémistiche,  casser,  rime  régulièrement  avec  deux  syl- 
labes suivantes  dont  une  est  l' avant-dernière  du  vers:  men: 

er  a  ober  joyae  (ce  mot,  =  joae,  rime  très  bien  avec  gay  = 
gae). 

Traduction  :      «   sans(?)  être  gai 

. .  on  me  hait  cruellement 
(?)  de  me  réjouir  ». 

(1.  4)  ..  Jahanic  me  oz  pet 

tavarnen  na  hoateit  quet 
.  a  palamour  den  davarn 
.  a  :  er  bedis  ouz  ho  barn. 

Ce  couplet  diffère  du  précédent  ;  il  est  composé  de  quatre 
vers  rimant  deux  à  deux  et  sans  rimes  intérieures. 

Peut-être  tavarnen  est-il  pour  tavarnen,  pluriel  vannetais, 
et  hoateit  pour  bantett.  Le  commencement  des  deux  dernières 
lignes  pouvait  être  [rac]  a  palamour  et  [<•///]#[//]  er  bedis.  Er  se- 
rait l'article;  pour  IV,  cf.  1.  6,  den  davarn;  pour  Yr,  cf.  1.  14, 
er  bet. 

Trad.  «  ..  Jahanic,  je  vous  prie, 

ne  hantez  pas  les  cabarets  ; 
[car]  à  cause  du  cabaret 
les  gens  vous  jugent  (litt.  sont  à  vous  juger)  » . 

La  traduction  proposée  par  M.  Loth  «  les  habitants  du 
monde  vont  hors  de  leur  jugement  »  suppose  une  autre  resti- 
tution, (/-]  a  er  bedis.  Mais  ou%  voulant  dire  en  moyen  breton 
«  contre,  envers,  à  »,  et  non  «  hors  de  »,  le  sens  serait  :  «  les 
gens  vont  à  leur  condamnation  ». 

(1.  8)  ..'  al  merch  flam  en  pep  amser 

...  casser  en  lion  bro  ny 
. . .  quement  den  a  so  en  h  y 
[bras]  ha  bihan  a  pet  gant  hi. 


Mélanges.  38$ 

Ici  reparaissent  les  rimes  intérieures.  Un  troisième  système 
est  employé  pour  l'arrangement  des  rimes  finales  ;  amser  rime 
avec  le  couplet  suivant. 

Trad.  «...  fille  pure  en  tout  temps 

...  on  hait(?)  dans  notre  pays; 
...  tous  les  gens  qui  y  sont 
[grands]  et  petits  prient  pour  elle  » . 

On  disait  en  moyen  breton,  par  exemple  pi 'dif  gant  an  anaj- 
fuon  «  prier  pour  les  défunts  »,  Sainte  Nonne,  1267,  comme 
on  dit  aujourd'hui  pidcin  gahd  an  anaon. 

(1.  12)  [Fur  ?]  nez  mat  ha  habaster 

hanet  en  pep  amser 

...  ha  lavenez  er  bet  man 

Trad.  «  sagesse  (?)  et  patience 

...  et  pur  (?)  en  tout  temps 
...  et  joie  en  ce  monde  ». 

(I,  1.   1)  de  nep  a  amao... 

ha  deze  ol  gotib[unan] 
nep  a  solicita  en  dra. 

Il  faut  corriger  au  derniers  vers  solicita  en  solicito,  cf.  ap- 
presset  pour  oppresset,  Rev.  Celt.,  VIII,  232,  note  1 1  ;  et  en 
en  an,  cf.  ibid.,  n.  5,  et  p.  80,  1.  5,6.  Les  lignes  2  et  3  de  ce 
fragment  semblent  ne  faire  qu'un  vers,  où  gotibunB.H  rime 
avec  an;  comparez  le  premier  couplet  de  l'autre  fragment. 

Trad.  «  à  celui  qui  .... 

et  à  eux  tous,  sans  exception, 

qui  solliciteront  la  chose  ». 
(1.  4)  adieu  Jahanic  deffet 

an  autru  doe  ro  si[cou]ro 

Jésus  map  doe  roey  en  ... 

roz  sicoro  ouz  ho  tiege. 
Amen. 


$  86  Mélanges. 

La  forme  autru  serait  un  indice  du  dialecte  vannetais,  s'il 
n'était  probable  que  sa  finale  rime  avec  sicow.ro.  Le  mot  roey 
est  pour  roe,  cf.  edoay  «  il  était  »,  Rcv.  Celt.,  VIII,  92,  1.  31, 
=  edoa,  p.  78,  1.  13,  etc.  Dcffct,  s'il  n'est  pas  pour  en  effet, 
pourrait  être  le  franc,  de  fait,  voy.  D/V/.  étym.  du  bref,  moy., 
s.  v.  defaet.  Rimes  intérieures  :  adieu  (adeo),  defïet,  cf.  Sainte 
Nonne,  1074;  autr(o)u,  sicou.ro;  doe,  roey.  Le  système 
des  rimes  finales  n'est  pas  facile  à  déterminer. 

Trad.  «  adieu,  Jahanic,  certes  (?) 

que  le  seigneur  Dieu  vous  aide, 
que  Jésus  fils  de  Dieu,  roi  de  ...  [...  ant). 

vous  soulage  de  votre  ...  (ou  vous  aide,  en  vous 
Amen  ». 

P.  230,  n.  6.  La  restitution  conjecturale  des  trois  premiers 
vers  n'est  pas  exacte,  car  si  le  troisième  finit  par  detry  il  faut 
que  les  deux  premiers  soient  en  et;  lisez  Autrone^  parfet  Dcoch 
e%  vexp  net  1 

P.  271,  v.  434.  Au  lieu  de  «  Il  parlera  si  bien,  que  je  ne 
puis  l'exprimer  (?)  »,  lisez  :  «  Si  bien  qu'il  dira  franchement  : 
Je  ne  puis  prononcer  une  parole  » .  Cette  correction  est  due  à 
M.  Loth,  Annales  de  Bretagne,  III,  65. 

P.  370-374.  Ce  jeu  gallois  est  la  mise  en  scène  d'une  ran- 
donnée bien  connue  en  français  ;  j'ai  entendu  chanter  ainsi  la 
finale  de  chaque  couplet  : 

Ah  !  ah  !  tu  sortiras,  biquon,  biquette, 
Ah  !  ah  !  tu  sortiras  de  ces  choux-là  ! 

Cf.  Julien  Vinson,  Le  folk-lore  du  pays  basque,  Paris,  1883, 
p.  216-220  : 

«  La  mort  est  venue  là  — ■  pour  tuer  le  boucher  ;  —  la 
mort  (tue)  le  boucher,  — le  boucher  le  bœuf,  — le  bœuf  l'eau, 
—  l'eau  le  feu,  —  le  feu  le  bâton,  —  le  bâton  le  chien,  —  le 
chien  le  loup,  —  le  loup  le  bouc,  —  le  bouc  le  maïs  :  —  ôtez 
le  bouc,  ôtez,  ôtez  !  —  le  maïs  était  à  nous  ». 


Mélanges.  387 

Comparez  aussi  les  randonnées  publiées  par  M.  E.  Rolland, 
Rimes  et  jeux  de  l'enfance,  Paris,  1883,  p.  115-118  et  124-125  : 

«  ...  le  chat  a  pris  la  souris;  —  la  souris  a  rongé  la  cour- 
roie ;  —  la  courroie  a  lié  le  bœuf;  —  le  bœuf  a  bu  la  rivière; 
—  la  rivière  a  éteint  le  feu  ;  —  le  feu  a  brûlé  le  bâton  ;  —  le 
bâton  a  fessé  le  chien;  —  le  chien  a  aboyé  le  loup  ;  —  le  loup 
a  mangé  Pété  —  qui  était  dans  le  bois  et  qui  ne  voulait  pas 
s'en  venir  »  (Maine). 

«  Je  te  vends  la  mort  qui  a  pris  le  boucher  qui  a  pris  la 
masse  pour  tuer  le  bœuf  qui  a  bu  l'eau  qui  a  éteint  le  feu  qui 
a  brûlé  le  bâton  qui  a  tué  le  chien  qui  a  tué  le  chat  qui  a 
mangé  le  rat  qui  a  mangé  la  souris »  (Loiret). 

P.  372,  n.  3.  La  forme  bac' h  «  bâton  »,  dans  un  document 
populaire  qui  contient  le  mot  cas  «  chat  »,  est  remarquable, 
mais  c'est  un  emprunt  au  dialecte  de  Vannes.  Ceci  n'a  rien 
d'étrange,  dans  un  pays  où  le  cornouaillais  est  si  voisin  du 
vannetais;  d'autres  formes  du  même  genre,  quoique  moins 
accusées,  sont,  dans  ce  texte,  l'article  en,  er,  eideit  «  venez  ». 

P.  384  «  [r]PÀ2EA02  ?  »,  voyez  Rev.  Celt.,  VII,  106-108. 
Il  y  a  bien  des  inconvénients  à  mettre,  dans  une  liste  de 
noms  gaulois,  tous  les  mots  au  nominatif;  cela  préjuge  la 
question  d'interprétation. 

P.  403,  1.  5,  22  avril,  lise%  20  mâl- 

P.  486,  v.  19 10,  lisez  pnsoniet  en  bet  man. 

P.  550,  lisez  roiau  «  des  bêches  ». 


E.  Ernault. 


XL 


LE  CHAR  DE  GUERRE  DES  CELTES  DANS  QUELQUES 
TEXTES  HISTORIQUES. 

§  I.  —  Les  Grecs  et  les  Romains. 

Combattre  à  cheval  est  chez  les  Européens  un  usage  relati- 
vement récent.  Les  chars  de  guerre  ont  précédé  la  cavalerie. 


3  88  Mélanges. 

Dans  Y  Iliade,  le  char  de  guerre  porte  deux  hommes  :  le  cocher, 
■fjvisyéç1,  et  le  guerrier,  r.oiçx'M-zrfc 2,  ou  h-zj;>,  et  la  dernière 
de  ces  expressions,  employée  au  pluriel,  peut  comprendre  avec 
les  guerriers  les  cochers  4. 

A  l'époque  historique  en  Grèce,  le  char  de  guerre  est  aban- 
donné, et  le  cheval  de  guerre  n'est  plus  une  bête  de  trait,  il 
est  monté  par  un  guerrier;  mais  en  l'an  424  av.  J.-C,  on  con- 
servait encore  en  Béotie  le  souvenir  de  la  tactique  ancienne 
par  une  dénomination  caractéristique  :  la  troupe  d'élite  des 
3éotiens  se  composait  de  trois  cents  hommes  qu'on  appelait  en- 
core tyioyci  et  zap6i-;c.  et  qui  passaient  en  tète  du  reste  de 
l'armée  5  comme  autrefois  leurs  homonymes  dans  Y  Iliade  6. 

A  Rome,  le  seul  souvenir  du  char  de  guerre,  que  les  insti- 
tutions eussent  conservé,  était,  semble-t-il,  l'usage  du  char 
dans  la  pompe  triomphale;  c'était  dans  un  char  que  le  général 
vainqueur  s'avançait  vers  le  Capitole.  Dès  les  époques  les  plus 
anciennes,  eques  paraît  avoir  signifié  «  cavalier  »  et  non 
«  guerrier  combattant  en  char  »,  comme  le  grec  i—EJr.  Il  est 
vaisemblable  que  ce  phénomène  est  purement  apparent,  il  a 
pour  cause  l'état  fragmentaire  dans  lequel  nous  sont  parvenus 
les  plus  anciens  monuments  de  l'histoire  romaine  et  les  re- 
touches que  ces  monuments  ont  subies  avant  d'arriver  jusqu'à 
nous. 

Nous  sommes  plus  heureux  pour  la  race  celtique.  Comme 
dans  Y  Iliade,  c'est  en  char  qu'apparaissent  les  guerriers  dans  la 
plus  ancienne  littérature  épique  de  l'Irlande.  La  mention  de 
l'équitation  est  dans  cette  littérature  un  des  indices  d'une  com- 
position relativement  récente.  Les  historiens  grecs  et  les  his- 
toriens romains  sont  d'accord  avec  la  littérature  épique  irlan- 
daise pour  constater  l'usage  du  char  de  guerre  chez'  les  Celtes 
dans  l'antiquité. 


1.  Iliade,  V,  580;  XI,  45;  XXIII,  132. 

2.  Iliade,  XXIII,  132. 

3.  Iliade,  XI,  52;  XXIII,  135. 

4.  Iliade,  XV,  2 58,, 270. 

3.  Diodore  de  Sicile,  V,  70,  §  1  ;  édition  Didot,  t.  I,  p.  455;  cf.  Adolf 
Bauer,  dans  l'Encyclopédie  d'Ivan  Mùller,  t.  IV.  re  partie,  p.  296. 

6.  Iliade,  XXIII,  132-133. 


Mélanges.  389 

Toutefois,  comme  ces  textes  antiques  grecs  et  latins  se  rap- 
portent à  des  populations  celtiques  auxquelles  le  contact  avec 
les  Grecs  et.  les  Romains,  avait  appris  les  inconvénients  du 
char  de  guerre,  ils  nous  montrent  chez  les  Celtes  la  cavalerie 
concurremment  avec  ce  char.. 

§  II.  —  Les  Gaulois  d'Italie. 

La  bataille  de  Sentinum,  295  avant  J.-C,  est  la  première 
des  batailles  livrées  par  les  Romains  aux  Gaulois  dont  le  récit 
semble  autre  chose  qu'une  œuvre  d'imagination.  Tite-Live 
emprunte  probablement  son  récit  à  Fabius  Pictor;  celui-ci,  né 
trente  ans  après  cette  bataille,  avait  pu  s'entretenir  avec  des 
témoins  oculaires.  Or,  suivant  l'historien  romain,  les  Gaulois 
y  avaient  une  cavalerie,  equiiatum  l,  et  des  guerriers  montés 
sur  des  chars  de  guerre,  essedis  carrisque  superstans  armatus 
hostis,  le  bruit  que  faisaient  les  chevaux  et  les  roues  de  ces 
chars  effraya  les  chevaux  des  cavaliers  romains 2.  Ces  chars 
étaient,  dit-on,  au  nombre  de  mille  3.  Un  détail  caractéristique 
qui  nous  est  donné  par  Tite-Live  semble  bien  indiquer  l'em- 
ploi d'une  source  originale  par  cet  écrivain.  Avant  le  récit  de 
la  bataille,  Tite-Live  dépeint  l'arrivée  des  cavaliers  gaulois  : 
vainqueurs  dans  une  première  rencontre,  ces  cavaliers  por- 
tent suspendues  au  poitrail  de  leurs  chevaux  ou  fixées  au 
bout  de  leurs  lances  les  tètes  des  légionnaires  qu'ils  ont  tués 
et  ils  chantent  des  hymnes 4.  Ils  furent  vaincus. 

Au  récit  de  la  bataille  de  Sentinum,  il  est  curieux  de  com- 
parer celui  de  la  bataille  de  l'Allia,  qui  n'est  qu'une  amplifi- 
cation de  rhétorique.  Evidemment  Tite-Live  ne  connaissait  de 
la  bataille  de  l'Allia  que  le  nom,  la  date  et  le  résultat),  tandis 
qu'en  écrivant  son  tableau  de  la  bataille  de  Sentinum,  il  avait 
sous  les  yeux  un  récit  détaillé  dû  à  un  auteur  plus  ancien. 
A  la  bataille  de  Télamon,  en  225,  les  Gaulois  avaient,  outre 


1 .  Bis  avertere  Gallicum  equitatum,  Tite-Live,  X,  c.  28,  §  8. 

2.  Tite-Live,  X,  c.  28,  §  9. 

3.  Tite-Live,  X,  c.  30,  §  5. 

4.  Tite-Live,  X,  26. 

5.  Tite-Live,  V,  38;  ci'.  Plutarque,  Camille,  18. 


390  Mélanges. 

cinquante  mille  fantassins,  vingt  mille  guerriers,  tant  à  cheval 
qu'en  char1;  mais  ils  se  défiaient  de  leurs  chars  qui,  à  Sen- 
tinum,  n'avaient  pu  leur  assurer  la  victoire,  ils  ne  les  lancè- 
rent pas  contre  l'armée  ennemie;  ils  les  partagèrent  en  deux 
groupes  qu'ils  placèrent  l'un  à.  droite,  l'autre  à  gauche  du 
corps  de  bataille2.  Malgré  cette  précaution,  ils  ne  furent  pas 
plus  heureux  qu'à  Sentinum. 

En  222,  à  la  bataille  de  Clastidium,  ils  ne  semblent  avoir 
mis  en  ligne  aucune  troupe  de  guerriers  montés  sur  des  chars. 
Plutarque,  reproduisant  plus  complètement  que  Polybe  le  récit 
de  Fabius  Pictor,  nous  parle  de  leur  cavalerie  plus  nombreuse 
que  celle  des  Romains  3  et  de  l'infanterie  mêlée  à  cette  cava- 
lerie 4.  De  chars  de  guerre  il  ne  dit  mot.  Toutefois,  nous  sa- 
vons qu'à  cette  bataille  le  roi  Virdumarus  était  en  char  :  ce 
fut  du  haut  d'un  char  qu'il  menaça  de  son  gresum  le  consul 
Claudius  Marcellus.  Celui-ci,  qui  était  à  cheval,  prévint  son 
adversaire,  le  frappa  d'un  premier  coup  de  lance,  le  renversa, 
puis  lui  donna  deux  autres  coups  dont  le  dernier  fut  mortel  >. 
C'est,  je  crois,  le  dernier  exemple  connu  d'un  Gaulois  com- 
battant en  char  en  Italie. 

§  III.  —  Les  Gaulois  en  Grèce. 

Dans  la  péninsule  des  Balkans,  les  Gaulois  arrivèrent  avec 
des  chariots,  mais  ce  n'étaient  probablement  point  des 
chars  de  guerre.  Lors  de  l'expédition  contre  Delphes,  en  279, 
Brennus  avait,  dit-on,  cent  cinquante  mille  fantassins,  dix  mille 
cavaliers  et  deux  mille  chariots  destinés,  semble-t-il,  au  trans- 
port des  bagages.  Voilà  ce  que  nous  apprend  Diodore  de 
Sicile,  et  celui-ci  nous  donne  vraisemblablement  un  arrangement 
du  texte  de  Timée,  auteur  contemporain  de  cette  guerre  célèbre6. 

Nous  devons  à  Pausanias  un  autre  arrangement  du  texte  de 

1.  Polvbe,  1.  II,  c.  23,  §4,  édition  Didot,  p.  84. 

2.  Polybe,  1.  II.  c.  28,  §  5,  éd.  Didot,  p.  88. 

3.  Plutarque,  Marcellus,  c.  6,  §  5,  édition  Didot,  p.  359. 

4.  Plutarque,  Marcellus,  c.  7,  §  4,  édition  Didot,  p.  360. 

5.  Plutarque,  Marcellus,  c.  7,  §  2,  édition  Didot,  p.  359;  cf.  Properce, 
livre  IV,  élégie  11,  v.  39-44. 

6.  'A^xÇûv  v.-j/'./.i'tov.  Diodore.  1.  XXII,  c  9,  edit .  Didot,  t.  II,  p.  457-438. 


Mélanges.  391 

Timée  ;  les  chariots  y  sont  négligés.  En  effet,  suivant  Pau- 
sanias,  l'armée  gauloise  se  composait  de  cent  cinquante-deux 
mille  fantassins  et  de  vingt  mille  quatre  cents  cavaliers1.  En 
combinant  la  rédaction  de  Diodore  avec  celle  de  Pausanias 
et  en  les  complétant  l'une  par  l'autre,  on  peut  arriver  à  ce  ré- 
sultat que  Timée  attribuait  à  Brennus  cent  cinquante-deux 
mille  fantassins,  vingt  mille  quatre  cents  cavaliers  et  deux 
mille  chariots.  Pausanias  a  négligé  les  deux  mille  chariots 
qu'il  considérait  comme  peu  intéressants  au  point  de  vue  stra- 
tégique; Diodore,  afin  de  donner  des  chiffres  ronds,  a  écrit 
pour  les  fantassins  cent  cinquante  mille  au  lieu  de  cent  cin- 
quante-deux mille,  et  pour  les  cavaliers  il  en  a  supprimé 
quatre  cents.  Quant  à  dix  mille,  [/.ùpHûv,  chez  le  même  Dio- 
dore, c'est  une  faute  de  copie  pour  Siap/jpiwv,  vingt  mille. 

Dans  l'armée  de  Brennus,  en  279,  la  cavalerie  gauloise 
avait  une  organisation  dont  il  n'est  question  nulle  part  ailleurs. 
Chacun  des  vingt  mille  quatre  cents  cavaliers  était  accompagné 
de  deux  domestiques  à  cheval,  en  sorte  que  l'effectif  réel  de  la 
cavalerie  était  triple  de  l'effectif  nominal  et  comprenait 
soixante  et  un  mille  deux  cents  hommes  et  autant  de  chevaux. 
Cette  organisation  spéciale  de  la  cavalerie  gauloise  est  un  ré- 
sultat de  la  suppression  du  char  de  guerre.  Le  cocher  qui  ac- 
compagnait le  guerrier  sur  le  char  est  doublé  d'un  aide,  et 
tous  deux  montent  à  cheval  comme  leur  maître. 

$  IV.  —  Les  Gaulois  dans  la  Gaule  transalpine  et  dans  les  Iles-Britanniques. 

Quand  Posidonius  fit  son  voyage  dans  le  sud  de  la  Gaule 
transalpine,  c'est-à-dire  peu  après  l'année  100  avant  notre  ère, 
il  trouva  dans  ce  pays,  qui  devait  être  un  jour  la  France  méri- 
dionale, des  corps  de  troupes  combattant  en  char.  Chacun  de 
ces  chars  portait  un  cocher  et  un  guerrier.  Le  guerrier  lançait 
son  javelot  du  haut  du  char,  puis  il  mettait  pied  à  terre  pour 
se  battre  à  l'épée.  Nous  lisons  l'exposé  de  cette  tactique  chez 
Diodore  de  Sicile,  qui  l'a  tiré  de  Posidonius  comme  le  reste  de 
sa  description  des  mœurs  gauloises2.  Il  y  a  un  exemple  célèbre 

1 .  Pausanias,  livre  X,  c.  19,  §  9;  éd.  Didot,  p.  $16. 

2.  Diodore,  1.  V,  c.  29;  édition  Didot,  t.  I,  p.  271.  Cf.  Strabon,  1.  IV, 


392  Mélanges. 

du  char  de  guerre  chez  les  Gaulois  de  la  Transalpine  à  une 
date  peu  antérieure  à  celle  où  écrivait  Posidonius.  Nous  vou- 
lons parler  du  char  où  combattit  le  roi  des  Arvernes,  Bituitus, 
le  8  août  121.  En  cette  journée,  Bituitus  fut  vaincu  par  le 
consul  Q.  Fabius  Maximus1.  L'année  suivante,  Fabius  obtint 
les  honneurs  du  triomphe,  et,  dit  Florus,  Bituitus  y  figura, 
assis  sur  son  char  de  guerre,  qui  était  d'argent2. 

Les  savants  travaux  de  M.  Alexandre  Bertrand  sur  les  chars 
de  guerre  dans  les  sépultures  gauloises  ont  donné  à  Diodore 
de  Sicile  et  à  Posidonius  une  éclatante  confirmation. 

Quand  César  arriva  dans  la  Gaule  transalpine  l'an  58  avant 
notre  ère,  il  n'y  trouva  pas  de  chars  de  guerre.  L'usage  en 
avait  disparu.  Les  troupes  gauloises  se  composaient  exclusi- 
vement de  fantassins  et  de  cavalerie.  Mais  le  char  de  guerre 
était  encore  usité  en  Grande-Bretagne.  Les  Bretons  avaient  à 
la  fois  et  des  cavaliers  et  des  essedarii>,  c'est-à-dire  des  guer- 
riers qui  combattaient  sur  des  esseda*  ou  chars.  Suivant  l'au- 
teur des  Commentaires,  le  roi  breton  Cassivellaunus  aurait  eu 
sous  ses  ordres  en  l'an  54  avant  J.-C.  environ  quatre  mille  es- 
sedarii  5,  c'est-à-dire  deux  mille  chars  de  guerre,  à  deux  hom- 
mes par  char,  en  comptant  le  cocher  avec  le  guerrier.  C'était 
le  double  du  nombre  de  chars  que  les  Gaulois  avaient  mis  en 
ligne  contre  les  Romains  à  Sentinum  240  ans  plus  tôt.  Suivant 
Tacite,  au  temps  d'Agricola  (78-84),  c'est-à-dire  plus  d'un  siècle 
après  César,  l'usage  du  char  de  guerre  persistait  chez  quelques 
nations  bretonnes6. 

Le  char  de  guerre  apparaît  souvent  plus  tard  dans  la  plus 
ancienne  littérature  épique  de  l'Irlande.  C'est  en  char  que  nous 
y  voyons  toujours  combattre  les  guerriers.  Le  cavalier  n'in- 


C.  5,§   2,  éd.   Didot,  p.    166,  1.    37-38:    -:ô;    oï  ~o:j;  -oÀsWj;  [ïlpi-TH/O:] 
a-ïjvai;  y  '.ilivu:  to  Tzkiov,  v.x^xr.ip  /.a:  KsXxàiv  evtoi. 

1 .  Mommsen,  Roemiscbe  Gescbicbte,  6e  éd.,  t.  II,  p.  162. 

2.  Argenteo  carpento  qualis  pugnaverat.  Florus,  livre  I,  c.  36  (111, 
2,  édition  Iahn,  p.  39,  1.  26-28).  Cf.  Acta  triumpborum  Capitolina,  dans  le 
Corpus  inscriptionutn  latinatum,  t.  I,  p.  460. 

3.  De  bello  gallico,  IV,  24;  V,  13,  19. 

4.  De  bello  gallico,  IV,  33  ;  V,  9,  16,  17. 

5.  De  bello  gallico,  V,  19 

6.  In  pedito  robur  :  quaedam  nationes  et  curru  praeliantur.  Agricole,  12. 


Mélanges.  395 

tervient  dans  les  monuments  de  cette  littérature  que  par  l'effet 
d'additions  .postérieures  aux  rédactions  primitives.  Le  char  de 
guerre  dans  l'épopée  irlandaise,  comme  dans  Ylliadc,  et  chez 
Posidonius,  porte  deux  hommes  :  le  guerrier  et  le  cocher1. 

H.  d'Arbois  de  Jubainville. 


XII. 

UNE  VERSION  INÉDITE  DU  PÉRÉDUR  GALLOIS. 

A  l'occasion  du  Pérédur  gallois  récemment  donné  par 
M.  Kuno  Meyer,  il  y  a  une  observation  à  faire  que  je  n'ai 
point  vue  dans  les  comptes  rendus  publiés  sur  ce  livre.  C'est 
que  M.  Kuno  Meyer  a  ignoré  l'existence  d'un  autre  ms.  où  se 
trouve  également  ce  texte.  Pourtant  la  collation  de  ce  ms.  lui 
aurait  permis  d'établir  plus  sûrement  son  texte  et  aurait  donné 
à  son  édition  une  valeur  originale. 

Nous  présentons  cette  observation  comme  renseignement, 
non  comme  critique  adressée  à  M.  Kuno  Meyer.  En  effet,  les 
mss.  gallois  se  rencontrent  surtout  dans  des  collections  parti- 
culières, et  si  des  catalogues  sommaires  —  très  sommaires  — 
des  principales  de  ces  collections  ont  été  publiés  autrefois  dans 
diverses  revues,  les  découvertes  récentes  d'anciens  mss.  gal- 
lois ont  le  plus  souvent  passé  inaperçues. 

En  janvier  1876,  l' Archœologia  Cambrensis  (4e  série,  t.  VII, 
p.  79)  annonçait  que  parmi  les  mss.  de  la  vente  de  Brony- 
rhwylfaen  1875,  mss.  acquis  par  M.  Breese,  se  trouvait  un  ms. 
contenant  «  quatre  Mabinogion  qui  ne  figuraient  pas  dans  le 
recueil  de  Lady  Guest  ».  Nous  écrivîmes  aussitôt  à  M.  Silvan 
Evans  pour  avoir  des  renseignements  plus  circonstanciés.  Il 
nous  répondit  que  ce  ms.  contenait  cinq  Mabinogion  :  Bown 
oHamtwn;  —  Peredur  ab  Efrog;  —  Caer  yr  Anrhyfeddodau  a 
Gwiddonod  Cacvloau;  —  Ysloria  Ysgan  ab  Asgo  ;  —  SelyJ  a 
Marcholff. 

1.  Le  char  de  guerre  assyrien  porte  trois  et  quatre  personnes.  G.  Perrot. 
et  Ch.  Chipiez,  Histoire  de  l'art  dans  l'antiquité,  t.  II,  p.  463,  491,  et  pi.  X. 


394  Mélanges. 

C'est-à-dire  : 

i°  Beuve  d'Hamton; 

2°  Pérédur  fils  d'Efrog; 

3°  La  ville  des  merveilles  et  les  sorcières  de  Gloucester 
(histoire  qui  est  probablement  le  développement  d'un  épisode 
de  Pérédur); 

4°  Histoire  d'Ysgan  fils  d'Asgo; 

5°  Salomon  et  Morolf  (ce  dernier  texte  est  incomplet). 

M.  Breese,  à  son  tour,  est  mort  en  1881,  et  en  annonçant 
sa  mort  dans  la  nécrologie  de  cette  Revue  (t.  V,  p.  156)  nous 
disions  :  «  il  laisse  une  belle  collection  de  livres  et  de  ma- 
nuscrits gallois  :  les  journaux  du  pays  expriment  l'espoir  que 
cette  collection  sera  acquise  par  un  établissement  public  ». 

Cet  espoir  n'a  pas  été  réalisé,  car  nous  recevons  le  cata- 
logue de  vente  de  la  bibliothèque  de  M.  Ed.  Breese  qui  doit 
se  disperser  aux  enchères  à  Londres,  le  31  mai  1888.  Ce  ca- 
talogue rie  ressemble  en  rien  aux  catalogues  faits  avec  tant  de 
soin  par  nos  libraires-experts  de  Paris  et  qui  gardent  une  va- 
leur bibliographique  après  la  vente.  Le  catalogue  de  la  vente 
Breese  est  des  plus  succincts  et  les  manuscrits  y  figurent  pêle- 
mêle  avec  les  livres.  Nous  croyons  pourtant  y  retrouver  le 
manuscrit  en  question  dans  ce  titre,  malgré  la  date  récente 
qu'on  lui  attribue  : 

N°  214.  Mabinogion  or  Juvénile  Talcs  in  Welsh.  Mamis- 
cript.  1844. 

Il  sort  encore  de  temps  à  autre  des  vieilles  bibliothèques,  sinon 
des  mss.  complets,  au  moins  des  feuillets  d'anciens  mss.  gallois. 
Au  mois  de  septembre  dernier  (1887)  nous  avons  vu  chez  un 
libraire  de  Galles  du  Nord  plusieurs  feuillets  de  mss.  gallois 
qui  nous  ont  paru  être  du  xve  siècle;  ce  n'étaient  malheureu- 
sement pas  des  Mabinogion,  mais  des  textes  religieux.  Le  li- 
braire n'a  pas  voulu  du  reste  nous  en  dire  un  prix;  car  il  les 
réservait  à  un  bibliophile  qui  a  dû  les  lui  acheter  depuis. 

H.  Gaidoz. 


BIBLIOGRAPHIE. 


South  Kensington  Muséum  art  handbooks.  —  Early  Christian 
Art  in  Ireland  by  Margaret  Stokes,  avec  cent  six  gravures  sur  bois, 
publié  pour  le  comité  du  Conseil  d'Education,  par  Chapman  et  Hall, 
h  Henrietta  Street,  Covent  Garden,  1S87,  in-8,  xvi-210  pages. 

Ce  charmant  volume  est  un  résumé  de  l'histoire  des  arts  en 
Irlande  depuis  l'introduction  du  christianisme  jusqu'à  la  con- 
quête anglo-normande  et  l'importation  de  l'architecture  et  de 
l'écriture  gothique.  On  peut  y  distinguer  quatre  parties,  la 
première  traite  des  manuscrits  et 'principalement  de  leurs  mi- 
niatures, la  seconde  des  objets  métalliques,  la  troisième  de  la 
sculpture  sur  pierre,  la  quatrième  de  l'architecture. 

La  première  partie  consiste  en  une  étude  sur  les  plus  an- 
ciens manuscrits  en  écriture  irlandaise  conservés  tant  dans  les 
Iles-Britanniques  que  sur  le  continent.  Mle  Stokes  résiste  cou- 
rageusement à  la  tendance  générale  qui  porte  ses  compa- 
triotes à  exagérer  l'ancienneté  de  leurs  manuscrits  ;  cependant 
je-  penche  à  croire  que  certains  de  ces  manuscrits  sont  encore 
moins  anciens  que  le  savant  auteur  ne  l'admet.  Il  me  semble 
que,  par  exemple,  le  livre  de  Kells  ne  remonte  pas  à  la  fin 
du  viie  siècle,  et  qu'il  ne  peut  être  antérieur  au  IXe. 

Parmi  les  objets  métalliques  dont  traite  la  seconde  partie, 
on  remarque  en  premier  lieu  les  cloches,  d'abord  en  fer  forgé1, 
à  commencer  par  celle  de  Saint-Patrice,  Ve  siècle,  puis  en  bronze 
fondu  depuis  le  Xe  siècle.  Un  certain  nombre  de  cloches  en  fer 
forgé  étaient  considérées  comme  des  reliques  et  conservées 

1 .   Il  en  existe  encore  cinquante-six  en  Irlande. 


3  9  6  Bibliographie. 

dans  des  châsses,  et  six  de  ces  châsses  existent  encore  aujour- 
d'hui :  elles  ont  été  fabriquées  du  xe  au  xne  siècle. 

La  belle  époque  de  l'orfèvrerie  irlandaise  commence,  sui- 
vant JVlle  Stokes,  au  vne  siècle  et  finit  avec  le  ixe;  à  cette  pé- 
riode appartiennent  la  broche  de  Tara  et  le  calice  d'Ardagh. 
Les  boites  de  livres  {cumdacl})  en  orfèvrerie  paraissent  posté- 
rieures à  cette  période,  les  .plus  anciennes  qui  subsistent 
datent  du  xie  siècle,  et  les  textes  n'en  .mentionnent  point  qui 
aient  été  fabriquées  avant  les  dernières  années  du  ixe.  Les 
plus  anciennes  crosses  épiscopales  ou  abbatiales  ne  sem- 
blent pas  remonter  au  delà  de  la  fin  du  xe  siècle  ou  du  com- 
mencement du  xie.  S'il  y  a  une  exception,  elle  est  unique, 
c'est  la  crosse  de  saint  Berach  qui  est  une  canne  d'if  couverte 
de  bronze,  elle  est  sans  valeur  artistique.  La  plus  belle  des 
crosses  d'Irlande  est  celle  de  l'abbaye  de  Clonmacnois  con- 
servée au  musée  de  l'Académie  d'Irlande. 

Mle  Stokes  ne  cite  que  trois  reliquaires  et  une  croix  de  pro- 
cession antérieurs  à  la  conquête  anglo-normande,  quant  aux 
reliures  de  livres  en  orfèvrerie  de  la  même  époque,  on  n'en  a 
guère  que  des  débris. 

Les  monuments  de  la  sculpture  consistent  en  tombes,  en 
autels  et  en  croix  monumentales.  Ces  croix  ont  souvent  une 
valeur  artistique,  on  en  compte  quarante-cinq.  M!e  Stokes 
donne  de  treize  d'entre  elles  une  description  détaillée. 

L'architecture  irlandaise  débute  par  les  dolmen  qui  parais- 
sent abriter  pour  la  plupart  des  sépultures  par  inhumation. 
Viennent  ensuite  les  tumuli  qui,  quelquefois,  recèlent  dans 
leurs  flancs  de  vastes  chambres  ;  ce  sont  des  sépultures  par 
incinération  qu'on  y  trouve,  des  urnes  y  renferment  les  cen- 
dres des  morts.  Dans  les  chambres  des  tumuli  les  parois  sont 
décorées  de  figures  variées,  parmi  lesquelles  on  chercherait  inu- 
tilement la  divergent  spiral  ou  le  trumpet  pattern,  caractère  dis- 
tinctif  de  la  décoration  celtique  dès  le  ne  siècle  avant  J.-C, 
suivant  Mle  Stokes  (p.  73,  121,  147-148),  et  qui  restèrent  en 
usage  en  Irlande  jusqu'au  commencement  du  xic  siècle. 

Dans  l'architecture  chrétienne  d'Irlande,  on  peut  distinguer 
trois  époques:  la  première  ne  connaît  ni  l'usage  du  mortier  ni 
la  taille  de  la  pierre.  La  seconde  époque  commence  au  vi%  au 


Bibliographie.  397 

viie  ou  au  vine  siècle  et  se  termine  dans  le  courant  du  xie. 
Elle  comprend  des  édifices  composés  d'une  seule  chambre  sans 
distinction  architecturale  entre  le  chœur  et  la  nef,  et  à  partir 
du  xe  siècle  on  leur  adjoint  une  tour  ronde  en  maçonnerie 
qui  est  à  la  fois  un  clocher  et  un  donjon.  Au  XIe  siècle,  on 
commence  à  construire  des  églises  romanes  imitées  de  celles 
du  continent. 

Le  livre  de  Mle  Stokes  résumant  sous  la  forme  d'un  ouvrage 
élémentaire  les  nombreux  travaux  et  la  science  acquise  par  la 
longue  pratique  archéologique  du  savant  auteur,  se  recommande 
à  l'attention  de  toutes  les  personnes  qu'intéresse  en  général 
l'histoire  de  l'art  en  Europe  et  spécialement  l'histoire  de  l'art 
dans  les  régions  celtiques. 

H.  d'Arbois  de  Jubaix ville. 

Ernst  Windisch.  Ueber  die  Verbalformen  mit  dem  Cha- 
racter  9*  im  Arischen.  îtalischen  und  Geltischen  (Abhand- 
lungen  der  philolog.-histor.  Classe  der  Kœnigl.  Saechs.  Gesellschaft  der 
Wissenschaften,  p.  447-512).  Leipzig,  Hirzel,  1887,  66  p.  in-4;  prix: 
3  mark. 

Un  des  principaux  traits  communs  à  la  fois  aux  langues 
celtiques  et  aux  langues  italiques,  et  qui  leur  donne  une  phy- 
sionomie à  part  dans  l'ensemble  des  langues  de  l'Europe,  est 
la  présence  d'un  r  dans  la  plupart  des  formes  médio-passives 
du  verbe.  Bopp,  le  premier,  émit  l'hypothèse  que  cet  r,  en 
latin,  venait  de  Y  s  du  pronom  réfléchi  de  la  troisième  personne  : 
amatur  serait  pour  amat-sc,  u  étant  «  voyelle  de  liaison  ».  Le 
rhotacisme  de  Y  s  intervocalique  étant  de  règle  en  latin,  cette 
explication  ne  soulève  pas  de  trop  graves  difficultés  :  d'ail- 
leurs, les  langues  letto-slaves,  qui  ont  formé  leur  passif  par 
un  procédé  analogue,  les  tournures  françaises  et  allemandes 
comme  «  cela  se  vend  bien  »  ou  «  das  verkauft  sich  gut  » 
montrent  avec  quelle  facilité  les  peuples  les  plus  divers  passent 
de  l'idée  réfléchie  à  l'idée  purement  passive. 

M.  Whitley  Stokes  a  été  le  premier  à  contester  l'exactitude 
de  cette  théorie.  Dans  les  Beitràge  %ur  vergleichenden  Sprach- 
forschung  (t.  VII,  p.  56  ss.),  il  fit  remarquer  que,  phonéti- 
quement admissible  pour  le  latin  et  pour  l'ombrien  qui  suit 
Revue  Celtique,  IX.  26 


398  Bibliographie. 

les  mêmes  règles  de  rhotacisme  que  le  latin,  psychologi- 
quement possible  pour  toutes  les  langues,  l'explication  de 
Bopp  ne  peut  s'appliquer  ni  à  l'osque  ni  aux  langues  cel- 
tiques :  car,  dans  ces  langues,  IV  du  médio-passif  serait  le  seul 
à  provenir  d'un  ancien  s,  tous  les  autres  s  ayant  subi  d'une 
manière  parfaitement  constante  un  traitement  différent.  Ainsi 
en  osque,  s  intervocalique  devient  ~  (noté  tantôt  par  s,  tantôt 
par  ^)  :  l'infinitif  de  la  racine  es-  «  être  »  est  L\-um,  non  er-um 
comme  en  ombrien  ;  le  génitif  pluriel  des  thèmes  en  a-  (sans- 
crit tâscuii)  est  en  -asum  ou  -a%um}  jamais  en  -arum  (ombrien 
et  latin  -arum).  On  trouve  dans  une  même  inscription  (Zve- 
taieff,  Sylloge  inscriplionum  oscarum,  n°  142)  à  la  1.  /^comparas- 
custer  (futur  antérieur  passif:  cf.  les  formes  actives  comme 
fefacusl)  et  à  la  1.  11  e~um  :  cette  même  inscription  contient  de 
plus  quatre  ou  cinq  exemples  de  l'adjectif  démonstratif  (en 
sanscrit  esha  avec  sh  provenant  de  s)  qui  en  ombrien  est  régu- 
lièrement ero-  (Bréal,  Tables  Eugubiues,  p.  354),  mais  qui  en 
osque  est  ei%p-  l.  Dans  les  langues  celtiques,  Y  s  intervocalique 
est  tombé  de  bonne  heure  (comme  en  grec);  jamais  il  n'est  de- 
venu r  :  comparer  au  gothique  eisaru  «  fer  »  le  vieil  irlandais 
iarn  et  le  vieux  gallois  hearn;  au  sanscrit  svasâ  «  sœur  »  (latin 
soror  avec  le  changement  régulier  de  s  intervocalique  en  r)  le 
vieil  irlandais  siur  et  le  vieux  gallois  chiuaer. 

De  là  il  résulte  qu'il  faut  ou  bien  séparer  les  formes  médio- 
passives  en  r  du  latin  et  de  l'ombrien  des  formes  analogues 
non  seulement  des  langues  celtiques,  mais  aussi  de  l'osque  2, 
ou  bien  trouver  à  ces  formes  une  origine  commune,  en  par- 
tant du  principe  que  la  consonne  qui  le  caractérise  était  dès  le 

1 .  L'exemple,  cité  par  M.  Windisch,  d'une  inscription  où  se  trouvent  côte 
à  côte  sakahiter  «  sacratur  »  et  aasas  «  arae  »  n'est  pas  suffisamment  pro- 
bant, car  on  trouve  ce  même  mot  asa  constamment  écrit  par  s  sur  les  Ta- 
bles Eugubines,  où  le  rhotacisme  de  s  intervocalique  est  pourtant  de  règle. 
Le  rapport  de  asa  avec  le  latin  ara  n'est  pas  encore  clairement  connu. 

2.  Et  cela  dans  l'hypothèse  la  plus  favorable  à  la  théorie  de  Bopp,  en 
admettant  que  la  voyelle  qui  suivait  Y  s  n'est  tombée  qu'assez  tard.  Car  s'il 
s'agissait  du  changement  de  5  final  en  r,  non  seulement  la  phonétique  de 
l'osque  et  des  langues  celtiques,  mais  celle  même  du  latin  et  de  l'ombrien 
(qui  présente  des  "formes  médio-passives  en  r  dans  les  tables  en  écriture 
étrusque  où  le  rhotacisme  de  s  final  est  en  principe  inconnu)  s'opposeraient 
à  cette  théorie. 


Bibliographie.  ^yy 

début  le  seul  son  qui  puisse  apparaître  à  la  fois  dans  toutes 
ces  langues  sous  la  forme  r,  c'est-à-dire  un  r.  Quelles  que 
soient  les  raisons  psychologiques  qui  militent  en  faveur  de 
l'opinion  de  Bopp,  force  nous  est  de  reconnaître  qu'elle  est  en 
contradiction  formelle  avec  tout  ce  que  nous  savons  de  certain 
sur  la  phonétique  italo-celtique. 

Un  peu  après  M.  Whitley  Stokes,  M.  E.  Windisch,  repre- 
nant l'étude  du  même  sujet  (Beitràge  ~.  vgl.  Sprachj.,  t.  VIII, 
p.  465  ss.)  fit  ressortir  la  singulière  ressemblance  des  troi- 
sièmes personnes  du  partait  indien  comme  mënirê  «  ils  pen- 
sèrent »,  jajhirë  «  ils  furent  enfantés  »,  avec  les  formes 
médio-passives  italiques  et  celtiques  :  v.  irland.  do-ménar  «  je 
pensai  »,  latin  gignuntur  «  ils  sont  enfantés  ».  C'est  cette  idée 
qu'il  reprend  et  qu'il  développe  dans  le  mémoire  dont  nous 
avons  transcrit  le  titre  en  tète  de  cet  article. 

Les  formes  verbales  en  r  sont  assez  nombreuses  en  sanscrit  : 
mais  à  l'exception  d'une  seule,  ur,  qui  se  trouve  à  la  troisième 
personne  du  pluriel  du  parfait  et  de  l'optatif,  toutes  ces  formes 
présentent  avec  les  formes  en  r  des  langues  italo-celtiques  une 
différence  essentielle  :  l'élément  caractéristique  r  se  trouve  en 
sanscrit  avant  la  désinence  ordinaire  du  verbe,  dans  les  lan- 
gues italo-celtiques  il  est  placé  après.  Une  forme  indienne 
comme  âvavrt-r-anta  ne  diffère  du  latin  uert-untu-r  que  par  la 
place  de  IV:  et  c'est  la  plus  grosse  difficulté  de  la  théorie  de 
M.  Windisch,  qui  présente  d'autre  part  tant  de  vraisemblance 
qu'on  est  peut-être  autorisé  à  négliger  cette  différence  dans  la 
place  de  l'élément  r.  D'ailleurs  ces  formations  ayant  disparu  à 
l'époque  historique  de  presque  toutes  les  langues  indo-euro- 
péennes, c'est  un  indice  que  vers  la  fin  de  la  période  d'unité 
elles  n'étaient  déjà  plus  guère  en  usage,  et  il  n'y  a  rien  de  sur- 
prenant à  ce  qu'une  des  familles  de  langues  n'ait  conservé 
qu'une  partie  de  ces  formations,  tandis  que  l'autre  en  con- 
servait une  autre  partie.  Ce  qu'il  y  a  de  caractéristique  pour 
leur  signification,  c'est  qu'on  trouve  au  moins  quelques-unes 
de  ces  formes  dans  le  Kig-Fëda  avec  le  sens  moyen  ou,  plus 
rarement,  le  sens  passif:  ainsi  àadhirê  dans  ce  vers  (III,  51,  6), 
tûbhyam  brâhmâni  gira  indra  îi'tbhyam  satrâ  àadhirê  «  à  toi  des 
prières,  à  toi,   Indra,  des  hymnes  ont  été  offerts    en  même 


400  Bibliographie. 

temps  ».  Mais  jamais  le  sujet  logique  de  l'action  (complément 
du  verbe  passif)  ne  se  trouve  à  l'instrumental  comme  il  l'est 
d'ordinaire  après  les  vrais  passifs  :  d'ailleurs,  dans  de  telles 
constructions,  le  sens  passif  est  le  plus  souvent  mêlé  au  sens 
moyen,  et  assez  difficile  à  en  dégager. 

Il  faudrait  reproduire  en  entier  ce  que  M.  W.  dit  du  détail 
des  formes  celtiques  en  r  :  nous  nous  contenterons  d'indiquer 
quelques-uns  des  résultats  les  plus  intéressants.  Et  d'abord  il  a 
rendu  à  peu  près  certain  que  la  caractéristique  r  était  primi- 
tivement réservée  dans  ces  langues  à  la  troisième  personne,  et 
probablement  à  la  troisième  personne  du  pluriel  :  car  l'a  de 
do-berar,  par  exemple,  ne  peut  représenter  que  la  voyelle  thé- 
matique, laquelle  était  o  (celtique  a)  au  pluriel,  mais  e  au  sin- 
gulier. Une  autre  question  est  de  savoir  si  IV  était  final  :  et 
cette  question  nous  semble  avoir  été  résolue  par  M.  W.  avec 
beaucoup  de  sagacité.  Dans  les  langues  italiques  la  voyelle  que 
suivait  r  a  pu  tomber  comme  celle  de  puer(os)  sans  laisser  de 
traces  de  son  existence.  Il  n'en  est  pas  de  même  en  celtique. 
Berair  opposé  à  do-berar  présente  dans  la  seconde  syllabe  un  i 
difficile  à  expliquer  :  il  n'est  pas  dû  à  l'influence  de  Yc  de  la 
première  syllabe,  puisque  do-berar  se  maintient  intact  dans  les 
mêmes  conditions.  Il  faut  donc  admettre  qu'après  IV  de  berair 
se  trouvait  un  son  c  ou  i  qui  a  disparu  après  avoir  altéré  l'a 
de  la  syllabe  pénultième  :  berair  se  trouverait  ainsi  remonter  à 
une  ancienne  forme  *  berari  tout  à  fait  comparable  aux  formes 
indiennes  en  -rë.  Le  parallélisme  sera  complet  si,  comme  la 
phonétique  nous  y  autorise,  on  restitue  pour  -berar  un  proto- 
type *berara  (védique  aduh-rd).  La  différence  de  la  forme  ab- 
solue berair  et  de  la  forme  conjointe  -berar  remonte  ainsi  en 
dernière  analyse  à  la  différence  des  désinences  primaires  et 
secondaires  (grec  ospe-cai,  koip—z).  — Au  pariait  déponent,  l'ir- 
landais menair  (pour  *  nieiiari)  correspond  de  même  tout  à  fait 
au  parfait  indien  (3e  p.  pi.)  nie  11  ire. 

