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Full text of "Revue de Linguistique et de Philologie comparée"

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DE 

LINGUISTIQUE 

ET    DE 

PHILOLOGIE  COMPARÉE 


TOME  XXXIV 


REVUE 


LINGUISTIQUE 

ET    DE 

PHILOLOGIE  COMPARÉE 

RECUEIL    TRIMESTRIEL 


PUBI  IF.      PAB 


JULIEN     VTNSON 

PROFESSEUR   A    L'ÉCOLE    NATIONALE    DES   LANGUES   ORIENTALES    VIVANTES 
Avec  la  collaboration  de  divers  savants   français  et  étrangers 


TOME  TRENTE-QUATRIÈME 

.0: 


PARIS 

J.    MAISONNEUVE,    LIBRAIRE-ÉDITEUR 

6,    RUE    DE    MÉZIÈRES    ET    RUE    MADAME,    20 
I  90  I 


LE  LANGAGE  MARTIEN 

(suite) 


CHAPITRE  II 
Les    Noms    propres 

(26)  Le  roman  martien  met  en  scène  un  grand 
nombre  de  personnages,  dont  plusieurs  portent  un 
nom.  Il  y  a  même  une  petite  fille  qui  en  a  deux  :  Anini 
Nikaïné.  Comme  rien  n'est  plus  arbitraire  qu'un  nom 
propre,  il  semble  que  ce  soit  peine  perdue  que  d'en 
scruter  l'origine;  et  aussi  ne  l'essaiera-t-on  pas  pour 
les  noms  des  comparses,  Eupié,  Pouzé^  Sika,  Saziné, 
et  tant  d'autres.  Tout  au  plus  pourrait-on  faire  observer 
qu' Anini  et  Zitêni  sont  des  appellations  fort  bien 
choisies  pour  des  fillettes,  et  que  Mâtêmi  a  tout  l'air 
d'un  féminin  martien  du  magyar  Maté  «  Mathieu  »  : 
particularité  digne  de  remarque,  en  ce  que  Mathieu 
est  précisément,  dans  nos  langues,  un  des  rares  noms 
d'homme  qui  n'a  pas  formé  de  dérivation  féminine'. 
Mais  il  y  a  quelques  protagonistes  qui  se  détachent  en 
vigueur  sur  cette  figuration  monotone  et  terne  :  ils 
jouent  un  rôle  important,  sont  ou  paraissent  des  réin- 
carnations ou  des  doublures  d'êtres  qui  ont  vécu  sur 
terre,  et  il  n'était  pas  sans  intérêt  de  savoir  si  leurs 
appellatifs  signifient  quelque  chose,  ou  si,  en  parti- 

1.  Paniné  (P'I.  23)  doit  bien  probablement  son  nom  aru  grand 
grammairien  sanscrit  Pnnini, 

1 


o    


cûlier,  leurs  noms  martiens  ne  seraient  pas,  eux  aussi, 
des  doublets  de  leurs  noms  terrestres.  J'ajoute  que  c'est 
cette  recherche,  par  laquelle  j'ai  débuté,  qui  m'a  fait 
pénétrer  d'emblée  parmi  les  procédés  les  plus  com- 
plexes delà  sémantique  martienne  (cf.  n°  25).  J'ai  donc 
cru  qu'il  y  avait  à  la  fois  avantage  et  loyauté  de  mé- 
thode à  faire  passer  le  lecteur  par  les  chemins  que 
j'avais  suivis.  Moins  je  chercherai  à  pallier  mes  témé- 
rités apparentes,  plus  il  se  trouvera  à  l'aise  pour  y 
adhérer  ou  s'insurger  contre  elles. 

(27)  I.  Ésenale.  —  On  a  vu  que  la  traduction  des 
phrases  martiennes  en  français  est  censée  l'œuvre  d'un 
esprit  réincarné  en  Mars,  puis  désincarné,  qui  vivait 
récemment  encore  sur  notre  terre.  Il  y  portait  le  nom 
d'Alexis  Mirbel.  Mirbel  est  un  pseudonyme  (FI. 
p.  140)  ;  mais  je  me  suis  assuré^  par  lettre  particulière  de 
M.  Flournoy,  qu'Alexis  n'en  est  pas  un.  Le  problème 
qui  se  pose  est  celui-ci  :  y  a-t-il  un  pont  à  jeter  entre 
les  deuxnoms  d'Alexis  et  d'Ésenale,  que  porte  en  deux 
mondes  différents  le  même  personnage? 

«  Alexis  »  n'est  pas,  si  Ton  veut,  un  prénom  fort 
rare  ;  mais  il  n'est  pas  commun  non  plus,  et  il  n'y  en 
a  pas  d'autre  qui  lui  ressemble  par  la  finale:  il  n'est 
donc  pas  étonnant  que  cette  consonnance  tant  soit  peu 
insolite  ait  fait  travailler  la  pensée  subconsciente  de 
M"^  Smith.  Remarquons  dès  l'abord  qu'elle  a  eu  pour 
cela  tout  le  temps  nécessaire  :  c'est  en  novembre  1894 
que  nous  apprenons  l'existence  d'Alexis  dans  la  pla- 
nète Mars,  en  octobre  1896  seulement  qu'on  nous  révèle 
son  nom  martien  d'Ésenale  (P^l.    p.  156).  Deux  ans: 


.—  3  — 

grande  mortalis  aevi  spattum,  pour  une  élaboration, 
si  compliquée  soit-elle,  dont  le  rêve  eût  pu  brûler  les 
étapes  en  moins  d'une  minute  ! 

La  consonnance  des  deux  syllabes  finales  d'Alexis 
rappelle  celle  du  mg.  csacsi,  surtout  si  on  le  prononce 
à  la  française.  Or  csacsi  signifie  «  âne  »  :  non  pas  terme 
générique,  notons-le  bien;  mais  espèce  de  diminutif 
de  caresse,  comme  on  en  enseigne  volontiers  aux 
enfants.  Le  mot  a  pu  jaillir  des  lèvres  de  M.  Smith, 
dès  la  première  fois  qu'il  a  montré  un  âne  à  Hélène  à 
peine  sevrée.  Traduisons  maintenant  en  allemand,  et 
nous  obtenons  Esel,  c'est-à-dire  presque  exactement 
les  deux  premières  syllabes  du  nom  d'Ésenale.  Et  la 
finale?  Eh  bien,  c'est  l'initiale  même  du  nom  d'Alexis  ; 
car,  bien  entendu,  Ve  final  est  muet.  L'opération  totale 
peut  s'exprimer  par  une  formule  d'une  rigueur  mathé- 
matique, savoir  al  -j-  csacsi  =  esel  -\-  al.  Les  deux 
noms  sont  identiques. 

Non  pas  tout  à  fait  cependant  :  on  devrait  avoir 
'^Eselale-,  mais  je  ne  pense  pas  que  personne  attache  la 
moindre  importance  à  cette  légère  divergence,  de 
quelque  façon  qu'on  se  l'explique.  On  peut  songer 
tout  simplement  à  une  dissimilation  d'un  des  deux  /; 
ou  à  une  formule  de  retraduction  en  français,  soit 
àouQ,  Esel  {(.âne  »,  dont  la  métathèse(cf.  n"  14)  donne 
exactement  Ésenale  ;  ou  bien  à  quelque  vague  inter- 
férence de  la  liaison  de  mots  mg.  ézen  allât  «  cet  ani- 
mal )).  Mais,  dût-on  ne  pas  se  l'expliquer  du  tout,  on 
ne  s'aheurtera  point,  je  pense,  à  un  aussi  minime 
désaccord,  en  présence  d'une  concordance  aussi  par- 
faite de  tout  point  par  ailleurs. 


Pour  concevable  qu'elle  soit,  l'opération  est  évidem- 
ment trop  complexe,  pour  qu'on  puisse  s'attendre  à  la 
rencontrer  souvent  dans  la  formation  d'un  vocabulaire 
qui  n'excède  pas  300  mots.  Elle  serait  suspecte  néan- 
moins, si  elle  constituait  un  cas  isolé,  et  je  crois  que 
M'^e  Smith  l'a  renouvelée  au  moins  une  fois,  dans  éré~ 
duté  «  solitaire  »,  n"  245.  Quant  au  principe  en  lui- 
même,  c'est-à-dire  à  la  création  de  formes  du  langage 
par  addition  d'éléments  juxtaposés,  il  ne  saurait  faire 
l'objet  d'un  doute,  puisque  l'application  en  est  visible 
à  l'œil  nu  dans  la  conjugaison,  soit  ni  -\-  é,  mé  -j-  /, 
machir  -\-  i,  n°22,  2". 

(28)  II.  Astané,  Ramié  et  consorts .  —  Dans  ses 
pérégrinations  à  travers  tous  les  cycles  qu'elle  parcourt, 
M"®  Smith  a  un  guide,  un  conseiller,  un  génie  tuté- 
laire,  qui  rarement  l'abandonne  et  intervient  à  temps 
pour  l'éclairer  de  ses  avis  et  de  ses  leçons  :  sur  terre 
et  à  l'époque  actuelle,  c'est  un  désincarné  nommé 
Léopold  ;  au  siècle  dernier,  en  tant  qu'elle  revit  son 
existence  passée  de  Marie-Antoinette,  c'est  Cagliostro; 
dans  rinde,  au  XV"  siècle,  la  princesse  Simandini 
consulte  le  fakir  Kanga;  enfin,  transportée  dans  la  pla- 
nète Mars,  elle  a  le  bonheur  d'y  rencontrer  deux 
sages,  deux  savants  éminents,  Astané  et  Ramié,  qui 
s'intéressent  à  ses  progrès  en  martien  et,  à  vrai  dire, 
lui  promettent  beaucoup  plus  d'informations  qu'ils  ne 
lui  en  donnent,  mais  à  qui  nous  n'en  sommes  pas  moins 
redevables  d'une  bonne  part  des  textes  précieux  édités 
par  M.  Flournoy.  Léopold  et  Cagliostro  ne  font  qu'un; 
ce  point  est  expressément  révélé,  ainsi  que  la  rein- 


—  5  -- 

carnation  du  fakir  Kanga  en  Astané;  d'autre  part, 
celui-ci  et  Ramié  sont  distincts  entre  eux  et  distincts 
de  Léopold;  mais  Ramié  n'est  visiblement,  en  tant 
que  fonction,  qu'une  doublure  affaiblie  d'Astané  ;  et 
enfin,  — ce  qui  est  l'essentiel,  — ces  cinq  personnages 
répondent  tous  à  un  concept  unique,  celui  de  directeur 
spirituel.  C'en  est  assez  pour  que  M.Flournoy  admette 
à  bon  droit  leur  identité  virtuelle.  Nous  le  suivrons 
dans  cette  voie,  et  nous  nous  demanderons  si  leurs 
noms,  dès  lors,  ne  seraient  pas,  comme  leurs  per- 
sonnes, apparentés  entre  eux,  abstraits  ou  dérivés  l'un 
de  l'autre.  A  priori,  l'hypothèse  serait  fort  séduisante  ; 
mais,  après  mûre  discussion,  je  crois  qu'il  vaut  mieux 
y  renoncer,  ou  plutôt  la  restreindre. 

Léopold  est  apparu  le  premier,  le  26  août  1892,  et  ce 
n'est  que  postérieurement  qu'a  été  révélée  son  identité 
personnelle  avec  Cagliostro,  mais  dans  des  circons- 
tances telles  que  M.  Flournoy  (p.  91)  n'exclut  nulle- 
ment la  possibilité  qu'il  ait  eu  la  conscience  nette  d'être 
Cagliostro  avant  qu'on  lui  en  eût  suggéré  l'idée.  S'il 
en  était  ainsi,  en  d'autres  termes  si  Cagliostro  avait 
virtuellement  précédé  Léopold,  —  le  nom  de  Cagliostro 
étant  supposé  prononcé  a  la  française,  c'est-à-dire  le 
g  et  Yl  articulés  à  part,  —  il  y  aurait  un  chemin  pour 
passer  de  l'un  à  l'autre  :  détachant  la  syllabe  initiale, 
qui  servira  plus  tard  à  former  le  nom  de  Kanga,  il 
reste  un  trisyllabe  commençant  par  -lio-,  qui  p.  pu 
fort  bien  suggérer  les  deux  premières  syllabes  de 
Léopold,  surtout  si  l'on  considère  que  ce  prénom  est 
en  mg.  Lipôt.  Certes,  cette  explication  en  vaut  une 


—  6  - 

autre,  et  en  tout  cas  elle  l'emporte  beaucoup  sur  l'éty- 
mologie  illuministe  (FI.  ibid.),  que  Lëopold  n'aurait 
jamais  trouvée  tout  seul  et  qu'on  lui  a  obligeamment 
soufflée. 

Mais  encore  tout  cela  n'est-il  pas  probable  :  la 
genèse  du  nom  de  Léopold,  datant  presque  des  débuts 
médiumiques  de  M'^"  Smith,  doit  être  plus  simple.  Cet 
esprit  a  supplanté  celui  de  Victor  Hugo  dans  la  direc- 
tion de  conscience  du  sujet,  et  tout  porte  à  croire 
qu'une  circonstance  accidentelle  a  fait  la  transition  de 
l'un  des  noms  à  l'autre.  M''*^  Smith,  qui  doit  être  fami- 
lière avec  les  œuvres  de  V.  Hugo  pour  l'avoir  choisi 
comme  premier  inspirateur,  a  au  moins  entrevu  un 
jour  la  dédicace  des  Voix  intérieures  à  Joseph-Léopold-^ 
Sigisbert  comte  Hugo,  et  ce  souvenir,  si  fugace  qu'elle 
en  a  nécessairement  per'du  toute  conscience,  est  resté 
empreint  dans  sa  mémoire  subliminale,  qui,  ayant  un 
autre  jour  besoin  d'un  prénom  pour  désigner  un  nou- 
veau personnage,  a  tout  naturellement  fourni  celui-là. 
Ou  bien  l'on  avait  raconté  devant  M^'*'  Smith  quelque 
anecdote  sur  V.  Hugo,  du  temps  de  son  exil  en  Bel- 
gique, où  se  mêlait  le  nom  du  roi  Léopold  P'";oubien 
le  prénom  du  frère  de  Marie-Antoinette,  échappé  du 
cycle  royal  en  voie  de  formation,  a  prématurément 
pris  corps  dans  le  personnage  qui  domine  cet  épisode 
des  vies  imaginaires  de  M"*"  Smith.  Que  sait-on? 
Chacune  de  ces  conjectures,  tout  au  moins,  y  compris 
celle  de  Tétymologie  purement  verbale,  cadre  parfai- 
tement avec  celte  circonstance  capitale,  que  Léopold, 
qui  sait  tant  de  choses,  ne  sait  pas  du  tout  d'où  lui  vient 


—  7  — 

son. propre  nom  :  le  hasard  qui  le  lui  a  imposé  est  un 
Hl  d'araignée  trop  ténu  pour  avoir  laissé  trace  dans  le 
réseau  de  ses  souvenirs. 

Poursuivons.  Si  Cagliostro  n'a  pas  engendré  Léopold, 
a-t-il  pu  engendrer  Kanga?  Chronologiquement  oui  :  le 
cycle  hindou  est  postérieur  au  cycle  royal,  bien  que 
plus  tard  ils  évoluent  parallèlement.  Au  point  de  vue 
verbal^  la  première  syllabe  de  Cagliostro,  moyennant 
une  nasalisation  et  Taddition  d'une  finale  sanscritoïde, 
donne  aisément  Kanga.  Mais  ce  n'est  encore  là  qu'un 
simple  possible,  que  n'étaie  aucune  preuve.  Il  est  bien 
plus  vraisemblable  que  le  nom  de  Kanga  ait  été  pris 
tout  fait  dans  le  roman  pseudo-oriental  qu'a  dû  un 
jour  feuilleter  M"«  Smith  (n""  2  et  8),  et  dont  elle  ne  se 
souvient  non  plus  que  de  la  dédicace  des  Voix  inté- 
rieures. Quoi  qu'il  en  soit,  jusqu'à  ce  qu'un  biblio- 
graphe nous  déterre  ce  roman,  la  question  demeure 
en  suspens. 

Jusqu'ici  le  terrain  a  cédé  sous  nos  pas  ;  mais  il  va 
s'affermir.  Par  quel  procédé  M"''  Smith  a-t-elle  extrait 
de  cette  syllabe  Cag-  le  mot  mg.  âg,  qui  signifie 
«  branche  ))?La  simple  aphérèse  est  diflicilement  con- 
cevable pour  un  mot  aussi  court;  mais,  de  quelque 
manière  qu'elle  s'y  soit  prise,  il  est  certain  qu'elle  l'a 
fait.  Le  grand  sage  de  Mars  s'appelle  Ast-ané,  c'est- 
à-dire,  sans  difficulté,  al.  ast  a  branche  »,  suivi  d'une 
suffixation  martienne  (n°  17,  4°). 

Et,  si  l'on  voulait  tenir  pour  fortuite  cette  coïnci 
dence  si  remarquable,  je  demanderais  alors  par  quelle 
récidive  du  hasard  la  doublure  d' Ast-ané  se  nomme 


—  8  — 

Ram-ié,  soit  exactement  le  radical  du  fr.  rameau,  qui 
à  son  tour  est  la  traduction  de  l'ai,  ast,  également 
accompagné  d'un  autre  suffixe  martien? 

Il  y  aurait  folie  à  expliquer  tous  les  mots  créés  par- 
M"^  Smith,  puérilité  peut-être  à  le  faire  alors  même 
qu'on  le  pourrait;  mais,  sur  ce  point  particulier,  je 
crois  en  avoir  dit  assez  pour  emporter  la  conviction . 


—  9 


CHAPITRE  m 
Les    petits    mots 

(29)  Il  y  a  lieu,  je  pense,  de  commencer  par  éliminer 
ce  que  j'appelle  les  petits  mots,  articles,  pronoms, 
menus  adverbes,  verbes  auxiliaires,  etc.,  qui  ne  sont 
d'aucune  langue,  pour  ainsi  dire,  par  la  raison  que 
dans  toutes  ils  se  présentent  sous  une  forme  semi- 
atone  et  de  prononciation  rapide  qui  ne  permet  guère 
à  l'esprit  d'y  attacher  son  attention,  en  sorte  que  le 
sujet  parlant  qui  y  cherche  des  substituts  se  trouve 
tout  naturellement  amené  à  remplacer  tel  monosyl- 
labe, qu'il  estime  arbitraire,  par  un  autre  monosyl- 
labe également  arbitraire,  ou  dont  tout  au  moins  le 
mode  de  création  nous  échappe.  Ici  donc  notre  étude 
se  confinera  presque  dans  la  statistique,  sans  toutefois 
négliger  les  rapprochements  assez  clairs  pour  valoir 
la  peine  d'être  relevés. 

§  1^''.   —  LES  ARTICLES 

(30)  L'initiale  de  l'article  défini  est  une  sifflante,  qui 
oscille  entre  la  sourde  et  la  sonore,  mais  avec  une  pré- 
férence marquée  et  définitivement  victorieuse  pour 
celle-ci:  toujours  x?é  «  le  »,  15  fois,  plus  une  fois  élidé 


—  10  - 

dans  ^alùév  Télément  »  (cf.  n°  42)  ;  ci,  une  fois,  et  ^i, 
3  fois,  «  la  »  ;  cée,  une  fois,^ée,  2  fois,  et  ^é,  une  fois, 
«  les  )).  On  a  déjà  vu  que  la  répartition  des  genres  est 
exactement  celle  du  français.  La  syntaxe  de  l'article 
partitif  n'est  pas  moins  calquée  sur  la  construction 
très  spéciale  de  cette  langue  :  ti  jsâmé  tensée[¥\.  30) 
«  de  meilleurs  moments  »;  et  jusqu'à  ti  ^/  masêté 
(FI.  27)  «  de  la  peine  ».  En  présence  de  pareils  faits, 
il  est  superflu  de  se  demander  où  M''*'  Smith  a  pris 
son  article  :  c'est  une  déformation  quelconque  et  de 
pur  caprice  des  monosyllabes  français  à  ce  afïectés . 

(31)  L'article  indéfini  est  beaucoup  plus  intéressant, 
parce  qu'il  a  une  forme  bien  mieux  caractérisée  ;  il  en 
a  même  deux.  La  première  fois  que  M"^  Smith  l'a 
employé,  elle  a  dit  tivé  (FI.  8)  «  d'un  »  :  liaison  où  l'on 
ne  peut  savoir  si  «  un  »  est  vé  ou  ivé,  puisque  a  de  » 
se  dit  ti  et  pourrait  être  élidé.  J'incline  à  croire  qu'il 
faut  suivre  la  seconde  alternative,  et  couper  fivé,  où 
ivé  représenterait  mg.  egyûvé,  «  en  un,  ensemble  », 
cas  factitif  du  numéral  mg.  ecjy  «  un  »,  entendu  jadis 
par  le  sujet  dans  quelque  phrase  usuelle  et  retenu 
comme  tel  sans  aucun  soupçon  de  sa  valeur  gramma- 
ticale. 

Quoi  qu'il  en  soit,  ce  mot  mort-né  n'a  paru  qu'une 
seule  fois,  et  a  été  aussitôt  remplacé  par  mis 
«  un  »,  9  fois,  auquel  il  faut  joindre  misé  «  une  », 
3  fois.  J'ai  suivi  bien  des  pistes  pour  retrouver  la  filia- 
tion de  ce  monosyllabe,  qui  ferait  penser  au  grec  (xta 
«  une  »,  s'il  nous  était  permis  de  supposer  que  M"'  Smith 
sût  un  peu  de^rec.  Aucune  n'étant  satisfaisante,  j'in- 


—  11  — 

dique  en  passant  la  moins  invraisemblable.  Une  fois 
créé  le  mot  tivé,  il  a  pu  être  coupé  et  compris  ti  vê 
et  la  syllabe  vé  a  évoqué  l'idée  de  l'ai,  weh  «  mal  », 
lequel  à  son  tour  a  évoqué  l'idée  du  préfixe  al.  miss-, 
si  souvent  traduit  par  «  mal  »,  par  exemple  dans  des 
juxtapositions  telles  que  miss  -handeln  a  mal-traiter  ». 
Le  chemin  parait  bien  détourné;  mais  j'ai  déjà  dit 
(n"  25,  4°j,  et  l'on  verra  par  la  suite^  que  la  genèse 
des  mots  par  voie  de  calembour  est  un  procédé  familier 
à  notre  sujet  et  justifié  par  le  flottement  de  toutes  les 
images  dans  le  rêve  ou  même  dans  la  rêverie. 

§  2.  —  PRONOMS  PERSONNELS  ET  POSSESSIFS 

(32)  Nulle  part  plus  qu'en  ce  domaine  ne  règne  dans 
la  grammaire  de  nos  langues  un  beau  désordre  appa- 
rent. Le  radical  de  chaque  pronom  varie  au  hasard  : 
je,  moi,  mon,  notre',  il,  le,  son,  leur,  etc.  ;  sans  qu'au- 
cune loi  semble  régir  ces  caprices.  M"'  Smith  ne 
manque  pas  de  transporter  ce  chaos  dans  la  planète 
Mars,  et  même  de  l'y  compliquer. 

l"""  personne.  —  Cas-sujet:  ce  «  je  »,  16  fois.  —  Cas- 
régime,  sans  distinction,  non  plus  qu'en  français,  entre 
l'accusatif  et  le  datif:  si  «  moi  »,  6  fois;  lé  «  me  », 
8  fois.  —  Pluriel,  sans  distinction,  non  plus  qu'en 
français,  entre  sujet  et  régime,  nini  a  nous  »,  6  fois. 
—  Possessifs  :  êd  a  mon  »,  14  fois  ;  ê:^é  «  ma  »,  3  fois  ; 
ésiné  a  mes  »  4  fois  ;  viche,  une  fois,  et  iche,  6  fois, 
((  notre  ».  —  Le  fr.  je  zézayé  a  suggéré  se,  qui 
apparaît  à  l'état   pur    dans  le  possessif,  mais   s'es^ 


—  12  — 

assourdi  en  sô  (écrit  ce)  dans  le  pronom,  ainsi  que  le 
prouverait  au  besoin,  de  surcroit,  l'élision  delà  voyelle 
dans  saline  FI,  11,  qu'il  faut  lire  s'aliné-  «  j'oublie  ». 
L'initiale  de  nous  se  reconnaît  sans  peine  dans  nini. 
La  forme  lé  semble  tirée  de  me  par  simple  substitu- 
tion à  la  consonne  de  la  consonne  immédiatement  pré- 
cédente dans  l'alphabet  (cf.  n°  13,  5").  Les  autres 
types  sont  peu  clairs  :  iche  rappelle  l'ai,  ich  par  la 
forme  et  l'ai,  uns  par  le  sens  ;  son  doublet  viche  est 
considéré  par  M.  Flournoy  comme  un  simple  lapsus; 
quant  à  si,  il  se  rattache  sans  doute  k  se  =  ce  «  je  ». 

2*  personne.  —  Cas-sujet  :  dé  «  tu  »,  10  fois.  — 
Cas-régime,  comme  plus  haut:  vi  «  toi  »,  14  fois; 
di  «  te  »,  19  fois.  —  Pluriel  :  sini  «  vous  »,  une  fois. 
—  Possessif  :  ché  «  ton  »,  13  fois;  chée  «  ta  »,  5  fois  ; 
chi  «  tes  »,  une  fois;  a  votre  »  est  inconnu.  — Le 
changement  de  dentale  dans  dé  et  di  a  été  suggéré, 
soit  par  l'ai,  du  et  dich,  soit  aussi  et  principalement 
par  la  métathèse  de  sonore  et  sourde  qui  s'est  produite 
dans  la  juxtaposition  fr.  de  te  (FI.  7)  devenue  mt.  ti 
di.  La  forme  vi  emprunte  assez  étrangement  son  ini- 
tiale au  fr.  vous,  de  politesse  sans  doute,  tandis  que 
sini  paraît  être  l'ai,  sie  «  vous  »  de  politesse,  affublé 
d'une  finale  venue  de  nini,  La  chuintante  du  possessif 
est  apparue  tout  au  début  du  martien,  à  une  époque 
où  M*^"  Smith  manifestait  une  prédilection  marquée 
pour  cette  consonne,  et  elle  n'a  sans  doute  pas  d'autre 
raison  d'être  fn°^  16  et  17,  1°). 

3^  personne.  —  Sujet  :  hed  a  il  »  et  «  ils  »,  7  fois  ; 
le  féminin  n'apparaît  pas.  —  Régime  :  .^é  «  le  »,  4  fois; 


—  13  — 

pi  «  lui  »,  une  fois;  le  féminin  n'apparaît  pas.  —  Pos- 
sessif :  bi  ((  son  »,  2  fois;  bê  «  sa  »,  et  bée  «  ses  », 
.chacun  une  fois.  Ici  le  désordre  est  à  son  comble  :  la 
rareté  en  martien  de  la  consonne  h  accentue  le  carac- 
tère énigmatique  de  la  forme  hed,  qui  ne  rappelle  ({ue 
l'anglais  A(%  alors  pourtant  que  l'auteur  du  martien  ne 
parait  pas  savoir  l'anglais;  la  labiale,  sourde  dans  pi, 
sonore  dans  bé,  etc.,  n'est  pas  moins  déconcertante; 
en  somme,  il  n'y  a  de  clair  que  ^é  «  le  »,  reproduction 
pure  et  simple  de  l'article  défini,  comme  en  français. 
4"  Réfléchi  :  rès  «  se  »,  3  fois.  —  La  première  fois 
que  le  mot  est  apparu,  c'est  dans  la  juxtaposition  rès 
pa;^ê  FL  23,  traduite  «  se  retire  »  :  l'initiale  de  ce 
dernier  groupe  est  se/%  dont  la  métathèse  (n''  14)  est 
res.  Une  fois  ce  monosyllabe  admis  au  sens  de  «  se  », 
il  a  été  reproduit  tel  (juel  deux  fois  ailleurs. 

§  3.   —  DÉMONSTRATIFS    ET  RELATIFS 

(33)  Cette  catégorie  est  très  pauvre. 

1"  Trs  «  ce  »,  et  aussi  a  cette  »,  en  tout  neuf  fois  ; 
tésée  ((  cette  »,  une  fois;  têsé  «  ces  »,  2  fois;  il  ne  faut 
pas  être  grand  clerc  pour  dénoncer  l'influence  de 
l'ai,  dies-et',  etc. 

2"  Dodé  ((  ceci  »,  2  fois  :  imitation  allitérante  du 
fr.  ceci,  rappelle  le  grec  toOto,  ou  a  pris  sa  consonne 
à  l'ai,  dies,  ou  bien  a  simplement  remplacé  une  lettre 
française  par  sa  voisine  dans  l'alphabet.  Cf.  n"  13,  5°. 

3°  Kâ  «  qui  »,  4  fois,  et  ké  «  que  »,  6  fois,  pour  tous 
les  genres  et  nombres,  comme  en  français,  ne  dissi- 
mulent pas  leur  origine. 


—  14  — 


§  4.  —  MENUS   ADVERBES 

(34)  1°  Ci  ((  là  )),  une  fois,  n'est  pas  sûr  {FI.  4),  mais 
probable,  puisqu'on  a  aussi  se  et  ^i  «  là  »,  chacun 
une  fois.  En  tout  cas,  le  fr.  ci  {ici)  et  l'homophonie 
avec  l'article  les  expliquent  suffisamment. 

2°  Le  même  élément  se  laisse  discerner,  joint  à 
d'autres  plus  obscurs,  dans  :  amni  a  alors  »,  plus  exac- 
tement «  ensuite  »,  FI.  17;  et  atrizi  «  là-bas  »,  dont 
on  rapprocherait  le  sk.  dira  a  ici  »,  si  l'on  pouvait 
croire  que  M''^  Smith  en  eût  connaissance. 

3°  Par  contre,  va  «  où  »  (4  fois)  se  réclamerait  du 
sk.  kvà  ((  où  »,  qu'elle  semble  connaître  et  précisément 
altérer  en  va  (FI.  p.  295),  si  l'ai,  wo  ne  fournissait  un 
répondant  moins  éloigné  et  presque  aussi  exact.  Peut- 
être  est-ce  une  contamination  de  l'un  et  de  l'autre. 

4°  Éni  ((  ici  »  (3  fois)  et  anà  (5  fois)  «  maintenant  » 
ne  répondent  à  rien  de  précis  et  ne  sont  que  des 
créations  démonstratives  relevant  du  langage  enfantin. 

§  5.  —  MENUES  PRÉPOSITIONS 

(351 1°  ((  De  »  se  dit  ti,  cf.  n°  32,  2°,  mot  qui  revient 
41  fois.  Comme  en  français,  il  se  combine  avec  l'article 
défini  masculin  ou  pluriel  :  ^é  «  du  »,  6  fois  ;  tiê  «  des  », 
3  fois  ;  mais  non  avec  l'article  féminin,  cf.  n"  30.  Ce 
décalque  du  français  est  la  naïveté  même  ! 

2"  «  A  »  se  dit  c,  14  fois,  dont  une  fois  traduit  par 
<(  vers  »,  FI.  11  :  simple  changement  de  voyelle.  Com- 


—  15  — 

biné  avec  l'article  défini,  il  devient  assez  étrangement 
itie  ((  au  »,  2  fois,  pour  lequel  l'ai,  in  ne  fournit  qu'une 
analogie  trop  lointaine. 

3"  «  Par  »  s'est  dit  une  fois  li  (FI.  28)  et  une  fois 
uni  (FI.  31).  Il  est  oiseux  d'insister  sur  un  petit  mot 
aussi  rare  et  aussi  peu  fixé. 

4°  Med  «  pour  »  (5  fois)  a  pu  naître  sous  l'influence 
de  l'ai,  mit  a  avec  ».  Je  ne  .vois  pas  autre  chose  à  en 
dire.  On  trouvera  encore  d'autres  prépositions  à  leur 
rang  alphabétique. 

§  6.   —  MENUES   CONJONCTIONS 

36  1"  ((  Et  »  s'est  dit  une  fois  se  (FI.  12),  qui  est  à 
peu  près  la  métathèse  du  mg.  es  (n"  14).  Partout  ail- 
leurs il  se  dit  ni  (17  fois)  :  on  en  peut  rapprocher  le 
fr.  ni,  qui  est  un  «  et  »  négatif,  ou  l'exclamation 
mg.  ni  «  vois  donc  »,  ou  enfin,  à  raison  de  l'homophonie 
en  français,  les  formes  du  verbe  «  être  »  (n°  37). 

2"  La  négation,  calquée  sur  le  fr.  ne...  pas,  com- 
porte deux  mots  :  à  «  ne  »  répond  ké  ou  kic,  respecti- 
vement 5  et  3  fois;  à  a  pas  »,  ani,  3  fois.  Phonétique- 
ment, l'un  rappelle  l'ai,  hein  «  aucun  »,  et  l'autre  le 
fr.  ne,  le  tout  beaucoup  trop  ^vaguement  pour  qu'il  y 
ait  le  moindre  intérêt  à  s'y  arrêter. 

3"  La  combinaison  de  «  et  »  et  de  la  négation  res- 
semble aussi  peu  que  possible  à  l'un  ou  à  l'autre  : 
c'est  un  mot  bê^  «  ni  »,  qui  au  surplus  n'apparaît  qu'une 
seule  fois.  En  vertu  de  la  concordance /'>  b,  conjec- 
turée au  n°  8,  on  en  pourrait  rapprocher,  par  voie  de 


—  16  — 

calembour,  le  mg.  fés^ek,  qui  précisément  signifie 
«nid  )). 

4°  L'exclamation  ké  «  que  »,  soit  au  sens  de 
((  comme  »  ou  «  combien  »,  soit  en  tant  qu'indice  du 
subjonctif  (en  tout  5  fois),  ne  diffère  pas  plus  qu'en 
français  du  pronom  relatif. 

5°//  «  si  [fait]  »,  une  fois,  est  l'al.ya  «  oui  »  avec 
transposition  vocalique  à  l'aigu. 

6°  C'est  ici  enfin,  faute  d'une  meilleure  place,  qu'on 
rangera  l'exclamation  i  «  ô  »  (7  fois),  qui  est,  comme 
l'a  fait  remarquer  M.  Flournoy,  un  bon  exemple  de  la 
transposition  à  l'aigu  que  subit  le  vocalisme  européen 
pour  passer  au  vocalisme  martien. 

D'autres  conjonctions  plus  importantes  viendront  à 
leur  rang  alphabétique. 

§  7.  ^   LE  VERBE  ((   ÊTRE  » 

(37)  Cette  conjugaison  est,  comme  on  s'y  doit  atten- 
dre, formidable  de  complication,  surtout  eu  égard  au 
peu  de  formes  qu'on  en  possède.  Le  mieux  est  de  com- 
mencer par  les  plus  simples  :  il  en  est  une,  mais  fort 
peu  usitée,  qui  reproduit  exactement  lefr.,  à  savoir  é 
«  est  »  FI.  27  (une  seule  fois). 

1"  Mais  cet  a^raÇ  n'est  probablement  qu'un  lap- 
sus; car,  partout  ailleurs,  «  est  »  se  dit  né,  soit  par 
homophonie  partielle  avec  «  et  »  (n"  36,  1**),  soit  sur- 
tout par  influence  de  l'exclamation  mg.  ne  «  tiens  » . 
Le  mot  revient  21  fois,  auxquelles  il  en  faut  ajouter 
deux  pour  cméa  c'est  »,  qui  recèle  en  outre  une  forme 


-  17  — 

de  démonstratif  a  ou  an-  qu'on  rapprochera  des  types 
ci-dessus  du  n"  33. 

2*-  Le  même  consonnantisme  apparaît  au  pi.  oné 
«  sont  )){2  fois),  avec  une  sorte  de  préfixation  dont  la 
genèsç  est  obscure. 

3"  Mais,  à  la  l''^  personne,  on  constate  un  radical  êv)-, 
dont  on  ne  saurait  guère  que  dire,  sinon  que  sa  con- 
sonne peut  avoir  été  suggérée  par  le  magyar  :  la 
forme  est  êvé  «  suis  »  et  revient  4  fois. 

4°  Bien  que  le  même  mot  soit  traduit  différemment, 
et  conjugué  pronominalement,  il  est  reconnaissable 
dans  êv)é  de  la  phrase  répétée  deux  fois  identiquement, 
FI.  5  et  6,  ké  di  êvê  dé  «  ne  te  tiens-tu  »  ;  car  le  sens 
revient  à  «  n'es-tu  ».  Il  n'en  est  pas  moins  remarquable, 
en  tant  que  tout  à  fait  contraire  aux  habitudes  du 
sujet,  que  deux  mots  aussi  différents  que  «  suis  »  et 
((  es  »  aient  le  même  répondant  martien. 

5*^  En  tout  cas,  le  radical  êv-  est  répété  à  satiété 
sous  la  forme  de  l'impératif:  éoaï  a  sois  »,  11  fois. 

6°  Enfin,  on  a  une  fois  le  participe  nié  «  été  »,  naïve- 
ment formé,  comme  le  fr.  ét-é,  par  l'adjonction  d'un  é 
au  mt.  ni  «  et  »  (observation  déjà  faite  par  M.  FI.). 

§  8 .   —  LE  VERBE  «  AVOIR  » 

i38)  La  conjugaison  n'est  pas  moins  étrange  que 
celle  du  verbe  «  être  »  ;  mais  nous  en  possédons  bien 
moins  de  formes. 

1°  La  plus  usuelle  est  é  «  [il]  a  »,  5  fois  dont  2 
comme  verbe  auxiliaire  :  homophone  évident  de  é  «  a  » 
n"  35,  2®),  comme  en  français  a  et  à. 

2 


—  18  — 

2®  En  tant  qu'auxiliaire,  on  a  une  fois  mé  «  [tu] 
as  »,  dont  la  nasale  initiale  m'est  un  mystère.  Comme 
fr.  aï  rrz  a  -[-  i  graphiquement,  M^'*^  Smith  a  tiré  de  ce 
mé,  par  le  même  procédé  d'addition  tout  extérieure, 
une  l*"'  personne  méi  «  [j'J  ai  »,  qui  n'apparaît  également 
qu'une  fois. 

3°  Est-ce  l'homophonie  de  é  «  est  »  et  é  «  a  »,  est-ce 
le  rapprochement  sémantique  des  deux  verbes,  ou 
toute  autre  cause,  qnia  introduit  dans  le  verbe  «  avoir  » 
le  radical  év-  «  être  »  ci-dessus  ?  Quoi  qu'il  en  soit,  il 
semble  bien  émerger  dans  évenir  «  [tu]  posséderas  » 
(une  fois),  qui  pourtant  est  susceptible  d'une  autre  ex- 
plication (n»  274). 


—  19  — 


CHAPITRE  IV 
Le  Vocabulaire  français 

(39)  Le  travail  de  déblai  terminé,  il  ne  reste  plus 
qu'à  suivre  Tordre  alphabétique,  en  rangeant  chaque 
mot  martien  sous  le  vocabulaire  auquel  il  paraît  le 
plus  vraisemblablement  emprunté.  Je  répète  ici  que 
je  ne  me  dissimule  nullement  le  caractère  hypothéti- 
que de  beaucoup  de  mes  rapprochements;  mais,  pour 
plus  de  sûreté,  je  les  qualifierai  moi-même,  à  l'occa- 
sion, de  «  douteux  »  et  «  très  douteux  ».  Il  en  est  que 
je  n'indique  que  par  acquit  de  conscience,  pour  si- 
gnaler une  piste  et  permettre  à  d'autres  chercheurs  de 
trouver  mieux. 

(40)  1°  Abadâ  «  peu  »,  une  seule  fois,  dans  la  locu- 
tion mis  abadà  «  un  peu  »  :  suggère,  avec  jargonne- 
ment  enfantin,  le  fr.  abondant,  d'où  il  a  pu  en  effet 
sortir  par  voie  de  contraste  sémantique.  Douteux. 

(41)  2°  Acâmi  a  astronome  »,  une  fois:  l'idée 
d'  «  astronome  »  suggère  celle  de  «savant»,  et  celle-ci 
celle  d'  «académie»  ;  on  observera  la  longue  médiaie, 
qui  semble  compensatoire  de  la  chute  de  la  pénultième. 

(42)  3°  Alhé  «  élément  »,  2  fois:  il  s'agit  d'un  élé- 
ment subtil,  dans  le  genre  du  fluide  des  sgirites  :  cette 


—  20  — 

idée  suggère  celle  de  «  vent  »,  et  celle-ci  le  mot  ali;?é 
qui,  en  sa  qualité  de  mot  non  usuel  et  savant,  demeure 
intact. 

(43)  4"  Animinâ  «  existence  »,  2  fois:  c'est  le  fr. 
animé  «  vivant  »,  avec  suffixation  arbitraire. 

(44)  5°  Ani^ié  «  envoie  »,  une  fois:  pourrait  être 
une  métathèse  avec  changement  de  sourde  en  sonore, 
du  fr.  assigner^  lequel  aurait  été  suggéré  par  consi- 
gner, terme  qui  en  technique  commerciale  revêt 
couramment  le  sens  d'  «  envoyer  »  ;  or  M'^"  Smith  a 
suivi  la  carrière  commerciale  et  entend  ce  terme  vingt 
fois  par  jour.  Douteux  pourtant  ;  cf.  n"  65. 

(45)  6°  Ankôné  «  réjouir  »  une  seule  fois,  tout  à  la 
fin,  FI.  40.  Le  texte  porte  lé  godané  ni  ankôné  a  me 
aider  et  réjouir  »,  et  l'on  est  amené  à  se  demander  s'il 
n'y  a  pas  eu  interversion  de  sens  entre  les  deux  verbes, 
d'autant  que,  suivant  les  habitudes  à  peu  près  inva- 
riables de  M""  Smith,  le  mot  fr.  aidei'  commençant  par 
une  voyelle,  le  mot  mt.  corrélatif  devrait  aussi  com- 
mencer par  une  voyelle  et  causer  élision  du  pronom- 
régime.  Cela  posé,  si  godané  signifiait  «  réjouir  »  et 
ankôné  «  aider  »,  on  reconnaîtrait  dans  ce  dernier  les 
deux  premières  syllabes  du  fr.  encourager,  avec  suf- 
fixation arbitraire.  Très  douteux,  mais  sans  aucune 
importance,  vu  l'isolement  et  la  date  tardive  du  mot. 
Cf.  n°«  4  et  82. 

(46)  7°  Aniéch  «  hier  »,  2  fois:  c'est  lefr.  antique, 
ou  plutôt  les  deux  premières  syllabes  du  fr.  antérieur, 
avec  suffixation  du  type  adverbial,  n°  17,  3". 


—  21  -- 

(47)  8*^  Aj^vâ  «  soleil  »,  4  fois.  A  sa  première  appa- 
rition, le  mot  a  été  traduit  comme  nom  propre,  FI.  14; 
mais,  là  aussi  sans  doute,  il  doit  déjà  désigner  le  soleil, 
car  autrement  la  phrase  n'aurait  guère  de  sens  : 
«  Arvâ  nous  quitte,  sois  heureux  jusqu'au  retour  du 
jour».  L'idée  de  «  quitter»  a  suggéré  la  salutation 
à  revoir,  usuelle  entre  gens  qui  se  quittent  (à  ce  point 
de  vue  il  serait  intéressant  de  savoir  si  à  Genève  on  dit 
à  revoir  ou  au  revoir),  et  celle-ci,  légèremefnt  altérée, 
ayant  pris  le  sens  de  «  soleil  »  dans  cette  phrase  inau- 
gurale, l'a  conservé  ailleurs.  Douteux. 

(48)  9°  Assilé  «  immense  »,  3  fois  :  semble  une 
simple  métathèse  altérée  de  alizé,  n°  43  ;  l'idée  d'((  élé- 
ment »  peut  aisément  suggérer  celle  d'à  immense». 

(49)  10°  Badêni  «  vent  »,  une  fois,  dans  une  scène 
maritime  ou  fluviale,  FI.  27.  On  dit  «  le  vent  bat  les 
flots  »,  en  sorte  que,  dans  un  langage  métaphorique 
et  enfantin,  où  l'épithète  devient  le  nom  commun,  le 
vent  peut  fort  bien  être  appelé  «le  battant  ».  Au  ra- 
dical de  ce  participe  présent  s'ajoute  ensuite  une 
suffixation  quelconque.  Très  douteux,  et  toutefois  la 
supposition  trouve  un  appui  dans  l'emploi  parallèle 
depriâni  au  sens  de  «  flot  »,  à  une  ligne  de  distance. 

(50)  11"  Bana  «  trois  »,  4  fois.  Mot  bien  difficile  : 
peut-être  un  vague  ressouvenir  d'une  leçon  de  géo- 
graphie sur  les  Confins  Militaires  Hongrois,  où  il 
était  dit  qu'ils  sont  divisés  en  trois  parties,  Croatie, 
Slavonie  et  Banat. 

(51)  12°  Basée  «  courte  »,  une  fois  :  fr.  basse.  Les 


deux  concepts  de  «  court  »  et  de  «  bas  »  sont  facile- 
ment associables,  au  point  de  vue  tout  à  la  fois  ma- 
tériel et  moral. 

(52)13"  Bénèz  «  retrouver»,  une  fois,  et  hénézée  «  re- 
trouvée »,  2  fois,  tout  au  début.  Il  y  a  un  mot  mg. 
henézni  qui  signifie  a  jeter  un  coup  d'œil  sur  »  ;  mais 
le  sens  concorde  trop  peu.  Il  ne  faut  sans  doute  pas 
chercher  si  loin  :  une  phrase  française  telle  que  «  béni 
soit  le  jour  où  je  te  retroiwe  !  »  —  tout  à  fait  dans  le 
ton  des  phrases  où  apparaît  hénes-,  —  suffit  ample- 
ment à  expliquer  l'emploi  d'un  de  ces  radicaux  au 
sens  de  l'autre.  Douteux  pourtant. 

(53)  14°  Bérimir  «  reviendra  »,  une  fois.  Ce  mot  a 
comme  un  faux  air  de  f r .  revenir,  et  en  fait  il  en  est 
l'anagramme  moyennant  les  substitutions  très  admis- 
sibles v>  b  et  n>  m.  Il  est  vrai  que,  normalement, 
-//'  étant  finale  de  futur,  le  radical  serait  bérim-  tout 
court  ;  mais  on  sait  que  M"^  Smith  n'est  pas  fort  con- 
séquente dans  sa  grammaire  (n"  22,  9*^).  La  question 
serait  sans  importance,  ce  bérimir  étant  un  otTra^,  si 
primi  (n«  285)  n'en  paraissait  une  répétition  altérée. 
De  toute  façon,  très  douteux. 

(54)  15°  Bisti  «  habitant  »,  une  fois  :  semble  unç 
simple  altération  jargonnante  de  habitant. 

(55)  16°  Brimai  «  paroles  »  une  fois.  En  comparant 
ce  mot  à  bîHmi  a  sagesse  »,  brizi  «  sagesse  »,  ébrinié 
«  pense»,  7'a6n?  «pensées»,  qu'on  retrouvera  à  leur 
rang  alphabétique,  il  est  impossible  de  ne  pas  songer 


à  un  radical  -bri-,  qui  signifierait  «  penser,  parler  », 
et  s'accompagnerait  de  suffixations  et  préfixations 
diverses.  Or  ce  radical  pourrait  fort  bien  être  abstrait 
du  mot  fr.  esprit,  soit  au  sens  spirite,  soit  au  sens 
d'  «  intelligence  »  ;  il  n'y  faut  qu'un  passage  de  sourde 
à  sonore.  De  plus^  comme  dans  la  phrase  FI.  17  il 
s'agit  d'((  écrire  »  des  «paroles  »,  Ym  suffixal  de  bri- 
mai peut  avoir  été  suggéré  par  celui  du  fr.  imprimer. 
Le  tout  bien  indécis. 

(56)  17«  Brimi  {une  fois,  FI.  22)  et  18»  bri^i  (une  fois, 
FI.  28)  ((  sagesse  »  :  sans  importance;  voir  le  n°  55. 

(57)  19"  Bu^i  «  moyen  »,  une  fois.  Le  «  moyen  » 
suggère  l'a  issue  »,et,  s'il  est  bon,  la  suppose  «  bonne  »: 
soit  donc,  métathèse  de  issue,  avec  changement  de 
sourde  en  sonore,  et  préfixation  de  l'initiale  de  bonne. 
Très  douteux,  et  cf.  n°  287,  5°. 

(58)  20"  CapjH  «  noir  »,  une  fois.  La  première  fois 
(ju'enfant  M^^""  Smith  a  vu  des  «  câpres  »,  elle  a  pu  être 
frappée  de  la  «  noirceur  »  de  ce  condiment  dans  la  sauce 
blanche,  et  associer  les  deux  idées.  Possible,  mais 
douteux  ;  d'ailleurs  insignifiant. 

(59)21"  Carimi  «  fenêtre  »,  une  fois  :  fr.  carreau, 
avec  suffixation  arbitraire. 

(60)  22"  Chandêné  «  délicieux  »,  une  fois  :  suggéré 
par  le  radical  du  fr.  en-chant-eur,  avec  passage  de  la 
sourde  à  la  sonore  et  suffixation  martienne. 

(61)  23"  ChèkeTii  papier  »,  mot  isolé  :  emploi  arbi- 


—  24  — 

traire  du  mot  chèque,  suggéré  par  l'idée  de  «  papier 
[commercial]  )). 

(62)  24°  Chiite  «  fils  )),  5  fois  :  métathèse  évidente  du 
fr.  chéri;  le  mot  n'apparaît  que  dans  des  phrases  de 
vive  tendresse. 

(63i  25"  Cliodê,  mot  non  traduit,  une  fois.  La  scène 
est  aquatique,  FI.  27  :  le  mot  pourrait  donc  signifier 
«  jet  d'eau  »,  dont  il  serait  la  métathèse  vocalique, 
avec  changement  en  sourde  de  la  sonore  initiale. 

(64)  26"  Dabé  «  maître  »,  2  fois.  L'argot  français  a 
un  mot  dab,  «  père,  patron  »  :  la  présence  d'un  terme 
d'argot  dans  le  vocabulaire  de  M'^''  Smith  n'a  rien  en 
soi  de  surprenant,  en  tant  que  résidu  fortuit  d'une 
lecture  quelconque;  cf.  n"  138. 

(65)  27°  Dassinié  indicatif  et  daziné  subjonctif  «  [il] 
garde  »,  chacun  une  fois  :  extension  de  sens  du  verbe 
fr.  assigner'.  Cf.  n°  44. 

(66)  28"  Départir  «  répondra  »,  une  fois  :  futur  mar- 
tien, formé  sur  un  radical  abstrait  du  verbe  fr.  dire' 
plus  exactement  du  participe  disant,  cf.  n°^  49  et  125. 

(67)  29"  Dimé  «  semblable  »,  une  fois  :  métathèse 
probable  du  fr.  demi,  puisque  rien  ne  se  ressemble 
plus  que  les  deux  moitiés  d'un  même  objet. . 

(68)  30°  Divine  «  heureux  »,  et  féminin  divinée,  en 
tout  10  fois  :  dérivation  manifeste  de  fr.  divin,  sug- 
gérée par  une  locution  telle  que  «  [félicité]  divine  ». 


—  25  — 

69)  31*^  Dij^ênû  «  profondément  »,  au  sens  de  «  re- 
cherche profonde  »,  une  fois,  tout  à  la  fin,  FI.  40  : 
vague  influence  du  verbe  fr.  discerner.  Bien  douteux, 
car  la  finale  "ênâ  parait  suffixale  ;  cf.  n°  17, 5°. 

(70)  32«  Dorimé  a  sain  )),  une  fois  :  métathèse  pos- 
sible du  fr.  modéré,  dont  l'idée  est  connexe  de  celle 
de  a  bien  portant  ». 

11)  33"  Dumêïné  «  ancienne  »,  une  fois,  FI.  11. 
Alexis  a  dit  à  sa  mère  terrestre  mode  «  mère  »  ;  puis 
il  se  reprend,  —  car  elle  n'est  plus  sa  mère,  puisqu'il 
en  a  une  autre,  étant  réincarné  dans  Mars,  —  et  il  lui 
dit  du/néïné  mode.  Cette  correction  a  pu  amener  l'idée 
de  la  conjonction  du  moins,  qui  l'accompagnerait 
presque  inévitablement  en  français,  et  c'est  celle-ci 
qui,  avec  une  suffixation  martienne,  a  assumé  la  fonc- 
tion de  l'adjectif  «  ancienne  ». 

(72)  34°  Durée  a  terre  »,  2  fois.  Une  métathèse  de 
l'ai,  erde  n'explique  pas  le  vocalisme;  cf.  n"  245. 
Beaucoup  plus  probable  est  l'influence  d'une  locution 
fr.  telle  que  «  [la]  dure  [terre]  »  ou  «  [coucher  sur  la] 
dure  »,  d'autant  que,  la  première  fois  au  moins  que  le 
mot  a  été  prononcé  (FI.  7),  c'est  par  un  habitant  de 
Mars,  avec  un  sentiment  de  profond  mépris  pour  notre 
infortunée  planète. 

(73j  35»  Ébrinié  «  [il]  pense  »,  une  fois,  cf.  n°  55. 
Comme  la  pensée  ici  est  passionnément  tendre,  on 
peut  aussi  songer  au  fr.  épris,  qui  expliquerait  l'ini- 
tiale. 


—  26  — 

(74)  36"  Épu'i  «  rose  »,  adjectif,  une  fois  :  suggéré 
par  l'association  des  mots  rose  et  épine  dans  mainte 
phrase  usuelle;  puis  apocope  et  suffixation  arbitraire. 

(75)  37"  Éspênié,  nonl  propre  qui  désigne  le  paradis 
martien,  2  fois  :  suggéré  par  les  peintures  enchante- 
resses de  Y  Espagne  des  romans  et  des  romances. 

(76)  38°  Èssat  a  vivant  »,  une  fois,  et  éssaté  «  vivre  »^ 
deux  fois  :  contient  visiblement  le  radical  du  verbe 
((  être  »  ;  comme  ce  radical  n'apparaît  nettement  en 
fr.  que  dans  le  mot  savant  essence,  peut-être  vaut-il 
mieux  recourir  à  l'ital.  essere,  qu'on  peut  connaître 
sans  être  polyglotte. 

(77)  39"  Fîmes  «  [je]  meurs  »,  une  fois  :  l'initiale 
rappelle  fr.  ^/in,  et  la  médiale  fr.  mort.  Douteux, 
mais  sans  importance  :  la  phrase  FI.  13,  proférée  en 
pleine  extase,  n'est  qu'exclamations  entrecoupées. 

(78)  40°  Finaïmé  «  senteurs  »,  une  fois  :  suggéré 
par  le  fr.  «  [odeur]  fine  »-,  avec  une  finale  de  suffixation 
assonante,  cf.  n°^  16  et  239. 

(79)  AV^  Forimé  «  marques  [d'écriture]  »,  une  fois  : 
le  ir.  forme  est  bien  voisin  ;  mais  le  terme  commercial 
firme,  en  tant  que  «  marque  commerciale  »,  convient 
mieux  au  sens,  et  M"®  Smith,  employée  de  commerce, 
doit  le  posséder  familièrement  ;  peut-être  y  à-t-il  eu 
contamination  de  l'un  et  de  l'autre. 

(80)  42"  Fouminé  «  puissant  »,  3  fois  :  contamination 
possible  des  deux  mots  fr.  fougueux  et  formidable. 
Douteux,  quoique,  dans  la  première  phrase  où  le  mot 


—  27  — 

est  apparu  (FI.  27),   l'une  et  l'autre  épithète  soient 
parfaitement  à  leur  place. 

(81)  43"  Garnie  «  il  pleure  »,  une  fois  :  peut  sortir 
d'une  métaphore  facétieuse  telle  que  «  [chanter  la] 
gamme  ».  Peu  importe  :  le  mot  appartient  à  la  phrase 
inintelligible  FI.  33,  où  il  y  a  presque  autant  d'énigmes 
que  de  mots,  et  dont  le  sens  a  été  violemment  brouillé 
par  la  volonté  subliminale  du  sujet. 

(82)  44°  Godané  «  aider  »,  une  fois,  mais  cf.  n°  45: 
le  sens  «  réjouir  »  s'apparierait  à  merveille  au  fr.  [se] 
gaudir  ou  à  l'ital.  godere.  Si  l'on  veut  s'en  tenir  au 
sens  «  aider  »,  je  ne  vois  de  ressource,  bien  détournée, 
que  dans  la  locution  anglaise  God  [lielp]  a  Dieu  aide  », 
dont  le  second  mot  aurait  suggéré  le  premier.  Douteux 
en  tout  cas. 

(83)  45°  Grani  «  corps  »,  une  fois,  dans  la  même 
phrase  que  valini  a  visage  »,  FI.  18  :  dérivation  asse- 
nante, sur  un  radical  gran-,  qui  parait  abstrait  du 
fr.  grand.  La  personne  dont  il  s'agit  est  «  maigre  »  : 
par  conséquent,  elle  doit  être  ou  paraître  «  grande  ». 
L'absence  du  d  final,  que  le  fr.  ne  prononce  pas,  ne 
fait  guère  difficulté,  cf.  n°«  49,  66,  125,  etc. 

(84)  46°  Grêm  «  larges»,  une  fois:  dérivé  du  fr. 
grève.  L'idée  de  a  largeur  »  peut  suggérer  naturelle- 
ment celle  de  «  grève  » ,  et  l'on  peut  avoir  vu  des  grèves 
très  larges  sans  même  avoir  jamais  quitté  les  rives 
du  lac  de  Genève.  Peu  sûr. 

(85)  47°  Hantiné  «  iidèle»,  4  fois.  L'A  est  fort  rare 


—  28  — 

en  mt.,  et,  comme  le  fr.  ne  le  prononce  pas,  on  se 
trouve  amené  à  l'assigner  de  préférence  à  un  emprunt 
al.  ou  mg.  :  c'est  pourquoi  ma  première  pensée  avait 
été  pour  l'ai,  hund  «  chien  »,  emblème  de  la  fidélité  ; 
mais  le  vocalisme  est  en  défaut.  Toute  réflexion  faite, 
le  verbe  fr,  Jianter  est  plus  proche,  et  la  seule  objec- 
tion qu'on  y  voie,  c'est  son  caractère  peu  usuel  ;  mais 
il  est  fort  littéraire,  et  les  phrases  qui  contiennent 
/<o/i^mé  ont  précisément  aussi  un  cachet  de  style  un  peu 
recherché.  La  suffixation  -inê  est  des  plus  communes 
en  martien . 

(86)  iS'^Idé  «  on  »,  3  fois.  «  On  »,  par  contraste  avec 
«  il  »,  etc.,  est  un  personnage  qui  ne  se  laisse  pas  voir 
en  chair  et  en  os,  mais  dont  on  a  simplement  Vidée. 
Je  me  hâte  d'ajouter  que  cette  explication  idéologique 
me  paraît  à  peu  près  désespérée. 

(87)  49^  Iminê  «  mince  »,  une  fois  :  soit  une  filière 
d'idées  telle  que  «  mince  > aminci >  diminué  »,  et  la 
contamination  de  ces  divers  mots,  ou  d'autres  encore. 

(88)  50°  Iné  et  inée,  «  adorée,  bien-aimée  »,  4  fois  : 
l'ai,  innig  a  intime  »  convient  peu  ;  plutôt  terme  de 
caresse  enfantin,  cf.  fr.  mignon,  minet,  etc.,  avec 
aphérèse. 

(89j  51°  //•/  «  souvent  )),  une  fois  :  suggère  le  fr. 
réitéré,  qui  a  dû  nécessairement  s'écourter  beaucoup 
pour  traduire  un  si  petit  adverbe. 

(90)  52°  Kalâmé  a  accomplir  »  [un  désir],  une  fois, 
tout  à  la  fin,  FI.  40:  accomplir  un  désir,  c'est  l'apaiser, 
le  calmer.  Douteux,  mais  sans  réelle  importance. 


-  29  — 

(91 1  53"  Kavivé  «  étranges  »,  une  fois  :  étant  donné 
que  kà  signifie  «  qui  »,  ka-vivé  pourrait  se  décom- 
poser en  «  qui  vive  !  »  exclamation  qu'on  pousse  lors- 
qu'on entend  ou  voit  un  objet  insolite. 

(92)  54°  Kêmà  «  mâle  »,  une  fois  :  métathèse  sylla- 
bique  du  fr.  mâle,  où  la  lettre  /  a  été  remplacée  par 
sa  voisine  immédiate  dans  l'alphabet.  Très  douteux. 

(93)  55*^  Kin'fc.Jie  «  quatre  »,  une  fois  à  la  toute 
première  apparition  du  martien  encore  informe  :  alté- 
ration arbitraire  et  jargonnante  du  fr.  quatre. 

(94)  56°  Lé^iré  «  souffrance  »,  une  fois  :  dérivé  évi- 
dent du  fr.   léser  ou  lésion. 

(95)  57"  Luné  «  jour  »,  6  fois.  Ici  l'on  a  beaucoup  de 
choix  :  ou  fr.  lune,  astre  de  nuit,  par  contraste  sé- 
mantique; ou  fr.  lundi,  ital.  lunedi,  par  lequel  com- 
mence l'énumération  des  jours  de  la  semaine  ;  ou,  plus 
simplement,  un  radical  lu-,  abstrait  de  luir^e,  lumière, 
etc.,  sur  lequel  s'applique  une  suffixation  martienne. 

(96i  58°  Mabûré  «  grossier  )),  une  fois.  L'idée  sug- 
gère celle  de  «  bure  )),  ou  même  de  «  [vêtement]  en 
bure  »,  juxtaposition  qui  pourrait  aussi  s'orthographier 
ambufe,  dont  mabûré  est  la  métathèse  exacte. 

^97)  59"  Maprinié  «entré  »,  une  fois:  contamination 
grossière  de  entré  et  pénétré,  â\ec\?b  syllabe  en-  écrite 
am-  puis  métathésée  comme  ci-dessus  ;  le  mot  appar- 
tient à  la  phrase  inintelligible  FI.  83,  ce  qui  pourrait 
légitimer  cette  explication  contournée  et  bizarre,  mais 
en  même  temps  la  rend  inutile. 


—  30  — 

(98j  60"  Ma:2êté  «  peine  »,  2  fois:  le  mot  suggère 
l'idée  d'une  a  masse  »  difficile  à  mouvoir  ;  suffixation 
arbitraire. 

(99)  61"  Médacke  «  madame  »,  une  fois  :  jargon  du 
début  du  martien,  où  la  chuintante  joue  un  rôle  pré- 
pondérant. Cf.  n"^  93,  102  et  104. 

(100)  62"  Médinié  «  entourent  » ,  une  fois  :  les  deux 
premières  syllabes  viennent  de  médi-terranée,  que 
toutes  les  géographies  enfantines  définissent  a  mer 
entourée  de  tous  côtés  par  les  terres  ». 

(101)  63"  Mervé  «  superbes  »,  une  fois  :  fr.  meroeille, 
ou  les  deux  premières  syllabes  de  merveilleux. 

(102)  64"  Métaganiclie  «  mademoiselle  »,  une  fois, 
le  même  jour  que  médache. 

(103)  65"  Mété  «  tendre  »,  une  fois,  dans  la  juxta- 
position allitérante  mété  mode  «  tendre  mère  ».  L'idée 
de  «  mère  »  a  suggéré  a  maternel  »,  qui  a  été  écourté 
et  jargonné. 

(104)  66"  Méticlie,  «  monsieur,  homme  »,  5  fois,  et 
métiché  «  hommes»,  une  fois  :  seul  mot  du  jargon  de 
l'extrême  début  (cf.  n"^  17,  1",  et  99)  qui  ait  survécu, 
grâce  à  son  adaptation  postérieure  au  sens  général 
d'  «  homme  »^  phénomène  que  M.  Flournoy  a  expliqué 
avec  une  élégance  que  je  lui  envie  (p.  2411, 

(105)  67"  Midée  a  laide  »,  une  fois:  contamination 
probable  des  deux  mots  misère  et  hideux. 


{ 


—  31  — 

106)  68°  iV/?7é,  mot  non  traduit,  une  fois,  FI.  19; 
mais,  vu  rimbitude  de  M^^"  Smith  de  multiplier  numé- 
ralement  ses  adieux,  la  phrase  mile pivi  inivâ  ne  peut 
guère  signifier  que  «  mille  fois  adieu  ».  On  a  donc  ici 
le  fr.  ruille.  La  raison  pour  laquelle  on  n'a  jamais  pu 
obtenir  d'Ésenale  la  traduction  de  mile  piri,  est  peut- 
être  précisément  que  mile,  venu  par  lapsus,  ressem- 
blait trop  à  son  prototype  français  et  aurait  rendu  le 
martien  suspect.  Par  le  même  motifs  quand  M"*'  Smith 
a  voulu  employer  encore  le  mot  a  fois  »,  elle  n'a  plus 
dit  piri,  et  l'a  remplacé  par  un  zézaiement  enfantin  et 
jargonnant,  ^i^a^^i,  visiblement  fabriqué  pour  la  cir- 
constance :  cf.  n°^  120  et  228. 

(107)  69°  Mima  «  parents  »,  une  fois  :  réduplication 
enfantine  et  caressante  du  radical  ma-,  suggéré  par 
fr.  maman. 

(108)70°  iV//^a,  une  fois, 'désigne  une  sorte  de  kiosque 
ou  de  pavillon  roulant  dans  le  rêve  incohérent  FI.  23: 
je  suppose  que  c'est  le  fr.  maison,  avec  transposi- 
tion vocalique  enfantine  ou  martienne. 

(^109  71"  Mùné  «  moment,  instants  »,  trois  fois  : 
déformation  vocalique  du  fr.  minute,  avec  chute  de 
la  finale. 

(110^  72"  Xipavê  «  crains  »,  2  fois,  et  mpunè:2é 
«  craindre  »,  une  fois  :  l'association  de  l'idée  de 
«  crainte  »  et  de  celle  de  a  punition  »  est  tout  à  fait 
conforme  à  la  psychologie  infantile  ;  quant  à  la  forma- 
tion du  mot,  j!inclinerais  à   croire   que   nipu  est   la 


métathèse  exacte  du  fr.  puni,  et  que  la  uu  les  syllabes 
finales  sont  de  sufiixation. 

(111)  73°  Nubé  «  curieux  »,  une  fois,  FI.  35.  Le 
jour  où  l'on  montre  à  M^i"  Smith  ce  tableau  «  curieux  », 
elle  ne  le  voit  pas.  Est-ce  aller  trop  loin  que  de  con- 
jecturer qu'en  cet  instant  le  mot  nébuleux  est  venu 
interférer  dans  sa  mémoire  et  a  fourni  par  métathèse 

syllabique  initiale  la  traduction  de  l'épithète? 

(112)  74"  OîHé  «  frapper  »,  au  sens  de  «  heurter  », 
une  fois:  malgré  la  divergence  apparente  et  purement 
graphique,  c'est  le  fr.  heurter,  à  peine  altéré  en  pro- 
nonciation. 

(113)  Ih'^  Palette  a  calme  »  impératif,  une  fois,  tout 
au  début,  FI.  4  :  abstrait  du  fr.  palliatif  {{  calmant  », 
mot  savant  il  est  vrai,  mais  compris  de  toutes  les  per- 
sonnes instruites.  Douteux  pourtant. 

(114)  76°  Pâlir  «  temps  »,  une  fois.  Si  l'on  avait 
*padir,  la  métatlièse  du  fr.  rapide,  naturellement 
suggéré  par  l'idée  de  «  temps  »,  sauterait,  je  pense, 
aux  yeux.  En  l'état,  1'/  est  embarrassant,  quoique  son 
échange  avec  le  d  soit  phonétiquement  facile.  Très  dou- 
teux, mais  sans  aucune  importance,  d'autant  que  1'/ 
peut  venir  de  l'association  du  mg.  repCd  a  il  vole  », 
également  naturelle. 

(115)  77°  Paré^ié  a  [il]  laissé  »,  une  fois:  l'idée  de 
«  laisser  »  suggère  aisément  celle  de  «  négligence  », 
et  par  suit^  le  mot  fr .  paresse. 

(116)  78°  Pastri  «  sang  »,  une  fois:  que  l'idée  de 


—  33  — 

«  sang  »,  dans  une  scène  médicale,  où  figure  un  ins- 
trument à  trois  tubes,  amène  sur  les  lèvres  du  sujet 
le  nom  de  Pasteur,  c'est  la  vraisemblance  même  ;  la 
finale  est  martienne,  assenante  à  bodri,  cf.  n"**  16 
et  251. 

(117)  79°  Pavi  a  joie  »,  3  fois  ;  pavi  «  heureux  », 
une  fois,  et  pavinée  «  joyeuse  »,  une  fois  :  paraissent 
abstraits  ou  dérivés  des  mots  fr.  pavillon,  paoier, 
pavoiser,  etc.,  qui  s'associent  bien  à  une  idée  de 
«  joie  ». 

(118)  80°  Pa^é  ((  retire  »,  une  fois,  FI.  23:  il  s'agit 
de  la  main  de  Paniné,  qui  doit  «  se  retirer  »,  et  par 
conséquent  «  repasser  »  par  l'ouverture  par  laquelle 
elle  est  sortie  ;  les  deux  locutions  susdites  se  conta- 
minent en  ((  se  repasser  »,  dont  la  métathèse  absolu- 
ment exacte  est  rès  pazé,  cf.  n"  32,  4". 

:119)  81"  Pi  «  très  i»,  une  fois  :  paraît  n'être  que 
l'initiale  altérée  du  fr.  bien  (superlatif). 

(120j  82"  Piri,  mot  non  traduit,  cf.  n"  106  :  si  l'on 
admet  le  sens  «  fois  »,  on  peut  songec  au  fr.  «  [à  millej 
reprises  »,  avec  semi-métathèse  ou  épenthèse  voca- 
lique. 

(121)  83"  Pit  ((  sans  »,  2  fois  :  petit  mot  bizarre  qui 
semble  une  déformation  violente  du  fr.  vide,  dont 
l'idée  est  connexe. 

(122)84°  Plëva  «  chagrin  »  (adjectif),  une  fois.  Mot 
difficile, il  cause  de />é/fc/ié  et  jjélésse  (n°  249),  auxquels 
il  ressemble  à  la  fois  trop  et  trop  peu.  Pour  moi,  je 

3 


—  34  - 

l'en  séparerais  plutôt,  pour  le  rattacher  au  ir.  pleurer. 
Le  V  peut  venir  du  fr.  pleuvoir,  suggéré  par  la  quasi- 
homonymie  et  l'analogie  de  sens. 

(123)  85"  Polluni  «  question  »,  une  fois  :  contami- 
nation possible  des  deux  mots  fr.  problème  et  solution. 

(124)  86"  Poviné  et  povini  «  arriver  »,  chacun  une 
fois  :  à  rapprocher  de  vinâ,  n°  143;  c'est  le  ir. parvenir, 
à  peine  altéré  par  un  adoucissement  qui  rappelle  les 
inflexions  créoles. 

(125)  87**  Priâni  «  flot  »,  une  fois  :  cf.  fr.  brillant. 
Dans  un  vocabulaire  par  épithètes,  où  «  le  vent  »  est 
«  le  battant»  (n°  49),  il  est  fort  admissible  que  «  le  flot» 
soit  dit  «  le  brillant  »  ;  la  finale  est  assonancée  avec 
badéni.  Mais  tout  cela  est  cruellement  hypothétique. 

(126)  88"  Rabril  «  pensées  »,  une  fois:  voir  n°  55; 
mais  je  ne  m'explique  pas  la  préfixation,  à  moins  de 
quelque  contamination  des  mots  raison,  réfléchir,  etc. 

(127)  89°  Ri^  «  sur  »,  3  fois  :  fr.  sur,  avec  méta- 
thèse  et  changement  vocalique. 

(128)  90"  Sandiné  «longtemps»,  2  fois:  l'idée,  en 
se  précisant,  peut  se  fixer  à  a  cent  ans  »,  soit  donc 
peut-être  une  adaptation  martienne  du  fr.  centenaire. 
Cf.  un  procédé  similaire  n"  189 . 

(129)  91°  Sures  «  [tu]  crois  »,  une  fois  :  ce  que  l'on 
((  croit  »,  on  en  est  volontiers  «  sûr  »;  dérivation  évi- 
dente du  fr,  sûr,  assurer,  etc. 

(130)  92"    Taméclie,    une  fois,  nop  traduit;  mais, 


—  35  — 

comme  il  est  question  d'un  arbuste  en  buisson,  il  est 
assez  naturel  de  penser  à  l'initiale  du  fr.  tamarix  avec 
finale  martienne. 

(131)  93°  Taniré  «  prends  »  (impératif),  une  fois  : 
transport  pur  et  simple  du  verbe  tenir,  suggéré  par 
l'exclamation  française  «  tiens,  prends  »  ;  rien  de  plus 
naïf. 

(132)  94"  Tapie,  une  fois,  non  traduit,  désigne  une 
vision  étrange,  qui  se  déroule  sans  doute  comme  un 
«tableau»  ou  une  «  tapisserie  »,  FI.  32;  contamination 
de  ces  deux  mots. 

(133)  95"  Ten  «  près  »,  12  fois  :  abstrait  du  radical  du 
f r.  at-ten-ant,  at-ten-ir,  etc,  ;  ces  mots  sont  peu  usuels, 
mais  «  tenir  à  »  exprime  la  même  idée;  cf.  le  suivant. 

(134)  96*  Ténassé  «  [je]  voudrais  »,  une  fois:  c'est 
le  radical  du  verbe  tenir  [à]  au  sens  de  «  vouloir  »  ;  si 
la  finale  est  empruntée  à  l'imparfait  du  subjonctif  fr. 
de  V^  conjugaison  en  vue  d'exprimer  le  conditionnel^ 
ce  cas  est  un  des  très  rares  où  le  sujet  accuse  quelques 
traces  de  sens  grammatical. 

135)  97"  Tensée  «instant  »,  3  fois  :  c'est  l'anagramme 
exact  du  fr.  instant,  où  la  voyelle  nasale  initiale  est 
remplacée  par  une  voyelle  simple  de  finale  martienne. 

136)  98°  Tou^é  «  même  »,une  fois:  soit  la  locution 
fr.  toutainsi,'d\ec  syncope  intérieure  et  finale  altérée; 
ou  la  première  syllabe  de  tout  de  même,  avec  suffixa- 
tion arbitraire.  Rien  de  tout  cela  n'est  bien  satisfaisant. 

(137)  dQ'^Tranéi  «  passage  »,  une  fois  :  il  est  aisé  de 


-  36  - 

reconnaitre  la  syllabe  ^/'a-,  abstraite  de  ira-Jet  et  autres 
mots;  mais  peut-être  bien  se  complique-t-elle  d'une 
contamination  du  fr.  traînée,  dont  tranéi  est  la  méta- 
thèse  graphique  lettre  pour  lettre.  On  observera  que 
précisément  ce  texte  est  graphique.  La  connexité  des 
idées  est  fort  suffisante. 

(138)100**  Trima^i  «  force  »,  2  fois:  dérivé  du  verbe 
d'argot  fr.  trimer.  C'est,  avec  dabé,  le  seul  mot  d'argot 
que  paraisse  connaître  M''*'  Smith  :  cette  proportion 
n'a  rien  d'excessif,  d'autant  que  trimer  a  passé  dans 
la  langue  familière.  Le  suffixe  vient,  par  assonance, 
de  majsi  qui  précède. 

(139)  101°  Triné  o  parler  »,  4  fois,  et  trinir  «  par- 
lera »,  2  fois  :  comme  tous  les  gens  qui  «  parlent  » 
martien  parlent  pour  «  enseigner  »  quelque  chose  à 
M"«  Smithj  la  seconde  syllabe  du  mot  fr.  doctrine  se 
présente  invinciblement  à  l'esprit  ;  mais,  d'autre  part, 
il  semble  difficile  de  séparer  tout  à  fait  triné  de  tar- 
viné  «  langage  »,  n°  210.  Douteux. 

(140)  102«  Tu^é  «  malade  »,  2  fois.  Mot  bien  diffi- 
cile :  le  [mg.  dûhôsség  «  rage  [du  chien]  »  est  bien 
éloigné  à  tous  égards,  et  le  fr.  usé  peu  satisfaisant  ; 
si  l'on  se  décide  pour  ce  dernier,  le  t  initial  peut  pro- 
venir d'une  liaison  naïve,  résultant  de  ce  que  le  mot 
précédent  est  né,  équivalent  du  fr,  «  est  »,  dans  la 
phrase  FI.  29,  où  tu:;é  fait  sa  première  apparition;  il 
n'a  été  répété  que  dans  la  phrase  inintelligible  FI.  33. 

(141)  103°  Uri  {(  soir  »j  une  fois:  l'idée  de  «  soir  », 


—  37  — 

implique  obsc-uri-té,  mot  trop  long,  par  rapport  à 
celui  qu'il  devait  traduire,  pour  ne  pas  subir  un  violent 
écourtement. 

(142)  104"  Véche  «  vu  »,  véchêsia  voyons  »,  véchi 
«  [tu]  vois  »,  véchir  «  verras  »,  vétéche  «  voir»,  cha- 
cun une  fois  :  altérations  diverses  d'un  radical  imité 
du  verbe  voir.  Le  mot  est  né  au  début  du  martien, 
dans  la  période  de  prépondérance  de  la  chuintante. 

(143)105"  Vinâ  «  retour  »,  2  fois,  ci.  poviné,  n°124: 
constructions  élémentaires  sur  la  base  du  radical  du 
verbe  fr.  venir. 

(144)  106°  Vi^êné  «  distinguer  »,  une  fois  :  dériva- 
tion martienne  du  fr.  vision,  qui,  en  tant  que  mot 
savant,  a  pour  M'^"  Smith  un  sens  plus  technique  que 
le  simple  sens  de  «  voir  »  ;  peut-être  aussi  viser. 

(145)  107°  Zabiné  «  arriéré  »,  une  fois,  FI.  35: 
peut-être,  avec  métathèse  et  suffixation  martienne, 
fr.  bas  au  sens  de  «  dégradé  »  qui  se  dit  des  races 
sauvages.  Très  douteux  :  tous  les  mots  commençant 
par  ,?  sont  des  à-Tia^  presque  indéchilïrables  ;  heureu- 
sement il  n'y  en  a  pas  beaucoup. 

(146)  108°  Zati  «  souvenir  »,  une  fois  :  suggestion 
des  deux  dernières  syllabes  de  myosotis  (vergissmein- 
nicht),  fleur  du  souvenir. 

(147)  109°  Ziné  «  bleu  »,  une  fois  :  peut-être  altéré 
etdérivé  de  Chine,  à  cause  de  la  belle  couleur  bleue  de 
certains  vases  chinois  :  au  surplus,  le  mot  fait  partie 
de  la  phrase  inintelligible  FI.  33. 


—  38  — 

(148)  En  somme,  déduisant  même  tous  les  cas  dou- 
teux, il  semble  qu'un  bon  tiers  du  vocabulaire  mar- 
tien vienne,  par  voie  plus  ou  moins  détournée,  du 
français  seul. 


—  39 


CHAPITRE  V 
Le  Vocabulaire  allemand 

(149i  1°  Andélir  «  apparaîtra  »,  une  fois,  FI.  39. 
Le  mot  a  ici  le  sens  de  «  être  en  relation,  avoir  com- 
merce fréquent  avec  »  :  soit  donc,  avec  semi-calem- 
bour, adaptation  de  l'ai,  handeln  a  traiter,  com- 
mercer »,  que  M^i"  Smith  doit  bien  connaître. 

(150)  2°  Bindié  a  [il]  trouve  »,  une  fois  :  conjugué 
sur  le  radical  de  l'ai,  finden  «  trouver  »,  cf.  n°  8. 
Presque  sûr. 

(151)  3**  Bounié  «  chercher,  [il]  cherche  »,  chacun 
une  fois  :  malgré  ce  qu'il  peut  y  avoir  de  forcé  à  tirer 
deux  mots  martiens  d'un  seul  mot  allemand,  le  rapport 
étroit  de  signification  des  mots  «  trouver  »  et  «  cher- 
cher »  ramène  irrésistiblement  la  pensée  au  même 
\erhe  finden,  mais  cette  fois  sous  sa  forme  de  parti- 
cipe passé  gefunden,  ou  au  substantif  qui  en  est  issu, 

fund  ((  trouvaille  ». 

(152)4°  Cen  «  beau  »  et  cêné  «  belle  »,  chacun  une 
fois  :  al.  schôn  «  beau  ».  Si  l'on  croyait  nécessaire 
d'expliquer  la  mutation  de  la  chuintante  initiale  en 
sifflante,  la  contamination  par  le  mg.  s^é/j  «  beau  »  ne 
soutïrirait  aucune  difficulté.  Sûr, 


—  40  — 

(153)  5°  C/n'nit  a  bague  »,  mot  isolé  :  al.  schm'tt 
«  taille,  coupure  »,  soit  parce  qu'une  bague  semble 
«  couper  »  le  doigt,  soit  à  cause  de  la  a  taille  »  des 
pierres  dont  elle  est  ornée,  etc.  Douteux,  mais  sans 
aucune  importance. 

(154)  6°  Ébanâ  «  lentement  »,  une  fois,  tout  à  la  fin 
(FI.  40),  sans  importance  :  le  sujet  doit  avoir  songé  à 
l'ai,  eben  «  uni  »,  qui  ne  concorde  point  exactement 
pour  le  sens;  toutefois  un  pas  «  égal  »  est  un  pas 
plutôt  «  lent  ». 

(155)  7"  Gudé  «  bons  »,une  fois  :  malgré  le  d,  il  y  a 
plus  de  probabilité  pour  l'ai,  gut  que  pour  l'anglais 
good,  parce  que  la  première  de  ces  langues  doit  être  de 
beaucoup  la  mieux  présente  à  l'esprit  du  sujet, 
cf.  n°  166;  en  tout  cas,  l'emprunt  est  manifeste. 

(156)  8°  Haudan  a  maison  »,  une  fois,  tout  au  début. 
M.Flournoy  fait  observer  avec  beaucoup  de  finesse  que 
Jiaudap.  est  calqué,  consonne  pour  consonne  et  voyelle 
pour  voyelle,  sur  maison.  Mais  cela  ne  nous  empê- 
chera pas  de  reconnaître  dans  la  première  syllabe 
l'ai.  haus.  Quant  au  d  médial,  il  demeure  énigmatique. 

(157)  9°  Hêné  «  s'élever  »,  une  fois  :  al.  hôhe 
«  hauteur  »  et  [sich  er-]hôhen  «  s'élever  »  ;  il  est 
assez  curieux  qu'ici,  contrairement  aux  habitudes  de 
M"^  Smith,  le  pronom  a  se  »  soit  sans  équivalent. 

(158)  10°  lé  et  iée  «  tout,  toute  »,  3  fois;  iéei 
«  toutes  »,  une  fois  :  ce  mot,  qui  a  de  bonne  heure 
remplacé  is  (n°  188),  a  pu  être  abstrait  de  locutions 
al.  très  usuelles  telles  que  werje  «  tous  ceux  qui  », 


—  41  — 

wasje  «  tout  ce  qui  )),etc.,oùye  prend  en  effet  le  sens 
de  «  tout  ».  A  peine  douteux. 

•  (159)  11"  Ilinée  «  reconnue  »,  une  fois,  a  remplacé 
cévouitche  (n°  182)  :  c'est  l'ai,  [sich]  erinnern  «  se 
rappeler  »,  très  peu  altéré  ;  car  r>l  est  de  phonétique 
courante. 

(160)  12°  Imà  «  ciel  »,  une  fois  :  il  est  impossible  de 
méconnaître  l'ai,  himmel. 

(161)  13"  Kirimê  «  prudent»,  une  fois,  eici.pocrimé 
((  science  »,  n"  167  :  les  deux  sens  se  concilieraient 
admirablement  par  un  rapport  avec  l'ai,  hirn  a  cer- 
veau »  ;  mais  le  phonétisme  serait  ici  trop  altéré. 

(162)  14**  Koumé  «  fondre  »,  une  fois.  Il  y  a  homo- 
phonie  parfaite  de  l'ai,  kummev  «  chagrin  »  ;  or,  préci- 
sément, la  phrase  (FI.  8)  est  «  fondre  tout  ton  chagrin  »  : 
la  coïncidence  est-elle  fortuite?  Il  se  peut  que  kummer, 
suggéré  par  l'idée  de  «  chagrin  »,  soit,  si  je  puis  ainsi 
m'exprimer,  parti  trop  tôt  à  la  manière  d'un  ressort 
qui  s'affole,  et  que  dès  lors,  utilisé  pour  exprimer 
«  fondre  »,  il  n'ait  pu  l'être  pour  a  chagrin».  Douteux. 

(163)  15°  Lassuné  et  lassunié  «  approche  »  (impé- 
ratif); lassuné  «  [il]  approche  »;  ilassiiné  «  [je]  m'ap- 
proche »  :  chacun  une  fois.  Ce  mot  est  cruellement 
embarrassant.  On  voit,  d'abord,  que  la  conjugaison 
n'obéit  à  aucune  règle  :  cela  est  vrai  surtout  de  la 
forme  ilassuné,  qui  devrait  être  *lé-lassuné,  n"  32, 1°; 
mais,  à  l'époque  où  elle  est  apparue  (FI.  9),  la  gram- 
maire de  IVI^^*^  Smith  était  encore  tout  à  fait  chaotique. 
Quoi  qu'il  en  soit,  prenant   lass-  comme  radical  du 


—  42  — 

verbe,  on  ne  sait  vraiment  à  quoi  le  rattacher.  En 
désespoir  de  cause,  j'ai  songé  à  une  image  de  piété, 
comme  il  en  existe  beaucoup,  représentant  la  scène 
«  laissez  les  enfants  s'approcher  de  moi  »  :  si  l'inscrip- 
tion de  celle  que  M"^  Smith  a  eue  quelque  jour  sous 
les  yeux  était  rédigée  en  allemand,  elle  commençait 
par  lass-et  [die  kinder...],  et  ce  radical  a  pu  ainsi 
s'associer  à  l'idée  de  s'approcher  ;  mais,  bien  entendu, 
je  ne  donne  la  conjecture  que  pour  ce  qu'elle  vaut. 

(164)  lô**  Mâche  a  [je]  peux  »,  4  fois;  machir  «  pour- 
ras »  et  machiri  a  pourrai  »  (pour  Vi  final,  cf.  le  n**  38, 
2°),  chacun  une  fois.  Le  premier  de  ces  mots  est  sûre- 
ment l'ai,  [ic/i]  mag,  peut-être  contaminé  de  [ic/i] 
mâche,  parce  que  «  pouvoir  »  c'est  généralement 
((  pouvoir  faire  ».  Les  deux  autres  sont  des  formes 
conjuguées,  d'allure  martienne  très  régulière. 

(165)  17°  Mané  a  père  »,  une  fois  :  c'est  l'ai,  mann 
«  homme,  époux  »,  peut-être  avec  une  confusion  par- 
tielle du  radical  de  mima,  n*^  107. 

(166)  18"  Mode  a  mère  »,  14  fois  :  toute  la  question 
n'est  qu'entre  l'ai,  mutter  et  l'anglais  mother,  celui-ci 
mieux  concordant  au  point  de  vue  du  phonétisme, 
celui-là  sûrement  mieux  connu  du  sujet  ;  cf.  n°  155. 
On  observera  que  les  mots  qui  reviennent  le  plus  sou- 
vent sont  aussi,  en  principe,  les  mieux  explicables  par 
un  emprunt  manifeste. 

(167)  19°  Pocrimê  «  savoir  »,  une  fois  :  cf.  kirimé, 
n°  161  ;  mais,  en  tout  cas,  je  ne  vois  absolument  aucune 
clonnée  qui  rende  compte  de  la  préfixation  apparente, 


—  43  — 

(168)  20«  Poênê^é  a  quelques  »,  une  fois.  Ici,  la  pré- 
fixation po-  pourrait  relever  du  procédé  de  l'allitéra- 
.tion,  n°  16;  car  le  mot  (FI.  11)  est  immédiatement 
précédé  du  mot  povini,  cf.  n"  124.  Cette  quantité 
déduite,  il  reste  -énê^éj  qui  s'applique  presque  lettre 
pour  lettre  sur  l'ai,  einige  «  quelques  ». 

il69)  21"  Raddré  «  prononcer  »,  une  fois,  FI.  15, 
dans  une  phrase  où  en  fait  l'emploi  du  verbe  «  parler  » 
conviendrait  beaucoup  mieux  :  al.  reden  «  parler  », 
avec  léger  jargonnement  et  terminaison  martienne; 
presque  sûr. 

(170)  22°  Réniv  «  portera  »,  une  fois,  FI.  18,  dans 
une  phrase  où  le  vrai  sens  est  «  apportera  »  :  futur  mar- 
tien sur  un  radical  rên-,  qui,  sauf  aphérèse  initiale, 
rappelle  de  bien  près  celui  deTaLôrm^-eAi  «apporter». 

(171)  23°  r/6m$  «  besoins  »,  une  fois  :  cf.  l'ai,  trieb 
«  instinct  ».  Les  deux  idées  sont  connexes,  et  la  pho- 
nétique concorde  à  merveille,  sauf  une  métathèse  des 
plus  simples.  Douteux  pourtant  :  le  terme  al.  n'est  pas 
de  ceux  que  M^'«  Smith  a  pu  aisément  connaître  et 
familièrement  retenir. 

(172)  24°  Tournai  «  charmes  »,  une  fois:  cf.  al.  tau- 
mel  «  vertige,  ivresse,  paroxysme  de  joie  ».  Le  pho- 
nétisme  va  bien,  comme  le  montre  imâ  venu  de  himmel, 
n°  160.  Douteux  pourtant  :  il  est  difficile  que  M"«  Smith 
connaisse  ce  mot  peu  usuel. 

{A  suivre)  V.  Henry. 


L'INSCRIPTION  DÉCOUVERTE  EN  1899 

SUR  LE  FORUM  ROMAIN 


C'est  peut-être  une  entreprise  téméraire,  en  tout 
cas  fort  risquée,  que  de  vouloir,  après  tant  de  tenta- 
tives diverses,  ofîrir  une  nouvelle  interprétation,  no- 
tamment une  qui  rejette  beaucoup  de  ce  qui  a  été 
admis  sans  dicussion,  presque  comme  hors  de  doute. 
Mais  dans  un  cas  tel  que  celui-ci, ce  sont  précisément 
les  bases  qu'on  a  crues  inébranlables,  qu'on  a  ac- 
ceptées avant  même  d'avoir  obtenu  une  idée  tant  soit 
peu  préalablement  exacte  des  choses  desquelles  il 
s'agit,  qui  prêtent  le  plus  au  doute.  Une  interprétation, 
qui  veut  approfondir  de  plus  en  plus  la  matière,  se 
trouve  de  plus  en  plus  en  face  de  difTicultés  inéluc- 
tables, et  ce  n'est  qu'après  avoir  essayé  en  vain  tous 
les  expédients  que  la  méthode  philologique  nous  four- 
nit, qu'on  se  résout  en  dernier  lieu  à  revenir  sur  ses 
pas  et  à  retourner  à  l'examen  rigoureux  des  supposi- 
tions fondamentales. 

C'est  du  moins  ce  que  l'expérience  nous  a  fait  voir 
dans  un  certain  nombre  de  cas  semblables,  et  s'il  en 
était  de  même  par  rapport  à  l'inscription  dont  la 
découverte  a,  l'année  passée,  révolutionné  le  monde 


—  45  — 

savant,  et  même  à  un  certain  degré  le  monde  cultivé, 
il  n'y  aurait  pas  lieu  de  s'étonner  grandement. 
•  Je  veux  donc  offrir  mes  remarques,  mes  doutes,  mes 
objections  sur  certains  points  qui,  pour  l'entendement 
de  ces  textes  si  mutilés,  et  par  conséquent  si  obscurs, 
pourront  être    de    quelque  importance. 

En  premier  lieu,  tout  le  monde  à  peu  près  semble 
être  d'accord  qu'il  faut  lire  slakros  esed,  et  que  cela 
doit  signifiera  peu  prèssacer  estod,  formule  ailleurs  très 
usitée.  Or,  il  me  semble  impossible  d'admettre  que 
même  au  Vl''  siècle  on  ait  dit  sacros  ;  superflu  de  rien 
dire  par  rapport  à  esed.  Je  m'inclinerais  devant  l'opi- 
nion des  savants  célèbres  (à  juste  titre),  qui  admettent 
cette  interprétation,  si  le  motso?vi...  précédait;  parce 
qu'on  ne  prononce  rimprécation  qu'après  en  avoir 
indiqué  le  motif  qui  la  justifie.  Ici,  ce  serait  le  con- 
traire. Parcelle  raison, j'interprète  les  \eUres akro sesed 
comme  signifiant  :  agru[m]  seret  «  celui  qui  ensemen- 
cera ce  champ».  11  s'agit  évidemment  d'un  fonds  sacré 
d'un  T£(jL£voç,  qu'on  avait  l'habitude  de  fermer.  On 
pourrait  donc  combler  les  lacunes  à  peu  près  de  la 
manière  suivante  : 

quoi  hoi[ke  loqoi 

seive  keivis  seive 

perekrinus]  akrom[m] 

sesed  —  ou 

quoi  hon[ke  s.  k.  s.  p.]  akrofm]  sesed 

sordes  ne  invehitod... 


—  46  — 

La  première  ligne  du  second  pian  reste  inintelli- 
gible; la  seconde  ofl're  selon  l'interprétation  recei; 
mais  cela  eneore  est  très  douteux,  parce  qu'il  serait 
infiniment  ditïicile  de  se  rendre  compte  du  datif.  Je 
crois  donc  que  le  c  n'est  autre  chose  qu'un  V  mis  de 
travers,  et  je  lis  reveitor  (revehitor)  :  re[x]  vehitor.  Les 
lettres  evam  se  complètent  par  l'addition  d'un  d  :  devam 
{=  divam);  je  ne  dirais  rien,  s'il  y  avait  une  lacune 
après  ce  mot;  mais  tel  que  l'inscription  nous  l'oflre, 
il  précède  immédiatement  quos  et  finit  la  phrase.  Je 
complète  donc  a  dextera  ad  laevam.  Quos  r[ex] 
quomque...  manque  un  verbe  :  proficiscetur  ;  quos 
paraît  être  le  prototype  de  us  dans  usquamj)rodibit. 

Pour  le  commencement  du  troisième  plan,  j'accepte 
la  conjecture  de  M.  Modestov  (V.  J.  Modestov,  Pamja- 
linki  carskagn  perioda  i  pervnëjmja  iatinskaja  nadpist 
na  Rimskom  i  Porumë  Skl-Peterburgi,  1900). 
sovo]m  kalatorem  hap...  (habelod). 

La  troisième  ligne  nous  ofîre  uod,  donc  je  risque  : 
makistratluod  iouxmenta... 

Plus  loin,  il  y  a  évidemment  confusion;  les  lettres 
lod  ont  changé  de  direction,  il  faut  lire  ou  captafod  ou, 
ce  qui  vaut  mieux,  capitod  ;  le  a  a  été  répété  fauti- 
vement. Au  représente  les  premières  lettres  de  au- 
ri(ja[m. 

. .  .sovo]  kalatorem  hap[etod. . . 

macistrat]  uod  iouxmenta  capitod  au!  rigam  currum 
ite]m  iteri  [...ipso]m  quoi. 


—  47  - 

havelod  ne  signitie  rien,  et  facelod  autant  que  cela. 
II  y  a  ici  encore  transposition  des  lettres;  je  corrige 
■avehitod  nef/u[e...]od  iovestod  (iusto). 
On  pourrait  conjecturer  : 
neque  in  ea  re  plus  morae  esltod  iovestod. 
Mais  cela  est  entièrement  incertain. 
Je  donne  l'inscription  dans  son  entier,  comme  il 
me  paraît  qu'il  faut  la  lire  : 

quoi  lioi  |ke  loquoi  seive  keivis  seive  perekrinusj 
akro[mj  sesed  |  ou 

quoi  hon  [ke  seive  keivis  seive  perekrinus]  akro[m| 
sesed  |  sord  [es  ne  invehitod...  (fin  de  la  première 
inscription  qui  ne  se  rapporte  pas  à  ce  qui  suit). 

reve[h]itor  (probablement  rea;  vehilor)... 

|...a  dextera  ad  lajevam  | 

quos  r[ex  quomque...  (quo  rex  quomque)  [proficis- 
cetur 

...sovoJm  kalatorem  liap..* 

...makistratluod  iouxmen 

ta  kapitod  au[rigam  currum  ite-] 

m  iteri... 

...ipso^m  quoi  avehitod  nequ[e  in  ea  re  plus  morae 
est]  od  iovestod . 

L'inscription  du  premier  plan  n'a  pas  trait  au  con- 
tenu du  reste  de  la  stèle;  on  s'est  simplement  servi 
d'une  pierre  déjà  employée,  parce  que  les  trois  côtés 
suffisaient  pour  y  graver  la  seconde  inscription. 

On  élèvera  probablement  des  objections  contre  lac- 


—  48  — 

vam,  au  lieu  de  laivam  ;  mais  devam  est  absolument 
impossible.  Il  ne  reste  donc  guère  que  laevam;ae  au 
lieu  de  ai  se  trouve  déjà  fort  anciennement. 

A.  F.    BOJESLAV. 

P. -S.  —  Il  est  assez  clair  que  le  maçon  qui  a  taillé 
l'inscription  trouvée  l'année  dernière  au  forum,  n'a  pas 
été  bien  exercé  à  graver  les  lettres  à  la  boustrophédon. 
Témoin  les  lettres  kap{i1)atodou,  où  tod  est  gravé  à 
l'envers;  peut-être  aussi  il  y  a  une  espèce  de  dittogra- 
pbie  kapiat  kapilod,  mais  il  est  vrai  qu'il  aurait  dû 
graver  dot  et  non  toda{i)pak;  témoin  encore  les  lettres 
havelod,  si  étrangement  bousculées  (ou  ilia  \  dotev). 

Plus  d'une  fois  il  a  renversé  les  lettres,  probablement 
parce  qu'il  s'élait  placé  faussement. 

Si  nous  tenons  compte  de  ces  faits,  il  se  pourrait 
que  la  même  chose  fût  arrivée  par  rapport  à  la  pre- 
mière ligne  du  second  plan,  qui  présente,  à  ce  qu'il 
paraît,  des  difficultés  insurmontables.  D'après  le  der- 
nier facsimile  de  M.  Comparetti,  il  faut  lire  (premier 
trait  presque  vertical  incertain,  pourrait  être  un  i)  laiFas 
(le  F. étant  tourné  de  l'autre  côté):  serait-ce  laivas'^ 
Alors,  il  ne  serait  plus  douteux  que,  malgré  la  diffé- 
rence d'orthographe,  les  lettres  evam  de  la  troisième 
ligne  ne  dussent  se  compléter  par  la{evam).  Mais  on 
pourrait  aussi,  sans  faire  un  trop  grand  tort  au  maçon, 
lire  amas  /serait-ce  la  porte  Naevia?  Malheureusement 
nous  en  savons  fort  peu  de  chose. 


-  49  - 

Dans  ce  qui  suit,  nous  n'avons  que  lo  et  (/nos  sur 
quoi  fonder  des  hypothèses.  Si  nous  acceptons  regei, 
il  faut  bien  qu'il  s'agisse  ici  d'un  affermage  de  quelques 
terres,  car  lo  exige  un  complément  candi  (fundi  agri), 
à  quoi  se  rapporterait  quos  dans  la  quatrième  ligne. 
Mais  pour  cela,  on  s'attendrait  plutôt  à  un  praeco  qu'à 
un  calaior.  Il  serait  donc  nécessaire  de  séparer  le 
contenu  du  3'  et  du  4e  plan  de  celui  du  1<^''  et  du  t\ 
Le  2^  plan  aurait  trait  à  certaines  terres,  dont  l'affer- 
mage entrait  dans  la  sphère  du  rex  sacrorum;  ces  terres 
devaient  être  situées  près  de  la  porte  Naevia. 

A.  F.  B0JESLA.Y. 

2l*P.-S. — On  pourrait  lire  sur  le  premier  plan  «akros 
seset  »,  ce  qui  s'accorderait  bien  avec  le  «  quos  »  du 
second  plan. 

Au  lieu  de  «  magistratuod  »  (le  Y  se  trouve  très 
clairement  sur  le  dernier  facsimile)  on  pourrait  sup- 
poser «  senatuod  »,  parce  que  «  magislratus  »  serait 
trop  indéfini. 

Pour  AKPOS,  je  suppose  que  c'est  la  transcription 
de  ACROS,  en  lettres  grecques,  peut-être  même  un 
archaïsme  voulu. 

Prague. 

A.    F.    BOJESLAV. 


ÉTUDE  DE  LA  LANGUE  DES  POULS 


SUITE 


LE    SUBSTANTIF 


En  poul,  le  substantif,  on  l'a  dit,  n'est  générale* 
ment  pas  autre  chose  qu'un  adjectif  puis  substantive- 
ment. 

Or,  l'adjectif,  de  son  côté,  n'est  leplus  souvent  qu'un 
participe  plus  ou  moins  défiguré  d'un  radical  verbal 
plus  ou  moins  tombé  en  désuétude  :  pour  démontrer 
cette  assertion  et  faire  concevoir  en  même  temps  le 
mécanisme  des  tranformations  successives,  le  meilleur 
moyen  consistera  à  insister  sur  la  genèse  des  trente- 
trois  formes  des  participes  en  do,  des  noms  verbaux 
en  owo  et  en  edjo,  tout  en  montrant  la  corrélation  ré- 
gulière qui  existe  entre  ces  deux  catégories  de  mots 
et  la  précédente  au  point  de  vue  des  suffixes  ;  puis  de 
faire  connaître  les  adjectifs  en  o  restés  seuls  en  usage 
de  leur  famille,  mais  présentant  encore  une  vitalité 
telle  que,  par  un  curieux  phénomène  de  réversibilité, 
ils  l'ont  en  quelque  sorte  perpétuée  à  leur  tour,  en 
donnant  naissance  à  de  nouveaux  radicaux  verbaux 
au  moyen  de  la  dérivation  en  di 


—  51  —, 

Enfin  on  passera  à  l'étude  des  substantifs  eux- 
mêmes. 

Hâtons-nous  de  dire  que  bien  des  questions  reste- 
ront sans  réponses. 

Il  nous  suffira  d'avoir  montré  d'une  manière  que 
nous  croyons  irréfutable,  que  les  Pouls,  non  plus  que 
bien  d'autres  peuples,  ne  font  rien  ni  pour  la  rime  ni 
pour  l'harmonie.  Ils  se  contentent  de  l'euphonie  et 
font  purement  accorder  substantifs,  adjectifs,  parti- 
cipes et  pronoms  en  genre  et  en  nombre. 

Dans  le  tableau  qui  suit,  on  donne  les  trente-trois 
formes  : 

1°  Des  participes  ou  adjectifs  prenant  doau  genre  o, 
en  tenant  compte  des  modifications  que  peut  subir  le 
suffixe,  selon  que  la  forme  qui  le  reçoit  se  termine  par 
une  des  consonnes  b,  d,f,  g/,  y,  dj,  k,  I,  m,  n,  p, 
r,  s,  t,  IV,  tch,  gn,  ou  par  la  voyelle  sourde  euphonique 
ou; 

2°  Des  adjectifs  verbaux  actifs  en  owo,  passifs  en 
édjo  ; 

3"  Des  adjectifs  prenant  simplement  o  au  môme 
genre. 

On  peut  dire  que  sauf  ma"-  (grand),  dont  les 
formes  sont  indiquées  à  la  vingt-deuxième  ligne  du 
tableau,  et  qui  n'est  d'ailleurs  irrégulier  qu'en  appa- 
rence, tous  les  adjectifs  de  la  langue  rentrent  dans  une 
de  ces  trois  catégories. 


52 


RACINE 

SENS 

(■)      0 

BÉ 

Web- 

facile 

beb-do 

web-bé 

Wad- 

faisant 

bad-do 

wad-bé 

Yaf- 

mou 

djaf-do 

yaf-bé 

Dog- 

courant 

dog-do 

dog-bé 

Fa'- 

allant  vers 

pa'-do 

fa'-bé 

May- 

mort 

may-do 

may-bé 

Tadj- 

coupant 

tag-do 

tag-bé 

Sek- 

déchirant 

tchek-do 

sek-bé 

Wel- 

plaisant 

bel -do 

wel-bé 

Bani- 

prenant 

bam-do 

bam-bé 

'An- 

embarrassé 

gan-do 

*an-bé 

Fap- 

pétant 

pap-do 

fap-bé 

'Ar- 

venant 

gar-do 

'ar-bé 

Was- 

s'abstenant  de 

bas-do 

was-bé 

Hot- 

partant 

kot-dô 

hot-bé 

Waw- 

pouvant 

baw-do 

waw-bé 

'Ang- 

haïssant 

gagn-dô 

'agn-bé 

Wod-é 

rouge  (originel"'  ) 

bodé-djo 

wodé-bé 

Wod-djou- 

rouge  (devenu) 

god-djou-do 

woddjou-bé 

Modj- 

bon 

modj-o 

modj-oubé 

Rim- 

libre 

dim-o 

rim-bé 

•Ma- 

grand 

maw-do 

maw-bé 

Hatch- 

hurlant 

kak-do 

hak-bé 

Sel- 

dissident 

tchebo-wo 

sel-o-bé 

—  53  — 


(«)    NDOU 

DI 

(3)    NGUÉ 

DI 

wem-dou 

beb-di 

weragué 

beb-di 

wandou 

bad-di 

wangué 

bad-di 

yaf-ndou 

djaf-di 

yaf-ngué 

djaf-di 

dog-ndou 

dog-di 

dog-ngué 

dog-di 

fa'-ndou 

pa'-di 

fa*-ngué 

pa'-di 

may-ndou 

may-di 

may-ngué 

may-di 

tag-ndou 

tag-di 

tagngué 

tag-di 

sek-ndou 

tchek-di 

sek-ngué 

tchek-di 

wel-ndou 

bel-di 

welngué 

bel-di 

bam-ndou 

bam-di 

bara-ngué 

bam-di 

*an-ndou 

gan-di 

'an-ngué 

gan-di 

fap-ndou 

pap-di 

fap-ngué 

pap-di 

'ar-ndou 

gar-di 

'ar-ngué 

gar-di 

was-ndou 

bas-di 

was-ngué 

bas-di 

ho-ndou 

kot-di 

hongué 

kot-di 

waw-ndou 

baw-di 

waw-ngué 

baw-di 

*agn-ndou 

gagn-di 

'agn-ngué 

gagn-di     ^ 

wodé-rou 

bodéjdji 

wodé-wé 

bodé-dji 

woddjou-ndou 

goddjou-di 

woddjou-ngué 

goddjou-di 

modj-ourou 

raodj  i 

modj-*é 

modj-i 

rim-rou 

dim-i 

rim-'é 

dim-i 

maw-ndou 

niaw-di 

ma* -n  gué 

maw-di 

kak-ndou 

kak-di 

hak-ngué 

kak-di 

sel  o-rou 

tchel-o-dji 

sel-o-wé 

tchel  o-dji 

—  54  - 


(4)     NGO 

DÉ 

(5)     NDÉ 

DÉ 

wemgo 

beb-dé 

wemdé 

beb-dé 

wango 

bad-dé 

wandé 

bad-dé       , 

yaf-ngo 

djaf-dé 

yof-ndé 

djaf-dé 

dog-ngo 

dog-dé 

dog-ndé 

dog-dé 

fa'-ngo 

pa'-dé 

fa'-ndé 

pa*-dè 

may-ngo 

may-dé 

may-ndé 

may-dé 

tagngo 

tag-dé 

tagndé 

tag-dé 

sek-ngo 

tchek-dé 

sek-ndé 

tchek-dé 

wel-ngo 

bel-dé 

wel  ndé 

bel-dé 

bam-  ngo 

bani-dé 

bam-ndé 

bam  dé 

*an-ngo 

gan-dé 

*an-dé 

gan-dé 

fap-ngo 

pap-dé 

fap-ndé 

pap-dé 

*ar-ngo 

gar-dé 

'ar-ndé 

gar-dé 

was-ngo 

bas-dé 

was-ndé 

bas-dé 

hongo 

kot-dé 

hondé 

kot-dé 

waw-ngo 

baw-dé 

waw-ndé 

baw-dé 

'agn-ngo 

gagn-dé 

'agn-ndé 

gaga-dé 

wodé-wo 

bodé-djé 

wodé  ré 

bodé  djé 

woddjou  ngo 

goddjou-dé 

woddjou-ndé 

goddjou-dé 

modj-'o 

modj-é 

modj-éré 

modj-é 

rim-*o 

dim-é 

rim-ré 

dim-é 

ina*-ngo 

maw-dé 

maw-ndé 

maw-dé 

hak-ngo 

kak-dé 

hak-ndé 

kak-dé 

pel-o-wo 

tchel-o-djé 

selo-rô 

tchel-o-djé 

55  — 


(G)       KO 

DÉ 

(7)    NGOU 

DI 

web-ko 

bed-dé 

bemgou 

bel-di 

wad-ko 

bad-dé 

bangou 

bad-di 

yaf-ko 

djaf-dé 

djaf-ngou 

djaf-di 

dog-ko 

dog-dé 

dog-ngou 

dog-di 

fa'-ko 

pa'-dé 

pa'-ngou 

pa*-di 

may-ko 

may-dé 

may-ngou 

may-di  ■ 

tag  ko 

tag-dé 

tagngou 

tag-di 

sek-ko 

tchek-dé 

tchek-ngou 

tchek-di 

wel-ko 

bel-dé 

bel-ngou 

bel-di 

bam-ko 

bam-dé 

bam-ngou 

bam-di 

*an-ko 

gan-dé 

gan-ngou 

gan-di 

fap-ko 

pap-dé 

pap-ngou 

pap-di 

'ar-ko 

gar-dé 

gar-ngou 

gar-di 

was-ko 

bag-dé 

bas-ngou 

bas-di 

hot-ko 

kot-dé 

kongou 

kot-di 

waw-ko 

baw-dé 

baw-ngou 

baw-di 

'agn  ko 

gagn-dé 

gagn-ngou 

gagn-di 

wodé-ko 

bodé-djé 

bodé-wou 

bodé-dji 

woddjou-ko 

goddjou-dé 

woddjou-ngou 

goddjou-di 

modj-(h)o 

modj-é 

modj-'ou 

modj-i 

rim-(h)o 

dim-é 

dim-'ou 

dim-i 

maw-ko' 

maw-dé 

ma'-ngou 

maw-di 

hak-ko 

kak-dé 

kak-ngOLi 

kok-di 

sel-o-ho 

tchel-o-djé 

tchel-o-wou 

tchel-o-dji 

—  56 


(H)       BA 

DI 

(O)    NGOL 

DI 

beb-ba 

beb-di 

bemgol 

beb-di 

bad-ba 

bad-di 

bangol 

bad-di 

djaf-ba 

djaf-di 

djaf-ngol 

djaf-di 

dog-ba 

dog-di 

dog-ngol 

dog-di 

pa'-ba 

pa'-di 

pa'-ngol 

pa-'di 

may-ba 

may-di 

may-ngol 

may-di 

tag-ba 

tag-di 

tagngol 

tag-di 

tchek-ba 

tchek-di 

tchek-ngol 

tchek-di 

bel-ba 

bel-di 

bel-ngol 

bel-di 

bam-ba 

bam-di 

bam-ngol 

bam-di 

gan-ba 

gan-di 

gan-ngol 

gan-di 

pap-ba 

pap-di 

pap-ngol 

pap-di 

gar-ba 

gar-di 

gar-ngol 

gar-di 

bas-ba 

bas-di 

bas-ngol 

bas-di 

kot-ba 

kot-di 

kongol 

kot-di 

baw-ba 

baw-di 

baw-ngol 

baw-di 

gagn-ba 

gagn-di 

gagn-ngol 

gagn-di 

bodé-wa 

bodé-dji 

bodé-wol 

bodé-dji 

goddjou-ba 

goddjou-di 

goddjou-ngol 

goddjou-di 

modj-'à 

modj-i 

modj-'ol 

modj-i 

dim-*à 

dim-i 

dim-'ol 

dim-i 

maw-ba 

maw-di 

ma'-ngol 

maw-di 

kak-ba 

kak-di 

kak-ngol 

kak-di 

tcbel-o-wa 

tchel-o-dji 

tchel  o-wol 

tchel-o-dji 

—  57  — 


(iO)    NDI 

DÉ 

(11)     Kl 

DÉ 

bemdi 

beb-dé 

beb-ki 

beb-dé 

bandi 

bad-dé 

bad-ki 

bad-dé 

djaf-ndi 

djaf-dé 

djaf-ki 

djaf-dé 

dog-ndi 

dog-dé 

dog-ki  , 

dog-dé 

pa'-ndi 

pa'-dé 

pa-'ki 

pa-'dé 

may-ndi 

may-dé 

may-ki 

raay-dé 

tagndi 

tag-dé 

tag-ki 

tag-dé 

tchek-ndi 

tchek-dé 

tchek-ki 

tchek-dé 

bel-ndi 

bel -dé 

bel-ki 

bel- dé 

bam-ndi 

bam-dé 

bam-ki 

bam-dé 

gan-ndi 

gan-dé 

gan-ki 

gan-dé 

pap-ndi 

pap-dé 

pap-ki 

pap-dé 

gar-ndi 

gar-dé 

gar-ki 

gar-dé 

bas-ndi 

bas-dé 

bas-ki 

bas-dé 

kondi 

kot-dé 

kot-ki 

kot-dé 

baw-ndi 

baw-dé 

baw-ki 

baw-dé 

gagn-ndi 

gagn-dé 

gagn-ki 

gagn-dé 

bodé-ri 

bodé-djé 

bodé-ki 

bodé-djé 

goddjou-ndi 

goddjou-dé 

goddjou-ki 

goddjou-dé 

modj  iri 

modj-é 

modj-(h)i 

modj-é 

dim-ri 

dim-é 

dim-(h)i 

dim-é 

raaw-ndi 

mow-dé 

maw-ki 

maw-dé 

kak-ndi 

kak-dé 

kak  ki 

kak-dé 

tchel-o-ri 

tchel-o-djé 

tchel-o-hi 

tchel-o-djé 

(I«)    KA 

DÉ 

(13)  DAM 

DÉ 

beb-ka 

beb-dé 

beb-dam 

beb-dé 

bad-ka 

bad-dé 

bad-dam 

baddé 

djaf-ka 

djof-dé 

djaf-dam 

djaf-dé 

dog-ka 

dog-dé 

dog-dam 

dog-dé 

pa'-ka 

pa'-dé 

pa'-dam 

pa'-dé 

may-ka 

may-dé 

may-dam 

may  dé 

tag-ka 

tag-dé 

tag-dam 

tag-dé 

tchek-ka 

tchek  dé 

tchek-dam 

tchek-dé 

bel-ka 

bel-dé 

bel-dam 

bel-dé 

bam-ka 

bam  dé 

bam-dam 

bam-dé 

gan-ka 

gan-dé 

gan-dam 

gan-dé 

pap-ka 

pap-dé 

pap-dam 

pap-dé 

gar-ka 

gar-dé 

gar-daru 

gar-dé 

bas-ka 

bas-dé 

bas-dam 

bas-dé 

kot-ka 

kot-dé 

kot-dam 

kot-dé 

baw-ka 

baw-dé 

baw-dam 

baw  dé 

gagn-ka 

gagn-  dé 

gagn-dam 

gagn-dé 

bodé-ha 

bodé-djé 

bodé-djam 

bodé-djé 

goddjou-ka 

goddjou-dé 

goddjou-dam 

goddjou-dé 

niodj-(h)a 

modj-é 

modj-am 

modj-é 

diin-(h)a 

dim-é 

dim-am 

dim-é 

maw-ka 

maw-dé 

maw-dam 

maw-dé 

kak-ka 

kak-dé 

kak-dam 

kak-dé 

tchel-o-ha 

tchel-o-djé 

tchel-o-djam 

tchel-o-djé 

—  59  — 


(14)  NGAL 

DÉ 

(15)    DÉ 

DÉ 

bemgal 

beb-dé 

beb-dé 

beb-dé 

bangal 

bad-dé 

bad-dé 

bad-dé 

djaf  ngal 

djaf-dé 

djaf-dé 

djaf-dé 

dog-ngal 

dog-dé 

dog-dé 

dog-dé 

pa*-ngal 

pa'-dé 

pa'-dé 

pa'-dé 

may-ngal 

may-dé 

may-dé 

may-dé 

tagngal 

tag-dé 

tag-dé 

tag-dé 

tchek-ngal 

tchek-dé 

tchek-dé 

tchek-dé 

bel -ngal 

bel-dé 

bel-dé 

beldé 

bam-ngal 

bam-dé 

bam-dé 

bam-dé 

gan-ngal 

gan-dé 

gan-dé 

gan-dé 

pap  ngal 

pap  dé 

pap-dé 

pap-dé 

gar-ngal 

gardé 

gar-dé 

gar-dé 

bas-ngai 

bas -dé 

bas-dé 

bas-dé 

kongal 

kotdé 

kot-dé 

kot-dé 

baw-ngal 

baw-dé 

baw-dé 

baw-dé 

gagn-ngal 

gagn-dé 

gagn-dé 

gagn-dé 

bodé-wal 

bodé-djé 

bodé  djé 

bodé-djé 

goddjou-ngal 

goddjou-dé 

goddjou-dé 

goddjou-dé 

modj-'al 

modj-é 

modj-é 

modj-é 

dim-'al 

dim-é 

dim-é 

dim-é 

ma* -ngal 

naw-dé 

maw-dé 

maw-dé 

kak-ngal 

kak-dé 

kak-dé 

kak-dé 

tchel-o-wal 

tchel-o-djé 

tchel-o-djé 

tchel-o-djé 

60  — 


(10)NGUEL 

KOGN 

(■7)  DOUM 

bemguel 

beb-kogn 

beb-doum 

banguel 

bad-kogn 

bad-doum 

djaf-nguel 

djaf-kogn 

djaf-doum 

dog-nguel 

dog-kogn 

dog  doum 

pa'-nguel 

pa'-kogn 

pa'-doum 

may-nguel 

may-kogn 

may-doum 

tagnguel 

tag-kogn 

tag-doum 

tchek-nguel 

tchek-kogn 

tchek-doum 

bel-nguel 

bel-kogn 

bel-doum 

bam-nguel 

bam-kogn 

bam-doum 

gan-nguel 

gan-kogn 

gan-doum 

pap-nguel 

pap-kogn 

pap-doum 

gar-nguel 

gar-kogn 

gar-doum 

bas-nguel 

bas-kogn 

bas-doum 

konguel 

kot-kogn 

kot-doum 

baw-nguel 

baw-kogn 

baw-doum 

gagn-nguel 

gagn-kogn 

gagn-doum 

bodé-wel 

bodé-kogn 

bodé-oum 

goddjou-nguel 

goddjou-kogn 

goddjou-doum 

modj-'el 

modj-(h)ogn 

modj-oum 

dim-'el 

dim-(h)ogn 

dim-oum 

ma'-nguel 

maw-kogn 

maw-doum 

kak-nguel 

kak-kogn 

kak-doum 

tchel-o-wel 

tchel-o-koga 

tchel-o-djoum 

—  61  — 

Il  suffit  de  jeter  les  yeux  sur  le  tableau  qui  précède 
pour  se  convaincre  que  les  trente-trois  formes  de 
chacun  des  participes  en  do  résultent  de  la  simple 
suffixation  à  la  forme  verbale  d'où  ils  émanent  des 
trente-trois  démonstratifs. 

Sauf  toutefois  en  ce  qui  concerne  le  premier  genre:  ici 
le  suffixe  est  do  et  non  o. 

Les  participes  passés  en  nô-dose  conduisent  comme 
fjod-djou-do. 

Comme  particularités,  remarquons  : 

a)  Les  formes  des  participes  iveb-,  wad-,  et  hot- 
aux  genres  dont  les  démonstratifs  présentent  un  n 
initial. 

b)  Les  formes  des  participes  tadj-  eihatch. 

La  finale  de  ces  radicaux  reparaît  dans  toute  sa 
pureté  lorsque  les  éléments  à  suffixer  commencent 
par  une  voyelle. 

Exemple  : 

mi    tadj-at     ho'' ré  inodoum 

Je    couperai     sa  tête 

Djamma    kala    di  katch-onnô 

Chaque    nuit      ils         hurlent 

c)  Les  formes  prises  par  l'adjectif  î/iaî<;-,?wa' «grand», 
qui  prend  le  "  comme  consonne  de  fermeture,  chaque 
fois  que  le  suffixe  commence  par  ng  et  le  w  dans  tous 
les  autres  cas. 

En  ce  qui  concerne  les  noms  verbaux  en  owo  et 


—  62  — 

edjo^  disons    d'abord   que  pour  toutes  les  formes 
en 

-edjo-  -edji'  -édjé-  -edjam- 

-edjoum-       -odji-  -odjê-  -odjoum- 

on  emploie  souvent  des  formes  en 

-éwo-        -éwi-        -êwé-  -éwam-  -êwoum- 

-owi-        ~owê-      -owoum- 

Ainsi  on  dit  presque  aussi  sou\  eni  dé/te  bod-éivé  «des 
livres  rouges  »  que  défté  bod-édje. 

Mais  les  formes  du  tableau  sont  plus  usuelles. 

Quant  aux  autres  désinences  de  ces  adjectifs,  il  est 
intéressant  de  remarquer  qu'elles  ne  diffèrent  de 
celles  des  démonstratifs  que  par  leur  initiale; 

Que  du  reste  cette  consonne  est  toujours  la  première 
de  la  paire  à  laquelle  appartient  celle  du  démonstratif 
(abstration  faite  de  1'^  proclitique). 

Ainsi  : 

à  ndi  correspond  tchel-o-ri 

à  ngoit  correspond  bod-ê-wou 

Ici  encore  tout  est  donc  réglé,  et  cette  transforma- 
tion vraiment  grammaticale  montre  bien  qu'en  em- 
ployant les  terminaisons  que  nous  examinons,  le  Poul 
n'obéit  pas  à  un  besoin  de  son  oreille,  mais  qu'à 
chaque  moment  de  son  discours,  il  veut  déterminer 
chaque  objet  dont  il  parle,  et  rapprocher  le  plus  pos- 
sible les  limites  entre  lesquelles  peut  flotter  l'indéci- 
sion de  son  interlocuteur  ;  lorsque  celui-ci  entendra  : 


—  63  — 

icod-é-rou,  il  saura  parfaitement  qu'il  ne  s'agit  pas 
d'un  cheval  (poutchou-ngou  «  ce  cheval  »)  mais  proba- 
blement d'un  chien  {raw'a-ndou  ndou  «  ce  chien  »)  ou 
de  tout  autre  objet  du  genre  ndou;  —  de  même  bod- 
éivoun'é\e\\]e  dans  son  esprit  que  l'idée  d'un  objet  du 
genre  ngou,  d'un  cheval  par  exemple. 

Pour  rendre  aux  terminaisons  des  adjectifs  en  o 
(modj,  rim)  leur  véritable  valeur,  il  ne  faut  pas  perdre 
de  vue  les  suffixes  de  ces  adjectifs  aux  genres  ndou^ 
ndé,  ndi. 

Comment  se  produit-il  qu'à  ces  trois  genres  la  con- 
sonne du  suffixe  se  soit  conservée  sous  la  forme  d'un  r? 

Pourquoi  arrivera-t-il  presque  toujours  que  l'on 
dira  :  ley-di  modj-irl  «  bonne  terre  «  ;  quelquefois 
ley-di  modj-o  (Wolofs-Soninkés  parlant  poul),  mais 
jamais  ley-di  modj-i? 

Il  y  a  là  une  probabilité  énorme  à  priori  pour  que 
les  autres  suffixes  n'aient  pas  plus  perdu  leur  con- 
sonne initiale  que  les  trois  suffixes  considérés. 

Matériellement  le  fait  n'est  pas  impossible.  La  con- 
sonne g  prend  bien  souvent  la  place  de  celte  consonne 
le  plus  souvent  presque  insensible,  absolument  insen- 
sible dans  le  dialecte  du  Fouta,  que  nous  avons  notée 
par  le  signe  '. 

On  a  établi  une  parenté  étroite  entre  le  b  et  le  g.  Le 
suffixe  ha  a  très  bien  pu  devenir  'a  dans  certaines  cir- 
constances. 

La  consonne  k  de  ko,  ki,  ka,  kogn  peut  très  bien 


—  64  — 

disparaître  pour  faire  place  à  un  h,  dont  les  mêmes  gens 
du  Fouta  articulent  presque  aussi  peu  l'aspiration  que 
celle  du  '. 

A  l'Est,  où  les  Pouls  guerriers  du  Macina,  de  Sokoto, 
de  Gando,  hennissent  leur  langue  presque  comme  les 
Arabes  hennissent  la  leur,  on  entend  toutes  les  finales 
précédées  de  leur  aspiration  gutturale  ou  palatale,  ou 
encore  d'une  consonne  appartenant  à  la  môme  paire 
que  cette  aspiration  :  là  où  le  Foutanké  dit  houd-o  ko 
«  cette  herbe»,  le  Masinanké  aspire  foud-lio  ko. 

Le  Poul  pasteur  du  Sénégal  dit  lel-a  ha  «  cette 
gazelle  »  ;  le  marabout  du  Niger  rétablit  lel-wa  ba. 

Ces  exemples  sont  assez  concluants. 

Et  il  est  une  raison  qui  prime  toutes  les  autres  : 
Quoique  rimant  ensemble,  7igou  et  ndou  ne  sont  pas 
interchangeables  à  volonté.  Jamais  on  ne  dira  :  lana 
ba,  mais  lana  ka«  ce  bateau  »  ;  jamais  on  ne  dira  gniwa 
ka,  mais  gnnva  ba  «  cet  éléphant»;  jamais  on  ne 
dira  wouro  ko,  mais  wouro  ngo  «  ce  village  »  ;  jamais 
on  ne  dira  lonro  ngo,  mais  louro  ko  «  ce  trou  ». 

Il  y  a  là  autre  chose  qu'une  rime.  On  doit  être 
certain  que  dans  le  principe,  chaque  genre  a  du  em- 
brasser une  catégorie  bien  déterminée  d'individus  ou 
d'objets  jouissant  de  propriétés  communes. 

L'étude  qui  va  suivre  mettra  ces  propriétés  en  lu- 
mière, tout  au  moins  pour  quelques-uns  de  ces  genres. 

Il  y  aura  de  nombreuses  lacunes. 

On  a  déjà  fait  pressentir  que  bien  des  questions 


—  05  — 

resteront  sans  réponse,  mais  celles  qui  seront  résolues 
le  seront  d'une  manière  si  décisive  que  l'on  ne  pourra 
attribuer  l'incertitude  qui  plane  sur  les  autres  qu'aux 
dénaturations  de  sens,  inévitables  dans  la  langue  qui 
n'a  jamais  été  fixée  par  l'écriture. 

Chacun  des  genres  sera  étudié  séparément.  On  ne 
suivra  pas  dans  cet  exposé  l'ordre  institué  dans  la 
\'^  partie  :  dans  l'étude  de  la  phonétique  les  genres 
ont  été  groupés  de  manière  à  rendre  lucide  l'exposition 
des  lois  de  permutation  des  consonnes  en  poul,  à  un 
point  de  vue  purement  abstrait. 

Pour  constituer  le  nouveau  classement,  on  remar- 
quera que  tous  les  démonstratifs  ont  pour  consonne 
initiale  : 

soit  '  ou  rien,  g,  b 
soit  d 

soit  k 

en  faisant  abstraction  de  la  nasale  proclitique  parasite. 

On  fera  de  ces  particules  trois  classes,  la  première 
éonliendra  : 

pluriel  bé  ou  di 

nrjou  di 

ha  di 

nguê  di 

nrjol  di 

ngo  dé 

tigal  dé 
nguct  pluriel    liofin 


—  66- 

La  seconde  compreiidra  : 

ndou  di 

dé  di  ou  dé 

ndé  dé 

ndi  dé 

dam  dé 

doum  doum 

La  troisième  comprendra  les  genres  : 

ko  di 

ka  dé 

ki  dé 

On  se  réserve  de  faire  voir  autre  part  que  celle 
classification  n'a  rien  d'arbitraire  et  que  chacune  de 
ces  trois  classes  de  genres  correspond  à  une  des  trois 
racines  : 

1°    *a    ou     wa,     ba    ou    ga 
2°    y  a  dja 

3°     ha  ka 

chacune  de  ces  trois  racines  ayant  ou  ayant  eu  dans 
l'origine  le  sens  de  «  être  »,  mais  avec  une  nuance 
spéciale. 

L'exposé  qui  suit  montrera  que,  sauf  un  petit 
nombre  d'exceptions,  tous  les  substantifs  d'origine 
réellement  poule  peuvent  être  classés  dans  une  des 
trois  catégories  que  l'on  a  établies  parmi  les  adjectifs 
et  les  participes. 


-  67  — 

C'est-à-dire  en  : 

1°  Analogues  des  participes  en  do, 

%°  Analogues  des  noms  verbaux  en  wo  et  djo, 

%°  Analogues  des  adjectifs  en  o. 

1"' GROUPE 
Genre  0 

Les  noms  appartenant  au  genre  o  peuvent  être  di- 
visés en  deux  sous-genres  ^ 

Le  1®'  sous-genre  correspond  exactement  à  ce  que 
le  général  Faidherbe  appelle  le  genre  hominin.  Il 
contient  à  peu  d'exceptions  près  (diminutifs  du  genre 
nguel,  augmentatifs  du  genre  ngual,  mots  étrangers 
du  21'  sous-genre),  tous  les  substantifs  exprimant  une 
manière  d'être  spéciale  à  l'homme,  sans  distinction 
de  sexe,  d'âge  ou  de  couleur. 

L'article  adjectif  démonstratif  applicable  à  ces  noms 
est  0,  pluriel  hé. 

Le  â"  sous-genre  contient  presque  tous  les  noms 
d'origine  étrangère,  ou  encore  les  noms  d'origine 
poule  qui,  tout  en  ayant  perdu  leur  suffixe  générique, 
s'appliquent  généralement  à  des  êtres  n'appartenant 
pas  à  l'espèce  humaine. 

L'article  adjectif  démonstratif  de  ce  deuxième  sous- 
genre  est  0,  pluriel  di. 


08  — 


h'  Sous-Genrk 
(a)  JNoms  en  do  bé 

La  plupart  de  ces  noms  sont  des  participes  pris 
subslantiveinent,  et  leur  nombre  est  aussi  considérable 
que  l'on  veut,  ou  des  noms  exprimant  une  parenté,  ou 
plus  généralement  une  relation  domestique,  ou  même 
simplement  sociale,  d'un  ordre  quelconque. 

Les  premiers  sont  peu  intéressants. 

La  forme  des  derniers  est  remarquable  :  le  plus 
souvent,  l'élément  suffixe  n'est  pas  -do,  -bé,  mais 
-irado,  -irabé. 

Exemples: 

Bad-irado         Bad-irabé       neveu 
Bad-irado         wad-irabé      cousin  éloigné 
Band-irado      Band-irabé    cousin, parent,  allié, fi'èrc 

(dans  le  sens  général  attaché  à  ce  mot  par  les  Noirs 

parlant  français). 

Dend-irado       Dend-irabé    «  cousin  germain  » 
Guend-irado     Guend-irabé  «  époux  » 
Djidjirado  et    Guidj-irado     Yidj-irabé    a  camarade 
(du  même  âge)  » 


Kes -irado  Hes-irabê 

Keyn-irado  Kcyti-irabé 

Djat-irado  Djat-irabé 

Tann-irado  Tann-irabé 


((  gendre,  beau-père  « 
((  beau-frère  » 
((  bisaïeul  » 
«  petit-bis  » 

D'autres  substantifs,  appartenant  sous  le  rapport  du 


C>\) 


sens  à  l;i  môme  catégorie,  ne  i»irni)ent  juicnn  sullixo 
an  singulier,  mais  font  cependant  leur  pluriel  en  irahé. 
lixemples: 


Baba 

Bab-irabé 

((  père  )) 

Gog-o 

Gogu-irabé 

«  tante  » 

Kaw 

Youma 
Yoiimi 

C  kaw-irabé 
l  kuwm-irabé 

\   Youm-irabc 

«  oncle  )) 
«  mèi'O  » 

Djoin 

Djoin-irabê 

«  maître,  chef  do  famille. 

chef  de 

case  )) 

Marna 

mam-irabé 

((  aïeul  » 

Né^iié 

ne^Ti-irabé 

•   «  mère  »• 

Yinna 

Yinn-irabé  a 

mère  »  (masina). 

Naw-la 

nawl-irabê 

«  co -épouse  d'un  même 

homme 

)) 

Seul 

seyi-irabé 

«  ami  » 

Soiiha 

soitk-ourabé 

«  amant  »  iiar  onoosition 

â  souka  fioukabé  jeune  homme.  De  même  : 
miijnoii  «  frère  cadet  »  fait  au  pluriel  nih/n-irabé,  et 
maw-do  «  frère  aîné  »  fait  au  pluriel  maœ-nirabé  par 
opposition  à  maw-do  «  grand,    vieux,  vieillaid  »  qui 
fait  maccbé. 

Tous  ces  noms  de  parenté  et  de  relations  intimes 
perdent  au  singulier  les  deuK  dernières  syllabes  de 
leur  suffixe  (lorsqu'ils  en  ont  un)  devant  le  nom  ou  le 
déierminatif  de  la  personne  avec  laquelle  ils  expriment 
une  alliance. 

Bad-am  «  mon  neveu  » 


-  70  — 

wadi-ma  «  ton  cousin  » 

migni-ko     ) 

\  «  son  frère  cadet  » 
mign-oum  ) 

youmi-Samba  «  la  mère  de  Samba  » 

maw-ni-Coumba  «  le  frère  aîné  de  Coumba  » 

naw-li-Fatou  «  la  rivale  de  Fatou  » 

hés-am  «  mon  beau-père  » 

Font  exception  les  mots  : 
Tannado         Tannabé  «  descendant  » 
Djid'^nado      DJidnabé  V 

Djiknado       Djiknabê\  «  aïeux,  descendants  » 
Djinnado       Djinnabê  ) 
Ponnnado      founnabé  «jumeau  » 
Tchouddido  Souddibé  «  épouse  » 
Mousid-do    Mousid-bé  «  parent,  allié 
J5?c^o  Bibé  «  fils  » 

Qui  ne  prennent,  comme  on  le  voit,  que  le  suffixe 
participial  ordinaire. 

Une  remarque  extrêmement  importante  est  la  sui- 
vante. La  plupart  des  noms  de  parenté  que  l'on  vient 
d'examiner  se  présentent  sous  forme  de  participes 
aoristes  passifs  de  verbes  instrumentaux,  ainsi  : 

Tdnirado  paraîtdevoir  être  traduit:  «  employé  à  faire 
l'action  de  tan  »,  qui  lui-même  peut  être  pris  pour 
tag-n  [tag-dé  «  créer  »);  l'aïeul  tanirado  pour  tagnirado 
est  donc  «  celui  qui  a  pour  mission  de  faire  procréer  ». 

Ces  mots  sont  donc  des  noms  d'agents.  On  se 
réserve  d'étudier  autre  part  les  fonctions  qu'ils  attri- 
buent à  chaque  membre  de  la  famille. 


—  71  - 

Il  ne  faut  pas  oublier  que  la  même  remarque  s'ap- 
plique aux  idiomes  indo-européens.  . 
•  Les  noms  en  owo  sont  des  noms  verbaux  actifs,  — 
tout  verbe  conjugable   donne  naissance  à  un   nom 
verbal  en  oivo. 

Tout  nom  en  otvo  est  issu  d'uu  verbe  conjugué 
encore  actuellement. 

Exemples  : 

Kor-owo  plur.  Hor-obé  «  espion  »  {Hor-dé  «  es- 
pionner )));  Bnr-owo  plur.  war-obé  a  assassin»  {war-dé 
«  tuer  ))),  etc. 

Comme  on  le  voit,  le  pluriel  se  forme  par  simple 
substitution  de  obé  à  owo. 

Les  noms  verbaux  en  édjo  sont  plus  rares.  Voici 
ceux  qui  ont  pu  être  relevés  sur  un  total  d'environ 
1.200  substantifs  : 
Bal-édjo       Bal-ébé  «  homme  noir  » 
Bod-i'djo       wod-ébé  «  homme  rouge  »  (poul) 
Dan-êdjo      ran  ébé  «  homme  blanc  » 
Nay-édjo      nay-ébé  a  homme  vieux  » 
Bil-êdjo       wil-ebû  «  grand  sorcier  » 

On  a  déjà  montré  en  traitant  des  verbes  dérivés  en 
wou  que  ces  substantifs  doivent  être  considérés  comme 
des  noms  verbaux  passifs  de  certains  verbes,  les  uns 
encore  usités,  les  autres  disparus,  mais  en  laissant 
des  traces. 

On  doit  joindre  à  ces  noms  verbaux  passifs  en  édjo 
ébé  les  noms  en  djo  bé  qui  suivent. 


1"  r.e  nom  en  adjo 
Rour-nadjo    Dour-nabé  «  potier  » 

2"  Les  noms  de  tribus 

Bissi-nadjo       Bissi-nahé 
Pampi-nadjo     Pampi-nabé 
Dasar-nadjo     Dasar-nabé 


Giiirladjo 
Kalay-djo 
Bosseya-djo 
Boda-djo 


'  irla-bé 
Halay-bé 
Bosseya-bé 
woda-bé 


S"*  Les  noms  de  famille  [djetiodé) 

4"  Enfin  beaucoup  de  noms  en  a,  prénoms  de  per- 
sonnes ijndé)  ou  noms  communs,  qui  prennent  facul- 
tativement le  suffixe  en  djo  au  singulier. 

(Bari)     Bari-nadjo      Bari-nabé 
(Ba)       Baba-djo  Baba-bé 

(Si)         Sisi-djo  sisi-bé,  etc. 

Dembadjo  ou  Demba  Dembabé  «  Uemba  »  (prénom) 
Tcliambadjo  ou  Samba  Sambabé  «  Samba  (prénom) 
Tchoukadjo    ou  Souka,     Souka-bé  «  jeune  iiomme  » 
Barka-djo      ou  Barka,    Barkabé   «  esclave  » 
Gada-djo        ou  Gada,      Gadabé     a  masseur  » 
Kalifa-djo      ou  Kalifa,    Kalifabé    «  maître  » 
Solimadjo       ou  Solima,    Solimabé   a  jeune   homme 

encore  incirconcis  » 
Tchoufadjo    ou  Soufa,     Soufabé     «  page,  écuyer  « 

etc.,  etc. 


Abslraclion  t'ai  le  de  celle  tiernière  variété  de  mots, 
qui  paraissent  être,  sauf  les  quatre  premiers,  d'origine 
•étrangère,  on  voit  que  les  mots  affectés  du  sufTixc  djo 
expriment  généralement  un  état,  une  manière  d'être 
involontaire,  ou  tout  au  moins  inerte  et  inactive,  à  la 
différence  des  noms  en  owo  qui  sont  des  substantifs 
verbaux  d'action. 

Il  y  a  lieu  de  remarquer  la  forme  du  suffixe  nadjo, 
nal)(',qu\  termine  un  certairi  nombre  des  mots  signalés. 
Son  sens  paraît  équivaloir  à  «  originellement». 

Par  exemple  Bari-nadjo  signitie  originaire  de  la 
famille  des  Bari. 

En  somme,  ces  mots  en  nadjo  expriment  tous  une 
qualité  qui  se  transmet  dans  la  famille. 

Le  mol  bour-nadjo  ne  constitue  pas  une  exception. 
En  Afrique,  on  ne  devient  pas  potier,  on  naît  potier. 

Les  potiers  constituent  une  partie  de  la  caste  infé- 
rieure des  griots  tisserands  {màbhonhé). 

Quant  aux  affinités  de  la  partie  pleine  du  mot,  elles 
sont  transparentes  : 

Woud-dé  signifie  «  rôtir,  enfumer», 

Bour-na-djo  n'est  autre  chose  que  le  nom  verbal 
passif  du  verbe  bour-nnu-dé  pour  wnud-noudé  «  rendre 
cuiseur». 

NO.\JS   EN  0 

Ces  noms  peuvent  être  : 

r  Ou  bien  de  véritables  substantifs  qui,  dans  le 


—  74  — 

passage  du  singulier  au  pluriel,  remplacent  simple- 
ment le  suffixe  0  par  le  suffixe  bé  (ou  oubé  si  l'euphonie 
l'exige),  sans  qu'il  soit  porté  préjudice  d'ailleurs  à 
l'application  des  règles  de  permutation  des  consonnes. 
Exemples  : 

Diw-o  Diw-bé  a  femme  veuve  ou  divorcée  » 

Poul-o  Foul-bé  ((  Poul  » 

Kod-o  Hod-bé  «  hôte  »  (qui  donne  ou  qui 

reçoit  l'hospitalité) 

Lab-o  Law-bê  a  tribu  de  Pouls  noirs  » 

Netar-o  rietar-bé  «  vaurien  » 

Gnamagnamal-o  Gnamagnamal-bê  «  créancier  » 

Gnegno  Gnêgn-bé  a  individu  de  basse  classe  » 

(captif,  forgeron,  cordonnier,  tisserand,  griot,  po- 
tier, etc). 

•^       ,.  (   'ouy-bê        )  - 

Gouaj-o  {         , .       ,     >  «  voleur  » 

(    oudj-oubé  ) 

Derer-o  ?'erer-bé  «  égoïste,  avare  » 

Deb-o  vew-bé  «  femme  » 

Don-o  ron-bè  a  héritier  » 

Tchoubal-o  soubal-bé  «  pécheur  » 

Mabb-o  mabb-oubê  a  griot,  tisserand  » 

Gawl-o  ^awl-oubé  a  griot,  chanteur,  men- 
diant )),  etc.,  etc. 

Auxquels  il  faut  joindre  un  certain  nombre  d'ad- 
jectifs pris  substantivement,  formant  leur  pluriel 
par  le  même  procédé,  tels  que  : 

Moum-o  moum-bé      «  muet  » 

Koug-no  hougn-bé      «  gourmand  » 

Etc.,  etc. 


—  75  — 

2°  Ou  bien  des  adjectifs  pris  substantivement,  qui 
dans  le  passage  au  pluriel  remplacent  leur  suffixe -o, 
par  le  suffixe  -doubé  ou  -idbé,  absolument  comme  s'ils 
étaient  les  participes  aoristes  actifs  de  verbes  dérives 
en  d  de  leur  radical. 

Du  reste,  la  plupart  du  temps,  ces  verbes  dérivés 
d'adjectifs  existent,  ainsi  qu'on  l'a  fait  observer  lors  de 
l'étude  des  verbes  dérivés. 

Exemples  : 

Gal-o  ^al-doubé  «  riche  » 

Pa-o  fa^doubé  «sourd  » 

Bofo  wof-doubé        «  impotent»,  etc., etc. 

Il  s'est  produit  ici  un  curieux  phénomène  de  réver- 
sibilité : 

La  racine  ^al-,  gai-,  par  exemple,  a  donné  dans  le 
principe  le  verbe  al-dé  avoir.  Il  n'y  a  pas  à  en  douter, 
puisque  de  ce  verbe  subsistent  encore  les  temps  né- 
gatifs : 

*ald  «  non  »  (il  n'a  pas...,  je  n'ai  pas...),  min  ga'ld 
gawri  «  nous  n'avons  pas  de  mil  »  ;  a  'alâtd  téwo  «  tu 
n'auras  pas  de  viande».  Les  temps  positifs  sont  perdus. 

L'adjectif  galo  «riche,  possédant  »,  s'est  conservé,  a 
donné  naissance  au  verbe  dérivé  al-dou-dé  :  mais  en 
revanche, il  a  perdu  son  pluriel  al-bé,eiGn  fin  de  compte 
a  emprunté  au  participe  aoriste  du  nouveau  verbe 
la  nouvelle  forme  al-dou-bé. 


Trois  noms  se  compoiieiit  (l'une  f;içon  particulière  : 

Gor-ko  wor-bé  «  homme  » 

Gay-iia-liO      '■cnj-na-hé         «  berger  » 

„  ,        ^       i  Safalbé     ) 
Icliapato     )  ^''        ,     >       «maure» 
}  Safar-bé  ^ 

Les  deux  premiers  ne  se  distinguent  des  substantifs 
en  dn  que  par  la  substitution  de  ko  à  do.  On  y  re- 
viendra. 

Le  troisième  est  intéressant  en  ce  que  de  concert 
avec  d'autres  mots,  tels  que  tcliaparodji  «les  choses  des 
Maures»  son  pluriel  safarbé  (dialecte  du  masina  et 
des  Irlabés)  permet  de  reconnaître  que  le  singulier  et 
le  pluriel  issus  d'une  racine  commune  se  sont  modifiés 
parallèlement,  mais  indépendamment  l'un  de  l'autre. 

Le  mot  sa/ara  signifie  en  woloff  :  «  feu  »  et  en  poul  : 
«  remède».  La  connexité  entre  ces  deux  idées  est 
évidente,  si  on  considère  que  les  indigènes  ne  con- 
naissent guère  d'autre  moyen  curatifquele  feu,  moyen 
du  reste  très  employé.  —  Si  on  remarque  que  le  même 
mot  nar  signifie  cà  la  fois  «  feu  »  dans  l'idiome  des 
Maures  du  Sénégal  et  «maure  »  en  langue  woloff,  on 
restera  convaincu  que  les  mots  mfarbè  et  safara  sont 
très  proches  parents. 

D'autre  part,  on  est  forcé  de  reconnaître  au  poul 
safara,  «  médicament»,  une  parenté  peu  équivoque 
avec  le  verbe  safroudé,  soigné  (un  malade). 

Ce  verbe  n'est  autre  chose  qu'un  dérivé  en  rou  du 
verbe  simple  sqf-dé,  dont  l'un  des  sens  est  :  «  être 


liabilemcnt  préparé  »  (en  parlant  d'un  mets,  et  proba- 
blement aussi  d'un  médicament) . 

Un  autre  mot  de  la  même  famille,"  tchakowo,  signifie 
«  oculiste»  {k  pour  /;). 

Ne  doit-on  pas  admettre  que  les  Pouls  ont  donné 
aux  \Iaurcs(iui,  les  premiers,  leur  ont  apporté  les  pro- 
cédés scientifiques  de  médication  et  en  particulier  la 
cautérisation  par  le  feu,  le  nom  de  «  médecins»  ? 

Tchapato  viendrait  directement  de  saf-dé.  Les  Maures 
ne  se  désignent  pas  eux-mêmes  par  le  nom  de  fchapato. 

Au  sous-genre  o,  hé,  que  l'on  vient  d'étudier,  il  faut 
rattacher  les  mots  étrangers  anthropiques  passés  en 
poul  sans  modification  organique. 

Ces  mots  prennent  l'article  o,  bé;  au  pluriel,  ils 
prennent  le  suffixe  bé. 

Exemples  : 

Sahaba      Sahababé    «  ange  » 

Tallba       Talibabé      «  guerrier  de  la  guerre  sainte  » 

•  Exceptons  toutefois  les  mots  procédant  du  malinké 
et  formés  dans  cette  langue  au  moyen  du  sulFixe  nké 
qui  signifie  «  homme  ».  4u  pluriel  nké  est  remplacé 
en  poul  par  nkobé. 

Malinké  Malinkobé 

Tougnaranké  Tour/narankobé  «  étranger  » 

FoiUaiiké  FoiUankobê         (diommedu  Fouta  » 
Etc..  etc. 


78 


2"  Sous-Genre 

Les  mots  appartenant  au  sous-genre  p  di  forment 
leur  pluriel  par  simple  suffixation  de  dji,  sans  modifi- 
cation de  la  consonne  initiale. 

Comme  on  l'a-dit,  ou  bien  ces  mots  sont  d'origine 
étrangère,  ou  bien,  s'ils  sont  d'origine  poule,  ils  ont 
perdu  leur  suffixe  générique. 

Du  reste,  il  arrive  souvent  que  l'article  o-di  dé- 
termine un  mot  d'un  autre  genre  que  le  premier,  sans 
donner  lieu  à  des  critiques. 

En  particulier,  il  est  facultatif  de  faire  rentrer  dans 
ce  sous-genre  les  substantifs  anthropiques  venus  de 
l'étranger  sans  modifications  importantes. 

Exemples  : 

Sahaba  «  ange  »  fait  Sahahabé  et  Sahabadjl 

Taliba    «  guerrier  musulman  »  Salibabé  Talibadji 
Solima  «  jeune  homme  encore  incirconcis  »  Solimabé 

SoUmadji 
Gada      «  masseur  >)  Gadabê        Gadadji 

(A  suivre.)  E.  Gibert. 


EXPLICATION 


M.  A.  Gampion,  la  langue  basque  et  moi 


Dans  le  numéro  de  juillet  dernier  de  la  présente 
Revue  (t.  XXX III,  p.  292),  j'ai  relevé  comme  il  conve- 
nait une  affirmation  de  M.Campionqui  me  concernait. 
M.  Campion  réclame  aujourd'hui  :  il  m'écrit  que  la 
citation  qu'il  me  prétait  est  exacte  et  qu'elle  figure 
dans  un  article  publié  par  moi,  en  espagnol,  d.ins  la 
Revista  Euskara  de  Pampelune,  2°  année  (1879), 
p.  145,  lignes  39  et  ss.,  reproduit  à  la  p.  21  G,  1.  t2^ 
et  ss.,  des  Mélanges  de  linguistique  et  d'anthropologie, 
par  A.  Hovelacque,  Kmile  Picot  et  Julien  Vinson 
{Paris,  E.  Leroux,  1880,  pet.  in-8«). 

Il  suffît  de  se  reporter  à  ce  passage  pour  voir  que 
M.  Campion  n'a  pas  compris  et  ne  comprend  pas 
encore  ma  pensée,  ou  ne  veut  pas  la  comprendre. 
L'article  dont  il  s'agit  est  intitulé  :  lil  método  cientifico 
y  la  lenijua  euskara;  il  était  adressé  précisément  à 
M.  A.  Campion,  alors  secrétaire  de  la  rédaction  de  la 
Revista  Euskara,  et  avait  pour  but  de  répondre  à  un 
compte  rendu  de  ma  traduction  de  V Essai  de  M.  Hi- 


—  83  — 

bary  ;  ce  coinple  rendu,  rédigé  par  un  certain  M.  M. 
Goroslidi  de  Saint-Sébaslieri,  m'accusait  formellement 
de«  bascophobie  »  et  prétendait  que  je  ne  me  préoc- 
cupais que  de  «  rabaisser  les  Basques  etieur  incompa- 
rable idiome  ». 

Je  répondis,  naturellement,  que  je  n'avais  jamais 
nourri  d'aussi  noiis  desseins,  mais  que  la  linguistique 
est  une  science  positive  et  que  l'enthousiasme  des 
«  Bascophiles  »  était  aussi  lidicule  qu'irraisonné.  Kt 
j'ajoutais:  «  Esta  admiracion  lodavia  es  natural  en  las 
personas  que  no  han  estudiado  màs  que  las  lenguas 
clàsicas,  y  â  quienes  no  han  sido  ensenados  los  datos 
y  el.método  de  la  ciencia  moderna.  Comparando  el 
vascuence  cou  el  latin,  el  griego,  el  h*ancés  y  otros 
semejantes  idiomas,  queda  alurdido  el  escritor  y  le 
parece  contemplar  un  hermoso  gigante  al  lado  de  un 
diforme  enano  ;  pero  disminuye  la  alucinacion  si  le 
compara  con  el  hebreo,  y  desaparce  por  completo 
cuandoenlran  en  la  estera  de  la  comparacion  el  hun- 
garo,  el  japonés,  las  lenguas  de  la  America,  de  la 
Africa,  y  de  las  [ndias  Orientales,  y  tambien  si  al 
mismo  tempo  se  examina  el  origen  del  lenguaje,  su 
pasado,  su  historia,  su  porvenir  y  su  objelo.  » 

Ceci  est  net  et  précis,  et  je  le  l'écrirais  encore  au- 
jourd'hui; le  passage  rapporté  par  M.  Campion  ne 
devait  pas  être  détaché  de  ce  qui  le  précède  et  de  ce 
qui  le  suit;  je  n'y  donnais  pas  mon  opinion  person- 
nelle, je  faisais  voir  à  (luelle  hallucination  |»ouv;iit  èti'e 


—  81  — 

exposé  l'écrivain  non  linguiste  qui  parlait  de  la  langue 
basque.  Il  y  a  loin  de  cette  indication  au  prétendu 
aveu,  au  soi-disant  témoignage  que  la  vérité  m'aurait 
arraché. 

En  réclamant  aujourd'hui  contre  ma  protestation  et 
en  prétendant  nVopposer  ma  propre  affirmation, 
M.  Campion  a  donc  plutôt  aggravé  son  cas.  L'article 
qu'il  cite  avait  surtout  pour  but  de  démontrer  la  sottise 
des  gens  qui  vous  qualifient  d'ennemis  parce  que  vous 
ne  partagez  pas  leurs  préjugés  ou  leurs  admirations. 
M.  Campion  se  range  hautement  parmi  ces  gens-là; 
au  surplus,  on  ne  voit  pas  bien  pour  quelle  raison  il 
m'a  pris  à  partie,  dans  son  exorde,  lorsqu'il  a  eu  à  écrire 
un  article  sur  la  langue  basque.  Ce  qui  est  d'ailleurs 
absolument  inadmissible  dans  le  travail  reproduit  i)ar 
le  volume  de  la  Tradition  basque,  c'est  cette  pré- 
tention de  se  poser  en  représentant  de  la  linguistique 
moderne  entre  les  Basques  et  moi. 

Je  devais  être  d'autant  plus  froissé  de  cette  altitude 
et  de  ces  allégations  que  le  volume  en  question  est 
l'œuvre  d'une  coterie  parfaitement  organisée,  dont  le 
but  est  très  défini,  pour  qui  la  science  n'est  qu'un 
prétexte,  et  qui  a  manifestement  atîecté  de  me  tenir  à 
l'écart  et  de  ne  pas  me  connaître.  Passe  pour  cette 
inconvenance,  mais  qu'on  ne  travestisse  pas  ma  pensée 
et  qu'on  ne  prétende  pas  h  l'infaillibilité.  Les  aveugles 
n'ont  pas  encore  été  autorisés  à  juger  souverainement 
des  couleurs.  Julien  Vinson. 


MAX  MULLER 


La  philologie  indo-européenne  vient  de  perdre  un  de 
ses  plus  illustres  représentants  dans  la  personne  de 
M.  MaxMûller.  Ce  grand  promoteurde  nos  études  réu- 
nissait en  lui  les  dons  si  rarement  combinés  du  savant 
méthodique  et  précis  et  du  vulgarisateur  aux  brillantes 
amplilications.  Considérable  est  le  nombre  des  ou- 
vrages sortis  de  sa  plume  qui  relèvent  les  uns  de  la 
science  pure  et  dont  les  spécialistes  ont  surtout  à  tirer 
profit,  les  autres  de  la  science  élucidée  et  mise  avec 
un  rare  talent  à  la  portée  du  grand  public.  De  la 
première  catégorie  dépendent  avant  tout  V Histoire  de 
l'ancienne  littérature  sanscrite,  l'édition  du  Rig-Véda 
accompagnée  du  commentaire  de  Sâyana,  la  traduction 
d'un  grand  nombre  d'hymnes  de  ce  recueille  mémoire 
célèbre  sur  la  Stratification  du  langage,  etc.,  etc.  La 
seconde  consiste  particulièrement  dans  ses  premières 
et  nouvelles  Leçons  sur  la  science  du  langage,  si  bien 
mises  à  la  portée  du  public  français  par  la  traduction 
de  MM.  Harris  et  Perrot. 

Quelques-uns  de  ces  ouvrages, et  particulièrement  les 
éditions  de  textes,  doivent  aux  soins  qui  les  ont  en- 
tourés ainsi  qu'à  leur  objet  même  une  utilité  dont  ils 


—  83  — 

bénéficieront  longtemps  et  à  juste  titre.  On  ne  saurait 
en  dire  autant  delà  traduction  partielle  du  Rig-Védael, 
en. général,  des  ouvrages  de  linguistique  et  de  mytho- 
logie du  célèbre  professeur  d'Oxford.  Le  talent  litté- 
raire auquel  est  due  la  meilleure  partie  de  leur  succès 
ne  saurait  l'emporter  longtemps  encore  sur  le  caractère 
essentiellement  transitoire  et  précaire  des  théories  dont 
ils  relèvent.  D'une  incontestable  valeur,  à  l'époque  où 
ils  ont  paru,  pour  éveiller  chez  le  lecteur  le  goût  des 
sciences  qu'ils  concernent,  ils  ont  à  l'heure  actuelle  le 
grand  tort  de  n'être  plus  au  point;  c'est  un  défaut  ra- 
dical et  dont  rien  désormais  ne  saurait  les  guérir. 

La  linguistique  et  la  mythologie  de  M .  Max  Mûller 
datent  d'avant  les  progrès  delà  méthode  évolutionniste, 
et  jamais  il  ne  s'est  douté,  à  ce  qu'il  semble,  que  Dar- 
win avait  posé  des  principes  destinés  à  agir  sur  toutes 
les  sciences,  sans  excepter  celles  à  l'étude  desquelles 
son  existence  a  été  consacrée.  De  là,  non  seulement 
une  persistance  extraordinaire  de  sa  part  à  s'en  tenir  aux 
doctrines  les  plus  contestables  et  les  plus  arriérées 
de  Bopp  en  matière  de  linguistique,  non  seulement 
l'adhésion  à  une  théorie  sur  l'origine  du  langage 
qu'aucun  linguiste  autre  que  lui  ne  saurait  admettre, 
non  seulement  une  explication  des  mythes  indo-euro 
péens  qui  remonte  en  droite  ligne  à  celle  des  brah- 
manes de  l'Inde  ancienne,  mais  encore  et  à  son  grand 
dam  l'exposé  dans  ses  derniers  ouvrages  d'une  philo- 
sophie fondée  sur  la  linguistique  dont  il  n'y  a  mallieu- 


—  84  — 

reuseinentrieii  à  retenir.  Ici  encore  l'évolutionnisme, 
qui  aurait  pu  servir  de  Sésame  ouvre-toi  I  a  été  tenu 
pour  nul  et  non  avenu,  et  cette  tare  de  la  méthode 
lait  que  l'exposé,  d'un  si  grand  intérêt,  des  rapports 
réels  de  la  logique  et  de  la  science  du  langage  est  à 
reprendre  à  piedd'œuvre. 

Cette  part  faite  à  la  critique,  il  serait  injuste  de 
terminer  sans  rappeler  que  c'est  à  l'initiative  ar- 
dente et  au  concours  laborieux  de  M.  Max  Mûller  que 
sont  dus  l'entreprise  et  le.  succès  de  l'inappréciable 
collection  des  Sacred  Books  of  the  Easl. 

L'illustre  mort  n'aurait-il  que  cette  tâche  à  son  actif, 
qu'il  aurait  droit  à  la  reconnaissance  et  aux  regrets  de 
tous  les  orientalistes  pour  qui  cette  collection  est  un 
inséparable  et  incomparable  instrument  de  travail. 

Paul  Regnaud. 

A  l'article  si  impartial,  si  exact  et  si  juste  de  notre  savant 
collaborateur,  il  me  paraît  utile  d'ajouter  un  mot  pour  bien 
marquer  le  caractère  néfaste  de  l'œuvre  scientifique  de  Max 
Mûller.  Au  point  de  vue  philosophique,  c'était  un  dévot,  un 
pieux  anglican,  à  l'esprit  étroit  et  absolu.  A  un  autre  point 
de  vue,  il  était  demeuré  un  parfait  Allemand,  et  lors  de  l'inau- 
guration, en  1872,  de  l'Université  allemande  de  Strasbourg, 
il  donna  une  preuve  de  mauvais  goût  qui  fut  relevée  dans 
cette  Revue  comme  elle  le  méritait  par  A.  Hovelacque.  Le 
Gouvernement  français  ne  le  nomma  pas  moins  comman- 
deur  de  la  Légion  d'honneur  en  1895. 

J.  V. 


QUELQUES  MANUSCRITS  BASQUES  BISCAYENS 


Au  couvent  des  Franciscains  de  Zarauz  (Guipuz- 
coa),  on  m'a  permis  de  voir,  le  20  septembre  1900, 
quelques  manuscrits  basques  qui  y  sont  conservés  : 

I.  L'original  autographe  du  livre  classique  de  la 
Biscaye,  El  Doctor  Peru  Abarka,  par  Don  Juan 
Antonio  de  Moguel.  Au  commencement,  au-dessous 
du  titre,  on  lit  :  a  Este  manuscrito  esta  donado  por 
D"  Juan  José  de  Moguel  al  Colegio  de  Misioneros 
de  la  Villa  de  Zarauz  y  se  entregara  en  mi  falta  inde- 
fectiblemente.  Unzueta.  »  Unzueta  habitait  ledit 
couvent,  et  fut  auteur  de  quelques  sermons  en  bis- 
cayen,  qui  ont  été  publiés  par  le  curé  d'Ochandiano. 
Juan  José  de  Moguel,  mort  en  1849,  neveu  et  suc- 
cesseur à  Markina  de  Juan  Antonio,  fut  lui-même 
aussi  auteur.  Au  revers  de  cette  feuille  Juan  Antonio 
a  écrit  :  «  Rusticus  abnonnis  sapiens  crassaque  Mi- 
nerba.  Horacio.  El  Rustico  excelente  savio,  y  la  savia 
Minerba  mui  estupida.  »  Bien  des  personnes,  en 
Biscaye,  ont  conservé  des  copies  de  ce  manuscrit, 
faites  avant  la  publication  de  la  première  édition 
(Durango,  1881).  J'en  ai  vu  quatre  chez  Don  J.  M. 
Bernaola,  prêtre  à  Durango.  Ils  offrent  des  variantes 
du  texte  et  de  l'orthographe  très  intéressantes.  La 
deuxième  édition  de  ce  livre,  qui  mérite  d'être  mieux 


—  86  — 

connu  et  étudié,  publiée  par  Don  R,  M.  Azkue,  à 
Bilbao,  en  1899,  avec  une  traduction  assez  peu 
exacte,  indique  que  l'éditeur  n'en  a  pas  examiné  criti- 
quementle  texte.  Il  s'est  cru  aussi  permis  de  changer 
Torthographe  d'une  manière  que  l'auteur  n'aurait  cer- 
tainement pas  approuvée.  Le  tilde  a  été  inventé  au 
moyen  âge  pour  indiquer  l'omission  d'une  lettre, 
comme  en  mùdu  pour  mundu,  afio  pour  anno,  Gui- 
mardes  pour  Guimaraens .  Mais  M.  Azkue  l'emploie 
avec  s  pour  exprimer  l'addition  d'un  son,  pour  faire 
de  s  l'équivalent  de  sh  ou  ch.  Tout  le  monde  sait  pro- 
noncer sh.  Il  est  inutile  de  mettre  un  signe  inconnu 
dans  sa  place .  Qui  peut  gagner  à  cette  innovation  ? 
A  la  page  15,  M.  Azkue  répète  le  mot  iaraozak  que 
Don  Arturo  Gampion,  dans  sa  Grammaire,  a  rejeté 
comme  intraduisible.  Le  manuscrit  de  l'auteur  le 
porte  bien  :  mais,  dans  certaines  copies,  on  l'a  changé 
en  jatorzak  =  me  viennent,  supposant  que  l'interlo- 
cuteur parlait  à  lui-même  en  tutoyant.  J'avais  annoncé 
cette  correction,  il  y  a  trois  ou  quatre  ans,  dans  un 
journal  du  pays,  et  j'ai  appelé  là-dessus  l'attention  de 
M.  Azkue,  lui-même.  Il  est  vrai  que,  plus  bas,  p.  29, 
on  trouve  iaraok  que  la  note  de  M.  Azkue  explique 
comme  une  variante  de  iagok.  Le  changement  de  g 
en  r  est  connu  en  basque,  comme  celui  de  /'  en  g. 
Le  moine  biscayen  qui  m'a  montré  le  manuscrit 
défend  la  leçon  iaraozak  comme  appartenant  au  verbe 
egon.  Dans  ce  cas,  les  paradigmes  connus  de  ce  verbe 
sont  défectueux.  Peut-être  est-ce  une  variante  locale 
de  yadagozak  ou  de  yoatazac.  Des  variantes  de  cette 


espèce  sont  toujours  à  noter,  mais  non  pas  à  repro- 
duire dans  le  style  littéraire. 

II.  L'original  autographe  de  l'ouvrage  précieux 
intitulé  :  El  Verbo  régulai'  vascongado  del  dialecto 
vizcaitio,  por  Fr.  Juan  Mateo  de  Zavala  (San  Sébas- 
tian, 1848).  Cet  auteur  mourut  dans  ce  couvent. 

m.  Trois  manuscrits  de  l'écriture  de  P'rai  Pedro 
de  Anibarro,  qui  naquit  à  Villaro  (Biscaye)  le  5  dé- 
cembre 1748,  et  mourut  dans  ce  couvent  (alors  col- 
lège) en  1830.  11  a  pu  connaître  Larramendi.  Dans 
son  petit  livre,  Escu  Liburua  (Tolosa,  1827),  duquel 
Don  Raimundo  Abaroa  m'a  donné  un  exemplaire,  il 
confirme  ce  que  le  grand  lexicographe  d'Anduain  a 
dit  sur  la  prononciation  de  la  lettreyen  basque  espa- 
gnol, c'est-à-dire  qu'elle  devrait  être  y  comme  elle 
l'est  toujours  en  labourdin.  Les  Basques  d'Espagne 
d'aujourd'hui  lui  donnent  pour  la  plupart  le  son 
guttural  de  la  jota  castillane  moderne. 

(A)  Bici  bedi  Jésus  !  Misionari  Euscalduiia  Cristi- 
nau-Dotrina,  ta  sermôiaç  Bizcai-errietan  iracasten. 
11  faut  corriger  Euscaldunak,  nominatif  du  verbe 
actif  qu'on  sous-entend  avec  iracasten,  et  traduire  : 
((  Vive  Jésus!  Le  missionnaire  basque  enseigne  dans 
les  pays  de  Biscaye,  la  Doctrine  chrétienne  et  les 
sermons.  »  Après  ce  titre,  il  y  a  une  note  ainsi 
conçue  :  «  Todas  estas  Doctrinas  se  trasiadaron,  y  se 
pusieron  en  limpio  en  otro  libro.  A.  Fr.  Pedro  Anto- 
nio Anibarro,  Zarauzco  Colegio  A.  San  Franciscoren 
Ordecaco  Misionisteac  ateréac,  tapredicatûac.Lenengo 
Zatia,  Bear  dan  léguez  »  c'est-à-dire  :   «  Toutes  ces 


—  88-  — 

instructions  ont  été  transférées^^t  mises  en  ordre 
dans  un  autre  livre.  Extraites  et  prêchées  par  le 
Père  Frère  [sic]  Pierre  A.  Anibarro^  missionnaire  du 
collège  de  Zarauz  (il  faut  lire  Colegioco  eta),  et  de 
l'Ordre  de  Saint-François.  »  Il  consiste  en  six  pages 
sans  numéros,  suivies  de  420  p.  chiffrées.  La  dernière 
porte  la  signature  de  Fauteur,  qui  a  ajouté  cette 
note  :  «  Esta  obra  del  Misionero  Bascongado  comencé 
en  5  de  Die*'  de  1808,  dia'  en  que  naci  y  compli 
60  aïlos  malempleados.  Conozcoque  nolapodré  con~ 
cluir,  y  suplico  à  algun  individuo  de  este  Colegio  la 
continue,  trasladando  àeste  manuscrito  misDotrinasy 
sermones  de  Misiones  que  los  tengo  enquadernados 
en  otro  lil)ro  tomo  P.  Dios  sera  su  galardon.  En  un 
tomo  se  pondran  seguidas  las  Doctrinas,  yen  otro  los 
Sermones  haciendo  dos  de  uno,  pues  son  largos.  » 
La  cote  de  ce  volume  est  Tabula  XXVI.  On  en  a 
publié  des  extraits,  avec  force  fautes  d'impression, 
chez  Florentino  Elosu  à  Durango.  Le  style  d'Aflibarro 
est  bon  ;  son  dialecte  est  celui  d'Arratia. 

(B)  Sous  la  cote  «  Bibliotheca  S.  Joannis  Baptistae, 
Zarauz.  Euskaldunak.  Tabula  NT  »,  464  pages  inti- 
tulées :  «  Voces  Bascongadas  diferenciales  de 
Biscaya,  Guipuzcoa,  y  Navarra  con  la  distincion  que 
las  usa  cada  nacion,  anotadas  con  sus  letras  iniciales 
B.  G.  N.;  y  quando  es  comun  à  todas,  précède  una 
G.  Por  Fr.  Pedro  Antonio  de  Anibarro,  Misionero 
Apostolico  del  Colegio  de  Zarauz  de  Menores  Obser- 
vantes, para  el  uso,  y  alivio  de  Parrocos,  Predica- 
dores  bascongados.  »  La  «  Diputacion  Provincial  » 


—  89  — 

de  Guipuzcoa  a  subventionné  Timpres^sion  de  plu- 
sieurs ouvrages  qui  méritèrent  beaucoup  moins  la 
■publication  que  celui-ci.  Ce  serait  un  Dictionnaire  de 
poche  fort  utile  pour  tous  ceux  qui  voyagent  dans 
le  pays  basque-espagnol. 

(C)  Vici  bedi  Jésus!  JESU  CHRISTOREN  lau  evan- 
GELiÔAC  halerd  alcarturic,  D.  Beniardo  Lamyc  da- 
cavtzaii  erara,  ta  A.  Felipe  Scioc  erderatu  cituan 
léguez.  A.  Fr.  Pedro  Afiibavro,  Zarauzco  Colegio 
A.  S.  Franciscoreii  Ordeaco  Misionisteàc  eusqueratu 
ditu.  Azquenedii  ifinten  da  Uvte  guztico  Jaietaco 
Evaiigeliôen  Idorogarri  bat;  ta  bestebat  jaquiteco 
Bizcaico  icéiieii  adierantza  Guipuzcoa^  ta  Nafarroa- 
raco  oiiela  libru  santu  veneragavriau  guztien  oiieraco 
izaii  dedin.  C'est-à-dire  :  «  Vive  Jésus  !  Les  quatre 
Evangiles  de  Jésus-Christ  mis  en  rapport  Tun  avec 
l'autre,  à  la  manière  dont  D.  B.  Lamy  les  porte,  et 
comme  le  Père  Philippe  Scio  les  mit  en  castillan.  Le 
Père  Frère  [sic]  P.  Anibarro,  le  missionnaire  du 
Collège  de  Zarauz  (il  faut  lire  Colegioco  eta),  et  de 
l'ordre  de  Sainl-Francois,  les  a  mis  en  Heuskara.  A 
la  fin,  se  trouve  un  index  des  Evangiles  des  fêtes 
de  l'année  entière,  et  un  autre  pour  savoir  la 
signification  des  noms  biscayens  en  guipuzcoan  et  en 
navarrais  (afin)  que  ainsi  ce  vénérable  saint  livre 
soit  pour  le  bien  de  tous.  »  Le  tout  consiste  en 
351  pages,  dont  la  dernière  porte  la  signature  «  Fr. 
Pedro  de  Aflibarro  ».  Aux  pages  338  à  343  inclus^ 
on  lit  le  Glossaire  qui  suit  : 

«  Bizcaico  Iceiien  adierantsa  Guipuzcoan  ta  Nafar^ 


—  90  — 

7'oan  G.  ta  N.  gaz  adierazoric^  »  c'est-à-dire  :  «  La 
signification  des  noms  de  la  Biscaye  en  Guipuzcoan 
et  Navarrais,  signalée  par  G.  et  N.  » 
Aguea,  abea,  viga. 

aguindu  :  n.  manatii  :  mandar. 

aizta  :  g.  n.  aizpa  :  hermana  de  la  liermana. 

alboa,  aldea  :  g.  n.  aldamena  :  lado. 

alogiiera,  bearsaria  :  jonial  {bear=^  work;  et  saria 
=  the  salary.) 

amatau  :  g.  itzali  :  apagar.  (Liçarrague  bas  aina- 
tigUy  perhaps  from  mitiga  in  Latin). 

aracatu,  aratu  :  rastrear. 

arbintasLina  :  ira. 

ardura  :  arrêta  :  cuidado  (Dans  quelques  dialectes 
ardura  signifie  souvent). 

area  :  g.  ondarra  :  n.  legarra  :  arena  (Le  latin 
harena  est-il  parent  du  basque  aie.,  are  =:  grain, 
ou  bien  de  arin  =  léger  ?). 

arerioa  :  g.  n.  etsaia  :  enemigo. 

arrasteguia,  arratsaldea  :  la  tarde. 

arraundu  :  remar. 
■  arteztu,  zucendu  :  enderezar. 

asco  :  n.  anitz  :  mucho. 

asmau  :  n.  sumatu  :  adivinar,  discurrir. 

asquea  :  g.  estrabia  :  n.  gambela  :  pesehre  [Gam- 
hela  is  from  the  Latin  camara.  In  the  Guipuzcoan 
farm-houses  the  cattle  occupy  the  ukuliiba  (from 
cubiculum  ?),  a  véritable  chamber  adjoining  the 
dining-room  of  the  family,  into  whose  présence 
they  thrust  their  heads  through  oval  holes   eut 


—  91  — 

in  a  wooden  partition  called  tresahia.  This  word 

is   probably  a   perversion  of  Gastilian  presebe. 

Askea  is  the  trougji^  holding  the  fodder  for  the 

oxen  or  cows]. 
astima  :  n.   aidurra  :  pesado. 
atartea,  ataria  :  pointai. 
atzea  :  n.  giiibela  :  tras,  atras  [Atze  dans  certains 

dialectes,   signifie  étranger.    Quelques   Basques 

veulent  mettre  l'étranger  ostean). 
aubea  :  g.  n.  amaguiarraba  :  suegra. 
aurrea  :  n.  aitzinea  :  delante,  delantera. 
auspaz  jarri  : /?o5^/"«r5e. 
autu,  autatu  :  elegir  (du  latin  optatum). 
aztu  :  n.  atzendu  :  olvidar. 
azuria,  bildotza  :  cordero. 
aror  :  g.  orra  :  ve  liai  (sic  pour  alii)  [aror  =  arra 

hor). 
Bala,  balea  :  ballena  (pez). 
barrua  :  g.  n.  barrena  :  interior,  dentro. 
bassen  :  g.  n.  baicic  :  tan. 
basoa  :  n.  oyana  :  monte. 

batzarra  :  bilcimtza  :  congreso^  sinagoga,  concilio. 
bedarlucea   :   Ae/io,    yerba  larga  [Bedar  est  une 

variante  de  belar  formé  de  be  =  bas  &  ar  =  ha- 
bitant), 
belu,  berandu  :  tarde. 
bertati,  laster  :  n.  sarri,  fite  :  luego. 
biguna  :  n.  beracha  :   blando. 
biguirea,    g.     gaubela   :    veladuria     (From     latin 

vigilia.     Gau-bela   =    night-watch,  not    night- 

crow  or  black  night). 


—  92  — 

biraldu,  bidaldu  :  n.  igorri  :  enviar, 

biurtii  :  n.  itzuli  :  volver. 

boscocha  :   i^uda  {yerba).  (Diminutif  du  castillan 
bosco"^). 
Gelan  :  g.  n.  nola  :  como. 

cemaitu,  cematu  :  n.  meachatu  :  amenazar,  repre- 
heiider. 

centurion  :  euntaria  {Sic.  L'auteur  aurait  dû  mettre 
euntaria,  centurion,  à  la  lettre  E). 

cenzuna  ijuicio,  entendimiento . 

ciapea  :  mostaza. 

cizpurua  :  5M5/?/ro'(Métathèse  du  castillan). 

chanchadurea,  levadura. 

copaua  :  g.  n .  mocadua  :  bocado  [bocaua  =  cobaua) . 
Deunguea,  donguea  :  g.  n.  gaiztoa  :  malo. 

dendatu  :  esforzarse,  aplicarse  (du  latin  tentare). 

domequea  :  n.  igandea  :  domingo  (Dommica). 
Ecandua  :  g.  n.  oitura  :    costumbre  (On  a  bifFé  g.  n.). 

ecer,  cerbait  :  n.  deus  :  algo. 

echaguntza  :  g.  baserria  :  n.  borda  :  cuserio. 

echun,  g.  n.  echin,  etzin,  recostarse. 

edena,  edendu  :  g.  n.  pozoia  :  veneno  [vedeno  ?). 

edolabere  :  n.  badere  :  a  lo  menos. 

emparau  :  sobrar. 

enzun  :  g.  aditu  :  oyr  (Du  latin  intonare). 

erago  :  diardu  :  insistir,  darle  a  ello. 

eragotzi  :  g.  n.  debecatu  :  prohivir. 

erbestea,    deserria   :  destierro  (de   erri,    pays,    et 
bestea,  l'autre,  i.  e.  alienus,  ausland). 

erdu,  g.  atoz,  n.  zato  :  ven   tu  (Variante  de  eldu). 


—  93  - 

eriegmûa,  evreixl  cirarvA  :  real  de plata. 

erraz,  facil. 

ernia  :  g.  n.  culpa. 

erruquitu  :  g.  n.  urricaritu  :  apiadarse. 

esan  :  n.  erran  :  decir. 
Escrivac  ciran  legueco  jaquintsu  letradûiiac  [C'esl- 

à-dire  :    Les  scribes  étaient  les   savants  lettrés   de 

la  Loi  (de  Moïse)]. 

escLidatu     :    defender    (Latin  sciitum,    ou    basque 
esku=  main), 

estutu  :  n.  ertsitu  :  apretar,  y  estu  \alar. 

ezaina,  ichusia:  cosa  fea. 

eztegua  :  g.  n.  eztaia  :  boda. 
Fariseôac    cirian    azalezco   sanlutasuna     eracusten 

ebeii  guizonbatzuc,  bana  biotz  cliarrecôac  ta  gaiS' 

tôac     [C'est-à-dire  :  Les    Pharisiens    étaient    des 

hommes  qui  étalaient  la  sainteté  de  croûte  (super- 
ficielle), mais  de  cœur  mauvais  et  méchants]. 
Garaua:  g.  aléa,  n.  picorra,  bia:  grano. 

garbitu:  n.  chaulu  :  limpiar. 

goiartu,  goitu  :  g,  n.    gallendu',    garaitu  :  vencer. 

gorrotoa:  g.  gaistzerizcoa,  n.  etsaigoa  :  odio. 

goxuetan  :  g.  ardazquetan  egon  :  hilar. 

gueitu  ;  n.  berretu  :  aumentar. 

gueratu,  guelditu  :  quedar. 

gura  izan  :  g.  n.  nai  izan  :  querer. 

guiarraba  :  g.  n.  aitaguiarraba  :  suegro. 
Hortua  :  g.  ti.  baratza  :  huerto. 

1.  Probablement  une  manière  d'écrire  ^a^e«rfa.  ya\v\xBallona 
pour  Botjona. 


—  94  — 

hipocrita,  virliite  fingitzallen  {Sic.  L'auteur  aurait 

dû  le  mettre  au  V  et  le  castillan  après). 
Ichi  :  g.  n.  utzi,  ichi  :  dejar\  y  cerrar. 

icoa^  :  g.  n.  picoa  :  igo^  iguera  [Sic,  en  omettant  le 

h  initial,  du  latin  ficus). 
idunà  ;  g.  n.  lepoa  :  pescuezo. 
idumbaguetu  :  g.  n.  lepobaguetu  :  degollar. 
imilauna  :  g.  lacaria  :  16" parte  de  unafaiiega  :  algo 

nienos  que  celemin. 
inarrea  :  g.  erratza  :  escoba. 
iraindu  :  agriarse^  enojarse. 
irazarri  :  g.  ernatu  :  despertar . 
irme',  irrime  ;  sendo  :  fuertemente. 
istanda  :  n .  lerre  eguin  :  reventar. 
itandu  :  g.  n.  galdetu  :  preguntar . 
itundu  :  convenir  en  palabra. 

iustura,  inustura,  oneztua  :  g.  chimista  :  relampago 
izarea  :  g.  n.  mandira  :  sabana  (d'où  Samana). 
Jagon',  jaon,  zaindu  ;  g.  n.  zaitu  :  cuslodiar. 
jagui  :  g.  jaiqui  :  levantarse. 
jaramon  ez  :  no  hacer  caso. 
jarri  :  g.    eseri  :  sentarse  (On    prononce    esheri  à 

Tolosa  et  San  Sébastian), 
jausi  :  g,  erori  ;  caer  (J'ai  entendu  dire  jausi  dans 

le  sens  de  sauter). 

jazo,  guertatu  :  acaecer^  suceder. 
Lagunquidea  :  légion  (Il  se  trompe  :    lagun   et  guide 

1.  Du  \dLi\r\  firme. 

2.  Probablement  une  variante   de  ichadon,  ichagoiu    icharon 
a=ï  attendre,  aguardar . 


—  95  — 

(de  ki,  kin  =  avec)  sont  des  synonymes,  signifiant 
compagnon^  copain^  camarade.  Lagunquidea  signi- 
fierait donc  «  le  compagnon  (de)  compagnon  ». 
Adizkidea  =^  \e  cdLiVidiVSiàe  d'esprit,  i.  e,  Tami.  Aur- 
hide  ou  aurkide  =  compagnon  (comme)  enfant,  i.  e. 
frère  ou  sœur.  Kide^  hide  n'est  usité  que  comme 
adjectif  postpositif.  Laguii  est  un  nom  substantif), 
lapicoguillea  :  g.  n.  eltzeguillea  :  ollero. 
laquetu  :  pennitir  (Du  latin  placet.  Dans    une  épi- 

taphe  du  XIIP  siècle  au  Musée  municipal  d'An- 

gouléme,    on    trouve  placet    et  plaqet  dans    la 

même  ligne), 
larga  :  n.  utzi  :  dejarlo. 
laumarai  :  un  quarto^moneda  (i.  e.  4  marais  =  ma- 

ravedis). 
lauonecoa\  charria  :  g.  ganaubeltza:  marrano. 
léguez  :  g.  n.  becela  :  como.  (i.  e.  par  règle  de), 
lolloa  .  bedar  charra  :  zizafia. 
lotsa,  lolsatu  :  n.  alquea,  alquetu  :  avergonzarse. 
lucurerua:  logrero,  usurero. 
lupetza  :  g.  loia  :  lodo. 
Maraia  :  maravedi. 

mastia  :  n.  ardantza:    vina  [Valmaseda  in  Biscaya 

=  Valley  of  villes.  The  name  still  describes  the 

place.    Matzeta    ou    malz-dia    =    quantité    de 

vignes), 
miesea,  euna  ;  lienzo. 


1.  Litt.   :  celui  de  4  pieds,  le  (luadrupcdc. 

2.  Le  latin  lolliuni. 


—  96  — 

muwR '.  collado  (Talvez  aqiii    tengamos  el    etymon 

de  Mun[d)aka  en  Biscaya.  Cf.  :  ale-k(i). 
magiiina  :  vaina  (Du  Latin  vagina  par  v  z=z  b  =  m). 
Nebea:  hermano  de  la  hermana. 
Obetandiia  : /?e//êc/o  (i.  e.  better-ed,  best-ed). 
opa  :  g.  n.  esqiieni  :  ofrecer. 
oratu  :  g.  n.  ichasi  :  asir  {cÂ.  orain  solvere). 
osatii  :    g.    n.    sendatu  :  saiiar  [seiida  vient-il  de 
saiiare  ?  a   Biseayen  =  e  en    Giiipu/.coan  idaiis 
maints  mots), 
ostean,  atzean,  n.  giiibelean  :  tilras. 
ostii  :  n.  ebatsi  :  Jiurtai'. 
otseiïa  :  g.  n.  mirabea:  criado^  sirvieiile. 
otzarea  :  otarra  :  ceslo. 
Publicanôac   cirian  errendatzalleac,  edo  liicurerûac, 
edo  becatari  aguiriac.  C'est-à-dire  :   «  Les  Publi- 
cains  étaient  les  collectionneurs  de  revenus,  ouïes 
usuriers,  ou  les  pécheurs  manifestes.  » 
Salatu:  «c«5«/',  delatar. 

satza  ;  g.  cimaurra  :  n.  ongarria  :  fieino,  estiercol. 

seina  :  g.  n.  aurra  :  n.  seia  :  iiiTio. 

soindun:    g.  n.    aurdun  :    e/n ba ta zada  {Litl.  :   qui 

tient  enfant, 'cliild-holder) . 
seinguea  :  g.  n.  aurbaguea  :  esierii  [gea  est  le  rac- 
courcissement de  bagea  =le  sans.  Cf.  don-gea). 
sartaldea:  occidente  (literally  the  enlry-side). 
sortaldea  :  oriente  (literally  tlie  exit-side). 
sustraia:  n.  zana  :  raiz  (métathèse  de  zur-tzana). 
La  Décima-Tercia  edi(ùôn  deL  Diccionario  de  la 
Lengua  Gaslellana  por  la  Real  ;Vcademia   Espa- 


-  97  - 

iiola  (Madrid,  1899)  dice  que  «  Zanahoria  viene 
de  «j«/io/7'«y  significa  iina  ralz  amarilla  »  y  que 
azaiioria  se  dériva  de  izfeneria,  palabre  Arabe. 
Los  Alemanes  traducen  esta  palabra,  que  se  pro- 
nuncia  muy  à  menudo  zanoria^  por  Mohr-riibe 
=  nabo  de  Moros,  perô  si  tambien  por  gelbe-riibe 
=  nabo-amarillo.  Este  Diccionario  no  es  infa- 
lible.  Dice  por  exemplo  que  agur  6  abur  se  dé- 
riva del  Turco  en  vez  del  Vascuence  agur  ô  del 
Latin  augurium^  y  que  cuidar  se  dériva  de 
^urare^  aunque  cada  cura  podria  saber  que  es 
una  contracciôn  de  cogitare.  Propongo  el  Vas- 
cuence zuTi,  zaifi  =  raiz  y  oria  =  la  amarilla 
como  etymon  del  nombre  Gastellano  de  esta 
legumbre.  Zairl  oria  ■=  la  raiz  amarilla.  \. 
Pallet  en  ^n  Diccionario  (Paris,  1604)  dice  a  Car- 
rote  ^  zanahoria  ». 
Taldea:  rebafio. 
Verbea:g.  itzarn.    mintza,  mintzoa  :  palabra  [mini- 

zoa  pour  mintzura). 
Ugazaba  :  g.  n .  nagusia  :  amo. 

uguerra  :  g.  erdoia  :  rofia. 

ulertu  :  comprehender,  advenir. 

ur,  urrean,  urreratu:  g.  n.  urbil,  urbildu  :  acerca^ 
acercarse , 

urrin  :  g.  n.  urruti  :  lejos. 

uriola,  urjola:  g.  ugoldea:  diluvio. 

urten:  g.  n.  irten  :  n.  atera:  salir. 
Zaina,  zaindu  :   g.    n.  zaia,   zaitu  :  custodiar  (La  ra- 
cine garde  la  vie  de  la  plante). 
Beste  icen  batzuC  dira  berez  ezagùnac  (c'est-à-dire 

7 


-  98  — 

il  y  a  quelques  autres  mots  que  l'on  reconnaît  par 
eux-mêmes):  alcar,  elcar:  bardin,  berdin:  azurra, 
ezurra  :  ebagui,  ebaqui  :  emon,  eman  :  idigui,  idi- 
qui  :  gâcha,  gaitza  :  acha,  aitza:  jagui,  jaiquî: 
baltza,  beltza  :  narrua,  larrua  :  soloa,  soroa: 
ucatu\  icutu  :  uUea,   illea. 

Les  Pères  Jésuites  de  Durango  ont  le  manuscrit 
anonyme  d'une  grammaire  basque  inédite. 

«  Reader.   But  who  is  he  that  hath  thy  books  repard, 

And  added  moe,  whereby  thou  art  more  graced? 

Chaucer.  The  sclfc  same  man  who  hath  no  labor  spard. 
To  helpc  what  time  and  writers  had  defaced  : 
Ande  made  old  words,  which  were  unknown  of  many, 
So  plaine  that  now  they  may  bc  known  of  any.   » 

(Speghts  Chaucer,  1598). 

Edward  Spencer  Dodgson, 
Paris,  23  octobre  1900. 

P. -S.  The  Biscayan  Grammar,  Vocabulary,    and 
BiLiNGUAL  Dialogue  of  Rafaël  Nicoleta 

Since  my  article  upon  this  work  was  published 
in  the  Sl***^  volume  of  La  Revue  de  Linguistique,  some 
newfacts  concerning  its  origin  hâve  beendiscovered. 
Doctor  Richard  Garnett,  who  was  then  Librarian  of 
the  British  Muséum,  wrote  to  me  in  February  1899, 
enclosing  a  copy  of  a  letter  addressed  to  Sir  Tho- 
mas Browne  of  Norwich  in  March  1661  by  Samuel 
St  Hill.  This  letter,  numbered  «  Sloane  4062. 
f.  147  »  in  the  British  Muséum,  was  discovered  by 
M'  Scott,  who  is  assistant  librarian  there.  The  let- 

1.  Veut-il  dire  ukitu  f  ukatti  signifie  nier. 


—  9d  - 

ter  was  published  bj  me  in  Notes  and  Queries,  Lon- 
don,  on  the  18"^  of  Maioh  1899.  It  Pefers  to  our 
author  by  the  name  of  N/coleta,  as  I  was  myself  iii- 
clined  to  read  it  when  I  first  saw  the  manuscript  in 
1897.  A  few  months  ago  I  saw  a  récent  manuscript  in 
Biscaya  in  which  an  initial  N  had  a  great  resem- 
blance  to  an  M.  Sainthiil  says  that  the  MS  had  been 
lying  at  Exeter  since  aboiit  1654,  that  thé  author  was 
the  only  poet  in  Biscaya,  that  his  «  Dialogues  (though 
only  the  first  of  them  has  survived). . .  are  the  same 
n'ith  those  in  Minshewes  Dictionary  ».  In  ail  copies 
ofthe  3  prinled  éditions  of  the  Modo  Brève,  and  in 
ail  catalogues  in  which  it  is  mentioned,  the  authors 
name  must  perhaps,  therefore,  be  written  Nicoleta 
hence  forward.  Some  mention  of  him  may  be  found 
in  the  archives  of  the  City  or  Ghurches  of  Bilbao. 
Don  J.  M.  Bernaola,  a  priest  dweliing  at  Durango, 
wrote  to  me  as  follows  :  «  En  el  libro  de  la  Gofradia 
de  la  Piedad  de  la  parroquia  de  Santiago  en  el  aflo 
1631  aparece  como  cofrade  el  Licenciado  Micoleta.  » 
So  it  is  dou])lful  therefore  if  he  is  M  or  N.  It  may 
be  that  Saint  Hill  in  his  letter  was  writing  from  me- 
mory,  &  at  the  end  of  some  years  made  a  mistake 
about  the  initial  letter  of  the  poets  name.  Some  part 
of  the  Modo  Brève  is  in  Saint  Hills  writing.  Ile  himself 
States  that  he  perfected  it.  Further  on  he  speaks  of 
dialogue  in  the  singular  number.  The  Spanish  text 
ofthe  Dialogo  Primero,  which  the  author  evidently 
meant  to  hâve  successors.  as  he  introduces  it  with 
the  leading  dialogos  in  the  original,  is  to  be  found 
at  the  beginning  of  the    «  Pleasant   and   Delightful 


-  lÛÛ  - 

Dialogues  in  Spanish  and  English  etc.  by  John  Miii- 
sheu  Professer  of  Languages  in  Londoti,  Printed 
at  London  by  lohn  Haviland  for  Edward  Blount. 
1623».  This  work  will  be  found  at  the  end  of  «  A 
Dictionary  in  Spanish  and  English:  London,  1623  » 
by  the  same  author.  Of  this  volume  a  copy  may  be 
seen  in  the  Bibliothèque  Nationale,  Paris,  with  the 
cote  «  Inventaire  Réserve  X  258  ».  It  would  be  a 
good  exercise  for  some  Biscayan  clergyman  to 
translate  the  rest  of  Minsheus  dialogues  as  well  as,  if 
not  better  than,  Nicoleta  did  the  first.  But  the  Bis- 
cayans  hâve  not  yet  translated  the  only  good  poet 
that  Biscaya  lias  produced,  Ercilla,  who  wrote  in 
Castillan,  as  D.  ArturoCampionhas  remindedtherea- 
ders  of  the  latest  volume  of  Biscayan  poetry  entitled 
«  Felipe  Arrese  ta  Beitiak  Eginiko  Ama  Euskeriaren 
LiburuKantaria.Bilbon.  José  Astuy-ron  Moldetegian 
1900  an  »,  published  in  October.  In  this  the  author, 
besides  committing  a  few  grammatical  blunders,  (^i: 
placing  his  grief  for  his  wifes  death  in  his  stomach 
[sabelan)V  states  that  Basque  is  an 'unaccented  lan- 
guage!  An  inspection  of  Nicoletas  manuscript^  or  of 
many    of  the    old  printed    books   in    Basque,  would 

1 .  From  Basquish  Sabcl  =  hellfi  cornes  the  name  of  a  big 
belliet  fish  that  fréquents  the  coasts  of  Portugal  and  Spain, 
peroaps  also,  sabela  =  una  especie  de  gusano,  rechrded  in  the 
Dictionary  of  José  Cabs^llero. 

2.  Since  described  this  manuscript  in  the  R.  de  L.  it  has  been 
■  honoured  by  being  placed  in  a  separate  binding.  M.  Owen  Brig- 
stocke,  whose  book-plate  it  contains,  was  the  son-in-Ia^  of  Sir 
T.  Browne,  the  well-known  author,  to  whom  M.  S.  S'  Hill  sent 
it*  From  the  coat   of  arms  on  the  seal  of  this  gentlemans  letter 


—  101  - 

convince  the  best  living  Biscayan  bard  that  he  wsa 
niistaken.  It  appears  that  the  Barcelona  édition  of 
the  Modo  Brève  is  biitthe  2"^  I  foundthere  last  siim- 
mer  a  brochure  of  91  pages,  produced  (as  a  note  at 
the  foot  of  p.  2  imbooks),  at  the  «  Imp.  yLibreria  de 
Y.  Dorca.  Gerona,  1880  ».  Page  1  bears  the  title. 
Modo  Brève,  para  (sic)  aprender  la  lengua  Viscayna. 
In  this  publication,  which  may  be  seen  at  the  British 
Muséum,  Nicoletas  work  occupies,  pages  1-37.  P.  38 
is  blank.  There  foUowtwo  pages  of  Erratas  y  E.vpli- 
caciones.  Pages  41  to  91  contain  a  Suplementos  al 
Diccionario  trilingiie  del  P.  Larramendi,  escritos 
en  1746  por  el  P.  Fr.  José  de  Maria  Carmelita  Des- 
calzo  ».  P.  41  bears  this  heading  &  a  brief  introduc- 
tion signed  Fidel  Fita.  The  same  signature  closes 
the  book  on  p.  91.  Fromthe  manuscriptofFriar  José 
de  Maria,  better  known  by  his  secular  name  Ara- 
quistain,  still  existing  in  the  Library  of  the  Royal 
Academyof  History  at  Madrid,  a  useful  supplément 
to  the  Dictionary  of  Anibarro  might  be  compiled.  It 
has  been  published,  with  some  inaccuracies,  by 
Don  R.  M.  Azkue,  in  his  review  Euskalzale  which 
was  suppressed  owing  to  the  opposition  of  the  civil 

Governor  of  Biscaya. 

Edward  Spencer  Dodgson. 
Paris,  23  November  1900. 

to  Sir  Tboraas  it  may  be  possible  to  identify  his  family.  By 
«  Heyling  »  M.  S'  Hill  referred  not  to  Hayling  iland,  but  to  Peter 
Heylyns  Mixpô/.orr[jio;  (Oxford,  1625,  etc.)  and  Cosinoc/rapliic 
(London,  1652,  etc.  in  which  there  is  a  curions  description  of 
Biscaya,  Guipuscoa  and  Navarre. 


BIBLIOGRAPHIE 


D'  Alfred   Mercier.   Étude  sur  la  langue[créole  en 
Louisiane  {S.  t.  1.  ni  d.),  19  p.,  pet.  in-8°. 

Cette  petite  notice,  qui  doit  être  fort  rare  et  fort  peu 
connue,  est  extrêmement  instructive.  L'auteur  y 
expose  d'abord  comment  se  sont  formés  les  patois 
créoles.  Le  Nègre  d'Afrique,  débarqué  dans  nos  vieilles 
colonies  françaises,  s'est  trouvé  en  présence  de  gens 
dont  il  lui  fallait  impérieusement  exécuter  les  ordres: 
il  a  donc  mis  toute  son  attention  à  écouter,  à  deviner, 
à  comprendre  le  langage  de  ses  maîtres,  et  pour  leur 
répondre,  il  a  fabriqué,  autant  que  le  lui  permettaient 
ses  facultés  natives,  un  idiome  artificiel  que  les  maîtres 
apprirent  aussi  pour  plus  de  commodité.  Les  enfants 
de  la  maison,  nourris  et  soignés  par  les  Négresses, 
parlèrent  créole  avant  de  parler  français.  Le  créole 
franc.o-louisianais  se  parle  encore  à  la  Nouvelle-Orléans 
et  dans  les  campagnes  environnantes  où  l'anglais 
cependant  commence  à  l'attaquer  vivement.  Mais,  par 
parenthèse,  quelle  preuve  nouvelle  de  la  puissance 
colonisatrice  de  la  France! 

Le  Nègre, comme  cela  est  naturel,  simplifie  la  gram- 


—  103  — 

maire.  Il  supprime  le  verbe  être  et  dit  mo  contan  «  moi 
content  »,  pour  «je  suis  content  »  :  il  évite  également 
avoir:  H  pa  peur  «  lui  pas  peur  »,  pour  «  il  n'a  pas 
peur  »  ;  il  n'a  pas  besoin  de  prépositions  ou  de  con- 
jonctions :  ma  lé  di  Madam  vou  la  «  moi  aller  dire 
Madame  vous  là,  »  pour  «  Je  vais  dire  à  Madame  que 
vous  êtes  là  »;  il  assimile  fort  logiquement  le  génitif  à 
l'adjectif,  et  dit  mézon  docter  pour  «  la  maison  du 
docteur  ».  M.  Mercier  signale  le  fait  bien  connu  de 
l'article  incorporé  dans  le  nom  ain  larue  «  une  rue  », 
mo  labouche  «  ma  bouche  »,  et  il  rappelle  fort  à  pro- 
pos nos  lendemain,  lierre,  luette;  les  Algonquins 
avaient  ainsi  pris  le  mot  mon  chapeau  pour  désigner 
un  couvre-chef  quelconque  et,  dans  le  basque  vulgaire 
de  Saint-Jean-de-Luz,  on  dit  couramment  maseurak 
«  les  ma-sœurs,  les  religieuses  ».  M.  Mercier  signale 
aussi,  au  point  de  vue  phonétique,  d'intéressantes 
métathèses  :  dromi  «  dormir  »,  garli  «  galerie  »;  il 
note  la  chute  du  r:  apé  «  après  »,  la  simplification  de 
UQW  i  :  torti  «  tortue  »,  de  eu  en  è,  et  de  /  en  z  après  a, 
oUy  é:  manzé  «  manger  »,  zalon  «  jalon  »,  etc.  Les 
mots  de  plus  de  trois  syllabes  sont  réduits  :  baracé 
pour  «  embarrassé  »,  blîé  pour  «  oublier  ».  La  pos- 
session est  indiquée  le  plus  souvent,  non  plus  par 
l'adjectif  possessif  ou  par  le  génitif,  mais  par  le  datif: 
ziés  à  moin  «  mes  yeux  ». 