On  peut  objecter  que  dans  les  formes  indiennes  la  voyelle 
thématique  (indo-européen  0,  celtique  a,  sanscrit  a  ou  û  sui- 
vant la  structure  de  la  syllabe)  manque  toujours  dans  les 
formes  en  r,  tandis  qu'elle  se  trouve  régulièrement  dans  les 
langues  italo-celtiques.  Mais  cette  objection  ne  suffit  pas  à  dé- 


Bibliographie.  40 1 

truire  les  ressemblances  profondes  qui  existent  pour  ces  formes 
entre  les  deux  groupes  de  langues  :  la  différence  que  nous  si- 
gnalons est  due  à  ce  que  les  idiomes  italo-celtiques  ont  presque 
complètement  perdu  toute  trace  de  la  conjugaison  athéma- 
tique  ;  la  présence  de  la  voyelle  thématique  dans  les  formes 
en  r  n'a  rien  de  plus  extraordinaire  que  sa  présence  dans  toute 
la  conjugaison  de  tant  de  verbes  où  elle  manquait  à  l'époque 
indo-européenne.  On  a  d'ailleurs  en  Inde  même  un  fait  exac- 
tement comparable  à  celui  qui  s'est  produit  dans  l'Europe  occi- 
dentale :  le  pâli  et  les  divers  prâcrits  ont  généralisé  l'emploi  de 
IV  dans  la  conjugaison  thématique. 

La  partie  du  travail  de  M.  W.  qui  concerne  le  latin  est 
malgré  ses  mérites  moins  intéressante  et  moins  neuve.  Il  faut 
remarquer  toutefois  un  nouvel  argument  apporté  en  faveur 
de  l'ancienneté  relative  de  la  troisième  personne  parmi  les 
formes  en  r  :  c'est  que  le  latin  a  ajouté  la  caractéristique  du 
médio-passif  à  la  troisième  personne,  alors  que  le  moyen  était 
encore  en  usage  (agïtu-r,  aguntu-r;  cf.  ifre-rs,  rtyo*no),  tandis 
que  la  première  personne  est  formée  sur  l'actif:  ago-r. 

M.  Windisch  termine  par  quelques  réflexions  sur  l'origine 
de  ces  formes  en  r  ;  il  voudrait  identifier  la  finale  -va  (indo- 
europ.  -va  ou  -ro?)  du  sanscrit  avec  le  suffixe  nominal  de  même 
forme  (indo-europ.  -ro-).  Il  est  certain  que  les  adjectifs  comme 
kshiprâ-  «  rapide  »,  proprement  «  se  lançant  »  (rac.  hship 
«  jeter,  lancer  »),  chidrâ  «  fendu  »  (rac.  chid  «  fendre  »)  ont 
pu  être  employés  sans  verbe  auxiliaire,  comme  en  latin  legimiiii 
(=  /.£7:;j.£v;'.)  et  prendre  peu  à  peu  le  sens  verbal  :  mais  tout 
cela  est  bien  hasardé.  Le  principal  argument  de  M.  W.,  l'iden- 
tification qu'il  emprunte  a  M.  Ascoli  du  participe  neutre  pluriel 
bharanti  «  les  portants,  ceux  qui  portent  »,  et  de  la  3e  pers. 
plur.  bharauîi  «  ils  portent  »  n'est  pas  flûte  pour  diminuer  nos 
doutes  :  car  ces  deux  formes,  identiques  en  sanscrit,  ne  le  sont 
que  par  hasard.  A  l'époque  indo-européenne  elles  différaient 
notablement.  L7  final  du  participe  neutre  pluriel  a  la  même 
origine  que  1'/  âepita  «  père  »,  que  le  second  i  de  iti  «  ainsi  »  : 
il  est  représenté  dans  les  langues  de  l'Europe  par  un  a  bref: 
grec  çizzT.z,  ~-x-.r,p;  latin  pater,  ita.  Ui  final  de  la  troisième 
personne  du  pluriel  de  l'indicatif  présent  actif  est  un  i  véri- 


402  Bibliographie. 

table,  comme  le  premier  i  de  iti,  et  celui  de  itnâs  «  nous  allons  », 
conservé  sous  cette  forme  dans  les  langues  de  l'Europe  :  dorien 
çépovTi,  latin  ita,  grec  commun  î'^ev. 

Mais  cette  hypothèse  n'est  qu'accessoire  dans  le  travail  de 
M.  Windisch,  qui  est  en  général  un  modèle  de  sagacité,  de 
prudence  et  de  clarté. 

Louis  Duvau. 

Annala  Uladh,  Annals  of  Ulster,  otherwise  Annala  Sé- 
riait, Annals  of  Sénat,  a  chronicle  of  Irish  affairs  from 
A.  D.  431  to  A.  D.  1540,  edited  with  a  translation  and  notes  by 
William  M.  Hennessy,  M.  R.  I.  A,  the  assistant  deputy  Keeper  of  the 
Records.  Vol.  I,  A.  D.  431-1056,  published  by  the  authorityof  the  Lords 
Commissioners  of  Her  Majesty's  Treasury  under  the  direction  of  the 
Council  of  the  Royal  Irish  Academy.  Dublin,  Hodges,  Figgis  and  Co. 
1887;  gr.  in-8,  m- 5 99  p. 

Quand  j'ai  pour  la  première  fois  appris  que  le  savant 
M.  Hennessy  préparait  une  édition  de  cette  chronique,  je 
n'ai  pu  retenir  l'expression  d'un  étonnement.  En  voici  la  cause. 
La  partie  la  plus  ancienne  de  la  chronique  d'Ulster  a  été  com- 
posée à  la  fin  du  xve  siècle.  Je  me  demandais  pourquoi 
M.  Hennessy  ne  préférait  pas  entreprendre  une  édition  de  la 
chronique  de  Tigernach  qui  remonte  au  xic  siècle. 

La  chronique  de  Tigernach  et  les  Annales  d'Ulster  ont  été 
publiées  toutes  deux  par  O'Conor  dans  ses  Rerum  hibernicarum 
scriptores,  la  première,  dans  le  tome  II,  la  seconde,  dans  le 
tome  IV.  Mais  on  ne  peut  donner  qu'une  très  médiocre  con- 
fiance aux  textes  d'O'Conor.  Leur  défectuosité  a  été  mise  en 
évidence  dès  1874  quand  M.  Gilbert,  dans  ses  Facsimiles  of 
national  manuscripts  oflrclaud,  première  partie,  planches  XLIII 
et  XLIV,  a  donné  le  facsimilé  d'un  feuillet  des  Annales  de 
Tigernach,  f°  6  du  manuscrit  Rawlinson  B.  502  de  la  Biblio- 
thèque Bodléienne  d'Oxford. 

Une  nouvelle  édition  des  Annales  de  Tigernach  est  néces- 
saire et  urgente.  Pourquoi  M.  Hennessy  a-t-il  préféré  nous 
donner  les  Annales  d'Ulster  ?I1  a  eu,  je  suppose,  deux  raisons. 
L'une  est  que  les  Annales  d'Ulster  n'ont  été  publiées  par 
O'Conor  que  d'une  façon  incomplète  ;  l'édition  donnée  par  ce 
savant  s'arrête  à  l'année  1131,  tandis  que  le  manuscrit  dont  il 


Bibliographie.  40  $ 

s'est  servi  (Bibliothèque  Bodléienne  d'Oxford,  Rawlinson 
B.  489)1  va  jusqu'à  l'année  1 541 .  L'autre  motif  qui  aura  décidé 
M.  Hennessy  est  que  la  partie  la  plus  ancienne  de  la  chro- 
nique d'Ulster  est  bien  plutôt  une  compilation  qu'une  com- 
position originale.  L'auteur  s'est  en  général  borné  à  réunir  en 
les  copiant  des  fragments  de  chroniques  diverses  aujourd'hui 
perdues.  Ces  textes,  lorsqu'il  s'agit  des  premiers  siècles,  sont 
presque  exclusivement  latins.  Cependant  on  y  rencontre  quel- 
ques mots  irlandais,  et  ces  mots  sont  notés  de  temps  en  temps 
avec  une  orthographe  archaïque  ;  cette  orthographe  nous  fait 
remonter  à  une  période  bien  antérieure  à  celle  où  écrivait  le 
compilateur.  C'est  ainsi  qu'à  la  page  108,  ligne  3,  nous  lisons: 
Duncath  aue  Rouai  11  jugulatus.  Aue  est  l'orthographe  en  vieil 
irlandais  du  mot  écrit  ûa  en  irlandais  moyen,  0  en  irlandais 
moderne,  et  qui  veut  dire  «  petit-fils  ».  Dans  ce  passage,  il 
s'agit  d'un  événement  qui  se  produisit  au  milieu  du  VIIe  siècle, 
et  qui  fut  probablement  noté  par  un  contemporain  dans  la 
chronique  d'une  abbaye.  La  même  orthographe  avec  une 
légère  variante,  aime,  se  retrouve  à  la  page  148,  ligne  13,  où 
il  est  question  de  faits  datés  de  l'an  700  de  notre  ère.  A  la 
page  62,  1.  12,  aeu  est  une  faute  d'impression  pour  aue. 

La  plupart  du  temps,  l'auteur  des  Annales  d'Ulster  ne  dit 
pas  où  il  a  pris  les  fragments  de  chroniques  monastiques  dont 
la  juxtaposition  constitue  son  oeuvre.  Il  cite  cependant  quelques 
autorités,  et  la  plus  intéressante,  comme  l'ont  déjà  fait  observer 
dans  les  deux  siècles  qui  nous  ont  précédés  Ware  et  Harris2, 
et  plus  récemment  O'Donovan  3,  est  le  livre  de  Cuana,  scribe 
de  l'abbaye  de  Trevet  au  comté  de  Meath.  Cuana  mourut  en 
7384.  Il  est  cité  treize  fois  dans  les  Annales  d'Ulster;  la  pre- 
mière sous  la  date  de  467,  la  dernière  sous  la  date  de  628. 

Un  autre  auteur  un  peu  plus  récent  est  Dubdalethe,  troisième 


1.  Catalogi  codicum  manuscriptorum  B'Miothccac  Bodleianae  partis  quintae 
fasciculus pritnus.  Confecit  Gnill.  Macray,  col.  709. 

2.  The  history  ofthe  writers  of  Ireland,  Dublin,  1764,  p.  26. 

3.  Annals  of  the  Kingdom  of  Ireland,  by  the  ibur  masters,    i8>  1,  t.   I, 
p.  46. 

4.  Cuana,  nepos  Bessain  scriba  Treoit  pausat.  Hennessy.  Annales  d'Uls- 
ter, t.  I,  p.  196,  197. 


404  Bibliographie. 

du  nom,  archevêque d'Armagh,  mort  en  1065  suivant  Harris1, 
en  1064  suivant  les  Annales  des  Quatre  Maîtres  et  celles  de 
Tigernach2,  et  en  106 1  suivant  le  Cronicum  Scotorumî.  Les 

Annales  d'Ulster  citent  le  livre  de  Dubdalethe  sous  les  années 
6284,  9625  et  10216.  Le  catalogue  des  manuscrits  de  la  Bi- 
bliothèque Bodléienne,  fascicule  premier  de  la  cinquième  partie, 
par  Macray,  1862,  col.  730,  nous  apprend  qu'outre  une  chro- 
nique, le  livre  de  Dubdalethe  contenait  le  récit  légendaire  inti- 
tulé Balle  in  Scâil.  Cette  mention  appartient  au  numéro  33  de 
l'analyse  du  manuscrit  Rawlinson  B.  5 12  7. 

Un  troisième  auteur,  qui  n'est  cité  qu'une  fois,  c'est  Mauc- 
teus  ou  Mochte,  dont  l'auteur  des  Annales  d'Ulster  aurait  eu 
entre  les  mains  une  lettre  commençant  ainsi  :  Maucteus  pec- 
cator,  prespiter,  sancti  Patriciidiscipulus,  in  Domino  salutem8. 
Ce  monument  serait  le  plus  ancien  que  nous  possédions  du 
culte  de  saint  Patrice.  Car  Mochta- mourut  en  534  ou  en  536 
suivant  les  Annales  d'Ulster,  en  534  suivant  celles  de  Tiger- 
nach 9.  Ce  texte  a  du  reste  été  déjà  signalé  par  Usserius,  après 
lui  par  les  Bollandistes10,  et  en  dernier  lieu  par  O'Donovan. 


1.  The  works  of  Sir  James  Ware  concerning  heland,  t.  I,  1739,  p.  30. 

2.  Edition  O'Donovan,  1851,  t.  II.  p.  886.  —  O'Conor,  Rcrum  hiber- 
nicarum  scriptorcs,  t.  II,  p.  305. 

3.  Edition  Hennessy,  p.  286,  287. 

4.  Edition  O'Conor,  p.  44;  édition  Hennessy,  p.  98,  99. 

5.  Edition  O'Conor,  p.  275;  éd.  Hennessy,  p.  478. 

6.  Edition  O'Conor.  p.  372;  éd.  Hennessy,  p.  346.  Voir  sur  le  même 
événement  les  Annales  de  Loch  Ce,  éd.  Hennessy,  t.  I,  p.  20.  22.  On  y 
trouve  aussi  un  renvoi  à  Dubdalethe  et  il  est  fort  intéressant  de  comparer 
les  deux  textes. 

7.  M.  Zimmer,  dans  les  Gcettingische  gelehrte  An\eigen  du  1  "  mars  1887, 
p.  182,  a  découvert  que  Macray  avait  négligé  de  mentionner  le  nom  de 
Dubdalethe  et  qu'il  n'y  avait  eu  que  deux  évêques  d'Armagh  de  ce  nom. 
Voyez,  sur  les  trois  Dubdalethe,  Harris,  The  works  of  Sir  James  Ware,  p.  42, 
48-30,  et  les  Annales  d'Ulster,  éd.  Hennessy,  p.  272.  304,  588.  Cf.  Harris, 
Theuriters  of  Ireland,  p.  63,  66,  et  Revue  Celtique,  t.  IX,  p.  97-98. 

8.  Page  46.  La  même  formule  initiale  est  citée  dans  les  Annales  de  Ti- 
gernach avec  une  légère  différence  d'orthographe  :  Moctews  p<:rcator,  p/rspi- 
Xcr,  sancti  Pfl/ricii  discip»h/s  in  Domino  salutem.  O'Conor,  Rcrum  hiberni- 
carum  scriptores,  t.  II,  p.  134-133. 

9     Voyez  les  renvois  contenus  dans  la  note  précédente. 
10.   Tome  III  d'août,  p.  759.  La  iète  se  faisait  le  19  août.  Martyrologe  d'I  )en- 
gus,  édition  Whitlev  Stokes,  p.  cxxiv,  cxxxn.  Cf.  Vie  de  saint  Columba  par 
Adamaan,  édition  Reeves,  p.  6.   Todd.  Saint   Patrick,  p.   29.  Harris,  The 


Bibliographie.  405 

Mais  il  avait  été  défiguré  par  O'Donovan  qui,  au  lieu  de 
Maucteus,  écrit  Macutenus. 

Mentionnons  aussi  le  Liber  monachorum  auquel  il  est  ren- 
voyé sous  la  date  de  5  r  1  x,  et  le  Liber  Mochod  dont  il  est 
question  sous  la  date  de  527  2. 

Enfin  l'auteur  des  Annales  d'Ulster,  sans  nommer  ses  au- 
torités, parle  de  temps  en  temps  des  contradictions  qui  exis- 
tent entre  elles.  Une  étude  sur  les  sources  des  chroniques  ir- 
landaises qui  nous  ont  été  .conservées  serait  un  travail  plein 
d'intérêt,  et  de  cette  étude  on  trouverait  probablement  dans  les 
Annales  d'Ulster  les  principaux  éléments. 

M.  Hennessy  n'a  pas  mis  de  préface  à  son  édition.  Un  aver- 
tissement d'une  demi-page  nous  prévient  que  l'introduction 
paraîtra  quand  l'édition  sera  terminée,  et  qu'elle  contiendra 
une  étude  sur  les  sources  des  Annales  d'Ulster  et  sur  les 
manuscrits  qui  ont  servi  de  base  au  texte  adopté  par  le  savant 
éditeur.  Il  y  aurait  certainement  témérité  de  notre  part  à  pré- 
tendre devancer  ici  l'érudit  irlandais.  Nous  nous  bornerons 
à  une  observation. 

Des  Annales  d'Ulster,  il  y  a  deux  manuscrits  principaux. 
L'un,  qu'O'Conor  considérait  comme  le  meilleur,  est  celui  dont 
ce  savant  a  reproduit  le  texte?.  C'est,  comme  nous  l'avons 
dit,  le  manuscrit  Rawlinson  B.  489  de  la  Bibliothèque  Bod- 
léienne  d'Oxford-*.  L'autre  appartient  au  Collège  de  la  Trinité 
de  Dublin  où  il  porte  la  cote  H.  1.  8.  Un  feuillet  en  a  été 
reproduit  par  M.  Gilbert  dans  ses  Facsimiles  of  National  Ma- 
nit  script  s  of  Ireland,  troisième  partie,  planche  lxxvii.  Ce  ma- 
nuscrit paraît  être  resté  inconnu  à  O'Conor.  L'usage  qu'en  a 
dû  faire  M.  Hennessy  constitue  pour  ce  savant  une  grande  su- 
périorité sur  son  devancier. 


works  of  ] ornes  Jl'are,  t.  I,  p.  19,  182.  Il  fut,  dit-on,  le  premier  évêque  de 
Louth,  Annales  des  Quatre  Maîtres  sous  l'année  534;  éd.  O'Donovan 
(185 1),  t.  I.  p.  17b. 

1 .  Page  36. 

2.  Page  42. 

3 .  Rerum  bibernicarum  scriptores  veteres,  t.  I,  seconde  partie  Prolegomena, 
pars  I,  p.  clxix.  Cf.  O'Curry,  Lectures  on  the  manuscript  materials,  p.  83,  84. 

4.  Il  a  été  décrit  par  Macray  dans  son  catalogue  précité,  col.  709-710. 
Cet  érudit  le  date  des  xvc  et  xvie  siècles. 


406  Bibliographie . 

Le  texte  est  accompagné  d'une  traduction  anglaise  en  regard. 
Il  paraît  avoir  été  fixé  avec  l'exactitude  à  laquelle  les  précé- 
dentes publications  du  savant  auteur  nous  ont  habitué.  Nous 
signalerons  cependant  les  fautes  d'impression  :pegni  pour  regni, 
p.  4,  1.  3  ;  moritus  pour  moriiur,  p.  92,  1.  7  ;  nerotum  pour  ne- 
potum,  p.  150,  1.  4.  Les  fautes  de  ce  genre  sont  une  consé- 
quence inévitable  de  l'emploi  des  caractères  irlandais  ;  et  fran- 
chement, nous  ne  comprenons  pas  l'utilité  de  cet  emploi, 
surtout  quand  il  s'agit  d'imprimer  un  texte  latin. 

H.  d'Arbois  de  Jubainville. 


MÉLUSINE.  Revue  de  mythologie,  littérature  populaire, 
traditions  et  usages  fondée  par  H.  Gaidoz  et  E.  Rolland,  1877- 
1887,  dirigée  par  Henri  Gaidoz.  Paraît -le  5  de  chaque  mois,  à  Paris, 
chez  E.  Lechevalier,  par  livraisons  de  12  pages  in-4.  Prix  de  l'abon- 
nement pour  un  an:  France  et  Union  postale,  12  fr. 

Depuis  que  nous  annoncions  à  nos  lecteurs  la  résurrection 
de  ce  recueil  en  1884,  il  a  poursuivi  régulièrement  sa  féconde 
carrière.  Les  tomes  II  et  III  se  composent  chacun  de  24  nu- 
méros parus  en  deux  années  consécutives;  le  tome  IV  a  com- 
mencé avec  1888,  sous  la  direction  unique  de  M.  Gaidoz. 

Ce  que  nous  disions  alors  (Revue  Celtique,  VI,  391),  à 
propos  du  tome  II  de  Mél usine,  de  l'intérêt  que  présente  cette 
publication  au  point  de  vue  spécial  des  études  celtologiques, 
n'a  pas  cessé  d'être  vrai.  Voici,  par  exemple,  l'indication  des 
articles  du  tome  III  relatifs  à  la  Basse-Bretagne  : 

Chansons  populaires  (texte,  sauf  pour  la  4e,  et  traduction; 
souvent  aussi  l'air  noté)  :  «  Le  navire  du  Port-Blanc  »,  col.  77- 
82  ;  «  Noël  pour  demander  ses  étrènnes  »,  82-83  '■>  <(  Le 
meunier  de  Kergantec  »,  161- 162;  «  La  lavandière  qui  avait 
oublié  de  prier  Jésus  »,  162-163;  ((  Le  plongeur  »,  182-184, 
et  453-455;  «  La  nourrice  et  les  voleurs  »,  184-188; 
«  L'amant  éconduit  »,  208-210  et  570-573  ;  «  La  maîtresse 
pauvre  »,  260-262.;  chansonnette  »,  327-328;  «  La  rage  », 
350-352  et  393-395;  «  L'embrassade  »,  421-422;  «  La  jeune 
amoureuse  »,  477-478. 


Bibliographie.  407 

Devinettes,  col.  88-89,  132-133,  235  ;  Inscription  en  breton 
moyen,  col.  92-93;  Sur  Guionvac'h,  col.  145-150  et  207-208; 
Proverbes,  .col.  232-233;  Prière  populaire,  col.  236;  Usages 
de  la  féodalité,  col.  274-276. 

Superstitions  :  «  Précautions  à  prendre  quand  on  doit 
voyager  de  nuit  »,  col.  358;  «  L'enfance  et  les  enfants  », 
374-376  et  568;  Le  mariage,  376-379;  La  coqueluche,  le  ra- 
chitisme, 380-381. 

Contes  populaires,  col.  474-476;  Alexandre  le  Grand,  487- 
496;  Les  conseils  d'un  père  mourant,  529-537. 

M.  Gaidoz  commence,  dans  le  tome  IV  de  Mélusine,  la  pu- 
blication d'une  série  d'anciens  textes  irlandais  qu'il  traduit  et 
commente  avec  sa  double  compétence  de  celtisant  et  de  folk- 
loriste.  Il  nous  a  donné  déjà  deux  légendes  chrétiennes  fort 
curieuses  «  Les  trois  clercs  et  le  chat  »,  d'après  le  Livre  de 
Leinster  et  le  Livre  de  Lismore  (Mélusine,  IV,  5-1 1;  41-42); 
et  «  L'enfant  juif»,  d'après  un  manuscrit  du  xve  siècle,  de  la 
Bibliothèque  Nationale  {Mil.,  IV,  39-41). 

Signalons  encore,  dans  ce  même  tome,  col.  62-65,  un  ar~ 
ticle  très  instructif  de  M.  Loth  sur  les  présages  fâcheux  que 
les  anciens  Gallois  tiraient  de  l'éternuement.  L'auteur  repro- 
duit le  texte  d'un  poème  du  Livre  noir  de  Caermarthen 
(n°  xxvii  des  Four  ancient  books  of  Wales)  et  corrige  heureu- 
sement la  traduction  de  Skene.  Qu'il  me  permette  cependant 
une  petite  observation.  Il  traduit  les  premiers  vers  des  strophes 
6  et  7  : 

Dyrcheuid  bran  y  hasgell 
Dyrcheuid  bran  y  hadein 

par  «  Que  le  corbeau  élève  ses  ailes  ».  Comme  le  fait  re- 
marquer M.  Gaidoz,  il  s'agit  d'un  mauvais  présage,  qui  n'ar- 
rête pas  un  chrétien  sur  le  point  d'aller  où  Dieu  l'appelle.  Ces 
vers  sont  donc  à  comparer  au  2e  de  la  str.  2  :  ■ 

«  C'est  au  profit  de  mon  roi  que  je  m'habille 
«  Aujourd'hui:  j'entends  un  éternuement... 

str.  3  ...  «  je  ne  crois  pas  à  un  présage... 

str.  5  ...  «  le  devoir  victorieux  sera  mon  maître  »; 


408  Bibliographie. 

et  puisque  dans  un  trev  a  glyuaiv  «  j'entends  un  éternueraent  » 
le  verbe  est  à  l'indicatif,  le  contexte  demande,  aux  str.  6  et  7, 
la  traduction 

«  Le  corbeau  élève  son  aile  ». 

On  sait,  d'ailleurs,  que  le  vieux  gallois  avait,  comme  le  vieil 
irlandais,  des  troisièmes  personnes  du  singulier  de  l'indicatif 
présent  en  -ici  (conjugaison  absolue). 

E.  Erxault. 


Etudes  iconographiques  et  archéologiques  sur  le  moyen 
âge,  par  Eugène  Mùktz,  conservateur  de  l'Ecole  nationale  des  Beaux- 
Arts.  Première  série.  Paris,  Ernest  Leroux,  1887,  in-16,  vi-i 73  p. 

Sous  ce  titre,  le  savant  auteur  a  réuni  quatre  mémoires. 
Les  trois  premiers  sont  étrangers  'aux  sujets  dont  s'occupe 
la  Revue  Celtique.  Ils  concernent  :  les  pavements  historiés 
du  IVe  au  xne  siècle;  la  décoration  d'une  basilique  arienne 
(Sancta  Agatha  in  Suburra,  à  Rome)  au  Ve  siècle;  la  légende 
de  Charlemagne  dans  l'art  du  moyen  âge.  Mais  le  dernier  est 
une  étude  sur  la  miniature  irlandaise  et  anglo-saxonne  au 
ixe  siècle.  M.  Mùntz  s'était  déjà  occupé  sommairement  de 
cette  matière  dans  le  tome  III  de  la  Revue  Celtique  où  il  a 
publié,  p.  243-245,  d'intéressantes  «  Recherches  sur  l'origine 
des  ornements  connus  sous  le  nom  d'entrelacs  ».  Il  démontre 
que  l'entrelacs  est  un  genre  d'ornement  usité  bien  avant 
l'époque  où  il  commence  à  paraître  dans  les  monuments  cel- 
tiques. L'entrelacs  était  déjà  connu  des  artistes  chaldéens.  On 
le  trouve  en  Syrie  et  dans  les  monuments  de  l'art  romain  à 
une  date  antérieure  aux  plus  anciens  manuscrits  irlandais. 

Sur  la  spirale,  M.  Mùntz  est  moins  affirmatif  et  il  n'ose  pas 
déclarer  mal  fondée  la  doctrine  de  M,le  Stokes  (voir  plus  haut, 
p.  396).  En  effet,  on  a  tiré  des  tombeaux  de  Hallstatt  des 
fibules  à  spirale  qui  paraissent  celtiques  et  qui  peuvent  remonter 
au  11e  siècle  avant  J.-C.  Cela  n'empêche  pas  que  la  spirale  n'ait 
été  employée  ailleurs  dans  l'antiquité,  par  exemple  à  Rhodes 
et  chez  les  Chaldéens. 

H.  n'A.  de  J. 


Bibliographie.  409 

Ueber  romanische  Ortsnamen  in  Salzburg  von  Theodor  von 
Grienberger.  Salzburg,  Dieter,  1886,  in-16,  62  p. 

Salzbourg  était  situé  dans  le  Norique,  c'est-à-dire  dans  une 
région  celtique.  On  doit  donc  s'attendre  à  y  trouver  des  noms 
de  lieu  formés  de  la  même  façon  que  ceux  de  la  Gaule.  C'est 
ce  qui  résulte  du  mémoire  de  M.  Grienberger.  Morzg  s'appe- 
lait en  800  Marciagus.  C'est  un  dérivé  gaulois  très  fréquent  en 
France  du  gentilice  romain  Marcius  comme  on  l'a  pu  voir 
dans  ce  volume,  p.  39-43.  La  variante  romaine  de  ce  nom  de 
fundus  est  Mavcianus,  d'où  le  français  Marchiènnes,  Nord 
(l'illae  Marcianae,  p.  43);  cette  variante  se  trouve  aux  envi- 
rons de  Salzbourg,  au  xivu  et  au  xvc  siècle,  avec  les  ortho- 
graphes Martzan  et  Marczan.  Après  les  suffixes  géographiques 
-acus  et  anus,  d'autres  suffixes  qu'on  trouve  quelquefois  en 
France  et  dont  nous  n'avons  point  parle  jusqu'ici,  sont  les 
suffixes  -lus  et  -avus.  Ainsi,  les  textes  du  moyen  âge  nous 
montrent  en  Limousin  un  ruisseau  appelé  Marciolis1.  Milhau, 
Avevron,  est  un  ancien  Aemiliavus ;  Belleneuve,  Côte-d'Or, 
est  un  ancien  Belenavus2.  Nous  retrouvons  ces  suffixes  près  de 
Salzbourg.  Une  localité  appelée  aujourd'hui  Marzoll  est  nom- 
mée ad  Marciolas  en  788  (p.  48);  Campanif,  près  de  Salz- 
bourg, s'écrivait  ad  Campanavam,  en  930  (p.  12).  A  côté  de 
ces  noms  d'origine  romaine  on  en  peut  signaler  d'autres  qui 
paraissent  gaulois.  Anif  s'appelait  Anava  au  xnc  siècle  :  ad  vil- 
lam  quac  vocatur  Anava  ubi  fontes  decurrunt.  Anava  est  proba- 
blement identique  au  mot  gallois  anaw  «  harmonie  »  si  fré- 
quent au  ixe  siècle  dans  les  noms  d'hommes  du  Cartulaire  de 
Redonl  et  plus  tard  dans  ceux  du  Liber Landavensis*.  Comparez 
le  cognomen  Anaus  dans  une  inscription  d'Espagne  5  et  le  nom 
de  peuple  Anauni  dans  l'Italie  du  nord6.  Kuchl,  le  CuciiUc 
(Cucullaé)  de  la  Table  de  Peutinger,  au  datif  Cucullis  chez  Eu- 

1 .  Deloche,  Etudes  sur  la  géographie  historique  de  la  Gaule,  deuxième 
partie,  p.  517. 

2.  Ecrit  à  tort  avec  deux  /  dans  la  Chronique  de  Be%e;  Garnier,  Nomen- 
clature historique..,  p.  40,  n'  174. 

3 .  Voir  l'index,  p.  632. 

4.  Grammatica  celttca,  deuxième  édition,  p.  129. 

5.  Corpus  inscriptioniuu  latinarum,  t.  II,  n*  1690. 

6.  Corpus  inscriptionum  latinarum,  t.  V.  p.  537-538. 


4 1  o  Bibliographie. 

gippiuS;    Vita  Severini;  ad   CucuUas  dans   un   document  de 
Tannée  800,  nous  offre  la  forme  féminine  du  cucullus  de  Ju- 

vénal  : 

Tempora  Santonico  vêlas  adoperta  cucullo1. 

Le  féminin  a  été  préféré  par  les  auteurs  ecclésiastiques,  qui 
écrivent  cuculla,  d'où  en  français  la  coule  monastique. 

H.   D'A.   DE  J. 

Esquisses  du  Bocage  normand,    par  Jules  Lecœur.  II.   Paris, 
Emile  Leehevalier,  1887,  gr.  in-8,  440  p.,  avec  gravures  hors  texte. 

Dans  ce  gros  volume,  M.  J.  Lecœur  a  réuni  d'intéressantes 
scènes  de  mœurs  villageoises  et  de  nombreux  renseignements 
sur  les  croyances  et  superstitions  populaires  dans  le  Bocage 
normand.  Son  livre  offre  donc  un  double  attrait;  le  littérateur 
y  trouvera  avec  plaisir  des  portraits  bien  tracés  et  très  vivants 
et  le  folkloriste  pourra  y  découvrir  quelque  document  impor- 
tant pour  la  science  des  traditions.  Il  nous  serait  fort  agréable 
de  nous  arrêter  quelque  temps  à  regarder  ces  types  villageois 
que  nous  connaissons  bien  et  que  M.  L.  nous  remet  devant 
les  yeux:  le  taupier  (p.  141),  le  faucheur  (p.  232),  le  pâtour 
(p.  276).  Malheureusement  M.  L.  ne  touche  que  fort  rare- 
ment à  quelque  partie  du  folklore  celtique  ou  plus  particu- 
lièrement du  folklore  breton.  Aussi  nous  nous  bornons  à  an- 
noncer ce  livre  écrit  sans  prétention  scientifique  et  qui  se  lit 
avec  un  çrand  plaisir. 

G.  D. 


Studies  in  the  Topography  of  Galloway  being  a  list  of  nearly 
4000  Names  of  Places  with  Remarks  on  their  origin  and  meaning  and 
anlntroductory  Essayby  Sir  Herbert  Eustace  Maxwell.  Bart.  of  Monreith. 
M.  P.,  F.  S.  A.  etc.  Edimbourg,  David  Douglas,  1887,  in-8,xv,  340  p. 

On  a  parlé  gaélique  en  Galloway  jusqu'au  commencement 
du  xvie  siècle.  Il  y  a  donc   en  Galloway  un  nombre  considé- 

1.  Satire  VIII,  vers  145. 


Bibliographie.  41 1 

rable  de  noms  de  lieux  d'origine  gaélique  ou  irlandaise.  Mal- 
heureusement les  documents  remontant  à  cette  époque  sont 
très  rares  dans  cette  région  des  Iles-Britanniques,  et  souvent 
il  est  difficile  de  reconnaître  les  mots  néo-celtiques  sous  la 
forme  orthographique  que  leur  a  donné  la  notation  anglaise. 
Se  rigure-t-on  Bordeaux  écrit  Bazudoc,  Rouen  représenté  par 
Roweng,  Richelieu  par  Reeshleiu,  etc.  Sir  Herbert  Maxwell  a 
étudié  la  toponomastique  irlandaise  qui  est  relativement  bien 
documentée,  et  par  la  comparaison  des  noms  de  lieux  de  l'Ir- 
lande avec  ceux  de  Galloway,  il  paraît  avoir  jeté  sur  son  sujet 
beaucoup  plus  de  lumière  qu'on  n'aurait  pu  l'espérer.  Son 
œuvre  nous  semble  raisonnable  ;  il  est  bien  rare  qu'on  puisse 
dire  cela  d'un  recueil  d'étymologies. 


CHRONIQUE 


SOMMAIRE  :  I.  Les  Annales  de  Bretagne  et  la  Chrestomathie  bretonne  de  M.  Loth.  —  II.  Le 
dictionnaire  gallois  de  M.  Silvan  Evans.  —  III.  Publications  de  M.  Ascoli.  —  IV.  Le  Tochmarc 
Emert  traduit  par  M.  Kuno  Meyer.  —  V.  Cantique  irlandais  du  XVIe  siècle  publié  par  M.  Do- 
nald Masson  dans  V  Archaeological  Revieui,  critique  de  la  traduction  de  M.  Donald  Masson  par 
M.  Standish  O'Gradv.  —  VI.  Mort  de  M.  Evan  Davies.  —  VII.  Vies  de  saints  bretons  dans 
les  Analecta  Bollandiana.  — VIII.  Nouvelle  édition  des  Annales  Cambriae  par  M.  |.-B.  Philli- 
more.  —  IX.  Tombes  de  Gaulois  trouvées  à  Alexandrie,  en  Egypte.  —  X.  Tome  XII  du 
Corpus  inscriptionum  latmarum  (Narbonnaise).  —  XI.  Atlas  historique  de  la  France  par  M.  Lon- 
gnon.  —  XII.  L'épopée  irlandaise  dans  le  Celtic  Magazine.  —  X1IL  Le  mystère  breton  de 
sainte  Tryphine  au  théâtre  de  Morlaix.  —  XIV.  Un  nouveau  mémoire  de  M.  Nettlau.  — 
XV.  Gloses  bretonnes   inédites  du  IXe   siècle.    —  XVI.   Un  conte  breton  publié  par  M.  Luzel. 

—  XVII.  The  Journal  of  the  Royal    historical  and   archaeological   Association  of  Ireland.  — 
XVIII.  Nouvelles  publications  de  M.  Zimmer.  —  XIX.  Prix  Volney  décerné  à  M.  E.  Emault. 

—  XX.  Le  char  de  guerre  gaulois  d'Issoudun  (Indre). 


I. 

La  troisième  livraison  du  tome  III  des  Annales  de  Bretagne  a  paru  au 
mois  d'avril  dernier.  Dans  la  dernière  livraison  (janvier)  M.  Loth  avait 
commencé  à  donner  des  extraits  de  textes  du  xvir  siècle.  11  continue  dans 
celle-ci  en  nous  faisant  connaître  :  i°  (p.  396-59.9)  un  recueil  de  Cantiques 
bretons  publiés  à  Quimper  en  1642.  Les  airs  de  ces  cantiques  sont  d'après 
l' Advertissement  au  lecteur  empruntés  en  grande  partie  à  Claude  le  Jeune, 
musicien  de  Henri  III.  —  2°  (p.  399-400)  An  noveîou  ancient  ha  dévot  gant 
TanguvGuegen.  EQemper  Caurintin,gant  G.  Allienne,  1650.  —  30  (p.  401- 
405)  Le  sacré  collège  de  Jésus  divisé  en  cinq  classes  ov  l'on  enseigne  en  langue 
armorique  les  leçons  chrestiennes  avec  les  3  clefs  pour  y  entre/ ,  vn  Dictionnaire, 
vue  grammaire,  et  syntaxe  en  même  langue.  Composé  par  le  R.  P.  Mien  Mav- 
noir  ...  Quimper-Corentin,  chez  Jean  Hardouin,  1659.  On  peut  dater  de 
ce  livre  le  commencement  de  la  période  de  l'armoricain  moderne.  Le  pre- 
mier, le  P.  Maunoir  écrit  régulièrement  les  mutations  de  consonnes  ini- 
tiales. —  4°(p-  406-408)  Canticou spirituel  hac  instructionou profitai!  evitdisqui 
an  béni  da  vont  d'ar  barados,  composet  gant  an  Tat  Julian  Maner.  Quemper. 
Jan  Perier  vers  1686.  50  (p.  408-414)  Un  formulaire  de  prône  en  breton  de 
Vannes  conservé  dans  un  manuscrit  de  1693  qui  appartient  au  chapitre  de 
Vannes.  C'est  le  texte  suivi  le  plus  ancien  en  dialecte  de  Vannes.  M.  Loth 
le  donne  en  entier. 

Pour  le  xvnic  siècle,  la  langue  étant  à  peu  près  dans  le  même  état  qu'au- 
jourd'hui, M.  Loth  se  bornera  à  un  petit   nombre  d'extraits.  Voici  les  ou 


Chronique.  41$ 

vrages  appartenant  à  cette  époque  que  la  troisième  livraison  des  Annales  de 
Bretagne  nous  fait  connaître  :  i°  (p.  4.14-420)  Cantiqueu  spirituel  ar  deverieu 
ar  christen  eu  quenver  an  autrou  Doué,  en  quenver  e  hunon,  bac  en  quenver  e 
nessan,  composet  dre  Per  Barisy,  person  à  Pares  Inguiniel,  escopti  aGuenet, 
MDCCX.  C'est  un  manuscrit  appartenant  à  la  bibliothèque  de  Quimper.  — 
20  (p.  421-427)  Pedennou  bac  Instructionou  christen  evit  serviebout  da  Heuryou 
Breymec  e  favêr  ar  £\>/>/  composet  gant  M.  Ch.  ar  B.  Belec  eus  a  escopti 
Léon  17 12.  G.  D. 

II. 

La  première  livraison  du  dictionnaire  gallois  du  Rev.  Silvan  Evans  a  paru 
l'année  dernière.  Elle  contenait  la  lettre  A.  La  seconde  livraison,  contenant 
la  lettre  B  et  atteignant  la  page  608  du  tome  I,  vient  d'être  publiée. 

III. 

M.  Ascoli  vient  de  mettre  au  jour  la  quatrième  livraison  de  son  excel- 
lente édition  du  manuscrit  irlandais  de  la  bibliothèque  Ambrosienne.  A 
cette  livraison  sont  annexées  les  trois  premières  feuilles  de  son  dictionnaire 
du  vieil  irlandais  dédié  à  M.  Whitley  Stokes  et  destiné  à  rendre  de  grands 
services  aux  celtistes.  Nous  en  espérons  le  prochain  achèvement. 

En  même  temps,  M.  Ascoli  a  fait  paraître  un  recueil  de  corrections  aux 
trois  premières  livraisons  du  ms.  irlandais  de  l'Ambrosienne.  Ce  recueil, 
inséré  dans  les  Mémoires  de  l'Institut  Lombard,  classe  des  sciences  morales 
et  historiques,  t.  XVII,  p.  11 3-128.  a  été  tiré  à  part. 

IV. 

Dans  le  n*  il  de  YArcbaeological  Review,  p.  150-155,  M.  Kuno  Meyer 
continue  la  traduction  de  la  «  Demande  en  mariage  d'Emer  »  Tocbmarc 
Emere  qu'il  avait  commencée  dans  le  numéro  précédent. 

V. 

Dans  le  même  numéro  de  YArchaeological  Review,  p.  147-149,  M.  Donald 
Masson  a  publié  les  premiers  quatrains  d'un  cantique  irlandais  sur  le  juge- 
ment dernier  imprimé  à  Dublin  en  1 5 7 1 .  Ce  document  a  été  découvert  par 
Henry  Bradshaw,  le  regretté  bibliothécaire  de  Cambridge,  dans  les  papiers 
de  l'archevêque  Parker  à  la  bibliothèque  du  Corpus  Christi  Collège  de 
Cambridge.  L'exemplaire  de  l'archevêque  Parker  est  probablement  le  seul 
qui  existe  aujourd'hui.  L'imprimeur,  Seon  Uiser,  comme  on  écrivait  en 
irlandais,  c'est-à-dire  John  Ussher,  des  presses  duquel  il  est  sorti,  fit  pa- 
raître la  même  année  le  catéchisme  irlandais  de  John  O'Kearnagh,  qui  est 
considéré  comme  le  premier  livre  imprimé  en  Irlande1.  L'édition  de 
M.  Donald  Masson  est  accompagnée  d'un  essai  de  traduction  anglaise. 


1.   Gilbert,  History  of  Dublin,  t.  I,  p.  385.  Cf.  Richard  Robert  Madden, 
Tbe  history  of  Irish  periodical  Literature,  t.  I,  p.   105-108. 

Revue  Celtique,  IX  27 


414  Chronique. 

M.  Standish  O'Grady,  un  des  hommes  qui,  aujourd'hui,  savent  le  mieux 
l'irlandais,  a  critiqué  dans  VAcademy  du  12  mai  dernier  la  traduction  de 
M.  Donald  Masson  et  en  a  proposé  une  autre  qui  a  d'abord  le  mérite  d'être 
claire,  qui  ensuite  est  beaucoup  plus  conforme  au  sens  du  texte  irlandais. 
Voici  quelques  exemples  :  commençons  par  le  premier  distique  du  troi- 
sième quatrain  : 

An  cheandsachd  chaitheas  rinde 
is  grian  angar  dhilinde 

«  La  mansuétude  qu'il  exerce  envers  nous 
est  [comme  le]  soleil  prés  du  déluge  ». 

M.  Donald  Masson  a  traduit  le  second  vers  par  :  «  a  sun  (?)  is  of  long 
indignation  »,  «  est  un  soleil  (?)  de  longue  indignation  ».  Il  a  pris  l'irlan- 
dais angar  «  près  de  »  (O'Reilly:  angar,  near,  hard  bye)  pour  le  gaé- 
lique d'Ecosse  angar,  qui  est  emprunté  à  l'anglais,  qui  n'est  autre  chose  que 
l'anglais  anger,  colère  (Dictionnaire  gaélique  de  l'Highland  Society,  t.  I, 
p.  55),  il  a  confondu  dilinde  ou  dilinda,  génitif  du  moderne  dilion  «  dé- 
luge »  (autrefois  dili,  gén.  dilenri)  avec  les  adverbes  dilin  (O'Reilly),  gu  dile 
(Highland  Society)  «  toujours  ».  Des  quatre  mots  dont  se  compose  le  se- 
cond vers  du  distique,  il  n'en  a  compris  que  deux:  is  «  est  »,  grian  «  so- 
leil »,  et  pour  le  second  sa  traduction  lui  a  paru  douteuse,  il  l'a  fait  suivre' 
d'un  point  d'interrogation.  La  faute  en  est  au  gaélique  d'Ecosse  angar 
(colère),  mot  qui  n'est  point  irlandais. 

Un  autre  mot  avec  lequel  M.  Donald  Masson  a  joué  de  malheur  est 
adhaint  (quatrain  5)  aussi  écrit  adbuint  (quatrain  14).  M.  St.  O'Grady  y  a 
reconnu  avec  raison  un  substantif  dérivé  du  verbe  adahainm  j'allume»  dont 
O'Reilly  note  l'infinitif  adanad  et  le  participe  passé  adanta.  Ce  verbe,  comme 
l'a  fait  observer  M.  Whitley  Stokes,  est  un  dérivé  d'adann  «  torche  »,  mot 
expliqué  dans  le  Glossaire  de  Cormac.  M.  Donald  Masson  a  dans  un  endroit 
confondu  adhaint  avec  le  gaélique  d'Ecosse  statuin  «  loi  »  ;  dans  un  autre 
avec  je  ne  sais  quel  temps  du  verbe dûnaim  «  j'enferme,  je  mets  en  sûreté  ». 
Voici  le  premier  passage,  quatrain  5  : 

Fogus  d'à  fherg  ah- adhaint, 
dhuinn  ni  cuirthe  a  gcunntabhairt  : 
La  na  togharma  dho  theachd, 
a-chomarrdha  ata  ag  toigheachd. 

Littéralement  :  «  Près  de  sa  colère  son  feu.  —  A  nous  n'était  pas  mis 
«  leur  doute  :  —  jour  de  l'appel  venir,  —  son  signe  est  arrivant  »  ;  c'est-à- 
dire:  «  Sa  colère  est  près  de  s'allumer.  —  Nous  ne  pouvons  douter  de  deux 
«  choses  :  —  le  jour  de  l'appel  approche,  —  le  signe  précurseur  arrive  ». 
M.  Donald  Masson  a  traduit:  «  Près  de  sa  colère  est  sa  loi,  ce  qui  ne  nous 
«  était  pas  assigné  n'a  pas  été  envoyé  »,  etc.  Le  reste  de  sa  traduction  de 
ce  passage  est  bon. 


Chronique.  415 

Passons  au  quatrain  14: 

Gach  anam  —  is  he  a-bhunadh  — 

tiocfais  —  trathd  ha  nothugadh  (correction  de  M.  St.  O'Grady 
La  an  tobhaigh  —  ar-ceand  a  chuirp  — ;  [pour  motugad) 
gearr  o  n-fholaidh  a  hadhuint. 

Littéralement  :  «  chaque  Ame  (c'est  sa  nature  originelle)  —  viendra  (mo- 
«  ment  de  sa  notation)  :  —  jour  de  l'exaction,  devant  son  corps  ;  —  court  de 
«  la  substance  son  feu  »  ;  c'est-à-dire  «  chaque  âme  (ainsi  le  veut  sa  na- 
«  ture)  —  viendra  (il  est  temps  d'en  prendre  note)  —  au  jour  du  jugement 
«  se  réunir  à  son  corps.  —  Peu  après  la  matière  prendra  feu  ».  M.  Donald 
Masson  a  entendu  à  peu  près  le  premier  distique,  mais  suivant  lui  le  second 
veut  dire  :  «  Le  jour  où  mis  en  liberté  sera  aussi  le  corps  près  du  vide 
«•  qui  est  fermé  ».  Ce  n'est  pas  seulement  un  contre-sens,  c'est  un  non- 
sens. 

Ce  cantique  est  en  général  difficile  à  comprendre,  cependant  il  y  a  des 
passages  qui  semblent  ne  l'être  guère.  Voici  le  dernier  quatrain  : 

Suidhfidh  a-neullaibh  nimhe 

os  ciond  na  n-ord  n-ainglidhe  : 
Gairm  shluaghaidh  ar  chach  cuire, 

fàth  uamhain  a  iondhsuighe. 

Littéralement  :  «  Il  sera  assis  dans  les  nuages  du  ciel  —  au-dessus  des 
«  ordres  angéliques  ;  —  cri  de  convocation  guerrière  pour  chaque  troupe, 
«  —  cause  de  terreur  sa  visite  ». 

M.  Donald  Masson  a  traduit  suidhfidh  «  il  sera  assis  »  par  he  shall  ride 
«  il  dirigera  »,  et  os  ciond  na  n-ord  n-ainglidhe  «  sur  les  ordres  angé- 
liques »,  par  above  the  order  oj  angcls  «  au-dessus  de  l'ordre  des  anges  », 
ne  s'apercevant  pas  que  ord  est  au  pluriel.  L'auteur  du  cantique  irlandais 
admettait  la  doctrine  du  pape  saint  Grégoire  le  Grand  :  Koveni  vero  angelo- 
runi  ordincs  dixinius,  etc.  (Homélie  54  sur  les  évangiles,  Migne,  Patrologia 
laiina,  t.  76,  col.  1249  D.) 

M.  St.  O'Grady  a  eu  raison  de  protester  contre  les  erreurs  de  traduction 
commises  par  M.  Donald  Masson. 


VI. 

Le  23  février  dernier  est  mort  à  Pontypridd,  dans  le  comté  de  Clamorgan, 
M.  Evan  Davies,  ou,  comme  il  se  faisait  appeler,  Mvfyr  Morganwg.  Il  avait 
acquis  une  célébrité  bizarre  en  prétendant  rétablir  la  religion  druidique  et 
en  s'en  faisant  grand-prêtre.  Il  avait  trouvé  un  certain  nombre  de  disciples 
qui  se  réunissaient  à  des  dates  déterminées  à  Pontypridd  pour  célébrer  le 
culte  druidique  dont  il  croyait  avoir  retrouvé  les  rites  mystérieux. 


4i  6  Chronique. 


VII. 

Depuis  1882,  les  savants  continuateurs  des  Bollandistes  font  paraître,  à 
côté  des  Acta  sanctorum,  une  publication  d'un  format  plus  modeste  et  qui 
est  appelé  à  rendre  de  grands  services  aux  érudits.  Ce  sont  les  Analecta  Bol- 
landiana,  recueil  de  documents  hagiographiques  réunis  sans  ordre  de  ma- 
tières, au  fur  et  à  mesure  des  découvertes  et  des  travaux  qui  se  produisent. 
C'est  dans  ce  recueil  qu'ont  été  imprimés  les  documents  sur  saint  Patrice, 
extraits  du  Livre  d'Armagh  par  le  P.  Edmund  Hogan.  S.  J.  (t.  I,  p.  531— 
585,  t.  II,  p.  35-68,  p.  213-238).  Nous  avons  eu  plusieurs  fois  l'occasion 
de  citer  le  travail  du  P.  Hogan  qui  a  été  fort  utile  en  donnant  pour  la  pre- 
mière fois  des  bases  certaines  à  la  critique  hagiographique  en  ce  qui  con- 
cerne l'origine  de  la  légende  de  saint  Patrice. 

Les  Analecta  Bollandiana  contiennent  aussi  un  certain  nombre  de  textes 
relatifs  à  la  Bretagne  française.  Nous  ne  parlerons  pas  de  la  Vie  de  saint 
Paul  de  Léon  publiée  par  Dom  Plaine  (t.  I.  p.  208-238,  c\.  t.  IL  p.  191- 
194)  et  dont  une  meilleure  édition  a  été  donnée  par  M.  Cuissard  dans  la 
Revue  Celtique  (t.  V,  p.  417-438).  Mais  nous  citerons  les  Vies  de  saint 
Brieuc  (t.  II,  p.  101-190),  de  saint  Meven  (t.  III.  p.  141-1 56),  de  saint  Ju- 
dicael  (extrait),  t.  III,  p.  157-158,  de  saint  Melorus  ou  Melorius  (t.  V, 
p.  165-176),  de  saint  Samson  (t.  VI,  p.  77-150)  publiés  par  Dom  Plaine. 

Dans  chaque  volume  des  Analecta  Bollandiana,  à  partir  du  tome  II,  on 
trouve  comme  appendice,  avec  une  pagination  séparée,  le  catalogue  des 
manuscrits  hagiographiques  de  la  Bibliothèque  royale  de  Bruxelles.  Ce  ca- 
talogue forme  déjà  un  premier  volume  de  614  pages,  et  le  commencement 
d'un  second  volume  qui  en  atteint  288.  On  y  a  décrit  les  manuscrits  d'après 
lesquels  a  été  établi  le  texte  d'une  grande  partie  des  vies  de  saints  publiées 
dans  les  Acta  sanctorum.  Des  tables  alphabétiques  donnent  le  moyen  de  s'y 
reconnaître.  Nous  signalerons  dans  le  tome  VI  des  Analecta,  seconde  partie, 
c'est-à-dire  tome  II  du  Catalogus  codicum  bagiographicorum  Bibliothecae  regiae 
Bruxellensis,  p.  126,  127,  la  notice  consacrée  au  manuscrit  coté  7672-7074. 
C'est  le  fameux  codex  Sahnanticensis  qui  contient  un  recueil  de  vies  de  saints 
irlandais  (voir  plus  haut,  p.  290-291). 

VIII. 

M.  J.-B.  Phillimore  vient  de  donner  dans  le  tome  IX,  première  partie, 
du  Cymmrodor,  une  édition  des  Annales  Cambriae  et  des  Généalogies  gal- 
loises contenues  dans  le  manuscrit  Harléien  3859.  Il  reproduit  ce  manuscrit 
lettre  pour  lettre,  ligne  pour  ligne,  en  respectant  les  abréviations.  Le  ma- 
nuscrit Harléien  38.59  est  celui  qui  a  servi  de  base  à  l'édition  de  Pétrie, 
Monumenta  historica  britannica,  18 18,  in-folio,  p.  830-840,  ci.  préface, 
p.  92,  et  à  celle  du  Rev.  John  Williams  Ab  Ithel  dans  la  collection  in-8  du 
Maître  des  rôles,  1860. 


Chronique.  4 1 7 


IX. 

M.  Salomon  Reinach,  le  savant  et  zélé  conservateur  adjoint  du  musée  de 
Saint-Germain,  m'a  signalé  dans  Y  American  Journal  of  Archaeology,  vol.  III, 
juillet-décembre  1887,  nos  3  and  4,  p.  261-298,  un  article  de  M.  Augustus  C. 
Merian  sur  des  stèles  sépulcrales  peintes  trouvées  en  Egypte,  à  Alexandrie. 
Ces  stèles  sont  au  nombre  de  six.  Elles  proviennent  toutes  du  même  cime- 
tière. Elles  appartiennent  à  M.  E.-E.  Farman,  ancien  consul  des  Etats-Unis 
d'Amérique,  en  Egypte,  qui  les  a  exposées  quelque  temps  au  musée  mé- 
tropolitain de  New-York.  Trois  d'entre  elles  proviennent  des  tombes  de 
Galates,  peut-être,  croit-on,  de  soldats  au  service  des  Ptolémées  (?).  Une 
des  inscriptions  se  lit  complètement  :  Bl'to;  Àoitoiex  0  Y<ùÂnt\c,.  Les  deux 
autres  sont  en  partie  effacées,  on  lit  sur  l'une  : 

....  'Ia;'otop'>; 

....  FaXxTT]; 
sur  l'autre  : 

....  Xat7]  ; 

D'autres  stèles  de  la  même  provenance  sont  arrivées  au  musée  du  Louvre. 
Sur  une  d'elles  on  lit  àeuiq;  «Xto;.  Sur  une  autre  Xeto'tcio;  yaXarr];;  ces 
lectures  sont  de  M.  Héron  de  Villefosse. 

Enfin  quelques  épaves  de  même  origine  ont  été  acquises  par  le  musée  de 
Saint-Germain.  Suivant  M.  Reinach,  elles  pourraient  bien  ne  pas  remonter 
au  delà  du  premier  siècle  avant  notre  ère.  M.  Héron  de  Villefosse  penche  à 
croire  que  l'ensemble  de  la  trouvaille  est  postérieure  à  cette  date. 

Les  stèles  acquises  par  le  musée  de  Saint-Germain  sont  au  nombre  de 
quatre.  Deux  portent  des  inscriptions.  Sur  l'une  M.  de  Villefosse  a  lu  : 


f&tXoj   . 

avo yaXaTOu 

sur  l'autre  : 


uvr,    ....  ojvo: 


i'aXatTr,  ; 


X. 

Le  tome  XII  du  Corpus  inscriptionum  latinarum,  dont  l'impression  est  de- 
puis si  longtemps  commencée,  est  enfin  arrivé  à  Paris.  Il  contient  quatre 
provinces  :  les  Alpes  Maritimae,  les  Alpes  Cottiae,  les  Alpes  Graine  et  Poeni- 
nae  et  la  Gallia  Narbonensis.  Quand  verrons-nous  enfin  paraître  la  Lyon- 
naise, l'Aquitaine  et  la  Belgique? 

Ce  volume,  qui  est  dû  àM.  Hirschfeld,  ne  renferme  pas  beaucoup  d'ins- 
criptions inédites.  Il  y  en  a  cependant  quelques-unes.  On  peut  citer  un 
exemple  nouveau  du   nom  divin  Belenus,  n'  5693,  12.   C'est  une  décou- 

Revue  Celtioue,  IX.  27. 


41 8  Chronique. 

verte  de  M.  Allmer,  elle  a  été  faite  à  Nimes.  La  dédicace  au  même  dieu 
découverte  a  Narbonne  par  M.  Lebègue  (R.  C,  t.  VIII,  p.  392)  porte  le 
n°  5958.  Ce  sont  les  seules  inscriptions  de  la  Gaule  où  soit  mentionné 
le  dieu  Bélénus. 

XI. 

M.  Longnon  vient  de  publier  à  la  librairie  Hachette  la  seconde  livraison 
de  son  Atlas  historique  de  la  France.  Elle  concerne  la  Gaule  au  ixe  et  au 
xe  siècle.  La  première  livraison  qui  traitait  de  la  géographie  de  la  Gaule 
depuis  et  y  compris  l'époque  de  César  jusques  et  y  compris  l'époque  de 
Charlemagne,  avait  paru  en  1884.  La  première  livraison  est  par  conséquent 
celle  qui  concerne  le  plus  directement  les  études  celtiques.  Mais  on  se 
tromperait  grandement  si  l'on  croyait  que  la  seconde  livraison  est  sans  in- 
térêt pour  elles.  Elle  comprend  en  effet  une  étude  sur  les  pagi  de  la  Gaule, 
dont  un  certain  nombre  portent  des  noms  celtiques  et  peuvent  remonter  à 
l'époque  celtique.  Parmi  les  noms  de  lieux,  un  grand  nombre  d'origine  cel- 
tique apparaissent  pour  la  première  fois  dans  les  documents  carlovingiens, 
et  par  conséquent  sont  mentionnés  dans -la  seconde  livraison,  tandis  qu'il 
n'en  est  pas  question  dans  la  première.  Dans  la  seconde  livraison,  les  noms 
composés  dont  le  second  terme  est  dunum  sont  au  nombre  de  trente-six, 
ceux  dont  le  second  terme  est  dura,  durum  sont  au  nombre  de  dix,  ceux 
dont  le  second  terme  est  magus  ou  ses  équivalents,  dont  -mutn  est  le  plus 
fréquent,  sont  au  nombre  de  trente-quatre.  Nous  croyons  avoir  reconnu 
sept  exemples  des  équivalents  du  terme  -briga,  comme  bria,  bra,  brum: 
Nous  avons  compté  618  exemples  de  noms  en  -'niais,  67  de  noms  en 
-acus,  40  de  noms  de  lieu  identiques  à  des  gentilices,  20  de  noms  de  lieu 
identiques  à  des  cognomina. 

Cette  publication  est  de  tout  point  digne  du  savant  auteur.  Nous  n'avons 
guère  à  lui  adresser  qu'une  critique.  C'est  d'avoir  quelquefois  donné  à  des 
noms  de  lieux  bretons  une  forme  qui  n'est  pas  antérieure  au  xnc  siècle. 

XII. 

Dans  la  livraison  de  mai  du  Céltic  Maga-iue,  M.  Alex.  Macbain  a  com- 
mencé, p.  319-326,  la  traduction  d'une  rédaction  du  Tain  bô  Ciialnge  re- 
cueillie dans  les  Highlands  par  M.  Carmichael  ;  et  un  auteur  anonyme  a 
donné  (p.  327-333)  une  étude  sur  les  mots  celtiques  empruntés  par  l'anglais. 

XIII. 

La  représentation  de  mvstère  breton  annoncée  à  Morlaix  pour  le  mois 
d'avril  dernier  a  effectivement  eu  lieu  les  14  et  13  de  ce  mois.  La  pièce 
représentée  a  été  sainte  Tryphine,  publiée  avec  une  traduction  française  en 
1863  par  M.  Luzel  et  par  l'abbé  Henry,  un  volume  in-12  de  433  pages. 
M.  Luzel  avait  composé  pour  la  circonstance  un  prologue  en  vers  bretons 
qui  a  paru  accompagné  d'une  traduction  française  à  Morlaix  chez  lîaslé  et 
qui  forme  une  brochure  de  treize  pages.  On  y  retrouve  l'élégance  du  poète 


Chronique.  419 

breton  que  les  années  ont  blanchi  et  dont  elles  ont  fait,  hélas  !  un  érudit  et 
un  archiviste,  Le  Monde  illustré  du  24  avril  dernier  a  donné  un  compte 
rendu  de  cette  représentation  avec  plusieurs  gravures,  où  l'on  voit  le  por- 
trait des  acteurs  revêtus  de  leurs  costumes  et  leur  jeu  dans  quelques  scènes. 

XIV. 

Notre  collaborateur,  M.  Nettlau,  a  publié  dans  le  tome  IX  des  Cym'mro- 
dorion  (p.  56-119)  un  recueil  de  savantes  observations  sur  le  verbe  gallois. 

XV. 

M.  L.  Delisle,  le  savant  administrateur  de  la  Bibliothèque  Nationale,  nous 
a  signalé  quelques  gloses  bretonnes  dans  le  manuscrit  45  du  fonds  Ashburn- 
ham  nouvellement  acquis,  ix°  siècle.  La  principale  est  au  f°  7  r°  sur  les 
mots  numéros  notis  singulis  ;  elle  est  ainsi  conçue  :  not  do  pop  un  trimer,  lit- 
téralement :  »  note  à  chacun  nombre  ».  Nous  citerons  ensuite,  f°  6  r°  :  ait 
sur  palme  artum,  blein  sur  summitatem. 

XVI. 

M.  Luzel  a  publié  dans  le  Bulletin  de  la  Société  archéologique,  n"  de 
mars  1848,  un  fort  joli  conte  breton:  Marie,  Yvon  et  la  Sirène,  avec  des 
notes  de  M.  Reinhold  Koehler  et  de  M.  le  vicomte  de  la  Villemarqué. 

XVII. 

Le  numéro  de  janvier-avril  du  Journal  of  ihe  Roval  historical  and  arcbaeo- 
logical  Association  of  Ireland  contient  (p.  238-240)  un  très  intéressant  ar- 
ticle du  Rev.  Charles  Scott  sur  le  droit  de  préséance  autrefois  reconnu  aux 
évèques  de  Meath,  c'est-à-dire  d'un  canton  primitivement  assigné  au  roi 
suprême  d'Irlande.  Si  l'église  d'Irlande  se  fût  conformée  à  la  pratique  suivie 
dans  l'empire  romain,  l'évêque  de  Meath  aurait  été  primat  d'Irlande.  La 
primauté  fut  donnée  à  l'archevêque  d'Armagh.  Le  siège  de  Meath  ne  de- 
vint pas  même  archiépiscopal,  mais  l'évêque  de  Meath  eut  le  pas  sur  les 
autres  évêques. 

Le  principal  article  du  numéro  est  la  suite  d'un  travail  de  M.  V.-G.  Wood 
Martin  sur  les  monuments  de  pierre  non  polie  d'Irlande,  p.  254-299. 
Nous  regrettons  de  ne  pas  connaître  le  commencement  de  ce  savant  mé- 
moire qui  est  l'œuvre  d'un  archéologue  de  grand  talent.  L'auteur  y  cons- 
tate notamment  que  la  population  à  laquelle  on  doit  les  chambres  funé- 
raires construites  dans  les  tombelles  irlandaises  avait  l'habitude  de  brûler 
ses  morts.  C'est  la  coutume  qui  a  précédé  sur  le  continent  l'usage  gaulois 
de  l'incinération.  Nous  continuons  à  regretter  que  M.  Wood  Martin,  si 
compétent  quand  il  s'agit  d'archéologie,  continue  à  négliger  le  côté  linguis- 
tique de  ses  études.  Leabaigh,  p.  259,  note  1,  est  une  mauvaise  leçon  pour 


420  Chronique. 

leabaid,  plus  anciennement  lepad,  avec  un  db  au  lieu  d'un  gh  final;  mais 
c'est  une  vétille.  Nous  ne  comprenons  pas  que  l'association  archéologique 
d'Irlande  soit  sans  relations  avec  les  sociétés  françaises  analogues.  Les  Français 
y  gagneraient  certainement  beaucoup.  Les  Irlandais  pensent-ils  qu'ils  n'y 
apprendraient  rien  ? 

XVIII. 

M.  Zimrner  vient  de  publier  deux  articles  intéressants  quoique  peut-être 
un  peu  longs:  l'un  dans  la  Zeitschrift  fur  deutsches  Alterthumund  Litteraiur, 
t.  XXXII,  p.  196-334;  l'autre  dans  la  Zeitschrift  fur  vergleichende  Sprach- 
for&hung,  t.  XXX,  p.  1-292.  Cela  forme  un  total  de  quatre  cent  trente  et 
une  pages,  un  joli  petit  volume  in-8. 

Le  premier  article  a  pour  objet  une  étude  sur  les  éléments  germaniques 
dans  la  tradition  épique  irlandaise.  Le  second  est  un  recueil  de  trois  mé- 
moires :  i"  contributions  à  l'étude  du  vocabulaire  moyen  irlandais  (p.  1); 
2°  l'aoriste  sigmatique  indo-européen  en  celtique  et  le  prétérit  celtique  en  s 
(p.  112);  à  ce  mémoire  se  rattachent  trois  appendices  :  sur  le  prétérit  en  / 
(p.  198);  sur  dorât  «  il  donna  »  (p.  217  ;  sur  rofetar  «  je  sais  »  (p.  221); 
3°  le  passif  et  le  déponent  italo-celtique  (p.  224).  On  aurait  tort  d'oublier 
un  postscriptum  où  la  première  question  traitée  par  M.  Zimmer  est  la  ques- 
tion la  plus  importante  à  ses  yeux  et  par  conséquent  aux  yeux  de  ses  bons 
amis  comme  nous,  c'est  de  savoir  si  pour  l'étude  du  passil  et  du  déponent 
celtique  la  priorité  appartient  à  M.  Windisch  ou  à  lui.  Le  mémoire  de 
M.  Windisch  a  paru  environ  six  mois  avant  celui  de  M.  Zimmer;  c'est  une 
injustice  du  sort.  M.  Zimmer  croit  que  son  mémoire  était  achevé  deux  mois 
avant  celui  de  M.  Windisch  et  que  par  conséquent  sur  ce  point,  comme  sur 
tant  d'autres,  c'est  lui,  Zimmer,  qui  l'emporte  sur  le  professeur  de  Leipzig. 
Cette  conviction  chronologique  et  personnelle  fait  le  bonheur  de  M.  Zimmer 
et,  certainement,  elle  ne  causera  au  public  aucun  chagrin. 

Les  amis  de  M.  Zimmer,  parmi  lesquels  nous  serions  heureux  qu'il  voulût 
bien  nous  compter,  regretteront  peut-être  que  ce  grammairien  érudit,  si  lé- 
gitimement attentif  quand  il  s'agit  de  défendre  ses  prétentions  à  la  priorité, 
laisse  à  ses  critiques  le  soin  de  remplir  pour  lui  ce  devoir  de  tout  homme 
courtois  qui  consiste  à  signaler,  le  cas  échéant,  la  priorité  des  autres.  Pre- 
nons comme  exemple  son  travail  sur  les  noms  communs  d'origine  germa- 
nique dans  les  monuments  épiques  les  plus  anciens  de  l'Irlande.  M.  Zimmer 
a  relevé  vingt-quatre  de  ces  noms,  p.  267-28S  du  tome  XXXII  de  la  Zeit- 
schrift fur  deutsches  Alterthum.  Or  il  y  en  a  quatorze  qui  figurent  dans  le 
glossaire  placé  par  M.  Windisch  à  la  suite  des  Irische  Texte,  et  M.  Zimmer, 
ce  farouche  défenseur  du  droit  de  priorité,  ne  renvoie  qu'une  fois  à  ce 
glossaire.  C'est  à  la  page  273,  au  mot  ammor,  amor,  au  sujet  duquel  il  a 
une  critique  à  adresser  à  M.  Windisch.  Les  lecteurs  de  M.  Zimmer  qui 
croiraient  que  l'article  ammor  du  vocabulaire  de  M.  Windisch  ait  été  le  seul 
articlede  ce  vocabulaire  consulté  par  M.  Zimmer,  se  tromperaient  malheureu- 
sement beaucoup.  Ainsi  de  M.  Zimmer,  p.  270,  commence  son  article  r  7 
en  disant  que  ce  mot  est  masculin.  Or  il  l'a  appris  par  un  passage  du  Felirt 


Chronique.  42 1 

Oenguso  où  l'on  rencontre  l'accusatif  pluriel  rôtu,  et  ce  passage  est  cité  par 
M.  Windisch.  M.  Zimmer  doit  donc  à  M.  Windisch  la  connaissance  du  genre 
de  rôt,  à  moins  qu'il  ne  Fait  acquise  dans  l'index  du  Felirc  par  M.  Whitley 
Stokes  qu'il  ne  cite  pas  davantage.  Quant  aux  exemples  du  mot  rôt  aux- 
quels renvoie  M.  Zimmer,  ils  sont  au  nombre  de  sept,  deux  de  plus  que 
dans  le  glossaire  de  M.  Windisch.  Mais  sur  les  sept,  trois  se  trouvaient  déjà 
chez  M.  Windisch:  Cormac;  L.  U.  104''  8,  106a  3  (deux  passages  du  Fled 
Bricrend,  chez  Windisch.  F.  B.  34,  47);  deux  sont  étrangers  à  la  littérature 
épique,  ce  sont  L.  L.  jo8a  43,  3081,  37.  Ainsi  le  contingent  de  M.  Zimmer 
se  réduit  à  deux  articles,  l'un  emprunté  au  Tochmarc  Emere,  L.  U.  I22b  7, 
où  se  trouve  l'expression  riad  root  mentionnée  par  M.  Windisch  d'après  L.' 
U.  106"  3  ;  l'autre  au  Cath  Ruis  na  Rig,  L.  L.  1 7 5b  u.  où  on  lit  cend  rôit, 
c'est-à-dire  rôit  au  génitif  singulier.  C'est  même  là  la  seule  addition  sé- 
rieuse de  M.  Zimmer  à  l'article  de  M.  Windisch.  L'article  de  M.  Zimmer 
pourrait  être  conçu  ainsi  :  «  Sur  le  mot  rôt,  voyez  Windisch,  Irische  Texte, 
«  t.  I,  p.  748,  col.  1.  Aux  exemples  de  cas  cités  par  le  savant  auteur, 
«  ajoutez  le  génitif  singulier  rôit,  L.  L.  1 7 5 b  1 1  ».  Rédigé  de  cette  manière, 
il  serait  moins  long,  moins  prétentieux  et  plus  équitable  envers  un  prédé- 
cesseur de  l'auteur. 

Mais,  dira-t-on,  M.  Zimmer  a  eu  le  premier  le  mérite  de  reconnaître  que 
les  vingt-quatre  mots  qu'il  a  étudiés  étaient  d'origine  germanique.  Il  est  re- 
grettable que  cela  ne  soit  pas  certain  pour  la  totalité  de  ces  vingt-quatre 
mots.  Ainsi  les  savants  qui  ont  traduit  jusqu'ici  penning  par  penny,  comme 
O'Donovan  et  M.  Windisch,  ont  entendu  que  penning  était  d'origine  ger- 
manique, et  cette  doctrine  était  déjà  énoncée  en  1881  dans  une  brochure 
publiée  à  Paris  sous  le  titre  d'Etudes  sur  le  droit  celtique,  p.  33.  34.  On  y 
voit  que  la  monnaie  dont  il  s'agit  est  mentionnée  dons  la  glose  du  Senchus 
mer  et  que  son  nom  «  est  d'importation  germanique  ». 

Le  mot  rossai  «  morse  »,  en  allemand  «  Wallross  »,  donne  lieu  à  la 
même  observation.  C'est  M.  Windisch  qui  a  proposé  l'identification  avec  le 
mot  allemand  en  donnant  d'après  Y  Attira  Choluimbchiïle,  §  60,  publié  par 
M.  Whitley  Stokes,  Goidelica2,  p.  164,  l'orthographe  ros-ualt  qui  se  rap- 
proche beaucoup  plus  de  la  source  germanique  que  l'orthographe  rossâl  du 
Cath  Ruis  na  Rig,  L.  L.  17211,  auquel  renvoie  M.  Ziminer.  M.  Zimmer  fait 
le  rapprochement  des  deux  formes,  mais  c'est  à  M.  Windisch  qu'il  doit  la 
connaissance  de  ros-ualt  comme  la  traduction  et  l'étymologie  Wallross. 
C'est  en  vain  que  pour  donner  le  change  aux  ignorants,  au  lieu  de  ren- 
voyer comme  M.  Windisch  à  l'édition  de  YAmra  donnée  par  M.  Whitley 
Stokes,  M.  Zimmer  cite  le  facsimilé  du  Lébor  na  h-Uidre  qui  contient  le 
même  texte.  La  leçon  du  Lébor  na  h-Uidre  est  connue  depuis  longtemps, 
même  de  ceux  qui  n'ont  pas  entre  les  mains  le  facsimilé  publié  par  l'Aca- 
démie d'Irlande  et  qui  apprécient  l'avantage  de  trouver  une  traduction  en 
regard  d'un  texte  irlandais,  puisqu'en  1871  O'Beirne  Crowe  a  publié  une 
édition  de  ce  texte  avec  traduction  anglaise.  Cela  n'a  pas  empêché  M.  Zim- 
mer de  consacrer  quinze  lignes  à  la  reproduction  du  texte  irlandais  et  à  sa 
traduction  imitée  de  celle  d'O'Beirne  Crowe,    qu'il  dédaigne  trop  pour  le 


422  Chronique. 

citer.  Entre  sa  copie  et  celle  d'O'Beirne  Crowe  ou  celle  de  M.  Whitley 
Stokes,  on  ne  peut  guère  remarquer  qu'une  différence.  Elle  porte  sur  le  gé- 
nitif pluriel  du  substantif  qui  veut  dire  «  année  ».  Ce  génitif  dans  les  deux 
manuscrits  (Liber  hymnorum  du  Collège  de  la  Trinité  de  Dublin  et  Lebor  na 
b-i'idre)  est  écrit  blia  avec  un  signe  d'abréviation.  La  copie  de  M.  "Whitley 
Stokes  porte  bliadan  en  plaçant  ce  mot  dans  la  déclinaison  féminine  en  </. 
La  copie  d'O'Beirne  Crowe  donne  bliadna,  en  mettant  ce  mot  dans  la  dé- 
clinaison en  i.  Il  y  a  des  autorités  pour  chacun  des  deux  svstèmes.  M.  Zim- 
mer  ne  voulant  se  prononcer  ni  pour  l'un  ni  pour  l'autre  a  écrit  bliad,  c'est 
une  des  grandes  découvertes  qui  sont  destinées  à  illustrer  son  nom. 

11  n'est  pas  certain  que  les  étymologies  germaniques  de  M.  Zimmer 
soient  admises  toutes  sans  exception.  Mais  nous  en  avons  assez  dit  sur  cet 
article  pour  craindre  de  fatiguer  le  lecteur  et  nous  passons  aux  savantes 
études  sur  le  vocabulaire  irlandais  qui  occupent  les  cent  dauze  premières 
pages  du  tome  XXX  de  la  Zeitschrift  de  Kuhn. 

M.  Zimmer  commence  par  l'expression  dia  bliadna  «  dans  un  an  à  pareil 
jour  ».  Il  revient  par  conséquent  sur  une  question  qui  a  déjà  été  traitée 
dans  la  Revue  Celtique,  t.  VII,  p.  282,  à  propos  d'une  note  publiée  par 
M.  Standish  O'Gradv  dans  YAcademy  du  14  novembre  1 S85 ,  p.  324-325. 
La  question  était  de  savoir  comment  il  fallait  lire  et  traduire  la  formule  dia 
/'/avec  un  signe  abréviatif  dans  le  Livre  de  Leinster,  p.  114,  col.  1,  1.  25. 
M.  "Windisch  a  lu  dia  bîiadain.  La  faute  était  peu  grave  :  il  fallait  dia  bliadna 
«  dans  un  an  à  pareil  jour  ».  M.  Zimmer,  Keltische  Studien,  I,  p.  35,  1881, 
proposa  de  lire  di  Ailill,  c'est-à-dire:  «  à  Ailill,  roi  de  Connaught  »  en  se 
moquant  agréablement  du  savant  professeur  de  Leipzig  qui  n'avait  pas  su 
faire  cette  belle  découverte. 

La  vérité  avait  été  connue  il  y  a  trente  ans  par  O'Currv  (Manners  and 
Customs,  III,  372)  et  c'est  à  M.  Standish  O'Gradv  que  revient  l'honneur 
de  l'avoir  établie  scientifiquement.  Il  s'est  appuyé  pour  cela  d'abord  sur  la 
formule  dia  mis  «  dans  un  mois  à  pareil  jour  »,  Book  of  Leinster,  p.  288, 
col.  2,  1.  33.  Cf.  Windisch,  Irische  Texte,  t.  I,  p.  477,  col.  1.  Puis  il  a 
réuni  huit  exemples  de  la  formule  dia  bliadna,  l'un  est  emprunté  au  Livre 
de  Leinster,  p.  106,  col.  1,  1.  44;  un  autre  au  Lebor  na  h-Uidre.  p.  122, 
col.  1,1.  4;  les  autres  aux  manuscrits  Egerton  92,  1782  et  Harleian  5280 
du  Musée  britannique.  M.  Zimmer  a  recueilli  sept  exemples  de  dia  bliadna: 
deux  sont  les  mêmes  que  ceux  de  M.  Standish  O'Gradv.  Il  est  très  méri- 
toire pour  M.  Zimmer  d'avouer  en  1888  l'exactitude  d'une  doctrine  traitée 
par  lui  d'absurde  en  1881.  Ce  n'est  rien  encore.  M.  Zimmer  nous  apprend 
qu'il  a  fait  cette  bonne  action  avant  de  connaître  l'article  publié  par 
M.  O'Grady  en  18S3  et  peut-être  avant  que  l'article  de  M.  O'Grady 
n'existât.  Partout,  même  quand  il  s'agit  de  réfuter  ses  propres  thèses, 
M.  Zimmer  a  la  priorité,  et.  si  les  apparences  sont  contre  lui,  c'est  la  faute 
des  imprimeurs. 

Le  second  mot  dont  parle  M.  Zimmer  dans  la  Zeitschrift  de  Kuhn,  i8S8. 
est  cennide  :  il  a  trouvé  que  ce  mot  qui  a  pour  équivalent  cathbarr  dans  certains 
mss.  veut  dire  «  couvre  chef  ».  Mais  cette  traduction  a  été  donnée  au  Col- 


Chronique.  42  3 

lège  de  France  pendant  l'année  scolaire  1885-1886  par  un  professeur  dont 
l'incapacité,  unfahigkeit,  est,  suivant  M.  Zimmer,  chose  établie.  Il  y  a  dans 
Paris  quelqu'un  qui  a  reçu  de  Leipzig,  sous  la  date  du  17  décembre  1886, 
une  lettre  où  on  lit  :  «  Au  sujet  de  cennide  vous  avez  raison  :  dans  le  ms. 
«  Rawlinson  on  lit  :  Is  and  sin  ro  l.i  Conchabar  a  chathbarr  dia  chend  ».  De 
là  vient  que  dans  la  traduction  du  Scèl  mucci  macDâthà publiée  par  M.  Duvau 
dans  la  Revue  archéologique,  numéro  de  novembre-décembre  1886,  p.  342, 
cennide  est  traduit  par  «  couronne  »  ;  il  s'agit  d'un  roi  ;  on  trouve  cathbarr 
désignant  la  coiffure  d'une  reine,  et  O'Curry  a  rendu  ce  mot  par  diadem 
(Manners  and  customs,  t.  III,  p.  394).  Ainsi  la  découverte  de  M.  Zimmer  était . 
dans  le  domaine  public  dix-huit'mois  avant  d'être  imprimée  par  lui. 

M.  Zimmer  n'a  pas  de  chance.  Il  fait  continuellement  le  premier  des 
trouvailles  qu'il  admire  ;  d'autres,  bien  inférieurs  à  ce  grand  homme,  font  ces 
découvertes  après  lui  et  les  portent  avant  lui  à  la  connaissance  du  public. 
Mais  il  a  pour  lui  sa  conscience  et  la  conviction  de  sa  supériorité  sur  ses 
concurrents  au  milieu  d'une  injustice  presque  universelle;  il  en  résulte 
qu'il  est  le  plus  content  des  hommes.  La  Revue  Celtique  est  heureuse  de  le 
constater.  On  aurait  tort  de  supposer  à  cette  revue  d'autres  sentiments  ;  ce 
ne  seraient  pas  de  petites  mésaventures  comme  celles  dont  elle  vient  de 
parler  qui  pourraient  troubler  la  majestueuse  quiétude  de  l'illustre  professeur 
de  Greifswald. 

XIX. 

Nous  avons  le  plaisir  d'annoncer  que  la  Commission  chargée  par  l'Ins- 
titut de  France  d'examiner  les  ouvrages  envoyés  au  concours  fondé  par 
Volney,  vient  de  décerner  le  prix  à  notre  collaborateur  M.  E.  Ernault,  pro- 
fesseur à  la  Faculté  des  lettres  de  Poitiers.  Les  travaux  qui  lui  ont  mérité 
cette  distinction  sont  :  1°  sa  thèse  de  doctorat  sur  le  Parfait  en  grec  et  en  latin, 
qui  a  paru  dans  la  Bibliothèque  de  l'Ecole  des  Hautes-Etudes,  chez  F. 
Vieweg  ;  2°  et  le  glossaire  moyen  breton  placé  à  la  suite  du  Mystère  de 
Sainte  Barbe,  librairie  Thorin. 

XX. 

Au  moment  de  mettre  sous  presse,  nous  recevons  de  M.  Buhot  de  Ker- 
sers,  le  savant  archéologue  de  Bourges,  une  lettre  où  il  donne  des  détails 
circonstanciés  sur  une  découverte  faite  à  Issoudun  (Indre)  en  1874,  et  si- 
gnalée pour  la  première  fois  beaucoup  plus  tard  par  cet  érudit  dans  sa  bro- 
chure intitulée  :  «  Note  sur  trois  épées  de  bronze  et  un  mors  de  bride 
«  gaulois,  trouvés  en  Berry.  »  Il  s'agit  d'une  sépulture  gauloise  contenant 
un  char  de  guerre.  On  a  trouvé  les  débris  de  chars  de  guerre  gaulois  dans 
les  départements  de  la  Marne,  l'Aisne,  la  Côte-d'Or,  en  Suisse  et  en  Alle- 
magne 1.  On  n'en  avait  pas  signalé  dans  le  centre  de  la  France. 

1.  Mazard,  Essai  sur  les  chars  gaulois  de  la  Marne,  Revue  archéologique, 
t.  XXXIII  (1877),  p.  154-172,  217-229. 


424  Chronique. 

En  1874,  on  taisait  des  fouilles  pour  construire  un  bâtiment  destiné  à  la 
malterie  de  la  brasserie  d'Issoudun  (Indre).  Ces  fouilles  mirent  à  jour: 
i°  les  deux  cercles  de  fer  qui  entouraient  les  roues  d'un  char,  20  les  boites 
de  1er  qui  servaient  au  passage  de  l'essieu,  30  des  fragments  de  mors  de 
bride  en  bronze,  enfin  quelques  autres  débris  métalliques.  Les  cercles  ont 
été  laissés  sur  place.  On  a  recueilli  les  boites  et  les  fragments  de  mors.  Le 
mieux  conservé  de  ces  fragments  de  mors  a  été  publié  par  M.  Buhot  de 
Kersers  dans  la  brochure  dont  nous  avons  donné  le  titre. 


Paris,  le  7  juin  iSSS. 

H.  d'Arbois  de  Jubaixville. 


ERRATA  DE  LA  LIVRAISON  PRECEDENTE. 

P.  230,  1.  13,  for  hivrimi,  read  hec,  rimi. 

note  91,  for  Au.  read  AuicentUl. 
P.  233,  notes,  1.  1,  for  «  springs  up  »,  read'  «  Aies  off  ». 

1.  6,  for  «  ladh  (?)  »,  read  «  rusty  sédiment  ». 
1.  16,  for  «  an  herb  or  a  strawberry  »,  read  «  the  plant  of 
the  strawberries  ». 
P.  234,  1.  9,  for  «  figda  »,  read  «  figt'da  ». 

1.  12,  for  «  coill/f  »,  read  «  co'iWcd  ». 
P.  235,  notes,  1.  6,  for  «  common  word  »,  read  «  generic  terni  ». 
P.  236,  notes,  1.  13,  read  sanguineus. 
P.  239,  notes,  1.  10,  for  milsêan,  read  milsein. 
P.  240,  1.  2,  for  peredha,  read  piredha. 

last  line,  The  Irish  word  is  sabhrai. 
P.  243,  note  23,  Cosc  ar  carraigi  «  a  remedy  for  the  scab  ». 
For  most  of  the  above  corrections  I  am  indebted  to  M.  St.  H.  O'Grady. 

Wh.  St. 


Le  Propriétaire-Gérant  :  F.  VIEWEG. 


Chartres.  —  Imprimerie  DURAND. 


LA  PROCESSION  DITE  DE  LA  LUNADE 

ET 

LES    FEUX    DELA    SAINT-JEAN 

A   TULLE   (BAS   LIMOUSIN). 

LA  FÊTE   DU   SOLSTICE   D'ÉTÉ 

ET 
LE   COMMENCEMENT   DE   LA   PÉRIODE   DIURNE 

CHEZ  LES  GAULOIS. 


Le  sujet  du  présent  mémoire  est  de  ceux  qui  paraissent  tou 
d'abord  n'offrir  qu'un  intérêt  local,  mais  dont  l'étude  peu 
conduire  à  des  conclusions  d'une  importance  générale  au  point 
de  vue  de  notre  histoire  nationale.  Par  l'époque  de  l'année  et 
l'heure  où  elle  est  célébrée,  par  le  rite  suivant  lequel  on  l'ac- 
complissait dans  les  siècles  passés  et  où  elle  s'accomplit  en- 
core, la  solennité  religieuse  dont  nous  allons  nous  occuper  se 
rattache  aux  pratiques  superstitieuses  de  nos  aïeux,  et  nous 
montre  la  persistance  au  moyen  âge,  voire  même  jusqu'à  nos 
jours,  de  cérémonies  païennes  et  du  système  usité  pour  la 
mesure  du  temps  dans  l'ancienne  Gaule. 


I. 

Depuis  une  date  fort  reculée  et  qui,   nous  le  montrerons 
bientôt,  remonte  au  moins  à  quatre  siècles,  on  célèbre  chaque 
année  a  Tulle,  en  bas  Limousin,  le  soir  du  23  juin,  une  fête 
Revue  Celtique,  IX  28 


426  M.  Deloche. 

appelée  le  Tour  de  la  Lunade.  C'est  une  procession  qui  a  lieu 
en  l'honneur  de  saint  Jean-Baptiste,  la  veille  de  sa  Nativité. 

Après  le  coucher  du  soleil  et  dès  que  la  lune  paraît  à  l'ho- 
rizon, le  clergé  de  la  cathédrale  et  des  trois  autres  paroisses  de 
la  ville,  les  confréries  de  pénitents  blancs  et  bleus,  les  congré- 
gations religieuses,  suivies  d'un  nombreux  concours  de  fidèles, 
sortent  de  l'église  cathédrale,  portant  en  grande  pompe  la 
statue  du  saint  Précurseur.  Cette  statue,  en  bois  de  chêne, 
grossièrement  sculptée  et  noircie  par  le  temps,  est  vêtue, 
comme  une  madone  italienne,  d'une  robe,  ou  plus  exactement 
d'un  riche  manteau  de  soie,  noué  au  cou  et  ne  laissant  paraître 
ni  les  bras  ni  la  taille.  La  tète  est  ceinte  d'un  diadème  en  ar- 
gent ou  cuivre  doré. 

En  1680,  un  ecclésiastique  du  pays,  le  P.  Béril,  publia  un 
opuscule  intitulé  la  Sainte  Lunade  de  S.  Jean-Baptiste,  qu'il 
adressa  à  Etienne  Baluze  et  qui  est  à  la  Bibliothèque  Natio- 
nale parmi  les  manuscrits  de  l'illustre  érudit1.  Suivant  l'itiné- 
raire qui  y  est  minutieusement  décrit  et" qui  est  actuellement 
encore,  ou  du  moins  était  naguère  observé,  le  cortège  gravit 
les  rampes  abruptes  d'un  faubourg  situé  à  l'est  de  la  ville, 
parcourt  les  hauts  plateaux  qui  la  dominent,  et  après  des  sta- 
tions faites  devant  sept  oratoires  ou  chapelles2  établis  sur  son 
passage,  rentre  dans  l'église,  où  l'on  replace  la  statue  du  saint 
sur  l'autel  qui  lui  est  consacré. 

Quelle  est  l'origine  de  cette  curieuse  solennité,  la  plus  po- 
pulaire assurément  de  la  contrée  ? 

La  plus  ancienne  mention  que  j'en  aie  rencontrée  jusqu'ici,  se 


1.  Volume  263,  fol.  177  et  suivants.  Le  P.  Béril  était  curé  de  Saint- 
Salvadour,  paroisse  rurale  voisine  de  Tulle.  Cette  brochure  de  36  pages  fut 
imprimée  «  à  Tulle,  chez  Jean  Dalw,  imprimeur  du  clergé  et  du  collège 
«  de  Mauriac,  en  1680  ». 

2.  Voici,  d'après  l'opuscule  précité  du  P.  Béril,  l'ordre  dans  lequel  les 
Stations  étaient  placées,  du  moins  au  XVIIe  siècle:  la  première  était  la  cha- 
pelle dédiée  à  saint  Jean;  la  seconde  une  chapelle  sise  au  faubourg  d'Al- 
verge  et  nommée  de  la  Présentation  Notre-Dame;  la  troisième  l'oratoire  dit 
de  Saint-Jean,  bâti  sur  un  petit  coteau  appelé  Je  petit  Calvaire;  la  quatrième 
l'oratoire  dit  de  la  Malaurie,  situé  au  milieu  d'un  bois;  la  cinquième  l'ora- 
toire dit  de  Breyge,  construit  à  l'entrée  du  plateau  ;  la  sixième  l'oratoire  dit 
de  la  Bachellerie;  la  septième  la  chapelle  des  Malades,  qui  avait  pris  depuis 
peu  le  nom  de  Notre-Dame  de  la  Santé. 


La  Procession  dite  de  la  Lunade.  427 

trouve  dans  un  extrait  de  registres  des  actes  de  notaires  de 
Tulle.  Un  acte  daté  du  27  juin  1490,  désigne  les  confron- 
tations d'une  terre  et  d'une  vigne,  notamment  «  avec  un 
«  chemin  appelé  le  chemin  de  la  Lunade  »,  «  et  cum  itinere 
«  vocato  h  chami  de'  lo  Lounado. x  » 

Nous  sommes  ainsi  assuré  que  la  procession  dont  il  s'agit 
ici  remonte  à  une  époque  antérieure  à  1490;  mais  à  cela  se 
bornent,  en  réalité,  les  notions  précises  et  certaines  que  nous 
possédons  sur  ses  commencements. 

D'après  le  P.  Béril  déjà  cité,  le  vœu  de  la  Lunade  aurait  été 
fait  en  l'honneur  de  S.  Jean-Baptiste,  «  en  1340,  à  cause  de 
«  la  peste,  de  la  famine  et  de  la  guerre  qui  ravageaient  le  D 
«  mosin2  »,  et  l'écrivain  produit  à  l'appui  de  cette  énonciation  '. 
i°  un  prétendu  titre  qu'il  désigne  en  ces  termes  :  «  Extrait  du 
«  livre  de  S.  Jean  Baptiste,  en  lettre  Gothique  (sic)  sur  le 
«  parchemin,  en  vieux  Limosin  »  ;  2°  une  déclaration  d'un 
habitant  notable  de  Tulle  attestant  la  tradition  établie  à  ce  sujet. 

Voici,  telle  qu'elle  est  rapportée  par  le  P.  Béril,  la  première 
de  ces  pièces  qui,  nous  le  ferons  voir,  a  dû  être  confectionnée 
à  une  époque  de  beaucoup  postérieure  à  celle  des  faits  qui 
nous  occupent. 

«  L'an  millo  très  cent  quarante,  en  lo  citât  et  villo  de  Tulo, 
«  et  en  tout  lo  part  olentour,  avia  granda  aversitat,  tant  dé 
«  guerra,  dé  fomina,  que  dé  mortalitat,  et  fut  avisa  et  or- 
«  donnât  per  los  prud'hommes  et  dévots  de  la  d.  citât,  una 
«  solemnitat  etconfraria  ol'honnour  dé  Diu,  dé  nostraDama, 
«  et  dé  Monseignour  S.  Jean  Baptista,  chacun  an,  el  moustié 
«  de  Tulo,  ofin  que  Monseignour  S.  Jean  Baptista  fut  inter- 
«  cessour  dé  lous  préserva  dé  la  dita  adversitat;  et  incontinent 
«  quoguérou  commençât  ia  dita  Festa,  la  dita  Citât  et  Pays 
«  tourneren  en  grendo  prospéritat  per  lo  intercessiu  dé  Mon- 
«  seignour  S.  Jean;  e  fara  si  Diou  play.  Dé  laquella  Festa  s'en 
«  seguentlas  Ordonnanças,  &a  (sic)  >  ». 

1.  Arch.  départent,  de  la  Corrè^c,  Registres  des  actes  de  notaires  de  Tulle 
des  xvie  et  xvn^  siècles;  Reg.  50,  fol.  153,  v°. 

2.  Ubi  supra,  p.  6  de  la  brochure  du  curé  de  Saint-Salvadour. 

3.  Page  7  de  l'opuscule  du  P.  Béril.  Voici  la  traduction  de  cette  notice: 
«  L'an  mil  trois  cent  quarante,  en  la  cité  et  ville  de  Tulle,  et  dans  tout 


428  M.  Deloche. 

La  deuxième  pièce  intitulée  :  «  Attestation  de  Me  Jean 
«  Brossard,  advocat  »,  est  ainsi  conçue  : 

«  Nous  attestons  comme  quoy  des  Personnes  fort  âgées,  de 
«  tout  sexe,  nous  ont  déclaré,  a  diverses  fois,  qu'un  religieux 
«  du  Monastère  de  S.  Benoist  de  la  présent  ville  de  Tulle,  à 
«  présent  sécularisé,  qui  passait  pour  un  saint  religieux,  célé- 
«  brant  la  sainte  Messe  sur  un  autel  qui  est  à  côté  des  orgues 
«  de  la  dite  église,  à  présent  la  Cathédrale,  contre  la  chapelle 
«  de  l'Assomption  N.  Dame,  il  eut  révélation  que,  pour  taire 
«  cesser  la  peste  qui  désolait  la  présent  ville  et  toute  la  pro- 
«  vince,  il  falloir  porter  l'image  de  S.  Jean,  dans  un  lieu  que 
«  Dieu  lui  avoit  inspiré,  en  Procession,  à  laquelle  les  habi- 
«  tants  assisteraient  en  chemise  et  nuds  pieds,  ce  qui  fut 
«  exécuté;  et  d'abord  la  peste  cessa,  et  du  depuis  la  même 
«  procession  fut  instituée,  dans  la  forme  insérée  dans  le  titre 
«  qui  fut  trouvé  dans  la  châsse  de  S.  Ulphard1  :  ce  que  nous 
«  attestons  avoir  appris  par  la  tradition  de  notre  père  et  autres 
«  anciens  habitants  de  la  présent  ville. 

«  Signé  Brossard  attestant  ce  dessus  2.  » 

Baluze,  qui  non  seulement  avait  connaissance  du  livre  du 
P.  Béril,  mais  en  tenait,  comme  nous  l'avons  dit,  un  exem- 
plaire des  mains  de  l'auteur  3,  s'est  borné,  dans  son  Histoire  de 


le  pays  d'alentour,  il  y  avait  grande  adversité,  tant  de  guerre  et  de  famine 
que  de  mortalité  ;  et  il  fut  conçu  et  ordonné  par  les  prud'hommes  et 
gens  dévots  de  ladite  cité,  une  solennité  et  confrérie  en  l'honneur  de  Dieu, 
deNotre-Dame  et  de  Monseigneur  S.  Jean-Baptiste,  enacun  an,  au  monas- 
tère de  Tulle,  afin  que  Monseigneur  S.  Jean-Baptiste,  intercédât,  pour  les 
préserver  de  ladite  adversité.  Et  aussitôt  qu'ils  eurent  commencé  ladite 
Fête,  ladite  cité  et  le  pavs  tournèrent  en  grande  prospérité  par  l'inter- 
cession de  Monseigneur  S.  Jean.  Et  ainsi  en  sera  fait,  à  l'avenir,  si  Dieu 
plaît.  De  laquelle  Fête  s'ensuivent  les  Ordonnances,  etc.,  etc.  ». 

1.  Saint  Ulphard  était  un  des  patrons  de  l'église  et  de  la  ville  de  Tulle, 
dont  la  cathédrale  possédait  des  reliques. 

2.  Page  36  du  livret  du  P.  Béril. 

3.  Voici  la  lettre  d'envoi  qui  est  à  la  suite  du  livret,  dans  les  mss.  de 
Baluze,  volume  263,  fol.  195  : 

«  Monsieur,' 
»  De  l'advis  d'un  de  vos  parents,  j'ay  la  hardyesse  de  vous  présenter  mon 
livret  de  la  Lunade    de  Tulle,  que  je  vous  prie  d'accepter.  J'ay  fait   une 
prose  de  la  sainte  Résurrection  que  je  vous  fairay  tenir  si  le   désirés.  Je 


La  Procession  dite  de  la  Lunade.  429 

Tulle  publiée  en  17 17,  à  reproduire  la  tradition  ci-dessus,  en 
transportant  toutefois  à  l'année  1348  l'événement  que  le 
P.  Béril  avait  placé  en  1340  :  nous  traduisons  le  passage  qu'il 
a  consacré  à  ce  sujet  : 

«  L'année  1348,  dit-il,  est  tristement  célèbrer  non  seule- 
«  ment  par  les  guerres  qui  troublaient  notre  contrée,  mais 
«  surtout  à  cause  de  la  famine  et  de  la  peste.  Au  milieu  de  la 
«  consternation  générale,  il  est  certain  qu'il  vint  à  l'esprit  de 
«  nos  concitoyens  d'implorer  le  secours  de  saint  Jean-Bap- 
«  tiste.  On  est  peu  fixé  (pantin  compertum  habetur)  sur  la  ma- 
te nière  dont  les  choses  se  passèrent.  Ceux  qui  disent  tenir  la 
«  tradition  de  plus  anciens  déclarent  qu'un  moine  de  Tulle, 
«  réputé  pour  sa  sainteté...  »  (suit  le  récit  de  Brossard  touchant 
la  révélation  annoncée  par  le  religieux,  la  cérémonie  accom- 
plie et  la  cessation  du  fléau). 