M.  Mercier  a  plus  particulièrement  étudié  le  verbe  ; 
mais  il  émet  cette  assertion  trop  souvent  répétée  et 


—  104  — 

inexacte  qu'à  proprement  parler  il  n'y  a  qu'un  seul 
verbe,  être.  Ce  n'est  pas  le  lieu  de  montrer  que  cette 
conception  est  absolument  fausse.  Mais,  il  faut  retenir 
que  le  Nègre,  supprimant  et  réduisant  les  formes 
grammaticales,  employant  l'infinitif  comme  thème  ver- 
bal unique,  le  prend  nécessairement  pour  indiquer  le 
passé,  qui  est  le  temps  le  mieux  défini,  et  compose  le 
présent  et  le  futur.  Pour  le  présent,  il  procède  à  la 
façon  de  l'anglais,  mais  use  d'une  préposition  au  lieu 
du  participe  présent  :  je  suis  après  dîner  {après  ayant 
le  sens  de  à  même,  occupé  à)  pour  «  je  dîne  »  ;  pour 
le  futur,  il  prend  l'auxiliaire  aller  :  «  je  chanterai  » 
s'exprime  par  «  je  vais  chanter  ».  De  sorte  que  les 
trois  temps  seraient  :  mo  apé  dinin  «  je  dîne  » ,  mo  vint 
«  je  suis  venu,  je  vins  »  et  mo  va  chanté  «  je  chan- 
terai »  ;  mais,  pour  plus  de  facilité,  les  formes  se 
contractent  et  l'on  a  mapé  dinin,  mo  vint,  ma  chanté. 
C'est  très  suffisant.  Pour  la  première  personne  plu- 
rielle de  l'impératif,  il  emploie  un  auxiliaire  spécial, 
anon  «  allons  »  :  anon  hoi  «  allons  boire,  buvons  ». 

La  brochure  se  termine  par  un  conte  en  créole, 
suivi  d'une  traduction  française  littérale  :  le  mariage 
de  la  tortue  qui  a  vaincu  le  chevreuil  à  la  course.  J'y 
relève  quelques  mots  intéressants:  tchor  «cœur  »,cila 
«  celui-là  »,  chivreil  «  chevreuil»,  nouite  «  nuit  »,  son^ 
g  lé,  jonglé,  «réfléchir»  popa  «papa,  père»,  ow^oie  «vous, 
vous  autres  »,  cocodri  «  crocodile  »,  zavoca  «  avocat  », 
kichoje  «  chose,  quelque  chose  »,  nizote  «  nous,  nous 


—  105  — 

autres  »,  ki  poti  fé  «  quoi  pour  faire,  ce  qu'il  y  a  à 
faire  »,  mékié  «  métier  »,  dolo  «l'eau  »,  diyor 
«dehors  »,  aïen  «  rien  »,  etc.  Je  remarque  aussi  le  cri 
go  «  allez  ». 

Dans  le  curieux  recueil  de  proverbes  créoles,  Gombo 
zhéhes  publié  à  New-York  en  1885,  M.  Lafcadio  Hentz 
recommande  le  roman  créole  de  M.  le  D'  A.  Mercier, 
lea  Saiiil-lbars  ;  j'ai  le  regret  de  ne  pas  connaître  cet 
ouvrajjfe.  Julien  Vinson. 


G.  F.  Abbott,  B.  A.,  Songs  of  modem  Greece,  with 
introductions,  translations  and  notes.. .  Cambridge: 
al  the  IJniversity  Press.  1900,  xii-308  p.,  in-8°. 
Prix  :  5  sh. 

M.  Abbott  otïre  au  public,  en  un  volume  élégant  et 
joliment  imprimé,  une  série  de  chansons  populaires 
grecques,  traduites  et  commentées,  qu'il  a  lui-même 
recueillies,  dans  un  récent  voyage  en  Orient.  Sa  prin- 
cipale source  paraît  avoir  été  un  certain  Barba  Stèrios, 
vivant  à  Salonique.  Le  Père  Stèrios,  nous  dit  M.  A., 
était  aveugle  et  vieux,  tout  comme  Démodocus.  Mais, 
moins  heureux  que  son  prédécesseur  de  l'Odyssée,  ce 
barde  n'était  pas  l'hôte  des  rois  ;  c'était  seulement 
devant  des  gens  de  basse  condition,  qu'il  chantait 
les  xXéa  àvâpwv,  en  s'accompagnant  d'un  instru- 
ment, qui  rappelait  la  XOpa  classique,  par  sa  forme 
et  par  son  nom.  Cette  lyre  n'était  sans  doute  qu'un 
vulgaire   bouzoùki,  et   le    nouveau   Démodocus  ne 


—  106  — 

différait  pas,  j'imagine,  des  innombrables  musiciens 
ambulants,  qu'on  rencontre  en  Grèce  et  ailleurs.  Pen- 
dant que,  toutentier  à  ses  souvenirs  homériques,  M.  A. 
s'efforçait  de  recueillir  les  vers  qui  tombaient  de  la 
bouche  de  cet  aède,  le  Père  Stèrios  songeait:  «  Un 
Xépâoç!  Bonne  affaire!  Il  faudra  que  j'augmente  mon 
répertoire.  » 

Le  soir,  en  rentrant  chez  lui,  le  Père  Stèrios  s'em- 
pressa de  chercher  ou  de  faire  chercher,  dans  des 
livres,  les  chansons  qui  pourraient  plaire  au  Xôpôoç, 
et,  comme  le  Père  Stèrios  avait  du  goût,  il  lui  ap- 
porta, entre  autres  choses,  un  fragment  de  Valaoritis\ 
ks  Deux  Fleurs  de  J.  Typaldos'  et  Nnconnue  de  Solo- 
mos',  que  M.  Abbott  eut  le  tort  de  ne  pas  reconnaîlre. 
L'extrait  de  Valaoritis  lui  arrache  même  ce  cri  d'admi- 
ration :  «Il  y  a,  dans  cette  pièce,  une  profondeur  et  une 
sincérité  de  sentiment,  qui  en  font  une  composition 
remarquable;  sa  pureté  etsaïraîche  simplicité  dénotent 
un  produit  authentique  de  la  muse  populaire  non 
sophistiquée  (unsophisticated).  » 

Où  le  Père  Stèrios  a-t-il  trouvé  ces  quelques  poésies? 
Assurément  pas  dans  les  ouvrages  mêmes  des  auteurs. 
Les  œuvres  de  Solomos,  de  Valaoritis  et  de  Typaldos 

1.  Abbott,   p.  164-167;   'Apiux.  BaXatopÎTou  Hoiï^fJ^aTa,  Athènes, 
1891,  t.  1,  p.  211-212. 

2.  Abbott,  p.  116-119;  Uoi-^^azot.  oiaçopa  'louXîou  TuTrâXoou, 
Zante,  1856,  p.  107-111. 

3.  Abbott,  p.  128-131  ;  "A-rrotvTa  Atovuaîou  SoXiojjioù,  Zante,  1880, 
p.  128-129. 


—  107  — 

ne  courent  malheureusement  ni  les  salons,  ni  les  cam- 
pagnes; le  Ka^afjitaç  (Almanach)  de  l'année,  l"Ov£i- 
poxptT7)ç  (Clé  des  songes),  T'EpcoTÔxpiToç  et  quelques 
anthologies,  plus  ou  moins  bien  faites,  constituent  à 
peu  près  toute  la  nourriture  IntelieclueMe  des  gens  du 
peuple,  en  Grèce.  Remarquons,  d'autre  part,  que,  dans 
le  livre  de  M.  Abbott,  nnconnue  de  Solomos  est  re- 
produite avec  des  fautes:  v.  10,  t'  cbpata  xàXXT),  au 
lieu  de  Ta  (bpata  tou  xàXXr)  ;  v.  18,  )(tiXioi,  au  lieu  de 
yeika  rimant  avec  (pùXXa;  v.  20,  poôaviôtç,  au  lieu  de 
poôaptâç;  v.  24,  utéXvei,  au  lieu  de  aTépvst;  v.  25, 
(xaXXicov  =  (jLaXXicbv,  au  lieu  de  pLaXXtwvs;  enfin,  deux 
vers  ont  été  supprimés  dans  la  dernière  strophe,  ce  qui 
la  rend  incompréhensible.  Or,  je  trouve  la  même 
pièce,  avec  les  mêmes  fautes,  dans  une  anthologie  po- 
pulaire, publiée  en  1898,  à  Athènes'.  Nous  sommes 
sur  la  voie.  Si  ce  n'est  pas  cette  anthologie,  qui  a  servi 
de  type,  c'est  du  moins  sa  proche  parente. 

Prenons  maintenant  les  autres  chansons  recueillies 
par  M.  A.  Le  n**  1  (p.  18)  se  retrouve,  depuis  le 
titre  jusqu'au  dernier  mot,  dans  cette  même  anthologie, 
p.  124;  le  n°  2  aussi,  et  dans  les  mêmes  condi- 
tions (Abbott,  p.  22;  Nicolaïdis,  p.  123);  le  n°  3 
aussi  (Abbott,   p.  26;   Nicolaïdis,  p.  122);  le  n°  5 


1.    'itoâvvo'j   NixoXaioou     'EXÀtqvixtj    àvOoXoYia  tJtoi   SuXXoyf,   zio^ 
iXXTfjvtxôJv    âafjLâxwv,   èv   'AOv/atî.   TuTzo'(Çia.^z~.ow    xal    ^lêXiOTOoXsïov 
'Iwivvo'j  NixoXaîooo,  42,  ôoô;  Upa^ixÉXoo;,  1898,  8-500 p.  in-8".  Sur 
e  titre  est  le  portrait  du  général  Smolenski. 


~  108  — 

aussi  (Abbott,  p.  34;  iNicolaïclis,  p.  120).  De  même 
pour  le  n"  6  (Abbott,  p.  38  ;  Nicolaïdis,  p.  123); 
pour  le  n°8  (Abbott,  p.  48;  Nicolaïdis,  p.  117, 
avec  un  nom  d'auteur:  G.  Kastriotis  Skenderbey); 
pour  le  n"  9  (Abbott,  p.  34;  iNicolaïdis,  p.  84). 
Et  non  seulement  les  titres  et  le  texte  sont  identiques, 
mais  l'ordre  des  chansons  a  été  à  peine  interverti.  Je 
pourrais  poursuivre  cette  énumération,  mais  j'aurai 
plus  vite  fait  d'indiquer  quelles  pièces  ne  sont  pas 
communes  aux  deux  ouvrages.  Ce  sont,  pour  la  pre- 
mière partie,  les  n°'  4,  7,  11,  12,  13,  14,  et, 
pour  la  seconde  partie,  4,  7,  11, 16  (deuxième  pièce), 
19,  20,  22,  25  à  35.  Les  cent  distiques,  qui  forment  le 
n"  36,  sont  tous,  mot  pour  mot,  dans  ladite  antho- 
logie. De  ces  numéros  il  convient  de  retrancher  11  et 
12,  puis  7, 11,  19,  20  et  22,  que  je  retrouve,  intégra- 
lement aussi,  dans  un  autre  recueil  similaire',  aux 
pages  178,  190,  509,  336,  498,  501  et  507.  Restent 
donc  les  n°"  4,  7,  13,  14,  puis  4,  16  (deuxième 
pièce  ;  en  langue  savante!)  et  25  à  35,  dont  les  livres 
que  je  possède  ne  me  permettent  pas  de  préciser  l'ori- 
gine. 

La  plupart  de  ces  chansons  ont  été  reproduites  avec 
une  telle  exactitude  par  M.  A.,  qu'elles  ne  peuvent  pas 
avoir  été  récitées.  Non  seulement  tous  les  mots  sont 
pareils,  mais,  lorsqu'il  y  a.  dans  l'original,  une  faute 

1.   'AvOoXoY'a  TTOiYjtix-fi  -^'toi   SuXXoyrj  exXexTwv  âaijLâ'tWv   ûizo  N  ■ 
MtyaXoTTOjXou,  Athènes,  1888,  '.ç'-544  p.  in-8". 


—  109  — 

contre  la  phonéliqne  du  grec  vulgaire,  ce  qui  arrive  à 
chaque  instant,  cette  faute  est  scrupuleusement  répétée 
dans  le  volume  de  .M.  A.:  Nicolaïdis,  p.  12â,  1.  1, 
xal  (7Tà  jBouvà  ^=  Abbott,  p.  34, 1.  12,  xat  'ç  xà  jBouvâ; 
mais  Nicolaidis,  p.  123, 1.10,  x' sic  Ta  (3ouvà  =  Abbott, 
p.  38,  1. 10,  x'sîç  Ta  j3ouvà.  Les  faits  de  ce  genre  sont 
innombrables.  Voici  les  deux  premiers  distiques  de 
M.  A.  et  les  distiques  correspondants  de  Nicolaidis  : 

Nicolaidis,  p.  443  : 

'AyâiTT,(ja  -'àTtôÀauaa  !  xovte'jw  v'  aTToOivco, 

Kaî  aj  6à  t,<j'  Tj  àtpopjJiTj,  ttoù  xr^v  ^wrj  jjlou  J(^âva). 

Abbott,  p.  212: 

'AyâTnrjffa  t'  àjrôXauaa  ;  xovtîuw  v'  àTToOâvoj, 

Kat  ffù  6à  fja'  •/]  àœopiJiTj  'tco'j  ir^v  Çw/j    jxou  yi^Ko. 

Nicolaidis,  p.  444  : 

"AyY^^^'J^  ^■'^'  "^o'J?  oùpavo'j;  porjOàTÉ.  [jie  x'  £[xiva, 
Hou  avai^a  xal  •/,atoi>]JLat  y^^  ^Évr^^  ;j.àvaî  'Yévva. 

Abbott,  p.  212  : 

"A^YÊ^ot  aTr'  'zo'jç  oùpavo'ji;  por)Oâxc  [jl£  vC  £[jt.£(va), 
'Hoù  avai^^a  xxl  xaiou[j.at  'là  $£vr,ç  {Jiâvaî  ^(hvoi'. 

Dire  de  mémoire  des  chansons  grecques,  avec  une 
précision  aussi  mathématique,  constituerait  un  tour  de 
force,  qu'aucun  Grec  n'est  capable  d'exécuter.  Chan- 
sons et  distiques  ont  été  copiés. 


—  110  — 

Je  ne  suspecte  pas  la  bonne  foi  de  M.  A.  S'il  avait 
lui-niême  emprunté  ces  chansons  aux  anthologies  dont 
j'ai  parlé,  il  eût,  j'en  suis  convaincu,  indiqué  ses 
sources,  et,  en  tout  cas,  il  n'aurait  pas  considéré  le 
Ii7){ji,avTpov  de  Valaoritis  comme  un  chef-d'œuvre  de 
poésie  populaire,  puisque,  dans  les  deux  anthologies  ci- 
tées, cette  pièce  de  vers  est  précédée  du  nom  de  l'auteur. 
D'autres  détails,  delangue  principalement,  sur  lesquels 
je  n'insite  pas,  me  confirment  dans  cette  opinion.  Ce 
serait  donc  le  pseudo-Démodocus,  qui  aurait  induit  en 
erreur  M.  A.,  en  lui  offrant  de  lui  faire  transcrire,  pour 
plus  de  commodité,  les  morceaux  de  son  répertoire. 

Pouvons-nous  le  lui  imputer  à  crime?  Je  ne. pense 
pas.  Le  Père  Stèrios  n'entendait  rien  à  nos  finesses 
scientifiques.  On  lui  demandait  des  chansons,  il  en  a 
donné.  C'était  pour  lui  une  question  de  commerce; 
en  bon  marchand,  il  n'a  pas  été  assez  sot  pour  dire 
d'où  il  tenait  sa  marchandise.  Son  admirateur  a-t-il 
même  songé  à  le  lui  demander?  Il  est  heureux  que 
M.  A.  n'ait  pas  entrepris  de  recueillir  des  contes  popu- 
laires. On  lui  aurait  servi,  avec  les  meilleures  inten- 
tions du  monde,  toutes  les  Mille  et  une  Nuits;  car  elles 
aussi,  sous  le  nom  de  t]  XaXtpLa,  courent  les  villes  et 
les  villages,  en  éditions  à  bon  marché. 

Dans  cette  affaire,  le  client  a  péché  par  naïveté  et 
par  inexpérience.  Il  n'est  pas  besoin  d'être  grand  clerc 
en  grec  moderne,  pour  distinguer  une  chanson  po- 
pulaire d'une  autre,  qui  ne  l'est  pas;  la  langue,  à  dé- 


—  111  — 

faut  du  sujet,  est  un  excellent  critérium.  Une  strophe 
comme  la  suivante  (Abbott,  p.  108): 

'\ï  navayta  [Jiou,  xa(jL£  xo  Oa'j;jt.a 

Kaî  va  <i£  xdtjjLU)  sva  àpvt, 
"OX'  àoTrjfxévto'  va  lo  >cp£|aâ(TW 

E?ç  TTjv  £'.y.ôva  crou  ttj  asTiiï^, 

ne  peut  être  qu'un  pastiche,  puisque  GaOfjia,  sva  âpvî, 
siçTYjv,  sediraient,  en  grec  vulgaire,  Gâfjia,  ëv'  âpvî,  (jtyjv, 
et  que  ceuTT)  n'est  populaire  ni  au  point  de  vue  pho- 
nétique, ni  au  point  de  vue  lexicologique.  Quand  un 
paysan  vous  récite  une  strophe  semblable,  il  est  cer- 
tain qu'il  n'a  pas  compris  ce  que  vous  réclamez  de 
lui.  Si  vous  n'êtes  pas  à  même  de  le  lui  faire  immé- 
diatement observer,  vous  vous  exposez  à  des  mé- 
comptes. 

Malheureusement  pour  lui,  l'auteur  ne  possède  que 
des  idées  nébuleuses  sur  la  grammaire  du  grec  actuel. 
Son  orthographe  se  ressent  de  celte  insuffisance  de 
connaissances  précises,  etpasn'étaitbesoin,  pourédifier 
le  lecteur,  d'étymologies,  du  genre  de  celles-ci  : 
(jiaXXcbvco^  se  quereller,  de  (xaXXov,  plus;  ■Kou'ki,  oiseau, 
de  l'italien  «polio  »,  poulet;  yàïâapoç,  âne,  de  àyav 
ôépco,   frapper  trop. 

Les  chansons,  qui  composent  ce  volume,  m'ont  paru 
traduites  avec  élégance  et  précision,  autant  du  moins 
que  j'en  puis  juger.  J'ai  cru  cependant  y  relever 
quelques  contre-sens  :  x^P<^  (P*  ^^'  ^'-  ^)  =  ^*^'<^»  ^t 
non  plaine;  aîôepa  (p.  48,  v.  4)  =^  fer  en  général,  et 


—  112  — 

non  mors;  ^uy^oyiôç  (p.  76,  \.  Il)  =  fils  adoplifel 
non  lieutenant;  vepôêpacToç  (p.  120,  v.  12)  =  cuit  à 
leau,  ei  non  à  demi  mil;  uaXafjLt^co  (p.  148,  v.  13) 
=  es  pal  mer,  caréner,  to  careen,  et  non  gréer  ; -Kcn-zepô 
(p.  1 70,  V.  12)  =  poutre,  solive,  et  non  pétrin;  uxpoOyya, 
(p.  178,  V.  10)  =  enclos.  Corriger:  p.  136,  v.  15, 
aaÔTïCùGBç  en  crxÔTwas;;  p.  !224,  v.  1 ,  [xè  en  aè;  p.  234, 

V.  13,   ^UV£piaTOÛ(Jl£   en  ^£(Tl»V£ptaTOÛ(J.£. 

Hubert  Pernot. 

La  Chi/lrocryplographie  à  transmutations  numériques 
variables,  par  Emile  Delage.  Paris,  McM,pel.  in-12 
de  64  p . 

Vers  1856,  mon  père,  Conseiller  auditeur  à  la  Cour 
de  Pondichéry  et  en  même  temps  Conservateur  de  la 
Bibliothèque  publique  et  des  anciennes  archives  de 
l'Inde  française,  me  montra  deux  ou  trois  alphabets 
singuliers  formés  de  chiffres,  de  lettres  et  de  signes 
divers  qui  constituaient  ce  qu'on  appelle,  en  diploma- 
tique, un  chiffre.  Cet  alphabet  avait  servi  à  la  corres- 
pondance secrète  de  Bussy  avec  Sufîren  et  avec  les 
commandants  des  divers  détachements  envoyés  dans 
le  pays.  Je  pris  là  le  goût  de  la  cryptographie  que 
développa  peu  après  la  lecture  du  Scarabée  d'or  d'Ed- 
gard  Poë.  Mais,  depuis,  d'autres  études  ont  absorbé 
mon  attention,  et  j'avais  un  peu  oublié  l'art  de  cacher 
la  pensée  sous  des  symboles  conventionnels  et  l'art, 
plus  intéressant  encore,  de  déchiffrer  les  écritures  se- 


—  113  — 

crêtes.  Il  y  a  cependant  une  certaine  analogie  entre  ce 
déchiffrement  et  la  lecture  des  inscriptions  en  langues 
inconnues.  Dans  l'un  et  l'autre  cas,  il  faut  avant  tout 
découvrir  ou  retrouver  la  base,  la  clé  du  système. 

J'ai  longtemps  cru  que  le  procédé  du  tableau  de 
Vigenère,  celui  qui  consiste  à  transcrire  les  mots 
lettre  par  lettre  à  l'aide  d'un  mot  conventionnel  inscrit 
et  répété  au-dessus  de  la  phrase  à  cryptographier,  en 
procédant  comme  pour  la  recherche  d'un  produit  dans 
la  table  de  Pythagore,  donnait  un  résultat  absolument 
indéchiffrable.  Mais  voici  que  j'apprends,  par  la  très 
intéressante  brochure  de  M.  Delage,  qu'il  n'en  est 
rien  et  qu'on  arrive  parfaitement  à  lire  cette  écriture- 
là.  Il  fallait  donc  trouver  mieux.  M.  Delage  l'a  cherché, 
et  il  me  semble  qu'il  y  a  réussi. 

Ce  qui  plaît  tout  d'abord  dans  cette  brochure,  c'est 
son  caractère  méthodique.  L'exactitude  des  faits  et  la 
sûreté  du  procédé  sont  garanties  par  la  netteté  des  dé- 
finitions et  la  précision  des  appellations.  L'auteur  dis- 
tingue d'abord,  comme  il  convient,  la  littérocryptogra- 
phie  et  la  chif/rocryptographie,  celle-ci  étant  à  ses  yeux 
bien  supérieure  à  l'autre  à  tous  les  points  de  vue.  Son 
système  consiste  dans  l'emploi  des  cent  premiers 
nombres,  écrits  de  01  à  00,  et  correspondant  aux 
lettres  de  l'alphabet  ainsi  qu'à  un  certain  nombre  de 
Syllabes  et  de  petits  mots  d'usage  courant  {an,  ble,  et, 
oui,  lion,  vous,  etc.)  :  la  correspondance  des  chiffres  et 
des  lettres  ou  syllabes  forme  un  tableau  que  M.  Delage 


—  114  — 

nomme  le  transmutographe,  et  dont  chacun  peut  à 
sa  convenance  personnelle,  intervertir  les  éléments. 
Avec  une  clé  conventionnelle  aussi  longue  et  aussi 
fantaisiste  qu'on  voudra,  avec  un  transmutographe 
ainsi  variable,  on  peut  défier  les  curieux  les  plus 
obstinés.  Au  surplus,  on  peut  compliquer  la  corres- 
pondance, en  employant  une  orthographe  simplifiée, 
phonétique,  irrégulière. 

Quand  on  a  transmuté  sa  clé  en  chiffres,  on  l'ins- 
crit au-dessous  de  la  phrase  secrète  également  trans- 
mutée, puis  on  fait  la  soustraction,  en  négligeant  le 
dernier  report  à  gauche  ;  c'est  la  différence  qui  est  ex- 
pédiée au  correspondant.  On  pourrait  aussi  bien  faire 
le  produit,  le  total  ou  le  quotient,  mais  c'est  moins 
commode.  On  pourrait  aussi  répéter  deux  ou  trois  lois 
successivement,  avec  la  même  clé,  ces  opérations.  On 
peut  intercaler  çà  et  là  des  nombres  de  fantaisie.  Bien 
entendu,  les  chiffres  se  suivent  sans  aucun  espace  entre 
eux.  M.  Delage indique  aussi,  comme  moyen  nouveau, 
celui  qui  consiste  à  extraire,  des  nombres  obtenus,  leur 
racine  carrée  ou  leur  racine  cubique,  en  faisant  con- 
naître au  correspondant  le  reste;  s'il  y  a  lieu.  Les  com- 
binaisons et  les  conventions  sont  d'ailleurs  infiniment 
variables. 

Le  système  de  M.  Delage  a  encore  un  autre 
avantage  qui  sera  fort  apprécié,  c'est  de  diminuer  en 
définitive  la  longueur  des  mots  et  de  faciliter  par  suite 
les  correspondances   télégraphiques.    Mais  nous  [en 


—  115  — 

arrivons  là  à  un  ordre  d'idées  où  je  ne  veux  pas  entrer; 
il  me  suffira  de  dire  que  M.  Delage  a  attaché  son  nom 
à  une  œuvre  dont  l'importance  est  capitale  au  point 
de  vue  commercial  :  la  rapidité,  la  simplification  et 
réconomie  d'argent  dans  les  communications  télégra- 
phiques internationales.  Il  y  a  des  pays  pour  lesquels 
on  paye  dix  ou  douze  francs  par  mot.,  et  il  y  a  des  mai- 
sons de  commerce  qui  dépensent  chaque  année  en 
télégrammes  plus  de  cent  mille  francs  I 

Julien  ViNSON. 


Us  Gaulois,  origines  et  croyances,  par  André  Le- 
FÈVRE,  P^im,  libr.  G.  Reinwald,  1900,  1  vol.  pet. 
in-8»,  203  p. 

Ce  nouveau  livre  d'André  Lefèvre  est  de  tous  points 
digne  de  ses  devanciers  :  c'est  une  monographie  aussi 
complète  que  possible  et  d'autant  meilleure  que  l'au- 
teur ne  se  cantonne  pas  dans  le  domaine  ordinaire  de 
l'histoire  :  il  appelle  à  la  rescousse  l'archéologie  préhis- 
torique, la  mythologie  et  la  linguistique.  La  question 
y  est  complètement  et  magistralement  traitée. 

Mais  le  sujet  appelle  notre  attention  une  fois  de  plus 
sur  le  problème  fondamental  des  races  primitives,  ou 
du  moins  des  races  préceltiques  de  l'Europe  occiden- 
tale. Il  est  indéniable  que  les  Indo-Européens  ont 
trouvé  sur  le  sol  qu'ils  envahissaient  des  habitants 
qui  y  étaient  établis  depuis  longtemps  déjà.  La  pa- 
léontologie conflrme  le  fait  et  montre  qu'il  y  a  eu  au 


—  116   - 

moins  deux  types  humains  successifs  dans  les  régions 
qui  ont  formé  la  Gaule,  l'Ibérie,  l'Italie,  etc.  Les  écri- 
vains anciens  nous  ont  transmis  des  noms  :  Sicanes, 
Ligures,  Ausones,  Turrhènes,  Aquitains,  etc.,  dont 
la  signification  précise  nous  est  inconnue.  Je  me  suis 
toujours  demandé,  pour  ma  part,  ce  que  cachent  ces 
appellations  variées  et  à  quelles  distinctions  réelles 
elles  correspondent:  race,  tribu,  peuplade,  d'origine 
commune  ou  d'origine  différente?  La  linguistique  n'a 
pas  assez  de  documents  pour  se  prononcer.  C'est 
comme  la  phrase  bien  connue  que  rappelle  notre 
collaborateur-  Tu  cellice,  velsimavis,  gallice  loquere. 
S'agit-il  de  deux  langues  différentes,  de  deux  patois, 
de  deux  accents  seulement?  La  dernière  hypothèse  est 
la  plus  probable,  car  il  est  difificile  d'admettre  qu'on 
parlât,  à  côté  du  latin,  deux  idiomes  originaux  dans 
la  même  localité  ;  l'orateur,  d'ailleurs,  s'était  excusé 
préalablement  de  la  rusticité  de  son  latin.  Nulle  part 
et  jamais,  les  mots  n'ont  eu  un  sens  absolu. 

Ce  qui  me  préoccupe  dans  l'identification  de  ces 
noms  ethnographiques,  c'est  la  relation  qu'elle  pré- 
sente avec  le  problème  basque.  Et  plus  je  vais,  plus 
je  demeure  convaincu  que  la  langue  basque  est  tout  à 
fait  isolée;  c'est  une  précieuse  épave  des  innombrables 
langages  nés  spontanément  aux  temps  préhistoriques 
sur  toute  la  surface  du  globe,  partout  où  se  produi- 
sirent des  groupes  humains.  Beaucoup  de  ces 
groupes  ont  fusionné  sans  doute  et  leurs  langues  ont 


117  — 


été  mises  en  contact,  se  sont  confondues,  se  sont  pé- 
Iruites  on  supplantées.  Qui  nous  donnera  la  clé  de  ces 
diflicultés  en  apparence  insolubles  ? 

J.  VlNSON. 


Virgilo  Limouzi,  poème  inédit  de  1 748  envers  limou- 
sins burlesques.  Paris,  Ém.  Bouillon,  1899  (iv)- 
xxxvii-338  p. 

Le  26  mars  1703,  naissait  à  Limoges  un  futur  poète 
patois,  J.-B.  Roby,  qui,  entré  dans  la  Congrégation  de 
l'Oratoire,  devint  plus  tard  curé  de  Saint-Pierre-du- 
Queyrois;  il  mourut  en  176â,  après  avoir  été  précep- 
teur de  Vergniaud.  D'humeur  gaie  et  enjouée,  il  com- 
posa, paraît-il,  de  fort  jolies  chansons  patoises  et  tra- 
duisit en  limousin,  en  imitant  le  genre  burlesque  de 
Scarron.  les  deux  premiers  livres  de  V Enéide.  Cette 
traduction,  faite  en  1748,  et  conservée  jusqu'en  ces 
derniers  temps  par  plusieurs  copies  manuscrites,  est 
aujourd'hui  publiée  en  un  fort  élégant  volume,  par  les 
soins  de  M.  Hubert  Texier,  avocat. 

Le  livre  doit  être  recommandé  comme  un  intéressant 
spécimen  linguistique;  mais  il  m'est  impossible  de 
partager  l'enthousiasme  de  l'éditeur.  Le  burlesque 
tombe  souvent  dans  le  grossier  et,  en  tout  cas,  le  poème 
qu'on  nous  met  sous  les  yeux  est  si  long  que  la  lecture 
en  devient  fatigante  et  fastidieuse. 

M.  Texier  a  joint  au  texte  patois  une  traduction 
française  littérale.  Il  cherche,  à  la  fin  de  la  préface,  à 


—  118  — 

donner  quelques  indications  sur  la  prononciation  li- 
mousine, et  ses  indications  sont  quelquefois  véritable- 
ment naïves,  comme  par  exemple  lorsqu'il  nous  dit  que 
tch  et  dj  sont  inconnus  au  français'.  Il  paraît  qu'en  li- 
mousin ces  articulations  passent  à  ts  etd^s.  M.  Texier, 
pour  indiquer  la  prononciation  de  ces  deux  consonnes 
composées,  emprunte  le  passage  suivant  au  Dictionnaire 
de  Béronie  :  «  Il  n'est  pas  de  jeune  homme  qui,  pour 
s'amuser  sur  le  bord  d'une  rivière,  n'ait  lancé  en  l'air 
une  petite  pierre  plate,  qui,  tombant  dans  l'eau,  rend 
le  son  de  tse  :  c'est  exactement  le  son  de  notre  ts.  » 
C'est  aussi  compliqué  qu'inintelligible. 

Julien  ViNsoN. 


Traité  de  Prononciation  française,  théorique  et  pra- 
tique, par  Albert  Liet,  professeur  au  collège  d'Autun. 
Paris,  Boyveau  et  Chevillet,  1900,  gr.  in-8°,  (vj)- 
141  p. 

La  préoccupation  de  M.  Liet  est  évidemment  d'en- 
seigner la  manière  de  lire  exactement;  il  devait  donc 
établir  les  synonymies  d'écriture,  si  cette  expression 
nous  est  permise.  Il  devait  aussi,  et,  à  mon  avis  préa- 
lablement à  toute  autre  étude,  donner  le  tableau  gé- 
néral des  sons  et  des  articulations  de  la  langue  fran- 
çaise. 

Dans  ce  tableau,  ou  si  Ton  veut  dans  cette  liste, 
M.  Liet  a  commis  de  graves  erreurs  ou  du  moins  a 
méconnu  des  élénicuts  phonétiques  essentiels.  De  soq 


U9  - 

travail  ne  ressortent  pas  le  nombre  et  la  nature  exacte 
de  ces  éléments;  on  n'y  jipprend  pa-s,  par  exemple, 
qu'il  y  a  trois  é  et  trois  eu  en  français. 

Certaines  assimilations  sont  d'ailleurs  discutables: 
e  =  œ  =  œu  =  eu,gti=  ni,  ill  =  iy  (pas  général  en  tout 
cas);  d'autre  part,  il  n'est  pas  vrai  que  ta  ou  oua  soit 
une  diphtongue  :  dans  ces  groupes,  i  et  ou  sont  pro- 
prement y  et  w,  c'est-à-dire  semi-voyelles,  jouant  ab- 
solument le  rôle  de  consonnes. 

J.  V. 


The  96^^  report  of  the  British  and  Foreign  Bible 
Society.  London,  146,  Queen  Victoria  Street,  1900. — 
In-8,  xvj-408-232  p.,  avec  cartes  géographiques  et 
linguistiques. 

Volume  aussi  intéressant  que  les  précédents  et  qui 
montre  une  fois  de  plus  ce  que  peuvent  la  conviction 
et  l'énergie.  I.e  budget  de  l'exercice  qui  a  expiré  le 
31  mars  1900,  s'élève  au  chiffre  de  299.276  livres 
16sh.6d.  (7.481.920  fr.  60).  Le  nombre  des  idiomes 
dans  lesquels  ont  été  traduits  soit  la  Bible,  soit  le 
Nouveau-Testament,  soit  des  portions  de  l'un  ou  de 
l'autre,  est  aujourd'hui  de  373  (dont  68  par  d'autres 
Sociétés);  depuis  l'an  dernier,  il  en  a  paru  en  huit 
langues  jusqu'ici  non  représentées  sur  la  liste  :  Mau- 
resque, Pahouin,  Tigrinya,  Joro,  Galwa,  Lenakel, 
Nyoroet  Ulawa.  Une  innovation  à  louer,  c'est  l'index 
alphabétique  qui  fait  suite  à  la  table  historique  des 


—  120  — 


langues  et  qui  manquait  jusqu'ici.  Parmi  les  publica- 
tions intéressantes,  j'en  signale  27  en  caractères  en 
relief  pour  les  aveugles,  dont  une  dans  la  langue  de 
l'Uganda  I  J.  V. 


Bulletin  trimestriel  de  la  Société  des  Lettres,  Sciences 
etArtsde  Pau.  IP  série,  tome  fS\  l'Mivraison,  1898- 
1899,  gr.  in-8%  (iv)-160p. 

Livraison  remplie  tout  entière  par  le  commence- 
ment d'un  très  intéressant  travail  de  M.  A.  Dufau  de 
Maluquer  :  «  Le  pays  de  Foix  sous  Gaston  Phœbus. — 
Rôle  des  feux  du  Comté  de  Foix  en  1390.  » 

J.V. 


VARIA 


I .  —  La  question  de  l'E  muet 

J'ai  reçu,  au  sujet  de  l'une  de  mes  récentes  causeries,  une  lettre 
qui  m'a  fait  grand  plaisir,  et  qui  n'en  fera  pas  moins  à  mes  lec- 
teurs. La  voici  : 

«  Cher  confrère  et  ami, 

»  Il  faut  que  je  vous  parle  de  vos  derniers  «  Menus  Propos  ». 

»  Comme  vous  avez  raison,  avec  Gréard,  contre  G.  Paris! 
L'e  muet  est  une  des  richesses  de  notre  poésie,  soit  à  la  fin  des 
vers,  soit  au  dedans  de  l'alexandrin.  En  l'accentuant,  on  donne 
parfois  une  force  singulière  à  un  mot.  Vous  rappelez-vous  cet 
hémistiche  du  Misanthrope,  au  cinquième  acte,  dans  la  bouche 
d'Alceste  : 

Allez,  je  vous  refuse... 

»  Supprimez  l'e  muet,  c'est  plat,  sec  et  grossier.  Mettez-le  en 
relief...  Quelle  grandeur! 

»  Je  me  rappelle  qu'un  jour,  causant  avec  M"'  Rachel  dans  sa 
loge,  après  le  premier  acte  de  Phèdre,  je  lui  dis  :  «  Quelle  faute 
vous  avez  faite  dans  ces  deux  admirables  vers  : 

Ariane,  ma  sœur,  de  quel  amour  blessée 

Vous  mourûtes  aux  bords  où  vous  fûtes  laissée  ! 

»  —  Comment!  me  répondit-elle.Mais  je  lésai  dits  avec  émotion 
et  vérité!  —  Oui,  mais  sans  poésie,  sans  mélancolie!  Pourquoi? 
Parce  que  vous  avez  mis  blessé  et  laissé  au  masculin. 

»  La  prolongation  de  ces  deux  e  muets  ouvre  à  nos  yeux  des 
horizons  infinis  de  solitude  et  de  douleur.  —  Vous  avez  raison, 
me  répondit-elle,  je  dirai  ces  vers  comme  vous  les  dites...  » 

»  Bien  des  amitiés  ». 

»E.  Legouvé.  »  {Le  Temps). 


122  — 


II .  —  La  théorie  de  la  formation  des  voyelles 

M.  Marage,  docteur  en  médecine  et  docteur  es  sciences,  com- 
munique au  Congrès  des  Sociétés  savantes  (section  des  sciences) 
un  intéressant  travail  sur  cette  question,  accompagné  de  nom- 
breux graphiques  et  du  schéma  de  multiples  expériences  pour- 
suivies la  plupart  dans  le  laboratoire  du  Collège  de  France. 

L'auteur  traite  successivement  dans  son  étude  :  de  la  disposition 
de  l'appareil  vocal,  des  théories  de  Helmholtz,  de  Hermann  et  de 
Guillemin,  des  expériences  sur  la  méthode  graphique,  de  la  syn- 
thèse des  voyelles,  de  la  théorie  de  leur  formation  ainsi  que  de  la 
concordance  de  cette  théorie  avec  la  disposition  anatomique  du 
larynx  et  de  l'oreille. 

Il  termine  par  Ténumération  d'une  série  d'applications  dont 
plusieurs  revêtent  le  plus  haut  intérêt  à  la  fois  scientifique  et 
pratique. 

Suivant  M.  Marage  : 

1°  On  pourrait  modifier  les  sirènes  des  navires,  suivant  un 
procédé  qu'il  indique^  et  l'on  obtiendrait  des  signaux  différents, 
ce  qui  permettrait  un  alphabet  international  ; 

2°  On  pourrait  former  un  acoumètra  type  avec  une  sirène 
construite  dans  des  conditions  déterminées; 

3°  Les  cornets  acoustiques  ordinaires  fatiguent  l'oreille,  parce 
qu'ils  modifient  les  groupements  que  l'oreille  est  destinée  norma- 
lement à  recevoir  ; 

4°  D'après  Lefort,  on  peut  chanter  n'importe  quelle  voyelle  sur 
n'importe  quelle  note  comprise  dans  le  registre  de  la  voix,  à  la 
condition  de  bien  émettre  la  voyelle,  c'est-à-dire  de  donner  à  la 
cavité  buccale  la  forme  voulue.  On  a  vu  en  effet  que  pour  A  il 
faut  que  la  cavité  renforce  le  troisième  harmonique  supérieur  de 
la  note  ;  pour  E  et  O,  le  deuxième  harmonique  supérieur;  pour  I 
et  OU,  il  faut  que  la  cavité  buccale  soit  à  l'unisson  avec  la  note. 
S'il  n'en  est  pas  ainsi,  la  cavité  buccale  transforme  le  tracé  de  la 
voyelle,  et  l'impression  qu'elle  produit  sur  l'oreille  :  on  chante 
mal,  parce  que  la  voyelle  est  mal  éniise  ;  on  chante  faux,  lorsque 


—  123  — 

les  périodes  laryngiennes  ne  se  suivent  pas  régulièrement;  par 
exemple,  pour  A,  lorsque  de  n  en  n  périodes  il  y  a  une  vibration 
simple.  Il  est  très  facile  de  faire  chanter  faux  la  sirène,  en  bou- 
chant un  ou  deux  trous  d'un  groupe  du  plateau  mobile. 

De  tuotes  les  méthodes  de  chant,  celle  de  ce  professeur  semble 
la  plus  scientifique,  et  Lefort  a  eu  le  mérite  de  découvrir,  il  y  a 
quinze  ans,  par  la  pratique,  une  vérité  que  les  expériences  scien- 
tifiques ont  vérifiée  plus  tard. 

5°  Les  sourds-muets,  au  début  de  leur  éducation,  prononcent 
chaque  voyelle  sur  une  note  différente,  très  grave  pour  OU,  de 
plus  en  plus  aiguë  pour  les  voyelles  suivantes  :  O,  A,  Ë,  1.  Ceci 
tient  simplement  à  la  façon  dont  on  leur  apprend  à  parler. 

Ainsi,  pour  1,  leur  résonateur  buccal  renforce  une  note  aiguë; 
alors  ils  émettent  I  sur  une  note  aiguë. 

6°  Il  arrive  souvent  que  l'on  est  pris  d'une  aphonie  subite;  il 
n'y  a  aucune  lésion  apparente,  sauf  un  peu  de  rougeur  au  niveau 
de  la  l'égion  interaryténoïdienne  ;  ceci  s'explique,  si  l'on  se  rap- 
pelle que  les  muscles  interaryténoïdiens  sont  des  adducteurs;  par 
conséquent,  l'adduction  se   faisant  mal,   la   phonation   n'existe 

plus,  etc. 

(Le  Temps,  5  septembre  1900). 

III.  —  Prononciation  du  basque 

Dans  certaines  régions  du  pay^  basque,  on  fait  dire  aux  étran- 
gers la  phrase  suivante  :  akherrak  adarrak  okherrak  ditu  «  le 
bouc  a  les  cornes  tordues  »  ;  ailleurs,  on  leur  fait  prononcer  sosa 
«  le  sou  »,  où  se  trouve  le  chuintement  spécial  aux  indigènes, 
véritable  ehiboleth  de  reconnaissance. 

J.  V. 


Le  Propriétaire-Gérant, 

J.  Maisonneuve. 


Chalon-sur-Saône.  —  Imprimerie  Franjaise  et  Orientale  de  E.  Bertrand. 


LE  LANGAGE  MARTIEN 

(suite) 


CHAPITRE  VI 
Le  Vocabulaire  mag^yar 

(173)  Avant  d'énumérer  les  mots  martiens  qui  peu- 
vent être  ramenés  immédiatement  aux  vagues  sou- 
venirs de  magyar  que  le  subconscient  de  M^'*  Smith 
a  dû  retenir  de  propos  tenus  en  sa  présence  par  son 
père,  il  convient  de  rappeler  brièvement  les  règles  de 
prononciation,  d'ailleurs  très  aisées,  de  cette  langue 
souple,  sonore  et  mélodieuse. 

Les  voyelles  se  prononcent  à  peu  de  chose  près 
comme  en  fr.  ou  en  al.  :  Vu,  comme  al.  u,  et  Vil  comme 
fr.  u  ;  les  voyelles  accentuées  sont  les  longues  ;  niais 
l'a  non  accentué,  bref  par  conséquent,  prend  un  timbre 
plus  sombre,  à  peu  près  intermédiaire  entre  a  et  o 
ouvert.  Enfin,  il  faut  noter  que,  dans  certains  dialectes, 
les  voyelles  longues  subissent,  du  fait  seul  de  leur  lon- 
gueur, une  légère  modification  de  timbre  qui  les  fait 
presque  confondre,  savoir  respectivement:  Va  avec  là 
diplitongue  ua  (fr.  oua  ou  oi),  et  Vé,  avec  un  i  long. 
Naturellement,  je  ne  suis  pas  en  mesure  de  décider 
si  et  dans  quelle  mesure  la  prononciation  mg.  de 
M""  Smith  a  subi,  de  par  l'origine  de  son  père,  l'in- 
fluence de  ces  dialectes  ;  mais  certains  indices  ten- 
draient à  le  faire  supposer,  cf.  n»*  181,  210  et  223. 

Parmi  les  consonnes,  il  n'y  a  de  vraiment  remar- 
quable que  les  consonnes  mouillées,  c'est-à-dire  suivies 

9 


—  126  — 

d'un  y,  semi-voyelle  qui  a  la  valeur  générale  de  Vy  du 
mot  fr.  yeux  ou  duy"  al,  ;  et,  parmi  celles-ci,  il  faut 
noter  spécialement  les  deux  groupes  dj  et  gy,  qui 
sont  absolument  équivalents  :  la  consonne  qu'ils  repré- 
sentent est  une  palatale  mouillée,  c'est-à-dire  une  ar- 
ticulation qui  n'est  exactement  ni  un  g  ni  un  d,  mais 
tient  de  l'un  et  de  l'autre,  et  confine  un  peu,  quoique 
plus  fuyante,  au  g  italien  de  oggi.  Lorsqu'elle  s'efface 
davantage  encore,  ce  qui  n'est  pas  rare  en  pronon- 
ciation rapide,  elle  se  réduit  presque  à  un  simple  y,  et 
les  deux  syllabes  qu'elle  sépare  semblent  n'en  plus 
faire  qu'une,  un  peu  allongée,  en  sorte  que  des  liaisons 
telles  que  igy  et  même  egy  ont  pu  fort  bien  ne 
laisser  à  l'oreille  et  surtout  à  la  mémoire  auditive  de 
M"®  Smith  que  l'impression  d'un  simple  i.  A  plus  forte 
raison  en  faut-il  dire  autant  de  ly  et  Ij,  c'est-à-dire  de 
1'/  mouillé,  qui  en  fr.  courant  même  ne  se  distingue 
plus  de  la  semi- voyelle  r/. 

Les  sifflantes  et  chuintantes  sont  nombreuses  et  va- 
riées ;  mais  la  distinction  n'en  a  guère  d'importance 
pour  le  parler  deMi^**  Smith,  dont  l'oreille,  la  mémoire 
ou  l'organe  parait  les  confondre  entièrement  entre 
elles,  soit  par  zézaiement  enfantin,  soit  par  changement 
de  sourde  en  sonore,  ou  réciproquement,  ainsi  qu'on 
va  le  voir.  J'en  rappelle  toutefois  la  valeur  aux  lecteurs 
qui  seraient  désireux  de  prononcer  correctement  les 
mots  mg.  cités:  s,  comme  ch  fr.  ou  scA al.  ;  s^,  comme 
s  fr.,  toujours  sourd  en  toute  position;  :^,  comme  ^  fr., 
sonore  de  l'articulation  précédente  ;  -«s,  comme  combi- 
naison de  *  et  s  mg.,  c'est-à-dire  avec  la  sonorité  du 


—  127  - 

premier  et  le  chuintement  du  second,  soit  donc  comme 
j  fr. ;  c,  comme  ts  fr.  ou  ^  al.,  en  toute  position;  es 
enfin,  comme  combinaison  de  c  et  s  mg.,  c'est-à-dire 
à  peu  près  comme  tch  fr.  dans  les  transcriptions  de 
mots  slaves. 

Ces  notions  sommaires  suffiront  amplement  pour  se 
rendre  compte  des  équivalences  phonétiques  admises 
par  la  linguistique  subliminale  de  M^^"  Smith. 

(174)  1°  Adi  et  add  «  bien  »  (adverbe),  chacun  une 
fois  :  abstrait  de  locutions  mg.  très  usuelles,  telles  que 
adja  Isten  «  plaise  à  Dieu  »,  adjon  Isten  «  bonne 
chance  »  (souhait),  qui  contiennent  le  verbe  adni 
((  donner  »  ;  le  groupe  mg.  dj  explique  très  bien  l'alter- 
nance de  d^  et  d  tout  court  dans  le  mot  emprunté; 
la  locution  ne  faisant  par  sa  fréquence  qu'un  mot 
pour  ainsi  dire,  Isten  «  Dieu  »  est  tombé,  comme 
seraient  tombées  les  deux  dernières  syllabes  d'un 
tétrasyllabe  quelconque.  Me  paraît  sûr. 

'176)  2"  Ame  a  venu  »,  2  fois;  améir  «  viendras  », 
une  fois;  amès  «viens  »  (impératif),  8  fois;  ainès  «  [je} 
viens  »,  2  fois;  ami  «  [il]  va  »,  une  fois:  en  tout  14 
fois.  Ce  mot,  des  plus  usuels,  se  recouvre,  par  le  radical, 
et  même  par  certaines  de  ses  formes,  avec  le  mg., 
meiini  «  aller  »:  il  suffit  de  comparer  ami  avec  mg. 
mcgy  «  il  va  »,  et  amès  avec  mg.  megyes^  ou  mes:; 
«  tu  vas  »,  en  tenant  compte  de  ce  qui  a  été  dit  de 
la  prononciation  du  groupe  egy,  n°  173.  Quant  à 
améir,  c'est  une  forme  normale  de  futur  martien.  Le 
préfixe  peut  n'être  qu'une  addition  arbitraire;  mais, 


—  128  — 

plus  probablement,  il  y  faut  voir  un  souvenir  du  verbe 
mg.  à  préfixe  àtmenni  a  passer,  traverser  »,  ce  qui 
explique  l'emploi  du  verbe  mt.  à  la  fois  dans  le  double 
sens  d'  «  aller  »  et  de  «  venir  ». 

(176)  3"  Asfiète,  mot  isolé,  désigne  une  espèce  de 
paravent:  peut  se  rattacher  à  un  vague  souvenir  du 
mg.  hâsnemû  {il  long)  a  mobilier  »  ;  au  surplus,  sans 
aucune  importance. 

(177)  4"  Avé  ((  vieil  »,  2  fois:  à  la  rigueur,  ce  pourrait 
être  le  mot  fr.  déformé;  mais  il  ressemble  davantage 
au  mg.  vén  «  vieux  »;  quant  à  l'initiale  a-,  on  peut 
songer,  si  l'on  veut,  à  une  contamination  par  l'ai. 
ait. 

(178)  5°  AMni  «  mal  »  (adverbe),  une  fois:  le  mg. 
a  alacsony  «  de  mauvaise  qualité,  bas»,  etc.  Rappro- 
chement douteux;  mais  le  mot  n'apparait  que  dans  la 
phrase  FI.  33. 

(179)  6°  Bibê  a  capable  »,  une  fois.  Mot  très  cu- 
rieux: le  mg.  a  bihe  «  petite  blessure,  bobo,  point  dé- 
licat »,  qu'il  emploie  dans  des  locutions  telles  que 
eltalâltad  a  bibeje  «  tu  as  mis  le  doigt  dessus  »,  donc 
«  tu  es  très  malin  »  ou  «  très  débrouillarde  »,  etc.; 
c'est  une  phrase  de  ce  genre,  happée  par  M"^  Smitli, 
peut-être  dans  un  petit  compliment  que  lui  adressait 
son  père  à  la  suite  de  quelque  preuve  précoce  d'intelli- 
gence enfantine,  qui  lui  a  fourni  très  naturellement  la 
traduction  du  mot  «  capable  ». 

(180)  7°  Bigâ  a  enfant  »  de  l'un  et  de  l'autre  sexe, 


-  129  — 

5  fois.  Lemg.  ?ijîa  «  son  fils,  son  petit  »,  mot  extrême- 
ment usuel,  par  exemple  dans  des  locutions  comme 
torony  fia  a  l'enfant  du  clocher  »,  désignant  «  un 
petit  clocher  »  par  opposition  à  son  jumeau  plus  grand» 
Le  g  médial,  assez  surprenant,  peut  procéder  de  la 
contamination  du  ^  initial  de  mg.  g  y  erinek  a  enhnt  ». 
Quant  au  b  initial,  voir  n^S  in  fine.  Douteux  pourtant; 
mais  je  ne  vois  pas  mieux. 

(181)  8°  Boua  a  frère  »,  une  fois:  c'est  l'initiale  du 
mg.  bàtya  «  frère  aine  »,avec  la  prononciation  signalée 
au  n°  173,  qui  se  développe  plus  aisément  après  con- 
sonne labiale  que  partout  ailleurs  ;  toutefois  le  timbre 
vocalique  fait  aussi  songer  à  l'ai,  brader  «  frère  »,  et 
peut-être  y  a-t-il  eu  contamination  légère  du  fait  de 
ce  dernier. 

(182)  9°  Cévouitche  «  [je]  reconnais  »,  au  sens  de 
((  reconnaître  avec  afïection,  vive  tendresse  »  (d'un  fils 
à  sa  mère).  Ce  mot  n'est  apparu  qu'une  fois,  tout  au 
début;  puis  il  a  été  remplacé  par  ilinée,  cf.  n°  159:  il 
faut  donc  qu'il  ait  été  formé  assez  artificiellement  et 
n'ait  occupé  qu'une  place  d'arrière-plan  dans  le  sub- 
conscient de  M'i"  Smith.  Par  toutes  ces  raisons,  la 
pensée  se  reporte  à  quelque  mot  mg.  qui,  sans  être 
inusité,  n'appartienne  pas  cependant  au  langage  de  tous 
les  instants,  à  un  dérivé  du  mg.  ss:w  «  cœur  »,  et  plus 
particulièrement  à  s^ioessêg  «tendresse  de  cœur», 
dont  le  consonnantisme  serait  assez  fidèlement  repro- 
duit. Cf.  n°  262. 

(183)  10°  Cri^r  «  oiseau  »,  2  fois.  Le  mg.  Ixirics  dé- 


—  130  — 

signe  une  sorte  d'hirondelle  de  mer:  le  mot  n'est  pas 
fort  répandu,  et  il  est  douteux  que  M''®  Smith  ait  eu 
occasion  de  l'entendre  ;  toutefois  son  père  a  pu  lui  dé- 
signer une  fois  sous  ce  nom  un  oiseau  fluviatile  ren- 
contré au  long  des  berges  du  Léman. 

(184)  11°  Danda  «  silence  »,  une  fois:  dans  le  mg. 
csendes  «  silencieux  »,  la  vraie  initiale,  ne  l'oublions 
pas,  est  un  t,  n°  173  ;  soit  donc  changement  initial  de 
sourde  en  sonore,  par  assimilation  de  l'initiale  à  la 
médiale,  mais  le  rejet  del's  suivant  est  embarrassant. 
Douteux,  mais  c'est  un  àua^. 

(185)  12°  Érté  ((.  âme  »,  2  fois:  parait  construit,  par 
changement  de  liquide  (cf.  n°  13,  2°,  et  159),  sur  le  ra- 
dical du  verbe  mg.  él-ni  «  vivre  »,  mais  plus  précisé- 
ment sur  la  forme  de  beaucoup  la  plus  usuelle  de  ce 
verbe  à  savoir  l'exclamation  êlj'en...  «  vive. . .  !  »  qui 
apparaît  surtout  avec  netteté  dans  le  suivant. 

(186)  13"  Érinê  «  satisfait  »,  une  fois:  soit  une  déri- 
vation martienne  sur  éljen  ;  cf.  le  précédent  et  le  verbe 
éljenezni  «  pousser  des  vivats  ». 

[Étéche  «  toujours  »  :  voir  n°  189.) 

(187)  14"/?  «  si» devant  un  adjectif  (lat.  tam),  3  fois. 
Le  mg.  a  igy,  igyen,  a  ainsi,  de  cette  manière  »,  et 
ilyen  «  tel  »  :  de  part  et  d'autre  le  phonétisme  est  irré- 
prochable, cf.  n°  173.  L'origine  mg.  paraît  donc  infini- 
ment plus  probable  qu'un  rattachement  à  ii  «  si  fait  », 
que  nous  avons  ramené  à  l'ai,  ja,  n"  36,  5°.  Mais  iln'est 
pas  douteux  que  l'homophonie  des  deux  si  en  fr.,  déjà 


—  131  — 

observée  par  M.  Flournoy,  n'en  ait  entraîné  l'homo- 
phonie  en  martien,  par  contamination  réciproque  des 
mots  mg,  et  al.  qui  leur  ont  servi  de  base. 

(188)  15° /s  ((  tout  »,  une  fois,  FI.  4.  Ce  mot  n'a  pas 
vécu:  il  a  été  remplacé  par  ié,  n°  158;  mais,  bien  que 
mort-né,  il  paraît  avoir  déposé  en  martien  le  germe 
d'une  postérité  adverbiale,  cf.  n°^  276-277.  Il  se  ramène 
sans  peine  au  mg.  egés^,  dont  le  sens  répond,  non  à 
celui  de  l'ai,  ail,  mais  à  celui  de  l'ai.  gan:^\  or  on  re- 
marquera que  c'est  plutôt  dans  le  sens  de  ganz  qu'il 
a  été  employé. 

(189  16°  Itèche  et  êtéche  a  toujours  »,  chacun  deux 
fois  :  il  n'y  a  donc  aucune  raison  extérieure  de  préférer 
l'une  des  deux  formes  à  l'autre,  en  tant  que  correcte- 
ment martienne;  il  n'y  en  a  pas  non  plus  de  raison  in- 
trinsèque, bien  que  étéche  soit  apparu  le  premier;  car, 
évidemment,  itèche  peut  tout  aussi  bien  être  une  cor- 
rection qu'une  corruption  de  étéclie.  Je  crois  que  la 
première  de  ces  deux  hypothèses  est  la  bonne,  et  que 
itèche  reproduit  plus  fidèlement  le  vocalisme  de  l'em- 
prunt au  mg.  idôs  «  âgé  »  ;  le  phonétisme  final  est  bien 
concordant,  et  le  changement  médial  de  sonore  en 
sourde  ne  fait  pas  difficulté.  Quant  au  passage  d'un  ad- 
jectif d  âge  au  sens  d'un  adverbe  de  temps,  on  com- 
parera sandiné,  n°  128;  et  l'on  prendra  garde,  en  outre, 
que  le  mg.  idô  signifie  a  temps  »,  et  a  pu  à  lui  seul 
suggérer  le  sens  «  longtemps  »,  qui  est  tout  connexe 
à  celui  de  «  toujours  ». 

(190)  17"  Ivre  «  sacré  »,  une  fois.  Ce  mot,  en  tant 


—  132  — 

qu'il  ne  figure  que  dans  la  phrase  inintelligible  FI.  33, 
pourrait  fort  bien  se  passer  d'explication.  Mais  la  con- 
cordance phonétique  avec  le  mg.  ivrét  «  in-folio  »  est 
trop  parfaite  pour  qu'il  soit  permis  de  l'omettre.  On 
remarquera  que  les  livres  «  sacrés  »  affectent  de  préfé- 
rence un  format  élevé.  Douteux  pourtant  :  où  M^'"  Smith 
aurait-elle  appris  le  nom  magyar  d'un  in-folio? 

(191)  18°  Kiné  «  petit  »,  une  fois,  tout  au  début  : 
mg.  kicsiny  «  petit  »,  avec  syncope  de  la  médiale, 
peut-être  par  une  contamination  du  mg.  kônnyû 
((  léger  »,  et  sous  une  vague  influence  de  l'ai.  kJein 
«  petit  ».  Voir  aussi  nikê,  n"  200. 

(192)  1^"  Kfainù  a  panier  »,  une  fois.  Le  mg.  garabô 
((  panier  »  n'est  que  dialectal  et  d'ailleurs  diffère  sen- 
siblement. On  ne  le  cite  que  pour  être  complet;  car  le 
mot  fait  partie  de  la  phrase  inintelligible  FI.  33. 

(193)  20**  Lâmi  «  voici  »,  3  fois  :  transport  presque 
pur  et  simple  de  l'exclamation  mg.  lâm  «  vois  donc  »  ; 
c'est  l'évidence  même. 

(194)21''  Maniké  a  attentive  »  [à  regarder],  une  fois: 
transport,  avec  légères  altérations  vocaliques,  du  mg. 
megnéz-ni,  ou  peut-être,  à  cause  de  la  gutturale  de  la 
syllabe  finale,  megné^gêl-ni,  «  considérer,  examiner  », 
entendu  un  jour  sous  la  forme  de  l'impératif. 

(195)  22°  Afamrw  écriture»,  une  foisrmg.  ivomâny 
«  écriture  »;  en  métathèse,  l'articulation  ny  s'est  con- 
tractée avec  \'i  initial  ;  il  ne  manque  à  l'appel  que  Vo 
médiat  dont  l'accentuation  est  très  faible.  Nous  avons 


—  183   - 

ici  un  exemple  frappant  de  la  manière  toute  mécanique 
dont  M^'*^  Smitli  forme  ses  mots:  mg.  -mciny,  qui  n'est 
qu'un  suffixe  sans  signification,  occupe  ici  la  place 
d'honneur,  et  l'élément  significatif  ir-  est  presque  dis- 
simulé. Cf.  aussi  le  n''  255. 

(196)  23«  Afa.r/  «  avec  »,  2  fois:  l'idée  de  «  avec 
[quelqu'un]  »  évoque  naturellement  cellede  «  un  autre»; 
mg.  màs  {(  autre  »  ou  même  màsik  «  autre  »,  avec 
changement  de  chuintante  sourde  en  sifflante  sonore. 

(197)  24"  Mess  a  grand  »,  4  fois,  et  messe  «  grande», 
une  fois.  Un  radical  commençant  par  un  m  et  signifiant 
«  grand  »  ne  peut  que  satisfaire  un  indogermaniste; 
mais,  comme  il  est  peu  probable  que  M^'"  Smith  con- 
naisse le  sk.  mahât,  ou  le  gr.  h^éyxç^  ou  l'ai,  michel, 
ou  même  le  lat.  magnus,  mieux  vaut  encore  recourir 
au  mg.  magas  a  haut  ».  Le  vocalisme,  il  est  vrai,  et  la 
disparition  de  la  médiale  font  difficulté  ;  mais,  en  re- 
vanche, le  sens  est  excellent;  car  mess  s'est  dit  d'abord 
et  de  prédilection  du  «  grand  homme  Astané  »,  et  le 
mg.  emploie  aussi,  usuellement,  son  mot  magas  au 
sens  moral.  En  somme,  ce  point,  qui  semblerait  devoir 
être  un  des  plus  clairs,  reste  fâcheusement  indécis. 

(198)  25°  Nâmi  «  beaucoup  »,  2  fois  :  mg.  némi 
«  maint  »  ;  on  peut,  si  l'on  veut,  pour  expliquer  le 
timbre  à,  invoquer  une  contamination  de  l'ai,  mannig 
qui  présente  les  deux  nasales  dans  l'ordre  inverse. 

(199)  26°  Nébé  «  vert  »,  une  fois  :  cf.  mg.  levél 
«  feuille  »:  il  est  question  d'un  «   rameau  ».  Les  con- 


—  134  — 

sonnes  ne  concordent  pas,  mais  sont  fort  voisines  ;  et 
il  ne  faut  pas  se  montrer  trop  sévère  sur  le  phoné- 
tisme  d'un  mot  de  la  phrase  inintelligible. 

(200)  27°  Niké  «  petit  »,  2  fois  :  par  métathèse  de 
/cmé,  cf.n"«  14  et  191. 

(201)28°  Oï<s^n(  bateau  )),  une  fois:  cf.  mg.  usstatni 
«  faire  flotter  »,  us^tatds,  etc.,  «  flottage  par  radeau  », 
etc.  Emprunt  sur. 

« 

(202)  29°Pédriné  «  quitter»  et((  [il]  quitte  »,  chacun 
une  fois,  et  pédrinié  «  [il]  quitte  »,  une  fois.  Le  mg. 
a  un  \erhe peder  «il  tourne)) , peder^ed ni  «  se  tourner  », 
qui,  à  la  vérité,  n'a  pas  le  sens  de  «  se  tourner  pour 
quitter  quelqu'un  avec  qui  on  vient  de  causer  ou  de 
s'arrêter  »  ;  maisl'homophonie  ici  nous  interdit  de  nous 
montrer  trop  difficiles  sur  la  sémantique.  IVI'^"  Smith, 
qui  ne  sait  pas  le  hongrois^  a  pu  entendre  une  forme 
du  verbe  peder  employée  au  sens  de  «  se  tourner  »,  et 
l'employer  elle-même  légèrement  à  contre-sens. 

(203)  30°  Réch  a  tard  »,  2  fois,  mais  seulement  dans 
la  locution  ^ou  rêch,  voir  n°  229. 

(204)  31"  Sadri  «  chanta  »,  une  fois.  Il  s'agit  du 
chant  d'un  oiseau.  Le  corps  du  mot  fait  immédiate- 
ment songer  au  mg.  madcir  «  oiseau  ».  L'initiale  est 
peut-être  transportée  de  la  syllabe  finale  de  maddrssô 
«  chant  d'oiseau  »,  ou  contaminée  de  l'initiale  du  verbe 
csatinà^ni,  qui  désigne  le  chant  du  rossignol.  Tous  ces 
mots  sont  très  usuels  ;  mais  le  résultat  laisse  à  dé- 
sirer. 


—  135  — 

(205)  32"  Sidiné  a  maigre  »,  une  fois,  FI.  18,  La 
finale  seule  est  claire,  en  ce  qu'elle  rime  richement 
avec  iminé,  n"  87,  et  cf.  n"  16.  Le  radical  peut  être 
celui  du  mg.  :2siclô  «  juif  »,  si  quelque  souvenir  d'en- 
fance, de  nous  inconnu,  a  associé  dans  l'esprit  de 
M'^"  Smith  cette  idée  à  celle  de  «  maigreur  »  ;  elles  ne 
sont  pas  incompatibles.  Très  douteux. 

(206)  SS**  Sirima((  rameau  »,  une  fois  :  quoique  ap- 
partenant à  la  phrase  inintelligible  FI.  33,  ce  mot 
paraît  s'expliquer  d'une  façon  assez  satisfaisante  par 
le  mg.  sjsirom  «  pétale  »  :  ce  sont  toujours  des  parties 
de  plantes,  et,  si  le  «  rameau  »  en  question  est  «  vert  », 
d'autre  part  le  mg.  smrmanyult  signifie  «  cresson  de 
roche  ». 

(207)  34°  Somé  «  admirer  »,  2  fois:  rappelle  de  loin 
une  dérivation  du  mg.  s:2em  «  œil  »,  soit  sternes  «  at- 
tentif »  ou  plutôt  s^emôk  (ô  long)  «  qui  a  de  grands 
yeux  »  ;  M.  Smith  a  pu  en  riant  appeler  sa  fillette 
s^emôk,  un  jour  qu'elle  ouvrait  des  yeux  béants  d'ad- 
miration ou  de  stupeur.  Douteux  :  le  vocalisme  ne 
concorde  pas. 

(208)  35°  Soumini  «  riant  »,  une  fois  :  métathèse 
probable  du  mg.  mosojogni  a  sourire  »,  quia,  en  mg. 
même,  une  variante  métathétique  dialectale  somo- 
jogni. 

(209)  36"  Takâ  «  pouvoir  »  (substantif),  une  fois  :  il 
est  question  d'un  très  grand  pouvoir  ;  or  le  mg.  tdgas 
signifie  «  vaste,  spacieux,  étendu  »  ;  l'homophonie  et  la 
sémantique  sont  approximativement  satisfaites. 


—  136  — 

(210)  37"  Tarviné  et  tai^vini  «  langage  »,  4  fois  en 
tout.  Le  mg.  tôrmny  signifie  «  loi,  droit,  justice  », 
au  sens  de  «  comparaître  en  justice  »  :  de  celui-ci  au 
sens  de  «  plaidoyer  »,  le  pas  est  aisément. franchi,  et 
«  plaidoyer  »  pour  a  langage  »  n'est  que  l'espèce  pour 
le  genre.  L'homopbonie  consonnantique  est  ici  frap- 
pante. Cf.  aussi  n°  261. 

-  (211)  38°  Tatinêe  «  chérie  »,  3  fois,  adressé  à  une 
mère:  cf.  mg.  tàta  «  père  »,  terme  de  caresse  enfantin; 
la  finale  est  une  suffixation  martienne,  ou  bien  le  terme 
est  contaminé  de  son  synonyme  inée,  n"  88. 

(212)  39°  Ta^ié  «  [il]  lance  »,  une  fois:  lancer  avec 
une  fronde  est  un  jeu  d'enfant^  et  «  fronder  »  se  dit 
en  mg.  paiHUycc^ni-,  M^^®  Smith  a-t-elle  entendu  ce 
mot?  l'a-t-elle  retenu  en  en  laissant  tomber  les  deux 
premières  syllabes?  Bien  douteux;  mais  en  tout  cas  la 
chute  de  Y  y,  qui  ne  fait  que  mouiller  le  t  précédent, 
ne  ferait  pas  difficulté. 

(213)  40°  Téassé  a  entier  »,  une  fois:  c'est  le  mg. 
teljes  «  complet  »  ;  l'articulation  de  1'/  mouillé  est  assez 
fugace  pour  que  la  chute  totale  se  justifie;  finale  mar- 
tienne. 

(214)  41°  Téri  «  comme  »,  4  fois.  Le  verbe  mg. 
terjedni  «  s'étendre  »  commande  au  dictionnaire  une 
série  d'exemples,  parmi  lesquels  je  relève  hiteîe  10000 
^ovintra  terjed  «  son  crédit  s'étend  jusqu'à  10000 
florins  »,  c'est-à-dire  en  somme  a  équivaut  à,  est  égal 
à  »,  d'où  peut  procéder  le  sens  de  «  comme  »  dans 
la  pensée  du  sujet.  Bien  douteux  pourtant:  ce  n'est 


—  137  — 

pas  devant  une  enfant  qu'on  prononce  des  phrases  de 
ce  genre  ;  ou,  si  on  ne  les  lui  adresse  pas,  elle  ne  les 
•comprend  point.  Il  est  fâcheux  de  ne  pouvoir  trouver 
mieux  pour  un  mot  relativement  usuel. 

(215)  42"  Tiche  et  tis  «  bientôt  »,  chacun  une  fois: 
c'est  le  mg.  tà^es  a  enflammé  >  zélé  >  ardemment 
>  vivement  »  ;  la  filière  sémantique  est  des  plus 
satisfaisantes. 

(216)  43°  Toué  «  dans  »,  2  fois  :  faute  d'aucune 
donnée  qui  permette  de  soupçonner  que  M^''  Smith 
ait  pu  utiliser  le  breton  étouez  a  parmi  »,  force  est 
bien  de  recourir  à  une  forme  déclinée  quelconque  du 
mg,  tô  (o  long),  «  tronc,  racine  »,  soit  l'accusatif  tôiiiet 
(o  bref),  ou  toute  autre;  le  mot  a  pu  être  entendu  dans 
une  phrase  où  il  impliquait  une  notion  d'  «  intérieur  », 
de  «  partie  interne  »,  en  opposition  aux  organes  ex- 
ternes delà  plante.  Douteux. 

(217)44"  Tiihré  a  seul  )),  une  fois:  cf.  la  locution 
mg.  tëhhre  {mennï\((  [pousser]  plus  avant  »,  etc.  Celui 
qui  «  prend  de  l'avance»  se  trouve  nécessairement 
«  seul  »  tout  le  temps  que  dure  son  avance:  cela  était 
peut-être  arrivé  àM''°  Smith  dans  une  promenade  avec 
son  père . 

(218)  45«  VdàniX  «  songes  »,  une  fois,  FI.  20:  le 
mg.  a  aludni  «  dormir  »  ;  l'aphérèse  syllabique,  ainsi 
que  le  timbre  initial  il  au  lieu  de  u  (.^  fr.  ou),  parait 
due  à  l'allitération  avec  uinèz,  qui  précède,  n°  16. 

(219)  46"  Umèz  «  [tu]  fais  »  et  umêzô  «  faire  Wj 


—  138  - 

chacun  une  fois:  métathèse  évidente  du  mg.  û^em 
«  exploitation  ». 

(220)  47°  Vadâsà\,  mot  non  traduit,  ime  fois,  FI. 
31.  Le  mg.  vàdds^a  signifie  «  son  chasseur  »:  le  mot 
avait  été  entendu  par  M^^*'  Smith  sans  qu'elle  en  apprît 
jamais  le  sens,  et  elle  Ta  répété  tel  quel,  au  hasard,  un 
jour  qu'il  lui  est  revenu,  et  sous  une  forme  presque 
irréprochable. 

(221)  48°  Vâmé  «  triste  »,  une  fois:  soit  une  méta- 
thèse possible  du  mg.  viddm  «  gai  »,  cf.  n°  24,  5°;  mais 
comme  le  d  et  le  sens  tout  à  la  fois  font  difficulté,  il 
n'est  pas  hors  de  propos  de  rappeler  que  le  mot  ne 
figure  que  dans  la  phrase  inintelligible. 

{222)  49°  Vêtiche  «cependant»,  une  fois:  le  mg.  a 
pedig  a  mais»,  dont  la  finale  a  pu  se  contaminer  de 
celle  du  mg.  is  «cependant».  Sans  importance. 

(223)50°  Viiîiâ  «nom»,  6  fois:  le  radical  vin-,  suivi 
d'un  suffixe  martien,  est  presque  sûrement  l'ana- 
gramme du  mg.  néo  «  nom  »  ;  cf.  n"  173. 

(224)  51°  Vi^é  «descend»,  une  fois:  cf.  mg.  tv'j 
«eau»  ;  l'idée  de  «descendre  [à  travers  les  espaces]  » 
FI.  6, évoque  celle  de  «  couler»  ou  plutôt  de  «se  ré- 
pandre en  pluie».  Pas  bien  sûr:  a  été  traduit  le  jour 
même. 

(225)52°  Vj^aïni  «désir»,  3  fois:  mot  très  difficile, 
d'autant  plus  qu'il  se  complique  de  ivraïni,  n°  267. 
La  pensée  va  tout  droit  au  mg.  vârni  «attendre»; 
mais  --m  est  un  suffixe  d'infinitif ,  qui  n'a  aucune  raison 


—  139  — 

d'être  reproduit  dans  le  substantif.  S'y  est-il  confondu 
avec  une  suffixation  martienne  ?  Ou  bien  avons-nous 
afïaire  à  une  métaphore  poétique,  ihg.  vù'dny  «flo- 
raison»? Tout  cela  est  bien  recherché  pour  une  langue 
enfantine.  Rien  de  moins  clair, 

(226)  53°  Zaki  «animal  )),  une  fois,  dans  la  phrase 
inintelligible,  et  pourtant  explicable  sans  trop  d'efïort 
par  une  métathèse  approximative  du  mg.  csiga  «es- 
cargot» :  on  a  montré  un  jour  un  escargot  à  Hélène, 
en  lui  disant,  comme  aux  enfants,  cjuelque  chose 
comme  «  vois-tu  la  bèbéte?»,  et  en  même  temps  on  le 
lui  a  nommé  en  hongrois,  en  sorte  que  la  consonnance 
de  ces  deux  syllabes  s'est  associée  dans  son  moi  sub- 
conscient au  concept  d'  «  animal  » . 

(227)  54°  Zâmé  «  meilleurs  »,  une  fois  :  cf.  mg.  cse- 
mege,  «  friandise,  dessert  »  ;  Hélène  enfant  a  dû  cons- 
tater par  expérience  que  le  «  dessert  »  était  «  meilleur  » 
que  le  repas.  Douteux  pourtant:  le  phonétisme  ne 
concorde  pas  suffisamment. 

(228)  55°  Z/^a^/  «fois  »,  une  fois,  tout  à  la  lin: 
bien  que  le  principe  de  la  formation  de  ce  mot  bizarre 
ne  semble  être  qu'un  jargonnement  arbitraire  (cf. 
n°106i ,  il  n'est  pas  interdit  de  reconnaître,  à  la  l)ase 
du  processus  réduplicatif  d'où  il  est  issu,  la  sifflante 
sonore  du  mg.  t^rom  «  fois». 

(229)  56"  Zow  «plus»,  2  fois,  mais  seulement  dans 
la  locution  ^ou  réch  «plus  tard».  On  peut,  dès  lors,  se 
demander  si  cette  locution  n'est  pas  coupée  en  deux 
mots  miiquement parce  qu'elle  en  forme  deux  en  fran- 


—  140  — 

çais,  et  si  l'ortliographe  correcte  ne  serait  pas  zouvéch 
en  un  seul.  Dans  ce  cas,  Ton  conjecturerait  une  altéra- 
tion, d'ailleurs  assez  grossière,  du  mg.  sokàra,  «  long- 
temps, longtemps  après».  Cette  dernière-identification 
est  incertaine;  mais  ce  qu'il  y  a  de  sûr,  c'est  xju'on  ne 
saurait  identifier  mot  pour  mot  ^ou  à  «plus«  et  vêch 
à  «  tard  »,  d'autant  que  «  plus  tard»  en  ce  sens  est  un 
idiotisme  français  que  les  Martiens  n'ont  guère  pu 
emprunter. 

(230)  Tout  compte  fait,  le  magyar  se  trouve  avoir 
fourni  directement  au  martien  deux  à  trois  fois  plus 
de  mots  que  l'allemand,  deux  fois  moins  que  le  français. 
Cette  proportion  resterait  à  peu  de  chose  près  la  même  si 
on  défalquait  de  part  et  d'autre  les  cas  que  nous  avons 
qualifiés  de  douteux.  Elle  est  tout  à  fait  conforme  à  ce 
que  la  théorie  nous  mettait  en  droit  d'attendre  (cf. 
n"*5^7)  :  l'auteur  du  martien  est  une  enfant  bien  douée, 
(jui  sait  à  fond  le  français  et  a  entendu  un  bon  nombre 
de  mots  magyars  très  usuels  ;  comme  c'est  aussi  dans 
un  cercle  d'idées  très  usuelles  que  se  meuvent  les  phra- 
ses martiennes,  ceux-ci  lui  reviennent  avec  une  abon- 
dance relative  ;  mais,  malgré  l'avantage  inappréciable 
qu'ils  offriraient  au  point  de  vue  du  déguisement  des 
origines  du  martien,  ils  restent  en  minorité,  parce 
qu'elle  n'en  a  à  son  service  qu'une  quantité  fort  limitée; 
quant  .à  l'allemand,  appris  plus  tard  et  sans  doute 
moins  fidèlement  retenu,  il  n'apporte  qu'un  faible  ap- 
point, bien  supérieur  toutefois  à  celui  des  autres  do- 
maines linguistiques  à  peine  effleurés  par  M'^"  Smith. 


141  — 


CHAPITRE  VII 
Le  Vocabulaire  anglais 

(231)  Tenant  compte  au  vocabulaire  anglais  de 
l'apport  possible  de  hed  (n^  32,  3°),  de  l'influence  qu'il 
a  pu  exercer  sur  l'adoption  ou  l'altération  de  mode  et 
cjudé  in^^  155  et  166),  et  de  l'explication  subsidiaire, 
éminemment  problématique,  de  godané  (n°  82),  il  ne 
reste  plus  à  son  actif  immédiat  que  trois  mots,  dont 
deux  fort  usuels,  que  M''"  Smith  a  pu  fort  bien  con- 
naître sans  savoir  l'anglais. 

(232)  1°  Kida  «  faveur  »,  une  fois,  FI.  28  :  semble 
être  un  transport,  avec  suffixation  martienne,  du  radi- 
cal de  klnd  «aimable  )),/t"mo?-;iess  «obligeance)),  etc., 
mais  prononcé  à  la  française  et  dépouillé  de  sa  nasale. 

(233)  2°  Méch  «  crayon  )),  une  fois,  FI.  17  :  ressemble 
trop  à  match  «  allumette  ))  pour  qu'on  ne  suppose 
pas  entre  les  deux  mots  un  lien  suggestif  ;  la  forme 
des  deux  objets  a  servi  de  transition.  Sans  importance: 
texte  graphique,  mais  traduit  dans  la  même  séance 
où  il  a  été  dicté. 

(234)  3°  Novi  «  jamais  )),  une  fois,  FI.  24  :  rappelle 
de  façon  irrésistible  la  locution  anglaise  nor  yet  «  ni 
jusqu'à  présent  ».  Sans  importance  au  surplus  :  le  mot 
est  isolé  de  tout  autre  contexte. 


10 

• 


—  142  — 


CHAPITRE  VIII 
Le  Vocabulaire  oriental 

(235)  Le  cycle  martien  a  débuté  le  25  novembre 
1892,  pour  se  dérouler,  avec  des  interruptions  plus 
ou  moins  prolongées,  jusqu'au  4  juin  1899.  On  peut 
dater  l'apparition  du  cycle  hindou  du  2  septembre  1894 
(FI.  p.  261)  ,  et  les  prodromes  de  cet  ensemble  de 
visions  remontent  beaucoup  plus  haut.  On  doit  donc 
considérer  les  développements  respectifs  de  ces  deux 
cycles  comme  chronologiquement  parallèles,  et  il  serait 
fort  surprenant  que  l'on  ne  constatât  point  de  mélange 
entre  eux,  d'influence  de  l'un  sur  l'autre.  En  fait,,  il  y 
a  des  rêves  mixtes,  ne  fût-ce  que  celui  de  la  séance  du 
23  mai  1897,  où  les  visions  orientales  et  martiennes 
interfèrent  au  point  de  se  gêner  réciproquement,  de 
même  qu'en  physique  deux  sources  de  lumière  se  ré- 
solvent en  obscurité  ;  et,  ce  jour-là,  parmi  beaucoup 
de  bavardages  indistincts,  on  recueille  un  texte  hybride 
(FI.  13),  contenant  deux  mots  dont  le  truchement 
martien  ne  sait  que  faire.  La  présomption  de  quelques 
emprunts  du  martien  au  vocabulaire  oriental  est  donc 
en  soi  parfaitement  légitime  :  il  s'agit  jde  savoir  si  elle 
se  justifie  dans  le  détail,  c'est-à-dire,  si  la  concordance 
est  assez  frappante  pour  emporter  la  conviction,  et   si 


—  143  — 

M"e  Smith  connaît  ou  peut  être  censée  connaître  le 
terme  oriental  qu'on  croit  retrouver  en  martien. 

(236)  1° Attanâic  monde  »,  une  fois,  et  «  mondes», 
une  fois  :  2  novembre  et  5  décembre  1898.  M'i"  Smith 
connaît  le  mot  pseudo-sanscrit  attamana,  qu'elle  a 
prononcé  en  cycle  hindou  le  l"""  mars  1898  (FI.  p.  299): 
c'est  le  sanscrit  â^md,  ou  plutôt  son  accusatif  â«!md/2am, 
auquel  elle  paraît  donner  le  sens  de  «  âme  »  ;  mais  ce 
dernier  ne  se  dégage  pas  assez  nettement  de  sa  phrase, 
pour  qu'on  n'y  puisse  substituer  celui  de  «  vie,  être, 
existence  »,  etc.,  dont  la  signification  du  sk.  âtmà  s'ac- 
commoderait également  bien.  En  somme,  tout  porte  à 
croire  que,  dans  sa  pensée,  c'est  un  mot  à  sens  vague 
et  élastique,  comme  par  exemple  le  sk.  védique  bhû- 
vanam,  qui  signifie  à  la  fois  «  être  »  et  amende»;  et 
au  surplus  l'acception  plus  abstraite  «  être  »  réap- 
paraîtra, si  je  ne  me  trompe,  dans  le  composé  atèv, 
n°  270:  il  ne  paraît  donc  guère  douteux  que  le  mt.  at- 
tanâ  ne  soit  une  syncope  du  sanscritoïde  attamana. 

(237)  2"  Davié  «  cœurs  »,  une  fois,  et  «  cœur  »,  une 
fois.  Ce  mot  nous  servira  à  interpréter  un  mot  sans- 
critoïde autrement  inintelligible,  et  en  même  temps  il 
s'expliquera  par  lui.  Dans  une  de  ses  effusions  hin- 
doues (FI.  p.  295),  M^'*^  Smith  a  dit  vadisivou,  que 
Léopold  traduit  tant  bien  que  mal  par  quelque  chose 
comme  «  bien-aimé  Sivrouka  ».  Or,  si  sîdoll  est  une 
abréviation  caressante  du  nom  de  Sivrouka,  radi-sicoa 
peut  en  elïet  avoir  le  sens  esquissé  par  Léopold,  mais 
plus  exactement  celui  de  «  Sivrouka  de  [mon]  cœur»: 
en  tant   que,  d'une  part,    le  mt.  da/'ic,  (jui    signilio 


—  144  — 

«  cœur  »,  est  la  métathèse  exacte  de  rmdi-,  plus  une 
suffixation  martienne;  en  tant  que,  d'autre  part,  radi- 
est  la  reproduction  approximative  de  hrdi  ou  la  méta- 
thèse de  hrdà  (usuellement  iprononcé  hridd) ,  respecti- 
vement locatif  et  instrumental  du  mot  sk .  hrd  «  cœur  ». 
Il  n'y  manque  que  l'aspirée  initiale,  assez  difficile  à 
prononcer  dans  cette  position,  et  généralement  omise 
par  les  sanscritistes  français.  On  sait  d'ailleurs  que 
M^'®  Smith,  fidèle  aux  usages  de  la  prononciation 
française,  laisse  volontiers  tomber  les  aspirées:  n°^160, 
176,  etc. 

(238)  3"  Mira  «  adieu  »,  12  fois.  Ce  mot,  répété  à 
satiété,  ne  ressemble  à  rien  de  connu.  En  désespoir  de 
cause,  j'ai  pensé  au  malgache  miavahaba  a  salue  », 
qui  expliquerait  même  la  longue  finale  constante  par  la 
contraction  des  deux  a  séparés  par  TA.  A  l'époque  des 
séances  de  M'^^  Smith,  les  affaires  de  Madagascar 
battaient  leur  plein,  les  journaux  fourmillaient 
d'anecdotes  malgaches,  et  il  n'y  aurait  rien  d'impos- 
sible à  ce  que  l'un  d'eux  lui  eût  mis  accidentellement 
sous  les  yeux  le  texte  d'une  salutation  telle  que  i:^aho 
miarahaba  anao  «  je  vous  salue  ».  Mais  il  va  de  soi 
que  cette  hypothèse  demeure  en  l'air. 

(239)  4°  Misaïmé((  fleur  »  et  «  fleurs  »,  chacun  une 
fois.  Je  transcris  ici  textuellement  un  passage  de 
M.  Flournoy  (p.  300).  «  Les  spécimens  [de  sanscrit] 
les  plus  remarquables  sont  les  deux  mots  sumanas  et 
smayamana,  qui  ont  particulièrement  frappé  M .  de 
Saussure.  Le  premier  est  la  reproduction  graphique- 
ment irréprochable  du  sk*  sumanas  «  bienveillant  », 


—  145  — 

cité  un  peu  dans  toutes  les  grammaires  et  servant 
même  çà  et  là  de  paradigme  de  déclinaison:  il  faut 
toutefois  noter  que,  pour  toutes  les  grammaires  égale- 
ment, ce  mot  se  prononce  soumanas,  tandis  qu'Hélène 
Ta  nettement  articulé  sunianas  et  qu'il  paraissait  dé- 
signer une  plante  dans  sa  phrase  :  C'étaient  les  plus 
belles  sumanas  de  notre  jardin.  »  Ce  qui  semble  avoir 
échappé  à  M.  de  Saussure,  c'est  que  le  sk.  sumanas 
signifie  aussi  «  fleur  »  :  il  est  évident,  dès  lors,  qu'elle 
ne  le  connaît  que  comme  tel.  Il  est  entendu,  de  plus, 
qu'elle  le  prononce  avec  un  u  français,  en  sorte  que,  si 
en  martien  elle  appelait  les  «  fleurs  »  *musaïmô,  per- 
sonne n'hésiterait  guère  à  reconnaître  dans  ce  dernier 
mot  une  métathèse  des  deux  premières  syllabes  de 
sumanas,  accessoirement  affublée  d'une  suffixation 
martienne:  cf.  n°  17,  4".  La  différence  de  timbre 
de  Vu  et  de  Vi  est-elle  suffisante  pour  infirmer  une 
conjecture  en  elle-même  aussi  plausible  ?  C'est 
ce  que  je  laisserai  de  bon  cœur  à  l'appréciation  du 
lecteur. 

(240)  b°  Ponde  «  savant»,  une  fois,  vers  la  fin. 
M"'  Smith  ne  connaît  sûrement  pas  le  sk.  panditàs 
«  savant  »  ;  mais,  si  elle  a,  comme  tout  l'indique,  jeté 
les  yeux  sur  quelque  roman  de  mœurs  orientales, 
elle  ne  peut  pas  manquer  d'y  avoir  rencontré  le  mot 
pandit,  qui  en  est  la  francisation.  Beaucoup  de  per- 
sonnes le  connaissent,  qui  ne  sont  pas  orientalistes, 
et  qui  naturellement  le  prononcent  sans  faire  sonner 
le  t.  Cq  rapprochement,  irréprochable  quant  aux 
consonnes,  me  paraît  donc  presque  sûr,   quoique  les 


—  446  — 


deux  mutations  vocaliques  se  soient  effectuées  en  sens 
précisément  inverse  des  tendances  phonétiques  rele- 
vées en  martien,  cf.  n"  12,  1";  mais  c'est  un  mot  de 
date  tardive, 


—  147  - 


CHAPITRE  IX 
Les  contaminations  ^ 

(241)  I.  Franco-allemand  et  réciproquement.  — 
1»  Aline  «  oublie  » ,  mot  im  peu  douteux,  en  ce  qu'il 
n'apparaît  qu'une  fois,  et  sous  la  forme  non  décomposée 
saline  «  j'oublie  »  ,  cf.  n°  32,  1".  Cependant  la  quasi- 
homophonie  avec  ilinée  «  reconnue  »  (n*^  159)  condui- 
rait à  penser  que  aliné  est  issu  de  îlinô  et  qu'il  en  est 
en  quelque  façon  la  négation  :  s'il  en  était  ainsi,  Va- 
initial  serait  un  a-  privatif,  dont  il  n'est  pas  besoin 
d'avoir  appris  le  grec  pour  avoir  pleine  conscience  par 
nombre  de  mots  français,  soit  acotylédone,  apétale, — 
toutes  les  jeunes  filles  apprennent  un  peu  de  botanique, 
—  anormal,  athée,  etc.  Tout  cela  pourtant  demeure 
fort  indécis,  soit  à  cause  de  la  disparition  de  1'?"  initial, 
soit  surtout  parce  que  ilinée  n'est  apparu  que  posté- 
rieurement à  saline.  Peu  important. 

(242)  2°  Ainêré  a  réunir  »  ,  une  fois.  Ici  la  préfixa- 
tion française  est  beaucoup  plus  claire  :  le  mot  a  été 
tiré  de  l'ai,  mehrere  «  plusieurs  »  ,  dont  il  conserve 
intacts  le  vocalisme  et  jusqu'à  la  quantité,  par  le  même 

1.  Il  s'agit  ici  des  contaminations  polyglottes,  telles  qu'on  les 
a  définies  et  expliquées  au  n°  25, 


—  148  — 

procédé  qui  a  formé  en  français  a-moncel-er  de  mon- 
ceau, et  tant  d'autres. 

(243)  3°  Bétiné  «  regarder  »  et  «  [je]  regarde'»,  et 
bétinié  «  regarde  »  ,  chacun  une  fois.  Le  fr.  «  regarder  » 
se  dit  aussi  dans  la  langue  courante  «  fixer  »  ,  et  d'autre 
part  «  fixer  »  ,  surtout  dans  le  sens  commercial,  de 
«convenir  [d'un  prix,  etc.]  »  ,  —  qui  est  précisément 
celui  que  M^^'^  Smith,  à  raison  de  sa  profession,  a  été 
le  mieux  en  mesure  d'apprendre,  —  se  dit  en  al.  be- 
dingen.  Le  rapport  parle  assez  de  lui-même. 

(244)  4°  Dastrée  «  paisible»,  une  fois.  Soit  une  lo- 
cution fr.  «  de  repos  »  ,  analogue  à  la  locution  «  de 
pouvoir  »  employée  un  jour  au  sens  de  «  puissant  » 
(n°  23, 1°)  ,et  pouvant  parfaitement  signifier  «  paisible  »  : 
contaminée  d'al.,  elle  devient  *c/e  rasi,  dont  la  méta- 
thèse  exacte  est  *dastre,  puis  avec  une  suffixation  mt, 
dastrée.  Le  procédé  est  curieux  et  me  paraît  sûr. 

(245)5°  Érédutéa  solitaire  »  ,  une  fois  :  cf.  la  forma- 
tion à'Ésenale,  n°  27.  Dans  le  mot  fr.  soli-taire,  iso- 
lons d'abord  la  seconde  moitié,  soit  terre,  qui  se  tra- 
duit en  al.  erde.  Voilà,  avec  une  légère  métathèse  ou 
une  petite  insertion  vocalique,  de  quoi  fournir  la  pre- 
mière moitié  du  mot  martien.  Reste  après  cela  soli-, 
c'est-à-dire  le  nom  d'une  note  de  musique,  plus  une 
voyelle,  qu'on  remplacera  par  le  nom  d'une  autre  note 
de  musique,  plus  une  voyelle  de  même  timbre  (cf.  n°12, 
2°)  .  La  formule  est  mathématique  :  sol-\-i-\-taire=éréd 
■\-ut^é.  Ce  dernier  peut  aussi  être  un  suffixe  martien. 

(246)  6°  Firêd  «  certainement  »,  une  fois.  Le  fr. 


—  149  — 

vrai  n'aurait  pas  pu  donner  aisément  Jii'é-,  -^i  étant 
une  suffixation  martienne  :  d'abord,  il  est  peu  probable 
que  M"®  Smith  change  un  v  en  /;  puis,  l'insertion 
vocalique  reste  inexpliquée;  enfin,  le  sens  ne  concorde 
pas  tout  à  fait.  Cependant  je  crois  que  vrai  se  retrouve 
ici  tout  au  moins  dans  la  voyelle  médiale  du  mot  :, 
/r;*<^-4;'r  serait  une  imitation  de  vrai-ment.  D'autre  part, 
le  sens  concorde  mieux  avec  l'ai,  freilich  «  certaine- 
ment »,  et  VBl.fi'œwahr  «  vraiment  ))  expliquerait, 
s'il  en  était  besoin,  l'insertion  vocalique.  L'anglais 
vertly  est  sans  doute  hors  de  cause. 

(247)  7°  Furimir  «  aimera  »,  une  fois.  Le  verbe 
«  aimer  »  évoque  le  radical  am-  deam-our,  am-i,  etc., 
et  celui-ci,  la  syllabe  initiale  de  l'ai,  am-eise  «  fourmi  »  : 
dejbwmiâ  furimir,  la  distance  est  courte.  Je  ne 
doute  pas  de  l'étymologie  ;  mais  elle  est  sans  impor- 
tance, le  mot  ne  faisant  partie  d'aucun  contexte 
suivi  (FI.  24). 

(248)  8"  Nazère  «  [je]  trompe  »,  une  fois.  Le  verbe 
tromper  évoque  le  substantif  trompe,  qui  suggère 
l'idée  de  «  nez  »,  al.  nase.  Reste  la  finale  -er,  qui 
fournit  la  syllabe  -ère.  Me  paraît  sûr. 

(249)  9*^  Pélésse  «  chagrin  »  et  péliché  «  souci  », 
une  fois  chacun  :  il  est  difficile  d'échapper  à  la  pensée 
que  ces  deux  mots  n'en  font  qu'un  ;  mais  l'explication 
en  serait  plus  aisée  si  le  second  n'était  apparu  le 
premier.  De  la  traduction  «  souci  »,  en  effet,  on  ne 
saurait  rien  tirer,  tandis  que  la  traduction  «  chagrin  » 
suggère  le  jeu  de  mots  a  sorte  de  joeaw  préparée  »,  puis 


—  150  — 

la  traduction  al.  peh,  dont  pélésse  est  la  reproduction 
presque  littéraire.  Il  est  vrai  que  peh  ne  signifie  point 
«  éuir  »,  mais  «  fourrure  »;  mais  les  équivalences  sé- 
mantiques du  martienne  sont  pas  à  cela  près.  La  seule 
objection  grave  est  celle  que  j'ai  formulée  au  début. 
Je  ne  crois  pas  qu'elle  soit  péremptoire  :  M"*'  Smith  a 
pu  traduire  «  souci  )),  tout  en  ayant  «  chagrin  »  dans 
la  pensée  quand  elle  a  créé  le  mot. 

(250)  10°  Sanâ  «  tant  »,  une  fois.  Une  dérivation 
mt.  de  tant,  le  t  final  ne  se  prononçant  pas,  donnerait 
*tanâ.  La  substitution  de  Y  s  au  t  peut  provenir  de  leur 
voisinage  dans  l'alphabet  (n°  13,  5°)  ;  mais  il  est  plus 
méthodique  de  supposer  une  contamination  très  aisée 
par  l'ai.  so. 

(251)  II.  Franco-hongrois,  et  réciproquement.  — 
1°  Bodri  «  os  »,  une  fois  :  mot  très  difficile.  La  mé- 
tathèse  de  os  est  so,  qui,  entre  autres  sens,  donne  en 
fr.  celui  de  «  sot  »  ;  or,  celui-ci  peut  se  traduire  en 
mg.  botor,  qui,  moyennant  une  mutation  de  sourde 
en  sonore,  une  syncope  et  une  suffixation  martienne, 
donne  bodri.  Je  ne  me  dissimule  pas  le  caractère 
aléatoire  de  cette  restitution  ;  cependant  je  fais  observer 
que  M'i^  Smith  paraît  bien  en  effet  avoir  songé,  pour 
le  traduire  en  martien,  à  un  mot  commençant  par  une 
consonne  [so],  et  non  par  une  voyelle  [os]  ;  car  autre- 
ment il  est  probable  qu'elle  aurait  créé  en  martien 
aussi  un  mot  commençant  par  une  voyelle  devant 
laquelle  l'article  se  serait  élidé.  Tant,  en  général,  son 
imitation  est  servile  !  Cf.  -s'alùé  «  l'élément  »,  n°^  30 
et  42.  Aussi  Ésenale,  appelé  à  interpréter  ce  texte, 


—  151  — 

traduit-il  séparément  et  sans  élision  «  le  os  »,  FI.  29. 
En  dehors  de  cette  présomption,  il  n'y  a  aucune  ana- 
logie que  celle  de  l'ai,  ou  anglais  butter,  que  je  ne 
vois  aucun  moyen  de  concilier  avec  le  sens  de  «  os  » . 

(252)  2"  Ladê  «  vers  »  (préposition),  une  fois  ; 
une  autre  fois,  le  sujet  a  employé  le  mot  plus  simple 
é,  n"  35,  2°.  Le  mg.  a  lât-ni  «  voir  »,  qui  n'est  guère 
compatible  au  point  de  vue  du  sens  ;  mais  le  rapport 
a  dû  s'établir  à  la  faveur  de  la  consonnance  presque 
identique  des  deux  mots  fr.  vers  et  voir. 

(253)  3°  Linéi  a  debout  »,  une  fois.  Le  mg.  allant 
«  se  tenir  debout  »  est  phonétiquement  trop  éloigné 
pour  être  seul  en  cause  ;  mais  les  sens  très  voisins  du 
fr.  ligne  [droite]  ou  aligné  expliquent  sans  difficulté 
l'altération  qu'il  a  subie.  A  peu  près  sûr. 

(254)  4°  Men  «  ami  »,  6  fois,  et  mené  «  amie  », 
4  fois,  total  10  :  le  second  est  apparu  le  premier  ;  mais 
il  importe  peu  que  mené  soit  dérivé  de  men,  ou  men 
abstrait  de  mené,  cf.  n°  19,  2«.  La  consonnance  fr. 
ami  est  identique  à  la  consonnance  mt.  ami,  que 
M"*  Smith  devait  plus  tard  employer  au  sens  de  «  il 
va  »,  cf.  n"  175  ;  or  l'infinitif  mg.  du  verbe  d'où  procède 
ce  dernier  est  menni,  qui  a  été  en  conséquence  trans- 
porté presque  textuellement  au  sens  d'  «  ami  »  ou 
«  amie  ».  L'homophonie  est  frappante,  et  pourtant 
l'hypothèse  très  douteuse,  en  ce  que  le  mt.  amès  et 
surtout  ciwï  n'est  apparu  que  bien  postérieurement  au 
mt.  mené.  Peut-être  vaudrait-il  mieux  partir  tout 
simplement  de  l'ai,  meine,  «  ma,  mienne  »,  etc. 


—  152  — 

(255)  5"  Mirivé  «  tracer  »  [des  caractères  d'écriture], 
2  fois.  Il  n'est  pas  difficile  de  reconnaître  dans  ce  mot 
lefr.  écrire,  ou  plutôt  un  barbarisme  fr.  *écriver,  in- 
finitif créé  sur  l'analogie  des  formes  écrivons,  écrivez, 
écrivais,  etc.  Le  procédé  est  remarquablement  en- 
fantin. Mais  la  syllabe  -ir-  me  paraît  due  à  une  con- 
tamination par  le  verbe  mg.  ir-ni  a  écrire  »,  que 
M^'*'  Smith  connaît,  cf.  n°  195.  Quant  à  Vm  initial,  je 
n'en  aperçois  pas  la  raison  d'être,  à  moins  qu'elle  ne 
connaisse  que  iromâny,  dont  elle  aurait  transporté  la 
médiale  au  début.  Cf.  pourtant  n°  16. 

(256)  6"  Neura  «  danger  »,  une  fois.  L'idée  de 
((  danger  »  appelle  celle  de  «  risque  »,  et  celle  ci, 
surtout  dans  l'esprit  d'une  personne  vouée  à  la  carrière 
commerciale,  se  lie  aisément  à  celle  de  «  spéculation». 
Or  le  mot  spéculateur  a  pour  équivalent  le  mg.  nije- 
rész.  Douteux  :  le  phonétisme  est  en  défaut. 

(257)  7''  Ouradé  «  [se]  souvenir  )),  une  fois  :  tout  à 
fait  différent  de  zati  «  souvenir  »,  n"  146.  Le  mg.  a 
plusieurs  mots  très  semblables  de  forme,  notamment 
uradalom  «  seigneurie  »,  et  surtout  ûrhadi  a  nobi- 
liaire »,  mais  très  différents  par  le  sens.  Le  rapport  a 
pu  s'établir  par  la  double  signification,  à  la  fois  ma- 
térielle et  intellectuelle,  du  fr.  posséder,  étant  donné 
qu'en  Hongrie  la  noblesse  est  encore  aujourd'hui  es- 
sentiellement la  caste  propriétaire . 

(258)  8°  Patrinèz  «  alors  »,  une  fois,  FI.  17.  Le 
mot  «  alors  »  a  dans  cette  phrase  le  sens  très  net  de 
((  donc  ,  c'est  pour^«o?  ».  Ce  dernier  mot  se  dit  en  mg. 


—  153  — 

melly,  et  melly,  retraduit  en  fr.  dans  un  autre  de  ses 
sens,  àonne poitrine,  dont  patrinèz'  Q^iwii  jargonne- 
ment  à  peine  déguisé  avec  finale  martienne. 

(259)  Séïmiré  «  comprendre  »,  deux  fois,  «  [je] 
comprends  »  et  «comprendras  »,  une  fois  chacun: 
total,  4  fois,  cf.  n"  22,  9°.  Une  chose  que  l'on  «  com- 
prend »  est  une  chose  qui  a  va  de  soi  d,  et  l'homonyme 
fr.  de  soi  est  soie  qui  se  traduit  en  mg.  selyem.  On  voit 
que  la  prononciation  fuyante  de  Yl  mouillé  (n°  173 
donne  exactement  un  radical  verbal  sêïm-,  qui  se  com) 
plète  par  une  suffixation  martienne. 

(260)  10"  Ti^iné  «demain»,  deux  fois.  Un  calembour 
très  simple  sur  fr.  demain  donne  fr.  deux  mains,  qui 
font  «  dix  doigts  »,  et  «  dix  »  se  dit  en  mg.  ti:^  ;  la  finale 
est  une  suffixation  fort  commune. 

(261)  11"  U^ir  ((  dira»,  une  fois.  Le  mg.  à  une  excla- 
mation ûgyef  «  n'est-ce-pas  ?»  dont  une  traduction  en 
fr.  usuel  serait  aussi  notre  (.(dis  donc»  :  c'est  ainsi  que 
ce  radical  a  pu  prendre  le  sens  du  verbe  «dire».  Mais 
peut-être  vaudrait-il  mieux  s'en  tenir  au  mg.  ùgyés^ 
«avocat»:  en  ce  cas,  il  n'y  aurait  pas  de  contamination 
par  le  fr.,  et  la  seule  remarque  à  faire  serait  celle  de 
la  curieuse  prédilection  de  M""  Smith  pour  les  termes 
juridiques,  en  tant  qu'il  s'agit  de  rendre  l'idée  de 
«parole»;  cf.  n°  210.  M.  Smith  père  aurait-il  eu  à 
soutenir  un  procès  en  Hongrie? 

(262)  12°  Zivênié  «  étudie  »,  une  fois.  L'idée  d'  «  étu- 
dier» évoque  facilement,  surtout  chez  un  enfant,  celle 
d'  «  apprendre  par  cœur  »,  et  ce  dernier  mot,  à  son  tour. 


—  154  — 

évoque  sa  traduction  mg.  sj^iv,  qui  au  surplus  n'est 
jamais  employée  dans  le  sens  spécial  au  français  ;  mais 
peu  importe,  il  s'agit  ici  d'un  calembour  bilingue,  et 
non  d'une  équivalence.  Avec  mutation  de  sourde  à 
sonore,  on  a  un  radical  siu-,  sur  lequel  s'applique  une 
suffixation  martienne.  Me  paraît  tout  à  fait  sûr. 

(263)  III.   HONGRO- ALLEMAND   ET  RÉCIPROQUEMENT. 

—1°  Borêsé  «pleines)),  une  fois.  Le  fr.  «plein»  se 
traduit  en  al.  voll,  lequel  signifie  aussi  «ivre»,  et  ce 
dernier  sens  a  suggéré  la  traduction  en  mg.,  soit  boros 
«  ivre  »  ou  borisza  «  ivrogne  »  ;  l'homophonie  est  pres- 
que absolue.  Cf.  le  suivant. 

(264)  2"  Châmi  «parfum»,  une  fois,  dans  la  même 
phrase  que  le  précédent.  L'ai. a  schmecken  n sentir)) 
[à l'odorat]  et  geschmack  «goût»;  mais  je  crois  que, 
pour  expliquer  la  voyelle  insérée  entre  s  et  m,  il  est 
presque  indispensable  de  faire  intervenir  le  mg.  zamat 
«  bouquet  du  vin  »  ;  d'autant  que  le  radical  de  bon's^a 
est  6or«  vin».  Il  devient  évident,  dès  lors,  que  le 
concept  de  «vin»  se  jouait  dans  l'arrière-pensée  de 
M^^«  Smitli  lorsqu'elle  a  prononcé  cette  phrase. 

(265)  3°  Gr-ini  «soulever»,  une  fois,  FI.  23.  L'idée 
de  «soulever»  évoque  celle  de  «sol»,  qui  se  traduit  en 
â\.  grand  et  en  mg.  gerend,  celui-ci  plus  proche  par 
le  vocalisme,  celui-là  par  la  double  consonne  initiale. 
Ce  mot  est  d'ailleurs  tout  à  fait  négligeable,  parce  que 
la  traduction  en  est  des  plus  équivoques  :  d'abord  hi 
phrase  «  le  miza  va  soulever  »  n'est  pas  française,  il  fau- 
drait   «se  soulever»;  puis,  dans  la  vision  qui  la  suit, 


—  155  — 

l'objet  ne  se  soulève  pas,  mais  «prend  un  mouvement 
de  balancement  qui  fait  un  bruit  de  tic- tac,  puis  glisse 
comme  un  train  sur  des  rails». 

(266)  4:°  Ujsénir  «  attendra  » ,  2  fois.  Le  mot  «  attendre» 
se  traduit  en  dl.wai^ten,  qui  signifie  aussi  «s'occuper 
de,  prendre  soin  de»;  sa  traduction  dans  ce  dernier 
sens  est  mg.  ûgyelni.  Pour  la  concordance  mg.  gy  > 
mt.  4?,  voir  n°«  173  et  174. 

(267)  IV.  Franco-hongro- ALLEMAND. —  VIvraïnt 
«  aujourd'hui  »,  une  fois,  FI.  27.  Vraïnï  «désir»  (FI.  14, 
cf.  n"  225)  est  chronologiquement  antérieur  à  ivraïni, 
en  sorte  que  rien  ne  s'oppose  à  la  filière  assez  complexe 
que  je  vais  restituer.  La  finale  de  «aujourd'Awn)  ou 
simplement  son  sens  amène  l'ai,  heute,  dont  le  pho- 
nétisme  suggère  très  facilement  le  mg.  ohajtâs  «  désir  »  ; 
celui-ci,  à  son  tour,  suggère  son  équivalent  mt.vvaïni', 
et,  comme  une  sorte  de  doigt  indicateur  qui  nous 
guide  dans  ce  dédale,  l'initiale  de  ohajtâs  demeure 
encore  figée  en  tète  de  ivraïni,  sous  le  bénéfice  de 
la  mutation  o  >•  /,  qui  nous  est  déjà  connue,  cf. 
n"  36,  6°. 

(268)  2°  Valini  «  visage  »,  une  fois.  Tout  d'abord, 
les  idées  très  voisines  «  visage,  aspect,  regard  »  se  sont 
évoquées  l'une  l'autre  ;  puis,  regard  traduit  en  al.  a 
donné  blick,  dont  la  traduction  mg.  exacte  serait 
pillanat.  Mais  blick  signifie  aussi  «  reflet  lumineux  », 
et  dans  ce  cas  sa  traduction  mg.,  peu  différente,  est 
villanat,  avec  le  verbe  villanni  «  lancer  des  éclairs  », 


—  156  — 

etc.  Il  n'échappera  à  personne  que  valini  en  est  la 
métathèse  rigoureuse.  Cette  cascade  de  doubles  sens 
est  douteuse  cependant,  parce  qu'il  n'est  pas  probable 
que  M^^*^  Smith  connaisse  tous  ces  mots-et  toutes  leurs 
nuances;  mais  peut-être,  précisément  parce  qu'elle 
ignore  les  nuances,  elle  emploie  les  mots  un  peu  à  tort 
et  à  travers. 

(269)  V.  Autres  contaminations.  —  1°  Ainiché 
«  mains  »  et  éinéclie  «  main  »,  une  fois  chacun.  Que  le 
vocabulaire  oriental  puisse  intervenir  dans  les  conta- 
minations, c'est  ce  que  démontrera  l'exemple  suivant  ; 
mais  celle  que  je  vais  analyser  est  au  premier  abord 
si  invraisemblable,  que  je  n'aurais  jamais  osé  l'im- 
primer, si  la  vraisemblance  était  un  critérium  appli- 
cable à  un  rêve.  Si,  ainsi  que  nous  l'avons  constamment 
supposé,  M^^"  Smith  a  feuilleté  quelque  roman  pseudo- 
oriental, il  est  difficile  qu'elle  n'y  ait  pas  rencontré  le 
nom  des  «  Ameshaspands  »,  ces  demi- dieux  tutélaires 
en  grande  vénération  dans  la  religion  persane  :  il  n'im- 
porte que  le  mot  ait  été  retenu  ;  il  suffit  qu'il  ait  été 
vu,  pour  que  la  mémoire  subliminale  puisse  l'utiliser 
sous  l'influence  de  quelque  excitation  accidentelle.  Re- 
venons à  présent  au  fr.  «  main  »:  l'équivalent  est  al. 
ou  anglais  hand,  dont  la  consonnance  évoque  la  finale 
de  amesaspand,  et  celle-ci  le  mot  tout  entier;  enfin, 
les  deux  premières  syllabes  détachées  fournissent  un 
radical  amis-,  ou  éinés-,  où  l'alternance  vocalique  elle- 
même  semble  trahir  une  origine  exotique  et  bizarre,  un 
mot  non  familier  au  sujet,  et  par  conséquent  mal 
retenu.  Tout  cela  me  semble  jx  peine  douteux. 


—  157^  — 

(270)  2°  Atév,  ((  être,  êtres  »,  7  fois:  contamination 
évidente  de  l'initiale  à'attanâ  avec  le  radical  mt.  du 
verbe  «  être  »  ;  cf.  n°«  37  et  236. 

(Éméche  «  main  »  :  voir  n°  269.) 


11 


158  — 


CHAPITRE  X 
Les  dérivations  ultérieures 

(271)  1"  Atimi  «  bonheur  »,  3  fois:  paraît  dérivé, 
par  suffixation  martienne,  de  adi  a  bien  »  (n°  174),  qui 
toutefois  n'est  apparu  que  plus  tard.  J'ai  déjà  dit  que 
je  considère  cette  objection  comme  sérieuse,  mais  non 
comme  décisive  :  un  mot  peut  avoir  été  élaboré  dans 
le  subconscient  du  sujet,  sans  avoir  encore  nécessaire- 
ment vu  le  jour. 

(272)  2°  Datrinié  «  caché  )),  une  fois,  dans  la  phrase 
inintelligible.  Si  l'on  peut  attribuer  à  da-  un  sens  pré- 
fixai, soit  inversif  ou  négatif,  pareil  à  celui  du  préfixe 
fr.  dé-  dans  dé-lié,  etc.,  on  voit  que  le  mot  entier  peut 
signifier  «  dont  on  ne  parle  pas  »  (cf.  triné  «  parler  », 
n°  139),  par  conséquent  «  secret,  caché  ».  Douteux, 
mais  sans  importance. 

(273)  3"  EJi  «  choses  » ,  une  fois  :  il  est  probable  que 
la  forme  plus  correcte  serait  *évi  (cf.  n"  8),  et  que  le 
mot  se  rattache  par  dérivation  au  radical  éi?-,  du  verbe 
m  t  qui  signifie  a  être  »  ;  voir  n°*  37  et  274. 

(274)  4°  É venir  «  posséderas  »,  une  fois:  dérivatioil 
possible  du  radical  év-  au  sens  de  «  chose  »,  par  con- 


^  159  — 

séquent  «  objet  qu'on  peut  posséder,  bien  »  ;  cf.  n"^  38, 
3«,  et  273. 

(275)  5°  Imi;2i  «  sous  »,  une  fois,  dans  la  phrase 
inintelligible  :  dérivé  possible  de  imâ  a  ciel  »  (n»  160), 
par  l'intermédiaire  de  Tidée  que  «  tout  est  sous  le 
ciel  ».  . 

(276)  6°  Izâ  «  mais  »,  2  fois:  dérivé  de  is  «  tout  » 
(n°  188),  de  par  la  transition  fournie  par  le  synonyme 
fr.  «  touteioiB  », 

(177)7°  /^é  ((  enfin  »,  3  fois  :  dérivé  de  is  (cf.  n°  276), 
à  la  faveur  de  la  transition  fournie  par  la  locution  sy- 
nonyme «  après  tout  ». 

(278)  S*'  Kêmisi  «  femelle  »,  2  fois  :  dérivé  fort  in-' 
solite  de  kêmâ  «  mâle  »,  n°  92. 

(279)  9°  Kévi  et  kêvi  »  quand  »,  en  tout  3  fois  : 
dérivé  du  thème  interrogatif  et  relatif  k-,  dont  on  a  vu 
l'origine,  n»  33,  3^ 

f280)  lO''  Kiché  «  pourquoi  »,  3  fois  :  autre  dérivé 
jargonnant  du  même  thème. 

(281)  11°  Xr^  «  quel  »,  4  fois,  et  kizé  «  quelle  »,- 
2  fois  :  autre  dérivé  du  même  thème. 

(282)  12"  Meta  a  pourtant  »,  une  fois:  étant  donné 
que  med  signifie  «  pour  »,  c'est  une  formation  calquée 
sur  le  fr.  pour-tant,  soit  *med-ta,  où  la  syllabe  -ta 
représente  la  syllabe  fr.  -tant.  Noter  toutefois  que 
med  est  postérieur  à  meta. 

(283)  13°  Najsina  a  nouveau  »,  une  fois:  comparer 


---160^-- 

œsini  (i  ensuite  »,  d'où  le  sens  «  postérieur,  récent  » 
cf.  n°34,  2°  ',Vn  initial  vient  de  contamination  par  le 
inot  fr.  nouveau. 

'  (284)  14°  Néûmi  «  mystérieux  »,  une  fois.  Le  mot 
lui-même  est  assez  mystérieux  et  semble  de  formation 
mystique  :  par  l'initiale,  il  rappelle  le  fr.  né-ant  ;  l'élé- 
ment subséquent  doit  se  rattacher  au  verbe  mt.  umez- 
«  faire  »  (n°  219),  ensorte  que  l'ensemble  aboutirait  au 
sens  de  «  infaisable  »  ou  «  incréé  ». 

(285)  15°  Primi  «  revoir    »  substantif,   une   fois, 
FI.  23:  ce  «  revoir  »  s'effectue  par  un  ((retour  »,  en. 
sorte  qu'il  est  difficile  de  ne  pas  soupçonner  un  rap- 
port étymologique  avec  bérimir  qu'on  a  vu  au  n°  53. 
Peu  clair. 

.  (286)  16°  Triménêni  ((  comprenions  »,  une  fois, 
FI.  15.  M.  Flournoy  fait  observer  que  la  traduction  est 
suspecte,  puisque  ((  comprendre  »  se  dit  tout  autre- 
ment (n<'259),  et  qu'il  vaudrait  mieux  ((  entretenions  » 
pris  dans  le  sens  de  ((  converser,  causer  »  :  dans  ces 
conditions,  et  puisque  taroini  et  triné  apparaissent 
dans  la  même  phrase^  le  rapport  à  établir  entre  ces 
trois  mots  n'est  pas  niable,  cf.  n°^  139  et  210.  Ce  qui 
demeure  obscur,  c'est  le  mode  spécial  de  dérivation 
de  «'nméAiem."  Peut-être  n'est-ce  qu'un  jargonnement 
arbitraire,  vaguement  imitatif  du  fr.  entretenions. 


161  _- 


CHAPITRE  XI 
Le  résidu 

(287)  Il  n'est  guère  d'analyse  linguistique,  si  pa- 
tiemment conduite  qu'on  la  suppose,  qui  ne  laisse  au 
fond  de  la  cornue  un  caput  mortuum  irréductible. 
Celle  du  martien  pouvait  moins  que  toute  autre 
échapper  à  cette  infirmité.  Il  me  reste  donc  àénumérer 
les  quelques  mots  dont  je  renonce  à  trouver  Texplica- 
tion,  et  à  souhaiter  à  mes  lecteurs,  s'ils  m'ont  suivi 
jusqu'ici,  plus  de  pénétration.  On  tiendra  compte,  en 
outre,  des  petits  mots  dont  la  genèse  demeure  obscure, 
et  des  incertitudes  dont  je  n'ai  pas  fait  mystère  au 
cours  de  ma  trop  longue  exposition. 

1"  Estotiné  «  ma  dernière  »,  FI.  15  :  ce  n'est  pas  la 
seule  anomalie  de  ce  texte  ;  mais  c'est  la  seule  dont  il 
soit  absolument  impossible  de  venir  à  bout  ;  car, 
puisqu'on  ne  peut,  dans  ce  prétendu  composé,  isoler 
un  mot  qui  ait  le  sens  de  «  ma  »  (cf.  n®  32,  1°),  à  plus 
forte  raison  n'y  reconnaît-on  pas  le  mot  «  dernière  », 
et  à  plus  forte  raison  encore  ne  saurait-on  le  rap- 
procher de  rien. 

2^"  lanlné  «  [il]  enveloppe  »,  FI.  14  et  28.  La  diffi- 
culté de  ce  mot  étrange  se  complique  de  ce  que,  la 
première   fois  qu'il    apparaît,    c'est  sous    la   forme 


—  162  — 

m-ianiné,  qui  est  censée  signifier  «  t'enveloppe  »  et 
où  pourtant  l'élément  m-  ne  peut  que  par  lapsus  évi- 
dent représenter  le  pronom  «  te  ».  Le  mg.  a  un  mot 
hiàny  «  lacune  »,  d'où  le  composé  hiânyjel  «  signe 
de  lacune  »,  qui  désigne  le  petit  symbole  que  nous 
appelons  «  apostrophe  ».  On  sait,  d'autre  part,  que 
l'apostrophe  est  souvent  employée,  dans  certains  ou- 
vrages, comme  le  seraient  les  guillemets,  et  qu'enfin 
les  guillemets  «  enveloppent  »  une  partie  déterminée 
d'un  texte.  Toutes  ces  idées  sont  donc  plus  ou  moins 
connexes,  et  il  n'était  pas  difficile  de  passer  de  l'une 
à  l'autre.  Mais  il  n'est  pas  croyable  que  W^^  Smith 
connaisse,  même  pour  en  fausser  le  sens,  un  terme 
grammatical  aussi  technique  en  langue  magyare. 

3°  Lâmêe  «  jusque  »  ,  une  fois.  Le  fr.  là  même  se 
suggère  tout  naturellement  ;  mais  il  faut  se  défier  des 
explications  trop  faciles. 

4°  Povê  «  rester  »  ,  une  fois  :  je  ne  trouve  à  citer 
que  l'ai,  bewohnen  «  habiter  »  ,  et  vraiment  il  est  trop 
éloigné  à  tous  points  de  vue. 

5°  Rusd  «  milieu  »,  FI.  24.  On  est  frappé  tout  d'abord 
de  l'homophonie  avec  busi  «  moyen  »  :  le  rapport 
aurait  pu  s'établir  par  l'intermédiaire  de  l'ai,  mittel, 
qui  signifie  à  la  fois  l'un  et  l'autre.  Mais  busi,  qu'on  a 
expliqué  tant  bien  que  mal  au  n°  57,  n'apparaît  que 
tout  à  fait  à  la  fin,  FI.  40  :  il  est  difficile,  dès  lors,  de 
croire  que  ru:sd  en  soit  issu  ;  et,  si  l'on  suppose  que  ce 
dernier,  au  contraire,  est  l'ancêtre,  c'est  bien  pis  en- 
core, car  il  n'y  en  a  pas  d'étymologie  visible.  Rien  non 
plus  ne  justifie  le  passage  de  6  à  /'  ou  réciproquement. 


—  163  - 

Mieux  vaut  donc  laisser  rui^d  parmi  les  mots  inex- 
pliqués, et  peut-être,  parla  même  occasion,  y  reléguer 
6w^ï  avec  lui.  Mais  avec  ces  deux  derniers  mots  nous 
avons  épuisé  la  totalité  du  vocabulaire  martien. 


164 


CONCLUSION 

(288)  Dans  mes  Antinomies  linguistiques,  —  aux- 
quelles je  m'excuse  de  renvoyer  si  souvent,  mais  il  le 
faut  bien,  le  présent  livre  n'étant  au  fond  qu'une  véri- 
fication expérimentale  des  principes  spéculatifs  que  j'y 
avais  exposés,  —  je  me  suis  trouvé  tout  naturellement 
amené  à  examiner  l'irritant  problème  de  la  conformité 
originaire  du  langage  et  de  la  pensée,  postulat  logique 
inéluctable,  mais  jusqu'à  présent  rebelle  à  tout  essai  de 
démonstration,  puisque  le  langage  primitif  de  l'huma- 
nité nous  est  lettre  close.  «  Peut-être,  ajoutais-je  (p. 41, 
n.  1)  ,  n'est-il  pas  téméraire  de  fonder  à  cet  égard 
quelques  espérances  sur  l'avenir  des  récentes  recherches 
qui  ont  si  fortement  modifié  et  ébranlé  l'antique  no- 
tion de  l'unité  du  moi.  Qui  sait  si  le  sens  élémentaire 
du  langage  ne  se  dégagera  pas  brusquement  ou  pièce 
à  pièce  de  quelque  moi  sous-jacent,  mis  à  découvert 
dans  un  de  ces  états  seconds  que  provoquent  les  expé- 
riences d'hypnotisme?  Si  étonnants  que  paraissent 
certains  de  leurs  résultats^  il  est  clair  que  les  expéri- 
mentateurs n'en  sont  encore  qu'aux  premiers  rudi- 
ments de  la  psychologie  qu'ils  nous  préparent  et  n'ont 
pas  encore  ébauchée.  » 

Tandis  que  j'exprimais  ce  timide  espoir,  d'éminents 
expérimentateurs,  à  mon  insu,  assistaient  à  l'éclosion 


~  165  — 

^d'ime  langue  telle  que  je  la  souhaitais,  mais  telle  aussi 
qu'elle  m'apprêtait  une  déception.  M"°  Hélène  Smith 
.est  évidemment  beaucoup  trop  instruite  et  trop  cul- 
tivée, pour  être  restée  l'intuitive  que  requerrait  la  re- 
. construction  d'un  langage  primitif  et  spontané;  son 
subconscient  est  encombré  de- trop  de  souvenirs  con- 
scients, linguistiques,  littéraires,  scolaires,  pour  laisser 
transparaître  encore  sous  ce  voile  factice  le  confus  et 
lointain  souvenir  des  concordances  mystérieuses  du 
son  et  du  sens  qui  créèrent  la  langue  de  nos  premiers 
ancêtres.  Il  y  faudrait,  sinon  un  sujet  qui  n'eût  jamais 
appris  à  parler,  du  moins  une  nature  plus  fruste,  un 
cerveau  beaucoup  moins  affiné.  N'en  désespérons  pas  ; 
ces  conditions  peuvent  se  rencontrer  demain  ;  mais 
dans  le  cas  présent  elles  nous  font  défaut.  En  fait,  on 
l'a  Vu,  M^'*'  Smith  ne  parle  qu'avec  ses  propres  souve- 
nirs, immédiats  (conscients)  ou  médiats  (inconscients), 
jamais  d'après  ceux  qui,  remontant  par  atavisme  les 
générations  disparues,  iraient  rejoindre  les  premiers 
anneaux  de  l'humanité  parlante.  Elle  a  beau  se  dire 
reine  de  France,  princesse  arabe  par  la  naissance  et 
Tnndoue  par  le  mariage^  exploratrice  de  la  planète 
Mars:  elle  n'a  vécu  toutes  ces  vies  que  sur  le  papier  des 
livres  qu'elle  a  lus  :  à  plus  forte  raison  n'en  revit-elle 
point  d'autres,  plus  réelles,  mais  plus  abstruses,  ense- 
velies qu'elles  sont  à  jamais  dans  un  passé  sans  histoire. 
Ne  lui  demandons  pas  plus  qu'elle  ne  nous  peut 
donner,  et  remercions  M.  Flournoy  de  l'avoir  si  fidè- 
lement recueilli  :  de  la  documentation  martienne,  où 
il  a  eu  l'heureuse  pensée  de  ne  pas  essayer  de  faire  uu 


—  166  — 

choix,  qu'il  nous  a  transmise  complète  et  rigoureuse- 
ment authentique,  quelles  conclusions  se  dégagent  au 
■point  de  vue  delà  psychologie  du  langage? 
'  l**  Presque  tous  les  mots  du  martien  ont  une  étymo- 
logie  assurée,  puisée  dans  des  langues  réelles,  connues 
■plus  ou  moins,  mais  certainement  connues,  de 
M"^  Smith.  En  admettant  que  quelques-unes  de  mes 
explications  doivent  être  tenues  pour  forcées  ou  très 
contestables,  il  en  reste  encore  un  assez  grand  nombre 
de  probables  ou  de  sûres,  pour  que  le  résidu  inexpli- 
cable ne  constitue  qu'une  infime  minorité:  il  est  donc 
à  présumer  que  ce  résidu  lui-même  deviendrait  ré- 
ductible, si  nous  disposions  de  moyens  plus  puissants 
ou  plus  sagaces  pour  pénétrer  les  secrets  de  l'élaboration 
subconsciente  à  laquelle  elle  s'est  livrée,  et  qu'il  appa- 
raîtrait dès  lors  qu'elle  n'a  point  créé  un  seul  mot 
qui  n'appartînt  d'ores  et  déjà  à  sa  mémoire  sous- 
jacente. — L'homme,  quand  il  le  voudrait,  n'inventerait 
pas  une  langue  :  il  ne  peut  parler,  il  ne  parle  qu'avec 
ses  souvenirs,  immédiats,  médiats  ou  ataviques. 

2"  L'inconscience  du  procédé  linguistique  chez  le 
sujet  parlant  est  une  notion  d'ordre  élémentaire,  qui 
pourtant  a  bien  de  la  peine  à  s'imposer  à  certains  es- 
prits. On  l'accorde  généralement  pour  le  processus 
phonétique,  qui  ne  saurait  en  effet  s'expliquer  ni  se 
produire,  si  le  sujet  qui  opère  une  mutation  ne  croyait 
articuler  ce  qu'en  fait  il  n'articule  point.  On  l'admet 
aussi,  en  principe,  pour  la  morphologie;  sauf  à  retirer 
parfois  en  détail  ce  qu'on  a  accordé  dans  l'ensemble, 
ou  à  laisser  échapper  encore  quelqu'une  de  ces  mons- 


—  167  — 

trueuses  explications  grammaticales,  qui  supposent 
que  le  sujet  opère  sciemment  un  certkin  métaplasme 
et-  prévoit  dans  l'avenir  une  certaine  confusion  qui  ne 
manquerait  pas  de  se  produire  s'il  ne  l'opérait  pas. 
Quant  à  la  syntaxe  et  à  la  sémantique,  il  semble 
qu'elles  demeurent,  dans  le  langage,  le  domaine  réservé 
à  la  conscience  et  à  la  volonté.  Oui,  pour  le  professeur 
qui  cherche  à  se  faire  parfaitement  entendre,  et  qui 
peine  à  trouver  un  tour  clair,  une  image  représentative  ; 
oui,  peut-être, — car  ceux-là  sont  déjà  dans  une  large 
mesure  des  spontanés  lorsqu'ils  sont  sincères^  — pour 
l'orateur  et  le  poète,  qui  songent  à  frapper  les  esprits 
par  un  tour  nouveau,  une  métaphore  brillante;  oui, 
enfin,  pour  qui  s'écoute  parler,  mais  on  conviendra 
que  tel  n'est  point  le  cas  des  millions  de  propos  oiseux 
qui  s'échangent  chaque  jour.  Et  ceux-là,  c'est  le 
langage,  le  langage  réel  et  vivant;  le  reste  n'en  est  que 
l'apparence  élégante  et  figée.  Or  M"*'  Smith, — in- 
consciente par  définition,  — employant  la  syntaxe 
française  parce  qu'elle  n'a  pas  la  plus  mince  idée  d'une 
autre,  mais  connaissant  partiellement  quelques  vocabu- 
laires différents  de  celui  du  français,  s'est  créé  un  vo- 
cabulaire spécial  à  l'aide  de  ces  matériaux,  retravaillés 
parles  mêmes  procédés  sémantiques,  métonymies,  asso- 
ciations, suggestions  et  contaminations  (n"»  24-25),  que 
l'on  constate  dans  les  langues  ordinaires.  Le  résultat 
étant  le  même,  il  faut  bien  que  le  principe  de  formation 
soit  le  même  chez  elle  et  chez  le  sujet  parlant  éveillé.  — 
Le  langage  est  la  consciente  mise  en  œuvre  d'un 
système  complexe  de  forces  inconscientes,  et  ses  anti- 


-  168  - 

nomiesse  résolvent  par  la  considération  de  la  conscience 
de  l'acte  unie  à  l'inconscience  du  procédé  \ 

3"  Discutant  la  '  formule  de  Darmesteter,  suivant 
laquelle  le  sujet  parlant  à  ses  débuts  aurait  «  plus  d'idées 
que  de  mots  »,  je  proposais  d'y  substituer  la  formule 
inverse  «  plus  de  mots  que  d'idées  »,  et  j'enseignais 
que  l'usage  de  la  parole  commence  par  un  inconscient 
bavardage,  vaguement  intelligible  peut-être  pour  le 
sujet  parlant,  mais  à  coup  sûr  intraduisible  par  lui  et 
pour  les  autres*.  Et  voici  que  le  prodrome  de  l'appa- 
rition du  langage  martien  (FI.  p.  149)  a  été  une  véri- 
table explosion  de  syllabes  étranges  et  de  sons  barbares, 
,  jaillissant  «  avec  une  volubilité  croissante»,  «  jargon 
incompréhensible  »,  presque  impossible  à  reproduire, 
qui  —  cela  va  sans  dire  r-  n'a  jamais  été  traduit  ni 
même  répété  dans  la  suite,  mais  qui  présente  déjà, 
tout  au  moins,  à  un  très  haut  degré,  les  caractères  de 
l'allitération  et  de  l'assonance,  distinctifs  de  la  langue 
postérieure  qui  en  devait  sortir.  —  Ainsi,  en  ce  qui 
concerne  la  genèse  individuelle  du  langage,  les  con- 
clusions qui  se  dégagent  du  martien  ou  de  l'observa- 
tion des  jargons  enfantins  sont  identiquement  les 
mêmes  :  tout  langage  commence  par  un  gargouillis  de 
mots,  entre  lesquels  et  sous  lesquels  le  sujet  n'apprend 
que  plus  tard  à  faire  un  choix  et  à  mettre  un  sens 
précis. 

4°  Et  maintenant,  s'il  est  vrai  ce  qu'on  enseigne 
couramment  et  ce  que  du  moins  la  raison  ne  désavoue 

1.  Antinomies  linguistiques,  pp.  23 et  64  sq. 

2.  Antinomies  linguistiques, ipp .  50  et  55. 


—  169  — 

pas,  que  l'ontogenèse  est  la  reproduction  exacte  de  la 
phylogénèse,  il  ne  nous  est  pas  interdit  de  nous  former 
une  représentation  très  vague  des  premiers  débuts  du 
langage  humain.  Le  cri  animal,  avant  d'être  un  appel, 
ne  fut  qu'un  réflexe  inconscient,  et  le  langage  en 
procède,  mais  par  une  voie  détournée  :  seul  le  cri 
d'appel,  l'interjection,  chez  l'homme,  est  la  survivance 
d'une  animalité  antérieure  ;  le  langage  proprement  dit 
a  une  autre  origine,  non  moins  mécanique,  au  surplus, 
ni  moins  foncièrement  étrangère  au  mécanisme  de  la 
pensée.  Bref,  ce  que  nous  nommons  «  le  langage  suivi  », 
par  opposition,  à  la  simple  exclamation,  a  dû  débuter 
par  une  éjaculation  de  sons  quelconques,  appropriés 
naturellement  à  l'organe  qui  les  émettait,  mélopée 
très  probablement  allitérante  et  assenante,  gymnas- 
tique pulmonaire  et  labiale,  sous  laquelle  le  sujet  ne 
mettait  sans  doute,  et  sûrement  ne  cherchait  encore  à 
faire  comprendre  à  ses  semblables  aucun  rudiment 
d'idée.  Avant  d'être  l'expression  d'une  pensée,  le 
langage  a  été  un  exutoire:  pour  les  muscles  pectoraux? 
pour  les  cellules  de  la  troisième  circonvolution?  C'est 
aux  physiologistes  d'en  décider^ . 

V.  Henry. 

1.  En  dehors  de  ces  considérations  génétiques,  le  fait  capital  qui 
se  dégage,  pour  le  linguiste,  des  observations  de  M.  Flournoy, 
c'est  que  tout  fait  linguistique,  en  tant  qu'il  a  été  une  fois  perçu, 
DEMEURE  dans  la  mémoire  au  moins  subconsciente  du  sujet.  Cette 
donnée,  pour  n'être  pas  absolument  nouvelle,  est  trop  importante 
pour  qu'on  ne  tienne  point  compte,  dans  toutes  les  inductions 
ultérieures,  de  la  preuve  éclatante  que  M"°  Smith  nous  en  a 
fournie. 


NOTES  ADDITIONNELLES 


Au  n°  2,  vers  la  fin.  —  J'entends  «  positiviste  »  au 
sens  d'adepte  d'une  méthode  scientifique  qui  rejette 
tout  jug'ement  préconçu  et,  à  ce  titre,  s'impose  à  tout 
enquêteur  sincère,  quelles  que  puissent  être  ses  con- 
victions philosophiques  ou  religieuses;  car,  du  positi- 
visme érigé  lui-même  en  doctrine  philosophique^  j'ai 
grand'peur^  pour  ma  part,  qu'il  ne  ressemble  à  la 
grenouille  émule  du  bœuf. 

Au  n°  6,  alinéa  2.  —  M.  Flournoy  n'avait  pas 
oublié  de  dire  (p.  306,  1.  6)  à  quel  âge  M^^®  Smith 
avait  appris  l'allemand  :  c'est  en  effet,  entre  douze  et 
quinze  ans  ;  mais  ce  point  m'avait  échappé,  ou  du  moins 
n'avait  laissé  trace  que  dans  ma  mémoire  subcon- 
sciente. 

Au  n°  19,  1°.  —  Ce  décalque  va  aussi  loin  que  pos- 
sible. Quel  est,  par  exemple,  le  genre  du  mot  érié 
«âme  »?  Il  doit  être  féminin.  Il  est  vrai  qu'il  ne  se 
construit  (FI.  6  et  20)  qu'avec  le  pronom  possessif 
masculin  e^î  «  mon  »  ;  mais  c'est  qu'en  français  on  dit 
(cmon  âme  »!  Plus  tard  (FI.  31),  lorsque  la  gram- 
maire de  M}^^  Smith-  a  acquis  un  peu  plus  d'indépen- 
dance, elle  dit  bé  animinâ  «  sa  existence  »* 


-r-   171    --. 

Au  n"  27.  —  A  ce  sujet  M.  Flournoy  a  ^611 
voulu  m'écrire  (16  juin  1900)  :  «  La  déduction  d'Ése- 
nale- Alexis,  de  solitaire-éréduté,  detîziné-demain,  etc., 
etc.,  me  semble  absolument  satisfaisante  par  sa  par- 
faite conformité  aux  processus  coutumiers  du  rêve.  » 
On  estimera  peut-être  que  l'autorité  qui  me  fàit:dé- 
faut  en  matière  psychologique  est  amplement  suppléée 
par  cette  précieuse  approbation. 

Au  n°  31.  -^  Ce  qui  complique  la  question,  c'est 
que  mis  est  apparu  le  même  jour  que  tivê,  et  même 
quelques  secondes  auparavant,  dans  la  phrase  FI.  '8  : 
il  n'en  pourrait  donc  être  dérivé  qu'au  prix  d'un  travail 
préalable,  subconscient  et  entièrement  latent.  En 
somme,  mieux  vaut  reléguer  mis  dans  le  résidu  inex- 
pliqué; mais  on  remarquera  qu'il  est  le  seul  mot  très 
usuel  qyni  rentre  dans  cette  catégorie.      ' 

Au  n°  47.  —  D'une  obligeante  communication  de 
M.  Flournoy  il  semble  ressortir  qu'on  dit,  à  Genève 
comme  chez  nous,  «  au  revoir  »  lorsqu'on  soigne  son 
langage,  [et  a  à  revoir  »  lorsqu'on  le  néglige.  Les 
patois  savoyards  des  environs  disent  ar^vi. 

Au  n"  106.  -^  Ce  mot  est,  pour  mon  essai,  une  grave 
pierre  d'achoppement,  qui  a  failli,  après  coup,  m'em- 
pêcher  absolument  de  le  publier.  On  a;  vu,  en  effet, 
à.la  préface,  que  M''"'  Smith  a  donné  plus  tard  la  tra- 
duction des  deux  mots  mile  piri,  et  que  cette  traduc- 
tion n'est  point  «  mille  fois  »,  mais  «  vite  encore  ».  Je 
suis  convaincu  que,  sur  ce  point,  Ésenale  se  trompe 
ou  nous  trompe;  mais  je  n'ai  aucun  moyen  direct;  de 
le    convaincre  d'erreur    ou  de  supercherie,  puisque 


jamais  en  aucune  autre  circonstance  M'^®  Smith  n'a 
proféré  le  inot  martien  qui  équivaudrait  à  «  vite  »,  ni- 
celui  qui  équivaudrait  à  «  encore  ».  Cependant,  à 
défaut  de  preuve  catégorique  contre  cette  traduction,  ' 
de  sérieuses  présomptions  en  font  suspecter  la  sincé- 
rité :  si  mile  piri,  lorsqu'il  a  été  prononcé,  avait  dû 
réellement  signifier  «  vite  encore  »,  quelle  raison 
aurait  eue  Ésenale  de  ne  pas  le  traduire  sur-le-champ 
avec  le  reste  de  la  phrase,  et  de  tenir  si  longtemps  en 
suspens  un  sens  aussi  simple?  Il  me  parait  évident 
qu'il  —  c'est-à-dire  le  subconscient  de  M"*'  Smith  — 
a  passé  ce  temps  à  chercher  un  sens  supplétoire  qu'il 
pût  sans  inconvénient  substituer  à  la  signification  pri- 
mitive, afin  de  ne  point  encourir  le  reproche  de  parler 
français  en  martien.  M.  Flournoy,  qui  partage  ma 
conviction,  a  bien  essayé  une  contre-épreuve;  mais 
Ésenale  était  sur  ses  gardes  et  ne  s'est  point  laissé 
surprendre  (21  juin  1900).  «  Dimanche,  dans  une  séance 
où  il  y  a  eu  de  l'ultra-martien,  après  la  scène  habi- 
tuelle de  traduction,  j'ai  vivement  insisté  pour  qu'Ése- 
nale'me  traduisît  le  texte  19:  je  le  lui  ai  répété  soit 
entier,  soit  par  fragments  plusieurs  fois  ;  à  force  de 
questionner,  et  au  milieu  de  mouvements  d'impa- 
tience, après  de  longs  silences,  comme  si  Ésenale 
cherchait  à  se  souvenir  péniblement,  il  a  murmuré  : 
«  ami,  je  ne  puis  te...  vite  encore  adieu.  »  Tous  mes 
efforts  pour  obtenir  le  sens  des  autres  mots,  triné, 
sandiné,  etc.,  sont  restés  vains.  Il  en  résulte  pour 
moi:  1"  que  des  mots  qui  ont  cependant  paru  plu- 
sieurs fois  en  martien  sont  oubliés^  ainsi  que  le  sens 


—  173  — 

total  de  ce  texte  qui  remonte  à  près  de  trois  ans; 
2°  que,  si  M^^*  Smith  a  traduit  les  premiers  mots,  ce 
kié  mâche  dé,  c'est  qu'ils  comptent  parmi  les  plus  fré- 
quents de  la  littérature  martienne,  ce  qui  fait  qu'elle 
ne  les  a  pas  oubliés;  3°  que,  si  elle  a  aussi  traduit 
mile  piri,  qui  ne  se  sont  présentés  que  dans  ce  seul 
texte,  c'est  qu'une  circonstance  spéciale  a  gravé 
ces  aua?  dans  sa  mémoire  ;  cette  circonstance  spéciale, 
c'est  évidemment  que  ces  mots  lui  ont  déjà  été  rede- 
mandés le  4  juin  1899,  —  où  elle  n'a  pas  pu  les  tra-, 
duire,  —  et  le  10  septembre  1899,  où  elle  les  a 
traduits  par  «  vite  encore  ».  Elle  s'est  souvenue, 
dimanche  dernier,  du  sens  fourni  le  10  septembre; 
mais  rien  ne  prouve  que  ce  soit  le  sens  primitif  ;  au 
contraire.  Et  je  ne  vois  aucun  moyen  de  faire  re- 
trouver ou  avouer  à  Ésenale  ce  sens  primitif. . .  •»  La 
question  en  demeure  là  :  je  crois  ma  traduction  meil- 
leure; mais  je  ne  me  dissimule  pas  qu'il  y  a  outrecui- 
dance de  ma  part  à  prétendre  donner  à  M"*  Smith 
une  leçon  de  martien. 

Au  n"  110.  — Le  sk.  nipuna  est  plus  voisin;  mais- 
il  signifie  a  habile  ».  Quelqu'un  m'a  suggéré  depuis 
le  fr.  répugner^  qui  en  elîet  a  pu  interférer.     ■ 

Au  n°  134.  —  Il  me  paraît  plus  probable  que 
ténassé  a  été  suggéré  tout  entier,  tel  quel,  par  le  fr. 
tenace,  qui  est  une  épithète  souvent  associée  à  l'idée 
de  «  volonté  ». 

Au  n°  163.  —  L'explication  cadrerait  également, 
mais  moins  bien,  avec  le  fr.  laisser,  non  seulement  à 
cause  du  vocalisme,  mais  surtout  parce  que  l'infinitif 

12 


-  174  — 

al.  lassen  permet  de  rendre  compte  de  1'^  pénultième 
du  martien. 

Au  n°  173.  —  Quelques  informations  sur  des  ques- 
tions d'usage  familier  de  la  langue  magyare  m'ont  été 
fournies  par  mon  collègue  de  Graz,  M.  H.  Schuchardt, 
que  je  remercie  ici  de  son  amicale  obligeance. 

Au  n**  212.  —  Tout  bien  considéré,  la  personne  qui 
est  ainsi  «  lancée  )),  l'étant  dans  une  disposition  en- 
thousiaste qui  ressemble  fort  à  l'extase,  a  fort  bien  pu 
tirer  son  verbe  «  lance  »  du  h. -extasiée.  Et  cette  voie 
me  parait  plus  simple  et  plus  sûre. 

Au  n°  236.  —  Le  prâcrit  a  des  mots  beaucoup  plus 
voisins  encore  du  jargonnement  sanscritoïde  attamana, 
soit  p.  ex.  pk.  atthamana  =  sk.  astamayana,  ou 
pk.  attamana  =  sk.  âvartamdna.  Mais  le  sens  ne  con- 
corde point  du  tout  ;  et  puis  nous  n'avons  pas  le  droit 
de  supposer  que  le  sujet  ait  entendu  des  spécimens  de 
toutes  les  langues  de  l'Inde. 

Au  n"  238.  —  Sans  insister  sur  cette  question  inso- 
luble, j'observe  que  M"*'  Smith  emploie  son  mot  mira 
dans  des  phrases  (cf.  FI.  18  et  31)  où  le  sens  «  salut  » 
serait  mieux  à  sa  place  que  celui  d'  «  adieu  ». 

Au  n°  254.  —  Toute  cette  pénible  déduction  est  à 
supprimer  et  à  remplacer  par  la  suggestion  portée  à 
la  fin  :  mené  «  amie  »  est  l'ai,  meine,  et  men  «  ami  »  en 
est  abstrait  par  suppression  de  la  finale  féminine. 

Au  n**  287.  —  Tenant  compte  des  modifications 
apportées  aux  statistiques  spéciales  des  chapitres  IV- 
XI  par  les  additions  ci-dessus  aux  n°»  212  et  254,  on 
voit  que  le  lexique  total  de  la  langue  martienne,  non 


—  175  — 

compris  les  noms  propres  et  les  petits  mots,  se  décom- 
pose de  la  manière  suivante  : 

1"  Mots  hypothétiquement  réductibles  au  français  seul.  110 

2»    —                 —                     —        à  l'allemand  seul.  25 

3°    —                 —                     —        au  magyar  seul . .  55 

4»    —                 —                     —        à  l'anglais  seul . .  3 

5°    —                —                    ^  à  une  source  orientale.  5 

6°  Contaminations  diverses 29 

7"  Dérivations  des  précédents. 16 

8"  Résidu  irréductible 5 

Total 248 


INDEX 

[N.  B. —  On  n'a  pas  dressé  d'index  martien:  les  chapitres 
IV-XI,  011  les  mots  martiens  sont  rangés  par  ordre  alpha- 
bétique, en  tiendront  lieu.  —  On  n'a  pas  non  plus  relevé  les 
petits  mots  qui  font  l'objet  du  chapitre  III.  —  Les  chiffres 
renvoient  aux  n»**  entre  parenthèses  en  caractères  gras.]. 

I.  Allemand 


ail 177 

ameise 247 

ast 28 

bedingen 243 

bewohnen  ..;.,.  287 

blick 268 

bringea 170 

bruder 181 

butter 251 

ebeu 154 

eiaig« 12,  lUS 

efde ....72,  245 

erinaeru. 159 


esel 27 

flndea....8,  150,  151 

freilich 246 

fund 151 

fûrwahr 246 

geschmack 264 

gruud 265 

gut 155 

handeln 12,  149 

haus ,,12,  156 

heuie 267 

himmel 160 

birn 161 


hohe 157 

hund 85 

innig 88 

je 158 

klein 191 

kummer ........  162 

lassen 163 

machen 164 

mag 164 

raaiin 165 

mannig 2â,  198 

mehrere 242 

meiuc, < 254 


176  — 


raichel.. . .. . —  197 

mittel 287 

matter 17,  166 

nase 248 

pelz..' 249 

butter 251 

good  .s 155 

kind,  kindness..  232 

-a..... 241,  242 

abondaut 40 

académie 41 

Alexis 27 

aligné 253 

alizé....; 42 

ami,  etc 247 

aminci 87 

âne 27 

animé 43 

antérieur 46 

antique 46 

à  revoir 47 

assigner 44,  65 

assurer 129 

attenant 133 

Banat 50 

battant 49 

bas 51, 145 

béni 52 

bien 119 

brillant 125 

bure 96 

calmer 90 

câpre .... i .....  i    58 


i-ast 244 

reden 169 

schmecken 264 

schnilt 153 

schôu. 152 

II.  Anglais 

match 23o       verily 

mother 17,  166 

uor  yet 234 


so... ............  -250. 

taumel........ ..  172 

trieb 171 

voll 26a 

warten 266 


III.  Français 

carreau 59 

centenaire 128 

chagrin 249 

chèque 61 

chéri ;...24,  62 

Chine 147 

cœur 237,  262 

consigner 44 

dab 64 

demain 260 

demi 67 

diminué 87 

disant 66 

discerner 69 

divine 68 

doctrine 139 

du  moins 71 

dure 72 

écrire 255 

enchanteur...  15,60 

encourager 45 

entré 97 

entretenir 286 

épine 24,  74 

épris 73 


246 


Espagne 17,  75 

esprit 55 

essence 76 

extasié 212 

fin 77 

fine 78 

firme 79 

forme 79 

formidable 80 

fougueux 80 

fourrai 247 

gamme 81 

gaudir 82 

grand 83 

grève 84 

habitant 54 

hanter 85 

heurter 112 

hideux 105 

idée 86 

imprimer 55 

instant 135 

issue 57 

jet  d'eau 63 

laisser 163 


—  "177  — 


Léopold -28 

léser,  lésion 94 

ligne 253 

luire,  lumière. . .     95 

luudi,  lune 95 

madame 99 

mademoiselle. . .  102 

maison 108,  156 

mâle 92 

maman 107 

masse 98 

maternel 103 

médiierranée 100 

merveilleu.x.  15,  101 

mignon 88 

raille 106 

mince 87 

minet 88 

minute 109 

misère 105 

modéré 70 

monsieur 104 

mort 77 

myosotis 146 

néant 284 


nébuleux 111 

obscurité 141 

os  .!!^..;.^.....  251 

palliatif 113 

pandit.... ......  240 

paresse 115 

parvenir .'.'. 124 

Pasteur...'.... ..  116 

pavillon,  etc 117 

pénétré 97 

pleurer '.  122 

pleuvoir 122 

poitrine 258 

problème 123 

puni 110 

quatre 03 

qui  vive 91 

raison 126 

rameau 28,  206 

rapide 114 

réfléchir 126 

réitéré 89 

repasser 118 

reprise 120 

répugner 110 


revenir ,  54 

si...;::..!.......  187 

soie ,.  259 

solitaire 245 

solution.::::.:::  123 

sur:...::.:::.:.  127 

sûr::.:::.:.:....  129 

tableau.:: 132 

tamarix 130 

tant 250 

tapisserie 132 

tenir...  131,  133,  133 

tout  ainsi 136 

traînée 137 

trajet 137 

trimer 138 

trompe 243 

usé 140 

venir 143 

vers 252 

vide 121 

vieil 177 

viser,  vision 144 

voir 142,  252 

vraiment 246 


essere 


IV.  Italien 

76      godere 82       lunedi 95 


adja  (Isten) 174 

adui 174 

âg 28 

alacsony 178 

âllani 253 

aludni 218 

âtmenni 175 


V.  Magyar 

bàtya 181 

benézni 52 

bibe 24,  179 

bor 264 

borisza 263,  264 

botor 251 

csacsi 27 


csatinâzni 204 

csemege 227 

csendes 184 

csiga 226 

dûhôsség 140 

egész 188 

éljen 185 


178 


éljeneznl 186 

élni 185 

ézen  allât 27 

fia 180 

garabô 192 

gerend 265 

gyermek 180 

hâznemû 176 

hiânyjel 287 

idô,  idôs 189 

igy^   igyen 187 

ilyen 187 

irni 195,  255 

iromâny 195,  255 

is... 222 

Ivrét 190 

izrom 228 

kicsiny 15,  191 

kirics 183 

kônnyû 191 

lâm 193 

lâtni 252 

levé! 199 

Lipôt 28 

madâr 204 

magas 197 


mâs,  mâsik 196 

Maté.- 26 

megnézgélni 194 

megy.. 175 

melly 258 

menni 175 

mész 175 

mosojogni 208 

uémi 25,  198 

név 223 

nyerész 256 

ohajtâs 267 

parittyâzni 212 

pederedni 202 

pedig 222 

pillanat 268 

repûl 114 

selyem 259 

sokâra 229 

somojogui 208 

szem,  szemôk. . .  207 

szép 152 

szirmanyult 206 

szirom 206 

sziv 182,  262 

szivesség 182 


tâgas 209 

tata. 211 

teljes 213 

terjedili 214 

tiz.. 260 

tôbbre 217 

tôrvény. 210 

tôvet 216 

tûzes 215 

iigye 261 

ûgyelni 266 

ùgyész 261 

uradalom 257 

ùrhadi 257 

usztatâs 201 

usztatni 201 

ùzem 219 

vadâsza 220 

vârni 225 

vén 177 

vidâm 221 

villanat 268 

virâny ; . . .  225 

viz 224 

zamat 264 

zsidô 205 


VI.  Sanscrit 


adhyâya 8      nipuna 110  mahât 197 

àtmànam 25,  236       panditâ 240  simantinï 8 

ganapati 8       Pànini 26  sumanas 239 

dvandva 8      bhûvana 236  h/d ,  hrdà,  hrdi. .  237 


LA  RAZA  VASGA 


Y   SUS 
RELACIONES   CON   LA   LINGÛiSTICA    Y   LA   ETNOLOGiA  ^ 


Seintoras  y  Seistores  : 

La  cuestion  de  la  raza  vasca  tiene,  como  todas  las 
otras  cuestiones,  variedad  de  aspectos  ô  puntos  de 
vista,  que  es  menester  no  confundir  :  el  primer  punto 
a  estudiar  era  6  por  mejor  decir,  debia  haber  sido  el 
precisar  los  caractères  antropolôgicos  de  los  Euskal- 
dunak  actuales,  seilalar  loque  constituye  su  persona- 
lidad  fisica  si  la  tienen;  solamente  despues  de  haber 
bien  definido  el  verdadero  tipo  yasco  mediante  una 
amplia  base  cientifica  se  podria  estudiar  con  provecho 
la  cuestion  de  las  analogias  que  pueda  tener  con  las 
otras  razas,  que  â  su  vez  debian  haber  sido  bien  estu- 
diadas  con  anterioridad;  solamente  despues  de  haber 
establecido  analogias  con  una  base  antropolôgica  sin 
prejuicios  procedentes  de  supuestas  analogias  lingûis- 
ticas  ô  de  otra  clase,  se  podria  abordar  la  cuestion  de 
las  origenes.  Pues  bien,  le  que  se  ha  hecho  es  precisa- 
mente  todo  lo  contrario;  se  han  emitido  hipôtesis  sobre 
las  origenes  antes  de  estudiar  ni  los  Vascos  ni  los  otros 

1.  Communication  faite  au  Congrès  International  des  Études 
basques . 


—  180  — 

pueblos  con  quienes  se  les  compara,  y  cuando,  por 
ùltimo,  han  venido  los  antropôlogos  à  estudiar  la  pri- 
mera cuestiôn,  se  han  visto  influidos  por  ideas  precon- 
cebidas,  por  teorias  que  se  queria  demostrar  ô  que  se 
querria  rechazar. 

Esta  ya  establecido  por  mis  descripciones  y  las  de 
M.  Collignon,  que  hay  verdaderamente  un  tipo  antro- 
polôgico  vasco  bien  definido;  no  es  ocasiôn  de  insistir 
sobre  esto,  pudiendo  referirme  à  mis  ùltimos  articules 
publicados  en  Euskal-erria  (XXV,  1896,  p.  577-580), 
Euskalduna  (III,  1898,  n**  84),  y  Lecciones  de  antro- 
pologia  (T,  4",  Etnografia,  razas  negras,  amarillas  y 
blancas;  Madrid,  1900)  :  pero  no  dejaré  de  hacer  notar 
la  ningunaatenciônque  presta  M.  Collignon  al  carâcter, 
que  habia  hecho  notar  yo  y  estaba  ya  indicado  en  las 
publicaciones  de  autores  anteriores,  referente  al  ângulo 
occipital  de  Daubenton  ô,  lo  que  viene  â  ser  lo  mismo^ 
la  posiciôn  de  la  cabeza  sobre  la  columna  vertébral, 
carâcter  que  con  el  de  la  nariz  colocan  à  la  raza  vasca 
â  la  cabeza  de  la  humanidad,  pudiendo  considerarla 
como  una  de  las  mâs>  aristocrâticas,  de  las  mâs  pro- 
piamente  blancas  ô  europeas,  de  las  mas  lejanas  de  la 
animalidad. 

Pero  lo  mâs  extrano  en  Collignon  son  sus  contradic- 
ciones  évidentes  que  reducen  â  la  nada  sus  conclusiones 
y  que  no  han  llamado  la  atenciôn  de  los  que,  mâs 
hambrientos  de  conclusiones  que  de  hechos  ciertos, 
admiten  aquellas  como  verdades  :  estudia  bastantes 
Vascos  franceses  y  algunos  Vasco-Espanoles  que  le  pre- 
sentan  en  San  Sébastian  con  ocasiôn  de  una  râpida  visita 


-  181  — 

que  hace  â  esta  ciudad;  deduce  la  escasez  del  tipo  en  la 
parte  espanola,  influida  por  las  gentes  dolicocéfals» 
de  Castilla;  crée  hallar  la  mayor  freciiencia  del  tipo  en 
los  valles  mas  braquicéfalos  del  pais  basco  francés; 
déclara  este  tipo  braquicéfalo  y  muy  diferente  de  los 
tipos  del  Norte  de  Africa.  Bien,  pues  despues  de  todo 
esto  y  para  forzar  un  poco  las  analogias  con  el  Norte 
9,fricano  que  crée  demostradas  porlalinguistica,  lo  que 
por  ahora  al  menos  esta  lejos  de  ser  verdad,  dice  que 
la  braquicefalia  de  los  Vascos  es  una  braquicefalia 
artijicial,  facticia,  accidentai  [\),  que  explica  con  teo- 
rlas  craneoscôpicas  trasnochadas;  no  le  llama  la  aten- 
ciiin  el  que  los  cantones  mâs  braquicéfalos  son  los  que 
estan  mâs  en  contacto  con  los  cantones  braquicéfalos 
bearneses  de  Navarrenx,  Monein  y  Lescar;  no  com- 
prende  que  puede  haber  influencia  de  los  braquicéfalos 
franceses  como  de  los  dolicocéfalos  espanoles;  no  ve 
que  ciertos  rasgos  de  la  fisoaomia  vasca  podrân  pare- 
cerle  mâs  manifiestos  en  una  cabeza  braquicéfala,  sin 
que  por  esto  sean  menos  existentes  en  las  cabezas  doli- 
cocéfalas  de  los  Vasco-Espanoles  y  podria  senalaros  un 
ejemplo  hoy  mismo  en  algùn  Vasco-Francés,  asi  como 
puedo  aseguraros  que  lo  he  visto  muy  frecuente  en 
Vizcaya  y  en  el  Goyerri  guipuzcoano,  regiones  las 
mâs  visitadas  por  mi.  Compara  tambien  M.  CoUignon 
el  torso  vasco  y  el  egipcio,  torsos  de  agricul tores;  pero 
si  es  verdad  que  los  Vascos  tienen  espaldas  anchas,  no 
lo  es  tanto  que  las  caderas  sean  estrechas  ;  séria  menester 
demostrarlo  por  medidas  y  no  lo  hace  :  ademâs,  basta 
comparar  los  Vascos  â  los  otros  Espanoles,  principal- 


—  182  — 

rhëiite  los  Andaluces,  para  que  se  distingan  los  pri- 
mêros,  no  solo  por  la  anchura  de  los  liombros,  sino 
tambien  de  las  caderas  y  de  los  pies;  son  pues  mâs 
europeos,  menos  bereberes  que  los  otros  Espaïloles. 

Por  lo  dicho  podeis  deducir  que  para  mi  el  verda- 
dero  tipo  basco  no  hay  porque  admitir  que  sea  tan 
braquicéfalo  como  los  cantones  vecinos  del  Béarn  ;  mâs 
equitativo  me  parece  que,  pues  hay  en  la  parte  espa- 
nolados  mâximos  de  frecuencia,  uno  subdolicocéfalo  y 
otro  mesocéfalo,  y  en  la  parte  francesa  tambien  dos, 
uno  mesocéfalo  y  otro  subbraquicéfalo,  el  mesocéfalo 
nos  representaria  mâs  propiamente  â  la  raza  basca.  Los 
antropôlogos  creen  hoy  en  el  dogma  de  la  incompatibi- 
lidad  de  la  mesocefalia  con  la  caracteristica  de  una 
raza  original  ô  primitiva;  creen  que  es  imposible  que 
una  raza  primitiva  tenga  unas  proporciones  de  anchura 
y  largura  en  la  cabeza  que  no  sean  ô  menos  de  3/4  ô 
mâs  de  5/6;  se  forman  al  mismo  tiempo  un  concepto 
de  raza  primitiva  tan  especial,  tan  petrificado,  rigide  y 
esclusivista,  que  parece  imposible  cômo  informe  las 
elucubraciones  de  darwinistas  y  crey entes  â  la  vez.  En 
tanto,  pasemos  provisionalmente  porque  el  tipo  meso- 
céfalo basco  sea  de  origen  mestizo;  siempre  sera  un 
mestizaje  muy  antiguo  y  producido  de  una  manera 
espontânea  ô  independiente^  si  vale  la  frase,  ântes  de 
la  época  de  la  formaciôn  de  los  rasgos  caracterlsticos  de 
la  cara  vasca,  rasgos  de  pueblo  de  vida  agricola  y  de 
alimentaciôn  cocinada,  mâs  bien  cocida  que  cruda,  de 
un  pueblo  que  no  tiene  carâcter  agresivo,  que  no  es 
precisamiente  conquistador,  pero  al  mismo  tiempo  de 


—  183  — 

un  pueblo  que  ha  sabido  tener  personalidad  propi^; 
por  oscura  é  insighificante  que  pueda  parecer  â  los 
idolâtras  de  las  mentiras  escHtas  por  los  représentantes 
de  los  pueblos  agresivos  y  esclusivistas. 

Existia  ya  constituido  el  euskera  ântes  de  este 
supuesto  mestizaje?  En  todo  caso,  en  el  estado  actual 
de  los  datos  antropolôgicos  no  vemos  motivo  suficiente 
para  orientar  las  analogias  solamente  hacia  el  Sud", 
séria  de  proponer  â  los  lingùistas  tuviesen  en  cuenta  la 
posibilidad  de  hallar  quizâs  algunas  analogias  estur 
diando  â  ser  posible  el  etrusco,  el  ligur  y  los  residuos 
de  lenguas  precélticas  en  el  Occidente  de  Europa, 
indicaciôn  esta  ùltima  digna  principalmente  de  tenerse 
en  cuenta^  por  lo  que  haee  â  la  numeraciôn,  no  solo  por 
su  carâcter  vigesimal,  sino  también  por  la  colocaciôn 
de  las  decenas  ântes  de  las  uriidades  en  consonancia 
con  la  sintaxis  del  sustantivo,  adjetivo  y  articule  y  en 
perfecta  antitesis  con  el  orden  de  unidades  y  decenas 
en  latin  y  aleinân. 

Y  no  solo  los  datos  antropolôgicos,  sino  tambien  los 
etnogrâficos  podrian  quizâs  ayudarnos  â  considerar 
como  probable  que  el  euskaldûn  se  ha  hecho  raza  y 
se  ha  hecho  pueblo  en  el  pais  que  habita  al  présente, 
sin  que  veamos  razôn  ninguna  para  suponer  otra  cosa-; 
asi  pues  el  euskaldûn  séria  hijo  legitimo  de  Euskal- 
erria,  â  quien  permanece  unido  con  la  intensidad  de 
carino  propia  de  los  pueblos  agricultores  dândola  el 
sello  étnico  propio  de  la  raza. 

Cierto  que  algunos  terribles  etimologistas  del  pré- 
sente quieren  encontrar  mâs  de  80  "/•  de  importaciôn 


—  184  - 

en  las  palabras  que  indican  cultura  y  hasta  en  las  ideas 
mâs  elementales  y  naturales;  pero  es  bien  seguro  que 
taies  afirmaciones  no  encontrarian  eco,  sino  se  tratase 
de  ideas  que  consciente  6  inconscientemente  halagan 
un  prejuicio  al  mismo  tiempo  que  brotan  de  él;  pre- 
juicio  muy  arraigado  en  los  pueblos  agresivos,  absor- 
bentes  y  vanidosos  con  literatura  escrita  y  relaciones 
exteriores  y  con  la  mordaza,  la  difamaciôn  y  la  arbitra- 
riedad  para  lo  que  les  estorba  en  sus  miras  esclusivas  ; 
prejuicio  cuya  espresiôn  hiperbôlica  pero  muy  grâfica 
vimos  en  ocasiôn  que  no  queremos  recordar,  cuando 
alguien  decia  que  â  los  indigenas  de  cierto  pais  se  les 
habia  ensenado  hasta  â  andar  en  dos  pies. 

En  ùltinio  termine,  ningùn  pueblo  es  inventor,  los 
inventores  son  los  individuos,  el  mérite  en  los  pueblos 
esta  en  saber  adoptar  y  aprovechar  los  inventes,  sean 
de  individuos  propios  ô  agenos,  dândoles  la  verdadera 
existencia  permanente  y  las  posibilidades  para  su  evo- 
luciôn;  y  en  este  sentido  es  menester  reconocer  que, 
si  cada  hombre  tiene  sus  cinco  dedos  en  cada  mano. 
cada  pueblo  tiene  sus  aptitudes  para  desarrollar  toilo 
lo  que  verdaderamente  sea  necesario  para  la  evoluciôn 
de  su  vida  en  lo  que  las  circunstancias  topogrâficas  é 
histôricas  se  lo  permitan. 

Terminaré  senalando  â  los  etnôlogos  en  sus  diversas 
especialidades  la  utilidad  que  para  el  conocimiento  de 
la  cuestiôn  reportaria  el  estudio  de  la  mûsica  vasca, 
por  ejemplo  no  solo  en  el  ritmo  de  las  canciones  tradi- 
cionales  y  en  su  modulaciôn,  sino  también  en  el  ritmo 
y  medida  de  sus  danzas,  el  aurresku,   los  diverses 


—  185  - 

tierapos  del  espata-dantza  y  el  zortziko,  que  de  tiempo 
de  danza  ha  pasado  hoy  a  ser  una  de  las  formas  de  la 
canciôn,  y  que  ofrece  la  particularidad  de  ser  su 
medida  cinco  por  ocho,  medida  que  Fetis  asigna  à  los 
Finlandeses,  pero  no  he  conseguido  ver  en  ninguna 
canciôn  de  aquel  pais;  medidas  todas  estas  que  hacian 
la  desesperaciôn  y  provocaban  los  denuestos  de  los 
maestros  ciruela  de  la  estrecha  escuela  musical  de  no 
hace  un  siglo.  Tiene  la  mùsica  popular  la  ventaja  de 
que  de  todas  las  artes,  industrias  y  demâs  manifesta- 
ciones  de  la  vida  de  un  pueblo,  es  ella  lo  mâs  espon- 
tâneo,  lo  mâs  libre,  lo  menos  sujeto  à  rigideces 
escolàsticas,  à  tiranias  politicas,  â  supersticiones  y  à 
influencias  antiartisticas;  por  esto  y  por  ser  el  arte 
mâs  moderne  es  el  que  àcaba  de  dar  el  sello  personal  à 
los  pueblos  actuales. 

Paris,  5  setiembre  1900. 

Prof.  D''Telesforo  De  Aranzadi, 


NOTE 

SUR  L'ORIGINE   DES  PARFAITS  FAIBLES 

DANS  LES  IDIOMES  GERMANIQUES 


i .  --  Les  parfaits  des  verbes  germaniques  faibles 
ont  pris  naissance  dans  la  série  des  formes  anormales 
goth.  ma^',  kann.  etc.,  qui,  employées  comme  pré^ 
sents,  ont  nécessilé  des  substituts  avec  fonction  spé- 
ciale de  parfaits. 

2.  —  Ces  substituts  ont  été  obtenus  par  la  combi- 
naison instinctive  du  rad.  du  plur.  mag,  kunn  avec  le 
t  {th  ou  d)  caractéristique  des  part,  passés  correspon- 
dants, comme  rna/ifs  (cf.  \al.  mactus,  qui  en  garantit  le 
caractère  primitif)  et  la  finale  {a,  pour  la  1'*  pers.  du 
sing.,  etc.)des  formes  correspondantes  du  présent  au 
singulier  et  celles  des  parfaits  forts  au  duel  et  au  plu- 
riel. 

Exemples  : 

Sing.  —  l^e  perg.  rnah-i-a,  kun-th-a 

—  2®  pers.  màh-t-es,  kun-th-es 

—  3'  pers.  mah-t-a,  kun-th-a 

(Désinence  de  la  3"  pers.  semblable  à -celle  de  la 
1"  par  analogie  avec  l'identité  des  formes  corres- 
pondantes des  parfaits  forts  {lag,  lag). 


—  187  — 

Duel,  qui,  ainsi  que  le  plur.,  se  développe,  avec  les 
mêmes  éléments  finaux,  sur  les1'%  3®  pers.  du  singu- 
lier, avec  affaiblissement  de  la  finale  ta  en  de  (cf.  la 
finale  es  pour  as  de  la  T  pers.)  : 

l''«pers.  mngte-d-u,  kunthe-d-u 
2»  pers.  magte-d-uts,  kunihe-d-uts 
Plur.  —  1"^  pers.  magte-d-um,  kunthe-d-um 

—  2®   pers.  magte-d-uth^  kunthe-d-uth 

—  3"   pers.  magte-d-un,  kunthe-d-un 

L'objection  à  laquelle  semble  pouvoir  donner  lieu 

la  valeur  passive  du  suffixe  du  part,  passé  tombe,  si 

l'on  admet  que  ces  formations  ont  eu  pour  point  dé 

départ  des  participes  à  sens  neutre,  comme  celui"  de 

mag,  «  être  fort,  pouvoir,  grandir  ».  Cf.  d'ailleurs  lé 

sens  neutre  ou  actif  des  part,  passés  des  déponents 

latins. 

Paul  Regnàud. 


BIBLIOGRAPHIE 


Légendes  bouddhistes  et  djainas,  traduites  du  tamoul 
par  Julien  Vinson.  —  Paris,  Maisonneuve,  1900, 
21  voL  in-12,  I  (viij)-xxviij-230  p.,  II  (viij)-274  p. 

L'Inde  ancienne  est  le  pays  d'origine  de  la  fable  et 
du  conte.  Du  moins,  les  recueils  tels  que  le  Panca- 
ianira^  VHitopadeça^  le  Kathâsaritsâgara,  que  la  litté- 
rature sanscrite  nous  a  conservés  et  qui  sont  la  source 
de  tant  de  récits  devenus  populaires  en  Occident 
même,  ont  tous  les  caractères  de  l'originalité;  la  plupart 
de  nos  apologues  classiques  viennent  de  là  et  ceux 
qui  constituent  ces  recueils  portent  avec  eux,  pour- 
rait-on dire,  leur  extrait  de  naissance.  Mais  si  de  bonne 
heure  ils  sont  venus  chez  nous  par  des  voies  que  la 
science  moderne  a  réussi  à  retracer,  à  plus  forte  raison 
se  sont-ils  répandus  et  conservés  dans  l'Inde  même  à 
Taide  des  littératures  dont  le  développement  est  dû 
aux  idiomes  d'origine  secondaire  qui  ont  succédé  au 
sanscrit  d'autrefois.  Le  tamoul,  par  exemple,  a  rempli 
ce  rôle  à  l'égard  des  récits  bouddhiques  et  djainas 
dont  M»  J.  Vinson  nous  donne  un  résumé  si  curieux 


—  189  — 

dans  l'intéressante  et  élégante  collection  des  «  Con- 
teurs et  poètes  de  tous  pays  »  que  publie  la  librairie 
Maîsonneuve. 

L'analyse  des  romans  (car  ce  sont  de  véritables 
romans  dont  il  s'agit)  que  nous  font  connaître  les 
fidèles  traductions  de  M.  Vinson  ne  serait  que  le  sec 
résumé  de  récits  qui  valent  surtout  par  les  détails 
dont  ils  sont  ornés  et  la  couleur  locale  que  ces  détails 
leur  prêtent.  Aussi  n'entreprendrons-nous  pas  la 
tâche  ingrate  de  priver  de  leurs  agréments,  sans  grand 
profit  pour  le  lecteur,  des  œuvres  que  les  soins  déli- 
cats et  diligents  du  traducteur  ont  déjà  resserrées  dans 
les  limites  qu'indiquaient  le  goût  européen  et  les  conve- 
nances littéraires  auxquelles  nous  sommes  habitués. 
Ceux  qui  voudront  connaître  les  Légendes  bouddhistes 
ne  sauraient  mieux  faire  que  de  recourir  à  la  traduc- 
tion même  que  nous  annonçons,  et  nous  nous  portons 
garant  qu'ils  n'auront  pas  à  le  regretter. 

Deux  mots,  pour  terminer,  sur  les  côtés  scienti- 
fiques de  l'ouvrage.  Si,  comme  nous  l'indiquions  plus 
haut,  les  contes  auxquels  nous  avons  affaire  ont 
été  créés  dans  l'Inile  même,  il  serait  extrêmement 
intéressant  de  déterminer  quelle  est,  en  ce  qui  les 
concerne,  la  part  de  l'imagination  et  celle  de  la  tra- 
dition. En  d'autres  termes,  sommes-nous  en  présence 
d'œuvres  personnelles,  même  au  point  de  vue  des  traits 
généraux  de  ces  contes,  ou  simplement  de  dévelop- 
pements et  d'arrangements  reposant  sur  des  ouvrages 

13 


—  190  — 

antérieurs  où  se  trouvaient  déjà  les  motifs  principaux 
des  légendes  postérieures? 

Pour  nous,  nous  avons  la  ferme  persuasion  de  l'im- 
portance capitale  en  pareille  matière  de  la  tradition 
sous  ses  formes  les  plus  anciennes,  c'est-à-dire  et 
quoiqu'il  s'agisse  du  bouddhisme,  celles  qu'elle  pré- 
sente dans  les  hymnes  védiques  et  les  Brdhmanas. 
C'est  là  qu'est  le  principe  et  la  source  de  toute  l'expan- 
sion religieuse  et  littéraire  de  l'Inde  ancienne.  On  en 
retrouve  la  filièrechaque  fois  qu'on  prend  la  peine  de  la 
rechercher,  et  certainement  M.  Vinson  la  rétablirait  sur 
ce  terrain  des  légendes  bouddhiques  et  djainistes,  s'il 
lui  plaisait  de  doubler  d'un  travail  d'érudition  l'œuvre 
plutôt  littéraire  dont  il  s'est  si  bien  acquitté. 

P.   R. 

I . Leiçarragà^  Baskische  Bûcher  von  1371  in  genauen 
Abdruck  herausgegeben  von  Th.  Linschmann  und 
H.  ScHUCHARDT...  Stmsbourg,  K.  J.  Trûbner,  1900, 
cxx-(xl)p.-439fLs-tij)-(îxiv)-(cxi)-(xvj)-(lj)  p.  in-8». 

On  sait  quelle  est  l'importance  des  œuvres  de  Li- 
çarrague  pour  l'étude  de  ce  que  le  pr.  L.-L.  Bonaparte 
appelait  le  basque  moyen,  expression  un  peu  préten- 
tieuse peut-être,  car  il  n'y  a  pas  entre  le  basque  du 
XVP  siècle  et  la  langue  contemporaine  une  différence 
aussi  marquée  qu'entre  le  moyen  allemand  et  l'alle- 
mand moderne;  les  formes  et  les  tournures  du  Nouveau 
Testament  de  1571  se  retrouvent  d'ailleurs  dans  les 


—  191  — 

auteurs  labourdins  du  XVIP  siècle, mais  leurs  ouvrages 
sont  bien  moins  volumineux  que  celui  du  ministre  de 
Briscous  et  ce  dernier  a  l'avantage  d'être  presque  tou- 
jours la  traduction  d'un  texte  facile  et  connu . 

Malheureusement,  les  exemplaires  en  sont  fort 
rares.  Des  deux  livres  de  Liçarrague,  l'un,  —  le 
Calendrier  et  ïAbc,  avec  les  prières,  —  n'a  été  con- 
servé qu'à  quatre  exemplaires  dont  deux  sont  dans 
des  Bibliothèques  publiques  (à  l'Arsenal  et  à  la  Maza- 
rine);  de  l'autre,  le  Nouveau  Testament  et  ses  annexes, 
on  connaît  vingt-six  exemplaires,  et  il  doit  en  exister 
quelques  autres  encore'.  Aussi  doit-on  féliciter  vive- 
ment MM.  Schuchardt  et  Linschmann,  ainsi  que 
l'Académie  des  sciences  de  Vienne,  du  service  consi- 
dérable qu'ils  viennent  de  rendre  à  la  science  en  faisant 
réimprimer  avec  la  plus  scrupuleuse  exactitude  ces 
précieux  textes. 

La  reproduction  a  été  faite  en  effet  page  pour  page, 
ligne  pour  ligne,  mot  pour  mot  et  signe  pour  signe, 
mais  il  est  regrettable  que  l'on  n'ait  pas  poussé  plus 


1.  Quinze  dans  des  Bibliothèques  publiques:  cinq  en  France 
(à  la  Bibliothèque  Nationale,  à  l'Arsenal,  à  Bayonne,  à  Oloron, 
et  chez  les  Bénédictins  delà  Bastide-Clairence),  trois  en  An.çle- 
terre  (au  British  Muséum,  à  la  Bodleyenne,  à  la  Société  Biblique), 
un  à  Leyde,  un  à  Hambourg,  un  à  Leipzig,  un  à  Stuttgart,  un  à 
Berne,  un  à  Rome,  un  à  Madrid;  et  onze  chez  des  particuliers  : 
six  en  France,  trois  en  Angleterre,  un  en  Esjîagne,  Un  en  Italie. 
Dans  ce  nombre  ne  sont  pas  compris  des  exemplaires  qui  ont 
figuré  dans  plusieurs  ventes  publiques  depuis  le  milieu  du 
dernier  siècle. 


—  192  — 

loin  la  ressemblance  en  employant  des  caractères  elzé- 
viriens.  Il  en  résulte  que  les  dimensions  des  pages  sont 
plus  grandes  que  dans  l'original;  dans  le  Calendrier  et 
VAbc,  les  pages  ont  110  mm.  et  demi  au  lieu  de  105 et 
63  mm.  au  lieu  de  53.  Les  s  longs,  les  tilde  ne  font 
pas  typographiquement  un  très  heureux  effet  au  milieu 
du  romain  ordinaire  allemand.  Du  reste,  les  fleurons 
et  les  lettres  ornées  ne  sont  pas  exactement  pareils, 
les  en-tête  des  mois  dans  le  Calendrier  ont  les  signes 
du  zodiaque  beaucoup  plus  petits,  les  c  et  «  ne  sont 
pas  liés,  les  s  et  les  ï  sont  séparés,  etc.  Enfln,  l'im- 
pression, quels  que  soient  le  soin  et  l'attention  avec  les- 
quels elle  a  été  faite,  n'offre  pas  le  goût  parfait  et  l'élé- 
gance que  nous  prétendons  réaliser  en  France  :  on  le 
remarquera  surtout  dans  l'introduction.  J'ai  colla- 
tionné  quelques  pages  et  je  les  ai  trouvées  tout  à  fait 
conformes  à  celles  de  l'édition  originale.  Les  savants 
éditeurs  indiquent  eux-mêmes  quelques  corrigcnda  ; 
M.  Dodgson  en  a  trouvé  deux  ou  trois  de  plus.  Mais, 
en  définitive,  on  peut  dire  que  la  publication  de 
MM.  Schuchardt  et  Linschmann  remplace  parfaite- 
ment les  éditions  de  157r.  Je  regrette  cependant 
beaucoup  pour  ma  part  que,  par  des  raisons  d'éco- 
nomie sans  doute,  on  n'ait  pas  intégralement  réim- 


1 .  Le  titre  du  Nouveau  Testament  est  reproduit  phototypogra- 
phicjuement.  Pourquoi  n'en  a-t-on  pas  fait  de  même  pour  le  Ca- 
lendrier et  VAhc,  dont  les  titres  ont  été  composés  en  caractères 
beaucoup  plus  gros  que  sur  l'original? 


J 


—  193  — 

primé  tout  le  petit  volume  de  VAbc;  les  parties  de  ce 
volume  qui  lui  sont  communes  avec  le  Nouveau 
Testament  offrent  des  différences  intéressantes  que 
M.  Schuchardt  s'est  borné  à  indiquer  dans  l'introduc- 
tion. J'aurais  voulu  aussi  qu'on  mit  en  tête  du  livre  une 
notice  bibliographique  complète.  On  aurait  été  ainsi 
obligé  de  faire  deux  volumes,  ce  qui  aurait  mieux 
valu,  car  ce  bloc  de  132!  p.  est  vraiment  un  peu  dis- 
gracieux. 

Après  le  titre,  en  rouge  et  en  noir,  vient  l'avant- 
propos  où  nous  apprenons  que  la  réimpression  du 
■N.  T  a  été  faite  à  l'aide  des  trois  exemplaires  de  Stutt- 
gart, de  Leipzig  et  de  Berne,  aux  frais  de  l'Académie 
des  sciences  de  Vienne.  Dirigée  simultanément  par 
MM.  Schuchardt  et  Linschmann,  dont  le  dernier  a 
corrigé  au  commencement  deux  épreuves  et  à  la  fin 
une  seulement,  mais  dont  le  second  a  toujours  corrigé 
la  dernière  épreuve,  l'impression  a  commencé  à  l'au- 
tomne de  1897  et  a  été  terminée  trois  années  après, 
M.  Schuchardt  seul  a  surveillé  la  réimpression  du 
Calendrier  et  de  VAbc,  il  ne  nous  dit  pas  d'après  quel 
exemplaire.  Le  travail  a  été  fait  dans  l'excellente 
imprimerie  Frommannà  léna.  Vient  ensuite,  en  109  p., 
une  très  intéressante  étude  de  M.  Schuchardt  sur  la 
manière  dont  a  été  menée  la  réimpression,  ainsi 
que  sur  «  les  fautes  d'impression  et  les  variantes 
de  Liçarrague  ». 

M.  Schuchardt  commence  par  une  rapide  revue  des 


—  194  — 

réimpressions  partielles  qui  avaient  été  faites  avant  lui  ; 
il  me  semble  qu'il  se  montre  un  peu  trop  sévère.  En 
ce  qui  concerne  le  Saint-Marc  que  j'ai  publié  à 
Bayonne  en  1874,  j'accepte  volontiers  la  plupart  de 
ces  critiques,  mais  je  plaide  non  coupable  ou  plutôt  je 
demande  les  circonstances  atténuantes.  Mon  excuse 
sera  dans  la  manière  dont  cette  publication  a  été  faite. 
Le  vénérable  M.  Nogaret,  le  regretté  pasteur  de 
Bayonne,  m'avait  donné  un  manuscrit  qu'il  avait 
trouvé  parmi  les  papiers  de  ses  prédécesseurs  et  qui 
était  une  copie  faite  en  Angleterre  du  Saint-Marc  de 
Liçarrague.  Fort  peu  de  temps  après,  le  directeur 
d'une  imprimerie  que  nous  avions  fondée  à  Bayonne 
pour  y  publier  un  journal  politique  quotidien,  se 
trouva  dans  un  grand  embarras;  par  suite  de  la 
fusion  de  ce  journal  avec  un  autre  journal  républi- 
cain, son  matériel  se  trouvait  inutilisé,  et  il  cherchait 
partout  du  travail  pour  alimenter  son  imprimerie. 
C'est  ainsi  que  je  fus  amené  à  faire  réimprimer  De- 
chepare  et  à  publier  le  Saint-Marc.  Un  de  mes  amis,  qui 
habitait  Paris,  m'avait  promis  son  concours  pour  le 
collationnement  des  épreuves  avec  les  originaux,  mais 
une  conjonctivite  vint  mal  à  propos  l'empêcher  de  me 
continuer  son  aide;  personne  ne  pouvait  le  remplacer, 
et  il  fallait  aller  vite.  Je  ne  connaissais  alors  aucun 
exemplaire  de  Liçarrague  dans  le  pays  et  celui  d'Olo- 
ron,  où  la  bibliothèque,  dont  le  conservateur  était  un 
prêtre,  n'était  ouverte  qu'un  jour  par  semaine,  était 


—  195  — 

à  peu  près  inaccessible.  Je  n'ai  pas  conservé  les  man- 
chettes, parce  que  c'était  une  grande  difficalté  pour  la 
composition  typographique  et  qu'elles  ne  sont  d'au- 
cune utilité  au  point  de  vue  linguistique.  Pourquoi 
n'ai-je  pas  reproduit  les  s  longs  et  pourquoi  ai-je 
gardé  les  tilde?  parce  que  je  me  suis  conformé  à  mon 
manuscrit.  D'ailleurs,  ces  détails,  comme  les  trémas, 
les  accents,  etc.,  n'ont  guère  d'importance  scienti- 
fique. En  définitive,  mon  petit  volume,  malgré  ses 
imperfections,  a  donné  aux  linguistes  un  spécimen 
sérieux  du  langage  de  Liçarrague.  M.  Schuchardt  ne 
comprend  pas  pourquoi  j'ai  évité  de  diviser  les  mots  à 
la  fin  des  lignes  :  j'ai  eu  pour  cela  deux  raisons,  d'abord 
pour  faîre  une  petite  curiosité  typographique,  puis 
parce  que,  au  point  de  vue  de  l'étymologie,  de  la 
grammaire,  de  la  dérivation,  les  mois  coupés  en  deux 
peuvent  quelquefois  être  mal  lus  et  mal  interprétés. 
J'ai  dit  que  le  Testament  de  1828  était  une  retouche 
de  Liçarrague;  c'est  que  je  sais,  de  source  certaine, 
que  cette  publication  a  été  faite  d'après  une  copie  du 
Testament  de  1571  prise  à  Londres  et  remaniée  à 
Bayonne  par  un  Basque  originaire  de  la  Basse-Navarre. 
Quant  au  Testament  français  de  Hautin,  1577,  il  ne 
fallait  pas  prendre  au  pied  de  la  lettre  mon  afTirmation 
que  les  caractères  des  deux  volumes  sont  les  mêmes  ;  je 
voulais  dire  seulenrent,  et  la  chose  est  indéniable,  que, 
quoique  plus  petits,  les  caractères  de  1577  sont  du 
même  type  que  ceux  de  1571  et  proviennent  du  même 


—  196  — 

fondeur  et  de  la  même  imprimerie.  En  ce  qui  concerne 
le  collationnement  des  parties  communes  au  Nouveau 
Testament  et  à  VAbc,  je  n'ai  relevé  ni  les  différences 
attribuables  à  des  coquilles  manifestes,  ni  celles 
purement  orthographiques  ;  j'ai  pu  d'ailleurs  en 
oublier  d'importantes.  Enfin,  M.  Schuchardt  me 
reproche  à  bon  droit  quelques  traductions  inexactes, 
notamment  Catech.  Cviii  r°  1  ecin  ekar  dirogu  «  nous 
ne  pourrions  le  supporter  »  pour  «  nous  ne  pouvons 
l'apporter  ». 

Mais  c'est  que  j'avais  traduit  ces  deux  passages  en 
eux-mêmes,  sans  me  reporter  au  contexte;  il  n'y  a  pas 
là  d'ailleurs  de  contresens  proprement  dits. 

M.  Schuchardt  trouve  que  M.  Van  Eys  et  moi 
avons  beaucoup  exagéré  en  louant  la  correction  du 
Nouveau  Testament  de  1571  ;  il  est  cependant  certain 
que  c'est  peut-être  le  livre  basque  dont  l'impression  a 
été  le  plus  soignée;  les  épreuves  en  ont  été  lues  et  cor- 
rigées avec  attention  et,  en  définitive,  il  offre  peu  de 
fautes,  surtout  si  on  le  compare  aux  autres  livres 
basques  du  temps  où  il  n'y  a  presque  pas  une  ligne 
irréprochable.  Ce  résultat  est  dû  évidemment  à  la  pré- 
sence à  la  Rochelle  du  traducteur  qui  dirigea  lui- 
même  l'impression,  à  ce  que  nous  apprend  de  Thou. 
Les  nouveaux  éditeurs,  dans  leur  sévérité,  n'ignorent 
pourtant  pas  qu'il  n'est  pas  un  seul  livre  parfait,  et  ils 
se  rappelleront  l'anecdote  de  Robert  Etienne  effrayé 
du  nombre  des  coquilles  que  lui  signalaient  dans  ses 


—  lo- 
pins beaux  ouvrages   les  écoliers  auxquels  il  avait 
promis  une  pièce  de  monnaie  par  faute  découverte. 

.  Après  avoir  ainsi  critiqué  les  tentatives  de  ses  pré- 
décesseurs, M.  Schuchardt  examine  et  classe  les 
coquilles,  les  fautes,  les  variantes  de  Liçarrague  ;  elles 
sont  trop  nombreuses  pour  que  j'essaye  môme  d'en 
donner  une  idée.  L'étude  de  M.  Schuchardt  est  admi- 
rable de  méthode  et  de  patience,  mais  il  ne  me  semble 
pas  qu'il  ait  suffisamment  mis  en  relief  ce  qui  est  une 
faute  ou  ce  qui  est  une  variante  phonétique  :  chilki- 
ratu  ^  chikiratu,  iaharom  ^^  iharrosi,  amorz  =  ha- 
maborZy  diaoCz=zdiagoc,  urte  =  urthe,  reprochu  =re- 
protchu,  compania  =  compainia,  battassun  =  batas- 
sun,  muthillén  =:muihilén,  gauherdi  ■=  gauerdi,  etc., 
sont  dans  la  seconde  catégorie.  Il  est  évident  que 
Liçarrague  n'a  pas  toujours  écrit  le  même  mot  de  la 
même  façon  et  que  cependant  il  a  voulu  représenter  la 
prononciation  qui  lui  était  habituelle.  Il  y  avait  là  de 
jcuri^ses  remarques  à  faire. — Une  intéressante  obser- 
vation de  M.  Linschmann  sur  ene,  hire  et  neuve, 
heure,  nous  est  communiquée  à  la  p.  lxvii:  le  second 
serait  employé  dans  le  sens  réfléchi  et  le  premier  dans 
le  sens  simple  ordinaire. 

VAbc  ofïre,  on  le  sait,  l'intéressante  particularité 
que  les  formes  grammaticales  y  sont  souletines  ou 
plutôt  bas-navarraises.  J'y  voyais  une  preuve  déplus 
que  ce  petit, volume  était  spécialement  destiné  à  la 
Basse-Navarre  et  à  la  Soûle.  M.  Schuchardt  met  le  fait 


—  198  - 

en  doute;  il  me  paraît  a  bsolument  certain  cependant: 
i'épîtie,  qui  est  en  tête,  est  adressée  «  à  ceux  qui  ont 
charge  d'enseigner  et  aux  supérieurs  »  ;  ce  livre  était 
donc,  pour  ainsi  dire  officiellement,  destiné  aux 
écoles  publiques,  et  il  ne  pouvait  évidemment  être 
employé  ainsi  que  dans  les  pays  soumis  à  l'autorité 
de  Jeanne  d'Albret,  c'est-à-dire  en  Soûle  et  en  Basse- 
Navarre. 

On  aura  remarqué  que  j'appelle  toujours  «  Liçar- 
rague  »  le  traducteur  des  documents  publiés  à  La 
Rochelle  en  1571;  MM.  Schuchardt  et  Linschmann 
lui  donnent  le  nom  de  «  Leiçarraga  »,  sous  pré- 
texte sans  doute  qu'il  écrit  lui-même  ainsi  son  nom 
dans  ses  épîtres  dédicatoires  basques.  L'argument  me 
paraît  faible  et  fort  peu  probant.  Le  véritable  nom  d'une 
personne  est  celui  qu'elle  porte  dans  la  langue  officielle 
de  son  pays,  dans  les  actes  publics  qui  la  concernent  : 
or,  quelle  que  soit  la  forme  basque  de  son  nom,  il 
est  certain  que  le  savant  ministre  de  la  Bastide  a 
toujours  été  appelé  «  Jean  de  Liçarrague  »:  son  nom 
n'est  autrement  écrit  ni  par  de  Thou  (1582),  ni  par 
Bordenave  (fin  du  XVI"  siècle,  avec  ss  pour  ç),  ni  dans 
les  registres  de  la  Chambre  ecclésiastique  de  Béarn  (à 
la  date  de  1573),  ni  dans  tous  les  anciens  documents 
où  il  est  parlé  de  lui  ;  tous  les  écrivains  postérieurs,  y 
comprislesBasques(Pouvreau,Haraneder,  Larramendi, 
Hiribarren,  etc.),  lui  ont  conservé  le  nom  de  «  Liçar- 
rague ».  A  Briscous  même,  le  nom  existe  encore  sous 


—  199  — 

cette  forme  parmi  les  «lieux-dits»,  et  j'ai  eu  plusieurs 
fois  affaire,  comme  Garde  Général  des  Forêts,  avec  un 
charpentier,  descendant  peut-être  du  iVlinistre  de 
Jeanned'Albret,  qui  s'appelait  et  signait  «  Liçarrague». 
Écrire  Leiçarraga,  c'est  donc  faire,  à  mon  avis,  du 
pédantisme.  Pourquoi  ne  pas  écrire  aussi  Bescoitze  (ou 
plutôt  Berazcoilze)  pour  «  Briscous  »  ? 

Les  observations  ci-dessus  n'enlèvent  rien  à  Tim- 
portance  et  à  la  valeur  du  livre  de  MM.Schuchardt  et 
Linschmann  qui  a  sa  place  marquée  dans  toutes  les 
bibliothèques  publiques  et  dont  aucun  amateur  de 
basque  ne  saurait  se  passer  désormais. 

Julien  ViNSON. 

N.B.  —  M.  E.-S.Dodgsona  répondu,  en  septpages(p.  37 
à  43,  à  la  suite  d'un  article  sur  le  verbe  dans  le  Catéchisme 
guipuzcoan  de  1713),  aux  critiques  que  M.  Schuchardt  a 
faites  de  ses  publications  relatives  à  Liçarrague.  Il  intitule 
cette  réponse  venoms  antidote.  Il  prétend  que  beaucoup  des 
fautes  signalées  sont  de  mon  fait,  parce  que  je  ne  lui  ai  pas 
envoyé  un  assez  grand  nombre  d'épreuves,  parce  que  j'ai 
écourté  ses  corrigenda,  etc.,  etc.  Je  ne  m'attarderai  pas  à 
me  justifier,  mais  M.  Dodgson  devrait  savoir  qu'un  journal 
ne  se  fait  pas  comme  un  livre.  Quant  au  fond  de  son  anti- 
dote, il  est  vraiment  étrange  que  M.  Dodgson  se  plaigne  si 
vivement,  lui  qui  s'est  érigé  de  son  chef  le  censeur  général 
des  études  basques,  qui  a  fait  de  longs  voyages  tout  exprès 
pour  découvrir  une  inexactitude  ou  une  coquille, qui  a  attaqué 
sans  aucune  mesure  et  sans  rien  considérer  depuis  le  premier 
des  basquisants  jusqu'au  dernier!  Qui  pourrait  s'émouvoir 
aujourd'hui  de  ses  récriminations?  Qais  tulerit  Gracchos  die 
seditionequer entes?  J.  V. 


—  200  — 

Zeitschrift  zûr  vergleidende  Spradi/orschung . . .  von 
E.KuHN  und  J.  Smmm.GûtersIoh,  1901,  t.  XXXVII 
(nouv.  série,  l.  XVII),  2^  livraison,  p.  157-276. 

Contient  :  Eine  Worlgruppe  bei  Verrius  FI  accus,  par 

0.  Làgercrantz,  p.  157-177;  Lateinische  Worterklaer- 

ungen,  par  le  même,  p.  177-189;  Zur  den  lykischen 

Inschri/ten,  par  Holger  Pedersen,  p.  189-207  ;  Rig- 

Vêda,  vii-33,  par  Edward  V.  Arnold,  p.  207-219  ;  Zur 

Lehre  von  den  Aktionsarlen,  par  H.  Pedersen,  p.  219- 

250;   Hibernica,    par  Whitley  Stokes,  p.    250-261  ; 

Wackernagels  Gesetz  im  Slavischen,  par  Elof  Nilsson 

p.  261-264;    Slavische  Miscellen,   par   P.    Lorentz, 

p.  264-274  ;  Zum  lateinischen  Wandel  von  ov  in  av, 

par  PaulKretschmer,  p.  274-296. 

J.  V. 

Grammaire  cantabrique  basque,  par  Pierre  d'URTE 
(1712)...  publiée...  par  le  Kev.  W.  Webster,  de 
%2iXQ.  —  Bagnères-de-Bigorre/\m^v.  D.  Bérot,  1900, 
gr.  in-8",  4-viij-5  à  568  p. 