«  Ce  qui  est  constant,  ajoute  Baluze,  c'est  qu'alors  et  dans 
«  cette  pensée,  les  habitants  de  la  ville  établirent  en  Thon- 
ce  neur  de  Dieu,  de  la  bienheureuse  Vierge  Marie  et  de  saint 

«  Jean-Baptiste,  une  confrérie  qui   subsiste  encore Nous 

«  ne  devons  pas  omettre  de  dire  qu'il  existe  dans  notre 
«  ville  deux  congrégations  religieuses  de  Pénitents  :  l'une 
«  de  Pénitents  gris1,  l'autre  de  Pénitents  blancs.  Les  pre- 
«  miers  font  le  tour  de  la  Lunade  la  veille  de  la  Nativité  de 
«  saint  Jean-Baptiste,  avec  le  clergé  et  le  peuple,  les  autres  le 
«  jour  même  de  cet  anniversaire. 

«  Par  la  même  cause  fut  instituée  dans  l'église  de  Saint- 
ce.  Pierre2  une  confrérie  de  S.  Léger,  évêque  d'Autun,  qui  fai- 

vous  auray  obligation  si,  vous  souvenant  de  l'amitié  du  temps  passé,  vous 
me  tenès  encore  au  nombre  de  'ceux  qui  vous  sont  acquis  comme  restant, 
«  Monsieur, 
«  Votre  très  humble  et  très  obéyssant  serviteur, 

«  Béril,  curé  de  St-Salvadour. 
«  Le  26  septembre  1680  ». 

1 .  Ces  pénitents  ont  été  remplacés  par  les  Pénitents  bleus,  dont  la  cha- 
pelle est  au  Puv-Saint-Clair,  dans  l'enclos  du  cimetière  ;  ils  ont  pour  patron 
saint  Jérôme  ;  saint  Jean-Baptiste  est  le  patron  des  Pénitents  blancs,  dont 
l'ancienne  chapelle,  placée  sous  ce_  vocable,  a  été  érigée  récemment  en  pa- 
roisse. 

2.  Cette  église,  qui  était  la  plus  ancienne  des  églises  de  Tulle,  a  été  dé- 
truite pendant  la  Révolution;  elle  était  située  dans  l'ancien  caslrum,  sur 


4}0  M.  Deloche. 

«  sait  dans  ce  temps-là  de  fréquents  miracles.  Cette  confrérie 
«  subsiste  également  de  nos  jours1.  » 

Ce  dernier  fait  est  attesté  par  une  notice  en  langue  romane, 
que  Baluze  a  publiée  à  la  fin  de  son  ouvrage,  et  dont  voici  le 
texte  : 

«  En  l'an  de  nostre  Seignor,  mial  et  ccc  e  xlviii,  éraguerra 
«  en  Francis  et  de  Angleterra;  e  lo  jorn  de  la  festa  de  tots 
«  Senhs,  la  vila  fo  presa  pels  Angles2.  E  el  quai  an  mccc  et 
«  xlviii,  fo  mortoudat  universal  per  tôt  lo  mon  et  grande 
«  fems  e  pestillesa.  Per  che  li  prodome  de  la  ciptat  de  Tulla, 
«  regardan  lo  péril  en  que  estavo,  recoguéro  a  nostre  Seignor, 
«  ordonero  e  establiro  entre  loi*  que,  a  la  honor  de  Diou  e 
«  de  Nostra  Dama  e  de  touta  la  court  celestial  companya,  fo 
«  fâcha  un  a  confreyria  de  Mosseignor  Saint  Legier,  loqual 
«  ovio  fach  e  fosia  e  fay  tout  journ  grand  cop  de  bels  miracles  3 .  » 

Ce  document  se  traduit  ainsi  : 

«  En  l'an  de  Notre  Seigneur,  mil  trois  cent  et  quarante- 
«  huit,  il  y  avait  guerre  en  France  avec  l'Angleterre;  et  le 
«  jour  de  la  fête  de  tous  les  Saints,  la  ville  fut  prise  par  les 
«  Anglais.  Et  dans  cette  année  mil  trois  cent  et  quarante-huit, 
«  il  y  eut  mortalité  universelle  par  tout  le  monde,  et  grande 
«  famine  et  pestillence.  C'est  pourquoi  les  prud'hommes  de  la 
«  cité  de  Tulle,  considérant  le  péril  où  ils  étaient,  recoururent 
«  à  Notre  Seigneur,  ordonnèrent  et  établirent  entre  eux  que, 
«  en  l'honneur  de  Dieu  et  de  Notre  Dame  et  de  toute  la  cour 
«  de  la  céleste  compagnie,  il  fût  fait  une  confrérie  de  Mon- 
«  seigneur  Saint  Léger,  lequel  avait  fait,  et  faisait  et  fait  tou- 
«  jours,  un  grand  nombre  de  beaux  miracles.  » 

le  plateau  qui  est  au  confluent  de  la  Corrèze  et  d'une  petite  rivière  appelée 
la  Solane,  et  qui  a  gardé  le  nom  de  «  Quartier  Saint-Pierre  ». 
i.  Htst.  Tutti. ,  p.  199-200. 

2.  Baluze  a  pensé  qu'il  fallait  remplacer  la  date  de  1 $48  par  celle  de  1346, 
par  le  motif  que,  dans  cette  dernière  année,  la  ville  fut  prise  par  les  Anglais. 
(//>/</.,  Appendice,  col.  718  in  fine.)  Nous  crovons  qu'il  faut  maintenir  la 
date  de  1348  :  1»  parce  qu'elle  a  été  inscrite  en  deux  endroits  de  la  notice, 
ce  qui  exclut  la  probabilité  d'une  inadvertance  ;  2°  parce  que  rien  ne  s'op- 
pose historiquement  à  ce  que  la  ville  ait  été  prise  une  première  fois  en 
1346,  abandonnée  et  puis  reprise  en  1348.  De  pareils  laits  étaient  fréquents 
dans  la  longue  et  calamiteuse  guerre  contre  les  Anglais. 

3.  Hist.  Tu  tel.,  Append.,  col.  717-718. 


La  Procession  dite  de  la  Lunade.  43 1 


IL 


Les  passages  du  récit  de  Baluze  que  nous  avons  mis  sous  les 
yeux  du  lecteur  suggèrent  des  observations  importantes. 

Notre  historien  a  reproduit,  en  modifiant  seulement  la  date 
de  l'événement,  la  tradition  rapportée  par  le  P.  Béril,  mais  il 
s'est  abstenu  de  publier,  à  l'appui,  le  vieux  titre  inséré  dans  la 
notice  de  cet  écrivain;  il  ne  le  mentionne  même  pas,  ce  qui 
dénote  chez  l'habile  diplomatiste  de  très  grands  doutes  rela- 
tivement à  son  authenticité. 

Cette  pièce  a  disparu  depuis  longtemps  I,  et  nous  n'avons 
aucun  moyen  d'en  vérifier  le  caractère  et  la  valeur.  Mais,  telle 
qu'elle  est  présentée  par  le  P.  Béril,  qui  était  sans  doute  peu 
compétent  pour  l'apprécier,  elle  soulève  les  plus  sérieuses  ob- 
jections. 

Et  d'abord,  la  date  de  1340  qui  y  est  énoncée  est  difficile  à 
justifier;  elle  ne  s'accorde  ni  avec  celle  de  1348,  que  porte  la 
notice  concernant  la  confrérie  de  Saint-Léger,  ni  avec  celle  de 
1346,  que  Baluze,  à  tort  selon  nous,  a  proposé  d'y  substituer2. 

Quant  à  la  langue  romane  limousine,  dans  laquelle  la 
pièce  dont  il  s'agit  a  été  rédigée,  elle  diffère  essentiellement  de 
la  notice  précitée,  qui  est  pourtant  également  écrite  en  langue 
limousine'.  Or,  une  telle  diversité  entre  deux  documents  qui 
auraient  été  rédigés  dans  la  même  localité  et  presque  au 
même  moment,  est  absolument  inadmissible,  à  ce  point  que 
l'un  des  deux  documents  doit  être,  suivant  nous,  nécessai- 
rement considéré  comme  faux.  Ce  ne  peut  être  la  notice  de  la 


1.  La  châsse  de  S.  Ulphard  ou  Ulfard,  où  cet  acte  était  conservé,  au 
dire  de  Me  Brossard,  a  dû  être  enlevée  et  probablement  détruite,  en  1793, 
comme  les  autres  châsses  qui  ornaient  l'église  cathédrale  de  Tulle. 

2.  Voir  ci-dessus,  p.  420,  note  2. 

3.  Ainsi  dans  la  notice  de  la  confrérie  de  Saint-Léger  on  lit:  midi  (mille), 
moiioudat  (mortalité),  prodomc  (prud'hommes),  la  bon  or  (l'honneur),  con- 
frayria  (confrérie),  mosseignor  (monseigneur).  —  Dans  le  ms.  de  la  châsse 
de  saint  Ulphard,  ces  mêmes  mots  sont  écrits  :  millo,  mortalitat,  prud'hom- 
mes, l'bonnour,  confraria,  monseigneur  ;  autant  de  formes  d'un  patois  beau- 
coup plus  moderne,  et  ne  remontant  guère  qu'au  xvie  siècle. 


432  M.  Deloche. 

contrérie  de  Saint-Léger,  qui  est  écrite  dans  un  idiome  beau- 
coup plus  ancien  que  l'autre,  et  que  Baluze,  qui  l'a  eue  sous 
les  yeux I,  n'a  certainement  éditée  qu'à  bon  escient.  Donc,  c'est 
l'autre  notice  qui  est  fausse. 

Il  me  semble  même  que  la  pièce  attestant  la  création  d'une 
confrérie  sous  l'invocation  de  S.  Léger,  à  l'époque  et  à  l'oc- 
casion des  malheurs  que  subissait  la  ville,  rend  invraisemblable 
la  fondation,  au  même  instant  et  pour  les  mêmes  causes,  d'une 
deuxième  confrérie  sous  l'invocation  de  S.  Jean-Baptiste,  et 
surtout  d'une  cérémonie  telle  que  la  procession  de  la  Lunade, 
dont  l'importance  et  la  solennité  étaient  autrement  grandes 
et  sur  laquelle  on  ne  comprendrait  pas  que  le  rédacteur  de 
cette  pièce  eût  gardé  le  silence. 

Cette  notice  doit  être  conséquemment  écartée,  et  la  tradition 
orale  restant  le  seul  appui  du  récit  du  P.  Béril,  il  nous  paraît 
difficile  de  le  regarder  comme  ayant  une  valeur  historique. 

Néanmoins,  et  pour  des  raisons  qu'il  nous  a  laissé  ignorer, 
Baluze  a  accepté  comme  faits  avérés  l'appel  des  Tullistes  à 
l'intercession  de  S.  Jean  et  l'établissement  d'une  congrégation 
nouvelle  sous  son  patronage. 

Nous  verrons  plus  loin  comment  ces  deux  faits  pourraient 
se  concilier  avec  une  explication  différente  de  celle  que  l'ho- 
norable ecclésiastique  limousin  a  donnée  des  causes  et  de  la  date 
de  la  procession  de  la  Lunade. 

Il  nous  suffit,  pour  le  moment,  d'avoir  montré  qu'en  l'ab- 
sence de  preuve  positive,  cette  question  d'origine  reste  ouverte 
aux  investigations  de  l'archéologue  et  de  l'historien. 


III. 

Dans  l'étude  à  laquelle  nous  allons  procéder,  notre  attention 
s'arrêtera  particulièrement  sur  le  jour  de  l'année  où  a  lieu  la 
procession  de  la  Lunade,  l'heure  à  laquelle  elle  commence,  le 


i.  Baluze  annonce  qu'il  publie  ce  document  ex  veteri codice  Tutelensi  dis.; 
Hist.  Tut  eh  y  Append.,  col.  717. 


La  Procession  dite  de  la  Lunade.  433 

cérémonial  qu'on  y  observe  et  sa  relation  avec  certaines  cou- 
tumes païennes  des  Gaulois. 

Le  soleil  fut  longtemps,  on  le  sait,  l'objet  de  l'adoration 
des  hommes  et  en  particulier  des  populations  celtiques.  Notre 
savant  confrère,  M.  d'Arbois  de  Jubainville,  nous  fait  con- 
naître, dans  son  Cours  de  littérature  celtique,  que  le  roi  suprême 
de  l'Irlande,  Loégairé,  contemporain  de  saint  Patrice  (43 1- 
464)  r,  ayant  été  fait  prisonnier  par  les  habitants  de  Leinster 
révoltés,  n'obtint  sa  liberté  qu'en  prêtant  serment  de  ne  plus 
exiger  la  redevance  qui  avait  motivé  la  révolte  ;  voici  la  for- 
mule de  ce  serment,  qui  nous  a  été  conservée  :  «  Il  jura  par 
«  le  Soleil  et  la  Lune,  l'eau  et  l'air,  le  jour  et  la  nuit,  la  mer 
«  et  la  terre2  ». 

Au  vu6  siècle,  le  culte  du  Soleil  et  de  la  Lune  était  encore 
pratiqué  en  Gaule,  puisque  saint  Eloi,  dans  une  des  homélies 
qui  lui  ont  été  attribuées  par  l'auteur  de  sa  Vie,  défend  aux 
fidèles  «  d'appeler  Seigneurs  (c'est-à-dire  Dieux)  le  Soleil  et  la 
«  Lune,  ou  de  jurer  par  eux;  car,  ajoute-t-il,  ils  sont  des 
«  créatures  de  Dieu,  et  par  l'ordre  de  Dieu  servent  aux  be- 
«  soins  des  Hommes.  »  —  «  Nullus  Dominos  Solem  aut 
«  Lunam  vocet,  neque  per  eos  juret,  quia  creaturae  Dei  sunt, 
«  et  necessitatibus  hominum  jussu  Dei  inserviunt  3.  » 

La  fête  du  Soleil  se  célébrait  au  solstice  d'été;  le  24  juin 
est  le  jour  où  tombe  le  solstice,  où  le  soleil  est  au  tropique 
du  Cancer,  arrivé  à  son  plus  grand  éloignement  de  l'Equateur, 
et  paraît,  pendant  quelques  jours,  y  être  stationnaire4. 

1.  S.  Patrice  a  commencé  sa  prédication  vers  431  et  est  mort  vers  464. 

2.  Introduct.  à  la  littèrat.  celtique,  p.  181.  Cf.  Le  Cycle  mythologique  ir- 
landais, du  même  auteur,  p.  251. 

3.  Vita  S.  Eligii,  auctore  Audoëno,  dans  D'Achery,  Spicilegium,  édit. 
in-4,  t.  V.  p.  216.  D'après  une  opinion  développée  par  M.  O.  Reich  dans 
une  thèse  soutenue  en  1872,  certaines  parties  de  la  Vie  de  S.  Eloi  date- 
raient bien  de  la  période  mérovingienne,  mais  d'autres  y  auraient  été  ajou- 
tées ou  intercalées  sous  les  Carolingiens  (Uber  Audoens  Lébensbeschreibung 
des  Hciligen  Eligius.  Inaugural  dissertation,  Halle,  1872).  Cette  circons- 
tance serait  ici  indifférente,  et  même  la  date  plus  récente  des  sermons  at- 
tribués à  S.  Eloi  prouverait  une  persistance  plus  prolongée  des  pratiques 
païennes  en  Gaule  au  moyen  âge,  persistmce  qui  ressort  d'ailleurs  de  nom- 
breux documents  de  la  période  féodale. 

4.  Solstitium  signifie  proprement  «  arrêt  du  soleil  »  de  sol,  soleil,  et  de 
siare,  rester  debout,  s'arrêter. 


434  M.  Deloche. 

«  Quel  temps  plus  propice  pour  cette  solennité,  suivant  la 
«  remarque  de  Leber,  que  celui  où  le  soleil  parait  dans  son 
«  plus  grand  éclat...,  où  la  terre  présente  tant  de  richesses  et 
«  tant  d'espérances,  où,  de  plus,  ce  point  de  sa  course  est 
«  facile  à  saisir  et  ne  demande  pas  d'observation  délicate!  J  ». 
Aussi,  comme  l'ont  dit  J.  Grimm2  et  après  lui  M.  Gaidoz>, 
«  le  solstice  d'été  fut-il  généralement,  chez  les  nations  indo- 
ce  européennes,  l'époque  de  l'année  à. laquelle  on  rendait  un 
«  culte  particulier  à  l'astre-roi.  »  M.  A.  Breuil,  dans  un  im- 
portant mémoire  sur  le  Culte  de  S.  Jean-Baptiste  et  les  usages 
profanes  qui  s'y  rattachent,  s'exprime  ainsi  :  «  Les  peuples  de  l'an- 
tiquité qui  avaient  fondé  leurs  diverses  religions  sur  l'obser- 
vation des  phénomènes  de  la  nature,  et  dont  les  principales 
divinités  étaient  des  personnifications  du  Soleil,  célébraient  de 
grandes  fêtes  aux  moments  les  plus  .considérables  du  cours  de 
cet  astre,  notamment  à  l'époque  du  solstice  d'hiver  et  à  celle 
du  solstice  d'été  4  » . 

Longtemps  après  l'établissement  du  christianisme,  cette  der- 
nière fête  conservait  un  tel  prestige  et  exerçait  encore  un  tel  em- 
pire sur  l'esprit  des  foules,  qu'au  milieu  du  vne  siècle,  dans 
un  des  sermons  déjà  cités,  saint  Eloi  en  faisait  l'objet  d'une  pro- 
hibition spéciale.  «  Que  nul,  dit-il,  à  la  fête  de  S.  Jean  ou 
«  dans  des  solennités  quelconques,  ne  célèbre  les  Solstices  et 
«  ne  se  livre  à  des  danses  tournantes  ou  sautantes,  ou  à  des 
«  carauïes  ou  à  des  chants  diaboliques.  »  — «  Nullus  infesti- 
«  vitate  sancti  Joannis,  vel  quibuslibetsolemnitatibus,  Solsticia, 
«  aut  vallationes  vel  saltationes,  aut  caraulas,  aut  cantica  dia- 
«  bolica  exerceat  » . 


i .  Article  de  Leber,  dans  la  Collection  des  meilleures  dessertations  relatives 
à  l'histoire  de  France,  par  Leber,  J.-B.  Salguy  et  J.  Cohen,  t.  VIII,  an- 
née icS2Ô,  p.  477-481. 

2.  Deutsche  Mythologie,  deuxième  édition,  p.  583. 

3.  Gargantua.  Essai  de  mythologie  celtique  ;  dans  la  Rev.  archéol.,  2e  série, 
année  1808,  t.  I,  p.  190.  —  Le  Dieu  gaulois  du  Soleil  et  le  symbolisme  de  la 
roue;  dans  la  Rer.  archéol.,  3e  série,  année  1884,  t.  II,  p.  19;  nous  faisons 
ici  toutes  réserves  touchant  le  passage  de  ce  savant  mémoire,  où  l'auteur 
fait  dériver  la  fête  du  solstice  d'été  chez  les  anciens  peuples  d'une  idée  qui, 
d'après  nous,  n'est  point  la  vraie. 

4.  Mém.  de  la  Soc.  des  Antiquaires  de  Picardie,  t.  VIII,  p.  199. 


La  Procession  dite  de  la  Lunade.  435 

Ces  défenses  impliquent  évidemment  que  les  actes  con- 
damnés par  le  prédicateur  étaient  fréquents,  sinon  usuels. 
Nous  y  trouvons  donc  la  preuve  de  la  persistance,  parmi  les 
populations,  de  l'adoration  du  Soleil  et  de  la  célébration  du 
Solstice  d'été. 

L'Église  chrétienne  s'appliqua,  avec  le  concours  actif  et 
énergique  de  l'autorité  royale,  à  déraciner  ces  restes  des  an- 
ciens cultes  ;  mais,  quand  elle  eut  reconnu  l'inanité  de  ses 
efforts,  «  elle  laissa  subsister  ces  vieilles  coutumes  et  se  con- 
«  tenta  de  les  sanctifier  en  leur  donnant  un  sens  chrétien1  ». 
«  Les  feux  de  Bélénus  furent  dédiés  à  S.  Jean-Baptiste,  dont 
«   la  fête  tombe  au  solstice  d'été2  ». 

Telle  est  l'origine  des  Feux  de  la  Saint-Jean,  de  ces  nom- 
breux bûchers  qu'on  allume  encore,  à  cette  époque  de  l'année, 
sur  les  places,  dans  les  carrefours  et  les  rues  de  petites  villes 
et  de  bourgades  de  plusieurs  de  nos  provinces.  C'est  là  assu- 
rément, et  de  l'avis  unanime  des  érudits,  une  des  pratiques 
survivantes  du  paganisme  gaulois.  3 

Il  convient  de  noter  ici  un  détail  qui  se  produit,  ou  du 
moins  se  produisait  jadis  à  la  procession  de  la  Lunade,  et  dont 
j'ai  été  souvent  témoin  dans  mon  enfance.  Les  fidèles  faisant 
partie  du  cortège  ne  manquaient  pas,  quand  ils  passaient  au- 
près des  Feux  de  la  Saint-Jean,  de  faire  toucher  par  les  flam- 
mes des  branches  de  noyer  ou  de  ehâtaigner  qu'ils  tenaient 
ensuite  pour  des  rameaux  bénits,  et  qu'ils  conservaient  pieu- 
sement dans  leur  demeure,  comme  une  sauvegarde  contre  les 
dangers  de  maladie  ou  autres. 

L'abbé  Lebeuf,  qui,  dans  le  Journal  historique  de  Verdun,  a 
consacré  à  ce  sujet  deux  dissertations,  cite,  dans  la  première, 
deux  anciens  auteurs  :  Durand  de  Chartres,  évêque  de  Mende 


1 .  Leber,  ubi  supra. 

2.  Mémoire  de  M.  T.  Pinard  sur  la  commune  de  Saint-Germain-le-vieux- 
Corbeil  (Seine-et-Oise)  ;  dans  la  Revue  archéol.,  première  série,  année  1848, 

P-  74  5- 

3.  «  Les  ieux  qu  on  allumait  alors  représentaient  la  chaleur  brûlante  de 
l'astre.  Quel  moyen  plus  naturel  de  célébrer  sa  fête  que  d'allumer  ces  feux 
qui  en  sont  l'image?  ».  Leber,  dans  la  Collection  de  dissertations  déjà  citée, 
t.  VIII,  p.  480. 


4}6  M.  Deloche. 

en  1290 T,  et  le  docteur  Jean  Beleth  (xne  siècle)2,  d'après  les- 
quels, à  la  fête  de  saint  Jean,  la  coutume  était  de  porter  des 
flambeaux  allumés  3. 

Dans  sa  deuxième  dissertation,  le  même  savant  cite  le  livre 
des  Antiquités  de  Paris,  où  Sauvai  décrit  la  manière  dont  se 
faisait  le  Feu  de  la  Grève  et  reproduit  le  mémoire  des  frais  de 
ce  feu  et  des  accessoires,  dressé  d'après  un  rôle  de  1573  et 
comprenant,  entre  autres  détails,  «  la  symphonie,  les  bouquets, 
«  les  chapels  de  roses,  les  torches  de  cire  jaune  et  de  cire 
«  blanche,  le  baril  d'artifices,  les  dragées,  etc.,  etc. 4  ». 

Il  est  intéressant  de  rapprocher  ces  détails  de  la  description 
que  le  P.  Béril  nous  a  laissée  de  la  procession  de  la  Lunade 
à  Tulle,  au  xvne  siècle.  Il  y  signale  :  «  la  grande  quan- 
«  tité  de  feux  de  joye  dont  les  rues  sont  toutes  parées  ».  On 
y  voit  les  représentants  des  confréries  de  la  ville,  portant  ce  des 
«  cierges  de  cire  allumés  à  quatre  mèches  et  garnis  de  ver- 
ce  dure  et  de  fleurs  ;  les  porteurs  de  la  statue  du  saint,  cou- 
ce  ronnés  de  guirlandes  de  cire  ou  de  fleurs,  et  de  jeunes  gar- 
ce çons  portant  en  outre  des  chaperons  de  fleurs  de  camomille 
ce  en  forme  d'écharpes;  les  femmes  marchant  pieds  nus,  le 
ce  front  ceint  de  guirlandes  de  cire  et  la  taille  ornée  de  cein- 
ce  tures  d'herbes  entremêlées  de  fleurs  ;  le  Roy  de  la  fête,  ayant 
ce  au  bras  gauche  un  chaperon  de  fleurs,  tenant  de  la  main 
ce  droite  une  chandelle  allumée,  et  suivi  d'une  bande  de 
ce  violons;  le  jeu  des  pièces  d'artillerie  et  des  fusées  volant  en 
ce  l'air  comme  des  serpents  de  feu,  et  les  feux  d'artifice;  enfin 
«  (ce  qui  rappelle  la  symphonie  du  feu  de  la  Grève),  les  flûtes, 
ee  phiphres,  tambours,  hautbois,  trompettes  et  clairons  qui  sont 
ce  aux  tourelles  du  grand  clocher,  qui,  à  raison  de  sa  hauteur, 
ce  domine  sur  toute  la  ville,  et  font  unanimement  une  ar- 


1.  Rationale  divinorum  officiorum. 

2.  Sutnma  de  divinis  officlis,  c.  137.  Ce  livre  a  été  écrit  en  1162. 

3.  Journal  hist.  de  Verdun,  t.  65,  année  1749,  p.  428.  Voir  aussi  la  Col- 
lection des  meilleures  dissertai,  relatives  à  l'hist.  de  France,  par  C.  Leber  et 
autres,  t.  VIII,  année  1826,  p.  472  et  suiv. 

4.  Journal  histor.  de  Verdun,  t.  70,  année  175 1,  et  Collection  des  meilleures 
dissertations,  etc.,  t.  VIII,  p.  476  et  note. 


La  Procession  dite  de  la  Lunade.  437 

«  monie  si  douce  à  l'ouye  que  vous  diriez  que  c'est  un 
«  concert  d'anges  suspendu  dans  l'air1  ». 

Dans  un  'autre  endroit  de  sa  deuxième  lettre,  l'abbé  Lebeuf 
fait  observer  que,  chez  les  Gaulois,  les  fêtes  et  les  réjouis- 
sances qui  avaient  lieu  à  l'époque  du  solstice  d'été,  avaient 
pour  but  d'attirer  les  populations  aux  grandes  assemblées  na- 
tionales fixées  à  cette  date  si  solennelle,  et  qu'elles  furent 
transformées  et  sanctifiées  par  le  christianisme2. 

Si  les  fêtes  et  réjouissances  et  les  feux  de  la  veille  de  la  Na- 
tivité de  S.  Jean  sont  la  reproduction  des  cérémonies  païennes 
de  la  veille  du  solstice  d'été  chez  les  Gaulois,  il  est,  ce  semble, 
tout  naturel  de  penser  que  la  procession  de  la  Lunade,  qui  se 
célébrait  le  même  jour,  au  même  moment,  et  suivant  un  rite  sem- 
blable, avait  le  même  caractère  et  la  même  origine. 

Nous  allons  voir  qu'il  y  en  a  d'autres  indices. 


IV. 

Nous  rappellerons,  en  premier  lieu,  que  les  processions  à 
travers  les  bourgades  et  dans  les  champs,  avec  port  de  simu- 
lacra,  c'est-à-dire  de  représentations  matérielles  de  divinités 
païennes,  d'animaux  ou  d'objets  divinisés,  étaient  une  des 
pratiques  superstitieuses  encore  usitées  dans  le  haut  moyen 
âge. 

Nous  en  avons  un  témoignage  dans  un  passage  de  la  Vie 
de  S.  Martin,  où  Sulpice  Sévère  (commencement  du  Ve  siècle) 
raconte  le  miracle  suivant:  Un  jour  S.  Martin  rencontra 
sur  son  chemin  le  cortège  funèbre  d'un  Gentil  :  il  s'arrêta  à  la 
distance  d'environ  500  pas,  et  comme  il  voyait  s'avancer  une 
troupe  de  gens  de  la  campagne  et  que  le  linceul  jeté  sur  le 
corps  du  défunt  était  agité  par  le  vent,  «  il  crut  que  ces  gens  se 
«  livraient  aux  pratiques  profanes  des  sacrifices,  parce  que  c'était 
«  la  coutume  des  paysans  gaulois  de  porter  à  travers  leurs  champs 


1.  Mss.  de  laBiblioth.  Nat.  Arm.  de  Baluze,  t.  263,  fol.  195  et  suiv. 

2.  Journ.  histor.  de  Verdun,  t.  70,  p.  130  et  131.  Voir  aussi  la  Collection 
des  meilleures  dissertât.,  etc.,  ubi  supra. 


4$ 8  M.  Deloche. 

a  les  misérables  simulacres  des  faux  dieux,  œuvres  de  leur  dé- 
«  mence,  couverts  d'un  voile  blanc  ».  Martin  ayant  de  la  main 
marqué  au  devant  d'eux  le  signe  de  la  croix,  ils  furent  arrêtés 
subitement  comme  changés  en  pierres,  et  s'efforçant  de  mar- 
cher, ils  tournaient  ridiculement  sur  eux-mêmes,  jusqu'à  ce 
que,  vaincus,  ils  eurent  déposé  à  terre  le  cadavre  qu'ils  por- 
taient. Mais  lorsque  le  saint  homme  eut  reconnu  son  erreur, 
il  éleva  de  nouveau  la  main  et  donna  au  cortège  le  pouvoir  de 
continuer  sa  marche  et  d'enlever  le  corps. 

Voici  le  texte  du  passage  que  nous  avons  souligné  comme 
se  rapportant  directement  à  notre  sujet  :  «  Profanos  sacrifi- 
ce ciorum  ritus  agi  credidit  :  quia  esset  haec  Gallorum  rusticis 
«  consuctudo,  siinulacra  daemonum  candido  tecta  velamine 
«  misera per  agros  suos  circumferre  dementia1  ». 

Cette  môme  pratique  se  trouve  mentionnée  dans  YIndiculus 
superstitionum  et  paganianim,  qui  parait  avoir  été  rédigé  au 
ixc  siècle  et  dont  l'art.  XXVIII  est  ainsi  conçu  :  «  De  siniu- 
«  lacro  quod  per  campos  portant2  ».  L'autorité  séculière  sé- 
vissait contre  les  actes  que  l'Eglise  condamnait,  ainsi  que  l'at- 
teste le  titre  IV  du  capitulaire  de  Karloman,  de  743  5,  édicté 
d'ailleurs  après  d'autres  dispositions  analogues. 

On  peut  voir  un  usage  semblable  dans  le  cérémonial  du 
Tour  de  la  Lunade,  où  l'on  portait  la  vieille  statue,  le  simu- 
lai rum  de  S.  Jean,  à  travers  la  campagne. 


1.  Voir  l'édition  des  œuvres  de  Sulpice  Sévère,  par  C.  Halm;  dans  le 
Corpus  scriptor.  eeclesiasticor .  latinor.,  t.  I,  Vienne  (Autriche),  1866,  p.  122, 
Fortunat  (fin  du  vie  siècle),  qui,  dans  sa  Vie  de  S.  Martin,  a  mis  en  vers 
celle  de  Sulpice  Sévère,  reproduit  dans  le  vers  suivant  le  passage  par  nous 
cité: 

«  Dum  putat  inde  vehi  cultu  simuïacra profana  ». 

Moniim.   Germon.   Instar. ,   édit.    in-40.   Auctor.   antiq.,    t.   IV,    première 
partie,  p.  303-404. 

2.  Edition  de  Borétius,  dans  Monument.  Germaniae  historié.,  in-4,  Capi- 
tulai-, reg.  Franc.,  t.  I,  p.  223. 

3.  «  Decrevimus  quoque,  quod  et  pater  meus  ante  praecipiebat,  ut  qui 
pavanas  observât  lotus  in  aliqua  re  fecerit,  multetur  et  damnetur  quindecim 
solidis  ».  Ubi  supra,  p.  28;  Pertz,  Monum.  germai'.,  historié.,  Leg.,  t.  I, 
p.  20;  Baluze,  Capital.  Reg.  Franc,  t.  I,  col.  1 50. 


La  Procession  dite  de  la  Lunade.  439 


V. 


Un  trait  encore  plus  caractéristique  est  l'heure  à  laquelle  la 
solennité  limousine  devait  commencer. 

Baluze  énonce  qu'elle  «  avait  tiré  son  nom  de  ce  qu'elle 
«  s'accomplissait  après  que  le  Soleil  avait  disparu  et  fait  place 
«  à  la  lune  »  ;  «  quia  fit  postquam  sol  recessit  et  lunae  locum 
«  fecit1  ». 

Le  P.  Béril  a  déterminé  avec  plus  de  précision  cette  partie 
du  cérémonial.  «  Ce  doit  être,  dit-il,  à  sept  heures  du  soir  prê- 
te cisèmeut,  que  le  clergé  se  rend  à  la  chapelle  S.  Jean,  baise 
«  l'autel  et  sort  par  ordre2.  » 

Cette  particularité  de  l'ouverture  de  la  procession,  fixée  à  la 
veille  de  la  Nativité  de  S.  Jean,  c'est-à-dire  du  solstice  d'été, 
au  moment  du  lever  de  la  Lune,  c'est-à-dire  au  commencement 
de  la  nuit,  n'a  fait,  que  je  sache,  l'objet  d'aucune  réflexion  de 
la  part  des  historiens  >.  Ils  n'ont  pas  recherché  la  raison  pour 
laquelle  cette  solennité,  à  la  différence  des  autres  cérémonies 
du  culte  chrétien,  avait  lieu  la  veille  au  soir  et  non  le  jour  de 
l'anniversaire.  C'était  là  pourtant  un  fait  digne  de  remarque 
et  qui  appelait  une  explication. 

Cette  explication,  nous  croyons  pouvoir  la  donner. 

C'est  d'abord  parce  que,  chez  les  Gaulois,   la  Lune  était 


1.  Hist.  Tutel.,  p.  200.  Le  P.  Béril  a  donné  des  explications  de  ce  nom, 
plus  bizarres  et  plus  inadmissibles  les  unes  que  les  autres  :  i°  la  procession 
passait  dans  les  bois  et  le  tour  qu'on  y  fait  «  ressemble  à  un  croissant  de 
lune  »  ;  2°  en  faisant  le  vœu,  on  a  invoqué  conjointement  avec  S.  Jean  la 
Vierge  Marie,  qui  est  cette  «  mystique  et  belle  Lune,  pulchra  ut  Lima,  qui, 
dans  nos  adversités,  nous  a  communiqué  les  influences  de  la  miséricorde  de 
Dieu  «  ;  30  les  habitants  allumaient  anciennement  et  quelques-uns  allu- 
ment encore  aux  fenêtres,  lorsque  la  «  vénérable  image  de  saint  Jean  est 
reportée  de  la  procession,  des  luminaires,  sive  Luns  en  Limosin  ».  Dans 
l'opuscule  cité,  La  sainte  Lunade,  etc.,  p.  9  et  10. 

2.  Ubi  supra. 

3.  M.  René  Fage,  qui  a  publié  en  1885  une  intéressante  brochure  inti- 
tulée Les  Anglais  à  Tulle,  La  Lunade  (Limoges,  Barbou  et  Cic),  n'a  point 
touché  cette  question. 


440 


M.  Deloche, 


l'objet  d'un  culte  fervent  *,  et  qu'elle  était  même  par  eux 
adorée  à  l'égal  du  Soleil2.  S.  Eloi  les  réunit  dans  une  même 
prohibition,  qui  nous  fait  voir  qu'ils  étaient  réunis  dans  un 
culte  commun.  «  Que  nul,  dit-il  dans  un  passage  déjà  cité  de 
«  ses  homélies,  n'appelle  Seigneurs  (c'est-à-dire  Dieux)  le  Soleil 
«  et  la  Lune  et  ne  jure  par  eux.  »  —  «  Nullus  Dominos  Solem 
«  et  Lunam  vocet,  neque  per  eos  juret>.  »  En  commençant  la 
procession  au  lever  de  la  Lune,  on  préludait,  par  l'adoration 
de  la  déesse,  à  l'adoration  du  Dieu-Soleil. 

S.  Eloi  insiste  d'ailleurs  beaucoup  sur  d'autres  superstitions 
qui  se  rattachaient  aux  influences  de  la  Lune,  à  ses  diverses 
phases  et  à  ses  éclipses,  de  manière  à  nous  faire  comprendre 
la  grande  place  qu'elle  occupait  dans  l'imagination  et  les 
croyances  populaires. 

«  Que  l'on  ne  soit,  s'écrie-t-il,  si  superstitieux  que  de 
«  pousser  des  cris  quand  la  Lune  s'obscurcit  et  perd  sa 
«  lumière;  d'autant  qu'à  certaines  époques,  suivant  les  dis- 
«  positions  divines,  elle  s'éclipse.  Et  que  personne  ne  fasse 
«  difficulté  d'entreprendre  un  ouvrage  quelconque  à  la  non- 
ce velle  Lune  4,  Dieu  ayant  créé  la  Lune  pour  désigner  et  mar- 
te quer  les  temps  et  pour  diminuer  l'obscurité  des  nuits,  et  non 
«  pour  empêcher  aucun  travail  de  l'homme  ou  mettre  son 
«  esprit  en  démence,  comme  le  pensent  les  gens  ignorants  qui 


i.  On  ne  devait  faire  l'importante  cérémonie  de  la  cueillette  du  gui  de 
chêne  qu'au  sixième  jour  de  la  lune  ;  c'était  également  à  ce  jour  que  com- 
mençaient, en  Gaule,  les  mois,  les  années  et  les  siècles  (Pline,  Histoire 
naturelle,  livre  XVI,  §  250;  éd.  Ianus,  t.  III,  p.  45).  Au  reste,  les  Anciens 
attribuaient  à  la  Lune  le  pouvoir  de  communiquer  la  fertilité  à  la  terre, 
d'influer  sur  toutes  ses  productions  et  de  procurer  l'accroissement  et  la 
végétation.  Dom  J.  Martin  ,Religion  des  Gaulois,  t.  I,  p.  367,  cite  à  ce  sujet 
Porphyre,  De  abstinentia,  II,  p.  248,  et  Macrobe,  Somn.  Scip.,  I,  19. 

2.  «  Les  anciens  monuments  allient  ordinairement  ces  deux  astres.  » 
Dom  J.  Martin,  Op.  cit.,  t.  I,  p.  369. 

3.  Vit.  S.  Eligii,  dans  D'Achery,  Spicileg.,  édit.  in-4,  t.  V,  p.  217. 

4.  Les  Germains  avaient  au  contraire  la  coutume  de  se  réunir,  à  moins 
d'empêchement  fortuit  et  subit,  les  jours  de  nouvelle  et  de  pleine  lune  : 
«  Coeunt,  nisi  quid  fortuitum  et  subitum  incident,  certis  diebus,  cum  aut 
inchoatur  Luna  aut  impletur.  Nam  agendis  rébus  hoc  auspicatissimum  ini- 
tium  credunt  ».  Tacite,  Germon.,  XI;  Tacite,  Opéra,  édit.  Halm,  collcct. 
Teubner,  t.  II,  p.  197. 


La  Procession  dite  de  la  Lunade.  441 

«  estiment  que  les  personnes  possédées  des  démons  souffrent 
«   par  l'influence  de  la  Lune1  ». 

Si  l'on  objectait  que  S.  Eloi,  évêque  de  Noyon,  s'adressait 
à  des  populations  du  nord  de  la  Gaule,  adonnées  à  des  pra- 
tiques ignorées  peut-être  de  celles  du  Centre,  je  répondrais  : 

En  premier  lieu,  d'après  ce  qui  nous  est  connu  des  croyan- 
ces, des  usages  comme  des  institutions  et  du  langage  des  ha- 
bitants de  cette  contrée,  les  tribus  de  la  confédération  auto- 
nome ne  différaient  que  peu  ou  point  les  unes  des  autres. 
Quand  César,  Tite-Live,  Pline,  Ammien  Marcellin  nous  ap- 
prennent un  trait  des  mœurs  gauloises,  ils  ne  distinguent 
point  entre  les  diverses  parties  du  domaine  de  nos  ancêtres. 

En  second  lieu,  l'on  ne  doit  pas  perdre  de  vue  que  S.  Eloi 
était  né  en  Limousin,  dans  le  village  de  Chatelat,  «  villa  Ca- 
talacensis  »,  situé  à  peu  de  distance  de  Limoges;  que  son  en- 
fance et  sa  jeunesse  s'écoulèrent  dans  ce  village  et  à  Limoges, 
où  il  travailla,  comme  on  sait,  sous  la  direction  d'Abbon,  alors 
chef  de  l'atelier  public  des  monnaies  de  cette  cité. 

Il  avait  donc  assisté,  durant  bien  des  années,  aux  pratiques 
superstitieuses  qui  abondent  dans  les  régions  montagneuses 
du  massif  central.  Il  avait  dû  même  sans  doute  y  prendre 
part,  et  il  est  tout  naturel  de  penser  qu'en  décrivant  les  cou- 
tumes païennes  qu'il  interdisait  à  son  troupeau,  il  s'inspirait 
beaucoup  des  souvenirs  des  premières  périodes  de  sa  propre 
existence. 

Il  est  même  à  remarquer  que,  parmi  les  prélats  du  haut 
moyen  âge  dont  les  discours  nous  ont  été  conservés,  il  est  un 
de  ceux  qui  se  sont  le  plus  étendus  sur  ce  sujet. 

Nous  sommes  conséquemment  autorisé  à  croire  que  lorsqu'il 
condamnait  avec  tant  de  véhémence  des  superstitions  invé- 
térées, S.  Eloi  avait  présentes  à  sa  mémoire  celles  de  son 
pays  natal. 


1.  «  Nullus,  si  quando  Luna  obscuratur,  vociferare  praesumat,  quia  Dco 
jubente  certis  tcmporibus  obscuratur,  nec  Lunâ  nova  quisquam  timcat  ali- 
quid  operis  arripere  quia  Deus  ad  hoc  Lunam  fecit,  ut  tempora  designet 
et  noctium  tenebras  temperct,  non  ut  alicujus  opus  impediat,  aut  demen- 
tem  faciat  hominem,  sicut  stulti  putant,  qui  a  dacmonibus  invasos  a  Luna 
pati  arbitrantur  ».  D'Achery,  loc.  cit.,  p.  216. 

Revue  Celtique,  IX.  29 


442  M.  Deloche. 

Nous  avons  enfin  quelques  témoignages  de  la  persistance, 
dans  cette  région,  d'usages  qui  prouvent  le  rôle  important  at- 
tribué à  la  lune  l. 

S.  Eloi  disait,  comme  on  l'a  vu  plus  haut,  qu'elle  «  servait 
«  à  désigner  et  à  marquer  les  temps  ».  «  Deus  ad  hoc  lunam 
«  fecit,  ut  tempora  designet  »  2. 

En  voici  un  exemple.  A  Tulle,  au  moyen  âge,  on  men- 
tionnait, dans  l'acte  de  présentation  d'un  nouveau-né  sur  les 
fonds  du  baptême,  la  phase  lunaire  pendant  laquelle  la  nais- 
sance avait  eu  lieu  :  Les  registres  des  actes  de  notaires  du 
xve  siècle  en  contiennent  plusieurs  :  l'un  d'eux,  daté  du  18  fé- 
vrier 1473  (n.  s.),  porte  ces  mots  :  «  Luna  erat  in  descensu, 
«  in  tercio  quartierio  5  » . 

Un  deuxième  fait  à  noter  est  le  suivant:  dans  les  marchés 
passés  entre  les  marchands  de  bois  et  les  entrepreneurs  de  flot- 
tage sur  la  haute  Dordogne  et  ses  affluents,  les  délais  pour  le 
transport  et  la  livraison  se  comptent  encore,  non  par  jours, 
mais  par  lunes. 

Quelle  est  la  raison  de  ce  mode  de  computation  ?  C'est  que 
la  Lune  est  la  reine,  la  déesse  de  la  nuit,  et  que,  chez  les 


1 .  Dans  les  métairies  des  environs  de  Tulle,  quand  une  des  bêtes  à 
cornes  est  malade,  le  paysan  va  la  nuit  dans  le  champ  le  plus  voisin,  où  il 
sait  que  croît  la  camomille,  et,  à  la  clarté  de  la  lune,  il  cueille  une  gerbe  de 
fleurs  de  cette  plante  et  en  fait,  sur  place,  une  couronne  qu'il  passe  au  cou 
de  l'animal  malade.  Je  ne  sais  si  cet  usage  s'est  maintenu,  mais  il  existait 
encore  il  y  a  trente  ans,  d'après  les  récits  que  m'en  ont  fait  des  paysans.  Il 
est  à  remarquer  que,  dans  son  Livret  de  la  Lunade,  le  F.  Béril  nous  apprend 
«  que  suivant  la  tradition  de  père  à  fils,  quelques  hommes  vieux  et  plusieurs 
jeunes  garçons  en  grand  nombre  ont  gardé  jusqu'à  présent  la  sainte  et 
louable  coutume  d'aller  à  la  Lunade,  en  chemise...,  ceints  de  ceinture, 
pies  nus,  tête  nue,  portant  par-dessus  leur  habit  blanc  de  grands  chaperons 
de  fleurs  de  camomille  en  forme  d'écharpes  ». 

2.  Vit.  S.  Eligii,  dans  D'Acherv,  Spicileg.,  édit.  in-4,  t.  V,  p.  216. 

5.  Voici  le  texte  entier  de  cet  acte  intéressant:  «  Die  iSa  februarii,  anno 
1472,  circa  auroram  diei  sive  alouïba  (à  l'aube),  natus  est  Petrus  Octavus 
Genitus;eum  levaverunt  de  fontibus  dominus  Petrus  Arnaldi  presbiter  et 
Isabellis  de  Saquet,  filia  Johannis  Saquet  Tutelle.  Luna  erat  in  descensu,  in 
tercio  quartierio.  Sextarium  siliginis  valebat  5  solidoset  6d  ;  sextar.  i'rumenti, 
8S  4d  ;  sextar.  avene,  4S' et  4d;  pinto  vini  3d  ».  Arch.  départ,  delà  Corrè\e, 
Registres  des  actes  des  notaires  publics  de  Tulle  aux  xve  et  XVIe  siècles, 
liasse  81,  fol.  36.  Il  y  a  des  actes  conformes  à  celui  que  nous  rapportons, 
aux  années  1460,  1465  et  1475- 


La  Procession  dite  de  la  Lunade.  443 

Gaulois,  la  période  diurne,  au  lieu  de  commencer,  ainsi  que 
cela  a  eu  lieu  depuis,  suivant  le  système  romain,  au  milieu  delà 
nuit,  commençait  avec  la  nuit  même,  et  finissait  quand  le  jour 
finissait. 

Cette  dernière  remarque  nous  conduit  à  exposer  la  deuxième 
et  principale  raison  de  la  fixation  du  commencement  de  la 
procession  de  la  Lunade  au  lever  de  la  Lune,  c'est-à-dire  à 
l'entrée  de  la  nuit. 

VI. 

«  Dans  la  doctrine  druidique,  nous  dit  M.  d'Arbois  de  Ju- 
«  bainville,  la  mort  précède  la  vie;  la  mort  engendre  la  vie, 
«  et,  comme  la  mort  est  identique  à  la  nuit,  et  la  vie  identique 
«  au  jour,  la  nuit  précède  et  engendre  le  jour.  De  même,  dans 
«  le  monde  divin  des  Irlandais,  les  Fomôré,  dieux  de  la  nuit 
«  et  de  la  mort,  sont  chronologiquement  antérieurs  aux 
«  Tuâtha  de  Danann,  dieux  du  jour  et  de  la  vie1.  » 

Cela  nous  fait  bien  comprendre  le  passage  suivant  du  livre  VI 
des  Commentaires  de  la  guerre  des  Gaules,  où  César  a  donné, 
comme  on  sait,  un  tableau  comparatif  des  croyances,  des  ins- 
titutions et  des  mœurs  des  Gaulois  et  des  Germains  : 

«  Les  Gaulois,  dit-il,  se  proclament  tous  issus  de  Dis  pater 
«  (le  Jupiter  infernal  ou  Pluton),  et  disent  tenir  cette  tradition 
«  de  leurs  druides.  Pour  cette  cause,  ils  mesurent  les  inter- 
«  valles  de  tout  temps  (c'est-à-dire  de  toute  période),  non  par 
'  «  le  nombre  de  jours,  mais  par  le  nombre  de  nuits  ;  et  ils  mar- 
«  quent  les  jours  de  naissance  et  les  commencements  des 
«  mois  et  des  années  de  la  vie,  de  façon  que  le  jour  suit  la 
«  nuit.  »  —  «  Galli  se  omnes  ab  Dite  pâtre  prognatos  praedicant, 
«  idque  ab  druidibus  proditumdicunt.  Ob  eam  causam  spatia 
«  omnis  temporis  non  numéro  dierum  sed  noctium  finiunt;  dies 
«  natales  et  mensium  et  annorum  initia  sic  observant,  ut 
«  noctem  dies  subsequatur2.  » 

1.  Cours  de  littérature  celtique,  t.  II  (Le  cycle  mythologique  irland.  et  la 
mytholog.  celtiq.),  p.  104. 

2.  Caesar,  de  Bello  Gallico,  VI,  18;  édit.  de  C.  Nipperdey,   p.  393;  éd. 
de  D.  Dinter,  dans  la  collect.  Teubner,  p.  114. 


444  M.  Deloche. 

Ce  que  César  a  si  formellement  constaté  chez  les  Gaulois, 
Tacite  l'a  observé  chez  les  anciens  Germains  :  «  Ce  n'est 
«  point,  dit-il,  par  le  nombre  des  jours,  comme  nous  le  fai- 
«  sons,  mais  par  le  nombre  de  nuits  qu'ils  comptent;  ils  ont 
«  établi  cette  règle  qui  est  observée  de  tous  :  la  nuit  semble 
«  précéder  le  jour.  »  —  «  Nec  dierum  numéro,  ut  nos,  sed 
«  noctium  computant.  Sic  constituunt,  sic  condicunt  :  nox 
«  ducere  diem  videtur r.  » 

C'est  pourquoi  nous  retrouvons  le  même  système  de  com- 
putation  dans  la  Loi  Salique2,  dans  les  Capitulaires  des  rois 
mérovingiens,  additionnels  à  cette  loi  3,  dans  les  traités  de 
paix  et  décrets  de  ces  princes  4,  dans  l'Appendice  aux  Formules 
de  Marculfe  5  et  dans  la  Lex  emendata,  édictée  par  Charle- 
magne6. 

De  là  vient  aussi  que,  suivant  la  remarque  de  Jérôme  Bi- 
gnon,  beaucoup  de  personnes  disaient  encore  de  son  temps 
(première  moitié  du  xvne  siècle):  Anuicî,  comme  hac  nocte 
(cette  nuit)  pour  aujourd'hui  7.  Enfin,  dans  le  patois  du  bas 
Limousin,  où  nuit  s'exprime  par  ne,  on  emploie,  pour  dire  au- 
jourd'hui, le  mot  onè,  par  abréviation  pour  oquesto  ni,  qui  si- 
gnifie proprement  cette  nuit,  comme  on  parlait  autour  du  sa- 
vant jurisconsulte  parisien8. 

Ainsi  s'explique  ce  fait  que  le  solstice  d'été,  qui  tombe  le 
24  juin,   était  célébré  par  les  Gaulois  le   2)  au  soir  :  c'est 


1.  De  morîbus  Germaniae,  cap.  xi.  Edit.  des  Œuvres  de  Tacite  par  C. 
Halm,  dans  la  collect.  Teubner,  1875,  t.  II,  p.  197. 

2.  Voir  dans  Behrend  et  Boretius,  Lex  Salica,  etc.,  le  Pactus  Legis  Sali- 
cae,  tit.  XXXVI,  XXXVII,  XLV,  L,  LU,  LVI;  p.  44,  45>  49,  59,  65,  69 
et  73. 

3.  Ibid.,  p.  91,  96,  114. 

4.  Ibid.,  p.  101,  103,  107,  109. 

5.  E.  de  Rozière,  form.  cccclxxix,  t.  II,  p.  581. 

6.  Tit.  XXXIX,  XLII,  XLVII,  XLIX,  LU,  LIV,  LIX.  Pardessus,  La 
Loi  salique,  p.  301,  303,  308,  310,  311,  313  et  316. 

7.  «  Quo  fit  ut  ad  haec  usque  tempora  plerique  anuict,  quasi  hac  nocte 
pro  hodie,  usurpent.  »  Hieronvmi  Bignonii  notae  ad  Appendicem  Marculfi. 
Cf.  Baluze,  Capitul.  reg.  Francor.,  t.  II,  col.  955.  J.  Bignon,  né  en  1589, 
est  mort  en  1656.  Son  édition  des  Formules  de  Marculfe  a  paru  en  1610. 

8.  Mes  savants  confrères,  MM.  Hauréau,  Pavet  de  Courteille  et  Siméon 
Luce  m'ont  fait  connaître  que  l'on  se  servait  de  termes  analogues  dans  les 
patois  du  Maine  et  de  Normandie. 


La  Procession  dite  de  la  Lunade.  445 

parce  que,  à  ce  moment,  en  réalité,  s'ouvrait  chez  eux  la  pé- 
riode diurne  du  solstice  du  24  juin. 

C'est  pour  le  môme  motif  que  les  feux  de  la  Saint-Jean 
étaient  et  sont  encore  allumés  la  veille  au  soir  et  non  le  jour 
de  la  Nativité  du  Précurseur,  c'est-à-dire  du  solstice. 

Enfin,  telle  est  sans  doute  l'origine  de  cet  usage  général  de 
célébrer  les  fêtes  patronales  des  particuliers  et  de  leur  porter 
les  offrandes  avec  les  vœux  des  parents  et  des  amis,  non  pas 
le  jour,  mais  la  veille  au  soir  de  leur  fête. 

Des  développements  qui'  précèdent,  ressort  cette  conclusion 
que,  suivant  toutes  les  probabilités,  la  procession  limousine  de 
la  Lunade  tire,  comme  les  Feux  de  la  Saint-Jean,  son  origine 
première  de  la  cérémonie  païenne  du  Solstice  d'été,  que 
l'Eglise  a  simplement  transformée  en  une  fête  consacrée  à 
S.  Jean-Baptiste. 

VII. 

A  quelle  époque  cette  transformation  s'est-elle  opérée  ?  Nous 
n'avons  aucun  moyen  de  l'indiquer,  même  approximativement. 

A  partir  du  moment  où  la  Nativité  de  S.  Jean-Br.ptiste  eut 
été  mise  au  rang  des  fêtes  chrétiennes  (ce  qui  remonte  au 
moins  au  premier  tiers  du  ve  siècle) 1  et  que  la  célébration  en 
eut  été  fixée  au  24  juin,  c'est-à-dire  au  jour  de  la  grande  fête 
gauloise  du  solstice  d'été,  l'Église  s'efforça  de  faire  disparaître 
les  pratiques  païennes  que  les  populations  s'obstinaient  à  ob- 
server à  cette  date.  L'histoire  nous  enseigne  que  ses  efforts 
restèrent  longtemps  infructueux.  Il  en  dut  être  ainsi,  plus 
qu'en  toute  autre  contrée,  parmi  les  habitants  du  centre  de  la 
Gaule,  qui  furent  toujours  les  derniers  à  renoncer  à  leurs 
vieilles  coutumes.  Aussi  est-il  à  présumer  que,  jusque  dans 
une  période  assez  récente  du  moyen  âge,  on  célébrait  encore 


1.  Voir,  dans  le  mémoire  de  M.  Breuil,  cité  plus  haut  (p.  434),  les  ren- 
seignements concernant  l'ancienneté  de  la  fête  de  la  Nativité  de  S.  Jean 
(Mém.  de  la  Soc.  des  Antiquaires  de  Picardie,  t.  VIII,  p.  161-162.  Cet  écri- 
vain l'a  fait  remonter  au  IVe  siècle  ;  mais  nous  croyons  qu'il  convient  de 
s'en  tenir  au  commencement  du  Ve  siècle,  où  s'arrêtent  les  preuves. 


446  M.  Deloche. 

à  Tulle  et  en  bas  Limousin  la  fête  du  solstice,  la  veille  de  la 
Saint-Jean. 

En  l'absence  de  tout  document  historique  qui  permette  de 
déterminer  l'époque  de  l'institution  de  la  cérémonie  religieuse 
de  la  Lunade,  on  peut,  ce  semble,  comme  nous  l'avons  an- 
noncé dans  la  première  partie  du  présent  mémoire,  concilier 
notre  thèse  avec  le  récit  légendaire  du  P.  Béril. 

En  effet,  d'après  la  notice.de  la  confrérie  de  S.  Léger, 
publiée  par  Baluze,  la  guerre,  la  famine  et  une  épidémie 
meurtrière  causaient,  en  1348,  de  terribles  ravages  dans  le  bas 
Limousin,  et  comme  les  populations  continuaient  de  célébrer, 
le  23  juin  au  soir,  la  fête  païenne  du  Solstice  d'été,  rien  n'em- 
pêche de  supposer  qu'aux  approches  de  ce  jour,  un  des  reli- 
gieux de  l'abbaye  de  Saint-Martin  de  Tulle  imagina  de  mettre 
à  profit  l'épouvante  qui  régnait  alors  dans  le  pays  pour  déter- 
miner les  habitants  à  changer  la  procession  annuelle  du  Sols- 
tice en  une  procession  destinée  à  honorer  le  saint  précurseur 
du  Christ.  La  nouvelle  cérémonie  religieuse  aurait  été  natu- 
rellement réglée  de  manière  à  s'effectuer  le  même  jour,  au 
même  moment  que  l'ancienne,  et  suivant  un  rite  se  rappro- 
chant autant  que  possible  du  rite  gaulois. 

Dans  cette  circonstance,  comme  dans  beaucoup  d'autres, 
l'Eglise  aurait  rattaché  au  culte  chrétien  une  solennité  païenne 
dont  elle  n'avait  pu,  jusque-là,  obtenir  l'abandon. 

M.  Deloche. 


THE  VOYAGE  OF  MAEL   DUIN 


The  following  ancient story,  now  for  the  first  time  published 
in  thc  original,  is  said  to  hâve  been  arrangée!  by  one  Aed 
the  Fair,  chief  sage  (ardeenaid)  of  Ireland.  Of  him  I  know 
nothing,  the  onlv  Aed  Finn  mentioned  in  the  Annals  having 
been  the  chief  of  Dal  Riata,  who  died  A.  D.  771,  andwhowas 
probably  more  given  to  making  raids  and  beheading  his  foes 
than  to  composing  imaginative  literature.  The  author  seems 
to  hâve  been  a  layman,  for  had  lie  been  a  cleric  he  would 
hardly  hâve  called  one  of  his  own  body  after  the  malignant 
Briccne  of  the  Conchobar-cycle;  and  he  would  hardly  hâve 
recounted  the  incidents  in  the  introduction  and  chap.  xxvm 
with  such  a  total  absence  of  professional  denunciation.  But 
he  seems  to  hâve  had  some  classical  culture,  for  he  cites  Vergil 
and  the  Vulgate. 

The  text  is  taken  from  four  vellums,  ail  more  or  less  defect- 
ive,  which  are  hère  denoted  respectively  by  LU.,  YBL.,  H., 
and  E. 

LU.,  the  Lebor  na  hUidre,  is  a  ms.  written  about  1100, 
and  preserved  in  the  library  of  the  Royal  Irish  Academy, 
Dublin.  This  codex  contains  two  large  fragments  of  our  story, 
namely,  in  p.  22  the  first  halfofthe  introduction,  and  in 
pp.  23-26  (which  are  divided  into  chapters  numbered  with 
roman  mimerais)  the  latter  half  of  chap.  X,  the  whole  of 
chapters  XI-XXVI,  and  the  beginning  of  chap.  XXVII.  I 
hâve  transcribed  from  the  lithographie  facsimile  published 
in  1870. 

YBL.,  the  Yellow  Book  of  Lecan,  is  a  ms.  in  the  library  of 
Trinity  Collège,  Dublin,  marked  H.  2.  16.  This  codex  is  of 


448  Whitley  Stokes. 

various  dates.  Columns  370-340  contain  the  whole  ofour  story 
except  its  last  two  sentences,  and  seem  to  hâve  been  written 
in  the  fourteenth  century.  I  hâve  transcribed  from  a  photo- 
graph  made  for  me  by  Mr  Mercer  of  30  Westmoreland  Street, 
Dublin. 

H.  is  a  fifteenth  century  ms.  in  the  British  Muséum,  marked 
Harleian  5280.  Our  story  begins  at  fo.  ia  and  ends  imper- 
fectly  at  fo.  20b,  with  the  sixth  line  of  the  verses  following 
chap.  XXXI. 

E.  is  another  ms.  in  the  British  Muséum,  marked  Egerton 
1782,  and  written  in  the  fifteenth  orbeginning  of  the  sixteenth 
century.  It  contains  two  fragments  of  our  story.  The  first 
fragment  (fo.  124%  i24b)  comprises  the  latter  half  of 
chap.  XVII,  chapters  XVIII-XXV  and  the  beginning  of 
chap.  XXVI.  The  second  fragment  (fo.  125%  125 b)  com- 
prises the  latter  part  of  chap.  XXXII,  and  the  whole  of 
chap.  XXXIII. 

There  are  no  verses  in  the  copies  contained  in  LU.  and  E. 
But  the  copies  in  YBL.  and  H.,  at  the  end  of  each  chapter, 
give  its  substance  in  Irish  verse.  The  latter  copies,  moreover, 
prefix  to  the  story  a  poem  in  four  stanzas,  each  consisting 
of  two  twelve-syllabled  rhyming  lines.  Of  thèse  stanzas  the 
following  is  the  first  : 

Ardri  uasal  na  n-uile1,  tustidhe 2  in  3  domuin, 
in  gach  aimsir,  is  in4  gach  re,  ron-be  a  chobairS  ! 

that  is  : 

The  noble  overking  of  ail  things,  the  parent  of  the  world, 
In  every  time  and  in  every  season  may  we  hâve  His  help  ! 

The  story  seems  to  me  full  of  fancy  and  even  ot  Imagina- 
tive power;  and  I  am  unable  to  make  more  than  a  tew  guesses 
at  the  sources  of  the  author's  inspiration. 


1 .  uasol  inanuile,  H. 

2.  Sic  H.  tuistidhi,  YBL. 
3  .   Sic  H,  an  YBL.     , 

4.  Sic  W,  an  YBL. 

5 .  Sic  H.  imachobair  YBL. 


The  Voyage  of  Mael  Duin.  449 

Two  of  the  incidents  (in  ce.  XXI  and  XXVIII)  may  hâve 
been  suggested  by  the  words  oi  Calypso  and  the  cast  made 
by  the  Gyclops  in  the  Odyssey.  The  intoxicating  fruits 
(chap.  XXIX),  and  the  need  of  mingling  their  juice  with 
water,  remind  one  of  the  fishes  in  Lucian's  Vera  Historia,  oi'vw 
[jS/dz'x  xat  tyjv  xpwàv  xat  tïjv  yeùavi  7cpoaectxéTaç.  The  enormous 
nuts  cast  into  the  sea  (chap.  XXIV)  recall  the  nutshells  used 
by  the  Kapuavau-ta'.  as  boats  :  the  ants  as  large  as  foals  (chap.  II) 
the  'iTciucp.ûppjxeç.  The  acçount  (chap.  X)  of  the  swine-like 
beasts  that  shook  with  their  tails  the  golden  apples  from 
the  trees  may  be  compared  with  that  of  the  mysterious  animais 
of  Taprobanê  which  (in  fragment  LIX  of  Megasthenes,  éd. 
Schwanbeck)  coil  their  tails  round  the  date-palms  and  shake 
them  so  violently  that  the  ripe  fruit  cornes  tumbling  down. 
The  serpents  of  enormous  size  mentioned  in  the  -same  frag- 
ment, «  of  which  some  kinds  seize  the  cattle  when  at  pasture 
and  devour  them  »,  may  bave  suggested  the  description  in 
chap.  XXIII  of  the  tree-python  seizing  and  devouring  the  ox. 
The  pilgrim  «  whose  clothing  was  his  hair  »  (chap.  XIX)  re- 
minds  one  of  S.  Mâcarius   (Wright,  St  Patrick's  Purgatory, 

P-  97)- 

From  otlier  Irish  stories  the  wrker  may  hâve  taken  the 
name  Briccne,  which  is  =  Briccriu  Nemthenga  («  poison- 
tongue  »,  «  bisweilen  Bricni  geschrieben1  »)  of  the  Con- 
chobar-cycle.  The  incident  of  the  lady  drawing  back  her 
departing  lover  by  means  of  the  thread  of  a  magie  clew 
(chap.  XXVIII)  occurs  also  in  the  story  of  Bran  mac  Febail 
(LU.,  p.  I2ia),  and  in  the  account  of  the  Argonautic  expé- 
dition prefïxLd  to  the  Togail  Trot,  Book  of  Leinster,  22 ib. 
The  accounts  of  the  mill  and  the  Miller  of  Hell  (chap.  XIV) 
the  Island  ot  weeping  (chap.  XV),  and  the  Island  of  laughter 
(chap.  XXXI)  are  tound  also  in  the  Imram  hua  Corra,  Book 
of  Fermoy,  ff.  io5a-io8b.  And  the  notion  of  the  food  that 
tastes  as  the  eater  prefers  (chap.  XVI)  occurs  elsevhere  in 
Irish    literature.    So  does  the  fancy    that  the    soûls   of  the 


Windisch,  Wœrterbuch,  p.  871. 


450  Whiîley  Stokes. 

departed  abide  hère  in  the  forms  of  birds  (chap.  XIX).  The 

incident  in  chap.  XII,  of  the  white  sheep  becoming  black, 
and  the  black  sheep  becoming  white  reminds  one  of  passage 
in  the  Mabinogi  of  Peredur,  R.  B.  Mab.  225,  Guest's  Mab., 

I>  344- 

But  the  pièce  from  which  our  author  has  apparently  drawn 
most  is  the  Perigrinatio  (or  Navigatio)  sancti  Brandani  Ab- 
batis,  a  Latin  romance,  of  which  one  copy,  said  to  be  of  the 
ninth  century1,  ispreserved  in  the  Vatican  (Regin.  Christinae, 
217,  vell.  4t0):  another  of  the  twelfth  century  (Ms.  2333,  A. 
Colbert)  has  been  published  by  M.  Achille  Jubinal2  and  Dr 
Moran  5  ;  and  a  third,  also  of  the  twelfth  century  (in  the 
«  Ms.  844  der  Pauliner  Bibliothek  zu  Leipzig  »),  by  Dr 
Cari  Schrôder4.  The  passages  of  this  romance  which  seem 
to  hâve  been  imitated  by,  or  known  to,  Aed  Finn  are  quoted 
in  the  notes  to  the  following  translation. 

Two  or  three  small  portions  of  the  text  now  printed  hâve 
been  published,  with  more  or  less  incorrectness,  by  Dr  Pé- 
trie 5,  O'Curry6,  and  Crowe/. 

A  translation  of  the  whole  text  by  Crowe,  which  I  hâve 
never  seen,  is  said  to  be  in  the  library  of  the  Royal  Iiïsh  Aca- 
demy.  The  so-ealled  translation  printed  in  Dr  Joyce's  Old 
Celiic  Romances,  pp.  1 12-176,  is  intended  for  popular  reading, 
not  serious  criticism.  One  may,  at  ail  events,  say  that  it  has 
suggested  to  a  great  English  fili,  Lord  Tennyson,  a  poem  — 
The  Voyage  of  Maeldune  —  which  is  full  of  colour  and  music, 
—  full,  too,  ofwise  counsel  for  the  Irish,  —  though  it  bears, 
as  we  shall  see,  only  a  remote  relation  tothe  original. 


1 .  Hardy's  Descriptive  Catalogue  of  Materials  relating  to  the  bistory  oj 
Great  Britain  and  Ireîand,  i.  159. 

2.  La  Légende  latine  de  S.  Brandaines.  Paris,  1856. 

3.  Acta  Sancta  Brendani.  Dublin,  1872,  pp.  85-131.  Dr  Moran  mentions 
another  ms.  in  the  Bibl.  Sessoriana,  Rome,  no.  114,  «  probably  of  the 
nt'h  century  ». 

4.  Sanct  Brandan,  Erlangen,  1871. 
3.   Round  Toïcers,  p.  378. 

6.  Manners  and  Customs,  III,  pp.  159,  164. 

7 .  In  a  note  to  his  édition  of  the  Siabarcharpat  Concuhinn,  p.  440. 


The  Voyage  of  Mael  Duin. 
CONTENTS. 


45' 


Introduction.      Mael  duin's  conception.  His  father's  murder. 

Mael  duin's  birth  and  rearing.  He  sets  out 

by  sea  to  avenge  his  father. 
Chap.  I.  He  finds  the  murderers  in  an  island,  but  be- 

fore  he  can  slay  them  is  driven  away  to 

the  océan  by  a  storm. 
IL  The  Island  of  the  enormous  Ants. 

III.  The  Island  of  the  great  Birds. 

IV.  The  horselike  Monster. 

V.  The  Démons'  Horserace. 

VI.  The  House  of  the  Salmon. 
VIL  The  wondrous  Fruit. 

VIII.  The  feats  of  the  Island  Beast. 

IX.  The  Fighting  Horses. 

X.  The  Fiery  Beasts  and  the  Golden  Apples. 
XL  The  Guardian  Cat. 

XII.  The  Transformed  Sheep  and  Rods. 

XIII.  The  Island  of  th,e  Swine,  the  Burning  River 

and  the  enormous  Calves. 

XIV.  The  Mill  for  grinding  begrudged  Wealth. 

XV.  The  Island  of  the  black  Wailers. 
XVL        The  Island  of  the  Four  Fences. 

XVII.  The  Magic  Bridge  and  thebeautiful  Hostess. 

XVIII.  The  Island  of  the  chanting  Birds. 

XIX.  The  Island  of  the  lonely  Pilgrim. 

XX.  The  Island  ofthe  wondrous  Fountain. 

XXI.  The  Island  of  the  savage  Smiths. 

XXII.  The  Sea  ofGlass. 

XXIII.  The  Sea  of  Cloud  and  the  Tree-python. 

XXIV.  The  Cliffs  of  Water  and  the  terrified  Islanders. 

XXV.  The  Water-Arch  and  the  Salmon. 

XXVI.  The  Silver  Column  and  the  Silver  Net. 

XXVII.  The  Island  on  the  Pedestal. 

XXVIII.  The  Island  Queen  and  her  Seventeen  Daugh- 

ters. 

XXIX.  The  Intoxicating  Fruits. 

XXX.  The  Hermit  and  the  Ancient  Eagle. 

XXXI.  The  Island  of  the  Laughers. 

XXXII.  The  Island  ofthe  RevolvingRampart  of  Fire. 

XXXIII.  The  Hermit  from  Torach. 

XXXIV.  The  Return  to  Ireland. 


4$ 2  Whitley  Stokes. 


[L.  U.  22*.] 

IMmram  Curaig  Mailduin  inso1. 

tri  bliadna  7  .w/;/  mis  iss  ft/  bôi  fbr'merogod  issind  ocian-. 

Bai  fer  amra  di  Eoganacht  Ninussa  (.1.  Éoganacht  na 
n-Arand)  .1.  Ailill  Ochair  Aga  a  ainm>.  Trén  milid  sede,j 
lséch-thigerna  a  thuathi  7  a  cenéoil  fein,  Mac-caillech  banair- 
chinnech  cilli  caillech  rochomraic-seom  fria.  Bai  mac  saine- 
mail  etorro  diblinaib  .1.  Miel  duin  mac  Ailella  esside. 

Iss  e  cruth  iarsa  luid  a  chomp^rt-som  7  a  gein  Maili  duin  4. 

Fechtus  dolluid  ri  Eoganachta  ior  tiri  hi  crich  7  hi  cenda- 
thaig  n-aile5,  7  Ailill  Ochair  Agai  [22b]  ina  choemtecht. 
Scorsit  7  gabsit  dûnad  hi  sleib  and.  Bôi  cell  chaillech  hi  com- 
îocus  don  tsleib-sin6.  Medôn-aidchi  iarom,  o  roan  cach  do  im- 
techt  is  dùnud,  luid  Ailill  don  chill.  Is  é  trâth  sôndodeochaid 
in  chaillech/  do  béim  chluic  do  iarmérgi.  Gabais  Ailill  a  ldim8, 
7  dos-tascar93  7  dogéni  a  coblige.  Asbtvt  in  banscdl  fris:  «  Ni 


1 .  Incipit  do  imrum  (de  nauigatione.  H.)  curaig  Mael  duin  andso,  YBL 

2.  De  navigatione  Mxl  duin  anno  intigro  et  .iiii.  mensibus,  et  de  mir- 
builibus  (mirapilibus,  //.)  ighnotis  quae  indiuisa  Trinitas  illi  ostenndit  in 
ociano  intînito,  YBL. 

3 .  Do  Eoganacht  Ninais  do  Madduin  ar  in  bunadzw.  Aïïill  acher  agha  a 
athair. 

4.  For  rochomraic...  duin,  YBL.  has  :  a  matha/r.  IS  amlaid  d'idiu  for- 
caemnacair  a  compert-so»z. 

5.  for  creich  7  innrud  ilchendadach,  YBL. 

6.  isan  maighin-sin  .i.  cell  dara  aniu,  YBL. 

7.  tanic  an  banaircindeach,  YBL. 

8.  doscuir  do  Ailill,  7  gabais  Ailill  a  laim  lais,  YBL. 

9.  dodatrascair.  YBL.  dodotascuir,  H. 


The  Voyage  of  Mael  Duin.  45  3 


THE  VOYAGE  OF  MAEL  DUIN  S  BOAT  THIS. 

Three  years  and  sevcn  months  was  H  wandering  in  the  océan. 

There  was  a  famous  man  of  the  Eoganacht  of  Ninuss  (that 
is,  the  Eoganacht  of  the  Arans)  :  his  name  was  Ailill  of  the 
Edge  of  Battle1.  A  mighty  soldier  was  he,  and  a  hero-lord  of 
his  own  tribe  and  kindred.  And  there  was  a  young  nun,  the 
prioress  of  a  church  of  nuns,  with  whom  he  met.  Between 
them  both  there  was  a  noble  boy,  Mael  duin,  son  of  Ailill, 
was  he. 

This  is  the  way  according  to  which  Mael  duin's  conception 
and  his  birth  came  to  pass. 

Once  upon  a  time  the  king  ofthe  Eoganacht  wenton  a  raid 
into  another  district  and  province 2,  and  with  him  fared  Ailill 
of  the  Edge  of  Battle.  They  unyoked  and  encamped  on  an 
upland  therein.  There  was  a  church  of  nuns  near  to  that 
upland'.  At  midnight,  then,  wheneveryone  had  ceased  from 
moving  in  the  camp,  Ailill  went  to  the  church.  It  was  the 
hour  that  the  (aforesaid)  nun  went  to  strike4  the  bellfornoc- 
.turn.  Ailill  caught  her  hand,   and  threw  her  down,  and  lay 


1.  ochair  gen.  of  ochar  «  edge  »  =:  W.  ochr,  Skr.  açri-s,  Gr.  a/po;, 
a/p.:,  o/.-.;:,  occurs  in  composition  in  ochar-clsss  one  of  Cûchulainn's  feats  : 
cf.  faebor-chless.  àga  sg.  gen.  of  âg  cognate  with  âytov  and  Skr   dji-s. 

2.  LU.  hère  seems  corrupt.  YBL.  «  upon  a  raid  and  inroad  on  main- 
provinces  ». 

3 .  YBL.  has  «  in  that  place,  even  Kildare  today.  » 

4.  to  strike  (not  to  ring)  the  bell,  which  was  tongueless,  asstill  in  Coptic 
churches. 


4$4  Whitley  Stokes, 

scgda  ar  cor1  »,  ol  si:  «  amser  chomprrta  damsa  inso2  »,  ol 
si.  «  Can  do  chenel  7  cia  th'ainm?  »  ol  si. 

Asbrrt  in  lséch:  «  Ailill  Ochir  Aga  mo  ainm-se  »,  ol  se: 
«  di  Eoganacht  Ninussa>  (.1.  a  tûath-mumain)  ». 

Luid  iarom  in  ri  dia  chrich.4  iar  n-inriud  7  giallai  do  5, 
7  Ailill  dam?  lais. 

Gair  iar  richtain  do  Ailill  dia  thûaith  nan-ortatar  ditwcaig 
lôinçse.  Loscit  Dubcluâin  fair6. 

Tofuisim  a  mbanscdl  mac  cind  nôi  mis,  7  dobtrt  ainm  fair  7; 
Maél  dûin  esede.  Bretha  in  mac  iarsin  fô  chlith  cûa  bancharait 
.i.  co  rigain  ind  rig,  7  alt-som  la  sudi,  7  asbtTt  bd  si  amdthair. 


Rodn-alt  iarom  oen  mumme  éseom  7  tri  maie  ind  rig  i 
n-6enchliab  7  for  éënchich  7  îor  énchûd8. 

Alaind  àidiu  a  delb-som,  7  is  infechtain  ma  roboi  hi  col- 
aind  nech  bed  chomalaind  dô.  Asais  iarom  co  mbu  oclâch  [7] 
co  mbu  thûalaing  airb/Vt9  gascid.  Ba  môr  aa.no  a  aine  7  a  uall- 
chas  7  a  chluichechaire.  Bd  forggaine  for  'câch  a  cluiche10, 
et/r  imarchor  liathrdite  7  rith  7  leim  7  cur  liac  7  imrim  ech. 
Bd  leis,  tri,  Luiaid  cech  cluchi  dib-sin. 

Laa  n-ôen  and  roformdigestdr  alaile  oclasch amsach  friss11,^ 


1 .  comruc,  YBL. 

2.  annosa,  YBL,  indossa,  H. 

3 .  Minais  dam,  YBL. 

4.  tigh,  YBL. 

5.  iar  n-innrud  na  enche  7  iar  ngialladh  do,  YBL. 

6.  Gar  bec  iarum  iar  riachtain  do  Ailill  dia   tig  rod-marbsad  dibergaig 
Laigsi,  7  loiscit  fair  in  chill  dianadh  ainm  Dubcluâin,  YBL. 

7.  Tic  dawo  amser  tuismidh  (tuismedho,  H.)  do  (don,  H.)  caillig  a  cind 
noi  m's,  7  berig  [leg.  beridj  mac,  7  doberar  ainm  fair,  YBL. 

S.    7  xn  glun,  YBL. 
9.   imberta,  YBL. 

10.   7  ba  fortail  for  cach  in  gach  cluiche  dognitis,  YBL. 
1 1  .   gabais  formud  (format  fris.  H.)  oclach   diumsach  don  macraid  fris, 
YBL. 


The  Voyage  of  Mael  Duin.  45  5 

with  her.  Said  the  woman  to  him  :  «  Unblessed  is  our  state1  », 
saith  she,  «  (for2)  this  is  the  time  for  my  conceiving.  Whence 
is  thy  race  and  what  is  thy  name  ?  » 

Said  the  hero  :  «  Ailill  of  the  Edge  of  Battle  is  my  name, 
(and  I  am)  of  the  Eoganacht  of  Ninuss  in  Thomond.  » 

Then  after  ravaging  and  taking  hostages,  the  king  returncd 
to  his  district,  Ailill  also  being  with  him. 

Soon  after  Ailill  had  reached  his  tribe,  marauders  of  Leix3 
slewhim.  They  burn  (the  church  named)  Dubcluain  upon  him. 

At  the  end4  of  nine  months  the  woman  brought  forth  a 
boy,  and  gave  him  a  name,  Mael  duin  was  he.  The  boy  was 
afterwards  taken  secretly  to  her  friendess,  even  to  the  king's 
queen;  and  by  her  Mael.  duin  was  reared;  and  she  gave  out 
that  she  was  his  mother. 

Now  the  one  fostermother  reared  him  and  the  king's  three 
sons,  in  one  cradle,  and  on  one  breast,  and  on  one  lap  5. 

Beautiful,  indeed,  was  his  form;  and  it  is  doubtful6  if  there 
hath  been  in  flesh  anyone  as  beautiful  as  he.  So  he  grew  up 
till  he  was  a  young  warrior  and  lit  to  use  weapons.  Great, 
then,  was  his  brightness  and  his  gaiety"  and  his  playfulness8  ». 
In  his  play  he  outwent9  ail  his  comrades,  both  in  throwing 
balls,  and  running,  and  leaping,  and  putting  stones,  and  racing 
horses.  Hc  had,  in  sooth,  the  victory  in  each  of  those  games. 

One  day,    then,  a  certain  soldierIO-warrior  grew  envious 


1 .  segda  seems  to  mean  «  sained  »  (gesegnet),  and  thence  «  lucky  », 
«  fortunate  ». 

2.  cor  state,  condition,  circumstance,  situation,  predicament,  etc.  P.  O'C. 

5.  LU.  lias,  corruptly,  «  marauders  of  a  fleet  »  (loingse).  YBL.  and  H.: 
«  marauders  from  Laigis  »,  which  seems  to  bave  been  on  the  seacoast, 
and  cannot,  therefore.  be  identified  with  the  modem  Leix  part  of  the 
présent  Queen's  County. 

4.   cind  locative  sg.  of  cenn. 

) .  For  cûd  (which  I  hâve  not  met  elsewhere,  and  which  seems  for 
* scùd  =Nhg.  scJmosi)  YBL.  hasglun  «  knee  ». 

6.  infechtain  or  inbechtain.  inbheachtain  .i.  contabhairt,  P.  O'C.  and  see 
other  belegstellen  in  Ir.  Texte,  zweite  série,  1  Heft,  p.  135. 

7.  uallchas  —  uallachas,  still  living  in  the  Highlands. 

8.  cluichechaire  an  abstract  fprmed  from  cluichech  «  playful,  gamesome  ». 

9.  jorggaive  (lit.  superior?)  which  I  hâve  not  met  elsewhere,  corresponds 
with  ihefortail  of  YBL. 

10.    1  suspect  the  amsach  of  LU.  is  a  scribal  error  for  diumsach  «  haughty  ». 


4$  6  Whitley  Stokes. 

n-epert  la  recht  7  feirg1  :  «  T/^su  »,  ol  se,  «  ndd  fess  ca/zcland 
nd  cene'l duic,  jniconîcs  [dojmdtair  ndhathair,  do  giallud  îorni2 
in  cech  ôen  chluchi,  cid  ior  tir,  cid  (or  usci,  cid  for  fidchill, 
côtrisam  fris  ». 

Sôchtais  Msél  dûin  iarom,  ar  doruménair^  co  sin  co  mbd 
mac  dond  rig  hé  7  don  rigdin,  dia  mumme.  Asb^rt  iarom  fria 
mummi  :  «  Ni  praindigiub-sa  7  ni  ib  ni  co  «-erbara  frim  »,  ol 
se,  «  mo  mdthair  7  m'athaii'4  ». 

«  Inge  »,  ol  si,  «  cid  notai  do  iarmôracht  indi-sin?  Nd 
tabair  dot  menmam  briathra  na  n-ôclach  ndiumsach.  Messe  do 
mdthair  »,  ol  si.  «  Ni  fulliu  serc  am-mac  la  dôinein  tireandas 
do  serc-so  limsa5  ». 

«  Doecmaic6  ani-sin  »,  [ol  sesium],  «  ocus  arai  fessa  dam 
mo  thwmdi  féin  ». 

Dolluid  a  iaummi  leis  iarom,  co  /zda-tdrat  il-laim  a  mathar7, 

[YBL.  col.  370]  7  co  n-atacht  iarsin  amathazV  con-erbar- 
adh  fris  a  athair  ». 

«  Ba;th  »,  ol  si,  «  inni  fora  tdi,  ar  cia  rofessair  h'  athazV  ni 
fuil  ba  duit  de,  7  ni  bat  failte  de,  ar  as  cian  uad  o  ramarb8  ». 

«  As  fer-di9  liumsa  a  fis  »,  ol  se,  «  cip  si  cruth  ». 

Asben  iarsin  a  mathflzV  fris  o  firindi.  «  Ai//ll  Ochair  Aga 
h'athrt/V  »,  ol  si,  «  do  Eogaiw/;/  Nindais  ». 

Luid  iarsin  dia  athar-[col.  37i]-du  7  dia  forba  fein,  7  a  co- 


1 .  co  feirg  7  loniitt*  fris,  YBL. 

2.  7  na  fes  cia  eu  rod-cHWJtusmi  (rot-chac,  H.)  for  otrach,  do  derscud- 
ugh  (-ugudh.  H.)  dinn,  YBL. 

3 .  dorumeidhir.  H. 

4 .  conna  caithfid  biadh  na  digh  co  n-erbaradh  fris  a  mathair  7  a  athair, 
YBL. 

5.  nocho  n-uilliu  lind  serc  duine  oldas  do  sliercc,  YBL. 

6.  dofomaiwg,   YBL.  defomaiwg,  H. 

7.  Her  ends  the  tirst  fragment  in  LU. 

8.  os  marb,  //.  9.   Is  ferrde,  H. 


The  Voyage  of  Mael  Duin.  457 

against  him,  and  he  said  in  transport1  and  anger  :  «  Thou  », 
saith  he,  «  whose  clan  and  kindred  no  one  knows,  whose 
mother  and  father  no  one  knows,  to  vanquish  us  in  every 
game,  whether  we  contend  with  thee  on  land  or  on  water,  or 
on  the  draughtboard  !  » 

So  then  Mael  duin  was  si  lent,  for  till  then  he  had  thought 
that  he  was  a  son  of  the  king  and  of  the  queen  his  foster- 
mother.  Then  he  said  to  his  fostermother  :  «  I  will  not  dine 
and  I  will  not  drink  until  thou  tell  me,  »  saith  he,  «  my 
mother  and  my  father.  » 

«  But  »2,  saith  she,  »  why  art  thou  inquiring  afterthat  ?  Do 
not  take  to  heart  the  words  of  the  haughty  warriors.  I  am 
thy  mother,  »  saith  she.  «  The  love  of  the  people  of  the 
earth  for  their  sons  is  no  greater  than  the  love  Ibear  to  thee  ». 

«  That  may  be,  »  saith  he  :  «  nevertheless,  make  known 
my  parents  to  me  ». 

So  his  fostermother  went  with  him,  and  delivered  him  into 
his  (own)  mother's  hand;  and  thereafter  he  entreated  his 
mother  to  déclare  his  father  to  him. 

«  Silly,  »  saith  she,  «  is  what  thou  art  doing,  for  if  thou 
shouldst  know  thy  father  thou  hast  no  good  3  of  him,  and 
thou  wilt  not  be  the  gladder,  for  he  died  long  ago  ». 

«  'Tis  the  better  for  me  to  know  it,  »  saith  he,  «  however 
it  be  ». 

Then  his  mother  told  him  the  truth.  «  Ailillof  the  Edge  of 
Battle  was  thy  father  »,  saith  she  —  «  of  the  Eoganacht  of 
Ninuss  ». 

Then  Mael  duin  went  to  his  fatherland  and  to  his  own  her- 


1.  recht  zzl  O'Clery's  reacht  .i.  cumas  «  power,  might,  strength:  also  an 
ungovernable  fit,  frake  or  transport  of  joy  or  grief,  laughing  or  crying  ». 
P.  O'C. 

2.  inçe—  ingi  .i.  acht,  LU.  H9b  37.  Ane.  Laws,  I,  90,  I.  30. 

3.  ba,  .i.  maith,  O'CL,  better  ba  or  baa,  LL.  240b,  242b. 

Revue  Celtique,  IX.  30 


4j8  Whitley  Stokes. 

maltai  leis,  7  ba  hoclaich  casma  cid  iatsidhe.  Ocus  ba  failidh  a 
cenel  frissium  iarom,  7  dobertatar  mesnig  moir  ann. 

I  N-araile  amsir  iarsin  robatar  lin  oclach  i  relie  chille  Dub- 
cluana  i[c]  cor  liac.  hxsised  iarum  a  cos  Maile  duin  for  folaig 
n-athloisc[th]e  na  hecailsi,  7  ba  tairrsi  noleicedh  an  lice.  Alaile 
fer  nemthengthach  do  muindt/V  na  cille,  Briccne  a  ainm,  as- 
bert-sidi  fri  Mael  duin  :  «  Bad  ferr  »,  ol  se,  «  ba  da  digail  do- 
gnethea  inn  fir  roloiscedh  sundinas  cor  liac  tara  cnamaibloma 
loistighi I  ». 

«  Cia  son?  »  ar  Mael  duin. 

«  Ailill  »,  or  se,  «  h'  athair-si  ». 

«  Cia  rod-marb?  »  ol  Ma.4  duin. 

Asbcrt  Briccne  :  «  Dibergaig  do  Laighis2  »,  ol  se,  «  ocus 
rodn-ortadar  isin  lathrach-sa  ». 

Leicis  uada  an  lice  iarom,  7  gabais  a  brat  uime  7  a  gaiscedh 
fair,  7  ba  bronach  de.  Ocus  imcomaircis  conair  do  asenam  do 
Laigis,  7  asbtTtadar  eoLz/Vr  fris  nad  bai  a  techt  achi  for  muir. 


Luid  iarom  i  tir  Corcomruadh  do  fiarfaighî  5  seoin  7  solaigi 
do  druid  bai  ann,  do  tindscedal  denma  nôi  .i.  Nuca  ainm  an 
druadh,  7  is  uad  ainmni[g]ter  BoirendNucca.  AsbtTt-sidi  fris  là 
ina  tinnscanad^  me,  7  lin  an  ûollaig  cou-tesed>  indti  .i.  scebt 
fir  dec,  no  sesca  iar  foirinn  aile,  7  asbcrt  fris  na  dics^f  lin  bud 
lia  nach  bud  uaiti  oldas  sin,  7  asbtrt  fris  an  là  notesft/  fo[r] 
muir. 


Dogni  d'idiu  noi  trechodlidi,  7  batar  urlaim  leis  daiw  inni 


1.  tarachnamhalomaloiscthe,W.  4.  tinnscanfad,  H. 

2.  Laighsi,  H.  5.  noihesed,  H. 

3 .  fïarfuidhigh,   YBL.  fliiarfa/ge, 
H. 


The  Voyage  of  Mael  Duin.  459 

itage,  having  his  (three)  fosterbrothers  with  him  ;  and  beloved 
warriors  were  they.  And  then  his  kindred  welcomed  him,  and 
bade  him  be  of  good  cheer1. 

At  a  certain  time  afterwards  there  was  a  number  of  war- 
riors in  the  graveyard  of  the  church  of  Dubcluain,  putting 
stones.  So  Mael  duin's  foot  was  planted  on  the  scorched  ruin2 
of  the  church,  and  over  it  he  was  flinging  the  stone.  A  cer- 
tain poison-tongued  man  of  the  community  of  the  church,  — 
Briccne  was  his  name  —  said  to  Mael  duin  :  «  It  were  better,  » 
saith  he,  »  to  avenge  the  man  who  was  burnt  there  than  to 
cast  stones  over  his  bare  burnt  bones  ». 

«  Who  (was)  that  ?  »  saith  Mael  duin. 

«  Ailill  »,  saith  he,  «  thine  (own)  father  ». 

«  Who  killed  him  ?  »  asked  Mael  duin. 

Briccne  replied  :  «  Marauders  of  Leix,  »  saith  he,  «  and 
they  destroyed  him  on  this  spot  ». 

Then  Mael  duin  threw  away  the  stone  (which  he  was  about 
to  cast),  and  took  his  mande  round  him,  and  his  armour  on 
him;  and  he  was  mournful  thereat.  And  he  asked  the  way  to 
wend  to  Leix,  and  the  guides  told  him  that  he  could  only  go 
by  sea. 

So  he  went  into  the  country  of  Corcomroe  to  seek  a  charm 
and  a  blessing  3  of  a  wizard  who  dwelt  there,  to  begin  building 
a  boat.  (Nuca  was  the  wizard's  name,  and  it  is  from  him  that 
Boirenn  Nuca  is  named).  He  told  Mael  duin  the  day  on 
which  he  should  begin  the  boat,  and  the  number  of  the  crew 
that  should  go  in  her,  to  wit,  seventeen  men,  or  sixty  accord- 
ing  to  others.  And  he  (also)  told  him  that  no  number 
greater  or  less  than  that  should  go  ;  and  he  (lastly)  told  him 
the  day  he  should  set  to  sea. 

Then  Mael  duin  builds  a  three-skinned  boat  4;  and  they  who 


1.  lit.  «  gave  great  courage  (meisnecb)  there  ». 

2.  folaig  seem  ace.  sg.  of  fol  À.  fulebrith  ruina,  H.  2.  16,  col.  111. 

3 .  solaigi  should,  be  solaidh  ;  cf.  Ra  airnaidit  andsain  sèna  7  soloda  7  lith- 
latheda  ldna  ra  airthriall  imthechta,  LL.,  21911. 

4.  i.  e.  a  large  canoë  of  wickerwork,  covered  with  three  folds  or  layers 
of  hide. 


460  Whitley  Stokes. 

noragtais  ina  comaitec/;/  inti.  Bai  and   ém  German  7  Diuran 
Leccerd. 

Luid  tra  for  muir  iarom  an  la  asbm  fris  an  drui  imtecht. 
Amal  dolotar  biucan  o  thir,  iar  tocbail  an  tseoil,  is  and  tan- 
catar  isin  purt  inaneis  a  tri  comalta-som,  tri  maie  a  aite  7  a 
muime,  7  congairtetar  fair  co  tistais  andochom  doridisi  arculo 
aracend  do  tecbt  léo. 

[«  Airc/V/h  do  far  tichc1,]  ar  cia  risam  forculu  »,  ar  Mœl 
duin,  «  ni  raga  limsa  acht  an  lin  atam  sund  ». 

«  Ragmuid-ne  at  degaig  isin  muir  conorrh-bâit/r2  and  mina 
tisiu  cuccaind  ». 

Dos-corad3  a  triur  iarom  isin  muir,  7  snaghid^  cocian  o 
thir.  O'tro/zairc  iarom  Masl  duin  [anni  sin  s]  impais  cuco  aracend 
arna  robaiditis,  7  do[s]brrt6  cuci  ina  curach  iat. 


Batar  al-la-sin  co  fescwr  ic7  imrum  7  an  adhaig  ina  diaidh  co 
medonaidche,  co  fuaratar  da  indsi  beca  majla,  7  da  dun8 
inntib,  co  cualatar  iarom  isna9  dûinib  amach  nuall  7  fogur  na 
mesca  7  na  m\\ed  7  na  comrum.  Oats  ba  hedh10  asbt'rt  in  fer 
fria  celé  :  «  An  dim,  tra  »,  ol  se,  «  am  ferrdo  laech[dai] XI  andai, 
ar  k  me  romarb  Ai/fll  Ochair  Agha,  7  roloisc  Dubcluain  fair, 


1 .  Sic  H.  7 .  oc,  H. 

2.  conorbatar,  H.  8.  da  ndûn,  H. 

3.  Duscorat,  H.  9.  co  colatar  iarsin  asna,  H. 

4.  snaised,  H.  10.  hann,  H. 

5 .  Sic  H.  1 1 .  im  ferr  do  laeedhai,  H. 

6.  àusb'ir,  H. 


The  Voyage  of  Mael  Duin.  461 

were  to  go  in  it  in  his  company  were  ready.  Germdn  was 
there  and  Diuràn  the  Rhymer1. 

So  then  he  went  to  sea  on  the  day  that  the  wizard  had  told 
him  to  set  out.  When  they  had  gone  a  little  from  land, 
after  hoisting  the  sail,  then  came  into  the  harbour  after  them 
his  three  fosterbrothers2,  the  three  sons  of  his  fosterfather  and 
fostermother;  and  theyshouted  to  themto  corne  back  again  to 
them  to  the  end  that  they  might  go  with  them. 

«  Get  you  home,  »  saith  Mael  duin;  «  for  even  though  we 
should  return  (to  land),  only  the  number  we  hâve  hère  shall 
go  with  me  » . 

«  We  will  go  after  thee  into  the  sea  and  be  drowned  î  there- 
in,  unless  thou  come  unto  us  ». 

Then  the  three  of  them  cast  themselves  into  the  sea,  and 
they  swim4  far  from  land.  When  Mael  duin  saw  that,  he  turn- 
ed  towards  them  so  that  they  might  not  be  drowned  s,  and 
he  broudit  them  into  his  boat. 


I. 

That  day  till  vespers  they  were  a-rowing,  and  the  night 
after  it  till  midnight,  when  they  found  two  small  bare6  is- 
lands,  with  two  forts  in  them;  and  then  they  heard  out  of 
the  forts  the  noise  and  outcry  of  the  intoxication,  and  the  sol- 
diers,  and  the  trophies7.  And  this  was  what  one  man  said  to 
the  other  :  «  Stand  off8  from  me,  »  saith  he,  «  for  I  am  a 
better  hero9  than  thou,  for  it  is  I  that  slew  Ailill  of  the  Edge 

1  leccerd  —  leith-cerd  a  half-poet.  This  was  a  name  for  the  ansruth- 
poet,  because  he  had  half  the  knowledge  of  the  ollomh,  O'Don.  Supp. 

2.  So  très  fratres  come  from  Brendan's  monastery,  when  ali  his  crew 
had  embarked,  Perigrinatio,  6 

3.  con-orm-bd.iter.  The  infîxed  pronoun  of  the  ist  pi.  or,  orn  is  not 
uncommon  in  Middle  Irish.  So  con-or-tinôltar  (gï.  locemur)  L.H.  3b. 

4.  snaghid  for  snàît,  près.  ind.  pi.  3  of  snàim  rz  Skr.  snâmi,  Gr.  vaw. 

5.  baiditis,  the  passive  2dy  près.  pi.  3  of  bâidim. 

6.  lit.  bald. 

7.  i.  e.  the  boasting  of  the  heroes  as  they  displayed  their  trophies. 

8.  lit.  stay. 

9.  lit.  «  better  of  heroism  ». 


462  Whiîley  Stokes. 

7  ni  dernad  olc  [col.  372]  frium  ind  cosse  o[a]  cheneol1,  7  ni 
dernais  a  samail-sin  » . 

«  Coscor  illama  anni-seo  »,  ar  German  7  ar  Diuran  Lec- 
cerd.  «  As  diriuch  don-fuc  Dia  7  roghab  Dia  ar  crannàn 2  re- 
moinn.  Tiagam  7  orgem  an  [dâ]  dun  sa',  o  rofoillsigh4  Dia 
duinn  ar  naimdiu  [indiph  S]. 

Ama/  robatar-som  forsna  briathraib  sin6,  dosn-anic  gaeth 
mor,  co  mbatar  for  imarchor  an  aidche?  co  maitin.  Ocus  cid 
iar  maidin  iarom  ni  facatar  tir  na  talmain,  7  ni  fhindtais  cia 
leath  teis;hdis.  Ba  hand  adbwt 8  Masl  duin  :  «  Leicid  in  noi  ina 
tost  cen  imrum,  7  an  leth  bus  ail  do  Dia  a  brith,  beraidh9. 

Lotar  iarom  isan  ocianI0môr  neimWcendach11, 7  osbert  Mael 
duin  iarsin  fri[a]  comaltaib  :  «  Sibsi  foruair  duinne  so,  for 
telgadh12  dun  isin  curuch  tar  breitlïir  an  tsenaire  7  an  druadh. 
Adb^/t  frind  ni  tismais  isan  curach  acht  an  lin  bamar  arbar- 
cindsi1?. 

Ni  raibe  freacra  accosom1^,  acht  bit[h]  ina  tost  bicI5. 