Tiré  à  cent  exemplaires.  Extrait  du  Bulletin  de  la 
Société  Ramond  (1896-1900).  Publié  en  grande  partie 
aux  frais  de  M.  Antoine  d'Abbadie. 

Je  n'ai  pas  besoin  d'insister  sur  l'utilité  de  cette 
publication  due  au  zèle  éclairé  de  notre  éminent  col- 
laborateur M.  W.  Webster.  Nous  avons  déjà  plusieurs 
fois  parlé  de  Pierre  d'Urte  dans  cette  Revue,  et  nous 
avons  donné  des  spécimens  de  ses  œuvres  oubliées  en 


—  201  — 

manuscrit  pendant  près  de  deux  siècles,  découvertes 
accidentellement  par  M.  J.  Rliys,  le  célèbre  ceitisant, 
et  signalées  par  lui  au  prince  L.-L.  Bonaparte. 

Pierre  d'Urte  était  un  assez  pauvre  grammairien  et, 
quoiqu'il  ait  appris  le  latin,  son  éducation  littéraire 
laissaitbeaucoup  à  désirer.  Son  français  est  assez  bar- 
bare et  porte  trop  souvent  l'empreinte  de  sa  langue 
maternelle:  (p.  475)  combien  d'heures  sont-elles? 
(p.  484)  ton  nom  m'est  oublié,  (p.  499)  je  meurs  à 
force  de  chaud,  etc.  L'orthographe  est  quelquefois  fan- 
taisiste ;  ainsi,  sans  la  traduction  basque  oray  «  main- 
tenant »  (lat.  Iiorœ),  on  aurait  quelque  peine  à  lire  à 
celle  heure  dans  asteure.  Quelques  mots  anglais  indi- 
queraient, si  l'on  n'en  était  certain,  que  la  grammaire  à 
été  écrite  en  Angleterre  :  (p.  453)  ardit«  liard  »  traduit 
par  fardings  «  farthing  »,  (p.  ItQt) arralsaldêan  par 
«  afternoon  »,  etc.  Une  phrase  (p.  445)  répond 
plutôt  aux  pensées  immédiates  de  l'auteur  qu'à  ses 
préoccupations  grammaticales  :  «  J'aurois  besoin  de 
44  livres  sterlings.  » 

En  parcourant  un  peu  rapidement  les  pages  de  ce 
volume,  j'ai  relevé  quelques  indications  intéressantes 
sur  la  phonétique  et  la  prononciation  basque.  D'Urte 
fait  bien  voir  (p.  6)  la  triple  prononciation  duj  ;  /  fr. 
en  Basse-Navarre  (il  confond  avec  la  Soûle),  Jota  en 
Espagne  et  y  en  Labourd.  11  dit  (p.  6,  9  et  12)  que  i 
avec  /  ou  n  cause  une  liquéfaction  à  Saint-Jean-de-Luz 
età  Sare,  que  Uy  représente  un  /  mouillé;  par  exemple 


—  202  — 

que  oillarra  «  coq»  s'y  prononce  à  la  française,  tandis 
qu'ailleurs  on  dit  oïtarra  sans  mouillement  :  il  y  a  là 
une  erreur  manifeste  en  ce  qui  concerne  Sare,  où  les 
n,  les  t,  les  /  ne  sont  pas  mouillés,  et  ne  l'étaient 
certainement  pas  au  XVIP  siècle  :  le  mouillement  est 
caractéristique  des  variétés  de  la  côte.  Certaines  or- 
thographes de  d'Urte  viennent  d'une  observation  fort 
exacte:  eisse^wr  (p.  414)  est  bien  la  prononciation  nor- 
male de  ez  segur  «  non  assurément,  nullement  ». 
Quelques  expressions  sont  remarquables  :  (p.  412  et 
416)  doidoya  «  naguère  »  ou  plutôt  «  à  peine  »,  spé- 
cial à  la  côte.  (p.  412)  gaur  «  aujourd'hui  »,  qui  est 
proprement  «  ce  soir,  cette  nuit  »  pour  *gauz,  etc. 
Quelques  mots  mériteraient  une  discussion  :  hobe  et 
hobeago,  urlia  «  un  tel  »,  etc.  Il  est  remarquable  que 
d'Urte  ait,  comme  Pouvreau  d'ailleurs,  absolument 
méconnu  l'article  basque  et  le  sens  spécial  du  suffixe 
k.  Il  a  résolu  d'une  façon  ingénieuse  la  question  de 
la  seconde  personne  :  pour  lui  hi  est  «  toi  »,  en  tu- 
toyant, zu  «  loi  »,  sans  tutoyer,  et  çuec  «  vous  ».  Ses 
étymologies  sont  naturellement  extravagantes  :  escual- 
duna  «  basque  »  est  pour  lui  «  un  homme  tout  bras 
et  tout  main,  c'est  à-dire  très  agissant»;  dans  Saint- 
Jean-de-Luz,  il  voit  l'espagnol  luz  \<  lumière  »  et  y 
soupçonne  «  quelque  superstition  de  l'Église  romaine»  ! 
La  plus  grande  partie  de  l'ouvrage  est  formée  par 
un  exposé  abondant,  mais  un  peu  confus,  de  la  conju- 
gaison, avec  les  tutoiements,  les  régimes  indirects, 


—  203  — 

les  conjonctions.  D'Urte  conjugue  successivement  les 
verbes  intransitifs  naiz  «je  suis  »,  nago  «  je  demeure  », 
natça  «  je  suis  couché  »,  nathor  «  je  viens  »,  noha 
«  je  vais  »,  nabilla  «  je  marche  »,  narrayte  «je  suis, 
sequor  »  ;  et  les  verbes  transitifs  dut^<  je  Tai  »,  acquit 
«je  le  sais  »,  daidiquet  «  je  peux  le  faire  »,  daguit  «je 
le  fais  »,  diot  «  je  le  dis  »,  dakhart  «  je  l'apporte  », 
daramat  «  je  l'emporte»,  diraquii  «  je  bous  »,  dirurit 
«  je  parais  »,  daritçat  «  il  me  semble,  je  m'appelle  », 
darauntçat  «je  ne  cesse  pas  de  »,  darit  «  il  me  coule  », 
darassat  «  je. bavarde  ».  Il  y  a  beaucoup  à  apprendre 
dans  ces  longues  listes. 

M.  Webster,  si  bien  connu  déjà  par  ses  belles 
études  sur  le  pays  basque,  a  donc  rendu  un  grand 
service  aux  linguistes  par  cette  intéressante  publica- 
tion ;  il  faut  également  savoir  gré  à  la  Société  Ramond 
d'avoir  bien  voulu  l'entreprendre.  Malheureusement 
l'exécution  ne  répond  pas  tout  à  fait  à  ce  qu'on  aurai 
désiré  ;  i'imprimeur  de  Bagnères-de-Bigorre  a  eu  plus 
de  bonne  volonté  que  d'expérience,  et  le  livre  n'est  pas 
composé  avec  le  soin  et  le  goût  qui  auraient  été  né- 
cessaires. La  disposition  typographique  n'est  pas  tou- 
jours heureuse  et  la  correction  est  parfois  insuffisante. 
Je  signalerai  quelques  cnrrigenda  dans  les  prélimi- 
naires :  p.  V,  I.  ^oet  27,  il  faut  lire  «  page  395  »  et 
«  p.  410  »,  p.  6,1.  27,  gaua,  etc. 

M.  Webster  n'a  eu  entre  les  mains  qu'une  copie  ma- 
nuscrite toute  récente.  Un  de  ses  amis.  M,  A.  Glarke, 


—  204  — 

a  pu  collationner  l'édition  imprimée  avec  le  manuscrit 
original  que  la  propriétaire,  M""  la  comtesse  de  Mac- 
clesfield,  a  bien  voulu  confier  pour  quelques  jours  au 
département  des  manuscrits  du  Britisli  Muséum.  Il  a 
pu  consacrer  à  ce  travail  les  journées  du  22  au  26  oc- 
tobre dernier  ;  il  n'a  p»  collationner  que  les  p.  77  à 
364,  397  à  522,  536-538  et  543-550.  C'est  le  résultat 
de  ce  travail  qui  va  être  publié  ci-après. 

Toutefois,  nous  avons  réduit  les  corrections  à  ce  qui 
nous  a  paru  le  plus  important.  Nous  n'avons  pas  relevé 
les  omissions  ou  les  abus  de  cédilles  faciles  à  corriger; 
ni  les  erreurs  sur  les  indices  m  ou  /"des  formes  allo- 
cutives  de  tutoiement  qu'un  peu  d'habitude  fait  aisé- 
ment reconnaître;  ni  les  erreurs  dans  les  correspon- 
dances des  mots  basques  aux  mots  français  marqués 
par  les  lettres  a,  b,  c,  etc.,  suscrites.  Les  lignes  sont 
comptées  soit  sur  l'ensemble  des  pages,  soit  sur  l'une 
ou  l'autre  des  deux  colonnes. 

En  ce  qui  concerne  le  c,  M.  Clarke  a  fait  remarquer 
que  d'Urte  paraît  n'avoir  mis  les  cédilles  qu'après 
coup,  et  avec  une  certaine  insouciance.  Le  premier 
copiste  a  pu  fort  bien  d'ailleurs  en  omettre  de  très 
bonne  foi  un  certain  nombre  qui  sont  à  peine  marquées 
sur  l'original. 

Quant  à  l'accentuation,  M.  Clarke  dit  que  c'est  peut- 
être  le  point  où  le  texte  imprimé  diffère  le  plus  du 
manuscrit;  cela  tient  surtout  à  des  difficultés  typogra- 
phiques. Je  n'ai,  pour  ma  part,  attaché  aucune  impor- 


-—  205  — 

tance  à  ces  différences  et  aux'  corrections  indiquées^ 
car,  en  labourdin,  l'accent  est  à  peu  près  sans  aucune 
utilité  pratique  :  M.  Clarke  fait  remarquer  au  surplus 
que  d'Urle  le  place  presque  toujours  sur  la  voyelle  de 
l'avant-dernière  syllabe  de  chaque  forme  verbale. 


pages 

lignes 

u 

, 

6 

27 

gaua 

.  GIM-U 

10 

11 

latin  se  lit 

•;  1. 1 

80 

6.  13, 

14,  32        &c.  (au  lieu  de  de) 

83 

3 

çaitçun,  vt  supra.  Ici 

9, 19  &c. 

26 

ou  içan 

29 

daquizquéôn 

85 

2 

natçaitçuen 

17 

nintçailQun&c. 

86 

18 

içatu 

19 

&c.  vt  supra 

32 

natçaïtçularic 

87 

22 

çaizquitealaric 

88 

7 

çitçaicularic 

89 

15 

çaïcunéan 

90 

12 

çitçaïcunéan 

96 

demboran  et  arteragno  deoraient  être   mis 
derrière  une  accolade  comme  n'appliquant 
à  toutes  les  personnes  du  temps 

100 

mèmie  observation  pour  beçain 
gâtic,  etc. 

sarri,  icana- 

100 

2 

guintezquéla 

.  /         ,'  ■ . 

104 

2 

baninduan 

105 

13-14 

Il  m'...  içaten...  balitçait-içan... 

baléquit  \ , 

106 

26-27 

quoyque  je  sois 

106 

arren,  en  apposition 

107 

28-29 

banatçaïc 

14 

% 

—  206  — 

pages        lignes 


110 

5 

banindâgo 

15 

baçignaûdete 

112 

18-19  bitartean  ou  bizquitartean,  en  apposition 

27 

gueroz  ou  guerostic,  en  apposition 

114 

2-4 

ni  baldin  banâgo 
hi...  baldin  baçaude 

19 

moy  étant  ...  ni 

114-115 

i 

arren  en  apposition 

116 

passim  oz  [pour  or) 

24 

baciathoztenan 

117 

7 

moy  étant  ...ni 

119 

34 

gueroz 

130 

19 

supprimez  nind'uân 

131 

5 

Tu  pouuois 

132 

5 

caizquizque- 

133 

22 

Si. 

142 

18 

Nous  le...                       ' 

145 

10 

aussi  Th  en 

27 

baciarraïzquiquéten 

147 

6 

baharraïqueotec 

9 

Tu  nous... 

150 

13 

banintçarrajoqueténan 

24 

baçignarraïzquiqueôten 

152 

2 

baguignarraïzquiquéân 

155 

5 

etçuân 

7-9 

ezguignen 
ezguintûân 

157 

dre 

nâucu 

158 

13 

Il  a.  harc  ...  du 

160 

24 

Vous  m'  ...me 

163 

13 

vën 

167 

içan  en  apposition 

170 

26 

vous  à  supprimer 

-  207  - 

pages 

lignes 

172 

22 

d.  Il  me 

181 

22 

Ils  te  les... 

27 

Laroquéten 

182 

12 

J'auois 

183 

23 

darocuçun 

25 

darocuàn 

190 

çeren  ou  en  apposition 

192 

11 

d.  me  ...  darotaçuna 

17 

darocuçuna 

193 

2-3 

dudâna...  ditudana...  vt  si 

28 

que  j'aurois 

195 

1 

banitu 

196 

13-15  balarotçu.  balaùtçu 

balaroc 

23 

II  nous  les...  balarozquigu 

200 

16-17 

-çuëgu 

202 

17 

Ils  me 

203 

1 

bietçâtet 

8 

ochola...  bada 

27 

biotçâte 

30 

Les...  betçâte 

204 

12 

baçigneçât 

23 

baçignôça 

26 

baçignôlço,  baçignotça 

209 

10 

baniquec 

19 

baguinduzquéen 

210 

18 

çiëçaat 

211 

4-5 

çiotçoqueteât 

212 

22 

dioçaquéçu 

213 

1 

çietçaquéguc 

11 

diëçaçûe 

217 

13 

nieçaquetec 

^  208  — 

pages 

lignes 

217 

16 

Ils...  te...  (P  à  siippr.) 

218 

av-'d""" 

ciotçaquéten 

221 

1 

de  la  sec.  col.  à  supprimer 

226 

9 

cietçadatéan 

227 

26 

dut...  &c. 

28 

çaitut...  &c. 

228 

5 

hors  qu'on  y 

19 

àuquet 

-f 

d'-c 

I 

duques 

229 

1 

Tu...  nous... 

231 

21 

ciquenagu 

dre 

ditizquenagu 

233 

23 

daroqueçute 

236 

32 

banaçâte 

237 

4 

badietçatet 

241 

10 

daquizquignan 

22 

nie...  naquien 

m 

245  entre  6  et  7  baçeaquizquiquetéân 

247 

21 

badaidizquédat 

249 

18 

-quetçute 

251 

8 

bahaiguizqueoan 

252 

21 

Ecin...  daidîquet 

256 

2 

baçaidiquean 

258 

5 

Ils...  les... 

263 

4 

balaguiote 

9 

baguignagui 

277 

12 

baniakharqueoten 

278 

13 

bacakharzquéen 

279 

3 

baguignakharquegun 

284 

10 

balakharqueoqueten 

285 

6 

les.  On  y 

-  209  - 

pages         lignes 

293  14        badaramozcotçu 

294  8        çatçuë  : 
14        badaramoco  ; 

295  5,8,10        -moco-  «                 ; 
13        -motçoguc 

297  11-13   -moco- 

298  27        -mocoQun 

299  2        -moco- 
12        -mozcoan 

301  8        baçiaramocoténan 

302  2        -motçocoan  i 

304  26        baçiaramategun  -  v, 

306  8        bacindaramaquétçu  .     - 

307  17        Tu  luy...  bacignaramoco- 
19        -coque 

28  bacindaramagutçuque 

29  bacignaramadazquegûtçu  ,  , 

310  8        baliaramazqueo 

17  -queguc 

18  -guquec 

19  -guquec 

311  2        -tçaquec 
25,  d^"  -quec 

330         16-17  ajoutez  baharamazquiguquéan  ou  baharatça- 

guquéan 
18-19  ajoutez  baharamazquiguquénan  ou  bahara- 

matçaguquénan 
332  25        çaquéan 

336  33        Vous  à  supprimer 

338  14-15  ou  baçiaramazquedatenan 

350  4        II  sort  à  moy.  niri  bada- 

353  \Q2den  en  apposition 

354-355  \qai,n  en  apposition  ,,,^ 


—  210  — 

pages         lignes 

355  15-16  ajoutez  eztiotçonala 

356  içan  en  apposition 

362  13        egon.  egotu 

363  8        jautssi 

9  hurbill.  hurbildu 

13  aurkhitçeâ.  aurkhi...  incuntratcea 

22  Egarri  içatea.  egarri.  egarritu 

di"*  sassiatu  !  asse  içatea. 

364  3  errepaussatu. 

7  jaiqui  çhutic. 

8  leué  çhutic  ou 
395          14,  21  j'aime. 

397  fin  ayoM^ez  Choisir,  bereztea.  berez.  bereçi  :  hau- 

tatcea.  hauta.  hautâtu. 

398  entre  27  et  28        intercalez  Deuenir.  asmatçea.    asma. 

asmatu . 
entre  31  et  32        intercalez  Durer.  Irautea.  iraun 

399  11        bessarcaraztéa 

n°  58        Irakhatassaraztea 

400  n"  74        othoitç 

no  82        Ethentçéa 

407  5-7     Si  je  suis  aimé.  ni.,  maitatua...  banaïz...  ou 

baldin...  banaïz..  &c.  Si  tu  es  aimé,  çu  hi 
maitatua...  baçare.  ba  haïz  ou  baldin  ba- 
çare..  &c. 

408  13  et  suiv.  Rectifiez  ainsi 

Vouloir,  nahi  içatea. 
le  veux.,  nahi...  dut ..  &c. 
l'ay  voulu.,  nahi...  içatu  dut..  &c. 
le  voudray...  nahico.  dut...  &c. 
le  voudroig..  nahi...  nuque...  &c. 
l'aurais  voulu.,  nahi...  nuquen...  &c. 
Veuilles,  duçun..  nahi. 
Voulant,  nahia.  borondatéa. 
De  vouloir.  Nahiz...  nahizco...  nabi  içateaz. 
&c.  vt  suprà  d'estre.  d'auoir...  partout. 

409  10        Erraguzquiguc 


211 


pages 

lignes 

410 

1 

Errotçue.  Errozquitçue.  Errotçuete. 

2 

Errozquitçuete.  Dites  les  leur 

412 

5-6 

lekhora.  De  la  en  hors 

7 

par  derrière 

7 

guibeletic.  en  arrière,  guibelera. 

16 

supprimez  tard 

17 

tantôt  aurkhico. 

18 

Etci.  tard,  berandu.  berandua. 

19 

haguitçaldiz 

413 

1 

subauditur.  tempus.  dembora 

3 

guerostic.  après  ondoan.  deuant.  aitcignean. 
rarement,  gutitan.noiçean  behign.  bakhan. 

4 

bethierétic.  aftevnoon 

7 

hiruraldiz 

26 

çertaco 

414 

4 

you...  y  ou  woman 

5 

woman 

14 

bay'ta  ère. 

17 

plusieurs 

415 

8 

a           b 

ez.  hura.  ez                                  !.• 

11 

tropelan.  l'un  sur  l'autre,  elkhargaànca. 

416 

4 

gu  ez 

5 

beregainqui 

417 

4 

alferric.  sagem^ 

8 

auec  esprit 

9 

à  l'aise,  aïsse 

10 

si  vite.  si.  hunen.  horren.  hagn.  Quantitatis. 

16 

largoqui 

dr« 

hagnitç 

418 

2 

le  moment 

420 

1 

contra,  id  est 

4?1 

5 

lekhora  ou  landais 

—  212  — . 

pages 

lignes 

421 

15 

hareragno 

19 

launaren  guibelean 

425 

4 

fa 

Optantis 
Ay  bada. 
Vocantis 
Ori.  oriçu. 
Laudantis 

10 

oyeneri 

426 

11 

naïz.sum  attingens 

429 

11 

de  la  maison,  etcheco'  ontassuna 
le  bien  de  la  maison,  atçocoa. 

430 

9 

legueac 

431 

3 

Ils  m'ont 

432 

16 

aïtareneco 

434 

6 

b 

naturel 

7 

e 

noueauté 

8 

b 

affamé 

12 

a 

futuri 

12 

hesterni 

15 

nouitatis 

17-18 

hetaz  iaquintssun 

18 

orhoitçen 

435 

3 

a             a 

Luy.  celuy  la 

13 

mil 

16  ' 

Ô 

436 

9 

Quhurrena 

d^'  hambat  da  gaçhto. 

437  1  supprimer  gaçhto. 

3  hagnitz 

19  comune 


—  213  — 


438 

ligne» 

3 

ou  bâta 

11 
17 

suppr.  Vaccusatif 
betheâ 

439 

1 
5 

appauris 
-sunetic 

441 

1 

on  le  met 

443 

444 
445 

9-12 

8 

8 

16 

à  la  fin.  Aberatss  aguertu  nahidu 

lutssuac.  Nahiago  dut. . . 
Gazteëy 

Duçun  nitaz  pietate* 
iduritcen 

vrguil- 

446 

447 

11 
1 

dietçaquihutçu 
ueulent 

448 
450 

2-3 
14 
•     4 
3 

dut  eguitecoâ. 
çor'  çarotanaz 
Beguirauc 
loannissi 

452 

9 

bertceren 

453 
454 

455 
456 

5 
8 
13 
2 
3 

suhjicitur 
pressond- 
suppr.  locoan 
propioz 
docte 

457 

7 
7 

ajquum 
Ene  obra 

458 

4 

arratssean 

460 
461 

7 
9 

munduguciaz 
emazte 

463 
464 

10-11 
1 

moy  je  viens. 

An 

•     r 

465 
469 

12 
3-4 
14 

aïtagana 
aïzpa  baithara 
Erromeess? 

"^ 

—  214 


pages 
470 

lignes 

8 

Harc  hori 

476 
475 

8 
10 

(Jre 
11 

gorphutç'  hilla 
jâten 
Obra  hori 
cer  ordu 

16 

erauntssi 

476 

7 

Ene  semeà 

477 

12 

7 

Sees  toy 
haraco 

478 

9 

7 

hegal' 
Orratç 

481 

5 

t'entens 

13 

Adiiu 

483 

15 

21 

cer  dioçun 
Eztitut 

486 
489 

6 
17 

lehenago 
soleil  par 

493 

16 

candela 

494 

6 

hari  da 

14 

20 

Baduçuc 
Dembor' 

495 
496 

20 

3 

17 

agueri 
Egunac 
iragan  da. 

497 

8 

dembor' 

498 

14 

8 

Baratçean 
afal 

19 

balu 

499 

9 

Beroaren'  fortssaz 

19 

iragan  da 

500 

15 

handibat 

501 
503 

12 

7 

hagnitç 

launa  !  Egun  on' 

1 


—  215  — 

pages 

504 

lignes 

9-11 

esquer' 

511 
512 

7 
7 
9 

cure' 

Baratçera...  passaiatuco 

ikhusteco 

514 

19 

bortç 

515 
516 

4,7 
3 

ô 

Bizquitarteao 

7 
11 

gauçec 
asmatua 

13 

e^iaquigna 

517 

14 

4 
16 

ezpaïtaquizquite 

duçu 

berbo' 

518 

16 

Hirur 

20 

rric 

519 

3 

adin* 

520 

10 
17 
10 
16 

gabetanic 
on'  gau' 
jauna 
dembora  harida? 

521 

7 

eguitenda 
cure 

536 

9 

arno' 

547 
549 

5 

6 

11 

18 

baïnuque 
baïnituzque 
baçiacussaat 
badacussac 

555 

2 
11 

Guc  baditçula 

Ils  les  ont.  badidutéla. 

15 

bahituëla 

20 

Que  etc. 

556 

Note 
15 

italiques  sont  coupées  par  le  relieur 
bacioteat.  baciotenat. 

-  216 


pages 

556 

lignes 

17 

mihi.  da 

18 

H  arc  badarocu 

21 

badarotan 

557 

2-3 

habet  illi.  ille  dat. 

Suomalais-ugrilaisen  senran  aikakauskirja.  Jour- 
nal de  la  Société  Finno-Ougrienne,  XVIII.  —  Helsing- 
fors,\900,  in-8%  20,  10,  9  et  49  p. 

Contient:  ]"  Études  ethnographiques  cliez  les  Os- 
tiaques,  par  K.  F.  Karjalainen  ;  %"  Sur  les  Ostiaques 
et  les  Vogoules,  par  U.  T.  Sirelius;  3°  Ein  weilerer 
Beitrag  zum  Tônniscultus  der  Esten,  par  Max  Buch  et 
Erwin  Jûrgens;  4°  Chants  populaires  mordvines,  par 
H.  Paasonen  ;  5*  Discours  prononcé  à  la  séance  annuelle 
du  2  décembre  1899,  par  0.  Donner  (sur  les  progrès 
du  Bouddhisme),  6"  et  7°  Rapport  annuel  en  finnois  et 
en  français. 

CORRIGENDA 

pages  lignes 

3  16        Astete  the  Jesuit 
15  4  d'en  bas  pi .  nac  =  those  who 

26  22        1741 
43  3  et  7  usaya  et  usanza 


VARIA 


L'Argot  des  Marins 

J'ai  trouvé,  dans  les  papiers  de  mon  père  la  copie  ci-jointc  d'un 
extrait  du  «  livre  de  bord  du  trois-màts  le  Souvenir,  capitaine 
G.  Odin  »  relatif  à  une  tempête  à  Pondichéry.  Je  crois  intéres- 
sant de  le  reproduire  comme  un  échantillon  remarquable  de  ce 
qu'on  peut  appeler  «  l'argot  des  marins  »  : 

«  Le  lundis  décembre  i856,vers  deuxheures  après  midi, on  signala 
au  mât  du  pavillon  du  port  de  se  tenir  prêt  à  appareiller.  Le  vent 
était  nord,  un  peu  vei's  l'ouest,  les  grains  violents,  la  mer  très  grosse 
et  venant  du  large,  le  baromètre  à  70,7  et  baissant  toujours  depuis 
le  matin.  «Les  dispositions  prises  depuis  deux  jours  ne  furent  pas 
longues:  tout  avait  été  envoyé  en  bas,  les  mâts  de  perroquet  et  tous 
les  boute-hors  de  bonnettes,  les  panneaux  condamnés,  drômes, 
embarcations,  ancres,  tout  était  solidement  serré.  A  quatre  heures 
(ordre  de  sauver  les  équipages  des  navires  hors  d'état  d'appareiller): 
le  Souvenir,  comme  un  des  plus  rapprochés,  devait  envoyer  abord  du 
Charles  Damergue  mouillé  dans  le  N.-E.  i/4  E.  Or,  il  y  avait  danger 
à  exécuter  cet  ordre  (que  beaucoup  ont  dû  éluder).  Quoique  le 
tempsfùt  très  mauvais,  les  grains  de  plus  en  plus  violents  et  fréquents, 
la  merde  plus  en  plus  grosse,  et  que  la  chute  du  jour  approchât^  des 
défenses,  espares,  amarres,  etc.,  furent  mises  en  dehors  pour 
garantir  l'embarcation  des  pitons  et  des  chaînes  d'artimon  qui 
l'auraient  infailliblement  crevée  avant  d'être  mise  à  l'eau,  tant  le 
roulis  était  effrayant.  Une  baleinière  fut  donc  immédiatement 
amarrée  et  armée  de  six  hommes.  Elle  alla  au  secours  du  navire  en 
question.  Le  coup  de  canon  d'appareillage  tire  à  quatre  heures  i/A- 
Tous  les  bâtiments,  ou  à  peu  près  tous,  mettent  sous  voile,  excepté 


—  218  — 

le  Souvenir  et  la  Sidonie  qui  attendent  leurs  embarcations.  La  ba- 
leinière arrive  à  bord  avec  onze  personnes  qui  sont  immédiatement 
embarquées  avec  des  bouts  de  corde.  Il  est  5  heures  1/3  et  la 
nuit  vient  à  grands  pas.  L'horizon  se  charge  de  plus  en  plus.  Mais 
il  reste  cinq  hommes  à  sauver.  A  peine  le  dernier  Indien  était-il 
embarqué  que,  malgré  la  mer,  les  grains,  malgré  la  tempête  qui 
approche,  quoique  l'embarcation  trop  chargée  ait  failli  chavirer 
en  accostant  et  soit  à  moitié  remplie  d'eau,  personne  n'hésite  à 
repartir.  Le  canot  part  donc  et  revient  heureusement  avec  le  reste 
de  l'équipage  du  navire  anglais.  Ces  hommes  sont  hissés  comme 
les  premiers.  La  baleinière  est  crochée  et  hissée,  non  sans  avaries. 
Un  coup  de  mer  la  jette  sous  l'arcade  et  écrase  le  côté  de  bâbord. 
Les  hommes  se  rattrapent  aux  bancs  et  aux  garants.  Aussitôt  le 
canot  hissé  est  saisi  ;  tout  le  monde  à  la  manœuvre. 

«  Les  huniers  aux  bas-ris  sont  établis,  moins  le  perroquet  de 
fougue.  A  6  heures  5o,  je  démaille  et  hisse  un  feu  à  la  corne  qu'^ 
n'a  pas  dû  apercevoir  de  terre,  car  je  distinguais  à  peine  le  feu  de 
Pondichéry  à  la  même  heure.  La  route  à  l'Est  ;  à  7  heures  le  ba- 
romètre à  70,/».  Grains  furieux  de  7  heures  à  8  heures,  tangage 
de  plus  en  plus  dur.  A  9  heures,  le  boutc-hors  de  foc  casse  au  ras 
de  la  draille  du  grand  foc  qui  reste  seule  en  place  dans  la  moitié 
de  son  clou.  Serré  le  grand  hunier.  Aussitôt  fait  route  du  S.-E. 
sous  le  petit  hunier  aux  bas-ris,  et  le  petit  foc.  Sauvé  tout  le  gré- 
ment  du  boute-hors,  haubans,  barbejouc . . .  Ouragan  déchaîné  à 
II  heures.  La  mer  démontée  roule  sur  le  pont,  les  drômes  sont 
soulevées.  Le  navire  fatigue  considérablement.  Vers  minuit,  le 
petit  hunier  se  défonce  ;  on  ramasse  les  lambeaux  avec  beaucoup 
■de  peine.  Mis  à  la  cape  à  sec  de  toile  ;  le  vent  au  N.-E.,  tournant 
à  l'Est,  parfois  le  S.-E.  i/4  E.  Le  grand  foc  qui,  jusque-là,  bien 
serré  sur  son  bâton  et  sur  sa  draille,  avait  tenu  bon,  commence  à 
se  déferler.  La  draille  en  filant  avait  cassé  le  hâle-bas  et  donné  du 
mou  dans  les  tours  de  raban  de  la  tète.  A  i  heure,  dans  le  fort  de 
l'oui^agan,  le  foc  part  fouettant  au  vent,  tenu  par  ses  amarres  et 
ses  écoutes;  les  bagues  de  la  têtière  partent  les  unes  après  les 
autres  et  le  foc  se  déploie  dans  toute  sa  longueur,  ébranle  la  inà^ 
ture  en  fouettant,  fait  partir  le  boutc-hors  qui  \ient  en  travers 


—  219  — 

sur  le  beaupré  on  tordant  le  chouquc.  Enfin  à  3  heures,  il  ne  reste 
plus  que  les  ralingues  et  quelques  lambeaux  de  toile.  Pendant  tout 
ce  temps,  on  essaye  inutilement  de  s'en  rendre  maître  en  envoyant 
en'  bas  la  drisse  dépassée  du  mât  de  hune  et  par-dessus  les  étais 
du  mât  de  hune.  Impossible  dehaler  la  têtière  au  vent  des  drailles: 
tout  part,  tout  se  brise,  poulies,  bagues,  drisses,  hâle-bas,  etc.  Il 
n'y  avait  pas  à  envoyer  d'hommes  sur  ces  tronçons  de  mât,  ni 
aussi  à  laisser  porter  au  Sud  ou  au  S.-O.  A  minuit,  le  baromètre 
était  à  74,8,  à  4  heures  à  74,2.  Le  grand  hunier  étala  jusqu'à 
4  heures  1/2.  A  cette  heure,  la  barre  de  bon  deT  casse  au  ras  du 
bossoir,  dévente  le  grand  hunier  qui  est  enlevé  dans  une  mi- 
nute. Il  se  déchire  d'abord  du  haut  en  bas,  puis  d'un  travers  à 
l'autre  en  arrachant  le  côté  de  tribord,  ne  laissant  qu'un  bout 
de  raUngue  et  des  lambeaux  sur  l'écoute  de  bâbord,  l'autre 
ayant  décroché  en  battant.  On  hâle  tout  dedans  en  filant  cette 
écoute. 

A  6  heures,  l'ouragan  mollit.  Accalmie  de  G  heures  i/4  à 
7  heures  4o  ;  profité  de  ce  répit  pour  ramener  le  petit  foc  déjà 
à  moitié  dévergué.  Souqué  les  rabans  des  autres  voiles.  Envoyé 
en  bas  les  lambeaux  des  deux  huniers,  les  ralingues  hachées  du 
grand  foc.  La  mer  affreuse,  le  navire  roulant  horiiblcment,  la 
mer  sur  le  pont  passant  par-dessus  les  panneaux,  etc.  A  7heures  1/12, 
jc  vent  dans  un  grain  saute  à  l'Ouest  en  furie,  et  l'ouragan  recom- 
mence comme  de  plus  belle  de  8  heui'es  à  3  heures  de  l'après-midi. 
11  était  temps  que  le  vent  changeât.  A  la  première  heure  du  jour, 
en  regardant  la  mer,  je  vis  (comme  je  m'en  doutais  bien)  que  nous 
étions  très  près  de  la  côte.  La  mer  était  couleur  jaune  sable.  Grâce 
à  Dieu,  je  n'eus  pas  besoin  de  préparer  une  ligne  de  sonde  pour 
compter  les  minutes  que  nous  avions  à  courir. 

«  L'ouragan  passé  à  l'Ouest,  O.-S.-O.,  se  déchaîne  donc  sur 
nous;  les  mâts  et  les  vergues  sans  voiles  (il  n'y  en  avait  que 
deux  et  deux  bien  serrées)  fouettaient  comme  des  roseaux; 
les  embarcations  frémissaient  sur  les  bossoirs  tremblants.  Les 
murailles,  môme  celles  au-dessous  du  pont,  les  parois,  éprou- 
vaient aussi  luie  sorte  de  convulsion  fort  sensible  au  toucher j 
et  le  navire  sans  voiles  à  la  cape,  les  dalets  dans  l'eau,  tenait  le  vent 


—  '220  — 

sans  essuyer  de  coups  de  mer,  gouvernant  jusqu'à  lo  heures  au  N., 
puis  auN.-0. 1/4  N.,N.-0.,N.-0.  i/4  0.;  le  vent  halait  toujours  le 
Sud.  Pendant  ce  temps  (c'est-à-dire  depuis  8  heures  du  matin  jus- 
qu'à 4  heures  du  soir),  le  baromètre  monte  toujours  même  pen- 
dant le  plus  fort  de  l'ouragan  du  matin  successivement  de.  74,1  à 
74,3  —  3 — 5 — 9,  75,3,  75,5.  Novis  fûmes  bientôt  dans  une  mer  plus 
bleue;  nous  étions  parés.  A  4  heures  1/2,  largué  la  misaine  avec 
un  ris,  le  petit  foc  envergué,  et  établi  la  benjamine.  A  6  heures,  le 
perroquet  de  fougue,  labrigantine  ;  fait  route  au  N.-O.  Le  lendemain 
10  décembre,  envergué  les  huniers  dès  la  pointe  du  jour  ;  puis, 
gréé  le  grand  perroquet;  à  midi  1/3,  relevé  Tranquebar  à  l'O.-N.-O. 
distant  de  8  milles.  Suivi  la  côte  sous  une  voilure  maniable,  mouillé 
sur  la  rade  de  Pondichéry  le  1 1  décembre  à  4  heures  du  soir. 

«  F.  LoMEux,  2"  Capitaine  Commandant.  » 


Le  Propriétaire-Gérant, 

J.  Maisonneuve, 


Chalon-sur-Saône.  —  Imprimerie  L.  Marceau,  E.  BERTHAND,  successeur. 


■    TIE  LIFE  AND  LEGEHDS  OF  SDKDARA-iRTTI 

The  Çaiva  devotee,  adapted  from  the  Periya  Purânam. 


§  1.  —  Sundavar's  origin. 

The  great  Sages  ofthe  Çaiva  sect  in  the  Soulh  of  Indiaare 
four  in  nuraber.  Of  thèse  Mânikka-Vâçagar  is  the  oldest  and 
incomparably  the  greatest.  Atan  interval  of  probably  a  een- 
tury  arose  Nâna  Sambandhar,  Sundarar  and  Appamùrtli. 
Thèse  three  lived  in  the  time  of  the  great  struggle  between 
theJains  and  the  Çaivites,  which  ended  in  favour  of  the 
latter.  There  was  a  great  dissimilarity  between  the  three  sages 
of  this  later  period  ;  Sambandhar  beingayouth,  almost  a 
child,  full  of  enthusiasm,  gifted  with  a  truly  poeiic  faculty, 
and  passing  away  in  his  earliest  manhood,  innocent  and 
uncorrupted  He  beams  upon  us  in  the  legends  as  a  lovely 
character.  Thenext,  Sundarar,  was  of  a  very  différent  type. 
He  seemsto  hâve  been  remarkable  forbeautyof  pcrson, —  his 
very  name,  which  is  also  one  of  the  names,  or  epilhets  of 
Çivan,  meaning  the  'beautiful'.  He  was  addicted  topleasure, 
—  an  acconiplished  courtier,  and  man  of  the  world.  There 
scems  indeed  nothing  whatever  of  the  ascetic  about  hini 
from  fîrst  to  last.  His  hymns,  100  in  number,  are  not  it 
seems  to  me  of  any  peculiar  value.  Like  ihose  of  Sambandhar 
and  Appamûrtti  they  are  decads  of  verses  in  houour  of  the 
idol  worshipped  at  each  shrine  visited  by  the  sage,  as  a 
sacred  bard.  Wemaysay,once  for  ail,  that  the  circumstances 
and  traditions  connected  with  the  great  collection  called  the 

15 


—  222  — 

Dêvâram  do  not  impress  us  wilh  any  conviclion  of  the 
genuineness  of  the  great  majority  of  thèse  songs.  About  a 
score  of  Ihem  are   striking  hymns. 

The  story  of  Sundarar  begins  before  his  appearance  in 
South  India.  He  wasone  of  the  host  of  ÇivainKailâsam, — 
(on  the  silver  hill)  —  his  name  being  Hâlâla-Sundara  (an 
epithet  of  Çiva;  Tiru-Vâçagam,  xii,  9),  and  was  one  of  the 
especial  favourites  of  Çiva.  One  day  as  hewas  walking  in  the 
flower  garden  belonging  tothegoddess,  hesaw  twomaidens, 
attendants  upon  Pârvathi,  or  Uniâ,  who  were  plucking 
flowers  for  her  garland.  He  imraediately  became  enam- 
oured  of  the  lovely  damsels,  and  in  a  state  of  great  bewild- 
erment  presented  himself  before  his  master,  who  atonce 
recognised  the  fact  that  evil  desires  and  passions  were  alive 
,  in  his  servant's  soûl.  He  accordingly  told  him  tliat,  because 
it  was  so.  he  must  descend  to  earth  and  be  born  a  man  in 
the  southern  land,  where  he  can  in  due  lime  marry  the 
girls  with  whom  he  is  in  love,  they  having  also  been  sent 
down  to  sojourn  on  earth.  Sundarar  adores  his  master  and 
says,  'our  Lord,  since  I  hâve  yielded  to  evil  impulses  that 
must  for  a  timé  separate  me  from  Thy  sacred  feet,  when 
I  am  on  earth  deign  at  times  to  appear  to  me,  and  make 
me  and  keep  me  ever  Thy  faithful    servant  and  devotee'. 

This  Çivan  promises  todo,  —  andso  Sundarar  quits  for  a 
tiraethe  bliss  of  Paradise,  to  expiate  (very  strangely)  his  sin. 

§  2.  —  Hisbirth  andcarly  hisiory. 

There  is  a  district  in  tlie  Southern  Tamil  country  named 
Tirnmunai-pâdi,  and  a  town  in  it  called  Nâval-ûr.  In  this 
village  lived  a  Çaiva  devotee  whose  name  was  Çadai-yanâr, 
and  his  wife,  a  most  virtuous  and  saintly  woman,  was  called 
Içai-nâniyâr.  He  was  born  as  the  son  of   this  worthy  pair. 


—  223  — 

When  buta  child  he  attracted  by  his  beauty  the  attention  of 
the  king  of  the  district,  who  begged  him  from  his  father 
and  brought  him  up  as  his  own  son.  This  did  not  however 
prevent  him  from  observing  ail  Brâhmanical  usages,  and 
from  reading  the  sacred  Vedas.  He  thus  grew  up  both  an 
accomplished  courtier  and  a  learned  sage.  When  the  time 
came  for  his  marriage  his  parents  arranged  for  his  union 
with  an  unexceptionable  bride,  and  on  the  appointed  day  in 
great  state  he  repaired  to  the  lady's  liouse  for  the  performance 
of  the  marriage  cérémonies.  At  thattime  Çivan,  ever  mindful 
of  his  servant,  and  cognizant  of  ail  deeds  and  of  ail  events, 
came  down  from  Kailâsam  to  fulfil  his  promise,  and  pre- 
senting  himself  in  the  marriage-hall  disguised  as  a  poor 
Çaiva  mendicant,  addresscd  the  brâhman  ministrant  with 
the  words:  'This  marriage  cannot  proceed,  for  1  hâve  a 
coraplaint  to  make,  and  a  claim  to  urge.  The  bridegroom 
is  my  SLAVE,  and  was  sold  to  me  by  his  grandsires. 
The  deed  of  sale  with  signature  is  hère.'  To  this  Sundarar 
naturally  replied  'Was  it  ever  known  tbat  a  brâhman  was 
sold  as  a  slave  to  another  brâhman?  Go,  madman.'  The  dis- 
guised god  replies:  'Whetherl  be  a  madman  or  a  démon 
matters  not.  Abuse  metothy  heart's  content;  but  the  suit  is 
not  so  settled,  nor  ray  claim  refuted.'  It  may  be  observed 
that 'Madman'  is  the  phrase  continually  applied  to  Çivan  as 
the  wandering  mendicant.  This  occurs  frequently  in  the 
Sacred  Songs  of  the  ascetics  (Cf.  note  I  to  Tiru-Vâçagam 
and  5).  A  great  dispute  hereupon  arose,  in  thecourseof  which 
the  unknown  mendicant  exhibiled  a  document  purporling 
lobe  a  deed  executedby  Sundarar'sgrandfather  raaking  over 
himself  with  his  entire  clan  to  the  Brâhman  as  his  absolute 
slaves.  This  deed  Sundarar  indignantly  pronounces  to  be  an 
absurd  forgery,  for  '^no  Brâhman  can  ever  he  a  slare';  and 
tears  up  the  document.   The  claimant  now  appeals  to  the 


—  224  - 

village  counciI,and  Sundarar  is  compelled  to  accompanythc 
disguisedgod  thither  to  défend  the  suit.  After  much  talk,  the 
original  document  is  produeed,  and  Ihe  signature  of  the 
grandfather  verified!  The  bond  ran  thus  'I,  Arûrân,  a 
Çaivite  of  the  original  stock  dwelling  in  Tiru-Nâvalîir,  niake 
this  agreement  withthe  "Madman",  who  résides  mVennai- 
Na llû r :  myse\(  and  my  posterity  agrée  to  give  ourselves  up 
to  him,  inwardly  andoutwardly,  ashis  hereditary  bondsmen'. 
Uponthe  exhibition  of  this  bond  Ihe  question  arises  whether 
the  claiinant  was  really  a  householder  in  ihe  village,  for  no 
one  seemed  to  know  either  him  or  his  dwelling  place. 
When  the  question  was  propounded  to  him  hebadethem 
foUow  him,  and  conducted  them  to  the  celebrated  Ci  va 
temple  in  the  neighbourhood,  entering  which  he  was  finally 
lost  to  view.  The  astounded  brâhmans  now^  perceive  that 
the  claimant  was  their  god,  and  that  the  document  simply 
asserted  whatevery  true  Çaivite  would  gladly  acknowledge, 
that  oulwardly  and  inwardly  he  and  ail  his  race  belong  to 
Çiva,  the  Suprême  Blessedness  !  It  is  in  very  deed  Sun 
darar's  divine  master  who  has  come  down  from  Kailàçam, 
has  assumed  this  form,  and  resorted  to  this  stratagem  to 
assert  and  make  manifest  his  eternal  sovereignty  over  his 
servant. 

Sundarar  now  understands  it  ail,  and  rushes  into  the 
temple  where  stands  the  image  of  Çiva  with  Pârvathi  his 
bride  conjoined.  Addressing  this  he  says  '  I  recognise  Thee, 
and  acknowledge Thy  claim,  o  my  Master.'  The  god  replies: 
'Before,  whilst  thou  wert  my  servant  on  thesilver  hill,  Ihou 
didst  permit  thy  soûl  to  swerve  from  its  fidelity  to  me,  and 
1  sent  thee  down  to  earth  to  rid  thee  of  the  stain.  1  hâve  now 
interfered  to  prevent  thee  from  entering  into  bonds  which 
woudl  entangle  thy  souI,  and  make  thee  more  and  more  of  the 
earth  earthly.'The  extatic  rapture  of  Sundarar  hère  fînds  ex- 


—  225  - 

pression  in  the  poet'sflowing  verses,  vvhich  are  more  copions 
than  interesting,  or  (to  us)  edifying.  Çivan  replies,  '  in  the 
dispute  thou  ha&t  used  migbty  words  against  me,  even 
calling  me  'Madman'  and  'Deceiver';  thou  shalt  hence- 
forth  be  called  '^the  mighttj  deootee\  and  shalt  mightily  praise 
and  serve  me  in  thèse  Tamil  lands.  Go  forth  therefore,  and 
singmy  praises  in  everloving  and  lovely  song.  Song  shall 
be  thy  worship.'  Thus  commissioned,  the  sage  goes  forth  to 
be  one  of  ihe  four  great  Çaiva  psalmists.  We  humbly  con- 
fess  after  long  study  an  utter  inability  to  admire  his  poetry, 
the  contrast  between  which  and  the  powerful  and  palhetic 
verses  of  Mânikka  Vâçagar  is  striking. 

§  3.  —  Sundarar's  PUgrimar/es. 

It  would  be  tedious  and  unprofitable  to  trace  ail  the  various 
pilgrimages  which  henceforwardoccupied  the  time  of  our  sage. 
He  visited  every  Çiva  shrine  from  Çithambaram  to  Sheally, 
and  it  is  mentioned  that  he  refrained  from  entering  the  latter 
town  because  it  was  the  birlhplace  of  the  renowned  Nâna 
Sambandhar.  This  certainly  isanodd  reason  for  avoidingit, 
and  seems  to  indicate  a  fear  of  being  considered  a  rival  of 
Sambandhar.  I  infer  too  that  his  date  was  some  litile  time 
after  the  two  other  saints,  Sambandhar  and  Appa  Mcwlti. 
Some  of  his  expériences  are  sufficiently  grotesque  :  for 
example,  he  once  came  to  a  place  called  Tivu-  Vathigai, 
wherc  he  laid  himself  down  to  sleep  in  the  adjoining  nionas- 
tery  porch.  Soon  an  old  bràhman  came  in  and  stretched  him- 
self by  Sundarar's  side.  Some  time  afterwards  the  sage  was 
aroused  from  slumber  by  feeling  this  old  brâhman's  feet 
pressing  his  head.  He  accordingly  arose,  rearranged  his 
pallette,  and  again  resigned  himself  to  slumber  ;  but  again 
was  roused  by  feeling  the  feet  of  his  pertinacious  old  neigh- 


—  226  — 

bourresting  on  his  head!  He  now  again  arose  and  planted 
himself  at  right  angles  to  the  restless  stranger  and  resigned 
himself  once  more  to  repose.  Still  however,  whatever  position 
he  took  up,  in  a  little  while  his  slumbers  were  surely 
disturbed  by  the  intrusive  feet.  On  risingat  length  to  expos- 
tulate,  hehearda  voice  say  'Sundarar  !  knowest  thou  me  not?' 
But  Ihe  old  bràhman  had  disappeared,  and  the  sage  knew 
now  that  his  Master  was  fulfilling  the  promise  he  made  to 
him  on  his  quitting  Kailâçam. 

§  4.  —  His  first  marriage. 

Meanwhile  one  of  the  two  damsels  with  whom  he  had  been 
enamouredin  Çivan's  paradise,and  whose  name  was  A'âma- 
lini,,  was  sent  down  by  Çivan  to  ÀrCir,  where  she  was  born 
as  a  dancing  girl,  and  received  the  name  of  Paravaiyâr.  She 
there  grew  up  tobe  a  young  maiden  of  exceeding  beauty  and 
accomplishments,  and  was  in  the  habit  of  visiting  tlie  temple 
daily  with  her  companions,  there  to  sing  the  praises  of  the 
god.  On  one  of  thèse  occasions  she  was  seen  by  Sundarar,  and 
although  they  did  not  recognise  one  another,  the  'ancieni 
flame'  was  felt  by  bo'th  of  tliem.  In  order  to  arrange  for 
their  union,  it  is  said  that  Çivan  himself  came  down  and 
negoliated  the  marriage,  such  as  it  was. 

Thisisnot  a  very  edifying  épisode  in  the  l^eriya  Purânam! 

At  this  period  Sundarar  settled  do^^  n  to  a  quiet  do- 
mestic  life  with  Paravaiyâr,  and  obtained  great  renow  n 
in  ail  the  neighbourliood  as  a  devotec  whose  prayers  and 
bénédiction  were  of  exceeding  value.  Some  of  tlie  neigh- 
bouring  villagers  werein  the  habit  of  fillingParavaiyâr's  sto- 
rehouses  with  paddy  and  puise  of  every  description,  and  she 
was  evidently  a  thrifty  housewife.  But  famine  came.  The 
chief  patron,  if  we  may  call  him  so,  of  Sundarar  was  apetty 


—  227  — 

chieftainof  Gundai,  who  on  the  failureof  the  crops  appcaled 
to  Çiva  especially  on  belialf  of  the  Saint  to  whom  he  could  no 
longer  send  the  accustomed  largesses.  In  a  dream  the  god 
proniised  relief,  and  next  morning  the  town  and  adjacent 
haralets  were  filledwith  piles  of  grain  rising  mountain-high. 
The  difiîculty  now  was  how  to  convey  them  to  Àrûr  where 
Sundarar  lived.  When  information  reached  him  of  the  vast 
heaps  of  grain  ready  for  him  in  Gundaihe  went  tothe  temple 
and  sang  one  of  his  celebrated  decads,  the  refrain  of  which 
is: 
'  Bid  thèse  be  lavishly  poured  forth  for  us'.  — 
Çivan  accordingly  sent  his  hosts  at  nightfall  frcminding 
one  of  Robin  Goodfellow!)  who  soon  brought  grain  enough 
to  fin  the  granaries  not  of  the  sage  only  but  of  ail  the  people 
of  Àrûr;  and  Paravaiyâr  made  the  distribution  with  great 
éclat. 

§  5.  —  Golden  gifis. 

A  devotee  of  his  is  celebrated  under  the  nome  of  Kol-puli- 
Nâyanâr.  At  his  earnest  request  Sundarar  visited  him  and 
was  received  with  extraordinary  pomp,  the  chieftain  brin- 
ging  out  his  two  daughters,  whom  he  présents  to  him  to  be 
his  slaves.  The  saint  receives  them  with  the  words'They  shall 
bemy  daughters',  and  in  thekindliest  manner  conversed  with- 
thcm  and  gave  them  présents.  Tlie  incident  throws  light 
upon  the  habits  and  feelings  of  the  time.  From  thcnce  Sun- 
darar returned  home,  and foundthat  Paravaiyâr  was,  as  usual, 
in  want  of  supplies,  and  the  more  so  as  a  great  feast  was  at 
hand.  Accordingly  he  set  out  to  the  town  of  Pugal-ûr  and 
going  to  the  temple  implored  the  assistance  of  tne  god,  and 
afterwards  retiring  to  the  neighbouring  monastery  (or  choul- 
tnj),  gathered  together  some  bricks  which  had  been  brough 
in  for  repairs,  and  piled  them  up  as  a  kind  of  pillow,  spread 


—  228  — 

ing  over  themhis  upper  garment.  He  thus  went  lo  sleep,  and 
when  he  awoke,  behold  !  the  bricks  were  gold,  a  woiiderful 
circumstance  which  he  commemoraled  in  a  suitable  ode. 
After  this  he  made  a  circuit  through  the  towns  in  theneigh- 
bOurhood  of  the  Kâvêri.  During  this  circuit  the  king  of  Ur- 
raitjïu'  losta  very  precious  breastplate  iulaid  with  gems;  but 
in  answer  to  the  prayer  of  the  saint  it  was  restored,  and  put 
into  a  vessel  of  water  used  for  bathing  the  idol.  Thus,  when 
the  servant  poured  water  upon  the  image  the  precious  jewel 
fell  out,  and  arrangeditselfaround  the  neckof  the  idol,  plainly 
indicating  the  god's  agency  in  its  restoration.  Sometime 
after  this  he  again  supplicated  the  god  (perhaps  at  the  insti- 
gation of  Paravaiyâr)  for  another  gift  of  money,  and  received 
what  the  history  calls  'a  pile  of  gold',  but  its  nature  and  value 
are  not  further  specified  Ile  then  went  on  tovisit  iheKonka- 
nâd,  and  after  a  great  round  came  to  Çithambaram.  One 
night  when  trying  to  find  his  way  to  Vriddâçalara  he  met  an 
aged  brâhman  from  whom  he  asked  directions  for  ihe  way. 

The  brâhman,  really  Çivan  himself,  showedit,and  disap 
peared.  Thus  was  the  master  the  ever  ready  guide  and  com- 
panion  of  his  servant.  At  that  time  the  god  spake  to  him  in 
a  voice  w  hich  he  heard,  but  saw  no  form,  bidding  him  casl 
the  gold  thathe  was  carrying  about  with  him  iîito  the  Mani- 
muttam  river,  assuring  him  that  when  he  required  it  he 
shouid  find  it  in  a  certain  spot  in  the  tank  in  the  temple  of 
Àrûr, 

Accordingly  our  sage  returning  home  told  his  spouse  that 
there  was  money  given  him  by  the  god,  now  lying  on  the 
western  side  of  the  tank  in  the  temple  enclosure.  She  laughed 
him  to  seorn,  but  he  replied  'by  the  grâce  of  our  god  I  will 
give  it  to  thee'  and  led  her  to  the  place  ;  where  having  per- 
formed  ail  reverential  cérémonies  he  went  down  into  the  tank 
to  seek  the  gold;  but  the  god  desirous  to  try  him,  and  make 


—  229  — 

the  circumstance  the  occasion  of  Ihe  production  of  the  sacred 
hymn,  withdrew  the  gold  from  the  tank  ;  sothe  sage  was'di- 
sappointed,  yet  he  sang  a  song  to  be  found  in  the  Dêvâram. 
Instantly  the  gold  was  restored,  but  on  examining  it  it  was 
found  lo  be  of  inferior  quality.  This  also  was  a  trial,  and  after 
hehad  devoutly  sung  anothersong,  he  receivedthe  gold  in  ail 
its  purity,  Paravaiyâr's  mouth  was  stopped,  and  her 
inordinate  désire  of  money  satisfîed.  After  this  the  sage  and 
his  wife  livcd  together  for  sometime  in  great  comfort  and 
poace. 

§  6.  —  At  oarious  shrines. 

He  now  set  out  on  a  new  circuit,  in  the  course  of  which 
he  came  to  Çirkâri  where  he  veneratedthe  feet  of  NânaSam- 
bandhar,  but  whether  this  means  that  he  there  met  that  sage, 
or  paid  vénération  to  some  image  of  him,  is  not  quite  clear. 
In  the  course  of  thisjourney  aremarkable  circumstance  hap- 
poned  :  the  sage  worn  out  with  fatigue  and  sufïering  frora 
hunger  and  thirst  was  fainting  by  the  way  when  his  ever 
watchful  master  in  the  shape  of  a  brâhraan  appeared  to  him 
undera  pavilion  in  which  everything  necessary  for  the  sage's 
refreshment  was  provided.  He  and  ail  his  retinue  proba- 
bly  nurabering  some  hundreds  were  fed,  and  after  that  reti- 
red  to  rest;  but  when  they  awoke  the  brâhman  and  the  pavi- 
lion had  both  disappeared.  This  is  commemorated  in  the 
Dêvâram.  lie  then  w  eut  on  to  Çithambaram  and  there  wor- 
shippedÇivaVAe  head  of  tlœ  aasemhh/.  Afterwards  hiswan- 
derings  led  him  to  a  place  called  Tiru-Kachùr,  which  is  a 
few  miles  from  Chingleput.  There  again  nighlfall  found  him 
under  the  outer  wall  of  the  town  exhausted  and  famished. 
Çivan,  the  Suprême,  however  appears  and  with  his  mendi- 
cant  bowl  in  his  hand  says,  'Remain  hère,  and  dismiss  ail 
anxiety.  I  will  go  andask  alms  for  you  and  speedilyreturn.  ' 


—   230  — 

Accordingly  thedisguised  god  went  to  ail  thebràhman  houses 
round  and  begged  for  curry  and  rice,  and  bringing  thèse  back 
to  the  famished  sage  placed  tliem  before  liim.  So  Sundarar 
praised  the  unknown  brâhman's  love,  while  he  and  his  re- 
tinue  ate  and  were  refreshed.  Fortliwith  the  brâhraan  disap-r 
peared.  Another  hymn  commémorâtes  this. 

His  next  journey  was  to  Kâhji^  wliere  lie  worshipped  the 
god  under  the  name  of  Egambarar'. 

Hère  he  remained  for  some  time,and  tlien  wentontoTiru- 
Kalatti,  the  mountain  where  Kanappa-Nâyanàv^^^  image 
stands  and  there  he  oflfered  his  adoration  and  sang  his  hymn 
(Dêvâram,  p.  1044). 

§  7.  — His  enianglement  witJi  Çahgili(jâr. 

Afterthis  hereturned  to  Tiru-Olti-ûr. 

We  now  come  to  what  is  the  most  curious  épisode  in  the 
sage's  (?)  history.  At  the  outsetofthe  story  we  find Sundarar 
in  relation  to  two  of  the  ladies  of  Kailâçam.  One  of  thèse 
under  the  name  of  Paracaiyâr  lias  been  born  onearth,  and, 
has  become  his  wife;  the  other  Aninthithai  (=  the  Irre- 
proachable)  also  was  now  born  upon  earth,  in  a  family  of  the 
yeoman  class  (Velâ|ar)  under  the  nameof  Çangiliyâr  ('She  of 
the  chain').  On  earth  she  grew  up  Ihoroughly  devoted  lo  the 
worsliipof  lier  mistressUmâ.  In  duc  lime  hec  parents  prepa- 
red  to  give  lier  in  marriage  lo  a  suitable  person  of  Ihc  tribe  ; 
but  she  stoadily  refused,  saying  that  she  was  destined  to 
belong  to  none  but  a  de  votée  of  Ci  va.  At  lengtli  after 
much  suffering,  she  finds  horself  installed  in  the  temple 
of  Tiru  otti-ûr  in  a  suitable  dwelling  as  a  nun,  or  pledged 
devotee  of  the  goddess,  lier  mistress.  In  this  retirement  three 

1.  TiruVâçagam,  IX,  15;  XIV,  4. 

2.  For  this  legend  see  Tiru-Vàçagam,  X,  13,  and  XV,  9-12. 


—  231  — 

times  every  day  she  visited  the  temple  to  behold  tbe  deity  ; 
and,  behind  a  veil  in  an  appropriate  recess,  she  employed 
herself  in  weaving  garlands  of  flowers  to  adorn  the  sacred 
images.  Thusit  happenedone  day  that  when  Sundara-Mûrthi 
came  to  the  temple  and  looked  round  uponthe  varions  wor- 
shippers  he  went  into  the  recess  where  the  garlands  were 
prepared.  There,  led  by  the  hand  of  fate  he  beheld  Çangiliijâr, 
fell  in  love  with  lier,  and  going  forth  enquired  her  name  and 
learnt  that  she  was  a  devotee  in  the  service  of  the  temple. 
He  straightway  ofïered  bis  pétition  to  bis  master,  wbo  in 
things  good  and  bad  is  represented  hère  as  being  the  unscru- 
pulous  friendandcobfidantratberthan  the  lord  of  bis  devotee. 
The  god  replied  to  the  sage' s  prayer,  'She  whom  you  ask 
for  is  the  most  ardently  devoted  ascetic  of  the  temple;  but 
fearnot,  I  will  give  lier  to  thee.  '  Accordingly  at  midnight 
when  she  was  asleep  in  her  cell  the  god  appearedto  her  in  a 
dream.  This  appearance  threw  her  into  ecstasies,  andfalling 
athisfeetshecried  'Lord,  what  meritorious  deeds  bave  I  donc 
in  former  embodiments  that  for  my  salvation  Ihou  shouldst 
thus  appear  ?  '  To  this  Çivan  the  suprême  replies,  '  AU  in 
TiruVenney-nallûr  know  liow  1  made  a  certain  bard  my  ser- 
vant and  my  companion.  Itis  he,  my  friend,  that  prays  that 
thou  mayest  be  given  to  him  as  bis  wife.  Joyously  consent 
thou  to  bis  request!  '  Shereplies'Thy  servant,  o  lord,  will 
obey  thy  command,  and  become  thewife  of  this  thy  devoted 
servant;  but  lie  now  livesin  Arûrin  grcat  joy  and  prosperity. 
Cause  him  to  swear  anoath  that  he  will  never  désert  me  after 
our  marriage.'  Accordingly  it  was  arranged  that  the  sage 
should  swear  unalterable  fidelty,  wiiich  considering  that 
Paravaiyâr  wasstill  alive,seemed  a  dilficult  matter  ;  and,  in 
fact  both  be  and  bis  master  knew  that  the  oath  would  not 
and  could  not  be  kcpt;  but,  since  Çangiliyâr  w^ould  listen  to 
no  compromise,  it  was  agreedat  the  suggestion  of  the  god  that 


—  232  — 

Ihe  oath  should  be  sworn,  not  in  Ihe  shrine  before  ihe 
sacred  image,  in  M'hich  case  it  would  be  binding,  but  under  a 
tree  in  the  precincts,  in  which  case  it  would  not  be  a  binding 
oath!  The  god  himself  having  suggested  this,  she  acoepted 
it,  and  accordingly  the  pretended  oath  was  sworn.  The 
next  day  the  god  appeared  to  the  devotees  of  the  temple  in  a 
dream,  andcommanded  them  to  give  Çangiliyâr  in  marriage 
to  his  servant  S undarar,  which  was  done  accordingly. 

Thus  a  new  life  begins  for  the  sage,  who  is  now  in  fact 
attached  to  Çithambaram,  of  which  Tiru-votli-ûr  isasuburb; 
yet  he  hasnotforgotten  the  lord  of  Àrûr;  and  to  hini  he  ad- 
dresses  a  song  which  is  celebrated  ;  and  after  that,  breaking 
his  oath,  leaves  Tiru-votti-ûr  to  return  to  his  first  loves, 
both  spiritual  and  earthly.  But  it  is  saidthat  his  eyesbecame 
blinded  as  a  punishment  for  breaking  his  oath,  and  thus 
blind,  but  still  singing  with  dévotion  the  praises  of  the  raas- 
ter  who  had,  as  it  would  seeni,  bctrayed  him  into  this  sin  of 
perjury,  he  raakes  his  way  towards  Àrùr.  On  the  road  he 
visited  several  shrines  specially,  âlamkàdu,  where  he  saw 
the  temple  of  'the  Lady  of  Kârikâl''.  Hethen  went  to  Kâùji 
where  in  answerto  his  fervent  supplications  his  left  eye  was 
restored.  After  this  he  went  onwards  from  village  to  village, 
but  it  seems  that  as  a  further  punishment  he  was  afilicted 
with  what  would  appear  to  hâve  been  a  kind  of  leprosy  co- 
vering  the  whole  of  his  body.  This  however  was  removed  in 
answer  to  his  prayers,  at  the  village  of  Tiru  àvadu-turr-ai, 
where  he  was  directedby  the  god  to  bathe  in  the  tank  on  the 
north  side  of  the  temple.  This  was  the  occasion  for  further 
hymns  of  thanksgiving.  Still  he  was  afïlicted  by  the  loss  of 
his  right  eye,  especially  because  the  glory  of  his  master  in 
each  shrine  could  scarcebe  beheld  even  by  both   eyes,  and 

1.  See  her  legend  iu  Tiru-viK^Uj^am,  VII,  ver  XV. 


—  233  — 

one  was  obviously  insufficient.  However,  in  ans\\  'îr  to  his 
prayers,  this  also  was  granted  him,  and  in  transports  of  joy, 
perfectly  restored  to  himself,  he  reenters  Àrûr.  Meanwhile 
Paravaiyâr,  his  first  wife  had  heard  of  his  infidelities,  and 
mock-raarriage,  and  was  of  course  exceedingly  indignant,  so 
that  when  our  devotee  wished  to  return  to  his  dwelling  she 
refusedto  permit  any  messengers  of  histo  enter  Ihe  dwelling. 
In  vain  was  the  help  of  varions  mediators  sought.  She  de- 
clared  that  she  would  die  rather  than  be  reunited  to  him.  In 
this  extremity  the  sage  has  recourse  to  his  master,  whom  he 
sought  again  to  employ  in  what  certainly  seems  to  us  to  be 
a  most  undignified  occupation.  It  is  difRcult  indeed  to  fancy 
*Çiva  Perumân'  acting  in  the  capacity  of  Sir  Pandarus  of 
Troy  !  However  tiere  seems  to  hâve  been  in  this  case  no  limit 
to  the  kindly  indulgence  of  the  master  who  treated  the  de- 
votee invariably  as  a  spoiled  child.  He  accordingly  paidtvvo 
visits  to  the  lady,  oue  in  the  guise  of  a  devotee,  and  again  in 
his  own  glorious  form  ;  and  she  is  at  lenglli  appeased,  Sun- 
darar  being  readmitted  to  his  home.  So  thoroughly  has  the 
god  performed  his  task  that  when  Sundarar  arrives  he  finds 
his  dwelling  in  festive  array,  lighls  gleaming  and  beautiful 
flowers  shedding  light  and  beauty,  and  difïusing  a  heavenly 
radiance  around. 

After  this,  for  a  long  period  he  and  Paravaiyâr  lived  in 
ail  the  luxury  of  amplest  wealth  :  the  sanctity  being  appa- 
rently  in  abeyance! 

§  8.  —  Healimj  of  Eyar-Kôn. 

At  this  time  a  distinguishod  devotee  of  Çivan,  called 
l'Jyar-Kôn  Kali-Kâma-Nâyanâr,  hearing  that  Sundarar  had 
actually  dared  to  employ  his  Master  as  a  vile  pandar;  was 
naturally  very  angry  and  gave  expression  to  his  wrath  in 


—  234  — 

words  of  contemptuous  indignation  againstboth  the  servant 
and  the  Master  ! 

Çivan,  the  suprême,  hearing  of  this,  sent  a  dreadful  colic 
as  a  punishment  to  the  presumptuous  devotee,  and  when  the 
sufferer  appealed  to  his  compassion  said  to  him  «  Only.  by 
the  hand  of  my  servant  Sundarar  can'st  thou  be  healed  ». 
The  impetuous  devotee  indignantly  refused  the  services  of 
one  whose  conduct  he  had  so  loudly  condemned^  declaring 
that  he  would  rather  he  branded  with  the  three-pronged 
spear  of  Çivan  made  red  hot,  than  allow  one  who  had  em- 
ployed  the  god  on  such  an  unworlhy  errand  toapproach  him. 

However,  the  sage  came,  and  was  denied  access  to  the  sick 
raan  ;  but  forcing  his  way  in,  declared  that  he  had  come  to 
heal.  The  patient,  in  a  t'ury  drew  his  sword  and  slewhimself, 
rather  than  be  healed  by  unworthy  hands.  The  sage  horri- 
fied  took  the  sword,  and  was  about  to  kill  himself,  when 
Çivan  restored  the  dead  man  to  life,  and  filled  his  mind  with 
heavenly  light,  the  resuit  of  which  was  that  he  sprang  up 
and  wrested  the  weapon  from  Sundarar's  hand.  A  full  expia- 
nation  and  reconciliation  took  place  and  from  that  time 
Éyar-kôn  became  the  attached  friend  of  the  sage,  who  paid 
him  a  long  visit  and  then  returned  to  Àrûr. 

§  9.  —  His  friend  Çêraman  Perumal. 

After  this  a  new  friend  cornes  into  the  life  of  the  sage. 
This  person  is  called  Çêramân-Perumâl-Nâyanâr,  who  was 
the  chieftain  of  Kodunkôl.  This  petty  king was  a  very  remark- 
able  devotee,  and  his  history  is  related  at  great  length.  We 
shall  only  note  the  particulars  connected  with  his  intimacy 
wilh  our  sage.  The  first  place  of  importance  which  they 
visited  together  was  Vêdâraniyam,  celebrated  in  the  history 
of  Nâna  Sambandhar.  This  chief  seems  to  hâve  been  himself 


—  235  — 

a  poet.  They  tlien  went  to  Maclura,  and  travelled  round  the 
Pândiyan  kingdora,  while  the  sage  composed  and  sang  lyrics 
at  ev.ery  sacred  shrine.  After  many  days  spent  in  Àrûr,  the 
tvvofriends  took  a  journey  westward,  and  having  to  cross  the 
Kâvëri,  which  was  swollen  by  the  rains,  the  sage  sang  one 
of  his  celebrated  songs,  the  conséquence  of  which  was  that 
the  river  divided,  and  standing  on  eitlier  side  like  walls  of 
crystal  permitted  them  to  pass  over  dryshod.  After  they  had 
sung  praises  to  the  god,  the  river  quietly  returned  to 
its  usual  ehannel;  After  this  Sundara-Mûrtti  accompanied 
his  friend  to  Kodunkol  where  he  was  received  with 
royal  pomp,  and  made  a  splendid  progress  round  tlie  little 
State,  singinghis  sacred  lyrics  everywhere.  After  some  time 
hefelt  an  irrésistible  impulse  to  returnto  Arûr,  but  his  friend 
and  patron  resisted  liis  departure,  and  only  consented  on  the 
understanding  that  immense  piles  of  gold,  jewels,  costly 
garments  and  perfuraes  should  be  sent  with  the  sage,  carried 
by  a  little  army  of  porters.  When  Ihey  were  on  the  way  the 
hosts  of  Çivan  disguised  as  robbers  came  and  carried  ofï  ail 
the  treasure:  but  the  sage  went  to  the  nearest  temple,  and 
sang  a  lyric  which  had  such  an  efïect  that  the  robbers  brought 
back  the  whole  of  their  spoil  and  piled  it  up  at  the  gâte 
of  the  temple;  so  the  wealth  reached  Àrûr  in  safety,  no 
doubt  to  the  great  satisfaction  of  Paravaiyâr,  who  was  of  an 
avaricious  disposition  it  may  be  inferred.  On  a  later  occasion 
when  Sundarar  returned  to  visit  his  friend,  itis  said  that  in 
a  certain  village  he  heard  sounds  of  rejoicing  proceeding 
from  one  liouse  and  of  raourning  from  the  opposite  one.  On 
cnquiring  the  reason  he  was  told  that  in  the  house  of  mour- 
ning  a  boy  of  fîve  years  of  âge  had  gone  to  bathe  in  the  tank 
with  another  boy  about  his  own  âge;  and  that  one  of  thèse 
boys  had  been  swallowed  by  an  alligator,  while  the  other  had 
escaped.  The  mourning  in  the  one  house  was  for  the  child 


-  236  — 

carried  away  in  such  a  terrible  manner;  while  the  rejoicing 
in  theother  house  was  for  the  childthat  had  returned  safe, 
whom  they  wereinvesting  withthe  sacred  thread!  The  saint 
was  fiUed  with  compassion  for  the  mourners,  who  came 
crowding  to  worshipat  his  feet,  imploring  him  to  accepttheir 
hospitality  and  feeling  that  his  présence  was  more  than  a 
compensation  for  their  bereavement,  and  sang  one  of  his 
sacred  lyrics,praying  that  the  child  might  berestored.  Accord- 
ingly  the  dreaded  king  of  death  brought  back  tlie  spirit  of 
the  child,  reunited  it  to  the  body,  and  caused  the  alligator  to 
bring  the  child  thus  rescued  to  the  bank.  This  wonderful 
résurrection  filled  the  whole  countryside  with  wonder,  and 
rich  présents  poured  in,  while  the  land  rang  with  the  praises 
of  the  illustrions  visiter. 

Many  days  after  this  the  sage,  while  hishost  had  gone  to 
bathe,  went  to  the  temple  of  Tiruvaûjaikalam,  and  having 
performedhis  worship  with  due  dévotion,  prostrated  himself 
before  the  image  in  an  ecstasy  of  mystic  ferveur,  praying  in 
language,  that  might  hâve  been  adapted  from  the  song  of 
Simeon,  that  lie  might  at  length  be  released  from  the  bonds  of 
earthly  life  andpermittedagain  to  worshipat  the  sacred  feet 
on  the  holy  hill.  No  sooner  had  he  ofïered  this  prayer  than 
Çiva-Perumân,  addressing  ail  the  gods,  bade  them  in  glad 
procession  proceed  toearth,  and  placing  Sundarar  on  a  white 
éléphant  conduct  him  to  Paradise.  This  was  accordingly 
donc.  AU  the  heavenly  hosts  surrounded  him.  He  was 
mounted  upon  an  éléphant;  and  with  the  sound  of  ail  kinds 
of  music,  amid  the  praises  of  ail  the  gods,  and  showers  of 
flowers  from  the  sky,  he  was  conducted  alongthe  celestial way 
to  Kailàçam.  Meanwhile  the  chief  his  friend  returning  saw 
the  wondrous  procession  making  its  way  through  the  sky, 
and  immediately  mounting  his  royal  charger   breathed  into 


—  237  — 

itsear,  the  *mystic  five  syllables''.  Forthwith  the  charger 
sprang  into  the  skies  overtook  the  éléphant  on  which  the 
saint  was  riding,  and  led  the  way  to  the  *silver  hill'.  Ail  the 
choicewarriorsofthe  kingdom  seeing  their  master  taken  f rom 
their  sight  fell  upon  their  swords,  and  leaving  their  earthly 
bodies  at  once  received  the  heavenly  shapesof  heroes,and  so 
preceding  their  master  waited  at  the  gâte  of  Paradise  to  wel- 
come  him  and  do  him  service.  So  the  whole  company  went 
on,  the  saint  stili  chanting  his  inspired  song.  At  length  at 
the  sacred  gâtes  the  sage  was  admitted,  but  his  friend  and 
attendants  remained  outside.  Çivan  received  his  faithful 
devoteeand  friend  with  warm  welcome.  The  sage,  bowing 
athisfeet,  said  "The  fault  which  banished  me  from  hence 
and  consigned  me  to  an  embodied  existence  is  forgiven,  and 
once  more  Ihou  dost  admit  me  to  share  thy  joy  with  thee  !" 
He  then  representedthecaseof  theNâyanârwho  was  waiting 
without  the  gâte.  The  order  was  given  at  once  for  his  ad- 
mission, and  our  sage  under  the  old  title  of  Halâla-sundarar 
was  made  the  chief  of  Çivan's  hosts,  with  his  friend  as  his 
second  in  command. 

Afterwards,  Paravaiyâr  and  Çangiliyâr,  restored  to  their 
old  names  and  positions,  were  galhcred  with  the  servants  of 
Pârvathi.  So  they  alJ  entered  into  the  joy  of  an  eternal  rest. 
To  the  king  of  the  sea  it  was  moreover  given  in  charge  that 
he  should  carry  down  to  the  Southern  land  the  hymn  which 
the  sage  had  -sung  on  the  way.  Thus  ends  the  legend  of  tlie 
third  of  the  Çaiva  saints,  or  if  we  include  Mànikka-Vâçagar, 
lliefourth.  It  will  be  seen  that  they  were  very  diverse  in 
'liaracter  and  history. 

By  the  readers  of  the  four  historiés  of  Mânikka-Vâçagar, 
Sambandhar,  Nâvukkaraçar  and  Sundara-Mùrtti,  who closes 

1.  See  Tiru-Vàçagam  p.  XXXIX,  note  II. 

16 


—  238  - 

the  séries,  it  will  be  seen  that  thèse  "  saints  "  liad  many 
peculiarities  and  even  vices  which  to  the  western  mind  seem 
most  répulsive,  and  unsaintly.  For  example  Sundarar  in  his 
poems  uses  the  most  unseernly  familiarity  in  his  addresses 
to  his  master.  Before  coming  down  from  Kailâça  he  had 
earnestly  implored  thegod  not  to  forsakehimin  his  new  po- 
sition ;  and  we  hâve  seen  that  Çivan  was  continually 
wilh  hisfaithlul  devotee,  who  calls  him  '  Madman'  '  Decei- 
ver  ',  '  Companion'  and  even  '  Servant'.  Something  of  this 
is  seen  in  Mânikka-Vâçagar'  s  verse,  but  Sundara  avails 
himself  of  the  liberty  of  aspoiled  child  in  a  strange  way.  We 
raay  notice  too  an  inconsistency  in  the  history  of  this  devotee 
not  discernible  in  the  others.  Sundara  was  sent  down  to  earth 
to  rid  himself  of  the  dominion  of  the  sensés  and  tomakeatone- 
raent  for  the  indulgence  of  undisciplined  thoughts  and  de- 
sires. The  god  also  appears  to  break  ofï  Sundara's  marriage 
by  claiming  the  young  bridegroom  as  liis  slave;  and  the  de- 
sign of  this  is  to  prevent  him  from  becoming  a  drudge  to  the 
world.  Yet  afterwards,  the  selfsame  Sundarar  is  actually 
permitted  to  employ  his  master  to  arrange  for  liis  union  with 
Paravaiyâr,  and  afterwards  to  bring  abbut  a  reconciliation 
when  she  was  justly  offended. 

Moreover  Çivan  was  employed  to  arrange  a  second  and 
clandestine  marriage  with  Aninthaiyâr  (or  Çangiliyâr)  ;  and 
this  was  accomplished  by  a  gross  déception,  Sundarar  swe- 
aring  never  lo  désert  her,  which  he  however  did  soon,  with 
the  connivance  of  Çiva!  He  swore  what  seemed  to  her  a 
binding  oath,  but  was  not  really  so,  bécause  not  sworn  in  the 
temple,  but  merely  under  tlie  shade  of  a  consecrated  tree. 
We  note  thèse  things,  because  the  tone  hère  is  decidedly 
lowerthan  that  of  thetwo  former  historiés.  Mânikka-Vâçagar 
laraents  bitterly  his  imperfections  and  falls,  but  gives  the 
idea  of  a  devout-minded  man  struggling  towards  purity  and 


—  239  — 

light.  Sambandhar  présents  an  exquisite  picture  of  youthful 
dévotion,  reminding  us  of  what  we  are  familiar  with  in 
connection  with  the  names  of  Samuel,  Daniel  and  S.  Johnthe 
Apostle.  We  say  this,  because  the  character  of  their  saints 
must,  one  would  suppose,  affect  the  conductof  the  votariesof 
the  System. 

Rev.  G.  U.  Pope,  M.  A.,  D.  D. 
Bailliol  Collège,  Oxford. 

Note  de  la  Rédaction.  —  La  légende  de  la  sainte  de  Kârikàl,  dont 
il  est  question  ci-dessus,  p.  232,  a  été  traduite  en  français  par 
M.  Julien  Vinson  et  publiée  dans  la  Reoue  orientale  (année  1880, 
p.  117-136),  d'après  le  Périya  Purânam. 


LE 

LEVER  DE  LA  LUNE  DE  LA  CONNAISSANCE 

(  prabôdhacandrôdaya) 

Drame  en  6  actes,  traduit  pour  la  première  fois  en  français 
du  sanskrit  et  du  prâkrit 

(suite)' 

quatrième  acte 

(Alors  entre  Amitié) 

Amitié.  —  J'ai  entendu  dire  à  Joie  que  ma  chère  compagne, 
Foi,  est  protégée  par  la  vénérable  Dévotion  à  Vishnu  contre 
l'ardeur  d'engloutissement  de  la  femme  de  Çiva.  Quand 
verrai-je  ma  chère  amie?  mon  cœur  le  désire  ardemment. 
(Elle  fait  quelques  pas  sur  la  scène). 

(Alors  entre  Foi). 

Foi.  ' —  (Elle  dit  à  haute  voix  avec  un  tremblement  de  crainte)  : 
Maintenant  encore  mon  cœur  tremble  comme  celui  d'une 
antilope:  je  vois  la  redoutable  femme  de  Çiva,  ayant  des 
crânes  d'homme  en  guise  de  pendants  d'oreille,  lançant  par 
ses  regards  une  multitude  d'éclairs,  dont  l'aspect  est  terrible 
par  des  cheveux  rougescomme  des  flammes  et  dont  la  langue 
s'agite  entre  les  dents  qui  sont  des  bourgeons  et  des  croissants 
de  lune. 

Amitié.  —  Ah!  voici  ma  chère  compagne,  Foi,  dont  le 
cœur  est  agité  par  la  crainte  et  qui  tremble  de  tous  ses 
membres  comme  une  antilope:  elle  délibère  sur  quelque  sujet 

1.  Voy.  t.  XXXIl,  numéro  de  juillet  (1899),  p.  230-246,  et  t.  XXXllI, 
numéro  de  janvier  (1900),  p.  67-86;  numéro  de  juillet,  p.  223-239. 


—  241  — 

et  ne  me  voit  pas,  bien  que  je  sois  allée  au-devant  d'elle.  Eh 
bien  !  je  vais  lui  parler. 

(Haut).  Foi,  ma  très  chère  amie  !  Pourquoi,  au  milieu  des 
tortures  de  ton  cœur,  ne  pas  même  me  voir  ? 

Foi.  —  (La  regardant  avec  un  soupir):  Ah!  ma  très  chère  com- 
pagne, Amitié! 

((  Pendant  que  je  me  trouvais  entre  les  dents  de  la  bouche 
grande  ouverte  de  la  nuit  de  la  mort,  je  t'ai  vue,  ô  amie!  et 
toi-même  tu  es  de  nouveau  dans  cette  même  naissance'.  » 

Viens  donc,  embrasse-moi. 

Amitié.  —  (Elle  fait  ainsi)  :  Amie,  comment  tes  membres 
peuvent-ils,  maintenant  encore,  trembler  à  cause  de  la  femme 
de  Çiva,  dont  le  pouvoir  magique  est  menacé  par  Dévotion  à 
Vishnu? 

Foi.  —  (Elle  redit  à  voix  haute):  «  Maintenant  encore,  mon 
cœur  tremble  comme  celui  d'une  antilope:  je  revois  la  redou- 
table femme  de  Çiva,  ayant  des  crânes  d'hommes  en  guise  de 
pendants  d'oreille,  lançant  par  ses  regards  une  multitude 
d'éclairs,  dont  l'aspect  est  terrible  par  des  cheveux  rouges 
comme  des  flammes,  et  dont  la  langue  s'agite  entre  les  dents 
qui  sont  des  bourgeons  et  des  croissants  de  lune.  » 

Amitié.  —  (Avec  crainte):  Ah!  la  misérable,  à  l'aspect  redou- 
table! Etqu'a-t-elle  fait  à  son  arrivée? 

Foi.  —  a  Elle  est  descendue  comme  un  faucon,  et,  d'une  de 
ses  mains,  in'ayant  saisie  par  les  pieds  et  de  l'autre  main 
ayant  pris  Devoir,  elle  s'est  envolée  avec  impétuosité  dans  les 
airs,  pareille  à  la  femelle  du  vautourqui  tient  dans  ses  serres 
deux  morceaux  de  chair  tremblante.  » 

Amitié.  —  Ah! malheur  1  Ah!  malheur!  (Elle  s'évanouit). 

Foi.  —  Amie,  reviens  à  toi,  reviens  à  toi. 

Amitié. —  (Revenant  à  elle).  Ensuite,  ensuite. 

1.  C'est-à-dire,  tu  vis  encore. 


—  242  — 

Alors  la  déesse,  en  entendant,  notre  cri  lamentable,  a  les 
yeux  en  larmes  et  la  pitié  se  glisse  dans  son  cœur. 

(f.Avec  un  froncement  de  sourcil  redoutable,  elle  lance  à 
la  cruelle  un  regardenflamraé  par  unecolèrequifaitrecourber 
son  corps  d'une  manière  puissante;  et  la  cruelle  est  tombée 
sur  la  terre,  comme  une  montagne  frappée  de  la  foudre,  ou 
comme  un  crâne  qui  tombe  en  ruine  et  se  brise.  » 

Amitié.  —  0  bonheur!  En  un  instant  ma  chère  amie  est 
rendue  à  la  vie,  comme  une  gazelle  qui  tombe  de  la  gueule 
d'un  tigre.  Ensuite,  ensuite. 

Foi.  —  Alors  la  Déesse,  après  avoir  réfléchi,  s'est  écriée: 
Je  détruirai  jusqu'à  la  racine  Grand  Aveuglement,  ce  maudit, 
ce  méchant  qui  me  méprise.  Puis  la  Déesse  m'a  chargée 
d'une  mission.  —  Va,  m'a-t-elle  dit,  ô  Foi  !  parle  à  Discer- 
nement et  dis-lui  de  faire  tous  ses  efforts  pour  la  défaite 
d'Amour,  de  Colère  et  des  autres.  Alors  se  manifestera  l'absence 
des  passions,  et  moi,  choisissant  ce  moment  favorable  je  pro- 
tégerai votre  armée  en  la  secourant  par  l'Acte  de  retenir  son 
souffle  et  les  autres;  la  déesse  Ritambharâ'  et  les  autres,  grâce 
àl'habileté  d'Apaisementet  des  autres,  produiront  lanaissance 
de  Prabôdha  pour  le  bienheureux  (Discernement)  uni  àladéesse 
Révélation.  — Jesuisdonc  partie  à  la  recherche  de  Discerne- 
ment; mais  toi,  à  quoi  passes-tu  tes  jours? 

Amitié.  —  Nous  aussi,  les  quatre  sœurs',  par  l'ordre  de 
Dévotion  à  Vishnu,  nous  sommes  estimées  des  gens  de  bien 
pour  le  perfectionement  de  Discernement;  car  ces  (gens  de 
bien) 

((  Songent  à  moi  pour  l'heureux  et  pour  le  malheureux;  ils 
songent  aussi  à  Pitié,  joyeuse  aux  bons  et  n'ayant  que  du 
mépris  pour  les  méchants;  et  par  ce  moyen  cette  âme,  même 

1.  Ritambharâ.  Personnage  allé<?orique  qui  ne  parait  pas  dans  le 
courant  de  la  pièce.  Il  en  est  fait  seulement  ici  mention. 

2.  Ces  quatre  sœurs  sont  :  Amitié,  Pitié,  -Joie,  Douleur. 


—  243  — 

souillée  par  les  vices,  tels  que  Passion,  Cupidité,  Haine  etles 
autres,  gagne  la  sérénité.  » 

Ainsi  nous  toutes,  les  quatre  sœurs,  nous  passons  nos  jours 
à  nous  occuper  uniquement  du  bonheur  de  Discernement. 
Maintenant  où  ma  chère  amie  voit-elle  le  grand  roi  ? 

Foi.  —  Voici  ce  que  m'a  dit  la  Déesse;  il  y  a  une  contrée 
que  l'on  nomme  Râdha:  là,  dans  Cakralîrtha,  qui  fait  l'orne- 
ment des  bords  du  Gange,  Discernement,  pour  sa  (prochaine) 
union  avec  la  déesse  Révélation,  s'adonne  à  la  pénitence  en 
soutenante  peine  son  souffle,  et  d'un  cœur  plein  de  componc- 
tion, appliquant  son  esprit  à  l'étude  de  la  Mîmànsâ'. 

Amitié.  —  Que  ma  chère  amie  s'en  aille;  moi,  de  mon  côté, 
je  vais  accomplir  ma  mission. 

Foi.  —  Qu'il  en  soit  ainsi. 

FIN  DU    PROLOGUE 


(Alors  entrent  le  roi' et  le  concierge  du  palais). 

Discernement.  —  Ah  !  méchant,  maudit  Grand  Aveugle- 
ment !  De  toute  façon  par  toi  les  honnêtes  gens  sont  tués.  En 
effet 

((  L'insensé,  quoique  plongé  dans  elle,  ne  boit  pas  dans 
l'eau  de  l'océan  de  l'immortalité',  pure,  d'une  grandeur  in- 
finie, sans  vagues,  ayant  le  bonheur  et  la  pensée'  sans  tache; 
mais  l'insensé,  au  prix  de  bien  des  fatigues,  boit  dans  l'eau 

1.  Philosophie  védantique. 

2.  C'estDiscernement(Vivêka).  C'est  cette  appellation  que  nous  adop- 
tons ici  à  la  place  de  ra/a  qui  se  trouve  dans  le  texte,  afin  d'éviter 
toute  obscurité. 

.3.  C'est-à-dire  Brahmâ. 

4.  Cidânanda.  On  voit  souvent Saictcfârtanrfa,  qui  est  l'expression 
complète.  C'est  une  formule  propre  au  système  védantique,  et  qui 
veut  dire:  l'être  qui  est  l'existence,  pensée  et  bonheur. 


—  244  — 

insipide  de  l'océan  (du  monde)  qui  n'est  qu'un  mirage:  il  boit, 
il  se  baigne  et  se  réjouit,  il  plonge  et  remonte.  )) 

Ce  qui  est  cause  de  tout  cela,  c'est  l'ignorance  (où  l'on  est) 
de  Grand  Aveuglement,  qui  met  en  mouvement  la  roue  de  la 
transmigration  du  monde,  et  la  cessation  (de  son  pouvoir)  ne 
peut  venir  que  de  la  connaissance  delà  vérité.  Car, 

((  Pour  le  renversement  et  le  déracinement  de  cet  arbre  du 
monde  qui  est  la  racine  de  l'ignorance,  il  n'y  a  pas  d'autre 
moyen  que  la  connaissance  de  la  vérité,  née  de  l'adoration 
pour  le  Souverain  roi  (Visnu).  » 

D'ordinaire,  quand  les  gens  de  bien  ont  décidé  l'accomplis- 
sement d'un  projet,  les  dieux  deviennent  leurs  alliés:  voilà 
ce  que  disent  les  gens  qui  savent  la  vérité.  Aussi  voici  les 
prescriptions  de  la  déesse  Dévotion  à  Visnu  :  —  Que  l'on 
fasse  des  efforts  pour  la  défaite  d'Amour  et  des  autres.  Pour 
moi,  mon  parti  est  pris  en  votre  faveur;  or,  parce  moyen. 
Amour  est  tout  à  fait  vaincu  par  le  premier  héros,  Esprit 
Critique^  —  Soit.  Eh  bien!  je  vais  lui  donner  mes  ordres 
pour  la  victoire. 

Védavati  M  appelez  Esprit  Critique. 

Le  Portier.  —  Comme  le  roi  l'ordonne. 

(Il  sort  et  revient  avec  Esprit  Critique). 

Esprit  Critique.  —  Ah!  le  monde  est  renversé  par  ce 
maudit  Kâma,  qui  ne  cesse  de  grandir  par  l'idée  que  l'absence 
de  réflexion  est  une  beauté,  ou  plutôt  c'est  ce  méchant  Grand 
Aveuglement  lui-même  (qui  cause  cette  ruine)    En  effet, 

«  Quand  il  voit  la  femme,  qui  n'est  qu'une  véritable  poupée 
impure,  le  sage  lui-même  se  réjouit,  plein  d'enivrement,  et, 
dans  son  bonheur,  il  la  loue,  en  disant:  Elle  est  belle,  elle  a 
des  yeux  de  lotus,  ses  hanches  sont  énormes,  ses  deux  seins 
se  dressent  élevés  et  gros,  sa  bouche  est  un  beau  lotus,  ses 

1.  En  sauskr.  castuoicâra. 

2.  Nom  du  portier. 


—  245  - 

sourcils  sont  pleins  de  beauté.  —  Ah  !  c'est  le  crime  d'Aveu- 
glement. » 

En  outre,  il  n'y  a  pas  même  de  repos  pour  les  gens  intelli- 
gents qui  réfléchissent  selon  la  réalité  et  qui  se  disent  :  La 
femme  est  faite  d'une  cage  d'os  revêtue  d'une  fange  de  chair, 
elle  a  une  mauvaise  odeur  qui  lui  vient  de  sa  nature,  et  son 
extérieur  est  repoussant.  Il  est  donc  bien  évident  que  l'on  a 
toujours  attribué  à  la  femme  des  qualités  qu'elle  ne  possède 
point.  En  effet, 

0  Un  collier  de  perles,  liane  faite  de  perles  résonnantes, 
des  nûpurâs  d'or,  des  guirlandes  merveilleuses  de  fleurs  odo- 
rantes, un  vêtement  splendide  de  lin  blanc,  oh!  tout  cela, 
pour  les  gens  inintelligents,  devient  autant  de  qualités  chez 
la  femme;  mais,  pour  ceux  qui  regardent  de  l'extérieur  au 
dedans,  la  femme  est  un  enfer:  c'est  le  nom  qu'ils  lui 
donnent,  m 

(En  l'air').  Ah!  méchant  Amour,  le  dernier  des  êtres!  Pour- 
quoi, lorsque  tu  te  manifestes,  le  monde  est-il  troublé  et  sans 
appui?  En  effet,  voici  ce  qui  se  passe  dans  l'imagination  de 
l'homme  :  il  se  dit  : 

«  Elle  me  désire,  cette  jeune  fille  au  visage  de  lune;  elle 
me  regarde  avec  plaisir,  cette  belle  aux  yeux  de  lotus  bleu, 
elle  désire  l'embrassement  de  ses  larges  seins .  » 

Fi! ô  insensé! 

«  Quelle  est  celle  qui  te  désire?  quelle  est  celle  qui  te  re- 
garde? 0  brute  !  la  femme,  formée  d'os  et  de  chair,  n'y  voit 
rien  du  tout;  l'âme  incorporelle  '  à  son  tour  te  regarde.  » 

Lf,  Portier.  —  Par  ici  venez,  Auguste!  (Tous  deux  font 
quelques  pas  sur  la  scène). 

1.  On  a  vu  plus  haut  que  cette  expression  scénique  était  employée 
quand  le  personnage  ou  scèue  ne  s'adressait  à  aucune  personne  pré- 
sente. 

2.  L'ànie  unique,  puhs. 


—  246  — 

Le  Portier.  —  Voici  le  grand  roi  qui  est  assis.  Que  votre 
seigneurie  s'approche. 

Esprit  Critique.  —  (S'étant  approché.)  0  roi!  triomphe! 
triomphe  !  Voici  Esprit  Critique  qui  devant  toi  s'incline. 

Discernement.  —  Assieds-toi  là. 

Esprit  Critique.  —  (S'étant  assis.)  0  roi!  le  voici,  ton  ser- 
viteur, il  est  arrivé:  favorise-le  de  tes  ordres. 

Discernement.  —  Notre  combat  avec  Grand  Aveuglement 
est  commencé.  Amour  en  est  le  premier  héros,  et  par  nous 
vous  êtes  désigné  pour  être  son  adversaire. 

Esprit  Critique.  —  Je  suis  heureux  d'être  ainsi  honoré  par 
mon  maître. 

Discernement.  —  Et  par  quelle  science  des  armes  vaincrez- 
vous  Amour? 

Esprit  Critique.  —  Ah  !  déjà,  en  pensant  qu'il  faut  vaincre 
Amour  aux  cinq  flèches  et  à  l'arc  de  fleurs,  on  a  considéré  le 
choix  des  armes.  Vois: 

«  Je  désarmerai  Amour,  (d'abord)  en  fermant  très  forte- 
ment, mais  avec  peine,  la  porte  (des  neuf  sens)  pour  empêcher 
tout  retour  vers  le  souvenir  des  femmes  et  le  charme  de  leur 
présence,  (puis)  en  faisant  réfléchir  à  plusieurs  reprises  sur 
leur  déplaisante  maturité  et  leurs  corps  repoussants.  » 

Discernement.  —  Bien,  bien. 

Esprit  Critique.  —  Et  aussi , 

((  S'il  y  a  des  fleuves  aux  grandes  îles,  s'il  y  a  des  mon- 
tagnes dont  les  rochers  sont  polis  par  les  eaux  qui  ne  cessent 
pas  d'y  tomber,  s'il  y  a  des  rangées  de  forêts  aux  arbres 
énormes,  s'il  y  a  des  paroles  d'apaisement  venant  de  Vyâsa  et 
le  commerce  avec  les  sages,  que  peuvent  faire  les  femmes 
faites  de  chair  et  de  graisse  et  que  peut  faire  le  dieu  de 
l'Amour?  » 

Ce  qui  s'appelle  la  femme,  voilà  l'arme  principale  d'Amour 
aussi,  quand  elle  aura  été  vaincue,  l'activité  de  tous  les  autres 


—  247  — 

compagnons  d'Amour,  deviendra  stérile  et  ils  n'y  trouveront 
que  leur  ruine.  En  effet, 

((  La  lune,  le  sandal,  les  forêts  de  plaisance,  blanches  par 
l'éclat  de  la  lune  et  qui  résonnent  du  sourd  bourdonnement 
des  abeilles,  les  levers  du  printemps,  les  levers  de  nuages 
aux  agréables  murmures,  les  jours  de  longue  durée  que  par- 
fument les  vents  qui  ont  passé  sur  l'arbre  Kadamba,  les  poudres 
odorantes...  etc.,  qui  sont  tous  les  compagnons  d'Amour,  sont 
vaincus  par  la  ruine  de  la  femme.  » 

Mais  c'est  tarder  beaucoup  trop,  que  mon  maître  ordonne. 

«  Moi,  en  détruisant  l'armée  des  ennemis  par  les  Réflexions 
se  précipitant  de  toute  part,  comme  par  des  flèches,  pareil  à 
celui  qui  a  pour  arc  Gândîva  (Arjuna),  je  renverserai  Amour, 
comme  l'armée  des  Kurus  abattit  Sindhurâja.  » 

Discernement.  —  (Avec  bienveillance.)  Que  votre  seigneurie 
s'apprête  donc  pour  la  défaite  des  ennemis. 

Esprit  Critique.  —  Comme  l'ordonne  le  roi. 
(Alors  il  s'incline  et  sort). 

Discernement.  —  Vêdavati  I  qu'on  appelle  Patience  pour  la 
défaite  de  Colère. 

Le  Portier.  —  Comme  l'ordonne  le  roi. 

(11  ."ort,  puis  il  rentre  avec  Patience). 

Patience.  —  «  Les  sages,  héros  profonds  comme  l'océan 
immobile  et  sans  tache,  supportent  les  méchants  propos  et  les 
cris  d'un  ennemi  redoutable  par  les  vagues  du  froncement  de 
ses  sourcils,  assombris  des  ténèbres  de  la  colère,  et  par  ses 

yeux  terribles  et  rouges  comme  les  rayons  du  crépuscule.  » 
(Se  regardant  elle-même  avec  complaisance). 
((  Ce  n'est  pas  la  fatigue  des  paroles  qu'il  faudrait  estimer, 
ni  la  douleur  aiguë  de  la  tête,  ni  la  torture  de  l'esprit,  ni  la 
lassitude  du  corps,  pas  plus  que  Nuisance  et  les  autres,  dont 
l'emploi  serait  stérile,  mais  c'est  moi  seule,  au  contraire,  que 
l'on  doit  estimer  pour  remporter  la  victoire  sur  Colère.  » 
(Tous  deux  fout  quelques  pas  sur  la  scène). 