IL 

Tri  la  7  .iii.  haidhche  doib,  7  ni  fuaratar  tir  na  talmain. 
Matain  iarom  an  très  ke  co  cualatar  iogur  uaidhib  soirtuaidh. 
«  Gair  thuindi  f/ia  tir  so  »,  ol  German.  Intan  iarom  ba  lasolus 
doib  doscuicsed16  don  tir.  Ama/  batar  oc  cor  chrandchoir  dits 
cia  noraghad  dib  a  tir,  is  andsin  dolotar  ealta  mor  de  sengan- 
aibx7,    7   meit  serraig  cechai  dib,   isa[n]lS  traigh  andochum 

1.  oachinel,  H.  10.  isin  oicen,  H. 

2.  ar  cradn  an,  H.  11 .  naforcendach,  H. 

3.  in  dâ  dun  sa,  H.  12.  telcad,  H. 

4.  ar  rofaillsig.  13.  bômar  arforcindsi,  H. 

5.  Sic  H.  14.  freccra  agaibsium,  H. 

6.  so,  H.  15 i .  H  omits. 

7.  in  océin,  H.  16.  doscuichsit,  H. 

8.  ispert,  H.  17.  sengannuib,  H. 

9.  beraigh,  YBL.  18.  isin,  H. 


The  Voyaqe  of  Mael  Duin.  46$ 

of  Battle,  and  burnt  Dubcluain  on  him  ;  and  no  evil  hath 
hitherto  been  done  to  me  therefor  by  his  kindred  ;  and  thou 
hast  never'done  the  like  of  that!  » 

«  We  hâve  the  victory  in  our  hands  !  »  saith  Germdn  and 
saith  Diuran  the  Rhymer.  «  God  hath  brought  us  direct,  and 
God  hath  guided  our  barque.  Let  us  go  and  wreck  thèse  two 
forts,  since  God  hath  revealed  to  us  our  enemies  in  them  !  » 

As  they  were  saying  thèse  words,  a  great  wind  came  upon 
them,  so  that  they  were  driven  (over  the  sea,  ail)  that  night 
until  morning.  And  even  after  morning  they  saw  nor  earth  nor 
land,  and  they  knew  not  whither  they  were  going.  Then  said 
Mael  duin:  «  Leave  the  boat  still1,  without  rowing;  and  whith- 
ersoever  it  shall  please  God  to  bring  it,  bring  ». 

Then  they  entered  the  great,  endless  océan  ;  and  Mael  duin 
afterwards  said  to  his  fosterbrothers  :  «  Ye  hâve  caused  this 
to  us,  casting2  yourselves  upon  us  in  the  boat  in  spite  of  the 
word  of  the  enchanter  3  and  wizard,  who  told  us  that  on 
board  the  boat  we  should  go  only  the  number  that  we  were 
before  you  came  ». 

They  had  no  answer,  save  only  to  be  silent  for  a  little 
space4. 

II. 

Thrce  daysand  three  nights  were  they,  and  they  found  neither 
land  nor  ground.  Then  on  the  morning  of  the  third  day  they 
heard  a  sound  Irom  the  north-east.  «  This  is  the  voice  of  a 
wave  against  a  shore,  »  said  Mael  duin.  Now  when  the  day 
was  bright  they  made  towards  land.  As  they  were  casting  lots 
to  see  which  of  them  should  go  on  shore,  there  came  a  great 
swarm  of  ants,  each  of  them  the  size  of  a  foal,  down  to  the 
strand  towards  them,  and  into  the  sea.  What  the  ants  desired 


1 .  i.  e.  let  her  drii't.  So  Brendan  :  «  Mittite  intus  omnes  rémiges  et  gu- 
bernacula,  tantum  dimittite  vêla  extensa,  et  faciat  Deus  sicut  vult  de  servis 
suis  et  de  sua  navi,  »  Perigrinatio.  p.  7. 

2.  telcad,  telgad  ■  tealgadh  .L  caitheamh  «  a  casting  or  hurling  »,  P.  O'C. 

3 .  sénaire  a  derivative  of  sén  ~  signum. 

4.  lit.  «  to  be  in  their  little  silence  ». 


464  Whitley  Stokes. 

ocus  l  isan  muir.  A  n-adcobairsed  a  n-ithi  cona  nôi,  7  techit 
iarom  tri  la  ele2  7  teoro  aidchi  doib,  7  ni  facatar  tir  na  talom. 


[III.] 

Matan  an  treas  lai  co  cualatar  fogwr  tuindi  ina  tracht,  7 
conacatar  la  soillsi  lai  indsi  n-aird  moir,  7  forscamon  im- 
macuairt  impi.  Issliu  cachae  achele  dib,  7  line  do  crandaibî 
impe,  7  eoin  mora  imda  forsna  crandaib[sin]4.  Ocus  bôi  com- 
airle  leo  dus  cia  noraghad  do  fromudh  na  hindsi  7  roptar 
cendsa  na  heoin.  «  Messi  ragas  »,  ar  Mail  duin.  Doluidh 
iarom  Mael  duin,  7  dofoichlenn  an  innsi,  7  ni  fuair  ni  do  ulcc 
indti,  7  rosasta  [o  na  henaiph*,]  7  dobtrtadar  alaile  dib  leo  ina 
nôi. 


[IV.] 

Tri  lai  7  teora  aidche  doib  îor  muir  iarsin.  Matan6  iarom 
an  ce//?ramudh  lai  rathaigsit  indsi  moir  n-aile.  Ganemdha  a 
talum.  Im  tancatar  do  tracht  na  hindsi,  adchonncatar  an- 
manda  isinn  indsi  anuz/7  each7.  Cossa  fondai  leis,  co  n-ingnib 
garbaib  gerraib/,  7  ba  mor  a  failti  [sium]8  friu,  7  nobid  ic 
surdlaig  ina  fiadhnaise,  ar  ba  saint  les 7  a  n-ithi  cona  nôi.  «  Ni 
bronach  atathar  ararcind  »,  ar  Macl  duin:  «  tiadham  on 
n-indsi  arculo  «,  ar  Ma:l  duin.  Dogn[iJad  9  annisin,  7  o  ro- 
vathaig  an  t-anmanda  teichedh  doibsi/mi,  doluith  isin  t/aigh, 


1.  H  omits.  6.  immaitin,  H. 

2.  oili,  H.  7.   H  omits. 

3.  line  cranna,  H.  8.  Sic  H. 

4.  Sic  H.  9.7  dogniat,  H. 

5 .  Sic  H. 


The  Voyage  of  Mael  Duin.  465 

was  to  eat  the  crew  and  their  boat  :  so  the  sailors  flee  for  three 
days  and  three  nights;  and  they  saw  nor  land  nor  ground. 


in. 

On  the  morning  of  the  third  day  they  heard  the  sound  of 
a  wave  against  the  beach,  and  with  the  daylight  they  saw 
an  island  high  and  great;.and  terraces1  ail  round  aboutit. 
Lower  was  each  of  them  than  the  other,  and  there  was  a  row 
of  trees  around  it,  and  many  great  birds  on  thèse  trees.  And 
they  were  taking  counsel  as  to  who  should  go  to  explore  the 
island  and  see  whether  the  birds  were  gentle.  «  I  will  go,  » 
saith  Mael  duin.  So  Mael  duin  went,  and  and  warily  searched  2 
the  island,  and  found  nothing  evil  therein.  And  they  ate 
their  fill  of  the  birds,  and  brought  some  of  them  on  board  their 
boat. 

IV. 

Three  days  thereafter,  and  three  nights  were  they  at  sea. 
But  on  the  morning  of  the  fourth  day  they  perceived  another 
great  island.  Sandy  was  its  soil.  \Vhen3  they  came  to  the 
shore  of  the  island  they  saw  therein  a  beast  like  a  horse.  The 
legs  of  a  hound  he  had,  with  rough,  sharp  nails  ;  and  great 
was  his  jov  at  seeing  them.  And  he  was  prancing(?)4  before 
them,  for  he  longed  to  devour  them  and  their  boat>.  «  He  is 
not  sorry  to  meet  us,  »  saith  Mael  duin  ;  «  let  us  go  back 
from  the  island  ».  That  was  done;  and  when  the  beast  per- 
ceived them  fleeing,  he  went  down  to  the  strand  and  began 


1 .  forscamon  seems  the  neut.  pi.  of  a  compound  of  the  prep.  for  and 
scamon  cognate  with  Latin  scamtiutn  «  a  bank  or  ridge  of  earth  »  ;  but  I  hâve 
not  met  the  word  elsewhere. 

2.  do-foichlenn  :  cf.  foichlim  in  Windisch's  Wœrterbuch.  W.  di-ogel. 

3 .  im  for  amal  ? 

4.  surdlaig.  What  is  this  ? 

5 .  Which,  be  it  remembered,  was  covered  with  a  triple  layer  of  edible 
hide. 


466  Whitley  Stokes. 

7  gabais  tochlaidh  in  trachta  cona  ingnib  gerraib *  7  oca  ndiu- 
brucadh,  7  nir'  sailset[som]2  eludh  uad. 


[V-] 

Raisid'  a  cein  iarsin,  7  adchiat  maiginis  moir  uaidhib.  Do- 
chuir  iarom  do  German  droch  crandcor  dul  do  descin  na 
hinnse-sin.  «  Ragmait  dib  linaib  »,  ar  £)iuran  Leeerd,  «  co  nde- 
caissi4  liumsa  nach  fer/;/  n-aile  a  n-indsi  dom-ria  crands  ». 
Lotar  iarom  a  ndis  isan  innsi.  Mor  a  met  7  a  lethed,  7  cona.- 
catar  faichthi  fota  moir  indti  7  fuilliuchta  dermara  each  indti, 
Meit  seolbrait  luingi  fo[l]liucht6  crui  gach  eich/,  con  accatar 
and  aa.no  blasscafcol.  372]  cno  mor8  amal  côedi  7  cowacadar9 
daiio  tuartha  mora  do  preid  daine10  n-imda  and.  Ataigsidar11 
iarom  anni  a[d]condcatar  7  congartadar  a  mumdtir  cuco  [do] 
descin12  a[n]  neich  adchonneatar.  Bâtard  imeclaigh,  da.no,  iar 
n-aicsin  an  neich  adcondcatar;  7  lotar  as  uile  codian  dein- 
mnitach  ina  curach. 


O  dolotar  biucan  o  thir  x4  cona.ca.tax  dirim  moir  iarsin  muir 
don  innsi,  7  feraiset  grafaind  tar  riachtain  faigthi  na  hindsi. 
Ocus  luaithiu  x5  gasth  gach16  ech,  7  ba  mor  a  nuall  7  a  ùgair  7 
a  ïogur,  co  clos1/  iarom  do  Majl  duin  bemendalSna  n-eachlasc 
ocon  «enach,  7  rochuala  dano  a  n-adbeiridh  cach  dib  .i.  «  Tue 
ind-each  nglass!  »  «  Uig  in  gabair  n-uidir  thall!  »  «  Tue  in 
ngabuir  ngil!  »  «  As  luaithe  mo  each-sa!  »  «  Ferr  leim 
moeich-si!  »    O'tchualatar  na  briat/a  sin,  lotar  ass  fo  nert 


1.  geraiph,  H.  10.  preidh  doeni,  H. 

2.  Sic  H.  11.  Ataigsetar,  H. 

3.  Raisit,  H.  12.  do  deiscin,  H. 

4.  dechuisiu,  H.  15.  bôtar,  H. 

5.  isininsidomruaacrannchor,//.  14.  on  tir,  H. 

6     ïnWhcbt,  H.  15.  luathithir,  H. 

7.  cith,  YBL.  •                           10.  cach. 

8.  mora,  h.  17.  cloistis,  H. 

9.  conacotar,  H.  18.  bemind,  H.    , 


The]Voyage  of  Mael  Duin.  46 7 

digging  up  the  beach  with  his  sharp  nails,  and  pelting  them 
(with  the  pebbles),  and  they  didnot  cxpect  to  escapefrom  him. 


V. 

Thereaftcr  they  rowed  afar,  and  a  great,  flat  island  they 
see  before  them.  Then  to  German  fell  an  ill  lot  to  go  and 
look  at  that  island.  «  Both  of  us  will  go,  »  saith  Diuran  the 
Rhymer,  «  and  thou  wilt  corne  with  me  some  other  time  into 
an  island  which  it  falls  to  my  lot  to  explore  »x.  So  the  two  of 
them  entered  the  island.  Great  was  its  size  and  its  breadth, 
and  they  saw  therein  a  long,  great  green,  with  vast  hoof- 
marks  of  horses  upon  it.  As  large  as  the  sail  of  a  ship  was  the 
mark  of  the  hoof  of  each  horse.  They  saw,  moreover,  the 
shells  of  huge  nuts  like...,  and  they  saw  there,  also, 
great  leavings  2  (?)of  theplunder  of  many  men.  So  they  dread- 
ed  that  which  they  saw,  and  they  called  their  people  to 
them  to  see  what  they  beheld.  They  were  afraid  then,  after 
seeing  what  they  beheld,  and  they  ail,  swiftly,  hastily,  went 
on  board  their  boat. 

When  they  had  gone  a  little  from  land,  they  beheld  (rush- 
ing)  along  the  sea  to  the  island  a  great  multitude,  which, 
after  reaching  the  green  of  the  island,  held  a  horse-race.  And 
swifter  than  the  wind  was  each  horse,  and  great  was  the 
shouting  (of  the  multitude)  and  their  outery  and  noise.  And 
then  the  strokes  of  their  horse-rods  at  the  meeting  were  heard 
by  Mael-duin,  and  lie  heard,  moreover,  what  each  of  them 
was  saying  :  «  Bring  the  grey  steed  !  »  «  Drive  the  dun  horse 
there  !  »  a  Bring  the  w7hite  horse  !  »  «  My  steed  is  faster  !  » 
«  My  horse  leaps  better  >  !  »  When  the  wanderers  heard  those 


1 .  ci'iedi :  cf.  cona  côidib  crèduma  fairsin  anuas,  LL.  29)b. 

2.  tiiartha:  ci'  tuartheit  «  remnant,  remainder,  jmanet?)  O'Don.  Supp. 
ni  tuairthet  and  iarsin  acht  se  lathi  trichât,  LB.  47^:  bô  7  tri  scxcpaill  iss  ed 
tuarteit  ann,  Harl.  452,  fo.  i6a(=  Laws, i.  246, 1.  ^),tiruairsi  «  remnant  », 
Laws  II.  212. 

3  .  lit.  «  Better  (is)  my  horse' s  leap  !  » 


468  Whitley  Stokes. 

a  mbagh1,  ar  ba  derb  leo  ba  hxnach  demna  adconncatar. 


VI. 

Sechtmuin  lan  doib  iarsin  ic  imrum  i  ngorta  7  i  n-itaidh2, 
co  fuaratar  indsi  moir  n-aird  7  teach  mor  indti  i  traigh  an 
mara,  7  dorus  asan  tig  hi  maigreidh  na  hinnsi,  7  dorus  n-aill 
isan  muir,  7  comla  lecdhà  f/isin  dorus  n-isin.  Boi  dercc  tresan 
comluith  sin  forsa  tochratis  tonna  an  mara  na  heicne?  isin 
tech-sin  ar  medhon.  Lotar  som  isin  teach  sin,  7  ni  fuaratar 
neach  and.  Gwacatar  iar  suidhiu  lighi  cumtachta  do  aircind- 
each  an  tighe  a  asnur,  7  ligi  gach  thrir  do  4  muntir,  7  biadh 
gach  t/ïr  arbelaib  gac[h]  imda,  7  lestar  glaine S  co  ndeglind  ar 
belaib  gâcha  imdha6,  7  dalem  di  glain  for  gach  lestar.  Praind- 
ighsed  7  iarom  a  mbiadh  sin  7  a  lind,  7  atlaigit  buidhi  do  Dia 
mlecumachtach  rodus-foir  on  gorto. 


[VIL] 

A  ndolotar  ond  indsi  sin  batar  sel  môr  oc  imrum  ceri  biadh 
cogortach,  co  fuaratar  indsi  7  allt8  mor  uimpi  do  gach  9  leith, 
7  fidh  Céel  fota  i  suidhiu,  7  mor  a  tôt  7  a  caile.  Gabais  Mael 
duin  slait  amal  tarraigh  don  fidbuith  sin  ina  laim  ic  I0  tocht10 
seacho10.  Tri  la  7  teoro  n-aidhche  bûi  an  tslat  ina  ldim,  7  an 
curach  fo  seol  la  taeb  in  alla,  7   isan   treaslô   fuair  crobung 


1.  fonertabagh.  H.  b.   cecha  himdei,  H. 

2.  anitaigh.  YBL.  7.   7  praindicsit,  H. 
}.  in  mara  ina  écne,  H.  8.   ailld,  H. 

4.  dia,  H.  9.  impi  di  cech,  H. 

3.  glain,  H.  10.   H  omits. 


The  Voyage  of  Mael  Duin.  469 

words,  they  went  away  with  ail  their  might l,  for  they  felt  sure 
it  was  a  meeting  of  démons  they  beheld. 


VI. 

A  full  week  were  they  voyaging,  in  hunger  and  in  thirst, 
when  they  discovered  a  great,  high  island  with  a  great  house 
therein  on  the  seashore  and  a  doorway  out  of  the  house 
into  the  plain 2  of  the  island  and  another  door  (opening)  into 
the  sea,  and  against  that  door  there  was  a  valve  of  stone. 
That  valve  was  pierced  by  an  aperture,  through  which  the  sea- 
waves  were  flinging  the  salmon  into  the  midst  of  that  house. 
Mael  duin  and  his  men  entered  that  house,  and  therein  they 
found  no  one.  After  this  they  beheld  a  testered  bed  for  the 
chief  of  the  house  alone,  and  a  bed  for  every  three  of  his 
household,  and  food  for  three  before  every  bed,  and  a  vessel 
of  glass  with  good  liquor  before  every  bed,  and  a  cup3  of  glass 
on  every  vessel.  So  they  dined  off  that  food  and  liquor,  and 
they  give  thanks  to  Almighty  God,  who  had  helped  them  from 
the  hunger. 

VII. 

When  they  went  from  the  island  they  were  a  long  while4 
voyaging,  without  food,  hungrily,  till  they  found  (another) 
island,  with  a  great  cliff  round  it  on  every  side,  and  therein 
was  a  long,  narrow  wood,  and  great  was  its  length  and  its 
narrowness.  When  Mael  duin  reachedî  that  wood  he  took 
(from  it)  a  rod  in  his  hand  as  he  passed  it.  Three  days  and 
three  nights  the  rod  remained  in  his  hand,  while  the  boat  was 
under  sail,  coasting  the  cliff,  and  on  the  third  day  he  found  a 

1.  cf.  a  nertaïb  bâghfear,  infra.  c.  ix. 

2.  maig-rêidh,  lit.  plain-level  :  cf.  maig-sliab. 

3 .  dailetn,  usually  «  cupbearer  »  hère  seems  to  mean  a  cup  used  for 
distributing  liquor. 

4.  sel  ~  W.  chwyl  «  versio  »,  Davies. 

5.  tarraigh  for  tarraidh  «  traf,  ùberfkl,  holte  ein  »,  Windisch's  Wœr- 
terbuch,  811. 


470  Whiiley  Stokes. 

.iii.  n-uboll  for  ind  naslaitte.  Cetracha  aidhci  nodo-sâs  çach1 
uball2  diib. 

[vin.] 

[col.  374].  Fuaratar  [dna3]  iarsin  indsi  n-aile,  7  sondach 
leacdha  uimpe4.  A  ndolotar  a  comfpc«j  di  atraig  anmanda 
môr  isind  indsi  7  cor-reithft/  imon  indsi  immacuairt.  Ba  luai- 
thi  la  Majl  duin  oldas  [an] 5  gasth,  7  luid  iarom  i  n-ard  na6 
hinnsi  7  dirgis  creit  and  .i.  a  cend  siss  7  a  cosa  suas,  7  is  am- 
\aid  nobidh,  imsoadh  ina  crocend7  [.i.]  an  leoil  7  na  cnama 
do  impodh,  in  crocund  ivamorro  diamr/tfair  cen  scibiudh.  No 
an  croiçend  fer/;/8  n-aile  dawp  dianer/j/air  do  impudh  amfl/ 
muilend9  do  impudh,  na  cnami  7  an  féol  ina  tairisium10. 

Orobai  cocian  in  cruth  sin,  atraclit  suas  dorisi IX  7  reithidh I2 
timcell  na  hindsi  immachuairt  r3  arnai  dorighne  artûs.  Luidh 
dano  doridhisi  isan  inad  cétna.,  7  an  îccht  sin  an  leath  dia 
crocund  nobidh  sis  cen  scibiudh  7  an  leath  n-aill  nobid  suas 
imrethedh  imacuairt  araaî  lice  muilind.  Ba  hisin  tra  a  abair[t]J4 
antan  bidh  ic  timcholl  na  hindsi.  Teichis  Mail  duin  cona 
muindtzr  a  nertaib  bdghfear,  7  rathaigis1?  an  t-anmanda  tech- 
eadh  doib[sium] l6  7  doluid  isin  tracht  dia  tiwnicbtam,  7  gabais 
esorgain  iat,  [7]  dibruicidh :"  7  sraighl/J  di  clochaib  na  caladh18 


I . 

rotasas  cech, 

H. 

1 1 .    arisi,  H. 

2. 

ugall,  YBL. 

12.   Sic  H.  reitigh,  YBL. 

3  ■ 

Sic  H. 

13.   H  omits. 

4. 

impi.  H. 

14.   abuirt,  H. 

s. 

Sic  H. 

15  .   rathuighsit,  H. 

6. 

inna  H. 

16.    Sic  H. 

7- 

immasoad  ina  crocann, 

H. 

17.   dibruicigh,  YBL. 

8. 

fes.  YBL.  fecht. 

H. 

18.   7  dibura'dh  7  sraigled  di  clo- 

9- 

muilind,  //. 

chaib  inna  cairce,  H. 

10.   Sic  H.  tairijwsium,  YBL. 


The  Voyage  of  Mael  Duin.  471 

cluster1  of  three  apples  at  the  end  of  the  rod.  For  forty  nights 
each  of  thèse  apples  sufficed  them. 


VIII. 

Thereafter,  then,  they  found  another  island,  with  a  fence 
of  stone  around  it.  When  they  drew  near  it  a  huge  beast 
sprang  up  in  the  island,  and  races  round  about  the  island.  To 
Mael  duin  it  seemed  swifter  than  the  wind.  And  then  it  went 
to  the  height  of  the  island  and  there  it  performed  (the  feat 
called)  «  straightening  of  body  »2,  to  wit,  its  head  below  and 
its  feet  above;  and  thus  it  used  to  be  :  it  turned  in  its  skin, 
that  is,  the  flesh  and  the  bones  revolved,  but  the  skin  outside 
was  unmoved.  Or  at  another  time  the  skin  outside  turned 
like  a  mill,  the  bones  and  the  flesh  remaining  still. 

When  it  had  been  for  long  in  that  wise,  it  sprang  up  again 
and  races  round  about  the  island  as  it  had  done  at  first.  Then 
it  returned  to  the  same  place  ;  and  that  time  the  lower  half  of 
its  skin  was  unmoved,  and  the  other  half  above  ran  round 
and  round  like  a  millstone.  That,  then,  was  its  practice?  when 
it  was  going  round  the  island. 

Mael  duin  and  his  people  fled  with  ail  their  might,  and  the 
beast  perceived  them  fieeing,  and  it  went  into  the  beach  to 
seize  4  them,  and  began  to  smite  them,  and  it  casts  and  lashes 


1 .  crobung,  properly  a  cluster  of  nuts  :  O  chall  cain  na  crobang  cas,  Book 
of  Fenagh,  p.  396,  1.  n.bang  .i..  crû,  ut  est  crobhang,  H.  3.  18,  p.  633, 
col.  1.  O'Reilly  explains  this  word  by  «  a  strong-handed  man  »  !  P.  O'C. 
has  «  crobhaing  a  bunch  or  cluster  of  berries,  derived  from  crobh,  W.  cra- 
ving  a  claw  or  clutch.  Crobhaùigeach  of  or  belonging  to  clusters  or  bunches  ». 

2 .  Cf.  dirgiud  crette  foi  a  rind  «  straightening  of  body  on  his  spear- 
point,  »  one  of  Cûchulainn's  feats  catalogued  in  LU.  73a. 

3.  abairt  .i.  bés,  H.  3.  18,  p.  5ib  .i.  ealadha  no  bés,  O'Cl.  abairt  .i.  ab 
airte  [leg.  arte]  .i.  issi  abairt  doni  .i.  elada,  H.  2.  16,  col.  88.  Roboth 
ocond  reib  sin  7  ocond  abairt  on  t/âth  co(a)raile,  LU.  7113  14.  It  é  d\diu 
dorigensat  ind  abairt  sin  etorro  andis,  LU.  71 b  27.  dognith  abairt  dia  si'r- 
sellad,  LU.  129b  43. 

4.  tarrachtain  :  cf.  fri  tarrachtain  drechta  dib  dîa  n-airlech,  LU.  72».  can 
tarrachtain  «  without  being  caught  >■>,  O'Don.  Supp.  O'Clery's  tarrachtain 
.i.di  oghail  «  vengeance  »  seems  a  bad  guess. 


472  Whitley  Stokes. 

inandiaidh.  Luid  cloch  dib  iarom  ina1  curach  co  rotreag- 
dastair2  sciath  Masl  duin  7  co  ndechaidhî  [is]an4  drumluirg 
in  curaig. 

[IX.] 

Ni  bu  cian  iarsin  dano  co  fuaratar  indsi  n-aird  aile,  is  si  aib- 
ind,  7  anmanda  mora  imda  indte  cosmaile  frî  heocho.  No- 
gaibcdh  gâchas  dib  mir  a  tasb  alaile,  7  no  beridh  conx  croc- 
end  >  7  coin  teoil  leis6,  co  maidhitis7  a  srotho  fola  fordergi 
asa  tcebaib  co  mba  lan  an  talom  di. 

Facsat8  dano  an  indsi  sin  codian,  dremun,  denmnitach, 
toirrsig,  geranaig,  mertnigh;  7  ni  fedatar  cia  leth  isan  bith 
noragtais,  7  cia  baile  i  fuigebtais  cobair  no  tir  no  talmuin. 


[X.j 

Rancatar  da.no  indsi  moir  [n-]  aie  9,  iar  scis  môir  do  gorto 
7  itaid  doib,  itéI0toirsig",  geranaig,  iar  mben^cheillefdoib^] 
do  chobair.  Cranda  imda  isan  indsi  sin:  ite  tortoirthech  : 
ubla  mora  orda  foraib.  Geirrmila  derga  amail  mucco  fo  na 
crandaib  sin.  Nocoisitis1^  iarum  frisna  crando  sin,  7  nos-bentais 


I . 

isin,  H. 

8. 

Facbuigsiut,  H. 

2 

corotregtastar,  H. 

9- 

n-aili,  H. 

3  • 

ndechaigh,  YBL. 

10. 

7  ate,  H. 

4- 

isin,  H. 

1 1 . 

toirsid,  KBL,tairsz^mertnig,/y. 

5. 

chrocund,  H. 

12. 

mbein,  H. 

6. 

H  omits. 

13- 

Sic  H. 

7- 

Sic  H.  muighitis. 

YBL. 

14. 

nuscoisitis,  H. 

The  Voyage  of  Mael  Duin.  475 

after  them  with  stones  of  the  harbour1.  Now  one  of  thèse 
stones  came  into  their  boat,  and  pierced  through  Mael  duin's 
shield,  and  lodged  in  the  keel2  of  the  curragh. 


IX. 

Now,  not  long  after  that  they  found  another  lofty  island, 
and  itwas  delightful,  and  therein  were  many  great  animais 
like  unto  horses.  Each  of  them  would  take  a  pièce  out  of 
another' s  side,  and  carry  it  away  with  its  skin  and  its  flesh,  so 
that  out  of  their  sides  streams  of  crimson  blood  were  breaking, 
and  thereof  the  ground  was  full>. 

So  they  left  that  island  swiftly,  madly,  hastily  (and  they 
were)  sad,  complaining4,  feeble;  and  they  knew  not  whither 
in  the  world  they  were  going  and  in  what  stead  they  should 
find  aidance  or  land  or  eround. 


X. 

Now  they  came  to  another  great  island,  after  great  weari- 
ness  of  hunger  and  thirst,  and  they  sad  and  sighing,  having 
lost  ail  hope  of  aidance.  In  that  island  were  many  trees  : 
fullfruited  were  they  5,  with  great  golden  apples  upon  them. 
Red  short  animais  like  swine6  were  under  those  trees.  Now 
they  used  to  go7(?)   to   those  trees  and   strike    them  with 


1 .  caladb  gen.  sg.  of  cala.  Caladb  .i.  cuan,   a  port,  harbour  or  haven  : 
shore  or  strand.  O'Cl. 

2.  drumluirg  I  hâve  not  met  elsewhere.  It  seems  the  ace.  sg.  oîdruim- 
lorg. 

5 .   A  réminiscence  of  the  ecbtress   «  horse-fight  »  of  the  ancient  Irish, 
which  corresponded  with  the  hestavig  of  the  Icelanders. 

4.  gerânaig  pi.  oïgerânach,  a  deriv.  oîgeran  a  complaint,  groan,  P.  O'C. 

5 .  tortoirtech,  perhaps  a  scribal  error  for  toirthech. 

6.  It  appears  from  the  sequel  that  they  were  wholly  or  in  part  composed 
of  fire.  A  sentence  to  this  effect  has  probably  dropt  out  hère. 

7.  no-coisitis  seems  2dy  près.  pi.  3  of  the  simplex  of  do-chôid,  ad-chuaid. 

Revue  Celtique,  IX  31 


474  Whitley  Stokes. 

cona.  n-iarluib,  co  tuititis  a  n-ublai1  diib,  7  conos-caithdis2 
iarsin.  O  matairi  co  fuinid  îlgrene  dognitis  andsin.  O  fuinedh 
grene  bxunorro  co  maitin  ni  artraigtiss  et/V,  acht  nobitis  a 
fochlaib  talmunî.  Eoin  imda  for  fosnam4  immon  indsi  sin 
immacuairt  forsna  tonda  imuig.  O  matain  co  nonai  sia  'sa  sia 
nosnaidis  on  innsis.  O  nonai  immorro  co  fescor  neso  'sa  neso 
ticdis  don  indsi  [LU.,  p.  23]  co  téigtis  iar  funiud  gréne  issin 
n-insi. 

Nolomraitis  iarwm  na  hubla6  7  nos'-ithitis/.  «  Tiagam  »,  ar 
Maél  dûin,  «  isin  n-insi  [itait  ind  eoin8].  Ni  hansu  dûn  oldds 
dona  hénaib  ».  Luid  fer  dib 9  do  déicsinnahinsi  7  dogair-side I0 
achéli11  chucai  i  tir.  Te  in  talam  fua  cossaib-som,  [7  nir'  fedsat 
atrab  and  ara  thés,12]  fôbith  ba  tir  tentidi  [hé,  7]1'  ind  an- 
mannai  7  notheigtis  in  tâlmain  ûasaib. 

Tob«rtatârI4  bec  dinix5  hublaib  léo  a  cétld  nos-ithitis  inna 
curuch16.  Intan  bd  solus  in  matandollotdr  ind  éoin  ond  insi 
for  sndm  isam-muir.  La  sodain  tocaibtis  ind  anmannai  thentidi 
a  cenna  asa  fochluib,  ocus  no-ittis  na  hubla  co  funed  ngrJne. 
Intan  adcuirtis  inna  fochlôi  notheigtis  ind  éoin  daranessi  do 
ithi  na  n-ubull  x7.  Dolluid18  àano  Mœl  dûin  cona  muint/V  7  tec- 
mallsat1?  an  ba  dina  hublaib  in  n-aidchi  sin.  Cumma  arang- 
gairtis  gortai  7  ittaid  dib  na  hubla.  Iss  ed  ani  linsait  a  curach 
dina  hublaib  ama/  bd  mellach  léo20,  7  lotair  îor  muir  afridisi. 


I . 

n-ublaib,  YBL. 

9- 

uaidhib,  YBL. 

2. 

condas-itis,  H. 

10. 

dogart-sidhe,     YBL.    diarard- 

S. 

hi  fochlaib  fo  talmain,  H. 

side, 

H. 

4- 

fbttnadh,  H. 

11 . 

fer  aile,  YBL. 

5« 

ond  inse,  H. 

12. 

Sic  H. 

6. 

cranna,  H.  crannu,  YBL. 

H- 

Sic  H. 

7- 

nohithetisiersin.  //. 

14. 

Doberaid,  YBL.    Doberad,  H. 

8. 

Sic  H. 

5- 

dona,  YBL. 

16.  For  t  a  cétlâ...  curuch  »,  YBL.  has  :  7  tiaghaid  ana  curach,  ciar  bo 
lesc  leo,  arînirjbo  din  iar  scis  e  doib,  acht  ba  iar  ngorta  moir  7  sœthar  0 
thuind  do  thuinn  doib. 

17.  For  «  ocus...  n-ubull  »,  YBL.  has:  do  thochaithem  na  n-ubull  o 
maitin  co  fescor;  o  fescor  immurro  co  maitin  tictis  an  eoin  do  ithi  na 
n-uboll. 

18.  Dothaed,  YBL.     . 

19.  teclomsad,  YBL. 

20.  For...  «  cumma...  afridisi  »,  YBL.  has:  7  linsad  a  curach  dona  hu- 


The  Voyage  of  Mael  Duin.  47$ 

their  hindlegs1  so  that  the  apples  would  fall  from  the  trees, 
and  then  they  would  consume  them.  From  dawn  to  sunset  the 
animais  did  not  appear  at  ail,  but  they  used  to  stay  in  the 
caverns  of  the  ground.  Round  about  that  island  many  birds 
were  swimming2  out  on  the  waves.  From  matins  to  none, 
further  and  further  they  used  to  swim  from  the  island.  But 
from  none  to  vespers  nearer  and  nearer  they  used  to  come  to 
the  island,  and  arrive  therein  after  sunset. 

Then  they  used  to  strip  .offthe  apples  and  eat  them.  «  Let 
us  go,  »  saith  Mael  duin,  «  into  the  island  wherein  the  birds 
are.  Not  harder  for  us  (to  do  so)  than  for  the  birds  ».  One 
of  the  crew  went  to  see  the  island,  and  he  called  hiscomrade  to 
him  on  shore.  Hot  was  the  ground  under  their  feet,  and  they 
could  not  dwell  there  for  its  warmth,  because  it  was  a  fiery 
land,  and  the  animais  used  to  heat  the  ground  above  them. 

On  the  first  day  they  brought  with  them  a  few  of  the  apples 
which  they  were  eating  in  their  boat.  When  the  morning  was 
bright  the  birds  went  from  the  island  swimming  to  sea.  With 
that  the  fiery  animais  were  upraising  their  heads  out  of  the 
caves,  and  kept  eating  the  apples  till  sundown.  When  they 
were  put  back  into  their  caves  the  birds  use  to  come  in  place 
of  them,  to  eat  the  apples.  Then  Mael  duin  went  with  his 
people,  and  they  collected  ail  the  apples  that  were  there  that 
night.  Alike  did  the  apples  forbid>  hunger  and  thirst  from 
them.  So  then  they  filled  their  boat  with  the  apples  as  seemed 
good4  to  them,  and  went  again  to  sea. 


1 .  iarhiib  I  hâve  never  met  elsewhere.  It  is  the  dat.  pi.  of  a  word  which 
must  mean  either  «  hind-leg  »,  or  •<  tail  ». 

2.  fosnam  is  perhaps  a  scribal  error  for  the  jonnadh  of  H.  This  is  ex- 
plained  by  «  gluasacht  no  sinbhal  a  going,  proceeding,  moving,  walking  », 
P.  O'C.  cf.  Eng.  ivend.  If fosnam  be  right,  it  may  be  —  snam  ••  swimming  », 
with  the  diminutivc  prefix/o  —  Ono-. 

3 .  ar-ang-gairtis,  2dy  près.  pi.  3  of  air-gairim,  with  infixed  relative 

4.  mellach  from  meldach  «  gratus  »  H.  10, 


476  Whitley  Stokes. 


XI. 

INtan  iarwm  arrochiûirtdr  na  hubla  hisin  *,  7  bd  môr  a 
ngorta  7  a  n-itu2,  7  intan  bâtir  ldna  a  mbéoil  7  a  srôna  di 
bréntaid  in  mara,  atchiat  insi  nar'bu  môr,  7  dùn  indi,  7  mûr 
gel  ard  im  sodain  amal  bad  du  aél  chombruithiu  dognethe,  no 
amal  bed  oen  chloch  calca  uile.  Mdr  a  dicsa3  on  muir  acht  nad 
roched  néolu*.  Oebela  robôi  indi'in.  Tige  snechtaidi  mdrgela  5 
immdm-mûr.  Al-lotdr  is-tech6  bd  moam  dib,  ni  con  facatâr 
nech  and  acht  catt  bec  bôi  forsind  ldr  oc  cluchiu  forsna  cethe- 
ôraib  uditnib?  lecdaib  bdtar  and.  Nolinged  di  cech  uditniu  fora- 
raili.  Dofécai8  biucdn  na9  firu,  7  nin-tairmesc10  dia  chluchiu. 
Qw-accatâr  iarsin  téora  sretha  isind[t];aigid  in  taige11  immd- 
cuaird  ônd  ursaind  diarali I2.  Sreth  and  chetum/tf  di  bretnas- 
aib  ôir  7  argit,  7  a  cosa  isind  fraigid,  7  sreth  di  muntorcaib 
ôir    7   argit,   mar  chirclu  dabcha  cechae^.    In  très  sreth  di 


b\aib,  oir  rancatar  a  les  gorta  7  itaid  do  beim  dib,  7  lotar  focctoir  doridisi 
for  muir  intan  ba  mithig  leou. 

1.  Inbuidh  tairnectair  doib  na  hubia  sin,  YBL. 

2.  YBL  inserts  :  bai  foraib,  7  batar  mugaighti  (mudaigh,  H.)  acht  becan 
(biucan,  H.). 

3.  airde,  YBL. 

4.  niullo  nime,  YBL. 

5 .  glegela  and,  YBL. 

6.  Dolotar  isan  teach.  YBL. 

7 .  for  ceitri  uaitneb,  YBL. 

8.  Dechais,  YBL. 

9.  inna,  YBL. 

10.  ni  rotairmisc,  YBL. 

!  1 .   for  fraighidh  an  tighi,  YBL. 

12.  co  araile,  YBL. 

1 3 .  Srcath  aile  dawo  di  muncib  moraib  amn/  chirclu  daibche  di  ôr  7  di 
airged.  YBL. 


The  Voyage  of  Mael  Duin.  477 


XI. 


Nowwhenthose  apples  failed1,  and  their  hunger  and  thirst 
were  great,  and  when  their  mouths  and  their  noses  were 
full  of  the  stench  of  the  sea,  they  sight  an  island  which  was 
not  large,  and  therein  (stood)  a  fort  surrounded  by  a  white, 
high  rampart  as  if  it  were  '  built  of  burnt 2  lime,  or  as  if  it 
were  ail  one  rock  of  chalk.  Great  was  its  height  s  from  the 
sea  :  it  ail  but  reached  the  clouds.  The  fort  was  open  wide. 
Round  the  rampart  were  great,  snow-white  houses.  When 
they  entcred  the  largest  of  thèse  they  saw  no  one  there, 
save  a  small  cat  which  was  in  the  midst  of  the  house, 
playing  on  the  four  stone  pillars  that  were  there.  It  was 
leaping  from  each  pillar  to  the  other.  It  looked  a  little  at 
the  men,  and  did  not  stop  itself  from  its  play.  Atter  that 
they  saw  three  rows  on  the  wall  of  the  house  round  about, 
from  one  doorpost  to  the  other.  Arow  there,  flrst,  ofbrooches 
of  gold  and  of  silver,  with  their  pins  in  the  wall,  and  a  row  of 
neck-torques  of  gold  and  of  silver  :  like  hoops  of  a  vat  was  each 
of  them.  The  third  row  (Vas)  of  great  swords,  with  hilts  of 


1.  ar-ro-chiùirtar  pi.  3  perf.  of  ar-chrinim.  The  sg.  3,  ar-ro-chiuir,  is  in 
the  Félire  Oengusso,  prol.  67,  127.  Skr.  çrndti,  çaçre,  Windisch  in  Kuhn's 
Zeitschrift,  XXIII,  205. 

2.  combruitbiu,  dat.  sg.  m.  of  com-briiithe,  for  com-bruighthe,  bruighim  rz 
3f  ûyw  ? 

3.  dîcsa,  a  deriv.  of  digas  «  high  »  :  digas  (gl.  edito)  Ml.  41e  9:  digas 
no  ard  (gl.  edito)  Ml.  47e  19. 


478  Whitley  Stokes. 

claidbib  môraib  co  n-imdornaib  ôir  7  airgit.  Ldna  inna  himda 
di  cholcthib  gelaib  7  di  tlachtaib  etrochtaib1.  Dam  bruthe 
da.no  7  tinne  forsind  ldr,  7  lestra  mâra  co  7zdeglind  inmesca. 
«  In  dunni  forracbad  so  ?  »  ol  Msèl  duin  frisin  cat.  Dosn-cca- 
cha  talmaidiu  7  gabais  cluche  arisi2.  Atgéoin  iarom  Méldûin 
ba  doib  {orrmsedi  in  praind.  Prain[dig]sit4  iarom  7  ibsit  7 
con-  [p.  23b]  toilset.  Dobmatdr  diurad  ind  lcnna  isna  paitti  7 
docosechtatar  diurad  in  biid.Intan  asbcrtsat  iarom  imthechtî, 
asbert  a  thris  comalta  Mdili  dûin  :  a  In  be'rsa  lemm  mûince  di- 
naib  muincib-se?  »  «  Ni  thô  »,  ol  Mœl  dûin,  «  ni  œn  chomet 
atâ  a  tech  ».  Doben  cammai6  corrici  ldr  ind  lis.  Dolluid  in 
cat  inandidid,  7  lebling  trit  amal  saigit  tentidi,  7  loiscthi  7  co 
mbu  lûathred,  7  luid  arisi  cor-rabi8  îor  a  uditni.  Rôailgenaig 
\-\rom  Maèlduin coni  briathraib  in  cat9,  7  sudigestdr  in  muince 
ina  inad,  7  glanais  a  lûathred  di  ldr  ind  lis,  7  fochairt  i  n-alt 
in  maro I0. 


Lotâr  iarwm  inna  curach  am-moltais  7  an-n-adamraigtis  in 
Comdid11. 

xn. 

Matan  moch  tres-ldi   iarsin  atchiat  insi  n-aili   7   sonnach 


1 .  Lana  na  himdagha  an  tighi  di  cluim  gil   7  di  tlachtaib  gelaib.  Cona- 
catar  iarsin  dam  etc.,  YBL. 

2 .  For  tins  sentence,  YBL.  has  :  7  nir  tairmeisc  an  cat  dia  cluiche. 

3.  foracbudh.  YBL. 

4.  praindighsed,  YBL.  -sid,  H. 

5 .  7  contascitar  forgradh  (furgrad)  an  bidh,  7  imraidhsid  iarom  imtedtf, 
YBL. 

6.  Dober  (dobir,  H.)  leis  araisin,  YBL. 

7.  nus-loisc,  YBL. 

8.  condesidh,  YBL. 

9.  Acallais  Mœlduin  he  o  briathraib,  YBL. 
10.  7  focherd  isan  ail  mara,  YBL. 

n .   7  lotar  iarom  ina  nôi,  7  molaid  7  aitchid  an  Comdigh  7  beraid  buidi 
do,  YBL. 


The  Voyage  oj  Mael  Duin.  479 

gold  and  of  silver.  The  rooms  were  full  of  white  quilts  and 
shining  garments.  A  roasted  ox,  moreover,  and  a  flitch  in 
the  midst  ôf  the  house,  and  great  vessels  with  good  intoxic- 
ating  liquor.  «  Hath  this  been  left  for  us  ?  »  saith  Mael  duin 
to  the  cat.  It  looked  at  him  suddenly  and  began  to  play  again. 
Then  Mael  duin  recognised  that  it  was  for  them  that  the 
dinner  had  been  left1.  So  they  dined  and  drank  and  slept. 
They  put  the  leavings(?)2  of  the  liquor  into  the  pots?,  and 
stored  up  the  leavings(?)  'of  the  food.  Now  when  they  pro- 
posed  to  go,  Mael  duin's  third  fosterbrother  said  :  «  Shall  I 
take  with  me  a  necklace  of  thèse  necklaces  ?  »  «  Nay,  »  saith 
Mael  duin,  «  not  without  a  guard  is  the  house».  Howbeithe 
took  it  as  far  as  the  middle  of  the  enclosure.  The  cat  followed 
them,  and  leapt  through  him  (the  fosterbrother)  like  a  fiery 
arrow,  and  burnt  him  so  that  he  became  ashes,  and  (then) 
went  back  till  it  was  on  its  pillar.  Then  Maelduin  soothed 
the  cat  with  his  words,  and  set  the  necklace  in  its  place,  and 
cleansed  the  ashes  from  the  floor  of  the  enclosure,  and  cast 
them  on  the  shore  of  the  sea4. 

Then  they  went  on  board  their  boat,  praising  and  magni- 
fying5  the  Lord. 

XII. 

Early  on  the  morning  of  the  third  day  after  that  they  espy 
another  island,  with  a  brazen  palisade  over  the  midst  of  it 


I  translate  the  fo-r-acbad  of  YBL.  The  forruised  of  LU.  is  obscure  to 


me. 


2.  diurad:  cf.  diurtha  .i.  rét  becc  (a  little  thing),  O'Dav.  77. 

3 .  paitti  pi.  ace.  of  pait  in  petit  meda  LU.  $4b  —  paitt  meda,  LL.  1 17a  :  da 
phait  fina,  LB.  I29a  35.  fon  pait  foilethi,  so  Laws  i.  152.  1.  28. 

4.  Compare  the  story  of  Brendan's  wicked  monk  who  steals  an  argtn- 
teum  frenum,  Perigrinatio,  p.  S 

> .    As  to  expressing  the  présent  participle  with  the  aid  of  the  conjunction 
an,  see  Kuhn's  Zeitschrift,  XXIX,  37b. 


480  Whitley  Stokes. 

umaide  tara  medôn  ros-rand l  in  n-insi  in 2  dé,  7  atchiat  tréta 
môra  di  chairib  inti  .i.  trèt  dub  fri  sonnach  adiu  7  tret  gel 
f/*i  sonnach  denall.  Oc  us  con2.cc2x.il  fer  mdr  oc  et/Vgle;?*  >  na 
csérech.  An  focherded  cairig  find  tar  sonnach  desiu  côsna  duba 
bd  dub  fôchetôir.  An  docured  d3.n0  cairig  nduib  tarsin  sonnach 
ille  bd  find  fôchetôir.  Bdtir  immecal-som^  oc  aicsin  ind  ni- 
sin5.  «  IS  ed  as  maith  [dun]  »,  ol  Maél  dûin,  «  cuirem  dd 
bunsaig6  isin  n-insi.  Dia  côemchlôt  7,  dath  awclôechbam-ni 8 
dia  tiasam  indi  ».  Fochartatdr  ian/m  bunsaig  ccr-nisc  dub  isa 
leth  i  mbdtdr  na  finna  7  finnais  fôchetôir.  Fochartatdr  da.no 
bunsaig  snaisi  gil  issa  leth  i  mbdtdr  na  duba,  7  ba  dub  fôche- 
tôir?. «  Ni  sechbaid  »,  ol  Maél  dûin,  [in  promad  sin] I0  nd 
dechammar  isin  n-insi.  Bes  ni  bad  ferr  ol  ndath-ni  olddti11  na 
bunsacha  ». 


Tollotdr  forcûlu  ônd  insi  la  himeclai I2. 


XIII. 


Très  lou  iarsin  dano  rathaigsit  araili  insi  mdir  lethain,  7  trèt 
mucc  n-dlaind  indi.  Gegnait-son  banb  bec  dib.  Asro[m]us  hrNin 


1 .  rorand,  YBL. 

2.  ardô.YBL. 

3.  ic  dtl'iugud,  YBL. 

4.  i  meaglaigh-sium,  YBL.  imedai-sium,  H. 

5.  oga  fégad  sin,  YBL. 

6.  ar  mbunsacha,  YBL. 

7.  claechload,  YBL.  claemhclat,  H. 

8.  clœclilobamuiine,  YBL.  claechlamaitne,  H. 

9.  Focerdatur  bundsacha  [con\z  ruse  dub  isin  leth  i  rabatar  na  finda  7 
batar  finda  focht:/oir,  7  cuirit  bundsacha  finda  isan  leith  a  mbatar  na  cairig 
duba  7  batar  duba  ibehetoir,  YBL. 

10.  an  fVomudh  sin,  YBL.  in  l'romadh  sin,  H. 

1 1 .  nibud  ferr  arndath  oldate,  YBL. 

12.  Lotar  foracula  doridhisi  ate  mertnig,  scitha,  imeclaig  7  ate  gortaig, 
acorcho,  YBL. 


The  Voyage  of  Mael  Duin.  481 

which  divided  the  island  in  two,  and  they  espy  great  flocks  ot 
sheep  therein,  even  a  black  flock  on  this  side  of  the  fence  and 
a  white  flock  on  the  far  side1.  And  they  saw  a  big  man  se- 
parating  the  flocks.  When  he  used  to  fling  a  white  sheep 
over  the  fence  from  this  side  to  the  black  sheep  it  became 
black  at  once.  So,  when  he  used  to  cast  a  black  sheep  over  the 
fence  to  the  far  side,  it  became  white  at  once.  The  men  were 
adread  at  seeing  that.  «  This  were  well  for  us  (to  do),  »  saith 
Mael  duin:  «  let  us  cast' two  rods2  into  the  island.  If  they 
change  colour  we  (also)  shall  change  if  we  land  on  it  ».  So 
they  flung  a  rod  with  black  bark  on  the  side  wherein  were 
the  white  sheep,  and  it  became  white  at  once.  Then  they 
flung  a  peeled  ?,  white  rod  on  the  side  wherein  were  the  black 
sheep,  and  it  became  black  atonce.  «  Not  fortunate(?)4  was 
that  experiment,  »  saith  Mael  duin  :  «  let  us  not  land  on  the 
island.  Doubtless  our5  colour  would  not  hâve  fared  betterthan 
the  rods  ». 

They  went  back  from  the  island  in  terror6. 


XIII. 

On  the  third  day  afterwards  they  perceived  another  island 
great  and  wide,  with  a  herd  of  bcautiful  swine  therein.  Of 
thèse  they  kill  a  small  pig.  Then  they  were  unable7  tocarry8 


1 .  fri...  adiu...  fri...  denall  :  cf.  adi'u  7  anall,  LU.  127*  15.  denall  rz:  do- 
anall  G.  C.  611. 

2.  bunsaig,    dual    ace.   of  bunsach   t  rod  ».    «  pôle,   switch,  wattle,  », 
P.  O'C. 

3.  snaisi  (ex  * snaid-ti),  part.  prêt.    pass.  of  snaidim  —  W.  naddu  «  as- 
ciare,  dolare  ». 

4.  sechbaid  zz:  scchfaid,  Trp.  Life,  p.  228,  1.  25. 

5 .  oln  for  arn  seems  a  scribal  error. 

b     Aocording  to  YBL.  «  They  went  back  again,  mournful,  wearied,  fear- 
ful,  hungry,  famished.  » 

7.  Asro(ni)us  seems  prêt.  pass.  sg.  3  oi*as-medim,  of  which  èmdim  (W'in- 
disch's  Woerterbuch)  is  the  dépendent  form. 

8 .  brith   «  bearing,  carrying   » .  Even  a  small  spécimen  of  thèse   swine 
required  the  whole  crew  to  carry  it  ! 


4  82  Whitley  Stokes. 

a  brith  dia  doud1,   co  tuidchetar  uli  imbi.  Fannôiset  7  nam- 
bertatâr  inna  curach  cucu. 

Atchiat  ûadib  iarsin  sliab  mdr  isind  insi,  7  imrdidset  techt 
dia  déicsin  na  hindseass2.  Al-lotdr  ian/m  Diurdn  Leccerd  7 
Germdn  [p.  24a]  do  ascnam  in  tslébi  arrecat  abaiad  let[h]ain 
nâd  bo  domain  aracind.  Tummis  German  irlund  a  çai  issin 
n-abaind,  7  immd/z-dibdai  dp  fôchétôir  amal  bid  tene  nod- 
loscad),  7  ni  lotdr  ni  bad  sire.  Co/jaccatar  and  da.no  frisin 
n-abaind  anall  daumu  môra  mêla  ina  ligu.  7  fer  môr  ina 
sadiu  occaib.  Bi  Germdn  iar  sudiu  crand  f/'ia  sciath  do  bup- 
thad  na  ndam-*.  «  Cid  dia  mbûpthai>  na  baéth-laegu  ?  »  ol  in 
t-aégaire  mdr  hi-sin.  «  Cairm  hi  rat  ammaithre6  nal-loeg-sa  ?  » 
ol  Germdne.  «  Atdt  frisa  sliab  ucut,  »  olse,  «  anall  ».  Tollotdr 
afrisi  coa  céli,  7  adfiadar  seéla  doib  7. 


Dollotdr  ass  iar«m8. 


XIV. 

Fûaratdr  insi  nir'  bu  chian  iarsin,  7  mulend  mdr  grainne 
and,  7  mulleôir  mdr  brûichnech  grainne  and 9.  Immufoacht10 
do  :  «  Cid  mulend  so  ?  »  «  Nicô  dm,  »  ol  se,  «  ni  nach 
eolach  iarmifôich  ni  nach  aithgenaid-si,  »  ol  se.  «  Ndtho,  » 
ol  seat-som11.  «  Leth  n-etha  îor  tire  dm,  »  ol  se,  «  is  sunda 
melair.  Ndch  ni  b<res  cesacht  de  isin  muilind-sa  conmélair.  » 

1 .  gegnaitw (gegnaid.  H.)  banb  leo  (beu,  H  )  dib  7  nom-beraid  (nus-beraid. 
H.)  leo  dia  fuine,  YBL. 

2.  For  «  ass  »,  YBL,  bas  da  siriudh. 

3 .  7  cthaidh  a  ma/  bidh  tene  noloiscedh  an  gœ.  7  batar  a  (hi ,  H.)  socht, 
YBL. 

4.  Binais  achrundu  (a  crandœ.  H.)  fria  sciath  do  ubtadh  (di  fubtadh,  H.) 
na  ndam. 

>.  fubthai.  YBL.  6.   a  maithrecha,  YBL. 

7.  YBL.  adds:  «  Ni  ricfom  eter,  »  ol  Mael  duin.  «  in  indsi  isa  scel  sin  ». 

8.  Imraiset  iarsin  ond  indsi  sin  co  scith  atoirsech,  YBL. 

9 .  7  muillcoir  bruichneach  gruganach  garb  croblom  cringranna  and,  YBL. 
io.  Imcomairsed.  YBL.  imcomairctis^  H. 

1 1 .  For  this  and  thc  preceding  sentence.  YBL.  has  :  muilenn  Innbir  tre  se- 
pant  andso,  ol  an  muilleoir. 


The  Voyage  of  Mael  Duin.  483 

it  to  be  roasted1,  so  they  ail  came  round  it.  They  cooked  it2 
and  bore  it  into  their  boat. 

Then  they  see  a  great  mountain  in  the  island,  and  they 
proposed  to  go  and  view  the  island  from  it.  Now  when  Diu- 
ran  the  Rhymer  and  Germdn  went  to  visit  the  mountain 
they  find  before  them  a  broad  river  which  was  not  deep. 
Into  this  river  Germdn  dipt  the  handle  of  his  spear,  and  at 
once  it  was  consumed?  as  if  fire  had  burnt  it.  And  (so)  they 
went  no  further.  Then,  too,  they  saw,  on  the  other  side  of 
the  river,  great  hornless  oxen  lying  down,  and  a  huge  man 
sitting  by  them. Germdn  after  thisstruck  his  spear-shaft  against 
his  shield  to  frighten  the  oxen.  «  Why  dost  thou  frighten  the 
silly  calves?  »  saith  that  huge  herdsman^.  «  Where  are  the 
dams  of  thèse  calves  ?  »  saith  Germdne.  «  They  are  on  the 
other  side  of  yonder  mountain,  »  saith  he.  Diuran  and  Ger- 
mdn return  to  their  comrades,  and  tell  them  the  tidingsï. 

So  thence  they  (ail)  went6. 


XIV. 

Not  long  thereafter  they  found  an  island,  with  a  great  hid- 
eous  mill  wherein  was  a  miller  huge,  .  .  .7,  hideous.  They 
asked  him:  «  what  mill  is  this?  »  «  Not.  .  .  indeed  »  saith 
he,  .  .  .  asks  what  ve  shall  not  know  ».  «  Nay  »  say  they. 
«  Half  the  corn  of  your  country,  »  saith  he,  «  is  ground  hère. 
Every  thing  which  is  begrudged  is  ground  in  this  mill  ». 

1 .   (îoud  (now  written  dogbadh)  burning,  singeing.  scorching. 

2  fa-n-nôiset :  cf.  orce...  fonoiset  for  beraib  cairthind,  LL.  p.  I20a  12 
of  the  facsimile. 

5.  imm.in-dibdai,  près.  ind.  act.  sg.  3  of  imm-dibdaim,  with  infixed  pron. 
of  ^d  sg. 

4.  lit.  «  shepherd  »,  but  generalised  into  «  herd  »,  like  (3ooxoXo;  in 
ht —qoou/.oào:. 

5 .  YBL.  adds  .  1  Wc  will  not  go  at  ail,  »  saith  Maelduin,  «  into  an  is- 
land of  which  that  is  the  news.  » 

6 .  YBL.  lias  :  «  Then  they  vovagcd  from  that  island  wearily  (and) 
sadly  ».  This  chapter  isobviûusly incomplète  as  to  the  swine  and  the  calves. 

7.  brûichnech  ~  bruighneach  riotous,  quarrelsome,  P.  O'C.  YBL.  bas  : 
«  and  a  miller...  rough,  barehanded,  withered  and  hideous  therein.   » 


484  Whitley  Stokes. 

La  sodain  atchiat  na  heriu  tromma  diarmidi  *  (or  echaib  7 
dôinib  don  mulinn  7  âad  da;/o  afrisi  :  achl  ani  dobtrthe  ûad  is 
siar  nobmhe.  Imcomarctàr  atheruch  cia  ainm  in  mulind-se. 
«  Mnlcnn  Inbir  tre  cena/zd,  »  ar  mulleôir. 

Noda-sénsat  iarsin  ô  airdiu  c/'oiche  Cvist  iarsinni  o'tchûal- 
atdr7  ô'tchoncatdrnahuli-sea2,  Lotdr  (or  intech  >  inna  curach. 


XV. 

Al-lotar4  da;/o  ond  insi  sin  in  mul/;w  fûaratar  insi  mair  7 
sochaide  môr  di  ddinib  indi.  Hit  é  duba  et/V  churpu  7  etach. 
Cennaithi  5  imma  cenna  7  ni  chumsantais  di  chui6.  Dofuit 
di-cra»dchor7  don  dala  comaltai  Mdili  duin  dul  isin  n-insi. 
Al-luid  side  cusna  dôini  robdtdr  oc  côi  ba  cz/mthach  friu  fô~ 
chétoir  7  gabais  côi  léo.  Foite  dias  dia  thabairt  ass  7  nin-athgen- 
atdr  et/r  a  célib  [p.  24b]  fecsit  cadesne  (or  côi  8.  Ba  hand  as- 
bert  Mxl  duin  :  «  Tét  cethrar  uaib  »,  ol  se,  «  co  n-armaib  7  tucaid 
na  fini  arecin,  7  nd  décid  in  talmain  nach  in  n-acr,  7  tabrid 
(or  n-étaige  immôbar  srôna,  7  immôbar  mbcolu,  7  na  siigid 
aér  in  tire  9,  7  [na]  gataid  (or  sella  do  (or  feraib  fodeisne  IO  ». 


1 .  dogach  leith,  YBL. 

2 .  iar  n-aicsin  in  muilind-sin  doib  7  iar  cloistecht  a  sccl,  YBL. 

3.  for  teichedh  iarsin,  YBL. 

4.  Amail  dolotar,  YBL. 

5 .  7  cendpaite,  YBL.  7  cendpati,  H. 

6.  7  siad  ic  sirchài  7  toirsi  cen  airisium,  YBL. 

7.  Dochuir  do  crandchur,  VBL. 

8.  For  Alluid...  cûi.  V3L.  has:  cosnadainib  robatar  acon  côi  7  ba  com- 
dath  é  friu  lbcetoir  7  gabais  i  coi  leo. 

9.  arnaro  suighti  an  aer  an  tire,  YBL. 
10.   do  for  fer  fodein,  YBL. 


The  Voyage  of  Mael  Duin.  485 

With  that  they  see  the  heavy,  countless  loads  on  horses  and 
human  beings  (going)  to  the  mill  and  from  it  again;  only 
that  what  was  brought  from  it  was  carried  westward.  Again 
they  asked  :  «  What  is  the  name  of  this  mill  ?  «  «  The  mill  of 
Inber  Tre-cenand,  »  saith  the  miller. 

Then  after  this  they  sained  themselves  with  the  sign  of 
Christ's  cross.  When  they  heard  and  saw  ail  thèse  things 
they  went  on  their  way1  into  their  boat. 


XV. 

Now  when  they  went  from  that  island  of  the  mill  they 
found  a  large  island,  and  a  great  multitude  of  human  beings 
therein.  Black  were  thèse,  both  in  bodies  and  raiment.  Fillets2 
round  their  heads,  and  they  rested  not  from  wailing.  An  un- 
lucky  lot  fell  to  one  ofMael  duin's  two  fosterbrothers?  to  land 
on  the  island.  When  he  went  to  the  people  who  were  wail- 
ing he  at  once  became  a  comrade^  of  theirs  and  began  to 
weep  along  with  them.  Two  were  sent  to  bring  him  thence, 
and  they  did  not  recognise  him  amongst  the  others, 
(and)  they  themselves  turnedî  to  lament.  Then  said  Mael 
duin  :  «  Let  four  (of  you)  »  saith  he,  «  go  with  your  weap- 
ons,  and  bring  ye  the  men  perforce,  and  look  not  at  the 
land  nor  the  air,  and  put  your  garments  round  your6  noses 
and  round  your  mouths,  and  breathe/    not  the  air  of  the  land, 

1 .  So  in  the  Imram  hua  Corra,  Book  of  Fermoy,  1 7 5^,  the  miller,  after 
declaring  that  jewels  and  treasures  and  kine  were  cast  into  the  mouth  of 
his  mill,  says  :  gach  ni  ara  n-denta'r  cesacht  isin  domun-se,  iss  e  sin  dobmm-si 
a  mbel  in  muil/««-si,  (7)  misi  muilleoir  If/rn,  «  every  thing  as  to  which 
niggardliness  is  shewn  in  this  world,  that  I  put  into  the  mouth  of  this  mill  ; 
and  I  am  the  Miller  of  Hell.  » 

2 .  cennaithi  —  cenn-snâithi  «  head-thread  » ,  «  fillet  » . 

3 .  One  of  Mael  duin's  three  fosterbrothers  having  been  killed  by  the  cat, 
he  had  now  only  two. 

4.  comthach,  LL.  2271  48.  «  comrade,  companion,  »  P.  O'C.  YBL  has 
comdath  «  of  the  same  colour  ». 

5 .  feacadh  a  bending  or  bowing,  stooping  down,  P.  O'C. 

6.  immo-bar  «  round  your  ».  Cf.  immuan-eclis  «  round  their  church  » 
Book  of  Armagh,  i8a  2. 

7.  Lit.  suck. 


486  Whitley  Stokes. 

Dognith  samlaid  anisin.  Luid  in  cethrâr1,  7  dobertatàr  léo  in 
diis  n-aili  arécin.  A  n-immdcomraicthe  ced  atconcatâr  isin  tir, 
asbt'rtis  :  «  Niro/z  fetammàr  dm,  »  ol  seatsom,  «  acht  a 
n-atchondcamdr  dorigensam  » 2. 

Tdncatdr  iarom  cohellam  iarsin  ond  insi. 


XVI. 

Recait  iarsin  insin-aird  n-aili  i  mba  rubatdr  cethri  sonnaig>, 
nod-randsat  hi  cethair.  Sonnach  di  or  chetumus,  alale  di 
argut,  in  tress  sonnach  di  humu  7  in  cethrammad  di  glain. 
Rig  isin  chethrammad  4  r[a]ind,  rigna  i  n-alaili,  oclâcha  i 
n-alaili,  ingena  isind  aili.  Tolluid  ingen  aracend  7  dosn- 
deraidî  hi  tir,  7  dobtrt  biad  dôib.  Fri  cdise  rosamlaisetar-som, 
7  secip  blas  ba  mellach  la  nech  fogebed  fair.  Ocus  ddlis  dôib  a 
cilurn6  bic  co  comtalsatar  mesci  5  tri  laa  7  téora  aidchi.  Rom- 
bôi  ind  ingen  oca  timthirecht  in  tucht-sa.  A  ndofochtraiset7 
isin  très  [16]  ba  inna  curuch  for  muir  bdtdr.  Ni  cott-facatar 
ndch  dû  a  n-insi  ndch  a  n-ingin. 


Rdisit  ass  iarom. 


1.  YBL.  inscris:  7  dogniait  (dogniat,  H.)  an  asbm  (anwl  aspert,  H.) 
Masl  duin. 

2.  7  dobcrait  leo  areicin  a  fer  muntire  7  imcomarcais  Mœl  duin  do  : 
«  Cidh  adeonaire  isin  indsi  ?»  «  Ni  fetar,  »  ol  se,  «  acht  a  n-atowarc  do- 
romwsa  to  bes  na  tuaithe  etir  a  mbit/w  (?)  » 

5.  sondaighe,  YBL.  sonnaiche,  H. 

4.  cht'/raind,   YBL.  cedna  raind,  H. 

5 .  duss-uc,  H.  dos-ucc,  YBL. 

6.  7  dalais  lind  a  (i.  H.)  lestar  bic  doib  coro  cotailset  ar  mesce,  YBL. 

7.  Amal  roduisigsed,  YBL. 


The  Voyage  of  Mael  Duin.  487 

and  take  not  your  eyes  off  your  own  men  ».  The  four  went, 
and  brought  back  with  them  perforée  the  other  two1.  When 
they  were  asked  what  they  had  seen  in  the  land,  they  would 
say  :  «  Verilv,  we  know  not,  »  say  they;  «  but  what  we  saw 
(others  doing)  we  did  » . 

Thereafter  they  came  rapidly  from  the  island. 


.  XVI. 

Thereafter  they  corne  to  another  lofty  island,  wherein  were 
four  fences,  which  divided  it  into  four  parts.  A  fence  of  gold, 
first  :  another  of  silver  :  the  third  fence  of  brass  :  and  the  fourth 
of  crystal.  Kings  in  the  fourth  division,  queens  in  another, 
warriors  in  another,  maidens  in  the  other.  A  maiden  went  to 
meet  them,  and  brought 2  them  on  land,  and  gave  them  food. 
They  likened  it  to  cheese;  and  whatever  taste  was  pleasing 
to  anyone  he  would  find  it  therein>.  And  she  dealt  (liquor) 
to  them  out  of  a  little  vessel,  so  that  they  slept**  an  intoxica- 
tion of  three  days  and  three  nights.  Ail  this  time  5  the  maid- 
en was  tending  them.  When  they  awoke6  on  the  third  day 
they  were  in  their  boat  at  sea.  Nowhere  did  they  see  their 
island  or  their  maiden. 

Then  they  rowed  away7. 


1 .  but  not  the  fosterbrother. 

2.  The  do-sn-de-raid  of  LU.  is  obscure  to  me.  It  seems  the  redupl.  prêt, 
sg.  3  of  * do-de-rithim  ? 

3 .  A  common  incident  in  Irish  legend. 

4.  comtalsalar,  deponential  s-pret.  pi.  3  of  comtalaim  :  cf.  tistai-si  isin  dûn 
acht  comtalat  «  ye  shall  corne  into  the  fort  provided  thev  are  asleep  s.  LL 

2)2a. 

5.  in-tucht-sa,  tucht  «  time  or  season  »,  P.  O'C.  tuchtimrulâith  in  I.îath 
Mâcha  7  inDub  Sainglend  fôn  charput,  LU.  io>b  16. 

b.  dofochtraiset,  s-pret.  pi.  3  (absolute  form)  of  the  verb  of  which  diuch- 
traà  (awaking)  is  the  infmitive. 

7.  This  chapter  also  is  incomplète.  The  mention  of  the  quadripartite 
division  of  the  island  must  hâve  been  rnade  for  some  purpose. 


488  Whitley  Stokes. 


XVII. 

Fogaibset  insi  n-aili  iarsin  ndr'bu  môr,  7  dûn  indi.  Dorus 
umaide  fair  7  dgai  umaidi  and.  Drochet  glainidi  ar  in  dorus. 
Amal  nothéigtis  suas  îor  in  drochet  dofuittitis  sis  forcûlu.  La 
sodain  atchiat  banscdil  asin  dûn  [immach]  7  cilor[n]d  l  inna 
ldim.  Tôcbaid  dàr  nglainidi  a  hicritur  in  drochit,  7  linais 
cilornd  asin  tiprait  bôi  fôn  drochat 2,  7  luid  àfrisi  isa  ndûn. 


Taét  ferthigis  5  &T.4  Maél  dûin  »,  ol  Germdne. 

«  Maél  dûin  on  ém5,  »  ol  sisi,  la  dûnad  in  dorais  tara 
héissi. 

Be;/tais  iarsudiu  inna  hdgu6  umaidi  7  al-lin  n-umaide  robôi 
foraib,  7  in  îogur  iarwm  dorigensat  ba  céol  meldach  n-dilgen 
son".  La  sodain  fochairt  inna  cotlud  co  matain  arabdrach. 

A  ndofôchtraiset 8  cowacca[tar]  in  mbanscaîl9  cetna  asin  dûn 
7  a  cilornd  inna  l(âim),  7  linaid  I0  fôn  chlar  chétna. 

«  hïge  taét  ferthaigis  (arcenn)  Mél  dûin,  »  ol  Germân. 

«  Amra  brige  [lium  »]  ol  si,  «  Mdel  dûin,  »  la  dûnad  ind  lis 
tarahessi. 

Fosn-dlaig  som  (in  ceol)  cétna  co  arabdrach11. 

1.  cilarn,  YBL.  cilurnn,  H. 

2.  clat\  YBL. 

3 .  ferdaigis,  YBL. 

4.  arcend,  YBL. 

5.  Ma;lduin  aras,  YBL. 

6.  7  bertaidhis  (bertaigis,  H)  iarsin  na  (ina,  H.)  gai. 

7.  ba  céol  tlaith  teidbind  (tetbinn,  H.),   YBL. 

8.  Amail  tuiscised  ar  maitin,  YBL. 

9.  an  mnai.  YBL. 

10.  7  linais  asan  tiprâit  cetna  bui  fon  clar,  YBL. 

11.  la  dunad  in  dorais,  7  fogni  [leg.  dognil  dorisi  an  ceol  cetna,  7  foscerd 
doridhisi  ana  cotlud  co  arabarach,  YBL. 


The  Voyage  of  Mael  Duin.  489 


XVII. 

Thereafter  they  fourni  another  island  which  was  not 
large.  Therein  was  a  fortress  with  a  brazen  door  and  brazen 
fastenings1  thereon.  A  bridge  of  glass  (rose)  by  the  portai. 
When  they  used  to  go  up  on  the  bridge  they  would  fall  down 
backwards.  With  that  they  espy  a  woman  coming  out  from 
the  fortress,  with  a  pail  in  lier  hand.  Out  of  the  lower  part 
of  the  bridge  she  lifts  a  slab  of  glass,  and  she  filled  the  pail  out 
of  the  fountain  which  flowed  beneath  the  bridge,  and  went 
again  into  the  fortress. 

«  A  housekeeper2  cornes  for  Mael  duin!  »  saith  Germane. 

«  Mael  duin  indeed!>,  »  saith  she,  closing  the  door  behind 
her. 

After  this  they  were  striking4  the  brazen  fastenings  and  the 
brazen  net  >  that  was  before  them,  and  then  the  sound  which 
they  made  was  a  sweet  and  soothing  music,  which  sent  them 
te  sleep  till  the  morrow  morning. 

When  they  awoke  they  saw  the  same  woman  (coming) 
out  of  the  fortress,  with  her  pail  in  her  hand,  and  she  fills  (it) 
under  the  same  slab. 

«  But  a  housekeeper  cornes  to  meet  Mael  duin  !  »  saith  Ger- 
màn. 

«  Marvellously  valuable  do  I  deem  Mael  duin  !  »  saith  she, 
shutting  the  enclosure  after  her. 

The  same  melody  lays  them  low6  then  till  the  morrow. 


1 .   âgai,   pi.  ace.   âgu,  infra,    perhaps  from  *pâgu,  cognate  with  rorydç 
È--àyr,v,  pa-n  gît. 

1.  ferthigis  oeconomus,  Windisch's  Wœrterb.,  544. 

3.  The  anue  of  YBL.  —  aviai,  Ascoli,  Gloss.  pal.  hib.,  p.  xl. 

4.  ben-t-ais  an  accumulation  of  the  forms  proper  to  the  t-  and  the  s-pre- 
terites. 

5.  a  portcullis? 

6.  fo-sn-alaig,  près,  indic.  act.  sg.  3  of  fo-algaim  «  sterno  »,  «  prostro.»; 
cf.  the  prêt.  sg.  3  jos—rolaich,  Fiacc's  hymn,  62. 

Revue  Celtique,  IX.  32 


490  Whitley  Stokes. 

Tri  Ida  7  téora  aidchi...  dôib  fond  riaw  sain1.  ISin  chetra- 
mad  lou  (iarwm)  dolluid  in  banscâl  andoc//m.  Alain  (dem  tu- 
naic  and.)  [p.  25*]  Brat  gel  impe,  7  buinne  ôir  immd  moing. 
Mong  orda  iuirn.  Da  maéldn  argit  imma  cossa  gelchorcrai. 
Bretnas2  argit  co  wbrephnib  3  ôir  ina  brut,  7  léne  srebnaide 
sita  fria  gelchnes4. 

«  Mochen  duit,  a  Mail  àûin  !  »  ol  si,  7  ainmnigestar  cach 
fer  fo  leith  cona  anmaim  diles  fein.  «  IS  clan  o  ta  hi  fis  7  hi 
forus  îor  tichtainî  sund,  »  ol  si. 

Dobeir  lei  iarom  hi  tech  môr  bôi  hi  comîocus  don  muir,  7 
tocaib  a  curach  hi  tir.  Ccwaccatar  iarom  aracind  isin  tig  dt;rgud 
do  Msél  àûin  a  ôenur  7  dérgud  cach  triir  dia  muintir.  Dobert 
biad  doib  i  n-ôen  chiss6  cosmail  do  chdssi  7  nô  thdth.  Ataig 
cuit  cach  trir.  Cach  blas  adcobrad  cach  iss  ed  fogebed  fair.  No- 
thimthirted8  dd.no  do  Miel  àûin  (or  leth.  Linais  dano  cilarnd 
fon  cldr  ehetna,  7  ddlis  doib  sel  cach  thrir  lee9.  Atgeoin  dano 
intan  ba  leôr10  leo.  Anais  do  dail  dôib. 


«  Ben  chomadas11  do  Maèl  àûin  in  ben-so  !  »  (or  cach[fer]  dia 
muintir. 

Luid-si  iarom  conz  henchiss  7  cona  cilurnd  [uaidhib.] 

Asb^rtatar12  a  muintt'r  fri  Miel  dûin  :  «  Inn  eberam  fria  dûs 
in  fièfed  Lit1'  ?  » 


1 .  fonn  innus  sin,  YBL. 

2.  Bretnais,  YBL. 

3.  cona  breifnib,  YBL. 

4.  gelcorp,  YBL. 

5  .  bar  tiachtain,  YBL. 

6.  latin  cista,  a  chest,  interlined:  .i.  in-oen  lesU/r. 

7.  chasiu,  YBL. 

8.  Doimtirthedh.  YBL. 

9.  lé  fo  sech,  YBL. 

10.  tan  bad  lôr,  E. 

11.  comadhais,  YBL.  comaduis,  E. 

12.  Asperat,  E. 

13.  in  ebcrtais  frie  in  faifai  laiss,  E. 


The  Voyage  of  Mael  Duin.  491 

Three  days  and  three  nights  were  they  in  that  wise1.  On 
the  fourth  day  thereafter  the  woman  went  to  them.  Beautiful, 
verily,  came  she  there.  She  wore  a  white  mande,  with  a  circ- 
let2  of  gold  round  lier  hair.  Golden  hair  she  had.  Two 
sandals?  of  silver  on  lier  rosy4  feet.  A  brooch  of  silver  with 
studsS  of  gold  in  her  mantle,  and  a  filmy6,  silken  smock  next 
her  white  skin. 

«  My  welcome  to  thee,  O  Mael  duin  !  »  saith  she  ;  and  she 
named  each  man  (of  the  crew)  apart,  by  his  own  name.  «  It 
is  long  since  your  coming  hère  hath  been  known  and  under- 
stood  ». 

Then  she  takes  (them)  with  her  into  a  great  house  that 
stood  nearthesea,  andhaulsup  theirboat  on  shore.  Then  they 
saw  before  them  in  the  house  a  couch  for  Maelduin  alone,  and  a 
couch  for  every  three  of  his  people.  She  brought  them  in  one 
pannier  food  like  unto  cheese  or  tâth7.  She  gave  a  shareto  every 
three.  Every  savour  that  each  desired  this  he  would  find 
therein.  There  she  tended  Maelduin  apart.  And  she  fllled  her 
pail  under  the  saine  slab,  and  dealt  liquor  to  them.  A  turn  for 
every  three  she  had.  Then  she  knew  when  they  had  enough. 
She  rested  from  dealing  to  them. 

«  A  fitting  wife  for  Mael  duin  were  this  woman,  »  saith 
every  man  of  his  people. 

Then  she  went  away  from  them,  with  her  one  vessel  and 
with  her  pail. 

Said  his  people  to  Mael  duin  :  «  Shall  we  say  to  her,  would 
she,  perchance,  sleep8  with  thee?  » 


1 .  rîan,  P.  O'C's  rian  and  raon  a  road,  way  or  passage. 

2.  buinne,  P.  O'C's  haine  a  hoop  :  also  the  hem  of  cloth. 

3.  maelân,  ace.  pi.  maelanu,  LU.  3b  45,  where  it  corresponds  with  the 
in  medio  ficonis  sui  of  Nennius. 

4.  Lit.  «  white-purple  ». 

5.  brephnib  seems  pi.    dat.  of  bref  ne  .i.  poil  no  ionga  <■  holeor  nail   », 
P.  O'C. 

6 .  Lit.  t  membranaceous  »,  a  derivative  of  sreabhan  a  caul  or  membrane, 
P.  O'C. 

7.  tdth  À.  mulcbàn,  cheese  unpressed  made  of  sour  milk  curds,  P.  O'C. 

8.  fcfed,  2dy  b-  fut.  sg    3  of  the  verb  ofwhich  the  b-  fut.  sg.  1  isfifat- 
sa,  LU.  78a,  sg.  j/^/einfra:  perf.  sg.  î,fiu,  pi.  }feotar. 


492  Whitley  Stokes. 

«  Cid  gâtas  uaib,  »  ol  seseom,  «  ci  atbcraid  fria  I  ?  » 
Tic-si  arabarach2.  Asbtvtatar  fria:  «  In  dingne-siu  caratrad 
fri  Maèl  àiiin,  7  in  faéfe  lais,  7  cid  na  hanai  hifos  innocht  ?  »> 
Asbért-si  na  hathgéoin  7  na  fit/r  cv  4  rét  peccad.  Luid  iarom 
uadib  dia  tig,  7  tic  arabarach  in  trath  cetna  cona.  thimthirecht 
dôib.  Oc  us  o  roptar  mescai  s  7  roptar  sâthig  râdit  na  briat[h]ra 
cetna  f/ïasi6. 

«  Imbarach  thra,  »  ol  si,  «  dobe'rthar  athesc  diiib  dind-isin.  » 
Luid  iarom  dia  tig  7  fo/ztuilet  som  fora  nd^rgodaib.  Amal  ro- 
diiiscset  som  ba  ina  curach  bâtar  îor  carraic,  7  ni  accatar  in 
n-inis  no  in  dûn  no  in  ben  no  in  magen  i  mbatar  riam7. 


XVIII. 

Amal  dolotar  on  magin  sin  co  cualatar  anairturid  gdir  môir 
7  lex  amal  bid  oc  cetol  salm8  nobethe  and.  Ind  adaig  sin  7 
al-la  arabarach  co  nonai  dôib  oc  imram  co  festais  cia  gair  no 
cia  lex  rochûalatar.  A[t]chiat  9  insi  n-cdird  sliabdai  ldn  d'énaib 
dubaib  7  odraib  7  alathaib  oc  nuall  7  oc  labra  môr  io. 


1 .  YBL.  adds:  ni  demaidh  forro.  E  has  :  Cia  dghat«5  di'p  a  râdo,  or  se. 

2.  YBL.  adds:  in  trath  cetno  do  timtireacht  doib  amal  dognidh  reine. 
E.  adds  only:  do  thimthirecht  doib. 

3 .  Aspirât  fria  :  in  fayï  ra  Moclduin  no  an  anfaz'  hifus  inocbt,  E. 

4.  cia,  YBL.,  E. 

5.  mescdo,  E. 

6.  rorâidsit  in  cetno  friasi,  E. 

7.  «  Immaroch  foghebtai  aithescc,  »  or  sî,  oc  imtecht  uaidib,  7  tulsit 
som  iarum,  conaà  ed  rodus-duscet  ina  curuch,  7  ni  fetatar  cia  letli  hi  raba 
in  dûn  nac/;  in  insi,  E. 

8.  spalm,  E. 

9.  Co«facotar.  E. 

10.   oc  nuâl  7  erlapra  gomôr,  E. 


The  Voyage  of  Mael  Duin.  495 

«  How  would  it  hurt  you,  »  saith  he,  «  to  speak  to  her1?  » 
She  cornes  on  the  morrow.  They  said  to  her:  «  Wilt 
thou  shew  affection  to  Mael  duin,  and  sleep  with  him?  and 
why  not  stay  hère  tonight?  »  She  said  she  knew  not,  and 
had  never  known,  what  sin  was.  Then  she  went  from  them 
to  her  house  ;  and  on  the  morrow,  at  the  same  hour,  she 
cornes  with  her  tendance  to  them.  And  when  they  were 
drunken  and  sated,  they  say  the  same  words  to  her. 

«  Tomorrow,  »  saith.  she,  «  an  answer  concerning  that  will 
be  given  to  you  ».  Then  she  went  to  her  house,  and  they 
sleep  on  their  couches.  When  theyawoke2,  they  were  in  their 
boat  on  a  crag;  and  they  saw  not  the  island,  nor  the  fortress, 
nor  the  lady,  nor  the  place  wherein  they  had  been. 


XVIII. 

As  they  went  from  that  place  they  heard  in  the  north-east 
a  great  cry  and  chant  3  as  it  were  a  singing  of  psalms.  That 
night  and  the  next  day  till  none  they  were  rowing  that  they 
might  know  what  cry  or  what  chant  they  heard.  They  behold 
a  high,  mountainous  island,  full  of  birds,  black  and  dun  and 
speckled,  shouting  and  speaking  loudly. 


1.  lit.  «  what  (is  it)  that  takcs  from  you  »,  saith  he,  «  though  ye  speak 
to  her?  » 

2.  ro-dûscset,   s-pret.  pi.   3  of  dmscim  (de-fo-oscim  ?)  Windisch's  Wœr- 
terbuch  485. 

3.  lex  pi.  ace.  îexu,  lexa,  lechsa,  Fél.  Nov.  14.  Compare  Xâay.w? 


494  Whitley  Stokes. 


XIX. 


IMraiset  *  biûcan  ond  insi  sin  co  fuaratar  insi  n-aile  nar'bu 
môr.  Craind  imdai  inti,  7  eôin  imdai  foraib.  Ocus  couac(ca)- 
tar  2  iarsin  fer  3  isind  indsi,  7  a  folt  ba  hetacrH  dô.  (Ro)iar- 
faigset5  dô  iarom  cuich  lie  7  çaw  a  cene'l.  «  Do  (fe)raib  Her- 
end  damsa,  »  ol  se.  «  Dodeochad  im  ailithri  (i  cu)rruch  biuc, 
7  dlugis  mo  churach  fôm  amal  (do)dechad  biucan  6  thir6. 
Dolud-sa  do  thir  arise",  »  (ol  s)e,  «  ocus  dobiur8  fôt  dom 
thir  fom  chossaib,  ocus  frissocb/^9  (fair)  îor  muir.  Rofothaig- 
estar10  in  Comdiu  damsa  isin  ma-[p.  25b]-gin-se11  in  fot- 
sain,  »  ol  se,  «  ocus  ùobeir I2  Dia  traig  cacha  hYizdne  îor  a  leth- 
et  o  sin  co  se,  7  crand  cacha  bliadna  do  as  r3  and.  Ind  éoin 
atchithi-si  r4  do.no  isna  crannaib,  »,  ol  se,  «  anmand1^  mo 
clainne-sea  7  mo  cheinôil,  et/r  mna  7  firu  :  até  sût  oc  ernaide 
lai  bratha.  Leth-bairgen  7  ordu  eisc  7  lind  in  topair  l6  dorât 
Dia  dam.  Dom-flc  J7  sin  cach  dia,  »  ol  se,  «  tria  thimthirecht 
aingel.  Trath  nona  da;/o  dosn-ic-seom  aile  lethbairgen  7  ordo 
eisc  cech  oen  fir  dib  sût  7  cach  ôen  mndl8.  Lind  in  topair 
amal  as  lôr  la  cach  ». 


O  roptar  ldnaa  teora  aidchi  ôigidechta,  celebraiset,  7  asb^rt- 
som  friu  :  «  Rosesaid-si  uli,  »  ol  se,  «  do  îor  tir  acht  ôenfer  »I9. 

1 .  Dolotar,  E.  3 .  œnfer,  YBL. 

2.  Atchiat.  E.  4.   a  folt  is  lie  ba  hetach,  E. 

5 .  imcomaircset,  YBL.  Imcomuirscet,  E. 

6.  7  dluighis  in  curach  ama/  tiaghed  o  thir,  E. 

7.  aridhisi,  YBL.  7  immpamsi  doridisiu,  E 

8.  toibghiu,  YBL.  tobgiu,  E.  12.   tôrannuid,  E. 

9.  romtogaib,  E.  13.    dofhâs,  YBL,  and  E. 

10.  Romfothuig,  E.  14.   adcidsi,  YBL. 

11.  isin  aitsi,  YBL.  15.   anmanda,  YBL.  anmundo,  E. 

16.  E  inserts  is  éd. 

17.  domairiuc,  YBL.  dom  airchisecht,  E. 

18.  Donicchuci  da.no  al-lâsin  a  lethbar^f»  uodein  7  lethuhargnz  gach  fir 
do  fhiallach  Mocî  dnin,  E. 

19.  O  robtar  lâna  teôra  la  âeguidcchto  doaib  celeprait  don  ôg\a:cb,  7  ro- 
tamgair  doib  rosechtis  slân  uile  acht  oinfher.  E. 


The  Voyage  of  Mael  Duin.  495 


XIX. 


They  rowed  a  little  from  that  island,  and  found  another 
island  which  was  not  large.  Thereinwere  many  trees,  and  on 
them  many  birds.  And  after  that  they  saw  in  the  island  a 
man  whose  clothing  was  his  hair.  So  they  asked  him  who  he 
was,  and  whence  his  kindred.  «  Of  the  men  of  Ireland  am  I,  » 
saith  he.  «  I  went  on  my  pilgrimage  in  a  small  boat,  and 
when  I  had  gone  a  little  from  land  my  boat  split  under  me.  I 
went  again  to  land,  »  saith  he,  «  and  I  put  under  my  feet  a 
sod  from  my  country,  and  on  it  I  gatme  up1  to  sea.  And  the 
Lord  stablished  that  sod  for  me  in  this  place,  »  saith  he, 
«  and  God  addeth  a  foot  to  its  breadth  every  year  from  that 
to  this,  and  a  tree  every  year  to  grow  therein.  The  birds 
which  thou  beholdest  in  the  trees,  »  saith  he,  «  are  the  soûls 
of  my  children  and  my  kindred,  both  women  and  men,  who 
are  yonder  awaiting  Doomsday.  Half  a  cake,  and  a  slice  of 
fish,  and  the  liquor  of  the  well  God  hath  given  me.  That 
cometh  to  me  daily,  »  saith  he,  «  bythe  ministry  of  angels2. 
At  the  hour  of  none,  nioreover,  another  half-cake  and  slice 
of  fish  corne  to  every  man  yonder  and  to  every  woman,  and 
the  liquor  of  the  well,  as  is  enough  for  every  one  ». 

When  their  three  nights  of  guesting  >  were  complète,  they 
bade  (the  pilgrim)  farewell,  and  he  said  to  them  :  «  Ye  shall 
ail,  »  saith  he,  «  reach4  your  country  save  one  man  ». 

(La  suite  au  prochain  numéro.)  Whitley  Stokes. 

1 .  frissoebus,  s-pret.  sg.  3  oîfrisôcbaim  «  ich  erhebe  mich  nach  etwas 
hin  »  (Windisch). 

2.  Die  Speisung  Frommer  durch  Engelbrot  gehœrt  zu  den  Lieblinge- 
motiven  der  Légende,  Schrœder,  Sanct  Braudan,  42,  citing  Liber  de  infantia 
Mariae,  éd.  Schade.  [On  peut  remonter  plus  haut.  Ce  prodige  est  emprunté 
à  Y  Ancien  Testament,  Rois,  III,  19,  v.  5-6;  et  à  la  vie  de  saint  Paul, 
ermite.  Note  de  la  rédation.] 

3.  Note  hère  (1)  the  similarity  of  the  Old-Irish  to  the  Teutonic  and 
gaulish  practice  of  counting  time'by  nights  instead  of  by  days,  and  (2)  the 
identity  ot  the  fixed  period  of  guesting  with  that  which  seems  to  hâve 
prevailed  in  Melita  (Acts,  XXVIII,  7). 

4.  ro-sesaid,  redupl.  s-fut.  pi.  2  oi*segaim  :  segait  gl.  adeunt,  Ml.  66b  5. 


CHRONIQUE 


SOMMAIRE  :  I.  Rectifications.  —  II.  La  vie  de  saint  Guénolé  par  Gurdestin  dans  les  Analecta 
Bollandiana.  —  III.  La  littérature  épique  irlandaise  dans  le  Celtic  Magasine.  —  IV.  Le  ms.  ir- 
landais de  Milan  et  le  glossaire  vieil  irlandais  de  M.  Ascoli  dans  YArchivio  gloilologico.  —  V.  Deux 
contes  bretons  publiés  par  M.  Luzel.  —  VI.  Les  thèmes  en  s  dans  les  langues  celtiques,  par 
M.  Whitley  Stokes.  —  VIL  Etude  du  même  savant  sur  le  glossaire  comique  du  Musée  Britan- 
nique. —  VIII.  The  Journal  of  the  royal  histor'ual  au.I  archeohgical  Association  of  Ireland.  — 
IX.  La  statue  de  Brizeux  à  Lorient. 

I. 

J'ai  fait  dans  ma  dernière  chronique  deux  grosses  erreurs  :  l'une,  faute  de 
mémoire,  l'autre,  par  simple  distraction. 

La  première  est  à  la  page  421,  où  j'attribue  à  M.  E.  Windisch  une  dé- 
couverte renouvelée  par  M.  Zimmer  en  1888,  celle  de  l'identité  du  mot 
irlandais  Rosualt  avec  l'allemand  Wallross.  M.  Windisch  a  publié  en  1880  le 
tome  premier  de  ses  Irische  Texte,  où,  p.  748,  il  propose  brièvement  cette 
identification.  Mais  ce  sujet  avait  déjà  été  traité  ex  professa  en  1872  par 
M.  Whitley  Stokes  dans  la  Revue  Celtique,  t.  I,  p.  258,  seize  ans  avant  que 
M.  Zimmer,  reprenant  le  même  sujet,  ne  fit  la  même  trouvaille  sans  se 
douter  que  sur  cette  route  érudite  il  avait  été  précédé  par  deux  autres  voya- 
geurs, et  en  donnant  ainsi  à  son  insu  une  éclatante  confirmation  à  leurs 
observations  concordantes. 

Mon  autre  erreur  a  consisté  à  parler  de  l'usage  gaulois  de  l'incinération 
(p.  419,  troisième  ligne  à  partir  du  bas)  ;  je  voulais  dire  inhumation  comme 
le  sens  l'exige  et  comme  le  veut  la  vérité  historique. 


II. 

Les  savants  directeurs  des  Analecta  Bollandiana  viennent  de  donner  place 
dans  leur  recueil  à  la  vie,  par  Gurdestin,  du  saint  breton  Guénolé,  abbé  de 
Landévenec.  Ils  la  publient  d'après  le  ms.  de  la  Bibliothèque  Nationale  de 
Paris,  Lat.  5610  A,  qui  date  de  la  fin  du  Xe  siècle  ou  du  commencement 
du  xic.  L'édition  commence  dans  le  tome  VII,  fasc.  II,  p.  167.  La  préface 
porte  la  signature  du  P.  Ch.  de  Smedt.  Nous  sommes  sans  nouvelles  de 
l'édition  du  même  texte  que  M.  de  La  Borderie  va  donner  d'après  le  ms. 
de  Quimper. 


Chronique.  497 


III. 

Dans  le  numéro  de  juin  du  Celtic  Magasine,  p.  351  et  suivantes,  M.  Al. 
Macbain  a  continué  la  publication  de  la  version  populaire  du  Tâin  bo  Chûal- 
gne  conservée  par  les  Gaels  d'Ecosse.  Le  même  auteur  a  donné  dans  le  nu- 
méro de  juillet  de  la  même  revue  une  étude  sur  le  héros  Cûchulainn  dans 
la  littérature  épique  irlandaise.  Le  même  numéro  contient,  p.  412-415,  une 
étude  sur  le  passif  en  r  d'après  M.  Zimmer  par  M.  Thos.  Cockburn. 


IV. 

M.  Ascoli  vient  de  faire  paraître  une  livraison  nouvelle  des  "vol.  V  et  VI 
de  son  Archivio  gloUologico,  qui  contiendront  l'un  le  texte  et  la  glose  du  ms. 
irlandais  de  l'Ambrosienne,  l'autre  le  dictionnaire  du  vieil  irlandais  composé 
par  le  savant  professeur  de  Milan.  Ces  deux  publications  sont  également 
dignes  de  la  légitime  réputation  de  l'érudit  auteur.  Nous  n'avons  à  faire  que 
d'insignifiantes  critiques  : 

T.  V,  p.  529,  fJ  127  cl  1.  cethalitride  (tetragrammaton)  nous  semble  une 
faute  d'impression  pour  cetharlitride. 

Dans  le  glossaire,  t.  VI,  p.  L,  la  traduction  de  cornai thech  par  «  qui  una  vel 
contigue  agros  cohducit  »  ne  nous  paraît  pas  exacte.  La  législation  ancienne 
de  l'Irlande  nous  fait  remonter  à  un  état  social  où  la  propriété  était  collective, 
où  la  féodalité  terrienne  était  inconnue,  où  il  n'y  avait  pas  de  laudlords;  et, 
dans  les  Ancient  laïcs  oj  Ireîand,  les  traductions  qui  contredisent  cette  doc- 
trine sont  des  contre-sens  ;  telle  est  la  traduction  par  land  «  terre  »  du  mot 
deis,  gén.  desa  (t.  I,  p.  250,  1.  7;  t.  III.  p.  20,  1.  7)  qui  est  un  terme  col- 
lectif signifiant  «  vassaux  »  (t.  IV,  p.  320). 

Au  sujet  des  termes  de  droit  que  son  glossaire  contient,  M.  Ascoli  renvoie 
ordinairement  au  glossaire  d'O'Donovan.  Ce  travail  d'O'Donovan  a  rendu 
et  rendra  encore  de  grands  services,  mais  il  est  aujourd'hui  très  arriéré.  Il 
nous  offre  par  ordre  alphabétique  le  recueil  des  notes  lexicographiques  re- 
cueillies par  le  savant  irlandais  en  rédigeant  sa  traduction  des  lois  des  Bre- 
hons,  et  les  renvois  se  rapportent  aux  pages  des  copies  alors  inédites  qu'O'Do- 
novan  et  O'Curry  avaient  faites  de  ces  lois.  Aujourd'hui  ces  lois  'sont  en 
grande  partie  publiées,  et  l'indication  des  volumes  et  des  pages  des  Ancient 
laws  of  Ireland  où  se  trouvent  les  mots  cités  par  M.  Ascoli  serait  bien  plus 
utile  que  la  mention  du  glossaire  d'O'Donovan  qui  cite  d'inabordables 
copies. 

Ainsi  sur  le  mot  aitheacb,  p.  xlix-l,  M.  Ascoli  renvoie  au  glossaire 
d'O'Donovan.  Or,  celui-ci  nous  apprend  que  la  formule  Aithech  ar  aitrebha 
se  trouve  dans  la  copie  des  lois  des  Brehons  par  O'Curry.  p.  492;  que  la 
formule  cenn  aithig for  rig  se  rencontre  dans  la  copie  d'O'Donovan,  p.  553, 
qui  dans  cet  endroit  transcrivait  une  page  inconnue  du  ms.  H.  5.  17  du 
collège  de  la  Trinité  de  Dublin.    On  peut   aujourd'hui  consulter  les  deux 


498  Chronique. 

passages  en  question  dans  Ancient  laws,  t.  IV,  p.  306,  1.  24,  et  t.  III, 
p.  106,  1.  4-5.  Ainsi,  au  lieu  de  nous  parler  d'O'Donovan  et  de  son  glos- 
saire, M.  Ascoli  aurait  mieux  fait  de  nous  renvoyer  a  Ancient  laws,  III, 
106,  1.  4-5;  IV,  306,  1.  24. 

De  même,  au  sujet  de  la  relation  de  droit  appelée  comaithchêas,  p.  l,  la 
ligne  et  demie  qui  parle  du  glossaire  d'O'Donovan  aurait  été  beaucoup  plus 
avantageusement  employée  à  nous  renvoyer  au  traité  consacré  spécialement 
à  ce  phénomène  juridique;  ce  traité  est  intitulé  Breatha  comaithcesa,  et  se 
trouve  dans  les  Ancient  laïcs,  t.  IV,  p.  68-159, 

A  propos  dHngen  «  ongle  1,  p.  lxxxvii-lxxxviii,  au  lieu  de  cf.  ingen 
for  meraià  apud  O'Donovan,  il  aurait  fallu,  je  crois,  dire:  ingen  ar  meraib, 
Ancient  Laws,  IV,  282,  1.  20;  286,  1.  1  ;  290,  1.  9. 