^  —  248  — 

Le  Portier.  —  Voici  le  roi!  Que  ma  chère  amie  s'ap- 
proche. 

Patience.  —  (S'étant  approchée)  Triomphe,  triomphe  pour 
le  roi  ! 

Voici  la  servante  du  roi,  Patience,  qui  s'incline  parlepros- 
terneraent  des  huit  membres. 

Discernement.  —  Asseyez-vous  ici. 

Patience.  —  (S'étant  assise).  Que  le  roi  me  donne  ses  ordres. 
Pour  quelle  cause  avez-vous  appelé  votre  servante? 

Discernement. —  Dans  ce  combat  la  méchante  Colère  doit 
être  par  toi  vaincue. 

Patience.  —  Grâce  à  la  protection  du  roi,  je  serai  ca- 
pable de  vaincre  Grand  Aveuglement  lui-même,  à  plus  forte 
raison  Colère,  qui  n'est  que  sa  servante.  Aussi  moi-même 
.bientôt 

«  Je  renverserai  ce  méchant,  Colère,  dont  les  yeux  vo- 
missent des  étincelles,  qui  entrave  sans  raison  les  œuvres  de 
la  lecture  des  Vôdas,  du  sacrifice  aux  dieux  et  aux  mânes  et 
de  mortification,  comme  Mahisha  a  renversé  la  déesse 
Durjâ.  » 

Discernement. — 0  Patience!  nous  écoutons.  Eh  bien! 
comment  se  fera  la  défaite  de  Colère? 

Patience.  —  O  roi  !  Je  vais  vous  le  faire  connaître. 

«  Oià  est  le  lever  de  Colère  pour  ceux  dont  le  cœur  est  hu- 
mide du  suc  de  la  compassion  et  qui  se  disent  :  Devant  un 
homme  en  colère,  on  doit  n'avoir  qu'un  visage  souriant,  et  Ion 
doit  se  conduire  avec  sérénité  ;  à  l'outrage  on  doit  répondre 
par  des  paroles  de  prospérité  ;  quand  on  est  frappé,  on  doit 
éprouverlajoie  de  la  destruction  des  péchés  de  l'âme.  Malheur 
à  l'homme  dont  l'âme  n'a  pu  se  vaincre  !  Il  sera  difficile  à 
écarter,  le  malheur  qui  s'est  approché  de  lui  par  un  fatal 
destin.  » 

Discernement.  —  Bien,  bien. 


—  249  — 

Patience.  —  O  roi!  par  la  défaite  de  Colère  seront  en- 
tièrement vaincus  Nuisance,  Fureur,  Orgueil,  Jalousie  et 
les  autres. 

Discernement.  —  Que  votre  seigneurerie  aille  donc  se 
mettre  dans  une  position  forte  pour  s'assurer  la  victoire. 

Patience.  —  Comme  l'ordonne  le  roi  (Elle  sort). 

Discernement.  —  (Au  portier).  Dêvavati  !  Qu'on  appelle 
Contentement,  victorieux  du  désir.  < 

Le  Portier.  —  Comme  le  roi  l'ordonne. 

(Il  sort  et  rentre  avec  Couteutemeat). 

Contentement.  —  (Réfléchissant  —  avec  pitié). 

«  On  peut  prendre,  si  on  le  désire,  le  fruit  des  arbres  dans 
toute  forêt  sans  fatigue  ;  en  tout  lieu  on  peut  prendre  l'eau 
froide  et.douce  des  rivières  pures;  on  peut  prendre  un  lit, 
doux  au  toucher,  que  l'on  a  formé  de  bourgeons  et  de  lianes 
très  douces  :  cependant,  à  la  porte  des  gens  riches,  les  misé- 
rables subissent  tous  les  tourments.  » 

(En  l'air).  Ohl  folie  de  l'homme  avide  !  Il  est  certes  bien  dif- 
ficile d'arracher  (à  ton  cœur)  cet  aveuglement.  En  effet, 

((  Combien  de  tes  entreprises  ont  été  brisées  et  combien  de 
fois  n'ont-elles  pas  été  anéanties!  0  brute,  qui  désirerais  boire 
dans  cette  eau  vile  des  océans  des  richesses,  qui  n'est  qu'un 
mirage!  Cependant  l'espérance  ne  cesse  pas  (de  régner)  en  toi, 
insensé  !  puisque  ta  tête,  faite  certainement  de  foudre  et  de 
rochers,  n'est  pas  brisée  cent  fois.  » 

Cette  conduite,  rendue  aveugle  par  Cupidité,  étonne  mon 
esprit.  En  effet, 

«  Insensé  !  tu  penses  toujours  aux  richesses,  en  te  disant  : 
Cette  chose,  que  je  devais  avoir,  elle  a  été  acquise;  mais  il  y 
en  a  une  autre  qu'il  faut  en  plus  acquérir,  car  celle-ci  dérive 
de  celle-là,  et  cette  autre  chose  est  obtenue.  —  Tu  ne  sais 
pas  qu'en  revanche  ce  démon,  Espérance,  en  peu  de  temps 


—  250  — 

t'avalera  de  force  tout  entier,  toi  qu'enveloppe  l'obscurité  de 
ta  cupidité  sans  bornes!  » 

De  plus, 

((  La  richesse,  eh  bien!  soit;  elle  a  été  acquise  avec  peine  : 
cependant,  lorsque  survient  la  perte  de  cette  richesse  ou  ta 
perte,  ta  mort,  la  séparation  n'en  existe  pas  moins  de  deux 
manières.  Est-ce  que  la  non-acquisition  des  richesses  est 
meilleure,  dis-moi,  ou  bien  la  perte  est-elle  bonne?  La  perte 
du  gain  nous  cause  un  grand  trouble,  mais  non  l'absence  de 
ce  gain  lui-même.  » 

Bien  plus, 

((  La  mort  se  réjouit  sur  ta  tête;  constamment  ce  serpent 
redoutable,  la  vieillesse,  te  dévore;  le  monde  est  dévoré  par 
des  vautours  faits  de  richesses.  Celui  qui  est  plongé  un  peu 
dans  l'eau  de  l'ambroisie  du  Contentement,  après  avoir  lavé 
par  les  eaux  de  la  science  cette  poussière  qui,  née  de  Cupi- 
dité, s'était  accrue  par  l'ignorance,  celui-là  trouve  le  bon- 
heur. » 

Le  Portier.  — ■  Voici  le  maître.  Que  l'Auguste  s'approche 
donc. 

Contentement.  — (Ayant  ainsi  fait).  Que  le  maître  triomphe, 
triomphe!  Voici  Contentement  qui  s'incline  devant  lui. 

Discernement.  —  Asseyez -vous  ici. 

(En  parlant  ainsi,  il  le  fait  asseoir  près  de  lui). 

Contentement.  —  (S'étant  assis  avec  modestie).  Voici  votre 
esclave  "•  que  le  roi  me  donne  ses  ordres. 

Discernement.  —  Votre  seigneurie  a  une  puissance  des 
plus  renommées  :  trêve  de  discours  sur  ce  sujet.  Votre  sei- 
gneurie doit  partir  pour  Bénarès  afin  de  vaincre  Cupidité. 

Contentement.  —  Comme  l'ordonne  le  roi. 

((  Comme  le  fils  de  Daçaratha  (Râma)  a  vaincu  le  souve- 
rain des  râkchasas  (Ràvana),  aux  visages  divers,  vainqueur 
des  trois  mondes  et  qui  doit  son  accroissement  à  l'empri- 


—  251  — 

sonnement  el  au  meurtre  des  dieux  et  des  brahmanes,  ainsi 
je  vaincrai  Cupidité  nécessairement  et  très  vite  »  (il  sort). 

(L'âme  ^  entre  avec  une  apparence  modeste). 

L'ÂME.  —  0  roi  !  on  a  obtenu  d'heureux  présages  pour 
la  victoire  et  pour  le  départ.  Elle  est  proche,  l'époque  du 
départ  que  nous  avait  fait  connaître  l'astrologue. 

Discernement.  —  S'il  en  est  ainsi,  que  les  chefs  reçoivent 
l'ordre  de  partir  avec  l'armée. 

L'ÂME.  —  Comme  l'ordonne  le  roi  (Elle  sort). 

(Dans  la  coulisse). 

«  Qu'on  équipe  les  éléphants  qui,  par  le  vin  du  mada 
tombé  de  leurs  fentes  et  de  leurs  bosses  (attirent)  les  bourdons 
enivrés;  qu'on  attelle  aux  chars  les  chevaux  qui,  dans  leur 
rapidité,  l'emportent  de  beaucoup  sur  les  vents  impétueux.- 
Que  les  fantassins  se  présentent  avec  leurs  lances  qui,  dans 
tout  l'espace  du  ciel,  font  jaillir  comme  une  forêt  de  lotus 
bleus  ;  (qu'ils  fassent  de  même)  les  cavaliers,  dont  les  mains 
puissantes  jouent  avec  les  épées.  » 

Discernement.  —  Soit.  Partons,  puisque  nous  avons 
obtenu  d'heureux  présages. 

(A  son  serviteur).  Ordonnez  à  mon  cocher  de  préparer  et 
d'amener  mon  char  de  guerre. 

Le  Serviteur.  —  Comme  l'ordonne  le  roi  (H  sort). 

(Alors  entre  le  cocher  menant  avec  lui  le  char). 

Le  Cocher.  —  0  roi  !  Voici  le  char  tout  apprêté.  Que  votre 
seigneurie  veuille  y  monter. 

Discernement.  —  (.\yant  fait  les  dispositions  des  présages 
heureux,  il  indique  par  ses  gestes  qu'il  monte  sur  le  char). 

Le  Cocher.  —  (Montrant  la  rapidité  du  char).  O  seigneur! 
vois,  vois  : 

«  Ces  chevaux,  dont  on  n'infère  la  succession  des  bonds 
que  par  la  masse  de  poussièreagitée,et  dont  Textrémité  seule 

1.  Skr.  :  purusa. 


—  252  — 

des  .sabots  dans  leur  élan  touche  à  peine  la  terre,  ces  che- 
vaux traînent  dans  les  airs  le  char,  dont  le  bruit  redoutable 
est  celui  de  l'Océan  baratté.  » 

Voici  la  ville  de  Bénarès,  purificatrice  des  trois  mondes, 
que  nous  apercevons  non  loin  d'ici. 

«  Voici  les  sommets  des  palais,  plus  éclatants  que  les  rayons 
de  la  lune  :  ils  apparaissent  nombreux  et  retentissent  du 
bruit  de  l'eau  qui  tombe  en  gouttelettes  des  machines.  Sur 
ces  sommets  cetle  rangée  d'étendards  est  aussi  belle  qu'une 
rangée  d'éclairs,  qui  diversement  resplendissent  aux  bords 
des  nuages  sans  tache  de  l'automne.  » 

Et  voici  non  loin,  à  l'extrémité  de  la  ville,  les  parcs,  où 
retentit  le  bruit  des  abeilles  s'attachant  à  chaque  bourgeon, 
où  tombent  en  abondance  les  pluies  du  suc  de  l'épanouisse- 
ment dès  plantes,  où  les  fleurs  embaument,  où  les  arbres  ont 
des  feuilles  si  denses  qu'ils  en  deviennent  noirs.  Dans  ce  lieu 
(à  Bénarès),  les  vents  ressemblent  à  des  religieux  sectateurs 
de  Ci  va.  En  effet', 

«  Les  vents  sont  humides  de  l'eau  du  Gange  et  blanchis 
par  le  pollen;  ils  honorent,  pour  ainsi  dire,  par  les  fleurs 
qu'ils  font  tomber  sur  leur  passage,  celui  qui  a  pour  diadème 
la  lune  (Çiva);  ils  chantent  un  éloge  deÇiva  (eu  retentissant) 
comme  un  bourdonnement  d'abeilles;  enfin  ils  dansent  en 
agitant  les  lianes  tremblantes  comme  des  bras.  » 

Discernement.  —  (Regardant  avec  joie). 

((  Voici  cette  Bénarès,  qui  attire  mon  cœur  en  lui  donnant 
l'éclat  du  bonheur  suprême  par  la  dispersion  des  ténèbres  : 
c'est  la  ville  de  celui  qui  a  pour  diadème  la  lune;  comme  la 
science  (qui  délivre),  c'est  pour  nous  le  lieu  de  la  délivrance. 

1.  Le  roi  va  donner  l'explication  de  ce  qu'il  avance,  quand  il  dit 
que  les  vents  à  Bénarès  ressemblent  à  des  religieux.  On  peut  remar- 
quer dans  la  stance  suivante  combien  l'écrivain  a  eu  soin  de  main- 
tenir la  comparaison  entre  les  vents  et  les  religieux. 


—  253  - 

Là,  sinueux  comme  un  collier  de  perles  qui  descend  du  cou 
de  la  terre,  le  Gange,  par  ses  masses  d'écume,  l'emporte  sur 
le  mince  croissant  de  la  lune.  » 

Le  Cocher  (ayant  fait  quelques  pas  sur  la  scène).  —  O  Sei- 
gneur !  vois,  vois:  voici  l'ornement  des  bords  du  Gange,  le 
temple  pur  deVishnule  bienheureux,  le  Kêçava  primitif. 

Discernement  (avec  joie).  —  Ah! 

«  Le  dieu  est  chanté  par  ceux  qui  connaissent  le  passé 
comme  étant  l'âme  de  ce  lieu  ;  et  c'est  ici  que  s'absorbent  en 
Vishnu  ceux  qui  meurent  en  ayant  la  vertu  en  partage.  » 

Le  Cocher. —  O  Seigneur!  vois,  vois:  voici  justement 
Amour,  Colère,  Cupidité  et  les  autres  qui,  en  nous  aper- 
cevant, fuient  bien  loin  de  ces  lieux. 

Discernement.  —  C'est  ainsi.  Soit.  (Etant  entré).  Triomphe, 
triomphe  pour  le  bienheureux!  Nous  honorons  le  bien- 
heureux pour  la  réussite  de  nos  désirs. 

(Etant  descendu  de  son  char,  il  entre  et  regarde). 

Triomphe,  triomphe  pour  le  bienheureux!  0  toi  dont  le 
siège  d'or  est  parsemé  de  vers  luisants  qui  sont  les  rayons  de 
tes  ongles  brillants  sur  le  lotus  de  tes  pieds,  qu'éclairent, 
rangés  en  cercle,  les  diadèmes  de  tous  les  immortels;  toi  qui  es 
seul  habile  dans  l'enlèvement  de  ce  songe  qu'est  le  monde 
pour  les  dévots  tourmentés  par  la  succession  de  cette  illusion 
qui  est  la  dualité  apparente;  toi  qui  as  supporté  le  cercle 
étincelant  des  montagnes  à  l'extrémité  de  tes  défenses  pour 
sauver  la  terre  (submergée  sous  les  eaux)  ,  toi  qui  à  tour  de 
rôle  as  gravi  les  trois  mondes  ;  toi  qui  as  plongé  dans  l'éton- 
nement  l'univers  entier  en  secourant  le  peuple  de  Gôkula, 
qu'effrayait  la  quantité  énorme  de  pluie  tombée  àl'improviste 
d'un  terrible  nuage  qu'avait  soulevé  la  colère  d'Indra:  ce 
péril,  tu  l'avais  écarté  en  soulevant  de  tes  bras  puissants  le 
mont  Gôvardhana  en  guise  de  parapluie  ;  ô  maître!  Souve- 
rain d'une  splendeur  immense  par  l'effacement  du  minium 

17 


—  254  — 

—  rouge  comme  les  rayons  du  crépuscule  —  du  front  de  la 
foule  des  femmes  Dâilyas  ^  ;  toi  qui  as  plongé  les  trois  mondes 
dans  un  vaste  océan  de  sang  qui  coulait  de  tes  deux  mains 
aux  ongles  brillants  et  invincibles  par  le  déchirement  de  la 
poitrine  du  roi  des  démons;  toi  qui  élèves  tes  bras  insignes, 
éclairés  par  l'éclat  resplendissant  de  ton  merveilleux  disque, 
aiguisé  et  rendu  clair  sur  l'amas  des  os  du  cou  élevé  de  l'asura 
Kaitabha,  objet  de  frayeur  pour  les  trois  mondes  ;  toi  qui  es 
cher  à  celui  dont  le  diadème  est  le  croissant  de  la  lune(Çiva)  ; 
toi  qui  as  le  cou'resplendissantdel'éclat  d'un  collier  superbe 
de  grosses  perles  sur  ta  poitrine,  où  sont  marqués  les  signes 
de  la  courbure  des  seins  gros  de  Laksmî,  unie  à  toi  par 
l'embrassement  de  ses  bras  pareils  à  des  lianes,  et  qui  était 
sortie  de  l'océan  de  lait  baratté  par  la  montagne-pilon  que 
faisaient  mouvoir  tes  bras  forts  ;  ô  fils  de  Vikunthâ  !  accorde 
le  lever  de  l'intelligence  qui,  pour  les  dévots,  brise  le  trouble 
qu'est  le  monde  ;  ô  dieu  !  respect  pour  toi  ! 

(Simulant  une  sortie  et  regardant)  : 

Cet  endroit  est  tout  à  fait  convenable:  il  est  propre  à  nous 
servir  de  demeure.  Donc  ici-même  nous  établissons lequartier 
général. 

(Tous  deux  sortent). 

Fin  du  quatrième  acte- 

Gérard  Devèze  . 

1.  Pour  dire  tont  simplement  que  le  dieu  a  rendu  veuves  les 
femmes  des  Daityas,  en  tuant  tous  leurs  maris.  Dans  tout  ce  qui 
précède,  il  est  fait  allusion  au  3«  avatar  de  Vishnu  sous  la  forme  d'un 
sanglier,  et  au  5»  sous  la  forme  d'un  nain. 


L  ARGOT  DE  SAINT-CYR 


Nous  devons  le  vocabulaire  suivant  b   l'amabilité  d'un 
officier,  ancien  élève  de  l'École  spéciale  militaire. 

Affoler  (s'),  se  presser. 

Aller,  sortir;  —  chez  Paria,  sortir  à  Paris;  —  chez 

/amille,  sortir  dans  la  famille. 
Ainphi,  amphithéâtre,  et  par  extension  rassemblement, 

attroupement  d'élèves. 
Au  hasard,  expression  qui  signifie  tout  le  contraire. 
Azimiiter,  repérer,  remarquer  quelqu'un  qui  est  en 

défaut. 
Baktl  {le),  l'École  de  Saint-Cyr. 
Baliuté,   chic,   élégant,  important;  —  note  balmtée, 

bonne  note*  —  élève  tricule  baliuté,  qui  est  entré 

dans  un  bon  rang. 
Bahuter  un  képy,  l'aplatir. 
Balancer,  renvoyer,  se  débarrasser  de,  etc. 
Baraguey,  lavabo  d'hiver,  qui  est  à  côté  de  la  statue 

du  maréchal  Baraguey  d'Hilliers. 
Barbette,  règle  de  bois  mise  dans  une  case  pour  faire 

tenir  un  effet  bien  régulièrement  plié;  épingle  qui 

maintient  en  place  un  bouton  décousu;  sens  le  plus 

général  ;  tout  ce  qui  dépasse;  —  la  barbette,   le 


—  256  — 

génie;  un  oljicier  de  barbette,  un  ofiicier  du  génie; 
coîirs  de  barbette,  cours  de  fortifications;  — avoir  le 
ponce  en  barbette,  à  l'exercice,  quand  il  n'est  pas 
réuni  aux  autres  doigts  ;  —  avoir  la  haiisseen  barbette, 
quand  elle  est  relevée  et  non  rabattue  sur  l'arrière, 
comme  il  est  prescrit. 

Barder,  être  affolé,  avoir  tout  le  temps  des  punitions 
ou  du  travail  à  faire. 

Basane  (le),  le  cheval. 

Bétons,  fortifications,  par  suite  mauvaise  garnison. 

Bois  {le  petit) ,  le  petit  bois. 

Bronze  [le),  l'artillerie. 

Brute  {la)  pompière,  le  bûcheur  de  pompe,  c'est-à-diro 
celui  qui  travaille  ardemment  aux  choses  non  mili- 
taires. 

Cafarder,  avoir  du  goût  :  cafarder  le  dessin  fumiste, 
avoir  du  goût  pour  le  dessin  de  paysage;  —  pro- 
téger :  un  ancien  protège  un  homme  auprès  d'autres 
anciens  pour  que  ceux-ci  ne  le  balancent  pas;  — 
cafarder  à  blanc,  protéger  en  tout  et  pour  tout. 

Calot  {faire),  lancer  son  képy  vers  le  ciel  en  signe  de 
joie. 

Capit,  capitaine,  officier  de  service  à  l'i'xole. 

Carotter,  imiter;  carotter  la  brute,  faire  la  brute,  faire 
semblant  de  ne  pas  comprendre;  —  carotter  le  père, 
être  paternel  ;  —  carotter  le  pieu,  rester  au  lit  après 
la  diane. 

Case  en  champignon  {mettre  une),  défaire  In  case  et 


—  257  — 

suspendre  tous  les  effets  à  l'unique  portemanteau 
dont  on  dispose  (punition). 

Chambre  [corvées  dé),  punition. 

Chapeau!  lancer  son  képy  vers  le  ciel  en  signe  de  joie. 

Chez,  à,  dans;  —  alkr  chez  famille,  aller  chez  Paris, 
sortir  dans  sa  famille,  sortir  dans  Paris. 

Chichi,  synonyme  de  cornard. 

Chien,  sergent-major. 

Chien  jaune,  cours  de  législation;  —  vert,  cours  d'ad- 
ministration; —  être  couché  en  chien  de  fusil,  être 
couché  les  jambes  repliées  et  formant  un  triangle  au- 
dessus  du  lit. 

Co  {un  petit),  un  ami  intime,  un  camarade  de  collège, 
un  camarade  de  promotion. 

Colle,  interrogation  d'examen. 

Cornard,  ce  qui  est  de  trop,  supplément;  —  confu- 
sion, trouble  (d'effets  ou  desoldatsà  l'exercice;  syn. 
chichi);  —  poussière,  résidu  laissé  dans  le  creux  des 
armes  ou  dans  les  coins  de  la  chambre  ;  —  bouc, 
le  cornard  de  Saint-Cyr  est  bien  connu  ;  —  chocolat 
vendu  à  quatre  heures  de  l'après-midi  par  les  sœurs; 
—  pain  grillé  au  beurre,  donné  aux  gradés  par  le 
caporal  aux  vivres  et  rabioté  par  lui  ;  —  avoir  du 
cornard,  avoir  des  galons  sur  la  manche  ;  — 
boite  à  cornard,  boîte  à  ordures  pour  la  chambre. 

Cornarder,  se  tromper  à  l'exercice  ou  ailleurs. 

Cosaque,  maladroit  à  tous  les  exercices. 


—  258  — 

Crampton,  chemin  de  fer;  —  officier  crampon,  tout 

employé  de  chemin  de  fer. 
('rapilm,  fort,  intelligent,  transcendant. 
Croco,  élève  à  titre  étranger. 
Crête  {jaillir  sur),    prendre  quelqu'un   en   flagrant 

délit. 
Creux  {mettre  dans  le),  faire  barder;  —  toucher  une 

remise  de  creux,  barder  (voy.  ce  mot). 
Déculasser  un  pieu,   défaire  'la  culasse,    c'est-à-dire 

défaire  les  couvertures  arrangées  en  carré  au  pied 

du  lit. 
Défiler  (punition),  faire  tirer  la  case  et  le  pieu,  c'est- 

dire  faire  mettre  le  matériel  en  action  —  punir  : 

défiler  de  case,  de  pieu;  — cacher  quelque  chose. 
Dé/iloir,  endroit  où  l'on  cache  «luelque-  objet  qui  n'est 

pas  réglementaire. 
Dégager  [se),   chanter  ou  parler  sur  un  sujet  quel- 
conque. 
Démuseler  [se),  parler  ou  chanter. 
Embusqué,  rusé,  habile. 
Enfilé,  sot,  maladroit, 
fe'/iorwe,  original. 
Évasé,  original. 

Exposer  sa  bayonnette  ou  son  pétoir  (punition). 
Facétie,  travail   actif  autre  que  l'exercice  (escrime, 

équitation,  pète-sec,  etc.). 
Fana,  fanatique. 
Fines,  les  derniers. 


—  259  — 

Fumiste  y  civil. 

Gabarit,  type,  modèle. 

Gabion  {être  foutu  comme  un),  être  mal  équipé  ou  mal 

habillé  pour  l'exercice. 
Galette  [sortie),  sortie  générale  même  pour  les  punis. 
Godillot,  soulier;  —  godillots  de  fixe,  souliers  mis  au 

pied  du  lit  et  retournés  la  semelle  en  haut. 
Gogo,  cours  de  géographie. 
Goguenot,  shako. 
Gradaille,  l'ensemble  des  gradés. 
Grand'pendu,  professeur,  le  commandant. 
Grand'pompe,  officier  directeur  des  études. 
Graviter,  monter. 
Hanspessoire,  premier  soldat. 
Hommes,  les  nouveaux. 
Huileux,  élève  reçu  dans  un  bon  rang. 
Idoine,  civil. 
Insulte  {toucher  /'),  être  réprimandé  ;  —  voir  l'insulte, 

même  sens. 
Insulter,  réprimander. 
Jaillir  sur   la  crête,   prendre  quelqu'un  en  flagrant 

délit. 
Jus  {avoir  un),  avoir  de  l'audace,  du  toupet;  —  «ces 

hommes  ont  tous  les  jus  ». 
Loup,  transcendant. 
Loils  (loups),  petits  bonshommes  mobiles  pour  le  tir 

réduit,  instructeurs  sévères    faisant  barder  leurs 

hommes  et  astucieux  pour  tirer  des  carottes. 


—  260  - 

Marchfeld,  champ  de  manœuvres. 

Malvina,  voy.  Tartelette. 

Maxi  (maximum),  très  bonne  noie. 

}Jili  {art),  cours  d'histoire  militaire;  — lemili,  l'exer- 
cice. 

Mini  (minimum),  très  mauvaise  note. 

Museler  (se),  se  taire . 

Nu  (être),  avoir  un  bouton  non  boutonné,  ou  un  vête- 
ment déchiré. 

Olficier,  élève  de  seconde  année,  ancien  ;  —  oflicier  de 
première  année,  élève  de  première  année  qui  recom- 
mence ses  études. 

Ours  (/'),  salle  de  police. 

Paradis,  infirmerie. 

Parent  {être),  avoir  pour  parent  un  personnage  influent 
ou  connu  à  la  boite  [Vtco\^). 

Pékin,  le  jour  de  la  sortie  de  la  seconde  année  ;  —  être 
pékin  de. . . .,  cesser  de  faire  quelque  chose  ;  —  être 
pékin  de  melon,  avoir  lini  la  seconde  année. 

Pékin  do,  f.  1  sou  la  ligne,  le  dernier  jour  de  janvier. 
Les  mois  de  la  première  année  sont  dits  otficiers;  et 
le  1"'  février  est  un  officier  qui  entre  en  ligne  en  ce 
moment. 

Pelote,  consigne. 

Pète-sec,  gymnastique. 

Pétoir,  fusil. 

Pendu,  professeur,  interrogateur;  — grand  pendu  {le), 
le  commandant. 


—  261  — 

Père-système,  le  dernier  de  la  promotion. 

Pied  de  banc,  sergent  d'infanterie. 

Pieu,  lit. 

Pique,  escrime,  —  sergent. 

Piquer  l'étrangère,  ne  pas  faire  attention. 

Poireau,  général. 

trompe,  travail  non   militaire;   —  la  grande  pompe, 

l'officier  directeur  des  études;  —  voir  la  pompe, 

préparer  le  travail. 
Pompier,  celui  qui  travaille,  qui  pompe. 
Ramasser,  obtenir. 
Ramener,  obtenir. 

Répéter,  remarquer  quelqu'un  qui  est  en  défaut. 
Repiquer,  recommencer. 
Restaurant,  réfectoire. 
Rostos,  becs  électriques. 
Sac,  sergent-fourrier;  —  qui  n'est  pas  dans  son  sac  à 

linge,  qui  est  de  taille  dans  son  sens  leplus  général. 
Saumdtre,  jeune  sous-lieutenant  sorti  depuis  peu  de 

temps  de  l'Hcole. 
Séraphin  [être  habillé  en),  être  habillé  de  blanc;  c'est 

au  paradis  qu'on  est  habillé  en  séraphin. 
Tapir,  cours  de  topographie. 
Tartelette  et  Mahina,  femmes  qui  venderit  des  gâteaux 

ou  des  petits  pains  les  jours  de  service  en  campagne. 
Toucher  tartelette,  manger  des  gâteaux. 
Toucher  une  remise  de  creux,  barder  (voy.  ce  mot). 
Tout-cuit,  commandant  de  bataillon. 


—  262  — 

Tricule,  nutnéro  matricule,  chiffre,  numéro,  note  de 

Colle.  —  voy.  Bahuté. 
Voleuse,  débitante  de  tabac. 
Foracer,  prendre  quelqu'un  en  flagrant  délit. 
Zèbre,  cheval;  aller  à  zèbre,  faire  du  zèbre. 
Zingot,  préau  de  la  cour. 


Analyse  des  formes  verbales  de  l'Évangile  de 
S.  Marc,  traduit  en  basque  par  Jean  de 
Liçarrague  (1571). 


SUITE 


DIOT.  2.  Ind  :  prés.  s.  1"  r.  s.  v.  i.  act:  erran, 

4.  18.    . . . ,  DioT,  (Haiitin  a  mis  diot  ,)...,  di-ie, 

5.  15.    ...  DIOT  :  (Hautin  a  mi^ diot:)  .  .  .,  di-ie^ 
DIOTSA.   y.  Ind;  prés:  s.  3'  r.   s.   r.     i.   s.    v.   i. 

act:  erran. 

2.  10...  (diotsa  paralyticoari)  ..,,  (il  dit  au  para- 
litique,) 

3.  3.  Eta  diotsa.  guiron  escu  eyhartua  çuenarî, 
Lors  il  dit  à  l'homme  qui  auoit  la  main  sèche, 
(à  comparer  escii  eyhartua  aux  mots  escua  ey- 
hartua sous  çuenic,  3.  1.  Là  seng  est  the  hatid 
ivithered.  Ici  c'est  the  withered  hand.  A  nice 
distinction  !  But  the  French  is  quite  the  same  in 
both  places.  Cï.  gogortua  sous  duçue  8.  17;  et 
chez  J.  Ochoa  de  Arin,  p.  139  «  izango  Hzatean 
confessioa  gaitza  »  =  the  confession  would  be 
the  bad. 

3.  5.  Eta  hetaràt  inguru  behatukic  asserrerequin, 
eta  hayén  bihotzeco  obstinalioneaz  contris- 
tatuiuc,  diotsa  guiçonari,  Et  adonc  les  regardant 
à    Tenuiron    auec    indignation,  &   pareillement 


—  264  — 

marri  de  rendurcissement  de  leur  cœur,  dit  au 
personnage, 
5.    36.    ...,    DioTSA  synagogaco  principalari,  ..., 
il  dit  au  principal  de  la  synagogue, 

5.  41,  Ela  HARTURic  nescatcharen  escua,  diotsa, 
Talitha-cumi  :  ...  Et  ayans  {sic)  prins  la  main 
de  la  fillette,  luy  dit, 

6.  22.  ...,  Reguec  diotsa  nescatchari,  ...,  le 
Roy  dit  à  la  fille 

8.  29.  ...  Pierrisec  diotsa,  ...  ?  Pierre.  .  . ,  luy  dit, 

9.  5.  Orduan  Pierrisec  hitza  harturic  diotsa  lesusi, 
Magistruâ.  Adonc  Pierre  prenant  la  parole  dit  à 
lesus,  Maistre, 

9.  21.   ...  ?  Etaharc  diotsa,  Ilaourra-danic.    ...  ? 

Lequel  dit.  Dès  son  enfance. 

10.  51.  ...  ?  Eta  itsuac  diotsa,  ...  ?  L'aueugle  dit, 
14.   30.  Orduan   diotsa    Isuesec,  Lors    lesus   luy 

dit, 

14.  37.  ...  :  eta  diotsa  Pierrisi,   ...  :  &  dit  à  Pierre, 

14.  45.  .  .  .,  bertan  harengana  hurbilduric  diotsa, 

.  .  .  . ,  incontinent    s'approchant  de    luy  dit 

DIOTSATE.   5.     Ind:    prés:  pi  :  3«.  r.  s.  r.  i.  s.  v. 

i.  a.  erran. 

2.   18.  ...  eta  diotsate,  ,..,&luy  dirent^, 
4.38.    ...,  eta  DIOTSATE,   ...&  luy  disent, 
6.  37...  Orduan  diotsate,  ...  Ils  luy  dirent', 
8.  19.  ...  ?  DIOTSATE,  Hamabi.  ...?  ils  luy  dirent', 

Douze. 


1.  L.  traduit  disent,  le  présent  historique  donnant  plus  de  vie 
à  la  narration. 


—  265  — 

12.    14.  Ela    hec  ethorririg    diotsate,  Magistriiâ, 
ïceux  estans  venus,  liiy  disent,  Maistre, 
DIOTSUET.  6.  Ind  :  prés  :  s.  1"  r.  s.  r.  i.  pi  :  2=  pers. 
V.  i,  a.  erran. 
6.  11.  8,  12.   9,  41.  10,  29.    12,  43.    14,  25.  Eguiaz 
DiOTsuKT,  En   vérité  ie  vous  di  (ou)  le  vous  di 
en  vérité 
DÏRADE.    42.   Ind:    prés:  pi:  3«  Verbe    subst  :  & 
aux: 

1.  21.  Guero  sartzen  G?im«?e  Capernaum-en,  Puis 
entrèrent  en  Capernaum  :  (Avec  sarlzen  on  at- 
tendrait Capernaumera,  Voyez  plus  bas  10.  46; 
11.  15  ;  11.  27,  mais  cf  :  diraden,  10.  23  ;  et  /e» 
sumân  sar  ditecen) 

2.  22.  Eta  bertan  anhitz  hildu  içan  dirade  ...  Et 
soudain  plusieurs  s'y  assemblèrent, 

2.  18.   ...  :  eta   hec  ethorthen  dirade  ...-.  lesquels 

vindrent  à  luy, 
2.  20.Baina  ETHORRiREN  d'i/vz^/e  egunac...  Mais  les 

iours  viendront 

2.  22.  ...,  eta  çahaguiac  galtzen  dirade^  (H.  a 
omis  la  dernière  virgule.) 

...,  &  les  vaisseaux  se  perdent  : 

3.  31,  Ethorten  diradehada  haren  anayeac  eta  ha- 
ren  ama  :  ...  Ses  frères  donc  &  sa  mère  vien- 
nent : 

4.  15.  Bada  hauc  dirade  ...  Et  voici,  ceux 

4.  1().  Eta  hauc   dirade  ...  Et  voici  semblablement 

ceux 
4.  17.  ..>,  baina  iraute  gutilaco  dirade  :  ...,•  bertan 


—  266  — 

SCANDALIZATZEN  fUrade.  (H .  a  mis   ber    à  la   fin 
de  la  ligne.)  ...,  mais   sont  de  petite  durée  :..., 
ils  sont  incontinent  scandalizez. 
4.  18.  Eta  hanc  dirade    .,.,  hauc  dirade,  ...  Aussi 
ceux...,  ceux-ci,...  sont 

4.  20.  Eta  hauc  dirade...  Mais  voici  ceux 

5.  15.  Eta  ethorten  dirade  lesusgana,  et 
viennent  à  lesus, 

6  Sommaire  3  Balna  harçaz  dirade  scandali- 
ZATZEN.  2...  Scandalizer 

7.  4.  ..,,  iKuciAG  ezpaDiRADE,  ...,  s'ils  ne  sont 
lauez, 

7.  15.   ...  DIRADE,  ...,  ce  sont 

7.  21.  Ecen  barnetic,  guiçonén  bihotzetic  ilkiten 
dirade  pensamendn  gaichtoac,  adulterioac,  pail- 
lardiçâc,  hiltzecac,  (H.  a  mis  liiltzecacj  22, ..  ., 
gaitzERRAiTEA,  Car  du  dedans,  c'est  à  dire,  du 
cœur  des  hommes,  sortent  mauuaises  pensées, 
adultères,  paillardises,  meurtres,...  22..., 
blasme,...  (St-Matt.  :  XV,  v,  19,  hiltzecac,..., 
gaitzerraitecâc.) 

7.  23.  Gaichtaqueria  hauc  guciac  barnetic  ilkiten 
dirade^  Tous  ces  maux  sortent  du  dedans, 

8,  3.  ... .,  flacaturejs  dirade  bidean:  ecen  horie- 
taric  batzu  vrrundanic  ethorri  içaii  dirade.  ..., 
ils  defaudront  en  chemin  :  car  aucuns  d'eux 
sont  venus  de  loin.  (En  Anglais  far-come.) 

10.  8.  Eta  biac  içanen  dirade  haraguibat.  Et  deux 

seront  comme  vne  chair:  (L.  ivdiàmt  les  deux .) 

10.  27...  :  ecen  gauça  guciac  possible  dirade  lain- 


—  267  — 

coa  ^  baithan.  . . .  :  car  toutes    choses  sont  pos- 
sibles quant  à  Dieu. 
10.31.  ...,  içANEN  dirade  azquen*:  eta  azquenac 
lehen. 

...    seront  derniers:  &  les  derniers  seront 
premiers. 
10.  35.   Orduan   ethorten    dirade    harengana  ... 

semeac, 
Adonc  ...    Fils...  viennent  à  luy, 

10.  46.  Orduan  ethorten  û?//'arfe  lericora  :  ...  Apres 
ils  arriuerent  en  lericho  : 

11.  15.  Eta  ETHORTEN  dirade  lerusalemera  :  ... 
Ils  vindrent  donc  en  lerusalem  : 

11.  27,  Orduan  ethorten  <ifV-«c?e  berriz  lerusale- 
mera :  Puis  derechef  ils  vindrent  en  lerusa- 
lem: 

12.  6.  ...,  AHALQUE  içanen  dirade  ene  semearen. 
...,  Ils  auront  reuerence  à  mon  fils. 

12.25.  ...  :   baina   içanen  dirade  ceruetaco    Ain- 

gueruàcbeçala. 

...  :  mais  on  sera  comme  les    Anges  qui 

sont  es  cieux . 
'13.  6.  Ecen  anhitz  ethorriren  dirade  ene  icenean, 

Car  plusieurs  viendront  en  mon  nom, 

13.  7.  ...  :  ecen  gaiiça  hauc  eguin  behar  dirade: 
(H.  a  misbehardirade)  . . .,  car  il  faut  que  ces 
choses  se  facent  : 


1.  L.  traduit  «  dans  Dieu,  chez  Dieu  ». 

2.  Dans  J.  Ochoa  de  Arin  on  trouve  ahquen,  e.  g.  pp.  50, 
129. 


—  268  — 

13.  8.  ...  :  eta  içanen  dirade  lur  ikaratzeag  lekytic 
lekura,  eta  gosseteac  eta  nahastecamenduac  : 
dolorén  hatseac,  hauc.  ...,  &  y  aura  tremble- 
ment de  terre  de  lieu  en  lieu,  «S:  famine,  et 
troubles  :  ces  choses  seront  commencement  de 
douleurs.  (L.  traduit  les  tremblements  et  les 
commencements .) 

13.  12.  ...:  eta  ALTCHATUiiEN  <:/i/«û?e  haourrac  aita 
amén  contra,  ...  :  &  s'esleuerout  les  enfans  à 
rencontre  des   pères  »&    mères, 

13.  19.  Ecen  içanen  dirade  egun  hec  halaco  tri- 
bulatione,  (On  remarque  hec.^  l'accusatif,  au  lieu 
du  locatif  hetan.  Voyez  16,  2  &  H.  egunean  = 
au  jour).  Car  en  ces  iours-la  il  y  aura  telle  tri- 
bulation 

13.  22.   Ecen    altchaturen  dirade   Christ  falsuac, 

Car  faux  christs  [sic].,  ...  se  leueront, 

13.  25.  Eta  ceruco  içarrac  ergriren  dirade,  eta.  . . 
verthuteac  ikaraturen  dirade.  Et  les  estoilles 
du  ciel  cherront,  &  les  vertus  .  .  .  branleront. 

13.  31,  Ceruâ  eta  lurra  iraganen  dirade,  Le  ciel 
et  la  terre  passeront, 

14.  27.  ...,  eta  harreyatlren  dirade  ardiac.  ..., 
&  les  brebis  seront  esparses. 

14.  32.  Guero  ethorten  dirade...  Apres  il  {sic) 
viennent 

16.  2.  Eta  guciz  goiz  astearen  lehen  egunean 
ethorten  dirade  monumentera,  (H.  a  mis  ethor 
à  la  fin  de  la  ligne.)  Parquoy  fort  matin  le  pre- 
mier iour  de  la  sepmaine  elles  vindrent  au  mo- 
nument. 


—  269  — 

16.  17.  ...,  lengoage   berriz*  minçaturen  <i^>««Q?e: 
.  . .  :  Ils  parleront  nouueaux  langages. 
16.   18.  .  .  . ,  eta  sendaturen  dirade.   .  .  . ,  &  seront 
guaris. 
DIRADELA,  4.  I.    q.  dirade  avec  la  conjonctif. 

6.  11.  .  .  .,  emequiago  tractatuac  içanen  diradela 
Sodomacoeta  Gomorrhacoac  iiidicioco  egunean, 
ecen  ez  hiri  hiira  :  ...,  que  ceiixde  Sodome  &  de 
(joinorrhe  seront  pins  doucement  traittez  au 
iour  du  iugement  que  ceste  ville  —  la. 

9.  1.  ...,e(;en  baniRADELA  ...  batzu,...  qu'il  en  y 
a  aucuns 

12.  26.  ...,  ecen  resuscitatzen  diradela,  ...,  qu'ils 
ressuscitent, 

13.  29.  ..  .  gauça  hauc  eguiten  diradela,  .  .  .  que 
ces  choses  se  feront,  (L.  traduit  .ce  font,) 

DIRADEN.  10.  I.  q,  dirade    avec  n  rel  :  &  conj  : 

3  Sommaire    35    Christeii  eguiazco  ahaideac*  cein 
niRADÉs  {fi.  conj  :)  34  Qui  sont  vrais  parens  de  Christ. 
4.  31.   ...  lurrean  diraden  haci   gucietaco  chipie- 
na  :  {n  rel  :) 

...,  est  le  plus  petit  de  toutes  les  semences  (jui 
sont  en  la  terre. 
7  Sommaire  21  BUiotzetic  diraden  gaiiçdc  {n   rel:) 
21  Ce  qui  procède  du  cœur . 

7.  15.  ...  :  baina  harenganic  ilkiten  diraden  gsniçàc 
{n.  rel  :) 

1.  L'instrumental  indéterminé  bcrr(\~  est  à  la  fois  singulier  = 
p(ir  noiiccau  et  pluriel  =par  noiwraiw.  Voyez  ll,27oùilsignifie 
(le  nniwoaii,  agn'ni. 

2.  De  aha  =  tribu.  Cf.  ahacoa  Actes  7,  14. 

18 


—  270  — 

...  :  mais  les  chosee  qui  sortent  de  liiy, 
V    8.  33.  .  .  .  laincoaren  diràden   gauçâc,  (//  rel:)  ,  .  . 

les  choses  qui  sont  de  Dieu, 
10.  23.   ...,  O   cein    nequez    onhassundunac   (sic) 

laincoaren  resumân  sarthuren  diraden  ! 
[il  conj  :)  ...,   O  qu'à  grande  difliculté  ceux  qui  ont 

des  richesses  entreront  au    royaume   de   Dieu  ! 

(H.  a  omis  une   virgule    après   onhassundunac, 

qui  est  d'ailleurs  une  faute  pour  ontassundunac  ; 

et  la  à  la  fin  de  la  ligne.) 
13.  1 cer  harriac  eta  cer    edificioac   diraden 

hauc.   [n    conj:).   quelles  pierres  &  quels  basti- 

mens  (H.   a   omis  diraden  hauc.)  parce  que  le 

Français  n'a  pas  l'équivalent  de  ces  mots. 
13.  4.    ...  noiz    gauça   horiac    içanen  diraden^  [n 

conj  :)  .  . .  quand  seront  ces  choses^ 
13.  25.    ...,  eta  ceruëtan  diraden  verthuteac  (H.  a 

mis  diraden  avec  n  nel:)    ...,  &   les  vertus  qui 

sont  es  ci  eux 
13.  32...,  ez  eta  ceruiin   diraden  Aingueruëc-ere, 

ez    eta    Semeac  —  ère,  Aitac  berac   baicen.  (//. 

rel:)...,  non  pas    mesme  les   Anges   des  cieux^ 

n'aussi  le   Fils  :  mais  le    Père.  (L.   traduit  qui 

sont  au  ciel,  et  sinon  le  Père  seul,  \oyez  ditzaque, 

2,  7.) 
DIRADENAG.  3.  I.q.  dirade  avec  n  rel  :  décl:  nom: 

passif  &  accus  :  [nac=z  ceux,  celles  qui.) 
8.  83.  ...,    baina  guiçonén   diradenac.  (H.  a  mis 

diradenac.)  . . . ,  mais  celles  qui  sont  des  hommes. 
10.    24.    ...   abrastassunetan   fida  diradenac,... 

à  ceux  qui  se  fient  es  richesses, 


—  271  — 

10.  31.  Baina   anliitz  lehen    diradenac,  (H,  a  mis 
diradenac)  Mais  plusieurs  qui  sont  premiers, 
DIRADENEAN.  2.    I.    (\.  dirade    aux:  avec/?    rel: 

•     décl  :  temporel  iieaii  ^=quand .- 

7.4.  Eta  merkatutic  itzultzen  diradenean,  (H.  a 
mis  itzultzen,  diradenean,)  Et  relournans  du 
marché, 

13.  4.  ...  gauça  horiac  guciac  complituren  dira- 
denean .  ...  quand  toutes  ces  choses  seront  ac- 
complies. 
DIRADENÉC.  3.  l.q.  dirade,  \erhe  subst:avec« 
rel:  decl  :  nom:  actif  ou  transitif,  {nec  =  ceux 
qui.) 

2.  17.  ,..,  Osso  DIRADENÉC...:  baina  eri  diradenéc 
Ceux  qui  ont  santé,  ...  :  mais  ceux  qui  ont  mal: 

10.  42...,  eta  hayén  artean  handi  diradenéc 

...  :    &  les  grans...    (L.  traduit  «    ceux  qui  sont 
grands  parmi  eux  .  »)  ' 
DIRADENETARIC.  2.  I.  q.  dirade,  aux  :  avec  u  rel  : 

nom:    décl  :  pi  :    partitif   déterminé  [uetaric  =  de 

ceux  qui.) 

7.  18...,  ecen  campotic  guiçona  baithan  sart/en 
diradeueta  rie  deiisec,  ...  que  tout  ce  qui  est  de 
dehors  entrant  en  Thomme,  (On  voit  ailleurs 
que  le. sens  propre  de  deus  n'est  pas  tout,  mais 
aucune  chose,  quelque  chose,  rien.) 

12.  38...  Scriba  arropa  lucequin  ebili   nahi  dira- 
denetaric,   ...    des    Scribes,    qui     volontiers  se 
pourmenent  en  robbes  longues, 
DIRADENEY.  1.   1.   q.  dirade,  verbe   subst:  avec // 


—  272  — 

rel  :  nom;  décl  :  datif  déterminé  [ney  =  a   ceux 

qui) 
4.  11...  :  baina  lekorean  diradeney 
...  :  mais  à  ceux-là  qui  sont  dehors, 
DIRADENOTARIG.  1.    I.    q.    diradenetaric,    verbe 
subst:  mais  avec  le  démonstratif  au  lieu  du  simple 
article,  [notarié  :=  de  ceux  qui.) 
9.  1.  .  ,  hemen  présent  diradeisotaric  batzu, 
...  aucuns  de  ceux  qui  sont  ici  presens 
DIRATENÉC.  1.  Ind:  fut:  pi  :  3"  verbe  subst:  avec 
n  rel  :  décl  :  nom  :act:  (néc=ceux  qui) 
13.   14...  orduan  fudean  diratenéc, 
..  .)  alors  que  ('eux  qui  seront  en  ludee, 
DIRATENEAN.    2.    Ind:    fut:    pi  :  3''  avec    n    rel  : 
décl:  temporel,   auxiliaire.  {/iean=  quand) . 
12.  23.    Resurrectionean   bada,  resuscitatu  dira- 

tenean 
.  .  .   En    la   résurrection    donc,    quand    ils    seront 

ressuscitez, 
12.    25.    Ecen   hilelaric    resuscitatu    diratenean, 

Car  quand  ils  seront  ressuscitez  des  morts, 
DIRAVGVG.  1.  Ind:  prés:    s.    3«   r.    s.   r.    i.  pi: 
1^  pers  :  adr:  masc  :  aux:  act  : 
12.  19.  Magistruâ,  Moysesec  scribatu  vkan  dirau- 

cuc,  Maistre,  Moyse  nous  a  escrit, 
DIRAVEAT.    1.  Ind:  prés:  s.  1' r.  s.   r.  i .  pi  :  adr  : 
masc  :  v.  i.  a.  erran. 

9.  18  ...  :  eta  erran  diraueat  hire  discipuluey 
...  :  &  i'ay  requis  tes  disciples 
DIROÇVE.  1.  Pot:- prés:  pi:  2^  r.  s.  aux  :  act  :  {r//<r// 

pléonastique) 


—  273  — 

10.  38.  ...  :  EDAN  AHAL  cHroçue . .  .  copâ, 
...  :  pouiiez   vous  boire  la  coupe  ...  ? 

DIRUDITELA.  1.  Ind:  prés:  pi:  S"  :  avec  la  par- 
ticipial qualifiant  Taccus  :  v.  i.  passif,  irudi.  In- 
chauspe  dit  qu'il  est  «  pour  diruditelaric .  En 
Soûle  on  ne  supprime  jamais  la  terminaison  rie  » . 
8.  24...  arboreac   diruditela  ...    ressemblables  à 

des  arbres  \ 
DITEGEN.  3.  Subj  :prés  :  pi  :  3«  aux: 

7.    27...    haourrac   ressasia    diteceii'.  ...,  Laisse 

premièrement  les  enfansestre  rassasiez  : 
10.24...:   laincoaren    resumân  sar    ditecen.  ..., 

d'entrer  au  royaume  de  Dieu  ! 

11.  49...    coMPLi  ditecen  Scripturàc.    ...  que  les 
Escritures  soyent  accomplies. 

DITENO.  1.  I.  q.  diteri^=  ditecen  avec  n  rel  :  décl  : 
àvxvdiûï  {no  =^ jusqu'au  temps  quand.) 

13.  30. .  .,  gauça  hauc  guciac  EGvm diteno. 

. .  .  tant  que  touiesces  choses  soyent  faites. 
baDlTEZ.  1.  Hypothétique  pi  :  3®  aux  : 

1 .  Arboreac  n'est  pas  l'accusatif  de  diruditela.  Si  ce  vei-be  était 
actif  il  exigerait  un  accusatif  au  singulier.  Dans  l'édition  du  beau 
livre  de  S.  Mendiburu  de  1747  que  j'ai  publiée  à  Saint-Sébas- 
tien (Jcsusen  Bihotzaren  Dccocioa,  526  exemplaires,  11  mai 
1900;  cette  édition  m'a  coûté  905 /)cse/!as).  On  trouve  p.  26  «  de- 
botoac  diruditen  »  =  «  qui  semblent  être  »,  ou  «  que  l'on  figura 
être,  dévots  ».  Là  il  pourrait  être  pour  irudi  diraden  =  qui  sont 
conçus,  ou  imaginés,  ou  considérés.  De  même  «  diruditenac  »  p.  6 
et  32  (bis);  semble  être  passif:  tandis  que  p.  340  «  andiena  diru- 
ditenac »  est  actif,  si  andiena  n'est  pas  adverbial  =/e  plus. 
Irudi  se  trouve  souvent  avec  le  verbe  actif,  e.  g.  Apoc.  I,  13  : 
Semea  irudi  çuembat=  un  (personnage)  semblable  au  Fils. 


-  274  — 

14.  29 Baldin  guciac  scandalizâ  haditez-ere, 

ni  ez  ordea. 

...,   Encores  que  tous  fussent  scandalisez,  si   ne' 
le  seray-ie  point. 
DITV.  15,  Ind  :  prés:  s.  3"  r,  pi:   aux:  aet  : 

2.  22....  :  ezpere  mahatsarno  *  berriac  lehertzen' 
ditu  çahaguiac 

...  :  autrement  le  vin  nouueau  rompt  les  vais- 
seaux, 

4.  32.  ...  :  etaadar*  handiac  eguiten  ditu...:  &i.  fait 
grans  rameaux, 

5.  30.  ...,  Xorc  HUNQUi  dilu  ene  abillamenduac  ? 
...  :  Quia  touché  mes vestemens  ? 

5.  43.  Eta  haffiutz  manatu  vk an  ditu.  Et  leur  com- 
manda  fort 

7.  37.  ...,  Vngui  gauça  guciac  eguin  d'tV?/ :  ...,eta 
mutuac  MiNÇA  eraciten"  ditu....,  Il  atout  bien 
fait:  il  fait  que  .  ..,  &  les  muets  parlent. 

9.  12.  . ..,  Segur  Eliasec  lehen  ethorririg  bere  sta- 
TURACO  dilu  gauça  guciac:  ...,  De  vray  Elie 
estant     venu    premièrement    restablira    toutes 

1.  Si  ne  rappelle  le  Basque  e^pait  dans  les  formes  telles  que  e-.-- 
pait^ditu^te  (6,11);  cspanaù(],l)  ;  c^paita  (^,  ii,  46,  <&:  148)  ; 
e^rpait^uen{4,  5  &  6);  où  l'affirmatif  paît  rend  plus  négatif  le  pré- 
fixe c^. 

2.  Cf  :  maats  ardoa  =  cl  cino,  licor  de  rina  à  la  p.  45  du 
Catéchisme  Gui puzcoan  He  J.OchoadeArin  (San  Sébastian,  1713). 

3.  Don  J.  M.  Bernaola  dit  que  larrain,  lieu  où  l'on  bat  du 
blé,  vient  àelc'her-eyiii=faire  rompre,  inake  to  break  orhurst. 

4.  yir/r^/- signifie  aussi  corne.  Cf.  \es>hois  d'un  cerf . 

5.  On  trouve  souvent  chez  P.  d'Urte  (  La  Genèse  ci  l'Exode), 
e/'a</i(en  en  sens  d'eraciten.  Est-ce  une  faute  ? 


—  275  — 

choses  :  (L.  traduit  les  mettra  à  leur  status,  will 
{ré)-in-state  them.) 
tO.  7.  Hunegatic  utziren  ditu  guiçonac  bere  aita 
eta  ama,  Pour   ceste  cause    l'homme   délaissera 
son  père  &  sa  mère, 

12.  9.  ...,  eta  deseguinen  ditu  laborarisrc,  ...,  &: 
exterminera  ces  laboureurs, 

13.  20.  .  . .,  LA.BURTU  ditu  egun  hec.  ...,  il  a  abbregé 
ces  iours. 

13.  27.  Eta  orduan  igorriren  ditu  bere  Aingue- 
ruiic,  eta  bilduren  ditu  bere  elegituak  laur^ 
haicetaric,  Lequel  alors  enuoyera  ses  Anges,  & 
assemblera  ses  eleus  de  tous  les  costez  des 
quatres vents,  (L,  ne  rend  pas  les  mots  en  ita- 
lique.) 

14.  33.  Eta  HARTZEN  ditu  Pierris  eta  lacques  eta 
loannes  berequin,  Et  prend  avec  soy  Pierre,  & 
laques,  &  lean: 

15.  31.  .  .  ,,  Berceac  empar.vtu*  ditu,  ...,  il  a  sauué 
les  autres, 

16.  Sommaire  15  Apostoluac  ditu  predicatzera  eta 

BATHEYATZERA      IGORTEN .      15      IcSQUels     il    eilUOye 

prescker  çf-  baptizer. 
DITVALA.  3.  1.  q.  dituc,  verbe  poss.:  avec  a  euph: 
|)our  c  devant  la  participial. 
9.43.   ...,  ecen  ez  bi  escuac  dituala(H.  a  misdià 
la  fin  d'une  ligne  et  :  après  gehennara  vv.  45  & 

1 .  J.  Ochoa  de  Aiin,  p.  135,  a  lab  pour  laiir, ou  Uia.  Ce  mot  ex- 
pJique-t-il  labr  =  four,  oven  f 

2.  En  vieux  français  emparer  signifie /or^//tVr,  défendre. 


—  276  — 

47)...,  qu'anoir  deux^  mains, 
9.45.   ...,  ecen  ez  bi  oinac  dituala.   ..._,  qii'auoir 

deiix^  pieds, 
9.  47.    ...,   ecen  ez  bi  beguiac  dituala,  qu'auoir 

deux'  yeux, 
DITVANAG.  1.  I.  q.  dituc,  verbe  poss:  avecaeuph: 
pour  c  devant /i  rel  :  pi:  ace:  décl:acc:  pi:   {iiac 
=  ceux  que)  10.   21.    ...,  dituanac...    tout  ce  que 
tu  as,  (Cf:  daiiak,   diradenak  =  tous.  The  things 
whicli  a  mail  lias  can  mean  ail  thaï  hehas.  L.  tra- 
duit   ceux    q  ic   lu   as.  En   Guipuzcoan    dituanac 
signifie  ceux  quil  a  et  celui  ou  celle  qui  les  a). 
DITVC.  1.  Ind  :  prés:  s.  2"  r.  pi:  adr  :  masc  :  aux: 
act:  =  tu  o  Jioinine^  les  as . 
11.  28.     ...  Cer  aulhoritatez  gauça  horiaç  eguiten 

dituc?   ...,    De   quelle     authorité     fais-tu     ces 

choses  ? 
DLTVG.  s.  Ind  :  prés:  pi  :  3^ adr:  masc  :  Verbe  sub- 
stantif ==^  ils  sont,  o  homme. 
9.  23.    ..  .,  gauça  guciac  dituc  possible,..,  toutes 

choses  sont  possibles  au  croyant. 
14.  36.   .  .  .,  gauça guçiac (5^6")  possible  dituc  hire*  : 

...,  toutes  choses  te  sont  possibles, 
DITVÇVE.  4.   Ind;  prés:  pi:  2«  r:  pi  :  Verbe  poss  : 
&  aux  :  act  : 
4.   13...?  ela  nolatan  comparatione  guciac  eçagu- 


1.  L,.  traduit  les  deux. 

2.  Hire  —  iibl  est  le  génitif  datival,  équivalent  de  hirot^at. 
Voyez  Daenaren  (9,  23)  pour  daetiareiitsat\  Duc  (9,  43  &  45  & 
47),  DlLrcu/un  (9,  5). 


—  277  — 

TUREN  dituçueJ  (Hautin  a  mis  eçagutiren)  ,..? 
&  comment  cognoistrez-vous  toutes  les  simili- 
tudes? 

6.  38...,    Cembat    ogui   dituçue  ?  ...,  Combien  ' 
auez-vous  de  pains  ? 

8.  5...,  Cembat  ogui  dituçue?  ...,  Combien  auez- 
vous  de  pains  ? 

14.  7.  Ecen  paubreac  bethiere  ukanen  dituçue  çue- 
quin,  Car  vous  auez  tousiours  les  poures  auec 
vous  : 
DITVÇVELARIC,  2.   I.  q.  dituçue  verbe  poss  :  avec 

la  participial  partitif. 

8.    18.  Beguiac  dituçuelaiuc,    ...   ?  eta    beharriac 
DiTUÇUELARic,  Avans  des  yeux,  ...  ?  &  ayans  des 
aureilles,  (L.   ne  traduit  pas  des  mais  les.) 
DITVDAN.  2.  Ind.  prés:   s.  1«  r.  pi:  avec  <:/«  euph  : 

pour  t  devant  n  conj  :  aux  :  act  : 

11.  29. . ,  cer  authoritatez  gauça  hauc  eguiten  ditu- 
daii.  ...  de  quelle  authorité  ie  fay  ces  choses: 

11.  33.  .  .  cer  authoritatez  gauca  hauc  eguiten  ditu- 
dan.    ...  de  quelle  authorité  ie  fay  ces  choses. 
DITVELA.  1.  I.  q.  ditu  aux:  act  :  avec  e  euph:  de- 
vant/«  participial. 

7.  19...,  CHAHUTZEN  ditucla  vianda  guciac,  pur- 
geant toutes  les  viandes. 

DITVEN.  3.   1.  q.  ditu  aux:  act:  avec  e  euph  :  &  ti 
rel  :  accus  :  pluriel. 

1.  44.  .  .  Moysesec   manatu   dituen    gauçàc  . .  .   les 
choses  que  Moyse  a  commandées. 

1.  Cciubal  littéialemeul  un  naei:^ 


—  278  — 

13.  19.  ...  laincoac  CREATU  <^////ie/?  gaucén  CREATZE 
HATSETic  oraindrano,  .  .  .  depuis  le  commence- 
ment de  la  création  des  choses  que  Dieu  a 
créées, 

13.  20. .  .  :  baina  elegitu  dituen  elegituacgatic, 
...  :  mais  pour  les  eleus  qu'il  a  eleus, 
DlTVgVEIZTEN.  1.  In*d  :  fut:  pi:  3"  r.  pi:  aux: 
act:  Il  rel  :  accus:  pi:  ==  par  lesquels.  M.  in- 
chauspe  l'appelle  «  synonyme  et  variante  de 
dituzketeii  » 

3.  28. . .,  eta  blasphematu  dituqueizten  blasphemio 
guciac  :  .  .  ,,  &  toutes  sortes  de  blasphèmes  par 
lesquels  ils  auront  blasphémé. 
DITVZTE.  5.  Ind  :  prés  :  pi  :  3"  r.  pi  :  aux  :  act  : 

13.  12.  .  .  :  ela  hil  eraciren  dituzté  .  .  . ,  &  les  fe- 
ront mettre  à  mort. 

13,  22.  .  .  :  eta  eguinen  dituzte  signoac  eta  miracu- 
luac  SEDUC1TZECO,  .  .  .,  ELEGiTUEN-crc.  ...,  &  fe- 
ront des  signes  &  miracles  pour  deceuoir,  voire 
les  eleus, 

16.  17.  .  .  :  Ene  icenean  deabruac  campora  egot/-i- 
REN  dituzté^  (H.  a  omis  le  :  devant  Ene).  .  .  :  Par 
mon  nom,  ils  ietteront  hors  les  diables. 

16.  18...:  Sugueac  kenduren  dituzté'....  erien' 
gainean'escuac  EÇARRiREN  dituzté.  Ils  chasseront 


1.  J.  Ochoa  de  Arin  (1713)  a  écrit  heii  :=  cnferino  (qu'il  traduit 
p.  100  par  gajo  =  (jaisho)  p.  73,74  (du  latin /e/'«-re?) 

2.  Pour  les  prépositions  qui  se  prononcent  après  le  mot  qu'ils 
qualifient  on  songe  à  l'Anglais  «  God  before  »  «  the  Angeliehosts 
ainonii  »;o-j  ôewv  aT£p=  non  sine  diis(Pindare, P.,5, 102,  presque 


—  279  — 

les   serpens.  .  .  :  Ils   mettront  les  mains  sur  les 

malades, 
DITVZTELA.  3.  I.  q.  dltuzte  avec  /«  participial. 
7.   3.  . .,  aitzinecoen  ordenançâc  eduquiten  dituz- 

tela.  ...,  retenans  les  ordonnances  des  Anciens. 
7.  7.  . .,  IRA.CASTEN  dituztela  doctrinatzat  giiiçonén 

manamenduac.    . .  .,  enseignans /?om/'  doctrines 

les  commandemens  des  hommes, 
12.  40.  iRESTEN  dituztela  ema  2L\\\[HY^\\Jïén  etcheac, 

are   luçaqui  othoitz  eguin  irudiz  :   .  .  .  Lesquels 

deuorent  les  maisons  des  vefues,  voire  en  faisant 

semblant  de  prier  longuement: 
DITZAGUN.  1.  Impér:pl:  l^r.  pi:  aux  :  act  : 
9.  5.  .  .  :  EGUiN  ditzagiin  bada  hirur  tabernacle,  bat 

hire,  eta  bat  Moysesen,   eta  bat    Eliasen' 

faisons-y  donc  trois  tabernacles,  vn  pour  toy,  & 

vn  pour  Moyse,  &  vn  pour  Elie. 
DlTZàN.  2.    Subj  :  prés:    s.  2"  r.   pi  :   adr  :   masc  : 
aux  :  act: 
5.  23.  ...,  eta  Eç\n  ditzdn  escuac  haren  gainean, 

.  .  .,  &que  tu  mettes  les  mains  sur  elle, 
11.28,   ...  gauça  horiac  eguin  ditzdti?  ...  (|ue  tu 

faces  ces  choses  '.* 
DitZAQVE.  2.  Pot  :    prés  :  s.  3«  r.   pi  :  aux  :  act  : 
2.   7.    .,.  ?    Norc    bekatuac    harka  ahal   ditznque 


le  Basque   atcra  =  au  dehors);  «  visceribus  super  accumbens  » 
Virgile, et /)«s.s7'm  cuin  avec  les  pronoms. 

1.  Remarquez  /lirc,  Moi/sescn,  Eliasea,  comme  exemples  du 
génitif  datival,  et  comparez  hirc  sous  duc  (9;  43,  45,  47)  &  dituc 
(14,  3()) . 


~  280  — 

ïaincoac   berac  '  baicen  ?    ...  ?   qui    est-ce    qui 
peut  remettre  les  péchez,  sinon  Dieu  seul  ? 

3.  27.  Ecin'  nehorc  borthitz  baten  ostillamenduac, 

haren    etchera    sarthuric,  pilla  ahal  diizaque^ 

Nul  ne  peut  entrer  en  la  maisoncrvn  iort  homme, 

&  piller  son  mesnage, 

DITZAQVEDANO.    1.  Pot:  fut:  s.    iM*.  pi  :  avec  da 

euph:  pour  Z  devant  n  rel  :  déd:  duratif;  aux:  act: 

(«o  =  jusqu'au  temps  que.) 

12.  36...,    EÇAR    ditzaquedano    hire  etsayac   hire 
oinén  scabella.    (pour  scabellatzat .)  .  .  .,  iusqu'à 
tant  que  i'aye   mis  tes  ennemis   marche-pied  de 
tes  pieds. 
baDITZAT.  2,    Hypothétiques,  l^r.  pi:  aux  :  act: 

5.  28...,  Baldin  haren  abillamenduac  hunqui  hadit- 

zat  ber% 
.,.,  Si  tant  seulement  ie  touche  ses  vestemens, 

8.  3.  Eta  baldin  igor  hdidilzat  baruric   cein    bere 
etcherat,  Et  si  le  les  renuoye  à  ieun  en  leur  mai- 
son, [ceiii  =  qui  explique-t-il    sendas    en    cas- 
tillan ?) 
baDOA.   i.  Ind:  prés:  s.  3*'v.  i.  passif to««. 

14.  21.  Segur  guiçonaren  Semea  baooA,  Et  certes 
le  l'ils  de  l'homme  s'en  va 


1.  Bcrac=  seul,  ht/  Ininself.  Voyez  diradcn,  13,  82. 

2.  Ecin  makes  the  sentence  négative,  and  renders  ahal  more 
emphatic.  But  ahal  with  ditxake  is  already  pleonastic.  Some 
Greek  manuscripts  hâve  'AXX'  =  But,  at  the  head  of  tbis  verse. 

3.  Bcr='tant  scalcincnt  est  la  racine  de  bcra  =  seul,  lui- 
nièinCj  et  de  bcrc  =  son.  sien.  Cf.  halaber,  etc. 


—  281  — 

DRAVAT .  2.  Ind  :  prés  :  s .  1*  r .  s .  r .  i .  s .  2®  pers  : 
adr  :  masc  :  aux  :  act  : 
5 .  23    ...  :  othoitz    eguiten    drauat,  (L'original    a 

eguiten  drauat,)  ...  :  le  te  prie 
14.  30  . . . ,  Eguiaz  erraiten  drauat.  .  . ,  le  te  di  en 
vérité 
DRAVC.  1.    Ind.  prés:  s.  3«  r.   s.  r.  i.  s.  2*  pers  : 
adr:  masc  :  aux  :  act  : 

11.  28...  ?  eta  norc   eman  draiic  authoritate  hori 
...?...?&  qui  est  celuy  qui  t'a  donné   ceste  au- 

thorité..  .  ? 
DRAVCA.  2.  Ind  :  prés:  s.  3®  r.  s.  r.  i.  s.  aux  :  act: 
2.  21..  .,ezpere  haren  compligarri  berri  harc  ede- 
QuiTEN  drauca  çarrari,  ...  :  autrement  le  drap 
neuf  qui  a  esté  mis  pour  remplage,  emporte  du 
viei  drap\ 

12.  36  . ..,  Erran  drauca  launac  ene  launari, 

...,  Le    Seigneur  a,   (l'original  porte  à)  dit    à  mon 
Seigneur, 
DRAVCADANA.  1.  (Dérivé  de  draucal)\\^à.\  prés: 
s.  1*^  r.  s.  r.  i.  s.  avec  da  euph:  pour  /  avant  n 
rel  :  datif  décl  :  nom  :  sing  :  intr:  [iia  =z  celui  à 
qui).  6.  16...  loannes  nie  burua  edequi  drauca- 
dana,  ...  ce  lean  que  i'ay  décapité  : 
DRAVCATE.  2.  Ind  :  prés:  pi  :  3«  r.  s.  r.  i.  s.  aux: 
act:  Dans  mon  ouvrage    sur  les   Epîtres  de  saint 
Paul  à  saint  Timothée  j'ai  inclus  par  insouciance 
eztraucate,   forme  négative   de  ce  mot,  parmi  les 
formes  masculines. 

1.  L  ne  traduit  pas  drap.  Godefroye  ignore   remplage;  mais 
donne  renipliage. 


—  282  — 

7.  32.  Or diian  PRESENT xT2V.^  draucate  gor...  bat..., 
eta    othoitz     eguiten.    Lors    on  luy  amené   vn 
sourd  ...  :  et  le  prie-on 
10.  34  ...,  etathu  egviise^  cl raucale,  . .  .,  &  crache- 
ront 
DRAVCATELA.  1.  I.  q.  préc  :  avec  la  conjonctif. 
9.  13...,  EGuiN  draucatela,  hawirgule  devant  eguin 
paraît  superflue  . ,  . ,  (et  luy  ont  fait  tout 
DRAVCV.   1.  Ind  :  prés  :  s.  3«  r.  s.  r.  i.  pi  :  l'*  pers  : 
aux  :  act  : 

16.  3...,   horc    ALD.^.RATUREN  dniucu   harria  monu- 
ment borthatic? 
.  .  . ,  Qui  nous  roulera  la  pierre  arrière  de  l'huis  du 
monument  ? 
DRAVE .  2.  Ind  :  prés  :  s.  3"  r.  s.  r.  i.  pi  :  aux  :  act  : 
2. 19."  Eta  ERHAiTKN  draue  lesusec:  lesus  leur  dit, 
7.  37...:  gorrey  '  ençun  eracitkn  draue,   ...:  il  fait 
que  les  sourds  oyent, 
DRAVEGV.  1.  Ind  :  prés  :  pi:   1"  r.  s.  r.  i.  pi  :  aux  : 
act  : 

6.  37.  .  .,  eta   emanen  drauegu  iatera  ?...,&  leur 
donnerions  à  manger?  (Peut-être  pour   donne- 
rons) 
DRAVET.  1.  l;id:  prés:   s.   1'  r.  s.    r.    i.  pi:  aux: 
act  : 

13.   37.  . .,  guciey   erraiten  drauet,  .  .  .,  iu  le  di  à 
tous, 
DRAVNAT.   1.   Ind:  prés  :  s.  1"  r.  s.  r.  i.s.2«pers: 
adr  :  fém  :  aux  :  act: 

1.  From  ,90//0A' =  hard.  Cf.  hard  ofhearing.  See  Drauçue  10,  5. 


—  283  — 

6.  22.  .  .,  eta  emanen  draunat.  .  .  .,  &ie  le  te  don- 

neray. 
6.  23,   ...    gucia    emanen    draunat^   neure  resii- 

maren  erdirano.    ...,  ie  te    le    donneray,  voire 

iusqu'à  la  moitié  de  mon  royaume. 

(A  suivre) . 


BIBLIOGRAPHIE 


The  Tiruvdçagam,  or  'sacred  ultorances'  of  the  tamil 
poet,  sailli  and  sage  Mânikkavâçagar;  the  tamil  text 
with  english  translation,  introduction  and  notes,  by 
the  rev.  G.-U.  Pope...  Oxford,  Clarendon  press,  1900, 
gr.  in-8'\  xcix-354-84  p. 

Mânikkavâçagar  (forme  tamouledeMânikyavàtchaka) 
était  un  grand  saint  civaïste  dont  la  légende,  résumée 
par  M.  Pope,  est  pleine  de  récits  merveilleux;  au 
point  de  vue  historique,  il  aurait  été  le  premier 
ministre  du  soixante-troisième  roi  du  Pàndi,  Arimard- 
dana;  ce  fut  sous  le  onzième  successeur  de  ce  prince 
que  le  Pândi  fut  conquis,  vers  l'an  1064  de  noire  ère, 
par  les  Tchôlas.  Mânikyavâtchaka  aurait  donc  vécu 
vers  le  huitième  siècle  de  J.-C.  On  lui  attribue  divers 
ouvrages  et  notamment  un  recueil  d'hymnes  qui  se 
chantent  encore  journellement  dans  les  temples  du 
sud  de  rinde  :  c'est  précisément  le  Tiruvdnagam  (skr. 
Çrîvâtchaka)  dont  M.  Pope  vient  de  nous  donner  une 
édition  définitive  accompagnée  d'une  admirable  tra- 
duction. Malheureusement,  cette  traduction,  qui  est 
aussi  exacte  que  possible,  est  en  vers;  elle  cherche  à 
exprimer  la  forme  de  l'original,  mais  elle  n'est  pas 


—  285  — 

aussi  parfaite  qu'elle  serait,  si  elle  avait  été  faite  en 
simple  prose. 

M.  Pope  a  laissé  deux  passages  sans  traduction.  On 
ne  s'en  étonne  pas,  quand  on  connaît  la  suscepti- 
bilité particulière  aux  Anglais;  mais  les  Français, 
moins  faciles  à  effaroucher,  aimeront  peut-être  à 
trouver  ci-après  la  traduction  de  ces  deux  passages 
dont  le  premier,  fort  curieux,  est  relatif  à  la  vie  fœtale 
de  l'homme  : 

P.  31  :  «  Au  milieu  de  ce  monde  aux  vastes  mers, 
j'ai  vécu  dans  l'activité,  passant  par  des  matrices 
innombrables,  depuis  celle  de  l'éléphant  jusqu'.-i  celle 
de  la  fourmi;  prenant  enfin  la  forme  humaine  dans  la 
matrice  de  ma  mère,  j'ai  vécu  dans  ce  nid,  embryon 
parfait;  une  lune,  j'ai  vécu  double  comme  la  Tcrmi- 
nalia  hellen'ca  et  son  fruit;  deux  lunes,  j'ai  vécu  unifié 
par  la  croissance  ;  trois  lunes,  j'ai  vécu  sous  une  poi- 
trine; deux  fois  deux  lunes,  j'ai  vécu  dans  l'obscurité 
profonde;  cinq  lunes,  j'ai  vécu  mourant;  six  lunes, 
j'ai  vécu  tleur  souffrante;  sept  lunes,  j'ai  vécu  terre 
affaissée;  huit  lunes,  j'ai  vécu  dans  la  détresse;  pen- 
dant neuf,  j'ai  vécu  dans  l'affliction;  à  la  dixième  lune 
convenable,  j'ai  vécu  avec  ma  mère  dans  le  mal  de 
l'océan  des  douleurs  qu'elle  souffrait'  ». 

1.  Ce  passage  est  traduit  ainsi  par  P.  A.  à  la  p.  18  de  la  bro- 
chure A  fca' /njnins  of  M(ini/,La  VachaUa  and  T((i/iiiiianacar-, 
translated  by  P.  A.  and  G.-U.  Pope  (Siddhanta  deepika séries, 
n"  I),  Madras,  1897,  46  p.:  «WasI  Saved  in  faultless  wombs  — 
On  the  seagirdled  earth,  elephant's  womb  to  ant's,  —  Saved  in 

19 


t 


—  286  — 

P.  257  :  «0  toi,  dont  la  poitrine  présente  deux 
points  brillants  comme  l'ardent  soleil,  traces  laissées 
par  la  poudre  odoriférante  dont  étaient  parfumés  les 
bouts  des  deux  seins  de  la  belle  aux  cheveux  bouclés, 
à  la  taille  frémissante.  » 

Le  volume  se  termine  par  un  vocabulaire,  qui  peut 
être  donné  comme  un  modèle.  L'introduction  et  les 
préliminaires  sont  remplis  de  détails  intéressants  sur 
la  littérature  tarnoule,  sur  les  légendes  locales,  sur  le 
çivaïsme,  et  il  y  a  à  apprendre  là  presque  chaque  ligne. 
Entre  temps,  M.  Pope  donne  la  traduction  complète 
d'un  traité  dogmatique  çàiva-siddhanla,  le  Tiruvarut- 
payan  «  profit  de  la  sainte  grâce  »,  dont  l'auteur  paraît 
avoir  vécii  au  quatorzième  siècle.  Cet  ouvrage,  qui  se 
compose  de  cent  mtras  en  distiques,  est  recommandé 
p;»r  les  docteurs  de  la  secte. 

M.  Pope,  par  une  sorte  de  coquetterie  charmante, 
a  voulu  dater  son  nouveau  livre  du  quatre-vingtième 
anniversaire  de  sa  naissance  :  il  a  commencé  ses 
études  tamoules en  1837,  il  y  a  soixante-trois  ans!  Il 

womb  of  human  mother,  —  Saved  tïom  stroke  of  sterilizing 
worm,  —  Saved  in  the  meeting  of  ihe  seeds  in  the  flrst  moon,  — 
Saved  in  their  growth  in  the  second  moon,  —  Saved  in  their 
struggie  in  the  third,  —  Saved  in  the  great  darkness  of  the 
fourth  month,  —  Saved  fi-om  the  blight  of  the  flfth  moon,  — 
Saved  from  the  mishaps  of  the  sixth,  —  Saved,  looking  earth- 
wards  in  the  seventh,^  Saved  in  the  straits  of  the  eighth  moon, 
—  Saved  in  the  dangers  of  the  ninth,  —  Saved  in  the  due  tenth 
moon,  —  Together  with  the  mother  in  a  sea,  —  of  agony  strug- 
gling.  »  On  peut  voir  par  là  combien  ce  morceau  est  obscur  et 
diflBcile  à  traduire. 


—  287  — 

a  apporté  un  soin  tout  particulier  à  son  Tiruvâçagam 
qu'il  semble  regarder  comme  sa  dernière  œuvre;  mais 
nous  pouvons  expérer,  je  crois,  qu'il  nous  en  donnera 
plusieurs  autres  encore  aussi  bonneset  aussi  bien  faites. 
Claudine  a  chanté  le  vieillard  de  Vérone  qui  n'avait 
jamais  quitté  le  lieu  de  sa  naissance  et  dont  il  oppose 
la  longueur  de  la  vie  aux  courses  lointaines  des  voya- 
geurs. M.  Pope,  lui,  joint  l'expérience  de  l'âge  aux 
connaissances  acquises  en  traversant  les  mers  :  il 
réunit  autant  déroute  que  de  vie  et  se  présente  à  nous 
ainsi  avec  une  double  auréole.  Puisse-t-il  nous  la 
faire  voir  bien  longtemps  encore  ! 

Julien  ViNsoN. 

P. -S.  J'avais  adressé  à  M.  Pope,  dès  la  réception 
de  son  volume,  les  vers  tamouls  suivants  : 

Iruvin'  eika  da  n  daçe  ha 

mçeiUavâfjagatteitjelld m 

V ar  uvikiy  allât' pôla 

inafumojiyadanilvait lî 

liaru  vin'eikand(l/dndat 

lavai' luldmuyirgalummeik 
Kuruvin'eiyén'amnangik 

Kur'eivilâvâjgaven'bâ r 

«Vous  avez  mis  dans  une  langue  étrangère,  comme 
par  un  jeu  accidentel,  —  toutes  les  paroles  saintes 
chantées  par  le  bienheureux  qui  a  échappé  aux  deux 
activités;  —  après  avoir  vu  ce  travail  précieux,  les 


—  288  — 

êtres  qui  habitent  les  sept  univers  vous  —  vénèrent 

et  vous  nommant  leur  guru  disent  :  u  puisse-t-il  vivre 
heureux  sans  cesse  1  »  J.  V. 


Sivagnâna  hôtham  of  Meikandadêva,  translated 
with  notes  and  introduction  by  J.-M.  Nallaswamj- 
PiLLAi.  Madras,  1895,  in-8«,  (vij)-xxxj-1â6  p. 

Light  o/  Grâce  or  Thiruvarutpayan  of  Umâpathi 
Siva  Gharya,  translated  with  notes  and  introduction  by 
J.-M.  Nallaswami-Pillai.  Madras  et  Trichenapally , 
1896,  in-8°,  (v)-xxxij-ix  p. 

Il  se  produit  en  ce  moment  dans  l'Inde,  et  surtout 
dans  l'Inde  méridionale,  un  mouvement  religieux  ou 
plutôt  philosophique  extrêmement  important,  qu'on 
pourrait  appeler  la  renaissance  du  çivaisme,  si  cette 
religion  avait  jamais  cessé  d'être  prédominante  dans  ces 
régions.  En  réalité,  il  s'agit  d'une  propagande  active, 
faite  par  des  Indiens  extrêmement  distingués,  élevés 
presque  à  l'européenne,  en  faveur  de  la  doctrine 
gàiva-siddliânta.  Au  mois  de  juin  1897,  un  journal 
spécial  a  même  été  fondé  dans  ce  buta  Madras,  et  il 
est  aujourd'hui  en  pleine  prospérité'. 

On  sait  que  le  çivaisme  repose  tout  entier  sur  la  con- 

1 .  Tho  light  of  fruth  or  Siddhanta  deepika,  a  monthly 
journal,  devoted  to  religion,  philosophy,  littérature,  science, etc. 
Madras,  J.-M.  Nagaratnam-Pillay,  publisher.  Blacktown.  — 
L'abonnement  est  de  4  roupies  (6  fr.  80)  par  an.  —  Siddhanta 
dîpikâ  signifie  exactement  «  la  lampe  de  la  perfection  ». 


—  289  — 

ception  des  trois  entités  :  Pati  «  le  chef,  Dieu,  le 
grand  tout  >>,  Paru  «  l'âme,  l'individualité  »,  et  Pâsam 
«Je  lien  »,  c'est-à-dire  l'ensemble  des  causes  qui  sé- 
parent le  paeu  du  pati  ;  le  but  suprême  est  la  libéra- 
tion du  joug  du  pâsam  ei  l'absorption  des  individualités 
dans  le  grand  tout.  La  doctrine  est  exposée  principa- 
lement dans  quatorze  ouvrages  tamouls,  dont  les  inspi- 
rateurs du  mouvement  en  question  ont  publié  tout 
récemment  une  édition  collective'. 

Parmi  ces  ouvrages,  le  Munsiff  de  Namdyal,  le  sa- 
vant Nallaavdmi-pUlei,  en  a  déjà  traduit  trois  en  an- 
glais: le  Tirunânaùtlyâr  (skr,  Çrîdjnânasiddhi),  dont 
la  publication  se  poursuit  dans  le  Siddhânta-dlpikâ,  et 
les  deux  autres  que  j'annonce  ci-dessus. 

Le  Çivandnahôdam  (skr.  Cwadjnânabôdha)  est  re- 
gardé comme  l'ouvrage  capital.  On  croit  qu'il  a  été  com- 
posé, probablement  au  commencement  du  XIIP  siècle, 
par  un  ascète  de  Tiruvenneinallâr,  qu'on  a  sur- 
nonmié  Meykandddéua  <.<  le  divin  qui  a  vu  la  vé- 
rité ».  Il  l'a  traduit  du  sanscrit,  expliqué  et  com- 
menté. Le  texte  comprend  12  sûtras  qui  contiennent 
ensemble  41  vers  tamouls  de  quatre  pieds,  du  mètre 
agaval  ;  Nallasvâmi  nous  en  donne  une  traduction 
rigoureuse,  en  anglais,  ainsi  que  la  traduction  du 
commentaire,  et  il  y  ajoute  de  nombreuses  notes  expli- 
catives. Un  missionnaire   américain,    M.  11. -K.  Hoi- 

1 .  Mei/kandaçdttiram  (la  science  qui  a  vu  la  vérité),  textes 
et  commentaires;  Madras,  aux  bureaux  du  Siddhanta  decpika). 


—  290  — 

sington,  en  avait  publié,  en  1850,  un  résumé  en 
18  pages  (ians  une  revue  américaine.  Il  peut  paraître 
intéressant  de  comparer  les  deux  traductions. 

Le  sûtra  XI  est  traduit  ainsi  qu'il  suit  par 
\1.  Hoisington  :  <.<  When  the  soûl  has  escaped  from 
tlie  influence  of  the  body  and  become  pure,  Siva  will 
look  upon  it  and  show  himself  to  it,  jusl  as  the  soûl 
acts  as  the  cause  or  power  of  vision  to  the  eye. 
Therefore  Siva,  by  Ihus  revealing  himself,  will  give 
bis  sacred  foot  to  ihe  soûl  with  a  love  which  it  never 
forgels  to  exercise.  »  Voici  la  nouvelle  traduction  : 
«  As  the  soûl  enables  the  eye  to  see  and  itself  sees, 
so  Hara  enables  the  soûl  to  know  and  itself  knows. 
And  this  adwaita  (non  dualistique)  knowledge  and 
undying  love  will  unité  it  to  His  feet.  » 

Le  texte  est  ainsi  conçu  : 

kânum  kannukku  kâttum  ulam  pôl 
kâna  ulattei  kandu  kâttalin' 
ayarâ  an'bin'  aran'  kajal  çélumê 

c'est-à-dire,  mot  à  mot  :  «  qui-voit  à-l'œil  qui-montre 
le-sens- intime  comme  —  pour-voir  le-sens-intime 
ayant-vu  par-l'action-de-montrer  —  inoubliable  par- 
une-affection  de-Hara  l'anneau-de-pied  joindra  »  ou 
«  aux  pieds  de  Hara,  parce  qu'il  voit  le  sens  intime 
et  lui  fait  voir,  comme  le  sens  intime  fait  voir  à  l'œil 
€t  voit,  (ce  sens  intime)  se  joint  d'un  inoubliable 
amour  ». 


—  291    - 

La  traduction  de  1895  est  donc  absolument  supé- 
rieure à  celle  de  1850. 

Le  livre  de  Nallasvâmi  est  fort  bien  fait  et  la  lec- 
ture en  est  éminemment  instructive  :  l'on  y  trouve, 
outre  le  texte,  la  traduction  et  les  notes,  une  savante 
introduction,  UFie  notice  sur  l'auteur,  la  liste  des 
âgamas,  celle  des  ouvrages  çivaïstes  tamouls  fonda- 
mentaux, le  texte  des  dokas  sanskrits  en  caractères 
dêvanagaris  et  en  caractères  télingas,  enlin  un  glos- 
saire des  mots  spéciaux  sanskrits  et  tamouls. 

Quant  au  Tiruvarutpayan  «  bénéfice  de  la  sainte 
grâce  »,  c'est  un  traité  dogmatique  en  cent  distiques, 
dont  M.  Pope  a  joint  une  traduction  (ainsi  que  des 
commentaires)  à  son  Tiruvâcagam. 

Tous  ces  ouvrages  sont  indispensables  à  celui  qui 
veut  avoir  une  idée  exacte  de  la  philosophie  çivaiste. 

Julien  ViNSON. 


Catalogue  des  manuscrits  mazdéens  de  la  Biblio- 
thèque Nationale,  par  E.  Blochet.  Besançon,  impr. 
P.  Jacquin,  1900,  in-8°,  (iv)-132  p. 

Bibliothègite  Nationale.  Catalogue  de  la  collection 
Schefer  acquise  par  l'État,  par  E.  Blochet.  Paris, 
\i.  Leroux,  1900,  in-8°,  (iv)-v-231  p.  et  M  pi. 

Un  de  mes  amis  avait  posé  sa  candidature  à  l'Ins- 
titut; c'est  un  homme  supérieur,  aussi  fait-il  également 
bien  plusieurs  choses  :  en  dehors  de  ses  autres' ou- 


—  292  — 

vriigps,  on  lui  doit  de  remarquables  études  de  biblio- 
graphie. Il  crut  convenable  d'y  faire  allusion  dans 
une  conversation  avec  un  de  ses  futurs  collègues; 
mais  il  fut  singulièrement  surpris  d'entendre  son  in- 
terlocuteur lui  demander  à  quoi  pouvaient  bien  servir 
de  pareils  ouvrages.  Doit-on  conclure  de  là  que  la 
Bibliographie  n'est  pas  très  appréciée  à  l'Institut? 
Pourtant,  L-V.h.  Brunet  a  donné  à  l'Académie  des 
Inscriptions  la  somme  nécessaire  pour  décerner  tous 
les  tmis  ans  un  prix  de  3,000  fr.  à  un  ouvrage  récent 
de  Bibliographie  savante;  la  manière  dont  ce  prix  a 
été  attribué  jusqu'ici  ne  répond  peut-être  pas  tout  à 
fait  à  ce  programme...  mais,  passons. 

J.-Ch.  Brunet  aurait,  je  crois,  couronné  les  Cata- 
logues de  M.  Blochet.  Ce  ne  sont  pas  de  secs  et  vul- 
gaires inventaires,  des  relevés  de  titres,  des  énumé- 
rations  fastidieuses;  ce  sont  des  indicateurs  utiles, 
rédigés  avec  soin,  et  accompagnés  de  notes  extrême- 
ment intéressantes.  Le  Catalogue  mazdéen  surtout 
plaira,  car  il  présente  le  tableau  complet  des  res- 
sources qu'offre  aux  éranistes  notre  Bibliothèque  i\a- 
tionale.  Avec  ces  notes  sous  les  yeux,  les  travailleurs 
sauront  où  s'adresser;  ils  iront  au  but  droit,  vite  et 
bien. 

M.  Blochet  a  groupé  dans  un  ensemble  naturel  des 
manuscrits  (lue  le  caprice  des  classilications  a  dispersés 
dans  cinq  catégories  différentes  :  le  supplément  per- 
san, le  fonds  indien,  les  papiers  et  les  manuscrits  de 


If. 


-'  293  — 

Burnouf,  et  celte  ollapodrida  qu'on  appelle  les  «  nou- 
velles acquisitions  françaises  >^.  Les  plus  importants 
de  ces  manuscrits  venaient  d'Anquetil... 

Chacun  de  ces  volumes  est  accompagné  d'une  table 
on  ne  peut  mieux  faite.  Le  Catalogue  de  la  collection 
Schefer  est  accompagné  de  fac-similé  excellents  en 
héliogravures. 

Toutes  nos  félicitations  au  savant  bibliothécaire 
qui  est,  en  même  temps,  l'un  de  nos  orientalistes  les 
plus  distingués. 

J.   VlNSON. 


Actes  de  la  Société  Philologique  (Bulletin  de  l'Œuvre 
de  Saint-Jérôme).  Tome  XXVLIl  (13«  de  la  nouvelle 
série),  année  1899.  Paris,  G.  Klincksieck,  1900,  in-8°, 
307  p. 

Contient,  p.  1-167  :  Lexique  des  fragments  de  /'i- 
vesta,  par  E.  Blochel  (c'est-à-dire  la  liste  des  mots  de 
tx)us  les  textes  en  langue  zendequi  ont  été  découverts 
depuis  la  publication  de  l'Avesta).  p.  169-306  :  suite 
de  ïArfe  de  la  leiigua  maçahua  (conversations  reli- 
gieuses.) 

J.  V. 


Suotnalais-ugrilaisenseuran  aikakauskirja.  —  Jour- 
nal de  la  Société  Firnio-Ougrienne.  Tome  XIX..  Hel- 
singjors,  \^0i,  in-8«,  (iv>iv-200-(ij)-ix-67-4â  p. 

Contient  :  l''  ïrjœ  Wichman,  documents  en  langue 


—  294  - 

voliaque  (proverbes,  devinettes,  contes)  ;  l""  H.  Paa- 

sonen,  chants  tartares  (ces  deux  recueils  de  textes  sont 

accompagnés  de  traductions  en  allemand);  3°  rapports 

et  comptes  rendus  annuels  par  MM.  K.  P.  Karjalainen, 

H.  Paasonen,  G.-J.  Kamstedt  et  0.  Donner,  en  suoml 

et  en  français. 

J.   V. 


Graïuinaire  canlabrique  bmque,  de   Pierre  d'il  rie, 
publiée  par  le  Kev.  VV.  Webster  (voyez  p.  200). 

Voici  le  comolément  de  l'erratum  de  M.  Clarke  : 


pages 

lignes 

5 

3 

du  S*  Évangile  natif  de  SWea 

15 

le  z,  l'c,  u  se 

6 

1 

du  son  de  1'/,  /,  i,  y 

2 

les  /, ./,  r,  y 

14 

c'est  Ih  portugais 

24 

hardiesse  cucusteguiâ 

26 

gaûa  nuit 

7 

10 

signifier  la 

dre 

partout,  bay,  oui,  baba,  febue. 

8 

3 

le/c 

9 

31 

ténèbres 

10 

12 

antçara 

20 

phustela 

24 

ophorra.  cofiiiaud 

11 

•    18 

sukhilla.  souche 

12 

5 

phutçûâ  ,. 

—  295  — 


âges 

lignes 

12 

9 

mais  elles  l'onl 
les  précède  f 

10 

pomme,  dites 

17 

muquitssûâ 

13 

8-12  hire'...  gueure' 

18 

hire'...  cure' 

23 

*Iainco' 

24 

lurraren 

28 

*infernuetara 

14 

3 

seculaco' 

6 

laun'goicoa 

16 

29 

babaçuça 

17 

4 

vztaïlla 

19 

17 

vkhondoa 

21 

8 

photcoa 

10 

bassurdéà 

23 

28 

corrocogna 

31 

maquaréla 

24 

5 

herressâca 

9 

colàca 

25 

16 

gosna 

17 

matalaça 

25 

cutçha 

33 

lapicerià 

27 

6 

arrôpa 

28 

24 

salbatcaïilea 

31 

18 

parropia 

32 

17 

açotea 

33 

9 

olôa 

13 

arantçéa 

16 

elhorria 

17 

lokharria 

21 

haritça 

egunorozco'...  çordun' 


—  296 


pages 

33 

lignes 

28 

cobréâ 

34 

10 
20 

ispilingua 
nahala 

35 

5 

okhincôà 

36 
37 

39 

13 
5 

16 
22 

çhiçhariâ 

ikhazquigna 

hateitçagna 

perfecçionéa 

çoramendàà 

40 

1 

19 

orriquia 
delicatataasana 

41 

9 

Likhisqaeria 

42 
44 

45 

8 

10 

8 

ingratasauna 

Caacôgna 
aenticorra 

55 
56 

7 
21 

jaquiiecoa 
haûrra 

57 

9 

10.15 

exceptez...  sic,  lie 
rie,  nie  (deux  fois) 

13 
14 

ragno 
baitharagno 

18 
19 

quign 
ou  daeo 

20 
21 

quign...  tan 
baitharican 

58 

28 
33 
23 

guiconarenera 
guiconarenean 
bozcariari,  bozcariora 

59 
60 

3 
17 
10-11 

des  joyes,  par  les  joyes 
Erreguebaithan 
aitassoenean,  aitassobaithan 

61 

24 

mahatssic 

—  297  — 

pages  lignes 

61  26-28  +  pour  x 

^2  13  toujours  un  a 

14  a  s'oste 

20  tout  a  fait  . 

24  comparaison 

31  hobequi  (trois  fois) 

63  4  barnerategui 

18  après,  du  depuis 

19  guerostiquégui 

64  7        hobeagoari 

10  hobeagoric 
66           7        çuetaragno 

11  çuequign 
15        Luy,  elle 

23  Dat.  haûy 

24  hautaragno,  jusques 

69  23        le  votre,  çuénaz,  çeuenaz ,  çuenetic,  çeuené'tic, 

par  le  votre,  du 
av.-dfeHunéna,  hunénac 

70  27        hauquiénic 

71  16        neurorri 

21  neureburuaz 

32  gueureburuari 

d'"  gueureburuac 

"^^  ^  par  nous  mêmes,  gueureburuagatic,  a  cause 

de  nous  mêmes,  gueureburuarentçat 

73  14  bereéna 
32  çegnentçat 
d'û  çeintaz 

74  7        nihorc 

20        delacaussa.  idem 
76  3        ascorenbaitharic 

''"''  9         biequign...  bioc 


-  298  - 

_n_-  lignes 

364  à"^^      passaiétan 

365  9        çhutic  ou  Jaïquiric 
d""»      higuitcen  naiz 

6-d'"«'  2^  col.  mettre  nintcen  en  apposition 

366  2        haritçen  etc.  nintcen 

367  27        Lagunduco 

371  av-'d''  effacer  sorteçoâ 

372  3        sorthurican 
d^e     mintçalurican 

374  4        hassarrâtu  eta 


377  9 

378  30 


382 


effacer  -j- 


379  16  asse  eta 

22  sassiatu.  eta 

aSÛ  2  effacer  + 

15  de  se  tenir  assis 


29  hillaz.  étant  mort,  hill  eta. 

383  10  pobretu.  gabe.  pobre 
15  eguign  billhatu 

384  14  vkhabillca 

385  4  josten  haritçéa 
8  se  diuertir 

14  Gaçhtatçéâ 

24  aïtçin.  aitçindu 

26  ezantssiâtcéâ 

386  10        vrratu 

387  10        illhundu 

13  hotçi  içatéâ 

14  sendatçéâ.  senda.  sendatu 

388  4       garbi 

19        goâtéâ.  goân 
21        Deit.  deithu 

389  3        makhurtçéâ 


—  299  — 

pages 

lignes 

389 

13 

guernu  eguiten 

390 

4 

ferdetçéâ 

9 

çuçentçéâ 

21 

Sauuer 

393 

2 

eguin.  eguign.  19.  lothu 

5 

itçuri 

17 

on  ajoute  co.  harico 

394 

10 

dire 

11 

çaeteris 

395 

6 

l'ay  de j une 

14 

l'aime 

20 

l'aimé 

522 

11 

8 

laur.  ou  illabete.  bâtez  guerostic  ou  bi,hirur, 
laur.  hilabetez 

523 

1 

bortçgarren' 

10 

illhabethebatetic 

11 

adisquideez 

524 

15 

15  jours 

525 

9 

le  le  voudrais 

11 

eztiotçoco 

527 

11 

dieçadaçu  haren' 

529 

8 

laincoac 

530 

10 

b 

feray 

533 

8 

lagun'  icateaz 

534 

3 

t 
eznaiz 

536 

9 

arno' 

538 

10 

t 
guignhârra 

9 

t 

maigre 

17 

cure' 

—  300 


pages 

540 

lignes 

3 

Lekhoe- 

(Jre 

Aberattss'  Dire? 

541 

15 

L'un  l'a  dit 

19 

Ils  t'auoient 

VARIA 


I. — La  langue  de  nos  parlementaires 

La  Remio  (ancienne  Revue  des  Reçues)  consacre  une  étude 
amusante  aux  crimes  contre  la  logique  et  la  syntaxe  commis  par 
les  plus  réputés  parmi  les  orateurs  de  la  Chambre.  Les  nombreuses 
citations  de  la  RerueiovmQni  une  véritable  anthologie  des  incon- 
séquences dont  se  rendent  coupables  nos  brillants  parlementaires. 

M.  de  Man  afiBrme  gravement  qu'un  ouvrier  est  un  instrument 
qui  ca  de  main  en  main. 

M.  Bourgeois  aperçoit  «  trois  grands  joom^s  exprimant  net- 
tement la  volonté  du  pays  ». 

Pour  M.  d'Estournelles,  «  l'Europe  continue  à  s'acheminer  les 
yeux  fermés  au  suicide  ». 

M.  Viviani  «  pose  les  termes  de  la  question  »,  oubliant  visi- 
blement que  si  la  question  en  français  a  des  termes,  il  est  quand 
même  difficile  déposer  les  termes  de  la  question. 

Cela  n'empêche  pas  M.  Ribot  de  «  la  poser  sur  son  véritable 
terrain  ». 

M.  Leygues  a  un  lyrisme  gynécologique  et  nous  déclare  que 
«  notre  siècle  enfantera  un  ordre  nouveau  ». 

Cependant,  si  les  politiciensexcellentà  exprimerdes  idées  vagues, 
parfois  ils  donnent  aussi  à  ce  vague  lui-môme  je  ne  sais  quelle 
précision  comique.  De  M.  Charles  Ferry,  cette  définition  pleine 
d'actualité  :  «  Le  féminisme  consiste  à  mettre  sur  le  même  pied 
l'homme  et  la  femme  ».  Cela  veut  tout  dire  et  ne  veut  rien  dire; 
cela  est  immense,  étant  très  étroit;  mais,  telle  quelle,  cette  défi- 
nition plaira  aux  ennemis  du  féminisme:  en  effet,  il  leur  sera 
très  aisé  de  démontrer,  grâce  à  elle,  que,  lorsque  l'homme  et  la 

20 


—  302  — 

femme  seront  sur  le  même  pied,  la  famille  aura  bien  de  la  peine 
à  se  tenir  en  équilibre,  je  veux  dire  à  se  tenir  debout... 


II. —  Bismarck  et  les  caractères  latins 

La  Gazette  de  Voss,  du  9  octobre  1882,  publiait  la  lettre  sui- 
vante, adressée  par  le  prince  de  Bismarck  aux  frères  Karl  et 
Adolphe  Millier: 

«  Varzin,  le  4  octobre  1882. 

»  Je  vous  remercie  bien  cordialement  de  votre  Histoire  Zoo- 
lofjirjue.  Les  descriptions  pleines  d'intérêt  et  les  dessins  repro- 
duisant les  formes  naturelles  ont  triomphé  delà  répugnance  que 
j'éptouve  généralement  à  lire  les  livres  allemands  imprimés  en 
caractères  latins,  par  ce  motif  que  je  sais  me  montrer  ménager 
du  temps  que  les  affaires  et  ma  santé  laissent  à  ma  disposition. 

»  Il  me  faut,  règle  générale,  80  minutes  pour  lire  en  caractères 
latins  le  nombre  de  pages  qui  méprendrait  une  heure  si  la  chose 
était  imprimée  more  vcrnaculo.  Le  français  ou  l'anglais  im- 
primés en  caractères  allemands,  ou  l'allemand  imprimé  en  carac- 
tères grecs,  présenteraient  la  même  difficulté,  même  à  ceux  qui 
sont  familiarisés  avec  tous  les  alphabets.  Le  lecteur  instruit  ne  lit 
pas  des  signes  de  lettres,  mais  des  signes  de  mots.  Or,  un  mot 
allemand  écrit  en  caractères  latins  lui  produit  une  impression 
aussi  étrange  que  pourrait  vous  produire  un  mot  grec  écrit  en 
caractères  allemands.  Cela  vous  contraint  à  lire  plus  lentement, 
absolument  comme  l'orthographe  arbitraire  et  fantaisiste  que  Ton 
a  substituée  naguère  à  notre  orthographe  traditionnelle. 

))  Pardonnez-moi  cette  explosion  de  mauvaise  humeur  échappée 
àun  lecteur  solitaire  et  ne  la  considérez  pas  comme  un  symptôme 
d'ingratitude  pour  votre  envoi  amical,  dont  la  lecture  attrayante 
me  fait  oublier  volontiers  la  nationalité  des  caractères. 

»  Von  Bismarck.  » 


—  303  — 


III.  — Jeu  de  mots  homonymes 

Un  journal  publiait  naguère  la  facétie  suivante:  «  M.  Lamcvre 
a  épousé  M"'  Lopère;  de  ce  mariage  est  né  un  fils  qui  est  devenu 
le  maire.  àQ\K  commune.  Monsieur,  c'est  le  père  ;  Madame,  c'est 
la  mère,  et  les  deux  font  la  paire.  Le  fils  est  le  maire  Lamerre. 
Le  père,  quoique  père,  eS't  resté  Lamen'e,  mais  la  mère,  avant 
d'être  Lamerre,  èta.it  Lepère.  Lepére  est  donc  le  père  sans  être 
Lepère, puisqu'il  est  La/ne/ve;mais  la  mèreest  Lamerre  quoique 
née  Lepère,  et  n'a  jamais  pu  êfre  Maire.  Le  père  d'ailleurs  n'est 
pas /«  mère,  tout  en  étant  Lamerre.  Si  la  mère  meurt,  Lamerre, 
qui  est  le  père,  et  qui  n'a  jamais  été  Lepère,  pas  plus  qu'il  n'a  été 
le  père  de  la  mère  du  Maire;  le  père,  dis-je,  devenant  veuf,  la 
perd,  et  le  père  Lamerre  ainsi  que  le  Maire  Lamerre  perdent  la 
tête  et  moi  aussi  ». 


Le  Propriétaire-Gérant, 

J.  Maisonneuve. 


Cbaloa-sur-Sadne.  —  Imprimerie  L.  Marceau,  B.  BiiRTKANL),  successeur. 


LITTÉRATURE  TAMOULE  ANCIENNE 


Le  Sûlâmani 

Ce  mot  Sûlâmani,  ou  plus  exactement  Çùlàmani^  est  une 
adaptation  du  sanskrit  Tchùdâmani  «  pierre  précieuse  mise 
sur  les  cheveux  réunis  au  sommet  de  la  tête  (de  Çiva)  »,  c'est- 
à-dire  «  bijou  supérieur,  joyau  par  excellence  »,  nom  qui 
convient  tout  à  fait  à  un  poème  qui  prétend  traiter  des  quatre 
fins  de  l'homme  :  vertu,  fortune,  plaisir,  but  suprême.  Ce 
poème  fort  intéressant,  peu  connu  et  peu  étudié,  était  cepen- 
dant estimé  de  quelques  érudits,  et,  dès  1886,  on  songeait  aie 
faire  imprimer.  Mais  c'est  seulement  en  1889,  par  les  soins  du 
savant  Ci.  Vài.  Tàmàdarampillei,  de  Jafifna,  que  le  livre  a 
vu  le  jour.  L'éditeur  raconte,  dans  une  très  intéressante  pré- 
face, l'histoire  de  cette  publication.  Il  était  allé  rendre  visite, 
quatre  ou  cinq  ans  auparavant,  à  l'illustre  Sahrahmantja- 
dèçikamùrti,  supérieur  du  monastère  de  Tiruvdvadutur'ei, 
et  ce  sage  éminent  lui  parla  du  Sùldmani,  lui  dit  que  c'était 
un  poème  remarquable,  qu'il  fallait  le  sauver  d'une  mort 
prochaine  en  le  faisant  imprimer  le  plus  tôt  possible,  et  que 
ce  devoir  incombait  particulièrement  à  lui,  Târàôdarampillei, 
qui  avait  déjà  publié  plusieurs  ouvrages  tamouls  précieux. 
Maliàlinga-aii/ar,  de  Madras,  lui  envoya  la  copie  manuscrite 
qui  se  trouvait  dans  son  couvent.  La  lecture  de  ce  manuscrit 

1.  J'6!cris  StHctmani  parce  que  j'avais  écrit  précédemment  Smrfâ- 
mani.  11  faut  remarquer  le  l  cérébral.  Ou  sait  que  les  textes  sanscrits 
du  sud  de  l'Inde  ont  gardé  cotte  lettre  qui  a  disparu  dans  les  textes 
septentrionaux. 

21 


—  306  — 

convainquit  le  vaillan l'éditeur  de  l'excellence  de  l'ouvrage  et 
lui  inspira  un  vif  désir  de  le  publier,  mais  il  était  nécessaire 
de  réviser  le  texte  avec  soin  et  de  pouvoir  comparer  entre 
elles  plusieurs  copies.  11  fit  donc  faire  des  recherches  dans 
tout  le   pays  tamoul.    Un   manuscrit  lui  fut  envoyé  par 
Véngattaràma-aiyangâr,  deKaruvûr,  qui  lui  signala  l'exis- 
tence d'un  autre  exemplaire  chez  lesDjâinas  de  Mannârkudi. 
Mais  ce  second  manuscrit  avait  été  emporté  à  Kumhhakônam; 
son  propriétaire  promit  de  le  communiquer  lorsque  le  moment 
de  la  révision  serait  venu.  Car,  il  ne  s'agissait  pas  d'une 
impression  immédiate,  Tâmôdarampoullé  étant  occupé  à  une 
autre  publication.  Cependant  les  recherches  continuaient  : 
Kanagaçaheimudaliyàr,   magistrat  à   Tanjaour,    découvrit 
deux  nouvelles  copies  à  Vèdàraniyam  et  à  Pérumaixdùr  ;  et 
Ràmatchandrâya,  munsiff  du  district  de   Vijuppuram,  en 
trouva  une  autre  chez  un  Djàina  de  Vîdùr.  Cependant,  le 
propriétaire  de  l'exemplaire  de  Mannârkudi  était  mort,  et  il 
fut  impossible  de  savoir  ce  que  cet  exemplaire  était  devenu. 
Sur  les  cinq  exemplaires  restants,  deux,  ceux  de  Vèdàraniyam 
et  de  Karuvùr,  n'étaient  que  des  copies  de  celui  de  Vidùr  ; 
on  n'avait  donc  en  réalité  que  trois  textes  à  coUationner.  Le 
travail  fut  fait  et  l'impression  commença. 

Une  centaine  de  pages  étaient  déjà  tirées,  lorsqu'un  ami 
de  l'éditeur  trouva  une  quatrième  copie,  dont  le  propriétaire 
venait  de  mourir,  à  Trichenapally.  Dans  l'espoir  d'en  décou- 
vrir encore  d'autres,  Tâmôdarampiljei  fit  lui-même  une 
tournée  parmi  les  Djâinas  de  la  région,  mais  ce  fut  seulement 
à  Kdntchipura  qu'il  trouva  un  vieux  manuscrit  du  poème. 
Les  variantes  offertes  par  ces  deux  nouveaux  textes  étaient 
nombreuses  et  intéressantes.  Il  fallut  donc  recommencer 
l'impression;  un  spécimen  des  corrections  ainsi  exécutées 
nous  est  donné  dans  un  tableau  très  intéressant  qui  vient  à  la 
suite  de  la  préface. 


—  307  — 

Tâmôdarampillei  attribue  au  Sùlâmani  un  âge  relative- 
ment fort  avancé  :  à  son  avis,  il  daterait  d'environ  1500  ans. 
Le  poème  est  en  effet  cité,  nous  dit-il,  dans  le  commentaire, 
écrit  vers  le  1V«  siècle,  de  la  Kârikâ,  traité  didactique 
tamoul,  composé  d'après  un  plus  ancien,  le  Yàpparungala, 
dans  le  commentaire  duquel  le  Sùlâmani  est  également  cité. 
Enfin,  dans  une  des  strophes  préliminaires  de  l'ouvrage,  il 
est  fait  mention  du  roi  Vidjaya  de  Kârvetti;  or  Kârvetti  était 
la  capitale  du  Tchôla  avant  Ur'andei.  Mais  rien  ne  prouve 
qu'il  s'agisse  là  d'un  roi  Tchôla;  le  Vidjaya  en  question 
n'était  peut-être  qu'un  chef  local,  tributaire  du  grand  mo- 
•narque.  Cette  strophe  d'ailleurs  n'est  évidemment  pas  de 
l'auteur  lui-même  et  doit  avoir  été  mise  en  tête  de  l'ouvrage 
par  un  copiste  postérieur.  Quant  à  la  date  du  commentaire 
de  la  Kârikâ,  elle  est  fort  incertaine.  Les  Indiens  n'ont  pas 
le  sens  de  l'exactitude  historique. 

Je  crois  le  poème  plus  moderne,  et  il  me  semble  qu'il  doit 
remonter  à  la  période  qui  a  précédé  immédiatement  celle  qui 
a  vu  le  triomphe  définitif  du  Çivaisme.  Peut-être  même 
a-t-il  été  écrit  plus  tard  encore.  C'est  ce  qui  expliquerait 
qu'il  était  si  peu  connu  en  dehors  des  Djâinas  et  qu'on  ne  lui 
ait  fait  aucun  commentaire.  Néanmoins,  il  est  certainement 
ancien  et  ne  doit  pas  être  postérieur  au  XIl^  siècle.  Il  est 
cité  dans  les  commentaires  de  beaucoup  de  très  anciens 
ouvrages  ;  mais  il  porte  en  lui-même  des  caractères  de  mo- 
dernité relative,  si  j'ose  exprimer  ainsi:  le  nombre  et  la 
variété  des  mètres  employés,  l'art  avec  lequel  ils  sont  alter- 
nés, le  soin  peut-être  exagéré  de  la  forme,  et  l'imitation 
manifeste  du  Sinddmani.  Pourtant,  les  deux  descriptions 
initiales  du  pays  et  de  la  ville  ne  sont  pas  conformes  aux 
traditions  classiques  que  le  Sindâmarii  a  au  contraire  obser- 
vées, mais  le  fait  que  ces  deux  descriptions  ont  été  l'objet  de 
chants   spéciaux  et  le  fait  que   les  diverses  divisions  du 


—  308  - 

poème  portent  le  nom  de  sarga  [çarukkam]  confirmeraient 
mon  hypothèse.  Maintenant,  quelle  part  faudrait-il  faire  aux 
questions  de  localités?  combien  de  temps  fallait-il,  à  ces 
époques  de  communications  rares  et  difficiles,  pour  qu'un 
ouvrage  littéraire  devînt  célèbre  et  fût  connu  dans  tout  le 
pays  tamoul  ? 

L'éditeur  indien  dit  à  ce  propos  que,  dans  la  plupart  des 
langues  connues,  les  grandes  épopées  ont  d'ordinaire  paru 
avant  les  petites,  mais  qu'il  y  a  des  exceptions  :  le  Sùlâmarii 
en  serait  une.  Je  crois  qu'un  élément  important  doit  être  la 
métrique,  en  ce  qui  concerne  les  livres  tamouls.  Des  divers 
genres  de  poésie  connus,  il  est  à  peu  près  certain  que  Vagaval 
ou  âçiriyappà,  sorte  de  prose  rythmée,  est  la  plus  ancienne, 
puis  vient  le  venbâ,  distique  d'abord  et  quatrain  ensuite,  enfin 
le  quatrain  se  régularise  et  produit  le  kalippâ,  le  tur'ei,  le 
viruttam  (vrddha).  J'ai  déjà  fait  remarquer  ailleurs  que  plu- 
sieurs ouvrages  tamouls  ont  été  deux  fois  écrits,  une  première 
fois  en  âçiriyappà  ou  en  venbd  et  une  seconde  fois  en  viruttam, 
p.  ex.  :  le  Mahâbhârata  abrégé  d'abord  en  venhâ  par  Pérun- 
dêvanâr,  puis  traduit  en  viruttam  par  Villipultûr  et  Nallâp- 
pillei,  l'histoire  de  Nala  par  Pugajêndi  et  par  Adivîrarâma- 
pàndiya,  etc.  C'est  ce  qui  m'a  permis  de  supposer  que  les 
deux  grands  ouvrages  classiques  perdus,  le  Kundalagéçiet  le 
Valeiyâbadi  avaient  eu  également  deux  formes.  iSJous  avons 
les  deux  états  de  la  légende  d'Udayana  :  un  abrégé  en 
355  viruttams  {udayanankumârankâppiyam,  dont  les  six 
chants  portent  le  nom  de  kàndam)  et  la  version  originale 
(udayanankadei  ou  pérunkadei)  en  agaval,  dont  le  com- 
mencement et  la  fin  manquent,  mais  qui  comprenait  six 
livres,  kàndam,  divisés  chacun  en  un  grand  nombre  de 
chants.  Parmi  les  petits  poèmes  djâinas  ou  bouddhistes, 
antérieurs  ou  postérieurs  aux  cinq  grandes  épopées  classiques, 
on  cite,  outre  le  Sùlâma)j.i  et.VUdayamkâppiyam,leNâga- 


—  309  — 

kumârakâppir/am,  le  Nilakêçi,  le  Yaçàdarakâppir/am,  dont 
le  dernier  aurait  été  imprimé  avant  le  Sùlàmani  :  je  ne  connais 
ces  ouvrages  que  de  nom. 

Une  particularité  qui  a  préoccupé  l'éditeur,  c'est  que,  dans 
tous  les  manuscrits,  le  Sùlàmani  porte  le  sous-titre  «  deuxième 
épopée  »,  irandàvadu  kâviyam.  Quelle  serait  la  première? 
Je  proposerais  volontiers  de  donner  ce  rang  au  Sindâmani, 
mais  peut-être  conviendrait-il  plutôt,  en  se  référant  à  l'hypo- 
thèse que  j'émettais  tout  à  l'heure,  de  traduire  «  seconde 
épopée  »  par  «  seconde  forme  (en  viruttam)  de  l'épopée  (an- 
ciennement écrite  en  agaçai)  ».  La  première  supposition 
serait  confirmée  par  le  parallélisme  des  deux  noms  : 
Sindâmani  et  Sùlàmani  (en  sanskrit  Tchintàmani  et 
Tchùdàmani).  Ce  sont,  on  le  sait,  les  deux  pierres  précieuses 
divines,  qui  font  obtenir  à  leurs  possesseurs  tout  ce  qu'ils 
désirent.  Ils  est  intéressant  de  faire  remarquer  à  ce  propos 
que  le  P.  Beschi,  au  commencement  du  XVIII®  siècle,  en 
composant  son  poème  chrétien  le  Témbâvani,  a  imité  le 
Sindâmani  jusque  dans  son  titre. 

Je  trouve  dans  le  t.  III  (1894-1895)  des  Epigraphia 
indica  de  M .  E.  Hultzsch  (p.  184-207)  un  document  qui 
peut  donner  sur  l'âge  du  Sùlàmani  de  très  intéressantes  indi- 
/cations.  C'est  une  inscription,  gravée  sur  les  quatre  faces 
d'une  colonne  carrée  de  pierre  érigée  à  la  mémoire  d'un 
saint,  sage  ou  précepteur  djâina,  Ma//i'.?è/îa-Maladhciridôva, 
qui  mourut  le  10  mars  1129  à  l'endroit  même  où  le  monument 
est  élevé,  c'est-à-dire  à  Sravana-Belgola,  talûka  de  Tchan- 
narâyapatna,  district  de  Hassan,  dans  le  Maïssour  (environ 
74"  de  long.  E.  et  13°  de  lat.  N.).  Belgola,  en  canara  «  lac 
ou  étang  blanc  »,  est  traduit  çcèlasaràcara  et  dhavalavarasa- 
tîrtha  dans  l'inscription,  qui  est  en  sanskrit.  Cette  inscrip- 
tion, dont  l'auteur  est  un  disciple  de  Mallisèna,  Mallinâtha, 
ne  peut  donc  guère  être  postérieure  au  milieu  du  XIP  siècle 


—  310  — 

de  notre  ère.  Elle  célèbre  les  mérites  de  Mallisêna,  qui  se 
laissa  mourir  de  faim,  par  sa  foi  religieuse,  et  qui  expira  après 
trois  jours  de  jeûne  absolu,  sous  Hastérisme  svâti,  à  midi,  le 
dimanche  3^  jour  de  la  quinzaine  noire  de  la  lune  du  mois  de 
Phalguna  de  l'année  Kîlaka,  1050  de  l'ère  çaka,  c'est-à-dire 
le  10  mars  1129.  Il  mourut  donc  pdiV  sallèkhanâ  a  amaigrisse- 
ment spontané  »  ou  samàdhi  «  absorption  contemplative  ». 
Ce  document,  assez  emphatiquement  rédigé  comme  il  con- 
vient, donne  une  liste  des  principaux  gurus  ou  Saints  djâinas, 
digambaras,  qu'on  vénérait  à  cette  époque;  parmi  eux,  se 
trouvent  les  noms  de  Tchintdmaj^i,  auteur  du  Tchintâmani, 
et  de  Çrîcarddhadêva,  auteur  du  Tchûlâmani.  Voici  le 
te^te  :  dharmmârtthakâmaparinirvrtitchârutchintaçtchin- 
tàmanih  pratinikètamakàri  yèna  —  sa  stûyatê  sarasa-sâur- 
vr/abhudjâ  sudjâtaçtchintâmanirmmunwrsâ  na  kathatch- 
djanena  =  Tchùlâmanih  kaoînara  tchûlâmaninâ[ma]sêvya- 
kàcyakavlh  —  çrivarddhadêca  êva  M  krtapunyah  kîrttimâ- 
harttum  —  çûrn,ni  — ya  écamupaçlôkitô  daridinâ —  djahnôh 
kanyâm  djatâ[grè]na  hahhâra  paramêçvarah  çrivarddha- 
dèva  samdhatsê  djihvâgrèna  sarasvaiim{%  15 à  17,  lignes  38 
à  43).  On  peut  traduire  :  «  Comment  ne  serait  pas  loué  par 
les  connaisseurs  ce  noble  muni  Tchintâmani,  prince  des 
sages,  par  qui  a  été  composé,  dans  toutes  les  maisons,  le 
Tchintâmani  aux  belles  pensées  sur  la  vertu,  la  fortune,  le 
plaisir  et  la  libération?  Seulement  f'rivarddhadêva,  le  Tchû- 
lâmani des  poètes,  l'auteur  du  poème  superbe  appelé  Tchû- 
lâmani, a  acquis  de  la  gloire  par  ses  actions  vertueuses.  — 
Note.  —  Il  a  été  ainsi  loué  en  un  çiàka  par  Dandi  :  —  Para- 
méçvara  a  porté  la  fille  de  Jahnu  au  sommet  de  sa  chevelure 
nattée;  (toi),  Çrîvarddhadêva,  tu  as  porté  Sarasvatî  sur  le 
bout  de  ta  langue.  » 

Le  Tchùlàmani  sanskrit,   prototype  du  Sùlamani  tamouL 
aurait,  d'après  cette  inscription,  été  connu  dès  le  milieu  du 


—  311  — 

XII®  siècle,  mais  l'insistance  du  rédacteur  de  ce  document  et 
le  témoignage  de  Dandi  qu'il  invoque  semblent  indiquer 
que  ce  poème  était  relativement  récent  et  n'avait  pas  été 
encore  classé  parmi  les  écrits  indiscutablement  et  universel- 
lement admis.  La  traduction  tamoule  n'a  dû  être  faite  que 
lorsque  le  prototype  sanscrit  avait  atteint  cette  réputation,  ce 
qui  nous  conduit  au  XI II®  siècle. 

L'auteur  du  Sùlâmani  tamoul  serait  un  certain  Tôlâmoji- 
dêca  ((  le  sage  à  la  parole  invincible  »,  sur  lequel  nous  ne 
savons  absolument  rien  et  dont  le  nom  est  donné  par  les  deux 
strophes  préliminaires,  œuvres  de  copistes  anciens,  dont 
voici  la  traduction  : 

«  Les  mots  réunis  dans  le  Sùlâmani  par  Tôlâmoji,  qui  se 
rit  des  pierres  précieuses  indestructibles,  brillantes  et  su- 
perbes,—  éclairent  abondamment  toutes  choses,  brisent  dans 
ses  fondements  l'obscurité,  relèvent  et  affermissent  ceux  qui 
ont  été  abaissés. 

»  Ceux  qui  comprennent  le  Sùlâmani  de  Tôlàmoji,  sage 
au  langage  indestructible  qui  adore  les  pieds  fleuris  du  Pur, 
prince  des  devoirs  toujours  célébré,  qui  n'a  ni  les  huit,  ni  lés 
dix  défauts,  tout  en  rendant  hommage  au  Seigneur  puissant, 
roi  du  fort  Kârvelli  qui  rit  en  battant  des  mains  de  ses  enne- 
mis, dont  la  main  est  libérale  comme  les  nuages,  le  victorieux 
redoutable  dont  la  gloire  a  conquis  les  huit  points  cardinaux; 
—  ceux-là  voient  le  port!  » 

Ces  deux  strophes  ont  été  évidemment  écrites  par  deux 
personnes  différentes  et  sans  doute  à  différentes  époques.  La 
première  offre,  à  son  troisième  vers,  une  variante  intéres- 
sante qui  nous  obligerait  à  traduire  :  «  les  mots  qui  sont  dans 
le  Sùlâmani,  paroles  irréfutables  qu'on  n'égalerait  pas  en 
réunissant  les  pierres  précieuses  indestructibles...  »  Cette 
variante  est  une  révélation  :  l'expression  «  paroles  irréfu- 
tables »  tôlâkkir  est  un  simple  synonyme  de  tôlâmoji,  de  sorte 


—  312  — 

que,  dans  les  deux  strophes  précédemment  traduites,  j'aurais 
pu  mettre  :  «  les  mots  réunis  dans  le  Sùlâmam,  paroles  irré- 
futables, qui  se  rient...  »,  «...  le  Sùlâmani  aux  paroles  irré- 
futables du  sage  au  langage...  »  ;  nous  aurions  ainsi  le  droit 
de  supposer  que  les  copistes  postérieurs  ont  pris  pour  un  nom 
d'auteur  ces  mots  qui  exprimaient  simplement  la  qualité  du 
poème.  On  peut  donc  affirmer  que  l'auteur  véritable  du 
Sùlâmani  est  inconnu . 

L'édition  de  1889  a  été  publiée,  chose  fort  intéressante, 
aux  frais  d'un  groupe  de  Tamouls,  fonctionnaires  du  gouver- 
nement anglais  à  Rangoun.  C'est  un  joli  volume,  cartonné 
et  couvert  en  toile,  à  l'anglaise,  formant  un  petit  in-S"  de 
(ij)- 18-4-308-20  p.  Ces  diverses  paginations  correspondent 
aux  parties  suivantes  :  titre,  préface,  table  des  noms  propres, 
texte  de  l'ouvrage,  table  alphabétique  des  strophes.  Outre  les 
deux  strophes  préliminaires  et  l'invocation  [kâppu],  le  poème 
se  compose  de  2.131  quatrains  répartis  en  12  chants,  ainsi 
qu'il  suit  :  «  préface  6,  I .  le  pays  29,  II.  la  ville  34,  III.  les 
fils  49,  IV.  Ratnanûpura  120,  V.  salle  du  conseil  192, 
VI.  message  142,  VII.  mort  du  lion  254,  VIII.  mariage  304, 
IX.  royauté  424,  X.  Svayamvara  286,  XI.  Renoncement  229, 
et  XII.  But  suprême  62.»  L'impression  est  élégante  et  soi- 
gnée. 

J'ai  déjà  dit  que  la  métrique  est  variée.  J'ai  compté  au  moins 
29  mètres  difïérents;  les  plus  fréquents  sontdes  deux  modules 
suivants  : 

1°  cilam,  ma,  tèmà;  vllam,  ma,  tèmà,  c'est-à-dire 


^     (deux  fois  répété) 


—  313  — 

2°  vilam,  vilam,  ma,  kûvilam,  ou 


Le  poème,  et  cela  est  assez  particulier,  commence  par  le 
même  mètre  que  le  Sindàmai),i.  A  l'exemple  de  ce  dernier 
également,  les  chants  ou  prières  au  dieu  suprême  sont  tou- 
jours en  trois  strophes  qui  ont  un  mètre  et  un  rythme  tout 
spéciaux;  tantôt,  ils  sont  en  vers  de  quatre  pieds  en  kâr/,  et 
le  second  vers  se  répète  presque  tout  entier  dans  le  troisième; 
tantôt  ils  sont  en  vers  du  rythme  oenbd  et  la  seconde  moitié 
du  second  vers  se  répète  pour  former  la  première  moitié  du 
troisième.  Le  premier  système  est  employé  dans  le  Sinddmani 
et  dans  le  SUappadigàram  ;  le  second  dans  le  Sindàmani 
seulement.  Dans  le  Sùlàmani,  le  premier  se  trouve  trois  fois 
(IV,  64-66  et  96-98 ;  VIII,  300-302),  et  le  second  deux  fois 
IV,  69-71;  VI,  109-111);  nous  avons  de  plus  (X,  65-67)  une 
variante  du  premier  où  le  premier  vers  se  répète  pour  former 
le  quatrième.  Voici  un  spécimen  de  ces  mesures  : 

Ai),itjâdumolitigajumàranangutiramùrt ti 

kaniyâdumujudunarndakadavulend'ar'eiya  . .  .mê 
kaniyàdumuj'udunarndakadaDulend'ar'eindâ.  .  .lu 
maninâlamudeiyât/eiyar'icârôoariya rê  (IV,  64) 

«  L'essence  suprême  toute-puissante  qui  brille  éclatante, 
même  sans  se  parer,  s'appelle  l'être  supérieur,  qui  comprend 
tout  sans  y  réfléchir;  —  môme  si  l'on  dit  que  l'être  supérieur 
comprend  tout  sans  y  réfléchir,  les  sages  éminents  t'ignorenl- 
ils,  toi  qui  possèdes  la  terre  magnifique?  » 

Vireimanandatâmareimèlvincan,angatchendâ 
yureimatiandiydmparaoacunmagijoâyal  .  .lei 


—  314  — 

unmagijvàyalleiyènjnumulagellà n 

kanmagijanind'cujkatkàdalojiyô mê  (IV,  69) 

((  Tu  as  marché,  salué  par  le  ciel,  sur  le  lotus  qui  répand 
une  odeur  parfumée;  comme  nous  nous  étendons  en  discours, 
tu  ne  t'en  réjouis  pas  en  toi  ;  même  si  tu  ne  t'en  réjouis  pas 
en  toi,  tu  demeures  pour  réjouir  les  yeux  de  tout  l'univers  : 
échapperons-nous  à  ton  amour?  )) 

ôdumêmanamô(îu ^.mê 

kùdumêianikôdeiya y 

kâduçèrkanikârido r^um 

à(îumêmanamô(iu mê  (X,  65) 

«  Il  court,  l'esprit,  il  court!  —  ôtoi  qui  portes  une  fraîche 
guirlande,  —  dans  tous  les  fruits  mûrs  des  bois,  —  il  court, 
l'esprit,  il  court!  » 

L'éditeur  n'a  pas  joint  à  sa  publication  un  résumé  du 
poème  en  prose  ;  il  s'en  excuse  par  cette  raison  qu'un  savant 
professeur  de  Jaffna  a  écrit  une  version  en  prose  et  aussi 
parce  qu'un  autre  savant  prépare  un  commentaire  minutieux 
de  l'ouvrage.  Mais  il  s'est  ravisé  depuis  et,  en  1898,  il  a  fait 
paraître  à  Madras,  à  l'imprimerie  de  Vadjravêlupijjay,  une 
analyse  détaillée  en  prose  (iv-163  p.  in-12),  qui  a  été  réim- 
primée en  1900  par  Thompson  and  C»  «attheMinerva  press, 
Popham's  broadway  »  (iv-163  p,.  in-12).  Ce  résumé  a  pour 
titre  Vaçanasùlàmani  (en  sanskrit  Vatchanatchùlâmani).  Je 
vais  donner  ci-après  un  précis  de  l'histoire,  d'après  ce  résumé, 
complété  par  une  lecture  rapide  du  texte  et  d'après  un  article 
de  M.  G.-U.  Pope,  dans  VIndian  Magazine  and  Review  de 
MissE.  Manning  (novembre  1897,  t.  XXVIII,  p.  569-573). 

Après  la  préface,  dont  on  trouvera  la  traduction  ci-après, 
vient  la  description  du  pays  (chant  P"").  Dans  une  région  de 
la  terre  qui  n'est  pas  indiquée,  il  y  avait  une  contrée  superbe, 
riche,  fertile,  où  tout  abondait,  où  les  paysages  étaient  ma- 


—  315  — 

gnifiques,  les  bosquets  toujours  fleuris,  les  champs  féconds, 
les  bois  remplis  d'oiseaux  aux  plumages  merveilleux,  aux 
chants  agréables,  les  habitants  heureux,  les  femmes  belles  et 
aimables  :  elle  s'appelait  Surami  «  la  délicieuse».  La  capitale 
(chant  II)  était  la  ville  sans  pareille  de  Bôdhana  «  la  sa- 
vante »,  où  tout  était  beauté,  joie  et  bonheur.  Là  régnait,  pro- 
tégeant le  monde,  ombrageant  l'univers  de  son  blanc  parasol, 
Pradj'âpati,  roi  victorieux,  roi  juste,  roi  des  rois,  aux  exploits 
incomparables,  terreur  de  ses  ennemis,  objet  du  respect  et  de 
l'amour  universels,  aidé  de  ministres  sages  et  habiles.  Il 
réunit  dans  son  palais  un  millier  de  femmes  de  races  il- 
lustres, aux  chevelures  splendides,  aux  seins  admirables,  aux 
charmes  incomparables,  parmi  lesquelles  deux  lui  étaient 
particulièrement  chères.  Ces  épouses  préférées,  deux  sœurs, 
portaient  les  noms  de  Mrgâpati  et  de  Çaçi;  leur  amour  lui 
était  un  bonheur  perpétuel.  Elles  devinrent  enceintes  en 
même  temps. 

Chant  III.  —  Les  fils.  —  Les  enfants  qu'elles  mirent  au 
monde  n'étaient  point  des  enfants  ordinaires;  l'aîné,  Vidjaya 
«  le  victorieux  »,  fils  de  la  première  reine  Mrgâpati,  était  une 
incarnation  de  Balarâma;  le  plus  jeune,  Divisiha  «  habitant 
du  ciel  »,  fils  de  Çaçi,  était  une  incarnation  de  Krsna  :  on 
sait  que  les  Djâinas  ont  conservé  tout  le  panthéon  brahma- 
nique. Vidjaya  était  en  conséquence  de  couleur  claire,  tandis 
que  Divistha  était  de  cette  teinte  bleu  sombre  qui  est  la 
caractéristique  des  incarnations  principales  de  Vichnu.  Les 
deux  princes,  beaux,  ardents,  admirablement  conformés,  se 
développèrent  à  la  perfection  de  toutes  les  manières  et 
reçurent  une  éducation  accomplie  qui  les  faisait  exceller 
en  tout.  Ils  venaient  d'atteindre  leur  dix-huitième  année, 
lorsque,  un  jour  d'audience  publique,  un  sage  éminent,  auquel 
l'avenir  était  révélé,  vint  demandera  parler  au  roi.  Introduit 
avec  le  cérémonial  convenable,  habile  dans  les  rites  et  con- 


—  316  — 

naissant  le  moment  propice,  il  prit  la  parole  en  ces  termes  : 
«  0  roi  qui  possèdes  de  robustes  éléphants,  j'ai  vu  ce  qui  suit 
dans  un  rêve  :  un  éléphant  est  descendu  du  ciel,  a  mis  au  cou 
du  jeune  prince  dont  la  couleur  est  celle  du  vaste  océan  une 
guirlande  de  fleurs  épanouies  toutes  blanches;  puis,  il  est 
remonté  dans  sa  demeure.  Apprends  quelle  est  la  signification 
de  cette  vision  :  un  roi  des  Vidyâdharas  viendra  donner  en 
mariage  au  jeune  prince  sa  fille  unique.  Tu  en  auras  la 
preuve  dans  sept  jours  :  un  messager  céleste  descendra  dans 
ton  grand  jardin  fleuri  et  sera  porteur  d'une  lettre  de  ce  roi  ^ .  » 
Au  comble  de  la  joie,  Pradjâpati  donne  les  ordres  nécessaires 
pour  qu'on  attende  le  messager  annoncé  et  qu'on  le  reçoive 
avec  les  honneurs  et  les  égards  qui  lui  sont  dus. 

Chant  IV.—  A  Ratnanûpura.  —  Pendant  que  ces  choses 
se  passaient  à  Bôdhana,  un  roi  puissant,  Svalanjati,  régnait 
sur  la  ville  de  Ratnanûpura,  dans  la  plus  belle  partie  du 
monde  des  Vidyâdharas.  Il  eut  deux  entants,  un  fils  Arkakîrti 
et  une  fille,  Svayamprabhâ,  de  sa  femme  préférée  Vâyuvêgà. 
Ces  enfants  grandirent  en  sagesse  et  en  beauté.  Un  jour,  la 
nourrice,  Vasantamahâtilakâ,  vint  annoncer  l'approche  du 
printemps.  Le  roi  se  transporta  alors  avec  tous  les  siens  à 
son  jardin  de  plaisance  Marôvana;  il  y  invoque  Arhat,  auquel 
il  adresse  des  prières  ardentes.  Deux  sages,  digambaras, 
arrivent  par  la  voie  des  airs  et,  sur  sa  demande,  lui  font 
ainsi  qu'à  ceux  qui  l'accompagnent  de  saintes  instructions. 
Svayamprabhâ  se  fait  admirer  de  son  père  par  sa  piété  ;  il 
songe  à  la  marier  dans  des  conditions  dignes  d'elle. 

Chant  V.  — Salle  du  conseil.  — Le  roi  réunit  ses  ministres 
et  leur  demande  s'ils  connaissent  quelque  part  un  prince  qui 
puisse  convenir  à  sa  fille.  Le  doyen  des  ministres,  Sutchunda, 
propose  Açvaganda,  roi  de  Ratnapallava.  Mais  son   collègue 

1.  Le  texte  porte  otei  «  feuille  de  palmier  ». 


—  317  — 

Bhavatchyuta  combat  cette  proposition  et  dit  qu'il  serait  pré- 
férable de  songer  à  Bhavanandja,  roi  de  Kinnaragîta.  A  son 
tour,  Sudhâkara,  un  autre  ministre-,  pose  la  candidature  de 
Méghavâhana,  roi  de  Suréndrakânda,  dont  la  sœur  Djyôti- 
mâlâ  pourra  épouser  Arkakîrti.  Alors,  le  premier  ministre, 
Sumantri,  prend  la  parole  et  conseille  d'aller  consulter  le 
devin  Çatavindu  ;  les  autres  ministres  se  rangent  à  cet  avis. 
Le  roi  rentre  dans  son  palais,  puis  se  rend  chez  le  devin. 
Celui-ci  lui  annonce  que  l'époux  destiné  à  sa  fille,  depuis 
longtemps,  est  le  prince  Divistha,  second  fils  du  roi  de 
Bôdhana  dans  le  monde  terrestre  :  a  La  preuve  de  la  vérité 
de  ceci  »,  ajoute-t-il,  «  c'est  que  dans  une  lune  d'ici,  ce  Di- 
vistha vaincra  un  lion  formidable  dontil  déchirera  la  gueule.  )) 
Le  roî  Jatî  émerveillé,  va  raconter  l'aventure  à  sa  femme 
Vâyuvêgâ,  puis  il  communique  la  nouvelle  à  son  fils  et  à 
ses  ministres,  et  il  décide  d'envoyer  au  père  de  Divistha  un 
ambassadeur,  Marîtchi,  ave<;  une  lettre  qui  l'informera  du 
mariage  projeté. 

Chant  VL  —  Le  message.  —  Marîtchi  descend  dans  le 
bois  fleuri  où  depuis  une  semaine  l'attend  Drumakânta, 
suivant  les  ordres  de  Prajâpati.  Prévenu,  celui-ci  envoie  au- 
devant  de  l'ambassadeur  quatre  des  premières  femmes  de 
la  cour,  de  nombreux  serviteurs  et  ses  deux  fils.  On  l'amène, 
avec  un  cortège  triomphal,  au  palais  qu'on  a  afl;ecté  pour  sa 
résidence.  11  remet  au  roi  la  lettre  de  Jatî,  qui  est  une  de- 
mande formelle  en  mariage.  Pradjâpati  objecte  la  différence 
de  natures  entre  les  Vidyâdharas  et  les  hommes.  L'ambas- 
sadeur le  réfute  par  des  arguments  mythologiques  et  le  roi  se 
rend.  Marîtchi  retourne  chez  Jatî,  comblé  d'honneurs  et  de 
présents. 

Chant  VU. — Mort  du  lion. —  Marîtchi  rend  compte  au  roi 
Jati  de  son  voyage  ;  le  roi  consulte  ses  ministres,  et  ils  lui 
conseillent  d'attendre  un  mois,  puisque  le  devin  aannoncéque 


—  318  — 

dans  cet  espace  de  temps  Divistha  devait  accomplir  un 
exploit  caractéristique.  Cependant  Açvaganda,  un  des  rois 
Vidyâdharas  qui  aspiraient  à  la  main  de  Svàyamprabhâ, 
apprend  par  le  purôhita  Çatavindu  l'existence  du  jeune 
prince  de  Bôdhana qui  est  son  rival  prédestiné.  L'orgueilleux 
monarque  sourit  avec  dédain,  mais  sachant  que  les  avis  des 
sages  ne  sont  pas  sans  portée,  il  consulte  ses  ministres  et,  sur 
leur  conseil,  envoie  des  messagers  à  Pradjâpati  pour  lui  ré- 
clamer un  tribut  :  mille  kôti  d'or,  mille  danseuses  de  toute 
beauté,  de  la  nacre,  des  perles,  du  corail,  de  l'argent,  des  vê- 
tements de  brocart,  des  défenses  d'éléphants,  des  éventails 
et  beaucoup  d'autres  choses  en  abondance.  Après  avoir 
hésité,  Pradjâpati  consent  à  payer  le  tribut  demandé,  il  réunit 
ces  objets  et  ces  femmes  et  les  fait  remettre  aux  messagers 
qui  se  préparent  à  repartir.  A  ce  moment,  surviennent  les 
princes  royaux  qui  s'étonnent  et  s'informent.  Divistha,  trans- 
porté décolère,  congédie  les  messagers  avec  un  refus  formel. 
Ceux-ci,  n'osant  rapporter  ce  refus  à  leur  roi,  en  avertissent 
le  ministre  Harimandju  qui  s'avise  de  l'expédient  suivant.  Il 
envoie  sur  la  terre  un  Vidyâdhara,  Harikêtu,  qui,  sous  la 
forme  d'un  lion  terrible,  ravage  le  Sind  ettoutle  pays  qui  en- 
vironne Bôdhana.  Les  deux  jeunes  princes  vont  le  combattre; 
le  lion  magique  se  réfugie  dans  une  sombre  grotte  de  la  mon- 
tagne et  y  disparaît.  Mais  il  s'y  trouve  un  lion  véritable  que 
Divistha  saisit  par  la  crinière  ;  puis  lui  prenant  les  mâchoires 
dans  ses  mains  robustes,  il  le  met  en  pièces,  aux  applaudis- 
sements des  dieux  et  des  hommes.  Les  deux  princes  rentrent 
en  triomphe  dans  la  capitale  et  reçoivent  les  félicitations  de 
leur  père. 

Chant  VIII.  — Mariage.  —  Svalanjati,  apprenant  ce  fait 
glorieux,  veut  hâter  la  conclusion  du  mariage  de  sa  fille  avec 
Divistha.  Il  se  rend  à  Bôdhana,  au  milieu  d'un  cortège  ma- 
gnifique, où  ont  pris  place  les  cinq  mères  de  Svàyamprabhâ 


—  319  — 

(la  directrice  des  jeux,  la  nourrice  au  sein,  la  nourrice  sèche, 
la  servante,  la  surveillante),  après  avoir  confié  à  huit  princes 
distingués  le  gouvernement  de  ses  États  pendant  son  absence. 
En  route,  Amrtaprabhâ,  compagne  de  Svayamprabhâ,  lui 
fait  admirer  les  pays  que  l'on  traverse  et  lui  en  raconte  les  lé- 
gendes, notamment  celle  de  la  Gangâ.  Arrivés  dans  le  pays 
de  Surami,  les  voyageurs  célestes  s'arrêtent  près  de  Bôdhana 
et  s'y  installent  dans  des  habitations  improvisées,  tandis 
que  Marîtchi  va  prévenir  Pradjâpati.  Celui-ci  s'empresse, 
conformément  aux  rites  et  aux  convenances,  d'aller  chercher 
son  hôte  en  grand  apparat  :  la  rencontre  des  deux  cortèges 
fut  comme  la  réunion  de  la  Gangâ  et  de  la  Yamunâ.  Les 
femmes  se  font  un  accueil  empressé.  Vidjaya  et  Divistha 
fraternisent  avec  Arkakîrti.  Svalanjati  présente  à  Pradjâpati 
sa  future  belle-fille^  qui,  au  premier  aspect  de  Divistha,  en 
est  subitement  éprise.  Le  mariage  s'accomplit  avec  des  céré- 
monies magnifiques. 

Chant  IX.  —  Royauté.  —  Cependant,  des  messagers 
viennent  annoncera  Svalanjati  qu'Açvaganda,  alliéaux  autres 
rois  Vidyâdharas,se  prépareàvenir  l'attaquer.  Ils  lui  racontent 
qu'Açvaganda,  instruit  par  Harikêtu  de  ce  qui  s'est  passé  au 
Çurami,  de  l'ambassade  de  Marîtchi,  de  la  mort  du  lion,  du 
mariage  de  Divistha,  a  été  pris  d'un  accès  de  colère  épou- 
vantable. Les  rois  Vidyâdharas  ont  partagé  ses  sentiments 
et  ont  juré  de  prendre  part  à  sa  vengeance  ;  les  chefs  de  son 
armée,  Vadjraganda  et  Kanakatchitra,  lui  ont  promis  que  la 
victoire  serait  prompte  et  facile.  Jati  communique  ces  nou- 
velles à  ses  guerriers,  à  son  fils,  à  son  gendre,  à  Vidjaya,  à 
Pradjâpati.  Ils  ne  sont  point  effrayés  et  se  disposent  à  recevoir 
l'ennemi.  Surviennent  deux  Gandharvas,  parents  et  en- 
voyés d'Açvaganda,  qui  demandent  la  remise  entre  leurs 
mains  de  Svayamprabhâ  ou  de  la  tête  de  Divistha.  Celui-ci,  à 
ces  paroles  insolentes,  entre  en  fureur  et  chasse  les  mes- 


—  320  — 

sagers.  Açvaganda,  de  plus  en  plus  irrité,  envoie  sur  la 
terre  les  armées  alliées,  avec  ordre  de  tuer  Jati,  Divistha  et 
tous  les  autres  «  rebelles  ».  Les  armées  descendent  sur  la 
terre  et  en  viennent  aux  prises  avec  Jati  et  les  siens  ;  le 
combat  est  long  et  acharné,  le  sang  coule  à  flots,  les  ca- 
davres couvrent  le  sol  ;  enfin  les  Vidyâdharas  sont  mis  en 
fuite.  Açvaganda  envoie  de  nouvelles  troupes,  des  soldats 
d'élite;  la  bataille  reprend  plus  violemment  que  jamais,  et  les 
chefs  des  deux  partis  en  viennent  aux  mains  ;  la  victoire 
reste  encore  aux  habitants  de  la  terre.  On  poursuit  les  vaincus . 
Divistha  chevauche  dans  les  airs  le  milan  Garuda,  et 
maniant  les  propres  armes  de  Vichnou,  met  à  mort  Açva- 
ganda, ses  frères  et  ses  derniers  partisans.  Les  Vidyâdharas 
s'humilient  devant  lui.  Il  montre  à  toussa  puissance  et  se 
révèle  comme  étant  Vâçudêva,  en  arrachant  une  montagne 
tout  entière  et  en  la  replaçant  sur  sa  base.  Il  remplace  par 
des  amis  les  rois  tués  dans  la  bataille;  il  donne  à  son  beau- 
père  TEmpire  des  Vidyâdharas  et  revient  se  reposer  auprès  de 
son  épouse  chérie  Svayamprabhâ. 

ChantX. — Svayamvara.  —  Leur  bonheur  fut  sans  mélange 
et  sans  trouble.  Leur  vie  se  passait  dans  les  plaisirs,  les  jeux 
et  les  délices.  Divistha,  suivant  l'usage,  avait  pris  d'ailleurs 
un  nombre considérabled'épouses  secondaires.  Svayamprabhâ 
lui  donna  deux  enfants:  un  fils  qu'on  appela  Vidjaya,  et  une 
fille  plus  jeune  de  cinq  ans,  Djyôtimâlâ  ;  ces  enfants  of- 
frirent en  eux  la  réunion  de  toutes  les  perfections  ;  leur  nais- 
sance fut  l'occasion  de  réjouissances  générales.  En  même 
temps,  dans  le  monde  des  Vidyâdhara,  la  femme  d'Arkakîrti, 
Djyôtimâlâ,  mettait  au  monde  deux  enfants,  un  garçon 
Amrtadéça  et  une  fille  Sutârâ.  Ces  enfants  grandirent  et  les 
jeunes  filles  devinrent  nubiles.  Pour  marier  convenable- 
ment les  jeunes  princesses,  on  organisa  deux  svayamvaras, 
et  il   se  trouva  que  les    deux   cousines    choisirent    leurs 


—  321  — 

cousins  germains.  On  maria  donc  Vidjaya  avec  Sutârâ  et 
Amrtadêça  avec  Djyôtimâlâ  ;  ces  derniers  remontèrent  au 
pays  des  Vidyâdharas,  tandis  que  les  premiers  demeurèrent  à 
Bôdhana.  La  prospérité  continua  à  régner  sur  la  terre  et  dans 
le  ciel. 

Chant  XI.  —  Renoncement.  —  Le  roi  Pradjâpati,  dont 
le  bonheur  était  égal  à  celui  qu'on  éprouve  dans  le  monde 
d'Indra,  voyant  tout  prospérer  autour  de  lui,  se  dit  que  cette 
situation  agréable  ne  pourrait  être  que  le  résultat  des  bonnes 
actions  de  ses  vies  passées  :  «  Il  est  nécessaire  par  conséquent 
que  j'acquière  de  nouveaux  mérites,»  dit-il,  et  il  réunit  ses 
ministres  pour  leur  faire  part  de  ses  intentions.  Il  se  rend 
processionnellement  au  temple  d'Arhat  où  le  dieu  suprême 
s'est  incarné  en  un  ascète  plein  de  science,  qui  enseigne  au 
roi  la  voie  de  la  certitude,  le  moyen  d'éviter  la  renaissance, 
et  qui  l'éclairé  sur  la  nature  des  quatre  sortes  d'êtres  :  gens 
des  mondes  inférieurs,  animaux,  hommes  et  dieux.  Le  roi 
et  ses  ministres  prennent  définitivement  la  résolution  de  se 
retirer  du  monde. 

Chant  XII.  —  Libération.  —  Pradjâpati  fait  part  de  son 
dessein  à  ses  fils  et  leur  laisse  le  pouvoir.  Suivi  par  ses  mi- 
nistres, par  ses  courtisans  et  par  ses  femmes,  il  renonce  à 
tout  l'appareil  royal  et  se  voue  à  l'acétisme  absolu.  Suivant 
les  instructions  du  sage  des  sages,  il  dompte  ses  cinq  sens, 
triomphe  de  l'amour  et  des  autres  grandes  fautes,  et  obtient 
le  bonheur  infini  «  en  s'unissant  à  la  vierge  suprême  qui  est 
la  libération  ». 

Je  vais  maintenant  traduire  textuellement  quelques  pas- 
sages caractéristiques  du  poème. 

INVOCATION 

Ceux  qui  adorent  prosternés   les  pieds  de  l'essence  lumi- 

22 


—  322  — 

neuse  qui  se  tient  brillante  au  sommet  de  tout  chasseront 
l'activité,  car  leur  intelligence  étendue  n'aurait  pas  suffi  à 
les  débarrasser  de  la  masse  infinie  des  actions  victorieuses. 

PRÉFACE 

1.  Je  me  propose  de  raconter  ici  l'histoire  du  grand  prince 
aux  yeux  brillants  qui  mit  en  pièces  le  lion  formidable  aux 
yeux  furieux,  aux  jours  anciens  où  celui  qui  était  comme  un 
joyau  splendide  pour  le  monde  vint  adorer  les  deux  pieds 
illustres  qui  détruisent  la  violente  activité. 

2.  J'ai  composé  du  tamoul  avec  une  affection  abondante 
pour  dire  les  qualités  du  grand  prince  qui  brandit  le  disque 
puissant  ;  s'il  y  a  dans  mon  récit  quelques  fautes,  c'est  que 
ceux  qui  sont  grands  par  leur  science  sont  seuls  exempts 
de  faiblesses. 

3.  Quoiqu'on  ait  dit  que  ma  langue  avait  commis  de 
grandes  fautes,  il  a  été  reçu  dans  l'assemblée  des  sages  où 
figuraient  les  princes  sacrés  à  la  guirlande  mielleuse  et  à  la 
lance  glorieuse,  le  chef  du  tamoul  pur  qui  s'appelle  Sêndan, 
le  roi  dont  la  poitrine  porte  un  magnifique  ornement. 

4.  Mes  fautes  dans  mon  projet  de  dire  les  aventures  du 
grand  prince  aux  yeux  ardents  ne  sont  plus  des  fautes  aux 
yeux  des  sages  ;  il  y  a  des  gens  qui  saluent  de  la  mainles 
taches  même  de  la  lune  lorsqu'elle  se  lève  dans  le  vaste  ciel 
pour  dissiper  les  ténèbres. 

5.  J'ai  suivi  la  marche  du  récit  dans  lepurâna  aux  belles 
paroles  qui  a  pour  sujet  la  fille  du  roi  à  la  couronne  par- 
fumée, empereur  des  Vidyâdharas.  la  femme  aux  pieds  ornés 
de  bracelets  et  tendres  comme  le  coton,  la  princesse  qui  res- 
semblait à  un  rameau  de  vandji  [Menispermum  cordifoUum) 
plein  de  fleurs. 


—  323 


CHANT  II 

24.  Mais  ses  déesses  qui  avaient  apparu  pour  illustrer  les 
races  des  rois  qui  dressent  le  makara,  aux  seins  miirs  qui  se 
gonflent  et  inspirent  de  la  pitié  pour  la  taille  prête  à  se 
rompre,  aux  bijoux  superbes, 

25.  Plus  cruelles  que  la  famine,  aux  vastes  pubis,  aux  tailles 
fatiguées  sous  le  poids  des  jeunes  seins  ornés  de  poudres 
brillantes,  femmes  semblables  à  des  rameaux  qui  s'agitent, 
avaient  des  fleurs  en  bouquets  splendides  ; 

26.  Épanouies  pour  l'amour,  avecleur  chasteté  rayonnante, 
leurs  chevelures  sombres  qui  pendaient  bien  adaptées  à  leur 
beauté,  leurs  bras  brillants  qui  s'agitaient  comme  une  vapeur 
légère,  leurs  yeux  de  glaives  ardents  et  troublants  sous  leur 
parure  parfumée, 

27.  Elles  étaient  mille,  mais  les  principales  déesses,  dont 
la  beauté  était  vraiment  descendue  du  vaste  ciel,  étaient  au 
nombre  de  deux  ;  on  ne  pouvait  en  parler  sans  dire  qu'elles 
étaient  des  reines  divines  pareilles  à  de  rouges  nénuphars 
magnifiques  : 

28.  La  première  déesse,  Mrgâpati,  aux  vastes  seins  arrondis 
et  gonflés,  aux  douces  paroles  qui  humilient  l'épouse  du  roi 
des  armées,  mer  agitée  et  bruyante,  qui  semblait  un  mélange 
de  miel,  de  sucre  et  de  délicieuse  ambroisie,  et  sa  sœur  à  la 
chasteté  sans  égale  qui  s'appelait  Çaçî  et  qui  était  pareille  à 
la  divinité  de  ce  nom. 

29.  Ces  femmes  aux  chevelures  parfumées  brillaient 
comme  un  tilaka  parmi  toutes  les  femmes  aux  beaux  bijoux, 
semblables  à  des  bouquets  de  fleurs  d'or  ;  c'étaient  comme 
deux  açôka  féconds  qui  s'épanouissent  et  produisent  des 
perles  magnifiques  à  la  saison  vasanta. 


—  324  — 

30.  Toutes  deux  étaient  chères  au  roi  et  ne  faisaient  qu'une 
seule  dans  son  cœur;  elles  lui  étaient  comme  une  seule  déesse 
de  la  félicité  toujours  favorable,  par  leur  babil  charmant, 
par  leur  amour  renouvelé  chaque  jour,  par  leur  beauté  re- 
doutable aux  dieux. 

CHANT  V 

125.  Au  moment  oîi  le  roi  dont  la  gloire  rayonnait  montait 
brillamment  au  palais  splendide  et  agréable,  l'astre  aux 
rayons  joyeux  qui  jette  partout  sa  lumière  en  répandant  la 
chaleur  arrivait  au  milieu  de  sa  course. 

126.  Les  douces  cannes  à  sucre  aux  yeux  abondants 
faisaient  autant  de  bruit  que  les  blanches  perles  des  belles 
qui  mâchent  le  bétel  gracieuxqu'ont  préparé  leurs  mains  ;les 
abeilles  quittaient  la  place  et  les  coquillages  bruissaient 
avec  les  rameaux. 

127.  Dans  l'enceinte  divine  abondaient,  avec  lafête  joyeuse 
des  chants,  les  drapeaux  marquant  l'endroit  du  sacrifice,  les 
sandals  parfumés,  les  guirlandes  pleines  d'un  miel  abondant 
où  bourdonnaient  les  essaims  bruyants  des  abeilles. 

128.  Pendant  que  les  jeunes  belles  se  baignaient  dans  les 
eaux  des  étangs  où  se  produisent  les  vertes  émeraudes  et  des 
lacs  où  fleurissent  les  nénuphars  couverts  de  gouttes  d'eau, 
les  abeilles  se  confondaient  avec  les  pétales  des  fleurs  qu'elles 
déchiraient  et  jetaient  autour  d'elles. 

129.  L'eau  des  rivières  où  les  nénuphars  tombent  en  pous- 
sière luttait  avec  les  seins  des  belles,  et  dans  les  étangs  s'en 
allaient  les  poudres  odoriférantes  mélangées  du  safran  et  du 
sandal  dentelles  se  décoraient. 

130.  Les  nymphœas  qui  croissent  dans  les  beaux  lacs 
couvraient  de  leurs  pétales  les  digues  et  embellissaient  le  lac; 
les  seins,  les  bouches  et  les  chevelures  des  belles  brillaient 


—  325  - 

au  milieu  des   fleurs  comme  la  face  resplendissante  de  la 
lune. 

131.  Les  belles  filles  se  plongeant  dans  l'eau  abondante  des 
étangs,  avec  leurs  yeux  rouges  dont  les  poudres  colorantes 
étaient  enlevées,  se  baissaient  en  se  lançant  des  pétales  des 
nénuphars  qui  les  cachaient  aux  regards  de  leurs  mères. 

132.  Les  gouttes  d'eau  parfumées  de  sandal  sautaient  en 
l'air,  les  éventails  s'y  agitaient  et  l'eau  en  retombait  en  pluie, 
tandis  qu'elles  s'amusaient  à  jeter  des  fleurs  de  nénuphars 
sur  le  sable  humide  des  tentes. 

133.  Celles  qui  ressemblaient  à  des  lianes  précieuses  et 
brillantes  comme  des  miroirs  ornés  de  pierres  précieuses, 
couvraient  de  fleurs  les  sièges  déjà  décorés  des  fruits  magni- 
fiques du  lotus. 

134.  Au  moment  oîi  le  soleil  était  au  milieu  de  sa  course, 
à  l'heure  déterminée  par  les  sages  habiles  dans  la  lecture  des 
livres  sur  la  science  du  temps,  on  vint  louer  intelligemment 
les  pieds  du  roi  et  le  reste. 

135.  Les  femmesaux  seins  magnifiques  pénétrèrenten chan- 
tant dans  le  palais  du  roi  plein  de  grâces  ;  au  bruit  agréable 
des  instruments  de  musique  harmonieux,  le  prince,  orné 
d'une  belle  guirlande  de  fleurs,  prit  une  nourriture  ex- 
cellente. 

136.  Le  prince,  dont  le  corps  était  orné  de  bijoux  éclatants 
qui  portait  une  guirlande  de  fleurs  de  jasmins  épanouies,  avec 
son  collier  de  fleurs  mielleuses,  s'en  alla  dans  la  rue  décorée 
de  fleurs  fraîches  aux  pétales  ravissants. 

137.  Ses  anneaux  d'or  et  de  pierres  précieuses  faisaient 
du  bruit,  les  abeilles  et  les  bourdons  se  pressaient  en  mur- 
murant sur  sa  guirlande  aux  fleurs  accumulées,  et  à  chaque 
pas  du  roi,  ses  pendants  d'oreille  en  forme  de  makara 
lançaient  de  longs  éclairs  lumineux. 

138.  Les  Vidyâdharas     accomplis,    avec  leurs  javelots 


—  326  — 

brillants  sous  l'enduit,  les  lances  étincelantes  qu'ils  tenaient 
à  la  main  ainsi  que  leurs  épées,  les  fourreaux  qui  se  voyaient 
à  leurs  côtés  et  les  cuirasses  qui  les  recouvraient,  entouraient 
de  toute  part  le  roi  dont  l'Empire  était  immense, 

139.  Salué  de  la  main  par  les  femmes  aux  paroles  douces 
comme  le  sucre,  qui  répandaient  devant  lui  une  pluie  de 
poudres  parfumées  et  des  fleurs  où  se  pressaient  les  abeilles, 
le  prince  à  la  guirlande  de  fleurs  en  boutons  arriva  gracieu- 
sement à  la  large  porte  de  l'ermitage  du  devin  à  la  science 
accomplie. 

140.  Le  sage  parfait  prononça  une  bénédiction  sur  le  roi, 
en  employant  les  paroles  de  bon  augure  et  en  disant  :  «  Sois 
toujours  victorieux,  ô  notre  roi  aux  fleurs  mielleuses,  qui 
as  daigné  venir  ici  et  qui  rends  notre  race  illustre  !  » 

141.  Le  roi  se  dirigea  vers  un  siège  superbe  sous  un  por- 
tique séparé,  au  bruit  des  abeilles  qui  se  pressaient  auprès  du 
miel  qui  coulait  abondamment  des  fleurs  dont  le  vent  em- 
portait au  loin  le  parfum  mêlé  à  la  fumée  odoriférante  de 
l'agalloche. 

142.  Après  s'être  assis  gracieusement  sous  ce  portique  où 
le  miel  coulait  abondamment  et  qui  ressemblait  à  un  bouquet 
de  sandals  aux  fleurs  épanouies,  le  prince  aux  bijoux 
éclatants  raconta  longuement  l'affaire  de  sa  fille  pendant 
que  les  Vidyâdharas,  comprenant  la  situation,  s'éloi- 
gnaient. 

143.  Après  que  le  prince  qui  portait  un  bracelet  d'oii 
partaient  d'ardents  éclairs,  dont  les  bras  semblables  à  une 
masse  de  palmiers  étaient  ornés  de  guirlandes  de  fleurs,  lui 
eut  expliqué  le  trouble  de  son  esprit,  l'habile  à  la  devination 
réfléchit  et  prit  la  parole  en  ces  termes  ; 

144.  Le  sage,  dont  la  langue  était  versée  dans  l'explication 
des  livres  vénérables  parla  ainsi,  après  avoir  réfléchi  lon- 
guement à  la  destinée  de  la  belle  à  la  taille  fatiguée,  dont  la 


—  327  — 

beauté  est  adorable  comme  celle  d'une  guirlande  magnifique 
dont  les  fleurs  répandent  un  miel  parfumé  : 

145.  «  Une  beauté  s'est  rencontrée,  passant  à  droite  du  roi 
aux-  guirlandes  convenables  à  des  belles,  aux  colliers 
brillants  de  l'éclat  de  la  blanche  lune  épanouie,  comme  une 
lune  terrestre  ;  si  l'on  songe  à  ce  que  ce  pouvait  être,  c'était 
la  déesse  de  la  fortune  qui  venait  à  ta  rencontre. 

146.  »  O  toi  dont  l'épée   fait  connaître  au  loin  la  gloire, 
.pourrais-je  aujourd'hui  dire,  par  la  parole,  tout  le  destin  de 

la  belle  délicate,  à  la  taille  mince  comme  l'éclair,  aux  beaux 
seins  ornés  de  bijoux  d'or  étincelants  ? 

147.  »  Dans  la  parole  sainte  qu^a  dite  aux  jours  primitifs 
le  Glorieux  qui  tient  la  roue  rayonnante  de  la  vertu,  est  in- 
diqué clairement  le  héros  destiné  à  cette  jeune  fille  aux  seins 
superbes,  aux  cheveux  parfumés  de  fleurs,  qui  ressemble  àun 
joyeux  rameau.  » 

148.  En  entendant  le  sage  parler  avec  précision  du 
bonheur  réservé  à  cette  jeune  fille  semblable  à  un  paon,  le 
roi  dont  le  corps  brillait  de  sa  prééminence,  apparut  joyeux 
comme  un  de  ces  êtres  pleins  de  vérité. 

149.  Il  demanda  :  «  Explique  comment,  dans  la  parole 
sacrée  du  principe  suprême  qui  préside  aux  destinées  du 
monde,  il  est  question  de  ma  fille,  »  et  le  sage  lui  exposa 
l'antique  histoire  : 

150.  «  Au  milieu  des  trois  mondes  différents,  sont  les  îles 
dispersées  dans  les  eaux  immenses  et  le  continent  du  Sind  ; 
les  décrire  une  à  une,  en  disant  tous  leurs  noms,  dépasserait 
tous  les  nombres  possibles. 

151.  »  Ce  cercle  terrestre  porte  à  son  centre  le  haut  mont 
Mandara  entouré  tout  autour  de  collines  superbes  ;  il  s'y 
trouve  de  grands  arbres  naval  aux  frais  rameaux  qui  se 
penchent. 

152.  »  Ce  cercle  terrestre  est  entouré  de  la  vaste  mer  aux 


—  328  — 

ondes  agitées,  ô  roi  dont  le  javelot  donne  la  mort,  qui  est 
une  des  quatorze  mers  aux  eaux  montagneuses  dont  sont 
coupées  les  sept  divisions  où  courent  les  rivières  originaires 
des  montagnes. 

153.  »  Mais,  dans  ce  cercle,  il  y  a  deux  parties  qui  se  sont 
produites  dans  la  suite  des  âges;  parmi  ces  deux  parties,  celle 
du  sud,  ô  toi  dont  la  louange  est  difficile  à  faire,  est  le  Bha- 
ratakhanda. 

154.  »  C'est  la  terre  bienheureuse  oîi  sont  les  bois  magni- 
fiques de  kalpakas  et  où  abondent  les  pierres  précieuses  ;  là, 
lorsque  trois  âges  se  furent  accomplis,  au  retour  de  l'âge 
nouveau,  apparut  Brahmâ. 

155.  »  Il  créa  là  le  soleil  aux  rayons  ardents,  l'astre  aux 
frais  rayons  et  tous  les  autres  organismes  ;  et  c'est  ainsi  que 
se  passa  ce  temps  heureux,  cercle  immense  de  créations. 

156.  »  A  la  fin  du  troisième  âge,  comme  plusieurs  douleurs 
détruisaient  les  divers  êtres,  notre  Seigneur  apparut,  roue 
antique  de  la  vertu,  principe  éclatant  de  lumière,  qui  s'étendit 
dans  les  sept  mondes. 

157.  »  Aux  pieds  nus  de  notre  Seigneur  qui  prodiguait  les 
grâces  et  qui  était  le  principe  de  la  roue  de  la  vertu,  le 
monde  se  prosternait  demandant  la  protection  de  sa  grâce, 
pour  obtenir  le  bonheur  par  la  destruction  de  la  noire  obscu- 
rité. 

158.  »  On  l'appelait  le  seigneur  à  la  parole  sainte  et  excel- 
lente, le  vertueux  inaccessible  aux  sens  et  à  leurs  organes, 
l'auteur  des  qualités,  des  races  et  de  la  voie  qui  chasse  la 
faim  destructrice  des  infortunés. 

159.  »  Alors,  pendant  que  s'épanouissait  sa  sainte  grâce,  il 
y  eut  un  roi  du  monde  qu'entoure  l'océan  aux  flots  qui  se 
gonflent,  un  prince  au  large  parasol  dressé,  qu'on  nommait 
Bharata  au  javelot  éclatant  comme  le  soleil  supérieur. 

160.  »  Il  gouvernait  le  monde  en  y  faisant  adorer   notre 


—  329  — 

Seigneur.  Ce  Bharata  au  bras  renommé  pour  sa  force,  aux 
éléphants  dont  le  front  est  orné  d'un  chaperon,  vint  adorer 
et  louer  les  pieds  roses  du  chef  des  temps,  en  lui  offrant  des 
fleurs  épanonies. 

161.  ))  Adorant  sa  couronne  ornée  de  pierres  précieuses 
éclatantes,  le  roi  l'interrogea  sur  l'avenir,  et  le  prince  ré- 
pondit, par  une  voix  qui  retentit  dans  les  nuages  amoncelés 
d'où  tombe  une  pluie  d'ambroisie  au  fond  du  ciel  tremblant 
d'effroi  : 

162.  ))  Il  y  aura  vingt-quatre  seigneurs  dont  je  suis  le  pre- 
mier, deux  fois  six  monarques  dont  tu  es  le  premier  ;  quant 
aux  sauveurs,  depuis  les  plus  anciens,  il  n'y  en  aura  que 
neuf,  et  il  n'y  en  aura  que  neuf  incarnations. 

163.  »  0  roi  !  ton  fils  Marîtchi  possédera  Bhôdana  qui 
est  entourée  de  remparts  d'or  brillants;  delà  race  de  ce  guerrier 
au  javelot  meurtrier,  aux  anneaux  superbes,  apparaîtra  un 
prince  qui  sera  le  premier  de  ces  sauveurs  incarnés . 

164.  »  Si  l'on  veut  savoir  ce  que  fera  ce  sauveur  pour  une 
vierge  plus  belle  que  la  pure  montagne  blanche,  ce  juste 
prendra  l'âme  d'Açvagrîva  et  le  disque  vainqueur. 

165.  »  Divistha  s'avancera  avec  son  armée,  océan  de  chars 
superbes,  et  deviendra  le  seigneur  du  cercle  terrestre  brillant 
et  vertueux,  ô  Bharata  que  loue  toute  la  terre  !  »  Ainsi  parla 
le  dieu  des  dieux,  à  la  parole  sainte  et  magnifique. 

166.  «  Lecommencement,lafinetle  milieu  m'appartiennent, 
ainsi  que  la  propriété  du  monde  aux  eaux  agitées  1  »  dit-il, 
et  il  combla  de  joie  le  roi  des  rois  aux  javelots  meurtriers  ;  ô 
toi  qui  portes  une  guirlande  de  fleurs,  tel  est  le  récit  ancien  ! 

167.  «  Ce  jeune  héros  aux  bras  glorieux  et  robustes  comme 
leroc,  annoncédans  le  livre  antique,  a  quitté  le  ciel  lumineux 
et  a  apparu  joyeusement  sur  la  terre  qu'entourent  les  eaux 
qui  se  gonflent. 

168.  »  Ce  bienfaiteur  est  le  plus  jeune  des  deux   fils  du 


~  330  — 

prince  dont  les  bras  sont  faits  pour  la  lutte  et  qui  porte  des 
anneaux  superbes,  celui  qui  possède  Bôdhana  aux  remparts 
d'or  dans  le  pays  prospère  de  Surami . 

169.  »  Pour  s'unir  à  la  poitrine  divine  de  ce  prince  à  la 
guirlande  de  fleurs  mielleuses  qui  est  venu  caché  sous  un 
corps  humain  pour  protéger  la  terre  boisée  aux  eaux  abon- 
dantes, ta  fille  seule  convient  ! 

170.  »  Quand  lu  la  lui  auras  donnée,  il  tuera  l'orgueilleux 
qui  aura  pris  l'empire,  et  par  sa  fortune  constante  il  te  don- 
nera deux  princijjautés  !  »  11  dit,  et  le  roi  ressentit  une  joie 
immense. 

171.  «  A  ce  que  je  viens  de  te  dire  sur  le  prince  à  la  guir- 
lande de  fleurs  mielleuses,  s  "applique  le  signe  suivant:  dans 
un  jour  lunaire  d'ici,  Divistha  déchirera  la  gueule  d'un  lion. 
Sache-le,  »  ajouta-t-il. 

172.  A  ces  mots  du  prophète,  le  roi  plein  de  gloire  fut 
plongé  dans  une  joie  sans  pareille,  et  il  couronûa  celui  qui 
ne  clignait  jamais  des  yeux  d'une  belle  guirlande  de  fleurs 
toujours  fraîches, 

173 .  Et  il  lui  donna  à  gouverner  le  pays  fertile  et  fécond 
de  Djyôlimâlâ,  arrosé  par  les  eaux  abondantes  de  la  pluie 
d'or  qui  tombe  du  ciel  où  sont  tous  les  trésors  sortis  de  l'océan 
décrit  dans  le  livre  de  la  déesse  qui  préside  aux  deux  mondes. 

174.  Le  roi  s'en  alla  alors  et  se  rendit,  comme  le  soleil  se 
couchait,  au  palais  de  Vâyuvêgâ  ;  et  faisant  connaître  à  la 
femme  dont  la  démarche  était  gracieuse  comme  celle  d'un 
cygne  la  grandeur  de  leur  fille  et  la  suite  des  événements,  il 
lui  dit  : 

175.  «  Un  bosquet  oîi  n'abondent  pas  les  jeunes  fleurs,  un 
étang  où  ne  sourient  pas  les  jeunes  fleurs  du  lotus,  une  nuit 
où  le  ciel  n'est  pas  orné  du  jeune  croissant,  une  maison  où  il 
n'y  a  pas  d'enfants,  se  ressemblent. 

176.  »  La  famille  apparaît  florissante  comme  le  précieux 


—  331  — 

kalpaka  :  le  chef  en  est  la  tige,  Tépouse  qui  pratique  ferme- 
ment la  vertu  en  représente  les  rameaux,  les  beaux  enfants 
en  sont  les  boutons  de  fleurs  et  les  anciens  y  sont  les  abeilles. 

177.  »  Il  est  facile  d'obtenir,  avec  des  éléphants  à  la  trompe 
creuse  et  à  la  longue  tête  ornée  d'un  bandeau,  de  l'or  et  des 
pierres  précieuses;  mais,  sur  cette  terreaux  eaux  profondes, 
il  est  difficile  aux  femmes  d'avoir  des  enfants  qui  prospèrent 
par  leur  grandeur. 

178.  »  Une  lumière,  même  seule  dans  une  lampe,  suffira  à 
éclairer  une  maison,  brisant  les  chaînes  de  l'abondante  obscu- 
rité; ô  toi  dont  les  bijoux  superbes  ont  des  pierres  précieuses 
o\x  ne  se  pose  aucune  poussière,  une  fille  suffit  pour  remplir 
les  divers  points  cardinaux. 

179.  »  La  grosse  perle  qui  est  née  dans  le  sein  d'un  coquil- 
lage dont  les  spirales  vont  adroite  est  un  objet  très  précieux; 
ô  toi  qui  ressembles  à  un  paon  magnifique  qu'on  admire,  le 
rameau  fleuri  que  tu  as  produit  sera  beau  pour  tous  ceux 
qui  ont  des  rapports  avec  notre  famille. 

180.  »  Oubliant  la  parole  qui  compare  celles  qui  n'ont  pas 
d'enfants  à  un  arbre  (sec),  tu  es  devenue  une  fortune  sem- 
blable au  ciel  rouge,  le  jour  oià  est  né  ce  jeune  croissant  qui 
éclairele  ciel  et  fait  sourire  l'eau. 

181.  »  Détruisant  la  vaste  activité,  ta  fille,  comme  la  déesse 
d'or,  comme  la  déesse  de  la  fleur,  sera  demain,  pour  le  dieu 
brillant,  de  l'ambroisie  et  une  divinité!  Ainsi  a  parlé  claire- 
ment le  prophète  qui  connaît  le  livre  sacré.  » 

182.  A  ces  paroles  du  héros  dont  les  éléphants  mâles  sont 
pleins  d'ardeur,  celle  qui  portait  une  guirlande  de  fleurs 
sur  sa  chevelure  épaisse  fut  au  comble  delà  joie;  retenant 
son  sourire  qui  allait  s'épanouir  en  perles  brillantes,  elle  se 
proterna  et  dit  : 

183.  «0  roi  des  rois  à  la  couronne  ornée  de  pierres  pré- 
cieuses et  d'or!  cette  jeune  vierge  a  été  favorisée  par  ta  grâce  ; 


—  332  — 

s'ils  n'obtiennent  pas  la  grâce  des  rois,  leurs  enfants  ne  sau- 
raient obtenir  la  moindre  grandeur. 

184.  »  C'est  parla  grâce  de  votre  seigneurie  aux  anneaux 
retentissants  qui  luttent  avec  les  joyaux  fleuris  des  rois  dont 
les  éléphants  caressent  leurs  femelles,  que  cette  belle  à  la 
chevelure  parfumée,  à  la  démarche  délicate,  a  obtenu  sa 
beauté.  » 

185 .  Le  roi  à  la  couronne  ornée  de  pierres  précieuses  fut 
réjoui  par  les  douces  paroles  mielleuses  de  sa  vertueuse 
épouse,  et  il  reposa  là,  au  détriment  de  la  guirlande  aux  fleurs 
parfumées,  pressant  sur  sa  poitrine  les  seins  magnifiques  de 
la  belle. 

186.  Le  lendemain,  le  prince  dont  la  large  main  brandit 
l'épée  meurtrière,  fit  appeler  son  fils  et  ses  ministres  et  leur 
dit  :  «  J'ai  pensé  d'abord  ceci,  puis  voici  l'histoire  que  m'a 
contée  le  sage  qui  a  étudié  les  livres  antiques.  » 

187.  Lorsque  le  roi  à  la  gloire  immuable  leur  eut  dit  la 
fortune  heureuse  de  sa  fille  aux  seins  gonflés  et  les  qualités 
du  prince  de  la  couleur  des  nuages  qui  lui  était  destiné,  les 
hommes  éminents  furent  remplis  de  joie  et  dirent  : 

188.  «  Nous  n'avons  aucun  doute  que  la  jeune  fille  à  la 
longue  chevelure  soit  une  divinité,  ô  roi  dont  la  lance  est 
ardente!  Il  convient  de  préparer  et  d'envoyer  un  message 
au  père  de  ce  Divistha,  roi  dont  la  lance  est  impétueuse  ! 

189.  »  Il  y  a  un  homme  instruit,  dont  la  parole  sait  ré- 
pondre ce  qu'il  faut  aux  objections  que  conçoit  un  homme 
instruit;  c'est  Marîtchi.  Nous  (conseillons  de)  l'envoyer,  car 
il  saura  lui  exposer  les  questions  de  race  et  les  autres .  » 

190.  A  ces  paroles  d'un  ministre  expérimenté,  le  roi  dit  : 
«  Faites  venir  le  vaillant  généreux.  »  Et  il  lui  remit  une  lettre 
sacrée  qu'il  écrivit  avec  soin.  Le  messager  se  prosterna  aux 
pieds  ornés  d'anneaux  du  grand  roi. 

191.  Sur  l'ordre  du  monarque,  Marîtchi  prit  son  chemin 


—  333  — 

dans  les  nuages  amoncelés  qui  remplissent  d'éclairs  le  vaste 
ciel,  et  il  descendit  dans  un  bosquet  qui  était  en  dehors  delà 
ville  d'or  qu'entoure  le  pays  fertile  de  Surami. 

192.  Comme  il  entrait  dans  le  bosquet  abondamment  fleuri 
qu'on  appelait  le  grand  massif  de  fleurs  nouvelles,  les  abeilles 
y  bourdonnaient  ardentes  en  s'unissant  aux  fleurs  dressées 
et  jonchant  le  sol  de  pétales  mielleux. 

CHANT  VII 

120.  Les  messagers  craignant  d'aller  saluer  les  anneaux 
brillants  de  leur  roi,  virent  Haridmandju  qui  pouvait  réflé- 
chir sur  ce  qu'il  convenait  de  faire  et  lui  racontèrent  leur 
visite  au  roi  plein  de  gloire,  les  dons  qu'il  leur  avait  faits  : 
trésors,  troupes  de  femmes  aux  démarches  de  paon, 

121.  Puis  l'arrivée  des  jeunes  princes,  le  rire  méprisant  du 
héros  aux  yeux  ardents  et  sa  colère  enflammée,  ainsi  que 
toutes  les  paroles  qu'il  avait  adressées  aux  porteurs  de  lances 
brillantes;  ils  dirent  tout  cela  au  ministre  dont  les  pendants 
d'oreilles  étincelaient. 

122.  Quand  Harimandju,  l'heureux  qui  avait  acquis  la 
science  difficile  à  obtenir,  entendit  ce  récit,  il  pensa  :  a  S'il 
apprend  ce  grand  affront,  le  souverain  ne  pourra  pas  le  sup- 
porter un  seul  moment;  comment  supprimer  ce  grand  en- 
nemi ?  »  Et  l'habile,  dont  la  poitrine  portait  une  guirlande 
où  bruissaient  les  abeilles,  s^absorba  dans  sa  méditation. 

123.  «  Le  prince  aux  joyaux  brillants  n'est  pas  encore  dé- 
veloppé et,  par  sa  jeunesse,  il  n'a  pas  encore  la  connaissance 
exacte  de  ce  qui  est  vrai  et  de  ce  qui  est  faux;  je  vais  ha- 
bilement lui  faire  voir  une  illusion,  et  je  le  ferai  prendre 
par  un  lion  qui  est  dans  la  montagne,  sur  lequel  il  s'élancera 
impétueusement.  » 

124.  Après  avoir  combiné  ceci  dans  son  esprit,  il  appela  le 


—  334  - 

Vidyâdhara  décoré  d'un  bel  ornement  qui  portait  le  nom  de 
Harikêtu,  et  racontant  à  ce  guerrier  aux  bras  de  roc  toute 
l'affaire,  il  lui  prescrivit  de  se  transformer  en,  un  faux  lion. 

125.  Le  cruel  prit  aussitôt  la  forme  d'un  lion  à  la  crinière 
ondulée  comme  la  flamme  qui  court  allumée,  aux  ongles 
puissants  qui  déchirent  les  entrailles  de  la  montagne,  aux 
défenses  recourbées  comme  la  lune  au  commencement  de 
son  voyage,  aux  yeux  ardents,  à  la  gueule  large  et  d'où 
sortait  une  voix  de  tonnerre;  et  il  partit. 

126.  Il  arriva  au  delà  de  l'Himalaya,  bordé  par  le  feuillage 
épais  des  bois,  pénétra  dans  le  pays  de  l'Inde  dont  les  guer- 
riers ont  des  bras  robustes  comme  des  rocs,  et  se  mit  à  rugir  ; 
les  montagnes  se  déchiraient  et  tremblaient,  la  terre  se  bou- 
leversait, le  triple  océan  mélangeait  ses  ondes  et  le  ciel 
s'agitait. 

127.  Les  forêts  tombaient  réduites  en  poussière,  les  ani- 
maux tombaient  pêle-mêle,  les  éléphants  et  leurs  femelles 
épouvantés  poussaient  des  cris  de  douleur,  les  écluses  s'écra- 
saient comme  la  paille  broyée  sous  Tenclume,  et  les  hommes 
s'affaissaient  tous  grinçant  des  dents  à  ce  bruit  terrible. 

128.  Après  l'avoir  vu  ainsi  transformé,  le  ministre  s'adressa 
aux  messagers  qui  lui  avaient  rapporté  ce  qui  s'était  passé 
avec  exactitude,  les  envoya  instruire  le  jeune  héros  ardent  à  la 
lutte  et  armé  des  armes  victorieuses,  en  leur  disant  :  w  Infor- 
mez-le de  tout  ceci  I  » 

129.  Alors,  les  messagers,  prenant  la  voie  des  nuages  re- 
tentissants, descendirent  et  se  rendirent  à  l'endroit  où  se  pro- 
menaient, entourés  de  leurs  armées  formidables,  les  princes 
aux  bijoux  ornés  de  pierres  précieuses  brillantes,  aux  an- 
neaux sonores,  fils  du  roi  de  Bôdhana  célèbre  par  ses  bos- 
quets fleuris,  et  dirent  : 

130.  «  Quand  nous  lui  avons  rapporté  le  refus  du  tribut, 
la  reprise  des  objets  préparés  pour  le  tribut,  et  les  invectives 


—  335  - 

que  tu  nous  as  adressées,  ô  prince,  en  disant  :  «  C'est  mal  !  » 
notre  roi  dont  la  large  main  est  armée  du  disque,  qui  a  de 
beaux  anneaux  sonores  et  dont  la  chevelure  est  parfumée,  a 
.souri  en  disant  :  a  C'est  bien  !  c'est  bien  1  » 

131.  «Après  qu'il  eut  appris  de  notre  bouche  que  tu  étais  un 
jeune  prince  portant  un  collier  de  fleurs  mielleuses,  notre  sei- 
gneur a  songé  à  sa  force  considérable  et  à  ce  qu'il  se  doit  à 
lui-même;  il  a  dit  dans  sa  bienveillance  :  «  C'est  un  enfant,  » 
et  il  a  calmé  sa  colère. 

132.  ))  Ce  jeune  présomptueux  qui  s'est  aventuré  à  reprendre 
le  tribut  qui  nous  avait  été  donné  devra  détruire  un  lion  de- 
meurant dans  les  grottes  de  la  montagne  fendue,  où  il  rugit 
comme  le  tonnerre  accompagné  d'éclairs  pour  détruire  ce 
pays  célèbre  dont  l'obtention  a  été  difficile  !  » 

133.  »  Il  a  dit  cela,  et  ajoutant:  «  Allez  le  lui  dire,  »  il 
nous  a  expédiés  ici.  »  En  leur  entendant  dire  ces  paroles,  le 
jeune  prince  s'écria  :  «  Quoi!  est-il  possible  que  dans  notre 
pays  il  y  ait  un  lion  cruel,  meurtrier,  menaçant  les  existences, 
rugissant  et  détruisant  tout  ?  » 

134.  »  Il  existe,  salut!  dans  le  beau  pays  de  l'Inde  aux 
eaux  bruyantes,  difficile  à  détruire  par  qui  que  soit,  dans  la 
montagne  immense,  il  existe  ce  lion  qui  rugit  comme  le 
tonnerre;  il  habite,  ô  seigneur,  dans  une  grotte  incommensu- 
rable et  il  dévore  tous  les  êtres,  »  répondit-on. 

135.  »  Soit,  dit-il,  mais  je  déchirerai  sa  gueule  large 
comme  les  grottes  de  la  montagne  pénible  et  je  romprai  son 
corps  en  deux  morceaux!  Si  je  ne  réussis  pas  à  le  faire,  que 
je  sois  l'enfant  diabolique  dont  parlait  votre  roi  !  » 

136.  Il  s'écria,  brandissant  son  trident  :  «  Que  les  éléphants 
de  combat,  avec  leurs  défenses  aux  pointes  puissantes  et 
leurs  trompes  creuses  rentrent  dans  leurs  demeures  et  restent 
enflammés  à  regarder  dans  l'ombre  !  que  les  guerriers  dont 
la  tête  ne  s'affaisse  pas  devant  les  armes  menaçantes  qui 
arrivent  ardentes  se  retirent  ! 


—  336  — 

137.  »  Que  les  chars  élevés  ornés  de  pierreries  traînés  par 
des  coursiers  superbes,  que  les  fantassins,  que  les  chevaux 
aux  fronts  ornés  de  voilettes,  rentrent  dans  leurs  séjours 
d'attente,  que  personne  ne  s'aventure  à  venir  avec  moi  et 
qu'on  se  retire!  »  dit  le  prince  dont  la  couleur  était  celle  du 
magnifique  océan,  de  façon  à  faire  s'éloigner  tous  ses  servi- 
teurs. 

138.  Comme  après  avoir  éloigné  les  gens  bruyants  de  la 
ville,  le  prince  qui  avait  la  couleur  de  la  mer  bruyante  aux 
ondes  fraîches  s'éloignait,  (son  frère)  connaissant  la  mon- 
tagne et  qui  avait  la  couleur  des  coquillages  de  la  mer  pois- 
sonneuse s'efforça  de  suivre  le  héros  qui  porte  la  fortune  sur 
sa  poitrine. 

139.  Les  pieds  ornés  d'anneaux,  qui  avaient  l'habitude  de 
tirer  sur  la  corde  attachée  au  cou  des  éléphants  robustes  à 
la  trompe  creuse,  s'enfonçaient  dans  la  poussière  ardente  qui 
recouvrait  la  route  au  milieu  de  la  montagne  noire;  ils  ar- 
rivèrent ainsi  à  la  recherche  du  lion  qui  tuait  les  travailleurs. 

140.  En  voyant  arriver  les  héros,  le  lion  à  la  crinière  ar- 
dente se  mit  en  colère  et  poussa  un  rugissement:  ce  fut  comme 
le  tonnerre  qui  éclate;  les  montagnes  fendues  s'écroulèrent, 
les  dalles  de  pierre  se  brisèrent  et  tombèrent  en  poussière 
roulant  en  débris. 

141.  Le  héros,  qui  avait  la  couleur  du  noir  nuage  fulgu- 
rant, attacha  ses  anneaux  de  jambes,  assujettit  à  ses  bras  ses 
bracelets  étincelants,  tressa  sa  chevelure  bouclée  que  déco- 
raient des  pierres  précieuses  et  poussa  un  grand  cri  ;  le  lion 
en  fut  effrayé. 

142.  Celui  qui  avait  pris  la  forme  d'un  lion  aux  yeux  verts 
s'éloigna,  brisant  la  montagne  et  y  détruisant  les  routes,  en 
se  demandant  :  «  Oîi  aller?  )>  le  prince  vaillant,  noir,  et  aux 
yeux  ardents,  le  poursuivit  rapidement:  la  mort  aux  yeux 
terribles,  les  points  cardinaux  et  le  ciel  tremblaient. 


—  337  — 

143.  Les  anneaux  ne  faisaient  plus  de  bruit,  car  les  pieds 
se  hâtaient  ne  touchant  pas  le  sol;  les  mains,  ornées  de 
bracelets  éclatants,  ne  se  rejoignaient  plus;  les  cheveux,  les 
tresses,  les  guirlandes,  les  colliers  se  dressaient  et  ne  tou- 
chaient plus  ni  les  bras  ni  le  cou. 

144.  Les  arbres  s'arrachaient  avec  leurs  racines  ;  comme 
emportés  par  un  vent  violent,  les  cerfs  bigarrés  et  les  oiseaux 
jonchaient  le  sol  tremblants  ;  les  doigts  du  héros  dont  les 
bras  avaient  la  dureté  des  pics  formant  le  sommet  des  mon- 
tagnes caverneuses  et  d^oià  roulent  les  rochers  s'écartaient 
violemment. 

145.  Les  nuages  s'amoncelaient  et  couvraient  tout;  les 
dalle-s  de  pierres  se  brisaient  avec  un  bruit  formidable  les  unes 
sur  les  autres  ;  les  divinités  des  bois  dansaient  rafraîchies; 
celui  qui  avait  pris  la  forme  d'un  lion  fuyait  éperdu  •'  il  dis- 
parut dans  l'intérieur  d'une  caverne  de  la  montagne  bril- 
lante. 

146.  Le  tremblement  du  sol  et  l'agitation  de  la  montagne 
élevée,  causée  par  la  course  rapide  du  jeune  prince,  dont  les 
épaules  fortes  comme  des  rochers  énormes  étaient  ornées  de 
guirlandes  superbes  et  dont  la  gloire  s'accroissait  de  jour  en 
jour,  tirèrent  de  son  sommeil  un  lion  royal  qui  habitait  dans 
cette  grotte. 

147.  Écumant,  le  prince  se  tint  à  l'entrée  de  la  caverne  pro- 
fonde et  s'écria:  «  Salut!  tu  t'es  caché  dans  la  grotte  pleine 
d'obscurité!  je  vais  déchirer  cette  montagne  immense!  »  et 
la  montagne,  ouvrant  sa  bouche  immense,  répéta  ce  cri  au 
loin. 

148.  A  ce  bruit  formidable,  le  lion  rendu  furieux  grinça 
des  dents  ;  dans  ses  yeux  ardents  s'alluma  la  flamme  de  la 
colère;  plein  de  rage,  il  s'élança  rugissant,  mais  la  montagne 
se  déchira. 

149.  Les  deux  yeux  enflammés  et  les  dents  brillantes  et 

23 


—  :^88  — 

blanches  de  ce  lion  à  la  queue  épaisse,  aux  ongles  acérés,  à 
la  gueule  monstrueuse  capable  d'absorber  tout  ce  qui  était 
dans  la  montagne,  suffirent  à  chasser  toute  l'obscurité.  Alors, 
ce  monstre  se  leva. 

150.  Cet  animal  robuste,  loué  pour  sa  grande  force  et  tel 
qu'on  pouvait  dire  qu'il  était  capable  de  détruire  le  monde 
qui  le  supportait  par  ses  qualités  apparentes  s'élança  vers  le 
prince  ;  les  habitants  de  l'air  plein  de  rosée  firent  tomber 
une  pluie  légère. 

151.  Comme  le  lion  se  levait  pour  s'élancer  rampant  sur 
sa  poitrine,  la  déchirer  et  en  boire  le  sang,  il  sauta  sur  sa 
crinière  et  le  saisit  de  ses  larges  mains  au  milieu  de  ses  mâ- 
choires recourbées  ;  puis,  le  lion  à  la  force  considérable  se 
coucha  déchiré,  la  gueule  fendue. 

152.  Les  immortels,  stupéfaits,  demeurèrent  là,  mettant 
chacun  un  doigt  sur  leur  bouche  en  disant  :  «  Celui-ci  vient  en 
un  instant  de  mettre  en  pièces  un  lion  terrible  qui  avait  la 
force  de  mille  fois  mille  animaux  féroces,  plus  fort  que  mille 
lions  furieux.  » 

CHANT  XII 

59.  Les  dieux  bienfaisants  et  destructeurs  s'étant  retirés 
chacun  de  son  côté,  le  héros,  sans  s'arrêter  aux  points  car- 
dinaux, s'éleva,  parla  lumière  de  la  certitude  qui  montre  au 
sens  intime  la  vérité,  au-dessus  de  tous  les  mondes  des  dieux 
et  devint  un  Sùlâmarii  pour  Tunivers. 

60.  L'activité  pénible  s'éloignait,  les  dieux  se  retiraient  de 
plus  en  plus,  le  roi  Pradjâpati  gouvernait  le  monde  de  Brahmâ. 
Cependant  le  prince  noir,  dont  la  large  main  rouge  comme  le 
lotus  brandissait  le  disque  sacré  de  Vichnu,  gouvernait  la 
terre  entourée  par  l'océan.' 

61.  Il  gouvernait^  recevant  les  hommages  des  rois,  bran- 


—  339  — 

dissantla  lance  de  Vichnu,  étendant  doucement  son  sceptre 
sur  toute  la  terre  que  revêt  l'océan  aux  ondes  agitées  et  que 
protègent  les  dieux,  pendant  que  son  père  gouvernait  belle- 
ment le  monde  qui  lui  convenait. 

62.  Celui  qui  a  la  couleur  des  coquillages  en  spirales  en- 
roulées à  droite  et  celui  dont  les  fortes  épaules  sont  célèbres 
et  dont  le  corps  a  la  couleur  du  triple  océan  poissonneux, 
étaient  vénérés  par  tout  le  monde.  Les  hommes  orga- 
nisaient des  fêtes  eu  l'honneur  des  pieds  de  lotus  roses  du 
prince  de  Vaçàka  qui  a  vaincu  l'activité,  et  leur  bonheur  allait 
augmentant  de  jour  en  jour. 

Julien  ViNsoN. 


A]ial3'se  des  formes  verbales  de  TÉvang-ile  de 
S.  Marc,  traduit  en  basque  par  Jean  de 
Liçarrag^ue  (1571). 


DRAVZQUIAN.  1.  Ind:  prés:  s.  3«  r.  pi:  r.  i.  s. 
2*^  pers:  adr:  masc  :  avec  à  euph  :  pour  c  devant  ii 
oonj  :  aux  :  act. 

5.  19...   cein   gauça  handiac  launac  eguin  drauz- 
quiàn,  .  . .  combien  grandes  choses  le  Seigneur 
t'a  faites, 
DRAYZQUIÇVET.  1.  Ind:  prés  :  s.  l^r.  s.  r.  i.  pi: 
2^  pers  :  aux  :  act  : 

13.  23,     ...    Hunâ,  aitzinetic  erran   drauzquiçuet 
gauça  guciac.  ...  :  voici,  ie  vous  ay  tout  prédit. 

DRAVÇVE.    3.  Ind:   prés:    s.    3«  r.    s.  r.  i.    pi: 
2°  pers  :  aux:  act  : 
10.    3...,  Ger    manatu    draaçue  Moysesec  ?     ..., 

Qu'est-ce  que  Moyse  vous  a  commandé  ? 
10.  5...,  Çuen  bihotzeco  gogortassunagatic  scri- 

BATU  drauçue  manamendu  hori.    ...,  Il  vous  a 

escritce  commandement  pour  la  durté  de  vostre 

cœur  : 

14.  15.    Eta  harc  eracutsiren    drauçue   gambera 
handibat  paratua  eta  appaindua^:  ...  Et  il  vous 

1 .  Is  this  from  appanarc  under  the  influence  of  pannus-cloth? 
Quand  il  s"agit  d'orner  et  dresser  une  table,  comme  c  14,  vv.  15 
et  16,  les  idées  de  panis  et  de  pannus  se  confondent. 


—  341  — 

monstrera  vne   grande  chambre   ornée   «k   pré- 
parée :  (à  remarquer  L,  ne  dit  pas  :  gambera  pa- 
rata  eta  appaindu  handibat). 
DRAVÇVEDANA.  1.  I.  q.  drauçuet  avec  da  eiiph: 

pour  t  et  n  rel  :  accus  :  décl  :  accus  : 

13.  37.   Eta  çuey    erraiten  drauçuedana.  Et  [iia 
=  ce  que)  ce  que  ie  vous  di, 
DRAYÇVEN.  1.  I.  q.  drauçue  avec  n  conj  :  régi  par 

becala. 