M.  Ascoli  paraît  avoir  reconnu  dans  une  certaine  mesure  l'avantage  qu'il 
y  avait  à  se  reporter  aux  Ancient  laws;  il  les  cite  quelquefois,  notamment 
au  mot  eric,  p.  lviii,  où  il  renvoie  au  t.  II,  p.  142  de  ce  recueil;  mais  cette 
page  n'est  ni  la  première  ni  la  plus  importante,  soit  au  point  de  vue  de  la 
définition  du  terme,  soit  à  celui  de  la  déclinaison.  Il  aurait  été  plus  inté- 
ressant de  citer  les  petits  traités  de  Y  eric  qui  se  trouvent  au  t.  III,  p.  536- 
539,  et  au  t.  IV,  p.  240-261,  des  Ancient  laws  of,  Jrcland. 

Mais  ces  critiques  n'ont  qu'une  très  minime  importance.  M.  Ascoli  fait 
une  foule  d'observations  grammaticales  intéressantes.  C'est  ainsi  qu'il  ex- 
plique, p.  lxxxiii,  la  préposition  is  «  au-dessous  de  >>  par  un  primitif  ens=. 
Iv;,  eîç  ;  le  verbe  do-fu-isliiu,  p.  lxxxiv,  par  io-fo-isl  (dont  le  dernier  terme 
serait  identique  à  l'adjectif  isel  «  bas  »)  au  lieu  de  to-jo-ess-sal  {Revue  Cel- 
tique, VI,  148);  c'est  ainsi  que  (p.  xc)  il  rejette  l'explication  proposée 
pour  indossa  «  maintenant  »  par  M.  Zimmer,  Keltische  Studieu,!,  p.  75;  etc. 


M.  Luzel  vient  de  publier  la  traduction  de  deux  contes  bretons  inédits  : 
i°  dans  le  Bulletin  de  la  Société  archéologique  du  Finistère:  «  L'oiseau  à  l'œuf 
d'or  h  ;  20  dans  la  Revue  des  Traditions  populaires,  n°  de  septembre  dernier  : 
«  Jannic  aux  deux  sous  ». 

VI. 

M.  Whitley  Stokes  a  inséré  dans  les  Transactions  de  la  Phîlologicàl  Society 
un  nouveau  mémoire  sur  les  thèmes  en  5  dans  les  langues  celtiques.  Dans 
notre  tome  VIII,  p.  534,  il  est  déjà  question  des  précédentes  études  du 
même  savant  sur  ce  sujet.  Les  thèmes  vieil  irlandais  en  s  qui  n'ont  pas 
été  signalés  par  Ebel  dans  la  Grammatica  celtica  ni  par  M  Thurneysen  dans 
le  tome  XXVIII,  p.  133,  de  la  Revue  de  Kuhn  (cf.  Revue  Celtique,  t.  VII, 
p.  123)  seraient  au  nombre  de  douze  :  1 .  ag  «  bête  à  corne;  2.  ail  «  rocher»; 
3.  au  «  oreille  »;  4.  delg'u  épine  »  »  fibule  »  ;  5.  dess  «  dieu  »  ;  6.  gleun 
«  vallée  »  ;  7.  grâad  «  joue  »;  8.  ond  «  pierre  »  ;  9.  og  1  œuf  »;  10.  s.il 
«  mer  a  ;  11.  ten  «  leu  »  ;  12.  téib  «  côté  ». 


Chronique.  499 


VII. 

VAcademy  du  25  août  dernier,  p.  120,  contient  une  notice  de  M.  Whitley 
Stokes  sur  le  glossaire  comique  conservé  par  le  ms.  Cotton.  Vesp.  A.  14 
du  Musée  Britannique.  Le  savant  linguiste  pense  que  l'auteur  de  ce  glossaire 
avait  pris  pour  base  de  son  travail  un  vocabulaire  anglo-saxon  dont  une  le- 
çon se  trouve  au  Musée  Britannique  dans  le  ms.  Cotton.  Julius  A  11.  M. 
Whitley  Stokes  donne  de  sa  thèse  plusieurs  preuves  concluantes  :  telle  est 
la  traduction  du  latin  classis  «  flotte  »  par  le  comique  liai  listri,  littéralement 
«  troupe  de  vaisseaux  »  ;  elle  rend  fort  mal  classis,  mais  elle  est  calquée  sur 
l'anglo-saxon  skip-bere  a  armée  de  vaisseau  »  qui  traduit  classis  dans  le  ms. 
Julius  A  11.  L'auteur  du  glossaire  comique  a  pris  dans  le  vocabulaire  anglo- 
saxon  les  fautes  theolenarius  pour  telonearius,  enula  pour  paenula,  etc. 

Il  y  a  dans  le  texte  latin  du  glossaire  comique,  Gramm.  CelL,  p.  1065- 
1081,  plusieurs  fautes  qui  se  corrigent  à  l'aide  du  vocabulaire  anglo-saxon  : 

P.  1068,  1.     1,   victricus  «  altrou  »,  lisez  vitricus. 

P.  1069,  1.     2,  emptius  «  caid  primid  »,  lisez  empticius. 

P.   1069,  1.     9,  ofinitina  t  gofail  »,  lisez  officina. 

P.  1070,  1.     1,  namus  «  cor  »,  lisez  nanus. 

P.  1070,  1.     5,  linthuus  ••  toll  corn  »,  lisez  lituus. 

P.  1074,  1.     7,  noctualis  stix  a  hule  »,  lisez  Noctua  vel  Strix. 

P.  1076,  1.  12,  vigila  j  melhyonen  »,  //Vq;  viola. 

P.  1077,  1.     1,  fraxus  «  onnen  »,  lisez  fraxinus. 

P.  1079,  1-     S,  globus  «  pellen  »,  lisez  glomus. 

M.  Whitley  Stokes  termine  par  quelques  observations  sur  quelques  mots 
d'emprunt  dans  les  langues  celtiques.  Sont  empruntés  à  l'anglo-saxon  les 
mots  comiques  vilecur  (parasitus),  stut  (culex),  saut  (dapes).  Il  y  a  aussi 
des  mots  irlandais  empruntés  à  l'anglo-saxon,  tel  est  gual,  qui  vient  de 
l'anglo-saxon  gèol,  en  anglais  yule,  noel. 

VIII. 

Dans  le  n°  de  juillet  du  journal  de  la  Société  historique  et  archéologique 
d'Irlande,  le  colonel  Wood-Martin  a  continué  son  intéressante  étude  sur  les 
monuments  de  pierre  brute  en  Irlande.  Nous  signalerons  dans  le  même  nu- 
méro un  article  du  colonel  Philippe  D.  Vigors  sur  la  fronde  et  sur  les  pier- 
res de  fronde. 

IX. 

L'érection  de  la  statue  du  poète  Brizeux  à  Lorient  ne  peut  être  passée 
sous  silence  par  la  Revue  Celtique.  Brizeux  a  écrit  en  breton  quelques  vers. 
La  cérémonie  a  inspiré  à  M.  Quellien  une  jolie  pièce  de  vers  bretons. 

Jubainville  (Vosges),  le  16  octobre   18SS. 

H    d'Arbois  de  Jubainville. 


NÉCROLOGIE 


Depuis  l'achèvement  de  la  dernière  livraison,  la  rédaction  de  la  Revue 
Celtique  a  perdu  son  éditeur  que,  depuis  quelque  temps,  une  maladie  dou- 
loureuse et  l'âge  avaient  contraint  à  se  retirer  presque  entièrement  des  af- 
faires. Hanovrien  de  naissance  et  naturalisé  français,  M.  F.  Vieweg  appar- 
tenait à  la  petite  mais  honorable  phalange  des  libraires  qui,  dédaignant  les 
succès  faciles,  consacrent  leurs  efforts  à  la  publication  des  livres  d'érudition. 
Chez  lui  ont  paru  les  premiers  écrits  de  "plus  d'un  jeune  inconnu  qui  est 
devenu  plus  tard  un  savant  illustre.  C'est  chez  lui  qu'ont  pris  naissance  la 
Romania  qui  lui  est  restée  fidèle,  la  Revue  critique  qui  depuis  a  changé  de 
main  et  qui,  toutes  deux,  ont  exercé  sur  l'érudition  française  une  influence 
aussi  grande  qu'utile.  Si  M.  Gàidoz  a  pu  fonder  la  Revue  Celtique,  c'est  g'"àce 
au  hardi  concours  de  M.  F.  Vieweg.  M.  F.  Vieweg  était  un  des  libraires 
français  les  plus  instruits,  et  la  rédaction  de  la  Revue  Celtique  ne  perdra  ja- 
mais le  souvenir  de  sa  physionomie  distinguée,  intelligente  et  douce  où 
dans  les  dernières  années  les  souffrances  et  la  maladie  avaient  marqué  leur 
empreinte  sans  pouvoir  en  altérer  la  sérénité. 


TABLE 


PRINCIPAUX    MOTS   CELTIQUES    ÉTUDIÉS    DANS    LE    VOLUME    IX 


DE    LA   REVUE  CELTIQUE'. 


I.  Gaulois  ou  ancien  celtique. 
(Voir  p.  28-35.) 

-acus,  358,  359,  409,  418. 
-adicus,  267. 
Adsmerius,  288. 
Agedillus,  80,  81. 
Agedincum,  80. 
Agedomapatis,  83. 
Alisanus,  288. 
ambactus  client,  281. 
ambi-  autour  de,  281 . 
Anauni,  409. 
Anaus,  409. 
Anava,  409. 


arcantodan,  27. 
Aremorica,  373. 
Atectorigiana  (ala),  78,  293. 
Atectorix,  78. 
Atepomarus,  288. 
-aticcus,  268. 
Avennacum,  145,  146. 
•avo-s,  359,  409. 
AVVOT,  AVOT,  293. 
Banvius,  288. 
Belatucadros,  146. 
Belenus,  146,  417. 
Belisama,  146. 
Bho;,  417. 
PpaTooSs,  295. 
-briga,  -bria,  -bra,  -brum,  41! 


1.  Cette  table  a  été  faite  par  M.  Emile  Ernault. 


502    Table  des  principaux  mots  celtiques  étudiés  dans  le  volume  IX. 


Camulinius,  268. 

Camullius,  268. 

Camulogenus,  293. 

Camulognata,  288. 

Camulus,  146,  268. 

Kanetonnessis,  288. 

•/.cXxd;,  417. 

Cernunnos,  146. 

Cobnertus,  86,  87. 

Cogidubnus,  85. 

Combaromarus,  288. 

Comnertus,  86,  87. 

Conconnetodubnus,  -dumnus,  82,  84, 
85,87. 

Conertus,  87. 

xo'pfia,  xoupfu,  bière,  375. 

Covinertus,  87. 

Covnertus,  87. 

cucullus  coule,  409,  410. 

Asû'.o;,  417. 

Dexsiva,  288. 

-dunum,  418. 

-dura,  -durum,  418. 

Epaticcus,  268,  288. 

Epotsorovidi  (gén.),  77. 

Esumagius    celui    qui    est    puissant 

comme  Esus,  268. 
Esunertus  celui  quia  la  forced'Esus, 

268. 
Esus,  146,  268. 
Esuvius,  268. 
raXatT7);,  4  17. 
Gedemonis  (gén.),  77. 
Germanissa,  288. 
Guariacus,  320,  321 . 
-iacus,  418. 
•illus,  80. 
Jovincillus,  7  1 . 
Adaio'.r/.,  417. 
Luguidicus,  267. 

Luguselva  propriété  de  Lugus,  celle 
qui  appartient  à  Lugus,  267,  268. 


madriacensis,  44,  48. 
-magus,  -mum,  418. 
Malliacus,  36,  37. 
Manciacus,  37,  38. 
Marcelliacenses,  38,  39. 
Marciacus,  39-43. 
Marciagus,  39-43,  409. 
Marciliacus,  Marcilliacus,  38,  39. 
Mariacus,  43,  44. 
Mariniacus,  44-46. 
Martiacus,  39-43. 
Martiniacus,  46,  47. 
Mauriacus,  48,  49,  55. 
Melliacus,  49,  50. 
Miliacus,  49,  50. 
Montaniacus,  50-52. 
Montiniacus,  50-52. 
Moriacum,  48,  49. 
Mulciacum,  53,  54. 
Musciacus,  52-54. 
vs;j.£tov  sanctuaire,  74. 
Nobiliacus,  56-58. 
Noniacus,  54. 
Novaliacus,  58. 
Noviacus,  54,  55. 
Noviliacus,  56-58. 
Novilliacus,  56-58. 
Otuaneuni  (gén.),  77. 
Ouniorix,  288. 
IIsvvoo'jivoo;,  33,  148. 
Piciacus,  58. 
Pisciacus,  58,  59. 
Pociacus,  59. 
Podentiacus,  61 ,  62. 
Pompciacum,  59,  60. 
Ponciacus,  60,  61 . 
Pontiliacus,  208. 
Postumiacus,  62,  63. 
Primiacus,  208,  209. 
Prisciacus,  209,  2  10. 
Prixiniacus,  211,  212. 
Romaniacus,  212,  213. 


Table  des  principaux  mots  celtiques  étudiés  dans  le  volume  IX.     503 


Romiliacus,  213,  214. 

Rominiacus,  212,  213. 

Romogillius^  288. 

Rufiacus,  2  14-2  16. 

Rulliacus,  216,  217. 

Sabiacus,  Saviacus,  217,  218. 

Sacciacus,  218,  219. 

Sacco,  288. 

Salviacus,  2 19,  220. 

Salviniacus,  220,  221 . 

Sansiacus,  221. 

sebo  suif,   147. 

Secundiaca,  222. 

Securiacus,  222,  223. 

Segomo,  288. 

-selva  propriété,  possession,  267. 

Selvaniacus,  Silvaniago,  223. 

Sentiacus,  302,  303 . 

Sessiacus,  306,  307. 

Severiacus,  303-306. 

sexciacensis,  306,  307. 

Siliacus,  307-309. 

Silviacus,  309-3 10. 

Silviniacus,  301 ,  302. 

Simplicciacus,  Simpliciaco,  3 10,  3 1  1 

Sociacus,  311. 

Soliacus,  312,   313. 

Sollemniacus,  311,  312. 

Superiacus,  305,  306. 

Tauriacus,  313  —  315. 

Tauricciacus,  315. 

Tauriniacus,  315,  316. 

Totatigens,  fils  de  Teutates,  268. 

trigaranus,  74. 

Turiliacus,  316,  317. 

OûXioxaroivou  (-oasojç),  299. 

Urupatis,  83. 

Veliocasses,  299. 

vercobretos  sorte  de  magistrat,  27. 

Victoriacus,  3  17-3 19. 

Vinciacus,  319. 

vindiacensis,  320. 


Vindiciacus,  3 19,  320. 

Vindius,  320. 

Vindoinissa,  288. 

vindos  blanc,  beau,  heureux,  320. 

Wariacus,  320,  32  1 . 

XexoasToÇj  417. 


II.  Irlandais. 


abairt  coutume,  471 . 

abbdaine  rang  de  l'abbé,  suprématie, 

132. 
abstanait  abstinence,  132. 
acarb  très  aigu,  132,  133. 
accur  bonheur,  108. 
ad-,  1 32. 

adanaim  j'allume,  414. 
adann torche,  414. 
as  abund,  hépatique,  231. 
sbgaire  berger,  482,  483. 
aeibheall  flammula,  233. 
âg  bataille,  453 . 
ag  bête  à  corne,  498. 
âgai  chaînes,  489. 
ai  de  lui,  363,  364. 
aibsint  absinthe,  243. 
aile  défense,  clôture,  1 $. 
ailithir-genti  étrangers,  106. 
ainches  gl.  fiscina,  107. 
âin-didin  vendredi,  269. 
ainsi-unn  il  nous  protégera,  123. 
-air  suffixe  de  3e  pers.  sing.  de  l'indic. 
.  prés,  passif,  400. 
airde  signe,  1  27. 
airec  désir,  inclination,  105. 
airer  territoire,  district,  103. 
airgairim  je  défends,  j'empêche,  475. 
airgedlam  orpiment?  225. 
airget  beo  vif-argent,  225,  242. 


504    Table  des  principaux  mots  celtiques  étudiés  dans  le  volume  IX. 


airt  place,  107. 

aitheach  vassal,  497. 

aithis  reproche,  368. 

aithne  dépôt;  mandat;  commande- 
ment, 133. 

ail  rocher,  498. 

almont  amande,  238. 

an  signe  de  participe  présent,  479. 

anac  j'allai,  1 37. 

anacar,  affliction,  108. 

angar  près  de,  414. 

ansa  difficile,  1 37. 

aoine  vendredi,  269. 

-ar  suffixe  de  passif,  ind.  prés.  3e 
pers.  sing.,  400. 

ar-chrinim  je  manque,  je  finis,  477. 

athabha  ellébore,  231. 

atramaili  alun,  243. 

au  oreille,  498. 

aue,  auae,  petit-fils,  403. 

ba  bon  457. 

bainne  lait,  226. 

banbh  cochon,  288. 

bara  colère,  102. 

barend  rocher,  102. 

benn  corne,  372. 

bentais  ils  frappaient,  489. 

biatas  m.  bétoine,  227. 

bilur  cresson,  236,  238. 

bindmer  ciguë,  242. 

bithnuad,  fuga  daemonum,  234. 

bitoine  bétoine,  228. 

biur  je  porte,  147. 

-bocan,  232. 

brafal  tromperie,  100. 

braflacc  piège,  100,  101 . 

braga  prisonnier,  1  y 

bran  du  son,  229. 

brefne  clou,  491 . 

brûichnech  querelleur?  483. 

bruighim  je  brûle,  477. 

buafallan  armoise  22$,  243. 


buinne  anneau,  491. 

bunsach  verge,  baguette,  481. 

caein    cir  coilled,    crista  galli,  234, 

424. 
caerthann  curruigh,  valériane,  234. 
cailement,  calamintha,  228. 
caimmse  chemise,  282. 
cala  port,  473. 
canim  je  chante,  1  37. 
carabûaidh  carvi,  230. 
caris  il  aima,  1  23. 
carsi  tu  aimas,  123. 
cartlann  balsamita,  228. 
carus  j'aimai,  123. 
cearracân  carotte,  232. 
cennaithi  bandeau,  485. 
cennlde  coiffure,  couronne,  422,  423. 
cerrbocan  g!,  eruca,  232. 
cet-ain  mercredi,  269. 
cind  au  bout  de,  4^5. 
claideb  épée  74,   127,  146. 
claman  in  lin  gl.  cuscuta,  241. 
clobus  girofle,  235. 
cnocc  hauteur,  colline,  374. 
cnu  frangcach  noix,  2 38. 
cnu  gaeidhiluch  noisette,  226. 
cogal,  agrostemma  githago,  235. 
coicidhach  quintefeuille,  22y. 
coinneall  Muire,  blionia  molena,  227. 
coirce  avoine,  226. 
coirci  lachan,  gentiane,  235. 
coirm,  cuirm,  bière,  375. 
coll  perte,  127. 
colmmene  nœud,  375. 
columbin  colombine,  239. 
comaithcheas  vassalité,  498. 
comaithech  vassal,  497. 
comgaire  voisinage,  1 $. 
comman  ocus    cretair,  chose  très  sa- 
crée et  précieuse,  20. 
cornus  pouvoir,  133. 
confodli(d)  vous  communiez,  107. 


Table  des  principaux  mots  celtiques  étudiés  dans  le  volume  IX.     505 


copog  lappa,  237. 
copurrus  couperose,  231. 
cor  état,  condition,  455. 
corr-chopôg  plantain,  236. 
cotofutaircsi  il  vous  baigne,  367. 
cretra  (comnai   ocus  — ),  voy.  com- 

man,  20. 
crobung  grappe,  471. 
cruach   Phadraic,   plantago  'atifolia, 

226. 
cûd  giron,  455. 
cuil  mouches,  229. 
cuilefaid,  culebad,  gl.  flabellum,  15. 
cuimin  cumin,  242. 
cuimrech  lien  36$,  366. 
cuit  part,  un  peu,  quelque,  105. 
cularân  noix  de  terre,  228. 
dailem  échanson,  coupe,  469. 
dair  chêne,  240. 
dairgin  germandrée,  229. 
dàm,  daim  barde,  poète,  savant,  276. 
dardôen,  dardain  jeudi,  269. 
delg  épine,  498. 

demum  grand  dommage,  367,  369. 
dess  dieu,  498. 
dia  bliadna,  dans  un  an  à  pareil  jour, 

15,  422. 
dia  mis  dans  un   mois  à  pareil  jour. 

103,  422. 
dia  oine  didine,  vendredi,  269. 
diardaoin  jeudi,  269. 
digas  haut,  élevé,  477. 
dili  déluge,  414. 
dfltud  scandale,  367. 
diluigim  je  pardonne,   1  34. 
dirgiud  crette,  l'action  de  se  tenir  la 

tête  en   bas  et  les  pieds  en  haut, 

471. 
diurad  reste?  479. 
dfuscim  s'éveiller,  493. 
do,  du  particule  verbale,   250,  357, 

358. 

Revue  Celtique,  IX. 


dofoichlenn  il  cherchait,  465. 
dofuislim  tomber,  498. 
do-ménar  je  pensai,  399. 
dorât  il  donna,  420. 
doud,  doghadh,  brûler,  483. 
dreagaid  ils  luttent,  233. 
druimlorg  quille  d'un  vaisseau,  473. 
du,  do  particule  verbale,  250,   357, 

358. 
dub  noir,  361 . 
dubcosach,    capillus    Veneris,    239, 

242. 
duille  feithi  chèvre-feuille,  230. 
dulbair  ceux   qui  parlent  lentement, 

107. 
eachsemar  maculatum  trifolium?  237. 
echtress  combat  de  chevaux,  473. 
ecrim  pimpinella,  239. 
eidhenn  lierre,  23 1 . 
eillinn,  elena  campana,  231. 
eisles  négligence,  1  $. 
elestront  iris?  230. 
eletreog  atriplex,  225. 
elitront,  diptannus,  pulegium  Martis, 

231. 
ellend  enula,  242. 
émir  sleibi  calmentum,  244. 
Eochaid,  268. 
eorfia  orge,  239. 
eric  réparation  de  crime,  498. 
esbeorna  esula,  232. 
faefed  il  dormirait,  491. 
fant  creux,  1 5. 
feacadh  se  baisser,  485. 
feirdris  rubus,  243. 
fenel  fenouil,  233. 
ferthigis  œconomus,  489. 
fid  bois,  102. 
fidchuach  un  autour,  102. 
figeda  figues,  234,  424. 
fine  parenté,  141 ,  142. 
finegra  vinaigre,  242. 

33 


506    Table  des  principaux  mots  celtiques  étudiés  dans  le  volume  IX. 


flidh,  hippia,  23  $. 

fo  sous,  475. 

fo-algaim  je  jette  par  terre,  489. 

fochlug,  bibolca,  228. 

fôit  mission,  106. 

fol  ruine,  459. 

for,  or,  dit-il,  103. 

forbas  siège,  1 $. 

fordat,  ordat,  disent-ils, 

forggaine  supérieur?  4$$. 

forscamon  terrasses,  465. 

fothannân  chardon,  227. 

frisôcbaim  je  m'élève  vers,  495. 

frisor^r)the  vous  offenseriez,  367. 

frithbuailtech     (force)     répercussive, 

240. 
fuimiterra  fumeterre,  234. 
fuinnseog  frêne,  233. 
gabhann  jusquiame,  229. 
gailingan  galanga,  234. 
gairgin  renoncule,  230,  242. 
gairm  appeler,  375. 
gallfothannan  branche-ursine,  227. 
gegar  pied-de-veau,  242. 
geilfine  «  parenté  de  la  main  »,  141. 
gerân  plainte,  gémissement,  473. 
gessa  il  fut  prié,  101 . 
gessi  adorandus,  101 . 
gilcach  genêt,  235.  • 

glasair  coilled  barba  silvana,  227. 
glenn  vallée,  498. 
gloriam  iris,  236. 
gô  mensonge,  374. 
goibél,  pi.  gobuil  bras  de  mer,  100. 
gorm  brun,  374. 
gronnlus  séneçon,  228. 
grûad  joue,  498. 
gûal,  en  anglais  yule  (noel),  499. 
gum  gomme,  235. 
gurmaille  grémil,  231. 
Holcundus,  optimo  jure  vir?  298. 
iarfir  vraiment,  368. 


iarluib,  (dat.)    pattes    de  derrière  ? 

queues?  475. 
(arn  fer  232. 
iat,  ils,  eux,  361. 
imb,  imm  beurre,  228. 
infectain  (il  est)  douteux,  455. 
inge  mais,  457. 
ingen  ongle,  498. 
innocht  cette  nuit,  1 37. 
is  dessous,  iset  bas,  498. 
isoip  hysope,  235. 
iubhar  beinne  genièvre,  234. 
iubhar  craigi,  genièvre,  234. 
ladh  rouille,  233,  424. 
laid  chant,  283. 
laithiu  (gén.)  des  jours,  98. 
lathar  sens  caché,  105,  370. 
leamach  mauve,  241. 
iebenn  échafaud,  plate-forme,  101. 
leccerd  poète  inférieur,  461. 
letus  laitue,  236. 
lex  chant,  493. 

liathlus,  liathlus  beag,  piloselle,  226. 
liathlus  mara,  aurone,  242. 
liathlus  môr  armoise,  226. 
licoiris  réglisse,  237. 
lili,  lis,  237. 
lôid  chant,  282,  283. 
luaidhe  plomb,  240,  243. 
Lugaid,  268. 
Lugudeccas,  268. 
lus  porreaux,  239. 
lus  crée,  burneta,  228. 
lus  in  sparain,  bursa  pastoris,  227. 
lus  na  frange,  tanaisie,  225. 
lus  na  lsgh  barba  ursina,  226. 
lus  na  meacan,  ipoquisdidos,  236. 
macall,  avencia  caryophyllata,  226. 
madra  garance,  240. 
mael.in  sandale,  491 . 
maig-réidh  plaine,  469. 
meacun  tughan,  bardane,  227. 


Table  des  principaux  mots  celtiques  étudiés  dans  le  volume  IX.    $07 


meisnech  courage,  459. 

mellach  agréable,  47$. 

membrumm  Inembrane,  241. 

mesoga  glands,  226. 

mesrugud  adjudication,  15. 

methrad  graisse,  240. 

mil  maige  lièvre,  237. 

millsen  monadh,  pullicaria,  239,  424. 

minta  menthe,  243. 

mo'.t  mouton,  375. 

murdraigen  aigremoine,  238. 

musdard  moutarde,  238. 

neipt  cataire,  238. 

nemed  sanctuaire,  74. 

nenntog  ortie,  243. 

nessa  plus  près,  1 37. 

nïmthâ  n'est  pas  à  moi,  266. 

nocht  nuit,  1 37. 

nochti  nudité,  368. 

nocoisitis  ils  avaient  coutume  d'aller? 

473- 
nom  dommage,  368,  369. 
nutamuic  muscade,  238. 
0  petit-fils,  403. 
ochar  pointe,  453. 
ochtrach  excrément,  106. 
og  œuf,  238,  498. 
oghradh  lingua  bovina,  237. 
Ogma,  275. 

ôibell,  àibell  étincelle,  241. 
ond  pierre,  498. 
ônni  de  nous,  105. 
or,  orn,  nous  (pron.  infixe),  461. 
orafunt  marrubium,  238. 
orddu  lâmae  gros  doigt  de  la  main, 

146,  147. 
organ,  orcan,  voy.  torcan,  228. 
paratari  pariétaire,  239. 
penn  plume  à  écrire,  99. 
penning  penny,  42 1 . 
persilli,  persil,  239,  242. 
pettan-eoin  (ace  )  oiseau  favori,   102. 


pibur  poivre,  239. 

picc  poix,  243. 

piredha  poires,  240,  424. 

pis  gregach  fenugrec,  233. 

puliol   muntan,  pulegium  montanum, 

239. 
puliol  ruighel,  pulegium  regale,  226. 
-r  suffixe  du  passif,  293,  397-40:. 
ragam,  ragum,   raphanus,  240,  241. 
raibh,  ruibh,  la  rue,  238,  240. 
rait  siler  montanum,  242. 
recht  transport,  accès  violent,  457. 
rian,  raon,  route,  passage,  491. 
rind  ruisg,  hippia,  23  $. 
ro  particule  verbale,  250. 
rofetar  je  sais,  420. 
ros  rose,  240. 

ros  lachan,  lemna  minor,  236. 
ros  muiridi  romarin,  244. 
rosesaid  vous  atteindrez,  495. 
ross  marina  romarin,  240. 
rossai,  ros-ualt  morse,  421,  496. 
rotbfat  seront  à  toi,  258. 
•s  suffixe  de  prétérit,  420. 
sabhraei  satureia,  240,  424. 
sâd-aile  aise,  1 37. 
saigid  il  dit,  370. 
sal  mer,  498. 
salunn  sel,  240. 
scethrad  vomissements,  244. 
scim,  sgim,  polypodium,  239,  244. 
segda  béni,  fortuné,  455. 
sel  m6r  longtemps,  469. 
selb  propriété,  possession,  267. 
«en  Patrice  le  vieux  Patrice,  1  16. 
sénaire  un  enchanteur,  463. 
serban  mue,  dens  leonis,  230. 
sianan  sorte  de  musique  vocale,  1 5. 
silin  cerise,  68. 
sitruilli  citrouille,  231. 
siur  sœur,  398. 
slaidhi  rouille,  232. 


$o8     Table  des  principaux  mots  celtiques  étudiés  dans  le  volume  IX. 


slaightech  in  airgid,  spuma  argenti, 

237- 
slanlus,  plantago  lanceolata,  236. 
snaidim  je  taille,  je  coupe,  481. 
snâim  je  nage,  461,  475. 
sobairgin  primevère,  23$. 
soilestar,    soilestrach,    glaïeul,  234, 

235. 
sraif  soufre,  242. 
sreabhan  membrane,  491. 
stoinsi  aristoloche,  225. 
storide  historique,  matériel,  366. 
sub  talman  fraise,  233. 
surdlaig,  ic  —  bondissant?  465. 
-t  signe  de  prétérit,  420. 
taccu  j'affirme,  368. 
talmaide  terrestre,  104. 
tarési  au  lieu  de,  369. 
tarrachtain,  dia  —  pour  le  saisir,  47  1 . 
tarraidh  il  atteignit,  469. 
tâth  sorte  de  fromage,  491. 
tech  coitchenn  le  commun, 

nés,  101. 
telcad,  telgad  jeter,  463. 
ten  feu,  498. 
tene  talman  gl.  hermodactilis,  235, 

242. 
tenecal,  teneacal,  tenegul,  joubarbe, 

227,  236,  243. 
tenga  enain,  teanga  enan  lingua  avis, 

237,  242. 
testa  il  manquait,  101-103. 
tôibcôté,  498. 

toirthech,  plein  de  fruits,  473. 
toreân  ou  orcàn?  chardon  béni,  228. 
trom  sureau,  240,  244. 
tuartha  restes .'467 . 
tucht  temps,  487. 
tuirenn  étincelle,  232. 
-u  eux,  361. 
ûa  petit-fils,  403. 
ualabort,  ualuard,  hièble,  228,  231. 


uallchas  gaîté,  45  <,. 

ubull  pomme,  243  ;  ubhlagrainneacha, 

mala  granata,  238. 
uindsend  frêne,  244. 
uioil  violette,  241. 


11k  Gaélique  d'Ecosse. 


angar  colère,  414. 
caill  perte,  1  27. 
sirist  cerise,  68. 
statuin  loi,  414. 


IV.  Mannois. 


les  latri-       shillish  cerise,  68. 


V.  Gallois. 
(Voir  p.  67-76.) 


-ai  suffixe  indiquant  l'instrument,  l'a- 
gent, 74. 
alwysen  aumône,  376. 
am  bu  j'eus,  259. 
amgyffred  comprendre,  382. 
anaw  harmonie,  409. 
anawdd  difficile,  1 37. 
argyfreu  dot,  371 . 
armerthu  pourvoir,  375. 
arwyddai  enseigne,  74. 
ban  corne,  372. 
banw  cochon,  288. 
beatws  bétoine,  227. 


Table  des  principaux  mots  celtiques  étudiés  dans  le  volume  IX.    509 


berywon  milans,  7$. 

briwo  briser,  75. 

byfoliaeth'biographie,  75. 

canre  poursuite,  382 . 

canu  chanter,  1  37. 

kawad  ondée,  75. 

cawr  géant,  74. 

ceirchen  avoine,  226. 

ceiri  géants,  74. 

ceirios  cerise,  68. 

cenaw,  ceneu  petit  d'un  animal,  73. 

Kernyw     Cornouaille    d'Angleterre, 

356. 
cethrëu  pousser,  382. 
chwaer  sœur,  398. 
chwyl  un  tour,  469. 
chwyd  vomissement,  244. 
cithremmet  gl.  libra,  382. 
cleddyf  épée,  74,  1  27. 
clowsen  girofle,  235. 
clywe-ist  tu  as  entendu,  122. 
cneuen  ffrengig  noix,  238. 
copras  couperose,  231. 
craving  griffe,  471. 
crawol  baies  d'aubépine,  75. 
creu  créer,  374. 
criafol  opulus  arbor,  75. 
cular  noix  de  terre,  228. 
cwlm  nœud,  375. 
cwrw  bière,  375. 
cwyr  cire,  1  20. 
cyffred  comprendre,  382. 
kyfryngthut  entre  eux,  360. 
cylion  mouches,  229. 
cymhellai  éperon,  75. 
cyrafol,  cyrafon  cormes,  75. 
cythrawl  adversaire,  démon,  382. 
damciichinnuou  détours,  372. 
defnydd,  denfydd  substance,  75,  76. 
deuaf  je  viens,  72,  73. 
diawl  diable,  69. 
diffygio  manquer,  372. 

Revue  Celtique,  IX 


dificiuou  diminutions,  372. 

diwarnawt  journée,  137. 

dof  apprivoisé,  276. 

dofydd  maître,  276. 

dometic  dompté,  276. 

Dubgint,  361 . 

duiu  dieu,  75. 

dwywol  divin,  75. 

dybi,  ië  —  oui  certes,  73. 

-ed  terminaison  d'impératif,  3e  pers. 
sing.,  250. 

ei,  i,  son,  sa,  ses,  363,  364. 

eiddew  lierre,  23 1 . 

elestr  glaïeul,  235. 

eu,  rac  —  devant  lui,  362-364. 

ewythr  oncle,  382. 

ffenigl  fenouil,  233. 

fferylliaeth,  fferylltiaeth  alchimie,  chi- 
mie, 275,  276. 

galltovydd,  gallovydd  mécanicien,  ar- 
tiste en  mécanique,  275. 

gallu  pouvoir,  275. 

goreu  le  meilleur,  74. 

gromil  grémil,  231. 

gurthdo  contre  eux,  361. 

gwinegr  vinaigre,  242. 

gwlad  la  campagne,  76. 

gwlanen  flanelle,  76. 

gwledig  rustique,  76. 

gwlydd  hippia  minor,  235. 

gwnaethym  je  fis,  247. 

gwrm  brun,  374. 

haearn  fer,  398. 

heiw  propriété,  possession,  267. 

heno,  henoid  cette  nuit,  137,  382. 

hwynthwy  eux,  361 . 

-id   terminaison   de    3e   pers.    sing., 
indic.  prés.,  407,  408. 

Ieuan  Jean,  72. 

ieuanc  jeune,  71,72. 

isop  hysope,  235. 

Ithel,  72. 

53- 


$  io    Table  des  principaux  mots  celtiques  étudiés  dans  le  volume  IX 

latwm  laiton,  241. 

lliwio  colorer,  75. 

mabcoll  avencia,  226. 

mach  caution,  1 10. 

mynydd  montagne,  137. 

naddu  asciare,  dolare,  76,  481. 

neddai,  neddyf,  doloire,  75. 

nés  plus  près,  137. 

neuadd  salle,  74. 

newydd  nouveau,  275. 

nos  nuit,  1 37. 

nouodou  salles,  74. 

nymdawr  peu  m'importe,  266. 

ochr  pointe,  453. 

Ofydd  Ovide,  276. 

ofydd  ouyt    homme   habile    dans  un 

art,  maître,  275,  276. 
ovydd  gradé  dans  la  hiérarchie  des 
lettrés,  276. 

pant  creux,  1  $. 

persli  persil,  239. 

powys  état  de  repos,  72. 

pyg  poix,  243. 

racdut  devant  eux,  360. 

recdouyd,  recouyt  maître,  arbitre  des 
présents,  274,  275. 

rheg-ddofydd,  rheg-ofydd  maître  des 
présents,  274. 

rhosmari  romarin,  240. 

ryfe!  guerre,  137. 

surian  cerise,  68. 

swllt  shelling,  trésor,  272. 

syfi  fraises,  233. 

taflu  jeter,  75. 

taradr  tarière,  74. 

trev  éternuement,  362,  363. 

-u  -udd  eux,  360,  361 . 

ufelyn  étincelle,  241 . 

ulai  hydrogène,  75. 

ulyf  restes  d'une  chose  brûlée;   car- 
bone, 75. 

utut  à  eux,  360. 


worm-,  wrm-  brun,  374. 

-yf  suffixe  d'instrument  ou  d'argent, 

75- 
y  mae  il  est,  246,  253. 
ys  gwir  c'est  vrai,  382. 


.VI.  Cornique. 

a  fus,  que  tu  as  eu,  260. 

altrou  vitricus,  499. 

am  been  que  j'aurais,  259. 

am  bef  j'eus,  259. 

asbetheugh  que  vous  aurez,  263. 

caid  primid  emptitius,  499. 

cor  nanus,  499. 

dotho  à  lui,  361 . 

gahen  jusquiame,  229. 

gofail  officina,  499. 

gwra  fais,  247. 

jawl,  jowl  diable,  69. 

loties  armoise,  226. 

melhyonen  viola,  499. 

mois  mouton,  375 . 

nam  beyn  que  nous  n'ayons  pas,  263. 

nedim  hache,  75. 

onnen  fraxinus,  499. 

pellen  glomus,  499. 

sira  sire,  379. 

yn  berna  je  l'ai  eu,  261 . 

stut  culex,  499. 

toll  corn  lituus,  499. 

hule  noctua  vel  strix,  499. 

vilecur  parasitus,  499. 


VII.  Breton. 
(Voir  p.  91,  9^-) 

a  qui,  que;   particule  verbale,  252, 
253,  256-258. 


Table  des  principaux  mots  celtiques  étudiés  dans  le  volume  IX.      $  i  i 


-al  terminaison  d'infinitif,  247. 

Alan,  140. 

ait  gl.  palm'e  artum,  419. 

aluson  aumône,  376. 

am  boe  j'eus,  259. 

an  je  vais,  253. 

•an  termin.  d'infinitif,  247. 

Anna,  Annan  Anne,  379. 

anpat  augmenter,  253. 

argoez  intersigne,   127. 

argourou  dot,  1 27,  371 . 

argouvreu  dot,  371 . 

arihue  arrivé,  379. 

armerhein  ménager,  375. 

Armor,  373. 

arvor  lieu  sur  le  bord  de  la  mer,  373. 

a  zrebi,  a  zrebu  depuis,  379,  380. 

bac'h,  baz,  bâton,  1  10,  354,  387. 

balan  genêt,  281 . 

baot  voûte,  375. 

Barban  Barbe,  379. 

Basila  Basil,  379. 

bazatat  battre,  3  54. 

baz-valan  entremetteur  de  mariages, 
1  10. 

beieyen  prêtres,  373. 

ben  j'aurai,  259. 

benhuec,  benvek  instrument,  372. 

benieu,benio  cornemuse,  371. 

benny  cornemuse,  372,  373. 

benvijou,  binhuyou,  binviou  instru- 
ments, 371-373. 

benuyo  il  fera  de  la  musique,  373. 

beont  qu'ils  aient,  265. 

bez  aie,  260,  26^. 

beza,  bezaff,  être,  246,  248,  257, 
2^$>  >  S  S 1  3 8 1  ;  avoir,  265,  266. 

bihier  bonal,  potred  er ,  en- 
tremetteurs de  mariages,  1  :o. 

biniou  cornemuse,  371-373. 

bizhuiquen,  birviken,  biken  jamais 
(dans  l'avenir),  380,  381 . 


blavéola  bluet,  379. 

blein  sommet,  419. 

boc'h  vous  aurez,  263. 

boet,  bwit  nourriture,  120. 

bols  voûte,  375. 

bou  si,  si  fait,  2^3,  2^4. 

bout  être,  355. 

Briec,  358. 

Brithiac,  3  58. 

cadarn  fort,   1  27. 

kanafi,  kana'raù,  etc.  je  chante,  245. 

cantréein  hanter,  382. 

cantren  courir  çà  et  là  ;  quantren  fu- 
reur. 382. 

caris  j'aimai,  123. 

casse  mouvement;  il  envoie,  379. 

kazek  dimignow  entremetteuse  de  ma- 
riages, 1  10. 

queffret  ensemble,  382. 

qeresen,  qirisen  cerise,  68. 

Kerneo  Cornouaille,  356. 

chache,    m.    chasse,    t.    de    marine, 

379 

chas  chiens,  379. 

chasé  chasse,  379. 

cnech  en  haut,  374. 

koer,  koar  cire,  120. 

coèt  bois,  1  20. 

coll  perte,  1  27. 

koloren,  keler  noix  de  terre,  228. 

corn  prêt  prendre,  382. 

control  contraire,  382. 

korn-boud le  gros  bourdon  du  biniou, 

372. 
koulm  nœud,  375. 
krec'h,  kroec'h  en  haut,  374. 
croeaff,  crouéein,  kroui  créer,  374. 
Crouisst  (Jésuss  —  1  Jésus-Christ,  374. 
cundu  conduite,  380. 
da  particule  verbale  250,    252,  357, 

358. 
dadlou,  dadluo  lieux  de  réunion,  372. 


»,  1 2    fable  des  principaux  mots  celtiques  étudiés  dans  le  volume  IX. 


defint  auront,  265. 

dehon  à  lui,  j6i  . 

dehou  à  lui,  361 . 

deit  venez,  387. 

deu'ra  il  vient,  247. 

deuz  elle  a,  260. 

dezaff,  dezan  à  lui,  361 . 

dezo  à  eux,  361 . 

diblas  cruellement,  383. 

diffigo   manquera,    s'épuisera,     372, 

575- 
dihuiguiêtt  épuisé,  372. 
diviet  épuisé;  tari,  lassé,  373. 
do  à,  419. 
donet  venir,  248. 
drespétt  dépit,  380. 
drillaou  (/  mouillé)  feuilles,  380. 
du  noir,  361 . 

e  signe  de  participe  présent,  354. 
-e  mi-muet,  378,  379. 

-ec,  3  59- 

-ek  terminaison  d'infinitif,  247. 

effe  il  serait,  355. 

effez  il  est  (habituellement),  355. 

ef  fezo  il  sera,  355. 

ef  fize  il  eût  été,  3  $  $. 

effoe  il  fut,  355. 

em  bemp  (ra )  que  nous  ayons, 

262. 
em  bout  avoir  (à  moi),  265. 
ema,  eman,  'man  il  est  actuellement, 

246,  2^3. 
-émp  iru  pers.  pi.,  impératif,  250. 
en,  er,  le,  la,  les,  387. 
en  que:  particule  verbale,,  252. 
end-eùn  précisément,  382. 
endevezout,endevoutavoir,  248,  265. 
e  n'eunt  ils  ont,  264. 
enostant  da,  malgré,  383. 
ent  particule  adverbiale,  3S2. 
-ent,  -eant  terminaison  de    3e  pers. 

pi.,  impératif,  249. 


enta  donc,  382. 

eo,  e  c'est;  si,  si  fait,  248,  254,  2^5. 

eontr  oncle,  382. 

er  car,  252. 

-et  impératif,  3e  pers.  sing.,  250. 

-et  terminaison  d'infinitif,  247. 

eus  si,  si  fait,  255. 

euteur  vous  voulez;  il  daigne,  266. 

euteurvout  daigner,  266. 

euz  int  ils  ont,  263,  264. 

ez  particule  adverbiale,  382. 

ez,  e,   en  que;  partie,  verbale,  252, 

3  S  S  - 

eza  donc,  3S2. 

famiiiarament,  familièrement,  779. 
finesaff  finesse,  379. 
fizy,  fizi,  fiz  fie-toi  ;  il  se  fie,  381 . 
fourondec,  fouloudec,  fromage,  376. 
frealzi  consoler,  375. 
g-  préfixe  verbal,  254,  255. 
galiout  pouvoir,  247,  253. 
gan  je  vais,  2  54. 
gant  (prier)  pour,  385. 
gaor  chèvre  ;  ober  er  aor,  être  entre- 
metteur de  mariages,  1  10. 
gaou  mensonge,  374. 
garm  cri,  375. 

geler  f.  tréteaux  funèbres,  383. 
geo,  geus  si,  si  fait,  254. 
Glauda  Claude,  379. 
gon  si,  je  suis,  254. 
goua  il  donne,  255. 
goût  savoir,  24$,  247. 
gra  il  fait,  2  54. 
groa  fais,  247. 
groeg  femme,  374. 
guéouann  si  fait,  255. 
guezan  si  fait,  2$$. 
gwammel  femme  mariée,  370,  371  . 
ha  et,  2  52. 

haï,  halo  crachat,  374. 
Halanau,  140,  281  . 


Table  des  principaux  mots  celtiques  étudiés  dans  le  volume  IX,     513 


ham  bezif  que  j'aie,  2$y. 

hazuez  aie,  260. 

he,  hi,  son,  sa,  ses,  273,  363. 

helmoï  s'accouder,  375. 

hi,  he,  son,  sa,  ses,  273,  363. 

hilguaennat  tirailler,  380. 

ho  leur,  381 . 

ho,  hoz,  hos,  hous  votre,  273,  355. 

ho  pezit  ayez,  263. 

hon  defem-ni  que  nous  ayons,  263. 

hor  bomp  que  nous  ayons,  262. 

hun  béemb,  hur  bemb  ayons,  262. 

hur  bout  avoir  (à  nous),  265. 

ia  il  va,  248. 

iann  je  vais,  249. 

Indaff  l'Inde,  379. 

int  ils,  361 . 

int  particule  adverbiale,  382. 

ioa  il  était,  248. 

is  il  est,  382. 

Jagu, Jegu,  Jacob,  361. 

Jegou,  361 . 

Jeneveu,  Jenovefan,  Geneviève,  379. 

luteq  chandelle  de  résine;  argent, 
monnaie,  258. 

maestre  maître,  378,  379. 

malou  béquilles,  382. 

mandamant,  mandement,  379. 

Manenberen,  Banenberen,  111. 

maout  mouton,  375. 

mar  si  251,  254,  255. 

marc'h  cheval;  entremetteur  de  ma- 
riages, 110,  in. 

marc'h  bonal,  marc'h  dimignow  in- 
termédiaire pour  les  mariages,  1  10. 

marhue  mort,  379. 

meistre,  mistre,  maîtres,  378. 

m'em  bout  avoir  (à  moi;,  26$. 

Merlevenez,  Brelevenez,  i  1  1. 

merzout  apercevoir,  375. 

meump  nous  avons,  261,  264. 

meuzom  nous  avons,  261. 


monid  montagne,  138,  275. 

nann  non,  255. 

ne  ne  pas,  251. 

nem  deur  je  ne  veux  pas,  266. 

n'eusomp  nous  avons,  261. 

n:eusont  ils  ont,  264. 

nevez,  a  nevez,  nouvellement,  récem- 
ment, 3*6,  3  S7- 

nimer  nombre,  419. 

nonpass  non  pas,  255. 

not  note,  419, 

-0  3e  pers.  sing.,  futur  et  impératif, 
261. 

-0  terminaison  d'infinitif,  247. 

-0  eux,  361 . 

0  deuezent  (y )  qu'ils  aient,  264. 

oa  il  était,  254. 

ober  faire,  248. 

•omp  iie  pers.  pi.  du  futur,  262. 

on  je  suis,  246. 

onestant  malgré,  383. 

-ont  3e  pi.  futur,  264. 

orchaedis,  orgued,  oryadez  amou- 
rette, 37$. 

-oint,  ouint,  3e  pers.  pi.  de  futur,  264. 

oz,  0,  signe  du  participe  présent, 
246,  3H- 

oz  votre  273. 

pa  quand,  251,  252. 

pazann  non,  255 . 

pobl  peuple,  251. 

poe,  pou  pagus,  272. 

pop  un  chaque,  419. 

Prijèc,  3  59. 

ra  particule  verbale,  250,  252. 

Radegofitan  Radegonde,  379. 

Roteneuc,  359. 

salokras,  salokroas,  saludkroas  non, 
nenni,  374,  375. 

Sam-Briëc  Saint-Brieuc,  359. 

scal  rasoir,  375 . 

skritur,  scruïtur  écriture,  374. 


5 1 4    Table  des  principaux  mots  celtiques  étudiés  dans  le  volume  IX. 

scruitoer  écritoire,  374.  teurvesit  veuillez,  266. 

Seidhun,  Sizun,  Sein  279.  trev  territoire  d'une  succursale,  '26. 

seul  tant  que,  381.  trig  triche,  373. 

Sillèc,  359.  trouc'ha  couper,  382. 

syra,  sire,  syr  sire,  379.  vaena  gloar,  vaine  gloire,  379. 

soeul  gl.  fiscus,  272.  ver,  ber  on  est,  253. 

soit,  soult,  sout,  fiscus,  272.  zo,  zou  (il)  est,  248,  249. 

térmal  ahaner,  376. 


ERRATA  DU  VOLUME  IX  DE  LA  REVUE  CELTIQUE. 


P.  78.  note  1,  Société,  lisez  Faculté. 

P.  25$,  1.  6  av.  la  fin,  deuont,  lisez  deuoht. 

P-  357;  !■  5»  Revue  celtique,  lisez  Revue  critique. 

P.  383,  1.  9  et  11,  enostant,  lisez  enostant. 

P.  392,  dern.  1.,  pedito,  lisez  pedite. 

P.  419,  1.  16,  après  Société  archéologique,  ajoutez  du  Finistère. 


Le  Propriétaire-Gérant  :  F.  VIEWEG. 


Chartres.  --  Imprimerie  DURAND. 


PB  1001  ,R5  V.9  SMC 
Revue  celtique 


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