16.  7...,   ERRAN    drauçuen  beçala.    ...,  comme  il 
vous  a  dit. 
DRAVÇVET.    11.   Ind  :    prés:  s.    !«  r.  s.    r.  i.  pi  : 

2®  pers  :  aux  :  act  : 

3.  28.  Eguiaz   erraiten   drauçuet^  le  vous  di    en 
vérité, 

9.  1...,  Eguiaz  ERRAITEN  drauçuet,  ...,  le  vous   di 
en  vérité 

9.  13.    Baina  erraiten  drauçuet  Mais  ie  vous  di, 

10.  15.    Eguiaz  erraiten  drauçuet,  le  vous  di  en 
vérité, 

11.  23.   Eguiaz  erraiten  drauçuet,  le  vous  di  en 
vérité 

11.  24.  Halacotz    erraiten  drauçuet.   Pourtant   ie 

vous  di, 
11.  29. . .,  eta  erranen  drauçuet  ...  :  adonc  ie  vous 

diray 

13.  30.  Eguiaz    erraiten  drauçuet,  le  vous  di  en 
vérité 

14.  9.   Eguiaz   erraiten  drauçuet,    le  vous    di  en 
vérité 


—  342  — 

14.  18...,  Eguiaz  erraiten  drauçuel^  ...,  levons 
di  en  vérité 
DV,  35.  Ind:  prés:  s.  3®  r.  s.  verbe  poss  :  &  aux: 
act  : 

2.  16...,  Cergatic  publicanoequin  eta  vicitze 
gaichtotacoequin  iaten  du  eta  edaten  ?  ..., 
Pourquoy  mange-il  &  boit  auec  les  peagers  & 
mal-viuans  ?  (On  a  omis  ce  ?) 

3.  26.. . ,  baina  fin  DU.  . .  . ,  mais  prend  fin. 

3.  27...  :  eta  ordiian  haren  etchea  pillaturen  du. 
...  :  &  adonc  il  pillera  sa  maison. 

3.  30...,  Spiritu  satsua  du.  ...,  Il  a  l'esprit  im- 
monde. 

4.  14,  Ereilleac  hitza  ereiten  du.  Le  semeur 
semé  la  parole. 

4.  15.  ...,  eta  kencen  du...^  &  oste  la(cf:  le  Grec 

KENOS) . 

4.    23.   Baldin  nehorc  ençutego  beharriric  badu, 

Si  aucun  a  aureilles  pour  ouir, 
4.  28.  Ecen  bere  buruz  lurrac  fructu  ekarten  du, 

behin    belhar  ^_,   guero   buru,  guero     ogui    bihi 

1.  M.  R.  Williams  in  his  Lexicon  Cornu- Britannicum 
(London,  1865)  mentions  some  Baskish  words,  but  cadarn  is 
Welsh.  He  Says  "Belers.  m.  Water-cress.  Welsh  bcrwr,  berwg. 
Ai'raorican  bcler.  Irish  biolar,  birur  (one  may  add  biorav). 
Gaelic  biolar,  biorar.  Manx  burlcy  ".  Do  thèse  words  come  from 
bir,  bior,  a  Keltio  word  for  water,  or  are  they  related  to  Baskish 
belar?  Under  da  A,  32,  belliar  is  used  of  ail  kinds  of  herbs.  A 
variant  i'orm  is  bcdar  (and  1  think  bcrar),  which  makes  one 
thinkot  be-belo  10  amà  dur,  the  formative  termination  meaning 
fréquenter  of,  dwellcr  in.  In  the  Biscayan  of  Arratia  water-cress 
îs  belarr  f/arra(^a=  bitter-f/rass,  and  also  borraJda. 


—  343  — 

belhea  buruan.  Car  la  terre  de  soy-mesme' 
fructifie,  premièrement  l'herbe,  après  les  espics, 
&  puis  le  plein  froument  en  Tespic  : 

4.  29.  ,..,  bertan  guieonac  du  eçarten  iguiteyà  : 
.  . .,  soudain  Vhomme  met  la  faucille, 

7.  6 Segurqui  vngui  prophetizatu  vkan  du 

Esaiasec  çueçaz  hypocritoz^  Certainement  Isaie 
a  bien  prophetizé  de  vous  autres  hypocrites: 

7.  10.   Ecen  Moysesec  erran  du.  Car  Moyse  a  dit 

7,  16.  Nehorc  ençuteco  beharriric  bant .  .  .  Si 
aucun  a  aureilles  pour  ouir, 

8.  2.  ...:  ecen  ia  hirur  egun  du...:  car  il  y  a 
desia  trois  iours 

8.  35.  . . .,  GALDUREN  du  hura  :  .  .  .,  saluaturen  du 
hura,   .  .  .,  il  la  perdra  :    .  .  . ,  il  la  saunera. 

8.  36.  Ecen  cer  probelchu  uu  guiçonac,  Car  que 
profitera-il  à  Thomme.  .  .? 

8.  37.  Edo  cer  emanen  r/«  guiçonac  bere  arimaren 
recompensamendutan  ?  Ou  que  donnera  riiomme 
en  recompense  de  son  ame? 

9.  21.  .  . .,  Cembat  dembora  du.  .  .'?  .  .  .,  combien 
y  a-il  de  temps.  .  .  ? 

10.  11.  .  .  .,  adulterio  iauquiten  du  haren  contra, 
.  .  .,  il  commet  adultère  contre  elle. 

1.  Litt.  :  de  o\i  par  sa  tète,  dans  le  Basque. 

2.  On  remarque  la  répétition  de  la  terminaison  casuelle  dans  le 
pronom  et  le  nom  qui  le  qualifie,  craz  k  .;. 

3.  Ce  du  est  un  gallicisme.  Avec  l'accusatif  pluriel  hii-iw  cf/un 
il  faut  ditu.  Si  ces  mots  sont  le  nominatif  passif,  il  faut  dirado 
=  ils  sont.  C'est  cette  forme  qui  m'a  donné  des  doutes  sur  la  défi- 
nition de  cituaii.  Aussi  c.  9,  v.  21,  quel  est  le  nominatif  de  du  :^ 
L.  a  pensé  en  Français  à  ces  endroits. 


—  344  — 

10.  12.  ...,  adulterio  iauquiten  fZ?/.,.,  elle  com- 
met adultère. 

11.  3...:  eta  bertan  hiira  igorriren  du  hiina. 
.  .  .:  &  incontinent  il  Teniioyera  ici. 

11.  31...:  EURANEN  du,  (Haiitin  a  omis  la  virgule) 
...  :  il  dira, 

12.  6.  Oraino  bada  bere  semé  maitebat  vkân  eta, 
hura-ere  igorri  vkaii  du  hetara  azquenic,  Or 
ayant  encore  vn  sien  fils  bien  aimé,  il  le  leur 
enuoya  aussi  pour  le  dernier 

12.  9.  Ger  eguinen  du  bada  mahasti  iabeac^  ?.  .  ., 
eta  EMANEN  du  mahastia  berceri  (à  remarquer 
que  le  verbe  avec  emaneii  n'a  pas  sa  forme  da- 
tivale.  11  faut  corriger  draue.)  ...  Que  fera 
donc  le  seigneur  de  la  vigne  ?  . . . ,  &  baillera 
la  vigne  à  d'autres. 

12.  19...,  eta  vtzi  badu  emaztea,  eta  haourric 
vTzi  ezpac^i^,  . .  . ,  &  ait  laissé  la  femme,  &  n'ait 
point  laissé  d'enfans, 

12.  36.  Ecen  Dauid-ec  berac  erran  du  Spirilu 
sainduaren  inspirationez,  Car  Dauid  luy-mesme 
a  dit  par  le  sainct  Esprit', 

12.  37.  Beraz  Dauid-ec  berac  deitzen  du  hura 
laun:  Dauid  donc  luy-mesme  l'appelle  Seigneur, 

12.  44.  .  .,  baina  hunec  eman  du  bere  paubreciatic 
.  .  .:  mais  ceste-ci  y  a  mis  de  sa  poureté  tout 

13.  12.   Orduan    liuraturen     du  anayeac     anayea 

1.  «The  vineyard-master.  »   Cf.  sous  duçue,  IL  17;  «  gaich- 
taguin  lece  »  =  malefactor-cacern. 

2.  L.  traduit  «  par  inspiration  du  S.  E.  ". 


—  345  — 

heriotara,   eta  aitâc  haourra  :   . .  .  Lors    le  frère 
liurera  son  frère  à  mort, 
14.  6.  .  .?  obra  ombat  enegana  eguin^  du.  . .  .Pelle 
a  fait  vn  bon  acte  entiers  moy . 

14.  8.  Hiinec,  .  .  eguin  du:   ...  Elle  a  fait  ce 

15.  14.  .  . ,  Baina  cer  gaizqiii  eguin  du?  .  .  . ,  Mais 
quel  mal  a-il  [sic]  fait? 

15.   35...,   Hunâ,  Elias  deitzen  <i«.   ...,  Voici,  il 
appelle  Elie. 
DVÂN.  2.  1.  q.   duc,  verbe  possessif  avec  «  eupho- 
nique pour  c  devant  n  conjonctif  &  rel  : 

6.  18...  euri  (pour  eure)  anayeren .  emaztea 
duAn.  (Voyez  eztuc  6,  18.  Anayearen  serait  plus 
régulier)...  d'auoir  la  femme  de  ton  frère. 

11.  21...,   Magistruâ,  hunâ,  /u'c  mar.^dicatv  duân 
fîcotzea    [n.    rél:    ace  =  que),    Maistre    voici   le 
figuier  que  tu  as  maudit 
DVANA.   1.  1.  q.  duc,  aux  :  act.,  avec  a  euph  :  pour 

c  devant  ii  rel  :  nom  :  décl  :  vocatif  [nci  =:o  tu  qui) 

15.  29.  ..,  He,  templea  OESEGUitEN  eta  hirur  egunez 
EDiFiCATZEN     duauci .    ...,     Hc,    qui   desfaits    le 
temple,  &  en  trois  iours  le  redifies: 
DVANA.   1.   1.    q.  le  précédent  avec  n   rel:  accus: 

décl  :  ace:  ou  nom  :  passif  (/««  =  ce  que) 

14.  36.  .  .,  baina  hic  nahi  duaiia.  . ,  .,  mais  ce  que 
tu  veux. 
DVC.  13.  Ind  :  prés:  s.  3«  adr  :  masc  :  verbe  subst  : 

&  aux  : 

1.  L.  renders  à  faire  under  diiela  11,  3  by  bcharra;  and  under 
dut/a  14,  63  by  bchar. 


—  346  — 

5.  23.  . .,  Ene  alabatchoa  hurrenean  duc:  . . .,  Ma 
fillette  est  à  l'extrémité  : 

5.  35. . .,  Hire  alabâ  HiL<iwc,  ...,  Ta  fille  est  morte, 

6.  35. . .,  Desertu  duc  leku  gaur,  eta  ia  berandua 
duc:...,  Ce  lieu  est  désert,  &  est  desia  grande 
heure  : 

7.  28...,  Hala  DUC  launa  :  ...,  Il  est  ainsi,  Sei- 
gneur, 

9.  5. . . ,  on  DUC ,  il  est  bon 

9.  43.  . .  :  hobe  duc  hire%  ...  :  il  te  vaut  mieux 
9 .  45 ... ,  hobe  duc  hire,  \  . .  :  il  te  vaut  mieux 
9.   47. . .,  hobe  duc  hire^  .  . .:  il  te  vaut  mieux 

11.  21...,  Magistruà,  ...  ficotzea  eyhartu  duc. 
. . . ,  Maistre ...  le  figuier . .  .  est  séché . 

12.  29.  ...  Manamendu  gucietaco  lehena  duc,  (H. 
a  mis  duc,)  .  .  .,  gure  lainco  launa,  laun  ba- 
koitzbat  duc.  ...,  Le  premier  de  tous  les  coman- 
demens  est,  ...,  le  Seigneur  nostre  Dieu  est  le 
seul  Seigneur.  (L.  traduit  un  seul.) 

12.  30...:  haur*   duc  lehen  manamendua.  (Ilautin 


1.  Pour  ces  trois  génitifs  dativaux  liire  voyez  dil^^xKjati  (9,  5) 
&  dilue  (14,  36).  Sous  esta  10,  40,  cne  traduit  à  inorj. 

2.  Les  Basques  français  d'aujourd'hui  disent  hua;  ceux  d'Es- 
pagne au.  Dans  le  livre  le  plus  ancien  en  Guipuzcoan,  le  caté- 
chisme de  J.  Ochoa  de  Arin  (Saint-Sébastien,  ou  Donostian. 
1713;  n°  45  dans  la  Bibliographie  de  M.  J.  Vinson),  on  le  trouve 
sous  les  formes  ah  (e.  g.  pp.  6,  7,  31,  129,  133,  134,  135,  137, 
138,  139,  &c  :)  et  auh  {pp .' 10  et  13).  De  même  de  la  racine  (jau 
il  forme,  p.  131,  gaurcn  =  de  nuits  et  f/anbean  =  dans  la  nuit. 
De  jaun  on  sl  formé  Jau-r-cf/i.  En  Biscayen,ya7(-/y6' dérive-t-il  de 
jaun  ou  bien  est-il  une  forme  régionale  àejahc=  maître  ?  Dans 
ce,  dialecte  palais  n'est  pas  Jauref/i  mais  jaubegi. 


—  347  - 

a   mis  duc.)  . . .    Gesluy-ct  est  le  premier  com- 
mandement. 
DVC.  10.    Ind  :  prés:  s.  2"  r.  s.    adr:  masc  :   aux  : 

act: 

1.  40.  . . .,  Baldin  nahi  hsiduc...,  Si  tu  veux, 

5.  35...,  cergatic  fatigatzen  duc  Magistrua  ?  ..., 
pourquoy  trauailles-tu  plus  le  Maistre? 

10.  21.. .  :  eta  vkanen  duc  thesaurbat  ceruàn^  :  ..., 
&tu  auras  vn  thresor  au  ciel  : 

10.  51 ... ,  Ger  nahi  duc. .  .  ?  . . . ,  Que  veux-tu 

12.  14...,  baina  eguiazqui  laincoaren  bidea  ira- 
CASTEN  duc  :  . . . ,  mais  tu  enseignes  la  voye  de 
Dieu  en  vérité. 

12.   30.  Onhetsiren  duc  bada  eure  lainco  launa, 

eta  eure  ahal  guciaz:  ...  Parquoytu  aimeras 

le  Seigneur  ton  Dieu...,  &  de  toute  ta  force. 

12.  31.. ..  Onhetsiren  duc  eure  hurcoa  eure  buruà 
beçala:  ....  Tu  aimeras  ton  prochain  comme 
toy-mesme  : 

12.  32  . .  . ,  Magistrua,  eguiazqui  erran  duc,  ...  : 
Maistre,  tu  as  bien  dit  la  vérité,  (L.  traduit  véri- 
tablement au  lieu  de  bien —  la  vérité .  ) 

14.  12...,  xNon  NAHI  duc. ..?...,  Où  veux-tu. . .? 

14,  37. .  .?  orembat  ecin  veillatu  duc?  . . .?  n'as- 
tu  peu  veiller  vne  heure  ? 

1.  M.  le  professeur E.  Galtier,  bascophile  de  Mont-de-Marsan, 
m'a  demandé  pourquoi,  si  ccru  vient  de  cœluin,  il  n'est  point 
kcrii.  Dans  les  langues  Scandinaves  on  a  vu  s/c  passer  en  sh.  Les 
Basques  ont  dû  emprunter  cœliim  quand  on  prononçait  déjà  cet 
ou  ciel  en  Français  ;  ciel  en  Toscan  et  Castillan  ;  ce-o  en  Portugais 
et  cd  en  Provençal. 


—  348  — 

DVÇVE.  18.  Ind:  prés:  pi:  2®  r.  s.  verbe  poss  :  & 
aux  :  act  : 

7.  8.  Ecen  laincoaren  manamendiia  vtziric,  giii- 
çonen  ordenencâ  eduquiten  diiçue,  hala  nola, 
cubén  eta  goporrén  ikutzeac  :  eta  hunelaco  berce 
gauçaric  anhitz  eguitrn  duçue.  Car  en  délaissant 
le  commandement  de  Dieu,  vous  retenez  l'or- 
donnance des  hommes,  comme  lauemens  de 
pots  &  de  hanaps  :  et  faites  beaucoup  d'autres 
choses  semblables. 

7.  9...,  Vngui  nombait  iraizten  duçue  laincoaren 
manamendua,  ...,  Vous  reiettez  bien  le  com- 
mandement de  DieUj 

7.  13.  ...  :  eta  hunelaco  berce  gauçaric  anhitz 
EGuiTEN  duçue.  ...  :  &  faites  plusieurs  autres 
choses  semblables. 

8.  17.'  ...  ?  oraino  gogortua  ^  ducue  cuen  bihotza. 
...  ?  auez-vous  encore  vostre  cœur  eslourdi? 

9.  50.  ...  cerçaz  hura  gacituren  duçue?  ...,  de 
quoy  luy  rendrez-vous  saueur? 

10.  36.  ...,  Cer  nahi  duçue...!...,  Que  voulez 
vous.. .  ? 

10.  39.  ...  copa  EDANEN  hdiduçue,  ...,  Vray  est  que 
vous  beurez  la  coupe  [ba  traduit  vray  est  que.) 

11.  2.  .  .  .  ERiDENEN  duçue  asto^  vmebat  estecatua? 
...,  vous  trouuerez  vn  asnon  lié, 

11.  3.  ...,  Gergatic  liori  eguiten  duçue?  .  .  .,  Pour- 
quoy  faites-vous  ceci  ? 

1,  Cf.  l'adjectif  prédicatif   esciia   cghartua  sous  çuenic,  c    3, 
V.  1,  et  asto  vmebat  estecatua  sous  duçue, 11,  2. 


—  349  — 

11.     17.     ...?  baina   çuec  hura   gaichtaguin   lece 

EGUiN  duçue.    ...  ?  mais  vous  en  auez  fait  vne 

cauerne  debrigans. 
11.  25,   ...  baldin  deus  baDUÇUE  nehoren  contra^  : 

...  si  vous  auez  quelque  chose  contre  aucun 
14.6.  ...,  cergatic  fâschatzen  duçue?    ...:    pour- 

quoy  luy  donnez-vous  fascherie  ? 
14.  62.  ...,  eta  ikussiren  duçue,..  :  &  vous  verrez  le 

14.  64.  Ençun  duçue  blasphemioa  :  Vous  auez  ouy 
le  blasphème  : 

15.  9...,  N\ni duçue...?  ...,  Voulez-vous. . .? 

15.  12...,  Cer  bada  nahi  duçue...?   ...  Que    vou- 
lez-vous donc. . .  ? 

16.  7...:    han  hura    ikussiren  c^wpwe,  ...:vousle 
verrez  là, 

DVÇVELA.  3.  I.  q.  duçue,  aux  :  act:  avec  la  conj  :  à. 
participial. 
7.      13.    EZDEUSTEN     ducuclci    laincoarcH   hitza... 

Mettans  la  parole  de   Dieu  à  néant  [ez-deus  te- 

n  =:  in  no-thing-iiig) . 

1.  Ici  on  voit  la  force  véritable  de  deus  et  nehor,  sans  le  né- 
gatif. Voyez  e;s-deusten  sons  diiçuelal,  13.  Pour /le/èo/- signifiant 
personne,  voyez  eslalte  &  eslaquian.Soyxs  litzaque  il  traduit  o/i ; 
sous  eUait^aten  13,  5,  quelqu'un;  sous  esta  9,  29  &  10,  29,  nul. 
Il  est  possible  que  l'étymon  de  nehor  =  inor,  enor  soit  e  =  non 
et  nor  =  qui:  c'est-à-dire  une  personne  indéfinie,  un  in-qui- 
ahle,\xn  fignore-qui,  un  un-icho'iible  sonie-onc-  Nor-ere=  qui- 
conque. Voyez  baita  10,  43  &  44:  a  not-who,  ali-quis.  Voyez 
baitravra,  baitraucac,  baitsauçue.  Nori  berea  =  suum  cuique, 
mot  à  mot  «  à  qui  le  sien  ».  Nor  donc  n'est  pas  essentiellement 
interrogatif,  pas  plus  que  qui  en  Français.  En  Gallois  on  a  bijnnag 
=  quiconque,  formé  de  py  nag  —  qui  non.  Voyez  «  A  Welsh 
Grammar»,  par  Anwyl,  professeur  de  l'Université  d'Aberystwyth. 


—  350  — 

11.   24...  othoitz  EGUiTEN  duçuela...  ecen  recebi- 

TUREN   duçuela:   ...  en  priant,  ...que  vous  le 

receurez, 
DVÇVEN.  4.  I.  q.  duçue,  aux  :  act  :  avec  îi  rel  :  conj: 
&  rel:  ace  :  =  que. 
4.  24. . .     cer  ençuten   duçuen  :    ...  ce  que  vous 

oyez  : 
7.  13...  ceuroc  ordenatu  duçuen  ordenançâz  :  (rel: 

ace:)    . . .  par  vostre  ordonnance  que  vous  auez 

ordonnée  : 
13.  11...   cer  ERRANEN  duçuen,    ...  de  ce  que  vous 

direz: 
15.    12...  luduén  Regue  deitzen  duçuenhnwU  {n 

rel  :  ace:)    . . .  à  celuy   que  vous  dites  Roy  des 

luifs  ? 
DVGVENOY.  1.  I.    q.  duçue ,  2iyxx  :  act:  avec/z  rel: 
nom  :   décl:  démonstratif  datif  pluriel  {noy  =   à 
ceux  {vous)  qui) . 
4.  24.  ...,  cuey^  ETsçvTEi^  duc uenoy .  ...:&àvous 

qui  oyez 


Gorrigenda  dans  la  Revue  de  Linguistique. 

T.  XXXII 

P.  70,  1.  13  al.  de  poss:  lisez  substantif. 
P.    70,  1.  15  et   16.  Biffez   la  note.  M.   le  docteur 
H.  Schuchardt  a  indiqué  dans  l'introduction  de  son 

1.  Remarquez  la  répétition  de  la  terminaison  casuelle  après  le 
pronom;  cy  et  oy.  Cf.  sous  du  7,  Q,  çueça;:^,  etc. 


—  351  — 

édition  du  Nouveau-Testament  Basque  de  J.  Licar- 
rague  la  nécessité  de  celte  correction.  Je  n'avais  pas 
songé  à  cilueii,  comme  il  le  dit,  mais  bien  à  citizaii, 
citiaii  formes,  enregistrées  par  J.-P.  Dartayet.  En 
tournant  pour  la  première  fois  les  pages  de  la  2^  édi- 
tion des  livres  de  Liçarrague,  j'ai  trouvé  les  fautes 
que  voici:  f.  52  recto  v.  18  e  do  pour  edo^  f.  212 
verso  /letheric  pour  ^etheric,  dans  J.  C.  gure  lau- 
aren  cena  Saindura  reecbitu  pour  recebitu. 

T.  XXXIII 

P,  291.  M,  J.  Vinson  a  écrit  en  parlant  de  mon 
édition  du  Mendiburu  de  1747  :  «  Il  n'est  pas  exact, 
au  surplus,  de  dire  que  c'est  là  le  premier  livre 
basque  guipuzcoan  imprimé  connu.  »  Mais  je  n'ai  pas 
dit  qu'il  l'est!  J'ai  dit  seulement:  «  A  excepciôn  del 
Diccionario  de  Larramendi(1745),  no  conocémosnin- 
gunlibro  impreso  en  San  Sébastian  en  Heuskara  mâs 
antiguo  que  este.  »  Gomme  éditeur,  j'ai  employé 
le  pluriel /lo  conocemos,  parce  que  je  ne  connaissais 
pas  à  cette  date-là  les  deux  exemplaires  du  livre 
de  Joseph  Ochoade  Arin  (imprimé  en  langue  basque 
en  1713  à  San  Sébastian)  que  mentionne  M.  J.  Vin- 
son  dans  sa  bibliographie.  Mais  je  ne  les  avais  pas 
oubliés.  J'ai  trouvé  depuis  un  autre  exemplaire, 
ignoré  de  M.  Vinson,  au  Musée  Britannique,  ayant 
à  la  fin  trois  pages  de  plus  que  les  autres.  Je  n'avais 
pas  oublié  non  plus  ce  que  M.  Vinson  avait  dit  des 
livres  de  Irazuzta  (Pampelune,  1742)  et  Zubia,  Mais 
Pampelune  n'est  pas  San  Sébastian,  et  Zubia  n'a  pas 
écrit  en  guipuzcoan  ! 


352 


T.  XXXIII 

P.  294.  Je  dois  indiquer  encore  des  corrigenda 
dans  mon  édition  de  Mendiburu  ; 

P.  147,  I.  25,  où  l'original  porte  Santuac  izain, 
lisez  izan 

P.  272,  1.  17,  où  l'original  porte  diezagula,  qui 
n'est  pas  traduisible  avec  le  reste  de  la  phrase,  lisez 
dizayola  (voyez  Lardizâbal). 

P.  430,  1.  8,  supprimez  272. 

P.  436^  ajoutez  Dizayola  272  (comme  émendation 
nécessaire). 

P.  442,  ajoutez  Genezan  224. 

P.   446,  le  numéro  2228  est  une  faute. 

P.   469,  1.  1,  lisez  1751  ;  y  tiene. 

P.  471.  M.  J.  Vinson  possède  un  exemplaire  de 
ce  volume,  qui  porte  le  numéro  89  a,  dans  sa  Biblio- 
graphie. Une  réimpression  avec  des  notes  critiques 
serait  sûrement  appréciée. 

P.  472,  Dans  quelques  exemplaires  le  colophon 
final  porte  un  n  au  lieu  d'un  ii  dans  deux  mots. 

T.  XXXIII 

P.  264,  1.  7,  lisez  15.  12... 

P.  265,  1.  8_,  lisez  baicen.  ..., 

P.  265,  1.  18,  MsGx  tenic.  ..., 

P.  265,  1.  21,  lisez  4.  12...  :  età 

P.  266,  1.  13,  lisez  s.  3°  r.  s. 

P.  266,  1.  15,  lisez  ...,  pegar-bat 

P.  268,  1.  3,  lisez  lo  datzala  erraiten 

P.  268,  1.  28,  lisez  baldin  mundu 


—  353  — 

P.   269,  1.   14,  lisez  deçaçvençât. 

P.   269,  1,    17,  lisez  deçacuençât. 

P.   269,  1.   22,  lisez  verrez... 

P.   269,  1,   2  d'en  bas,  lisez  parcatiim 

P.   270,  1.   3,  lisez  deçadançat: 

P.   270,  1.  3  d'en  bas,  après  anayac  inserez  haren 

P.   272,  1.   3,  lisez  4.  12.  ...  ikus 

P.   272,  1.    10,  lisez  Christ. 

P.  273,  l.  14,  ajoutez  [la  participial  qualifiant 
Taccusatif  et  dépendant  de  ikussiren  duçue.) 

P.   273,  1.   21,  lisez  ondoan, 

P.    274,  1.   9  avant  scribatua,  insérez,  harçaz 

P.   274,  1.    12,  lisez  deii. 

P.   274,  1.    16,  lisez  becembatean, 

P.   275,  1.   1,  lisez  ...,  harcaz 

P.   276,  1.    14,  lisez  Lo  datzala  erraiten 

P.  276,  1.  18,  lisez,  8.  27  ...  Philipperen  Ge- 
sarea 

P.   276,  1.  24,  lisez  whether 

P.   278,  1.   14,  lisez  die: 

P.   278,  1.   21,  lisez  utzitera.    ... 

P.   279,  1.   16,  lisez  dieçadân. 

P.   279,  1.   25,  lisez  dieçôu. 

P.   280,  1.   28,  lisez  16. 

P.  281,  1.  16,  lisez  çuec...  dioçue  ?  Onvoitique 
cette  ligne  et  la  suivante  sont  à  transférer  deux 
lignes  plus  haut. 

P.   281,  1.   28,  lisez,  Borz, 

P.   282,   1.    1,  lisez   ...   dioite  Cergatic. 

P.   282,  1.   7,  lisez   ...,  dioitela, 

24 


—  354  — 
P.  282,  1.  8,  DioNÂN 

P.    282,    1.     10,    DIONÂN 

P.   282,  1,    12,  ajoutez    (Inchauspe    dit   qu'il    est 
dioûat  et  doiat  en  Souletin.) 

P.   283,  1.  3,  13,  &  14,  DiosTK, 

P.  284,  1.    10,  lisez  dadinçât. 

P.  284,  1.   12  et  22,  lisez  ajoutez 

P.   284,  1.  17,  .18  et  22,  lisez  lisez 

P.   285,  1.   6,  lisez  ajoutez 

P.   285,  l.   11,  avant  p.   329,  insérez  T.   32. 

P.   285,  1.   13,  lisez  çabaltas- 

P.  285,  à  la  fin  ajoutez  (p.  33,  v.  1,  Sarai).  Dans 
l'édition  d'Oxford  on  n'a  pas  marqué  le  c  en  Saraic 
comme  une  faute.  Je  viens  de  collationner  (oc- 
tobre 1891)  au  château  de  Shirburn,  tout  près  de  la 
gare  de  Watlington,  et  dans  la  Bibliothèque  Bod- 
léienne  le  manuscrit  de  P.  d'Urte  et  la  transcription 
de  Samuel  Greatheed  avec  l'édition  de  1894.  Je  trouve 
que  cette  édition  contient  une  bonne  quantité  de 
fautes,  desquelles  je  vais  publier  une  liste.  Dans 
l'édition  de  1899  du  texte  de  la  Genèse  lisez  p.  104, 
V.  9,  erraten  çioela,  iduritçen  ciaitâan. 

TOME  XXXIV 

P.  93,  1.  19,  garaua  vient-il  de  granua  avec  la 
chute  du  n  et  la  séparation  de  gr  moyennant  un 
un  a  euphonique  ? 

P.  93,  1.  25,  géra  vient-il  de  que^^a.  On  sait  qu'un 
k  ou  qu  passe  souvent  en  g  en  Heuskara,  et  d  en  r. 

P.  94,  1.  4,  lisez  icoa:  (à  comparer  ika,  de pica 
Castillan.) 


—  355  — 

P,   94.  1.   18  après  Samana  insérez,  i^xxissamaua. 
P.   99,  1.   2  d'en  bas,  lisez  heading 
P.   100,  notes,  1,   2  bellied  1.  3  perhaps,  recorded 
1 .  5.  Since  I. 

P.   101,  1.  1,  wasl.   5  d'en  bas,  Thomas 
P.  266,  1.  4,  hauc 

1.  16,  HiLTZECÀc,  hiltzecâc 
P.  270,  1.  13,  a  mis  diraden  hauc  parce 

1.  14,  mots. 
P.  278,  note,  1.5,  pesetas)  on 
1.  6,  figure 

P.    275,   1.    11,   ELEGITVAC 

P.  276,  l.  18,  DiTvc.  2. 
P.  277,  l.  27,  pluriel  =  que 
P.  281,  1.  18,  Seigneur  a 
P.  282,  1.  11,  Norc 
1.  26,  ie  le 

1.   28,   DRAVNAT    2 

E.    S.     DODGSON, 

(A  suivre). 


LA  REUNION  D'HENDAYE 

ET  LA  RÉFORME  DE  L'ORTHOGRAPHE  BASQUE 


Au  mois  de  juin  dernier,  M.  M.  Guilbeau,  officier 
de  santé  à  Sainl-Jean-de-Luz,qui  a  composé  quelques 
poésies  en  basque  et  qui  a  écrit  quelques  articles  sur 
divers  points  de  la  linguistique  euscarienne,  m'adres- 
sait plusieurs  lettres  pressantes  pour  m'inviter  à  me 
rendre  le  16  juillet  à  Hendaye;  il  me  priait  et  me 
suppliait  de  ne  pas  manquer  au  rendez-vous  qu'il 
donnait  à  plusieurs  basquisants  :  la  réunion  devait 
avoir  pour  but  la  régularisation  ou  plutôt  la  fixation 
définitive  de  l'orthographe  basque.  Je  répondis  à 
M.  Guilbeau  que  n'étant  pas  libre  avant  le  mois 
d'août,  ou  même  avant  le  mois  de  septembre,  il  ne 
m'était  pas  possible,  à  mon  très  grand  regret,  de  me 
rendre  à  son  aimable  convocation. 

Je  n'avais  plus  entendu  parler  de  ce  projet,  lorsque, 
le  10  septembre  suivant,  en  arrivant  à  Bayonne,  je  me 
rencontrai  successivement  avec  trois  Basques  dis- 
tingués, amateurs  ou  écrivains  de  mérite,  qui  me  par- 
lèrent d'un  «  Congrès  »  qui  devait  avoir  lieu  à  Hen- 
daye le  lundi  16,  toujours  pour  traiter  cette  question 
de  l'orthographe.  Ces  Messieurs  ne  paraissaient  pas 


—  357  — 

douter  que  je  ne  fusse  convoqué  à  celte  réunion. 
N'ayant  reçu  aucun  avis  et  croyant  à  une.  erreur  de  la 
poste,  j'allai  le  lendemain  voir  M.  Guilbeau  à  Saint- 
Jean-de-Luz.  —  Je  trouve  un  homme  embarrassé, 
gêné,  qui  m'explique  qu'on  a  voulu  écarter  certaines 
personnalités,  qu'on  n'a  pas  trouvé  de  meilleur  moyen 
que  de  limiter  la  réunion  aux  Basques  de  naissance, 
qu'on  parlera  exclusivement  basque  dans  cette  réu- 
nion, etc.,  etc.:  il  ajoutait  du  reste  que  ce  n'était  pas 
à  moi  qu'on  en  voulait  et  qu'on  m'y  admettrait  peut- 
être,  etc.,  etc. 

Je  connais  M.  Guilbeau  depuis  de  longues  années; 
bien  avant  la  chute  de  l'Empire  et  depuis,  il  s'était 
posé  comme  un  des  rares  défenseurs  de  l'idée  libérale 
et  républicaine;  nous  avions  donc  ensemble  combattu 
le  bon  combat,  collaboré  aux  mêmes  journaux,  fait  les 
mêmes  campagnes;  j'ai  publié  plusieurs  choses  de  lui 
dans  cette  fîeuwe;  j'ai  fait  partie  de  l'Association  basque 
qu'il  avait  fondée  il  y  a  une  dizaine  d'années,  et,  si  je 
n'y  ai  pas  pris  une  part  très  active,  j'ai  toujours  très 
exactement  payé  les  cotisations  qui  étaient  relative- 
ment élevées. 

Le  16  septembre,  je  me  suis  donc  rendu  à  Hendaye. 
Le  «  Congrès  »  s'est  ouvert  solennellement;  et,  après 
plusieurs  discours  en  français,  en  basque  et  en  espa- 
gnol, le  secrétaire  général,  —  M .  Guilbeau,  —  a  invité 
les  personnes  qui  n'avaient  pas  reçu  une  convocation 
spéciale  à  sortir,  les  renvoyant  à  la  séance  de  l'après- 


—  358  - 

midi  qui  devait  être  publique.  Je  n'étais  pas  convoqué, 
et  l'on  n'a  pas  voulu  faire  une  exception  en  ma  faveur; 
M.  Guilbeau  a  même  afïïrmé  qu'une  quinzaine  d'adhé- 
rents se  retireraient  si  je  prenais  part  aux  travaux  de 
la  séance.  J'aurais  pu  faire  observer  que  ma  collabora- 
tion valait  peut-être  plus  que  celle  de  ces  quinze  adhé- 
rents; mais  je  m'en  suis  bien  gardé. 

Dans  la  séance  publique  de  l'après-midi,  on  a  rendu 
compte  des  travaux  de  la  matinée.  Les  congressistes 
s'étaient  partagés  en  trois  sections;  les  secrétaires  ont 
lu  des  rapports,  dont  les  conclusions  se  complétaient 
l'une  par  l'autre  et  qui  se  résument  dans  une  sorte  de 
règlement  très  compliqué.  Toute  proposition  orthogra- 
phique devra  être  imprimée,  adressée  au  bureau  per- 
manent et  à  tous  les  adhérents;  dans  un  délai  de  six 
mois,  les  adhérents  devront  la  renvoyer  au  bureau 
avec  leur  réfutation  s'il  y  a  lieu;  puis  le  bureau  fera 
son  rapport  au  Congrès  suivant  qui  décidera.  Il  va 
sans  dire  que  les  Basques  de  naissance  auront  seuls 
voix  délibérative.  Je  n'insiste  pas  sur  l'absurdité  de 
cette  dernière  stipulation. 

J'avais  préparé  la  note  suivante  que  j'ai  gardée  par 
devers  moi,  bien  entendu  : 

«  Pour  être  vraiment  sérieuse  et  pratique,  une 
orthographe  conventionnelle  doit  reposer  sur  les  prin- 
cipes suivants: 

»  1"  S'écarter  le  moins  possible  des  usages  reçus, 
des  habitudes  locales  ; 


-  359  — 

»  2"  Ne  donner  à  chaque  signe  qu'une  seule  valeur; 

»  3°  Représenter  par  un  signe  différent  chacun  des 
sons  différents  de  la  langue  ; 

»  4°  Employer,  autant  que  possible,  des  signes 
simples  formés  d'une  seule  lettre,  accentuée  ou 
ponctuée  au  besoin,  faciles  à  trouver  dans  les  impri- 
meries ; 

»  5°  Dans  ce  cas,  prendre  des  signes  conventionnels 
déjà  employés  pour  transcrire  les  sons  particuliers  à 
la  plupart  des  autres  langues . 

»  Donc,  en  ce  qui  concerne  le  basque  : 

»  Généraliser  le  h  pour  qn-,  —  gardez  les  //,  u 
mouillés;  —  gardera  et  z;  —  garder  /  (qu'on  pro- 
nonce, suivant  les  dialectes,  comme/  français,  comme 
^,  ou  comme  layo/a);  —  remplacer  ich,  ch,  ts,  tx,  etc., 
par  un  signe  simple  c  ouc',  &c. 

»  Il  y  aura  évidemment  certains  signes  qui  ne  seront 
employés  que  dans  certains  dialectes,  parce  qu'ils 
représenteront  les  sons  propres  à  ces  dialectes.  C'est 
pour  cela  qu'on  devra  laissera  u  la  valeur  générale  de 
ou  français  et  qu'on  représentera  par  û  le  son  de  Vu 
français  qui  se  trouve  en  souletin: 

»  &c. 

»  Au  point  de  vue  euphonique  : 

»  Écrire  (dialectes  bas-navarrais)  wya  et  non  uïa, 
parce  que  le  son  euphonique  représenté  par  y  ou  ï 
n'est  pas  une  voyelle  franche; 

»  Ne  pas  écrire,  en  un  seul  mot,  ezda,  ezdire,  bai- 


—  360  — 

dago,  ce  qui  est  contraire  à  la  prononciation,   mais 
ezta,eztire,  baitago,  ou  en  deux  mots  ez  da,  ez  dire, 
bai  dago,  etc. 
»  &c.  » 

Les  membres  de  l'une  des  sous-commissions 
s'étaient  occupés  de  quelques-uns  des  points  traités 
dans  la  note  ci-dessus;  mais  ils  proposaient  de*  ne  pas 
distinguer  il  et  u,  et  ils  substituaient  /et /tildes  à  tt  et 
//,  ce  qui  n'est  pas  pratique. 

En  définitive,  il  a  été  résolu  qu'on  se  réunirait  de 
nouveau  en  septembre  1902  à  Fontarabie.  Que  sor- 
tira-t-il  de  ce  second  «  Congrès  »? 

Je  ne  regrette  pas  trop  de  n'avoir  pu  assister  à  la 
séance  du  matin.  Pendant  cette  réunion,  qui  pourrait 
probablement  être  à  bon  droit  caractérisée  par  le  titre 
en  quatre  mots  d'une  pièce  de  Shakespeare,  j'ai  uti- 
lisé mes  loisirs  forcés  en  allant  faire  un  pèlerinage  qui 
me  tenait  au  cœur  et  une  visite  qui  me  souriait  beau- 
coup. Le  pèlerinage  avait  pour  but  la  tombe  de  Miss 
Laetitia  Probyn,  cette  vaillante  et  aimable  Anglaise 
qu'un  épouvantable  accident  a  tuée,  là,  en  quelques 
minutes,  dans  cette  Bidassoa  si  nonchalante  et  si 
calme,  il  y  a  vingt-deux  ans  déjà.  Elle  avait  étudié  le 
basque  et  m'avait  demandé  quelques  indications  ;  elle 
aimait  cette  langue  curieuse  et  singulière,  mais  elle 
s'étonnait  de  la  pauvreté  de  sa  littérature,  malgré  le 
mysticisme  et  l'esprit  rêveur  de  ceux  qui  la  parlent; 
elle  commençait  sans  doule  à  croire  comme  moi  que 


—  361  — 

c'est  là  un  organisme  arriéré,  incompatible  avec  les 
exigences  de  la  vie  moderne,  qui  de  lui-même  s'effa- 
cera peu  à  peu  et  disparaîtra  dans  le  respect  attentif 
des  hommes  d'étude. 

De  là,  je  suis  allé  au  Sanatorium  créé  entre  le  Casino 
et  le  château  observatoire  de  >J.  d'Abbadie  par  la  ville 
de  Paris  :  entre  la  science  et  le  plaisir,  la  charité,  non 
pas  cette  charité  banale  de  l'aumône  et  de  la  pitié, 
mais  une  œuvre  de  fraternité  et  de  solidarité  sociales  ; 
plus  de  deux  cents  enfants,  presque  tous  des  quartiers 
excentriques  de  la  capitale,  presque  tous  enfants  des 
déshérités  de  l'existence,  plus  ou  moins  physiquement, 
sinon  moralement  abandonnés,  viennent  y  chercher, 
avec  la  santé,  la  vigueur  de  l'esprit  qui  leur  permettra 
de  prendre  utilement  bientôt  leur  part  du  labeur 
universel. 

Et  je  m'en  suis  revenu,  songeant  à  ces  choses, 
satisfait  du  présent,  plein  d'espoir  dans  l'avenir,  plus 
que  jamais  résolu  à  marcher  toujours  en  avant,  et  à 
dédaigner  les  mesquineries  des  imbéciles,  les  calculs 
subtils  des  ambitieux  de  bas  étage,  et  les  prétentions 
des  savants  faciles.  Qu'importent  les  règlements  et  les 
distinctions  du  royaume  d'Entéléchie?  Le  monde 
marche. 

Julien  ViNSON. 


L'ARGOT  DE  SAINT-CYR 


CORRECTIONS  ET  ADDITIONS 

P.  255,  1.  17,  Balancer,  se  moquer  de. 

P.  256,  1.  9-10,  Bas-qf,  adjudant  du  cadre. 

P.  257,  1.  4,  Chapeau  (faire),  lancer,  etc. 

1.  19-20,  boue  ;  le  cornard  de  Satory. 
1.  av.-d""®,  ailleurs.  Exemple  célèbre  :  cornarder 
comme  un  tapin  (tambour). 

P.  259,  1.  5,  punis.  A  l'origine  :  contre- épaulette  qu'on 
met  pour  la  sortie. 
1.  25  et  26,  loup,  loups. 

P.  260,  l.  19,  fini  la  seconde  année.  Un  pékin,  une  caisse 
servant  de  malle  le  jour  du  pékin. 
Pékin  d'O,  FI  sur  la  ligne.  Les  dix  mois  que  les 
élèves  ont  à  passer  à  l'École  sont  désignés  par 
les  lettres  de  ces  deux  mots  :  un  officier,  prises 
dans  l'ordre.  Quand  on  est  pékin  d'O,  c'est  que 
l'on  a  fini  au  mois  de  janvier,  et  que  FI  c'est-à- 
dire  février,  est  sur  la  ligne,  c'est-à-dire  en 
action,  c'est-à-dire  en  train  d'être  «  tiré  »,  F2 
est  le  mois  de  mars.  R  est  le  mois  d'août.  Quand 
on  est  pékin  d'r,  on  est  soit  pékin  de  melon  (pre- 
mière année),  soit  pékin  de  bahut. 

P.  260,  1.  d'O,  le  commandant,  professeur-en-chef. 

1.  V.  la  Reoue,  t.  XXXIV,  p.  255-262. 


—  363  — 

P.  261,  1.  2,  sergent  d'infirmerie. 

1.  10-11,  Promo,  promotion. 
1.  13,  Repérer. 
1.  17,  dans  un  sac. 

1.   25-26,    Toubib   (mot  arabe),   médecin;  grand 
toubib,  médecin  en  chef. 


Le  Temps  du  25  juin  1901  publiait  la  lettre  suivante  : 

«  La  question  du  triomphe  de  Saint-Cyr,  a  failli  prendre, 
ces  jours  derniers,  les  proportions  d'un  événement  européen. 
C'est  bien  le  cas  de  dire  :  Que  de  bruit  pour  un  triomphe  qui 
n'en  est  pas  un  ! 

»  On  a  parlé  de  traditions  détruites  ou  à  détruire... 

»  Ah  ça,  pour  qui  nous  prend-on? 

»  Le  triomphe,  tel  qu'il  existe  aujourd'hui,  n'a  jamais  fait 
partie  des  traditions  de  l'école.  Il  s'en  faut  même  de  beaucoup, 
attendu  que  cette  solennité,  cette  cérémonie,  appelez  cela 
comme  vous  voudrez,  est  une  manifestation  essentiellement 
contraire  à  cette  discipline  dont  le  premier  bataillon  de 
France  doit,  plus  que  tout  autre,  donner  l'exemple. 

»  Jadis,  lorsque  les  élèves  de  l'école  tiraient,  au  polygone 
de  Saint-Cyr,  le  mortier  de  32  centimètres  et  le  24  court,  — 
une  pièce  extraordinaire,  abominablement  égueulée,  mais 
vénérable  parce  qu'elle  avait  fait  bravement  son  devoir  en 
1870,  — il  était  d'usage, —  par  analogie  avec  ce  qui  se  passe 
dans  l'artillerie,  —  de  fêter  le  pointeur  adroit  qui  avait  réussi 
à  loger  un  obus  ou  une  bombe  dans  le  tonneau  qui  servait 
de  but. 

»  Une  prolonge  réquisitionnée  au  quartier  de  cavalerie, 
attelée  de  chevaux  blancs  et  ornée  de  feuillage,  de  branches 
empruntées  aux  peupliers  du  polygone,  amenait  le  triompha- 
teur et  le  père  Système  (l'élève  ayant  le  plus  bas  matricule  de 


—  364  — 

la  promotion  des  anciens)  dans  la  cour  Wagram.  Ledit  père 
Système  prononçait  un  petit  discours  à  la  suite  duquel  il 
baptisait  la  promotion  des  conscrits  et  lui  donnait  sa  béné- 
diction. Ensuite  il  montait  à  la  salle  de  police,  délivrait  (avec 
le  consentement  du  Général)  les  prisonniers;  le  dimanche 
suivant,  il  y  avait  grande  galette  (sortie  générale)  et  c'était 
tout. 

»  Quel  que  fût  le  nombre  de  tonneaux  d'une  promotion,  il 
n'y  avait  qu'un  seul  triomphe.  On  cite  des  promotions  peu 
favorisées  du  sort  qui  firent  des  choux  blancs,  et  qui,  par 
suite,  n'eurent  aucune  solennité  de  ce  genre.  Une  autre, 
malheureuse  dans  ses  premiers  tirs,  avait  réussi,  le  dernier 
jour,  à  mettre  une  bombe  dans  le  tonneau.  Certaines  mau- 
vaises langues  prétendirent  même  à  cette  occasion  que  les 
choses  s'étaient  passées  d'une  façon  peu  naturelle,  mais  ce 
n'est  pas  notre  affaire.  D'ailleurs,  il  y  a  si  longtemps  de 
cela! 

»  Ce  qu'il  y  a  de  plus  clair,  c'est  que  cette  promotion  reçut 
à  l'époque  le  surnom  de  promotion  monotone.  Cette  évocation 
d'un  passé  déjà  si  lointain  ne  sera  évidemment  pas  agréable 
à  nombre  de  généraux  et  de  colonels  appartenant  à  cette 
fournée,  mais  tant  pis!  la  vérité  avant  tout. 

»  Par  la  suite,  en  raison  de  la  grande  portée  des  nouveaux 
canons  (de  7  et  de  5,  puis  de  90  et  de  80)  les  élèves  de  Saint- 
Cyr  ne  tirèrent  plus  au  polygone  de  l'école,  et  il  n'y  eut  plus 
de  triomphes.  C'est  alors  que  l'on  inventa  les  représentations 
que  le  général  Passerieu  a  failli  supprimer,  puis  a  régle- 
mentées... faute  de  mieux. 

Un  ancien  Saint-Cyrien.  » 


BIBLIOGRAPHIE  BASQUE 


Notes   et  Documents 

M.  E.-S.  Dodgson  nous  communique  la  notice  suivante 
qu'il  doit  à  l'amabilité  d'un  savant  ecclésiastique  du  pays 
basque  espagnol  : 

En  esta  villa  de  Durango  (Vizcaya)  hace  poco  tiempo 
que  se  ha|hallado  un  librito  impreso  en' pape!  de  hilo, 
que  contiene  80  paginas,  y  tiene  nueve  centiinetros  y 
medio  de>lto  por  siete  de  ancho,  y  con  cubierta  de 
pergamino.  En  la  pagina  l**  que  esta  sin  numerar  se 
halla  la  portada  que  dice  asi  :  «  NOVENA  A  MARIA 
SS.  Senora  nuestra,  q  baxo  del  Soberano  Mysterio 
de  su  Assumpcion  gloriosa  a  los  clelos,  y  de  la  denomi- 
nacion  Bascongada  de  Vribarri,  vendra  la  cordial  devo- 
cion  de  la  Nobilissima  Villa  de  Tavira  de  Durango 
(districto  del  Inclilo  Senorio  de  Viscayà)  en  su  famosa 
Iglesia  Parroquial  Matriz.  Dispuesta,  Por  el  ardiente 
zelo,  devocion,  y  desvelo  de  I).  Diego  Lorenzo  de  Ur- 
quizu  y  Guissasa,  vecino  de  la  mesma  Villa,  quien 
humilde  ofrece,  ydedica;  Al  Em.  Senor  Cardanal  de 
Molina,  etc.  Con  Lie.  En  Pamp.  en  la  Olicina  de  la 
Viuda  de  Alfonso  Burguete.  » 

Con  estoconcluye  la  p.  1".  La  p.  2'  sin  numerar 


—  366  — 

esta  en  blanco.  En  la  pagina  3'  numerada  dice  :  «  Al 
Eminentyssimo  Senor  Cardenal  de  Molina,  etc.  »  En 
la  p.  17  concluye  la  dedicatoria  dicha,  con  estas  pala- 
bras :  «  En  las  casas  de  mi  habitacion,  que  son  si  tas 
en  Durango  à  16.  de  Enero  de  1740.  Em"""  Seflor.  B. 
L.  P.  DE.  V.  EM^^su  masinfimo  siervo,  humilde,  y 
reconocido  servidor.  D.  Diego  Lorenzo  de  Urquizu  y 
Guissasa.  »  P.  18  dice  :  «  Licencia  delOrdinario.  » 
En  la  p.  19  concluye  la  licencia  con  estas  palabras  : 
«  Dada  en  Pamplona  à  30  de  Julio  de  1740.  Lie.  D. 
Antonio  Fernandez  de  Arcaya.  Por  mandado  del  Senor 
Provisor  D.  Matheo  Hermoso  de  Aranda,  s ice -sec.  » 
P.  20  DA  NOTiciA  EL  AUTOR  DE  los  motivos,  que  le  han 
asistido  pasa  imprimir  esta  Novena.  Concluye  en  la 
p.  26  y  en  la  27  empiega  la  Novena  que  concluye  en 
la  p.  75;  hasla  aqui  todo  en  Castellano. 

En  la  p.  76  dice  :  «  Q  Por  si  mostraren  queja  mis 
queridos  paisanos,  de  aver  yo  dispuesto  esta  Novera  en 
lenguaje  estranodel  Pais,  quevenera  la  milagrosalma- 
gen  de  Nueslra  Senora  de  Uribarri  (en  cuyoobsequio  la 
dispuse)  les  doy  gustoso  en  su  idioma,  las  octavas 
siguientes,  que  las  primeras  contienen  la  historia  de 
dicha  Santa  Imagen,  para  que  leyendo,  ô  cantandose 
diviertan  santamente. 

» 

ESTRIVILLO 

Zeu  biar  dan  léguez  alabetaco 
noc  izango  dau  gaur  mina, 


—  367    - 

Uribarrico  lirio  ederr, 
Assumcinozco  Virgina. 

Manso  Lopecen  devocinoac. 
ezin  aurquitu  eiquian, 
prenda  abaric  Durangorenzat, 
vere  ondasunen  arteân  : 
vere  icena  aztu  zecidim, 
erequi  eban  Imagina, 
Uribarrico  lirio  ederr, 
Âssumzinoeco  Virgina. 

Cumplidû  ezebari  vere  gustaba, 
vera  vicizan  artean, 
Baina  aguindueban  eguinzedilla, 
Azcango  vorondatean 
cleja  ederr  bat,  an  ifinteco. 
Ceruetaco  Krreguina, 
Uribarrico  lirio  ederr, 
Assuncinoeco  Virgina. 

Andra  Menina  Arandonoco 
(zein  zan  bere  lengusina) 
eracusi  zan,  encargû  onetan 
ondo  devotèa,  eta  fina, 
verè  lurrean  ifinten  ebala 
Serafinera,  Serafina, 
Uribarrico  lirio  ederr 
Assumcinoeco  Virgina. 

Ceruco  ondasùn  parebaguean 
izan  cedinzat  comtina, 


—  368  - 

Vri  noblèau  nai  izanèban 
eguin  laùbea,  eta  launa, 
ceuc  bacarrican  pagaduzeinque 
ceurè  onelaco  onguina, 
Uribarrico  lirio  ederr 
Assumzinoeco  Virgina . 

loia  ederr  au  veretu  azquèro, 
Durangoco  uri  nobleac, 
berà  adorerân  ifinten  ditu, 
berè  cuidadu  guztiac  ; 
ezin  obèto  empleaduleitè, 
noia  zengân  guère  aleguina, 
Uribarrico  lirio  ederr 
Assumcinoeco  Virgina. 

Ondo  pagtiètari  dozu  Andréa 
deusuben  devozifloa, 
mese  dèbaga  ichibagaric 
inoren  peticifloa, 
agaitizara  elejà  onetan 
gueùrc  Patrona  eguina 
Uribarrico  lirio  ederr 
Assumcioenco  Virgina. 

Âinbat  mirari  icustendogu 
guènrè  beguien  aiirreàn, 
zeinda  ustedogun  Amà  maytea 
zaucaguzala  lurrean; 
baya  baquigu  gueuc  zariana, 
Ceruetaco  Erreguina, 


—  369  — 

Uriharrico  lirio  ederr 
Assumcinoeco  Virgina. 

Nor  izangô  da  egongo  dana 
Novena  an  acabaduric, 
berè  pena,  ata  miseriaren 
consueloa  bagaric, . 
izanic  bere  deboto  enzat 
ain  ongui  eguilla  fma, 
Uribarrico  lirio  ederr 
Assumzinoeco  Virgina. 

FIN.  —  qSugèto  ciianto  este  escrito,  y  librillocon- 
tiene  à  la  censura,  y  correccion  de  nuestra  Santa  Madré 
Iglesia,  como  humilde,  y  fiel  hijo  de  ella,  y  para  que 
conste  firme  en  la  Villa  de  Durango  en  16.  de  Enero 
de  1740.  Diego  Lorenzo  de  Urquizu  y  Guissasa.  » 

Asi  concluye  en  la  ultima  hoja,  que  es  pagina  80, 
y  certifico  que  esta  copiado  en  extracto  exactamente 
del  original,  que  he  devuelto  al  vecino  de  esta  villa 
D.  José  de  Unamuno,  que  me  lo  presto  para  ello. 

Durango,  1°  de  Marzo  de  1901 . 

José  M"  deBERNAOLÀ. 

Le  même  amateur  a  aussi  communiqué  le  document 
suivant  : 

«  Don  Liborio  de  Azurmendi,  presbitero  résidente 
en  Abadiano,  Viscaya,  me  ha  prestado  los  versos  si- 
guientes,  que  los  ha  hallado  entre  los  papeles  queper- 
tenecieron  al  finado  pbro  de  Abadiano   Don    Pedro 

25 


—  370  — 

Valentin  de  Aresti,  y  qaecopiadosliteralmente  por  mi 
dicen  asi  : 

Sorcico  para  el  Nacimiento  deî  Seflor  1804. 

Eldu  dira  jentiac 
juslu  Patriarcac 
atzeguiri  baga  icharon 
situben  egunac 
Bete  dira  Igarten 
sarrico  esanac 
elduco  sala  jauna 
salbetan  guizonac 

Estrivillo 

Olgau  gaitian  gustioc 
Egun  olgurasco  onetan 
daijogun  solas  seinoni 
atzeguinen  jasarriric 
eraguijoc  tambolinorri 
da  trago  bat  esarri  :  Ai... 
Orainche  nac  ni  egarri 
suben  osasunagaiti. 

Bost  milla  ta  gueijago 
urte  ozuelan 
sispuruca  azabac 
icusi  guenduzan 
Bialdu  cijen  cerubac 
Irins  gozuetan 


—  371  — 

esquiniric  eustsena 
etorrico  bazan. 

Aguertu  da  Belenen 
egun  gaberdijan 
esquinirico  jauna 
aingueru  artian 
guizon  eguinic  dator 
amatzat  arturic 
Virgina  Andra  Marija 
Pepegas  loturic. 

Aingueruben  eguinez 
barrijau  da  aguertu 
Belengo  Arzainetara 
alan  da  sinistu 
Artu  artuca  duas 
barrijau  entzunic 
jaijo  dana  icustera 
atzeguin  bagaric. 

Erdiguzu  Arzainac 
l  Nor  dozube  icusi 
Belengo  portalian 
Aingueruba  candi? 
jaijaquera  eder  bat 
olguras  beteric 
ipini  gaitubana 
guslis  soraturic. 

Jaijo  dan  sein  ederraii 
Bedeincatutera 


—  372  — 

guazan  daigun  gustijoc 
portale  alara 
M  a  ri  j  a  da  losepe 
dagos  auspasturic 
Arzainai  seinau  nordan 
agertu  ezinic 

Ea  bada  jentiac 
gogo  arguituric 
arirna  ta  gorpulzac 
ondo  ipiniric 
guertu  gaitîan  laster 
emoiten  jaunoni 
barri  onen  eguinez 
lastanchu  barribi.  » 

r^e  même  ecclésiastique  a  relevé  les  notes  suivantes 
dans  le  livre  de  la  Cofradia  de  S"»  Maria  de  Durango, 
fondée  en  1654,  après  la  mort  de  d.  Martin  Ochoa  de 
Capânaga  : 

«  En  siete  de  Noviembre  de  mil  seiscientos  y  no- 
venta  y  cuatro  anos,  muriô  al  D»'  D"  Nicolas  de  Zubia, 
Beneticiado  que  fué  des  estas  Iglesias,  Cofrade  que  fué 
de  Cofradia  de  la  Purisima  Concepciôn,  habiendo  reci- 
bido  los  Santos  Sacramentos.  Su  cuerpo  fue  enterrado 
en  la  parroquia  de  Santa  Maria  de  esta  villa  y  testo  anle 
Domingo  de  Latatua. 

^>  En  veinte  y  uno  de  Noviembre  de  mil  seiscientos 
y  noventa  y  cuatro  anos  celebrô  la  Cofradia  los  dos 


—  373  — 

piares  de  harras  en  sufragio  del  anima  del  D'  D"  Ni- 
colas de  Zubia,  Beneficiado  que  fué  de  estas  Iglesias. 
»  En  veinta  y  très  dias  del  mes  de  Diciembre  de  mil 
seiscientos  y  ocho  anos  se  tocô  sentimiento'  en  la 
Tglesia  parroquial  de  Nuestra  Sna  Sancta  Maria  de 
esta  villa  del  Lic^^  j)n  Joseph  de  Lezamis,  cura  de  la 
Iglesia  catedral  de  la  Ciudad  de  Mégico  y  despues  de 
Visperas  y  el  Lunes  siguiente  se  celebraron  el  nove- 
nario  y  aniversario  del  susodicho  por  la  Cofradia.  » 
On  sait  que  le  catéchisme  de  N.  de  Zubia  a  été  re- 
produit dans  la  Revue  de  Lingmstique  en  1888. 

M.  J.-M.  Bernaola  nous  communique  de  plus  la 
liste  suivante  qu'il  a  copiée  dans  un  manuscrit  de 
D.  Hamon  de  Echezarreta,  auteur  de  plusieurs  petits 
ouvrages  biscayens  : 

Nombres  de  varias  drboles 

Aricha.  roble.  castaina.  castana. 

artia.  encina.  madarija.  peral. 

ametsa.  roble  albar.  ocarana.  ciruelo. 

aliza.  aliso.  sagarra.  manzano. 

eltzuna.  chopo.  masustabia.  morera. 

elchuna.  otro  arbol  que  tam-  macatza.  peral  silvestre. 

bien  Uaman  orricarria).  mispillia.  mispero. 

agulna.  tejo.  guerisia.  cereso  o  quindo. 

pagua.  haya.  j)n'sca6a.melocoton,abricote. 

lessarra,  leixavra.  fresno.  picua.  higuera. 

inchaurra.  nogal.  urquija.  abedul. 

1.  On  sonna  le  (2;las. 


374 


Nombres  de  varias  arbustos 


azcarra.  arce. 

elorrija.  espino  blanco. 

erinotza.  laurel. 

ichusqui  latza.  brusco. 

gurhisia  {purpuixa).  borto, 
su  fruto  madrono. 

gorostija.  acebo. 

masusta  chicarra.  morera 
enana. 

guisatza.  brezo  alto. 

saratza.  sauce. 

guinarria-  brezo  bajo- 

saarra.  zarzo. 

asto  larrosia.  rosa  silvestre. 

larrosia.  rosa  cultivada. 

araba  olia.  Otraargoma  mas 
bajo,  pero  ancha  como  fi- 
gura de  campana. 


maatza,  parra  o  cepa. 

maurijay  arohija.  aréndano, 
planta  parasita  que  se  cria 
en  las  copas  de  algunos 
arboles  y  aùn  en  tierra,  y 
da  unos  granos  negros  dul- 
ces. 

TJntza.  hiedra. 

Uurra  (urra)  urricha,  avel- 
lano  (este  ultimo,y  el  pri- 
mero)  el  fruto. 

Zumia,  miembre. 

Zuma  ligarrà.  Arbusto  de 
cuyas  ramas  hacen  los  za- 
pateros  las  estaquillas  para 

.  los  zapatos. 

Sabija,  planta  joven,  chir- 
pia. 


BIBLIOGRAPHIE 


Grammatik  der  Prakrit-Sprachen  von  R.  Pischel 
(Grundriss  der  [ndo-Ârischen  Philologie  und  Âlter- 
lumskunde,  von  G.  Biihler  und  F.  Kielliorn;  I  Band, 
8  Heft).  Strasbourg,  K.-J.  Trûbner,  1900.  grand  in-8°, 
(ij)-430p. 

I.e  travail  de  M.  Pischel  est  au-dessus  de  tout  éloge  ; 
cette  magistrale  élude  rendra  les  plus  grands  services 
aux  linguistes  et  surtout  à  ceux  qui  s'occupent  des 
langues  modernes  de  l'Inde  issues  directement  des 
prakrits.  On  sait  que,  dans  ces  langues  modernes,  se 
manifestent  deux  courants  ou  si  l'on  veut  deux  ten- 
dances, phonétiques  et  morphologiques,  marquées  no- 
tamment par  l'hindî  oriental  et  par  les  patois  occiden- 
taux du  même  idiome.  L'analyse  des  prakrits  donnera 
la  clef  de  cette  double  et  remarquable  évolution. 

M.  Pischel  ajoute  aux  formes,  pour  ainsi  dire  clas- 
siques, des  prakrits,  les  dialectes  djâinas  qui  se  rat- 
tachent au  Mâhârâstrî  et  au  Çâurasênî,  où  l'on  trouve 
de  précieuses  et  très  remarquables  variantes.  Que  de 
faits  intéressants  et  peu  connus  ! 

L'ouvrage  est  accompagné  de  tables  fort  bien  faites 
et  très  utiles.  Mais  je  lui  ferai  pourtant  un  reproche, 


—  376  — 

celui  d'être  vraiment  trop  compact;  la  lecture  et  le 
maniement  n'en  sont  pas  faciles,  quelque  claires,  pré- 
cises et  méthodiques  qu'en  soient  les  diverses  parties. 
On  regrette  aussi  de  ne  pas  y  trouver  des  tableaux  ré- 
capitulatifs, des  résumés  schématiques. 

Comme  exemple  des  variations  que  les  mots  les  plus 
usuels  ont  pu  subir,  je  citerai  le  nom  de  nombre  «  dix- 
neuf  »,  êkânavimçnti  qui  est  devenu  en  arddhamâ- 
gadhî  êgûnavîsam,  en  apabhramça.  êgûmvimsâ;  en 
magadhî  et  en  jâina-mahârâstrî,  aûmvîsai  et  amavî- 
sam;  on  sait  que  le  vieil  hindî  avait  agunîs,  gunis; 
l'hindî  moderne  a  wiîs,  le  panjabî  unnih,  le  sindhî 
unîh,  le  gudjaratî  ôganîs,  le  mahratî  êkunis,  l'uryia 
unâiç,  le  bangalî  ûnk. 

Julien  ViNSON. 


Légendes  morales  de  l'Inde,  empruntées  au  Bhagavata 
purâna  et  au  Mahâbhârata,  traduites  du  sanscrit  par 
A.  Roussel  (Les  littératures  populaires,  t.  XXXIX). 
Paris,  J.  Maisonneuve,  1901,  petit  in-8°,  (viij)-361  p. 

Je  ne  puis  que  m'en  rapporter  à  mon  compte  rendu 
du  premier  volume,  et  je  dois  louer  de  nouveau  la 
forme  et  le  fond  de  cette  publication.  x\lais  j'ai  le  devoir 
de  rechercher  dans  les  notices  préliminaires  et  dans 
les  notes  qui  accompagnent  chaque  récit  comment  le 
savant  traducteur  comprend  et  apprécie  les  choses  de 
l'Inde.  Or,  à  la  note  33  du  premier  récit,  je  vois  que 
M.  Houssel,  parlant  des  quatre  fins  de  l'homme,  rend 


—  377  — 

kâma  par  «  le  désir  »  et  émet  même  l'hypothèse  que 
«  le  désir  »  kdma  peut  être  confondu  avec  le  môkcha, 
la  délivrance  finale.  Cette  hypothèse  est  absolument 
inadmissible  :  kâma  c'est  l'amour,  l'amour  matériel, 
l'amour  charnel,  si  j'ose  m'exprimer  ainsi,  et  jamais 
aucun  Indien  n'a  pu  l'assimiler  à  l'aspiration  au  môkcha 
qui  est  la  cessation  de  toute  activité. 

Je  vois  ailleurs  que  M.  Roussel  a  bien  reconnu  que 
le  mot  de  création  n'a  aucun  sens  pour  les  Indiens  et 
qu'il  a  bien  compris  le  rôle  véritable  deÇiva,  qui  n'est 
pas  tant  le  destructeur  que  le  rénovateur,  mais  je  ne 
saiss'il  s'est  bien  rendu  compte  du  principe  fondamental 
de  toute  la  philosophie  hindoue.  Cette  conception  est 
en  effet  absolument  incompatible  avec  les  considéra- 
tions queM.  Roussel  expose  à  la  p.  62,  où  le  bonheur 
est  présenté  comme  la  principale  fin  de  l'homme,  ce 
bonheur  étant  la  vérité,  c'est-à-dire  Dieu  ou  le  Christ. 
Mais,  pour  les  Indiens,  Dieu,  ainsi  compris,  n'existe 
pas;  «  Dieu  »  n'est  rien  pour  eux  en  dehors  de  la  sub- 
stance éternelle  inerte  et  inaçtive.  Les  dieux  hindous 
sont  humains  :  ils  vivent,  ils  agissent,  ils  meurent.  Et 
voilà  pourquoi  j'ai  dit  ailleurs,  et  je  le  répète  ici,  que 
Jésus-Christ  est  fort  inférieur  au  Bouddha  par  exemple. 
M.  Roussel  crie  à  ce  propos  au  blasphème,  au  sacri- 
lège, au  ridicule,  à  l'insanité;  mais  il  suffit  de  lire 
l'Évangile,  auquel  M.  Roussel  me  renvoie  maladroi- 
tament  et  de  ne  pas  faire  de  métaphysique.  Le  Jésus 
de  l'Évangile  est  un  rêveur  mystique,  un  théoricien 


—  378  — 

révolutionnaire;  mais  prudent,  traînant  de  village  en 
village  sa  misère  et  sa  faconde,  mauvais  fils,  citoyen 
médiocre,  n'ayant  su  être  ni  époux,  ni  père,  n'ayant 
rendu  aucun  service  à  la  chose  publique.  Certes,  les 
détails  de  la  philosophie  bouddhiste  peuvent  être  pué- 
rils ou  ridicules,  mais  la  personnalité  de  Gâutama  est 
incontestablement  respectable.  Il  ne  renonce  au  monde 
qu'après  y  avoir  joué  son  rôle;  il  descend  du  trône 
pour  chercher  dans  la  solitude  la  vraie  base  de  la  loi 
morale;  il  ne  prêche  point  la  haine  des  riches;  il 
n'excite  point  les  inférieurs  contre  les  privilégiés.  Et, 
en  résumé,  il  enseigne  que  le  malheur  ou  le  bonheur 
résultent  delà  manière  dont  chaque  homme  conduit  sa 
vie;  est-ce  que  cela  ne  vaut  pas  mieux  que  les  huit 
béatitudes  ou  les  divers  commandements  de  l'Église? 

Julien  ViNsoN. 


Paul  Sébillot.  Le  Folk-lore  des  pêcheurs  (Les  Lit- 
tératures populaires  de  toutes  les  nations,  t.  XLIII). 
Paris,  J.  Maisonneuve,  1901,  petit  in-8°,  (viij)-xij- 
389  p. 

Je  suis  enchanté  que  M.  Sébillot  ait  enfin  adopté  ce 
mol  de  folk-lore  qui  lui  répugnait  tant  naguère  et  qu'on 
a  vainement  essayé  de  remplacer  par  des  équivalents 
français.  L'adoption  de  ce  mot  que  j'ai  été  un  des  pre- 
miers à  employer  n'a  rien  d'offensant  pour  notre 
amour-propre;  ce  sera,  si  l'on  veut,  de  l'internationa- 
lisme, et  du  bon. 


—  879  — 

Que  dirai-je  maintenant  de  ce  nouveau  volume  de 
notre  éminent  collaborateur?  Son  nom,  au  frontispice 
d'un  livre,  en  indique  suffisamment  l'excellence;  et  il 
n'est  plus  besoin  de  recommandation  ou  d'éloge.  Il 
s'agit  là  d'une  catégorie  spéciale  de  populations  qui 
forment  souvent  des  groupes  ethniques  distincts  et  qui 
ont  par  conséquent  leurs  mœurs,  leurs  coutumes,  leur 
langage,  leurs  superstitions;  c'est  la  première  fois 
qu'on  entreprend  de  les  étudier,  et  M.  Sébillot  est 
passé  maître  dans  ce  genre  de  travaux.  On  pourra  com- 
pléter son  livre;  on  y  ajoutera  des  subdivisions  et  des 
détails,  mais  le  cadre  général  restera.  Il  n'est  pas  une 
page  d'ailleurs  qu'on  n'y  lise  avec  profil. 

Julien  ViNSON. 


Bibliographie  des  Bibles  et  des  Nouveaux  Testa- 
ments en  langue  française  des  XV^  et  XVI"  siècles,  par 
W.  J.  Van  Eys.  Genève,  H.  Kûndig,  in-8".  —  l'"  par- 
tie :  Bibles.  1900,  viij-211  p.;  —  2'  partie  :  Nou- 
veaux Testaments,  1901,  (iv)-269  p. 

Ce  travail,  fort  bien  fait,  sera  éminement  utile.  Mais 
je  dois  me  borner  à  l'annoncer,  car  je  ne  saurais  en  faire 
aucunement  la  critique.  Pour  les  quelques  volumes  que 
j'ai  sous  la  main,  les  descriptions  de  M.  Van  Eys  me 
semblent  tout  à  fait  exactes,  et  je  ne  vois  aucune  édi- 
tion nouvelle  à  lui  signaler.  En  ce  qui  concerne  le 
Testament  de  Pierre  Hautin,  la  Rochelle,  1577,  —  que 


—  380  — 

j'ai  proposé,  faute  de  mieux,  de  prendre  pour  servir 
de  référence  à  la  traduction  basque  de  Liçarrague,  — 
M.  Schuchardt  paraît  en  posséder  un  exemplaire  com- 
plet avec  le  titre. 

On  ne  peut  que  féliciter  le  savant  linguiste,  qui  est 
aussi  un  excellent  bibliophile.  Son  nouvel  ouvrage 
fort  élégamment  imprimé  est  précis,  clair,  méthodique 
et  complété  par  des  tables  très  commodes.  On  y  ajou- 
tera sans  doute,  mais  on  aura  vraisemblablement  peu 
à  y  corriger.  Julien  Vinson. 


Manuel  de  la  langue  haoussa,  par  M.  Delafosse, 
chargé  du  cours  des  dialectes  soudanais  à  l'École  des 
Langues  orientales.  Paris,  J.  Maisonneuve,  1981, 
in-8°,  xiv-134p. 

Ce  petit  manuel  est  très  bien  fait.  Il  comprend  un 
abrégé  de  grammaire  (p.  1-33),  des  textes  (contes, 
légendes,  récits,  proverbes,  p.  35-88)  et  un  vocabulaire 
(p.  89-134),  le  tout  précédé  d'unesubstantielle préface, 
où  nous  apprenons  parfailement  quelle  est  l'importance 
géographique  et  commerciale  du  haoussa.  Il  a  de  plus, 
pour  nous,  cet  intérêt  d'être  parlé  dans  la  zone  soumise 
à  l'influence  française. 

Rien  à  dire  sur  le  vocabulaire  et  sur  les  textes, 
M.  Delafosse  avait  recueilli  lui-même  des  documents 
originaux,  mais  ils  ont  été  détruits  malheureusement 
dans  rincendiedupostedeToumodi,en  septembre  1899, 


-  381  - 

et  il  a  fallu  emprunter  des  spécimens  linguistiques  à 
des  recueils  anglais.  C'est  très  regrettable. 
■  La  grammaire  est  l'œuvre  personnelle  de  M.  Dela- 
fosse.  Il  m'a  paru  intéressant  de  la  comparer  avec 
l'esquisse  de  Fr.  Mûller  dans  sa  Grundriss{t.  I,  2^  par- 
tie, p.  215-237),  rédigée  d'après  les  travaux  du  Kév. 
P.  Schoen  qui  a  le  premier  étudié,  et  pour  ainsi  dire 
découvert  la  langue  haoussa.  M.  Delafosse  n'a  pas  donné 
le  tableau  des  sons  et  des  bruits  de  cette  langue,  et  il  ne 
parle  que  très  sommairement  de  la  prononciation  et  de 
l'euphonie  :  il  semble  pourtant  que  le  haoussa  a  des 
sons  particuliers,  un  e  et  o,  par  exemple,  et  des  con- 
sonnes composées  remarquables,  tch,  dj,  ts,  dz,  qu'il 
aurait  fallu  signaler,  ainsi  que  le  groupe  initial  gb.  Je 
remarque  que  M.  Delafosse  ne  distingue  pas  a,  i,  u 
brefs  de  d,  î,  û  longs,  et  que  son  ii  [gn  fr.)  ne  se 
retrouve  pas  dans  le  tableau  de  Fr.  Mûller.  Y  a-t-il  là 
une  particularité  de  prononciation  locale? 

Je  ne  puis  entrer  dans  le  détail  des  faits  grammati- 
caux, mais  le  résumé  de  M.  Delafosse  me  parait  clair, 
méthodique,  et,  autant  que  je  puis  en  juger,  générale- 
ment exact.  La  conjugaison,  fort  développée,  est  com- 
posée d'éléments  pronominaux  nombreux  et  de  verbes 
pour  ainsi  dire  auxiliaires  (aller,  être)  qui  forment 
beaucoup  de  nuances  temporelles.  La  %^  et  la  3"  per- 
sonne du  singulier  ont,  comme  en  arabe,  une  forme 
spéciale  pour  le  masculin  et  le  féminin.  La  numération 
parait  décimale,  mais   les  dizaines,  de  20  à  90,  sont 


—  382  — 

empruntées  à  l'arabe.  Le  vocabulaire  a  naturellement 
beaucoup  de  mots  arabes,  ainsi  mallâmi  «  prêtre  y^  est 
une  adaptation  de  mu'alUm  «  professeur  ». 

Julien  ViNSON. 


•  Emiliano  de  ÂRRiAGA.  Lexicon  etimologico,  natura- 
lisla  y  popular  del  Bilbaino  neto.  Bilbao,  S.  de  Amor- 
rortu,  1896,  petit  in-8°  de  317  p.  (avec  un  post-scrip- 
lum  de  xvj  p.) 

Très  intéressant  spécimen  du  parler  populaire  de 
Bilbao,  qui  est  de  l'espagnol  prononcé  parfois  d'une 
façon  particulière,  et  mélangé  d'expressions  emprun- 
tées au  basque.  Quelques  locutions  sont  d'une  origine 
difficile  à  déterminer.  Comme  fait  remarquable  de  pro- 
nonciation, je  citerai  le  z  [ce,  ci)  prononcé  comme  s  et 
la  suppression  du  tZ  fyial  que  le  castillan  siffle  [Vaya- 
dolù,  le  bilbaïendit  Vayadoli).  Certains  mots  changent 
de  genre  :  la  vinagre,  la  pes,  el  /ucnte,  etc.  On  se  sert 
beaucoup  des  terminaisons  augriientatives  ou  diminu- 
Xiwes  on  (esp.),  tchu  (h'dsq.)  ;  ex.  :  hijotchu,  proprement 
«  mon  fiston  ». 

Le  vocabulaire  est  très  curieux  et  très  instructif.  On 
y  trouve  beaucoup  de  basque.  Il  faut  seulement  re- 
gretter que  l'auteur,  qui  est  homme  d'esprit,  ait  gâté 
son  travail  en  proposan  t  des  étymologiesde  mots  basques 
aussi  extravagantes  que  celles  proposées  pour  Bilbao, 
Be-ili-bat-o  «  deux  villes  en  une  »,  amil-be-o  «sous 
l'escarpement,    la  escarpa  »,   etc.,   et  pour  Biscaya 


—  383  — 

bizkar-di-a  «  el  lomol  »  ou  «  terre  montagneuse  ».  C'est 
absurde,  et  cela  ne  prouve  absolument  rien. 

J.  V. 

Zeitschri/t  fur  vergleichende  Sprachforschung  auf 
dem  Gebiete  der  indogermanischen  Sprachen.  Von 
E.  KuHN  und  J.  ScHMiDT.  Band  XXXVII  (Neue  Folge, 
BandXVII),3Heft.  Giltersloh^C.  Bertelsmann,  1901, 
in-8o,  p.  277  à  428. 

Contient  :  Aniautstudien,  par  Th.  Siehs,  par  277- 
314;  Slavische  Miscellen,  par  F.  Lorentz,  p.  324-351  ; 
Bemerkungen  ûber  die  Âkzeniqualilœten  des  Kaschu- 
Imchenund  Slovinzischen,  par  F.  Lorentz,  p.  351-364  ; 
Der  Genitiv-Accusativ  bei  belebten  Wesen  im  Slavischen, 
par  Frich  Berneker,  p.  364-386;  Miscellen,  par  E.  Zu- 
pitza,  p.  387-406;  Neiigrieschisches  und  Romanisches, 
I,  par  K.  Dieterich,  p.  407-423;  [risches,  par  B. 
Thurneysen,  p.  423-427;  Miscellen  (armenische),  par 
L.  de  Patrubàny,  p.  427-428. 


Bulletin  trimestriel  de  la  Société  des  sciences, 
lettres  et  arts  de  Pau,  1898-1899  (11'  série,  tome 
XXVIII  (2Mivraison).  Pau,  veuve  L.   Ribaul,  1900. 

Contient  :  p.  160-280,  Rôle  des  feux  du  comté  de 
Foix  en  1390,  par  A.  de  Dufau  de  Maluquer;  — 
281-288,  Rapport  sur  le  Congrès  des  Sociétés  savantes 
à  Toulouse,  par  Adrien  Planté;  — p.  289-308,  67as- 
sifications  chimiques,  ^diX  V.  Ducla;  —  p.  309-318, 


—  384  — 

Prévision  du  temps  au  moyen  de  la  bouteille  de  Leyde, 

par  V.  Duclà;  —  p.  319-324,  Précision  du  temps  par 

l'attraction  d'aiguilles  aimantées,  parV.  Duclà;  — 

p.  325-340,  Procès-verbaux  des  séances;  —  p.  341- 

346,  Liste  des  membres  de  la  Société;  —p.  347-350, 

Liste  des  Sociétés  avec  lesquelles  la  Compagnie  est  en 

correspondance. 

J.  V. 


VARIA 


I.  —  Les  Éditeurs  et  les  vieux  Manuscrits  tamouls 

Beaucoup  d'anciens  ouvrages  tamouls^  fort  importants,  ont  été 
perdus  par  la  négligence  de  ceux  qui  en  possédaient  des  copies 
manuscrites,  ou  plutôt  par  l'insouciance  des  héritiers  de  ces  ama- 
teurs; ce  qui  d'ailleurs  a  le  plus  contribué  à  ces  pertes  irrépa- 
rables, c'est  la  fragilité  de  la  matière  sur  laquelle  ces  vieux 
ouvrages  étaient  écrits.  Il  n'y  a  guère  plus  d'un  siècle  que  le 
papier  a  commencéà  être  d'un  usage  courant  dans  l'Inde,  et  il  n'y 
a  pas  plus  de  quatre-vingts  ans  qu'on  a  commencé  à  imprimer  les 
écrits  originaux.  Jusqu'à  cette  époque,  la  littérature  dravidienne 
était  représentée  tout  entière  par  des  manuscrits  sur  feuilles  de 
palmier,  sur  ôlcs. 

On  s'est  occupé,  depuis  une  vingtaine  d'années,  d'arracher  à  la 
destruction  ces  vieux  ouvrages.  On  en  a  fait  prendre  des  copies 
sur  papier,  on  a  déposé  des  manuscrits  anciens  dans  les  biblio- 
thèques publiques,  et  plusieurs  savants  du  pays  se  pont  occupés 
de  faire  imprimer  ces  précieux  restes  d'une  longue  et  brillante 
période  littéraire.  Parmi  ces  savants,  il  faut  citer  au  premier  rang 
Vè.  Sâtninâda-aiyar,  professeur  au  collège  de  Kunxhhakônatn, 
et  Ci.  Vâi.  Tâmôdarampillei  (de  Jaftna),  qui  ont  publié,  avec  une 
sollicitude  empressée  et  une  minutieuse  attention,  de  remarquables 
éditions  des  vieux  classiques.  Le  premier  n'a  donné  aucun  détail 
sur  les  manuscrits  qu'il  a  consultés,  mais  le  second  a  rendu  un 
compte  très  exact  et  très  intéressant  de  la  peine  qu'il  a  prise  et 
des  ennuis  que  l'état  déplorable  des  manuscrits  lui  a  causés, 
surtout  à  propos  du  Sâlàinani,  poème  épique djâina,  et  du  Kalit- 
togci,  poème  didactique  amoureux. 

On  a  vu,  par  la  notice  qui  est  en  tête  de  ce  numéro  (p.  305), 

26 


—  386  — 

que  le  Sûlâmani  a  été  publié  d'après  cinq  manuscrits.  On  avait 
pu  en  découvrir  huit  dans  tout  le  pays  tamoul,  mais  deux 
n'étaient  que  des  copies  d'un  des  six  autres^  et  l'un  de  ceux-ci 
a  disparu  depuis  le  moment  où  il  avait  été  signalé  à  l'éditeur. 

Quant  au  Kalittogei,  l'histoire  de  l'édition  est  encore  plus  triste, 
encore  plus  intéressante  et  plus  propre  à  provoquer  de  salutaires 
réflexions.  TàmôdarampiUei  a  consulté  tout  d'abord  un  œanufîcrit 
contenant  le  texte  seul,  sans  commentaire,  appartenant  à  Naya- 
nappanmdalir/âr,  de  Pondichéry,  mais  il  dut  l'abandonner,  parce 
que  ce  manuscrit  était  incomplet  du  commencement  et  de  la  fin, 
qu'il  était  à  peine  lisible  et  dans  un  état  déplorable.  Précédemment, 
l'éditeur  avait  obtenu  une  assez  bonne  copie  du  savant  Arhcmu- 
ganâvalar;  il  écrivit  aux  supérieurs  des  divers  monastères  pour 
leur  demander  communication  de  celles  qu'ils  posséderaient.  Le 
supérieur  du  couvent  de  Tirncûcadmlurei,  Saf  kuriinàdaçvâmi, 
lui  envoya  aussitôt  la  sienne  et  en  même  temps  deux  autres  qu'il 
avait  fait  venir  du  Sud.  Les  autres  monastères  n'envoyèrent  rien^ 
parce  qu'ils  ne  possédaient  rien  sans  doute.  La  publication  fut 
alors  préparée;  le  texte  copié,  collationné  et  revu;  un  vocabulaire 
des  mots  difficiles  fut  rédigé:  mais  le  travail  était  défectueux  et 
incomplet,  et  il  devint  nécessaire  de  chercher  d'autres  manuscrits. 

Deux  amateurs  distingués,  KanagaçabeippiTlci,  de  JaSna,  et 
Râmalingappillei,  de  Méliapour,  s'empressèrent  de  communiquer 
leurs  exemplaires.  Divers  fragments  furent  retrouvés  dans  des 
collections  publiques  de  Madras  et  de  Tanjâvûr,  mais  leur  réunion 
ne  formait  qu'un  exemplaire  peu  utilisable,  que  Téditeur  laissa 
de  côté. 

Sur  ces  bases,  l'impression  fut  sérieusement  préparée.  Mais  toutes 
les  copies,  excepté  l'une  de  celles  venues  de  Tiruvâvadudurei, 
se  terminaient  avant  la  fin  de  la  quatrième  section  de  l'ouvrage, 
qui  en  contient  cinq.  Que  faire?  Évidemment  chercher  encore. 
Ta  môdai-ampillei  écrivit  au  Sud,  à  l'Est  et  à  l'Ouest,  et  entreprit 
lui-même  un  voyage  d'exploration  dans  le  Nord  :  «  Lorsque  j'étais 
venu  de  Jaffna  dans  le  pays  »,  dit-il,  «  l'année  Pramâdîca  (1853), 
il  y  a  trente-cinq  ans,  dans  le  but  de  rechercher  les  ouvrages 
tamouls  devenus  rares,  je  me  rappelai  avoir  vu  des  manuscrits  du 


—  387  — 

Kalittogei  chez  un  vieux  professeur  de  Manjakkuppam,  à  Gou- 
delour,  nommé  Çantnugacâttit/âr,  et  chez  un  savant  de  Nellit- 
tôppu,  à  Pondichéry,  nommé  Çokkalingappillei,  et  je  me  rendis 
dans  ces  localités  pour  y  faire  des  recherches.  Je  ne  pus  retrouver 
l'endroit  où  habitait  le  premier.  Quant  au  second,  j'appris  que  sa 
petite-fille  et  le  reste  de  sa  famille  habitaient  la  ville  voisine;  j'y 
allai,  je  m'informai  auprès  du  mari  de  la  petite-fille  en  question 
qui  me  répondit  :  «  Quoi?  Nous  avons  là  depuis  fort  longtemps 
un  paquet  d'ôles  dont  nous  ignorons  même  le  titre  ;  ii  elles  peuvent 
vous  intéresser,  regardez-les  et  emportez-les,  et  il  me  donna  géné- 
reusement ce  paquet  d'ôles.  Les  larmes  que  je  versai  témoignent 
quelle  fut  ma  douleur  en  constatant  l'état  de  ce  manuscrit;  mais, 
bien  que  le  Kalittogei  y  fût  incomplet  et  défectueux  çà  et  là,  je 
l'emportai  avec  une  grande  joie,  car  il  contenait  la  cinquième 
section  de  l'ouvrage  que  je  cherchais.  »  Pendant  ce  temps,  on  avait 
trouvé  à  Tin(;licanain  un  exemplaire  qui  contenait  le  commence- 
ment de  cette  cinquième  section. 

D'autre  part.  Ta.  Kanagaçundarampillei,  de  Tirikônamalei, 
afiBrmait  qu'il  avait  vu  cette  cinquième  section  dans  un  dépôt 
public  de  Madras;  Tdinôdarampillci  revint  aux  fragments  qu'il 
avait  mis  de  côté  et,  à  son  immense  satisfaction,  il  y  trouva  en 
effet  la  section  signalée;  de  plus,  il  eut  la  bonne  fortune  de  décou- 
vrir, dans  le  même  endroit,  un  autre  manuscrit  qui  allait  jusqu'à 
lastrophe23  de  la  même  division.  La  copie  et  le  collationnement 
furent  aussitôt  entrepris. 

Mais  Guruçàini-aiyar,  de  Tiruttanigei,  fit  connaître  qu'un 
amateur  avait  emportéà  Gâr/amuttàr  un  exemplaire  daKalittogei 
qui  avait  appartenu  au  savant  Çaracanappèrumàlaigav,  son 
parent.  On  fit  demander  que  ce  manuscrit  fût  prêté  pour  quelques 
jours,  mais  on  se  heurta  à  un  refus  formel,  basé  sur  ce  que  le 
propriétaire  actuel  tenait  à  ses  livres  plus  qu'à  la  vie,  «  comme 
s'il  s'agissait  de  perles  contenues  dans  les  huîtres  de  la  mer  ou  de 
la  pierre  précieuse  qui  est  dans  la  chevelure  de  Çiva  ».  Les  regrets 
de  l'éditeur  furent  cependant  atténués  quand  il  apprit  que  ce 
manuscrit  contenait  seulement  les  quatre  premières  sections. 
Aucune  autre  copie  ne  fut  envoyée  ni  apportée  de  nulle  part;  il 


—  388  — 

fallut  donc  se  remettre  à  l'ouvrage  avec  trois  copies  seulement  de 
la  cinquième  section. 

-L'édition  de  l'ouvrage  complet  fut  ainsi  publiée  d'après  dix 
manuscrits. 

Cette  histoire  n'est-elle  pas  édifiante?  Mais,  hélas!  à  qui  de 
nous  n'en  est-il  pas  arrivé  autant?  La  seule  conclusion  à  en  tirer, 
c'est  qu'il  est  urgent  et  nécessaire  de  rechercher  activement,  par- 
tout, tous  les  vieux  manuscrits  tamouls  et  de  les  mettre  autant 
que  possible  à  l'abri  de  la  destruction.  Le  sort  nous  réserve  peut- 
être  encore  d'heureuses  surprises. 

J.  V. 

II.  —  Paris  et  Londres 

Un  journal  rappelait  dernièrement  l'ingénieuse  boutade  sui- 
vante : 

Paris  est  droitier,  Londres  est  gaucher. 

Le  cocher  parisien  conduit  à  droite,  celui  de  Londres  à  gauche. 

Le  premier  prend  place  sur  le  devant  du  véhicule,  le  second 
derrière . 

Paris  est  compact,  Londres  dispersé. 

Paris  s'accroît  par  l'absorption,  Londres  par  l'expansion. 

Paris  est  bâti  en  pierres,  Londres  en  briques. 

Paris  a  de  hautes  maisons  et  des  rues  étroites,  Londres  de  larges 
rues  et  des  maisons  basses. 

Paris  a  des  fenêtres  à  espagnolettes,  s'ouvrant  comme  des  portes, 
Londres  des  fenêtres  à  guillotine. 

Les  persiennes  de  Paris  sont  établies  au  dehors,  celles  de  Londres 
au  dedans. 

Paris  est  collectiviste,  il  habite  des  maisons  qui  sont  des  casernes; 
Londres  est  individualiste,  chaque  famille  y  a  sa  maison  à  elle. 

Paris  a  son  portier,  Londres  sa  clef. 

Paris  prononce  «  cacao  »,  Londres  «  cocôa  ». 

Paris  quitte  de  grand  matin  son  lit  installé  contre  le  mur, 
Londres  quitte  tard  son  lit  installé  au  milieu  de  la  chambre. 

Paris  dîne,  Londres  mange. 

Londres,  a  dit  Voltaire,  possède  cent  religions  et  une  seule 
sauce;  Paris  a  cent  sauces  et  pas  de  religion. 


—  389  — 

Londres  se  sert  d'une  fourchette  à  trois  dents,  Paris  d'une  four- 
chette à  quatre  dents. 

Paris  est  gai,  Londres  triste. 

Paris  flâne,  Londres  court. 

Londres  a  trop  peu  de  soldats,  Paris  en  a  trop.  Le  soldat  de 
Paris  porte  la  tunique  bleue  et  le  pantalon  rouge, celui  de  Londres 
la  tunique  rouge  et  le  pantalon  bleu... 

A  Paris,  les  prêtres  célèbrent  les  mariages  ;  à  Londres,  ils  se 
marient  eux-mêmes. 

A  Paris,  les  femmes  mariées  sont  libres  ;  à  Londres,  elles  cessent 
de  l'être. 

Paris  a  plus  de  suicides,  Londres  plus  d'homicides. 

Paris  travaille,  Londres  trafique. 

A  Paris,  la  canaille  se  bat  à  coups  de  pied  ;  à  Londres  à  coups  de 
poing. 

Le  prolétaire  de  Paris  appelle  le  raont-de-piété  «  ma  tante  »  ; 
celui  de  Londres  dit  «  mon  oncle  » . 

Félix  Pyat. 

III.  —  La  première  femme  tamoule  reçue  docteur 

We  are  glad  to  learn  that  Mrs.  S.  Satthianadhan,  who  as  Miss 
Kamala  Krishnana,  took  herB.  A.  degree  in  History  and  Sanskrit 
in  1898,  has corne out  successfullyat  therecentM.  A.  examination 
in  English  with  Sanskrit  as  her  second  language,  her  Disserta- 
tion being  on  the  «  Sonnet  in  English  Literature  »,  and  we  hear- 
tily  congratulate  Mrs.  Satthianadhan  on  the  distinction  she  has 
attained.  As  she  was  the  first  Indian  lady  to  take  the  B.  A. 
degree,  she  will  be  the  first  lady  M.  A.  of  the  Madras  University. 
Among  ladies,  Bengal  has  produced  two  M.  A.  s,  Ailahabad 
one,  the  Punjabone  and  Bombay  none,  and  ail  thèse  M.  A. 's  are 
Indian  Christians.  —  The  Madras  Mail,  Fridar/  Eeeninr/,  Jidtj 
19,  1901. 


TABLE  GÉNÉRALE  DU  TOME  XXXIV 


Pages 

Le  langage  martien,  par  V.  Henry :1,  125 

L'inscription  découverte  en  1899  sur  le  forum  romain,  par 

A .  BojESLA V 46 

La  langue  des  Pouls,  par  E.  Gibert 50 

Explication  (linguistique  basque),  par  J.  Vinson 79 

Max  Millier,  par  P,  Regnaud 82 

Quelques  manuscrits  basques,  par  E.  Dodgson 85 

La  raza  vasca,  par  T.  de  Aranzadi 179 

Les  parfaits  faibles  germaniques,  par  P.  Regnaud 186 

The  lifeand  legends  of  Sundara-Murtti,  par  G.-U.  Pope..  221 

Prabôdhacandrôdaya,  trad.  fr.    par  G.  Devèze 240 

L'argot  de  Saint-Cyr 255,  362 

Analyse  des  formes  verbales  du  S.  Marc  basque  de  Liçar- 

rague,  par  E.-S.  Dodgson 263,  340 

Littérature  tamoule  ancienne.  Le  Sâlâmani,  parJ.  Vinson  305 

Bibliographie  basque.  Notes  et  Documents 365 

Corrigenda 216,  350,  362 

Varia.  La  question  de  l'e  muet 121 

—  La  formation  des  voyelles. 122 

—  Prononciation  du  Basque. 123 

—  L'argot  des   marins 217 

La  langue  de  nos  parlementaires 301 

— ■  Bismarck  et  les  caractères  latins 302 

—  Jeu  de  mots  homonymes 302 

—  Les  éditeurs  et  les  vieux  manuscrits  tamouls 385 

—  Paris  et  Londres 388 

—  La  première  femme  tamoule  reçue  docteur 389 

BIBLIOGRAPHIE 

A.  Mercier.  La  langue  créole  en  Louisiane 102 

G.  Abbot.  Songs  of  modem  Greece 105 


—  391  - 

Pages 

Em.  Delage.  La  chiffrocryptographie 112 

A.  Lefèvre .  Les  Gaulois '. 115 

J.-B.  RoBY.  Virgile  limouzi 117 

A.  Liet.  Prononciation  du  français 118 

J .  ViNSON.  Légendes  bouddhistes  et  jainas 188 

H.   ScHucHARDTet  T.  LiNscHMANN.  Lciçarraga's  baskische 

Bûcher 190 

P.  d'LIrte.  Grammaire  cantabrique 200,  294 

G.-U.  Pope .   Tirùvâçagam 284 

J.M.  Nallaswami-Pillay.  Sivagnânabôtham  et  Light  of 

Grâce 288 

E.  Blochet.  Catalogues  des  manuscrits  mazdéens  et  delà 

collection  Schefer 291 

R.  Pischel.  Grammatik  der  Prakrit  Sprachen 375 

A.  Roussel.  Légendes  morales  de  l'Inde 376 

Paul  Sébillot.  Le  folk-lore  des   pêcheurs 378 

M.  J.  vanEys.  Bibliographie  des  Bibles  et  des  Nouveaux- 
Testaments  379 

M.  Delafosse.  Manuel  de  la  langue  haoussa 380 

Em.  DE  Arriaga.  Lexicon  del  Bilbaino  neto 382 

Kuhn's  Zeitschrift v 200,  383 

Suomalais-ugrilaisen    Seuran  Aikakauskirja 216 

Bulletin  de  la  Société  des  sciences  de  Pau. , 120 

26th  report  of  the  Bible  Society 383 

Actes  de  la  Société  philologique  293 

LANGUES   ÉTUDIÉES 

Linguistique  générale,  82, 122,  112,  200,  302,  293,  383. 

Basque,  79,  85, 123,  179,  216, 190,  200,  263,  294,  340,  356,  365. 

Allemand,  186. 

Français,  102, 121,  115, 117, 118,  217,  255,  301,  362,378,  379,  388. 

Grec  moderne,  105. 

Espagnol,  382. 

Finnois,  216, 293. 

Haoussa,  380. 


—  3&g  - 

Martien,!,  125. 

Latin,  46. 

Poul,  50. 

Persan,  291. 

Tamoul,  188,  221,  284,  288,  305,  385. 

Sanscrit,  240,  375,  376. 

AUTEURS 

P.  de  Aranzadi,179. 
J.-M.  Bernaola,  365. 
A.  Bojeslav.  46. 
G.  Devèze,  240 
E.-S.  Dodgson,  85,263,  340. 
E.  Gilbert,  50. 
V.   Henry,  1,  125. 
H.  Pernot,  105. 
G.-U.  Pope,  221. 
P.  Regnaud,  82, 186. 

J.  Vinson,79, 102, 112,  115,117,  118,  119,  120,  190,    200,   216, 
284, 288,  291, 293, 305, 356, 375, 376,  378,  379,  380,  382, 383,  385. 


Le  Propriétaire-Gérant, 

J.  Maisonneuve. 


Chalon-stir-Saône.  -  Imiirimcrie  L.  Marceau,  E.  BERTKANL),  successeur. 


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